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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le vendredi 5 décembre 2003 - Vol. 38 N° 37

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures six minutes)

Le Président: Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Alors, au nom de tous mes collègues, je voudrais souhaiter un bon anniversaire de naissance demain, samedi, à M. le ministre du Revenu.

Le 5 décembre 1983, un événement important: un jeune homme faisait son entrée à l'Assemblée nationale comme secrétaire de la commission de l'économie et du travail. C'est son 20e anniversaire aujourd'hui à l'Assemblée nationale. Notre secrétaire général, M. François Côté.

Vous avez vu le changement à L'Argus ce matin, hein? Ça s'appelle François Côté.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation.

Rapport annuel de la Commission des programmes
d'études et document intitulé Commission
parlementaire sur la qualité, l'accessibilité
et le financement des universités

M. Reid: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer les documents suivants: le rapport annuel 2002-2003 de la Commission des programmes d'études et un document de consultation intitulé Commission parlementaire sur la qualité, l'accessibilité et le financement des universités.

Modification à la composition
du Bureau de l'Assemblée nationale

Le Président: Les documents sont déposés. Pour ma part, je désire vous informer que j'ai reçu de M. le premier ministre une lettre datée du 4 décembre 2003, dans laquelle ce dernier m'informe de la nomination de M. Tony Tomassi, député de LaFontaine, à la fonction parlementaire de membre du Bureau de l'Assemblée nationale. Cette nomination prend effet à compter d'aujourd'hui.

Document déposé

Je dépose cette lettre. M. le vice-président et député de Laurier-Dorion.

Motion proposant d'adopter la modification

Le Vice-Président (M. Sirros): Oui, M. le Président. Je fais motion pour que soit adoptée cette modification proposée par le premier ministre à la composition du Bureau de l'Assemblée nationale.

Mise aux voix

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Consentement. Mme la députée de Matapédia.

Préserver et développer le parc d'habitations
à loyer modique, et maintenir les loyers actuels

Mme Doyer: Merci. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 990 pétitionnaires qui sont locataires ou qui appuient les locataires d'habitations à loyer modique du comté de Matapédia.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

n (10 h 10) n

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement ? bien, on dirait qu'on n'en aura pas;

Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logements à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la députée. La pétition est déposée. Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre afin de déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 269 locataires d'habitations à loyer modique du comté de Chapleau.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements publics, protéger et rénover son parc de logements publics, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: M. le Président, je demande le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 479 pétitionnaires, locataires d'habitations à loyer modique et résidents de la municipalité de Shawinigan, dans le comté de Laviolette.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement du Québec révise ses programmes en habitation et que certaines mesures envisagées menacent directement l'ensemble des familles et des personnes âgées habitant dans les HLM;

«Attendu que le gouvernement du Québec a sabré de 25 % dans les budgets alloués en 2003 à la rénovation des HLM et coupé de 2,3 % leur budget de fonctionnement;

«Attendu que le parc de logement social au Québec constitue un patrimoine précieux pour tous les citoyens et citoyennes à revenus modestes et qu'il est un rouage important de notre filet de protection sociale;

«Attendu que les HLM sont une partie importante de la solution à la pénurie de logements que connaît le Québec;

«Attendu qu'il serait injuste que les plus pauvres de notre société fassent les frais de la baisse des impôts promise par le gouvernement;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Pour ces motifs, nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de bien vouloir s'assurer que le gouvernement du Québec prenne des mesures énergiques afin de conserver la propriété de ses 65 000 logements à loyer modique, protéger et rénover son parc de logement à loyer modique, maintenir les loyers à 25 % des revenus des locataires à faibles revenus, permettre la réalisation de nouveaux logements publics.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: M. le Président, je demande le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de Saint-Maurice.

Maintenir en poste un nombre suffisant
d'agents de conservation de la faune

M. Pinard: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale et signée par 11 306 pétitionnaires. Désignation: Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec et les citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs a coupé 45 postes d'agent de la faune saisonniers;

«Attendu que, comptant déjà très peu d'effectifs, les agents sont maintenant en nombre nettement insuffisant pour protéger adéquatement la ressource faunique;

«Attendu que les activités reliées à la faune ne sont pas négligeables: elles génèrent des retombées économiques importantes ? près de 3 milliards de dollars par année ? le maintien et les créations d'emplois dans toutes les régions du Québec;

«Attendu que les agents saisonniers ne seront plus là pour prendre la relève lorsque les employés permanents prendront leur retraite;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous signifions au gouvernement notre désaccord quant aux coupures d'effectifs dans un domaine qui n'est pas estimé à sa juste valeur.»

Je certifie que cet extrait, M. le Président, est conforme à l'original de la pétition.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je vous rappelle, dans les galeries, de ne pas faire d'applaudissements. Je vous remercie de votre collaboration.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales. Je reconnais M. le chef de l'opposition officielle.

Intentions en matière de baisse d'impôts

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, le gouvernement a décidé de renier son engagement électoral de baisser les impôts de tous les Québécois de 1 milliard. C'est un bris de contrat spectaculaire, de l'avis de toute la population, alors que cet engagement est écrit noir sur blanc à la page 22 de la fameuse plateforme électorale du Parti libéral et qu'il est repris dans une lettre du futur premier ministre publiée le 13 septembre et qui disait: «L'État au service des Québécois respecte le citoyen contribuable. Nous réduirons l'impôt des particuliers de 1 milliard de dollars par année pendant cinq ans.» Fin de la citation.

Lors de son premier discours inaugural, l'occasion solennelle du premier ministre de s'adresser à la nation, il a réitéré formellement son engagement après avoir examiné les livres et fait l'usage abusif du soi-disant rapport Breton. Et, lors du Conseil général du Parti libéral, donc plus tard encore, à la mi-septembre, le premier ministre a redit la même chose.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre: Est-ce qu'elle peut nous dire ce que nous devons croire: la déclaration du premier ministre d'hier ou ses engagements formels répétés à maintes reprises et violés de façon spectaculaire aujourd'hui?

Le Président: Madame... M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Le chef de l'opposition me permettra de souligner que c'est rare qu'on le voit lire le programme du Parti libéral et que c'est rare qu'on le voit réclamer une baisse d'impôts. Le Parti québécois, sous sa direction, avait même annoncé qu'il n'y aurait pas de baisse d'impôts pour continuer à financer ce qu'il appelle les services publics. Moi, je veux réitérer...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le chef de l'opposition, vous avez posé votre question. Maintenant...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! La parole est à M. le ministre des Finances.

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Séguin: Je voudrais rappeler au chef de l'opposition qu'il n'a pas de leçons à donner sur la façon de tenir les finances publiques au Québec.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: M. le Président, question de règlement. Demandez-lui donc de respecter le règlement à la lettre. S'il veut être pris au sérieux, il faudrait qu'il commence à respecter le règlement.

Le Président: M. le chef de l'opposition, je vous demande votre collaboration. M. le ministre des Finances.

n(10 h 20)n

M. Séguin: Oui. Merci, M. le Président. J'allais dire que les finances publiques sont dans un état lamentable. Nous sommes dans un déséquilibre budgétaire monstre, la dette du Québec a progressé de 14 milliards en six ans. Nous avons actuellement une dette publique de 112 milliards, nous approchons un service à la dette de 8 milliards, les deux tiers du budget de l'éducation du Québec, et je pense que les contribuables qui nous écoutent et qui suivent nos travaux savent le péril que cela représente. Mais je tiens à réaffirmer ici ce matin formellement que l'engagement du gouvernement de réduire le fardeau fiscal des Québécois au prochain budget, printemps 2004, est tenu et va se faire.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition.

Compensation des familles au regard
de l'augmentation du tarif
de certains services publics

M. Bernard Landry

M. Landry: Ayant commencé à les hausser de façon obscure, les impôts, je suis heureux de l'entendre dire aujourd'hui qu'il va les baisser de 1 milliard, comme il l'a dit dans son engagement. Et nous allons suivre ça de très près. Mais, après ses explications, là, technocratiques, circulaires, est-ce qu'il pourrait maintenant faire preuve d'un peu plus de compassion? Il a parlé de tous les contribuables du Québec ou il a parlé d'une catégorie particulière?

Il y a 40 % des contribuables québécois qui ne paient pas d'impôts. Donc, il ne peut pas baisser leurs impôts. Or, parmi eux, il y a 300 000 familles qui ont déjà subi 1 100 $ de hausse et qui devront le payer de leurs poches. Quelle est la réponse à ces familles-là alors que Noël approche? Il a passé un sapin au reste du monde, là. Comment les familles qui vont payer 1 100 $ de plus vont équilibrer leurs finances, déjà vulnérables, pour Noël?

Le Président: Votre question est considérée comme une question principale. M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Je trouve ça assez spécial d'entendre le chef de l'opposition nous donner des leçons ici sur les hausses d'impôts. Il y a eu 54 hausses d'impôts depuis 1994. Les Québécois paient actuellement le fardeau fiscal le plus élevé en Amérique du Nord. Que ce soit l'impôt sur le revenu des particuliers, que ce soit...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le chef de l'opposition officielle, je vous demande votre grande collaboration. Vous savez que vous ne pouvez pas intervenir lorsqu'un député a la parole dans cette Assemblée. Je vous demande votre collaboration et je suis certain que vous allez me l'accorder. M. le ministre des Finances.

Une voix: ...

Le Président: Quelle est votre question de règlement?

M. Dupuis: L'attitude répétée du chef de l'opposition officielle ce matin commande, commande, M. le Président, que vous le rappeliez à l'ordre une première fois.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je me suis adressé au chef de l'opposition et je suis sûr qu'il va m'apporter sa collaboration. M. le ministre des Finances.

M. Séguin: ...M. le Président. J'allais dire que je trouve ça assez incroyable que le chef de l'opposition ne se rappelle pas dans quelle situation les contribuables du Québec, sous sa direction, se retrouvent aujourd'hui avec le fardeau fiscal le plus élevé en Amérique du Nord, que ce soit l'impôt sur le revenu des particuliers, que ce soient les taxes de vente. Faut-il s'en rappeler, que tous les jours présentement nous payons 7,5 de taxe de vente, la plus élevée qu'on a jamais connue au Québec? Est-ce que le chef de l'opposition se rappelle qu'actuellement les taxes représentent, sur le dos des contribuables, un poids immense, que c'est sous sa direction, son gouvernement que, année après année, il a élevé, haussé les impôts au Québec?

Je pense que les contribuables le savent. Les contribuables du Québec veulent du changement, et, moi, je vous promets que dans le prochain budget on va assister à la réforme fiscale et au rabais fiscal tel qu'on l'a dit, et ça va se faire.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Joliette.

Tarification des services de garde

M. Jonathan Valois

M. Valois: M. le Président, là où le bris de contrat à l'égard de la population du Québec est évident, c'est en matière de services de garde. On promet, on revient sur les promesses, on va de l'avant à la sauvette avec le projet de loi n° 32, on repart à zéro avec le 26 jours. Et d'ailleurs, M. le Président, sur le projet de loi n° 32, la Commission d'accès à l'information et là maintenant le Protecteur du citoyen font des reproches au sujet de l'article 4 du projet de loi, un article qui pourrait faire entrer une question de modulation en fonction des revenus.

Ma question est bien simple: Est-ce que la ministre déléguée peut s'engager à ne pas moduler les tarifs des services de garde en fonction du revenu? Parce que, si on fait une chose semblable, M. le Président, ça voudra dire que les parents vont payer, d'un côté, par les tarifs, leurs baisses d'impôts qu'ils vont recevoir de l'autre.

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille.

Mme Carole Théberge

Mme Théberge: M. le Président, nous avons annoncé qu'il y aurait une hausse de tarif de 5 $ à 7 $ le 1er janvier, évidemment, suite aux modifications du projet de loi, justement pour respecter l'universalité qui était demandée autant par l'opposition que par différents groupes que nous avons rencontrés. Le Protecteur du citoyen nous fait certaines recommandations, et évidemment que nous allons nous plier à ses recommandations et faire en sorte de répondre à nos objectifs, et ce, en toute transparence avec les organismes qui sont concernés dans ce qu'on parle.

M. le Président, vous savez, avoir des enfants, c'est un choix personnel. Notre rôle comme État, c'est de soutenir les familles, et c'est ce que nous faisons en mettant en place différents services de qualité, en les maintenant et en assurant à ces familles et à ces parents du Québec une politique familiale beaucoup plus globale qu'on va leur présenter. Et on va faire ça, M. le Président, en respect des objectifs des nouveaux besoins des familles et en respect également de nos paramètres de soutien à ces familles du Québec. Merci.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Joliette.

