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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 4 mai 1999 - Vol. 36 N° 25

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour

Nous débutons nos affaires du jour après maintenant trois semaines de débats en commissions parlementaires au niveau de l'étude des crédits. Et, avant de céder la parole à M. le leader du gouvernement, je vous informe que l'étude des crédits budgétaires des différents ministères pour l'année financière 1999-2000 est maintenant terminée.

Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 286 du règlement qui stipule qu'une séance de la commission plénière est consacrée à l'étude des crédits de l'Assemblée nationale? Consentement? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vais demander à cette Assemblée un deuxième consentement, celui de déroger à l'article 53 du règlement de l'Assemblée nationale.


Dépôt de rapports de commissions


Étude des crédits budgétaires pour l'année financière 1999-2000

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement? Alors, de consentement pour déroger à l'article 53 du règlement, j'ai l'honneur de déposer les rapports des commissions parlementaires qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1999-2000, soit les rapports de la commission des institutions, de la commission des finances publiques, de la commission des affaires sociales, de la commission de l'économie et du travail, de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, de la commission de l'aménagement du territoire, de la commission des transports et de l'environnement, de la commission de l'éducation et de la commission de la culture. Ces crédits ont été adoptés. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, cette journée commence bien; nous en sommes au troisième consentement, et je vois le sourire de mon via-à-vis. Alors, je vous demanderais le consentement pour déroger à l'article 258 du règlement de l'Assemblée pour procéder immédiatement au débat restreint.


Affaires prioritaires


Débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1999-2000

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 288 qui stipule que ces rapports font l'objet d'un débat restreint à la séance suivant leur dépôt? Consentement?

Alors, à l'article 25 de notre feuilleton, l'Assemblée entreprend le débat restreint sur les rapports des comissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière se terminant le 31 mars de l'an 2000. Suite à une rencontre avec les leaders, le partage du temps pour ce débat restreint de deux heures a été établi de la façon suivante: cinq minutes seront accordées au député indépendant; le reste du temps sera partagé également entre le groupe ministériel et celui de l'opposition officielle; le temps non utilisé par l'un des groupes ou par le député indépendant pourra être redistribué; dans ce cadre, les interventions ne sont pas limitées.

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. M. le président du Conseil du trésor et député de Labelle.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le 25 mars dernier, je déposais ici, en cette Chambre, le budget des dépenses du gouvernement du Québec pour l'exercice 1999-2000 qui marque un tournant pour les finances publiques du Québec. On aura remarqué d'ailleurs que, cette année, le discours du budget aura précédé de quelque deux semaines le dépôt des crédits, ce qui était une innovation ici, à la l'Assemblée nationale.

À l'aube de l'an 2000, de nouvelles perspectives s'ouvrent sur l'avenir de nos services publics. Il y a quatre ans, les finances publiques du Québec étaient dans un état lamentable. Notre déficit avait atteint un sommet, soit 5 800 000 000 $. Le gouvernement avait perdu toute marge de manoeuvre. Il fallait redresser la situation, et le défi était colossal.

Collectivement, nous nous sommes donné des objectifs ambitieux. En mars 1996, lors de la Conférence socioéconomique de Québec lancée par le premier ministre, un consensus s'est forgé sur les cibles budgétaires qu'il nous fallait atteindre pour éliminer le déficit sur un horizon de quatre ans. Ces cibles ont par la suite été consignées dans une loi adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale.

Depuis le discours sur le budget du 9 mars dernier, nous savons maintenant que nous avons réussi un an plus tôt que prévu, puisque l'objectif de déficit zéro est atteint dès cette année 1998-1999. Les Québécois et les Québécoises ont raison d'être très fiers du succès obtenu. Pour la première fois en 40 ans – la première fois en 40 ans, M. le Président – le déficit a été éliminé. Nous n'empruntons plus pour payer les services à la population.

Dans son dernier discours sur le budget, le ministre des Finances a indiqué qu'il disposait d'excédents de 1 100 000 000 $ pour l'année financière 1999-2000. Ces excédents ont été utilisés pour investir 592 000 000 $ dans la santé, 393 000 000 $ dans l'éducation et la jeunesse et finalement 160 000 000 $ notamment dans la création d'emplois et l'innovation. En conséquence, les crédits déposés pour l'exercice débutant le 1er avril 1999 incorporent des dépenses de programmes de 36 238 000 000 $, soit 1 100 000 000 $ de plus que ce qui était prévu au discours sur le budget de l'année dernière.

(10 h 10)

M. le Président, le dernier discours sur le budget a aussi annoncé des investissements ponctuels applicables dès 1998-1999. C'est ce qui fait que la progression des dépenses de programmes par rapport à l'exercice précédent est de 0,8 %. En incluant le service de la dette, le budget de dépenses 1999-2000 s'établit à 43 172 000 000 $, donc, toutes dépenses confondues, incluant le service de la dette, ce qui représente une hausse de 1,4 % par rapport à l'exercice précédent.

Malgré la croissance budgétaire, le poids des dépenses de programmes dans l'économie québécoise est inférieur à celui qui prévalait au début des années quatre-vingt-dix. Le ratio des dépenses de programmes en pourcentage du produit intérieur brut, le PIB, se situe à 18,5 %, alors qu'il était de 22,9 % en 1992-1993. Et les dépenses de programmes coûtent maintenant, en 1999-2000, 4 919 $ par habitant, comparativement à 5 091 $ en 1992-1993, le tout par habitant, et vous aurez remarqué que cela tient compte de l'inflation, comprend l'inflation, et donc c'est en fait une réduction significative de nos dépenses par habitant du budget du Québec, des dépenses de programmes du budget du Québec.

Et, par-delà ces chiffres, l'année financière 1999-2000 marque un virage dans la gestion des dépenses publiques. Les années les plus difficiles, croyons-nous, sont passées; c'est le début d'une époque nouvelle, celle de l'après-déficit. Tous ensemble, nous avons fait de grands sacrifices pour parvenir à l'équilibre budgétaire. Nous en tirons une leçon: il n'est pas question de nous remettre à dépenser comme par le passé, de retomber dans les mêmes ornières et de repartir la spirale de la dette. Il nous faut, pour garder l'équilibre budgétaire en héritage, continuer de miser sur les principes qui nous ont valu ce succès, à savoir: respecter nos objectifs, gérer de manière rigoureuse, miser sur la concertation pour agir et faire agir.

Au début de cette nouvelle ère budgétaire, il nous faut relever deux grands défis. Le premier, c'est celui de gérer nos priorités, de les définir, de bien les définir et de les gérer. Le deuxième défi que nous avons, c'est de viser la performance.

Lors de la dernière campagne électorale, notre gouvernement a pris des engagements envers la population: d'abord, atteindre ce déficit zéro, mais, ensuite, réinvestir prioritairement dans la santé et l'éducation, et c'est ce qui a été fait lors du dernier discours sur le budget. Pour un gouvernement qui, comme le nôtre, s'engage à préserver l'équilibre budgétaire, tout ne peut être prioritaire en même temps. Il faut choisir un nombre limité de priorités et les gérer soigneusement. Le budget de dépenses 1999-2000 met l'accent sur cinq grandes priorités.

D'abord, dans la santé et les service sociaux, les budgets additionnels accordés totalisent 592 000 000 $. Ces investissements serviront notamment à faciliter l'accès à des services jugés prioritaires comme la diminution des listes d'attente et le développement de services à domicile. Ils permettront aussi de financer la progression des salaires et l'évolution des coûts de programmes. Et, en outre, le dernier discours sur le budget a annoncé d'autres investissements de 1 155 000 000 $ qui se rapportent à l'exercice 1998-1999. Entre autres, 700 000 000 $ sont investis pour rétablir la situation financière du réseau et 300 000 000 $ pour consolider l'accessibilité et la qualité des services à la population. Et, sur deux ans, c'est un total de 1 700 000 000 $ qui est investi dans la santé.

En éducation, des investissements de 207 000 000 $ ont été annoncés pour 1998-1999: 170 000 000 $ pour améliorer la situation financière des universités, 7 000 000 $ pour le maintien de l'équilibre budgétaire des cégeps et 30 000 000 $ pour l'achat de livres, de dictionnaires et de grammaires. En 1999-2000, les majorations de budgets octroyés totalisent 393 000 000 $, ce qui comprend un ajout de 342 000 000 $ pour financer notamment l'évolution des coûts de programmes et l'augmentation de la rémunération découlant des offres patronales, 46 500 000 $ pour, entre autres, poursuivre la réforme en éducation et favoriser le développement des ressources humaines dans les secteurs stratégiques, ainsi qu'une somme de 4 500 000 $ pour offrir 2 350 emplois d'été et stages de formation dans la fonction publique. Au total, c'est 600 000 000 $ sur deux ans qui sont investis pour l'éducation et la jeunesse.

Au ministère de la Famille et de l'Enfance, l'enveloppe de dépenses augmente cette année de près de 100 000 000 $. Cette croissance résulte de l'impact de la mise en oeuvre de la politique familiale, plus particulièrement l'ajout de 18 100 places additionnelles et l'implantation, à compter de septembre 1999, de places à contribution réduite pour les enfants de deux ans. Ces investissements additionnels traduisent notre engagement indéfectible envers la famille. Depuis la mise en oeuvre de la politique familiale, les sommes allouées sont passées de 856 000 000 $ en 1996-1997 à 1 460 000 000 $ en 1999-2000.

Le dernier discours sur le budget a annoncé d'importantes mesures pour favoriser la création d'emplois et le passage à l'économie du savoir. Ainsi, la ministre responsable de la Recherche, de la Science et de la Technologie s'est vu allouer une enveloppe de 100 000 000 $ en 1998-1999 pour Valorisation-Recherche Québec, un organisme qui a comme mandat de renforcer les partenariats entre l'entreprise privée et les milieux de l'enseignement et de la recherche. Le budget de dépenses 1999-2000 comprend en outre un ajout de 32 000 000 $ pour la création d'Innovation Québec.

Par ailleurs, une majoration de 50 000 000 $ a été annoncée au dernier discours sur le budget pour le programme FAIRE, qui est un programme dont le titre est le Fonds pour l'accroissement de l'investissement privé et la relance de l'emploi, FAIRE, sous la responsabilité du ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

D'autre part, le renouvellement des conventions collectives de travail constitue certes un enjeu majeur pour le gouvernement au cours de cette année. La rémunération totalise près de 20 000 000 000 $ et représente plus de la moitié des dépenses de programmes. La négociation touche plus de 400 000 salariés.

Le 10 mars dernier, au lendemain du discours du budget, le gouvernement a rendu publiques ses offres salariales aux employés des secteurs public et parapublic pour les trois prochaines années. Le coût de ces offres s'élève à 1 300 000 000 $ pour la durée des conventions collectives. La négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic s'amorce dans un contexte où les attentes des parties sont importantes.

Ayant fourni une contribution indéniable au redressement des finances publiques, les employés de l'État souhaitent certains correctifs, et les correctifs souhaités touchent notamment le dossier de l'équité salariale et celui des emplois précaires. Le gouvernement a abordé cette négociation dans un esprit d'ouverture. Notre engagement envers nos employés est le suivant: être équitable tout en respectant la capacité de payer des contribuables.

Notre deuxième défi consiste à viser la performance. L'État est maintenant prêt à faire face aux défis du XXIe siècle. Après ces années difficiles, nous savons plus que jamais que les ressources sont précieuses, et pour faire mieux l'administration publique doit se transformer. Il nous faut relever le défi de la performance, nous fixer des buts, apprendre à nous mesurer et chercher à devenir les meilleurs.

Il faut relever ce défi et répondre davantage aux attentes des citoyens envers leur appareil public. Les citoyens sont plus exigeants et sont en droit de réclamer des services de qualité. Comme contribuables, ils veulent s'assurer que les services publics soient toujours rendus de manière efficace et courtoise et, comme le permettent les nouvelles technologies, sans égard, ou du moins le moins possible, aux contraintes de temps ou de distance.

Il en est de même pour les entreprises qui transigent avec le gouvernement. Elles s'attendent, dans un contexte de mondialisation des marchés, ou d'ouverture des marchés, et d'entrée dans l'ère de l'économie du savoir, à ce que l'administration publique fasse preuve d'innovation, trouve de nouvelles solutions aux nouveaux problèmes, acquière de nouvelles compétences. Pour relever ce défi, nous pouvons compter sur une fonction publique professionnelle, compétente, intègre et loyale. C'est là un acquis inestimable pour une société moderne.

(10 h 20)

Cependant, la culture de gestion de l'administration publique est en mutation. Lors du dépôt des crédits, j'ai fait état des intentions du gouvernement de relever le défi de la performance en privilégiant une gestion plus transparente, davantage axée sur les résultats et utilisant de plus en plus les technologies pour supporter les travaux de l'administration publique et ses relations avec les entreprises et les citoyens. Ce projet de modernisation de l'administration publique est un besoin tant pour l'État que pour ses citoyens. Il repose sur des acquis parmi lesquels figurent la compétence de la fonction publique et la relation de confiance qui existe entre les fonctionnaires et les élus. Et je tiens aussi à confirmer la volonté gouvernementale d'aller de l'avant avec la modernisation de l'administration publique, qui prévoit de continuer à miser sur l'imputabilité des hauts fonctionnaires.

Le gouvernement s'est donc orienté vers un mode de gestion davantage axé sur les résultats. L'attention est portée sur l'atteinte d'objectifs de résultats mesurables qui ont été fixés préalablement. Afin d'encourager une gestion performante, mes collègues de la Santé et des Services sociaux et de l'Éducation ont d'ailleurs adopté une approche semblable pour l'allocation des nouveaux budgets. Au sein de la fonction publique, la gestion axée sur les résultats doit prendre son envol et de nouvelles règles du jeu s'imposent, soit de mettre l'accent sur l'atteinte des résultats plutôt que sur la conformité à des règles et à des procédures, laisser davantage le choix des moyens aux ministères pour l'exécution de leurs mandats, donc leur donner plus de flexibilité de gestion, renforcer en contrepartie la reddition de comptes à tous les paliers de l'administration gouvernementale et rendre publics les objectifs de résultats et le rendement atteint.

Ainsi, les parlementaires disposeront d'une information de meilleure qualité, une information en termes d'objectifs, de résultats et d'indicateurs. De même, la population saura non seulement à quoi sert l'argent des taxes et des impôts, mais connaîtra également les moyens mis en oeuvre pour que cet argent soit utilisé efficacement. De leur côté, les gestionnaires du gouvernement auront plus de latitude pour la conduite des opérations, mais seront responsables et imputables des résultats.

C'est une gestion ouverte, transparente, une incitation sans équivoque à rechercher aussi la performance. Performance et qualité des services doivent aller de pair. La gestion au grand jour ou transparente, je devrais dire, c'est également un engagement public quant à la nature et aux objectifs de qualité des services rendus à la population. La Régie des rentes et le ministère du Revenu ont publié de tels engagements. C'est une pratique qu'il faut étendre à tous les ministères et organismes qui fournissent des services directement à la population. Et voilà là un gage qui renforcera le lien de confiance des citoyens envers l'État.

La performance et la gestion transparente représentent des défis de taille. Il est donc utile et nécessaire qu'une nouvelle législation reconnaisse le principe de la gestion axée sur les résultats et les étapes qu'elle implique, soit la planification, le contrôle a posteriori et la reddition de comptes. Notre gestion gouvernementale est arrivée à un tournant décisif. Je compte donc, au cours de ce printemps, déposer un énoncé de politique décrivant les enjeux de la transformation de la gestion gouvernementale ainsi que les pièces législatives qui y seraient proposées. Par la suite, une commission parlementaire entendra les avis de tous les intéressés.

La performance passe aussi par l'utilisation des nouvelles technologies de l'information. La gestion axée sur les résultats doit s'appuyer sur un système d'information perfectionné. Les raisons sont évidentes. Pour connaître et suivre avec justesse les résultats de chacun des programmes, pour le calcul des coûts de revient qui permettront d'apprécier les résultats et de prendre des décisions stratégiques éclairées, l'information doit être fiable, complète et disponible en temps réel à tous les échelons de l'organisation.

Le gouvernement s'apprête d'ailleurs à effectuer un investissement majeur afin d'intégrer la gestion des informations concernant les ressources humaines, financières et matérielles. Ce projet, connu sous le vocable GIRES, est plus qu'un système informatique, car il contribuera à transformer les processus administratifs et à générer, de la sorte, des gains de productivité que nous estimons prometteurs.

L'autoroute de l'information est au coeur du développement d'une société moderne. Un État moderne transparent et performant doit être branché. Un État branché devient plus accessible et donne accès instantanément à toute l'information requise. Alors, les ministères et les organismes ont tissé leur part de la toile qui les relie à la population et aux entreprises. En mai 1995, avec l'ouverture de la première page d'accueil gouvernementale dans Internet, l'État québécois a donné un signal clair: utiliser ce nouvel outil pour rendre accessible l'information publique. Ce signal a été bien suivi. En effet, on dénombre 190 sites Internet mis en ligne par les ministères et les organismes au moment où nous nous parlons.

Un État branché simplifie la prestation des services et assure la sécurité des renseignements personnels. La sécurité de l'information constitue un enjeu important, car elle ouvre la voie au développement des transactions électroniques. Une entreprise ou un citoyen qui échange des données avec un ministère ou un organisme doit le faire en toute confiance et sur une base strictement confidentielle. C'est dans ces conditions, par exemple, que dès l'année d'imposition 1999 les déclarations sur le revenu pourront être acheminées par Internet. Dans l'ensemble des ministères et des organismes, le potentiel est impressionnant et signifie pour tous moins de papiers, moins d'attente et moins de déplacements.

Rendre l'autoroute de l'information plus sûre, amener encore plus de citoyens et d'entreprises à l'emprunter pour leur usage personnel ou professionnel et pour accéder à l'information gouvernementale et aux services de l'État, voilà qui devient une nouvelle nécessité. Mon collègue le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux disposera de 3 000 000 $ en complément des efforts déjà consentis pour la mise en oeuvre de l'autoroute de l'information. Cette somme servira à soutenir des initiatives visant à faciliter l'accès à l'autoroute de l'information, à assurer la sécurité des échanges et du commerce électronique et à favoriser l'apprentissage des citoyens à l'utilisation des nouvelles technologies de l'information.

M. le Président, la dernière année a été marquée par une reprise de l'embauche pour combler, entre autres, des besoins dans le domaine de l'informatique. Je souligne que les concours de recrutement comportaient des conditions d'admission permettant d'ouvrir la fonction publique aux jeunes ayant encore peu d'expérience. Cette reprise de l'embauche se confirme pour l'avenir.

Une planification des besoins de main-d'oeuvre a été réalisée dans les ministères et les organismes à la fin de l'année 1998. Ceux-ci ont identifié environ 800 emplois à pourvoir. Ces résultats ont permis de dresser un plan de travail qui comporte, d'ici la fin du mois de mai 1999, la publication de six concours de recrutement. En outre, le Conseil du trésor prépare une campagne majeure dans les collèges et les universités pour l'automne 1999, ce qui ne s'est pas produit depuis plusieurs années. En plus, donc, d'assurer l'entrée d'une jeune relève, le recours plus important au recrutement offre la possibilité d'obtenir une meilleure représentation de la diversité québécoise au sein de l'administration.

Le gouvernement a posé d'autres gestes pour préparer la relève. Le Secrétariat du Conseil du trésor, en partenariat avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, a lancé, l'année dernière, le programme de stages pour nouveaux diplômés afin d'augmenter la présence des jeunes dans la fonction publique et surtout de leur permettre de développer leur employabilité. Bien encadrés, ces stages constituent un tremplin pour offrir aux nouveaux diplômés l'accès au marché du travail. Ce programme prévoit d'ici l'an 2002 un investissement de 25 900 000 $ pour permettre à 430 nouveaux diplômés de niveaux collégial et universitaire de réaliser un stage d'une durée de deux ans. Déjà, 261 stagiaires ont commencé leur stage à l'automne 1998.

Mais, M. le Président, les candidatures excèdent largement le nombre de stages retenus. De nombreux projets de stage proposés par les ministères n'ont pu être réalisés et c'est pourquoi le gouvernement a décidé d'en accroître le nombre. J'ai le plaisir de dire, et j'ai eu le plaisir de l'annoncer, que, pour l'année 1999, une nouvelle cohorte de 215 stagiaires s'ajoutera aux deux autres déjà annoncées l'an dernier. Une somme additionnelle, donc, de 12 800 000 $ a été prévue à cette fin, et, au total, nous aurons accueilli près de 700 stagiaires. Un appel de candidatures a d'ailleurs été publié récemment, et des nouveaux stagiaires vont nous arriver en septembre 1999.

(10 h 30)

M. le Président, en conclusion, le budget de dépenses 1999-2000 traduit l'engagement de notre gouvernement à investir en priorité dans la santé et les services sociaux ainsi que dans l'éducation et la jeunesse, et nous veillerons, mes collègues et moi, à ce que ces investissements donnent les meilleurs résultats ou, en tout cas, les résultats attendus.

M. le Président, j'ajouterai aussi que nous avons un autre objectif maintenant que le déficit zéro a été atteint. C'est celui de diminuer nos impôts. Vous savez, M. le Président, qu'ils sont très élevés; nous l'avons reconnu, et nous le devons d'ailleurs aux gens d'en face. Je vais simplement vous citer, année après année, ce qui s'est passé quant à l'effort fiscal du Québec, au fardeau fiscal du Québec. En 1990-1991, le fardeau fiscal au Québec s'est augmenté de 960 000 000 $; en 1991-1992, de 1 900 000 000 $; en 1992-1993, de 2 200 000 000 $; en 1993-1994, de 3 300 000 000 $; en 1994-1995, d'un autre 2 400 000 000 $. Total de l'augmentation des impôts, du fardeau fiscal au Québec durant ces années, 10 800 000 000 $. J'entends maintenant que l'opposition qui nous fait face et qui est, elle, la responsable de ces augmentations d'impôts réclame maintenant une baisse du fardeau fiscal. Nous, nous allons le faire, mais, eux, ils ont peu de crédibilité pour l'exiger.

M. le Président, le budget de dépenses 1999-2000 marque le début d'une nouvelle étape, celle de l'après-déficit, justement. Même en situation d'équilibre budgétaire, les ressources demeurent précieuses. Pour en tirer le maximum, il nous faut gérer soigneusement nos priorités et viser la performance et il nous faut aussi baisser le fardeau fiscal des Québécois. Le temps pour nous, à l'intérieur, du côté de l'opération même du gouvernement, le temps donc est venu d'accélérer la modernisation de notre administration publique, de la doter des moyens législatifs et technologiques lui permettant de relever le défi de la performance, d'innover et d'être parmi les meilleurs au monde. Les Québécois et les Québécoises peuvent compter sur une fonction publique dynamique, proche des besoins de la population et fière aussi de servir l'État du Québec, une fonction publique, d'ailleurs, qui fait la fierté des Québécois. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le président du Conseil du trésor et député du comté de Labelle. Nous allons maintenant céder la parole au député de Vaudreuil et critique officiel de l'opposition en matière des dossiers du Conseil du trésor. M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Enfin, nous terminons aujourd'hui l'étude des crédits après plusieurs séances de commissions parlementaires, et également ça donne suite au dépôt du discours du budget. Ce que nous constatons, c'est que la population du Québec continuera d'être la plus taxée en Amérique du Nord, que les promesses électorales du gouvernement n'ont pas été tenues et que les grandes annonces faites à renfort de publicité dans les domaines de l'éducation et des affaires sociales cachent en réalité des compressions.

Lors du discours sur le budget et du dépôt des crédits, le gouvernement a voulu donner l'impression que tout allait bien dans le meilleur des mondes pour les Québécoises et les Québécois, que la croissance économique se comparait avantageusement à celle de nos voisins et que de nouveaux investissements dans les secteurs de la santé et de l'éducation allaient permettre de rétablir des services ou d'en offrir de nouveaux.

La réalité est tout à fait différente, et en voici quelques exemples. D'abord, les Québécois continuent de s'appauvrir depuis 1995. Le revenu personnel disponible, c'est-à-dire le revenu après impôts, a diminué, alors que celui des autres Canadiens a augmenté de 2,8 %. Cette différence de 3,4 %, eh bien, c'est l'équivalent d'un chèque de paie de deux semaines que les Québécois ont en moins dans leurs poches.

L'appauvrissement des Québécois – et nous avons vu encore une étude récente du Mouvement Desjardins – se traduit par un taux d'épargne qui est presque nul, qui a baissé d'ailleurs, et un taux croissant d'endettement à la consommation. C'est un endettement, d'ailleurs, à la consommation d'un niveau record, nous dit-on.

Depuis 1994, le gouvernement s'est enrichi deux fois plus vite que l'économie. Si le PIB a connu une croissance de 12,2 %, les revenus autonomes ont augmenté de 22,6 %. Depuis quatre ans, faut-il le constater également, le Québec tire de l'arrière, premièrement, sur la part relative des investissements privés, sur la croissance économique réelle mesurée par le PIB au cours des trois dernières années – la croissance économique du Canada a été de 50 % plus forte que celle du Québec – et sur la création d'emplois.

On rappelait tout à l'heure les objectifs du Sommet socioéconomique, qui étaient de rattraper les indicateurs canadiens et même de les dépasser; eh bien, cet objectif est loin d'avoir été atteint en ce qui a trait à la création d'emplois. Force est de constater que le taux de chômage est toujours de 2 % plus élevé au Québec que la moyenne canadienne. Depuis 1995, le Québec est au huitième rang pour le taux de création d'emplois, en fait depuis 1994. Depuis décembre dernier, les dernières statistiques nous indiquaient que nous avions perdu 38 200 emplois et qu'il s'en était créé près de 72 000 au Canada dans son ensemble. C'est la même chose pour l'emploi chez les jeunes de 15-24 ans, où, au cours du premier mandat du gouvernement: 3 800 emplois pour les jeunes de 15-24, 18 500 en Ontario, 28 400 au Canada.

Cette incapacité de gérer et de provoquer la croissance économique comparable à celle de nos voisins a comporté des conséquences. D'abord, des coupures extrêmement drastiques dans les secteurs de la santé, des services sociaux et de l'éducation. Des mesures de court terme, des compressions majeures ont été prises qui ont affecté de façon considérable les réseaux. Un exemple: les départs massifs à la retraite, départs massifs qui avaient été pris de façon centralisée par le gouvernement, contre l'avis d'ailleurs de tous les gestionnaires des réseaux de la santé et de l'éducation, et notamment ceux de la santé et des services sociaux.

On peut lire, dans La Presse du 16 avril dernier, un article du président du conseil et directeur général du Centre universitaire de santé McGill, qui dit, et je cite: «Le programme de réductions budgétaires imposé par le gouvernement et qui s'étend sur une décennie comprenait également un vaste plan d'indemnités de départ lancé sans consultation, ni d'ailleurs auprès des autres établissements de santé, ce qui a conduit, comme il fallait s'y attendre, à des pénuries de personnel significatives, allant des anesthésistes aux infirmières et aux plombiers, qui produisent un impact négatif sur le niveau des services offerts à nos patients.» Fin de la citation.

Si on examine les crédits 1999-2000 par rapport aux dépenses effectuées en 1998-1999 dans la santé et dans l'éducation, on constate que l'augmentation, que la différence ne couvre même pas les coûts de système, ce qui impliquera encore des compressions additionnelles ou des déficits. Pourtant, il est de la responsabilité du Conseil du trésor de pourvoir aux crédits nécessaires afin de fournir les services adéquats à la population, lorsque le ministre des Finances dispose d'une marge de manoeuvre réaliste. Si le Conseil du trésor doit gérer avec rigueur – et nous en convenons – son président a également la responsabilité et le devoir de subvenir aux besoins à même la marge de manoeuvre du ministre des Finances, ce qui est le cas pour 1999-2000.

Selon le ministre des Finances – et c'est lui-même qui le mentionnait – 1 % de croissance nominale du PIB rapporte 380 000 000 $ de revenus additionnels aux coffres de l'État. Le même ministre prévoit, de façon conservatrice, une croissance de 2,9. Donc, 2,9 par 380 000 000 $ donne des revenus additionnels de 1 100 000 000 $. À la page 3, section III de son plan budgétaire 1999-2000, le ministre des Finances prévoit une croissance de revenus autonomes de 546 000 000 $ pour 1999-2000. Où sont donc les 550 000 000 $ qui manquent? Comment expliquer qu'avec des croissances économiques comparables les revenus autonomes ont augmenté de 2 600 000 000 $ en 1997-1998 et de 1 900 000 000 $ en 1998-1999?

(10 h 40)

M. Jean-Jacques Samson, éditorialiste au Soleil , mentionnait d'ailleurs, le 29 avril dernier, que le ministre disposera d'une cagnotte de près de 2 000 000 000 $ en 1999-2000. Donc, pourquoi, d'une part, maintenir les impôts qui sont les plus élevés, continuer de comprimer les services, pour pouvoir possiblement annoncer encore une fois une heureuse surprise à la fin de l'année 1999-2000, ce qui se sera fait évidemment au préjudice des citoyens au cours de l'année financière actuelle? Pourquoi maintenir les aberrations fiscales, ce que tout le monde a reconnu, le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, alors qu'une personne qui gagne dans les 30 000 $, une augmentation de 3 %, il lui restera à peu près 3 $ ou 4 $ dans ses poches? Pourquoi le gouvernement continue-t-il de faire des compressions dans le domaine de la santé et des services sociaux et dans l'éducation, malgré des déclarations ronflantes pour faire croire qu'on ajoute des crédits pour mettre en place de nouveaux services? On a eu un exemple la semaine dernière avec le ministre d'État à la Jeunesse qui, pour une troisième fois, a annoncé les mêmes mesures. Dans le fond, on recycle les mêmes promesses.

M. le Président, à l'étude des crédits du Conseil du trésor, j'ai discuté avec le ministre des crédits dans le domaine de la santé et des services sociaux et de l'éducation. Commençons d'abord par le secteur de la santé et des services sociaux. Nous nous rappellerons qu'au cours des récentes années il y a eu des compressions dans le réseau, dans l'ensemble du secteur, de plus de 2 000 000 000 $, et ça, c'est reconnu; les chiffres sont clairs là-dessus, ça a été reconnu par le ministère. Et on a constaté des effets pernicieux à de telles réductions majeures, rapides, à court terme: non seulement les mises à la retraite qui ont créé des bouleversements énormes dans l'organisation du travail et dans le service aux patients, mais également des déficits astronomiques dans les établissements qui devaient continuer de répondre à la demande, et malgré, vous savez, les ordres du ministre de la Santé et des régies régionales qui demandaient d'absorber un autre 150 000 000 $ l'an dernier, ce qui était tout à fait irréaliste, parce que, dans un hôpital, vous ne pouvez pas en toute conscience dire non au patient qui arrive et refuser de le soigner. C'est facile, assis dans un bureau, de dire: Écoutez, on va établir telle norme et vous devez la respecter. Ce n'est pas vrai que ça se passe comme ça dans la réalité.

Pour 1999-2000, la discussion en commission parlementaire avec la ministre de la Santé et des Services sociaux confirme qu'il y a encore des compressions ou que les établissements devront encourir des déficits. Je cite encore La Presse du 16 avril, de M. Steinberg et M. Scott: «En dépit des manchettes fracassantes relatives à de nouveaux investissements en soins de santé, les réductions vont se poursuivre, à moins que le gouvernement n'intervienne pour y mettre fin rapidement.»

La ministre de la Santé a d'ailleurs confirmé en commission parlementaire qu'il va manquer 200 000 000 $, et je cite une question que je lui posais: «Globalement, donc, vous admettez, sur les mêmes bases budgétaires, qu'il manque 200 000 000 $? Donc, le choix, c'est qu'il y a des établissements qui vont continuer à faire des déficits au cours des prochaines années.» La réponse de la ministre: «Oui.»

Un peu plus loin, évidemment, la ministre nous sert la même réponse que celle de son prédécesseur l'an dernier, donc établir des plans de résorption de déficit sur trois ans. C'était la même chanson l'an dernier. Elle dit, par exemple: «Nous croyons – encore en commission parlementaire – que ce que nous avons élaboré comme stratégie budgétaire nous permettra de retrouver cet équilibre sur une période de trois ans. Nous ne le faisons pas sur un an, parce que, si nous le faisions sur un an, votre logique nous amènerait à demander des efforts importants aux établissements, et nous ne voulons pas le faire.»

Quelle est la différence entre ce discours et celui de dire: On devra encore faire des résorptions et des compressions dans le secteur de la santé? On dit qu'on procédera par des ententes de gestion avec les régies, et les régies devront passer des ententes de gestion avec des établissements.

L'an dernier, on se rappellera, des établissements et nombre d'établissements hospitaliers ont dû refaire, de façon inutile, des exercices de résorption de déficit trois ou quatre fois au cours de l'année.

