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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 12 décembre 2002 - Vol. 37 N° 143

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures cinq minutes)

La Présidente: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: Alors, Mme la Présidente, l'article b.

Projet de loi n° 152

La Présidente: Alors, à l'article b du feuilleton, M. le ministre des Régions présente le projet de loi n° 152, Loi sur la Commission nationale des régions.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Mme la Présidente, le projet de loi crée la Commission nationale des régions du Québec. La Commission, instituée sous l'autorité de l'Assemblée nationale, a principalement pour mandat d'étudier et d'analyser toute question relative aux problématiques liées au développement des régions ainsi que de formuler des recommandations à cet égard. La Commission peut également se pencher sur des sujets particuliers dont certains peuvent lui être référés par l'Assemblée nationale ou dont elle se saisit elle-même.

Ce projet de loi prévoit que la Commission est composée de 12 membres permanents et de cinq membres temporaires qui sont des députés de l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale peut élargir la composition de la Commission d'au plus sept membres permanents additionnels qu'elle considère représentatifs des milieux concernés par le mandat de la Commission. La Commission peut également élargir sa composition d'au plus cinq membres additionnels qu'elle choisit en fonction de leur compétence, leur expertise et leur connaissance du domaine qu'elle examine.

Ce projet de loi comporte un chapitre sur l'organisation de la Commission prévoyant des mesures relatives à la présidence, au secrétariat, au fonctionnement et à la gestion des dépenses de la Commission.

Et il contient aussi des dispositions finales.

Des voix: Bravo!

Mise aux voix

La Présidente: Alors, l'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Adopté.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre de la Justice.

Rapports annuels du Tribunal administratif
du Québec et de l'Office des professions

M. Jutras: Alors, Mme la Présidente, je dépose les rapports annuels 2001-2002 du Tribunal administratif du Québec et de l'Office des professions du Québec.

La Présidente: Ces documents sont déposés.

Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Saint-Maurice.

Consultations particulières sur le projet
de loi n° 129 et étude détaillée

M. Pinard: Alors, Mme la Présidente, je dépose les rapports de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé les 3, 4, 10 et 11 décembre 2002 afin de procéder à des consultations particulières et à l'étude détaillée du projet de loi n° 129, Loi sur la conservation du patrimoine naturel. Alors, la commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

La Présidente: Alors, ces documents sont déposés.

Dépôt de pétitions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de... c'est-à-dire au dépôt de pétitions, plutôt, Mme la députée de Beauce-Sud.

Fermer la carrière appartenant à la firme
Giroux & Lessard, à Saint-Benjamin,
dans la circonscription de Beauce-Sud

Mme Leblanc: Alors, Mme la Présidente, je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition conforme.

Une voix: ...

Mme Leblanc: Elle est conforme, je n'ai pas besoin de demander le...

La Présidente: Alors, consentement.

Mme Leblanc: C'est vrai.

Une voix: ...

n (10 h 10) n

Mme Leblanc: C'est parce qu'elles sont rares, celles qui sont conformes, hein?

Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par six pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Saint-Benjamin.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant qu'une carrière appartenant à la firme Giroux & Lessard s'est installée pendant l'été 2002 dans le rang 13 à Saint-Benjamin;

«Considérant qu'une plainte a été déposée auprès du ministère de l'Environnement sur les possibilités que la nappe d'eau phréatique ait été brisée suite à un dynamitage effectué par la firme;

«Considérant que le ministère de l'Environnement a répondu à la plainte déposée en mentionnant que les personnes qui l'ont déposée devaient prouver, à leurs frais, que le dynamitage pourrait être en cause;

«Considérant que le ministère de l'Environnement a accordé un permis d'exploitation à cette firme et qu'il n'y a pas respect des normes de distances séparatrices entre la firme et les résidences familiales, les sources d'eau, les chemins publics et un ruisseau;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale que la carrière appartenant à la firme Giroux & Lessard, qui est située à Saint-Benjamin, soit fermée.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

La Présidente: Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Et nous allons maintenant aborder la période des questions et des réponses orales. Et je cède la parole au député de Châteauguay.

Préparation d'un plan de fermeture
de certaines salles d'urgence

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Que ce soit dans le cas de Jonquière, de Shawinigan, de Paspébiac et de bien d'autres, le ministre a longtemps répondu, à nos questions sur les urgences fermées, que ce n'était pas grave. Il disait que tous les cas urgents étaient traités. Cet été, changement de discours. Le ministre porte la main à son coeur et nous dit maintenant que toutes les urgences doivent être ouvertes.

Aujourd'hui, est-ce que le ministre de la Santé peut confirmer que, depuis plus d'un an et encore maintenant, son ministère prépare en privé un plan de fermeture des urgences au Québec?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, je suis surpris de la question du député de Châteauguay. On se rappellera, Mme la Présidente, que, cet été, on avait dû malheureusement, parce que c'était la seule solution pour garder les urgences de Jonquière et de Shawinigan ouvertes, venir ici en session spéciale pour adopter une loi spéciale pour s'assurer qu'on donne des services à la population de Jonquière et de Shawinigan dans les salles d'urgence. Donc, je suis surpris de voir le député de Châteauguay s'inquiéter, s'intéresser aux urgences, puisqu'on se rappellera, Mme la Présidente, que le Parti libéral du Québec a voté contre cette loi pour assurer des services à la population.

Je veux rassurer le député de Châteauguay, il n'y a aucun plan au ministère de la Santé et des Services sociaux pour fermer des urgences majeures. Il existe peut-être, Mme la Présidente, dans certains cas, des services qui sont donnés dans les CLSC, et il y a une coordination qui peut être faite dans les régions pour assurer tous les services à la population d'une façon optimale, mais il n'y a absolument aucun plan pour fermer les salles d'urgence au Québec, Mme la Présidente.

La Présidente: En question complémentaire, M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Avec le consentement de la Chambre, je voudrais déposer un document du Comité d'experts du Centre de coordination nationale des urgences, en date du 24 septembre, pour consultation restreinte.

Document déposé

La Présidente: Est-ce qu'il y a consentement? Y a-t-il consentement?

Une voix: Oui.

La Présidente: Consentement.

M. Fournier: Mme la Présidente, je vais vous citer un passage de ce document qui pour le moins porte à faux avec ce que le ministre vient de nous dire à l'effet qu'il n'y avait pas de plan.

«Il existe dans certaines régions une abondance d'unités d'urgence[...]. Le MSSS doit revoir la distribution des services de soins d'urgence au Québec[...]. Afin de répondre à cette demande, le Comité d'experts du Centre de coordination nationale des urgences a reçu du ministère le mandant suivant:

«1. établir une catégorisation des urgences [...];

«2. évaluer la pertinence de conserver une présence médicale sur place, la nuit[...];

«3. dans le mesure où le groupe conclurait qu'il est possible de fermer certaines unités d'urgence, préciser quel devrait être le plan de mesures d'urgence.»

Ma question au ministre qui vient de nous dire qu'il n'y a pas de tel plan pour fermer certaines urgences: Comment explique-t-il que son ministère, depuis plus d'un an, travaille sur un mandat qu'il a donné lui-même pour établir un plan pour fermer certaines urgences au Québec? Au-delà des beaux discours, qu'il veut ouvrir les urgences, il prépare en catimini un plan pour fermer certaines urgences. C'est écrit où dans votre plan d'action que vous voulez fermer certaines urgences au Québec?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, d'abord, on parle de propositions d'un comité, premièrement. Deuxièmement, on parle de catégoriser les urgences. Je pense, c'est important, Mme la Présidente, de reconnaître qu'il y a des urgences qui sont plus importantes puis d'autres qui sont moins importantes. Il y a des urgences, Mme la Présidente...

Des voix: ...

La Présidente: Un instant! Écoutez, j'ai laissé plus de temps que le règlement le prévoit pour la question complémentaire, mais j'aimerais qu'on puisse entendre la réponse.

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, il y a des salles d'urgence, entre autres dans certains CLSC, qui reçoivent une ambulance à tous les deux jours, une ambulance à tous les deux jours. Il y a des urgences au Québec, donc, qui n'ont pas un volume d'activité important. Je vous donne un exemple, Mme la Présidente: l'urgence au CLSC de Port-Cartier. On a, durant la nuit, un médecin qui est disponible en cas d'urgence. Il arrive tellement peu de cas que ce médecin peut se rendre disponible en quelques minutes. On n'a pas à assurer la présence de plusieurs médecins à temps plein, 24 heures par jour, et on est capable, avec les autres ressources de la région, d'offrir des services à la population.

Mme la Présidente, que le député de Châteauguay vienne nous reprocher de faire une utilisation optimale des médecins qui, on le sait, sont en nombre réduit au Québec, je ne comprends absolument pas où il veut en venir, surtout venant de la part du Parti libéral du Québec qui a décidé, dans son plan, de ne pas prioriser la santé, de proposer, Mme la Présidente...

Des voix: ...

M. Legault: Non, mais c'est vrai, Mme la Présidente. Parlez à tous...

Des voix: ...

M. Legault: Mme la Présidente, parlez à tous les partenaires dans le réseau de la santé et des services sociaux, ils vont vous dire que, dans le plan du Parti libéral du Québec, on n'en rencontre même pas le tiers, des besoins qui sont reconnus par tout le monde, même par M. Romanow. Le Parti libéral du Québec est rendu en dessous du gouvernement fédéral pour réclamer des services à la population du Québec.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Est-ce que le ministre se rend compte que ce n'est pas juste un rapport de fonctionnaires? Il est appliqué. À Port-Cartier, c'est fermé à 18 heures. Et qu'est-ce qui arrive? Bien, les gens, quand il y a des cas lourds, c'est à Sept-Îles qu'ils vont, c'est à 60 km. Là, il va me dire que c'est la personne... Parce que, dans le fond, hein, on parle des personnes qui sont dans l'ambulance, là. C'est déjà arrivé ailleurs. Il y a des rapports du coroner là-dessus. Ce que vous êtes en train de faire, c'est de préparer, de façon systématique, la fermeture de certaines urgences au Québec, et vous n'osez pas le dire.

Avant-hier ? avant-hier, Mme la Présidente ? le ministre disait, en commission: «Il y a assez de médecins pour être capable de garder toutes nos salles d'urgence ouvertes dans toutes les régions du Québec.» Ça, c'était avant-hier. Hier ? hier ? dans un texte de Jocelyne Richer, de la Presse canadienne: «Dans les salles d'urgence qui doivent demeurer ouvertes 24 heures sur 24, sept jours sur sept».

Moi, ma question, M. le ministre, là: Quand est-ce que vous allez dire la vraie vérité? Parce que, la fausse vérité, on y a déjà assez goûté.

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on reconnaît la vieille habitude libérale de faire peur à la population du Québec. Mme la Présidente, je veux rassurer la population du Québec, je veux rassurer la population du Québec: Partout, on va s'assurer d'offrir à la population des services de base, et ça, ça inclut, en première priorité, les urgences, Mme la Présidente.

Je veux revenir, Mme la Présidente, sur l'exemple de Port-Cartier. Durant la nuit, au CLSC de Port-Cartier, il y a des infirmières compétentes qui sont là, de garde, à temps plein, et il y a un médecin qui est disponible, sur appel de quelques minutes, pour les cas très urgents. Et il y a très peu d'ambulances qui se présentent là à chaque semaine, Mme la Présidente.

Donc, c'est normal qu'on ait une certaine catégorisation des urgences. Et, oui, Mme la Présidente, je vais répéter ce que j'ai déjà dit, il y a assez de médecins au Québec pour assurer les services de base, essentiels. Cependant, il y a un problème de répartition de ces médecins, Mme la Présidente, sur le territoire. Et ce n'est pas simple de négocier ces mesures de répartition. On l'a vu cet été avec la loi n° 114 que le Parti libéral a refusé d'appuyer. J'ai bien hâte de voir, dans les prochains jours, si le Parti libéral du Québec va appuyer la loi n° 142 qui présente des mesures structurantes, des mesures qui vont permettre à tous les Québécois et à toutes les Québécoises, peu importe la région où on se situe, d'avoir des services de base. C'est possible de le faire, ça prend des mesures. Et, nous, au gouvernement du Parti québécois, on va avoir la responsabilité, on va avoir le courage de le faire. Et j'ai bien hâte de voir si le Parti libéral va faire comme cet été puis laisser tomber la population des régions.

n(10 h 20)n

La Présidente: En question principale, Mme la députée de Laviolette.

Pénurie de personnel médical
dans la MRC de Mékinac

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Merci, Mme la Présidente. En parlant des régions, Mme la Présidente, en date du 2 décembre dernier, les dirigeants du CLSC et CHSLD de la Vallée de la Batiscan adressaient une lettre au ministre de la Santé lui signifiant qu'ils vivent présentement une situation inacceptable et dangereuse. Effectivement, Mme la Présidente, on nous informe que deux médecins ont quitté la région durant l'année 2002 et que quatre autres s'apprêtent également à quitter en début d'année 2003, suite aux effets pervers de la loi n° 114. C'est plus de 50 % des effectifs qui quittent le territoire, laissant ainsi près de 5 000 personnes qui ne pourront compter désormais sur la présence d'un médecin de famille accessible sur tout le territoire de cette MRC.

Alors, j'aimerais savoir ce que le ministre a à répondre à ces gens, à cette population qui est très insécure par rapport à cette situation-là. Quelles sont vos solutions à court terme, M. le ministre?

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, je pensais que la députée de Laviolette se levait pour nous féliciter pour l'entente qu'on a faite pour l'hôpital de Shawinigan, avec mon collègue. Mme la Présidente, les médecins de l'hôpital Pierre-Boucher, sur la Rive-Sud de Montréal, ont accepté d'une façon très solidaire, à tour de rôle, de venir faire des gardes à l'hôpital de Shawinigan. On peut maintenant confirmer à la population que tous les services vont être donnés 24 heures par jour, sept jours par semaine, à Shawinigan. C'est un exploit important pour la population.

Maintenant, Mme la Présidente, la députée arrive avec un problème au CLSC. Nous, au gouvernement du Parti québécois, on a fait le choix que ces problèmes ponctuels soient gérés par les régies régionales. Donc, ça va me faire plaisir...

Des voix: ...

M. Legault: Je le sais que le Parti libéral, on en entend crier, ils n'ont pas confiance aux régies régionales, ils n'ont pas confiance aux régions. Ils veulent les abolir. Ce qu'ils veulent, c'est tout centraliser à Québec. Nous, on veut faire confiance aux régions.

Donc, Mme la Présidente, je ne suis pas au courant du dossier qui est mentionné par la députée de Laviolette. Ça me fera plaisir, au cours des prochaines heures, de prendre des informations auprès de la régie régionale. Donc, je prends avis de la question et je vais revenir avec une réponse pour la députée.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Laviolette.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Mme la Présidente, le ministre nous dit qu'il faut faire confiance aux régions puis qu'il faut faire confiance aux régies régionales. Bien, on l'a, votre résultat, M. le ministre: on n'a plus de médecins dans la MRC de Mékinac. 5 000 personnes, ce n'est pas cinq, ce n'est pas 10.

Quand même que vous avez réglé le problème de l'hôpital puis que vous vous en vantez, la loi n° 114, elle nous a fait un mal irrécupérable. Les médecins ne viennent plus s'établir dans la MRC de Mékinac parce qu'ils ne veulent pas se voir imposer des contraintes de loi matraque. C'est ça, la réalité de la MRC de Mékinac.

Mme la Présidente, est-ce que le ministre réalise que la Mauricie, c'est la région où le niveau d'accès réel aux soins est le plus bas de toute la province? Il nous a mis, cet été, la loi matraque n° 114 qui devait être pour nous autres et qui s'est revirée complètement contre la région. Et là, avec son projet de loi n° 142 où il nous dit qu'il va ajuster les plans de répartition d'effectifs médicaux, quand on est en contexte de pénurie, qu'il manque des médecins dans toutes les régions du Québec, voulez-vous me dire, M. le ministre, quand est-ce que ça va déborder jusqu'en Mauricie, ces médecins-là? C'est un projet de loi virtuel qui va donner des résultats dans un an et demi ou deux. Alors, c'est ça, la solution que vous avez à offrir aux gens de la Mauricie, M. le ministre?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services Sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, la vérité, là, la vérité, la vérité, c'est que...

Des voix: ...

La Présidente: Vraiment, c'est inacceptable. Il faut reconnaître que la question a pu être posée dans le silence. Alors, je voudrais qu'on entende la réponse dans le silence. M. le ministre.

M. Legault: Mme la Présidente, la vérité, c'est que, jusqu'à ce qu'on adopte la loi n° 114, la salle d'urgence à Shawinigan était fermée à toutes les nuits depuis cinq semaines. C'est ça, la vérité. Et la vérité, Mme la Présidente, c'est que, depuis qu'on a adopté la loi n° 114, au mois de juillet, la salle d'urgence à Shawinigan a été ouverte 24 heures par jour, sept jours par semaine. C'est ça, la vérité, Mme la Présidente.

Des voix: ...

La Présidente: M. le ministre.

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on sait qu'effectivement, dans la région de la Mauricie et du Centre-du-Québec, il y a moins de médecins per capita que dans les autres régions au Québec. Il y a un problème de répartition des médecins. Grâce aux mesures qu'on va mettre en place si la loi n° 142 est adoptée dans les prochains jours, on pourra, dès les prochains mois, répondre à plus de 95 % de tous les besoins qui ont été identifiés pour toutes les spécialités en Mauricie et Centre-du-Québec, grâce à la loi n° 142. J'espère que, cette fois-ci, la députée de Laviolette ne fera pas honte à la population de son comté. Cet été...

Des voix: ...

La Présidente: Écoutez, écoutez! Alors, je rappelle au ministre de la Santé et des Services sociaux et à vous tous ? n'est-ce pas, ça peut porter bénéfice à tous ? qu'on ne peut pas prononcer des paroles blessantes dans cette Assemblée. Alors, je vais vous demander de retirer, de retirer les dernières paroles que vous avez prononcées.

M. Legault: Oui, Mme la Présidente, je retire mes paroles, mais je veux juste vous dire que, pour avoir visité la région de la députée de Laviolette, il y a plusieurs personnes qui nous ont dit cet été... Cet été, lorsque la députée a voté contre le projet de loi n° 114, il y a des gens dans la population de la région de la Mauricie et Centre-du-Québec qui ont eu l'impression que leur députée les laissait tomber. C'est ce que les gens nous ont dit. C'est ce qu'ils nous ont dit, Mme la Présidente.

La Présidente: Alors, la réponse est terminée, M. le ministre. Bon. Mme la députée de Laviolette. En complémentaire, Mme la députée de Laviolette.

Mesures envisagées pour solutionner
la pénurie de personnel médical en Mauricie

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Merci, Mme la Présidente. Il y a deux problèmes principaux avec M. le ministre ? oui. Le ministre, il n'écoute pas ce qu'on dit...

Des voix: ...

La Présidente: En question complémentaire, en question... En principale, Mme la députée de Laviolette.

Mme Boulet: Alors, Mme la Présidente, il y a deux principaux problèmes avec le ministre actuel de la Santé: un, il n'écoute pas nos questions; puis, deux, il déforme nos propos à tout bout de champ. Troisièmement, Mme la Présidente, il n'est même pas venu à Shawinigan quand il y a eu le problème de l'urgence cet été. Alors, qu'il ne vienne pas nous dire que ça le préoccupe, les problèmes des gens de la Mauricie, ce n'est pas vrai.

Alors, son projet de loi n° 142, Mme la Présidente, tous les organismes, tous les groupes qui sont venus à la commission parlementaire ont dit que ça ne donnerait pas de résultats avant un an et demi ou deux ans parce qu'il y avait une pénurie d'effectifs. De plus, M. le ministre nous a parlé de la bonification de la cote R pour les étudiants en région; malheureusement, la Mauricie n'est pas dans sa liste, encore une fois.

C'est quoi, M. le ministre, que vous avez contre les gens de la Mauricie? Et, si vous n'avez rien contre les gens de la Mauricie, c'est quoi que vous avez à leur apporter comme solution?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, je ne peux pas avoir déformé les propos de la députée, puisque que je ne parlais pas des propos de la députée, je parlais des propos de la population. La population...

Des voix: Bravo!

M. Legault: Mme la Présidente, avant qu'on adopte la loi n° 114 cet été, au mois de juillet, la population de la Mauricie et du Centre-du-Québec était inquiète, elle était inquiète parce que la salle d'urgence était fermée à toutes les nuits. Depuis qu'on a adopté la loi n° 114, la population n'est plus inquiète. C'est ça, la vérité, Mme la Présidente.

Et, Mme la Présidente, au cours des prochains jours, au cours des prochains jours... Ce n'est pas souvent qu'on a une deuxième chance dans la vie, mais la députée de Laviolette, au cours des prochains jours, aura une nouvelle chance, une nouvelle chance que la population de son comté soit fière d'elle, et je l'invite, pour y arriver, à ce qu'elle vote en faveur de la loi n° 142 pour permettre une meilleure répartition des médecins, pour permettre, entre autres, que les nouveaux jeunes médecins qui arrivent aillent pratiquer en Mauricie, Centre-du-Québec. C'est vrai que c'est peut-être un peu coercitif, mais les jeunes médecins l'acceptent, Mme la Présidente, parce qu'ils sont solidaires, solidaires de ce qui se passe en Mauricie, en Centre-du-Québec. Donc, j'espère, j'espère que la députée de Laviolette votera du bon bord cette fois-là pour que la population de son comté soit un peu plus fière d'elle. Merci.

n(10 h 30)n

La Présidente: En question principale, Mme la députée de Bonaventure.

Demande de compensation financière
des résidents de Murdochville

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. En parlant d'un gouvernement qui abandonne des citoyens, j'aimerais, ce matin, évidemment parler du dossier de Murdochville. À quelques jours de Noël, on comprend bien que les gens à Murdochville, justement, n'ont pas beaucoup le goût de fêter. Plusieurs misent sur la compassion du gouvernement pour obtenir des compensations suite au départ de Noranda. Le 21 septembre dernier, le premier ministre a pris un engagement ferme à l'endroit de la population en déclarant ? et vous me permettrez de le citer: «Le gouvernement du Québec assure la population de son soutien. Nous aiderons le choix des uns et des autres.»

Alors, Mme la Présidente, aujourd'hui, si le premier ministre est sensible à l'appel des citoyens de Murdochville, s'il est conséquent avec lui-même, si le premier ministre a une seule parole, est-ce qu'il peut donner suite aux demandes de compensation qui ont été formulées par les citoyens? Et est-ce que le premier ministre comprend, aujourd'hui, que les gens à Murdochville sont inquiets, sont très inquiets, qu'ils ont besoin d'être rassurés? Et, à quelques jours de Noël, est-ce que le premier ministre peut leur annoncer une bonne nouvelle?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: On dirait, Mme la Présidente, que la députée lit dans mes pensées, puisque je m'en vais annoncer des bonnes nouvelles en Gaspésie lundi prochain. Mais, au fond, elle ne lit pas dans mes pensées, c'est le fruit du hasard. Je vais en Gaspésie régulièrement. Jamais un premier ministre du Québec n'est allé aussi souvent en Gaspésie que votre humble serviteur depuis qu'il occupe ces fonctions, même plus souvent que le grand René Lévesque, et cela a donné que nous avons, d'une certaine manière, avec les Gaspésiens et les Gaspésiennes, réinventé la Gaspésie. Nous, nous entendons, comme je n'ai jamais entendu dans ma vie, des échos d'espoir de notre Gaspésie. Il y a près de 1 000 nouveaux emplois en centres d'appels en Gaspésie. Qui l'eût cru? Et ce n'est pas l'économie libérale qui a fait ça, c'est l'économie volontariste et l'intervention du gouvernement qui a amené les centres d'appels en Gaspésie. Et, lundi prochain, il y en aura un de plus, mais je ne vous dis pas où. Je veux exciter la curiosité de la députée, qui par la suite aura à nous féliciter sur le lieu précis où la chose va... Et j'espère qu'elle en prend l'engagement, de seconder le gouvernement et de le féliciter.

Quant à Murdoch, nous avons travaillé très fermement dans ce dossier et nous avons secondé ceux qui cultivent l'espoir. Hélas! il y en a qui cultivent le désespoir, et je le comprends, c'est une situation dramatique. Mais j'ai encore eu hier des contacts très positifs avec le président de la Fédération des travailleurs du Québec, M. Henri Massé. Mon cabinet en fait le suivi aujourd'hui. Nous sommes à peu de distance d'un règlement satisfaisant qui doit venir de la multinationale Noranda, qui a été chercher du cuivre dans le sol gaspésien pendant 50 ans. Alors là il faut que la multinationale ? et je les ai vus à quelques reprises et je suis prêt à le faire encore ? s'acquitte de ses obligations.

Quant au gouvernement du Québec, il est déjà fier de ce qu'il a fait, et, si on complète la petite opération, le petit jalon qu'il manque, il sera très fier et la Gaspésie sera contente.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Oui. Mme la Présidente, est-ce que le premier ministre est conscient... Pour que les espoirs justement de la population de Murdochville se matérialisent, encore faut-il qu'il soit à l'écoute de la demande qui a été formulée par la population. Je tiens à rappeler au premier ministre que, depuis la fermeture des activités de Noranda le 27 avril dernier ? ça fait presque huit mois ? la situation à Murdochville n'a pas changé d'un iota. Alors, aujourd'hui, Mme la Présidente, est-ce que le premier ministre peut tendre l'oreille? Est-ce qu'il peut également tendre la main à la population de Murdochville et s'engager aujourd'hui à compenser la population de Murdochville? La réponse est simple, Mme la Présidente. Est-ce que, oui ou non, le gouvernement a l'intention de répondre à l'appel à l'aide qui est formulé par la population de Murdochville?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: D'abord, il y a quelque chose de changé à Murdochville. Ce que la députée dit n'est pas exact. Pour une partie notable de la population, l'espoir renaît, ils ne veulent pas que leur ville meure. Il nous fut suggéré par des gens à courte vue de fermer Murdoch, et, après réflexion, on a décidé que nul homme ou femme de cette ville n'en serait chassé par disparition de la ville. Déjà, poser ce geste alors que plusieurs nous demandaient le contraire, c'était déjà un acte qui faisait renaître espoir, plus ce qui a été annoncé par le ministre des Régions et le ministre responsable de la région, plus ce qui va se passer dans les jours qui viennent.

Mais là je voudrais un engagement de l'opposition officielle concernant notre chère Gaspésie, justement. Le gouvernement du Canada, de manière discriminatoire, empêche que la Gaspésie ne devienne un lieu pétrolier et gazier, c'est-à-dire un des éléments les plus importants de la richesse des nations aujourd'hui. Je demande à l'opposition officielle de blâmer sévèrement le gouvernement du Canada qui a, dans des circonstances analogues, à quelques dizaines de kilomètres dans la mer, donné les permis à Terre-Neuve et à la Nouvelle-Écosse. S'il faut leur parler dans la langue majoritaire du Canada, je leur demande, à Jean Chrétien et à tous les autres: «Are we children of a lesser God»? Comment ça se fait qu'on a du gaz naturel et du pétrole et que le gouvernement central nous empêche de le faire?

Je vais aller dire ça en Gaspésie lundi prochain puis je suis sûr que j'aurai l'appui des Gaspésiens et des Gaspésiennes. Et je défie la députée de Bonaventure de me donner sur-le-champ son appui. Elle rigole! Elle rigole alors que ça pourrait créer...

Des voix: ...

La Présidente: Alors, je vous demande de conclure, M. le premier ministre, sur cette question complémentaire.

M. Landry: Je conclus en disant que la députée vient de réinventer la rigolade, mais dans des circonstances bien dramatiques pour la population gaspésienne. Et je lui réitère ma demande, cette fois-ci. Je la supplie de nous appuyer pour que l'injustice commise par le gouvernement central du Canada à l'égard de la Gaspésie et du Québec cesse avant Noël.

La Présidente: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui. Mme la Présidente, est-ce que le premier ministre n'a pas été informé par son leader parlementaire que l'appui qu'il sollicite aujourd'hui à Mme la députée de Bonaventure lui a été accordé par l'ensemble des membres de l'opposition, unanimement, et qu'une motion a été adoptée à cet effet? Peut-être qu'il y aurait lieu de rétablir les contacts.

La Présidente: Alors, en question principale? En question principale, Mme la députée de La Pinière.

Aide aux propriétaires de maisons
lézardées en raison de la sécheresse

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, le 20 novembre dernier, j'ai questionné le ministre délégué à l'Habitation concernant l'aide qu'il comptait accorder aux victimes des maisons lézardées, suite à la sécheresse exceptionnelle de l'été dernier. Le ministre s'était alors engagé à soumettre un mémoire à cet effet au Conseil des ministres dans les prochains jours, a-t-il dit. Or, il y a eu trois conseils des ministres depuis: le 27 novembre, le 4 décembre et hier, le 11 décembre. Mme la Présidente, trois semaines après, il n'y a rien qui a été fait.

Est-ce que le ministre peut nous dire: Quand va-t-il annoncer le programme d'indemnisation des victimes des maisons lézardées qu'il a lui-même promis, sachant que l'argent est disponible dans le programme Rénovation Québec?

n(10 h 40)n

La Présidente: M. le ministre.

M. Jacques Côté

M. Côté (Dubuc): Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, effectivement, un mémoire a été déposé dans les jours... il y a quelque temps. Il reste encore, à ce que je sache, encore quelques jours avant la fin de décembre, il y aura encore d'autres conseils des ministres, et le gouvernement prendra la décision dans les meilleurs délais.

Maintenant, je voudrais rappeler à Mme la députée de La Pinière également que plusieurs de mes collègues m'ont fait part des problèmes des maisons lézardées. C'est qu'elle n'est pas la seule à défendre ce dossier, les députés de la Montérégie m'ont tous interpellé dans ce dossier. Et le gouvernement prendra les décisions qui s'imposent de façon à ce que la population du Québec soit protégée de la meilleure façon. Merci.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de La Pinière.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Oui, Mme la Présidente. Parlant des prochains conseils des ministres, il en reste un avant les Fêtes, le 18 décembre prochain. Est-ce que le ministre peut prendre l'engagement devant cette Assemblée et au nom de tous les collègues de cette Assemblée qui l'ont sensibilisé à ce problème de faire valider son engagement et d'annoncer le 18 décembre prochain le programme d'indemnisation des victimes des maisons lézardées?

La Présidente: M. le ministre.

M. Jacques Côté

M. Côté (Dubuc): Merci, Mme la Présidente. Je voudrais rassurer la députée de La Pinière, tous mes collègues du Conseil des ministres et du caucus du Parti québécois ont été sensibilisés à ce dossier. Et, je répète, le gouvernement prendra la décision qu'il jugera la meilleure dans l'intérêt des citoyens et citoyennes qui sont affectés par ce problème.

La Présidente: En question principale, M. le député de Marquette.

Aménagement d'étages à bureaux
dans la tour du Stade olympique

M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Est-ce que le ministre responsable de la Régie des installations olympiques peut confirmer la nouvelle parue dans le journal Les Affaires ce matin même à l'effet que le gouvernement va de l'avant avec l'aménagement de 12 étages à bureaux dans la tour du Stade olympique, même si aucun locataire ? je répète, aucun locataire ? n'a encore été trouvé?

La Présidente: M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: D'abord, ce n'est pas le gouvernement qui va de l'avant, c'est un partenaire privé appelé Busac, avec lequel le ministre des Finances et la RIO ont conclu une entente. Cette entente prévoit le versement d'une somme à Busac pour qu'elle puisse faire des aménagements à l'intérieur de la tour. Cette somme, Mme la Présidente, n'est qu'un levier toutefois pour que le secteur privé investisse tout autant dans la réfection de la tour.

Il y a peu de temps, le député me demandait quand les travaux allaient-ils commencer. Je lui avais répondu: Incessamment. Effectivement, Busac a obtenu l'ensemble des autorisations de la ville de Montréal pour pouvoir procéder, et c'est dans ce contexte que des travaux devraient débuter sou peu. Je crois même, mais je ne voudrais pas induire cette Assemblée en erreur, que certains travaux d'aménagement en périphérie des installations principales sont déjà en cours, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Peut-il nous dire si des locataires ont été signés? Et peut-il confirmer également que la participation financière du gouvernement, de 20 millions de dollars de fonds publics, a déjà été transférée à la société Busac il y a plus d'un an et demi?

La Présidente: M. le ministre d'État.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Je confirme effectivement, et ce n'est pas la première fois que nous discutons de ces choses, que les sommes ont été déboursées. Toutefois, la Régie des installations olympiques suit de façon très régulière les dépenses qui sont faites par Busac. Nous voulons nous assurer de la conformité des dépenses qui sont faites en fonction du contrat qui a été signé, et, à cet égard, Mme la Présidente, je peux dire qu'à ce jour l'ensemble des dépenses qui ont été faites l'ont été dans le respect des règles du contrat et que ce n'est qu'un 10 % à 15 % des sommes qui à ce jour ont été dépensées.

Mais je m'assure, Mme la Présidente... Parce que je semble comprendre l'inspiration du député. J'attends d'autres questions, mais je veux lui dire que j'ai déjà demandé au vérificateur de la Régie des installations olympiques de s'assurer que toutes les dépenses faites par Busac soient conformes au contrat. Je veux aussi dire que nous rencontrons régulièrement les gens de Busac. J'ai aussi demandé à mon sous-ministre responsable de la Régie des installations olympiques de faire le nécessaire pour que l'intérêt public soit en tout temps bien respecté.

La Présidente: M. le député de Marquette, en complémentaire.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Parlant d'intérêt public, le ministre peut-il nous confirmer si le contrat a été versé dans le cadre d'un appel d'offres public?

La Présidente: M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: C'est un contrat qui a été négocié de gré à gré, comme on l'a indiqué au moment de l'annonce, Mme la Présidente. Il n'y a pas de nouvelles là.

La Présidente: M. le député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Mme la Présidente, ça fait trois fois que je pose la question. Est-ce qu'il y a des locataires de signés dans la tour à bureaux qui sera construite?

La Présidente: M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Mme la Présidente, ce n'est pas à moi à répondre à cette question, puisque ce n'est pas le gouvernement qui a la responsabilité de la gestion de la tour, nous l'avons déléguée à Busac en contrepartie d'un investissement de leur part. C'est Busac qui est en ce moment sur le marché. Je me souviens même d'avoir vu récemment dans Le Journal de Montréal un article qui faisait état des efforts de Busac pour aller chercher des locataires. On faisait même état d'une brochure utilisée par Busac, de très grande qualité, qui même récemment s'était mérité un prix par une association de promoteurs immobiliers pour la qualité de la brochure.

Je comprends que Busac est en ce moment à multiplier les efforts. Il est, me dit-on, trop tôt pour qu'ils puissent annoncer celui qui serait le locateur principal, mais... Je sais que plusieurs personnes sont intéressées à aller dans la tour, mais, avant de conclure des ententes avec des gens intéressés, la stratégie de l'entreprise ? et Busac devrait être capable d'en rendre des comptes encore mieux que moi ? c'est d'abord de trouver un locateur principal qui pourrait occuper une très grande partie des espaces. Et, une fois ce locateur principal trouvé, vous comprenez que ce sera, par la suite, plus simple de signer les autres contrats de location.

La Présidente: En question principale, M. le député de Bellechasse.

Allégations concernant la disparition
des chants religieux à l'école

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. Ma question s'adresse au ministre de l'Éducation. Un quotidien...

Des voix: ...

M. Lachance: Non, ce n'est pas une question plantée. Je le jure.

Des voix: ...

La Présidente: Écoutez, je rappelle que les députés ministériels, en vertu d'une décision antérieure, auraient droit à deux questions par trois séances, que cela fait quelques séances déjà qu'il n'y en a point eu. Alors, M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Deux ministres ne le savaient pas. Merci, Mme la Présidente. Un quotidien, ce matin, un quotidien montréalais titrait à la une, et je cite: Finis les chants religieux à l'école.

Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer, nous confirmer ou nous infirmer cette information à l'effet que son ministère aurait donné des directives aux écoles du Québec dans ce sens-là?

La Présidente: M. le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): En effet, Mme la Présidente, le journal La Presse, ce matin, en première page, titrait de la façon que vient d'indiquer le député de Bellechasse. Je dois redire ici ce que j'ai dit aux médias il y a quelques minutes: Il n'y a jamais eu de directive, il n'y en a pas et il n'y en aura jamais dans ce sens-là. Et plus que ça...

D'ailleurs, 10 minutes après mon intervention sur les ondes de LCN, la directrice de l'Académie Michèle-Provost est venue confirmer qu'elle n'avait reçu aucune directive en ce sens et que l'article était fondé sur une rumeur urbaine.

Mme la Présidente, Mme la Présidente...

Des voix: ...

Une voix: Légende. On dit «une légende».

M. Simard (Richelieu): J'ai dit quoi?

Une voix: Rumeur urbaine.

M. Simard (Richelieu): Une légende urbaine, Mme la Présidente. Mme la Présidente, à ce moment-ci ? et je pense que nous sommes au bon moment de l'année pour le dire ? j'inciterais plutôt toutes les enseignantes et tous les enseignants du Québec de profiter de ce moment de l'année pour faire chanter leurs élèves et leur apprendre ces chants traditionnels qui nous viennent de la tradition et qui sont le sel de notre culture québécoise.

n(10 h 50)n

Mme la Présidente, j'espère que, d'ici la fin de nos travaux, ici même nous entamerons quelques-uns de ces hymnes traditionnels, et je souhaite évidemment à tous les enseignantes et enseignants du Québec et à leurs élèves de beaux chants ensemble et de bons moments dans la tradition culturelle de chez nous.

La Présidente: En principale, M. le député de Richmond.

M. Vallières: Oui. Mme la Présidente...

Des voix: ...

La Présidente: Les fêtes, c'était hier soir. M. le député de Richmond.

Utilisation de l'amiante-asphalte
pour les travaux de voirie

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Mme la Présidente, c'est à l'unisson que la population de la région d'Asbestos, tout dernièrement, descendait dans la rue pour supporter tant les travailleurs que les retraités, comme suite à l'annonce de la fermeture de la mine Jeffrey, à Asbestos, manifestation de solidarité importante. Un des objectifs de cette manifestation, de cette marche, était de sensibiliser le gouvernement du Québec à l'importance d'utiliser chez nous des matériaux à base d'amiante, et ce, sur une base sécuritaire, et plus particulièrement le procédé amiante-asphalte du ministère des Transports.

Alors, j'aimerais savoir du ministre des Transports dans quelle mesure son ministère a utilisé ce procédé au cours de la dernière saison.

La Présidente: M. le ministre de la Sécurité publique et des Transports.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Il me fait vraiment plaisir, Mme la Présidente, de répondre à la question du député et de rassurer tous ceux qui comprennent qu'il y a des utilisations sécuritaires de l'amiante qui peuvent être faites et que nous sommes en train d'en faire la preuve actuellement au Québec par l'utilisation que nous faisons depuis plusieurs années d'enrobé avec l'amiante, qui assure une durée un peu plus longue d'ailleurs des surfaces qui sont ainsi recouvertes.

Mais, pour vous dire, pour la dernière session, sur 2 millions de tonnes d'enrobé... Quand je parle d'enrobé, vous comprenez que je parle d'asphalte. Ha, ha, ha! Il y a plusieurs types d'asphalte. Ça, c'en est un. Sur 2,3 millions de tonnes que nous avons répandues, il y en a quand même 133 000, soit 5,6 %, le plus haut pourcentage depuis les 10 dernières années, qui ont utilisé une quantité de 1 741 tonnes d'amiante. Et, à 2002, à 2002 actuellement, nous sommes rendus à 1 365, mais c'est parce que les estimés ne sont pas encore terminés.

Je dois dire que les expériences que nous avons faites sur le plan de la sécurité des travailleurs sont concluantes. Même dans les opérations de planage, ces opérations où on gratte l'asphalte pour en faire des lignes, que vous avez vues, les taux d'amiante retrouvés étaient inférieurs, très inférieurs à ce qui peut être dangereux. Nous avons aussi une table multisectorielle, qui regroupe le ministère des Richesses naturelles, le ministère de l'Environnement, la CSST, et je peux dire que c'est notre intention de continuer à utiliser ce type d'amiante.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Oui. Alors, Mme la Présidente, compte tenu du détail de la réponse, j'aurais aimé qu'on assiste à une augmentation substantielle de l'usage. Je constate qu'il y a statu quo par rapport à l'année précédente, 2001, où on utilisait 130 000 tonnes du même enrobé, donc il n'y a pas eu de progression. Je voudrais savoir du ministre, qui me répondait récemment, à une lettre que je lui faisais... qu'il allait utiliser ce procédé, mélange asphalte-chrysotile, pour un projet dans mon comté, à la condition que ce matériau, donc l'amiante, soit disponible dans la région d'Asbestos lors de la pose du revêtement bitumineux: Est-ce qu'il faut comprendre que, s'il n'y a pas une mine à proximité des travaux, on n'aura pas de possibilité d'en étendre ailleurs au Québec?

La Présidente: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Non. La réponse est non. D'ailleurs, c'est quand même... L'année d'avant, 2001, là, c'était quand même uniquement 1 %, puis, les autres années qui ont précédé, c'était généralement moins de 2 % qui était utilisé. Donc, quand nous avons acquis l'assurance qu'il n'y avait pas de danger, nous nous sommes mis à l'utiliser de façon considérable.

Quand même, 5,6 %, et probablement que nous allons atteindre la même proportion et même supérieure cette année dans des travaux qui ont été considérables, je veux dire, c'est quand même utiliser beaucoup d'amiante. Et il n'y a pas évidemment juste la proximité des mines d'amiante qui peut assurer la proximité de la ressource qui peut être transportée. Si on veut la vendre à travers le monde, c'est qu'on est capable de la transporter, n'est-ce pas?

La Présidente: En question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.

Actualisation de la Loi sur les ingénieurs

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Mme la Présidente, en juin 1998, le ministre responsable de l'application des lois professionnelles déposait un avant-projet de loi ayant pour objectif de mettre à jour la Loi sur les ingénieurs, adoptée il y a environ une trentaine d'années et qui ne correspond plus à la pratique d'aujourd'hui. Des consultations ont eu lieu à la fin de l'été 1999, où le ministre de l'époque concluait que l'avant-projet de loi devait être révisé. Dans sa récente déclaration sur ses priorités d'action, le nouveau ministre responsable de l'application des lois professionnelles n'a fait aucune mention du dossier de la mise à jour des lois sur les ingénieurs.

Mme la Présidente, l'échéance ne cesse d'être reportée de session parlementaire en session parlementaire. Plus de cinq ans se sont écoulés depuis, et quatre ministres responsables des lois professionnelles ont siégé.

Mme la Présidente, doit-on croire que le nouveau ministre responsable de la Justice a l'intention de reléguer aux oubliettes ce projet de mise à jour de la Loi sur les ingénieurs parce qu'il s'agit d'un dossier trop complexe?

La Présidente: M. le ministre.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, Mme la Présidente, c'est vrai qu'il s'agit d'une question complexe. Cependant, ce que je voudrais rappeler au député de l'opposition, c'est que nous avons entamé, au niveau des lois professionnelles, une réforme en profondeur. En juin dernier, nous avons adopté le projet de loi n° 90 concernant les professions qui oeuvrent dans le domaine de la santé dans le secteur public. Il y a une deuxième phase du rapport Bernier qui nous a été soumise au cours des derniers mois, et l'Office de professions procède maintenant à une consultation relativement à cette deuxième phase.

Quant au problème de l'Ordre des ingénieurs et les autres professions connexes au domaine du génie, nous sommes aussi en train de regarder cette situation parce que, cette révision que nous avons entamée, Mme la Présidente, nous voulons la mener à bon port, et cela inclut toutes les professions.

La Présidente: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.

Document déposé

M. Paradis: Mme la Présidente, avec le consentement de mon bon ami le leader du gouvernement, je souhaiterais déposer, pour le bénéfice du premier ministre, la motion unanime qui a été adoptée en cette Assemblée nationale, et qui était parrainée conjointement par Mme la ministre déléguée à l'Énergie et M. le député de Kamouraska-Témiscouata, et qui a recueilli l'ensemble des votes de l'Assemblée. Peut-être que le premier ministre pourrait profiter de l'occasion pour féliciter les gens qui lui ont donné l'appui dans ce dossier.

La Présidente: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales.

Une voix: Il y a consentement.

La Présidente: Ah, il y a consentement?

Des voix: Consentement.

La Présidente: Consentement.

M. Landry: Profondément reconnaissant, profondément reconnaissant vis-à-vis le leader de me donner l'occasion de réintervenir sur une question aussi cruciale. Et je suis profondément reconnaissant à l'opposition officielle. Et j'espère que l'ADQ avait concouru, je ne l'ai pas dans mes documents. Motion unanime de notre Assemblée pour que le gaz gaspésien soit foré, commercialisé dans les meilleurs délais. Il y a 4 000 emplois possibles en Gaspésie. C'est une révolution économique extraordinaire. Et j'aimerais que cette Assemblée, que je remercie... Et j'espère que la députée... Elle pourrait peut-être même se joindre à moi lundi quand je vais aller en Gaspésie.

Une voix: Si vous m'invitez, je vais y aller avec plaisir.

M. Landry: Je vous invite.

Des voix: ...

M. Landry: Je vous invite sans condition véritable, mais, si vous applaudissiez à la bonne nouvelle quand je vais l'annoncer, je serais très content aussi. Et, encore une fois...

Des voix: ...

M. Landry: On s'est presque habitués.

La Présidente: Alors, sur ce bon climat, je pense qu'on peut terminer. En conclusion.

M. Landry: Vous allez voir, je vais l'améliorer, le climat, alors que les gaz à effets de serre le détériorent. Mme la Présidente...

n(11 heures)n

La Présidente: M. le premier ministre, compte tenu de cette unanimité, je vais donc, en votre nom, transmettre cette motion aux autorités fédérales concernées.

Motions sans préavis

Alors, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Alors, aux motions sans préavis, j'invite... La présentation d'une motion conjointe. J'invite donc la ministre d'État à la Culture et aux Communications conjointement avec M. le député d'Outremont. Mme la ministre.

Souligner le 25e anniversaire
de la Charte de la langue française

Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Je sollicite donc le consentement de l'Assemblée nationale pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 25e anniversaire de la Charte de la langue française et réaffirme son attachement indéfectible à cette loi fondamentale assurant la qualité et le rayonnement de la langue française et qui permet au peuple québécois d'exprimer son identité.»

La Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de cette motion? Je comprends qu'il y a donc consentement. Il s'agit donc d'un 25e anniversaire. Et je demanderais aux députés qui ont à quitter l'Assemblée à le faire immédiatement, dans le silence pour que nous puissions accueillir cette motion. Mme la ministre.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, le 26 août 1977, l'Assemblée nationale adoptait la Charte de la langue française. Ce jour-là, René Lévesque, Camille Laurin, Bernard Landry, Marc-André Bédard, Lise Payette et tous les autres membres du premier gouvernement du Parti québécois, et nous, peuple du Québec, avec eux, nous posions un geste historique, une des plus importantes affirmations politiques de l'histoire du Québec moderne. Nous réalisions ainsi l'engagement que nous avions pris de faire du français la langue normale et habituelle du Québec, langue de l'enseignement, du travail, du commerce, des communications et des affaires. Il s'agit d'un grand moment de notre histoire dont il faut souligner l'importance pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois et qu'il nous faut faire connaître aux nouvelles générations.

Il faut le dire et le répéter, l'adoption de la loi 101 mérite d'être commémorée comme l'instant où nous avons redressé la barre de l'histoire, car c'est bel et bien ce que nous avons accompli, avec la Charte de la langue française. Profitons de l'occasion pour mettre en pratique notre devise nationale. Souvenons-nous que notre langue était menacée et rappelons-nous que nous avons réussi à en faire «une langue belle, avec des mots superbes», comme l'exprime si bien la chanson d'Yves Duteil que nous avons choisie pour célébrer les 25 ans de la Charte de la langue française, chanson qui fut, je tiens à le souligner, M. le Président, magnifiquement mise en images par le cinéaste Francis Leclerc, le fils de Félix Leclerc, dont le message diffusé à la télévision pour souligner l'anniversaire de la loi 101 a été remarqué.

En cette année d'anniversaire, nous avons aussi un autre devoir de mémoire, celui de rendre hommage à un homme remarquable, le Dr Camille Laurin, qui a été le principal artisan de la Charte de la langue française. J'ai eu l'honneur et le bonheur, le plaisir de côtoyer M. Laurin lorsqu'il m'a aidée de ses conseils et de ses encouragements, en 1998, au moment où je suis venue le relayer dans le comté de Bourget. Je l'admirais, comme bien d'entre nous, pour l'aplomb légendaire qu'il a démontré à ceux qui refusaient cette loi, mais j'avais aussi beaucoup d'affection pour l'homme généreux et surtout tolérant qu'il était.

M. Laurin a relevé la tâche à la fois titanesque et délicate de concevoir la loi 101 avec cette intelligence et cette rigueur intellectuelle qui lui valaient le respect de ses pairs de l'Assemblée nationale. Il considérait qu'un statut inaliénable accordé à la langue française au Québec était une question de justice sociale, mais il savait aussi que son application devait se faire dans un esprit d'équité et d'ouverture exempt de tout esprit revanchard. J'aimerais ici redire les paroles d'engagement profond qu'il prononça envers la société québécoise en déclarant: «La langue est le fondement même d'un peuple, ce par quoi il se reconnaît et il est reconnu, qui s'enracine dans son être et lui permet d'exprimer son identité.»

M. le Président, la Charte de la langue française a donc franchi ce dernier quart de siècle en faisant consensus comme mesure indispensable et indiscutable pour la sauvegarde de la langue française et de l'identité du peuple québécois. Après 25 ans d'application de la loi 101, nous pouvons nous féliciter, collectivement, d'un bilan très positif. La Charte a aidé à redonner à Montréal un visage français dans l'affichage public et la publicité commerciale. Elle a fait en sorte que les francophones puissent recevoir des services dans leur langue. L'usage du français au travail et dans la vie des entreprises a connu une progression remarquable. La fréquentation de l'école française par les jeunes immigrants a augmenté de façon spectaculaire, et cela a favorisé leur intégration à la société québécoise. Il est toujours émouvant de voir, d'ailleurs, ces Québécois de toutes les origines parler le français, et c'est là un des grands succès de la Charte de la langue française.

Je me permets, M. le Président, de faire remarquer, au bénéfice de nos collègues parlementaires, que l'empreinte profonde que la loi 101 a laissée dans le paysage sociolinguistique du Québec a fait l'objet d'un numéro spécial de la Revue d'aménagement linguistique, publiée par l'Office québécois de la langue française ? un exemplaire d'ailleurs a été déposé sur le bureau de chacun des membres de l'Assemblée nationale. J'invite les collègues parlementaires à y faire référence, puisque ce recueil constitue une lecture vraiment passionnante pour tous ceux qui s'intéressent à l'évolution du Québec en ce début de millénaire, puisqu'il nous offre un instantané de notre réalité linguistique.

La Charte de la langue française a permis, donc, de contenir des forces dominantes du marché, en Amérique du Nord, auquel la mondialisation des économies et les nouvelles technologies de l'information favorisent l'usage de l'anglais. Mais il ne faut pas, il ne faut pas nourrir cette fausse impression de sécurité que les acquis de la loi 101 ont pu créer. Tous ces progrès ne peuvent nous faire oublier ce qu'il nous reste à réaliser. Les nouveaux enjeux planétaires nous ont amenés à être très actifs sur la scène internationale pour la reconnaissance de la diversité culturelle et de la diversité linguistique des peuples de la terre. Pour nous, comme pour des dizaines de petites nations, ce sont des enjeux stratégiques majeurs pour l'avenir des cultures du monde. Nous avons donc le devoir de poursuivre les grands objectifs qui ont présidé à l'adoption de la Charte pour faire en sorte qu'en terre d'Amérique la langue française demeure une langue d'État et une langue de la modernité et qu'au Québec elle soit la langue normale et habituelle de l'enseignement, du travail, des communications, du commerce, des affaires, de l'administration et des entreprises.

Ce 25e anniversaire est l'occasion par excellence pour nous, parlementaires de l'Assemblée nationale, de réaffirmer notre engagement à tout mettre en oeuvre pour conserver et renforcer le français en tant que langue officielle et la langue commune du peuple québécois. Alors, M. le Président, je propose donc, par cette motion, que l'Assemblée nationale affirme clairement son attachement indéfectible au français ainsi que sa volonté, présente et future, de protéger cet héritage distinctif qui contribue à affirmer l'identité nationale des Québécois et des Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'opposition dans le dossier de la Charte de la langue française. M. le député d'Outremont, la parole est à vous.

M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: M. le Président, vous m'excuserez si, lors de mon allocution, j'arrive à vous désigner comme la présidente, parce que je pensais que la présidente de l'Assemblée nationale serait là pour nous entendre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez remarqué qu'elle n'est pas là et que c'est moi.

M. Laporte: Alors, si je fais des erreurs, M. le Président, ce n'est pas mauvaise foi. Le rôle qu'a joué la Charte de la langue française dans l'évolution du profil linguistique québécois, ce que d'autres appelaient, à l'époque de la commission Gendron, la situation de la langue française au Québec, au cours des 25 dernières années est incontestablement déterminant. L'emploi du français dans tous les domaines de la vie publique québécoise s'est normalisé, au cours des 25 dernières années.

n(11 h 10)n

Dans le domaine du travail, par exemple, domaine prioritaire d'intervention législative, non seulement l'emploi du français est-il devenu nécessaire et habituel, mais il s'est accompagné... ? le numéro de l'Office de la langue française que vous nous avez distribué en témoigne, à mon avis, abondamment ? donc, l'évolution du français langue de travail s'est également accompagnée d'une remarquable diffusion de l'utilisation d'une langue correcte au chapitre des terminologies professionnelles et techniques. En d'autres mots, nous avons assisté, depuis 25 ans, à une régression marquée de la fréquence des anglicismes dans l'usage courant des langues de spécialité et de technologie et des terminologies reliées aux technologies de pointe. C'est très important, là. On n'a pas assisté seulement à une évolution de la langue de travail au sens de la quantité de français qui circule dans les milieux de travail, mais on a assisté à une évolution aussi au sens de la qualité du français qui circule et de la qualité du français technique. Je parle du français écrit et du français utilisé dans le traitement de la technologie, je ne parle pas nécessairement du français qu'on utilise dans l'intimité, n'est-ce pas, des occasions de travail qui ne sont pas des occasions publiques. Bon. Donc, ce changement est le fruit de la Charte de la langue française: plus de français dans le monde du travail et plus de bon français dans le monde du travail.

Mme la... M. le Président, pour les gens de notre génération qui se rappellent que nous allions faire réparer notre «muffler», n'est-ce pas, avant d'aller acheter notre «computer», n'est-ce pas, et de faire ensuite des achats au «shopping center», n'est-ce pas, je pense qu'on pourra remarquer que le changement dont je parle n'est pas un changement insignifiant.

Tout autant remarquable a été la progression du français comme langue parlée à la maison par les allophones montréalais en particulier, ces citoyens et citoyennes dont la langue maternelle est l'arabe, l'espagnol et le créole. Je cite, M. le Président, le rapport rendu public mardi par Statistique Canada: «Les membres de ces groupes sont plus enclins à effectuer un transfert vers le français.» De 1996 à 2001, M. le Président, le pourcentage d'allophones montréalais parlant le français à la maison est passé de 16,1 % à 20,1 %, soit un bond de 4 %. Je laisse aux spécialistes des questions démolinguistiques le soin de nous éclairer sur les causes de cette évolution rapide du profil linguistique montréalais.

J'attends, de plus, M. le Président, avec impatience les réactions de nos Cassandre nationaux, qui, année après année, nous prophétisent le déclin tendanciel du français à Montréal comme une fatalité contre laquelle la politique linguistique ne peut rien. Cette donnée du rapport de Statistique Canada, M. le Président, est très importante. En d'autres mots, nous avons assisté, à Montréal, au cours des quatre dernières années ou des six dernières années, entre 1900... de toute façon, entre 1986 et l'an 2000, donc au cours des cinq dernières années, à une progression de 4 % des transferts linguistiques, au sein de certains groupes d'immigrants, vers le français. Ça contredit, à mon avis, beaucoup et beaucoup de stéréotypes et de préjugés qui circulent au sujet de la capacité d'attraction du français montréalais et à Montréal sur les populations immigrantes.

M. le Président, l'expérience québécoise... En troisième lieu, M. le Président, l'expérience québécoise en matière de politique et de législation et d'aménagement linguistiques s'est imposée, au cours des 25 dernières années, à l'échelle internationale comme une référence, c'est-à-dire qu'elle jouit d'une grande reconnaissance à l'échelle internationale. Lors du Sommet de la francophonie tenu à Québec au début de septembre 1987, le président François Mitterrand avait déclaré ? je le cite de mémoire ? que le Québec méritait la reconnaissance des pays de la francophonie pour son courage à vouloir assurer la sécurité, la vitalité et l'épanouissement du français dans un contexte continental, ajoutait-il, qui pose au regard de ces enjeux un défi à nul autre comparable. Ce haut témoignage d'admiration, d'estime et de soutien... Mme la Présidente, à ce haut témoignage s'ajoutent les nombreux emprunts, les nombreux emprunts faits à ce qu'on peut appeler le modèle québécois de planification linguistique par des communautés linguistiques aussi diverses que la Catalogne, les Pays-Bas, quelques pays de l'Europe de l'Est et bon nombre de pays de la région nord de la mer Baltique. Je pense à la Lituanie et à d'autres pays de cette région. Des emprunts ont été faits, et j'en sais quelque chose, puisque j'ai été moi-même l'un des agents qui ont facilité ces emprunts, en particulier dans le cas de la Catalogne.

J'étais même informé récemment, M. le Président, que la République populaire de Chine porte maintenant un vif intérêt à l'expérience québécoise en matière de développement du traitement informatique des langues et des terminologies techniques sur la plateforme multilingue de la Banque de terminologie du Québec. Donc, on se retrouve devant une législation, une politique linguistique qui a eu non seulement des résultats sur l'emploi du français, qui a eu aussi des résultats sur la diffusion d'un français de meilleure qualité, en tout cas dans les champs techniques, et on se retrouve en présence d'une politique linguistique qui jouit d'une reconnaissance certaine à l'échelle internationale.

Que la Charte de la langue française, M. le Président, ait joué un rôle décisif dans l'évolution du profil linguistique québécois, il n'en faut pas douter. Cependant, je m'empresse d'ajouter que, dans ses intentions stratégiques, la Charte plonge ses racines dans des précédents qui doivent être soulignés: création, en 1961, de l'Office de la langue française à l'initiative de Georges-Émile Lapalme, à l'époque député d'Outremont; élaboration, en 1970, du programme visant à faire du français la principale langue de travail des entreprises québécoises ? on se rappellera que le premier ministre Robert Bourassa avait nommément confié à la commission Gendron de se consacrer en priorité à l'évaluation de la faisabilité de ce programme de francisation des milieux de travail et d'en faire l'objet majeur de ses études et de ses recommandations; institution, en 1974, par la loi n° 22, et lancement du Français, langue officielle, et lancement d'un ambitieux programme de francisation des entreprises.

Mon but, M. le Président, n'est pas de faire le partage des mérites partisans mais de bien faire voir à ceux et à celles qui nous écoutent que la Charte de la langue française s'inscrit dans la continuité historique des interventions de l'État québécois en matière de langue depuis la Révolution tranquille plutôt qu'en rupture par rapport à ses interventions. La quête de pérennité du français s'appuie sur un idéal, une valeur qui transcende les partisaneries politiques au Québec, je pense que c'est très important de le noter. Il y a eu dans les interventions de l'État une continuité qui a été remarquable. Ce n'est pas pour nier la fermeté des intentions stratégiques de la Charte, n'est-ce pas. Bien sûr que le regretté Camille Laurin, que la ministre mentionnait tantôt, a apporté à notre politique linguistique des orientations plus affirmées que celles qui avaient été retenues antérieurement, mais les antécédents sont loin d'être insignifiants, ainsi que je l'ai mentionné, et je pense que, au-delà de toute considération partisane, il faut savoir les reconnaître.

n(11 h 20)n

En réalité, M. le Président, la seule intention de la Charte à propos de laquelle il y a eu, depuis le début de son adoption, un désaccord durable et profond entre les formations politiques a été l'interdiction légale de l'emploi de l'anglais dans l'espace public, en particulier dans l'espace public commercial, un conflit linguistique qui a mobilisé un niveau de rancoeur sociale démesurément élevé et démesurément long par rapport à l'importance de l'enjeu proprement linguistique qui était en cause. Il y a, là-dessus ? vous vous en souviendrez, ceux qui sont de ma génération ? l'espèce de boutade humoristique de Robert Bourassa, qui disait qu'il faut être très heureux pour se chicaner tant sur des questions d'affichage.