M. Jonathan Valois

M. Valois: M. le Président, est-ce que je dois comprendre de la réponse de la ministre qu'elle ouvre la porte à la modulation en fonction des revenus?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille.

Mme Carole Théberge

Mme Théberge: M. le Président, pas du tout. Ce n'est pas du tout l'objectif, ce n'est pas du tout ça, et je pense que le porte-parole de l'opposition le sait très bien.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Joliette.

M. Jonathan Valois

M. Valois: Dans ce cas-là, M. le Président, est-ce que la ministre peut s'engager à retirer l'article 4 du projet de loi pour qu'on n'en parle plus?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille.

Mme Carole Théberge

Mme Théberge: M. le Président, le projet de loi contient différents alinéas qui vont nous permettre de faire en sorte que les services de garde, que ce soit autant en centre de la petite enfance, en garderie privée ou en milieu familial, soient plus performants dans tous les sens du terme et, premièrement, qu'ils procurent aux familles du Québec des places. Alors, c'est de la qualité et de l'accessibilité. Et se donner une possibilité ne nous oblige pas, en fait, à le faire. Et c'est ça. Mais on entend être transparents et faire en sorte que nos gens soient servis, et ça, c'est les familles du Québec qui ont besoin de places, M. le Président.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

Prestation de services dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je suis arrivé quelques minutes en retard à nos travaux, ayant voulu entendre en direct le début de la conférence de presse de M. Dupont, un patient de l'Hôpital Saint-Charles-Borromée qui avait ce matin à faire un témoignage qui donne extrêmement froid dans le dos. Il citait avoir demandé un verre d'eau, s'être fait répondre: Bois ta salive, s'être fait menacer parce qu'il était, après une heure d'attente, trop pressé à faire changer sa couche.

Les cas sur le plan humain inquiètent de plus en plus. Et, cette semaine, en commission parlementaire, mercredi, le Conseil pour la protection des malades est venu et a exprimé au ministre qu'ils détenaient, eux, au moins 10 cas autres dans 10 établissements distincts comme celui de Saint-Charles-Borromée, et le ministre leur a répondu qu'il savait. Vous savez très bien que, des cas comme Saint-Charles-Borromée, il y en a d'autres ailleurs. Il y a des enquêtes diverses qui sont ouvertes. Le ministre nous a dit hier que son inquiétude grandit.

Est-ce que le ministre est conscient qu'il est le seul à avoir les pouvoirs de réduire sa propre inquiétude, et en même temps l'inquiétude de l'ensemble de la population, en prenant des actions?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, il y a, je dirais, une balance très fine à observer ici entre, d'une part, avoir la vérité et toute la vérité, et c'est ce que nous désirons. D'ailleurs, dans le cas que M. le député soulève, l'enquête est en cours. Le rapport devrait être remis le 8 décembre, tel que prévu. Je suppose, sans avoir bien sûr eu connaissance de ce rapport encore, que le cas qu'il décrit aura été porté à l'attention de l'enquêteur qui est sur place actuellement. Et nous prendrons par la suite des actions appropriées en ce qui regarde l'institution dont il est question. Ça, c'est d'un côté. Donc, toute la vérité, oui, partout. Les visites d'établissements, les visites de résidents de centre... prolongés, comme nous l'avons indiqué, vont se faire.

De l'autre côté, il y a également des centres hospitaliers et de soins de longue durée où ça va très bien, où les patients ont de très bons soins, où les gens partout, y compris à Saint-Charles-Borromée, plusieurs employés, sont extrêmement dévoués et attentifs. Il faudrait que le député soit prudent, dans ses remarques et ses questions, de ne pas jeter le discrédit complet sur l'ensemble de ce réseau dans lequel les gens travaillent très fort pour nos personnes âgées, et des soins de bonne qualité, M. le Président.

n(10 h 30)n

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre peut nous informer? Dans les 10 autres cas de 10 établissements distincts, comme celui de Saint-Charles-Borromée, qui sont sur le bureau du Conseil pour la protection des malades, est-ce que le ministre a demandé qu'on lui dépose ces dossiers, qu'on lui présente ces cas? Et quelles actions il a entreprises dans ces 10 nouveaux cas pour lesquels il a eu un échange en commission parlementaire ce mercredi?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, ces cas ont été fournis à l'examen, je suppose, du processus d'examen des plaintes. Je suis disposé à recevoir tous les cas qu'on voudra me transmettre et à leur donner la suite appropriée. Compte tenu du contexte, compte tenu des événements, compte tenu du haut degré de préoccupation justifiée de la population dans ce domaine, nous allons suivre chacun de ces cas très attentivement, et j'invite les gens qui sont témoins ou qui sont préoccupés par la qualité de vie des résidents dans les résidences d'hébergement de nous communiquer les faits qui sont portés à leur attention.

Le Président: En dernière question additionnelle, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Comment le ministre peut être rassuré, ne pas s'occuper personnellement et laisser les mécanismes en place s'occuper des 10 cas alors qu'encore aujourd'hui un ombudsman nous dit: Les plaintes se perdent dans le système ? l'ombudsman de l'hôpital Douglas?

Est-ce que le ministre se rend compte que réagir avec compassion, s'inquiéter, écouter, tout ce qui ont été ses réponses jusqu'à maintenant, c'est bien du point de vue de l'image, mais qu'à ce point-ci les gens attendent des actions de leur ministre?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Écoutez, pour ce qui est de l'image, les déclarations récentes du député de Rivière-du-Loup dans le dossier de l'affaire soi-disant Scorpion, là, montrent que c'est un peu délicat.

Deuxièmement, pour ce qui est des actions concrètes, il y en a, il y en aura. Nous voulons faire toute la lumière, nous n'avons aucune tolérance pour que l'abus, quel qu'il soit, où qu'il soit... nous voulons faire la lumière partout où ce sera possible et nous voulons que, suite à ces événements malheureux, l'ensemble du réseau des hébergements s'améliore et apporte une qualité de vie supérieure aux résidents qui y sont, M. le Président. Nous allons agir avec compassion, lucidité et fermeté.

Le Président: Alors, en question principale, Mme la députée de Taillon.

Investissements en éducation

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Le gouvernement s'apprête à briser un autre engagement électoral, celui du réinvestissement en éducation. Avec des coûts de système évalués à 1,75 %, bien en dessous du seuil de l'inflation ? même celui fixé par le ministre des Finances ? le cadre financier du Parti libéral a budgété d'importantes compressions en éducation: 123 millions en 2004-2005, cela atteindra 1 milliard en 2008-2009, et, si nous cumulons le tout, c'est 3 milliards en un mandat, M. le Président.

Quels sont les services que le ministre de l'Éducation entend réduire ou couper pour respecter son cadre financier?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, le cadre financier prévoyait, pour l'année dans laquelle nous sommes... ne prévoyait pas d'investissement particulier. Nous avons investi 400 millions de dollars en éducation, nous avons investi jusqu'à 3,6 % d'augmentation du budget de l'Éducation. Alors, les chiffres qu'apporte la députée de Taillon sont des chiffres purement spéculatifs, avec lesquels je pense qu'elle essaie de faire ce qu'elle a fait à plusieurs reprises, c'est-à-dire essayer d'allumer des feux, M. le Président. On a parlé des feux d'abolition des cégeps, d'abolition des commissions scolaires, etc.

Il n'y a pas de feu, dans cette question-là. L'éducation demeure notre priorité, nos engagements sont clairs et nous travaillons, M. le Président, avec les gens des commissions scolaires, nous travaillons avec les gens des cégeps, nous travaillons avec les universités pour faire en sorte que nos élèves au Québec réussissent.

Et ceci est vrai, M. le Président, pour la réforme de l'éducation. C'est vrai pour la formation professionnelle, M. le Président. C'est vrai pour le forum sur les cégeps qui s'en vient, M. le Président. C'est vrai pour la commission parlementaire, pour laquelle je suis très fier d'avoir déposé ce matin un document de consultation, et c'est vrai, M. le Président, pour le rôle que l'éducation joue dans le développement des régions.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Bien sûr, M. le Président. Est-ce que le ministre se rappelle que c'est 200 millions de moins que ce que nous avions prévu investir en éducation pour l'année en cours et est-ce que le ministre, en ce sens, peut s'engager fermement à faire en sorte que le niveau de réinvestissement soit au moins à la hauteur du niveau d'inflation, s'il ne veut pas couper de services, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, je sais que, à force de le répéter, l'opposition essaie de banaliser la situation. Mais l'argent qui était... et auquel on fait référence ? du fameux budget ? on sait tous maintenant que c'est un budget fictif, c'est un budget pour lequel il n'y avait pas d'argent. On n'en a pas trouvé quand on est arrivé, et les mauvaises nouvelles se sont succédé.

Écoutez, il y a même des mauvaises nouvelles concernant des choses non seulement qui correspondaient à l'année qui s'en vient... qui s'en venait, c'est-à-dire l'année où nous sommes, mais, en arrivant, nous avons trouvé des mauvaises nouvelles correspondant à l'année précédente. M. le Président, j'ai appris, quelques jours après avoir été nommé, que, alors qu'on avait donné aux universités un réinvestissement de 80 millions l'année dernière, M. le Président, ce réinvestissement-là n'avait pas été prévu dans le budget réel, lui, de l'année précédente. Il fallait trouver l'argent pour l'année précédente maintenant, il restait un mois pour le trouver, M. le Président.

Alors, des mauvaises nouvelles financières, il y en avait. Quand on fait référence au budget fictif, je pense que ce n'est pas une bonne comparaison. Nous avons prouvé que l'éducation est une priorité pour nous, nous avons investi 400 millions de dollars de plus en éducation que l'année précédente, et, M. le Président, c'est toujours une priorité pour nous.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Est-ce que le ministre sait ? et il le sait sûrement, je le présume, M. le Président ? que ces sommes devaient être versées dès le 1er avril aux universités? Est-ce que le ministre peut s'engager ? parce qu'il ne répond pas aux questions, M. le Président ? est-ce que le ministre de l'Éducation peut s'engager à investir au moins à la hauteur du taux d'inflation en éducation, M. le Président? Et ce sera, s'il le fait, plus que son cadre financier. Et donc, est-ce qu'il peut s'engager aussi à améliorer et à augmenter les services offerts autant aux élèves, aux étudiants qu'aux enseignants, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: Oui, M. le Président. Quand la députée de Taillon dit que je ne répond pas aux questions, évidemment, il faut comprendre que je ne réponds pas aux questions de la façon dont elle voudrait que je réponde, c'est-à-dire tomber dans ses pièges.

Le Président: Alors, M. le ministre, vous vous adressez toujours à la présidence.

M. Reid: Oui. M. le Président, on me demande si on prévoit des sommes pour réinjecter dans les services. M. le Président, c'est exactement ce que nous avons dit que nous ferions, et c'est ce que nous allons faire.

Je voudrais insister notamment sur les services aux élèves en difficulté, des gens très vulnérables. Ce sont là-dessus... ce sont sur eux... Ce sont à eux qu'on a causé des problèmes par les coupures dramatiques, terribles, qui ont été faites par le gouvernement précédent. Ça s'est traduit d'abord et avant tout par des compressions auprès des professionnels qui aident les élèves en difficulté et auprès des personnels.

Le Président: En terminant.

M. Reid: Et, là-dessus, M. le Président, nous avons pris des engagements clairs et nous allons les tenir. Nous allons augmenter de façon très importante, dans les cinq années à venir, le nombre de professionnels qui vont aider nos élèves en difficulté, leurs parents et aussi les enseignants, qui actuellement procèdent à l'intégration de ces élèves-là dans les classes normales.

Le Président: En question principale, M. le député de Laval-des-Rapides.