Et là on vient évidemment de sortir un autre lapin du chapeau. L'an dernier, nous avions vu que des régies régionales avaient emprunté, donc, la Régie de la Montérégie, 15 000 000 $, la Régie des Laurentides, 16 000 000 $, sous forme d'emprunts. Maintenant, ces emprunts sont devenus ce qu'on appelle dans leur jargon de la comptabilité des engagements régionaux non provisionnés. La question à la ministre au cours de la commission parlementaire: Quel montant ont atteint ces engagements régionaux non provisionnés? Il semble que ce n'est pas encore compilé, que la réponse viendra. Les renseignements que nous avons, c'est que ces engagements régionaux non provisionnés – ce qui est nouveau évidemment dans le vocabulaire – excéderaient les 100 000 000 $. Sujet à la confirmation.

Et, pendant ce temps-là, vous savez, les mêmes problèmes reviennent. On a connu les urgences encombrées, il y a une semaine ou deux, encore à Montréal, malgré tous les discours pour dire qu'on a réinvesti de l'argent et que ça va être terminé, l'encombrement des urgences. Et pourtant c'est arrivé à une période de l'année où normalement il n'y en a pas, d'encombrement des urgences.

On voit la pénurie d'infirmières pour l'été, qui est annoncée, problème qui, vous savez, l'an dernier a été mis en exergue, qui a créé d'énormes bouleversements et des déficiences sur le plan des services aux patients et aux patientes au cours de l'été. On a dit: Il n'y aura pas de problèmes; on va planifier ça et, l'an prochain, tout va être prévu. Encore une fois, donc, ce que nous annonçons pour l'été, c'est un surcroît de travail, une pénurie de personnel infirmier, sans doute la fermeture de lits, ce qui réduira encore l'accès des services aux patients. Simplement le CHUM, par exemple, dit: Nous avions besoin de 200 infirmières et nous n'avons pu en embaucher que 90.

Enfin, vous savez, l'impression que nous avons, c'est qu'avec toutes ces ententes de gestion entre le ministère, les régies et les établissements nous allons encore une fois assister à une partie de tordage de bras où on va dire: Vous devez rencontrer ces objectifs. Et les établissements, les dirigeants, les administrateurs vont dire: On n'a pas le choix que de fournir les services aux patients. Vous savez, l'an dernier, par exemple, il y a des régies qui avaient écrit à des établissements en disant: Plus que jamais il faut s'assurer que les objectifs de performance sont atteints. Advenant que l'exercice ne suffise pas, je vous demande dès maintenant d'identifier la diminution ou la fermeture de services qui, selon votre expérience de gestionnaire, pénalisera le moins possible la population. Est-ce que nous allons encore une fois cette année assister à des discussions semblables entre les régies et les établissements, toujours au préjudice des patients?

Enfin, dans le domaine de la santé, les fonctions des 17 régies régionales coûtent près de 100 000 000 $. Évidemment, c'est un lourd processus bureaucratique. La ministre dernièrement a déclaré: L'ère de la régionalisation est terminée, et elle indiquait qu'elle va centraliser davantage les décisions dans son ministère et que les centres hospitaliers universitaires, qui représentent, vous savez, une proportion importante des activités, relèveront dorénavant directement de la ministre.

Donc, après avoir demandé aux conseils d'administration des régies, l'an dernier, de faire l'odieux du travail de bras, de réduire les déficits, d'avoir demandé la même chose aux administrateurs d'hôpitaux, maintenant on dit: On va décider de centraliser. Voulez-vous nous dire maintenant pourquoi on maintient les mêmes dépenses administratives pour les régies, qui verront, semble-t-il, leur rôle réduit? Déjà en 1996, le rapport Deschênes disait que le nombre de fonctionnaires dans le ministère n'avait pas diminué malgré la mise en place des régies, que le nombre des fonctionnaires, des employés dans les régies, lui, avait augmenté. Pourtant, rien n'a été fait depuis ce temps pour revoir les rôles des régies, pour éviter les duplications. Et surtout, maintenant que la ministre déclare que l'ère de la régionalisation est terminée, ne pourrait-on pas économiser, sur le plan administratif, des sommes importantes que nous pourrions réinvestir dans les soins et les services directs aux patients?

(10 h 50)

Parlons maintenant brièvement des réseaux de l'éducation – et mon collègue de Kamouraska en reparlera tout à l'heure. Encore une fois, on tente de faire accroire que le montant considérable sera disponible pour de nouvelles activités, des réinvestissements. Sur la même base budgétaire, on retrouve un manque à gagner, encore, simplement pour les réseaux primaire, secondaire, collégial et universitaire, de 30 000 000 $ pour rencontrer les augmentations de coûts de système.

D'ailleurs, déjà, des commissions scolaires commencent à être inquiètes. Et une commission scolaire de mon comté, M. le Président, me faisait parvenir une résolution hier en disant que «le conseil des commissaires est inquiet de l'impact de certains paramètres sur la possibilité pour les commissions scolaires de fournir les services requis». Et je pense que ce n'est pas la seule commission scolaire qui partage les mêmes sentiments. Donc, encore une fois, beaucoup de marketing, beaucoup de chiffres, mais la réalité, c'est que les fonds alloués en 1999-2000 ne suffiront même pas à couvrir les coûts de système sur les mêmes bases budgétaires que celles de 1998-1999.

Pensons, par exemple, au Fonds d'accompagnement de l'économie sociale. Après deux ans, le gouvernement n'a dépensé que 52 000 $ sur les 2 600 000 $ qui avaient été promis par le ministre Landry dans son budget de 1997-1998. N'est-ce pas là l'illustration d'un programme qui ne fonctionne pas?

Si on parle du budget d'immobilisation des équipements culturels, il est passé de 63 000 000 $ l'an dernier à 47 000 000 $ cette année. Encore une fois, le gouvernement ne respecte pas son engagement de lever le moratoire sur les équipements culturels, et notamment les bibliothèques publiques. Au début de mars 1999, le responsable du Programme de soutien aux équipements culturels de la Montérégie écrivait à une municipalité de mon comté pour dire: «La levée du moratoire, attendue pour le 1er avril prochain, permettra aux clientèles admissibles de se prévaloir de ce programme.» Or, déclaration de la ministre de la Culture, le moratoire n'a pas encore été levé. Et des municipalités qui attendent depuis deux, trois ans ne pourront pas encore cette année, malgré les promesses faites en campagne électorale, bénéficier des sommes dont elles devaient bénéficier.

M. le Président, je voudrais simplement dire un mot également, lorsqu'on parle de croissance économique, sur le prix à payer pour l'incertitude politique. Je pense que c'est important de le rappeler. Et c'est le premier ministre lui-même qui le disait dans son discours inaugural: Il y a un prix à payer pour l'incertitude politique. Et, quand les agences Moody's maintenaient la cote du Québec, il y a quelques semaines, on mentionnait quand même: «Nous croyons que le risque lié au potentiel de séparation a quelque peu diminué ces dernières années, mais il s'agit d'une situation qui peut changer. S'il y a un changement, il est difficile de croire qu'il n'y aura pas d'impact.»

Dans une annonce dans les journaux après le discours du budget, le ministre des Finances indiquait: «Pour stimuler l'économie, une première tranche de 400 000 000 $ de réduction d'impôts aura lieu en juillet 1990.» Le ministre lui-même reconnaît donc que la réduction d'impôts est une manière de stimuler l'économie et notamment d'ouvrir des emplois pour nos jeunes. Pourquoi n'a-t-il pas décidé de le faire ou ne décide-t-il pas de le faire rapidement? Depuis 1980, plus des deux tiers des augmentations des revenus des Québécoises et des Québécois sont retournés à l'administration publique. À ce rythme, on l'a mentionné au début, les Québécois continuent de s'appauvrir. Et c'est ce qu'illustre le montant additionnel de péréquation qui a été versé par le gouvernement fédéral il y a un mois, à peu près.

Je pense que c'est donc important, M. le Président, de vous dire que les choses doivent changer. Les Québécoises et les Québécois ont besoin d'un gouvernement qui revoit son organisation, qui réduit les coûts administratifs, qui recentre son rôle sur les missions principales de l'État – ses missions de base – et qui cesse de voir l'interventionnisme de l'État et la multiplication des structures comme la solution à tout. La preuve, depuis quatre ans, sur le plan de la croissance économique, c'est que nous n'avons pas atteint les résultats qui avaient été identifiés au Sommet économique et surtout pas des résultats où nous pouvons nous comparer à nos voisins au Canada.

En somme, l'État doit arrêter de se promener avec le portefeuille des Québécois parce qu'il estime qu'il est meilleur juge qu'eux pour dépenser leur argent. Le vent a changé de direction autour de nous dans nos sociétés contemporaines. Nous devrions, nous aussi, réorienter les voiles de l'État, M. le Président, pour être capables de nous ajuster au monde nouveau, au monde contemporain et de remettre le Québec sur la voie de la croissance économique. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vaudreuil et critique officiel de l'opposition au niveau des dossiers du Conseil du trésor. Nous cédons maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe et adjoint parlementaire à Mme la ministre de la Culture et des Communications. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: M. le Président, je vous remercie de me donner la chance de m'exprimer aujourd'hui sur une chose excessivement importante, puisqu'il s'agit d'une des raisons fondamentales pour laquelle il existe une Assemblée nationale, c'est-à-dire voter les crédits, contrôler les crédits, surveiller les crédits, c'est-à-dire surveiller la caisse commune que le peuple du Québec constitue chaque année grâce à ses impôts et aux taxes qu'il paie, une caisse commune qu'il se constitue pour se payer des services. Et une caisse commune, quand on constitue ça, M. le Président, on ne met pas ça entre les mains de n'importe qui, on met ça entre les mains de gens de confiance.

Moi, M. le Président, je suis très heureux de faire partie d'une équipe qui mérite la confiance de la population, d'une équipe qui a su démontrer du courage, qui a su démontrer de la détermination et qui a su démontrer du savoir-faire pour le bénéfice de la population.

M. le Président, quand nous avons pris le pouvoir, en 1994, je me bornerai à le rappeler, nous avons pris la situation des finances publiques dans un piteux état. Les déficits s'accumulaient les uns après les autres et, en 1994, on s'orientait vers plus de 6 000 000 000 $ de déficit, 6 000 000 000 $ de déficit, ce qui était beaucoup, plusieurs fois au-delà de ce qui avait été prévu par le budget. On s'orientait donc vers des déficits exceptionnels parce qu'il n'y avait plus de contrôle à la direction de l'État. C'est alors que notre premier ministre a dit: Nous, on va vous dire ce qu'on va faire et on va faire ce qu'on vous dit, à part ça. Et, étant donné que le gouvernement a fait ce qu'il a dit, il a mérité la confiance de la population parce qu'il a fait preuve de responsabilité.

Pour la première fois en 40 ans, rappelons-le – rappelons-le – le gouvernement du Québec, notre gouvernement, a mis fin à la spirale de l'endettement systématique. Et maintenant, nous n'endettons plus, nous ne nous endettons plus pour payer l'épicerie, nous ne nous endettons plus pour payer les investissements; nous vivons, nous avons appris à vivre selon nos moyens, M. le Président, et nous devons cela aux membres de cette équipe gouvernementale qui a fait preuve d'un grand courage et d'une grande détermination. Nous le devons à notre premier ministre qui a su montrer la direction, nous le devons au président du Conseil du trésor qui a su, malgré les assauts des députés, dont je suis, malgré nos assauts à nous, garder la ligne vers la diminution et la disparition du déficit.

(11 heures)

C'était dur pour nous, M. le Président, parce qu'on a des grands besoins dans nos comtés et, chacun d'entre nous, eh bien, nous faisons valoir les besoins de nos commettants. C'est ce que nous avons offert, mais nous pouvons le faire avec d'autant plus de confiance, nous, de cette équipe gouvernementale, M. le Président – ou Mme la Présidente, parce que je vois que M. le Président s'est fait remplacer par Mme la Présidente, n'est-ce pas, une dame qui a fait preuve dans le passé de beaucoup de compétence dans les différentes fonctions qu'on lui a confiées et qui saura en faire autant à titre de présidente de cette Assemblée, et que je salue très amicalement.

Alors, Mme la Présidente, je voulais mentionner l'importance, donc, du rôle qu'a joué le président du Conseil du trésor. Et, vous comme moi, vous avez été députée et vous avez sans doute fait preuve de beaucoup de courage, et de détermination, et d'insistance pour satisfaire les besoins de votre comté, mais vous pouviez le faire avec d'autant plus de sérénité que vous saviez que M. le député de Labelle, président du Conseil du trésor, saurait maintenir le tout dans le domaine, dans la mesure de ce qui est possible à un État responsable, Mme la Présidente.

Et on a réussi aussi à faire le ménage dans des domaines qui nous sont très sensibles. Par exemple, la santé et l'éducation, ça, c'est des choses qui sont sensibles. Vous savez, on a toujours peur d'avoir besoin de soins de santé et on veut avoir un système qui soit prêt à répondre au moindre besoin que nous ayons. Donc, chacun d'entre nous, la santé, ça nous inquiète, ça nous préoccupe, et on veut que ça aille bien de ce côté-là. Et nous avons eu la chance d'avoir, dans l'ex-ministre de la Santé et député, je crois, de Charlesbourg, nous avons eu la chance d'avoir un grand ministre de la Santé qui a réussi à faire un grand ménage qui était difficile à faire et qui l'a fait avec beaucoup de détermination et de savoir-faire. Et maintenant notre nouvelle ministre de la Santé continue ce travail, la députée de Taillon, avec une pertinence et une qualité d'intervention qui sont soulignées par l'ensemble de la population, Mme la Présidente.

Et ça a été la même chose dans le domaine de l'éducation, où nous avons réussi à faire le ménage, à permettre à plus de 5 000 jeunes enseignants et enseignantes d'avoir un poste permanent dans l'éducation, en même temps que nous avons fait des transformations majeures pour nous assurer que l'école serait le centre de toutes les décisions, c'est-à-dire l'école, là où il y a de vrais professeurs, là où il y a de vrais étudiants et là où il y a de vrais parents et de vrais directeurs, et que c'est là que se prendraient les principales décisions dans l'éducation, Mme la Présidente.

Nous avons fait la même chose dans le domaine de l'emploi. Nous avons fait en sorte de multiplier les investissements grâce à l'effet de levier d'un certain nombre d'interventions, et nous devons remercier le député de Verchères, n'est-ce pas, ministre des Finances, qui a su mettre en place des programmes qui ont fait en sorte de diminuer la charge de l'État par rapport à l'aide sociale qu'il doit verser à ceux qui n'ont pas d'emploi. Donc, grâce à la contribution de M. le député de Verchères ainsi que de l'ex-ministre de l'Emploi et de la Solidarité, on a vu sortir, en moins de deux ans, plus de 120 000 personnes du cercle infernal de la pauvreté, de l'aide sociale. Ça, c'est des grands succès, et ce sont des succès qui ont été obtenus dans des années de vaches maigres, Mme la Présidente. Pourquoi? Par le savoir-faire et par la concertation avec les principaux intervenants du milieu.

Mme la Présidente, j'aurais beaucoup d'autres choses à vous souligner, mais je vois que le temps passe rapidement. Je voudrais vous dire, Mme la Présidente, que, malgré tout cela, je dois admettre qu'il y avait des choses vraies dans ce qu'a dit le député qui a parlé devant moi, qu'il y a encore trop de chômage, trop de dettes, trop d'impôts payés au Québec. Le fait qu'on paie plus d'impôts que partout au Canada, ça nous fait mal, ça nous préoccupe. Le fait qu'on ait plus de chômage que partout au Canada, ça nous préoccupe, Mme la Présidente. Le fait que le Québec soit la province la plus endettée du Canada, ça nous déchire le coeur, M. le Président, parce que ça a des conséquences pour nos enfants. Alors, ça nous préoccupe profondément. Mais, M. le Président, ça ne fait pas que nous préoccuper, ça nous occupe aussi, ça nous occupe, parce qu'on veut trouver une solution à ce problème-là, et, pour trouver une solution, il faut en connaître la cause.

Pourquoi le Québec est dans cette situation dans l'ensemble canadien, alors qu'il a des richesses amplement, alors qu'il a une population intelligente, active, dynamique, alors qu'il est placé dans une position stratégique par rapport aux grands courants de l'économie mondiale? Pourquoi on a encore ce problème-là, M. le Président? C'est à cause de l'oeuvre systématique du gouvernement fédéral qui s'est organisé, à travers les décennies, pour nuire à notre économie. Et ça, ce n'est pas une affirmation générale, globale qu'on fait comme ça en l'air parce que ça paraît bien. Vous vous souvenez de la ligne Borden? Je n'ai pas besoin d'en ajouter plus. Vous vous souvenez que, grâce à cela, à cette ligne Borden, à cette loi fédérale, on a étouffé les raffineries de sucre et quasiment réussi à détruire notre pétrochimie au Québec? Vous vous souvenez, M. le Président, de l'attitude du gouvernement fédéral dans tout le domaine du Pacte de l'auto? Toute l'industrie automobile s'est développée en Ontario. On est restés des clients et des chômeurs.

M. le Président, c'est à travers l'histoire, c'est toujours comme ça. On donne, nous, le Québec, généreusement. On ne s'est pas plaint de contribuer largement à la construction du fameux pont de Charlottetown. C'est important. On a contribué largement. Mais, quand est venu le temps, par exemple, de faire l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard ont obtenu des compensations du gouvernement fédéral pour harmoniser leurs taxes. Le Québec qui avait été le premier à le faire n'a jamais eu un sou.

M. le Président, le retard du Québec, il est dû à l'effet systématique du gouvernement fédéral sur les entreprises, sur les initiatives québécoises. Et j'irai plus loin, M. le Président. Une chose que beaucoup de députés savent mais que la population ne savait peut-être pas encore jusqu'à tout dernièrement, dimanche dernier, M. le premier ministre a fait un discours au Conseil national du Parti québécois et il a expliqué des choses que les gens doivent savoir, c'est l'action systématique du gouvernement fédéral pour nuire aux intérêts du Québec à l'étranger.

Regardez ce qu'il disait, M. le Président, écoutez ça: Le gouvernement canadien travaille d'ailleurs très fort pour empêcher le Québec de donner un prolongement politique à sa force économique sur la scène mondiale. Le gouvernement canadien mène toujours un combat acharné pour que le Québec ne puisse pas poster en permanence un seul diplomate dans la capitale américaine, alors que les États-Unis sont le principal partenaire économique du Québec. Il ne veut pas, le fédéral, que le Québec parle de sa propre voix à Washington. Nous n'avons pas le droit d'aller parler nous-mêmes quotidiennement dans la capitale américaine à nos premiers clients et à nos premiers fournisseurs.

Puisque le Québec a trouvé une façon, grâce à l'ALENA, n'est-ce pas, de développer davantage son réseau économique nord-sud, eh bien, Ottawa a décidé d'oeuvrer pour nuire au Québec. Puisque le Québec a réussi à mettre en place la COPA, la Conférence des parlementaires des Amériques, et à faire en sorte que les parlementaires québécois puissent aller en Amérique latine et défendre les intérêts du Québec, eh bien, puisque le Québec a trouvé une façon de dialoguer avec les Amériques, Ottawa a décidé d'oeuvrer pour nuire à cette organisation parlementaire. Le Parlement fédéral s'est retiré de la COPA et travaille à remplacer ça, à mousser à la place une organisation parlementaire concurrente qui serait contrôlée par l'OEA, M. le Président.

Alors, c'est ça. Chaque fois que le Québec travaille pour résoudre ses problèmes, le gouvernement fédéral, qui devrait être son principal allié, travaille à lui nuire. Alors, nous, on est préoccupés par cette situation du Québec. C'est pourquoi on ne fait pas que s'en préoccuper, on s'en occupe.

Notre gouvernement a mis en place une réforme de la SGF, il a créé Investissement-Québec, il a pris toutes sortes d'initiatives que je devrai passer sous silence parce que j'ai peu de temps, M. le Président. Mais tout ça a donné des résultats. Le chômage a baissé, en moins de deux ans, de plus de 12 % à moins de 10 %. Donc, on a réussi des choses. Je vous disais tout à l'heure que plus de 120 000 personnes sont sorties de l'aide sociale. Je ne vous disais pas, mais je vais vous le dire, que nous avons réussi à réduire les impôts de 500 000 000 $ malgré tout le reste que nous avons fait pour assainir les finances publiques, ce qui fait que plus de 200 000 familles québécoises qui, normalement, auraient payé de l'impôt n'en paient plus parce qu'elles sont de petits gagnants.

(11 h 10)

Alors, M. le Président, nous avons beaucoup fait et nous allons continuer dans le même sens. Il faut continuer maintenant à réinvestir dans la santé, mais pas n'importe comment. Puisque les gens nous font confiance, puisque nous avons démontré que nous sommes rationnels et responsables dans l'administration des finances publiques, M. le Président, il faut maintenant continuer comme ça.

Donc, dans la santé, il n'est pas question de décharger des tas d'argent au hasard. Non, M. le Président. Il y aura un montant de plus de 1 000 000 000 $ qui sera mis pour éponger des déficits et faire en sorte d'absorber les coûts de système et il y aura, sur deux ans, un montant d'environ 600 000 000 $ pour redévelopper, réinjecter des sommes seulement dans les secteurs où il y a des besoins qui sont apparus. Nous allons avancer de façon systématique, progressive, rationnelle pour s'assurer que nous respectons les exigences d'une saine administration.

C'est pour cela que les gens nous font confiance, M. le Président, c'est pour ça qu'à la dernière élection les gens nous ont élus. C'est parce qu'on était capable de prendre les bonnes décisions. Peut-être est-ce vrai qu'il arrive parfois que l'opposition nous fait des critiques fondées, M. le Président. Il arrive même parfois qu'ils font de bonnes critiques. C'est sans doute pour cela que la population a décidé qu'elle en avait encore besoin, de l'opposition, et les a maintenus dans l'opposition. Alors, nous comptons sur vous pour nous faire de bonnes critiques afin que nous puissions continuer d'améliorer l'administration publique, et ensemble, nous, avec notre responsabilité, avec la confiance dont nous disposons de la population, bien nous allons pouvoir continuer à servir les intérêts du Québec.

Prenez, par exemple, chez nous, au Québec, un cas particulier. Grâce au principe des carrefours de la nouvelle économie, nous avons réussi à provoquer une explosion de développement économique dans la Cité du multimédia à Montréal. Et ça, c'est dans le comté d'ailleurs de notre collègue de Sainte-Marie–Saint-Jacques, n'est-ce pas, qui est actuellement leader parlementaire de cette Chambre, alors il y a sûrement contribué et il contribue à encourager les investissements pour donner de l'emploi aux Québécois et Québécoises.

Eh bien, cette action, M. le Président, a donné à penser à d'autres. Maintenant, nous travaillons, à Saint-Hyacinthe, dans la technopole agroalimentaire du Québec, à mettre en place la Cité des biotechnologies agroalimentaires, agroenvironnementales et de médecine vétérinaire. Alors, voici, M. le Président, un filon qui est productif et qui va contribuer à créer de l'emploi chez nous, mais pas seulement chez nous, parce que nous avons une vision pour l'ensemble de l'État du Québec, un peu partout où il faudra développer l'agroalimentaire, l'agroenvironnement et la médecine vétérinaire.

Par des actions concertées, rationnelles, structurées et avec une vision à long terme et des effets à court terme, c'est comme ça que nous travaillons, M. le Président, et le budget actuel, c'est comme ça qu'il faut le lire. C'est pour ça que les crédits que nous avons devant nous, il faut les adopter, parce qu'ils nous permettent de rendre au Québec, aux Québécois et Québécoises au centuple l'argent qu'ils ont mis dans la caisse commune et qu'ils ont confié à des gens de confiance: l'équipe de ce gouvernement, M. le Président, à laquelle je suis fier d'appartenir. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe et également adjoint parlementaire à Mme la ministre de la Culture et des Communications. Nous allons maintenant céder la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata et critique officiel de l'opposition en matière d'éducation. Alors, M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je ne peux pas laisser sous silence le dernier discours du député de Saint-Hyacinthe qui nous fait comprendre à tous pourquoi il est adjoint parlementaire de la ministre de la Culture et des Communications. Quel discours! Quel beau théâtre! Cependant, quand on s'arrête sur le fond du discours comme tel, force est d'avouer, M. le Président, qu'il n'y a pas grand-chose là-dedans.

Un de ses thèmes principaux – je suis heureux de voir qu'il a lu les documents libéraux – c'était Vivre selon ses moyens . Je suis heureux de voir que le député de Saint-Hyacinthe a lu avec attention le premier document qui a vraiment orienté le gouvernement du Québec vers la réduction du déficit, vers l'atteinte du déficit zéro, pas en 1998, pas en 1996, pas en 1995, mais en 1993. Par qui? Par le gouvernement libéral. C'est là qu'a commencé la véritable lutte au déficit. Et, malgré tout ça, le député de Saint-Hyacinthe...

Des voix: ...

M. Béchard: ... – merci, je suis heureux de voir qu'enfin ils comprennent – tente de dire que, bon, la vie est belle. Et il a même mentionné une chose – un autre thème important de son discours, je pense, qu'il faut relever – que son gouvernement avait fait le grand ménage. Puis il a vanté les mérites du député ministre de Charlesbourg, celui qui avait planifié dans les moindres détails sa réforme, celui qui a fait en sorte que les gens qui attendent encore aujourd'hui dans les salles d'urgence et celui qui a fait en sorte... Écoutez bien ça, M. le Président, on est obligé de réengager des gens qu'on a mis à la retraite. C'est dans les moindres détails pas à peu près, ça. C'est vraiment épatant. Vous pouvez bien être fier de faire partie de ce gouvernement-là. On n'a pas le même sens de la fierté.

Vous parlez des grandes réformes au niveau de l'emploi. Le cafouillis qu'on a actuellement au niveau de l'emploi au Québec, de la réforme de l'emploi, de l'arrivée de la nouvelle compétence en matière de main-d'oeuvre et de l'incapacité de ce gouvernement-là de la gérer adéquatement... On est en train de faire regretter à tous les Québécois d'avoir demandé cette revendication-là dans les 30 dernières années. Au lieu de préparer des discours vides comme ça, faites du bureau de comté, et vous allez voir que sur le terrain ça ne fonctionne pas du tout, du tout, du tout. C'est un cafouillis épouvantable.

Il a vanté le rôle primordial du président du Conseil du trésor dans des années de vaches maigres. Juste pour vous rafraîchir la mémoire, il ne faudrait pas oublier qu'au cours des quatre, cinq dernières années on a vécu la meilleure reprise économique pas juste au Québec, pas juste au Canada, en Amérique du Nord au complet. Et par hasard, malgré toute cette reprise économique, les millions d'emplois créés sur le continent, le Québec arrive quasiment dernier dans cette création d'emplois là. Pourquoi? Sûrement pas à cause de l'opposition, hein, M. le Président. Ça me surprendrait beaucoup. C'est peut-être en raison des grands calculs savants du cabinet, de l'autre côté.

Et d'ailleurs je vais profiter de sa présence pour mentionner quelque chose qui est assez révélateur de la capacité de bien compter, de bien gérer des membres du cabinet. La semaine dernière, le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes a dit, en déchirant sa chemise, que des étudiants québécois étaient privés de 10 000 bourses de 3 000 $ chacune, soit un total de 30 000 000 $ depuis avril 1998, à cause de l'imbroglio sur les bourses du millénaire. Juste pour son information, le programme commence en l'an 2000. On ne peut pas être privé de quelque chose qui n'est pas encore en vigueur. Il a mentionné ça, M. le Président. Tout un gestionnaire! Tout un gestionnaire!

Mais, pour revenir aux crédits comme tels, M. le Président, je pense qu'il faut placer le dossier de l'éducation dans le contexte des quatre dernières années. Le contexte est le suivant, c'est qu'il y a eu des coupures de 1 400 000 000 $: 1 200 000 000 $ au niveau du primaire et du secondaire; 250 000 000 $ au niveau du collégial; et 500 000 000 $ dans les universités. Alors, quand le député de Saint-Hyacinthe dit qu'ils ont fait le ménage, ils ont fait le ménage mais ils l'ont pelleté dans le réseau. C'est la même chose au niveau de la santé. C'est la même chose au niveau des affaires municipales. Demandez aux maires s'ils se souviennent du 375 000 000 $ que vous leur avez pelleté. Ils s'en souviennent tous. Donc, on a réduit de cette façon-là. Ça paraît bien, à Québec, de dire: On a atteint le déficit zéro.

Encore une fois, le député n'a pas mentionné que la véritable raison pour laquelle ils ont atteint le déficit zéro, lui qui a déchiré nombre de chemises en disant que le gouvernement fédéral faisait tout pour que le Québec ne fonctionne pas et que l'économie québécoise tire de la patte... Vous avez oublié un petit 1 400 000 000 $ de péréquation qui est arrivé dans le dernier budget et qui est la raison pour laquelle vous avez atteint le déficit zéro avant. Et ce n'est pas une fierté qu'on a à avoir, ce 1 400 000 000 $ là. C'est la preuve que vous êtes incapables de créer de l'emploi et incapables de créer de la richesse au Québec. Et c'est ça qui fait qu'on reçoit 1 400 000 000 $ du gouvernement fédéral. Et ça, je comprends qu'ils doivent être gênés d'en parler.

Dans le contexte de l'éducation, on a vu arriver un nouveau ministre qui, dès ses premières déclarations, disait qu'il allait se battre pour le refinancement du réseau de l'éducation, dès le 14 janvier. Il a mentionné par la suite qu'il souhaitait accroître dans la mesure du possible le financement du réseau durement touché par les compressions budgétaires, le 3 février. Mais, par hasard, par enchantement, en réaction du dernier budget, il a dit qu'il était très satisfait, il était très content de ce 600 000 000 $ là qu'il annonçait comme des nouveaux investissements en éducation.

(11 h 20)

Et cependant les réactions qui ont été faites, suite au dépôt de ce budget-là... Je vais seulement en dire quelques-unes. Le président de la Fédération étudiante universitaire, Nikolas Ducharme, disait: «Ce budget, c'est l'art de rire des gens; il ne s'y trouve pas 1 $ pour embaucher des profs, alors qu'il en manque 1 500.» Le président-directeur général de la Fédération des cégeps, a mentionné, suite au dernier budget: «Il n'y a pas de réinvestissement. On pensait voir la lumière au bout du tunnel, je ne vois qu'une bougie vacillante.» On pourrait continuer et continuer pendant plusieurs minutes.

Cependant, suite à ces réactions-là, le ministre de l'Éducation a probablement relu le dernier budget, a probablement vu les crédits qui lui étaient alloués et il s'est probablement rendu compte, à son tour, qu'il manquait de l'argent. Et, pour ces raisons-là, il a lui-même déclaré, le 22 mars, on peut le citer: «Le nouveau ministre de l'Éducation, M. François Legault, approuve les étudiants lorsqu'ils soutiennent que 600 000 000 $ en éducation, ce n'est pas suffisant.» Donc, après avoir vu tout ça, après avoir vu les réactions, même le ministre en est venu au fait que ce 600 000 000 $ qui a été investi, ce n'était pas suffisant.

On tente de faire une diversion pour démontrer que le ministre de l'Éducation est sensible aux revendications du réseau de l'éducation et de l'enseignement supérieur au Québec. Mais cependant je vous dirais qu'à la lumière des crédits, quand on a fait tout le débat sur les différents domaines qui concernent le ministère de l'Éducation et des argents qui y sont alloués, on se rend vite compte que le nouveau ministre de l'Éducation n'est pas un ministre de l'Éducation qui défend, comme tel, son réseau, défend les étudiants, défend les professeurs, défend les directeurs généraux. C'est un ministre de l'Éducation qui défend son gouvernement et qui est là pour transmettre la bonne nouvelle péquiste dans le réseau. Ce n'est pas à ça qu'on s'attend d'un ministre de l'Éducation. On s'attend du ministre de l'Éducation qu'il défende son réseau. Ce n'est pas le cas.

Mon collègue le député de Vaudreuil l'a dit avec éloquence tout à l'heure, et juste pour le rappeler, si on regarde les chiffres qui ont été alloués dans les derniers crédits, on se rend compte que le calcul fait en sorte qu'il y a un 100 000 000 $ quelque part qu'on prend, qu'on donne pour l'année passée et on dit: Vous allez être supprimés de certaines coupures, on vous redonne 100 000 000 $, puis que, cette année, le même 100 000 000 $, on dit: On va vous l'enlever sur les chiffres de l'année passée, mais on vous le redonne cette année. On va vous donner l'impression que c'est de l'argent neuf, ce qui fait que, dans les livres des crédits, on le mentionne exactement de cette façon-là et on dit même: «Il est à noter que la croissance par rapport à la dépense probable est inférieure aux investissements de 389 000 000 $ annoncés, lesquels ont été établis en considérant des dépenses de 137 300 000 $.»

Il y a un 100 000 000 $ là, M. le Président, qu'on vous donne pour l'année passée. Là, on fait les chiffres, on dit: On va vous l'enlever, on ne le mettra pas dans les chiffres, mais, cette année, on va vous le redonner, ça va être de l'argent neuf. C'est le même 100 000 000 $ qui se promène d'une année à l'autre, ce qui fait en sorte que, en bout de ligne, il manque présentement 35 000 000 $ dans le réseau de l'éducation.