Nous avons passé à travers ce conflit, nous avons passé à travers ce conflit avec une capacité de négociation qui nous fait honneur, mais, je pense ? j'insiste, maintenant ? qu'avec l'adoption de la loi 86 l'interdiction légale était remplacée par la réglementation de l'emploi des langues. Et, à mon avis, M. le Président, vous qui voyagez, vous devriez le savoir et le savez sûrement autant que moi, il me semble que, depuis la loi 86, un consensus s'est établi sur les intentions stratégiques de la Charte entre nos formations politiques et dans l'opinion publique. À mon avis, encore du point de vue de l'expérience québécoise, cette approche vers un consensus auquel la ministre faisait appel antérieurement est, à mon avis, une donnée remarquable. Bien entendu, M. le Président, il n'y a pas d'unanimité sur ce que devait être ou devrait être le profil linguistique québécois. Mais n'est-ce pas ce à quoi il faut s'attendre dans une société démocratique où la diversité des points de vue et des opinions est non seulement normale, mais souhaitable?

En terminant, M. le Président, j'aimerais tourner brièvement, si vous me le permettez, mon regard vers l'avenir. Quels sont les défis de la politique linguistique pour les années qui s'annoncent? J'en vois principalement deux. D'abord, conserver avec détermination les acquis substantiels de la Charte tels qu'ils sont apparus petit à petit au cours des 25 dernières années. Toute législation, quelle qu'elle soit, malgré ses obligations de résultat, est soumise à ce que les experts de la sociologie des politiques publiques appellent l'effet de délai. On entend par là l'observation fréquemment faite qui veut que, avant qu'une législation produise des effets tangibles, des effets mesurables, il se déroule un délai qui est habituellement un peu plus long que celui qui avait été prévu. Parce que, finalement, on le sait très bien, nous, en politique, les délais sont relativement courts parce que nos délais intentionnent finalement des promesses, et des promesses électorales, donc on a tout intérêt à décrire les délais comme étant brefs, n'est-ce pas. C'est bon pour les compétitions partisanes. Mais, en réalité, ce qu'on observe, c'est que les législations prennent toujours un peu plus de temps que nos promesses pour réaliser les objectifs attendus.

Dans le cas de la Charte, M. le Président, je pense que l'effet de délai s'est maintenant estompé, et c'est ce que j'ai voulu montrer tantôt en parlant de ce qui s'était produit comme utilisation du français dans les espaces publics, comme capacité d'attirance du français au sein des populations immigrantes sur l'île de Montréal. Il est évident que la Charte a produit, au cours des années, des effets qui sont maintenant tangibles, qui sont maintenant mesurables et que l'un des défis que nous avons pour l'avenir est celui de nous assurer que ces effets durent, que ces effets soient stabilisés et qu'on se retrouve donc avec une permanence de ces effets pour les années à venir.

Ensuite, M. le Président, je dirais ? et c'est une opinion que j'exprime en toute humilité ? je dirais que nous devons donner, dans l'avenir, à l'école un rôle d'agent structurant sur le profil linguistique québécois, supérieur à celui que nous lui avions confié dans le passé. Je pense que la Charte, dans ses intentions, attribuait une importance moins grande à l'école qu'elle devrait lui en accorder dans l'avenir, principalement parce que les priorités étaient plutôt celles de la francisation des milieux de travail. Mais, à mon avis, tout en maintenant cette priorité, une autre priorité s'impose, qui est celle de rendre à l'école un rôle beaucoup plus structurant en matière d'aménagement linguistique. Dans toutes les sociétés modernes, l'école, à tous les niveaux d'enseignement ? je parle du niveau primaire, secondaire, collégial, universitaire ? impacte directement sur le profil linguistique des communautés. On comprendra, par exemple, qu'on n'envoie pas nos jeunes gens et nos jeunes filles à l'université étudier dans des manuels techniques en français sans enrichir leur vocabulaire. Donc, l'université, de par son enseignement, de par les manuels qu'elle adopte pour ses étudiants, de par ses politiques linguistiques internes, a évidemment un effet réel sur le profil linguistique. Et, à mon avis, l'école, à tous les niveaux, doit maintenant agir de façon plus structurante qu'elle a agi dans le passé.

Je ne voudrais pas élaborer trop longuement sur une argumentation, M. le Président, parce que ça risquerait d'être un peu compliqué, mais je dois vous dire que, du point de vue du rôle de l'école, les transformations radicales de la famille au Québec que nous avons observées récemment ne sont pas sans une grande signification. Je vais vous poser, à vous, M. le Président, et à mes collègues, les questions, un certain nombre de questions concernant la transmission par la famille québécoise d'aujourd'hui des habilités linguistiques qu'il faut bien acquérir pour performer efficacement sur le marché du travail en particulier. En d'autres mots, une des questions qu'on peut se poser, compte tenu de l'évolution récente de la famille québécoise, c'est: De quelle qualité la socialisation dans la langue maternelle, au plan familial... de quelle qualité de socialisation en langue maternelle l'école prend-elle le relais lorsque les enfants sortent de la famille pour y entrer?

Je pense ? je fais une hypothèse, M. le Président ? que nous ne sommes plus dans une situation comparable à celle du passé, où la famille jouait un rôle de transmission centrale. Je pense que les transformations de la famille font que l'école, qui doit prendre le relais de la famille, se retrouve devant une population d'étudiants qui n'a pas nécessairement acquis autant les capacités linguistiques que les générations antérieures ont pu le faire au sein des familles... de leur propre famille. Est-il plausible, M. le Président, qu'en matière d'acquisition des habilités linguistiques de base le profil québécois, tel que transmis par la famille, témoigne d'un déficit significatif? On comprend ce que je veux dire, là. Est-il possible que les transformations de la famille font que les habilités, la socialisation des habilités linguistiques n'est pas aussi sûre qu'elle a pu l'être dans les générations passées?

Donc, à ce moment-là, on se retrouve devant un défi majeur pour l'école, qui, elle, doit prendre le relais à tous les niveaux, parce que nous vivons dans une société mondialisée où la maîtrise des langues est devenue une condition essentielle non seulement du succès professionnel, mais aussi du partage de ce nouvel humanisme qui est en train d'apparaître et qui se caractérise par un très... niveau de diversité linguistique et de pluralisme linguistique. Donc, l'école est appelée maintenant à adopter une vocation en matière d'aménagement des langues au Québec qui est assez différente de celle qu'elle a eue jusqu'à maintenant.

n(11 h 30)n

M. le Président, je terminerai en disant qu'il y a ici pour l'école québécoise, dans le cadre de l'application de la Charte de la langue française et de la politique linguistique, un défi majeur qui consiste essentiellement à devenir un agent structurant de transmission des langues maternelles, des langues secondes et des langues étrangères. La petite communauté linguistique que nous sommes n'atteindra pas sa capacité de performance pleinement actualisée dans l'avenir si les générations montantes n'ont pas une beaucoup meilleure maîtrise des langues maternelles, secondes et étrangères que l'école est maintenant capable de leur transmettre. Nous pourrions aller vers une situation que je qualifierais d'indésirable si le choix lucide dont je parle n'était pas fait par l'école.

Donc, à mon humble avis, M. le Président, le Québec, dans son meilleur intérêt en tant que communauté linguistique performante, face aux défis de l'heure, aux défis de la mondialisation, doit faire le choix politique de redonner à l'école ou de donner à l'école un rôle accru en matière d'aménagement des langues et de politique linguistique. À mon avis, ce qui, jusqu'à maintenant, a été dévolu principalement à l'entreprise continuera de l'être, bien sûr, mais sera, à mon avis, encore plus fortement dévolu à l'école. Et je parle vraiment de l'école à tous les niveaux, au niveau primaire, au niveau secondaire, au niveau collégial.

Et je terminerai M. le Président, en disant que, si ce choix n'est pas fait rapidement, nous risquons de nous retrouver dans une société qui sera de plus en plus inégalitaire. En d'autres mots, la capacité d'écrire, la capacité de communiquer, la capacité de transiger dans sa langue maternelle, dans des langues secondes et dans des langues étrangères sera de plus en plus distribuée selon la distribution des revenus, n'est-ce pas, selon la distribution des revenus qui permettent aux enfants de fréquenter des écoles privées, par exemple, de meilleure qualité en matière de transmission des langues secondes.

Donc, ce que je recommande, c'est la création d'un système d'enseignement des langues public de calibre mondial au Québec dans les 10 ou 15 prochaines années. Faute d'aller dans cette direction, M. le Président, je le répète, je pense que nous prendrions le risque d'une sous-actualisation de notre potentiel, du soi linguistique québécois qui pourrait être relativement grave.

M. le Président, je termine là-dessus, ce choix lucide me paraît non seulement pleinement compatible avec les intentions stratégiques de la Charte de la langue française, mais encore la condition sine qua non de la pleine réalisation à terme de ces intentions. Donc, je suis en train de dire ? si j'ai tort ou raison, on pourra en faire un débat public ? je suis en train de dire le rôle que je souhaiterais voir dévolu à l'école du point de vue de la transmission d'un riche équipage linguistique, d'un très riche équipage linguistique. Et, pour que ce soit le cas, il va falloir que l'école commence à transmettre ce riche équipage linguistique dans les années les plus inférieures, finalement, de la hiérarchie scolaire.

Toutes les données de la sociolinguistique moderne montrent que, pour bien apprendre une langue, en particulier une langue seconde ou une langue étrangère, il faut l'apprendre précocement, relativement précocement, et continuer de l'apprendre dans un système qui nous en transmet une acquisition de qualité tout au long de la scolarisation. Ça veut dire qu'on ne peut plus reléguer l'apprentissage de la langue maternelle ou des langues secondes à l'école primaire et l'oublier, à toutes fins pratiques, par la suite. Les écoles secondaires, les collèges, les universités doivent aussi prioriser cette maîtrise absolument essentielle dont, je regrette, on ne saura pas se passer compte tenu des pressions de la mondialisation économique, mais aussi compte tenu des pressions de l'humanisme mondial qui est en train d'émerger.

Donc, je conclus là-dessus, M. le Président, en me résumant très brièvement, en disant: La Charte a été une législation remarquable du point de vue de la qualité et de la quantité du français qui circule dans les milieux de travail. La Charte a été une législation remarquable du point de vue de sa reconnaissance internationale, du point de vue de sa capacité de créer un élan vers le français au sein des populations immigrantes, mais que finalement, pour donner à la Charte toute sa capacité de dépassement, il va absolument falloir, à mon avis, qu'on repense le rôle de l'école comme agent structurant de l'acquisition des langues maternelles... de la langue maternelle, des langues secondes et des langues étrangères. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Outremont, de votre grande intervention. Je reconnais maintenant, sur ce même sujet, Mme la députée de Berthier. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Marie Grégoire

Mme Grégoire: Merci, M. le Président. Alors, je salue la passion et la sagesse du député d'Outremont et je serai par ailleurs brève pour, moi aussi, joindre ma voix à mes collègues pour souligner le 25e anniversaire de la Charte de la langue française. Je crois qu'on doit être fier de cet acquis inestimable qui a modifié, sans contredit, le paysage de notre société.

Si la langue française occupe maintenant une place prioritaire dans nos lois, nos institutions, nos écoles, nos entreprises, dans le fond dans notre quotidien, dans les échanges entre les citoyens et les citoyennes, c'est par le travail de parlementaires qui a culminé, le travail de parlementaires dont on a parlé tantôt, mais qui a culminé par l'adoption, le 26 août 1977, de la loi 101, un outil collectif qui a été rendu possible par l'initiative de M. Camille Laurin. Avec l'adoption de cette Charte, nous avons confirmé et aussi assuré le rôle du Québec comme foyer officiel de la langue française en Amérique du Nord. Pour la première fois, les Québécois de toutes origines se sont levés à la défense d'une cause afférente à leur identité sociale.

Toutefois, je crois qu'il est important de rappeler que la prédominance de la langue française a été gagnée de haute lutte, tout au long de l'histoire du Québec. Le flambeau de la langue française au Québec a effectivement été porté par des gens de toutes appartenances politiques et idéologiques. La langue française, c'est l'affaire de tous les Québécois et de toutes les Québécoises de toutes origines, et nous devons continuer à en être solidaires. La langue française, c'est un précieux héritage que nous devons léguer aux futures générations, c'est «la langue de chez nous», comme le dit si bien la chanson d'Yves Duteil.

Nous sommes une société de langue française de plus de 7 millions de personnes, l'une des économies de pointe sur la planète, dotée d'un réseau gouvernemental, social et universitaire aussi complexe que diversifié. Une société qui est capable des plus hauts sommets dans la vie... de la culture et d'ouverture d'esprit. Sur ce point, je crois cependant qu'il nous reste encore des efforts à faire afin d'être une culture attrayante, une culture accueillante.

Les dernières données de Statistique Canada nous démontrent d'ailleurs qu'il faut, comme société, prendre conscience qu'il nous reste encore du chemin à faire. Avec un taux d'accueil bien en deçà de notre poids démographique, soit 24 %, il faut être davantage créatifs, innovateurs et flexibles. Parce que tous en conviennent, on est dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée qui est annoncée. Et je considère que le Québec a tout avantage à être une terre d'accueil vivante, attirante et attrayante, capable de tirer profit de sa diversité et d'additionner les contributions. Or, le meilleur moyen pour y parvenir, c'est d'offrir et partager notre passion pour notre culture, pour notre langue française. Ce choix de société de lire, parler, écrire, exposer en français doit toutefois se faire de façon harmonieuse, en respectant les droits de tous et chacun de vivre ici. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix

Est-ce que la motion présentée par Mme la ministre... conjointe, présentée par Mme la ministre d'État à la Culture et aux Communications, conjointement avec M. le député d'Outremont, motion pour souligner le 25e anniversaire de la Charte de la langue française, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader... Oups! nous sommes toujours aux motions sans préavis. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le leader.

M. Boisclair: M. le Président, nous avons assisté à un débat plus qu'intéressant, et je pense que l'intérêt est proportionnel aux minutes que nous avons consacrées à ce débat.

Et sachant que le leader de l'opposition est sûrement dans de bonnes dispositions puisque, à la période de questions, il a habilement su marquer un point, ce que je lui reconnais, est-ce qu'il pourrait m'accorder une faveur et que je puisse ainsi procéder aux avis touchant les travaux des commissions avant que nous puissions, comme convenu, procéder au débat? Il ne nous faudra que quelques secondes pour donner les avis touchant les travaux des commissions.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement? Oui.

Mme Houda-Pepin: ...moment et je préfère procéder, si c'était possible, avec le consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il n'y a pas de... Vous ne donnez pas le consentement, si je comprends bien?

n(11 h 40)n

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il n'y a pas de consentement, M. le leader.

M. Boisclair: ...nous pourrions faire une motion sans débat tout simplement, la motion qu'elle s'apprête à faire. Cela permettra justement d'aller rencontrer les engagements. Alors, on peut peut-être, dans ces circonstances, faire la motion sans débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader.

M. Paradis: Oui, je suis certain que le ministre, qui est également responsable de l'Habitation, va souscrire à une motion qui traite du 54e anniversaire de la Déclaration des droits humains. Il y aurait un hommage particulier et spécial à M. François Saillant et au FRAPRU, qui se sont mérité le prix des Droits et Libertés, M. le Président. Dans les circonstances, il y avait eu une entente entre les formations politiques, une intervention de part et d'autre. J'ai pris soin de vérifier auprès de Mme la députée de La Pinière. L'intervention va être la plus brève possible, mais en soulignant quand même ce qui s'est produit.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous poursuivons aux motions sans préavis. Mme la députée de La Pinière, je vous reconnais.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Boisclair: Je comprends, puisque la députée est aussi bien occupée dans le temps, que nous pourrions limiter les interventions à un maximum de cinq minutes pour chacune des interventions qui pourraient se faire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Écoutez, là, premièrement, on va faire ça dans l'ordre. Je suis aux motions sans préavis. Je vais vous donner la parole. Vous avez une motion sans préavis. Après, je demanderai si on donne le consentement pour la débattre et je vous entendrai, M. le leader, à ce niveau-là.

Mme la députée de La Pinière, la parole est à vous.

Souligner la Journée des droits de l'homme et
rendre hommage à M. François Saillant et
à l'équipe du FRAPRU, récipiendaires
du prix Droits et Libertés

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 54e anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme et rende hommage à M. François Saillant et à l'équipe du FRAPRU, qui se sont mérité le prix Droits et Libertés décerné par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le 10 décembre dernier, pour leur engagement en faveur de l'accessibilité des plus démunis à un logement décent.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. leader.

M. Boisclair: Il y aurait consentement, M. le Président, mais on comprend aussi qu'on limiterait chacune des interventions à un maximum de cinq minutes. Il y aurait une intervention du côté de l'opposition officielle, une intervention du côté des députés indépendants et une intervention du côté ministériel.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a consentement, une intervention de cinq minutes pour la formation ministérielle, cinq minutes pour la formation de l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. Alors, Mme la députée de La Pinière, je vous reconnais sur cette motion.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, le 10 décembre dernier, plusieurs événements ont été tenus au Québec, au Canada et ailleurs dans le monde pour souligner le 54e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Cette déclaration est à la base de tous les instruments juridiques internationaux et nationaux desquels découle notre propre dispositif législatif, notamment la Charte canadienne des droits et la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Dans le contexte de la mondialisation et de l'intégration hémisphérique, la question des droits de la personne prend une dimension très importante qui interpelle tous les pouvoirs publics et l'ensemble des parlementaires.

Plus près nous, l'exclusion et la discrimination nous rappellent que, bien que le Québec soit une société de droit, plusieurs citoyens doivent se battre pour en assurer l'exercice réel. À cet effet, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse est l'institution vers laquelle on se tourne pour faire valoir ces droits. Depuis quelques années, la Commission a trouvé une façon originale de rappeler l'importance de sa mission en octroyant des prix de reconnaissance à des individus et des organismes qui se sont distingués par leur engagement en matière de droits de la personne. Cette année encore, elle a tenu à célébrer le 54e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme lors d'une cérémonie de remise des prix Droits et Libertés à laquelle j'ai participé lundi dernier et qui a réuni à Montréal de nombreux représentants et représentantes des milieux institutionnels, des organisations non gouvernementales, des groupes de femmes et des groupes communautaires qui oeuvrent sur le terrain pour lutter contre la discrimination, contre la violence et le racisme.

Pour avoir participé par le passé à la remise de ces prix Droits et Libertés, il me paraît évident que cet événement a une signification très importante pour des centaines de militantes et de militants des droits de la personne et pour les organismes engagés dans cette voie. À titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'habitation, j'ai, cette année, une raison supplémentaire de me réjouir puisque le prix Droits et Libertés, édition 2002, de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a été octroyé à M. François Saillant, coordonnateur du Front d'action populaire en réaménagement urbain, mieux connu sous l'appellation du FRAPRU et surtout mieux connu pour son engagement soutenu et indéfectible à l'égard des mal-logés et des sans-logis du Québec.

Dans son communiqué de presse du 10 décembre 2002, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse déclare que ce prix prestigieux a été décerné à M. François Saillant, et je cite: «Pour son engagement de plus de 20 ans à la défense et l'amélioration des conditions de logement et de vie de la population à faibles revenus, l'une des formes essentielles de réalisation du droit au logement. Ce prix bien mérité a été octroyé par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse à M. Saillant tant pour son leadership et ses qualités personnelles que pour les réalisations d'une équipe de personnels et de bénévoles qui l'ont accompagné dans sa lutte au sein du FRAPRU.»

Tout en félicitant M. Saillant pour sa conscience sociale, je tiens à rendre hommage, à travers lui et à travers le FRAPRU, à tous les dirigeants d'organismes communautaires et coopératifs qui oeuvrent dans le domaine de l'habitation pour l'amélioration des conditions de vie des plus démunis en leur assurant un logement décent. Je profite de cette occasion pour souligner le travail de deux organismes communautaires qui se sont également mérité, le 10 décembre dernier, des mentions d'honneur de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, soit l'AQDR Drummond, pour son action de défense des droits des aînés à travers des stratégies d'intervention visant à prévenir les abus et l'exploitation des personnes âgées, et Cible famille Brandon, un organisme qui a mis de l'avant des projets mobilisateurs dans huit municipalités rurales de la MRC D'Autry afin d'aider les familles à développer des compétences parentales et lutter contre la négligence et la violence dont sont victimes les enfants.

En terminant, je tiens à rappeler l'importance, dans une société pluraliste comme la nôtre, du respect des droits de la personne comme une valeur fondamentale et un pilier sur lequel repose l'ensemble de notre structure institutionnelle. Comme parlementaire, je tiens à saluer le travail de la Commission des droits de la personne, M. le Président, pour le leadership qu'elle exerce sur le terrain. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée La Pinière. Sur cette même motion, je cède la parole M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens et à l'Immigration. M. le ministre, la parole est à vous. Oui. S'il vous plaît.

M. Paradis: ...ministre et de façon à permettre à plusieurs de ses collègues d'entendre sans doute un discours qui vaut la peine d'être entendu, je vous demanderais, à ce moment-ci, de vérifier le quorum. Et je pense que c'est assez clair...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les députés.

n(11 h 48 ? 11 h 49)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ceux qui étaient debout, si vous voulez vous asseoir. M. le leader.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Simplement offrir au ministre de ne pas réduire son temps de parole à cinq minutes. S'il souhaite à ce moment-ci utiliser plus de temps de parole, de ce côté-ci, conformément à l'entente que nous avions avec le gouvernement, nous consentons à ce qu'il puisse prendre le temps nécessaire pour bien s'exprimer.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a eu un consentement, ça prend une dérogation pour revenir à... M. le ministre délégué à... Oui.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a le... Bien, le leader de l'opposition me demande s'il y a consentement pour rallonger le temps du ministre délégué.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il n'y a pas de consentement?

M. Boisclair: ...l'opposition, il ne parlera tout de même pas au nom des députés ministériels.

n(11 h 50)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ça va. Alors, il n'y a pas de consentement. S'il vous plaît. Alors, sur ce même sujet, M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens et à l'Immigration, je vous cède la parole.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Mais, M. le Président, je suis heureux, je ne vais pas nier, de voir que se sont ajoutés de nombreux députés en cette partie de la Chambre. Malheureusement, celle qui l'a initiée, la députée libérale de La Pinière, a fait son petit tour de piste et a déjà quitté l'Assemblée. Elle aurait dû...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre...

M. Boulerice: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous ne pouvez pas souligner l'absence d'un député en cette Chambre, et vous connaissez très bien cette règle. Je vous demande de vous y conformer. Si vous voulez poursuivre.

M. Boulerice: Je ne dirai pas qu'elle est absente, je dirai qu'elle est non présente. Voilà. Alors, M. le Président...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, s'il vous plaît! On ne peut pas souligner l'absence, et de le faire de façon indirecte, ce n'est pas mieux. Alors, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Boulerice: En l'absence du député que j'aurais bien aimé avoir présente dans cette Assemblée et que je ne peux nommer, M. le Président, je vous dirai que le parti gouvernemental est très heureux de souligner, lui aussi, le 54e anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme et de rendre hommage, nous également, à M. François Saillant. Je crois bien connaître François Saillant depuis 17 ans et ? nous sommes le 12 décembre ? je dirai, 10 jours, M. le Président. Donc, je suis en mesure, puisque les locaux du FRAPRU sont situés au Centre Saint-Pierre, situé sur la rue Panet, à Montréal, près du boulevard René-Lévesque, bien en mesure de connaître et d'apprécier le travail tout à fait exceptionnel qui a été accompli par le FRAPRU, en collaboration d'ailleurs avec bien d'autres organismes d'habitation au Québec, dont notamment Alerte Centre-Sud, Comité logement Centre-Sud, et ces GRT, ces groupes de ressources techniques en habitation qui nous ont permis de faire beaucoup de logement social à Montréal. Et d'ailleurs je me réjouis d'appartenir au gouvernement qui a fait le plus au nom du logement social au cours de toute l'histoire contemporaine du Québec. Donc, je sais, M. le Président, ce que François Saillant et l'équipe du FRAPRU ont accompli durant ces nombreuses années.

Une voix: Simplement, en m'excusant...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, ce n'est pas une question de règlement, M. le député. M. le ministre.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vous me demandez le quorum? Excusez-moi.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une minute. Une minute. Alors, qu'on appelle les députés.

n(11 h 52 ? 11 h 53)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Boulerice: Parlant d'absents, M. le Président, il y a aussi un grand absent dans ce grand débat, et j'ose espérer qu'à cette cérémonie ? malheureusement, je ne pouvais être présent, mais le ministre d'État à la Population, mon collègue député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue était là ? j'ose espérer qu'il n'y a aucuns féds, pour employer l'expression populaire, qui a osé se présenter à la remise d'un prix décerné par la Commission des droits de la personne du Québec à M. Saillant et à l'équipe de FRAPRU, quand on sait que le gouvernement fédéral s'est complètement désinvesti de la construction de logement social au Québec, M. le Président. Donc, ce sont des centaines de millions de dollars qui nous ont encore été une fois volés par le gouvernement fédéral canadien.

Et, durant que la députée de Mercier s'interroge sur la longueur des paragraphes de mes lettres d'appui aux groupes d'habitation que j'ai toujours supportés, parce que ma présence en politique n'est pas, contrairement à elle, un bonheur d'occasion mais une vocation quotidienne, je lui dirais qu'elle devrait beaucoup plus, beaucoup plus, M. le Président, mettre ses culottes, dans le sens figuré du terme, et dénoncer le gouvernement fédéral qui rend la tâche de FRAPRU et de François Saillant aussi difficile qu'elle peut l'être, M. le Président.

Ayant remis les pendules à l'heure face à ce que je ne vois pas devant moi, M. le Président, je vous dirais que nous nous réjouissons que ce travail quasi bénévole de François Saillant et de toute l'équipe de FRAPRU a été reconnu, M. le Président. Et je profite des sept secondes qui restent pour lui tirer mon chapeau et lui dire: Bravo! François, nous serons toujours derrière toi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre. Sur le même sujet, Mme la députée de Berthier.

Mme Marie Grégoire

Mme Grégoire: Oui. Alors, il me fait plaisir d'intervenir sur cette motion qui a pour but de souligner le prix, mais aussi le 54e anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme, et de rendre hommage aux récipiendaires du prix des Droits et Libertés, M. François Saillant et le FRAPRU. Mais aussi vous me permettrez de saluer Cible famille Brandon, qui est dans mon comté et qui travaille justement dans un secteur où la pauvreté est encore très présente. Malgré certaines performances économiques, on le sait qu'il reste des poches de pauvreté marquées. Brandon, chez nous, c'est le cas, et Cible famille Brandon travaille et accompagne les parents, accompagne les familles de façon exemplaire avec le soutien du milieu. Alors, je veux leur lancer un coup de chapeau, c'est bien certain.

Il y a 54 ans, donc au lendemain d'une guerre, je pense, qui a dépassé en horreur tout ce que la conscience humaine pouvait imaginer, l'Assemblée générale des Nations unies adoptait la Déclaration universelle des droits de l'homme, un acte de foi en un avenir différent, une étape marquante dans l'histoire de l'humanité qui a pris et prend toujours différentes formes dans la société. En effet, si ce thème des droits de l'homme s'est imposé à la conscience du monde au cours des décennies de combats et d'efforts, il est important de savoir qu'il reste beaucoup de travail à faire. Puis on le voit au quotidien, je pense, dans nos bulletins d'information, qu'on n'a pas atteint le plein potentiel des droits de l'homme, et je pense qu'on a encore du travail à faire, autant comme société au Québec que comme plus grande société comme... l'humanité, chez nous.

Alors, il y a donc des personnes qui s'affairent à promouvoir par diverses actions les droits des individus, les droits de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Il faut, par conséquent, rendre hommage à ceux et celles qui, par diverses initiatives, mettent de l'avant des mesures concrètes pour faire respecter cette Déclaration, mais des gens aussi qui travaillent au quotidien, des organismes communautaires qui travaillent à améliorer, donc, dans l'action, qui agissent à améliorer dans l'action le quotidien de nos concitoyens et de nos concitoyennes qui vivent certaines difficultés.

Donc, le prix Droits et Libertés décerné par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse permet notamment de souligner l'apport de citoyens et de citoyennes comme ceux-là qui, au quotidien, donnent de leur temps, donnent de leur énergie puis, je dirais, donnent de leur créativité à trouver des solutions qui sont dans les milieux. Alors, cette année, ce prix a été décerné à M. François Saillant, on en a parlé, et à l'équipe du FRAPRU pour leur engagement en faveur de l'accessibilité des plus démunis à un logement décent. Donc, au nom de ma formation politique, je veux les féliciter et féliciter les gens de l'AQDR Drummond et les gens de chez nous, de Cible famille Brandon. Merci.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant les activités médicales, la répartition et l'engagement des médecins, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Ainsi que la commission de l'aménagement du territoire qui entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 77, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les municipalités régionales de comté, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle 1.38b de l'édifice Pamphile-Le May.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vos avis sont déposés.

Pour ma part, je vous avise que la commission des finances publiques se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 15 heures, à la salle RC.161 du l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de décider des suites à donner au mandat sur la responsabilité sociale des entreprises et l'investissement responsable.

Nous en sommes aux renseignements sur les travaux.

Affaires du jour

Passons maintenant aux affaires du jour. Alors, M. le leader du gouvernement.

n(12 heures)n

M. Boisclair: Oui. M. le Président, l'article 41 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 112

Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 41, Mme la ministre de la Solidarité sociale propose l'adoption du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, je vous remercie, M. le Président. Alors, M. le Président, c'est un moment extrêmement important, je dirais même qui revêt un caractère extrêmement solennel. Vous savez, la loi n° 112, que j'appellerais la loi de la solidarité de la nation québécoise, permet d'initier de manière durable notre démarche collective afin de lutter contre l'ensemble des causes et des conséquences de la pauvreté et de l'exclusion sociale. Par ce projet de loi, le Québec s'engage donc tout entier dans un processus capital pour les plus démunis... et de faire en sorte que nous puissions ensemble avoir ce progrès collectif auquel nous aspirons tous.

Comme le soulignait notre premier ministre dans l'avant-propos du document Horizon 2005, la lutte contre la pauvreté est un acte de compassion mais aussi de clairvoyance. La pauvreté, nous le savons, nous affecte tous. La pauvreté et l'exclusion sociale ont des conséquences sérieuses pour tout le monde, car elles affectent directement le développement de notre société, et personne n'est à l'abri, M. le Président, d'une telle situation. Tant dans ses causes que dans ses manifestations ? pensons, par exemple, au décrochage scolaire, atteinte à la santé physique ou morale, le taux de suicide, le chômage, la violence, les inégalités sous toutes ses formes ? la pauvreté menace non seulement la dignité humaine des gens, mais elle génère également des coûts et freine notre progrès collectif. Investir dès maintenant et au cours des prochaines années pour faire reculer la pauvreté et combattre l'exclusion sociale constitue un choix d'avenir extraordinaire pour tout le Québec.

Le projet de loi que nous nous apprêtons à adopter est une pièce législative unique, extrêmement importante, à l'image des valeurs de partage et de solidarité qui unissent les Québécoises et les Québécois. À cet égard, j'aimerais, M. le Président, saisir les membres de l'Assemblée nationale du témoignage qui a été livré par M. Pierre-Joseph Ulysse, un renommé chercheur au Groupe de la recherche sur les transformations du travail, des âges et des politiques sociales, à l'INRS Urbanisation, Culture et Société, le 17 octobre dernier, en commission parlementaire, qui affirmait, et je le cite, M. le Président, «que le projet de loi n° 112 était sans équivalent ailleurs dans le monde et représentait un progrès remarquable et une illustration exemplaire du modèle québécois de développement économique, de développement social et culturel».

Cette loi vient inscrire non seulement la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale de manière durable dans le temps grâce à l'outil le plus fort de notre démocratie, celui d'une loi adoptée à l'Assemblée nationale, ce projet s'appuie sur l'engagement de toute la collectivité québécoise qui désormais plus que jamais prend conscience qu'elle ne peut, pour son avenir social et économique, laisser personne de côté, une société qui a la volonté d'agir et la force de réussir.

Un projet qui est devant nous, qui a été enrichi, rappelons-le, des travaux d'une commission parlementaire qui s'est étendue sur sept semaines et au-delà de 90 heures d'échange et de discussion, où quelque 132 groupes et individus, sur un total de 166 mémoires reçus, représentant tous les secteurs et tous les milieux de la société québécoise, sont venus indiquer leur volonté de se mobiliser autour de l'enjeu d'amener progressivement notre Québec, d'ici 10 ans, au nombre des nations industrialisées comptant le moins de personnes pauvres. C'est un objectif ambitieux qui est inscrit dans un projet de loi et représente un défi à la hauteur de nos aspirations comme société.

Avec l'engagement qui a été pris par notre premier ministre et député de Verchères, en mars 2001, de faire de la lutte à la pauvreté l'une de ses priorités, un vaste chantier de travail s'amorçait afin de cerner avec justesse les visages de la pauvreté et de l'exclusion au Québec et de circonscrire nos approches à privilégier pour combattre efficacement cette pauvreté et cette exclusion.

M. le Président, cette initiative l'a été par mon collègue ministre et député de Charlesbourg, par ma collègue ministre déléguée à la Lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale, qui s'adressera à vous également tout à l'heure, auxquels se sont ajoutés par la suite la secrétaire d'État à la Condition féminine et moi-même ainsi qu'un comité de députés, au nombre de 12, qui ont travaillé pendant plus de trois ans pour que nous soyons capables ensemble non seulement d'identifier les pistes de solution, de les valider auprès des femmes et des hommes que nous représentons... Est-ce que l'orientation que nous voulons prendre correspond véritablement à ce virage que nous devons faire?

Je voudrais, M. le Président, les remercier de façon particulière. Nombreux sont ici, en cette enceinte, aujourd'hui. Je voudrais également indiquer que notre collègue député de Charlesbourg, qui non seulement a contribué à ce projet de loi également, mais qui actuellement se retrouve en pleine commission parlementaire, avec le doigté qu'on lui connaît... une révision importante de la Loi sur les normes du travail, qui est une pièce législative extrêmement importante et d'une grande valeur dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et qui confirme les orientations sociales-démocrates de notre gouvernement...

Vous savez, M. le Président, cette loi, plusieurs sont venus l'exprimer, il s'agit d'une colonne vertébrale dans laquelle des actions législatives, des actions humaines... où l'ensemble de la société est interpellée pour que nous ayons une lecture commune des choses et que notre intervention soit globale. Et, dans ce contexte-là, du travail a été fait, du travail est en train de se faire, et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui nous pouvons adopter avec beaucoup de confiance ce projet de loi, et de fierté.

Nous avons, tout au cours de cette commission, et particulièrement article par article, apporté près d'une quarantaine d'amendements que nous avons déposés et qui vont nous permettre encore une fois de ressortir avec un projet de loi qui, je vous dirais, a fait l'objet d'une fine lecture, a fait l'objet de fines précisions. Et, à cet égard, c'est un travail de moine qui a été fait, M. le Président, parce que, considérant l'ampleur de ce projet de loi, il nous fallait justement nous assurer que les mots qu'on allait y retrouver, les obligations qu'on allait retrouver dans ce texte de loi et les engagements correspondent à cette mobilisation nécessaire pour la suite des choses également.

M. le Président, je voudrais également profiter de l'occasion pour remercier de la contribution exceptionnelle l'ensemble des parlementaires qui ont participé également aux travaux de la commission des affaires sociales, que ce soient nos collègues députés ministériels de même que notre collègue député de Laurier-Dorion et la députée de Berthier également, pour leur collaboration à l'amélioration du projet de loi, ainsi que nos collègues ministériels qui jour après jour faisaient le point sur le travail que nous allions effectuer. Et, je vais vous dire, ça a été un grand privilège de pouvoir vivre cette commission.

M. le Président, ce projet de loi est également porté par l'action citoyenne. Nous nous devons donc ici aujourd'hui de reconnaître et de saluer le travail extrêmement important réalisé dans toutes les régions du Québec quotidiennement par de nombreuses personnes en provenance de partout pour inscrire l'enjeu de la pauvreté au coeur des préoccupations des Québécoises et des Québécois. Je pense, par exemple, à la Marche mondiale des femmes où nous avions, à ce moment-là, déjà été à même de constater la mobilisation pour lutter contre la violence et la pauvreté, également aux actions qui ont été menées par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté. Vous avez 200 000 personnes qui ont signé... des gens qui venaient de tout partout, de tous les organismes, soutenus et supportés par les députés également, qui ont eu à exprimer, à contribuer, à écouter, à entendre ce que ces gens avaient à leur raconter.

Alors, M. le Président, le projet de loi que nous allons adopter dans les prochaines heures et les actions qui seront mises en place par la suite... Nous comptons non seulement encourager cette participation citoyenne, mais elle est extrêmement nécessaire par la contribution des personnes qui vivent des situations de pauvreté. Nous le savons, une loi à elle seule ne peut éliminer la pauvreté. Mais désormais les situations de pauvreté et d'exclusion sociale feront l'objet d'une préoccupation constante et interpelleront l'ensemble de la société. L'État, ses partenaires devront régulièrement rendre compte de leurs actions en ce domaine. Le projet de loi vient aussi donner une impulsion supplémentaire aux actions déjà entreprises par notre gouvernement, tant par l'État également que par les acteurs socioéconomiques et communautaires, pour lutter contre la pauvreté. Il s'agit d'un geste fondamental qui est engageant et qui a été mûrement réfléchi.

Cette nouvelle façon de faire appelle la cohérence, la concertation et l'engagement. Elle met la table en faveur d'une action plus solidaire, plus complice des ministères et des réseaux, des régions, des villes, des MRC, des entreprises, des patrons, ainsi que les partenaires syndicaux et surtout tout le monde communautaire. Cette stratégie, M. le Président, elle est d'une très grande valeur collective. Elle est porteur d'espoir non seulement pour les individus qui vivent la pauvreté et l'exclusion sociale, mais elle est également porteur d'espoir pour l'ensemble de notre société.

n(12 h 10)n

Je voudrais rappeler que ce projet de loi précise les buts, les orientations que nous nous donnons, les balises qui viendront guider notre action et l'ensemble des partenaires. Les travaux de la commission parlementaire nous ont amenés non seulement à proposer, mais à faire un consensus autour de cinq buts: d'abord, promouvoir le respect et la dignité des personnes en situation de pauvreté ou d'exclusion sociale contre les préjugés à leur égard; améliorer la situation économique des personnes et des familles qui vivent la pauvreté ou qui en sont exclues socialement; réduire les inégalités qui peuvent nuire à la cohésion sociale; favoriser la participation de ces personnes et de ces familles à la vie collective et au développement de la société; développer et renforcer le sentiment de solidarité de l'ensemble de la société québécoise afin de lutter collectivement, ensemble, contre la lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale.

Les travaux de la commission nous ont permis d'en arriver à préciser également trois axes d'intervention. C'est important de savoir quels sont les axes que nous avons priorisés et qu'est-ce que l'ensemble des gens sont venus nous dire: d'abord, reconnaître l'apport des aînés dans la société et soutenir ceux qui vivent des situations de pauvreté afin de leur rendre accessible une diversité de services, de programmes, et leur permettre aussi de continuer à exercer pleinement leur citoyenneté, ces femmes et des hommes qui ont de l'expérience, qui souhaitent la partager avec les autres, et qu'on puisse leur donner la possibilité de le faire, favoriser également, pour les personnes en situation de pauvreté, l'accès à la culture, aux loisirs et aux sports ? c'est important ? favoriser, pour les personnes et les familles en situation de pauvreté, l'accès en toute dignité à un approvisionnement alimentaire suffisant et nutritif, à coût raisonnable, de même qu'à une information simple et fiable qui leur permette de faire des choix alimentaires éclairés, tant pour leurs enfants que pour eux-mêmes.

Le projet de loi prévoit également pour le gouvernement une obligation extrêmement importante: d'abord, rendre public dans les 60 jours suivant l'entrée en vigueur de cette loi un plan d'action. Le projet de loi vient baliser les orientations, les axes d'intervention, et ces actions, en vertu du projet de loi que nous nous apprêtons à adopter, devront, dans l'avenir, dans leur conception et leur mise en oeuvre, viser à prendre en compte les réalités qui sont propres aux femmes et aux hommes en appliquant notamment une analyse différenciée selon les sexes, de même que les indices plus forts de pauvreté dans certaines régions ou sur certaines parties du territoire, et, finalement, les besoins spécifiques de certains groupes de société qui présentent des difficultés particulières notamment en raison de leur âge, de leur origine ethnique ou de leur déficience ou incapacité.

Le plan d'action prévoit également un ensemble de changements à apporter au programme d'assistance-emploi, notamment l'introduction du principe d'une prestation minimale, soit un seuil en deçà duquel une prestation ne peut être réduite en raison de l'application des sanctions administratives, de la compensation ou du cumul de celle-ci. Et, M. le Président, non seulement nous introduisons le principe, mais, en plus, à compter de janvier 2003, de nombreuses familles, de nombreuses personnes se retrouveront avec une augmentation de revenus qui, il faut le rappeler, sont modestes en soi, mais qui représentent 50 $, 60 $ ou 68 $, parfois même un peu plus pour les familles qui vivent ces situations de pauvreté. Alors, M. le Président, c'est que les gens nous avaient demandé, les gens vivant une situation de pauvreté, qu'ils voulaient avoir des gestes concrets immédiatement, tout en étant d'accord avec cette orientation qu'on se donne, des axes d'intervention, parce qu'ils savent très bien qu'on ne peut pas tout faire ça du jour au lendemain.

Alors, nous avons entendu ces gens et nous avons posé des gestes concrets également faisant en sorte que, dès janvier, l'ensemble de ces personnes vivant des situations de pauvreté et d'exclusion sociale auront cette bougie d'allumage pour dire qu'il y a eu des gestes qui ont été posés concrètement pour nous qui vivons cette situation sur le terrain, et ça, c'est dû, je dirais, à la générosité de l'ensemble des femmes et des hommes du Québec qui, grâce bien sûr à leurs impôts, qui sont venus dire: Oui, nous sommes solidaires aux hommes et aux femmes, peu importe où ils vivent sur le territoire du Québec. Nous terminons l'année en leur laissant cette bougie d'allumage, mais, en plus, concrètement, nous allons débuter l'année 2003 en leur disant que, dans leur quotidien, ils pourront voir un geste concret, la solidarité des femmes et des hommes du Québec. Et, ça, je vais vous dire, on peut être fier, M. le Président, parce que c'est un bel exemple de solidarité de notre société.

Nous avons également un autre élément que nous avons ajouté, vous le savez, l'exemption partielle des revenus de pension alimentaire pour enfants à l'égard des familles ayant un enfant à charge. Vous savez qu'actuellement il y a une donnée au Québec qui fait qu'il y a une famille sur deux qui connaît la rupture. Près de 85 % des chefs de famille monoparentale sont des femmes seules, et, actuellement, avec les changements que nous avons faits, les pensions alimentaires ne sont plus imposées comme elles pouvaient l'être auparavant. Alors, il est évident qu'aujourd'hui les familles qui ont des enfants de moins de cinq ans conservent la pension intégralement pour l'enfant, mais elle est comptabilisée lorsque les enfants ont plus de cinq ans. Alors, on a pris l'engagement, M. le Président, que dans notre plan d'action nous puissions corriger cette situation et être capables aussi de l'arrimer avec tous les ministères qui sont concernés ? je pense à l'Éducation, je pense à la Santé, je pense au ministère de la Famille.

Vous savez, cette loi, elle est cette colonne vertébrale pour l'ensemble du gouvernement. Alors, dans ce contexte-là, nous avons entendu les gens, nous avons entendu les familles, les personnes qui dans leur quotidien vivent ces situations, et on va également s'attaquer à cette situation.

Également, un autre élément qui était important, c'est celui de permettre aux adultes et aux familles de développer leur actif pour favoriser leur autonomie, ou de les maintenir dans certaines situations liées à des difficultés économiques transitoires. Vous savez que, lorsqu'un travailleur ou une travailleuse perd son emploi à 45 ans, quelqu'un qui bien souvent a toujours gagné dignement sa vie, mais avec une scolarisation qui, à l'époque, n'était pas aussi nécessaire qu'elle peut l'être aujourd'hui... Souvent, on demandait à ces gens: Bien, prenez toutes les épargnes que vous avez pu faire, dépensez-les, puis après on vous aidera. Alors, M. le Président, vous savez, ce que ces gens demandent tout simplement, c'est, considérant les emplois qui sont disponibles partout au Québec, d'avoir cet accompagnement nécessaire pour leur permettre d'avoir les compétences, les aptitudes pour être capables d'occuper ces nouveaux emplois.

Alors, M. le Président, en vertu de ce projet de loi, le plan d'action vient proposer une démarche qui oblige tous les ministères, avec nos partenaires sur le terrain, d'arrimer notre action en fonction de l'individu et non pas en fonction des programmes. Et, quand on sait comment, lorsqu'on utilise cette formule-là, Solidarité jeunesse, où on a regardé qu'est-ce que le jeune avait besoin... C'étaient 8 000 jeunes au Québec qui en 2000 étaient susceptibles d'être prestataires de l'aide de dernier recours. En 2002, aujourd'hui, M. le Président, c'est 85 % de nos jeunes qui ont retrouvé leur pleine dignité, qui sont retournés aux études ou retournés en emploi et qui ne sont pas prestataires de l'aide de dernier recours parce qu'on les a aidés autrement. Alors, ça, c'est une réussite extraordinaire, puis on peut en être fier.

Alors, vous le savez, M. le Président, nous sommes dans une situation financière extrêmement difficile pour différents éléments, et j'y reviendrai tout de suite. Mais je voudrais juste réaffirmer que le gouvernement du Québec, malgré les difficultés que nous avons actuellement, malgré notre réaffirmation à maintenir l'équilibre des finances publiques, malgré la difficulté que notre ministre des Finances, comme elle l'exprime... Nous avons une économie extraordinaire. Il n'en demeure pas moins qu'on se retrouve avec des difficultés terribles, le déséquilibre fiscal qui prive les hommes et les femmes du Québec de revenus de 50 millions par semaine. Malgré que, vous le savez, au niveau de la santé, nous ne retrouvons plus ce que les Québécois et Québécoises envoient au fédéral ? ils envoient presque deux tiers de leurs impôts, et ça ne nous revient pas ? malgré cette difficulté, notre gouvernement, notre premier ministre, cette équipe ministérielle, cette équipe de la solidarité sociale a réaffirmé que nous allions investir 1,5 milliard pour les cinq prochaines années pour soutenir le plan d'action, pour justement permettre à ces femmes et à ces hommes d'exercer leur pleine citoyenneté, d'occuper des emplois qui seront disponibles. Parce que, avec la création d'emplois, ce que nous leur disons: Il y en a, des emplois disponibles; il faut juste nous assurer que ces personnes soient en mesure d'occuper ces emplois.

Alors, M. le Président, malgré les investissements majeurs que nous avons faits, malgré le premier plan d'action que nous allons déposer, malgré la reconnaissance du principe du barème plancher, le partage du logement que nous avons retiré, qui existait, malgré toutes ces mesures, M. le Président, nous ne pourrons pas répondre à toutes les demandes légitimes des femmes et des hommes qui aujourd'hui vivent des situations de pauvreté. Ce serait totalement irresponsable et ce serait de ne pas dire la vérité, de dire à ces gens que nous allons tout donner, parce que ce n'est pas uniquement une question d'argent. Mais il n'en demeure pas moins qu'il est important qu'il y en ait, des sommes d'argent. Nous le faisons. Et les gens ont exprimé qu'ils comprenaient que nous ne pouvions pas faire tout en même temps. Et de reconnaître que, au mois de janvier, il y a près de...

Je vais vous dire, c'est 50 millions, ne serait-ce que pour le partage du logement, mais pour bien d'autres éléments aussi qui touchent l'habitation, le supplément au revenu qui a été reconduit, différentes mesures qui ont été mises de l'avant. Il nous faut absolument faire en sorte que nous puissions adopter fièrement ce projet de loi, se l'approprier puis être capables de s'engager pour la suite des choses, pour que nous atteignions les ambitieux défis que nous nous sommes relevés, c'est-à-dire de réduire de moitié le nombre de femmes vivant une situation de pauvreté et d'exclusion sociale.

n(12 h 20)n

Vous savez, M. le Président, quand on a réussi à faire un consensus solide pour établir d'une prestation minimale ou d'un barème plancher la fixation d'un revenu de solidarité et les moyens pour l'atteindre, la révision du traitement de revenu de pension alimentaire pour enfant, dans nos programmes sociaux, M. le Président, je peux vous dire qu'on adopte ce projet de loi non seulement avec fierté pour tout ce que je vous ai dit précédemment, mais aussi parce qu'il y est rattaché des sommes d'argent extrêmement considérables qui appartiennent aux femmes et aux hommes du Québec, mais qui sont venus nous dire: C'est nécessaire. Il nous faut être plus solidaires à l'égard des gens qui ont plus de difficultés.

Alors, M. le Président, je ne peux passer sous silence aussi l'introduction dans la loi d'une clause d'impact afin d'assurer que toute décision gouvernementale soit dorénavant examinée à la lumière de son effet sur la pauvreté et sur les écarts, c'est-à-dire une obligation de dire que, dans tous les gestes que nous poserons, dans toutes les actions qui sont proposées, il y a cette obligation de regarder quel serait l'impact à l'égard des personnes vivant des situations de pauvreté et d'exclusion sociale. M. le Président, non seulement cette clause d'impact, elle est extrêmement importante, mais ça veut dire que, pour la suite des choses, il n'y aura plus de gestes qui pourront être posés sans se préoccuper de ce que cela pourrait occasionner à l'égard des femmes et des hommes qui vivent des situations de pauvreté.

Alors, avant de terminer, M. le Président, je voudrais en profiter aussi pour remercier tous les fonctionnaires, les femmes et les hommes qui ont travaillé au sein de l'équipe du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, qui ont travaillé sans relâche pour définir cette stratégie, pour y intégrer les contributions provenant d'autres ministères, les points de vue recueillis aux quatre coins du Québec et auprès de centaines de groupes de personnes, les propos recueillis par nos députés, qui, en travaillant avec ces personnes-là, ont été à même de bonifier ce projet de loi. Je voudrais également remercier, M. le Président, l'équipe politique aussi qui nous a accompagnés, ma collègue qui est ici avec moi et qui prendra la parole tout à l'heure, toute son équipe, notre secrétaire d'État, notre personnel politique. Vous le savez, ce sont des gens qui travaillent de façon extraordinaire, et ils le font avec beaucoup de passion et de détermination, mais particulièrement... d'être à l'écoute de personnes qui vivent des situations comme celles-là. Vous savez, avec le ministère de la Solidarité sociale, la famille, l'enfance, nos aînés, c'est le visage humain du Québec. Alors, on en a entendu, des gens, mais ça a donné des résultats extraordinaires.

Non seulement ce projet de société, ce projet de loi a une portée historique ? c'est une première en Amérique du Nord ? c'est une première dont notre société, au niveau de l'international, pourra être citée en exemple, où on échangera ensemble le chemin qu'on aura parcouru. Et, le jour où le Québec sera au concert des nations, encore une fois, de notre propre voix, nous pourrons avoir un élément de fierté pour être capables de partager avec les femmes et les hommes des Nations unies l'expérience et l'expertise qu'on aura développées avec les citoyens et citoyennes du Québec, et c'est comme ça qu'on apportera, nous aussi, au concert des nations une approche que l'on appelle sociale-démocrate, une approche qui dit que, malgré toutes nos réussites économiques, elle ne peut pas se faire sans un développement social solide, M. le Président.

Je voudrais terminer en vous disant qu'il y a eu certaines personnes, je dirais, comme ma mère nous disait, des mauvaises langues qui ont prétendu que notre projet de loi, lorsque nous l'avons déposé au mois de juin... À ces gens qui nous disaient que c'était une manoeuvre électoraliste, M. le Président, je terminerai en vous disant: Notre gouvernement ne s'est pas engagé dans un projet de loi pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale pour gagner une élection; il l'a fait pour permettre à sa nation de grandir, il l'a fait par solidarité. Et nous voulons un Québec qui soit membre du concert des Nations unies, mais nous voulons planter notre drapeau avec toutes les femmes et les hommes du Québec parce que nous avons besoin, tous, les uns des autres. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre, de votre intervention. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et je reconnais le vice-président de la commission de l'économie et du travail. Il est le porte-parole officiel de l'opposition en matière de solidarité sociale. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, n'eût été pour le dernier petit bout, j'aurais pu, moi aussi, applaudir avec la ministre cette adoption à laquelle on nous convie aujourd'hui. Je ne commenterai pas les motifs, M. le Président, à l'ouverture de mon discours, comme le faisait la ministre à la fin de son discours, je pense qu'il s'agit, à ce moment-ci, de constater que nous sommes à la dernière étape de l'adoption d'une loi qui a eu un cheminement très long, M. le Président.

Et ça vaut la peine de jeter un petit regard sur ce chemin parcouru depuis les deux dernières années parce qu'il faut se rappeler que, la première fois dont il a été question d'une loi, de l'adoption d'une loi, ce n'était pas par l'introduction de cette idée par le gouvernement, ce n'était même pas par l'introduction de cette idée de la part de l'opposition officielle, c'était le fait que, il y a à peu près deux ans, au mois de novembre 2000, ont déposé en cette Chambre, ici, trois députés, de façon conjointe, des trois partis politiques ici représentés, une pétition, qui contenait 215 000 noms à peu près, qui réclamait l'adoption d'une loi basée sur les principes et objectifs... sur un modèle, dis-je, d'un projet de loi qui avait été élaboré par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté. On se rappellera, M. le Président, qu'à ce moment-là il n'était nullement question, de la part du gouvernement, de procéder vers la voie de l'adoption d'une loi. Même, ça avait été rejeté du revers de la main. On nous avait dit, à ce moment-là: Bien, voyons donc! Ce n'est pas quelque chose qui est très sérieux, ce n'est pas quelque chose que l'on envisage. Ça avait été rejeté du revers de la main.

On était, de ce côté-ci, M. le Président, le Parti libéral du Québec... Et je tiens à le dire parce que la ministre est revenue plusieurs fois sur cette notion qu'elle veut mettre de l'avant ? et je comprends sa tentative ? à l'effet que cette loi soit une loi sociale-démocrate. On ne se chicanera pas sur c'est quoi au juste. Tout ce que je veux faire, M. le Président, c'est constater que le Parti libéral du Québec, suite au fait que cette idée d'une loi avait été menée à travers le Québec par le biais du Collectif, avait recueilli un fort appui de la part de la population, d'un bon nombre de nos concitoyens, avait su mobiliser des groupes et des personnes, puis dans toutes les régions du Québec. On a effectivement regardé ça de près, puis on s'est dit: Mais pourquoi pas une loi? Pourquoi pas une loi pour bien cibler le fait que, comme société, la pauvreté, c'est un fléau qu'on ne veut pas supporter, qu'on veut effectivement essayer de cibler comme une cible à éliminer. On peut envisager cette possibilité-là, on s'est dit.

C'est une idée que j'avais apportée à notre caucus, M. le Président, qui a fait son chemin, ce qui nous a permis de déposer en cette Chambre, il y a deux ans, au même moment où le gouvernement, à l'époque, refusait de suivre ce chemin, une motion, à l'initiative des députés, qui réclamait au gouvernement l'adoption d'une loi basée sur les principes de celle qui nous avait été présentée par le Collectif. Et on avait bien pris soin, de façon responsable, à ce moment-là, de circonscrire la motion autour des principes qui avaient été soutenus par la proposition du Collectif parce qu'on a toujours estimé puis on estime toujours que, ultimement, c'est les élus qui doivent choisir les moyens, selon l'ensemble des autres situations auxquelles nous devrons faire face, afin de mettre en oeuvre les principes qu'on aurait retenus, M. le Président.

À ce moment-là également, cette motion n'a pas été adoptée, n'a pas été adoptée parce qu'on nous a écarté cette possibilité-là en disant: Ce serait une stratégie nationale de lutte à la pauvreté. Mais on a vu là, quand même, M. le Président, un certain cheminement, hein? Il y avait quand même la retenue de l'idée qu'il fallait concentrer les actions autour de l'objectif de lutter contre la pauvreté. Et c'est pour cette raison-là qu'on a persisté puis on a continué, parce que, fondamentalement, en parlant d'idéologie politique, fondamentalement, une valeur fondamentale, pour nous, au Parti libéral, c'est la notion de justice sociale, la notion du développement économique au service de la justice sociale, et justice sociale et pauvreté sont des contradictions.

n(12 h 30)n

Alors, avec cette valeur fondamentale comme prémisse, nous avons poursuivi notre travail. Nous sommes retournés, par exemple, dans nos instances politiques propres, où on a présenté des engagements précis afin d'ajouter le geste aux paroles. C'est une chose de présenter des motions ici, parce que ç'aurait été très facile pour le gouvernement de nous dire: Vous le présentez parce que vous n'aurez pas à l'assumer, vous le présentez parce que vous pensez qu'on ne vous suivra pas, donc vous êtes sécures dans cette voie-là. Et c'est pour ça qu'on a voulu, à ce moment-là, également affirmer, à travers nos propres instances, que, dans un prochain gouvernement libéral, il y aurait un certain nombre de choses quant à cet objectif de lutte à la pauvreté qu'on s'engageait à faire.

Et c'est ainsi que nous avions pris trois engagements précis et bien identifiés: l'indexation automatique des prestations de l'aide sociale, le retour à la gratuité des médicaments et l'établissement d'un barème minimal au niveau des prestations sociales afin de commencer quelque part. Ça ne veut pas dire ? et je veux bien le clarifier ? que nous estimons, par exemple, que le barème minimal est le barème suffisant, mais nous estimons qu'il faut quand même établir un plancher pour qu'on ne puisse pas percer, à travers des trous qui existent, en bas de ce plancher-là, comme c'est le cas actuellement. Actuellement, il y a un montant de base, qui est de 515 $ par mois, qui est donné aux prestataires adultes seuls sur l'aide sociale, mais c'était coupable, si vous voulez, on peut le couper davantage. Alors, nous, on veut au moins... on avait dit: Il faut au moins établir ce minimum des minimums pour qu'on puisse, par la suite, commencer à bâtir davantage.

Alors, ces engagements ayant trouvé un appui au sein de notre formation politique, nous nous sommes tournés vers le parti ministériel, parce que ? et la ministre en a fait référence ? avant l'arrivée de la ministre actuelle, il y avait un autre ministre qui pilotait le dossier, et je me rappelle très bien des discussions et des échanges acerbes, je dirais, M. le Président, que j'ai eus personnellement avec ce ministre sur la question, particulièrement, du barème plancher et de l'élimination des pénalités, du seuil minimal. Je me rappelle très bien de la réponse cinglante que je me suis fait servir, en me disant, à ce moment-là, qu'il n'était pas question d'abolir les pénalités parce qu'il fallait pouvoir garder une façon punitive d'inciter en quelque sorte les personnes.

J'avais trouvé ça scandaleux, à l'époque, à un tel point que j'ai estimé qu'il fallait que je saisisse également l'ensemble des députés ministériels et même les militants du parti ministériel, lors de leurs conseils nationaux, en leur rappelant quelques engagements qu'ils avaient dans leur programme politique et en leur offrant, à partir des engagements que, nous, on avait pris dans nos instances politiques, la possibilité d'établir au Québec un consensus minimal autour d'un certain nombre de questions ? j'en avais énuméré les trois ? quant à l'objectif de lutter sur la pauvreté. Je leur ai rappelé qu'ils s'étaient engagés, eux aussi, à poursuivre dans la voie du seuil minimal, la possibilité d'une loi, etc.

Et je ne sais pas si ça a eu un effet quelconque, M. le Président, je ne prétends pas prendre le crédit d'une décision qui, ultimement, a été prise par le gouvernement, mais tout ce que je veux établir, c'est que c'est un cheminement que nous avons ici aujourd'hui, deux ans après le dépôt initial du projet de loi, qui fait en sorte que nous sommes aux dernières étapes de l'adoption d'une loi. Parce que, suite à tous ces événements et dans la session parlementaire qui a suivi, entre 2001 et 2002, nous sommes revenus à plusieurs reprises sur ces engagements. Nous avons été heureux de constater que la ministre des Finances a finalement reconnu la nécessité d'indexer les prestations de base, pour les personnes prestataires d'aide sociale, au coût de la vie et arrêter ainsi l'érosion de leur pouvoir d'achat, qui était déjà bien en bas du minimum, qui avait subi pendant quatre, cinq ans presque, cinq ans, un gel de cette indexation qui avait résulté donc à une diminution réelle de leur pouvoir d'achat. Donc, on a senti que c'était un point gagné.

On a insisté davantage sur la question de l'assurance médicaments et, jusqu'à hier, quand on prenait en considération le rapport, on tentait de convaincre les députés ministériels de rétablir sa gratuité, tout au moins pour cette clientèle de personnes assistées sociales, qui coûterait 16 millions, qui sont disponibles. Parce que ce n'est pas vrai qu'on... si c'est vrai qu'on ne peut pas tout faire, ce n'est pas vrai qu'on ne peut pas faire ça. Ça, on peut le faire, on aurait pu le faire, mais... Passons. Mais tout ça ensemble, M. le Président, a résulté à ce qu'au mois de mai 2002, après ces deux ans de cheminement, finalement, à la dernière semaine de la session parlementaire, le gouvernement, pour des raisons dont je n'imputerai pas des motifs, si vous voulez ? en bon parlementaire, je ne dirai pas ici aujourd'hui ce que j'avais considéré à l'époque ? mais, pour des raisons qui lui sont propres, a décidé, à la dernière semaine de la dernière session parlementaire, de dire que, finalement, il allait y avoir un projet de loi. Alors, nous avons donc accueilli avec intérêt cette ouverture qui avait été faite parce que ça rejoignait ce qu'on réclamait depuis deux ans.

