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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 12 mai 1999 - Vol. 36 N° 29

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour


Affaires inscrites par les députés de l'opposition


Motion proposant que l'Assemblée fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi

Nous débutons les affaires du jour. À l'article 46 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 de notre règlement, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi.»

Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Effectivement, j'étais très heureuse de citer le ministre des Finances, parce que ça fait depuis que le budget de ce gouvernement a été déposé que je soulève l'ampleur de l'écart, au niveau du fardeau fiscal, entre ce que paient en impôts les Québécois et les citoyens des autres provinces.

On a eu d'ailleurs, récemment, un autre témoignage un peu inquiétant à l'effet que nos concitoyens de la province voisine vont à nouveau, possiblement, pouvoir profiter d'une autre baisse d'impôts de près de 20 %, et ça, c'est si le gouvernement Harris se fait élire. On sait que nos voisins ont pu profiter, depuis les derniers quatre ans, d'une baisse d'impôts de 25 %, si bien que le fossé qui s'est creusé entre le Québec et l'Ontario s'est encore agrandi. D'ailleurs, l'écart qui sépare le Québec de nos voisins atteint un niveau tel que c'est devenu extrêmement inquiétant. L'écart se situe maintenant entre 7 000 000 000 $ et 8 000 000 000 $ si on se compare avec l'Ontario et cet écart est encore plus grand si on se compare avec nos voisins les Américains.

Comme vous le savez, M. le Président, on ne peut plus vivre en vase clos, le commerce se fait sur le plan international, on ne peut plus se mettre des oeillères. Il faut absolument que l'on compétitionne avec ces gens et il faut absolument que le Québec soit en mesure de pouvoir manufacturer et vendre ses produits. C'est donc dire qu'il va falloir que le gouvernement du Québec, que ce gouvernement promette aux Québécois des baisses d'impôts plus importantes que ce à quoi il s'est engagé aujourd'hui. Ce gouvernement s'est engagé à baisser les impôts de 1 300 000 000 $ sur une période de cinq ans, et cette baisse d'impôts va débuter l'an prochain, à raison de 200 000 000 $ par année. C'est nettement insuffisant, cette baisse d'impôts, puisqu'il est clair que l'écart entre nous et nos voisins va encore s'élargir.

Vous savez, M. le Président, on a tous endossé un discours très différent de ce que nous tenons aujourd'hui. Moi-même, durant les années soixante-dix, je croyais sincèrement que l'État pouvait corriger les maux de la société, pouvait se substituer aux citoyens pour alléger les malheurs de ceux-ci, que ce soit la pauvreté, que ce soit la maladie; si seulement l'État essayait de corriger ces problèmes, l'État pouvait le réussir. Or, on se rend bien compte aujourd'hui des lacunes de ce que nous avons pensé et surtout des résultats souvent piètres que nous avons réussis.

D'ailleurs, ce qui est étonnant dans tout ça, c'est qu'il y a plusieurs pays qui se sont rendu compte de ça. Je me suis rendue, l'an dernier, aux Pays-Bas rencontrer ces gens pour voir comment les Pays-Bas avaient réussi, dans l'espace de deux ans, à faire un virage aussi important, passer d'un taux de chômage qui approchait les 15 % et réduire ce taux de chômage à un niveau d'aux environs de 6 %. Comment ce pays de 15 000 000 de citoyens avait-il réussi une telle démarche? Bien, c'est que, tout à coup, toute la société, y compris le gouvernement, cette société a décidé, de façon claire et articulée, qu'elle allait mettre toutes ses ressources pour devenir plus compétitive, pour s'assurer qu'elle allait prendre le marché européen et développer les ressources de cette économie, si bien que vous avez aujourd'hui, aux Pays-Bas, un taux de chômage qui est très bas, un climat d'enthousiasme, un climat d'une vision où on croit qu'on peut tout, et, que ce soient les syndicats, que ce soit le gouvernement, que ce soient les citoyens, les gens ont tous embarqué dans ce train. Si bien que vous avez là un exemple d'une société dont on disait qu'elle périclitait, qu'elle diminuait en termes de force au niveau de l'ensemble de l'Union européenne, vous avez là un témoignage qui est très intéressant, et je pense que c'est un témoignage – en tout cas, certainement dans mon cas – qui m'a largement inspirée pour arriver aujourd'hui et dire avec beaucoup de conviction qu'effectivement la façon de générer de la croissance, la façon de créer de l'emploi, c'est essentiellement de baisser les impôts.

Pourquoi il faut baisser les impôts? Bien, c'est que le gouvernement, quand il prend un de vos dollars et qu'il s'approprie ce dollar, pour des raisons qu'on trouve difficiles à expliquer, il reste moins de ce dollar quand il vous le redonne. En passant de la poche gauche à la poche droite, il s'est perdu de l'argent. Il s'est perdu de l'argent, si bien qu'il y a une perte qui semble ne pas exister quand je vous laisse l'argent dans vos poches et que vous le dépensez et que vous faites vos propres choix quant aux désirs, aux aspirations que vous avez.

Donc, moi, je pense, et le Parti libéral du Québec pense sincèrement qu'il va falloir qu'on redonne aux Québécois ce pouvoir de dépenser parce que les citoyens, lorsqu'ils font des choix, que ce soient des bons choix ou que ce soient de mauvais choix, ce sont les leurs. Qu'on veuille changer sa voiture ou qu'on veuille prendre des vacances ou qu'on veuille payer dans d'autres secteurs, c'est là notre choix, mais il semblerait qu'il n'y a pas de perte. Et c'est la raison pour laquelle, je pense, il va falloir baisser les impôts. Et la proposition actuelle du gouvernement, elle est beaucoup trop timide.

(10 h 10)

Bon, on peut comprendre que le ministre des Finances veuille être prudent. On peut comprendre que, le rôle qu'il joue, il veuille s'assurer de ne pas tomber dans le piège des déficits. Mais je pense qu'il faut avoir la conviction et y croire suffisamment, que les baisses d'impôts sont importantes, qu'on va convaincre les citoyens que c'est là une avenue importante, une avenue remplie de succès.

D'ailleurs, je lisais ce matin un sondage qui était effectué et où les Québécois disent que le fardeau fiscal est devenu une première priorité. C'est donc dire que les gens se rendent compte que, quand ils ont des augmentations de salaire, ils gardent trop peu de ces augmentations de salaire. D'ailleurs, le Québec est une des provinces où on vous enlève le plus d'une augmentation de salaire. On vous enlève aux environs de 66 %, alors que, dans d'autres régions, c'est 33 %, d'autres pays notamment.

M. le Président, je pense que c'est là un projet important. Je voulais en faire une priorité. Je veux absolument que ce débat ait lieu au Québec, qu'il soit discuté, qu'il soit compris, qu'on en saisisse toutes les nuances, parce que c'est là un débat fondamental de notre société et qui va faire que le Québec va vibrer, va pouvoir exporter, va pouvoir remplir son rôle, sa fonction et jouer un rôle déterminant dans la société dans laquelle nous vivons.

Je disais plus tôt, M. le Président, que nous avons tous endossé des concepts de social-démocratie des années soixante. Et ce pourquoi je parle de social-démocratie des années soixante, c'est que je pense sincèrement que ce discours est démodé. Ce discours est démodé parce qu'on s'en est servi à une époque à laquelle nous avons cru, mais de plus en plus nous parlons désormais de la redistribution de possibilités, la redistribution de ce qui fonctionne, la redistribution des opportunités. Et, si on veut plutôt maintenir ce que j'appelle des clichés millésimés 1968, je pense que ce ne sont là que des clichés qui ne marchent plus dans notre société et qu'il va falloir changer.

Et je pense, M. le Président, que les Québécois sont tout à fait conscients, de plus en plus conscients, non seulement sont-ils de plus en plus conscients, mais ils le disent constamment, que le fardeau fiscal est un boulet qu'ils doivent porter, qu'ils doivent assumer et un fardeau fiscal qui les prive d'opportunités. Rappelons-nous, M. le Président, que l'écart entre le Québec et l'ensemble du Canada – je vous épargnerai de parler de l'Ontario – est de plus de 5 000 000 000 $ au niveau du fardeau fiscal. C'est donc un boulet important, un boulet que les Québécois veulent diminuer, parce qu'ils le savent bien, eux, qu'ils sont capables d'avoir des opportunités, ils le savent bien, eux, qu'ils sont capables d'alimenter le développement économique de cette province, ils en sont parfaitement conscients. Et, M. le Président, je pense qu'il est vital que nous abordions cette question de façon urgente et que ce débat ait lieu aujourd'hui et qu'on maintienne à l'ordre du jour ces questions fondamentales qui vont faire que nous allons être une société qui va se développer, une société qui va faire que nous serons fiers de jouer un rôle dans le monde dans lequel on vit.

Pour ça, il faut croire, il faut croire en la croissance économique. Je me rappelle, lors d'une commission que nous avons eue avec le ministre des Finances, quand j'ai dit qu'en mettant cet argent dans l'économie... Le ministre des Finances n'était pas très sûr que cet argent allait circuler au sein de l'économie et rester, finalement, créer des emplois autant qu'on pouvait le croire. Bien, il va falloir que le ministre des Finances y croie. Et d'ailleurs c'est pour ça que j'ai demandé, dans cette motion, que l'Assemblée nationale la fasse sienne, à l'effet que le haut taux d'impôts diminuait l'emploi, parce que je pense que c'est là une avenue importante. Et je suis contente, finalement, que le ministre des Finances ait reconnu ça.

Il faut y croire non seulement de façon idéologique, M. le Président, il faut croire à nos petites entreprises. Il faut croire à nos jeunes qui partent des petites entreprises et qui doivent se voir donner des possibilités. Parce que souvent j'ai entendu plusieurs anecdotes de jeunes qui partaient des entreprises, qui allaient dans des foires internationales et qui se voyaient tout à coup octroyer des contrats qu'ils ne pouvaient même pas remplir tant ils étaient peu équipés. Alors, ces jeunes avaient fait des découvertes, avaient commercialisé des produits qu'ils pouvaient exporter. Il faut croire en ces gens, croire dans le potentiel de nos jeunes et nous assurer que nous allons donner aux Québécois de l'air, de l'espace et une possibilité de dépenser et de pouvoir s'enrichir sans tout donner au fisc québécois, comme c'est le cas notamment au niveau de plusieurs familles qui se voient parfois taxer un dollar additionnel de revenus à plus de 100 %.

Je pense que c'est là un exemple qui fait que le fardeau fiscal est intolérable. Des taux marginaux de 60 %, 70 %, 80 % et 100 %, c'est là un phénomène inacceptable, M. le Président. Et je pense que c'est la raison pour laquelle il va falloir aujourd'hui mettre fin à cette situation et baisser les impôts de 5 000 000 000 $ dans une période de cinq ou six ans, du moins développer un plan à cet effet. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officielle de l'opposition en matière de finances. Nous allons céder maintenant la parole au vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, d'abord, je veux remercier l'opposition de remettre en lumière une phrase que j'ai prononcée, pas dans le dernier budget mais dans le précédent, qui exprime exactement le fond de ma pensée et de celle de notre gouvernement. Et cette phrase, c'est: «Trop d'impôt tue l'emploi.» C'est ma conviction profonde. Et elle était d'ailleurs partie d'une série de phrases à tiroir.

Il y a une phrase avant ça que vous auriez pu citer aussi, et on aurait voté pour la motion de la même façon. Nous allons voter pour la motion. Vous mettez en lumière: «Trop d'impôt tue l'emploi». L'autre phrase, c'est: «Trop d'impôt tue l'impôt.» Et c'est une conséquence logique de l'autre, parce que, si trop d'impôt tue l'emploi, il y a moins de gens qui vont payer des impôts. Trop d'impôt tue l'impôt. Alors, j'aurais aimé, puisque l'imitation est le plus sincère des compliments, que vous m'ayez fait le compliment plus complet encore en citant les deux phrases. La prochaine fois, vous pourrez faire une motion en disant: «Trop d'impôt tue l'impôt», puis on votera pour aussi. Donc, pour ça, je vous remercie.

(10 h 20)

Je vous remercie aussi de me donner l'occasion pour la nième fois de mettre en lumière que ceux qui ont illustré parfaitement la phrase – on pourrait en faire un cas dans les facultés de sciences économiques d'Occident – c'est ceux qui nous ont précédés. Et c'est mathématique. Ça va faire un beau cas. Des fois, dans les facultés, on étudie des cas compliqués. Même le prof a de la misère à comprendre. Là, professeurs et étudiants vont comprendre facilement que, durant les quatre ans qui nous ont précédés, il s'est créé au Québec zéro emploi. Alors, tuer, ça ressemble à zéro. L'électroencéphalogramme plat, c'est la mort. Or, en termes d'emploi, ça a été électro plat pendant quatre ans. Or, ce qui vérifie parfaitement la thèse et qui est l'objet de la motion, c'est que, pendant ces quatre ans là, s'est abattue sur la tête de nos concitoyens et concitoyennes une invraisemblable pluie d'impôts. Alors, on ne pouvait pas illustrer de manière plus éclatante que trop d'impôt tue l'emploi.

Je les rappelle brièvement – parce que j'ai une formule allongée, quand je les dis au complet, le Président m'arrête; j'appelle ça ma litanie puis il trouve que c'est trop long – c'est les taxes que les libéraux ont imposées durant leur dernier mandat. Alors, j'ai une formule simplifiée de la litanie. Vous n'êtes pas obligés de répondre après chaque invocation. Laissez faire!

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Amen!

M. Landry: Non, «Amen», ça serait comme si on était complaisant puis qu'on était d'accord. Si on répondait comme aux litanies des saints d'autrefois, on dirait: C'est la faute aux rouges. Mais je ne vous demande pas de le faire. Mais je les commence, les litanies: 960 000 000 $ d'impôts supplémentaires au Québec en 1990-1991, 1 900 000 000 $ en 1991-1992, 2 200 000 000 $ en 1992-1993, 3 300 000 000 $ en 1993-1994 et 2 400 000 000 $ en 1994-1995. Total: 10 800 000 000 $ d'impôts de plus...

Une voix: C'est la faute aux rouges.

M. Landry: ...et, durant la même période, emploi, zéro. Trop d'impôt tue l'emploi, CQFD, c'est bien ce qui était à démontrer. J'imagine que c'est ça que l'opposition voulait faire par sa motion. L'opposition ne l'a pas fait qu'en paroles, elle l'a fait en actes et elle l'a démontré d'une façon immortelle, parce que je ne crois pas que les Québécois et les Québécoises jamais ne veuillent reconnaître un tel cauchemar qui a laissé dans nos finances publiques, hélas, des traces profondes, non pas indélébiles, parce que des traces indélébiles, ça ne s'efface pas, mais des traces profondes qu'on est en train d'effacer, mais avec quelle difficulté, avec quelle patience. Je vous fais un petit état de ces traces.

Les libéraux ont laissé les finances publiques dans un état lamentable: déficit de plus de 4 000 000 000 $ à chaque année de leur dernier mandat, avec le record absolu de tous les temps, à la dernière année du dernier mandat, pour 6 000 000 000 $, le déficit le plus élevé de l'histoire du Québec.

Nous avons établi un précédent, il y a quelques semaines, M. le Président. Pour la première fois en 40 ans, les finances publiques du Québec sont équilibrées, un record qui restera gravé longtemps dans l'imaginaire public québécois, que le Parti québécois a mis fin à 40 ans de déficits consécutifs. Mais ce qui doit rester dans l'imaginaire québécois aussi, M. le Président, c'est que le Parti libéral a fait le déficit le plus élevé de l'histoire du Québec, à près de 6 000 000 000 $, en 1994-1995.

Qui dit déficits – évidemment successifs – dit hausse de la dette. Tout ça va s'accumuler sur une immense montagne déficitaire dont nous avons commencé la désescalade, au moins de façon relative. Alors, la dette a plus que doublé sous l'administration libérale. C'est sûr, quand on accumule les déficits annuels, la montagne de la dette augmente. Ils ont pris la dette du Québec à 31 600 000 000 $, en 1985-1986, on s'en souvient, et, avec les conventions comptables du temps, en 1994-1995, ils l'avaient fait passer à 74 000 000 000 $. Alors, c'est un changement à peu près du simple au double.

En termes de produit national brut, c'est également très éprouvant de constater qu'en 1985-1986, quand le Parti québécois a quitté le pouvoir, la dette du Québec était à 29,2 % du PIB. Quand les libéraux ont quitté le pouvoir, en 1994-1995, elle était rendue à 43,5 % du PIB. Qu'on prenne ça sous tous les angles, en chiffres absolus, en chiffres relatifs, qu'on le prenne sous l'angle du déficit annuel ou de la dette, les libéraux ont battu les records de tous les temps et ont prouvé d'une façon éblouissante que trop d'impôt tue l'emploi en même temps.

Ça a eu des conséquences sur les Québécois et les Québécoises, les milliers et les milliers et les centaines de milliers de personnes qui n'ont pas eu d'emploi à cause de ces excès et à cause de ces négligences. Ça a eu un impact démoralisant sur tous les autres, même ceux qui ont des emplois, puisque leurs impôts ont monté d'une façon outrancière. Et, en plus, ça a eu un impact sur l'ensemble de l'économie, parce que, pour faire face aux mêmes besoins, les entrepreneurs sont obligés de faire des efforts supplémentaires pour donner à leurs travailleurs et à leurs travailleuses au moins l'indexation, et mieux, si c'est possible, pour maintenir leur pouvoir d'achat.

Mais il y a eu une conséquence extérieure à conséquence interne qui aussi doit être soulignée, et c'est celle de ce que les étrangers maintenant pensent de nous. On pourrait dire: On s'en fiche de ce que les étrangers pensent de nous! Ce ne serait pas bien de dire ça. Je ne connais pas un peuple de la terre qui se fiche de ce que les étrangers pensent de lui. Il n'y a pas un peuple qui aime ça être considéré comme négligent dans la gestion de ses finances publiques ou dans quelque autre travers national qu'on lui attribue.

Mais, dans le cas de l'administration libérale, les étrangers en question étaient notamment les agences de crédit, parce qu'une partie de notre dette est financée précisément par des étrangers. Nous avons emprunté à New York, à Boston, à Londres et à Zurich, et les gens de New York, Boston, Londres et Zurich, ils ne viennent pas voir la critique de l'opposition officielle ou ils ne viennent pas faire des sondages sur la rue, au Québec, ils appliquent des critères mathématiques extrêmement rigoureux que leurs puissants ordinateurs calculent, et ils cotent, ou décotent, ou recotent. Alors, qu'est-ce qui est arrivé? Quand ils ont vu ce qui se passait au Québec, à cause de la négligence de nos prédécesseurs, bien, ils les ont décotés six fois au cours de leur mandat: une fois, Standard & Poor's, deux fois Moody's, une fois Dominion Bond Rating Service, et deux fois Canadian Bond Rating Service, avec le résultat...

Et ma collègue, dans le métier qu'elle faisait avant, avait bien compris le péril de cette affaire, et je la cite, elle a écrit dans le journal Les Affaires , un titre bien choisi d'ailleurs – j'espère que c'est elle qui a choisi le titre, parce que des fois ce n'est pas l'auteur de l'article qui le choisit... Elle dit que c'est elle qui a choisi le titre. Le titre est bien choisi, il est même poétique: Quand Wall Street se promène sur la Grande Allée – c'est bien trouvé. Et celle qui est maintenant la critique officielle de l'opposition et la critique de l'opposition officielle disait: «Si la cote annuelle de Standard & Poor's de A plus était abaissée à A, il nous en coûterait 100 000 000 $ de plus par année.» Alors, elle était bien placée pour apprécier, du temps où elle était journaliste et chercheuse, le gâchis libéral. Maintenant qu'elle vit dans ce sérail au jour le jour, elle est encore plus près pour constater la situation catastrophique.

(10 h 30)

Alors, on va se détourner un peu du passé, que, je pense bien, tout le monde a compris, pour maintenant regarder le présent et l'avenir. Le présent et l'avenir, c'est que ce gouvernement n'a pas à être convaincu que l'impôt doit baisser, parce que trop d'impôt tue l'emploi, oui, mais parce que trop d'impôt en soi, pour nos concitoyens et nos concitoyennes, peut constituer une injustice, un fardeau indu, un découragement au travail et à l'entrepreneurship. C'est pourquoi nous avons commencé la désescalade.

Mais, pour commencer la désescalade, il y avait une opération extrêmement difficile à réaliser, qui était de mettre fin au déficit. Ça a été fait un an plus tôt que prévu, avec une pente relativement raide, mais qui a quand même préservé le consensus social. L'objectif de déficit zéro et son calendrier d'application ont été décidés dans un sommet économique célèbre, auquel les agents de l'économie ont tous et toutes contribué, et ça nous a permis de passer donc de 6 000 000 000 $, suivant une pente qui est bien connue, c'était 3,2, 2,2, 1,2, 0 et nous en sommes à ce chiffre maintenant. Ça veut dire que nous pouvons considérer des baisses d'impôts de plus en plus importantes et de plus en plus considérables, je l'espère.

Mais, avant de parler des baisses d'impôts que nous ferons, je veux parler de celles que nous avons déjà faites. Malgré cet effort inouï pour passer de 6 000 000 000 $ de déficit à zéro, nous avons baissé les impôts des particuliers déjà, dans le budget 1998-1999, de 841 000 000 $ pour les personnes physiques. Ça veut dire que ceux et celles qui gagnent moins de 50 000 $ par an ont déjà joui d'une baisse d'impôts de, moyenne, 15 %, et ceux qui sont en haut, eux aussi, dans des proportions beaucoup moindres, ont baissé leurs impôts d'une moyenne de 3 %.

Le mouvement se démontre en marchant, et le plus long des voyages ne fait toujours que commencer par le premier pas. Le premier pas, il est fait. Est-ce que d'autres s'en viennent? Oui, et ils sont déjà annoncés. D'ici la fin de notre présent mandat de gouvernement, notre idéal est de baisser les impôts, au minimum – et j'expliquerai ce minimum par la suite – de 1 300 000 000 $. Mais déjà, au 1er juillet 2000, une première baisse de 400 000 000 $ prendra effet. Si l'on ajoute ce projet aux 841 000 000 $ que nous avons faits, nous allons réduire les impôts de 2 100 000 000 $, soit une réduction globale de 15 %.

Ça, comme la critique de l'opposition l'a dit, c'est fait dans une hypothèse prudente. On a fait des hypothèses de croissance prudentes d'autour de 2 %, alors que certaines agences privées et publiques plus optimistes font des prévisions d'autour de 3 %. Il y a une banque, la canadienne impériale de commerce, qui a prévu pour le Québec une croissance de 3,1 %; il y a une autre banque, la Banque Nationale, qui, elle, a prévu 2,9 %; et d'autres un peu moins, mais personne plus que CIBC.

Espérons que nous nous sommes trompés dans le bon sens. Les libéraux, eux, se sont trompés des années de suite dans le mauvais sens. C'est ce qui a conduit au déficit que l'on connaît. Pendant des années, toutes leurs prévisions économiques étaient assimilées, dans les milieux compétents, à des blagues plutôt qu'à des prévisions. Nous, nous faisons des prévisions conservatrices, il est vrai, mais qui nous ont permis de dire à la population: Nos promesses sont remplies. Ce que nous avions dit de fondamental, l'atteinte du déficit zéro, est faisable et fait. Alors, si nous nous sommes trompés dans le bon sens, M. le Président, je vous dis, comme le premier ministre l'a dit et comme nos porte-parole l'ont répété à plusieurs reprises: Nous irons plus vite et nous irons plus loin, et nous diminuerons davantage les impôts que les chiffres que j'ai déjà communiqués.

L'économie tient le coup. L'économie du Québec, celle de la grande région de Montréal en particulier, est dans une forme qu'on a rarement vue. Et, si elle est moins en forme dans les régions, ce n'est pas parce que les régions ne travaillent pas bien et qu'il n'y a pas d'entrepreneurs en région, c'est parce qu'il y a une conjoncture mondiale qui affecte plusieurs de nos régions. Et cette conjoncture mondiale, évidemment c'est l'affaissement du prix des matières premières, qui a connu quand même une certaine vigueur au cours des dernières semaines. Mais c'est sûr que, si les prix de l'aluminium, du cuivre, du fer, du zinc et autres métaux ont tendance à se tasser, il y a forcément des régions du Québec, malgré tous leurs mérites, malgré tous leurs efforts, qui connaissent des difficultés.

Mais les régions qui ne sont pas des régions-ressources, disons la grande région de Montréal, la grande région Hull–Gatineau, la grande région de notre capitale nationale et quelques autres au Québec qui ne sont pas trop dépendantes des ressources naturelles connaissent une économie florissante.

Je dis souvent, et je vous le redis ce matin, M. le Président: Nous sommes contents mais non satisfaits. Ça veut dire contents que le chômage ne soit plus à 14 %, mais non satisfaits de voir qu'il est encore autour de 10 %. Et il y a encore beaucoup de chemin à faire, il y a encore beaucoup d'efforts à faire, mais, si ça se poursuit comme c'est parti...

Je crois que, dans ma vie d'homme, je n'ai jamais vu l'économie de Montréal aussi en forme. J'ai bien vu Expo 67, j'ai bien vu des milliers de camions faire naître des îles dans le Saint-Laurent, et j'ai vu le métro de Montréal se construire, et j'ai vu les autoroutes et les voies de toutes sortes pour améliorer nos infrastructures. C'était spectaculaire, c'était fantastique, sauf que ça n'a jamais ajouté un emploi à notre base industrielle. C'était très bien, mais ce n'était pas comparable aux 40 000 emplois qu'on a maintenant dans l'aérospatiale. Parce que l'Expo, ça a duré l'espace d'un seul été.

L'aérospatiale, dont Montréal est une des villes les plus représentatives du monde... Il y a quatre villes au monde qui comptent en aérospatiale: Seattle – nom associé à Boeing, bien entendu – Wichita, Toulouse et Montréal. Et Toulouse, qui est un fabuleux centre, a 25 000 emplois; Montréal en a 40 000. Et les gens de l'aéronautique, de l'aérospatiale prévoient une croissance avec des dents de scie, des hauts et des bas, mais de 5 % par année pendant les prochaines 25 années. Alors, c'est plus, ça, que de conduire des gros camions de terre dans le Saint-Laurent pour faire des îles, hein. Ça va laisser des traces durables. Si tout ça se produit, nous baisserons les impôts davantage.

Mais ma collègue de l'opposition m'a surpris quand elle a évoqué les États-Unis. Qu'elle évoque l'Ontario, passe encore, j'y reviendrai. C'est vrai que l'écart avec l'Ontario est gênant, mais ça peut se relativiser aussi, j'en reparlerai. Mais, quand elle parle des États-Unis, bien là un instant! Je ne rêve pas, M. le Président, d'avoir le niveau d'impôt des États-Unis d'Amérique parce que je ne rêve pas d'avoir leur système de santé. C'est aussi simple que ça.

Dans nos impôts, nous, on paie notre système de santé. Allez demander aux dirigeants de General Motors s'ils préfèrent avoir à payer un système de santé privé à leurs travailleurs à Détroit, ou s'ils ne sont pas très contents du système de santé qu'ils retrouvent à Oshawa, Ontario, ou qu'ils retrouvent à Boisbriand, Québec. Poser la question, c'est y répondre. Et ce n'est pas juste en termes économiques, c'est en termes humains aussi.

Une de nos fiertés, M. le Président, et j'espère que la critique de l'opposition officielle devrait considérer sérieusement de partager la même fierté, c'est qu'au Québec quelle que soit la classe sociale, quelle que soit le degré de fortune ou de richesse, si quelqu'un fait un infarctus du myocarde dans les rues d'une de nos villes, il viendra une ambulance lourde qui le conduira dans un centre hospitalier de premier ordre dans les huit minutes ou, en tout cas, dans le plus bref délai, et il aura des soins, qu'il soit un privilégié de la fortune ou qu'il soit un clochard, qui seront exactement les mêmes. Alors, pour ça, je suis prêt à avoir une différence d'impôts. Pour ça, je suis prêt à avoir une différence d'impôts! C'est pour ça qu'il faut faire une distinction quand on compare les États-Unis et le Québec ou l'Ontario. En Ontario aussi, il y a un système public de santé. Alors, là, c'est plus comparable.

Et j'en arrive donc à la comparaison avec l'Ontario. Il y a divers ouvrages qui font des comparaisons avec l'Ontario, le rapport Bédard, en particulier, sur les finances municipales, diverses publications. Mais il y a aussi un journaliste qui a produit un document concentré mais d'une pertinence stupéfiante. Il s'agit de M. Robert Dutrisac, journaliste au Devoir , qui opérait à partir de Montréal, généralement, mais là qui a rejoint les forces du Devoir ici, sur la colline parlementaire, à Québec. Et ça illustre... Je ne veux pas être flagorneur pour M. Dutrisac – peut-être que demain il va nous planter au bout, puis c'est son droit le plus absolu parce que c'est ça, un bon journaliste – c'est quelqu'un qui nous apprend des choses, même si ces choses sont critiques.

À la lecture des journaux... Les gens de politique lisent les journaux ce matin, comme tous les autres matins. Et il y a des journalistes qui nous rendent de véritables services. Parce qu'on n'a pas le temps de tout chercher et de tout fouiller tout le temps, et eux, par métier, ceux qui le font de façon consciencieuse, c'est-à-dire le plus grand nombre d'entre eux, ils font des recherches pointues qui sont très utiles pour les gens de politique comme pour la population en général. M. Dutrisac, il a fait ça.

(10 h 40)

Et là qu'on me comprenne bien. Je ne veux pas dire que nous ne devons pas le plus rapidement possible rejoindre les impôts de l'Ontario, mais je veux dire que, quand on aura fait ça, le Québec sera une fantastique place où vivre parce qu'il l'est déjà. Savez-vous quel est le titre de l'article de M. Dutrisac dans Le Devoir du jeudi 6 mai? Il vaut mieux vivre à Montréal . C'est bien un titre aussi bon, ça, que celui de l'article de la critique de l'opposition officielle. Pourquoi vaut-il mieux vivre à Montréal? M. Dutrisac nous donne une série de raisons impressionnantes.

Le logement. Le logement, vous savez c'est quoi dans les finances des familles? Quand ça dépasse le quart, disait la vieille sagesse de nos parents, c'est rendu critique. Donc, c'est 25 %, plus ou moins, des finances familiales. Bien, «le logement à Toronto: ce n'est pas une sinécure», dit M. Dutrisac. «Les loyers sont en général au moins deux fois plus chers qu'à Montréal. On trouve bien un quatre et demi à 500 $ ou 600 $ par mois à Montréal; il sera de 1 200 $ à Toronto», pour des jeunes ménages, des jeunes couples, des étudiants et des étudiants. Quand ils pensent aux impôts québécois, il faut leur rappeler de penser aux loyers montréalais.

Mais il y a beaucoup plus que ça. Si on en a assez, à Toronto, de payer des gros loyers... Je dis, en passant, qu'à Montréal et au Québec, si les loyers sont moins élevés, ce n'est pas par l'opération du Saint-Esprit, là, c'est nos législations progressistes, c'est notre Régie du logement, et ainsi de suite. C'est l'intervention collective et sociale de notre État national qui fait que nous avons la fierté de dire que deux étudiants vivant rue Sanguinet, à Montréal, aujourd'hui, payent deux, trois fois moins cher qu'à Toronto.

À Toronto, quand ils sont tannés, ils peuvent toujours s'acheter une maison, hein. Mais qu'est-ce qui arrive quand ils s'achètent une maison? À Toronto, il leur «faudra débourser environ 250 000 $ pour une demeure moyenne, ce qu'on peut obtenir pour 150 000 $ à Montréal». Alors, le petit impôt de plus ou de moins que tu as payé, il est vite mangé quand l'hypothèque arrive, là. Il y a eu une effervescence spéculative du marché à Toronto, et certains propriétaires ont fait le pactole, mais d'autres se ramassent avec des hypothèques de 200 000 $ sur le dos, alors que la propriété ne vaut plus ce qu'elle valait au moment où l'institution bancaire a consenti l'hypothèque. Alors, vous voyez le genre. À chaque mois, des paiements hypothécaires.

Les garderies maintenant. Bien, attendez. Avant, je vais rester dans l'immobilier. Le gouvernement Harris a augmenté les taxes municipales et les hausses ont été refilées aux locataires. Quelques centaines de dollars de plus par année, après ce que j'ai dit des loyers, hein. Bon.

Les garderies. Il en coûte de 800 $ à 1 200 $ par mois pour envoyer son enfant dans une garderie ontarienne. Ici, à 5 $ par jour, il y a bien cinq jours gardables par semaine, si je peux employer cette expression-là, hein. Alors, ça fait 100 $ par semaine multipliés par quatre... Non, ça ne fait pas 100 $ par semaine, ça fait 25 $ par semaine multipliés par quatre. Ça fait 100 $ par mois comparés aux 800 $ à 1 200 $ par mois en Ontario.

Les frais de scolarité maintenant. Si, d'aventure, vous pensez envoyer votre progéniture, en Ontario, dans une école privée, parce qu'il n'y a pas d'école francophone à proximité, par exemple, ce qui arrive en Ontario, il vous en coûtera près de 12 000 $ par année. Pour fins de comparaison, là, un des meilleurs collèges de Québec et de Montréal, celui qui a formé un certain Pierre Elliott Trudeau – qui n'avait peut-être pas toujours des bonnes idées mais qui était au moins un bel esprit, bien formé – ça coûte 3 000 $. Il aurait peut-être été mieux d'être un peu moins bien formé puis de comprendre un peu mieux la question québécoise, mais en tout cas on ne fait pas le procès de Trudeau, on parle des taxes et des impôts.

L'assurance automobile, une autre réalisation du gouvernement péquiste, comme les garderies à 5 $ par jour. Alors, il n'y a pas de régime d'État comme au Québec. Il peut en coûter de 500 $ à 1 000 $ par année pour assurer son automobile. Si tu avais une petite différence d'impôts de 254 $, juste pour assurer ta bagnole, tu t'en fais manger 500 $ à 1 000 $, de plus, j'ai bien dit.

Alors, toutes ces dépenses mises bout à bout démontrent qu'il en coûte beaucoup plus cher de vivre à Toronto qu'à Montréal. Et, selon la fiscaliste – on revient, là, dans le domaine fiscal plus global – Nathalie Joron de KPMG, il en coûtait l'an dernier entre 2 400 $ et 7 200 $ de plus par année pour vivre dans le grand Toronto, en calculant les économies d'impôts. Et Mme Joron ne tenait compte que du facteur immobilier. Une étude du ministère des Finances du Québec publiée l'an dernier pour le budget établit des comparaisons de coût de la vie, y compris la fiscalité, donc les taxes, à Montréal et dans différentes villes d'Amérique du Nord. L'étude établissait entre 5 % et 10 % l'écart entre Montréal et Toronto, en faveur de Montréal.

