L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 30 mai 2001 - Vol. 37 N° 29

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Présence du consul général de la République libanaise
à Montréal, M. Khalil El-Habre

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés!

Nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.

Présence du consul général de la République
libanaise à Montréal, M. Khalil El-Habre

Alors, avant de débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes du consul général de la République libanaise à Montréal, M. Khalil El-Habre.

Affaires courantes

Alors, nous abordons les affaires courantes maintenant.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Il n'y a pas de dépôt de documents gouvernementaux non plus.

Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des institutions et député de Portneuf.

Étude détaillée du projet de loi n° 169

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé les 24 et 29 mai 2001 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 169, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives concernant l'exercice des activités professionnelles au sein d'une société. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Très bien. Alors, ce rapport est déposé.

Maintenant, M. le président de la commission des finances publiques et député de Charlevoix.

Étude détaillée du projet de loi n° 167

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 29 mai 2001 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 167, Loi modifiant certaines dispositions législatives relatives à la conclusion et à la signature de transactions d'emprunt et d'instruments financiers. La commission a adopté le projet de loi sans amendement.

Le Président: Très bien. Alors, ce rapport est également déposé.

Alors, avant d'aborder la période de questions et de réponses orales, je vous avise que Mme la ministre déléguée à la Santé, aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse répondra, après la période de questions, à une question posée le 25 mai dernier par M. le député de Nelligan concernant le financement des centres jeunesse en Montérégie.

Questions et réponses orales

Alors, pour le moment, nous passons à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Négociations avec les chirurgiens
cardiaques

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Hier soir, il y a eu une réunion de l'exécutif de l'association des chirurgiens cardiaques du Québec. Ils ont décidé de convoquer une assemblée générale spéciale lundi, à Montréal. Ils vont recommander à leurs membres de cesser de faire des opérations, sauf pour les cas les plus urgents.

M. le Président, les médecins qui sont des chirurgiens cardiaques au Québec, je pense que personne ne peut en douter, ont à coeur d'abord l'intérêt de leurs patients et, depuis très longtemps maintenant au Québec, ils essaient de dire au gouvernement du Parti québécois que nous vivons une situation de crise, que les listes d'attente frôlent toujours les 1 000 personnes. C'était le cas l'an dernier lorsque j'ai interrogé le gouvernement sur cette question-là, au mois d'avril. Ils ont interpellé le gouvernement de toutes sortes de façons: privément, publiquement, dans les cabinets ministériels, pour tenter de les faire bouger, M. le Président.

M. le Président, les médecins chirurgiens cardiaques au Québec sont les victimes de politiques abusives de ce gouvernement, qui est le seul gouvernement, rappelons-le, qui a fait un programme de mise à la retraite d'infirmières, de médecins, qui a fait un programme aveugle de coupures, de fermetures de lits, qui continue à sous-financer le système de soins de santé, qui continue avec une politique de mépris, avec la loi n° 107, une loi antiservices qui a pour effet de couper encore une fois aveuglément dans les services alors qu'il y a des besoins criants, M. le Président.

M. le Président, je pose ma question au premier ministre ce matin, parce que semble-t-il que les interventions auprès de ses ministres ne donnent à peu près aucun résultat. Et les médecins, rappelons-le, on ne peut pas le dire assez, l'ont dit et l'ont répété dernièrement, qu'il y a des gens qui ont perdu leur vie parce que les listes d'attente sont trop longues. C'est donc dire la gravité de la situation.

Alors, je veux savoir ce que son gouvernement a l'intention de faire et ce que lui a l'intention de faire pour éviter le pire lundi prochain, avec une décision qui serait catastrophique pour les patients au Québec, alors que les médecins, les chirurgiens cardiaques, en désespoir de cause, parce qu'ils sentent qu'ils n'ont plus aucun moyen pour faire bouger ce gouvernement-là... Qu'est-ce qu'il a, lui, l'intention de faire pour éviter le pire, M. le Président?

Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Oui, M. le Président. Nous sommes en négociation quant aux conditions de travail avec les 39 chirurgiens cardiaques du Québec.

Deuxièmement, oui, il est vrai d'affirmer que les listes d'attente en chirurgie cardiaque sont la moitié moins élevées qu'en 1992. Elles étaient à 2 300 personnes qui attendaient, en 1992, une chirurgie cardiaque; nous avons réussi à les diminuer de 50 %. Et c'est pas parce qu'on a diminué de 50 % qu'on va se contenter du résultat de 900 personnes. Nous avons réussi, avec les chirurgiens cardiaques ? c'est pas le gouvernement qui fait les interventions chirurgicales, c'est les professionnels de la santé, ce sont ces spécialistes ? nous avons réussi à faire 1 600 dilatations des artères supplémentaires l'an passé, parce que les techniques ont évolué. Et le fait qu'on réalise ces interventions chirurgicales au moment... pas chirurgicales, ces interventions au niveau du coeur, ça fait en sorte que, oui, à l'occasion d'une intervention pour la dilatation des artères, eh bien, on en arrive à diagnostiquer, chez ces spécialistes, la nécessité d'intervention chirurgicale chez un certain nombre de personnes.

Troisièmement, oui, aussi, il s'agit des moyens disponibles, les moyens qui sont à notre disposition pour réaliser davantage d'interventions. Et, dans ce sens-là, le chef de l'opposition, qui revient de l'Ouest, a réclamé, lui aussi, que le gouvernement fédéral respecte la parole donnée à Robert Bourassa en 1970 et qu'il paie 50 % des coûts de la santé là où sont dispensés les services au Québec. Quand le chef de l'opposition va dans l'Ouest et rappelle au gouvernement fédéral qu'il doit respecter la parole donnée à Robert Bourassa en 1970, au moment où on a mis au monde le régime d'assurance maladie, et qu'il respecte la parole donnée, cela va donner les points d'impôt nécessaires au Québec pour en faire davantage pour les malades.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: La réponse du ministre, elle est insultante et méprisante pour la population du Québec. Le ministre a beau essayer de se défiler comme son premier ministre le fait si bien, M. le Président, il reste toujours que les programmes de mise à la retraite massive d'infirmières puis de médecins, c'est pas le fédéral qui a pris cette décision-là, c'est son gouvernement ? puis c'est le seul gouvernement au monde à avoir fait ça ? que c'est son gouvernement qui est le neuvième sur 10 en termes de dépenses per capita dans le domaine de la santé ? ça n'a rien à voir, ça, avec des décisions qui sont prises ailleurs, c'est la décision de son gouvernement ? que la loi antiservices, c'est son gouvernement qui a décidé de faire ça, M. le Président.

M. le Président, le ministre a beau porter des lunettes roses au salon bleu, il reste toujours que, lundi prochain, il y a des gens qui vont souffrir du fait que l'incompétence et l'insensibilité de ce gouvernement vont mettre leur vie en péril.

Et j'aimerais savoir de la part du premier ministre ce qu'il a l'intention de faire dans les jours qui viennent pour éviter que la vie de citoyens du Québec soit mise en danger, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Si la réponse du ministre, qui consistait à rappeler les énormes contraintes financières qui nous sont imposées par le gouvernement central, est insultante, ça veut dire que le périple dans l'Ouest du chef de l'opposition officielle est un pur spectacle, puisqu'il est allé dire à la face du Canada qu'une coalition était nécessaire pour ramener l'argent du gouvernement central vers les gouvernements provinciaux pour faire face aux demandes de santé, en chirurgie cardiaque comme en d'autres choses. Alors, moi, j'avais une certaine admiration et reconnaissance pour le chef de l'opposition d'être allé nous aider à régler ce problème, mais, vérité dans l'Ouest, mensonge dans l'Est, il vient de nier toute son action de la semaine dernière ici.

Le Président: Je pense, M. le premier ministre, que vous comprenez que le mot «mensonge» était...

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le premier ministre, s'il vous plaît.

M. Landry: Il s'agit là... Oui, vous avez raison, mais je vais quand même expliquer qu'il n'y avait aucune mauvaise foi et vindicte à l'endroit du chef de l'opposition officielle, c'est une phrase classique qui vient de la littérature italienne, où on disait...

M. Brassard: Pascal. Pascal.

M. Landry: Reprise par Blaise Pascal. C'est important d'avoir un leader érudit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: ...qui dit: «Vérité au-delà des Alpes...

M. Brassard: Des Pyrénées.

n (10 h 10) n

M. Landry: ...des Pyrénées, mensonge en deçà.» C'est donc une image littéraire qui ne mettait nullement en cause la véracité des propos, mais il a une attitude carrément différente. Je trouvais que ce que le chef de l'opposition faisait était positif pour le Québec et pour toutes les provinces du Canada, il allait nous aider à bâtir une coalition pour avoir de l'argent pour la chirurgie cardiaque en particulier. Mais là il revient ici et il accable le gouvernement, comme si ce qu'il avait dit la semaine dernière n'avait aucune pertinence. Alors, je fais remarquer ça.

Et, deuxièmement, je voudrais m'assurer d'une chose, M. le Président. Il y a une négociation cruciale avec des professionnels de la santé, dont le rôle est crucial. J'espère que le chef de l'opposition, d'aucune manière, ne s'associe à l'usage de traitements médicaux essentiels en guise de moyen de pression dans une négociation.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Décidément, M. le Président, il n'y a pas de limite à l'arrogance de ce premier ministre. On pensait, à chaque jour...

La question que je vous pose est très précise. C'est vous qui avez fait le programme de mise à la retraite massive de médecins puis d'infirmières. C'est vous qui avez fait la loi n° 107. C'est vous qui dépensez le moins per capita, vous êtes au neuvième rang. Alors, blâmer les autres, c'est faire preuve d'irresponsabilité, M. le Président. Et, si le premier ministre s'intéresse aux périples, qu'il aille faire un périple dans les salles d'urgence, parce que, à partir de lundi, il y a une menace qui va planer sur des patients, sur des gens qui sont malades, que ces gens-là ne méritent pas. Mais les gens, les médecins concernés le font parce qu'ils sentent qu'ils n'ont plus aucun recours pour essayer de faire entendre le bon sens au gouvernement.

Je vais lui donner un exemple: Comment se fait-il que les chirurgiens cardiaques sont obligés de faire du télémarketing, qu'ils passent leurs journées au téléphone à essayer de placer leurs patients? Il y en a, des solutions à portée de main. Vous n'avez pas à attendre le fédéral, ou l'Ouest, ou personne d'autre. Les citoyens du Québec méritent mieux que ça. Allumez vos lumières, bougez, agissez, arrêtez d'insulter les gens, faites quelque chose.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, vous allons continuer à travailler pour réduire, d'au-delà de 50 %, le drame qui existait jusqu'en 1994 en chirurgie cardiaque, pour passer de 2 300, avec l'augmentation du nombre de diagnostics, de diminuer de 100 %.

Deuxièmement, on comprend, M. le Président, que la méthode de négociation choisie, semble-t-il, a l'aval du chef de l'opposition, mais il faudrait qu'il regarde aussi partout qu'est-ce qui se passe en chirurgie cardiaque, comme à Trois-Rivières, parce qu'il s'en fait aussi. Cardiologie, Trois-Rivières, la semaine dernière, pas trop mal: «Malgré ce qu'on peut entendre ou lire du côté des médias nationaux, il semble bien que la situation ne soit pas trop dramatique du côté des patients en cardiologie au centre hospitalier régional de Trois-Rivières en attente d'une intervention chirurgicale, aussi dans l'établissement de Montréal.»

M. le Président, nous avons mis au point un centre national de coordination en matière d'interventions chirurgicales au niveau cardiaque de façon à ce que chacun des établissements puisse donner le maximum. Et, dans ce sens-là, le réseau des 39 chirurgiens cardiaques au Québec... sont en mesure, oui, d'en réaliser davantage, et l'effort spécifique que nous devons réaliser, c'est de faire en sorte qu'il y ait davantage d'équipes d'infirmières à la disposition de ces médecins, de ces chirurgiens.

Et, à chaque jour, M. le Président ? pas à chaque semaine, à chaque jour ? nous travaillons à un plan quant aux conditions au travail de ces infirmières et à constituer pour l'été des équipes spécifiques qui vont permettre aux chirurgiens, qui en ont manifesté l'intention, de réaliser davantage de chirurgies cardiaques, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le ministre dit qu'il y a des négociations. Il y en a pas, de négociations. Soyons très clairs là-dessus: il y en a pas, de négociations. Le ministre vient de dire que les listes d'attente ont baissé. Les listes d'attente en chirurgie cardiaque ont pas baissé, M. le Président. On va dire les choses comme elles sont. Et le ministre vient de dire qu'il travaille à constituer des équipes d'infirmières. Or, tout le monde sait qu'on va vivre probablement le pire été qu'on aura jamais vécu au Québec parce qu'il y a pénurie d'infirmières, M. le Président. Ça, c'est la réalité. Si le ministre peut enlever ses lunettes roses pour une seule seconde, là, ça, c'est la réalité.

Alors, au lieu de blâmer les autres puis au lieu de faire de l'histoire comme le ministre aime en faire puis retourner neuf ans en arrière, est-ce que je peux lui demander ce qu'il a l'intention de faire? On est, aujourd'hui, là, mercredi; c'est lundi, l'assemblée générale des médecins. Il a l'intention de faire quoi, le premier ministre, d'ici lundi prochain pour éviter le pire? Et est-ce que, dans sa réponse, il peut, encore une fois, éviter, cesser d'insulter, de mépriser ces gens-là et donner des réponses aux citoyens du Québec qui sont sur les listes d'attente?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je pense que les vociférations du chef de l'opposition sont beaucoup plus insultantes pour quiconque que les explications patientes et organisées du ministre. Tout le monde sait que, depuis longtemps ? et ça, c'est à l'honneur du corps médical québécois ? nos médecins sont moins payés, et pas mal moins, que dans la puissante Ontario voisine, là, qui a un niveau de vie de 25 % plus élevé que nous, qui a 250 000 travailleurs dans l'automobile seulement, et qui...

Des voix: ...

M. Landry: Qu'est-ce qui est insultant, là? Crier et vociférer et, quand l'autre veut répondre, l'empêcher de le faire par des grognements? M. le Président. Alors, je réitère que c'est à l'honneur du corps médical québécois de s'être adapté au fait que notre niveau de vie, qui était de 40 % plus bas naguère ? parce qu'il y a quand même une amélioration, il est encore de 25 % plus bas... Alors, ces hommes et femmes du corps médical en souffrent.

Mais, cela dit, je voudrais être sûr, en dépit de toute la sympathie qu'on peut avoir pour eux et pour elles, que personne dans cette Chambre n'ira se solidariser avec une restriction de l'offre de services médicaux comme moyen de pression dans une négociation.

Le Président: Bien. M. le député de Shefford, maintenant, en question principale.

Mesures législatives pour contrer la conduite
d'un véhicule avec facultés affaiblies

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Oui. Merci, M. le Président. Cette semaine encore, un individu ivre au volant, récidiviste notoire de la conduite en état d'ébriété, a happé à mort sur un trottoir un jeune garçon de six ans à Massueville, en Montérégie.

Vous vous en souviendrez, en novembre dernier, je demandais au ministre des Transports, suite à la tragédie de Thetford-Mines, s'il avait l'intention de déposer une loi plus sévère afin de contrer le plus possible ces tragédies. Nous avions offert au ministre alors notre consentement pour l'adoption rapide d'un projet de loi qui pourrait, entre autres, imposer des mesures sévères de réhabilitation, imposer à long terme un antidémarreur, responsabiliser les tiers négligents avec les récidivistes, revoir les compensations de la SAAQ envers les récidivistes et réviser les peines.

Ma question au ministre des Transports: En réitérant notre consentement pour l'adoption d'une loi efficace, quand compte-t-il déposer cette loi que l'on attend déjà depuis trop longtemps?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui. M. le Président, depuis que j'occupe le poste de ministre des Transports, chaque fois qu'il arrive un accident du genre, on est peiné, on est déchiré, on cherche toutes les mesures appropriées. Le député vient de faire allusion à Thetford. À Thetford-Mines, le conducteur n'avait ni permis de conduire ni d'auto, il a pris l'auto d'un autre, puis il est arrivé ce qui est arrivé. En quoi la faute d'un Parlement, d'une Assemblée nationale ou d'un gouvernement dans les circonstances?

n(10 h 20)n

Il y a des choses malheureuses qui arrivent, déchirantes, puis, face à ces familles éprouvées, je trouve ça épouvantable de vivre ce qu'on a à vivre. Et c'est pour ça qu'on a mis sur pied un comité interministériel, avec toutes les mesures que le député connaît, y compris celle de la baisse du taux d'alcool, y compris aussi, par exemple, l'encadrement de ces individus, en réinstaurant par exemple, avec l'aide du fédéral, l'antidémarreur, que le fédéral a fait sauter dans la loi, on obligeant des évaluations avant d'obtenir, de réobtenir un permis, en encadrant ces individus malades, très malades, à part ça. C'est une responsabilité sociale que nous avons.

Je sais que c'est déchirant, mais je sais aussi que la vraie responsabilité passe pas nécessairement... la vraie responsabilité ne passe pas nécessairement et exclusivement par la condamnation rapide et totale, elle passe par un changement de mentalité, elle passe par des mesures accrues, elle passe par des mesures que nous allons déposer. Déjà, il y a un consensus entre les ministères, on est à rédiger justement des amendements législatifs, et, dès qu'ils seront prêts, avec le mémoire, je le présenterai automatiquement au Conseil des ministres. Parce que ça me déchire tout autant. Je suis aussi grand-père de quatre petits-enfants, et je voudrais surtout pas que ça arrive à personne en cette Chambre, à personne dans la société, et je dois vous dire que c'est alarmant, ce que l'on vit, et j'espère que la société va comprendre nos messages.

Le Président: M. le député.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre est conscient... S'il veut vraiment augmenter la sécurité routière très rapidement, est-il conscient, par exemple, qu'en 1999 plus du tiers des décès sur nos routes étaient reliés à une conduite en état d'ébriété? Deux cent soixante-cinq morts; aussi, 2 200 blessés graves, 1 000 blessés légers. Et le quart des 15 500 conducteurs arrêtés en état d'ébriété auraient déjà été mêlés auparavant à une procédure menant à la suspension d'un permis de conduire.

Donc, M. le Président, s'il tient vraiment à la sécurité routière, peut-il considérer l'adoption immédiate ? l'adoption immédiate ? d'une loi sur l'alcool afin de sécuriser la population du Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, depuis trois ans, il n'y a jamais eu autant de mesures pour faire face à la situation. Il y a eu des campagnes-chocs, des images qui frappent comme ce n'est pas possible. On a réussi pour la première fois à faire passer l'alcool en deuxième. C'était la première cause de décès et d'accidents graves; c'est maintenant la vitesse.

Et je veux m'attaquer autant à la vitesse qu'à l'alcool ? le député en sait quelque chose ? je veux même instaurer des cinémomètres photographiques dans des endroits où la vitesse tue de façon régulière. Et l'objectif n'est pas de faire une piastre. L'objectif, c'est d'en arriver à sauver des vies humaines, à éviter des traumatismes majeurs le reste de leur vie. Et je demande à l'opposition d'y concourir.

Mais, une loi, ça se prépare de façon sérieuse. Il ne faut pas légiférer pour le plaisir de légiférer. Le lendemain d'un accident grave, si on se laissait aller à nos émotions, ça serait quoi? Ça serait la prison à perpette, bien sûr. Mais, après que t'as dit ça, t'as pas guéri les individus. Même si t'as plus de permis, même si tu les as mis en tôle un an, même s'ils ont plus d'auto, s'ils prennent l'auto d'un autre, s'ils vont poser des gestes aussi graves, ça, il y a pas une société qui peut empêcher ces choses-là, si ce n'est que d'amener à modifier nos comportements, à changer les mentalités, à faire en sorte que les proches de ces victimes, de ces personnes-là qui causent des dommages épouvantables sur le plan moral, ces proches-là puissent aider les personnes à ne plus poser des gestes qu'ils ont posés.

Et ça, je suis un de ceux qui voudraient y concourir, mais pas de façon partisane à l'Assemblée nationale, de façon objective comme Parlement.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: En additionnelle, M. le Président. M. le Président, quand on est face à une catastrophe, à un drame comme on a vu il y a quelques jours, il n'y a personne qui, pour une seule seconde, voit ça comme étant un enjeu partisan.

Le ministre a parlé de vitesse. C'est un problème important, mais, de la vitesse, on peut en avoir ici aussi, surtout s'il y a un consensus. Surtout que ça fait deux ans, M. le Président, je pense, environ deux ans qu'on attend qu'il y ait des mesures. Et, malheureusement, ces événements-là, c'est un douloureux rappel. Et je veux réitérer, au nom de l'aile parlementaire libérale, que nous sommes prêts à consentir à ce que le gouvernement dépose un projet de loi avant l'été, dans lequel on pourrait retrouver des mesures sévères de réhabilitation, des mesures prévoyant des antidémarreurs, M. le Président, responsabiliser les tiers négligents avec les récidivistes ? le ministre sait de quoi je parle ? d'individus qui pourraient et qui ont une responsabilité civile envers l'ensemble de la société, pour éviter les situations comme on a connues, et revoir les compensations de la SAAQ envers les récidivistes, également réviser les peines.

Alors, je veux vous réitérer, M. le premier ministre, que vous avez de ce côté-ci de la Chambre une volonté de passer ces mesures-là avant la fin juin, de le faire par consentement et de le faire parce que c'est la bonne solution. Parce que, contrairement aux autres citoyens du Québec qui sont tous aussi déchirés qu'on puisse l'être, nous, on a le pouvoir d'agir, on peut poser des gestes. Et l'événement qui vient de se produire nous rappelle à quel point cette responsabilité nous interpelle aujourd'hui.

n(10 h 30)n

Le Président: M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je peux affirmer que, dès que le projet de loi sera prêt, on fera diligence au Conseil des ministres pour le déposer. Oui, je me rends à cela. C'était mon objectif d'ailleurs de le déposer si possible avant la fin de la session et peut-être, si on est unanime, de faire la procédure écourtée qu'on est capable de faire ici.

Puis, quant à l'antidémarreur, je voudrais répondre au chef de l'opposition, parce que l'antidémarreur, il ne relève pas de la propriété de l'Assemblée nationale, c'est dans le Code criminel canadien. Et j'ai demandé à la ministre de la Justice, avec l'aide de ma collègue et maintenant du nouveau ministre de la Justice, M. le député de Louis-Hébert, précisément de réintroduire dans le Code criminel la possibilité de l'antidémarreur. Ça relève du Code criminel canadien. Mais nos démarches sont faites, nos lettres sont là, on pourra les déposer à l'Assemblée nationale.

Quant aux compensations, ça fait partie précisément de la possibilité de modifier qu'on a soumise à l'opinion publique, avec des dates, dès le début de septembre, cette partie-là.

Quant aux autres, je rappelle au chef de l'opposition que les drames arrivent principalement par deux causes: l'alcool et la vitesse. La vitesse est devenue la première cause et, malheureusement, la vitesse tue énormément à des endroits où il y a même danger pour la police d'agir. C'est pour ça qu'on introduit, à titre expérimental, sur une base expérimentale, le cinémomètre photographique, afin précisément d'éviter des catastrophes. Et j'ose espérer que l'opposition changera d'opinion sur le sujet.

Le Président: M. le député de Marquette.

Fermeture appréhendée du centre de jour
du Centre hospitalier de Lachine

M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, hier, les médecins, les infirmiers, le personnel médical et les patients de l'hôpital de jour du Centre hospitalier de Lachine ont lancé un appel d'urgence, un appel 9-1-1, au premier ministre du Québec. À cause de sa loi antiservices et du sous-financement chronique, le seul hôpital de jour à desservir la population de l'Ouest-de-l'Île de Montréal fermera ses portes dès vendredi de cette semaine. Et contrairement à ses prétentions, le ministre de la Santé a été avisé personnellement et par écrit le 16 mai dernier de la situation et de la décision de fermer.

M. le Président, des patients très lourdement malades et handicapés reçoivent quotidiennement, à cet hôpital de jour, leurs traitements. La régie régionale étudiait même la possibilité de doubler sa capacité, puisque cet hôpital permet de sauver des millions de dollars en frais d'hospitalisation. Or, l'hôpital de jour fermera ses portes pour se conformer à la loi antiservices du gouvernement.

Ma question va donc s'adresser directement au premier ministre du Québec. Le premier ministre va-t-il s'engager personnellement à donner les ressources nécessaires pour éviter la fermeture, cette semaine, de cet hôpital de jour qui soigne des malades?

Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, nous avons bien pris note que le député de Marquette a convoqué une conférence de presse pour annoncer qu'il y aurait fermeture de ce qu'il appelle un hôpital de jour et qui est un centre de jour qui sert entre 10 et 20 personnes par jour à l'hôpital de Lachine.

Deuxièmement, nous sommes dans les jours où les 102 établissements hospitaliers du Québec doivent présenter à leur régie régionale et à l'État les budgets équilibrés qu'ils entendent administrer au cours de la prochaine année, et c'est un exercice extrêmement difficile, qui demande beaucoup d'énergie, qui demande beaucoup de créativité, parce que tout cela doit se faire avec une prémisse essentielle: qu'il n'y ait pas de coupures de services.

Troisièmement, le budget de l'hôpital de Lachine est de 32 millions de dollars et, oui, demeure une situation problématique pour 420 000 $, c'est-à-dire 1 % du budget de l'établissement. Et la Régie de la santé et des services sociaux de Montréal et le ministère de la Santé et des Services sociaux, dès le moment où il a été informé, nous nous sommes mis au travail pour aider l'établissement, parce que c'est pas un travail facile. Et la conclusion pour les personnes, les patients qui attendent, c'est aussi ce qu'ont déclaré hier, après communication avec le ministère, les responsables au niveau de l'île de Montréal des services hospitaliers, la régie régionale: si on touche les services à la population, on va s'assurer que les patients reçoivent des services ailleurs, en CLSC, ou dans les cabinets de médecins privés, ou à l'hôpital sur le territoire.

M. le Président, à l'hôpital de Lachine comme ailleurs, puisque nous sommes dans la période critique de fabrication et de préparation des budgets équilibrés en vertu de la loi n° 107, il y a beaucoup de travail, et c'est parfois tentant, oui, de dire: Je déborde dans les médias, surtout, surtout lorsque tout cela est soutenu par le député de l'opposition. Et aussi il nous faut nous mettre en mode solution pour aider, parce qu'il n'y aura pas d'interruption de service pour le centre de jour de l'hôpital Lachine. Nous sommes capables d'y arriver avec toutes nos énergies, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, le ministre réalise-t-il que c'est bien beau, les énergies, mais ça prend des ressources financières pour le faire fonctionner, cet hôpital de jour là? Réalise-t-il également, M. le Président, que c'est le centre hospitalier qui a convoqué la conférence de presse? Mais, troisièmement, que répond-il au Dr Morgan, qui est le directeur des services professionnels de l'hôpital, qui disait ceci dans Le Journal de Montréal ce matin ? et ça vaut la peine de le citer, M. le Président: «Nous sommes dans un cul-de-sac. Si on devient hors-la-loi, le gouvernement va nous couper nos remplacements d'équipements spécialisés à la salle d'opération et en radiologie. C'est une loi qui a des effets pervers. Nous avons réduit les heures de remplacement; nous avons réduit des examens diagnostiques en médecine nucléaire; nous avons réduit nos durées de séjour; nous sommes obligés de dire à nos médecins de faire moins de tests.»?

Le gouvernement, et le premier ministre, peut-il faire preuve d'un minimum de compassion et annoncer dès aujourd'hui qu'il y aura les ressources financières nécessaires pour permettre le bon fonctionnement de cet hôpital pour soigner les malades de Lachine, de l'île de Montréal et des environs?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, je réponds au député concerné et à M. Morgan, le directeur général intérimaire, que nous allons déployer tous les efforts nécessaires, difficiles pour répondre aux besoins et qu'il n'y ait pas d'interruption de service aux malades et aux personnes âgées de Lachine ou ailleurs sur le territoire de Montréal, parce que nous sommes capables d'y arriver.

Deuxièmement, le 8 mars, M. le Président, l'hôpital de Lachine nous avait expédié une série de 11 mesures qui totalisaient 437 000 $, 437 000 $, que nous pouvions appliquer dans l'établissement. Quand on applique une mesure visant à gérer de façon plus serrée, ce n'est jamais des mesures faciles, ce n'est jamais... Ça se déroule pas tout seul, ça. Ça arrive pas par miracle. Ça demande des interventions, des efforts des médecins, des infirmières, des préposés, de l'administration, et c'est ça, le plan qui nous a été présenté.

On arrive à une autre séquence maintenant du plan d'équilibre où on dit: On ne prendra pas ces 11 mesures qui vont donner 437 000 $ de gestion plus serrée, donc un budget équilibré, qui vont nous permettre de servir les malades et les personnes en détresse, et on dit: À la place, savez-vous, on va fermer le centre de jour. Nous n'abandonnerons pas les personnes âgées de Lachine; nous n'abandonnerons pas les personnes âgées au Québec; nous n'abandonnerons pas les personnes âgées qui bénéficiaient et qui vont continuer à bénéficier de services reliés à leur état de santé sur le territoire de Lachine comme ailleurs au Québec.

Le Président: M. le député.

M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, le ministre réalise-t-il que sa réponse n'est pas claire? Le centre va fermer vendredi. C'est bien beau de parler des énergies, ça prend de l'argent, parce qu'il y a un sous-financement chronique. Et, pire que ça, M. le Président, l'hôpital est obligé de prendre cette décision-là parce qu'ils ont reçu une lettre de sa prédécesseure, la ministre de la Santé, qui menaçait dans sa lettre que, s'il n'y avait pas d'équilibre budgétaire, ils allaient perdre leurs équipements médicaux spécialisés. C'est à ça que vous contraignez l'hôpital. C'est signé, la lettre, de la main de l'actuelle ministre des Finances. Des menaces de cette nature-là n'ont pas place dans notre société aujourd'hui.

Le Président: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: La liste des mesures qui nous a été expédiée le 8 mars... Ça vous dit quelque chose, le 8 mars? Il y a eu comme un changement de responsabilités. Et la lettre qui a été écrite par ma prédécesseure, elle ne faisait pas de menaces. Elle indiquait les éléments d'une gestion rigoureuse, avec compassion, pour arriver aux résultats recherchés. Ça, là, il y a deux méthodes pour le faire, il y a deux méthodes pour le faire, c'est très clair: il y a la méthode de la compassion, et de la rigueur, et des efforts ou il y a la méthode du laisser-aller, ce que vous avez fait pendant 10 ans et qui a amené des déficits de 6 milliards par année et de la perte de contrôle des finances publiques. C'est ça, les deux méthodes d'approche.

n(10 h 40)n

Et ça demande du travail, ça demande de l'énergie, et on va le faire, et on va consacrer tout le travail nécessaire au niveau du ministère national de la Santé et des Services sociaux, au niveau de l'équipe administrative et professionnelle sur l'île de Montréal. Puis, avec les autorités et les personnels de l'hôpital de Lachine, on va réaliser ce défi-là et on se mettra pas... M. le député, vous souhaiteriez ça, qu'on se mette en mode punition, en mode sanction. Non, on est en mode solution et on est en mode d'aide. Et, oui, il est vrai d'indiquer qu'il y a là une question d'argent et ce serait intéressant que, oui, lui aussi se rallie au chef de l'opposition et qu'il réclame du gouvernement fédéral le respect de la parole donnée à Robert Bourassa en 1970 et que l'autre gouvernement, qui perçoit l'autre moitié des impôts, paie sa juste part pour les services aux personnes âgées à Lachine comme partout au Québec.

Le Président: Alors, M. le député de Rivière-du-Loup maintenant, en question principale.

Plan d'action du gouvernement à la suite
de l'adoption par le fédéral de la Loi sur
le système de justice pénale pour les adolescents

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. C'est avec consternation, déception aussi, hier, que, je suis certain, tous les membres de l'Assemblée nationale, comme plusieurs intervenants, enfin tous les intervenants au Québec dans l'intervention auprès des jeunes contrevenants, ont constaté l'adoption de la Loi fédérale sur les jeunes contrevenants. C'est un genre de fédéralisme impérial qui est rejeté au Québec. Ce dossier-là a été...

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: ...mené avec arrogance, ce dossier-là a été mené avec entêtement. Il y a des moments comme ça où le gouvernement fédéral, le gouvernement Chrétien, mène le Canada comme un régime féodal du Moyen Âge.

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, M. le Président. Je pensais que l'opposition officielle faisait partie du consensus québécois. Elle en fait encore partie.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Alors, ma question, elle est fort simple, M. le Président: Face à une loi qui est mauvaise, face à une loi qui va coûter une fortune, en passant, pour faire des choses moins bonnes, est-ce que le gouvernement du Québec, dès ce matin, évalue toutes les possibilités de contester cette loi-là, d'utiliser les mécanismes qui sont en place pour contourner et pour s'assurer qu'on va protéger jusqu'à la dernière énergie un modèle québécois qui a fait ses preuves et que tout le monde veut conserver?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je pense que toute cette Assemblée est reconnaissante au député de Rivière-du-Loup d'avoir, si je puis dire, enrichi le vocabulaire, vocabulaire que plusieurs gouvernants québécois ? René Lévesque, Robert Bourassa, même le très calme Gérard D. Levesque ? ont utilisé pour qualifier ces genres de coups de force. Celui-là, c'en est un, c'en est un contre notre jeunesse. En 1982, rapatriement unilatéral, c'était contre l'ensemble de la société. Et c'est une longue série qui devrait nous ouvrir les yeux et nous pousser au-delà du vocabulaire.

Le député de Rivière-du-Loup a fait avancer les idées aussi quand il a parlé, à notre instar, d'une union confédérale conclue en tout respect avec nos compatriotes du Canada. Dans une telle union, ces coups de force dont nous sommes victimes ne seraient plus possibles et la nouvelle donne permettrait enfin, dans le respect, de consolider une amitié. Comment consolider une amitié entre le gouvernement national du Canada et le nôtre si, dans un secteur aussi vital que le traitement des jeunes contrevenants, malgré notre unanimité ici, M. le Président, et une belle unanimité, on continue quand même à Ottawa d'agir de la façon décrite par le député de Rivière-du-Loup?

Il est évident, et j'espère que tout le monde suit le consensus, que notre ministre de la Justice, à qui, M. le Président, je vous demanderais maintenant de céder la parole, va expliquer ce qu'il a conçu comme plan pour faire face à cette attaque sans précédent contre notre société. Et, au mot «société», j'ajoute ceci pour montrer, je ne veux pas faire d'excès de verbe, mais pour montrer jusqu'à quel point c'est féodal et impérial. Vous savez que le premier ministre du Canada se vante souvent d'avoir fait une motion à la Chambre des communes reconnaissant le Québec comme société distincte. Cette motion, on le voit bien, ne vaut pas le papier sur lequel elle est écrite, parce que, s'il avait une chance de nous traiter de façon distincte, c'était dans ce dossier.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. Alors, la question demeure: Est-ce que le gouvernement du Québec, ce matin, envisage des façons concrètes de défendre jusqu'à la dernière énergie ce modèle québécois? Le premier ministre vient de référer à une motion, est-ce qu'il est évalué d'aller tester juridiquement cette motion en vertu d'un dossier très concret où le caractère distinct du Québec est en cause? Je voulais entendre du premier ministre... C'est une chose de se plaindre, c'est une chose de contester ce que les Québécois ont voté comme résultat au référendum en 1995, c'est une autre chose pour son gouvernement de faire son devoir et de défendre le Québec concrètement ce matin.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Paul Bégin

M. Bégin: Alors, M. le Président, il est extrêmement rare que, dans notre société, nous obtenions un consensus qui peut s'exprimer par une motion unanime de l'Assemblée nationale, de tous les partis et de toutes les personnes qui sont ici, et, si nous l'avons obtenue, c'est parce que nous rejoignons quelque chose de fondamental qui transcende les partis politiques.

Nous l'avons obtenu aussi des partis politiques parce qu'ils ont entendu ce que tous les intervenants dans le milieu nous ont dit: Nous ne pouvons pas continuer à bien traiter les jeunes avec la loi C-7 que le gouvernement fédéral veut adopter, même si elle était amendée; il faut que l'on continue à pouvoir appliquer au Québec la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous avons fait tous les efforts, une commission parlementaire, nous avons entendu tous les intervenants, nous avons convenu d'adopter cette résolution ici, c'était la première phase de ce que nous pouvions et que nous devions faire à l'égard de nos jeunes enfants.

Maintenant que ceci a été adopté, ce projet a été adopté par la Chambre des communes, il reste une possibilité, c'est le Sénat, où on peut intervenir. C'est une des voies envisageables, mais on sait aussi quelle est la possibilité que nous obtenions véritablement des changements. C'est le volet, je dirais, entre guillemets, relations publiques que nous pouvons faire.

Du côté, cependant, judiciaire, j'ai déjà demandé qu'on regarde si, effectivement, nous ne pouvons pas contester juridiquement cette loi C-7 sur la base de principes qui seraient extrêmement valables devant les tribunaux, et on m'a déjà donné non pas une opinion juridique, mais une première indication à l'effet qu'effectivement nous pouvons trouver dans cette loi des motifs suffisants pour la contester. Dès que nous aurons une opinion formelle là-dessus, et si on recommande d'aller de l'avant, soyez certain, M. le Président, que nous contesterons cette loi, qui est considérée par tous comme étant ? je dirais bien un mot très fort ? inique.

Le Président: En question principale, M. le député de Châteauguay, maintenant.

Prescription du médicament Eprex
pour les patients atteints de cancer

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, merci, M. le Président. Le médicament Eprex, dont nous avons déjà eu l'occasion de parler en cette Chambre, permet aux patients du Québec qui souffrent d'anémie de produire leurs propres globules rouges. Selon l'Institut de l'anémie ? et il y a des représentants ici dans nos galeries et des familles des patients ? et selon de nombreux spécialistes, c'est un traitement plus efficace que les transfusions sanguines.

n(10 h 50)n

Or, M. le Président, avec un assureur privé, l'Eprex est prescrit sans condition. Et, au Québec, avant l'assurance médicaments du gouvernement du Parti québécois, la RAMQ faisait de même. Depuis 1997, avec l'assurance médicaments du Parti québécois, c'est à l'instauration d'un système à deux vitesses que nous assistons. Les patients atteints de cancer doivent subir deux...

J'entends beaucoup de grognements, M. le Président, en face. Je pense que c'est une question assez importante concernant le cancer, et il serait peut-être temps que le gouvernement du Parti québécois écoute ces questions. Les patients atteints de cancer...

Une voix: ...

M. Fournier: Pardon?

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Question importante, M. le Président. Les patients atteints de cancer doivent subir deux transfusions sanguines avant d'avoir droit à l'Eprex. Ça, c'est avec le système d'assurance médicaments du gouvernement du Parti québécois. Avec le système antérieur et l'assurance privée, il n'y a pas besoin de passer par ces deux transfusions sanguines. En outre des problèmes de pénurie et des risques associés aux transfusions sanguines, c'est véritablement un système à deux vitesses où le sang des patients est utilisé comme ticket modérateur.

En 1999, le Comité de pharmacologie disait attendre les orientations ministérielles. En décembre dernier, la ministre a promis une décision pour les premiers jours de l'année 2001. En mars, la ministre écrivait à mon collègue de Nelligan pour lui dire qu'elle promettait la décision pour le printemps. Au mois de mai, un nouveau ministre, le ministre de la Santé actuel, disait que le tout était reporté à l'automne prochain.

M. le Président, c'en est assez. La question, elle est simple, au ministre et au gouvernement: Comprennent-ils que c'est de leur faute à eux s'il est implanté au Québec actuellement un système à deux vitesses où le ticket modérateur dans ce cas-là, c'est le sang des Québécois? Et qu'entend-il faire rapidement pour donner suite aux demandes de l'Institut d'anémie et de nombreux spécialistes pour que les Québécois aient enfin droit au service auquel ils ont droit parce qu'ils paient pour ce service-là?

Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je pense que la question se pose quant à l'utilisation d'un médicament qui s'appelle l'Eprex. Il y a même des personnes ici, dans nos galeries, qui en particulier sont atteintes à différents degrés ? et sans utiliser les noms tout au long ? d'anémie, qui, dans certaines situations, peuvent être appelées sur prescription du médecin à utiliser un médicament, Eprex, qui est un médicament reconnu et accepté par le régime d'assurance médicaments du Québec. C'est un médicament reconnu. Il est utilisé en vertu d'une procédure qui doit être réalisée par le médecin traitant, qui nous justifie pourquoi on doit utiliser ce médicament au lieu de la transfusion sanguine, et tout en constatant que l'utilisation du médicament Eprex n'annule pas la nécessité ou les transfusions sanguines dans ce cas.

Oui, M. le Président, il appert, et je le reconnais ? je le reconnais ? il appert que j'ai provoqué un drame national chez la compagnie fabricante du produit lorsque j'ai dit qu'au lieu du 30 juin, c'était le 30 juillet, et c'était le 30 juin que je vais recevoir le rapport du Comité consultatif national de médecine transfusionnelle d'Héma-Québec, parce que, en pareille question, ce n'est pas matière à évaluation uniquement par les critères du commun des mortels, ça nous prend l'intervention des scientifiques et des personnes en particulier de la profession médicale pour nous faire les recommandations. Et nous avons mis sur pied, avec Héma-Québec, un comité qui s'appelle le Comité national de médecine transfusionnelle, qui va nous donner son avis quant à l'utilisation d'Eprex dans les cas d'anémie parce que, évidemment, pour le fabricant ? et ça se comprend et ça s'accepte ? ça s'accepte en termes de discussion et d'échanges, puisque ce traitement peut aller jusqu'à 200 000 $ par patient et que ce régime, il doit fournir les meilleures indications, et les meilleures prescriptions, et les meilleures doses pour corriger.

Cependant, il nous faut être capable ? je conclus là-dessus, M. le Président ? de s'appuyer sur deux organismes: un premier qui a été créé en vertu d'Héma-Québec sur la question de la médecine transfusionnelle et, deuxièmement ? je vous le rappellerai, M. le député de Châteauguay ? sur la recommandation du Conseil consultatif de pharmacologie, qui a été mis sur pied en 1971 et qui est chargé de conseiller le ministre quant aux médicaments qui doivent être admis sur la liste des médicaments à remboursement. Je recevrai le rapport d'ici le 30 juin et, lorsque j'aurai reçu le rapport, je le lirai attentivement, comme tous les autres rapports, et nous donnerons la suite compte tenu du contenu de ce rapport, M. le Président.

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée. Vous demandez le consentement...

M. Fournier: ...le consentement de poser une question additionnelle, considérant qu'il y a des patients et des familles des patients qui sont ici et qu'il y a des choses à corriger dans ce qu'a dit le ministre.

Le Président: Alors, il y a demande de consentement pour une question complémentaire, M. le leader du gouvernement. Alors, il y a consentement. M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre est au courant, lui qui nous dit que le comité fera son rapport seulement 30 jours plus tard, est-ce qu'il est au courant que la ministre nous disait, au mois de décembre dernier, à des questions qui lui étaient posées: «J'ai demandé au Comité consultatif national des médecines transfusionnelles de revoir les conditions et les indications thérapeutiques de remboursement de ces médicaments. Je leur ai demandé de faire ça au cours de l'automne. C'était cet automne qu'ils devaient me faire une recommandation, nous sommes aujourd'hui l'hiver, et j'imagine, d'ici quelques jours...»? Elle annonçait ça pour le début de l'année. Ça fait depuis 1999 qu'on attend, et on nous pellette toujours en avant. Et là il a le culot de nous dire qu'il l'attend pour cet été, alors que ça a été fait depuis l'automne dernier.

Quand est-ce qu'on va avoir la vérité en cette Chambre? Pas pour les compagnies pharmaceutiques, pour les patients qui ont droit à ces produits.

Des voix: Bravo!

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Il faut d'ores et déjà, et sans trop de partisanerie, je l'espère, reconnaître la sagesse de ma prédécesseure, qui, à l'automne, devant ces questions qui comportent des dimensions scientifiques...

Des voix: ...

Le Président: Alors, il y a eu consentement pour poser une question, et je présume que c'était aussi pour entendre la réponse.

M. Trudel: Je vous remercie, M. le Président, parce que, en pareille matière d'utilisation de médicaments pour soigner sur prescription du médecin, il faut qu'on ait les avis et les conseils, surtout, des professionnels, des professionnels en pharmacologie, en médecine, en hémato-oncologie, les avis qui nous donnent les critères pour être capable de prendre une décision. Et c'est ce que ma prédécesseure a enclenché comme mécanisme, de façon à ce que les autres professionnels qui sont chargés de traiter cette information, ça s'appelle le Conseil consultatif de pharmacologie, nous amènent une recommandation étayée, parce que c'est la responsabilité de ce Conseil.

Et déjà, M. le Président, le 30 avril dernier, oui, à mon cabinet, nous avons rencontré les fabricants, la compagnie qui fabrique ce produit, et nous leur avons indiqué à nouveau la démarche avec les scientifiques, avec les évaluations qui devaient être produites pour nous amener à prendre une décision et que nous soyons capables aussi, en conclusion, M. le Président, en termes de coûts-bénéfices, de mesurer quel est l'état de mieux-être qu'on peut atteindre pour ces personnes qui sont aux prises avec des difficultés réelles en termes d'anémie, par exemple, au Québec, et avec les meilleurs traitements possible à l'aide des professionnels concernés.

Réponses différées

Financement des centres jeunesse
de la Montérégie

Le Président: Alors, maintenant nous allons aller à la réponse de la ministre déléguée à la Santé, aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse à la question qui a été posée le 25 mai dernier par M. le député de Nelligan concernant le financement des centres jeunesse en Montérégie. D'abord, Mme la ministre.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. J'étais, samedi dernier, au congrès de l'Association des centres jeunesse du Québec, où d'ailleurs les dirigeants du Centre jeunesse de Montérégie ont pu me transmettre leurs préoccupations en direct, et nous avons eu un court échange à ce sujet. Alors, voici en substance ce que nous nous sommes dit.

D'abord, je leur ai rappelé que le plan d'équilibre budgétaire de leur établissement est à l'étude actuellement à la régie régionale de la santé de la région et au ministère de la Santé et des Services sociaux et qu'il doit être autorisé avant d'être mis en application.

Donc, nous n'en sommes pas du tout à la mise en application des mesures, et évidemment nous porterons une attention très particulière dans l'application de ces mesures à ce qu'il n'y ait pas coupure de services pour la jeunesse du Québec. D'ailleurs, une rencontre est prévue très bientôt entre l'établissement et les autorités du ministère de la Santé et des Services sociaux où nous verrons, nous trouverons des pistes de solution avec l'établissement.

n(11 heures)n

Je tiens à rappeler que nous connaissons depuis longtemps la situation particulière des centres jeunesse de la Montérégie et que nous lui avons accordé une attention particulière. L'an dernier, nous avons ajouté au budget de la Montérégie plus de 2 millions de dollars et, cette année, en 2001-2002, nous allouerons près du tiers des sommes additionnelles récurrentes allouées pour l'ensemble des centres jeunesse du Québec, soit 3 millions sur 9,4 millions de dollars qui seront alloués à la Montérégie. En plus de cela, évidemment, nous les accompagnerons ? et ils le savent ? dans leur recherche de l'équilibre budgétaire et dans les solutions pour ce faire.

Le Président: Bien. Alors, M. le député de Nelligan, maintenant.

M. Russell Williams

M. Williams: Est-ce que la ministre comprend que c'est pas juste la Montérégie? C'est à cause de la loi n° 107, la loi antiservices, que plusieurs centres jeunesse sont en train d'allonger la liste d'attente, de couper les services, parce qu'ils ne peuvent pas respecter les décisions du tribunal, les ordonnances du tribunal et la loi n° 107. Je redemande ma question: Est-ce que la ministre est ouverte à soustraire les centres jeunesse à la loi n° 107, loi antiservices, et peut prioriser d'abord et avant tout les jeunes et leurs familles en difficulté?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: M. le Président, s'il y avait une loi à laquelle il faudrait soustraire les centres jeunesse du Québec et la jeunesse en difficulté, c'est à la loi C-7 qu'il faudrait le faire. C'est ça, la première loi à laquelle il faudrait se soustraire. C'est une bonne occasion pour le rappeler, ce matin.

Deuxièmement, il y a un excellent contrôle des listes d'attente. Actuellement, au Québec, les centres jeunesse font un magnifique travail, elles sont en diminution constante depuis cinq ans et ça continue. De ce côté-là, excellent contrôle, je tiens à le rappeler. Il faut féliciter les gens pour l'excellent travail qu'ils font.

Deuxièmement, il y a très peu de centres jeunesse qui ont des difficultés financières actuellement parce que, depuis deux ans, nous accompagnons ces centres et nous investissons des sommes d'argent supplémentaires. Nous allons travailler avec les... Soit qu'il en reste trois ou quatre qui ont encore des difficultés... Nous allons les accompagner dans l'année, travailler avec eux autant sur les mesures de réduction de leur déficit que les mesures d'accompagnement financier pour leur permettre de traverser cette dernière période difficile, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Motions sans préavis

Le Président: Maintenant, nous allons passer aux motions sans préavis. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Révocation du renvoi à la commission
des institutions du projet de loi n° 5

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter les motions suivantes:

«Que l'ordre de renvoi du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie, pour étude détaillée à la commission des institutions, soit révoqué.»

Renvoi à la commission
de l'économie et du travail

«Que le projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie, soit renvoyé pour étude détaillée devant la commission de l'économie et du travail.»

Le Président: La motion est-elle adoptée? M. le leader.

M. Paradis: M. le Président, simplement une précision, là. Qu'est-ce qui explique l'erreur du gouvernement dans ce dossier?