Alors, j'avais repris l'image suivante en commission parlementaire, M. le Président, en disant que c'est un peu comme s'il fallait se rendre à l'endroit où logeait une loi pour lutter contre la pauvreté, qu'il n'y avait pas de chemin pour y arriver, que le Collectif avait fait le gros du travail d'ouvrir le chemin, de tracer le chemin, avait abattu les arbres, avait déménagé les pierres, que l'opposition officielle est venue par la suite suivre le Collectif en enlevant ce qui restait, des branches, etc., et que, par la suite, il y a maintenant cinq mois à peu près, le gouvernement a décidé d'emprunter la voie qui lui avait été ouverte. Tant mieux. Tant mieux, parce qu'on dit souvent que la politique c'est l'art du possible, alors ça a été possible, à ce moment-là, pour le gouvernement d'emprunter cette voie. Peut-être aussi des considérations de tous ordres sont entrées, sans mettre en doute pour une seconde la bonne volonté, le désir réel que je peux affirmer et que je constate chez les deux ministres qui ont piloté ce dossier depuis qu'ils ont eu cette responsabilité-là. Mais un ensemble de facteurs, je pense, a fait en sorte que le gouvernement a finalement décidé que c'était possible de suivre ce chemin, d'emprunter ce chemin qui lui avait été ouvert. Et nous avons poursuivi par la suite. Nous avons poursuivi par une commission parlementaire qui a fait en sorte qu'aux mois de septembre et octobre on a entendu tout près de 130 groupes venir nous parler du projet de loi tel qu'il avait été déposé.

Et parlons deux secondes de ce projet de loi tel qu'il avait été déposé, M. le Président. Ce projet de loi ? et je l'avais dit à la ministre à l'époque, je tiens à le répéter ? c'est un projet de loi basé sur des valeurs libérales, et nous n'avons aucun problème, au contraire, de l'appuyer. Au contraire, nous aurions aimé voir deux ou trois choses supplémentaires dans le projet de loi qui auraient fait en sorte que ça aurait été le reflet d'un vrai projet de loi libéral.

Et, M. le Président, si on regarde le projet de loi, ça fait quoi, au juste? C'est un projet de loi qui affirme un certain nombre de choses dans un préambule quant aux effets qu'a la pauvreté sur la société, sur les personnes, et qui prend ses distances quant à ces effets-là, déclare que ce sont des entraves à l'exercice de la liberté, à l'exercice de la pleine citoyenneté, et commence, par la suite, dans ses articles, dans son corps, de mettre sur pied une grille d'orientation pour les actions qui sont à venir par le biais des décisions et des actions gouvernementales, et identifie cinq champs prioritaires d'intervention et d'action que, je pense, ça vaut la peine de relire, M. le Président, parce que, fondamentalement, ce projet de loi, c'est un projet de loi d'orientation, ça vise à orienter les actions d'un gouvernement afin d'atteindre un objectif précis, qui est celui de lutter contre la pauvreté. Et, pour ce faire, il y en a cinq buts poursuivis qui le seront par le biais d'une stratégie qui sera élaborée suite à ce projet de loi ? parce que c'est ce qui est prévu ? et, de la stratégie, découlera un plan d'action.

Mais les buts poursuivis sont de prévenir la pauvreté et l'exclusion sociale en favorisant le développement du potentiel des personnes. Y a-tu une valeur plus libérale que développer le potentiel des personnes?

n(12 h 40)n

Renforcer le filet de sécurité sociale et économique. Même chose, le filet de sécurité sociale et économique, au Québec, a été bâti durant les 35 dernières années à partir des interventions des gouvernements, d'abord, libéraux, suivis par la suite par les gouvernements du Parti québécois, qui sont venus ajouter aussi d'autres pierres. Mais, je pense, on partage, à travers la collectivité québécoise, fondamentalement, un certain nombre de valeurs qu'on peut qualifier de valeurs libérales, pas du Parti libéral du Québec, de la philosophie libérale, qui est incarnée et qui est véhiculée sur la scène politique par le Parti libéral du Québec.

Troisièmement, M. le Président, on vise à favoriser l'accès à l'emploi et valoriser le travail. Donc, il y a là la notion évidente de la responsabilité de l'individu en équilibre avec le rôle de protection de l'État qu'on trouve exprimée à travers l'établissement de ce filet de sécurité sociale. Alors, cette notion d'équilibre ? bonne valeur grecque aussi, hein, si vous voulez ? équilibre, responsabilité de l'individu pour son propre développement, rôle de protection de l'État, alors c'est, encore une fois, une valeur qui nous trouve non seulement très à l'aise, mais très heureux de la retrouver dans le projet de loi.

On vise par la suite à favoriser l'engagement de l'ensemble de la société et d'assurer, cinquièmement, à tous les niveaux la constance et la cohérence des actions. Il est évident que, plus les gens vont participer à atteindre cet objectif à travers l'ensemble de la collectivité et de la société, plus ça va réussir. Plus les actions seront cohérentes et constantes, encore une fois, plus ce sera efficace. Alors, ça, c'est le coeur du projet de loi. Ça, c'est les cinq buts poursuivis.

Par la suite, on a procédé à se donner des moyens, dans le projet de loi initial, qui étaient la stratégie nationale, suivie d'un plan d'action, suivi des rapports de la ministre qui auraient été déposés à l'Assemblée nationale, M. le Président. Et nous avons entendu, comme je disais, tous ces groupes, qui nous ont fait un certain nombre de recommandations, et nous avons, de part et d'autre, présenté nos amendements pour démontrer comment est-ce qu'on envisageait les choses. Et, heureuse convergence dans le travail que nous avons fait en commission parlementaire dans l'étude article par article, la grande majorité des amendements des uns et des autres, tant les nôtres que ceux qui ont émané du parti ministériel, nous ont trouvés en accord. Nous nous sommes, d'un accord mutuel, donné comme objectif d'améliorer le projet de loi initial, de pouvoir faire en sorte que ce projet serait un instrument d'orientation efficace, par exemple, et le ministre en a fait référence, ajoutant une clause d'impact. Sage décision. Nous appuyons, nous suivons le gouvernement sur ce point, qui a pris l'initiative de présenter cet amendement. Ça va permettre effectivement une sensibilisation plus grande de la part de l'ensemble des ministres quant à l'impact de leurs décisions sur les personnes qui vivent des situations de pauvreté.

On nous a fait remarquer, par un certain nombre de personnes, que la clause d'impact parle seulement de l'impact sur le revenu des personnes et non pas nécessairement de leur situation. J'ose espérer que, dans l'analyse qui sera faite des impacts, c'est la globalité de la situation qui sera prise en compte. Et je suis convaincu que ce sera ainsi pour tous les ministres qui vont fournir des informations quant à leur décision, sous cet angle-là, M. le Président.

On a aussi présenté des amendements, de notre part, qui ont été reformulés, et, sur ce, je veux peut-être faire une parenthèse afin de véritablement remercier l'ensemble des officiers du ministère qui ont participé aux travaux de la commission, qui ont véritablement travaillé de façon extrêmement professionnelle, avec une bonne volonté évidente quant à essayer de rapprocher les parties en trouvant, des fois, les mots justes pour exprimer en termes légaux, en termes corrects, quant aux amendements proposés, la volonté qu'on exprimait afin qu'on puisse ultimement, je pense, sur la quasi-totalité des amendements, à deux ou trois exceptions près, voter ensemble pour que de façon unanime on améliore la loi.

C'est ainsi que le désir qu'on avait et qui manifestement a été partagé par le parti ministériel, d'inclure et de voir incluses dans la loi des cibles précises plutôt que de référer ça tout simplement à la stratégie nationale... Des cibles précises quant aux objectifs à atteindre au niveau... en termes de nombre de personnes vivant des situations de pauvreté ont été incluses dans la loi. Nous avons donc maintenant dans la loi une obligation, si vous voulez, à atteindre d'ici 10 ans un niveau qui ferait en sorte que le Québec serait parmi les sociétés industrialisées comptant le moins grand nombre de personnes pauvres, selon les méthodes de calcul reconnues sur le plan international, M. le Président.

Et on a ajouté à ça, pour que ça ne reste pas tout simplement un voeu exprimé mais qu'on se donne aussi un mécanisme de suivi plus pertinent, on a ajouté à ça une façon de pouvoir saisir les députés de l'Assemblée nationale, de saisir l'Assemblée nationale de cette question de façon périodique. Il ne s'agit pas, pour nous... Et c'est pour ça que je trouvais que c'était une excellente collaboration de la part des officiers du ministère. Ils ont trouvé une façon d'exprimer qui fait en sorte que, à partir des études qui sont faites par le comité consultatif, qui sont reprises par le ou la ministre, il y aurait dépôt à l'Assemblée nationale, pour examen en commission parlementaire pertinente de façon préalable à la décision de modifier, ou d'ajouter, ou d'améliorer le plan d'action. Préalablement à d'autres recommandations que le ou la ministre pouvait faire à son gouvernement, il y aurait eu... il y aura dorénavant la participation des parlementaires, et ce qui va aussi, je pense, dans le sens de valoriser le travail des parlementaires. Parce que, je le répète, s'il y a un enjeu qui est central à ce qu'on vise tous à faire ici, c'est bel et bien celui de lutter contre la pauvreté, d'améliorer les conditions de vie de nos concitoyens.

De la même façon, M. le Président, il y a eu d'autres amendements dont je n'ai pas le détail de tous ces amendements devant moi à l'heure actuelle. Mais, encore une fois, sur tous ces amendements, à l'exception de deux, nous avons pu voter ensemble. Je ne reviendrai pas avec insistance à ce moment-ci, M. le Président, sur les amendements qui nous ont divisés, je pense qu'on l'a fait hier. On a marqué le point de façon constante, durant tous nos travaux, quant au seuil minimal où nous estimions qu'il aurait fallu également identifier de façon concrète le barème minimal à partir duquel on pourrait commencer la démarche ou la marche vers la couverture des besoins essentiels, qui est un élément qui a aussi été introduit dans la loi, la reconnaissance, par exemple, qu'il y a un chemin à suivre quant à l'atteinte des besoins essentiels par le biais des prestations minimales, et la question de l'assurance médicaments. Je pense que le point a été marqué. Et je pense que c'est plus le temps aujourd'hui de souligner le fait que nous allons sortir d'ici avec une belle unanimité sur un enjeu fondamental. Nous avons, de part et d'autre, gardé nos différences et nos positions.

La ministre a terminé son discours en faisant un petit tour du côté souverainiste, en lançant le message habituel, traditionnel, qui commence à être assez fatigant. Et on a vu comment ça peut être drôle de voir quel genre d'effet ça peut faire quand on a un premier ministre qui se déchaîne, qui déchire sa chemise sur les demandes qu'il fait à l'opposition, sans savoir que c'était un peu impertinent parce que ça avait été déjà réglé. Je parle de la motion, par exemple, sur la question du gaz, qu'il a faite en période des questions...

Des voix: ...

M. Sirros: Bien, voilà! Voilà, voilà, ce que je veux dire, M. le Président. On a gardé, de part et d'autre, nos positions respectives parce que...

Une voix: Hors sujet.

M. Sirros: Bien, si c'est hors sujet, la ministre a été hors sujet parce que, quand la ministre, par exemple, nous parle du déséquilibre fiscal... Et de temps en temps elle a fait ça en commission parlementaire aussi, elle revenait sur le plaidoyer du déséquilibre fiscal, le méchant fédéral qui nous étouffe, le ci, le ça, etc. Je lui rappelle que nous sommes d'accord qu'il y a un déséquilibre fiscal, nous sommes d'accord qu'il y a de l'argent à aller chercher, mais nous estimons que, au lieu de constamment chercher des raisons pour faire des fausses guerres, si vous vous embarquiez dans un processus réel, de bonne foi, d'amélioration du fonctionnement, de construction des alliances avec nos partenaires, nos véritables partenaires, M. le Président, nous pourrions...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Quelle est votre question de règlement?

M. Simard (Montmorency): ...s'il vous plaît, l'article 211 qui traite de la pertinence des propos, s'il vous plaît. Je sais qu'il pourra trouver toutes sortes d'entourloupettes...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Simard (Montmorency): ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je suis debout. Je suis debout. Alors, j'attire votre attention, monsieur, de parler sur le projet de loi n° 112.

n(12 h 50)n

M. Sirros: M. le Président, si je fais cette référence, c'est parce que je me suis raccroché au discours de la ministre, qui terminait son discours avec un plaidoyer qui n'avait rien à faire de façon précise avec la loi. Mais elle prétendait que le déséquilibre empêchait de faire la pleine lutte à la pauvreté et que la solution, c'était de planter le drapeau aux Nations unies. Alors, si, ça, ce n'était pas...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je tiens à indiquer à cette Assemblée que la parole est au député de Laurier-Dorion, et je vous abstiendrais de faire des commentaires, là, s'il vous plaît. Si vous voulez poursuivre et terminer.

M. Sirros: M. le Président, je comprends que les gens veulent juste entendre leur façon de penser, ils veulent vivre dans leur petite bulle qui... D'ailleurs, qu'ils continuent. Si vous voulez, continuez comme vous êtes partis là. Je pense que la population va vous donner la réponse qu'il vous faut. Parce que je veux juste terminer sur cet aspect-là, en vous rappelant que nous sommes, de notre côté... Si on partage l'objectif qui est, effectivement, de rétablir un équilibre dans la fiscalité, nous estimons que ce serait beaucoup plus efficace qu'au lieu de partir avec les guerres de chiffons rouges, les guerres de drapeaux, les guerres, les grands déchirements de chemise comme ceux qu'on a constatés ici... un travail efficace de construction des alliances, de propositions concrètes quant à l'amélioration du fonctionnement de la fédération, qui doit partir à partir d'une croyance de l'autre côté que ce qui est avancé, c'est basé sur la bonne volonté, ce qui manifestement ne peut pas être votre cas, je le comprends. Personne, de l'autre côté, parmi nos partenaires, ne va croire que ce que le Parti québécois va proposer pour le fonctionnement du système fédératif peut être pour le bien de cette fédération à laquelle manifestement vous ne croyez pas.

Mais, ça étant dit en réponse à ce que la ministre disait, hein, je veux revenir pour souligner que nous sommes quand même à un point où, en dépit ? et c'est ce que j'essayais d'établir ? en dépit de ces différences que nous pouvons avoir quant à certaines orientations fondamentales de chacune de nos formations politiques, nous pouvons quand même partager l'objectif de lutter contre la pauvreté, de s'entraider, finalement, d'améliorer ces instruments-là et d'essayer d'arriver à un point où on peut tous reconnaître qu'il y a des valeurs qui sont partagées à travers tous les groupes de la société québécoise, qui sont des valeurs qui nous ont bien servis depuis les années des temps modernes, M. le Président.

Et c'est dans ce sens-là que nous sommes heureux de constater qu'aujourd'hui nous allons adopter ce projet de loi qui a eu un long cheminement et qui aboutit aujourd'hui, à la veille de Noël à peu près, avec une unanimité en cette Chambre qui va nous permettre de faire un petit pas de plus dans la reconquête auprès de nos citoyens de la crédibilité, de la valorisation que nous voulons qu'ils sachent que nous avons quant aux objectifs que, fondamentalement, on partage. On ne fait pas de la politique pour le plaisir de faire de la politique. Tous ici, de notre côté, et, j'en suis certain, c'est la même chose de l'autre côté, nous partageons l'objectif fondamental, par notre action ici, qui est l'amélioration des conditions de vie de nos concitoyens. Et, en mon nom, au nom de mon chef, au nom de notre formation politique, nous réaffirmons que c'est l'objectif fondamental du pourquoi nous sommes ici. Et, M. le Président, avec ça, bonne adoption de la loi n° 112 et bonne suite des choses!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Laurier-Dorion. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Berthier, si vous voulez que je suspende compte tenu de l'heure, si vous avez... ou si vous voulez faire votre...

Mme Grégoire: ...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, Mme la députée de Berthier, la parole est à vous.

Mme Grégoire: Je vais être brève et précise.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, mais, écoutez, vous avez droit à 20 minutes, là, il n'y a pas de problème avec ça, mais... Ah, vous avez droit à 10 minutes. C'est vrai, on est en troisième lecture. Mme la députée de Berthier, la parole est à vous.

Mme Marie Grégoire

Mme Grégoire: M. le Président, merci. Il me fait plaisir d'intervenir à ce moment-ci. Effectivement, on est intervenu à plusieurs reprises durant cet automne sur le projet de loi n° 112: à l'adoption du principe; on a rencontré les gens en commission parlementaire; on s'est rencontré par la suite à l'étude article par article. Et je pense que, tout au long, on a cheminé, on a bonifié, on a amélioré ce que la ministre a appelé sa colonne vertébrale, mais je pense que c'est la colonne vertébrale, je pense, de tous. C'est ça, on a amélioré ce projet de loi de façon à en faire un projet qui crée l'unanimité entre les parlementaires, et je pense que ça, c'est important pour la suite des choses. C'est important, puisque les gens qui vivent des situations de pauvreté et d'exclusion savent que, tout au long, il y aura, dépendamment de la philosophie, dépendamment des projets de société, mais il y aura quand même la volonté et l'engagement de tous les parlementaires dans cette Chambre de travailler à cet objectif qui est fort ambitieux mais qui est d'avoir... donc, d'être la société où on retrouve les gens vivant le moins en situation de pauvreté.

C'est un projet de loi intéressant, puisque justement il permet d'engager les efforts de tous les intervenants. Or, c'est un nouveau partage de responsabilités, moi, je vois ça comme un nouveau partage de responsabilités entre l'État, la communauté et les citoyens. On le dit, on le dit bien, on veut s'assurer que les gens puissent se prendre en main, que les gens puissent obtenir une certaine quête d'autonomie. Parce que, pour moi, sortir de la pauvreté, c'est d'atteindre une certaine autonomie. Et les gens qui sont venus nous voir en commission parlementaire nous ont dit qu'ils avaient cette envie-là, qu'ils avaient ce goût-là, qu'ils avaient besoin d'un coup de main pour le faire, qu'ils avaient besoin d'accompagnement mais qu'ils avaient le goût de contribuer à l'essor du Québec. Et le projet de loi met justement l'emphase sur différents moyens mais aussi sur le partage des responsabilités et établit bien que l'État a des responsabilités mais la communauté aussi, la communauté, comme tantôt on y faisait référence avec la motion sur les droits de la personne, où des organismes travaillent dans des milieux à trouver des solutions qui correspondent bien aux besoins de ces milieux-là et accompagnent les gens dans leur quête d'autonomie. Alors, je pense que ça, c'est quelque chose de positif pour le Québec, que de reconnaître cet apport-là, que de reconnaître ce travail-là qui se fait au quotidien, souvent dans l'ombre. Moi, je les appelle mes héros du quotidien, ces gens qui oeuvrent, qui travaillent dans nos communautés et qui font en sorte qu'il y a des gens qui se sortent de situations difficiles.

Puis, on en parle aujourd'hui, c'est particulier parce que 112, l'adoption de 112 arrive à la période des fêtes. C'est une période où on parle de solidarité un peu plus, on en entend plus parler. Ce matin, on avait une de nos ministres qui passait, qui faisait La guignolée parmi nous. Alors, c'est une période où on est...

Des voix: Bravo!

Mme Grégoire: Oui, c'était très bien, je pense qu'on a vu la solidarité des parlementaires. Mais c'est au quotidien que la pauvreté se vit. Et, en période des fêtes, on en parle, on voit les Moisson, on voit... Mais c'est au quotidien que cette situation-là se vit, et il ne faut pas l'oublier. Parce que, souvent, on a tendance, en période des fêtes, à être généreux, et là il faut que ce geste-là puisse avoir justement une propension au cours des 364 autres jours. Et ce qui est intéressant, c'est le travail des organismes qui, justement, eux, prennent la relève, avec la générosité des Québécois et des Québécoises, prennent la relève et permettent à des gens de pouvoir s'en sortir.

n(13 heures)n

Donc, je pense que, dans les choses qu'on a atteintes dans ce projet de loi là, c'est la souplesse, la souplesse, puisque ? je crois que, du côté gouvernemental, on l'a mentionné ? il va falloir offrir la possibilité aux gens de s'en sortir sans même qu'ils fassent partie d'une petite case et qu'ils correspondent aux critères d'un programme très serré. Souvent, on l'a vu, la ministre y faisait référence, des gens qui vivent des situations problématiques temporaires, qui pourraient avoir besoin d'un support temporaire mais qui doivent effectivement prendre toutes leurs économies, vendre leurs acquis, ou laisser partir leurs acquis plutôt, pour pouvoir avoir ce soutien-là. Alors, je pense que, ça, c'est un grand pas, le pas de la souplesse, c'est un grand pas qu'on fait, donc, d'avoir des mesures adaptées davantage aux besoins de chacun des citoyens parce que, lorsqu'on vit l'exclusion, c'est vraiment une situation qui demande des mesures particulières à un individu. Alors, je pense que, ça, c'est une chose qui... Cette flexibilité-là, je pense, va permettre à plus de gens de s'en sortir, à plus de gens de se rapprocher du marché du travail et d'avoir une estime de soi qui va leur donner des ailes et qui va leur permettre de contribuer au projet de prospérité du Québec.

Donc, moins de structures aussi, c'est quelque chose qu'on a acquis à travers le projet de loi. L'Observatoire va être plus léger, en tout cas, c'est plus léger comme structure. Alors, je pense qu'on a fait un petit peu de millage là-dessus. C'était une des préoccupations qu'on avait. Un barème plancher, moins de pénalités avec d'autres projets de loi qui y sont reliés, une clause d'impact, une clause d'impact que je considère quand même importante, puisqu'elle permettra d'avoir une action horizontale, je pense, à travers le gouvernement.

Alors, je pense que c'est un projet de loi où je pense que les Québécois peuvent être fiers parce que c'est un projet de loi qui va permettre d'aller chercher, d'aller motiver ceux qui sont exclus aujourd'hui, de leur tendre la main, puis qui va aussi leur donner de l'espoir, parce que souvent c'est juste ce petit bout-là que ça prend. Donc, on va pouvoir leur donner de l'espoir. Et c'est un projet qui arrive, je pense, à point nommé, puisque, on l'a dit, c'est la période des fêtes et c'est une période où l'espoir, je pense, est garant pour l'avenir. Alors, ça nous fera plaisir d'appuyer ce projet de loi là et ça nous a fait plaisir d'y contribuer. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Berthier. Et, sur ce, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

 

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour. Nous en étions à l'article 41. Mme la ministre de la Solidarité sociale propose l'adoption du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Est-ce qu'il y a encore des intervenants? M. le député de Frontenac, je vous cède la parole.

M. Marc Boulianne

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Je suis très heureux, M. le Président, parce que, comme l'a souligné la ministre, c'est un événement historique, à mon avis, parce qu'une telle loi démontre encore la volonté de notre gouvernement de bien se positionner dans la modernité en luttant, par voie législative, contre la pauvreté et contre l'exclusion. Dans un premier temps, permettez-moi, M. le Président, de féliciter la ministre, de féliciter toute son équipe ainsi que la commission et tous ceux qui ont collaboré pour, encore une fois, faire preuve de patience, de courage et de détermination pour mener à bon port un projet de loi d'une telle envergure, et, on l'a mentionné tout à l'heure, d'autant plus, M. le Président, que nous sommes à la période des fêtes. Alors, c'est un très beau cadeau de Noël qu'on donne à la population.

Alors, ce projet de loi, M. le Président, contient trois grands principes qui serviront à atteindre, j'en suis convaincu, les objectifs qui sont de créer une société plus juste, une société plus équitable et en fait une société de tolérance zéro en ce qui concerne la pauvreté.

Le premier principe que nous y retrouvons, c'est l'institution d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Vous savez, M. le Président, quand on veut faire une bataille, quand on veut gagner la guerre, évidemment, c'est de se définir une stratégie, et c'est de cette façon qu'on peut réussir à marquer des points, avec un plan précis de stratégie. C'est ce que le projet de loi fait au tout départ.

Une stratégie, évidemment, n'est pas faite de n'importe quelle façon. On a une stratégie qui met à contribution l'ensemble des intervenants de la société québécoise. On a les partenaires économiques, les organismes communautaires, les mouvements. Alors, toute la collectivité est mise à profit dans cette stratégie qui est basée, comme le soulignait la ministre, sur l'écoute de la population, donc qui est efficace si l'on considère d'autant plus la grande quantité de mémoires qui a été présentée, l'intérêt que ce débat-là a suscité dans nos comtés. Je viens de rencontrer encore des groupes tout à l'heure, M. le Président, qui nous parlent de la loi contre la pauvreté. Pour eux, c'est important, c'est important qu'enfin un gouvernement va légiférer pour éliminer la pauvreté. Alors, dans ce premier principe, donc de stratégie, nous avons là une méthode qui va donner des résultats et qui sera efficace.

Le deuxième principe que l'on retrouve et qui a été d'ailleurs élaboré par la ministre, c'est un plan d'action, alors un plan d'action qui sera déposé pour atteindre des buts, encore une fois, très précis. D'abord, la réduction des inégalités. On vit dans une société, il ne faut pas se le cacher, M. le Président, dû à plusieurs facteurs, plusieurs raisons, où l'on retrouve des inégalités, une partie de la population. Alors donc, il faut atteindre cet objectif-là.

Deuxième objectif aussi, toujours dans ce principe: l'amélioration de la situation économique et sociale des familles. Alors, je pense que chaque député a eu des cas de comté très précis. On travaille sur ces dossiers-là, et les personnes, quel que soit le statut des familles, nous demandent évidemment d'améliorer la situation économique et sociale. Il n'y a pas juste ça, M. le Président, mais c'est quand même important pour régler le problème de la pauvreté.

Et il y a une chose aussi, un autre principe qui est rattaché à ça, c'est le développement d'un sentiment de solidarité. C'est extrêmement important, pour combattre, pour faire la lutte à la pauvreté, d'être solidaires, d'avoir, si vous voulez, une solidarité entre toute la population, autant ceux qui possèdent les richesses que ceux évidemment qui n'ont pas cette richesse-là. Et, comme je le mentionnais tout à l'heure, la pauvreté au Québec, dans les comtés, je pense qu'on a été confrontés à ça. Et là je suis convaincu, maintenant, qu'un tel projet de loi va nous aider à intervenir plus efficacement et à combattre la pauvreté.

Et je reprends les paroles de la ministre tout à l'heure: La pauvreté va se combattre par la mobilisation nationale, et évidemment de tous les intervenants, comme je disais tout à l'heure, qui sont concernés par la justice sociale. Et ce n'est pas simplement un mouvement régional ni non plus un mouvement national ? c'est heureux que ce soit un mouvement national ? mais c'est un mouvement de la lutte à la pauvreté qui s'inscrit dans un mouvement universel d'épanouissement de tous les êtres humains, de tous les êtres qui doivent avoir accès à la richesse, qui doivent avoir accès à l'égalité des chances.

Il y a un troisième principe, M. le Président, qui consiste à mettre sur pied un comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. Alors, ça, c'est important, c'est une structure qui pourra éventuellement... qui sera secondée par l'Observatoire. Alors, dans les consultations que j'ai eues et des personnes qu'on a rencontrées, l'Observatoire, c'est quelque chose, c'était quelque chose d'important pour au moins présenter... non seulement conseiller la ministre, mais aussi présenter, proposer des initiatives de financement pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sur le terrain. Vous savez, M. le Président, ce n'est pas tout de faire une loi, d'énoncer des grands principes, il faut qu'on puisse appliquer cette loi-là. Il faut aussi, sur le terrain, qu'on ait des structures qui puissent non seulement vérifier, comme le projet de loi le prévoit, mais qui puissent aussi contribuer à enrayer complètement la pauvreté.

Nous avons donc, M. le Président, un projet de loi qui va, si vous voulez, rendre service encore à une partie de la population, et, quand je dis rendre service, c'est rendre sa dignité à la population, à une partie de la population, en s'attaquant d'une façon systématique aux contraintes qu'impose la pauvreté. Il n'y a rien de pire, M. le Président ? je pense que vous en avez entendu parler aussi ? que d'être exclu d'une société pour des raisons strictement économiques ou encore pour des raisons de travail. Je pense que notre société doit contribuer à donner une chance égale à tout le monde, et un projet de loi d'une telle envergure, comme je mentionnais tout à l'heure, est là pour justement imposer des règles de justice à toute notre société.

Alors, en terminant, M. le Président, on aura beau, comme députés, régler des dossiers politiques importants, on aura beau régler des dossiers économiques, mais notre travail sera toujours incomplet et notre bilan ne pourra pas être positif si nous ne réglons pas le cas de la pauvreté, si nous ne gagnons pas la guerre contre la pauvreté. Alors donc, c'est un projet de loi avant-gardiste, c'est un projet de loi qui met encore le Québec au rang des nations modernes. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Frontenac. La prochaine intervenante sera Mme la députée de Mercier. Mme la députée.

Mme Nathalie Rochefort

Mme Rochefort: Merci, M. le Président. C'est un plaisir pour moi d'intervenir sur le projet de loi qui va être rendu concret dans quelques heures, je l'espère, projet de loi visant à éliminer la pauvreté du Québec. C'est un pas en avant. C'est un pas en avant pour toutes les personnes démunies du Québec, c'est aussi un pas en avant dans leur intégration sociale et économique. Mais je me dis aussi que je suis un petit peu déçue. On n'a pas encore le retour à la gratuité des médicaments pour les personnes âgées et les personnes démunies. Il y a encore des personnes qui vont avoir à faire le triste choix entre se nourrir ou prendre des médicaments. On n'a pas mis en place de processus non plus pour évaluer qu'est-ce que serait un barème plancher.

n(15 h 10)n

Mais le travail immense effectué par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté, depuis cinq ans, démontre une chose, c'est que les gens, les citoyens du Québec sont tenaces. Et je suis convaincue qu'on va continuer à en entendre parler et que, tant et aussi longtemps qu'il va y avoir des obstacles à l'intégration sociale et économique des gens, on va avoir des groupes de citoyens, des groupes communautaires qui interviennent et qui vont venir nous dire: Aïe! La loi est bien, mais on devrait faire ça de plus, on devrait en mettre un petit peu plus. Donc, une étape à la fois, un petit pas à la fois.

La lutte à la pauvreté, oui, c'est bien, une loi, mais, comme je le dis souvent, toutes les lois ne valent rien si, comme députés, à la base, on ne prend pas nos responsabilités, on ne s'assure pas que les citoyens démunis qui ne la connaissent pas, la loi... Dans la vraie vie, là, je ne connais pas beaucoup de personnes qui vont prendre le temps de le lire, le texte de loi. Mais notre job de député, si on la remplit correctement, selon les normes, c'est aussi d'accompagner les citoyens démunis dans leurs revendications de leurs droits, de supporter les groupes de défense de droits qui les accompagnent au quotidien. C'est important.

Mais c'est une responsabilité aussi collective. C'est d'envoyer aussi le message aux entrepreneurs, aux citoyens qui ne sont pas démunis aussi, que eux aussi ont une part à faire pour lutter contre la pauvreté. Ce n'est pas seulement de donner dans le cadre de La guignolée ? c'est important, mais ça, je vais y revenir ? mais c'est aussi d'ouvrir sa porte, de dire: Aïe! Ce n'est pas parce que tu es démuni que tu ne vaux rien. Tu as une valeur et tu es capable de contribuer à notre société, que ce soit de façon bénévole à travers des groupes communautaires... Je vous rappellerai, M. le Président, que les heures de bénévolat au Québec équivalent, selon certains, à 104 000 emplois à temps plein. C'est quand même une fois et demie la fonction publique. 104 000 emplois à temps plein, ça représente plus de 3 millions de bénévoles; 3 millions de bénévoles, c'est des gens qui travaillent, oui, mais il y a beaucoup de personnes démunies qui s'impliquent dans notre société. Il y a des aînés, il y a des enfants. C'est toutes les couches de la société qui sont solidaires et qui se donnent la main pour améliorer le Québec dans lequel on vit et dans lequel nos enfants vont vivre plus tard.

Je trouve ça symbolique qu'aujourd'hui on fasse l'adoption finale du projet de loi, pour une loi visant l'élimination de la pauvreté, surtout quand on sait qu'aujourd'hui c'est La guignolée, où tous les médias se sont mobilisés pour organiser une grande collecte de nourriture et d'argent au profit de Moisson Montréal, la Société Saint-Vincent-de-Paul, Jeunesse au soleil. Je trouve ça très symbolique, parce que je me dis: On fait un geste de solidarité, on pose aujourd'hui un geste de solidarité comme parlementaires. Notre collègue la ministre déléguée à l'exclusion nous a d'ailleurs approchés tous ce matin pour venir collecter un peu de sous. Elle a encore sa petite chaudière avec elle. Et c'est symbolique, mais en même temps c'est très concret. La pauvreté, nous la vivons tous dans nos comtés à tous les jours, quand nous y sommes. Et, même quand on est à Québec, à chaque jour on voit des personnes démunies, on entend leur message. Ils nous appellent, ils nous écrivent, et nous sommes là pour eux. Et, encore une fois, grâce à notre collègue, on peut poser un geste très concret. Merci beaucoup.

Ensuite, que dire de plus. Les organismes font un travail colossal dans la lutte à la pauvreté. Je vais juste vous citer l'exemple de Jeunesse au soleil, qui est un de mes exemples préférés, qui a débuté il y a une cinquantaine d'années ? 50 ans dans deux ans exactement ? qui sert maintenant 2 000 à 3 000 familles à chaque mois, donc leur fait des sacs de nourriture, qui leur apporte le minimum de base, habillement aussi, et qui a conclu des ententes pour pouvoir fournir du mazout aux personnes démunies lorsque arrivent les grands froids ? c'est des gestes concrets qui, comme ils disent eux-mêmes, se voulant à l'écoute de la communauté... ? a instauré un programme d'aide pour l'achat de médicaments pour les personnes âgées. Pour avoir visité le service, ça marche. C'est des gestes concrets qui partent d'une réalité, et nul autre mieux que les groupes communautaires peut s'adapter rapidement pour supporter les personnes démunies. Parce que, comme gouvernement, on vient de le voir, on a travaillé depuis plus de deux pratiquement sur le projet de loi. Deux ans, c'est long dans la vie d'une personne démunie qui a peut-être 6 000 $ par année pour vivre. Au quotidien, dans la vraie vie, le petit sac de nourriture où on retrouve un pain, un peu de beurre de peanuts souvent, quelque part, ça permet de manger pendant la semaine.

Donc, je profite de la journée aussi de La guignolée pour saluer le travail colossal effectué par les groupes communautaires et saluer l'adoption aussi du projet de loi plus tard, peut-être, aujourd'hui. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie bien, Mme la députée de Mercier, pour vos bonnes paroles. Et je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre ? j'ai toujours de la difficulté à dire exactement ? à la Pauvreté ? c'est ça? ? Lutte à la pauvreté. C'est bien. Alors, Mme la ministre.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Alors, merci, M. le Président. Alors, au cours des dernières semaines, un grand nombre de femmes et d'hommes sont venus témoigner, lors de l'étude en commission parlementaire du projet de loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, des actions à poser et des préoccupations à considérer dans notre lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale: 167 mémoires reçus, 132 entendus; près de 100 heures d'écoute, d'auditions; une tournée dans toutes les régions du Québec; des rencontres thématiques avec plusieurs organisations, syndicales, communautaires, patronales; religieux, jeunes et bien d'autres, un groupe-conseil, participants de la société civile; des rencontres, des échanges, des témoignages; des gens en situation de pauvreté qui se sont exprimés. Et, depuis plusieurs mois, avec volonté, nous avons poursuivi nos travaux à travers un processus démocratique qui a toujours caractérisé le Québec.

Ce projet de loi appelle à la cohérence, à la concertation et à l'engagement des différents acteurs de la société québécoise, car, faut-il le rappeler, la lutte contre la pauvreté et l'exclusion ne se limite pas à l'État, la lutte contre la pauvreté et l'exclusion concerne tout l'ensemble de la société. De tendre à un seul et même objectif vers lequel toutes les Québécoises et tous les Québécois doivent se mobiliser, c'est un Québec sans pauvreté, une société où personne n'est laissé de côté.

J'aimerais corriger le porte-parole de l'opposition, le député de Laurier-Dorion, qui nous dit que cela ne fait que cinq mois ou quelques mois que nous préparons une loi. Je tiens à lui rappeler particulièrement la rencontre que nous avons eue avec le premier ministre, avec le Collectif, au début de son mandat comme premier ministre, c'est-à-dire en mars 2001, voilà déjà près de deux ans. J'étais présente, et il a été très clair... de l'ouverture du premier ministre à une loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion.

Il est important, pour bâtir une société plus juste et plus équitable, que les efforts conjugués du gouvernement mais également des citoyennes et des citoyens soient rassemblés. Afin de favoriser l'engagement de l'ensemble de la société, le projet de loi prévoit favoriser la participation citoyenne pour que les personnes concernées par la pauvreté ou celles qui les représentent trouvent leur place dans les mécanismes qui seront conçus pour développer les actions et les mesures à mettre en oeuvre dans le cadre de la stratégie. Il revient à l'État, dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et de l'exclusion sociale, de créer les conditions de cette mobilisation en faveur des plus démunis en proposant des moyens pour soutenir la participation de toutes et de tous. Le projet de loi n° 112 a donc été renforcé pour y inclure, de façon plus évidente, l'importance de la participation citoyenne.

Je ne peux à ce titre passer sous silence le travail du Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté qui, depuis plusieurs années, a mobilisé un grand nombre d'acteurs sociaux. On se rappellera le dépôt, en cette Chambre, d'une pétition de plus de 200 000 noms en faveur d'une loi. Cette participation citoyenne s'effectue également par l'entremise de l'action communautaire et bénévole des Québécoises et des Québécois qui oeuvrent auprès des plus démunis de notre société. À cet égard, le texte de loi met dorénavant en évidence l'importance que le gouvernement et toute la société accordent à la valeur de l'action communautaire et de l'action bénévole.

n(15 h 20)n

J'ai pu constater, lors des consultations publiques en commission parlementaire, que l'action bénévole en matière de soutien aux personnes les plus démunies se situe souvent au niveau de l'aide alimentaire. Plusieurs de ces groupes et personnes entendus lors des auditions publiques nous ont fait part de l'insécurité alimentaire à laquelle sont confrontées maintes personnes en situation de pauvreté. En effet, des individus et des familles s'inquiètent de ne pouvoir se nourrir suffisamment, doivent composer avec une moins grande variété d'aliments et ont un pouvoir d'achat limité. Il va sans dire que la sécurité alimentaire est très importante dans une société comme la nôtre qui se donne les moyens pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est pourquoi nous avons apporté les modifications nécessaires au projet de loi pour faire en sorte d'y inscrire la sécurité alimentaire.

Un nombre considérable de personnes et de groupes entendus en commission parlementaire ont jugé de première importance la prise en charge par les collectivités elles-mêmes, particulièrement sur le plan local, des mesures et des actions visant à faire reculer la pauvreté et l'exclusion dans leurs communautés. Le Rendez-vous national des régions a permis à notre gouvernement de manifester de façon concrète le choix qu'il fait de travailler en partenariat avec les communautés locales et régionales, respectant ainsi les priorités de développement et les initiatives déterminées par ces dernières. Pour assurer la continuité et la complémentarité de nos interventions en faveur des collectivités, le projet de loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale privilégie le soutien aux initiatives locales et régionales qui seront développées et mises en oeuvre dans le contexte de la stratégie nationale inscrite dans ce projet de loi.

À cette fin, le gouvernement du Québec a prévu la création d'un fonds spécial, lequel se nomme maintenant le Fonds québécois d'initiatives sociales. En collaboration avec les villes et les MRC, ce nouveau fonds permettra l'émergence de stratégies locales de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui renforceront les efforts de développement déjà initiés dans les collectivités. En effet, l'enjeu de la pauvreté est déjà très présent dans les planifications stratégiques régionales. D'ailleurs, plusieurs régions ont déjà conclu des ententes portant sur le développement social dans le cadre des pactes ruraux. Dans cet esprit et en continuité avec ces initiatives, le Fonds québécois d'initiatives sociales soutiendra l'action concertée des acteurs locaux et permettra d'accroître les efforts fournis par les villes et les MRC afin d'y associer les personnes touchées par la pauvreté. Il s'agit d'une préoccupation qui a été maintes fois soulignée par les groupes et les personnes qui se sont présentés en commission parlementaire.

Ainsi, les régions détermineront elles-mêmes les priorités d'action en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, établiront un consensus autour des territoires d'intervention prioritaires et seront responsables de la gestion d'une enveloppe destinée à soutenir les actions à l'échelle de la région. Sur les territoires d'intervention prioritaires identifiés par les CRD, les MRC concernées et leurs partenaires élaboreront des stratégies locales de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Selon les scénarios envisagés, une enveloppe financière sera destinée à la mise en oeuvre des ententes qui seront signées avec les partenaires. La souplesse des utilisateurs du fonds, telle que souhaitée par plusieurs groupes et organismes, sera respectée. Dans le cas des grandes villes, des stratégies locales dans les arrondissements prioritaires seront élaborées et viendront s'inscrire dans les contrats de ville. Le plan d'action qui sera déposé dans les 60 jours suivant l'entrée en vigueur de la loi sera alors l'occasion de dévoiler les modalités financières du fonds.

Enfin, la dimension locale et régionale de la lutte contre la pauvreté sera prise en compte dans les mécanismes de reddition de comptes. L'Observatoire de la pauvreté que le projet de loi propose d'instituer sera chargé de développer des indicateurs qui tiendront compte, dans la mesure du possible, de la réalité propre à chaque région en matière de pauvreté. Cette façon de faire nous permettra de mesurer de façon plus détaillée le chemin parcouru et de réajuster le tir, s'il y a lieu, dans les régions ou les territoires où la pauvreté continuera de se concentrer.

Vous me permettrez, M. le Président, de faire des remerciements. D'abord, à ma collègue ministre de la Solidarité sociale et toute son équipe ainsi qu'à ma collègue secrétaire de la Condition féminine et toute son équipe aussi également; mais aussi les personnes et les organismes de toutes les régions du Québec qui oeuvrent auprès des démunis, les témoignages de toutes ces personnes vivant des situations difficiles, qui nous ont livré leur grande solitude; le travail rigoureux du Collectif pour une loi visant à éliminer la pauvreté et tous ses partenaires; toutes les personnes également et groupes venus exposer leur mémoire en commission parlementaire.

Mon équipe de cabinet, bien sûr, qui s'est donnée avec passion, avec une grande intensité à l'ouvrage, d'un bel esprit de création, de solution et d'adaptation et la ténacité à l'atteinte du résultat et à me soutenir avec les hauts et les bas qui, depuis deux ans... à une démarche qui est si ambitieuse et si porteuse. Les autres équipes de cabinets ministériels qui sont venues aussi soutenir toute cette démarche.

Bien sûr, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale ? ma collègue la ministre d'État l'a souligné tout à l'heure ? ces femmes et ces hommes travaillant dans l'ombre du sous-ministre, à l'équipe de direction des politiques, une petite équipe extraordinaire, efficace, d'une ouverture d'esprit à cet ambitieux défi d'une stratégie et d'une loi avec ses comparatifs à travers le monde et cette cohésion québécoise devant ce phénomène de la pauvreté et ses multiples facettes.

Le caucus des députés ministériels et, principalement, le groupe de députés qui ont particulièrement participé étroitement à la démarche étant le comité de députés aviseur à la solidarité sociale, qui ont éclairé les débats, alimenté la réflexion et guidé les actions. De même que les députés de la commission des affaires sociales qui, eux aussi, par leur travail rigoureux, ont permis la réalisation de nos objectifs.

Et, évidemment, les militants du Parti québécois parce que le Parti québécois a avancé la cause par des résolutions et des prises de position lors de nos conseils nationaux et lors de nos forums thématiques.

Et, bien sûr, le premier ministre du Québec qui a cru depuis le début, qui nous a confié son désir de faire de la lutte à la pauvreté le même combat que celui de l'emploi et du développement économique du Québec et de livrer ce combat avec cette équipe ministérielle.

Alors, le projet de loi visant à lutter ? en terminant, M. le Président ? contre la pauvreté et l'exclusion sociale démontre bien que le Québec prend les moyens nécessaires pour s'attaquer au problème de pauvreté et d'exclusion sociale. L'adoption de ce projet de loi fera du gouvernement du Québec un chef de file mondial en matière de pauvreté et d'exclusion, puisqu'il les inscrit de façon permanente dans la législation avec nos collègues de l'opposition.

Nous vivons présentement un moment historique, important, socialement novateur et prometteur, qui invite à une grande solidarité québécoise. Nous remercions l'opposition à cet effet.

Le Vice-Président (M. Brouillet): En conclusion, Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme Léger: Après une stratégie de lutte contre la pauvreté et l'exclusion, une loi et un plan d'action, quoi de mieux que de s'offrir d'ici peu un pays? Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.

M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, à mon tour de participer au débat sur l'adoption du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, Bill 112, Mr. Speaker, An Act to combat poverty and social exclusion.

M. le Président, comme ont indiqué plusieurs des députés ici, en cette Chambre, l'Assemblée nationale aujourd'hui, probablement, va adopter une loi-cadre dont l'objectif est de lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il restera une étape, la sanction par la lieutenant-gouverneur, qui suivra, j'imagine, dans les jours qui suivent. Ce processus, M. le Président, l'adoption aujourd'hui, je ne dis pas que c'est la fin, parce que c'est la fin d'un processus législatif, mais ce n'est pas la fin évidemment de la lutte contre la pauvreté. Mais c'est la fin d'un processus législatif qui date de plusieurs années.

On peut retourner aux initiatives d'il y a deux ans, un peu plus, trois ans, amenées par le Collectif pour la loi sur l'élimination de la pauvreté. On se souvient d'une pétition de 200 000 noms, on se souvient... Moi, je me souviens, M. le Président, du Parlement de la rue ? j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité du revenu à ce moment-là ? où on était convié à un Parlement de la rue qui a été établi en face de l'Assemblée nationale, M. le Président, pour discuter des questions qui touchent les personnes qui vivent dans la pauvreté, comment est-ce qu'on peut améliorer leur sort, comment est-ce qu'on peut diminuer l'écart entre le 20 % de la population plus riche puis le 20 % de la population plus pauvre. Alors, c'est un processus qui est en marche depuis un certain nombre de temps. Évidemment, tout le travail colossal qui a été fait par la commission des affaires sociales, les consultations.

n(15 h 30)n

Moi, je tenais à m'exprimer aujourd'hui, M. le Président, pour deux raisons, parce que je prends beaucoup d'inspiration, je le dis très humblement, de mon collègue le député de Laurier-Dorion qui a déjà une longue carrière politique faite. Élu en 1981 pour la première fois, alors ça fait 21 ans, ici, à l'Assemblée nationale. Il a occupé des postes importants: il était ministre dans le temps de M. Daniel Johnson, fils. Mais, M. le Président, ce qui l'anime depuis un certain nombre de mois, c'est toute la question de la justice sociale, de la solidarité sociale et le principe qu'on partage, je pense, en tout cas je l'espère, le principe, comme hommes et femmes politiques, de vouloir améliorer le sort de nos concitoyens. C'est pour ça que je suis venu en politique. Je pense que c'est la raison principale qui devrait nous animer comme politiciens, ce désir d'améliorer le sort de nos concitoyens.

Eh oui, M. le Président, le projet de loi n° 112 établit un cadre législatif, énonce l'avenir d'une stratégie nationale. Je comprends, M. le Président, que le Collectif et ces milliers et milliers de bénévoles qui ont travaillé sur leur propre loi sont généralement satisfaits. Et l'opposition officielle appuie le projet de loi.

Mais je tenais également à participer dans le débat, M. le Président, parce que j'ai reçu, le 2 décembre, à mon bureau de comté une lettre qui a été envoyée par le pasteur Claude Caron de la paroisse Notre-Dame-de-Grâce, également par Claire Doran, présidente du conseil de pastorale, et Geneviève Hébert, présidente de Justice et solidarité de la paroisse Notre-Dame-de-Grâce. Vous le savez, M. le Président le comté de Notre-Dame-de-Grâce a une longue tradition d'entraide, d'action bénévole, et, à la paroisse Notre-Dame-de-Grâce, ils ont un comité Justice et Solidarité qui travaille depuis maintenant des mois, sinon des années, sur toute la question de la lutte contre la pauvreté.

Alors, ils m'ont demandé dans la lettre... et j'ai reçu une délégation lundi de cette semaine: «Nous aimerions recevoir des nouvelles de l'appui que vous apporterez au projet de loi n° 112 dans les jours et les semaines qui viennent.» Alors, je réponds à leur demande, M. le Président. Je dis: oui, nous allons appuyer le projet de loi n° 112; c'est une amélioration sur la situation actuelle.

Il y a, par contre, M. le Président, des déceptions. Et d'ailleurs, dans la lettre de la paroisse, ils me demandent comme député d'amener des amendements, d'appuyer des amendements qui bonifieront le projet de loi, entre autres... Oui, c'est trop tard... si c'est trop tard. Le député qui a voté contre l'amendement pour établir une prestation minimale, de fixer une prestation minimale, oui, c'est malheureusement trop tard.

Mais, M. le Président, dans cette lettre, ils me demandent de regarder la question de la gratuité des médicaments, ce que nous avons fait de ce côté, qui a été rejetée par le gouvernement. Ils me demandent également des solutions pour la crise du logement et ce qu'ils appellent, eux, le barème plancher. Alors, M. le Président, oui, nous avons regardé ces questions-là, nous avons une position là-dessus.

D'ailleurs, mon collègue le député de Laurier-Dorion a tenté d'amener ici... après avoir présenté un amendement à la commission des affaires sociales, de répondre à toutes les préoccupations dans la lettre de la paroisse et les préoccupations du Collectif dans le sens de la notion d'un barème plancher, une prestation minimale, et on se souvient, M. le Président, malheureusement, que la majorité ministérielle a voté contre cet amendement, sauf une exception, que je veux saluer, le député de L'Assomption qui, lui, a eu le courage de ses convictions et a voté en faveur de cet amendement, conformément à sa conscience.

M. le Président, je vais simplement terminer sur une autre déception, et je vous le dis avec tout le respect que je dois à la ministre de la Solidarité sociale et à la ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l'exclusion. C'est ça, ma déception, pour moi, M. le Président, parce que, si j'ai compris une chose dans tout ce débat-là, les personnes vivant une situation de pauvreté nous exigent un standard de non-partisanerie. Ça, je l'ai compris à des rencontres au Parlement de la rue, dans les rencontres avec eux. Et je trouve malheureuses, M. le Président, et gratuites les références qu'ont faites la ministre de la Solidarité sociale et la ministre déléguée à l'accession du Québec au statut d'un pays souverain. Cette référence est gratuite. Oui. Cette référence, M. le Président, est gratuite, n'a pas sa place lors d'un débat sur une question tellement importante que la lutte contre la pauvreté. Cette question, M. le Président, ne fait que diviser des Québécois et des Québécoises. Cette question ne fait que diviser les Québécois et les Québécoises, et je trouve très malheureux que les deux ministres responsables de ce dossier ont fait le choix d'évoquer une telle question qui divise des Québécois et des Québécoises de façon tellement fondamentale.

J'aurais beaucoup aimé, M. le Président, terminer sur un autre ton, terminer sur le ton d'une justice sociale, des questions d'entraide, de solidarité, tel que la paroisse Notre-Dame-de-Grâce a terminé là-dessus, M. le Président, mais, malheureusement, ce n'est pas ça. Dans les deux cas, les deux ministres ont terminé leur discours avec une référence à la séparation du Québec et à son accession aux Nations unies. Et, malheureusement...

Des voix: ...

M. Copeman: Oui, oui, oui. Ça répond beaucoup aux attentes de la population qui vit dans la pauvreté dans Notre-Dame-de-Grâce. Beaucoup.

Une voix: Tout à fait.

M. Copeman: Oui, tout à fait. J'invite la députée de Rimouski à venir rencontrer les gens de mon comté, essayer de vendre leur salade, puis ils vont savoir exactement qu'est-ce qui arrive avec ça. Il est malheureux, M. le Président, que ce soient les ministres de l'autre bord qui ont politisé ce dossier jusqu'à un tel point où ils l'utilisent comme un véhicule pour promouvoir la souveraineté du Québec, M. le Président. C'est ça qui est malheureux, c'est ça qui est malheureux. Ça diminue l'importance d'un tel geste et ça nous rend...

Des voix: ...

M. Copeman: M. le Président, je vous dis: Ça nous rend...

Une voix: ...

M. Copeman: Oui, M. le leader, on a dépassé les 10 minutes pour la ministre déléguée, vous allez m'écouter pendant quelques autres secondes. Too bad!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Continuez à vous adresser à la présidence, M. le député.

M. Copeman: M. le Président, il est malheureux que les députés de l'autre bord aient terminé sur ce ton-là parce que ça ne répond pas aux attentes des personnes qui vivent dans des conditions de pauvreté. Nous avons toujours essayé d'avoir un certain niveau de débat, et je pense, M. le Président, qu'on a diminué la question avec les références gratuites que viennent de faire la ministre d'État et la ministre déléguée. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, ceci met fin au débat, et je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique maximum de 20 minutes.

Mme Linda Goupil (réplique)

Mme Goupil: Je vous remercie, M. le Président. Alors, je vais vous dire: Je suis non seulement particulièrement fière, M. le Président, de ce projet de loi parce que nous tous, membres de cette Assemblée, y avons travaillé de façon extraordinaire, et nous avons aussi dit quelque chose d'extrêmement important, c'est que nous voulions permettre aux femmes et aux hommes d'exercer pleinement leur citoyenneté, d'exercer pleinement leur citoyenneté pour participer activement à la progression du Québec.

Vous savez, M. le Président, j'ai le privilège de représenter les gens dans le comté de Lévis, qui m'ont choisie pour les représenter à l'Assemblée nationale, comme le député de Notre-Dame-de-Grâce a été choisi, comme tous les membres de cette Assemblée. Et vous savez, à chaque fois, M. le Président, que l'on nous dit qu'on fait de la petite politique lorsque l'on parle d'un projet de société extraordinaire ? moi, je respecte totalement les gens d'un parti qui ne partagent pas notre opinion ? cependant, à chaque fois, M. le Président, que, en cette Chambre, on indique que l'on fait de la petite politique lorsque l'on parle de ce qui nous fait vibrer, de ce qui est le sens de notre engagement, à chaque fois qu'on dit qu'on veut politiser un dossier parce qu'on le fait démocratiquement pour échanger, non seulement ce n'est pas bon pour le député de Notre-Dame-de-Grâce, mais ce ne l'est pas non plus pour les gens qui sont ici.

n(15 h 40)n

Les hommes et les femmes ont besoin de savoir franchement ce que nous leur proposons et, dans le cadre du projet de loi, ce que nous sommes venus dire, entre autres: Que, unanimement, les trois partis politiques, M. le Président, considéraient que la pauvreté et l'exclusion sociale est tellement grave au sein de notre société qu'il nous faut nous donner une intervention qui soit plus globale et qui permette à ces citoyens de pouvoir exercer leur citoyenneté et de faire progresser le Québec.

M. le Président, c'est rare qu'on a un projet de loi où les trois partis politiques sont d'accord. C'est rare également que, sur un point aussi important, qui est celui des congés d'assurance parentaux, où le député de Notre-Dame-de-Grâce a signé également en cette Chambre... On a signé également sur le déséquilibre fiscal, où nous avons demandé aux gens du Collectif d'y participer, et ils ont dit, eux aussi et elles aussi, qu'ils trouvaient que c'était inacceptable. On a demandé aux gens venant du communautaire de s'asseoir à côté des gens qui venaient du patronat, qui venaient du monde des affaires. Nous nous sommes assis ensemble pour dénoncer, de façon éhontée et inacceptable, comment nous sommes traités, comme gens qui, démocratiquement, avons été choisis. Et les trois partis politiques, unanimement, ont dit que nous voulions être respectés dans le choix des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, nous avons également dit et nous avons entendu... Le député de Notre-Dame-de-Grâce ne l'a pas entendu comme le député de Laurier-Dorion, parce qu'il a toujours été à la commission parlementaire. Les gens sont venus nous demander de réinvestir en santé, en éducation, pour la famille. Les organismes communautaires ? notre collègue fait un travail exceptionnel pour soutenir la première politique du soutien aux organismes communautaires ? les gens sont venus nous dire: Il faut maintenir les fonds qu'on a établis partout. Mais, M. le Président, ce n'est pas de faire de la petite politique de dire que, si nous avions récupéré toutes les sommes qui appartiennent aux femmes et aux hommes que nous représentons, pour être respectés dans nos choix, dans nos valeurs... que c'est de faire de la petite politique. Ça s'appelle se tenir debout, avoir une colonne vertébrale et être fier, M. le Président. C'est incroyable. C'est incroyable.

Des voix: Bravo!

Mme Goupil: Mais, M. le Président, avec l'appui de l'opposition et l'autre parti politique également, on est venus dire, en cette Assemblée nationale, que c'était inacceptable que 2,5 milliards qui appartiennent aux contribuables du Québec... Ça ne m'appartient pas, ça ne vous appartient pas, ça n'appartient pas au député de Notre-Dame-de-Grâce. On fait quoi, une fois qu'unanimement ici on a dit que c'est inacceptable? Puis on veut un pays démocratique. Le dernier pays à avoir accédé aux Nations unies, M. le Président, c'est le Timor, 800 000 de population, 100 000 personnes ont donné leur vie.

Nous, ce qu'on veut, on veut que les citoyens, qu'ils soient riches, qu'ils soient moins riches, qu'ils viennent du monde des affaires, du monde communautaire, on veut qu'ils contribuent à construire cette société. Et ce que l'on veut, c'est un pays pour nous-mêmes, pas contre les autres, pour nous-mêmes. Et, oui, les personnes qui vivent des situations de pauvreté et d'exclusion sociale ont la chance, je dirais, d'avoir des gens qui, n'étant pas préoccupés par le vivre dans leur quotidien, ils ont la responsabilité de se lever debout puis d'exiger qu'on soit respectés, et ce qui appartient aux femmes et aux hommes du Québec, et qui ont choisi des députés ici pour les représenter à l'Assemblée nationale... s'attendent, quand on signe ensemble que c'est inacceptable, qu'on se tienne debout. Puis, quand on le dit, M. le Président, quand on le dit, ce n'est pas de faire de la petite politique, c'est de dire franchement au peuple québécois que les trois partis politiques se sont entendus.

Ça fait deux ans, M. le Président, qu'on a signé ici, puis le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a signé, il l'a redit lors du déséquilibre fiscal où il a voulu qu'on ait un congé d'assurance parentale. M. le Président, ça fait cinq ans que l'assurance emploi accumule 45 milliards de surplus, et, nous, tout ce que l'on veut, c'est récupérer l'argent qui appartient aux femmes et aux hommes du Québec pour leur donner un congé d'assurance parentale qui leur permettrait, lorsqu'ils ont le désir d'enfants, de passer une année de vie avec leurs enfants. Ce n'est pas exagéré, ça, M. le Président, c'est de nous respecter dans nos valeurs et dans nos choix.

Et je vais vous dire, M. le Président, en terminant, sur ce projet de loi qui est exceptionnel, et oui, nous avons contribué, tous les parlementaires, mais il n'en demeure pas moins, M. le Président, que, si nous avions tous les impôts que les contribuables du Québec envoient au gouvernement central et qui ne nous reviennent pas, il est évident que, ensemble, nous aurions pu aller encore plus loin au niveau de ce projet de loi, parce que, quand est venu le temps, au niveau du Conseil du trésor, pour dire, et avec notre premier ministre et toute l'équipe, qu'il y a 1,5 milliard qui va être consacré pour soutenir la pauvreté, si, M. le Président, nous avions récupéré les impôts qui appartiennent aux femmes et aux hommes du Québec...

Puis on a voté unanimement. Ça fait combien de fois qu'on vote unanimement en cette Chambre? Et qu'est-ce qu'on a comme réponse? Qu'est-ce que nous avons comme réponse? Rien du tout! À chaque fois qu'on demande d'être entendus, M. le Président... Puis on le fait poliment. Parce que, je vais vous dire, j'ai eu le privilège de représenter cette Assemblée avec des conférences fédérales-territoriales-provinciales et je n'ai jamais manqué de respect aux femmes et aux hommes qui ne partagent pas notre opinion. Cependant, jamais ils ne nous respectent dans ce que nous sommes, et ça fait déjà plusieurs années.

Et je vais vous dire, M. le Président, ce que je souhaite et ce que je rêve, c'est que, les femmes et les hommes, si on est capables de les sortir de cette pauvreté, ils vont contribuer à nos côtés, comme ils le font déjà modestement avec des moyens... Parce que les femmes et les hommes qui nous soutiennent, chacun dans nos circonscriptions, les 125 députés ici, à cette Assemblée, M. le Président, ce sont des gens modestes qui ont des revenus qui sont modestes. Mais ce qu'ils souhaitent, par exemple, ils souhaitent être respectés, et ils ont suffisamment confiance en elles et en eux pour qu'un jour nous le plantions, notre drapeau, aux Nations unies, et j'espère que nous le ferons d'ici 2005.