Et je vous dirais que ce pelletage-là, ce manque d'argent chronique a des effets bien, bien réels. On a l'impression peut-être, souvent, quand on parle de chiffres, que ça ne concerne pas les gens, que ça n'a pas d'implications réelles. Et je vous dirais que, sur le terrain, dans la vie de tous les jours, là, au niveau des commissions scolaires, ce que ça provoque, ces coupures-là et ce sous-financement là, c'est qu'il y a de plus en plus de parents qui doivent payer des frais pour envoyer leur étudiant à l'école, que ce soient des frais de surveillance, des frais de garde, des frais de transport, ça se multiplie partout.

Et ça, M. le Président, c'est certain que, dans les livres du ministre des Finances, ce n'est pas comptabilisé. Mais c'est le même citoyen qui, en plus, je dirais, de la fiscalité et de ses effets pervers qu'on a découverts dans les dernières semaines... C'est une autre façon de taxer les gens. Ces gens-là qui ont des étudiants qu'ils envoient à l'école primaire et secondaire, qui sont obligés de payer des frais, bien on les taxe.

Un exemple. On a coupé dans les professionnels. On a des établissements dans le réseau de l'éducation au primaire-secondaire, des commissions scolaires qui sont déficitaires. Ce n'est pas arrivé souvent, ça, M. le Président. Ces réseaux-là n'ont pas le droit de faire de déficits. On se ramasse avec des commissions scolaires qui sont obligées de faire des déficits. On continue de dire, malgré tout ça, malgré qu'il en coûte 200 $, 300 $, 400 $ par année aux parents pour envoyer leur enfant à l'école, on continue de prétendre que c'est gratuit. Ce n'est pas vrai. Et les parents qui nous écoutent aujourd'hui, qui ont à payer, le savent, que ce n'est pas vrai que l'école est gratuite au Québec.

Même chose au niveau des cégeps. Au niveau des cégeps, on dit: Il n'y a pas de frais de scolarité, c'est gratuit. Mais, par hasard, on a un relevé de toute une série de frais qui sont chargés aux étudiants pour faire en sorte de se financer. Les établissements collégiaux ne font pas ça de gaieté de coeur. Il y en a presque une trentaine qui sont déficitaires dans les deux dernières années au Québec. Ce n'est pas de gaieté de coeur que des administrateurs font des déficits. Ils sont obligés de les faire, ils ne sont pas capables de faire autrement. Ils ont le choix entre la qualité et les services éducatifs offerts aux étudiants ou absorber les coupures puis sacrifier ces services-là. Et ce qu'ils font, ils ont chargé des frais.

Et, M. le Président, on disait en commission parlementaire que c'est seulement certains frais qui sont chargés pour couvrir les vrais coûts, mais, si c'est seulement pour couvrir les vrais coûts, pouvez-vous m'expliquer comment ça se fait que des étudiants et des étudiantes, par exemple, en technique infirmière, au Québec, leurs frais de vaccination avant de commencer leurs stages, à certains endroits, on leur charge 20 $, à d'autres endroits, pour le même vaccin, on leur charge 300 $? Donc, qu'on ne vienne pas me dire que ce n'est pas une mesure financière.

Mais, encore une fois, c'est une façon que les dirigeants d'établissements collégiaux ont trouvée pour absorber les coupures qui leur sont imposées. Qu'est-ce que vous voulez qu'ils fassent d'autre? À un moment donné, il faut payer l'électricité, il faut payer des frais fixes, et, quand on a moins d'argent, on trouve des situations comme ça et on fait en sorte que ce sont des étudiants et des parents d'étudiants qui doivent payer, encore une fois, parce que ce n'est pas vrai que l'enseignement primaire, l'enseignement secondaire et l'enseignement collégial au Québec sont gratuits. Ce n'est plus vrai depuis que ce gouvernement-là est en place, M. le Président.

Et je vous dirais que le ministre de l'Éducation est le premier à dire que ça va très bien, qu'il rajoute de l'argent, qu'il n'y a pas de problèmes. Je pense que le ministre de l'Éducation, quand il va dans les écoles, devrait faire plus que seulement se faire prendre en photo, il devrait aller voir vraiment ce qui se passe dans les classes. Il devrait vraiment aller voir ce qui se passe au niveau des dirigeants comme tels des établissements. Et il se rendrait peut-être compte que finalement ces gens-là sont essoufflés, sont fatigués et n'ont plus d'autres moyens et d'autres solutions que de faire payer les parents ou les étudiants pour en arriver à, je dirais, offrir un enseignement qui est encore de qualité.

Au niveau universitaire, ce gouvernement-là fait les gorges chaudes en se disant: On a coupé en deux la dette des universités. On a donné 170 000 000 $ cette année. Soit. Ce qu'ils ne disent pas, c'est que ce déficit-là a grimpé de presque 300 000 000 $ dans les quatre dernières années. Ça, ils ne le mentionnent pas. Ce qu'ils ne disent pas, c'est que, pour avoir la totalité de ces argents-là, les universités doivent présenter des plans de redressement au ministère de l'Éducation, plans de redressement qui, parfois, peuvent même aller jusqu'à proposer de fermer les bibliothèques universitaires les soirs et les fins de semaine. C'est là qu'on en est rendu, M. le Président. Beau système!

Ce n'est la faute de l'opposition, là, ça s'est passé dans les quatre dernières années. Et c'est de pire en pire, et on ne voit pas la lumière au bout du tunnel. Et je vous dirais que ça a des effets, dommages et très dangereux sur, entre autres, les chercheurs qui quittent parce que nos dirigeants n'ont plus les moyens de les retenir ici. Parce qu'on a en plus, je dirais, une situation fiscale qui avantage les départs, qui est un incitatif à l'exode des cerveaux, mais ce gouvernement-là ne fait rien pour bouger là-dessus. Ça fait en sorte que des établissements d'enseignement supérieur qui, au Québec, ont mis des années à bâtir une réputation nationale, une réputation internationale, se retrouvent aujourd'hui dans des situations où, à se promener dans les campus, on voit la différence entre si on est dans une université québécoise ou si on est dans une université canadienne ou américaine, seulement à regarder, parce que nos administrateurs ont été étouffés dans les dernières années par les compressions budgétaires de ce gouvernement-là, M. le Président.

Et je vous dirais que, à la lumière des crédits et de ce qui se passe, tout le monde mentionne que l'éducation, c'est la clé vers une société plus prospère. Juste vous mentionner deux des points noirs à l'économie montréalaise qui ont été soulevés par le Conference Board dans les dernières semaines, c'est le taux de décrochage scolaire, qui est en hausse croissante pour atteindre 34,2 %, et le niveau d'éducation montréalais qui est plus bas que Toronto et Vancouver. Ce n'est pas la faute des autres, là, c'est la faute d'eux autres. C'est aussi simple que ça et ce sont eux qui sont les vrais responsables.

Et je vous dirais, M. le Président, que, quand j'entends mon collègue de Vaudreuil dire que le gouvernement actuel a sous-estimé, a caché, a mis sous le bureau 550 000 000 $ qu'il se garde comme marge de manoeuvre pour je ne sais quoi, peut-être pour un référendum, soit, on ne sera pas surpris... Mais, pendant ce temps-là, ce sont les professeurs, les étudiants, les dirigeants du monde scolaire qui marchent ensemble dans la rue pour dire qu'ils ne sont plus capables et que c'est le réseau qui est en péril.

(11 h 30)

Donc, M. le Président, en terminant, je vous dirais que ce qui ressort des derniers crédits, c'est que, un, il n'y a pas plus d'argent et que, deux, encore plus décevant, on a présentement un ministre de l'Éducation qui est beaucoup plus vice-président du Conseil du trésor, qui est beaucoup plus porte-parole du gouvernement péquiste et justificateur de leurs décisions qu'un véritable défenseur du monde de l'enseignement primaire, secondaire, collégial et universitaire. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata et critique officiel de l'opposition en matière d'éducation. Nous allons maintenant céder la parole au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement. M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie. M. le Président, pour la première fois depuis 40 ans – nous l'avons dit, nous l'avons souligné et nous allons le répéter – en cette Assemblée nationale, le ministre des Finances et ministre de l'Économie nationale a déposé un budget non déficitaire. Pour la première fois en 40 ans. Les gens d'en face – puisque c'est l'expression coutumière – ont eu 10 occasions de faire la même chose; jamais, M. le Président, les gens d'en face n'ont saisi l'occasion de déposer en cette Assemblée nationale un budget non déficitaire. L'action gouvernementale cohérente, audacieuse a fait que la santé économique du Québec est bien meilleure aujourd'hui qu'elle n'était hier et encore moins qu'elle ne le sera demain, compte tenu des secteurs d'intervention que nous avons décidé de prioriser.

Pour employer une expression coutumière dans la population, nous avons décidé que la carte de crédit était suffisamment loadée. La date d'échéance du paiement arrivait, nous reportions. Par voie de conséquence, l'intérêt sur le paiement augmentait et nous étions toujours en train de courir après quelque chose qui devenait inatteignable, puisque le déficit du Québec grandissait. Nous avons décidé, M. le Président, que nous faisions le ménage là-dedans. L'opposition était d'accord que nous le fassions. L'ironie de la chose, c'est qu'au moment où ils étaient en situation de le faire jamais aucun d'entre eux n'a eu la bonne intelligence de prendre cette décision et de dire: Ça suffit! Nous sommes en train de nous endetter collectivement, et nous sommes en train également de retourner la facture à celles et ceux qui nous suivent, c'est-à-dire nos fils, nos filles, nos neveux, nos nièces, qui d'ailleurs nous regardent d'un oeil un peu sceptique.

Et, compte tenu de l'âge de la majorité des membres de cette Assemblée, j'aurais peut-être le goût de raconter une toute petite anecdote qui me vient de monsieur mon filleul, qui dit: Quelle est la différence, parrain, entre toi et moi? Il dit: Toi, tu es un baby-boomer, et moi, je suis un baby-boomerang. Qu'est-ce que c'est, Maxime? Toi, compte tenu de ton âge, tu as évolué dans une situation où les choses étaient plus faciles. Donc, tu as profité d'un grand espace, à la fois de liberté et de prospérité. Pour moi, les choses sont plus fragiles. Toi, tu as pu quitter la maison et prendre un appartement parce que, à la sortie de tes études, tu avais déjà plusieurs contrats potentiels en poche. Moi, je suis obligé de faire je ne sais pas combien de demandes, et je vais peut-être tenter de quitter la maison et quitter papa et maman, mais je suis certain que la situation pourrait peut-être être difficile et que je vais revenir à la maison. Donc, je suis, moi, un baby-boomerang.

Eh bien, il fallait s'occuper, M. le Président, de cette génération des baby-boomerangs. Ma responsabilité, n'ayant pas d'enfants, était de me préoccuper du sort de cet extraordinaire petit bonhomme – petit bonhomme, mais il est maintenant rendu à 16 ans, là – qui s'appelle Maxime, qui est mon filleul, et envers lequel je me sens une responsabilité tout à fait particulière. Il n'était plus question de lui dire: En plus du pays que je veux te donner et que je te donnerai, bien, je vais t'en donner un endetté, mal administré, mal géré. Non. Nous l'avons fait courageusement, nous l'avons fait sans mobiles électoraux. C'est ce qui différencie d'ailleurs, M. le Président, des politiciens et des hommes et des femmes politiques: le politicien prépare la prochaine élection; l'homme politique prépare la prochaine génération.

C'est dans cet esprit, M. le Président, que nous avons décidé d'agir. Je vais convenir avec l'opposition, puisque l'opposition ne peut pas avoir tort, surtout qu'il y a des endroits où, oui, ça a fait mal, mal pour nos compatriotes et mal également pour nous aussi... Mais ils avaient laissé pourrir cette situation à un point tel que, si on laissait continuer, c'était l'amputation. Un laisser-faire, un laisser-aller. Et, quand j'écoutais le député de Kamouraska-Témiscouata qui parlait d'effets pervers, la pire perversité est de laisser le Parti libéral gouverner le Québec durant 10 ans, comme ça a été le cas. On voit le résultat.

Et j'écoutais, de plus, un nouveau collègue en cette Assemblée, le député de Mont-Royal, livrer sa critique. Comme le disait notre collègue ministre des Affaires intergouvernementales dans une commission parlementaire il y a quelques années, j'estime que l'opposition n'a pas suffisamment profité des vertus salvatrices et rédemptrices de l'opposition. Nous leur ferons faire un troisième mandat dans l'opposition, ils n'ont pas encore tout appris.

On nous dit: La création d'emplois au Québec, ah! bien non, mais c'est une conjoncture internationale. Vous n'y êtes pour rien! C'est l'intervention du Saint-Esprit. Mon collègue le député de Saint-Hyacinthe a mentionné, à juste titre, une des actions les plus importantes du ministre des Finances et de l'Économie nationale, député de Verchères, la Cité du multimédia. En six mois, nous avons créé la moitié des emplois que nous souhaitions créer en 10 ans, et dans un secteur porteur pour lequel les gens d'en face n'ont eu aucun intérêt.

Des voix: ...

M. Boulerice: Aucun intérêt! Leurs collègues qui ont été ministres de la Culture ou des Communications ou des inforoutes, la seule chose qu'ils ont à leur actif, c'est d'avoir laissé le Québec perdre un pouvoir important qui était le tout dernier qu'il lui restait, au niveau des télécommunications. Je me souviens très bien qu'en cette Chambre j'étais intervenu, interpellant l'ancienne députée de Marguerite-Bourgeoys, néanmoins grande amie, le lendemain du jugement de la Cour suprême où le Québec était évacué de ce champ, en lui disant: Mais, maintenant que la tigresse est dégriffée, que va-t-il se passer? Que va-t-il se passer?

(11 h 40)

Ce gouvernement a décidé d'investir, M. le Président, dans des secteurs de pointe. Voilà! Nous avons investi une somme, somme toute modeste mais qui est porteuse, où il y a une plus-value. L'actuel ministre de l'Économie nationale avait proposé au Québec, en 1983, je crois, de prendre le virage technologique. De 1985 à 1994, le virage technologique... Bon, au départ, la définition du mot ne semblait pas avoir été comprise par ceux qui, à l'époque, formaient le gouvernement. Eh bien, il a décidé, puisque nous étions de retour, de mettre à profit ce nouveau secteur de l'économie, secteur porteur, de façon à créer de l'emploi et, de surcroît, augmenter les exportations et les transferts de haute technologie en provenance du Québec.

Et ce qu'il y a de merveilleux au niveau du multimédia – et mon collègue adjoint parlementaire à la ministre de la Culture et des Communications va sans aucun doute être du même avis que moi – est que c'est presque l'âge d'or. C'est comparable à une renaissance, puisque cela fait appel à plusieurs secteurs de l'activité nationale. Cela fait appel à des techniques pointues, mais fait appel également à la culture. Dans ces hautes technologies, nous nous engageons et nous faisons travailler à des emplois valorisants et prometteurs des gens qui sortent autant des écoles techniques que ceux qui sortent des beaux-arts, puisqu'on allie à la fois culture et technologie. Beau choix, M. le Président, très beau choix. Eh bien, on nous dit: Non, non, c'est l'intervention du Saint-Esprit.

Et, en plus de faciliter l'établissement de ces entreprises, une foule de programmes ont été inventés pour aider à l'engagement, aider à l'exportation, garantir leurs projets d'agrandissement et d'investissement, comment faire la promotion de leurs produits. Et j'étais témoin d'un bel exemple où, la semaine dernière, une entreprise reliée aux hautes technologies présentait un concept, mais tout à fait révolutionnaire, au gouvernement de la municipalité de Saint-Pétersbourg, en Russie, et seuls les Québécois sont détenteurs, puisqu'ils possèdent les droits mondiaux, de cette technologie.

Il y a, grâce à nos actions, quatre villes au monde où l'aéronautique a une importance: Seattle, Wichita, Toulouse, Montréal. Je ne les ai pas nommées par ordre d'importance, M. le Président, parce que Toulouse, c'est 20 000 emplois reliés au grand secteur de l'aéronautique, et Montréal, c'est 40 000. Et, là encore aussi, c'est des secteurs de pointe. Nous sommes probablement le seul endroit au monde où l'avion, chez nous, ça va de la planche à dessin jusqu'au simulateur de vol et au véritable décollage de l'avion, tellement nous sommes bons là-dedans.

Donc, nous avions, M. le Président, une situation financière extrêmement difficile où nous avions des choix à faire, où nous savions que nous risquions de heurter une grande partie de la population, mais, en politique, le courage est toujours beaucoup plus payant que la lâcheté. Nous avons décidé d'agir. Résultat: nous avons été réélus, M. le Président, gratuitement. Nous avons été réélus. Et puis, nous avons fait les efforts nécessaires de façon à refaire le tissu économique du Québec, mais à en faire un en fonction de l'économie telle que nous la vivons.

Dans ses interventions, l'opposition dit: Le Québec est le pays le plus taxé; vous n'avez absolument pas songé aux contribuables, vous continuez de les égorger. M. le Président, je vous disais tantôt qu'ils n'ont pas suffisamment profité des vertus salvatrices et rédemptrices de l'opposition. Ils y resteront. En 1990-1991, les gens d'en face ont accru le fardeau fiscal des Québécois de 960 000 000 $, mais ils ont dit: On pourrait peut-être faire mieux. En 1991-1992, ils ont dit: Bien, écoutez, tant qu'à y être, là, agissons sérieusement: Ils ont augmenté le fardeau fiscal de 1 900 000 000 $. En 1992-1993, ils ont dit: Écoutez, on est bien partis, il faut continuer. L'avenir est radieux, camarades. Ils ont dit: On a fait 1 900 000 000 $; si on allait à 2 200 000 000 $?

Une voix: Une grande année.

M. Boulerice: C'est une grande année, un bon cru. Mais il ne faut pas s'arrêter quand on est aussi bien parti. En 1993-1994, ils ont dit: Là, vers les sommets! 3 300 000 000 $, en 1993-1994. En 1994-1995, 2 000 400 000 $. C'est moins. Pourquoi? Ils ne se sont pas rendus au bout de l'année. Heureusement, on les a remplacés. Et, durant ce temps-là, ils ont augmenté, dans le budget de 1993-1994, de manière rétroactive – rétroactive, M. le Président, je l'ai bien dit, là, rétroactive – l'impôt sur le revenu des particuliers de 1 300 000 000 $.

Ils ont le front, eux qui ont littéralement égorgé la population du Québec, de dire: Mais vous ne faites rien pour eux. Écoutez, on pourrait peut-être, à même nos budgets discrétionnaires, vous fournir des glaces; vous pourriez vous regarder en face et vous désoler de ce que vous avez fait durant les neuf années que vous étiez là. Pour employer cette phrase mythologique, nous n'avons pas fini de nettoyer les écuries d'Augias. Et nous le ferons, et nous avons eu un budget et des crédits qui sont tout à fait exemplaires, et nous les voterons. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et leader adjoint du gouvernement. Avant de céder la parole à Mme la députée de La Pinière, je vous demande s'il y a consentement pour que nous dépassions l'heure fixée. Il reste un temps de parole de 21 minutes à l'opposition officielle.

M. Boulerice: Je sais que le leader de l'opposition, une fois, l'a refusé, mais, comme je suis d'une autre nature, je vais consentir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je comprends que vous consentez. Alors, nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière et critique officielle de l'opposition en matière d'autoroute de l'information et de services gouvernementaux. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je comprends qu'il a été convenu avec les deux leaders d'un débat restreint de deux heures, ce qui nous amène exactement à l'heure que vous avez suggérée. Donc, il n'y a pas nécessairement de faveurs de l'autre côté.

M. le Président, il me fait plaisir de participer, au terme de cette opération d'étude des crédits, à ce débat restreint parce que c'est une occasion de plus qui m'est donnée pour exprimer ma profonde déception par rapport à cet exercice laborieux. J'ai eu l'occasion de participer à l'étude des crédits dans différentes commissions, plus particulièrement à la commission de l'économie et du travail, la commission des finances publiques, la commission de l'aménagement du territoire, la commission de la culture, la commission des affaires sociales, la commission du transport et de l'environnement, la commission de l'éducation et la commission des institutions.

Cet exercice d'étude des crédits dans différentes commissions parlementaires m'a permis, M. le Président, de dégager une vue d'ensemble et de voir finalement que les dégâts que ce gouvernement a fait dans les services à la population, ce n'est pas seulement dans un secteur en particulier, on les rencontre dans l'éducation, on les rencontre dans la santé, on les rencontre dans le transport, on les rencontre dans les nouvelles technologies, et j'en passe. Et ce gouvernement, il gouverne justement selon la vision comptable du président du Conseil du trésor et non pas selon une vision de société, une vision d'avenir à l'approche du troisième millénaire.

On se rappellera, M. le Président, que le ministre des Finances a déposé son budget à la fin du mois de mars, et, dans ce budget, on avait de bonnes nouvelles, semble-t-il, le déficit zéro, qui aura été atteint au moins sur papier et ceci grâce à la péréquation qui nous a permis d'aller chercher 1 400 000 000 $ de fonds fédéraux. On aurait pu s'attendre justement, lors de la présentation de ce budget, à une certaine euphorie, mais, loin de là, l'accueil a été assez froid, et pour cause. Parce que le déficit zéro a été atteint à un prix qui est lourdement payé par les contribuables, car le déficit, s'il ne figure plus dans les livres du gouvernement, il est rendu dans la poche des contribuables.

(11 h 50)

Il est rendu dans la poche des contribuables justement parce qu'il y a eu un pelletage du déficit gouvernemental aux autres paliers administratifs. Il y a eu un pelletage dans la cour des municipalités, et les municipalités se sont retrouvées devant des choix extrêmement difficiles, soit réduire les services à la population, soit augmenter les taxes. Ce pelletage est rendu dans les hôpitaux, et on se rappellera qu'on a eu un discours et des débats interminables ici même, dans cette enceinte, et on nous avait dit que les coupures dans les hôpitaux, dans les établissements étaient planifiées dans leurs moindres détails. On a vu ce que ça a donné, M. le Président, la levée de boucliers partout, à la grandeur du Québec, les listes d'attente, les urgences, les services à la population qui se détériorent, la pénurie de médecins, la pénurie d'infirmières, et j'en passe.

Il y a eu aussi le pelletage en avant du déficit gouvernemental, qui a été transféré aux commissions scolaires, lesquelles se sont retrouvées aussi dans une position où il fallait augmenter le fardeau des contribuables en leur refilant la tarification sur certains services éducatifs. Les cégeps et les universités, M. le Président, ont fait valoir à plusieurs reprises et sur toutes les tribunes tous les dommages qui sont causés à l'éducation à cause des coupures qui ont dû être assumées et qui ont été pelletées en avant par ce gouvernement.

Alors, M. le Président, s'il faut se rendre à la vertu du déficit zéro... on l'a présenté, nous, dans notre programme d'élection en 1994, le déficit zéro, mais on n'était pas d'accord avec la façon dont ce gouvernement-là a saccagé les services publics. Il a saccagé même la mission essentielle de l'État, l'éducation et la santé. Et tout ça, M. le Président, nous est annoncé dans ce budget du ministre des Finances, mais la nouvelle tant attendue n'est pas venue. Car la nouvelle tant attendue par les Québécois et les Québécoises, par les contribuables, c'est, sans conteste, la baisse des impôts et des taxes. Et, dans ce sens, c'est vraiment une grosse déception pour moi de constater que, malgré une croissance économique plus forte que prévu, dans le contexte nord-américain, dans le contexte de l'économie que nous avons connu, qui était quand même assez favorable, le gouvernement n'a pas été en mesure de livrer la marchandise en ce qui a trait à la baisse des impôts et des taxes. Pourtant, la province voisine, l'Ontario, a été en mesure de relever ces défis-là, puisque les impôts et les taxes, en Ontario, ont été réduits de 30 % durant le présent mandat.

Donc, M. le Président, les Québécois et les Québécoises demeurent les citoyens et les citoyennes les plus taxés en Amérique du Nord, tout en ayant une diminution de services constante et une érosion constante de leur pouvoir d'achat. Le plus inquiétant pour les citoyens du Québec, pour les citoyens de mon comté et ceux de la rive nord et de la rive sud de Montréal, c'est que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole ne se cache plus pour dire qu'il faut faire payer les banlieues pour les déficits de Montréal. M. le Président, c'est là un enjeu majeur. Ce à quoi les citoyens s'attendent de leur gouvernement, c'est une baisse d'impôts et de taxes parce qu'ils sont essoufflés. Or, ce que la ministre de la Métropole se prépare à livrer pour un nombre considérable de citoyens et de contribuables, c'est une augmentation de taxes, si l'on croit les déclarations qu'elle a elle-même mises de l'avant. Pourtant, M. le Président, ce gouvernement, en 1994, à la veille des élections, avait promis un pacte fiscal pour Montréal, un pacte fiscal qui n'a pas été livré.

Alors, qui sont les citoyens et les citoyennes de la banlieue qu'on s'apprête à surtaxer pour juguler le déficit de Montréal? Les citoyens des banlieues, M. le Président, on le sait, ce sont des jeunes familles. Ce sont aussi des jeunes, des étudiants, des jeunes qui commencent une carrière. C'est des familles monoparentales. C'est aussi une proportion importante de personnes âgées.

Et je vous dirais, M. le Président, puisqu'on parle de la banlieue et que je suis concernée par cet enjeu-là au premier chef – je représente un comté de banlieue – dans Le profil des MRC de la Montérégie , Recensement de 1996 , document émanant d'Emploi-Québec, du gouvernement, les dernières données, M. le Président, on nous dit que «la population de la Montérégie vieillit plus rapidement que celle de la province». On peut y lire aussi que, «parce que les banlieusards sont venus en Montérégie pour y élever leur petite famille, la croissance de la population dans la catégorie de 0-14 ans est supérieure à celle de la province». On y lit aussi que, les familles monoparentales, «la progression du phénomène est de 18,8 %», et c'est beaucoup plus important que dans le reste du Québec. Et «ce sont les femmes qui, dans 80 % des cas, se retrouvent chef de famille monoparentale. Cette tendance est encore plus marquée dans les milieux urbains de la Montérégie».

Ça, M. le Président, c'est la population que la ministre de la Métropole s'apprête à affliger par des augmentations de taxes. Et je lis, dans un article qui a paru aujourd'hui même dans La Presse du 4 mai 1999, ceci, en parlant de la ministre qui «parle de la fiscalité "d'agglomération" comme du seul moyen de préserver l'équilibre entre la métropole et la banlieue. Dans le cadre de ce régime, la banlieue serait appelée à contribuer au financement des "fonctions métropolitaines" comme le transport en commun, le développement économique, l'aménagement, la gestion des déchets et l'environnement.» On lit dans cet article, un peu plus loin, ce qui suit: «...la ministre reconnaît qu'elle devra peut-être imposer cette fiscalité d'agglomération: "...mais j'aurais l'appui de la population et des chefs politiques, dit-elle. Ces derniers me disent que la résistance vient moins d'eux-mêmes que de leurs cadres et syndicats. C'est une structure qui résiste."»

Ce n'est pas la structure qui résiste, ce sont les contribuables qui n'en peuvent plus! Où est l'équité dans un tel système, s'il faut, à chaque fois qu'il y a un problème ou un déficit à Montréal, faire porter le fardeau aux citoyens de la banlieue? Comment on peut justifier ça, M. le Président, quand le gouvernement devrait donner l'exemple des villes les mieux gérées?

Or, ce que le gouvernement nous propose en adoptant une tendance comme celle qui est exprimée par la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, c'est de pénaliser, justement, les municipalités et les décideurs locaux qui, eux, ont pris le virage de l'assainissement des finances publiques depuis de nombreuses années, qui ont planifié et qui ont coupé dans certaines dépenses pour les ramener à une proportion acceptable pour le niveau de taxation de la population.

Or, parce que ces décideurs ont bien fait leur travail, parce que ces décideurs ont vu à long terme et qu'ils ont bien géré la chose publique, aujourd'hui, le gouvernement leur dit: Ça ne marche pas de même; vous allez suivre le modèle de la ville de Montréal puis vous allez payer, vous allez être pénalisés doublement non seulement parce que vous avez fait l'effort des compressions et de la saine gestion, mais, de plus, vous allez payer en plus pour le déficit de Montréal.

(12 heures)

M. le Président, c'est inacceptable pour la population que je représente. C'est inacceptable, de toute façon, au sens même de l'équité, de l'équité interrégionale, une question qui me préoccupe énormément et sur laquelle j'ai eu l'occasion de revenir à l'étude des crédits, notamment en ce qui a trait à toute la question de la santé. Dans la région que je représente, la Montérégie, M. le Président, on a une pénurie de médecins suite aux coupures infligées par ce gouvernement au réseau de la santé et des services sociaux. On le sait déjà, la Montérégie est une région sous-financée. C'est une région qui a un manque à gagner de 200 000 000 $ uniquement au chapitre de l'équité interrégionale, c'est-à-dire: pour avoir le même niveau de ressources pour soigner un malade ou une malade en Montérégie de la même manière et avec le même niveau de ressources qu'à Montréal, il nous manque 200 000 000 $.

À cela s'ajoutent les coupures qui ont été imputées aux établissements depuis que ce gouvernement est au pouvoir. La conséquence, c'est qu'il y a eu des départs incitatifs, pour lesquels le gouvernement a payé des médecins pour quitter le réseau. On a payé des infirmières, on a payé du personnel soignant pour quitter les hôpitaux, pour quitter les établissements; résultat, la Montérégie a besoin de 184 nouveaux médecins. Quand j'ai soulevé la question avec la ministre de la Santé à l'étude des crédits, elle ne semblait même pas au courant, il a fallu lui montrer la manchette de La Presse . Et on réalise que, depuis que le gouvernement a opéré ce virage de départs incitatifs, la Montérégie a perdu 1 533 personnes soignantes dans le réseau de la santé et des services sociaux. C'est énorme quand on sait que c'est une population en croissance, quand on sait que les besoins sont en croissance et qu'on sait qu'au point de départ il y a un manque à gagner de 200 000 000 $.

Les centres jeunesse, un autre dossier préoccupant, tellement préoccupant, M. le Président, qu'il a fait la manchette des journaux régulièrement, tellement préoccupant que la Commission des droits de la personne et de la protection de la jeunesse a été obligée de déposer une requête en injonction devant les tribunaux pour ordonner aux centres jeunesse la fermeture de certains centres transits pour les jeunes. La situation est dramatique.

Pas plus tard qu'hier, j'ai rencontré les représentants d'un centre de réadaptation, Le Virage, et ils m'ont expliqué à quel point le réseau est mal pris, à quel point les organismes du milieu sont mal pris avec la situation dans laquelle le gouvernement les a placés. On m'a dit: On est obligé de tartiner mince – c'est l'expression qui a été utilisée – et on se demande, même lorsque les injonctions sont annoncées par le gouvernement, où va cet argent. Par exemple, Le Virage a eu un maigre montant de 65 000 $ d'argent neuf en 1998-1999 dans les budgets qui ont été annoncés. Alors, on me demande de questionner ce gouvernement pour savoir: Où va l'argent, dans la bureaucracie ou dans les services à la population?

M. le Président, c'est très sérieux quand on sait que c'est de notre jeunesse qu'il s'agit. Et on m'a également expliqué que l'âge moyen des personnes toxicomanes ou polytoxicomanes ne cesse de baisser. C'est les jeunes qui sont de plus en plus affectés. Or, il faut investir: investir dans la jeunesse, investir dans la prévention, sinon les coûts vont s'en aller croissants et les coûts sont énormes tant du point de vue financier que du point de vue humain.

Et, lorsqu'on regarde les données du ministère de la Santé et des Services sociaux – ce n'est pas l'opposition qui parle, c'est les données qui viennent du ministère de la Santé et des Services sociaux en date de juillet 1998 – on constate que les dépenses en santé par personne et par secteur sont extrêmement faibles pour la Montérégie: en toxicomanie, le manque à gagner pour la Montérégie est de 4 400 000 $; en santé mentale, le manque à gagner est de 65 300 000 $; en protection de la jeunesse, 40 800 000 $; en déficience physique, 13 400 000 $; les personnes âgées, on a un manque à gagner de près de 60 000 000 $; la santé publique, 5 400 000 $; la déficience intellectuelle, 5 300 000 $; et la santé physique sans le régime d'assurance-maladie du Québec, 32 000 000 $.

M. le Président, la situation est grave, elle est critique, elle est majeure. Ce gouvernement-là, il a saccagé le réseau de la santé et des services sociaux qui est l'une des missions essentielles de l'État. Comment est-ce qu'on peut faire confiance encore à ce gouvernement pour gérer la chose publique?

J'ai reçu récemment, M. le Président, des organismes communautaires qui oeuvrent dans le domaine de la santé et des services sociaux dans la région de la Montérégie, des représentations. Ces organismes-là sont autour de 200. C'est eux qui prennent à bras-le-corps le virage ambulatoire justement parce que les personnes sortent des hôpitaux très rapidement et qu'il faudrait leur venir en aide et qu'il faudrait offrir des services à domicile. On me dit qu'ils ont un manque à gagner de 10 000 000 $ pour offrir des services.

