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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 7 juin 2000 - Vol. 36 N° 118

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures cinq minutes )

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons nous recueillir un moment.

Bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons immédiatement les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


Rapport d'activité du Fonds d'indemnisation du courtage immobilier et rapport annuel de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec

M. Landry: M. le Président, je dépose les rapports 1999 suivants: Rapport d'activité du Fonds d'indemnisation du courtage immobilier et rapport annuel de l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec.

Le Président: Alors, ces deux documents sont déposés.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des finances publiques et député de Richelieu.


Étude détaillée du projet de loi n° 125

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 6 juin 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 125, Loi sur l'exercice des activités de bourse au Québec par Nasdaq. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.


Consultations particulières sur le projet de loi n° 135

M. Lachance: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 6 juin 2000 afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les transports.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Merci. Je demande le consentement, M. le Président, pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement, M. le député.


Abaisser immédiatement les taxes provinciales sur l'essence

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 819 pétitionnaires représentant la population de la région de la Haute-Mauricie.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le prix de l'essence atteint des sommets inégalés au Québec;

«Attendu que cette hausse de prix de l'essence entraînera inévitablement une augmentation de l'inflation;

«Attendu que les taxes sur l'essence représentent près de la moitié du prix de l'essence;

«Attendu que le gouvernement du Québec refuse de diminuer ses taxes sur l'essence;

«Attendu que la hausse des prix de l'essence risque d'avoir un effet très négatif sur l'économie du Québec;

«Attendu que le gouvernement du Québec dispose de la marge de manoeuvre nécessaire pour diminuer les taxes sur l'essence;

«Attendu que les Québécois et les Québécoises sont les plus taxés sur l'essence au Canada et en Amérique du Nord;

«Attendu que le Parti libéral du Québec, qui forme l'opposition officielle, réclame une baisse de taxes sur l'essence;

«Attendu que la population de la région de la Haute-Mauricie en a assez d'être utilisée pour gonfler les surplus de l'État;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale qu'elle exige du gouvernement du Québec qu'il cesse d'empocher des bénéfices sur le dos des contribuables du Québec et qu'il baisse immédiatement les taxes provinciales sur l'essence.»

Le Président: Bien. Cette pétition est déposée. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, maintenant.

Mme Loiselle: M. le Président, je demande, s'il vous plaît, le consentement pour une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement, Mme la députée.


Empêcher la commission scolaire English-Montréal de déménager l'école secondaire alternative Vézina dans des locaux de l'école élémentaire St. Gabriel's

Mme Loiselle: Merci. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 530 pétitionnaires de la communauté de Pointe-Saint-Charles à Montréal et parents de l'école élémentaire St. Gabriel's.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Whereas the English-Montréal School Board has not considered the negative impact the integration of high school students with special needs will have on our elementary school children;

«Whereas the English-Montréal School Board has not taken into consideration the safety risk involved in limiting student access to an entire staircase;

«Whereas the English-Montréal School Board has refused to examine other potential sites for the relocation of the above mentioned school, sites which would be more appropriate and cost effective, such as high school setting;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«We, the undersigned, ask the National Assembly to intervene on our behalf to stop the English-Montréal School Board from following through with the plan to integrate Vézina Alternative High School into St. Gabriel's Elementary School.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition, M. le Président.

(10 h 10)

Le Président: Bien. Alors, cette pétition est également déposée.


Questions et réponses orales

Nous allons maintenant aborder immédiatement la période de questions et de réponses orales. Et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.


Maintien de l'équilibre budgétaire des établissements du réseau de la santé


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au premier ministre, et ça touche l'absurdité de sa ministre de la Santé et les politiques absurdes du ministère de la Santé.

Le gouvernement est en train d'enfoncer dans la gorge des administrateurs de notre régime de santé la loi n° 107, la loi antiservices, qui force l'équilibre budgétaire. Or, hier, dans ma région, dans la région de l'Estrie, les 15 établissements de soins de santé – la Régie régionale s'est jointe à eux – sont sortis pour dénoncer le fait que la politique du gouvernement impose deux poids, deux mesures. Ces établissements-là ont fait les efforts requis depuis plusieurs années maintenant, ils étaient bien en avant d'autres régions pour faire l'équilibre budgétaire, et la politique actuelle du gouvernement, telle qu'elle se pratique, fait en sorte qu'ils sont pénalisés parce que d'autres établissements ont choisi à la place de faire des déficits, M. le Président.

Alors, que répond le premier ministre aux gens du réseau de la santé qui sont placés aujourd'hui devant une telle injustice?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je comprends la réaction de ces organismes, parce que je crois que nous devons, dans les faits, corriger la situation. Il est évident qu'un certain nombre d'établissements ont dû faire des déficits parce qu'ils ont dû offrir un plus grand nombre de services compte tenu d'une demande plus grande. Dans certains autres cas, et les cas présentés hier ont été particulièrement éloquents à cet égard, les établissements présentant leur situation ont été particulièrement éloquents à cet égard, ils ont procédé à des réorganisations de services, à des fusions d'établissements, à introduire de nouvelles façons d'offrir les services, de telle sorte qu'ils ont pu respecter un budget équilibré.

Je crois que leur point de vue doit être entendu, et non seulement je crois qu'il doit être entendu, je me suis engagée à ce que nous révisions pendant l'année en cours la façon dont nous allouons les budgets, les critères sur lesquels nous nous appuyons, de telle sorte que nous puissions reconnaître mieux, davantage et autrement la performance des établissements et que nous puissions, s'il y a lieu, intervenir dans les cas où, au contraire, il y a un certain laxisme.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je ne sais pas comment la ministre va réconcilier son admission, celle qu'elle vient de faire, à l'effet que les déficits étaient causés par une demande de services qui excédait ce que les budgets permettaient, et qu'elle impose en même temps sa loi qui oblige aveuglément les établissements à équilibrer leur budget. Je ne sais pas de quelle façon elle va joindre les deux bouts. Sauf que je peux lui donner un exemple précis, justement, qui touche ma région. Le CLSC de Sherbrooke s'est fait donner trois jours pour trouver 800 000 $ dans son budget; le CLSC a jusqu'à vendredi. Sauf que le CLSC s'est fait dire en même temps par le ministère qu'il devait absolument équilibrer son budget mais ne pas couper dans les services.

Alors, elle répond quoi au CLSC de Sherbrooke qui se fait dire par son ministère qu'il a trois jours pour trouver 800 000 $, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Le chef de l'opposition, qui n'a pas beaucoup de propositions à faire... Il y a, semble-t-il, de ses amis qui proposent qu'on mange du pain intégral, que ça réglerait nos problèmes de santé, là, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Sur un mode plus sérieux, parce que...

Des voix: ...

Le Président: Bien. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Sur un mode plus sérieux, j'en conviens bien, le chef de l'opposition a oublié un épisode majeur. Nous avons réinvesti, depuis trois ans, 4,4 milliards dans l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux, et, pour cette année, ce que nous avons fait, nous avons couvert les déficits accumulés pendant les années passées, là où il y avait eu des pressions, oui, pour augmenter les services parce que la demande était là.

Mais, une fois cela fait, nous ne nous sommes pas arrêtés en chemin, nous avons rehaussé les bases budgétaires des établissements, de telle sorte qu'ils puissent, ces mêmes établissements, répondre à la demande. Et, dans le cas de la loi qui est devant nous pour étude et des obligations qui sont faites à n'importe quelle institution au Québec, il me semble que c'est normal, ça va de soi, de respecter son budget. Il y a des directives qui ont été envoyées identifiant des cas spécifiques et exceptionnels où nous pourrions voir comment rehausser certains éléments de leur budget pour tenir compte de la progression de la demande, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: La ministre a beau dire, M. le Président, que le gouvernement a réinvesti de l'argent, elle oublie toujours de mentionner que c'est son gouvernement qui a coupé 2,1 milliards dans le système de soins de santé, que c'est son gouvernement qui a mis en place un autre programme absurde de départs volontaires, dénoncé par le Vérificateur général du Québec, dénoncé par le Protecteur du citoyen, qui a créé le chaos dans le système, que c'est elle, comme ministre de l'Éducation, qui coupait les inscriptions en sciences infirmières, M. le Président.

Mais, comme le théâtre de l'absurde n'est pas terminé et que la ministre prétend que c'est normal, ces choses-là, est-ce qu'elle trouve normal que son sous-ministre, un certain Pierre Roy, écrive à tous les établissements de santé et leur propose une formulation de lettre qu'il a rédigée lui-même à l'avance? Le sous-ministre s'écrit à lui-même!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charest: Il leur demande juste de signer dans le bas de la lettre. Et, dans la lettre en question, il leur fait dire ceci, que la priorité de leur établissement, ce n'est pas la santé, c'est l'équilibre budgétaire. Mais il va plus loin que ça, M. le Président, il ajoute ceci: Vous allez signer une lettre dans laquelle vous allez vous engager à dire exactement ce qui suit: «À notre avis, aucun événement n'est survenu ou n'est sur le point de survenir et aucun fait n'a été découvert jusqu'à ce jour qui pourrait avoir un effet important sur les prévisions financières de l'établissement pour l'exercice en cours.»

En d'autres mots, M. le Président, il faudrait que tous les administrateurs d'établissements de santé au Québec signent une lettre dans laquelle ils diront: Il n'y aura pas d'accidents cette année, il n'y aura pas de grippes cet hiver, il n'y aura pas d'épidémies, puis, si jamais il y en a, ne vous en faites pas, on va équilibrer le budget d'abord.

Des voix: Bravo!

Le Président: Bien. M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense qu'il est utile de rappeler certains faits et certains principes. D'abord, le gouvernement a réinjecté 4,4 milliards depuis deux ans dans le domaine de la santé. C'est un montant énorme qui fait que maintenant près de 40 % du budget du Québec est consacré à la santé, ce qui nous amène à la limite même des possibilités de notre gouvernement, comme d'ailleurs de tous les gouvernements du Canada qui font face aux mêmes problèmes. Mais ce 4,4 milliards a rétabli les bases essentiellement au niveau des dépenses de l'an dernier.

Alors, je pense que le chef de l'opposition va être le premier à convenir que dans aucun pays du monde il ne peut y avoir de budget ouvert pour la santé. Je comprends que c'est un besoin fondamental, la santé, mais ce n'est pas vrai que le budget consacré à la santé peut être ouvert. Il n'y a pas un gouvernement au monde qui fait ça, M. le Président, parce que faire cela, c'est l'anarchie, c'est la fin des gouvernements, c'est la fin de la capacité de gérer. Et ce serait même compromettre les programmes de santé et les programmes sociaux que de faire ça. Il faut que, quelque part, il y ait un budget, évidemment fixé en fonction de plusieurs considérations, les besoins, mais essentiellement...

Des voix: ...

M. Bouchard: ...M. le Président, essentiellement...

(10 h 20)

Le Président: M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: Un instant, M. le chef de l'opposition. Je comprends qu'il peut y avoir des réactions, c'est la règle du jeu, mais vous avez le temps en masse de poser des questions complémentaires. Nous allons permettre au premier ministre de terminer.

M. Bouchard: C'est une obligation fondamentale pour une société de s'assurer qu'elle n'est pas en train de basculer dans la faillite, M. le Président, et que la façon de gérer, de façon professionnelle, rationnelle et avec compassion la santé, c'est justement de nous assurer que les programmes vont être respectés. Et c'est, je crois, M. le Président, si vous me permettez, une responsabilité fondamentale d'un gestionnaire d'hôpital que de justement, par son expertise à lui, être capable de concilier les impératifs de la pression des besoins sur les budgets et le respect des budgets.

Le chef de l'opposition a eu une remarque au début qui m'a paru sensée, qui m'a paru fondée, quand il a posé la question de la perversité de combler toujours des déficits, quels qu'ils soient, et que, là, il y a le danger de pénaliser les bons administrateurs. Je crois qu'il a raison, M. le Président, c'est pour cela qu'il ne faut plus le faire. Une fois qu'on a rétabli les bases, il faut maintenant gérer à partir d'indicateurs de performance, de critères objectifs qui seront définis, qui permettront de comparer les gestions et qui nous permettront de savoir quand est-ce qu'il faut ajouter parce qu'il y a un besoin réel et quand est-ce qu'il ne faut pas le faire et même, dans certains cas, diminuer les budgets – on peut le penser, M. le Président. C'est gérer correctement l'argent des contribuables dans l'intérêt de ceux qui ont besoin de soins.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Ce que le premier ministre oublie de mentionner, M. le Président, c'est qu'il n'y en avait pas, de déficit dans le système de soins de santé, lorsque le gouvernement du Parti québécois a été élu, en 1994. Ces déficits-là, peu importent les circonstances...

Des voix: ...

Le Président: Cette fois-ci, la mise en garde s'adresse à l'autre côté de la Chambre. C'est le chef de l'opposition officielle qui a la parole.

M. Charest: Oui, je suis content de voir qu'on admet que le gouvernement actuel a transféré aux établissements le déficit, comme il le fait pour les universités, comme il continue à le faire d'ailleurs pour les universités puis les hôpitaux. Et j'ai pris la peine, M. le Président, de faire parvenir au premier ministre la directive que son sous-ministre Pierre Roy a fait parvenir à tous les établissements. Il l'a devant les yeux.

J'aimerais qu'il lise le paragraphe en question, où on dit ceci: «Aucun événement n'est survenu ou n'est sur le point de survenir qui pourrait avoir un effet sur les prévisions financières de l'exercice en cours.» M. le Président, cette lettre-là du sous-ministre, qu'il s'écrit à lui-même, c'est une lettre qu'il veut imposer à tous les administrateurs, conseils d'administration des établissements de santé au Québec, qu'ils seraient tous censés signer cette lettre-là qu'il adresse à M. Pierre Roy.

J'aimerais savoir si le premier ministre approuve cette directive et cette lettre et si son gouvernement est rendu à un point tel où il va enfoncer dans la gorge des lettres, des directives qui sont envoyées par sa ministre de la Santé aux établissements de santé, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, deux choses, rapidement. D'abord, M. Pierre Roy est un des plus éminents fonctionnaires que nous ayons, un homme de grande capacité, qui assume des responsabilités difficiles et qui s'assure que l'argent du public soit bien dépensé, et nous l'en félicitons, M. le Président.

Deuxièmement, M. le Président, vous me le permettrez, vous me permettrez de relever l'énormité que vient de prononcer le chef de l'opposition en disant qu'il n'y avait pas de déficit du temps des libéraux, alors que, quand le Parti québécois a pris le pouvoir, il y avait un déficit de 6 milliards de dollars, que l'avenir des jeunes était compromis, qu'on nous avait décoté cinq fois de suite à New York et qu'on était rendu au point où on était sur le bord du précipice, de la faillite. Et c'est le Parti québécois qui aura l'honneur d'avoir relevé le Québec!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le premier ministre aura beau crier, je peux lui dire une chose, dans le système de soins de santé, à la fois les malades, les administrateurs puis les donneurs de soins ont beaucoup de difficultés à trouver le moindre honneur dans les politiques de son gouvernement.

Des voix: Bravo!

M. Charest: Le moindre honneur. D'ailleurs, c'est tellement vrai, M. le Président, que, lorsque les dirigeants des établissements ont reçu la directive qu'il a devant les yeux, envoyée par son sous-ministre, ils ont dit ceci: «Nous ne sommes pas des simples subalternes du ministère, nous avons été élus par la population pour assurer la qualité des services.»

Une voix: Élus par la population?

M. Charest: M. le Président...

Le Président: Bien. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Charest: M. le Président, si le premier ministre peut se calmer une seconde, là, je peux lui relire... peut-être un petit peu plus qu'une seconde. À l'institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke, le conseil d'administration a tout simplement refusé de signer la déclaration parce que, selon ses membres, des élus n'ont pas d'ordre à donner à d'autres élus, et là je cite: «Nous ne sommes pas de simples subalternes du ministère, nous avons été élus par la population pour assurer la qualité des services», M. le Président. C'est une citation de Mme Suzanne Philips-Nooten, présidente du conseil d'administration.

Alors, si le premier ministre a un minimum d'honneur – parce qu'il aime ça, faire référence à ça – est-ce qu'il va déclarer aujourd'hui à l'Assemblée nationale qu'il va retirer cette directive qui est absurde puis insultante pour la population du Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je ne sais pas si le chef de l'opposition se rend compte de ce qu'il vient de faire: il vient d'opposer la légitimité démocratique des gestionnaires d'hôpitaux à celle des élus de l'Assemblée nationale et des membres du gouvernement. M. le Président...

Le Président: Bien. M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est le fond du problème. C'est que le chef de l'opposition revendique pour les gestionnaires d'hôpitaux le droit de gérer le budget de l'État, de faire les dépenses de façon illimitée, alors que, nous, ici, à l'Assemblée nationale, nous, au gouvernement, en vertu d'une loi, nous avons l'obligation de ne pas faire de déficit. Quand un hôpital fait un déficit, c'est nous, le gouvernement du Québec, qui devons le payer, en plus de respecter le déficit zéro.

Alors, M. le Président, je veux croire que le chef de l'opposition devrait comprendre que nous sommes en face d'un véritable problème maintenant et que, si c'est ça qui explique qu'on défonce les budgets, c'est très grave, parce qu'il y a des gens qui sont chargés de lever des taxes. Ce ne sont pas les gens qui siègent dans les hôpitaux, c'est nous qui levons les taxes, nous, ici, qui levons les taxes, qui les gérons, c'est nous qui en répondons vis-à-vis de la population. C'est nous qui avons la responsabilité ultime de rendre les soins, M. le Président, la responsabilité ultime de rendre compte de ce que nous faisons.

Le Président: S'il vous plaît! Alors, il reste encore presque 27 minutes. Si les députés de l'opposition veulent choisir de poser toutes les questions sur la santé, je n'ai pas de problème, mais je pense qu'on pourrait faire la période de questions dans un ordre respectable. M. le premier ministre, en terminant.

M. Bouchard: M. le Président, il me semble que le chef de l'opposition et son parti, qui, semble-t-il, ont encore quelque espérance de former un gouvernement un jour, devraient se rendre compte que ça n'a pas de bon sens et que c'est très grave, ce qu'ils disent. Que les gens qui lèvent les impôts doivent être ceux qui en répondent et ils doivent être les comptables définitifs de la gestion des fonds publics et qu'il n'est pas vrai que des gens qui ne lèvent pas des impôts peuvent dépenser de l'argent de façon inconsidérée, au-delà des déficits. Ce n'est pas vrai, ça!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le premier ministre devrait aller relire ses propres lois. La loi sur la santé et des services sociaux exige, et l'Assemblée nationale le dit dans la loi, que les services soient rendus. On ne donne pas de discrétion aux administrateurs, aux donneurs de soins, M. le Président. Puis, en plus de ça...

(10 h 30)

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Charest: En plus de ça, M. le Président, l'Assemblée nationale du Québec a mis en place un mécanisme des lois qui permet l'élection de membres de conseils d'administration d'hôpitaux, justement. Alors, dans ce cas-là, ces élus-là ont le droit de faire leur travail.

Alors, M. le Président, maintenant, le chat sort du sac. Non seulement on sait que ce premier ministre là s'inspire de son grand penseur, Maurice Duplessis, avec le «toé, tais-toé», mais, maintenant, c'est «l'État, c'est moi». Sa loi n° 107 force les établissements à équilibrer leur budget. Or, ces établissements-là ne lèvent pas d'impôts, ils ne décident pas, eux, qui se présente le matin à leurs portes.

Est-ce que le premier ministre va continuer avec cette directive absurde, M. le Président, qui demande que ce sous-ministre s'écrive à lui-même et fasse signer des gens, qu'il leur annonce à l'avance qu'ils vont équilibrer leur budget parce que, pour l'avenir, il n'y aura pas d'épidémies, d'accidents, puis qu'au besoin on va équilibrer le budget parce qu'on va ignorer les malades?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense que nous aurons tous constaté, et la population aussi, que le chef de l'opposition signe et persiste. Il cite la loi. Il oublie de dire que l'obligation de rendre les soins est «en fonction des besoins», et il y a une disposition qui ajoute «et des ressources disponibles». Ça veut dire que, quand il y aura des élections au Québec, les gens devront constater qu'il y a un chef de parti qui sollicite de remplir la fonction de chef de gouvernement et qui se prépare à dépenser de façon illimitée, sans tenir compte des ressources, comme le Parti libéral l'a toujours fait, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Vaudreuil.


Renouvellement des équipements médicaux


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Notre parc d'équipements médicaux au Québec devient de plus en plus vétuste parce que le gouvernement n'a pas investi au cours des dernières années, et cette vétusté aura des impacts sur les soins aux patients. À titre d'exemple, deux médecins nous apprenaient avant-hier qu'à l'Institut de cardiologie de Montréal 30 appareils d'anesthésie utilisés en salle d'opération sont vieillots et qu'on ne trouve même plus les pièces pour les réparer. C'est la même chose pour 14 défibrillateurs. Et ces médecins ont ajouté que la situation était comparable dans l'ensemble des hôpitaux.

Je comprends, M. le Président, que, dans le cas des chirurgies cardiaques, on a attendu que les médecins viennent déplorer qu'il y avait des décès sur les listes d'attente avant que la ministre agisse. Est-ce que nous sommes rendus, dans le cas des équipements, dans la même situation et nous attendons que des médecins sortent en public pour dire que des équipements médicaux sont désuets, tombent en morceaux avant d'accorder les fonds pour les remplacer et soigner les patients?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je suis toujours étonnée d'entendre le député de Vaudreuil comme s'il n'avait aucune mémoire de ce que nous sommes en train de faire depuis que nous avons recommencé à investir des sommes considérables dans le réseau de la santé et des services sociaux. Je lui rappelle, puisque nous avons eu l'occasion d'en discuter longuement ici, en commission parlementaire et autrement, que, l'an dernier, nous avons investi des sommes considérables, plus de 100 millions de dollars, à l'occasion du passage de l'an 2000, où nous avons modifié et surtout introduit de nouveaux équipements dans nos établissements. Et, cette année, nous investirons dans les équipements, les petits instruments et tout ce dont on fait état dans les hôpitaux qui ont besoin d'être rénovés, nous investissons et nous investirons 200 millions de dollars, M. le Président.

Le Président: M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: M. le Président, est-ce que la ministre pourrait nous expliquer comment il se fait qu'elle a annoncé 200 millions il y a trois mois – trois mois déjà – et que là des médecins viennent nous dire que des appareils tombent en morceaux dans les hôpitaux pour soigner les patients? Ce dont nous avons besoin, ce n'est pas d'un autre comité, d'un autre groupe de travail, d'un autre groupe de réflexion, c'est le transfert des fonds aux hôpitaux pour qu'ils puissent se procurer les équipements.

Simplement, les centres hospitaliers universitaires nous disaient l'an dernier qu'il y avait un besoin urgent de 200 millions pour le remplacement des équipements technologiques; dans la région de Québec, 50 millions. Quand la ministre va-t-elle transférer les fonds aux hôpitaux, au lieu d'attendre comme elle a fait dans plusieurs cas? Et est-ce qu'elle peut nous assurer, contrairement à la rumeur, que les fonds seront transférés avant le mois de décembre 2000 dans les hôpitaux?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Un certain nombre de décisions sont déjà prises, M. le Président, d'autres se prennent quotidiennement, au fur et à mesure que les demandes arrivent au ministère, en fonction des priorités établies par les hôpitaux, en collaboration avec les régies régionales de la santé et des services sociaux, et il n'y a, M. le Président, aucun retard à cet égard.

Le Président: M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Quand les fonds seront-ils transférés, M. le Président? Et est-ce que la ministre peut nous déposer en cette Chambre la répartition et les dates de transfert des fonds aux hôpitaux?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, j'ai déjà dit et je vais redire que 200 millions s'investissent, qu'au fur et à mesure que les demandes arrivent elles sont analysées bien sûr et sont priorisées. À partir de ce moment-là, les autorisations sont données. Peut-être que le député de Vaudreuil pourrait se souvenir que, dans certains cas, des hôpitaux qui avaient tous les fonds disponibles ont pris presque un an à pouvoir obtenir l'équipement nécessaire. Il n'y avait pas besoin de débourser les fonds, M. le Président. Voyons donc!

Le Président: En question principale, M. le député de Shefford.


Réaménagement des bureaux de la Société générale de financement


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Hier, à la période de questions, le ministre des Finances, encore une fois avec son style théâtral habituel, éludait une question, en fait, gênante pour le premier ministre. En passant, M. le Président, j'invite le ministre des Finances à bien écouter les questions qui lui sont posées, car, lorsque j'ai posé ma question sur les aménagements à la SGF – et le ministre en a fait grand état hier – j'ai dit à ce moment-là que, premièrement, l'escalier à lui seul avait coûté 50 000 $, probablement pour y faire circuler les grands personnages et ceux qui pensent l'être, et, deuxièmement...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: S'assurer que la tête passe.

Des voix: Bravo!

M. Brodeur: Et, deuxièmement, M. le Président, j'avais déposé à ce moment-là la facture d'importation d'un très beau carrelage de marbre d'Italie, importé par avion, et dont la dépense était confirmée le même jour par la SGF, pour 20 592 $. Donc, je l'invite donc à descendre de l'escalier et prendre ses informations à la base.

Donc, si j'ai une facture de 20 542 $, si j'ai une confirmation de la SGF, en fait, que ce marbre-là a été installé, s'il dit que le marbre n'est pas là, M. le Président, donc ma question est bien simple: Il est où, le marbre?

Des voix: Ha, ha, ha!

(10 h 40)

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Des voix: ...

Le Président: Alors, je n'ai pas lancé le concours à savoir qui parlerait le plus fort et qui lancerait la meilleure blague. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, le député s'est disqualifié pour monter cet escalier lui-même, dans ses premières remarques. Je l'avais invité hier à venir visiter la SGF. Il prendra l'ascenseur, sur trois étages, pour féliciter les administrateurs de la SGF d'avoir pu faire un escalier de 50 000 $ dans un immeuble de catégorie 1, sur trois étages. Et je redis que les gens de la SGF m'ont assuré – ils peuvent m'avoir trompé; ils ne m'ont jamais trompé; si c'est ça, c'est la première fois – qu'il n'y a pas une graine de marbre dans cet escalier.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Shefford, s'il vous plaît. À l'ordre!


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: M. le Président, tout simplement, faut-il comprendre du vice-premier ministre que, quand on a le nez en l'air, autant à la SGF...

Le Président: Là, le président sait flairer une question qui n'est pas réglementaire. M. le député de Shefford, une question complémentaire, sans débat, sans commentaire.

M. Brodeur: Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, tout simplement, lorsqu'on regarde peut-être un peu haut, autant à la SGF que dans une montgolfière, qu'on en perd la notion de la gestion quotidienne, M. le Président? Où est le marbre?

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Heureusement qu'il ne veut pas monter cet escalier, parce que, s'il regarde en l'air, il va buter à chaque marche, comme il le fait sur chaque question qu'il pose depuis quelque temps.

Je suis content aussi qu'il revienne sur l'affaire de la montgolfière, parce que, quand il a posé ses questions, il l'a fait aussi d'une façon perverse, il a oublié de dire que le pilote de la montgolfière est champion canadien et champion québécois et que cette montgolfière va défendre fièrement les couleurs du Québec dans plusieurs événements sportifs. Vous ne pourriez pas me laisser parler?

Des voix: ...

Le Président: Bien. Est-ce qu'on peut revenir à... M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Je redis que cet appareil ira, par exemple, dans les festivals américains, à Albuquerque, et que le drapeau du Québec – je sais que l'opposition n'en a rien à cirer, mais, nous, ça nous importe – sera vu par des millions de Nord-Américains à cause de cet instrument. Alors, pour le petit montant qui a été investi, juste en publicité, ça va rapporter au centuple.

Quant à la SGF et son escalier, là, les gens qui sont en train de travailler sur l'investissement Mosel Vitelic, le plus gros investissement industriel de l'histoire du Québec, ont d'autre chose à penser que des questions fausses venant de l'opposition officielle.

Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.


Niveau de la taxe sur l'essence


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Il n'y a pas seulement le marbre qui est dispendieux, l'essence aussi, et ça, il y a plus de nos concitoyens et de nos concitoyennes qui en ont besoin. Tout le monde sait combien la hausse des prix de l'essence a un impact sur les consommateurs, combien la hausse des prix de l'essence est susceptible d'avoir un impact et de mettre une pression inflationniste sur l'économie et de devenir, à terme, un facteur de ralentissement.

Il va de soi que ce n'est pas le gouvernement qui fixe les prix de l'essence, mais, dans une organisation économique comme celle qu'on a au Québec, le gouvernement a un rôle, le gouvernement a un impact sur le prix de l'essence par un certain nombre de ses politiques. Alors, quand on fait le bilan de ce que le gouvernement a comme impact, cette semaine, par exemple: taxes, c'est connu depuis longtemps, nettement supérieures à la moyenne et Régie de l'énergie qui met une pression à la hausse sur les prix de l'essence, bien là, on a un double effet. C'est comme un étau qui resserre, puis là c'est les consommateurs du Québec qui ont les doigts dedans pour tout de suite.

Alors, ma question au ministre de l'Économie et des Finances est bien simple: Est-ce que le ministre est inquiet du fait que l'action globale du gouvernement du Québec mette une pression inflationniste, une pression à la hausse plutôt qu'à la baisse sur les prix de l'essence?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ce n'est pas l'action du gouvernement qui m'inquiète, c'est la hausse du prix de l'essence et la hausse du prix du brut à la tête du puits. C'est ça qui est la cause de toutes les difficultés. Ça peut avoir des effets inflationnistes, d'une part; ça a des effets négatifs sur les finances publiques, d'autre part, parce que, je l'ai bien expliqué, quand les prix de l'essence montent, les gens en consomment moins et prennent d'autres attitudes de consommation. Heureusement, ça ne pénalise pas les professionnels, parce que la taxe leur est remboursée, parce que c'est un intrant, suivant notre taxe sur la valeur ajoutée.

Quant aux baisses que l'on pourrait considérer, et nous ne les considérons pas, pas plus à Ottawa qu'à Québec ou ailleurs, c'est parce qu'on a une expérience de ces baisses. Nous avons baissé le prix de l'essence de 0,05 $ lors d'une administration précédente. Ça avait coûté 100 millions par 0,01 $ de baisse, et, en moins de trois semaines, les compagnies avaient mis l'argent dans leurs poches. Alors, il y a un effet pervers à agir dans les circonstances présentes. Ce n'est pas drôle pour la population. Il faut que les organisations internationales amènent les pays de l'OPEP à penser qu'ils vont se nuire à eux-mêmes à terme, comme la fois où ils ont fait monter le prix du pétrole à 40 $; ça a provoqué l'inflation, puis ça a ruiné tous leurs bénéfices, puis ça a fait baisser la demande.

En attendant, une des consolations de la population québécoise, c'est notre bilan énergétique global. L'électricité est à 70 % de notre bilan énergétique global, et on paie l'électricité moins cher que partout dans notre continent. Alors, ça ne règle pas le problème à la pompe, mais il faut raisonner de façon globale quand on parle d'énergie au Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Alors, pourquoi le ministre nous parle des leviers qu'il ne contrôle pas, des organismes internationaux, du prix du brut, qui sont les leviers qu'il ne contrôle pas, alors que les leviers que son gouvernement contrôle, au niveau de la Régie de l'énergie, au niveau des taxes, il les utilise pour mettre une pression à la hausse? C'est ça, la question. Ce n'est pas de nous parler des leviers qu'il ne contrôle pas, c'est de nous expliquer comment il se fait que ce que le gouvernement du Québec contrôle pousse les prix vers le haut alors que les citoyens voudraient les voir aller vers le bas.

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ce que le député de Rivière-du-Loup me demande, c'est de jeter 500 millions, 600 millions de dollars dans le fleuve en face de Rivière-du-Loup. On l'a déjà essayé; pour baisser d'une cenne, ça coûte 100 millions de dollars. Et ça ne serait pas significatif. Alors, on a déjà baissé de 0,05 $, les compagnies l'ont mis dans leurs poches. Disons qu'on baisse de 0,10 $, les compagnies vont le mettre dans leurs poches encore une fois. Ça n'aura aucun effet sur les prix à la pompe. L'expérience empirique l'a démontré.

Et, en plus, question que le député de Rivière-du-Loup devrait se poser, lui qui est très sensible au déficit: Si on met 1 milliard dans des baisses de taxes d'essence, on va le prendre où? Le député nous demande de baisser les impôts sur les personnes physiques, ce qu'on fait, de remettre de l'argent dans la santé, ce qu'on fait, de remettre de l'argent dans l'éducation, ce qu'on fait, et d'en mettre dans l'économie. Alors, si on en met partout, il faut le prendre quelque part.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Comment le ministre peut nous parler de données empiriques à l'effet que les baisses de taxes ou des taxes plus basses n'ont pas d'impact sur le prix, alors qu'il y a une donnée empirique à travers le Canada qui est fort simple, c'est que, dans les provinces qui ont des taxes sur l'essence plus basses, on paie un prix de l'essence à la pompe qui est moins cher conséquemment? Alors, comment le ministre peut justifier sa théorie alors que l'évidence, d'une province à l'autre dans le Canada actuellement, démontre le contraire, puis que dans le fond la réalité, c'est que le Québec, dans ce domaine-là, est encore un champion des taxes? Pourquoi on ne pourrait pas au Québec, pour une fois... est-ce qu'on serait malade si on avait des taxes moins élevées que la moyenne canadienne sur une affaire? Il me semble qu'on ne s'en porterait pas si mal que ça.

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Le Québec, champion des taxes, j'espère que le député ne pense pas qu'il a fait une découverte. Je l'ai dit moi-même à plusieurs reprises, et ça me désole. Notre fiscalité est beaucoup trop lourde, sauf que, nous, au lieu de continuer à faire des déficits démesurés et sans contrôle qui augmentent nos dettes et notre fiscalité, on a fait les étapes nécessaires à la décélération: premièrement, déficit zéro; deuxièmement, baisse d'impôts et de taxes. Et on s'attaquera à toutes les taxes avec les moyens qui seront les nôtres.

(10 h 50)

La voie que le député veut que nous empruntions, nous l'avons déjà empruntée. Mais, M. le Président, je l'appelle au réalisme. S'il ne veut pas que ça pousse directement la dette vers les générations futures – ce en quoi il a raison, dans le fait qu'il s'en offusque – bien, qu'il ne nous demande pas des choses absurdes, qu'il ne nous demande pas une chose et son contraire en même temps. Je regrette d'avoir à lui dire ça, mais c'est exactement ce qui arriverait. Un milliard en baisses de taxes, il faut le prendre quelque part. Si on ne veut pas pénaliser tout le monde et remonter les impôts, il faut aller au déficit. Et ça, c'est plus jamais, au nom des générations futures, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, en question principale.


Financement des universités


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, M. le Président. Dans une simulation économique qui estime les effets des réels investissements en éducation au niveau universitaire et qui a été préparée par le réseau des universités du Québec, on apprend que les réinvestissements prévus n'atteindraient même pas le niveau des déficits structurels des établissements des universités du Québec en région. En effet, pour cinq des six composantes situées en région, on parle d'un déficit de 45 millions environ au cours de la dernière année, alors que, selon la simulation du ministère de l'Éducation, l'investissement prévu est de 30,5 millions, donc un manque à gagner encore de 14,5 millions pour l'année qui vient.

M. le Président, comment le ministre de l'Éducation peut parler de réinvestissements en éducation alors qu'il ne rétablit même pas les bases budgétaires de façon adéquate et que, selon la simulation des universités du Québec, au niveau de l'UQAM, l'Université du Québec à Montréal prévoit... un déficit, l'année passée, de 20 millions, le réinvestissement de 15,6, donc encore un déficit de 4,4 millions; l'Université du Québec à Rimouski, déficit, l'an dernier, 4,5 millions, réinvestissement prévu, 2 millions, donc encore un déficit de 2 millions; et, finalement, au niveau de l'Abitibi-Témiscamingue, un déficit, l'année passée, de 3,8 millions, le réinvestissement prévu, 1,4, donc une différence, encore, un manque à gagner de 2,4 millions? M. le Président, à quand la lumière au bout du tunnel et un réel investissement au niveau universitaire au Québec?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président, puisqu'on parle évidemment d'éducation, je ne peux pas passer sous silence les résultats extraordinaires qu'ont connus nos étudiants lors des dernières olympiades canadiennes qui ont eu lieu au cours des derniers jours. M. le Président, sur 54 médailles d'or, 32 médailles d'or ont été gagnées par les Québécois et les Québécoises.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Legault: M. le Président, on a des étudiants et des étudiantes performants. On a des universités performantes. Concernant l'Université du Québec, les constituantes de l'Université du Québec m'ont déjà soumis un projet de plan de redressement où elles nous proposent un plan pour retrouver l'équilibre budgétaire d'ici trois ans, avant l'investissement de 600 millions de dollars qui sera fait dans le réseau universitaire du Québec.

M. le Président, je pense qu'avec ce qu'on est en train de faire on est en train de suivre une démarche cohérente. On a maintenant la première politique à l'égard de l'université, qui a fait consensus. On est en train de travailler sur une politique de financement où on a demandé l'avis de tout le monde, une politique où on s'assure justement d'avoir une plus grande équité dans le partage des ressources pour s'assurer qu'on continue à avoir, au Québec, des universités performantes.

Le Président: M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, d'abord, sur les olympiades, M. le Président, il y a le consentement de l'opposition pour déposer une motion pour féliciter tous les gagnants, effectivement, tous les Québécois qui sont là et qui ont gagné, malgré les coupures des dernières années du gouvernement d'en face.

Des voix: Bravo!

M. Béchard: M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation est en train de nous dire, un peu comme le premier ministre l'a déjà dit, qu'au niveau universitaire il y a encore du gras à couper et qu'étant donné qu'il ne veut pas redresser les bases structurelles à un niveau acceptable les universités ont deux choix, c'est-à-dire couper encore dans les services au cours des prochaines années ou encore attendre qu'un autre ministre de l'Éducation, lui, réajuste les bases du financement de façon structurelle?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je pense qu'on a, encore une fois, la preuve, ce matin, que le Parti libéral du Québec a de la misère avec la performance, a de la misère avec l'efficacité. Je les inviterais, cet été, à aller suivre des petits cours de rattrapage: comptabilité 101 ou gestion 101. Ce n'est pas nécessaire d'aller à Harvard pour suivre ce genre de cours, M. le Président.

M. le Président, on a annoncé un réinvestissement de 600 millions dans nos universités. En retour, on a demandé au recteur de chaque université de s'assurer qu'on suive les plans de retour à l'équilibre budgétaire qui ont déjà été soumis, qu'on s'assure de continuer à avoir une qualité au niveau de la formation et de la recherche, qui est compétitive avec ce qui se fait de mieux dans le monde entier. Les recteurs sont d'accord avec notre démarche, le fonctionnement est en train d'être revu dans chacune des universités. C'est une démarche qui respecte l'autonomie des universités, et, oui, on va continuer à agir de façon performante au Québec.

Le Président: Bien. Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée pour aujourd'hui.


Motions sans préavis

Aux motions sans préavis, M. le député de Saguenay.


Souligner la Journée de l'air pur

M. Gagnon: Oui. M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne aujourd'hui, le 7 juin, la Journée de l'air pur.»

Le Président: Alors, y a-t-il consentement?

M. Brassard: Un intervenant de chaque côté, M. le Président.

Le Président: Alors, il y a consentement pour un débat limité, une intervention de chaque côté. M. le député de Saguenay, d'abord.


M. Gabriel-Yvan Gagnon

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Les problèmes liés à la qualité de l'air que nous respirons nous affectent tous personnellement et collectivement. Cette Journée de l'air pur est donc une excellente occasion de nous interroger sur notre responsabilité face à deux enjeux planétaires majeurs: l'appauvrissement de la couche d'ozone et les changements climatiques.

Parce que ces problèmes menacent la santé humaine et les écosystèmes du monde entier, ils ont déjà fait l'objet de deux protocoles internationaux signés ou proposés aux gouvernements: le Protocole de Montréal, qui vise les substances appauvrissant la couche d'ozone, en 1993, et le Protocole de Kyoto, portant sur la réduction des gaz à effet de serre, en 1997. Sur la base de ces ententes, le gouvernement du Québec a consulté ses partenaires et mis au point une stratégie destinée à protéger la couche d'ozone.

Parlons d'abord des substances qui affectent la couche d'ozone, dont les halons et la famille des chlorofluorocarbures. Pour éviter les dommages causés par les substances qui appauvrissent la couche d'ozone, des produits de remplacement ont été mis au point au cours des dernières années. On les appelle familièrement HFC et PFC. Comme il s'agit de puissants gaz à effet de serre, nous sommes dans l'obligation de contrôler leur utilisation et la gestion de ces substances afin d'en minimiser les émissions. C'est dans ce contexte que le ministère de l'Environnement a élaboré sa stratégie de gestion des substances appauvrissant la couche d'ozone et leurs produits de remplacement.

La stratégie québécoise tient compte des amendements apportés au Protocole de Montréal depuis 1993 et du Plan d'action canadien sur les substances appauvrissant la couche d'ozone. Elle reconnaît aussi la nécessité de planifier le retrait des CFC et des halons de toutes leurs utilisations. Dans ce sens, le Québec innove, puisqu'au Canada il est le premier gouvernement à intégrer dans son approche les deux problématiques majeures de l'heure, soit celles des changements climatiques et de l'appauvrissement de la couche d'ozone.

Dans le dossier des changements climatiques, nous savons que les secteurs de l'industrie et des transports produisent environ 70 % des gaz à effet de serre rejetés dans l'atmosphère au Québec. De 1991 à 1997, les émissions du secteur des transports à elles seules ont augmenté de 16 %, soit 2,7 % par année. Il faut donc agir sur ce qui conditionne les choix du consommateur en faveur des transports collectifs ou individuels ou sur ce qui conditionne son choix de voiture. Outre un choix plus éclairé de transport individuel, l'une des avenues du cadre d'orientation consiste à rendre plus accessibles les transports en commun et promouvoir le covoiturage.

Du côté gouvernemental, le ministre des Transports a récemment annoncé des investissements importants pour améliorer le transport collectif dans la région de Montréal. Par ailleurs, on peut obtenir des réductions d'émissions assez importantes en favorisant l'introduction de véhicules à faible consommation de carburant, le développement de nouvelles technologies moins énergivores et l'implantation de programmes d'inspection et d'entretien des véhicules déjà utilisés.

(11 heures)

Toutes les problématiques atmosphériques sont préoccupantes. Aussi, dans le but de maintenir et d'améliorer la qualité de l'air au Québec par la réduction des émissions à la source, une révision complète du Règlement sur la qualité de l'atmosphère a été entreprise. Grâce à cette nouvelle réglementation, on pourra atteindre entre autres une diminution de 40 % des précipitations acides en 2002. Cet important projet de règlement et les lignes directrices pourront, selon toute vraisemblance, être présentés dès cet automne.

La protection de la qualité de l'air passe par un ensemble de choix individuels et collectifs plus conscients et plus éclairés. Qu'il s'agisse de protéger la couche d'ozone pour sauvegarder notre santé ou de ralentir la tendance au réchauffement du climat, notre mode de vie et nos gestes quotidiens peuvent peser lourd dans la balance. Cette Journée sur l'air pur nous donne l'occasion de prendre conscience, une fois de plus, de l'importance des enjeux reliés à la qualité de l'air pour notre santé, notre économie et la survie même de notre milieu de vie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saguenay. Nous cédons maintenant la parole au député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. J'aimerais joindre ma voix à celle du député de Saguenay et lui rappeler que, la semaine dernière, nous avons voulu, l'opposition... nous avons fait une motion, la semaine dernière, sur la Semaine de l'environnement au Canada, et le ministre de l'Environnement, via son leader, a refusé que nous la discutions. Cette semaine, alors que nous allons discuter de cette motion sur la Journée de l'air pur, le ministre de l'Environnement n'est pas ici, M. le Président. Ça ressemble un peu, malheureusement, à ce ministère-là en ce moment.

Oui, mondialement, de grands efforts de concertation sont faits, que nous parlions du Protocole de Kyoto ou de Rio. Et hier, pas plus tard qu'hier, nous voyions que le président américain, qui était en Ukraine, nous annonçait que, oui, ils régleront finalement la centrale thermique nucléaire de Tchernobyl qui est encore un grand problème quand on parle de la qualité de l'air. Et il est heureux de voir comment ces grands décideurs sont capables de s'unir pour arriver à des conclusions.

D'autre part, si nous avons de grandes constances ou de grandes préoccupations mondialement, via Kyoto, via Rio, via l'ensemble des ministres de l'Environnement, nous devons, comme citoyens, chacun chez nous, poser des gestes. Beaucoup ont dit avant moi: Penser globalement et agir localement, M. le Président. Que ce soit dans une école, ces enfants qui planteront des arbres, que ce soit ce garagiste qui fait son travail un peu mieux que les autres, finalement, un peu partout à travers le monde, ces gestes individuels ont leur importance.

C'est David Suzuki qui nous disait, dans un communiqué, il y a quelques jours, qu'en 1989 il avait interviewé le ministre de l'Environnement à Ottawa de l'époque, et ce ministre lui avait dit: Notre espèce est menacée, et qu'il fallait agir vite. Eh bien, ce ministre, il est maintenant premier ministre du Québec.

Quand il dit «agir vite», M. le Président, je cherche encore où est l'action. Quand le bon député de Saguenay nous dit qu'ils ont mis énormément d'argent dans le transport en commun pour réduire les effets de serre, ce n'est pas ma compréhension. Ils sont là depuis sept ans et il n'y a pas eu un seul geste en transport en commun qui a été fait au Québec. Le seul qui fut fait, ça a été fait par Claude Ryan, à l'époque, M. le Président. Aucun geste n'a été fait pour le transport en commun par ce gouvernement. Et, quand on voit dans leur politique, C'est le temps d'agir ensemble , c'est le temps d'agir ensemble, bien oui, M. le Président, c'est le temps d'agir ensemble. Dans les termes «c'est le temps d'agir», il faut agir, et nous ne voyons pas dans ce gouvernement aucune forme d'action quand ça a trait effectivement à la Journée de l'air.