Et le député de Notre-Dame-de-Grâce, quand il dit qu'on fait de la petite politique, M. le Président, savez-vous ce qu'il fait? Il contribue lui-même à nuire à tous les femmes et les hommes qui font de la politique. On en fait avec un grand P puis il faut qu'il y en ait, des débats. Et, si nous cessions, de part et d'autre de cette Chambre, de nous taxer de faire de la petite politique, peut-être que les femmes et les hommes auraient beaucoup plus de respect pour celles et ceux qui font de la politique.

Moi, j'ai du respect pour des collègues qui ont été élus démocratiquement, et puis je ne suis pas gênée du tout de parler de la souveraineté. J'en parle avec mon coeur, j'en parle avec passion, j'en parle avec mes enfants. Nous en parlons entre nous.

Que vous ne partagiez pas notre opinion, je le respecte, vous avez le droit. On veut un Québec démocratique, on veut un Québec où les gens peuvent exprimer leur point de vue. Et, comme je dis, le jour où on se choisira, en cette Assemblée nationale... nous aurons des personnes qui seront plus à droite, plus à gauche, qui seront plus libérales, et ça, c'est bien qu'il en soit ainsi. Mais cessez, de grâce, de nous dire qu'on fait de la petite politique quand on réaffirme en cette Chambre que le déséquilibre fiscal existe, qu'on ne nous respecte pas sur les congés d'assurance parentale, puis on ne nous respecte pas sur la Loi sur les jeunes contrevenants.

Alors, M. le Président, je voudrais terminer, je voudrais terminer en disant sincèrement que ce projet de loi est un projet dont on peut être fier, comme société. C'est une bougie d'allumage qu'on vient dire aux femmes et aux hommes du Québec que, oui, la pauvreté, il faut s'y attaquer, et ce n'est pas parce que le Québec a des réussites extraordinaires dans plusieurs domaines que nous allons laisser tomber celles et ceux qui ont besoin de nous plus que jamais. Mais ce que je dis par exemple: Si, demain matin, nous étions souverains, nous pourrions le faire plus vite, le faire mieux et le faire dignement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Ceci met fin, donc, au débat.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une question que vous aimeriez poser.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une petite minute, s'il vous plaît. Une petite minute, s'il vous plaît, on va... Mme la ministre, M. le député de Laurier-Dorion se réfère à l'article 213 pour vous demander si vous êtes prête à recevoir une question ou...

M. Sirros: Est-ce que j'ai la permission, de la part de la ministre, de lui poser une question suite à...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, c'est ça que je viens de vous proposer, là. Elle a dit non. Elle a dit non. Alors, s'il vous plaît, nous sommes rendus maintenant...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous avez eu à peu près deux ans à discuter de ce dossier-là, et là, actuellement, bien, c'est la fin. Et puis... Alors, je dois respecter l'ordre et mettre aux voix le projet de loi n° 112.

Ce projet de loi, Loi visant la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, est-il adopté?

M. Simard (Montmorency): M. le Président, étant donné l'importance de ce projet de loi, le projet de loi n° 112, visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, un projet de loi très important, sur lequel tous les parlementaires de cette Chambre, qu'ils soient issus de la majorité ministérielle ou encore de l'opposition, étant donné donc le travail considérable qui s'est fait là-dessus et l'importance du projet de loi, j'aimerais que nous puissions procéder par un appel nominal, en vertu des dispositions que nous confère l'article 223 de nos règlements, donc, à la prochaine séance.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vous voulez aussi qu'on le reporte en même temps. Bon. Alors, le vote sera reporté aux affaires courantes de demain. Vous demandez? Oui. Alors, aux affaires courantes de demain. Et ceci met fin, donc, au débat sur cet article 41.

J'inviterais le leader du gouvernement à nous indiquer la suite, s'il vous plaît.

n(15 h 50)n

M. Simard (Montmorency): Avec plaisir, M. le Président. Je vous réfère à l'article 34 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 126

Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude détaillée et
de l'amendement de la ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 34, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 126, Loi modifiant la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale et modifiant la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et instituant la Commission des partenaires du marché du travail, ainsi que l'amendement transmis en vertu de l'article 252 du règlement de l'Assemblée par Mme la ministre de la Solidarité sociale. Cet amendement est déclaré recevable.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur cet amendement? Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 126, qui est un projet extrêmement important également, M. le Président, nous en sommes à l'étape de la considération. Ce projet de loi, comme vous l'avez indiqué, il est important parce que, d'abord, il vient concrétiser ce que j'appelle non seulement poser des gestes concrets pour les personnes vivant des situations de pauvreté et d'exclusion sociale, mais permet également de pouvoir concrétiser un engagement que nous avions pris, M. le Président ? ma collègue y a fait référence tout à l'heure ? avec les membres de notre parti, c'est-à-dire de faire en sorte d'abolir, à compter du 1er janvier 2003, du texte «du logement et de la réduction pour partage du logement dans le cadre du Programme d'assistance-emploi».

Vous savez, M. le Président, depuis de nombreuses années, il y avait eu une instauration, au 1er août 1989, de cette notion de partage, qui a été introduite, justement, faisant en sorte que, lorsqu'une personne vivait avec une autre personne, on retirait un montant d'argent que l'on appelait la pénalité pour partage du logement. Nous avions fait en sorte de prendre un engagement, de voir à l'abolir, nous l'avions abolie. À une première étape, suite à l'équilibre des finances publiques, il y a un bout de chemin qui avait été fait. Cependant, il nous restait à compléter totalement cette pénalité, et cette pénalité va directement avec le principe que nous avons adopté dans le projet de loi, à savoir d'introduire le principe du barème plancher.

Alors, M. le Président, cette mesure entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2003 et également celle de l'indexation automatique des prestations, et, ainsi, il y aura bien sûr des femmes et des hommes qui auront une somme supérieure pour leur permettre, justement, d'avoir, je dirais, plus de liquidités pour répondre aux besoins de la vie. Ce sont des sommes modestes, mais, lorsque déjà tu ne reçois pas beaucoup de sous, ça permet aux gens de pouvoir améliorer leur situation financière, puisque, souvent, ils décident d'habiter ensemble justement pour réduire les dépenses et ainsi augmenter modestement leurs revenus.

Également, il y a dans ce projet de loi l'introduction, dans la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et instituant la Commission des partenaires du marché, des dispositions requises pour permettre le transfert du personnel d'un organisme au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et la conclusion d'ententes déterminant les modalités d'intégration de ces employés.

Il y aura également d'autres modifications à la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, à la Loi sur le ministère de l'Emploi, c'est-à-dire de remédier à certains problèmes d'application, d'actualiser certaines notions ou concepts et également d'harmoniser les dispositions existantes avec celles de législations connexes.

Ainsi, il est prévu ? et je le résume brièvement ? d'abord d'assouplir la définition de «conjoints» applicable aux parents d'un même enfant dans le cadre du Programme assistance-emploi; d'introduire la possibilité de définir la notion de «résidence», par règlement; de clarifier le sens et la portée de l'expression «légalement autorisé à demeurer au Canada» et d'actualiser la notion de «réfugié»; et d'harmoniser le traitement des allocations de participation versées par les organismes autochtones intervenant dans le domaine de la main-d'oeuvre avec le traitement et l'allocation qui est versée par Emploi-Québec; de prévoir également que la saisie pour dette alimentaire des allocations d'aide à l'emploi versées par Emploi-Québec et des prestations versées dans le cadre du programme APPORT ne pourra pas excéder 50 % et de rendre complètement insaisissable l'aide financière qui est versée par Emploi-Québec sous forme de remboursement de frais supplémentaires aux individus participant à un programme ou à une mesure d'aide à l'emploi, également par mesure de cohérence avec les autres textes de loi; également, de rendre insaisissable l'aide financière accordée à une personne physique dans le cadre de toute autre mesure et aussi d'introduire la possibilité de porter en révision les réclamations ayant trait soit à l'aide qui est versée sous forme de prêt en vertu du pouvoir discrétionnaire du ministre soit à l'aide versée par Emploi-Québec dans l'attente de la réalisation d'un droit, le droit à la révision donnant par ailleurs ouverture à l'appel devant le Tribunal administratif; également, de prévoir les mêmes possibilités en ce qui a trait aux réclamations se rapportant aux sommes versées à une personne morale, une association, une société ou un organisme, dans le cadre d'une entente conclue avec Emploi-Québec; également, de préciser la portée de la solidarité entre conjoints, eu égard au remboursement des sommes dues au ministère, de manière à établir clairement qu'elle s'applique aux sommes qui ont été versées à l'un d'entre eux à titre de chef de famille monoparentale alors qu'ils étaient des conjoints au sens de la loi; enfin, d'apporter diverses autres modifications de concordance au programme APPORT, dont une uniformisation du traitement des sommes versées dans la première phase de Solidarité jeunesse avec celui dont font l'objet les prestations d'assistance-emploi.

Alors, M. le Président, c'est un projet de loi qui vient concrétiser des engagements que nous avions pris, qui vient également faciliter le soutien apporté aux femmes et aux hommes dans différents programmes, qui permet également des ajustements en fonction... Vous savez, parfois on met des mesures en place et ça a certains effets pervers pour certains groupes de personnes. Alors, avec ce projet de loi, nous venons corriger, M. le Président, tous ces éléments et surtout ? et surtout ? faire en sorte de rétablir le fait que, lorsque des personnes choisissent de vivre ensemble pour améliorer leur situation financière, ils ne fassent plus l'objet de coupures, et, ainsi, concrètement, on applique immédiatement le principe de la reconnaissance du barème plancher, c'est-à-dire d'enlever toutes les coupures.

Et, cette coupure, elle était extrêmement importante, M. le Président. Et, comme je l'ai mentionné au niveau du principe que nous avons adopté dans la loi n° 112 du barème plancher, dans le plan d'action, nous nous sommes obligés et engagés de le corriger ? c'est 60 jours après l'adoption du plan d'action ? et également de trouver une solution pour faire en sorte que dans, des cas exceptionnels, lorsqu'il s'agit de la fraude ou le remboursement de dettes, de trouver les bonnes modalités qui devront s'appliquer pour que nous puissions, bien sûr, avoir cette adhésion au niveau de l'ensemble de notre société pour la suite des choses. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de la Solidarité sociale, et je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion. M. le député.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, somme toute, le projet de loi à cette étape-ci, au niveau de la prise en considération du rapport, fait état de tous les amendements qui ont été discutés en commission parlementaire, et, somme toute, c'est des amendements de concordance, de nature technique, qu'on a ajustés durant cette étude qui a été souvent compliquée au niveau de la rédaction et de la compréhension exacte de différentes notions juridiques. Donc, pour ce qui est des amendements comme tels et pour la réception de ce rapport, nous serons favorables, et comme d'ailleurs avec l'adoption du projet de loi n° 126.

Je tiens tout simplement et très brièvement à reprendre et peut-être recentrer, si vous voulez, ce que la ministre dit par rapport au barème plancher en nous disant qu'avec l'abolition de la coupure pour le partage du logement on établit le barème plancher. Ce n'est pas tout à fait exact parce qu'il reste encore des pénalités qui sont possibles, il reste encore des saisies sur le montant de 6 000 $ par année que les gens reçoivent. Et d'ailleurs, c'est pour ça qu'on avait demandé l'instauration d'un barème plancher au-delà de simplement l'énoncé d'un principe.

Donc, ce n'est pas exact de dire qu'avec ce projet de loi on établit le barème plancher. Ça, il faut bien être conscient du fait, il faut que les mots disent ce que les mots veulent bien dire. Un barème plancher, c'est un minimum, un seuil minimal en bas duquel on ne peut pas y aller. Ce n'est pas le cas actuellement, M. le Président, et ça ne sera pas le cas, même après l'adoption de ce projet de loi n° 126.

n(16 heures)n

Je tiens à souligner à la ministre que, lors de nos discussions, nous avons suggéré effectivement des façons de procéder qui permettraient d'établir ce barème plancher en tenant compte des situations où les gens reçoivent des argents auxquels ils n'ont pas droit. Ils doivent les rembourser

à un moment donné.

Ce qui arrive à l'heure actuelle, pour que ce soit clair pour tout le monde, c'est qu'il y a une prestation minimale, bien, une prestation de base de 115 $ qui est accordée aux personnes assistées sociales adultes seules. Mais, on constate, à sa face même, que 515 $ par mois, ça fait 6 200 $ par année à peine. C'est nettement insuffisant pour rencontrer les besoins essentiels, c'est reconnu comme tel.

Mais il faut bien comprendre que, même à ce niveau-là, le gouvernement peut réduire cette prestation, soit en pénalisant les gens pour une action qu'ils auraient posée, que quelqu'un estime ne va pas dans le sens de donner suite à la possibilité d'améliorer leur propre sort, ou parce qu'ils récupèrent des montants sur ce chèque qui avaient été versé auparavant en trop.

Alors, on a suggéré qu'une façon de faire, ce serait, par exemple, d'identifier ces montants qui sont dûs, parce qu'ils ont été reçus en trop, comme des comptes à recevoir, donc de ne pas effacer la dette, de ne pas sanctionner les fausses déclarations, etc., mais de les mettre dans un compte où c'est des comptes à recevoir qui restent là, dans l'équilibre financier, mais que, dans la vraie vie et dans la réalité, on ne vient pas chercher, sur le montant de 515, jusqu'à 100, 200 $ de plus, pour laisser la personne avec 300 $ par mois; ça n'a pas de sens.

Alors, ça donne quoi d'énoncer un principe, si on ne met pas à côté du principe une façon concrète de le concrétiser, de l'appliquer? Et c'est pour ça qu'hier on a proposé qu'on puisse établir le montant des barèmes actuels, c'est 515, comme non compressible. Ça ne veut pas dire que c'est suffisant; c'est clairement insuffisant. Mais, au moins, ce serait un point de départ pour qu'on puisse, avec les disponibilités financières, avec la croissance économique, etc., et dans le temps, l'améliorer.

Alors, on veut bien qu'on adopte des mesures qui bonifient la situation, mais il faut quand même situer les choses dans leur véritable contexte et ne pas faire dire à la loi ce que la loi ne fait pas. Alors, c'est un pas qui reçoit notre approbation. Mais je m'objecte quand la ministre affirme que c'est l'établissement d'un barème plancher, ce n'est pas ça. Alors, on verra par la suite si le gouvernement va retrouver la capacité de dire simplement les choses comme elles sont. Vous savez, ce n'est pas parce qu'on veut faire croire aux gens qu'on fait des bonnes choses qu'on les fait véritablement.

Alors, M. le Président, ceci étant dit, il y aura l'étape de la troisième lecture qui, j'imagine, sera dans les jours qui viennent. Il n'y aura pas d'objections de notre part à ce qu'on procède rapidement à l'adoption de ce projet de loi. Et, à ce stade-ci, je vous indique que nous serons favorables à adopter le rapport de la commission, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Mise aux voix de l'amendement de la ministre

Alors, je vais mettre aux voix l'amendement qui a été déposé. Cet amendement... Enfin, cet amendement, vous le savez, il s'agit de remplacer «leur enfant» au singulier par «leurs enfants» au pluriel dans un texte de la loi. Amendement de la loi. Alors, c'est ça. Vous êtes au courant?

Alors, je mets aux voix l'amendement. Cet amendement... Y a-t-il des interventions sur ce rapport... Excusez-moi. Je suis rendu à l'amendement. L'amendement proposé par Mme la ministre de la Solidarité est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 126, Loi modifiant la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale et modifiant la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et instituant la Commission des partenaires du marché du travail, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Oui, je vous remercie, M. le Président. Je vous réfère à l'article 42 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 128

Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 42, Mme la ministre de la Solidarité sociale propose l'adoption du projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, je vous remercie, M. le Président. Nous sommes maintenant à l'adoption finale de ce projet de loi.

En premier lieu, ce projet a une extrême importance pour reconnaître les droits de certains conjoints de même sexe, tout en respectant les exigences de l'équité envers l'ensemble des cotisants et des bénéficiaires du régime de retraite, des régimes de rentes.

Comme vous le savez, l'ensemble des lois québécoises ont été modifiées en juin 1999 pour que les conjoints de même sexe soient traités de la même manière que tous les autres conjoints de fait. Cette reconnaissance législative des conjoints de même sexe s'applique en ce qui concerne le droit à la rente de conjoint survivant du Régime de rentes du Québec pour des décès survenus à compter de son entrée en vigueur, c'est-à-dire à partir du 16 juin 1999.

L'article 3 du projet de loi n° 128 vient étendre la reconnaissance des conjoints de même sexe aux décès antérieurs à cette date. C'est dire que les personnes concernées pourraient être admissibles à la rente pour un décès survenu entre le 4 avril 1985 et le 16 juin 1999, pourvu qu'une demande soit faite à la Régie des rentes après le 1er mars 2002.

Cette disposition a été en grande partie inspirée par un jugement rendu par la Cour d'appel, le 1er mars 2002. Ce jugement qui interprète la définition de «conjoint survivant» de la Loi sur le régime de rentes du Québec à la lumière de la Charte des droits et libertés de la personne a accordé aux quatre requérants qui étaient parties le droit à la rente de conjoint survivant. En raison de ce jugement, la Régie a aussi, en fonction de l'interprétation mise de l'avant à la Cour d'appel, accordé la rente dans les affaires qui étaient pendantes au Tribunal administratif du Québec à la date du jugement. Dans tous ces cas ? près d'une soixantaine ? la rente est devenue payable à compter du douzième mois précédant celui qui suit le mois de la demande, comme le prévoit la Loi sur le régime de rentes du Québec. Voilà qui règle maintenant les instances qui étaient en cour à la date du jugement.

Que dire des nouvelles demandes, M. le Président? La réponse, elle est claire. Elles sont étudiées en regard de cette nouvelle interprétation. Le jugement de la Cour d'appel ne touche aucunement les décisions de la Régie ou de la Commission des affaires sociales qui ont, dans le passé, refusé le droit à la rente de conjoint survivant pour le motif que le demandeur était de même sexe que le cotisant décédé. Comme des décisions sont définitives, elles ne peuvent, à cause du principe de la chose décidée, la chose jugée, être remises en question en raison du changement dans l'interprétation de la notion de conjoint.

Or, par souci d'équité, le projet de loi écarte la règle de la chose décidée et permet à toute personne, même celle à qui le droit à la rente de conjoint survivant a été antérieurement refusée par une décision définitive, de présenter une nouvelle demande de rente. La rente de conjoint survivant pourra leur être payable avec une rétroactivité de 12 mois par rapport à cette nouvelle demande.

L'article 3 du projet de loi crée donc de nouveaux droits. Il ne faut pas oublier par ailleurs que ceux-ci doivent s'inscrire dans le cadre plus large de la Loi sur le régime de rentes du Québec et donc en respecter les principes de base. L'exigence d'une demande constitue l'une de ces conditions essentielles sans laquelle il n'est pas possible à la Régie des rentes de déterminer l'admissibilité aux prestations et d'en autoriser le versement. Aussi, l'ensemble des autres conditions d'admissibilité à la rente de conjoint survivant en vigueur au moment du décès doivent toutes être rencontrées.

Cette modification à la Loi sur le régime de rentes du Québec est la plus juste et la plus équitable qu'il était possible de proposer. Il nous fallait agir équitablement non seulement à l'endroit des conjoints de même sexe, mais aussi à l'endroit des conjoints de tous les autres requérants d'une rente de conjoint survivant. C'est ce que nous faisons avec les mesures proposées.

Le temps était aussi venu d'agir pour mettre à jour certains pouvoirs et certaines habilitations de la Régie des rentes du Québec. Cette mise à jour poursuivait d'abord un objectif de simplification. Cette mise à jour nous a permis de regrouper dans la Loi sur le régime de rentes du Québec, qui est la loi constitutive de la Régie, plusieurs dispositions que l'on retrouvait actuellement dans trois autres lois que celle que la Régie administre, soit la Loi sur le régime de rentes du Québec, la Loi sur les prestations familiales et la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Alors, nous fusionnons donc dans un seul article les dispositions que trois lois différentes énonçaient dans des termes qui, s'ils se ressemblaient, n'en demeuraient pas moins différents.

n(16 h 10)n

Alors, le projet de loi que nous nous préparons à adopter ne se limite cependant pas à reformuler un pouvoir que la Régie possède déjà. Il veut également étendre la capacité d'agir de la Régie de façon à permettre que d'autres puissent avoir recours à l'expertise développée par la Régie dans l'accomplissement de ses diverses missions au fil des ans.

En premier lieu, M. le Président, il prévoit qu'un ministre pourra désormais faire appel aux services de la Régie en confiant à celle-ci un mandat particulier dans n'importe quel domaine relié aux pouvoirs et aux compétences qu'elle possède. Bien entendu, il faut éviter à tout prix que l'exécution d'un mandat particulier, qui s'ajouterait aux fonctions régulières de la Régie, ait pour effet de causer des dépenses qui seraient à la charge de la Régie elle-même et qui pourraient avoir un effet négatif sur la caisse du Régime de rentes. C'est donc la raison pour laquelle le projet de loi précise que, si le gouvernement ou un ministre entend confier une fonction ou un mandat spécifique à la Régie, il doit s'engager à en assumer les frais en totalité.

J'ai eu l'occasion d'indiquer à cette Assemblée que la Régie des rentes du Québec consacre depuis plusieurs années des efforts extrêmement importants et des ressources considérables à se doter d'instruments parmi les plus perfectionnés afin de mieux servir sa clientèle et d'accomplir sa mission avec une efficacité remarquable. À cet égard, je pense, M. le Président, que nous pouvons souligner l'excellent travail qui est accompli par toutes les personnes qui travaillent au niveau de la Régie des rentes. D'ailleurs, ils se sont vu reconnaître leur travail récemment, lors de la remise de prix au sein de la fonction publique. Non seulement la qualité du service que la Régie offre à ses clients a plusieurs fois été reconnue...

Le projet de loi veut permettre à la Régie, d'abord, de récupérer au moins une partie des investissements importants qu'elle a effectués ces dernières années en l'autorisant à conclure des contrats pour céder son savoir-faire ou les produits qu'elle développe dans l'exercice de ses fonctions ou pour fournir des services qui se rapportent à son savoir-faire ou à ses produits. De cette façon, non seulement d'autres sociétés ou organismes gouvernementaux ou autres pourront tirer parti de l'expertise de la Régie, mais encore celle-ci pourra-t-elle réaliser des profits grâce aux transactions qu'elle sera désormais habilitée à conclure.

Comme je l'ai mentionné lorsque nous avons examiné le rapport de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi, le nouveau pouvoir contractuel que nous voulons confier à la Régie ne change en rien aux missions fondamentales de cet organisme. La Régie devra continuer à se consacrer à l'administration du Régime de rentes du Québec, à la surveillance des régimes de retraite privés, à la promotion de la planification financière de la retraite et à la gestion du programme de prestations familiales du Québec. La Régie n'a pas pour mission de concurrencer l'entreprise privée ni de prendre la place de celle-ci en développant des activités commerciales qui s'éloigneraient des objectifs de service public que lui imposent les lois qu'elle applique. J'ajouterais que la Régie a démontré, durant les travaux de la commission parlementaire, qu'elle est pleinement consciente de ses obligations, et à tous les points de vue.

Lors de l'étude détaillée du projet de loi en commission parlementaire, nous avons modifié l'article 2 du projet de loi afin d'exiger que la Régie obtienne l'autorisation du ministre qui en est responsable avant de conclure un contrat prévu par cet article. De cette façon, un ministre et membre de cette Assemblée pourra, à chaque fois que la Régie envisage de conclure un contrat se rapportant à son expertise, s'assurer qu'elle n'outrepasse pas sa mission de service public.

Et également, un autre exemple de cette volonté de simplification et d'efficacité qui nous a amenés à présenter le projet de loi, c'est la suppression du pouvoir qui était accordé à la Régie de fixer par règlement les conditions et les circonstances dans lesquelles une personne peut être considérée invalide. C'est après une longue période d'études et de réflexions que la Régie en est venue à la conclusion qu'il ne serait pas avantageux de procéder par règlement pour décréter les conditions et les circonstances qui permettent de conclure qu'une personne est invalide. C'est une préoccupation extrêmement importante. Donc, il faut avoir les meilleurs outils pour pouvoir analyser avant, au préalable, d'en arriver avec un verdict d'invalidité. Il semble donc maintenant clair qu'un système réglementaire, compte tenu de sa rigidité et de sa lourdeur, ne pourrait convenir à l'évaluation individuelle de la capacité de chaque individu et ne pourrait suivre l'évolution constante et parfois très rapide de la science médicale et de la notion d'invalidité médicale.

M. le Président, il m'a fait plaisir de constater, lors de l'étude du projet de loi, que les mesures que nous avons proposées sur cette question ont rapidement fait consensus. C'est ainsi que le projet de loi que nous nous préparons à adopter retire de la Loi sur le régime de rentes du Québec une disposition créatrice d'un pouvoir dont, en cette dernière analyse, l'exercice ne pourra conduire à un résultat satisfaisant pour la population. En même temps qu'il enlève ce pouvoir à la Régie, le projet de loi oblige la Régie à rendre publiques toutes les directives qu'elle applique en ce qui concerne l'analyse d'un dossier médical en matière d'invalidité. De cette même manière, la transparence du processus d'évaluation de l'invalidité pour les fins du Régime de rentes est assurée, et l'ensemble des citoyens et des citoyennes pourront connaître les critères sur lesquels la Régie se penche pour évaluer la capacité des personnes qui peuvent avoir droit à une rente d'invalidité.

La dernière mesure proposée dans le projet de loi et que je tiens à vous présenter se rapporte au régime de retraite des travailleurs de l'industrie de la construction. J'ai déjà expliqué à quel point ce régime de retraite est extrêmement important pour le Québec: c'est plus de 300 000 travailleurs et retraités du domaine de la construction qu'il rassemble. Le projet de loi vise à permettre au gouvernement de soustraire ce régime à l'application de certaines dispositions de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, et cela, de manière rétroactive. Si nous proposons cette mesure, M. le Président, c'est dans le but de simplifier la tâche des administrateurs du régime et de permettre de réduire les coûts associés à l'application des exigences de la loi. En permettant ainsi d'harmoniser les exigences de la loi avec les caractéristiques de ce régime de retraite unique qu'est le régime de retraite des travailleurs de l'industrie de la construction, le projet de loi permettra d'assurer à ces travailleurs les mêmes droits et les mêmes protections qu'aux travailleurs des autres domaines mais en réduisant de façon importante les frais d'administration du régime.

Alors, voici, M. le Président, l'essentiel de ce projet de loi. Donc, j'espère que nous pourrons adopter l'adoption finale du projet de loi n° 128. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de la Solidarité sociale. Je vais céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Ce projet de loi, essentiellement, est un projet de loi multifacettes qui touche quatre grandes questions, quatre grandes questions, et je vais aborder rapidement les questions sur lesquelles l'opposition est en accord et je m'étendrai un peu plus longtemps, M. le Président, sur les points de divergence.

Les premiers articles, à savoir les articles 1 et 2, vont toucher plus spécifiquement les pouvoirs de la Régie. L'article 1, M. le Président, vient en quelque sorte regrouper dans un seul article des pouvoirs qui étaient présents dans la loi sur la Régie mais qui étaient aussi présents dans d'autres lois, parce que la Régie des rentes maintenant ne fait pas simplement qu'administrer le Régime de rentes du Québec, elle administre, par exemple, la loi sur les pensions alimentaires et les allocations familiales. Et on a regroupé ce pouvoir qu'avait la Régie de pouvoir faire des études, etc., dans un seul article. C'est une simplification législative sans grande portée, M. le Président.

L'article 2 nous avait posé d'énormes difficultés, si vous vous en rappelez, lorsque j'étais intervenu, en ce que, dans sa rédaction initiale, il permettait à la Régie de pouvoir exactement commercialiser son savoir et comme concurrencer, le cas échéant, le secteur public. Il est vrai que la Régie des rentes a développé au fil des ans une expertise qu'elle est souvent seule à avoir développée et qu'elle peut rentabiliser si elle la commercialise ou elle en fait bénéficier d'autres organismes publics. Ce cas est un cas particulier. Les autres cas, M. le Président, c'est-à-dire la possibilité que la Régie aurait eue de concurrencer, le cas échéant, des bureaux d'actuaires ou des bureaux de professionnels des régies des rentes, nous inquiétaient énormément.

n(16 h 20)n

En commission parlementaire, j'ai proposé un amendement, M. le Président, qui a eu pour effet, qui a eu pour effet de soumettre ce pouvoir que l'on accorde à la Régie à l'autorisation du ministre responsable de l'application de la loi, c'est-à-dire, c'est-à-dire que la Régie des rentes ne pourra pas, ne pourra pas dorénavant pouvoir faire cette commercialisation du savoir-faire qu'elle a pu développer sans, au départ, l'autorisation du ministre responsable.

Ça a l'effet de quoi, M. le Président? C'est-à-dire, ça soumet à l'approbation du gouvernement, voire au débat public, la possibilité que la Régie aurait eue de concurrencer le secteur, le secteur public. Il y a dans cet amendement, que j'ai moi-même proposé et qui a été accepté par la commission, un équilibre qui nous permet d'être en faveur de l'article 2.

Je m'attarderai plus tard sur l'article 3, M. le Président, parce que c'est l'article qui pose pour nous des problèmes et qui pourrait nous amener à voter contre le projet de loi au moment de son adoption finale, à cause de l'article 3. Je dois dire néanmoins que les articles 4 et 5, tels qu'ils sont énoncés dans le projet de loi et qui touchent à ce moment-là la question des rentes d'invalidité, c'est-à-dire le statut d'invalide...

Vous savez ? et je m'adresse ici à un certain nombre de mes collègues et vous-même, M. le Président, qui avez l'habitude de faire du bureau de comté ? vous savez à quel point des personnes viennent vous voir parce qu'elles peuvent être déclarées invalides par leur médecin mais refusées dans leur statut d'invalidité par la Régie des rentes et que l'obligation qui a été faite dans la loi à la Régie des rentes de procéder par règlement, c'est-à-dire de devoir publier dans la Gazette officielle, règlement, la manière de devoir interpréter le statut d'invalide...

Le statut d'invalide, vous le savez, M. le Président, les règles pour déclarer quelqu'un invalide varient si on a moins que 60 ans ou plus que 60 ans. Vous savez que la Régie juge différemment la possibilité de retour au travail pour les personnes avant 60 ans et après 60 ans. C'était une lourdeur inutile. La Régie des rentes vient supprimer en quelque sorte... La loi vient supprimer cette obligation de procéder par règlement lorsqu'on veut modifier la question qui touche les normes ou les possibilités de déclarer quelqu'un invalide et va permettre, strictement par déclaration de la Régie des rentes, de pouvoir mieux préciser en quelque sorte ce qui est... de pouvoir faire évoluer le concept d'invalidité.

Alors, obligation est faite, évidemment, M. le Président, puisqu'on retire à l'article 4 l'obligation de procéder par règlement... À l'article 5 est introduite l'obligation à la Régie, quand même, de faire connaître, de faire connaître aux personnes qui sont les bénéficiaires, de faire connaître les nouvelles, les nouvelles normes, les nouvelles directives en matière de dérogation médicale de l'invalidité. C'est une souplesse qui est utile, M. le Président. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a une évolution dans la pensée médicale. Par exemple, des phénomènes qui étaient considérés comme de la fatigue chronique il y a cinq ou six ans commencent maintenant à être ? je pense particulièrement aux cas de fibromyalgie ? peuvent être considérés comme des cas, maintenant, d'invalidité. Il y a une évolution dans la pensée médicale, et cette souplesse dans la loi va permettre en quelque sorte de suivre l'évolution de la pensée médicale sans nécessairement avoir à chaque fois à faire référence à un règlement et une publication dans la Gazette officielle.

Les articles subséquents, M. le Président, vont toucher ? et la ministre l'a rappelé ? certains articles de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Et vous connaissez la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. En particulier, le régime de retraite qui touchait les employés de la construction du Québec avait une situation bien particulière, bien particulière, parce que, d'abord, souvent, c'est un régime de retraite multipatronal parce que c'est le même régime de retraite mais qui touche l'ensemble des employés du secteur de la construction, premier élément.

D'autre part, il est fréquent qu'une personne passe d'un employeur... fait une quinzaine de jours comme charpentier, par exemple, pour un employeur, il va faire 15 jours de travail pour un autre employeur. Alors, vous aviez une difficulté d'appliquer, à l'heure actuelle, toutes les dispositions de la Loi sur les RCR. Donc, la disposition qui est prévue dans la Loi sur le régimes de rentes, tout en protégeant et en continuant à protéger les bénéficiaires et les employés de la construction qui sont bénéficiaires de ce régime de rentes, va retirer en quelque sorte... permettre au gouvernement, par règlement, d'éviter de suspendre l'application de certains articles de la Loi sur les RCR, et d'une manière rétroactive pour ce régime de rentes des employés de la construction.

Donc, M. le Président, somme toute, compte tenu du fait que le gouvernement s'est rallié à la position que j'avais défendue en commission parlementaire et avait accepté l'amendement que j'avais proposé sur les articles 1, 2, 4, 5, 6 et suivants, nous avons fini par arriver à une position de consensus.

Reste maintenant, M. le Président, le point où nous avons une divergence de point de vue, qui est l'article 3 de ce projet de loi. L'article 3 de ce projet de loi, M. le Président, touche essentiellement les conjoints de même sexe et la possibilité de verser une rente de conjoint survivant à des conjoints de même sexe. Il n'est pas inutile, pour ceux qui nous écoutent, de faire l'historique, de faire l'historique de ce qui s'est passé, M. le Président.

En juin 1999, le Parlement, ce Parlement ? je crois que c'était le 19 juin, si je ne m'abuse ? ce Parlement a modifié, dans l'ensemble de son corpus législatif, le concept de «conjoints de fait» pour inclure, dans le concept de «conjoints de fait», le principe de «conjoints de même sexe». Donc, depuis le mois de juin 1999, les conjoints homosexuels peuvent être considérés comme conjoints de fait dans l'ensemble du corpus législatif de la province de Québec, et ça inclut bien sûr la loi sur la Régie des rentes, ce qui permet, depuis cette date, aux personnes qui vivaient maritalement ? et on pourra après... j'aurai à revenir sur le concept et à tâcher d'analyser avec vous le concept de «vivre maritalement» ? aux personnes qui vivaient maritalement et qui étaient de même sexe de pouvoir, après le décès d'un des deux conjoints, bénéficier de la rente de conjoint survivant.

M. le Président, il restait néanmoins une situation, c'est-à-dire ceux qui étaient encore vivants mais dont le conjoint était décédé avant la date, je crois, du 19... je vais regarder dans mes... la date du 19 juin, je crois, 1999, date où on avait modifié la loi, le Code civil en général et l'ensemble du corpus législatif, en ce qui touchait le concept de «conjoints de même sexe», M. le Président. Au moment où nous avions fait le débat, au moment où nous avions fait le débat, j'avais proposé que cette définition ait un effet rétroactif. Et on était en 1999, et on n'aurait pas eu aujourd'hui à débattre l'amendement que nous avons devant nous si le gouvernement, à l'époque, avait accepté ce que je lui avais proposé en 1999, qui était de donner un effet rétroactif, particulièrement pour les causes qui étaient des causes pendantes devant les tribunaux, en ce qui touchait les conjoints de même sexe et la possibilité d'avoir un effet rétroactif, M. le Président, sur le versement de la rente de conjoint survivant.

n(16 h 30)n

Alors, pour ceux qui nous écoutent, je vais bien limiter exactement notre débat. Il s'agit à l'heure actuelle de personnes qui étaient en relation homosexuelle, qui vivaient avec un lien marital, M. le Président, dont le conjoint était décédé avant la date du mois de juin 1999 et qui prétendaient avoir droit à la rente de conjoint survivant. M. le Président, il y avait, à ce moment-là, devant les cours et les tribunaux du Québec, un certain nombre de causes qui étaient des causes pendantes qui avaient été introduites par un certain nombre de nos concitoyens. M. le Président, je pourrai vous les citer: MM. Bleau, Brody, Crispin, Lebeau et Mme Crispin, Johanne Crispin. Ces causes étaient des causes pendantes à l'effet que ces personnes considéraient qu'il y avait une discrimination qui était faite à leur égard parce qu'elles vivaient maritalement avec un conjoint de même sexe et que ce conjoint était décédé, et, de leur point de vue, elles auraient eu droit au versement de la rente de conjoint survivant. Donc, la cause a été portée devant les tribunaux.

La cause se basait, M. le Président, devant les tribunaux, sur l'interprétation, ou la primauté de la Charte des droits et du fait que, dans la Charte des droits, on ne doit pas faire de discrimination sur la base de l'orientation sexuelle. Et, dans la Charte des droits, M. le Président, on ne doit pas faire de discrimination sur la base de l'orientation sexuelle. Ces personnes arguaient que, si le concept de vivre maritalement impliquait qu'il fallait être de sexe différent pour pouvoir vivre maritalement et satisfaire à la définition qui était incluse dans l'article 91 de la loi sur la Régie des rentes, cette interprétation était discriminatoire, à la lecture de la Charte des droits.

Ces personnes ont d'abord comme suivi la procédure normale et se sont rendues devant la Commission des affaires sociales, la CAS, qui ne leur a pas donné raison. Et la CAS, à ce moment-là, a rendu un certain nombre de décisions qui étaient des décisions qui étaient négatives à l'effet de personnes qui vivaient en union en étant de même sexe, qui vivaient en union... qui considéraient qu'elles vivaient en union maritale mais qui n'étaient... La Commission des affaires sociales a considéré que l'interprétation qu'elle donnait de l'article 91 de la loi sur la Régie des rentes était restrictive et ne leur permettait pas d'avoir droit à la rente de conjoint survivant.

Ces personnes, M. le Président, appuyées, pas par n'importe quoi, par la Commission des droits de la personne, des droits de la personne et des droits de la jeunesse... Donc, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a pris fait et cause pour les appelants pour appeler de la décision du tribunal de la Commission des affaires sociales devant la Cour d'appel du Québec. Alors, ces personnes ont appelé... Et, en plus, je me permets de vous dire la définition qui était la définition de l'article 91 de la loi sur la Régie des rentes, qui disait: «Se qualifie comme conjoint survivant, sous réserve de l'article 91.1, la personne qui, au jour du décès du cotisant, est mariée avec le cotisant et n'en est pas judiciairement séparée de corps ou vit maritalement avec le cotisant, qu'elle soit de sexe différent ou de même sexe.» Alors, à l'époque, c'était: «...vit maritalement avec le cotisant, pourvu que ce dernier soit judiciairement séparé de corps ou non marié au jour de son décès, depuis au moins trois ans ou, dans les cas suivants, depuis au moins un an: un enfant est né ou à naître de leur union, ou ils ont conjointement adopté un enfant, ou l'un d'eux a adopté un enfant de l'autre.» Ça, c'était pour réduire la période de trois ans à une période d'un an.

Alors, M. le Président, la définition... le débat a porté, devant la Cour d'appel, autour du concept de «vivre maritalement», et le panel de trois juges a rendu un jugement le 1er mars 2002. Ces trois juges étaient Marie Deschamps, Jacques Delisle et Joseph Nuss, et, au mois de mars 2002, ils ont rendu le jugement suivant, que j'ai d'ailleurs, M. le Président, déposé devant cette Chambre lorsque j'ai fait le débat en prise en considération du rapport. Ce jugement impliquait et fait l'analyse en quelque sorte de l'article 91 et 91.1 de la Régie des rentes. Et, lorsqu'il fait l'analyse de l'article 91 et 91.1, il recommande, suite à la jurisprudence qui avait été mise de l'avant par l'ancien président de la Cour suprême du Canada, le juge Antonio Lamer, il arrive à suggérer qu'une interprétation généreuse de l'article 91 est pertinente dans ce cas-ci et s'impose parce que... L'interprétation... s'impose donc lorsqu'elle ne met pas nettement à l'encontre de l'objectif de la législation en cause... lorsqu'elle constitue un empiètement moindre sur cet objectif que l'annulation de la loi ? je vous répète actuellement les critères, la grille d'analyse qui avait été mise de l'avant par le juge Antonio Lamer ? lorsqu'elle ne représente pas une usurpation du domaine législatif et lorsqu'elle n'applique pas une contrainte à ce point importante sur les décisions financières du législateur qu'elle modifierait la nature du régime législatif en question.

D'après le panel des trois juges, aucune de ces limitations n'est présente. Alors, je vous fais grâce, M. le Président, ici de la lecture de l'ensemble du jugement, mais le jugement continue et le panel de juges se pose la question. La question est donc: Un couple homosexuel qui remplit par ailleurs les autres conditions de l'article 91 de la loi vit-il comme mari et femme, c'est-à-dire vit-il maritalement? Donc, la question qui a été soulevée devant les juges, c'était: Est-ce qu'un couple homosexuel qui satisfait évidemment les questions de date, de stabilité, de partage vit-il maritalement, pour savoir s'il se qualifie au sens de l'article 91? M. le Président, la conclusion est la suivante: Les personnes de même sexe peuvent former des unions durables qui partagent les mêmes besoins d'affection que les couples hétérosexuels, qui en ont les mêmes obligations d'attention et de soin et qui peuvent être soumises à la même interdépendance économique. Ces constatations découlent obligatoirement d'une interprétation libérale de l'article 91 de la loi, imposée par la recherche de l'égalité établie par la Charte. Elles conduisent à la conclusion que les intimés ? qui étaient Brody et Crispin ? sont donc des conjoints survivants au sens de cet article.

Le résultat est le même, les intimés Bleau et Lebeau, le corridor d'interprétation du texte de l'ancien article 91.1 de la loi serait sûrement plus étroit que dans le cas de l'article 91, mais il n'en ressort pas moins de son texte un objectif clair du législateur d'inclure les conjoints de fait dans la définition de «conjoint survivant». Donc, clairement, à l'heure actuelle, ce que dit le jugement, M. le Président, le jugement vient dire, à la lecture de la Charte des droits: Le concept de vie maritale doit permettre, à la lecture de la Charte des droits, d'inclure, à ce moment-là, dans le concept de «conjoint de même sexe» les conjoints homosexuels, même avant la décision du 19 juin 1999.

Que vient faire devant nous, M. le Président, l'article 3? La ministre, dans son débat, a dit: L'article 3 veut satisfaire à la décision de la Cour d'appel. C'est évident. D'abord, la décision de la Cour d'appel, pour les appelants, a un effet probant. Il n'a pas été porté en appel devant la Cour suprême, M. le Président. Donc, elle a un effet exécutoire. Donc, on s'entend bien.

Ce que dit l'article 3, il va dire: Les personnes qui auraient été ? dont le conjoint aurait décédé, en quelque sorte ? dans cette période qui va du ? je vais vous donner la date exacte ? du 4 avril 1985 au 16 juin 1999, c'est-à-dire entre la date de la modification du statut de conjoint de fait, le 16 juin 1999, et le 4 avril 1985... Pourquoi le 4 avril 1985? Parce que le 4 avril 1985, c'est le moment où un jugement de la Cour suprême a établi la primauté de la Charte, a établi la primauté de la Charte. Donc, à partir du 4 avril 1985, on doit dire: La Charte s'applique. Et, à la lecture du jugement des honorables juges Marie Deschamps, Jacques Delisle et Joseph Nuss, c'est de dire: À partir du 4 avril 1985, ces personnes, c'est-à-dire ces personnes qui vivaient en union homosexuelle, avaient des droits, et, si quelqu'un décédait dans le couple, il aurait eu droit à la rente de conjoint survivant.

n(16 h 40)n

Le bât blesse, M. le Président, une fois qu'on a reconnu cela, le bât blesse au niveau du deuxième alinéa de l'article 3. Donc, au deuxième alinéa de l'article 3, M. le Président, le projet de loi va intervenir en disant: Ces personnes à qui on reconnaît enfin qu'elles avaient des droits à partir de 1985, ces personnes qui avaient des droits à partir de 1985 vont pouvoir faire une nouvelle demande à la Régie des rentes, et, à partir de la date de cette nouvelle demande, elles auront probablement droit à la rente de conjoint survivant, mais leur rétroactivité ne sera que d'une seule année. La rétroactivité ne sera que d'une seule année. Alors, M. le Président, à ce moment-là, vous voyez la difficulté.

Et voici pourquoi nous allons être contre le projet de loi. La difficulté est la suivante: les juges, les honorables juges Deschamps, Delisle, Nuss ont reconnu que ces citoyens qui vivaient maritalement en couple homosexuel avaient des droits. Un des deux partenaires est décédé entre 1985 et 1999. Au lieu de leur dire: Vous pouvez aujourd'hui faire une demande, on devrait dire: À partir de la naissance du droit, c'est-à-dire le jour du décès, à partir du décès de votre conjoint, puisqu'on a mal interprété le droit à ce moment-là en vous refusant la rente de conjoint survivant, vous pourriez avoir rétroactivement droit à cette rente à partir du décès de votre conjoint. Et voici le point sur lequel je diverge d'opinions actuellement avec la loi. La loi dit: Nous reconnaissons que vous aviez un droit; vous pouvez maintenant faire une demande.

La protectrice du citoyen, M. le Président, à cet effet-là ? et je me permettrai tout à l'heure de vous en lire certains points de vue ? est assez d'accord avec l'analyse que je viens de vous faire à cet effet-là et elle recommande... Et je me permets, tiens, tout de suite de vous le faire, de vous lire ces articles de la lettre du Protecteur du citoyen, lettre que, pour que mes collègues en soient conscients, j'ai déjà aussi déposée ici, en cette Chambre. Alors, la protectrice du citoyen commence en disant:

«Je suis heureuse de constater votre intention de donner suite au jugement de la Cour d'appel. Cependant, je ne peux qu'exprimer ma désapprobation devant l'alinéa 2 de l'article 91.2 que vous projetez d'insérer dans la loi. En effet, je considère inacceptable que la Régie fasse abstraction de la demande initialement formulée pour établir la date où la rente deviendra payable.

«Comme je l'explique dans ma lettre adressée à M. Morneau, dont copie est jointe à la présente, il me paraît déraisonnable de faire porter sur les citoyens les conséquences des décisions erronées de la Régie. Agir comme vous le proposez équivaudrait à cautionner la faute d'interprétation reconnue par le tribunal et le préjudice qui en découle devant les citoyens.»

Il faut bien que vous compreniez, M. le Président. La Régie, probablement de bonne foi, compte tenu de ce qui était la tendance générale au moment... a dit: Si vous êtes en union maritale dans un couple homosexuel, vous n'avez pas le droit à la rente de conjoint survivant. La Cour, dans un jugement de la Cour d'appel qui n'a pas été porté en appel, la Cour dit: Cette interprétation est erronée, à la lecture de la Charte. C'est une interprétation erronée, à la lecture de la Charte. Vous auriez dû... Évidemment, elle statue, parce qu'une cour ne statue que sur ce qu'on lui demande, elle statue par rapport aux personnes qui ont déposé devant elle une plainte. Vous auriez dû, en ce qui concerne les requérants, à savoir MM. Bleau, Brody, Crispin et Lebeau, vous auriez dû à ce moment-là considérer qu'ils étaient des conjoints qui vivaient maritalement, des conjoints de fait, et, au moment du décès d'un des deux conjoints, vous auriez dû reconnaître le droit à la rente de conjoint survivant. Alors, vous comprenez bien, M. le Président, avec la deuxième lecture du deuxième alinéa, ce droit à la rente de conjoint survivant ne sera rétroactif que d'une seule année et non pas à la naissance du droit.

Je me permets de continuer pour votre éducation, M. le Président, la lecture de la lettre de la protectrice du citoyen:

«Le deuxième alinéa de l'article 91.2 projeté reprend essentiellement le principe des articles 170 et 72 de la loi. Ce sont les articles qui dans la loi parlent de la rétroaction simplement pour une seule année.

«Je suis d'avis que ces dispositions pourraient et devraient recevoir une interprétation plus large permettant de considérer les demandes déjà présentées. À défaut d'une telle interprétation, j'ai proposé qu'une modification législative soit apportée pour qu'un versement rétroactif d'une rente puisse se faire.»

Et je tiens, M. le Président, à ce que chacun des parlementaires ici prenne bien conscience de ce que je vais vous dire. C'est le texte même de la protectrice du citoyen: «J'ai proposé qu'une modification législative soit apportée pour qu'un versement rétroactif d'une rente puisse se faire à compter de la naissance du droit à cette rente et non depuis la date de la nouvelle demande, le premier refus étant injustifié, selon la Cour d'appel du Québec.» Donc, ce que dit la protectrice du citoyen, c'est que, puisque ces gens avaient déjà un droit, qu'il n'a pas été reconnu par la Régie mais qu'il est maintenant établi, établi et par le législateur et par le jugement de la Cour d'appel du Québec, puisque ces gens avaient déjà un droit, il faut reconnaître la rétroactivité, c'est-à-dire le versement de la rente à la naissance du droit et non pas les forcer à faire une nouvelle demande et n'autoriser simplement qu'une année de rétroactivité.

M. le Président, vous allez certainement être intéressé. Ce débat autour des couples, des conjoints de fait de même sexe, est un débat qui est un débat au Québec mais aussi un débat dans l'ensemble du Canada. Vous savez, M. le Président, que le Québec a son régime de rentes, le Régime de rentes du Québec, tandis que le Canada a établi le RPC, le Régime de pensions du Canada. Je ne vous informerai pas parce que j'imagine, M. le Président, que vous devez être au courant que, récemment, un juge ontarien... Donc, on va parler maintenant non pas du Régime de rentes du Québec, mais on va parler maintenant du Régime de pensions du Canada. Et, je vais vous le dire, le juge ontarien a autorisé les gais et lesbiennes du Canada à intenter un recours collectif et d'aller dans un recours collectif pour avoir des droits aux prestations du Régime de pensions du Canada pour leur conjoint décédé. Alors, bien sûr, je ne peux pas ici présumer et je ne voudrais pas présumer assurément de la décision des cours et de la Cour d'appel de l'Ontario, mais il faut être conscient, M. le Président, que, dans ce cas-là, il ne s'agirait plus d'un certain nombre de personnes qui en ont appelé, il s'agit d'un recours collectif au nom de l'ensemble de tous les couples gais et lesbiennes qui n'ont pas eu droit à la rente de conjoint survivant au moment du décès de leur conjoint et qui collectivement font un recours collectif devant la Cour de l'Ontario, et jugement de la Cour de l'Ontario qui aura effet aussi sur une requête semblable qui avait lieu en Colombie-Britannique. C'est-à-dire, il y a eu accord pour ne pas avoir des multijugements, mais de n'avoir qu'un seul jugement.

n(16 h 50)n

Il faut être conscient qu'à l'heure actuelle les plaignants demandent actuellement, au nom de chacune de ces personnes, dans un recours collectif, le versement d'un montant de 85 000 $ à être versé à chacune des personnes membres qui font ce recours collectif. Je ne veux pas ici présumer du jugement actuellement de la Cour d'appel, mais je dis que ce que nous faisons aujourd'hui en ne reconnaissant pas, en ne reconnaissant pas, M. le Président, la rétroactivité de la rente de conjoint survivant au moment de la naissance du droit, mais en prenant une formule ou une approche, je dirais, bureaucratique, c'est-à-dire en forçant ces personnes qui avaient un droit, droit qui a été non reconnu et mal interprété par la Régie, en les forçant à faire une nouvelle demande et, à ce moment-là, de n'avoir droit simplement qu'à une rétroaction d'une seule année, vous ouvrez la porte éventuellement, M. le Président, à des recours judiciaires de la part de ces personnes pour faire reconnaître, à ce moment-là, leur rente non pas, non pas au moment où... un an qui va précéder la date de leur nouvelle demande, mais faire rétroagir le versement de la date au moment de la naissance du droit.

J'ai plaidé, M. le Président, en commission. La Régie, essentiellement, et si je gratte un peu, a d'abord dit ? premier type d'argument: Nous avons déjà étudié les demandes et nous avons rendu un jugement, nous avons rendu une décision. Le fait est, M. le Président, que la décision rendue par la Régie entre 1985 et 1999 pour ces cas, c'est-à-dire ces conjoints homosexuels qui étaient des conjoints de même sexe qui vivaient maritalement ensemble et dont l'un des deux était décédé, droit qui vient de leur être reconnu par et le projet de loi qui est devant nous et le jugement de la Cour d'appel du Québec, que ce droit, M. le Président, devrait permettre la rente au moment de la naissance du droit et non pas de dire: Nous avons pris une décision. C'était sur des critères qui étaient erronés. Les gens n'ont pas nécessairement été en appel, parce que tout le monde ne va pas nécessairement en appel, et ils se sont satisfaits de la décision. Il y a là, M. le Président, sur le plan des principes et sur le plan de l'équité, un point sur lequel nous ne pouvons pas être d'accord et qui va brimer à l'heure actuelle peut-être une minorité de personnes de la communauté homosexuelle qui avaient des droits, droits qu'on ne reconnaît pas.

Deuxième argument de la Régie des rentes: Si on nous demandait de revenir en arrière sur l'ensemble des dossiers, ce serait une tâche énorme parce qu'on n'a pas classifié exactement les dossiers. On ne sait pas exactement qui avait fait une demande et pour quelle raison telle ou telle demande a été refusée. Il faudrait qu'on aille fouiller dans nos archives. Je me permets de vous dire, M. le Président, que très probablement l'ensemble de ces personnes, l'ensemble de ces personnes ? alors, comprenons-nous bien, il s'agit des personnes qui étaient des personnes qui étaient en relation de couple homosexuel et dont un des deux partenaires est décédé avant le mois de juin 1999 ? vont se signaler. Ils vont se signaler, ils vont refaire surface parce qu'ils ont un intérêt direct de pouvoir faire une demande maintenant de rente de conjoint survivant, puisque et la loi et le jugement leur reconnaissent leurs droits, M. le Président. Ils vont se signaler.

Il serait extrêmement simple, extrêmement simple à la Régie, à ce moment-là, de pouvoir considérer que, ceux qui se signalent, ceux qui existent, ceux qui demandent une rente de conjoint survivant, on analyse la rétroactivité à la date de la naissance du droit et non pas un an avant la date de cette nouvelle demande. Ce serait relativement simple, M. le Président. Et qu'on ne nous fasse pas croire que ça apporterait une difficulté énorme sur le plan administratif à la Régie des rentes. Les gens vont certainement refaire surface, signaler leur existence et pouvoir se faire valoir.

Le dernier point, M. le Président, en est une analyse de coûts. Le dernier point est une analyse de coûts. Et, à ce moment-là, je dois dire: C'est vrai, c'est vrai, le fait de rétroagir, le fait de dire à ces personnes, à ces citoyens qui avaient des droits, qui avaient le droit de recevoir une rente: Nous allons vous payer ce que vous aviez droit, ça engendre des coûts, c'est vrai. Mais est-ce que, M. le Président, on doit juger les droits de nos concitoyens aux coûts que cela entraîne pour l'État ou la Régie des rentes? Est-ce qu'un droit, M. le Président, doit être mesuré à l'aune du coût qu'il y a pour la Régie des rentes? Est-ce que le fait qu'on accorde, on reconnaisse ce droit à ces personnes, c'est-à-dire qui avaient le droit de pouvoir toucher la rente de conjoint survivant à partir de la naissance du droit, doit être mesuré au fait qu'il y en a un certain nombre et que ça aura des effets sur les sorties de fonds qui doivent être sorties de la Régie des rentes? Et, si c'est le point de vue des ministériels, si c'est le point de vue du gouvernement, si c'est le point de vue de dire: Il y a des droits, mais ces droits que nous respectons ne sont valables que dans la mesure où ils ne coûtent pas grand-chose... Parce que c'est ça, essentiellement. Si on arrive jusqu'au bout, c'est ça, on arrive à la fin de l'analyse. Les droits ne seront valables, M. le Président, que dans la mesure où ils ne coûteraient pas grand-chose à la Régie des rentes.

Nous ne partageons pas ce point de vue, M. le Président. Nous ne partageons pas ce point de vue. Nous pensons que et la Cour d'appel ? et d'ailleurs la loi reconnaît ce principe-là ? a accordé, reconnaît... parce que notre société a évolué, mais parce que nous avons aussi ? et je dois dire que c'est un des grands, grands gains de notre appartenance au Canada ? la Charte des droits qui protège chacun des citoyens. La Charte des droits, à l'heure actuelle, la Charte des droits, M. le Président, permet de dire que certaines lois vont à l'encontre des droits fondamentaux des personnes. Et là, à l'heure actuelle, la Charte des droits... Et, à la lecture de la Charte des droits, les juges de la Cour d'appel du Québec ont dit et ont déclaré: L'interprétation que la Régie fait de ces articles 91 et 91.1 en ce qui a trait à la manière dont on doit analyser ce qu'est le principe de vivre maritalement est erronée. Ça ne respecte pas le droit fondamental qu'ont chacun des Canadiens et des Canadiennes de ne pas voir de discrimination sur la base de leurs orientations sexuelles, M. le Président. Et c'est sur ça, M. le Président, que je ne comprends pas. Je ne peux pas être d'accord aujourd'hui qu'on ne reconnaisse pas la position qui est celle de la protectrice du citoyen, à savoir que, cette rente de conjoint survivant ? parce que la Régie, au moment où elle a analysé la demande, a fait une décision qui était une décision erronée, erronée ? qu'à ce moment-là, M. le Président, on ne rétroagisse pas au moment de la naissance du droit.

n(17 heures)n

Alors, M. le Président, je dois dire que, même si nous sommes d'accord avec les articles 1 et 2, même si nous sommes d'accord avec les articles 4, 5, 6 et 7 du projet de loi en ce qui a trait aux pouvoirs de la Régie, pouvoirs qui sont maintenant, suite à l'amendement que j'ai proposé, considérablement encadrés, même si nous sommes d'accord avec le fait que ce projet de loi va amener un assouplissement utile en ce qui a trait à la manière dont on va utiliser les définitions de l'invalidité, même si ce projet de loi vient apporter, en ce qui a trait au régime de rentes de la construction du Québec, des amendements nécessaires et même souhaitables, le fait que le deuxième alinéa de l'article 3, le fait que ce deuxième alinéa n'ait pas un effet rétroactif à la naissance du droit va nous amener, M. le Président, à nous exprimer contre ce projet de loi.

Le premier alinéa de l'article 3 a reconnu le droit, a reconnu que ces gens-là avaient un droit à partir de la date de la primauté de la Charte, c'est-à-dire à partir d'avril 1985. Mais on vous dit, dans ce deuxième alinéa, que l'exercice de ce droit ne sera limité simplement qu'à une seule année, qu'à une seule année. Vous n'aurez droit qu'à une seule année de rétroactivité. Et ça, M. le Président, c'est absolument contraire à l'ensemble de principes et de respect des droits de nos concitoyens homosexuels, M. le Président. Et donc, c'est à regret que nous allons voter contre le projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Verdun. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaitent intervenir sur l'adoption de ce projet de loi?

Mise aux voix

Alors, puisqu'il n'y a pas d'autres intervenants, est-ce que le projet de loi n° 128, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté sur division. M. le leader adjoint.

M. Simard (Montmorency): Merci, M. le Président. C'est avec honneur que je vous réfère à l'article 12 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 147

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Beaulne): À l'article 12, M. le ministre responsable de la Faune et des Parcs propose l'adoption du principe du projet de loi n° 147, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. M. le ministre.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Merci. Merci, M. le Président. Effectivement, je présente aujourd'hui, à titre de ministre responsable de la Faune et des Parcs, le projet de loi n° 147 modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Ce projet couvre principalement les trois thèmes suivants: d'abord, la reconnaissance du droit de chasser, pêcher et piéger; ensuite, l'interdiction de faire obstacle sciemment à ces activités; et, enfin, le respect de la propriété privée et le droit des municipalités de légiférer en la matière.

Comme vous le savez, la chasse, la pêche et le piégeage ont joué un rôle déterminant dans l'histoire de l'Amérique du Nord et évidemment dans l'histoire du Québec. Aujourd'hui, c'est 2,2 millions de Québécois qui manifestent de l'intérêt pour la pêche, dont 800 000 détenteurs de permis, et environ 650 000 personnes pour la chasse, dont 400 000 détenteurs de permis. Ces activités dites de prélèvement génèrent annuellement des retombées économiques de plus de 1,3 milliard de dollars et permettent le maintien de 32 000 emplois à temps complet, consolidant ainsi évidemment nos économies locales et régionales. À elle seule, M. le Président, la pêche assure plus de 10 000 emplois, et ce, évidemment principalement en région.