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je pense qu'il s'agit tout simplement d'un changement de commission, d'une commission parlementaire. Alors, c'est tout simplement cela.

Mise aux voix

Le Président: Alors, il y a consentement. La motion est donc adoptée. Une autre motion sans préavis de Mme la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance.

Souligner la Semaine des centres

de la petite enfance et des services de garde

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour que l'on puisse bien sûr marquer «la tenue de la Semaine des centres de la petite enfance du 27 mai au 2 juin 2001 et qu'elle souligne, à cette occasion, l'importance de l'apport des centres de la petite enfance au développement harmonieux des enfants du Québec».

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion? Il y a consentement. Mme la ministre, d'abord. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, un intervenant de chaque côté, à condition de courtes allocutions.

Le Président: Bien, c'est ce que le leader de l'opposition m'avait indiqué. Alors, très bien, je pense qu'il y a entente. Mme la ministre.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, c'est avec fierté que je propose bien sûr aujourd'hui aux membres de cette Assemblée de souligner la Semaine des centres de la petite enfance qui se déroule tout au long de la semaine. Comme l'évoque son thème, Un univers à ma mesure, c'est un événement annuel qui nous rappelle le rôle primordial qu'assument les centres de la petite enfance dans le développement des enfants, en leur offrant notamment un univers qui est basé sur l'apprentissage et la socialisation à travers le jeu. Nous pouvons également nous réjouir de cette initiative des regroupements et des centres de la petite enfance qui, dans les diverses régions du Québec, organisent une gamme d'activités de sensibilisation et d'information sur leur mission éducative et sociale.

Le centres de la petite enfance sont des partenaires primordiaux dans le développement de la politique familiale, apportant aux parents et à leurs enfants un soutien concret qui répond aux nouvelles réalités des familles québécoises. Les 898 centres de la petite enfance, dont les quelque 11 000 responsables de services de garde en milieu familial, sont en effet interpellés par les besoins émergeant des parents qui ont notamment des horaires de travail atypiques ou qui requièrent des services de soutien préventif et adapté aux besoins spécifiques de leurs enfants. La diversité de cette offre de service tient aussi à la concertation avec les organismes du milieu avec lesquels les centres de la petite enfance sont et seront appelés à conclure des ententes de collaboration.

Avec les centres de la petite enfance, ce sont de véritables pas de géant que nous avons faits ensemble pour soutenir le rôle essentiel des familles dans la société québécoise et pour offrir aux enfants des services éducatifs de qualité qui font l'envie de beaucoup de parents vivant ailleurs qu'au Québec et dans d'autres pays. C'est donc dans cet esprit, M. le Président, que j'invite les membres de cette Assemblée à participer aux activités qui se dérouleront dans leur région et à réitérer leur appui à l'égard des familles du Québec, et cela, en procédant à l'adoption de la présente motion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance, également députée de Lévis. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci. Il me fait plaisir de vous voir sur le fauteuil, M. le Président, après une absence douloureuse. Mais on est contents que vous soyez de retour.

M. le Président, dans un premier temps, je dois dire très amicalement et respectueusement à la ministre que je vais suggérer un amendement, de consentement avec peut-être la leader adjointe du gouvernement, au libellé de la motion parce que la motion de la ministre indique que c'est la Semaine des centres de la petite enfance. Elle l'indique à deux reprises. C'est très clair, malheureusement, qu'il ne s'agit pas d'une semaine des centres de la petite enfance mais qu'il s'agit d'une semaine des services de garde au Québec. C'est le thème. C'est pas une semaine des centres de la petite enfance. Toute la littérature émanant du ministère appelle la semaine la Semaine des services de garde au Québec.

Puis il y a une raison fort simple pour laquelle je vais suggérer cet amendement, M. le Président: parce que, avec le libellé de la ministre sur les centres de la petite enfance, on exclut évidemment les garderies à but lucratif et les services de garde en milieu scolaire. Je ne pense pas que c'est l'intention de la ministre d'exclure les garderies à but lucratif et les services de garde en milieu scolaire de la motion, parce que les services de garde au Québec comportent évidemment trois éléments, même quatre éléments. Ça comporte les services de garde en milieu, installation, ce qu'on appelait anciennement des garderies, qui sont maintenant donnés par les centres de la petite enfance et par les garderies à but lucratif, ça comporte des services de garde en milieu familial supervisés par les centres de la petite enfance et donnés par des responsables des services de garde, et ça comporte les services de garde en milieu scolaire.

Il y a présentement tout près de 900 CPE au Québec, M. le Président. Il y a 500 garderies à but lucratif au Québec. Il y a 1 300 services de garde en milieu scolaire. Du côté des services de garde réguliers, il y a 133 000 enfants dans à peu près 1 400 établissements. Il y a à peu près 150 000 enfants qui fréquentent des services de garde en milieu scolaire. Et, comme je vous ai dit, sur les 133 000 enfants en service de garde régulier, il y en a à peu près 51 000 en centre de la petite enfance en installation, à peu près 56 000 en milieu familial avec les 1 000 responsables de services de garde, il y a à peu près 27 000 enfants en service de garde en garderie, et il s'agit évidemment d'à peu près 20 000 personnes qui travaillent dans le réseau. Vingt mille personnes. Des directeurs, des directrices, des éducateurs, des éducatrices, le personnel de soutien.

n(11 h 10)n

Honnêtement, M. le Président, je suis tout à fait d'accord avec la ministre, il faut souligner le travail remarquable de ces 20 000 personnes qui travaillent dans nos réseaux de services de garde et des milliers de personnes qui travaillent dans le réseau des services de garde en milieu scolaire aussi. Ce n'est pas facile, vous le savez, de confier nos enfants à des tiers, hein? Mes trois enfants ont tous passé par des services de garde au Québec, des services de garde à but non lucratif. Dernièrement, ma fille qui est maintenant d'âge scolaire a été dans un CPE, et c'est toujours déchirant pour un parent... Malgré la qualité des services qui sont offerts, malgré la qualité exceptionnelle des personnes qui travaillent dans le domaine, c'est toujours déchirant de confier nos enfants à une tierce partie, hein? Je me rappelle des premières journées, là. Ma fille était accotée sur ma jambe, elle ne voulait pas que je parte. Ça ne dure pas longtemps, mais c'est un choc.

Moi, je pense honnêtement que, de temps en temps, c'est plus un choc psychologique pour les parents que ce l'est pour les enfants. Les enfants s'adaptent très rapidement, ils sont heureux dans nos services de garde au Québec, M. le Président. C'est les parents qui reçoivent le traumatisme quand ils confient leurs enfants. C'est une responsabilité très lourde qui incombe à toutes ces personnes-là, et on souligne le travail remarquable et excellent qu'elles font. On les remercie pour leur dévouement à nos enfants parce que, effectivement, elles assument un rôle important dans le développement, l'assimilation précoce, le développement éducatif et social de nos enfants.

Je ne peux pas passer sous silence, M. le Président, malheureusement, quelques préoccupations qu'on a, de ce côté de la Chambre, dans cette Semaine des services de garde au Québec, du 27 mai au 2 juin de cette année. Il y a évidemment les 68 000 enfants qui attendent toujours une place en service de garde au Québec. Ça veut dire que trois enfants sur 10 dont les parents souhaitent obtenir une place en service de garde n'ont aucune place au moment où on se parle. La ministre indique que le gouvernement devrait être en mesure de combler ces besoins pour l'an 2005-2006, dans cinq ans.

L'autre aspect troublant, M. le Président, c'est les 20 000 places autorisées mais non développées, selon même un aveu du ministère, une lettre du 9 mai du sous-ministre adjoint à la Direction générale des services à la famille et à l'enfance qui indique deux choses. Il y a 20 690 places autorisées au Québec en service de garde mais non développées, et ce, pour chacune des régions du Québec. Et, dans la même lettre, à cause de ce curieux processus d'annoncer des places qui ne se sont pas réalisées, on indique qu'il y aura un moratoire sur le développement d'un nombre de nouvelles places jusqu'en septembre prochain. La phrase est très claire. Je cite la même lettre: «En considérant l'impact des délais de réalisation des places déjà autorisées et des renseignements supplémentaires qui nous seront livrés par les résultats de l'enquête sur les besoins des familles en matière de services de garde éducatifs sur nos activités de planification, nous estimons être en mesure de vous communiquer les orientations, les paramètres du développement et le nombre de nouvelles places autorisées en 2001-2002 dans votre région en septembre prochain.» Alors, il y a un certain délai que le ministère de la Famille et de l'Enfance impose sur le développement des places dont les parents québécois ont grandement besoin.

Et il y a toute la question de l'autonomie des CPE, des garderies, qui est mise en cause de temps en temps, M. le Président. On a parlé de la question des vacances en période estivale. Nous, de ce côté, on prétend qu'il y a, à cause des règles budgétaires du ministère, des CPE qui sont obligés de dire à leurs clients, à leurs parents: Si vous retirez votre enfant en période estivale, vous allez perdre votre place. La ministre a déjà qualifié ces genres de propos comme des faussetés en cette Chambre. Je me souviens très bien, lors d'un échange en Chambre, elle a qualifié ça de faussetés. J'ai devant moi une lettre émanant du CPE La Ribambelle, qui est situé à Loretteville, qui indique exactement ça. Ça indique ? et je peux citer la lettre qui a été envoyée à tous les parents pour le volet familial: «Cependant, il est très important de maintenir votre inscription durant tout l'été. Une annulation de fréquence mettrait fin à votre contrat et à votre prolongation de contrat 2001-2002. Elle vous ferait perdre votre place et vous pénaliserait pour l'année prochaine.» Fin de la citation. Je ne pense pas que c'est la situation souhaitée par les parents de se faire dire que, pendant la période estivale, si on veut prendre un peu plus de temps avec nos enfants, si on veut les retirer des services de garde, on va perdre notre place en septembre prochain. Ce n'est pas une approche qui est acceptable. J'ai la preuve devant moi que ça existe ailleurs au Québec. Il faudrait que le ministère se penche sur cette question.

M. le Président, je terminerai en remerciant les partenaires de cette Semaine des services de garde au Québec: la CIRCPEQ, un long acronyme qui est la Concertaction interrégionale des centres de la petite enfance du Québec, l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec et, évidemment, le ministère de la Famille et de l'Enfance.

Motion d'amendement

En conséquence, M. le Président, avec le consentement de la ministre, compte tenu que la Semaine s'appelle la Semaine des services de garde au Québec, peut-être que, de consentement avec la ministre et la leader adjointe, je suggérerais un amendement pour remplacer, dans la deuxième et la quatrième ligne, les mots «les centres de la petite enfance» par les mots «services de garde». Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce que vous voulez déposer votre amendement, s'il vous plaît?

M. Copeman: Avec plaisir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Votre amendement est reçu, à ce stade-ci. Le débat étant terminé, est-ce que l'amendement... Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, on peut en prendre connaissance. On a très bien entendu aussi en même temps le député, puisque c'est assez simple comme amendement. Puisque la ministre a un droit de réplique, je pense que très rapidement on pourrait disposer aussi de l'amendement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Effectivement. Alors, sur l'amendement, Mme la ministre.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je suis tout à fait en accord avec l'amendement qui est proposé d'ajouter «Semaine des centres de la petite enfance et services de garde». J'ai reçu le matériel au ministère. La motion qui vous a été présentée est en fonction bien sûr des textes. Il y a eu des discussions pour modifier le titre parce que, tout comme moi... J'ai exactement le même poster qui a été remis ? l'affiche ? et on parlait de la Semaine des centres de la petite enfance. Alors, comme il y a eu modification, de concert avec bien sûr les différents intervenants dans le milieu, c'est avec plaisir que je l'accepte, d'autant plus que l'objectif est tout simplement de reconnaître et d'inviter l'ensemble de la population à visiter, à connaître et à participer aux activités qui sont organisées par les centres de la petite enfance et les services de garde, parce qu'on en est très fiers, les parents qui bénéficient des services sont tout à fait contents et heureux.

M. le Président, l'objectif, c'était bien sûr de s'assurer que les gens allaient participer à cette Semaine. J'ose espérer qu'ils accepteront cette invitation et j'accepte avec grand plaisir l'amendement qui est proposé par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'amendement est donc adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, la motion dûment amendée pourrait se lire comme suit:

«Que l'Assemblée nationale marque la tenue de la Semaine des services de garde du 27 mai au 2 juin 2001 et qu'elle souligne, à cette occasion, l'importance de l'apport des services de garde au développement harmonieux des enfants du Québec.»

Mme Goupil: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Si vous me permettez une intervention, c'est tout simplement d'ajouter... Lorsque l'on disait que l'on soulignait l'importance de l'apport des centres de la petite enfance au développement harmonieux, c'est qu'on ajouterait «les services de garde». Alors, elle se lirait ainsi: «Semaine des centres de la petite enfance et services de garde».

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce bien le sens de votre amendement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Copeman: Bien...

n(11 h 20)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Parce que ce n'est pas...

M. Russell Copeman

M. Copeman: Oui. M. le Président, je ne veux surtout pas faire de la procédurite. Je suis un peu embêté, par contre. Moi, ma compréhension des choses, c'est que la Semaine qu'on souligne aujourd'hui est la Semaine des services de garde, point. Je peux bien me rendre à la demande de la ministre. Moi, j'ai une fiche qui dit «la Semaine des services de garde». Semble-t-il, elle, elle a une fiche qui dit «la Semaine des centres de la petite enfance». On a des fiches...

We got competing posters, M. le Président. Ils sont tous les deux beaux, hein? Ils sont très beaux, mais ils ne disent pas la même chose. Moi, ma compréhension des choses, c'est qu'on parle de la Semaine des services de garde. Je préférerais...

Bien, écoute, si les deux choses sont vraiment officielles, on va les prendre. Tout ce que je souhaite, c'est qu'on souligne le vrai événement tel que défini par le ministère. Si la ministre me dit: C'est la Semaine des centres de la petite enfance et autres services de garde au Québec, bien, on va le libeller comme tel.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que, Mme la ministre, vous vous ralliez à cette modification de l'amendement?

Mme Goupil: M. le Président, tout à fait.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui?

Mme Goupil: Ce qu'il est important de retenir, c'est que l'on souligne la Semaine des centres de la petite enfance et des services de garde, tout simplement.

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. Alors, je vous demanderais, M. le secrétaire, de prendre en note que la motion dûment amendée pourrait se lire comme suit:

«Que l'Assemblée nationale marque la tenue de la Semaine des centres de la petite enfance et des services de garde du 27 mai au 2 juin 2001 et qu'elle souligne, à cette occasion, l'importance de l'apport des centres de la petite enfance et des services de garde au développement harmonieux des enfants du Québec.»

Est-ce que ça vous convient, de part et d'autre?

Mme Goupil: Tout à fait.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, bien entendu, cet amendement, le titulaire en est le député de Notre-Dame-de-Grâce. Donc, l'amendement a été adopté.

Mise aux voix

Est-ce que la motion, dûment amendée, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Bon. Y a-t-il d'autres motions sans préavis?

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission des transports et de l'environnement procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi n° 21, Loi modifiant le Code de la sécurité routière, projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur les transports et la Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la commission de l'économie et du travail complétera les consultations particulières sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code du travail, instituant la Commission des relations du travail et modifiant d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 à 18 heures et de 20 à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 173, Loi sur la sécurité civile, aujourd'hui, de 15 à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 165, Loi modifiant la Loi concernant le mandat des administrateurs de certains établissements publics de santé et de services sociaux, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la leader adjointe. Pour la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous rappelle que, du consentement de l'Assemblée pour déroger aux articles 309 et 312 du règlement, le débat de fin de séance entre Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne et M. le ministre de la Santé et des Services sociaux concernant la construction d'un centre d'hébergement à Saint-Félix-de-Valois a été reporté à la séance d'aujourd'hui, à 18 heures. Ceci met donc fin aux affaires courantes.

Affaires du jour

Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe à nous annoncer...

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 5, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 11

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'article 5 de votre feuilleton. Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. Alors, y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 11? Mme la ministre des Finances et vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, bien sûr, M. le Président, d'abord, je dois vous dire que c'est avec enthousiasme que je présente aujourd'hui pour adoption de principe le projet de loi n° 11 intitulé la Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. En fait, ce projet de loi, c'est une autre législation maîtresse présentée par notre gouvernement en matière de saine gestion des finances publiques. En effet, depuis que nous avons pris les commandes de l'État à l'automne 1994, nous avons accompli des progrès énormes en ce qui concerne l'amélioration des finances publiques québécoises.

J'aimerais rappeler aux membres de cette Assemblée que le déficit avait atteint un niveau record de près de 6 milliards de dollars en 1994-1995, sous l'administration du Parti libéral. Grâce à la bonne gestion de notre gouvernement et bien sûr aussi aux efforts considérables déployés par les Québécoises et les Québécois, nous avons réussi à éliminer le déficit en quatre ans seulement, soit un an plus tôt que ce que prévoyait la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. La période des déficits chroniques est donc heureusement derrière nous, M. le Président.

Depuis l'exercice 1998-1999, nous avons amorcé une nouvelle étape, et il faut dores et déjà se donner des outils permettant de bien gérer les excédents. Cependant, en effet, lorsqu'un excédent se dégage, il est souvent connu seulement à la fin de l'année financière, comme ce fut le cas d'ailleurs lors de l'exercice financier 2000-2001. Dans une telle situation, il est souvent trop tard pour que l'on puisse affecter de tels excédents au financement de services publics additionnels, et ce, avant la fin de l'année financière, bien sûr, à moins d'en confier la gestion à des tiers, de telle sorte qu'ils servent automatiquement à réduire la dette. C'est pourquoi, dans le discours du budget, j'ai annoncé la constitution d'une réserve budgétaire. Cette réserve permettra de pourvoir, au cours des prochaines années, au financement de nouvelles initiatives à même les excédents dégagés à la fin d'une année financière. La mise en oeuvre de cette réserve budgétaire permettra également au gouvernement de conserver le plein contrôle sur les deniers publics. En outre, cette réserve nous permettra de faire les arbitrages nécessaires, et ce, en toute transparence, entre les montants à allouer à la réduction de la dette et ceux à affecter au financement des services publics.

Les sommes mises en réserve seront utilisées notamment pour financer la modernisation des réseaux de la santé et des services sociaux et de l'éducation ainsi que pour la mise en oeuvre de nouvelles initiatives dans le domaine de la solidarité sociale et de la recherche. Je vous rappelle la ventilation des 950 millions de dollars mis en réserve entre les quatre volets prévus au discours sur le budget: 600 millions de dollars au volet santé et services sociaux; 200 millions de dollars au volet éducation; 100 millions de dollars au volet solidarité sociale; et enfin, 50 millions de dollars au volet recherche.

Le projet de loi prévoit que c'est à l'occasion du discours sur le budget que sera déterminée quelle partie des excédents sera affectée à la réserve, ainsi que les volets et les montants qui y seront affectés. Ce projet de loi prévoit aussi que les sommes affectées à la réserve seront déposées à la Caisse de dépôt et placement du Québec qui agira à titre de fiduciaire et seulement comme fiduciaire, comme c'est le cas pour la gestion des sommes déposées à l'égard des régimes de retraite des employés du gouvernement. Ce projet de loi prévoit également que la réserve ne pourra être utilisée que pour les fins suivantes: des projets d'immobilisation, c'est-à-dire la construction et la rénovation d'immeubles ou l'acquisition d'équipement spécialisé; des projets dont la réalisation aura une durée déterminée, par exemple la mise en place de groupes de médecine de famille pour les coûts d'implantation et de transition; ou tout autre projet aussi que pourrait autoriser le gouvernement lorsqu'il estime que l'intérêt public l'exige.

J'ajoute que ce projet de loi prescrit que le gouvernement constituera des comités ministériels qui auront la responsabilité de sélectionner les projets à être approuvés par le gouvernement. Ainsi, les dépenses devront faire l'objet des autorisations habituellement requises auprès du Conseil du trésor et, le cas échéant, bien sûr, auprès du Conseil des ministres.

n(11 h 30)n

Le budget de dépenses déposé par mon collègue le président du Conseil du trésor présentera un sommaire des crédits relatifs aux dépenses qui se rapportent à l'utilisation de la réserve. Donc, un commentaire qui nous avait été fait par l'opposition et par le Vérificateur général aura été entendu, puisque, de fait, l'Assemblée nationale sera appelée à adopter les crédits requis pour permettre d'effectuer ces dépenses. C'étaient en effet, on s'en souviendra, une remarque et des commentaires qui nous avaient été faits par le Vérificateur général et aussi commentaires qui venaient de l'opposition.

Évidemment, je vous dirai que je peux comprendre qu'on ait des commentaires sur l'utilisation que nous avions faite des surplus des années passées, M. le Président, étant entendu que, malheureusement, nous n'avions pas l'habitude des surplus et qu'au contraire l'opposition, lorsqu'elle était au gouvernement, nous avait plutôt habitués à l'inverse, puisque, année après année, c'étaient plutôt des déficits auxquels on était habitués malheureusement.

Donc, il fallait prendre le temps de voir comment nous allions gérer cela en même temps que nous voulions respecter ? et ce qui est le cas maintenant et ce qui sera le cas en ce qui me concerne pour la suite des choses ? en même temps que nous voulons toujours respecter cette loi sur l'équilibre budgétaire qui prévoit que nous n'ayons pas de déficit année après année, M. le Président.

Donc, ce projet de loi prévoit une reddition de comptes annuelle à l'Assemblée nationale, à l'occasion du discours sur le budget, portant sur l'état des opérations de la réserve pour chacun des volets.

Enfin, ce projet de loi modifie la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire afin d'y apporter des ajustements et des modifications de concordance, notamment pour que les concepts de surplus budgétaire et d'équilibre budgétaire tiennent compte des sommes affectées à la réserve budgétaire et des montants que nous pourrons y puiser.

En conclusion, c'est par souci de clarté, de transparence face à la population que le gouvernement présente, pour adoption de principe, ce projet de loi qui constitue la réserve budgétaire et définit les règles quant à son utilisation. La création de cette réserve budgétaire s'inscrit dans la foulée des actions mises en oeuvre par notre gouvernement en vue d'assurer une saine gestion des finances publiques. Nous visons à répondre encore mieux aux besoins exprimés par la population tout en assurant le maintien de l'équilibre budgétaire tel que prévu à la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre des Finances, vice-première ministre et également députée de Taillon. Nous cédons maintenant la parole à la critique officielle de l'opposition en matière de finances, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme la députée.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Moi aussi, M. le Président, je veux vous souhaiter la bienvenue. Combien nous sommes tous heureux de vous savoir de retour et manifestement en pleine forme. Alors, je me réjouis de votre état de santé.

M. le Président, on a aujourd'hui devant nous un projet de loi qui a l'air anodin, un projet de loi de 19 articles et dont le titre s'intitule comme ceci: Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents.

M. le Président, ce projet de loi nous arrive un peu parce que tout à coup le gouvernement, suite à de multiples critiques qui ont été exprimées ou par l'opposition ou par le Vérificateur général à l'endroit des tendances, des façons pour ce gouvernement d'utiliser des fonds de façon discrétionnaire, arbitraire, qui ont été condamnées par le passé...

Aujourd'hui, la ministre des Finances veut essayer de nous rassurer. Elle arrive avec un projet de loi puis elle dit: Bien, je vais faire une réserve de 950 millions, et, faites-nous confiance, faites-nous vraiment confiance, nous, on va savoir, durant l'année qui vient, comment distribuer ces fonds et à quelles fins donner ces sommes de 950 millions dans l'année en cours.

M. le Président, le projet de loi est clair. La réserve, on dit ceci: Le ministre des Finances détermine ? la ministre des Finances plutôt ? la somme à l'occasion du discours du budget des excédents qui peuvent être affectés en totalité ou en partie à une réserve budgétaire. Donc, c'est la ministre des Finances qui va déterminer l'envergure de cette enveloppe-là.

Mais par ailleurs, à l'article 2: «La réserve ne peut être utilisée que pour des projets d'immobilisations et d'autres projets dont la réalisation a une durée déterminée.» Alors, voilà ce qui a l'air très concret, très, n'est-ce pas, acceptable. C'est d'une durée déterminée, donc ce ne sont pas des coûts récurrents.

Mais, M. le Président, tout de suite après: «Toutefois, lorsque le gouvernement estime que l'intérêt public l'exige, il peut autoriser des projets autres que ceux prévus au premier alinéa.»

M. le Président, qu'est-ce que c'est, ce projet de loi? C'est une caisse, c'est une caisse électorale, c'est une caisse qui s'ajoute aux autres caisses qui sont également en réserve pour pouvoir aller en élection et distribuer comme bon leur semble ces sommes d'argent pour acheter le vote des Québécois et acheter l'appui des gens au niveau des régions, au niveau des entreprises et au niveau du public.

M. le Président, c'est une porte ouverte, ce projet de loi, à l'arbitraire, au discrétionnaire, et c'est manifestement un projet de loi qui se veut un projet de loi électoraliste, parce qu'on n'a pas voulu baisser les impôts suffisamment, parce que ce gouvernement n'y croit pas, qu'il faille baisser les impôts. Rembourser la dette, il le fait modestement; baisser les impôts, il le fait modestement. Mais, quand arrive une croissance économique comme on a eue au Québec, et au Canada, et en Amérique du Nord, ce gouvernement ne veut pas, n'a pas l'intention de retourner cet argent aux contribuables québécois.

M. le Président, je ne suis pas la seule à dire ça. Ce petit magot de 950 millions, qu'on garde en réserve pour distribuer comme bon leur semble... Je vais vous citer Jean-Jacques Samson, dans Le Soleil du 30 mars 2001: «Faut-il [...] rappeler ? dit M. Jean-Jacques Samson à la ministre des Finances ? que des surplus n'existent pas en finances publiques? Lorsque des excédents sont enregistrés en fin d'exercice, ils appartiennent à ceux qui ont été trop cotisés par rapport à une performance de l'économie volontairement ? volontairement ? sous-évaluée l'année précédente et aux besoins réels de l'État, votés par le Parlement. Ils devraient alors en priorité leur être retournés ou servir à rembourser la dette.

«Or, sur un excédent officiel de 1,4 milliards de dollars pour 2000-2001, Mme Marois ? dit-il, je le cite ? affecte 500 millions au remboursement de la dette et près du double, 950 millions, pour des dépenses discrétionnaires à inventer ? à inventer. Le ministère des Finances a ainsi trouvé une nouvelle façon pour contourner la loi, après que le Vérificateur général eut dénoncé la création de fonds spéciaux pour parvenir aux mêmes fins. Mme Marois aurait pu faire beaucoup mieux en réduction d'impôts.» Ça, M. le Président, c'était Jean-Jacques Samson du Soleil, au mois de mars cette année.

M. le Président, il est clair que ce gouvernement ne croit pas aux baisses d'impôts, il croit plutôt qu'il va pouvoir, dans les mois qui viennent, attribuer comme bon lui semble ce 950 millions de dollars. N'oublions pas, M. le Président, qu'il y a encore ces sommes qui sont dans le 730 millions qu'il avait donné aux organismes sans but lucratif. Ces sommes-là ne sont toujours pas dépensées, elles sont toujours dans les coffres du gouvernement. Il y a des sommes qui ont été assignées, mais l'argent est toujours là. Le Vérificateur général a dit, là, juste avant le dépôt du budget, qu'il y avait que 10 millions qui avaient été dépensés de ce 730 millions au niveau des organismes sans but lucratif.

M. le Président, c'est donc un fonds électoral qu'on a devant nous aujourd'hui, c'est un fonds électoral dont on veut pouvoir disposer de façon discrétionnaire, arbitraire et avec des visions simplement pour se faire élire. D'ailleurs, M. le Président, je vais poursuivre, parce qu'il y a un Jean-Robert Sansfaçon, également, du Devoir, encore au mois de mars cette année: «Astuce que tout cela, et non pas prudence ? ce 950 millions, astuce. L'an dernier, on avait placé les excédents dans des organismes sans but lucratif ? le 730 millions, là, qu'on avait caché dans les organismes sans but lucratif ? aujourd'hui, cette année, on confie les 950 millions de surplus à la Caisse de dépôt et placement[...].

n(11 h 40)n

«Au chapitre des réductions d'impôts, le gouvernement reste modeste malgré son apparente générosité. Non pas que le récent budget n'annonce aucun allégement fiscal, mais, au regard de la marge de manoeuvre dont il dispose une fois prise en compte la croissance normale, voire importante des dépenses, le moins que l'on puisse dire, c'est que nous continuerons au Québec à payer plus d'impôts que les autres Canadiens, et surtout plus d'impôts que requis par les besoins normaux de l'appareil de l'État.» M. le Président, continue-t-il: «Nous ne sommes pas en année électorale, mais quand même! Pourquoi faut-il toujours attendre l'approche d'élections pour récolter les fruits de ce que nous semons?»

Mais, M. le Président, peut-être que M. Jean-Robert Sansfaçon avait cru ce gouvernement, mais peut-être que justement la ministre des Finances, et ce gouvernement, et son premier ministre, ils ont parfaitement planifié ce 950 millions de dollars là. Ça fait longtemps qu'ils le voient venir, ce 950 millions. Ça fait longtemps qu'ils voient venir le 500 millions de surplus également qu'il y avait pour rembourser la dette. Ça fait longtemps qu'on sait que le surplus de ce gouvernement serait entre 1,8 et 3 milliards de dollars. Les revenus additionnels, ils ont été de 3 milliards supplémentaires que ce qu'avait prévu l'ancien ministre des Finances en décembre dernier. Tout le monde lui disait que les surplus cette année seraient beaucoup plus élevés que le 35 millions qu'il avait prévu. Vous voyez, M. le Président, la prévoyance? Trente-cinq millions qu'il avait prévu de surplus. Or, il se retrouve avec des revenus additionnels de 3 milliards de dollars.

C'est ça qu'a fait ce gouvernement, il cache la vérité. La ministre estime et prétend aujourd'hui que c'est par souci de transparence. Je vous dis que ce 950 millions pour une campagne électorale, un fonds électoral, manifestement pour se préparer pour les élections qui s'en viennent, ce n'est pas par souci de transparence, c'est parce qu'on veut se faire réélire, qu'on veut utiliser l'argent des Québécois qu'ils ont gagné de peine et de misère, qu'on va demeurer les plus taxés en Amérique du Nord. On l'était, on l'est aujourd'hui et on va le demeurer demain encore. Nous demeurerons les plus taxés en Amérique du Nord, il n'est pas question qu'on change ça. Manifestement, ce gouvernement n'a pas l'intention de changer notre première place, notre médaille d'or quant au niveau d'impôts et de taxes que nous payons.

D'ailleurs, M. le Président, à l'occasion, le gouvernement a fait mention que le gouvernement fédéral, lui aussi, avait des réserves, que le ministre Martin avait des réserves. Mais voici ce que dit le gouvernement fédéral au sujet des réserves qu'il pourrait avoir: «La troisième étape consiste à ajouter une mesure de prudence, prudence économique, à ses prévisions financières au sein de la planification budgétaire. Il s'alloue un montant de 3 milliards de dollars au cas où les projections économiques qu'on a faites auraient été trop optimistes.» Ça, c'est une réserve. Ça, c'est une réserve qu'on garde au cas où l'environnement dans lequel on vit serait différent de l'environnement qu'on a estimé et prévu. Ça, c'est une réserve, on se dit: On va garder une marge de manoeuvre au cas où ça irait moins bien que ce qu'on avait prévu. Il peut y avoir une récession, il peut y avoir un ralentissement économique. Il peut y avoir, donc, des revenus moins importants au niveau des coffres de l'État. Et ça, donc ça veut dire qu'on est prudent.

Et, encore là, on peut déterminer à l'avance ce qu'on va faire de ces réserves parce qu'on a des choix. On peut dire: Bien, si on a été... si on a bien fait nos projections, nos prévisions pour l'année qui s'en vient, on peut déterminer à ce moment-là qu'on va retourner cet argent-là aux contribuables. C'est un choix, M. le Président. Je vais revenir à ce pourquoi c'était un choix que plusieurs, plusieurs, plusieurs économistes estiment comme étant extrêmement souhaitable pour le Québec.

On aurait pu dire également: On va rembourser plus de dette. Parce que, quand on rembourse la dette, ça nous coûte moins cher, l'intérêt sur cette dette, par la suite. Donc, on sauve pour les années à venir quant aux intérêts à payer année après année. Parce que rappelons-nous que seulement les intérêts cette année au Québec, c'est 7 milliards de dollars. Vous réalisez, M. le Président, 7 milliards de dollars? Le réseau de la santé, c'est plus de 10 milliards de dollars, c'est à peu près 14 milliards, 14 ou 16 milliards de dollars. C'est donc dire que la dette qui est 7 milliards de dollars, c'est important. C'est important. Donc, ça constitue un fardeau incroyable sur les épaules des contribuables et sur des obligations que le gouvernement doit rencontrer.

Et là, M. le Président, je pense que tous les gouvernements ont péché. Je l'ai vu plusieurs fois, tous les gouvernements ont péché. D'ailleurs, le gouvernement du Parti québécois, de 1976 à 1984, a augmenté la dette de 500 %. Alors, il n'a pas de leçon beaucoup à faire au monde. Tout le monde, au début des années quatre-vingt-dix, notamment en 1993, 1994, 1995, ont commencé à s'adresser au niveau du déficit. Pendant des années, pendant des décennies, les gouvernements ont négligé, ignoré de regarder, de considérer les déficits comme étant dangereux. On estimait que la croissance économique s'occuperait de ça et finalement qu'on pourrait s'en sortir, jusqu'au jour où ce niveau est devenu manifestement intolérable, et tous les gouvernements se sont penchés sur ça.

M. le Président, à titre de transparence... La ministre disait qu'on proposait ce projet de loi n° 11 pour s'occuper de cette réserve budgétaire à titre de transparence. Bien, je vais vous dire, moi, que 950 millions de réserve, ça ressemble remarquablement aux 841 millions de dollars qu'il y avait à Toronto, et, même elle, à titre de ministre de la Santé, elle l'ignorait. Elle l'avait dit le lendemain matin, elle n'était pas au courant qu'il y avait cet argent-là à Toronto.

Rappelons-nous, c'est de l'argent que l'ancien ministre des Finances, l'actuel premier ministre, avait laissé là-bas en catimini, en cachette, jusqu'au jour où, comme par hasard, c'est sorti dans les journaux. Puis là ça a créé une crise. Puis là tout le monde s'est rendu compte qu'en dépit du fait qu'on faisait souffrir, jour après jour ? jour après jour ? des gens au niveau des services de santé, en dépit du fait, M. le Président, qu'on forçait les Québécois à déménager à Plattsburgh pour aller se faire soigner, on apprenait qu'il y avait une cagnotte de 841 millions de dollars à Toronto, précisément pour les services de santé. C'était pour ça, le 841 millions de dollars. La ministre était alors ministre de la Santé; elle ne le savait pas.

M. le Président, l'année suivante, après l'histoire d'horreur du 841 millions de dollars, arrive une autre histoire d'horreur que découvre le Vérificateur général. C'était le 730 millions à des organismes sans but lucratif. Comme par hasard, tout à coup, l'avant-veille de la fin de l'année, on crée des organismes sans but lucratif, on nomme des présidents d'organisme sans but lucratif, on invente des numéros de téléphone, il n'y a pas d'adresse les trois quarts du temps, et on distribue 730 millions de dollars.

Sept cent trente millions, là, on oublie combien c'est beaucoup d'argent. Vous réalisez, M. le Président, 730 millions de dollars, ce n'est pas loin de 1 milliard de dollars. C'est beaucoup d'argent. Ce sont des sommes fabuleuses. Alors là on a vite, vite donné... Il fallait se débarrasser de ces sommes d'argent là le plus rapidement possible. Ça nous chauffait les doigts. Parce qu'il fallait surtout pas retourner l'argent aux contribuables québécois, il ne fallait surtout pas leur redonner ces sommes d'argent là. Au contraire, il fallait s'assurer qu'on les dépense. On a amené des gens, on les a invités à créer des organismes.

n(11 h 50)n

Un an plus tard, le Vérificateur général dit: Des 730 millions, 10 millions ont été dépensés. Le ministère des Finances prétend aujourd'hui que la moitié des sommes ont été dépensées. M. le Président, je les mets au défi. Le Vérificateur général estime que, non, les sommes ont été assignées, les sommes ont été données. On a écrit une lettre, on a dit à quelqu'un: Vous allez recevoir 50 millions de dollars. Mais entre recevoir une lettre qui vous donne 50 millions de dollars et l'argent que vous avez dépensé, il y a une marge. Et vous vous imaginez ce que ça invite, ça, M. le Président, de recevoir, des organismes sans but lucratif qui vivent ordinairement de façon extrêmement pauvre, de se voir donner 90, 50, 120 millions de dollars comme ça? Ça veut dire qu'il faut dépenser. Il faut aller louer des beaux bureaux puis il faut s'organiser vite, puis il faut le dépenser, parce que là ça brûle, ça chauffe, c'est connu. Ça, M. le Président, ce sont des incitatifs à gaspiller l'argent des Québécois, gaspiller l'argent que les contribuables ont donné à ce gouvernement. On va leur chercher l'argent dans leurs poches, on les force à payer des taxes, on les force à payer des impôts.

Vous savez quoi? Les contribuables sont d'accord, M. le Président, quand on leur donne des services. Ils demandent des services, les citoyens du Québec. Vous avez été malade, M. le Président, vous savez comment c'est important, des services de santé. Il s'agit d'être malade, ou d'avoir un parent malade, ou un enfant malade, ou un ami malade pour savoir combien c'est important. Et ça, les Québécois, ils en veulent, ils croient dans ça, ils veulent avoir des services de santé. Il y a des choses pour lesquelles on est prêt à payer, puis tous les Québécois sont prêts à payer pour des bons services de santé, tous les sondages le disent. Tous les sondages le disent. Il y a un endroit, là, où tout le monde est unanime: on veut avoir de bons services de santé. Quand on est malade, on le sait, comment est-ce qu'il n'y a rien, rien, rien de plus important que la santé. Je suis sûre qu'aujourd'hui vous êtes parfaitement d'accord avec moi, il n'y a rien de plus important que la santé, il n'y a pas un dollar, il n'y a pas une richesse, il n'y a rien.

Alors, M. le Président, quand on voit le gouvernement tout à coup dilapider des fonds publics, comme le 730 millions de dollars, je pense que, manifestement, ce n'est pas par souci de transparence. La ministre des Finances, elle n'a pas voulu baisser les impôts du 950 millions, elle a voulu se garder cette réserve encore. Le gouvernement s'est dit: Ah! moi, je ne vais pas retourner cet argent-là aux contribuables, ils ont payé, ils sont les plus taxés en Amérique du Nord. Et d'ailleurs, vous vous rappelez, M. le Président, vous avez dû remarquer, dès qu'on mentionne ça, le premier ministre se lève puis il dit: Oui, je suis d'accord, je l'ai dit nombre de fois, nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. Encore faudrait-il qu'il fasse quelque chose. Encore faut-il qu'il fasse quelque chose. Quand il y a une possibilité comme 1 milliard de dollars de réserve, là, on peut faire quelque chose avec ça, on peut les diminuer encore, les impôts, davantage. C'est possible, là, c'est une alternative, c'est une possibilité.

Alors, le gouvernement, non, a décidé qu'on va se garder cette réserve, notre petite cagnotte électorale: Si on s'en va en élection, on aura le 950 millions, on aura le reste de ce qui reste des 730 millions de dollars qui n'ont pas été dépensés, on aura des revenus additionnels qu'on a sous-estimés, et on peut s'en aller en campagne électorale avec une petite somme d'à peu près, pas loin de 3 milliards de dollars à dépenser.

Je suis sûre que les députés sont bien contents du gouvernement. Ils vont pouvoir aller faire des annonces dans leur comté puis faire un petit cadeau ici et là. Parce que, manifestement, vous savez qu'en période d'élection, tout à coup, les gouvernements trouvent de l'argent, les gouvernements trouvent de l'argent et font des promesses. Et alors là, M. le Président, la tentation justement de dilapider les fonds publics juste avant une période électorale, la tentation va être grande d'aller acheter les Québécois.

Sauf que les Québécois ne sont pas dupes, parce que c'est eux autres qui l'ont payé, ce 950 millions, c'est eux autres qui l'ont pris de leurs poches. Et on le sait, M. le Président, que tout à coup, là... Moi, quand je vais dans mon comté, quand je parle à des gens, une des choses qui reviennent constamment, c'est qu'on est trop taxé, et on paie trop d'impôts, et on paie trop de taxes. Ça, là, ça revient constamment. Alors, quand on dit qu'on est les plus taxés en Amérique du Nord, c'est pas théorique, là, les gens le voient sur leur chèque de paie, les gens le sentent quotidiennement. Les gens sentent qu'ils sont étouffés, qu'ils n'ont plus d'espace pour respirer, et l'argent pour lequel ils travaillent quotidiennement, du matin au soir, ils ont l'impression qu'il est mal utilisé.

Et, M. le Président, je vais vous dire, ils ont raison. Quand on voit un gouvernement qui décide tout à coup de garder une réserve de près de 1 milliard de dollars, 950 millions de dollars... Fallait le faire, 950 millions, c'est comme si on n'était pas capable de faire 1 milliard de dollars, quand on est rendu qu'on gère un gère un budget de cette envergure-là. On a fait 950 millions parce qu'on ne voulait pas que ça ait l'air de 1 milliard. Parce que le surplus, là, manifestement... Ils vont devoir répondre de 950 millions, mais manifestement c'est 1 milliard de dollars qu'il y avait en surplus, qu'ils ont trop perçu des contribuables québécois. C'est tout simplement ça, ils sont allés chercher trop d'argent. Ils avaient fait des projections, des prévisions, ils avaient prévu des dépenses, puis, à la fin, ils se sont retrouvés avec des surplus. Puis ces surplus-là, bien ils ont dit: Bien, on va les garder, on va les accumuler puis on va s'assurer que... quand on en aura besoin, on va les utiliser.

D'ailleurs, M. le Président, dans le projet de loi également, il est clairement dit, à l'article 6: «Le ministre ? c'est-à-dire la ministre ? peut également, à l'occasion du discours sur le budget, réduire les montants affectés à l'un des volets de la réserve des sommes qui n'ont pas été allouées à un projet. Ces sommes devront être allouées de nouveau à d'autres volets.»

Encore là, le gouvernement, là, s'il ne l'a pas dépensé, le 950 millions de dollars ou le 1 milliard de dollars, il n'a pas l'intention d'aller rembourser la dette, il n'a pas l'intention d'aller baisser les impôts, il dit: Là, je vais le garder, puis là je vais l'allouer à d'autres choses. Donc, on va se retrouver avec un surplus de 841 millions de dollars qu'il y avait à Toronto, le 730 millions, qu'il n'a encore pas dépensé, des organismes sans but lucratif, le 950 millions en réserve qu'on n'aura peut-être pas dépensé, puis on va additionner ça tout ensemble, puis ça va nous faire encore... on va pouvoir tout à coup... jusqu'à ce qu'on en ait besoin. M. le Président, il est clair que ce gouvernement ne croit pas dans les baisses d'impôts.

Moi, j'aimerais, M. le Président, aujourd'hui également vous parler de l'image de social-démocrate que le premier ministre a, encore récemment dans les médias... a essayé de nous convaincre de ses prétentions d'être un social-démocrate. M. le Président, moi, là, si c'est d'être social-démocrate que de ne pas indexer les prestations des assistés sociaux pendant quatre ans, bien je ne sais pas où est-ce que je me situe. S'il faut inclure dans le budget une telle provision, moi, je ne sais pas si ça s'appelle de la social-démocratie. Il me semble, M. le Président, qu'il fut un temps où indexer les prestations des assistés sociaux, c'était automatique. Ça se faisait tous les ans. Et d'ailleurs il fut un temps où ça se faisait trois fois ou quatre fois par année, parce qu'il y avait plus d'inflation. Alors, M. le Président, si c'est ça d'être social-démocrate...

Moi, je vais vous le dire, M. le Président, si j'étais le premier ministre, je serais un peu plus prudent. Si c'est d'être social-démocrate de se garder une réserve de 950 millions de dollars puis d'arriver avec une loi antiservices, c'est-à-dire d'empêcher des citoyens de recevoir des services de santé, comme on a été témoins récemment vis-à-vis des opérations en cardiologie, la chirurgie cardiaque, M. le Président, s'il faut attendre... Il y a 1 000 personnes qui attendent. Moi, j'ai un patient dans mon comté, ça fait neuf mois... Apparemment, le médecin, quand il l'a vu, c'était urgent. Ça fait neuf mois qu'il attend pour une intervention en chirurgie cardiaque. Bien, si c'est ça d'être social-démocrate, ce n'est pas le cours de sciences politiques que j'ai eu.

M. le Président, si c'est d'être social-démocrate également d'augmenter les subventions aux entreprises, les richissimes de ce monde, des entreprises qui font des millions de profits, moi, je vous dis, je ne sais pas qu'est-ce que c'est que d'être de droite, je n'ai pas vu ça, là, puisque le... Le premier ministre aime ça utiliser cette terminologie des années cinquante et soixante, la droite et la gauche. Je ne sais pas qu'est-ce que c'est.

n(12 heures)n

M. le Président, il est clair que ce gouvernement, il a fait des choix. Il a fait des choix de venir en aide aux entreprises. Il a fait des choix pour donner, accorder des subventions à des entreprises qui déménagent pour s'en aller dans un périmètre particulier. Ce gouvernement a fait le choix également de subventionner en crédits d'impôt pour 1 milliard additionnel cette année. Ça a passé de 2 milliards à 3 milliards, vous imaginez, les crédits d'impôt aux entreprises. M. le Président, c'est ce gouvernement également qui donne des subventions encore à une entreprise, un organisme, Métaforia. On a donné 27 millions de dollars en tout à cette entreprise. Vous trouvez ça normal, vous? C'est un endroit, là...

Moi, je suis allée voir Métaforia, parce que, comme je critiquais, j'ai dit: Je vais aller voir ce que ça a l'air. C'est un jeu virtuel de 15 minutes, et, après ça, savez-vous ce que c'est, M. le Président? Des arcades, des dizaines d'arcades de machines de toutes sortes. C'est ça, Métaforia. Je vous invite à tous aller voir, vous allez être séduits de voir que le gouvernement, votre gouvernement, a décidé que ça valait 27 millions de dollars. Je vous invite, c'est intéressant, c'est...

Une voix: Formateur.

Mme Jérôme-Forget: ...formateur, exactement, pour la jeunesse. Alors, on a décidé de donner comme ça 27 millions de dollars à Métaforia.

Là, on vient d'accorder une subvention également pour la construction de bureaux dans la Tour de Montréal, la tour du Stade olympique, où il manque de fenêtres, où les ascenseurs sont bruyants, où apparemment il y a une courbe, puis ça fait des années que les ingénieurs se posent la question comment régler le problème de la tour olympique. C'est pas parce que c'est nouveau, là. Il y a du monde qui a regardé ça avant aujourd'hui. Ça fait longtemps que les gens se penchent sur le problème. Ça fait longtemps. Moi, j'ai parlé à toutes les firmes d'ingénieurs, ou à peu près, pour savoir si c'était faisable, si c'était logique. M. le Président, non. Là, on va le faire en donnant à une entreprise américaine une subvention de 20 millions de dollars en plus, n'est-ce pas, de ce qu'Investissement-Québec a mis dans le projet.

M. le Président, ça, là, ça fait partie de l'image de social-démocrate que veut se donner ce gouvernement, que se targue d'avoir le premier ministre, d'être le champion de la social-démocratie. Je vais vous dire, je pense que, dans l'histoire des gouvernements, on n'a jamais vu un gouvernement être aussi peu social-démocrate. Je pense que ça n'a pas existé. Je pense que de ne pas indexer les prestations aux assistés sociaux, de couper de façon aussi arbitraire dans les services de santé, de couper en éducation comme on l'a fait, d'axer toutes ses ressources à des subventions à des entreprises... Là, je pense qu'ils ont le championnat d'un gouvernement qui est loin de la social-démocratie, qui se situe à Gengis Khan beaucoup plus qu'à la social-démocratie.

M. le Président, revenons à ce projet de loi, puisque, avec des réserves, des surplus comme ça, c'est important de réfléchir à nos enfants. C'est important de penser que, quand on a des surplus, comme on a été négligent dans le passé et qu'on a dépensé plus que ce qu'on recevait, il faudrait, à un certain moment donné, penser à nos enfants. Est-ce qu'on est en train de les endetter de façon qu'ils ne puissent pas se sortir de cette...

M. Gautrin: Outrancière.

Mme Jérôme-Forget: Outrancière, exactement. Merci, M. le député de Verdun, cher collègue.

M. le Président, il y a des impératifs budgétaires, et un des impératifs sur lesquels il faut se pencher, ce sont les transferts intergénérationnels. Les transferts intergénérationnels, c'est la dette qu'on laisse à nos enfants, aux générations futures par rapport à ce que, nous, nous avons comme utilisé, ce que nous avons dépensé. Il y a plusieurs études qui ont été faites sur ça, et là où je suis très heureuse, c'est que l'Institut où j'assumais la présidence avant de venir ici, l'IRPP, l'Institut de recherche en politiques publiques, a fait du travail sur ça, les transferts intergénérationnels. Le grand gourou de ce domaine-là, il s'appelle Kotlikoff, et il s'est rendu compte qu'il fallait non seulement faire les calculs comme on les fait aujourd'hui au niveau d'un déficit et au niveau de la dette, mais qu'il faudrait essayer, par des façons, d'estimer qui reçoit quoi, qui va recevoir quoi au niveau des services. Autrement dit, est-ce qu'aujourd'hui encore on est en train de recevoir trop de services ou on n'est pas en train de recevoir trop de services?