Quand le député de Saguenay nous parle de la bonne performance du Québec, eh bien, en grande partie, c'est à cause de l'hydroélectricité. Et je voudrais lui rappeler que la bonne performance du Québec, si elle est à cause de l'hydroélectricité, on n'a qu'à féliciter le Parti libéral de Jean Lesage, le Parti libéral de Robert Bourassa. C'est eux qui ont fait que la politique... Le premier ministre le disait aujourd'hui qu'effectivement notre politique énergétique, qui relève de l'hydroélectricité à 80 %, c'est lui-même qui le disait tantôt, on n'a qu'à en féliciter le Parti libéral. Ce n'est certainement pas le projet que M. le premier ministre Parizeau a arrêté qui a emmieuté la situation électrique du Québec.

Je finirai en vous lisant ce que l'UQCN faisait parvenir à tous les citoyens du Québec dans les dernières journées: «Notre planète suffoque. Au cours du dernier siècle, l'être humain a consommé davantage de pétrole, de bois, de charbon, de gaz naturel qu'il ne l'a fait au cours de toute son histoire. L'émission de ces gaz à effet de serre s'ajoute à la déforestation, entraînant des changements climatiques qui affectent toutes les régions du monde. L'équilibre planétaire est menacé. Serions-nous en train de perdre la boule?

«Un peu partout sur la planète, la nature nous prévient. On constate une multiplication des catastrophes dites naturelles mais qui sont souvent provoquées en partie par la pollution atmosphérique et les activités humaines. Nous ne pouvons prédire où et quand surviendront les prochaines catastrophes climatiques, nous savons cependant que les problèmes suivants sont en grande partie causés par la pollution des véhicules automobiles.»

Je vous rappelle que pas un seul geste n'a été fait par le gouvernement en ce qui a trait au transport en commun dans la province de Québec. Tous les niveaux de gouvernement – fédéral, provincial, municipal – doivent se mobiliser. Et je dirais même au niveau de gouvernement de la famille, M. le Président! Est-ce que les pères de famille, les mères de famille n'ont pas à se préoccuper, gestes quotidiens dans ce tout petit gouvernement qui est celui de la famille? Tous les niveaux de gouvernement doivent se mobiliser pour lutter contre les émissions de GES. Si on ne prend pas dès maintenant les mesures qui s'imposent, ce sont nos enfants qui risquent de payer gros.

Déjà, déjà, ils paient beaucoup, nos enfants. Parlez à quelques spécialistes du cancer de la peau, ils vous diront qu'en ce moment il y a déjà un problème. Les spécialistes vous diront que d'ici 15 ans les cancers de la peau auront quadruplé et en grande partie à cause du phénomène de la couche d'ozone qui est en voie de disparition.

Alors, je joins ma voix à celle du gouvernement. Je suis désolé qu'il n'ait point voulu la semaine dernière parler de la Semaine canadienne de l'environnement et que cette motion ait été refusée. Je déplore énormément que le ministre de l'Environnement ne soit pas ici pour parler de ce sujet-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford, tout en mentionnant – vous êtes un parlementaire d'expérience: Vous savez très bien que vous n'avez pas le droit de mentionner si quelqu'un est présent en cette Chambre ou pas. Le ministre peut très bien être en commission parlementaire.


Mise aux voix

Alors, le débat étant terminé, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Il y en a une deuxième, en espérant que le ton soit plus élevé de la part de l'opposition. Il y a consentement, un-un.

Le Vice-Président (M. Pinard): Toujours à notre rubrique Motions sans préavis, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse, une motion pour féliciter les étudiantes et les étudiants du Québec lors des olympiades québécoises et canadiennes de la formation professionnelle et technique. Alors, je comprends qu'il y a consentement pour débattre de cette motion. Consentement, un-un. Alors, M. le ministre.


Féliciter les étudiantes et étudiants du Québec qui se sont distingués aux olympiades québécoises et canadiennes de la formation professionnelle et technique

M. Legault: M. le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je propose l'adoption de la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale félicite les étudiantes et les étudiants du Québec qui se sont distingués lors des Olympiques québécoises de la formation professionnelle et technique et des Olympiques canadiennes de la formation processionnelle et technique qui ont eu lieu à Québec en fin de semaine, et particulièrement les médaillés d'or qui représenteront le Québec lors des Olympiades qui auront lieu à Séoul.»

Donc, en effet, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Votre motion est déposée?

M. Legault: Oui. Attendez une minute.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous cède la parole, M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. C'est en effet les 1er et 2 juin que se sont tenues d'abord les Olympiades québécoises, ensuite on a eu les Olympiades canadiennes, les 4 et 5 juin, donc il y a quelques jours. Ce sont plus de 700 jeunes qui viennent de différents endroits du Québec et du Canada qui se sont présentés à ces olympiades pour compétitionner dans toutes sortes de domaines: dessin technique, électronique, mécanique, esthétique, pâtisserie, dans toutes sortes de secteurs donc qui représentent la formation professionnelle et technique.

(11 h 10)

Ce qui est impressionnant, M. le Président, c'est lorsqu'on regarde les résultats. On avait 49 jeunes qui représentaient le Québec. Sur les 49 qui représentaient le Québec, 44 ont gagné des médailles. Quarante-quatre ont gagné des médailles, c'est-à-dire: trois médailles de bronze, neuf médailles d'argent et 32 médailles d'or! Et c'est là que c'est encore plus impressionnant. Sur le grand total de 54 médailles d'or qui ont été distribuées pour tous les participants canadiens, 32, ça veut dire environ 60 % des médailles, ont été gagnées par des participantes ou participants québécois. C'est vraiment impressionnant, puis ça vaut la peine de mentionner cette excellence et cette compétence. Et je pense que ça vaut vraiment la peine que tout le monde ici, à l'Assemblée nationale, unisse sa voix pour témoigner de son admiration.

Je pense qu'il faut profiter de l'occasion pour remercier et féliciter aussi les parents. D'abord, les parents, on le sait, ont un rôle à jouer important dans l'éducation et l'accompagnement des jeunes. J'en ai vu plusieurs en fin de semaine lorsque j'ai visité le site des compétitions. Il y avait aussi beaucoup d'enseignants, d'enseignantes, d'entraîneurs, de directeurs d'école; il faut aussi les féliciter parce qu'une bonne partie du succès leur revient. Ce sont quand même eux qui ont entraîné ces jeunes qui ont vraiment performé lors de ces olympiades.

Donc, je termine en disant, M. le Président: On souhaite, au Québec, valoriser davantage l'éducation, valoriser, entre autres, la formation professionnelle et technique; une des façons d'y arriver, c'est de valoriser et de montrer nos bons coups. Donc, je pense qu'il faut le dire haut et fort, il faut que tous les Québécois et toutes les Québécoises comprennent que les résultats des jeunes Québécois et Québécoises qui étaient présents à ces olympiades témoignent justement de la qualité de la formation qu'on donne dans nos centres de formation professionnelle et technique au Québec, et je pense que leur réussite doit être une source de fierté pour tous les Québécois et toutes les Québécoises. Donc, encore une fois bravo et merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de l'Éducation. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel en la matière, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. À mon tour de joindre ma voix et la voix de l'opposition officielle, par le fait même, à la motion qu'a présentée le ministre de l'Éducation afin de féliciter les étudiants et les étudiantes du Québec qui se sont distingués aux Olympiades québécoises de la formation professionnelle et technique et aux Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique, qui ont eu lieu à Québec, la fin de semaine dernière.

Je vous dirais, M. le Président, d'entrée de jeu, que ce type de compétition là... Il faut regarder d'où ça vient, là, cette compétition-là, et, je dirais, voir la clairvoyance de ceux et celles qui ont pensé à cette idée-là et qui ont mis ce type de compétition là en place. C'est peut-être un des meilleurs moyens à l'origine qu'ils ont trouvés justement pour valoriser, favoriser la valorisation et le développement de la formation professionnelle, des métiers, et démontrer que c'était très valorisant, d'exercer ces métiers-là.

Permettez-moi de saluer, entre autres, ceux qui, en 1992... les partenaires qui ont mis de l'avant cette première olympiade, entre autres l'Alliance des manufacturiers exportateurs du Québec, l'Association des entrepreneurs en construction, le Club automobile, Emploi et Immigration Canada, Hydro-Québec et le ministère de l'Éducation, dont la titulaire à l'époque était Mme Lucienne Robillard.

Donc, vraiment là, à l'origine, on se rend compte que ces gens-là ont eu vraiment une bonne idée de mettre en place ces olympiades-là pour que les jeunes qui apprennent les métiers, qui apprennent comment tout ça fonctionne aient la chance de se comparer les uns aux autres dans une compétition qui, en fin de compte, n'est pas une compétition où les gens sortent de là déchirés, puis on remet en question quoi que ce soit.

C'est d'abord et avant tout un lieu et une bonne façon de se comparer et d'exercer son métier sous un certain stress. Parce que ces métiers-là dans l'avenir, quand les jeunes vont sortir de l'école et vont aller travailler, il y a ce facteur de stress là qui va entrer en ligne de compte, et je pense que ces olympiades-là sont peut-être, je dirais, une première occasion de justement vivre, exercer son métier sous une certaine pression, pression qu'ils retrouveront également plus tard dans leurs fonctions.

Je vous dirais que, quand on regarde la façon et la participation des jeunes à cet événement-là, eh bien, c'est extrêmement intéressant et valorisant que de voir d'année en année... Et on a eu, entre autres, l'automne dernier, on se souvient, à Montréal, la finale internationale des Olympiades de la formation professionnelle et technique. Donc, on a vraiment, je pense, implanté un modèle, en 1992, qui mérite d'être souligné, auquel les jeunes aiment participer et qui, je pense, a beaucoup d'avenir également.

Vous me permettrez aussi, M. le Président, de saluer effectivement ceux et celles qui ont gagné. On parle, au Québec, de 49 qui ont participé, de 44 qui ont gagné une médaille, que ce soit d'or, d'argent ou de bronze. Mais aussi, finalement, ces participants-là qui ont gagné ont vraiment subi certaines situations bien particulières. Certains disaient que, entre autres, le fait de devoir exercer cette compétition-là en plein public alors que des gens passent, des gens arrêtent voir qu'est-ce qui se passe, arrêtent voir quelle est la façon dont ça se déroule, pouvant même quelquefois les déranger, bien, ça amène un facteur de plus dans l'atteinte des résultats. Et je pense qu'il faut le souligner.

Vous me permettrez aussi de saluer un jeune qui voulait tellement participer, qui voulait tellement gagner, Dan Desroches, du Centre de formation professionnelle de Neufchâtel, on dit qu'il voulait tellement gagner qu'il est passé à travers les épreuves régionales avec un bras dans le plâtre. Et ça, c'est en ébénisterie, M. le Président. Il faut le faire. Il voulait tellement gagner, il voulait tellement participer que, même avec un bras dans le plâtre, il a réussi à se démarquer au niveau régional et à gagner. Donc, je pense qu'il faut le saluer.

Il faut aussi saluer, je pense, l'ensemble des gagnants qui ont participé. Et, rapidement, juste peut-être pour que ces gens-là un jour puissent dire qu'ils sont dans les galées de l'Assemblée nationale, permettez-moi de saluer, entre autres, Frédéric Beaudin de la commission scolaire Marie-Victorin, Éric Beaumier du collège Ahuntsic, Manon Bélanger de la commission scolaire de la Capitale, Véronique Boily, Carl Bouchard, Sébastien Boulais, Cyndi Cantin, Christian Desbiens, Dan Desroches, dont on vient de parler justement, Éric Dubé qui est de la commission scolaire de Kamouraska–Rivière-du-Loup – donc vous comprendrez qu'on va le saluer d'une façon un peu particulière – et qui participait au niveau de l'électricité et de la construction.

Si je prends cet exemple-là du Pavillon de l'avenir, à Rivière-du-Loup, et de la participation et de la récompense de M. Dubé, hier j'entendais, dans une entrevue qu'il faisait à la station de Rivière-du-Loup, à quel point il était fier d'avoir gagné. Mais ce qu'il était intéressant d'entendre, c'est surtout à quel point son professeur était aussi fier et aussi content que lui de le voir gagner. La récompense était autant pour l'enseignant qu'elle pouvait être pour le jeune comme tel d'avoir gagné.

Donc, je pense que ce qui est à la base de tout ça, de ces olympiades-là, ce qui est à la base de la formation professionnelle et technique, et entre autres dans le cas du Pavillon de l'avenir de Rivière-du-Loup, que je connais un petit peu plus que les autres maisons d'enseignement au niveau professionnel et technique au Québec... bien, de souligner à quel point ces gens-là se font une fierté d'enseigner, se font une fierté de transmettre des connaissances dans ces métiers-là, qu'on peut appeler, dans certains cas, des métiers traditionnels, dans d'autres cas, des métiers qui sont en plein développement, des métiers de pointe, et vraiment d'ajuster ces métiers-là à la réalité des années 2000. Je pense que les enseignants et enseignantes doivent être tout autant salués que les étudiants comme tels.

Il y avait aussi Jean-Philippe Dugré, Stéphanie Dupont, Jean-Marc Filion, Yannick Godbout, Nadia Lachance, Éric Laplante, Alain Larochelle, Jonathan Lauzon, Nicolas Leblanc, Stéphane Léger, Mélanie Martel, Mathieu McKale, Julie Noël de Tilly, Justin Pelchat, Vicky Perreault, Simon Plante, Rémi Poirier, Jonathan Ranger, Christian Robert, Philippe Sirois, Martin St-Onge, Manon Therrien, André Arcand, Benoît Arcand, Mélissa Bouchard, Hugo Briand, Étienne Brûlé, Serge Desrosiers, Éric Ferron, Marc Lambert, Bruno Lévesque, Martin Gauthier, Isabelle Nolin et Jonathan Robert.

Des voix: Bravo!

M. Béchard: Oui, je pense qu'on peut les saluer. Et permettez-moi aussi, M. le Président, de souhaiter la meilleure des chances possibles à ces participants-là qui vont représenter le Québec et qui vont aussi représenter le Canada. Et c'est un peu une fierté de voir que nous avons des jeunes qui, de façon majoritaire, vont aller représenter l'équipe canadienne aux Olympiades au niveau mondial qui se dérouleront à Séoul l'automne prochain.

Permettez-moi aussi, M. le Président, de saluer, comme le ministre l'a souligné, les parents, les gens qui s'impliquent, qui permettent à ces jeunes-là de réaliser leur rêve, dont plusieurs disaient qu'ils étaient même prêts, dans certains cas, pour pratiquer, à coucher à l'école tellement ils voulaient gagner et participer. Je pense que c'est une belle façon, des compétitions comme ça, des compétitions qui sont saines, des compétitions qui sont correctes, c'est une bonne façon de valoriser et de donner cette passion-là de leur métier à des étudiants et à des jeunes qui, j'en suis certain, dans les prochaines années, vont exercer ce métier-là avec autant de passion, avec autant de détermination, avec autant d'enthousiasme qu'ils ont pu participer aux olympiades de la formation professionnelle et technique et aux finales qui ont eu lieu en fin de semaine dernière.

(11 h 20)

Donc, félicitations à tout le monde. Je ne pense pas que cette motion-là soulèvera beaucoup de débats et fera en sorte qu'elle pourra être adoptée sur division. Nous joignons notre voix à celle du gouvernement pour les saluer, comme le gouvernement avait joint sa voix à notre motion, l'automne dernier, pour saluer aussi les gagnants. Et je pense que c'est la moindre des choses que l'Assemblée nationale peut faire aujourd'hui pour saluer chacun des gagnants de ces olympiades-là et leur souhaiter la meilleure des chances possibles pour les finales mondiales qui se dérouleront à Séoul, l'automne prochain. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Le débat étant terminé, est-ce que cette motion du ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, toujours au chapitre des motions sans préavis, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 112, Loi sur la sécurité incendie, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement du territoire complétera, quant à elle, l'étude détaillée du projet de loi n° 110, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des transports et de l'environnement procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les transports, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'économie et du travail entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader de l'opposition officielle.


Question de règlement concernant la convocation d'une commission parlementaire pour l'étude d'un projet de loi faisant l'objet de procédures devant les tribunaux


M. Pierre Paradis

M. Paradis: À ce moment-ci, M. le Président, le leader adjoint du gouvernement appelle le projet de loi n° 116 pour étude détaillée, projet de loi qui touche la Régie de l'énergie, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures. Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'on procède à cet avis, à ce moment-là, à la condition que la présidence puisse répondre à des questions que l'on se pose de ce côté-ci, qui relèvent de l'interprétation du droit parlementaire et qui sont soulevées dans un jugement de la Cour supérieure du Québec rendu hier, M. le Président.

Je vous cite un bref extrait de ce jugement que vous retrouvez à la page 39, sous la plume de l'honorable Pierrette Rayle, dans une cause qui interpelle le Procureur général du Québec, représentant le Conseil exécutif, le gouvernement du Québec, et l'honorable Jacques Brassard, en sa qualité de ministre des Ressources naturelles.

Le paragraphe à la page 39 se lit comme suit: «Le tribunal conclut que le gouvernement s'est ingéré sans droit et de manière abusive dans un processus administratif que la Régie, respectueuse de l'esprit et de la finalité de sa loi constituante...»

M. Boulerice: Question de règlement, M. le Président.

M. Paradis: Je suis sur une question de règlement, là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Là, M. le leader adjoint de l'opposition... Écoutez, je ne peux pas écouter deux questions de règlement en même temps, M. le leader adjoint du gouvernement.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Je veux vous simplifier la tâche, M. le Président. Vous savez que j'ai toujours eu une grande relation d'aide à votre égard. Le leader du gouvernement, qui est un vieux parlementaire dans cette Assemblée...

M. Paradis: ...

M. Boulerice: ...le leader de l'opposition, pardon, sait fort bien qu'il n'appartient pas à la présidence d'interpréter le droit. Voilà. Alors, je me demande pourquoi il faut cette question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Bon. Alors, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Moi, je pense, M. le Président, que l'important, c'est de permettre au leader de l'opposition de poser sa question de règlement, et, s'il reste quelque chose au leader adjoint du gouvernement, il se lèvera à ce moment-là. Mais l'important, c'est qu'on puisse vous expliquer le contexte dans lequel on trouve que c'est normal que cette Assemblée et son président considèrent l'importance d'un jugement d'hier, des tribunaux, qui concerne directement un sujet que le gouvernement voudrait qu'on considère en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, M. le leader de l'opposition officielle, j'aimerais connaître votre point de règlement, s'il vous plaît.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Très brièvement, M. le Président, j'en étais à vous citer un bref extrait du jugement de la Cour supérieure, de l'honorable Pierrette Rayle, que vous retrouvez au deuxième paragraphe de la page 39 dudit jugement et qui fait spécifiquement référence à l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président, et c'est pourquoi j'attire votre attention.

Ce n'est pas simplement une question de déclarer invalide, on fait également référence au rôle de l'Assemblée nationale du Québec, et à ce moment-là la présidence aura le temps, si elle le juge à propos, d'ici 15 heures, de rendre sa décision, où si elle veut un délai supplémentaire... Et c'est pour ça que j'interviens à ce moment-ci, au moment des avis, M. le Président, afin d'en aviser les membres de cette Assemblée.

La citation se lit comme suit: «Le tribunal conclut que le gouvernement s'est ingéré sans droit et de manière abusive dans un processus administratif que la Régie, respectueuse de l'esprit et de la finalité de sa loi constituante, voulait transparent et public. Le gouvernement n'est pas au-dessus de la loi, et, lorsqu'il usurpe les pouvoirs de l'Assemblée nationale, il incombe à la Cour supérieure d'intervenir. Les effets de la directive ainsi que le moment où elle est émise sont déraisonnables et incompatibles avec la lettre, l'esprit et la finalité de la loi.»

Lorsqu'il y a usurpation par le gouvernement des pouvoirs de l'Assemblée nationale, je vous soumets respectueusement que, oui, la Cour supérieure a un devoir d'intervenir à la demande des citoyens. Mais je fais également appel à votre interprétation de l'article 2 du règlement de l'Assemblée nationale. N'est-il pas également du devoir du président de l'Assemblée nationale de s'assurer que le gouvernement n'usurpe pas les pouvoirs qui nous sont dévolus en temps que législateurs? C'était là le but de ma question, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, je demanderais à notre secrétaire général de venir me rencontrer, et je suspens quelques instants les travaux tout en vous demandant de demeurer à vos sièges respectifs.

(Suspension de la séance à 11 h 27)

(Reprise à 11 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle, concernant votre interrogation, je suis prêt à rendre immédiatement une décision.


Décision du président

Nous sommes actuellement dans un processus législatif. Vous savez très bien, étant avocat de profession, que la séparation des pouvoirs est bel et bien existante: le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif, deux pouvoirs totalement différents, distincts l'un de l'autre. Alors, vous savez très bien qu'il ne peut y avoir aucune injonction ni aucun jugement qui peut interférer dans le rôle de l'Assemblée nationale qui est de légiférer. Alors, le président n'a qu'à interpréter la procédure. Le président n'a pas à interpréter le judiciaire versus le législatif.

Si, effectivement, nous poursuivons le processus en commission parlementaire et l'adoption éventuellement en troisième lecture, à ce moment-là vous savez très bien que, le lendemain de la sanction du projet de loi, cette loi-là peut parvenir devant les tribunaux qui, eux, à ce moment-là, décideront si, oui ou non, cette loi qui sera adoptée par l'Assemblée nationale a force ou pas. Alors, c'est ma décision.

M. Paradis: Oui. M. le Président, 41 me force à ne même pas discuter de votre décision quant à l'interprétation de l'article 2 comme telle. Maintenant, j'aimerais également porter à votre attention quelque chose qui m'apparaît encore plus clair concernant la même question, les dispositions du troisième alinéa de l'article 35 de notre règlement. Les dispositions de cet article stipulent ce qui suit: «Le député qui a la parole ne peut – et on sait que ce qui s'applique au salon bleu s'applique également devant nos commissions parlementaires – parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit.»

Le jugement a été rendu hier. Il y a toujours une possibilité d'appel de la part de la partie gouvernementale pour les 30 ou les 29 prochains jours, M. le Président. Ce que le projet de loi n° 116 fait – parce qu'on a déjà discuté du principe ici, à l'Assemblée nationale – c'est qu'il incorpore la directive déclarée illégale, pour le moment, par le tribunal à un projet de loi qui est devant l'Assemblée nationale.

Compte tenu du jugement de première instance rendu par la Cour supérieure et la possibilité d'en appeler devant la Cour d'appel, comment un député peut-il se pencher sur l'article par article dont l'objet est d'incorporer la directive qui a été déclarée illégale et ultra vires, compte tenu des dispositions de l'article 35.3°? Il va, à ce moment-là, automatiquement se retrouver dans une position qui va l'amener à violer les dispositions de notre règlement, et cette disposition est à ce point claire que même une interprétation notariale nous satisferait à ce moment-ci.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous allez devoir vous contenter d'une interprétation notariale. Je crois, à première vue, que, le jugement de la Cour supérieure étant déposé, si effectivement – écoutez, je vous dis ça sous toutes réserves, là – aujourd'hui il y avait mention par le gouvernement qu'on portait le jugement en appel, à ce moment-là je crois qu'on pourrait avoir des problèmes en vertu de l'article 35.3°. Mais, comme la partie qui a à prendre une décision est l'exécutif, dans le cas présent, et comme, nous, actuellement, nous travaillons au niveau législatif, vous connaissez également la règle de la séparation des pouvoirs, donc, à partir de ce moment-là, le législatif peut très bien continuer à procéder dans le processus normal en vue d'en arriver à l'adoption d'un projet de loi, et ce, tant et aussi longtemps – d'après moi, là, j'essaie de voir, parce que c'est une vraie belle question de droit parlementaire – que l'exécutif ne décide pas d'aller en appel de la décision du juge de la Cour supérieure, madame... Enfin, j'oublie son nom.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, à partir de ce moment-là, je crois que les députés en commission parlementaire peuvent très bien travailler, et, l'article 35.3°, on l'oublie. Mais, si, dans une semaine, si dans deux jours, dans 10 jours, l'exécutif portait le jugement en appel, je crois qu'à ce moment-là il faudrait qu'on suspende les travaux. À partir de ce moment-là, il faudrait, je crois, suspendre les travaux au niveau de la commission parlementaire parce que, oui, on pourrait avoir de sérieux problèmes.

M. Paradis: M. le Président, je pense que la décision que vous êtes en train de rendre porte sur le cas qui nous préoccupe présentement mais peut également porter sur d'autres cas soumis à l'Assemblée nationale, de même nature. Si j'ai bien compris le sens ou la direction que vous souhaitez donner à votre décision à ce moment-ci, à partir du moment où la cause n'est pas directement devant les tribunaux parce qu'elle est dans le délai d'appel et qu'aucune des parties ne s'est encore prévalue de son droit d'appel, ce n'est pas considéré comme étant devant les tribunaux à ce moment-ci. Si c'est ça, la décision de la présidence, ça ne s'applique pas simplement à cette cause-ci, ça s'applique à l'ensemble des causes qui seraient susceptibles d'appel.

Moi, je voudrais, à ce moment-là, que la présidence rende une directive qui est claire et que ça s'applique à l'ensemble des causes. S'il y a un délai intermittent, qu'on le sache, à l'Assemblée nationale du Québec, et qu'on se gouverne en conséquence.

Le Vice-Président (M. Pinard): Comme je l'ai mentionné tout à l'heure – et je me sens très à l'aise; je n'ai qu'une formation notariale, mais j'en suis fier – soyez assuré que nous allons la prendre en considération parce que c'est vraiment une belle question de droit parlementaire. Nous allons fouiller davantage et nous allons vous revenir ultérieurement sur cette question parce qu'elle est très pointue. Elle est très pointue, et on se doit de l'approfondir. D'accord?

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le leader.

M. Paradis: C'était le début de mon intervention. À ce moment-là, je ne sais pas si on souhaite que le leader adjoint du gouvernement procède aux autres avis et qu'on prenne en réserve cet avis-là ou qu'il le donne sous réserve de la décision présidentielle.

M. Boulerice: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous permettez, M. le leader adjoint? Avant de vous céder la parole, j'aurais un texte à lire.

Notre secrétaire général vient de me remettre un document concernant la règle du sub judice et le droit de légiférer. On mentionne ici que la règle n'empêche pas une assemblée législative de légiférer sur toute matière. À ce sujet, Erskine May écrit: «The House has expressly resolved that the sub judice role is qualified by the right of the House to legislate on any matters.» La convention s'applique dans le cas de motions, de renvois au débat, de questions et de questions supplémentaires. Elle ne s'applique pas aux projets de loi, puisqu'on ne peut restreindre le droit que possède le Parlement de légiférer dans les domaines relevant de sa compétence.

De plus, une loi peut changer les motifs sur lesquels se fondent les tribunaux pour rendre leurs décisions. Or, l'orateur Lamoureux a rendu, en 1971, une décision qui apporte des précisions à cet égard: «Il me semble logique, disait-il, comme l'ont indiqué certains députés qui ont participé à la discussion, d'adopter ce point de vue, sans quoi tout le processus législatif pourrait être entravé par le simple fait d'introduire une instance ou d'instituer des poursuites dans une cour du Canada.» Donc, si on maintient le processus qui règne ici, en cette Chambre, dans ce salon bleu, depuis 1971, à ce moment-là nous pouvons poursuivre le processus législatif, aller en commission parlementaire et même adopter le projet de loi, et, si un groupe quelconque de la société décidait de prendre le projet de loi et d'en faire un cas devant la Cour supérieure, bien, à ce moment-là, nous devrions assister à la présence d'un autre pouvoir, qui est le pouvoir judiciaire, qui pourrait soit infirmer ou confirmer une loi qui est adoptée en cette Chambre par la majorité ou l'unanimité des membres.

M. Paradis: M. le Président, vous nous rappelez là – et c'est habile de le faire – les notions de suprématie du Parlement. Le président Lamoureux, qui siégeait dans un autre Parlement, s'est exprimé sur le sujet, et j'endosse complètement ses propos, et je peux même ajouter que, même si ce n'est pas le même Parlement, ce Parlement est aussi souverain que l'autre dans le domaine de ses juridictions. Je n'ai pas de problème avec cette interprétation de la souveraineté de notre Parlement, mon problème vient de l'interprétation que l'on doit accorder au troisième alinéa de l'article 35. La question est beaucoup moins vaste que la réponse que vous me donnez. Je souhaite obtenir une réponse précise à une question précise.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je suspendrai quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 40)

(Reprise à 11 h 45)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous sommes toujours sur un point de règlement, une question de droit parlementaire. Vous m'avez posé la question tout à l'heure de l'application de 35.3°. Vous vous rappelez, je vous ai parlé tout à l'heure de la règle du sub judice, à l'effet que cette règle-là s'applique dans les cas de motions, de renvois au débat, de questions et de questions supplémentaires, mais qu'elle ne s'applique pas aux projets de loi, puisqu'on ne peut restreindre le droit que possède le Parlement de légiférer dans les domaines relevant de sa compétence.

À ce compte-là, je tiens à vous mentionner qu'il existe une décision qui a été rendue par Jean Garon le 13 juin 1994 concernant justement la règle du sub judice, et il est clairement établi dans cette décision 267/6 que la règle du sub judice n'empêche pas une assemblée législative de légiférer sur toute matière. Donc, en pratique, ce qui va survenir, c'est que les travaux en commission devront débuter cet après-midi, à 15 heures, et que c'est le président de la commission parlementaire qui se devra d'appliquer notre règlement. Mais le règlement ne peut pas aller à l'encontre de la loi.

C'est d'abord et avant tout le rôle de la commission de procéder, et procéder va vouloir dire pour le président de la commission parlementaire de travailler avec son règlement et également de travailler avec l'article 35.3° pour faire en sorte qu'on puisse à la fois faire notre processus législatif et à la fois respecter le plus possible l'article 35.3° de notre règlement. Mais je crois que, si on...

Le règlement ne peut pas aller à l'encontre de la loi et de notre fondement même au niveau législatif. Donc, le président de la commission pourra aller jusqu'à presque oublier l'article 35.3°, dans les circonstances, pour exécuter l'ordre qui lui est donné par l'Assemblée nationale. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. M. le Président, si on était en commission, effectivement, il appartiendrait au président de la commission d'interpréter notre règlement. Présentement, nous sommes au salon bleu, la commission ne siège pas. C'est à la présidence de déterminer la règle. Est-ce que je dois comprendre que votre interprétation de la suprématie du Parlement dans le cas qui nous concerne exclut l'application du troisième alinéa de l'article 35 de notre règlement?

Le Vice-Président (M. Pinard): L'article 35.3° ne peut pas contrer le fondement même du parlementarisme. Alors, à partir de ce moment-là, si vous avez autre chose, on peut discuter d'un autre point de règlement, mais, en ce qui me concerne, je pense qu'on a fait le tour de la question.

M. Paradis: Je veux bien que ce soit clair, M. le Président. Ce que vous nous dites comme parlementaire, c'est que, lorsqu'il y a une cause qui se retrouve devant les tribunaux et qu'on a enclenché à l'Assemblée nationale du Québec le processus législatif, il n'y a pas d'application du troisième alinéa de l'article 35. Si c'est clair dans tous les cas, je peux vivre avec votre décision.

Le Vice-Président (M. Pinard): Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le président de la commission parlementaire devant laquelle on va se retrouver cet après-midi devra travailler avec le maximum de doigté avec notre règlement, avec lequel nous vivons à tous les jours. Mais, comme je vous l'ai mentionné, la latitude que le président de la commission parlementaire devra prendre, c'est vraiment un rôle qui va être très difficile à jouer. Mais, comme je connais nos présidents de commission parlementaire, je suis persuadé qu'on va réussir à travailler avec beaucoup de doigté. Alors, ceci termine nos échanges sur cette question de droit parlementaire.


Avis touchant les travaux des commissions

M. le leader adjoint du gouvernement, s'il vous plaît.

M. Boulerice: Oui, bien, vous me permettrez quand même d'ajouter une phrase, puisque ce n'est pas moi qui ai exagéré dans cette Chambre, là. Si on suit le raisonnement du leader de l'opposition, ce n'est pas compliqué, c'est que, à chaque fois qu'un groupe ou un opposant veut arrêter un projet de loi, il s'agirait tout simplement de présenter une requête en cour, ce qui signifie que le Parlement ne siégerait plus jamais, c'est de toute évidence.

(11 h 50)

Alors, ceci étant dit, M. le Président, je vous dis que la commission de l'économie et du travail entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures ainsi que de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et finalement

Que la commission des finances publiques, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 126, Loi sur les coopératives de services financiers, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.


Avis de sanction

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Quant à moi, renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Je vous avise qu'il y aura sanction du projet de loi n° 127, Loi modifiant la Loi sur les établissements touristiques, au cabinet de Son Honneur le lieutenant-gouverneur aujourd'hui, à 11 h 30. Alors...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Voilà. Ha, ha, ha!


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. le leader de l'opposition officielle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: Oui. En prenant pour acquis que les gens ont été avisés autrement – ha, ha, ha! – M. le Président, le 2 juin dernier, le bureau d'avocats Tremblay, Bois, Mignault, Lemay s'adressait au président de l'Assemblée nationale du Québec concernant l'interprétation du règlement de l'Assemblée nationale et particulièrement de l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, article 21 qui stipule que toute personne a droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée nationale pour le redressement de griefs. La lettre était accompagnée d'une plaidoirie détaillée qui mettait en relief d'un côté les droits du citoyen garantis par la Charte et de l'autre côté les dispositions des articles 62 et suivants du règlement de l'Assemblée nationale du Québec.

Ma question est bien simple, M. le Président: Quand la présidence a-t-elle l'intention de rendre une décision quant à cette affaire? Et, dans l'éventualité où la présidence souhaiterait rendre une décision, quand a-t-elle l'intention d'entendre les représentations des leaders ou des parlementaires?

(Consultation)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Je peux vous dire, M. le Président, que, nous aussi, nous attendons avec impatience la décision du président, puisqu'il y a des citoyens de la circonscription d'Anjou qui souhaiteraient être entendus par cette Assemblée via une pétition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui.

M. Paradis: Je pense que la décision de la présidence va affecter tous les citoyens de façon égale et qu'il n'y aura pas de personnes incluses de force ou exclues de force.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, au niveau de la présidence, nous sommes au fait de ces demandes qui nous ont été adressées. Toutefois, si vous le permettez, nous allons prendre la question en délibéré parce que le président lui-même désire communiquer avec les deux côtés de la Chambre, et il pourra vous mettre au courant personnellement de l'intention qui le dirige actuellement – ça vous va? – et ça, très rapidement, d'ici 24 heures.

M. Paradis: M. le Président, je souhaiterais quand même que la démarche soit de nature publique. Elle implique deux lois qui sont majeures – une qui s'appelle la Charte des droits, qui est une loi quasi constitutionnelle, et d'un autre côté la loi et le règlement de l'Assemblée nationale – et qui risque d'affecter dans les années à venir l'ensemble des citoyens. J'aimerais avoir la possibilité de faire des représentations publiques.

Le Vice-Président (M. Pinard): Moi, je vous mentionne que je rencontre le président à 13 heures, cet après-midi. Je vais le mettre au fait de votre demande, mais je voudrais que ce soit le président lui-même, parce que c'est un cas excessivement sérieux, qui vous réponde. Alors, nous venons de terminer les affaires courantes.


Affaires du jour

Nous allons procéder aux affaires du jour, et je demanderais au leader adjoint du gouvernement de bien vouloir appeler un article.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, si l'opposition a des intervenants, nous souhaiterions reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117. Donc, je vous réfère à l'article 5 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, à l'article 5 de... Excusez-moi. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce qu'on doit comprendre des propos du leader adjoint du gouvernement que le gouvernement n'a plus d'intervenants sur ce projet de loi?


Projet de loi n° 117


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Ha, ha, ha! À l'article 5 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 juin 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Alors, y a-t-il des interventions? La dernière intervenante était Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, qui avait effectivement terminé son intervention. Alors, je cède maintenant la parole au député de Chapleau. M. le député.


M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais parler du projet de loi n° 117. Il s'agit de la Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Et, si je prends la parole sur ce projet de loi, c'est surtout pour le dénoncer, surtout pour vous dire à quel point l'opposition officielle est vraiment scandalisée par le fait que le gouvernement suggère l'adoption d'un projet de loi de cette nature.

Il faut comprendre l'enjeu, M. le Président. L'enjeu est le suivant: le gouvernement, par son projet de loi, cherche à hausser le montant maximal de la prime annuelle reliée à l'assurance médicaments pour la faire passer de 175 $ à 350 $. Alors, de 175 $ à 350 $, on veut donc hausser la prime annuelle reliée à l'assurance médicaments. Et, au surplus, comme si cela n'était pas déjà suffisant, comme si cela n'était pas déjà assez, le gouvernement vise, par le projet de loi n° 117, à indexer sur une base annuelle la prime d'assurance médicaments. De cette façon-là, donc, la prime sera vraisemblablement haussée le 1er janvier de chaque année.

Donc, c'est une hausse de la prime d'assurance médicaments. C'est une hausse qui va d'abord être applicable dès l'adoption du projet de loi, et, par la suite, c'est une hausse annuelle à prévoir, puisque, comme je viens de le mentionner, le gouvernement propose qu'il y ait une indexation annuelle de la prime. Or, quand on fait passer une prime, M. le Président, de 175 $ à 350 $, il faut que vous réalisiez qu'à ce moment-là on procède à une augmentation de 100 % d'un seul coup. On double le montant, finalement, de la prime et on fait cela d'un seul coup. On fait cela pour quoi? Vous allez sans doute poser la question tout autant que les gens qui nous écoutent. Le gouvernement cherche à faire ça pour quoi? Tout simplement pour augmenter les fonds publics. Le gouvernement est à la recherche d'argent, est à la recherche d'argent pour combler son déficit, est à la recherche d'argent à tout prix.

(12 heures)

On sait que, dans le dossier de la Régie de l'énergie, on cherche justement à diminuer les pouvoirs de la Régie de l'énergie pour permettre à Hydro-Québec d'être une machine à faire de l'argent. Ici, c'est à peu près le même principe, sauf que ce qui est encore plus grave, c'est que le moyen que l'on prend pour faire de l'argent, ici, du côté gouvernemental, c'est en augmentant de 100 % les primes d'assurance médicaments. Et qui, d'après vous, va souffrir le plus d'une telle mesure? C'est les gens qui sont démunis, c'est les personnes âgées, c'est les personnes qui sont dans le besoin, c'est les personnes qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté, bref ce sont les gens qui sont les plus vulnérables dans notre société.

Il ne s'agit, M. le Président – et c'est pour ça que l'opposition officielle s'oppose au projet de loi n° 117 – ni plus ni moins que d'une taxe déguisée. On fait en sorte que l'assurance médicaments devienne un véritable puits sans fonds, un puits incontrôlable et qui va permettre au gouvernement, donc, d'enrichir ses coffres de l'argent des contribuables. Il faut s'attendre à ce qu'il y ait une hausse perpétuelle des primes d'assurance médicaments.

Et il s'agit, il faut en être convaincu, M. le Président, d'une mesure strictement financière. Le gouvernement, par son projet de loi n° 117, privilégie une approche strictement financière. Et pourquoi est-ce que j'insiste sur les mots «strictement financière»? C'est pour dire que, dans ce projet de loi, justement, il n'y a pas de compassion, dans ce projet de loi, il n'y a pas de souci d'équité, dans ce projet de loi, il n'y a pas de conscience sociale, dans ce projet de loi, il n'y a pas de sensibilité par rapport à la situation des gens qui sont démunis dans notre société.

Tout ce qui compte du côté ministériel, c'est de faire de l'argent, d'imposer les taxes qui sont les plus déguisées qui soient, comme c'est le cas avec l'augmentation de la prime de l'assurance médicaments prévue par le projet de loi n° 117, et tout simplement de faire payer ceux-là mêmes qui n'ont pas le moyen de verser des sommes d'argent substantielles pour se procurer les médicaments dont ils ont besoin, d'une part, et, d'autre part, pour se procurer des médicaments de qualité.

Est-ce que la mesure qui est ici envisagée dans le projet de loi n° 117, M. le Président, va avoir des conséquences négatives pour une bonne partie de la population du Québec? La réponse est oui. Notamment, ça va avoir des conséquences négatives pour les personnes âgées. Qui dit cela? Ce n'est pas seulement l'opposition officielle. C'est déjà pas mal que l'opposition officielle le dise, puisque nous avons eu, après tout, plus de votes que le Parti québécois, que le parti ministériel, lors de la dernière élection provinciale. C'est déjà énorme que l'opposition le mentionne. Mais ce n'est pas seulement l'opposition qui le dit, M. le Président, c'est aussi l'Association des hôpitaux qui dit: Voilà, faisons attention ici, parce qu'on fait payer des gens qui sont dépourvus. Ça a des conséquences négatives, ce projet de loi n° 117, et ça a des conséquences négatives notamment pour les clientèles les plus vulnérables et surtout pour les personnes âgées.

Est-ce que l'opposition officielle, M. le Président, est la seule instance à avoir dénoncé l'approche exclusivement financière qui est ici privilégiée par le gouvernement? La réponse est non. Nous ne sommes pas les seuls à l'avoir dénoncée. Nombreux sont les organismes, nombreuses sont les institutions qui, dans la société québécoise, ont également dénoncé ici l'augmentation de la prime d'assurance médicaments. Je peux vous mentionner deux institutions fort importantes qui finalement elles aussi ont dénoncé le projet de loi n° 117. Il s'agit du Collège des médecins, ce n'est quand même pas rien; il s'agit aussi de l'Ordre des pharmaciens du Québec, ce n'est pas rien ça non plus. Ces deux organismes-là ont vertement dénoncé l'approche strictement, je dirais, financière, l'approche matérialiste, l'approche sans compassion qui est ici privilégiée par le gouvernement du Québec.

Pourquoi est-ce que, nous, selon vous, dans l'opposition officielle, nous portons à la défense non seulement de l'assurance médicaments, mais également nous nous portons à la défense de l'idée que les primes d'assurance médicaments soient les plus basses possible? Pourquoi le faisons-nous? C'est parce que nous reconnaissons l'importance des médicaments dans notre système de santé actuel, dans notre système de santé contemporain.

Vous savez tout comme moi, M. le Président, que les médicaments, dans le fond, sont aujourd'hui des outils thérapeutiques extrêmement importants dans notre système de santé. Les médicaments, ça fait partie intégrante aujourd'hui de nos outils thérapeutiques. Les outils thérapeutiques sont utilisés dans l'ensemble des hôpitaux du Québec. Bien entendu, certains médicaments – vous le savez aussi, M. le Président – remplacent les interventions chirurgicales, donc, ce faisant, génèrent des économies substantielles dans notre réseau de la santé. Il ne faut pas penser que les médicaments, c'est une mauvaise chose. Au contraire, les médicaments font en sorte qu'il puisse y avoir moins d'interventions chirurgicales dans certains cas, et, par ailleurs, le médicament peut générer des économies importantes en ce qui concerne la gestion de notre réseau de santé.

Vous savez qu'aujourd'hui, par ailleurs, les médicaments sont beaucoup plus efficaces qu'ils ne l'étaient auparavant. Les médicaments sont beaucoup plus faciles à utiliser, ils sont beaucoup plus variés, par ailleurs – il y a une grande variété de médicaments qui sont offerts à la population – et cette variété de médicaments qui existent aujourd'hui et l'efficacité des médicaments a d'ailleurs permis en bonne partie la mise en place de réformes importantes dans notre système de santé.

Je vois, M. le Président, que vous vous interrogez. Vous vous dites: Qu'est-ce que le député de Chapleau entend par le fait que les médicaments aient favorisé des réformes importantes dans notre système de santé? Eh bien, je vous donne tout simplement deux exemples, M. le Président, pour répondre justement à votre curiosité intellectuelle insatiable, d'ailleurs probablement le propre de tous les notaires du Québec.

Le premier exemple, M. le Président, c'est que les médicaments ont permis la désinstitutionnalisation, au Québec, des personnes qui sont atteintes de maladie mentale. Et, par ailleurs, les médicaments ont permis, en bonne partie, que nous réalisions le virage ambulatoire. Maintenant, la population va peut-être se demander: Qu'est-ce que ça veut dire, le virage ambulatoire? Parce que c'est un concept évidemment qui est à la mode, mais c'est un concept qui est mal défini. C'est un concept dont malheureusement nous ne saisissons pas tout à fait l'importance. Le virage ambulatoire, ça veut dire qu'on peut remplacer, dans bien des cas, la présence à l'hôpital par des soins à domicile. Le virage ambulatoire favorise le fait qu'il y ait des soins appropriés à domicile. Le virage ambulatoire favorise aussi ce qu'on appelle les «chirurgies d'un jour» et ça favorise la diminution du nombre de jours pour les chirurgies nécessitant l'hospitalisation.

Alors, si aujourd'hui il peut y avoir des soins à domicile, si aujourd'hui il peut y avoir des chirurgies d'un jour, si aujourd'hui certaines chirurgies requièrent une durée d'hospitalisation qui est moins longue qu'auparavant, c'est grâce aux médicaments, M. le Président. Si aujourd'hui il peut y avoir une désinstitutionnalisation des personnes atteintes de maladies mentales – et Dieu sait que ça a été important à un moment donné dans la réforme de notre système de santé au Québec – c'est justement parce que les médicaments existent et c'est justement parce qu'aujourd'hui les médicaments sont plus variés, plus efficaces, et bien entendu aussi, je dirais, plus faciles à utiliser qu'auparavant.