Les transformations sociales survenues au cours du dernier siècle cependant ont bien sûr modifié notre rapport avec la nature. Les fruits de la chasse, de la pêche et du piégeage ne suffisent plus depuis longtemps évidemment à combler nos besoins en alimentation. De plus, la perception d'une partie de la population s'est également modifiée à l'égard des activités de prélèvement. Ce faisant, la chasse et le piégeage sont devenus souvent la cible de groupes s'opposant à toute forme de prélèvement. Or, M. le Président, il faut savoir que ces activités sont non seulement légitimes, mais qu'en plus elles sont un maillon important et tout à fait nécessaire quand il est question de conservation de la faune. La conservation de la faune implique justement qu'on s'assure que les espèces animales soient en nombre suffisant, qu'elles soient en santé, qu'elles jouissent d'un bon habitat et qu'elles ne causent pas de préjudice aux humains. Pour ce faire, M. le Président, il est impératif, lorsque cela est requis, d'effectuer des prélèvements par la chasse et le piégeage de façon justement à régulariser les populations fauniques. Aussi, malgré les efforts d'information et d'éducation de la part de la Société de la faune et des parcs et de tous ses partenaires, ses nombreux partenaires, force est de constater qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire en matière de sensibilisation. Cela est vrai, M. le Président, surtout lorsqu'on constate que les problèmes occasionnés par une surabondance faunique sont méconnus de plusieurs groupes.

Premièrement, il faut rappeler que, justement, la surabondance de certaines espèces peut générer des coûts sociaux et économiques importants. En Estrie, par exemple, un accident de la route sur trois, en dehors des milieux urbains, est imputable au très grand nombre de cerfs de Virginie qu'on retrouve dans cette région. Aussi, quand survient un accident, il s'ensuit des coûts humains et matériels majeurs. Deuxièmement, la surabondance cause parfois des pertes au niveau des récoltes, avec le coût économique qui en résulte. Le cas de l'île d'Orléans où il a fallu récemment permettre un prélèvement limité de chevreuils en est un exemple. Troisièmement, la surabondance occasionne dans certains cas une dégradation des habitats qui se traduit, on le comprendra, par une perte réelle pour la faune. Finalement, il y a les cas où le surnombre, associé à un manque de nourriture et de prédateurs, a pour effet la prolifération de maladies qui viennent affaiblir globalement le cheptel.

Pour toutes ces raisons, la chasse, la pêche et le piégeage sont des instruments de régulation des populations fauniques sans lesquels, il faut le dire, il faudrait, à l'occasion, procéder purement et simplement à des activités d'abattage, ce qui n'est pas, vous le comprendrez, une solution intéressante pour qui que ce soit.

C'est en partie dans ce contexte, M. le Président, que le gouvernement du Québec a décidé d'agir, et j'aimerais ici préciser qu'il y a de nombreux précédents en matière de reconnaissance du droit de chasser, de pêcher et de piéger. On l'a fait, avant nous, en Ontario et dans plusieurs États américains, on pense au Colorado et au Michigan. Nous ne sommes donc pas des pionniers dans ce dossier. Mais, par ailleurs, là où nous innovons, c'est dans la gestion de ces activités, mais aussi dans la réelle implication des organismes liés à la chasse, à la pêche et au piégeage au chapitre de la conservation de la faune.

Entre autres, il ne faut pas oublier qu'au Québec ces organismes, eux, ont été des pionniers pour le maintien des habitats et qu'ils sont toujours à l'avant-garde dans ce domaine. Les millions de dollars investis annuellement par diverses fondations et organismes de la faune contribuent tout autant au maintien de la biodiversité qu'à la qualité de vie de l'ensemble de la collectivité. La conservation des espèces fauniques, le juste partage des ressources et la sécurité des citoyens sont à la base des normes qui encadrent ces activités au Québec. À cela s'ajoutent les diverses règles d'éthique en vigueur dans ces domaines en vue de maintenir la légitimité de la pratique aux yeux de l'ensemble de la population.

Dans un autre ordre d'idées, j'aimerais dire quelques mots, M. le Président, sur un phénomène qui s'est répandu au cours de la dernière décennie, soit celui des réglementations municipales qui interdisent, sur la base de la nuisance, la décharge d'armes à feu et donc, évidemment, empêchent le prélèvement.

Je tiens d'abord et avant tout à sécuriser les intervenants du monde municipal quant aux implications de ce projet de loi, les implications face à leur pouvoir de réglementer sur leur territoire. Il n'est nullement question de limiter ce pouvoir ni de l'affecter d'aucune manière. Les municipalités et villes pourront continuer à gérer les nuisances qui peuvent survenir chez elles. Entre autres choses, il est vrai que les tribunaux ont reconnu que la pratique de la chasse, notamment, pouvait constituer une nuisance dans un lieu fortement urbanisé. Cependant, la situation est différente à l'extérieur des zones urbaines, puisque les territoires rural et périurbain offrent souvent un bon potentiel faunique. Cependant, certains citoyens s'opposent parfois à la chasse, surtout par méconnaissance des avantages que procure cette activité. Nous comprenons que, dans certaines municipalités, il puisse y avoir des situations problématiques. Or, outre la possibilité de réglementer les nuisances, les municipalités ne disposaient pas, jusqu'à tout récemment, de moyens ni de ressources pour agir. C'est pourquoi, en réponse à la demande du monde municipal, la Société de la faune et des parcs du Québec a développé avec ses partenaires de nouveaux outils réglementaires efficaces dans le règlement des conflits. On pense, entre autres, à l'interdiction de tirer à proximité des chemins publics et aux restrictions relatives aux types d'armes autorisées en milieu périurbain. La Société d'ailleurs est toujours prête à rencontrer les municipalités et à leur proposer des solutions aux problèmes auxquels elles font face dans la pratique de la chasse.

n(17 h 10)n

Chose certaine, et je répète, M. le Président, il n'est pas de notre intention par ce projet de loi de limiter d'une quelconque façon le pouvoir des municipalités de réglementer la décharge d'armes à feu à des fins de sécurité. Il faut préciser ici que la problématique de la chasse et du piégeage en milieu périurbain n'est ni nouvelle ni spécifique au Québec. Déjà, dans les suites du Sommet québécois sur la faune en 1988, un code d'éthique était produit afin de baliser les relations entre chasseurs et propriétaires terriens. Puis, en 1999, un document invitant la concertation recevait l'appui des associations municipales et était remis à chaque municipalité. Ce document intitulé La chasse à l'aube du XXIe siècle est toujours d'actualité. Nous poursuivons aujourd'hui ce même objectif de concertation, car nous sommes convaincus qu'il est prérequis à la pratique harmonieuse de ces activités sur le territoire périurbain dans le respect des particularités locales.

Un autre volet important de ce projet de loi, M. le Président, concerne la propriété privée. En effet, le domaine privé, bien qu'il ne représente que 10 % du territoire québécois, supporte plus de 40 % des journées de chasse. Or, l'accès à ces terrains privés devient de plus en plus difficile. Le défi consiste à concilier les intérêts des producteurs agricoles qui demandent, à juste titre, un contrôle des populations fauniques tout en assurant aux chasseurs un accès aux terres de ces mêmes producteurs afin d'effectuer les prélèvements.

Un autre point à souligner concerne l'encadrement de la chasse, de la pêche et du piégeage. D'emblée, il faut préciser que ces dernières sont déjà les activités récréatives de masse les plus réglementées qui soient. En plus, il faut tenir compte du fait que les chasseurs, pêcheurs et piégeurs ne sont pas les seuls utilisateurs de la forêt à des fins récréatives. Aussi, et je tiens à être clair là-dessus, ce projet de loi qui s'inspire de démarches entreprises par plus du tiers des administrations nord-américaines ne vise en aucune façon à prioriser ces pratiques par rapport aux autres usages du territoire. Ceci inclut évidemment le respect du droit de propriété qui, pour moi, doit demeurer et demeurera inviolable.

Avec ce projet de loi, il s'agit d'abord et avant tout d'une reconnaissance formelle, d'une affirmation de principe selon laquelle l'Assemblée ici présente confirme à toutes les Québécoises et à tous les Québécois que la pratique de ces activités: la chasse, la pêche et le piégeage, la pratique de ces activités est tout à fait légitime au XXIe siècle. Aussi, afin d'éviter toute interprétation erronée des intentions du législateur quant à la pratique des autres activités de plein air ou quant à la libre jouissance de la propriété, cette reconnaissance sera assortie d'une clause de non-prépondérance. Ce que ce projet de loi n° 147 recherche, c'est l'équilibre dans la pratique des activités de plein air, l'équilibre entre les activités avec prélèvement et les activités sans prélèvement.

Quant à la reconnaissance par le Québec d'une telle légitimité, elle viendra soutenir, nous l'espérons, la dynamique des efforts de concertation que les municipalités et les associations représentant les chasseurs sont souvent amenées à assumer au plan local. Pour ce qui est de la modification que nous proposons sur l'interdiction de faire obstacle à une personne pratiquant la chasse, la pêche ou le piégeage, la très grande majorité des gouvernements nord-américains ont déjà inscrit cette interdiction dans leur législation. Il s'agit, selon moi, d'une mesure qui vise à s'assurer que les adeptes d'une ou l'autre de ces activités puissent la pratiquer sans être importunés indûment, ce qui est normal, souhaitable et souhaité. Il va de soi que cette nouvelle mesure ne vise évidemment que les activités pratiquées légalement et que les personnes ayant un accès légitime à un lieu de pratique. Le cas échéant, la preuve devra démontrer clairement que la nuisance à la pratique de ces activités aura été causée de façon volontaire.

Au chapitre du respect de la propriété, valeur qui nous tient tous à coeur, le projet de loi prévoit une interdiction de chasser, de piéger ou de pêcher sur un terrain privé, à moins d'y être autorisé, dans les cas où le propriétaire est partie à une entente avec un organisme voué à l'accès des chasseurs, pêcheurs ou piégeurs sur un tel terrain. Sans cette autorisation, une intrusion constituera une infraction à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Le respect du droit de propriété assuré par les agents de protection de la faune constitue, selon moi, un gain pour le respect de la propriété privée. Précisons ici que de telles ententes entre les propriétaires et les organismes voués à l'accès des chasseurs, pêcheurs ou piégeurs existent depuis 1983, de sorte que nous sommes en mesure d'offrir une protection accrue de leurs propriétés. La modification proposée a ainsi pour objectif de faciliter la conclusion d'ententes avec des propriétaires en allégeant la démarche.

En guise de conclusion, M. le Président, j'aimerais souligner que chez nous, au Québec, la conservation de la faune est une réalité qui se traduit quotidiennement par des actions concrètes de la part de l'État, mais surtout de la part de ceux et celles qui pratiquent des activités reliées à la nature et à la faune, qu'ils soient chasseurs, randonneurs, ornithologues ou trappeurs. Au Québec, nous sommes modernes dans nos comportements, dans nos façons de faire et dans notre vision de la conservation et de la mise en valeur de la faune. Nous ne ménageons aucun effort de ce côté ni du côté de l'harmonisation des différentes activités qui se pratiquent aujourd'hui dans la nature. Aussi, M. le Président, le projet de loi n° 147, je le redis, vise à assurer que les activités pratiquées en nature, qu'elles soient avec ou sans prélèvement, cohabitent le plus harmonieusement possible, et c'est tout à fait possible.

En terminant, M. le Président, j'aimerais remercier tous les organismes, groupes et individus qui nous ont fait part de leurs commentaires dans le processus de rédaction de ce projet de loi et qui ont ainsi contribué à améliorer le contenu. Je pense, entre autres, au Groupe-faune national, à la Fédération québécoise de la faune qui regroupe près de 150 000 membres dans 200 associations, aux gens des Affaires municipales et, évidemment, à l'équipe de la Société de la faune et des parcs du Québec. Je sais qu'ils souhaitent l'adoption de ce projet de loi dans les meilleurs délais ? et ils le souhaitent depuis plusieurs mois et plusieurs années ? et que, comme moi, ils comptent sur la collaboration de tous les partis politiques et de tous les députés de l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole officiel de l'opposition en matière de parcs et de faune, le député d'Argenteuil, à nous adresser la parole. M. le député.

M. David Whissell

M. Whissell: Alors, merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je tiens à vous souligner que l'opposition libérale tend la main au ministre et au gouvernement dans l'adoption de ce projet de loi. Trop souvent, on nous critique, à tort, de vouloir contester, protester les projets de loi gouvernementaux, mais je pense que celui-là est quand même unanime. Il n'en demeure pas moins, M. le Président, que, lorsqu'on fera l'étude détaillée, on aura des questions, je pense, pertinentes, au niveau du libellé de la loi, parce que je dois vous avouer qu'il y a des gens extérieurs aux Groupe-faune qui, lorsqu'ils font la lecture du projet de loi, ont certaines interrogations et certaines craintes.

n(17 h 20)n

M. le Président, au niveau de la faune, je pense que les Québécois sont unanimes à dire que c'est un des secteurs importants qu'il faut préserver au Québec. L'Assemblée nationale s'est dotée d'une loi il y a plusieurs années, la Loi de la conservation et de la mise en valeur de la faune, qui vient encadrer la protection de la faune en permettant la création de parcs, de réserves, de zecs et de d'autres types d'aires de protection.

Je profiterai de l'occasion ici pour dire que mon collègue d'Orford et moi-même avons, au cours des derniers jours, travaillé au niveau de la loi qui est présentée par le ministre de l'Environnement, la loi qui s'intitule la loi sur le patrimoine naturel, et je me dois quand même de souligner la non-participation du ministre responsable de la Faune aux travaux parlementaires pour cette loi, parce que les deux sont quand même intimement liés. Et je vois le ministre qui m'écoute attentivement, il n'est pas trop tard pour bien faire, il pourra participer à nos travaux, il reste encore des étapes à l'adoption du projet de loi. Mais il est quand même utopique de voir un ministre qui travaille, d'un côté, à protéger la faune, les parcs et certains territoires et, d'un autre côté, on a un ministre qui nous parle de biodiversité et de protections bien spécifiques, avec ou sans chasse, ou pêche, ou piégeage sur ces territoires. Alors, c'est comme si le gouvernement n'avait pas fait l'union de l'objectif, mais on laisse bel et bien deux ministres piloter deux dossiers différents.

M. le Président, la chasse, il faut le reconnaître, ça fait partie de notre histoire. Les premiers colons qui se sont établis au Québec, en Amérique, subsistaient en grande partie grâce à la chasse, à la pêche, au piégeage. L'économie du Québec a été longtemps basée sur la fourrure, et la fourrure, on la prélève lors d'activités de chasse et de piégeage. Alors, M. le Président, il faut être capable de reconnaître que c'est une activité humaine qui rejoint nos origines, qui rejoint également nos aspirations initiales en tant qu'êtres humains. Se nourrir, c'est la base d'une société et, pour y parvenir, les premiers humains ont dû chasser et pêcher. Et ces valeurs-là, ces instincts, si je peux les nommer ainsi, sont ancrés en nous. Alors, il n'est pas surprenant de voir que des millions de personnes au Québec pratiquent la chasse et la pêche.

Vous-même, M. le Président, je suis convaincu que, dans votre longue carrière, vous avez pris le temps d'aller pêcher et chasser à travers le Québec et peut-être même à travers le monde. Souvenez-vous, l'ancien ministre de l'Agriculture qui avait été à la chasse aux pigeons en Amérique du Sud, ça avait fait un peu un tollé, et on avait un peu ridiculisé le nombre de pigeons qui avaient été tirés par le ministre de l'Agriculture du Québec. Mais il n'en demeure pas moins que ça fait partie d'une réalité.

M. le Président, ici, en cette Chambre, en tant que législateurs, le ministre, le gouvernement se doivent d'assurer la protection de la ressource. On est chanceux, la chasse, la pêche, ce sont des activités qui sont basées sur une ressource qui est renouvelable, c'est-à-dire que, si on contrôle bien la ressource, elle ne se tarira jamais. Alors, il est normal que nous devons chasser. À défaut de quoi, on peut voir des épidémies arriver dans certains types d'animaux. On voit le nombre d'accidents qui augmentent le long des routes du Québec; il y a des régions où c'est devenu très problématique, par exemple en Estrie. Il y a d'autres territoires qui sont affectés par la forte population d'une espèce sur ce même territoire; pensez à Anticosti où on fait des prélèvements forestiers, mais, avec la forte population de chevreuils, les arbres ne peuvent se régénérer, parce que les chevreuils consomment les repousses au fur et à mesure qu'elles grandissent. M. le Président, une fois qu'on a admis tout ça, on n'a pas à avoir honte de dire que, la chasse et la pêche, c'est une bonne activité.

Ce qui est demandé présentement, c'est d'enchâsser dans la loi existante, et je prendrai le temps de vous lire l'article, d'enchâsser dans la loi que «toute personne a le droit de chasser, de pêcher et de piéger conformément à la loi». Et cette loi, M. le Président, elle vient clarifier, encadrer, réglementer justement la chasse, la pêche et le piégeage. Parce que le gouvernement du Québec a dit oui à la chasse et à ses activités inhérentes, mais il faut l'encadrer. Alors, on a mis en place, depuis les années des périodes de chasse, des nombres d'animaux ou de poissons qu'on peut prélever lors d'une activité, par jour ou par semaine, et, M. le Président, heureusement qu'on le fait, parce que nous contrôlons les populations fauniques au Québec.

Il y a quelque chose qu'il faut reconnaître d'entrée de jeu, le droit de propriété. Le ministre y a fait référence. Pour nous, les libéraux, ça fait partie de façon intrinsèque à nos valeurs de respecter le droit d'autrui. Alors, l'accessibilité à une propriété, ça passe obligatoirement par le consentement du propriétaire, et ça, fondamentalement, les libéraux, on n'ira jamais à l'encontre de cette valeur, parce que c'est un droit, c'est un droit qu'on a enchâssé dans notre Code civil, c'est un droit qui a été reconnu, et je pense que c'est légitime, M. le Président, de dire que, quand vous êtes chez vous, vous êtes maître de l'accessibilité de vos lieux. Bien sûr, le gouvernement peut y venir pour contrôler certaines activités, qu'elles soient de la chasse ou autres, mais c'est un droit fondamental, et je tiens à dire que jamais le Parti libéral n'endosserait le projet de loi n° 147 si on n'avait pas la ferme certitude que le droit de propriété ne sera pas protégé.

Par contre, je vous dirais qu'il faut reconnaître également que les animaux qui vivent, qui traversent, qui survolent la propriété privée, eux, sont la propriété de l'ensemble des Québécois, et je vous dirais que c'est un droit qui nous appartient au même titre que l'air, et que les ressources minérales, ou que la forêt en terre publique. Alors, une fois qu'on a reconnu que la ressource appartient à tous, on peut se permettre de la réglementer. Et, M. le Président, je suis convaincu que, dans vos longues années d'expérience, vous avez pris le temps de regarder la Gazette officielle du Québec, et, quand on regarde la table des matières, je peux vous dire une chose, le secteur, le ministère où on voit le plus de règlements passer, c'est le secteur de la faune et des parcs. Je ne vous dirais pas qu'il y a le tiers des règlements qui passent dans la Gazette officielle qui proviennent justement de la réglementation faunique, mais je vous dirais que c'est de loin le ministère ou le dossier qui prend le plus de place dans la Gazette officielle. Alors, ça démontre à quel point, avec les années, le législateur a voulu donner de l'importance à ces activités et à leur protection.

Vous savez, moi, quand je suis arrivé dans le domaine en tant que porte-parole, ce qui m'a surpris le plus, c'est de réaliser que les plus grands défenseurs de la faune, des espèces fauniques, étaient les chasseurs et les pêcheurs. Pourquoi? Parce qu'ils ont dans leurs valeurs le désir d'exécuter une activité de chasse et de pêche. Mais, quand on fait une activité, M. le Président ? et je suis convaincu que ça a été le cas pour vous la dernière fois ? on veut attraper le plus gros poisson puis on veut attraper le plus gros chevreuil avec le plus de panache et le plus de pointes. Et ça, pour en arriver à ce résultat, il faut avoir planifié justement la montée de la population, préservé les mâles. Vous savez, le chevreuil, il y a des gens qui vont dire: Il ne faut pas tuer les chevreuils. Mais, vous savez, dans la région chez nous, on ne peut tuer que les chevreuils mâles. Les femelles sont protégées, les chevreuils en bas âge sont protégés. Et je vous dis que, pour en attraper un, il faut être vigilant, il faut se lever de bonne heure et avoir un bon terrain.

n(17 h 30)n

Alors, revenons, M. le Président, au projet de loi en lui-même. Une fois ceci étant dit, regardons ce qui se fait ailleurs. C'est toujours intéressant, quand le gouvernement nous amène un projet de loi, de dire: Regardons autour de nous les autres sociétés et qu'est-ce qui se passe. Alors, en Colombie-Britannique, on a passé un projet de loi très similaire, et je vais juste vous lire le titre de la loi: «The Hunting and Fishing Heritage Act», et, vous voyez, dans le titre on parle d'«Heritage». C'est dire à quel point on relie la chasse et la pêche à notre héritage personnel ou à notre héritage collectif. Alors, concrètement, le projet de loi vient donner, au point de vue législatif, la même couverture que celle du Québec.

Plus près de nous, en Ontario, il y a un projet de loi qui est déposé ? je n'ai pas pu savoir s'il a été adopté depuis ? et c'est un projet de loi qui dit... Le titre, c'est Loi visant à reconnaître le patrimoine de la chasse et de la pêche sportive en Ontario et de créer la Commission du patrimoine chasse et pêche. Alors, ici, on vient, par amendement législatif, renforcir la notion de chasse et pêche dans la loi. Et on va même plus loin, on crée une commission du patrimoine qui verra justement à s'assurer que ce droit fondamental qui nous appartient tous sera protégé. Et protéger ce droit, M. le Président, ça ne veut pas dire nécessairement abolir tous les règlements municipaux qui viennent encadrer, à une façon et à une échelle plus locales, ces activités. Il y a des activités de chasse, M. le Président...

Je vais vous donner un exemple, chasser à la poudre noire. J'ai vécu cette expérience pour la première fois cette année. C'est assez intéressant comme type de chasse. C'est un fusil qui a une portée très courte, qui a une puissance de feu très, très faible. Alors, pour chasser, il faut être très proche de l'animal. Deux cents mètres, c'est trop. Il faut vraiment être proche. Alors, c'est de la chasse fine et c'est de la chasse, que je vous dirais, qui est respectueuse de l'environnement au point de vue de la sécurité parce que le projectile parcourra une distance très courte, et il y a moins de risques d'accident. Alors, il y a des zones présentement au Québec où on ne peut pas chasser avec une arme très puissante, mais on peut chasser le chevreuil avec une arme de puissance restreinte. Et la beauté, M. le Président, c'est que ce type de fusil, de carabine a un seul coup. Alors, si vous manquez votre coup, le chevreuil est déjà disparu et vous devrez vous reprendre une autre journée.

Alors, ce sont les chasseurs qui ont amené cette vision, cette approche de protection de la faune. On a dit: Il y a des secteurs où c'est peut-être dangereux d'y aller avec une arme très puissante. Le projectile peut parcourir 1 km puis 1,5 km, créer des dommages ou même des pertes humaines. Et le milieu s'est adapté, et on revient aux sources. Regardez comment que c'est, on revient avec des carabines qu'on utilisait il y a 100 ans. Alors, M. le Président, c'est dire que le milieu reconnaît l'importance de préserver la ressource.

Le ministre a fait état de groupes qui se sont déclarés favorables au projet de loi. Je prendrai le temps pour les énumérer, même si certains ont été énumérés par le ministre: la Fédération québécoise de la faune, un organisme qui s'implique activement au niveau de la préservation, de la remise en état d'habitats fauniques et qui également fait... je n'utiliserai pas le mot «groupe de pression», mais qui s'assure que les droits des chasseurs et des pêcheurs sont respectés dans nos législations, et c'est normal; l'Association des biologistes du Québec, qui est venue donner son accord au projet de loi; la Fédération québécoise des zecs; la Fondation de la faune du Québec, dont le rôle est de mettre en valeur certains habitats fauniques; la Fédération des pourvoyeurs du Québec, des gens qui vivent des activités de chasse et de pêche et qui, eux aussi, réclament le plus de protection possible pour les espèces parce que c'est leur gagne-pain. Plus d'animaux dans la forêt, plus de pourvoyeurs. Ils ont donné leur appui.

La Fédération des trappeurs. Vous savez qu'au Québec il y a encore des gens qui viennent à bout de ramasser des montants assez importants pour gagner leur vie, et je connais quelqu'un, moi, qui aurait payé ses études d'étudiant seulement en faisant du trappage. La Fondation héritage faune, un autre organisme. La Fédération québécoise du saumon atlantique, qui, elle aussi, prône la protection de la ressource. Ils le prônent tellement, M. le Président, qu'ils sont en train de transmettre comme valeur aux pêcheurs de saumon la remise à l'eau. On attrape un beau saumon, on le regarde, on prend la photo, on le remet dans la rivière en espérant qu'il se reproduira et apportera, l'année suivante, des nouveaux saumons.

Le Syndicat des agents de conservation de la faune, qui s'est déclaré en faveur, et on sait qu'ils peuvent être très critiques parfois à l'égard du gouvernement. Ici, c'est M. Huppé, directeur au Service juridique de la SEPAQ. Ici, c'est intéressant parce que c'est l'organisme WWF, le Fonds mondial pour la nature, qui est un organisme à connotation et à portée internationale, qui ici dit qu'on ne peut pas dissocier prélèvements fauniques avec préservation. Alors, c'est très intéressant. Mme Nathalie Zinger, qui est également venue présenter un mémoire en commission parlementaire concernant le projet de loi pour le patrimoine de protection des aires protégées. Et, en terminant, ici, George Arsenault, qui nous écrivait pour nous dire qu'on procédait.

M. le Président, ceci dit, il aurait été intéressant quand même d'entendre le monde municipal. Lorsqu'on a fait les discussions entre nous, la première question qu'on s'est demandée: Quelle est la réaction des élus municipaux, des MRC qui actuellement ont des réglementations qui limitent la pratique de la chasse et de la pêche sur leur territoire? Et, vous savez, on demande toujours des consultations publiques. Le ministre a décidé de s'abstenir. Soit! Mais on tient à souligner que le domaine municipal, le monde municipal aurait fort pu bien nous présenter ses interrogations et également ses positions.

M. le Président, ce projet de loi, je pense, permettra de lancer un message clair, que la chasse est une activité légitime et que, dans la Loi de la conservation et de la mise en valeur de la faune qui encadre les activités, qui encadre déjà les activités de chasse et de pêche, on viendra enchâsser l'article que je vous ai lu précédemment et qui viendra, dans le fond, clarifier et mettre encore plus d'emphase, accentuer le fait que les Québécois ont le droit d'utiliser cette ressource qu'est la faune et les espèces qui y habitent. Alors, M. le Président, nous pourrons passer à l'étude détaillée du projet de loi, et je vous réitère que, pour nous, la question du droit de propriété est fondamentale, la question également du droit des municipalités de réglementer dans le respect de la Loi de la conservation et de la mise en valeur de la faune, et je dis bien dans le respect parce que, à mon point de vue, une municipalité ne peut outrepasser ses droits et aller plus loin que ce que le législateur a édicté dans son règlement.

Alors, M. le Président, nous sommes prêts à passer à l'autre étape, et je suis convaincu que le ministre aura toute, et je dis bien toute, notre attention et toute notre collaboration au bon déroulement des travaux en commission parlementaire et que, en bout de ligne, je pense que la faune en sortira gagnante. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député d'Argenteuil. Y a-t-il d'autres interventions à cette étape-ci du principe du projet de loi n° 147?

Mise aux voix

Puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que le principe du projet de loi n° 147, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission
des transports et de l'environnement

M. Simard (Montmorency): Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des transports et de l'environnement et pour que le ministre responsable de la Jeunesse, du Tourisme, du Loisir et du Sport en soit membre.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

n(17 h 40)n

Le Vice-Président (M. Beaulne): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Simard (Montmorency): Alors, M. le Président, c'est pour moi un très, très grand honneur que de vous référer à l'article 40 qui concerne un important projet de loi sur l'environnement.

Projet de loi n° 102

Adoption

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bon. À l'article 40 du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Environnement et à l'Eau propose l'adoption du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. M. le ministre.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Je vous remercie beaucoup, M. le Président. C'est donc avec très, très grand plaisir que j'interviens dans la dernière série de débats qui concernent le projet de loi n° 102 qui, comme vous le disiez, s'intitule Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. Alors, c'est une loi qui, M. le Président, a priori peut paraître banale parce que son titre n'est pas des plus percutants, parce qu'il s'agit d'un projet de loi qui ne contient que... bon, moins d'une vingtaine d'articles, mais ne vous fiez pas aux apparences, parce qu'il s'agit d'un projet de loi vraiment important qui fera avancer la collectivité québécoise dans la relance de la collecte sélective, un projet de loi donc qui vient modifier une loi déjà existante, une des lois les plus volumineuses que nous ayons au Québec, la Loi sur la qualité de l'environnement, qui incidemment fêtait, en l'an 2002, ses 30 ans d'existence. La première rédaction de cette loi remonte à 1972, ici, au Québec. Comme dans l'ensemble de plusieurs d'ailleurs collectivités et sociétés industrielles, c'est au début des années soixante-dix qu'on a amorcé les premières rédactions législatives, donc de textes de loi concernant l'environnement. Alors, ce projet de loi, je vous le disais, vient modifier le chapitre VII de cette loi qui concerne la gestion des matières résiduelles.

Très souvent, on écoute les débats à l'Assemblée nationale et on s'imagine que les députés de la majorité ministérielle et ceux de l'opposition sont souvent à couteaux tirés, qu'ils ne se rejoignent pas et qu'ils sont en perpétuelle opposition. Or, ce projet de loi, M. le Président, comme d'autres, mais celui-ci en particulier, est l'illustration que, dans certaines circonstances, l'ensemble des parlementaires peuvent se retrouver, se regrouper et faire front commun pour l'avancement de la collectivité, notamment en matière environnementale et tout particulièrement eu égard au recyclage. Et c'est donc le cas pour le projet de loi n° 102 qui fait l'unanimité des membres de cette Assemblée et sur lequel l'ensemble des membres de la commission de l'environnement ont d'ailleurs travaillé d'arrache-pied depuis des mois.

Je vous dis «des mois» et, dans le fond, je pourrais parler d'années parce que ce projet de loi, M. le Président, que nous voterons prochainement est une loi qui a connu ses premières versions via une réglementation sur l'emballage au milieu des années quatre-vingt-dix. Donc, depuis ce temps, depuis ces premières versions où on a commencé à penser sur la manière dont on pourrait relancer la collecte sélective au Québec, il a passé beaucoup d'eau sous les ponts, et nous en sommes rendus donc à un projet de loi qui fait largement consensus dans la société québécoise, un projet de loi que j'aimerais vous présenter dans ses grandes lignes dans les minutes qui s'annoncent.

Alors, la première question à laquelle on se doit de répondre pour les personnes qui nous écoutent, c'est: Mais pourquoi ce projet de loi, hein? Pourquoi a-t-on besoin d'un projet de loi pour relancer la collecte sélective? La réponse est très simple. Depuis le début des quatre-vingt-dix, au moment où on a créé la société d'État RECYC-QUÉBEC, on a amorcé, dans une pléiade de municipalités du Québec, le recyclage. Au tout départ, en 1992, on recueillait autour de 132 000 tonnes par année. Aujourd'hui, on en recueille un peu plus de 320 000, une dizaine d'années plus tard, donc un accroissement majeur de plus de 280 %, si ma mémoire est exacte, mais qui reste largement insuffisant. Pourquoi? Parce que, sur l'ensemble des déchets ? permettez-moi cette expression un peu péjorative ? que l'on génère, nous ne recyclons que 35 % de ce total. Il reste donc encore des quantités de matières résiduelles que l'on met dans nos sacs verts et qui pourraient servir à autre chose, mais qui ne servent pas à autre chose parce qu'on ne se donne pas la peine, parfois faute de moyens, de pouvoir le recycler adéquatement et redonner vie d'une manière ou d'une autre à ces substances.

Donc, sur les 10,7 millions de tonnes que l'on génère comme collectivité au Québec, c'est-à-dire à peu près 20 tonnes à la minute ? hein, c'est quand même considérable ? eh bien, on en recycle moins de sept à la minute. Alors, vous voyez l'énorme fossé qui nous sépare entre ce que nous faisons maintenant et ce que nous pourrions faire à l'avenir.

Nous avons, parlant d'avenir, des objectifs assez ambitieux. Nous voudrions, d'ici l'an 2008, récupérer 60 % des matières résiduelles qui se retrouvent dans le sac vert. Nous n'en récupérons, au moment où on se parle, qu'à peine 20 %. Alors, vous voyez que, d'ici 2008 ? nous serons, dans quelques jours, en l'an 2003 ? nous avons moins que cinq ans devant nous pour pouvoir atteindre nos objectifs, en fait pour pouvoir tripler, dans le secteur municipal, les matières résiduelles que l'on met donc dans nos poubelles. Alors, vous voyez un peu le contexte.

Depuis une dizaine d'années, la société québécoise a connu une croissance économique fulgurante, l'une des plus importantes d'ailleurs de l'ensemble du G7, parce que vous savez que le Canada est considéré comme un pays qui a connu l'une des meilleures croissances du G7, et le Québec est l'entité qui dans le Canada a le mieux performé. Alors, vous vous imaginez que, dans l'ensemble des sociétés occidentales, le Québec est une des collectivités qui a eu les gains économiques les plus fantastiques au cours des 10 dernières années, dis-je. Le taux d'emploi est là pour en corroborer, l'accroissement de notre PNB également. Mais, vous me voyez venir, M. le Président, qui dit accroissement du produit national brut, donc accroissement de la production des biens et des services, dit forcément, presque mathématiquement et logiquement, accroissement des matières résiduelles que l'on met dans nos poubelles, parce que, avant de les mettre dans les poubelles, on les a souvent achetées, et donc c'est un lien direct entre la croissance économique, très souvent, et l'accroissement des matières résiduelles.

Donc, il faut comprendre, M. le Président, cette nuance importante. C'est que, même si, depuis 1992, nous n'avons jamais cessé d'accroître la quantité de matières que nous récupérions, de manière relative, nous avons atteint comme un plafonnement parce que nous produisons beaucoup plus, d'une année par rapport à l'autre. Alors, tout cela pour vous dire que nous avons beaucoup de chemin à rattraper, et nous sommes habités par un sentiment d'urgence parce que vous devez comprendre que, à terme, ces matières que l'on met dans nos poubelles, elles se retrouvent dans des lieux d'enfouissement, des lieux d'enfouissement qui n'ont pas de durée de vie illimitée.

Vous savez qu'au Québec, grosso modo, M. le Président, on a à peu près 130 lieux d'enfouissement, 64, ou à peu près, dépôts de matériaux secs, à peu près autant de lieux d'enfouissement sanitaire, et, à terme, ces sites ont des capacités de rétention relativement limitées, et on ne peut pas, M. le Président, continuer ad vitam aeternam en se disant: Bon, on fera des trous un peu partout, quand l'autre sera rempli... sinon ce serait la stratégie de vouloir faire du Québec une espèce de poubelle à ciel ouvert. Et, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, nous ne voulons absolument pas envisager cette possibilité, et c'est la raison pour laquelle on s'est dit: Bon, bien, il est important de limiter l'enfouissement.

Il est important de le faire, pourquoi? Parce que vous savez très bien, M. le Président, que nos sites d'enfouissement génèrent des gaz à effet de serre. Certains spécialistes estiment même que 7 % ou à peu près des gaz à effet de serre proviennent de l'émanation de ces substances qui se retrouvent dans les lieux d'enfouissement sanitaire. Vous savez que ces lieux, généralement, génèrent beaucoup de bruit, beaucoup de va-et-vient parce que c'est des camions qui s'y rendent, qui en sortent. Vous savez que ces mêmes camions eux-mêmes génèrent de la pollution parce qu'il faut toujours bien mettre de l'essence dedans, les entretenir, etc., changer les pneus. Donc, en soi, l'entretien même d'un site d'enfouissement est quelque chose qui génère des activités parfois qui sont polluantes. Il y a d'associés aux lieux d'enfouissement des problèmes environnementaux, outre les odeurs, tels que la lixiviation, parce que... Et qu'est-ce qu'on entend par «lixiviation», pour ceux qui s'y connaissent un peu moins dans le secteur? Imaginez un immense lieu d'enfouissement sanitaire à ciel ouvert, en quelque sorte, et il pleut. Lorsqu'il pleut, l'eau, évidemment, rentre dans le site et parcourt les différentes couches de déchets.

n(17 h 50)n

M. Benoit: Percole.

M. Simard (Montmorency): Le député d'Orford me souligne un mot que je reprends et qui est très juste et fort pertinent, c'est que l'eau, en quelque sorte, percole, et elle chemine à travers le site. En cheminant, elle touche différentes substances, se mêle avec différents produits chimiques qui créent une combinaison qui est, de manière environnementale, pas trop ragoûtante, parfois même dévastatrice et dont il faut s'occuper. Et, en disant que nous voulons limiter l'enfouissement, M. le Président, c'est qu'on veut, à terme, limiter les dommages à l'environnement reliés aux lieux d'enfouissement.

Mais, plus que ça, on veut faire des gains qui sont écologiques parce que moins on enfouit de papier et plus on recycle ce papier, et moins on met de pression sur nos forêts, plus on recycle l'aluminium et moins on met de pression sur nos ressources minières, etc. Donc, il y a deux grands avantages à recycler, un avantage immédiat du fait qu'on n'a plus ces espèces de poubelles à ciel ouvert, et, dans un deuxième temps, on réduit en quelque sorte la pression que l'on exerce sur nos ressources premières, et on sait à quel point les ressources naturelles sont des ressources qui nous sont comptées, sont des ressources qui nous sont fragiles, et à quel point il nous faut prendre soin de l'environnement qui est autour de nous ici, au Québec, mais également de l'environnement mondial parce qu'on sait que, dans un contexte de globalisation des marchés, très souvent un produit qu'on va acheter dans le supermarché à côté de chez nous viendra tantôt d'Italie, tantôt du Japon, tantôt d'Afrique, et on sait très bien que les ressources que l'on achète ici sont souvent le fruit non seulement d'une fabrication, mais d'une extraction de matières premières qui sont très souvent prélevées à l'extérieur de nos frontières nationales. Donc, agir ici, c'est, comme de grands penseurs le disent, penser de manière globale pour l'environnement.

Et on n'aura, je crois, M. le Président, jamais... on ne mettra jamais assez d'énergie à nous rappeler à nous-mêmes à quel point l'environnement est fragile et précaire. Il y a des images parfois très frappantes. Il me vient souvent à l'esprit cette image que l'on voyait récemment dans les journaux et sur nos petits écrans, ce glacier dans l'Antarctique qui avait 12 000 ans d'âge et qui s'est en très grande partie effondré en l'espace de quelques heures, comme un jeu de cartes, tout cela étant le fruit du réchauffement planétaire. Alors, on se dit souvent: Oui, mais ça m'apparaît loin un peu, ces problèmes écologiques là. Puis qu'est-ce que je peux faire, moi, pour apporter ma contribution en environnement? Bien, on peut le faire de mille et une façons, et j'attire l'attention de ceux qui nous écoutent en leur disant qu'on peut notamment le faire...

Et chaque petit geste compte, en récupérant. Et j'ai ici, en vous disant, M. le Président, que chaque geste compte... C'est peut-être unique dans les annales de l'histoire du parlementarisme, M. le Président, mais j'aimerais vous montrer une poubelle bleue. Il n'y a aucun rapport avec la couleur de notre formation politique, quoique je suis très fier de ce bleu. Mais c'est ici une poubelle que l'on a instaurée dans différents locaux de l'Assemblée nationale du Québec depuis quelques semaines à peine, arborant le logo de la récupération. Et, dorénavant, à l'Assemblée nationale, nous allons récupérer le papier, papier que nous n'avions pas, jusqu'à tout récemment, l'habitude de récupérer. Et, en ce sens, je tiens à vous saluer, M. le Président, et, à travers vous, la présidente de l'Assemblée nationale pour l'extraordinaire initiative qu'elle a prise de pouvoir ici même donner la chance aux parlementaires de donner l'exemple en récupérant plus et en récupérant mieux.

Alors, M. le Président, le projet de loi a un objectif très précis, c'est d'aider la collectivité québécoise à récupérer plus. Alors, il y a, jusqu'à présent, 85 % des contribuables et des citoyens qui nous écoutent présentement qui sont desservis par un système de collecte sélective à travers le Québec. 85. Et, via leur compte de taxes municipales, ce sont les contribuables qui présentement assument 100 % des coûts de la collecte sélective domestique municipale. C'est 100 %, l'effort contribuable des concitoyens, via leurs comptes de taxes municipaux. Et l'esprit de ce projet de loi n° 102 est de dire: Oui, pour relancer la collective sélective au Québec, pour aider les municipalités à se donner les moyens de recycler plus et de recycler moins, nous allons les aider financièrement parce qu'on croit que le nerf de la guerre, c'est l'argent, et on croit que nos partenaires qui sont au premier front du recyclage, municipaux, que sont les villes, ont besoin d'aide. Et nous nous sommes dit qu'il nous fallait absolument mettre à profit deux concepts qui sont au coeur de la politique environnementale de la dernière décennie, un premier concept qui est celui du pollueur-payeur et un second concept qui est celui de la responsabilité élargie du producteur.

Alors, pourquoi je vous parle de ces deux concepts, M. le Président? C'est parce que c'est en mettant en opération ces deux idées que nous allons trouver les fonds requis pour aider les municipalités et indirectement, voire même directement, les contribuables qui paient la collecte sélective.

Alors, comment ça coûte, ça, la collecte sélective au Québec? Je vous disais qu'il y avait 85 % des citoyens qui étaient desservis par ce service. J'arrondis, là, à quelques centaines de milliers de dollars près pour qu'on ait une idée approximative mais relativement précise. La collecte sélective, ça coûte, M. le Président, 70 millions de dollars par année. Une fois qu'on a revendu, après retraitement, les matières premières qui se trouvent dans le bac, on a des revenus de 20 millions. Il reste encore un déficit de 50 millions de dollars qu'assument à eux seuls les contribuables qui nous écoutent, qu'assument les voisins, là, qui habitent à côté de chez nous, qu'assument les membres de ma famille, que j'assume également via mon compte de taxes municipales. L'idée est donc, à travers ce projet de loi, de défrayer et d'aller chercher 50 % ou à peu près des coûts de la collecte sélective chez les entreprises qui voient leurs produits se retrouver dans le bac bleu ou dans le bac vert, dépendamment où on demeure, après leur utilisation. C'est l'idée fondamentale de ce projet de loi, une idée qui concerne la tarification des entreprises. On veut qu'elles internalisent, à terme, dans leurs coûts de production, le recyclage.

Nous voulons, du côté du Parti québécois comme du parti de l'opposition, nous souhaitons dorénavant que les entreprises, lorsqu'elles conçoivent la mise en marché de leurs produits, se disent: À partir de maintenant, je vais assumer la responsabilité de ce produit du berceau jusqu'au tombeau. Je vais l'assumer non seulement jusque chez les détaillants, mais je vais faire en sorte que, une fois utilisé, je puisse le recycler et éventuellement m'en resservir pour la fabrication de nouveaux produits que je vais mettre en marché.

Alors, M. le Président, il sera bientôt, voire même dans quelques secondes, 18 heures. Je vous demanderais donc de pouvoir suspendre nos travaux, que nous reprendrions, comme nos règlements le prévoient, à 20 heures, et je vous demanderais, à ce moment-là, à 20 heures, de pouvoir me reconnaître pour que je continue à pouvoir vous décrire les avancées extraordinaires que contient et propose ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Alors, M. le leader adjoint, bien sûr, vous pourrez poursuivre votre intervention lorsque le débat reprendra. Et sur ce j'ajourne nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonsoir, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Si vous voulez prendre place. Vous pouvez vous asseoir.

Alors, l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. Et, lors de la suspension, la parole était au ministre délégué à l'Environnement, et il avait utilisé 19 min 10 s. Donc, il peut poursuivre son intervention s'il le désire. M. le ministre délégué à l'Environnement, la parole est à vous.

M. Simard (Montmorency): Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, avant d'arrêter nos travaux tout à l'heure, nous étions sur la présentation de cet important projet de loi qu'est le projet de loi n° 102 qui vise la relance de la collecte sélective au Québec. Et, M. le Président, entre 6 heures et 20 heures, j'ai eu la chance de me rendre à une activité dans mon comté, à Saint-Jean, île d'Orléans, au Manoir Mauvide-Genest. Je salue d'ailleurs les gens de l'île qui nous écoutent. Mais, au retour, je suis arrêté à la maison pour chercher un bac bleu de récupération, M. le Président, parce que je crois que ce projet de loi...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, question de règlement.

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que vous pourriez nous expliquer, en termes du décorum, si vous trouvez acceptable... Je ne suis pas en train de me formaliser à outrance. Vous savez comme moi qu'il y a des précédents dans cette Chambre pour l'utilisation d'un tel dispositif visuel. Est-ce que vous pouvez nous dire... Parce que j'ai déjà été là quand le président Charbonneau avait expliqué à un de nos collègues qui avait amené une poubelle qui n'était pas plus large que le bac bleu, il avait dit que c'était contre les règlements de cette Chambre. Alors, j'aimerais juste une directive, si je peux le demander ainsi de votre part, concernant qu'est-ce qui est acceptable ou pas dans le cadre d'un débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint de l'opposition officielle, si vous me demandez une directive, ça va être difficile de vous en donner parce que nous fonctionnons un peu cas par cas. Mais, évidemment, lorsqu'un député a un discours et qu'il veut expliquer aux auditeurs... mais il ne faut pas que ce soit exagéré. Alors, la présidence apprécierait dans ces circonstances qu'on puisse le montrer, mais pas trop longtemps. Ça vous va?

M. Simard (Montmorency): M. le Président, je tiens à souligner à quel point je suis sensible à l'argument du leader adjoint. De manière générale, je serais parfaitement d'accord avec lui, et je vous promets de ne pas abuser. Mais je crois que mon collègue poursuivra sur ma lancée, lui qui l'a déjà fait, et je dois vous avouer que je m'inspire un peu de lui en cette matière. Et je crois que ce projet de loi, qui est consensuel, est un moment tout à fait particulier pour faire un peu de pédagogie et rappeler aux gens que chaque geste, notamment en matière de recyclage, peut parfois faire toute la différence dans l'atteinte de nos objectifs. Alors, je remercie encore une fois mes collègues de leur compréhension à cet égard.

Donc, très rapidement, M. le Président, j'aimerais simplement rappeler aux Québécois et aux Québécoises que, tout dépendamment de l'endroit où on demeure au Québec, il y a des bacs bleus ou des bacs verts qui servent à la récupération. Et de nos foyers respectifs, que l'on soit en appartement, ou en maison, ou en loyers multiples, donc on peut faire oeuvre écologique en récupérant, en récupérant tantôt le verre... Alors, les bouteilles de verre, de vin, etc., que l'on achète à la Société des alcools du Québec ou encore ailleurs peuvent se retrouver très facilement dans le bac bleu ou dans le bac vert. Tout ce qui est plastique également, M. le Président, est récupérable. Alors, on le met dans le même compartiment. Vous savez, il y a un petit truc de plastique qui sépare ici. Alors, du même côté que le verre, on peut mettre nos trucs de plastique. Et on peut également y mettre toutes les formes de contenants de carton que l'on retrouve. Mais, à ce moment-là, tout ce qui est fibre, tout ce qui est papier, eh bien, on le met ici dans le bac bleu. Voyez-vous, ici, on a des journaux. Une fois lus, bien, on peut les remettre. Il y a un article notamment ici: Malaise au sein du caucus du PLQ. Enfin, je ne lirai pas l'article, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard (Montmorency): ...on met ça ici dans le... Enfin, il y a nos Publi-Sac. À chaque semaine, nous recevons dans nos maisons, de manière gratuite, des Publi-Sac qui contiennent énormément de publicité. Évidemment, une fois qu'on a lu les offres publicitaires qui sont dedans, bien, nous, on invite fortement les Québécois et les Québécoises à recycler ce papier, parce que, évidemment, plus il y a de papier recyclé et moins il y a d'arbres coupés et plus les forêts sont donc protégées. Il ne faut pas oublier d'enlever le sac de plastique, le mettre d'un côté, et puis le papier de l'autre. Voilà. Alors, c'était une petite explication pour dire qu'à chaque semaine, M. le Président, on a l'occasion de pouvoir récupérer.

Mais vous voyez bien que ce bac que je viens de vous montrer est petit et que, somme toute, il n'y a pas assez d'espace pour mettre l'ensemble des matières que nous pourrions recycler. Et, lorsque l'on dit qu'il nous faut nous donner les moyens de relancer la collecte sélective au Québec, c'est justement de pouvoir dépasser cette première génération de bacs bleus ou de bacs verts, d'avoir des contenants qui soient, à terme, plus grands pour nous permettre d'y mettre davantage de matières résiduelles, que ce soit tantôt le plastique, tantôt le verre, tantôt le papier. Il nous faudra également trouver des moyens plus astucieux, notamment dans les loyers à logements multiples. Vous vous imaginez, vous, 60 bacs bleus devant un logement à loyers multiples. Alors, il y a des manières de faire avec lesquelles nous devrons composer, et ces manières de faire devront innover pour nous donner la chance de pouvoir recycler plus que nous le faisons maintenant et mieux que nous le faisons maintenant.

n(20 h 10)n

La particularité, donc, de ce projet de loi, M. le Président, c'est que... Vous avez vu les matières que je viens de déposer dans mon bac bleu. Eh bien, ces produits, c'est le fruit d'une mise en marché par un entrepreneur, par une compagnie. Nous allons directement interpeller ces compagnies qui voient, à terme, leurs produits être déposés dans le bac bleu, nous allons les interpeller financièrement et nous allons leur demander de nous appuyer et d'appuyer les citoyens et les citoyennes du Québec qui paient ce recyclage via leurs taxes municipales. Nous allons leur demander de financer jusqu'à un maximum de 50 % des coûts de la collecte sélective.

Alors, très concrètement, M. le Président, grosso modo, quels sont les objectifs financiers que l'on recherche à travers la tarification que l'on propose dans le projet de loi n° 102 et dans la réglementation qui suivra cette législation? Pour toute l'entreprise de l'emballage, c'est-à-dire les contenants de céréales, les bocaux de ketchup ou d'olives, etc., alors nous allons leur demander l'équivalent de 60 % du déficit de la collecte sélective, d'un déficit qui s'élève autour de 50 millions de dollars par année. Nous allons donc leur refiler 50 % de ce que coûte le traitement de récupération de leurs matières. Nous allons également imposer 20 % de la facture à l'industrie des Publi-Sac. Et nous allons également faire participer les médias écrits. Mais je reviendrai un peu plus loin sur la participation effective des médias écrits, parce qu'il y a une exception quant à cette catégorie d'entreprises.

Alors, permettez-moi de résumer et d'être le plus clair possible. Je vous disais, avant de suspendre nos travaux, à 18 heures, que la collecte sélective, au Québec, coûte grosso modo 70 millions de dollars. Une fois qu'on a retraité et revendu ce qu'il y a à l'intérieur du bac bleu, on a des revenus de 20 millions de dollars. 70 millions moins 20, il reste encore un déficit d'opération de 50 millions. Notre loi fait en sorte que nous allons demander une participation financière à l'entreprise d'à peu près 50 % du déficit, donc 50 % de 50 millions. Nous allons donc demander à l'industrie et à l'entreprise une contribution avoisinant 25 millions. Comme l'entreprise de l'emballage occasionne 60 % de ce 25 millions, ils paieront l'équivalent, à peu près, de 60 % de la facture, autrement dit 15, 16 millions de dollars. L'industrie du Publi-Sac, quant à elle, va financer 5 millions de dollars. Alors, on est déjà rendu à à peu près 20 millions de dollars.

Qu'arrive-t-il pour l'industrie des médias écrits, qui, à eux seuls, représentent 52 % du volume de matières que l'on retrouve dans nos bacs bleus? Eh bien, en théorie, ils devraient payer 5 millions de dollars. Si on ventilait sans forme aucune d'interfinancement ce que revient le traitement de leurs matières, ils devraient payer 5 millions de dollars. Or, il s'avère que, lors de nos commissions parlementaires, de nos auditions publiques, M. le Président, que nous avons tenues à la fin du mois de mai dernier, l'industrie des médias écrits, les hebdos qu'on lit, là, qu'on reçoit chez nous, parfois gratuitement, chaque semaine ou chaque mois, dans nos foyers, les quotidiens et les magazines, ils sont venus nous voir pour nous dire: M. le ministre, on est d'accord avec le principe qui sous-tend votre projet de loi; on trouve que le concept du pollueur-payeur est nécessaire dans nos sociétés modernes; on trouve que la responsabilité élargie du producteur, c'est une bonne idée; on pense qu'effectivement, dorénavant, les compagnies devront s'occuper de leur mise en marché, du tombeau... du berceau, dis-je, jusqu'au tombeau; mais, voyez-vous, nous avons une situation très particulière, nous, médias, surtout francophones ? hein, c'est essentiellement les médias francophones ? nous avons une situation tout à fait particulière, parce que, notre auditoire, il n'est composé que de 7 à 8 millions de lecteurs francophones.

Et vous savez, M. le Président, que, partout à travers le monde, ce n'est pas un phénomène qui est seulement québécois, mais partout à travers l'Occident, on assiste, depuis la montée d'Internet, à une baisse radicale du taux... du nombre de lecteurs de journaux par jour. Il chute partout au monde, y compris au Québec. Et certains spécialistes estiment que c'est peut-être un peu plus, même, au Québec qu'ailleurs. Mais enfin, toujours est-il qu'il y a une baisse notoire du lectorat.

Et vous savez que notre communauté linguistique, et le député d'Outremont y faisait référence aujourd'hui, la communauté linguistique francophone d'Amérique du Nord, elle est la quatrième en importance en Amérique. Avec un contingent de 7 à 8 millions d'habitants, vous comprendrez que nous sommes très loin derrière nos compatriotes anglophones, qui sont à peu près 300 millions d'individus à travers l'Amérique. Nous sommes très loin derrière nos compatriotes hispanophones, qui sont au moins 225 millions d'individus parlant l'espagnol, donc, à travers tous les pays d'Amérique. Et on est très, très loin derrière même le portugais qui, on l'oublie trop souvent, M. le Président, mais est parlé par plus de 180 millions de Brésiliens tous les jours.

Alors, les chiffres parlent d'eux-mêmes, la presse écrite francophone ne jouit pas d'un marché qui est aussi substantiel que d'autres groupes linguistiques. Et les médias sont venus donc nous rappeler toute la précarité de la presse québécoise, qui donc fait face à une réalité démographique que je viens de vous décrire et qui également fait face, comme d'autres presses, à une diminution du lectorat, donc, en définitive, à une diminution de ses revenus et une diminution donc de sa rentabilité.

Nous avons été, M. le Président, du côté du Parti québécois et du gouvernement dirigé par le député de Verchères, extraordinairement sensibles à cette argumentation. En fait, ici, deux grandes valeurs s'opposaient: la volonté de protéger l'environnement, une valeur écologique qui confrontait une autre valeur qui est celle de la culture, de l'information et de la nécessité, dans une démocratie, d'avoir une presse non seulement libre, mais ayant les coudées franches pour pouvoir s'adresser au plus grand nombre d'individus possible.

Alors, nous avons pris fait et acte des revendications de la presse écrite et nous avons tenté d'opérer un modus vivendi qui, sans les exclure de la loi, tout en leur permettant d'être partie prenante à une certaine contribution au niveau de la relance de la collecte sélective... On a voulu donc mettre de l'avant ? permettez-moi l'anglicisme ? un «agreement» qui, tout en les faisant participer, leur permettrait de ne pas avoir le même fardeau que les compagnies qui mettent en marché des pots de yogourt, parce que, effectivement, nous ne voulions surtout pas comparer ? comment dire? ? un emballage d'une marque quelconque de nouilles sèches à un journal, un quotidien qui donc nous informe tous les jours de la vie démocratique québécoise. Donc, les médias... Nous avons établi un consensus, une entente cordiale avec les médias écrits, et ceux-ci vont contribuer en nature, non pas en espèces sonnantes, mais en nature, c'est-à-dire en publicité, pour l'équivalent de 1,3 million de dollars par année ? exactement ce qu'ils contribuent d'ailleurs en Ontario ? pour les cinq prochaines années.

Alors, c'est donc dire que nous aurons, M. le Président, une loi consensuelle, attendue par les gens du milieu, appuyée par les intervenants, appuyée par les entreprises qui, en cette matière, se veulent écologiquement responsables. Nous aurons un projet de loi demandé et réclamé par les municipalités, réclamé par les groupes écologiques, qui nous donnera les moyens financiers d'être plus performants dans la collecte sélective que nous menons à travers tout le Québec.

Donc, nous aurons dorénavant des revenus équivalant à 21 ou 22 millions de dollars par année, bon an, mal an, que nous pourrons réinjecter à travers l'ensemble du Québec auprès des municipalités qui voudront relancer leur collecte sélective. Et cet argent, M. le Président, sera distribué pas n'importe comment, il sera redistribué en fonction de l'atteinte de critères de performance, en fonction de plans de développement que les municipalités déposeront à RECYC-QUÉBEC, qui, comme vous le savez, est un peu l'Hydro-Québec du recyclage, une formidable société d'État qui veille à l'ensemble de la gestion des matières résiduelles au Québec.

n(20 h 20)n

Ce projet de loi n'est qu'une partie, M. le Président, d'un des nombreux outils que le gouvernement du Québec est en train de mettre en place pour nous assurer que nous atteindrons d'ici 2008 nos ambitieux objectifs de recyclage, qui sont de 60 % pour la collecte sélective domestique et de 65 % pour l'ensemble des matières générées au Québec. D'abord, M. le Président, je dois vous rappeler, comme vous le savez très bien vous-même, qu'il y aura toujours minimalement des déchets qu'on ne pourra pas récupérer. Un exemple notoire et très criant que celui des rasoirs: ça ne se récupère pas. Il y aura toujours un minimum de matières que l'on devra soit valoriser, soit éliminer ou soit enfouir. Il y aura toujours donc un pourcentage de 15 à 20 % des matières qu'on ne pourra pas recycler étant donné leur configuration et leur fabrication. Mais l'essentiel de ce que l'on produit, ça, c'est récupérable. Donc, c'est sur cette catégorie de matières recyclables, à peu près 85 %, par rapport auxquelles nous avons donc un objectif de 65 %. C'est 65 % du 85 que nous essayons de recycler, comme objectif, d'ici 2008.

Pour y parvenir, en plus de la loi n° 102, loi dont nous parlons présentement, qui vise à faire cotiser l'entreprise jusqu'à concurrence de 50 % du déficit, nous avons mis en branle, finances à l'appui, des plans de gestion de matières résiduelles que nous avons demandé de faire élaborer par chacune des MRC et des communautés métropolitaines au Québec. Alors, chacune des MRC a donc reçu une subvention de 120 000 $, 40 000 $ pour les trois prochaines années, pour qu'elle puisse nous élaborer leur plan de gestion des matières résiduelles. Ces PGMR seront comme, M. le Président, des schémas d'aménagement de gestion des matières résiduelles, si vous me permettez la comparaison. Et, en fonction des caractéristiques qui leur sont propres, nous demandons aux MRC du Québec ainsi qu'aux communautés métropolitaines de nous présenter la façon dont elles entendent procéder à la planification et à la gestion de leurs matières résiduelles pour les 20 prochaines années, en proposant des révisions quinquennales, M. le Président.

Donc, une vision à long terme pour les deux prochaines décennies, avec des révisions périodiques et des plans qui devraient être déposés dans les mois qui viennent. J'en ai d'ailleurs déjà reçu un au bureau. C'est pour vous dire toute la détermination du monde municipal à oeuvrer dans le sens d'une meilleure gestion de leurs matières résiduelles. Donc, les PGMR, les plans de gestion des matières résiduelles, concoctés et planifiés, dis-je, par les MRC, sont une autre pièce importante du casse-tête, en quelque sorte, nous permettant de relancer la collecte sélective au Québec avec la loi n° 102.

Vous savez également, M. le Président, que, dans la même foulée, dans la même perspective, nous avons récemment annoncé la tenue d'un important forum national sur la gestion des matières résiduelles, qui aura lieu à la fin du mois de janvier prochain, qui réunira un bon nombre d'intervenants des groupes environnementaux écologiques, de la société civile, du monde municipal, des entreprises. Il y a déjà trois grandes tables sectorielles représentant les différents groupes que je viens de vous nommer qui sont à l'oeuvre depuis des semaines et qui préparent ardemment ce forum. Et ce forum vient en quelque sorte compléter les PGMR, en ce sens que le Forum national sur la gestion des matières résiduelles sera l'occasion de penser nationalement parlant les moyens que nous pouvons et devons nous donner pour relancer la collecte sélective au Québec.

Alors, il y a le projet de loi n° 102 qui viendra très bientôt apporter aux municipalités entre 21 et 22 millions de dollars, bon an, mal an, pour les aider à financer leur collecte sélective, pour les aider à développer des moyens qui pourront nous faire recycler plus et mieux. Nous avons le Forum national qui nous permettra de faire le point sur l'état de la situation et nous mettre sur de nouveaux chantiers d'action. Nous avons également, donc nous sommes dans l'attente également de dizaines et de dizaines de PGMR, de plans de gestion des matières résiduelles, partout à travers le Québec, qui devraient nous donner, localement et régionalement parlant, la vision de ce que sera la gestion des matières pour les 20 prochaines années.