État de la situation en matière d'emploi

M. Alain Paquet

M. Paquet: Merci, M. le Président. On sait qu'il est démontré que le Québec, lorsqu'on se compare aux 50 États américains et 10 provinces canadiennes, sur 60, se situe au 52e rang en termes de niveau de vie, de PIB par habitant. On sait d'ailleurs qu'une étude récente par le Fonds de solidarité de la FTQ...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Excusez-moi, M. le député. Je demande votre collaboration. M. le député de Laval-des-Rapides a le droit de poser une question et il a droit à l'ordre de tous les membres et le respect de tous les membres de cette Assemblée. M. le député de Laval-des-Rapides.

n(10 h 40)n

M. Paquet: Merci. On sait qu'une étude récente du Fonds de solidarité de la FTQ a comparé le PIB par habitant, hein, du Québec, par rapport à ce qu'il était aux États-Unis: en 1981, ça représentait environ 76 %; aujourd'hui, enfin en 2001, le PIB par habitant du Québec représente 56 % du PIB par habitant aux États-Unis. On remarque donc, M. le Président, qu'il y a des choses à faire, qu'il faut mettre en place des conditions gagnantes pour la croissance économique du Québec, pour la croissance des emplois, la croissance des revenus des travailleurs du Québec.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Paquet: Ce matin, M. le Président, et ma question s'adresse au ministre de l'Emploi, de la Solidarité et de la Famille...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député de Drummond! Vous pouvez poser votre question, M. le député.

M. Paquet: Merci, M. le Président. Et je vous remercie de faire respecter le respect de l'institution, ce qui parfois semble laisser à désirer.

Le Président: Votre question.

M. Paquet: Alors donc, M. le Président, la question s'adresse au ministre de l'Emploi, de la Famille et de la Solidarité: Ce matin, des chiffres sont sortis sur la situation de l'emploi au Québec, et j'aimerais qu'il nous donne un exposé de la situation de l'économie du Québec en matière d'emploi, par rapport à ce quelle a été historiquement et par rapport à ce quelle est ailleurs au Canada. Merci.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci. Merci, M. le Président. Enfin, une excellente question!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, à la réponse.

M. Béchard: Le chef de l'opposition devrait prendre des notes. M. le Président, c'est avec un grand plaisir que, ce matin, on peut annoncer que le Québec a créé, en novembre, 54 200 emplois; il s'agit d'un record. Il y a plus de population active ce matin, à 4 079 000, qu'il n'y en a jamais eu dans l'histoire du Québec, et c'est la preuve que sous un gouvernement libéral, sous un gouvernement qui a à coeur l'économie, l'économie québécoise se démarque et fait en sorte que plus... Pour paraphraser un ancien premier ministre du Québec, il y a plus de personnes qui ont été travailler lundi passé que jamais dans l'histoire du Québec, M. le Président.

Le Président: En question additionnelle, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bernard Landry

M. Landry: Un emploi créé doit nous réjouir, mais ma question... C'est que se réjouir d'une façon intempestive ne tient peut-être pas compte d'un fait, et je pose la question au ministre...

M. Dupuis: Question de règlement. Question de règlement...

Le Président: Question de règlement.

M. Dupuis: Il est clairement en additionnelle, et là, à ce stade-ci, à ce stade-ci ? sa fonction n'a rien à voir ? il doit poser sa question, purement et simplement. Je comprends que les nouvelles ne sont pas bonnes pour lui, là, ça, je comprends ça, là...

Le Président: Pas de commentaires.

M. Dupuis: Posez votre question.

Le Président: On ne peut pas faire une question de règlement puis faire des commentaires en même temps, vous le savez très bien. Alors, est-ce que... En question additionnelle.

M. Landry: Est-ce que, en se réjouissant de 54 000 alors qu'il reste 30 jours à courir dans l'année, le ministre sait que, l'an dernier, il s'en est créé 170 000?

Le Président: M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Je vois que le chef de l'opposition a pris des notes, ce qui va nous permettre de rétablir aussi un autre fait extrêmement intéressant, M. le Président, c'est que, dans la présente année, de janvier à mars, sous la gouverne du Parti québécois, il s'est perdu au Québec 19 700 emplois. Depuis avril, d'avril à novembre, sous un gouvernement libéral, il s'est créé 73 300 emplois, ce qui démontre la force de l'économie du Québec.

Mais le combat n'est pas terminé, il y a encore des chômeurs, il y a encore des gens qui se cherchent de l'emploi, il y a encore des régions où on a les pénuries de main-d'oeuvre. Et notre gouvernement va s'y attaquer avec la même ferveur qu'on travaille depuis des mois à faire en sorte que l'économie du Québec soit un exemple au sein de la fédération canadienne.

Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Investissements dans le réseau
de la santé en 2004-2005

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, qu'en est-il exactement des promesses libérales d'injecter 2,2 milliards en santé en 2004-2005? Hier, le ministre des Finances affirmait, et je le cite: «Le prochain budget sera déposé au printemps, et vous verrez qu'on respecte nos engagements.» Mercredi, le premier ministre déclarait, et je le cite: «À partir de l'année fiscale 2004-2005, nous allons mettre en oeuvre le programme et notre cadre financier.»

Le ministre de la Santé et des Services Sociaux, pour respecter la plus importante promesse électorale du Parti libéral, peut-il confirmer que ces 2,2 milliards promis en santé se retrouvent bel et bien déjà dans sa revue de programmes pour 2004-2005?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Je me permettrais, avant de répondre à la question directement, de relever qu'à ce que mon collègue a dit dans son excellente nouvelle il faut ajouter également que ça fait deux mois de suite que nous avons un tel record de création d'emplois. Depuis la Deuxième Guerre mondiale, jamais dans l'histoire du Québec, deux mois de suite, 80 000 emplois ont été créés.

Le Président: À la question, M. le ministre.

M. Séguin: Oui, directement à la question. La santé est une priorité majeure que n'avait pas reconnue l'ancien gouvernement, de 1994 jusqu'à l'élection récemment, puisque les montants investis n'ont jamais été aussi élevés que ce que nous avons annoncé dans le budget de la santé, M. le Président, le 12 juin. Et, dans le prochain budget, nous entendons, avec les transferts fédéraux à la santé, avec l'arrivée du prochain gouvernement à Ottawa... puisque ma collègue se rappellera que ce qu'elle a cité repose sur deux éléments: notre engagement à nous ? et, oui, il sera là ? et les transferts à la santé par le gouvernement fédéral. Les deux ensemble devraient donner le montant qu'elle a estimé.

Et je peux d'ailleurs dire, M. le Président, je vais terminer là-dessus, que nous avons devancé notre engagement dans le dernier budget. Il n'était pas convenu que nous investissions autant à la santé le 12 juin. Mais nous l'avons fait en respect des besoins à la santé, que l'ancien gouvernement n'avait pas fait. Alors, nous avons devancé un milliard d'investissements dans le dernier budget, et ça veut dire que, l'an prochain, M. le Président, l'an prochain... On est déjà en avance sur l'engagement auquel on s'est engagé.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Oui, M. le Président, est-ce que le ministre des Finances reconnaît que sa réponse est une astuce cousue de fil blanc? Pour abandonner l'engagement ferme de réinvestissement de 2,2 milliards en santé en 2004-2005, cette astuce consiste à soustraire, pour 2004-2005, la hausse des coûts de système de 2003, M. le Président.

Est-ce qu'on doit comprendre que l'engagement ferme, la principale promesse électorale va être abandonnée par le gouvernement libéral?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Notre engagement n'est pas cousu de fil blanc. Nous sommes devant un budget qui a été présenté par l'ancien gouvernement, qui, lui, était rempli de pages blanches. Et, à la santé, il est quand même étonnant de réaliser... d'entendre les propos que je viens d'entendre dans la question de ma collègue, parce que nous avons investi avec l'argent des contribuables, malgré une situation difficile, malgré un fardeau fiscal élevé encore, nous avons investi la somme, à la santé, la plus élevée jamais consentie ici, à l'Assemblée nationale: plus de 7 % de plus à la santé.

Le Président: Si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Séguin: Et c'est toujours notre priorité d'investir à la santé, et, au prochain budget, M. le Président, nous allons respecter nos engagements. Que ce soit à la santé et, je le répète, que ce soit à la réduction du fardeau fiscal, nous allons être au rendez-vous tel que promis.

Le Président: En question additionnelle, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, est-ce que le ministre des Finances reconnaît que, cette année, l'augmentation du budget en santé est entièrement financée par l'argent fédéral arraché par le gouvernement précédent, qu'il a même utilisé la réserve de l'argent fédéral en santé pour l'an prochain? Et, M. le Président, peut-on comprendre que cet engagement ferme de 2,2 milliards est devenu conditionnel aux transferts fédéraux encore incertains?

n(10 h 50)n

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Yves Séguin

M. Séguin: Merci, M. le Président. Ma collègue comme le chef de l'opposition me surprennent beaucoup ce matin, parce que, lorsqu'on parle de finances publiques, pour un gouvernement qui a été neuf ans au pouvoir, qu'est-ce que nous faisons, nous, depuis l'élection? Nous sommes à notre septième mois, et je ne fais que gérer un désastre financier. J'aurai l'occasion, et je le confirme maintenant, j'aurai l'occasion, le 15 décembre, de présenter publiquement la synthèse des opérations financières...

Une voix: ...

M. Séguin: ...la synthèse. Je m'excuse, j'entends des voix ici qui contredisent ce que je dis, M. le Président. Alors...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je crois que M. le député s'est reconnu. Si vous voulez terminer.

M. Séguin: La synthèse révélera l'ensemble des revenus et dépenses au 30 septembre dernier. Et je vais aussi déposer, pour le rendre public, le rapport venant du contrôleur financier du ministère des Finances sur deux sociétés: Société générale de financement et les sociétés Innovatech du Québec, et on comprendra, M. le Président, que, si j'ai dû devancer le 800 millions qui était prévu en 2004 à cette année, si je suis obligé aujourd'hui de financer les désastres financiers du passé, le 15 décembre, on va comprendre qu'est-ce qui s'est passé.

Le Président: En question principale, M. le député de Saint-Maurice.

Rappel des agents de conservation
de la faune saisonniers

M. Claude Pinard

M. Pinard: Alors, M. le Président, lors de l'étude des crédits, le 2 juillet dernier, le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs nous affirmait en commission qu'il ne prévoyait pas de coupures de postes chez les agents de conservation de la faune. Deux semaines plus tard, il congédiait sans ménagement 45 agents saisonniers, certains ayant 10 ans, 15 ans, 20 ans, 25 ans de service. Le 21 septembre dernier, M. le Président, à l'émission de Jean Pagé à RDS, Chasse et Pêche Sans Limite, le ministre a déclaré qu'il s'engageait à réembaucher ces 45 agents en 2004.

M. le Président, est-ce que le ministre peut nous confirmer en cette Chambre que les 45 agents de conservation de la faune seront tous réengagés en avril 2004?

Le Président: M. le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, ce que j'ai dit lors de l'étude des crédits ? et j'ai le verbatim ici ? c'est: «On est en train de faire une révision justement pour être en mesure de diminuer, réduire et, si possible, annuler l'impact sur la main-d'oeuvre et sur les régions.»

Je suis étonné de la question du député de Saint-Maurice, parce que l'impasse budgétaire à laquelle on fait référence abondamment depuis juin dernier a mis la Société de la faune et des parcs dans une situation, elle aussi, délicate, et on a dû procéder en juillet à des mises à pied de 45 agents de protection de la faune, mais pas nécessairement, comme le dit le député de Saint-Maurice, sans ménagement. Au contraire, on a essayé de s'assurer de mesures d'atténuation de cette décision-là.

Malgré la situation financière, je me suis engagé à ce que les agents aient les sommes nécessaires pour opérer sur le terrain et ainsi protéger la faune. Une enveloppe de 500 000 $ du budget du ministère des Ressources naturelles, Faune et Parcs a été consentie pour le fonctionnement et la réembauche d'agents. Depuis ce temps-là, M. le Président, il y en a sept de ces 45 là qui avaient été réengagés pour assurer un service dans certains bureaux: à Parent, à Saint-Camille, à Rapides-des-Joachims, à La Vérandrye-Sud et aussi dans la région de Mégantic et de Sherbrooke. On laisse...

Le Président: En conclusion.

M. Corbeil: Bien, en conclusion...

Le Président: Oui, vous pouvez... Allez-y.

M. Corbeil: ...tout dépendant des budgets et des crédits qui seront disponibles pour l'année 2004-2005. Je n'ai pas envie...

Des voix: ...

M. Corbeil: ...je n'ai pas envie, M. le Président, de répéter cette situation-là l'an prochain, et j'espère être en mesure de tous les réembaucher et, si on a plus d'argent, bien, en réembaucher plus.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Saint-Maurice.