(12 h 10)

Et vous savez aussi, M. le Président, jusqu'où les médicaments sont essentiels pour le traitement des maladies chroniques. Pensons rien qu'un instant aux malades chroniques, c'est-à-dire les gens qui sont obligés de prendre beaucoup de médicaments, qui sont obligés de prendre beaucoup de médicaments chaque jour et qui sont par ailleurs obligés de prendre beaucoup de médicaments chaque jour pendant toute leur vie, pensons à eux et imaginons ce que représente dans leur cas le fait de doubler la prime d'assurance médicaments, et non seulement la doubler, mais par ailleurs, par la suite, l'indexer sur une base annuelle, ce qui fait que la prime va sans cesse augmenter au cours des prochaines années. Pensons à ces gens qui sont dans la souffrance, pensons à ces gens qui sont finalement en proie à des maladies sévères, qui sont obligés de consommer, malgré eux bien entendu, pour lutter contre leurs souffrances, pour rétablir leur santé, beaucoup de médicaments. Pensez à l'impact que va avoir le projet de loi n° 117 dans leur vie. Et, trop souvent, M. le Président, vous le savez comme moi, ces gens-là qui ont des problèmes de santé, ces gens-là qui souffrent de maladies chroniques, eh bien, trop souvent, ce ne sont pas les gens qui font partie de la population la plus riche de la société. Souvent, ce sont des gens qui vivent déjà dans une situation économique qui est précaire et, je dirais, qui vivent même dans des situations sociales qui sont déplorables.

Donc, la loi n° 117, M. le Président, va avoir des conséquences, va avoir des répercussions qui sont, bien entendu, indésirables: ça va augmenter les visites à l'urgence, ça va augmenter le nombre de visites à l'urgence de la part d'une partie de la population du Québec, ça va augmenter le nombre de visites médicales, ça va venir saper toute l'énergie que l'on avait mise dans le virage ambulatoire jusqu'à présent. Donc, forcément, nous sommes en présence d'une situation qui risque d'être catastrophique, et c'est pourquoi l'opposition officielle, sans même que le parti ministériel ne s'en soucie – c'est ça, le pire, M. le Président – dénonce donc fermement, dénonce avec ardeur le projet de loi n° 117.

Forcément, M. le Président, il faut admettre que rien n'explique le projet de loi n° 117 si ce n'est le fait que, de la part de ce gouvernement, il y a absence d'une vision globale. Nous ne sommes pas les seuls à le dire, le Conseil de la santé et du bien-être a également recommandé à la ministre de la Santé de décloisonner les budgets de l'administration de l'assurance hospitalisation, de l'assurance maladie et de l'assurance médicaments, afin de développer des solutions plus efficaces, plus cohérentes et plus économiques. Quelle réponse a reçue le Conseil de la santé et du bien-être à cette demande fort légitime de sa part? Quelle réponse a-t-il reçue, ce Conseil, par le gouvernement? Ça a été une fin de non-recevoir.

Par ailleurs, la Conférence des régies régionales a proposé l'abolition du régime mixte – le régime mixte, c'est le régime public-privé – la création d'un seul et unique régime universel avec des cotisations plus faibles et la gratuité pour les personnes âgées et les plus démunies. Quelle réponse a eue cette Conférence de la part du gouvernement? Ça a été une fin de non-recevoir, ça a été un non.

Le Protecteur du citoyen a réclamé l'intégration du régime d'assurance médicaments au régime d'assurance maladie du Québec afin d'assurer une couverture juste et équitable à tous les citoyens. Quelle réponse a-t-il eue, le Protecteur du citoyen? Ça a été encore une fois un non, un non sans compassion, un non sans merci de la part du gouvernement.

La Coalition sur l'assurance médicaments, M. le Président – et ce n'est pas rien, cette Coalition-là représente 206 groupes, associations et regroupements – a demandé la révision immédiate du régime afin d'assurer la gratuité des médicaments pour toutes les personnes vivant sous le seuil de faibles revenus établi par Statistique Canada, soit 17 000 $ à peu près, 17 571 $. Donc, les gens de la Coalition ont par ailleurs demandé, réclamé l'intégration complète des médicaments dans le système public de santé. Quelle réponse ont-ils eue de la part du gouvernement? Ça a été non, encore une fois. Je répète: Non, sans compassion. Et que dire, maintenant, M. le Président, en terminant, du Conseil des aînés, que dire du Conseil des aînés qui a réclamé l'abolition pure et simple du régime et qui a prôné le retour au fonctionnement antérieur? Lui aussi, le Conseil des aînés, M. le Président, s'est fait dire non par le gouvernement.

Alors, tout ce que fait aujourd'hui l'opposition officielle, c'est de rappeler que le projet de loi n° 117 va vraisemblablement avoir des conséquences négatives, des conséquences négatives pour une partie de la population du Québec qui est particulièrement vulnérable. C'est un projet de loi qui double d'un seul coup les primes annuelles d'assurance médicaments et qui par ailleurs indexe ces primes-là par la suite, ce qui veut dire qu'il va y avoir des augmentations le 1er janvier de chaque année, il va y avoir des augmentations de la prime d'assurance médicaments. Tout ça pour que le gouvernement ait plus d'argent dans ses coffres, M. le Président, comme s'il n'en avait pas déjà assez, que ce soit ici au Québec ou que ce soit à Toronto. Et tout ce que fait l'opposition officielle, c'est de joindre sa voix, M. le Président, à ces nombreux groupes, à ces nombreuses associations, à ces nombreuses coalitions, conseils et autres organismes qui ont dénoncé le projet de loi n° 117.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Chapleau. Alors, nous allons maintenant céder la parole au député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci. Merci, M. le Président. Je vais essayer de convaincre – malheureusement, pour le peu de minutes que j'ai – mes collègues ministériels qu'ils font fausse route actuellement en présentant le projet de loi n° 117. Et, déjà, il y a deux ans, lorsqu'on a voté la Loi sur l'assurance-médicaments, nous nous étions levés dans cette Chambre pour expliquer que ce que, vous, comme gouvernement, vous mettiez de l'avant ne fonctionnerait pas.

Aujourd'hui, force est de constater que ça n'a pas fonctionné. Et les modifications que vous proposez, encore une fois, ne fonctionneront pas plus. Pourquoi? Parce qu'il y a, au départ, M. le Président, un vice fondamental à l'intérieur du projet de loi et à l'intérieur de tout ce mécanisme d'assurance médicaments: on ne confond pas une politique sociale avec une politique d'assurance. Si vous gérez une politique d'assurance, vous devez, si vous êtes un gestionnaire d'une compagnie d'assurances, arriver à établir le juste coût, en évaluant les risques, de ce que vous proposez et de ce que vous mettez de l'avant. Ça, c'est l'approche d'une compagnie d'assurances.

Si vous faites une politique sociale, vous pouvez, et on l'avait décidé dans le temps, dire: Certaines personnes, catégories de personnes dans une société ont droit à des bénéfices soit parce qu'elles sont relativement ou particulièrement défavorisées soit parce qu'elles ont un certain âge. C'était ce qu'était la situation avant, où, par exemple, les personnes qui bénéficiaient de l'aide sociale ou les personnes qui avaient dépassé l'âge de 65 ans pouvaient avoir accès à leur prescription de médicaments en payant une modeste somme de 2 $.

(12 h 20)

Vous avez voulu changer ce mécanisme parce qu'il vous coûtait trop cher. Et on a instauré un principe, une loi sur l'assurance-médicaments où, à la fois, on veut tenter d'arriver au juste coût, premièrement, mais en même temps on n'a pas abandonné complètement les objectifs de compassion, parce qu'on maintient encore des barèmes minimaux à partir desquels on doit contribuer à l'assurance médicaments. Alors, vous comprenez bien, M. le Président? Et c'est ça, essentiellement, ce qui est vicié à l'intérieur de ce projet de loi.

Lorsqu'à l'article 1 on dit que le régime, les cotisations au régime vont augmenter avec le coût des médicaments, d'ailleurs, il faut faire bien attention, M. le Président, c'est quelque chose qui est, sur le plan gestion d'une compagnie d'assurances, tout à fait compréhensible. Vous offrez, vous assurez un bien. Si ce bien ou le coût de ce bien augmente, il est naturel et logique que les primes augmentent.

Ça devient tout à fait moins acceptable lorsque ce bien est un bien de première nécessité comme l'est le médicament, premièrement, et que les consommateurs de ce bien de première nécessité sont pour la plupart... Et on regarde les taux de consommation, c'est surtout lorsque les personnes deviennent plus âgées qu'elles ont une consommation plus importante de médicaments. Lorsque ces personnes ont dépassé 65 ans, à ce moment-là, elles ont des revenus qui ne sont plus indexés, qui, pour la plupart, sont des revenus de pension qui sont des revenus fixes. Et alors les primes d'assurance pour participer à l'assurance médicaments vont augmenter plus vite même que l'indice des prix à la consommation.

Parce que vous savez parfaitement, M. le Président, que, depuis les 10 dernières années, l'augmentation des prix des médicaments a dépassé, et de loin, l'augmentation moyenne de l'indice des prix à la consommation. Alors, on est pris dans ce dilemme et dans ce régime qui est bancal. C'est ça qui est le problème: ce régime est bancal. Il se veut à la fois un régime d'assurance collective et aussi un régime de politique sociale. Et on ne peut pas – je vais vous démonter encore, dans un instant, un autre point, à quel point il est bancal – à la fois poursuivre ces deux objectifs à même le même régime.

Voyez-vous à quel point ce régime, il est inique aussi, il est injuste? Pourquoi? Parce que, comme on veut qu'il équilibre ses coûts, donc que les primes équilibrent les dépenses et qu'on inclut à l'intérieur un certain nombre de politiques sociales, seuls, M. le Président, les participants au régime vont contribuer pour soutenir les politiques sociales qui sont incluses dans le régime, c'est-à-dire soutenir les prix des médicaments pour les personnes qui sont sur la sécurité du revenu et pour les personnes qui sont les personnes âgées qui ont quand même un régime un peu particulier.

Comprenez bien, M. le Président, que vous et moi qui actuellement avons notre propre régime privé, c'est-à-dire le régime des fonctionnaires et des employés de l'Assemblée nationale, ne participons pas à ce régime-là. Donc, nos primes sont couvertes par quelque chose de différent. Et toutes les mesures sociales incluses à l'intérieur du projet de loi n° 117, qui visent à ne pas charger le véritable coût des médicaments aux personnes – et je trouve qu'il faut avoir des mesures sociales dans ce sens-là – vont être reportées sur les autres qui n'ont pas accès aux régimes d'assurances privés, comme vous, moi et beaucoup de gens qui ont quand même un certain revenu peuvent se payer.

Et il y a encore, à l'intérieur de ce projet de loi, une répartition du risque injuste envers ceux qui participent au régime public, vous comprenez? Ça, c'est tout le problème que l'on a lorsqu'on veut à la fois poursuivre des objectifs d'une politique sociale et, deuxièmement, des objectifs de politique d'assurance.

Deuxième élément de l'incongruité que vous voyez à l'intérieur de ce projet de loi, vous, puisque vous avez une formation... Les notaires connaissent beaucoup de choses dans la vie. Et vous avez vu aussi souvent qu'est-ce que fait une compagnie d'assurance. Une compagnie d'assurance, lorsqu'elle est obligée d'augmenter ses coûts, elle va étaler l'augmentation de ses primes sur deux ou trois ans. Parce que, si vous étiez président aujourd'hui, M. le Président, de la compagnie d'assurance médicaments qui gère cette compagnie d'assurances et si vous proposiez à vos personnes, à vos adhérents de doubler le coût de la prime, vous savez parfaitement ce qui arriverait: vos adhérents changeraient de compagnie d'assurances. Et c'est ce qui arriverait si vous gériez actuellement une compagnie d'assurances privée.

Ce que font les compagnies lorsqu'elles ont à augmenter les coûts, c'est ce qu'on appelle un phénomène de lissage, c'est-à-dire qu'elles augmentent progressivement les cotisations. Ici, puisque vous avez une clientèle captive, obligée quasiment de contribuer, parce qu'elle n'a pas le choix de contribuer ou de ne pas contribuer, le gouvernement ne se gêne pas et double, augmente de 100 % les primes – ça, c'est l'article 2. Et ça, c'est aussi un deuxième élément particulièrement inique. Il y aurait eu d'autres solutions.

Et on peut parfaitement concevoir qu'on mette sur pied un régime qui facilite l'accès aux médicaments, qui soulage, en politique sociale, l'accès aux médicaments, mais finançons-le à même le fonds consolidé lorsqu'on décide collectivement que certaines catégories de classes de la population doivent pouvoir avoir accès à des médicaments parce que ça fait partie de notre philosophie et que ça fait partie d'un principe de l'assurance santé que nous mettons de l'avant. Mais vous ne pouvez pas, du même souffle, M. le Président, avoir une approche qui dit: Je veux avoir un régime d'assurance qui est équilibré en soi, et, de l'autre côté, inclure dans ce régime d'assurance des éléments de politique sociale, qui d'ailleurs clairement ne sont pas suffisants pour poursuivre les objectifs que vous avez.

Vous regardez, M. le Président, encore la manière dont le gouvernement s'est senti mal à l'aise. Il s'est senti mal à l'aise dans son fonctionnement et il a dit: Le régime actuellement marche plus ou moins bien et, parmi les médicaments... Je n'entrerai pas ici dans la règle de 15 ans par rapport aux médicaments originaux et ce qu'on appelle les médicaments génériques. Il y a certaines provinces où on ne protège pas la recherche pharmaceutique comme nous le faisons ici, au Québec. Pour soutenir la recherche pharmaceutique, nous maintenons, sur une période de 15 ans après l'expiration du brevet, l'accès au médicament d'origine avant de recommander le médicament générique, M. le Président.

Alors ça, ça a évidemment directement un effet, puisqu'on a cette politique de soutien implicite, si vous voulez – et je pense que c'est une bonne politique d'avoir ce soutien, de maintenir un des fleurons de l'industrie québécoise ici, au Québec, qui est notre secteur pharmaceutique – mais une partie de l'existence et de la vigueur du secteur pharmaceutique au Québec vient justement de cette politique où on maintient sur les listes, c'est-à-dire sur les médicaments qu'on peut rembourser par nos régimes d'assurance, 15 ans après l'obtention du brevet, les médicaments dits médicaments d'origine et non pas des médicaments génériques.

(12 h 30)

Alors, M. le Président, vous voyez ce qu'il y a dans l'article 4 du projet de loi. Le gouvernement, parce qu'il est conscient qu'ici il est en train de débalancer en quelque sorte le système d'assurances, il dit: Pour compenser le Fonds d'assurance médicaments du Québec, le fonds consolidé – c'est-à-dire l'ensemble des impôts que vous payez et que chacun d'entre nous et tous les Québécois et Québécoises nous payons qui vont directement au fonds consolidé – le fonds consolidé, c'est l'article 4 du projet de loi, pourra faire des transferts du fonds consolidé au Fonds de l'assurance médicaments pour compenser en quelque sorte un choix gouvernemental, qui est un choix que nous trouvons tout à fait acceptable, qui est de dire: Puisque, nous, sur le plan de stratégie, de développement économique, nous croyons à l'heure actuelle qu'il faut maintenir cette politique qui aide en quelque sorte les compagnies pharmaceutiques mais que cette politique est pénalisante pour le Fonds d'assurance médicaments, à ce moment-là il y aura un transfert du fonds consolidé vers le Fonds d'assurance médicaments pour compenser en quelque sorte le fait qu'on n'oblige pas le recours aux médicaments génériques dès le début.

Mais vous voyez, M. le Président, que, si on appliquait ce même principe qui est un peu une entorse en quelque sorte au principe général d'une compagnie d'assurances, on devrait – et c'est important de bien le comprendre – avoir la même approche lorsque, à l'intérieur du régime d'assurance médicaments, on fait porter au régime d'assurance médicaments, qui devrait théoriquement être un régime d'assurance pur, des objectifs qui sont des objectifs aussi éminemment louables, qui sont ceux de soutenir les personnes les plus défavorisées qui ne peuvent pas payer les primes. D'ailleurs, à cet effet-là, je crois que l'augmentation de prime est absolument extrêmement pénalisante pour les personnes les plus défavorisées. Comprenez donc qu'à partir d'un revenu de 18 360 $, ce qui n'est pas quand même extraordinaire, vous allez avoir un doublement de votre prime, doubler la prime, une augmentation de 100 %.

Alors, ce que, nous, nous disons de ce côté-ci de la Chambre, on dit que l'accès aux médicaments est quelque chose qui doit être inclus réellement dans notre approche au régime de santé. Le choix du véhicule, le véhicule que vous avez mis de l'avant pour atteindre ce but-là, ce que vous avez essayé d'utiliser, qui est une espèce de système bizarroïde où vous incluez à la fois une politique sociale et à la fois une politique d'assurance, a démontré déjà qu'il ne fonctionnait pas. Rappelez-vous lorsque le député de Charlesbourg avait proposé ceci. Il disait: Oui, je vous garantis, à l'heure actuelle, qu'on pourra rester à l'intérieur des primes que je mets de l'avant. C'était évident pour toute personne qui connaît un peu la question que la mécanique qu'on mettait de l'avant ne pouvait pas fonctionner avec ce niveau de prime, premièrement, et était virtuellement faussée dès le départ parce qu'elle incluait des mesures qui étaient des mesures tout à fait sociales, que vous ne pouviez pas contrôler et sur lesquelles les risques étaient difficilement évaluables. C'était prévisible, M. le Président. Deux ans après, le système est en faillite, il faut qu'on revienne devant les parlementaires, il faut qu'on dise: Il faut augmenter les primes ou augmenter les contributions.

Mais, comme je vous l'ai dit tout à l'heure – et vous l'avez bien compris, M. le Président – la manière dont on augmente les contributions et sur qui on fait peser en quelque sorte le fait que le régime est en difficulté, c'est sur la clientèle captive. Comprenez-moi bien, c'est sur la clientèle captive. Vous, vous pourriez demain choisir, si vous étiez à votre compte, par exemple, si vous étiez assuré en fonction d'un régime d'assurance médicaments, si le régime ne vous satisfaisait pas, de passer à un autre régime. Mais actuellement on a une clientèle captive à qui on impose un doublement de prime, ce qui est totalement inique. Si vous étiez en affaires, votre compagnie d'assurances gouvernementale serait fermée demain, il n'y a personne qui resterait dans ce genre de compagnie qui augmente comme ça les primes.

Alors, quelle est la solution? Je crois qu'il aurait fallu revenir à une des recommandations, qui était celle de l'Association des régies régionales. L'Association des régies régionales disait: Il n'y a pas lieu vraiment de distinguer entre l'accès aux médicaments et l'accès à l'ensemble des soins de santé, surtout qu'il y a des gains et des pertes. Parce qu'on renvoie les gens plus rapidement – c'est-à-dire le virage ambulatoire – que les gens restent moins longtemps à l'hôpital, il y a des économies par rapport au système de santé parce qu'on maintient moins longtemps les gens à l'hôpital. Par contre, il y a un coût pour le réseau d'assurance médicaments, puisque, si les gens ne sont plus à l'hôpital, ils doivent payer leurs propres médicaments. Donc, il y a un équilibre entre les deux. Et l'Association des régies régionales nous disait: Écoutez, vous devriez avoir une vision globale, une vision intégrée, non plus séparer l'assurance médicaments du reste de la santé.

Le Protecteur du citoyen avait aussi un autre point de vue, il disait: Ce n'est pas correct d'avoir seulement une clientèle captive qui, elle, doit assumer cette politique sociale. Faisons un régime universel qui couvre tout le monde, privé et public. Là, à ce moment-là, il répondait au deuxième type d'argument qui est celui qu'on fait payer les politiques sociales incluses dans le régime d'assurance médicaments seulement à une fraction de la population, les gens qui forment la clientèle captive.

Alors, très franchement, si le gouvernement a d'autres objectifs que des objectifs purement financiers – et je suis prêt à le croire là-dessus, comme des fois j'en doute – on ne peut pas continuer à avoir ce régime bancal. Il faut avoir l'un ou l'autre: soit on a un régime d'assurance qui va être, donc, un régime d'assurance universel, position du... Je vais terminer brièvement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Malheureusement, votre temps est déjà écoulé. Je vous remercie infiniment. À ce stade-ci, je me dois de vous interrompre, malgré le fait que votre allocution était très intéressante.

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons maintenant céder la parole au député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Ce projet de loi qui vient modifier à la hausse le montant maximal de la prime annuelle, la faisant passer de 175 $ à 350 $, il introduit également une disposition visant l'indexation annuelle de ladite prime. En décembre 1999, la ministre de la Santé et des Services sociaux déposait un rapport intitulé Évaluation du régime général d'assurance médicaments . Ce rapport précisait que, en 1999-2000, les médicaments pour les personnes âgées et les prestataires de l'aide sociale, financés par le fonds consolidé, coûteraient 122 millions de plus que les crédits prévus. Quant au Fonds de l'assurance médicaments qui finance 1,5 millions d'adhérents, il générerait un déficit accumulé de 79 millions à la fin de l'année financière 2000.

En février 2000, la commission des affaires sociales procédait à une consultation générale portant sur un document intitulé Pistes de révision du régime général d'assurance médicaments . La majorité des groupes ne se sont pas prononcés sur le montant de l'augmentation éventuelle de la prime, alléguant qu'ils ne possédaient pas l'expertise nécessaire pour le faire. Dès le départ, la décision de la ministre de doubler les primes était arrêtée, et ce, peu importent les recommandations ou les suggestions des groupes.

L'article 1 du projet de loi, M. le Président, vient augmenter le montant de la prime annuelle de 175 $ à 350 $. Une personne seule payait 175 $, avec un revenu de 15 235 $; après l'adoption de ce projet de loi, cette personne verra sa prime doubler à la hauteur d'un revenu de 18 360 $. Un couple sans enfant avec un revenu de 26 350 $ payait 350 $, 175 $ deux fois; il paiera dorénavant 700 $, à la hauteur du revenu familial de 30 933 $.

(12 h 40)

L'article 1 prévoit également que ladite prime de 350 $ sera indexée, M. le Président, le 1er janvier de chaque année, selon un taux d'ajustement qui sera fixé par la Régie de l'assurance maladie. Ce taux sera éventuellement déterminé par règlement. Comme le coût du régime d'assurance médicaments a augmenté de 15 % par année depuis 1997, on peut présumer que les ajustements annuels seront substantiels. La ministre veut mettre en place des mesures visant à freiner l'augmentation des coûts du régime. Son prédécesseur, Jean Rochon, tenait le même discours en juillet 1997 en promettant l'élaboration d'une politique du médicament ayant comme objectif le contrôle des coûts du médicament. Ladite politique n'a jamais vu le jour.

L'article 2 du projet de loi vient modifier les paramètres entourant le calcul de la prime. Pour une personne seule, les premiers 10 860 $ du revenu seront exemptés. Un taux de cotisation de 4 % sera applicable sur les 5 000 $ du revenu supplémentaire. Au-delà de ces 15 860 $ du revenu, un taux de 6 % sera appliqué jusqu'à concurrence de la prime maximale, soit 350 $. Pour un couple d'adultes, les premiers 17 600 $ du revenu seront exemptés. Un taux de cotisation de 4 % sera applicable sur les 5 000 $ de revenus supplémentaires. Au-delà de ces 22 600 $ de revenus, un taux de 6 % sera appliqué jusqu'à concurrence de la prime maximale de 700 $.

D'autre part, l'article 4 prévoit qu'une compensation financière sera accordée à la ministre de la Santé et des Services sociaux afin de combler les pertes financières générées par la non-participation... du prix le plus bas, prix des médicaments génériques. D'après la ministre, pour l'année 2000-2001, le Fonds d'assurance médicaments recevra une contribution de 9 millions et le fonds consolidé, une contribution de 13 millions, pour un total de 22 millions.

M. le Président, plusieurs groupes ont fait beaucoup de commentaires sur le projet de loi n° 117. Parmi ces groupes, le Collèges des médecins et l'Ordre des pharmaciens du Québec ont dénoncé l'approche exclusivement financière de la ministre. Les médicaments d'aujourd'hui font partie intégrante des outils thérapeutiques de notre système de santé. Certains médicaments remplacent l'opération chirurgicale et génèrent des économies substantielles au réseau de la santé. De plus, comme les médicaments sont plus efficaces, plus sélectifs et plus faciles à utiliser, ils ont permis la mise en place des réformes de notre système de santé, soit la... des personnes atteintes de maladie mentale et le virage ambulatoire – soins à domicile, chirurgies d'un jour, diminution du nombre de jours pour les chirurgies nécessitant l'hospitalisation. La ministre n'a pas pris en compte les économies générées par le virage ambulatoire dans l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux; elle a préféré prendre la voie la plus facile, soit la solution d'augmenter la prime de 100 % d'un seul coup pour régler son problème financier.

Devant cette absence de vision globale, le Conseil de la santé et du bien-être a recommandé à la ministre de décloisonner les budgets et l'administration de l'assurance hospitalisation, de l'assurance maladie et de l'assurance médicaments afin de développer des solutions plus efficaces, plus cohérentes et plus économiques. La Conférence des régies régionales a proposé l'abolition du régime mixte public-privé et la création d'un seul et unique régime universel avec des cotisations plus faibles et la gratuité pour les personnes âgées et les plus démunies. Le Protecteur du citoyen a réclamé l'intégration du régime d'assurance médicaments au régime d'assurance maladie du Québec afin d'assurer une couverture juste et équitable à tous les citoyens, M. le Président. La Coalition sur l'assurance médicaments, qui représente 206 groupes, associations et regroupements, a demandé la révision immédiate du régime afin d'assurer la gratuité des médicaments pour toutes les personnes vivant sous le seuil du faible revenu établi par Statistique Canada, soit 17 571 $. Ils ont réclamé également l'intégration complète des médicaments dans le système public de santé. Quant au Conseil des aînés, il a réclamé l'abolition pure et simple du régime et prôné le retour au fonctionnement antérieur.

Pour donner l'impression qu'elle recevait ces recommandations, la ministre a annoncé la mise sur pied éventuelle d'un nouveau comité multipartite chargé d'étudier la faisabilité et la pertinence d'instituer un seul régime d'assurance médicaments public et universel.

Depuis son implantation, le régime d'assurance médicaments a fait l'objet de nombreuses dénonciations de la part de différents intervenants oeuvrant auprès des personnes démunies et des personnes âgées. D'ailleurs, le rapport Tamblyn, rendu public le 26 mars 1999, est venu confirmer les effets pervers de ce régime, particulièrement chez les personnes âgées. Le rapport précise qu'une baisse de consommation des médicaments essentiels pour le traitement des maladies chroniques a engendré une augmentation de 66 % des événements indésirables, de 111 % des visites médicales et de 47 % des visites à l'urgence. Le projet de loi ne vient en rien corriger les faits dénoncés dans le rapport, notamment chez les personnes âgées, M. le Président. Depuis trois ans, le gouvernement est venu chercher dans les poches de nos aînés 836 millions de dollars en contribution pour le régime d'assurance médicaments: primes, franchise, coassurance. On est loin du 2 $ par prescription qui était exigé des personnes âgées jusqu'à concurrence de 100 $ par année.

M. le Président, j'aimerais en profiter pour vous citer quelques citations par différents groupes comme le Collège des médecins du Québec, l'Ordre des pharmaciens du Québec, le Conseil de la santé et du bien-être, la Coalition des médecins pour la justice sociale et le Conseil des aînés qui disent, et je les cite: «L'essentiel de notre message concerne le fait que l'administration de ce régime et les scénarios envisagés pour l'améliorer relèvent d'une approche strictement comptable et actuarielle, sans tenir compte d'une approche d'assurance qualité. La place du médicament doit être examinée aux côtés des autres composantes du système de soins. L'opportunité d'utiliser un nouveau médicament peut supplanter l'opportunité d'utiliser un lit d'hôpital ou une salle d'opération.» C'est le Collège des médecins du Québec, M. le Président.

Et je cite l'Ordre des pharmaciens du Québec: «Il est difficile de comprendre pourquoi l'État souhaite réduire le débat à une stricte perspective économique.» Le Conseil de la santé et du bien-être: «Si la coexistence des régimes privés et public soulève d'importantes questions d'équité, on peut en dire autant des mesures de primes, de franchise et de coassurance qui font partie du fonctionnement du régime public. De telles mesures freinent l'accès aux médicaments des adhérents, particulièrement des plus vulnérables. Même si des corrections ont été apportées récemment, la difficulté demeure. Il semble que ces mesures réduisent la consommation de tous les types de médicaments, même ceux qui sont efficaces et essentiels. Cela est pour le moins paradoxal de la part d'un régime dont l'intention est de garantir un accès équitable et raisonnable aux médicaments à une population éprouvant des difficultés particulières à se les payer.»

La Coalition des médecins pour la justice sociale, et je la cite, M. le Président: «La proposition de la ministre de la Santé d'augmenter les primes est déraisonnable et met en péril la santé de la population vulnérable du Québec. Ces mesures réduisent leur accessibilité aux médicaments essentiels.»

«Nous considérons, quant à nous – et c'est le Conseil des aînés que je cite – que vous avez oublié – en parlant du gouvernement du Parti québécois – un scénario dans les propositions, soit celui d'abolir le régime d'assurance médicaments et de prôner le retour au fonctionnement antérieur. Quand on s'est trompé de façon si évidente, il n'y a pas de mal à l'avouer et à revenir à un système où on avait un meilleur contrôle, quitte à en revoir certaines fonctionnalités.

«Le Conseil des aînés considère qu'une telle prise de décision nécessite plus d'éclairage, de précisions et de discussions qu'il nous a été permis de faire lors des processus.»

On a aussi, M. le Président, un constat de la part de l'Association des hôpitaux du Québec: «Notamment, les augmentations de la contribution se traduiront par un impact non souhaitable sur le virage ambulatoire. L'intégration de l'épisode des soins entre le centre hospitalier et le CLSC, telle que prévue dans un réseau intégré de soins et de services, sera freinée non seulement par l'absence d'harmonisation du statut du médicament entre les établissements, mais aussi par les pressions exercées sur les usagers, qui ne pourront plus assumer une hausse de la contribution. Il est étonnant que la MSSS ne rapporte pas ces faits dans son document d'évaluation.

(12 h 50)

«Nous constatons que le problème n'a pas été abordé dans sa globalité. Puisqu'il s'agit de soins pharmaceutiques requis dans le cadre d'une pathologie aiguë, il faut être conscient que le centre hospitalier devra gérer les impacts soit par les soins ambulatoires à l'urgence ou la médecine de jour. Plus important encore, une hospitalisation peut être requise.»

Le Conseil des aînés, M. le Président, comme je le mentionnais tantôt, lors de la création en 1996, avait déposé un mémoire dans lequel il signalait ne pas s'opposer au principe même du projet de loi qui voulait, d'une part, rendre les médicaments disponibles à l'ensemble de la population et, d'autre part, diminuer les coûts reliés à la consommation des médicaments. Toutefois, le Conseil des aînés était particulièrement préoccupé par les impacts négatifs qu'il pourrait y avoir sur la santé des aînés et aussi sur le faible seuil d'exemptions proposé par l'établissement d'une participation à la prime. Après un peu moins de trois ans de fonctionnement, les préoccupations du Conseil étaient fondées, puisque, bien que la couverture du régime ait été étendue à toute la population, le deuxième objectif, le contrôle des prix, s'avère un échec lamentable.

Il a été souvent mentionné, au cours des trois ans, les impacts négatifs de ces coûts sur l'usage des médicaments chez les aînés. Certains ont dû faire des choix entre une alimentation saine et équilibrée, le logement et l'achat des médicaments prescrits, M. le Président. L'étude du Dr Tamblyn en 1999 mentionne que l'introduction des contributions plus élevées a provoqué une baisse de la consommation des médicaments chez les personnes âgées – 9 % en moyenne. Les médicaments essentiels, comme ceux qui le sont moins, ont été touchés. La baisse de consommation de médicaments essentiels a entraîné des effets négatifs sur la santé des groupes plus vulnérables et une hausse de la consommation des autres services de santé: visites médicales, visites à l'urgence, hospitalisations et admissions en longue durée.

Le Conseil des aînés déplore le fardeau financier additionnel que le régime proposé impose aux aînés. La contribution moyenne des personnes aînées lors de l'achat des médicaments est passée de 49 $ en 1995 à 240 $ en 1998, d'autant plus que celle-ci s'ajoute aux nombreuses mesures qu'elles se sont vu imposer dans les derniers budgets, diminuant ainsi leur pouvoir d'achat.

Il y a des nouvelles préoccupations. Si on regarde de près les propositions du document Pistes de révision du régime général d'assurance médicaments , le Conseil des aînés est en accord avec les propositions concernant la maîtrise de la croissance des coûts, la création consultative du médicament à partir d'une fusion des mandats du Conseil consultatif et du Comité de revue de l'utilisation des médicaments.

La pauvreté relative des aînés au Québec a été démontrée par notre document, le document des aînés. On mentionne que 62,8 % des personnes âgées de 65 ans ou plus ont un revenu de moins de 15 000 $. En considérant uniquement les femmes aînées, ce sont 74,3 % d'entre elles qui ont un revenu moindre de 15 000 $. Seulement 14,9 % des personnes aînées ont un revenu de plus de 25 000 $. Il paraît illusoire de vouloir augmenter les tarifs d'assurance médicaments auprès de cette clientèle comme vous le proposez dans votre document sur les pistes de révision. Ceux qui paraissent un peu moins nantis, entre 15 000 $ et 25 000 $ de revenus par année, sont en fait dans une situation économique très précaire.

Prenons l'exemple d'une femme seule âgée de 80 ans, en perte d'autonomie modérée, qui nécessite certains services qu'elle trouve dans une résidence privée d'hébergement pour personnes âgées et ayant 17 000 $ de revenus par année, soit plus que les maximums fixés dans les scénarios 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Elle doit consacrer, uniquement pour se loger, se nourrir et obtenir certains services essentiels à sa condition, près de 14 500 $ par année, soit un tarif de 1 200 $ par mois, ce qui est le tarif moyen en résidence privée d'hébergement pour quelqu'un dans sa condition, lui laissant un maigre 2 500 $ par année pour se vêtir et avoir accès à un minimum de qualité de vie. Elle pourrait être réduite à devoir changer de milieu de vie et elle n'a plus de revenus suffisants pour se permettre d'y demeurer. L'angoisse de cette situation à elle seule pourrait détériorer sa santé et son bien-être.


Motion de report

M. le Président, suite à ces études des commentaires de plusieurs de ces groupes-là et pour aider un peu le gouvernement à pouvoir réfléchir, j'aimerais déposer une motion de report qui se lit comme suit:

«Que l'étude du principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, soit reportée de six mois.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Papineau. Alors, nous allons nous saisir de cette motion de report. À ce stade-ci, je vais suspendre nos activités pour faire une réunion avec les deux leaders, du gouvernement et de l'opposition, pour établir le temps de parole.

(Suspension de la séance à 12 h 56)

(Reprise à 15 h 9)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour, bon après-midi. Si vous voulez prendre place.

Si vous voulez vous asseoir.

Alors, lors de la suspension des travaux à 13 heures, M. le député de Papineau a présenté une motion de report sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Je déclare cette motion recevable.

À la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat de deux heures, le partage du temps est établi de la façon suivante: cinq minutes sont allouées au député indépendant, 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par le député indépendant pourra être distribué entre les groupes parlementaires. Les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Je suis prêt maintenant à entendre le premier intervenant.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion est adoptée? Non?

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'opposition officielle.

(15 h 10)

M. Paradis: Oui. Simplement une précision: Est-ce qu'on doit comprendre, du fait que personne ne s'est levé du côté ministériel, qu'il n'y aura pas d'intervenants du côté ministériel?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Je comprends malheureusement que le leader de l'opposition ne comprend pas. M. le Président, que ceux qui ont proposé une telle motion la motivent. Donc, nous vous donnons la chance inespérée de parler en premier et de tenter de nous convaincre du bien-fondé de votre motion. Nous répliquerons en temps et lieu, ne vous inquiétez pas.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, simplement pour rappeler à mon bon ami le jeune leader adjoint du gouvernement une décision qui date de 1986 de la présidence de l'Assemblée nationale dans le cadre de l'application de l'article 240 en vertu duquel la motion a été présentée. Je vous cite la décision de la présidence: «Depuis, il est d'usage que le premier intervenant, lors de ce débat restreint, ne provienne pas du groupe parlementaire qui propose le report de l'adoption du principe du projet de loi.»

Je vous demande à ce moment-ci, M. le Président, de maintenir cette décision et de m'indiquer si de l'autre côté il n'y a personne qui veut parler. À ce moment-là, nous saurons à quoi nous en tenir et nous occuperons le temps nécessaire pour que le leader comprenne bien de quoi il s'agit.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, le vieux leader de l'opposition l'a bien dit, «d'usage». Donc, ce n'est pas une loi, c'est une coutume. S'il contemple le passé, moi, je préfère regarder vers l'avenir. Alors, qu'il motive le bien-fondé de sa motion, et, comme je l'ai indiqué tantôt, nous répondrons.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, moi, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. Je regarde des deux côtés de la Chambre.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. À ce moment-ci, je vous demande d'interpréter l'article 240 de notre règlement et de statuer si les usages sont maintenus ou si les usages sont renversés.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous allons suspendre quelques instants et nous allons regarder ça.

(Suspension de la séance à 15 h 12)

(Reprise à 15 h 39)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place.

Alors, suite à la demande du leader de l'opposition officielle, voici ma décision à cet effet. L'usage veut que le premier intervenant dans ce débat soit un membre du groupe parlementaire différent de celui d'où provient la motion. Celui qui a proposé la motion de report n'a plus de droit de parole à ce moment-ci. Même si l'usage est à l'effet que présentement un député du côté ministériel devrait être le premier à prendre la parole, le président n'est pas lié par cette tradition. En effet, il peut accorder la parole à celui qui s'est levé le premier. De plus, constatant qu'aucun député ministériel ne veut prendre la parole à ce moment-ci, je dois reconnaître tout autre député qui veut initier le débat.

(15 h 40)

De toute façon, selon la répartition du temps qui a été décrétée précédemment, le groupe parlementaire de l'opposition pourrait se voir attribuer le temps non utilisé par le groupe formant le gouvernement si ce dernier ne veut utiliser tout son temps. C'est seulement au moment où un des groupes aura utilisé tout son temps que je pourrai voir à cette redistribution s'il n'y a pas d'intervenants de l'autre groupe. Dans les circonstances, il serait souhaitable qu'il y ait alternance entre les groupes parlementaires, mais je ne peux imposer un droit de parole à un parlementaire qui ne veut pas se lever pour s'adresser à l'Assemblée à ce moment-ci. C'est au président qu'appartient le privilège d'accorder le droit de parole à un député.

Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Strictement, M. le Président, de façon à bien comprendre la décision que vous venez de rendre, vous avez maintenu, si je comprends bien, la décision rendue par quelqu'un qui vous a précédé sur le banc le 9 juin 1986. La décision est maintenue. Maintenant, en maintenant la décision, vous appliquez les articles 179 et 180 de notre règlement:

«179. Fondements de la procédure.

«La procédure de l'Assemblée est régie:

«1° par la loi;

«2° par son règlement et ses règles de fonctionnement;

«3° par les ordres qu'elle adopte.

«180. Au besoin, la procédure est déterminée en tenant compte des précédents et des usages de l'Assemblée.»

Est-ce que la décision que vous venez de rendre, M. le Président, est fondée à la fois sur l'article 180 et sur la décision rendue le 9 juin 1986?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, c'est sûr que la présidence doit accorder le droit de parole en considérant l'usage, mais elle ne peut aussi préjudicier aucun parlementaire. Alors, à ce moment-ci, le partage du temps a été fait entre deux groupes, 50 %-50 %. Tel que je l'ai mentionné au début, suite à la motion de report du député de Papineau, lui ne peut pas intervenir à ce moment-ci. Lorsqu'un député propose une motion de report dans l'intervention qu'il a faite avant de déposer sa motion de report, son discours est à l'effet qu'il conclut par une motion de report, et c'est la même chose dans une motion de scission. Dans ces cas-là, les députés qui ont le droit de parole, qui ont proposé ces deux motions-là, ne peuvent pas parler.

L'usage, à ce moment-là, tout simplement, c'est que, lorsque la motion de report ou la motion de scission a été accordée, le prochain qui doit intervenir doit être de l'autre groupe parlementaire pour répondre à la motion de report qui a été proposée. Mais, s'il n'y a pas de député de la formation parlementaire qui veut intervenir à ce moment-ci, ce n'est pas à la présidence de restreindre le droit de parole à cette Assemblée. Donc, je ne veux pas que le temps de parole des deux groupes soit préjudicié par la présidence. Et la présidence n'est pas liée par l'usage, la présidence doit voir à ce que tous les parlementaires aient un droit de vote régulier, et c'est ce que je vais faire.

M. Paradis: M. le Président, compte tenu du fait qu'il y a eu une entente, que vous avez ratifiée, à l'effet que le temps était divisé de façon égale, cinq minutes réservées au député indépendant, et que le temps non utilisé par une formation politique accroissait à l'autre, y inclus le temps du député indépendant, à ce moment-ci, compte tenu de l'usage, si, de notre côté, nous sommes informés que du côté gouvernemental il n'y a pas d'intervenants sur cette motion, nous allons préparer nos interventions en conséquence. Si nous sommes informés qu'il n'y a pas d'interventions mais que, de façon à casser une décision qui a été rendue par la présidence, de façon à éviter de se soumettre à l'article 180 de notre règlement, de façon à éviter de se soumettre à la jurisprudence, on souhaite de façon pratique renverser la présidence en disant: Nous, on n'en a pas pour le moment, mais, dès qu'il y en aura un qui aura terminé du côté ministériel, on en aura et on compte utiliser notre temps, à ce moment-là on fait indirectement ce qu'on n'a pas le droit de faire directement et on est en parfaite violation de l'article 41 de notre règlement. Dans les circonstances, M. le Président, je vous invite à demander au parti ministériel s'il compte intervenir. S'ils nous disent qu'il n'y a pas d'interventions, pas de problème, nous allons intervenir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'opposition officielle, dans les remarques qu'a faites le leader adjoint du gouvernement, il a indiqué dans ses propos que le gouvernement répondrait plus tard. C'est ce qu'il a dit, alors je présume qu'il va y avoir des gens qui vont utiliser leur droit de parole du côté du gouvernement, parce qu'il a dit qu'ils étaient pour vous répondre.

M. Paradis: À ce moment-ci, M. le Président, nous indiquons également au gouvernement que nous répondrons plus tard.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, moi, ce que je souhaiterais concernant l'usage... Ha, ha, ha! Évidemment, si un membre du côté ministériel veut se lever à ce moment-ci, ça... Si vous ne voulez pas, je pourrais reconnaître un premier intervenant. M. le député... Oups!

M. Paradis: M. le Président, à ce moment-ci, nous vous indiquons que nous allons répondre au gouvernement, à moins que le gouvernement n'ait personne à faire entendre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, c'est très bien. Le temps de parole a été bien réparti, et je vais voir, à l'utilisation, que le temps de parole soit selon ce qui a été décidé entre les leaders. M. le...

M. Paradis: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Paradis: M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre, à ce moment-ci – et je veux être très clair – que le gouvernement n'est pas en train de renverser la décision rendue par les présidents de l'Assemblée nationale et l'interprétation de l'article 180? Si on nous indique qu'il n'y a pas personne qui va intervenir, à ce moment-ci nous allons intervenir. Mais, s'il y a quelqu'un qui a l'intention d'intervenir du côté gouvernemental, il se doit de le faire immédiatement.

Des voix: Non, non, non.

M. Paradis: Je m'excuse, M. le Président, là, je vous demanderais à ce moment-ci de suspendre nos débats et de vérifier, parce qu'on est en train de renverser des décisions de la présidence, de l'autre côté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais prendre quelques instants, là.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Non, non. Écoutez, la présidence va prendre quelques moments. J'ai des experts avec moi, puis on va regarder ce qui vient d'être dit sur les articles 179 et 180. Je vais vous revenir tout de suite.

(Suspension de la séance à 15 h 46)

(Reprise à 15 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez vous asseoir.

Alors, j'ai suspendu pour consulter le conseiller à la présidence, mais le leader adjoint du gouvernement a manifesté l'intention d'intervenir. Je vais l'écouter, par courtoisie, avec plaisir.

M. Boisclair: Simplement, M. le Président, à deux reprises, vous avez invité les parlementaires à s'exprimer sur cette question. Je souhaite que le débat sur la motion de report puisse débuter le plus rapidement possible. Vous avez rendu une décision, les choses m'apparaissent claires. Est-ce qu'on peut procéder? En tout temps, dans un contexte où l'enveloppe est répartie, s'il y a des parlementaires qui veulent s'exprimer, ils s'exprimeront à l'intérieur de l'enveloppe qui a été consacrée par l'entente. Ça finit là.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La présidence peut vous dire qu'elle souhaite que le débat commence, c'est évident. Je voudrais vous rappeler, M. le leader de l'opposition officielle, une décision de M. Clément Richard le 24 octobre 1979, et la décision est la suivante: «Au sujet de l'ordre des intervenants dans un débat, la règle générale établie par l'article 92 – dans l'ancien règlement. Le premier qui se lève en s'adressant au président se voit accorder le droit de parole. Cependant, le président respecte une rotation entre les différentes formations politiques au début du débat. Par la suite, selon une tradition maintenant établie, le principe de l'alternance entre en jeu: un opinant pour, un opinant contre. Cette pratique n'est toutefois pas absolue et ne lie pas le président.»

Pour la bonne marche de nos travaux, il faut qu'il y ait une collaboration avec l'ensemble des députés. C'est pourquoi je souhaite qu'on respecte le plus possible l'usage. Je ne suis pas lié par l'usage, mais j'exprime ardemment, comme je l'ai mentionné tantôt, qu'un membre du gouvernement puisse s'adresser à ce moment-ci... Alors, M. le président du caucus du gouvernement et député d'Abitibi-Ouest.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, je veux utiliser le temps qui est prévu pour les membres de notre formation politique et indiquer qu'en ce qui me concerne – on vient d'en avoir une preuve – quand un leader de l'opposition veut donner congé à ses parlementaires, tous les moyens sont bons, hein, un bel après-midi à Québec pour, dans une mesure dilatoire, strictement appliquer quelque chose qui n'a rien d'autre comme objectif...