Enfin, une dernière fierté du Québec. Le Québec a une courbe d'impôts sociale-démocrate. M. Harris n'a jamais prétendu qu'il était un social-démocrate. Il a raison, et c'est son droit. Mais, nous, nous sommes plus de l'école de Lionel Jospin, de Tony Blair ou de Gerhard Schroeder; nous sommes parmi les progressistes occidentaux. Et notre courbe d'impôts, elle reflète cela. Alors, pour les gens à revenus modestes, l'écart Montréal ou Québec–Ontario était de 23 %. C'est-à-dire qu'une personne seule avec un revenu annuel de 15 000 $, par exemple, disposait d'un pouvoir d'achat de 33 % supérieur à Montréal, donc au Québec, comparé à Toronto, donc en Ontario. C'est extrêmement considérable.

Tout ça pour dire, M. le Président, qu'il faut baisser les impôts. Oui. Tout ça pour dire, M. le Président, que notre population n'a pas à s'ameuter non plus, et elle le sait, quand même, avec beaucoup de sagesse. Notre courbe d'impôts fait que quelques millions de nos contribuables ne paient aucun impôt au Québec. Alors, ils ne peuvent pas être frappés par les différences Québec-Ontario. Notre courbe d'impôts fait que, pour un couple, deux enfants, 40 000 $ et moins, l'impôt est moins élevé au Québec qu'en Ontario. Et, pour les autres, en haut, on a vu les ravages que peuvent faire le prix des maisons, le prix des loyers, les garderies, les frais de scolarité.

Il faut donc être prudent, essayer de savoir compter. Et là je vais rappeler ici à la population – ils l'ont entendu d'ailleurs – que le chef de l'opposition officielle, donc le chef de notre critique ici présente ce matin, a dit dans cette Chambre, en me posant une question, que l'écart entre l'impôt au Québec et en Ontario était de 60 %. Vous vous rappelez de ça? Vous étiez en Chambre. Cet écart est de 30 %. Comment se fait-il qu'un personnage qui doit être un des plus documentés de cette Chambre, le chef de l'opposition officielle, qui, lui, n'a pas à gouverner comme nous et à occuper d'écrasantes responsabilités de gouvernement, puisse se tromper du simple au double dans un facteur vital? Ce n'est pas un détail, là, ce n'est pas se tromper sur la prévision de la température de demain, qui est toujours une chose aléatoire, de toute façon, et ça dépend d'Ottawa; c'est se tromper sur l'écart d'impôts entre le Québec et l'Ontario. Qu'est-ce que c'est sinon, ça, que vouloir rabaisser le Québec soit volontairement ou soit par légèreté?

Il y a bien un service de recherche à l'opposition. Ma collègue, qui était elle-même en recherche avant, qui a dirigé des instituts, qui est une économiste chevronnée, devrait se donner comme obligation pédagogique dans les mois qui viennent – ça peut prendre des années aussi – d'éduquer un peu son chef, de lui montrer à compter. Il pourrait contribuer au mieux-être du Québec. Il pourrait s'acquitter mieux de son rôle de chef de l'opposition officielle.

Je vais terminer en disant, M. le Président, que, si j'ai relativisé pour le Québec et l'Ontario, ça m'apparaissait une question de justice, une question de rassurer notre population quant à la réalité québécoise, économique et fiscale. Mais ce n'était d'aucune manière pour atténuer la phrase qui est l'objet de cette motion, que j'ai prononcée et que je reprononce, et c'est pourquoi le gouvernement votera pour la motion: Trop d'impôt tue l'impôt, trop d'impôt tue l'emploi.

(10 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le vice-premier ministre et ministre d'État aux Finances et du Revenu. Avant de poursuivre notre débat, permettez-moi de vous rappeler les règles de notre débat. Bien entendu, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys aura une réplique de 10 minutes à la toute fin de notre débat. Cinq minutes sont habituellement allouées et seront allouées aux députés indépendants. Et le temps restant est partagé à parts égales entre les deux formations parlementaires. Le temps non utilisé par une formation sera alloué à l'autre formation. Et, vous le savez tous, le temps de débat est illimité.

Alors, nous poursuivons notre débat en vous mentionnant que Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys a déjà utilisé 15 minutes et M. le vice-premier ministre a déjà utilisé 32 minutes. Nous cédons maintenant la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. À mon tour de supporter l'excellente motion présentée par la députée de Marguerite-Bourgeoys:

«Que l'Assemblée nationale fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi.»

Et une raison additionnelle pour voter sur cette motion, c'est que le ministre des Finances, lui-même, reconnaît que trop d'impôt tue l'emploi. Je voudrais simplement quand même le rappeler, au début de son discours, il mentionnait que le gouvernement du Parti québécois a atteint l'équilibre financier, mais il a sûrement fait une petite omission, sûrement involontaire – je ne voudrais pas lui prêter d'intentions – celle de mentionner le chèque du gouvernement fédéral qui est arrivé juste quelques jours avant de pouvoir équilibrer son budget.

Je voudrais également rappeler, M. le Président, à quel prix l'équilibre financier a été atteint. Je pense aux patients dans les hôpitaux, je pense aux nombreuses fermetures d'hôpitaux du précédent mandat du gouvernement, aux coupures aveugles et à tout le gâchis dans la santé. L'actuelle ministre de la Santé est obligée de jouer au pompier. Elle était à Jonquière hier. Elle doit aller à d'autres endroits. Si on lit les nouvelles tous les jours, il y a des feux qui prennent dans différentes régions du Québec à ce sujet-là.

M. le Président, je voudrais aussi rappeler une déclaration du premier ministre, qui, dans le cadre d'un échange avec le chef de l'opposition, mentionnait, et je le cite: «Tout en admettant que le fardeau fiscal des contribuables québécois est presque intolérable, le premier ministre a déclaré qu'il n'avait pas l'intention de présenter un budget spécial pour corriger la situation, comme le souhaitait le chef de l'opposition, M. Charest.»

Le premier ministre et le ministre des Finances ont clairement indiqué... Et ils sont d'accord avec la prémisse que trop d'impôt tue l'emploi, trop d'impôt tue également l'impôt. Eh bien, pourquoi est-ce qu'ils ne font rien? Pourquoi est-ce qu'on n'a pas un budget additionnel qui permettrait la création d'emplois? Parce qu'il faut rappeler, M. le Président...

Je vais prendre une comparaison. Quelqu'un qui paie 100 $ d'effort fiscal, dans les différents pays industrialisés, quelqu'un qui paie 100 $ au Québec, eh bien, en Ontario, n'aurait payé que 93 $; à Terre-Neuve, 91 $; en Allemagne, 89 $. Ça, c'est toujours quand un citoyen du Québec paie 100 $. En Colombie-Britannique, il aurait payé seulement 89 $; en Angleterre, 84 $; en Nouvelle-Écosse, 85 $. Comment se fait-il qu'on est toujours les derniers? Nous sommes toujours les derniers, M. le Président, dans beaucoup de dossiers, dans l'emploi mais aussi dans la fiscalité.

Le gouvernement du Parti québécois mentionne aussi tout ce dossier du Pacte de l'auto qui favorise l'Ontario, quand on veut faire des comparaisons. Mais je me permettrais de citer un éditorialiste de La Presse bien connu qui parle des problèmes de comparaison entre l'Ontario et le Québec: «C'est qu'ils nous font rapidement quitter le terrain de l'économie pour nous amener sur le champ miné de la politique. Il suffit d'un sursaut de nationalisme primaire et hargneux pour expliquer que l'Ontario est plus riche parce qu'elle a profité de largesses dont le Québec a été privé», et il donne l'exemple du Pacte de l'auto.

Mais, M. le Président, on mentionne: «S'il n'y a pas eu de Pacte de l'auto au Québec, au Manitoba, en Colombie-Britannique ou à d'autres endroits dans le monde, pourquoi toujours dire: Eux autres, ils sont chanceux parce qu'ils ont cet avantage? Il n'y a pas de pétrole au Québec, il n'y a pas de mines de diamant sur le mont Sainte-Anne ou sur le mont Royal.» Alors, M. le Président, c'est toujours la faute des autres, alors que la véritable raison pourquoi le Québec est toujours le dernier, bien c'est parce que le fardeau fiscal... c'est parce qu'on charge trop d'impôt aux Québécois.

M. le Président, une étude qui a été faite par MM. Yves Chartrand et Claude Laferrière a clairement démontré que l'État fait main basse sur les augmentations de salaire. Alors, les Québécois sont frappés par des taux d'imposition réels de 60 %, voire de 100 % et plus aussitôt que leur revenu familial annuel passe le cap des 26 000 $. M. le Président, ça répond peut-être à la question que le ministre des Finances posait tantôt: Comment se fait-il qu'on est obligé, aussitôt qu'il y a une augmentation de salaire, de la redonner complètement à l'État?

Les personnes âgées, la situation n'aura jamais été aussi catastrophique. En matière de fiscalité, la situation des personnes âgées est déplorable – c'est toujours la même étude. M. le Président, les courbes de M. Laferrière, professeur en fiscalité de l'Université du Québec à Montréal, et de M. Chartrand, fiscaliste au Centre québécois de formation en fiscalité, révèlent qu'exclusion faite de la tranche de revenus entre 17 000 $ et 26 000 $ le taux marginal d'impôts d'une personne retraitée vivant seule est constamment au-dessus de 50 %. Il atteindra même des pointes de plus de 80 %. Entre 53 000 $ et 84 000 $, le taux réel d'imposition excède 60 %.

M. le Président, le ministre des Finances voulait rappeler les impôts qui ont été mis de l'avant historiquement au Québec, mais il a omis de parler des augmentations d'impôts dont il nous a fait part, impôts directs. L'augmentation de la taxe de vente de 1 %, c'est le gouvernement du Parti québécois qui a fait ça. Puis ça, ça limite la consommation quand on fait une augmentation, surtout au moment où on a des difficultés.

Deuxièmement, l'assurance-médicaments. Ça, c'est un impôt caché, un impôt indirect, un cadeau du gouvernement du Parti québécois. Alors que, sous le gouvernement libéral, les personnes aînées payaient, pour leurs prescriptions, 2 $ par prescription jusqu'à un maximum de 100 $ dans l'année, eh bien, sous le gouvernement du Parti québécois, maintenant un couple de personnes âgées va payer jusqu'à 1 500 $, 750 $ chacun, M. le Président. Alors, c'étaient toujours des impôts déguisés: impôt direct, je vous donne l'exemple de la taxe de vente, puis impôt indirect, l'exemple de l'assurance-médicaments. Il y en a plusieurs autres.

«Un régime fiscal fou, fou, fou», c'était Claude Picher qui le mentionnait. Et je vais aller rapidement, je sais que le temps passe, mais M. Picher donnait plusieurs exemples. Le régime fiscal québécois contribue puissamment à démotiver les travailleurs – et je pense qu'on le sait – il décourage l'investissement, la compétitivité. Il appauvrit les ménages à revenus moyens. C'est eux qui doivent supporter les programmes sociaux pour les plus démunis. Il encourage le travail au noir et l'évasion fiscale. Le gouvernement du Québec se plaint, avec raison, des pertes énormes que l'économie souterraine lui fait subir. Il alimente également l'exode des cerveaux. Et qui ne connaît pas dans son entourage soit une infirmière, un médecin, un informaticien, un ingénieur, un administrateur qui a dû quitter le Québec. Pourquoi? Parce qu'il y avait des avantages à d'autres endroits qu'au Québec.

(11 heures)

M. le Président, M. Picher déclare, à la fin de son article: Si au moins les Québécois pouvaient voir que leurs impôts exceptionnellement élevés servent à financer des services de qualité aussi exceptionnels, ce serait un moindre mal. Avec des routes superbes et bien entretenues, des soins de santé accessibles et rapides et d'une qualité supérieure à tout ce qui se fait en Amérique du Nord, un régime d'éducation hautement performant, une fonction publique remarquable par son efficacité, eh bien, si c'était ça, la lourdeur du fardeau fiscal serait sans doute plus facile à tolérer. Mais on paie, M. le Président, et on n'a pas de services.

Je regarde mes confrères qui ont à voyager sur la 20, sur la 40 ou à d'autres endroits du Québec lorsqu'ils viennent ici, il sont sûrement les témoins de tous les instants pour voir dans quel état sont rendues nos routes, M. le Président. Et j'ai suffisamment déjà parlé des hôpitaux, du système d'éducation. Mon collègue le critique de l'opposition officielle l'a mentionné également.

M. le Président, je voudrais, en terminant, souligner tout l'impact de cette fiscalité-là sur l'emploi. C'est M. Alain Dubuc, dans La Presse , qui dit: «Tranquillement, en douce, sans que personne n'en parle trop, le Québec est en train de perdre les emplois qu'il avait réussi à créer. Et la situation est d'autant plus troublante parce qu'on n'assiste pas à un tel recul de l'emploi à l'échelle pancanadienne.» Ce n'est pas le Parti libéral qui affirme ça, c'est M. Dubuc du journal La Presse .

M. le Président, en terminant, je voudrais de nouveau m'associer avec la députée de Marguerite-Bourgeoys, souligner l'excellence de sa motion, mais aussi son habileté, parce qu'elle aura été capable d'aller chercher un vote unanime, fort probablement, en cette Chambre, mais aussi de faire dire au ministre des Finances que trop d'impôt tue l'emploi. Mais, maintenant qu'il le reconnaît, est-ce qu'il peut prendre les moyens pour le régler, le problème de la fiscalité au Québec? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin et critique officiel de l'opposition en matière d'emploi.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Saint-Jean, s'il vous plaît! Alors, nous allons maintenant poursuivre notre débat. Nous cédons la parole au député de Johnson et également adjoint parlementaire au vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances. M. le député de Johnson.


M. Claude Boucher

M. Boucher: M. le Président. Je suis extrêmement fier d'intervenir sur une motion du Parti libéral et je suis heureux qu'elle soit présentée maintenant, en Chambre, en vous disant d'avance, de toute façon, que cette motion que le gouvernement va appuyer évidemment, puisque c'est le combat du gouvernement, la baisse des impôts et la création d'emplois, c'est ce à quoi s'attarde le gouvernement, notre gouvernement, depuis qu'il est au pouvoir, depuis 1994.

Compte tenu aussi des difficultés auxquelles le gouvernement a fait face à cause de la situation financière du Québec, lorsqu'il a pris le pouvoir, on doit dire d'ores et déjà que cette motion, «trop d'impôt tue l'emploi», est une motion qui tombe à point, puisque le gouvernement, justement, travaille sur cette question-là depuis cinq ans et est en train de réussir.

J'ai été étonné, par contre, que la députée de Marguerite-Bourgeoys fasse rapport aux difficultés économiques qu'on éprouve et qui sont généralisées. C'est des difficultés que le Québec éprouve, bien sûr, mais le Québec ne vit pas isolé, le Québec vit dans un ensemble économique très important et aussi bénéficie des conditions économiques qui sont favorables, mais aussi est pénalisé par les conditions économiques défavorables. Et ça dépasse largement la fiscalité à laquelle elle a fait allusion, la fiscalité des Québécois qui, semble-t-il – évidemment tout le monde le reconnaît – est difficile, qui impose trop d'impôts et trop de taxes aux Québécois.

Cette motion, M. le Président, aurait dû être présentée en Chambre en 1985. Quand les libéraux ont pris le pouvoir, en 1985, ils auraient dû présenter une telle motion et mettre en plan toute une organisation, des projets, des programmes pour faire en sorte que l'impôt des Québécois et aussi les conditions économiques du Québec s'améliorent. Mais ce n'est pas ce qu'ils ont fait. Et je sais que c'est tannant pour eux d'entendre parler de tout ce qu'on leur rappelle constamment par rapport à la façon dont ils ont géré le Québec pendant ces années-là, mais c'est important de le dire, puisqu'on ne rétablit pas une situation économique, fiscale et financière très détériorée en un tour de main, comme ça. Ce n'est pas magique, ça prend beaucoup de temps.

Nous nous sommes attardés à le faire. Nous avons commencé dès le début de notre mandat et nous sommes en train de réussir. Mais nous commencions extrêmement loin. Le vice-premier ministre, tout à l'heure, l'a rappelé, et je pense qu'il est important de le rappeler constamment. Les libéraux, pendant leurs années de pouvoir, de 1985 à 1994, ont augmenté les taxes et les impôts des Québécois de 10 000 000 000 $. Ce faisant, ils ont évidemment tué l'emploi, puisque, pendant le dernier mandat, ils ont créé zéro emploi; ils ont créé zéro emploi, alors qu'au Canada il s'en créait des centaines de milliers, d'emplois.

Dans ce contexte, M. le Président, c'est très intéressant de constater que cette motion arrive maintenant, alors qu'elle aurait dû arriver voilà justement 10 ans et qu'elle aurait dû être présentée par les libéraux. Ils n'ont rien fait. Les libéraux ont une vision de l'économie qui est assez particulière, pas dans la théorie, puisque, quand on regarde leur programme, on s'aperçoit qu'ils ont de très beaux projets, mais, quand ils prennent le pouvoir, les libéraux, ils laissent l'économie aller comme bon semble aux développeurs, aux gens qui créent les emplois ou qui devraient les créer. Ils n'ont pas mis en place des programmes de support, comme nous l'avons fait.

Non seulement les libéraux ont augmenté les taxes et les impôts de 10 000 000 000 $, mais ils ont multiplié les déficits. Vous le savez, nous nous le rappelons, mais il faut se le rappeler, chaque année, pendant ces années-là, ils ont défoncé leurs prévisions budgétaires d'une moyenne de 1 000 000 000 $ par année, ce qui, évidemment, faisait en sorte que les investisseurs perdaient confiance dans le gouvernement qui nous a précédés et les cotes du gouvernement, les cotes de crédit, vous le savez, M. le Président, ont constamment baissé durant leurs années de pouvoir.

Ils ont aussi – M. le vice-premier ministre y a fait référence tout à l'heure – ils ont doublé, plus que doublé la dette qui est passée de 31 000 000 000 $ à 74 000 000 000 $ entre 1985 et 1994. Ils ont même fait un déficit de 6 000 000 000 $ à leur dernière année de pouvoir. Ils avaient abandonné, à toutes fins pratiques, la gestion serrée, rigoureuse des finances publiques au Québec; ils avaient abandonné la partie. Les Québécois, évidemment, l'ont reconnu, puisqu'ils ont élu le Parti québécois en 1994.

Ce que nous avons fait depuis, eh bien, tout le monde le sait, mais c'est bon de le rappeler: nous avons décidé de réduire les dépenses de l'État, nous avons décidé de mettre en place des programmes pour créer des emplois, augmenter les revenus de l'État, et nous avons atteint une année plus vite que prévu le déficit zéro. Cette année, nous avons mis en place des mesures, vous le savez, M. le Président, qui vont favoriser le développement, la création d'emplois. Et il faut voir ce que nous avons fait au niveau de la fiscalité des entreprises notamment, puisque nous savons que ce sont les entreprises qui créent des emplois. Ce n'est plus le gouvernement qui crée des emplois, ce sont les entreprises. On a découvert et reconnu ça maintenant.

Il faut reconnaître, et il faut le dire, contrairement à ce que nos adversaires disent, que, globalement, le fardeau fiscal des entreprises est très compétitif quand on le compare aux économies concurrentes. Notre objectif au Québec étant de favoriser le développement économique et la création d'emplois, nous avons pris des mesures pour faire en sorte que notre fiscalité soit compétitive. Nous avons donc un niveau global qui est très intéressant au Québec, contrairement à ce que nos adversaires disent.

Les travaux qui ont été menés par la firme Price Waterhouse sont à cet égard, M. le Président, très révélateurs. Quand on additionne tous les impôts et taxes payables par une grande entreprise au Québec – on parle des impôts sur les profits, des taxes sur le capital, sur la masse salariale, les taxes foncières, etc. – on constate que le fardeau fiscal d'une grande entreprise au Québec est égal à ce qu'il serait si elle était en Ontario. Mais, par rapport aux États-Unis, notre fardeau est de 30 % plus faible que celui du Massachusetts, par exemple, ou 27 % plus faible que celui du Michigan, 33 % plus faible que dans l'État de New York, 24 % plus faible qu'en Pennsylvanie. L'avantage du Québec est du même ordre pour les petites entreprises. Le fardeau fiscal d'une petite entreprise du Québec est égal à celui qu'elle aurait en Ontario. Il est 26 % plus faible que dans le Massachusetts, 22 % plus faible que dans le Michigan, 33 % plus faible que dans l'État de New York, 20 % plus faible qu'en Pennsylvanie. Cela peut expliquer d'ailleurs, M. le Président, pourquoi les exportations du Québec vers les États-Unis ont presque doublé depuis le libre-échange et sont en nette croissance constamment.

(11 h 10)

Dans la région de l'Estrie, dont je représente une circonscription électorale, ici, à l'Assemblée nationale, on s'aperçoit que toute notre région est en train de se développer en fonction du marché Nord-Sud, en fonction du grand marché des Américains. Et c'est grâce justement à nos politiques de libre-échangisme du Québec qu'on a réussi ça, mais c'est grâce aussi à notre fiscalité, qui est très concurrentielle et même avantageuse par rapport à beaucoup d'États américains.

Par ailleurs, on sait que le régime de TVQ est très favorable aux entreprises du Québec. Par rapport à l'Ontario, par exemple, la TVQ confère un avantage de plus de 1 000 000 000 $ aux entreprises du Québec. Au total, nos calculs établissent l'avantage global des entreprises du Québec à 906 000 000 $ en 1999. Alors, on est loin des scénarios d'horreur et de catastrophe dont nous parlent nos adversaires; bien au contraire, et on le voit bien sur le terrain d'ailleurs.

Combien de nouvelles entreprises, actuellement, s'installent au Québec ou font des investissements pour se développer davantage, pour créer des emplois? Juste dans ma région, M. le Président... Pourtant nos amis libéraux sont bien représentés dans ma région et ils ont six des sept comtés, je suis le seul rescapé de cette vague libérale dans la région de l'Estrie. Je ne comprends pas qu'ils ne reconnaissent pas que, dans notre région, il y a des projets d'entreprises grâce notamment à Investissement-Québec, Investissement-Québec que leur chef voulait abolir pendant la campagne électorale, s'il était devenu premier ministre. Vous imaginez les conséquences de ça, d'ailleurs.

Alors, ils ne se rendent pas compte que, dans la région de Lac Mégantic, dans la région d'Asbestos, où on a un projet d'investissement de plus de 750 000 000 $, création d'emplois directs de 350, le projet Magnola... Le gouvernement, d'ailleurs, ne s'en tient pas à annoncer ou à supporter des investissements de cette nature-là, le gouvernement supporte aussi la mise en place de groupes ou d'organismes qui travaillent à maintenir les emplois et à développer la transformation de la matière première, dans notre région. Par exemple, on supporte actuellement, grâce au fonds conjoncturel, un groupe qui s'appelle COMAX, dont l'objectif est de faire en sorte qu'on transforme le plus possible le magnésium qui sera produit à Asbestos dans la région d'Asbestos et dans la région de l'Estrie.

On a des projets formidables qui sont en plan, actuellement. Et le gouvernement, comme je vous le disais, M. le Président, travaille très fort pour faire en sorte qu'on ne répète pas l'erreur qu'on a faite dans l'aluminium, où on exporte notre aluminium, mais on le transforme très peu au Québec. Ce qu'on va faire avec le magnésium, grâce à notre façon de gérer le développement économique dans notre région mais aussi dans tout le Québec, c'est qu'on va travailler à développer la matière première chez nous, à la transformer chez nous.

Alors, je parlais de la TVQ et je parlais aussi des avantages concurrentiels. Combien de programmes nous avons mis en place depuis notre élection, M. le Président, pour favoriser la création d'emplois? Et je pense notamment à la création des centres locaux de développement et à leur pendant, au niveau des chercheurs d'emploi, que sont les centres locaux pour l'emploi, les CLE.

Nous avons apporté à la fiscalité des entreprises, dans le budget 1999, beaucoup d'améliorations. Même si le fardeau fiscal est satisfaisant globalement, je viens de le dire, M. le Président, il demeurait un problème avec la composition de ce fardeau, qui est très axée sur les charges fixes, ce qui nuisait particulièrement aux PME. Alors, la réforme annoncée en 1998 est venue corriger cela. Il y a eu une baisse de 37 % de la taxe sur la masse salariale des PME.

Quand vous vous promenez dans les PME, maintenant, et que vous parlez de ça aux gens, les gens reconnaissent les efforts énormes que fait le gouvernement malgré une situation financière difficile pour favoriser justement le développement de l'emploi dans les entreprises. Il y a eu une contre-abolition de la déduction pour petites entreprises aussi. Au net, par ces mesures, nous avons injecté 293 000 000 $ par année pour les entreprises du Québec. Nous avons développé aussi une entreprise encore plus favorable pour les projets les plus structurants.

Notre gouvernement ne se contente pas d'être globalement compétitif. Notre approche en matière de création d'emplois est beaucoup plus proactive. Il existe des catégories d'entreprises, des activités qui jouent un rôle stratégique dans notre développement économique. Il est nécessaire donc de les inciter positivement à se développer au Québec.

Sur ça, M. le Président, j'aimerais vous dire ce que nous vivons actuellement – et il y a un lien, vous savez, entre la création d'emplois et nos exportations, un lien évident – les difficultés que le gouvernement fédéral nous impose actuellement dans notre désir de nouer des liens de plus en plus importants avec les autres pays en matière économique. J'arrive du Guatemala dans une mission diplomatique, la semaine prochaine j'irai au Brésil. On constate constamment que, sur le terrain, le gouvernement fédéral tente de bloquer... Et nous avons la preuve actuellement, avec le voyage que fait le premier ministre du Québec au Mexique, comment le gouvernement fédéral tente d'empêcher le Québec de créer des liens, des échanges commerciaux, des partenariats avec les autres pays. C'est une lutte qui n'est pas dans les intérêts des Canadiens, ni des Québécois, évidemment, un gouvernement qui travaille contre la création d'emplois. C'est une des raisons, d'ailleurs, qui motivent notre désir d'en sortir.

Et je vais terminer sur ça, M. le Président. La création d'emplois et la souveraineté du Québec ont un lien qui est extrêmement évident pour toute personne qui est capable de faire une analyse objective. Je suis content que mes amis d'en face semblent vouloir écouter ce que je vais dire. Le Québec, actuellement, est bloqué systématiquement par le gouvernement fédéral dans sa tentative de créer des liens commerciaux, des partenariats économiques avec les autres pays, notamment dans les Amériques.

Le gouvernement canadien a voulu créer une relation Est-Ouest, vous savez, une économie qui était tout à fait artificielle avec nos voisins de l'Ontario ou nos voisins du Nouveau-Brunswick, ou plus particulièrement encore de l'Ouest, alors que le mouvement naturel de l'économie est vers les États-Unis. Ça dérange énormément Ottawa, évidemment, puisque ce pays-là a été fondé sur une façon de concevoir la nation qui était fausse dès le départ et qui l'est demeurée, évidemment.

Nous tentons d'en sortir pour pouvoir donner au gouvernement du Québec et à l'ensemble des Québécoises et des Québécois tous leurs impôts, toutes leurs taxes, diminués évidemment par ce biais-là, et nous donner des programmes qui sont bien coordonnés pour promouvoir nos exportations. C'est ce que nous voulons faire et c'est ce que peut nous donner et nous donnera la souveraineté du Québec.

En l'absence de ça, on voit qu'il nous manque des outils pour réaliser, pour augmenter nos exportations et créer de cette façon-là des emplois et réduire la fiscalité des Québécois. Il n'y aura pas d'autres moyens, M. le Président, que d'enlever un gouvernement, il y en a trop, d'enlever des ministères, il y en a de trop – déjà, dans ça, il y a énormément de coûts à l'État – et de développer nos exportations grâce à des moyens qui sont à Ottawa, qui ne joue pas actuellement en notre faveur.

Voilà pourquoi, M. le Président, j'aimerais que nos amis d'en face reconnaissent que, finalement, le régime fédéral dans lequel nous vivons est un obstacle fondamental à la réduction des impôts et à la création d'emplois. Et nous allons faire en sorte, d'ici un an et demi, M. le Président, pour en sortir en donnant au Québec un pays à sa mesure. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Johnson et également adjoint parlementaire au vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances. Nous cédons maintenant la parole au député de Mont-Royal et critique officiel... j'allais dire député de Mont-Royal et également critique officiel de l'opposition en matière d'industrie et commerce. M. le député.


M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président, de la correction. À mon tour, il m'est très agréable de supporter la motion de la députée de Marguerite-Bourgeoys et aussi critique officielle en matière de finances. Je crois personnellement, sincèrement, après avoir vécu de longues années dans le monde des affaires, que l'impôt est vraiment là pour tuer l'emploi et que le gouvernement du Parti québécois n'a fait que ça depuis qu'il est au pouvoir. Je vais essayer de vous le démontrer. Contrairement à ce que mes collègues ont fait – ils ont parlé surtout de l'impôt des particuliers – moi, je vais essayer de vous parler et de vous démontrer la fiscalité des entreprises au Québec.

Contrairement à ce que le député de Johnson vient de dire... ou, devrais-je dire, je suis d'accord avec le député de Johnson que, vraiment, la fiscalité des entreprises sur les profits des entreprises au Québec, elle est compétitive; elle est même en bas d'autres provinces.

(11 h 20)

Par contre, M. le Président, ce qu'il faut comprendre, c'est que l'impôt sur les profits des entreprises compte, au Québec, seulement pour 19 % de tout l'impôt payé par les entreprises, l'impôt ou la taxe sur le capital compte pour 26 % des impôts payés et, finalement, la taxe sur la masse salariale compte pour 55 %. Donc, ce n'est pas une fiscalité compétitive que nous avons au Québec, bien au contraire. En fait, quand on additionne ces trois niveaux de taxation ou d'imposition, on obtient des chiffres qui sont très variables de ce qu'on essaie de nous faire accroire. Au Québec, la fiscalité des entreprises représente 3,8 % du produit intérieur brut du Québec. En Ontario, cette même fiscalité des entreprises, au total, représente 2,4 %. Ça veut donc dire qu'une entreprise ontarienne est taxée à 58 % moins qu'une entreprise québécoise.

Qui plus est, M. le Président, la taxe sur le capital, c'est la pire taxe que vous pouvez créer. C'est une taxe qui est prise, quelle que soit la rentabilité de l'entreprise, directement sur le capital de l'entreprise investi dans l'entreprise. C'est donc dire que ça fait partie des frais fixes de l'entreprise, et, quelle que soit la rentabilité de cette entreprise-là, cette entreprise aura à payer cette taxe sur le capital. Donc, à ce moment-là, c'est une taxe qui empêche l'investissement au Québec.

Deuxième taxe, la taxe sur la masse salariale, qui est également une taxe fixe, M. le Président. C'est une taxe qui est imposée aux entreprises quelle que soit leur rentabilité. Qu'une entreprise perde de l'argent ou gagne de l'argent, elle va être imposée sur sa masse salariale. Je ne le sais pas pour vous, M. le Président, mais, pour moi, ça m'apparaît ridicule de la part d'un gouvernement qui dit être progressif, penser en termes de croissance, vouloir faire croître cette province, et qui taxe les entreprises. À chaque fois qu'elles mettent 1 $ de plus en capital, elles sont taxées jusqu'à concurrence du 26 % de leur impôt total. Et, à chaque fois qu'elles engagent une personne de plus, elles sont également taxées sur leur masse salariale jusqu'à concurrence de 55 % de tout l'impôt qu'elles ont à payer. C'est incroyable! Écoutez le ridicule de la situation: vous voulez créer de l'emploi puis vous taxez les gens quand ils en créent; vous voulez créer des investissements au Québec et vous taxez les entreprises quand elles investissent au Québec. Il y a quelque chose que je ne comprends pas dans la logique du Parti québécois, M. le Président, et il est temps que ça change.

Donc, comme je vous le disais, si on additionne ces trois taxes au niveau de l'entreprise, l'entreprise québécoise est fortement plus taxée que l'entreprise ontarienne ou l'entreprise canadienne d'une autre province, fortement plus taxée, parce que ces trois taxes-là, au total, représentent 3,8 % de notre produit intérieur brut, alors qu'en Ontario, comme je vous le disais tantôt, c'est 2,4 % du produit intérieur brut et, au Canada entier, c'est 2,3 % du produit intérieur brut. Donc, nous sommes fortement taxés non seulement au niveau des individus, mais aussi au niveau des entreprises.

Laissez-moi continuer sur la taxe sur la masse salariale un peu. Lors du discours du budget, en mai 1996, le gouvernement décidait d'augmenter justement cette taxe sur la masse salariale – qui est importante maintenant, c'est 4 000 000 000 $ qu'on va chercher dans les poches des entreprises – et, pour amadouer les grandes entreprises, le gouvernement du Parti québécois avait dit: Bien, écoutez, au mois de novembre, on va vous permettre d'avoir un remboursement de taxes sur vos intrants, sur vos achats ni plus ni moins. Alors, le 30 novembre est arrivé, ce qu'on a dit aux grandes entreprises, c'est: Écoutez, oubliez ça, on va attendre au mois de mai 1997, on n'est pas prêt tout de suite à le faire. Au mois de mai 1997, savez-vous ce qu'on a dit aux grandes entreprises? On a dit: Oubliez ça indéfiniment, il n'en est pas question. Alors, aujourd'hui, les grandes entreprises du Québec, en termes de masse salariale, ont une imposition de 500 000 000 $, dans l'ensemble, de plus qu'elles auraient si elles étaient établies en Ontario. C'est incroyable, encore une fois, M. le Président: on veut créer de l'emploi et on taxe la masse salariale d'une façon incroyable. On veut attirer des entreprises pour investir au Québec et on leur impose la taxe sur le capital. Et, encore une fois, je vous rappelle que l'impôt sur les profits des entreprises, ce n'est que 19 % de tous les impôts qu'elles paient, alors que la taxe sur le capital, c'est 26 %, et la taxe sur la masse salariale, c'est 55 %.

Ce qui me fascine le plus, M. le Président, c'est quand on regarde ce qui se passe dans l'ensemble canadien, et je veux attirer votre attention particulièrement sur deux provinces, l'Ontario et l'Alberta. La raison pour laquelle je veux attirer votre attention sur ces deux provinces-là, c'est qu'on sait que ce sont deux provinces qui sont progressives en termes de taxation. C'est deux provinces qui taxent moins les entreprises et qui taxent moins aussi les individus, la population. Mais voici ce qui se passe. La moyenne canadienne de création d'emplois, au cours des quatre dernières années – donc, je réfère à la période du Parti québécois, qui était au pouvoir ici, au Québec – a été de 7,8 % d'augmentation de création d'emplois. En Alberta, là où l'impôt est le plus bas et pour les entreprises et pour les individus, au lieu de 7,8 %, ça a été 13,2 % de croissance de l'emploi. Exceptionnel. En Ontario, où, là aussi, l'impôt sur les entreprises et sur les individus est plus bas que par ici, qu'au Québec, la création d'emplois, au lieu du 7,8 % canadien, a été de 8,8 %. Au Québec, où les impôts sont plus élevés et pour les individus et pour les entreprises, pendant que le Canada avait une création d'emplois qui croissait de 7,8 %, la croissance n'a été que de 5,4 %. Alors, ça fait beaucoup de chiffres, je vous les rappelle: 13,2 % en Alberta; 8,8 % en Ontario; 5,4 % au Québec. Si c'est ça qu'on appelle «créer des emplois», je ne sais pas, moi, qu'est-ce qui se passe, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre système.