M. Claude Pinard

M. Pinard: Les propos du ministre nous confirment qu'ils ne seront pas réengagés en 2004. Mais est-ce que le ministre réalise l'ampleur de l'erreur qu'il a commise en congédiant ces agents de la faune? Est-ce qu'il réalise qu'en refusant aujourd'hui de les réembaucher pour 2004 le message qu'il lance aux braconniers du Québec: Tant que, moi, je serai ministre, le bar est ouvert?

Le Président: M. le ministre délégué à la Forêt, à la Faune et aux Parcs.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, le bar qui était ouvert, c'est le saccage qui a été fait dans les finances publiques du Québec avec... de 3 milliards.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Corbeil: On entend agir, M. le Président, de façon responsable. Et M. le député de Saint-Maurice veut laisser croire à la population qu'il n'y a personne qui s'occupe de la faune au Québec. Je tiendrais à rappeler ceci, M. le Président. Il y a encore 433 agents de protection de la faune, il y a 442 assistants à la protection de la faune, il y a des gardiens de parc et, surtout, il y a 7 millions de Québécois qui sont préoccupés par la situation et qui signalent des actes de braconnage quand il y en a.

De plus, M. le Président, les citoyens... les opérations, en ce qui concerne le braconnage, se poursuivent. À témoin, il y a eu des enquêtes qui ont été menées, il y a eu des arrestations qui ont été faites dans différentes régions, et puis le travail se poursuit. Certes, les assistants puis les gardiens ne sont pas des agents de la paix puis ils n'ont pas le pouvoir de perquisition comme les agents de protection de la faune...

Le Président: En conclusion.

M. Corbeil: ...mais je pense que, M. le Président, il y a encore du travail qui se fait et j'ai l'impression que ce qui est dérangeant, là, c'est plus l'émoi et le tapage que l'opposition a fait là-dessus...

Le Président: Merci, M. le ministre. Alors, en question principale, M. le député... En question principale, M. le député de Richelieu.

M. Simard: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En complémentaire. Dernière complémentaire sur la question.

M. Sylvain Simard

M. Simard: Oui. Tout en rappelant au ministre, M. le Président, qu'après cinq ans de déficit zéro ce genre de leçon est totalement inutile.

Je demande au gouvernement, M. le Président: Est-ce qu'il s'agit là, dans la réingénierie de l'État, d'un nouveau mode de gestion du personnel qui consiste à les payer six mois et à les mettre six mois sur l'assurance chômage? Est-ce que vous allez dire à ces gens-là, qui sont dans les tribunes aujourd'hui, que c'est votre nouvelle façon de gérer le personnel au Québec, six mois au travail, six mois sur le chômage?

Le Président: Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous sommes en question additionnelle, et la réponse est moins longue qu'en question principale. M. le ministre.

M. Pierre Corbeil

M. Corbeil: M. le Président, ce n'est pas le genre de décision et de mesure qu'on prend de gaieté de coeur, sans compassion, de façon froide et stoïque, hein. Alors, c'est des employés saisonniers, occasionnels, qui font un excellent travail, et j'espère être en mesure d'avoir... de faire appel à leurs services l'an prochain pour qu'ils puissent continuer à faire l'excellent travail qu'ils ont fait.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Rimouski.

Prolongement de l'autoroute 20
dans la région du Bas-Saint-Laurent

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Toute la région du Bas-Saint-Laurent est mobilisée ? et je dis bien: toute la région du Bas-Saint-Laurent ? pour que le prolongement de l'autoroute 20 se poursuive au cours du mandat du gouvernement libéral. Dans une entrevue à Radio-Canada à Rimouski, la ministre des Transports a déclaré qu'elle attendait de savoir combien le ministre des Finances lui accorderait d'argent avant d'aller de l'avant.

M. le Président, est-ce que la ministre des Transports est à la remorque du ministre des Finances pour décider des priorités de son ministère, ou si elle va convaincre le ministre des Finances du bien-fondé de réaliser l'autoroute 20 dans le Bas-Saint-Laurent?

Le Président: Alors, Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, je suis très heureuse d'avoir cette question-là. Je voudrais dire à Mme la députée, ma collègue, que son gouvernement, en neuf ans, il a mis seulement 65 millions sur cette route-là; elle en a besoin de 600 millions de dollars. Vous auriez dû dire ça à votre chef de gouvernement à l'époque, Mme la députée.

n(11 heures)n

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Boulet: Alors, M. le Président, ils avaient promis la route pour 2007, bien, à ce rythme-là, ils ne l'auraient pas eue avant 2050. Alors, nous, contrairement à vous, on ne fait pas de promesses quand on n'a pas l'argent. On ne fait pas de promesses quand on n'a pas l'argent.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Boulet: M. le Président, quand on est arrivés au ministère du Transport du Québec, il y avait pour 5,3 milliards de dollars de promesses de travaux routiers qui avaient été faites par l'ancien gouvernement, 5,3 milliards de dollars. Alors, ça, c'est la réponse. Il n'y avait pas d'argent, mais ils l'ont promis. Alors, aujourd'hui on se retrouve avec ça.

Deuxièmement, nous, on est capables de travailler avec le fédéral et on est capables de faire des ententes. Et le ministre est allé chercher 108 millions de dollars au mois d'août, dans le programme PSIR, avec le gouvernement fédéral, une entente que vous refusiez de signer depuis deux ans.

Le Président: En question additionnelle...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader. En question additionnelle, Mme la députée Matapédia.

Mme Doyer: Est-ce que...

Une voix: ...

Le Président: M. le député! M. le député! M. le député de Vimont. Ce n'est pas vous? Je m'excuse. Mais des gestes comme ça, là, ça ne se fait pas à l'Assemblée nationale. Ça ne se fait pas. Je m'excuse, M. le député, mais ça ne se fait pas, de qui que ce soit. En question additionnelle, Mme la députée de Matapédia.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, M. le Président. La ministre, vu qu'elle ne nous donne pas de réponse, s'engage-t-elle aujourd'hui à rencontrer le milieu qui est mobilisé en appui au prolongement de l'autoroute 20, un engagement électoral du Parti libéral, et à leur donner à eux une réponse?

Le Président: Mme la ministre déléguée aux Transports.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, on est très conscients de l'importance, au niveau du développement économique, de l'autoroute 20 pour les gens du Bas-du-Fleuve. Ceci dit, j'ai rencontré les maires de la région et les membres de la Chambre de commerce et je leur ai garanti que c'était une priorité pour nous, mais que ça va dépendre des disponibilités financières dont on disposera. Mais, quand on va le promettre, nous, on va la faire.

Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

Procéder à une consultation générale
sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité
et le financement des universités

M. Dupuis: Oui. M. le Président, je voudrais présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'éducation procède à une consultation générale et tienne des auditions publiques à compter du 17 février 2004 afin d'examiner les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 6 février 2004; et

«Que le ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Alors, cette motion est adoptée. Mme la députée de Chambly.

Souligner l'anniversaire de la tragédie de l'École
polytechnique et prendre les mesures nécessaires
pour contrer la violence faite aux femmes

Mme Legault: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Excusez-moi.

Mme Legault:«Que l'Assemblée nationale du Québec se souvienne aujourd'hui de la tragédie survenue à l'École polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989, et que chacune et chacun de ses membres s'engage à prendre action pour faire du Québec une société toujours plus ouverte, tolérante et non violente à l'égard des femmes.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Alors, Mme la députée de Chambly, je vous cède la parole.

Mme Diane Legault

Mme Legault: Je sollicite aujourd'hui le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec se souvienne aujourd'hui de la tragédie survenue à l'École polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989, et que chacune et chacun de ses membres s'engage à prendre action pour faire du Québec une société toujours plus ouverte, tolérante et non violente à l'égard des femmes.»

Avant toute chose, M. le Président, je vous propose que nous observions une minute de silence à la mémoire d'Anne-Marie, de Barbara, d'Annie, Marie, Geneviève, Michèle, Barbara, Sonia, Hélène, Anne-Marie, Maryse, Annie, Maud et Nathalie.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, on va tenir une minute de silence.

n(11 h 6 ? 11 h 7)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Bien.

Mme Legault: Merci, M. le Président, merci, chers collègues. Comme femme et comme mère, je veux témoigner aux parents et aux familles de ces jeunes femmes toute ma compassion et ma profonde sympathie. La perte d'un enfant est une épreuve foudroyante, et l'extrême violence de la tuerie de la Polytechnique a soulevé et soulève encore, après toutes ces années, des sentiments de colère et d'indignation. 14 ans plus tard, la société québécoise ne doit pas oublier que ces jeunes filles sont mortes parce qu'elles étaient des femmes et qu'elles se destinaient à des carrières traditionnellement masculines. Elles incarnaient l'expression même que l'égalité entre les hommes et les femmes était devenue possible.

Au-delà de la commémoration de la perte de ces 14 jeunes vies, cet anniversaire du 6 décembre nous permet de faire un temps d'arrêt afin de réfléchir au phénomène de la violence à l'endroit des femmes et des jeunes filles de notre société. C'est également un moment opportun pour se rappeler qu'à chaque jour des milliers de femmes vivent dans la peur, sous la menace de la violence, ou meurent suite à des actes délibérés de violence dirigés expressément contre elles. C'est aussi l'occasion pour nous tous de songer aux mesures concrètes qui nous permettront de prévenir et d'éliminer toutes les formes de violence à l'endroit des femmes.

Nous savons tous que la violence faite aux femmes peut s'exprimer de différentes façons. Elle peut être physique, psychologique ou verbale. Elle est parfois et souvent insidieuse et sournoise. La violence est un rapport de domination. Elle constitue une prise de contrôle d'une personne sur une autre plus vulnérable. Selon des statistiques, M. le Président, près d'une femme sur trois au Canada est victime de violence tant physique que sexuelle de la part de son conjoint; plus de la moitié de ces femmes ont été grièvement blessées. Plus de femmes se sont rendues aux services d'urgence à la suite de violence conjugale que pour faire traiter des blessures résultant des causes suivantes réunies: accidents de voiture, vol et agression, et viol, M. le Président.

Le statut social, le niveau de revenus, la notoriété ne mettent pas les femmes à l'abri de la violence. Les femmes les plus jeunes sont les plus à risque d'être violentées. Les femmes âgées sont elles aussi en voie de devenir la cible de violence et d'abus de tout ordre. De plus, plusieurs d'entre elles font face à de nombreux préjugés lorsqu'elles demandent de l'aide et de la protection, ce qui est totalement inacceptable dans une société qui se veut civilisée.

n(11 h 10)n

Les conséquences de la violence ne sont pas les mêmes pour toutes les femmes, elles varient selon l'âge et le lien qui les unit à l'agresseur, selon la gravité et la durée des actes commis et aussi selon le soutien qu'elles reçoivent. Les facteurs de marginalité, d'exclusion, d'isolement et de pauvreté rendent d'ailleurs les personnes victimes de violence encore beaucoup plus vulnérables. En hypothéquant lourdement la vie, la violence limite aussi le potentiel de développement de toute une société.

M. le Président, c'est à nous, élus de cette Chambre, que revient la tâche de faire respecter les droits fondamentaux des femmes à leur intégrité et à leur sécurité. Il nous appartient d'en faire une responsabilité collective à laquelle doit être associée toute la population du Québec. Nous devons aussi, comme parlementaires, rappeler à la population du Québec le caractère intolérable et criminel des manifestations de violence contre les personnes et de la nécessité de dénoncer ces actes. Bien que le taux de dénonciation soit en croissance au Québec, tous sont interpellés pour que tout acte de violence soit dénoncé.

Il nous revient aussi, comme parents, d'inculquer à nos enfants dès leur plus jeune âge des valeurs d'égalité entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes. Cette responsabilité parentale m'apparaît primordiale comme mesure de prévention pour contrer la violence.

Le présent gouvernement entend faire toutes les alliances nécessaires dans le réseau public, paragouvernemental, associatif et privé pour atteindre trois objectifs: la prévention, et la sensibilisation contre la violence, et la protection des personnes.

Je désire d'ailleurs souligner le travail de tous les jours accompli par des groupes de femmes et remercier toutes celles et tous ceux qui interviennent sur le terrain auprès des femmes victimes de violence, que ce soit en les accueillant ou en leur apportant le support nécessaire et leur expertise. Je remercie particulièrement le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence et le CALACS, Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel.

J'invite aujourd'hui particulièrement chacun d'entre vous à joindre et à soutenir les associations qui luttent avec courage et détermination pour que cessent enfin toutes les formes de violence. Nous ne pouvons tolérer ni les gestes qui tuent ni ceux qui minent et grugent quotidiennement la sécurité et l'intégrité auxquelles ont droit tous les membres de notre société, qu'ils soient enfants ou adultes, femmes ou hommes. Merci de votre attention.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. le chef de l'opposition.