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je me serais attendu à ce que vous vous leviez pour rappeler le whip du gouvernement à l'ordre. Il impute à l'opposition officielle des motifs qui sont indignes alors que nous avons travaillé avec la présidence à faire progresser le droit parlementaire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez poursuivre. Je demande votre collaboration, nous sommes sur la motion de report. M. le président du caucus du gouvernement.

M. Gendron: Vous l'aviez, M. le Président, ma collaboration, et vous allez l'avoir. D'aucune façon je n'ai imputé quelque motif indigne. Ceux qui veulent faire perdre le temps de cette Chambre, ils ne sont pas de ce côté-ci, ils sont de l'autre côté. J'ai assez d'expérience dans une Chambre pour avoir constaté au fil des ans que je n'ai rien à redire contre des parlementaires qui voudraient s'exprimer contre un point de vue différent du nôtre. Ça, j'ai toujours accepté ça, c'est légitime, ça, c'est la véritable démocratie, et on la subit depuis une semaine, une semaine et demie, puisqu'il n'y a à peu près personne de l'autre côté qui ne s'est pas levé en disant, depuis quelques jours: Comment se fait-il qu'il y a juste nous, de notre côté, qui avons des choses à dire? Bien, c'est simple, ce n'est pas ma première fin de session, ça va être bientôt la vingt-quatrième, et ce à quoi on assiste, c'est que, légitimement, l'opposition officielle a un certain point de vue qui est différent du nôtre sur un certain nombre d'articles – je ne les énumérerai pas tous, mais il y en a plusieurs – et ça, ça fait partie du régime parlementaire courant.

Je n'ai aucun problème avec ça, M. le Président. Là où j'ai des problèmes, c'est avec la situation qui nous arrive. À l'article prévu au règlement, c'est très clairement exprimé: une motion de report ne peut être faite qu'une fois sur le principe de quelque chose quand des gens ont de la misère à se brancher, quand des gens veulent faire perdre du temps de la Chambre, quand ils veulent libérer leur monde pour autre chose. Alors, j'ai le droit de dire ça puis c'est très respectueux, c'est la réalité, vous allez le voir. Vous compterez les gens qui sont ici aujourd'hui, là, il n'y en a pas beaucoup de l'autre côté.

Alors, ils ont fait le choix de faire une motion de report inutile qui ne changera strictement rien d'autre que nous faire perdre l'après-midi, puisque, quand on aura à la régler, la motion de report, vous savez quelle sort on va lui donner parce que, nous, notre lit est fait, et notre lit est fait pour des raisons qui ont été largement expliquées.

J'ai déjà vu des motions de report, M. le Président, quand on acquiert la conviction que le gouvernement de ce côté-ci a été négligent, a été irrespectueux, n'a pas pris les moyens démocratiques que nous connaissons pour s'assurer du choix qu'il fait... qu'il y a eu moult consultations. Est-ce que, avant d'arriver à la décision, par le projet de loi n° 117, de faire ce que nous faisons, c'est-à-dire s'assurer que dorénavant on aura un fonds d'assurance médicaments équilibré... Parce que c'est ça, l'objectif du projet de loi, rien d'autre. Alors, je me rappelle que, quand il a été question de ça puis que ces gens-là nous ont alertés correctement, correctement en octobre, novembre, décembre, parce qu'on lisait ça dans les journaux, que susceptiblement la somme qui était prévue pour pourvoir au Fonds d'assurance médicaments ne serait pas suffisante – j'expliquerai pour quelles raisons tantôt – quand on a été saisis de l'affaire, le gouvernement, comme un gouvernement responsable, a décidé de regarder qu'est-ce qu'il en était exactement.

Je me rappelle que, lorsque ma collègue ministre de la Santé et des Services sociaux a convoqué tout ce beau monde en commission parlementaire, ils ne sont pas venus à moitié d'un, ils ne sont pas venus un quart de groupe, ça a été pendant des semaines et des semaines, M. le Président, que nous avons entendu toutes sortes de groupes, correctement – c'est ça, la démocratie – qui sont venus, lors d'auditions pas restreintes, des auditions très larges, ce qu'on appelle les auditions publiques, qui ont été tenues sur deux mois, février et mars, pour nous transmettre leur opinion. Ça, c'est respectueux de la démocratie. Ça, c'est correct lorsqu'on est dans un régime comme le nôtre.

Le Secrétariat des commissions, M. le Président, il n'a pas reçu trois mémoires ou la moitié d'un, il en a reçu 85. Les membres de la commission ont entendu 51 organismes au cours des 40 heures d'audiences réparties sur 11 jours de délibérations. Et, durant ces 11 jours là, vous avez une bonne idée qu'il n'y a pas beaucoup de points de vue qui ont été omis. Il n'y a pas beaucoup de points de vue qui ont été oubliés, puis c'est normal. La plupart de ceux qui sont venus se faire entendre, ils nous ont parlé de ce qu'on discute: oui, il est requis d'équilibrer le Fonds d'assurance médicaments. Je n'essaie pas de vous dire que, sur la méthodologie, on a l'unanimité de cette Chambre puis on va avoir l'unanimité de tous les citoyens et citoyennes du Québec, je ne mentionne pas ça, mais je vais vous rappeler quelques orientations ou quelques pistes qui ont été évoquées lors de cette consultation. Et, si ces gens-là avaient un petit peu le sens de la cohérence... D'ailleurs, c'est leur propre président de commission de je ne sais trop quoi qui a plaidé l'incohérence totale du chef. L'incohérence, on la voit à chaque période de questions: Ajoutez de l'argent; occupez-vous pas des équilibres; le déficit, ça ne nous dérange pas.

Nous, c'est les citoyens qui nous intéressent. On ne peut pas fonctionner comme ça. Je l'ai connu, ce système-là, de l'autre côté. Pendant neuf ans, on les a vus aller, puis on connaît le résultat à la fin, catastrophes à tous égards: catastrophe au niveau de l'emploi, catastrophe au niveau des finances publiques, catastrophe sur le plan constitutionnel. Parce que c'est des gens qui ont toujours géré à l'air du temps, puis ils sont guidés par le vent. Alors, les journées où il n'y en a pas, c'est compliqué. Dans ce sens-là, moi, j'aime mieux un gouvernement qui de temps en temps prend des décisions. Nous, on en a pris une, puis c'est évident qu'on aimerait bien mieux dire: Jamais, pour les 25 prochaines années, il n'y aura d'augmentation de quoi que ce soit, peu importe l'objectif qui est visé par la mesure. Alors, je vais y revenir.

C'est un fonds d'assurance médicaments pour offrir à des gens un minimum de protection sociale. Mais, par définition, tu pourvois une caisse qui va assurer de le financer, ou on fait comme ces gens d'en face, on n'a aucune responsabilité budgétaire puis on dit: Ce n'est pas grave, on le pellette dans le déficit ou on le pellette dans le fonds consolidé, puis c'est les générations qui repasseront dans quelques années qui s'occuperont de notre irresponsabilité chronique. Ça, ce n'est pas notre genre. Est-ce que ça a été dur? Oui, M. le Président. Est-ce que ça a exigé de sacrifices de beaucoup de gens? Oui, M. le Président. Est-ce que les gens sont conscients des sacrifices qu'ils ont faits et du gouvernement qui leur a fait faire ces sacrifices-là? Ça doit, puisqu'on a été réélus. En septembre 1998, ils ont réélu le gouvernement qui les avait fait souffrir, selon l'opposition. Moi, je prétends qu'ils ont plutôt réélu le gouvernement qui avait été responsable, qui avait hérité d'une situation invraisemblable, intenable, qui ne nous conduisait nulle part et qui nous obligeait à prendre des décisions de gens matures, responsables, qui ont à gérer l'État du Québec.

Revenons à la consultation. Leur contribution a permis d'améliorer le fonctionnement du régime et d'en préserver ses valeurs fondamentales; je l'illustrerai tantôt. Ces consultations-là, M. le Président, ont permis de dégager un consensus à l'effet que le régime d'assurance médicaments représente un net progrès par rapport à la situation qui prévalait avant son adoption. C'est drôle, je n'ai pas entendu ça des répondeurs automatiques, l'autre côté, qui constamment arrivent avec à peu près exactement le même contenu. Parce qu'il doit en rester trois, quatre à parler sur le principe, puis ils ont dit: Ce serait le fun, une petite mesure dilatoire, une perte de temps de deux heures et demie de la Chambre – par une mesure de report qu'ils n'ont même pas voulu plaider pour nous en expliquer les motifs. Ils n'ont même pas eu le courage d'en parler, pourquoi ils recommandent la motion de report. Pourquoi ils arrivent avec une motion de report s'il y en a 33 qui ont parlé puis qui ont dit qu'ils étaient contre le principe, que ça n'avait pas de bon sens, que ça n'avait pas d'allure? Donc, ça veut dire que leur opinion était faite.

Quand on n'a pas d'opinion puis qu'on ne veut pas se brancher, là il y a une logique, M. le Président, à présenter une motion de report. Mais il n'y a pas de logique à utiliser une motion de report quand on sait ce qu'on veut puis qu'on sait ce qu'on fait et surtout pourquoi on le fait.

(16 heures)

Alors, je reviens à ce qui s'est passé à cette consultation-là. Tous ont reconnu le bien-fondé de la couverture universelle d'un régime qui permet un meilleur accès aux médicaments. Ces gens-là, ils nous ont tous demandé de préserver ce filet social qui place les citoyens du Québec à l'abri d'un risque financier associé à la maladie et à la prise de médicaments. L'exercice a permis d'identifier des pistes de révision qui ont été soumises mais également certaines propositions très intéressantes, très inédites, qu'on appelle, qui ont favorisé ou qui favoriseront un meilleur usage des médicaments, et ça, c'est un objectif. Quand on a une assurance médicaments, il y a une logique à ce que j'appelle rationaliser l'usage des médicaments.

Également, par le projet de loi qu'on voulait étudier, nous autres, puis faire adopter, le 117, c'est évident qu'on restaure et qu'on rétablit un équilibre financier du Fonds de l'assurance médicaments. On octroie un meilleur fonctionnement et une plus grande maîtrise des coûts du régime, tous des éléments essentiels. Mais, également, comme c'était logique lors de cette consultation-là, on a essayé d'apprécier c'est quoi, les raisons qui font... Pas leurs discours démagogiques, leurs discours irresponsables, leurs discours de perroquets répondeurs à répétition. Ils nous ont tous dit: Écoutez, on vous l'avait dit. Mon père est plus fort que le tien. Je le savais, que ça ne balancerait pas à la fin, puis on vous l'avait dit il y a un an et demi. Les raisons sont bien plus sérieuses que ça, M. le Président, les raisons qu'ils sont venus expliquer en commission, les gens qui connaissent ça. Un, les dépenses du régime d'assurance médicaments ont connu une progression très, très rapide. Parce qu'on n'est pas capable de prévoir, parce qu'on n'a pas pu planifier des choses? Pas du tout. Ce n'était pas ça, les raisons. J'en cite quelques-unes pour montrer comment ces gens-là sont irresponsables.

Une première, c'est qu'il est arrivé une série de médicaments nouveaux. Ah bon! Ça, c'est intéressant parce que, règle générale, à chaque fois qu'il arrive un médicament nouveau, il est plus efficace puis il est plus sécuritaire. Mais il y a un petit problème, M. le Président. À chaque fois, il coûte plus cher. Ah bon! Ça ne prendrait pas beaucoup d'onces d'honnêteté pour dire ça, l'autre côté. Mais je n'ai pas entendu un mot là-dessus, pas un mot de nos répondeurs, l'autre côté, qui à répétition ont répondu exactement la même chose. Ils ont dit tous la même chose: On est contre, ça n'a pas de bon sens, puis il ne faudrait pas payer, puis on est des ci puis des ça. Si ces gens-là avaient un peu de conscience sociale, ils auraient dit les vraies raisons qui ont été évoquées lors de la consultation par celles et ceux qui sont venus nous parler.

Alors, le premier point, je répète, là: À chaque fois qu'un médicament est meilleur, qu'il est plus sécuritaire, comme par hasard, il coûte toujours plus cher que l'ancien. Ça ressemble à d'autres choses que vous connaissez. Deuxième raison: Il y a eu une multitude d'utilisations de nouveaux médicaments. Un médicament qui, il y a deux ans, n'existait pas, puis aujourd'hui, plus, exemple, les 50 000... j'exagère peut-être, je ne sais pas exactement combien il y en a, de médicaments, mais il y en a plus qu'avant. Quand il y en a plus, plus efficaces puis plus sécuritaires, puis ça coûte plus cher, ça, ça s'appelle avoir un effet sur la progression rapide des coûts. Il faut en parler.

Il y a également, pour un régime qu'on a dit, l'autre côté, pourri, de plus en plus d'utilisateurs qui s'en servent, du régime dit pourri, selon l'opposition officielle. Alors, il ne doit pas être si terrible que ça, parce que de plus en plus il y a des gens qui sont utilisateurs du régime d'assurance médicaments. Quand il y a un plus grand nombre d'utilisateurs, encore là, ça ne prend pas un grand quotient pour déduire que, si on veut sauver la survie du régime d'assurance médicaments que l'État a mis en place pour permettre à des gens qui consacraient trop d'argent, pas par choix, par obligation, à cette situation, bien, ça prenait un filet de protection sociale, puis le gouvernement du Québec l'a offert.

Comme il y a également, je l'ai mentionné tantôt, une responsabilité de vouloir que les finances publiques soient gérées d'une façon responsable, on ne peut pas dire: C'est vrai pour le budget, ça, ça doit être équilibré, mais chaque fonds pour une vocation spécifique, que ça soit un fonds routier, que ça soit le fonds de la jeunesse, que ça soit le Fonds pour l'assurance médicaments, ça, ce n'est pas grave. Si ça coûte 2 milliards puis on en collecte 1 milliard, ce n'est pas grave. Il y a 1 milliard de déficit, mais c'est nos enfants qui s'occuperont de ça. Ça, c'est le raisonnement historique, traditionnel des amis d'en face. On sait où ça nous a conduits: à des sacrifices sans précédent. On va recommencer ça, M. le Président? On va s'amuser comme ils s'amusent cet après-midi? Motion de report, reportons les décisions, reportons ce que j'appelle l'obligation d'être des adultes qui gèrent la chose publique, entre guillemets, d'une façon mature, responsable et qui donnent l'heure juste aux citoyens. Parce que, ça aussi, c'est fondamental, donner l'heure juste.

Alors, donner l'heure juste aux citoyens... Ça serait de leur mentir en pleine face que leur dire: On veut sauver le régime, mais on va le rendre déficitaire. Puis vous pensez que, ça, ça va aider dans 15 ans, que le régime du Fonds d'assurance médicaments va être en meilleure santé, s'il est en déficit de 2,5 milliards ou de 3 milliards? Parce que, si c'est vrai que... On n'a pas beaucoup de vécu avec le régime, on vient de commencer avec. S'il est déjà déficitaire parce que les médicaments sont plus efficaces, plus sécuritaires mais coûtent plus cher et qu'il y a plus d'utilisateurs, pensez-vous que ça va arrêter demain matin, ça, M. le Président? Pensez-vous qu'en l'an 2002 les médicaments vont être 50 % moins chers qu'aujourd'hui? Voyons donc! C'est quoi, ce raisonnement-là? Un raisonnement qui n'a pas de sens.

Puis là, tout ce qu'ils ont à proposer, eux autres, pour régler ça: motion de report. On va se soustraire à notre responsabilité. Ah! Être en désaccord sur des modalités du régime, je répète, je n'ai pas de trouble avec ça, M. le Président. Ça, ça fait partie de nos valeurs démocratiques, c'est même sain qu'il en soit ainsi parce que ça permet de mesurer la valeur des arguments des uns et des autres, et c'est de même qu'une démocratie progresse. Quand on peut vérifier la valeur des arguments des uns et des autres, c'est la meilleure façon de faire progresser ce que j'appelle une opinion documentée, parce que les opinions pas documentées, dans mon livre à moi, c'est moins valable.

Or, c'est de ça qu'il s'agit, et c'est pour ça que c'est un peu étonnant que ces gens-là ne veuillent pas nous dire pourquoi la motion de report. Ils n'ont même pas d'arguments à faire valoir, puis ils ont dit: Écoute, on va prendre congé après-midi, là, puis on va s'occuper de ça, à un ou deux qui vont pérorer sur la motion de report pour faire perdre le temps de la Chambre pendant deux heures et demie, avec une demi-heure de questions de règlement au préalable. Puis là, on le sait, que ça va permettre de recommencer ce soir, on va avoir perdu l'après-midi, le temps de la Chambre. Des supergestionnaires! Ils devraient s'occuper de ça, de ne pas faire perdre le temps de la Chambre inutilement.

Alors, moi, cette motion de report là, M. le Président, c'est évident qu'on va la battre, c'est évident qu'elle n'a pas d'affaire dans le débat, là, elle est complètement inutile, lorsqu'on a l'once d'un poil d'une responsabilité de parlementaire consciencieux qui veut s'assurer que les débats se font, mais que ça permet d'avancer et de progresser. Puis, quand on a débattu pendant des heures une même question, on l'arbitre, on la tranche, on la sanctionne par un vote, puis on s'en va dans le peuple avec ça. Puis, à chaque année... Pas à chaque année, mais aux quatre ans, c'est pour ça qu'il y a des élections, pour dire: Nous, on pense que la gestion de cette équipe-là n'a pas été valable et, en conséquence, on vous demande de prendre congé. Mais ce n'est pas ça qui nous est arrivé récemment, c'est l'inverse. Alors, la population a dit: Ça a été dur, ça a été difficile, on sait pourquoi, mais on continue à vous faire confiance parce que vous avez le sens des responsabilités, vous avez le sens des valeurs puis vous n'êtes pas là pour faire perdre le temps de la Chambre.

On a appris également lors de cette consultation-là – parce qu'il y a eu beaucoup de gens qui sont venus – on nous a indiqué que, d'une part, il fallait assurer la pérennité du régime général d'assurance médicaments puis que, d'autre part, il fallait assurer son efficacité. Donc, légitimement, des gens nous ont demandé d'être plus performants encore: non seulement qu'on assure le Fonds d'assurance médicaments en termes de pérennité, mais qu'il soit plus efficace. Alors là, quand on a à apprécier comment on fait ça, un régime plus efficace, plus performant puis qui doit être en équilibre, par définition, ça se traduit, M. le Président, par des hausses de primes.

Est-ce qu'on a voulu que les hausses de primes soient toutes de même nature, sans tenir compte de la capacité des gens de payer? Bien, vous savez bien que la réponse est non! La réponse est non, parce qu'on le sait, que c'est difficile pour des gens, puis on le sait, qu'il y a des gens démunis, puis on le sait, que le portefeuille des uns n'est pas celui des autres.

(16 h 10)

Alors, les modifications au nouveau régime, une des préoccupations qu'on avait puis que les parlementaires avaient puis dont ils ont tenu compte lors du débat social, ça a été qu'il faut s'assurer que le régime d'assurance médicaments puisse épargner les plus démunis. Ah! Une constatation qu'ils n'ont pas... Moi, je ne les ai pas entendus parler de même, je n'ai pas entendu un parlementaire de l'autre côté dire: Il y a 48 % des gens qui contribuent et qui se servent du régime pour lesquels il n'y aura aucune augmentation, parce qu'on a regardé ça puis on prétend qu'ils ne sont pas capables de subir quelque augmentation que ce soit, pour des raisons de seuil de pauvreté, pour des raisons de seuil de revenu. On a dit: On va respecter ces gens-là puis on va permettre à 48 % des gens de ne pas contribuer à la hausse du régime.

Puis, d'ailleurs, si on regarde un peu comment avaient été conclus les points de vue exprimés à la commission des affaires sociales... j'en cite juste un à titre d'exemple: «La mise en place du régime a permis un accès plus équitable aux médicaments, et la majorité de ceux qui se sont exprimés devant la commission des affaires sociales, M. le Président, nous ont demandé de préserver cette équité – ah, bon – au bénéfice des personnes à faibles revenus, au moment d'apporter au régime les ajustements qui s'imposent.» Ils n'ont pas dit: Au moment d'apporter aucune modification; «d'apporter les modifications qui s'imposent». «Le scénario de financement que le gouvernement a adopté respecte cette volonté exprimée en commission parlementaire.»

J'aime toujours, M. le Président, moi, quand je veux intervenir, ne pas uniquement y aller de mon propos personnel mais tenter de l'appuyer sur des dires de gens qui ont moins ce que j'appelle cette situation de pouvoir-opposition, ou de face-à-face, ou de vis-à-vis. Donc, là, ce que je citais là, c'est la recommandation de la commission des affaires sociales. C'est pas mal plus neutre, là, que ce que j'ai comme bebites en face de moi, c'est pas mal plus responsable. Des gens...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît.

M. Gendron: Oui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous demande... ce que vous avez dit, là, «de bebites», des parlementaires... Voulez-vous retirer ces propos?

M. Gendron: Je retire mes propos.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien. Merci.

M. Gendron: J'aime pas mal mieux me fier à des propos de gens autres que nos chers parlementaires d'en face qui ont reçu le mandat de leur leader: Y a-tu moyen que la moitié de mon monde soit en vacances cet après-midi puis que les trois, quatre qui restent puissent faire perdre le temps de la Chambre pendant deux heures et demie? Alors, c'est ça qui est arrivé après-midi. Alors c'est ce que je veux dire, c'est les parlementaires qui sont là après-midi pour dire: Motion de report, parce qu'on ne veut pas prendre nos responsabilités.

Deuxièmement, je regarde également ce que M. Robert Sansfaçon mentionnait.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. Question de règlement, M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Autant c'est important dans les débats parlementaires de pouvoir s'exprimer – parfois les débats vont avoir des éléments un peu durs – je pense que, en vertu de notre règlement, ce qu'on vient d'entendre de la part du whip en chef du gouvernement du Québec dépasse encore une fois ce qui est acceptable dans cette Chambre. Et je vous demanderais de lui rappeler qu'il est interdit d'imputer des motifs indignes. Il n'arrête pas de dire que les gens de notre côté sont en train de faire perdre le temps à l'Assemblée. C'est lui qui est en train de parler; on n'oserait pas lui dire la même chose.

Les débats sont prévus des deux côtés pour faire avancer les projets de loi, pour faire avancer les idées, pour faire valoir l'opposition, le cas échéant. Et, si ça ne lui plaît pas, notre système parlementaire, il peut essayer de le changer. Pour l'instant, l'opposition en fait partie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, c'est le choix de l'opposition de présenter une motion de report, et je vous demanderais de poursuivre votre débat tout en respectant le règlement, M. le député.

M. Gendron: Oui, vous faites bien. Mais il s'agissait d'une opinion et non d'une question de règlement. Alors, le leader adjoint de l'opposition a droit à ses opinions, je n'ai pas de trouble avec ses opinions. C'est justement ce que je commentais, que leur opinion dans ce débat-là fait perdre le temps de la Chambre, parce que c'est une motion de report inutile, qui n'ajoute rien. C'est très parlementaire, c'est rigoureux et, en plus, ça a le mérite de traduire ce qui se passe ici, M. le Président. Donc, je ne vois pas quel péché aurais-je commis.

Alors, je poursuis. M. Sansfaçon, un éditorialiste... Encore là, j'aime mieux parfois la crédibilité de M. Sansfaçon sur certaines questions que nos amis d'en face, qui nous répètent la même chose à satiété en pensant qu'après 40 fois, quand on a dit quelque chose, bien, ça devient une vérité. Ce n'est pas le nombre de fois qu'on répète la même chose qui fait que ça donne de la valeur à tes arguments, c'est la valeur des arguments qui donne quelque chose. Alors, M. Sansfaçon disait ceci: «On pense aussi à l'assurance médicaments, que l'on a bien fait de déclarer contributive – ah bon – dès sa création et dont les primes doivent suivre l'évolution des coûts – quoi, les primes doivent suivre l'évolution des coûts? – afin que les individus contribuent au traitement de leurs maladies dans la mesure de leurs moyens. Quand on sait l'importance qu'occuperont et qu'occupent les médicaments dans les protocoles de soins de l'avenir, voilà une façon toute trouvée d'éviter de faire exploser les budgets de l'État.»

Hein, Sanfaçon, lui, il a compris ça, qu'il faut être responsable dans la gestion de tous les fonds et de tous les coûts et que, en conséquence, prétendre qu'un fonds qui n'est pas équilibré, qui n'a pas les sommes prévues pour acquitter les obligations pour lesquelles le fonds existe, ce n'est pas grave, on ne s'occupe pas de ça, on pellette ça dans la cour de je ne sais trop qui... Ce n'est pas compliqué, ça, Sanfaçon, il a compris ça, lui. Tout en s'assurant que les malades auront accès rapidement aux médicaments les plus efficaces. Il faut vous rappeler ce que je vous ai dit au début: Plus efficaces, plus sécuritaires, mais, comme par hasard, plus chers. Je parle des médicaments. Si les médicaments sont plus chers, c'est évident que ça prend une somme plus importante pour couvrir le même monde et ceux qui s'y ajoutent, compte tenu de la qualité du régime que nous offrons.

C'est ça, les vraies questions de fond, M. le Président, et j'aurais souhaité que nos amis d'en face nous en parlent. Ils aimaient mieux nous parler, pendant les 30 et quelques qui ont répondu de la même façon, en disant: On est contre, on n'est pas d'accord, on n'en veut pas. Mais ils nous ont jamais parlé de ces considérations-là. Ils disaient juste: Nous, quand on a lancé le Fonds d'assurance médicaments, on n'avait pas pu tout prévoir, ce qui s'appelle l'explosion des coûts, les nouveaux médicaments, puis être capables de chiffrer, il y a deux ans, que le coût d'aujourd'hui serait de 20 %, de 30 %, 40 %... dans certains cas, c'est 100 % plus cher. Il y a des médicaments qui ont eu des hausses de 100 % en dedans d'un an. On n'est pas des futurologues, on est gestionnaires responsables. Puis, des gestionnaires responsables, ça appelle des décisions qui nous permettent de faire un certain nombre de choix.

Alors, c'est ce que nous avons fait, et, moi, je n'irai pas plus loin, parce que je ne voudrais pas contribuer... mais, qu'est-ce que tu veux, on est pris par le règlement pour, pendant deux heures, expliquer que cette motion-là est inutile, inopportune, n'ajoute rien au débat. Et, quand on veut faire perdre le temps de la Chambre, on fait ce que l'opposition a fait. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, nous poursuivons le débat, et je suis prêt à reconnaître le... Oui, quelle est votre question?

M. Boisclair: Je solliciterais le consentement de l'opposition. Je comprends qu'il y a eu entente pour qu'on puisse revenir aux avis touchant les travaux des commissions et donner un avis.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader adjoint de l'opposition officielle, pour donner un avis de motion sur...

M. Mulcair: Oui, M. le Président, il y aurait consentement, pourvu que le temps pris pour faire les annonces ne compte pas sur le temps du débat sur la motion.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Avec raison, consentement que l'avis de motion sera donné. Le deux heures de débat, le temps ne sera pas inclus là-dedans. Vous avez le consentement, M. le leader adjoint du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Boisclair: C'est très rapide, et je remercie mon collègue de l'opposition.

Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire complétera l'étude détaillée du projet de loi n° 110, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, de 16 h 30 à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.


Reprise du débat sur la motion de report

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...déposé. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, le porte-parole officiel de l'opposition en matière de services sociaux et député de Nelligan et vice-président de la commission des finances publiques. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. La motion de report proposée par l'opposition officielle aujourd'hui a été proposée pour protéger la population québécoise. J'ai écouté le président du caucus, il a juste fini son discours, et je pense... parce qu'il n'y a aucun autre député qui a eu le courage de se lever dans cette Chambre et défendre ce projet de loi n° 117. C'est un projet de loi, là, qui est antidémocratique, qui est vicieux et qui montre clairement que ce gouvernement met les balances dans ses livres devant la santé de la population québécoise.

(16 h 20)

M. le Président, pendant une demi-heure, est-ce que le député ministériel a mentionné que l'objectif fondamental du projet de loi n° 117, c'est de doubler la prime, 175 $ à 350 $? Est-ce qu'il a mentionné ça? Non, M. le Président. Il veut fouiller dans les poches québécoises plus qu'ils ont fait. Est-ce qu'il a mentionné que – comme d'habitude, l'arrogance de ce gouvernement – une fois que la loi n° 117 serait passée, il n'aurait pas besoin de retourner ici, dans cette institution démocratique, pour plaider pourquoi il doit augmenter les primes? M. le Président, il y a un article dans la loi, caché dans la loi, qui dit qu'il peut indexer ça – et il n'a pas dit à quel niveau – il peut indexer 15 %, 20 %, 50 %, 100 % à chaque année, avec aucun débat public. C'est une loi antidémocratique, M. le Président.

Déjà, nous avons vu un système mal planifié. Laissez-moi juste vous rappeler quelques faits. Nous avons essayé, avec les interventions en Chambre sur les débats du principe de la loi n° 117, de convaincre le gouvernement qu'il doit arrêter la loi n° 117, mais il n'a pas écouté. C'est pourquoi nous avons pensé qu'on pourrait reporter ce projet de loi, donner une chance de faire un vrai débat sur le fond de cette question. Parce que, effectivement, les médicaments, ça coûte cher maintenant. Je ne sais pas si vous êtes au courant, je présume que oui, mais les coûts des médicaments sont plus chers dans notre système de santé que les coûts des médecins. C'est la première fois. C'est assez important. Et ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose, mais c'est en train de montrer que nous sommes... Je mentionne ce chiffre parce que ça montre que notre système de santé est en train de changer, de s'adapter.

Mais, M. le Président, les médicaments, comme nous sommes en train d'en discuter, ne sont souvent même pas inclus dans la loi de santé fédérale. Ce n'était pas là à l'époque. C'est pourquoi le gouvernement peut charger de plus en plus pour ce type d'intervention médicale. Dans le passé, le gouvernement libéral n'a eu aucune prime – rien, zéro – mais il a chargé 2 $ par ordonnance, jusqu'à un maximum de 100 $ par année. Ça prend cinq ans d'ordonnances pour avoir ce maximum. Qu'est-ce que le gouvernement péquiste a fait? Il a augmenté ça à 925 $ maximum, le 175 $ plus le 750 $ maximum. Ça vient de nos poches, M. le Président. Il a fait tout un débat sociodémocrate, mais, vous le savez, M. le Président, c'est un transfert de fardeau fiscal sur le dos de la population québécoise. Ce n'était pas une loi sur la santé, là, c'était une loi fiscale.

Mais ce n'était pas assez. Après les élections, ils ont finalement commencé à admettre qu'effectivement ils ont besoin de plus d'argent – à peu près 200 millions – de nos poches encore et qu'ils vont augmenter le maximum. N'oubliez pas, avant, c'était 100 $. Ça a augmenté à 925 $ par adulte, et il veut augmenter maintenant à 1 100 $. M. le Président, c'est tellement beaucoup d'argent! Et on ne parle pas des services récréatifs, on ne parle pas des services qui ne sont pas essentiels, on parle des médicaments qui aident les soins de santé de la population québécoise.

M. le Président, est-ce que c'est juste les riches qui paient? Non, si vous êtes une seule personne et que vous avez un revenu de 18 360 $, votre prime va doubler. Si vous êtes un couple sans enfant avec un revenu de 26 350 $ – et, vous le savez, ce n'est pas beaucoup d'argent – votre prime va doubler. C'est cher, M. le Président! Qu'est-ce que le gouvernement essaie de faire avec cette loi? Il essaie de passer ce transfert de responsabilité, mais plus que ça, il veut avoir le pouvoir. L'année prochaine, il peut augmenter sans avoir de débat, il peut augmenter ça comme ça. Il peut augmenter de 15 %, un autre 50 $, un autre 100 $, un autre 150 $. Mais pourquoi? Parce qu'ils ont mal planifié le programme, ils ont fait ça dans la période préélectorale. Tout le monde a dit que ça ne marchait pas comme ils l'ont proposé.

Et, M. le Président, j'étais là, pendant la commission parlementaire, avec mon collègue, le député de Vaudreuil, nous avons écouté les groupes. Les groupes, ils n'ont pas présenté leur mémoire en disant: S'il vous plaît, augmentez les primes. Ils n'ont pas dit ça. Ils ont dit que le programme actuel avait eu des effets pervers, ils ont dit que ça allait mal, que nous étions les plus taxés en Amérique du Nord. J'ai entendu qu'on dépensait moins que la moyenne per capita dans le système de santé, M. le Président. Les groupes, ils ont dit: Devant une absence de vision globale... Par exemple, le Conseil de la santé et du bien-être a recommandé au ministre de décloisonner les budgets administratifs de l'assurance hospitalisation, de l'assurance maladie, assurance médicaments.

Parce que, effectivement, l'utilisation de médicaments peut coûter plus cher. Le député a parlé des médicaments qui coûtent de plus en plus cher, mais ils sont de plus en plus efficaces. Si on peut sauver de l'argent dans les hospitalisations, peut-être que ça va être une dépense très utile pour inscrire ces médicaments sur les listes. La Conférence des régies régionales a proposé l'abolition du régime mixte public-privé que nous avons maintenant. Ils ont recommandé un seul et unique régime universel. Le Protecteur du citoyen, et ce n'est pas un parti politique, a réclamé l'intégration du régime d'assurance médicaments au régime d'assurance maladie du Québec pour assurer que nous ayons une couverture juste et équitable pour tous les citoyens. La Coalition sur l'assurance médicaments, qui représente 206 groupes, a aussi recommandé une intégration complète aux médicaments dans le système public de santé. Et, finalement, le Conseil des aînés a réclamé l'abolition pure et simple du régime et prôné le retour au fonctionnement antérieur.

M. le Président, rappeler que dans le passé nous avons eu un programme de malades sur pied. Est-ce que le programme était 100 % parfait? Je pense que non. Mais c'était un programme efficace. Peut-être on peut... nous avons eu une autre approche, peut-être la solution était d'élargir ce programme. N'oubliez pas, à l'époque, si vous n'aviez pas utilisé les médicaments, vous aviez payé rien, zéro. Avec ce programme, maintenant, quelqu'un qui n'utilise aucun médicament, chaque année, va payer à ce gouvernement, après taxes, 350 $. Et le gouvernement veut avoir le pouvoir d'augmenter sans avoir de débat public.

M. le Président, pendant la commission parlementaire, j'ai entendu, et j'ai déjà entendu ça avant, que 15 % de nos admissions dans nos hôpitaux sont causées, sont directement rattachées à la mauvaise utilisation des médicaments. Ce peut... surutilisation des médicaments, trop de médicaments. Ce peut être sous-utilisation des médicaments, nous n'avons pas respecté les ordonnances de nos médecins. Ce peut être une contre-indication des effets des médicaments. 15 % de nos admissions, ça coûte beaucoup d'argent et aussi ça cause un problème de santé de notre population.

Est-ce que la ministre arrive avec un programme d'utilisation rationnelle des médicaments? Non, M. le Président. Elle a eu une commande du ministre des Finances d'augmenter les primes, chercher un autre 200 000 $. Peut-être la ministre elle-même serait d'accord avec notre motion de report, de donner une chance de faire le débat de fond. Comment nous allons utiliser les médicaments dans notre système de santé public? Comment on va assurer que nous avons le meilleur accès aux meilleurs médicaments pour la population? Comment on peut encourager la recherche et développement? On peut avoir tout ce débat. Nous avons eu une discussion dans le passé sur comment on peut avoir un système qui peut toujours faire les bonnes recherches, de trouver le meilleur médicament. On peut avoir accès aux meilleurs médicaments possible, mais le gouvernement a décidé... pas le vrai ministre de la Santé, qui est le ministre des Finances, je sais, c'est assez clair, il a déjà fait les annonces assez claires comme ça. Et la commande a dit: Tu cherches 200 000 $, au moins 200 000 $, peut-être plus.

M. le Président, ce n'est pas un projet de loi sur le système de santé, c'est un projet de loi fiscal. Le gouvernement va chercher plus d'argent. C'est pourquoi on veut reporter l'implantation de ce projet de loi. Le vrai ministre a dit non. C'est le ministre des Finances, il a dit: Nous avons besoin d'autre argent. Et, quand je mentionne qu'on dépense plus d'argent sur les médicaments que sur les médecins, il me semble qu'on doit avoir un débat sur le fond. Est-ce que nous sommes en train de créer un système de deux vitesses? Est-ce que nous sommes en train de laisser le transfert du fardeau aux malades? Parce que, de plus en plus, quand vous êtes malade, au Québec, vous avez besoin de dépenser votre argent, votre argent après taxes, malgré que nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord.

(16 h 30)

M. le Président, j'ai entendu aussi pendant la commission parlementaire, qui était fort intéressante pour nous... Mais il me semble que la décision de la ministre était déjà prise par le ministre des Finances. Nous avons entendu qu'à peu près 10 % des personnes qui sortent à cause du fameux virage ambulatoire sortent trop vite de nos hôpitaux ou repartent, reviennent à l'hôpital. Est-ce qu'on trouve ça dans le projet de loi, qu'il y a une façon de corriger ce problème? Non. Nous avons un projet de loi avec beaucoup de bon langage et des articles de loi assez bien écrits mais qui passent le message que nous allons doubler la prime de 175 $ à 350 $. Est-ce qu'il a mentionné ça? Non, il n'a pas voulu mentionner ça. Et c'est dans le même mois, ce projet de loi a été déposé dans le même mois que la ministre de la Santé – et écoute bien, là, qu'est-ce qu'elle a dit – a annoncé la fin de la gratuité du maintien à domicile. Pensez-vous, M. le Président, que tous les résidents de votre comté, vos «constituents», maintenant ils doivent payer 1 100 $ maximum par année s'ils ont besoin d'un peu d'aide, d'un peu de maintien à domicile, d'un peu de soins à domicile pour rester dans leur appartement, leur maison? Et souvent ça ne prend pas beaucoup, là. Ça prend juste un peu d'aide, une visite d'un travailleur social, une visite d'un préposé, une visite d'un ergothérapeute, une visite d'un professionnel de la santé, et ils peuvent rester dans leur maison, leur appartement. Mais maintenant, là, le gouvernement est en train d'augmenter, de doubler les primes, d'augmenter le maximum que nous allons payer pour les médicaments, et la ministre a dit: C'est fini, la gratuité du maintien à domicile. C'est grave.

Ce gouvernement péquiste est en train de briser le contrat social que nous avons eu avec les personnes âgées qui ont bâti notre société, qui ont contribué dans notre société, qui ont mis de l'argent dans la création des systèmes de santé, d'éducation, et tout ça, et qui ont pensé que, quand ils auraient moins de flexibilité fiscale, ils allaient avoir une certaine protection de l'État. Mais le gouvernement est en train de tout changer ça, M. le Président. Il est en train de tout bouleverser ce contrat social. Et il y a vraiment deux comportements de ce gouvernement: un avant les élections, quand il veut avoir les votes, et l'autre après les élections, quand il veut vraiment fouiller dans nos poches.

Il est en train d'augmenter la prime de 175 $. On commence à payer ça à 18 000 $. Ce n'est pas beaucoup d'argent, M. le Président. Et, si nous sommes un couple, 26 000 $. Ce n'est pas beaucoup, mais tu vas payer. Un couple à 26 000 $, vous pouvez payer 2 200 $ si vous êtes deux personnes qui prennent des médicaments. C'est un déficit artificiel. Ils ont mal planifié ce système.

Et, justement aujourd'hui, M. le Président, la RAMQ, la Régie de l'assurance maladie du Québec, a découvert un autre hic à son régime d'assurance médicaments: les doubles assurés. Plus de 147 000 Québécois pourraient avoir affaire au fisc, peuvent avoir une double assurance. 147 000, c'est beaucoup. Et est-ce que vous trouvez une réponse à cette problématique dans le projet de loi n° 117? Non, vous ne trouvez pas ça. Vous avez une loi qui vient d'un ministre des Finances qui va tout de suite augmenter les primes, doubler les primes. Il va charger à la population beaucoup plus.

M. le Président, maintien à domicile, fin de la gratuité, doubler la prime, est-ce que c'est vraiment l'année 2000 qui va être la priorité, comme le gouvernement dit? Non, c'est loin d'être la priorité. N'oubliez pas, ce gouvernement, il a coupé l'inscription dans nos universités pour les infirmières. N'oubliez pas que ce gouvernement paie jusqu'à 300 000 $ pour que nos spécialistes arrêtent de soigner la population québécoise. N'oubliez pas que c'est le même gouvernement qui ne donne pas assez de cours pour nos techniciens dans les services préhospitaliers pour remplir nos ambulances.

M. le Président, déjà, avec le 175 $ comme prime, nous avons vu des effets pervers dans le rapport. Nous avons tous discuté le rapport Tamblyn. Peut-être que le gouvernement ne veut pas qu'on discute de ça, mais la population a à choisir entre manger et prendre des médicaments déjà avec le 175 $. Qu'est-ce que ce gouvernement péquiste fait après ça? Quand il apprend que le 175 $ fait mal à la population, que ça fait mal aux personnes qui sont à faibles revenus, un peu plus que le seuil, quand il sait que le 175 $ fait mal à nos personnes âgées, il double ça. Il est en train de doubler, de 175 $ à 300 $. S'il pense qu'il peut convaincre la population, je pense qu'il a tort.

Laisse-moi juste citer quelques chiffres, et ils ne viennent pas de nous, là. J'ai reçu un sondage sur l'opinion des consommateurs canadiens à l'égard des soins de santé, fait par Aventis Pharma, troisième édition, 2000: Les Canadiens et leurs régimes collectifs de soins de santé . C'est un supplément spécial au régime public d'assurance médicaments du Québec. Et ça ne vient pas du Parti libéral, M. le Président. Ils ont fait un sondage assez objectif et ils ont vu que, après avoir expliqué aux répondants que le gouvernement proposait d'augmenter les primes annuelles du régime de la RAMQ jusqu'à 300 $, parce qu'ils n'étaient pas au courant que le gouvernement irait jusqu'à 350 $, on peut constater que la proposition a été rejetée par les Québécois dans une proportion de 75 %. Plus précisément, la majorité – 52 % – des répondants sont fortement en désaccord parce qu'ils savent que ce n'est pas un bon système, il savent que ça fait mal à la population.

Je continue, M. le Président. Il y a 77 % des résidents qui sont d'accord avec l'énoncé que le gouvernement ne devrait pas hausser le coût du régime provincial d'assurance médicaments parce que ce serait trop cher pour les Québécois qui en ont besoin. Qu'est-ce qu'on doit dire à ce gouvernement pour qu'il comprenne qu'effectivement ça ne marche pas, ce système? Ça a été mal planifié. C'est un système qui a tout été fait avant les élections, c'est un système qui n'est pas bien pensé.

M. le Président, j'étais vraiment déçu quand j'ai vu la réaction de ce gouvernement, quand j'ai entendu tous les groupes qui ont présenté leurs documents, leurs mémoires, qui ont utilisé leur créativité, qui ont proposé beaucoup de bonnes choses, mais que le gouvernement, il a juste décidé que ses livres, ses comptables, c'est plus important que la population québécoise. C'est pourquoi – parce que nous avons vu que le gouvernement n'a pas écouté la population – 75 % de la population québécoise est contre le projet. Déjà, à 300 $, ils étaient contre à 75 %. Je présume que ça va être beaucoup plus élevé maintenant qu'ils savent que ça va être 350 $.

Nous avons dit: Reportez le projet de loi pour six mois, donnez une chance de faire un vrai débat et laissez la population québécoise trouver une bonne solution. Est-ce qu'il y a un déficit, M. le Président? Il y a un déficit d'un système mal planifié juste avant les élections pour assurer que tout le monde pense que ça va être 175 $, mais ils savaient que ce n'était pas assez, selon leur définition. Mais, comme j'ai mentionné, il me semble qu'on doit aller plus loin que ça.

De plus en plus, on utilise les médicaments comme une intervention médicale. J'ai déjà mentionné, M. le Président, que les dépenses de médicaments sont plus chères maintenant que les médecins parce que de plus en plus on utilise les médicaments pour assurer qu'il n'y a pas d'hospitalisation qui... Mais nous sommes en train de juste laisser ce gouvernement augmenter les primes, doubler les primes, augmenter... Qu'est-ce que ça va nous coûter comme population? Jusqu'à 1 100 $. Si on veut vraiment garder un système de santé universel qui protège l'accessibilité – et c'est ça que je vois dans tous les sondages, incluant le sondage d'Aventis Pharma que j'ai juste reçu – il y a une vision que les Québécois et Québécoises ont: ils veulent avoir une accessibilité juste et équitable. Mais ce gouvernement est en train de faire exactement le contraire.

Mr. Speaker, quickly, this is a Government that doesn't have the courage to tell us what Bill 117 is all about. Let me tell the population that it's doubling the «prime», doubling what people will have to pay, whether you're sick or not, from $175 to $350 per adult. It is going to increase the maximum from $925 to $1 100. It starts at $18 360. If you're a couple with no children, you pay that maximum at $26 000. It's not a lot of money, $26 000, as a couple. But this is the Government that decided that it's more important to listen to the Minister of Finance than to develop a proper health care plan.

(16 h 40)

That's why, Mr. Speaker, we are asking for a delay in the implementation of the law, because we frankly think this Government should withdraw the law. But give the population a chance, give the population a chance to know what they are really up to, because there's another hidden effect in this bill. There's an indexation clause. This Government is so arrogant, so arrogant that he doesn't want to ever come back to this House to debate another increase. So they built in an indexation clause. Will that be $50 next year, $100, $200? We don't know. It is fundamentally antidemocratic.