Laissez-moi vous reparler plus spécifiquement, maintenant, du Québec, toujours au niveau de la création d'emplois. Il est démontré que, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, donc depuis 1994, il s'est créé au Québec 16,5 % de tous les emplois créés au Canada. On est en droit, M. le Président, de s'attendre de créer, en emplois, au Canada, au moins la même proportion qu'on a en population. Donc, on serait en droit de s'attendre à une croissance des emplois, au Québec, en proportion du Canada, de 24,5 %. Ce qu'on a eu, depuis que le Parti québécois est au pouvoir: 16,5 %. C'est honteux. Depuis que M. Bouchard est arrivé, ce n'est pas 16 %, c'est 15 %, et on est au septième rang. Les seules provinces qui font moins bien que nous, c'est Terre-Neuve, la Saskatchewan et l'Île-du-Prince-Édouard. Ce sont les seules provinces qui performent moins bien que le Québec. Et je vous rappelle encore une fois qu'on est au septième rang depuis l'arrivée de M. Bouchard et qu'on est au huitième rang depuis l'arrivée du PQ au pouvoir. Si c'est ça de la performance au niveau de l'emploi, j'aime autant qu'il ne performe pas.

M. le Président, la dernière chose que je veux vous rappeler, c'est que la croissance économique, au Québec, a été de 12,2 %. Autrement dit, nous nous sommes enrichis, comme société, de 12,2 % dans les quatre dernières années. Mais le gouvernement, lui, ses revenus ont crû de 22,6 % pendant cette période-là. Autrement dit, le gouvernement s'est enrichi deux fois plus que sa population. Ça veut-u dire qu'on ne demande pas plus d'impôts, ça, aux gens? Bien au contraire, ça veut dire qu'on leur demande beaucoup trop d'impôts.

Finalement, M. le Président, je voudrais vous dire que le ministre des Finances, contrairement à ce qu'il dit, avait les moyens de baisser les impôts des contribuables. On estime, nous, sur une base très conservatrice, qu'il avait au moins 550 000 000 $ dans ses coffres pour baisser les impôts au cours de l'année dont on parle. Il y en a d'autres qui vont plus loin que nous. M. Samson, par exemple, du Soleil , va jusqu'à 2 000 000 000 $, lui. Mais on va y aller sur une base conservatrice. Et je crois sincèrement que le ministre des Finances, à la place de garder des cachettes pour lui, pour faire plaisir à ses petits amis, à la place de faire ça, il aurait dû baisser les impôts de 550 000 000 $. Et, tout comme mon chef, le chef de l'opposition, je voudrais demander au ministre des Finances de refaire un budget immédiatement pour baisser les impôts. C'est ce que je lui demande. Merci, M. le Président.

(11 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Mont-Royal et critique officiel de l'opposition en matière d'industrie et commerce. Nous allons maintenant céder la parole au dernier intervenant pour la partie gouvernementale, pour le groupe formant le gouvernement. Je vous avise, M. le leader adjoint du gouvernement et député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qu'il reste un temps de parole de 4 min 30 s à votre formation politique. M. le leader adjoint.


M. André Boulerice

M. Boulerice: En quatre minutes, M. le Président, je vous dirai que je suis d'accord avec l'opposition libérale. Ils ont raison, nous payons trop d'impôt au gouvernement fédéral.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: 500 000 000 $ pour construire un pont à l'Île-du-Prince-Édouard, alors que le Québec en a payé 150 000 000 $. Trop d'impôt pour acheter des sous-marins usagés à la marine de guerre canadienne qui est aussi efficace, d'ailleurs, que la marine de guerre du Liechtenstein. Trop d'impôt, M. le Président, pour permettre à la gracieuse Sheila Copps de distribuer ses drapeaux. Si j'étais un New-Yorkais, je dirais d'elle «She is the flag lady». Oui. Trop d'impôt, M. le Président, pour créer une onzième province où il y a 15 000 habitants, que je respecte, mais 32 000 caribous.

Trop d'impôt, M. le Président, pour maintenir des ambassades canadiennes qui font tout pour torpiller les missions économiques du Québec en vue de favoriser nos exportations, donc créer des emplois. J'espère que le député de Mont-Royal m'écoute attentivement. Son ancienne bière se serait bien vendue au Mexique. D'ailleurs, elle est fabriquée dans ma circonscription. C'est quand même une qualité qu'il avait.

Trop d'impôt, M. le Président, 27 000 000 000 $ d'impôts des Québécois et des Québécoises qui sont payés au gouvernement central et centralisateur du Canada, 27 000 000 000 $, alors que le gouvernement central et centralisateur du Canada s'est complètement récusé de tous les programmes sociaux au Québec, et notamment un programme qui touche le député de Verdun autant que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui est l'habitation sociale.

Trop d'impôt payé au gouvernement fédéral, central, centralisateur du Canada, M. le Président. 27 000 000 000 $ qui sont gaspillés dans des folies comme des sous-marins, je vous le répète, usagés pour la marine de guerre canadienne qui va compétitionner, d'ailleurs, je vous le répète, avec la marine de guerre du Leichtenstein, ou de la République de Saint-Marin ou, je ne sais pas, moi, la république d'Andorre. Oui.

M. le Président, c'est faire injure aux femmes et aux hommes de la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques, ceux du Centre-Sud, du Plateau Mont-Royal comme du Vieux-Montréal, que de leur dire: Vous payez trop d'impôt. On peut se loger dans ma circonscription, comme l'a indiqué le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie nationale, à 350 $, 400 $ par mois. Et, comme c'est un quartier de centre-ville que je représente, essayez donc de vous trouver un trois et demi, comme on dit en langage nord-américain, dans un centre-ville comme celui de Toronto.

Mme Gingras, de la rue Mantana, est capable d'envoyer son fils et sa fille au cégep du Vieux-Montréal, comme auparavant à la polyvalente Pierre-Dupuis et après à l'Université de Montréal, parce que les frais de scolarité sont moindres et que, deuxièmement, l'aide et les prêts aux étudiants du Québec, c'est incommensurablement plus avantageux que ce qui est offert dans la province de l'Ontario, province voisine qui semble être le nouveau veau d'or que vous souhaitez tous vouloir adorer. Et, quand elle est malade...

Et création d'emplois. J'écoutais M. le député de Mont-Royal avec attention. Oui, mais les garderies à 5 $, ça a permis à combien de femmes dans ma circonscription d'être capables de retourner sur le marché du travail, donc d'augmenter le revenu familial parce qu'il y avait la possibilité pour elles d'aller travailler? Les enfants étaient bien gardés, par du personnel qui était compétent. Oui, on paie tous de l'impôt. On souhaiterait ne plus jamais payer d'impôt, que tout soit gratuit, mais ce n'est pas ça, la réalité, M. le Président. C'est que, contrairement à l'Ontario qui a choisi la voie des égoïsmes individuels, nous, au Québec, de mentalité – je conclus, M. le Président – on a décidé de pratiquer la solidarité collective. Rembarquez votre Ontario chez vous, déménagez si cela vous plaît, allez vous acheter une maison quatre fois plus chère que celle que vous allez payer à Montréal et vous n'aurez aucun service.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint. M. le député de Verdun, s'il vous plaît, vous connaissez notre règlement. Je dois céder la parole à tous ceux qui sont debout. Alors, nous allons maintenant terminer ce débat. Avant de passer à la réplique de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, nous allons céder la parole au député de Beauce-Nord et critique officiel de l'opposition en matière de PME. M. le député.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur cette motion de ma collègue de Marguerite-Bourgeoys: Que le gouvernement fait siens les propos du vice-premier ministre à ce que l'impôt tue l'emploi.

Examinons, M. le Président, l'impôt au Québec. Depuis 1995, l'écart entre les revenus des Québécois et des Canadiens s'est considérablement détérioré. Un Québécois paie l'équivalence de deux semaines de salaire de plus que les autres Canadiens. C'est énorme, M. le Président, deux semaines. Pour le consommateur québécois, c'est des pertes d'achat de biens et de services qui ne procurent aucune retombée au sein des entreprises québécoises.

Les Québécois ont dû faire face à de nombreuses hausses de taxes suite aux politiques mises en place par le Parti québécois. Entre autres, il y a eu la hausse de la TVQ qui a procuré 675 000 000 $ de revenus additionnels au gouvernement. Il y a eu le transfert de responsabilités aux municipalités: 375 000 000 $ qui a été distribué. Nous, dans des régions comme la Beauce, plusieurs municipalités ont dû revoir leurs programmes de développement économique et couper dans des secteurs essentiels qui auraient pu procurer de la création d'emplois, M. le Président. Il y a eu des hausses de tarifs d'Hydro-Québec, 126 000 000 $, auxquelles le consommateur a dû faire face. Il y a eu le régime d'assurance-médicaments, un autre 196 000 000 $ qui a été dirigé aux Québécois. Il y a eu d'autres hausses: des frais d'immatriculation, augmentation des taxes scolaires, et j'en passe.

L'impôt tue l'emploi, M. le Président. Au Québec, les Québécois paient 5 000 000 000 $ de plus d'impôts et de taxes que le reste du Canada, 5 000 000 000 $. Un Québécois qui a un revenu de 25 000 $ paie environ 1 500 $ d'impôt de plus qu'un Ontarien, 1 500 $, M. le Président. Un Québécois qui a un revenu de 35 000 $ paie 2 800 $ de plus d'impôt qu'un Ontarien. C'est énorme. C'est un pouvoir d'achat qui est enlevé aux familles québécoises. Ça diminue d'autant et ça a l'effet de limiter la croissance des entreprises. Résultat: moins d'emplois pour le Québec.

La politique de ce gouvernement est de réduire les impôts de 400 000 000 $ en l'an 2000, à compter du 1er juillet, et cette réduction est répartie sur 12 mois. Je ne sais pas pourquoi on nous a présenté une réduction d'impôts de 400 000 000 $ pour l'an 2000, alors que le revenu d'un Québécois, c'est pour une période de six mois, ça représente 200 000 000 $. C'est encore une astuce probablement pour chercher à montrer aux gens qu'on fait un effort, mais, quand on lit dans le détail les documents qui nous ont été présentés, en fait, les Québécois ne feront face qu'à une réduction de 200 000 000 $ seulement. Et, dans les autres provinces, on n'a qu'à voir, encore là, il y a des efforts pour réduire les impôts. Donc, l'écart va s'élargir davantage encore avec le reste du Canada. Moins de baisses d'impôts, moins de création d'emplois et toujours un taux de chômage élevé, M. le Président.

(11 h 40)

Le résultat de ces politiques-là, ça se traduit comme ceci. Il y a eu 27 000 emplois de perdus au Québec comparativement à 113 000 qui ont été créés dans le reste du Canada. Le Québec, en cinq ans, se trouve au huitième rang en termes de création d'emplois, après Terre-Neuve et la Saskatchewan. Le Québec n'a créé que 12 % des emplois, alors qu'il devrait atteindre 24 %. Au niveau des investissements privés, le Québec ne va chercher qu'un pourcentage de 18 %, alors que, encore là, il devrait être de 24 %.

Au Québec, nombreux sont les regroupements qui réclament immédiatement une intervention du gouvernement pour qu'on réduise les impôts, entre autres, pour ne nommer que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Québec, le Conseil du patronat. On demande à ce qu'il y ait une intervention immédiate pour que le Québécois soit diminué dans son fardeau fiscal. Pas de réduction d'impôts, M. le Président, pas de croissance économique. La croissance économique, en trois ans, au Québec, est la moitié de celle du Canada. La moitié, ce n'est pas peu dire. Si on veut stimuler notre économie, il faut permettre aux gens de pouvoir consommer.

Actuellement, nos entreprises se doivent de vendre à l'extérieur. Elles ne progressent plus dans des ventes intérieures. Elles se doivent de vendre à l'exportation. En Beauce, c'est ce que les gens font. S'ils veulent continuer à grandir – et c'est une des régions au Québec, là, qui va le mieux – ils se doivent, on va dire, de vendre leurs biens à l'extérieur. Parce que le Québécois n'a pas les moyens d'acheter les biens des entreprises qui sont produits ici.

L'impôt chez les petits entrepreneurs, M. le Président. Les petits entrepreneurs autonomes et indépendants sont victimes de la politique fiscale du ministre des Finances. Dans une analyse très poussée, M. Michel Girard, journaliste de La Presse , grand spécialiste des mystères de la fiscalité du ministre des Finances, arrive à la conclusion, dans l'édition du 13 mars dernier, que la réforme de la fiscalité du gouvernement du Parti québécois pénalisera les petits entrepreneurs qui travaillent en solitaire ou avec moins de cinq employés et dont la masse salariale est inférieure à 400 000 $.

Selon ce spécialiste, les très petites entreprises et les travailleurs autonomes vont passer dans le tordeur du ministre dès le 1er juillet et paieront plus d'impôt au gouvernement pour financer les mesures destinées aux grosses PME. C'est comme si Robin des bois, dans une histoire revue et corrigée, volait aux plus petits pour donner aux plus gros. Ça représente, ça, en termes plus concrets, une augmentation de 3,15 %. Ça équivaut à une hausse d'impôts directe de 31,50 $ pour chaque 10 000 $ de bénéfice brut. Encore une fois, ça va affecter la création d'emplois dans nos régions où il y a beaucoup de travailleurs autonomes, des petites entreprises qui vont être encore augmentées dans leur fardeau fiscal.

Conclusion, M. le Président. Les politiques de ce gouvernement ont fait du Québécois le champion toutes catégories au niveau des impôts en Amérique du Nord. De plus en plus de Québécois quittent la province. L'exode des jeunes, l'exode des cerveaux sont le résultat d'une politique qui a fait des Québécois les champions toutes catégories pour les taxes. Ça a comme conséquences un taux de chômage toujours très élevé, un pouvoir d'achat diminué et un appauvrissement des Québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Beauce-Nord et critique de l'opposition officielle en matière de PME. Nous allons céder maintenant la parole pour six minutes au député de Verdun et également critique officiel en matière de recherche, science et technologie. Alors, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. M. le Président, il y a eu un document, document qui a été préparé en 1996 pour le ministre des Finances. Ça s'est appelé la commission D'Amours, du nom d'Alban D'Amours qui présidait cette commission, qui a publié un document et qui s'appelait Ensemble pour un Québec responsable , qui, déjà, dès 1996, prétendait – il avait fait une étude et une tournée dans la province – deux choses. Premièrement, que le taux, c'est-à-dire la part du PIB qu'on consacre au Québec à l'impôt était beaucoup plus importante que pour l'ensemble canadien et en particulier aussi que pour l'Ontario. Premier élément. Deuxièmement, il concluait dans une de ses recommandations que, pour soutenir la création d'emplois – on est en 1996 – il était important de diminuer la charge fiscale des Québécois. Et c'est essentiellement, exactement ce que l'opposition essaie de faire comprendre au gouvernement, et ce que déjà, en 1996, le rapport D'Amours disait, et ce que la députée de Marguerite-Bourgeoys essayait de rappeler: c'est actuellement la charge fiscale qui est un frein à la croissance économique.

M. le Président, j'ai un autre document. Ça vient du Mouvement Desjardins. Vous connaissez le Mouvement Desjardins? En général, il vous est favorable, à votre option politique. Je dis en général. Pas toujours, mais en général. Il remarque aussi que la croissance du PIB au Québec est 1 %... Je peux vous dire exactement. Mais elle traîne derrière la croissance du PIB du Canada. Non pas à cause des exportations, comme a essayé de le faire dire le député de Johnson, au contraire, le secteur des exportations est un secteur où le Québec performe bien. Le problème, c'est la faiblesse du marché intérieur. Ça veut dire quoi dans un texte en langage courant? Ça veut dire que les gens au Québec ne consomment pas ou n'ont pas la possibilité de consommer assez pour soutenir la croissance du PIB. Et la meilleure manière, M. le Président – et vous le savez facilement – de pouvoir soutenir ce marché intérieur, cette croissance du marché intérieur, c'est de diminuer l'impôt.

Et, faites bien attention, lorsqu'on parle actuellement du poids du déficit, etc., si vous augmentez l'activité économique à l'intérieur de la province, si vous augmentez ce qu'on appelle dans notre langage le produit intérieur brut, s'il y a donc plus de gens qui travaillent, les rentrées fiscales, l'ensemble des rentrées fiscales vont être plus importantes. Comprenez-moi bien. Le poids, le poids relatif sur le PIB va être plus faible, mais l'ensemble des rentrées fiscales peuvent être plus importantes parce que vous avez, à ce moment-là, stimulé la croissance du marché intérieur, c'est-à-dire que vous êtes en mesure de consommer plus d'objets, de faire en sorte qu'il y a plus de gens qui vont travailler. Vous avez stimulé la croissance du marché intérieur, ce qui fait qu'il y a plus de gens qui sont en mesure de travailler. Et, parce qu'il y a plus de gens qui sont en mesure de travailler, vous avez plus de gens qui paient d'impôts. Et, parce que vous avez plus de gens qui payent d'impôts, l'ensemble de vos rentrées fiscales sont plus importantes.

Donc – et c'est ça qu'on veut essayer de faire comprendre actuellement, ici, dans l'opposition au ministre des Finances – pour réduire son déficit, il aurait eu avantage à baisser les impôts. Il faut bien comprendre que, en baissant les impôts, vous facilitez la réduction du déficit parce que vous augmentez le nombre de personnes qui vont travailler. Et vous augmentez le nombre de personnes qui vont travailler, parce qu'il y aura plus de personnes, il y aura plus de gens qui vont consommer sur le marché intérieur. Et, parce qu'il y aura plus de gens qui vont travailler, vous allez avoir augmenté vos rentrées fiscales.

Et c'est ça qui est difficile à comprendre. Et c'est ça que le ministre des Finances – probablement qu'il le comprend très bien – n'a pas voulu appliquer. Et ici, de ce côté-ci, M. le Président, on va s'évertuer à rappeler que le moyen le plus facile actuellement mis à la disposition des gouvernements pour stimuler la croissance, c'est-à-dire stimuler l'augmentation – et on mesure l'augmentation par l'augmentation du PIB – c'est de diminuer le fardeau fiscal. Parce que, lorsque vous diminuez le fardeau fiscal, et en particulier le fardeau fiscal des particuliers, vous permettez à plus de gens d'avoir de l'argent dans leurs poches et de pouvoir dépenser. C'est simple, mais c'est quelque chose sur lequel le gouvernement ne semble pas vouloir s'engager. Dès 1996, comme je le rappelais au début, la commission D'Amours lui suggérait de prendre cette voie-là.

Et beaucoup de gens se sont permis de parler de ce que nous faisions lorsque nous étions au pouvoir, nous, les libéraux. Je me permets de vous rappeler que, dès 1994, on avait sorti un document Vivre selon nos moyens . Je me permets de vous rappeler que, dans le premier budget, M. Daniel Johnson, qui était à l'époque le député de Vaudreuil, a amené une réduction du fardeau fiscal de 500 000 000 $. C'était un premier pas qu'on faisait à ce moment-là pour être en mesure, dans cette direction-là, de réduire le fardeau fiscal des Québécois. Ça a été la tendance dans laquelle nous voulions aller. Et, malheureusement, elle n'a pas continué lorsque nos amis d'en face sont arrivés au gouvernement, M. le Président. Mais je répète, en un mot: Diminuer les impôts, stimuler la croissance, ça aide à réduire le déficit. Merci.

(11 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Alors, nous terminons notre débat ce matin avec la réplique de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, critique officielle de l'opposition en matière de finances publiques. Alors, madame.


Mme Monique Jérôme-Forget (réplique)

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Eh bien, moi, j'aimerais terminer, clore ce débat pour, dans le fond, nous rafraîchir la mémoire et peut-être rafraîchir la mémoire au ministre des Finances, qui a quand même une formation d'économiste. Il aime bien me rappeler que je comprends les chiffres, mais j'aimerais bien ça que lui aussi comprenne un peu ce qui s'est passé, n'est-ce pas, durant les années où le Parti libéral du Québec a été au pouvoir.

Il répète à qui veut bien l'entendre que le Parti libéral a créé zéro emploi et il est tout fier de ça, de dire combien ce gouvernement a été incompétent. J'aimerais juste lui dire que, s'il veut annoncer de tels chiffres, il devrait au moins dire la vérité, toute la vérité. D'ailleurs, le ministre des Finances m'a avoué en commission qu'il ne disait jamais de mensonge mais qu'il ne disait pas toujours toute la vérité. Bien, là, je vais lui dire que toute la vérité est très importante dans ce cas-ci, parce que imaginez-vous qu'il y a eu une récession. Il y a eu une récession au début des années quatre-vingt-dix qui a fait effectivement que la situation a été très difficile pour tout le Canada.

Et là j'aimerais rappeler certains chiffres au ministre des Finances. Alors que, de 1986 à 1994, le Québec baissait son taux d'emploi de 56 % à 54,9 %, il le baissait de 1 %, dans la même période, l'Ontario baissait son taux d'emploi de 3 %, plus précisément 2,9 %.

C'est donc dire qu'il s'est passé quelque chose, il s'est passé quelque chose. Et le ministre des Finances devrait être au courant de ce que c'est qu'une récession. Il ne faut pas avoir un doctorat en économie pour comprendre ça; il faut avoir le cours élémentaire d'économie pour savoir quelles sont les répercussions d'une récession économique.

Par ailleurs, de 1994 à 1999, donc les cinq dernières années de ce mandat, effectivement le Québec a augmenté son taux d'emploi, il l'a augmenté de 1 %. Pendant la même période, l'Ontario a haussé son taux d'emploi de 2 %. Donc, un écart important: deux fois plus.

Alors, j'aimerais bien comprendre ce que veut dire le ministre des Finances. S'il était capable de nous expliquer, dans un petit cours élémentaire d'économie, comment est-ce qu'il peut justifier les propos qu'il tient – qu'il a d'ailleurs répétés à tous ses collègues qui sont de l'autre côté de cette Chambre et qu'on répète allégrement – que le Parti libéral n'a pas créé d'emplois. Il y avait une situation désastreuse en Amérique du Nord: il y avait une récession. Et nous avons dû en subir les conséquences. C'est ça qui s'est passé. Et, effectivement, pendant cette période, il y a eu moins d'entrées d'argent, il y a eu moins d'entrées de revenus pour l'État.

J'aimerais rappeler encore des chiffres. Le ministre des Finances se dit social-démocrate, il parle toujours de ces clichés millésimés 1968 – j'ai l'impression de revivre mon cours d'introduction en sciences politiques de 1968, je pense qu'on vit dans l'ancien temps – bien j'aimerais juste lui rappeler que les dépenses publiques du Québec représentent 35 % du PIB, alors que chez nos voisins, c'est 25 %.

Mais, encore là, les hausses d'impôts, le ministre des Finances nous rappelle constamment les hausses d'impôts qu'on a fait subir, et là il parle de sa litanie que peut-être vous allez l'interrompre, puis il nous donne un spectacle de litanies. Bien, j'aimerais lui rafraîchir également la mémoire, j'aimerais lui faire retourner... qu'il regarde le bilan du Parti libéral du Québec. De 1985 à 1994, les revenus autonomes du gouvernement sont passés de 18 000 000 000 $ à 29 000 000 000 $, donc sur neuf ans, une hausse de 11 000 000 000 $; le Parti québécois, sur une période de quatre ans, 1994 à 1999, les revenus autonomes sont montés de 29 000 000 000 $ à 37 000 000 000 $, une hausse de 9 000 000 000 $. Effectivement, le ministre des Finances a garni les coffres en récupérant l'argent qu'il allait chercher.

En partie, M. le Président – et c'est là que je suis très fière de dire que je vais voir le contexte et je vais le justifier en termes d'un contexte économique; je ne ferai pas comme le ministre des Finances, donner la moitié de la vérité – il y a eu plus de croissance économique, il n'y a pas eu de récession. Et, quand il y a de la croissance économique, c'est simple, l'argent rentre dans les coffres de l'État parce qu'il y a plus de monde qui travaille. Comme disait le ministre des Finances, les taxes tuent l'emploi et tuent également l'impôt. D'accord? Parce que, si les gens travaillent, ils paient des impôts, et donc, ça, c'est bien important.

Alors, je reconnais qu'il y a eu une partie due à la croissance économique, mais il reste quand même 4 700 000 000 $ de plus qui sont entrés dans les coffres de l'État, dus essentiellement à des hausses de revenus du gouvernement. D'ailleurs, l'impôt des particuliers a augmenté de 12 400 000 000 $ à 15 000 000 000 $, une hausse de 2 600 000 000 $. Ce ne sont pas des chiffres que j'ai pris au hasard, je les ai pris dans le plan budgétaire de ce gouvernement. Donc, ce sont des chiffres publics connus, et je n'invente pas de chiffres.

Alors, M. le Président, je pense que, si on veut dire des choses, si on veut donner des chiffres, il faudrait que non seulement on donne ces chiffres, mais qu'on donne la situation. C'est ça, faire de l'économie, c'est expliquer son environnement, c'est essayer de trouver des explications logiques de comportement.

Parfois on peut blâmer les gouvernements de poser certains gestes. Et d'ailleurs, personnellement... et mon gouvernement blâme le gouvernement, actuellement, d'avoir raté le virage et, comme disait mon collègue, de ne pas avoir baissé les impôts maintenant. C'était possible, il y avait une marge de manoeuvre, il y a là de l'argent, il y a de l'argent caché dans différents endroits du budget. Et bien sûr qu'on nous annoncera prochainement des surplus budgétaires. Et, pendant ce temps, M. le Président, on aura fait subir énormément de problèmes à tout notre secteur, en particulier notre secteur de la santé.

Le ministre des Finances s'est vanté qu'il était très heureux de ne pas être Américain. De nous comparer aux États-Unis, c'était une approche disgracieuse. Bon, encore là, s'il voulait se rafraîchir la mémoire et regarder les chiffres un peu plus, il se rendrait compte qu'aux États-Unis le gouvernement dépense à peu près la même chose de son PIB en termes de santé publique. Et je ne vais pas vanter les mérites du régime américain alors qu'il y a une partie importante de la société américaine qui n'est pas couverte de services de santé, mais j'aimerais juste qu'on se rappelle que le Québec et les États-Unis, en termes de contribution financière publique aux services de santé, les chiffres sont fort semblables.

Le ministre des Finances s'est également vanté de sa courbe des impôts, la courbe sociale-démocrate encore. Toujours son discours 1968, toujours millésimé durant les années soixante. Bien, je vais vous dire que cette responsabilité financière chez le gouvernement, dans ce parti, c'était un complot de l'extrême-droite. Pendant des années, on disait que c'était Mme Thatcher, qu'on voulait copier Mme Thatcher, et là on s'inspire de Tony Blair, le travailliste en Grande-Bretagne, pour dire que, nous, on est sociaux-démocrates. J'aimerais lui dire que Tony Blair, justement, ne parle plus de social-démocratie, il parle d'une troisième voie. Il serait bon qu'il voie comment ça se passe parce que, effectivement, on parle d'une troisième voie, on parle des opportunités et des possibilités.

Autre croyance, M. le Président, le gouvernement vient de découvrir qu'est-ce que c'est que la croissance économique. Le ministre des Finances vient de nous rappeler qu'il est pour la création d'emplois. Bien, je pense que c'est un peu tard, aujourd'hui, de nous dire ça, alors que finalement, pendant des années, ce parti a complètement négligé et certainement ne s'est jamais fait le défenseur de la création d'emplois. Merci beaucoup, M. le Président.

(12 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officielle de l'opposition en matière de finances publiques.

Alors, le débat étant maintenant complété, nous mettrons aux voix la motion de la députée de Marguerite-Bourgeoys qui se lui comme suit:

«Que l'Assemblée nationale fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi.»

M. Gautrin: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce qu'on pourrait faire un vote nominal, si vous nous permettez, sur cette motion?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.


Vote reporté

M. Boulerice: M. le Président, la présence de cinq députés de l'opposition est toujours suspecte. Donc, conformément à l'article 223 de notre règlement, je vais demander de reporter ce vote à la période des affaires courantes de cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Nous suspendons donc nos travaux à cet après-midi, 12 mai, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: À l'ordre! Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles aujourd'hui.


Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, commençons par l'article c.


Projet de loi n° 29

Le Président: Alors, à cet article de notre feuilleton, M. le vice-premier ministre et ministre du Revenu présente le projet de loi n° 29, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ce projet de loi, M. le Président, a pour principal objet d'harmoniser la législation fiscale du Québec avec celle du Canada. À cet effet, il donne suite principalement à certaines mesures d'harmonisation prévues dans les discours sur le budget du ministre d'État à l'Économie et aux Finances du 25 mars 1997 et du 31 mars 1998.

De manière accessoire, il donne également suite à certaines mesures prévues dans le bulletin d'information 95-4 émis par le ministère des Finances le 5 juillet 1995.

Ce projet de loi modifie en premier lieu la Loi concernant les droits sur les mines en concordance avec les modifications apportées à la Loi sur les impôts pour étendre les règles relatives aux fiducies de restauration minière à d'autres fiducies semblables pour l'environnement.

Il modifie en deuxième lieu la Loi sur les impôts principalement afin d'y apporter des modifications semblables à une partie de celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par le projet de loi fédéral C-28 (L.C., 1998, chapitre 19) sanctionné le 18 juin 1998. Ces modifications concernent notamment:

1° les régimes enregistrés d'épargne-études afin d'accroître l'intérêt des contribuables pour ce véhicule d'épargne servant à financer des études postsecondaires, et ce, notamment, en permettant au souscripteur d'un tel régime de retirer, en certaines circonstances, le revenu qui s'y est accumulé...

Le Président: Je m'excuse, M. le vice-premier ministre, il y a malheureusement un bruit de fond qui fait en sorte qu'on n'entend pas très bien, là. Très bien.

M. Landry: Ce n'est pas pour vous contredire, M. le Président, mais, à la décharge de ceux et celles qui font ces bruits, je ne prétends pas que la lecture que je fais est passionnante.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Mais ça serait utile qu'elle soit audible, M. le vice-premier ministre.

M. Landry: 2° l'instauration d'un impôt spécial relatif aux paiements de revenu accumulé versés en vertu d'un régime enregistré d'épargne-études;

3° les règles relatives aux différents régimes de revenu différé notamment en ce qui a trait aux modalités de transfert entre les régimes;

4° le traitement fiscal applicable aux prestations versées à un contribuable en vertu d'un régime d'assurance-invalidité de sorte qu'il demeure inchangé dans le cas où, l'assureur étant devenu insolvable, l'employeur maintient les prestations;

5° l'élargissement de la liste des frais médicaux reconnus pour l'application du crédit d'impôt non remboursable pour frais médicaux et l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour frais médicaux qui vise à compenser en partie la perte des prestations spéciales pour un prestataire de la sécurité du revenu qui entre sur le marché du travail;

6° l'introduction, à l'égard des fiducies pour l'entretien d'une sépulture, des règles semblables à celles applicables aux fiducies régies par les arrangements de services funéraires;

7° l'élargissement des règles relatives aux fiducies de restauration minière à d'autres fiducies semblables pour l'environnement;

8° le regroupement, l'amélioration et l'uniformisation des règles permettant le report des pertes résultant de certains transferts de biens impliquant des personnes affiliées;

9° le resserrement de certaines règles qui visent à faire obstacle aux promotions abusives d'abris fiscaux;

10° l'élargissement de l'assiette de l'impôt minimum de remplacement aux pertes de sociétés de personnes attribuées aux membres à responsabilité limitée et à certains associés passifs et aux pertes provenant d'abris fiscaux;

11° les règles relatives aux méthodes d'évaluation de biens décrits dans l'inventaire d'une entreprise;

12° les règles relatives à l'exonération d'impôt dont bénéficient certains organismes gouvernementaux afin d'en préciser le champ d'application;

13° certaines règles de nature administrative, soit celles relatives aux cotisations, aux pénalités, aux oppositions et aux appels pour prévoir, notamment, que la détermination de certains montants peut être faite au niveau d'une société de personnes;

14° diverses modifications à caractère technique incluant notamment des modifications de concordance et de terminologie.

Il modifie en troisième lieu la Loi sur le ministère du Revenu notamment afin de tenir compte des modifications apportées dans la Loi sur les impôts relativement à certaines règles qui touchent les sociétés de personnes et afin d'y apporter d'autres modifications semblables à une partie de celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par le projet de loi fédéral C-28. Ces modifications concernent notamment:

1° le pouvoir du ministre d'imprimer tout livre, registre ou autre document conservé sur support autre que le papier et qu'il a examiné ou obtenu ou dont il a pris possession, notamment lors d'une vérification;

2° la création de nouvelles infractions pour avoir obtenu ou tenté d'obtenir un remboursement ou un crédit sans droit ou pour avoir conspiré pour obtenir un tel remboursement ou crédit;

3° la reconnaissance de la valeur probante d'un imprimé réalisé à partir d'un document dont le support d'origine est autre que le papier ou un microfilm.

(14 h 10)

Il modifie enfin diverses autres lois pour tenir compte de certaines modifications apportées à la Loi sur les impôts.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: L'article h, M. le Président.


Projet de loi n° 57

Le Président: À l'article h du feuilleton, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances présente le projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ce projet de loi a principalement pour objet de modifier les dispositions de la Loi sur les valeurs mobilières qui régissent les marchés financiers afin de permettre leur adaptation à l'émergence rapide de nouveaux produits financiers et de nouveaux types d'intervenants dans le contexte de la mondialisation des marchés et de doter la Commission des valeurs mobilières du Québec de moyens d'intervention propres à assurer la protection des investisseurs.

À cette fin, ce projet prévoit l'établissement de régimes particuliers d'information prescrivant les exigences auxquelles doivent satisfaire certains documents déposés auprès de la Commission ou transmis aux épargnants et à quelles conditions un document peut tenir lieu de prospectus. Il prévoit également le dépôt ou la transmission de documents par support électronique. Il assujettit à l'obligation d'inscription les promoteurs de systèmes électroniques de négociation et les personnes exerçant l'activité de courtier ou de conseiller en valeurs auprès d'acquéreurs avertis sauf, dans ce dernier cas, s'il s'agit de personnes déjà autorisées à exercer à l'extérieur du Québec une telle activité.

De plus, ce projet de loi attribue à la Commission le pouvoir d'imposer des pénalités administratives aux personnes inscrites qui font défaut de respecter une obligation prévue par cette loi et permet l'institution de régimes de concertation avec des organismes poursuivant une fin analogue à celle de la Commission. Il énonce des règles de conduite applicables aux personnes inscrites dans leurs relations avec leurs clients et des obligations particulières destinées à prévenir des situations de conflit d'intérêts.

Ce projet attribue à la Commission le pouvoir réglementaire requis et prévoit en outre diverses mesures visant à habiliter la Commission à intervenir dans des situations où la protection des investisseurs le requiert.

Enfin, ce projet de loi assure la concordance de la terminologie de la Loi sur les valeurs mobilières avec celle du Code civil et contient d'autres dispositions de concordance ainsi que des dispositions de nature corrective ou technique.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement à nouveau.