Un communiqué de presse est sorti en date du 29 janvier 1999, et on y lit: «Les banques alimentaires de la Montérégie crient famine.» C'est grave, M. le Président, on est rendu que les organismes qui oeuvrent au niveau du dépannage alimentaire n'arrivent plus à avoir suffisamment de ressources, de biens pour satisfaire à la demande.

M. le Président, je suis extrêmement déçue de ce que nous avons fait comme exercice d'étude des crédits durant les trois dernières semaines parce que cela nous a démontré, preuves à l'appui, avec des chiffres, que ce gouvernement n'a pas le coeur à la bonne place, que c'est une opération comptable qui est menée par le président du Conseil du trésor qui impose ses objectifs à chacun des ministères indistinctement de l'impact que cela peut avoir sur la vie, la qualité des services à la population. Je le déplore, je le regrette au nom de tous les citoyens que je représente et de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière et critique officielle de l'opposition en matière d'inforoute et de services gouvernementaux. Alors, cette intervention met fin au débat sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1999-2000.

L'Assemblée ayant déjà statué sur les motions de censure ainsi que sur la motion de M. le ministre d'État à l'Économie et aux Finances proposant l'adoption de la politique budgétaire du gouvernement présentée dans le cadre du débat sur le discours sur le budget, conformément à l'article 288 du règlement, l'Assemblée doit maintenant se prononcer sur les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2000 et sur le projet de loi n° 40, Loi n° 3 sur les crédits 1999-2000. Alors...

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: J'avais paré aux coups, M. le Président. Donc, en vertu de l'article 223 du règlement, je vais vous demander de reporter les votes à la période des affaires courantes de cet après-midi.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je décrète que ces votes par appel nominal seront tenus à la période des affaires courantes, cet après-midi. Je vous souhaite à tous bon appétit.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

(Reprise à 14 h 6)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés!

Nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons immédiatement les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles aujourd'hui.


Présentation de projets de loi

À l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, commençons par l'article f, M. le Président.


Projet de loi n° 21

Le Président: Très bien, M. le leader du gouvernement. À cet article du feuilleton, M. le ministre du Revenu présente le projet de loi n° 21, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la législation fiscale du Québec afin d'y apporter des changements de nature administrative.

Il modifie, en premier lieu, la Loi concernant l'impôt sur le tabac et la Loi concernant la taxe sur les carburants notamment afin de supprimer l'obligation de détenir un certificat d'enregistrement et certains permis prévus par ces lois.

Il modifie, en deuxième lieu, la Loi sur les impôts et la Loi sur le régime de rentes du Québec pour prévoir que les retenues à la source doivent être établies conformément aux tables dressées par le ministre du Revenu et pour prévoir que ces tables entrent en vigueur à la date de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à toute autre date ultérieure qui y est fixée.

Il modifie, en troisième lieu, la Loi sur les licences afin de prévoir les modalités et le délai de versement au ministre du Revenu des droits de licences exigibles lorsque ceux-ci n'ont pas été payés par le détaillant au moment de l'achat de boissons alcooliques.

Il modifie, en quatrième lieu, la Loi sur le ministère du Revenu afin d'intégrer les dispositions relatives à la perception des créances fiscales, au Fonds de perception, à la majoration de l'amende relativement à certaines infractions, à la communication de certains renseignements et au moment où un paiement effectué au moyen d'une carte de crédit est présumé avoir été fait.

Il modifie enfin la Loi sur la taxe de vente du Québec afin de rendre obligatoire l'inscription des petits fournisseurs de carburant et pour y apporter des modifications de concordance.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, l'article d, M. le Président.


Projet de loi n° 33

Le Président: Alors, à l'article d de notre feuilleton, M. le ministre responsable de la Recherche, de la Science et de la Technologie présente le projet de loi n° 33, Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie. M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ce projet de loi prévoit la création du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie dirigé par un ministre désigné sous le titre de ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

Le projet de loi définit la mission du ministre qui sera de promouvoir la recherche, la science, la technologie et l'innovation en favorisant la synergie des différents acteurs intervenant dans ces domaines, par l'établissement de mécanismes facilitant leur concertation et l'intégration de leurs actions. Il prévoit à cette fin que le ministre devra notamment élaborer une politique de la recherche, de la science, de la technologie et de l'innovation.

Le projet de loi confère au ministre la responsabilité du Conseil de la science et de la technologie ainsi que celle du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche et du Fonds de la recherche en santé du Québec, constitués par la Loi favorisant le développement scientifique et technologique du Québec, et intègre les dispositions correspondantes de cette loi.

Enfin, ce projet de loi contient certaines autres dispositions modificatives de concordance ainsi que des dispositions transitoires et finales.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que le l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

(14 h 10)

M. Brassard: L'article e, M. le Président.


Projet de loi n° 31

Le Président: À l'article e du feuilleton, Mme la ministre de la Justice présente le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile. Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, ce projet de loi modifie le Code de procédure civile afin d'apporter certains assouplissements à la procédure d'appel, notamment en ce qui concerne la compétence du juge siégeant seul, la compétence du greffier de la cour, le remplacement, dans les matières familiales, du mémoire d'appel par une argumentation écrite, ainsi que la possibilité de produire les mémoires d'appel sur support informatique.

Ce projet de loi apporte également certaines modifications à la procédure par voie de requête en matière familiale. Plus particulièrement, la preuve par affidavit détaillé ne sera plus la règle et les parties pourront avoir le choix de procéder de cette façon ou de présenter une preuve orale sans autorisation du tribunal. Dans ce nouveau régime, applicable à toutes les requêtes pour pension alimentaire et garde d'enfants, les parties pourront faire leur preuve au moyen d'un seul affidavit chacune, suffisamment détaillé pour établir les faits au soutien de leurs prétentions. Un deuxième affidavit détaillé sera permis, en réplique, au requérant. Par ailleurs, lors de la présentation de la requête, le juge aura une plus grande latitude dans la gestion du dossier, notamment quant aux moyens propres à simplifier ou accélérer la procédure et à abréger l'audition.

Ce projet de loi modifie en outre ce Code afin d'y apporter diverses modifications de nature technique, de concordance et de terminologie.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: L'article c.


Projet de loi n° 34

Le Président: Alors, à l'article c de notre feuilleton, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration présente le projet de loi n° 34, Loi modifiant le Code civil en matière de nom et de registre de l'état civil. M. le ministre.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Alors, M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier le Code civil en matière de nom et de registre de l'état civil.

Ainsi, en matière d'attribution de nom, il précise que le choix du nom par les parents prévaut et il transfère au Procureur général du Québec le pouvoir du directeur de l'état civil de saisir le tribunal si le nom choisi prête manifestement au ridicule. Il précise également que le nom de famille de l'enfant peut consister en une partie seulement du nom de famille composé de son père ou de sa mère. Enfin, il prévoit la règle d'usage de l'alphabet français pour la transcription des noms et prénoms écrits en caractères différents de cet alphabet.

En matière de registre de l'état civil, il prévoit que les déclarations de mariage sont transmises sans délai au directeur de l'état civil et que les déclarations de décès peuvent être transmises au directeur de l'état civil par les directeurs de funérailles. Il élargit en outre le pouvoir du directeur de l'état civil en matière de déclaration tardive relative à un acte d'état civil et il lui permet, à certaines conditions, d'inscrire une filiation non déclarée initialement. Il propose également des modifications de nature plus technique pour permettre que des mentions postérieures à un acte d'état civil ne soient portées que sur l'exemplaire informatisé, pour préciser ce que contient la copie d'un acte de l'état civil et pour élargir le pouvoir du directeur de l'état civil de déléguer ses fonctions à son personnel.

Enfin, ce projet de loi propose des mesures transitoires pour la mise en oeuvre de certaines modifications.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents


Nouveau diagramme de l'Assemblée

À l'étape du dépôt de documents, je dépose d'abord le nouveau diagramme de l'Assemblée nationale, daté du 4 mai.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

J'ai reçu également, dans les délais prescrits, préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, conformément à l'article 97.1 du règlement. Donc, je dépose copie de ce préavis.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions aujourd'hui, pas plus qu'il n'y a d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise cependant qu'après la période de questions et réponses orales seront tenus les votes reportés suivants: d'abord, sur les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars de l'an 2000 et sur le projet de loi n° 40, Loi n° 3 sur les crédits 1999-2000.


Questions et réponses orales

Alors, nous abordons maintenant la période de questions et de réponses orales.

M. le chef de l'opposition officielle, en question principale.


Disparité dans la répartition des services de santé en région


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. M. le Président, ce matin on apprenait ce qu'on savait déjà, c'est-à-dire qu'il y a dans le réseau de la santé au Québec des iniquités sur les distributions des ressources dans les régions du Québec. Le premier ministre sait que c'est un problème qui existe déjà depuis longtemps, déjà depuis un bon bout de temps, sauf que c'est un problème qui semble s'aggraver, c'est-à-dire que les écarts semblent être de plus en plus grands. Et ces écarts, en passant, ne se justifient pas, même dans le contexte où on doit pondérer la distribution des ressources en tenant compte, M. le Président, des soins qui sont surspécialisés.

Je voudrais donc savoir de la part du premier ministre, M. le Président, s'il reconnaît d'abord qu'il y a un problème, entre autres en Montérégie, Lanaudière et Chutes-de-la-Chaudière, et j'aimerais savoir si le gouvernement a l'intention d'agir.

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. C'est une situation qui est largement documentée depuis un très bon moment au ministère de la Santé et des Services sociaux, c'est-à-dire qu'on a, à partir d'un certain nombre de critères basés sur l'âge, le sexe, sur la scolarité des populations, considéré comment on partagerait les ressources pour répondre aux besoins de la population en matière de santé, de services sociaux, d'aide aux jeunes, d'action communautaire, etc. Sur cette base-là, il y a essentiellement eu une querelle d'écoles, on peut dire, et nous avons consulté des sommités en la matière. Le député de Charlesbourg et ministre de la Santé et des Services sociaux avait demandé d'ailleurs un avis au Conseil québécois de la recherche sociale qui avait confirmé que la méthode – commençons par cela – choisie et retenue et les critères choisis et retenus par le ministère de la Santé et des Services sociaux pour allouer les ressources étaient adéquats et répondaient aux normes scientifiques usuelles.

Deuxièmement, nous constatons, en analysant l'ensemble de la répartition des ressources, qu'il y a effectivement un certain déséquilibre quant aux régions périphériques au Grand Montréal et quant à la rive sud de Québec, soit Chaudière-Appalaches. C'est vrai aussi, M. le Président – il y a une région qu'on a oublié de mentionner – pour le centre du Québec, Mauricie–Bois-Francs entre autres. Dans les budgets que nous avons alloués depuis un certain nombre d'années ou les réaffectations budgétaires auxquelles nous avons procédé, il y a eu des réajustements pour permettre de corriger le tout. Cependant, j'ajoute une dernière chose, M. le Président, il faut savoir que, selon qu'on prend la grande région métropolitaine de Montréal, donc le coeur de Montréal et sa bordure immédiate, on constate que le déséquilibre des ressources est beaucoup moins important que si on prend chaque région en soi, étant entendu que la partie excentrique des régions est moins bien servie que la partie centrale ou près de l'île de Montréal.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je constate que la ministre ne change pas ses habitudes, M. le Président, à chaque fois qu'on pose une question, on se fait servir une longue réponse, on se fait servir un plat de statistiques. La question que je veux poser au premier ministre est fort simple parce que c'est un problème qui existe, tout le monde le sait, déjà depuis plusieurs années, puis ce n'est pas un problème qui va se régler du jour au lendemain non plus, tout le monde le reconnaît. On veut bien le dire tout haut et reconnaître que le gouvernement ne pourra pas du jour au lendemain régler les inéquités. On aimerait donc savoir de la part du premier ministre s'il reconnaît, d'abord, qu'il y a inéquité, même en pondérant, même en ajoutant les variations statistiques que sa ministre vient de nous livrer. Premièrement, est-ce qu'il reconnaît qu'il y a un problème? Et, deuxièmement, est-ce que le gouvernement a un plan, a-t-il l'intention d'adopter un plan justement pour effacer les inéquités entre les régions, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: D'ailleurs, je voudrais rappeler au chef de l'opposition, M. le Président, que, sans utiliser aucune statistique, je lui ai dit que nous reconnaissions le problème. Non seulement nous le reconnaissons, mais nous l'avons documenté et nous avons agi en conséquence de la connaissance de ce problème.

D'abord, dans les réallocations budgétaires qui ont eu lieu dans les années passées, nous avons demandé des efforts moins importants, quand ce n'est pas pas d'effort du tout, dans certaines régions, alors que, au plan des compressions budgétaires, les efforts budgétaires ont porté dans les régions qui avaient plus de ressources. Ça, c'est le premier geste que nous avons posé.

Le second. Dans le développement des budgets, dans les ajouts de crédits, nous ajoutons cette année, sur deux ans, 1 750 000 000 $, 160 000 000 $ d'argent neuf. Une partie de cet argent va être répartie pour contrer cet effet de déséquilibre et cette inéquité, M. le Président. Le meilleur exemple est sans doute l'annonce qu'a faite mon collègue le ministre délégué aux Services sociaux et à la Jeunesse en annonçant justement qu'il allouait spécifiquement à la Montérégie, à Laurentides, à Lanaudière, à Chaudière-Appalaches des budgets supplémentaires et réservés à ces seules régions pour l'aide à la jeunesse. C'est une preuve que nous agissons très concrètement sur cette question.

Des voix: Bravo!

(14 h 20)

Le Président: M. le chef de l'opposition.


Implantation du centre mère-enfant dans la région de Québec


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, en principale, sur un autre dossier qui touche la santé, celui de la saga du centre mère-enfant de la grande région métropolitaine de Québec et pour l'Est du Québec.

Le premier ministre doit savoir que, dans ce dossier-là, les cafouillages se sont succédé presque de six mois en six mois à partir de juin 1997 alors que la régie régionale confirmait un centre mère-enfant à Saint-François-d'Assise en décembre 1997, alors que le député de Charlesbourg, alors ministre, confirmait l'enveloppe budgétaire, décision renversée en septembre 1998, alors que, malgré les dépenses pour des plans et devis, on fait un virage à 180 degrés. Depuis ce temps-là, on reporte la décision d'établir un centre mère-enfant et, le 29 avril dernier, on annonce le statu quo.

J'aimerais savoir si le premier ministre, M. le Président, aujourd'hui, parce qu'il y a déjà eu quatre membres de son gouvernement qui sont ministres qui ont touché au dossier, là... Est-ce que le premier ministre, lui, aujourd'hui, peut nous dire si, oui ou non, il y aura un centre mère-enfant qui desservira l'Est du Québec? Et quand la décision va-t-elle venir? Est-ce qu'on devra attendre un autre six mois ou est-ce que le premier ministre peut nous confirmer aujourd'hui qu'il y aura bel et bien un centre mère-enfant?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Cette question a été abordée la semaine dernière devant cette Assemblée. À la question soulevée, j'ai répondu oui, M. le Président, qu'il y aurait un centre mère-enfant dans la région de Québec pour desservir tout l'Est du Québec. J'attends un dernier éclairage qui devrait nous venir d'une consultation à laquelle procède le Centre hospitalier universitaire de Québec et, suite à cela, je prendrai ma décision.

Je dois rappeler cependant au chef de l'opposition que cela ne fait pas six ou sept mois ou deux ou trois ans. Il y a presque 20 ans que ce dossier est débattu et discuté dans la région de Québec. Nous allons prendre les décisions nécessaires pour que les services soient rendus, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: En additionnelle, M. le Président. Bon, alors, puisque, si ça fait 20 ans et ça fait au moins quatre ministres de son gouvernement qui, à un titre ou à un autre, ont touché de près ou de loin à ce dossier, et comme ça a connu une succession de cafouillages... Je vous rappelle que le directeur d'Opération Enfant soleil, qui a réservé 7 000 000 $ pour ce projet-là, M. Pierre Touzin, lui, décrivait le cheminement de ce dossier-là comme étant, et je cite, «un vaudeville». C'est pour cette raison-là que j'interpelle le premier ministre aujourd'hui. Ses ministres, on les a entendus, avec tous les virages à 180 degrés. Est-ce que le premier ministre, lui, aujourd'hui, peut confirmer à l'Assemblée nationale que le centre mère-enfant sera effectivement réalisé pour l'Est du Québec et que la décision viendra dans les six prochains mois, au plus tard?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, je suis certaine que le chef de l'opposition sait cela: quand je prends des engagements devant cette Chambre et que je dis qu'il y aura un centre mère-enfant – je souhaite et j'espère que cette décision pourra être rendue publique d'ici une quinzaine de jours – c'est parce que j'ai un mandat pour le faire et il me vient du premier ministre.

Le Président: En question principale maintenant, Mme la députée de Beauce-Sud.


Transmission de renseignements du ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Dans le registre des communications du ministère du Revenu du Québec confectionné le 26 avril 1999, on apprend qu'avant d'envoyer des milliers de renseignements fiscaux à la firme de sondage SOM le ministère du Revenu avait aussi envoyé les mêmes renseignements confidentiels au Bureau de la statistique du Québec.

Est-ce que le ministre du Revenu peut déposer l'avis de la Commission d'accès à l'information sur la transmission de ces renseignements confidentiels ainsi que le contrat liant le ministère du Revenu et le Bureau de la statistique du Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre, ministre d'État à l'Économie et aux Finances et ministre du Revenu.


M. Bernard Landry

M. Landry: Je ferai les deux avec joie quand j'en aurai pris connaissance, sans aucun doute. Mais la question me permet de rappeler que, d'abord, nous avons mis sur pied une commission pour examiner en profondeur la façon dont ces circonstances déplorables ont pu se développer. Elle implique la Commission d'accès à l'information, le ministère de la Justice et le ministère du Revenu. Et, en plus, je me suis engagé, et j'ai rencontré les fonctionnaires du ministère du Revenu ce matin, et les choses sont bien claires: le ministère, en l'absence d'informations supplémentaires ou de réglementation plus précise, ne procédera plus jamais sans l'accord préalable de la Commission d'accès à l'information à des transmissions de données de cet ordre.

Le Président: Mme la députée.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, est-ce que j'ai bien compris que le ministre du Revenu s'engage à déposer l'avis de la Commission d'accès à l'information en question, avec le Bureau de la statistique du Québec?

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Bien, c'était qualifié par le fait que je devais en prendre connaissance, donc que tel avis existait, qu'il était disponible, qu'il était prêt. Il me semble que ma réponse était claire, et je vous la refais. Ce sera d'une transparence absolue. Ce ministère...

Des voix: ...

M. Landry: Puisqu'il y a une question supplémentaire, je vais donner aussi des informations supplémentaires sur ce ministère. J'ai rencontré 2 000 ou 3 000 hommes et femmes du ministère du Revenu ce matin, à qui je me suis adressé directement, et je leur ai dit qu'on avait eu une mésaventure, qu'on avait eu une malchance, mais je leur ai fait mon compliment pour le formidable travail de lutte au travail au noir depuis quelques années et pour le culte qu'ils ont développé de la protection des renseignements personnels.

Cet accident est malheureux. Nous ferons tout en notre pouvoir pour qu'il ne se reproduise plus. Mais nous n'allons pas accabler de fidèles serviteurs de l'État qui ont fait leur possible. Quant aux deux responsables symboliques, je le dis bien, la sous-ministre et la ministre, elles ont assumé leurs responsabilités de chefs, et ces deux femmes ont démissionné, ce qui montre que le gouvernement prend au sérieux la question des renseignements personnels.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Hull, en principale.


Transmission de renseignements du Curateur public à une firme de sondage


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. M. le Président, il y a à peine deux semaines, des révélations ont été faites en cette Chambre à l'effet que des informations parmi les plus confidentielles qui soient ont été transmises à une compagnie privée de sondage.

Aujourd'hui, j'ai entre les mains une copie d'un autre sondage, réalisé en 1996, celui-là, par la firme Léger & Léger, dans lequel on apprend que le Curateur public a transmis une liste contenant des informations confidentielles sur plus de 12 000 personnes sous curatelle. Non seulement cette liste contenait des informations sur les gens sous curatelle, mais aussi des informations nominatives sur leurs parents ou leurs proches, notamment le nom, le prénom, le numéro de téléphone, le lien de parenté ainsi que les régimes de protection des personnes. On apprend aussi que plus de 300 d'entre eux ont été sondés.

Alors, M. le Président, comment le ministre responsable du Curateur public, qui est aussi responsable de la Commission d'accès à l'information, peut justifier que ces informations aussi confidentielles aient été transmises à la firme Léger & Léger?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui. Alors, M. le Président, le député fait référence à des faits qui se sont passés en 1996, dont je n'ai pas eu connaissance. Je vais prendre acte de sa question et vérifier.

Je veux cependant apporter une nuance qui me semble importante ici, mais qui mériterait quand même d'être explorée davantage. On sait que le Curateur public représente directement les personnes. De ce point de vue, sa situation est différente de celle d'autres organismes et ministères lorsqu'il est amené à transmettre des renseignements de nature nominative. Il a, par sa fonction, effectivement à représenter directement ces personnes.

Cela dit, M. le Président, je vais vérifier les faits évoqués par le député et j'apporterai une réponse à l'Assemblée.

Le Président: M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: M. le Président, est-ce que le ministre réalise la gravité des faits qui sont invoqués aujourd'hui? Considérant qu'il s'agit des gens les plus vulnérables dans notre société, si le Curateur et son ministère ne peuvent pas les protéger, qui va le faire, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.


M. Robert Perreault

M. Perreault: M. le Président, je veux bien réaliser la gravité, encore faut-il que je prenne connaissance des faits. Mais il y a une chose sur laquelle, je pense, on ne fera pas de leçons à ce gouvernement. Du côté du rôle et du travail du Curateur public, M. le Président, nous avons de nous-mêmes été voir ce qui se passait. C'est mon collègue qui l'a fait avant moi. Nous avons eu des rapports qui étaient accablants sur les pratiques, et nous sommes à les corriger. Alors, j'irai aux nouvelles sur les faits. On n'a pas de leçons à recevoir de l'opposition, en face, là-dessus.

(14 h 30)

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Chomedey.


Contrat entre le Curateur public et le Groupe Léger & Léger concernant la transmission de renseignements


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Oui, M. le Président. Dans le but d'aider le ministre responsable à prendre connaissance du dossier, que ça soit de sa responsabilité ou de celle de son prédécesseur, on va le référer à l'article 2.2 de la loi sur la protection des informations privées et d'accès à l'information qui prévoit ceci: que la loi en question ne s'applique pas au Curateur public. Et je l'invite aussi à prendre connaissance des articles 51 et 52 de la Loi sur le curateur public, M. le Président, qui prévoient le régime le plus sévère, encore plus sévère que l'article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu invoqué par mon collègue le député de Hull.

M. le Président, on veut savoir, de ce côté de la Chambre, comment, avec un tel régime de protection, un contrat a pu être signé avec Léger & Léger, qui prévoit, et je cite: «Le Curateur public du Québec met à la disposition du Groupe Léger & Léger inc., pour l'exécution du présent contrat, les documents suivants: liste des clients, liste des familles et liste des proches des gens sous le régime de la curatelle publique.»

M. le Président, on veut savoir qui est responsable pour cette situation? Qui, dans ce gouvernement, va admettre que cette situation est intolérable, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


M. Robert Perreault

M. Perreault: M. le Président, bien simplement, j'ai répondu tantôt qu'on a évoqué des faits qui se sont passés en 1996. C'est des faits que je vais vérifier. J'aurai l'occasion de revenir devant cette Assemblée et d'apporter les détails et les explications. Je pense que c'est la meilleure des réponses que je peux apporter à ce moment-ci.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, en question principale.


Frais afférents imposés aux parents par les commissions scolaires


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. La Loi sur l'instruction publique indique, à l'article 3, que tout résident du Québec a droit à la gratuité des services éducatifs. Or, les coupures de 1 200 000 000 $ en éducation au cours des dernières années font en sorte que cette loi n'est plus respectée, et même qu'une commission scolaire, celle des Monts-et-Marées, fait des mises en demeure à des parents qui ne peuvent plus payer les frais de 55 $ qu'on leur impose, parce qu'ils n'en ont pas les moyens.

M. le Président, qu'est-ce que le ministre de l'Éducation entend faire pour que sa propre loi soit respectée, et surtout que l'on cesse de harceler des parents pour payer pour un enseignement qui devrait être gratuit au Québec, et surtout que l'on cesse de taxer indirectement ces parents qui n'en ont pas les moyens?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, les frais chargés aux parents au niveau des commissions scolaires, donc aux niveaux primaire et secondaire, c'est un dossier qu'on surveille de près au ministère de l'Éducation. La Loi sur l'instruction publique, à laquelle fait référence le député, indique aussi que les frais qui sont souvent questionnés par les parents, entre autres les frais qui sont chargés pour la surveillance sur l'heure du midi, des frais auxquels le député faisait référence la semaine dernière en commission parlementaire, sont permis selon la Loi sur l'instruction publique.

Ce que je suis en train de faire avec les conseils d'établissement qui sont maintenant au-dessus de chaque école, c'est d'utiliser, finalement, ou de pouvoir, justement, utiliser le jugement des parents pour établir quels sont les frais qui sont raisonnables et ceux qui ne sont pas raisonnables.

J'ai eu deux commissions scolaires, au cours des dernières semaines, où j'ai eu des faits: commission scolaire Riverside et commission scolaire Harricana où on m'a rapporté des faits, où j'ai jugé que les frais chargés n'étaient pas acceptables, étaient contraires à la loi. J'ai écrit et demandé à la commission scolaire de cesser immédiatement de charger ces frais.

Donc, je pense actuellement, M. le Président, qu'on est en train de revoir tout le dossier. On est en train de le faire aussi avec la Fédération des commissions scolaires. Et au cours des prochaines semaines, on pourra s'assurer que le dossier soit encore mieux encadré, M. le Président.

Une voix: Très bien.

Le Président: M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il trouve normal qu'une commission scolaire comme, par exemple, celle de Laval, paie des centaines de milliers de dollars en frais d'huissier pour harceler et collecter des frais divers qu'elle charge aux parents qui n'ont pas les moyens de payer? Leur jugement est bien simple: ils n'ont pas d'argent pour payer ces frais-là.

Est-ce qu'il trouve ça normal qu'une commission scolaire paie des bureaux d'huissier pour collecter des parents qui n'en ont pas les moyens, alors que l'école publique, au Québec, devrait être gratuite?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, évidemment, je ne peux pas être au courant de ce qui se passe dans chaque école, dans chaque commission scolaire. Par contre, je vous dirais qu'a priori ça me semble surprenant qu'on charge des centaines de milliers de dollars en frais d'huissier. Mais je vais vérifier le dossier, M. le Président, et vous revenir dès que possible.

Le Président: En question principale, M. le député de Chomedey?

M. Mulcair: Non, en additionnelle.

Le Président: En complémentaire.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Est-ce que le ministre peut commencer en regardant à la commission scolaire de Laval quelle est leur facture pour l'huissier au cours des dernières années? Il se rendrait vite compte que mon collègue n'a pas exagéré.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, d'abord, il faudrait comprendre la question, le député de Kamouraska-Témiscouata nous parlait, au cours d'une année, de frais d'huissier de plus de 100 000 $...

Une voix: De centaines de milliers de dollars.

M. Legault: De centaines de milliers de dollars, excusez, M. le Président. On nous parle maintenant au cours d'un certain nombre d'années. Je vais vérifier l'état des frais d'huissier de la commission scolaire de Laval et vous revenir dès que possible.

J'ajouterai en terminant que je suis très surpris de voir l'opposition enfin s'intéresser aux frais de scolarité. Merci, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député d'Anjou.


Respect du principe de gratuité de l'instruction publique


M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Oui. Merci, M. le Président. Le 16 avril dernier, je recevais à mon bureau de comté une représentante du conseil d'établissement de l'école Saint-Joseph, à Anjou, qui m'indiquait elle aussi, à son tour, que la gratuité scolaire n'était plus réelle.

Alors que, dans d'autres écoles, on charge aux parents 56 $ pour les photocopies, 7 $ pour un agenda, 4,75 $ pour une carte de transport, 14 $ pour les activités de masse, 13 $ pour...

Le Président: M. le député d'Anjou, un instant, s'il vous plaît. Je m'excuse.

M. le député d'Anjou.

M. Lamoureux: Merci, M. le Président. Pour reprendre, donc: 56 $ pour les photocopies, 7 $ pour un agenda, 4,75 $ pour carte de transport, 14 $ pour les activités de masse, 13 $ pour les coûts de la première sortie obligatoire. On parlait tout à l'heure des frais de garde pour le midi, 225 $, alors que l'alternative, c'est de marcher 3 km pour les enfants et que la facture peut s'élever jusqu'à 500 $ par année par enfant pour certains parents.

Est-ce que le ministre de l'Éducation, qui nous mentionnait tout à l'heure qu'il ne pouvait pas connaître la situation dans toutes les écoles, peut au moins s'engager sur un principe bien clair: c'est que l'école primaire soit gratuite non seulement pour les enfants, mais aussi pour les parents, M. le Président?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, l'école, au Québec, c'est gratuit. C'est gratuit au primaire. C'est gratuit au secondaire. C'est gratuit, à part quelques frais incidents, au niveau collégial. Un des seuls endroits où on a des frais... gratuit aussi au collégial. On a les frais de scolarité, au niveau universitaire, parmi les plus bas en Amérique du Nord.

M. le Président, effectivement, il y a des frais, actuellement, qui sont chargés dans certaines commissions scolaires, certains frais qui me préoccupent, je suis en train de les regarder. Par contre, quand on mentionne les frais de garde du midi, c'est spécifiquement prévu qu'on a le droit de charger ces frais actuellement pour les étudiants qui restent à l'école le midi. Donc, pour ce qui est des autres frais, je suis en train de regarder tous ces frais, et on va vous revenir au cours des prochaines semaines pour un inventaire complet de ce qui se passe dans les commissions scolaires.

Le Président: En question principale, M. le député de Nelligan.


État des services professionnels dans les écoles


M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Ce gouvernement a imposé dans nos écoles des coupures qui mettent en péril la gratuité de notre système d'éducation. Des coupures de plus de 4 % chez les psychoéducateurs; 5 % chez les psychologues; 13 % chez les conseillers en orientation; et plus de 26 % chez les travailleurs sociaux. Un sur quatre a été coupé.

Est-ce que le ministre de l'Éducation peut admettre que, même s'il vante la gratuité scolaire au primaire et au secondaire, des centaines de parents sont obligés de payer pour des services qui étaient offerts gratuitement à l'école avant que son gouvernement se mette à couper aveuglément?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, au cours des dernières années, le ministère de l'Éducation, comme la plupart des ministères au gouvernement du Québec, a dû procéder à des compressions pour réduire à zéro le déficit, une chose qui était souhaitable pour tous les jeunes du Québec. On ne peut pas, d'un côté, travailler pour l'avenir des jeunes dans nos écoles et continuer à leur laisser un déficit annuel important.

(14 h 40)

Maintenant, pour répondre précisément à la question du député, j'ajouterais que, au cours des trois dernières années, le nombre d'orthopédagogues a été augmenté de 29, le nombre d'orthophonistes a été augmenté de 26, le nombre de techniciens en éducation spécialisée a été augmenté de 548, le nombre de techniciens en travaux pratiques a été augmenté de 47, et je pourrais vous donner encore une liste comme celle-là. Il faut faire attention. Effectivement, dans le personnel professionnel, il y a eu des réductions, mais c'est surtout dans le personnel qui s'occupe de l'encadrement, donc pas du service direct aux élèves. On a fait attention au niveau des enseignants, au niveau du personnel qui s'occupe directement des élèves de continuer à augmenter les services, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre de l'Éducation, après avoir appris qu'il y a des huissiers qui courent après des parents qui ne paient pas les frais, après avoir appris que l'on coupe les services comme tels aux étudiants, après avoir appris qu'il y a des étudiants qui vont devoir vendre des billets de loterie pour aller à l'école, pour se payer des services, est-ce que le ministre de l'Éducation pourrait nous dire ce qu'il entend faire dès aujourd'hui – pas dans des semaines, dès aujourd'hui – pour faire le ménage dans ces frais-là qui font en sorte que l'école publique au Québec, M. le ministre, ce n'est plus gratuit et ça coûte de plus en plus cher aux parents?

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, vous savez que, dans la réforme de l'éducation qui a été entreprise par la députée de Taillon qui m'a précédé, on a mis en place des conseils d'établissement pour chaque école. À ces conseils d'établissement, on a des parents. Je pense qu'il ne faut pas dramatiser. Il faut faire confiance au jugement des parents pour l'application des lois. Dans chaque commission scolaire, dans chaque école du Québec, les situations sont différentes d'une école à l'autre, et on ne peut pas généraliser et tout gérer de Québec. Et c'est normal qu'on ne connaisse pas tous les frais de toutes les écoles au Québec. Il faut faire confiance aux parents et aux conseils d'établissement de chaque école.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Est-ce que le ministre de l'Éducation est en train de dire que c'est de la faute des parents s'il y a des frais dans les écoles? Est-ce qu'il est en train de nous dire que les éducateurs qui disent que c'est à cause des coupures et les directeurs d'écoles qui disent que c'est en raison de leurs coupures depuis quatre ans, et de la réforme justement de sa collègue de Taillon et de toutes les coupures de son gouvernement qui a pelleté le déficit dans les commissions scolaires, qu'aujourd'hui c'est le même contribuable, le même payeur de taxes qui doit payer pour envoyer ses enfants à l'école et que, lui, il trouve ça normal?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, tout ce que je peux constater, c'est que la députée de Taillon, qui avant moi était responsable de l'éducation, a géré de façon très responsable.