Mr. Speaker, we've already seen some serious problems in the current program. This Government has decided that his only response is to increase the cost, charge the population even more without changing some of the fundamental problems of our current system.

M. le Président, après notre brève intervention aujourd'hui, j'espère que la population comprend l'importance de la loi n° 117. La loi n° 117 est en train de doubler la prime de 175 $ à 350 $. J'espère que chaque député ministériel va avoir le courage d'aller dans les groupes communautaires cette fin de semaine expliquer pourquoi ils ont décidé de doubler leur prime. Ils doivent expliquer pourquoi, à l'époque du Parti libéral, le maximum était de 100 $ et, sous le régime du Parti québécois, le maximum, ça va être 1 100 $. Ils doivent avoir le courage d'expliquer ça.

La raison pour laquelle nous avons proposé cette motion de report, c'est de protéger la population québécoise contre ce gouvernement antidémocrate, contre ce gouvernement vicieux, contre ce gouvernement qui a décidé que ses livres et ses comptables sont plus importants que la population québécoise qui a besoin d'accès aux médicaments. Merci, M. le Président, et j'espère que le gouvernement va accepter notre motion et donnera une chance à la population québécoise d'avoir un vrai débat sur cette importante question. J'espère que, une fois que nous aurons fait le débat, nous allons retourner avec une vraie réforme qui peut répondre à quelques questions fort légitimes mais qui peut respecter qu'est-ce que nous avons entendu, qui peut encourager une bonne utilisation rationnelle des médicaments mais qui ne cause pas plus de mal à la population que le gouvernement a déjà causé à la population. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Vaudreuil... Excusez, M. le député de Vaudreuil, il y a M. le député de Saint-Hyacinthe qui était dans le coin, puis je ne l'avais pas vu. Alors, c'est très bien, M. le député de Saint-Hyacinthe, je vous cède la parole.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole sur cette motion de report qui n'aurait pas dû être déposée, évidemment, parce que j'aurais préféré parler sur le fond de la loi n° 117. Mais je serai obligé quand même d'en parler un peu parce que, si cette motion de report n'a pas lieu d'être, c'est justement parce que la loi n° 117 est une loi qui est bien fondée, qui est à propos et qui est nécessaire maintenant.

Je vais commencer mon exposé par la déclaration du député de Chapleau cet avant-midi qui disait que les médicaments sont des outils thérapeutiques importants. Alors, vous voyez, M. le Président, moi, ce que dit l'opposition, je l'écoute parce qu'il arrive parfois qu'elle dise des choses très intéressantes qui peuvent nous instruire. Alors, les médicaments sont des outils thérapeutiques importants, moi, je suis d'accord avec ça.

Ils ont dit aussi une autre chose. Le député de Chapleau parlait des conséquences négatives pour les personnes les plus vulnérables et pour les personnes âgées qui découleront de la loi. Ça, c'est une autre chose qu'ils ont dite, et cependant la deuxième chose, elle est non fondée, et je vais le démontrer, M. le Président. Que les médicaments soient importants, tout le monde en convient. Chacun, quand il part en voyage, n'oublie pas d'apporter sa petite trousse de médicaments, n'est-ce pas? Quand on part en camping, on apporte sa petite trousse de premiers soins. Tout le monde apporte ses petits médicaments, c'est important. Il faut les avoir avec soi, n'est-ce pas? Tous les médicaments sont importants, et il y en a de toutes sortes. Il y en a des ovales, il y en a des oblongs, il y en a des ronds, il y en a qui sont plutôt épais, d'autres qui sont plutôt minces, il y en a de toutes sortes. Il y en a des roses, des verts, des bleus, des rouges, des orange, et tout ça, c'est très important pour notre santé.

D'ailleurs, j'ai eu l'occasion d'assister à un magnifique spectacle de Mario Jean en fin de semaine où il parlait de l'importance de nos «pelunes». Alors, vous comprenez, M. le Président, que ça rejoint un langage populaire qui touche tout le monde. Mais, justement parce que les médicaments sont importants, c'est une question qui est très sensible, et la question de l'assurance médicaments, ça touche les gens profondément. Alors, quand on en parle, il faut en parler correctement et dire les choses comme elles sont, pas lancer n'importe quels épouvantails en l'air qui ne sont pas fondés. Il faut dire les choses comme elles sont.

Il y a peut-être des choses dans ce projet de loi là qu'on peut améliorer et il y aura une commission pour y travailler, mais il y a des choses, dans ce que disent les députés de l'opposition, qui sont nettement exagérées. Des véritables bonshommes sept heures, M. le Président. Ils disent n'importe quoi. Ils disent que ça va faire un tort énorme, que les gens ne seront plus capables d'acheter leurs médicaments au comptoir. Or, la hausse de 175 $ ne touche absolument rien quant au prix que les gens vont payer au comptoir de la pharmacie, ils vont payer exactement le même prix après qu'avant. Donc, ils sortent toutes sortes de choses, toutes sortes d'affirmations, les unes vraies, les autres fausses, les autres à moitié vraies et à moitié fausses, pour faire peur au monde. Des vrais bonshommes sept heures.

D'ailleurs, M. le Président, vous savez d'où ça vient, l'expression «bonhomme sept heures», hein? J'ai fait de profondes recherches là-dessus pour savoir d'où ça vient, cette expression-là populaire, «le bonhomme sept heures». Ça vient d'où, cette affaire-là, «le bonhomme sept heures»? J'ai trouvé toutes sortes de choses. J'ai cherché dans des dictionnaires importants, des dictionnaires sur la langue parlée au Québec, des dictionnaires des canadianismes, des mots pittoresques et savoureux. Le bonhomme sept heures, qu'est-ce que c'est qu'un bonhomme sept heures? Il semblerait que ça viendrait de l'expression «bone setter» et que cette expression-là partirait des régions du Québec où il y avait plus d'anglophones, où les «bone setters», c'étaient les ramancheurs, qui étaient connus dans les rangs, puis, après leur journée d'ouvrage, si quelqu'un s'était cassé une jambe dans le rang, bien là on allait chercher le ramancheur, puis le ramancheur, après sa journée dans le champ, bien, il allait faire son travail de «bone setter», il allait ramancher les gens.

Alors, imaginez-vous, le «bone setter» arrive à la maison chez vous, vous vous êtes cassé une jambe. C'est le soir, il est 19 h 30, 20 heures, à la brunante, et puis le «bone setter» arrive, et puis là il commence à vous jouer avec la jambe pour vous ramancher ça. Peut-être que vous allez crier un peu, hein? Alors, évidemment, ça faisait peur aux enfants des alentours, et le «bone setter» a eu, comme ça, une très mauvaise réputation. Alors, les parents, le soir, quand ils voulaient faire rentrer leurs enfants pour les coucher, qu'est-ce qu'ils disaient? Oh! rentrez, les enfants, autrement je vais appeler le bonhomme sept heures, il va venir vous casser les jambes. Et c'est comme ça que, de «bone setter», on est tombé à «bonhomme sept heures», c'est une déformation. Alors, nos amis de l'opposition se comportent dans cette loi-là comme des bonshommes sept heures. J'ai expliqué le sens de «bonhomme sept heures» parce que c'est important, c'est au coeur de toute leur argumentation. Ils mélangent le vrai et le faux, ils brassent tout ça puis là ils font peur au monde. Des vrais bonshommes sept heures.

Alors, moi, M. le Président, je vais essayer de dire les choses comme elles sont. Prenez, par exemple, le député de Hull, il a dit ceci: «Si je vous l'explique simplement, la loi fait passer la contribution annuelle d'un individu de 175 $ à 350 $.» Il y a beaucoup de vrai là-dedans. «Oui – vous n'avez pas mal entendu – oui, on va doubler le coût de la prime.» Le coût de quelle prime? Nous allons voir, parce que la seule façon de bien comprendre la situation, c'est de faire le ménage dans les grandes affaires qui comportent la moitié de vérités puis la moitié d'erreurs ou un tout petit peu de vérités et beaucoup d'erreurs. «Mais, M. le Président, il faut ajouter à ce montant le 750 $ de franchise. Alors, au bout de la ligne, chaque individu, particulièrement... Et je fais référence notamment aux personnes âgées, qui, on le sait, consomment davantage de médication.» On sait que les personnes âgées sont plus vulnérables. On peut leur faire peur peut-être plus facilement parce qu'elles sont plus à la merci des autres. Donc, le bonhomme sept heures s'adresse aux personnes âgées.

(16 h 50)

«Pour les personnes âgées, c'est donc 1 100 $ qu'elles devront payer.» 750 $ plus 350 $, ça fait 1 100 $. Or, c'est faux. Ça, c'est faux. Pourquoi? M. le Président, si vous avez fait votre budget au début de l'année et si vous avez dit: Moi, je vais dépenser 100 $ par mois pendant cette année pour mes vêtements, pour acheter des vêtements, à la fin de l'année, ça va faire 1 200 $, hein? Arrive le mois de janvier, vous avez plus de besoins, vous dépensez 200 $. Est-ce que ça veut dire qu'à la fin de l'année vous allez avoir dépensé 2 400 $? Non. Vous avez ajouté 100 $ au premier mois, ça va passer de 1 200 $ à 1 300 $. C'est ça. Mais, si, moi, je vous dis: Bien non, ce n'est pas ça, vous avez doublé votre montant, donc à la fin c'est 2 400 $, alors là je vous induis en erreur. C'est ce que font les gens de l'opposition, c'est ce que fait le député de Hull. Et il ajoute: «Pour les personnes âgées, c'est donc 1 100 $ qu'elles devront payer.» Et, un peu plus loin, il dit: «C'est 2 200 $ pour un couple de personnes âgées.» Imaginez-vous, si c'était vrai pour une personne, c'était vrai pour deux personnes. Mais c'est faux pour une personne; c'est doublement faux pour deux personnes. Des bonshommes sept heures, M. le Président. Ils font peur au monde avec un petit peu de vérités puis beaucoup de mensonges – mettons, beaucoup d'exagérations, pour être parlementaire.

Alors, M. le Président, moi, je vais essayer de faire le ménage là-dedans et puis dire ce qui est vrai dans le projet de loi et ce qui est faux dans le projet de loi. Avec ça, vous allez voir que c'est important qu'on l'adopte, la loi, puis au plus vite. Actuellement, évidemment, une des choses qui ont été dites, c'est que l'augmentation des médicaments ferait en sorte que les gens qui ont de la misère à payer leurs médicaments présentement et qui s'en privent à cause de ça, bien, ils vont être obligés de s'en priver bien plus après. Donc, il y a un tas de gens qui vont être obligés de se priver de médicaments, et puis ça va leur nuire. Ça, c'est ce qu'ils ont dit. Or, ce n'est pas vrai.

Premièrement, M. le Président, j'ai fait des recherches pour répondre à tout ça parce que, vous savez, je prends bien au sérieux ce qu'ils disent. Alors, je me suis dit: Il y a des choses importantes, il faut voir clair là-dedans. Eh bien, regardons. On dit qu'il y a des personnes âgées qui sont obligées de se priver de médicaments à cause de l'assurance médicaments. Alors, qu'est-ce qu'il en est au juste? Il y a du vrai là-dedans puis il y a du faux. Avant que la loi n'existe, quel était le pourcentage de gens qui devaient se priver de médicaments parce qu'il n'y avait pas d'assurance? Ceux qui devaient s'en priver occasionnellement: 9,2 % des gens qui en avaient besoin devaient s'en priver. Et ceux qui devaient s'en priver souvent: 2,1 %. Au total, 11,3 % des gens devaient se priver de médicaments avant l'assurance médicaments. Maintenant qu'il y a de l'assurance médicaments, la situation est telle que, occasionnellement, il y a 5,7 % des gens qui doivent s'en priver et 0,8 % qui doivent s'en priver souvent, ce qui veut dire 6,5 %.

Ça veut dire que l'adoption de l'assurance médicaments, du régime, a fait en sorte que la moitié des gens qui devaient se priver de médicaments avant ne doivent pas s'en priver. Donc, c'est une grosse amélioration. Ce n'est peut-être pas suffisant. Qu'ils nous disent, les gens d'en face, que ce n'est pas suffisant, et je dirai: Peut-être que vous avez raison. On va essayer de trouver autre chose. Mais, au moins, réglons ce problème-là! Alors, voici donc encore des affaires pour faire peur au monde – bonshommes sept heures – alors que l'assurance médicaments a amélioré beaucoup la situation.

On nous dit: Oui, mais vous allez augmenter la prime de 175 $ à 350 $, doubler. Bon, doubler, doubler... Doubler, c'est un grand mot. Si, par exemple, ça me coûtait 1 $ par mois et que je faisais passer ça à 2 $, ce serait doubler, hein? Ce serait doubler. Mais, si je passe de 175 $ à 350 $, c'est plus important mais ce n'est quand même peut-être pas si considérable. Et pourquoi ce n'est peut-être pas si considérable? À cause de la mécanique qui a été mise en place pour ne pas toucher les plus petits gagnants. On nous a dit: Oui, mais avec ça les plus petits gagnants, les gens les plus dépendants ne pourront pas se procurer les médicaments. C'est faux, parce que, pour qu'il y ait augmentation de prime, il faut quoi? Il faut, premièrement, qu'on paie de l'impôt, parce que la prime se calcule sur le revenu imposable. Donc, tous ceux qui n'ont pas assez de revenus pour payer de l'impôt, les gens les plus défavorisés, ils n'auront aucune augmentation. Ça, c'est la vérité. Ils ne l'ont pas dit, en face, non, parce qu'ils veulent faire peur au monde. Des bonshommes sept heures, je vous le dis, M. le Président.

Alors, à partir de quel moment le revenu de la personne va être touché? Bon, faisons une distinction. Quelle est la situation des gens par rapport à l'assurance médicaments actuellement? Actuellement, si on gagne 10 860 $, on ne paie pas de prime, mais, si on gagne un peu plus, à partir de 10 860 $, là on commence à payer. On paie combien, M. le Président? On paie 4 %. Alors, si on gagne 11 000 $, on paie combien pour l'assurance médicaments? J'ai des tableaux ici. On paie 6 $ présentement. Combien paiera-t-on après l'augmentation de la prime? 6 $. Aucune différence. Si on gagne 15 000 $, combien paie-t-on maintenant par année en prime? On paie 166 $. Combien paiera-t-on si on gagne 15 000 $ par année, une personne seule? Combien paiera-t-elle, cette personne seule? Après la modification que la loi va apporter, le montant de 166 $ passera à 166 $. Aucune différence. Donc, à 15 000 $, la loi n'apporte aucune différence. À partir de 15 500 $ de revenus personnels sur mon rapport d'impôts, l'augmentation apportée par cette loi-là va faire en sorte qu'au lieu de payer 175 $ pour l'année en prime je vais payer 186 $ pour l'année, donc 1 $ de plus par mois. Ce n'est pas si terrible.

On voudrait bien que tout soit gratuit. C'est ça, M. le Président. Vous savez, on ne demande rien au nourrisson quand on lui donne sa bouteille de lait. Il n'a rien à payer, c'est un nourrisson. Mais, entre adultes, on s'entend pour dire que les choses ont un prix et qu'il faut payer un prix. La difficulté est de ne pas payer un prix exorbitant. Ça ne me semble pas exorbitant, à ce moment-là, quand on gagne 15 500 $ par année, qu'on paie 186 $. Ça veut dire à peu près par mois 15 $. Ce n'est pas énorme. Et, pour qu'on paie 350 $, quel montant d'argent il faut gagner, c'est-à-dire quel est le montant d'argent qu'il faut avoir? Quel est le salaire qu'il faut gagner au moins pour que notre prime passe de 175 $ à 350 $? 18 500 $ par année. Alors, vous voyez, ce n'est pas vrai que ça touche les plus démunis, ce n'est pas vrai que ça touche les gens à l'aide sociale, ce n'est pas vrai que ça touche les personnes âgées qui n'ont que leur pension de vieillesse pour vivre, ce n'est pas vrai. Tout ce qu'ils ont dit là-dessus pour faire croire ça aux gens, ce n'est pas vrai. Des vrais bonshommes sept heures pour faire peur aux personnes âgées.

Alors, je continue, M. le Président. Vous voyez, l'important quand on discute les projets de loi, c'est qu'on peut être pour, on peut être contre, mais il faut savoir contre quoi on est et pour quoi on est. Il faut dire la vérité aux gens pour que les gens se fassent une idée puis qu'ils disent: Je suis d'accord ou pas d'accord, mais je suis d'accord avec la vérité, avec la réalité. Bon. Quel est l'objectif de cette loi-là? C'est faire en sorte de consolider le système d'assurance médicaments.

(17 heures)

Vous savez, j'ai rencontré un député de l'opposition que j'estime beaucoup, je vous dis. Je ne le nommerai pas par discrétion. Il dit: Il y a un problème dans cette loi-là parce que, imaginez, imaginez bien, si les gens qui gagnent moins de 10 000 $ ne paient pas leur prime, qui est-ce qui la paie? C'est ceux qui gagnent 10 000 $ en montant, de 10 000 $ à 36 000 $, ceux qui vont voir leur prime passer à 350 $. C'est eux qui vont payer pour les plus pauvres, puis, nous autres qui gagnons un peu plus, on ne paiera rien. C'est faux. Pourquoi c'est faux? Parce que le gouvernement, le fonds consolidé du Québec a mis, en 1998, dans l'assurance médicaments 771 millions. L'an dernier, c'était autour de 900 millions et, cette année, ce sera quelque chose qu'on estime autour de 1,1 milliard qui sera mis, pris dans nos impôts à tout le monde pour consolider le système d'assurance médicaments. Pourquoi? Pour que, nous aussi, on aide les plus pauvres à avoir des soins de santé. C'est ça, la réalité. Ça, ils ne l'ont pas dit. Alors, c'est important de regarder les choses et de les voir comme elles sont.

L'objectif de cette loi-là, c'est de consolider le système et de faire en sorte que les gens qui sont dans les revenus de la classe moyenne puissent contribuer un peu plus, mais seulement un peu plus. Pourquoi? Parce que l'augmentation ne se fait que sur la prime, c'est-à-dire ce que vous payez dans votre rapport d'impôts. Quand vous allez aller au comptoir pour chercher des médicaments, vous ne paierez pas un sou de plus. Les gens à l'aide sociale, qu'est-ce qu'ils vont payer? Ils vont payer 8,33 $, qui est leur franchise pour le mois, puis, s'ils achètent pour 200 $ dans le mois, ils ne pourront pas payer plus que 16,66 $. Ça, c'est le maximum. C'est déjà comme ça et ça va être encore comme ça, ils ne paieront pas plus. Pourquoi? Parce que, les gens de la classe moyenne et nous, nous payons plus. Alors, c'est un système qui me semble équitable. Pourquoi est-ce qu'on veut le consolider en augmentant la prime? Pour rapprocher le coût du fonctionnement du système des besoins de la population. Si le système fonctionne bien, si les coûts sont relativement équitables, c'est un système qui va continuer à donner des services à l'ensemble de la population.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qui se passe? Avant, 11,3 % de la population ne pouvait pas se permettre d'acheter ses médicaments. Souvent, c'étaient des jeunes familles avec des enfants. Un enfant avait, par exemple, une mauvaise grippe, avait besoin d'antibiotiques, une facture qui pouvait monter à 50 $. Bien des familles ne l'achetaient pas parce qu'elles n'avaient pas les moyens. Maintenant, ça ne se voit plus, ça. Ça ne se voit plus parce que ça ne peut pas leur coûter plus que 15 $, donc le tiers. Alors, elles sont capables de l'acheter. Donc, qu'est-ce que ça veut dire? 1,4 million de personnes qui n'avaient aucune couverture et qui maintenant sont couvertes. Donc, il y a beaucoup moins de gens qui ne peuvent pas se payer des médicaments, et, ceux qui ne peuvent pas se les payer, on va étudier pour savoir comment résoudre ce problème-là.

Deuxième chose, pour les revenus les plus modestes, bien, la loi actuelle protège les gens qui ont les revenus les plus modestes, ils n'ont aucune augmentation. Alors, c'est une autre bonne raison pourquoi j'appuie la loi, et je dis: Il faut l'adopter et au plus vite. Il n'est pas question de reporter.

Autre chose. J'ai expliqué que la franchise et la coassurance pour les plus pauvres, ça reste à 8,33 $ par mois au maximum, ce qui veut dire 16,66 $ au maximum pour les plus pauvres. Donc, ça n'augmente pas la charge actuelle, ça ne pourra pas les priver d'acheter leurs médicaments, M. le Président. Enfin, et peut-être le plus important, tous les enfants en bas de 17 ans n'ont rien à payer. Rien. C'est pris à la charge de tous nous autres, M. le Président, grâce à nos impôts. Ensuite, les étudiants en bas de 25 ans qui demeurent avec leurs parents n'ont rien à payer encore, tout ça pour aider à encourager nos étudiants, nos jeunes à se former et à aller de l'avant.

Alors, vous voyez, M. le Président, c'est un excellent projet de loi, c'est un projet de loi qui permet de consolider un système d'assurance médicaments dont nous avons grand besoin. Et on voudrait, de l'autre côté, que ce soit reporté aux calendes grecques pour niaiser, pour compliquer la situation, alors qu'on est élus pour régler les problèmes et aller de l'avant? Non. Il faut adopter ce projet de loi et il faut l'adopter tout de suite. C'est pour ça que je suis contre le report. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Vaudreuil.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Je suis heureux de prendre la parole pour appuyer la motion de mon collègue de Papineau pour reporter l'étude du projet de loi n° 117 et je dois vous dire qu'il me semble assez déplorable de voir que des collègues de l'opposition mentionnent qu'il est irrespectueux de faire une telle motion ou encore que c'est niaiseux de faire ça. Je pense que, si nous le faisons, c'est pour demander au gouvernement de reconsidérer sa décision, et, si on le fait, c'est par respect pour les personnes âgées et les plus démunis qui auront à porter le fardeau de l'augmentation d'une taxe déguisée que fait le gouvernement avec son projet de loi.

D'ailleurs, il est peut-être intéressant de faire un bref rappel historique. Vous savez, dans les années 1992 ou 1993, à ce moment-là, le gouvernement libéral du temps avait proposé de maintenir les médicaments gratuits pour les assistés sociaux et également pour les personnes âgées qui recevaient le supplément de revenu garanti, mais, pour les autres personnes âgées qui recevaient soit une partie ou en totalité... de charger 2 $ par prescription jusqu'à un montant annuel de 100 $. À ce moment-là, le député d'Abitibi-Ouest, le député de Laviolette et d'autres collègues du parti du gouvernement, du gouvernement péquiste, qui étaient alors en Chambre avaient déchiré leurs chemises en disant que ça n'avait aucun bon sens, que le gouvernement manquait de compassion pour les personnes âgées en demandant 2 $ par prescription avec un maximum de 100 $ par année. Ces mêmes personnes là qui ont déchiré leurs chemises en disant: Ça n'a aucun bon sens, vous êtes un gouvernement qui n'a pas de compassion, bien, elles viennent dire: Maintenant, on peut doubler, augmenter de 100 % les primes.

Donc, je voudrais simplement vous donner individuellement, M. le Président, un cas bien précis pour que les gens puissent se retrouver dans la situation qui existait avant 1996 et celle qui existe maintenant, parce que, en 1996, vous savez, le gouvernement péquiste a décidé de mettre en place ce régime-là pour faire des économies dans le cadre des compressions budgétaires, et il a vendu de façon hypocrite, sous forme d'une mesure sociale, une mesure d'ordre fiscal. Vous savez, depuis 1996, le gouvernement est allé chercher dans la poche des personnes âgées près de 900 millions sous forme de contributions et de primes, 900 millions. Et qu'est-ce que ça veut dire individuellement? C'est que, avant 1996, le coût individuel moyen pour une personne âgée pour ses médicaments, qu'elle devait supporter, c'était 50 $. Cette année, le coût individuel moyen qu'une personne âgée doit supporter pour ses médicaments, c'est 300 $. Donc, en trois ans, une augmentation de 600 %. Et on va venir nous dire que, non, c'est correct, que c'est niaiseux de parler de ça?

M. le Président, une personne adulte qui gagne 15 235 $ présentement, elle peut payer jusqu'à 925 $ de sa poche pour les médicaments, et vous savez comme moi que les personnes âgées doivent consommer beaucoup de médicaments. Donc, une personne âgée paie jusqu'à 925 $. Avant ce régime-là, avant 1996, elle payait jusqu'à un maximum de 100 $. Donc, elle doit payer aujourd'hui, elle peut être appelée à payer 825 $ de plus qu'il y a trois ans et demi. Pour une personne âgée, un adulte qui a un revenu de 18 360 $ – vous savez, 15 000 $, je ne pense pas qu'on doive croire que c'est un revenu qui est exagéré dans le contexte d'aujourd'hui, surtout pour des gens qui sont à revenus fixes – un adulte qui gagne 18 360 $ présentement, une personne âgée, ça peut lui coûter jusqu'à 925 $. Avec les propositions du projet de loi, l'augmentation qui est prévue dans le projet de loi n° 117, ça pourra aller jusqu'à 1 100 $, alors que, il y a trois ans, c'était jusqu'à 100 $. Donc, 1 000 $ de plus de la poche d'une personne âgée qu'elle pourra être appelée à débourser pour ses médicaments. Et je vois mal comment des gens qui avaient déchiré leurs chemises pour un 100 $ en 1992-1993 disent aujourd'hui: Ça a du bon sens et il faut aller de l'avant avec ça.

(17 h 10)

M. le Président, le projet de loi n° 117, non seulement il augmente la prime, donc il la double de 175 $ à 350 $, il prévoit également une indexation automatique annuelle. Ça veut dire que dorénavant la prime, de façon automatique, elle va augmenter à chaque année. De combien? On ne le sait pas. Combien les personnes âgées devront débourser de plus? On l'ignore parce que les critères seront établis par un règlement qui sera adopté par le gouvernement mais qu'on ne connaît pas encore. Donc, c'est l'incertitude pour les personnes qui auront à payer pour leurs médicaments dans le futur.

Au mois de décembre dernier, vous savez, la ministre a déposé un rapport sur l'évaluation du régime général d'assurance médicaments et, au mois de février, elle a déposé ce qu'on appelait des pistes de révision soi-disant pour faire une consultation et demander à des groupes, différents groupes, de venir donner leur opinion sur les pistes de révision et faire part de l'impact qu'avait eu, selon eux, la mise en oeuvre du régime d'assurance médicaments depuis 1996. Ces consultations, M. le Président, d'abord, elles se sont faites rapidement. On se souviendra que la ministre avait déposé ses pistes de révision le 2 février et qu'on demandait que les mémoires soient entrés pour le 9 février, et vous comprenez que c'est toujours difficile pour ces groupes-là de préparer des mémoires, surtout pour analyser un régime qui est fort complexe, qui est compliqué et qui a des impacts importants pour les gens qui sont couverts par ce régime-là.

Vous savez, je voudrais vous indiquer que les groupes qui sont venus devant la commission nous ont donné comme évaluation du régime qu'il ne fallait pas revoir uniquement l'aspect financier du régime, qu'il y avait beaucoup d'autres éléments qui devaient être revus dans le cadre d'une évaluation plus générale de ce régime d'assurance médicaments. Je vais vous donner, M. le Président, les principaux éléments qui ont été soulevés par ces groupes en donnant justement les arguments qui ont été fournis. Premièrement, tous les groupes ont dit: Ne faites pas une évaluation uniquement financière et ne faites pas de modifications uniquement financières; deuxièmement, analysez l'impact sur le virage ambulatoire; troisièmement, analysez l'impact également au niveau de la facilité pour les personnes les plus démunies et les personnes âgées de pouvoir consommer les médicaments dont elles ont besoin; quatrièmement, il y a des problèmes d'équité dans l'application du régime, il y aurait des corrections à apporter; cinquièmement, il y a des problèmes d'application dans le régime, et, tant qu'à revoir le régime, on devrait tenter d'apporter des solutions à ces problèmes d'application. Or, on constate que, dans le projet de loi n° 117, aucune mention n'est faite pour apporter des solutions à ces différents éléments qui ont été mentionnés.

Premièrement, si je reviens sur l'aspect financier, vous savez, il y a plusieurs groupes qui sont venus devant la commission pour demander d'élargir la révision à des aspects autres qu'uniquement financiers. Par exemple, le Collège des médecins, il dit: «L'essentiel de notre message concerne le fait que l'administration du régime et les scénarios envisagés pour l'améliorer relèvent d'une approche strictement comptable et actuarielle sans tenir compte d'une approche d'assurance qualité. L'opportunité d'utiliser un nouveau médicament peut supplanter l'opportunité d'utiliser un lit d'hôpital ou une salle d'opération.» L'Ordre des pharmaciens dit, et je cite: «Il est difficile de comprendre pourquoi l'État souhaite réduire le débat à une stricte perspective économique.» Et pourtant, M. le Président, c'est ça que fait le projet de loi, il réduit les modifications à une approche uniquement fiscale et financière pour aller chercher de l'argent pour le ministre des Finances.

Plusieurs groupes nous ont parlé de l'impact négatif qu'avait, dans son cadre actuel, le régime sur le virage ambulatoire, virage ambulatoire que nous devons favoriser. Je pense qu'avec les nouvelles technologies aujourd'hui, justement avec les nouveaux médicaments, il est possible d'avoir davantage de chirurgies d'un jour, de pouvoir réduire les durées de séjour à l'hôpital, ce qui est favorable également à la personne elle-même. Par ailleurs, lorsqu'elle retourne chez elle, elle doit assumer le coût de ses médicaments.

Alors, M. le Président, l'Association des hôpitaux du Québec est venue déposer un mémoire fort bien documenté où elle dit comme conclusion: «Il est donc évident, compte tenu des éléments invoqués à partir de l'information que nous avons recueillie, que toute modification aux modalités du régime et notamment les augmentations de contribution se traduiront par un impact non souhaitable sur le virage ambulatoire. L'intégration de l'épisode de soins entre le centre hospitalier et le CLSC, telle que prévue dans un réseau intégré de soins et de services, sera freinée non seulement par l'absence d'harmonisation du statut du médicament entre les établissements, mais aussi par les pressions exercées par les usagers, qui ne pourraient plus assumer une hausse de la contribution.» Donc, voilà pourquoi plusieurs groupes sont venus nous dire: Il faudrait évaluer l'impact des économies qu'on génère dans le système hospitalier avec le virage ambulatoire et tenir compte de cet impact-là dans la révision du régime d'assurance médicaments. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est l'Association des hôpitaux du Québec.

Le troisième élément, M. le Président, ce sont les impacts négatifs qu'aura une augmentation des primes sur la consommation des médicaments par les plus démunis et par les personnes âgées, et on pourra vous rappeler qu'en 1996 l'opposition officielle avait dès ce moment-là dénoncé avec vigueur les impacts fort négatifs que l'introduction du régime aurait sur les assistés sociaux et les personnes âgées, en disant: Il y a des personnes qui devront dorénavant choisir entre la consommation de médicaments et payer leur loyer ou se nourrir. Bien, sans doute qu'à ce moment-là également le gouvernement avait qualifié l'opposition d'irresponsable, de démagogue, de vouloir faire peur au monde. Bien, c'est exactement ce qui est arrivé.

Et, si nous nous reportons au rapport Tamblyn, rapport Tamblyn dont certains éléments, vous savez, étaient devenus publics au cours de la campagne électorale de 1998... Et le ministre du temps s'était dépêché de dire: Écoutez, non, non, non, c'est seulement préliminaire, et puis ce n'est pas vrai, ça ne se peut pas, et c'est démagogue, et ça fait peur au monde. Bien, le rapport final a été déposé en mars 1999 et qu'est-ce qu'on retrouve comme faits saillants? Baisse de consommation marquée chez les prestataires de la sécurité du revenu, moins 14 %, et chez les personnes âgées, moins 9,2 %. La baisse de consommation touche de façon plus importante les médicaments essentiels, puisque le taux de consommation des médicaments essentiels est de deux à trois fois supérieur à celui des médicaments moins essentiels. On note une baisse de 11,8 % chez les personnes âgées.

On continue: «Chez les personnes âgées, la baisse de consommation des médicaments essentiels pour le traitement de l'asthme, de l'épilepsie, des maladies cardiaques, du diabète et du risque d'embolie a fait augmenter de 66 % les événements indésirables, de 111 % les visites médicales.» Est-ce qu'on sauve de l'argent? On paie pour les visites médicales. Également, ça fait augmenter de 47 % les visites à l'urgence. Ce n'est pas l'opposition officielle qui dit ça, c'est un rapport réalisé par 16 chercheurs dirigés par le Dr Robyn Tamblyn, de l'Université McGill. Et, quand la ministre dit: Écoutez, nous avons corrigé la situation l'automne dernier quand nous avons ramené la gratuité des médicaments pour les assistés sociaux avec des contraintes à l'emploi, ce n'est qu'une partie de la solution.

Beaucoup de groupes qui oeuvrent dans les milieux défavorisés et notamment pour des personnes qui sont atteintes de santé mentale dans tout le processus de désinstitutionnalisation, qu'on doit appuyer également, ont énormément de problèmes aujourd'hui à choisir, à pouvoir financer et consommer des médicaments essentiels parce qu'ils doivent choisir entre payer leur loyer, se nourrir et consommer, acheter leurs médicaments. Ça, ce sont des groupes qui oeuvrent dans ces milieux-là qui sont venus le dire devant la commission parlementaire.

(17 h 20)

Si on revient, par exemple, aux personnes âgées, vous avez le Conseil des aînés, qui est un organisme consultatif au gouvernement, qui dit: «La pauvreté relative des aînés du Québec a été démontrée dans notre document La réalité des aînés québécois où on mentionne que 62,8 % des personnes âgées de 65 ans ou plus ont un revenu de moins de 15 000 $[...]. Même ceux qui vous paraissent un peu mieux nantis – entre 15 000 $ et 25 000 $ de revenus par année - sont en fait dans une situation économique précaire[...]. Plusieurs personnes âgées sont dans cette situation, surtout des femmes seules, et chaque perte de revenus ou chaque augmentation de taxes ou d'impôts les oblige à réévaluer leur capacité de se maintenir dans leur environnement actuel.» Et le Conseil des aînés conclut: «Il est donc hors de question que les aînés québécois subissent une nouvelle hausse du coût de leur assurance médicaments.» Et il recommande même plutôt d'abolir le régime actuel.

Pour ce qui est du mémoire de l'Association des hôpitaux du Québec qui dit avoir justement validé auprès d'une partie de ses membres bien des informations, surtout celles des infirmières qui s'occupent du maintien à domicile, on dit: «Les témoignages de ces personnes-là – les infirmières – sont à l'effet que plusieurs patients hésitent à aller chercher leurs médicaments à cause des coûts. Les impacts organisationnels sont la non-observance des plans d'intervention de l'infirmière afin de diminuer les coûts. Après une consultation rapide auprès des intervenants oeuvrant dans le secteur de l'hôpital de jour, nous avons recueilli différentes informations. Pour plusieurs personnes âgées, la franchise réclamée par le régime actuel, même si elle semble peu élevée, a un impact sur leur équilibre budgétaire déjà précaire et les force à faire des choix.» M. le Président, si nous augmentons la prime, nous allons empirer la situation pour ces personnes-là.

Les questions d'équité, maintenant. Plusieurs groupes également sont venus souligner des problèmes d'équité qui existent avec le régime actuel. Simplement, le Protecteur du citoyen, dans un mémoire fort élaboré, est venu présenter ses commentaires. Il nous dit: «Il y a des difficultés majeures qui subsistent. Le Protecteur du citoyen se dit insatisfait des réponses apportées aux divers problèmes qu'il a soulevés, et les pistes de solution proposées par la ministre ne répondent pas à ses interrogations.» Il dit: «On consacre à peine une page et demie au sujet de l'équité en n'évoquant que quelques-uns des problèmes qui sont décrits dans le document. En outre, aucune solution n'est proposée. On parle de poursuivre les réflexions ou les travaux en cours.» Donc, M. le Président, le projet de loi n° 117, uniquement financier, perçu pour aller collecter des argents auprès des personnes qui sont couvertes, ne répond pas, vous savez, aux interrogations et aux commentaires du Protecteur du citoyen qui soulève divers problèmes d'inéquité, ce qui touche les pauvres, ce qu'il appelle les pauvres sans statut, qui ont des plafonds différents pour des situations financières analogues, et ça, ce sont des personnes qui gagnent des revenus très modestes.

Autre inéquité, les personnes âgées qui ont droit partiellement seulement au supplément de revenu garanti. Dès que ces personnes-là, qui ont un revenu fixe, reçoivent une petite rente d'ailleurs, automatiquement elles devront contribuer, si elles achètent des médicaments, jusqu'à 500 $ au lieu de 200 $ pour la franchise et la coassurance.

Autre problème, l'harmonisation avec les régimes privés – rien là-dedans – et le problème également des personnes qui, dans les régimes privés, doivent payer des franchises sur une base annuelle et non pas sur des bases mensuelles, et ça, c'est un autre sujet, une autre question qui a été soulevée par le Conseil de la santé et du bien-être, d'ailleurs. Le Conseil de la santé et du bien-être, qui est un organisme aviseur au gouvernement, dit: «Vous savez, de telles mesures freinent l'accès aux médicaments des adhérents, particulièrement des plus vulnérables. Même si les corrections ont été apportées récemment – et ça, c'est les mesures qui ont été apportées par la ministre l'automne dernier – la difficulté demeure. Il semble que ces mesures réduisent la consommation de tous les types de médicaments, même ceux qui sont efficaces et essentiels.» Et la Coalition des médecins pour la justice sociale: «La proposition de la ministre de la Santé d'augmenter les primes est déraisonnable et met en péril la santé de la population vulnérable du Québec. Ces mesures réduisent leur accessibilité aux médicaments essentiels.» M. le Président, voilà, pour les problèmes d'équité, ce qui a été soulevé par les différents groupes. Curieux que le député d'Abitibi-Ouest n'en ait pas parlé tout à l'heure.

Autre question, les problèmes d'application. Plusieurs groupes sont venus souligner des problèmes pratiques d'application du régime actuellement, entre autres l'Association des pharmaciens propriétaires qui a à chaque jour – ces personnes-là, ces professionnels – à répondre aux personnes qui viennent acheter leurs médicaments dans le cadre du régime. On nous dit: «D'abord, c'est un régime extrêmement difficile à appliquer. Après trois ans, les pharmaciens doivent toujours consacrer une partie importante de leur temps à expliquer aux assurés comment ça fonctionne. Deuxièmement, la question des franchises – et là ce n'est pas nous qui disons ça. La franchise – vous savez, la franchise de 8,33 $ – est un des éléments qui rendent le régime inutilement complexe, et par ailleurs un très grand nombre d'assurés ont appris à contourner la franchise – ce sont les pharmaciens qui viennent nous dire ça – en renouvelant leurs ordonnances le premier jour d'un mois et le dernier jour de ce même mois pour le même traitement. Ils évitent ainsi de payer une franchise sur deux ordonnances.» Donc, problème d'application, et ça, il n'y a rien dans le projet de loi n° 117 qui vient le corriger.

M. le Président – le dernier item – vous savez, la ministre nous dit: Je vais prendre des mesures pour ralentir l'augmentation du coût des médicaments, nous allons mettre sur pied une politique du médicament. Son prédécesseur, en 1996, il y a quatre ans, avait exactement le même discours. Il disait, et je cite: «Un autre aspect que je veux souligner – il disait ça en 1996 – c'est que, ayant ce régime et ces paramètres, le monde va bénéficier... On a un système qui va être contrôlé et dont l'évolution des coûts va être contrôlée parce qu'on va avoir une politique du médicament, c'est prévu dans la loi.» Ça, c'était en juin 1996. En juillet 1997, le ministre faisait une grande déclaration – le ministre du temps – en disant: On va mettre en vigueur une politique du médicament. M. le Président, c'est encore le même discours de la ministre. Quatre ans après, il n'y a rien de fait, la ministre dit: On va mettre en place une politique du médicament pour ralentir l'augmentation des coûts. Encore une fois, c'est de la fuite par en avant.

Donc, pourquoi on demande au gouvernement de reconsidérer sa décision? C'est parce que, dans ce projet de loi là, les modifications sont uniquement économiques et financières, alors que les groupes qui sont venus en grande majorité ont demandé d'élargir et de profiter de la situation pour apporter d'autres amendements et apporter des solutions à des problèmes qui existaient. C'est une vision plus globale qui est nécessaire. C'est la voie de la facilité qui a été prise en disant: On augmente les primes. On n'a pas analysé les impacts sur le virage ambulatoire, on n'a pas corrigé les problèmes d'équité, on n'a pas corrigé les problèmes d'application. Ce qu'on fait, cependant, c'est qu'on va chercher de l'argent additionnel, c'est l'unique objectif de cette loi-là, et je pense que, par respect pour les plus démunis et les personnes âgées, c'est pour ça, M. le Président, qu'on demande au gouvernement de reconsidérer sa décision. Merci.

M. Gautrin: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Vaudreuil et M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre, vous avez une intervention de 11 minutes.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. C'est avec beaucoup de plaisir que je vais intervenir sur cette motion de report parce que j'ai un certain nombre de messages à dire et à partager avec les membres de cette Assemblée et qui concernent le point de vue de l'opposition, qui concernent la motion de l'opposition à l'heure actuelle.

C'est assez incroyable, M. le Président, que la seule proposition qu'on ait à nous faire pour améliorer l'ensemble de notre régime, que ce soit celui de l'assurance médicaments ou notre système de santé – de toute façon, hein, faut les entendre aux différentes périodes de questions, faut les entendre aux commissions parlementaires – c'est de nous dire: Une motion de report. Ça correspond exactement à l'attitude qu'a eue ce parti lorsqu'il a formé le gouvernement. De report en report, il nous a mis dans la dèche, hein? Il nous a mis dans la dèche.

Des voix: Bravo!

(17 h 30)

Mme Marois: De report en report, il n'a pas procédé à la réforme de la santé et des services sociaux, de telle sorte que nous avons dû le faire sur une période courte, M. le Président, trop courte, en même temps que nous ramassions leur gâchis au plan budgétaire. Report des réformes municipales, tout ce qu'on avait trouvé à faire, c'était de refiler une facture aux municipalités sans proposer de véritables changements au plan institutionnel. Un gouvernement de report, une opposition de report, M. le Président. Mais il y a une chose cependant dont on peut se réjouir: ils sont dans l'opposition, et ça a beaucoup moins de conséquences, lorsqu'on est dans l'opposition, que d'être une opposition de report.

Une opposition de report puis une opposition de contradiction, parce qu'on veut en même temps baisser les impôts, augmenter les investissements en santé, en éducation, on veut continuer à avoir des déficits dans le régime d'assurance médicaments, on veut rembourser la dette. On veut faire tout ça – c'est la quadrature du cercle – sans proposer quelque changement que ce soit autrement que de dire que leur arrivée au gouvernement serait comme la pensée magique et permettrait que toutes les solutions apparaissent tout d'un coup. Sans compter le fait qu'ils n'ont jamais été capables non plus de défendre le Québec pour éviter que leurs grands frères à Ottawa, les libéraux, actuellement, ne viennent nous enlever l'essentiel de ce que sont les transferts sociaux canadiens qui nous permettraient de mieux investir autant en santé et en éducation que dans la lutte à la pauvreté, M. le Président. Alors, une opposition de report, un gouvernement qui a été un gouvernement de report.

Nous sommes des gens responsables, des gens respectueux des besoins de la population québécoise. Comme personnes et comme membres du gouvernement, comme équipe gouvernementale, nous avons assumé pleinement et complètement nos responsabilités. Ça les choque parfois quand je leur dis que ça a pris pas mal de courage pour faire ce que nous avons fait à l'égard de l'assainissement des finances publiques; ça a pris aussi pas mal de courage de la part de mon collègue le député de Charlesbourg, ministre de la Santé et des Services sociaux, pour procéder à la réforme essentielle et nécessaire de l'ensemble de notre réseau. Et aujourd'hui on peut recommencer à construire sur des bases plus solides, plus saines, dans une perspective où on peut se refixer à nouveau un ensemble de priorités pour mieux répondre aux besoins de nos concitoyens et de nos concitoyennes.

Oui, nous avons aussi été audacieux pendant cette période, puisque, en même temps que nous faisions cela, nous avons été capables d'adopter de nouvelles politiques et de nouvelles mesures sociales particulièrement progressistes. Et l'exemple du régime d'assurance médicaments est probablement celui qui illustre le mieux à cet égard les choix et les orientations de notre gouvernement à l'égard de l'amélioration des conditions de vie de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Il y avait au moins 1,2 million de Québécois qui n'avaient aucune couverture, aucune possibilité d'avoir accès à des médicaments, pas gratuitement, pas en payant une petite franchise, pas en payant une petite somme chaque mois si on a un revenu très bas, rien, pas d'assurance médicaments, M. le Président. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons rendu possible l'implantation d'un régime d'assurance médicaments qui fait que maintenant, de façon universelle, l'ensemble de la population québécoise a accès à des médicaments à un coût acceptable, compte tenu de leurs revenus.

Et pour m'assurer, dans les changements que nous proposons, que nous allons corriger – pas reporter, M. le Président! – les problèmes vécus à l'intérieur du régime qui effectivement sont des problèmes financiers... Eux disent: Bien, oui, ils règlent les problèmes financiers, ils ne s'occupent pas du reste. Bien, eux, ils n'ont pas réglé les problèmes financiers puis ils ne se sont pas occupés du reste non plus, ça fait qu'ils nous ont laissé les deux sur les bras. Bon.

Alors, dans l'assurance médicaments, c'est vrai qu'il y a actuellement un déficit au Fonds de l'assurance médicaments dû essentiellement à deux causes, elles sont simples: d'abord, le prix lui-même des médicaments qui augmente à un rythme absolument démentiel, il faut bien en convenir, de l'ordre de 15 % par année; et par ailleurs dû au fait qu'il y a un plus grand nombre d'adhérents qui ont accepté de participer au régime d'assurance médicaments parce qu'il était plus intéressant que le régime privé dans lequel ils étaient inscrits et qui soit se terminait ou parce qu'ils quittaient leur emploi.