Alors, il fut un temps, lorsque les gouvernements faisaient des déficits, M. le Président, où le transfert intergénérationnel était très important. Aujourd'hui, on dit non. Donc, il faut par ailleurs se pencher sur comment la société va évoluer. Prenons, par exemple, au niveau des pensions. Je vois le député de Verdun qui est un expert au niveau des pensions. Qu'est-ce qui va se passer au niveau des pensions? Au niveau du transfert intergénérationnel, c'est que vous avez une cohorte de gens entre 20 et 60 ans qui travaillent, et vous avez des gens qui ne sont pas en âge de travailler, et vous avez des gens qui sont à leur retraite. Donc, vous avez les deux bouts de l'âge, de la courbe d'âge de gens qui sont, je dirais, dépendants. Or, qu'est-ce qui se passe? Ce qui se passe, c'est que les plus de 60 ans sont en croissance. Non seulement les plus de 60 ans sont en croissance, mais de plus en plus on invite les gens, dont ce gouvernement, à prendre des retraites anticipées à 55 ans. Non seulement on prend des retraites anticipées puis il y a plus de gens qui vont avoir 60 ans, imaginez-vous donc qu'on va vivre plus vieux.

On va vivre, nous, aujourd'hui, les femmes qui vivent aujourd'hui peuvent espérer vivre jusqu'à l'âge de 88 ans et les hommes jusqu'à l'âge de 81 ans. C'est donc dire qu'il y a des facteurs importants, au niveau du transfert intergénérationnel, qui font qu'on va avoir un bassin beaucoup plus petit de gens qui vont travailler et de gens qui vont pouvoir, n'est-ce pas, profiter et ne pas travailler, aller ou aux études ou être à la retraite, alors d'où la nécessité de se pencher sur ce volet-là.

Il y a un autre impératif, n'est-ce pas, un impératif quand on fait un budget, c'est le fardeau fiscal. Donc, on a le transfert intergénérationnel, ce qu'on laisse au niveau de la dette, et on a un autre impératif, ce qu'on paie au niveau des impôts, M. le Président. Alors, au niveau des impôts, il est clair que ? on l'a dit nombre de fois ? les Québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord. Le premier ministre également chaque fois se lève, lui aussi, il est d'accord avec ça. Il avait une occasion, cette fois-ci, le 950 millions de dollars. Il avait une occasion rêvée de diminuer les impôts. C'était là un choix qu'il aurait pu faire. Il ne l'a pas fait, si bien qu'aujourd'hui, comme hier, comme demain, nous demeurons les plus taxés en Amérique du Nord.

Qu'est-ce que ça fait, ça, M. le Président? Quel est l'impact de ne pas réduire les impôts? Je voudrais que ce soit bien clair. Je vais vous citer encore un article, des points d'un article écrit par un ami conjoint, Pierre Fortin: «La fiscalité doit être allégée.» Je sais que ça fatigue le monde d'entendre Pierre Fortin, là, parce qu'il est tellement respecté de part et d'autre que, quand il écrit quelque chose... Mais cet homme-là a son franc parler et il ne doit rien à personne. À personne. Alors, il écrit ce qu'il pense et il l'écrit ouvertement et de façon que tout le monde peut comprendre.

n(12 h 10)n

Alors, qu'est-ce qu'il dit, M. le Président? Le titre de son article: Notre fiscalité excessive réduit l'intérêt des entreprises à investir ici. Il dit encore: «S'il y a une évolution fondamentale que doit prendre le modèle québécois ? c'est pas le Parti libéral qui parle, là, c'est Pierre Fortin ? sur le plan économique, c'est de se détacher peu à peu de la vieille culture de la protection et de la dépendance qui marqua notre adolescence économique dans les quatre décennies qui suivirent la Seconde Guerre mondiale.» Alors, qu'est-ce qu'il dit encore, notre ami Pierre Fortin? «Les Québécois ont payé 42 % de leur revenu intérieur brut en impôts et taxes aux trois ordres du gouvernement. Les Ontariens, 37 %.» Parce qu'on paie tous, au niveau fédéral, la même chose, là, qu'on soit au Québec, en Ontario ou ailleurs. Or, qu'est-ce que ça veut dire, ça? C'est que, le Québec étant plus taxé que ses voisins et ayant une opportunité de 1 milliard de dollars pour baisser les taxes ? c'était du trop-perçu, après tout, c'était de l'argent qu'on était allé chercher en trop dans les poches des contribuables ? ce gouvernement a décidé de ne pas baisser les impôts, de garder sa petite cagnotte cachée, de se garder un petit fonds de réserve comme ça de 950 millions pour être bien sûr qu'en temps opportun, en période électorale, il sera capable de faire appel à ce 950 millions de dollars et de le distribuer comme bon lui semble.

Au fait, la ministre prétend que ce sera très serré, qu'il y aura un comité formé de la ministre des Finances, du président du Conseil du trésor et de tout ministre susceptible d'être appelé à pouvoir, n'est-ce pas, utiliser ces fonds de 950 millions. Ce sera un petit comité de trois personnes dirigé par le maestro, le premier ministre, qui va déterminer où vont ces sommes d'argent et assigner comme bon lui semble ces sommes qu'il voudra, n'est-ce pas, distribuer en période électorale.

Alors, qu'on mentionne dans un projet de loi, n'est-ce pas, la création d'un comité, ça aussi, il fallait le faire. C'est comme si le gouvernement n'était pas capable de créer des comités sans l'inscrire dans un projet de loi. Franchement, M. le Président, le gouvernement peut décider des sommes d'argent qu'il va dépenser, il y a un ministre, puis il y a un conseil du trésor, puis il y a un premier ministre. Ces gens-là sont censés décider. Est-ce qu'on écrit dans un projet de loi comment ça va fonctionner, qu'on va créer un comité à trois, présidé, n'est-ce pas, par la ministre des Finances et par le Conseil du trésor? Voyons, ça ne fait pas très sérieux. Alors, pourquoi baisser les impôts? Parce que tout le monde est d'accord, y compris Pierre Fortin, y compris l'Association des économistes du Québec, y compris plusieurs, plusieurs intervenants de la situation économique du Québec, qu'il faut baisser les impôts.

M. le Président, je vais vous citer également Michel C. Auger, du Journal de Québec, également au mois de mars cette année: «Le gouvernement du Québec a de l'argent, tellement qu'il a été capable, dès le milieu de son mandat, donc avant des échéances électorales régulières, d'accélérer les baisses d'impôts, de remettre un demi-milliard sur la dette et de mettre de l'argent de côté. Ces réserves ont un air on ne peut plus électoral. En conférence de presse, Mme Marois ne cachait pas que ces sommes en réserve serviraient surtout à des projets spécifiques et non récurrents, ce qui se traduit souvent par des projets populaires et électoralement rentables.» Alors là c'est Michel C. Auger, c'est pas le Parti libéral qui parle. Par ce projet de loi, on n'a pas voulu baisser les impôts. Donc, on va demeurer les plus taxés en Amérique du Nord, donc on va demeurer les champions ? la médaille d'or ? au niveau des taxes, et puis, bien, ça va continuer, ça va être la même rengaine qui va continuer, sauf que, comme le 841 millions, comme le 730 millions, comme le 950 millions, on va se garder une belle petite réserve. En période électorale, on aura près de 3 milliards de dollars et donc on va garder ces sommes d'argent pour être bien sûr qu'on y peut faire appel en cas de besoin. Et, en cas de besoin, ça, ça veut dire en période électorale. En cas de besoin, c'est ça.

M. le Président, notre fiscalité excessive a des impacts majeurs sur la société. Encore là, je cite Pierre Fortin: «Notre fiscalité excessive rend le Québec globalement moins concurrentiel. Elle réduit l'intérêt des entreprises d'ici et d'ailleurs à investir au Québec. Elle pourrait, à la longue, entraîner l'émigration d'une fraction importante de nos meilleurs cerveaux.» Ça, c'était Pierre Fortin. C'était pas la députée de Marguerite-Bourgeoys, là. Je citais un homme que les Québécois et en particulier le gouvernement... Ils aiment bien faire appel à Pierre Fortin et le citer.

M. le Président, encore Pierre Fortin: «Et enfin, même si les chiffres globaux à cet effet ne sont pas encore concluants, il ne faut pas sous-estimer la possibilité que la fiscalité excessive du Québec entraîne, à la longue, un mouvement important d'émigration des jeunes Québécois, surtout des jeunes diplômés universitaires, un exode des cerveaux. Ça ne sert pas à grand-chose d'investir autant que nous le faisons en éducation si nous sommes incapables de convaincre une fraction importante de nos meilleurs diplômés de rester au Québec.» Ça, c'est Pierre Fortin qui parlait. Il en dit comme ça, là, constamment, l'importance d'assurer la croissance économique.

Si c'était si bon, la façon dont on fait, si on avait tant de succès, M. le Président, il est clair qu'on ne serait pas les cinquante-septièmes sur 60 au niveau de vie. Ça fait sept ans que ce gouvernement est au pouvoir. Si c'était si efficace, il est clair qu'on n'aurait pas les résultats qu'on a aujourd'hui. Et là non seulement on est cinquante-septièmes sur 61... Encore là, c'est pas moi qui le dis, c'étaient des données de Statistique Canada. Encore là, notre ami Pierre Fortin, il l'a cité, ça.

M. le Président, encore là, on est neuvièmes sur 10 au niveau des épargnes. Je m'excuse, là, on peut bien prétendre entre nous que ça va très bien, ici, dans l'Assemblée nationale, puis se réjouir que ça va très bien, mais, quand on sort de chez nous et qu'on s'en va ailleurs, on est capable de le voir. Et, quand on lit des analyses, on est capable de voir quel est l'impact des politiques de ce gouvernement et de son hésitation à baisser les impôts alors que la croissance est là, alors qu'on a des voisins qui l'ont fait. Je parle pas seulement des Ontariens, là. Tous nos voisins mitoyens aux États-Unis, tous les gens se sont penchés vers cette approche-là.

M. le Président, baisser les impôts, ça a été démontré par plusieurs personnes. Il y a eu, bien sûr, n'est-ce pas, Pierre Fortin qui en a parlé, puis il y a eu plusieurs études qui ont été faites à cet égard. Et d'ailleurs très souvent on fait appel à la Suède, la Suède qui a décidé également de baisser ses impôts de façon importante, parce que voilà un exemple d'un pays qui avait tellement taxé qu'il avait un taux de chômage qui était parti de 3 % à 16 %. Parce qu'on aime ça, invoquer la Suède, parfois. Or, il y a eu une étude qui a été faite, démontrant les effets pervers d'un système fiscal trop lourd, un peu comme au Québec, parce que, nous, on est encore à un taux fiscal extrêmement élevé. Les contribuables québécois le savent, ils le sentent. Or, la Suède, suite à cette étude de Lindbeck... Lindbeck, c'est un grand penseur. C'est un des hommes justement qui donnent le prix Nobel en économie. C'est celui qui donne le prix Nobel en économie. Lindbeck, c'est lui qui est derrière la sélection du meilleur économiste dans le monde. Or, Lindbeck, qu'est-ce qu'il a dit à son gouvernement en Suède? Si vous continuez comme ça, c'est la faillite totale. C'est la faillite. Alors, qu'est-ce qu'il a proposé? Qu'on baisse les impôts, et c'est ça que la Suède a fait, elle a baissé ses impôts. Elle les a baissés de façon extrêmement importante.

Alors, M. le Président, ce projet de loi, la ministre prétend que c'est un projet de loi pour être plus transparent. Moi, je vous dis que c'est un fonds de réserve électoral. C'est un fonds de réserve qui est là au cas où nous en aurions besoin. Et, manifestement, nous en aurons besoin d'ici un an probablement. On va ajouter ça aux autres sommes qui sont pas encore dépensées, à la fâcheuse tendance de ce gouvernement de sous-estimer les revenus, à la fâcheuse tendance de ce gouvernement de sous-estimer les transferts du gouvernement fédéral. Nous estimons que ce gouvernement a une cagnotte d'à peu près 3 milliards de dollars.

n(12 h 20)n

Alors, M. le Président, voyant tout ça, vous imaginez que nous estimons, quant à nous, que le gouvernement avait un choix à faire. Il avait trop perçu d'argent, il est allé chercher trop d'argent dans les poches des contribuables. Je pense qu'un gouvernement qui va trop chercher d'argent dans les poches des contribuables a le devoir, a l'obligation de retourner cet argent qu'il est allé trop percevoir dans les poches des contribuables. Je pense que je ne suis pas la seule à dire ça, quand on s'est trompé, on doit retourner l'argent à celui qui nous a trop payés. Et donc, voyant la façon avec laquelle ce gouvernement se comporte souvent quand il a des réserves, voyant la culture de ce gouvernement, tout à coup, de dilapider à la dernière minute les fonds publics, quand on se rappelle...

Il ne faut pas devenir sénile tout à coup, M. le Président. Il ne faut pas devenir sénile. Il faut se rappeler le 730 millions de l'avant-veille, de nominations, d'adresses qui n'existaient pas, de téléphones qui n'étaient pas branchés, de bureaux qui n'existaient pas. Je veux dire, il faut s'en rappeler, de ça, c'est pas nouveau. Moi, je pense que ce gouvernement aurait dû se pencher sur des baisses d'impôts. Ce gouvernement aurait dû retourner l'argent qu'il a trop pris dans les poches des contribuables et retourner cet argent aux contribuables qui sont, rappelons-nous, les plus taxés en Amérique du Nord. Ils l'étaient hier, ils le sont aujourd'hui, comme je le disais, ils vont l'être demain. Alors, c'est pour cette raison que, manifestement, nous allons voter contre le principe de ce projet de loi, parce que nous estimons que ce projet de loi est manifestement arbitraire. Il est discrétionnaire. M. le Président, cette réserve est une cagnotte électorale, et on ne peut pas l'endosser.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, je vais céder la parole au vice-président de la commission des institutions, porte-parole de l'opposition en matière de recherche, de science et de technologie et responsable des dossiers RREGOP et régime de rentes. M. le député de Verdun, vous avez la parole.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Comme l'a rappelé avec beaucoup de brio l'orateur précédent, la députée de Marguerite-Bourgeoys, il est important de réaliser que, lorsqu'un gouvernement fait un surplus, c'est qu'il a perçu plus d'impôts qu'il n'en avait besoin pour payer les services qu'il a offerts à la population. Je m'explique. Lorsqu'un gouvernement fait un surplus, c'est parce qu'il a été chercher plus dans vos poches que la quantité, la valeur des services qu'il vous a donnés. Alors, actuellement, on est en train de se poser la question: Lorsqu'on a été chercher plus d'argent dans vos poches que ce qu'on vous a donné, est-ce que vous ne pensez pas qu'il serait juste et naturel de vous retourner ce qu'on a été chercher en trop pour la qualité des services qu'on vous a donnés? Et ça, ça s'appelle une réduction des taxes et des impôts. C'est ce que nous préconisons, de ce côté-ci de la Chambre.

On l'a rappelé maintes fois, les Québécois et les Québécoises sont les plus taxés actuellement en Amérique du Nord ? et on pourra y revenir ? parce qu'on a eu une tendance parfois à trop dépenser mais surtout une tendance à trop dépenser, dans les années quatre-vingt, qui nous a créé une dette énorme et sur laquelle le service de la dette a été très lourd à porter. Je voudrais profiter de l'occasion, M. le Président, puisque j'ai ici la parole, pour répondre à ce que le premier ministre essaie de nous dire la majeure partie du temps. Avant 1985, donc au moment où le Parti québécois était au pouvoir, c'est-à-dire dans les années 1980 à 1985, les dépenses du gouvernement, c'est-à-dire les services qui étaient offerts au gouvernement, dépassaient largement, largement ce qu'on recevait comme impôts. Après 1985 ? et ça, c'est important de le voir ? à partir du moment où Robert Bourassa est arrivé au pouvoir, les dépenses de services qui étaient offerts par le gouvernement étaient inférieures à ce qui était perçu comme impôts. Vous allez me dire: Mais pourquoi il y avait quand même un déficit? C'est parce qu'il y avait le service de la dette qu'il fallait assumer, service de la dette qui avait été accumulé dans les années précédentes.

Je mets au défi actuellement chacun des parlementaires péquistes de me démontrer le contraire, et en particulier le premier ministre s'il a le courage de voir la réalité des chiffres. À partir de 1985, à partir du moment où Robert Bourassa est arrivé au pouvoir, la gestion des finances publiques a été corrigée, c'est-à-dire qu'on a commencé à dépenser, en termes de services offerts à la population, moins que ce qui était perçu comme impôts, et la différence, le fait qu'il y avait quand même un déficit, c'est qu'on était obligé d'assumer le service d'une dette qui avait été accumulé par les gens qui étaient venus avant nous, et en particulier par M. Parizeau au moment où il était aux Finances, et ça, M. le Président, c'est absolument limpide. Il s'agit seulement de regarder les chiffres et de voir la réalité des chiffres.

Je voulais revenir, M. le Président, sur le projet de loi n° 11 qui est devant nous. J'ai rarement vu, comme parlementaire, un projet de loi qui essaie d'occulter, de cacher la gestion des fonds publics plus que ce projet de loi. On a, dans notre parlementarisme, et vous le savez parfaitement, une période, laquelle on appelle la période des crédits, dans laquelle le gouvernement propose aux parlementaires la façon dont il compte dépenser les fonds qu'il a perçus dans vos poches par les impôts, et nous avons un débat, nous discutons de la manière dont vont être affectées ces sommes. Actuellement, on a un changement complet. On crée des réserves qu'on n'affecte pas. On crée des réserves, M. le Président, qui n'ont pas d'affectation, si ce n'est qu'être affectées à tel ou tel ministère. Je vais vous donner un exemple qui était dans le champ sur lequel je suis critique de l'opposition, qui est le domaine de la recherche, de la science et de la technologie. On a créé une réserve de 50 millions de dollars. Je reviendrai après sur les tendances, sur ce qu'on a appelé les OSBL, qui était la tendance l'année précédente. Cette année, on oublie les OSBL, qui n'ont d'ailleurs pas dépensé leur argent. On en avait créé deux. Dans le domaine de la recherche, de la science et de la technologie, on avait créé Innovation Québec, on avait créé Valorisation de la recherche où, bien sûr, on leur avait accordé, à chacun, un 50 millions. Bien sûr, il y a eu des engagements, mais on n'a pas dépensé dans l'année budgétaire la quantité d'argent qui avait été réellement affectée. Mais là on parlait de l'année budgétaire précédente.

Cette année, voici, M. le Président, la manière dont on a fonctionné. On a créé une réserve de 50 millions, et, je vais vous dire, on ne dit pas à quoi on va l'utiliser. Alors, chacun pense qu'il aura une chance probablement d'avoir un petit morceau de ce 50 millions. Il est clair qu'on ne peut pas financer tout ce qu'on annonce qu'on financera éventuellement avec la fameuse réserve de 50 millions, mais tout le monde espère qu'il sera le gagnant. Donc, c'est une manière absolument extraordinaire de faire croire à chacun que ses besoins vont être satisfaits, mais dans laquelle on n'affecte pas, à l'heure actuelle, le fameux 50 millions.

Je me permets de vous rappeler ce à quoi devrait être utilisée cette réserve. Elle devrait être utilisée, M. le Président, à permettre au gouvernement de mettre en oeuvre la politique de recherche qu'il avait édictée au mois de janvier. Alors, voici ce qu'il doit faire avec ce fameux 50 millions. Il doit, en premier lieu, soutenir les frais indirects de la recherche. Je me permets de vous rappeler que déjà, simplement, si vous vouliez soutenir les frais indirects de recherche dans l'ensemble de nos universités du Québec, vous dépasseriez l'enveloppe de 50 millions. Alors, les universités se disent satisfaites, probablement qu'on va avoir le gros morceau de ce fameux 50 millions.

n(12 h 30)n

Deuxième élément, M. le Président. On dit au fonds de recherche, c'est-à-dire le fonds FCAR, le Fonds de recherche en santé du Québec, le FRSQ, et le CQRS, le Conseil québécois de recherche en science sociale: Là, vous allez, vous, être ceux qui vont avoir le gros morceau parce que vous êtes les porteurs en quelque sorte de la redistribution des fonds qui sont alloués à la recherche. Chacun est heureux. Ils vont dire: Bon, c'est nous qui allons avoir, bénéficier de ce fameux 50 millions.

J'ai pas terminé. Il y a un autre problème qui a été identifié dans la politique de recherche pour laquelle le gouvernement ne paie à peu près rien, qui est le phénomène qu'il faut soutenir l'innovation en région. Une manière de soutenir l'innovation en région, c'est de soutenir ce qu'on appelle les centres collégiaux de transfert technologique ? dans le langage des acronymes, c'est les CCTT ? qui permettent de rendre disponible aux petites et moyennes entreprises en région l'expertise qu'il y a dans les programmes techniques des collèges qui souvent sont répartis sur l'ensemble des régions. Les CCTT ont été terriblement... ont coupé sur le plan financier ces cinq dernières années, au point que la majeure partie d'entre eux survivent avec beaucoup de difficultés, M. le Président. Mais à l'heure actuelle ils voient tous la possibilité, avec ce 50 millions, de dire: Ah! enfin, on aura une chance de pouvoir aller de l'avant. Je me permets de dire aussi que les centres de veille technologique et les centres de liaison et de transfert, qui eux aussi ont eu d'importantes compressions les années précédentes, pensent que c'est à eux que va évidemment revenir la majeure partie de ce pactole.

Alors, vous comprenez bien comment fonctionne ce gouvernement, M. le Président. Il va dire: Je mets ça en réserve, je soustrais au débat public l'attribution du montant de la réserve. On dit simplement: Bien, n'ayez crainte, il y aura une réserve, et on pourra éventuellement soutenir un certain nombre de projets. Dans le milieu, chacun pense qu'il a le meilleur projet au monde et il pense évidemment que c'est son projet qui va être soutenu, M. le Président. Mais on soustrait au débat public, au principe dans lequel les parlementaires doivent pouvoir se prononcer sur l'attribution des fonds, l'attribution des fonds de la réserve. Et j'ai rarement vu, M. le Président, j'ai rarement vu une situation où on était moins transparent, plus opaque, que ce projet de loi qui cache, qui cache réellement aux parlementaires la possibilité de débattre de l'affectation des fonds.

On avait connu dans les années précédentes déjà une tendance très pernicieuse qui avait été dénoncée par le Vérificateur général. La tendance pernicieuse, c'était: on créait des organismes sans but... non lucratifs. Dans le domaine dont je m'occupe, on en avait créé deux, je l'ai rappelé tout à l'heure: on avait créé Innovation Québec et Valorisation de la recherche. Je ne dis pas qu'ils n'avaient pas des objectifs qui étaient des objectifs louables, l'un et l'autre, mais on leur a tout de suite attribué les montants d'argent sans réellement qu'ils puissent le dépenser dans l'année sur laquelle on faisait cette budgétisation.

Même tendance pernicieuse... Je vais vous en raconter une autre, tiens. Et je ne conteste pas l'opportunité à l'heure actuelle de soutenir l'INO, l'Institut national de l'optique à Québec, qui était quelque chose d'extrêmement valable, et je ne conteste pas l'opportunité actuellement de soutenir cet Institut, mais regardez comment on le fait. On dit à l'INO: Voici, vous allez recevoir 5 millions de dollars sur une période de cinq ans, ça veut dire 25 millions, mais on le budgétise, on le met tout de suite en réserve qu'on place à la Caisse de dépôt. Vous n'avez pas besoin, M. le Président, de connaître beaucoup les mathématiques financières pour comprendre que, pour donner 5 millions sur cinq ans, ça ne prend pas 25 millions; avec 19 ou 18 millions, compte tenu du taux de rendement moyen de la Caisse, vous avez suffisamment d'argent immobilisé pour justifier une subvention de 5 millions sur cinq ans.

Alors, vous voyez comment on fonctionne. On budgétise dès maintenant un excédent, un surplus. Et, à première vue, ç'a l'air simple, on dit: cinq fois cinq égale 25. C'est pas comme ça que ça fonctionne. Parce que, chaque année, si vous laissez ce montant d'argent à la Caisse de dépôt, il génère des revenus d'intérêts, au taux de rendement moyen de la Caisse qui varie entre 10 et 12 %, comme vous le savez pertinemment, M. le Président. Donc, vous voyez à quel point on est en train, par ces mécanismes, actuellement, d'occulter le débat public autour de la gestion des fonds.

Troisième élément, et la députée de Marguerite-Bourgeoys l'a rappelé extrêmement pertinemment, on affecte et on a tendance de ne pas affecter suffisamment au paiement de la dette. Elle l'a rappelé, on s'en va collectivement ? je dis bien collectivement ? vers ce qu'on appellera le choc démographique. Le choc démographique, ça va vouloir dire quoi? Si vous projetez d'ici une quinzaine d'années, disons entre 15 et 20 ans, on va se retrouver dans une situation où on sera à peu près... sur cinq personnes, il y aura trois personnes qui seront des personnes qui travailleront, qui contribueront à la société, et deux personnes qui seront des personnes dites dépendantes. Je ne voudrais pas rentrer sur la définition du concept de facteur de dépendance, la députée de Marguerite-Bourgeoys l'a clairement établi tout à l'heure. Donc, on va se retrouver avec une augmentation considérable du facteur de dépendance. Ça veut dire que ceux d'entre eux, des gens plus jeunes que nous, qui continueront, eux, à être sur le marché du travail, eux qui continueront à contribuer, à payer des impôts, etc., auront une plus grande partie de la population à soutenir, une plus grande partie de la population à être en mesure de payer pour eux leurs frais médicaux, de payer pour eux les frais, l'hébergement en soins de longue durée.

Alors, M. le Président, une politique sage, une politique sage serait dès maintenant soit de capitaliser un certain nombre de fonds, comme le Fonds de santé du Québec, soit de rembourser la dette pour éviter de faire peser sur les épaules de nos enfants une charge trop lourde dans les 10 ans qui vont venir ou dans un horizon de 10 ou 15 ans. Pour éviter que cette charge soit trop lourde, il faudrait dès maintenant, dès maintenant, M. le Président, voir à diminuer le poids de la dette.

Et ça, M. le Président, on ne le voit pas du tout, en aucune manière, à l'heure actuelle dans ce projet de loi. Bien au contraire, on est en train de se créer des petites cachettes. Et j'insiste sur le mot «cachettes», M. le Président, cachettes parce que, réellement, il n'y a rien dans le projet de loi qui va permettre la transparence, permettre aux parlementaires de se prononcer sur l'utilisation même de ces fonds. Donc, on va créer des petites cachettes, où un comité formé du premier ministre, de la ministre des Finances et du président du Conseil du trésor va refaire après des appropriations sans qu'il y ait réellement eu débat parmi les parlementaires.

Je dois dire, M. le Président, si vous me permettez, que j'ai été même bizarrement choqué par un article de ce projet de loi. On dit: «La réserve ne peut être utilisée que pour des projets d'immobilisations et d'autres projets dont la réalisation a une durée déterminée.» Et je vois dans le discours, le discours qui avait été un discours au nom de la ministre des Finances qui présente ce projet de loi... Parce que la ministre des Finances qui présente ce projet de loi, M. le Président, elle est aussi la ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie, et son porte-parole est le ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie. J'imagine que, quand il parle, il parle aussi au nom de sa ministre, qui est la ministre titulaire du poste.

Alors, dans l'utilisation de ce 50 millions de la réserve, à chaque fois, il n'était aucunement question que c'étaient des projets d'immobilisation ni des projets qui avaient une durée limitée. Au contraire ? et je ne fais pas les envolées oratoires du député de Vimont ? il voyait l'utilisation de ces montants d'argent pour soutenir réellement une véritable politique de la recherche au Québec et une politique de l'innovation au Québec, politique qui fait diablement défaut actuellement.

n(12 h 40)n

Alors, comment concilier à la fois le fait que le financement de cette politique ne va se faire que par le mécanisme du 50 millions qui a été mis en réserve et comment concilier cela avec le fait que ceci ne peut servir qu'à financer des projets dont la réalisation a une durée déterminée, M. le Président, ou des projets d'immobilisation? Je me permettrai de vous rappeler que les projets auxquels faisait allusion le député de Vimont, ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie, étaient de soutenir les frais indirects de recherche ? je m'excuse, ça se passe régulièrement qu'il y aura des frais indirects de recherche; c'est des dépenses qui sont des dépenses récurrentes ? soutenir les fonds de recherche FCAR, FRSQ, CQRS qui sont des fonds, en général, bien, qu'ils planifient lorsqu'ils font des subventions sur un horizon de trois ans ou de cinq ans, lorsqu'ils subventionnent des centres de recherche; soutenir les centres collégiaux de transfert technologique. Je m'excuse, M. le Président, qu'on le dise tout de suite, qu'on dise tout de suite et que vous affirmiez: ce que vous pensez pouvoir donner aux centres collégiaux de transfert technologique n'aura qu'une durée déterminée. Alors, si c'est ça, votre approche, si c'est ça, ce que vous dites, si c'est ça que vous êtes en train de dire dans les régions, que ce que vous leur promettez à même une enveloppe qu'on n'a pas encore attribuée n'aura qu'une durée déterminée, je pense que vous êtes en train malheureusement de mal informer la population ou, du moins, le message que vous lui transmettez n'est pas reçu dans ce sens-là, parce que l'ensemble des directeurs des centres collégiaux de transfert technologique pensent, quant à eux, que, à même ce 50 millions, ils vont pouvoir avoir un soutien budgétaire récurrent qui leur permettra de corriger le déficit budgétaire qu'ils ont depuis longtemps.

Alors, M. le Président, vous me dites, vous me signalez malheureusement que mon temps est arrivé à échéance. À l'heure actuelle, je voudrais quand même rappeler l'élément de base, l'élément fondamental, l'élément qui devrait nous lier tous ici, c'est que, lorsqu'il y a un surplus, c'est qu'on a été chercher trop d'argent dans les poches de l'ensemble des contribuables, c'est qu'on a été chercher trop d'argent dans l'ensemble des poches du contribuable. La première chose qu'on devrait faire lorsqu'il y a un surplus, c'est de le retourner à l'ensemble des personnes qui y ont contribué, c'est-à-dire l'ensemble des contribuables, par une baisse d'impôts, par une baisse de taxes, Et ensuite, éventuellement, il est important, lorsqu'on dépense ce que le gouvernement dépense, qu'il le fasse en toute transparence dans le débat public avec les parlementaires et non pas en cachette dans une loi où on met ça dans une réserve dans laquelle on ne sait même pas, devant les parlementaires, comment on l'utilisera. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Verdun. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents, et je vais céder la parole au prochain intervenant. Il est le critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales et député de Hull. M. le député, la parole est à vous.

M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, pourquoi je suis debout, M. le Président?

Des voix: ...

M. Cholette: Bon, on vient de réveiller la galerie. Justement, si je suis debout, c'est parce que vous avez dormi. Vous avez dormi parce que, dans un projet de loi inique, on est en train de cacher de l'argent. C'est pour ça que je suis debout, parce que les citoyens du Québec se sont fait surtaxer pour vous faire une cagnotte électorale pour vous en aller en élection. C'est pour ça que je suis debout. Ah! Ça parle moins fort tout à coup. M. le Président, grâce à ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, porte-parole officielle en matière de finances, on est en train de découvrir que le gouvernement a décidé de se faire un bas de laine sur le dos des contribuables du Québec, les plus taxés en Amérique du Nord, pour préparer les prochaines élections.

Et ça, c'est présenté par la ministre des Finances, projet de loi n° 11, ministre des Finances, vice-première ministre, en théorie, numéro deux. Mais là on est tout mêlé, parce que des fois c'est elle qui est numéro deux puis des fois c'est le ministre des Régions qui est numéro deux, organisateur en chef du PQ. Je comprends que la ministre des Finances a eu le titre de numéro deux parce qu'elle a décidé de ne pas aller à la chefferie, mais là on est tout mêlé dans les numéros. Qui est le numéro deux au PQ? Est-ce que c'est l'organisateur en chef ou est-ce que c'est la vice-première ministre, ministre des Finances? Quelqu'un peut-être un jour sera capable de nous le dire.

Mais en tout cas celle qui officiellement a le titre de numéro deux ou peut-être deux et demi, je ne sais pas, a décidé de cacher de l'argent. Combien, M. le Président? 950 millions de dollars. Tranquillement, c'est combien, ça? C'est 950 millions de dollars, tout près de 1 milliard de dollars. C'est mille millions, ça. Ça fait bien, bien, bien de l'argent qu'on va mettre dans un bas de laine caché sous la chaise du premier ministre, en collaboration avec la vice-première ministre et le ministre responsable du Conseil du trésor, qui vont saupoudrer ces montants à leur guise loin, loin du débat de l'Assemblée nationale. C'est ça dont il s'agit aujourd'hui.

M. le Président, vous savez que cette mesure a été annoncée dans le budget. Mais c'est quoi, un budget, M. le Président? Bien, ce n'est pas compliqué, un budget. C'est bien facile. Le budget du Québec, c'est que le gouvernement se ramasse dans un lac-à-l'épaule, là, ils se mettent dans une petite salle ensemble, puis ils disent: Oui, bien là je taxe mes citoyens puis je vais leur donner des services, puis là, quand je donne des services, je vais établir mes priorités. C'est un mot, ça, important dans un gouvernement, «priorités». Il y a même un Comité des priorités au PQ. Mais savez-vous c'est quoi, la réponse à la priorité, M. le Président? La souveraineté revient à l'avant-scène. C'est ça, la priorité des priorités.

Des voix: Bravo!

M. Cholette: Bien, oui, applaudissez, applaudissez. Alors, on peut voir qu'il est clair que la priorité des priorités est la souveraineté. Dans un discours inaugural: 20 pages sur la souveraineté, 20 mots sur l'éducation, 20 lignes sur la santé, c'est ça, M. le Président, la priorité des priorités. Et on est en train de se faire un beau petit bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre qui, avec l'aide de ses deux compatriotes, va saupoudrer ce montant-là partout au Québec pour une seule raison, dans un seul but, pour répondre à une seule priorité, soit l'indépendance du Québec du reste du Canada, question à laquelle ils se sont fait dire non pas une fois, deux fois. Deux fois. Au hockey, si c'était un deux dans trois, ça serait fini. Mais non! Moi, je leur demande: C'est-u un trois dans cinq? C'est-u un quatre dans sept? C'est combien? On est-u en surtemps, là? Le prochain goal, ça compte, c'est fini? C'est-u ça qu'on a, là? Je ne le sais pas, puis je vous dis qu'ils se gardent bien de répondre à cette question-là, hein?

Mais, M. le Président, quand on fait des priorités, quand on décide des priorités du côté gouvernemental, ça veut dire qu'on a fait ça de façon éclairée, hein? On a pris un grand tableau, puis on a mis ça, là, puis on a mis tous les sujets sur le tableau, puis on a dit: Bon, bien, au Québec, qu'est-ce qui est important? La souveraineté? L'éducation? La santé? Les routes? Les chevaux? La haute technologie? Le monde? Le monde municipal? Alouette. Puis là, en théorie, le gouvernement devrait prendre un petit crayon noir puis mettre des chiffres à côté: de un à 150.

Je viens de vous dire que le un, c'était clair dans leur tête, c'est la souveraineté. Personne ne veut ça, là. Ça fait deux fois que le monde leur disent non, dans les sondages personne ne veut entendre parler de ça, mais, encarcané dans un projet vieux de 30 ans, comme les fusions municipales forcées, soit dit en passant, le PQ est aveuglé par cette option, menotté par l'article 1 de son programme.

Mais qu'est-ce qui arrive avec les autres priorités? C'est là, le problème. C'est là, le problème, parce que, chaque fois que mes collègues se lèvent, puis on dit: Savez-vous, ça va mal dans la santé, j'ai du monde qui meurt sur les listes d'attente, le ministre se lève puis il dit: Savez-vous, j'ai pas d'argent. Bien, non, il n'a pas d'argent, il est là, l'argent, il est dans le bas de laine pour la souveraineté. Je comprends qu'il dit ça, mais il ne dit pas toute la vérité. Il devrait continuer sa réponse: J'ai pas d'argent parce que j'ai décidé de pas le mettre là. J'ai décidé de le mettre ailleurs, en dessous de la chaise du premier ministre, dans un petit bas. Avec ses deux comparses, ils vont décider de le saupoudrer pour des fins purement souverainistes. C'est ça, toute la réponse.

Alors, le ministre, quand il se lève puis qu'il est obligé d'expliquer qu'il y a du monde qui meurt sur les listes d'attente, il est obligé de dire: J'ai pas d'argent parce que mon gouvernement a pas décidé de prioriser ça. Quand le ministre de l'Éducation se lève puis dit: Bien, vous avez raison, j'ai des écoles qui sont pas mal délabrées, j'ai du monde qui n'ont pas de manuels scolaires, j'ai pas assez d'intervenants pour les enfants dysphasiques, j'ai des méchants problèmes dans mes écoles, mais j'ai pas d'argent, bien non, il n'a pas d'argent. Pourquoi? Parce que le premier ministre a un petit bas de laine en dessous de sa chaise, avec ses deux comparses, pour saupoudrer ces montants-là. Pourquoi? Pour l'objectif un du gouvernement, la priorité un du gouvernement: la souveraineté. C'est toujours comme ça.

Quand le ministre des Transports dit: Bien, oui, les routes sont pas très belles, il y a des trous partout, mais j'ai pas d'argent, bien, non, il n'a pas d'argent. Pourquoi il n'a pas d'argent? Bien, j'ai pas d'argent parce que le gouvernement a décidé de garder un petit bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre, avec ses deux comparses, pour saupoudrer ces montants-là partout au Québec, pour un seul objectif: la souveraineté.

950 millions de dollars. Combien, pensez-vous, M. le Président, que 950 millions de dollars pourraient ouvrir de lits dans un hôpital? Avez-vous une idée? Moi, je pense que c'est plusieurs. Pensez-vous qu'on serait capable d'aider des écoles avec 950 millions de dollars? Bien, moi, je penserais que oui. Pensez-vous qu'il y a des familles monoparentales qui pourraient utiliser plus de places en garderie? Je penserais que oui. Pensez-vous qu'il y a des groupes communautaires qui pourraient avoir un petit plus d'argent pour aider les plus démunis de notre société? Bien, moi, je penserais que oui. Est-ce que c'est le choix du gouvernement? Non, pas du tout.

Moi, j'aimerais ça vous parler de ma région, l'Outaouais, comté de Hull. Ça, c'est juste à côté d'Ottawa, la véritable capitale nationale.

Des voix: Oh!

M. Cholette: Ah, ils se réveillent encore. Chaque fois que je parle de ça, ils se réveillent. C'est drôle, le seul temps qu'ils se réveillent, c'est pas quand je parle du monde qui meurt sur des listes d'attente, c'est quand je parle de souveraineté puis quand je parle d'Ottawa. Là, ça se réveille. Aïe! ç'a pas de bon sens. Bien, non, ce qui n'a pas de bon sens, c'est qu'il y a du monde qui meurt sur les listes d'attente. Ce qui n'a pas de bon sens, c'est ? à l'unisson ? qu'on garde un petit bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre qui, avec ses deux comparses, saupoudre ça partout au Québec pour un seul objectif: la souveraineté. Un seul. C'est pas moi qui le dis, c'est le premier ministre lui-même dans son discours inaugural: 20 pages sur la souveraineté, 20 mots sur l'éducation, 20 lignes sur la santé. C'est ça, le rapport de force au Québec.

Alors, l'Outaouais, Hull. Y a-tu une mesure dans le budget qui aurait pu nous aider de façon importante? Si je vous disais qu'entre mettre 950 millions de dollars dans un bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre qui, avec ses deux comparses, saupoudre ça pour la souveraineté, si c'est le choix entre ça et baisser les impôts du monde, qu'est-ce que vous pensez que les gens dans mon compté aimeraient mieux?

On paie, M. le Président, 30 % de plus d'impôts à Hull qu'à Ottawa, 30 %. C'est pas rien, là. Il y a du monde quotidiennement qui traverse de l'autre côté. À tous les jours il y a un exode chez nous, à tous les jours. Ça a des impacts dévastateurs, ça, M. le Président. Le gouvernement va dire: Ah! tu connais rien, Cholette, on les a baissés, les impôts. C'est vrai, on a baissé les impôts dans le dernier budget, 11 $ par semaine pour une famille de quatre. Je ne sais pas si vous êtes allé chez McDo dernièrement, vous, M. le Président? Peut-être, mais 11 $ par semaine, c'est pas assez pour un repas chez McDonald's, ça. Moi, quand j'y vais avec mes enfants puis Nathalie puis on prend des trios ? hein, pas rien pour se garrocher à terre; moi je prends un Coke diète, même pas de milk-shake ? j'ai même pas assez d'argent, avec la baisse d'impôts, pour me payer un lunch chez McDonald's. Même pas.

n(12 h 50)n

Ça veut dire quoi, concrètement? Ça veut dire que j'ai des jeunes qui s'en vont rester à Ottawa. Pourquoi? Parce que j'ai un sous-financement à mon université. Ils vont à l'Université d'Ottawa. Ils disent: Tant qu'à aller de l'autre bord, je vais aller vivre là, je vais payer moins d'impôts. J'ai des entrepreneurs qui disent: Ça a pas de mosus de bon sens, je suis poigné avec toutes sortes de lois, comme la CCQ, comme toutes sortes de lois, la taxe sur la masse salariale, je paie 30 % de plus, puis je vais aller de l'autre côté. Bien, oui, la maison vaut plus, mais ça me reste. J'ai du monde à chaque jour qui va de l'autre côté.

Et savez-vous où ça me fait encore plus mal? Dans un domaine qu'on connaît bien, la santé, bien oui! Pourquoi? Parce que, voyez-vous, on a un problème de médecins au Québec. On a un problème de chirurgiens cardiaques, on a un problème de médecins généralistes, de spécialistes. Dans mon centre hospitalier, j'ai quatre médecins de famille qui font le tour des étages. Je suis capable de vous les nommer, j'en ai quatre. J'en ai quatre, ç'a-tu du bon sens? Non. Pourquoi? Parce qu'ils s'en vont l'autre côté. Le per diem par acte médical est plus cher, ils paient 30 % moins d'impôts, ils ont de meilleurs équipements. Ils vont travailler de l'autre côté.

Est-ce que je souhaite, moi, que la population de l'Outaouais aille se faire soigner en Ontario? Bien, non, non. D'ailleurs, on a fait une campagne massive pour le rapatriement de la clientèle, pour se doter nous-mêmes des équipements nécessaires pour soigner le monde du Québec qui paie des taxes au Québec. Mais là ce qui arrive, c'est l'inverse, hein? On est en train de voir un exode encore de patients parce qu'ils sont pas capables de se faire traiter au Québec, parce que j'ai pas assez de monde, parce que j'ai pas assez d'argent, parce que j'ai pas assez d'équipements, parce que j'ai pas assez de ressources financières.

Pourquoi j'ai pas assez de ressources financières à mettre dans le réseau de la santé en Outaouais? Parce que la ministre des Finances a décidé de mettre un petit bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre qui, avec ses deux comparses, utilise ça pour saupoudrer ça partout au Québec, pour un seul objectif: la souveraineté. C'est pour ça que je n'ai pas assez d'argent.

Je perds des étudiants au profit de l'Université d'Ottawa. Pourtant, on a une université qui, je pense, est très correcte. D'ailleurs, je suis issu de là, moi, de l'Université du Québec à Hull. Je suis un produit très local. Bon, il y a des gens qui pensent que c'est moins un, l'Université du Québec. Vous devriez dire ça publiquement. Parce que le député de Hull a gradué là, c'est moins un, l'Université du Québec à Hull. Ça, c'est un beau fleuron pour leur réseau de l'éducation, c'est ben smart, ça. Je vous invite à dire ça publiquement, que vous trouvez que ce n'est pas une bonne université parce que je viens de là. Moi, je ne suis pas sûr que vous allez avoir le courage de vos convictions.

Alors, cette université-là perd du monde. Pourquoi? Parce que je ne suis pas capable de faire de développement de programmes, parce que je ne suis pas capable, notamment, d'implanter tous les programmes COOP, là, où est-ce que tu fais un stage en milieu de travail puis... à l'école, un peu comme Sherbrooke. Je ne suis pas capable de faire ça parce que je n'ai pas d'argent de développement. Ça prend tout le petit change pour faire de la consolidation, c'est étendu sur plusieurs campus. On n'a pas d'argent pour faire ça. Les gens quittent donc... Même, ils paient plus cher en frais de scolarité, pas mal plus cher à Ottawa. Ça leur fait rien, ils veulent y aller à cause de l'éducation qu'ils vont recevoir puis la qualité de l'organisation physique de l'université, la variété des programmes.

Pourquoi je n'ai pas d'argent pour faire ça, M. le Président? Mais vous le savez, pourquoi je n'ai pas d'argent. Parce que la ministre des Finances a décidé de mettre un petit bas de laine en dessous de la chaise du premier ministre qui, avec ses deux comparses, utilise cet argent-là pour saupoudrer ça partout au Québec, pour justement, justement favoriser la souveraineté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Là, M. le Président, regardez, depuis le début de son intervention, le député de Hull fait des entraves à notre règlement. C'est à la limite. Écoutez, je pense qu'on peut être tolérant lors des interventions, mais vous connaissez très bien, M. le Président, et le député de Hull doit connaître très bien aussi maintenant l'article 35 de notre règlement qui... On ne prête pas d'intention indigne, on ne fait pas...

Écoutez, je vais vous lire quelques éléments, là: «Se servir d'un langage violent [...] blessant à l'adresse de qui que ce soit», «attaquer la conduite d'un député» ou prêter des intentions qui ne sont pas dignes de sa fonction, si on veut. Alors, M. le Président, écoutez, je trouve que c'est à la limite. Je pense qu'on peut tolérer, mais il y a une limite à la tolérance.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Cholette: Merci, M. le Président. Belle tentative de diversion. Ça change rien, hein? Ça change absolument rien. Ils peuvent tous se lever pour dire que ça n'a pas de bon sens, ce que je dis, sauf que c'est la réalité. Je comprends que ça fait mal. Je le sais, que ça fait mal, puis je sais surtout quoi? Que les Québécois en ont soupé de cette manoeuvre, de cette tactique. Je sais très bien qu'ils en ont soupé qu'on utilise de l'argent alors qu'on est les plus taxés en Amérique du Nord, qu'on a des besoins criants dans le domaine de la santé et dans le domaine de l'éducation, qu'on est les plus taxés puis qu'on utilise cet argent-là pour le cacher en dessous, dans un bas de laine, en dessous de la chaise du premier ministre qui va l'utiliser avec ses deux comparses pour saupoudrer ça pour des fins purement souverainistes partout au Québec.

Puis je le répète, puis je vais le répéter, parce que c'est ça, la réalité. Puis, s'il faut que... Je vous rappelle, M. le Président, que j'espère qu'à cette Assemblée, dans le salon bleu, on soit au moins capable de dire la vérité, que ça plaise ou non au Parti québécois. Ça, ce n'est pas mon problème. Ils iront défendre ça devant la population. Mais je ne peux pas croire que je n'ai pas le droit de dire les vraies affaires dans le salon bleu. Je ne peux pas croire!

Parce que c'est ça qu'on a fait. On a fait un fonds électoral de 950 millions de dollars pour aller vendre la souveraineté. Qu'est-ce que tu veux que je te dise? C'est ça, la réalité. Alors, vous pouvez vous relever pour dire que vous n'êtes pas contente. Moi non plus, je ne le suis pas, parce qu'en Outaouais...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Alors, je vous indique, M. le député, qu'il reste quatre minutes à votre droit de parole sur le projet de loi n° 11 et je suspends les travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

 

(Reprise à 15 h 2)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Madame, vous demandez l'appel du quorum. Oui? Alors, je vais vérifier rapidement.

Il manque quelques députés pour quorum, alors nous allons suspendre quelques minutes pour permettre au quorum de se rétablir.

n(15 h 4 ? 15 h 9)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement à nous indiquer l'article à l'ordre du jour.

Mme Carrier-Perreault: Oui. Alors, M. le Président, nous allons donc poursuivre avec l'article 5.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 5, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. Alors, M. le député de Hull avait débuté son intervention et il lui restait quatre minutes. Alors, vous pouvez le faire immédiatement, M. le député de Hull, poursuivre votre intervention. Je vous cède la parole.

M. Cholette: Merci, M. le Président. Évidemment, quand il reste quatre minutes, mon Dieu, combien de choses à dire dans si peu de temps! Mais, pour résumer cette situation-là, pourquoi est-ce que je suis debout? Pourquoi est-ce qu'on est ici? C'est parce que c'est un projet de loi odieux qu'on a devant nous. C'est un projet de loi qui prend 950 millions de dollars de nos taxes et qui met ça dans un petit bas de laine, en dessous de la chaise du premier ministre, avec l'aide de ses deux comparses, la ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, et qui utilise ce montant-là de façon à saupoudrer le Québec. Pour faire quoi? Pour répondre à des besoins criants? Non, M. le Président, pour répondre à un impératif de souveraineté. C'est à ça que ça sert.

n(15 h 10)n

Alors qu'on est les plus taxés en Amérique du Nord, le gouvernement du Québec a décidé de prendre de la poche des Québécois et des Québécoises de l'argent, et, plutôt que de l'investir en soins de santé pour diminuer les listes d'attente, pour diminuer les *décès sur les listes d'attente, pour aider les enfants dysphasiques, qu'est-ce qu'on fait, M. le Président? On fait un bas de laine, on met ça en dessous de la chaise du premier ministre et, avec l'aide de ses deux comparses, on saupoudre le Québec de ces montants justement dans le but de faire la souveraineté du Québec, alors qu'il n'y a personne qui veut entendre parler de cela. Il n'y a personne qui pense que c'est une priorité, sauf le gouvernement du Parti québécois qui est déconnecté de la réalité, qui est d'une arrogance telle que les besoins de la population sont ignorés.