Donc, vous voyez la vision globale et intégrée et l'intention très ferme du gouvernement du Québec de nous donner les moyens de réussir nos objectifs. Ce n'est pas tout d'avoir des ambitions, M. le Président, en politique, encore faut-il avoir les moyens de les atteindre, de les réaliser et voire même de les dépasser. Certes, nos objectifs sont ambitieux, nous en convenons tous, mais, si on met la barre très basse en partant, c'est sûr que ça ne motivera pas beaucoup les gens. Et, moi, je sens, de par tous les sons de cloche que j'ai dans le monde municipal, je sens de par tous les sons de cloche que j'ai dans les différents centres de tri que nous avons au Québec, les 39 centres de tri, ou quelque, que nous avons au Québec, je sens à travers nos partenaires municipaux, je sens dans l'entreprise une volonté de se mobiliser pour que nous puissions à terme ensemble et très bientôt réussir nos objectifs.

Alors, M. le Président, le temps file, et je sais que mon collègue le député d'Orford souhaite également intervenir sur ce dossier, mais je tiens à vous rappeler ainsi qu'à toutes celles et ceux qui nous écoutent que chaque petit geste fera la différence dans l'atteinte de nos objectifs. Et, si les gens qui nous écoutent et qui ont un bac bleu ou un bac vert à la maison se disaient: Bien, moi, tiens, cette semaine, je vais faire un effort et je vais essayer de doubler la quantité de matières que je mets dans mes bacs de récupération, je suis persuadé que très rapidement, très rapidement, M. le Président, nous connaîtrions des gains puissants. Et j'invite la population qui nous écoute, j'invite les jeunes et les moins jeunes à faire ce qu'il faut pour remplir les bacs bleus. Moi, je souhaite, moi, M. le Président, dans les semaines qui viennent, en arrivant à la maison le soir, un peu tard trop souvent malheureusement, voir tous les voisins avec des bacs bien remplis et, j'espère, aussi remplis que le mien. C'est là l'objectif auquel nous sommes conviés et appelés.

J'étais récemment aux Îles-de-la-Madeleine où... chez mon ami le député, le ministre de l'Agriculture, avec qui j'ai des discussions toujours aussi intéressantes. Eh bien, aux Îles-de-la-Madeleine comme ailleurs, en Estrie entre autres, ce n'est pas seulement l'apanage des Îles-de-la-Madeleine ? mais je tiens à saluer les Madelinots et les Madeleines qui nous écoutent présentement ? ils ont trois bacs. Eux, ils ont un bac brun dans lequel ils mettent le putrescible; ils ont un bac bleu dans lequel ils mettent l'ensemble des matières que je vous ai présentées plus tôt, plastique, verre, métal, etc., tout ce qui se récupère; et ils ont un bac noir où ils mettent les matières qui ne sont vraiment pas récupérables. Et puis, à chaque semaine, on fait le tri. Tantôt, on ramasse le bleu; tantôt, on ramasse le brun; tantôt... Mais, M. le Président, ils ont des taux de récupération extraordinairement hauts. Ils sont la fierté du Québec en matière de recyclage, ils donnent le ton. Et j'aimerais, ici, saluer le député des Îles-de-la-Madeleine, qui est un fervent partisan du système de la collecte sélective, et saluer tous les Madelinots qui nous écoutent présentement et les féliciter pour leur effort, mais féliciter également les femmes et les hommes qui, bénévolement, très souvent, dans le milieu municipal, pensent, planifient ces activités de récupération.

M. le Président, lorsque l'on parle de récupération, n'oubliez pas qu'il y a également d'autres grands concepts que l'on se doit de rappeler...

Une voix: ...

M. Simard (Montmorency): ... ? pardon? ? à l'esprit de celles et ceux qui nous écoutent, ce sont les RRRVE . Alors, le déchet, M. le Président, qui est le plus facile à récupérer, c'est encore celui qu'on ne produit pas. Alors, dans l'avenir, les entreprises qui sont appelées financièrement à participer à la collecte sélective auront un avantage à produire des biens qui sollicitent moins d'emballages. C'est un peu le défi auquel nous sommes confrontés, auquel les entreprises sont confrontées, donc réduire à la source l'utilisation des matières pour générer moins donc de déchets. Premier R, réduction à la source.

n(20 h 30)n

Deuxième R, c'est le réemploi. J'insiste là-dessus, il y a beaucoup de linge, beaucoup d'autres matières également qu'on peut envoyer dans des ressourceries, hein, qui sont, très souvent, à proximité immédiate de la maison. Chez nous, bon, à Beauport, on a la Société Saint-Vincent-de-Paul, on a une autre ressourcerie sur la Côte-de-Beaupré, on a la Communauté Agapè, enfin on a également La Commode, etc. On a plusieurs ressourceries qui n'attendent que... Je donne l'exemple du linge, je pourrais donner l'exemple de beaucoup d'autres, les livres, etc. Donc, ce qui ne nous sert plus, parfois, peut servir à autrui. On peut redonner vie à des biens, et c'est donc le deuxième R, le réemploi. C'est une forme également de... une façon d'économiser au niveau des ressources naturelles.

Le troisième R, c'est évidemment le recyclage. C'est très important, on en a parlé ce soir. Je vous parlais des RRRVE. Le V, c'est pour la valorisation. Il y a des matières, tantôt, que l'on utilisera pour les transformer de manière énergétique. Et puis, ultimement, il y a l'élimination.

Alors, le temps passe, mes collègues me pressent de conclure. Ha, ha, ha! Mes collègues me pressent de conclure, et je sens à quel point ils sont vraiment intéressés. Et je sais, M. le Président, qu'elles seront et qu'ils seront les ambassadeurs auprès de leurs électeurs respectifs pour faire valoir l'importance du recyclage. Et il n'y a pas d'économie de la petite échelle, chaque produit peut être recyclé et doit être recyclé.

Alors, sur ça, M. le Président, je sais que mon collègue d'Orford piaffe d'impatience, lui également, de nous parler de cet important projet de loi qui fait l'unanimité. C'est un projet de loi qui est un des plus progressistes en Amérique du Nord. Très peu de sociétés ont l'équivalent de notre projet de loi. C'est tout à l'honneur du Parti québécois que d'avoir pu mettre de l'avant cette idée non seulement du pollueur-payeur, mais de la responsabilité élargie du producteur. Et, une fois de plus, dans la foulée de la Politique nationale de l'eau, le Parti québécois prouve qu'il a l'environnement à coeur et il prouve que le vrai parti vert au Québec est de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président. Je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du projet de loi n° 102, et je vais reconnaître le porte-parole officiel de l'opposition en matière d'environnement. M. le député d'Orford, la parole est à vous.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Les gens qui nous écoutent ce soir vont peut-être, à un moment donné ou à un autre dans la veillée, penser que leur télévision fait défaut. Écoutez, j'aurai quatre projets de loi un après l'autre, avec trois ministres différents. Alors, à chaque fois qu'ils vont allumer la télévision, ils vont dire: Coudon, il est encore là, celui-là. Je ne sais pas, peut-être qu'on est après essayer de me faire battre un record. Mais on va commencer par le premier. Comme disait le slogan: pour arriver au deuxième, on va commencer par le premier.

Alors, le premier, c'est le projet de loi n° 102 dont le ministre vient de faire... Pour la première fois, je dois avouer, en sept ans, je vois un ministre, M. le Président, pour la première fois en sept ans, je vois un ministre enthousiaste quand il parle de l'environnement. Je ne vous dis pas qu'il est compétent, je ne vous dis pas qu'il est bon ? ça, c'est une autre affaire, on va y revenir tantôt ? mais l'enthousiasme est déjà une grande victoire quand on parle d'environnement. Et, vous savez, quand vous êtes enthousiaste, vous pouvez déménager des montagnes, vous pouvez faire pas mal de choses dans une société. Et je dois avouer: après cinq ministres de l'Environnement en ligne en sept ans, lui, il est enthousiaste sur le projet de loi n° 102. J'ai déjà vu un ministre nous parler une minute sur un projet de loi en environnement, sur les parcs privés. Là, il n'est plus ministre, il est maintenant député. Malheureusement pour lui parce que je pense que, légalement, ça avait été un bon ministre de l'Environnement. Mais il avait parlé une minute sur les parcs privés. Imaginez-vous que ça manquait un petit peu d'enthousiasme. Alors là on a un jeune ministre enthousiaste et puis qui a démontré qu'il y croyait, au projet de loi n° 102, et je dois avouer que l'opposition ? ça, il ne pouvait pas le dire trop fort ? mais que l'opposition, on y croyait aussi, nous, au projet de loi n° 102. Et je dois vous dire pourquoi on y croyait.

C'est un long processus. Tout ça commence en 1994, dans mon livre à moi. Le ministre a parlé de 1990, une politique qui était un peu occulte, sur l'emballage. Je ne l'ai pas vraiment en mémoire. Ce que je me souviens, moi, c'est d'un moratoire où l'opposition... À l'époque, c'était Mme Marois qui avait ce que je fais maintenant, la job que je fais en ce moment. C'était Mme Marois qui avait appuyé le député, le ministre de l'époque, qui est maintenant le député de Brome, le ministre de l'Environnement de l'époque, M. Paradis, et suite à une pétition de 10 000 jeunes de la ville de Magog. Et c'est tout à l'honneur des gens de Magog qui ont toujours été très avant-gardistes au niveau de l'environnement.

D'ailleurs, je salue le ministre qui était de passage ? le ministre des Parcs et du Loisir ? qui était de passage à Magog en fin de semaine. Il s'attendait à ce qu'il y ait sept mémoires pour lui parler du parc; il y en a eu 52. Il a été un peu surpris de la dynamique environnementale dans l'Estrie. Et il ne faudrait pas qu'il pense que c'est fini là; les 52, ça, c'était juste comme le canapé qu'on lui a servi pour commencer la démarche dans l'histoire du parc du Mont-Orford. Imaginez-vous, si on avait appelé tous nos amis puis on leur avait dit d'être là, jamais on n'aurait pu dans cette petite salle qu'eux avaient réservée parce qu'ils croyaient qu'il y aurait sept mémoires. Je ferme la parenthèse.

C'est un milieu qui est environnemental, la région de Magog. Et il y avait eu un jeune ? il s'appelait François ? qui avait décidé qu'il y avait un problème d'environnement dans la ville de Magog, qui avait déposé une pétition de 10 000 noms ? pour une ville qui a à peu près 15 000 citoyens, il faut le faire ? et de là le ministre de l'Environnement... Il est arrivé d'ailleurs un incident assez cocasse ? on a pas mal de temps, on peut se raconter ces choses-là. La pétition n'était pas conforme, la pétition n'était pas conforme. Alors, nous n'avions point pu la déposer à l'Assemblée nationale. Alors, nous avions dû rencontrer le ministre à son bureau et déposer la pétition. Et là il avait réalisé, avec l'opposition de l'époque, qu'il y avait un problème en environnement.

Il y a un moratoire sur les sites de déchets, lequel moratoire est toujours en place, et ce qui faisait que les sites de déchets, on se disait, parce qu'il faut le comprendre, il faut se rappeler cette petite histoire... Tous ceux qui avaient un permis pour accepter des déchets ? et, à l'époque, on acceptait en plus les déchets américains ? ça valait une fortune, ces permis-là. Alors, à partir du moratoire, on s'est dit: Bien là, si on ne peut plus agrandir les sites de déchets ou si ça va être compliqué de les agrandir, il va falloir trouver d'autres solutions. Et la solution a recommencé vraiment à ce moment-là à porter vers la récupération sous toutes ses formes.

Je veux saluer d'ailleurs les gens qui, suite à ce moratoire-là... Il y a eu une enquête du BAPE dont le thème a été Déchets d'hier, ressources de demain. Maintenant, on ne parle plus de déchets. C'est vraiment hier qu'on parlait de déchets. Maintenant, on parle de matières résiduelles. Et la présidente a fait à l'époque, Claudette Journault, un ouvrage absolument extraordinaire avec 69 résolutions ? je relisais ça tantôt pendant que le ministre parlait. Et finalement, on s'aperçoit que, dans le temps, il y a un certain nombre de ces résolutions-là qui ont pris place. Et le travail qu'a fait Mme Journault avec son équipe était pas mal extraordinaire. Je vous montre ici juste le résumé, mais la brique au complet est pas mal plus importante que ça.

Alors, ce soir, et je suis heureux de le dire puis je suis heureux de le dire au ministre, je pense qu'on ferme un chapitre. Il y en a d'autres qui vont s'ouvrir ? je vais finir avec ça tantôt. Mais on ferme un chapitre qui a commencé en 1994, celui des matières résiduelles. Malheureusement, tout ça a pris trop de temps. Et on ne peut pas le dire autrement, M. le Président, les citoyens du Québec étaient prêts à récupérer. Et là on a tellement pris notre temps que, dans les dernières années, le ministre l'a dit en d'autres termes que, moi, je vais le dire, on a finalement perdu du terrain en pourcentage. Il se récupère moins de matières résiduelles aujourd'hui en pourcentage qu'il s'en récupérait il y a quelques années. Et les dernières statistiques sur la consigne aussi démontrent qu'il y aurait une baisse au niveau de la consigne. Alors, on a comme abandonné le citoyen. On a arrêté de faire de la promotion, on a arrêté de faire cette éducation nécessaire et on en voit les conséquences. Et là je dis au ministre, là, je dis au ministre: Il faut aller de l'avant; la loi est là ? je vais y revenir tantôt ? on a tous les éléments pour que ce soit un succès, cette histoire-là, et, si on devait, pour une deuxième fois, manquer notre coup, là, les citoyens nous jugeront très sévèrement, peu importe de quel côté de la Chambre nous sommes, M. le Président.

Dans le projet de loi, et je veux encore souligner ? puis que le ministre le prenne pendant que ça passe parce que c'est rarement comme ça ? il y a eu quatre groupes qui ont demandé des amendements au projet de loi. Il y a eu trois de ces amendements-là que, l'opposition, on supportait. Le quatrième, ils ne l'auraient pas fait, ça n'aurait pas été si grave que ça dans mon livre à moi. Il y en a trois qu'on supportait, dont celui de Recyclemédias. Nous, on lui a dit carré dès le début... Et je dois avouer que le ministre a eu une très bonne écoute, très bonne écoute.

Le premier, ça a été la Fédération des municipalités, avec Michel Belzil, que je salue, le président de la Fédération, un bon citoyen du comté d'Orford. M. Belzil avait des préoccupations avec un aspect du projet de loi. Il ne voulait pas que les maires aient à se rapporter au président de RECYC-QUÉBEC. Il voulait se rapporter au bureau du ministre. Le ministre a bien entendu et a amendé le projet de loi. C'est à son honneur. Vous savez, moi, ça fait des années que j'entends des gens venir parler en commission parlementaire, puis tu relis la dernière édition du projet de loi versus la préédition, il n'y a pas une virgule de changée. On se demande des fois pourquoi on a entendu tout ce monde-là. Ici, le ministre a été correct, il les a entendus et il a amendé le projet de loi.

n(20 h 40)n

Ensuite, il y a eu RÉSEAU environnement, Martin Dussault: l'article 18.1. Alors, dans le projet de loi, RECYC-QUÉBEC se gardait le droit de pouvoir être un consultant et de vendre ses services. Martin Dussault, qui est un autre citoyen du comté d'Orford ? qu'est-ce que vous voulez, les environnementalistes semblent tous se regrouper là ? a clairement indiqué au ministre à ce moment-là: Écoutez, mettez donc toutes les chances sur votre bord. Si RECYC-QUÉBEC est en compétition avec l'entreprise privée, c'est loin d'être sûr que vous jouez gagnant, M. le ministre. Il a amendé ça, il a enlevé l'article 18.1. C'est tout à son honneur.

Finalement, il y a eu Recyclemédias. Alors, ça, c'est toute la dynamique des journaux. Le ministre l'a expliquée, je ne veux pas rentrer là-dedans trop longuement. Toutes les industries au Québec vont être mises à contribution, et il y a une industrie qui est venue nous voir en commission parlementaire et qui a dit: Écoutez, on a des spécificités, écoutez-nous, entendez-nous. Et, nous, on a pris position pour eux. En terre d'Amérique, il y a seulement 7 millions de parlant français, on pensait que le monde médiatique devait être protégé, surtout qu'à travers le monde il ne paie pas la taxe sur la récupération. Alors, nous, on les a appuyés, Recyclemédias, dès le début. J'ai amené ça au caucus des députés libéraux, et, à l'ensemble du caucus, on a dit: Écoutez, ces gens-là, il faut les appuyer. On le leur a dit publiquement. Et je suis heureux de voir que le ministre a accepté la demande de Recyclemédias.

Maintenant, en parlant de Recyclemédias, il est intéressant de voir... Je me suis amusé un peu en fin de semaine. Nous recevons tous chez nous, j'imagine, ces sacs de publicité et de littérature en fin de semaine. Alors, vous vous demandez... Ça, c'est celui de cette fin de semaine ci, il pesait exactement 1 000 g, dans un petit village comme Austin. Alors, il y a deux sections là-dedans: la première, celle du journal, qui pèse 140 g. Alors, pour celui-là, ils vont continuer à payer; c'est un journal, ils vont continuer... C'est-à-dire que c'est sur celui-là qu'ils vont avoir l'exemption, excusez. Sur le journal, ils auront l'exemption ou ils paieront très peu finalement, 1,3 million pour l'ensemble du Québec. Alors, ça, ça représente, dans votre sac, la fin de semaine dernière, 15 % du poids. 85 % du poids, c'est tout le reste, de la publicité que vous avez reçue, 840 g. Alors, on pourrait se demander pourquoi c'est comme ça. Je veux dire, mon âme d'environnementaliste a un peu de misère à passer à travers tout ça. Je me demande toujours qui a le temps de lire tout ça. Mais enfin, il faut comprendre que l'entente qu'on a eue avec Recyclemédias n'est pas sur la publicité. Cette publicité-là, ils vont continuer à payer les taxes sur la récupération, comme toutes les autres entreprises au Québec. L'avantage qu'ils auront, c'est vraiment sur les médias, sur les journaux où, là, ils auront un avantage certain sur les autres industries, et il y a des raisons très, très évidentes pour lesquelles autant le ministre que l'opposition ont poussé dans cette direction-là.

La province s'est donné un objectif de récupérer 65 % de ces matières d'ici l'an 2008. Moi, M. le Président, je suis plutôt positif, mon parti est très positif, je vous dirai que c'est un objectif très, très haut. On n'a jamais... Depuis le début de la récupération au Québec, nous n'avons jamais atteint les objectifs que nous nous étions mis, jamais. Et non seulement nous ne les avons point atteints, nous étions souvent très loin des objectifs. Au moment où nous nous parlons, quand le ministre nous dit: On va regrouper les industries par secteur, donc le plastique, l'agroalimentaire, le verre, la peinture, je veux juste vous dire que ça représente à peu près 5 000 fournisseurs d'emballage sous toutes ses formes. Il y a une seule industrie en ce moment qui s'est entendue, c'est celle de la peinture, via un regroupement à Victoriaville. Cette industrie-là, il y a à peu près 32 fabricants de peinture, et ça a pris des années pour qu'ils s'entendent. Imaginez-vous quand on va tomber dans les contenants de plastique, les contenants de verre, l'agroalimentaire, etc. Il y a là tout un chantier en avant, et ce n'est pas demain la veille que je pense que les municipalités vont payer moins cher parce que l'industrie va s'être entendue. Je souhaite que ça aille très vite, et il faut que ça aille très vite.

Ce qu'on fait finalement dans le projet de loi, c'est qu'on internalise le coût environnemental dans le produit. Laissez-moi vous expliquer ça, M. le Président. Anciennement, on disait à un entrepreneur fabricant de pneus ? le client lui disait, tous tant que nous sommes, le consommateur: Produisez-moi le pneu le plus performant, le plus joli, la meilleure couleur, etc. Mais jamais on disait à cette entreprise-là, dans le cas des pneus ? on pourrait prendre n'importe quelle: Produisez-moi aussi un pneu qui va être plus environnemental, qui va... où on aura moins de problèmes avec éventuellement. Dans la vraie vie, qu'est-ce qui se passait? La compagnie produisait un pneu, elle le mettait sur le marché, et on le ramassait dans la dump municipale, dans le fosset. Et la compagnie, peu importe qui elle était, qu'elle soit européenne ou canadienne, n'avait aucune préoccupation de ce qui arrivait à la deuxième vie de ce produit-là. Alors, on va internaliser le coût environnemental dans leurs produits. Et, si on regarde un peu plus loin, les entreprises vont avoir un avantage certain à essayer de baisser ce coût pour baisser leurs coûts effectivement qu'ils devront donner à la collecte. Et, c'est dans la bonne direction, je pense qu'on ne peut pas trouver meilleure façon. Déjà, il y a 20 ans, dans les universités, on enseignait ça en environnement. Alors, ce n'est pas des nouvelles théories, si ce n'est que c'est long à mettre en place.

Ce que je dis à M. Latulippe, le président de RECYC-QUÉBEC: ça va être tout un chantier. Mais vous avez, d'autre part, maintenant tout ce qu'il faut pour réussir. En anglais, ils disent: It's now or never. Je voulais le chanter; je ne le chanterai pas, j'ai...

Des voix: ...

M. Benoit: Alors, je vois que la chorale s'est un peu excitée, la chorale de Noël, M. le Président. Alors, «it's now or never». Si on ne le faisait pas maintenant, si on ne réalisait pas maintenant les objectifs qu'on s'est donnés, le consommateur ne fera plus l'effort, les municipalités vont abandonner, l'entreprise va abandonner.

Et il y a la règle des trois f en affaires, celle d'avoir le feu, la foi et le foin. Dans le cas de RECYC-QUÉBEC, auquel le projet de loi donne du panache, donne tous les pouvoirs qu'ils auront besoin, on donne effectivement les trois f. Mais il va falloir que les gens qui sont à RECYC-QUÉBEC, eux, aient la flamme. Ça, on ne pourra pas leur donner. Ce qu'on leur donne ici, c'est le foin. La règle des trois f: le feu, la foi et le foin. Alors, la foi, il va falloir que ces gens-là croient dans leur mission et qu'ils arrêtent de nous dire que ça ne va pas assez vite, puis qu'ils ont des problèmes, puis que telle industrie, elle ne veut pas. Là, ils ont tout ce qu'il faut. Ils vont ramasser, ces gens-là, des millions de dollars dans les prochaines années.

Le ministre nous a dit que le coût de la collecte au Québec était environ 70 millions. En revendant les matières premières, on reçoit à peu près 20 millions; il y a un manque à gagner de 50 millions. On a l'impression qu'à plus ou moins long terme RECYC-QUÉBEC va aller chercher quelque chose comme ça. Il va y avoir de l'argent qui va se brasser à RECYC-QUÉBEC. Le ministre a pris l'expression: Ça va être l'Hydro-Québec de l'environnement. C'est ce qu'on doit souhaiter. Franchement, c'est ce qu'on doit souhaiter. Mais, si ces gens-là n'ont pas le feu quand ils arrivent au bureau le matin, s'ils ne sont pas convaincus de cette mission qu'ils ont ? et là ils auront le foin ? puis s'ils n'ont pas cette foi que ça va prendre pour transporter des montagnes en environnement, bien, dans trois ans, dans quatre ans, on sera encore ici à se dire: Si on avait un autre règlement puis une autre loi.

Alors, moi, ce que je dis à M. Latulippe, le président-directeur général, ex-ex-sous-ministre au ministère de l'Environnement: vous avez, vous, la compétence, vous avez maintenant tous les outils et tous les moyens. Revenez-nous pas avec des excuses. Ce qu'on veut maintenant, c'est des résultats ? autant du côté de l'opposition que du côté du gouvernement ? et on n'acceptera rien de moins que des résultats, rien de moins que des résultats. Et ça, c'est le gars qui a travaillé en affaires pendant des années où nos patrons nous évaluaient non pas sur tout le verbiage mais bien sur le résultat en bout de ligne, ce que l'entreprise ? sa mission ? elle, avait à faire. Et RECYC-QUÉBEC, ce qu'elle a à faire dans les prochaines années, c'est de recycler, de recycler et d'aller chercher des sommes d'argent dans l'entreprise. Et ils seront évalués, ces gens-là et le conseil d'administration, sur cette mission qu'ils ont maintenant à mettre en place.

n(20 h 50)n

Maintenant, M. le Président, d'où viennent les matières premières? Bien, elles viennent de partout, et je veux juste vous les donner par catégories: 60 % de ce qui va dans le bac que le ministre nous a montré tantôt, c'est du papier. Ça, c'est le papier juste du petit journal de la ville de Magog. Je ne vous ai pas montré La Presse, Le Devoir, etc. Imaginez-vous ce qui rentre dans une maison, dans une seule journée en fin de semaine. Alors, 60 % de ce qui va dans le bac, c'est du papier; le verre, environ 16 %; le carton, 11 %; le plastique, 5 %; autres matières, 4; et le métal, 3 %. M. le Président, il faut voir. Le ministre nous a montré un petit bac, et effectivement il n'est déjà plus à la mode ? parce que vous ne m'aviez pas permis de rentrer mon bac ici. Ce qui va se passer dans les prochaines années, et on le voit déjà, ce sont les gros bacs, ce sont les gros bacs, parce que le petit bac, le ministre, s'il nous avait mis une bouteille d'eau de javel puis trois, quatre bouteilles, son bac, il était plein. S'il a trois enfants, avec la bouteille d'eau de javel puis les trois bouteilles de je ne sais pas quoi, son bac est déjà plein. Le reste, où est-ce que vous pensez que ça va? Ça va dans la poubelle, ça ne va pas au recyclage. Alors, les municipalités qui nous écoutent, ce qu'il faut faire maintenant, c'est le gros bac. Et ça, il n'y a plus personne qui va vous dire le contraire.

Le ministre nous a aussi dit une autre affaire, et là aussi il est un petit peu en retard, le ministre ? ça leur arrive des fois. Il m'a dit... Il a dit: Moi, je fais le tri à la source. Puis il a probablement raison parce que, dans sa municipalité, ils font du tri à la source, c'est-à-dire que tu mets le papier dans une partie du bac; les bouteilles dans l'autre; le plastique dans l'autre, etc. Puis là tu vois le gars, le matin ? ça coûte une fortune à la municipalité ? il prend le bac, il embarque ça sur le bord du camion, prend les bouteilles, il met ça là, le papier là, puis il met le plastique là. Ça coûte une fortune.

Dans la vraie vie, comment ça devrait se passer maintenant? Comment ça se passe aux États-Unis? Comment ça se passe en Europe? Tu prends le gros bac, tu ne fais pas le tri à la source. Tu le vides dans le camion, et le centre de tri va faire le triage mécaniquement. Alors, ceux qui auront la chance d'aller visiter le centre de tri de Victoriaville, qui est le modèle des modèles au Québec, il n'y a à peu près plus de main-d'oeuvre là-dedans. Le camion verse les matières résiduelles. Il y a un premier courant d'air qui prend les journaux et qui les lève dans les airs pour s'assurer qu'il n'y a rien d'autre que des journaux. Après ça, par un aimant, on retire tout le métal. Après ça, le plastique, par force centrifuge, est envoyé sur une courroie. Là, on doit le faire manuellement parce que, de mémoire, il y a sept sortes de plastiques différents, etc.

Quoique je ne connaisse pas bien ça, je vous avouerai que, quand on regarde les grands conteneurs dans lesquels ils mettent ces matières résiduelles là, une fois qu'ils sont triés, je vous avoue que, entre ce que j'ai vu trié à la main et ce que j'ai vu trié mécaniquement, le tri mécanique était nettement supérieur au tri manuel. De un. De deux, d'autre part, il faut faire attention, quand on met tout ça dans le bac, pour ne pas souiller la matière. Et c'était, à l'époque, la théorie, c'est qu'il fallait faire le tri à la source pour ne pas souiller. Maintenant, quand on lave le pot de cornichons et le pot de beurre de pinottes en plastique, si tout ça est bien lavé, ça ne souillera pas les autres matières qui sont dans le bac.

M. le Président, à chaque fois que vous m'avez vu parler de matières résiduelles ici, je vous ai fait une petite présentation avec mes bouteilles. Je sais que vous avez hâte de la revoir. Je m'en viens, pressez-vous pas. Je veux juste vous dire que je n'étais pas toujours très sûr que j'avais raison, parce qu'il me semblait qu'il n'y avait rien que moi qui parlait de ça. Imaginez-vous donc que L'actualité a fait un sondage sur l'environnement il y a quelques jours: 1 140 personnes sondées par la compagnie CROP. Alors, écoutez bien ce que je vais vous dire. Des gens qui seraient tout à fait d'accord ou plutôt d'accord pour tout envoyer dans le gros bac: alors, tout à fait d'accord, 57 %; plutôt d'accord: 35 %. Ça, c'est des gens qui m'ont écouté trois ou quatre fois avec mes bouteilles puis qui disent: Coudon, le gars d'Orford, pour moi, il a raison. Moi, je suis le tata qui traîne mes bouteilles de l'épicerie à la maison, au dépanneur, puis un petit bout, etc. Alors, 57 plus 35 %, vous ferez l'addition. Ceux qui sont plutôt en désaccord ou tout à fait en désaccord, qui veulent continuer avec la consigne, c'est 8 %, M. le Président. Alors, imaginez-vous si je suis convaincu de ce que j'avance maintenant.

Regardez-moi bien aller à cette heure avec mes bouteilles, si vous me le permettez. Vous êtes le consommateur, il est jeudi soir chez vous et la municipalité va ramasser demain, ce que le ministre nous a expliqué, les trois bacs. Alors, demain, dans votre municipalité... Les trois bacs, il faut comprendre que c'est le bac des déchets, le bac du compost, des matières qu'on peut composter, et, le troisième bac, le bac de la récupération. Alors, vous dites à votre ado: Écoute, je te donne 3 $ par semaine, c'est ton allocation; l'entente, c'est que tu sors les déchets. Charlie, sors donc la récupération, c'est le bac de la récupération cette semaine.

Alors, votre fils va arriver, Charlie, puis il va dire: Écoute, p'pa, là, je ne sais pas trop, là; il y en a, là, qu'il faut que je mette dans le bac de récupération, il y en a que tu m'as dit que ça allait à la Société des alcools, puis il y en a qu'il faut que j'envoie au dépanneur parce qu'il y a une consigne dessus. Tu peux-tu me dire lequel qui est lequel? Bien, tu vas lui dire: Écoute, c'est bien simple, c'est tout du verre blanc, ça doit tout aller à la même place. C'est tout du verre blanc. Puis là, comme bon père de famille, vous allez dire: Oui, c'est peut-être plus compliqué que ça, mon affaire.

Puis là je vais vous le dire, parce que c'est votre fils qui avait raison. Alors, celle-là, M. le Président, un verre blanc, elle est consignée à la Société des alcools du Québec. Ne l'apportez pas au dépanneur, ils ne la prendront pas. Si vous le mettez dans le bac, bien, vous allez perdre la consigne, c'est bien sûr. Celle-là ici, qui est identique, c'est du verre blanc, à tous égards, probablement fabriquée par la même compagnie, dans le même pays, au même prix. Alors, celle-là, elle s'en va au dépanneur. Vous pouvez seulement la consigner au dépanneur. Si vous l'amenez à la Société des alcools, ils ne vous donneront pas votre consigne, ils vont vous demander de retourner avec vos bouteilles. Et celle-là, il n'y a pas de consigne dessus. Celle-là, elle s'en va directement dans le bac de récupération.

Si vous voulez qu'un système ne fonctionne pas, là, on a trouvé la formule magique: compliqué, pas évident, puis pas de résultats en bout de ligne. Pas de résultats, ce n'est pas tout à fait vrai, parce que, effectivement, au Québec, on a un taux de consigne relativement élevé. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas moyen de récupérer autrement. Quand le législateur a décidé de mettre la consigne en place, c'était comme la première génération pour partir la récupération. Il n'y avait pas de bac dans les municipalités. Or, ça a été la façon de partir un système. Puis c'était tout à fait correct à l'époque, puis on a atteint des taux de l'ordre de 70 %. Bravo!

Mais, on est rendu en 2002. On veut simplifier la vie au consommateur. Qu'est-ce qui se passe dans la vraie vie? Ce même verre là, que vous le mettiez dans votre bac, que vous le mettiez au dépanneur ou que vous le mettiez à la Société des alcools, dans les trois cas, il va retourner à la même compagnie, M. le Président. Peu importe que, vous, le consommateur, vous vous êtes promené avec vos bouteilles puis que votre fils vous a demandé où est-ce que ça allait, ça va tout finir à la même compagnie de verre. Vous êtes donc en quelque part un peu naïf comme consommateur ou le législateur vous laisse croire que vous améliorez l'environnement parce que vous vous promenez avec vos bouteilles, alors que, si vous les mettiez dans le bac, tout le monde serait gagnant.

Je vais aller à une étape plus loin. On sait que la matière la plus rentable en ce moment en environnement, et tout le monde se chicane pour l'avoir, c'est l'aluminium, et, au Québec, il y a une vingtaine de millions de dollars qui, en ce moment, va dans le réseau de la récupération, de la consigne. Imaginez-vous si ce 20 millions là on pouvait l'envoyer directement aux municipalités. Bien, ici, on a trois cas d'aluminium, M. le Président. Alors, votre fils, Charlie, qui, ce soir, veut avoir son allocation pour demain ? la fin de semaine s'en vient ? alors, il est après faire le tri de tous vos déchets, et puis là il dit: Papa, celle-là, où est-ce qu'elle va? Bien là, c'est une bière, ça, importée, alors, bien là, celle-là, elle va à la consigne, Société des alcools. Ça, c'est une liqueur gazeuse, alors celle-là seulement au dépanneur. Et puis, ça, c'est un jus de tomate en boîte en aluminium; celle-là, il n'y a pas de consigne dessus. Imaginez-vous que votre gars, ou votre petite fille, ou votre grand-mère, ou vous-même finalement, vous devriez savoir ça, là, hein, vous devriez savoir ça.

Il n'y a pas un ministre de l'Environnement ? j'en ai connu cinq, hein; je les nomme par les numéros, c'est plus facile, parce qu'on n'a pas le droit de nommer leur nom... Mais que ce soit le ministre 1, 2, 3, 4, 5, je leur ai tous fait passer le test ici, sans exception, il n'y en a pas un qui l'a passé, M. le Président. Il n'y en a pas un qui était capable de me dire ce que, lui, il dirait à son fils, et ça, c'est les ministres qui décident... à leur fils ou à leur épouse ou à leur blonde, là... parce que c'est ça.

Alors, on peut continuer rapidement. Ici, j'ai trois bouteilles avec du verre brun, et je pourrais le faire avec des grosses bouteilles puis des petites bouteilles ? j'ai un inventaire extraordinaire pour mon spectacle. Alors, ici, vous avez avec du verre brun, c'est la même chose. Alors, celui-là, seulement au dépanneur; celui-là consigné seulement à la Société des alcools du Québec et, celui-là, à cause que c'est du moût de pomme ? je salue d'ailleurs les fabricants, des gens du comté d'Orford, c'est extraordinaire, ce produit-là ? c'est un verre brun. Tout ce verre brun là est probablement produit par la même compagnie et récupéré par la même compagnie, si ce n'est que, dans un cas, le consommateur doit aller à la Société des alcools et, dans l'autre cas, il doit se rendre au dépanneur et, dans le troisième cas, il peut le laisser tout simplement dans son bac.

Je vais vous faire une dernière démonstration. Dans le cas du plastique, c'est la même affaire, M. le Président, excepté qu'aucune, dans le plastique, ne va, je pense, à la Société des alcools; certaines vont au dépanneur et les autres sont non consignées.

Le point, et vous l'avez compris, M. le Président: jusqu'à il y a une semaine, je pensais que j'étais tout seul à penser que j'avais raison, et ça, c'est pas drôle quand vous vous couchez, le soir, puis vous êtes tout seul à penser que vous avez raison; vous vous posez des questions. Mais, à force de penser que vous avez raison, vous finissez par lire une statistique dans le Châtelaine ou dans L'actualité qui vous démontre que les citoyens ont vite compris que, effectivement, ils se promenaient avec leurs bouteilles.

n(21 heures)n

Maintenant, là, il faut que j'apporte une note très importante, très importante. Même si on prône... Et vous étiez d'ailleurs... Deux choses que je veux dire, puis, en vous regardant, ça me fait penser à une autre dynamique. D'abord, les bouteilles de bière. Les bouteilles de bière, M. le Président, on voudrait les laisser à la consigne. Ça ne coûte rien à la province, les compagnies de bière se sont organisées entre elles, et on laisserait ça là parce qu'il y a un pacte social au Québec pour qu'effectivement les bouteilles de bière passent par le dépanneur. Et vous savez que c'est un peu... on ne peut pas le dire trop fort, mais c'est un peu une barrière pour empêcher l'importation de la bière, au Québec, américaine, et c'est une façon aussi de créer beaucoup d'emplois chez nous. Alors, là-dessus, il y a un pacte social pour que nous laissions la bière comme elle fonctionne. D'ailleurs, je vous dirai que le plus grand défendeur de la consigne, bien, lui, il est venu, le plus grand...

Une voix: Défenseur.

M. Benoit: ...défenseur de la consigne ? j'ai dit «défendeur» ? défenseur de la consigne, il est venu en commission parlementaire, il a dit au ministre: Écoutez, nous, on s'est battus, les dépanneurs, pendant des années pour avoir la consigne. Bien là je viens en commission parlementaire... Et le ministre est là, il en est témoin. Il est venu puis il nous a dit: On ne la veut plus, la consigne; des bouteilles plein de liquide, des bibites, on n'a plus de place dans le dépanneur pour mettre ça, les grosses bouteilles, et puis on n'a pas de personnel pour faire ça, puis ce n'est pas payant, on ne le veut plus. Alors, j'ai dit: Ça, c'est le premier objet.

L'autre, c'est vous, M. le Président, lors d'un caucus. Avant que vous soyez président de cette Chambre, vous assistiez à nos caucus. Et j'avais fait une courte présentation sur mon histoire de consigne. Il y avait pas mal de monde qui n'était pas d'accord avec mon histoire. Et je me souviens de votre point de vue, vous aviez dit: Écoutez, oui, mais les scouts qui en ramassent sur le bord de la route puis qui vont porter ça au dépanneur, qu'est-ce qu'on va faire avec eux? Alors, je me suis empressé d'appeler le plus grand environnementaliste du Québec, celui qui a le plus compris comment les matières résiduelles devraient fonctionner, Normand Maurice, un gars de Victoriaville, un homme extraordinaire. Il n'y a pas de mots pour parler en bien de ce bonhomme-là. Alors, Normand Maurice, je l'ai appelé, je lui ai dit: Viens donc t'asseoir sur mon perron, j'aimerais jaser avec toi. Moi, j'ai un député, un député extraordinaire, qui me dit que j'ai un problème, si je propose ça, avec les scouts. Il dit: J'arrive. Il est venu, cet été, on s'est assis sur le perron, on a pris un jus de pomme ensemble puis on a jasé de votre problème des scouts. Il dit: Écoutez, juste en aluminium, il y en a pour 20 millions. On fera un petit projet, un petit programme de 1 million à côté. Il y en a déjà plein, de programmes au ministère de l'Environnement. Et, quand des groupes environnementaux ou autres feront de la collecte de matières résiduelles, on les subventionnera à l'unité. Alors, moi, je vous assure, M. le Président, que, ne vous inquiétez pas pour vos scouts, il y a moyen, si on enlevait la consigne, il y a moyen de trouver facilement une solution. Et on va brasser des millions de dollars en récupération dans les prochaines années, alors ne vous inquiétez pas.

Alors, je veux continuer. L'autre point, maintenant. Parce que tout n'est pas parfait, malheureusement. Là, il y a des gens qui ne paient pas ce qu'ils devraient payer, et le pire, c'est que ce sont des sociétés d'État. La Société des alcools du Québec. L'an passé, la Société des alcools du Québec a fait des ventes, au Québec, de 2,3 milliards. C'est beaucoup, beaucoup de ventes, ça, M. le Président. Ça les situe dans les très grandes entreprises de vente au détail. Ils ont fait des bénéfices nets de 519 millions. Donc, en d'autres mots, vous faites des ventes, vous avez tous vos frais d'opération, vous dégagez un bénéfice: 519 millions de dollars. C'est énorme comme profit. Et vous payez ? parce que la Société des alcools, elle appartient à l'ensemble des Québécois, qui nous écoutent ce soir ? alors, vous payez à l'État, au fonds consolidé, qui est l'actionnaire, vous lui payez 487 millions de dividendes, au gouvernement, et, de cette façon-là, l'argent va dans les hôpitaux, il va sur les routes, etc.

Combien avez-vous mis en environnement? Vous qui vendez ? je peux vous le donner en chiffre de caisses, en nombre de bouteilles, j'ai tout ça ici ? combien avez-vous, à la Société des alcools, sur des ventes de 2,3 milliards, combien avez-vous mis pour l'environnement au Québec? Je ne le sais pas, vous allez me dire 100 millions, 50 millions, 25 millions puis vous seriez dans l'ordre. Vous allez me dire, bien, 10 millions, puis vous allez me dire 5 millions, puis je vais vous dire que vous vous êtes trompé sur toute la ligne. Ils ont donné en bas de 4 millions de dollars pour la récupération sous toutes ses formes au Québec. En bas de 4 millions de dollars, et c'est plus de l'ordre de 2,7... Il y a 1,3, dans les états financiers, qui sont un peu compliqués à comprendre, là. Mais quelque chose de sûr, c'est qu'ils n'ont pas donné 4 millions, la Société des alcools du Québec, pour s'assurer qu'on récupère notre affaire. Alors, vous comprendrez que ces gens-là, à soir, qui nous écoutent...

M. Benoit: ...dans les états financiers, qui sont un peu compliqués à comprendre, là. Mais, quelque chose de sûr, c'est qu'ils n'ont pas donné 4 millions, la Société des alcools du Québec, pour s'assurer qu'on récupère notre affaire. Alors, vous comprendrez que ces gens-là, à soir, qui nous écoutent, ils ont toute une job à faire, eux autres aussi. Et, ou bien le ministre va les embarquer avec une autre industrie, puis ils vont devoir payer au même titre que les autres ? parce qu'il n'y aura pas d'exception dans leur cas ? ou bien ils vont se considérer comme étant leur propre industrie, et là on va devoir voir comment ces gens-là vont devoir cotiser.

D'autres points, maintenant, sur le projet de loi. Pourquoi ça a été si long, d'amener les municipalités à récupérer? Il y a une ou deux raisons fondamentales. Si, en ce moment, vous êtes le maire d'une ville, ça vous coûte à peu près 60 $ pour envoyer des déchets dans un site de déchets. Si vous le récupérez, ce déchet-là, via la récupération dans votre municipalité, ça va vous coûter à peu près 150 $. Alors, imaginez-vous, quand la salle du conseil municipal est bien pleine puis vous avez le choix de payer 60 $ de la tonne pour envoyer ça dans le site de déchets ? vous ne le voyez plus, ça ne vous appartient pas, merci beaucoup, bonjour ? ou bien de bâdrer avec la récupération puis faire de la publicité pour que le monde récupère plus, je vais vous dire tout de suite où elle se situe, l'équation: vous allez vers la facilité et vous essayez d'ensevelir le plus de déchets possible. Et, quand le ministre me montre un petit bac, effectivement, il sait très bien que la grosse partie des biens dans sa résidence vont encore dans la poubelle bien plus que dans le bac de récupération.

Or, il y a un autre projet de loi qui s'en vient, sur lequel on travaille avec un autre ministre de l'Environnement. Parce que, pour me tenir tête, là, ils sont rendus avec deux ministres de l'Environnement, M. le Président. Alors, il y en a un autre, là, qui travaille sur un autre projet de loi, et, lui, il va taxer vos déchets. Parce que, quand le ministre dit... Puis, là-dessus, je les reconnais juste trop, mes amis d'en face. Là, il dit: Bien là les entreprises vont en payer un bout. Bon, c'est vrai. Là-dessus, il n'y a rien qui n'est pas vrai. Il y a juste un petit bout qu'il a oublié de vous dire, c'est que, là, on a une autre loi qui s'en vient ? on va la passer ce soir, d'ailleurs, je crois ? et cette loi-là, ce qu'on dit, c'est que, quand un sac va rentrer dans le site de déchets, on se garde maintenant le droit, comme État, de taxer le sac qui va entrer dans le site de déchets pour améliorer l'équation de 60 $ à 150 $. Le but est noble, mais je vois déjà se profiler derrière cette taxe au sac vert... je vois déjà, je vois déjà le coût augmenter pour le citoyen, et ça, c'est préoccupant. Et je vous dirai que, quand je rencontre des maires, je leur dis: Ne sortez pas le champagne trop vite, ce n'est pas réglé, cette affaire-là. Enfin, l'intention est bonne, on verra. On verra, et on verra à quelle vitesse on va essayer de taxer indirectement le citoyen sur ses déchets. Mais je ne peux pas faire de procès, si ce n'est que c'est dans la loi, une autre loi que nous voterons ce soir.

Je finirai sur certains points. D'abord, le ministre l'a dit à plusieurs occasions, il a invité les citoyens à poser des gestes. Oui, il faut que les citoyens se convainquent maintenant... Et j'espère que RECYC-QUÉBEC, par des opérations de publicité, de rencontres avec les citoyens, que ce soit dans les foires, que ce soit un peu partout, explique le bien-fondé de leur démarche. Mais il faut d'abord faciliter le geste aux citoyens. Il faut faciliter le geste, il ne faut pas que les choses soient compliquées. Il faut qu'ils voient aussi ? et ça, c'est dans le rapport du BAPE ? il faut qu'ils voient l'impact visible sur la réduction des rebuts à enfouir.

Je vous donne un exemple. Nous, dans notre région, nous avons un des plus importants sites de déchets du Québec. Au même moment où on essaie de prêcher, dans la MRC de Memphrémagog, de récupérer, ces gens-là voient des 140 camions par jour passer devant leurs maisons, qui s'en vont au site de déchets. C'est bien compliqué de dire à ce monde-là: Écoutez, c'est bien noble, ce que vous faites, puis vous en voyez le résultat. Or, les citoyens, devant voir le résultat, et si ce n'était que, par exemple, si on demandait à vos scouts, pendant une semaine, de ramasser toutes les bouteilles de plastique dans une municipalité et qu'on bâtissait une immense montagne dans le milieu de la municipalité. Il faut que, visuellement, les citoyens réalisent l'ampleur de ce qu'ils pourraient faire s'ils y mettaient juste la main à la pâte un petit peu: Et on va voir les résultats.

n(21 h 10)n

Alors, l'objectif, c'est 60 % en l'an 2008, la récupération sous toutes ses formes. Ça comprend le compost. Et le ministre a une expression que j'aime bien, quand il dit: Du berceau jusqu'au tombeau. Et ça, c'est exactement ce qu'on veut faire maintenant, on veut suivre, de sa fabrication jusqu'au moment où on va la recycler, la matière. Et, moi, je pense que, si les citoyens embarquent, il n'y a pas raison, il n'y a pas raison qu'on n'y arrive pas.

D'ailleurs, le plus bel exemple, c'est celui des pneus. Il faut en parler parce que c'est un «successful story», ça, cette histoire-là, «successful story». Vous vous souvenez tous de cette scène d'horreur où, un soir ? sous le ministre Clifford Lincoln, ce grand M. Lincoln, qui était un très bon ministre de l'Environnement ? nous avons ouvert nos télévisions, en soirée, et nous avons vu ce tas de pneus, à Saint-Amable, qui étaient en flammes. Et on ne savait trop quoi faire avec cette situation-là. De là, il y a eu tout un cheminement des Québécois et des influenceurs et des législateurs, et nous sommes arrivés avec une structure via RECYC-QUÉBEC. Vous le savez tous maintenant: vous déposez vos pneus au garage, vous payez 3 $, un camion les ramasse et il les amène dans des entrepôts, et ils sont réutilisés. Ce qu'on a été capables de faire, ça a été de créer des marchés, des marchés stables pour la matière première.

Vous savez, vous, avec vos trois, quatre bouteilles d'aluminium, M. le Président, on ne peut pas dire à une industrie: Organise-toi. Mais, quand on a été capable de dire aux industries: On va vous livrer... c'est à peu près, de mémoire, 7 millions, 5 millions de pneus par année au Québec, quand on est capable de dire à une cimenterie: Écoutez, organisez-vous, changez vos fours, on vous assure que vous allez avoir ces pneus-là, il y a moyen de faire des choses. Et c'est ce qu'on a fait avec les pneus.

C'est tellement extraordinaire, ce qui se passe avec les pneus, qu'il n'y a à peu près pas un mois, un mois et demi où il n'y a pas une entreprise qui vient voir le porte-parole de l'environnement dans l'opposition, imaginez-vous ? ils doivent aller voir le ministre avant, en tout cas, j'espère ? pour nous dire: Écoutez, moi, j'aimerais ça, en avoir, des pneus, j'aimerais ça, en avoir, des pneus, je me partirais une entreprise, je ferais telle affaire. Il y a même un entrepreneur qui est venu à Magog, cet été, pour me rencontrer. Ils sont arrivés ? c'était impressionnant ? ils sont arrivés en avion à Sherbrooke, des gens de l'Ontario. Eux, ils me montraient des photos aériennes de tous les champs de pneus au Québec et ils me disaient: On va tous les acheter et les sortir du Québec, vous n'aurez plus jamais de problème avec vos pneus.

Bien, j'ai dit: Je ne suis pas sûr qu'on veut vous les vendre, moi, ces pneus-là. Je ne suis pas sûr qu'on veut vous les donner. Je ne suis même pas sûr que, même si vous nous payez, on va vous les laisser. Parce qu'on est tous après réaliser qu'il y a une matière première dans ces pneus-là, il y a de l'énergie, il y a une matière première, au même titre qu'il y a une matière première dans les mines. Et ces gens-là qui voudraient acheter cette matière première là, on n'est plus sûr qu'on veut leur vendre. Bien, en tout cas, c'est probablement ce que le ministre fait parce que, quand ces gens-là viennent me voir, c'est parce que le ministre leur a dit qu'il ne voulait pas leur vendre ces champs de pneus là, qu'on a trop longtemps vus comme une cochonnerie, quelque chose de désagréable. Maintenant, on y voit là une ressource dans laquelle il y a une grande somme d'argent possible.

Or, si on a été capable de le faire avec les pneus, on peut le faire à peu près avec tout. On peut le faire. On le fait déjà avec le papier. On ne peut pas vendre une tonne de papier aux États-Unis si on n'y met pas 35 % de matières recyclées à l'intérieur, etc. Et, au fur et à mesure qu'on a des quantités, on est capable d'établir des marchés. Exemple, je vous donne un exemple où il n'y a pas de marché en ce moment: les sacs de plastique, les sacs de plastique comme ceux-là. Il n'y a pas de marché au Québec. C'est-à-dire que les récupérateurs ne savent trop quoi faire, alors ils les envoient tout simplement aux sites de déchets. À Victoriaville, devant la quantité de ces sacs-là, on a trouvé un marché. Ils les vendent apparemment en Chine, et ils chauffent, en Chine, avec ça, si j'ai bien compris. Posez-moi pas de question, je n'en sais pas plus que ça. Mais ils ont développé un marché.

Alors, dans la mesure où on va être capable de stabiliser la quantité ? à la hausse, bien sûr ? il y a des gens, des gens d'affaires qui vont dire: Il y a là une matière, moi, je serais intéressé si le prix est correct. Et puis, dans le cas des pneus, on a dit: Bien, si tu prends un pneu, on va te donner en plus une subvention, et cette subvention-là, elle va être décroissante. La subvention, c'était pour les aider à s'organiser.

Or, quels sont les quelques problèmes que nous allons rencontrer dans les années qui viennent? Si je mets mes grosses lunettes épaisses, j'essaie de voir un peu plus loin ce qui nous attend dans l'univers de la récupération. D'abord, on va devoir faire beaucoup d'efforts pour embarquer les citoyens du Québec. Ça ne se fera pas seul. Les gens vont avoir des résistances, et il va falloir, par toutes sortes de moyens sympathiques leur démontrer aussi tout l'aspect presque moral. C'est-à-dire que tu poses un geste qui est noble, c'est un geste gratuit, c'est un geste qui est noble, et, en le faisant, ce geste-là, tu améliores ton environnement et celui de tes enfants éventuellement.

Et l'autre grand problème qui nous guette, c'est toute la dynamique des sites de déchets. Vous, M. le Président, vous êtes de la région de Montréal. Bien, je vous annonce qu'en l'an 2004 il n'y a plus un site de déchets alentour de Montréal qui pourra prendre vos déchets. On a tout un problème, là, on a tout un problème. Et, quand on voit des villes comme Toronto qui prennent leurs déchets ? qui voulaient les envoyer en arrière de North Bay, à trois, quatre heures de train ? là, ils les descendent au niveau du Sunbelt américain parce qu'ils ne sont plus capables de les mettre chez eux... Or, on a potentiellement le même problème dans la région de Montréal.

Le site de Saint-Jérôme est à peu près plein, le site à côté de Trois-Rivières est à peu près plein, le site de Drummondville est à peu près plein, le site de Magog, la grande couronne, là. Puis il n'y a personne qui veut d'autres sites chez eux. Vous parlerez aux gens de Saint-Grégoire, ce soir, le Mont-Saint-Grégoire. Le bon maire là-bas, là, vous lui demanderez s'il veut avoir le site qu'on veut lui proposer pour la MRC de Saint-Jérôme. Vous demanderez aux gens de Magog, ce soir, s'ils veulent avoir l'agrandissement du site. On leur propose, à Magog, d'agrandir, 300 000 tonnes par année, le site de déchets pour, en grande partie... Les déchets de la MRC de Memphrémagog, c'est 60 000 tonnes, on leur propose 300 000 tonnes par année. Alors, les gens de Memphrémagog, ils disent: Non, nous autres, les déchets de Montréal, on ne veut pas les avoir. Il y a tout un débat, il y a tout un débat, et ça ne se réglera pas facilement. Ça ne se réglera pas facilement. Et je vais aller un «step» plus loin.

Une voix: Un «step»?

M. Benoit: Je vais aller une étape plus loin, M. le Président. Si vous êtes à essayer d'ouvrir un nouveau site au Québec, moi, je vous dirai que c'est à peu près mission impossible. Toronto l'a essayé dans une mine dans le nord de North Bay, et il y a eu une... C'était une mine qui était dans... C'était dans le milieu de «nowhere». Ils n'ont jamais été capables de l'ouvrir.

Il y a en ce moment... Écoutez bien ce que je vais vous raconter. Je pense que ça va se terminer la semaine prochaine ou l'autre semaine après. Les déchets de l'Abitibi. Il y a de la place en Abitibi, là, c'est grand, l'Abitibi, il n'y a pas tant de monde que ça en Abitibi. Jusque dans les trois, quatre prochaines années, depuis quelques années, on ne s'entendait pas, en Abitibi, pour ouvrir un site de déchets. Alors, savez-vous où sont enterrés ce soir les déchets de l'Abitibi? 700 km plus tard, à côté de Saint-Jérôme, M. le Président. Il y a des dynamiques compliquées dans... Le ministre de l'Éducation hoche du bonnet, hein, il hoche du bonnet. C'est la réalité. On n'est pas capables de s'entendre en Abitibi... On n'était pas capables, il y a un décret gouvernemental qui les a obligés à s'entendre, ils n'ont pas été capables de s'entendre. Et c'est comme ça à la grandeur du Québec. Et puis je vous dirais même que c'est quasiment correct que ce soit comme ça à la grandeur du Québec parce que ça va nous forcer à dire: Bien là, si on n'est plus capables de les ensevelir, nos déchets, on va trouver d'autres solutions.

Prenez la MRC de Memphrémagog, quand le bon préfet dit: Ce n'est pas vrai que 300 000 tonnes vont rentrer chez nous. Savez-vous ce que ça représente, 300 000 tonnes de déchets sur le bord d'un lac comme le Memphrémagog, où toute l'eau potable de la ville de Sherbrooke est puisée? 300 000 tonnes, trois ans, c'est 1 million de tonnes, ça, ou à peu près. Un million de tonnes, c'est l'ampleur du World Trade Center une fois qu'il est tombé à terre. Vous avez une idée de ce qu'on veut rentrer dans un site de déchets sur le bord du Memphrémagog? Il y a des sites où on va rentrer trois fois ça. À côté de Trois-Rivières, entre autres, on va rentrer trois fois ces quantités-là. Alors, les citoyens vont être réfractaires, le ministre le disait tantôt. Les camions, le bruit, la poussière, plus tous les problèmes, tous les problèmes de lixiviat, de pollution de nappe phréatique.

Et là, en avant de nous autres, on a tout un problème. On a tellement un problème qu'il y a un règlement au ministère de l'Environnement qui est sur une tablette depuis deux ans. Il a été en prépublication, le ministre pensait qu'il n'y avait pas de problème. Passez-moi l'expression, ça a jammé dans le coude, M. le Président. Ils ne sont plus capables de le sortir du ministère, ce règlement-là, il n'y a personne qui veut le voir. On aura dans les années à venir un problème et peut-être qu'on va apprendre, à partir de ce problème-là, à être beaucoup plus sages avec nos matières résiduelles. C'est peut-être la grâce qu'il faut se souhaiter, que le problème soit assez grave qu'on va trouver des façons très intéressantes de solutionner le problème.

n(21 h 20)n

Je finirai sur une note très positive. Lundi... Et mon discours a été plutôt... ma présentation a été très positive, je pense.

Des voix: ...

M. Benoit: Très positive, très positive. Je ne dis pas qu'elle a été bonne, je dis qu'elle a été positive. Il y a une différence à être bon et positif.

Des voix: ...

M. Benoit: Ils veulent brûler mon temps, M. le Président. Ha, ha, ha! Je vais finir sur une note très positive. Lundi, j'étais invité dans une école qui s'appelle l'école Gendreau, à Coaticook. Et là on remettait les mentions d'honneur. Parce que cette école-là vient d'être choisie pour être une école Brundtland. Et il y avait la mascotte. D'ailleurs, je ne sais pas si le ministre a eu l'occasion de la rencontrer, la mascotte RRRV. Il n'y a pas de H dans RRRV. C'est R-R-R-V-E. Bien, eux, ils n'ont pas mis le E, là, l'élimination, ils ne l'ont pas mise, alors c'est RRRV, avec les 3R et le V. Et RRRV, il est très sympathique. Il a des sabots qui sont faits avec des bouteilles récupérées et puis un chapeau avec une autre bouteille récupérée. Les enfants l'adorent. Il leur fait faire de la gymnastique, il les fait danser, il leur parle d'environnement. Alors, vous auriez dû voir toute l'école qui était en commotion quand je suis passé là, les professeurs qui recevaient des mentions, etc. Moi, je suis ressorti de là ? j'ai été deux heures là; je devais être 20 minutes, j'y ai passé deux heures ? j'ai trouvé ça extraordinaire de voir tous ces petits bambinos. C'est une école primaire, et tous ces enfants, là, sont partis de là avec une mission dans la société, là, de récupérer.

Là, il faut juste que, quand ils vont arriver chez eux, que, un, ils ne se bataillent pas avec leur père sur des histoires de récupération et de consigne qui ne fonctionnent pas et puis que le bac ne soit pas trop petit. Parce que, dans cette ville-là, c'est effectivement des petits bacs. Alors, le pauvre petit bonhomme, là, quand il va avoir mis la bouteille d'eau de Javel puis la pile de journaux, il n'y a plus de place pour le reste, son père va dire: Bâdre-moi pas avec ça, sacre-moi ça dans la poubelle. Alors, il faut, rapidement, qu'on regarde sur tous ces angles et qu'on aille de l'avant. Et, moi, je suis positif, parce que je me dis: Si les jeunes embarquent dans une affaire comme ça, les parents vont embarquer.

Et des écoles Brundtland, il y en a un certain nombre. D'ailleurs, ici, parce qu'il me reste quelques minutes, peut-être le raconter. Les professeurs m'avaient expliqué que les enfants étaient très sensibles à l'environnement, ils avaient eu une belle... Alors, je leur ai posé une seule question dans un gymnase: Brundtland, est-ce que c'est une marque de jeep, une marque de camion, un homme ou une femme? Et, presque à l'unanimité, ils m'ont dit que c'était une marque de camion. Alors là on a encore un petit peu d'éducation à faire de ce côté-là, mais on va y arriver, M. le Président. Brundtland, pour les gens qui nous écoutent, ça a été une première ministre d'un pays, qui a été avec les Nations unies, avec l'UNESCO, qui a fait la plus grande enquête en environnement, et de là est arrivé le thème Penser globalement, agir localement.

Laissons à des gens ? il y en a de réunis ce soir ? la Communauté économique européenne qui est réunie ce soir, 25 présidents de pays européens, ou que ce soit ici, avec les gens de l'ALENA, que ce soit l'UNESCO, que ce soient les Nations unies, laissons ces gens-là regarder les grandes problématiques mondiales. Nous, comme citoyens, que pouvons-nous faire? Bien, nous pouvons, chacun dans notre maison, nous pouvons, chacun dans notre garage, essayer, au mieux de nos connaissances et au mieux des moyens que la municipalité mettra à notre disposition le plus rapidement possible, essayer, nous aussi, de faire comme ces enfants que j'ai rencontrés à l'école Brundtland, d'avoir cette volonté d'améliorer quelque chose. M. le Président, merci beaucoup pour votre attention.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci beaucoup, M. le député d'Orford, de votre intervention sur ce projet de loi. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Le projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président. J'aimerais vous référer à l'article 35 inscrit au feuilleton de ce jour, ou de ce soir.