Alors, évidemment les deux éléments combinés, puis ajoutez à cela, oui, le fait que de nouveaux médicaments apparaissent de plus en plus sur le marché. Nous sommes l'endroit au Canada qui inscrit ses médicaments à un rythme le plus élevé et qui donc régulièrement inscrit les nouveaux médicaments qui apparaissent sur le marché. Ces fameux médicaments novateurs brevetés, nous les inscrivons sur la liste, nous les rendons accessibles à la population. Or, dans les faits, bien sûr à cause de l'amélioration et des découvertes que nous faisons à cet égard, il y a des médicaments qui apparaissent qui sont plus efficaces et que nous pouvons offrir à la population québécoise, que nos spécialistes peuvent prescrire. Donc, évidemment, ça aussi, ça a un impact sur l'augmentation des coûts.

On aurait pu, comme l'opposition nous l'a suggéré, nous le redemande encore aujourd'hui, se mettre la tête dans le sable puis dire: Ce n'est pas grave, un jour quelqu'un, quelque part, assumera les déficits. Ce seront nos enfants, nos petits-enfants. On s'en lave les mains. Ce n'est pas ça qu'on a fait, ce n'est absolument pas l'attitude qu'on a eue. C'est un régime essentiel, valable, il répond à des besoins. Il faut le préserver, il faut le maintenir, mais, pour ce faire, il faut l'assainir, M. le Président.

Alors, on a retenu essentiellement deux stratégies. Elles sont simples, elles sont faciles à comprendre. D'abord, on a voulu épargner, dans la correction à apporter, toutes les personnes à moyens et bas revenus, de telle sorte qu'on ne leur demande pas une contribution supplémentaire. Ce faisant, on a évité d'augmenter soit la franchise soit la coassurance, de telle sorte que les personnes ne voient pas leur accessibilité aux médicaments réduite. Ça, ça a été un choix majeur. Donc, plus de la moitié – la moitié – des adhérents au régime d'assurance médicaments du Québec ne verront, demain matin, après-demain, dans six mois ou dans un an, aucun, aucun changement quant à leur contribution monétaire au coût d'achat des médicaments. Oui, c'est ça, plus de la moitié des adhérents, aucun sou de plus ne leur sera demandé. Ça veut dire...

Une voix: ...

Mme Marois: Oui, on l'oublie. Oui, il faut le répéter. Et ajoutez à cela, M. le Président, que cela voudra dire que, pour tous les enfants dont les parents sont des adhérents, ils ne paient pas un sou, zéro sou. C'est ça que ça veut dire aussi: nous maintenons cette protection.

Le député de Vaudreuil nous dit: Oui, mais il y avait plusieurs autres améliorations à apporter. Ça leur ressemble beaucoup, ça. Probablement qu'ils auraient apporté les améliorations, augmenté le déficit puis ensuite, encore une fois, agi de façon irresponsable. Non, nous allons corriger le Fonds d'assurance médicaments et nous allons améliorer aussi le régime par un ensemble de mesures, sachant cependant que la base, elle est saine.

Alors, la deuxième stratégie que nous appliquons, c'est une augmentation de la prime. Cette prime, elle varie en fonction – oui, je sais, M. le Président, il ne me reste qu'une minute – des revenus, donc elle progresse au fur et à mesure que les revenus augmentent, qu'on augmente son revenu. C'est vrai, si on avait pu commencer à l'appliquer, cette prime, sur un revenu un peu plus élevé, ç'aurait été préférable. On a corrigé d'ailleurs un peu cette situation pour améliorer le sort d'un certain nombre de nos concitoyens qui vont devoir payer une prime supplémentaire. Elle augmentera plus lentement pour certains. Et c'est vrai qu'un certain nombre d'adhérents dont les revenus sont un peu plus élevés contribueront à une hauteur plus importante que maintenant, mais pour un service obtenu, M. le Président, pour un régime qui n'existait pas dans le passé. C'est pas mal facile maintenant de regarder ça puis de se dire: Bien, non, ce n'est pas acceptable. M. le Président, ce qui n'est pas acceptable, c'est qu'on nous propose une motion de report. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Je cède la parole à M. le député de Verdun pour une intervention de 11 minutes.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il faut un certain culot aujourd'hui pour être en mesure... Alors qu'on nous parle, on est en train de voter une loi pour réformer un régime d'assurance qui a été passé il y a deux ans, qui s'est avéré tout croche, n'a pas fonctionné, et on est en train de revenir en disant...

Des voix: ...

M. Gautrin: Non, mais, regardez, le régime ne fonctionne pas, n'a pas fonctionné aujourd'hui, et c'est pour ça, à l'heure actuelle, que vous êtes obligés de présenter une loi pour modifier la Loi sur l'assurance-médicaments. Et là qu'est-ce qu'on dit? On dit: Oui, mais, vous savez, vous avez été au gouvernement il y a un certain temps. Voyons donc, au lieu de toujours revenir sur les périodes où on était au gouvernement, regardez ce que vous avez fait. Vous avez présenté une loi, un projet de loi et un système – et je vais vous expliquer, M. le Président, pourquoi le système ne marchait pas – et là, à l'heure actuelle, parce que, au bout de deux ans vous étiez complètement dans le trou, le régime était en train de tomber complètement en faillite et que vous étiez amenés à devoir le modifier, au moment où on est en train de vous dire: Reprenez le bon sens parce que vous êtes en train d'aller dans la même direction qui était tout à fait une erreur, là vous êtes en train de vous réveiller et de dire: Vous avez été au gouvernement il y a un certain temps. Mme la ministre, je me permets de vous dire que ça prend un certain culot pour être en mesure de présenter ça.

M. le Président, laissez-moi revenir quand même sur le fond de la question. Vous allez dire à toutes les personnes âgées qui avaient plus de 65 ans, qui payaient 2 $ par prescription jusqu'à concurrence de 100 $, que ça a été un plus pour elles aujourd'hui d'avoir leurs médicaments en payant 838 $? C'est ça que vous allez leur dire, que ça a été un plus pour l'ensemble des personnes âgées? Vous allez leur dire: Oui, ça a été mieux? C'est beaucoup mieux aujourd'hui de payer 838 $ par l'assurance que vous leur proposez plutôt que le système qui était avant? Soyez sérieuse. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président. N'importe quelle personne âgée doit savoir qu'avant – et ça, toutes – elle payait 2 $ par prescription – d'ailleurs ils l'avaient critiqué lorsqu'on l'avait instauré, je m'en rappelle bien, vous arrachiez vos chemises quasiment à ce moment-là – jusqu'à concurrence de 100 $. Aujourd'hui, avec la réforme, ça va être 836 $ qu'elles vont être amenées à devoir contribuer pour avoir leurs médicaments. Et on essaie de nous faire croire qu'il y a amélioration avec ça. Est-ce qu'il y a le moindre semblant de sérieux?

Mais ce n'est pas tout, M. le Président, ce n'est pas tout à l'intérieur de ce projet de loi. Il est encore complètement bancal. Il est encore complètement bancal, vous voulez faire à la fois, à l'intérieur du même régime, un programme de soutien ou un programme social – d'ailleurs c'est assez mineur – et un régime d'assurance et vous vous dites: Tiens, ça ne marche pas. Vous faites payer à ceux qui participent, qui sont obligés de participer au régime, l'ensemble des mesures que vous mettez à l'heure actuelle pour aider. Alors, quand la ministre dit, à l'heure actuelle: C'est magnifique, les enfants n'auront pas, par exemple, à payer pour avoir leurs médicaments, je me permets de vous rappeler que, comme le régime doit être équilibré, si les familles avec enfants ne paient pas, ça va être les autres qui vont payer, les autres.

Vous, M. le Président, ne participez pas à ce régime-là, parce que, vous comme nous, on a notre régime privé d'assurance, on en est exclus, on n'est pas obligés réellement de participer à ce régime tout bancal, mais l'ensemble des personnes qui sont soi-disant riches, car elles gagnent plus que 18 000 $, alors on considère que ça commence à être des personnes riches, ces gens-là, on va leur dire: Vous devez, par vos contributions, aider et contribuer à l'amélioration des mesures sociales qui sont à l'intérieur du régime.

La situation, elle est grave, M. le Président. La situation, elle a été grave et elle a été dénoncée par nombre des gens qui sont venus, à savoir qu'il existe actuellement des gens qui ne peuvent plus assumer leur consommation de médicaments parce qu'ils sont amenés à devoir payer des contributions trop élevées au régime d'assurance médicaments. Et c'est une réalité qui est vécue dans les régions les plus pauvres de Montréal et les régions les plus pauvres du Québec. Et ça, on essaie de nous le présenter comme étant un plus.

Alors, la ministre, dans son argument, elle dit encore un autre argument qui est absolument magnifique et mirobolant, à savoir quoi? À savoir de dire: Oui. Ah! regardez, avant, il y avait des gens qui n'avaient pas d'assurance médicaments. Mais peut-être qu'ils n'en voulaient pas, peut-être qu'ils n'en voulaient pas. Est-ce que réellement il faut que le gouvernement soit présent dans la vie de chaque personne, que le gouvernement décide pour chacun d'entre nous, décide, à l'heure actuelle, qu'il faut absolument que vous ayez une assurance médicaments, que vous soyez obligé de contribuer à une assurance médicaments? Il y a des gens, de bonne foi, qui pensaient qu'ils n'avaient peut-être pas besoin d'une assurance médicaments. Mais là maintenant, pour eux, ça veut dire le régime où c'est le gouvernement qui pense pour les citoyens. C'est le gouvernement qui est de l'avant et qui va savoir ce qui est le mieux pour chacun des citoyens. Je me permets de vous signaler, bien gentiment, M. le Président, que, de notre point de vue, on pense qu'il y a des gens qui – permettre la liberté de choisir, la liberté d'agir – pourraient peut-être faire leurs propres choix quant à savoir si c'est préférable d'avoir une assurance médicaments ou ne pas avoir d'assurance médicaments.

Deuxième élément, M. le Président, que je n'ai jamais vu dans aucun régime d'assurance. Et je vais vous dire, vous seriez actuellement le gérant, le président de la compagnie d'assurances qui met ce régime d'assurance de l'avant, vous seriez en faillite demain parce que tout le monde partirait. Est-ce que vous avez vu beaucoup, dans votre vie, de régimes d'assurance où on double les primes? Est-ce que vous en avez vu beaucoup? Moi, je vais vous dire comment on fonctionne lorsqu'un régime d'assurance est légèrement déficitaire et qu'il a besoin d'augmenter ses primes. Il va faire un phénomène de lissage dans lequel il va augmenter progressivement les primes de manière à ce que le coût de l'augmentation ne soit pas trop violent sur l'ensemble des citoyens et sur l'ensemble des gens qui doivent contribuer. Parce que, normalement, dans un régime où il y a de la compétition, les gens pourraient choisir un autre régime.

Mais là, évidemment, vous les avez vus captifs, ils sont preneurs captifs par la loi. Vous leur avez dit: Vous êtes obligés de contribuer au régime d'assurance médicaments et, de surcroît, à ce moment-là, vous êtes obligés d'avoir... On va vous doubler, pour la majeure partie des gens, vos primes. M. le Président, est-ce que vous connaissez – et je le vous demande, c'est important, là; si vous êtes capable de me donner un exemple, je serais prêt à parier avec vous – un seul exemple où on double, on augmente de 100 % – 100 % – les primes pour l'année qui vient? Je n'en connais pas. Et ça va créer des situations graves sur le plan social. Vous allez avoir des gens qui maintenant vont avoir des primes de 836 $ et des primes qu'ils ne pourront pas assumer.

Troisième élément, parce qu'il y a plein de trous dans ce projet de loi, et c'est pour ça qu'on vote, qu'on leur suggère actuellement de le reporter. Troisième élément. La ministre a dit, et elle avait raison au moins sur ce point-là, elle a dit: Les médicaments augmentent terriblement, ils augmentent avec un taux bien plus élevé que l'indice des prix à la consommation, ils augmentent avec un taux de 14 % ou 15 % par année. C'est vrai. Ça, on n'en discute pas, ça fait partie de la réalité. Mais, M. le Président, les gens qui vont payer ces augmentations de primes... Parce que, rappelez-vous, l'article 1 fait en sorte que les augmentations de primes vont continuer à augmenter année après année. On vote la loi, mais, après, ça va continuer à augmenter. Alors, ça va augmenter probablement avec le rythme d'augmentation des médicaments. Ça vient augmenter à près de 14 % à 15 % après par année.

Alors, ces personnes, les plus grands consommateurs de médicaments – et c'est normal parce que le vieillissement entraîne, en général, une consommation augmentée des médicaments – sont, en général, des personnes qui sont des retraitées, des personnes qui sont âgées. Et, vous le savez, à l'heure actuelle, la majeure partie des régimes de rentes, la majeure partie des régimes de pensions ne sont pas indexés complètement, et, lorsqu'ils sont indexés, ils sont indexés à IPC moins 3 %, comme la majeure partie des retraités du gouvernement.

(17 h 50)

Alors, vous regardez ce que vous leur proposez, M. le Président, dans l'article 1. Je ne parle pas simplement du double de la prestation que vous avez faite; ça, c'est déjà inscrit. Mais, en plus du double de la prestation, vous allez leur dire: Leur prestation, leur obligation de payer au régime d'assurance médicaments va augmenter de 13 % ou 14 % par année, chaque année, alors que vos revenus, si vous êtes une personne âgée, si vous êtes une personne qui est actuellement retraitée ou une personne qui est pensionnée – merci de me signaler qu'il me reste peu de temps, mais c'est important de faire passer ce message-là, de bien comprendre – vous, vous ne recevez pas d'indexation, vous, vous n'avez pas d'augmentation. Ça veut dire que la part... D'un côté, le gouvernement vous dit, comme il l'a dit à l'ensemble de ses employés ou l'ensemble de ses retraités: Je n'indexe pas plus que IPC moins 3 % pour l'ensemble des retraités; par contre, j'oblige les gens qui vont devoir consommer des médicaments à devoir avoir une augmentation de prime de 13 % ou 14 % par année.

M. le Président, il y a un phénomène qui ne marche pas dans ce projet-là, il ne marche pas dans ce régime. Et c'est pour ça qu'on demande au gouvernement cette motion de report, pour qu'il puisse reconsidérer ce régime mixte qu'il veut à la fois être un régime d'assurance – et, si on a un régime d'assurance, on va discuter sur les valeurs et les biens des régimes d'assurance – et, deuxièmement, il veut peut-être aussi avoir des promoteurs de politique sociale. Vous ne pouvez pas faire les deux. Vous ne pouvez pas mêler les deux éléments. Ça ne marche pas, ça ne fonctionne pas à l'heure actuelle. Et, de grâce, ce qu'on vous dit: Votez avec nous cette motion de report, étudions sérieusement quelque chose qui aurait un peu de bon sens plutôt que ce régime mixte qui a démontré clairement qu'il ne fonctionnait pas.

Le même débat que nous avons fait ici, de ce côté-ci de la Chambre, on l'a fait il y a deux ans lorsque vous avez présenté la première loi sur le régime d'assurance médicaments. M. le Président, on avait présenté ces mêmes recommandations, ces mêmes questions. Et, à l'époque, je me rappelle, le député de Charlesbourg, pour qui j'ai beaucoup d'estime, disait: Le régime va fonctionner, je vous le garantis, il fonctionnera, etc. Et il s'est avéré à la pratique, réellement, que, deux ans après, on est obligé de revenir devant le Parlement et de dire: Le régime n'a pas fonctionné, le régime n'a pas été un régime qui fonctionne réellement. Les craintes que l'opposition avait à l'époque quant à la validité et à la fiabilité du régime – et je me rappelle avoir fait des discours en ce sens-là – elles sont, deux ans après, encore vérifiées, au point que nous sommes obligés de revenir devant le Parlement, ici, pour être en train de repasser cette loi.

Je le dis de la même manière aujourd'hui: Ce qu'on nous propose ne sera pas viable, M. le Président. Et, dans ce sens-là, vous me permettez, votons la motion de report, recommençons à avoir un régime sur des bases saines, mais non pas sur des bases floues comme ce qu'il y a actuellement dans ce projet de loi. La sagesse appelle de voter la motion de report et de recommencer tout ce travail-là sur des bases saines. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Avec cette dernière intervention, nous mettons fin au débat restreint de deux heures sur la motion de report présentée par M. le député de Papineau.

Je mets maintenant aux voix la motion qui se lit comme suit:

«Que l'étude du principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, soit reportée de six mois.»

Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vote par appel nominal. Appelons les députés. Nous allons suspendre quelques minutes.

(17 h 54 – 18 h 2)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mesdames, messieurs, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Mise aux voix

Alors, nous allons procéder au vote sur la motion de report présentée par le député de Papineau.

Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Williams (Nelligan), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Chevrette (Joliette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:39

Contre:63

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion est rejetée. Étant donné l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 6)

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, lorsque les travaux ont été suspendus, à 18 heures, la motion de report a été réglée. Donc, je demanderais au leader adjoint du gouvernement de bien vouloir nous annoncer la rubrique.

M. Boulerice: M. le Président, après cette brève interruption que le leader de l'opposition, autant que moi, nous regrettons, nous allons poursuivre, si vous le voulez bien, avec l'article 5 du feuilleton de ce soir.


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 5 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 juin 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec.

Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne avait terminé son intervention. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117? Alors, je reconnais le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi. M. le député.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Merci, M. le Président. Pour les gens qui nous écoutent, vous me permettrez à ce moment-ci de reprendre les notes explicatives du projet de loi. Le titre, comme vous l'avez signalé, indique que c'est la Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. On pourrait être porté à croire qu'il s'agit d'un bon projet de loi, d'une bonne intention gouvernementale. Même au niveau des notes explicatives, M. le Président, ce n'est pas tout à fait explicatif.

Ce projet de loi modifie certaines règles relatives au financement du régime général d'assurance médicaments et qui ont trait au montant maximal de la prime annuelle, aux règles de calcul du montant payable par un particulier ainsi qu'aux sommes versées au Fonds de l'assurance médicaments. M. le Président, on serait porté à croire que c'est un projet de loi qui vise à bonifier un régime d'assurance médicaments de façon à s'assurer qu'il coûte moins cher aux gens qui en bénéficient et qu'on élargisse la liste des médicaments qui sont éligibles.

M. le Président, j'attire votre attention sur le fait que ce projet de loi modifie non pas une mais deux lois. Dans un premier temps, il s'agit de la Loi sur l'assurance-médicaments. Le projet de loi est simple dans sa modification. C'est clair. Vous retrouvez les dispositions au premier article. L'article 23 de la Loi sur l'assurance-médicaments est modifié par le remplacement, dans la dernière ligne du premier alinéa, du montant «175 $» par le montant «350 $». Les gens qui écoutent, particulièrement les personnes âgées, auront compris que le gouvernement s'apprête à doubler la prime de l'assurance médicaments. Mais le premier ministre, M. Bouchard, le député de Jonquière, tient à les rassurer: Ils ne s'en apercevront pas tout de suite, pas avant de compléter leur rapport d'impôts de l'an prochain. Donc, dans un premier temps, on double la prime de l'assurance médicaments.

Dans un deuxième temps, M. le Président, on autorise le gouvernement, le 1er janvier de chaque année, à augmenter la prime qui est doublée, et ça, pas suite à un débat à l'Assemblée nationale, pas suite à un débat entre les élus du peuple, mais par décret gouvernemental. M. le Président, le projet de loi vise donc une augmentation substantielle et radicale de l'assurance médicaments. On double les primes et on permet au gouvernement, sans débat, à chaque année, d'augmenter de façon substantielle la prime que les bénéficiaires, les gens qui ont besoin de médicaments auront à payer.

Dans un deuxième temps, la loi modifie la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, et là il s'agit – je vous le soumets très respectueusement, M. le Président – de dispositions qui visent à s'assurer que le Québec continue d'être en peloton de tête de ce qui se fait sur le plan mondial en recherche et développement. Et ça nous dit que ce n'est plus finalement l'assurance médicaments qui va payer pour ça, mais le fonds consolidé du Québec. On va tous payer à travers nos taxes.

Donc, M. le Président, il y a des éléments de taxation et des éléments de recherche et développement qui sont soumis dans ce projet de loi. C'est important de le noter également, et vous l'aurez noté, le présent projet de loi, s'il est adopté par l'Assemblée nationale, va entrer en vigueur le 1er juillet de l'an 2000. On veut votre argent et on le veut le plus rapidement possible. Moi, j'ai été parmi les membres du Conseil des ministres d'un gouvernement qui a poussé l'audace – je le dis comme je le pense – à son maximum en imposant un 2 $ par prescription sur les prescriptions de médicaments, en plafonnant le montant total qu'une personne pouvait payer à 100 $, et ça, avant les élections de 1994. Puis là on s'est présenté aux élections de 1994 puis les gens d'en face qui sont encore ici aujourd'hui... j'en reconnais certains, dont le président du Conseil du trésor, dont le député de Joliette, dont le député de Lac-Saint-Jean. Il y en a qui me font signe de ne pas les nommer, là. Ce n'est pas important, ils étaient tous là et ils ont tous dénoncé le gouvernement de Robert Bourassa qui à l'époque avait osé imposer un ticket modérateur de 2 $ sur les prescriptions, maximum 100 $ par personne.

(20 h 10)

Je me souviens de cette campagne électorale où le Parti québécois a dépensé des centaines de milliers de dollars en publicité. Vous allez vous en souvenir, M. le Président. Vous rappelez-vous de cette publicité où deux personnes d'un certain âge, sur un banc, dénonçaient les libéraux d'avoir été des sans-coeur, d'imposer 2 $ par prescription, un maximum de 100 $ sur une base annuelle? Des centaines de milliers de dollars pour dénoncer le gouvernement Bourassa de l'époque.

Moi, je me souviens de m'être promené et dans mon comté et à travers les comtés de la province de Québec, à l'époque, pour rencontrer des personnes âgées qui étaient furieuses que les médicaments ne demeurent pas quelque chose de gratuit dans un système de santé qui est supposé être gratuit et universel. Puis j'ai tenté de convaincre ces gens qu'un ticket modérateur de 2 $ par prescription ferait en sorte de diminuer la consommation de médicaments. Il y avait surconsommation de médicaments. Et, en imposant un ticket de 2 $, on a tenté d'expliquer aux gens qu'ils y penseraient à deux fois avant de se procurer un médicament et que ça n'empêcherait personne dans le besoin de se procurer un médicament, M. le Président. C'est sur la base de ces arguments que la campagne électorale de 1994 a été menée.

Puis, de l'autre côté, on a dénoncé les libéraux comme étant un gouvernement sans coeur parce qu'il avait osé imposer un ticket modérateur de 2 $. Bof! Ça fait six ans, M. le Président, puis, aujourd'hui, on nous demande, à l'Assemblée nationale du Québec, comme parlementaires, parce qu'il n'y a pas d'élection à proximité, parce qu'on pense être capable de le cacher, on nous demande, après avoir voté une loi qui est allée chercher plus de 200 millions dans la poche des contribuables pour les médicaments, de doubler la prime d'un coup sec. Puis on nous demande également d'autoriser le gouvernement à augmenter à chaque année l'assurance médicaments, sans revenir à l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président.

Où sont ces ténors, défenseurs des pauvres puis des personnes âgées qui nous faisaient la morale il y a à peine six ans, M. le Président? Est-ce qu'ils ont pris la parole dans le cadre de ce débat? Est-ce qu'ils se sont exprimés pour défendre les citoyens qui leur ont donné le mandat de les représenter à l'Assemblée nationale?

M. le Président, du côté de l'opposition officielle, une quarantaine de députés, à ce moment-ci, ont pris la parole sur ce projet de loi. Ils se sont portés à la défense de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes contre cette taxe sur la santé des personnes âgées du Québec.

Du côté du Parti québécois, M. le Président, quatre députés – quatre députés – plus la ministre, ont osé prendre la parole. La consigne du premier ministre: Toé, tais-toé! s'applique, même quand il s'agit de prendre la défense des personnes âgées de notre comté.

Le représentant de l'Action démocratique, quant à lui, M. le Président, est demeuré totalement silencieux. Qui ne dit mot consent.

Les quatre députés péquistes qui ont pris la parole – et je tiens à le souligner, M. le Président, pour que leurs électeurs s'en souviennent et qu'ils lisent le discours qu'ils ont prononcé, qu'ils en prennent connaissance; maintenant, c'est sur Internet, c'est facile d'accès – la députée de Mille-Îles, le député de Gaspé, la députée de Crémazie, le député de Roberval. Fait à souligner, M. le Président, aucun ministre, aucun autre membre du cabinet n'est venu à la rescousse ou supporter la ministre de la Santé dans cette imposition de taxe, même pas le ministre des Finances qui l'avait incluse dans ce qu'il appelle ses équilibres budgétaires qu'il bâtit sur le dos des personnes âgées du Québec qui ont bâti le Québec, M. le Président. Ceux et celles qui se rappellent l'élection de 1994 – qui a élu les gens d'en face, M. le Président, je vous le souligne – et qui nous regardent ce soir, lorsqu'ils compléteront leur rapport d'impôts de l'année prochaine – parce que c'est seulement là qu'ils vont s'en rendre compte – pourront conclure à une fraude électorale, M. le Président.

M. Jolivet: Là, tu exagères.

M. Paradis: Le député de Laviolette, M. le Président, dit: Là, tu exagères. Il était un de ceux qui, à l'élection de 1994, ont dénoncé, dans leur comté et ailleurs au Québec, l'imposition d'un ticket modérateur de 2 $ par prescription, puis il va se lever tantôt, M. le Président, puis il va voter sans s'être exprimé, sans expliquer son vote, pour doubler la taxe sur les médicaments qu'auront à payer les personnes âgées de son comté. M. le Président, dans son cas, c'est peut-être moins lourd de conséquences que pour d'autres, compte tenu de ses plans pour son avenir.

M. le Président, une taxe à la santé, c'est ce qu'il y a de plus odieux. Personne ne demande à être malade, personne ne demande, personne ne souhaite avoir à dépenser de l'argent pour se soigner. Et, quand un gouvernement en est rendu à fouiller dans les poches des malades, c'est qu'il est devenu véritablement un gouvernement sans coeur.

Ce gouvernement-là ne pense pas aux conséquences des gestes qu'il pose. Ce n'est pas un député libéral qui vous le dit, M. le Président, je vais prendre à témoin des organismes en matière de santé et d'intervention sociale qui ont de la crédibilité et qui oeuvrent dans chacun de nos comtés. Je vais demander aux députés d'en face de mettre de côté le «toé, tais-toé», là, puis vote comme un robot, puis de prendre la peine de communiquer avec les organismes suivants. Le Collège des médecins du Québec, quand il est question de médication, c'est peut-être un organisme qu'il vaut la peine de consulter. L'Ordre des pharmaciens du Québec. Vous avez, dans chacun de vos comtés, des pharmaciens qui vous dénoncent présentement.

Le Conseil de la santé et du bien-être, M. le Président, ça, pour pouvoir les contacter, il faut quand même faire un petit effort parce que, quand on parle du Conseil de la santé et du bien-être, on parle de quelqu'un qui a un petit côté social. On parle un petit peu de social-démocratie. Puis, quand on refuse d'inclure ça dans le programme d'une formation politique, comme le PQ l'a fait à son dernier congrès, bien, on sent un petit peu l'interdiction de contacter ces gens-là. Ce sont les exclus de la société.

La Coalition des médecins pour la justice sociale. On dit souvent: Vous savez, les docteurs font bien de l'argent, des bons revenus. Puis ils ont-u vraiment une conscience sociale? Moi, à lire ce que j'ai lu, je dois conclure qu'ils en ont une meilleure que les parlementaires de l'autre côté de la Chambre, qui vont voter pour doubler la taxe sur les médicaments.

Le Conseil des aînés. L'organisme qui représente ceux et celles qui ont bâti le Québec dont on est fier, ceux et celles qui l'ont bâti dans des conditions difficiles, ceux et celles qui ont travaillé jour et nuit pour faire en sorte qu'on hérite d'une société qui soit prospère et dynamique, aujourd'hui, tantôt, on va vous demander de voter pour les remercier. Qu'est-ce que vous allez faire de l'autre côté, les péquistes? Vous allez voter pour doubler leur taxe sur les médicaments. Et vous allez voter pour vous assurer que cette taxe sur les médicaments n'est pas seulement doublée, mais qu'elle va pouvoir être augmentée à chaque année, sans débat à l'Assemblée nationale du Québec.

(20 h 20)

Vos parents, leurs amis, les gens qui ont bâti ce qui existe dans vos circonscriptions électorales, vous allez leur voter une taxe spéciale. Puis plus ils vont être malades, plus ils vont payer. Genre de raisonnement tordu que seul un gouvernement complètement déconnecté des préoccupations de la population peut se permettre de considérer, M. le Président. Il ne s'agit pas de prendre de l'argent dans le fonds consolidé, là, il ne s'agit pas de prendre de l'argent de l'impôt des compagnies pour soigner nos malades. Il s'agit de taxer nos malades parce qu'ils sont malades. Puis, parmi ces gens-là, il y en a qui n'ont pas les moyens – puis vous le savez – de s'acheter des médicaments.

M. le Président, il y a des personnes âgées qui ont encore de l'orgueil. Il y a des personnes âgées qui n'admettront pas qu'elles n'ont pas l'argent pour s'acheter des médicaments. Il y a des personnes âgées qui vont se priver de médicaments. Puis on aura, nous, comme députés à l'Assemblée nationale, contribué à les priver de leur santé en imposant une taxe sur la santé.

Est-ce que vous pouvez vous imaginer un geste plus odieux? Pensez-y, là. Y a-t-il quelqu'un qui, quand il s'est présenté dans son comté, de l'autre bord, a dit aux citoyens: Je vais taxer votre santé; si vous êtes malades, je vais m'assurer que vous allez payer pour vos médicaments? Est-ce qu'il y a quelqu'un, de l'autre côté, qui a pensé à ça? Est-ce qu'il y a quelqu'un, de l'autre côté, qui a envie de laisser au Conseil des ministres les augmentations annuelles des médicaments? Ça vous tente-tu vraiment de vous présenter à la prochaine campagne électorale, dans vos comtés, puis de vous vanter d'avoir voté pour ça?

M. le Président, il n'y a pas beaucoup de députés qui se sont levés de l'autre côté. Il y a encore pour eux et pour elles la possibilité de le faire, de penser quelle motivation les animait quand ils se sont présentés en politique. Moi, je ne peux pas croire qu'il y en a un seul ou une seule, de l'autre côté, qui s'est présenté en politique pour faire ça. Puis, si, après s'être présentés en politique, ils font ça, c'est quoi qui les a corrompus à ce point-là, M. le Président? Je ne parle pas de corruption monétaire, je parle de la corruption de l'âme, du coeur et de l'esprit, la pire corruption qui peut arriver à une personne politique. Puis, quand on est prêt à plier sur nos principes puis quand on est prêt à accepter un diktat d'un ministre des Finances qui a le goût de faire ça – peut-être pour des ambitions personnelles, M. le Président – on est prêt à plier sur notre âme politique. Puis, quand on est prêt à plier sur notre âme politique, qu'est-ce qu'on fait en politique? Si vous avez des talents, allez donc faire d'autres choses.

M. le Président, comme je vous l'ai indiqué au début, ce projet de loi modifie deux lois, ce projet de loi contient deux principes. Il y a un principe pour lequel je pourrais voter, la recherche et le développement de l'industrie pharmaceutique au Québec, pour qu'on conserve, comme société québécoise, notre leadership dans le domaine. Mais la taxe sur les médicaments, la doubler et permettre au gouvernement de l'augmenter annuellement, jamais, M. le Président!


Motion de scission

Dans les circonstances, et de façon à permettre à nos collègues de pouvoir s'exprimer le plus clairement et le plus correctement possible et de ne pas noyer leur vote sur l'augmentation de la taxe dans un autre principe qui peut être justifiable, je présente la motion suivante, M. le Président:

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, soit scindé en deux projets de loi, un premier intitulé Loi doublant la taxe sur les médicaments et autorisant son augmentation annuelle par décret gouvernemental, comprenant les articles 1 à 3, 5 et 6, et un second projet de loi intitulé Loi favorisant la recherche et le développement du secteur pharmaceutique, comprenant les articles 4 et 6.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, votre motion est déposée. Nous allons également vous en remettre une, M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Si le leader du gouvernement souhaite prendre quelques minutes pour prendre connaissance de la motion de scission de façon à présenter son argumentation, il y aurait consentement à une suspension.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous désirez prendre quelques instants?

M. Boisclair: Vous comprenez, M. le Président, qu'on l'a vu venir et qu'on s'est un peu préparés, mais j'aimerais bien prendre connaissance du texte de la motion, et on pourrait prendre effectivement une minute ou deux pour en prendre connaissance, mais pas davantage.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Alors, je suspends donc nos travaux jusqu'à 20 h 30.

(Suspension de la séance à 20 h 26)

(Reprise à 20 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez vous asseoir.


Débat sur la recevabilité

Alors, concernant la motion de scission déposée par le leader de l'opposition officielle, je serais maintenant prêt à entendre vos arguments de part et d'autre, en vous suggérant d'être le plus bref possible. Alors, M. le leader de l'opposition officielle, pour quelle raison devrais-je l'adopter?


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je suis très à l'aise de débuter en vous soulignant que le leader adjoint du gouvernement vous a déjà indiqué qu'il s'attendait à une motion de scission. Il s'agit là d'un aveu dont je vous prie de prendre note. Quand on s'y attend, c'est qu'on sait que le projet de loi que l'on dépose ou que l'on présente contient plus d'un principe.

M. le Président, je vous l'ai soumis très respectueusement, le projet de loi n° 117 contient deux principes distincts. Le premier principe est la taxation. Dans un premier temps, on double la prime de l'assurance médicaments et on permet au gouvernement de l'augmenter annuellement. Un principe de taxation qui est en deux étapes: une étape où l'Assemblée nationale est associée, double comme tel la taxation; une deuxième étape où l'Assemblée nationale ne sera plus associée, mais on va l'augmenter à chaque année sans qu'il y ait de débat public, sans que les députés de l'Assemblée nationale puissent prendre la défense des intérêts des gens qui les ont élus à l'Assemblée législative.

Deuxième élément du projet de loi: la recherche et le développement dans le secteur pharmaceutique. M. le Président, tout le monde est au courant qu'il y a eu un large débat public sur ce deuxième principe. Ce large débat public a fait l'objet d'une documentation, d'une revue de presse extensive.

Je vais vous citer peut-être quelques articles qui vont vous rappeler la position du gouvernement. Vous vous souvenez que la ministre de la Santé, elle, prônait de son côté que le gouvernement puisse acheter les médicaments les moins chers, les médicaments dits génériques comme tels sur le marché. De son côté, le ministre des Finances, responsable du développement économique du Québec, souhaitait qu'on puisse continuer à encourager l'industrie pharmaceutique québécoise, la recherche et le développement au sein de cette industrie.

Les deux se sont affrontés, j'imagine, à l'interne, chose que nous ignorons, mais, à l'externe, chose que nous connaissons, M. le Président. Cette connaissance est publique. Dans un article de Robert Dutrisac dans Le Devoir du 23 février 2000: Landry contredit Marois: Pas question de retirer leurs privilèges aux fabricants de médicaments brevetés . Et le débat a eu lieu tout au long du printemps pour aboutir à une conclusion à la veille du dépôt du projet de loi à l'Assemblée nationale, M. le Président, le 2 mai: Bouchard tranche en faveur de Landry . Il s'agit essentiellement d'un projet de loi qui n'a rien à faire avec la taxation sur les médicaments. C'est un projet de loi qui dit que le Québec décide d'encourager sa recherche et son développement dans l'industrie pharmaceutique.

M. le Président, à la limite, le projet de loi sur la taxation aurait dû être présenté par le ministre des Finances et le projet de loi sur la recherche et le développement par l'ancien meilleur ministre de la Santé qui est aujourd'hui responsable de la recherche et du développement, et vous auriez eu une Assemblée nationale saisie de deux projets de loi totalement distincts: un qui est justifié par la taxation, pour augmenter sur le dos des personnes malades les revenus du gouvernement; l'autre pour favoriser la recherche et le développement dans l'industrie pharmaceutique. Donc, le premier élément, le premier critère: très distinct, taxation; recherche et développement.

Pour vous rassurer, M. le Président, la recherche et le développement ne sont pas financés par la taxation imposée par ce projet de loi. Vous allez, à la lecture du projet de loi, vous en rendre compte, la recherche et le développement sont financés par le fonds consolidé, donc par des taxes sur l'ensemble des contribuables québécois, tandis que l'augmentation des primes sur les médicaments, elle, touche les personnes malades comme telles.

Deuxième élément, chaque partie du projet de loi scindé constitue un tout et non une fraction d'un tout. M. le Président, le gouvernement souhaite augmenter par une taxe sur les médicaments ses revenus, il le fait. Le gouvernement souhaite la recherche et le développement, il le fait. Je vous dirais même, M. le Président, que ce n'est pas une idée du Parti québécois, la recherche et le développement sur les produits pharmaceutiques, c'est une initiative du Parti libéral du Québec. Et on n'avait pas de taxe sur les médicaments puis on avait de la recherche et du développement que l'on favorisait dans le domaine des médicaments. Donc, deux principes complètement distincts.

D'ailleurs, M. le Président, je souligne, là, la présence du député de Nelligan, qui a été à l'époque un des artisans de cette politique du Parti libéral du Québec.

Une voix: C'est à son honneur.

M. Paradis: Troisième élément, M. le Président, troisième critère de décision, chaque partie du projet de loi scindé constitue plus qu'une simple modalité. Je pense, M. le Président, que vous allez en convenir, je n'ai pas l'intention de m'étendre sur le sujet, quand on double la taxation sur les médicaments puis qu'on permet au gouvernement de l'augmenter à chaque année, là, ce n'est pas une modalité, c'est un principe. Et, d'un autre côté, quand on décide comme gouvernement d'encourager la recherche et le développement dans l'industrie pharmaceutique, ce n'est pas une modalité, c'est une décision majeure, c'est un principe.

Quatrième élément, des projets de loi qui résulteraient de la scission constituent des projets de loi en eux-mêmes. Le leader adjoint du gouvernement l'a admis: Je m'attendais à une motion de scission. Les députés qui sont ici le constatent, lorsqu'ils vont voter pour doubler la prime d'assurance que leurs personnes âgées auront à payer dans leur comté puis qu'ils vont permettre à leur gouvernement... Ils votent sur un principe.

Puis, moi, je soupçonne qu'il y a des députés qui sont en faveur de la recherche et du développement mais qui sont contre la taxe. Il faudrait permettre à ces députés-là de s'exprimer correctement. En tout cas, de ce côté-ci, là, je peux vous le dire, à ma connaissance, il n'y a pas un seul député libéral qui est en faveur de cette taxe sur la santé de la population en taxant les médicaments, mais je ne connais pas de député libéral qui n'est pas en faveur de la recherche et du développement dans le domaine pharmaceutique. Donc, M. le Président, vous constaterez que, si on veut favoriser le vote libre des députés comme tel, il faut leur permettre de voter sur des critères distincts.

Je vous soumets respectueusement, M. le Président, que les quatre critères de recevabilité sont rencontrés, et ce, conformément à la dernière décision charnière rendue par le président Bissonnet le 7 juin 1993. Le second projet de loi pourrait donc exister sans les dispositions concernant la taxation. Le 4 décembre 1990, le président Bissonnet rendait une décision fort importante sur les motions de scission et énonçait un critère additionnel capital: un parlementaire pourrait être contre un élément en étant par ailleurs d'accord avec les autres mesures venant bonifier le projet de loi, en autant que les deux projets de loi qui résulteraient de la scission seraient des projets de loi en eux-mêmes. Je vous soumets respectueusement que les deux projets de lois, comme des troncs distinctifs, se tiennent debout par eux-mêmes sans le besoin d'être joints.

Nota bene, M. le Président, c'est un petit peu difficile, sur le plan de l'humilité qui doit animer la présidence, de citer celui qui occupe présentement le fauteuil, mais je me dois quand même de citer le président Pinard, le 11 décembre 1997. Et je le dis, c'était entre guillemets: «Lorsqu'elle décide de la recevabilité d'une motion de scission, la présidence n'a pas à rechercher l'intention du législateur. Elle se limite à la lecture du texte sans l'interpréter.»

De façon à faciliter votre recherche, je l'ai indiqué au début de mon intervention sur le principe – on n'en était pas à ce moment-là au niveau de la recevabilité – il y a deux lois qui sont modifiées: la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur l'assurance maladie du Québec. Essentiellement, vous retrouvez le deuxième principe à l'article 4. Les autres principes touchent la taxation.

Maintenant, je sais que le leader adjoint du gouvernement va vous plaider qu'à deux reprises nous indiquons dans notre motion de scission l'article 6 du projet de loi. C'est l'article qui prévoit sa mise en vigueur. C'est une tradition qui est généralement acceptée, M. le Président. Dans ce cas-ci, c'est une disposition qui est encore plus spécifique que d'habitude: «La présente loi entrera en vigueur le 1er juillet 2000.» Mais, s'il fallait que vous corrigiez un vice de forme, si vous vous rendiez à certains arguments de la partie gouvernementale, on n'aurait pas d'objection à ce que le premier projet de loi n'entre jamais en vigueur.

(20 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je pense qu'il faut revenir à cette vieille maxime: Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément. Après l'ensemble des mots et des arguments qui ont été utilisés par le leader de l'opposition officielle, je serai très bref. J'irai, de façon très simple, droit au but. À sa face même, M. le Président, vous avez compris la faiblesse des arguments du leader de l'opposition, qui sent le besoin de citer des articles de journaux qui n'ont rien à voir avec l'actuel débat à l'Assemblée.

Vous avez la responsabilité de regarder de quelle façon est conçu ce projet de loi. Il faut bien comprendre qu'il n'y a qu'un seul principe, celui de la révision des règles de l'assurance médicaments. Et la grave erreur du leader de l'opposition, c'est qu'il confond un principe et une modalité. Le principe, il est fort simple, c'est la mise en oeuvre et la poursuite des régimes d'assurance médicaments et, pour y arriver, il y a un certain nombre de modalités qui sont prévues. Et d'ailleurs les notes explicatives contenues au projet de loi n° 117 nous rappellent bien que l'objectif du projet de loi, c'est de modifier des règles relatives au financement, et, pour y arriver, il y a différentes modalités.

Je vous rappellerai de la jurisprudence, 241/4 et 241/3 au recueil de jurisprudence, où le critère pour établir la recevabilité d'une motion de scission est très clairement énoncé: «Un premier critère veut que chaque partie du projet de loi ne constitue pas une fraction d'un tout, le tout constituant le principe. Il n'est pas certain que le projet de loi constitue un tout – dans le cas de la décision 241 – puisque, d'une part, il porte sur la réforme de la taxation et, d'autre part, il prévoit l'administration d'une loi fédérale.»

Je ne veux pas rentrer dans le détail de la décision qui avait été rendue, mais l'objectif et je pense que ce qui doit vous guider dans la décision que vous avez à rendre, c'est de distinguer entre l'essence et les modalités du projet de loi. Je pense que, en scindant le projet de loi, comme le leader de l'opposition veut le faire, c'est qu'il veut tout simplement distinguer différentes modalités, mais le tout est cohérent, le tout constitue un principe. Pour atteindre ce principe, il y a différentes modalités. Donc, à sa face même, M. le Président, là, la faiblesse des arguments de l'opposition est évidente. Il n'y a qu'un seul principe.

Aussi, sur la recevabilité même de la motion, que certains pourraient évoquer – j'ai fait un tour rapide des dernières motions de scission qui ont été adoptées – il y a peut-être même un vice de forme. Je le soumets; il vous appartiendra de trancher. Mais il m'apparaît même qu'il y a un vice de forme dans la motion, où deux fois on reprend un même article dans ce qui serait deux projets de loi. Je fais référence à l'article 6, puisque, dans toutes les autres motions de scission qui ont été déposées, jamais ce genre de situation ne s'est reproduit, où on met, dans ce qui serait les deux éventuels projets de loi distincts, un même article. M. le Président, ne perdons pas davantage de temps, et je vous invite à rapidement rendre une décision sur cette question.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Très brièvement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Très brièvement, oui.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Deux éléments. Pour un gouvernement qui tente de nous parler de clarté, je vais tenter de vous faciliter la tâche dans une décision qui est difficile, compte tenu de l'obscurité dans laquelle s'enveloppe ce gouvernement dans ce dossier-ci, comme dans le dossier constitutionnel généralement.

L'article 4, que j'ai invoqué tantôt, se lit comme suit, M. le Président, on va parler de clarté: L'article 40.1 de cette loi est modifié par le remplacement du paragraphe d par le suivant – écoutez bien ça, là, puis essayez de deviner ce que ça veut dire:

«d) les sommes attribuées au ministre de la Santé et des Services sociaux pour tenir compte du coût additionnel des médicaments qui sont exemptés de l'application de la méthode du prix le plus bas prévue par la liste des médicaments dressée en vertu de l'article 60 de la Loi sur l'assurance-médicaments.»

Nos spécialistes, M. le Président, de l'autre côté, me disent que c'est clair. Il s'agit d'un deuxième principe. C'est le principe de recherche et développement. Vos spécialistes auront l'occasion tantôt de le vérifier.