Des voix: Bravo!

M. Legault: Et, lorsqu'on examine les états financiers, sur une base consolidée, de toutes les commissions scolaires au Québec, on est en surplus, M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée de La Pinière.


Attribution du contrat d'achat de guichets multiservices pour Emploi-Québec


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, maintenant qu'on sait qu'un employé de SHL Systemhouse, Gilles Beauchesne, a travaillé au ministère de l'Emploi et de la Solidarité à l'élaboration de l'appel d'offres relative aux guichets multiservices qui devaient se déployer dans les centres locaux d'emploi, maintenant qu'on sait que le consortium SHL a obtenu le contrat en question, on apprend qu'un deuxième employé de SHL Systemhouse a été dépêché à Emploi-Québec pour préparer toute l'architecture des guichets.

M. le Président, est-ce que la ministre peut nous confirmer que le technicien de SHL Systemhouse, qui a développé l'architecture des guichets, a travaillé dans son ministère pendant plusieurs semaines et que SHL Systemhouse facturait ses honoraires sur le temps de travail de Gilles Beauchesne?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'ai expliqué la semaine dernière à quel point le ministère faisait appel à différentes ressources externes pour l'aider à développer ses systèmes informatiques. Elles sont plusieurs. Je suis même allée sur un étage où il y en a une bonne dizaine qui travaille à différents aspects. C'est normal, les besoins sont complexes.


Documents déposés

Et la députée de La Pinière, la semaine dernière, a aussi, toujours dans cette histoire-là, diffusé des documents. Je me permets de sa question pour préciser un certain nombre de choses. D'abord, elle a déposé un document la semaine dernière, le 29 avril, qui s'appelle Infrastructure détaillée des postes de travail d'appoint . J'aimerais, M. le Président, dans un but de transparence et pour corriger les inexactitudes, déposer deux documents, parce que je signale à la députée que le document qu'elle a déposé ne comportait pas la bonne page d'identification. Donc, je voudrais prévenir la députée de La Pinière que, avant de faire des informations et de déposer des documents supposément compromettants, elle devrait s'assurer de ses sources, qu'elles lui fournissent les informations exactes et non pas des documents trafiqués. Alors, je voudrais déposer ces documents.

Des voix: Bravo!

Le Président: D'abord, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt des documents? Alors, il y a...

Des voix: ...

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre ne reconnaît pas en même temps qu'il y a eu plusieurs versions, depuis décembre 1997, de préparation par Gilles Beauchesne, qui était le conseiller principal du directeur des services informatiques de son ministère, qu'il y a eu plusieurs versions de la préparation des documents dans laquelle Systemhouse était directement impliquée? Et est-ce que la ministre peut nous déposer, par souci de transparence, toutes les factures soumises à son ministère par SHL Systemhouse en rapport avec ce contrat pour toute la période durant laquelle M. Gilles Beauchesne était impliqué directement dans ce dossier?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, quand un ministère veut préciser ses besoins, il fait affaire avec des ressources externes. SHL est une des ressources, comme il y en a eu d'autres. D'ailleurs, je souligne à la députée de La Pinière qu'une autre des personnes qui a un contrat pour évaluer ces besoins s'appelle un M. Lévesque et qu'il est maintenant rendu pour une firme concurrente à SHL qui a d'ailleurs soumissionné et qui n'a pas eu ce contrat. Alors, faut faire attention, il y a ici des soumissionnaires qui sont déçus.

Par ailleurs, je le rappelle et je le redis, les appels d'offres ont été rédigés à l'interne et les documents en préparation de ces appels d'offres là – d'ailleurs, j'ai fait un exercice extraordinaire – n'ont rien à voir, en termes de degré de détails et d'information, avec les contenus des appels d'offres, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre peut s'engager à déposer toutes les factures soumises par SHL Systemhouse en rapport avec ce contrat? Est-ce que la ministre peut aussi reconnaître que le technicien de Systemhouse qui a développé l'architecture des guichets multiservices a fini par rédiger lui-même, à même son sous-sol, son propre appel d'offres sur lequel il a soumissionné? Est-ce que cette façon de procéder est conforme aux normes d'attribution des contrats et aux règles élémentaires de l'éthique gouvernementale?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Lemieux: M. le Président... M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je vous rappelle que, pour la dernière année – d'ailleurs, la députée de La Pinière a eu l'occasion... – le ministère de la Solidarité sociale, avec son volet Emploi, a dégagé à peu près 28 000 000 $ en ressources externes. Alors, si on se met à sortir les factures de tout ce monde-là, on n'est pas sorti de l'auberge. Deuxièmement...

(14 h 50)

Des voix: ...

Le Président: Bien. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, la députée de La Pinière aura... Il y a une opération, au gouvernement, qui s'appelle «l'étude des engagements financiers». Elle aura tout loisir de scruter toutes les factures qu'elle voudra. Et je lui rappelle que, parmi ses sources, il y a visiblement quelqu'un qui a déjà travaillé à SHL et qui est actuellement pour un soumissionnaire qui est déçu.

Le Président: Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre peut cesser une bonne fois pour toutes sa technique de diversion et déposer devant cette Assemblée toutes les factures que lui a soumises SHL Systemhouse en rapport avec ce contrat, maintenant, pas à l'étude des crédits? Qu'est-ce qu'elle a à cacher?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, d'abord, la députée devrait cesser ses insinuations, d'autant plus qu'il y a visiblement beaucoup de mélange dans les documents dont il est question ici. Deuxièmement, je me suis permis de faire un tout petit exercice, c'est-à-dire de comparer des éléments de contrats généraux qui ont été donnés par le ministère pour déterminer les grandes lignes des besoins du ministère en termes d'architecture technologique, et je vous donne un exemple. Par exemple, dans un des documents que la députée de La Pinière a déposés, on y dit, au sujet des composantes du guichet libre-service, on y dit donc qu'il faut que ça ait un coup d'oeil agréable, que ce soit composé d'éléments résistants et qu'on puisse y travailler debout ou assis. Ce sont des grandes généralités, ici, M. le Président. Moi-même, qui ne suis pas spécialiste en informatique, j'aurais pu trouver ces éléments-là. Or, dans l'appel d'offres, il y a 12 spécifications extrêmement précises. Alors, je pense qu'on exagère un peu quand on dit qu'il y a entre les deux des liens très, très serrés.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Beauce-Nord.


Bilan du plan Paillé favorisant le démarrage d'entreprises


M. Normand Poulin

M. Poulin: Oui, M. le Président. Selon Investissement-Québec, le plan Paillé a contribué à la création de 10 400 entreprises; 5 528 entreprises ont fermé leurs portes. Résultat: 150 000 000 $ ont été perdus et déboursés par le gouvernement jusqu'à maintenant. On prévoit une perte de 260 000 000 $ sur les 400 000 000 $ investis au programme. Contrairement à ce qui s'est produit dans l'ensemble du Canada, le nombre de faillites d'entreprises au Québec a augmenté en janvier dernier par rapport à l'année précédente, le nombre d'emplois a diminué de 38 000 dans les trois derniers mois au Québec.

Est-ce que le ministre des Finances attribue cette augmentation des faillites et les pertes d'emplois au Québec au fait que le plan Paillé fut un échec et n'a pas atteint les objectifs fixés par son gouvernement?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, j'ai déjà répondu en commission parlementaire, mais je remercie le député de me permettre de le faire séance tenante.

Le plan Paillé, comme il fut bien établi par un des chercheurs les plus spécialisés au Québec, le professeur Pierre-André Julien, titulaire de la chaire Bombardier, a un taux de survie plus élevé que le taux naturel de survie des entreprises qui se créent au Québec, premièrement. Donc, il ne peut pas contribuer aux faillites, il en fait moins que les autres.

Deuxièmement, les bénéfices-coûts du plan Paillé, analyse détaillée que nous avons d'ailleurs déposée, démontrent que dans l'hypothèse la plus pessimiste de taux d'échec les bénéfices nets pour le gouvernement sont de 425 000 000 $. Mais nous espérons que c'est l'hypothèse optimiste qui va se réaliser, c'est-à-dire 1 000 000 000 $ de bénéfices, c'est-à-dire le symétrique inverse du milliard que vous aviez perdu dans la SDI dans votre dernier mandat.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. Normand Poulin

M. Poulin: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire où sont les 50 000 emplois qui devaient être créés par le plan Paillé? Ils sont au nombre de 19 000 seulement actuellement.

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Je ne sais pas pourquoi ils applaudissent pour ça. Les entreprises qui survivent en créent constamment et sont en croissance, et il y a plusieurs vedettes.

Mais je ne veux pas abuser de votre temps, M. le Président, parce qu'il y a une partie de la question à laquelle je n'ai pas répondu, l'affaire sur le taux de faillite au Québec. Mais ça, vraiment, c'est une vieille de la vieille, hein? J'étais au collège de Joliette, puis le Québec avait déjà le taux le plus élevé du Canada, et puis ça me choquait beaucoup. Et puis j'ai fini, pendant des années, par regarder ça, puis, là j'ai des nouvelles pour vous, enfin, depuis deux ans, ça baisse. On avait, en 1991-1996, en dollars de passif, de faillites au Québec, 41 % du passif. Aujourd'hui, on est à 22,9 %, 3 % de moins que notre proportion dans la population. C'est ce qu'on appelle être dans le bons sens, d'autant plus que les prévisions de Dun & Bradstreet, elles sont quasiment gênantes, M. le Président. Dans le Globe and Mail , aujourd'hui: «Québec business leaders highly optimistic.» Et puis la phrase clé, je n'en reviens pas encore, d'abord, ils disent que Montréal, pour la première fois depuis je ne sais pas combien d'années, va battre Toronto à bien des égards pour la croissance...

Des voix: Bravo!

M. Landry: ...mais la phrase clé, je vais la citer dans la langue originelle, que parfois le chef de l'opposition emploie: «Québec is really doing well. Whatever it is that they are doing, it appears to be the right thing to do.»

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Beauce-Sud. À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la députée de Beauce-Sud, en question principale.


Mesures fiscales s'appliquant aux travailleurs autonomes


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, alors qu'en pleine campagne électorale le Parti québécois promettait de venir en aide aux travailleurs autonomes, on découvre chaque jour des aberrations fiscales, des règles insipides qui sont contraires aux engagements de ce gouvernement. Par exemple, on a appris que les travailleurs autonomes qui ont un bureau à leur domicile perdent 50 % de leurs déductions s'ils accèdent à leur bureau de l'intérieur de leur maison.

Est-ce que le ministre du Revenu peut nous dire en quoi l'effet de placarder une porte intérieure de son bureau, de construire une nouvelle porte extérieure, de mettre son manteau, ses bottes pour sortir de la maison, pour accéder à son bureau qui, lui, est relié à sa maison, en quoi, finalement, toute cette réglementation facilite la vie des travailleurs autonomes?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ça peut leur compliquer la vie, mais faciliter leur rapport d'impôts. Alors, la question est assez technique, là, les portes d'entrée et les fenêtres. Quand les impôts sur les fenêtres sont devenus trop élevés, il y a quelques siècles, les gens ont barricadé les fenêtres. Alors, je vais me pencher profondément sur cette question – je suis nouveau ministre du Revenu – et je répondrai plus amplement dans une séance à venir.

(15 heures)

Des voix: Bravo...

Le Président: M. le député de Johnson, s'il vous plaît! Alors, cela complète la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui.


Décision du président sur une demande de directive du leader de l'opposition concernant le droit à une question complémentaire aux réponses différées pour chaque avis pris par un ministre

À l'étape des réponses différées, lors de la séance de jeudi dernier, j'ai été appelé à rendre une décision au moment d'une réponse différée qui avait été donnée par le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse. En fait, le 15 avril dernier, M. le ministre avait pris avis d'un aspect d'une question principale adressée par Mme la députée de Beauce-Sud concernant la commission scolaire de la Beauce-Etchemin. Il avait également pris avis d'une question complémentaire du député de Beauce-Nord concernant la commission scolaire de la Beauce-Etchemin également.

Jeudi dernier, M. le ministre a donné une seule réponse aux deux questions précitées. Après la réponse différée du ministre, la députée de Beauce-Sud a posé, comme le règlement le prévoit, une question complémentaire. À la suite de la réponse du ministre à cette question complémentaire, M. le député de Beauce-Nord s'est levé afin de poser également une question complémentaire au ministre, puisque celui-ci avait pris avis de sa question préalablement.

Compte tenu que le ministre avait donc pris avis de deux questions portant sur le même sujet et que c'était la députée de Beauce-Sud qui avait initié le processus de questionnement sur le sujet lors de la question principale, j'ai décidé, à ce moment-là, que seule la députée de Beauce-Sud avait droit à une question complémentaire. C'est pourquoi j'ai, à ce moment-là, alors décidé de ne pas accorder une question complémentaire au député de Beauce-Nord.

À la suite de cette décision, le leader de l'opposition officielle, tout en respectant la décision de la présidence, m'a fait valoir certains arguments à l'encontre de cette décision que j'avais prise et m'a invité à réfléchir plus longuement à la question.

Vérification faite, j'ai décidé d'apporter les précisions suivantes aujourd'hui, immédiatement lors de la séance subséquente. Tout d'abord, l'article 80 du règlement qui traite des réponses différées ne fait aucune distinction entre les questions principales et les questions complémentaires. Cet article prévoit que «le ministre, et je cite, à qui une question est posée peut y répondre à l'issue de la période de questions ou au cours d'une séance subséquente».

Ainsi, cet article vise toute question, soit les questions principales et les questions complémentaires. Un ministre peut donc prendre avis autant d'une question complémentaire que d'une question principale. De plus, le règlement ne prévoit aucune restriction. Chaque réponse différée donne lieu à une question complémentaire. La présidence n'a donc pas à apporter des restrictions là où le règlement ne le fait pas. La règle est claire, et, dès qu'un ministre prend avis d'une question, qu'il s'agisse d'une question principale ou d'une question complémentaire, chaque avis donnera lieu à une question complémentaire, peu importe que le ministre ait décidé de donner une seule ou deux réponses pour les deux questions.

En conséquence, je pense que, si à la fois le député de Beauce-Nord et le ministre en conviennent, demain je crois que vous pourriez revenir à l'étape des réponses différées pour apporter à la fois la réponse et éventuellement ajouter au questionnement.

Par ailleurs, en terminant, il est certain que les réponses différées – et je profite de l'occasion pour l'indiquer – peuvent prolonger la période des questions et des réponses orales. C'est pourquoi j'inviterais les membres de l'Assemblée à se conformer au temps généralement imparti pour les questions et les réponses lors des réponses différées. En fait, une réponse différée ne peut générer plus de temps que celui auquel aurait eu droit le député ou le ministre au cours de la période des questions et des réponses orales. En somme, ce n'est pas une période de déclarations ministérielles ni de questionnements prolongés de la part de l'autre côté.


Votes reportés


Rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1999-2000

Alors, cela étant dit, j'ai annoncé précédemment des votes reportés. Alors, nous allons procéder d'abord au vote en regard des rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars de l'an 2000.

Alors, si tout le monde est prêt, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. Paquin (Saint-Jean), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Chagnon (Westmount– Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:64

Contre:40

Abstentions:0

Le Président: Alors, très bien, les crédits budgétaires pour l'exercice financier se terminant le 31 mars de l'an 2000 sont approuvés et les rapports regroupés des commissions sont donc adoptés.


Présentation, adoption du principe et adoption du projet de loi n° 40

En conséquence, maintenant M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 40, Loi n° 3 sur les crédits 1999-2000, et qu'elle en adopte le principe, et qu'elle adopte également le projet de loi proprement dit. Alors, M. le leader...

M. Brassard: M. le Président, je suggérerais le même vote.

Le Président: Le leader de l'opposition officielle me fait signe qu'il est d'accord, alors nous allons enregistrer le même vote, s'il n'y a pas d'objection. La motion du vice-premier ministre est donc adoptée, et, en conséquence, le projet de loi n° 40, Loi n° 3 sur les crédits 1999-2000, est adopté.


Motions sans préavis

Alors, nous avons quelques motions sans préavis. D'abord, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Souligner la Semaine nationale de la santé mentale

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Chambre afin de présenter la motion suivante, soit:

«Que l'Assemblée nationale, en cette Semaine nationale de la santé mentale, souligne l'importance de la promotion de la santé mentale qui vise à sensibiliser la population québécoise à cette problématique.»

(15 h 10)

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de cette motion, M. le leader...

M. Brassard: L'adoption sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Sans débat? La motion est donc adoptée. M. le ministre délégué au Tourisme.


Souligner la Semaine nationale du tourisme

M. Arseneau: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que les membres de l'Assemblée nationale se joignent à moi pour souligner la Semaine nationale du tourisme, qui a lieu du 2 au 8 mai, et reconnaissent le dynamisme ainsi que le professionnalisme des gens qui y travaillent et qui contribuent de façon exceptionnelle au rayonnement du Québec tant auprès des touristes d'ici que de ceux d'ailleurs.» Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion?

M. Brassard: Sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Alors, l'adoption sans débat? Très bien. M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse, maintenant.


Souligner le Mois de l'éducation physique et du sport étudiant

M. Legault: M. le Président, je propose:

«Que l'Assemblée nationale souligne le Mois de l'éducation physique et du sport étudiant.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation? Oui?

M. Brassard: Sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Et adoption sans débat?

Une voix: Sans débat.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Sans débat. Très bien.

S'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement, est-ce que vous avez des avis?

M. Brassard: Non.

Le Président: Non? En ce qui me concerne, je vous avise que la commission de l'administration publique va se réunir demain, le mercredi 5 mai, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin d'entendre, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, le sous-ministre de la Santé et des Services sociaux. Cette audition sera précédée d'une séance de travail aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la même salle.

Je vous avise également que la commission de la culture va se réunir en séance de travail le mercredi 5 mai prochain – en fait, demain – de 9 h 30 à midi, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement, afin d'organiser les travaux de la commission.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Alors, s'il n'y a pas d'autres choses, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion suivante de Mme la députée de Bourassa. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Parti québécois qu'il prenne sans délai toutes les mesures nécessaires afin de régler les problèmes urgents à court, moyen et long terme concernant les pénuries de personnel médical dans toutes les régions du Québec.»


Affaires du jour

Alors, nous allons passer aux affaires du jour, à ce moment-ci. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président. Alors, nous commençons aujourd'hui nos travaux proprement législatifs, et je vous réfère, pour commencer, à l'article 14.


Projet de loi n° 25


Adoption du principe

Le Président: Alors, à l'article 14, Mme la ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, chers collègues, nous nous retrouvons aujourd'hui en cette Assemblée pour discuter du principe du projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction. Avec l'adoption de ce projet de loi, le gouvernement a pour objectif de modifier diverses lois dans les domaines du bâtiment et de l'industrie de la construction afin d'en faciliter l'application.

On se rappelle qu'en 1998 le législateur a introduit diverses modifications à des lois relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, notamment pour instituer le Commissaire de l'industrie de la construction, ou encore prévoir la possibilité pour le gouvernement de confier des responsabilités en matière de qualification professionnelle aux corporations d'entrepreneurs. Avec le temps, il appert que certains ajustements doivent être apportés pour que la volonté gouvernementale sous-jacente à certains de ces changements puisse être rendue pleinement opérationnelle.

Par ailleurs, le milieu de la construction...

M. Boulerice: M. le Président, de toute évidence, les murs acoustiques qui servent sur les autoroutes ne sont pas en utilisation ici. Alors, si vous pouviez, s'il vous plaît, calmer les jeux de façon à ce qu'on puisse entendre la ministre et, après, le porte-parole de l'opposition, dans une certaine tranquillité.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous invite, s'il vous plaît, à... À la fin d'une période de questions, il y a toujours un peu de mouvement, de déplacements. Donc, je vous invite à terminer ce petit jeu de déplacements le plus rapidement possible pour qu'on puisse poursuivre nos débats. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: ...auprès de la ministre, simplement pour que les gens qui nous écoutent comprennent que les bruits provenaient de part et d'autre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je cède la parole à Mme la ministre.

Mme Lemieux: Alors, on se rappelle donc qu'en 1998 le législateur a introduit diverses modifications à des lois relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, notamment pour instituer le Commissaire de l'industrie de la construction, ou encore prévoir la possibilité pour le gouvernement de confier des responsabilités en matière de qualification professionnelle aux corporations d'entrepreneurs. Avec le temps, il appert que certains ajustements doivent être apportés pour que la volonté gouvernementale sous-jacente à certains de ces changements puisse être rendue pleinement opérationnelle.

Par ailleurs, le milieu de la construction a vu, au cours de l'année 1998, la naissance d'une nouvelle association représentative résultant d'un regroupement de deux associations représentatives majeures de l'industrie. Ce nouveau partenaire se doit donc d'être pris en compte dans la législation actuelle.

Ainsi, M. le Président, ce projet de loi a pour objet de reconnaître comme intervenant dans les domaines du bâtiment et de la construction le Conseil conjoint de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction) et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international), récemment formé.

Rappelons que c'est en 1980 que plusieurs syndicats affiliés au Conseil provincial du Québec des métiers de la construction quittaient ce dernier. Avec l'aide de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, ces syndicats se regroupèrent et fondèrent la FTQ-construction.

Au fil des ans, plusieurs tentatives de réunification eurent lieu, mais ce n'est qu'au printemps 1998 que les deux syndicats adoptèrent, dans leurs instances respectives, une résolution concrétisant le regroupement des deux centrales et préconisant la création du Conseil conjoint.

L'assemblée générale de fondation officielle du Conseil conjoint de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ-construction) et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international) a eu lieu le 17 novembre 1998 à Québec.

Le projet de loi habilite également le gouvernement à confier à la Corporation des maîtres électriciens du Québec et à la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, dans la mesure qu'il l'indique, le mandat de voir à l'application de la Loi sur le bâtiment relativement aux garanties financières exigibles de leurs membres.

Le projet de loi n° 445, adopté en juin 1998, favorisait la prise en charge par la Corporation des maîtres électriciens du Québec et la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec de l'administration de la Loi sur le bâtiment en ce qui a trait à la qualification de leurs membres. La signature des ententes par lesquelles le gouvernement confie aux deux corporations le mandat de surveiller l'administration de la loi devait avoir lieu à la fin de décembre 1998 et le transfert des responsabilités le 1er avril 1999. Il est apparu, au fur et à mesure que les travaux progressaient, que l'échéancier prévu ne pouvait être respecté. En effet, deux éléments essentiels au transfert posaient problème.

Il s'agit, d'une part, du fait que les corporations n'ont pas, en vertu de la loi actuelle, le pouvoir de mettre en place des garanties financières exigibles de leurs membres, un élément essentiel aux yeux des corporations pour qu'elles puissent s'acquitter correctement de cette nouvelle responsabilité. Il s'agirait là de garanties financières dont l'instauration serait sujette à l'approbation du gouvernement et qui seraient complémentaires à celles prévues au Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs de la Régie du bâtiment du Québec.

D'autre part, l'application des dispositions actuelles de la loi sur le plan du partage des coûts et des revenus entre les corporations et la Régie du bâtiment du Québec pour la réalisation du mandat ne prévoit pas une juste rétribution de la Régie du bâtiment du Québec pour les activités de registraire et de qualification qu'elle doit continuer d'exercer. Le projet de loi permet donc de modifier l'habilitation réglementaire afférente au partage entre les corporations mandataires et la Régie du bâtiment des droits exigibles des entrepreneurs de construction en matière de licences.

L'adoption du projet de loi n° 445 créait également une instance spécialisée dans l'industrie de la construction, qui est à la fois dotée de fonctions administratives et juridictionnelles. Cette instance, le Commissaire de l'industrie de la construction, résulte de la fusion du Conseil d'arbitrage et du Commissaire de la construction. En plus des compétences qu'avaient déjà le Conseil d'arbitrage et le Commissaire de la construction, cette instance s'est vue confier celle de disposer des appels logés à l'encontre des décisions rendues par la Régie du bâtiment du Québec ou tout autre organisme qui se verrait confier des pouvoirs à cette fin en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement, la modification, la suspension ou l'annulation d'une licence d'entrepreneur ou de constructeur propriétaire.

(15 h 20)

Le projet de loi établissait également des mécanismes de financement du coût des activités. Il introduisait aussi un mécanisme de conciliation pour favoriser le règlement de certaines contestations soumises au Commissaire de l'industrie de la construction. Toutefois, il demeure qu'aucune instance juridictionnelle autre que les tribunaux de droit commun n'a actuellement la compétence qui fait appel à des connaissances spécialisées pour disposer des questions relatives à l'interprétation des définitions de secteurs de l'industrie établies par les projets de loi 142 de 1993 et 46 de 1995 aux fins de la négociation et de l'application des conventions collectives. Le projet de loi habilite le Commissaire de l'industrie de la construction à régler toute difficulté d'interprétation ou d'application des définitions existantes des quatre secteurs de cette industrie. Enfin, le projet de loi édicte quelques dispositions à caractère technique ou de concordance ainsi que des dispositions transitoires et finales.

En résumé, M. le Président, le principe de base de ce projet de loi, vous pouvez le constater, est de faciliter l'application des lois dans le domaine du bâtiment et de l'industrie de la construction afin de traduire pleinement la volonté gouvernementale énoncée lors de l'adoption du projet de loi n° 445 et de prendre en compte la nouvelle réalité qu'est le Conseil conjoint de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ-construction) et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction.

C'est pour ces raisons que je sollicite aujourd'hui le consentement de cette Assemblée pour l'adoption du principe du projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 25. Comme la ministre l'a expliqué, c'est un projet de loi qui modifie certaines dispositions législatives relativement aux relations de travail dans la construction en particulier. Alors, c'est un projet qui, dans son ensemble, donne suite au voeu qui a été émis et ratifié en assemblée, démocratiquement, par les gens de la FTQ-construction et du Conseil provincial des métiers de la construction à l'effet de fusionner leurs organisations et leurs associations.

M. le Président, nous aurons l'occasion, lors du débat en commission parlementaire, article par article, de discuter plus longuement de cette partie en particulier, et particulièrement sur les modalités d'application. Car, bien sûr, dans le projet de loi, on ne retrouve pas la mécanique et la manière dont ça va se passer. À titre d'exemple: Est-ce qu'on va conserver, à certaines tables de négociation, un représentant du Conseil provincial puis un représentant de la FTQ, ou est-ce qu'on va scinder, vu que c'est une fusion, en un seul? C'est des questions qui vont devoir être certainement posées.

M. le Président, nous aurons aussi, dans l'autre partie – parce qu'il y a trois parties dans ce projet de loi là, trois choses importantes – la délégation aux corporations des plombiers, des électriciens de gérer la garantie financière, en d'autres termes la caution qui est donnée lorsqu'un de ces entrepreneurs entreprend des travaux sur un chantier.

M. le Président, bien sûr que ça fait suite à un projet de loi, le projet de loi n° 445 qui a été adopté en 1998, mais je crois que nous devrons, là aussi, discuter. Nous devrons peut-être aussi entendre les gens. Je ne sais pas, M. le Président, quelle serait, dans cette partie-là en particulier, la position de l'ensemble des personnes ou des corporations qui vont être touchées, et je crois qu'il serait sage que peut-être nous puissions les écouter. Nous verrons dans les semaines ultérieures avec les intervenants, les intéressés et la ministre certainement s'il y a lieu de demander à des gens de venir se prononcer là-dessus. Peut-être y aura-t-il un intérêt pour les gens de venir en commission parlementaire, comme ça se fait, article par article, se prononcer, car ça a certaines incidences. On change les règles du jeu, et peut-être que...

On a pu voir dans le passé, et depuis les nombreuses années que je suis en cette Chambre j'ai pu voir que des fois l'article de loi qui semblait le plus anodin ou le plus simple, lorsqu'il était exposé aux intervenants, aux gens qui sont concernés, soulevait un nombre de questions important et permettait, de par le soulèvement de ces questions-là, au législateur d'apporter des correctifs ou des changements que peut-être nous n'avions pas vus, bien sûr. Car, après tout, qui est mieux placé que les gens qui doivent vivre avec les lois que nous faisons, qui est mieux placé qu'eux pour nous éclairer, M. le Président? Bien, je pense que ce sont eux.

M. le Président, il y a aussi la troisième partie. La troisième partie, ça accorde au Commissaire de l'industrie de la construction la possibilité de trancher lui-même ce qu'on pourrait appeler – je dis ça un peu schématisé pour que les gens comprennent bien – un peu les litiges qui peuvent exister entre les secteurs de l'industrie. Vous savez que l'industrie est divisée en quatre secteurs, et prenons l'exemple du secteur commercial. Le secteur commercial pourrait entreprendre un certain genre d'actions, de chantiers, et les gens de l'industriel diraient: Non, non, non, ça, c'est chez nous, ce n'est pas dans le commercial. Avant, c'était la Régie du bâtiment qui avait cette juridiction. Maintenant, on donne ça au Commissaire de l'industrie de la construction, qui est un nouveau poste, d'ailleurs, qui est tenu par une femme, en plus, maintenant, ce qui est très bien. Ça me permet de la saluer en cette Chambre, vu que c'est la première fois qu'on la mentionne en cette Chambre, ou presque la première fois, en tout cas. Alors, il faudra voir, là aussi.

Est-ce que les intervenants, les gens qui vont être touchés, les gens des différents secteurs, les entrepreneurs en particulier ou les gens du milieu du travail voudront se faire entendre sur cette partie-là? Je ne le sais pas encore. Les premiers contacts que j'ai pu avoir lorsque le projet nous a été communiqué m'amènent à penser qu'il y a un certain nombre de questions qui se posent, quand même. Est-ce que ça nécessitera d'aller le dire devant la commission ou est-ce que, simplement par l'intermédiaire de la discussion avec l'opposition et la ministre, nous pourrons répondre à ces questions de manière satisfaisante pour les gens? Ça sera à voir, bien sûr, M. le Président.

Aussi, une des particularités de ce projet de loi, M. le Président, c'est qu'il ouvre un certain nombre de lois. Alors, en particulier, il touche à la Loi sur la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, chapitre R-20, et on sait actuellement qu'il y a un grand débat qui se fait, particulièrement suite aux problèmes que nous avons dans la région de l'Outaouais et de l'Ontario avec les cartes de qualification professionnelle, et un certain nombre de Québécois et de Québécoises s'interrogent grandement sur cette manière de procéder. Alors, je trouve un peu paradoxal que l'on ouvre rapidement cet article, au chapitre R-20 de la loi sur la formation professionnelle et la qualification dans l'industrie de la construction, alors que d'autres débats nous interpellent d'une manière très pressante, car, en effet, on sait que, dans ces régions-là, un grand nombre de travailleurs sont malheureusement dans une situation où ils ne peuvent plus ou ne pourront plus aller gagner leur salaire parce que, bon, la province voisine a décidé de faire un embargo ou de bloquer l'accès de ces travailleurs à leur marché, prétextant, entre autres causes, entre autres cas, que notre système de qualification, de cartes, de contingentement, de bassin de travailleurs nuisait à la mobilité de ses travailleurs à elle.

(15 h 30)

Alors, M. le Président, je pense que ça nous rappelle que, dans ce domaine qu'est la construction, beaucoup de choses sont à faire. Nous sommes interpellés régulièrement par les Québécois et les Québécoises, par les travailleurs de la construction, par des gens qui aimeraient y travailler, qui n'ont pas de travail, qui ont une qualification professionnelle, quand même. Nous sommes aussi interpellés bien sûr par des entrepreneurs et des gens qui oeuvrent dans la construction pour que nous fassions une mise à jour ou une libéralisation ou une ouverture, une modernisation de l'ensemble de ces lois et règlements qui régissent, un peu comme... À l'occasion, ça peut être un carcan, tous les rapports qui peuvent exister entre les différents partenaires ou différents intervenants dans cette industrie.

Alors, nous entendons prendre le temps nécessaire, bien sûr, pour, je le disais, écouter les gens et voir ce qu'ils ont à nous dire, et aussi apporter, si c'est nécessaire, quelques modifications ou amendements à ce projet de loi. Aussi, comme à chaque fois et vu que c'est le premier projet de loi que nous allons avoir à faire avec Mme la ministre en cette Chambre, nous lui offrons, bien sûr, toute notre collaboration dans l'optique de faire et de réussir à faire adopter en cette Chambre des projets de loi qui correspondent le mieux et de la manière la plus pointue et la plus pratique à l'ensemble des citoyens, Québécois et Québécoises, qui vont être touchés, mais aussi qui ne deviennent pas par la suite des freins, des entraves à l'activité économique, car on sait, M. le Président, qu'une société qui réglemente et qui légifère sans tenir compte de cette dimension-là, va créer bien souvent... Bien souvent, de bonne volonté, de vouloir arranger quelque situation qui crée problème dans un secteur peut aller créer ailleurs, dans d'autres secteurs, des effets, ou des dommages, ou des entraves à cette activité économique. Alors donc, c'est dans cet esprit-là que nous entendons, bien sûr, travailler et collaborer avec la ministre.