M. Brassard: Article i, M. le Président.


Projet de loi n° 36

Le Président: Alors, à l'article i de notre feuilleton, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux présente le projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Ce projet de loi attribue à la Régie de l'assurance-maladie du Québec la fonction d'assumer la gestion de données en matière de santé et de services sociaux que lui confie le ministre de la Santé et des Services sociaux, une régie régionale, un établissement, un directeur de la santé publique ou un conseil régional. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article j.


Projet de loi n° 46

Le Président: À l'article j de notre feuilleton, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole présente le projet de loi n° 46, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et la Loi sur les dettes et les emprunts municipaux. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, ce projet de loi apporte des modifications visant à régler des problèmes d'application qui découlent du régime fiscal municipal québécois.

Ce projet de loi modifie la définition du mot «propriétaire» que l'on retrouve dans la Loi sur la fiscalité municipale afin que des usufruitiers faisant partie d'un groupe d'usufruitiers ayant chacun un droit de jouissance périodique et successif ne soient pas réputés propriétaires.

Ce projet de loi autorise l'évaluateur municipal à regrouper en une seule unité d'évaluation distincte, inscrite au nom de l'exploitant d'un réseau de télécommunications sans fil, l'ensemble des constructions faisant partie de ce réseau qui sont situées sur le territoire de la municipalité et qui sont installées sur un bâtiment appartenant à une autre personne. Il autorise de plus, dans le cas où une unité d'évaluation est déjà inscrite au nom de l'exploitant, à y ajouter l'ensemble de ces constructions.

Ce projet de loi permet à l'organisme municipal responsable de l'évaluation, si la municipalité locale y consent, de prolonger à une date pouvant aller jusqu'au 30 avril le délai accordé à l'évaluateur pour répondre à une demande de révision.

Ce projet de loi remplace l'obligation faite à une municipalité qui impose une compensation pour services municipaux de fixer un taux de compensation applicable aux valeurs foncières par l'obligation de prescrire des règles de calcul pouvant varier selon des catégories d'immeubles.

Ce projet de loi précise que la personne à qui la municipalité doit rembourser un trop-perçu de taxe d'affaires ou que la personne qui doit verser à la municipalité un supplément de taxe d'affaires est celle qui a trop payé ou qui n'a pas suffisamment payé, selon le cas. Il prévoit aussi que la mesure d'étalement continue de s'appliquer lorsque l'unité d'évaluation subit une modification qui apporte une perte de valeur imposable.

Il permet que, dans le cadre de la mesure de diversification transitoire des taux de certaines taxes, la composition des classes puisse être changée lorsque l'évaluateur modifie sa valeur pour y corriger une erreur, rétroactivement au jour de l'entrée en vigueur du rôle.

Ce projet modifie la Loi sur les dettes et les emprunts municipaux pour étendre à six mois la période au cours de laquelle une municipalité peut devancer la réalisation d'un emprunt arrivant à échéance.

Enfin, ce projet de loi permet au comité exécutif de la Communauté urbaine de Montréal de décréter que les rôles d'évaluation foncière et les rôles de la valeur locative de l'ensemble des municipalités dont le territoire est compris dans celui de la Communauté demeurent en vigueur jusqu'à la fin de 2000.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté.

M. Brassard: Article a.


Projet de loi n° 18

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles présente le projet de loi n° 18, Loi modifiant la Loi sur le développement de la région de la Baie James. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le développement de la région de la Baie James pour supprimer la disposition créant l'obligation de consulter la Société de développement de la Baie James prévue lors de l'octroi de concessions et de certains droits du domaine public sur le territoire de la région de la Baie James, ainsi que pour valider les concessions et les droits qui auraient été octroyés sans que ne soient respectées les exigences de cette disposition.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Oui. Très bien. M. le leader.

M. Brassard: Article d, M. le Président.


Projet de loi n° 41

Le Président: À l'article d de notre feuilleton, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation présente le projet de loi n° 41, Loi abrogeant la Loi sur les grains et modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, ce projet de loi transfère à la Régie des marchés agricoles et alimentaires le pouvoir réglementaire attribué au gouvernement par la Loi sur les grains et abroge cette loi. Il modifie la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés afin, entre autres, de confier au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation la responsabilité de délivrer les permis qui y sont prévus et de regrouper dans la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche les pouvoirs de la Régie pour ce qui concerne notamment la fixation des prix du lait et l'administration du régime de garantie de solvabilité des acheteurs de lait.

Ce projet de loi modifie la Loi sur la protection sanitaire des animaux afin de transférer à la Régie la responsabilité d'encadrer la solvabilité des exploitants des établissements de vente aux enchères d'animaux vivants. Il modifie, de plus, la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche afin, entre autres, d'intégrer les dispositions pertinentes des lois précitées, d'introduire des mesures permettant d'alléger le fonctionnement de la Régie et de rendre conforme le libellé de certaines dispositions aux structures mises en place par la Loi sur la justice administrative et la Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie? Adopté. M. le ministre.

M. Brassard: Article k.


Projet de loi n° 16

Le Président: À l'article k du feuilleton, Mme la ministre de la Justice présente le projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale et la Loi sur les tribunaux judiciaires. Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la division territoriale et la Loi sur les tribunaux judiciaires afin de transférer de Cowansville à Granby le chef-lieu du district judiciaire de Bedford.

Ce projet prévoit également que les causes inscrites pour enquête et audition au palais de justice de Cowansville avant l'entrée en vigueur du projet de loi sont réputées inscrites pour enquête et audition au palais de justice de Granby à la date d'inscription au palais de justice de Cowansville.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La ministre entend-elle tenir des consultations particulières sur ce projet de loi là?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Non, M. le Président.

Une voix: Le député de Shefford n'en veut pas.

Le Président: Alors, très bien. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article f.


Projet de loi n° 45

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration présente le projet de loi n° 45, Loi modifiant certaines dispositions législatives concernant le curateur public. M. le ministre.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Ce projet de loi modifie d'abord les règles applicables au financement des activités du Curateur public. C'est ainsi qu'il prévoit que désormais les dépenses du Curateur public seront imputées sur les crédits accordés annuellement par le Parlement et que ses revenus seront versés au fonds consolidé du revenu. Il suspend de plus temporairement le pouvoir du Curateur public d'exiger des honoraires pour la protection et la représentation des personnes et pour l'administration de leurs biens.

(14 h 20)

En matière de placements, le projet de loi soustrait le Curateur public de l'application des règles relatives aux placements présumés sûrs dans le cadre de la gestion des portefeuilles collectifs, lorsque la gestion de ces portefeuilles est confiée à la Caisse de dépôt et placement du Québec ou à ses filiales.

Le projet de loi habilite de plus le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration à constituer un comité consultatif chargé de conseiller le Curateur public en matière de protection et de représentation des personnes inaptes et protégées.

Par ailleurs, le projet de loi confie au Vérificateur général du Québec la vérification de l'ensemble des livres et des comptes de tous les fonds gérés par le Curateur public, qu'ils soient publics ou privés, et apporte diverses autres modifications afin de faciliter au Curateur public l'exercice de ses fonctions.

Enfin, M. le Président, le projet de loi propose deux modifications aux dispositions du Code civil du Québec. L'une vise à permettre au Curateur public ou à une autre personne de protéger, avec l'autorisation du tribunal, les personnes inaptes par des mesures provisoires lorsqu'une ouverture de régime de protection est imminente. L'autre mesure vise à permettre au Curateur public, lorsqu'il agit comme tuteur ou curateur d'un majeur soigné par un établissement de santé ou de services sociaux, de déléguer à une personne salariée de cet établissement ou qui exerce pour celui-ci une fonction la gestion de l'allocation mensuelle des dépenses personnelles du majeur.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: L'article o, M. le Président.


Projet de loi n° 194

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, M. le député de Saint-Jean présente le projet de loi n° 194, Loi concernant le regroupement des municipalités d'Iberville, de L'Acadie, de Saint-Athanase, de Saint-Jean-sur-Richelieu et de Saint-Luc. M. le député de Saint-Jean.


M. Roger Paquin

M. Paquin: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter devant cette Assemblée un projet de loi préparé conjointement avec le député d'Iberville et j'ai le plaisir de le faire en présence d'une délégation du Haut-Richelieu qui est coprésidée par l'ancien député libéral Jacques Tremblay, d'Iberville, et l'ancien ministre progressiste-conservateur qui a siégé avec les chefs des deux formations politiques à une certaine époque, M. André Bissonnette, et qui est présent ici aujourd'hui.

Alors, le présent projet de loi a pour objet de favoriser le regroupement des municipalités d'Iberville, de L'Acadie, de Saint-Athanase, de Saint-Jean-sur-Richelieu et de Saint-Luc et, à cette fin, détermine un échéancier afin de permettre le bon déroulement de la démarche de regroupement proposée par le milieu local.

Ce projet de loi prévoit en outre l'annulation des élections prévues pour le 7 novembre 1999 dans Iberville et L'Acadie et la création de la nouvelle ville pour le 24 juin 2000.

Le Président: Bien, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le leader du gouvernement peut nous indiquer si c'est l'intention de son gouvernement de tenir des consultations publiques, en commission parlementaire, sur ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, en cours de cheminement, on verra si c'est opportun. Si oui, il y en aura.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie? Oui. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article s, M. le Président.


Projet de loi n° 211

Le Président: En rapport avec cet article, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 211, Loi concernant la Commission de l'aqueduc de la Ville de La Tuque. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Alors, je dépose le rapport.

M. le député de Champlain présente le projet de loi d'intérêt privé n° 211, Loi concernant la Commission de l'aqueduc de la Ville de La Tuque.


Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi?

Des voix: ...

Le Président: Très bien. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: ...

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre des Transports.


Rapports d'activité de la Société de l'assurance automobile du Québec et sur le contrôle du transport routier

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le rapport d'activité 1998 de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Le Président: Le document est déposé. Mme la ministre de la Justice et ministre responsable de l'application des lois professionnelles.


Rapport annuel de l'Ordre professionnel des conseillers et conseillères d'orientation du Québec

Mme Goupil: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1997-1998 de l'Ordre professionnel des conseillers et conseillères d'orientation du Québec.

Le Président: Le document est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions.

Il n'y a pas non plus d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et des réponses orales Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux répondra à deux questions posées hier, le mardi 11 mai: celle posée par le député de Montmagny-L'Islet concernant l'Hôtel-Dieu de Montmagny et celle posée par M. le député de Limoilou concernant la radiothérapie à L'Hôtel-Dieu de Québec.

Je vous avise également qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Alors, nous allons aborder la période de questions et de réponses orales?

M. Mulcair: M. le Président, juste sur cette question-là, il y a une longue liste de réponses différées, on en a plusieurs qui sont arrivées aujourd'hui. Hier, le ministre des Finances a eu l'amabilité de répondre à une question, qui datait du 4 mai, de ma collègue de Beauce-Sud.

Étant donné qu'il était sans doute sur son erre d'aller, est-ce qu'on peut avoir une indication de quand est-ce qu'on aura le dépôt, qui avait été promis par le ministre des Finances dans les meilleurs délais, des différentes versions du registre tenu en vertu de l'article 67.3 du ministère du Revenu? C'est quoi, les meilleurs délais? Une semaine plus tard, pour un simple document?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. M. le Président, il y aura complément de réponse en temps opportun, mais j'ajouterais que, si l'opposition cessait de questionner des ministres qui sont absents – de façon rarissime – peut-être qu'il y aurait moins de compléments de réponse.

Une voix: ...

Le Président: Rapidement, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Mulcair: Très brièvement, juste pour rassurer mon collègue le leader du gouvernement, le ministre des Finances était bel et bien là, c'était lui que je citais. C'était son propos à lui, «dans les meilleurs délais». Si les ministres répondaient, on aurait moins besoin de revenir les semaines d'après.

M. Brassard: S'il y avait consentement, le ministre est disposé maintenant à déposer le document.

M. Mulcair: Avec volupté.

Le Président: Alors, la volupté étant... Ayant donné le consentement à M. le vice-premier ministre, s'il vous plaît.


Registre des communications de renseignements nominatifs transmis par le ministère du Revenu

M. Landry: Ce qui prouve que, quand le gouvernement dit «dans les meilleurs délais», c'est dans les meilleurs délais. Je dépose le document.

Des voix: Ha, ha, ha!


Questions et réponses orales

Le Président: Bien. Alors, ceci étant fait, nous allons aborder maintenant la période de questions et de réponses orales. Mme la députée de Saint-François, en question principale.


Réforme des services d'emploi


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Deux ans après la signature de l'entente Canada-Québec sur la formation de la main-d'oeuvre, force est de constater qu'il y a des ratés. Encore aujourd'hui, dans un article de Michel Vastel dans Le Soleil , les fonctionnaires remettent en question les choix du gouvernement. Ils trouvent désastreux le fait qu'en début d'année financière ils doivent refuser des services aux sans-emploi et aux entreprises en raison de l'incompétence de l'organisation à gérer les nouveaux budgets fédéraux. Ils ont l'impression d'avoir reculé de 15 ans. Ils se sentent non seulement étouffés, mais ils sont aussi démotivés. En s'attardant aux structures, comme le gouvernement l'a fait avec l'adoption de la Loi créant le nouveau ministère de l'Emploi et de la Solidarité, il faut bien admettre maintenant que l'opération déménagement s'est plutôt transformée en grand dérangement et a retardé une véritable offensive en faveur des chômeuses, chômeurs et prestataires de la sécurité du revenu.

Ma question au premier ministre, M. le Président: Qu'attend le premier ministre pour corriger le tir de ces décisions et rétablir non seulement la crédibilité, mais aussi la réputation du Québec en matière de gestion du développement de l'emploi?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'ai déjà dit dans cette Chambre que cette réforme, elle était importante, qu'elle apportait des modifications majeures, que nous nous sommes donné trois ans. Nous sommes à la première année, et il y a plus de 200 000 personnes que nous avons desservies. Nous avons atteint les objectifs qui étaient fixés dans cette entente Québec-Canada, au-delà même des objectifs qui étaient fixés. Nous sommes allés au-delà. Et je dirais que c'est très facile de dire qu'on ne répond pas aux attentes, considérant qu'avant le fédéral ne desservait qu'une clientèle, les prestataires d'assurance-emploi, et qu'il nous envoyait toutes les personnes qui étaient finalement des prestataires d'assurance-emploi qui sont devenues des prestataires de la sécurité du revenu. Plus de 60 % des personnes que nous avons desservies cette année sont des prestataires de la sécurité du revenu. Nous livrons marchandise auprès des gens qui sont en recherche d'emploi.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Puis-je rappeler à la ministre, M. le Président, que non seulement, lorsqu'on a créé le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, on a créé une nouvelle structure nationale qu'on appelle la Commission des partenaires du marché du travail, une unité autonome qui a été rattachée au ministère, c'est-à-dire les 151 CLE, une nouvelle structure régionale qu'on appelle les conseils régionaux des partenaires du marché du travail, en plus des comités consultatifs, puis on y a ajouté les CLD?

Alors, M. le Président, on a beau s'amuser avec les statistiques et dire qu'on a atteint les objectifs, mais il y a des personnes qui vivent de l'incertitude et qui n'ont pas les services qu'elles sont en droit d'exiger. Et on devra reconnaître que le gouvernement est champion dans les structures mais ne l'est pas dans les services à donner aux clients. Qu'attend le gouvernement pour donner les véritables services auxquels s'attend la population, M. le Président?

(14 h 30)

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, vous me permettrez de dire à la députée de Saint-François qu'elle fait un peu de raccourci. Quand je dis qu'on a rejoint au moins 200 000 personnes, qu'il y a au moins 60 % de ces personnes-là qui sont des prestataires de la sécurité du revenu qui n'en avaient à peu près pas, de services, parce qu'ils étaient éparpillés un peu partout, ce n'est quand même pas banal. Bien sûr, on a restructuré un certain nombre de choses, c'était éparpillé. Il y avait une bonne centaine de mesures, et on a ramené ça à une douzaine de mesures pour vraiment faire en sorte que les bonnes interventions soient faites auprès des personnes au bon moment.

Alors, je pense qu'on livre marchandise. Et, bien sûr, on a créé la Commission des partenaires, et j'en suis très heureuse parce que, la question de l'emploi, elle appartient au gouvernement, mais elle appartient aussi aux autres partenaires du marché du travail. Et tant mieux si, sur la scène nationale, les partenaires du marché du travail ont de la prise, ont des possibilités de développer avec nous, et encore tant mieux si, sur la scène régionale, les acteurs régionaux, qu'ils soient du milieu des affaires, du milieu syndical, du milieu communautaire, ont quelque chose à dire dans le développement de leur région.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Sauvé, en question principale.


Services d'emploi aux prestataires de la sécurité du revenu


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. À la fin de la semaine dernière, le centre local d'emploi de Montréal-Nord a émis la directive suivante, et je la cite: «Dans la situation budgétaire actuelle, nous devrons adopter des lignes de conduite plus strictes. Premièrement, étant donné que le budget s'avère insuffisant pour les prestataires de la sécurité du revenu, les nouvelles participations aux mesures suivantes seront réservées, pour les quatre prochains mois, de mai à août 1999, aux prestataires de l'assurance-emploi. Les mesures sont les suivantes: formation, soutien individuel à la formation, projets de préparation à l'emploi, projets d'insertion sociale, projets locaux de développement des compétences et subventions salariales d'insertion à l'emploi. Deuxièmement, les références aux ressources externes d'aide à l'emploi continueront de se faire, mais les mises en mouvement des prestataires de la sécurité du revenu seront éventuellement retardées dans l'attente d'argent neuf en provenance de la Sécurité du revenu.»

Après avoir revendiqué si longtemps, avec l'appui des forces vives du Québec, le rapatriement du fédéral des mesures d'emploi, comment la ministre de l'Emploi peut-elle accepter que de nouveau on fasse une différence entre les assistés sociaux et les chômeurs et que ce soient les assistés sociaux qui en paient le prix?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, d'abord, je veux rappeler... Je me permets de revenir sur le passé. Avant cette réforme-là, les prestataires de la sécurité du revenu n'avaient accès à à peu près aucune de ces mesures. Alors, cette année, au cours de l'année 1998-1999, on a rejoint beaucoup de prestataires de la sécurité du revenu. Maintenant, je conviens qu'actuellement nous fermons les livres de l'année 1998-1999, nous ouvrons ceux de 1999-2000, et, effectivement, là, on est dans une période où il y a des choix à faire, c'est clair. Je comprends qu'il y a de l'inquiétude, parce que toute l'opération de la répartition budgétaire région par région n'est pas complétée, ça, je tiens à le dire à tous les députés. Je pense que c'est un dossier qui nous tient à coeur, et des décisions seront prises dans les meilleurs délais pour garder le plus accessible possible l'ensemble des mesures à tous les chercheurs d'emploi.

Le Président: Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: En additionnelle. Est-ce que la ministre est en train de nous confirmer que, six semaines – je dis bien six semaines – après le début de cette année financière, on n'a plus d'argent pour les services directs aux assistés sociaux mais que, bien sûr, on a gardé toutes les structures?

Le Président: Mme la ministre du Travail.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je pense que c'est tout à fait injuste. Ce n'est pas la réalité. Ce n'est pas vrai qu'il n'y a plus d'argent pour les assistés sociaux.

Le Président: Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: En additionnelle. À ce moment-là, est-ce que la ministre s'engage, à court terme, pour les quatre prochains mois visés par cette directive, à faire en sorte que les assistés sociaux de Montréal-Nord – et ils sont plus de 8 000 – aient accès pleinement aux mesures de formation et d'insertion?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je suis en train de compléter toute cette opération de répartition budgétaire région par région. Je vais le faire, j'y travaille très intensément. Dans les prochains jours, les décisions vont être prises pour faire en sorte que ces mesures soient accessibles auprès des personnes qui en ont besoin.

Le Président: Mme la députée de Bonaventure, en question principale.


Programme de création d'emplois en forêt


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Le 15 avril dernier, en commission parlementaire, le ministre des Ressources naturelles confirmait la reconduction de 7 000 000 $, pour 1999-2000, de son ministère dans le cadre du Programme triennal de création d'emplois, programme qui est géré par REXFOR. Comme ce programme en est un où le Fonds de lutte contre la pauvreté et Emploi-Québec sont impliqués, le ministre soulignait, vous me permettrez de le citer: «Compte tenu des bienfaits et des retombées bénéfiques de ce programme, j'essaie par tous les moyens d'augmenter le financement.» M. le Président, près d'un mois après cette affirmation, il n'y a toujours rien de réglé sur le terrain et le laxisme du gouvernement inquiète au plus haut point les travailleurs de la forêt, les gestionnaires du programme, en Gaspésie et partout au Québec. Alors, pendant qu'on attend après le gouvernement, les travaux, eux, affichent déjà un retard de plus d'un mois.

Alors, ma question au ministre des Ressources naturelles: Qu'est-ce que le ministre attend pour convaincre ses collègues responsables du Fonds de lutte et d'Emploi-Québec pour s'entendre sur les budgets? Est-ce que le ministre peut aujourd'hui prendre ses responsabilités et annoncer la reconduction des 28 400 000 $ investis l'an passé dans ce programme?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: D'abord, M. le Président, je rappelle que c'est un excellent programme qui a permis à des centaines de bénéficiaires de l'aide sociale de retourner sur le marché du travail et en faisant oeuvre utile, ce qui est la preuve évidemment que le gouvernement aussi se préoccupe beaucoup de l'aménagement des forêts et de la régénération de notre patrimoine forestier.

Ceci étant dit, oui, très bientôt, d'ici quelques jours... Ma collègue ministre du Travail et mon collègue, également, responsable du Fonds de lutte à la pauvreté sont parfaitement à la fois conscients et très sensibles à cette question. Et je devrais, d'ici quelques jours, être en mesure d'annoncer le niveau de ressources que nous pourrons consacrer à ce programme pour l'année 1999.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, complémentaire, M. le Président. Est-ce que la ministre de l'Emploi peut nous confirmer que la vraie raison pour laquelle 200 emplois sont menacés en forêt dans le Bas-Saint-Laurent, c'est parce que son ministère est incapable de confirmer sa participation financière au projet de création d'emplois des organismes de gestion forestière? Pendant qu'elle étudie, il y a des gens qui attendent, il y a des gens qui ne savent pas s'ils vont travailler cet été ou non. Est-ce qu'elle peut confirmer que c'est son ministère qui est le véritable problème dans ce dossier-là?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre d'État à l'Emploi et au Travail.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, mon collègue a été clair, nous sommes dans un processus pour renouveler, nous sommes en train d'ajuster nos interventions. Nous devons le faire correctement, en toute cohérence. Et c'est ce que nous faisons et ce que nous allons compléter dans les prochains jours.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, d'abord.


Projet de loi sur les clauses orphelin


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Le gouvernement continue à reculer dans le dossier des clauses orphelin. On apprend ou on se fait confirmer aujourd'hui qu'il n'y aura pas, dans les délais prévus au règlement, de dépôt d'un projet de loi, contrairement à ce qu'avait pris comme engagement la ministre, qu'elle avait répété en commission parlementaire lors de l'étude des crédits. Le gouvernement a clairement reculé sur ce front de faire adopter à l'intérieur de la session du printemps un projet de loi pour éliminer les clauses orphelin.

Le gouvernement a reculé sur un deuxième front en créant un autre comité qui va faire une espèce de recension de la bonne ou de la mauvaise discrimination, supposément, qui va refaire soi-disant le travail qui a déjà été fait en commission parlementaire. Pourtant, le gouvernement, le Parti québécois avait pris durant la campagne électorale un engagement en toute connaissance de cause. Le premier ministre savait que le patronat était opposé à une législation. Le premier ministre savait que les syndicats étaient réticents à une législation. Le premier ministre savait que les jeunes étaient unanimes à vouloir une législation.

Ma question au premier ministre: Qu'est-ce qui a changé depuis l'élection? Est-ce qu'il y avait une parole électorale et une parole maintenant? Qu'est-ce qui a changé, alors qu'on connaissait la position de tout le monde et que, maintenant, son gouvernement recule en faisant semblant d'être surpris de voir les positions des gens?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, l'intention du gouvernement, qui s'est formulée par la forme d'un engagement électoral, est la même. Et l'engagement va être respecté, c'est-à-dire que nous allons déposer un projet de loi d'ici la fin de la session. Et nous pourrons procéder à l'étude de ce projet de loi. Je ne sache pas que l'engagement a été contracté en termes d'adoption d'un projet de loi avant la fin de la session. L'engagement était de déposer un projet de loi et de le soumettre à l'étude et au débat public que nous aurons à faire.

(14 h 40)

Une voix: Exactement. Très bien.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre du Travail a un peu plus de mémoire et se souvient de ses propos très clairs, très précis, à la commission parlementaire sur l'étude des crédits, où elle s'est engagée à déposer un projet de loi avant le 15 mai? Avant le 15 mai, c'est entre guillemets. C'est sa propre citation. Et est-ce qu'elle peut aujourd'hui nous expliquer qu'est-ce qui l'a amenée à changer d'idée, qu'est-ce qui a fait que, dans cette première étape, elle a reculé? Est-ce qu'on n'est pas en train de voir, dans ce dossier-là, que c'est les lobbys 2 et les jeunes 0?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, moi, je suis très heureuse de constater que, dans ce dossier-là, on ne recule pas, on avance. Et la preuve, c'est qu'il y a des milieux qui sont interpellés par un projet de loi comme celui-là qui sont en train de creuser, d'imaginer toutes sortes de solutions pour avoir un véritable dialogue sur cette question-là. Et je suis très heureuse que, par exemple, l'Alliance des manufacturiers ait proposé cette idée de comité assez ouvert entre des jeunes, entre l'industrie, le monde des affaires, entre les syndicats. Et pourquoi pas? Je vais déposer un projet de loi et je tiens... je pense que c'est important que nous ayons un dialogue sur ce dossier-là, sur cette préoccupation importante qui est apportée par les jeunes quant à l'accès à l'emploi et quant à l'exclusion, ce qu'on appelle les clauses orphelin.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que la ministre peut nous donner, maintenant qu'elle a commencé à repousser les échéanciers, à ne pas respecter sa propre parole... Est-ce que la ministre peut nous redonner aujourd'hui, redonner aux jeunes un échéancier, à savoir dans quels délais elle a l'intention de faire chacune des étapes? Est-ce qu'elle peut nous assurer en même temps qu'elle ne va pas noyer le dossier des clauses orphelin l'automne prochain dans l'ensemble de la réforme du Code du travail et que les jeunes vont servir de monnaie d'échange, abandonnés, dans le dossier des clauses orphelin?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je pense que c'est un peu inutile d'appréhender le pire. Le premier ministre l'a dit, nous allons déposer un projet de loi dans les meilleurs délais. Il y a encore des étapes à franchir, et je veux les franchir correctement. Parce que les débats que nous avons à l'intérieur du gouvernement, c'est les débats qui ont lieu dans nos cuisines, dans nos salons et sur la place publique, et je veux que le dialogue se fasse le plus correctement possible, de la manière la plus ouverte possible, entre les jeunes, entre les syndicats et avec le milieu des affaires.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa.


Nombre de médecins spécialistes au centre hospitalier régional Delanaudière


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. La situation est devenue infernale à l'hôpital de Lanaudière. Au cours des dernières semaines, près de 24 médecins spécialistes ont quitté l'établissement. Pourtant, les mesures contenues dans le plan de consolidation de la régie régionale devaient faciliter le recrutement et la rétention des médecins. Tel que demandé par la régie régionale, M. le Président, est-ce que la ministre a l'intention d'attribuer les fonds nécessaires pour régler ce problème ou va-t-elle préférer continuer d'ignorer que l'hôpital puise actuellement dans des fonds réservés aux malades?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je remercie la députée de Bourassa de sa question, M. le Président. Vous remarquerez qu'hier, alors que j'étais absente, on a posé cinq questions en ligne en commençant la période de questions avec les questions. On a attendu que ce soit la cinquième question, alors que j'étais présente aujourd'hui. Il me semble que, compte tenu du fait que j'ai été particulièrement présente à cette Assemblée, il aurait peut-être été normal qu'on commence par la première question aujourd'hui.

Alors, M. le Président, dans le cas de Lanaudière...

Des voix: ...

Le Président: Je m'excuse. Bien. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Dans le cas de Lanaudière, comme dans tous les autres cas au Québec, puisqu'il y a des situations difficiles, qu'il s'agisse du Lac-Mégantic, qu'il s'agisse du comté de Richmond, par exemple, qu'il s'agisse d'autres situations, on le sait qu'il y a des difficultés soit pour couvrir certaines plages horaires soit pour rendre certains services spécialisés. J'ai répondu à plusieurs reprises, M. le Président, que cela était ma priorité.

Dans les faits, nous avons engagé des travaux tant avec la Fédération des médecins spécialistes qu'avec la Fédération des médecins omnipraticiens. Nous avons par ailleurs une série de comités, un ensemble de comités de travail qui doivent me faire rapport dans les semaines et les jours qui viennent de telle sorte que nous puissions mesurer l'impact de certaines corrections dans la rémunération. Et d'ailleurs, nous n'avons pas attendu les questions de l'opposition pour corriger de telles choses, qu'il s'agisse de la question des urgentologues, qu'il s'agisse de la question de la rémunération mixte, de la reconnaissance de l'alourdissement des clientèles dans les services d'urgence. Oui, la situation de Lanaudière nous préoccupe, oui, nous nous en occupons.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Bon, là, je pense qu'on ne se comprend pas, M. le Président. Mme la ministre est-elle consciente qu'il y a un plan de consolidation qui a été approuvé par la régie régionale? Et a-t-elle l'intention, oui ou non, d'investir les argents nécessaires pour régler le problème, ou va-t-elle continuer d'ignorer que l'hôpital de Lanaudière puise actuellement dans des fonds réservés aux malades pour recruter et retenir des médecins? Il y a un fonds consolidé qui a été approuvé par la régie.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, la députée de Bourassa sait très bien, puisque je lui ai déjà répondu à ces questions, que nous avons demandé aux établissements de ne pas procéder à de la surenchère ou d'utiliser des fonds autrement prévus pour servir les malades aux fins de procéder à du recrutement. Il y a une lettre qui a été envoyée à l'ensemble des institutions du réseau, autant dans les régies que dans les hôpitaux, et, dans les faits, nous travaillons avec nos institutions à nous assurer que la réponse aux besoins des gens qui sont malades soit une réponse de qualité. Nous le faisons pour Lanaudière, nous le faisons pour les autres régions du Québec.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, que répond Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux au président de la régie régionale qui dénonce le manque total de réceptivité du ministère, et je le cite: «On a l'impression que les besoins régionaux ne sont pas importants, à Québec»?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je suis un peu désolée de constater ce commentaire, puisque, dans les faits, nous avons, entre autres, investi dans de l'équipement spécialisé; je pense, entre autres, à la résonance magnétique particulièrement pour cette région. Régulièrement, je rencontre mes collègues qui représentent la région. Nous avons un dossier actuellement à l'étude au Conseil du trésor pour un investissement majeur dans cette région et pour une réorganisation de l'ensemble des services de santé, comprenant des soins et des places d'accueil pour les personnes âgées, de même que le réaménagement des services de soins de courte durée et des services généraux et spécialisés, M. le Président. Oui, nous nous occupons des régions, et nous nous occupons surtout des gens qui ont des besoins dans les régions du Québec.

Le Président: En question principale, M. le député de Châteauguay.


Nombre de médecins spécialistes au centre hospitalier Anna-Laberge de Châteauguay


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Au centre hospitalier Anna-Laberge de Châteauguay, il y a actuellement une grave pénurie de médecins spécialistes. À compter du 1er juillet, la situation deviendra dramatique puisque les deux anesthésistes... sur 2,33, il y en a deux qui ont démissionné et qui vont quitter le 1er juillet. La raison de cette situation est simple: l'hôpital est victime d'une injustice parce que la ministre a décidé que, partout autour de Châteauguay, à Valleyfield, à Saint-Jean, à LaSalle, les hôpitaux vont payer 100 % du tarif, pendant qu'à Châteauguay on sera limité à 70 %. Ou bien la ministre est au courant de l'injustice, auquel cas c'est un scandale, ou bien elle ignore les effets de ses décisions.

(14 h 50)

Ma question, dans ce contexte, est bien simple, M. le Président: La ministre va-t-elle enfin accepter, après de nombreuses demandes, de venir rencontrer les intervenants de l'hôpital pour réaliser les effets pervers de ses décisions et ainsi corriger la situation pour que justice soit faite?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je remercie le député de Châteauguay de sa question. C'est un débat que nous avons eu déjà en commission parlementaire, qui correspond déjà aux propos que j'ai tenus tout à l'heure. Lorsque nous modifions la rémunération soit d'un spécialiste soit d'un omnipraticien, cela a des effets domino sur les établissements autour de l'établissement concerné. Et, dans certains cas, on nous a reproché... Les propres collègues du député de Châteauguay nous ont reproché d'avoir rehaussé les rémunérations salariales de certains spécialistes, avec comme effet d'avoir provoqué le départ de ces spécialistes, parce que, justement, ils sont allés vers les endroits plus près, à proximité pour obtenir cette rémunération.

Je connais le dossier Anna-Laberge; c'est d'ailleurs dans ma région. Il y a des gens de mon cabinet, de même que notre collègue, qui ont rencontré les personnes responsables au centre hospitalier Anna-Laberge. J'ai d'ailleurs dit au député de Châteauguay que, si jamais nous nous retrouvions devant une pénurie ou un manque de spécialistes, soient-ils anesthésistes ou autres, nous avions prévu des équipes de dépannage de telle sorte qu'il n'y ait pas rupture de services auprès de la population, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Ma question était simple, M. le Président: Est-ce que la ministre accepte de venir rencontrer les intervenants de l'hôpital? Je veux bien qu'on entende parler de dépannage, mais, tout autour, il n'y a pas de dépannage; il y a la règle du 100 %. Pourquoi, seulement à Châteauguay, il y aurait le dépannage, pendant qu'ailleurs on sécurise les institutions en venant marauder nos médecins à Châteauguay? Est-ce que la médecine ambulatoire, c'est rendu d'avoir des médecins ambulants? C'est ça, le système qu'elle nous propose? Est-ce qu'elle va venir, oui ou non, à Châteauguay?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, moi, je pose la question au député de Châteauguay: Est-ce que l'important, c'est que les malades aient accès à des services et aient accès à des spécialistes? Est-ce que, par les moyens que nous trouvons et qui nous apparaissent raisonnables, on y a accès? Oui, M. le Président. Alors, non seulement je rencontre les gens des différentes institutions, mais j'ai une rencontre de prévue, d'ici quelques semaines, avec l'ensemble des hôpitaux de la région de la Montérégie, et nous aborderons autant ces questions que les autres, et, en plus, j'aurai sans doute en main un certain nombre de données me permettant d'identifier les actions que nous pourrions prendre pour mieux couvrir l'ensemble des besoins sur tout le territoire québécois.

Le Président: En principale, M. le député de Limoilou.