Ces besoins essentiels, la santé, l'éducation, sont ignorés de la population parce que le gouvernement a décidé de prendre 950 millions de dollars ? c'est pas petit, là, hein, c'est pas des petits montants, c'est près de 1 milliard, 1 000 millions de dollars ? des gens les plus taxés en Amérique du Nord, pour faire quoi? Pour faire quoi? Pour se faire une cagnotte électorale, un bas de laine que le premier ministre garde soigneusement en dessous de sa chaise. Justement, avec l'aide de ses deux amis, deux comparses, il va prendre cet argent-là pour saupoudrer le Québec pour réaliser quoi? Pour réaliser un avantage aux citoyens? Non, M. le Président. Pour réaliser l'objectif ultime que le Parti québécois s'est donné.

Le discours inaugural, il a 20 pages qui parlent de souveraineté, il a 20 lignes qui parlent de santé puis il a 20 mots qui parlent d'éducation. Est-ce que ça a du bon sens, ça, M. le Président? Est-ce que c'est ça, la priorité des gens? Est-ce que c'est vraiment ça dont les Québécois et les Québécoises ont besoin, alors qu'on voit qu'en chirurgie thoracique on a des problèmes, les enfants dysphasiques ont des problèmes? En Outaouais, on a un exode de cerveaux, on a un exode de gens vers l'Ontario. On paie 30 % d'impôts de plus au Québec qu'en Ontario. Mais, malgré cela, c'est pas assez, on taxe encore, on taxe encore.

Dix-sept nouvelles taxes de ce gouvernement pour faire quoi? Pour puiser dans les poches des contribuables pour faire un bas de laine au premier ministre, pour mettre le bas de laine en dessous de sa chaise avec l'aide de ses deux comparses, la ministre des Finances, la numéro deux, peut-être la numéro deux et demi, ça dépend quand on compte avec le ministre des Régions et avec le président du Conseil du trésor, pour saupoudrer ce montant partout au Québec pour atteindre l'objectif ultime du PQ qui s'est fait dire non deux fois, soit la souveraineté du Québec.

Si vous croyez que j'ai répété cette phrase souvent, si vous croyez que j'ai dit souvent que le premier ministre avait un bas de laine en dessous de sa chaise, que, avec la ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, il a un but dans la vie, la souveraineté ? c'est lui qui préside le comité, d'ailleurs ? et qu'ils vont saupoudrer ça partout au Québec, si j'ai dit ça souvent, c'est parce que, M. le Président, c'est la réalité. C'est pas une figure, c'est pas une exagération, c'est pas une risée. Malheureusement, c'est la vérité, c'est la réalité. Les Québécois, à même leurs poches, sont en train de financer l'opération Le printemps de la souveraineté. Ils sont en train de subventionner l'opération qui fait en sorte que l'objectif ultime du gouvernement, c'est pas la santé, c'est pas l'éducation, c'est pas les simples citoyens, c'est purement et simplement la cause de la souveraineté du Québec. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Hull. Nous allons enchaîner avec le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Je suis sûr que mes collègues d'en face se réjouissent déjà à l'idée que peut-être je vais emprunter la même ligne de pensée que mon collègue de Hull. Bien, vos joies sont justifiées, parce que, effectivement, ce dont on se rend compte dans le projet de loi qui est devant nous, le projet de loi n° 11, c'est-à-dire une loi qui constitue finalement le bas de laine du premier ministre, le bas de laine qu'il veut mettre sous sa chaise pour réaliser la souveraineté, et cela, bien sûr, avec l'aide de ses deux comparses, comme l'a dit mon collègue de Hull, la ministre des Finances, à temps partagé la numéro deux du gouvernement... Et l'autre moitié du temps, c'est le ministre bien sûr des Régions et l'organisateur en chef, monsieur élection, et son autre comparse, le président du Conseil du trésor.

Pourquoi? Pourquoi on constitue ce bas de laine là? M. le Président, on se souvient tous que, au début du processus budgétaire cette année, dès la montée sur le trône de l'actuel premier ministre, quand il est arrivé, au mois de mars, il a dit dans plusieurs entrevues: On aura seulement 35 millions de surplus budgétaire. Ça fait que, là, à ce moment-là, bien, tout le monde se dit: Ah bien, c'est pas beaucoup. On va limiter nos demandes, on ne demandera pas beaucoup d'argent au gouvernement. On va faire attention, ils n'ont pas beaucoup de surplus.

On peut penser, entre autres, aux taxes sur l'essence, on peut penser à tout ce qui a concerné le débat sur les prix élevés au niveau de l'huile à chauffage. Tout le monde, de l'autre côté, nous disait: Ah non! on ne peut pas, on n'a presque pas de surplus. Ça va arriver serré, cette année, on a juste quelques millions de surplus. Début mars, 35 millions. Fin mars, quoi? Tout à coup, 2,6 milliards de surplus. 2,6 milliards qui viennent d'où, M. le Président? Ils viennent des poches des Québécois et des Québécoises, les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord, ceux qui paient le plus de taxes et d'impôts, ceux qui chaque semaine voient la plus grande partie de leur paie partir en Amérique du Nord pour aller engraisser les coffres et les budgets du gouvernement du Québec, et ça, tout ça se passe dans une période où les gens ont besoin de plus en plus de ces argents-là. Ils ont besoin de cette marge de manoeuvre là, ils ont besoin de ça pour, eux, être capables de faire face aux coûts élevés que représente la vie aujourd'hui.

Quand on regarde le projet de loi n° 11 qui est devant nous, qui a été déposé, je vous dirais, M. le Président, que non seulement, comme le mentionnait mon collègue de Hull, c'est un projet de loi qui est odieux, non seulement c'est un projet de loi qui fait des cachettes, qui vient dire aux Québécois et aux Québécoises: Continuez de payer le plus de taxes possible, on va continuer de vous en cacher encore plus, on va continuer sur la même lancée qu'on était l'année passée... Qu'est-ce qui s'est passé, l'année passée? Encore une fois, le même processus. On commence, fin février, début mars: On n'a presque pas d'argent, on ne sera pas capable de faire des surplus, c'est serré, on n'a pas moyen de baisser les impôts beaucoup, même pas assez pour vous payer à peu près un Big Mac par semaine chez McDonald's. Si vous avez des enfants, oubliez ça. Vous avez pas assez d'argent pour ça. On vous dit: C'est trop serré. Bien, l'année passée, la même chose. Non seulement on laisse dormir de l'argent à Toronto dans des fonds cachés, on se lamente, de l'autre côté, qu'on n'a pas assez d'argent pour la santé, que le fédéral paie pas sa part. Mais, quand ils paient leur part, au fédéral, ce qu'ils font, de l'autre côté, ils prennent l'argent puis ils le mettent ailleurs. Ils l'ont mis à Toronto l'année passée. Cette année, ils l'ont détourné. Il manque 500 millions des transferts fédéraux au Québec pour la santé.

Alors là ces mêmes gens là en face arrivent et nous disent, l'année passée, au début du processus budgétaire: On a des surplus beaucoup plus élevés que ce qu'on pensait. On va être obligé de constituer une réserve des organismes sans but lucratif, M. le Président. Et ça, l'année passée, on en a mis pour 730 millions. Un an plus tard, on en a mis, juste pour vous rappeler sur les organismes sans but lucratif... L'année passée, on en a mis, dans Infrastructures-Québec, 175 millions, on en a mis, dans Valorisation-Recherche Québec, 120 millions, Société de gestion du Fonds Jeunesse, 120 millions, Innovation-Papier, 100 millions, Infrastructures de transport... Et on le sait, s'il y en a, des trous sur la route, hein? Je suis sûr que le whip en chef du gouvernement, quand il s'en vient de chez eux, là, de son comté, puis qu'il passe pas par la 20 ou par la 40, ça doit lui coûter cher de caps de roue par semaine, parce qu'il y en a, des trous. Il doit les perdre à toutes les semaines, ses caps de roue. On n'a plus besoin de voler de caps de roue, au Québec, on a juste à se promener le long des autoroutes puis à les ramasser.

Société de diversification économique, 50 millions, Fonds québécois pour le développement durable, 45 millions, et Société des événements internationaux du Québec, 30 millions. Un an plus tard, qu'est-ce qui s'est passé? Est-ce que cet argent-là a été vraiment remis dans l'économie québécoise? Est-ce qu'il a servi à faire de l'asphalte? Est-ce qu'il a servi à améliorer nos infrastructures municipales? Est-ce que ça a servi à moderniser nos infrastructures au niveau des papetières? Bien, on en a eu la réponse, M. le Président, lors d'un reportage, juste avant le dernier budget, sur les organismes sans but lucratif, où la reporter Sophie Langlois disait finalement, sur toute cette opération-là, en citant le Vérificateur général, que ces 730 millions de dollars sont sortis de comptes du gouvernement le dernier jour de l'année et sont allés dans huit organisations que je viens de vous nommer. Dans ces huit organisations-là, un an plus tard, il restait encore au-dessus de 700 millions, l'argent n'avait pas encore été dépensé. Ça, on le sait tous, et sûrement que le nouveau secrétaire d'État, le député de Sainte-Marie, s'il avait eu cet argent-là, il pourrait engager plus de personnel pour sans doute pourvoir à toutes les obligations qu'il a. Mais non, parce que cet argent-là est resté dans des organismes sans but lucratif, est resté caché.

Donc, un an plus tard, on n'a toujours pas d'argent, et, juste pour quelques citations sur cette opération-là, Janvier Cliche, de la Société de diversification économique des régions, disait: On n'a pas eu une semaine d'avis pour savoir comment on allait... Alors, ça s'est fait très rapidement, il ne savait pas encore exactement comment il allait dépenser ça, cet argent-là. Et il disait, par la suite, qu'il a été avisé de sa nomination 48 heures seulement avant la création de l'organisme, un organisme sans but lucratif qui a été créé le 10 mars 2000. Trois semaines plus tard, il recevait un chèque de 50 millions. Il n'y a pas beaucoup de gens au Québec, il n'y a pas beaucoup d'entreprises, il n'y a pas beaucoup d'organismes, et sûrement pas dans le réseau de la santé, où, suite à la nomination d'un nouveau directeur général d'un établissement ou de toute autre personne du réseau de la santé, on peut dire que, quelques heures après, il y a 50 millions de plus qui arrivent. Non. Tout ça s'est passé dans des organismes sans but lucratif, M. le Président.

n(15 h 20)n

Ça a été un peu la même chose au niveau d'Infrastructures-Québec. Tantôt, on a vu apparaître le ministre délégué aux Transports. Il le sait, tous les députés en font, des demandes. Il y en a, des besoins dans les infrastructures routières, partout au Québec. Mais, plutôt que d'investir là, on a mis ça dans des organismes sans but lucratif l'année passée. Et là, dans le reportage de Radio-Canada, on descendait finalement à peu près tous les organismes qui, directement ou indirectement, ont été touchés par ce fonds-là, ces organismes sans but lucratif là qui ont été créés à la dernière minute l'année passée.

Juste pour reprendre quelques commentaires, je vous dirais qu'on mentionnait, dans le reportage de Radio-Canada qui a été présenté juste avant le dernier budget sur les surplus de l'année passée, que certains organismes sont encore embryonnaires. La Société des événements majeurs internationaux du Québec n'a qu'une adresse postale, pas de bureau. C'est là, le problème. Selon la comptabilité du gouvernement, ces sommes sont déjà dépensées, mais, dans la réalité, elles seront dépensées au cours des trois, cinq ou sept prochaines années. Guy Breton, Vérificateur général, ami personnel du premier ministre, disait: C'est comptablement exact, mais c'est agaçant. C'est un peu comme si quelqu'un, pour améliorer son rapport d'impôts personnel, passait une entente avec une compagnie d'assurance maladie en disant: Je vais vous payer mes 10 prochaines années de primes d'assurance maladie cette année et je vais les réclamer contre des revenus pour baisser mon impôt. C'est à peu près ça que le gouvernement a fait.

Et là, en plus, on mentionne plus loin que finalement le premier ministre admet qu'il était plus rentable politiquement, électoralement, de créer des distributrices à subventions que de rembourser la dette. C'était plus payant de créer des fonds, de créer un bas de laine qu'il va mettre en dessous de sa chaise. Il a fait ça avec ses complices, la ministre des Finances, le président du Conseil du trésor, et ça, c'est un fonds à but purement électoral, c'est un fonds à but électoral. Ça a été fait l'année passée, ça a été refait cette année.

Et, juste pour une citation, Dominique Vachon disait: On a une gestion qui est complètement malsaine. On vous passe des sommes imposantes au dernier moment, c'est fait rapidement, on ne voit pas l'efficacité de ces sommes dépensées, c'est pas signé, et finalement on cache tout ça à un peu tout le monde. Donc, M. le Président, on croyait, on croyait fermement, après la leçon de l'an dernier, après tous les commentaires qui ont été faits à cet égard-là sur les montants comme tels qui ont été mis dans les organismes sans but lucratif, on était certain que ça ne se reproduirait pas. On s'est dit: À un moment donné, quand quelqu'un fait quelque chose qui est autant décrié, ça ne se reproduira pas. Mais non, cette année, ça s'est reproduit, puis encore plus.

Donc, si on fait une récapitulation, on a eu de l'argent d'Ottawa pour la santé, qu'on a caché à Toronto. Cette année, on a eu de l'argent ? sans doute qu'ils sont en train de préparer leurs discours pour tantôt; j'ai bien hâte d'entendre ça, M. le Président ? qui venait d'Ottawa pour la santé, qu'on n'a même pas tout dépensé. On a détourné un demi-milliard, 500 millions. On a créé, ensuite de ça, des organismes sans but lucratif l'année passée, puis là, cette année, on revient avec le projet de loi n° 11, le projet de loi qu'on a devant nous, et, finalement, lui, ce qu'il amène, c'est qu'il dit: Dans le fond, ce qu'on a fait dans les dernières années, c'est vrai que c'était plus ou moins correct, mais, au lieu de tenter d'améliorer la pratique, de ne plus refaire ça, on s'est dit: On va la rendre légale, on va passer une loi, puis, comme ça, on va la rendre légale, ça va devenir tout à fait correct.

Et, comme le disait avec beaucoup d'à-propos mon collègue de Hull tantôt, ce qui est en train de se faire, c'est qu'on est en train de créer un bas de laine de toutes pièces pour le premier ministre pour la campagne électorale, et il est en train de faire ça avec ses complices habituels, le président du Conseil du trésor et la ministre des Finances. Donc, ce qu'on fait avec ce fonds-là, on prend les surplus, hein, qui sont passés de 35 millions au début mars à 2,6 milliards à la fin mars... Ça, c'est cette année. On a pris ça et on a dépensé un petit peu partout, mais surtout on s'est dit: Faudrait en garder, tout à coup qu'il y aurait une élection dans la prochaine année. Tout à coup, là, qu'on devrait, à l'intérieur d'un mois ou deux, se promener partout au Québec, puis là il faut annoncer des choses. Puis là, pour répondre à la question: Oui, mais où vous allez prendre l'argent pour financer ces dépenses-là? bien, les gens d'en face se sont dit: On va le prendre dans le fonds qu'on vient de créer, qui est la réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. C'est donc dire que la pratique de cette année, si on reste avec ce gouvernement-là, bien, elle va se poursuivre dans les prochaines années.

Ce qui est épouvantable, M. le Président, dans ça, c'est que, au cours des dernières années, on a eu des périodes difficiles. Les Québécois et Québécoises ont souffert des coupures budgétaires, ont souffert du manque de services au niveau de la santé, ont souffert du sous-financement en éducation, ont souffert du manque de moyens qu'ont plusieurs régions du Québec pour se développer. Et ce qu'on a fait, finalement... On continue de laisser souffrir les gens en leur disant: Bien, voici, on crée, cette année, 900 millions de réserve, 950 millions, dont 600 millions pour la santé, 200 millions pour l'éducation, 100 millions pour la solidarité sociale et 50 millions pour la recherche. Ce que ça veut dire, c'est qu'on a dit, au cours des derniers mois, des dernières années, beaucoup de non à beaucoup de monde.

Dans mon comté, par exemple, que ce soit l'hôpital Notre-Dame-de-Fatima, que ce soit l'hôpital Notre-Dame-du-Lac, les deux ont un problème de sous-financement. Les deux centres hospitaliers, les deux réseaux de santé du Kamouraska et du Témiscouata ont besoin de plus d'argent pour répondre mieux au service de la population. Les deux ont besoin, par exemple, d'un mammographe, les deux ont besoin de certains équipements, de certaines rénovations, de certains aménagements.

Mais ce que dit le gouvernement à ces gens-là chez nous, c'est... Il leur dit non. Il leur dit: On n'a pas les moyens. Mais, dans le fond, ce qu'il veut leur dire, c'est: On n'a pas les moyens maintenant parce qu'on a caché cet argent-là. On aura les moyens quand ce sera la campagne électorale. Donc, finalement, si vous avez des projets à présenter, attendez. Présentez-les en campagne électorale, c'est là qu'on va sortir l'argent. Parce que, dans l'actuel projet de loi, ce qu'on dit, on ne le dit pas exactement, comment on va dépenser cet argent-là. On ne dit pas exactement la façon ? et les processus ? dont tout ça va se passer. On dit: Ça va passer par les comités ministériels, on va décider ça au niveau du gouvernement. Donc, là, on est en train de tout accumuler les projets, on est en train de mettre ça sur un beau bureau, on est en train de monter ça, et ça, ça s'appelle programme électoral, campagne électorale du Parti québécois 2001 ou 2002, et ça veut dire qu'on va continuer, dans les prochains mois, à dire non à des gens, à dire non à des gens au niveau de l'éducation, à dire non à des gens au niveau de la santé.

Ça veut dire encore une fois, chez nous... Les gens, par exemple, de l'école Saint-Onésime ont besoin de rénovations majeures, mais ces gens-là ne les auront pas. Pourquoi? Pas parce qu'on n'a pas l'argent. Non, on l'a caché dans un fonds parce qu'on n'est pas en élection. Attendez les élections, c'est là qu'il va sortir, l'argent.

Les gens de Saint-Jean-de-Lalande dont l'école a passé au feu l'année passée puis qui attendent la reconstruction, qui attendent d'avoir un coup de main de la part du gouvernement actuel, qu'est-ce qu'on leur dit? On leur dit: Pas tout de suite. On s'en fout que les travaux ne commencent pas cet été, on s'en fout que l'école ne soit pas en place à l'automne. On va attendre d'être en élection, et donc, avec ce projet de loi là, le projet de loi n° 11 qui est devant nous, c'est exactement ce qu'on est en train de faire, c'est-à-dire de monter un fonds électoral pour une campagne électorale à venir.

Si, autrefois, dans un passé pas si lointain, on faisait des campagnes électorales en se promenant avec des frigidaires et en promettant de l'asphalte d'un bord puis de l'autre avec des boîtes de chocolat, bien, cette année, on se promène avec un fonds, avec une cagnotte électorale, avec un bas de laine qui est là, qui est sous la chaise du premier ministre, directement sous la chaise du premier ministre, qui va être dépensé par lui, par ses comparses, qui a été accumulé grâce à la collaboration des collaborateurs, grâce à ses collaborateurs, la numéro deux à temps partiel, parce que, quand on est en élection, c'est le député des régions, le ministre des Régions qui devient le numéro deux officiel, l'organisateur en chef, sans doute, celui qui a le carnet de chèques, celui qui est en train de se faire des ampoules à force de trouver des rubans d'un bord puis de l'autre puis d'essayer de les couper. Je le soupçonne d'ailleurs de se pratiquer chez eux les fins de semaine pour bien sourire puis le couper au bon moment, parce qu'il n'y en a pas tant que ça, de rubans à couper, dans nos régions, M. le Président, vous le savez très bien.

Et, d'autre part, bien sûr, le président du Conseil du trésor, d'ailleurs, qui est quand même resté très muet lors de l'annonce du dernier budget, je ne sais pas si c'est parce qu'on a voulu le cacher, mais on a présenté les crédits puis le budget en même temps, ce qui a laissé très, très peu de place au président du Conseil du trésor. Et certains diront que c'est une bonne nouvelle de ne pas avoir entendu le président du Conseil du trésor, parce que finalement il aurait été obligé d'expliquer pourquoi ces sommes-là sont laissées de côté et pourquoi on continue de faire souffrir les Québécois et les Québécoises pendant qu'ils ont des besoins.

n(15 h 30)n

On ne peut plus avoir comme argument que, les gens au Québec, quand on a à leur dire non de la part du gouvernement, on n'a pas d'argent. Et je vois certains députés, là, qui étaient sans doute impliqués dans le processus de décision sur les projets d'Infrastructures-Québec, qui sont sans doute dans des comtés ruraux comme le mien, où on a besoin de plus d'argent pour nos routes aussi. En plus de la santé, l'éducation, les besoins en infrastructures sont grands. Bien, au lieu de dire à ces gens-là: Oui, on va vous donner un coup de main, on va améliorer la qualité de vie des Québécois et Québécoises, bien, ce qu'on leur dit avec le projet de loi actuel, c'est: Prenez votre mal en patience, continuez de vous promener sur des routes pleines de trous, continuez de ramasser les caps de roue dans le bord des routes puis sur les fossés. C'est rendu une vraie collection. Comme je vous ai dit: On n'a plus besoin d'en voler, de caps de roue, au Québec, on a juste à se promener sur la 20 puis sur la 40 puis se promener sur les fossés, il y en a en masse. Ça, ce sont les effets du gouvernement d'en face, M. le Président. Au lieu d'améliorer ça, hein, ce qu'on fait, c'est qu'on dit: Non, pas tout de suite, on n'est pas en élection. Donc, au lieu de distribuer des frigidaires, on pourrait peut-être distribuer des caps de roue, de l'autre bord, à la prochaine élection.

Mais ce que je veux vous dire, M. le Président, sur ce projet de loi là, ce qu'on trouve inacceptable ici, c'est que, pendant que le gouvernement est en train d'engraisser ses coffres pour sa campagne électorale, il faut jamais oublier qu'il y a des Québécois et des Québécoises qui souffrent présentement, qui ont besoin de certaines améliorations de leurs infrastructures, autant au niveau de la santé, au niveau de l'éducation. Et les gens d'en face diront: Oui, mais ça, c'était pour éviter d'avoir à mettre cet argent-là dans la dette, de diminuer la dette. On ne voulait surtout pas trop soulager le fardeau des générations futures, il fallait pas faire ça. Il faut se garder une cagnotte pour nous autres. Il y a un moyen bien simple de faire ça. Si vous aviez baissé les impôts pour la peine, si vous vouliez baisser les taxes sur l'essence, si vous vouliez donner un peu d'air, un peu de marge de manoeuvre aux Québécois et aux Québécoises pour qu'ils aillent pas chez McDonald's juste une fois par semaine puis qu'ils passent toute leur gigantesque baisse d'impôts, hein, d'à peu près 10 $ par semaine, bien vous auriez baissé les impôts tout simplement.

Et c'est ça, la différence entre les deux gouvernements, les choix que les gens auront à faire. D'un côté, on a un gouvernement péquiste, et, pour lui, M. le Président, ce qui compte le plus, c'est d'en garder pour lui, de l'argent, de s'acheter de la publicité, de s'organiser pour avoir des belles publicités, des belles annonces. On va en annoncer, des agrandissements d'hôpitaux, on va en annoncer, des agrandissements d'écoles en campagne électorale. Et, de l'autre côté, il y a un gouvernement libéral qui s'en vient et qui va soulager les Québécois et les Québécoises en diminuant les taxes, les impôts et en faisant en sorte que les Québécois et Québécoises en aient plus dans leurs poches, parce que, contrairement à ce que le premier ministre pense, les mieux placés pour décider quoi faire de leur argent, c'est encore les travailleurs et travailleuses du Québec, les Québécois et Québécoises. Eux savent où sont leurs priorités.

Mais malheureusement, présentement, avec le projet de loi n° 11, ce qu'on est en train de faire, c'est de s'organiser, de l'autre côté, une campagne électorale aux frais des Québécois et Québécoises. Mais, moi, je vous dis une chose, c'est pas vrai que vous allez avoir fait souffrir le monde, avoir fait attendre le monde pendant quatre ans, les avoir privés d'investissements en santé, en éducation pour tout à coup arriver et dire: Bien, voici, on s'excuse. Et ça, c'est pour ça qu'on est contre ce projet de loi, M. le Président, et qu'on va continuer de se battre contre ce projet de loi là. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait évidemment un immense plaisir de joindre ma voix à celle de mes collègues qui ont eu l'occasion de livrer un argumentaire implacable, M. le Président, un argumentaire implacable pour les mauvais choix que fait ce gouvernement, mauvais choix qu'il fait. Et la plus brillante illustration est sûrement ce projet de loi n° 11 qui a été déposé donc par le gouvernement, projet de loi n° 11 qui s'intitule Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. Alors, quand on regarde le titre un peu plus attentivement et surtout le contenu du projet de loi, on se rend compte que le projet de loi devrait s'intituler plutôt loi constituant le fonds Bernard-Landry. Et «pour l'affectation d'excédents», on devrait y lire «pour l'affectation des argents pris dans la poche des contribuables depuis 1994».

Parce que les sentiments des gens, des citoyens, des citoyennes, des payeurs d'impôts au Québec, c'est que les péquistes sont venus leur siphonner, depuis 1994, M. le Président, de l'argent puis encore davantage d'argent. C'est des millions et des millions de dollars que le gouvernement du Parti québécois est venu siphonner dans la poche des contribuables. Les gens sont fatigués de payer, fatigués de payer. Ils ont vraiment le sentiment de ne pas en avoir pour leur argent. C'est comme l'annonce, la publicité qui passait dernièrement, M. le Président: Paie, paie, puis paie, puis continue de payer! C'est ce qu'on entendait, M. le Président.

Et je dois dire que, lorsqu'on rencontre les citoyens qui sont en région ? et on l'a faite, la tournée du Québec, on l'a faite à plusieurs reprises et on va continuer de la faire parce que, nous, M. le Président, nous avons fait le bon choix, celui donc d'être à l'écoute des citoyens et des citoyennes dans les régions du Québec ? lorsqu'on rencontre les gens, M. le Président, il y a un sentiment vraiment profond de frustration de la part d'un gouvernement qui n'est pas à l'écoute de leurs besoins. On le voit chaque jour à l'Assemblée nationale par les questions que nous posons au premier ministre et aux différents membres du Conseil des ministres. Souvent, M. le Président, ils choisissent d'évacuer complètement la question pour bifurquer vers une réponse qui, très souvent, n'a aucun lien avec la question posée, qui, soit dit en passant, est toujours très pertinente parce qu'on a fait le choix de s'exprimer au nom des citoyennes et des citoyens du Québec et donc de livrer leurs préoccupations ici, à l'Assemblée nationale.

Le plus souvent, M. le Président... Et ça commence par le premier ministre qui fait preuve d'une arrogance absolument incommensurable, une arrogance sans fin ? sans fin ? qu'il déploie à l'intention, à l'endroit des députés qui sont de ce côté-ci de cette Chambre, mais il faut lire également une arrogance qu'il déploie à l'endroit des hommes et des femmes du Québec, à l'endroit des citoyennes et des citoyens du Québec. Ça, M. le Président, c'est la marque de commerce du premier ministre, du premier ministre désigné: l'arrogance, la condescendance et le fait que ce gouvernement-là ne soit pas à l'écoute des hommes et des femmes du Québec.

Alors, ce projet de loi n° 11 donc, M. le Président, vient instituer un nouveau fonds, le fonds Bernard-Landry, qui est justement la cagnotte dont auront tant besoin les péquistes pour gagner la prochaine élection. Parce que, effectivement, la stratégie qui est mise de l'avant par le gouvernement qui est en face de nous est une stratégie purement électoraliste. J'en ai fait la démonstration hier, par exemple, à la période de questions. Le ministre des Régions qui est en face de nous, M. le Président, est surtout le ministre des élections. C'est le numéro deux du gouvernement du Parti québécois, ça, le ministre des élections, mais c'est d'abord et avant tout l'organisateur politique de Bernard Landry, organisateur politique qui lui a permis. donc, d'occuper le poste et le siège qu'il occupe en ce moment. Et il est très fier d'occuper le poste qu'il occupe, M. le Président. Mais, pour récompenser son bon ami l'organisateur politique, le député de Berthier, M. le Président, il lui a confié cette tâche comme responsabilité au niveau des régions, mais le ministre des Régions a encore cette étiquette d'organisateur politique sur le front, étiquette qui va le suivre jusqu'à la prochaine élection. Et j'ai eu l'occasion de le dire en cette Chambre, M. le Président, les annonces qui sont faites à l'heure actuelle par le ministre des élections, ces annonces, il va les faire, il va les refaire, il va les re-refaire jusqu'à l'élection pour donner l'impression justement que le gouvernement du Parti québécois s'occupe des régions.

Mais c'est un discours, c'est une action, une stratégie qui sonne faux chez les péquistes. Qui sonne faux. Parce que, si les régions c'était si important que ça pour les péquistes, bien pourquoi ça leur a pris sept ans à se réveiller, M. le Président? Pourquoi ça leur a pris sept ans à se réveiller? Et l'énergie qu'ils ont déployée lors du dernier budget en déposant une stratégie, une soi-disant stratégie pour relancer les économies des régions en dit très long sur leur inconfort à l'endroit de l'attitude de négligence qu'ils ont démontrée au cours des sept dernières années à l'endroit des régions du Québec. En fait, le budget qui a été déposé à l'endroit des régions est un aveu, M. le Président, d'impuissance pour les sept années de laxisme du gouvernement péquiste en matière de développement régional et rural.

M. le Président, les Québécois et les Québécoises ne sont pas dupes. Ils ne sont pas dupes. Les gens voient très bien la stratégie que déploie le gouvernement qui en face de nous. C'est même pas subtil, M. le Président. C'est même pas subtil. À tout bout de champ, le premier ministre du Québec et les députés, les ministres qui sont en face de nous invoquent toutes sortes de stratégies, de discours et de rhétoriques surtout pour convaincre les Québécois donc qu'ils sont la meilleure équipe en place pour diriger le Québec. Mais, nous, M. le Président, chaque jour on fait la démonstration en cette Chambre que les Québécois et les Québécoises méritent mieux, que les Québécois et les Québécoises méritent un gouvernement, une équipe qui est responsable et qui, donc, s'est donné comme objectif de définir des actions, des politiques qui, pour une fois, correspondent aux besoins véritables des hommes et des femmes du Québec.

n(15 h 40)n

Il y a ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys, qui est critique au niveau des finances, qui a fait un travail absolument colossal depuis que nous sommes en place pour démontrer à quel point le gouvernement péquiste fait fausse route en matière d'économie au Québec. Et elle a fait publier dans les grands quotidiens un texte fort éloquent sur les choix du gouvernement de Bernard Landry, du premier ministre. Donc, le texte s'intitule Bilan Landry: 17 nouvelles taxes. Alors, c'est ça, M. le Président, qu'on doit dire aussi. C'est que les Québécois et les Québécoises sont les plus taxés en Amérique du Nord.

Et, lorsqu'on rencontre les gens qui sont dans toutes les régions du Québec, je peux vous assurer, M. le Président, que le bilan qu'a fait ma collègue, c'est un bilan qui, donc, a une réalité, s'appuie sur une réalité vécue à chaque jour par les hommes et les femmes du Québec qui sont fatigués de payer, fatigués de payer parce qu'en retour ils ont la nette impression de ne pas en avoir pour leur argent, hein, lorsqu'on constate l'effritement des services de santé en région, les services liés à l'éducation qui s'effritent également dans les régions du Québec, les salles d'urgence, les gens qui font la file dans les salles d'urgence. Ce matin, on a apporté un élément extrêmement éloquent quant à tout l'aspect lié au domaine de la cardiologie au Québec, M. le Président. Alors, on a des exemples concrets où les gens paient, paient et paient et finalement n'ont pas de juste retour sur leur investissement, si je peux m'exprimer comme ça.

Ma collègue a fait vraiment une illustration, une brillante illustration, à quel point les choix qui sont faits par le gouvernement du Parti québécois sont des choix qui ne correspondent pas aux attentes et aux aspirations des Québécois. Elle a dénoté, dans le texte qu'elle a publié, un ensemble d'astuces ? hein, c'est vraiment d'astuces ici qu'il faut parler, M. le Président ? de la part des gens qui sont en face de nous. Elle a également dénoté l'incapacité chronique du gouvernement péquiste à réduire les impôts des contribuables, alors que dans le dernier budget, par exemple, déposé par le gouvernement ontarien, on a fait vraiment un effort considérable pour réduire la fiscalité, donc, des contribuables ontariens, ce qui se traduit encore une fois par un accroissement du fossé entre les contribuables québécois et les contribuables ontariens.

Mais, si on regarde le texte de ma collègue d'un peu plus près, on se rend compte, parce qu'elle a fait très justement l'énumération de ces 17 nouvelles taxes... Et vous me permettrez donc de vous donner quelques exemples de ces taxes qui ont été imposées par le gouvernement qui est en face de nous depuis qu'il est au pouvoir.

Première taxe, M. le Président, celle qui fait référence à la hausse des primes d'assurance médicaments, y compris bien sûr pour les personnes âgées. On a vu une prime qui a pratiquement doublé depuis que les députés du Parti québécois sont au pouvoir. Ça, M. le Président, c'est un combat qu'on a livré en cette Chambre. Donc, une prime d'assurance médicaments qui a doublé. M. le Président, malgré tous les bons discours, les beaux discours que vont nous livrer nos amis d'en face, c'est évident que cette augmentation des primes d'assurance médicaments a un effet concret dans la vie des personnes âgées au Québec, a un effet concret qui est souvent néfaste et dévastateur pour les clientèles qui sont en plus mauvaise posture sur le plan économique et sur le plan financier. Ça, ça veut dire concrètement qu'il y a des personnes âgées au Québec qui ne peuvent pas prendre leurs médicaments à l'heure où on se parle. Et ça, ça semble, M. le Président, en termes de préoccupations, à mille lieux ? à mille lieux ? du gouvernement qui est en face de nous. Pourtant, ça, c'est vraiment des réalités avec lesquelles les personnes âgées doivent composer au Québec à chaque jour.

Autre nouvelle taxe, M. le Président, c'est celle qui concerne bien sûr la taxe de vente du Québec qui est passée de 6,5 % à 7,5 % au Québec. Une autre taxe, celle sur les produits du tabac, hein, 19 millions de dollars annuellement depuis 1997. Ça, c'en est une autre, taxe, qui touche les Québécois et les Québécoises. Financement des investissements routiers. Bien, on est venu en chercher un peu plus dans vos poches en taxant davantage, donc, au niveau de vos immatriculations, hein. Pendant qu'évidemment on vient en chercher un peu plus dans vos taxes pour les immatriculations, bien le réseau routier, lui, est toujours dans un piteux état, M. le Président, il est toujours dans un piteux état et particulièrement dans les régions du Québec. Et c'est mon collègue le député de Shefford, le critique au niveau des transports, qui le soulignait avec une image, je pense, qui en disait long sur le laxisme que déploie ce gouvernement en matière de transports. C'est qu'au Québec, M. le Président, on est à la veille d'avoir comme symbole le nid de poule, hein, c'est mon collègue le député de Shefford qui disait ça très justement, tellement le réseau routier est dans un état lamentable partout au Québec.

M. le Président, autre taxe, c'est celle sur les pneus neufs. Alors, on va chercher, on siphonne 14 millions de dollars dans les poches des contribuables au Québec avec cette nouvelle taxe. Taxe maintenant sur les véhicules de luxe. Non-indexation des tables d'impôt, M. le Président, ça, c'est beaucoup d'argent. Taxe pour le Fonds de lutte à la pauvreté. Encore une fois, M. le Président, le Fonds de lutte à la pauvreté, c'est une bonne mesure, mais pourquoi avoir choisi de taxer les Québécois et les Québécoises pour financer un fonds comme celui-là?

Taxes sur l'essence qui est un dossier extrêmement important au Québec, pour lequel mon collègue le député de Kamouraska-Témiscouata a fait plusieurs interventions. Vous vous souviendrez, M. le Président, que notre formation politique a déposé en cette Chambre une pétition de 12 000 signataires, 12 000 Québécois et Québécoises qui, dans les régions du Québec, ont réclamé et réclament toujours une diminution des taxes sur l'essence parce que les prix sont importants. Mais, au-delà des prix, lorsqu'on creuse un peu plus la structure entourant les prix à la pompe, on se rend compte qu'il y a pratiquement plus de 50 % du prix qui sont dévolus aux taxes fédérales et provinciales.

Alors, M. le Président, un gouvernement qui est responsable, un gouvernement qui est à l'écoute des citoyens et des citoyennes, un gouvernement qui est à l'écoute des contribuables devrait avoir un peu de respect et de compassion pour les hommes et les femmes du Québec et prendre des dispositions justement pour qu'on puisse soulager le fardeau des contribuables du Québec, et ça passerait notamment par une réduction des taxes sur l'essence. C'est donc le message que nous avons livré en cette Chambre. C'est le message, la demande que vont continuer de livrer les citoyens et les citoyennes du Québec.

Et, à cet égard, vous me permettrez de rappeler à juste titre ce que soutenait mon collègue le député de Kamouraska-Témiscouata dernièrement, en citant la députée bloquiste de Rimouski, M. le Président, qui, elle aussi, hein... Ça, on sait que les bloquistes, c'est les grands frères des péquistes à Ottawa, hein, c'est le bras des péquistes à Ottawa. Alors, les bloquistes, par la voix de leur députée de Rimouski, ont aussi convenu qu'il était temps, au Québec, de réduire les taxes sur l'essence. Alors, on souhaiterait évidemment que le gouvernement du Parti québécois, s'il refuse d'écouter les propositions que nous lui formulons, s'il refuse d'écouter des millions de citoyens qui font cette demande depuis plusieurs mois, bien qu'il écoute minimalement ? qu'ils écoutent minimalement ? le parti du Bloc québécois et les députés qui en sont membres.

Alors, ma collègue a fait l'énumération ? et la liste est encore très longue, M. le Président ? de ces 17 nouvelles taxes. Mais vous me permettrez quand même de la citer, puisqu'elle termine son texte très justement en soulignant la chose suivante: «Après ces 17 nouvelles taxes, elle dit, bref, le gouvernement du Parti québécois, avec Bernard Landry, a plutôt choisi les subventions aux entreprises.» Soit dit en passant, M. le Président, ces fameuses subventions aux entreprises qui s'adressent à des entreprises qui n'en ont pas besoin, ma collègue a eu aussi l'occasion d'en faire la démonstration avec des entreprises qui empochent des millions de profits par année mais qui, pourtant, reçoivent un appui financier de la part de ce gouvernement qui est en face de nous. «Il est paradoxal, ajoute-t-elle, de le voir aujourd'hui se transformer en saint Vincent de Paul, lui qui a depuis quatre ans frayé les plus cossus de ce monde. C'est juste que le Parti québécois n'a pas les bonnes priorités.»

Alors, M. le Président, c'est ça, le Parti québécois n'a pas les bonnes priorités. Et je pense qu'il faut s'insurger contre un projet de loi comme celui-là, parce que tous les députés qui sont ici, et en particulier les députés qui vivent dans certaines régions qui connaissent des difficultés, savent très bien ? le savent très bien ? que les priorités de leur gouvernement ne correspondent pas ou ne répondent pas aux attentes et aux besoins qui sont formulés par les gens qui sont en région.

M. le Président, parlant de régions, on écoute évidemment régulièrement, bien sûr avec attention, les réponses formulées par le premier ministre et le ministre des élections, et je dois vous dire que le discours triomphaliste des péquistes en matière de développement régional et rural détonne d'une façon absolument remarquable d'avec la réalité. Vous me permettrez de prendre quelques minutes pour vous faire la démonstration suivante. Parce que, nous aussi, on a regardé les chiffres d'un peu plus près, et alors que le ministre des élections tente de nous faire croire que le taux de chômage a diminué dans plusieurs régions du Québec, bien, nous, ce qu'on a constaté, M. le Président, c'est que, dans 11 régions du Québec sur 17, entre 1996 et 2001, les écarts au niveau du chômage, par rapport à la moyenne provinciale, se sont donc agrandis. En d'autres termes, M. le Président, ce que ça veut dire, c'est que le fossé entre les régions du Québec et les grands centres s'est creusé sur le plan économique.

Je vous donne un exemple concret: Abitibi-Témiscamingue, M. le Président, entre 1996 et 2001 ? 1996, il faut bien se rappeler que c'est l'année où Bernard Landry est arrivé au poste de...

Une voix: Ministre des Finances.

n(15 h 50)n

Mme Normandeau: ...ministre des Finances, voilà, merci, cher collègue; donc Bernard Landry, le premier ministre, est arrivé, a pris les commandes de l'économie du Québec ? alors, en Abitibi-Témiscamingue, M. le Président, l'écart s'est creusé par rapport au chômage, à la moyenne provinciale, de 89 % à 138 %; pour la région du Bas-Saint-Laurent, l'écart s'est creusé de 119 % à 151 %; même chose pour le Centre-du-Québec, où l'écart est passé de 109 % à 141 %; pour la Côte-Nord et le Nord-du-Québec, même chose, même portrait, l'écart est passé de 128 % à 168 %; pour la Gaspésie?Îles-de-la-Madeleine, c'est la région qui, sur le plan économique... est la région au Québec qui bat tous les records, et c'est vraiment loin d'être réjouissant, l'écart est passé de 173 à 255 %; et, en terminant, les Laurentides, un autre exemple, donc on parle de 109 % à 128 %. Et ce qui est étonnant dans le cas des Laurentides, c'est que l'écart donc s'est creusé au même moment où, lui, le taux de chômage a diminué de quelques pour cent.

C'est donc dire, M. le Président, que le discours triomphaliste des péquistes, lorsqu'on va creuser, gratter un peu plus la réalité, donc on se rend compte qu'on est vraiment très loin de l'optimisme que déploient les membres du gouvernement du Parti québécois pour ce qui est des efforts qui sont consentis au Québec en matière de développement économique, régional et rural.

M. le Président, cette réserve qui est constituée, ce fonds Bernard-Landry qui est constitué aussi a certains antécédents. Et on se souviendra tous des 841 millions qui ont été placés à Toronto, cette fameuse banque où on a fait dormir des millions de dollars pendant que les besoins étaient criants autant au niveau de la santé, de l'éducation qu'au niveau des régions. Les organismes sans but lucratif qui ont été créés l'année passée, qui ont permis de planquer plus de 600 millions de dollars, même un peu plus. Il y a des organismes sans but lucratif qui ont été créés dans un délai d'à peu près 48 heures. La Société de développement économique régionale... C'est mon collègue tout à l'heure qui citait le président de cette fameuse Société de développement économique régional, qui dit: On a eu 48 heures pour s'organiser, pratiquement. Alors, ce qu'on a appris dans le budget qui a été déposé, sur les 50 millions qui ont été dévolus à cette Société de développement économique régional, il y a seulement 1,7 million qui a été dépensé. Mais, si le gouvernement qui est en face de nous était conséquent avec ses actions et ses paroles, la Société de développement économique des régions, bien on lui mettrait la clé dans la porte. Pourquoi? Parce qu'on confierait aux régions du Québec, si on leur fait confiance, la gestion des 50 millions de dollars qui ont été donnés à la Société de développement économique des régions.

En terminant, M. le Président, vous me permettrez donc de joindre ma voix à celle de mes collègues, et en particulier ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, pour vous dire à quel point le gouvernement qui est en face de nous est complètement déconnecté de la réalité. Et la solution, la solution à la prochaine élection, bien elle est pas compliquée, c'est de faire comprendre aux hommes et aux femmes du Québec, c'est de faire comprendre aux contribuables du Québec qu'il est grand temps qu'on retourne les députés du Parti québécois sur les banquettes de l'opposition. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, ça me fait plaisir d'intervenir dans le débat du principe du projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents, Bill 11, An Act to establish a budgetary surplus reserve fund.

Et, à première vue, l'exercice qui est devant nous aujourd'hui, ça a l'air très simple, on est en train de créer un fonds de 950 millions de dollars que le gouvernement peut dépenser presque quand il veut, comme par exemple à la veille d'une élection. Mais, si on va un petit peu plus loin, qu'est-ce qu'on est en train de faire ici, c'est de remettre en question le devoir le plus fondamental des 125 députés de l'Assemblée nationale. Parce que, si on rappelle un petit peu notre histoire de notre Assemblée dans le XIXe siècle, peut-être le moment le plus important, c'était la victoire du pouvoir législatif d'avoir un mot à dire sur les dépenses du pouvoir exécutif. Et l'arrivée du gouvernement responsable en 1848 était effectivement une bonne nouvelle pour les membres de cette Assemblée, parce que nous avons enfin eu le contrôle sur où va l'argent des contribuables. Et, avant tout, je pense, notre devoir de base, notre devoir principal ici, en Chambre, c'est d'avoir une bonne idée où va l'argent que les citoyens et citoyennes de nos comtés paient année après année à l'État, au gouvernement du Québec. Alors, qu'est-ce qu'on est en train de faire ici, c'est de remettre en question ce principe de base que je trouve fondamental, et je m'explique.

À chaque année, au printemps, c'est la session qui touche les finances publiques, c'est vraiment la session importante: il y a dépôt d'un budget, il y a dépôt d'un livre de crédits, et chaque étape occasionne un débat devant nos commissions parlementaires et ici, en Chambre. Il y a un débat ici, dans le salon bleu, d'une quinzaine d'heures sur le débat sur le budget, un autre cinq heures est accordé sur le livre des crédits, et il y a 200 heures qui sont accordées en commission parlementaire pour mieux comprendre les choix et les priorités de ce gouvernement. Alors, pour un député, c'est vraiment la saison la plus importante pour, comme je dis, répondre à la question la plus fondamentale: Où va l'argent des contribuables? Alors, comme je dis, je trouve que c'est vraiment notre devoir primordial.

Mais qu'est-ce qu'on a vu cette année? Cet exercice devient de plus en plus compliqué, et je veux ajouter ces éléments aussi pour mieux comprendre le contexte du projet de loi n° 11. L'année passée, nous avons adopté une réforme de l'administration publique, le projet de loi n° 82 qui a été adopté, qui a introduit d'autres éléments qui en principe sont louables. Le deal, si vous voulez, qu'on veut faire avec la fonction publique québécoise, c'est de laisser plus de flexibilité, plus de marge de manoeuvre dans la gestion des fonds publics. Mais qu'est-ce qu'on demande? C'est une meilleure reddition de comptes. On veut une plus grande transparence, on veut s'assurer que les législateurs, les parlementaires, les députés sont bien informés des choix qui ont été faits, des dépenses faites par l'argent du gouvernement. Alors, ça, c'est le projet de loi n° 82 qui comprend déjà des idées qui sont difficiles pour un parlementaire à suivre, des idées comme les crédits au net.

Moi, j'ai eu l'occasion de questionner l'ex-président du Conseil du trésor, l'ancien député de Labelle, Jacques Léonard, à maintes reprises pour m'expliquer c'est quoi, un crédit au net. Je ne suis pas plus avancé, mais peut-être qu'un jour je vais saisir. Mais c'est un effort de comprendre c'est quoi, la notion d'un crédit au net. On a la notion des crédits étalés sur quelques années qui se trouvent maintenant dans nos livres de crédits. Alors, de suivre les dépenses du gouvernement, pour les parlementaires, est déjà de plus en plus complexe. Et même le gouvernement a eu des misères à le faire parce que, chose que je n'ai jamais vue comme parlementaire, ils ont dû même corriger le livre des crédits en déposant une autre feuille, parce que, quand on regarde le montant consacré à la Famille et à l'Enfance, le soutien qu'on donne aux familles québécoises, il y avait une erreur d'un tout petit 150 millions de dollars. Alors, c'est pas juste les députés de l'opposition qui trouvent que le nouveau contexte pour comprendre les chiffres qui sont présentés en Chambre par ce gouvernement est de plus en plus complexe, même le Conseil du trésor a eu des misères à comptabiliser 150 millions de dollars. Moi, je trouve que c'est toujours beaucoup d'argent, 150 millions de dollars. Alors, je pense qu'on a tout intérêt d'avoir une certaine rigueur quant à sa gestion.

Mais, si on ajoute à ça la pratique courante depuis une couple d'années d'arriver, comme le 27, le 28, le 29 mars, avec des crédits supplémentaires pour l'année en cours, alors il y a la fiction pure, M. le Président. Cette année, c'était à la hauteur de 600 millions de dollars, les crédits supplémentaires qui étaient déposés 48 heures avant la fin de l'année financière. Alors, quoi en croire? Qu'il y avait vraiment des dépenses tous azimuts à travers les ministères ou c'est vraiment l'argent qu'on a mis dans le budget de 2000-2001 qui va être dépensé dans l'an 2001-2002?

Et la preuve de ça, c'est d'essayer de comprendre ? c'est une toute petite ligne dans le budget, mais très importante pour les personnes qui aiment la lecture ? l'effort de ce gouvernement de soutenir le livre et la lecture au Québec. Parce qu'on a gonflé artificiellement les dépenses de l'année passée à 32 millions, cette année on a coupé ça à 18 millions, mais ça a pris comme une demi-heure en commission parlementaire pour arriver qu'on n'a rien ajouté, on n'a rien coupé, c'est plus ou moins 25 millions de dollars par année.

n(16 heures)n

Mais ça devient de plus en plus difficile de faire l'exercice très important pour les députés, c'est-à-dire de comparer les comparables, parce qu'on prend les chiffres de l'année passée, on les gonfle artificiellement, on baisse les chiffres de cette année. Alors, le net-net, c'est une confusion plus ou moins totale pour essayer de comprendre les choix budgétaires qui ont été faits par ce gouvernement.