M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, cette date du 12 décembre 1989 s'inscrit, hélas, avec un certain nombre d'autres dates de l'histoire contemporaine où les gens se demandent ce qu'ils faisaient quand ils ont appris la nouvelle. Et, quand ça dure des années après ? ça s'applique à l'assassinat de John Kennedy, ça s'applique évidemment aux événements de Manhattan ? ça veut dire que ça les a marqués profondément. Et, dans le cas de la tragédie de 1989, je me souviens, moi, que j'ai appris la nouvelle avec ma femme. Nous étions ensemble au moment où cette nouvelle nous fut communiquée et nous avons été bouleversés comme tout le monde, et particulièrement par le fait que, elle et moi, avions eu nos diplômes universitaires sur cette montagne où l'horreur est arrivée. Cette montagne de l'Université de Montréal et l'École polytechnique, qui est un lieu de culte des valeurs spirituelles, des valeurs de réflexion, d'entraide, de science et de technologie qui font partie de ce qu'il y a de mieux dans la nature humaine, et soudain, dans ces mêmes lieux, se manifeste ce qu'il y a de plus horrible dans la nature humaine.

Comment se consoler devant une telle tragédie? Je me souviens de mon amie Thérèse Daviau qui a perdu sa fille, Thérèse Daviau qui s'est illustrée dans la politique municipale de Montréal puis qui a perdu sa fille dans ces événements. Et j'ai pu en parler plusieurs fois avec elle. D'ailleurs, elle est devenue une militante de la non-violence en général, mais de la protection des femmes en particulier. Et Thérèse Daviau ne s'est pas consolée, mais elle s'est mobilisée. Ce qui veut dire que ces personnes, ces jeunes femmes qui ont laissé leur vie ne l'ont pas laissée en vain. L'horreur, oui, mais l'horreur dont peut naître un mouvement positif et un mouvement qui empêche que de telles choses ne surviennent.

Et ce n'est pas de violence en général dont il s'agit, il faut bien le reconnaître. Plusieurs se sont mobilisés contre la violence en général, et c'est une mobilisation qui est un devoir de l'espèce humaine. Mais là c'est la violence faite aux femmes et spécifiquement aux femmes qui se préparaient à une vie réussie, d'égal à égal avec les hommes, dans des métiers comme métier d'ingénieur qui, traditionnellement, n'a pas toujours été aussi féminin qu'on l'aurait souhaité. C'était donc une cible. Alors, si c'était une cible, il faut que la réponse soit également ciblée et qu'elle déclenche et continue... et réconforte ceux et celles, et c'est une responsabilité d'homme autant que de femme, qui trouvent que la violence contre les femmes est un des fléaux de nos sociétés contemporaines. Et ce qui n'est guère encourageant, ou c'est une question de statistique ou une question réelle, on dirait qu'il y en a de plus en plus. Comment se fait-il que nous nous réjouissions des succès technologiques, des succès économiques, de la hausse du niveau de vie et que nous cheminions en même temps vers des attitudes aussi rétrogrades et aussi barbares, qui sont contraires aux fondements mêmes de la nature humaine?

Alors, il est important qu'à cette date de l'année notre Assemblée nationale, puisque les faits se sont produits sur notre territoire national... Mais il y a d'autres endroits au monde aujourd'hui où on fait cette même réflexion. Pour que le Québec devienne une société exemplaire en cette matière, s'il y a une statistique négative qui doit reculer, c'est bien celle de la violence faite aux femmes. Et, heureusement, il y a beaucoup de groupements qui sont mobilisés au Québec, la députée en a nommé quelques-uns dans son intervention. Mais, encore une fois, il faut insister lourdement qu'il ne s'agit pas d'une responsabilité de femme ou de groupe de femmes, il s'agit d'une responsabilité de société. Et hommes et femmes doivent s'appliquer, d'abord par la recherche, pour bien comprendre le phénomène. Comment une telle chose aussi absurde peut-elle survenir que la violence faite à quiconque, mais à une femme en particulier? Et, si l'on vient à cerner un peu mieux la nature et des motivations profondes de telles choses, on sera mieux en mesure de déclencher une lutte, qui, encore une fois, est une responsabilité fondamentale de la société québécoise. Exemplaire en bien des domaines de solidarité, notre société doit viser à devenir exemplaire aussi en ce domaine de respect élémentaire de la personne, les femmes.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le chef de l'opposition. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. C'est avec émotion aujourd'hui que je prends la parole au nom de notre groupe pour commémorer cette date, le 6 décembre, qui, tristement, dans l'histoire du Québec, est devenue une date qui n'est pas comme les autres dans notre société, société paisible, société qui... dans son histoire, dans ses traditions, dans la façon de vivre de ses hommes et ses femmes, notre société qui a toujours valorisé au plus haut point la tolérance, la place de chacun, qui a toujours voulu marquer au progrès... être marquée du progrès de l'égalité entre les hommes et les femmes. La journée du 6 décembre est arrivée... évidemment, sur le plan des images et des drames humains, a secoué l'ensemble de la société et elle est arrivée, en plus, en travers de plusieurs de nos convictions, des progrès dont on était fiers comme société.

n(11 h 20)n

Pour rappeler les faits, le 6 décembre 1989, un homme est surgi dans une salle de cours à l'École polytechnique, il a posé un premier geste horrible, il a séparé les filles des garçons, avant de se mettre à tirer à l'aveuglette et de se suicider. Le bilan: 15 vies. Un crime qui a été commis par une vision tordue développée de toutes sortes de façons, dont la société doit prendre acte, développée de toutes sortes de façons dans la tête d'un homme qui... parce que des candidatures de filles avaient été préférées à la sienne, pour toutes sortes de raisons se sont développées dans son esprit, dans une action aussi horrible que celle qui a été commise. Un geste donc qui visait spécifiquement les femmes et qui a de quoi faire frissonner encore aujourd'hui les femmes et les hommes qui nourrissent des ambitions légitimes pour leurs filles, pour leurs enfants.

Les événements de l'époque sont certainement, aujourd'hui encore, une source... Si elle est une source de tristesse à chaque année, elle demeure, par la tradition qu'on en a fait de le rappeler, de le souligner, demeure certainement un point d'ancrage dans l'action pour beaucoup de groupes de notre société. Et, là-dessus, je partage entièrement les réflexions et propos du chef de l'opposition sur le fait que, même si c'est les groupes de femmes qui se sont largement faits les défenseurs de ces causes-là, c'est une responsabilité de tous les groupes, de toutes les associations, de toutes les organisations politiques, sociales ou autres de la société, des hommes comme des femmes, de continuer à militer, à pousser, à se battre en faveur du progrès de l'égalité, du progrès de l'arrêt de la violence dans notre société, sous toutes ses formes, et particulièrement de la violence faite aux femmes.

Alors, je veux remercier aujourd'hui, en soulignant cet événement tragique, prendre un instant pour remercier toutes les personnes, des femmes, des hommes qui chaque jour apportent leur aide, apportent leur soutien, apportent leur énergie pour donner espoir aux femmes qui souffrent, pour donner espoir à ceux pour qui la violence, pour qui la peur ? un des sentiments les plus horribles qui peut exister ? pour qui la peur fait encore partie, malheureusement, aujourd'hui, du quotidien. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député Rivière-du-Loup. La parole est maintenant à la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, non seulement il est important, mais il est essentiel de commémorer le drame de Polytechnique, parce que, comme le dit si bien la Fondation des victimes du 6 décembre, il faut se souvenir pour agir.

M. le Président, elles étaient 14 jeunes femmes se donnant les moyens pour un brillant avenir, cultivant de nombreux espoirs. Elles symbolisaient la réussite et le droit pour les femmes d'étudier dans des domaines jadis réservés aux hommes. Elles étaient la fierté de leurs parents, des êtres qui les aimaient et de toute la société québécoise, qui souhaitaient avec elles la réalisation de leurs rêves et de leurs espoirs. Elles furent frappées à l'aube de leur vie, le 6 décembre 1989, par un tireur, Marc Lépine, qui leur refusait le droit d'étudier à la Polytechnique. Il ne tirait pas au hasard, il avait délibérément décidé d'éliminer les jeunes femmes de Polytechnique.

Pourquoi assassiner des jeunes femmes étudiantes dans un milieu non traditionnel? Parce qu'il considérait qu'elles avaient pris la place qui lui revenait. Et pourtant, elles ne prenaient que leur place. Elles avaient le même droit que les jeunes hommes qui étudiaient à Polytechnique. Leur destin tragique n'était pas leur destinée. Leur destinée était d'ouvrir des portes, de poursuivre au quotidien la longue marche des femmes pour l'égalité des droits.

Toute la société québécoise a frémi d'horreur avec les parents, les amis, les collègues, le personnel, la direction de Polytechnique. Pour nous tous, l'incroyable venait d'arriver chez nous, au Québec, dans une société pacifique, progressiste et se voulant égalitaire. Aujourd'hui, nous nous souvenons de toutes ces vies brisées, fracassées, volées, de la peine des familles, des amis, des proches qui est toujours vivante.

Ce jour-là, M. le Président, toutes les femmes ont ressenti la peur et constaté la fragilité de ce que nous croyons des acquis. Toute la société québécoise, hommes et femmes, se sentait impuissante devant cette tuerie imprévisible. Cet événement dramatique venait nous rappeler brutalement que nos acquis étaient illusoires. Nous prenions conscience que rien n'est jamais assuré dans cette longue marche de la reconnaissance des droits des femmes non seulement dans les lois, mais aussi dans les faits.

14 ans plus tard, nous pouvons nous questionner: Qu'en est-il maintenant? Depuis, la Fondation des victimes du 6 décembre s'est mise sur pied pour tenter de redonner espoir, soutenir financièrement des regroupements qui viennent en aide pour contrer la violence faite aux femmes. D'ailleurs, M. le Président, je souhaiterais rappeler certains propos de la réflexion présentée par la présidente, Mme Sylvie Haviernick, qui nous dit, qui nous précise sa pensée, sa réflexion cette année: «Qu'est-il arrivé depuis 14 ans, M. le Président? Depuis, au Québec seulement, plus de 600 femmes et enfants ont été tués par des hommes parce qu'elles n'étaient pas au bon endroit, au bon moment.»

«Tout comme vous, nous pensons que de parler ouvertement de la violence faite aux femmes, c'est déjà la combattre, d'en parler aux quatre coins de la planète, c'est la faire reculer partout, et qu'il est essentiel que chacun d'entre nous, hommes et femmes, prenne en compte les intérêts de celles qui ne veulent plus survivre parce que femmes, qui ne veulent plus mourir parce que femmes.»

La présidente dit, un peu plus loin: «Les phrases choquantes, j'en conviens, prononcées au début de ce texte, "600 femmes tuées par des hommes", ne vous atteindront plus de la même manière. Ce ne sera plus la voie de la honte, de la lassitude qui alimentera vos discours, mais celle du courage naturel de dénoncer les petits, moyens et grands gestes de violence.»

Depuis, aussi, M. le Président, un organisme est né en 1992, le FRONT, Femmes regroupées en options non traditionnelles, fondé en 1992, pour rassembler les forces, les expériences, le savoir-faire des étudiantes et des travailleuses et encourager la mise sur pied d'un réseau de femmes en emplois non traditionnels partout, dans toutes les régions du Québec. Évidemment, la Fédération des femmes du Québec s'est mobilisée au niveau national et au niveau international. Des regroupements des maisons de femmes violentées, les centres de femmes, Le CRAN des femmes pour la prévention, et, partout, l'action a continué.

Mais, parallèlement à cette action, M. le Président, je suis particulièrement troublée. Depuis plusieurs mois, certains regroupements masculinistes tiennent des propos haineux sur leur site Internet contre les femmes qui font et ont fait avancer l'égalité des droits des femmes. Effectivement, M. le Président, on a même retrouvé sur ce site un plaidoyer pour la réhabilitation de Marc Lépine, le tueur de l'École polytechnique. On considère que Marc Lépine n'était pas sexiste, qu'il est qualifié d'activiste des droits de l'homme, quoique extrémiste, M. le Président. Et ce mouvement-là, il n'est pas seulement au Québec. Des chercheurs féministes l'ont poussé un petit peu, et ce mouvement-là, il est très discret, insidieux, mais il sème des germes de violence envers les femmes. Et je pense sincèrement que, du côté de la Commission des droits de la personne, nous devrons regarder ensemble pour interdire ce genre de propos sur des sites qui ne font avancer personne, c'est évident.