Transfert du centre d'hématologie et de greffe de la moelle osseuse à L'Hôtel-Dieu de Québec


M. Michel Després

M. Després: Merci, M. le Président. Le 28 avril dernier, le conseil d'administration du centre hospitalier affilié de Québec a renversé la décision de la régie régionale de la santé qui envoie le centre d'hématologie et la greffe de la moelle osseuse de Saint-Sacrement à L'Hôtel-Dieu. Dans Le Soleil du 7 mai, on nous dit que les hématologues de Saint-Sacrement préfèrent quitter Québec plutôt que de travailler à L'Hôtel-Dieu. Ce matin, dans le journal, on titre: Marois appuie le transfert vers L'Hôtel-Dieu , et, dans le même article, le directeur de l'Hôpital de L'Enfant-Jésus déclare – et je cite, M. le Président: «Budget ou pas, la décision est prise de déménager ce programme à L'Enfant-Jésus, et nous allons la maintenir.»

Ma question, M. le Président, à la ministre de la Santé: La ministre peut-elle nous dire qui dit vrai: les hématologues de Saint-Sacrement, le conseil d'administration de l'Hôpital de L'Enfant-Jésus ou la régie régionale?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, le député sait très bien que la réalité est souvent très nuancée. Alors, dans les faits, la recommandation principale sur l'organisation des services de santé à Québec et dans la grande région de Québec, au niveau universitaire, c'est de s'assurer que les surspécialités, c'est-à-dire les services que l'on concentre, d'une part, parce qu'on y fait de la recherche, de l'évaluation des technologies et surtout que l'on y traite des problèmes particulièrement sérieux et rares, que ces surspécialités seraient concentrées dans le Centre hospitalier universitaire de Québec, à Laval, au Centre hospitalier de l'Université Laval de même qu'à L'Hôtel-Dieu, et que, par ailleurs, on accepterait, bien sûr, par les établissements affiliés, qu'il y ait certaines spécialités qui soient, par exemple, à l'institut, dans le cas de l'hôpital Laval, ou dans d'autres parties du réseau hospitalier de Québec, qu'il s'agisse de L'Enfant-Jésus ou d'un autre établissement.

Que, donc, des hématologues ou que du personnel spécialisé soient transférés ou veuillent être transférés à L'Enfant-Jésus, il n'y a pas de problème à cela, M. le Président, en autant, cependant, qu'on s'assure qu'au niveau de la surspécialité, compte tenu que l'ensemble des autres spécialistes nécessaires, entre autres, au transfert et à la greffe de la moelle osseuse et, d'une façon, encore là, je vous le dis, très spécialisée, puissent être disponibles à L'Hôtel-Dieu de Québec. Je pense qu'il n'y a aucun problème là, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Michel Després

M. Després: M. le Président, comment la ministre peut-elle assurer les services à la population quand la structure va à L'Hôtel-Dieu et que les médecins vont à l'hôpital de L'Enfant-Jésus?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Il y aura des médecins à l'Enfant-Jésus qui pourront continuer à offrir des services spécialisés, entre autres en hématologie, et nous ne l'empêchons pas, M. le Président. Nous nous assurons cependant que, dans le cas de la surspécialité... et c'est ce que le CHUQ s'engage à réaliser; il a d'ailleurs accéléré son processus d'immobilisations pour être sûr que les équipements allaient être disponibles et prêts pour la fin de l'été, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Michel Després

M. Després: M. le Président, est-ce que la ministre peut nous assurer que, dans la période de transition où le centre d'hématologie sera transféré à L'Hôtel-Dieu de Québec, aucun patient ne sera traité à Montréal?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, je peux assurer les membres de cette Assemblée que tous les patients, que tous les malades qui ont des problèmes sérieux, urgents et qui doivent être traités le seront. Ils le seront à Québec, avec entente, si nécessaire, avec les centres hospitaliers de la région de Québec. Et si ce n'était pas le cas et si la vie d'une personne était en danger et qu'elle doive être soignée à Montréal, elle le serait, M. le Président.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Chapleau.


Droit de subir un procès dans la langue officielle de son choix


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): M. le Président, dans une décision rendue en 1998, la Cour d'appel du Québec a clairement reconnu qu'un accusé a le droit de subir son procès dans la langue officielle de son choix, ce qui implique, de dire la Cour, que le procureur de la couronne parle la même langue que l'accusé pendant le procès.

Cette décision bénéficie aux anglophones du Québec mais aussi aux francophones du reste du Canada. Or, la Procureur général du Québec a décidé d'interjeter appel de cette décision auprès de la Cour suprême du Canada. Pourtant, cette décision émane de la Cour d'appel, soit le plus haut tribunal du Québec. Elle est unanime, claire, logique et respectueuse du droit des minorités.

M. le Président, est-ce que le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, qui fait publier ces jours-ci dans les journaux un article où il écrit que le gouvernement du Québec veut souligner à sa façon le dynamisme des communautés francophones du Canada et de L'Acadie, est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi son gouvernement a décidé d'en appeler d'une décision dont l'un des effets concrets est de permettre aux francophones du reste du Canada d'avoir un procès en français, avec un procureur de la couronne qui parle français?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.


M. Joseph Facal

M. Facal: M. le Président, le gouvernement du Québec est évidemment très sensible à la situation des francophones hors Québec. L'opposition officielle, M. le Président, formait le gouvernement du temps de l'affaire Mahe, à la fin des années quatre-vingt; elle est donc sûrement très sensible à la complexité de cette situation.

(15 heures)

Cela dit, comme il s'agit d'une affaire de nature strictement judiciaire, elle relève exclusivement de la compétence de la Procureur général du Québec qui va maintenant compléter ma réponse.

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, comme mon collègue vient de le mentionner, c'est une affaire qui était très délicate. Ça a un impact tant sur les francophones vivant au Québec que sur les francophones habitant à l'extérieur du Québec. J'ai reçu également à mon ministère une lettre de la fédération, de l'association des juristes d'expression française de «common law» du Manitoba pour me sensibiliser à cette question. Considérant l'importance et la complexité, j'ai demandé à mon ministère de regarder à nouveau la pertinence et l'opportunité de porter ce dossier en appel et, lorsque ma réflexion sera terminée, je ferai part de ma décision, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): M. le Président, est-ce que la ministre sait qu'une requête pour permission d'en appeler a été présentée par son gouvernement auprès de la Cour suprême du Canada qui a d'ailleurs décidé d'entendre l'appel en question, appel d'une décision unanime de la Cour d'appel du Québec qui aurait réglé le débat en faveur tant des anglophones du Québec que des francophones du Canada, Mme la ministre?

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, il est évident que, lorsque j'ai été mise au courant de cette situation, c'est la raison pour laquelle j'ai demandé que l'on puisse regarder à nouveau la pertinence et l'opportunité de notre appel, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Est-ce que la ministre réalise qu'elle est engagée dans un litige judiciaire? La Cour suprême du Canada a décidé d'entendre l'appel qui provient du Québec, qui a été initié par le Québec. Contrairement à l'affaire Mahe, qu'on a citée, où nous intervenions, la province de Québec intervenait dans un dossier, ici, c'est le Québec qui initie le dossier. Est-ce qu'elle comprend qu'elle est engagée dans un processus judiciaire, qu'il va y avoir des auditions, qu'il y a même un mémoire qui a été produit par son ministère auprès de la Cour suprême et que tout cela va à l'encontre des droits des francophones du reste du Canada et des anglophones du Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, il est toujours temps de regarder la pertinence et l'opportunité d'aller en appel, et, comme Procureur général, il est de mon devoir de m'assurer que nous prenons conscience de tous les tenants et aboutissants du mémoire qui a été déposé pour aller en appel.

Le Président: M. le député.


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Est-ce que je dois comprendre, Mme la ministre, que vous allez vous désister de l'appel en question?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, comme vient de le souligner le député, et ce qu'a reconnu d'ailleurs d'emblée la ministre de la Justice, il s'agit d'une affaire extrêmement importante qui met en cause les droits fondamentaux, qui met en cause le droit constitutionnel à plusieurs égards. Alors, que le gouvernement du Québec ait jugé à propos de préserver ses droits de toute façon en obtenant une permission d'appeler le situe maintenant dans une position où il peut évaluer en toute connaissance de cause quelle est la meilleure avenue à emprunter. C'est ce que nous ferons une fois que la ministre de la Justice aura terminé l'analyse en cours, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): M. le Président, est-ce que les membres de ce gouvernement se rappellent que, dans le discours qu'il devait prononcer le 30 octobre 1995 si les forces du Oui l'avaient emporté, l'ex-premier ministre Parizeau devait affirmer que le Québec avait un devoir imprescriptible de solidarité envers les communautés francophones du Canada?

Je demande à ce gouvernement de nous dire maintenant, à leurs yeux, de quelle solidarité il s'agit? Est-ce qu'il s'agit d'une solidarité bidon, creuse? Est-ce que c'est d'une solidarité simulée qu'il s'agit? De quoi s'agit-il au juste? Et, s'il s'agit d'une véritable solidarité, qu'on nous annonce le retrait de la procédure en Cour suprême du Canada.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.


M. Joseph Facal

M. Facal: M. le Président, ce gouvernement n'a évidemment aucune leçon à recevoir de la part d'une opposition...

Des voix: Oh!

M. Facal: ...de la part d'une opposition dont le chef, au mois d'avril de l'an dernier, avait eu l'outrecuidance de dire que, si le français avait survécu au Canada, c'était grâce à la générosité de nos amis canadiens-anglais.

Des voix: Bravo!

M. Facal: Par ailleurs, M. le Président, cette année, le gouvernement du Québec augmente de 20 % l'enveloppe budgétaire consacrée à la francophonie hors Québec, enveloppe qui elle-même était l'une des rares au gouvernement à ne pas avoir été touchées par les compressions des trois dernières années, tandis que le gouvernement fédéral, lui, de 1992 à 1997, a fait baisser de 28 000 000 $ à 20 000 000 $ l'enveloppe consacrée à l'aide aux francophones hors Québec. Bref, pour donner des leçons, le Parti libéral et leurs amis d'Ottawa sont bien mal placés.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Saint-Laurent.


Avis du procureur de la couronne concernant la divulgation de renseignements nominatifs par le ministère du Revenu


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Dans le dossier, M. le Président, de la fuite de renseignements personnels et confidentiels du ministère du Revenu, la ministre de la Justice et Procureur général affirmait hier, et je cite: «Ce matin – en parlant d'hier – un substitut du procureur m'a confirmé qu'il n'y avait eu aucune intention criminelle de la part des fonctionnaires au ministère du Revenu. Donc, il n'y a eu aucune volonté, aucune intention criminelle [...] ce qui confirme qu'il n'y aura pas de poursuite criminelle dans ce dossier.» Fin de la citation. Or, M. le Président, tout le monde sait qu'un substitut du Procureur général, au Québec, n'émet aucune opinion, ne prend aucune décision, sauf sur un dossier qui est constitué à la suite d'une enquête.

Alors, ma question à la ministre de la Justice, M. le Président: Si on a suivi dans ce dossier-là les procédures usuelles, ce que tout le monde fait, ce que tous les substituts du Procureur général au Québec font, à la suite de quelle enquête le procureur de la couronne a-t-il émis l'opinion qu'il a donnée à la ministre hier matin?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, ma réponse d'hier, lorsque j'ai fait référence au substitut qui a confirmé qu'il n'y avait pas ouverture à poursuites criminelles parce qu'effectivement il n'y avait eu aucune intention frauduleuse dans les événements, en regard du dossier du ministère du Revenu, donc, ce que j'ai confirmé, c'était que mon ministère m'avait confirmé hier matin qu'il n'y avait aucune ouverture à des poursuites criminelles. Donc, comme Procureur général, je n'avais aucune intervention à faire à ce niveau.

Et pour ce qui est de la suite de la réponse que j'ai donnée, c'était comme jurisconsulte du gouvernement. Comme jurisconsulte du gouvernement, la ministre de la Justice, elle est appelée à donner des informations juridiques à tous les ministères. Et, M. le Président, le député de Marquette, lorsqu'il m'a posé la question, le savait très bien, qu'en vertu de la Loi sur le ministère de la Justice et à l'article 3d on dit ceci: «Le ministre de la Justice donne son avis aux ministres titulaires de divers ministères du gouvernement du Québec sur toutes les questions de droit qui concernent ces ministères.»

Alors, M. le Président, la ministre de la Justice et Procureur général occupe ces deux fonctions, mais il ne faut pas les mêler. Et ce qu'on a essayé de faire dans cette Chambre depuis quelques jours, c'est de mêler ces deux fonctions, et on sait très bien que, comme ministre de la Justice, on est à la fois Procureur général et jurisconsulte.

Le Président: M. le député.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Ma question est bien simple, M. le Président, en additionnelle: La patronne du procureur de la couronne qui l'a appelée hier matin – la ministre de la Justice est Procureur général du Québec – s'est-elle enquise auprès de ce procureur de la couronne là sur quels faits, sur quels témoignages, sur quels dossiers il s'était appuyé pour lui donner une opinion à l'effet qu'il n'y avait aucune intention frauduleuse ou criminelle dans ce dossier-là? C'est ça, la question.

Une voix: Bravo!

(15 h 10)

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, ce que j'ai exprimé hier, ce que j'ai dit, c'était que mon sous-ministre m'informait qu'il n'y avait aucune ouverture à poursuites criminelles. Et ce que j'ai ajouté, c'est qu'hier matin il y avait également un substitut qui confirmait que, de par la nature du dossier que nous en connaissions, il n'y avait aucune ouverture à matière criminelle... il n'y avait aucune poursuite criminelle dans ce dossier. Donc, comme Procureur général, c'est ce que j'ai dit, c'est ce que je redis en cette Chambre aujourd'hui.

Le Président: M. le député.

M. Dupuis: La ministre réalise-t-elle, M. le Président, que les réponses qu'elle donne aujourd'hui ressemblent étrangement à une opinion de complaisance qui lui aurait été donnée pour faire l'affaire du vice-premier ministre?

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, à ce moment-ci...

Des voix: ...

Le Président: Oui. M. le député de Saint-Laurent, je vous rappelle les dispositions de l'article 35. En vertu du paragraphe 5°, «le député qui a la parole ne peut attaquer la conduite d'un député, si ce n'est par une motion mettant sa conduite en question». Je pense que vous réalisez que les propos que vous venez d'utiliser laissent entendre que la ministre de la Justice et Procureur général a manqué à son serment d'office. C'est très grave. Alors, je vous demande de retirer vos paroles ou, tout au moins, d'utiliser les dispositions du règlement pour aller de l'avant.

M. Dupuis: Je vais reformuler la question, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: Je pense que... M. le...

Des voix: ...

Le Président: Je pense, M. le député de Saint-Laurent, que ça économiserait le temps et que ça calmerait le jeu si vous, d'abord, retiriez vos propos et, par la suite, reformuliez votre...

M. Dupuis: Je retire les propos que j'ai prononcés. Je vais poser...

Le Président: Très bien.

M. Dupuis: Voilà. La ministre réalise-t-elle que les réponses qu'elle nous donne aujourd'hui ressemblent étrangement à une opinion qu'elle aurait sollicitée pour faire l'affaire du ministre des Finances?

Des voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Brassard: Oui, sur une question de règlement. Avec la dernière question, peut-être que le député est un peu plus subtil qu'avec l'autre question avant, mais, M. le Président, de façon similaire il y a violation du règlement, manifestement. Manifestement, c'est une insinuation tout aussi malveillante, la deuxième, que la première question, une insinuation aussi malveillante à l'égard et de la ministre de la Justice et du ministre des Finances.

Une voix: Bravo!

M. Mulcair: Sur la question de règlement, M. le Président, j'invite mon collègue le leader du gouvernement à la prudence. La dernière fois qu'ils se sont insurgés de la manière...

Des voix: ...

Le Président: Sur la question de règlement, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Mulcair: M. le Président, la dernière fois, dans ce même dossier, qu'on a eu une réaction de cette nature de la part du gouvernement, c'était quand on avait expliqué qu'un document avait été fabriqué pendant le week-end. Le dépôt qui a été fait tantôt a confirmé que le document a été fabriqué pendant la fin de semaine, et la question de mon collègue ne fait que confirmer que, dans ce dossier, de A à Z il y a «cover-up».

Une voix: Bravo!

Le Président: Je pense que la question de règlement ne devrait pas, elle non plus, porter une accusation qui finalement envenime la situation. Le leader du gouvernement a posé une question de règlement sur l'application de l'article 35.

M. Brassard: Non.

Le Président: Je pense que, M. le leader adjoint de l'opposition officielle, vous vouliez émettre un point de vue sur cette opinion-là.

M. Brassard: M. le Président.

Le Président: Je vais juste terminer.

M. Brassard: L'autre question de règlement.

Le Président: Je comprends, mais je pense que je viens déjà d'indiquer que, dans une question de règlement, on ne peut pas, sous prétexte qu'on est sur une question de règlement, nous-même commettre un accroc au règlement. D'abord, je vous demande de retirer vos propos à l'égard du «cover-up» puis, deuxièmement, après ça, j'émettrai une opinion sur le reste.

M. Mulcair: Bien sûr, M. le Président. On laissera tout le monde décider ce que c'est, et je retire volontiers le mot «cover-up». Mais, maintenant, la question demeure posée, et on aimerait bien avoir une réponse du gouvernement.

Une voix: Bravo!

Le Président: Très bien. Ça règle cette question, et j'apprécie votre collaboration, M. le leader adjoint de l'opposition officielle. Maintenant, j'ai entendu les deux argumentations. M. le député de Saint-Laurent, même si effectivement c'était un peu plus subtil, je vous demande encore une fois, s'il vous plaît, de formuler la question d'une façon ni à susciter un débat ni à laisser entendre qu'un député de l'Assemblée a manqué à son serment d'office.

M. Dupuis: La ministre confirme-t-elle... Alors, je retire mes paroles.

Le Président: Merci, M. le député.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: La ministre confirme-t-elle que le téléphone qu'elle a eu hier matin d'un procureur de la couronne qui lui a affirmé, selon elle, qu'il n'y avait aucune intention criminelle ou frauduleuse, pour employer ses propres termes tantôt, n'était basé sur aucun fait, sur aucun dossier ni sur aucun témoignage de qui que ce soit?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, le député de Saint-Laurent, je ne sais pas où il prend ses éléments d'information quand il dit «par téléphone», etc. Je n'ai jamais donné ces précisions-là. C'est de la fabulation. Ce que j'ai dit hier, c'était à l'effet que, à mon ministère, on m'a dit clairement qu'il n'y avait aucune poursuite, qu'il n'y avait aucune ouverture à des poursuites criminelles. Et le député de Saint-Laurent lui-même, qui a été substitut du Procureur, sait très bien que l'opinion qui a été donnée par mon ministère a été faite à partir de l'ensemble des faits qui ont été mentionnés par la Commission d'accès à l'information. Et je suis tout à fait surprise, M. le Président, que le député de Saint-Laurent, qui lui-même a été substitut, ne sache très bien qu'il est normal que des substituts puissent exprimer des opinions à partir d'éléments qu'ils reçoivent. Et ils peuvent aussi très bien... Et ils se doivent de le faire. Ils sont indépendants, les substituts, lorsqu'ils font l'analyse d'un dossier. Ils sont tout à fait autonomes. Et ce qui m'a été confirmé, c'est qu'il n'y avait pas dans ce dossier, à partir de la décision de la Commission d'accès à l'information, de matière à poursuites criminelles dans ce dossier, M. le Président.

Le Président: Bien, cela met fin à la période des questions et des réponses orales aujourd'hui.


Réponses différées


Déficits des établissements hospitaliers

Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux va maintenant répondre à deux questions qui ont été posées hier. D'abord une question posée par M. le député de Montmagny-L'Islet concernant l'Hôtel-Dieu de Montmagny. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je répète ce que j'ai dit lorsque j'ai répondu à la première question qui m'a été posée aujourd'hui: j'ai probablement été moins absente de l'Assemblée nationale à la période des questions que tous mes critiques réunis, M. le Président, mais on a profité de cette journée pour me poser cinq questions. Je remercie d'ailleurs mes collègues d'avoir pris la peine, lorsqu'il était possible pour eux de le faire, d'avoir répondu à ces questions.

Dans le cas du député de Montmagny-L'Islet qui soulevait la question du déficit de l'Hôtel-Dieu de Montmagny, d'abord, il n'est pas inutile de rappeler, M. le Président, que c'est plus de 1 750 000 000 $ que nous réinvestissons dans l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux, dont 700 000 000 $ pour couvrir les déficits de nos établissements, qui sont particulièrement concentrés dans une quarantaine d'hôpitaux. Dans le cas particulier du déficit de l'hôpital de l'Hôtel-Dieu de Montmagny, on nous dit qu'effectivement au 31 mars 1999 le déficit était de l'ordre de 1 000 000 $. La régie régionale reconnaît qu'il y a une récurrence à ce déficit, c'est-à-dire que, si on ne corrige pas certaines façons de faire, si on ne corrige pas l'organisation des services ou la façon de les livrer, on risque de se retrouver encore avec une somme du même ordre, M. le Président.

Et donc, en ce sens, on a prévu corriger, d'une part, le 1 000 000 $ qui est dû au déficit qu'a vécu cet établissement comme tous les autres et, par ailleurs, pour le 1 000 000 $ supplémentaire qui n'avait pas été préalablement autorisé puisque c'étaient des fonds qui n'étaient pas disponibles, la régie a consenti une somme additionnelle de l'ordre de 250 000 $ pour faciliter le respect des cibles budgétaires, M. le Président.

(15 h 20)

Et j'ajouterai ceci. J'ai encore rencontré hier l'Association des hôpitaux du Québec. Nous travaillons avec l'Association et avec la table des régies régionales de la santé et des services sociaux, de telle sorte que nous puissions arriver à des protocoles d'entente, à des contrats de gestion permettant de voir comment, établissement par établissement, non seulement nous couvrirons le déficit accumulé, mais nous nous assurerons que les déficits qui risquent d'être récurrents soient résorbés sans pour autant entacher les services à la population, M. le Président.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: M. le Président, je voudrais d'entrée de jeu rappeler à Mme la ministre qu'hier, évidemment, nous nous sommes inscrits dès le début de la période de questions parce que nous savions... on avait été informés qu'il y aurait de l'argent qui serait distribué à certains établissements et on voulait en bénéficier.

M. Brassard: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Question de règlement.

M. Gauvin: Donc, Mme la ministre, qu'est-ce que vous entendez faire pour supporter l'Hôtel-Dieu de Montmagny dans les meilleurs délais pour vous assurer qu'il n'y ait pas de coupures de services? Parce qu'il y a un effort qui a été fait, comme je le mentionnais hier, depuis déjà deux ou trois ans, un effort remarqué dans la région. Il y a une sous-budgétation de la région Chaudière-Appalaches, et, à l'intérieur de la région, c'est l'Hôtel-Dieu de Montmagny qui est considéré comme l'enfant pauvre des budgets additionnels qui ont été distribués récemment. Donc, qu'est-ce que vous entendez faire pour porter une attention spéciale à l'Hôtel-Dieu de Montmagny?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je ne peux, M. le Président, que répéter ce que j'ai déjà donné comme information: Il y a d'ores et déjà 1 000 000 $ qui devraient servir à couvrir une partie du déficit. Il y a par ailleurs un 250 000 $ – c'est ça – qui est dégagé pour réviser justement certaines bases budgétaires de l'hôpital de Montmagny. Et, par ailleurs, il y a actuellement d'engagées sur tout le territoire québécois, avec tous les établissements autant de santé que de services sociaux, d'ailleurs, lorsqu'il y a des déficits dans ces établissements, des discussions pour voir comment retrouver l'équilibre budgétaire, sachant qu'il y a des budgets de développement, qu'il y aura éventuellement des budgets d'immobilisation et que nous avons une période, je le rappelle, de trois ans pour retrouver cet équilibre, sans cependant avoir à réduire les services aux personnes malades.


Liste d'attente en radiothérapie à L'Hôtel-Dieu de Québec

Le Président: Bien. Alors, maintenant, Mme la ministre va répondre à une question posée par le député de Limoilou qui concerne la radiothérapie à L'Hôtel-Dieu de Québec.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. C'est un dossier qui est très préoccupant. On a déjà soulevé cette question d'ailleurs à l'Assemblée – je crois que c'est la députée de Bourassa qui l'avait fait – sur l'augmentation des listes d'attente. Effectivement, nous avions réussi à réduire le nombre de personnes en attente pour des services en radio-oncologie, mais nous avons constaté depuis quelque temps que ces listes ont tendance à augmenter et donc que les délais d'attente risquent d'être plus élevés qu'ils ne l'étaient par le passé. On sait, évidemment, quand on a un cancer, comment on peut être inquiet et comment il est nécessaire qu'on ait, dans certains cas, une intervention très rapide pour éviter justement que la maladie ne s'amplifie et que la situation du malade ne se détériore.

J'ai demandé... Je l'ai fait dans trois autres situations aussi, M. le Président, en chirurgie cardiovasculaire, en ophtalmologie de même que dans le cas des prothèses pour les genoux et les hanches, mais, dans le cas de la radio-oncologie, comme c'est plus complexe, j'ai confié un mandat à l'une des plus grandes spécialistes de cette question au Québec et, je vous dirais, dans l'univers même, en tout cas canadien, sûrement, Mme Carolyn Freeman, qui est spécialiste de ces questions et qui vient du Centre McGill. Ils devaient me présenter un projet pour voir comment, par les protocoles médicaux, on s'assurerait que les délais d'attente seraient des délais acceptables, dans le sens suivant: dans le sens où la situation de la personne ne se détériorait pas si on n'intervenait pas pendant ce temps-là. Ils devaient me remettre le rapport en juin. Heureusement – et je leur ai demandé de le faire – ils ont devancé cette remise de rapport. Je devais les voir hier, c'est mon sous-ministre qui les a rencontrés, et on nous a fait un certain nombre de suggestions pour corriger la situation autant ici, à L'Hôtel-Dieu, que sur l'ensemble du territoire québécois.

Il y a des problèmes d'équipement, et donc il faut voir comment se procurer ces équipements, parce qu'on sait que ce sont des équipements hautement spécialisés et que les entreprises qui les produisent ne les ont pas disponibles comme ça demain matin parce qu'on en a besoin. Alors, on documente ça pour voir si nous pourrions avoir accès à de l'équipement rapidement, dans quelles circonstances, aux États-Unis, ailleurs au Canada, ou peu importe. Il y a deux centres actuellement qui sont, un, ouvert, l'autre devrait l'être bientôt, celui de Rimouski. On sait qu'on a dû, dans le cas de Rimouski, faire venir des radio-oncologues de l'extérieur. Donc, oui, on a un problème aussi de disponibilité de spécialistes, et là on nous a présenté... Je sais que c'est long, mais c'est complexe, M. le Président, et c'est inquiétant pour les gens...

Le Président: Je comprends, Mme la ministre, mais j'ai pris la peine, la semaine dernière, de rappeler que les réponses différées doivent entrer dans le temps normalement imparti, comme si on était à la période de questions et de réponses orales, puisque c'est le prolongement. Autrement, on en arrive à faire une déclaration ministérielle. Vous êtes à presque trois minutes de réponse, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vais terminer, M. le Président, en disant d'abord, un, que – cet équipement, je viens d'en parler – l'ouverture des centres devrait améliorer la situation pour l'Est du Québec, et, par ailleurs, il faut voir comment recruter de nouveaux spécialistes, puisque ceux qui sortent actuellement de nos universités ne sont pas assez nombreux pour nous permettre de couvrir toute la demande. Mais je dois vous dire que c'est une situation qui existe un peu partout à travers le monde, alors il faudra être particulièrement ingénieux. Mais nous explorons différentes solutions en ce sens.

Le Président: M. le député de Limoilou.


M. Michel Després

M. Després: Merci, M. le Président. Étant donné, Mme la ministre, que le temps est un facteur important pour ces gens qui sont malades, étant donné le mandat que vous avez donné, quel échéancier, dans combien de temps nous pourrons ramener les délais dans des délais acceptables? Vous me parlez d'équipement, dans combien de temps ces gens seront traités, Mme la ministre?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: D'abord, il faut bien sûr rassurer les gens, chacun des spécialistes fait un effort considérable pour que les délais, dans les situations urgentes, soient les plus courts possible. Alors, cela, évidemment, se fait déjà. J'espère que, d'ici la mi-juin, la fin juin au plus tard, on aura suffisamment d'informations sur l'un ou l'autre des gestes à poser pour être capables soit d'annoncer ceux qu'on aura posés ou d'identifier ceux qui seront à venir. Qu'il s'agisse, encore une fois, d'aller chercher des spécialistes à l'étranger, de reconnaître des gens formés hors Québec et hors Canada pour offrir de tels services, ou du côté de l'équipement, chacune de ces propositions, chacune de ces avenues est actuellement en train d'être documentée au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux.


Votes reportés


Motion proposant que l'Assemblée fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi

Le Président: Merci, Mme la ministre. Alors, nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, qui propose: «Que l'Assemblée nationale fasse siens les propos du vice-premier ministre à l'effet que trop d'impôt tue l'emploi.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Després (Limoilou), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

(15 h 30)

M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Brouillet (Chauveau), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), M. Pinard (Saint-Maurice), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever. Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:105

Contre:0

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est adoptée à l'unanimité.


Motions sans préavis

Nous allons passer maintenant aux motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Souligner la Semaine québécoise des familles

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de proposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Semaine québécoise des familles qui se tient du 10 au 16 mai.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion?

M. Brassard: Oui, M. le Président, avec un intervenant de chaque côté.

Le Président: Très bien. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce d'abord.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est un honneur pour moi, au nom de ma formation politique, de présenter la motion qui souligne la Semaine québécoise des familles.

Vous savez, M. le Président, la Semaine québécoise des familles, l'objectif est de promouvoir les rôles essentiels de la famille dans notre société, un objectif tout à fait louable qui existe depuis plusieurs années, la Semaine québécoise. Quelques chiffres: il y a tout près de 1 300 000 familles au Québec avec enfants – on a tendance à parler de familles avec enfants versus des familles sans enfant – dont à peu près 950 000 sont des familles avec un enfant mineur.

Le thème, cette année, de la Semaine québécoise, est de promouvoir la famille élargie. On parle des grands-parents, des oncles, tantes, frères, soeurs, cousins, etc., à titre de réseau naturel de solidarité et de partage. Je trouve ce thème tout à fait approprié, pour plusieurs raisons. On parle d'un réseau naturel de solidarité et de partage. C'est approprié parce que, évidemment, le nombre est absolu et le pourcentage de familles monoparentales ne cesse d'augmenter au Québec et, pour l'année 1996, a franchi le cap de 300 000. Trois cent mille familles monoparentales au Québec. Comme vous le savez, M. le Président, vous qui êtes père de famille, moi aussi, on peut juste imaginer, je pense, les responsabilités importantes qu'ont les familles monoparentales, un fardeau assez important, dans l'éventail des responsabilités familiales, quand il s'agit d'un parent. Il y a beaucoup de familles comme vous et moi qui trouvent difficile de vaquer à nos responsabilités à deux, mais de le faire seul demande un effort particulier et demande aussi la présence d'un réseau naturel de solidarité et de partage.

M. le Président, une autre raison pour laquelle ce thème est particulièrement approprié est toute la question de la pression financière que subissent les familles québécoises. La proportion de familles à faibles revenus au Québec ne cesse d'augmenter. D'ailleurs, dans un étude, un portrait statistique dévoilé en fin de semaine, portrait statistique des familles, des enfants au Québec, un excellent portrait d'ailleurs, M. le Président, produit avec la collaboration du Bureau de la statistique du Québec, le Conseil de la famille et le ministère de la Famille et de l'Enfance, on peut lire, à la page 185, M. le Président: «En 1996, le Québec comptait la plus forte proportion des familles à faibles revenus au Canada, soit 22,1 %, par rapport à 20 % en Ontario, 21,2 % dans les provinces de l'Atlantique et 20,5 % dans les provinces de l'Ouest.» M. le Président, malheureusement, nous étions, au Québec, en 1996, les champions du plus haut taux de familles avec de faibles revenus au Canada; plus haut que, évidemment, même les provinces des Maritimes, plus haut même que Terre-Neuve, M. le Président. Et c'est très inquiétant.

Et d'ailleurs, M. le Président, une récente étude faite pour le Conseil canadien de développement social, qui s'appelle Le revenu et le bien-être de l'enfant , indique que les seuils de faibles revenus établis par Statistique Canada sont inférieurs aux ressources financières nécessaires pour vaquer aux responsabilités des enfants au Canada. Alors, non seulement est-ce que nous avons la proportion la plus forte de familles à faibles revenus au Canada ici, au Québec, mais on indique que le seuil de pauvreté est inférieur au prix du bien-être des enfants. Ça remet en question, M. le Président, toute la question de comment est-ce qu'une famille peut vaquer à ses responsabilités pour ses enfants.

Un autre élément, M. le Président, qui est important, un autre indice de comment se comportent les familles québécoises: le revenu moyen des familles après impôts au Québec ne cesse de diminuer. C'est une donnée qui, également, émane du portrait statistique. Il y a une légère augmentation dans l'année 1998, mais, de façon générale, la tendance est que la moyenne familiale après impôts est en diminution depuis 1994, M. le Président.

Alors, il y a toute une pression financière, énorme, sur les familles. Et en même temps qu'il y a ces pressions financières, M. le Président, il y a des responsabilités familiales accrues. On peut penser à l'effet du virage ambulatoire, M. le Président, sur les enfants, sur les personnes âgées. On peut penser aux besoins en services de garde, qui demeurent, malgré un certain développement de places important, insuffisants pour les besoins des familles québécoises. Je vous rappelle simplement que, dans les familles biparentales maintenant, 55 % d'elles ont un ménage où les deux parents travaillent; 55 %, M. le Président, ce qui met, encore une fois, avec le phénomène de la monoparentalité, une pression énorme sur les services de garde au Québec.

(15 h 40)

M. le Président, cette Semaine québécoise des familles, également, souligne le rôle important des personnes âgées, dans le contexte de l'Année internationale des personnes âgées, qui est cette année, 1999. Alors, on a voulu valoriser le rôle des personnes âgées, notamment et évidemment les grands-parents, quant aux responsabilités et à l'apport qu'elles peuvent faire aux familles québécoises. M. le Président, je suis convaincu, et vous l'êtes également aussi, que les enfants s'enrichissent par un contact accru, la présence accrue des personnes âgées dans leur réseau naturel, largement par le biais des grands-parents.

Alors, M. le Président, je veux féliciter les organisateurs de cette Semaine québécoise des familles. Ils ont organisé diverses activités. Je les remercie pour le travail qu'ils font, ainsi que les organismes communautaires, les nombreux organismes communautaires qui travaillent dans le domaine des différents services pour les familles, des services de support pour les familles. Ils jouent un rôle très important dans une ère où il y a un désengagement de l'État vis-à-vis certains services fournis aux familles. Alors, je félicite les organisateurs et je souhaite aux 1 300 000 familles québécoises avec des enfants, je leur souhaite une bonne semaine, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Pointe-aux-Trembles et ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. En tant que ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, je suis heureuse d'appuyer une motion qui souligne la tenue de la Semaine québécoise des familles, qui se déroulera du 10 au 16 mai 1999 dans toutes les régions du Québec. Cet événement annuel a pour but de promouvoir la place qu'occupe la famille dans la société québécoise. Il met en valeur la contribution essentielle de la famille à notre société.