Et qu'est-ce qu'on est en train de faire, ici? C'est ajouter un autre niveau de complexité dans tout ça en créant une réserve budgétaire. Une réserve budgétaire, quel langage poétique pour expliquer que ce qu'on veut créer, c'est 1 milliard de dollars plus ou moins, 950 millions ou... Et je pense qu'il faut le lire, M. le Président, l'article 2, pour voir à quel point c'est balisé, la rigueur de gestion de ce fonds: «La réserve ne peut être utilisée que pour des projets d'immobilisations et d'autres projets dont la réalisation a une durée déterminée.» Bien, il y a assez de marge de manoeuvre dans tout ça. Mais, au moins, ça se comprend qu'on a quelque chose, que c'est pas n'importe quoi qu'on va trouver dans ce fonds, il y a une certaine balise.

Sauf qu'il y a le deuxième paragraphe. Il faut toujours lire le deuxième paragraphe. Et le deuxième paragraphe se lit comme suit: «Toutefois, lorsque le gouvernement estime que l'intérêt public l'exige, il peut autoriser des projets autres que ceux prévus au premier alinéa.» Alors, on peut faire n'importe quoi. Au moins, dans l'ancien exercice... Parce que c'est pas un scandale si, pendant l'année, le gouvernement change ses priorités budgétaires. Il y a le changement de contexte, peut-être que l'économie a changé. Alors, si, en cours de route, après les prévisions, le budget qui a été déposé au printemps, on arrive à l'automne et je dis: Il y avait des changements, mes dépenses pour l'aide sociale, par exemple, sont augmentées, donc c'est tout à fait normal et responsable que, dans ces circonstances, le gouvernement va revenir ici, en Chambre, va déposer les crédits supplémentaires. L'ensemble des 125 députés auront l'occasion, dans un débat statutaire de huit heures, de poser des questions sur les crédits supplémentaires. C'est de la saine gestion, c'est ouvert, c'est transparent, c'est démocratique et ça nous donne, comme parlementaires, la possibilité de faire notre devoir, de poser les questions sur la dépense de l'argent public.

Mais on remplace ça avec quoi? C'est quoi? Qu'est-ce qu'on trouve dans le projet de loi n° 11 comme reddition de comptes pour bien informer les parlementaires? Article 7: «Le ministre fait rapport annuellement à l'Assemblée nationale de l'état des opérations de la réserve pour chacun des volets.» Pas d'obligation de débat en Chambre, pas d'obligation de référer ce rapport d'une façon automatique à la commission des finances publiques pour faire un examen, pour faire un débat, des choses qui sont fondamentales, parce que 950 millions de dollars, c'est une somme très importante. Ici, on est en train de créer un fonds de 950 millions de dollars. Je pense qu'il faut créer en même temps un droit de regard pour les parlementaires afin que le législateur ait l'occasion de questionner le pouvoir exécutif, qu'est-ce qu'il entend faire avec 1 milliard de dollars. C'est 2,5 % de l'ensemble des dépenses de programmes du gouvernement qui sont consacrés à ce fonds, alors c'est énorme.

Mais, comme je dis aussi, ces 2,5 % faussent également notre examen et notre débat sur à quel point ce gouvernement est rigoureux dans le contrôle des dépenses publiques, parce que, on regarde, on a quelques chiffres déjà pour l'argent dépensé l'année passée, on peut commencer avec la somme annoncée en mars 2000, on peut ajouter à ça les crédits supplémentaires d'octobre 2000, on peut ajouter d'autres crédits supplémentaires qui ne sont pas vraiment des crédits supplémentaires. Alors, c'est la confusion totale. Mais je pense qu'on a une marge, maintenant, et on peut dire que, cette année, le gouvernement, dépendant du montant dans cette réserve qu'il va utiliser, va augmenter ses dépenses de 3 à 5,5 %, ce qui est une augmentation très importante. Si qu'est-ce qu'on cherche pour donner aux contribuables l'occasion d'avoir un petit peu de répit...

Il y a le concours maintenant entre le premier ministre et le chef de l'opposition officielle pour dénoncer le fait qu'on est les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord. Il y a juste une seule différence, M. le Président, que je trouve très importante pour le moment ? et je souligne «pour le moment»; le premier ministre est dans une position où il peut faire quelque chose pour corriger la situation ? pour le moment, le chef de l'opposition n'a pas ce pouvoir, mais bientôt on espère qu'il aura l'occasion de corriger le tir avec une équipe libérale. Mais, pour le moment, comme j'ai dit, c'est uniquement le premier ministre, avec le ministre des Finances, qui peut corriger la situation, qui peut corriger le fardeau fiscal que nous devrons supporter comme contribuables au Québec.

Le premier ministre, il rend ça presque comme une blague de répéter que c'était désastreux, c'était affreux, etc., mais il faut rappeler aux personnes qui nous écoutent, M. le Président, que M. le premier ministre peut changer les choses. Il peut abaisser les impôts, et ça, c'est l'autre chose dont, je trouve, on n'a pas eu l'occasion de faire le débat. Nous avons, d'une façon unanime, je pense, il y a deux, trois ans, adopté la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire, qui était un effort fort louable de s'assurer un équilibre budgétaire et d'indiquer qu'il faut mettre en priorité la lutte contre les dettes, qui est une des autres choses qu'on peut faire avec l'argent. Alors, il y a des choix qu'on peut faire avec 1 milliard de dollars. On peut baisser davantage les impôts, ce qui, je pense, était réclamé par, entre autres, ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys avec beaucoup d'éloquence au moment des débats sur le budget, ou on peut davantage s'attaquer au problème de dette, parce que, cette année, les coûts pour le service de dette pour le gouvernement du Québec sont 7,9 milliards de dollars. Alors, c'est 80 % du budget du ministère de l'Éducation. On va payer ça au service de dette. C'est la moitié du budget du ministère de la Santé et des Services sociaux. Alors, c'est une somme très importante que nous devrons consacrer au service de la dette. Alors, ça, c'est un choix qu'on pouvait faire.

On pouvait dire: Avec 1 milliard de dollars, plutôt que laisser ça dans une réserve sans balises, sans vraiment de contrôle des parlementaires sur son utilisation, on peut mettre ça pour réduire d'une façon plus importante la dette accumulée par les gouvernements des deux côtés de la Chambre. C'est un héritage bipartisan, puis on a fait les déficits pendant des années. On a une dette, il faut s'attaquer à ça. Alors, peut-être que ce serait une priorité.

L'autre priorité aussi, c'est la question de baisser les impôts, parce que l'écart qu'on paie entre les taxes au Québec et l'Ontario se creuse davantage, et, moi, je suis très sensible pour être concurrent, pour s'assurer que les professionnels restent au Québec. C'est un élément dans la décision. Moi, j'ai parlé, dans mon comté, à une couple de jeunes infirmières, et le choix devant elles est très important, parce que, si elles vont travailler à Cornwall ? il ne faut pas aller trop loin, M. le Président ? elles vont gagner entre 8 000 et 10 000 $ de plus par année et payer 4 000 ou 5 000 $ de moins en taxes, en impôts. Alors, ça commence à être un écart très important pour une jeune infirmière au début de sa carrière. Et, comme j'ai dit, c'est pas qu'il faut aller à l'autre bout du monde, une heure sur la 401 et nous sommes à Cornwall, à Kingston, à Ottawa.

Nous avons récemment rencontré nos vis-à-vis les parlementaires de l'Ontario, et une des présentations qui étaient faites, c'était par le directeur général de la Régie régionale de l'Outaouais. Et, effectivement, un des problèmes transfrontaliers, c'est le fait qu'il y a beaucoup de pression sur les hôpitaux à Ottawa afin d'avoir les infirmières et les effectifs médicaux bilingues. Et c'est où, l'endroit le plus facile afin de les trouver? À Hull. Avec les salaires et avec le régime fiscal que le gouvernement de l'Ontario peut offrir à ces infirmières, ça devient de plus en plus un problème grave dans l'Outaouais, mais à travers le Québec, parce que les conditions de travail et le régime d'imposition sont nettement plus intéressants dans d'autres provinces. C'est ça, la vérité, et ça, c'est une autre chose qu'on peut faire.

n(16 h 10)n

Mais, au lieu de faire ça, comme j'ai dit, on a 1 milliard de dollars, 2,5 % du budget. On a dit: Ah! on va regarder ça. Peut-être qu'on veut faire une élection, peut-être qu'on veut faire autre chose. On va le mettre là. Moi, je pense que, au niveau du contrôle des parlementaires, au niveau du contrôle des députés, c'est une nette perte de pouvoirs, de droit de regard sur cet argent, parce que, comme j'ai dit, dans le régime actuel, aujourd'hui, quand le gouvernement change ses priorités budgétaires ? ce qu'il a le droit de faire en tout temps ? dans la mécanique actuelle, il présente les crédits supplémentaires, il y a un débat de huit heures ici, en Chambre, et on a l'occasion de vérifier, de regarder les choix qui ont été faits. Maintenant, j'ai lu le projet de loi n° 11, il n'y a comme aucun contrôle. Le ministre des Finances, le président du Conseil du trésor et d'autres ministres intéressés peuvent décider de faire n'importe quoi. C'est ça, l'article 2, un projet d'intérêt public. Assez large, M. le Président, comme définition. Alors, il y aura un an pour dépenser ces argents sans faire rapport à l'Assemblée nationale.

Alors, on peut cautionner ça, on peut dire que ça, c'est un grand pas en avant, mais, moi, je ne le crois pas, M. le Président. Je pense que c'est mettre encore une fois en question le droit de regard des députés sur le pouvoir de dépense du pouvoir exécutif. Alors, je pense que c'est un net recul. Et, quand on additionne ça aux difficultés déjà existantes dans la réforme de l'administration publique, avec les crédits au net, avec les crédits étalés sur certaines années, ça devient de plus en plus difficile, comme j'ai dit, de comparer les choix qui ont été faits par ce gouvernement.

In conclusion, Mr. Speaker, Bill 11, on the surface, looks like it's something easy. We're creating a fund of $950 million which will allow the Executive Branch, the Minister of Finance, the President of the Treasury Board and other ministers to spend more or less however they please. There are very few restrictions in the bill before us today on how the Government is going to spend the money. And instead of doing one of two things, using some of that money to pay down the debt, which costs almost $8 billion a year for taxpayers ? to pay the debt service costs, $8 billion ? or to reduce our taxes, because, as we all know, Quebeckers are the most taxed individuals in North America, the Government has maintained this paternalist attitude that we know better than Quebeckers how to use their money. So, we'll have this nice little billion hanging around. Who knows what kind of projects might come along that we might find interesting on the eve of an election? We'll keep that money to ourselves, as opposed to either returning it directly into the pockets of the taxpayer or using it indirectly to pay down the debt, which would free up more money to be used to pay for health services and other things that Quebeckers desperately need. But the Government has decided: We know best, we're not gonna listen to Parliament. We're not gonna listen to the people who are elected, we're gonna decide on our own how to spend this money.

For this reason, I will be joining with my colleagues to vote against Bill 11 because I think it reduces the power of the Parliament to oversee the spending of the Executive Branch. I think it's a setback for the Parliament, for the power of each and everyone of us in this House to keep an eye on how the Government is spending the taxpayers' money. Thank you very much.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier.

Mme Houda-Pepin: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît.

Mme Houda-Pepin: Pourriez-vous vérifier si nous avons quorum?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il nous manque quelques personnes. S'il vous plaît, si vous voulez sonner quelques minutes.

Nous allons suspendre quelques instants.

n(16 h 14 ? 16 h 15)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Y a-t-il un intervenant?

Des voix: Non.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il n'y a pas d'intervenant, on va mettre le projet de loi au vote.

Mme Houda-Pepin: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Madame? Alors, Mme la députée de La Pinière, je vous cède la parole.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais intervenir sur le projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents. Ce projet de loi a été déposé par la nouvelle ministre des Finances, et ma collègue la critique en matière de finances et députée de Marguerite-Bourgeoys a bien argumenté au nom de l'opposition officielle. Elle a présenté, en tout cas, des éléments qui sont assez forts pour démontrer à quel point ce projet de loi est un projet de loi alambiqué, qui ne répond pas nécessairement aux critères auxquels on peut s'attendre dans l'adoption d'une législation, c'est-à-dire l'intérêt public, mais qui répond à un autre critère qui est l'intérêt du parti au gouvernement.

Alors, M. le Président, de quoi s'agit-il? Il s'agit d'un projet de loi qui vise à constituer une réserve pour l'affectation d'excédents, et ce projet de loi édicte les règles applicables à l'affectation d'excédents à la réserve. Il vise également à constituer des comités ministériels pour la sélection des projets qui seraient financés par ce fonds de réserve là, et, évidemment, le tout étant fait de façon à soustraire ce fonds-là au contrôle des parlementaires, puisque c'est par simple dépôt d'un rapport à l'Assemblée nationale que les parlementaires en seraient informés.

Lorsqu'on regarde très rapidement Le Petit Robert, il nous dit, au chapitre de la réserve, ce qui suit: «Quantité accumulée de manière qu'on puisse en disposer et la dépenser au moment le plus opportun.» Alors, retenons les termes «quantité accumulée de manière qu'on puisse en disposer et la dépenser au moment le plus opportun». Ça veut tout dire, M. le Président, et ça résume les intentions que la ministre des Finances et ce gouvernement ont par rapport au dépôt du projet de loi n° 11.

M. le Président, il ne fait aucun doute dans l'esprit de tous qu'à la veille d'une élection le gouvernement dépose un projet de loi pour se constituer une réserve de 950 millions de dollars. 950 millions de dollars, c'est près de 1 milliard de dollars qui va être soustrait au contrôle des parlementaires et qui va être mis dans une réserve qui, comme le dit Le Petit Robert, sera dépensée au moment le plus opportun, et on comprendra que le moment le plus opportun pour le gouvernement actuel, c'est évidemment à la veille d'une élection.

D'où vient cet argent, 950 millions de dollars, presque 1 milliard de dollars? Eh bien, cet argent, c'est l'argent des contribuables. Ce sont les surplus qui ont été réalisés au cours de l'exercice dernier, M. le Président. De quoi s'agit-il essentiellement? Le projet de loi n° 11 constitue une réserve suite à l'annonce du budget du 29 mars 2001 où la ministre des Finances a engouffré, dans ce fonds-là, dans cette réserve, comme je le disais tantôt, près de 1 milliard de dollars. Ce projet de loi précise que c'est la ministre des Finances qui détermine les excédents qui seront affectés à cette fameuse réserve.

n(16 h 20)n

M. le Président, nous étions habitués, dans nos règles d'exercice budgétaire, à un certain nombre de méthodes et de pratiques où les parlementaires pouvaient questionner l'exécutif sur la façon de gérer les fonds publics. Le gouvernement ? et j'ai amené avec moi une copie du budget de dépenses 2000-2001 ? il pouvait aussi déposer un livre de crédits pour des crédits supplémentaires, et nous avons, comme parlementaires des deux côtés de la Chambre, l'opportunité de questionner le gouvernement, le ministre responsable, sur les motivations qui justifient ces surplus et ces crédits supplémentaires. Mais, avec le projet de loi qui est devant nous, l'argent qui va être dans cette réserve et qui, pour le moment, est de l'ordre de 1 milliard de dollars, mais qui va se faire fructifier également, eh bien, cet argent-là, il va être soustrait aux règles de l'exercice budgétaire auxquelles nous sommes habitués. C'est une perte de pouvoirs pour nous comme parlementaires et, juste pour cet aspect-là, c'est inacceptable.

Le projet de loi, M. le Président, spécifie que les sommes affectées à la réserve doivent être déposées à la Caisse de dépôt et de placement qui agira en tant que fiduciaire. En même temps, et ça, c'est une chose très intéressante, ce projet de loi prévoit à la fois la chose et son contraire. Dans le même article, il stipule que les fonds de réserve ainsi constitués seront utilisés pour des projets d'immobilisation et d'autres projets à durée déterminée. Et je suis ici à l'article 2 du projet de loi. Que dit l'article 2 du projet de loi? Il dit ceci: «La réserve ne peut être utilisée que pour des projets d'immobilisations et d'autres projets dont la réalisation a une durée déterminée.» On peut comprendre ça, bien que le processus par lequel le gouvernement veut agir soit à nos yeux inacceptable. Mais, dans le même article, quand je disais que le gouvernement parle des deux côtés de la bouche, il dit la chose et son contraire. Dans le même article, le deuxième alinéa dit ceci: «Toutefois, lorsque le gouvernement estime que l'intérêt public l'exige, il peut autoriser des projets autres que ceux prévus au premier alinéa.» Donc, il peut autoriser toutes sortes de projets, même si la raison d'être de cette réserve était de créer finalement un fonds pour les immobilisations et les projets dont la réalisation a une durée déterminée.

Alors, on le voit, M. le Président, c'est un paravent, le projet de loi n° 11, c'est un paravent pour permettre au gouvernement d'agir à sa guise, à l'abri de la vigilance des parlementaires, à l'abri de l'imputabilité, et ça, c'est inacceptable. Et, en guise de transparence, on a un petit cadeau dans le projet de loi n° 11. En guise de transparence, le projet de loi prévoit que la création des comités ministériels, c'est elle qui va... C'est ces comités ministériels qui auront pour mandat de sélectionner des projets, comme si la constitution de comités ministériels était garante de la transparence, était garante de l'imputabilité. C'est là qu'on a des graves problèmes, et ce n'est pas la première fois. Depuis le dernier budget et depuis que ce gouvernement est au pouvoir, on a assisté à des pratiques qui sortent des normes comptables qu'on connaît, et ça a été questionné et critiqué par le Vérificateur général.

Comment sommes-nous arrivés là? Qu'est-ce qui justifie un tel stratagème? Parce que le projet de loi, c'est un stratagème, M. le Président. C'est rire des parlementaires de déposer un projet de loi de cette nature, libellé de la façon dont il est libellé, pour

permettre au gouvernement d'agir à sa guise, à l'abri du contrôle des parlementaires, des commissions parlementaires, et le tout se fait à la veille d'une élection. Donc, comment sommes-nous arrivés là? Rappelons le contexte, le contexte d'une autre astuce qui consiste à créer de toutes pièces, à quelques jours de la fin de l'exercice financier de l'année dernière, une panoplie d'OSBL ? les OSBL, c'est les organismes sans but lucratif ? dans lesquels le gouvernement a transféré 730 millions de dollars. C'est pas de la petite bière, c'est beaucoup d'argent, 730 millions de dollars qui ont été distribués à des organismes fictifs jusqu'alors, qui ont été créés spécialement pour justifier ces transferts de fonds afin de les soustraire encore une fois au contrôle des parlementaires.

Selon le Vérificateur général, il y a à peine 10 millions de dollars qui ont été dépensés de ce 730 millions de dollars. Il reste donc 720 millions de dollars qui dorment dans des coffres du gouvernement sous prétexte qu'ils ont été octroyés à des organismes sans but lucratif. Le Vérificateur général a d'ailleurs été très critique quant aux méthodes que le gouvernement utilise pour gérer les fonds publics. Ces méthodes sont désormais connues: c'est le manque de transparence, c'est l'arbitraire et c'est le retour de l'ère du patronage.

Cette réserve de 950 millions de dollars est une marge de manoeuvre non pas pour les Québécois, non pas pour les contribuables, mais pour le gouvernement du Parti québécois à la veille d'une élection générale, M. le Président. C'est une marge de manoeuvre qui va lui permettre de choisir les projets qu'il veut financer selon les critères qu'il se donne lui-même, en toute impunité et en toute partisanerie, on le dira, qui lui permettra de saupoudrer de l'argent à travers le Québec dans différents projets qu'il aura lui-même choisis en fonction des dividendes politiques qu'il va recueillir. Donc, le projet de loi n° 11, comme l'a dit ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys, c'est une véritable caisse électorale pour acheter le vote des Québécois, c'est une porte ouverte sur l'arbitraire, et ça, c'est inacceptable.

Et, si mes collègues d'en face n'acceptent pas la parole de l'opposition, les critiques de l'opposition, on va leur citer quelqu'un qui n'est pas partisan et qui a une plume, qui écrit dans un journal, Le Soleil, Le Soleil du 30 mars 2001, Jean-Jacques Samson, qui écrit ceci ? vous me permettrez de le citer: «Faut-il rappeler ? à la ministre des Finances ? que des surplus n'existent pas en finances publiques? Lorsque des excédents sont enregistrés en fin d'exercice, ils appartiennent à ceux qui ont été trop cotisés par rapport à une performance de l'économie volontairement sous-évaluée l'année précédente et aux besoins réels de l'État, votés par le Parlement. Ils devraient alors en priorité leur être retournés ou servir à rembourser la dette.

«Or, sur un excédent officiel de 1,4 milliard de dollars pour 2000-2001, la ministre affecte 500 millions au remboursement de la dette et près du double, 950 millions, pour des dépenses discrétionnaires à inventer ? c'est pas l'opposition officielle qui parle, ici. Le ministère des Finances a ainsi trouvé une nouvelle façon pour contourner la loi après que le Vérificateur général eut dénoncé la création de fonds sociaux pour parvenir aux mêmes fins. Mme Marois aurait pu faire beaucoup mieux en réduction d'impôts.»

M. le Président, ça, c'est le témoignage et l'opinion de Jean-Jacques Samson, du Soleil.

n(16 h 30)n

Rappelons l'autre astuce où l'ancien ministre des Finances a transféré 841 millions de dollars dans la Banque de Toronto-Dominion à Toronto, 841 millions de dollars qui étaient destinés au financement de la santé. Alors, faisons le compte: 720 millions qu'il nous reste du transfert à des OSBL créés de toutes pièces à la fin de l'exercice financier. 720 millions. 841 millions de dollars qui ont été transférés et cachés dans une banque de Toronto-Dominion alors que la ministre de la Santé de l'époque, qui est actuellement ministre des Finances, n'était même pas au courant que son collègue, actuel premier ministre et ancien ministre des Finances, lui a joué comme un tour de passe-passe. Ajoutez à cela le 950 millions de dollars que le gouvernement constitue sous forme de réserve, et ça fait, ça, M. le Président, beaucoup d'argent, beaucoup de millions de dollars que le gouvernement pourrait utiliser à sa guise, les dépenser en période électorale.

M. le Président, lorsqu'on regarde où vont ces fonds de réserve, la santé aura un fonds de 600 millions de dollars; l'éducation, 200 millions de dollars; la solidarité sociale, 100 millions de dollars; et la recherche, 50 millions de dollars. Mais les besoins sont connus et archiconnus. Dans le domaine de la santé, ça crie de partout. Dans le domaine de l'éducation, ça crie de partout. Comment le gouvernement peut-il, moralement, garder des surplus, les transférer dans des réserves, les transférer dans des OSBL quand les besoins sont criants? Qu'est-ce qu'on répond, M. le Président, qu'est-ce qu'on répond aux citoyens, aux malades? Est-ce qu'il y a quelqu'un de l'autre côté qui comprend la réalité que vivent les citoyens du Québec?

Dans ma région, la Montérégie, on a besoin de 200 millions de dollars pour donner des soins adéquats à nos malades, 200 millions de dollars qui manquent au chapitre de l'équité interrégionale au niveau du financement de nos établissements et de nos services. Dans une seule région, 200 millions de dollars. De ce chiffre, les centres jeunesse ont besoin de 60 millions de dollars pour offrir des services appropriés à nos enfants et à nos jeunes. Il y a des enfants qui n'ont même pas accès à une première évaluation avec un professionnel parce que les ressources ne sont pas là; les personnes handicapées qui sont forcées de rester chez elles parce qu'on aura coupé dans les budgets de transport adapté ? des réalités qui sont vécues; des listes d'attente qui rallongent; des chirurgies cardiaques qui sont reportées; des malades souffrant de cancer qui se font trimballer aux États-Unis pour être soignés.

Ce gouvernement a saccagé le système de santé. Il l'a fait parce qu'on avait un objectif à atteindre, celui du déficit zéro. Maintenant que le déficit zéro est atteint, il faut redonner aux citoyens, M. le Président, l'argent que le gouvernement a en sa possession sous forme de surplus parce que cet argent-là appartient aux citoyens.

Dans le domaine de l'éducation, c'est la même chose: on manque de ressources. Il y a des écoles qu'on ferme, M. le Président, faute de ressources. Les parents n'arrêtent pas d'appeler dans leur bureau de député pour se plaindre de la qualité des services au niveau de l'enseignement. Encore aujourd'hui ? encore aujourd'hui ? je viens de recevoir une lettre, et ce n'est pas signé par une seule personne, une lettre qui est signée par des personnes qui sont dans le réseau et qui critiquent le réseau de l'intérieur. Et cette lettre est signée par Colette Larose, qui est commissaire scolaire, et qui me demande...

C'est une lettre en date du 29 mai. Dans cette lettre, M. le Président, Mme Colette Larose m'écrit ceci: «Vous trouverez ci-joint copie d'une lettre adressée à M. François Legault, ministre de l'Éducation. Les membres de la Table de concertation des présidents des conseils d'établissement de la ville de Brossard apprécieraient que vous vous assuriez que M. le ministre en prenne personnellement connaissance.» C'est ce que je fais, M. le Président.

Et que dit la lettre au ministre? Vous me permettrez de vous citer quelques extraits: «La Table de concertation des conseils d'établissement de la ville de Brossard désire vous informer de son profond mécontentement face aux difficultés de la commission scolaire Marie-Victorin à maintenir un niveau de services acceptable à nos élèves. Depuis la fusion, même après avoir subi une hausse importante de nos taxes scolaires, nous constatons une hausse aussi importante du déficit de la commission scolaire Marie-Victorin, et paradoxalement on nous impose une diminution de services. Ces coupures mettent en péril nos plans de réussite élaborés avec enthousiasme et énergie suite à votre demande. Il est donc impérieux que vous interveniez afin de nous redonner la motivation, la confiance, les outils et les moyens financiers pour continuer à travailler à la réussite scolaire de nos élèves.»

Cette lettre, M. le Président, elle est adressée à M. François Legault, ministre de l'Éducation, et elle est signée par quatre commissaires scolaires et plusieurs membres, en fait tous les membres de la Table de concertation des présidents des conseils d'établissement de la ville de Brossard. M. le Président, quand les citoyens sont rendus à écrire au ministre pour crier au secours, comment peut-on accepter moralement qu'on puisse constituer des réserves et cacher des fonds dans ces réserves-là quand les besoins sont si criants? Je vous pose la question, M. le Président. La réponse est claire, c'est qu'on est contre le projet de loi n° 11. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Vaudreuil. M. le député.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président, Alors, je suis heureux d'intervenir à mon tour sur le projet de loi n° 11 intitulé Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents, projet de loi que nous pourrions peut-être mieux décrire sous l'appellation de fonds Bernard-Landry.

M. le Président, lorsque nous lisons les notes explicatives, on nous indique que ce projet de loi qui donne suite au discours du budget du 29 mars dernier prévoit qu'on va édicter des règles qui sont applicables à l'affectation d'excédents d'une réserve constituée par la ministre, réserve d'un montant de 950 millions de dollars. Et les sommes constituées dans cette réserve seraient affectées, déposées à la Caisse de dépôt et placement du Québec. On prévoit également que la réserve peut être utilisée pour des projets d'immobilisation, des projets dont la réalisation a une durée déterminée ou à d'autres projets autorisés par le gouvernement lorsqu'il estime que l'intérêt public l'exige. En d'autres termes, ça peut servir à peu près à n'importe quoi, selon ce que le gouvernement peut décider de façon arbitraire et de façon tout à fait opaque. Les projets, nous dit-on, seront décidés par des comités ministériels, seront choisis et seront soumis à l'approbation du gouvernement.

Nous nous rappellerons, M. le Président, que l'an dernier, plutôt que d'affecter des sommes au remboursement de la dette de la province ? je voudrais vous rappeler que le Québec est toujours la société la plus endettée en Amérique du Nord ? donc, plutôt que de rembourser une partie de la dette, le ministre des Finances du temps, maintenant l'actuel premier ministre, à la dernière minute, avait constitué... ce qu'il a fait, il avait créé des OSBL, des organismes sans but lucratif, afin de pouvoir ramener l'excédent budgétaire à zéro et de s'assurer que ces sommes-là seraient sorties de ce qu'on appelle le périmètre comptable. Donc, ces organismes sans but lucratif, on leur a attribué des sommes totalisant 750 millions, et un peu dans toutes sortes de domaines: Infrastructures-Québec, Valorisation-Recherche, Société de gestion du Fonds Jeunesse, Innovation-Papier, Infrastructures transport, Société de diversification économique des régions, Fonds québécois pour le développement durable et Société des événements internationaux du Québec. Donc, 750 millions dont 20 millions seulement ont ou auraient été dépensés à la fin de l'année financière qui s'est terminée en mars 2001.

n(16 h 40)n

La constitution de ces organismes que l'on sortait du périmètre comptable a été vertement critiquée par le Vérificateur général qui a dit que les dépenses n'étant pas comptabilisées dans la bonne année financière, c'était tout à fait incorrect sur le plan des principes comptables et que ces organismes-là n'étaient qu'un moyen de transit pour faire passer des dépenses futures dans l'année financière qui fait l'affaire du gouvernement. En d'autres termes, M. le Président, c'est un stratagème ou une astuce pour camoufler des sommes d'argent et pour pouvoir les affecter selon le bon vouloir du gouvernement, hors du contrôle des parlementaires.

Cette année, la ministre des Finances décide de créer ce qu'elle appelle une réserve ? elle l'avait annoncée dans son discours sur le budget ? et à cette fin propose l'adoption du projet de loi n° 11, dont nous discutons aujourd'hui. M. le Président, la ministre, pourtant, avait plusieurs choix. Au lieu de constituer cette réserve de 950 millions, elle pouvait baisser les taxes. On se rappellera que les Québécois et les Québécoises étaient toujours les plus taxés en Amérique du Nord avant le discours du budget; ils sont toujours les plus taxés en Amérique du Nord après le discours du budget. Donc, la ministre aurait pu réduire davantage le fardeau fiscal de nos familles, de nos jeunes, de nos personnes âgées.

La ministre aurait pu indexer les tables d'impôt, par exemple, dès cette année plutôt que de reporter cette indexation et ce soulagement fiscal à l'an prochain. Mais, non, elle a décidé de maintenir les tables d'impôt au niveau actuel, de sorte que, de plus en plus, le fardeau fiscal au Québec s'alourdit par rapport aux citoyens qui demeurent dans les régions limitrophes à celle du Québec, que ce soit l'Ontario, que ce soit les États-Unis.

La ministre aurait pu également commencer à rembourser la dette du Québec, parce que nous sommes la société la plus endettée en Amérique du Nord. Mais, non, la ministre préfère transférer un montant de près de 1 milliard dans une réserve dont les fonds seront déposés auprès de la Caisse de dépôt et qui pourront être utilisés subséquemment au bon vouloir du gouvernement, et sans aucun contrôle.

La ministre aurait pu également, si elle ne voulait pas baisser les taxes, continuer, disons, vous savez, à faire que les Québécois et les Québécoises soient les plus taxés en Amérique du Nord, si elle ne voulait pas non plus commencer à réduire la dette, réinvestir dans certains secteurs où nous avons des besoins qui sont criants, et je voudrais vous donner quelques exemples.

Dans le secteur de la santé et des services sociaux. Dans le domaine de la santé mentale, par exemple, vous savez, dans mon comté, dans ma région, on reçoit per capita à peu près 0,30 $ par habitant pour des services en santé mentale. La moyenne du Québec est à peu près de 1 $; c'est à peu près de 50 et quelques sous en Montérégie et c'est considérablement moins dans la région de Vaudreuil-Soulanges, de sorte que les services offerts ou qu'on peut offrir aux personnes atteintes de déficience intellectuelle qui ont des problèmes de santé mentale sont tout à fait insuffisants.

Parlons d'un autre sujet, les centres de femmes. J'ai reçu la visite au bureau de comté, il y a à peu près deux mois ? et la même chose s'est d'ailleurs produite à travers le Québec ? des centres de femmes qui demandaient à la ministre des Finances, qui était alors la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui avait fait des promesses dans le cadre de la Marche des femmes, de rehausser le financement pour les centres de femmes parce qu'il y avait des besoins urgents. Non, il n'y a pas eu de rehaussement du financement. Donc, la ministre n'a pas répondu et n'a pas rempli la promesse, l'engagement qu'elle avait fait lors de la Marche des femmes.

Parlons des services et des centres d'accueil pour les personnes âgées. On a vu récemment, dans la région de la Rive-Sud de Montréal, le centre d'accueil, le CHSLD du Littoral qui doit encourir un déficit pour continuer de fournir des services appropriés aux personnes âgées.

Et, plus récemment, M. le Président, aujourd'hui nous avons discuté des services et de tout ce qui touche la chirurgie cardiaque. Donc, des personnes qui ont des problèmes et qui doivent être opérées pour des problèmes cardiaques ne peuvent pas l'être. On augmente la liste d'attente parce qu'on ne peut pas opérer suffisamment. On ne peut pas utiliser les salles d'opération parce qu'on a insuffisamment de fonds, on n'a pas d'infirmières pour le faire, et à ce moment-là on oblige les personnes à aller ailleurs si vraiment elles ont le moyen de le faire. Celles qui n'ont pas le moyen, bien elles demeurent sur la liste d'attente. Et on se rappellera que l'an dernier la ministre de la Santé et des Services sociaux, au mois de mars, avait promis d'intervenir et de régler le problème des listes d'attente en chirurgie cardiaque.

M. le Président, parlons, par exemple, de l'éducation. Vous savez, on pourrait rappeler que, dans le secteur de l'éducation, ce gouvernement a coupé pour 1,9 milliard dans le secteur de l'éducation, de sorte que, malgré ces réinvestissements maintenant dont on parle et qui sont loin de venir combler les compressions et les coupures qui ont été faites, eh bien, les commissions scolaires, beaucoup de commissions scolaires sont encore en déficit. En Montérégie seulement... D'ailleurs, on voyait ce matin dans un article que 60 % des commissions scolaires au Québec sont en déficit cette année, ce qui veut dire qu'elles continueront d'être en déficit l'an prochain, à moins de réduire les services. Simplement en Montérégie, en date du 18 avril dernier, on prévoyait que l'ensemble des commissions scolaires de la Montérégie, pour juin 2001, seraient en déficit prévu de l'ordre de 12 millions, 12 millions pour 2000-2001. Donc, imaginez-vous quelle sera la situation pour 2001-2002, alors que le ministre a dit: Bien, écoutez, proposez des plans de redressement afin de pouvoir rétablir l'équilibre budgétaire. Bien, les plans de redressement, ça veut dire, ça, des réductions de services, M. le Président.

Et on se rappellera, vous savez, que la ministre des Finances actuelle, qui était ministre de l'Éducation, lorsqu'elle avait proposé la fusion des commissions scolaires en 1997-1998, avait estimé qu'on réaliserait des économies de 100 millions par la fusion des commissions scolaires. Or, la Fédération des commissions scolaires nous indiquait en décembre dernier que les coûts de transition associés aux fusions des commissions scolaires totalisaient 62 millions et qu'il n'y avait eu que 25 millions d'économies. Donc, une petite différence de 137 millions en termes d'économies non réalisées par rapport aux prévisions que la ministre des Finances actuelle, alors ministre de l'Éducation, avait faites lorsqu'elle parlait de la fusion des commissions scolaires. Ce qui me fait penser, vous savez, à ce qu'on parle aujourd'hui dans le domaine des fusions municipales lorsqu'on dit qu'il va y avoir beaucoup d'économies et beaucoup moins de coûts estimés que les comités de transition n'indiquent actuellement.

Lorsqu'on parle de la réduction des services dans les commissions scolaires, M. le Président, compte tenu des compressions, on a réduit beaucoup les ressources complémentaires dans le réseau scolaire, donc toutes les ressources affectées pour aider les enfants, les élèves en difficulté d'apprentissage ou en difficulté d'adaptation. On se rappellera que le nombre de ces ressources, en 1993-1994, était de 4 700 personnes dans le réseau; en 1999-2000, il n'y en avait plus que 3 900. Donc, une réduction de près de 800 ressources, orthophonistes, psychoéducateurs, psychologues, etc., dont on a réduit les postes, alors que ces personnes étaient requises pour fournir des services aux enfants qui avaient plus de difficultés. On a également rogné dans les investissements, dans les équipements et dans les bâtiments.

Et, à cet égard-là, je voudrais simplement vous citer des déclarations qu'ont faites M. Ron Patterson, qui est le président de l'Association des commissions scolaires anglophones, ainsi que M. André Caron, qui est le président de la Fédération des commissions scolaires du Québec, lors d'une conférence de presse donnée par le ministre le 17 mai dernier, le 17 mai 2001. Donc, M. Patterson disait: «Bien, écoutez, au cours des 10 dernières années, les commissions scolaires ont été sujettes à des compressions. On a essayé de maintenir les services, cependant. On a pris de l'argent qui normalement était destiné pour entretenir les bâtiments et on l'a utilisé pour les services.»

Et M. André Caron, de la Fédération des commissions scolaires, disait exactement la même chose, et je cite ce que M. Caron mentionnait: «On ne peut pas avoir coupé. Il y a eu des compressions de plus de 1 milliard de dollars ? donc, ça, c'est dans les commissions scolaires, M. le Président ? au cours des dernières années, et les commissions scolaires autant au niveau anglophone que francophone, on a essayé de protéger au maximum les services directs aux élèves.

n(16 h 50)n

«Donc, les coupures se sont faites ailleurs. Ça s'est fait dans les équipements, ça s'est fait dans toutes sortes de moyens, en essayant de protéger les services directs aux élèves. Et, à la fin, on a été obligé finalement d'en arriver là, et ça a des conséquences maintenant au niveau des équipements et des écoles. On ne peut pas couper environ 1 milliard de dollars puis, dans l'espace de deux ans, tout est réparé, puis c'est fini, bonjour.» Ça, c'est ce que disait M. André Caron, le président de la Fédération des commissions scolaires.

Ajoutant sur le plan des équipements et de la technologie, M. Caron disait: «Vous savez, on espère un nouveau plan quinquennal en matière de technologie, parce que le plan quinquennal qui avait été mis en place il y a cinq ans est maintenant terminé.» M. Caron dit, et je cite: «Et aussi parce que, quand on en a acheté, des ordinateurs, pendant cinq ans, vous savez, l'informatique, c'est quoi, ça veut dire qu'il faut faire du remplacement en même temps. Donc, ce plan-là, il faut tout attacher ça pour les cinq prochaines années.» Fin de la citation. Alors, voilà, M. le Président, des besoins clairement exprimés dans le milieu de l'éducation.

Alors, au lieu de répondre à ces besoins pour la prochaine année, ce que le gouvernement, la ministre des Finances et le ministre de l'Éducation font, ils créent une réserve, dans le domaine de l'éducation, de 200 millions de dollars. Et, lorsque nous lisons le discours sur le budget, on dit: «Le montant ? et je cite ? pourra être utilisé pour améliorer et mettre à jour les parcs technologiques et immobiliers. Il pourra également contribuer à faciliter la transition de la réforme de l'éducation notamment par l'achat de manuels scolaires ? on en reparlera tantôt ? et par un meilleur soutien aux enseignants.»

Le ministre de l'Éducation, dans son communiqué, lorsqu'il parle du budget, c'est un peu différent, vous savez. On dit: «La somme pourra être utilisée pour moderniser le réseau et faciliter la transition de la réforme de l'éducation en cours.» Le ministre de l'Éducation, le 30 mars dernier, nous disait: «Écoutez, ce que j'ai mentionné aux différents partenaires, les trois réseaux, commissions scolaires, cégeps et universités, c'est qu'il n'y a rien de décidé pour l'affectation de cette somme-là. Quand je parle du parc technologique, quand je parle de l'implantation de la réforme, c'est des suggestions qu'on fait. Donc, ça ne veut pas dire du tout que ça va être affecté à ces besoins-là; ça pourrait être, entre autres, pour ces raisons-là. Donc, ce qu'on aura l'occasion de faire au cours des prochains mois, c'est d'examiner les priorités.» Encore une fois, M. le Président, on reporte le problème.

Le ministre nous dit même, vous savez, que ça peut ne pas être dépensé au cours de la prochaine année. M. Legault, en réponse à une question d'un journaliste qui dit: «Est-ce que vous comptez dépenser cet argent pendant l'année courante?» Alors, le ministre répond: «Mais ça pourrait être plus long. Ce que je comprends du mécanisme qui est mis en place, c'est qu'on a une période de trois ans pour débourser ces montants. Je ne doute pas que les responsables des différents réseaux vont nous faire rapidement des demandes.» Et, également, il indique des hypothèses d'affectation de ces fonds pour des manuels scolaires, pour la transition, pour la réforme.

Donc, ce qu'on a pu voir, M. le Président, c'est qu'il n'y a rien de clair, et, plutôt que de répondre directement à des besoins clairement exprimés par des intervenants du réseau, on préfère placer une somme dans un bas de laine et décider ponctuellement, de façon arbitraire, comment on pourra l'affecter au cours des prochaines années.

M. le Président, ce que ce projet de loi indique, c'est une façon différente d'effectuer le contrôle parlementaire. C'est un projet de loi qui vient éroder le pouvoir des parlementaires en termes de contrôle budgétaire. Vous savez, déjà avec la Loi sur l'administration publique qui a été adoptée à l'automne dernier, il y a d'autres dispositions qui viennent éroder le contrôle parlementaire. Par exemple, on parle des crédits au net. Et le président du Conseil du trésor à ce moment-là a été incapable de répondre aux questions que nous lui avons posées pour avoir plus de clarifications sur le contrôle des parlementaires dans le cas des crédits au net. C'est la même chose lorsqu'on a proposé, dans la Loi sur l'administration publique, d'avoir des crédits étalés sur un certain nombre d'années, plus qu'une année. Bien, M. le Président, avec ce projet de loi, on vient encore une fois affaiblir le contrôle parlementaire sur les budgets et sur les dépenses.

D'autre part, c'est un projet de loi qui permet au gouvernement de décider, de façon arbitraire, de l'affectation de fonds au moment où il le jugera à propos. C'est ? on l'a souligné, je pense ? une façon pour le gouvernement péquiste de se constituer une sorte de cagnotte électorale où il pourra saupoudrer, à travers la province, les bienfaits de ce gouvernement, avec une réserve dont les fonds auraient dû être affectés à des besoins qui existent dans les réseaux, ou encore à la réduction de la dette, ou encore à des baisses de taxes. Parce que, M. le Président ? je pense qu'il est important de le rappeler ? les Québécoises et les Québécois étaient, avant le budget du gouvernement péquiste, les plus taxés en Amérique du Nord, les plus endettés; après le budget, les Québécoises et les Québécois sont encore les citoyens et les citoyennes les plus taxés en Amérique du Nord. Donc, nous allons voter, M. le Président, contre le projet de loi n° 11. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Vaudreuil.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il reste du temps? Bien, enfin, oui, il y a toujours du temps. Vous avez un droit de parole, chaque député a un droit de parole de 20 minutes sur l'adoption du principe. Alors, M. le député de Papineau, je vous cède la parole.

M. Norman MacMillan

M. MacMillan: M. le Président, il me fait plaisir de pouvoir... Il me fait plaisir! Je ne devrais pas dire qu'il me fait plaisir de parler ou de discuter avec vous ici, à l'Assemblée nationale, d'un projet de loi qui va faire un fonds de roulement pour le gouvernement puis déposer ça dans une banque, à la Caisse de dépôt. Bien, c'est une banque... C'est pas une banque, c'est la banque, maintenant, du Parti québécois, je pense, qui existe au Québec. C'est la banque qui décide d'avoir des projets ou prêter de l'argent pour développer supposément des emplois. On a eu l'exemple cette semaine à Varennes, que je connais très bien. J'ai des gens qui demeurent là, des relations personnelles qui demeurent à Varennes, qui me disaient: On va investir une couple de millions pour créer des emplois, puis il n'y en a pas, d'emplois. Je ne sais pas si ça vient de la Caisse de dépôt ou du 950 millions ? c'est le montant exact ? qui est déposé.

Alors, M. le Président, je voulais intervenir, probablement pas pour 20 minutes, mais pour vous dire: Chez nous, dans l'Outaouais, nous avons des urgences sur la table. Un exemple: les ressources qui ont une liste d'attente, pour des gens qui sont en difficulté, des gens qui sont plus démunis que d'autres, des attentes de deux ans pour avoir des services. Puis on est capable, comme gouvernement, de prendre 950 millions, puis le mettre dans un compte de banque, puis attendre pour voir où on va mettre ces argents-là.

Pensez-vous M. le Président, si c'était dans votre comté, que vous accepteriez ça? J'aimerais ça vous poser la question. Malheureusement, vous ne pouvez pas répondre, mais j'aimerais ça vous la poser. Comme je vous connais très bien, sûrement que vous seriez d'accord avec moi. Qu'on prenne 950 millions, qu'on le dépose dans un compte de banque puis que... pendant que chez nous les ressources n'ont pas leur construction, n'ont pas les services, qu'il y a une liste d'attente de deux ans. Une partie de ces argents-là, on pourrait vraiment la prendre et en profiter chez nous, dans l'Outaouais. Les hôpitaux, chez nous, dans l'Outaouais, ont un problème. Même qu'on est proche... en tutelle, M. le Président. Il y a un manque d'argent. On ne peut pas payer les docteurs, on ne peut pas payer les spécialistes. Ils ne veulent pas venir dans la région parce que les hôpitaux présentement ne peuvent pas aller en déficit. Alors, qu'on prenne une partie de ces argents-là puis qu'on la donne aux hôpitaux dans l'Outaouais pour pouvoir attirer des docteurs, qui vont venir.

On trouve ça drôle, de l'autre côté. J'aimerais ça me promener à Charny, moi, s'il y avait des problèmes comme on a dans certaines régions du Québec puis qu'on ne peut pas les régler. C'est vraiment pas drôle, M. le Président, qu'on prenne un montant d'argent de cette ampleur-là puis qu'on dépose ça dans un compte de banque pendant qu'on a des problèmes, chacun dans nos comtés, les 125 qui sont ici, qu'on ne peut pas les régler parce qu'on se dit: Bien, il manque des docteurs, il manque des infirmières, puis on ne peut pas aller les chercher parce qu'ils disent qu'ils n'ont pas d'argent, les hôpitaux sont obligés de couper dans tous leurs départements pour ne pas donner le service aux gens. Pensez-vous, M. le Président, que c'est vraiment honnête ? je ne pense pas ? qu'on laisse des gens dans les urgences, dans tous les hôpitaux du Québec, complètement, et qu'on laisse ces gens-là sans services parce qu'on dit qu'il faut couper les déficits dans les hôpitaux?

n(17 heures)n

Je n'ai pas eu la chance d'écouter tous nos collègues, mais sûrement que nos collègues vont parler de leurs cas dans chacun de leurs comtés, pour parler dans l'éducation, pour parler de l'action communautaire. Notre collègue de Mercier sûrement pourrait discuter avec vous pendant 25 minutes ou une heure de temps du manque d'argent qui existe pour aider ces jeunes-là qui sont dans la rue puis qui ont pas d'aide, qui ont pas d'argent. Puis on a 950 millions qu'on dépose dans un compte de banque. C'est bien, hein? C'est intéressant comme gouvernement de déposer...

Et je vous souhaite la bienvenue dans cette enceinte, M. le Président. Mais, si je vous posais la question, puis qu'il vous manque 900 millions ou 900 000 $ dans une de vos activités, dans un de vos hôpitaux, dans un hôpital chez vous, à Saint-Léonard, dans votre comté, puis qu'on peut pas l'avoir parce qu'il manque de l'argent, puis que le gouvernement prend 950 000 $ puis qu'il le met en banque, puis vous avez pas le droit d'y toucher, je pense que, si je vous posais la question, vous me diriez: C'est terrible. Je suis sûr que vous me répondriez ça au moment où on se parle. Parce que, nous, on a été élus pour donner le service à la population, chacun d'entre nous, ici. Chacun de nous a été élu, ici, pour donner le service à tous nos citoyens et citoyennes du Québec qui ont besoin du service, pas seulement ceux qui paient des impôts, tout le monde qui ont besoin de l'aide au Québec, M. le Président. Mais c'est pas ça qui se passe. On prend 950 millions, on le met dans un compte de banque puis on va attendre. On va attendre, d'après le projet de loi ici...

Et c'est la raison pourquoi j'ai voulu terminer peut-être le débat, pas pendant 20 minutes, mais on dit, on prévoit dans un projet de loi ? après 12 ans ici, c'est la première fois que je vois ça ? on prévoit dans le projet de loi n° 11 également que «la réserve ne peut être utilisée que pour des projets d'immobilisations ? pourquoi pas un hôpital? pourquoi pas une école? pourquoi pas une bibliothèque? pourquoi pas une maison pour des gens qui ont pas de toit sur eux à Montréal, dans le comté de Mercier ou d'autres comtés? ? des projets dont la réalisation a une durée déterminée ou à d'autres projets autorisés par le gouvernement, lorsqu'il estime que l'intérêt public l'exige». Ben, ça se peut-u! «L'intérêt public l'exige», c'est écrit dans un projet de loi. Ça me dépasse.