Et, s'il s'avérait, bien sûr, dans d'autres projets, dans celui-là ou dans d'autres, qu'il y ait des incompatibilités avec les citoyens, avec les intervenants – dans les projets de loi de la ministre, bien sûr – bien, nous verrons à faire en sorte qu'elle les change. Et, si elle ne le faisait pas pour des raisons qui la regarderaient, elle et son gouvernement, et que les citoyens, bien sûr, nous le demandaient encore, nous verrons à prendre les moyens à notre disposition dans la panoplie des moyens parlementaires pour faire notre travail et défendre les intérêts des citoyens, des Québécois encore une fois.

Alors, M. le Président, ce projet de loi, pour l'instant, nous semble un projet de loi qui ne crée pas de problèmes. Nous réservons notre position pour, bien sûr, l'adoption finale du projet de loi et aussi l'étude en commission parlementaire.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Alors, s'il n'y a pas d'autres interventions, je vous demande de mettre aux voix le projet de loi.

Le principe du projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, est-il adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Boulerice: Oui. Bien, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, normalement je vous référerais à l'article 7, mais, avant de le faire, je vous demanderais un bref temps de suspension de façon à permettre aux intervenants concernés de part et d'autre de la Chambre de se joindre à nous.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Nous allons suspendre pour quelques minutes avant d'entreprendre la suite de nos travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 33)

(Reprise à 15 h 49)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Avant d'entreprendre nos travaux, je vais vous annoncer quelques bonnes nouvelles. Il y aura trois débats de fin de séance.

Le premier débat, c'est le député de Kamouraska-Témiscouata qui interrogera le ministre de l'Éducation concernant les frais pour les services éducatifs dans les écoles publiques du Québec.

Le deuxième débat: Mme la députée de Beauce-Sud questionnera le ministre d'État à l'Économie et aux Finances concernant le contrat avec le Bureau de la statistique du Québec.

Et le troisième débat: Mme la députée de La Pinière questionnera la ministre d'État au Travail et à l'Emploi au sujet de l'appel d'offres pour les guichets multiservices.

Alors, je suis prêt maintenant, M. le leader du gouvernement, pour la suite des choses.

(15 h 50)

M. Brassard: Alors, je vous réfère, M. le Président, à l'article 7.


Projet de loi n° 8


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 7, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 8, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. M. le ministre des Ressources naturelles, je vous cède la parole.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, le 18 mars dernier, j'ai déposé le projet de loi n° 8 intitulé Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. Ce projet de loi vise essentiellement à permettre à la compagnie Abitibi-Consol d'utiliser les forces hydrauliques d'une section de la rivière Shipshaw, au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Plus précisément, le projet vise la centrale Jim Gray, une centrale d'une puissance de 52 MW construite et exploitée par l'entreprise depuis le début des années cinquante.

Pourquoi une loi? Avant de présenter plus en détail le projet de loi, je pense qu'il est important d'expliquer les raisons qui rendent nécessaire l'adoption d'une loi afin de conclure un nouveau bail avec l'entreprise. D'abord, il faut savoir que le gouvernement du Québec avait autorisé en 1951 la Price Brothers, devenue aujourd'hui Abitibi-Consol, à utiliser les forces hydrauliques d'une section de la rivière Shipshaw et les terrains adjacents afin qu'elle puisse construire la centrale électrique. Cette autorisation avait été accordée par l'adoption d'une loi, la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. En vertu de cette loi, un premier bail a été signé avec l'entreprise pour une durée de 25 ans. Ce bail a ensuite été renouvelé pour un autre terme de 25 ans se terminant le 31 décembre 2001.

Et on se souviendra, M. le Président, que, lors de la dernière crise majeure du papier, Abitibi-Price avait jonglé avec l'idée de vendre son réseau hydroélectrique. Les pressions de la région et les discussions avec le gouvernement avaient permis de conserver cet actif important pour la région. Consciente aussi de la valeur inestimable de ces installations, l'entreprise a exprimé il y a quelque temps le désir de louer à nouveau les forces hydrauliques de cette section de la rivière, et le projet de loi que j'ai déposé s'inspire en quelque sorte des leçons du passé.

Le gouvernement a jugé pertinent de revoir certains paramètres du bail. Après 50 ans, il m'apparaît tout à fait normal de revoir les conditions d'une entente et de vouloir l'adapter aux exigences et aux préoccupations du jour. Nous avons étudié cette demande en ayant à l'esprit l'idée que le ministère des Ressources naturelles a la responsabilité de définir les règles d'accès et d'exploitation des ressources naturelles du domaine public dans l'intérêt de tous les Québécois. Nous avions également pour objectif premier de consolider les activités de cette papetière au Saguenay–Lac-Saint-Jean tout en cherchant à maximiser les retombées socioéconomiques liées à l'exploitation des ressources naturelles du Québec.

Bref, M. le Président, nous avons négocié de nouvelles conditions avec Abitibi-Consol, conditions qui ont été acceptées par cette dernière. Toutefois, comme ces modifications à l'entente ne cadraient pas avec la loi de 1951, il nous fallait adopter une nouvelle loi. Par ailleurs, la loi actuelle sur le régime des eaux, qui détermine les règles de location des forces hydrauliques, prescrit que la location d'une force de plus de 25 MW, ce qui est le cas de la centrale Jim Gray, ne peut se faire que par l'adoption d'une loi.

Quelles sont donc ces conditions au nouveau bail? Elles sont nombreuses. Toutefois, parmi celles-ci, il y en a une qui revêt une grande importance pour le gouvernement, puisqu'elle vient, comme je le précisais plus tôt, consolider les activités de l'entreprise dans la plus grande région forestière du Québec. C'est ainsi que la compagnie s'est engagée dans un programme de modernisation de l'usine Kénogami dont l'avenir était sérieusement menacé. La compagnie devra réaliser des investissements structurants dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, pour un montant d'au moins 390 000 000 $ en dollars de 1998, et ce, d'ici la fin du bail, soit d'ici le 31 décembre 2011. Cette condition illustre bien ce que nous entendons par «maximiser les retombées socioéconomiques pour la région et pour le Québec». La force hydraulique de cette rivière est du domaine public, elle appartient aux Québécois. Il est donc normal que nous utilisions cette ressource comme levier pour encourager les entreprises à investir dans des projets porteurs d'avenir.

Il est évident que cette centrale électrique procure un certain avantage à Abitibi-Consol: elle l'assure d'un approvisionnement électrique stable. En contrepartie, cependant, je dirais sur une base d'affaires et de confiance, nous avons demandé à l'entreprise de faire des investissements industriels dans ses établissements de la région. En fait, nous avons proposé à l'entreprise une formule qui l'assure de conserver l'avantage que lui procure la centrale électrique, dans la mesure où la collectivité pourra aussi en retirer certains bénéfices.

Et le juste retour que nous escomptons se traduit en ces termes: des investissements structurants dans la région. Précisons que le terme «structurant» prend ici toute son importance. Il signifie que, pour être admissibles, les investissements devront avoir un effet durable sur le long terme. Ils devront être, par exemple, des investissements visant l'amélioration de la capacité de production de l'entreprise, tels que la mise en place de nouveaux procédés de transformation, la modernisation d'équipements de production, etc. Ces critères seront d'ailleurs inscrits au bail.

390 000 000 $ d'investissements en dollars de 1998. Chaque année, l'entreprise devra fournir au ministère les données financières sur les investissements manufacturiers réalisés. La valeur de ces investissements sera calculée en dollars de 1998, actualisée à raison de 10 % par année. Concrètement, cela veut dire, par exemple, que, si l'entreprise attendait à la dernière année du bail, 2011, pour faire tous ses investissements, c'est plus de 1 000 000 000 $ qu'elle devrait investir. Évidemment, cette situation ne se produira pas, car l'entreprise a déjà annoncé en mai dernier des investissements de quelque 150 000 000 $, toujours en région, précisément à l'usine Kénogami. Les renseignements obtenus à ce jour nous révèlent que l'entreprise a déjà acheté pour quelque 50 000 000 $ d'équipements. On peut donc dire qu'une partie des retombées est déjà là, puisqu'il n'y a pas si longtemps le sort de l'usine de Jonquière était loin d'être assuré.

De plus, comme il est précisé au projet de loi, s'il advenait que l'entreprise ne réalise pas les investissements requis au terme du bail, elle devra payer au gouvernement un montant correspondant à 20 % de la valeur des investissements manquants, calculé, selon la formule établie, en dollars de 1998. En outre, si l'entreprise devait fermer l'une de ses usines dans la région, le ministère pourrait résilier le bail sans aucune indemnité.

Enfin, le projet de loi prévoit également que ce bail est renouvelable pour une autre période de 10 ans. Dans l'éventualité d'un tel renouvellement, l'entreprise devra réaliser des investissements supplémentaires de 150 000 000 $ calculés selon les règles énoncées précédemment, à la différence cependant que la valeur des investissements sera établie en dollars de 2002.

Le projet de loi contient également d'autres obligations pour l'entreprise. Parmi celles-ci, vous me permettrez, M. le Président, de mentionner les suivantes. À la signature du bail, l'entreprise devra verser au gouvernement un montant forfaitaire équivalant à 15 % de la valeur de la production d'électricité d'une année, d'environ 3 000 000 $. La valeur de cette production sera calculée comme si elle avait été vendue à Hydro-Québec, conformément à la politique des petites centrales hydroélectriques.

L'entreprise devra payer les redevances annuelles établies selon l'article 68 de la Loi sur le régime des eaux. Ces redevances seront calculées au taux fixé en vertu de cette loi et applicable aux petites centrales électriques. De plus, elle devra payer les redevances fixées en application de la politique concernant l'exploitation des forces hydrauliques du domaine public pour les petites centrales.

L'électricité produite à cette centrale devra servir exclusivement aux besoins des usines de l'entreprise dans la région. Si l'entreprise ne consomme pas toute l'électricité produite par la centrale, elle pourra vendre le surplus en versant au gouvernement une partie du produit de cette vente. Toutefois, si l'entreprise consomme moins de 50 % du potentiel de production de la centrale pendant trois années consécutives, le bail pourra être résilié par le gouvernement.

L'entreprise doit entretenir les barrages et autres ouvrages érigés pour l'exploitation de la centrale. Au besoin, elle pourra reconstruire des barrages et autres ouvrages, en prenant soin, bien sûr, d'obtenir les autorisations gouvernementales nécessaires.

Enfin, au terme de ce bail ou de son renouvellement, la propriété de la centrale sera cédée gratuitement au gouvernement.

Je conclus mon intervention, M. le Président, en soulignant que toutes ces conditions ont été discutées et acceptées par l'entreprise. Elles sont le fruit d'un juste arbitrage entre les intérêts de l'entreprise, les attentes des milieux régionaux et l'intérêt public. Elles représentent donc le résultat concret de nos discussions, qu'il nous faut qualifier, je le dis sans ambages, de franches, honnêtes et respectueuses.

Enfin, j'ajouterais que ce projet de loi est tout à fait en accord avec la politique énergétique du Québec. Il est dit dans cette politique, et je cite: «Le Québec demeure favorable à l'accueil des industries grandes consommatrices d'électricité et à leur développement pour celles qui sont déjà installées sur son territoire, dans la mesure cependant où chacune des parties en tire un bénéfice sur une base d'affaires établie de façon transparente.» Fin de la citation.

Je crois avoir démontré, M. le Président, que le bail que nous signerons avec l'entreprise sera profitable puisqu'il entraîne des investissements dans la région et que ceux-ci profitent à la communauté. Voilà ce que j'appelle mettre en valeur nos ressources naturelles au profit de tous. Alors, je pense que la présentation d'un projet de loi à l'Assemblée nationale répond aussi à cette exigence de transparence si souventes fois exigée, avec raison, par nos concitoyens et concitoyennes. Ce projet de loi établit les principaux paramètres de l'entente et les rend donc accessibles à tous.

C'est pourquoi, bien sûr, M. le Président, j'invite les membres de cette Assemblée à adopter le principe de ce projet de loi.

(16 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, l'adoption du principe du projet de loi n° 8, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw, est la suite logique à donner au bail devant être renouvelé en 2002 entre le gouvernement et l'entreprise Abitibi-Consol. Quand, en 1951, le gouvernement a créé la Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw, il avait prévu trois périodes de location de 25 ans, la première prenant effet le 1er janvier 1952 et se terminant en 1977. La seconde période de 25 ans, de 1977 à 2002, était renouvelable à l'option de la compagnie, sous des conditions semblables à la location originale. La troisième, celle qui nous intéresse ici, est renouvelable aux conditions fixées par le gouvernement. Cependant, contrairement aux baux précédents, ce projet de loi fixe la durée du nouveau bail à une période de 10 ans renouvelable pour 10 autres années. Bien que la compagnie Abitibi-Consol aurait préféré renouveler pour une période ferme de 25 ans comme c'était le cas auparavant, elle a accepté de se plier à cette décision gouvernementale de diminuer de plus de la moitié la durée de la location prévue.

Ce que nous retenons, M. le Président, de ce projet de loi, c'est l'engagement de l'entreprise à réaliser des investissements manufacturiers, dans la région administrative du Saguenay–Lac-Saint-Jean, de l'ordre de 390 000 000 $ à la fin de la première période de location, soit au plus tard au 1er octobre 2012. D'ailleurs, l'entreprise a déjà démontré son sérieux en annonçant, l'an dernier, un investissement de 150 000 000 $ à son usine de Kénogami. Dans cette nouvelle entente, Abitibi-Consol est tenue de maintenir en opération ses usines du Lac-Saint-Jean sous peine de voir son bail être résilié par le ministre. De plus, les usines exploitées par l'entreprise doivent consommer plus de 50 % du potentiel de la production d'électricité des forces hydrauliques sur une base régulière, ce qui assure un maintien minimum des opérations. Des six usines que possèdent Abitibi-Consol ou ses filiales au Saguenay–Lac-Saint-Jean, trois oeuvrent dans le domaine des pâtes et papiers et trois autres sont des scieries. Comme le projet de loi n° 8 ne fait pas de distinction entre ces usines, il serait opportun, selon l'opposition officielle, d'apporter les précisions nécessaires avant l'adoption finale de ce projet de loi.

Le projet de loi n° 8 prévoit également les sommes que la compagnie s'engage à verser au gouvernement pour pouvoir profiter des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. L'entreprise devra verser un montant forfaitaire au début du bail et verser annuellement des redevances au gouvernement. Comme il s'agit d'articles de nature plus technique, nous demanderons bien sûr au gouvernement d'apporter des précisions quant à leur portée.

En terminant, M. le Président, je conclurais mes remarques en vous soulignant que l'opposition officielle entend donc appuyer, au stade de l'adoption du principe, le projet de loi n° 8, et nous serons également très intéressés aux précisions qui seront apportées par le gouvernement lors de son étude par la commission de l'économie et du travail. Alors, je vous remercie.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. S'il n'y a pas d'autres interventions, je mets aux voix le principe du projet de loi.

Le principe du projet de loi n° 8, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw, est-il adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Brassard: Oui. Alors, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je vous réfère maintenant à l'article 9, M. le Président.


Projet de loi n° 15


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 9, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux. Alors, je vais céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, le 31 mars dernier, je déposais le projet de loi n° 15 que vous venez de mentionner, la Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux.

Ce projet, qui ne contient que six articles, est relativement simple. Il vise essentiellement à modifier deux éléments de la loi. L'objectif principal de ce projet de loi consiste à permettre au gouvernement de louer à des producteurs indépendants des forces hydrauliques du domaine public d'une puissance ne dépassant pas 50 MW. En fait, ce que nous proposons, c'est de relever la limite actuelle qui est établie à 25 MW et de la porter à 50 MW, toujours en ce qui concerne, évidemment, les forces hydrauliques dans le domaine public. Nous tenons, de plus, à apporter une clarification technique quant au paiement des redevances; j'en parlerai tout à l'heure.

Il faut convenir, M. le Président, qu'au fil du temps les producteurs indépendants ont démontré leur aptitude à réaménager ou à aménager les petits sites hydrauliques de 25 MW et moins laissés de côté par Hydro-Québec. Le gouvernement a donc décidé d'élargir leur champ d'intervention aux sites n'excédant pas 50 MW. Les sites d'une puissance de plus de 50 MW resteront la prérogative exclusive d'Hydro-Québec.

Le Québec a tout intérêt à apporter quelques modifications à la Loi actuelle sur le régime des eaux. Il nous faut en effet nous adapter aux nouvelles réalités et donner des suites concrètes à notre politique énergétique qui, je le rappelle, a fait l'objet à la fois d'une large consultation, donc d'un large débat public, et d'un consensus social important. Grâce à l'adoption de cette loi, le Québec se donnera un cadre législatif qui lui permettra de s'inscrire dans la tendance nord-américaine et mondiale d'accroissement du nombre de producteurs d'électricité. Ce nouveau cadre législatif nous permettra de développer une expertise, un savoir-faire aussi bien dans la conception et la construction que dans la gestion des petites centrales hydrauliques. J'ajoute ici qu'il ne faut pas perdre de vue que ce savoir-faire est exportable sur les marchés extérieurs.

Finalement, cette ouverture à la production privée fournit au gouvernement un indicateur, un comparatif qui nous aidera à apprécier l'efficacité d'Hydro-Québec et sa capacité à satisfaire les besoins du Québec en électricité au meilleur coût possible.

La loi actuelle exige une autorisation par loi spéciale dès que l'ajout de forces publiques a pour résultat de porter la capacité de la centrale à plus de 50 MW, et cela, même si le producteur produisait, par exemple, 48 MW à partir de forces hydrauliques lui appartenant, donc du domaine privé. Ce projet de loi fait passer à 50 MW le potentiel de la force hydraulique du domaine public qui peut être louée à un producteur indépendant par la voie d'une autorisation gouvernementale plutôt que par celle de la présentation d'une loi spéciale. La limite de 50 MW fixée par le projet de loi s'applique à la force hydraulique du domaine public et non pas à la capacité totale de production de la centrale, comme c'est le cas dans la loi actuelle. Cette précision vise à distinguer la force hydraulique publique de la force hydraulique privée. Le gouvernement pourra ainsi autoriser un producteur privé propriétaire de sa force hydraulique à ajouter des mégawatts de force publique à sa centrale.

Il s'agit bien ici, M. le Président, de réaliser notre mandat de mise en valeur et de développement de la ressource hydraulique du domaine public selon des règles claires, dans la transparence et en prenant en compte l'intérêt de la collectivité québécoise, propriétaire de cette ressource.

(16 h 10)

Par ailleurs, comme je l'ai mentionné en introduction, ce projet de loi poursuit un second but: apporter une clarification technique relative au paiement des redevances. Pour comprendre cette modification, il faut savoir qu'il y avait auparavant une distinction qui était faite au chapitre des redevances. Selon que le producteur d'électricité était propriétaire ou locataire de la force hydraulique, une redevance dite additionnelle était réclamée au locataire. Cette distinction a été éliminée en 1984, lors d'une modification de la Loi sur le régime des eaux. Il a alors été décidé d'assujettir l'ensemble des détenteurs de force hydraulique au Québec, qu'ils soient propriétaires ou locataires, à un seul régime de redevance.

La redevance a toutefois conservé le qualificatif «additionnelle» dans la loi, prêtant ainsi à confusion. Certains producteurs, propriétaires de la force hydraulique qu'ils utilisent, contestent le paiement de la redevance sous prétexte qu'elle n'est pas additionnelle à une autre redevance. C'est pourquoi nous proposons simplement de biffer, à l'article 68 de l'actuelle loi, le mot «additionnelle» ainsi que le mot «contribution» apparaissant aux articles 69 et 70, et ce, pour des raisons de clarification du texte de la loi.

En somme, M. le Président, ce projet de loi porte un ajustement à la loi qui encadre le développement de la petite production hydraulique au Québec. Par ce geste, nous transposons dans la loi une orientation de la politique énergétique du Québec, politique qui a été établie, je le rappelle, à la lumière d'une vaste consultation. Nous profitons également de l'occasion pour apporter une clarification au texte de la loi.

Je tiens à préciser que ce projet de loi confirme des règles établies quant à l'octroi d'un site public, de même qu'en matière environnementale. Rien n'est changé, nous procéderons toujours par un appel public de propositions. Cette règle s'applique à tous les nouveaux sites du domaine public, permettant ainsi une véritable concurrence entre les entreprises intéressées. Les règles relatives aux autorisations environnementales s'appliquent à ces projets aussi, c'est-à-dire que, par exemple, les projets de plus de 10 MW sont assujettis à la procédure d'évaluation environnementale complète prévue à l'article 31 de la Loi de la qualité de l'environnement.

Finalement, l'adoption de ce projet de loi ne change en rien la pause que nous observons dans la production indépendante d'électricité depuis quelques années, puisque, en effet, avant de procéder à la relance de ce dossier, ce qu'on appelle «la petite hydraulique», nous considérerons d'abord l'avis de la Régie de l'énergie sur cette question, entre autres sur la question de la quote-part dévolue à la production hydroélectrique indépendante dans le plan de ressources d'Hydro-Québec ainsi que sur le prix de vente de cette électricité à la société d'État. On le sait, la Régie examine actuellement cette question, et il y aura d'ailleurs très bientôt – je pense que c'est au début de juin – des audiences publiques de la Régie où un certain nombre d'intervenants témoigneront ou se feront entendre devant la Régie sur cette question de la petite hydraulique, et la Régie va ensuite, évidemment, soumettre son avis au gouvernement, et c'est à partir de l'avis de la Régie que le gouvernement pourra envisager la relance de la production indépendante d'électricité.

Dans cette perspective, j'invite évidemment les membres de l'Assemblée, M. le Président, à adopter le principe du projet de loi n° 15.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Le projet de Loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux, peut nous sembler anodin avec ses six articles. Cependant, une lecture attentive des six articles en question vient plutôt nous confirmer l'importance, et je soulignerais même le caractère hautement déterminant pour la production privée d'électricité au Québec.

M. le Président, c'est la première fois depuis 1994 que le gouvernement du Parti québécois se positionne clairement sur la question de la production indépendante d'hydroélectricité au Québec. Vous conviendrez cependant qu'après avoir pris connaissance de l'historique du projet de loi n° 15 je trouve assez particulière ma position aujourd'hui, alors que le gouvernement péquiste d'en face se fait le promoteur d'un projet de loi qu'il a lui-même décrié avec ardeur lorsqu'il a été présenté pour la première fois, en 1988, par le ministre des Ressources naturelles de l'époque, le ministre libéral M. John Ciaccia.

Ce projet de loi adopté en 1988 avait comme objectif – et je vous le rappelle – d'encourager l'émergence de petites ou de minicentrales dans le développement de nos ressources hydroélectriques. Il modifiait donc la Loi sur le régime des eaux pour simplifier la procédure de location de forces hydrauliques du domaine public en conférant au gouvernement le pouvoir d'autoriser les projets de centrales de 25 MW et moins, alors que l'ancien seuil était seulement de 225 kW. Alors, par cette décision importante, M. le Président, on venait de franchir un pas de géant dans la question de la production privée d'électricité au Québec. C'était là un message, un premier message clair sur l'importance, pour le gouvernement libéral de l'époque, de reconnaître l'apport de la production privée d'électricité au Québec.

Et vous me permettrez, M. le Président, de vous rappeler cet après-midi les propos de l'opposition péquiste de l'époque qui dénonçait avec ardeur et conviction ce projet de loi, allant même jusqu'à accuser les libéraux, à l'époque, de vouloir dénationaliser et privatiser de façon indirecte Hydro-Québec.

Une voix: Ah non! Ils ont fait ça?

Mme Normandeau: M. le Président, j'ajouterais même qu'il est pathétique de relire les transcriptions de l'adoption du principe du projet de loi 71, à l'époque présenté par le gouvernement libéral. Le député de Laviolette et actuel ministre des Régions parlait lui aussi du caractère apparemment anodin d'un projet de loi qui contenait, à ce moment-là, cinq articles. Il annonçait dès le départ la position de son parti, du Parti québécois, et vous me permettrez de le citer, M. le Président. Le député de Laviolette, à l'époque, a affirmé: «Nous n'avons pas l'intention de voter pour ce projet de loi, puisqu'il cache des choses.» Un peu plus loin, il poursuivait en ces termes: «Quel est ce cheval de Troie qu'il installe – en parlant, bien sûr, du gouvernement libéral de l'époque – à l'intérieur d'Hydro-Québec?»

M. le Président, la chasse aux fantômes était ouverte. Et on relit enfin une prédiction du député de Laviolette, une prédiction qui s'est avérée juste quoique plutôt un tantinet démagogue. Et, vous me permettrez encore de le citer, le député de Laviolette nous disait: «Je dois dire que l'opposition – on parle, bien sûr, de l'opposition péquiste – fera tout le travail qu'elle a à faire pour empêcher l'adoption d'un tel projet de loi qui, au bout de la course, aura pour effet d'amener cette petite graine à devenir très grosse dans l'avenir et faire en sorte que, finalement, une fois le premier pas fait, les autres suivent. Nous n'acceptons pas ça, nous allons nous battre pour l'empêcher.»

Alors, vous admettrez avec moi, M. le Président, que le député de Laviolette a eu en partie raison en parlant des pas qui allaient suivre, sauf que cette fois-ci c'est son propre gouvernement qui, aujourd'hui, fait les pas suivants. Là s'arrête toutefois les dons de voyance du député de Laviolette, car l'opposition officielle, aujourd'hui, n'a pas l'intention de s'opposer au projet de loi n° 15, car il cadre très, très bien avec la philosophie libérale. Comme le projet de loi 71, qui fut tant décrié par les péquistes, le projet de loi n° 15, lui, nous apparaît avantageux pour Hydro-Québec, pour les consommateurs et pour l'entreprise privée qui créera de nouveaux emplois dans l'ensemble des régions du Québec.

Pendant des années, M. le Président, les péquistes ont nié ces avantages. Aveuglés qu'ils étaient par la chasse aux sorcières, ils ont même institué une commission d'enquête, la fameuse commission Doyon. On s'en rappellera tous. Malgré toutes les ressources qui ont été mises à sa disposition, le dépôt du rapport Doyon, en mars 1997, avait démontré hors de tout doute raisonnable qu'aucune des allégations d'irrégularités qui avaient été à son origine ne s'avérait fondée.

Alors, ce que nous pouvons conclure aujourd'hui, M. le Président... Ou je devrais dire: Comment devons-nous interpréter ce virage à 180 degrés des élus, aujourd'hui, du Parti québécois dans le dossier des petites centrales hydroélectriques privées? A-t-on assisté, depuis 1988, à la dénationalisation d'Hydro-Québec? Bien sûr que non. Ce dont nous nous réjouissons aujourd'hui, M. le Président, c'est que les députés du Parti québécois semblent enfin avoir compris. Bien sûr, ils ne l'admettront pas, mais la présentation du projet de loi n° 15 et les modifications prévues à la Loi sur le régime des eaux viennent confirmer que ce gouvernement a erré pendant des années dans le domaine de l'allocation des forces hydrauliques du Québec aux petits producteurs privés d'électricité. Force leur est d'admettre aujourd'hui – et cela, j'en conviens, ne doit pas être très, très facile pour eux – que le ministre des Ressources libéral, en 1988, avait raison alors que les libéraux avaient vu juste en favorisant l'émergence de petites centrales privées.

Le projet de loi n° 15 qui est déposé aujourd'hui est un véritable mea culpa pour les péquistes. Cependant, il arrive à un bien drôle de moment. Nous nous sommes posé plusieurs questions, à savoir: Pourquoi le gouvernement du Parti québécois dépose dès maintenant ce projet de loi, alors qu'au moins deux instances se penchent actuellement sur des sujets qui touchent de près la question de la production privée d'électricité et celle de la gestion de l'eau au Québec?

(16 h 20)

Ainsi donc, le ministre y a fait référence tout à l'heure, en juin prochain, suite à la demande de M. Guy Chevrette alors qu'il était ministre des Ressources naturelles, la Régie de l'énergie tiendra des audiences publiques sur les modalités de mise en oeuvre de la contribution de la filière de la petite hydraulique d'électricité au plan des ressources d'Hydro-Québec. À la suite de ces audiences, la Régie déposera au gouvernement un avis sur le sujet. Le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, le BAPE, tient lui aussi depuis le début de 1999 des consultations sur toute la question de la gestion publique de l'eau. Et, même si son plan stratégique de développement prévoit l'acquisition de 300 MW d'électricité en provenance de producteurs privés sur une période de 10 ans, on n'a toujours pas en main, M. le Président, le fameux plan de ressources d'Hydro-Québec.

Donc, aujourd'hui, du côté de l'opposition officielle, nous sommes en droit de nous interroger, et nous questionnerons, bien sûr, sur la façon de faire du gouvernement dans ce dossier. Quel est le message, aujourd'hui, que le gouvernement envoie à la Régie de l'énergie en adoptant ce projet de loi? La Régie doit-elle craindre de nouvelles directives qui viendraient encore limiter son pouvoir d'intervention et diminuer d'autant le mandat qui lui a été confié par ce gouvernement? Quel est le message que doit comprendre Hydro-Québec de ce changement de cap du gouvernement péquiste? Nous avons certes des raisons de nous inquiéter, M. le Président, non pas tant du projet de loi n° 15 mais de la façon dont ce gouvernement gère l'ensemble du dossier de l'énergie au Québec.

Ce gouvernement, M. le Président, est marqué par l'immobilisme de son ministre des Ressources naturelles. Un ministre qui n'a toujours pas commenté le rapport Nicolet sur la crise du verglas et sur les suites à donner à ce rapport. Un ministre qui retarde indûment l'entrée en vigueur des articles de la Loi sur la Régie de l'énergie, limitant au minimum son mandat et l'empêchant de jouer pleinement son rôle. Et, sur cette question, le ministre conviendra avec moi qu'il y a une lenteur qui est déplorable des deux côtés de cette Chambre. Alors, un ministre également, M. le Président, qui n'a pas encore donné suite à l'avis de la Régie de l'énergie concernant les modalités d'établissement et d'implantation des tarifs d'électricité, qu'il a encore en sa possession, sur son bureau, depuis presque un an. Un ministre qui tarde encore, M. le Président, à donner suite à l'avis de la même Régie, qui date de septembre 1998, cette fois-ci sur la place de l'énergie éolienne dans la politique énergétique du Québec.

Alors, M. le Président, nous pensons qu'il est tout aussi urgent pour le gouvernement de mettre de l'ordre dans sa gestion de l'énergie, et que le ministre responsable prenne enfin des décisions dans ses dossiers, et qu'il consacre un peu moins de temps et d'énergie à la question du référendum. C'est, selon nous, M. le Président, la plus élémentaire preuve de bon sens et de responsabilité.

M. le Président, même si nous appuyons le projet de loi n° 15, nous nous interrogeons cependant sur l'utilisation qu'entend en faire le gouvernement du Parti québécois. On comprend que le projet de loi n° 15 va faciliter le travail des producteurs d'électricité privés en simplifiant tout le processus de location des forces hydrauliques publiques. Cependant, en donnant ici plus de latitude au gouvernement qui pourra, par simple décret, autoriser les projets de moins de 50 MW, il faudra s'assurer, M. le Président, que toutes les règles sont respectées dans l'approbation des projets via le processus des décrets. Quand on connaît les expériences désastreuses qui ont suivi les derniers décrets du gouvernement péquiste dans le domaine de l'énergie – on n'a qu'à penser, bien sûr, au dossier Hertel–des Cantons – cela justifie l'opposition libérale d'affirmer aujourd'hui qu'elle fera preuve d'une très grande vigilance pour que les lois et règlements des instances concernées soient respectés.

Donc, M. le Président, comme je l'ai mentionné plus tôt, nous appuyons le projet de loi n° 15 et nous apprécions le message clair que son adoption prochaine donne aux entreprises privées de cet important secteur de notre économie. Nous espérons que l'adoption du principe de ce projet de loi sonnera la fin de la position plutôt ambiguë du gouvernement et qu'elle permettra l'émergence de nouveaux projets qui seront créateurs d'emplois pour l'ensemble des régions du Québec.

Alors, en terminant, M. le Président, j'ajouterais que nous serons intéressés aux précisions que voudra bien nous apporter le ministre responsable de ce dossier, le ministre des Ressources naturelles, lors de l'étude du projet de loi en question devant la commission de l'économie et du travail. Alors, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. M. le député de Gaspé, oui? Vous voulez intervenir?

M. Lelièvre: S'il vous plaît, oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Gaspé, je vous cède la parole.


M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Alors, merci, M. le Président. J'écoutais attentivement ma collègue de Bonaventure nous parler du passé, nous parler de 1988, nous parler de la période au cours de laquelle ils ont exercé le pouvoir au Québec, période au cours de laquelle aussi, hein, ils ont fait des appels d'offres pour la construction de minicentrales, période au cours de laquelle des contrats ont été octroyés, attribués, mais en l'absence de politiques, en l'absence de vision, en l'absence de stratégies, en l'absence d'orientations. En 1992, on m'a signalé, dans le comté de Gaspé, qu'il y avait eu un appel d'offres aussi, mais le résultat, selon mes commettants, a été qu'on a attribué le contrat avant même la fin de l'appel d'offres, avec documents à l'appui qu'on m'a présentés. Alors, qu'on nous dise que le Parti québécois, lors de cette période, s'élevait contre certaines mesures, bien, on peut constater que l'histoire lui donnait raison.