Cette année, le thème de la Semaine québécoise des familles, Ma famille, mes racines, des forces pour la vie , prend toute sa signification, en cette Année internationale des personnes âgées. En effet, ce thème invite les membres d'une famille à tisser des liens étroits avec les personnes âgées qui leur sont proches et à prendre le temps de connaître leurs origines.

Parce que les familles sont les racines de notre société, le gouvernement du Québec s'est assuré de la mise en place de conditions propices à leur épanouissement. Il suffit de mentionner les différentes mesures fiscales qui totalisent plus de 1 300 000 000 $, les places de services de garde à 5 $, la maternelle à temps plein gratuite, la garde scolaire à 5 $, le programme APPORT, l'allocation au logement et bien d'autres éléments, M. le Président, dont l'objectif premier est de soutenir les familles tout en s'assurant que les besoins essentiels des enfants soient couverts.

J'invite donc les membres de l'Assemblée nationale, M. le Président, à participer aux différentes activités qui se dérouleront un peu partout au Québec dans le cadre de cette Semaine québécoise des familles et, tout comme je le proposais à quelques milliers d'écoliers québécois à qui un arbre généalogique a été distribué récemment, à découvrir leurs racines et à redécouvrir leur famille. Alors, bonne Semaine de la famille à tous les Québécois et Québécoises, M. le Président. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement. Non. Excusez. Je crois que...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, vous... Excusez, ça ne sera pas très long.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. Alors, je vous invite, M. le leader adjoint du gouvernement, à nous faire part des travaux.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail va poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, aujourd'hui, de 16 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Et qu'également la commission de l'économie et du travail, quant à elle, va procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux, demain, le jeudi 13 mai 1999, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, le mercredi 12 mai 1999, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour les listes d'avril 1997 à mars 1998 et celles d'avril 1998 à mars 1999.

Je vous avise également que la commission de la culture se réunira en séance de travail aujourd'hui, mercredi 12 mai 1999, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira demain, jeudi 13 mai 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de la Culture et des Communications pour les listes d'avril 1997 à mars 1998 et celles d'avril 1998 à mars 1999.

Je vous avise enfin que la commission des affaires sociales se réunira en séance de travail demain, jeudi 13 mai 1999, à compter de 8 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Alors, ceci met fin aux avis concernant les travaux des commissions.

Nous sommes maintenant rendus à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

Alors, s'il n'y a pas de questions, nous allons mettre fin à la période des affaires courantes et passer aux affaires du jour. J'inviterais M. le leader adjoint à nous indiquer le menu.

M. Boulerice: Oui. Bien, le menu, nous allons commencer, M. le Président, par l'article 2, qui est l'adoption du principe du projet de loi n° 3.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, j'inviterais les gens de la table, s'il vous plaît, à me procurer le dossier de séance pour les affaires du jour. Bien. Merci.

Alors, M. le leader, c'est quel article que vous m'aviez demandé d'appeler, s'il vous plaît?

M. Boulerice: L'article 2, M. le Président. Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie. Très bien. Ha, ha, ha! La table était trop loin.


Projet de loi n° 3


Adoption du principe

M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 3, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. Alors, j'inviterais M. le ministre à prendre la parole. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: En effet, M. le Président, je soumets à cette Assemblée pour qu'elle en adopte le principe le projet de loi n° 3 intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. Ce projet de loi, dans la foulée des projets de loi à caractère fiscal qui ont été présentés devant cette Assemblée au cours des dernières années, contient un très grand nombre de mesures à caractère technique, pour ne pas dire très technique. Ainsi est faite la fiscalité malgré les efforts que l'on fait pour la simplifier et la rendre la plus intelligible possible.

Il modifie donc, ce projet, 20 lois, M. le Président, dont la Loi sur les impôts et la Loi sur la taxe de vente du Québec, afin de donner suite principalement au discours sur le budget du 31 mars 1998 et à la déclaration ministérielle du 11 juin 1998 ainsi qu'aux bulletins d'information 97-3, 97-4, 97-5, 97-6, 97-7, 98-1, 98-3, 98-5, 98-6 et 98-8 émis par le ministère des Finances respectivement le 22 mai 1997, le 3 juillet 1997, le 16 octobre 1997, le 14 novembre 1997, le 18 décembre 1997, le 13 février 1998, le 23 juin 1998, le 17 septembre 1998, le 24 septembre 1998 et le 22 décembre 1998.

On aura compris que le ministère des Finances, et le ministre des Finances en particulier, peut, suivant nos lois, édicter des mesures à l'occasion du discours du budget ou par déclaration ministérielle ou par bulletin d'information, et ces divers gestes ont force de loi sous réserve, évidemment, que notre Assemblée les approuve. Alors, c'est ça, on est en train de modifier la législation pour la rendre cohérente avec les budgets, les déclarations ministérielles, éventuellement, et les bulletins d'information.

(15 h 50)

Tout d'abord, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi concernant les droits sur les mines afin de bonifier de 50 % à 75 % le taux de l'allocation additionnelle pour exploration à l'égard de frais engagés pour des travaux d'exploration dans le Moyen Nord et le Grand Nord québécois. Ce sont de vastes régions du Québec qui sont très riches sur le plan minéral et qui, à cause de la faiblesse du cours des matières premières, ont été affectées plus que d'autres régions. Je suis allé, par exemple, ces derniers jours en Abitibi et j'ai rencontré l'Association des prospecteurs, évidemment, qui est très contente de ces diverses mesures et de beaucoup d'autres que nous avons prises pour seconder notre industrie minière dans une phase un peu plus difficile.

Le projet de loi modifie également la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de hausser le taux de la taxe sur les produits du tabac, en concordance avec une mesure de détaxation dans le régime de la taxe de vente du Québec, principalement dans le but de contrer la fraude reliée au commerce de ces produits. De plus, le taux de la taxe sur les produits du tabac est aussi révisé afin d'intégrer une augmentation annoncée de concert avec le gouvernement fédéral et ceux de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard et afin de prévoir la taxation de nouveaux produits du tabac tels que les bâtonnets et les rouleaux de tabac. Qu'on s'entende bien, là, on n'est pas en train d'augmenter les taxes, on est simplement en train de mettre en forme juridique des choses qui sont en place déjà depuis un certain temps.

Ce projet de loi modifie aussi, M. le Président, la Loi sur les impôts principalememt afin d'y modifier ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec. J'aborderai maintenant par sujets quelques-unes des règles modifiées ou introduites par le projet de loi n° 3 et qui concernent la Loi sur les impôts. Le premier sujet que je porterai à votre attention concerne le secteur financier, qui revêt pour le Québec une importance stratégique. Afin de faire en sorte qu'une plus grande partie des épargnes des Québécois soit gérée au Québec et que soit également gérée au Québec l'épargne des autres tout en respectant le principe de libre circulation des capitaux et de libre choix des épargnants et consommateurs, une aide fiscale est accordée aux sociétés qui créent de nouveaux fonds d'investissement dont l'administration et la gestion sont effectuées au Québec. Cette aide fiscale comporte, d'une part, le volet création de nouveaux fonds d'investissement et, d'autre part, le volet apprentissage à la gestion de portefeuille.

Le volet création de nouveaux fonds d'investissement consiste, premièrement, en un crédit d'impôt remboursable qu'une société peut réclamer pour les dépenses qu'elle a engagées dans une année d'imposition à l'égard d'un fonds d'investissement nouvellement créé et qui sont attribuables à la période de démarrage de celui-ci et, deuxièmement, en une exemption d'impôts dont la société peut bénéficier pour une certaine période à l'égard de ses revenus nets provenant de l'administration et de la gestion d'un fonds d'investissement.

En ce qui a trait au volet apprentissage de la gestion de portefeuille, celui-ci consiste en un crédit d'impôt remboursable accordé à des sociétés de gestion de portefeuille, qui peut atteindre 40 % des salaires versés par la société pour une année d'imposition à des gestionnaires de fonds admissibles au cours de leur période d'apprentissage. Ces mesures, M. le Président, s'inscrivent dans une stratégie plus vaste et plus ample qui a été instaurée il y a déjà quelques budgets pour consolider Montréal comme place financière internationale. Alors, les centres financiers internationaux que nous avions créés il y a nombre d'années méritaient une revitalisation, méritaient un soutien beaucoup plus puissant, et c'est ce que nous avons fait, et avec succès. Ça fait quelques fois que j'annonce, à Montréal – j'ai coutume de dire que je le fais à la douzaine – des douzaines de nouvelles implantations, dans le cadre des centres financiers internationaux, d'entreprises généralement étrangères, quelquefois locales mais pour des activités à portée étrangère. C'est une politique – ce n'est donc pas juste quelques mesures fiscales – globale qui fonctionne très bien et qui donne des sous.

Le deuxième sujet concerne l'industrie du vêtement et de la chaussure. Comme vous le savez, M. le Président, cette industrie a dû faire face au cours des dernières années à une concurrence accrue de la part de producteurs basés dans des pays où les salaires sont moins élevés. Afin de favoriser la compétitivité des entreprises québécoises oeuvrant dans ce secteur et parallèlement de combattre le travail au noir qui est encore présent dans cette industrie, ce projet de loi instaure, pour une période de quatre ans, un crédit d'impôt remboursable pour la création d'emplois dans l'industrie du vêtement et de la chaussure. Alors, vous voyez que nous n'avons pas uniquement d'égards pour les très hautes technologies qui sont pour aujourd'hui, demain et après-demain. Il y a des industries traditionnelles où des gens très bien gagnent leur vie. Ils aiment ces genres de métiers. Ils n'ont pas besoin d'avoir un doctorat en physique, ça, c'est entendu, mais ça ne veut pas dire qu'ils n'ont pas le droit d'avoir une job puis qu'ils n'ont pas le droit d'être soutenus par leur gouvernement au mieux. C'est ce que nous faisons.

Le troisième sujet, M. le Président, traite des modifications apportées aux mesures existantes qui ont été introduites dans la législation fiscale québécoise par le gouvernement afin d'encourager les investissements et la création d'emplois dans des secteurs d'activité, cette fois, stratégiques de notre économie. Alors, la chaussure, c'est une chose, mais il y a beaucoup d'autres développements spectaculaires dans notre économie. Ces encouragements prennent notamment la forme de crédits d'impôt remboursables, et les modifications concernent:

Un, à l'égard du crédit d'impôt remboursable pour la recherche scientifique et le développement expérimental, l'assouplissement des règles relatives à la sous-traitance et à la mise en place d'un impôt spécial visant la récupération du crédit d'impôt accordé à une personne à l'égard d'une dépense dont elle a obtenu, en tout ou en partie, le remboursement.

À l'égard du crédit d'impôt remboursable pour les productions cinématographiques québécoises, la bonification du taux de crédit d'impôt à l'égard des salaires versés pour réaliser des effets spéciaux ou de l'animation informatique dans le cadre de certaines productions. Vous savez que cette politique aussi rencontre un très grand succès. Et Montréal et sa région, qui tiraient de l'arrière par rapport à Toronto et Vancouver, ont complètement rattrapé et sont en train, même, de prendre une envergure insoupçonnée, soit avec des lieux de production comme la cité du cinéma ou Cité-Ciné et autres organisations du même genre dont les annonces ont été faites récemment, mais aussi en raison d'une tradition cinématographique vigoureuse qui a réussi à s'imposer même dans un petit marché. On n'a pas le marché intérieur des États-Unis ni celui de la France, mais, malgré ça, on a des producteurs, on a des gens expérimentés, on a des séries spectaculaires qui sont regardées, comme on le sait, par une très grande proportion de la population du Québec. Au moment de certaines de ces séries populaires, on dit que la circulation diminue dans les villes, et je le crois, parce que les gens regardent ces séries. Alors, ce n'est pas un secteur d'activité mineur, ni en termes culturel ni en termes de création d'emplois.

À l'égard du crédit d'impôt remboursable favorisant le développement des technologies de l'information, l'assouplissement des critères de qualification des sociétés admissibles, l'élargissement des dépenses donnant ouverture au crédit de manière qu'elles ne visent plus non seulement l'acquisition de matériel admissible mais également la location de tel matériel et, finalement, la bonification du taux de crédit et la prolongation de son application alors qu'il porte sur des salaires versés à des employés admissibles.

Vous savez aussi, M. le Président, que tout ça s'inscrit dans le cadre d'une vaste politique qui est déjà couronnée de succès et qui s'appelle CDTI. Il y en a à Québec, à Montréal, à Laval, à Hull, Gatineau, à Sherbrooke, mais aussi Cité de l'optique dans notre capitale nationale, aussi Cité du multimédia à Montréal, Centre des nouvelles technologies de Québec, qui va démarrer bientôt, et autres mesures de ce genre. Et on a déjà des résultats extraordinaires. Le CDTI de notre capitale nationale s'est rempli plus vite qu'on l'aurait crû, et plus vite que celui de Montréal en particulier – mais celui de Montréal va très bien. Nous avons des annonces, d'ailleurs, assez importantes qui s'en viennent. Et dans la Cité du multimédia, seulement à Montréal, on avait pensé de créer 10 000 emplois en 10 ans et on en a 5 000 de créés en 10 mois. Ça veut dire qu'on est en avance sur l'objectif, et nous espérons que tout ça va continuer à se développer et croître.

À l'égard du crédit d'impôt remboursable pour la construction de navire, la majoration de 40 % à 50 % du taux de crédit pour la construction d'un navire prototype, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour la transformation d'un navire prototype ainsi que l'accessibilité à ces crédits pour les trois premiers navires construits ou transformés en série selon les plans et devis d'un navire prototype. C'est une chose qui n'est peut-être pas célébrée comme elle devrait, mais depuis des années nos intervenants maritimes, y compris les syndicats, nous demandaient une politique navale pour le Québec. Nous l'avons. Elle est forte, elle est puissante. Et actuellement, le Bloc québécois, à Ottawa, fait des pressions énormes pour que les fédéraux nous suivent, puisqu'ils contrôlent une partie de notre fiscalité, et qu'ils imitent le Québec. Ce qui, évidemment, aiderait davantage nos chantiers maritimes. Nous ne contrôlons qu'une partie de la fiscalité. Pour notre partie, on peut dire: mission accomplie. Les gens des chantiers sont très contents: les petits, les moyens comme les grands. Mais le fédéral traîne de l'arrière, et nous espérons que la vaste coalition que le Bloc est en train de constituer à Ottawa les amènera à raison le plus rapidement possible.

À l'égard du crédit d'impôt remboursable pour les titres multimédias, la bonification du taux de crédit et l'instauration de deux nouveaux volets qui en simplifient le fonctionnement.

(16 heures)

Par ailleurs, M. le Président, en sus des bonifications que je viens d'énumérer, ce projet de loi instaure de nouveaux crédits d'impôt remboursables qui s'ajoutent aux mesures existantes ou les complètent. Ainsi, il prévoit, premièrement, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable à l'égard des dépenses de main-d'oeuvre engagées par une société pour effectuer le doublage de films au Québec. Alors, c'est toujours pour consolidation de l'industrie du film, de l'industrie culturelle.

Deuxièmement, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour les services de production cinématographique à l'égard des dépenses de main-d'oeuvre engagées par une société pour des services rendus au Québec dans le cadre du tournage d'une production étrangère et la bonification du taux de ce crédit à l'égard des salaires versés pour la réalisation d'effets spéciaux ou d'animation informatique dans le cadre d'une telle production.

Alors, vous voyez, ce n'est pas pour rien, là, que l'industrie se développe, et se développe de façon accélérée à Montréal, c'est parce que le gouvernement national du Québec a décidé d'appuyer puissamment le développement de cette industrie qui est une belle industrie et qui touche la culture, qui ne pollue pas l'environnement, qui fait travailler des jeunes, des jeunes créateurs, des jeunes créatrices.

Troisièmement, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour les sociétés spécialisées dans la production, cette fois, de titres multimédias, lequel est destiné aux sociétés qui se consacrent à la production de titres multimédias et, le cas échéant, à des recherches scientifiques et à du développement expérimental se rapportant à de tels titres.

Quatrièmement, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable à l'égard de salaires versés par une société établie dans la Cité du multimédia pour la réalisation d'une activité relative au secteur du multimédia ou d'une activité liée aux technologies de l'information.

Je vous ferai remarquer que dans ces activités, M. le Président, on a remarqué que le retour sur l'investissement gouvernemental est relativement rapide parce que les salaires sont bons, puis il y a des effets indirects, puis il y a une restructuration de plusieurs quartiers, de plusieurs villes. C'est arrivé dans l'ancien édifice du Soleil , on l'a vu, mais ça arrive dans la Cité du multimédia. C'est un secteur industriel abandonné dans le faubourg des Récollets qui est en train de renaître et où on voit de nouveau une industrie de la construction florissante.

Enfin, d'autres mesures de modification à la Loi des impôts:

Premièrement, la bonification du traitement fiscal applicable à l'égard des dons de bienfaisance et l'uniformisation des règles applicables à l'égard de ces dons et de dons à l'État.

La bonification de la déduction pour frais d'exploration d'un montant égal à 25 % des frais d'exploration engagés dans le Moyen Nord et le Grand Nord.

La modification apportée au Régime d'épargne-actions permettant à une société à capital de risque à vocation régionale d'émettre une nouvelle catégorie d'actions admissibles à ce régime. Alors, toujours la préoccupation des régions qui rejoint celle des carrefours de la nouvelle technologie qu'on retrouvera dans les régions, carrefour de la nouvelle économie.

Quatrièmement, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour les particuliers habitant un village nordique, payable en deux versements égaux en août et en décembre de chaque année. Il ne faut pas oublier qu'il y a des latitudes nordiques au Québec où de nos compatriotes vivent avec le peuple inuit, et c'est impressionnant de voir des enseignants, des enseignantes, des médecins, des infirmiers, des infirmières et divers fonctionnaires municipaux et de tous ordres qui vivent avec ces peuples du Nord, avec le peuple inuit en particulier, dans des conditions, il faut bien le reconnaître, extrêmement difficiles, mais pour une action concrète, une action humanitaire, une action de fraternité entre les peuples même, si je puis dire. Donc, le gouvernement reconnaît cette situation particulière.

Cinquièmement, la bonification de la réduction de la taxe sur le capital pour permettre une telle réduction à l'égard de certains navires transformés au Québec. Alors, complément à notre politique maritime.

Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi n° 3 modifie la Loi sur la sécurité du revenu et la Loi sur le soutien du revenu en favorisant l'emploi et la solidarité sociale, notamment pour tenir compte des règles relatives à la défiscalisation des pensions alimentaires pour enfants et du revenu total de la famille découlant de l'introduction des règles du régime d'imposition simplifié.

Il modifie également la Loi sur les sociétés de placement dans l'entreprise québécoise afin de simplifier le programme des sociétés de placement dans l'entreprise québécoise et d'uniformiser l'aide fiscale à l'égard de tous les placements de ces sociétés.

M. le Président, le projet de loi n° 3 modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y introduire, outre la mesure de détaxation sur les produits du tabac mentionnée antérieurement, les mesures relatives à l'exonération des services d'appel d'urgence 911 acquis par une municipalité ainsi que celles relatives à l'harmonisation des périodes de déclaration de la taxe spécifique sur les boissons alcooliques à celle du régime de la taxe de vente du Québec.

Je vous fais grâce, M. le Président, de l'énumération des autres sujets abordés par le projet, puisque les notes explicatives de ce projet de loi en font état et que nous aurons l'occasion de les examiner un par un, puis très en détail, en commission parlementaire. J'invite donc les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 3 intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, et nous continuerons notre travail d'une façon beaucoup plus pointue en commission parlementaire quand ce sera à cette étape de notre procédure.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État à l'Économie et aux Finances et ministre du Revenu. J'inviterais maintenant Mme la députée de Beauce-Sud à prendre la parole. Mme la députée.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, j'ai écouté attentivement l'intervention du ministre du Revenu sur le projet de loi n° 3, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. Il s'agit d'un imposant projet de loi de 287 pages et de 336 articles, comme le disait tantôt le ministre du Revenu. Alors, je suis assurée qu'on passera de très nombreuses heures en commission parlementaire à essayer de comprendre le langage législatif compliqué qui fait suite principalement au discours sur le budget du ministre des Finances, du 31 mars 1998, à sa déclaration ministérielle du 11 juin 1998 ainsi qu'aux bulletins d'information 97-3, 97-4, 97-5, 97-6, 97-7, 98-1, 98-3, 98-5, 98-6, 98-8 émis par le ministre des Finances. Et je m'excuse pour cette longue énumération.

Vous savez, M. le Président, je ne suis pas fiscaliste et je ne possède pas la science du ministre des Finances, mais mon rôle au sein de l'opposition officielle consiste tout de même à tenter de bonifier le projet de loi en question. Or, comme je n'ai pas eu le cahier explicatif encore sur ce projet de loi, vous comprendrez que, pour moi, comme députée qui a à coeur de bien faire son travail, malheureusement, je n'ai pas eu le temps nécessaire pour examiner en entier ces 336 articles-là, comme il se doit, eh bien, de comprendre les articles de loi comme celui que je vais vous lire à l'instant relève de la haute voltige législative.

Alors, comme je vous le lisais, je vous cite l'article 181 du projet de loi n° 3, que l'on retrouve à la page 94 du document. Ça se lit comme suit:

1. L'article 1029.8.33.12 de cette loi, édicté par l'article 253 du chapitre 85 des lois de 1997, est modifié, dans la définition de l'expression «dépense admissible»:

1° par le remplacement du paragraphe a par le suivant:

«a) sauf s'il est prévu au paragraphe b, un montant payé par le contribuable admissible ou la société de personnes admissible à l'égard d'un employé admissible relativement à l'année d'imposition ou à l'exercice financier, selon le cas, en vertu de l'une des dispositions suivantes:»;

2° par l'insertion, après le paragraphe a, du suivant – et là je vois que notre collègue de Sainte-Marie– Saint-Jacques a l'air fasciné par la lecture que je fais de l'article du projet de loi;

«a.1) le montant payé, au titre d'une cotisation, par le contribuable admissible ou la société de personnes admissible à l'égard d'un employé admissible relativement à l'année d'imposition ou à l'exercice financier, selon le cas, conformément à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (chapitre A-3.001);»;

3° par le remplacement du paragraphe b par le suivant:

«b) une indemnité afférente au congé annuel telle que prescrite par la Loi sur les normes du travail ou l'indemnité en tenant lieu prévue dans un contrat d'emploi et payée à l'égard d'un employé admissible par le contribuable admissible à l'égard de l'année d'imposition ou par la société de personnes admissible à l'égard de l'exercice financier, selon le cas, et tout montant payé par le contribuable admissible ou par la société de personnes admissible en vertu des dispositions mentionnées aux sous-paragraphes ii à iv du paragraphe a à l'égard de cette indemnité.»

Et là je vais cesser là. L'article 181 en question n'est pas encore terminé, mais je pense que vous en avez déjà assez. Vous y comprenez quelque chose, vous, M. le Président? Bien, moi, j'ai hâte d'avoir les explications du ministre. J'ai très hâte de l'entendre nous expliquer de long en large les tenants et les aboutissants de tous les articles de loi qui sont rédigés de la sorte. Je sens qu'on aura beaucoup de plaisir.

(16 h 10)

Vous savez, les lois sont faites pour le monde. Alors, comme je me considère du monde, et députée aussi, je crois être en droit de comprendre de quoi ce projet de loi là parle et comment il affectera la vie des citoyennes et citoyens du Québec. Dans cet imposant projet de loi qu'on aura tout le loisir d'étudier d'ici la fin de la session, donc d'ici six semaines – et on en a trois autres au feuilleton aussi à étudier – alors, dans celui-ci, on va modifier rien de moins que 20 lois, et là je vais, si vous voulez, vous les énumérer – on les retrouve aux pages 5 et 6 du document, du projet de loi: alors, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, la Loi sur les biens culturels, la Loi concernant les droits sur les mines, la Loi sur la fiscalité municipale, la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur les impôts, la Loi concernant l'application de la Loi sur les impôts, la Loi sur les licences, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec – c'est long, je le sais, mais permettez-moi de poursuivre – la Loi sur le régime de rentes du Québec, la Loi sur la sécurité du revenu, la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, la Loi sur la taxe de vente du Québec, la Loi concernant la taxe sur les carburants, la Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives, la Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, la Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, la Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal et, enfin, la Loi sur le soutien du revenu favorisant l'emploi et la solidarité sociale. Enfin, il modifie également plusieurs lois afin d'y apporter diverses modifications à caractère technique de concordance ou de terminologie.

M. le Président, vous comprendrez avec moi que tout ce projet de loi là est, à quelque part, indigeste. Le ministre a parlé avec beaucoup de vigueur au cours de la dernière année de la réforme de la fiscalité. Alors, dans son discours sur le budget de mars 1998, le ministre clamait haut et fort d'entrée de jeu que son budget ne contenait pas de hausse de taxes et d'impôts. Je comprends que les citoyennes et citoyens du Québec en avaient déjà moins dans leurs poches à cause de l'augmentation de 15 % de la TVQ au 1er janvier 1998. Eh oui! 15 %, c'est déjà toute une augmentation pour les contribuables! Alors, ils paient plus cher leurs achats de biens essentiels tels les vêtements, les chaussures pour eux et pour les membres de leur famille en raison de l'augmentation de la TVQ.

Moi, ce que je retiens de ce projet de loi, c'est qu'on a pu se rendre compte, en complétant nos rapports d'impôts, nos déclarations de revenus de l'année 1998, des augmentations d'impôts déguisées et non annoncées par le ministre lors de son discours sur le budget. On a fait la démonstration au cours des dernières semaines qu'une bonne majorité de contribuables qui bénéficiaient des crédits et déductions ne peuvent plus s'en prévaloir depuis que le ministre a effectué sa réforme de la fiscalité. Quand on pense qu'en plus la majorité de ces familles avaient déjà perdu leurs allocations familiales et les crédits d'impôt pour enfant à charge, il est faux de prétendre que le fardeau fiscal des contribuables a baissé; au contraire, il a augmenté, et pour plusieurs. On a pu se rendre compte, en complétant nos déclarations de revenus, des augmentations d'impôts déguisées et non annoncées lors du discours sur le budget de 1998, et voici comment, M. le Président.

Suite au décès de son mari, une dame transfère à son nom le REER de son mari, de monsieur, en franchise d'impôts. Or, mauvaise surprise, cette dame, en dépit d'un modeste revenu imposable de 15 000 $, perd tous les crédits et déductions accordés aux gens à faibles revenus parce qu'on tient compte maintenant du revenu familial des couples. Cette nouvelle notion de revenu familial net, non annoncée dans le budget de 1998, a fait en sorte que plusieurs contribuables, à partir de revenus très modestes, paient plus d'impôts. La semaine dernière, pourtant, le ministre du Revenu, ici, en Chambre, nous disait que les contribuables qui gagnent moins de 15 600 $ par année ne paient pas d'impôts au Québec. Bien, c'est jouer sur les mots, M. le Président. Je viens de vous faire la démonstration qu'en vertu de cette nouvelle notion de revenu familial la veuve en question, avec un revenu de 15 000 $, paie beaucoup plus au fisc québécois.

Vous savez, M. le Président, récupérer certains crédits d'impôt à partir de la notion de revenu familial net de 26 000 $ – et 26 000 $, ce n'est vraiment pas le Pérou pour un couple – ça fait en sorte que les aînés ont payé 80 000 000 $ de plus au ministère du Revenu en 1998. Comment? Bien, je vous en fais la démonstration encore, M. le Président.

À partir d'un revenu familial net de 26 000 $, la déduction accordée en raison de l'âge, qui est de 2 200 $, et la déduction pour revenus de retraite, qui est, elle, de 1 000 $, sont réduites de 0,15 $ pour chaque dollar qui excède le revenu familial net de 26 000 $. C'est ainsi qu'un citoyen de Sauvé âgé de 75 ans et vivant avec une dame de 55 ans a dû payer, en 1998, 400 $ de plus pour 200 $ de revenus de plus qu'en 1997. Ah! c'est toute une augmentation d'impôts. Quelle aberration! Cette nouvelle notion de revenu familial net réduit aussi d'autres crédits comme la réduction d'impôts à l'égard de la famille et le taux du crédit d'impôt pour frais de garde. C'est ainsi, comme je vous le disais tantôt, qu'une famille gagnant 50 000 $ de revenus paie plus en 1998 qu'en 1997. Les mesures sociales et fiscales qui devaient censément s'appliquer de façon progressive s'avèrent à l'usage de véritables coupe-gorge pour les contribuables de la classe moyenne.

Une étude réalisée par les fiscalistes Chartrand et Laferrière, dont on a beaucoup parlé ici au cours des dernières semaines, a démontré qu'au Québec 25 mesures sociales et fiscales viennent alourdir la note d'impôts à mesure que le revenu du contribuable augmente, au point de gruger directement tous les gains salariaux réalisés. Quand l'État fait main basse sur votre augmentation de salaire, à quoi cela sert de travailler davantage? Les couples du Québec qui tentent d'améliorer leur sort, leur qualité de vie, en ont pris pour leur rhume, M. le Président. Comment voulez-vous inciter les gens à se dépasser quand il est si facile de se cantonner dans notre petit train train quotidien? Et, en plus, ça permet de bénéficier de tous les avantages fiscaux et des mesures sociales à 100 %.

Le président du Conseil du trésor, pour sa part, en l'absence de son collègue le ministre des Finances et ministre du Revenu, nous disait la semaine dernière que les règles étaient ainsi au nom de l'équité sociale. Quelle absurdité, quand on sait que l'augmentation des revenus peut se transformer en perte de revenus réelle.

Le gouvernement du Parti québécois s'est fait un point d'honneur d'enrayer le travail au noir, et je dois dire qu'il y travaille très fort, mais, lorsque l'on prend conscience de la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement, on comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table, M. le Président. Le constat auquel en sont arrivés les fiscalistes Chartrand et Laferrière est non seulement choquant, il est tout à fait scandaleux et désolant pour les familles de la classe moyenne. On savait par expérience que les familles de la classe moyenne avaient de plus en plus de difficulté à se sortir la tête de l'eau. Bien, l'étude en question ne vient que confirmer ce que l'on soupçonnait depuis longtemps: le fisc les égorge, tout simplement.

Il faut savoir, M. le Président, que 77 % des ménages québécois gagnent moins de 50 000 $ par année au Québec. Pour eux, pour les retraités, pour les célibataires, 1998 aura été la pire année d'imposition, selon Yves Chartrand, l'un des auteurs de cette étude. Alors, quand j'entends le ministre des Finances et ministre du Revenu nous dire, et je le cite à partir de la page 2 du discours sur le budget, en 1998: «D'entrée de jeu, le présent budget ne comporte aucune hausse de taxes et d'impôts», eh bien, je réponds qu'il est passé maître dans l'art de maquiller la vérité, M. le Président. Et quand je dis «maquiller la vérité», je suis très gentille, c'est parce que je veux bien respecter les règles parlementaires.

(16 h 20)

Comment qualifier autrement que, passé le cap des 26 000 $ de revenu familial annuel, les Québécoises et Québécois sont frappés par des taux d'imposition de 60 %, voire de 100 % et plus? Nos gouvernements luttent contre le travail au noir, mais ils pratiquent eux-mêmes la fiscalité au noir. C'est ce que nous dit Yves Chartrand, fiscaliste au Centre québécois de formation en fiscalité.

Le déficit étant à zéro, le premier ministre a promis de s'attaquer à ce problème en priorité. Il admet que le fardeau fiscal des Québécois est le plus élevé en Amérique du Nord. Malgré ça, une fois cette déclaration faite, il refuse de la mettre en application dès maintenant. Il s'est contenté d'annoncer, comme son ministre des Finances l'avait fait dans son discours du budget de 1999, une réduction d'impôts de 1 300 000 000 $ au cours du mandat de quatre ans qui vient, mais rien avant l'an 2 de ce mandat, rien avant juillet de l'an 2000, pas d'engagement.

Pendant ce temps-là, l'écart des impôts entre le Québec et l'Ontario continue de s'agrandir. En 1994, lorsque le Parti libéral du Québec était au pouvoir, cet écart, pour une famille qui gagne 50 000 $ avec deux enfants, avait été réduit à 89 $. Aujourd'hui, en 1999, cet écart a augmenté de 89 $ à 1 037 $, donc une augmentation, en pourcentage, de l'ordre de 1 065 %. Et le pire, c'est que, ça, c'était avant le dernier budget de l'Ontario qui a annoncé encore de nouvelles réductions d'impôts.

Ce n'est pas surprenant de constater, M. le Président, que des jeunes diplômés du Québec nous quittent pour aller s'établir en Ontario. C'est la triste réalité qu'un père beauceron m'apprenait la semaine dernière. Eh oui, son fils a décidé de traverser en Ontario pour améliorer son sort, une décision tout à fait légitime. Et c'est encore plus triste d'entendre le président du Conseil du trésor nous dire que la taxation n'est pas la véritable cause du problème, ce qui l'est, c'est la faute des avantages sociaux. Mais quelle différence cela peut-il bien faire? C'est le bout de la ligne qui compte, c'est le bas de la colonne. En reste-t-il plus ou moins dans les poches des contribuables, dans les poches des familles? Bien, la réponse, c'est moins, M. le Président.

Une voix: C'est vrai.

Mme Leblanc: Et quand il laisse entendre qu'aucun correctif ne s'impose d'emblée, eh bien, là je ne peux m'empêcher d'avoir peur. Je considère qu'il faut, au contraire, faire quelque chose rapidement et je souhaite que mon message, et celui du chef de l'opposition officielle, sera entendu par ce gouvernement et qu'il prendra des actions à court terme.

Le régime fiscal québécois contribue non seulement à démotiver les travailleurs, il décourage aussi les investissements. Et tout le monde comprend que des investissements qui se font ailleurs, bien, c'est aussi des emplois qui se créent ailleurs, M. le Président. En plus d'appauvrir les ménages à revenus moyens, le projet de loi n° 3, qui est une suite au budget de 1998, fait en sorte que les consommateurs qui ont moins d'argent dans leurs poches, bien, ils freinent leurs dépenses, ce qui contribue aussi à créer du chômage. Et c'est sans oublier que cette fiscalité malsaine ouvre la porte à plus de travail au noir, alors que justement le gouvernement du Québec se plaint avec raison des pertes énormes que l'économie souterraine lui fait subir.

Alors, M. le Président, lorsque vous entendez le ministre des Finances et ministre du Revenu vous dire que le projet de loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives se traduit par une baisse des impôts, eh bien, n'en croyez pas un mot – on a longtemps parlé qu'il y avait une baisse de 840 000 000 $ d'impôts – alors, d'autant plus que c'est exactement la somme des argents qui ont été soutirés aux Québécois depuis 1994 par le fait que les tables, déductions et crédits d'impôt provinciaux n'ont pas été indexés. Quand on y ajoute les augmentations de la TVQ en janvier 1998 – il s'agit d'une somme de près de 500 000 000 $ que les contribuables ont à payer en plus au fisc québécois – lorsqu'on y ajoute aussi la facture de 375 000 000 $ refilée aux municipalités, laquelle s'est traduite pour plusieurs citoyens en une augmentation de taxes et d'impôts fonciers, quand on y ajoute l'augmentation des taxes scolaires qui a fait suite aux coupures dans l'éducation au Québec, eh bien, on dépasse largement les 850 000 000 $ pour la seule année de 1998.