D'ailleurs, je citerai le texte que j'ai pris de La Gazette des femmes, parce qu'il faut dire aussi tout le travail qui est fait au niveau du Conseil du statut de la femme et du Secrétariat à la condition féminine, et c'est Francis Dupuis-Déri qui disait: «Présentement, le féminisme est en procès. On essaie de nous faire croire que son but véritable était la haine des hommes. C'est comme si on nous disait que le mouvement Black et anti-apartheid des années 1970 était conçu pour promouvoir la haine des Blancs.»

n(11 h 30)n

Non, M. le Président, lorsqu'on se parle de féminisme, on se parle d'une égalité des droits entre les femmes et les hommes.

C'est pourquoi non seulement l'Assemblée nationale doit-elle réaffirmer haut et fort sa volonté d'agir, mais nous devons solidairement nous engager, n'accepter aucun recul des droits des femmes. Au contraire, il faut accélérer cette marche démocratique des femmes et de l'ensemble de la société québécoise en faisant de nouvelles avancées pour l'exercice des droits égalitaires des femmes dans les lois et dans les faits, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Et, tout simplement, peut-être avant qu'on aille plus loin dans nos travaux, vous me permettrez, au nom de la présidence, tout simplement d'exprimer le souhait le plus sincère que le Québec n'ait plus à connaître ce genre d'événement tragique dans son avenir.

Ceci étant dit, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Évidemment, M. le Président, la motion est adoptée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): La motion est adoptée évidemment et unanimement.

M. Dupuis: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement pour présenter un avis touchant les travaux des commissions.

Le Vice-Président (M. Sirros): Consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Dupuis: Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 30, Loi concernant les unités de négociation dans le secteur des affaires sociales et modifiant la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, poursuivra les consultations particulières à partir de maintenant, pour une durée de 90 minutes, et de 15 heures à 18 h 45, à la salle du Conseil législatif.

Motions sans préavis (suite)

Poursuivre les consultations
particulières sur le projet de loi n° 25

Je souhaiterais également, M. le Président, à l'étape des motions sans préavis, déposer la motion suivante:

«Que la commission des affaires sociales, dans le cadre des consultations qu'elle tient sur le projet de loi n° 25, Loi sur les agences de développement de réseaux locaux de services de santé et de services sociaux, entende les organismes suivants, lundi le 8 décembre, à la salle du Conseil législatif, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: 11 h 45, Solidarité rurale du Québec; midi trente, Ordre des infirmières; 16 h 45, Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec; 17 h 30, Association des groupes de défense en santé mentale du Québec; et, à 18 h 15, finalement, la Fédération CJA;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque personne et organisme soit de 15 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 30 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition.» Je vous remercie, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci. Cette motion est adoptée.

Alors, je suis prêt à reconnaître, toujours dans les motions sans préavis, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille. M. le ministre.

Souligner la Journée internationale des bénévoles

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de l'Assemblée pour déposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne, en ce 5 décembre 2003, la Journée internationale des bénévoles en saluant l'engagement et la contribution des Québécoises et des Québécois qui donnent généreusement de leur temps et de leur énergie pour améliorer la qualité de vie de leurs concitoyens et [...] concitoyennes.»

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement. M. le ministre.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. J'ai le plaisir évidemment de souligner la Journée internationale des bénévoles. Et, d'ailleurs, je salue les membres du Réseau de l'action bénévole du Québec, qui sont avec nous aujourd'hui, qui sont dans les galeries, avec nous. Et je veux souligner également l'engagement et la contribution des Québécoises et des Québécois qui donnent généreusement de leur temps et de leur énergie pour améliorer la qualité de vie de leurs citoyens et de leurs concitoyens et vous dire que, pour plusieurs, faire du bénévolat, c'est presque devenu, avec le temps, un emploi à temps plein.

Et plusieurs des questions qu'on doit se poser, c'est: que ferions-nous sans ces dizaines de milliers de bénévoles qui, partout au Québec, jour après jour, donnent aussi généreusement de leur temps, et plus particulièrement en cette période des fêtes où des milliers de bénévoles, partout, dans toutes les régions du Québec, dans presque toutes les communautés du Québec, se dévouent pour apporter un peu de réconfort aux gens qui vivent des situations de pauvreté, qui sont isolés ou qui sont démunis?

Au Québec, c'est environ 1,1 million de bénévoles qui consacrent en moyenne près de 160 heures de leur temps à diverses activités de bénévolat. Ces bénévoles, on les retrouve partout, leur engagement est constant et se fait de multiples façons. Et c'est pour cette raison que, pour eux, je tiens, au nom du gouvernement du Québec, à les saluer et à leur offrir toute notre gratitude pour ces gestes généreux qu'ils posent quotidiennement.

Et j'ai eu hier le plaisir de lancer la période de mise en candidature du prix Hommage Bénévolat-Québec qui sera remis le printemps prochain à ces bénévoles qui oeuvrent partout, dans toutes les régions du Québec. Et je profite de l'occasion pour inviter tous les parlementaires, inviter tous les parlementaires de l'Assemblée nationale à faire connaître les gestes bénévoles posés dans leurs régions, dans leurs communautés par ces organismes, parce qu'on a la chance, comme députés, comme parlementaires, de faire beaucoup de visites dans nos comtés, de rencontrer beaucoup de ces gens, et parfois nous devons et nous avons la responsabilité de les mettre en évidence et de les souligner.

Parce que, normalement et, je dirais, en très grande majorité, ces bénévoles sont des gens très humbles, des gens qui ne font pas ça pour recevoir des prix, des honneurs, des hommages, mais le prix Hommage Bénévolat-Québec est une des plus belles occasions de les récompenser et de mettre en lumière ces heures de travail qu'ils donnent à leur communauté. Et c'est pour cette raison que je crois fermement que nous devons tous et toutes, dans l'Assemblée nationale mais aussi dans nos communautés, mettre en lumière le travail et les efforts que font ces bénévoles.

Et, depuis le printemps dernier, les orientations gouvernementales en matière d'action bénévole sont mises en oeuvre sous la coordination du Secrétariat à l'action bénévole et communautaire autonome du Québec, et ces orientations visent bien sûr à appuyer les initiatives qui émanent des milieux bénévoles et de répondre aux défis qu'ils rencontrent notamment au sein du recrutement, de la formation et de la concertation.

Et je veux ouvrir une parenthèse sur le recrutement, parce que, pour plusieurs, comme je le mentionnais, faire du bénévolat, c'est un travail presque à temps plein. Et, parfois, ça fait peur à ceux qui ont envie de commencer à faire du bénévolat parce qu'ils disent: J'aimerais ça donner seulement quelques heures, mais, si je commence, est-ce que je vais être capable d'arrêter? La réponse qu'on doit leur donner, c'est: Non, vous ne serez pas capable d'arrêter. Par contre, vous pouvez contrôler bien sûr le nombre d'heures que vous y mettez. Et je vous invite tous et toutes à relever ce défi qui est si valorisant et qui fera en sorte que vous connaîtrez de nombreuses expériences, connaîtrez de nouvelles personnes. Et, parfois, ce sont des groupes et des milieux où se forment de belles amitiés et où, finalement, plusieurs personnes réunies autour d'objectifs communs en viennent à faire avancer leur communauté et leur municipalité.

Je veux aussi souligner la mise sur pied du Réseau de l'action bénévole du Québec dont les activités sont lancées officiellement ces jours-ci et qui regroupe près d'une quinzaine d'associations et qui rejoint des centaines de milliers de bénévoles. Le gouvernement du Québec soutient financièrement la mise sur pied du Réseau, avec qui nous saurons entreprendre des actions qui répondront aux besoins des bénévoles et des organisations qui les soutiennent.

En terminant, je tiens encore une fois à remercier les bénévoles de partout au Québec qui, chaque jour ? chaque jour ? dans leur communauté, posent des gestes qui font une réelle différence, qui font une réelle différence dans la vie des gens, dans la vie des gens parfois les moins fortunés, les plus démunis de nos communautés. Et, bien sûr, je veux saluer particulièrement ceux et celles qui oeuvrent dans mon comté, dans Kamouraska-Témiscouata, et qui, chaque jour, dans chacune des 37 municipalités, rendent la vie de nos concitoyens et concitoyennes plus belle. Ne lâchez pas, nous avons besoin de vous, et nous avons besoin de vous pendant encore longtemps. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le ministre. La parole est maintenant à la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. Moi aussi, j'aimerais joindre ma voix pour souligner, en ce 5 décembre, la Journée internationale des bénévoles en soulignant leur engagement et leur contribution dans notre société. On ne le dira jamais assez, M. le Président, aucune société moderne et dite civilisée ne pourrait se passer de leurs bénévoles, compte tenu de l'apport aussi important. Ils sont partout, ces gens, ils sont vraiment intégrés dans notre société, et, je me répète, M. le Président, il serait impensable de penser nos sociétés, à l'heure actuelle, sans leur apport.

n(11 h 40)n

L'action bénévole a plusieurs définitions, mais j'aimerais vous donner une définition que nous avons... Lors des orientations gouvernementales en matière d'action bénévole que nous avons mis de l'avant en 2001, nous avons, de concert avec l'ensemble des organismes et des groupes bénévoles... on s'est mis d'accord sur une définition. Et, pour ce qui nous concerne, en ce qui concerne les orientations gouvernementales, l'action bénévole est, pour nous, une place qui occupe une place importante au Québec. Elle se déploie de façon distincte et autonome en complément de l'action des milieux professionnels. Son activité est portée par des individus ou des groupes agissant de leur propre initiative et sans perspective directe de rémunération en vue d'apporter des solutions et une aide pour répondre à un besoin de leurs collectivités. Et c'est avec une très grande générosité que ces gens donnent de leur temps auprès de ceux qui sont plus défavorisés dans notre société et qui ont vraiment besoin d'un support, que ce soit un support moral, que ce soit un support physique, que ce soit un support d'ordre affectif. Ces gens-là sont présents constamment, par leur chaleur, par leur compréhension, par leur compassion, à aider des gens, dans des moments difficiles, à faire le passage dans leur vie pour qu'ils puissent au moins pouvoir envisager des jours meilleurs.

C'est en 1901, M. le Président, que l'Année internationale des bénévoles a été décrétée par l'ONU. Le gouvernement du Parti québécois, à ce moment-là, publiait la Déclaration nationale sur l'action bénévole. En 2000, on déclarait plus de 19 % d'adultes de plus de 15 ans qui avaient réalisé des activités d'entraide directe ou de bénévolat au sein d'organismes ou d'associations dans des milieux aussi variés que les services sociaux, de la culture, de la santé, dans le monde sportif, éducatif. Et, plus près de nous, en cette période des fêtes, je n'ai qu'à parler de l'Opération Nez rouge, M. le Président.

C'est donc dire l'importance... que ces gestes gratuits d'entraide sont porteurs de cette solidarité bien nécessaire dans notre société. Le développement social du Québec dépend de ces milliers de gens qui s'impliquent dans les organismes d'entraide. Les bénéficiaires de l'action bénévole au Québec sont démunis. Ce sont les personnes âgées, les handicapés, les déficients, les malades, les pauvres, et, en fait, ce sont des gens qui ont besoin du don de soi des autres, M. le Président. Les bénévoles sont ces gens qui donnent de leur temps, qui donnent de leur énergie pour rayonner de l'amour autour d'eux.

Les bénévoles s'impliquent autant dans des tâches administratives au sein des organismes communautaires que dans la prestation de services auprès de ceux qui en ont besoin. Malheureusement, la nécessaire implication des bénévoles se complexifie par plusieurs défis: complexification des problèmes sociaux qui entraîne le découragement et l'essoufflement des bénévoles. Les organismes, par le fait même, ont de plus en plus de difficultés à recruter de nouveaux bénévoles.

Cette situation, avec le gouvernement libéral, est loin d'aller en s'améliorant. Ils vivent d'incertitude en incertitude. Et, avec la réingénierie de l'État, on ne sait pas de qui relèvera l'ensemble des groupes communautaires et bénévoles. En premier lieu, les organismes communautaires n'ont toujours pas de réponse de la part du gouvernement quant à leur statut et quant à leur financement. Dans l'entourage des ministres, on ne parle que de réingénierie, de rationalisation et de coupures. Ce gouvernement préférerait peut-être moins de groupes communautaires pour envoyer moins de chèques.