M. le Président, les petites centrales occupent une place importante pour les régions, et, dans la politique, on y réfère, et on y réfère dans le but de s'en servir comme d'un levier de développement économique. Ça s'inscrit dans la politique qui a été déposée à la suite d'une vaste consultation au Québec. Nous, avant d'élaborer cette politique, en 1995, on a lancé un vaste débat, un débat sur l'énergie, et toutes les parties, toutes les personnes, toutes les entreprises, tous les organismes concernés ont pu venir s'exprimer, dire ce qu'ils en pensaient. Le ministre, à la suite de ça, à la suite de la vaste table de consultation et des résultats qui s'ensuivirent, a débouché sur une politique, une politique que tout le monde connaît, que même la députée de Bonaventure connaît et qu'il serait peut-être pertinent qu'elle lise pour voir quels sont les choix qui ont été faits dans cette politique.

Donc, le projet de loi qui est déposé, il vise à augmenter de 25 MW à 50 MW la production des minicentrales, mais en se basant sur les forces hydrauliques et non pas sur la capacité de produire de la centrale. Alors, dans cette politique, M. le Président, on a fait des choix. On a fait le choix des filières, hein, et, dans une région comme la nôtre, comme la sienne, comme celle qu'elle connaît très bien, qui est la Gaspésie, il y a un certain potentiel énergétique également à développer. Il y a déjà, dans le passé, des études qui ont été faites, il y a déjà eu des barrages. Il s'agit de voir maintenant comment, dans ce processus démocratique qui sera mis en place, les régions pourront tirer leur épingle du jeu.

On n'a pas signé de contrats secrets non plus avec les grandes entreprises. Dans le cadre de la politique, on aura les données, c'est très clair. On élargit également la possibilité pour les producteurs privés de participer à l'exploitation des différentes filières, donc un accroissement du secteur privé.

Je regardais également le rappel qu'on nous faisait sur la place qu'occupe l'hydroélectricité au Québec. Qu'est-ce que ça nous a donné comme Québécois? Ça nous a donné de développer une expertise qui est reconnue mondialement, une expertise qui nous permet de nous classer parmi les meilleurs dans le monde. On a formé des ingénieurs et des firmes d'ingénieurs de réputation internationale qui sont reconnus partout. Et il faut considérer également que le Québec, hein, c'est le troisième producteur mondial d'hydroélectricité, le troisième producteur mondial dans l'aluminium à cause qu'il utilise l'électricité pour faire cette production. L'électricité a apporté des avantages économiques considérables, et les récents projets de développement dans l'aluminium qui ont été annoncés ne sont pas étrangers à la place que nous occupons.

(16 h 30)

Je suis très heureux d'entendre ma collègue, qui participe à la même commission, la commission de l'économie et du travail, nous dire qu'elle va s'intéresser en profondeur à toutes ces questions et je dois lui dire, M. le Président, que je vais travailler assidûment à cette commission pour enrichir les travaux avec son concours, et nous allons pouvoir, j'espère, assurer les Québécois que l'utilisation des ressources hydroélectriques se fera bien, dans l'esprit d'un développement durable, et également assurer aux générations futures, la relève qui s'en vient, un potentiel et une capacité de travailler et de se développer aussi, à tous les niveaux, que ce soit domestique, donc au Québec, ou à l'étranger, sur les marchés internationaux. Alors, je termine là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Gaspé. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux, et je cède la parole à M. le député d'Orford et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement. M. le député, la parole est à vous.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. C'est un sujet qui m'a toujours intéressé, la production privée, pour toutes sortes de raisons. Mais comment en est rendu le PQ à prendre les idées du Parti libéral et à les mettre en application? Il faut voir la petite histoire de chez nous. Comment ils sont rendus là? La vraie raison, c'est qu'ils ont été poussés dans le dos par les gens d'affaires. Ils ont nommé, un bon jour, Bernard Lemaire sur une commission de la déréglementation, le président de Cascades, homme qui a des convictions, qui croit à la libre entreprise, qui est propriétaire, avec des actionnaires, listée à la Bourse de Montréal, d'une compagnie qui s'appelle Cascades, laquelle compagnie, croyez-le ou non, peut prendre son expansion en ce moment à Cuba, pays socialiste, prend son expansion, bien sûr, aux États-Unis et dans à peu près toutes les provinces canadiennes, mais ne pouvait pas croître au Québec. Compagnie propriété de Québécois qui ne pouvait pas croître au Québec parce que son marché était fermé: elle avait un certain nombre de centrales et elle ne pouvait pas bâtir d'autres centrales. Alors, au moment du dépôt du document sur la déréglementation, ce M. Lemaire, avec sa barbe blanche, que nous connaissons tous au Québec, a été virulent à l'égard de ce gouvernement. Il leur a dit comment ridicule c'était, une compagnie propriété de Québécois qui ne pouvait pas, ou très peu, oeuvrer au Québec, devait soumissionner dans tout ce qu'il y a de provinces canadiennes, aux États-Unis et à Cuba, pour ne nommer que ceux-là. Une compagnie qui, en passant, est en pleine croissance, M. le Président.

Et ça me rappelait, en écoutant le dépôt du rapport sur la déréglementation par M. Lemaire, ce soir-là, comment le distingué député de Joliette, il y a quelques années, avait fait... Parce que la députée de Bonaventure, tantôt, qui, entre parenthèses, est nouvelle ici, elle est extraordinaire. Elle représente ce comté-là, je le dis, avec tellement de fougue, d'enthousiasme, elle fait un travail acharné pour les citoyens de Bonaventure, comme Gérard D., d'ailleurs. Elle a suivi les traces de Gérard D., et les gens de Bonaventure vont être récompensés d'avoir élu une députée de cette trempe-là dans Bonaventure. Et je pense qu'on va reconnaître, avec le temps, la qualité de l'ouvrage de la députée de Bonaventure.

Or, elle a mentionné, cette bonne députée de Bonaventure, tantôt, l'enquête Doyon. Moi, là, quand on me parle de l'enquête Doyon, c'est comme un rêve. Un ministre qui se lève ici, en cette Chambre, le distingué député de Joliette, et qui, lui, décide de l'enquête et des conclusions de l'enquête, du juge de l'enquête, il décide de tout: de la date de l'enquête, du montant qu'ils vont dépenser pour l'enquête, qu'est-ce qu'ils vont étudier dans l'enquête, et même la conclusion de l'enquête. Il nous disait ici ça va être quoi, la conclusion. Moi, j'ai vécu ça, hein. Si ce n'est que M. Doyon était plus sage que le distingué député de Joliette. Oui, il l'a faite dans les délais, oui, il l'a faite dans les budgets, mais le M. Doyon en question, lui, a décidé des conclusions. Ça n'a pas été pantoute les conclusions que le député de Joliette nous avait dit que ça serait.

Savez-vous la pire affaire qu'ils ont reprochée au gouvernement qui avait été là avant? Ça, c'était le gouvernement qui avait créé les 100 000 emplois, c'est le gouvernement qui avait créé la Baie James, c'était le gouvernement de Robert Bourassa, à l'époque où les Québécois travaillaient, à l'époque où les Québécois étaient moins taxés qu'en Ontario, à l'époque où on était fier d'être dans le monde économique du Québec, pas à l'époque, comme en ce moment, où on est les plus taxés, les plus endettés, les moins productifs. Non, M. le Président, c'était un Québec dynamique où les hommes d'affaires avaient leur place.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qu'a dit le rapport Doyon? D'abord, il a dit: Il n'y en a pas eu, de magouilles. C'est ça, la première affaire qu'il a dite. Ensuite, il a dit: Effectivement, la vraie magouille, là, c'est le ministre qui a essayé de la créer en faisant cette enquête-là. C'est à peu près ça qu'il a dit. Et troisièmement, M. le Président, ce qu'il a dit: Il y avait eu un cas. C'est le pire cas qu'ils avaient trouvé dans tout le rapport. Il avait démontré qu'un promoteur de centrale privée – imaginez-vous, un homme d'affaires du Québec, dynamique, qui voulait investir au Québec – avait pris un rendez-vous avec un conseiller du premier ministre, qu'il avait été reçu par ce conseiller du premier ministre, et puis... C'est ça. Ça, ça avait été la pire erreur qu'on avait commise.

M. le Président, vous irez vous installer au «bunker» aujourd'hui pour voir le nombre de gens qui rentrent pour aller voir un premier ministre dans une journée. De tout acabit. En tout cas, moi, à mon bureau, si je me fie juste à mon petit bureau de comté de Magog, la quantité de monde qui vient me parler dans une journée, il y en a un bon nombre. Puis c'est bien sûr que, si on faisait une enquête sur tous ceux qui sont venus dans mon bureau depuis 10 ans, il y en a peut-être bien un qui a retourné croche ou qui a fait quelque chose de croche. Ça, ça a été le pire exemple qu'on a pu trouver dans tout le rapport Doyon: un gars qui avait pris un rendez-vous avec un conseiller du premier ministre, M. le Président. De là on a fait une enquête qui a coûté une fortune. On n'a rien prouvé. Ce qu'on a prouvé, c'est que les gens du Québec étaient dynamiques, ils voulaient investir dans le Québec, on avait des forces naturelles puis il fallait les exploiter.

Or, M. le Président, je veux rappeler à ce ministre que, oui, il y a une grande consultation sur l'eau en ce moment. Et la bonne députée de Bonaventure nous disait il y a quelques instants qu'elle était surprise du temps auquel vous déposiez ce projet de loi. Moi, comme porte-parole de l'environnement, je vous dirais que, moi aussi, je suis un peu surpris du temps. Pas plus tard que jeudi dernier, le ministre de l'Environnement, auquel je demandais: À quel moment allez-vous mettre en application le rapport Boucher sur les embarcations sur les plans d'eau du Québec? Parce qu'il y avait des recommandations très environnementales dans le rapport Boucher. Ah!, il m'a dit, non, non, non. On ne peut pas toucher à ça avant une grosse année. Il y a une grosse consultation sur l'eau.

Alors, la députée de Bonaventure a bien illustré tantôt par ses propos la double mesure. D'un côté on a le ministre de l'Environnement qui nous dit non, on ne veut pas toucher au rapport Boucher tout de suite, pas avant un an parce qu'on a une grande consultation sur l'eau, et de l'autre côté on est après nous passer un projet de loi, pour lequel on est en faveur. On le dit, nous, on ne se cache pas. C'est nous, d'ailleurs, qui l'avons proposé, ce projet de loi là. Mais on pense qu'au moment où des centaines et des centaines de citoyens iront dans les sous-sol d'église dire au BAPE ce qu'ils pensent de toute la régie de l'eau au Québec, on pense qu'on aurait peut-être pu attendre quelques semaines encore.

Mais enfin, c'est le choix que le gouvernement a fait. Et je rappellerai au gouvernement... parce que, dans cette consultation sur l'eau, on va parler beaucoup des petites centrales. C'est déjà commencé, d'ailleurs. Il sera important, M. le ministre, que, quand les petites centrales au Québec... Et les gens ont déjà démontré leur enthousiasme à participer, à aider. Il est important que les gens soient associés, dans leur milieu, à la construction de ces centrales-là.

Je veux finir avec un autre point de vue sur lequel je n'ai point entendu dans ce débat des petites centrales et que nous avons pu vivre au moment de la crise du verglas. Une des conséquences de la crise du verglas, ce que nous rappelle le rapport Nicolet, c'est le transport sur les grandes distances, et nous sommes vulnérables, au Québec, à cet égard-là. La petite centrale, elle a l'avantage, dans la mesure où elle est connectée sur le réseau local, d'éviter qu'en période de crise nous soyons à la merci des transporteurs éloignés. Je donne des exemples précis.

La ville de Coaticook qui a un barrage et des réservoirs dans sa municipalité, lesquels barrages sont la propriété de la ville de Coaticook, et elle distribue aussi l'électricité dans sa ville. Advenant une crise de l'électricité, instantanément la ville de Coaticook est capable de connecter entre autres la polyvalente qui est à quelques pas de là, et tout est en place. La ville de Magog a le même avantage avec ce qu'on appelle à Magog «la grande dam». La ville de Sherbrooke a le même avantage, avec ses petites centrales, de pouvoir produire et distribuer.

(16 h 40)

Alors, j'invite le ministre dans ce projet de loi – et, nous, on va y participer avec beaucoup de positivisme – à regarder que ces petites centrales ne soient pas connectées seulement sur le grand réseau québécois mais qu'elles puissent, en cas d'urgence, aussi servir localement dans les périodes de pointe, dans les périodes d'urgence, à aider ces régions-là et à éviter que tout le Québec soit au noir alors que, dans leur cour, souvent, les gens avaient des centrales. Mais, malheureusement... Combien de villes... J'ai visité tout le Québec, moi, depuis 15 ans, là, comme député, comme bénévole dans une formation politique. Il y a beaucoup de villes où il y a des barrages, il y a beaucoup de villes où on pourrait remettre des barrages en exploitation. Saint-Hyacinthe est le bel exemple où il y avait un barrage pour la vieille compagnie Penmans, la compagnie des sous-vêtements Penmans, qui avait été abandonné pendant des années, et soudainement on a remis en fonction cette centrale-là. On me dit qu'elle n'est pas connectée sur le réseau local de Saint-Hyacinthe, qu'elle est sur le grand circuit. Donc, pendant la crise du verglas, on ne pouvait pas reconnecter Saint-Hyacinthe sur le réseau de Saint-Hyacinthe. Alors, je pense que j'invite le ministre, moi, au fur et à mesure qu'on autorisera ces centrales-là, à s'assurer qu'on puisse s'en servir localement au moment des périodes de crise.

Alors, encore une fois, comme la députée de Bonaventure, nous sommes positifs au projet de loi. Nous aurons bon nombre de questions, particulièrement en environnement, et nous aiderons le ministre à cheminer avec son projet de loi. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford. J'ai une information pour les membres de cette Assemblée. Je vous avise que la commission de la culture, qui devait se réunir en séance de travail demain, le mercredi 5 mai 1999, de 9 h 30 à midi, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement, a été annulée.

Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux, et je cède la parole à M. le député de Châteauguay et whip en chef de l'opposition officielle. M. le député, la parole est à vous.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 15. Je crois que c'est toujours utile d'intervenir sur des projets de loi lorsque l'opposition appuie le gouvernement. Les gens qui regardent nos débats ont parfois tendance à penser que l'institution qu'est l'Assemblée nationale ne représente rien d'autre qu'un match de lutte où il y a toujours un combat, et je pense que c'est utile de souligner qu'il y a parfois des projets de loi qui reçoivent l'appui des députés des deux côtés de la Chambre.

Ça m'amène à quelques considérations que je voudrais faire à l'égard du projet de loi n° 15 et qui ne sont pas inutiles, justement dans ce concept de débat que nous faisons à l'Assemblée nationale. D'abord, je voudrais reprendre là où mon collègue d'Orford a laissé, sur le verglas et sur la capacité et la possibilité qu'ont ces minicentrales de participer à secourir des gens dans le besoin en cas de sinistre comme celui du verglas, et je pense que c'est une considération excessivement importante. Je ne sache pas qu'elle ait été étudiée abondamment lors des études qui ont suivi le verglas, mais je pense que ce sont des considérations à garder en mémoire et que le ministre responsable devrait tout au moins regarder attentivement, probablement en discuter un peu aussi avec le ministre de la Sécurité publique, pour faire en sorte que les plans de sécurité justement soient aménagés en tenant compte des équipements qui peuvent être mis de l'avant grâce à une politique comme celle que le Parti libéral avait mise sur pied en 1988 et que le gouvernement du Parti québécois maintenant appuie.

Avant de parler de la conversion tardive, mais conversion quand même, du Parti québécois à cette idée de minicentrales, je me permets de vous dire que j'ai été un peu étonné quand j'ai entendu parler de ce projet de loi, dû au fait qu'il intervient comme s'il ne se passait rien d'autre. Assez étonnamment, il y a un an, il y a le ministre des Ressources naturelles qui avait demandé un avis à la Régie de l'énergie quant à la pertinence de relancer la production privée. Les audiences sur justement la production hydraulique doivent se tenir en juin prochain, alors on peut se demander: Comment se fait-il qu'un projet de loi comme celui-ci, comme le projet de loi n° 15, est déposé alors qu'un avis concernant des questions similaires n'est pas rendu, doit être rendu très bientôt? Pourquoi est-ce qu'on anticipe avant même la conclusion de cette enquête-là?

Par ailleurs, il y a la consultation sur l'eau que le BAPE mène. On sait bien, si on parle de pouvoir hydroélectrique, qu'on fait référence à l'eau. Forcément, on devrait au moins attendre quelles seront les conclusions de cette consultation, les orientations qui seront privilégiées. Il y a donc une considération, là, qu'il faut regarder sur les intentions de ce projet de loi qui ne devance parfois que de quelques semaines des enquêtes, des avis. Alors, il sera utile de connaître l'avis du ministre, pourquoi il a choisi d'agir dans ce sens-là.

Parlant du ministre actuel qui s'occupe de ce dossier, M. le Président, je n'ai pas pu faire autrement que de constater l'analogie, ne serait-ce qu'en termes de numérotation. La dernière fois qu'on a assisté à une conversion du même ministre, il y avait le projet de loi n° 15 aussi. C'était un projet de loi sur l'Accord sur le commerce interprovincial, et, M. le Président, lorsque le ministre a déposé le projet de loi 15, à l'époque il était ministre responsable des Relations intergouvernementales canadiennes, il venait nous déposer un projet de loi qui consacrait... Il allait même jusqu'à dire qu'il fallait une loi pour donner toute une valeur symbolique à l'accord sur le commerce interprovincial.

Vous vous souviendrez qu'à l'été 1994, lorsque Daniel Johnson, alors premier ministre et chef du Parti libéral du Québec, avait signé cet accord, le Parti québécois avait fait une campagne dénonçant cet accord, disant que c'était épouvantable de faire un accord comme celui-là. Or, rendu au pouvoir, le ministre, le même ministre, aujourd'hui, dépose un projet de loi n° 15 qui vise à consacrer et à chanter les louanges de cette entente. Et j'étais heureux, à l'époque, de constater que parfois, à force de plaider, à force de démontrer les résultats que l'on obtient, on pouvait convaincre.

Et j'interviens aujourd'hui, M. le Président, parce que souvent en commission parlementaire ou ici, en Chambre, nous nous levons, et souvent on se dit: Mais est-ce qu'on est entendu? Et le projet de loi qui consacrait l'accord sur le commerce interprovincial est pour moi une preuve que nous faisons oeuvre pédagogique auprès des banquettes du pouvoir lorsque nous plaidons, nous présentons nos causes. On perd peut-être trop souvent à notre goût, mais il reste que parfois, on le voit bien, ils sont capables de voir la réalité, de voir les résultats et de se dire: Bon, bien, oui, les libéraux disaient ça, on était contre, il faut être pour.

C'est arrivé, donc, avec ce projet de loi là et ça arrive encore aujourd'hui. Ça arrive encore aujourd'hui, le projet de loi n° 15 qui nous est déposé aujourd'hui... Souvenez-vous de ce qui s'est dit – et ma collègue de Bonaventure en a fait écho tantôt – lorsque le gouvernement libéral de l'époque a dit: On va permettre des minicentrales. Aujourd'hui, le ministre dit: C'est formidable, on a développé une expertise qu'on peut exporter. Mais où était-il à l'époque? Il était parmi ceux qui criaient à la privatisation d'Hydro-Québec, M. le Président. Où était-il? Il était parmi ceux qui dénonçaient le gouvernement pour des mesures qui n'étaient pas appropriées. Aujourd'hui, les mesures qui n'étaient pas appropriées, les mesures libérales, sont celles qui ont permis au Québec de développer une expertise exportable, un savoir-faire qui nous rend fiers.

Je tiens à intervenir aujourd'hui, M. le Président, pour rappeler à tous ceux qui ont critiqué, qui ont attaqué la politique du gouvernement libéral, la politique de John Ciaccia notamment, et que je tiens à saluer aujourd'hui... Aujourd'hui, ces gens-là se rendent compte que la politique économique, parce qu'il y en avait une... On se demande encore aujourd'hui... Ça fait cinq ans, maintenant, que je me demande quand est-ce que le gouvernement du Parti québécois va avoir une politique économique. Du temps du Parti libéral, il y avait une politique économique. Il y avait une politique économique qui portait des fruits. C'est tellement vrai qu'aujourd'hui on nous dépose le projet de loi n° 15 qui vient dire au Québec tout entier: Voyez les réussites que nous ont données les gouvernements libéraux qui nous ont précédés. C'est ça qu'on fait aujourd'hui. Et, si j'interviens en Chambre aujourd'hui, c'est pour vous dire cela, pour vous dire que la politique économique que le gouvernement libéral avait mise de l'avant a porté des fruits, qu'elle permet aujourd'hui au ministre de dire: Il y avait des bons résultats, maintenant le Québec a un savoir-faire qui est exportable. Et je suis heureux d'entendre le ministre dire ça, je l'invite à le répéter, je l'invite à saluer la politique économique qu'avait mise de l'avant le gouvernement libéral après qu'elle a été contestée par le Parti québécois.

Des exemples, M. le Président, il y en a de nombreux exemples où, une fois rendu au pouvoir, éclairé, le Parti québécois constate que les résultats sont là. Et j'espère qu'ils vont savoir faire comprendre aux Québécois maintenant qu'avec une politique économique, avec une vision, on peut être fier. Je les invite même, au risque que ce soit plus difficile pour les libéraux, mais plus heureux pour les Québécois, à se doter d'une politique économique pour tous les Québécois. Qu'elle soit inspirée des libéraux, peu importe, c'est les Québécois qui, en bout de ligne, vont y gagner. Et je pense que, maintenant qu'on a un ministre qui a chanté les louanges de l'accord sur le commerce interprovincial après l'avoir dénoncé, maintenant qu'il chante les louanges de la politique économique libérale en matière d'électricité après l'avoir dénoncée, on est donc peut-être en voie d'assister à ce que d'aucuns appellent un virage, mais certainement une nouvelle conversion que je tiens à saluer.

(16 h 50)

Et je termine en rappelant que j'étais nouveau député, c'était dans la première année, je pense bien, de 1994-1995, et j'ai constaté comment le ministre de l'époque – pas celui qui est devant nous – avait lancé la commission Doyon et les accusations qui avaient été lancées. Je peux vous dire que je n'ai jamais trouvé la façon dont le ministre avait abordé ce dossier très élégante, et une fois que la preuve a été faite, et une fois que la commission nous a dit que tout ça n'était que du feu d'artifice – qu'on a d'ailleurs déjà pensé être très lié à une campagne préréférendaire – ça ne m'a pas donné un bon goût pour la démocratie, M. le Président.

Alors, tant qu'à saluer la conversion de ce gouvernement aux politiques libérales, j'aimerais bien aussi que ce gouvernement apprenne de ses erreurs du passé, des erreurs qui ont été commises par la commission Doyon à l'égard de personnes qui ont travaillé à mettre sur pied cette politique économique dont, aujourd'hui, on chante les louanges. Alors, je pense que le passé devrait servir de leçon à ceux qui, aujourd'hui, ont des responsabilités, pour faire en sorte qu'on soit capable de regarder les résultats, de voir ce qui a été bien fait et éviter de toujours se lancer dans des accusations où, finalement, on cherche à salir des réputations pour faire un petit gain politique. Les gens que l'on représente, partout au Québec, partout sur le territoire du Québec, les Québécois et les Québécoises dont nous avons tous le mandat, peu importe l'étiquette sous laquelle nous nous sommes fait élire, les gens que nous avons le mandat, le devoir de représenter, ils nous demandent, nous, de faire oeuvre utile, que le Québec soit une place où il fait bon vivre, où on cherche toujours une meilleure prospérité et qu'on ne se perde pas dans des combats futiles, des débats où on retrouve des attaques personnelles. Et il me semblait utile, à l'égard de ce projet de loi là, de pouvoir dire au gouvernement que parfois l'opposition appuie le gouvernement, que souvent l'opposition inspire le gouvernement, mais que toujours, toujours, M. le Président, le gouvernement devrait s'assurer que, dans la façon dont il gère les choses et qu'il traite les personnalités comme des commissions Doyon, qu'il s'assure toujours de ne pas sombrer dans ce genre d'enquête qui ne fait finalement que salir la réputation de ceux qui les lancent parce qu'ils ont eux-mêmes sali la réputation d'autres. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, en vertu de votre droit de réplique, M. le ministre des Ressources naturelles, la parole est à vous.


M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: M. le Président, j'invite le député de Châteauguay à apporter son soutien à la politique économique du gouvernement du Parti québécois parce que, peut-être l'a-t-il oublié, mais il y en a une, qui a été déposée, d'ailleurs, en cette Chambre, au moment où le ministre de l'Économie et des Finances a lu son discours sur le budget, alors une politique tout à fait articulée, cohérente et efficiente. Et puis, aussi, j'invite le député de Châteauguay de même que sa collègue, la députée de Bonaventure, à apporter leur appui et leur soutien à la politique énergétique du Québec.

Mes collègues de l'opposition s'interrogeaient tout à l'heure dans leur intervention, les trois qui sont intervenus: Comment le gouvernement en est-il arrivé à déposer ce projet de loi? Quel est le cheminement qu'il a suivi pour en arriver à déposer ce projet de loi? Il est très simple, le cheminement. C'est que je rappelle à cette Chambre, M. le Président, qu'il y a eu au Québec, il y a quelques années, en 1995-1996, un large débat public sur l'énergie. C'était à la suite d'un engagement électoral pris par le Parti québécois au moment de la campagne électorale de 1994. On s'était engagé à faire ce débat sur l'énergie. Une multitude de groupes et d'intervenants le réclamaient à cor et à cri. C'est ce qu'on a fait. Très large débat, plus de 300 mémoires, M. le Président, qui ont été déposés devant la commission qui a été créée pour tenir ce débat, 250 personnes ont été entendues. La commission a visité presque toutes les régions du Québec, et puis elle a délibéré et elle a déposé un rapport sur ce débat, et c'est sur la base de ce rapport, suite au débat sur l'énergie, que le gouvernement a adopté une politique énergétique, et nous l'appliquons, cette politique énergétique. Nous l'appliquons parce que nous avons créé l'Agence de l'efficacité énergétique, qui est maintenant en opération, qui entreprend sa deuxième année, nous avons créé la Régie de l'énergie. Ça se retrouve dans la politique. Ça a été réclamé par tous les intervenants parce qu'il faut dire que ce qu'on retrouve dans la politique, c'est le fruit de consensus. Tous les intervenants ont réclamé ce qu'on retrouve dans la politique.

Dans la politique, il y avait également, concernant la petite hydraulique, la volonté de faire en sorte qu'on relance la petite hydraulique au Québec, la production d'électricité privée, et qu'on puisse également rendre accessibles à cette production privée les sites du domaine public de 50 MW et moins. Donc, passer de 25 MW à 50 MW, c'est l'objet de la loi. On donne suite à un des éléments et à un des consensus de la politique énergétique du Québec.

On pourra envisager, comme gouvernement, ensuite d'aller de l'avant avec une autre étape en matière de production privée d'électricité, un appel de propositions, offrir un certain nombre de sites du domaine public pour produire de l'électricité. On pourra passer bientôt à cette étape-là lorsque, comme je l'ai mentionné et comme l'a reconnu la députée de Bonaventure, la Régie de l'énergie aura déposé son avis sur cette question. Ça a été fait. Mon collègue député de Joliette, qui était ministre des Ressources naturelles alors, a fait une demande d'avis à la Régie sur toute cette question de la petite hydraulique. C'est en cours. Les audiences sont prévues pour juin. On devrait recevoir, quelques semaines ou mois après, un avis, et c'est sur la base de cet avis que le gouvernement pourra envisager de relancer la production privée d'électricité au Québec.

Évidemment, il faudra aussi, j'en suis bien conscient, que le gouvernement prenne une décision relativement à toute la question du tarif de fourniture ou du tarif de production. Nous avons entre les mains un avis de la Régie à cet égard depuis un certain nombre de mois. Son examen et l'analyse de cet avis sont pratiquement complétés. Je devrais être en mesure, d'ici quelques semaines, de me présenter au Conseil des ministres avec un certain nombre de propositions relativement à cette question du tarif de fourniture ou du tarif de production d'Hydro-Québec, parce que ça a une importance évidemment dans le cadre de la relance de la production privée d'électricité. La question du tarif de fourniture, la question du tarif de production doit être résolue, ou réglée, si on veut relancer la production privée d'électricité.

Alors, voilà, M. le Président, tout simplement. Il y a une politique énergétique au Québec complète, articulée, cohérente, qui couvre toutes les dimensions de l'énergie, de la question de l'énergie, du sujet de l'énergie, qui est un sujet très complexe, à multiples dimensions. On couvre tout et on la met en oeuvre. On la met en oeuvre par un certain nombre de décisions qui ont été prises antérieurement, on la met en oeuvre par le dépôt du projet de loi n° 15 qui, comme je viens de le constater, sera adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, ce qui est très bien. Mais aussi il y aura ultérieurement d'autres décisions qui seront prises par le gouvernement, qui visent à mettre en oeuvre cette politique énergétique du Québec, fruit non seulement d'un large débat public, mais aussi surtout fruit de multiples consensus qui sont apparus, qui se sont dégagés à la suite de ce débat public. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Le principe du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Brassard: Oui. Alors, je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

(17 heures)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mercredi 5 mai 1999, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le leader du gouvernement, nous avons trois débats de fin de séance qui auront lieu à 18 heures. Est-ce qu'il y a consentement pour que les débats de fin de séance aient lieu immédiatement? Pas de consentement. Je vais suspendre les travaux pour quelques instants et je vais y revenir.

(Suspension de la séance à 17 h 1)

(Reprise à 17 h 6)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous asseoir. Merci beaucoup. Alors, j'en étais à une proposition d'ajournement des débats de cette Assemblée à demain et, comme je l'ai indiqué à cette Assemblée, qu'il y avait trois débats de fin de séance qui doivent être tenus en conformité du règlement à compter de 18 heures, est-ce qu'il y a consentement pour que ces débats aient lieu avant 18 heures?

M. Paradis: Oui, M. le Président. Compte tenu que la présidence avait déjà annoncé pour 18 heures ces débats de fin de séance, les députés impliqués qui n'ont pas obtenu, à l'occasion de la période de questions, de réponses satisfaisantes aux questions qu'elles ont ou qu'ils ont adressées au ministre de l'Éducation, au ministre du Revenu et à la ministre de l'Emploi, à ce moment-là, ils ont organisé l'agenda de façon à être là à 18 heures très précises, M. le Président, je tiens à vous l'assurer.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...M. le leader de l'opposition officielle, il n'y a pas consentement. Donc, je suspends les travaux de cette Assemblée à 18 heures, et les trois débats de fin de séance auront lieu à compter de 18 heures. Merci et à plus tard.

(Suspension de la séance à 17 h 8)

(Reprise à 18 h 5)


Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous en sommes maintenant au débat de fin de séance suite à une demande de M. le député de Kamouraska-Témiscouata, suite à une question qu'il a posée aujourd'hui au ministre de l'Éducation concernant les frais pour les services éducatifs dans les écoles publiques du Québec, alors la demande d'un débat de fin de séance avec le ministre de l'Éducation. Je tiens à vous faire rapport que vous avez un droit de parole de cinq minutes, un droit de parole de cinq minutes et une réplique de deux minutes. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Frais afférents imposés aux parents par les commissions scolaires


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. M. le Président, ce débat de fin de séance fait suite à la question que j'ai posée cet après-midi au ministre de l'Éducation relativement aux frais que l'on charge aux parents dans les commissions scolaires maintenant. La question était bien simple, cet après-midi: Est-ce qu'on se rend compte, M. le Président, que partout au Québec, dans le contexte des coupures de 1 200 000 000 $ en éducation primaire et secondaire des quatre dernières années, les commissions scolaires sont aux prises avec un problème, c'est-à-dire qu'on n'a plus d'argent pour financer des services qui étaient offerts avant gratuitement? Donc, si on veut sauver les services qui sont offerts aux étudiants, on a le choix: ou on coupe ces services-là ou on charge des frais.

Plusieurs commissions scolaires, après avoir fait le tour... Comme le dit lui-même le président de la Fédération des commissions scolaires, M. André Caron: On a regardé tout ce qu'il y avait à couper; quand il n'y a plus rien à couper, pour garder le service, on le charge aux parents. Ce qui fait que le ministère de l'Éducation contrevient à sa propre loi qui dit clairement, la Loi sur l'instruction publique, M. le Président, que tout résident du Québec a droit à la gratuité des services éducatifs prévue par la présente loi. Et cet après-midi, le ministre de l'Éducation me répondait qu'il était justement en train de faire le tour avec les conseils d'établissement pour regarder ce qui se passait, et que ce sont finalement les conseils d'établissement et les parents qui ont à choisir et à déterminer si, oui ou non, il y aura des frais. Mais force est d'admettre, M. le Président, que les conseils d'établissement n'ont pas de grands mots à dire là-dessus quand, finalement, le budget qu'ils ont à adopter pour leur école leur vient de leur commission scolaire. Alors, que voulez-vous que les parents fassent sur le conseil d'établissement? Dire: Non, on ne chargera pas de frais puis on va couper pour la surveillance le midi? On va couper dans le transport scolaire? Il y a des limites, M. le Président, à couper.