Il y a des gens ici sûrement 100 fois plus intelligents que je le suis, mais je le suis, moi, dans le sens que les gens dans mon comté, quand ils me demandent de l'aide, ils me demandent: Tu peux-tu aller me chercher de l'argent? Peux-tu me donner 1 000 $? Ils nous ont même coupé nos budgets, certains d'entre nous, nos budgets de discrétionnaire. Ça peut-u être effronté à ton goût, toi? Hein? Trouvez-vous plus effronté que ça? Coupé par un ministre qui a pas de siège, puis qui a pas de filet non plus, puis qui est même pas en Chambre, qui a pris les décisions de nous couper des budgets. Ils m'ont coupé de 300 $, moi. C'est pas grand-chose, 300 $, mais 300 $, c'est un club de l'âge d'or, c'est un club...

Une voix: ...

M. MacMillan: Hein? Je vais tous vous envoyer une lettre, vous allez me donner 100 $ chaque? Merci. Vous êtes témoin, M. le Président. Vous êtes témoin de ça.

Coupé, le budget discrétionnaire, puis on prend 950 millions puis on le met dans un compte de banque à la Caisse de dépôt. Mme la ministre des Finances a sûrement eu une réunion, je ne sais pas quand puis à quelle heure, mais ça a été déposé à la Caisse de dépôt. C'est terrible, M. le Président. On enlève des argents qui devraient être déposés pour le service de tous les citoyens et citoyennes du Québec. Je peux pas comprendre ça quand on nous dit qu'il y a des gens qui sont en liste... À partir de lundi, 39 spécialistes cardiaques qui opèrent dans les hôpitaux vont probablement aller en grève, vont faire juste les opérations qui sont nécessaires parce qu'il manque des fonds. Puis on va le déposer dans un compte de banque. On peut accepter ça ici, à l'Assemblée nationale? Je pense pas, moi, qu'on peut accepter ça. C'est notre rôle premier de défendre tous les intérêts dans chacun de nos comtés et circonscriptions du Québec, puis on va laisser passer ça? Je ne pense pas.

Le chef l'avait dit dans son discours, quand même, discours du budget. Il avait carrément mentionné quelles sont les astuces qui permettent de cacher une aussi grosse réserve électorale. C'est le chef qui dit ça. D'abord, 950 millions en réserve inscrite au budget, ensuite une sous-estimation des revenus de péréquation de 500 millions ? ça a l'air que c'est des bons comptables ? encore un compte en banque à Toronto de 251 millions, une sous-estimation des recettes du gouvernement de 1 milliard, sans oublier le solde de 720 millions sur 730 à l'origine dans nos fameux OSBL. Là, on a des comptes de banque tout partout. Ça va bien en maudit, hein? C'est vrai, je suis sérieux quand je dis ça. On a des comptes de banque tout partout au Québec puis il y en a même à Toronto. À matin, on a souri parce qu'on a dit «impérial». C'est anglais. Ça fait mal, c'est anglais. Ça fait mal à leurs tripes. C'est terrible. Ç'a pas de bon sens. J'ai passé proche de dire d'autre chose, M. le Président, mais ça n'a pas de bon sens.

On prend l'argent, on met ça dans un compte de banque. Je me répète, chez nous, les cégeps, les universités, on manque d'argent. Ils n'ont pas de professeurs parce qu'ils n'ont pas d'argent pour les engager. Les gens sont obligés d'aller à l'Université d'Ottawa, à Carleton University, de l'autre côté du pont. Ça leur fait mal, ils n'aiment pas ça, mais ils mettent de l'argent à la banque au lieu de le donner à nos étudiants et étudiantes qui pourraient aller là, M. le Président.

Les ressources qui prennent soin des plus démunis chez nous qui ont besoin de services n'ont pas d'argent pour améliorer. Il y a une liste d'attente de deux ans. Chez nous, on a des compagnies qui veulent investir des argents. On n'est pas devenu une région-ressource. Je suis un peu content de ça, de ne pas me faire dire que je suis une région-ressource, parce que ça veut dire que ça va un peu mieux dans l'Outaouais, dans mon comté, et la Petite-Nation. Au lieu d'avoir 14 % d'assurance chômage, c'est descendu à 11. Ils vont dire que c'est eux autres qui ont fait ça. Ils vont dire que c'est eux. Ce n'est pas ça. Je vais vous les nommer, les gens qui ont fait ça, moi: un nommé M. Lauzon, création d'emplois de 400; M. Turpin, 350; Papier Masson, 250. C'est ces gens-là. Aucune subvention. Aucune subvention. Aucune subvention! Alors, l'assurance emploi...

Et on doit rajouter une petite part que vous avez faite là-dedans, c'est le carrefour jeunesse-emploi, où 1 800 à 1 900 jeunes depuis trois ans ont eu de l'aide de carrefour jeunesse-emploi pour les garder chez nous. Je vais vous féliciter au moins pour ce que vous avez fait chez nous dernièrement. Et l'autoroute 50 que supposément on va avoir la construction. Je vais vous donner ça. Mais là, au lieu de vous péter les bretelles, prenez le 950 millions, donnez-moi 400 millions, on va toute la faire, on va la faire à quatre voies, puis on va régler le problème une fois pour toutes, on n'en parlera plus.

Mais vous ne faites pas ça, vous mettez ça à la banque. On met ça à la banque. Je ne comprends pas. Quand tu veux investir de l'argent ou tu veux améliorer le sort de quelqu'un, tu ne fais pas juste mettre ça à la banque. Tu vas le séparer ou le donner à plusieurs comtés ? et je parle comme député ? ou tu vas le donner à ma collègue de Mercier qui va pouvoir, dans ses groupes communautaires, améliorer le sort de ces jeunes-là. Est-ce que vous avez assisté à l'assermentation de ma collègue de Mercier? De toute beauté, mes chers amis, mes chers collègues. De toute...

Une voix: ...

M. MacMillan: Tout le monde était invité. Tout le monde était invité. Au lieu de vous promener avec un chauffeur, vous devriez écouter qu'est-ce qui se passe ici, ça irait mieux, peut-être.

M. le Président, pour terminer, sérieusement... J'ai mis un peu d'humour dans ce discours-là, mais c'est pour dire une affaire: Les Québécois et les Québécoises, là, commencent à comprendre qu'est-ce qui se passe. On a parlé d'élection. On est prêts, nous autres du Parti libéral, à aller en élection. On est prêts. Vous déciderez quand, la date, mais, quand vous allez décider la date de l'élection, ça va nous faire plaisir, ça va nous faire plaisir vraiment, parce que j'ai hâte en sacrifice de pouvoir traverser, d'être de l'autre côté. Ça va aider, parce qu'il n'y aura pas 950 millions dans un compte de banque. Parce que le lendemain vous pouvez être assuré, M. le Président, que les députés du caucus du Parti libéral vont demander... et le chef l'a dit lui-même, que ce 950 millions là va être dépensé pour le bien des Québécois et des Québécoises, pas dans un compte de banque puis surtout pas dans un projet de loi, M. le Président.

Alors, nous allons sûrement voter contre ce projet de loi là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je voudrais souligner à l'Assemblée que M. le député de Papineau a célébré hier son 12e anniversaire de vie politique. Alors, au nom de tous les collègues, je veux le saluer de façon particulière. Alors, si je comprends bien, M. le député de Papineau commence aujourd'hui sa 13e année.

Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 11, et je cède la parole au ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie et député de Vimont. M. le ministre, la parole est à vous.

M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Je ne pensais pas intervenir cet après-midi, mais je dois intervenir parce qu'on entend des choses ici assez incroyables. D'abord, je veux rectifier le tir puis expliquer aux gens qui nous écoutent l'utilisation de ces réserves. D'abord, lorsque les gens d'en face disent: On met ça à la banque, on a besoin d'argent, puis ils mettent ça à la banque, ils essaient de faire croire aux gens comme si c'était un placement à la banque. Ce n'est pas un placement à la banque, M. le Président.

n(17 h 10)n

Voici pourquoi on a fait ça comme ça cette année. D'abord, on a dû apprendre, nous, à gérer le fruit de notre bonne gestion gouvernementale. Eux, en face, quand ils étaient au pouvoir, ils dépensaient l'argent avant de l'avoir. Alors, qu'est-ce qui arrive quand on dépense l'argent avant qu'on l'ait, M. le Président? Bien, on s'endette. Tous les ménages savent ça. Achetez maintenant, payez plus tard. Alors, eux vivaient à crédit. Eux, ils ne mettaient pas d'argent à la banque, ils l'empruntaient à la banque. C'est très différent. Là, ils nous accusent d'en mettre de côté. Eux, ils l'empruntaient puis ils le dépensaient avant de l'avoir. Alors, c'était la spirale du déficit: emprunte, emprunte, emprunte.

Pourquoi on a mis ces réserves à la Caisse de dépôt? Parce que, nous, au lieu de dépenser l'argent qu'on n'a pas, on dépense l'argent qu'on a en fin d'année. On gère très serré. Il faut que vous compreniez ça, là, on fait des projections très serrées. Si, à la fin de l'année, on réalise qu'on a des surplus, là on affecte ces surplus à des besoins de la population, aux besoins reconnus par le gouvernement, reconnus par le caucus, parce qu'on en parle également au caucus.

La première année qu'on a fait ça ? parce qu'on taille dans le neuf, on n'a jamais fait ça; ça fait 30 ans, 40 ans que les gouvernements font des déficits, là il faut apprendre à gérer des surplus de fin d'année ? on a envoyé ça dans des organismes sans but lucratif où on a nommé le conseil d'administration, et on leur a donné des mandats très spécifiques. Celui que je connais le mieux, c'est Valorisation-Recherche Québec, qui est un organisme sans but lucratif auquel on a confié 220 millions de dollars, qui fait des rapports au gouvernement, qui fait des rapports au ministère, qui travaille à livre ouvert.

Mais le VG nous a dit: On ne nie pas que les mandats que vous avez donnés à Valorisation-Recherche Québec soient des bons mandats, essentiellement valorisation de la recherche, investissement dans Génome Québec, etc., mais on voudrait que ces argents-là demeurent dans le périmètre comptable du gouvernement et qu'ils soient éventuellement analysés, lors des crédits, par les membres de cette Assemblée nationale. On a dit: Très bien, très bien, on va vous écouter, M. le Vérificateur général. C'est pour ça que nous avons envoyé ces réserves à la Caisse de dépôt. À la Caisse de dépôt, on a mis ces argents-là, mais on va aller y puiser dans l'année pour les biens publics, pour l'intérêt public. Le député de Papineau disait: L'intérêt public, l'intérêt public. Je regrette, l'intérêt public, c'est un concept connu, c'est un concept qu'on retrouve dans moult projets de loi; c'est un concept reconnu.

Alors, au nom de l'intérêt public, on va aller piger dans les réserves selon un processus qui est établi par la loi. Par exemple, pour la recherche, science et technologie, on a affecté une réserve de 50 millions. Pour que j'aille puiser dans cette réserve, il faut d'abord un débat ministère des Finances, Trésor, ministères sectoriels, ça prend un décret au Conseil du trésor, un décret au Conseil des ministres, et l'utilisation de ces argents sera subséquemment soumise à l'analyse des membres de cette Assemblée nationale, lors de l'étude des prochains crédits. Les budgets du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie qui seront bonifiés au cours de l'année fiscale grâce à l'utilisation de cette réserve, de ces crédits, sont momentanément placés à la Caisse de dépôt. Les crédits du ministère seront donc modifiés à la lumière de l'utilisation de cette réserve de 50 millions de dollars.

Si on décide, par exemple, de bonifier le programme de soutien aux communicateurs scientifiques, on décide d'y ajouter 1 million grâce à l'utilisation d'une partie de cette réserve de 50, bien les crédits du ministère seront automatiquement modifiés, et on pourra faire le débat sur l'utilisation de ces crédits lors de l'analyse des crédits de l'an prochain à l'Assemblée nationale. Or, c'est pour ça qu'on fait ça comme ça. C'est pour s'assurer, un, qu'on ne dépense pas l'argent qu'on n'a pas et qu'on affecte les surplus de fin d'année, grâce à notre bonne gestion et grâce à la bonne économie, aux besoins de l'État, aux besoins de la population. On peut parler d'éducation, on peut parler de santé, on peut parler de recherche, science et technologie, etc. C'est pour s'assurer que l'utilisation de ces réserves soit ultimement, l'an prochain, à l'analyse des membres de cette Assemblée nationale, lors de l'étude des crédits. Donc, c'est pour se conformer à cette décision du Vérificateur général.

Donc, il n'y a rien de honteux à dire qu'on va mettre de l'argent à la banque, comme si on ne savait pas quoi faire, puis qu'on ne voulait utiliser cet argent-là, puis qu'il ne servirait pas. Non, il va servir, et il est dans le périmètre comptable. Et on pourra, lors des crédits l'an prochain, tous ensemble, ici, dire: Pour le 50 millions de la réserve, vous l'avez affecté de telle ou telle façon; comment ces argents ont été affectés. On aura les débats usuels des crédits en toute transparence, et il n'y aura pas de cachette, M. le Président.

Alors, je voulais expliquer ça, parce que la façon dont nos gens d'en face expliquaient ça, ça avait l'air comme si on ne sait pas quoi faire, on ne planifie pas; on a mis ça là, puis on attendra. Non, non, non, non, c'est planifié. C'est géré serré. Et on aura le plaisir, dans les semaines qui viennent, de vous présenter la façon dont on va affecter ces réserves, la façon dont on va utiliser ces réserves. Et l'utilisation précise par les crédits de nos ministères, on en fera l'analyse au printemps prochain lors de l'analyse du crédit. Mais je voulais expliquer ça parce que c'est comme ça que ça fonctionne, et c'est le fruit d'une bonne gestion gouvernementale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Non. Alors, le principe du projet de loi n° 11, Loi constituant une réserve budgétaire pour l'affectation d'excédents, est-il adopté?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote nominal? Vote nominal. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Alors, conformément à l'article 223 de notre règlement, M. le Président, je vous demanderais de reporter le vote à demain à la période des affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, votre demande est... Le vote sur le projet de loi n° 11, quant à son adoption du principe, est reporté à l'item Votes reportés demain, jeudi, à la période des affaires courantes. O.K. Ça va. Mme la leader adjointe.

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 46.

Projet de loi n° 177

Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 46. À l'article 46, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2001 sur l'adoption du projet de loi n° 177, Loi sur les géologues. Je reconnais maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de lois professionnelles et député de D'Arcy-McGee. M. le député, la parole est à vous.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté qu'à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'application des lois professionnelles je participe aujourd'hui à l'adoption finale du projet de loi n° 177, Loi sur les géologues, Bill 177, Geologists Act.

M. le Président, l'intégration des géologues dans notre système professionnel n'est pas une question nouvelle. La première démarche en ce sens remonte à l'année 1978. Jusqu'en 1991, l'Office des professions du Québec proposait d'intégrer les géologues à l'Ordre professionnel des ingénieurs. En 1991, l'Office des professions, considérant l'évolution de la profession des géologues en Amérique du Nord, recommandait la constitution d'un ordre professionnel à titre réservé. En décembre dernier, la ministre responsable de l'application des lois professionnelles déposait le présent projet de loi n° 177, Loi sur les géologues, qui vise la constitution d'un ordre professionnel à exercice exclusif.

M. le Président, la question de l'intégration des géologues dans notre système professionnel québécois fait consensus au sein de cette Assemblée. Quand on a étudié le projet de loi n° 177 article par article en commission parlementaire, on a demandé à la ministre pourquoi constituer un ordre professionnel à exercice exclusif alors que l'intégration avec l'Ordre des ingénieurs semble être une meilleure solution. À cette question, la ministre nous a répondu, et je cite: «Le genre de situation fait en sorte qu'il est nécessaire que nous légiférions immédiatement.» C'était le 25 janvier 2001. L'urgence, M. le Président, ne provient pas du fait que ça fait près de 23 ans que les géologues désirent se constituer en un ordre professionnel. L'urgence provient du fait qu'une norme nationale, adoptée par les différentes commissions des valeurs mobilières du Canada, va entrer en vigueur sous peu et que le gouvernement péquiste l'a ignorée pendant deux ans. Il s'agit de la norme 43-101 des autorités canadiennes en valeurs mobilières.

n(17 h 20)n

Essentiellement, cette norme exigera que les rapports d'exploitation minière devront être approuvés par des personnes qualifiées. La norme définit une personne qualifiée comme suit, et je résume, en citation: «Une personne physique qui remplit les trois conditions suivantes: a) il s'agit d'un ingénieur ou d'un géoscientifique qui compte au moins cinq ans d'expérience dans le domaine d'exploitation minérale[...]; b) elle a une expérience pertinente à l'objet du projet minier et du rapport technique; c) elle est membre en règle d'une association professionnelle.» Fin de la citation.

M. le Président, la norme 43-101 définit l'association professionnelle comme suit, et je cite encore, M. le Président: «Un organisme professionnel doté de pouvoirs de réglementation regroupant des ingénieurs, des géoscientifiques, ou les uns et les autres, qui remplit les conditions suivantes: a) une loi lui confère ses pouvoirs ou le reconnaît.» Fin de la citation.

Les documents de consultation sur le projet de norme ont été publiés en 1998 par les autorités canadiennes en valeurs mobilières. Le 10 juillet 1998, la Commission des valeurs mobilières du Québec publiait un communiqué de presse dans lequel elle invitait les personnes intéressées à fournir leurs commentaires. Le 16 mai 2000, la Commission des valeurs mobilières du Québec déposait son mémoire auprès des autorités canadiennes. Quand nous avons demandé, en commission parlementaire, à la ministre de l'époque à quel moment son ministère a été informé du projet de cette norme 43-101, elle a été incapable de nous répondre correctement.

Sous prétexte de l'urgence d'agir, le gouvernement péquiste rejette du revers de la main tout le travail qui s'est fait au sein de l'Office des professions, de l'Ordre des ingénieurs et de l'Association professionnelle des géologues du Québec. Alors que tous s'entendaient soit pour joindre les géologues aux ingénieurs soit pour constituer un ordre professionnel à titre réservé, le gouvernement arrive avec la solution de constituer un ordre professionnel à exercice exclusif, et ce, sans qu'aucune étude récente ni de la part de l'Office des professions ni du ministère de l'Éducation ne vienne justifier ce changement de cap.

M. le Président, on doit souligner que la dernière étude date de 1991. Il s'agit de celle de l'Office des professions qui recommandait, dans le temps, la constitution d'un ordre à titre réservé. D'ailleurs, en commission parlementaire, nous avons demandé à la ministre pour quelle raison il n'y a pas d'avis plus récent. Elle a répondu, et je cite: «Il ne faut pas exiger des papiers et des papiers, des papiers qui font en sorte que ça devient extrêmement difficile d'avancer.» Fin de la citation. Elle a toutefois admis qu'un mémoire présenté au Conseil des ministres en 1994 suggérait toujours la constitution d'un ordre à titre réservé.

M. le Président, un rapport aux 10 ans par dossier, c'est peu demander pour prendre des décisions importantes. La ministre de l'époque nous demande de faire acte de foi des discussions qui se sont passées entre son ancien ministère et l'Office des professions. M. le Président, il ne faut pas oublier qu'il y avait une solution rapide, celle ? et ça a été suggéré par l'opposition officielle ? d'intégrer les géologues à l'Ordre des ingénieurs du Québec. Cette solution est conservée depuis le premier avis de l'Office des professions en 1978, il y a près de 23 ans. Cette alternative a fait ses preuves au sein d'autres juridictions, tant canadiennes qu'américaines. Mais le gouvernement a promptement évacué cette alternative pour d'obscures raisons. En effet, toujours selon le gouvernement, l'intégration serait trop compliquée et trop longue.

M. le Président, au surplus, la ministre a déclaré en commission parlementaire, et je cite: «Si eux ? les géologues et les ingénieurs ? exprimaient très clairement que, pour eux, ils souhaiteraient qu'il puisse y avoir unification [...] tout est possible.» Fin de la citation.

La veille de la commission parlementaire sur l'étude détaillée du projet de loi, le 24 janvier dernier, les ingénieurs étaient toujours prêts à travailler dans le sens de l'intégration. Je cite un extrait de la lettre de l'Ordre des ingénieurs, datée du 24 janvier 2001: «L'Ordre a manifesté clairement son ouverture à cette adjonction.» Fin de citation. Et, plus loin dans la même lettre: «Un accord de principe a été donné au président de l'Office et des discussions ont été menées rondement par la suite à ce sujet avec l'Association des géologues et des géophysiciens et l'Office quant aux modalités de réalisation de ce projet de modification de la Loi sur les ingénieurs.» Fin de citation.

M. le Président, la constitution d'un nouvel ordre professionnel engendre des coûts, en général, ces coûts sont supportés par les professionnels eux-mêmes. On se souvient, à l'occasion, comme dans le cas des sages-femmes, les coûts pour démarrer l'ordre professionnel sont supportés par le gouvernement.

Il est important d'assurer qu'il y aura assez de professionnels au sein du nouvel ordre professionnel qu'on crée aujourd'hui afin que leur cotisation ne soit pas prohibitive. Or, M. le Président, le gouvernement péquiste, par la voix de l'ancienne ministre responsable de l'application des lois professionnelles, est incapable de garantir qu'il y aura assez de géologues pour que la cotisation professionnelle soit abordable ou que le gouvernement n'aura pas besoin de soutenir financièrement le nouvel ordre professionnel. Je cite la ministre, dans cette question, elle a dit: «Je ne peux pas présumer de ce que va être la cotisation.» Fin de citation. C'était le 25 janvier 2001, à la commission des institutions.

M. le Président, le calcul est simple, on prend les coûts de fonctionnement d'un ordre professionnel et on les divise par le nombre de membres. Le gouvernement a admis en commission parlementaire que les coûts de mise en place d'un nouvel ordre professionnel étaient d'environ 200 000 $ et qu'il en était de même pour les coûts de fonctionnement pour les années à venir. On peut donc estimer que la cotisation professionnelle des géologues tournera autour de 800 à 1 000 $. Les ingénieurs, quant à eux, paient environ 200 $ par année, une différence de 600 à 800 $. M. le Président, l'inclusion des géologues à l'Ordre des ingénieurs du Québec aurait permis une cotisation professionnelle pour les géologues à un montant plus qu'abordable, vu la masse de professionnels desservis par cet Ordre. L'ordre combiné comporterait au-dessus de 44 000 membres au lieu de 300 à 400 membres ou peut-être 1 000 membres, si l'on est optimiste, pour le nouvel ordre.

n(17 h 30)n

M. le Président, cette solution a fait ses preuves aussi dans la plupart des États américains et les provinces canadiennes qui ont adopté ce mode de fonctionnement, la fusion des géologues avec les ordres des ingénieurs. M. le Président, le gouvernement peut-il nous expliquer comment il se fait que d'autres provinces canadiennes ? et je les nomme: l'Alberta, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve, les Territoires du Nord-Ouest ? ont toutes eu le temps d'étudier le projet de norme 43?101 au cours des deux dernières années et qu'elles n'ont eu aucun problème d'échéancier pour s'adapter à la venue de la nouvelle norme?

M. le Président, maintenant que nous avons dit nos préoccupations, je tiens aussi à vous exprimer notre déception pour la manière dont le gouvernement a travaillé dans ce dossier. Mais maintenant, on doit aller de l'avant et on doit vous dire que nous allons donner notre accord à ce projet de loi, et nous allons donner la bienvenue à ces nouveaux membres dans le système professionnel et ce nouvel ordre professionnel qui sera le 45e ordre professionnel dans notre système professionnel.

Alors, je vais prendre aussi quelques minutes pour exprimer à ces femmes et à ces hommes géologues toute mon admiration face à cette profession et vous assurer le support de l'opposition officielle dans ces premiers pas comme ordre professionnel. Ce nouvel ordre professionnel sera le 45e dans notre système professionnel, guidé par notre Code des professions.

M. le Président, qui est le géologue, qui inclut aussi le géophysicien? M. Michel A. Bouchard, le président de l'Association des géologues et des géophysiciens, dans une allocution donnée dans le cadre d'un colloque à l'Université du Québec à Chicoutimi sur la profession de géologue et le marché international, a dit, et je cite: «Traditionnellement, le géologue aura été un explorateur lié au développement de l'industrie minière du Québec, un métier somme toute assez peu connu et non conventionnel s'exerçant souvent en région ou même plus loin encore, dans un secteur de l'économie si bien ciblé que le marché de l'emploi, bien que fluctuant, ainsi que la nature de l'ouvrage semblaient l'un protégé, l'autre immuable. Mais, aujourd'hui, le géologue doit devenir un partenaire du développement et du rayonnement économiques de tous les secteurs du Québec. Il doit chercher à diversifier ses champs d'action hors des applications traditionnelles, il doit aussi chercher à exporter hors du Québec son expertise et son expérience acquises dans les champs traditionnels de sa profession.» Fin de la citation.

M. le Président, le Code des professions nous guide en ce qui concerne la possibilité d'octroyer l'autogestion professionnelle à de nouveaux groupes de personnes. L'article 25 du Code des professions nous conseille d'examiner les facteurs suivants.

Premièrement, les connaissances requises pour chaque personne qui veut devenir membre de l'ordre en question. La géologie est la discipline des sciences naturelles qui a pour objet tant l'histoire du globe terrestre que l'étude de sa structure et de son évolution. Comme mentionné dans un rapport de l'Office des professions, la géologie exige des connaissances approfondies sur la genèse des produits naturels et s'inspire des méthodes de la recherche expérimentale pour l'observation et l'interprétation des faits géologiques.

Deuxièmement, l'article 25 du Code des professions nous dit qu'un autre facteur, c'est le degré d'autonomie des professionnels qui forment un ordre professionnel. M. le Président, nous devons nous souvenir que le géologue doit faire des rapports sur la valeur probable des ressources naturelles, et c'est très important de savoir, pour la protection du public, qu'il y a un haut degré d'autonomie.

Troisièmement, une autre caractéristique, le caractère personnel des rapports des géologues avec les clients.

Quatrièmement, la gravité des préjudices ou des dommages. Nous, comme législateurs, avons le devoir de protéger le public et nous connaissons la gravité pouvant résulter d'une pratique fautive. Notre système professionnel a les outils pour éviter cette forme de pratique fautive.

Finalement, une autre caractéristique, la dernière caractéristique émise par l'article 25 du Code des professions: le caractère confidentiel des renseignements détenus. On peut reconnaître les problèmes qui peuvent arriver si ce caractère confidentiel n'est pas maintenu.

M. le Président, nous pouvons dire avec confiance que les géologues méritent certainement de faire partie de notre système professionnel. Et, pour les mêmes raisons, le droit de pratique exclusive réglementée en vertu de l'article 26 du Code des professions semble être aussi un bon choix pour ce nouvel ordre.

Alors, M. le Président, nous, les membres de l'opposition officielle, sommes d'accord pour l'adoption du projet de loi n° 177, Loi sur les géologues, Bill 177, the Geologists Act. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix

Le projet de loi n° 177, Loi sur les géologues, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 21 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 166

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la leader. L'Assemblée reprend le débat ajourné le 23 mai 2001 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. La ministre avait terminé son intervention, et je reconnais le porte-parole officiel de l'opposition en matières autochtones, président de la commission de l'administration publique et député de Jacques-Cartier. Je vous cède la parole, M. le député.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, c'est un plaisir d'intervenir dans le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, Bill 166, An Act to amend the Youth Protection Act.

D'entrée de jeu, je vais annoncer que l'opposition officielle va appuyer ce projet de loi qui est un autre petit pas mais un pas important dans la grande marche vers une plus grande autonomie gouvernementale pour les premières nations du Québec. Alors, je pense que, ce qui est proposé ici, qui est une loi habilitante, si vous voulez, qui permet aux représentants de notre ministère de la Santé et des Services sociaux et le réseau de la protection de la jeunesse de signer les ententes avec les premières nations, soit les regroupements, soit les communautés, soit les organismes qui travaillent en milieu autochtone, je pense que c'est un autre pas en avant pour une plus grande prise en charge, par les premières nations du Québec, de leurs services. En ce cas ici, c'est le service de protection de la jeunesse.

Et, je pense que c'est toujours important, d'entrée de jeu, M. le Président, de rappeler le profil démographique des premières nations du Québec qui est tout à fait différent que le nôtre. On sait que, au sud, dans le Québec non autochtone, notre baby-boom est chose du passé, nos baby-boomers sont un petit peu comme moi, à l'âge de 46 ans. Je suis là-dedans, né en 1955; je suis un exemple typique d'un baby-boomer, M. le Président.

Mais le baby-boom en communauté autochtone est maintenant et aujourd'hui. Il y a des communautés où la moitié de la communauté a en bas de 18 ans. Alors, le phénomène démographique et le profil démographique de ces communautés, c'est complètement différent que le nôtre. Alors, les enjeux des années à venir pour la jeunesse sont nettement plus importants au niveau des proportions à l'intérieur de ces communautés.

Mais, malheureusement aussi, les conditions sociales, qui amènent aux cas de difficultés, qui amènent aux cas qui sont importants pour la protection de la jeunesse sont très présents dans ces communautés aussi. Si on parle d'un taux de chômage qui est nettement plus élevé que la moyenne québécoise, si on parle d'un phénomène de sous-scolarisation, si on parle d'un phénomène de l'éclatement des familles, si on parle d'une situation où, trop souvent, il y a de l'abus de la drogue et de l'alcool, tous ces facteurs rassemblés sont malheureusement un terrain fertile pour les problèmes qui peuvent impliquer les jeunes.

n(17 h 40)n

Et je veux signaler en passant une étude tout à fait remarquable qui a été faite par l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador il y a deux ans. C'était la première fois qu'ils faisaient leur propre étude, leur propre enquête sur les conditions sociales et les conditions de santé dans les communautés autochtones du Québec. Ils ont publié un rapport sur l'analyse et l'interprétation d'une enquête médicale régionale. Alors, c'est la première fois qu'on a eu une recherche conçue et effectuée par les représentants des premières nations du Québec.

Et qu'est-ce qu'ils ont trouvé au niveau d'un lien direct? Et on le voit que, pour les jeunes qui demeurent dans les familles stables, les difficultés de comportement étaient nettement inférieures. Et qu'est-ce qu'on a trouvé dans les ménages où il y avait un divorce, une séparation, où c'est monoparental? Alors, c'est une preuve éloquente que, malheureusement, quand il y a des éclatements de famille, trop souvent mêlés avec ça, on va trouver également des problèmes qui peuvent nous amener à faire appel à la protection de la jeunesse.

Alors, dans cette étude... Et je pense que le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui reprend l'essence de la recommandation n° 5 que je veux juste indiquer, cette recommandation, et je la cite: «Il faut élaborer pour le Québec une politique sur la santé des premières nations qui appuie une approche intégrée des services de santé fondée sur un modèle holistique qui touche le mieux-être physique, mental, spirituel, émotionnel des premières nations. Le désir d'un retour aux traditions des premières nations pour la promotion du mieux-être dans les communautés a été clairement documenté par les résultats de l'enquête régionale sur la santé. Une politique sur la santé des premières nations, fondée sur les traditions des premières nations, renforcera la responsabilité des communautés envers la nation et fera de la santé une question prioritaire à laquelle il faudra s'attaquer.»

Alors, je trouve que le projet de loi qui est devant nous cet après-midi est dans la foulée de cette recommandation. Ça touche juste un élément du puzzle, c'est-à-dire la protection de la jeunesse, mais je pense que c'est un pas en avant. On a vu, je pense, dans la dernière session de l'Assemblée, la création d'un CLSC à Kawawachikamach; chez les Naskapis aussi. Alors, chaque petit pas, chaque moment qu'on fait des progrès comme ça, je pense que l'ensemble de l'Assemblée nationale et les députés doivent en être heureux.

C'est également, si j'ai bien compris, dans les remarques que la ministre a formulées, basé sur un projet-pilote, une expérience chez les Attikameks où il y avait déjà une certaine prise en charge dans la protection de la jeunesse et les alternatives d'essayer de trouver les moyens de guérison, les moyens pour aider ces jeunes en détresse, qui sont basés sur les traditions autochtones. Alors, ce n'est pas du mur-à-mur, ce n'est pas nécessairement les tactiques ou les moyens peut-être qu'on va utiliser dans nos centres de protection de la jeunesse. Ils sont basés sur la tradition, ils sont basés sur leur façon de faire et les traditions des premières nations, et je trouve que ça donne des résultats intéressants. Et le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui est encore une fois basé sur cette expérience.

Pour l'opposition officielle, il reste une couple de questions et, moi, j'en trouve une qui est très importante, qui va être à considérer pour les personnes qui vont être appelées à négocier ces ententes. C'est le phénomène de plus en plus important des jeunes autochtones qui demeurent aux réserves. On a vu les manchettes un petit peu choc, dans La Presse, récemment, de la détresse des Inuits sur la rue Sainte-Catherine à Montréal. Et, dans les conditions des éclatements de famille que je viens de décrire, trop souvent il y aura des jeunes qui quittent soit les communautés cries, les communautés inuites qui sont isolées, qui sont une certaine manière de vie. Ils vont se trouver à Montréal, à Val-d'Or, à Québec, dans les autres centres urbains, probablement pas avec la formation ni les moyens de réseautage pour trouver un emploi, trouver les services sociaux. On a notre réseau de centres d'amitié autochtone qui font un travail extraordinaire, mais avec des moyens limités. Je sais que le Centre d'amitié autochtone à Montréal, sur la rue Saint-Laurent, coin Ontario, c'est un endroit très vivant où on essaie de donner beaucoup de services pour la jeunesse, entre autres, trouver un emploi, faire les liens avec les services sociaux existants, mais c'est un problème alarmant pour le moment. Je pense qu'on est loin de l'expérience dans l'Ouest canadien, mais je pense qu'il y a des leçons à tirer quand même des expériences à Winnipeg, des expériences à Régina, où beaucoup des... surtout les jeunes ont quitté les réserves, sont venus s'installer en ville avec peu de services, peu de moyens vraiment de se trouver dans un tissu urbain. Et ça créait des problèmes de la pauvreté, de l'abus, et d'autres choses qui sont très, très criantes.

Et, comme je dis, ce n'est pas de dire qu'on a le même phénomène ici, au Québec; loin de ça. Mais il faut tirer des leçons, il faut être vigilant. Et, comme je viens de décrire, avec le phénomène démographique dans les communautés autochtones, soit il faut trouver ou créer beaucoup d'emplois dans ce milieu ou il y aura un surplus de jeunes dans ces communautés, et ils vont faire comme beaucoup de jeunes font dans toutes les régions du Québec qui n'ont pas une opportunité économique, ils vont venir s'installer en ville. Et je pense que ça va être important quant à la protection de la jeunesse et les autres services d'être sensibilisé aux besoins de cette clientèle qui est croissante.

Et, ça, c'est une des choses, en discutant ce projet de loi avec l'Assemblée des premières nations du Québec et Labrador, qu'ils ont insisté beaucoup sur le phénomène des jeunes qui se déplacent vers la ville. On sait déjà que la protection de la jeunesse dans nos villes a ses propres problèmes; ils sont débordés. Il y avait beaucoup de questionnement de centres de la protection de la jeunesse dans la Montérégie, sur l'île de Montréal; ils ont très peu de ressources déjà. Alors, de les taxer avec un autre mandat, une autre responsabilité, peut-être c'est trop demander. Alors, il y a un certain arrimage qu'il faut faire pour s'assurer que cette nouvelle clientèle, peut-être peu importante au niveau du nombre absolu, mais quand même qui va se trouver... Les Inuits sur la rue Sainte-Catherine, comme j'ai dit, la manchette de La Presse, ça, c'est une clientèle qu'il faut surveiller de près.

Alors, j'invite la ministre, dans les discussions, dans ses relations, entre autres avec le Centre d'amitié autochtone qui, je pense, est le réseau le mieux placé pour venir en aide pour ces clientèles hors réserve, a les moyens nécessaires pour accomplir la tâche...

Et, l'autre, c'est toujours un thème que j'aime revenir, c'est de consulter davantage nos partenaires. Il y a une commission de la santé et des services sociaux crie; il faut les associer davantage. Il y a un article dans le projet de loi qui dit que les dispositions de l'entente prévalaient sur toutes dispositions inconciliables de la présente loi en matière de l'organisation de prestation des services, de la Loi sur les services de santé et sociaux ou de la Loi sur les services de santé et sociaux pour les autochtones cris.

Juste un rappel que les services sociaux des Cris sont gérés par la Convention de la Baie James. On ne peut pas, dans une loi, unilatéralement amender un traité. Ça prend une discussion avec nos deux partenaires qui ont signé l'entente de la Baie James, c'est-à-dire les premières nations et le gouvernement fédéral. Alors, je vois cet article dans le projet de loi. Je vais poser la question dans l'étude détaillée. Mais il faut se rappeler que la Convention de la Baie James a le statut d'un traité. Alors, ce n'est pas à nous à amender ou à changer les termes et les conditions à l'intérieur de la Convention de la Baie James. C'est quelque chose qu'il faut faire avec beaucoup plus de respect.

Finalement, en terminant, M. le Président, je vais lancer une invitation, un appel. Je pense que l'autre consultation qu'il faut faire avant tout, c'est avec les jeunes autochtones. Et on m'informe qu'il y aura un rassemblement au mois d'août, organisé par l'Assemblée des premières nations, des jeunes. Ça va être vraiment le premier rassemblement jeunes autochtones au Québec qui aura lieu dans la communauté crie de Waswanipi. Et je pense que, ça, c'est les personnes qui vivent ces problèmes de détresse. Parce qu'on est dans le domaine de la protection de la jeunesse ici; alors, on parle des situations qui sont souvent difficiles. Alors, je pense qu'on a tout intérêt d'écouter ces jeunes.

n(17 h 50)n

In conclusion, Mr. Speaker, what we have here today is another small step forward in a greater self-government for the First Nations of Québec. The Official Opposition will join with the Government in voting for this bill which will entitle the Government to negotiate agreements on youth protection with the communities of the First Nations, with the First Nations grouped together or with other organizations providing social services to the First Nations of Québec. It is one of many small steps that have been taken over the last decade or more by governments of both sides because, as a general rule, there is bipartisan support in the National Assembly for a greater taking charge, responsibilization of the First Nations of Québec.

What we are looking at here today is youth protection. The Official Opposition would just like to remind the Government that there is a special growing phenomenon of young people who are leaving First Nations communities and going into urban centers. They are living off of the reserve, an old Indian Act term, and I think that this is a clientele who must be watched very carefully. The problem is that they come from far away, from Northern Québec, from the Cree country into Montréal where they find themselves alone, without connections, on Sainte-Catherine street. It can be an unhealthy recipe, Mr. Speaker, and I think we have every interest to make sure that that clientele has services provided for them, if they are people who have come out of a youth protection situation, that there will be services provided to them in an urban context as well.

But, having said that, overall I think the bill is a positive step forward. We will have more detailed questions when it comes to the more detailed study of the bill in parliamentary committee, but the Official Opposition intends to support the adoption of Bill 166. Thank you very much.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci beaucoup, M. le député de Jacques-Cartier. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Le principe du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je fais donc motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales et aussi pour que la ministre déléguée à la Santé, aux Services sociaux et à la Protection de la jeunesse en soit membre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, j'appellerais maintenant l'article 23.

Projet de loi n° 180

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 23. L'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2001 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 180, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu égard à la divulgation de renseignements confidentiels en vue d'assurer la protection des personnes. Je cède la parole maintenant au porte-parole de l'opposition officielle en matière de lois professionnelles, M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député, la parole est à vous.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Nous sommes ici aujourd'hui pour adopter le principe du projet de loi n° 180, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu égard à la divulgation de renseignements confidentiels en vue d'assurer la protection des personnes, Bill 180, An Act to amend various legislative provisions as regards the disclosure of confidential information to protect individuals.

M. le Président, il arrive parfois en droit que deux principes fondamentaux se heurtent entre eux et forcent la société à réévaluer, à nuancer la prépondérance de l'un par rapport à l'autre. C'est le cas du présent projet de loi où il s'agit du droit à la confidentialité contre la protection du public.

Bien que la réflexion sur ce sujet ait débuté depuis plusieurs années dans d'autres juridictions ? et je pense ici aux divers États des États-Unis ? ce n'est que récemment que la société québécoise s'est vu confronter à ce problème. Chez nos voisins du sud, le débat a débuté en Californie au milieu des années soixante-dix, avec l'affaire Tarasoff. Un jeune étudiant, M. le Président, confia à un psychologue de l'université qu'il avait l'intention de tuer son ex-conjointe après l'entrevue. Ce qu'il fit. C'est triste. Même après plus de 25 ans, plusieurs États américains hésitent encore à prendre position. Je mentionne ce point, car je veux illustrer le fait qu'il s'agit d'une question sérieuse qu'il faut aborder délicatement.

Au Canada, la Cour suprême s'est prononcée sur la question en 1999 dans le cas de Smith contre Jones. J'y reviendrai plus loin. Le projet de loi n° 180 semble aller dans le sens de ce jugement et il s'agit d'un bon pas dans une bonne direction en principe.

Mais nous devons examiner ce projet de loi simplement pour voir s'il suit les recommandations du jugement de la Cour suprême. Et, sur la première étude de ce projet de loi, il y a beaucoup des éléments qui manquent dans le projet de loi, qui ont été soulevés par la Cour suprême dans le cas de Smith contre Jones. Et, nous, de l'opposition officielle, même si nous donnons notre accord en principe à ce projet de loi ce soir, nous allons examiner le projet de loi article par article en commission parlementaire, avec prudence.

M. le Président, j'aimerais tout d'abord rappeler la position de la Cour suprême sur la question. Selon cette Cour, le droit au secret professionnel ou à la confidentialité n'est pas absolu. Sous certaines conditions, la protection du public peut avoir préséance. Ces conditions sont au nombre de trois. Premièrement, la menace doit être claire et la victime ou le groupe de victimes doit être identifiable. Deuxièmement, la menace doit être grave et sérieuse et, troisièmement, l'exécution d'une menace doit être imminente.

Quant à la clarté de la menace, généralement, il y a peu de problèmes. Toutefois, l'identification de la victime est parfois plus problématique. La gravité et le sérieux de la menace sont aussi assez faciles d'évaluer. Quant à l'imminence de l'exécution de la menace, la Cour suprême précise qu'il ne s'agit pas d'une exécution dans un futur prochain, mais plutôt le caractère d'imminence porte sur la probabilité d'exécution dans un court délai.

Mais, M. le Président, il ne faut surtout pas oublier que dans la majorité des cas qui font l'objet de ce débat, la personne qui menace d'en agresser une autre se trouve dans une situation de détresse mentale. C'est cette situation même qui fait qu'elle est portée à se confier à une personne de confiance, et on doit être très prudent en examinant ce projet de loi pour pas briser, pour le futur, l'élément de confiance qu'une personne peut avoir envers un professionnel, envers une personne en autorité, et je peux vous dire, M. le Président, qu'on va examiner avec prudence les questions de cet élément de confiance.

Il existe donc deux dimensions à la problématique: premièrement, la protection de la personne visée par les menaces, c'est clair; deuxièmement, la prise en charge aussi de la personne qui profère les menaces par les autorités médicales ou judiciaires. Mais, pour être certain que les droits de cette personne ne sont pas brimés, le projet de loi s'attarde de façon relativement adéquate à la première dimension, la protection de la personne visée. La deuxième dimension est un peu faible, et nous allons examiner cette question en commission parlementaire. J'espère, M. le Président, que le gouvernement aura l'esprit assez ouvert pour aborder cette dimension lors de l'étude détaillée de ce projet de loi.

Sur l'autre point, dans le respect de l'équilibre des deux concepts judiciaires, il ne faut surtout pas permettre aux personnes qui auraient à alerter une victime ou des tiers de façon trop large et trop imprécise. Une certaine hiérarchie dans la démarche du bris du secret professionnel doit être établie non seulement dans le but de limiter la divulgation du secret, mais aussi dans le but d'optimiser la capacité d'intervention des autorités, tant médicales que judiciaires, et d'augmenter les chances de toutes les parties impliquées dans ces situations de crise.

M. le Président, je vous rappelle que le principe qui est inclus dans le projet de loi n° 180, qui est devant nous ce soir, est un bon pas dans la bonne direction. Mais je rappelle qu'il s'agit d'un sujet très délicat, que plusieurs juridictions ont mis plusieurs années à prendre position. Sans dire qu'il faudra autant de temps à l'Assemblée nationale à solutionner ce problème, j'espère que les membres de cette Assemblée auront l'esprit ouvert pour couvrir tous les aspects de cette problématique.

Alors, on supporte l'adoption en principe de ce projet de loi n° 180. Merci, M. le Président.

n(18 heures)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Vous allez avoir un meilleur souper.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 180, Loi modifiant diverses dispositions législatives eu égard à la divulgation de renseignements confidentiels en vue d'assurer la protection des personnes, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des institutions

Mme Carrier-Perreault: Alors, M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions et pour que le ministre de la Justice en soit membre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Je vais suspendre les travaux pour quelques instants, pour notre débat de fin de séance entre Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne et M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, et la séance reprendra à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

 

(Reprise à 18 h 5)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place.

Débats de fin de séance

Consultation entourant la construction
d'un centre d'hébergement et de soins
de longue durée à Saint-Félix-de-Valois

Alors, nous entreprenons ce débat de fin de séance. C'est à la demande de la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, à une question qu'elle a posée à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux concernant le construction d'un centre d'hébergement à Saint-Félix-de-Valois.

Alors, je vous rappelle les temps de parole: cinq minutes à Mme la députée qui propose ce débat de fin de séance, cinq minutes à M. le ministre, et une réplique de deux minutes. Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, je vous cède la parole.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Pour les gens qui nous écoutent, je veux rappeler que, la semaine dernière, lors de la période de questions, j'ai soulevé, à l'attention du ministre de la Santé, une situation que je considère et que les citoyens du comté de Berthier considèrent inacceptable, inexplicable, injustifiée, et qui est encore plus loufoque, M. le Président, qui a été provoquée par le député même ? le député élu du comté de Berthier ? le député ministre de Berthier, le soi-disant numéro deux du gouvernement.

M. le Président, je m'explique: Il s'agit ici d'un projet afin d'établir, afin d'implanter et de construire un centre de soins de longue durée dans le comté de Berthier, mais précisément à Saint-Félix-de-Valois. Tous les intervenants, tous les décideurs, la régie régionale, depuis des années, ont dit, de façon unanime, d'une même voix, que ce centre d'hébergement de 64 lits pour personnes âgées doit être implanté dans la municipalité de Saint-Félix-de-Valois. Eh bien, tout à coup, le député de Berthier, lui, de façon unilatérale, de façon cavalière, on dit même dans le comté, de façon partisane, décide que ça s'en va dans Saint-Jean-de-Matha, dans la municipalité de Saint-Jean-de-Matha.

M. le Président, pour les gens qui nous écoutent, je veux rappeler les faits de ce dossier. En 1995, il y a eu un comité d'étude. Le comité d'étude a dit, au sujet de l'implantation de ce centre d'hébergement: Ça doit aller dans Saint-Félix-de-Valois. La régie régionale de la région a voté majoritairement pour la construction de ce centre à Saint-Félix-de-Valois. Le conseil de la MRC et tous les maires... il y a même une résolution, M. le Président, où l'ancien maire de Saint-Jean-de-Matha vote également pour que ce centre d'hébergement aille à Saint-Félix-de-Valois. Les médecins de la région ont dit: Oui, on est prêts à desservir ce centre d'hébergement s'il s'en va à Saint-Félix-de-Valois. En plus, M. le Président, un cadeau ? surtout que le gouvernement ne met pas beaucoup d'argent dans la santé ? la municipalité de Saint-Félix-de-Valois dit: Si vous établissez ce centre d'hébergement, nous, on vous donne le terrain gratuitement.

Mais non, M. le Président! Le député de Berthier, lui, tout à coup ? je ne sais pas si c'est parce qu'il est devenu le ministre numéro deux du gouvernement ? décide que sa majorité à lui, son château fort, c'est à Saint-Jean-de-Matha, puis il a décidé de tout concentrer à Saint-Jean-de-Matha en laissant de côté les décisions qui sont prises par les intervenants, par la population du territoire de Saint-Jean-de-Matha. Il a même eu le culot, le ministre député de Berthier, de dire dans son journal local, dans une conférence de presse, que c'est lui-même qui a décidé, au-delà de tout le monde, au-delà même du ministre de la Santé de l'époque, qui est aujourd'hui ministre des Finances, au-delà même de son gouvernement, que, lui, le centre d'hébergement, ça ne s'en allait pas à Saint-Félix-de-Valois, qu'il ne respectait pas cette décision-là, que ça s'en allait à Saint-Jean-de-Matha. Dans son journal local, on dit: «Les Féliciens pleurent pour rien, selon Gilles Baril. Visiblement agacé par les questions qu'on essaie de lui poser concernant le fameux dossier d'un centre hospitalier et de soins de longue durée qui devait être construit à Saint-Félix-de-Valois et qui le sera finalement à Saint-Jean-de-Matha, le député ministre Gilles Baril a haussé le ton lundi dernier, en conférence de presse, pour dire que c'est lui qui avait décidé que ce projet serait réalisé à Saint-Jean-de-Matha.»

n(18 h 10)n

Mais sa décision unilatérale, M. le Président, et sa décision de favoritisme et de partisanerie, eh bien, ça a provoqué une réaction dans le comté. Ça a provoqué de la stupéfaction, en partant, parce que tout le monde était certain, était assuré que ça s'en allait à Saint-Félix-de-Valois. Alors, tout le monde a dit: Qu'est-ce qui se passe? Même la Régie régionale est sortie publiquement et la Régie régionale a dit: «La localisation aurait pu être déterminée par un processus plus participatif et moins politique.» Alors, ça en dit grand quand une régie régionale ose sortir publiquement pour dire de telles choses.