Cette déresponsabilisation est également claire dans les projets du ministre de la Santé et des Services sociaux qui souhaite engager les organismes communautaires dans un processus de fusion forcée du réseau de la santé et des services locaux. Avec toute la loi n° 25 et la loi n° 30, c'est exactement ce vers quoi on se dirige, M. le Président, et c'est encore de l'incertitude que l'on fait vivre à des gens qui donnent de leur temps généreusement, d'une façon bénévole, M. le Président.

Le problème de recrutement de bénévoles dans les organismes ne se réglera pas lorsque le gouvernement aura réalisé sa réforme de la santé et que les organismes communautaires devront redéfinir leurs missions pour se conformer à des clientèles cibles et offrir les services comme les réseaux locaux l'auront décidé. L'action bénévole est plutôt basée sur l'engagement personnel d'une personne pour une cause qui lui est chère, non pas du travail à rabais pour l'État.

Plus que cela, avec le projet de loi n° 34, l'action bénévole perdra sa voix dans le développement de ces milieux, puisque la société civile est pratiquement évincée des lieux de décision régionaux. Présentement, les CRD regroupent au sein de leur structure décisionnelle non seulement des élus, mais aussi des bénévoles du secteur privé et public qui travaillent en partenariat au développement économique et social de leur milieu. Il semble que, pour le gouvernement, ces milliers de gens qui s'impliquent bénévolement pour le mieux-être de leurs concitoyens et concitoyennes pèsent bien peu dans la balance du pouvoir.

Et j'aimerais, M. le Président, en terminant cette intervention, féliciter, en fait, tous les récipiendaires qui ont reçu les prix Hommage Bénévolat du Québec, de l'édition 1903, tous qui sont des exemples dans notre communauté. À chacun d'entre eux, j'aimerais leur souhaiter, en fait, des voeux, pour 2004, des plus heureux et de continuer leur action. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole, au nom de mon équipe parlementaire, sur la Journée de l'action bénévole. Voici une définition du bénévolat: Action envers autrui que l'on exerce sans exigence de rémunération. On oppose parfois le bénévole au professionnel, ce qui est une faute, puisqu'un professionnel peut très bien s'adonner à des activités bénévoles. Seule l'absence de rémunération permet d'établir une telle distinction.

Le bénévolat au Québec est le pilier de bien des associations, organismes ou oeuvres d'entraide. Il est cependant aujourd'hui de plus en plus difficile de recruter, parmi les membres d'une association, des personnes désireuses de mettre gracieusement une partie de leur temps libre, de leur savoir et de leurs idées au service de la communauté. Peut-être s'agit-il d'un manque de temps, d'intérêt, d'égoïsme ou tout simplement de l'indifférence.

Par définition, le bénévole n'est pas un professionnel, reproche qu'on entend parfois, mais, quand il assume sa tâche de manière exemplaire, les rôles sont cependant complémentaires. Le bénévole n'est pas un exhibitionniste. Il n'est ni vieux ni jeune. Il se recrute dans l'environnement social proche: les parents, les amis, les membres d'un organisme ou d'une association, voire les jeunes retraités. On le rencontre dans toutes les couches de la population.

Le bénévole souhaite, dans la grande majorité des cas, voir des gens heureux autour de lui. Il est donc créateur de relations humaines, puisque son action est de rendre service. Ses qualités d'entraide lui permettent de s'oublier lui-même. Le bénévole met au service de la collectivité ses compétences et son imagination sans contrepartie financière. Son engagement volontaire fait appel à son plaisir de travailler avec et pour les autres en donnant régulièrement et pendant de longues durées, à sa volonté d'apporter une pierre à l'édifice du groupement pour lequel il s'est engagé, à son désir aussi de nourrir sa vie.

Notre société a des manques. Les associations, les services sociaux, les organismes n'arrivent pas ou plus à assumer un rôle d'action, de soutien, d'écoute, d'appui, d'encadrement, d'organisation et de partenariat. Les bénévoles sont donc sollicités pour pallier aux lacunes officielles, au manque de moyens financiers et pour répondre à des besoins non satisfaits. Tant qu'il en sera ainsi, leur rôle social est indispensable dans notre société.

Je voudrais remercier chaleureusement les femmes, et les hommes, et les jeunes qui, dès qu'ils ont un moment libre, s'impliquent dans la société québécoise par des actions bénévoles. Merci beaucoup. Sans vous, le Québec ne serait pas ce qu'il est. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. Mme la ministre déléguée aux Transports.

Souligner la 20e édition d'Opération Nez rouge

Mme Boulet: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin que soit présentée la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la 20e édition d'Opération Nez rouge.»

Le Vice-Président (M. Sirros): Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement, Mme la ministre.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet: Alors, M. le Président, il me fait extrêmement plaisir de souligner aujourd'hui la 20e édition d'Opération Nez rouge. Permettez-moi tout d'abord de saluer les gens présents dans les galeries: M. Jean-Marie De Koninck, président fondateur d'Opération Nez rouge; M. Gilles D'Ambroise, vice-président d'Opération Nez rouge; M. Daniel Lépine, directeur général d'Opération Nez rouge; M. Jacques Brind'Amour, président-directeur général de la Société de l'assurance automobile du Québec; et Mme Johanne St-Cyr, vice-présidente à la sécurité routière de la Société de l'assurance automobile du Québec.

n(11 h 50)n

Lorsque, en décembre 1984, M. De Koninck, accompagné des athlètes de son club de natation et de ses partenaires de la première heure ? et j'aimerais ici les rappeler, M. le Président: l'Université Laval, la station radiophonique CHRC de Québec, le Service de police de la ville de Québec de même que le Groupe Desjardins, assurances générales ? donc, lorsque M. De Koninck et ses partenaires ont fait cadeau de cette magnifique initiative à la population de Québec, ils ont sans contredit démontré que responsabilisation rime avec plaisir.

En effet, Opération Nez rouge est non seulement un partenaire de première ligne dans la lutte contre l'alcool au volant, mais c'est également un événement qui invite à la camaraderie, au bénévolat et qui permet à toute une communauté de se prendre en main pour offrir un service important dans la bonne humeur et le respect. En fait, ce qui distingue Opération Nez rouge depuis ses tout débuts, c'est son approche novatrice. En effet, le créneau qu'a développé Opération Nez rouge au fil des ans est à la fois unique et extrêmement mobilisateur.

D'ailleurs, M. le Président, des bénévoles de l'organisation remettront aujourd'hui à tous les députés de l'Assemblée nationale une bouteille d'eau aux couleurs de Nez rouge. Ces bouteilles d'eau sont en quelque sorte un rappel à tous les Québécois et Québécoises que la sobriété au volant a bien meilleur goût.

Dès ses débuts, la Société de l'assurance automobile du Québec s'est associée à l'approche originale de Nez rouge. Et, ce partenariat, c'est beaucoup plus qu'un investissement financier, c'est une histoire de coeur qui dure depuis près de 20 ans entre deux organismes qui ont un objectif commun: sauver des vies et ainsi éviter des tragédies humaines. Et, plusieurs s'en souviendront, il y a 20 ans, recourir à Nez rouge pour le raccompagnement était une exception. Aujourd'hui, c'est quelque 75 000 personnes qui se font raccompagner chaque année.

Il est clair, M. le Président, qu'Opération Nez rouge, ses bénévoles et ses nombreux partenaires des secteurs public et privé ont fortement contribué à sensibiliser la population. Elle a également permis que se développe et se maintienne un consensus social contre l'alcool au volant. En fait, Opération Nez rouge aura réussi le tour de force de sensibiliser l'ensemble d'une collectivité. En effet, aujourd'hui, les sondages indiquent que 97 % de la population désapprouvent la conduite en état d'ébriété. Bien enraciné dans les traditions du temps des fêtes, le recours à Opération Nez rouge est maintenant ancré dans les habitudes de toute une génération de Québécoises et de Québécois. En effet, les retours à la maison après les soirées de festivités ne sont plus les mêmes. Ce faisant, Opération Nez rouge a contribué à ce que toute nouvelle génération grandisse en considérant que conduire en état d'ébriété est un non-sens. C'est un exploit qui mérite toute notre estime et toute notre admiration.

M. le Président, il est également important de rappeler qu'au-delà du service de raccompagnement la mission de sensibilisation développée par l'équipe de Nez rouge a fortement contribué à créer un effet durable et permanent au sein de notre société avec la notion de conducteur désigné. Ainsi, aujourd'hui, bien des gens, et particulièrement les jeunes, s'abstiennent de conduire leur voiture après avoir consommé de l'alcool et ont recours au conducteur désigné afin de rentrer chez eux, et ce, tout au long de l'année.

J'aimerais ajouter également que le positivisme de Nez rouge rejaillit directement dans de nombreuses localités, puisque cette activité sert de financement à plusieurs organismes régionaux oeuvrant auprès de la jeunesse. En outre, la participation des bénévoles à la Tournée Intervention Jeunesse, une tournée axée sur la prévention auprès des jeunes dans plus de 200 écoles secondaires et établissements postsecondaires, démontre que Nez rouge dépasse les limites d'un simple événement ponctuel.

Il est également important de souligner que la logistique et la coordination nécessaires au bon fonctionnement d'une telle activité sont des éléments essentiels au succès d'Opération Nez rouge. En effet, il serait impensable de mener à bien toute cette opération sans l'implication exemplaire des quelque 30 000 bénévoles qui oeuvrent à Nez rouge chaque année. Depuis 20 ans, ce sont plus de 300 000 personnes qui ont consacré leur temps et leurs loisirs à cette importante cause. À toutes et à tous, je dis bravo pour votre merveilleux travail.

Opération Nez rouge, c'est donc, et pardonnez-moi l'expression, M. le Président, un «success story». Une preuve tangible de ce succès est que ce projet novateur a inspiré plusieurs initiatives semblables ici comme ailleurs, d'abord au Québec, où elle est présente dans plusieurs régions, et également dans six autres provinces canadiennes: le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Ontario, le Manitoba, l'Alberta et la Colombie-Britannique où elle a conquis la population et continue de prendre de l'ampleur.

Je profite donc de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui pour saluer les efforts passés, présents et futurs de tous ceux et celles qui sont devenus des ambassadeurs en sécurité routière dans toutes les régions du Québec, faisant ainsi bénéficier la collectivité québécoise de leur engagement.

En somme, souffler 20 bougies sur le gâteau d'anniversaire d'Opération Nez rouge équivaut à célébrer un effort d'équipe hors du commun, l'engagement de milliers de bénévoles et le bon sens d'autant d'utilisateurs du service. C'est également, M. le Président, applaudir le succès d'une initiative québécoise orientée vers la communauté et dont nous pouvons tous être extrêmement fiers.

Encore une fois, bravo et longue vie à Opération Nez rouge! Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la ministre. La parole est maintenant au député de Drummond. M. le député.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Merci, M. le Président. J'interviens, moi aussi aujourd'hui, pour souligner la 20e édition de l'Opération Nez rouge qui se poursuit jusqu'à la fin du présent mois, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre prochain, sous le thème 20 ans de Nez rouge, on est mûrs pour un p'tit dring! ? et non pas un p'tit drink.

Alors, je veux, moi aussi, M. le Président, saluer les représentants de Nez rouge qui sont ici et les représentants de la Société de l'assurance automobile du Québec et, en particulier, M. Jean-Marie De Koninck que je veux féliciter pour son initiative, puisqu'il est le président fondateur de l'Opération Nez rouge qui, le 13 décembre 1984, a mis en place un service ingénieux de raccompagnements qui, à ce jour, en a exécuté effectivement plus de 1 million. Et je suis convaincu que, il y a 20 ans, M. De Koninck ne pensait pas que le lancement de l'Opération Nez rouge allait donner naissance à un film qui s'annonce, là, comme étant un succès du cinéma québécois.

En 1984, Jean-Marie De Koninck est professeur de mathématiques à l'Université Laval, à Québec. Il est également entraîneur du club de natation de l'Université et cherche une façon originale de financer son équipe. Un jour de septembre 1984, au volant de sa voiture, il est frappé par les statistiques préoccupantes concernant la conduite automobile lorsque certaines facultés sont diminuées, que ce soit par l'alcool, la fatigue ou la drogue.