Et d'ailleurs, déjà, sur cette question-là, le ministre de l'Éducation m'avait répondu le 26 mars dernier que, finalement, ce sont les conseils d'établissement qui ont à déterminer comme tel ce qui est valable et ce qui n'est pas valable au niveau des frais. Cependant, dans une lettre qui lui a été adressée justement par des parents sur cette question-là, ils mentionnent, ces parents-là: «Il est intéressant de constater comment tous les paliers de l'éducation se déresponsabilisent face à tous les frais accessoires, dont la surveillance du midi, en s'en remettant aux conseils d'établissement.» Et ces parents-là mentionnent: «Le gouvernement donne les pouvoirs aux commissions scolaires qui, elles, transfèrent la responsabilité aux écoles en leur demandant de gérer elles-mêmes leur service de surveillance du midi, qui, elles, remettent les budgets dans les mains des conseils d'établissement.» Mais le budget comme tel de la commission scolaire... Ce n'est pas parce que le conseil d'établissement va dire: Non, ça ne me convient pas, et on veut plus, que la commission scolaire va lui en donner. Donc, on vient dire au conseil d'établissement, toute nouvelle structure: Maintenant, ça va être de votre faute si on charge des frais aux parents.

(18 h 10)

Dans cet esprit-là, c'est quand même drôle de voir, M. le Président, tout ce qui est en train de se faire au niveau de ces frais-là. On a eu aujourd'hui le cas de la commission scolaire des Monts-et-Marées qui justement charge 55 $ en frais de surveillance le midi, par enfant, à des parents, mais à des parents qui n'ont pas toujours les moyens de payer ce 55 $ là. Faut bien que le ministre se rende compte que ce n'est pas tout le monde au Québec qui a la capacité financière de payer pour des taxes supplémentaires, et ce n'est pas de gaieté de coeur non plus que les dirigeants de commission scolaire mettent en place ce type de frais là. D'ailleurs, pour reprendre le cas de l'école Monts-et-Marées, c'est suite à une recommandation des enseignants comme telle de transférer un étudiant de l'école qui est tout près de chez lui à une école qui est plus loin en milieu urbain, à Amqui, qu'on charge de nouveau ce 55 $ là. Donc, le résultat net – et c'est ce que les parents dénoncent: les parents sont pris pour payer des frais même si ce ne sont pas eux qui ont pris la décision. À ce moment-là, on se retrouve avec toutes sortes de situations farfelues.

Dans certaines écoles, ça peut aller jusqu'à 150 $, ce qu'on demande aux étudiants, et, dans d'autres écoles, écoutez bien ça, M. le Président, on met en place des loteries, des tirages dans lesquels on demande aux étudiants comme tels d'aller vendre des billets partout – écoutez bien ça, on appelle ça la «sérénade de nos petits troubadours» – dans lesquels les prix qu'on leur donne pour les encourager à vendre des billets, c'est des certificats-cadeaux chez Archambault, des certificats pour le meilleur troubadour de chaque classe, ou on leur donne des billets de cinéma. On est en train de récompenser les meilleurs vendeurs de billets au Québec. Au lieu d'encourager les meilleurs résultats scolaires, on encourage les meilleurs vendeurs de billets pour financer des services. Et, quand ils ne paient pas, ce sont des huissiers, ce sont des avocats qui sont mis sur le dossier pour poursuivre les parents.

Le ministre de l'Éducation nous disait cet après-midi qu'il avait l'air de trouver ça absolument normal et qu'il allait faire une petite enquête là-dessus, mais, pendant ce temps-là, il y a des gens qui paient...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député, de votre intervention. Alors, je cède la parole maintenant à M. le ministre de l'Éducation. M. le ministre, la parole est à vous.


M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, visiblement le député de Kamouraska-Témiscouata a besoin d'information supplémentaire pour bien saisir l'ampleur du dossier des frais supplémentaires. Bon, il nous rappelle que le ministère de l'Éducation, au cours des quatre dernières années, a réduit les budgets des commissions scolaires de 1 200 000 000 $. C'est vrai. Ce qu'il ne nous dit pas, c'est que le gouvernement fédéral a réduit les budgets du gouvernement du Québec en éducation de 4 600 000 000 $. Je le sais que ce n'est pas le genre d'information que l'opposition aime entendre, mais c'est la réalité. Donc, je pense que, dans le contexte où le gouvernement fédéral a réduit ses budgets en transferts en éducation de 4 600 000 000 $, le gouvernement du Québec a quand même réussi à protéger son système d'éducation.

Ensuite, le député de Kamouraska-Témiscouata nous dit que les commissions scolaires ne peuvent plus couper ailleurs, que la situation est dramatique. Ce que je veux rappeler au député de Kamouraska-Témiscouata, c'est que les commissions scolaires ont actuellement, au niveau consolidé, un surplus de 120 000 000 $. Donc, de dire que la situation est catastrophique, je pense que, encore, le député de Kamouraska-Témiscouata exagère.

Maintenant, il nous parle de toutes sortes de projets dans les écoles, et je pense qu'on ne peut pas généraliser. Puis, oui, il faut laisser des responsabilités aux conseils d'établissement. Depuis toujours, M. le Président, dans les écoles, on vend des billets pour organiser des projets de visite à New York ou pour organiser des projets de toutes sortes. Je pense qu'il faut distinguer.

La loi, M. le Président, est assez claire. D'abord, dans la Loi sur l'instruction publique, à l'article 7, on dit clairement que la gratuité des manuels scolaires n'est pas remise en cause. Donc, il y a pleine gratuité au niveau du matériel didactique et des manuels scolaires. Toutefois, on dit dans ce même article 7 que le coût des documents pour que l'élève écrive, dessine, découpe, c'est à la charge des parents. C'est clair dans la loi, ça a toujours été comme ça depuis que la loi a été adoptée. Il en est de même pour les crayons, les papiers et les autres objets de toute nature.

Maintenant, il y a aussi tous les services de garde, de restauration et d'hébergement qui sont couverts aux articles 256 à 258. J'invite le député de Kamouraska-Témiscouata à en prendre connaissance. Il y a aussi – il faisait référence à la surveillance des élèves – l'article 292, qui est bien clair, et je vous le lis, M. le Président, où on dit: «Une commission scolaire, qu'elle organise ou non le transport le midi pour permettre aux élèves d'aller dîner à domicile, assure la surveillance des élèves qui demeurent à l'école selon les modalités convenues avec les conseils d'établissement et aux conditions financières qu'elle peut déterminer.»

M. le Président, le coût pour ces divers services varie d'une commission scolaire à l'autre, et c'est normal. De plus, avec la mise en place des conseils d'établissement dans chaque école, une mesure qui a été mise en place par notre gouvernement, qui assure une transparence pour toutes les décisions et amène justement les informations auprès des parents avant que les décisions soient prises, donc, ces conseils d'établissement doivent approuver tous ces frais, et, comme je le disais tantôt, donc, les commissions scolaires qui ont des surplus peuvent toujours prendre, s'il y a des cas urgents, une partie de ces surplus pour assumer une partie des frais.

Ce qu'il est important aussi de dire, M. le Président, c'est que cette année il y a des parents qui se sont plaints auprès de mon ministère à l'effet que la commission scolaire adressait des factures générales à tous les parents, qu'ils soient utilisateurs ou non des services aux élèves. Comme cette pratique est illégale, je me suis empressé de demander aux deux commissions scolaires concernées de modifier leur pratique. Donc, je pense, M. le Président, que c'est un dossier que je suis de très près. Nous sommes en train, au ministère, avec les commissions scolaires, de faire le tour de la question pour éviter les abus.

Il faut se rappeler aussi, M. le Président, que les commissaires des commissions scolaires sont des élus. Donc, lorsque les élus des commissions scolaires prennent la décision de charger des frais aux parents, je souhaite que ces derniers se fassent entendre auprès de ceux et celles qui ont été eux-mêmes élus. Donc, il ne faut pas oublier, M. le Président, que c'est au niveau des conseils d'établissement, mais aussi au niveau des commissions scolaires, avec des élus, que les décisions se prennent. La preuve en est que les coûts varient d'une commission scolaire à l'autre, donc, pour les frais des services, par exemple, de surveillance le midi.

Donc, je terminerais, M. le Président, en disant aussi que le dossier, on ne le laisse pas en blanc. J'ai eu des discussions pas plus tard que la semaine dernière avec le président de la Fédération des commissions scolaires du Québec, et nous avons convenu ensemble de travailler sur ce dossier, et nous allons nous assurer ensemble de mettre des balises en place pour qu'on garde au Québec la gratuité scolaire, comme on doit l'avoir au Québec, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le ministre, de votre intervention. Et nous en sommes maintenant au droit de réplique de deux minutes. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, la parole est à vous.


M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: Merci, M. le Président. Comme c'est son habitude, avec le ministre de l'Éducation, c'est de la faute des autres et c'est une priorité. Ah! c'est bon d'entendre ça. Je veux juste lui rappeler, pendant qu'il parle des coupures du fédéral, que l'Ontario a été coupée de la même façon que le Québec, au prorata. Pendant qu'eux autres coupaient 1 800 000 000 $ en éducation, l'Ontario réinvestissait 1 800 000 000 $. Ce qu'il demande aux commissions scolaires aujourd'hui, c'est de sabrer dans leurs surplus, c'est-à-dire faire en sorte que les sommes qu'ils ont gardées pour rénover leurs écoles, améliorer la qualité de leurs écoles... Envoyez ça, coupez ça, enlevez ça, oubliez ça. Belle façon de gérer. Et ce que vous avez décentralisé, vous avez décentralisé des déficits. Aujourd'hui, les jeunes vendent des billets, M. le ministre. On donne des concours pour les meilleurs vendeurs de billets, pas juste pour des sorties éducatives. Écoutez bien ça. Dans le plan de financement de l'école château Piché-Dufrost, écoutez bien à quoi a servi cette vente de billets là: entre autres à l'achat de matériel éducatif pour l'école, à l'achat de matériel éducatif pour les classes, c'est-à-dire des jeux éducatifs, des livres, des cédéroms et des logiciels, pour 3 177 $. Et vous osez dire que, ça, ce n'est pas du matériel dont les classes ont besoin, dont les étudiants ont besoin. Vous dites ensuite aux conseils d'établissement qu'ils doivent approuver tous ces frais-là. Que voulez-vous qu'ils fassent? Ils n'ont pas d'autre marge de manoeuvre. Ils ne peuvent pas refuser le budget que la commission scolaire leur envoie.

Et, quand vous dites que, dans les commissions scolaires, les commissaires sont des élus, est-ce que vous les avez consultés avant de faire en sorte que maintenant les commissions scolaires donnent plus d'argent à des huissiers, à des avocats pour poursuivre des parents qui n'ont pas les moyens de payer vos frais plutôt que de vraiment réinvestir dans la qualité de l'éducation?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Béchard: Êtes-vous fier de ça, ce système-là dans lequel indirectement vous en êtes à encourager des bureaux d'huissiers et d'avocats pour courir après des parents...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Béchard: ...qui ont besoin, qui sont dans la nécessité, qui ne sont pas capables de payer ces frais-là? Ça fait en sorte que vous venez encore dire que le système d'école est...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député, de votre intervention. Ceci met fin à ce débat de fin de séance entre M. le député de Kamouraska-Témiscouata et M. le ministre de l'Éducation.

Suite à la période de questions, la députée de Beauce-Sud a demandé à la présidence de tenir un débat de fin de séance avec le ministre d'État à l'Économie et aux Finances concernant le contrat avec le Bureau de la statistique du Québec, alors je cède la parole à Mme la députée de Beauce-Sud.


Transmission de renseignements du ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, je vous rappelle que, cet après-midi, en Chambre, j'ai posé une question au ministre du Revenu dont la teneur était la suivante. Dans le registre des communications du ministère du Revenu du Québec, confectionné le 26 avril 1999, on apprend qu'avant d'envoyer des milliers de renseignements fiscaux à la firme de sondage SOM le ministère du Revenu avait déjà envoyé les mêmes renseignements au Bureau de la statistique du Québec. Alors, j'ai demandé au ministre du Revenu de déposer l'avis de la Commission d'accès à l'information sur la transmission de ces renseignements confidentiels, ainsi que le contrat liant le ministère du Revenu et le Bureau de la statistique du Québec.

À cette question, le ministre a répondu deux choses: qu'il fera les deux avec joie lorsqu'il en aura pris connaissance; et qu'il a rencontré ce matin 2 000 ou 3 000 hommes et femmes du ministère du Revenu à qui il s'est adressé directement et à qui il a fait son compliment pour le culte qu'ils ont développé de la protection des renseignements personnels. Or, je rappelle au ministre que le culte de protection des renseignements personnels dont il parle s'est plutôt transformé, au cours des 18 derniers mois, en une litanie de scandales que les citoyennes et citoyens du Québec apprennent avec horreur et qui font état de l'incompétence de ce gouvernement en ce qui a trait à la protection des renseignements personnels. Je veux parler de la vente de renseignements fiscaux, qui a donné suite à une enquête de la Sûreté du Québec et au congédiement de huit employés du ministère; de la transmission de données personnelles par fax aux employeurs de débiteurs alimentaires qui faisaient l'objet d'une retenue sur la paie; de l'affaire du député bloquiste Ghislain Lebel dans laquelle le cabinet du premier ministre est directement impliqué; puis encore, la semaine dernière, la fuite de milliers de renseignements confidentiels à une firme de sondage privée.

(18 h 20)

Compte tenu que la fuite de renseignements fiscaux semble être devenue monnaie courante au ministère du Revenu, comment le ministre du Revenu peut-il parler d'un culte de protection du renseignement personnel? Dans le dernier dossier dont je viens de parler, on sait que les nom, adresse, numéro de téléphone, statut civil, nombre d'enfants de 10 600 créanciers et débiteurs alimentaires ont été transmis à la firme de sondage SOM, et ce, en dépit des lois en vigueur au ministère du Revenu, ce qui a nécessité, on le sait, l'intervention de la Commission d'accès à l'information qui a fait une enquête, enquête au bout de laquelle on a conclu que la transmission de renseignements avait été faite illégalement. Ceci a eu pour effet de forcer la ministre à démissionner. Pourtant, dans ses communiqués à la population, le ministère du Revenu dit que le secret fiscal est capital pour l'État québécois et pour la population qui paie des taxes et des impôts. Il appartient de toute évidence au gouvernement d'en assurer le respect et d'en répondre publiquement.

Or, la réalité, on l'a démontré il y a quelques instants, est tout autre. Les citoyens ont raison de craindre que des renseignements fiscaux servent à d'autres fins que celles prévues par la loi. Ces fuites témoignent d'une insouciance dans la façon de faire du ministère du Revenu, et, comme le rôle de l'opposition en est un de surveillance des activités du gouvernement, de ses ministères, de ses organismes et de son administration publique, alors, à titre de porte-parole de l'opposition en matière de revenu, ce que je veux savoir aujourd'hui, c'est: Dans le cadre du mandat préparatoire qui avait été confié au Bureau de la statistique du Québec, est-ce que le ministre du Revenu a pris la peine de s'assurer, depuis trois heures cet après-midi, qu'un avis a bel et bien été demandé à la Commission d'accès à l'information sur ce dernier mandat confié au Bureau de la statistique du Québec? Et le ministre est-il en mesure de déposer cet avis de même que le contrat liant les deux organismes? En cas d'absence d'un tel avis, est-ce que le ministre fera la même chose que sa collègue et demandera à la Commission d'accès à l'information de faire enquête? Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme le députée de Beauce-Sud. Alors, je cède maintenant la parole à M. le ministre du Revenu, avec un droit de parole de cinq minutes.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, je voudrais dire d'abord que tout ce qui est exagéré est insignifiant. Alors, parler de série de scandales, parler d'horreurs, parler de viol du secret fiscal... Ça ne veut pas dire que ce qui est arrivé n'est pas important. Ce qui est arrivé est assez important, on en a vu la suite, mais le secret fiscal n'a pas été violé. Les procédures ont été violées, les règlements ont été violés, les lois ont été violés, et nous nous en occupons sérieusement.

En effet, dans le registre du 26 avril 1999 des communications de renseignements nominatifs transmis par le ministère du Revenu, on indique que le ministère a transmis des informations pour deux sondages portant tous les deux sur l'évaluation du programme de perception des pensions alimentaires. Le mandat confié à SOM, et qui a été interrompu à la suite de l'avis de la Commission d'accès, portait sur l'évaluation de l'impact psychosocial du système de perception des pensions. Le deuxième mandat a été confié au BSQ à l'automne 1998 et il visait à mesurer la satisfaction de la clientèle, créanciers, débiteurs, de la Direction des perceptions des pensions alimentaires.

Pour l'information de l'opposition, d'ailleurs, 90 % des créanciers – 90 % des créanciers – et 62 % des débiteurs se sont déclarés satisfaits des services rendus par le MRQ. C'est pourquoi nous, qui sommes des élus, ne voulons pas que des fonctionnaires ou que des gens qui ont bien fait leur travail, avec des fautes... On peut avoir le culte et être pécheur, je pourrais vous en nommer des millions. Je pense que la députée, sur ce point, concédera qu'il y a comme une base de vérité là. 90 % des créanciers, ce qui est le plus important, et 62 % des débiteurs se sont déclarés satisfaits. Alors, avant d'attaquer les fonctionnaires puis de dire que tout ce qu'ils font n'est pas correct... Au contraire, je suis allé leur dire ce matin qu'ils avaient l'estime et le respect de la population. Aux fins du sondage, 2 100 coordonnées personnelles ont été fournies au BSQ, et elles ont été détruites à la fin du sondage. C'est pour ça qu'ameuter les populations avec des fuites comme si c'était un panier percé... Elles ont été détruites.

Le ministère n'a pas sollicité d'avis préalable. Je réponds à sa question. J'espère que la députée, si elle ne m'écoute pas, lira le Journal des débats parce que, là, visiblement, elle est occupée à d'autres choses. Le ministère n'a pas sollicité d'avis préalable de la Commission, et on me confirme qu'un contrat formel a été signé entre le ministère et le Bureau.

En Chambre tout à l'heure j'ai promis une approche transparente. J'indique donc que le registre du 26 avril auquel a fait référence l'opposition n'est pas complet – ce qui était connu – et trois autres transmissions de données au BSQ auraient dû y apparaître. Cette omission s'explique par le fait que, jusqu'à maintenant, le ministère ne tenait pas un registre centralisé pour se conformer à l'article 67.4 de la Loi d'accès.

Chaque direction opérationnelle du ministère tenait son registre, et l'information devait être regroupée lorsqu'une demande d'obtention de registre était formulée. Il appert que l'information colligée le 26 avril était incomplète, et le mode de tenue du registre devra être examiné par le comité d'experts afin d'éviter que cela se produise. Parce que, vous savez, M. le Président, que j'ai constitué, je pense dans les heures où j'ai été assermenté ministre du Revenu, un comité qui comprend le ministère de la Justice pour les avis les plus pertinents et les plus pointus et qui sortent d'une autre source que le ministère du Revenu, le ministère du Revenu lui-même, et enfin, évidemment, la Commission d'accès qui est au centre de tout cela. Alors, l'information qui était incomplète fera l'objet, ainsi que tout ce qui l'entoure – en périphérie – d'une étude attentive et d'un examen par le comité d'experts afin d'éviter que cela ne se reproduise.

Les sondages additionnels réalisés par le BSQ ont tous fait l'objet d'un contrat en bonne et due forme avec le ministère du Revenu du Québec. Aucun avis préalable de la Commission n'a été sollicité. Toutes les informations transmises ont été détruites après chacune des opérations. Alors, encore une fois, qu'on parle du viol de la loi, qu'on parle du viol des procédures, bien sûr, mais qu'on ne parle pas de secrets fiscaux répandus dans le décor, c'est une exagération et c'est, pour le moins qu'on puisse dire, insignifiant.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre du Revenu. En vertu de votre droit de réplique, madame...

Je tiens à vous dire, dans les galeries, que vous ne pouvez pas applaudir.

Alors, Mme la députée de Beauce-Sud, en vertu de votre droit de réplique de deux minutes.


Mme Diane Leblanc (réplique)

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Dans la réponse que le ministre vient de nous faire, il y a quelque chose qui est très étonnant – très, très étonnant. Le ministre est en train de nous donner, de nous dévoiler les résultats du sondage pour lequel il dit: Toutes les informations ont été récupérées, brûlées, détruites. Il nous dit que 99 % de la clientèle est satisfaite. Donc, le sondage a eu lieu, et il est au courant.

M. Landry: 90 % seulement.

Mme Leblanc: Il est au courant. 90 %... Alors, il est au courant de ces renseignements-là et il vient nous dire qu'on parle de secret fiscal et que rien de ça ne devait être dévoilé.

Deuxièmement, le ministre nous dit que son ministère ne se conformait pas à la loi, que le registre était incomplet. C'est un bel aveu de sa part, mais le ministre, lui, pourtant, qui est le responsable du Bureau de la statistique du Québec en tant que ministre des Finances, il oublie de nous dire qu'il a demandé un avis à la Commission d'accès à l'information, qu'il aurait dû le demander et qu'il ne l'a pas fait. Et il ne nous a toujours pas dit s'il va le faire. Il se retranche derrière son comité d'experts, mais son comité d'experts, ce n'est pas la CAI, ce n'est pas la Commission d'accès à l'information, et il refuse toujours de nous dire s'il va vraiment demander un avis formel à la CAI en cette matière. En tout cas, je me demande, moi...

M. le Président, je conclus en disant que, cet après-midi, là, le ministre n'a pas pu apporter de réponse satisfaisante, que, ce soir non plus, il n'est toujours pas capable d'apporter une réponse satisfaisante et que donc il y a 10 600 citoyens dont les droits ont été brimés qui ont toutes les raisons du monde de s'inquiéter de la grande désinvolture de ce gouvernement en matière de protection de renseignements personnels. beaucoup.

Une voix: Bravo!

(18 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Beauce-Sud.

Nous procédons à une autre demande de débat de fin de séance. Il s'agit de la demande de Mme la députée de La Pinière qui s'est adressée aujourd'hui à la ministre d'État au Travail et à l'Emploi concernant l'appel d'offres pour les guichets multiservices. Alors, je vous cède maintenant la parole, Mme la députée de La Pinière.


Attribution du contrat d'achat de guichets multiservices pour Emploi-Québec


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, cet après-midi, j'ai questionné la ministre d'État au Travail et à l'Emploi sur la façon dont a été attribué le contrat des guichets multiservices au consortium SHL Systemhouse.

On se rappellera, M. le Président, que ces guichets devaient être implantés dans les centres locaux d'emploi à travers le Québec en mai 1998, il y a pratiquement un an. On parlait alors d'une possibilité de 3 000 guichets pour un coût total de 53 000 000 $. Or, à ce jour, les guichets n'ont pas encore été livrés, et de sérieuses questions sont posées quant à la transparence, quant à la probité et quant à l'intégrité du système d'attribution des contrats. Ce sont là, M. le Président, des questions fondamentales qui sont au coeur de l'imputabilité du gouvernement.

Le 27 avril dernier, à l'étude des crédits, j'ai soulevé cette question, et la ministre s'est comportée avec désinvolture et a fait preuve d'une irresponsabilité surprenante. C'est ainsi que je l'ai informée qu'un employé de SHL Systemhouse, Gilles Beauchesne, était engagé dans son ministère pour aviser, à titre de conseiller principal, le directeur des technologies de l'information, M. Jutras, et qu'à ce titre il a participé à toutes les étapes d'élaboration des études techniques et à la rédaction de l'appel d'offres, ce que son sous-ministre de l'Emploi et du Travail n'a pas nié.

Et, M. le Président, la ministre, tantôt, à la période de questions, tentait une opération de diversion en disant que les documents ont été trafiqués. C'est des documents, je le lui rappelle, internes à son propre ministère. Et M. Beauchesne, selon les informations que j'ai de son propre ministère, a participé à l'élaboration de ces documents.

M. le Président, les allégations de conflit d'intérêts qui ont été portées dans ce dossier sont assez sérieuses pour inciter la ministre à faire la chose qu'elle doit faire dans les circonstances, c'est-à-dire faire enquête. C'est ce que j'ai demandé, M. le Président, mais elle refuse, et aujourd'hui encore je l'interpelle et je lui demande de faire toute la lumière sur cette question-là afin de lever toute ambiguïté, toute équivoque quant à l'intégrité du processus d'attribution des contrats par le gouvernement.

J'ai également demandé le dépôt des rapports qui ont été rédigés par les experts de son ministère et qui démontrent que les équipements qui ont été retenus dans le contrat qui a été accordé au consortium SHL Systemhouse sont non conformes, et ce, à bien des égards. Sa réponse à l'étude des crédits, vous me permettrez de la citer parce que c'est très révélateur. Voici ce que la ministre m'a répondu quand j'ai demandé le dépôt des rapports. Elle a dit ceci: Je n'en ai aucune idée. Je n'ai jamais vu ces rapports et je ne veux pas les voir, je n'y comprends rien. Ça, c'est la ministre qui parle, M. le Président. Ce sont ses paroles citées textuellement. Une ministre dont le ministère est au centre d'une controverse, qui s'en lave les mains en disant: Je n'y comprends rien, comment peut-on faire confiance à une ministre qui avoue publiquement son incompétence?

M. le Président, les informations qui me parviennent de son ministère sont à l'effet que les guichets proposés par le consortium Systemhouse ne sont pas conformes. Et pourtant elle lui a donné le contrat. De nombreuses questions se posent. Elles sont sérieuses, elles interpellent l'intégrité du système, la probité et l'intégrité du gouvernement, et elle a une responsabilité pour répondre devant cette Chambre et devant tous les parlementaires en déposant les documents demandés.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, pour bien saisir ce problème et surtout le fait que la députée de La Pinière m'accuse de ne pas voir les choses – je pense qu'elle est légèrement embrouillée – je vais me permettre de partir un peu du début. On se rappellera que, dans ce rapatriement des mesures actives d'emploi, il y a eu des nouveaux services qui ont été mis en place, notamment des services de placement, et que ça a généré, donc, des nouveaux besoins informatiques. Et, n'en déplaise à l'opposition, sachez que, dans cette entente Québec–Canada sur le rapatriement des mesures actives, il y avait beaucoup d'attentes envers le Québec sur ces services de placement mais qu'aucune ressource n'a été mise à notre disposition. Alors, c'est bien de notre propre chef que nous avons décidé de développer ce type d'outil informatique.

Donc, nous avons, pour faire face à ces besoins, eu recours à des firmes spécialisées pour nous aider à cerner ces nouveaux besoins en termes informatiques. Il fallait donc savoir ce qui existait sur le marché, comment on pouvait déployer notre propre système et comment on pouvait le rendre évolutif. Pour ce faire, nous avons fait des appels d'offres auprès de firmes spécialisées qui ont l'habitude, donc, de préciser les besoins d'architecture technologique d'un ministère ou d'instruments comme les guichets libre-service. Nous l'avons fait en bonne et due forme, il y a eu différents soumissionnaires qui ont soumissionné et Systemhouse est arrivé en premier. Ils ont donc accompli ces contrats-là.

Il faut comprendre que l'objet de ces contrats, et c'est là qu'il y a un décalage de la part de la députée de La Pinière, c'étaient des contrats d'ordre général qui nous permettent de répondre à nos besoins généraux et que le ministère a ses propres ressources pour développer les devis techniques nous menant à des appels d'offres qui répondent à nos besoins. Ces besoins-là... Et cette opération-là de rédaction des appels d'offres a été assumée par le ministère lui-même. Donc, l'objet des contrats était assez large, du genre définir les travaux de définition des architectures technologiques requises pour la mise en place des guichets libre-service.

Et, quand on compare – et je l'ai fait, cet exercice-là – le résultat de ce contrat et les appels d'offres, on se rend compte à quel point il y a un écart et un degré de détail tellement grand que c'est très difficile de soutenir cette thèse de conflit d'intérêts. J'ai donné des exemples cet après-midi qui étaient un peu amusants, mais qui témoignent de la réalité. Quand on dit que ce contrat nous disait qu'il fallait donc avoir des écrans particulièrement résistants, j'aurais pu moi-même écrire ça. C'est bien évident, il y a des dizaines et des dizaines de personnes qui utilisent ce type de matériel par jour, alors bien sûr qu'on peut s'imaginer qu'il nous fallait des écrans résistants.

Un autre exemple. Dans le document qui résulte du contrat auquel la députée de La Pinière fait allusion, on dit qu'il faudrait avoir des moniteurs de 17 pouces. C'est ça qu'on dit, point à la ligne. Dans l'appel d'offres, il y a 11 items qui précisent cette question-là des moniteurs. Alors, je peux vous en donner quelques-uns. Non seulement on parle d'un moniteur de 17 pouces, mais on dit qu'il doit être tactile, de haute qualité, un écran antireflets, le type de résolution, le support de la norme d'émission d'électromagnétique, etc. Écoutez, ce genre d'informations là n'étaient pas – et c'était normal, puisqu'on en était à des besoins généraux – dans le document final rédigé par Systemhouse.

Donc, à la face même, il faudrait que la députée de La Pinière le fasse, cet exercice. Le document n'a pas pu servir à la préparation et à la rédaction du devis technique. Et je rappelle que c'est le ministère qui a procédé à la rédaction de ces avis techniques. Nous avons des ressources qui sont spécialisées, ce sont des chargés de projets qui sont impliqués dans ce genre de rédaction là. Nous l'avons fait également avec les Services gouvernementaux, et je rappelle également que tout a été fait selon les règles du jeu.

Je termine en disant que, visiblement, et je le rappelle d'ailleurs à la députée de La Pinière, les contrats que le ministère de l'Emploi fait, il les fait non pas avec des individus, mais avec des firmes. Alors, quand elle dit que nous avons contracté avec M. X et M. Y, ce n'est pas juste. Nous contractons avec des firmes qui elles-mêmes ont leur propre personnel, ou alors ont des contrats, et on n'a pas la responsabilité de voir à ces employés des entreprises privées.

Alors, je pense que la députée veut probablement bien faire, mais je pense que c'est inutile de chercher des conflits où il n'y en a pas. C'est des besoins complexes, il y a beaucoup de firmes qui sont en cause, et je rappelle à la députée à quel point la compétition est féroce. Et dites-vous que dans tous les soumissionnaires, y compris ceux qui ont gagné et ceux qui ont perdu, chacun d'entre eux a déjà eu des contrats avec le ministère de l'Emploi.

(18 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. En vertu de votre droit de réplique, Mme la députée de La Pinière, la parole est à vous.


Mme Fatima Houda-Pepin (réplique)

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Dans tout ce que la ministre vient de dire, il y a juste une chose qui est vraie, c'est quand elle a dit que la députée de La Pinière veut bien faire. Ça, c'est vrai, M. le Président. Parce que, en effet, ce qui est en cause ici, et je voudrais le dire à la ministre, et je veux qu'elle le comprenne une bonne fois pour toutes, ce n'est pas la concurrence entre des firmes compétitives, ce n'est pas notre affaire à nous de nous mêler de la compétition des entreprises. Ce qui est en jeu ici, c'est l'intégrité du système d'attribution des contrats par le gouvernement, par appel d'offres.

Elle dit, M. le Président, que le gouvernement fait affaire avec des compagnies et non avec des individus. Qu'est-ce que Gilles Beauchesne faisait comme conseiller principal du directeur des technologies de l'information du ministère de l'Emploi, situé à un poste stratégique où il pouvait influencer les choix technologiques du ministère pour que le consortium SHL Systemhouse obtienne le contrat selon les spécifications et les informations que lui livrait régulièrement à la compagnie soumissionnaire? Est-ce que la ministre trouve ça correct? Elle trouve ça éthiquement acceptable, moralement acceptable, M. le Président? Moi, je ne le trouve pas et j'ai raison d'être révoltée devant vous aujourd'hui de la façon dont la ministre traite ce dossier-là, avec tant et tant de désinvolture.

M. le Président, si la ministre dit que tout s'est fait dans les règles de l'art, pourquoi elle ne dépose pas les rapports des experts de son propre ministère? On va les lire en toute transparence. On va se rendre compte que les experts de son propre ministère, les gens qui sont professionnels, ont fait leur travail correctement et qu'à quelque part dans son ministère, au niveau politique, la décision a été changée. C'est ça qui est au centre de l'enjeu et c'est de ça que la ministre doit répondre en instituant une enquête et en déposant les documents.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Mme la députée, merci. Alors, ceci met fin à nos trois débats de fin de séance d'aujourd'hui, et j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain, le mercredi 5 mai, à 10 heures. Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 18 h 42)