En résumé, le projet de loi n° 3 fait en sorte que, avec l'introduction de la nouvelle notion de revenu familial net... Je vous rappelle que toutes les déductions et crédits d'impôt suivants ont été touchés: les crédits d'impôt pour conjoint, enfants à charge et autres personnes à charge; les crédits d'impôt en raison de l'âge, pour revenus de retraite et pour personnes vivant seules; les crédits d'impôt pour frais médicaux; la réduction d'impôts à l'égard de la famille; le crédit remboursable pour la taxe de vente du Québec; le crédit remboursable pour frais de garde d'enfants; le remboursement d'impôts fonciers pour les taxes scolaires et municipales. De plus, dans certaines situations, le nouveau revenu familial net fait augmenter la cotisation au régime d'assurance-médicaments et, d'autre part, fait diminuer l'allocation unifiée pour enfants, ce qui fait dire à nos deux fiscalistes, Chartrand et Laferrière, que notre régime fiscal et social, accordé principalement aux personnes à faibles et très faibles revenus, dépasse la capacité de payer de la classe moyenne, qui est carrément dépouillée par le gouvernement dans le cadre du régime fiscal actuel.

Je tiens à préciser cette façon honteuse du gouvernement de taire cet important changement qui fait suite au bulletin d'interprétation du ministre des Finances en date du 14 novembre 1997. Nulle part dans ce bulletin a-t-on expliqué le changement de notion de revenu familial net. Revenu Québec n'a pas cru bon non plus de souligner ce changement dans le guide 1998 de la déclaration de revenus. En effet, pas un mot sur ledit changement n'apparaît à la page 4 du guide 1998, laquelle est réservée aux principaux changements. En plus d'être les plus taxés en Amérique du Nord, on nous impose sournoisement un changement dans les règles du jeu. C'est une honte que d'agir ainsi. Je trouve ça assez bizarre que le ministre nous parle de la réforme de la fiscalité et de réduction d'impôts, parce que, finalement, quand on se donne la peine de décortiquer tout ça, quand on essaie de voir ce que ça signifie clairement pour les poches des contribuables, on constate qu'il s'agit d'augmentation d'impôts. Il y a donc plus d'impôts dans le projet de loi. Je pense que les journalistes, depuis quelques mois, ont bien compris l'astuce qui se cache derrière cette réforme de la fiscalité.

Alors, moi, je vous dis que, pendant l'étude du projet de loi en commission parlementaire, on discutera longuement de tout ça avec le ministre. Puisque le fardeau fiscal des Québécoises et des Québécois continue d'augmenter et puisque le premier ministre, dans son discours inaugural en juin 1996, avait pris l'engagement de ne pas augmenter les taxes et les impôts, eh bien, on a tout le loisir de constater qu'encore une fois nous avons été floués par ce gouvernement.

Avec ce projet de loi et la réforme de la fiscalité, je reconnais que quelques familles s'en tirent assez bien et qu'effectivement dans quelques cas il a pu y avoir baisse d'impôts. Mais, dans plusieurs cas, il y a augmentation des impôts, et ça, ça fait mal aux familles du Québec. Depuis que ce gouvernement est au pouvoir, c'est plus de 1 000 000 000 $ d'impôts qu'on a à payer en plus. Donc, plus de taxes et d'impôts et, vous le savez, moins de services. Ce projet de loi, qui fait suite au budget de mars 1998, donne force de loi au budget – ça, je pense que je vous l'ai dit au début de mon intervention – mais ça ne nous empêchera pas de questionner les articles de loi pour connaître réellement l'impact de celui-ci sur les contribuables, et nous essaierons de faire des suggestions qui, j'espère, seront bien accueillies par le ministre du Revenu.

Pourquoi attendre que la commission des finances publiques tienne des consultations pour interroger la population sur la façon d'alléger le fardeau fiscal? On peut se mettre à la tâche tout de suite en apportant des modifications au projet de loi n° 3. Si le gouvernement est vraiment sérieux dans son désir d'abaisser les taxes et les impôts, il peut le faire maintenant. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Beauce-Sud. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 3? Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, en vertu de votre droit de réplique?

(16 h 30)

M. Landry: Oui, c'est bien ça.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre du Revenu.

M. Landry: M. le Président...

Une voix: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

Une voix: ...du côté de l'opposition officielle...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Écoutez... Non, non, je m'excuse. J'ai demandé: Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Quand je demande: Est-ce qu'il y a d'autres intervenants, je m'attends que ceux qui veulent intervenir se lèvent. S'ils ne se lèvent pas, vous savez, je regarde et je ne vois pas... Là, maintenant, je ne vous enlèverai pas votre droit de parole; je vous cède la parole, M. le député de Mont-Royal.

M. Landry: Oui, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement.

M. Landry: Vous m'avez coupé la parole l'autre fois parce que j'ai demandé la parole quelques secondes en retard. Vous vous souvenez d'une fin de séance, c'était fini, puis j'ai été obligé de me rasseoir puis je n'ai pas eu le droit de parler. Est-ce que je pourrais vous rappeler ce précédent? Vous avez bien demandé s'ils avaient quelque chose à dire? Ils pensaient à d'autres choses, ou je ne sais pas quoi, ils étaient mêlés dans leurs chiffres, ils n'ont pas réagi. Alors, j'étais debout, vous m'aviez donné la parole, et je crois que je dois exercer mon droit de réplique.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Juste avant votre question de règlement, M. le député, lorsque je vous ai coupé, l'autre jour, M. le ministre des Finances, c'était un débat de fin de séance. Et quand c'est cinq minutes, c'est un droit de cinq minutes. Et, à cinq minutes, moi, je me lève. Je fais de même pour les deux côtés.

M. Landry: Ce n'est pas de ça que je parle, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous ne parliez pas de ça? De quoi parliez-vous?

M. Landry: Je suis venu pour intervenir sur un projet de loi, et ça m'a pris quelques secondes pour me rendre de l'antichambre à ici, puis mon leader vous a supplié de me laisser parler, tout ça, puis vous m'avez envoyé...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je me rappelle, M. le ministre, je me rappelle très bien.

M. Landry: Alors...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, je me rappelle très bien. J'ai demandé s'il y avait d'autres intervenants, il n'y en avait pas.

M. Landry: Comme aujourd'hui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Comme aujourd'hui. Et je vais vous revenir. Et, à ce moment-là, on m'avait informé que vous n'étiez pas ici, on m'avait informé privément. Alors, lorsque je vous ai vu arriver, c'était fini, on était déjà au vote. Et c'était le leader adjoint qui était à côté de vous, qui était là à ce moment-là. Alors, je me rappelle de ça.

Mais, aujourd'hui, je vais vous permettre la question de règlement, mais ce que je veux vous dire, on est ici pour donner le droit de parole aux parlementaires. C'est un projet de loi. J'ai demandé: Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Là, évidemment, il faut que les députés sachent... On est en début de session, ça ne fait que trois mois, depuis le 2 mars qu'on a commencé ici, il faut que, les règles, on les connaisse tous.

Je vais dire, à ce moment-là, j'apprécie, moi, que le bureau des deux whips, des deux partis, s'ils peuvent m'indiquer s'il y a des intervenants qui vont intervenir, s'ils ne sont pas là, ça facilite la tâche de la présidence.

Alors, compte tenu qu'il y a d'autres intervenants qui ne se sont pas manifestés mais qui ont l'intention de parler, je vais les reconnaître. Mais, quant à l'avenir, quand je dirai «Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?», si on ne se lève pas, à ce moment-là, je serai beaucoup plus strict. Est-ce que vous voulez ajouter, M. le député?

M. Dupuis: M. le Président, je ne vais pas plaider une cause qui me semble être gagnée d'avance, de telle sorte que, si c'est votre décision que vous venez d'indiquer, évidemment, je suis certain que M. le ministre des Finances et vice-premier ministre, ministre du Revenu, en gentilhomme qu'il est, va se plier à votre décision et va permettre au député de Mont-Royal de faire son intervention sur un projet de loi qui tient à coeur au ministre, j'en suis persuadé.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci de votre intervention, M. le député. M. le leader adjoint.

M. Boulerice: Non, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Landry: Pardon. M. le leader?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, si vous voulez, je vais vous reconnaître, vous. Vous vous êtes levé avant. M. le leader adjoint, puis après je reviendrai à vous.

M. Landry: Moi, je veux que tout le monde parle. Et puis, au contraire, la première intervenante a commis tellement d'erreurs de chiffres que, plus ils vont en accumuler, plus ça va me donner des répliques plantureuses. Alors, je suis tout à fait d'accord qu'ils parlent, sauf que, avec la jurisprudence que vous aviez établie l'autre fois, je pense que, quand quelqu'un ne demande pas la parole, il ne la reçoit pas, et que vous l'avez déjà donnée à un autre...

Mais là je comprends, vous dites: À l'avenir, on ne le fera plus. Puis là, aujourd'hui, vous me coupez la parole. Je suis d'accord.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mais je ne vous ai pas coupé la parole, M. le ministre. Je n'aime pas ça que vous me disiez ça, parce que je ne suis pas le genre de président à couper la parole des gens. Est-ce que vous avez quelque chose à dire, M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Boulerice: M. le Président, très brièvement, parce que je pense qu'on ne fera pas de motion de procédure à ce niveau-là, je veux simplement vous dire que vous avez entièrement raison. Je savais, puisque les leaders sont informés, qu'il y avait trois intervenants potentiels au nom de l'opposition officielle, sauf qu'effectivement faut-il qu'ils se manifestent.

Peu avant, j'ai prévenu les députés de ma formation que, s'ils n'étaient pas en Chambre au moment où leur temps de parole viendrait, le temps de parole ne leur serait pas attribué et que je procéderais selon les règles de procédure de l'Assemblée nationale.

Alors, je pense que c'était pertinent que vous rappeliez aux députés qui prennent la parole de bien vouloir se manifester quand la présidence les invite. Voilà. Ça évitera aussi des imbroglios.

Alors, un peu plus d'attention et de vigilance. J'admets qu'il s'agit d'un jeune parlementaire pas encore rompu aux procédures, mais il va apprendre rapidement, je suis certain.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci de votre intervention, et ça met fin à cette discussion.

Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant sur le projet de loi n° 3, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. M. le député de Mont-Royal, la parole est à vous.


M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Je voudrais en profiter pour remercier mon ancien député dans mon ancien emploi, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, pour cette intervention et sa reconnaissance de mon inexpérience en Chambre. Alors donc, merci à vous deux.

Je voudrais intervenir cet après-midi, comme vous vous en doutez, sur la loi modifiant le crédit d'impôt remboursable à l'égard des salaires qui sont versés à des sociétés qui sont établies dans ce qu'on appelle la Cité du multimédia. Ce que je reproche à cette loi, M. le Président, c'est que c'est une loi strictement temporaire. Elle donne des supports à des entreprises, favorise certaines entreprises au détriment d'autres, mais ce ne sont que des mesures qui sont temporaires, c'est-à-dire qu'on donne un support à l'embauche de gens qui est équivalent à 40 % du salaire de ces personnes-là et que, malheureusement, c'est sur une base temporaire seulement, ce ne sont pas des infrastructures permanentes et structurelles. Donc, à ce moment-là, ce qu'il en résulte, c'est un effet seulement temporaire.

Ce que je reproche aussi à cette mesure, c'est d'attirer des entreprises seulement sur une base temporaire. Et, là-dessus, je m'appuie sur des données publiées dans un journal, La Presse , pour ne pas le nommer, par M. Denis Lessard qui lui-même cite un spécialiste en la matière, M. Michel Cartier, qui sonne l'alarme. Michel Cartier, pour votre information, M. le Président, est un professeur de l'UQAM qui est un professeur reconnu mondialement et qui intervient dans ce domaine pour conseiller d'autres pays, comme la France, par exemple. Alors, ce qu'il dit, c'est que le gouvernement Bouchard, et je cite, «est en train de manquer le bateau dans la course [...] mise en place à Montréal d'une technopole d'envergure internationale». Donc, ce qu'on fait, c'est qu'on crée des entreprises qui viennent ici, on les attire avec des leurres qui sont équivalents à environ 40 % des salaires des gens, mais ce qu'on oublie de dire, par contre, c'est que très souvent ça crée du chômage dans d'autres entreprises. D'autres entreprises sont défavorisées, puisqu'on choisit une entreprise qui décide de venir s'établir dans la Cité du multimédia, au détriment de celles qui n'y sont pas. Alors donc, c'est de favoriser une entreprise au détriment d'autres.

Deuxième point, M. le Président, c'est que ça crée des fois des pertes d'emplois – et j'ai des exemples précis à vous souligner – chez certains employeurs au détriment d'autres qui sont établis justement dans cette Cité du multimédia. Je vous cite, par exemple, le cas de la compagnie i3d, en Beauce, qui a perdu des employés qui étaient d'une grande valeur pour cette entreprise-là au profit justement d'une entreprise établie dans la Cité du multimédia, entreprise qui peut offrir de meilleurs salaires puisqu'elle jouit d'un 40 % jusqu'à concurrence de 25 000 $ par employé. Donc, toute cette loi ne garantit aucun emploi permanent, sur la base des emplois de ces nouvelles entreprises, et je cite à ce sujet le cas de Cognicase, dont le président et chef de la direction disait lui-même, dans le journal La Presse toujours, qu'il aurait créé ces emplois même s'il n'avait pas reçu ces crédits. Donc, on ne crée pas vraiment des emplois. C'est des emplois qui auraient été créés, puisqu'on sait que le multimédia est un milieu qui est en effervescence.

(16 h 40)

Alors, au lieu de s'occuper de ces mesurettes temporaires, on devrait bien plus s'occuper, par exemple, des 27 000 emplois qu'on a perdus depuis le mois de janvier, 27 000 emplois qu'on a perdus depuis le mois de janvier, M. le Président, pendant que le reste du Canada en créait 113 000. Alors, c'est de ça qu'on devrait s'occuper. Ce sont des vrais emplois qu'on perd et donc qui ne nous restent pas ici. Si c'est si bon que ça, la Cité du multimédia – autre question pour le ministre des Finances – pourquoi sommes-nous encore au huitième rang au niveau de la création d'emplois? Depuis que le Parti québécois est au pouvoir, dans les quatre dernières années, on a réussi à créer seulement 16,5 % de tous les emplois qui ont été créés au Canada, ce qui nous place au huitième rang sur 10. Seules Terre-Neuve et la Saskatchewan sont en arrière de nous. Incroyable! C'est impensable! Et, pendant ce temps-là, on nous parle de la Cité du multimédia comme étant l'invention du bouton à quatre trous.

Alors donc, M. le Président, c'est une mesure temporaire seulement, et ce que je reproche au gouvernement, c'est justement de créer ces genres de mesurettes, de se taper les bretelles grâce à ces mesurettes plutôt que d'offrir aux Québécois un vrai plan de société où, en fait, on travaillerait sur des valeurs fondamentales, des valeurs permanentes, comme, par exemple, la baisse d'impôts. On soulignait encore ce matin que l'impôt au Québec, pour les particuliers, est 36 % plus élevé qu'en Ontario. Ça, ça serait des mesures fondamentales. Le gouvernement du Parti québécois a au moins 500 000 000 $ dans ses coffres, libres, et qui pourrait baisser les impôts des Québécois, et il ne le fait pas. À la place, il saupoudre l'argent à gauche et à droite.

Et, en plus de ça, M. le Président, il y aurait lieu aussi de baisser les impôts des entreprises, parce que les entreprises québécoises, dans leur impôt total... Et là j'additionne leur impôt sur les profits, l'impôt qu'il faut qu'elles paient aussi, les taxes sur le capital et les taxes sur la masse salariale. Si on additionne ces trois niveaux d'imposition là, on arrive à 3,8 % du produit intérieur brut qui est versé par nos entreprises québécoises sur la foi de leur impôt total. En Ontario, le même chiffre, c'est 24 %. Un écart majeur entre les deux provinces.

Donc, ce que je propose au gouvernement, c'est beaucoup plus, à la place de saupoudrer de l'argent à gauche et à droite comme ça, et particulièrement dans la Cité du multimédia, de travailler sur des changements fondamentaux de la société québécoise, de baisser nos impôts, les impôts des particuliers et aussi les impôts des entreprises, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Mont-Royal. Alors, je suis prêt à reconnaître la prochaine intervenante, la porte-parole officielle de l'opposition en matière de ressources naturelles et députée du beau comté de Bonaventure. Mme la députée, la parole est à vous.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, aujourd'hui, je suis très heureuse de joindre ma voix à celle de la députée de Beauce-Sud, également à celle du député de Mont-Royal, dans cet exercice qui nous permet de commenter les différentes modifications contenues dans le projet de loi n° 3. De toute évidence, compte tenu de l'ampleur et du nombre d'articles qui sont contenus dans ce projet de loi, notre collègue de Beauce-Sud et critique officielle en matière de revenu a une immense tâche qui l'attend, et je suis convaincue qu'elle saura relever le défi avec brio, c'est-à-dire celui de contribuer à une meilleure compréhension et vulgarisation des modifications qui sont contenues dans ce projet de loi n° 3.

Alors donc, le projet de loi n° 3, M. le Président, propose notamment de modifier la Loi concernant les droits sur les mines afin d'augmenter de 50 % à 75 % le taux de l'allocation additionnelle pour l'exploration à l'égard des frais engagés pour des travaux d'exploration dans le Moyen Nord et le Grand Nord québécois. De plus, on apprend que le projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin de bonifier la déduction pour frais d'exploration d'un montant égal à 25 % des frais d'exploration engagés dans le Moyen Nord et le Grand Nord québécois.

M. le Président, lors de l'exercice des crédits du ministère des Ressources naturelles, le 15 avril dernier, on apprenait que, dans le plan stratégique du ministère, on souhaitait concourir au maintien d'un investissement global minier de l'ordre de 1 000 000 $ pour 1999-2000. Compte tenu que depuis trois ans la moyenne des investissements dans le secteur minier au Québec a oscillé entre 900 000 000 $ et 1 100 000 $, il y a lieu de s'interroger sur l'objectif, que nous jugeons plutôt conservateur. Plutôt que de chercher à développer l'investissement minier au Québec, ce qu'on comprend, c'est que ce gouvernement décide de maintenir le cap en se gardant un objectif qui correspond aux résultats des années antérieures.

M. le Président, malheureusement, c'est une vision du développement minier qui est à court terme et qui a déjà causé beaucoup de tort au Québec. D'ailleurs, selon des statistiques qui nous sont parvenues du ministère des Ressources naturelles du Canada, on apprend que de 1991 à 1993 le Québec se situait au premier rang canadien au niveau de l'exploration minière. À partir de 1994, la situation commence à se dégrader, puisque le Québec est tombé au second rang de l'exploration minière, si bien que, en 1995 et 1996, le Québec, malheureusement, affichait un résultat déplorable puisqu'il se situait au troisième rang.

M. le Président, pour l'opposition officielle, c'est une dégringolade incompréhensible comte tenu du potentiel minier qu'on retrouve au Québec. Et vous me permettrez de citer un article tiré du journal La Presse du 19 avril 1999 dans lequel on nous informe qu'un grand nombre de mines junior tirent littéralement le diable par la queue au Québec. Alors, c'est une situation, bien sûr, qui est drôlement préoccupante pour un secteur d'activité d'une aussi grande importance pour le Québec. Et même le ministre Brassard, en commission parlementaire, a cautionné cette affirmation qui est rapportée par le journal La Presse . Et vous me permettrez de le citer lorsqu'il a affirmé que «c'est vrai qu'il y a eu une sorte de déclin des investissements en matière d'exploration minière au Québec».

Alors, M. le Président, il y a une question légitime qui se pose: Qu'est-ce que fera ce gouvernement pour permettre au Québec de reprendre la première place, de reprendre le premier rang, rang qu'il occupait entre 1991 et 1993? On apprend aujourd'hui que deux mesures du projet de loi n° 3 viendront modifier les crédits pour l'exploration minière dans le Grand Nord, dans le Moyen et le Grand Nord du Québec. Alors, notre interrogation est la suivante: Quel sera l'impact de ces mesures pour l'exploration minière? Il nous semble bien minime par rapport à la tâche qu'a à accomplir ce gouvernement pour permettre au Québec de reprendre la place qui lui revient.

Le ministre des Ressources naturelles, en crédits, nous informait également que, dans le discours sur le budget qu'a prononcé le ministre des Finances, on annonçait la formation d'un comité conjoint industrie-gouvernement-ministère pour examiner, donc, l'ensemble des outils et des instruments de soutien à l'exploration. Est-ce que les mesures qui sont contenues dans le projet de loi n° 3 sont le fruit du travail de ce comité? C'est une question que je pose au ministre des Finances. Est-ce que ce sont vraiment des moyens efficaces, les modifications qui sont contenues dans le projet de loi n° 3, qui contribueront réellement à relancer l'exploration minière au Québec? En fait, nous nous demandons, bien sûr, si le ministre juge que les modifications qui sont apportées à la présente loi sont suffisantes pour donner un coup de barre nécessaire pour permettre au Québec d'occuper, donc, le premier rang ou de rattraper le retard, malheureusement, qu'on a affiché au cours des dernières années.

Alors, M. le Président, en terminant, de ce côté-ci de la Chambre, nous formulons le voeu, bien sûr, que l'ensemble de ces modifications au niveau de l'exploration minière permettront à cet important secteur d'activité économique de connaître une véritable relance, donc, et de retrouver les lettres de noblesse qu'il avait dans le passé. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Bonaventure. Il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 3, quant à l'adoption de son principe? N'ayant pas d'autres intervenants, je cède la parole maintenant à M. le ministre du Revenu pour son droit de réplique, conformément au règlement.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry: Merci, M. le Président. En fait, vous aviez raison en un sens: ça valait la peine d'attendre, parce qu'il s'est dit suffisamment de faussetés pour alimenter une réplique plus vive, mais qui est brève. J'ai 10 minutes.

Mais, en ce qui a trait au député de Mont-Royal, les faits sont la meilleure réplique qu'on peut lui donner. Les faits parlent par eux-mêmes. En termes de proportion d'emplois créés au Québec, notre dernier mandat, 1994-1998, est le meilleur des 15 dernières années. Alors, ce qu'il a dit de la fiscalité, ce qu'il a dit de divers problèmes et d'investissements est démenti formellement par la réalité. En 1998, on a créé 67 000 emplois, une des meilleures performances depuis 10 ans, et plus de la moitié chez les jeunes, c'est-à-dire 34 000, soit la plus forte création d'emplois chez les jeunes depuis les 25 dernières années, dernier quart de siècle. Je comprends que l'opposition peut être exigeante, là, mais on a fait mieux qu'à aucun autre moment depuis 25 ans.

(16 h 50)

Depuis le début de l'année, la création moyenne d'emplois est de 75 300 emplois, tous des emplois à temps plein. Le Québec a créé 24,2 % des emplois à temps plein au Canada. Et les jeunes ont continué de récolter la moitié des emplois créés, c'est-à-dire 37 200, et leur taux de chômage a baissé de 2,1 points. Alors, je pense que les faits parlent par eux-mêmes.

Et d'ailleurs, la Banque canadienne impériale de commerce n'a pas du tout la vision du Québec du député de Mont-Royal. C'est surprenant d'ailleurs que cette Banque connaisse mieux l'économie du Québec qu'un député de cette Assemblée. Mais, en tout cas, ça peut arriver, c'est arrivé souvent dans le passé. La banque dit: «Le Québec a une croissance supérieure à la moyenne canadienne en 1999 et un taux de chômage en deçà de 9 % en l'an 2000; 1999 devrait être particulièrement favorable à l'économie intérieure du Québec, caractérisée par une confiance accrue des consommateurs et du milieu des affaires.» Et le Mouvement Desjardins, lui, dit que «la progression de l'économie québécoise sera analogue à celle de l'économie canadienne en 1999-2000», chose qui est rarissime, parce qu'on a toujours traîné la patte, comme vous le savez, particulièrement entre 1990 et 1994 où on a créé zéro emploi. «Et dans ce contexte, le taux de chômage continuera de décliner.» En moyenne, depuis 1994, le taux de croissance par habitant est légèrement supérieur au Québec qu'au Canada. Un fait qui est pratiquement sans précédent.

Alors, non seulement on n'a pas honte de notre bilan économique, mais on trouve que l'opposition n'a pas intérêt à essayer de diminuer l'économie du Québec et de la présenter en deçà de ses performances. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, nous sommes contents mais non satisfaits. On est contents que le taux de chômage ne soit plus de 14 %, qu'il soit à 10 %, mais ce n'est pas satisfaisant qu'il soit à 10 %, et on va continuer.

En matière de fiscalité, il fut dit aussi un certain nombre de choses qui n'étaient pas conformes aux faits les plus élémentaires. Bon. L'exemple est venu de haut. Le chef libéral, le chef de l'opposition, avant de nous quitter pour le voyage que nous lui payons, de nos deniers, à l'étranger, avait dit que «l'écart entre le Québec et l'Ontario était de 60 %». Il y a un écart entre le Québec et l'Ontario, on le sait. On se bat avec toutes les forces possibles pour le combler, mais le multiplier par deux dans une erreur en pleine période de questions à l'Assemblée nationale dénote une faiblesse soit du chef de l'opposition soit de son service de recherche, et probablement des deux. Alors, qu'on dise la réalité telle qu'elle est. C'est déjà assez grave qu'ils aient monté les impôts de 10 000 000 000 $ en quatre ans, durant les quatre ans qui ont précédé notre arrivée au pouvoir, qu'ils n'aillent pas, en plus, maintenant qu'ils ne sont plus au pouvoir, exagérer une différence entre le Québec et l'Ontario alors qu'ils sont ceux qui sont responsables de l'avoir créée.

Alors, dans notre cas, la désescalade est commencée et elle n'est pas finie. Et je donne quelques chiffres. Jusqu'à maintenant, 93 % des ménages québécois – 93 %, ce n'est pas loin de 100 %, ça – sont avantagés par la réforme que les présentes lois consacrent. Et la proportion varie entre 90 % pour les couples sans enfant et 98 % pour les familles monoparentales. Et ça, le gouvernement du Québec, je l'ai dit à plusieurs reprises, en est fier. Notre fiscalité est trop haute, nous en convenons, mais, au moins, elle est humaine, au moins, elle est sociale. Les deux fiscalistes dont on a beaucoup parlé... surtout en mon absence, d'ailleurs... J'ai été absent, au sommet des ministres des Finances de la francophonie. Il s'est posé une série de questions sur les impôts, et, depuis que je suis revenu, je n'en ai pas entendu une seule. Il y a quelque chose d'étrange là-dedans.

Mais, en tout cas, dans ce qu'ils ont dit, les fiscalistes, dans leur explication du phénomène, ils disent, et je les cite – je parle de MM. Chartrand et Laferrière, deux professeurs pour lesquels j'ai beaucoup d'estime et qui ont sûrement fait avancer le débat – ils disent: «La cause: des régimes sociaux et fiscaux trop généreux pour les gens à revenus faibles ou très faibles et un nombre trop faible de contribuables à revenus élevés.» Alors, s'il est vrai que notre fiscalité n'est pas ce qu'elle devrait être parce qu'elle est trop élevée, parce qu'on a eu 10 ans de négligence qui nous ont précédés... Je l'ai déjà dit, faisant référence à ce qui s'est passé en Grande-Bretagne, aujourd'hui, c'est M. Tony Blair, un progressiste, qui est premier ministre de la Grande-Bretagne, sauf qu'il y a eu avant lui Mme Margaret Thatcher qui avait fait le ménage. Mais, nous, on a une droite qui ne fait pas son travail. Alors, quand les progressistes comme nous arrivons au pouvoir, on est obligés de faire le ménage puis de rester progressistes en plus. Alors, ça fait tout un contrat, puis on est capable de le réaliser parce qu'on a fait le ménage et le déficit est à zéro. Puis on a commencé à baisser les impôts, comme je l'ai dit, pour l'immense majorité des Québécois. J'ai donné des chiffres globaux, je peux en donner des plus pointus. Par exemple, la proportion des contribuables non imposables, c'est-à-dire ceux qui ne paient aucun impôt – alors, ils n'ont pas de différence entre Québec et l'Ontario, ils n'en paient pas – est passée de 27,9 % des contribuables en 1982 à 39 % aujourd'hui.

Maintenant, les gains découlant de la réforme. Les ménages gagnant entre 15 000 $ et 25 000 $ paient, au Québec, 4,3 % des impôts. Ils ont bénéficié de 20,2 % de la baisse des impôts de 841 000 000 $, soit un gain net pour ce groupe de 170 000 000 $. Les personnes âgées, dont on a dit, ouvrez les guillemets, qu'elles avaient mangé la claque, erreur profonde, les personnes âgées de 65 ans et plus paient, au Québec, 10,7 % des impôts. Elles ont bénéficié de 19,1 % de la baisse des impôts, soit un gain net de 161 000 000 $. Alors, nous avons la fierté de dire que les personnes âgées, comme d'autres et plus que d'autres, ont profité de cette réforme.

Maintenant, les gains découlant de la réforme sur diverses catégories: pour les célibataires, la baisse moyenne est de 92 $; pour les couples sans enfant, elle est de 334 $; pour les familles avec enfant, elle est de 337 $; pour les personnes âgées, elle est de 258 $. Alors, c'est la différence entre des impôts qui montent, avec lesquels l'opposition est tout à fait familière, et des impôts qui baissent, qu'ils ont de la difficulté à comprendre. Et, encore une fois, ce n'est pas fini, ce n'est que le début.

La députée de Beauce-Sud aussi a dit une chose à laquelle il faut réfléchir, et je la cite parce que j'ai en main le compte rendu de nos travaux, ce qu'on appelle les galées. Elle dit, et je la cite au texte, contrairement à ce qu'elle a fait durant mon absence... Elle a essayé de torturer mes paroles et de triturer mes paroles, qui sont pourtant inscrites au Journal des débats , alors que j'étais allé m'adresser à l'Union des municipalités du Québec, chose que j'ai peu appréciée. Si elle veut m'attaquer, qu'elle le fasse pendant que je suis là. Si elle veut me tourmenter, qu'elle me tourmente, mais qu'elle ne tourmente pas mes paroles en mon absence.

Alors, moi, je ne tourmenterai pas les siennes, je vais citer le Journal des débats : «Le gouvernement du Parti québécois s'est fait un point d'honneur d'enrayer le travail au noir, et je dois dire qu'il y travaille très fort, mais, lorsque l'on prend conscience de la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement, on comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table.» C'est une compréhension qui n'est pas admissible. Ce n'est pas convenable qu'une députée de notre Assemblée nationale, élue au suffrage universel, et membre de l'institution, et membre du Parlement, dise qu'elle comprend les gens qui travaillent au-dessous de la table. Ça n'a pas de bon sens, ça, M. le Président. C'est une chose qui me déçoit énormément de la députée, et je regrette qu'elle ne soit plus dans cette Chambre – elle y reviendra, c'est entendu – pour que je puisse lui demander des explications sur le sens de cette phrase qui, moi, me scandalise.

Je dois dire aussi que... Non, mais c'est vrai, là, personne n'aime payer des impôts. C'est lourd, les impôts, c'est difficile. Et, s'il y a les impôts qu'on a au Québec, c'est à cause largement, je l'ai démontré, de la négligence de ceux qui nous ont précédés, puis on fait tout pour les baisser. Mais, en attendant, si quiconque, directement ou indirectement, encourage ou se montre compréhensif pour les gens qui fraudent le fisc et travaillent sous la table, non seulement...

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député.

M. Dupuis: Question de règlement, M. le Président. Le ministre des Finances, vice-premier ministre, ministre du Revenu est parfaitement conscient que les paroles de la députée de Beauce, les paroles qu'il lui prête ne sont pas du tout les paroles qu'elle a prononcées. Ce qu'elle a dit, c'est qu'elle déplorait que les agissements du ministre des Finances fassent en sorte qu'il y a des gens qui se croient obligés d'agir de telle sorte, mais elle n'a jamais endossé ce genre de comportement là, et le ministre le sait très bien.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Si vous voulez poursuivre...

M. Landry: M. le Président, je l'ai citée au texte et je la recite au texte.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez poursuivre votre droit de réplique.

(17 heures)

M. Landry: Je l'ai citée au texte et je la recite au texte. Après avoir rendu hommage au gouvernement dans sa lutte contre le travail au noir, la députée dit ceci, à moins qu'on veuille mettre en cause les gens qui tapent nos débats, ouvrez les guillemets: «...lorsque l'on prend conscience de la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement, on comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table», fermez les guillemets. «On comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table.» Non, M. le Président, ce n'est pas une façon de vivre en société, ce n'est pas une façon sociale, parce que la fiscalité est lourde...

M. Dupuis: Question de règlement.

M. Landry: ...pour un parlementaire...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, je m'excuse.

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre question de règlement?

M. Dupuis: Ma question de règlement est la suivante: ce que le ministre des Finances vient de citer prouve tout à fait l'affirmation que j'ai faite tantôt à l'effet que la députée n'avait pas endossé les comportements mais avait déploré le fait que les agissements du ministre des Finances fassent en sorte que ces gens se sentent obligés de faire ça.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, s'il vous plaît. Le ministre des Finances a lu les galées. Je ne les ai pas lues, les galées, mais il les a lues. Alors, je vais permettre que le ministre termine. M. le député de...

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement. Je pense que la question de règlement de l'honorable député de Saint-Laurent n'était pas une question de règlement. Et je pense qu'il aurait plutôt avantage à écouter la réplique du ministre des Finances, parce que, si, à ce moment-là, le leader adjoint du gouvernement était intervenu, j'aurais invoqué sans aucun doute l'article 35, dans son 10e paragraphe, qui est «tenir des propos séditieux».

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. Alors, si vous voulez poursuivre votre intervention. Je vous indique qu'il vous reste sept minutes et demie, M. le ministre.

M. Landry: Alors, le député est criminaliste de formation, je crois, et, de métier, procureur de la couronne. Alors, je vous demande de réfléchir sur ceci. Prenons un exemple théorique: Une personne a commis un crime, est condamnée par les tribunaux, un crime d'une certaine importance, et quelqu'un dit – un député, ou un ministre, ou un maire: On comprend très bien que la personne ait commis ce crime. Ce sont des propos extrêmement lourds de conséquences. Ces propos peuvent avoir une certaine pertinence dans certains cas. Mais qu'une personne qui est payée par les deniers publics et qui reçoit son salaire à tous les deux mercredis, comme vous et moi, M. le Président, dise: On comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table, ça me fait croire que ses propos sont en dessous de tout, comme propos, et pas rien qu'en dessous de la table.