M. le Président, nous avons fait une demande à la Commission d'accès à l'information qui nous assure qu'il n'y a eu aucune étude approfondie à ce sujet-là. Je redemande, étant donné que mon temps s'écoule, au ministre de la Santé, par respect pour la population du territoire de la Matawinie, par respect pour les gens du comté de Berthier: Allez-vous mettre en branle un processus de consultation transparent, non partisan, afin que la décision d'implanter ce centre d'hébergement en soit une éclairée et non pas de partisanerie politique, comme le ministre de Berthier a fait avec ce dossier-là. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne. Je reconnais maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Ça vaut la peine de prendre quand même quelques secondes pour remercier le leader de l'opposition et la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne pour avoir accepté de déplacer le débat de fin de séance qui devait avoir lieu jeudi passé à aujourd'hui. J'avais un engagement dans mon comté, puis, comme c'est un peu loin, en Abitibi-Témiscamingue, je les remercie de cette considération.

Deuxièmement, sur le fond maintenant du dossier qui a été soulevé par la députée, écoutez, regardez, là, les gens qui nous écoutent, ça fait cinq minutes qu'ils viennent de prendre pour parler de la brique. Ils n'ont jamais parlé des personnes âgées, ils n'ont jamais parlé des services, ils n'ont jamais parlé des 64 lits qui vont être créés dans la région de Lanaudière pour les personnes qui doivent être hébergées, les personnes âgées qui ont besoin d'hébergement. Ça, c'est fort révélateur.

On peut comprendre, M. le Président, dans cette façon de traiter les choses, il y a comme une partie de picossage sur le député de Berthier et ministre, qui, oui, a émis très fermement son opinion à l'égard de la répartition des ressources sur son territoire, et la députée, quant à moi, rapporte au moins quelques faits qui sont très exacts. Comme, par exemple, elle a bien mentionné le mot «majoritaires» au conseil d'administration de la régie régionale de la santé et des services sociaux.

Ça veut donc dire qu'il y avait, oui, effectivement, une espèce de réel tiraillement entre Saint-Félix-de-Valois et Saint-Jean-de-Matha, et que des forces se jouent. Et c'est normal, les gens ne sont pas désincarnés de leur milieu. Il y a des gens qui sont plus proches de la communauté de Saint-Jean-de-Matha; d'autres qui sont plus proches de la communauté de Saint-Félix-de-Valois. Vous savez, dans ces contextes-là, il y a aussi souvent des vieilles affaires qui ressortent par en arrière.

J'ai été témoin, moi, non seulement témoin, mais d'à peu près la même situation à Rouyn-Noranda, où le foyer Pie XII, voulant se renouveler, on a autorisé la mise à l'étude d'un plan de reconstruction en quelque sorte ? un plan fonctionnel et technique ? pour 17 millions de dollars, puis d'aucuns voulaient que ça soit au centre-ville, en face de l'hôpital, puis d'autres voulaient que ça soit à peu près à deux kilomètres de là, sur le site actuel.

Bien, la régie régionale, par toutes sortes d'espèces de passe-passe qui se sont faites ? mais dans la légalité puis tout à fait normal, a fait en sorte que... ils ont dit eux-mêmes, la Régie ? je prends cet exemple-là pour l'illustrer: On s'est fait un peu piéger, m'ont-ils dit, dans le processus, et finalement, on aura à recommander que ça se fasse plutôt dans la partie sud de la ville de Rouyn-Noranda, à deux kilomètres.

Bon, alors, j'ai pris note et j'ai dit: Est-ce qu'on défend tous ensemble cette décision-là, même si d'aucuns pourraient dire qu'il manque un peu de logique là-dedans? Et, tout le monde a convenu, comme dans le cas de Lanaudière, que, oui, ce qu'il fallait d'abord s'intéresser, c'est 64 places qui vont être développées dans un centre neuf, un foyer pour personnes âgées neuf pour les gens de la région de Lanaudière, parce que, ces 64 places, on les avait temporairement décrochées en quelque sorte, obtenues et mises en place au centre hospitalier régional de Lanaudière. Et puis maintenant qu'on est en mesure de réaliser le projet, bien, on le fait sur le territoire pour rapprocher les ressources physiques parce qu'il y a des besoins. Il y a des besoins, c'est immense en termes de besoins.

Alors, il y a eu des opinions qui ont été émises et même plus que ça. Il y a eu des recommandations qui ont été émises effectivement par la régie régionale, et la ministre de la Santé et des Services sociaux de l'époque a dit à la toute fin de l'année dernière: Oui, nous allons construire dans Lanaudière, à Saint-Jean-de-Matha, un foyer pour personnes âgées, pour 64 personnes. En fait, 62, plus deux lits polyvalents parce qu'il peut y avoir du... Le fait que ça tourne et qu'il y a des gens qui ont besoin d'hébergement temporaire.

Alors, l'important ici, c'est de dire: Il y aura 64 places de plus dans la région de Lanaudière en conformité avec les besoins qui ont été évoqués, évalués par la régie régionale dès 1995, et il faut s'en réjouir, M. le Président. Et, dans ce contexte-là, de n'avoir donné aucune augmentation de 4, 5 % pour l'hébergement des personnes âgées au Québec pour la prochaine année dans tous les centres, les foyers de personnes âgées, ça, c'est une bonne nouvelle. Les 30 millions de dollars qu'on a rajoutés et également les 32 millions de dollars pour l'économie sociale pour servir 49 000 foyers avec 3 800 entreprises d'économie sociale, c'est une bonne nouvelle.

Oui, M. le Président, je conclus. Oui, il y a du tiraillement; oui, nous avons pris la décision. Non, je n'ai pas l'intention de faire en sorte de reconsidérer la décision parce que je considère qu'il est plus urgent de développer ces 64 places pour les personnes âgées de Lanaudière. Et nous allons travailler avec les deux composantes régionales de cette région de Lanaudière pour faire en sorte que les premières personnes servies, ce soient d'abord les personnes âgées de Lanaudière.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. En vertu de votre droit de réplique, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, la parole est à vous pour un maximum de deux minutes.

Mme Nicole Loiselle (réplique)

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Un autre bel exemple de ce nouveau ministre de la Santé qui devient de plus en plus, c'est malheureux, je l'admets, le ministre, le prince de la parole vide, de la parole creuse, la personne qui parle pour endormir les gens qu'il y a devant lui.

C'est incroyable. Quand il connaît le dossier, quand il sait que la régie régionale est sortie publiquement pour dire que les intervenants de Berthier se faisaient bafouer par le député local, M. le Président, et qu'aujourd'hui le ministre de la Santé a la possibilité de dire au rouleau compresseur de Berthier: Wo! On met les freins. C'est moi, le ministre de la Santé. Vous avez dupé les gens dans ce dossier. Je vais maintenant demander un processus de consultation transparent pour bien écouter les gens de la région. Le ministre de la Santé aujourd'hui n'a même pas été capable de faire ça, M. le Président. Les gens du territoire de la Matawinie, les gens de Berthier se sont fait duper par leur propre député, puis aujourd'hui, dans cette Chambre, ils se font gourer par le ministre de la Santé, M. le Président.

Oui, le Parti libéral en veut, M. le Président, des soins de longue durée de qualité pour les personnes âgées du Québec. Oui, le Parti libéral du Québec était contre la hausse odieuse, deux fois en moins de six mois, de hausser les frais d'hébergement des personnes âgées en soins d'hébergement. Oui, le Parti libéral du Québec est contre le fait que le Parti québécois a empoché, avec l'assurance médicaments, depuis 1997, 1,3 milliard dans les poches des personnes âgées du Québec.

M. le Président, je m'attendais à beaucoup plus de la part de ce ministre de la Santé que de radoter ce que son collègue député de Berthier, politicailleur dans son comté, qui a décidé, par favoritisme, par partisanerie, de mettre ça dans son château fort péquiste où est sa majorité... Je pensais que le ministre de la Santé aurait eu un petit peu plus de respect pour les gens de Berthier, un petit peu plus de respect pour les gens, les décideurs de la régie régionale, pour les maires du territoire de la Matawinie. Mais je me rends compte, M. le Président, qu'il fait un super beau duo avec le député de Berthier.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Ceci met fin à ce débat de fin de séance. Et les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 19)

 

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonsoir. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, veuillez prendre en considération l'article 9 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 17

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 9. Oui, ça va. L'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2001 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique.

Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le président de la commission de l'administration publique et député de Jacques-Cartier. M. le député, la parole est à vous.

M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir ce soir de participer au débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique, Bill 17, An Act to amend the Highway Safety Code and the Code of Penal Procedure as regards photographic speed-measuring devices.

Et je pense qu'on a un débat ici, ce soir, comme on a vu dans d'autres questions, c'est la question de comment gérer les fins louables, comment est-ce qu'on peut arriver à quelque chose où il y a un appui des deux côtés de la Chambre, c'est-à-dire de réduire le nombre de décès, le nombre d'accidents sur les routes au Québec et d'assurer qu'on peut utiliser nos voitures d'une façon sécuritaire. Alors, il n'y a pas de débat sur ces grands principes. Mais c'est le comment est-ce qu'on peut y arriver, les moyens qui sont employés qui ont occasionné un débat en Chambre sur cette question.

On a vu les chiffres qui étaient dévoilés par le gouvernement récemment sur le bilan de la sécurité routière, et c'est fort encourageant, et, je pense, ça vaut la peine de le répéter, le tableau qui était publié dans Le Journal de Québec, il y a deux semaines. On parle, en 1973 ? et je pense que c'est important de le rappeler ? il y avait 2 209 accidents mortels sur les routes au Québec. Alors, 2 209 personnes ont perdu la vie suite aux accidents routiers. Vingt-sept ans après, nous avons réduit le nombre à 765, ce qui demeure toujours trop élevé, M. le Président. Mais quand même, je pense, de voir qu'on a réduit de deux tiers le nombre d'accidents mortels sur la route, ça, c'est une bonne nouvelle, ça, c'est quelque chose qu'on veut... Il y a une nette progression. Depuis 1973, nous avons réussi, malgré le fait qu'il y ait un plus grand nombre de voitures sur les routes, que la population ait augmenté d'une façon importante, à réduire de deux tiers le nombre de décès sur la route. Bonne nouvelle pour tout le monde.

Le pourquoi, et je pense que c'est important à retenir, il y a un élément où on n'a plus de contrôle, c'est une question d'âge, parce que la couche d'âge de la société où il y a le plus grand nombre d'accidents, c'est les jeunes garçons surtout de 16-25 ans. Et c'est là qu'on trouve ? et c'est reflété dans le coût de l'assurance dans la société, entre autres ? les personnes à risque, c'est-à-dire les conducteurs qui aiment rouler à grande vitesse, peut-être ils sont des fois coupables de faire le... alcool au volant aussi. Alors, dans cette couche d'âge, il y a le plus grand nombre d'accidents. On a moins de jeunes hommes dans notre société. Alors, ça, c'est un des éléments qui a réussi à réduire le nombre d'accidents routiers au Québec.

Mais, le deuxième, il y avait une politique très agressive, à la fois par le gouvernement libéral et également par le gouvernement du Parti québécois, d'avoir les amendes beaucoup plus importantes et les points d'inaptitude. Alors, ça, c'est les deux autres choses qui ont été utilisées d'une façon assez agressive, comme j'ai dit, de réduire le nombre d'excès de vitesse et l'alcool au volant sur nos routes.

Alors, c'est un ensemble de mesures. On peut ajouter à ça les efforts de rendre nos autoroutes plus sécuritaires. On voit de moins en moins les anciennes autoroutes à trois voies, où il y avait une voie pour passage à l'intérieur de deux routes. Il en reste quelques-unes au Québec, qui sont toujours des endroits très, très dangereux. Mais, graduellement, nous avons réussi à réduire ça avec les routes, qui sont, règle générale, plus sécuritaires que les routes d'autrefois. Alors, tous ces mélanges sont mis ensemble pour avoir une «success story», je pense qu'il faut dire ça comme ça, qu'on a moins d'accidents mortels sur nos routes.

Maintenant, le gouvernement nous propose un autre moyen, c'est-à-dire d'utiliser les cinémomètres, les photoradars sur les routes comme moyen d'encore une fois réduire le nombre d'accidents sur les routes. Et ça, c'est malgré le fait que plusieurs de nos voisins en Amérique du Nord ont essayé ces machines et ils ont trouvé, à la fois au niveau technique ou au niveau juridique... Ça, c'est les outils, les mécaniques qui ont posé beaucoup de problèmes. Alors, je pense, c'est important de regarder un après l'autre pour voir pourquoi l'opposition officielle questionne l'utilisation de ces photoradars, ces cinémomètres pour contrer la vitesse dans notre société.

Pour les problèmes techniques, il y en a plusieurs. Mais, avant tout, et je pense que mon collègue le député de Shefford, hier soir, a fait toute une liste des expériences-pilotes, à la fois en Ontario, ils sont maintenant questionnés en Colombie-Britannique, plusieurs États américains ont essayé... Et, comme je dis, la fin est louable, on veut réduire le nombre d'accidents sur la rue. Alors, on a l'expérience de nos voisins qui ont essayé d'utiliser ces machines et ça a causé des problèmes. Alors, l'Ontario était peut-être notre voisin le plus proche, où, après une période d'essai de quelques mois, ils ont abandonné l'utilisation de ces machines. La Colombie-Britannique, avec un nouveau gouvernement, également réfléchit à: Est-ce que c'est efficace pour réduire le nombre d'accidents? Parce que c'est ça qu'on cherche avant tout: C'est quoi, les moyens les plus efficaces pour réduire le nombre d'accidents sur la rue? Et c'est important de le rappeler. Parce que j'ai écouté le discours du ministre des Transports hier soir, qui a parlé d'un large consensus, mais je pense que c'est important de rappeler que, parmi les témoins qui sont venus en commission parlementaire, le Barreau du Québec et l'Association des policiers provinciaux du Québec, deux des personnes qui vont être appelées à appliquer ces mesures sont contre les photoradars. Ils ont dit que ça pose tellement de problèmes dans les autres expériences qu'on a vues en Amérique du Nord, ils se sont prononcés contre. Et même un des témoins que le ministre a cités comme appuyant le projet, la Régie régionale de la santé et des services sociaux, a mis un bémol très, très important qu'elle veut garder la possibilité de donner les points d'inaptitude suite aux excès de vitesse par les personnes.

n(20 h 10)n

Et une des choses qui est impossible à faire, et je pense que c'est très important de le retenir, c'est qu'en utilisant les photoradars on ne peut pas donner les points d'inaptitude parce qu'on ne sait jamais qui était le conducteur de la voiture. Alors, le propriétaire de la voiture est coupable, il doit payer une amende, mais, devant les cours, c'est impossible de prouver, M. le Président, que c'était vous-même qui étiez derrière... dans la voiture au moment de l'infraction. Alors, vous êtes coupable, comme propriétaire, vous payez l'amende, mais on ne peut pas faire la preuve que c'est vous-même qui étiez l'auteur de l'acte, de l'excès de vitesse. Et ça, c'est très important.

Et je pense que je suis le seul député qui parle à ce sujet et qui n'est pas dans un conflit d'intérêts parce que, moi, je n'ai pas de permis de conduire, alors mon intérêt dans ce sujet, avant tout, est théorique plutôt que pratique parce que je n'ai jamais eu des points de démérite. Mais je sais fort bien, comme père d'une famille d'adolescents, que faire la preuve de qui avait la voiture à 18 heures, samedi le 1er mai, chez nous ? parce qu'il y a un troisième conducteur chez nous, j'ai deux filles adolescentes qui maintenant partagent, entre guillemets, la voiture avec leur mère ? c'est déjà compliqué. Bientôt, il y aura un quatrième chauffeur chez nous. Alors, un des problèmes très pratico-pratiques: Qui avait la voiture samedi soir, la semaine passée, chez nous? J'ai pas la moindre idée. Mais il faut rappeler que, dans le processus qui est proposé dans le projet de loi n° 17, l'infraction va arriver 15 jours après. Alors, imaginez! Et même le ministre de la Sécurité publique a souligné ça dans son discours hier soir ? parce que je pense qu'il est dans la même situation que le député de Jacques-Cartier, sauf qu'il a une limousine fournie par le gouvernement; mais ça, c'est une autre histoire ? il a dit, chez lui, il y a plusieurs personnes qui utilisent sa voiture personnelle et il n'a pas la moindre idée qui a utilisé la voiture samedi soir, il y a deux semaines.

Alors, ça, c'est un des problèmes pratiques, que, en utilisant ça, on n'a pas les moyens de donner les points d'inaptitude. Mais, moi, je trouve ça important. Et c'est une question, peut-être, en commission parlementaire, que je vais poser au ministre de la Sécurité publique. Mais c'est mon expérience personnelle que ces points d'inaptitude sont vraiment très efficaces pour les personnes qui font des excès de vitesse parce que, une amende, ça fait mal, M. le Président. On va peut-être sacrer un petit peu, du fait qu'il faut émettre un chèque pour 100 $ ou 150 $. Mais le mal passe assez rapidement, et la prochaine fois qu'on est derrière... dans la voiture, peut-être un excès de vitesse, c'est possible. Mais c'est mon expérience que, les chauffeurs qui sont rendus qu'il leur reste un ou deux points et ils vont perdre leur permis de conduire, ça, c'est les personnes qui risquent d'être beaucoup plus prudentes, parce que, s'il faut utiliser leur voiture pour aller au travail, s'il faut utiliser leur voiture pour amener leurs enfants à leurs activités, ils ont besoin du permis de conduire. Alors, les personnes avec un nombre de points d'inaptitude élevé vont penser deux ou trois fois avant de faire un excès de vitesse.

Dans ce système, on perd ça. Et, comme je dis, c'est une des questions plus précises que j'aimerais poser en commission parlementaire pour savoir si le ministère de la Sécurité publique a fait une évaluation: C'est quoi, l'élément le plus dissuasif? Est-ce que c'est effectivement les amendes ou est-ce que c'est plutôt le fait que quelqu'un peut perdre son permis de conduire? Et ça, c'est quelque chose qu'on ne peut pas faire maintenant, avec le projet de loi n° 17, parce que, dans ces zones, on ne sait pas qui était le conducteur, alors on ne peut pas enlever les points d'inaptitude suite à un incident, on va juste passer une amende. Alors, moi, je veux savoir si c'est vraiment efficace, ce système.

L'autre chose. Et le ministre hier soir, était tout rassurant en disant: On ne coupera pas le nombre de policiers sur les routes en échange pour installer les machines. Mais, M. le Président, moi, je me rappelle, la banque nous a dit la même chose il y a quelques années, avec l'arrivée des guichets automatiques: Soyez rassurés, il n'y aura pas de réduction du nombre d'êtres humains qui vont travailler dans les banques; au contraire, on va libérer beaucoup de temps de ce personnel pour vous donner un service accru. Moi, quand je regarde les mises à pied dans les grandes banques canadiennes, je dis: Peut-être, il y avait un changement dans cette tendance, après un certains temps.

Et ma crainte aussi... Les photoradars peut-être ont certains défauts, mais, à ma connaissance, il n'y a pas de syndicats, il n'y a pas des salaires, les vacances, et toutes les autres choses qu'il faut faire. Alors, le photoradar, c'est efficace, ça ne dit jamais non, ça dit pas: Ça ne me tente pas de travailler, un vendredi soir. Alors, tout ça mis ensemble, M. le Président, un photoradar, peut-être c'est plus facile à gérer que composer avec un corps de polices qui ont un métier très difficile. Blague à part, M. le Président, je remets pas en question le danger et le travail fait par nos policiers et policières à tous les jours, mais il y aura une tentation. Surtout dans une optique de compressions budgétaires, s'il n'y a pas vraiment assez d'argent pour boucler le budget, je peux toujours mettre à pied quelques policiers et embaucher davantage mes photoradars, mes cinémomètres. Et ca, c'est quelque chose qui, je pense... on a vu ça dans d'autres industries, dans d'autres endroits où nous avons utilisé des machines pour remplacer les êtres humains.

Et ça, c'est quelque chose qui est très important, parce que même le ministre de la Sécurité publique dans son discours hier soir a mentionné: Il y a un effet dissuasif de voir une voiture de police. On voit ça sur l'autoroute et tout le monde va ralentir tout de suite, c'est automatique. On va s'assurer que la ceinture est bouclée, on va faire toutes ces choses, M. le Président, quand on voit un policier.

Et surtout, et c'était très clair, au moins pour le moment, on parle de mettre quatre de ces photoradars sur le territoire du Québec dans une quarantaine de sites. Et ça, c'est un autre élément qui me surprend un petit peu parce que, et je le comprends, on va mettre des grands panneaux, des grandes affiches pour clairement dire au monde: Vous entrez maintenant dans une zone de photoradar, alors ralentissez-vous. Alors, ça va être très clair. Mais, la nature humaine, dès qu'on sort de l'autre côté, on voit le panneau dire: Vous n'êtes plus dans la zone, il y aura une tendance à accélérer tout de suite après parce qu'on n'est plus dans la zone. Et on va perdre l'élément surprise. Parce qu'une des choses, les pièges que les policiers mettent sur la route, le meilleur élément, c'est une surprise. Et, vous savez comme moi, M. le Président, il y a certains endroits sur la 20 et sur la 40, notamment dans mon quartier, dans l'ouest de l'île de Montréal, où il y a toujours une voiture de la police, alors l'élément surprise est perdu, parce qu'on sait que, sous cet aqueduc, il y a toujours une voiture, tout le monde ralentit d'une façon automatique. Alors, il faut toujours trouver des moyens d'avoir une surprise. Il n'y a aucune surprise, avec un photoradar, parce que ça va être dans quelques-uns des sites qui sont bien identifiés. Le monde va ralentir pour faire la courbe Logan, sur le pont Jacques-Cartier, qui a été évoquée à maintes reprises hier soir, mais, tout de suite après, ils vont accélérer. Alors, je pense qu'on ne peut pas remplacer les policiers dans leur voiture. Et ça, c'est une autre chose qui...

Derrière tout ça, pour le moment, on parle d'un projet très modeste, juste quatre photoradars, uniquement une quarantaine de sites, dans un projet-pilote. Mais c'est le genre d'expérience, surtout si c'est rentable pour l'État... de peut-être extensionner l'expérience et utiliser ça dans les autres endroits aussi.

So, for these reasons, Mr. Speaker, nobody questions how important it is to make our roads safer. And I think we have a success story in Québec, that, over the last 25 years, we have cut by two-thirds the number of fatal accidents on the roads in Québec. I think this is something we can take collective credit for. It has been an aggressive policy of increasing fines, increasing demerit points to make sure that there are fewer people on the roads who have been drinking and driving and there are fewer people on the roads who go too quickly. But we still have 765 deaths ? last year ? on the highways of Québec, and that's 765 deaths too many. So, any measure we put into place that could reduce the number of accidents, I think, deserves looking at very carefully.

n(20 h 20)n

But the proposal before us tonight to use photoradars has been tried in several States, in the province of Ontario, in the province of British Columbia, and it has proved to have a great deal of difficulties both on the technical level and before the courts. It's very difficult to maneuver this system. The machines don't always give the clear photographs that the promoters promise the Government: Oh! don't worry, everything will be clear, everything will be wonderful, you'll be able to read every license plate. It doesn't always work that way, Mr. Speaker.

So, for these reasons plus the fact that... It's just a hunch of mine, and, if there is evidence to the contrary, I'd like to read it, but it is my experience that the demerit points are a very effective tool in getting people to slow down. If you only have one point left before you lose your license, drivers tend to... It focuses their concentration a great deal, Mr. Speaker. And that is something that we risk to lose, because, with the photoradars, you don't know who the driver is. So the driver is financially responsible for his car, so he has to pay a fine, but there are no demerit points awarded because there's no proof as to who was driving the car at the time of the infraction. I think that's important, because, as I say, I think they're a very effective way.

Finally, it is a fear on this side of the House that these measures will be used to replace police officers on our highways, and that would be an error. The number of police officers who have been hired to patrol our highways has always been under the number that the Government has announced, so that they have always cut corners and had fewer police officers. And, when it comes to drinking and driving, when it comes to drivers who are in trouble on our highways, nothing replaces the human touch, the human presence. So, I think, if this is a way to cut down on the number of police officers on the highway, once again, the Government is making a mistake.

En conclusion, j'ai un petit sourire parce que le ministre a répété à maintes reprises hier soir que ça, c'est un projet-pilote, et un projet-pilote qui risque de faire un petit peu d'argent pour l'État. Et je me rappelle... J'ai deux mots qui viennent à l'esprit, c'est le nom d'un M. Thomas White. Tout le monde dit ici: Qui est Thomas White? C'est quelqu'un, un ministre des Finances, un politicien canadien qui a touché la vie de tout le monde ici, en Chambre, parce que c'est lui, comme projet-pilote, en 1917, qui a introduit l'imposition ? je vois le ministre du Revenu qui est ici ? mais un impôt sur nos revenus d'une façon temporaire, pendant la Première Guerre mondiale, juste pour payer pour la guerre.

Un autre projet-pilote qu'on voit maintenant, 84 ans après. Je ne pense pas que c'est dans les intentions du ministre du Revenu ce soir d'annoncer qu'on va mettre fin à ce projet-pilote au Québec et mettre fin aux impôts sur nos revenus. Ça serait une très bonne nouvelle, mais je pense que les impôts sur nos revenus des deux gouvernements sont là pour rester pour le moment. Alors, ça, c'est un projet-pilote qui a duré 84 years in counting, Mr. Speaker. Et je pense que le projet-pilote qu'on est en train d'établir avec le projet de loi n° 17, c'est dans le même ordre d'idées.

Alors, pour les raisons que nous avons décrites, je pense que ce n'est pas la meilleure façon de réduire la vitesse sur nos routes. Alors, je vais me joindre à mes collègues et voter contre le principe du projet de loi n° 17. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, il est le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse. M. le député, la parole est à vous.

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. J'apprécie jusqu'à un certain point, même s'il a indiqué qu'il était contre le projet de loi, le député qui m'a précédé par le ton serein qu'il a utilisé. Ce ton est très différent de ce que nous avons entendu hier soir, alors que, d'une façon toute particulière, le critique de l'opposition officielle en matière de transports, le député de Shefford, nous a tenu des propos pour le moins alarmistes. Il s'est avéré jusqu'à un certain point un prophète de malheur. J'ai cru déceler chez lui une certaine phobie, une peur maladive. Je ne sais pas si c'est la peur d'être pris par cet appareil qui pourra être utilisé lorsque le projet de loi n° 17 sera adopté, c'est-à-dire le cinémomètre photographique. Mais, M. le Président, il ne s'agit cependant que d'un élément de dissuasion.

Moi, je n'ai pas peur de ça. Je n'ai pas peur de ça parce que je sais très bien qu'à un moment donné, lorsqu'on utilise des moyens de persuasion, ça devient insuffisant. La preuve, c'est ce que nous avons vécu il y a quelques années lorsque, par exemple, il n'y avait pas d'infraction au fait de ne pas attacher, de ne pas boucler la ceinture de sécurité. On s'est rapidement rendu compte que, rendu à hauteur de 40, 45 % des gens qui bouclaient, c'était difficile de franchir la barre des 50, 60, 70 %, et il a fallu rattacher à ça des mesures plus coercitives. Et ça a donné des résultats, M. le Président, parce que, aujourd'hui, on peut dire que les Québécois, les automobilistes québécois qui bouclent leur ceinture le font à hauteur de 95 %. C'est presque un championnat mondial; certainement, en tout cas, que ça l'est en ce qui concerne les automobilistes en Amérique du Nord. Donc, ça a prouvé son efficacité.

Et, M. le Président, lorsqu'on regarde les statistiques, qui sont effarantes en ce qui concerne le bilan routier au Québec, je vous rappelle qu'en 1973 ça avait été l'année record, avec 2 209 morts sur les routes, alors qu'à ce moment-là il y avait 2,4 millions de véhicules en circulation; dix ans plus tard, en 1983, on avait déjà amélioré le bilan avec 1 185 morts, ce qui était encore énorme; en 1993, plus près de nous, 10 ans plus tard donc, 945 morts; et finalement, l'année dernière, en l'an 2000, 765 décès reliés à des accidents d'automobiles.

M. le Président, au Québec, la vitesse, avec l'alcool, c'est l'une des principales causes d'accident. Et, selon les rapports d'accidents, la vitesse est responsable de 25 % des décès. 25 % des décès en l'an 2000, c'est 191 morts. La vitesse est responsable aussi de 19 % des blessés graves. 19 % des blessés graves en l'an 2000, ça veut dire 1 024 personnes. Et 13 % des blessés légers, en l'an 2000, ça signifie tout près de 6 000 personnes.

n(20 h 30)n

M. le Président, malheureusement, l'excès de vitesse n'est pas pris au sérieux, c'est ce que des études ont démontré au fil des années. Nous avons eu, à la commission des transports et de l'environnement, l'occasion d'étudier un document, un livre vert intitulé La sécurité routière au Québec: un défi collectif. Les membres de cette commission ont eu l'occasion d'étudier cinq items, cinq sujets: d'abord, le port du casque protecteur pour les cyclistes; le patin à roues alignées; troisièmement, le virage à droite sur un feu rouge; cinquièmement, la conduite avec les capacités affaiblies par l'alcool... c'est-à-dire quatrièmement; et cinquièmement, le cinémomètre photographique, ce qu'on appelle plus communément le photoradar.

M. le Président, en 1978, le taux de décès pour 100 millions de kilomètres au Québec était plus du double de celui de nos voisins américains, parce qu'on cherche toujours à se comparer dans ce domaine-là. En 1999, dernière année disponible, le taux au Québec est à peu près le même qu'aux États-Unis, soit une victime pour 100 millions de kilomètres.

Il y a aussi plusieurs pays qui ont adopté le cinémomètre photographique. C'est quoi, ça, le cinémomètre photographique? C'est tout simplement un radar avec un appareil photographique 35 mm et ça fonctionne avec un ordinateur. Alors, il y a plusieurs pays dans le monde, puis pas des pays les moindres, qui utilisent cette technologie depuis plusieurs années, et je pense à l'Australie, je pense à l'Autriche, à la Belgique, au Danemark, à plusieurs États américains, à la France, à l'Italie, au Japon, la Norvège, le Royaume-Uni, la Suède, la Suisse. En fait, il y en a 70, pays, qui utilisent présentement cette technologie.

M. le Président, je partage tout à fait l'objectif du ministre des Transports et député de Joliette, c'est-à-dire de faire de la réduction du nombre de décès et de blessés sur les routes du Québec une obsession. J'entendais aussi nos amis d'en face dire que c'était une machine pour faire de l'argent. Vous connaissez le caractère du député de Joliette. Je l'observe en commission parlementaire depuis deux ans d'une façon particulière. On peut lui imputer des motifs ou un caractère particulier, mais le député de Joliette, il a une grande qualité: il est franc, il dit la vérité. Et, quand il dit la vérité concernant le fait qu'il n'y aurait pas d'attrape-nigaud avec les photoradars, je le crois, M. le Président. Il ne faut pas lui imputer des motifs qui ne sont pas réels. Je sais très bien qu'est-ce qu'il veut, c'est de diminuer le nombre de décès et le nombre de blessés sur les routes du Québec. Et on ne peut que partager cet objectif. Ce que nos amis d'en face ne semblent pas partager toutefois, c'est les moyens pour réussir à diminuer encore davantage ces décès et ces blessés sur les routes du Québec. C'est leur droit.

Mais il me semble que ce que le ministre veut faire par l'adoption du projet de loi n° 17 est tout à fait correct dans le sens qu'à certains endroits il n'est pas possible pour des policiers de pouvoir intercepter les véhicules qui circulent à une vitesse excessive et, à ce moment-là, le photoradar s'avère un moyen intéressant. Il n'y a pas de cache-cache là-dedans non plus dans le sens que, M. le Président, l'auto dont la plaque minéralogique sera photographiée, cette auto évidemment peut être conduite par différentes personnes, mais on ne verra pas la personne qui conduit l'auto. Et il devra y avoir émission d'une contravention dans un délai très court, pas des périodes de trois, quatre, six mois, mais ça doit se faire dans un délai maximum de 15 jours de façon à ce que le propriétaire du véhicule soit capable de savoir qui était au volant du véhicule au moment où l'infraction a été commise.

M. le Président, on remarque aussi selon les statistiques, et elles sont implacables, que, parmi les personnes qui sont les plus impliquées dans des accidents graves, dans des accidents mortels, ce sont surtout les personnes de la catégorie 15 à 24 ans. Sur 765 décès en l'an 2000, il y en a 208 qui étaient dans la catégorie 15 à 24 ans, 111 dans la catégorie 25 à 34 ans et 123 dans la catégorie 35 à 44 ans. Évidemment, on n'a pas à ce moment-là, ici, dans ces statistiques, le nombre d'automobilistes de ces différents groupes, mais ce qu'on constate, c'est que les jeunes sont souvent impliqués dans des accidents graves.

Le nombre de conducteurs impliqués dans des accidents pour 1 000 titulaires de permis de conduire en fonction de l'âge: 16 à 24 ans, 95 en l'an 2000, 25 à 34 ans, 55. Voyez-vous, là, tout de suite, il y a une différence en ce qui concerne... Plus les personnes sont âgées, plus les statistiques indiquent que le taux d'accident diminue.

Alors, M. le Président, en terminant, je voudrais dire que, après avoir utilisé toutes sortes de moyens, de la publicité, de la persuasion, il s'avère nécessaire maintenant, pour réduire d'une façon importante le nombre de décès sur nos routes et le nombre de blessés graves, et réduire par conséquent les coûts qui sont rattachés à ça, parce que c'est énorme... On a juste à penser, par exemple, aux accidents qui ont été occasionnés au cours de l'année 2000. C'est des coûts, pour la Société de l'assurance automobile, de l'ordre de 125 millions de dollars, sans compter les autres coûts sociaux qui peuvent atteindre 500 millions de dollars et sans parler des drames humains qui sont engendrés par ces accidents. Il faut absolument trouver des moyens, et le cinémomètre photographique est un de ces moyens.

Hier, M. le Président, le député de Shefford a parlé de fric, beaucoup d'argent, de fric. Moi, je voudrais simplement lui rappeler quelque chose qui n'est peut-être pas très agréable pour nos amis d'en face. C'est que, pendant la période de 1986 à 1994, alors que le gouvernement était formé par nos amis d'en face, il s'est passé un phénomène dont, semble-t-il, s'est inspiré le gouvernement fédéral, c'est de pomper dans la caisse de l'assurance, c'était l'assurance automobile... On a siphonné 2 milliards de dollars ? les gens ne s'en rappellent pas beaucoup, mais, moi, je m'en rappelle ? 2 milliards de dollars, de l'argent des automobilistes, qui ont été envoyés un peu partout, on ne sait trop où. Et M. Chrétien, à Ottawa, s'est inspiré de ça, lui, avec l'assurance emploi. Il va chercher de l'argent dans les poches des personnes qui cotisent et puis il utilise ces milliards pour d'autres fins.

Alors, quand on arrive et qu'on essaie de faire croire au monde... On essaie de faire croire aux gens que l'introduction du cinémomètre photographique, c'est pour aller chercher de l'argent. Moi, je prends la parole du ministre des Transports et député de Joliette qui a une grande crédibilité, malgré le caractère un peu particulier parfois qu'on peut lui reconnaître. Merci, M. le Président.

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, quelle est votre question de règlement?

M. Brodeur: Suivant l'article 213, est-ce que le député de...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant. Est-ce que le député de Bellechasse ? j'y arrive... Est-ce que vous accepteriez que le député de Shefford vous pose une courte question et que vous y apportiez une brève réponse?

Une voix: Certainement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a consentement? Vous avez droit à une question, mais très brève, M. le député.

M. Brodeur: Très brève, M. le Président, et très simple. Est-ce que je dois comprendre du député de Bellechasse qu'il va appuyer le projet de loi sans réserve, projet de loi qui est présenté par le ministre des Transports et son gouvernement?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: M. le Président, bien sûr, parce que je crois en la sincérité du ministre des Transports de réduire le nombre de décès et de blessés sur les routes du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Bellechasse. Alors, nous poursuivons le débat sur le principe du projet de loi n° 17, et je cède la parole au critique de l'opposition officielle en matière d'environnement et député d'Orford. M. le député, la parole est à vous.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. C'est toujours un plaisir de dialoguer avec nos confrères d'en face. Je viens d'entendre le député de Bellechasse, il m'a presque convaincu, M. le Président, mais il y a encore quelques zones que j'aimerais éclaircir avec lui.

D'abord, je suis un peu surpris devant l'importance de ce débat-là. J'espère que l'adjoint parlementaire du ministre va lui faire part de nos points de vue, étant donné que le ministre est sûrement pris ailleurs, qu'il lui fera part des points de vue de l'opposition et peut-être que, dans le temps, le ministre pourrait finir par comprendre nos points de vue.

n(20 h 40)n

Tout d'abord vous rappeler, M. le Président, pour les gens qui nous écoutent ce soir: qu'est-ce que c'est, un cinémomètre? C'est un appareil qui sera installé de façon sournoise sur le bord des routes, le jour et la nuit, et qui, quand vous passerez, va prendre le numéro de votre véhicule et, dans les 15 jours qui suivront, vous recevrez une facture à la résidence vous disant que vous alliez à telle vitesse et que vous devez tel montant. La bonne nouvelle, c'est qu'ils ne pourront pas vous mettre en prison ? c'est dans le projet de loi, ils ne pourront pas vous mettre en prison ? puis ils ne vous enlèveront pas de points de démérite. C'est peut-être pour mieux faire accepter la machine à ce point-ci. Et mon expérience de ces affaires-là, c'est que, normalement, une fois que tu as commencé, une fois que tu as mis le bras dans le tordeur, le reste suit par la suite.

Vous comprendrez que l'opposition est convaincue, jour après jour, qu'on est le peuple, la nation, la province, appelez-les comme vous voudrez, les Québécois, les Canadiens, les Nord-Américains, appelez-les comme vous voudrez, M. le Président, et là je vais vous laisser toute votre imagination pour trouver le terme, les plus taxés en Amérique du Nord. Il n'y a pas une journée où est-ce que le gouvernement ne se met pas une main dans nos poches. Quand ce n'est pas 4 $ pour les pneus, c'est 3 $ avec les enfants pour aller marcher dans le parc, c'est ton impôt, tu as la taxe la plus élevée sur l'essence. Tous les jours, le gouvernement a une main dans tes poches en quelque part.

Une voix: La consigne sur les pneus.

M. Benoit: La consigne sur les pneus. Il n'y a pas une journée où, à quelque part, il n'y a pas quelqu'un qui te dit: Aïe! c'est pour le gouvernement. Tellement que le premier ministre n'a pas aimé ça quand ils ont mis son nom sur une facture disant que c'était la taxe du premier ministre. Il a fait une crise dans un restaurant. Je comprends qu'il ait fait une crise; lui-même, il est obligé de payer ces taxes-là à tous les jours. Lui aussi, même s'il est premier ministre, le gouvernement a la main dans ses poches à tous les jours. Alors, le cinémomètre, M. le Président, c'est probablement pour la petite poche en haut. Ils n'y avaient pas encore pensé, à celle-là. Bien, imaginez-vous donc, ils vont se mettre la main tranquillement dans la petite poche d'en haut pour aller chercher les quelques derniers cents qui vous restaient.

Nous sommes le peuple le plus taxé en Amérique du Nord. Quand on parle de la journée J, la dernière journée que vous travaillez pour payer vos impôts, vous regarderez ça, les Américains finissent de payer leurs impôts le 3 mai; les Canadiens, c'est quelque part au milieu de juin; et la dernière fois que j'ai vérifié ces statistiques-là, nous autres, on est quelque part en juillet. Donc, les Québécois travaillent jusqu'au milieu de juillet, en quelque part, avant de partir en vacances puis de dire: Bon, bien, là, tout ce que j'ai gagné jusqu'à aujourd'hui, c'était pour le gouvernement; à partir d'aujourd'hui, je vais commencer à travailler pour moi. Nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. Tu t'imagines, là, taxés comme ça, qu'ils n'en trouveront pas d'autres, moyens. S'il y a quelque chose, ils vont essayer de faire comme d'autres premiers ministres, d'en remettre aux citoyens, d'aider les familles, d'aider les plus jeunes, d'améliorer le système routier, d'améliorer le système hospitalier, d'améliorer le système scolaire. Pantoute. On a à peu près ce qu'il y a de pire dans le système hospitalier, on a à peu près ce qu'il y a... en tout cas, on peut se questionner sur le système scolaire, particulièrement la réforme. Et le système routier, et là je n'en parle pas, c'est une horreur. C'est une horreur. Alors, on va continuer à nous taxer.

Et ces machines-là qu'on va installer, M. le Président, savez-vous comment ça va rapporter? On nous dit que l'expérience ontarienne, par machine ? ça, c'est bien plus payant qu'une machine de Loto-Québec, ça, là, je vous le dis tout de suite, hein, c'est bien plus payant qu'une machine de Loto-Québec... En Ontario, ces petits appareils là rapportaient 4 millions de dollars par année. C'est bien des piastres, par machine.

Une voix: Combien?

M. Benoit: Quatre millions par année par machine, M. le Président. Imaginez-vous, là, mettez ça ici sur la 20, puis, à chaque auto qui passe à un kilomètre de trop haut, bingo, 15 jours après, il y a une facture d'envoyée à la maison du gars ou de la madame. Ç'a pas de bon sens. Il n'y a pas un citoyen qui nous écoute à soir qui va être d'accord, peu importe comment le distingué député de Joliette va essayer de nous prouver ça. Il nous dit: Bien, écoutez, on va essayer. Nommez-moi des gouvernements qui ont essayé de trouver des moyens de faire de l'argent qui les ont enlevés ensuite. Je n'en connais pas un. Je n'en connais pas un. La taxe au Canada, ça devait être quelque chose de temporaire pendant la Première Guerre mondiale; elle n'a jamais été enlevée ensuite. Je n'ai jamais vu ça, un gouvernement enlever des taxes, en tout cas au Québec, et comptez sur eux autres pour pas vous l'enlever. Quand ils vous disent que c'est un projet-pilote pour quelques semaines, moi, je ne les crois pas. Je ne les crois pas.

Or, qu'est-ce que ça a fait ailleurs? J'écoutais le député de Bellechasse, qui est un bon président de commission parlementaire, qui nous disait... lui, il a sincèrement cru ce que le ministre lui a dit. J'admire ça, moi. Moi, c'est ma job de pas trop croire ce que le ministre dit puis d'essayer de voir les aspects qui sont faibles dans l'argumentation du ministre. Alors, faut-il comprendre qu'il y a un bon nombre d'États américains qui viennent d'enlever ça de là, qui disent que ça ne marche pas, cette affaire-là. L'Ontario, c'est toujours bien pas des enfants d'école, nos voisins, eux, ils viennent de l'éliminer. Je vais aller plus loin que ça, M. le Président, saviez-vous ça qu'en 1970 on avait ça au Québec, ces affaires-là? Oui. Je me suis fait moi-même arrêté avec mon épouse en dessous du viaduc de l'Île-des-Soeurs. J'ai reçu ça 15, 20 jours après, belle photo, ma photo, la plaque en avant et puis le montant d'argent que je devais. Savez-vous la bonne nouvelle au Québec? Ils ont mis ça en 1970 puis, en 1973, ils ont dit: Ça n'a pas... Ça ne marche pas, cette patente-là. On va enlever ça de là. Dans notre propre province, on l'a essayé puis on l'a enlevé éventuellement. J'imagine que ce gouvernement-là, il a compris ça; L'expérience a été tentée, il ne recommencera pas. Mais non, il se relance là-dedans. Ça va coûter excessivement cher de tout mettre ça en place et puis qui sait si on ne devra pas enlever ça dans quelques années.

Maintenant, je vous pose les problèmes, M. le Président. Le premier. On va seulement photographier la plaque parce que la Charte des droits et libertés maintenant défend qu'on photographie les gens au cas où vous ne seriez pas avec des gens avec qui vous devriez être. Bref, je vais laisser votre imagination travailler un petit peu. Alors, on va photographier seulement la plaque d'immatriculation. Vous recevez ça 15 jours après. Cette journée-là, vous avez prêté votre voiture à l'association des gens qui aident les démunis de votre municipalité pour les paniers de Noël. Et, cette journée-là, il y a cinq, six bons bénévoles qui ont travaillé avec votre voiture, comme on le fait régulièrement. Il n'est pas rare, en tout cas en politique, qu'on prête nos véhicules à toutes sortes de monde pour toutes sortes de bonnes causes.

Alors, vous recevez, 15 jours après les paniers de Noël, 15 de janvier, une facture chez vous de tant de dollars, de tant de dollars. Alors, là, vous appelez l'association des paniers de Noël de l'hôpital et vous leur dites: Écoutez, il semble que ça a été émis, l'amende, la journée que je vous ai prêté ma voiture. Alors, là, on va nous répondre: Écoutez, nous, cette journée-là, votre voiture, on l'a prêtée à cinq, six bénévoles; on ne peut pas vraiment vous dire qui est-ce qui l'a conduite cette journée-là. Alors, comment...

Là, vous allez vous ramasser en cour, vous allez vous ramasser en cour, vous allez expliquer au juge que vous étiez bien intentionné, que vous avez prêté votre voiture, qu'on a arrêté les gens et que, M. le Président, on n'est pas capable d'identifier la personne qui conduisait la voiture. Alors, vous vous imaginez, vous qui êtes avocat, M. le Président, la papeterie qu'on va se mettre à imprimer. Comptez sur les gouvernements sociaux-démocrates pour peser sur le piton des papiers et des formules. Là, là, ça va être encore une fois l'État-papier, et là tout le monde va se perdre dans la bureaucratie puis dans la paperasse. Et le plus comique de l'histoire, c'est qu'on ne saura probablement jamais qui a conduit la voiture cette journée-là.

Pire que ça. Vous vous faites voler votre voiture, M. le Président, vous vous faites voler votre voiture et vous recevez une amende. Le bon voleur, il est allé trop vite. Qu'est-ce que vous voulez, il a pris la poudre d'escampette avec votre voiture. Alors, vous recevez une amende. Qui est coupable, M. le Président? C'est le genre de problèmes pratiques qu'on va rencontrer sur une base quotidienne et que le législateur aujourd'hui nous demande de voter pour.

M. le Président, ce bon ministre de l'Environnement, ce distingué ministre de l'Environnement, le très honorable ministre de... Pas de l'Environnement, du Transport, excusez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Le très distingué ministre du Transport, je l'inviterais, plutôt qu'à perdre son temps sur les cinémomètres, à régler le problème de l'alcool au volant. J'ai moi-même, dans ma circonscription, eu deux jeunes dans les dernières années tués par des gens en état d'ébriété, un à Saint-Élie, un dans le village d'Austin. À chaque fois, on se dit: Est-ce que nous, personnes en autorité dans cette province, avons fait tous les efforts? Je me pose la question.

Je vous donne certaines statistiques. L'alcool au volant, l'an passé, il y a eu 265 personnes de tuées; de blessées, 2 200; des blessures légères, 1 000; pour un total de 3 465. C'est beaucoup de monde, ça, M. le Président. Alors, le ministre du Transport, plutôt qu'essayer de trouver des patentes pour ramasser des sommes d'argent, est-ce qu'il ne serait pas mieux de trouver des formules pour éviter ce genre d'accidents mortels de gens au volant?

n(20 h 50)n

L'an passé, au moment des barrages, vous savez, ces barrages qu'on fait dans les périodes des fêtes, on a arrêté 15 500 personnes en état d'ébriété. C'est bien du monde, ça, là. 25 % de ces 15 000 personnes là étaient à la deuxième ou à la troisième offense. Est-ce que le ministre n'aurait pas avantage à regarder ces aspects-là de la conduite plutôt que de nous installer des cinémomètres qui vont être des machines? Ça va être des guichets automatiques, encore une fois, et puis on va piger quotidiennement dans les poches des citoyens.

Ce que j'ai vu aux États-Unis, si le ministre veut faire de l'éducation... Et ça, quand un policier nous arrête, ce qui m'est arrivé il y a deux semaines avec mon confrère de Shefford... On ne s'en venait pas assez vite à Québec pour travailler. Le policier a été d'une amabilité, il a dit: Écoutez, M. Benoit, vous alliez trop vite. J'ai admis: Oui, j'allais trop vite. C'est vrai que nous allions trop vite. On voulait être ici pour la période des questions, nous étions en retard. Et je n'ai pas contesté...

Des voix: ...

M. Benoit: Je n'ai pas contesté l'amende, je l'ai payée. Et le policier m'a expliqué que, effectivement, même si j'avais un travail à faire, même si la voiture était bonne, même si j'étais pas en état d'ébriété, à la vitesse à laquelle j'allais, c'était dangereux. Puis il avait absolument raison. Alors, il a eu un effet dissuasif sur le citoyen. Et je peux vous dire que maintenant, sur la 20, c'est 115 km, pas un kilomètre de plus élevé, M. le Président, parce que ce bon policier a prouvé son point.

Imaginez-vous, si je m'étais fait arrêter par une machine, maintenant. Quinze jours après, j'aurais reçu ça dans le courrier; je ne suis pas sûr que ça aurait eu cet effet dissuasif. Loin de là, loin de là! Je serais probablement arrivé à l'heure à la période des questions, remarquez bien, cette journée-là, mais ça n'aurait pas eu cet effet dissuasif.

Alors, aux États-Unis, on a joint l'utile à l'agréable. Ce qu'on a fait, aux États-Unis, on a installé de ces cinémomètres, mais ils n'émettent pas de contravention. C'est une approche proactive. Alors, on indique sur le panneau: Monsieur, madame, vous alliez à telle vitesse. Alors, le cinémomètre écrit ça sur un immense écran, à quelque 1 000 pi plus loin: Vous alliez à telle vitesse. Si nous vous avions arrêté, vous auriez eu une amende de 215 $. Vous auriez eu une amende de 215 $. Nous vous invitons à être plus prudent.