Projet de loi n° 130

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 35. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 130, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement de l'Assemblée par M. le ministre de l'Environnement. Ces amendements sont déclarés recevables.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements? Alors, je reconnais M. le député d'Orford, porte-parole de l'opposition en matière d'environnement. M. le député, la parole est à vous.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Alors, M. le Président, vendredi dernier, nous avons, avec le ministre et un bon nombre de confrères et de consoeurs des deux côtés de la Chambre, nous avons travaillé de 3 heures de l'après-midi jusqu'à tard en veillée sur le projet de loi n° 130, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives.

Ce projet de loi là était un projet de loi assez large, qui couvre plusieurs aspects de l'environnement. Il aura, entre autres... prévoit la suppression des permis de sondage et de forage pour la recherche d'eau souterraine. Alors, nous avons, en ce moment, au Québec, un certain nombre de problèmes. Nous avons un certain nombre de municipalités qui ne peuvent pas faire de la recherche d'eau sur les terrains environnants à la municipalité. La seule façon dont ils pourraient le faire serait en expropriant la propriété.

Je vous donne un cas précis qui est porté à mon attention, la ville de Bury, en ce moment ? B-u-r-y ? dans les Cantons-de-l'Est, où la municipalité ? j'ai fait vérifier ça par la députée de Mégantic-Compton ? a de sérieux problèmes d'eau. Et ils ne pouvaient pas aller sur les terrains qui ne leur appartenaient pas pour faire la vérification: Est-ce qu'il y a de l'eau ou pas sur ces propriétés-là? Or, le ministère a décidé de permettre à une municipalité d'aller sur des propriétés privées ? publiques, il n'y avait déjà pas de problème ? d'aller sur des propriétés privées pour vérifier les quantités et les qualités de l'eau. Bon, jusque-là... Et là on a demandé un amendement. Je vois que l'amendement est déposé. On voulait donner un avis de 24 heures aux citoyens. Nous, on a exigé 48 heures, minimum.

Le problème qu'on... On a finalement... Le principe de la loi est valable, c'est-à-dire qu'on a une municipalité qui est prise en kidnapping. Puis il y en a un certain nombre. Je vous parle de celle-là, on me parle de Thetford Mines, on m'a parlé d'une autre sur le long du fleuve. Alors, il y a un certain nombre de municipalités qui ont ce type de problème là. Et vous savez que le problème de l'eau, là, on n'a rien inventé ici, c'est un problème mondial. Même au Québec, il y a certaines régions qui ont des problèmes. À l'occasion, ce qu'une municipalité pouvait faire, c'était de s'entendre avec ces gens-là. Elle pouvait payer, elle pouvait arriver à des ententes. Mais, dans les cas où elle ne pouvait pas s'entendre avec les terrains adjacents à la municipalité, bien, il y avait rien qu'une solution, c'était d'exproprier ces terrains-là sans jamais être sûr qu'il y avait de l'eau sous le terrain. Alors là on va permettre, entre autres, à cette municipalité-là de pouvoir aller forer et de trouver ou de ne pas trouver de l'eau.

Le seul problème, et on a dialogué longuement, le ministre et moi, là-dessus... Vous savez qu'être libéral il y a certaines valeurs fondamentales, et être Canadien aussi, il y a certaines valeurs fondamentales. Et une de ces valeurs-là, n'en déplaise à qui que ce soit ici, dans cette Chambre, c'est une valeur fondamentale, c'est celle de la propriété privée, c'est celle de la propriété privée. Et, au Parti libéral, on a toujours été très, très, très, très respectueux de cette dynamique-là où tu n'as pas le droit d'aller sur la propriété de quelqu'un d'autre. Si ce n'est pas ta propriété, que ce soit pour y chasser, que ce soit pour le bien commun, tu n'as pas le droit d'y aller. Mais, en quelque part, ici, je pense que le droit commun doit prévaloir sur un droit individuel. Le problème que j'ai, c'est qu'on espère, dans ces situations-là, que les villes vont se servir de leur jugeote un petit peu pour bien faire les choses. On dit aussi qu'on va payer le citoyen. En d'autres mots, si on va sur votre terre, M. le Président, et puis qu'on fore, bien, on est obligé bien sûr de payer tous les dommages qu'on aurait pu causer à votre propriété. On est d'accord avec ça. On espère que les gens des municipalités vont se servir de leur jugeote.

Alors, v'là-ti pas qu'est rentré à mon bureau le cas, via une firme d'avocats, où l'avocat de cette municipalité-là appelle le bon monsieur, qui a 85 ans, et on lui dit: Écoute, on attend juste qu'ils passent la loi n° 130, mon gars, puis on va rentrer sur ta terre, puis tiens-toi bien! Puis le pauvre monsieur, qui a 85 ans, et sa pauvre dame, qui sont des anglophones, là, ils voient ça arriver, alors, pas besoin de vous dire qu'ils nous appellent puis ils disent: Aïe, c'est quoi, cette affaire-là? On a beau leur expliquer... Mais là on dit: Il n'y a pas moyen que la municipalité aille forer un peu plus loin que votre hangar? Ils disent: Non, là, ils veulent forer à côté du hangar. Et là, la raison, c'est bien sûr que ça coûte très cher de transporter de l'eau par tuyau, alors la municipalité dit ? puis il semble que, dans ce cas-là, c'est un cas encore très spécial ? la municipalité dit: Nous, on veut que le tuyau soit le moins long possible. Donc, le moins long possible, ça va être le plus près de la maison de cet individu-là. Puis il y a d'autres terrains alentour de la municipalité, mais ils sont tous plus loin.

n(21 h 30)n

C'est le genre de danger, avec ce type de projet de loi là. Et au moment où on a discuté de ça, vendredi passé, je n'avais pas cet exemple-là. On va voter pour le projet de loi parce que, en quelque part, le bien commun, ici, on ne peut pas passer à côté puis, dans les années à venir, on anticipe des problèmes d'eau un peu partout. Mais, d'autre part, il va falloir que les municipalités se servent de leur jugeote. Et ce n'est pas parce qu'une loi vous permet d'aller sur le terrain d'un individu que vous allez pouvoir y aller à n'importe quelle heure du jour puis de la nuit, n'importe comment.

Il y a des dommages, qui ne sont pas évaluables, de gens âgés, 85 ans, qui ont paisiblement vécu, qui ont fait un choix d'aller vivre dans ce petit village là et qui soudainement... Ils seraient probablement d'accord, en fin de compte, qu'on vérifie s'il n'y a pas de l'eau. Ils vivent dans une communauté eux-mêmes. D'ailleurs, eux-mêmes sont sur le circuit d'eau de la municipalité, que j'ai appris. Ils sont probablement fondamentalement d'accord avec l'opération. Ils ne le diront pas trop ouvertement. Mais, en quelque part, ce qu'ils ne sont pas d'accord, c'est que la municipalité se comporte en cowboy et essaie de puiser quasiment dans la maison. Et là c'est le genre de problématique que j'espérais qu'on ne voie pas. Et on n'avait pas sitôt fermé les livres, vendredi soir, que j'avais un premier cas qui était porté à mon attention. Alors, le sens du projet de loi, c'est surtout ça, et ça va dans le sens...

Il y aura aussi des tarifications. Vous savez qu'en ce moment, si vous voulez opérer un site de déchets au Québec, vous allez devoir aller chercher des permis au ministère de l'Environnement. Ces permis-là peuvent prendre des années avant qu'on vous les émette parce que c'est vraiment compliqué, l'émission d'un permis de site de déchets. Je ne veux pas rentrer dans toute la problématique, mais c'est d'une très grande complexité. Or, le ministère est obligé d'exiger étude après étude après étude, et, au moment où on se parle, ce que le ministre nous expliquait ? et c'est ma compréhension depuis longtemps ? on ne chargeait pas à ces gens-là. On ne chargeait pas à ces gens-là. Alors, c'était l'ensemble des citoyens, imaginez-vous donc, qui payaient pour des multinationales qui impriment de l'argent dans leur site de déchets. C'était le citoyen qui payait pour ces histoires-là. Et on dit: Ça n'a pas d'allure, ces gens qui demandent des services au ministère doivent maintenant payer.

Il y a aussi que les demandes... Il y a un certain nombre maintenant de permis qui vont être affichés au ministère, des permis qui ne l'étaient pas antérieurement. Alors, c'étaient les grands points de ce projet de loi. J'essaie de voir, ici, M. le Président. Normalement, le ministre fait une présentation avant. Il a décidé de ne pas en faire. C'est son choix. Parce qu'on a fait quatre projets de loi, là. Je veux juste être sûr que...

M. Simard (Richelieu): ...

M. Benoit: Je pense qu'effectivement, comme le dit si bien le ministre de l'Éducation... c'est excellent. Alors, M. le Président, nous allons voter pour le projet de loi. Encore une fois, j'invite les municipalités auxquelles nous allons maintenant donner un certain avantage, non pas pour eux, mais pour l'ensemble des citoyens qui ont un problème d'eau dans ces municipalités-là, de bien réaliser ce que le législateur veut faire ici ce soir, là. Il dit: Le bien commun doit passer en avant du bien individuel, mais, si vous deviez vous comporter en fanfarons, si vous deviez vous comporter en cowboys, les juges, quelque part, vont reconnaître ça, et il y aura des pénalités obligées aux municipalités. Ce n'est pas vrai, là, qu'on va pouvoir, demain, tous ces bons maires et ces mairesses qui depuis longtemps voulaient rentrer sur le terrain de quelqu'un pour aller évaluer la qualité de l'eau, que... Si ça rentre tous comme des cowboys dans une semaine sur ces terrains-là, je vais vous dire que, le Parti libéral, on va être les premiers à le décrier puis on va être les premiers à dire: On avait-u raison de voter avec le ministre là-dessus? Et là, dans ces situations-là, on doit évaluer toutes ces situations-là puis dire: Bien là on va aller vers le bien commun. C'est ce qu'on fait ici, M. le Président, et en espérant qu'on ne se trompe pas en votant dans cette direction-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements proposés par M. le ministre de l'Environnement sont-ils adoptés? Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 130 est-il adopté? Adopté.

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant. O.K. Ça va. M. le leader.

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président. Je vous proposerais, à ce stade-ci, de suspendre temporairement nos travaux.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je suspends temporairement les travaux, pour quelques minutes, et on reviendra dans quelque temps. Merci.

(Suspension de la séance à 21 h 35)

 

(Reprise à 21 h 39)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez vous asseoir.

Merci beaucoup. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Je vous remercie, M. le Président. J'aimerais vous référer à l'article 36.

Projet de loi n° 134

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 36, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 134, Loi instituant le Fonds national de l'eau. Y a-t-il des interventions? M. le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement et député d'Orford, je vous cède la parole.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. N'ajustez pas vos appareils, on est là depuis 8 heures puis on en a encore un petit bout à faire, M. le Président.

n(21 h 40)n

Alors, le projet de loi n° 134, ça crée un fonds national de l'eau. Un fonds national de l'eau, qu'est-ce que ça va faire, M. le Président? On va mettre un peu d'humour dans nos travaux ici ce soir. Fondamentalement, le terme est beaucoup plus important que la réalité. Le Fonds national de l'eau, c'est finalement un compte de banque qu'ils vont ouvrir au ministère des Finances. Mais, vous savez, ils ont un peu une tendance, de l'autre côté de la Chambre, à en mettre beaucoup. Alors, ils ont décidé d'appeler ça un fonds national de l'eau, mais, dans la vraie vie, je vous le dis, faites-moi confiance, ils vont appeler le ministère des Finances puis ils vont dire: On peut-u ouvrir un compte, puis, l'argent ? je vais vous dire d'où elle vient tantôt ? on va mettre ça dans ce compte-là? Puis ils ont appelé ça le Fonds national de l'eau.

C'est à peu près comme les gens qui nous écoutent ce soir, qui disent: Bien là on voudrait peut-être que notre fils fasse l'université dans quatre ans, on va s'ouvrir un compte à la caisse puis on va mettre de l'argent dans le compte pour que notre fils aille à l'université dans quatre ans. Ils n'appelleront pas ça le fonds national pour Jean-Louis, ils vont dire: C'est un compte pour que Jean-Louis aille à l'université. Puis, dans la réalité, c'est comme ça que le monde se comporte. Mais, nous autres, ici, comprenez-vous qu'il faut toujours en mettre un peu plus? Alors, on appelle ça le Fonds national de l'eau.

Moi, je n'ai pas de problème, là. Si ça peut leur faire plaisir, ils peuvent l'appeler le fonds international de l'eau, je n'ai vraiment pas de problème avec ça. Dans la vraie vie, c'est un compte de banque au ministère des Finances, point à la ligne, on passe à d'autres choses. Maintenant, d'où l'argent va venir pour aller dans ce Fonds national de l'eau, M. le Président? Dans la Politique de l'eau qui a été déposée au Québec... Peut-être deux mots sur la Politique de l'eau. On reviendra sur le fonds national ensuite.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: On est un peu dans l'eau, comme vous pouvez voir, là. Politique de l'eau, une autre affaire qu'ils ont fait tout un spectacle il y a une semaine: petits canapés, vin blanc, le premier ministre, le salon... Aïe, c'était le spectacle en trois dimensions. La musique, ils ont invité 300 personnes. Là, j'ai dit: Ils vont réinventer la forme de la planète, c'est évident, avec le spectacle qu'ils étaient après monter là. Alors, pendant qu'il y avait le spectacle en bas, moi, j'ai lu le document. Ça a... Je vais vous dire exactement combien de pages. C'est très bien fait, d'ailleurs. Je vais vous dire, au niveau de la sobriété, le document est correct. Ça a 95 pages, cette affaire-là. Alors, j'ai rapidement lu ça, et là j'ai essayé de trouver les nouvelles mesures, parce que le projet de loi dont nous parlons découle directement de cette affaire-là, de ce document-là, ce qu'on appelle la Politique nationale de l'eau, qui n'est fondamentalement pas mauvais. Mais là on a fait un spectacle extraordinaire. On a essayé de faire croire au monde que c'était une grosse affaire. Moi, j'ai lu ça de bord en bord. Ça fait quelques années qu'on lit sur l'eau. Dans les choses totalement nouvelles qui n'existaient pas avant, il y a un élément, c'est la redevance que devront payer certaines entreprises. On en parlera tantôt. Ça, c'est nouveau. Ça fait longtemps que c'était dans le portrait, et puis là, avec la Politique de l'eau, c'est nouveau, ils l'ont mis en place.

Mais je vous donne des exemples, là, de patentes, genre: Nous allons travailler avec les groupes d'environnement. M. le Président, on sait comment ils ont travaillé contre les groupes d'environnement sur Hertel?des Cantons, puis la côte des Éboulements, puis etc. Alors, c'est le genre de choses qu'on va lire. À un moment donné, on va lire: Il va y avoir 33 bassins versants au Québec qu'on va aider. Il y en avait déjà 22 qu'on aidait. Il y a 400 bassins versants au Québec. Il y en a 400, il y en avait 22 qui étaient en opération: la Yamaska, Richelieu, la rivière Chaudière, bon, etc.. Là, ils vont monter ça à 33. Mais, pour faire une affaire comme ça, là, tu n'as pas besoin de faire tout un gros spectacle comme ça. Ils auraient pu envoyer un communiqué de presse puis dire: On fait un fonds de l'eau puis on va avoir des redevances. Le citoyen aurait trouvé qu'on dépensait pas mal mieux, pas mal mieux ses deniers que les petits canapés, puis le vin blanc, puis tout le chiard que j'ai vu là.

Et je le dis franchement parce que, moi, j'ai été élevé en politique par un monsieur qui s'est appelé Robert Bourassa, puis avant ça c'était Claude Ryan. C'était rien qu'un peu pire. Je me souviens encore, la première fois que j'ai vu M. Ryan arriver chez nous, la première fois que j'ai vu M. Ryan arriver chez nous alors qu'il était chef de l'opposition, il se promenait dans une vieille Chevrolet brune poquée. Pour lui, ça n'avait aucune forme d'importance, toutes ces histoires-là. Mais, lui, c'était d'atteindre des buts pour la société québécoise, et, tout l'aspect dépenses, il était réfractaire à ça. Et après ça, vous et moi, M. le Président, on a travaillé avec un premier ministre ? j'ai été son adjoint parlementaire ? et, s'il y avait un gars qui... Lui, la dépense, ça le fatiguait. Ça le fatiguait bien gros. Puis, je vais vous dire, quand un ministre rentrait dans son bureau pour avoir une dépense, il était mieux d'avoir des bien bonnes raisons.

Je me souviendrai toujours, quand on allait le voir sur le perron au bunker, qu'il était assis sur une chaise toute défoncée qu'il avait achetée chez Woolworth, à peu près une chaise à 1,50 $. Il était premier ministre du Québec. C'était ça, M. Bourassa. C'était ça, le Parti libéral. C'étaient des gens qui faisaient attention aux deniers publics parce qu'ils se disaient...

Des voix: ...

M. Benoit: Ils se disaient: Les gens du Québec travaillent très fort pour chaque dollar qu'ils gagnent. Ils sont effectivement les plus taxés en Amérique du Nord, et il faut faire attention aux revenus des gens. Alors, quand je vois ces spectacles-là avec le vin puis les canapés aujourd'hui...

Vous avez vu le théâtre qu'ils ont monté là? Ça n'a pas d'allure, M. le Président. Pendant ce temps-là, les gens travaillent fort, paient des impôts, essaient d'envoyer les enfants à l'école puis à l'université, payer... Un peu comme l'annonce, là, ils paient tout le temps. On avait une belle occasion ici, avec la Politique de l'eau, d'annoncer une politique de l'eau. Et puis il n'y avait pas grand-chose là-dedans, pas assez, en tout cas, là, pas assez pour faire le chiard qu'on a fait là. Je vais vous dire ça tout de suite, je suis un peu allergique à ce genre de présentation là. Le document est «top», c'est tout à l'honneur du ministre qui l'a approuvé, mais le spectacle était «too much», bien, en tout cas, pour finalement ne rien nous annoncer, hein, pour finalement ne rien nous annoncer.

Le rapport Boucher, là, sur le loisir et les embarcations, bien, là-dedans on nous dit qu'on va continuer la bonne oeuvre du rapport Boucher. La bonne oeuvre du rapport Boucher, ils l'ont prise, ils l'ont divisée comme un pain, en 11 tranches, puis ils envoient ça dans 11 ministères. Depuis ce temps-là, tout le monde s'obstine dans 11 ministères. Imaginez-vous, ça s'obstine dans un. Imaginez-vous quand ils envoient ça dans 11 ministères. C'est des histoires comme ça.

La seule affaire nouvelle dans la Politique de l'eau, c'était la redevance, et ils ont effectivement décidé d'aller de l'avant avec le Fonds national de l'eau. Alors, il y aura maintenant des redevances qui seront payées par les gens. Et ce qu'on a statué aussi sur l'eau ? mais, finalement, c'était déjà dans les us et coutumes du Québec ? c'était la propriété de l'eau. Trop souvent, les gens disaient: L'eau qui est en dessous de mon entreprise ou est en dessous de ma maison, elle m'appartient à moi. Et, dans la Politique de l'eau, on décrète que l'eau va être un bien commun. Et, de la même façon qu'on vous charge une redevance si vous coupez les forêts de l'État ou que vous creusez dans une mine, on vous charge des redevances, on dit: C'est un bien qui appartient à l'ensemble des Québécois, vous allez donc payer pour avoir ce bien-là. Que ce soit ce qu'on appelle les CAAF, là, les régions où on coupe les forêts, il y a des redevances de payées. Alors, on va faire la même chose pour l'eau, et les compagnies qui puisent de l'eau au Québec devront maintenant payer des redevances, et ces sommes d'argent là iront maintenant dans ce Fonds national de l'eau, ce compte de banque, que j'appelle, au ministère des Finances.

Il n'y a pas de conseil d'administration. C'est vraiment un compte de banque, l'argent va rentrer et va sortir. Et ils disent que ces argents-là devront servir pour toute la problématique de l'eau, que ce soit pour les rejets d'eaux usées ou que ce soit pour de l'eau qu'on va pomper.

Alors, on a posé plein de questions au ministre. On a vite aperçu dans la loi qu'il y avait une faille. On l'a souligné. Dans ce Fonds national de l'eau, le Barreau nous a écrit et nous a dit: Écoutez... Parce qu'on va demander aux gens de faire des dons, des legs et autres contributions. Alors, vous, vous vous appelez la famille Chagnon, vous avez une fondation de 1,3 milliard et vous décidez que vous faites un don de quelques centaines de millions au Fonds national de l'eau. Le Fonds national de l'eau prend l'argent. Jusque-là, tout est très bien, c'est noble, il n'y pas de problème. Et là il y a une action qui est intentée parce que vous avez donné un permis à quelqu'un qui a pollué la nappe phréatique, ou le barrage a été emporté ? pensez à n'importe quelle des situations ? et là vous actionnez le Fonds national de l'eau. Mais, quand la famille Chagnon, hypothétiquement, a fait son don au Fonds national de l'eau, elle voulait que ça serve pour améliorer la situation de l'eau, elle ne voulait pas que ça serve à des débats légaux ou à payer des compensations. Alors, le Barreau a fait valoir ce point de vue là, et nous avons décidé, les députés de l'opposition, de se battre jusqu'à tard dans la veillée de vendredi soir pour faire valoir le point de vue du Barreau, disant: Écoutez, il y a...

n(21 h 50)n

Et là on a offert trois propositions au ministre. Mais, vous savez, au ministère de l'Environnement, ils n'ont pas tous le même pouvoir d'entendement. Il y en a qui entendent mieux que d'autres. Lui, franchement, vendredi soir, il n'avait pas le pouvoir d'entendement très fort. Alors, il a refusé tout, les trois propositions.

La première, on lui disait: Dans votre loi, ajoutez une phrase, dites que, votre Fonds national de l'eau, il y a une sous-section qui va être pour les dons, les legs et les contributions, et nommez-vous un conseil d'administration. Vous allez être redevable, c'est vous qui annoncez le conseil d'administration. Et les gens qui mettront de l'argent là-dedans sauront que c'est géré un peu comme une fondation, finalement. Ce ne fut pas retenu. Enfin, on a fait trois propositions dans une approche de vouloir régler le problème du Barreau et celle du ministre. Mais, comme j'ai été obligé de lui dire à un moment donné, on peut vouloir votre bien, M. le ministre, mais on ne peut pas vous obliger à l'accepter, ce bien-là.

Ah! il l'a refusé, et là, bien, à un moment donné, il nous a dit, dans une envolée oratoire comme seul il est capable de faire, il nous a dit: «Je l'affirme ? j'ai les galées ici ? le député n'est pas seul dans le champ, il est accompagné du Barreau. Les deux sont dans le champ. Et la preuve de l'erreur commise par le Barreau dans l'analyse sans doute un peu hâtive qu'ils ont signée...» Ah, il n'est pas pour admettre qu'il s'est trompé. Et là il ajoute: «Je suis prêt à le défendre, à leur écrire pour leur dire qu'ils se trompent.» Pas de problème avec ça, moi. Malheureusement, je n'ai pas le droit de dire qu'il n'est pas ici ce soir, mais la première question que je voulais lui demander, c'est: Avez-vous écrit au Barreau pour leur dire que l'opposition, avec le Barreau, se trompait?

D'ailleurs, j'ai dit au ministre: Quand vous écrirez au Barreau puis que vous leur dites que Robert Benoit s'est trompé, ça ne va rien leur dire. Mettez un nota bene en bas: Robert Benoit, le bon député du comté d'Orford, porte-parole en matière d'environnement pour l'opposition officielle, parce que, au Barreau, je ne suis pas sûr que je suis très bien connu.

On a argumenté longtemps, et le ministre de l'Environnement n'a rien voulu, rien voulu savoir, M. le Président. Alors, je lui annonce en primeur ce soir, devant le fait que je n'ai pas de réponse s'il a écrit ou pas au Barreau: Bien, moi, demain je vais écrire au Barreau, avec les galées, et je vais leur indiquer que je suis dans le champ avec eux, et je vais leur demander leur opinion. Ça ne nous aura pas empêchés de voter sur le projet de loi, si ce n'est qu'on aura d'autres votes subséquents. Et nous pourrons toujours, suite à ce que nous dira le Barreau...

Et je lui ai dit, au ministre, à ce moment-là... Parce que je vous ai dit ce que le ministre a dit, mais, moi, je vais maintenant vous dire ce que, moi, je lui avais répondu à ce moment-là. Il n'y a pas de cachette, on lui a dit: «Le ministre nous a offert d'écrire au Barreau pour leur indiquer leur erreur. Je l'invite à le faire et à envoyer une copie à l'opposition. J'aimerais qu'on aille au fond de cette chose-là. Le ministre nous l'a offert. Alors, j'invite le ministre à le faire, et on fera un suivi là-dessus de notre côté pour qu'il envoie une lettre au Barreau, qu'il leur dise qu'ils n'ont pas raison, qu'il explique son point de vue, et on verra ce que le Barreau va répondre.»

Alors, ce que je vous dis ici, c'est ce que je lui ai dit en commission. On ne pourra pas nous accuser de ne pas avoir une certaine continuité. Et demain, étant donné que le ministre ne peut pas répondre à la question, nous allons écrire au Barreau et nous allons nous demander si effectivement le ministre a totalement raison.

Quoi d'autre qu'on pourrait dire sur le Fonds national de l'eau? C'est fondamentalement correct. Je veux dire, encore une fois, on n'avait pas besoin de faire tout ce tapage-là alentour de ça, c'est un compte de banque. On aurait juste pu ouvrir un compte de banque, passer une loi. D'ailleurs, je disais au ministre: Si c'est pour être le Fonds national de l'eau, peut-être que vous pourriez l'ouvrir à la Banque Nationale, votre Fonds national de l'eau.

Et je pense qu'il n'y a rien d'autre. Je passe rapidement à travers tous ces articles. Il n'y a rien d'autre. Les surplus, le ministère des Finances peut les retirer ou il peut mettre de l'argent dans le fonds. Et, bon, c'est à peu près ça. Ça ne changera pas l'histoire de l'humanité, c'est dans la bonne direction. Ce qu'on a peur, c'est que, les argents qui seront perçus dans un premier temps par les compagnies qui pompent de l'eau au Québec, ces argents-là... On verra. On espère vraiment qu'ils retournent dans la dynamique de l'eau et que le ministère ne se désengage pas à la même vitesse où il met de l'argent dans ce fonds-là.

Il nous a indiqué aussi qu'il voulait... et je pense qu'il a raison de le faire. Non seulement il veut avoir une redevance des eaux qu'ils vont pomper, ces compagnies-là, mais il veut éventuellement, pour forcer les municipalités à nettoyer leurs eaux qu'ils envoient vers les rivières, les rejets, il veut éventuellement ? il ne le fera pas immédiatement ? il veut éventuellement imposer une taxation sur les rejets d'eaux usées, et cette forme de redevance là serait finalement ajustée selon la quantité des rejets d'eaux usées mais aussi la qualité de l'eau usée, et ça, je pense que ça aussi, ça va dans la bonne direction, si ce n'est que, il faut bien se comprendre, au niveau d'une municipalité, il y a là une forme de taxation qui pourrait éventuellement, je le dis bien, chez les municipalités qui n'ont pas fait des efforts, il pourrait y avoir là une augmentation de la taxation.

D'autre part, il va falloir se dire qu'autant les municipalités que les individus n'ont pas de droits acquis à la pollution. Vous savez qu'il y a encore 300 municipalités au Québec qui rejettent directement dans les ruisseaux et les rivières, sans aucune forme de traitement, et, ces municipalités-là, finalement, on n'a aucune forme ? en anglais, on dit «incentive» ? on n'a aucune façon de les obliger, à toutes fins pratiques, à part que de les subventionner, etc. Alors, on pourra éventuellement dire à une municipalité: Écoutez, vous ne faites pas les efforts nécessaires, et on va devoir vous taxer sur les rejets d'eau. Et là ça va avoir un effet plutôt positif.

La question qui est posée... Et je vois tous ces députés tout le tour de moi qui se demandent: Il y en a combien, d'eau de pompée au Québec par ces compagnies d'eau là? Est-ce que c'est important? La réponse: C'est très, très minime. Je ne vous le donnerai pas en pourcentage, je vais vous le donner en quantité de résidences. On dit que ce serait à peu près l'équivalent de ce que boivent à peu près 900 résidences au Québec dans une année. C'est la quantité d'eau qui est pompée par les compagnies pour embouteiller au Québec.

D'autre part, pour ceux qui reçoivent la revue L'actualité de cette semaine, il y a un très bon article sur l'eau embouteillée au Québec ? j'invite les gens à le lire ? un très bon article, mais qui est un peu désolant. Nous y apprenons que 80 % de l'eau embouteillée appartient à trois multinationales étrangères et que le Québec a manqué la courbe là-dessus. Souvent, l'eau embouteillée a été partie par des petites entreprises québécoises. Elles furent toutes achetées, ou à peu près, et, au moment où on se parle, 80 % de l'eau a été achetée par des compagnies comme Nestlé qui vient d'acheter Montclair, etc. Alors, les grandes compagnies, en ce moment, qui sont propriétaires de l'eau au Québec, c'est la compagnie Danone, qui est propriétaire de Labrador, de Naya, de Naturo et de Larochelle, Nestlé, qui est propriétaire de Montclair, et Parmalat, une compagnie italienne ? l'autre était suisse, l'autre était française ? qui est propriétaire d'Esker. Alors, la plus grande partie de l'eau qui est pompée au Québec en ce moment à partir des nappes phréatiques, ce sont des compagnies qui appartiennent à des multinationales mondiales, et, malheureusement, le Québec a manqué cette courbe-là, on doit l'avouer bien franchement. Enfin, il est trop tard pour pleurer, c'est fait.

Alors, on va voter pour le projet de loi, au moment où nous sommes, mais nous allons dès demain écrire, M. le Président, au Barreau, nous allons leur dire qu'ils sont dans le champ ? ce sont les paroles du ministre ? et que l'opposition est dans le champ avec le Barreau, et on va attendre la réponse du Barreau pour voir ce qu'ils ont à dire de cet aspect où des gens vont mettre des fonds dans une fondation, à toutes fins pratiques, sur lequel les argents pourraient servir à d'autres fins que celles de la fondation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vous rappelle que nous en sommes à la prise en considération du rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 134, Loi instituant le Fonds national de l'eau, et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Oui. M. le Président, j'ai fait la promesse à mon collègue le ministre de l'Éducation d'être très bref, mon collègue le député d'Orford, critique de l'opposition officielle, ayant tout de même fort bien couvert le sujet, mais je tenais, pour évidemment le personnes qui nous écoutent via leur télévision, à rappeler la finalité de ce fonds en lisant les quatre ou cinq phrases qui l'expliquent globalement: Ce fonds est affecté au financement de mesures prises par le ministre de l'Environnement pour assurer la gouvernance de l'eau; il est notamment affecté au financement de mesures visant à favoriser la protection et la mise en valeur de l'eau ainsi qu'à en assurer une qualité et une quantité suffisantes, dans une perspective de développement durable. Voilà, pour l'essentiel, l'objectif de ce fonds.

n(22 heures)n

La philosophie donc qui transcende ce projet de loi, c'est de dire: Ayons donc les sous requis pour financer de manière permanente et récurrente l'ensemble des actions que nous voudrons prendre comme collectivité pour protéger ce plus beau patrimoine collectif qu'est l'eau. Parce que, et le député d'Orford y faisait très pertinemment référence, ce fonds est, de manière consubstantielle, relié à la Politique nationale de l'eau, une politique nationale qui, pour la première fois de notre histoire, présente l'eau dans toute sa simplicité mais, en même temps, dans toute sa complexité. Parce que, lorsqu'on fait référence à l'eau, M. le Président, on fait référence bien sûr à une source de vie que l'on doit protéger comme la prunelle de nos yeux, qui est très fragile, comme vous le savez.

L'eau, c'est également une source de pouvoir de développement hydroélectrique. L'eau, c'est une ressource naturelle, une ressource première, notamment, qui assure le développement de certaines industries, au premier chef la vaste industrie agroalimentaire. L'eau, c'est également un potentiel de développement récréotouristique, et on sait qu'il y a de plus en plus de gens qui, de par le monde, viennent chez nous pour cet attrait formidable que nous pouvons leur offrir.

Alors, la Politique nationale de l'eau a ceci de particulier qui la démarque de d'autres politiques à travers le monde, qui ont le même objet, c'est qu'elle présente l'eau dans sa globalité et dans sa complexité. Et le Fonds national de l'eau servira à recueillir les sommes, qui proviendront de quel endroit? Qui proviendront d'un prélèvement que nous effectuerons auprès des compagnies qui embouteillent l'eau, qui l'embouteillent en la prenant soit des eaux souterraines, soit des eaux de surface, voire même, M. le Président, des eaux du robinet, parce qu'on sait qu'il y a certaines compagnies qui prennent directement l'eau du robinet, qui la traitent un peu, qui la réembouteillent.

Alors, disant que nous ferons de l'eau un patrimoine collectif, nous allons, à échéance, imposer une redevance à ces compagnies en, donc, prélevant un certain nombre de sous éventuellement par litre d'eau prélevée, et c'est cette somme qui servira à mettre en oeuvre la formidable Politique nationale de l'eau, qui a été largement saluée par nombre de groupes écologistes, par nombre d'observateurs et de spécialistes comme une percée extraordinaire et une politique qui était attendue depuis longtemps. Et, encore une fois, c'est avec grande fierté que le Parti québécois a mis de l'avant cette politique très progressiste en matière environnementale. Je vous remercie, M. le président.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué à l'Environnement et à l'Eau. Alors, il n'y a pas d'autres interventions? Je mets donc aux voix la motion. Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 134, Loi instituant le Fonds national de l'eau, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Alors, je vous remercie, M. le Président. Je vous réfère à l'article 53 inscrit au feuilleton de ce soir.

Projets de loi publics au nom des députés

Projet de loi n° 392

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 53, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 392, Loi visant à assurer l'approvisionnement en porc d'un abattoir exploité en Abitibi-Témiscamingue. Il y a des interventions? Alors, M. le député d'Abitibi-Est. Alors, je vous cède la parole, M. le député.

M. André Pelletier

M. Pelletier (Abitibi-Est): M. le Président, le projet de loi n° 392, que nous sommes présentement à l'étape de son adoption finale, est une loi spéciale, une loi privée pour bien démontrer qu'elle est très spécifique, qu'elle s'applique à une seule entreprise, qu'elle s'applique à un seul produit et qu'elle s'applique à une seule région. Les restrictions à cette loi font en sorte qu'il ne peut y avoir de similitudes à travers toutes les autres régions du Québec. C'est une loi qui n'a qu'un seul but... c'est-à-dire, plusieurs buts, mais avec des spécificités qui sont propres à la région, ses habitants et ses populations.

Cette loi n° 392, M. le Président, elle vise d'abord à sauver 40 emplois et elle vise aussi à créer au cours des prochaines années 70 emplois supplémentaires. M. le Président, vous comprendrez que, dans une région dont la conjoncture de l'industrie de la forêt, de l'industrie des mines n'est pas présentement favorable, dans une région qui vit une décroissance démographique, vous comprendrez que la sauvegarde de 40 emplois, la sauvegarde d'une entreprise à Lorrainville, au Témiscamingue, c'est, pour les gens de ma région, d'une importance aussi grande que la sauvegarde de GM à Montréal, à Sainte-Thérèse. Pour nous, ça a une équivalence semblable, une importance semblable.

Le projet des Viandes Lorraine, parce que c'est de cette manière qu'on appelle le projet, l'industrie, l'entreprise Les Viandes Lorraine, à Lorrainville, au Témiscamingue, c'est un projet unique en ce sens qu'il s'adresse, comme je l'ai dit plus tôt, à une seule entreprise et que son permis sera accordé pour permettre à l'entreprise de ne faire qu'un seul produit, un produit haut de gamme qui ne se fait pas au Québec, qui ne se fait pas au Canada. Donc, il est unique en ce sens que sa composition, la recette de ce produit-là fait en sorte qu'à travers le monde c'est un produit recherché. C'est un jambon qu'on appelle prosciutto, une recette avec une... une nomenclature qui vient de l'Italie et dont la recette, autant pour la nourriture que pour toute la question technique, va être soutenue par des gens de l'Italie.

Le projet, M. le Président, est accepté par toute les municipalités du Témiscamingue. L'ensemble des municipalités du Témiscamingue ont donné leur accord, après en avoir bien discuté avec le promoteur. Le projet est aussi accepté par les cinq MRC de toute la région Abitibi-Témiscamingue. Le projet est accepté aussi par l'ensemble des CLD de la région Abitibi-Témiscamingue. Le projet, il est accepté par le conseil de développement économique de ma région. Il est aussi accepté par le Conseil de l'environnement de l'Abitibi-Témiscamingue. Enfin, il est accepté par l'UPA, et il est même accepté ? et je pense que c'est une première ? par l'Union paysanne. Donc, vous voyez que l'ensemble de la région accepte ce projet pour, premièrement, développer une industrie et puis aussi parce qu'il y a de l'espace. En Abitibi-Témiscamingue, il y a 79 municipalités. Il y a 75 municipalités qui n'ont aucune production porcine. Donc, vous voyez qu'il y a de l'espace. On peut mettre quelques porcheries, puis ça ne dérangera pas personne, surtout que retenez bien que c'est un projet très spécifique pour un seul produit, pour une seule entreprise.

Il faut comprendre aussi que cette entreprise a pris des engagements pour développer son produit dans le respect des personnes, mais aussi dans le respect le plus strict de l'environnement. Et ça va aussi dans un esprit de commercialisation. Plus le produit a des hauts standards de respect de l'environnement, plus le produit, au niveau commercial, a de meilleures chances d'être accepté par le public en général.

n(22 h 10)n

M. le Président, en terminant, j'aimerais vous dire que le gouvernement a choisi de prendre cette démarche pour lever le moratoire qui avait été créé au mois de juin par la loi n° 103, qu'on se rappelle. Le gouvernement a voulu prendre cette démarche au lieu d'y aller par simple règlement. Le gouvernement a voulu, par cette démarche de la loi n° 392, y aller d'une consultation, mais aussi d'une visibilité la plus large possible. Le gouvernement a voulu obtenir l'assentiment de tout le monde en région, mais aussi a voulu que cette levée spécifique de moratoire soit approuvée, discutée par l'ensemble de tous les députés, ici, à l'Assemblée nationale. Et c'est dans ce sens-là que j'ai eu le plaisir, lors de la première lecture, d'avoir l'appui de l'opposition. Et, pendant la commission parlementaire, qui a duré quelques heures, les membres de l'opposition ont posé toutes les questions, ont obtenu toutes les réponses. Et, dans ce sens-là, M. le Président, j'ai été très heureux de parrainer ce projet de loi qui va être un début d'une industrie porcine en Abitibi-Témiscamingue, mais plus est, va sauver de la fermeture une industrie et les 40 emplois qui existent. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Abitibi-Est. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.

M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, d'abord, je veux saluer le député d'Abitibi-Est. Je ne sais pas si on lui a donné trop de fil à retordre en commission parlementaire ou s'il a trouvé ça... je ne le sais pas. Nous, on a aimé travailler avec lui. Je vais vous dire franchement, on a vraiment aimé travailler avec lui. Et peut-être que je ne l'aurais pas dit si ce n'était avec les derniers événements qui se sont produits, mais, franchement, il a bien défendu son dossier, et on va lui souhaiter bonne chance pour la suite des événements dans sa vie. Il nous a annoncé, le lendemain de la commission parlementaire, qu'il se retirait de la vie publique. Alors, je me suis senti coupable sur le coup. J'ai dit: Peut-être qu'on lui a donné trop de fil à retordre avec son projet de loi. Mais il m'assure que ce n'est pas ça. Il m'assure que ce n'est pas ça. Il m'assure qu'il a été un bon maire dans ce coin-là puis qu'il a fait une job comme député. Et puis, bon, on lui souhaite bonne chance pour les événements à venir dans sa vie personnelle.

Effectivement, le projet de loi ? je pense que le député Pelletier a bien résumé la situation ? ça fait l'assentiment d'une région. On a ici une résolution de la MRC signée à peu près par tout le monde et son père. Vous savez, le projet de loi n'a pas été débattu par les gens de l'agriculture, quoiqu'ils étaient avec moi au moment du projet de loi. Chez nous, on a décidé de le regarder sous l'angle environnemental, avec les gens de l'agriculture. On a fait les vérifications aux différents endroits. On nous assure que les normes vont être très élevées, très élevées, et il y a des moyens de contrôle auprès des producteurs porcins qui pourraient être... d'une quinzaine de nouveaux producteurs porcins, à ce qu'on nous dit. Et les mesures environnementales qu'on va exiger de ces gens-là sont probablement, je dis bien «sont probablement» parce qu'on ne sait pas ce qui va se passer avec l'enquête du BAPE, mais sont probablement dans la nature de ce que j'aimerais voir, en tout cas certains égards, de ce qu'on va exiger dans ce que le rapport du BAPE va déposer éventuellement. Encore une fois, je ne veux pas rien décider pour le BAPE, ils vont faire leur ouvrage, mais il y a des mesures là-dedans, j'en donne une: les fumiers solides versus les fumiers liquides, et on ne serait pas à moitié dans le trouble qu'on est au Québec ? pour ne pas prendre une autre expression ? on ne serait pas à moitié dans le trouble qu'on est dans le Québec si nous avions pris des fumiers solides et si nous n'avions pas été vers les fumiers liquides, tel que nous l'avons fait.

Alors, fondamentalement, c'est pour une production. Nous avons rencontré les promoteurs, ils étaient à la commission parlementaire, on a eu l'occasion de les saluer. Le personnel du ministère était là, ils ont répondu à toutes les questions. Et, vous savez, vous qui connaissez un peu ça, M. le député, quand une opposition se met à poser des questions pointues sur certains aspects, je vais vous dire qu'à un moment donné le ministre était obligé de poser les questions à ses sous-ministres puis à ses haut fonctionnaires pour avoir les réponses. On est allé vraiment au fond du projet de loi, même si le projet de loi n'a que quelques articles, tel que le stipule... finalement, il y a deux articles, il a des conséquences.

Maintenant, on a voté pour, mais on a fait la morale à ces gens-là, puis on va la refaire ici ce soir, parce que, dans le débat porcin, le Parti libéral, à un moment donné, le 30 avril, a statué que assez c'était assez. Ça nous a pris beaucoup de courage, nous. On est allé rencontrer l'UPA, on est allé rencontrer les municipalités, on a amené ça à notre caucus, puis on a dit: Ce qui se passe au Québec, il y a un climat social qui est après se détériorer dans toutes les régions du Québec, il faut vraiment faire quelque chose. Moi, j'ai déjeuné avec le président de l'UPA, il est venu déjeuner avec un groupe de députés. On lui a dit: Écoutez, M. Pellerin, bien malheureux, mais on pense que, pour le bien de l'industrie, on pense que, pour le bien de l'agriculture, il faut absolument avoir un temps d'arrêt, et il va falloir aller devant le BAPE.

Alors, on a déposé un document le 30 avril, avec six propositions tout à fait logiques. Je ne veux pas vous les relire. On ne fera pas... on ne veut pas brûler le temps de la Chambre, là, pour des raisons... Mais on disait, première chose: «En confiant immédiatement au Bureau d'audiences publiques, pour 18 mois, une étude sur les fumiers, non pas juste sur les fumiers porcins.» Et ça, ça a été la première erreur qu'a faite le ministère, et là les agriculteurs, bon nombre d'agriculteurs ne sont pas heureux de ça. Dans les régions où il y a beaucoup de vaches, entre autres, les gens ne sont pas heureux du tout qu'on étudie juste la situation des fumiers de porc. Et là, c'est une erreur, parce que, de toute façon, quand vous envoyez du phosphate dans les rivières, ça peut venir autant des poulets que des vaches que des porcs. Et c'est la première erreur du ministère.

Deuxième erreur, nous, ce qu'on a proposé au ministère ? et on ne comprend pas à ce jour, on ne comprend tellement pas ce qu'ils viennent de faire en faisant la loi 392 ? nous, ce qu'on disait, nous, ce qu'on disait: Faites un moratoire à la grandeur du Québec, mais offrez la clause «opting out». Or, toutes les municipalités sont dans le moratoire, mais une municipalité, avec l'aide du ministère ? on disait qu'il fallait offrir de l'aide du ministère ? une municipalité qui était en surplus, prenez par exemple la Montérégie, il n'y a pas une MRC là-bas qui aurait demandé de sortir du moratoire. Il n'y a pas une MRC dans la Beauce qui aurait demandé de sortir du moratoire. Il n'y a pas une MRC, probablement, dans la grande région de Québec qui aurait demandé de sortir du moratoire. Il y aurait eu probablement l'Abitibi, possiblement l'Outaouais et peut-être ? je dis bien peut-être, avec un grand point d'interrogation ? certaines régions de la Gaspésie qui auraient pu demander de sortir du moratoire. Alors, ils auraient fait venir le ministère, ils auraient regardé la situation, puis ils se seraient prévalus de la clause du «opting out», de sortir du moratoire. Alors, on nous a dit, le ministre de l'Environnement qui est assis devant moi m'a dit, à l'époque, que ce serait ingérable, qu'on ne pouvait pas faire ça. Eh bien, M. le Président, M. le Président, c'est exactement ce qu'on fait ce soir avec le projet de loi n° 392.

L'autre affaire que le ministre de l'Environnement nous a dite à l'époque, parce que, quand on a parlé d'un moratoire et d'une enquête du BAPE, lui, ce qu'il avait dans sa tête à l'époque, c'était un groupe de chums qui étaient pour étudier ça pendant quelques semaines, puis vogue la galère! Nous, on leur a dit: Ce n'est pas pantoute ça. On va aller au fond de cette histoire-là.

Et je suis très heureux, d'ailleurs, qu'on ait fait ça, parce que, quand nous regardons les problématiques en agroalimentaire à travers le monde, comment les consommateurs en ce moment sont préoccupés par la qualité de la denrée qu'ils mangent, je suis très heureux que le Parti libéral ait poussé dans cette direction. Le ministre nous disait: Si on fait ça, on va mettre l'industrie porcine à terre. Bien là, ça fait déjà quelques mois que le moratoire est là, ça fait déjà quelques mois que l'enquête du BAPE est commencée. L'enquête va très bien. Il y a peut-être un peu trop d'influence gouvernementale: là, on sait qu'ils ont reçu des documents du ministère leur disant quoi faire puis comment le faire ? ça, on reviendra là-dessus un autre tantôt ? mais, fondamentalement, l'industrie continue, il y a même eu une baisse des prix, finalement, dans le secteur du porc. C'est peut-être une bonne chose que... au moment où on est après faire cette enquête-là, il y a probablement pas mal de monde qui n'aurait pas augmenté la production de leur cheptel.

Alors, ce n'est pas dramatique, ce qui se passe. L'industrie va passer à travers et, après ça, on va avoir des résultats de l'enquête du BAPE, on va avoir des recommandations. Et, si le ministre nous avait écoutés ? il a un problème d'entente, le ministre, hein, il a un problème d'entente ? parce que, s'il avait écouté la proposition du Parti libéral, on n'aurait pas aujourd'hui à faire le projet de loi n° 392. On ne l'a pas juste dit, on est allés devant les médias, on est allés en conférence de presse, on a rencontré l'UPA. Notre position, elle était claire, et c'était une position où l'ensemble du caucus ? pas juste un ministre qui se lève un moment donné ? c'est le député d'Orford avec le député porte-parole en matière d'agriculture qui ont réuni d'abord un petit groupe de députés pour voir comment on pouvait opérationnaliser ça, après ça qui est allé au caucus à trois occasions, parce que justement on essayait de trouver... Les gens chez nous disaient: Ce n'est pas correct, un moratoire à la grandeur du Québec, parce qu'il y a des régions où on va demander à sortir du moratoire. Et c'est comme ça qu'on est arrivés avec la clause du «opting out». Si le ministre nous avait écoutés ? il faut le dire, M. le Président ? si le ministre nous avait écoutés, aujourd'hui on ne serait pas après faire le projet de loi n° 392.

n(22 h 20)n

Alors, on pourrait parler longtemps de production porcine. J'ai eu l'impression un moment donné que j'avais un doctorat en production porcine, tellement que j'en ai visité au Québec, tellement on en a parlé ici. Et le problème, il n'est pas réglé, mais je vais vous dire qu'il se fait de belles choses dans le cas de la production, d'abord dans le cas de la production porcine. Et, vous savez, je n'avais pas peur de la position que le Parti libéral du Québec avait prise, hein. Le lendemain que j'ai pris cette position-là, je suis allé au congrès des producteurs de porcs du Québec. Il faut le faire, là! Nous, on était tellement convaincus qu'il y avait un problème, qu'il fallait trouver une solution puis qu'il fallait la trouver avec le monde agricole que, le lendemain où nous avons déposé cette position-là, moi, je n'ai pas hésité ? d'ailleurs, le ministre était là, le ministre était là, il m'a vu dans la salle... je ne suis pas sûr qu'il m'a vu, mais, en tout cas, c'était à Magog, vous étiez là.... Alors, le lendemain qu'on a déposé notre position, moi, je suis allé au congrès de la production porcine, je suis allé rencontrer le président de l'UPA, je n'avais aucun problème avec la position que nous avions prise et j'étais capable de la défendre devant les producteurs de porcs. Je suis convaincu, je suis convaincu que la position que le Parti libéral défendait, c'était la bonne décision, et je suis encore convaincu.

D'ailleurs, cet été, je me suis permis, avec un certain nombre de gens de ma région, d'aller visiter des producteurs de porcs dans leurs installations, et le reproche qu'on fait au gouvernement, c'est d'avoir mis seulement l'évaluation d'un seul fumier, celui du fumier de porc, et de ne pas avoir mis l'ensemble de l'étude des fumiers. Il se fait des choses au Québec, M. le Président, il faut le dire, il y a en ce moment des études. Les gens nous disent: Y a-tu moyen de traiter les purins de porc? Alors, effectivement, il y a des évaluations des technologies de gestion, de traitement du lisier de porc. Il se fait des choses là-dedans. Il y a des gens qui étudient différentes formules ? le ministre pourrait nous dire tantôt combien il y en a, là. Il y en avait 14, je pense qu'on est rendu à une vingtaine d'installations où on étudie différents processus pour traiter les lisiers de porc. Il n'y a pas de miracle en ce moment, il n'y a pas de miracle, et, les pays où on a essayé ça, il n'y a pas de grand résultat très probant. Mais, au moins, on essaie de trouver des solutions au même moment où il y a l'enquête du BAPE. Et je suis un de ceux qui pensent qu'à un moment donné on va arriver avec des solutions, et l'acceptation sociale, à ce moment-là, sera beaucoup plus grande et on évitera ces coups de force qu'on a connus dans trop de villages du Québec, où l'intégrateur décidait qu'il y aurait une porcherie, envers et contre tout le monde, et là c'était la pagaille dans le village au complet.

Alors, on pense que l'Abitibi mérite ce projet-là. C'est un beau projet, ça va créer des emplois et ça va être fait selon toutes les normes environnementales. Malheureusement, on a dû repasser cette loi-là. On a dû faire attendre les gens là-bas. Si ça avait été avec ce que le Parti libéral avait proposé, déjà, probablement que la couverture serait bâtie et qu'on serait déjà après faire mûrir ? parce que je pense que c'est le terme qu'on doit prendre, on va garder ces pièces de viande là pendant 14 mois, pendant qu'ils mûrissent... Déjà, on ferait mûrir les premiers jambons, et la compagnie serait en affaires, alors que là il y a eu des délais parce que le gouvernement n'a pas écouté l'opposition officielle, M. le Président. Merci beaucoup.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Il n'y a pas d'autres intervenants? Alors, je mets aux voix la motion. Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 392, Loi visant à assurer l'approvisionnement en porc d'un abattoir exploité en Abitibi-Témiscamingue, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président, je vous réfère à l'article 37.

Projet de loi n° 135

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 37, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement de l'Assemblée par M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Alors, les amendements transmis sont déclarés recevables. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Si j'ai bien compris, j'ai une heure pour le temps qui est à ma disposition?

Des voix: ...

M. Trudel: Très bien.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je crois que mes collègues seraient d'accord pour 30 minutes.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Très bien, M. le Président. Je vais probablement résister à l'appel de mes collègues, M. le Président, l'appel pressant et bruyant, quelquefois, de mes collègues qui veulent que j'intervienne plus longuement. Tout simplement pour dire, M. le Président, que, suivant notre règlement, nous avons étudié en détail ce projet de loi. C'est pourquoi la commission nous a fait rapport. Ça a très bien fonctionné. On a apporté une vingtaine d'amendements au projet initial qui a été soumis à l'Assemblée nationale, plus deux amendements qu'on vous a soumis et qui seront discutés à la dernière étape du processus parlementaire. J'aurai l'occasion aussi, en quatrième étape, de lire ce qui nous a été expédié depuis ce moment de la satisfaction tant de la part des grossistes en voyages que de la part des agences de voyages dits réceptifs ou expéditifs, ou encore des consommateurs, puisque c'est une loi qui vise d'abord à protéger les consommateurs, que les grandes agences, comme les filiales d'Air Transat, qui ont participé aussi aux travaux et, finalement, qui vont nous permettre d'avoir une loi qui protège les consommateurs et qui fait en sorte que cela se fait à l'intérieur d'un contexte moderne de développement, de fonctionnement des affaires dans l'industrie du voyage.

Une bonne commission, M. le Président, point besoin d'insister. Nous reviendrons à la dernière lecture pour l'ensemble des conclusions de cette excellente loi qui a été présentée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee. Alors, je vous cède la parole, M. le député.

M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, il me fait plaisir de m'adresser à vous ce soir à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de protection du consommateur. Ce soir, cette Assemblée doit prendre en considération le rapport de la commission de l'éducation qui a étudié le projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur; Bill 135, An Act to amend the Travel Agents Act and the Consumer Protection Act.

M. le Président, en 1971, le gouvernement du Québec a créé une organisation dont la mission était et demeure la protection du consommateur. Ainsi, la Loi sur la protection du consommateur a créé l'Office de la protection du consommateur. Le premier devoir du législateur est de protéger le consommateur et de trouver le bon équilibre entre le commerçant et le consommateur.

Mais, M. le Président, 30 années ont passé depuis la création de l'Office de la protection du consommateur, les habitudes de consommation ont changé, notre société a bien changé. M. le Président, depuis 30 ans, nous avons vu une diversification des biens et des services offerts, des nouveaux marchés, du commerce électronique, des nouvelles réalités, vraiment un nouveau monde. Dans ce contexte, le gouvernement péquiste a imposé à l'Office de la protection du consommateur d'importantes compressions budgétaires, réduisant ainsi près de la moitié de ses ressources.

Comme je l'ai dit en première lecture, dans un article intitulé Protection des consommateurs: des lois désuètes, paru dans le journal Le Devoir du 20 septembre 2002, Mme Nicole Fontaine, présidente sortante de l'Office de la protection du consommateur, nous dit, et je la cite: «Si l'OPC a fait de son mieux pour obtenir des résultats, on ne peut malheureusement que déplorer l'état vétuste dans lequel est laissée la législation en matière de protection du consommateur. En effet, les quatre lois dont l'OPC assure l'application et la surveillance pour le gouvernement sont complètement désuètes.» Fin de la citation.

Dans ce même article, elle dit que, et je la cite, «la situation actuelle de l'industrie du voyage est un exemple criant de la nécessité de revoir la législation. Les intervenants de ce secteur demandent depuis longtemps que la loi les régissant soit revue afin que celle-ci s'adapte à la réalité. Les événements du 11 septembre 2001 ont davantage mis en évidence les lacunes de la loi. Aujourd'hui, consommateurs et voyagistes vivent avec les conséquences».

n(22 h 30)n

M. le Président, nous sommes à l'étape de prise en considération du rapport de la commission parlementaire qui a étudié ce projet de loi article par article. Le projet de loi cherche à moderniser quelques dispositions applicables à ce secteur d'activité, c'est-à-dire la Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages. Nous avons examiné avec beaucoup d'attention le projet de loi et les amendements qui étaient déposés. Par contre, je répète les mêmes inquiétudes que j'ai soulevées en commission parlementaire, car je juge particulièrement importants le droit et la protection du consommateur.

M. le Président, le projet de loi devant nous introduit des moyens pour prendre des recours civils contre la personne qui agit comme agent de voyages sans permis. Nous devons savoir que, dans ce domaine, il y a des personnes qui, de temps en temps, agissent comme agents de voyages sans permis avec parfois des effets négatifs sur le consommateur. Nous devons, par ce projet de loi et en révisant la Loi sur la protection du consommateur, être certains que nous protégeons le consommateur. Oui, M. le Président, c'est important d'avoir le bon équilibre entre le commerçant et le consommateur, mais la personne que nous devons protéger en bout de ligne, c'est le consommateur.

Maintenant, avec le projet de loi n° 135 qui est devant nous, en vertu de l'article 4, nous constatons l'ajout de l'article 4.1 à la Loi sur les agents de voyages, lequel se lit comme suit, et je cite: «4.1. Une personne peut demander l'annulation d'un contrat conclu avec quiconque agit comme agent de voyages sans permis.» Fin de citation de cet article 4.1.

Cet article, M. le Président, apporte une importante protection vis-à-vis le consommateur qui fait affaire avec un agent de voyages sans permis. C'est aussi un avertissement à ceux qui agissent dans ce domaine sans permis.

M. le Président, le projet de loi permet aussi à une personne d'être titulaire d'un permis pour une autre personne physique. En vertu de l'article 6 du projet de loi devant nous, l'article 6 de la Loi sur les agents de voyages se lirait comme suit: «Tout permis est délivré au nom d'une personne physique pour son compte, pour le bénéfice d'une autre personne physique ou pour le bénéfice d'une association, société ou personne morale.» Fin de citation de cet article.

M. le Président, je déplore fortement cet article. J'ai soulevé en commission parlementaire qu'avec cet article le projet de loi permettra le concept de prête-nom, c'est-à-dire, M. le Président, monsieur A pourrait détenir un permis pour le bénéfice d'une autre personne physique, soit monsieur B. Lorsque j'ai questionné le ministre concernant ce concept de prête-nom, celui-ci ne nous a pas donné de réponse claire visant à protéger le consommateur. Pourquoi permettre une situation comme celle-là? Je reviens avec mon exemple de monsieur A et monsieur B, pourquoi est-ce que monsieur B ne détient pas le permis lui-même? C'est une réponse qu'on a demandée... C'est une question qu'on a demandée en commission parlementaire au ministre, à laquelle nous n'avons pas eu de réponse.

La réponse que le ministre nous donne est que c'est possible que monsieur B ne démontre peut-être pas que sa situation financière lui permettra d'assumer les obligations qui découlent des opérations d'agent de voyages et ne peut assurer, dans l'intérêt public, l'exercice honnête et compétent de ces opérations d'agent de voyages, comme l'indique le nouvel article 12.1 créé par l'article 13 du projet de loi n° 135.

M. le Président, c'est insensé, si M. B n'est pas qualifié pour accomplir ses fonctions de conseiller en voyage, le consommateur risque de tomber dans le piège d'agents peu scrupuleux. M. le Président, pourquoi lui accorder le droit d'avoir indirectement lorsque nous ne pouvons lui donner directement ce permis? M. le Président, le ministre n'a pas donné de réponse à cette question, et je suis déçu, voire même inquiet, que ce concept fasse partie du projet de loi n° 135.

M. le Président, le projet de loi prévoit aussi les règles relatives au transfert des permis, et je me questionne à l'effet que, dans ce domaine, la loi semble permettre le transfert de permis trop facilement quand l'agent de voyages ne remplit pas les critères du nouvel article 12.1 de la Loi sur les agents de voyages en vertu de l'article 13 du projet de loi n° 135.

Je vous donne un exemple. Le nouvel article 11.1, premier alinéa, créé par l'article 11 du projet de loi n° 135, nous indique ceci, et je cite le 11.1: «Le président peut autoriser le transfert d'un permis à une autre personne en cas de décès, de démission ou de destitution du titulaire du permis ou lorsque celui-ci ne rencontre plus les exigences requises pour être titulaire de ce permis.» Fin de citation de cet article.

M. le Président, nous pouvons voir que le président de l'Office de la protection du consommateur a le droit d'autoriser le transfert d'un permis à une autre personne dans le cas de destitution du titulaire du permis ou lorsque celui-ci ne rencontre plus les exigences requises pour être titulaire de ce permis. M. le Président, encore une fois, le projet de loi permet, dans des circonstances questionnables, le transfert du permis à un prête-nom qui va le détenir pour une personne qui n'est pas qualifiée selon la même loi. M. le Président, les réponses du ministre dans ce domaine étaient insuffisantes.