Alors, je continue, M. le Président, mon intervention en rappelant, puisqu'on a invoqué des fiscalistes, ce que j'ai dit dans un débat ce matin et qui est assez éclairant, où on fait la vraie comparaison entre la situation d'un contribuable montréalais et d'un contribuable torontois. Le titre de l'article que j'ai cité ce matin, de M. Dutrisac, qui est un article, encore une fois, remarquablement bien fait... Les journalistes, qu'ils soient d'accord avec nous ou pas d'accord – demain, il ne sera peut-être pas d'accord – mais qui travaillent consciencieusement et qui donnent des chiffres, méritent qu'on les lise, ils nous rendent de grands services. Alors, M. Dutrisac, il a rendu de grands services, et il écrit en particulier: «Depuis l'arrivée de Mike Harris et l'avènement de la révolution du bon sens, ils – les Ontariens – paient moins d'impôts, plusieurs milliers de dollars de moins qu'il y a quelques années, beaucoup moins qu'au Québec, mais ils reçoivent aussi moins de services. Ils savent aussi qu'ils vivraient beaucoup mieux à Montréal avec les mêmes salaires.»

Et M. Dutrisac cite le logement, qui, pour un logement comparable, est de 1 200 $ à Toronto alors qu'il est de 500 $ ou 600 $ à Montréal. Et ça, ce n'est pas l'opération du Saint-Esprit, ce sont nos lois sociales qui font qu'on a une Régie du logement qui fait son travail. Ceux qui achètent des maisons, pour la même qu'à Montréal qui vaut 150 000 $, il faut payer 250 000 $ à Toronto. Pour l'assurance automobile, il faut débourser de 500 $ à 1 000 $ de plus par année. Pour les garderies, il en coûte 800 $ à 1 200 $ par mois pour envoyer son enfant dans une garderie à Toronto; on est loin des garderies à 5 $ par jour que nous avons au Québec, dû à notre gouvernement et à ses politiques éclairées de la petite enfance.

Et globalement, une fiscaliste qui s'appelle Nathalie Joron, de la firme KPMG... J'ai déjà dit ce que je pensais des chercheurs et des practiciens. Les chercheurs sont des gens très utiles à la société, mais cette personne est une fiscaliste de KPMG qui dit: «Il en coûtait l'an dernier entre 2 400 $ et 7 200 $ de plus par année pour vivre dans le Grand Toronto, en calculant les économies d'impôts.»

Alors, avant de dramatiser et de présenter l'économie du Québec, comme l'a fait le député de Mont-Royal, en dessous de ses performances, qui sont, je l'ai dit, dans certains cas les plus spectaculaires des 25 dernières années, avant de dire, comme le chef de l'opposition, que l'écart entre le Québec et l'Ontario est de 60 % alors qu'il est de 30 %, avant de dire que les citoyens du Québec sont dans une situation de fiscalité... Je vais reciter toujours, parce que, quand la députée de Beauce-Sud a cité mes paroles, elle les a travesties, mais, moi, je cite au texte en mettant des guillemets: «...mais, lorsque l'on prend conscience de la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement...» Bien, la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement, elle fait que, même après impôts, il en coûte 2 400 $ de plus, 7 200 $ de plus à Toronto qu'à Montréal, ayant tenu compte des impôts.

Alors, leur modèle, leur idéal, Mike Harris, présenté durant la campagne électorale sous l'éclairage que l'on sait par l'opposition officielle et avec l'insuccès que l'on sait, du reste fort heureusement, c'est ça que ça donne dans la pratique. Alors, que les impôts québécois et le fardeau fiscal global soient trop élevés pour les personnes physiques, le gouvernement n'en a pas à être convaincu. On les a déjà baissés de 841 000 000 $, on va les baisser de 400 000 000 $ en juillet 2000. On a promis de les baisser de 1 300 000 000 $ dans notre présent mandat, et nous allons le faire avec la même vigueur que nous avons atteint le déficit zéro. Pour les personnes physiques.

Quant aux corporations, bien, là, j'ai été très surpris. Là, ce ne sera plus la droite, ça va être l'extrême droite bientôt. Le député de Mont-Royal dit que les taxes sur les corporations au Québec sont plus élevées. Il ne connaît pas l'étude de Price Waterhouse, qui est faite à tous les ans, qui a été commencée par mon ami Gérald Tremblay quand il était ministre de l'Industrie et du Commerce, qui démontre hors de tout doute que la fiscalité corporative des entreprises au Québec est la plus concurrentielle de toute notre partie de notre continent. C'est-à-dire prenant en compte Nouvelle-Angleterre, prenant en compte Ontario, Maritimes, Québec est champion, et le député de Mont-Royal voudrait, avant, je suppose, qu'on baisse les impôts sur les personnes physiques qu'on admet trop hauts, baisser les impôts des compagnies qui sont déjà extrêmement concurrentiels. Alors, on en a appris beaucoup dans ce débat, M. le Président. On a appris où logent chacun et chacune et quels sont leurs vrais intérêts et les principes qu'ils défendent dans cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Alors, ceci met fin au débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 3, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives.


Mise aux voix

Est-ce que le projet de loi n° 3, quant à son principe, est adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Alors, j'informe l'Assemblée que la présidence a reçu dans les délais requis une demande du député de Châteauguay, suite à la période de questions aujourd'hui, à un débat de fin de séance avec la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant le centre hospitalier Anne-Laberge. Ce débat de fin de séance aura lieu à la fin des affaires du jour, demain, à 18 heures.

Alors, je suis prêt à reconnaître M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je vous réfère à l'article 4 du feuilleton.


Projet de loi n° 19


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 4, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Il m'est agréable aujourd'hui de présenter le projet de loi n° 19 visant à introduire une modification à la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès afin de permettre la conclusion d'ententes avec la Société de l'assurance automobile du Québec et la Commission de la santé et de la sécurité du travail en vue de leur contribution au financement des investigations du coroner reliées aux accidents de la route et aux accidents du travail.

(17 h 10)

Je voudrais rappeler en premier lieu que les coroners interviennent, au total, à chaque année, dans environ 4 500 cas de décès de nature obscure ou violente, dont environ 1 000 sont reliés à des accidents de la route ou du travail. Conformément à la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, le coroner doit procéder à une investigation chaque fois qu'un avis lui est donné pour un cas semblable afin de déterminer les causes médicales et les circonstances du décès. Dans certains cas, qu'on évalue à plus ou moins 25 par année, il peut procéder à une enquête publique.

Les cas d'accidents mortels de la route et du travail impliquent que le coroner procède à une investigation en vue de formuler des recommandations visant la protection de la vie humaine. Les gestes posés par le coroner et les rapports qu'il produit dans le cadre de ses investigations sont d'une très grande utilité pour la Société de l'assurance automobile du Québec et la Commission de la santé et de la sécurité du travail, puisqu'ils permettent de contribuer aux missions de prévention des accidents routiers ou de travail de ces deux organismes.

Jusqu'à maintenant, les coûts des investigations et des enquêtes dans les cas de décès dus à des accidents de la route et du travail, comme c'est le cas d'ailleurs pour les autres types de décès relevant de la compétence du coroner, sont entièrement supportés par les contribuables québécois, à même les crédits consentis par l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, dans le cas des accidents n'entraînant pas de décès, les compensations relatives aux soins de santé et aux indemnités versées aux personnes blessées sont prises à même les fonds gérés soit par la Société de l'assurance automobile du Québec soit par la Commission de la santé et de la sécurité du travail. La création de ces fonds et leur maintien actuel s'appuient sur des notions d'assurance. À titre d'exemple, M. le Président, les accidents de la circulation sont responsables annuellement de dommages corporels et matériels importants, directement reliés à l'activité de la conduite de véhicules.

Le mode de financement de la Société de l'assurance automobile du Québec est fondé sur le principe de faire supporter aux conducteurs le coût des risques encourus par la circulation routière, et non à l'ensemble des contribuables québécois; c'est, en fait, une assurance. Ainsi, avec les cotisations que doivent payer les conducteurs en contrepartie de leur privilège de conduire, on a constitué un fonds destiné, entre autres, à verser des indemnités aux personnes blessées et aux proches des personnes décédées dans des accidents, de même qu'à défrayer les coûts générés par les soins de santé et le transport ambulancier. Ce même principe s'applique pour la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la différence que ce sont les employeurs qui cotisent pour constituer le fonds.

La raison d'être de ces fonds consiste à défrayer le coût des soins de santé dispensés aux personnes blessées, à les indemniser ou à indemniser la succession des personnes décédées, de même qu'à mettre en place les mécanismes de prévention susceptibles de diminuer les accidents. C'est ce même principe qui sous-tend la proposition de modification que je propose aujourd'hui. Elle vise essentiellement à faire supporter par ces mêmes fonds, et par voie de conséquence les organismes chargés de les administrer, le coût des services d'investigation du Bureau du coroner, lesquels sont évidemment une conséquence directe des accidents de la route ou du travail entraînant la mort.

Différentes avenues de solution ont été examinées en vue d'atteindre cet objectif. Il s'est avéré que la voie contractuelle constituait un avantage réciproque pour toutes les parties concernées et qu'il était préférable de protéger l'impartialité du coroner en ne l'impliquant pas directement dans les ententes à venir.

En outre, cette proposition rencontre les critères requis pour la mise en place d'une approche permettant l'affectation de recettes à des fins spécifiques. La proposition se concilie aussi très bien avec la notion d'assurance sous-jacente à la création des fonds gérés par la Société de l'assurance automobile du Québec et la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour le cas des personnes blessées.

Les estimations qui ont été réalisées concernant cette proposition situent la récupération possible pour le Bureau du coroner à environ 430 000 $, répartis respectivement en 400 000 $ pour la Société de l'assurance automobile du Québec et 30 000 $ environ pour la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Ces estimations sont basées sur des tarifs visant la récupération des coûts standards du Bureau du coroner en matière d'investigation.

La Société de l'assurance automobile du Québec et la Commission de la santé et de la sécurité du travail ont été consultées relativement à la possibilité qu'elles puissent contribuer financièrement à certains services d'investigation du Bureau du coroner. Les deux organismes souscrivent à cette proposition et sont d'accord pour assumer des coûts de l'ordre de grandeur dont nous venons de parler. Des ententes de principe ont même déjà été conclues à ce sujet avec eux.

En somme, M. le Président, j'estime que cette proposition constitue un excellent moyen de permettre un meilleur arrimage entre les services offerts et leur financement dans les cas de décès reliés aux accidents de travail ou d'automobile, dans la mesure où une entente le prévoit. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre, de votre intervention. Je rappelle que nous sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès.

Et je cède la parole maintenant au porte-parole officiel de l'opposition en matière de sécurité publique, le député de Saint-Laurent. M. le député, la parole est à vous.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Permettez-moi de remercier le député de Verdun pour son enthousiasme. J'espère que le temps que je vais prendre pour parler ne réduira pas cet enthousiasme.

M. le Président, j'ai entendu le ministre commencer son discours tantôt en nous annonçant que ça lui faisait plaisir de déposer ce projet de loi là et de prendre la parole à l'Assemblée nationale à son sujet. Je dois dire qu'une chance qu'il nous l'a dit, parce que ça n'a pas paru dans le ton dans lequel il a donné son discours. Mais surtout, j'ai l'impression que ça ne va faire plaisir qu'à lui, ce projet de loi là.

Le projet de loi, M. le Président, bien sûr, à première vue, pourrait sembler être banal, comme l'a dit le ministre, d'ailleurs, en rapport avec les sommes qui sont impliquées et ce que le ministre est en train de faire. Il faut savoir que, quand on parle du Bureau du coroner, en 1999, on ne peut ignorer l'année 1996 au cours de laquelle l'ancien ministre de la Sécurité publique, le député de Mercier, avait annoncé publiquement, d'une part, et au coroner en chef et au Bureau des coroners qu'il s'apprêtait, pour l'année 1997-1998, à imposer une ponction budgétaire de 3 000 000 $ au Bureau des coroners. Alors, quand on parle du Bureau du coroner, aujourd'hui, là, il faut rappeler historiquement 1996, année au cours de laquelle il y a eu ce que j'appellerai, pour les fins de la discussion à l'Assemblée nationale aujourd'hui, un assaut qui a été perpétré à l'égard du Bureau des coroners.

En effet, M. le Président, il faut rappeler – je pense que c'est important que les gens le sachent – que, le 8 octobre 1996, La Presse publiait un article qui, en substance, disait la chose suivante: «Le Bureau du coroner, une institution québécoise dont les services légaux ont toujours été d'une importance capitale pour le bon fonctionnement de l'appareil judiciaire, serait menacé de fermeture. Le gouvernement envisagerait de faire appel au secteur privé pour assurer une certaine continuité.» L'article ajoutait: «Dans une lettre datée du 22 février 1996, le sous-ministre Florent Gagné, du ministère de la Sécurité publique, actuel directeur général de la Sûreté du Québec, avise le coroner en chef du Québec, Me Pierre Morin, de son intention de sabrer encore 3 000 000 $ pour l'année qui vient.»

Il faut savoir également que, dans le même temps, il y avait, au ministère de la Sécurité publique, un rapport qui circulait, qu'on a appelé du nom de son auteur, le rapport Cloutier, qui heureusement n'a jamais vu le jour mais qui prévoyait – les gens le savaient à cette époque-là – un certain nombre de réformes du Bureau du coroner, dont l'instauration d'un régime de coroners privés qui recevraient leurs mandats des familles des gens décédés et qui seraient payés par elles, la fermeture de la morgue de Montréal, aucune investigation systématique dorénavant dans le cas de mort violente, mais un échantillonnage. Imaginez-vous, là, quand vous êtes la famille de quelqu'un qui est décédé de mort violente, de savoir – et c'était le projet de 1996, je le répète – que peut-être la personne qui vous est chère, qui était décédée, allait faire l'objet d'une enquête, peut-être celle-là parce qu'elle faisait partie de l'échantillonnage... C'était ça, le projet.

Alors, qu'est-ce qui est arrivé quand cette nouvelle-là a été annoncée au coroner en chef? Le coroner en chef a eu le courage de se lever et de dire publiquement qu'il était en désaccord avec ce projet-là. Le lendemain, le 9 octobre 1996, suite à ce premier article qui indiquait une ponction importante dans le Bureau des coroners, le coroner en chef du Québec faisait une déclaration publique qui était reprise par La Presse du 9 octobre 1996 et qui était coiffée du titre – c'étaient les paroles du coroner en chef: Sommes-nous des emmerdeurs que Québec veut écarter? demande le coroner en chef .

M. Boulerice: ...

M. Dupuis: Je m'excuse, M. le Président, j'ai perdu le fil. Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques me pose une question, mais il pourra venir, en vertu d'un article du règlement, tantôt et poser la question s'il le veut. Ça prouve qu'il m'écoute, tout de même. Alors donc, le coroner en chef réagit de façon extrêmement publique et vindicative évidemment à l'endroit de l'assaut qui est perpétré à l'endroit du Bureau des coroners. Au gouvernement, à ce moment-là, évidemment, on recule, le gouvernement recule et le budget du Bureau du coroner pour la période de 1997-1998 est finalement fixé à 4 591 000 $.

(17 h 20)

Il faut savoir que, depuis l'année 1994 – et c'est dans ce cadre-là que le projet de loi actuel est déposé – régulièrement, le budget du Bureau du coroner a diminué, et ce gouvernement, évidemment, a imposé des ponctions de façon constante dans le budget du Bureau du coroner, de telle sorte que le budget prévu pour le Bureau du coroner en 1999-2000, pour l'année budgétaire en cours, est de 4 497 000 $, de 6 435 000 $ qu'il était en 1994. Des baisses importantes.

D'ailleurs, et c'est important de le mentionner aujourd'hui, je voudrais signaler que cette position courageuse que le coroner en chef, Pierre Morin, a prise en 1996, malheureusement va probablement lui nuire dans les mois qui viennent. En effet, M. le Président, le coroner en chef, dont le mandat s'est terminé au mois de décembre, n'a eu aucune nouvelle du gouvernement du Québec depuis ce temps-là. On ne lui a pas dit si on allait lui renouveler son mandat de coroner en chef. Son mandat est échu depuis le mois de décembre, et il n'a aucune nouvelle du gouvernement. Or, la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès prévoit, en son article 8, le mode de nomination du coroner en chef de la façon suivante: Le gouvernement nomme, parmi les coroners permanents, le coroner en chef du Québec. De telle sorte que le mandat du coroner en chef, Pierre Morin, qui s'était opposé à la volonté du gouvernement en 1996 d'imposer une ponction de 3 000 000 $ au Bureau du coroner, confirmant à toutes fins pratiques la presque fermeture du Bureau, son mandat est venu à échéance en décembre, et il n'a pas eu de nouvelles du gouvernement. La loi prévoit que le coroner en chef est nommé parmi les coroners permanents.

Or, dans l'édition du Journal du Barreau du mois de mai 1999, on s'aperçoit que le gouvernement du Québec a publié un avis visant à recruter des avocats pour agir à titre de coroners permanents. De là, M. le Président, à conclure que le gouvernement a déjà décidé, sans le dire au coroner en chef, qu'il allait le remplacer par un autre coroner qui viendrait de l'extérieur, il n'y a qu'un pas. D'autre part, je voudrais signaler également que le mandat du coroner en chef adjoint du Bureau du coroner, le Dr Serge Turmel, vient à échéance au mois de juin et que lui non plus n'a pas eu de nouvelles du gouvernement. On va surveiller ça dans les prochains mois. Je veux terminer sur cette question en disant et en répétant le courage que le coroner en chef a eu lorsqu'il a décidé de s'objecter de façon publique à ce que le gouvernement voulait faire du Bureau du coroner.

Je ferme la parenthèse, M. le Président, en disant que c'est dans cette atmosphère-là, qui règne depuis 1996, que, à chaque année, on se demande ce que le gouvernement va faire avec le Bureau du coroner, à chaque année, on se demande s'il va y avoir un nouvel assaut qui va être perpétré à l'endroit du Bureau du coroner et, à chaque année, le budget du Bureau du coroner diminue.

Où flotte le rapport Cloutier dans le ministère? Est-ce que le ministre a l'intention de le ramener? Est-ce que le gouvernement a l'intention de le ramener sur la table? On n'en a plus entendu parler, mais, à chaque année, il y a cette espèce d'atmosphère-là qui règne, au moment des crédits particulièrement.

M. le Président, il faut savoir comment fonctionne le Bureau du coroner pour bien comprendre la portée du projet de loi n° 19. La mission du coroner est celle de connaître les circonstances des décès de nature obscure ou des décès de nature violente. Deux sortes d'enquêtes, pour employer une expression générique, peuvent se tenir au moment du décès violent d'une personne ou d'un décès dans des circonstances qui sont obscures. Le Bureau du coroner peut tenir ce qu'on appellera pour les fins de la discussion mais qui est le terme employé dans le milieu «une investigation» ou alors il peut tenir une enquête. Les enquêtes, c'est ce qu'on connaît. Les enquêtes publiques, celles évidemment qui ont le plus de répercussions dans les médias, sont les enquêtes, et elles sont tenues par des coroners enquêteurs.

Dans les cas de toute nature de mort obscure ou de mort violente, il y a une investigation qui doit se tenir. En général, cette investigation-là se tient par un coroner qu'on appelle un coroner investigateur, qui est un médecin et qui, évidemment, fait un certain nombre d'examens lors d'un décès. C'est de ça que le projet de loi n° 19 parle. Le projet de loi n° 19 indique que dorénavant, si le projet de loi est adopté, bien sûr, certains frais qui sont occasionnés par ces investigations-là devront être, dans le cas des morts violentes par suite d'un transport routier, couverts, ces frais-là, par la SAAQ dorénavant, ou, s'il s'agit d'un décès survenu à la suite d'un accident de travail, l'investigation, les frais seront payés par la CSST.

Évidemment, d'où viennent les argents qui sont dans les coffres de la SAAQ, de la Société de l'assurance automobile du Québec, et les argents qui sont dans les coffres de la CSST? Le ministre l'a souligné dans son discours, les argents qui sont contenus dans les coffres de la Société de l'assurance automobile, bien sûr, viennent des primes d'assurance, de ce qu'il est convenu d'appeler les primes d'assurance qu'on paie, qui sont évidemment les tarifs qu'on paie pour avoir les permis de conduire, pour obtenir un permis d'immatriculation, pour passer les examens. Ces argents-là vont à la Société de l'assurance automobile du Québec qui, elle, évidemment, administre ces argents-là pour se faire vivre elle-même et constitue aussi un fonds pour indemniser, bien sûr, les victimes d'accidents de la route.

D'autre part, M. le Président, les argents qui sont collectés par la Commission de la santé et de la sécurité du travail viennent exclusivement et uniquement des contributions des employeurs pour, évidemment, encore là, assurer en grande partie les indemnisations des victimes d'accidents de travail. Qu'est-ce à dire, M. le Président? Et c'est ça, au fond, qui est l'objet du projet de loi. Au moment où nous nous parlons, les investigations qui sont faites par le Bureau des coroners sont payées à même les impôts de tous les contribuables. Dorénavant, ce que le ministre fait, ou l'effet de son projet de loi, c'est que dorénavant ces frais-là seront payés par une clientèle ciblée: les gens qui détiennent des permis de conduire, les gens qui détiennent des permis d'immatriculation. D'autre part, pour ce qui concerne les accidents de travail, les argents seront dorénavant pris à même les contributions des employeurs. C'est ça que le ministre veut faire. Alors donc, il rétrécit à la clientèle qui va payer ces frais-là plutôt qu'à tous les citoyens en vertu des impôts.

C'est une mesure budgétaire, c'est clair. Le ministre pourra essayer d'enrober, d'expliquer son projet de loi de toutes les façons possibles pour essayer d'en justifier le contenu, il reste que c'est une mesure budgétaire. D'ailleurs, M. le Président, le mémoire que le ministre a déposé au soutien de son projet de loi au Conseil des ministres est clair là-dessus. Dans la solution qu'il préconise, qui est celle de déposer le projet de loi n° 19, le mémoire dit bien que les avantages qu'on voit dans cette mesure de déposer le projet de loi n° 19, les cinquième et sixième avantages mentionnés dans le mémoire sont: «La proposition permet de résorber une partie appréciable de la problématique budgétaire du Bureau du coroner, d'une part. Et, d'autre part, cette avenue permet au ministère de la Sécurité publique de contribuer, même si cela est perçu comme minime, aux grands équilibres budgétaires du gouvernement.» C'est ça, là, l'objet du projet de loi. À travers toutes les belles intentions que le ministre donne, c'est une mesure budgétaire.

(17 h 30)

Or, c'est important de se rappeler... Je vais faire un petit peu d'histoire, M. le Président. Or, on se souviendra – d'ailleurs, nous en avons fait les frais pendant un certain temps dans la première année du mandat de ce gouvernement-là – de toute la problématique qui a été créée autour de la décision des gouvernements, le nôtre, quand nous étions au pouvoir et celui du Parti québécois, d'aller puiser dans les fonds de la Société d'assurance automobile du Québec pour d'autres motifs, pour des motifs d'ordre budgétaire autres que ceux pour lesquels les argents sont déposés à la Société d'assurance automobile du Québec, qui sont l'indemnisation des victimes.

Vous vous souviendrez – je ne veux pas revenir là-dessus très longtemps – que la Cour d'appel du Québec avait dit: Oui, le gouvernement du Québec peut aller dans les fonds accumulés à la Société d'assurance automobile retirer de l'argent pour les fins qu'elle veut. Évidemment, le Parti québécois, les représentants de l'opposition officielle quand nous étions au pouvoir, a poussé les hauts cris et nous a reproché d'avoir eu ce genre d'agissement. À leur tour, évidemment, quand ils ont été au gouvernement, c'est drôle, à ce moment-là ils trouvaient ça pas mal moins pire, ils ont fait exactement la même chose. Le jugement de la Cour d'appel est intervenu, disant: Oui, le gouvernement peut faire ça. Mais, dès la publication du jugement de la Cour d'appel, le premier ministre lui-même est intervenu en disant... Malgré le fait que le gouvernement du Québec peut utiliser à sa guise les surplus accumulés par la Société d'assurance automobile du Québec, le premier ministre, Lucien Bouchard, a catégoriquement rejeté la possibilité que son gouvernement puise à son tour dans la caisse de la Société d'assurance automobile du Québec malgré l'ouverture ainsi créée par la Cour d'appel. «Nous avons dit que nous ne le ferions pas et nous le ferons pas non plus», a-t-il dit à l'occasion de la réunion du Conseil des ministres qui se tenait hier à Vaudreuil. Et je lis évidemment un extrait d'un article paru dans Le Devoir le 28 août 1996.

Dans Le Soleil du 25 avril 1996, le premier ministre avait indiqué: «L'État ne pigera plus dans la caisse de la Société d'assurance automobile du Québec.» Et, en Chambre le lendemain, il avait confirmé que ça ne se produirait plus. Force nous est de constater aujourd'hui que probablement le ministre ne se souvient pas de cette déclaration du premier ministre parce que c'est exactement ça qu'il s'apprête à faire. Je conviendrai, pour les fins de la discussion, M. le Président, qu'il ne s'agit pas de sommes faramineuses, sauf que le ministre conviendra avec moi qu'il s'agit d'une brèche, qu'il s'agit d'une ouverture, qu'il s'agit d'un précédent qui est créé dans le cas des investigations.

J'ajoute, avec votre permission, M. le Président, qu'il faut également se demander, quand on regarde le projet de loi n° 19 et qu'on essaie de comprendre ce que le gouvernement, au fond, est en train de faire à l'intérieur de ce projet de loi là, quelle est l'utilité de ces investigations-là. Le ministre a dit dans son discours: Vous savez, il faut que les gens qui bénéficient des investigations soient ceux qui paient pour de telles investigations. À première vue, c'est un raisonnement qui semble être un raisonnement inattaquable, sauf quand on scrute un petit peu plus ce que sont ces investigations. Si les investigations qui sont faites par le Bureau des coroners en cas de mort violente ou en cas de mort dans des circonstances obscures ne bénéficiaient qu'aux familles des gens qui malheureusement sont décédés dans ces accidents-là, on pourrait être d'accord avec le ministre, mais les investigations ont un objet qui est beaucoup plus important que celui-là, qui est un objet qui relève de la nature de l'intérêt public.

Effectivement, M. le Président, il faut savoir que, suite à ces investigations-là, il y a des recommandations qui sont faites par les investigateurs auprès soit de la Société d'assurance automobile du Québec, quand on parle de cette matière-là, ou soit auprès des employeurs, en matière d'accidents de travail, des recommandations qui sont faites pour que certaines pratiques changent afin que certaines pratiques soient plus sécuritaires à l'endroit des gens qui soit circulent sur les routes ou soit travaillent pour le bénéfice de cet employeur-là, en matière d'accidents de travail, premièrement.

Deuxièmement, les investigations facilitent jusqu'à un certain point et de temps en temps les réclamations qui peuvent être faites, auprès de la succession des gens qui sont décédés, par les héritiers ou par des tiers, et finalement les investigations servent à informer le public sur certaines pratiques qui ont cours soit en matière de transport routier soit en matière d'accidents de travail. Il en découle donc que les investigations qui sont faites par le Bureau du coroner, par les coroners investigateurs ont... enfin, que les coroners investigateurs ont un rôle d'intérêt public.

Quand on prend en compte tous les éléments du projet de loi n° 19 et tout ce qui est sous-entendu par le projet de loi n° 19, que peut-on conclure? On peut conclure, premièrement, d'abord que le gouvernement va faire payer dorénavant par une clientèle qui est ciblée, c'est-à-dire les détenteurs de permis de conduire, les détenteurs de permis d'immatriculation, des frais qui, aujourd'hui, avant que le projet de loi ne soit adopté, sont à la charge de tous les contribuables par le biais de leurs impôts. Alors, ça ressemble tranquillement et c'est de la nature d'une taxe déguisée à l'endroit de ces clientèles-là. Le ministre dira: Il n'y a pas beaucoup de montants en jeu, on n'augmentera pas les cotisations pour ça, on n'augmentera pas les frais de permis de conduire, les frais de certificat d'immatriculation pour ce motif-là. J'en conviens pour aujourd'hui, sauf que c'est une brèche qui est faite. D'autre part, si on devait continuer dans ce domaine-là, il pourrait y avoir un danger de hausse des frais. À chaque fois qu'on ajoute des frais dans cette matière-là, on risque de provoquer à la hausse les frais pour les permis de conduire, pour les permis d'immatriculation, également pour les contributions des employeurs.

Deuxièmement, on détourne des sommes qui étaient prévues à l'origine pour fins d'indemnisation de victimes d'accidents de la route ou pour fins d'indemnisation de victimes d'accidents du travail, on détourne ces sommes-là pour faire payer des frais d'autopsie, des frais de transport de cadavres, des frais de prises de toxicologie, des frais d'examens de laboratoire. Alors donc, on détourne des sommes qui étaient à l'origine prévues pour des fins d'indemnisation, c'est ça qu'on fait.

Et, finalement, et ce qui est très important, M. le Président, on met également en péril le statut d'indépendance des coroners. Posons-nous la question deux secondes, M. le Président. Les coroners font des investigations qui, à l'occasion mais assez fréquemment débouchent sur des recommandations à faire au gouvernement sur les mesures de prévention qui sont faites, par exemple, en transport routier; les investigations débouchent fréquemment sur des recommandations qui sont faites à tel ou tel employeur relativement aux règles de sécurité qui ont cours dans son entreprise. Or, M. le Président, dorénavant, les personnes à qui on fait des recommandations, qu'à l'occasion on peut rabrouer, qu'à l'occasion on peut critiquer, seront dorénavant les personnes qui vont payer pour les frais d'investigation. Alors, non seulement ça affecte le statut d'indépendance des coroners, mais, en plus, ça affecte l'apparence de statut d'indépendance des coroners. Ça n'a pas de sens, ça ne fait pas de sens.

Et c'est trivial comme effet, M. le Président, parce que, quand on permet que le public puisse percevoir que le statut d'indépendance n'est pas respecté, que le statut d'indépendance est ébréché, la crédibilité, bien sûr, du Bureau du coroner va s'en ressentir, la crédibilité du gouvernement va s'en ressentir, et c'est ça que le ministre est en train de faire. Alors, c'est une mesure budgétaire, oui, qui a des effets sur le statut d'indépendance des coroners, et je pense qu'il faut le déplorer. L'opposition officielle le déplore tellement, M. le Président, qu'elle a l'intention de voter contre l'adoption de principe du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le projet de loi n° 19? N'ayant pas d'autre intervenant, est-ce qu'il y a un droit de réplique? M. le ministre de la Sécurité publique, votre droit de réplique.

(17 h 40)

M. Ménard: Merci. Deux minutes, seulement deux minutes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous écoute.


M. Serge Ménard (réplique)

M. Ménard: Alors, M. le Président, pour montrer qu'on coupait tellement dans les crédits accordés au coroner, le représentant de l'opposition part d'un budget de 6 000 000 $ pour en arriver à un budget de 4 000 000 $. Évidemment, il ignore ou il feint d'ignorer, comme l'opposition le feint souvent, qu'au moment où le budget était de 6 000 000 $, c'est parce que le Bureau du coroner avait à supporter une enquête publique du coroner extrêmement coûteuse, celle du coroner Gilbert, ad hoc, sur les événements d'Oka. Alors, si on enlève cette ponction énorme qui était faite sur le budget du coroner à l'époque, on en arrive au fait que le Bureau du coroner a fourni, comme tous les services gouvernementaux, sa part de baisse des dépenses pour qu'on en arrive finalement au déficit zéro, ce qui est une mesure qui était le premier pas pour en arriver à une baisse de taxes.

Et l'opposition peut vraiment passer, d'un orateur à l'autre, à des positions totalement contradictoires parce que, immédiatement avant, j'entendais le député de Mont-Royal rappelant encore que nous sommes la province, le territoire le plus taxé en Amérique du Nord, etc., oubliant du même fait, par contre, les nombreux avantages que la grande majorité des Québécois reçoivent du fait que nous avons certaines dépenses publiques plus efficaces qu'ailleurs. Alors, ces critiques qu'il a faites sur le budget, où il ignore totalement ou il feint d'ignorer les raisons pour lesquelles il y a eu une baisse de 2 000 000 $, montrent la rigueur du reste de son analyse.

Alors, là où c'est le comble aussi, c'est quand il dit que le fait que les citoyens, j'imagine, qui conduisent des automobiles, vont payer une fraction infinitésimale, peut-être, plus grande de leur prime d'assurance automobile pour payer l'indépendance des coroners mettrait en danger l'indépendance des coroners, puisque les coroners pourraient être appelés à faire des constatations dont on pourrait déduire – parce que les coroners eux-mêmes ne peuvent pas le déduire – leur responsabilité ou leur tort. Bien, là, franchement, c'est de la même farine!

Ce projet de loi est simple. On doit comprendre que les coroners n'enquêtent pas sur les décès pour établir la responsabilité de quiconque, ça leur a été enlevé. Quelle est donc l'utilité d'un coroner? L'utilité d'un coroner, c'est d'examiner des morts violentes ou des morts suspectes pour faire des recommandations qui vont nous permettre d'éviter d'autres morts dans des circonstances semblables. Donc, en matière d'automobiles, les coroners étudient des accidents d'automobile pour qu'à l'avenir, si on peut les éviter, ces accidents-là, on prenne les mesures pour les éviter. Et, si on évite des accidents d'automobile, cela va nécessairement coûter moins cher à la caisse qui indemnise les victimes d'accidents d'automobile.

N'est-ce pas raisonnable que ce soit donc à même cette caisse que nous puisions – d'une façon infinitésimale, n'est-ce pas, 300 000 $ sur les dizaines de millions de dollars que contient cette caisse – un petit peu d'argent pour financer cette activité qui rapporte tellement à l'ensemble des contribuables? D'autant plus que je signalais hier que les objectifs fixés par la SAAQ, qui étaient de descendre à 750 décès d'ici l'an 2000 – je crois, 2002, même; en tout cas... – ont été atteints l'an dernier grâce, certainement, entre autres, aux recommandations qui sont faites par les coroners qui, à la suite de certains accidents, font des recommandations pour améliorer la sécurité sur les routes.

C'est exactement le même principe aussi pour les accidents du travail. Quand des coroners examinent les circonstances des décès survenus sur les lieux de travail, ils font des constatations qui permettent ensuite d'améliorer la sécurité au travail. Donc, ça coûte moins cher à la caisse qui indemnise les gens pour les accidents du travail. Cette fonction utile, n'est-il pas raisonnable de demander qu'une partie infinitésimale, une toute petite partie, aille à financer ce qui... Ça permettra aussi de baisser les taxes dont tout le monde se plaint, et l'opposition en premier, qu'elles sont trop élevées. Justement, dans ces cas-ci, c'est un endroit où on paie ça par l'impôt sur le revenu ou la taxe de vente, plutôt que de l'imputer à la bonne caisse.

Alors, c'est une petite mesure, pas très grande. Ça représente peut-être 400 000 $, je l'ai dit tout à l'heure, mais je ne vois vraiment pas... à moins de bonnes raisons pour voter contre une aussi bonne idée que de faire payer, à ceux qui causent le risque, l'enquête sur les risques encourus afin que ces risques soient éliminés. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci met fin à l'étude de l'adoption du principe du projet de loi n° 19. Alors, le principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Boulerice: ...dire au député de Saint-Laurent qu'il n'était pas à son fauteuil, M. le Président, pour procéder à l'adoption de ce projet de loi. Mais néanmoins je vais faire motion que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée où ils pourront continuer à se parler.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je fais motion que nous ajournions nos travaux à demain, jeudi 13 mai 1999, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain, le jeudi 13 mai, à 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 46)