Ces panneaux, aux États-Unis ? et je les ai vus aussi en Ontario ? ont un effet tout à fait dissuasif. Vous réalisez soudainement que ce que vous faites aurait pu vous coûter très cher, que vous étiez un citoyen probablement dangereux et que vous allez faire probablement plus attention à l'avenir. Et, heureux si, un peu plus loin, ils ont mis un policier en voiture qui vous arrête, parce que, franchement, vous avez été averti. Alors ça, c'est une approche très proactive. Les États-Unis le font, et, franchement, on doit être heureux de ce genre d'approche où on dit aux citoyens: Écoutez, vous avez une attitude qui n'est pas responsable, et on vous invite à l'être.

Le ministre nous dit, dans ses exposés, qu'il va sauver 100 vies, avec ça. Que bien lui soit fait! Nous souhaitons, de l'opposition, qu'il ait raison. Mais, quand nous demandons au ministre: Prouvez-nous, M. le ministre, que ce sera 100 vies, il est pas capable de le faire. Il est pas capable de le faire. Par aucune forme de calcul, par aucune forme d'approche il peut soutenir l'avancée des 100 vies qu'il pourrait sauver. Ce que, nous, nous savons, c'est qu'en ce moment au Québec il y a un mort par 100 millions de kilomètres conduits. Et c'est l'équivalent de ce qui se passe aux États-Unis en ce moment. Sur 4,6 millions de voitures, nous avons la même équation que celle des États-Unis, soit un mort par 100 millions de kilomètres. Donc, nous sommes pas excessifs. Nous avons pas à nous réjouir non plus, mais ce n'est pas excessif. Et nous devons essayer de continuer à baisser, bien sûr, les morts au volant.

Je vous rappelle que chacune de ces machines va rapporter à l'État québécois 4 millions. C'est des guichets automatiques. On sait pas encore combien de machines il va mettre, donc on peut pas nous dire combien ça va rapporter. Il peut nous dire combien de vies ça va sauver, mais il peut pas nous dire combien ça va rapporter, alors que, lui, il sait combien ça rapporte et il sait combien de machines il va mettre. Permettez-moi, M. le Président, par déduction, de vous dire que, s'il sait que c'est 100 personnes qui ne mourraient pas, que s'il sait que c'est 4 millions par machine, il doit savoir aussi combien de machines il va autoriser, et la somme doit être tellement astronomique qu'il ne veut pas le dire aux citoyens du Québec, combien on va encore piger dans leurs poches, avec ces machines-là.

Ce que je peux vous dire d'autre part, les citoyens du Québec, quand je vous dis qu'on pige dans chacune de leurs poches, bien, pour l'essence, l'an passé, ils ont donné 2 milliards en taxes; c'est beaucoup, beaucoup d'argent. Et vous savez, c'est une taxe ascenseur hein? À chaque fois que l'essence monte, il faut bien comprendre que la taxe augmente en proportion. Alors, le gouvernement va la chercher en pourcentage. Ah! bien sûr qu'il fait... à chaque fois que le prix augmente, le gouvernement fait de plus en plus d'argent.

Les permis sur votre bagnole, l'an passé, le gouvernement est allé chercher tout près de 700 millions, un peu plus de 700 millions; c'est beaucoup, beaucoup d'argent. Vous savez, ce 30 $ qu'on a mis dans les régions périurbaines sur les plaques, eh bien, l'an passé, ça a rapporté 60 millions. Presque tout le comté d'Orford est affecté par ce 30 $ là.

L'Agence métropolitaine, qui était un autre moyen qu'on a pris pour vous taxer un peu pour aider le transport en commun là-bas, on est allé vous chercher un autre 50 millions, et les 2 $ sur les pneus, bien, on est allé vous chercher 14 millions, M. le Président. Si vous avez le malheur d'avoir une voiture au Québec, ça vous coûte drôlement cher. Je vous souhaite de ne pas en avoir deux. Et, si votre premier ado veut en avoir une troisième, dites-lui que ça coûte bien cher, conduire une voiture au Québec, surtout depuis qu'on pense qu'il va y avoir des cinémomètres.

Le ministre nous dit, et je terminerai avec ça: C'est un projet-pilote. Les projets-pilotes là, quand il y a des grosses piastres d'attachées à ça, les gens qui m'écoutent ce soir, ils savent exactement, eux, ce que ça veut dire, un projet-pilote. Projet-pilote, ça veut dire qu'on va nous embarquer dans l'entonnoir tranquillement puis, là on va nous pousser dessus là et puis, finalement, on ne sera plus capable de débarquer de cette affaire-là.

Et là, dans le projet de loi, on nous dit: Bien, là il n'y aura pas de points de démérite puis on ne peut pas ? je vais vous le lire, on dit dans le projet de loi, j'ai été bien surpris de lire ça, je ne comprends pas pourquoi ils disent ça: De plus, ce projet de loi modifie le Code de procédure pénale afin de prévoir qu'une peine d'emprisonnement ne pourra pas être imposée pour des sommes dues, à la suite d'une infraction constatée au moyen d'un cinémomètre photographique. C'est un peu spécial qu'on nous dise ça.

Soudainement, il y a une amende et puis on ne pourrait pas aller jusqu'au bout, on ne pourrait pas finalement vous amener en peine d'emprisonnement. Probablement qu'ils ne sont pas sûrs que tout ça tiendrait en Cour. En tout cas, c'est ma lecture de cet énoncé dans le projet de loi.

Alors, vous comprendrez que l'opposition, après avoir sérieusement étudié le projet de loi, l'avoir amené au caucus des députés... Parce que c'est pas un député qui se prononce là-dessus, c'est l'ensemble des députés dans un caucus. On étudie le projet de loi, le porte-parole, le député de Shefford qui fait un ouvrage extraordinaire, est venu nous l'expliquer. Et, en fin de semaine, il y avait ce qu'on appelle dans les formations politiques un «conseil général». Le conseil général, ça regroupe cinq, six personnes de chacune des associations, des 125 associations. Alors, il y avait donc du monde de tout le Québec avec notre chef, M. Charest. Et il y a eu une résolution numéro 8 qui a été lue et qui a été votée à l'unanimité dans la salle. Les gens qui étaient contre les cinémomètres... et ça, c'est des gens qui viennent de partout au Québec, hein! Il y avait des gens des Îles-de-la-Madeleine, de l'Abitibi, de l'Estrie bien sûr, de la Montérégie. Et ces gens-là ont lu la résolution et on eu à voter librement; ils n'avaient pas à voter pour ou contre, ils ont un petit carton, ils lèvent la main, ils peuvent voter contre, il n'y a personne qui leur en saurait gré, ils peuvent voter pour. L'ensemble des gens dans la salle étaient mais vraiment, vraiment contre le cinémomètre au Québec.

Alors, M. le Président, vous avez compris que nous voterons contre en première lecture, nous voterons contre en deuxième lecture, nous voterons contre en troisième lecture, et nous allons mener, au nom des Québécois, la bataille jusqu'à la fin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député d'Orford. Et nous poursuivons le débat sur le projet de loi n° 17 quant à l'adoption du principe.

Je voudrais reconnaître maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de Ressources naturelles et député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, vous comprendrez qu'après une telle allocution, la marche est un peu haute, hein? La marche est un peu haute pour nous tous parce que c'était une excellente allocution. Et on voit que ça a captivé l'attention de tous les députés d'en face, y compris le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, qui a sans doute profité du nouveau service qui est offert à l'Assemblée nationale, la retransmission des débats sur Internet, pour mieux comprendre encore ce que voulait dire le député d'Orford et avoir toutes les conséquences au fur et à mesure.

n(21 heures)n

M. le Président, sur le projet de loi n° 17 qui est devant nous aujourd'hui, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique, pour reprendre les paroles de mon collègue d'Orford, c'est un projet de loi qui, chez nous, a été amené de façon extrêmement, extrêmement rigoureuse par le député de Shefford, député de Shefford qui, lorsqu'il en a fait la présentation au caucus des députés, nous a vraiment tracé un portrait global, un portrait complet de toutes les conséquences, de tous les impacts et de tout ce que ça pouvait représenter pour les Québécois et Québécoises, déjà les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, la mise en place de cette nouvelle bebelle, de cette nouvelle patente du député de Joliette qu'on verra apparaître bientôt le long de nos autoroutes, à moins qu'il finisse par comprendre raison.

Ce projet de loi là, M. le Président, certains l'ont considéré comme machine à taxes. On entendait aujourd'hui la nouvelle offensive du gouvernement contre les joueurs impulsifs. On pourrait qualifier cette nouvelle machine à taxes, ce nouveau cinémomètre de nouvelle offensive contre les conducteurs impulsifs. Et il faut se questionner aussi sur l'efficacité de cette machine-là. Et, mon collègue l'a bel et bien mentionné tantôt, hein, imaginez la paperasse, imaginez tout le débat autour d'une contravention que des gens recevront dans la malle, recevront chez eux deux, trois semaines après qu'une infraction ait été commise et que finalement ils pourront avoir de la difficulté à voir d'où ça vient.

Mon collègue d'Orford parlait, avec son éloquence habituelle, d'une remise de panier de Noël. Plaçons-nous tout simplement aussi dans la peau d'une auto, une fin de semaine, dans une fête de famille. L'auto est là, sur le bord de la rue, c'est la première qui est stationnée, c'est pas celle-là qui est en avant. Peu importe à qui elle est. Et, tout à coup, les gens veulent aller chercher au dépanneur de la liqueur, chercher des chips, préparer le barbecue. Et quelqu'un prend l'auto, s'en va au dépanneur. Tout à coup, ça peut être notre blonde, ça peut être notre femme, ça peut être aussi notre belle-mère, notre beau-père qui part au dépanneur avec l'auto, fait un excès de vitesse, se fait photographier...

Une voix: ...fringale. Ha, ha, ha!

M. Béchard: Oui, la fringale, hein. L'été, il fait chaud, les barbecues sont là, vite, il veut y aller. Le charbon est ardent, et c'est le temps de faire cuire le hamburger. C'est le temps; c'est pas plus tard, c'est là. Là, il se dépêche et y va. Bien, 15 jours après, qu'est-ce qu'il reçoit par la malle? Il reçoit une belle petite facture, avec les compliments du député de Joliette, l'éloquent député de Joliette, qui lui dit que finalement sa fringale lui au coûté cher, même si c'était pas son auto. Mais c'était l'auto de qui? Qui a pris l'auto ce soir-là pour aller chercher la viande et les pains à hamburger, hein? Qui l'a pris? Ça va être ça. Au tribunal, là... Puis, comme mon collègue le disait ? d'Orford ? M. le Président, vous qui êtes là, en avant, vous êtes avocat, vous le savez, à un moment donné, en cour, il faut avoir quelques preuves, hein? Qui a pris l'auto? C'est rendu qu'il va falloir non seulement le cinémomètre dans la rue, mais un aussi sur la galerie pour savoir qui part avec l'auto pour aller chercher des hamburgers, comme tel. C'est facile à comprendre, ça, M. le Président.

Donc, ça démontre toute la pertinence et toute la rigueur du député de Joliette quand il arrive avec des projets de loi comme ça. Et, quand il dit que ça va être extrêmement efficace... Ça va être efficace, ça, là, ça va être épouvantable! Il prend la peine de mentionner dans ses notes explicatives que, là où il va y avoir ces nouvelles machines là, ces cinémomètres-là, inquiétez-vous pas. C'est un peu comme la surveillance aérienne sur les autoroutes. Vous n'en voyez pas souvent, d'avion qui vous surveille, mais c'est écrit, là. Bien, là aussi, quand il va y avoir un cinémomètre, ça va être inscrit qu'il y en a un qui s'en vient. Ça fait que, ça, là, ça veut dire: Prenez pas de chance. Ça va être tellement efficace que, même s'il y en a pas, il y a une pancarte qui vous avertit qu'il va y en avoir un. Moi, à toutes les fois... M. le Président, vous le savez, quand on conduit puis on voit tout à coup «surveillance aérienne», on regarde en haut: Y a-tu un avion? Non. Bien, on pèse. On en profite, on pèse, il n'y en a pas. Ça va être un peu la même chose, avec ça. C'est comme dire à l'avance, finalement: Faites attention, il y a peut-être quelque chose qui s'en vient.

Et ça, on tente de nous faire croire que ça va être plus efficace, que ça va être plus efficace que la surveillance policière, ça va être plus efficace que la présence sur nos routes de policiers qui font leur travail et qui font en sorte qu'on respecte les règles, qu'on respecte les limites de vitesse. Et ça, quand on voit une telle machine arriver puis on entend les propos du député de Joliette nous dire: Inquiétez-vous pas, ça va bien aller, moi, quand j'entends le député de Joliette dire ça, là, ça me rappelle le film le Titanic, quand, à 1 h 45, le capitaine qui avait l'eau aux genoux, il disait: Inquiétez-vous pas, on coulera pas, il y en a pas de problème! C'est à peu près ça aussi que nous dit le député de Joliette quand il nous dit que cette machine-là va bien aller, et qu'il n'y aura pas de problème, et que, finalement, ce n'est pas une machine à taxer du tout. Ce n'est pas ça, ce n'est pas ça qu'il veut du tout.

Il y a aussi un précédent important. Et, si on était les premiers au monde, si c'était la première fois au monde qu'on veut mettre en place une telle machine, une telle bébelle sur le bord de la route, on pourrait dire: Bien, on va essayer puis on verra. Mais ce n'est pas ça, la situation. Il y a déjà plusieurs endroits où on a essayé, et finalement on a reculé. Et peut-être que c'est dans le but du député de Joliette de mettre ça en place pour plus tard reculer, hein? On se souvient de ses grands ébats sur les minicentrales à un moment donné. Il a déchiré sa chemise pendant trois, quatre ans là-dessus. C'était épouvantable puis tout était terrible, puis les libéraux avaient fait ci, avaient fait ça. Bien, ça a pris une commission d'enquête, la commission Doyon, ça a coûté 4 millions aux Québécois et Québécoises, puis, même après ça, on n'a pas réussi à rendre crédibles les propos du député de Joliette; 4 millions pour rendre crédibles les propos de quelqu'un, puis ça n'a pas marché.

Alors là, moi, quand j'entends le président de la Commission des transports nous dire que, lui, les yeux fermés, il fait confiance au député de Joliette, permettez-moi d'avoir des doutes et de lui souhaiter qu'on ne se retrouve pas dans un autre débat comme les minicentrales, qui, plusieurs années plus tard, font en sorte que les propos du député de Joliette, ça a été prouvé, ne sont pas fondés. Non seulement ils ne sont pas fondés, mais le ministre des Ressources naturelles, qui à l'époque était contre, fait l'annonce comme si rien n'était, puis on va de l'avant. Donc, on n'est pas à une contradiction près du côté du gouvernement.

Mais, pour revenir sur le fait, est-ce que ça a déjà été essayé ailleurs? Oui, ça a déjà été essayé ailleurs. En Ontario, puis ça a été retiré; au Québec, dans les années soixante-dix, puis ça a été retiré; en Alaska, ça a été retiré aussi; en Californie, ça a été retiré; Illinois, ça a été retiré; au Texas, ça a été retiré; en Utah, ça a été retiré; dans l'État de Washington, ça a été aussi retiré; dans l'État du Wisconsin, ça a été retiré. Et, nous, tout à coup, sous les lumières des fils qui se touchent, du député de Joliette: Ah, non! nous, ça va marcher. Ça va marcher, il n'y a pas de problème. On va aller de l'avant.

Bien, M. le Président, vous me permettrez d'avoir de gros doutes là-dessus et de vous dire que, finalement, tout ce que ça risque d'amener, ceux et celles qui risquent d'en retirer les plus grands bénéfices, de ce projet de loi là, le projet de loi n° 17, ce sont ni plus ni moins que tous ceux et celles qui seront chargés de prouver finalement qui conduisait l'auto , quand la photo a été prise, qui conduisait l'auto, qui était là. Et ça va être une paperasserie épouvantable. Ça va continuer, on est, comme le disait si bien tantôt avec tant de pertinence mon collègue d'Orford, dans un État de papier où on met des papiers, on en remet, puis on en remet, puis on en remet. Bien, ça, c'est un projet de loi qui prouve clairement que, finalement, on va continuer d'en mettre, et encore pour longtemps.

Il y a un élément aussi extrêmement important qu'il faut se poser comme question dans la mise en place de ce projet de loi là, c'est son efficacité. Est-ce que vraiment vous croyez, vous tous en face qui faites confiance, les yeux fermés, au député de Joliette, que ça va être efficace? Est-ce que vous croyez vraiment que ça va ralentir les gens sur les routes? Est-ce que vous croyez vraiment qu'à la vue d'une pancarte qui va dire «Faites attention! Vous entrez dans une zone où peut-être il y a un cinémomètre, où peut-être on vous surveille» ça va ralentir les gens et ça va faire en sorte que les gens vont être plus prudents? Est-ce que ça, ça peut remplacer des policiers, des policières qui font leur travail sur le bord de la route, qui sont là, qui surveillent la circulation, qui peuvent même intervenir rapidement?

n(21 h 10)n

Bien, M. le Président, vous nous permettrez d'avoir des doutes là-dessus et vous nous permettrez aussi d'avoir des doutes sur le changement de comportement que ça va amener. Qu'est-ce que ça va amener quand on va voir une pancarte qui va indiquer: Attention, vous êtes en zone de cinémomètre? Les gens vont ralentir. On est à deux pas de voir le député de Joliette nous dire: Inquiétez-vous pas, quand vous allez ressortir de la zone, il va y avoir aussi une pancarte qui va vous dire: Accélérez, vous êtes sortis de la zone de cinémomètre. Continuez, pesez sur le gaz, c'est fini, vous n'êtes plus sur le pont, vous n'êtes plus dans le tunnel. Vous pouvez y aller, donnez la claque, on y va. On est à deux cheveux d'entendre ça du député de Joliette. Il va dire: Bien là ça va être vraiment efficace dans la zone, on va le dire avant qu'il y en a un puis on va le dire après qu'il n'y en a plus. On est à deux cheveux d'entendre ça. Peut-être que ça va être dans les amendements en commission parlementaire si on se fie à la rigueur et à la cohérence habituelles du député de Joliette.

Est-ce que, finalement, on n'est pas en train, au Québec, d'assister beaucoup plus à la mise en place d'un système parallèle de contrôle de la vitesse? Qu'est-ce que je veux dire par là, M. le Président? Moi puis mon collègue de Shefford, l'hiver passé, on est allés à Sept-Îles. En arrivant à Tadoussac, mon collègue était presque ébouillanté. Il s'était pris un café en partant de Baie-Saint-Paul, puis il y avait tellement de trous dans le chemin, tellement de nids de poule ? on n'avait pas besoin de cinémomètre, on ne pouvait pas aller vite ? il est arrivé à Tadoussac, à la traverse, il était presque en train de se brûler. Parce qu'on ne peut pas aller vite, on n'a pas besoin de cinémomètre. Il y a tellement de trous dans les rues, depuis que vous êtes là, sur les routes que c'est le meilleur cinémomètre qu'il n'y a pas.

On est au Québec, M. le Président. S'il vous manque un cap de roue sur votre auto, dites-vous que vous n'êtes pas le seul. Vous n'êtes pas le seul parce que, au Québec, maintenant, puis peut-être que c'est un effort indirect qu'ils ont fait aussi... On n'a plus besoin de voler de cap de roue au Québec. Non. On se promène sur le long de la 20 puis sur le long de la 40 puis on les ramasse dans les fossés. Il y a tellement de trous dans les routes... Je suis sûr que la députée de Matapédia, quand elle monte de son comté, si elle se rend compte en arrêtant à une halte routière qu'il lui manque un cap de roue, elle monte plus tranquillement après, puis elle regarde, puis elle en ramasse un avant d'arriver à Québec. Parce que ça, on croirait que c'est la nouvelle politique du gouvernement: pour contrôler la vitesse, on laisse les trous sur les autoroutes, M. le Président.

Si l'emblème du Québec, comme le disait mon collègue de Shefford, de plus en plus ça s'en vient le nid de poule... Ça s'en vient ça, le nouvel emblème du Québec. À la Saint-Jean-Baptiste, on va peut-être avoir le fleur de lis puis le nid de poule à côté. Mais, pour finir tout ça, la médaille qu'on va remettre, ça va être un cap de roue. On va remettre un cap de roue. Parce que c'est à peu près ça, la trilogie que ce gouvernement-là a réussi à faire comme développement de notre réseau routier. Ça tente de nous faire croire par la suite: Ah! les régions, c'est important. Bien, oui, les régions, c'est important. Les gens, c'est rendu que ça leur coûte tellement cher, sortir de leur région, en bris sur leurs autos qu'ils aiment mieux rester chez eux. C'est une belle façon de faire du développement régional.

Vous me permettrez aussi, M. le Président, de parler un peu d'un autre élément important dans ce projet de loi là, c'est-à-dire la fameuse présence de l'État partout. Au cours des dernières années, on a eu plusieurs débats sur: L'État est dans vos vies, Big Brother est là, on vous surveille, on vous watche, on vous a à l'oeil, on sait ce que vous faites, on sait où vous êtes, on veut savoir ce qui se passe. Bien là on en a un nouvel exemple. On en a un nouvel exemple parce que non seulement, avec toutes les cartes, avec tous les numéros, on sait exactement ce qui se passe partout, on va même vous surveiller sur la route. Bien, pas tout à fait vous, M. le Président, mais votre auto, parce que ce n'est peut-être pas vous qui allez être dans votre auto.

Comme je vous disais tantôt, comme mon collègue de Shefford l'a dit, comment retrouver celui ou celle qui conduisait? Et je voudrais là-dessus que... On est presque à la veille, en plus, hein, ça serait intéressant... Quand on va entrer dans une zone de cinémomètre, ça va être marqué: Il y a un cinémomètre dans le coin. «Souriez, vous allez peut-être être pris en photo», on pourrait rajouter ça aussi en plus. Et là on va réussir à monter un dossier complet. On va avoir votre immatriculation, vous dans votre auto, puis on va avoir le dossier complet. On va savoir exactement où vous étiez, à quelle vitesse vous alliez.

Et, si jamais ma collègue de Matapédia ? imaginez la scène ? perd un cap de roue sur son auto, elle arrête sur le bord de la route en ramasser un en zone de cinémomètre, on la prend en flagrant délit. Est-ce qu'elle aura volé un cap de roue ou non? Est-ce qu'elle l'aura ramassé ou non? Ah! ce sont toutes des choses qui risquent de faire en sorte qu'avec ce qu'on propose présentement, avec ce qui est en train de se mettre en place... On a une caméra qui nous surveille partout. Quand la députée de Matapédia arrivera à Québec suite à tous les cinémomètres qu'elle aura traversés, elle aura presque tourné dans l'émission Survivor, elle sera presque arrivée intacte à Québec. On aura des scènes d'elle partout sur la route.

Est-ce que c'est ça qu'on veut au Québec? Est-ce que ça, ça peut remplacer la présence de forces policières le long des autoroutes? Est-ce que c'est ça, le moyen de faire en sorte que les gens vont ralentir? Non, M. le Président. C'est uniquement une nouvelle machine, une nouvelle bebelle qu'on met en place, et pendant ce temps-là, malheureusement, on passe à côté de débats qui sont beaucoup plus importants. On en a parlé aujourd'hui à l'Assemblée, tout ce qui a trait à l'alcool au volant, tout ce qui a trait à la sécurité routière comme telle, ça, c'est beaucoup plus important que de savoir si on va filmer ou non les automobilistes.

Et qu'est-ce qu'on a sur la table présentement? Qu'est-ce qu'on a pour faire face à ça? On n'a rien, on n'a rien présentement. On dit que c'est une priorité, on dit qu'on va revenir, mais on n'a rien sur la table. Donc, le temps pourrait être beaucoup plus efficace, mieux utilisé à l'Assemblée nationale si on l'utilisait pour vraiment s'attaquer aux vrais problèmes sur nos routes, s'attaquer au problème d'alcool au volant, s'attaquer au problème de sécurité routière.

On a beau parler, là, mais, quand on se promène sur l'autoroute 20, sur l'autoroute 40, qu'il y a plein de trous, sur la 138 pour aller sur la Côte-Nord... La 138, là, il y a certains endroits où on passe, il n'y a plus d'asphalte sur les ponts, on est directement sur la structure. Là, tu passes là-dessus puis tu ne sais jamais comment tu vas t'en sortir de l'autre côté, surtout si tu rencontres un camion lourd en passant sur le pont. Ça, ce sont de vrais problèmes. On s'attaque pas à ça. On dit pas combien il y a d'argent de plus qu'on doit mettre dans le réseau routier.

D'ailleurs, là-dessus, même les gens qui travaillent au ministère des Transports le disent, les routes, c'est pas une priorité au Québec, le fond de route, c'est pas une priorité. Et, moi, je suis certain, je suis certain que le ministre délégué aux Transports aimerait beaucoup mieux pouvoir compter sur plus d'argent, compter sur plus de montants pour investir dans nos routes que de se poser la question: Où est-ce que je vais implanter des cinémomètres? Ça entre sûrement pas dans le programme d'infrastructures, à moins qu'il y ait tout un trépied sur le cinémomètre. Mais, lui, je suis sûr, là, qu'il doit se dire, quand il regarde le député de Joliette, il doit se dire: Moi, au lieu de mettre de l'argent puis de l'énergie là-dessus, j'aimerais bien mieux qu'on en mette plus sur nos routes, d'asphalte, qu'on améliore la qualité des routes, qu'on fasse des réfections des courbes dangereuses. Parce que, même les gens du ministère des Transports, ils trouvent ça difficile parce que les routes, ils se disent... Imaginez, là, ces gens-là, ça fait 20 ans qu'ils travaillent dans un ministère puis tout à coup ils se disent: C'est dommage, mais notre ministère, c'est pas une priorité pour nous autres, c'est pas une priorité pour le gouvernement. C'est dommage, on passe toujours les derniers, donc c'est pas important.

Bien, c'est un peu ce que les Québécois et Québécoises ont aussi derrière la tête depuis qu'ils voient le député de Joliette, après s'être attaqué au casque à vélo, s'être attaqué au virage à droite... Hein, il est peut-être à la veille d'étudier la possibilité de tourner a gauche aussi sur une lumière rouge. Il a peut-être vu le conseil général du Parti libéral en fin de semaine puis il s'est dit: Aie! ça a l'air bon, le virage à gauche, hein, on pourrait peut-être essayer ça sur une lumière rouge aussi. Il va peut-être arriver avec un projet de loi là-dessus prochainement. On serait pas surpris. On serait pas surpris de le voir arriver avec un projet de loi sur le virage à gauche au feu rouge. Faites attention, vous pourriez être obligés de voter pour! Vous savez comment ça se passe dans vos caucus, vous pourriez être obligés de voter pour.

Mais, en fin de compte, M. le Président, on a eu, chez nous, en fin de semaine, une résolution qui est claire, qui est simple, adoptée par tous les militants, peu importe d'où ils viennent au Québec, et qui ont dit clairement que le gouvernement doit revenir sur sa décision, de ne pas utiliser le photoradar afin de contrôler les excès de vitesse sur les routes. Parce que, en faisant ça, un, on n'améliore pas la sécurité, deux, c'est pas un très grand signal de confiance envers nos forces policières de dire qu'ils ne sont pas capables de faire leur travail comme il faut puis qu'on aime mieux les remplacer par des machines. Et, trois, quel est le niveau de confiance que les Québécois et Québécoises peuvent avoir en ces machines-là qui finalement, en bout de ligne, vont mener à beaucoup plus de débats juridiques qu'à de véritables politiques de prévention et de changement de comportement sur nos routes? Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je reconnais maintenant M. le vice-président de la commission de l'éducation et député de La Prairie. M. le député, la parole est à vous.

M. Serge Geoffrion

M. Geoffrion: Oui, merci. Merci, M. le Président. Avant d'entreprendre mon allocution, j'aimerais souligner et faire remarquer à la population qui nous écoute avec quelle désinvolture les députés de l'opposition officielle discutent de cette question extrêmement importante pour la sécurité sur nos routes. Je vois que le député de Kamouraska-Témiscouata continue de rigoler sur cette question-là.

n(21 h 20)n

M. Béchard: M. le Président, excusez-moi... prêter des intentions...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député. S'il vous plaît!

M. Béchard: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, voulez-vous vous adresser à la présidence.

M. Geoffrion: M. le Président, je répète, avec quelle désinvolture le député de Kamouraska-Témiscouata a parlé pendant une quinzaine de minutes sur cette question-là. Il a parlé de patente, de bébelle, il a parlé, bon, des références avec le film Le Titanic, avec Survivor, avec les caps de roue, les nids de poule, enfin, sur un ton extrêmement désinvolte. Moi, j'ai été une douzaine d'années journaliste et j'ai eu la très mauvaise expérience d'aller sur les lieux d'accidents de la route, mortels, et je peux vous dire que, si le député de Kamouraska m'avait accompagné lors de ces accidents-là, il n'aurait pas eu le même goût de rigoler comme il vient de le faire depuis une quinzaine et une vingtaine de minutes.

Également, j'aimerais souligner le commentaire du député d'Orford, qui disait tout à l'heure que notre ministre était dans l'incapacité de prouver les cent vies potentiellement que nous pourrions sauver avec cet appareil. C'est bien sûr que, sur une base théorique, il est évidemment très difficile de le prouver, mais, si nous sauvions une vie ou deux, est-ce que ce serait déjà quelque chose d'extrêmement positif et d'extrêmement heureux? Alors, je peux comprendre que l'opposition officielle s'objecte à l'utilisation de cet appareil qui est utilisé dans plusieurs pays, mais je ne comprends toujours pas le ton sur lequel ils argumentent sur cette question extrêmement importante et délicate, dramatique dans certains cas.

Alors, M. le Président, en 1995, lors du dévoilement de la politique de sécurité routière 1995-2000, le Québec s'était fixé l'objectif de réduire les décès sur nos routes. Ainsi, malgré l'amélioration constante de 1995 à 2000, ce bilan nous apprenait qu'il y avait eu 765 décès sur les routes du Québec au cours de la seule année 2000 comparativement à 763 l'année précédente. Malgré tous les efforts consacrés aux campagnes de sécurité routière, on les a tous visionnées, les acquis sont fragiles, notamment en raison de ce mélange de la vitesse et de l'alcool sur nos routes.

On a donc réfléchi sur la manière de briser cette fragilité et de trouver des pistes d'action pour diminuer le nombre de décès et de blessures sur nos routes, pour améliorer en fait la sécurité des usagers de nos routes. On le sait, la vitesse excessive est l'un des axes sur lesquels il nous faut agir et sur lesquels nous allons agir. Et nous comptons le faire, notamment, par le biais du cinémomètre photographique qui, je vous le rappelle, je me répète, est utilisé dans plusieurs pays: en Allemagne, en Australie, en Autriche, en Belgique, au Danemark, en France, en Italie, au Japon. Et je pense bien que ce sont des pays qui ont une certaine maturité et sur lesquels on peut s'inspirer positivement pour ce type d'expérience.

Donc, on peut déjà le constater, malgré tout ce que l'on dit, cette mesure, malgré ce qu'en dit l'opposition, n'a pas été conçue pour remplir les coffres du gouvernement. Elle a pour seul objectif de protéger les usagers de nos routes en diminuant le nombre des décès et des blessures causés par la vitesse excessive. On le lit tous les jours dans les journaux, on le voit dans les bulletins télévisés, le dépassement des limites de vitesse et les accidents que cela occasionne constitue un phénomène quasi généralisé. Des relevés effectués par le ministère des Transports établissent que la proportion des conducteurs de véhicules de promenade qui excèdent les limites de vitesse, au sein notamment des agglomérations urbaines, est de plus de 75 %, ce qui est énorme, alors qu'elle est de 64 % sur les routes principales et de 75 % sur nos autoroutes. Selon les dernières statistiques de la Société de l'assurance automobile, la vitesse, la vitesse notamment chez les jeunes a maintenant rejoint l'alcool au premier rang des causes d'accidents mortels et de blessures légères ou graves sur les routes du Québec.

Donc, le présent projet de loi propose de permettre, dans des endroits bien ciblés, l'utilisation de cinémomètres photographiques dans le cadre d'un projet expérimental ? on l'a assez dit, que c'est un projet expérimental ? visant donc à accroître la surveillance de la vitesse et à améliorer le bilan routier. Donc, cet appareil est un outil d'intervention ? on l'a expliqué, le ministre l'a expliqué ? qui saisit sur pellicule photographique le numéro de la plaque d'immatriculation d'un véhicule routier qui excède la limite de vitesse permise dans une zone identifiée, et cela, tout en préservant donc l'identité des personnes. Le cliché permet également d'indiquer la vitesse enregistrée, la date, l'heure et le lieu de l'infraction. Dans sa phase expérimentale, il est prévu qu'il y ait quatre appareils utilisés en alternance sur un nombre significatif de sites d'intervention désignés au préalable par le ministre de la Sécurité publique.

Donc, en conclusion, je veux tout simplement rappeler qu'il s'agit là d'un mécanisme de contrôle reconnu par plusieurs pays dans le monde pour son effet dissuasif et son impact positif sur le bilan routier. Et j'invite les collègues de l'opposition officielle qui veulent poursuivre le débat sur cette question importante et délicate à le faire sur un ton respectueux, sur un ton respectueux compte tenu des conséquences et des drames que l'on vit à tous les jours malheureusement sur nos routes. Alors, M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 17, et je cède la parole maintenant au vice-président de la commission de l'économie et du travail et député de Laurier-Dorion. M. le député, la parole est à vous.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. On se trouve à débattre du projet de loi sur le cinémomètre qui serait installé, semble-t-il, selon les dires du ministre, à différents endroits à travers le Québec, afin de, disent-ils... Et on vient d'entendre le député, qui a pris le ton qu'il fallait prendre dans ce débat-là, au niveau de l'efficacité de cette mesure quant à la réduction des vitesses et les conséquences que ça peut avoir quant aux personnes, aux victimes de ces accidents-là, M. le Président.

Nous, on s'objecte, de ce côté-ci, M. le Président, à l'installation de cette mesure pour un certain nombre de raisons qui sont, nous croyons, très valables. Deux niveaux, finalement. L'efficacité de la mesure. Elle est inefficace, elle est inefficace sur les comportements des personnes par rapport à une situation de vitesse, et j'y reviendrai. Deuxième chose, le renversement du fardeau de la preuve finalement par rapport aux individus, une atteinte finalement aux droits et libertés des personnes et l'instauration d'un système de société qui fait en sorte que c'est le citoyen qui doit constamment se défendre contre l'État qui décide qu'il est coupable de quelque chose par, dans ce cas-ci, de la technologie, M. le Président, sans tenir compte du principe bien ancré dans notre société depuis un bon nombre d'années, du fait que quelqu'un qui est coupable de quelque chose, on doit lui signifier de quoi il est coupable, à lui.

n(21 h 30)n

Alors, revenons sur ces deux choses-là pour qu'on puisse comprendre véritablement le tort que ça peut nous faire d'avoir au Québec ces cinémomètres qui, soit dit en passant ? et peut-être même pas en passant ? ont été installés à plusieurs endroits en Amérique du Nord, M. le Président, et dont l'expérience que les gens ont vécue les ont conduits, dans la majorité des cas où ils ont été installés, à les retirer. N'allons pas trop loin, commençons avec le Québec. Dans les années soixante-dix, on les avait. On les a retirés parce que ça posait bon nombre de problèmes par rapport à l'identification des personnes qui étaient dans les véhicules, à l'époque, M. le Président.

Alors, aujourd'hui, on dit: On n'identifiera pas qui est le conducteur, on va juste prendre une photo de la plaque, de la vitesse de la voiture, puis on va facturer le propriétaire de la voiture, M. le Président, et ça va lui incomber de payer cette amende ou de prouver que quelqu'un a utilisé sa voiture sans sa permission. Alors, ça va en soi entraîner toute une série de problèmes au niveau individuel, parce qu'on peut imaginer bien des situations où les personnes auraient peut-être prêté la voiture à leur enfant, leur ami, etc., qui aurait fait un excès de vitesse, mais c'est le propriétaire qui va recevoir l'amende, c'est le propriétaire qui sera tenu de la payer. À lui après d'aller collecter son ami, son enfant, son parent, peu importe, mais ça va lui mettre le fardeau de la preuve, ça va lui imposer la nécessité d'aller collecter, et on peut imaginer le genre de chicane que ça peut conduire et produire.

En plus de ça, il aura toujours le loisir d'aller en cour pour dire que son enfant, son fils, sa fille a pris ses clés, a pris la voiture pour aller au cinéma ou je ne sais pas trop quoi sans que lui le sache, sans quoi il va être obligé de payer. Perdre une journée de travail pour aller prouver quelque chose, M. le Président, ou payer. L'État, lui, va dire: Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a une plaque d'immatriculation, c'est votre voiture, vous êtes responsable. C'est peut-être pour ces raisons et d'autres que, dans un bon nombre d'États et provinces canadiennes, cette mesure a été essayée puis retirée.

Je sais bien qu'on est distinct, M. le Président, mais quand même, est-ce qu'on ne pourrait pas peut-être prendre la peine d'apprendre de l'expérience des autres et se demander pourquoi, en Ontario, ils ont essayé cette mesure, ils sont arrivés à la conclusion que ça ne marchait pas, ils l'ont retirée. Ils ont fait la même chose en Alaska, en Californie, en Illinois, au Texas, en Utah, à Washington, dans l'État de Washington, dans l'État du Wisconsin, etc. Il y aurait de quoi se poser comme question: S'ils l'ont fait ailleurs puis ils ont décidé de le retirer, c'est parce que ce n'était peut-être pas la méthode la meilleure pour s'assurer que la vitesse soit réduite.

Le ministre, je l'ai entendu, nous dit qu'on va installer ces cinémomètres à des endroits stratégiques. Il n'y a rien de tel qui est inclus dans le projet de loi, M. le Président. Il n'y a pas de discussion des endroits stratégiques, il n'y a pas une indication, nulle part dans le projet de loi, que ça va être limité à des endroits entre guillemets stratégiques, et tout ce qu'on dit, c'est qu'on pourrait les installer là où le ministre décidera. Alors, on peut voir qu'avec le temps on va les retrouver un peu partout, M. le Président.

La question de l'efficacité donc est soulevée. Est-ce que ça va avoir un effet efficace sur le changement des comportements des conducteurs quant à la vitesse? On sait que ces endroits-là seront marqués et on va dire aux gens, quand ils vont arriver: Vous entrez maintenant dans une zone de cinémomètre. Alors, de deux choses l'une, M. le Président, soit la personne qui va voir l'affiche va se ralentir pour passer à travers et va reprendre son cours normal de vitesse ? normale dans sa tête à elle ? une fois la zone terminée, ou elle sera attrapée là où le cinémomètre s'applique. Le véhicule, l'immatriculation sera photographiée, puis le propriétaire aura une contravention. Si c'est le cas d'un propriétaire ou d'un conducteur plutôt qui n'est pas propriétaire, il pourrait très bien s'en foutre, des conséquences de son excès de vitesse, parce qu'il sait d'avance que ce n'est pas lui qui aura à la payer, ça sera le propriétaire. Et on verra, dans les semaines qui vont venir, comment le propriétaire puis le conducteur du véhicule vont s'arranger entre eux pour payer l'amende. Mais une chose est certaine, c'est le propriétaire qui sera pris avec l'amende.

C'est inefficace aussi, M. le Président, sur le comportement des gens parce que c'est prouvé, dans toutes les études de comportement humain, que, quand on sait exactement à quoi s'attendre, on s'ajuste en conséquence. Et, si on veut véritablement agir sur les comportements, il s'agirait de ne pas effectivement... d'avoir une approche un peu plus arbitraire entre guillemets dans le sens de ne pas dire effectivement où est-ce qu'on pourrait se faire attraper, mais de savoir qu'à tout moment on pourrait se faire attraper. Et, dans ce sens-là, il y a une plus grande incitation à toujours garder la vitesse à l'intérieur des paramètres acceptables, M. le Président, et légaux. Et ça, c'est un travail que seulement des policiers peuvent faire.

S'il s'agit de l'autre côté des endroits stratégiques, comme nous dit le ministre, où les policiers, par exemple, ne peuvent pas intervenir, je pense ici aux ponts ou aux tunnels, etc., M. le Président, on en convient, qu'il y a des endroits effectivement stratégiques, qui sont peut-être plus dangereux par rapport à la vitesse. Mais qu'est-ce qui empêche qu'on puisse, à l'entrée de ces endroits stratégiques, effectivement, avoir des radars ou des cinémomètres, si vous voulez utiliser ce terme-là? Mais qu'à la sortie le policier soit là pour livrer la contravention. Là, ça va être efficace. Et il y aura pas de problème de savoir qui était le conducteur, etc. On va l'arrêter et on va lui dire: Monsieur ou madame, voici la contravention basée sur le nom qu'on a sur le permis de conduire.

Alors, il n'y a rien qui oblige nécessairement à avoir des cinémomètres à des endroits tels que les tunnels, etc. On pourrait les avoir à l'entrée et que le policier sert la contravention à la sortie. On n'aurait pas de problème avec ça, M. le Président. On partage l'objectif qui est de réduire le nombre de victimes d'accidents routiers, personne ne peut prétendre le contraire, mais il s'agit effectivement de choisir des mesures qui seront efficaces et qui vont respecter également un certain nombre de règles qu'on s'est données comme société. Parce que, prenez-le à l'envers, si l'objectif est de réduire les vitesses et si le gouvernement croit que les cinémomètres sont efficaces, bien, mon Dieu! installez-les partout, sur toutes les routes. À tout moment donné, dès que vous dépassez la limite de vitesse, automatiquement il y aura une contravention.

Pouvez-vous imaginer ce genre de société où finalement tout est contrôlé, partout? La société normalement doit s'établir, la cohésion sociale doit se bâtir et s'établir sur l'appartenance volontaire aux règles de la société, et on doit agir à ce que les gens qui des fois dépassent ces règles soient ramenés à l'ordre. Mais on ne doit pas prendre comme approche que c'est tout le monde, tout le temps, partout, qui doit être contrôlé. Alors, ces cinémomètres, c'est le début de ça. Si c'est ça qu'on vise, M. le Président, qu'on nous le dise.

Et, je répète, le ministre nous dit dans ses interventions ici, en période de questions, que ça va être bien limité, ça va être à des endroits stratégiques. Mais je lis le projet de loi et je ne trouve pas ce qu'il nous dit en Chambre. Je trouve au contraire un article qui dit que les cinémomètres photographiques ne peuvent être utilisés qu'en des endroits déterminés par le ministre de la Sécurité publique et par les corps de police que celui-ci désigne. Alors, ça ne me fait pas très confiance. Je ne suis pas très confiant par rapport à ça parce qu'on nous indique pas ici quels sont les paramètres qui sont utilisés pour décider des endroits, on ne dit pas quel est le nombre total ou maximal de ces machines qui seront mises de l'avant. On dit simplement que c'est le ministre qui décidera, comme si c'était un gage de sécurité quant aux inquiétudes qui sont exprimées. Ce n'est un gage de rien d'autre que le fait que le ministre qui décidera à un moment donné que, peut-être c'est une chose qui sur un plan financier, par exemple, rapporte, il pourrait essayer de les augmenter constamment, allant jusqu'au point où je disais: Pourquoi pas, ultimement... La logique pourrait l'amener à dire: Pourquoi pas les avoir partout, tout le temps, pour tout le monde? C'est pas notre conception d'une société libérale, M. le Président.

La police, ça, c'est efficace. Des endroits où la police change de temps en temps leurs trappes radars, si vous voulez. Des cours de conduite obligatoires qui pourraient constamment essayer de rappeler à ces gens-là, des cours de conduite obligatoires, soit dit en passant, qui ont été abolis par ce gouvernement. Il y avait, quand ils sont arrivés au pouvoir, des cours de conduite obligatoires pour tout le monde afin de commencer l'entraînement, M. le Président, et ils ont été abolis.

n(21 h 40)n

Alors, il nous semble que ce n'est pas quelque chose qui sera ni efficace ni respectueux de la question de la liberté individuelle. Renverser le fardeau de la preuve, c'est quelque chose qui est toujours problématique pour les citoyens. Et on le fait allégrement de l'autre côté, M. le Président. On décide tout simplement que dorénavant, c'est toujours le citoyen qui aura à aller, lui, à se démerder avec la machine gouvernementale, l'appareil judiciaire pour prouver que c'était pas lui dans ce cas-ci, le conducteur de l'automobile, même s'il était le propriétaire. C'est d'ailleurs ce qui a probablement conduit toutes ces juridictions que je mentionnais tantôt à enlever ces machines de leurs routes, même après avoir essayé de faire exactement ce que le gouvernement essaie de faire.

Alors, il me semble, M. le Président, qu'on pourrait s'entendre ici en cette Chambre pour viser l'objectif de la diminution des accidents de la route qui sont causés par les excès de vitesse. Mais on ne s'entendra pas sur la façon qui est utilisée ici par ce gouvernement.

Je reviens sur le fait que c'est une mesure qui peut-être a aussi un certain intérêt financier derrière elle, M. le Président, pour le gouvernement à l'heure actuelle, parce qu'on sait bien que c'est peut-être quelque chose qu'il considère. Ils ne l'avoueront jamais, que c'est l'objectif principal, et je ne pense pas que c'est l'objectif principal non plus, je peux leur donner ce crédit-là. Disons que c'est pas l'objectif principal. Mais je gage que c'est aussi une considération qui a été prise en compte, parce que, si on peut constater que ça ne sera pas efficace sur le comportement des conducteurs parce que ça va être limité à des endroits spécifiques, ça va être préannoncé, ça n'aura pas d'effet sur le comportement, ça peut des fois rapporter des sous. Je suis convaincu que c'est quelque chose qui a été pris en compte. Et ça a peut-être été pesé entre les revenus que ça peut rapporter et l'inconvénient que ça va causer aux citoyens. Et, finalement, c'est pas l'inconvénient causé aux citoyens qui a été retenu comme le principe qui aurait dû guider ce gouvernement dans cette décision, c'est l'autre aspect, les sous qui seront rapportés.

Je répète, si le ministre nous dit que c'est juste pour des endroits stratégiques, dangereux où la police ne peut pas intervenir, je pose la question très simple: Pourquoi ne pas avoir à l'entrée de ces endroits des photoradars ou des radars puis des policiers à la sortie? Des policiers à la sortie. Si la préoccupation, c'est de minimiser les accidents sur ces endroits spécifiques, bien, il me semble que ça serait drôlement efficace, M. le Président, de savoir que, quand tu vas rentrer dans ce tunnel ou sur ce pont et on va te dire que «dorénavant, vous êtes maintenant sur radar» et qu'à la sortie il y a un policier qui surveille... Ça, ça va être efficace par rapport à ce bout de chemin, M. le Président. Si c'est ce qu'on vise, là, ça va être efficace, puis il n'y aura pas de problème avec l'identification des conducteurs.

C'est le chemin que le gouvernement devrait choisir de façon systématique dans des endroits stratégiques: radar à l'entrée, police à la sortie. Pourquoi pas? Pourquoi se fier strictement sur ces cinémomètres qui vont causer le genre de problèmes qu'on identifiait tantôt, M. le Président? Je vais vous dire pourquoi. Parce que le gouvernement a décidé que ça allait être moins coûteux d'avoir un cinémomètre, de ramasser les sous, de faire le tralala aux gens qui vont avoir à se démerder avec la justice par la suite que de payer un policier pour faire ça. Ça va sauver le coût du policier, M. le Président.

Il nous semble, de ce côté-ci, que ce projet de loi, même si l'objectif est louable, les moyens choisis sont à côté de la track. C'est pour cette raison-là que nous croyons qu'il faut bien prendre le temps de revoir toute cette question-là, d'aller voir aux juridictions qui ont testé cette mesure et qui l'ont retirée pourquoi elles l'ont retirée et peut-être d'apprendre que ce n'est pas nécessaire de répéter les erreurs des autres pour arriver, nous autres, à la même conclusion quelques mois ou quelques années plus tard et qu'on pourrait peut-être profiter du fait que d'autres ont fait l'expérience, ont conclu que c'était pas concluant, que c'était même pas souhaitable et l'ont retirée pour qu'on puisse examiner d'autres façons de faire, M. le Président.

Motion de report

C'est pour cette raison que je tiens, M. le Président, à proposer la motion de report suivante:

«Que l'étude du principe du projet de loi n° 17, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique, soit reportée de six mois.»

Je vous la dépose, M. le Président, et je vous remercie pour l'attention que vous m'avez accordée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Laurier-Dorion. Votre motion est recevable. Conformément au règlement, je vais suspendre les travaux pour rencontrer les deux leaders pour le partage du temps.

(Suspension de la séance à 21 h 45)

 

(Reprise à 21 h 52)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez vous asseoir. Merci.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, suite à la réunion des leaders, je comprends qu'il y aurait consentement pour qu'on puisse procéder immédiatement au vote sur la motion de report, et, par la suite, nous ajournerons nos travaux à demain, 10 heures.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion de report est adoptée?

Une voix: ...sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Rejeté sur division.

M. Boisclair: Elle est rejetée... Voilà.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez compris. Je voulais savoir si vous étiez très...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): J'ai remarqué que vous suiviez le débat, c'est déjà quelque chose. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Alors, je fais donc motion pour ajourner nos travaux à demain, 10 heures, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, les débats sont ajournés à demain, le 31 mai, jeudi, à 10 heures. Bonne soirée à tous.

Ajournement

(Fin de la séance à 21 h 53)