M. le Président, l'article 1 du projet de loi n° 135 nous donne une nouvelle définition du mot «dirigeant». Nous avons porté à l'attention du ministre, en commission parlementaire, que la définition du mot «dirigeant» était un peu trop large et un peu trop ambiguë. Aujourd'hui, je porte encore ce problème devant les membres de cette Assemblée, car ce projet de loi impose une responsabilité solidaire aux dirigeants d'agences de voyages pour les sommes reçues de clients, lesquelles doivent être déposées en fidéicommis. J'ai présenté la problématique de la définition du mot «dirigeant» au ministre en commission parlementaire. M. le Président, comme nous le mentionnent les notes explicatives, et je cite: «Le projet de loi modifie également le pouvoir réglementaire du gouvernement pour permettre l'adoption de nouvelles règles relatives à la constitution d'un fonds à des fins d'indemnisation des clients d'agents de voyages.» Fin de la citation.

n(22 h 40)n

M. le Président, il est important de souligner en ce moment que les seuls clients qui auront la protection offerte par ce fonds à des fins d'indemnisation des clients, ce sont seulement les clients des agents de voyages avec permis qui peuvent se prévaloir de ce fonds d'indemnisation. Alors, M. le Président, si un client, soit le public, fait affaire avec un agent de voyages sans permis ou bien s'il fait affaire directement avec la compagnie aérienne, ou encore s'il fait des réservations de voyage via Internet, il doit être avisé que les protections offertes par la Loi sur les agents de voyages ne seront pas disponibles pour lui.

M. le Président, j'ai fait référence au pouvoir réglementaire du gouvernement qui est accordé en vertu du projet de loi. M. le Président, ce pouvoir réglementaire est vraiment excessif, et, par cet article, le vrai effet de la loi sera par les règlements qui seront adoptés. Je comprends que le gouvernement veut se donner un chèque en blanc dans la procédure de surveillance de ce projet de loi par l'Assemblée nationale.

Maintenant, M. le Président, l'article 25 du projet de loi n° 135 modifie l'article 36 de la Loi sur les agents de voyages et, si nous prenons la peine de lire le premier alinéa de l'article 36, nous voyons que: «Le gouvernement peut faire des règlements...» Et le projet de loi n° 135 ajoute l'alinéa c.1 à l'article 36 qui se lit comme suit:

«c.1) pour instituer tout fonds à des fins d'indemnisation des clients d'agents de voyages, pour prescrire le montant et la forme des contributions requises des agents de voyages et pour déterminer les cas, conditions ou modalités de perception, de versement, d'administration et d'utilisation d'un fonds, notamment pour fixer un montant maximum, par client ou par événement, qui peut être imputé à un fonds.» Fin de citation.

Maintenant, M. le Président, nous attendons les règlements du gouvernement dans ce domaine pour instituer tout fonds à des fins d'indemnisation des clients d'agents de voyages. Étant donné que nous n'avons aucun pouvoir ou contrôle dans l'établissement des règlements, nous demandons au gouvernement de s'assurer que les règlements protègent les consommateurs dans toutes leurs relations avec les agents de voyages. Le client doit être bien protégé.

Finalement, M. le Président, le projet de loi modifie la Loi sur la protection du consommateur afin de prévoir la nomination d'un vice-président au sein de l'Office de la protection du consommateur. M. le Président, ce même gouvernement, qui a tellement réduit le budget de l'Office de la protection du consommateur, admet enfin ses erreurs du passé. Je ne peux que me réjouir que finalement le gouvernement commence à comprendre nos prétentions de ne pas réduire les effectifs de l'Office. C'est un début, mais ce n'est pas suffisant.

M. le Président, nous, les membres de l'opposition officielle, appuierons ce projet de loi même s'il n'est pas parfait. C'est un début, mais ce n'est pas assez pour nous assurer que nos voyageurs sont bien protégés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Il n'y a plus d'autres intervenants? Alors, je vais mettre aux voix les amendements.

Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements proposés par M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'éducation portant sur le projet de loi n° 135, Loi modifiant la Loi sur les agents de voyages et la Loi sur la protection du consommateur, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, je vais céder la parole à M. le leader pour le prochain item à l'ordre du jour.

M. Simard (Montmorency): Oui, je vous remercie, M. le Président. Je vous prie de prendre en considération l'article 31 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 123

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 31, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi n° 123, Loi modifiant la loi sur les collèges d'enseignement collégial et professionnel et la Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial.

Je vais céder la parole à M. le ministre de l'Éducation. Je vous cède la parole.

Des voix: Bravo!

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Quel enthousiasme! M. le Président. Quand j'aurai fini de présenter la synthèse de ce projet de loi et des motifs qui nous ont poussés à le faire voter, je pense que l'enthousiasme de mes collègues sera un peu moins élevé. M. le Président, je suis évidemment très heureux de procéder aujourd'hui à l'adoption finale du projet de loi n° 123, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et la Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, pour son adoption.

Je vous rappelle que l'objectif du projet de loi consiste à rendre obligatoire pour les cégeps l'établissement d'un plan stratégique intégrant un plan de réussite ainsi qu'à préciser la mission de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Il vise aussi à assurer une gestion plus transparente des cégeps, une imputabilité accrue et une reddition de comptes publics qui fasse état de la progression des collèges vers l'atteinte des objectifs qu'ils se seront fixés.

Les cégeps dispensent une formation de grande qualité qui contribue à donner au Québec une main-d'oeuvre qualifiée et aux élèves des assises solides pour bâtir leur carrière et leur vie dans la collectivité. On se rappellera que le Sommet du Québec et de la jeunesse a amené le gouvernement à prendre l'engagement de faire de la réussite l'une de ses priorités. Dans la foulée du Sommet, nous avons demandé aux établissements d'enseignement collégial d'élaborer un plan institutionnel de réussite et de diplomation. Les plans de réussite maximisent leurs effets positifs et ils donnent une plus grande cohésion à l'ensemble des efforts déployés pour favoriser la réussite du plus grand nombre.

Le projet de loi n° 123 rendra aussi obligatoires pour les cégeps l'élaboration et la mise en oeuvre d'une planification stratégique. Cette dernière devra contenir l'ensemble des objectifs et des moyens prévus pour réaliser leur mission éducative et inclure un plan de réussite. Ainsi, les cégeps seront amenés à recentrer davantage leur gestion dans la perspective de rendre de meilleurs services éducatifs aux citoyens et aux citoyennes.

Ces nouvelles dispositions législatives amèneront les collèges à rendre compte de leur gestion. En effet, l'instauration d'un plan stratégique, la production d'un rapport annuel faisant état de l'atteinte des objectifs de ce plan et l'évaluation qui en sera faite par la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial et qui sera rendu publique seront autant de moyens qui permettront aux citoyens et aux citoyennes d'être informés des services offerts par les cégeps et de leur qualité. De l'instauration de ce mécanisme de reddition de comptes découleront une plus grande transparence de la gestion des collèges et une plus grande imputabilité de la communauté collégiale. Enfin, en précisant la mission de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, nous évitons de multiplier les mécanismes de reddition de comptes. Afin d'assurer une transition harmonieuse vers ces nouvelles exigences, l'obligation d'adopter un plan stratégique sera effective à compter de l'année scolaire 2004-2005. Voilà pour la synthèse de ce que contient ce projet de loi.

Lors des consultations particulières de la commission de l'éducation concernant le projet de loi n° 123, nous avons pu constater la large adhésion aux objectifs poursuivis. À cette occasion, les acteurs du monde collégial sont venus nous livrer leurs appréciations, leurs observations, nous affirmer leur appui ou partager avec nous leurs craintes sur les biais possibles que pouvait laisser planer le libellé de certains articles de ce projet de loi. Nous les avons écoutés avec attention.

La commission de l'éducation a tenu compte des commentaires exprimés. Cela nous a permis, lors de l'étude détaillée du projet de loi, de lui apporter des modifications et de le bonifier afin de lever toutes les ambiguïtés. J'aimerais d'ailleurs remercier les membres de la commission de l'éducation, des deux côtés de la Chambre d'ailleurs. Ça a été une remarquable collaboration à l'occasion de l'étude détaillée de ce projet de loi. Cette collaboration nous a permis d'effectuer un travail sérieux dans un esprit d'ouverture.

Si l'éducation ? en conclusion, M. le Président ? est la clé de voûte d'une société dynamique, la réussite de ses élèves est un enjeu crucial. C'est pourquoi la réussite éducative est au coeur des préoccupations des Québécoises et des Québécois. L'importance de cet enjeu nous interpelle tous pour soutenir les élèves dans leur cheminement et leur donner des outils pour développer leur plein potentiel. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que l'appréciation de la réussite des élèves ne peut se limiter à de simples statistiques, à des taux d'obtention de diplômes, à une évaluation qui serait strictement quantitative.

n(22 h 50)n

Notre conception de la réussite est plus vaste: elle touche toutes les dimensions de la triple mission de l'éducation, soit d'instruire, de qualifier et de socialiser. Certes, la réussite comprend le succès scolaire, personne ne peut le nier, mais elle intègre aussi la capacité personnelle d'utiliser ses acquis dans son cheminement personnel et professionnel.

Par ailleurs, la gestion de nos institutions doit se faire dans la plus grande transparence possible, en inscrivant dans la législation l'obligation pour les cégeps de se doter d'une planification stratégique et de rendre compte à la population de l'atteinte de leurs objectifs. Nous nous assurons de cette transparence et d'une plus grande imputabilité des intervenants des collèges.

Le projet de loi n° 123 est une preuve tangible des efforts que nous déployons pour qualifier le plus grand nombre possible de personnes. Avec son adoption, M. le Président, nous poserons un nouveau jalon vers l'atteinte de ce noble et combien important objectif qu'est la réussite pour tous. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Éducation. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey et le leader adjoint de l'opposition. M. le député.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, il me fait extrêmement plaisir de prendre la parole concernant le projet de loi n° 123, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et la Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial.

Bill 123, An Act to amend the General and Vocational Colleges Act and the Act respecting the Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. If we had decided to give that bill an English title, that would of course concern the Evaluation Board that's set up to take care of college education, cégep education in the province. And, as I say that, I realize that there's no one in the province of Québec, in English, who says anything other than «cégep» in English, but it's good to know that the actual term in English is «a general and vocational college».

M. le Président, lorsque le système des cégeps a été créé au Québec dans la foulée du rapport Parent, vers le milieu des années soixante, il y a beaucoup de gens qui questionnaient quelle serait la valeur de cet enseignement-là. En effet, on a créé un système unique en Amérique du Nord: à la sortie de l'école secondaire, on allait faire soit deux années d'enseignement général menant à un cours universitaire qui donnerait un bac pour commencer, ou encore un cours de trois ans dit professionnel.

Après beaucoup de soubresauts, je crois qu'il y a très peu de personnes dans la province de Québec aujourd'hui qui mettraient en cause le rôle, voire l'importance de ce système. Et un des éléments qui a le plus aidé au cours des derniers 10, 15 ans à augmenter l'appréciation du public pour le rôle des cégeps dans notre société, c'est l'existence de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Je tiens à souligner l'importance de leur travail et l'extraordinaire qualité de leur travail.

C'est extrêmement difficile, peu importe l'opération à laquelle on se livre dans la société, dès qu'on dit à des gens qui ont une responsabilité quelconque qu'on va les évaluer, il y a un réflexe tout à fait humain de dire: Pourquoi, tu ne me fais pas confiance? Pourquoi que tu veux vérifier ce que je fais? Je crois que, par une approche client et une approche qui consistait à convaincre leurs partenaires dans les cégeps que c'était dans l'intérêt de tout le monde d'avoir des manières de sonder l'enseignement, de le mesurer et de pouvoir faire en quelque sorte le bilan, pour ne pas dire le bulletin de chaque cégep, cette commission à réussi une prouesse.

Lorsqu'on visite les cégeps ? et c'est vraiment étonnant ? plutôt que de rencontrer de la résistance, que ce soit chez les professeurs, chez la direction et, lorsqu'il y a des instances estudiantines qui s'y intéressent auprès de ces mêmes instances, on se rend compte qu'il y a une unanimité de l'utilité et de l'importance de ce travail d'évaluation. Donc, on salue l'initiative qui consiste à élargir leur mandat en fonction de ces nouveaux plans qui vont être dressés. Et je suis convaincu que les gens qui sont membres vont être heureux d'avoir un quatrième membre qui va s'adjoindre à eux autres.

Je me permets aussi de souligner à l'actuel ministre de l'Éducation ? je ne suis pas sûr qu'il était ministre à l'époque non plus ? mais avant que l'actuel président du Conseil du trésor devienne ministre, il avait présidé un comité sur la déréglementation. Et une des suggestions de ce comité, c'était de fusionner la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial à un autre organisme ? dont on va parler sans doute dans quelques minutes parce que c'est le prochain projet de loi normalement qui va être débattu ce soir ? à savoir, le Conseil supérieur de l'éducation.

De notre côté, on était opposé à ça. On disait: Vous ne comprenez pas la distinction importante qui doit exister entre un organisme comme le Conseil supérieur, qui est là justement pour donner des conseils dans le sens le plus large au ministre et de prendre des éléments de toutes les sphères de la société en matière d'éducation et d'exister vraiment à ce niveau-là ? le Conseil ? puis un organisme qui a vraiment un mandat beaucoup plus pointu, beaucoup plus spécifique. Et les deux, sans être incompatibles, sont difficilement conciliables, ça ne fait pas bon ménage ensemble. Et je suis content de voir que le gouvernement s'est non seulement ravisé sur toute notion de faire disparaître la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, mais est en train, au contraire, de poser des gestes concrets pour rehausser sa capacité d'occuper cette importante fonction.

Je le disais tout à l'heure, M. le Président, que, au début des années soixante-dix, lorsqu'il y avait quelques problèmes de rodage... Moi, je suis diplômé de Vanier College, qui est un des premiers cégeps anglophones, et maintenant nos deux garçons sont aussi... viennent de finir leurs propres études collégiales. Je n'ai qu'à regarder l'atmosphère ? pour moi, c'est un terme technique ? l'atmosphère un peu rock'n'roll qui régnait dans les cégeps à l'époque. Je me souviens, comme beaucoup de gens ici, j'étais très actif dans la vie politique et des associations étudiantes à l'époque, dont une qui s'appelait... avec le nom assez évocateur du Front d'étudiants du Québec. Je me souviens d'un weekend complet au cégep de Limoilou au début des années soixante-dix. Si jamais je décide, un jour, d'écrire mes mémoires, je pense que je pourrais écrire à peu près un chapitre pour chaque journée de cette réunion du Front d'étudiants du Québec au cégep de Limoilou, M. le Président. Mais passons. Cette période-là est maintenant révolue. Il y a eu une période de stabilité.

Si on regarde le rôle du cégep comme institution, souvent, si on regarde la taille du territoire que les 7 millions de personnes que nous sommes au Québec... la taille du territoire que nous occupons, on se rend compte que c'est souvent la salle de spectacle, c'est souvent un centre très important dans la vie de la collectivité dans cette réunion. Il n'y a plus personne donc qui met en cause le rôle et l'importance des cégeps, mais encore fallait-il, parce que c'est une institution unique au Québec, qu'on se dote d'instruments pour bien mesurer la validité, la constance de l'enseignement qui s'y donnait. Si on est au niveau universitaire, il y a des instances qui existent au niveau pancanadien, souvent au niveau international. Si on a une faculté d'ingénierie, il faut qu'elle soit agréée, il faut qu'elle soit visitée, il faut qu'il y ait une certification. Il faut que la personne qui embauche un ingénieur issu de Polytechnique ou de McGill sache que cette personne a les mêmes études de maths que quelqu'un qui sort de MIT ou d'une autre université. Si les deux veulent s'appeler ingénieurs ou «professional engineers», il y a des manières de faire pour mesurer ça.

Mais, puisque notre système est unique, il n'y a personne qui peut faire cette comparaison aisément. Donc, c'est important que, nous, on s'assure de la valeur, de la validité et de la constance de cet enseignement. C'est pour ça que je salue les gens qui font un... Je les connais, les gens qui sont là à l'heure actuelle. J'ai eu l'immense plaisir de travailler avec eux quand j'étais à l'Office des professions du Québec. Il y a même M. Louis Roy, qui a été le vice-président de l'Office des professions pendant de nombreuses années et qui est un ancien président de l'Ordre des conseillers en orientation du Québec, quelqu'un qui connaît vraiment ça et a une rigueur dans sa manière d'aborder les problèmes tout en ayant un sens très pratique, comment aborder les choses, et le président actuel aussi qui fait un travail extraordinaire.

Et donc, je salue l'initiative. C'est dans l'intérêt des étudiants d'abord et avant tout, c'est à eux qu'on s'intéresse quand on fait ce travail-là. Mais c'est aussi dans l'intérêt de l'institution, de cette institution qui est la nôtre, qui... Si ma mémoire est bonne, le rapport Parent date de 1965, et donc les premiers cégeps... Montmorency à Laval, ses balbutiements vers la fin des années soixante. Donc, c'est une institution qui date maintenant... Comme je le mentionnais, dans mon propre cas, c'est deuxième génération de cégep. Ça marche bien, puis ça va encore marcher mieux grâce à une initiative comme celle-ci. Donc, au nom de l'opposition officielle, je suis heureux de dire que nous allons appuyer le projet de loi n° 123, M. le Président.

n(23 heures)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Mise aux voix du rapport

Je mets aux voix le rapport. Le rapport de la commission de l'éducation portant sur le projet de loi n° 123, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et la Loi sur la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint.

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président. Je vous prie de prendre en considération l'article 32 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 124

Prise en considération du rapport de la commission
qui a procédé à des consultations particulières
sur le projet de loi et en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 32, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique. M. le ministre de l'Éducation, je vous cède la parole.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Merci, M. le Président. Je serai très bref, puisque nous n'avons pas avec nous ce soir les interlocuteurs qui nous ont permis de construire ce projet de loi en commission, enfin de l'améliorer en commission, le projet de loi n° 124 qui modifie la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et surtout la Loi sur l'instruction publique. Avec ce projet de loi, nous inscrivons dans la loi l'obligation pour chaque école, centre de formation professionnelle et centre d'éducation des adultes de se doter d'un plan de réussite. Nous précisons les éléments que ce plan doit contenir ainsi que les règles d'élaboration et d'approbation.

M. le Président, pour résumer un petit peu ce projet de loi, qui est un petit peu le pendant, le miroir de ce que nous venons d'adopter, la loi n° 123 sur l'enseignement collégial, il s'agit d'amener chacune des commissions scolaires du Québec et chacune des écoles du Québec, par l'intermédiaire de leur conseil d'établissement et de leur direction, de se doter... dans le cas des commissions scolaires, de se doter d'un plan stratégique. Les conseils d'établissement ayant un projet éducatif auront maintenant un plan de réussite pour actualiser, pour mettre en oeuvre ce projet éducatif.

Nous avons écouté, en commission parlementaire, avec beaucoup d'attention chacun des intervenants du milieu de l'éducation. Il est très important, lorsque nous voulons arriver à ce noble objectif d'une gestion plus transparente, par objectifs, avec reddition de comptes, il est très important que chaque élément, que chacune des composantes du réseau, de ce vaste réseau, trouve vraiment sa place. Il ne s'agissait pas ? pour reprendre une expression du député de Vaudreuil ? il ne s'agissait pas d'une attitude, d'avoir une approche du haut vers le bas, «top-down», mais bien de nous assurer que le ministère de l'Éducation se dote d'un plan stratégique, que les commissions scolaires aient elles aussi sur leur territoire, et en tenant compte de leur réalité, un plan stratégique qui tienne compte évidemment des grands objectifs et des grands indicateurs nationaux émis par le ministère de l'Éducation et que chacune des écoles ? et ça, c'est la grande force de la décentralisation qu'avait apportée il y a trois ans le projet de loi n° 180 ? que les écoles puissent poursuivre dans la voie de cette autonomie en se dotant d'objectifs, en se dotant d'un projet éducatif, mais surtout d'un plan de réussite qui mette en oeuvre ce projet éducatif.

Alors, je pense que nous avons trouvé l'équilibre. Les comités de parents ont émis d'ailleurs aujourd'hui un communiqué de presse qui... La Fédération des comités de parents du Québec applaudit aux amendements apportés au projet de loi n° 124. Je pourrais citer de longs passages de ce communiqué de presse qui dit l'appui total et absolu des comités de parents à l'opération plans de réussite et au projet de loi n° 124. De la même façon, la Fédération des commissions scolaires. Enfin, tous les intervenants ou, en tout cas, la plupart des intervenants de l'éducation sur tous les éléments essentiels... Et, je le répète, il s'agit d'une opération délicate. Lorsque vous touchez à la Loi sur l'instruction publique, vous touchez à des morceaux importants. Les acteurs de l'éducation, que ce soient les parents, les enseignants, les directions d'école ? il ne faut jamais oublier les directions d'école qui ont un rôle de leadership pédagogique considérable ? les commissions scolaires, tout le monde doit trouver sa place et être à l'aise avec toute l'autonomie nécessaire, mais en même temps avec des obligations, des objectifs qui tiennent compte des objectifs et des obligations que les autres participants du réseau doivent assumer.

Donc, nous sommes très fiers du travail qui a été fait en commission. Je remercie nos collègues de la commission de l'éducation, sa présidente, son vice-président, ainsi que les porte-parole de l'opposition officielle, en particulier dans ce cas-ci le député de Vaudreuil. C'est un travail que nous avons fait en commun de nous assurer que ce projet de loi reflète bien l'intention du ministre évidemment de doter le réseau scolaire de plans de réussite, mais également de nous assurer que chacun des acteurs du monde de l'éducation puisse jouer parfaitement son rôle.

Alors, je suis très fier, très heureux du résultat. Je pense que c'est une avancée considérable dont tout le monde aura à se féliciter, parce que l'objectif de tout cela, c'est d'améliorer la réussite des élèves du Québec, diminuer le redoublement au primaire, diminuer l'abandon scolaire au secondaire, nous assurer que... la réussite des élèves, mais réussite dans tous les sens du terme ? n'oublions pas que la réussite, c'est la réussite scolaire, mais c'est aussi la socialisation des étudiants, la qualification des étudiants ? nous assurer donc d'une réussite globale, complète des étudiants. Et je pense que le projet de loi va nous permettre... Évidemment, il y avait jusqu'à maintenant, au cours des dernières années, un mouvement vers la réalisation de ces plans de réussite, mais maintenant, sur des bases légales solides, cela va nous permettre d'aller plus loin dans cette direction, et j'en suis très heureux. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey et leader adjoint de l'opposition. M. le député.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, encore une fois, au nom de l'opposition, il me fait plaisir de prendre la parole sur un projet de loi important dans le domaine de l'éducation. Cette fois-ci, c'est le projet de loi, comme le ministre vient de l'indiquer, n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique, Bill 124, An Act to amend the Act respecting the Conseil supérieur de l'éducation and the Education Act.

M. le Président, le projet de loi antérieur, dont on vient de parler, dans le domaine de l'évaluation des cégeps, parlait, traitait d'une commission qui est une structure très légère, très souple et très peu coûteuse, par contre très performante et très rentable pour nous tous dans la société québécoise. Tout en indiquant dès le départ que l'opposition va aussi appuyer le projet de loi n° 124, je vais exprimer la même réserve qui a été à plusieurs reprises exprimée par mes collègues dans leurs analyses. On a juste peur que l'intervention, ici, soit un peu lourde, voire bureaucratique ou teintée d'un aspect un peu plus technocratique.

On se souvient à chaque année de l'importance d'évaluer l'enseignement, au niveau secondaire notamment, lorsque l'Institut économique de Montréal publie son bulletin des écoles secondaires du Québec. Il y a beaucoup de critiques qui sont faites à chaque année de la valeur scientifique de leur approche. Par exemple, des gens vont dire: Ça ne tient pas suffisamment compte des différences objectives dans les milieux socioéconomiques. C'est vrai. Par contre, l'Institut économique de Montréal, je pense, nous rend un fier service en lançant un débat, en nous mettant au défi de regarder s'il n'y a pas des choses qui clochent parfois à certains endroits. Les parents ne sont pas fous. Ils savent les différences dans les milieux socioéconomiques, mais ils sont aussi capables de savoir que tel coin de Montréal peut ressembler à tel coin à Laval ou à tel coin dans les Basses-Laurentides et se demander pourquoi, dans trois polyvalentes publiques, par exemple, il peut y avoir de si vastes différences dans les résultats année, après année, après année. Aussi, si on devient strictement axé sur une telle analyse, ça peut avoir des effets pervers, puis on nous en signale parfois dans nos bureaux de comté, que les écoles vont commencer à délaisser les enfants qui ont des problèmes chroniques plutôt que d'essayer de travailler avec eux autres. Je pense que toute la société risque de perdre à ce moment-là.

Donc, nous allons suivre le gouvernement, nous allons voter pour le projet de loi, parce que ça y va de l'intérêt des étudiants, ça y va d'un intérêt généralisé d'accroître la réussite. Donc, on appuie le projet de loi tout y mettant certains bémols et tout en invitant le ministre, notamment, de faire attention, de s'inspirer de ce que fait la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, c'est-à-dire d'aller chercher des partenaires, de ne pas essayer de faire du «one size fits all», de dire que ça doit être ça pour tout le monde. C'est ça qu'on évoque quand on parle d'une approche technocratique ou bureaucratique et que mon collègue de Vaudreuil dit: Est-ce que ça va partir de Québec et aller imposer une manière de faire identique à toutes les écoles ou à toutes les commissions scolaires? Il faut justement tenir compte des différences, il faut les respecter, tout en visant uniformément un objectif, c'est-à-dire un enseignement de grande valeur qui va préparer des jeunes personnes pour leur vie dans une société qui a besoin de leurs talents et qui a aussi besoin de s'assurer qu'ils ont appris quelque chose qui va leur permettre justement de mettre ces talents à contribution dans la société.

n(23 h 10)n

Alors, avec cette invitation à une prudence dans l'application de la loi, il nous fait plaisir encore une fois, M. le Président, dans l'opposition, de dire qu'on va voter pour le projet de loi n° 124.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Ceci met fin aux interventions.

Mise aux voix du rapport

Je mets aux voix le rapport de la commission de l'éducation portant sur le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation et la Loi sur l'instruction publique. Est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint, pour un prochain item.

M. Simard (Montmorency): Oui. Je vous remercie, M. le Président. Nos travaux vont bon train. Je vous réfère donc à l'article 28 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 115

Prise en considération du rapport de la commission
qui a procédé à des consultations particulières
sur le projet de loi et en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 28, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 115, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et la Loi sur le ministère du Revenu. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Oui. Je prendrai quelques minutes. Alors, voici un projet de loi relativement simple qui a fait l'objet d'une étude assez courte, puisque nous nous sommes entendus rapidement. Il prévoit d'abord que la Société de l'assurance automobile du Québec pourra obtenir des informations du ministère du Revenu, mais des informations bien particulières.

Le ministère du Revenu administre déjà un plan de partage des taxes qui sont payées sur l'essence par les camionneurs qui circulent, nos camionneurs qui circulent à travers l'Amérique du Nord et dans d'autres provinces canadiennes et aussi des camionneurs américains qui viennent ici porter des marchandises ou même en chercher et des camionneurs... Alors, il y a un vaste échange en Amérique du Nord de marchandises transportées par des camions venant de diverses régions. Ces camions paient des taxes sur l'essence dans divers endroits.

Il y a une entente entre, je pense, la totalité... la majorité, en tout cas, des États américains et des provinces canadiennes pour que ces taxes qui sont payées par les camionneurs soient partagées selon le kilométrage qui est parcouru par les camions, et les partager en fonction des déclarations que les camionneurs font de ce kilométrage. La majorité d'entre eux, vous comprendrez, font des livraisons régulières. C'est pourquoi ils peuvent ainsi nous indiquer, avec assez de précision, quel est le kilométrage qu'ils ont parcouru dans les différentes juridictions. Alors, ces déclarations sont volontaires, mais il est prudent ? et il est d'ailleurs dans l'accord international qui perçoit ce partage ? de vérifier entre, je crois, 3 et 5 % des déclarations qui sont faites en allant évidemment... bon, en allant chez les compagnies de camionnage qui ont fait les déclarations et en vérifiant si effectivement, par divers procédés, elles correspondent à la réalité.

Nous avons joint en plus récemment un régime d'immatriculation international qui, là, permet justement aux camions de ne payer leur immatriculation qu'à un seul endroit, leur permettant quand même, par cette immatriculation internationale, de circuler dans tous les États qui font partie à l'entente... que les provinces canadiennes. Le partage de ce qu'ils paient en immatriculation se fait de la même façon que le partage des taxes qu'ils paient sur l'essence. Là aussi, on prévoit qu'il doit y avoir un examen des déclarations qui sont faites. Alors, plutôt que d'avoir des agents de la Société de l'assurance automobile du Québec qui vont faire des enquêtes sur exactement le même sujet que des agents du Revenu, il est plus économique, tant pour l'État et évidemment aussi mieux pour les entreprises, qu'il n'y ait qu'un seul groupe d'enquêteurs qui fasse ces vérifications.

Je signale que ces vérifications sont faites sur des trajets qui sont publics, dans l'exercice d'un commerce, du commerce des transports, qu'elles comportent donc peu de vérifications de faits, à proprement parler, nominatifs et que l'on voudrait secrets ou personnels, sinon qu'on peut savoir, dans ces enquêtes, parfois qui a conduit le camion. Mais il y a donc des garanties, quand même, qui sont données dans les deux ententes pour que ces informations de nature confidentielle ne soient pas communiquées à d'autres personnes que celles qui en ont besoin.

La Commission d'accès à l'information a examiné ce projet. Elle est venue présenter ses conclusions à la commission parlementaire et a signalé qu'elle n'avait pas d'objection à cette partie du projet de loi n° 115 qui prévoit que le ministère du Revenu transmet à la SAAQ les informations dont elle a besoin et qu'il a compilées pour l'administration d'un système international de partage de l'immatriculation, comme le ministère du Revenu le fait pour le partage des taxes sur l'essence.

Deuxièmement, ce projet de loi avait aussi un autre but. Puisqu'il modifiait le Code de la sécurité routière, nous en avons profité pour apporter la confirmation dans la loi... puisque nous avons décidé que le virage à droite sur feu rouge serait permis à travers le Québec sauf à Montréal, qui décidera si elle se joint au reste du Québec ou si elle, comme la ville de New York aux États-Unis, elle garde le système actuel. Mais, pour le moment, le Code de la sécurité routière ne prévoyait qu'un projet-pilote. Alors, nous avons remplacé l'article qui prévoyait un projet-pilote par un article qui permet donc la permanence. Et, encore là, c'est évidemment un amendement qui n'a pas fait beaucoup de... qui n'a pas reçu beaucoup d'objections et qui est bien accueilli, d'après des sondages, par 84 % de la population.

Finalement, nous allons corriger un oubli qui avait été fait dans une loi antérieure et qui permet maintenant de saisir un véhicule automobile qui a été utilisé durant... ah, oui, pour quelqu'un qui a refusé de fournir un échantillon d'haleine à la demande d'un agent de la paix, de la même façon que nous pouvons le faire pour des périodes variant de 30 à 90 jours pour quelqu'un qui a conduit son véhicule avec ses facultés affaiblies ou encore quelqu'un qui aurait commis un délit de fuite. Évidemment, on présume que ceux qui refusent de fournir un échantillon d'haleine à la demande d'un agent de la paix, et c'est une présomption qui est inscrite dans le Code criminel, c'est parce qu'ils ne veulent pas que le résultat soit connu, appréhendant qu'il leur soit défavorable. Alors, c'est pourquoi on leur applique la même sanction que ceux qui ont fourni cet échantillon fournissant ainsi la preuve qui a permis de les condamner par la suite. Je pense que c'était aussi logique.

Donc, l'étude de ce projet de loi s'est donc terminée dans la plus grande harmonie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford... de Shefford, excusez. M. le député de Shefford.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Oui, merci, M. le Président. Même, ça ne m'offusque pas de me faire appeler le député d'Orford, qui est un excellent député également, M. le Président.

Donc, M. le Président...

Une voix: ...

M. Brodeur: Je n'invoquerai pas une question de règlement sur le commentaire du député de Salaberry. Donc, M. le Président, nous sommes à l'adoption du rapport concernant la commission parlementaire qui s'est tenue sur l'étude de la Loi modifiant le Code de la sécurité routière et la Loi sur le ministère du Revenu. Donc, M. le Président, le titre en tant que tel peut-être ne dit pas grand-chose aux citoyens qui nous écoutent ce soir, mais c'est la loi qui va mettre en vigueur le fameux virage à droite. Pour ceux qui nous écoutent, on l'attend, on l'attend depuis longtemps. Aucun rapport avec le virage en rond à l'Assemblée nationale, on parle plutôt du virage à droite. Donc, M. le Président, on attend ce projet de loi là, on attend la mise en vigueur du virage à droite depuis déjà très longtemps.

n(23 h 20)n

Vous vous souviendrez, M. le Président, à l'époque où M. Guy Chevrette était ministre des Transports, il avait implanté, à ce moment-là, des projets-pilotes sur le virage à droite, entre autres, par exemple, à Joliette, à Drummondville, à Chicoutimi, aujourd'hui est ville de Saguenay. Ces expériences-pilotes-là, à ce que je sache, M. le Président, ont été fort... révélateur sur l'efficacité ou, au moins, l'effet de ces virages-là.

On sait, M. le Président, que nous sommes le dernier État d'Amérique à adopter le virage à droite. On sait que partout aux États-Unis, sauf dans le centre-ville de New York, et au Canada le virage à droite est autorisé. Donc, M. le Président, nous étions en queue de peloton pour adopter le principe du virage à droite. Naturellement, aussi, M. le Président, inévitablement ce virage à droite là ne doit pas être en vigueur partout. On sait, aux endroits où il y a une circulation piétonnière importante, il est important d'interdire, pour la sécurité des gens, le virage à droite. Le ministre en faisait mention tantôt, à Montréal, il ne sera pas en vigueur au mois d'avril comme ailleurs au Québec, puisqu'il y a des consultations qui vont avoir lieu pour permettre, en fin de compte, de savoir si le virage à droite peut être dangereux pour les piétons ou pas.

Il est évident, M. le Président... je pense que c'est dans tout près de 30 % des endroits où le virage à droite sera interdit, sera interdit naturellement dans les endroits où la circulation piétonnière est importante. C'est important pour Montréal, c'est important pour chacune des villes que l'on connaît. M. le Président, vous êtes peut-être résident d'un endroit, d'une ville ou d'un village où la circulation piétonnière peut être importante dans le centre-ville.

D'ailleurs, il y a quelques instants, je discutais avec la députée de Bourassa, la députée de Bourassa qui a été longtemps au service des malades du Québec, donc au service de gens qui ont souvent, dans plusieurs cas, des difficultés pour circuler aussi facilement que nous, moi et vous, M. le Président. Elle me disait qu'elle est inquiète, elle est inquiète en certains endroits concernant le virage à droite. Mais j'ai pris la parole du ministre. Et, ici, on très conscient aussi, M. le Président, que ce n'est pas des virages à droite qui seront faits possiblement dans les endroits, dans les centres-villes où la circulation piétonnière est importante.

Donc, M. le Président, à la suite des projets-pilotes, à la suite des projets-pilotes que nous avons eus l'année dernière, on a vu des épisodes qui se sont succédé, qui n'ont pas toujours été concluants de la part du gouvernement, c'est-à-dire la façon dont ils ont traité l'adoption de ce virage-là, principalement après le départ du ministre précédent des Transports, M. Guy Chevrette. Et on a cru comprendre durant l'été, pour ne pas faire de jeu de mots, un demi-tour, un demi-tour de la part du ministre. Mais, suite probablement à des consultations avec son Conseil des ministres, le projet de loi que l'on connaît a été déposé au mois de novembre et a fait l'objet d'étude en commission parlementaire.

Je l'ai répété à quelques reprises en commission parlementaire et ici, à l'adoption du principe, M. le Président, que nous aurions préféré avoir un projet de loi qui ne comportait que des éléments... qu'un principe de loi, sur le virage à droite. Mais, M. le Président, le gouvernement a cru bon d'inclure au projet de loi n° 115 d'autres principes sur une législation qui aurait dû être différente concernant principalement la possibilité de divulgation de renseignements personnels. D'ailleurs, notre porte-parole en matière de revenu, la députée de Beauce-Sud, est ici ce soir et elle va probablement prendre la parole à ce sujet-là après mon intervention.

Donc, M. le Président, on cru bon, à ce moment-là, de demander au ministre une consultation, principalement auprès de la Commission d'accès à l'information, pour leur demander leur opinion concernant ces divulgations de renseignements personnels concernant la circulation des camionneurs en Amérique du Nord. Donc, M. le Président, nous... cette consultation-là. Heureusement, il n'y a pas eu d'objection de la part de l'opposition, mais, s'il y en aurait eu, il aurait été malheureux, M. le Président, que ça soit interprété comme une volte-face concernant le principe du virage à droite alors qu'on se posait des questions sur un tout autre principe qui a été inclus au projet de loi.

Donc, M. le Président, je donne le signal au gouvernement, du moins pour le temps qu'il lui reste à gouverner, que, si jamais les élections sont à l'automne prochain, s'il y a des projets de loi qui sont déposés au printemps, que nous n'apprécions pas tellement la façon de légiférer dans laquelle on dépose deux ou trois principes dans le même projet de loi. D'ailleurs, M. le Président, il y a un projet de loi qui n'a pas encore fait l'objet de l'étude complète du principe, qui porte sur les affaires municipales, un projet de loi que l'on dit omnibus, où on voit toutes sortes de choses. Ça ne permet pas, M. le Président, un vrai débat sur chacun des principes du projet de loi.

Donc, M. le Président, ce n'est pas mon intention de discuter du virage à droite toute la nuit, sauf qu'il est évident, M. le Président, qu'il était réclamé depuis longtemps par l'opposition, il était réclamé depuis longtemps par la majorité de la population du Québec. Reste au gouvernement de le mettre en vigueur. Le ministre nous a annoncé qu'il y aurait un programme important de publicité concernant la sensibilisation autant des piétons que des automobilistes concernant le virage à droite, et je pense qu'il est de première importance de le commencer le plus rapidement possible. Le ministre nous annonçait aussi que le projet de loi ou la loi serait mise en application à partir d'avril, 13 avril, si j'ai bien compris le ministre, et, concernant Montréal, en fin de compte, on attendrait les consultations et la décision de Montréal et de leur rapport avant de le mettre en application.

Donc, M. le Président, ce qu'on peut déplorer aussi, souvent nous sommes... le gouvernement du Québec agit de façon excessivement tardive. On l'a vu, par exemple, dans plusieurs cas, lorsqu'il arrive des accidents importants: on l'a vu à Saint-Michel-de-Bellechasse, on a légiféré après; on l'a vu aussi après l'accident dans la région de Nicolet concernant... là où plusieurs enfants ont perdu la vie, on a légiféré après. Malheureusement, le virage à droite est réclamé depuis longtemps par la population du Québec, et il sera en vigueur, heureusement, au mois d'avril prochain.

Donc, là-dessus, M. le Président, vous aurez compris que nous allons voter, je dirais avec empressement, pour l'adoption de ce projet de loi là. Nous avons très hâte, très hâte, M. le Président, que ce virage à droite là prenne effet au Québec, au printemps prochain. Là-dessus, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Shefford. Il y a une autre intervenante. Mme la députée de Beauce-Sud, je vous cède la parole.

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le Président, d'entrée de jeu, je dois vous dire que, lorsque mon collègue de Shefford, qui aurait aimé aussi être député d'Orford... Puis je suis certaine que, si on lui demandait, il aimerait aussi être député de Beauce-Sud, parce que c'est un gars terre-à-terre, et les gens de Beauce-Sud, ce sont des gens terre-à-terre et des gens qui apprécient ce genre de comportement là. Alors, on est très heureux, nous, de pouvoir compter sur le député de Shefford au sein de notre organisation.

Une voix: ...

Mme Leblanc: Ha, ha, ha! Alors, les motions de félicitations pourront venir ultérieurement, je pense que ce n'est pas le temps ici. On est ici pour parler du projet de loi n° 115. Nous en sommes à l'adoption finale, tel que vous le savez. Le titre du projet de loi n° 115 s'appelle Loi modifiant le Code de la sécurité routière et la Loi sur le ministère du Revenu.

Alors, comme le député de Shefford présentait le projet de loi n° 115, qui, vous le savez, est supposé être un projet de loi qui parle du virage à droite, il m'est arrivé, il nous est arrivé en disant que, dans le projet de loi n° 115, il n'y avait que deux articles concernant le virage à droite; le reste concernait d'autres dispositions, notamment des dispositions concernant le ministère du Revenu. Alors, j'ai été... on m'a éveillé les esprits à savoir comment on pouvait, à l'intérieur d'une modification qui a trait à la sécurité routière, changer des dispositions concernant le ministère du Revenu, et des dispositions, M. le Président, qui concernent notamment le secret fiscal.

n(23 h 30)n

Et on se rappelle que, pas plus tard qu'au début de l'année, nous avons eu à étudier le projet de loi n° 14 qui remettait en cause tous les fondements mêmes du secret fiscal, qu'on a tenu deux consultations plutôt qu'une à ce sujet-là et que nous en sommes arrivés à adopter ce projet de loi là le 14 mai. Alors, je me demandais comment se faisait-il qu'on voulait déjà amender un projet de loi qui avait fait couler quand même beaucoup d'encre, sur lequel nous avions discuté longuement. Alors qu'on venait juste de le sanctionner, de le mettre en application, on voulait déjà le modifier. Alors, j'étais un petit peu inquiète parce que justement ça concernait ces renseignements confidentiels là. Et il y a certains articles du projet de loi qui portaient à questionnement, tout au moins, et c'est pour ça, que je me suis intéressée à ça, à ce sujet-là.

Alors, par exemple, il y a l'article 6. Et l'article 6 fait en sorte que «La Société ? là, on parle de la Société de l'assurance automobile du Québec ? peut, sans le consentement de la personne concernée ? alors on parle, là, probablement du transporteur, alors ? communiquer au ministre du Revenu un renseignement nécessaire à l'application de l'article 13.1.» Alors, «La Société peut également, sans le consentement de la personne concernée, communiquer à une juridiction qui a adhéré au Régime d'immatriculation international, au mandataire ou préposé désigné d'une telle juridiction ainsi qu'à toute personne chargée de la mise en oeuvre de ce régime un renseignement nécessaire à l'administration de ce régime.»

Alors, la question que je me suis posée, c'est: Quel type de renseignement la Société de l'assurance automobile du Québec a-t-elle besoin de communiquer? Dans quelle circonstance elle a besoin de communiquer un renseignement au ministère du Revenu? Et là on voit que ça modifie les articles 610.1, 610.2, qui fait en sorte que le ministre du Revenu peut, lui aussi, sans le consentement de la personne concernée, communiquer à la Société de l'assurance automobile du Québec un renseignement qui est nécessaire à l'administration du Régime d'immatriculation international.

Alors, moi qui a coutume, depuis quatre ans, d'être la porte-parole officielle au ministère du Revenu, le Régime d'immatriculation international, ça ne voulait absolument rien dire pour moi. Je me demandais même depuis quand ça existait, ce régime-là. Et vous comprendrez que c'est un régime qui n'existe quand même pas depuis longtemps.

Alors, de cet article-là, je me demandais aussi quels renseignements la Société de l'assurance automobile du Québec a-t-elle besoin de connaître du ministère du Revenu du Québec. Parce que, on sait que, au ministère du Revenu du Québec, ce sont des dossiers fiscaux. En quoi la Société de l'assurance automobile du Québec a-t-elle besoin d'avoir des renseignements du ministère du Revenu? Et là ça me chicotait, et d'ailleurs on avait un avis, une lettre de la Commission d'accès à l'information qui suscitait lui aussi des interrogations, des questionnements.

À l'article 7, toujours, du projet de loi n° 115, bien là on modifie l'article 69.0.0.7 de la Loi sur le ministère du Revenu. Et il faut savoir que tout ce qui a trait à l'article 69, M. le Président, ce sont des renseignements d'ordre confidentiel, personnel et confidentiel, et fiscaux, et on est en plein dans le coeur du secret fiscal. Alors, il fallait, en tant qu'opposition officielle, être très prudents avec ce que pouvait contenir le projet de loi n° 115 et s'assurer qu'on avait les bonnes informations.

Alors, ce qu'on a fait, on a demandé... Premièrement, mon collègue de Shefford, qui est le porte-parole aux Transports, a demandé qu'on entende la Commission d'accès à l'information sur ce sujet-là. Parce que d'abord, le Régime d'immatriculation international, ni la Commission d'accès à l'information ni nous on n'avait une longue expérience de ce que ça pouvait être, une longue connaissance de ce que ça pouvait être aussi. Alors, on a questionné le ministre.

Et je dois signaler, M. le Président, que le ministre a accepté avec, je vous dirais, facilité, de nous amener la Commission d'accès à l'information, et non seulement la Commission d'accès à l'information, mais également des personnes de son ministère et du ministère du Revenu qui se sont déplacés pour venir nous expliquer qu'est-ce qui en était au juste. Alors, je peux dire que nous avons obtenu une très bonne collaboration de sa part, de la part du ministre, de son équipe, et que ça nous a permis de déchiffrer tout ça, de savoir si on avait raison, comme la Commission d'accès à l'information, d'avoir des craintes sur les dispositions qu'on venait modifier, aux articles de loi du ministère du Revenu qui ont trait au secret fiscal.

Alors... Bon. Ce que le ministre nous a dit dans un premier temps, c'est que l'immatriculation du Québec pour les camions qui vont dans des juridictions, comme aux États-Unis ou dans d'autres provinces canadiennes ? finalement, on parle de 60 États ? alors il y a, avec le Régime d'immatriculation international, une espèce d'entente qui fait en sorte que... on se souvient que, lorsqu'on était plus jeune, on voyait des camions avec des licences d'un peu partout, hein, Wisconsin, Oklahoma... en tout cas, toutes les juridictions ou tous les États par lesquels le transporteur se promenait, ça lui prenait une licence d'immatriculation. S'il allait en Ontario, c'était la même chose. Alors, c'était compliqué pour le transporteur d'avoir à s'immatriculer partout. Alors, c'est pour ça que le Régime d'immatriculation international a été introduit.

Et, comme il existe déjà au ministère du Revenu, je dois vous dire, M. le Président, une entente sur les carburants par laquelle il y a des échanges d'information actuellement entre ces juridictions-là, les États-Unis, le reste du Canada et nous, le Québec, sur les carburants, l'utilisation, la taxe sur les carburants, alors il y avait déjà au ministère du Revenu des gens qui sont habilités, qui ont l'expertise là-dedans pour aller vérifier la taxe sur les carburants. Alors, ces gens-là ont accès à des informations. Alors, le ministre, ce qu'il nous a dit là-dessus: On ne voit pas pourquoi qu'il y aurait à ce moment-là deux organismes, c'est-à-dire l'IRP et en même temps le ministère du Revenu, qui feraient les contrôles chez les mêmes transporteurs. Alors, ils compilent des statistiques chacun sur leur bord, et ça coûte finalement deux fois plus cher à l'État.

Alors, la Commission d'accès à l'information, elle, est venue nous dire qu'elle aussi elle avait des craintes à ce sujet-là et ce qu'elle nous a dit... Parce que là, on faisait en sorte que non seulement le ministère du Revenu pouvait aller vérifier ce que, auparavant, la Société de l'assurance automobile du Québec vérifiait par le biais du système de l'IRP, mais maintenant on voulait savoir comment ça se passait et s'il y avait des craintes à l'effet que... Vous savez, nous, on a un système de secret fiscal qui est assez complexe mais qui est complet en même temps puis qui sécurise beaucoup le citoyen. Alors, le fait que ces informations-là puissent être échangées avec les Américains, et là on se demandait quelle sorte de sécurité les Américains étaient pour apporter aux échanges d'information qui se seraient donnés. Alors, on a questionné beaucoup là-dessus, et la Commission d'accès à l'information nous a, elle aussi, fait part de ses craintes là-dessus.

D'abord, la Commission d'accès à l'information nous a dit qu'elle voyait dans cette modification d'abord la persistance d'une tendance à utiliser des renseignements fiscaux à des fins de gestion de programmes particuliers, des programmes qui ne peuvent pas être qualifiés de programmes fiscaux comme tels. «Alors, la Commission tient à exprimer ? je cite au texte ? ses craintes au sujet de cette tendance. En effet, sous le prétexte de l'efficacité administrative, on confère de plus en plus au ministère du Revenu une fonction d'agent de recouvrement.» Alors, cette façon de faire, aux yeux de la Commission d'accès à l'information, détourne le ministre, le ministre du Revenu, de sa véritable vocation, c'est-à-dire l'application ou l'exécution des lois fiscales.

n(23 h 40)n

Et il y avait également un élément dans le projet de loi qui méritait d'être traité et non pas d'être banalisé. Alors, il fallait que, dans ce projet de loi... on allait permettre finalement aux Québécois de pouvoir tourner à droit sur feu rouge, mais encore est-il qu'il fallait apporter d'autres modifications par rapport au secret fiscal, et là on avait de la difficulté à arrimer les deux, là: pourquoi le fait de virer à droite obligeait le ministre à modifier la Loi sur le ministère du Revenu? Et, si on fait référence aux articles 8 et 10 du projet de loi n° 115, bien, on comprend facilement que des renseignements fiscaux vont être communiqués à des organismes privés, à leurs mandataires, et on était inquiet, tout comme la Commission d'accès à l'information, de la protection, de l'usage que, par exemple, les Américains ou les autres provinces canadiennes pouvaient faire de ces renseignements-là. Alors, nous nous sommes inquiétés de l'insertion de ces articles, nous en avons discuté en commission parlementaire et nous avons demandé au ministre, là, finalement, de nous éclairer là-dessus.

Bon. Ensuite, ce qu'il y avait qui allumait nos lumières, finalement, M. le Président, sur ce projet de loi là, c'est que la Commission nous disait qu'elle comprenait que, dans ce type d'accord international, le ministre du Revenu et la Société de l'assurance automobile du Québec pouvaient avoir des difficultés à s'acquitter des responsabilités qui leur incombaient en matière de protection de renseignements personnels et fiscaux. Je cite presque au texte, M. le Président, ce que Mme Jennifer Stoddart est venue nous dire en commission parlementaire. Et elle disait: «Toutefois, il ne saurait être question d'abdiquer de telles responsabilités. La Commission n'ignore pas qu'une vaste infrastructure informatique supportera les multiples communications de renseignements nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord.» Alors, c'est ce qui lui faisait peur. Et la Commission tenait à déplorer une nouvelle exception à la règle du secret fiscal, soit l'ajout du paragraphe t à l'article 69.1 de la Loi sur le ministère du Revenu.

Alors, il s'agit, M. le Président, d'une 19e exception au secret fiscal, et, avant qu'on adopte le projet de loi n° 14, qui a été sanctionné au mois de mai 2001, il y en avait déjà 15, exceptions. Alors, on en est rendu à une 19e et on se demande si un jour ça va arrêter, si on ne serait pas mieux de dire que finalement on a droit de transmettre n'importe quelle information et dire lesquelles on veut absolument ne pas divulguer, parce que là c'est rendu qu'il y a énormément, énormément d'entorses au secret fiscal, comme je pourrais dire. Alors, on permet de plus en plus, on le sait, des accès à des renseignements personnels. Le ministère du Revenu détient des mégafichiers sur tout le monde au Québec, et c'est un système... une espèce de «Big Brother» qui n'est pas sans nous faire peur.

Alors, ce que le ministre nous a répondu, le ministre de la Sécurité publique, ici, là-dessus, c'est qu'il s'agissait de renseignements qui étaient absolument nécessaires au partage de recettes fiscales pour que ça se fasse d'une façon beaucoup plus efficace, efficiente, avec moins de fonctionnaires, que ça coûte moins cher, moins coûteux à l'État. Ensuite, il nous a dit qu'il s'agit aussi de renseignements qui apparaissent dans un document qui est public, que les conducteurs sont obligés de tenir à jour, de présenter à des organismes de contrôle. Alors, qu'ils l'obtiennent eux-mêmes ou que ça leur soit communiqué par un autre, il y a une seule différence, M. le Président, selon le ministre, c'est que c'est plus économique pour le contribuable. Alors, le ministre nous disait que, à ce sujet-là, il prenait la défense, si vous voulez, du contribuable.

Alors, après toutes ces inquiétudes-là, nous avons rencontré quelqu'un de l'IFTA. L'IFTA, c'est l'organisme, M. le Président...

M. le Président, je ne sais pas si on pourrait ramener les collègues à l'ordre, là, mais là je vois que, de l'autre côté, il semble y avoir une autre conférence. Alors, on pourrait peut-être faire en sorte qu'il y ait seulement qu'une personne qui discute...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, j'inviterais ceux qui sont debout de prendre place, s'il vous plaît, pour permettre à Mme la députée, là, de terminer son intervention.

Mme Leblanc: Alors, je remercie les collègues d'en face de bien vouloir...

Une voix: ...

Mme Leblanc: Oui. Écoutez, les propos qu'on a à tenir sur le projet de loi n° 115, puis, quand même, on parle de virage à droite, c'est un pas important, hein, pour la société québécoise; on attend depuis tellement longtemps que cette disposition arrive en vigueur.

Alors, finalement, la Commission nous assurait en nous disant qu'on lui soumettrait l'avis... l'entente, c'est-à-dire, concernant l'échange de renseignements qui doit permettre la mise en application de ce programme d'immatriculation. Alors, l'échange d'information entre, par exemple, les Américains, les États-Unis, les autres provinces canadiennes et nous, cette entente-là sera envoyée à la Commission d'accès à l'information qui, elle, soumettra un avis aux parlementaires qui sont ici, à l'Assemblée nationale, afin que nous puissions en prendre connaissance et s'assurer que tout est fait selon le respect du secret fiscal.

Alors, M. le Président, compte tenu que le ministre de la Sécurité publique nous a offert son entière collaboration afin que l'on puisse mettre fin à ces craintes que nous avions de modifier, encore une fois, les dispositions de la Loi sur le ministère du Revenu et qui traitent du secret fiscal, compte tenu que les experts nous ont assurés que finalement ça n'allait rien changer de plus aux renseignements qui étaient collectés, qu'il n'y aurait pas d'échanges nécessairement, d'échanges de secrets... de données fiscales, mais plutôt des échanges sur le nombre de kilométrage, le carburant acheté, le nombre de kilométrage dans chacun des États, et tout ça, les pièces qui seraient vérifiées, les pièces justificatives qui seraient vérifiées par les agents, soit de la SAAQ ou soit du ministère du Revenu, étant à peu près les mêmes... On sait qu'il y a environ 23 à 24 000 camions sur nos routes au Québec à chaque année et on sait que le ministère du Revenu ou la SAAQ, par le Régime d'immatriculation international, vérifie 235 parcs par année d'automobiles, alors ça équivaut à 7, 8 000 transporteurs que nous avons au Québec. Là-dessus, on en vérifie 235 parcs. Alors, je pense, qu'il fallait vraiment faire en sorte que le système soit efficace, et, là-dessus, je peux vous dire, M. le Président, que, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, j'ai été satisfaite par les réponses, tant celles que le ministre nous apportées que celles que la Commission d'accès à l'information ou les experts nous ont apportées. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Beauce-Sud. Alors, il n'y a plus d'autres intervenants.

Mise aux voix du rapport

Je mets aux voix le rapport. Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 115, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et la Loi sur le ministère du Revenu, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président, j'aimerais vous référer à l'article 30.

Projet de loi n° 120

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 30, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi concernant les services de transport par taxi. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Bon. Alors, M. le Président, vous savez que l'industrie du taxi est une industrie qui connaît parfois des jours difficiles et qui... où ne règne pas toujours l'harmonie. Cependant, une loi concernant le transport par taxi, que nous avons adoptée il y a moins d'un an, je crois, ou environ un an, je pense, a établi une paix que je souhaite durable dans l'intérêt de l'industrie et dans l'intérêt des clientèles de l'industrie, pour donner un meilleur service. Elle commence à produire ses effets, et je pense que beaucoup de gens qui n'étaient pas... Personne ne pouvait être satisfait complètement avec cette loi, mais les gens se sont mis quand même d'accord pour essayer de la faire fonctionner, et j'espère qu'ils réussiront. D'ailleurs, j'ai de bonnes raisons de le croire.

Mais, justement, comme c'est quand même difficile, il nous est apparu nécessaire d'apporter quelques amendements, et c'est effectivement l'objet du projet de loi que nous avons étudié. Le premier de ces amendements permet de clarifier le statut juridique du permis ainsi que du véhicule et de bien dire que les personnes qui utilisent ce permis et ce véhicule sont réputées exercer une activité économique organisée, ce qui veut donc dire qu'ils pourront mettre des droits réels, c'est-à-dire donner en garanties ? des garanties qui sont enregistrées, dans le RD... enfin, le Registre des droits personnels et mobiliers du Québec ? qui pourront être clairement... ils pourront être enregistrés pour mieux les donner en garantie à la banque. Je vous signale que certains de ces permis se vendent aussi cher que 120 ou 140 000 $, et que, évidemment, il s'agit d'un investissement très important que l'on pourra donner en garantie.

n(23 h 50)n

Un deuxième amendement permet aussi à des personnes morales d'avoir plusieurs permis de propriétaire de taxi. Je pense que c'est effectivement, oui, que les personnes morales aussi puissent devenir titulaires d'un permis de propriétaire de taxi et non seulement des individus. Cela permettra notamment à certaines coopératives d'acheter plusieurs permis de propriétaire de taxi et de bâtir une flotte.

Troisièmement, il s'est avéré nécessaire aussi de clarifier les contrôles des antécédents judiciaires qui seront faits sur les propriétaires et les chauffeurs de taxi pour assurer une meilleure protection du public. Et finalement, quatrièmement, il s'est avéré que ce n'est pas dans toutes les juridictions du Québec qu'il y aurait des véhicules adaptés au transport des personnes handicapées. Alors, dans les juridictions où il n'y aura pas... personne n'aura à demander un pareil permis, mais quelqu'un qui a son permis dans une autre juridiction pourra donner le service.

Je pense que, donc, ça assurera que les personnes handicapées pourront bénéficier de ce transport adapté. Je vous signale que c'est quand même important, les personnes handicapées en sont assez satisfaites. Nous fournissons jusqu'à, je pense, de mémoire, 19 000 $ pour transformer un véhicule en véhicule adapté pour transporter les personnes handicapées. Ceux qui auront des permis spéciaux auront des chauffeurs qui ont reçu des formations particulières pour accompagner ces personnes. C'est un transport qui se développe et qui correspond à un besoin qui n'est, hélas, pas encore suffisamment comblé.

Alors, ce sont donc des amendements mineurs, et, encore une fois, nous les avons adoptés dans la plus grande harmonie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci. Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 120 conserve encore l'industrie du taxi. Vous vous souviendrez du projet de loi mère, en fin du compte, du projet de loi n° 120, que nous avions adopté de force, par bâillon, il y a un an ou deux. Donc, M. le Président, ce projet de loi là avait été adopté tellement rapidement, avec plus d'amendements... Je me souviens... C'est certain que, dans le Journal des débats, ça va assez difficile d'indiquer ça d'épais, mais quand même, il y a plus d'amendements que le volume du projet de loi. Donc, on se souviendra également des débats d'un haut degré intellectuel qui étaient tenus à ce moment-là avec le ministre du Transport de ce moment-là ? on l'appelait le distingué ministre des Transports, Guy Chevrette.

Donc, M. le Président, nous avons eu un débat beaucoup plus civilisé en commission parlementaire concernant le projet de loi n° 120, qui a soulevé au point de départ certaines interrogations, entre autres, par les propriétaires de limousines. Donc, M. le Président, on sait que ces gens-là ont des permis par secteur à Montréal, on parlait du secteur A-5, A-11, A-12, de mémoire, je me trompe peut-être, A-5 ou A-6. Donc, on a eu des représentations des propriétaires de limousines de ces secteurs-là qui nous ont fait des suggestions, à l'opposition et au ministre. Il y a des amendements qui ont été déposés pour, en fin de compte, simplifier la Loi sur les taxis et faire en sorte que le projet de loi soit applicable d'une façon plus logique, principalement à Montréal.

Donc, M. le Président, je sais que le temps passe, minuit moins quelques minutes, et je suis convaincu que notre cote d'écoute est moins bonne qu'il y a quelques heures. Donc, M. le Président, tout ça pour vous signifier que nous allons voter en faveur du projet de loi. Et, sans en faire une motion, M. le Président, je suggérerais au leader adjoint, après mon intervention, après l'adoption du rapport, M. le Président, que nous puissions continuer nos travaux demain, à 10 heures.

Donc, là-dessus, M. le Président, je vous cède la parole.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je constate que c'est la fin des interventions.

Mise aux voix du rapport

Alors, je mets aux voix le rapport. Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi concernant les services de transport par taxi, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, je vous ferais remarquer, il reste trois minutes. Alors, M. le leader.

Ajournement

M. Simard (Montmorency): M. le Président, vous savez qu'on peut faire beaucoup de choses en trois minutes, y compris faire une proposition pour ajourner nos travaux à demain, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 56)