Pour leur permettre de le vérifier plus spécifiquement, ils vont sans doute attirer votre attention sur le communiqué de presse émis le 11 mai dernier, date du dépôt du projet de loi par Mme la ministre de la Santé, qui nous explique, d'une façon un petit peu plus claire – ce n'est pas évident, mais un petit peu plus claire – la traduction de cet article 4. Je vous avoue, M. le Président, que ce n'était pas facile. On a dû consulter des spécialistes, mais on nous assure que cet article 4 est l'issue de la chicane Marois–Landry sur laquelle le premier ministre a tranché et qui a fait en sorte qu'on a décidé de favoriser la recherche et le développement en ne puisant pas dans la taxe sur l'assurance médicaments mais en puisant plutôt dans la poche de tous les contribuables québécois via le fonds consolidé.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci beaucoup. Alors, comme j'ai reconnu une deuxième fois le leader de l'opposition, je vous reconnais également une deuxième fois, M. le leader adjoint du gouvernement.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, tout simplement, pour être bien sûr que le message soit clair, il n'y a qu'un texte que vous avez à interpréter, c'est celui-ci. Tout le reste, c'est des arguments que le leader de l'opposition pourra plaider à l'extérieur de l'Assemblée, pourra plaider sur le perron de l'Assemblée, pourra plaider devant les médias. Mais ici il y a un texte qui nous concerne, c'est le projet de loi qu'on a entre les mains, et c'est sur cette base que vous devez rendre une décision, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Nous allons donc suspendre, et je vais vous rappeler au son des cloches.

(Suspension de la séance à 20 h 45)

(Reprise à 21 h 55)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés qui sont debout, veuillez vous asseoir.


Décision du président sur la recevabilité

Alors, nous avions pris en délibéré la motion de scission qui a été déposée par le leader de l'opposition officielle. Alors, je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la recevabilité de la motion de scission du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Cette motion a été présentée par le leader de l'opposition officielle. La motion de scission se lit comme suit:

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, soit scindé en deux projets de loi, un premier intitulé Loi doublant la taxe sur les médicaments et autorisant son augmentation annuelle par décret gouvernemental, comprenant les articles 1 à 3, 5 et 6, et un second intitulé Loi favorisant la recherche et le développement du secteur pharmaceutique, comprenant les articles 4 et 6.»

Le leader de l'opposition officielle prétend que le projet de loi n° 117 peut être scindé, puisqu'il contient deux principes. Selon lui, les projets de loi qui résulteraient de la scission formeraient en eux-mêmes des projets de loi cohérents qui pourraient exister de façon autonome. Il est également d'avis que le fait de viser la modification de deux lois en une est un indice que le projet de loi peut être scindé. Le leader est d'avis également que le premier principe concernerait l'augmentation du montant payable par un particulier pour le régime d'assurance médicaments. Quant au deuxième principe, il viserait la recherche et le développement dans le domaine pharmaceutique.

Lorsque la présidence a à décider de la recevabilité d'une motion de scission, elle s'en tient au texte du projet de loi. Elle n'a pas à rechercher tous les effets qui pourraient découler en pratique de l'application du projet de loi une fois celui-ci adopté. Or, à l'analyse des dispositions du projet de loi n° 117, je ne peux y retrouver les deux principes tels qu'identifiés par le leader de l'opposition officielle. Rien dans le texte de l'article 4 du projet de loi n° 117 ne m'indique que son objet est de favoriser la recherche et le développement dans le domaine pharmaceutique. Peut-être cette disposition aura-t-elle cet effet, mais, je le répète, ce n'est pas à la présidence de l'Assemblée nationale de le déterminer. Le plus loin qu'il m'est permis d'aller à la suite de la lecture de l'article 4 du projet de loi n° 117, c'est de mentionner qu'il vise à apporter une modification au Fonds de l'assurance médicaments, lequel fonds constitue un des éléments du financement du régime général d'assurance médicaments.

Donc, dans l'opinion de la présidence, le projet de loi n° 117 comporte un seul principe, soit celui du financement du régime général d'assurance médicaments. Comme cet argument est suffisant en soi pour rejeter la motion de scission, je n'ai pas à analyser les autres considérations soumises par les leaders. La motion est donc jugée irrecevable. Alors, M. le leader de l'opposition.

(22 heures)

M. Paradis: Oui, M. le Président...

(Problèmes techniques)

Le Vice-Président (M. Pinard): Voulez-vous fermer le tout? Fermez le tout, madame.

(Suspension de la séance à 22 h 1)

(Reprise à 22 h 2)

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-nous pour ce contretemps. La motion de scission est rejetée par la présidence. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. En prenant les dispositions, M. le Président, pour s'assurer que votre décision soit quand même transcrite au Journal des débats et sans vouloir contrevenir, ni de façon directe ni indirecte, aux dispositions de l'article 41 de notre règlement, je vous dirai tout simplement que ce que risque d'entraîner votre décision pour l'avenir, c'est que plus le gouvernement légifère d'une façon nébuleuse, plus il risque d'introduire des principes différents dans des projets de loi avec l'assentiment de la présidence. Je fais simplement cette remarque, M. le Président, dans le but de nous assurer que les gouvernements n'abusent pas d'un langage opaque et non transparent dans le but d'en arriver à leurs fins.

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est bien noté, M. le leader de l'opposition officielle.


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors donc, nous poursuivons notre débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 117. Alors, je reconnais à ce stade-ci...


Mise aux voix

Alors, comme il n'y a plus d'intervenant à ce stade-ci, le principe du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît. Alors, je considère... Actuellement, je ne peux compter que quatre députés de votre formation politique, au niveau de l'opposition. Donc, adopté sur division?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté sur division. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: L'article 9, M. le Président, du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 134


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 9 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 juin 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. Lors du 6 juin 2000, M. le député de Chomedey avait effectivement terminé son intervention. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 134? M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, le projet de loi n° 134, qui est la Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, est un projet de loi qui soulève de notre part un certain nombre d'interrogations mais qui aussi introduit quelques pistes qui ne sont pas sans présenter un certain intérêt, et je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas ici les soulever.

Donc, revenons d'abord à ce qui nous occupe, M. le Président, parce que c'est ça ici qui est l'élément important. Je vois la ministre, actuellement, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, la ministre des Affaires... et de la Métropole, porteuse du projet de loi, qui va certainement concourir avec moi. Le projet de loi crée une nouvelle structure, une structure de concertation pour ce qu'on appelle la région métropolitaine de recensement. On appelle cette nouvelle structure la Communauté métropolitaine de Montréal. Et vous avez, dans le projet de loi, dans les premiers articles du projet de loi, une description du territoire. Je sais, parce que je vois ici la députée de Terrebonne qui fait partie de la couronne nord, qu'il y a un certain nombre de maires de la couronne nord qui se questionnent.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le député.

M. Paradis: Oui, deux éléments, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. Quelle est votre question?

M. Paradis: M. le Président, auriez-vous l'obligeance de vérifier le quorum?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des commissions parlementaires qui siègent présentement? Alors, il y a quorum. Si vous voulez poursuivre.

M. Paradis: M. le Président, après avoir vérifié le quorum, auriez-vous l'obligation de vérifier l'application de l'article 32?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 32. Alors, je demanderais aux députés de vouloir prendre le siège que la présidence leur a assigné dans cette Assemblée. Merci de votre collaboration. Je cède la parole maintenant au député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Après cette interruption, malheureuse d'ailleurs, il me fait plaisir... Non, non, mais c'est un... Je continue, si vous me permettez, à expliquer la portée du projet de loi. Et je vois ma bonne amie la députée de Terrebonne qui a certains problèmes, bien sûr, avec le projet de loi, par rapport aux maires de la couronne nord qui, comme vous le savez, ont des réticences, qui vont être inscrits à l'intérieur du territoire de la région métropolitaine de recensement. Il y a aussi des interrogations de la part de certains maires de la couronne sud quant à leur inclusion ou l'inclusion de leur municipalité dans le territoire de la région métropolitaine de recensement, et donc couverts par cette nouvelle structure de concertation qui va chapeauter ou contrôler en quelque sorte la Communauté métropolitaine de Montréal.

Il est important quand même de signaler que, dans les objectifs, il y a un certain nombre d'objectifs qui sont louables à l'intérieur du projet de loi. Alors, je tiens à le rappeler, ça fera des fois plaisir aux ministériels, il y a des objectifs louables à l'intérieur du projet de loi. En particulier, le premier, c'est qu'on va créer une structure de concertation, mais qui va être gérée et qui va être dirigée principalement et uniquement par des élus. Et là il y a une grande différence, M. le Président, avec ce qu'on a connu dans les CRD, etc., où on voyait à la fois le corporatisme... ou participer autour de la même table des gens qui avaient un mandat électif et un parquet de personnes qui étaient là représentant elles-mêmes et certains groupes. Là, la structure est éclaircie, le groupe qui va diriger cette nouvelle structure est d'abord et avant tout formé par des élus.

Il y a un élément qui me semble intéressant et important à signaler. D'abord, qu'est-ce que va faire – non, non, M. le Président, c'est important que vous voyiez – cette nouvelle Communauté métropolitaine de Montréal? Alors, il faut que vous alliez un peu plus loin, ça va chercher dans les articles du projet de loi – et j'ai le projet de loi ici avec moi – 100 et suivants et aussi dans les articles 128 et suivants. La Communauté, essentiellement, va avoir une compétence sur... Et ça, c'est important. Comprenez bien, on est en train de créer une structure de concertation entre des élus municipaux sur un territoire pour un certain nombre de questions.

(22 h 10)

Alors, la première question, c'est l'aménagement du territoire, M. le Président, et ça tombe sous le sens, le développement économique. Et vous n'êtes pas sans savoir les difficultés que l'on a connues, les rivalités entre parcs industriels, entre le parc industriel de Saint-Laurent, par exemple, le parc industriel de Laval, le parc industriel dans Montréal-Est, où, là, à ce moment-là, chacun voulait attirer à soi les différents investissements. Mais, quand vous êtes un investisseur qui se trouve soit à Singapour soit à Buenos Aires, quand vous venez à Sainte-Anne-de-Bellevue ou vous venez à Laval, en principe, vous venez dans la région de Montréal. Et là on va avoir une meilleure coordination ici du développement économique par cette structure. Et j'insiste, parce que c'était un élément sur lequel nous ne pouvions... qui était incontournable pour les membres de l'opposition. Il fallait que la structure soit une structure souple et une structure qui soit composée d'élus, d'élus. Le mot est absolument fondamental.

La responsabilité sur le logement social – j'y reviendrai tout à l'heure – sur les équipements, les services à caractère métropolitain, sur le transport en commun. Vous le savez, M. le Président, puisque vous êtes un député de la région métropolitaine, à quel point on a eu des difficultés entre les trois sociétés de transport, celle de la Rive-Sud, celle de Laval, la STL, et la STRSM, et avec l'Agence métropolitaine de transport qui gérait, elle, les trains. On va avoir une meilleure coordination des différentes sociétés de transport dans cette structure qui – il est encore important de le rappeler – est une structure souple qui est présente là-dedans.

Et le troisième élément, la troisième responsabilité, c'est la gestion des matières résiduelles – il était important de le faire – et aussi la gestion de l'eau. Vous savez aussi bien que moi que l'eau, actuellement il y a une usine de filtration à Montréal, il y a partage en quelque sorte de l'eau entre différentes municipalités. Cette nouvelle structure va être en mesure de pouvoir mieux gérer l'eau.

Maintenant, une fois qu'on a ce projet de loi devant nous, donc le principe de créer sur un territoire donné une structure souple formée d'élus devant s'occuper de questions bien précises, c'est un principe sur lequel, dans le vote ici, le vote que nous avons à faire, nous, comme parlementaires... Sur une question comme celle-là, le principe, nous y adhérons. Mais, une fois qu'on adhère au principe, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas, dans le projet de loi, un certain nombre d'irritants qu'il faudrait au maximum pouvoir être en mesure de corriger. Et je vais vous en signaler quelques-uns, M. le Président, qui sont probablement dangereux, des absences, des points qui ne sont pas compris dans le projet de loi ou des articles actuellement qui peuvent soulever un certain nombre de questionnements.

M. le Président, le premier article, ou l'absence d'article, c'est celui qui concerne la CUM. Nous créons une nouvelle structure. Nous trouvons quelque chose au-dessus, en quelque sorte, de la Communauté urbaine de Montréal, nous créons quelque chose qui va gérer la région métropolitaine de transport, et c'est un principe. Et je vois le député de Mercier, qui est un homme qui connaît bien la question parce qu'il a déjà siégé à de nombreux niveaux, et je suis sûr qu'il va adhérer avec moi qu'on va être en mesure d'avoir une meilleure gestion au niveau régional des questions comme le transport, l'aménagement du territoire ou le développement économique. Mais on maintient néanmoins cette structure de la CUM qui perd, si vous me permettez, M. le Président, parce qu'on transfère une partie des responsabilités, qui actuellement étaient des responsabilités de la Communauté urbaine de Montréal, à la structure supérieure qui se trouve être la nouvelle Communauté métropolitaine, c'est-à-dire qui agit sur le territoire beaucoup plus vaste qui inclut Laval, la Rive-Sud et la couronne nord, qu'on appelle la région métropolitaine, mais on maintient quand même les responsabilités de la CUM.

Là, il y a lieu de s'inquiéter de la multiplication des structures. Et ça, je tiens à vous le rappeler, M. le Président, c'est une inquiétude que, nous, les parlementaires de l'opposition, nous avons, même si nous adhérons à ce principe qui se résume à trois: une structure de coordination sur un territoire plus large que celui de la Communauté urbaine de Montréal, formée principalement pour coordonner les élus municipaux, formée principalement d'élus, et une structure qui a des responsabilités dans un certain nombre de champs, dont en particulier l'aménagement du territoire et le développement économique. Et ça me permet de saluer le sénateur Prud'homme, un éminent parlementaire du Québec, ça me fait plaisir de le saluer ici, dans les gradins. Cette réflexion étant faite, je voudrais continuer et vous rappeler qu'on ne décide pas et qu'on n'élimine pas ce qui va toucher la Communauté urbaine de Montréal. Et la crainte que j'ai, c'est qu'on multiplie, on additionne structure sur structure sans faire le ménage.

Deuxième point, M. le Président, et je voudrais insister là-dessus... Il y a des articles qui m'inquiètent énormément. Et je suis sûr qu'un certain nombre de parlementaires ministériels vont aussi réfléchir et pouvoir s'inquiéter à certains articles que nous voyons à l'intérieur de la loi, et je pense plus particulièrement à l'article 102. Je vais vous le dire, parce qu'il m'inquiète, si vous voulez. Parce que l'article 102 prévoit qu'à titre expérimental on peut déléguer aussi à cette nouvelle structure, cette nouvelle structure qui est une structure de coordination des activités municipales entre les différentes municipalités dans des champs de juridiction traditionnellement propres aux municipalités, comme l'aménagement du territoire, le développement économique ou la gestion des eaux, on a aussi la possibilité de lui déléguer des pouvoirs qui sont propres au gouvernement du Québec.

Je vais me permettre de vous lire cet article 102, et je suis sûr que certains parlementaires ministériels qui ne l'ont peut-être pas lu avec la même pertinence auront lieu aussi de s'inquiéter sur la portée qu'on veut donner dans cet article 102. Je vous le lis, M. le Président, parce qu'il me semble particulièrement édifiant: «La Communauté peut conclure avec le gouvernement une entente – ça, ça va bien – en vertu de laquelle elle se voit confier la prise en charge, à titre d'expérience-pilote, de responsabilités que définit l'entente et qu'une loi ou règlement attribue au gouvernement ou à l'un de ses ministres ou organismes.»

Alors, vous voyez ce qu'on est en train de faire? Et là il y a danger. Il y a danger, et je voudrais inviter très fortement mes collègues ministériels... On est en train ici d'ouvrir la porte complètement à un gouvernement régional, où le gouvernement du Québec transférerait des responsabilités. Je ne suis pas sûr que mes collègues ministériels en aient bien saisi toute la portée, de cet article 102, parce qu'il est grave s'il s'applique dans toute sa généralité. Je conviens qu'on utilise le terme «expérience-pilote». Mais vous savez comme moi, M. le Président, que, bien des fois, des expériences-pilotes ont tendance à se généraliser et à devenir le cas habituel. Alors, autant, moi personnellement, j'adhère, comme on l'a rappelé, au principe d'une structure de coordination au niveau de cette grande région qu'est la région métropolitaine de recensement, autant j'ai des réticences à voir cette structure de coordination remplacer localement le gouvernement du Québec parce que le gouvernement lui aura transféré ses responsabilités.

Je parle de l'article 102, mais ce n'est pas seulement à l'article 102, et j'en appelle actuellement à des spécialistes, comme le député de Mercier qui est un spécialiste, non, mais sérieusement, un spécialiste de ces questions. S'il regarde un peu plus loin dans le projet de loi l'article 130, qui est un article aussi qui, pour moi, pose problème parce qu'il est le parallèle en quelque sorte de l'article 102. On dit, à l'article 130:

«Le gouvernement ou l'un de ses ministres ou organismes peut déléguer à la Communauté un pouvoir non discrétionnaire.

«La Communauté peut accepter cette délégation et exercer ce pouvoir.»

(22 h 20)

Alors, vous voyez, M. le Président, on est en train à la fois de mettre quelque chose sur lequel nous sommes d'accord, c'est-à-dire une structure souple de coordination sur un territoire donné responsable de l'aménagement du territoire et du développement économique, de la gestion des eaux et de la gestion de certaines infrastructures, mais, en plus, on inclut dans la loi une possibilité sur laquelle, moi, j'aurais beaucoup de réticences, c'est la possibilité de déléguer à cette nouvelle structure des pouvoirs qui sont propres aux pouvoirs du gouvernement du Québec. Et ça, M. le Président, je vois un danger dans cette loi dans les articles 102 et 130 qui y sont inclus.

Cette Communauté aura aussi, et c'est les articles un peu plus loin... Il y a toute une discussion que l'on doit avoir sur le financement de la Communauté. Vous verrez, il y a énormément d'articles. Il y a la possibilité pour cette nouvelle structure d'avoir un pouvoir d'emprunt, de pouvoir générer ses propres emprunts. Toute la structure financière, toute la question financière qui entoure la nouvelle Communauté métropolitaine de Montréal, à mon sens, a besoin d'être regardée à la loupe. Bien sûr, vous allez me dire: Ça va être financé à même des cotisations qui viennent des municipalités. Ça, je n'en disconviens pas, c'est probablement comme ça que les choses vont se faire. Néanmoins, M. le Président, si vous regardez les articles qui suivent, c'est-à-dire les articles qui touchent le financement et qui sont relativement... c'est tout le chapitre IV, à partir des articles 145 et suivants, vous avez la possibilité, pour la Communauté, de faire des règlements, même de décider temporairement qu'elle ne réside plus au Québec. C'est un article qui est assez bizarre, pour des fins d'emprunt.

Alors, je dis ici: Toute cette question de la structure financière, des liens de cette nouvelle Communauté, pour nous, a besoin d'être étudiée particulièrement en détail. Je n'adhère pas nécessairement au principe que cette structure, que nous avons voulue souple – et c'était important, souple – une structure de coordination entre des élus municipaux tant de Laval que de la Rive-Sud, que des municipalités de banlieue de Montréal, que de la couronne nord ou de la couronne sud, formée d'élus... Cette structure financière qu'on accorde dans le projet de loi a lieu de nous inquiéter.

M. le Président, face à ça, nous, les parlementaires de l'opposition, nous avons le choix suivant. D'un côté, nous sommes d'accord avec le principe – et je voudrais bien préciser quel principe auquel nous adhérons – qu'il y a nécessité, sur un territoire, le territoire de la région métropolitaine de recensement de Montréal, de pouvoir avoir une coordination entre les élus municipaux de cette région municipale de recensement. C'est un principe auquel nous adhérons. Qu'on mette sur pied une structure souple de coordination ayant des responsabilités dans des champs bien spécifiques, c'est un principe auquel nous adhérons. Et ça va, M. le Président, nous amener à voter en faveur du projet de loi en deuxième lecture, parce que nous adhérons à ce principe-là. C'est un principe auquel nous croyons.

Néanmoins, M. le Président, et je voudrais insister là-dessus, il y a, à l'intérieur du projet de loi, des énormes inquiétudes, et je les ai soulevées tout à l'heure. Le principe que cette structure souple puisse devenir un gouvernement local dans lequel le gouvernement du Québec fera une délégation de pouvoirs, à savoir les articles 102 et 130, nous inquiète et nous inquiète énormément. Le pouvoir d'emprunt, de pouvoir emprunter, la structure financière de la Communauté nous inquiète énormément. En commission parlementaire, nous allons soulever ces inquiétudes. Mais, le principe l'emportant, nous allons voter en faveur du principe du projet de loi n° 134, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Verdun. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. Et je cède la parole à la porte-parole officielle de l'opposition en matière de l'autoroute de l'information et des services gouvernementaux et députée de La Pinière. Mme la députée, je vous cède la parole.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Permettez-moi d'intervenir à mon tour sur le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, à cette étape de l'étude de principe. On sait, M. le Président, que cette étape de l'adoption de principe est un moment assez intéressant où on peut questionner la pertinence d'un projet de loi, son opportunité, son efficacité par rapport aux objectifs qu'il annonce.

Lorsqu'on regarde les notes explicatives de ce projet de loi, on nous dit que le projet de loi n° 134 va déterminer le territoire d'intervention de la Communauté métropolitaine, qui inclut 105 municipalités de la RMR. Déjà là, M. le Président, sur le territoire, il y a des notes discordantes, parce qu'il y a des sous-régions qui sont incluses dans ce territoire de la CMM, Communauté métropolitaine de Montréal, qui sont des territoires divisés, qui ne correspondent pas au sentiment d'appartenance des MRC, qui sont coupés littéralement en deux pour être intégrés dans ce territoire. Nous avons eu l'occasion, M. le Président, d'entendre les représentants de ces sous-régions qui sont très inquiets par rapport au découpage territorial de la CMM.

Deuxième élément par rapport à l'objectif de ce projet de loi, c'est qu'il détermine l'organisation de la Communauté métropolitaine de Montréal. Il détermine également ses pouvoirs, ses compétences ainsi que les règles de son administration financière.

Le projet de loi détermine également la composition de ce que devrait être son conseil d'administration composé de 31 membres dont trois membres d'office, à savoir le maire de Montréal, le maire de Laval et le maire de Longueuil, ainsi que 28 autres membres à désigner selon la répartition suivante: neuf membres de Montréal, deux de Laval, sept de la banlieue de Montréal, six de la Rive-Sud et quatre de la couronne nord. Le projet de loi détermine également, M. le Président, un exécutif de neuf membres: le président, les trois maires d'office, plus cinq autres membres désignés.

Le projet de loi n° 134 créant la Communauté métropolitaine de Montréal définit également les compétences de cette nouvelle structure. Au nombre des compétences qui lui sont conférées par le projet de loi, il y en a au moins six qui sont clairement définies, à savoir: l'aménagement du territoire, le développement économique, le logement social, les équipements, services et activités à caractère métropolitain, le transport en commun et la gestion des matières résiduelles. À cela s'ajoutent d'autres responsabilités qui sont conférées à cette nouvelle structure qui doit également établir un programme de partage de la croissance de son assiette foncière. D'aucuns voient dans cette nouvelle superstructure une sorte de gouvernement régional, et ça les inquiète.

Je voudrais réitérer, comme l'a fait mon collègue le député de Westmount–Saint-Louis, qui est notre critique en matière de la métropole, que nous adhérons, nous, de l'opposition officielle, à l'idée d'une vision métropolitaine. Non seulement nous y adhérons, nous y croyons et nous pensons qu'il est urgent que l'on puisse développer cette vision métropolitaine, qu'on puisse développer une concertation supralocale, qu'on puisse favoriser le regroupement des services municipaux et qu'on puisse surtout, M. le Président, alléger les structures, alléger la bureaucratie de façon à offrir les meilleurs services aux citoyens aux moindres coûts.

(22 h 30)

On est conscient de la difficulté financière que vit Montréal et on comprend que Montréal a besoin d'être aidée. M. le Président, je représente un comté de la rive sud de Montréal, le comté de La Pinière, une région qui est incluse, selon le projet de loi n° 134, dans le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal. Et je dois vous dire, M. le Président, qu'au-delà de l'adhésion à cette vision métropolitaine, à cette nécessité de concertation, il y a des inquiétudes qui ont été d'ailleurs exprimées par les maires et les préfets de la rive sud qui sont venus en commission parlementaire présenter leur mémoire. Ces inquiétudes, aussi, sont largement partagées par les citoyens, par les contribuables, parce qu'il faut toujours garder à l'esprit qu'au-delà des débats sur les structures il y a l'intérêt des citoyens. Et, comme parlementaires, nous sommes obligés de situer l'intérêt des citoyens au centre de nos préoccupations lorsque nous discutons de projets de loi de l'ampleur du projet de loi n° 134. Donc, M. le Président, ce que nous avons entendu à ce jour par les élus locaux, par les décideurs de chez nous sur la rive sud de Montréal, c'est beaucoup d'inquiétudes par rapport à cette nouvelle superstructure.

Ce que les gens nous disent, au-delà de la vision qu'on veut se donner, c'est qu'il faut toujours que ce débat sur les structures se fasse dans l'équité par rapport à tous les citoyens de la grande région de Montréal. Le bien commun, ça concerne tous les citoyens, et de Montréal, et de la couronne nord, et de la couronne sud. C'est très important que l'on puisse garder cela à l'esprit. Malheureusement, M. le Président, il y a des gens qui véhiculent un préjugé qui est devenu quasiment dominant dans le discours public à l'égard des citoyens des banlieues, à l'égard des citoyens de la couronne sud et de la couronne nord aussi.

Et je tiens à saluer le courage des maires et des élus de la couronne nord plus particulièrement qui sont capables de tenir un discours cohérent, de se lever et de défendre de façon très solide les intérêts des citoyens. Je tiens également à saluer, M. le Président, le leadership des élus de la couronne sud, plus particulièrement le maire de Chambly, qui représente la couronne sud au sein du comité aviseur de la Communauté métropolitaine de Montréal, ainsi que le maire de Longueuil, M. Gladu, qui sont venus, avec d'autres préfets, avec d'autres maires, d'autres conseillers de la rive sud, pour plaider la cause des citoyens de cette région.

Ce que les citoyens de la rive sud ne veulent pas, M. le Président, c'est de se ramasser avec les factures, sous prétexte qu'on veut aider Montréal. Montréal a un déficit de 1 milliard de dollars. Et la ministre, lorsqu'on lui dit qu'il faut penser l'équité et la responsabilité pour tous les citoyens, elle refuse d'avoir une vision métropolitaine qui tienne compte des besoins de tous les citoyens. La vision métropolitaine de la ministre, celle qui transparaît dans le projet de loi n° 134, c'est une vision centralisatrice, c'est une vision à partir de Montréal et seulement Montréal. Moi, je voudrais l'inviter, M. le Président, à ouvrir ses horizons et même à être à l'écoute de ses propres collègues, dans son propre caucus, qui représentent aussi des citoyens de la couronne nord et de la couronne sud et qui tiennent en privé le même discours que celui que je vous tiens aujourd'hui, M. le Président.

Alors, oui, on a un grand souci pour Montréal, pour son développement, pour sa prospérité. Mais ce n'est pas en déshabillant Jacques et en habillant Pierre qu'on va régler les problèmes de Montréal. Il est utile, M. le Président, de rappeler que le gouvernement du Parti québécois a promis un pacte fiscal à Montréal. Je me souviens encore aujourd'hui de cette visite éminemment médiatisée du président du Parti québécois, Jacques Parizeau, à l'hôtel de vile de Montréal. C'était une visite très importante, en 1994, en pleine campagne électorale. Le chef du Parti québécois s'était engagé à livrer un pacte fiscal à Montréal. Il l'a fait avec tambour et trompette. Mais, dès qu'il a été élu et dès qu'il est arrivé au pouvoir, il a oublié son engagement à l'égard de Montréal. C'est ça qui est fâchant. Aujourd'hui, ce gouvernement veut refiler la facture aux citoyens de la couronne sud et de la couronne nord tout simplement parce qu'il n'a pas livré la marchandise et il n'a pas tenu les engagements qu'il a pris.

Son successeur, d'ailleurs, le premier ministre actuel, lui aussi, M. le Président, s'est engagé envers Montréal. Mais Montréal attend toujours le respect des promesses que ce gouvernement et que plusieurs ministres de ce gouvernement ont tenues à l'égard de Montréal. L'actuelle ministre des Affaires municipales, qui est en train de préparer la voie qui la mènerait à la mairie de Montréal, n'a pas été capable non plus de convaincre son propre gouvernement, ses propres collègues de livrer le pacte fiscal tant promis et jamais concrétisé.

À défaut de respecter son engagement, le gouvernement du Parti québécois décide d'effectuer une ponction dans la poche des contribuables de la couronne sud et de la couronne nord et il envoie cette facture via le projet de loi n° 134 tel que formulé. M. le Président, le projet de loi n° 134 a pour principale raison d'être d'imposer aux citoyens de mon comté et de la rive sud une fiscalité d'agglomération.

La communauté métropolitaine de Montréal est une structure lourde, mais elle est aussi une structure fiscale dont les citoyens de la rive sud et de la rive nord vont être les principales victimes. D'ailleurs, le comité aviseur, créé à la hâte et improvisé et qui a été imposé d'ailleurs aux élus du Grand Montréal, sous la présidence du grand timonier Louis Bernard, a pour mandat de forcer le jeu pour remettre un rapport, au mois de juin d'ailleurs, ce mois-ci, à la ministre des Affaires municipales. Et sur quoi porte le mandat de ce comité aviseur? Sur deux points: premièrement, le financement des équipements régionaux; et, deuxièmement, le partage de la croissance de l'assiette fiscale. Et voilà, M. le Président, pourquoi est-ce qu'on veut mettre sur pied une structure métropolitaine. On le voit bien, l'objet même de cette structure, c'est de taxer les citoyens des deux couronnes pour éponger les déficits de Montréal.

Pour ce faire, M. Bernard et les tenants de la centralisation métropolitaine ont mis sur la table une série d'organismes actuellement financés par le gouvernement – financés par le gouvernement! – et dont on veut transférer le financement aux citoyens des deux couronnes. Il s'agit, entre autres, du Jardin botanique, du Biodôme, du Cosmodôme, de l'Insectarium, du Planétarium et de bien d'autres équipements dits régionaux, car la Communauté métropolitaine de Montréal, si elle voit le jour, va désigner d'autres équipements de son propre chef comme étant des équipements régionaux pour lesquels les couronnes nord et sud seraient sollicitées pour payer la facture. Le gouvernement aussi peut désigner de son propre chef des équipements et les considérer comme ayant un caractère régional.

(22 h 40)

M. le Président, il est démontré que les utilisateurs ou les visiteurs de certains équipements de Montréal, à 50 % ils proviennent d'en dehors de la grande région de Montréal. C'est la preuve que Montréal, c'est la métropole du Québec, ce n'est pas la métropole des banlieues. Montréal, c'est la métropole du Québec, et, donc, le gouvernement du Québec doit la traiter comme telle, doit reconnaître sa spécificité et doit lui livrer le pacte fiscal tant promis et jamais concrétisé.

M. le Président, pour forcer les municipalités de la rive nord et de la rive sud à embarquer dans l'engrenage de la fiscalité d'agglomération, la ministre a déposé un autre projet de loi, le projet de loi n° 124, qui, lui, va imposer les fusions. C'est un projet de loi de fusions forcées. La Fédération québécoise des municipalités locales et régionales, dans son mémoire à la commission parlementaire, a trouvé les termes justes pour décrire cette situation. Je cite la page 12 de ce mémoire: «Dans le contexte actuel, plusieurs municipalités dites périphériques sont tentées, pour éviter une fusion forcée, d'accepter la facture présentée par la ville-centre pour le financement des équipements à vocation supralocale sans même avoir validé le bilan net de l'apport de leurs citoyens à la ville-centre. En effet, le discours martelé par les villes-centres sur les coûts supplémentaires qu'elles ont à assumer, liés à leur fonction de centralité, a fini par s'incruster.

«Dans les faits, les villes-centres bénéficient de l'apport des navetteurs, et le bilan serait plutôt positif en leur faveur. Dans ce contexte, on s'explique mal les demandes répétées des villes-centres pour que les municipalités périphériques contribuent aux dépenses dites régionales alors qu'elles en retirent davantage de retombées fiscales en raison de leur essor économique occasionné par les diverses activités qu'ils y exercent, tel le travail, le loisir ou la consommation de biens ou de services du secteur privé. Même le rapport Bédard reconnaît qu'on ne peut conclure, à partir des études faites sur le navettage, un bilan négatif pour les villes-centres.

«Dans ce contexte, nous sommes en accord avec le partage des coûts ou bénéfices d'exploitation des équipements et activités à vocation supralocale à la condition que soit pris en considération le résultat d'études coûts-bénéfices sur les activités sociales, culturelles et économiques des populations en interaction à l'intérieur de la MRC ou de la communauté urbaine.»

Voilà, M. le Président, un texte de la Fédération québécoise des municipalités locales et régionales, qui est très éloquent et qui clarifie nettement le contexte dans lequel tout ce débat-là est mené. En effet, on se rappelle que le 25 avril 2000, après un an d'attente, la ministre a déposé son livre blanc. Les unions municipales et les groupes ont eu quelques jours pratiquement pour se présenter devant nous, et j'ai eu l'occasion d'entendre les maires et les préfets se plaindre de cette façon de traiter les municipalités. Entre autres, les maires de la Rive-Sud, dans leur mémoire, disent ceci: «Le délai irréaliste qui nous est imposé nous amène à nous questionner sur la volonté réelle de votre gouvernement de collaborer avec les élus municipaux de la région métropolitaine et de les traiter en véritables partenaires.»

M. le Président, les maires de la Rive-Sud et les préfets sont venus nous dire qu'ils souhaitent une structure souple, légère, non bureaucratisée, alors que nous avons devant nous une structure lourde, une structure lourde aussi de conséquences et surtout lourde pour le fardeau fiscal qu'elle implique pour les citoyens que je représente. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Nous poursuivons le débat sur le principe du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, et je reconnais l'adjoint parlementaire de la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole et député de Bertrand. M. le député, la parole et à vous.


M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Merci, M. le Président. M. le Président, la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole a déposé l'important projet de loi n° 134, lequel projet de loi crée la Communauté métropolitaine de Montréal.

Il est évident et prouvé hors de tout doute que la Communauté urbaine actuelle est trop limitée sur le plan territorial pour prendre en charge adéquatement l'ensemble des enjeux de développement que l'on retrouve sur le territoire de ce qu'est, en réalité, l'agglomération de Montréal. Ce territoire correspond à peu près à la région métropolitaine de recensement, à quelques exceptions près.

Le présent projet de loi, M. le Président, a pour but de positionner la Communauté métropolitaine sur l'échiquier des métropoles nord-américaines et de lui permettre de concurrencer efficacement, avec les bons outils de développement, les autres agglomérations hors Québec sur le plan international.

Les grandes métropoles de plus en plus prennent le relais des États en ce qui concerne le commerce international, la culture et le développement. Nous assistons, M. le Président, à une véritable révolution en ce qui a trait aux échanges et aux nouveaux liens avec des agglomérations dans des pays étrangers. Les grandes agglomérations du Québec, bien qu'elles soient de grandeur moyenne si on les compare aux autres agglomérations des pays industrialisées, se doivent de prendre leur place sur cet échiquier mondial et, pour ce faire, nous devons faire en sorte de leur donner tous les outils nécessaires et indispensables à leur développement. Nous devons créer cette synergie, cette symbiose au sein de la Communauté métropolitaine de Montréal pour démontrer que nous sommes là, prêts à échanger et à créer des liens économiques et culturels avec les autres.

Le projet de loi n° 134 a été préparé et pensé dans cet esprit. Il n'est pas le fruit de quelques bureaucrates, comme certains se plaisent à le dire, mais le résultat de nombreuses discussions, de projections économiques, d'extrapolations, de rencontres étalées sur plusieurs mois. Il est basé sur une évidence: les Québécois et les Québécoises comprennent l'importance de renforcer nos agglomérations pour être plus concurrentiels sur le plan international.

Nous avons déjà perdu assez de temps. La réorganisation de la Communauté métropolitaine aurait dû commencer il y a quelques années, mais le gouvernement qui nous a précédés n'a pas eu le courage politique et la vision avant-gardiste pour entreprendre cette démarche combien nécessaire, et ce, après le dépôt et les recommandations du rapport Pichette, en décembre 1993. J'aimerais citer, M. le Président, quatre paragraphes du mémoire déposé le 25 mai 2000 par les membres de l'ex-groupe de travail du groupe Pichette, lesquels se sont réunis afin d'étudier le livre blanc du gouvernement portant sur la réorganisation municipale, de même que les projets de loi nos 110, 124 et plus spécifiquement le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal.

Les membres rappellent, M. le Président, que «le mandat confié en 1992 au GTMR portait sur les conditions dans lesquelles devront s'exercer, au cours des prochaines années, les fonctions municipales de la région de Montréal, proposer une vision d'avenir pour Montréal et sa région et recommander des voies d'action aptes à promouvoir un développement intégré et durable de Montréal et sa région». Les membres estiment «opportun d'affirmer qu'il est temps que le gouvernement mette en place la Communauté métropolitaine de Montréal, car, selon eux, la grande région de Montréal a un pressant besoin de s'organiser au plan supramunicipal, comme nous l'avons montré dans le rapport d'étape de janvier 1993 et dans le rapport final de décembre 1993».

Les membres de l'ex-comité nous disent: «Nous croyons utile d'inviter les leaders politiques de la grande région de Montréal à trouver une voie commune pour relever collectivement le défi métropolitain auquel la population et les entreprises sont confrontées tous les jours. Enfin, même s'il est préférable d'obtenir un large consensus sur les réformes à effectuer, nous constatons que cela ne se produira pas et nous croyons que le gouvernement, responsable du bien commun, doit agir rapidement et fermement.»

(22 h 50)

C'est ce qu'on retrouve dans le mémoire présenté le 25 mai 2000, sept ans après le dépôt du rapport Pichette. Je me dois quand même d'être bon joueur, M. le Président. Certains grands penseurs près de l'opposition officielle ont déjà clairement énoncé leur position sur ce sujet. Je ne citerai que M. Ryan qui, lors de son allocation du 7 octobre 1999, face aux membres de la Chambre de commerce et d'industrie de Thérèse-de-Blainville, disait, dans une série de propositions, et je cite:

«Proposition 1: L'existence d'une région métropolitaine de Montréal est une réalité que nous devons reconnaître et accepter.

«Proposition 2: La région de Montréal est présentement sur-gouvernée, 111 municipalités, 15 MRC, et sous-gouvernée. Ce diagnostic est extrait du rapport Bédard et je me sens obligé d'y souscrire, a précisé M. Ryan. Sous-gouvernée, car malgré cette abondance d'organismes à vocation limitée que l'on y retrouve, la région métropolitaine est sans orientation, sans direction et sans voix lorsqu'il s'agit de défendre des dossiers d'envergure régionale et internationale auprès des investisseurs et des gouvernements supérieurs.

«Proposition 3: La création d'une autorité régionale est une nécessité.» M. Ryan ajoute: «Je souhaite en conséquence la création d'une autorité régionale au sein de laquelle les villes de chaque zone seraient représentées au pro rata de leur population respective. Le regroupement des municipalités situées sur le territoire de la région métropolitaine est nécessaire pour leur propre efficacité et pour le développement ordonné de la région.

«Proposition 5: En conséquence de la révision des frontières municipales et de la création d'une autorité régionale, il faudra envisager, disait-il, une révision possible du statut et du territoire de la CUM.»

M. Ryan, lors de son allocation, a conclu en disant: «Au terme de la période fixée par le mandat de la Table de transition, il appartiendra au gouvernement de prendre les décisions qu'il jugera appropriées et de les soumettre à l'Assemblée nationale.» Fin des citations de M. Ryan.

Alors, M. le Président, vous voyez que les propositions de M. Ryan, en 1999, rejoignent les recommandations du rapport Pichette de 1993 ainsi que le mémoire déposé par les ex-membres du rapport Pichette, déposé le 25 mai 2000. À ce que je sache, M. le Président, M. Ryan n'est pas un bureaucrate, mais, lorsqu'on analyse attentivement ses réflexions et ses propositions, nous nous apercevons que le projet de loi n° 134 qui a été déposé par la ministre des Affaires municipales rejoint en partie sa façon de voir l'avenir de la grande région métropolitaine.

D'ailleurs, M. le Président, dans un article de Martin Pelchat, dans La Presse du 17 mai 2000, intitulé Claude Ryan appuie la réforme Harel, il est clair à la lecture de l'article que ce dernier n'a pas changé d'avis depuis. Son exposé devant la Chambre de commerce et d'industrie, en 1999, soutient ce que j'avance. Voici ce que nous pouvons y lire: «Je suis d'avis, disait M. Ryan, qu'après des années de tergiversations, le temps est venu d'agir dans ce dossier et que seule une intervention de Québec peut permettre de le faire efficacement et dans des délais raisonnables, a lancé M. Ryan.» Rappelons que ce dernier a été ministre des Affaires municipales de 1990 à 1994.

Le projet de loi n° 134, M. le Président, décrit minutieusement ce que sera la Communauté métropolitaine de Montréal, sa composition, son financement, ses règlements, ses pouvoirs, sa juridiction, ses compétences en matière d'aménagement du territoire, de développement économique, de logement social, de gestion des équipements, d'activités et de services à caractère métropolitain, de transport en commun, de gestion des matières résiduelles.

M. le Président, la mise en place de la Communauté métropolitaine de Montréal n'est pas uniquement une question d'efficacité administrative. Il y va de la qualité de vie des citoyens, laquelle bénéficiera de la prise en charge de responsabilités comme le transport en commun ou l'aménagement du territoire par une instance capable d'avoir une prise significative sur les enjeux qui se posent dans ce domaine. Le financement sur un territoire plus large des équipements et des activités à vocation supralocale et de services comme le logement social conduira à une répartition plus équitable du fardeau fiscal.

M. le Président, les citoyens et citoyennes comprennent bien, malgré ce que certains disent, l'importance de supporter équitablement les équipements régionaux par un système fiscal juste. Toutes ces compétences doivent être encadrées prioritairement sous l'autorité de la Communauté métropolitaine de Montréal. C'est une question d'efficacité et de renforcement.

La fragmentation des instances municipales, tant locales que supramunicipales, sur le territoire des agglomérations, se traduit par une absence de vision commune et de sentiment d'appartenance dans son ensemble, plus particulièrement dans les compétences ci-haut mentionnées. Cette fragmentation contribue aussi aux effets de débordement et aux disparités fiscales inéquitables qui en découlent. Dans une étude récente intitulée La région métropolitaine de Montréal et les métropoles de l'Amérique du Nord: compétitivité et politique , l'économiste Pierre Proulx concluait que les métropoles les plus compétitives sont celles qui se dotent d'un plan stratégique de développement, qui collaborent avec les gouvernements supérieurs et qui ont une forme de gouvernement régional.

M. le Président, nous sommes à l'heure des choix et des décisions. Le projet de loi n° 134 propose une structure moderne et efficace, à l'image du Québec d'aujourd'hui et de demain. De plus en plus, nous devons mettre en place les structures nécessaires pour faire en sorte que les emplois à venir soient de qualité et permanents. Nous devons nous assurer que ces structures indispensables favorisent au maximum le développement économique.

Le projet de loi n° 134 est nécessaire et indispensable pour que la Communauté métropolitaine de Montréal soit la locomotive du Québec et de ses régions. Le renforcement des agglomérations des villes-centres et des villes de services est une nécessité incontournable. Il ne faut pas voir la création de la Communauté métropolitaine de Montréal comme une menace mais bien comme un moteur, une courroie d'entraînement vers le développement rationnel d'une région forte, fer de lance de tout le Québec.

Je termine, M. le Président, en citant la ministre, qui disait, dans son communiqué du 11 mai dernier: «Le territoire de l'actuelle Communauté urbaine de Montréal, la CUM, est trop restreint pour permettre de prendre en charge les grands enjeux touchant l'ensemble du Grand Montréal. Le renforcement du palier supramunicipal vise à favoriser le développement économique, social et culturel de l'ensemble de la région métropolitaine de Montréal et à répartir équitablement le fardeau fiscal entre tous les contribuables.»

J'appuie donc, M. le Président, sans réserve le projet de loi n° 134 créant la Communauté métropolitaine de Montréal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Mulcair: Question de règlement, M. le Président. Est-ce que le député de Bertrand accepterait de répondre, en vertu de l'article 213, à une question, suite à son intervention?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que M. le député de Bertrand accepterait une question brève et une réponse brève? Est-ce que vous acceptez, M. le député?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il n'y a pas de consentement. Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Nous poursuivons toujours le débat sur le principe...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ... – s'il vous plaît, à l'ordre! – du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. Et je cède la parole à M. le vice-président de la commission des finances publiques, porte-parole officiel de l'opposition en matière de services sociaux et député de Nelligan. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup de me donner une opportunité de faire une brève intervention sur le projet de loi n° 134...

Une voix: ...

(23 heures)

M. Williams: ... – merci, M. le député – Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, Bill 134, An Act respecting the Communauté métropolitaine de Montréal. M. le Président, la loi n° 134 – et je vais juste citer deux paragraphes explicatifs – a l'objectif suivant: «Ce projet de loi a pour objet d'instituer la "Communauté métropolitaine de Montréal". Il détermine notamment le territoire d'intervention de la Communauté, son organisation, ses pouvoirs et compétences ainsi que les règles relatives à l'administration de ses finances.

«Le projet de loi accorde à la Communauté la compétence dans plusieurs domaines, notamment l'aménagement du territoire, le développement économique, le logement social, les équipements, services et activités à caractère métropolitain, le transport en commun et la gestion des matières résidentielles...

Une voix: ...

M. Williams: ...résiduelles.» Merci beaucoup. J'ai beaucoup d'appui pour mon intervention, ce soir.

«The bill assigns jurisdictions to the Community in several areas, including land use planning, economic development, social housing, equipment, services and activities of metropolitan scope, public transportation and residual materials management.»

M. le Président, il me semble que c'est un objectif fort intéressant, d'avoir une meilleure coordination dans la Communauté métropolitaine de Montréal. Et je me souviens, dans plusieurs dossiers économiques, que nous avons essayé d'avoir une stratégie qui peut faire avancer tout le territoire et assurer que tous les résidents peuvent y gagner.

Je voudrais juste le rappeler, M. le Président, au moment où on parle, il y a tout un débat sur le développement économique de l'ouest de Montréal, particulièrement avec les investissements étrangers. Je me souviens, M. le Président, souvent nous avons bâti une stratégie dans le secteur pharmaceutique, recherche et développement, et aussi certainement sur les questions de nos routes et nos transports en commun.

Mais, M. le Président, quand j'ai étudié ce projet de loi n° 134, j'ai voulu avoir un système qui peut nous aider à coordonner, à avoir plus de coordination mais avec un système et une structure beaucoup moins lourds que je trouve. J'ai voulu avoir un système souple, léger, qui peut répondre d'une façon efficace, et pas nécessairement une augmentation et une duplication de structures.

M. le Président, ce projet de loi... Je ne cite pas toutes les municipalités, parce que ça touche l'île de Montréal, Laval, la rive sud, la couronne nord, ça touche 104 municipalités, 61 organismes supramunicipaux qui existent, soit la Communauté urbaine de Montréal, 14 MRC, plus la ville de Laval et Mirabel, qui sont également des MRC, trois sociétés de transport, STCUM, STL et STRSM, 13 corporations intermunicipales de transport, 28 régies intermunicipales et l'Agence métropolitaine de transport. M. le Président, je peux continuer, mais je voudrais juste mentionner que ces 61 organismes supramunicipaux dirigent un budget de presque 2 milliards de dollars et leurs dépenses d'administration totalisent plus que 200 millions de dollars. Ils engagent plus que 15 300 personnes, qui travaillent dans ces organismes.

Dans le projet de loi n° 134, j'ai cherché, mais je n'ai pas trouvé, dans tous les articles de cette loi, et il y a un peu plus que 252 articles de loi, je n'ai pas vu les articles où le gouvernement veut réduire le nombre d'organismes suprarégionaux. Je ne veux pas avoir, M. le Président, un autre niveau de gouvernement, une autre duplication, une autre dépense. J'ai vu déjà – je vais mentionner ça un peu plus tard – que j'ai de la misère à croire quand la ministre dit que cette structure n'augmentera pas les taxes.

M. le Président, je connais le réseau municipal, j'étais un ancien conseiller municipal. Je voudrais féliciter toutes mes sept municipalités, les conseils de ville de Baie-d'Urfé, Sainte-Anne-de-Bellevue, Senneville, Kirkland, Pierrefonds, Sainte-Geneviève et Île-Bizard, pour leur efficacité et leur ténacité, la façon dont ils représentent la population, particulièrement la façon dont ils ont mené la bataille contre les fusions forcées. Je voudrais certainement continuer à appuyer ces leaders municipaux.

Mais, M. le Président, je voudrais utiliser un peu de mon temps, ce soir, en citant une lettre que j'ai reçue du Barreau, signée par le bâtonnier du Québec le 2 juin, et je voudrais citer quelques paragraphes parce que ça mentionne, je pense, quelques questions que j'ai dans ce projet de loi n° 134. Dans la lettre datée du 2 juin sur le projet de loi n° 134, M. le Président, le bâtonnier dit: «Sans remettre en cause la volonté du gouvernement de mettre en place une structure régionale, nous constatons le morcellement des responsabilités des municipalités régionales de comté ainsi que de la Communauté urbaine de Montréal au profit de la Communauté métropolitaine de Montréal sans que ces structures ne disparaissent. Le Barreau du Québec s'intéresse à la viabilité des municipalités régionales de comté dans les circonstances. Or, nous croyons que cette duplication des structures n'entraînera peut-être pas la réduction des coûts escomptée et éloignera le citoyen des pôles décisionnels pour lesquels des orientations importantes sur la vie quotidienne pourraient être prises.»

M. le Président, c'est une question fort importante. Est-ce que nous sommes en train de créer une duplication des structures? Est-ce que nous sommes en train actuellement de rendre l'accès aux instances décisionnelles plus difficile? C'est ça que le Barreau nous demande. Et le Barreau continue, il estime que «le citoyen devrait être au coeur de cette réforme, alors que les structures proposées par le projet de loi n° 134 nous apparaissent au contraire complexifier les choses».

M. le Président, un peu comme les régies régionales, je pense qu'on peut être tous pour une instance qui peut planifier, peut coordonner, mais qu'est-ce que nous avons? Nous avons, dans la question santé – et je l'ai déjà mentionné dans la question municipale – beaucoup de structures, beaucoup d'administration, beaucoup de personnes qui vérifient une autre structure. Il me semble qu'effectivement nous avons besoin plus de coordination. On peut trouver le grand objectif dans le projet de loi n° 134 assez intéressant, mais sans créer d'autres structures, sans créer plus de lourde administration. Et, comme le Barreau le mentionne, il me semble que nous sommes en train de rendre cette relation entre le citoyen et ses instances municipales plus difficile.

M. le Président, aussi, dans le projet de loi – je ne cite pas toute la composition du conseil – je peux juste mentionner qu'il y a 31 membres du conseil pour administrer ce conseil de la Communauté métropolitaine de Montréal. On doit demander comment les autres municipalités peuvent avoir l'accès au niveau décisionnel, comment on peut influencer ses décisions. Au moment où on parle, nous n'avons pas les réponses de ces questions.

M. le Président, dans le même ordre d'idées, le bâtonnier continue: «On s'interroge sur la ligne d'appartenance de regroupement proposée par la Communauté métropolitaine de Montréal. Certaines municipalités peuvent avoir des affinités avec d'autres villes d'importance autres que Montréal. Pour que l'exercice ait du succès, il faut que les municipalités se sentent concernées par l'avenir de la région métropolitaine; tantôt, elles contribueront financièrement à ce projet.»

M. le Président, il me semble que c'est assez important, toute cette question d'appartenance, et il me semble que jusqu'à maintenant – encore une fois, j'ai écouté le discours de la ministre – je n'ai pas eu les réponses de cette question.

M. le Président, il y a une autre question que je trouve assez importante: quand les champs de compétences sont imprécis. Il y en a quelques-uns qui sont mentionnés, mais on ne sait pas c'est quoi, la relation entre la Communauté urbaine de Montréal et la Communauté métropolitaine de Montréal. Qui va décider quoi? Ça va être quoi, la relation? Est-ce que nous sommes en train de créer un autre niveau de gouvernement? Je n'ai pas les réponses à ces questions.

Aussi, il y a quelques articles de la loi assez importants qu'on doit discuter – le député de Verdun a mentionné ça un peu avant ce soir – les articles 102 et 130, quand «la Communauté peut conclure avec le gouvernement une entente en vertu de laquelle elle se voit confier la prise en charge, à titre d'expérience-pilote, de responsabilités que définit l'entente et qu'une loi ou un règlement attribue au gouvernement ou à l'un de ses ministres ou organismes».

(23 h 10)

M. le Président, si j'ai bien compris cet article et aussi l'article 130 qui dit: «Le gouvernement ou l'un de ses ministres ou organismes peut déléguer à la Communauté un pouvoir non discrétionnaire», nous sommes en train de créer un autre niveau, une autre structure, une duplication de structure, nous sommes en train de rendre l'accès pour les citoyens potentiellement plus difficile, nous sommes en train aussi de donner à cette structure un pouvoir qui reste au niveau provincial, que le gouvernement peut déléguer, ce pouvoir, dans les articles 102 ou 130. Il me semble qu'on doit vraiment questionner sur cette approche.

M. le Président, le Barreau aussi a questionné, et je cite: De plus, bien que le projet de loi vise une structure de planification et de coordination souple et peu exigeante, la lecture du projet de loi n° 134 nous laisse entrevoir plutôt une organisation... nécessiter un appareil bureaucratique imposant. Ce n'est pas le Parti libéral qui dit ça. C'est le Barreau du Québec qui pense qu'effectivement ce projet de loi est en train de rendre l'administration plus bureaucratique.

M. le Président, aussi il me semble qu'à la fin de cette lettre il y a un paragraphe qui me frappe beaucoup, et je comprends mal un peu comment nous sommes en train de procéder. Le dernier paragraphe de cette intervention du Barreau du Québec dit: «Enfin, bien qu'une loi d'application viendra compléter la teneur du projet de loi à l'automne – pas maintenant, à l'automne – le Barreau du Québec estime qu'on risque d'adopter un projet de loi qui serait difficilement applicable, d'autant que les médias nous rapportent déjà de nombreux changements.»

M. le Président, nous sommes en train de passer une loi qui va créer une nouvelle structure, la Communauté métropolitaine de Montréal, mais même le Barreau dit que nous allons avoir une autre loi, loi sur l'application. Est-ce que nous sommes en train de faire un débat sur une demi-loi? Pourquoi le gouvernement n'est-il pas capable de présenter tout son plan d'action, toute sa stratégie? Comment, comme législateur, on peut avoir un débat de fond si effectivement il y a la moitié de leur stratégie qu'on peut trouver dans le projet de loi n° 134? Et j'ai besoin de faire le débat sur le projet de loi n° 134 dans le contexte de la loi n° 124 aussi, qui est la loi qui va donner le pouvoir de faire avoir les fusions forcées. Il me semble qu'on doit tellement être prudent avec ça. Nous avons toujours dit que nous sommes clairement contre ce pouvoir et la loi n° 124.

Avec ça, j'ai lu le projet de loi. J'ai fait beaucoup de discussions avec mes maires municipaux. On cherche à avoir une structure qui nous aide dans notre coordination, on cherche à avoir une structure qui peut nous aider dans le développement économique, mais on veut avoir une structure qui est souple, qui n'est pas lourde, qui ne complique pas la vie de la population québécoise, et particulièrement ceux et celles qui sont touchés par cette loi.

Mais, selon moi, sauf si j'ai d'autres réponses à mes questions, on se trouve avec un projet de loi qui fait exactement le contraire. Et, avec le comportement que j'ai vu de ce gouvernement qui, pendant des années, il a fait le pelletage, il a fait le transfert de responsabilités, du fardeau fiscal sur les payeurs de taxes municipales, j'ai beaucoup de questions. Malgré que je trouve l'idée d'avoir une organisation pour la coordination pour le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal fort intéressante, j'ai encore beaucoup de questions sur ce projet de loi.

And, Mr. Speaker, on June 6th, in The Gazette , headline: Harel's tax pledge - Metropolitan plan won't lead to raises, she says . Mr. Speaker, the Minister is coming around, going up and talking to the folks on North Shore who have mounted a campaign against this project. She stated that, and I quote, «North Shore taxpayers will win out on balance». But, as Yvan Deschênes, the mayor of Rosemère and the spokesman for the North Shore mayors, said: «The Government is starting to realize how many people here are opposed to the reform, so she's pulling this rabbit out of her hat to try to win people over to her side – but it won't fool anyone.»

When a minister – and I've seen this with this Government many times – comes around and says: I promise this new reform won't increase taxes, I would expect that, if you're going to bother doing this type of reform, you're going to create all this change of structures, we would have ministers going around and saying: This will reduce taxes; this will make services more accessible to the population; this will be more efficient; you'll be able to save money; you'll be able to save tax dollars; we'll be able to coordinate; we'll be able to plan; we'll be able to develop our region in a much more effective and coordinated way. Unfortunately, Mr. Speaker, this is not what this Government, as I said, is going to do.

So, Mr. Speaker, I've tried to lay out some of the questions I have, some of the questions that were shared in the letter that I read, from the Bar. Mr. Speaker, I have many questions about this law, and I really would like to have them answered before I can feel comfortable. I want to be very clear, though. I really do believe that there is room for better municipal coordination. I believe that this kind of working together could become much more effective. Mais, M. le Président, je n'ai pas des réponses à mes questions.

Je voudrais juste, en terminant, mentionner que j'ai voulu aussi avoir enfin peut-être le projet sur le pacte fiscal pour les municipalités, parce que, comme dans plusieurs autres projets, nous avons vu un comportement avant les élections et un autre comportement après les élections. Ils ont tous promis, le Parti québécois, qu'ils vont arriver avec un nouveau pacte fiscal avant les élections quand ils ont essayé d'avoir les votes de tout le monde, la même chose quand ils ont créé le système d'assurance médicaments – et il est en train, ce soir, de doubler la prime – mais, après les élections, nous n'avons vu absolument rien.

Je pense, M. le Président, que les résidents, les payeurs de taxes, chez moi, dans mes sept municipalités, c'est ça qu'ils veulent. Ils veulent avoir un système qui est juste, équitable. Ils sont prêts, comme on le fait maintenant, à payer leur part sur les structures suprarégionales; on fait ça déjà avec la Communauté urbaine de Montréal. Nous sommes prêts à aller dans cette direction, mais on veut avoir un système qui est juste. Et, je pense, si on veut vraiment, comme quelques députés l'ont mentionné, faire un pas dans la bonne direction pour s'assurer que nous sommes compétitifs avec le reste du monde, on ne peut pas créer une structure, une autre lourde structure, une autre administration, tel que mentionné par le Barreau du Québec, on doit créer une structure qui est souple, qui répond aux besoins de la population du Montréal métropolitain. Et on doit s'assurer qu'on tient compte de toutes les questions, qu'on tient compte de l'appartenance de toutes ces personnes, les 104 municipalités.

Et, M. le Président, si nous sommes en train de créer d'autres structures, j'espère que nous allons simplifier les autres. Je ne veux pas continuer de mettre une structure sur l'autre. Il me semble, M. le Président, que tout le monde veut avoir moins de gouvernements, veut avoir quelque chose qui peut répondre aux besoins économiques. Mais, jusqu'au moment où on se parle, je suis loin d'être convaincu que j'ai toutes les réponses. C'est pourquoi, M. le Président, je vais certainement participer à écouter toutes les réponses du côté ministériel. J'espère que nous allons avoir une chance de proposer les amendements – je voudrais attendre les autres députés – sur cette question. Mais, avant qu'on puisse être 100 % à l'aise avec ce projet de loi, il me semble qu'on doit répondre aux questions que j'ai essayé de souligner ce soir. Merci beaucoup, M. le Président.

(23 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Nelligan. Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. Ce débat, c'est l'un des plus importants de cette session de cette année parce que c'est une loi-cadre, une loi d'orientation, une loi qui reconnaît un fait majeur: l'existence de la métropole du Québec, qui est la métropole Montréal.

M. le Président, depuis longtemps, le gouvernement du Québec passe des lois sur Montréal, sur toutes les questions qui touchent les problèmes qui entourent Montréal. Cette loi fournit un cadre à l'existence de la métropole du Québec. Alors, j'ai souvenir, quant à moi, d'avoir écouté, à 12 ans, Maurice Richard jouer du hockey, l'hiver, dans le fin fond de la campagne, à Saint-Jovite, et de le voir, l'entendre gagner, jouer, gagner et nous enflammer. Oui, j'ai des souvenirs comme cela.

J'en ai d'autres qui sont, par exemple, les problèmes de Montréal et les articles qu'il y avait dans les journaux sur toutes sortes de sujets, dont la moralité à Montréal qui a amené l'élection de Jean Drapeau, sa défaite à Sarto Fournier, à l'époque, sa réélection, et puis, ensuite, une longue période de développement de Montréal, de ses structures, de ses équipements, qui nous a amené Expo 67, ensuite les Olympiques avec quelques problèmes, il faut le reconnaître. Mais Montréal a grandi avec aussi des problèmes.

Aujourd'hui, les souvenirs qu'on en a sont traversés aussi d'autres gestes ponctués par ceux du gouvernement, par exemple, en 1969, à la fin de la session, la création de la Communauté urbaine de Montréal, où deux grands pouvoirs avaient été accordés à cette Communauté, en particulier deux grands pouvoirs qui étaient les transports et la police. On se rappelle que c'était quelque part assez houleux aussi dans certaines municipalités de Montréal.

Cette Communauté urbaine a connu aussi ses difficultés, mais, en 1981 en particulier, j'ai eu l'occasion, je dirais, oui, le plaisir ou l'honneur de présider à une première réforme de la Communauté urbaine de Montréal, qui était, à ce moment, très orientée est-ouest, à côté de M. Drapeau qui aurait espéré – il l'a dit sans détour d'ailleurs – avoir une île, une ville. Il y avait aussi des banlieues qui s'estimaient les égales de Montréal. C'était une orientation est-ouest. Quand vous regardez la configuration géographique des lieux, c'est effectivement ce qui a été reconnu dans cette réforme de la CUM à l'époque, que l'axe de développement de Montréal était est-ouest.

Il y avait bien quelques autres problèmes qui ont été laissés de côté à l'époque, l'existence de l'île Laval ou de ville Laval, si on peut appeler cela un problème, c'était, sur le plan de l'aménagement, un problème. Sur le plan urbain, c'était autre chose, c'était du développement. Et déjà pointaient des développements qui se passaient de plus en plus sur la rive sud et de plus en plus sur la rive nord, déjà à l'époque. Et on s'était dit: On espère qu'en faisant cette réforme de la CUM, on arrivera à garder, sur l'île de Montréal, beaucoup plus de développement. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé.

Je pense que la réalité, qui fait bien les choses finalement, s'est orientée aussi vers un développement de plus en plus accentué nord-sud. La population s'est déplacée. La population de l'île de Montréal, depuis 1980, est à peu près la même que dans le temps, elle n'a pas bougé. Mais, en dehors, il y a eu une très forte croissance démographique. Alors, aujourd'hui, nous reconnaissons ce fait. Il y a 10 ans entre la création de la CUM et sa réforme en 1981. Il y a maintenant 20 ans, 20 ans après, aujourd'hui, il y a une réforme devant nous, une question qui se pose, une loi-cadre. Et je crois que nous avons la chance de constater que la métropole du Québec a grandi, qu'elle s'est développée et, plus que cela, que, dans les dernières années, son développement économique s'est accéléré, ce qui est une excellente chose. Je parle de la métropole.

Au fond, j'entends toutes sortes de commentaires sur cette question et je me dis que, au lieu de considérer tout ce qui a été fait depuis 20 ans, il faut aussi se poser la question de ce que sera la métropole du Québec dans 20 ans. Quand on en parle aujourd'hui, on parle, à mon sens, peu de Montréal. On en parle. Mais on doit aussi parler de toutes les autres villes qui l'entourent. La banlieue de l'île, dite la banlieue mais qui est aussi de plus en plus urbanisée, mais Laval, la couronne nord, la couronne sud, Longueuil, la rive sud, cela constitue la réalité de la métropole aujourd'hui.

Je dirai aussi que, d'un point de vue futur, comme le Québec accentue son commerce extérieur, qu'il en est à exporter 57 % de son PIB hors de ses frontières, le Québec a besoin d'une métropole solide de niveau international, et une métropole de 3 200 000 habitants est une ville, une métropole modeste sur le plan international. Encore faut-il la reconnaître comme telle. Alors, ce qui est dans ce projet, c'est la reconnaissance de la métropole, c'est le principe qu'il existe un tissu urbain qu'on peut qualifier de métropole et qui fait qu'il y a toutes sortes d'activités économiques, orientées, pour beaucoup, vers l'étranger, mais, pour beaucoup, vers le Québec, qui s'y passent et qu'on doit encourager, et pour lesquelles on doit mettre en place des structures municipales, locales, urbaines, de toute nature, qui seront de nature à accentuer ce développement économique et à faire rayonner le Québec. Le Québec a une capitale qui est Québec, qui est au coeur de son territoire, mais le Québec a aussi une ville très internationale qui est sa métropole. C'est ce que nous reconnaissons dans ce projet de loi cadre.

Plus concrètement, le projet de loi qui est devant nous donne une structure générale. Tout n'est pas précisé. J'entendais le précédent orateur dire qu'il y avait des trous, qu'il manquait des choses. Je crois que oui. Dans toute loi-cadre, rien n'est précisé... pas rien mais... sauf les choses essentielles. C'est là qu'on y met des choses essentielles, et c'est ce qu'il y a dans ce projet de loi cadre. Effectivement, par la suite, il y aura d'autres projets de loi qui vont préciser les choses, mais je crois qu'il faut s'assurer qu'il existe dans un tel projet de loi des éléments importants qui dessinent à grands traits ce qu'est la métropole. En particulier, ce que je voudrais y voir, puis ce que j'espère qu'il y ait, parce que nous en avons discuté, il faut y voir une logique de perspective plutôt qu'une logique de compromis. Je m'explique.

(23 h 30)

Par exemple, dans les MRC, les maires sont élus au premier niveau et sont délégués à la MRC. Ils discutent, ils échangent, ils négocient des intérêts, des avantages, chacun pour sa municipalité, le tout très correctement. Cela, cependant, recèle ou provoque une attitude plutôt de compromis. On fait des compromis les uns par rapport aux autres. C'est toujours bien d'en faire, je suis tout à fait d'accord, il en faut. Mais il faut aussi, au-delà de cela, voir en avant, il faut développer ce que j'appelle, moi, une logique de perspective. Il faut se demander où sera la métropole dans cinq ans, dans 10 ans, dans 20 ans, j'oserais dire dans 50 ans.

Mais il faut avoir une perspective de long terme. Et il faut qu'il s'y développe un esprit en conséquence. Il faut qu'il y ait des équipes qui voient loin en avant, le plus loin possible, pour l'ensemble de leurs concitoyens. Bien sûr, c'est ça, l'objectif, au fond, mais c'est ça qu'il faut développer, et non pas mettre des structures en place qui perpétuent des batailles, des chicanes, des conflits qui n'arrivent pas à se résorber. Il faut au contraire qu'on mette en place des structures qui fassent que les conflits se résorbent.

Alors, je pense que nous aurons l'occasion d'en parler, parce que, à mon sens, les habitants de la métropole ont le choix entre deux options. Une option où il y a une métropole, un conseil métropolitain avec des représentants, des élus municipaux qui viennent comme élus municipaux, qui vont discuter. J'espère ou je dirais: Il faut que les pouvoirs du conseil métropolitain soient suffisamment solides, élargis, forts pour qu'on draine l'ensemble de ces élus municipaux vers l'avenir, vers des perspectives plutôt que vers des compromis par rapport à des chicanes, à des conflits qu'on doit régler. Il faut voir en avant. L'autre optique – c'est ce à quoi un certain nombre de capitales en sont arrivées – c'est d'avoir une ville avec des quartiers que l'on définit, que l'on structure, où l'on organise l'exercice de la démocratie locale, M. le Président. Ce sont les deux options. En réalité, lorsqu'on veut être concret, possiblement qu'avec une structure ou l'autre on en arrive presque au même résultat pour peu qu'on y mette de la bonne volonté.

Alors, au-delà de ça, quels sont ces pouvoirs qu'on doit donner à une communauté urbaine ou à un conseil métropolitain? Pour moi, le premier, le principal, sûrement le premier: l'aménagement. Le pouvoir sur la planification du territoire, l'aménagement, où chacun confronte ses idées sur l'avenir. Parce que, si l'on pense perspective, il faut à la base que l'aménagement soit sans conteste l'apanage d'une telle structure. Sans conteste, il faut que ce soit clair que l'aménagement est la responsabilité du conseil métropolitain.

Et, si on réfléchit par rapport au passé, on se rendra compte que les problèmes que l'on déplore maintenant originent pour beaucoup dans ces questions d'aménagement mal réglées, impossibles à confronter, contradictoires d'une partie à l'autre. On les a vues durant des dizaines d'années, ces questions. Alors, il ne faut pas penser à une municipalité qui est composante de la métropole, il faut penser à l'ensemble de la métropole pour penser correctement l'aménagement. Après, les plans d'urbanisme sont de nature beaucoup plus locale, j'en conviens, mais, au départ, il faut avoir cette perspective, ce qui est l'aménagement, 20 ans au moins, qui amène tout le monde à travailler dans la même direction. C'est ça, une métropole. C'est ça, un conseil métropolitain. Et je pense que c'est comme ça qu'il faut voir les choses.

Un deuxième pouvoir, M. le Président: les transports. Les transports, c'est la logistique de l'économie. Sans transports, vous ne pouvez pas transporter votre production économique, les personnes circulent mal. C'est fondamental. Le transport en commun? Majeur. Et cela relève, d'une certaine façon, je ne dis pas les opérations, je parle de la planification des transports, la grande organisation, les grandes orientations... ce que fait en quelque sorte à ce moment-ci l'AMT. Mais, au-delà de ça, il y a évidemment le transport des personnes. Mais, dans une métropole comme Montréal, les transports ont beaucoup plus de signification. Vous avez le transport maritime qui est important à Montréal, le transport aérien, le transport par voitures, par route, pour les personnes mais aussi pour les camions. Parce que le transport par camionnage, c'est devenu le transport aujourd'hui, surtout au Québec. C'est une responsabilité très importante, M. le Président.

Autre pouvoir, autre domaine d'activité: la sécurité publique. La Communauté urbaine de Montréal a autorité sur la police, les villes ont autorité sur la police, mais, dans la métropole, il va falloir intégrer ces services ou ce service. Il faut le penser comme cela. Le territoire de la métropole, 3,2 millions d'habitants, territoire qui est la RMR. Quand on en fait le tour, effectivement il y a des polices un peu partout, il y a du transport organisé un peu partout. Alors, la métropole, c'est ça, le contexte où nous sommes.

M. le Président, je trouve que c'est une loi emballante qu'il y a ici. C'est peut-être difficile à lire, mais à quoi convie-t-elle nos concitoyens? À une oeuvre collective de construction vraiment raisonnée où on sait où on s'en va: une grande ville de 3,2 millions d'habitants; une ville dont le Québec a besoin pour tout ce qu'il fait; une ville qui recèle des richesses incroyables, universitaires, sur le plan des technologies de l'information, sur le plan de l'activité économique dans les transports, l'activité et la recherche pharmaceutiques. On pourrait faire tout le tour de toutes les activités économiques, il y a des choses extraordinaires à Montréal. Et, quand je dis Montréal, la métropole Montréal, je ne parle pas de la ville de Montréal, je parle de la métropole, des 3 millions d'habitants.

Alors, c'est un bon débat. Il commence, M. le Président. Bien sûr que, dans une loi-cadre, il y a des choses qui manquent, parce que, après, viendront des lois qui vont articuler de façon concrète, des lois de mise en opération, de mise en oeuvre d'une loi-cadre. Mais il appartiendra aux habitants de la métropole de simplifier leurs structures. J'espère qu'elles seront le plus simple possible au bout du compte. C'est vrai qu'il y en a beaucoup. Il y en a trop, je le constate, je le déplore, puis il faut les simplifier. Mais il faut d'abord poser le cadre général qui est la loi que nous mettons ici, que nous avons à voter.

Moi, je souhaite que tout le monde s'y rallie. Il y a des oppositions sur le territoire. Il y en a qui souhaitent ne pas en faire partie. Je pense que, dans 10 ans, ils le regretteraient. Ils le regretteraient dans 10 ans parce que, au fond, nous voulons construire une belle grande ville ou une grande Communauté, comme on voudra, mais c'est ça, une grande métropole. D'autres voudraient écorner quelque peu les grands pouvoirs que j'ai mentionnés tout à l'heure – il y en a d'autres dont je n'ai pas parlé – mais qui voudraient faire des compromis. Je crois que ce serait une mauvaise orientation, parce qu'il faut avoir un concept clair de ce qu'on veut faire, une idée très claire de là où on veut aller, y aller ensuite consciemment, résolument.

M. le Président, c'est une oeuvre collective formidable que nous avons à faire. Nous sommes passés collectivement par une période de déprime, sous différents aspects, mais aujourd'hui la métropole est en plein essor économique, et nous avons la chance de reprendre le dossier au moment où le Québec est au début d'une période de progression. Et je suis très content, très heureux de participer à ce débat. Que tous ceux qui ont des craintes s'y rallient de bon coeur et surtout qu'ils viennent travailler avec nous de tout leur coeur.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Labelle et président du Conseil du trésor. Nous poursuivons le débat sur le principe du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant, M. le vice-président de la commission des finances publiques... Non? Vous voulez poser une question?

M. Kelley: Non, je ne suis pas le vice-président de la commission des finances publiques.

(23 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, président de la commission des finances publiques, c'est ce que j'ai dit. Alors, vous êtes président de la commission des finances publiques et député de Jacques-Cartier. M. le député, la parole est à vous.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, j'aimerais intervenir dans le débat sur le principe du projet de loi n° 134, la Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, Bill 134, An act respecting the Communauté métropolitaine de Montréal.

Je dois avouer d'entrée de jeu, je dois dire: «Here we go again». Parce qu'on est en train, devant un gouvernement... J'ai lu attentivement le discours de la ministre hier qui nous reproche, comme opposition libérale, dans les huit mois entre la publication du rapport du groupe Pichette et l'élection de 1994, de ne pas avoir mis en place la réforme qu'a proposée M. Pichette. Alors, c'est vrai, en huit mois, on n'a pas eu le temps pour le faire, et je regrette, peut-être que c'est dommage, on n'a pas gagné l'élection en 1994. Mais ça, c'est l'histoire. Mais, depuis ce moment-là, les derniers six ans, ce n'est pas l'opposition libérale qui était au pouvoir, c'était plutôt le gouvernement du Parti québécois, L'autre façon de gouverner , M. le Président. Alors, je pense que, pour les personnes qui nous écoutent ce soir, c'est très important de faire un certain survol rapide de tous les grands succès dans le dossier de la réforme municipale faite par ce gouvernement depuis 1994, parce que la feuille de route, je dois avouer, laisse beaucoup à désirer.

Je pense qu'il faut commencer par une belle journée de l'été sur le toit, à l'hôtel de ville de Montréal. Bel événement. Le maire de Montréal de l'époque, Jean Doré, était là avec le chef de l'opposition de l'époque, Jacques Parizeau, et ils annonçaient un pacte fiscal pour les Montréalais. Alors, même après la défaite, le 12 septembre 1994, j'ai dit: Au moins, comme quelqu'un qui demeure dans la grande région montréalaise, il y aura une bonne nouvelle, un pacte fiscal, on va mettre...

Parce que c'est très important. Il faut voir les succès aux États-Unis et les grandes villes-centres qui ont fait une renaissance, comme Boston, comme Cleveland, comme Pittsburgh et les autres villes américaines. C'est parce que les gouvernements supérieurs s'intéressent à la vie des villes-centres. Alors, on regarde Boston, l'incroyable projet du gouvernement fédéral américain, The Big Dig, où ils sont en train de mettre 20 milliards de dollars américains dans leurs infrastructures routières. Alors, je comprends que Boston est en pleine renaissance, Cleveland, Pittsburgh et les autres villes américaines parce que les gouvernements supérieurs s'y intéressent.

Alors, moi, j'ai dit: Au moins, il y aura un pacte fiscal pour Montréal, parce que le Parti québécois est venu au pouvoir. Six ans après, je cherche et je ne trouve pas notre pacte fiscal. On ne peut pas le trouver. Alors, premier constat: le pacte fiscal demeure toujours quelque chose à voir peut-être un jour.

Par contre, ce gouvernement a forcé la ville de Montréal à faire une vente de feu. Et, comme encore une fois quelqu'un de la région montréalaise, de voir Montréal dépouillée des choses importantes comme le Casino, comme les terrains autour de l'hippodrome de Montréal, Blue Bonnets, les choses que le gouvernement a achetées à rabais parce que M. le maire Bourque était mal pris dans un déficit... Alors, nous sommes allés et avons acheté les acquis, les biens de la ville de Montréal et substitué ça pour un pacte fiscal. Encore une fois, peut-être comme contribuable québécois, j'ai dit: On a acheté les terrains, on a acheté les biens à bon marché, mais, pour les Montréalais, encore une fois, c'est une mauvaise nouvelle. Alors, ça, c'était la deuxième grande démarche de ce gouvernement pour régler la question municipale.

La troisième: un projet de loi n° 1, M. le Président, présenté en grande pompe par le présent ministre de la Sécurité publique et député de Laval-des-Rapides, la loi n° 1, la loi sur la création d'un ministère de la Métropole qui va tout changer nos façons de faire, etc., qui a présenté une liste des municipalités – je vais dire, en passant, qui ne correspond pas tout à fait au projet de loi qui est devant nous ce soir, mais je reviens sur ça. Mais le projet de loi n° 1, moi, je me rappelle, mon collègue le député de Verdun a tout fait pour mettre une clause crépusculaire dans le projet de loi n° 1, que, cinq ans après la création du ministère, on peut revenir en commission parlementaire pour revoir la pertinence de la décision de le créer. Malheureusement, le ministère n'a même pas fait les cinq ans. On n'a pas eu l'occasion de faire le débat en commission parlementaire parce que le ministère de la Métropole ne fonctionnait pas.

Autre démarche: on a créé une Agence métropolitaine de transport, et ça, c'est quelque chose que je trouve... L'idée en soi d'avoir un lieu de planification, ce n'est pas mauvais, mais, au lieu de simplifier, on a juste ajouté un autre acteur à côté des trois sociétés de transport, les 13 corporations intermunicipales de transport existantes. Il y a maintenant trop d'acteurs. Et je vais revenir sur ce thème parce que je pense que le transport en commun, c'est très important pour la région. Mais l'AMT, en soi, n'a pas livré la marchandise, elle n'a pas créé un lieu pour faire la coordination du transport en commun. Alors, ça, c'était la quatrième grande réforme. Quatre échecs sur quatre.

Cinquième: Commission de développement de la métropole. Elle est malheureusement née morte. Ça n'a jamais vu le jour. Alors, l'opposition officielle a dit: Ça ne marchera jamais, cette affaire-là. Eux autres, ils disaient: Non, non, non, ça va bien fonctionner. Mais on n'a même pas siégé, la Commission, une fois.

Sixième: changement de ministre de la Métropole. Il y avait le projet du député de Mercier pour faire une fusion des trois sociétés de transport. Ça a mené nulle part. D'un succès à l'autre, on commence à voir la feuille de route, M. le Président.

Et le dernier... Et je ris parce que j'ai lu le texte du discours de Mme la ministre hier soir, en Chambre, qui a dit que c'est de la grande science, le territoire de la métropole, c'est les objectifs qui sont des définitions de Statistique Canada et c'est les déplacements à l'intérieur de la région. Mais ça fait, de ce côté de la Chambre, au moins une demi-douzaine de ministres que nous avons écoutés dire que c'est la science pour établir le territoire, mais la liste n'est jamais pareille.

Prenez la loi n° 1, la loi n° 92, la loi qui a créé l'Agence métropolitaine de transport, et le territoire est toujours différent, toujours changeant, parce qu'il n'y a aucune science dans tout ça, on tombe dans l'arbitraire. Et je pense que le meilleur exemple a été la décision du ministre des Finances il y a un mois d'exempter certaines municipalités de payer le 30 $ pour le permis de conduire et la 0,015 $ sur l'essence parce qu'il n'y a pas de système de transport.

Alors, Vaudreuil-sur-le-Lac, qui est plus près de Place Ville-Marie que de Hudson, est exemptée maintenant. Mais Hudson, avec son énorme service de transport, le train qui part à 7 heures le matin et qui revient à 18 heures coûte à la petite ville de Hudson 450 000 $ par année. Moi, j'ai vu récemment Stephen Shaar, le maire de Hudson, qui m'a dit: Écoute, je vais faire un deal avec le gouvernement du Québec. Je vais acheter aux 30 passagers un char neuf à tous les trois ans, ça va me coûter le tiers du coût. Alors, au lieu de payer 450 000 $ pour le train, je coupe le service de train et je vais acheter des voitures pour les 30 personnes qui le prennent, et la ville de Hudson sort gagnante. Mais Hudson, on définit ça comme ayant maintenant le service de transport en commun, le train qui part la plupart du temps... Des fois, s'il y a des feuilles sur les rails, on a de la misère à le démarrer, mais ça, c'est une autre paire de manches, un autre petit problème que l'AMT n'a pas tout à fait réglé.

Alors, ça, c'est la feuille de route de ce gouvernement cohérent dans le domaine de la réforme municipale. Je dois avouer ce soir... Je regarde 134, la ministre nous dit: «Trust me». Le président du Conseil du trésor vient de dire: Venez travailler avec nous autres, on va faire avancer les choses. Et j'ai dit: J'ai mes doutes. Moi, je crois fermement que Montréal est une région, il existe une métropole, il faut voir les choses...

Et je pense que le meilleur exemple, c'est le transport en commun. On ne peut pas avoir une société de transport de Beaconsfield, qui va de la frontière de Beaconsfield à l'autre. De toute évidence, il faut voir les déplacements, les choix que le monde prend à tous les jours. Moi, je demeure à Beaconsfield, je travaille dans votre comté peut-être, M. le Président, à Saint-Léonard. Alors, pour la personne à revenus modestes, pour l'étudiant, pour la personne qui préfère prendre soit le train, soit le métro, soit l'autobus, comment est-ce qu'on peut l'accommoder? Bon pour l'environnement, c'est beaucoup mieux pour notre société d'encourager le monde de prendre le transport en commun.

(23 h 50)

Mais est-ce que le projet de loi qui est devant nous, qui a juste un article – je pense que c'est 143 – qui traite du transport en commun, va simplifier l'affaire? Au contraire, M. le Président, on va juste ajouter un autre acteur sur une scène qui est déjà pleine de monde qui doit faire la planification pour le transport en commun. Alors, maintenant, si, moi, je veux peut-être changer une route d'autobus, si je veux proposer que quelqu'un qui demeure dans mon comté, qui veut aller travailler dans le comté du député de Chomedey, le faire en moins de cinq heures, moi, je dois faire quoi? Je dois peut-être aller parler au nouveau Conseil métropolitain de Montréal qui va me référer sans doute à l'Agence métropolitaine de transport. L'Agence métropolitaine de transport dit: Bien, ce n'est pas chez nous qu'il faut régler ça, il faut aller voir la Société de transport de Laval et la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal. Et peut-être, si on veut aller un petit peu plus loin, on peut intégrer les 13 corporations intermunicipales de transport aussi.

Alors, dans l'optique qu'on veut quelque chose plus souple, plus simple, plus efficace, qu'est-ce qu'on règle avec ça? On ne règle rien, on va juste compliquer ça davantage. Alors, moi, je pense que c'est essentiel pour le ministre dès maintenant d'indiquer qu'est-ce qu'on va remplacer, qu'est-ce qu'on va abolir, comment on va changer les règles du jeu pour promouvoir le transport en commun. Moi, je suis pour ça. Moi, je pense que c'est très important d'avoir un plan de transport beaucoup plus efficace. On a juste à penser à l'autoroute 40 qui traverse nos deux comtés, c'est engorgé. On parle d'investir 800 millions de dollars les prochaines années dans la 40, et je pense, même à ça, que ça va être insuffisant. On sait qu'une des solutions c'est d'avoir le transport en commun planifié, organisé, qui faciliterait la tâche pour tout le monde de faire les déplacements en autobus, en train ou en métro. On est loin de l'avoir ici dans le projet de loi n° 134.

Juste une parenthèse pour vous donner... L'AMT, mon exemple préféré. Avant l'arrivée de l'AMT, on était capable d'utiliser les mêmes billets pour prendre le métro et prendre le train de banlieue. Assez simple. Et, pour la personne qui achète des billets, qui voyage en transport en commun, on pouvait les utiliser sur les deux équipements. Mais, avec le nouveau système de perception, l'AMT a tout changé. Maintenant, il faut des billets pour les trains, un autre genre de billets pour le métro, on ne peut pas les utiliser dans les deux endroits. Tout ça pour simplifier. Ça, c'est une meilleure perception et c'est comme ça qu'il faut encourager le transport en commun?

Moi, j'ai eu l'occasion, comme représentant de l'Assemblée nationale, d'aller à Washington, D.C., récemment. Leur système de perception, c'est formidable. On peut utiliser une carte bancaire, on peut utiliser une carte Visa pour acheter des billets. Pour le nouveau système d'AMT qu'ils ont mis en place et qui coûte une fortune, il faut de la monnaie. Imaginez, moi, je prends trois de mes enfants et moi-même pour aller en ville, j'ai dois trouver 9 $ en monnaie. Ce n'est pas évident, ce n'est pas «user friendly», ce n'est pas un système pour encourager le transport en commun.

Et, au lieu de simplifier les choses, qu'est-ce que 134 propose? On va les compliquer davantage. Et ça, je pense que c'est quelque chose qu'il faut sérieusement regarder en commission parlementaire. Encore une fois, c'est bien beau, on a identifié les champs de compétence pour la nouvelle CMM, mais ça laisse beaucoup de confusion sur le rôle des élus. Ça laisse beaucoup de confusion. Prenons encore la question du transport. Les maires sur l'île de Montréal vont être appelés à être sur le... Parce que la CUM, la Communauté urbaine de Montréal, va demeurer en place au moins pour gérer la sécurité publique, parce qu'il y aura toujours une police de la Communauté urbaine de Montréal. Il y aura toujours une Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal. On n'a pas de nouvelles de ce gouvernement qui va proposer quelque chose d'autre. Alors, le maire de Pointe-Claire, par exemple, peut siéger sur la STCUM, peut siéger comme un des représentants de banlieue sur l'AMT, peut siéger également maintenant sur la CMM. Tout ça, au nom de simplifier les choses pour les citoyens, M. le Président?

Le développement économique. Dans cette métropole, il y aura maintenant cinq CRD. Je ne peux même pas compter le nombre de CLD, CLE, etc., qui vont être tous appelés, avec la CMM, à faire le développement économique. On a déjà Montréal international qui est dans le portrait aussi. Alors, au lieu de simplifier, au lieu d'au moins réduire le nombre d'acteurs qui sont dans le portrait, qu'est-ce qu'on propose ici? On va juste ajouter, et ajouter, et ajouter.

Moi, je pense qu'il y a deux tests pour tout projet de loi de réforme municipale: Est-ce que, dans le projet de loi, on rend les choses plus simples? Est-ce qu'il y a moins de gouvernance, moins de gouvernement? Est-ce qu'on peut réduire le nombre de structures? Et ce projet de loi, cette réforme est mal partie parce qu'on n'abolit rien. On laisse en place déjà trop de structures. C'est ça, le constat de ce gouvernement. On a déjà trop de structures. Alors, la solution, M. le Président? On va en ajouter davantage.

Alors, si on pense qu'on a déjà trop de structures, si ce n'est pas clair aujourd'hui, imaginez la confusion pour les citoyens. Quelqu'un qui s'intéresse à la question du transport en commun, par exemple, qui est un des grands chantiers pour le nouveau Conseil métropolitain de Montréal, il doit s'adresser maintenant à une trentaine d'acteurs différents. Alors, où est la vision régionale? C'est bien beau d'en parler, mais, quand on cherche, quand on veut le trouver dans le projet de loi, ce n'est pas là.

Et, quand je dis, l'autre test: Est-ce que ça va réduire le fardeau fiscal des contribuables? Tout le monde des deux côtés de la Chambre a dit: Les Québécois paient trop de taxes. C'est un constat. Le ministre des Finances a dit ça, dans ses derniers budgets, qu'on est les plus taxés au monde. Le ministre des Finances a dit que les taxes tuent l'emploi. Alors, est-ce que, dans le projet de réforme qui est ici, on voit l'espoir qu'on va réduire le fardeau fiscal des Montréalais dans la grande région métropolitaine? Et, je pense, la réponse est claire, c'est non.

Mr. Speaker, I think any reform of municipal structures or anything else has to answer two tests. First, will this reduce the size of government? Will it reduce regulation? Will it make it simpler for the citizen to be heard and to make his views known? And I think what we see, the reform 134... As I say, I believe in original body, I believe someone has to think about Montréal's interest, but I think you have to try to make things simpler.

And the bill that is before us tonight is starting off in the wrong direction because it leaves everything in place. So all the CLDs, and the CRDs, and the five regional administrative districts that the Government has put into place, all stay there. So we'll have five regional health councils for this one region which is called the Metropolitan Region. We will have five regional bureaus of the Ministry of Education. On and on it goes.

The Government does nothing about tiding up its own duplication. Government does nothing about trying to perhaps develop a regional vision within the Québec Government. Oh, forget that! We cannot touch that! But we'll go out and we'll try to add more players, more actors, and make the decision making process in Montréal even more complicated than it already is.

So that's my first test. We will see in parliamentary commission whether the Minister can answer our questions. But we believe that, if you're going to reform, if you're going to make things better in Montréal, you have to start off by making things simpler.

Secondly, everyone agrees that Quebeckers pay to many taxes. And one of the things that should be important is that any reform should reduce the tax burden of all Montrealers. And there is no indication in this bill, there has been no indication either in the Bédard report that was tabled to this Government or in any of the declarations the Minister has made that has caused any reinsurance to people in Montréal that this is going to be cheaper.

And what we see with this multiplication of structures, with all these things that are coming along, the risk is very real that this is going to end up taxpayers supporting even more the Government. And that is something, from our side of the House... We think those are the two big tests. And, so far, we haven't had satisfactory answers in how these two problems are going to be addressed.

En conclusion, M. le Président, nous avons constaté qu'il y a des éléments importants qui manquent dans le projet de loi. On veut simplifier les structures. Je pense, tous les Montréalais ont besoin d'une vision régionale, mais des structures beaucoup plus souples qui vont fonctionner, qui vont répondre aux besoins des Montréalais. Ça, on ne le trouve pas dans le projet de loi n° 134. On a beaucoup de questionnements. Moi, comme je dis, peut-être que la question-clé la plus importante, c'est le transport en commun. Et, à l'oeil, qu'est-ce qui est proposé ici va juste ajouter un autre acteur, va compliquer davantage le fonctionnement du transport en commun, qui est un système, à mon avis, qu'il faut simplifier. Également, on va exiger de ce gouvernement... Il faut réduire le fardeau fiscal des Montréalais, et ça, c'est quelque chose...

(minuit)

So we have many questions. The Government is asking us, with the record that they have of seven failures in trying to do municipal reform in six years, they come along today and say: Trust me. We're going to have an awful lot of questions in parliamentary commission, Mr. Speaker, because there is very little in their past record which inspires our confidence. Thank you very much.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Jacques-Cartier, de votre intervention. Et, sur ce, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain, le jeudi 8 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 1)


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