L'idée lui vient donc de faire appel à ses 25 nageurs et nageuses pour reconduire chez eux et dans leurs propres voitures les automobilistes qui auraient bu un verre de trop, par exemple. Le conte de Noël du petit renne au nez rouge guidant le traîneau du père Noël grâce à la lumière de son nez est alors choisi comme symbole de l'Opération Nez rouge.

Au Québec, cette idée a peu à peu été développée pour devenir une véritable campagne de sécurité routière. En 1990, après que l'idée ait été répandue dans d'autres provinces canadiennes, l'idée, entre autres, a traversé l'Atlantique et elle a été reprise, entre autres dans le canton du Jura tout d'abord, puis, progressivement, dans toute la Suisse.

Si l'Opération Nez rouge a su prendre de telles proportions, c'est qu'un nombre impressionnant de bénévoles ont sacrifié de leur précieux temps pour faire évoluer les mentalités. Par leur participation, ils ont veillé à ce que les gens qui ne se sentent pas en état de conduire confient leur voiture à un conducteur sobre, et, pour cela, il faut les en remercier et les encourager à participer encore cette année.

Je profite donc de la présente occasion pour faire, à la veille du temps des fêtes, un peu de promotion pour l'Opération Nez rouge. Il s'agit, M. le Président, d'un programme unique en son genre, un programme unique de prévention et de lutte contre la conduite lorsque certaines facultés sont affaiblies. Il s'agit principalement d'un service gratuit et bénévole de chauffeurs privés, offert durant la période des fêtes de fin d'année à tout automobiliste qui a consommé de l'alcool et qui ne se sent pas en état de conduire son véhicule.

n(12 heures)n

Le message diffusé par l'Opération Nez rouge est toujours demeuré simple, positif, sympathique et surtout non moralisateur: Avant de partir, téléphonez à un parent, à un ami, un taxi ou à l'Opération Nez rouge. Le caractère méritoire de Nez rouge est exceptionnel. C'est un service à la population, c'est un service qui contribue à la sécurité routière, c'est un service d'information et d'éducation à l'effet que l'alcool et le volant sont incompatibles. Et, en plus, des milliers de bénévoles s'impliquent au service de leurs concitoyens et concitoyennes. En plus, M. le Président, l'argent recueilli est redistribué à d'autres organismes s'occupant plus particulièrement de sports. Entre autres, chez nous, à Drummondville, les profits sont remis à l'organisme Drummondville Olympique, qui s'occupe de toute l'organisation des sports dans Drummond.

En 20 ans, d'une opération, qui a commencé à Québec, elle a su rayonner même à l'échelle internationale, mais surtout elle est devenue une tradition du temps des fêtes. Pour ses 20 ans, nous disons aux bénévoles de Nez rouge: Bravo, félicitations et merci. Et n'oublions pas les petits drings à Nez rouge tout au cours du mois de décembre.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député. M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

M. Marc Picard

M. Picard: C'est avec plaisir, M. le Président, que je prends la parole aujourd'hui pour souligner la 20e édition de l'Opération Nez rouge. Voilà donc une belle initiative de M. Jean-Marie De Koninck qui a pris forme pour la toute première fois en décembre 1984. Nous pouvons certainement dire que cette initiative a fait du chemin, car aujourd'hui elle est présente dans 23 villes canadiennes et dans certains pays européens comme la France et la Suisse.

Cette année, la 20e édition de Nez rouge, qui se déroule à compter d'aujourd'hui jusqu'au 31 décembre, nous rappelle encore à tous que boire et conduire ne vont pas ensemble. À cet effet, les années ont certainement permis aux Québécois et aux Québécoises de prendre conscience que conduire avec des facultés affaiblies peut avoir des conséquences très graves. Cependant, il faut se rappeler que l'alcool au volant demeure la première cause de décès sur nos routes, soit en moyenne 265 décès par année au Québec. C'est pourquoi il est important de poursuivre la sensibilisation, et, sur cet aspect, l'Opération Nez rouge joue un très grand rôle par ses campagnes publicitaires mais aussi par le service de raccompagnement qu'elle offre durant la période des fêtes.

Je ne pourrais passer sous silence le moteur même de l'Opération Nez rouge, soit les milliers de bénévoles. Par votre engagement à la sécurité des autres, vous contribuez de façon tangible à réduire le nombre de personnes conduisant en état d'ébriété et, du même coup, à modifier l'attitude et le comportement de la population face à ce sérieux problème. Votre travail exceptionnel fourni année après année assure une belle continuité à l'Opération Nez rouge. Je tiens donc à leur dire merci.

En conclusion, M. le Président, je me permettrais de faire le même souhait que le fondateur de l'Opération Nez rouge, soit que cette opération n'existe plus, qu'elle n'existe plus parce que la problématique de l'alcool au volant n'existera plus, parce que toute la population aura un comportement responsable lorsqu'ils consomment de l'alcool. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Sur cette même motion, M. le député de Saint-Laurent et leader du gouvernement.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Oui. Quelques mots seulement, M. le Président, parce que je voudrais rendre hommage particulièrement... D'abord, je veux saluer M. Brind'Amour, que j'ai connu dans une ancienne vie, il y a quelques mois, alors que j'étais critique de l'opposition et qu'il était au ministère. Je voudrais rendre un hommage particulier à M. De Koninck. Et le fait de sa présence aujourd'hui m'a permis de me rappeler à moi un souvenir que je voudrais partager avec lui. Je veux aussi le saluer de la part du ministre de l'Éducation, qui a été l'un de ses confrères de classe, me dit-il.

Je voudrais rappeler ? et M. De Koninck, lui, il ne s'en souvient pas, mais, moi, je m'en souviens très bien ? j'étais étudiant au Séminaire de Québec il y a un peu moins de 40 ans, et M. De Koninck était instructeur de l'équipe de natation au Séminaire de Québec, et je faisais partie de cette équipe. Je n'étais pas un membre très éminent de l'équipe, puisque j'ai fait partie de cette équipe pendant une année seulement. Et certains diraient que, puisque je suis devenu politicien, je suis un meilleur patineur que j'étais un meilleur nageur. Mais je me souviens de M. De Koninck, et il était notre idole, à l'équipe de natation.

Plusieurs années plus tard, lorsque j'ai réalisé qu'il avait fondé l'Opération Nez rouge, c'est en souvenir, et par respect, et en admiration de M. De Koninck que je me suis joint pendant quelques années à l'équipe des bénévoles de Nez rouge. J'ai donc fait l'Opération Nez rouge à titre de bénévole, bien sûr, et non pas à titre de personne qui a été reconduite chez elle. J'ai donc participé à l'Opération Nez rouge pendant plusieurs années, particulièrement lorsque j'étais procureur de la couronne à Québec.

Je veux inciter les gens qui nous écouteraient à joindre comme bénévoles l'Opération Nez rouge. J'y ai passé des nuits extraordinaires. Malheureusement, bien sûr, les heures auxquelles je convie les membres de cette Chambre nous empêchent, en général, de participer comme bénévoles à l'Opération Nez rouge comme élus. Cependant, si certaines personnes nous écoutent ce matin et souhaiteraient joindre l'équipe des bénévoles de Nez rouge, je les encourage fortement à le faire. M. De Koninck est là régulièrement, il le sait très bien. D'abord, on rencontre des gens qui sont fort heureux, joyeux quand on va les reconduire. Il y a peu d'incidents regrettables parce que les gens, en général, qu'on va reconduire sont... nous remercient...

Une voix: Reconnaissants.

M. Dupuis: Reconnaissants, merci. Merci beaucoup. Et aussi il y a une atmosphère, chez les bénévoles de Nez rouge, qui est extraordinaire. Alors, je tarde de retourner comme bénévole, M. De Koninck. Et je voulais lui rendre hommage particulièrement, c'est un grand Québécois.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi n° 33, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal, et le projet n° 23, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Que, d'autre part, la commission de l'agriculture procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: d'abord, le projet de loi n° 27, Loi sur l'aquaculture commerciale, et ensuite le projet de loi n° 28, Loi modifiant la Loi sur la protection sanitaire des animaux, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Qu'enfin, M. le Président, la commission des affaires sociales, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 25, Loi sur les agences de développement de réseaux locaux de services de santé et de services sociaux, poursuivra les consultations particulières lundi, le 8 décembre 2003, de 11 heures à 13 h 15 et de 14 h 30 à 19 heures, à la salle du Conseil législatif. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le leader du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'opposition.

M. Boisclair: Oui. Je comprends, M. le Président, c'est donc officiel, nous ne siégeons pas lundi?

M. Dupuis: M. le Président, je n'ai pas l'intention de convoquer la Chambre lundi.

M. Boisclair: ...qu'il soit su, M. le Président, que nous étions prêts à répondre à l'invitation.

Le Vice-Président (M. Sirros): Si tout le monde était prêt à répondre à l'invitation, je suis convaincu que les députés sont très heureux de la nouvelle qu'ils viennent d'apprendre. Et ça va leur donner...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Mais, M. le leader adjoint du gouvernement, je voulais tout simplement compléter ma pensée en disant tout simplement que ça leur donnera l'occasion de retourner dans leur circonscription rencontrer les électeurs. Et, dans ce sens-là, je pense qu'ils seront heureux d'accomplir leur travail correctement aussi dans leur comté.

M. Boisclair: ...M. le Président, là, que les députés ne sont pas heureux du tout, parce que les députés, ils savent qu'ils vont se faire imposer un bâillon, parce que les députés ont le goût de parler justement au nom des gens, des citoyens qu'ils rencontrent, puis ils auraient voulu siéger...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader...

M. Boisclair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader de l'opposition officielle, je parlais tout simplement en exprimant la volonté que, je suis certain, les députés ont de rencontrer leurs électeurs dans leur comté. Arrêtons ça là. Si vous avez trouvé la remarque de trop, je m'en excuse, mais j'exprimais tout simplement ce que je considère être une volonté que tous les députés ont de rencontrer...

M. Boisclair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je vais vous donner le droit de parole, M. le leader de l'opposition officielle, allez-y, mais je pense que j'ai été clair dans ce que je voulais dire.

n(12 h 10)n

M. Boisclair: Non seulement vous avez été clair, M. le Président, vous avez réitéré, vous avez, de votre siège, dit pour une deuxième fois que vous sentez une perception des députés, de la grande majorité des députés, qu'ils sont contents de retourner dans leur circonscription. M. le Président, ces commentaires-là, du siège du Président de l'Assemblée nationale, sont des commentaires inexcusables, parce que, de ce côté-ci, qu'il soit su que nous voulons siéger le plus longtemps possible, que nous sommes disposés à faire notre travail correctement, dans le respect des règles. Il y a un paquet de projets de loi qui ne sont même pas sortis de l'adoption de principe, on n'a même pas débuté l'étude en commission parlementaire. On apprend qu'on risque d'être bâillonnés le 15. M. le Président, nous aurions souhaité, lundi... souhaité, lundi...

Et des commentaires comme ceux que vous venez de faire, ils se font très bien des banquettes d'en face, mais, du siège du président de l'Assemblée nationale, ils ne sont pas corrects, et, M. le Président, je vous demande de le noter. Et je vous demande, M. le Président, de faire bien attention. Vous n'avez pas à interpréter, de votre siège, les intentions des uns et des autres. Vous êtes là pour faire entendre nos droits et nos voix, vous n'avez en aucune circonstance la responsabilité d'interpréter les voeux des députés. Et, si vous voulez le faire, notez que nous aurions souhaité siéger ici, nous aurions souhaité faire notre travail de législateurs, parce qu'il y a des gens qui parlent dans la rue, nous, on aurait aimé pouvoir parler dans le Parlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): J'en prends note. Ceci étant dit, nous allons faire la suite de nos travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: J'apprécierais, M. le Président, que vous appeliez, que vous preniez en considération l'article 21 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Pardon? L'article?

M. Dupuis: 21 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): À l'article 21 de notre règlement... Il y avait effectivement des renseignements sur les travaux, je m'excuse. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: M. le Président, j'aurais aimé demander au ministre de la Famille quand il s'apprêtait à... Le ministre de la Famille?

Une voix: Emploi...

Mme Vermette: Emploi, Solidarité. Quand s'apprête-t-il à déposer son plan d'action en matière gouvernementale sur l'action communautaire autonome, parce que, depuis octobre, il nous disait en novembre. Novembre, on est décembre...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je m'excuse. Les renseignements sur les travaux...

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Dupuis: Évidemment, les renseignements sur les travaux de l'Assemblée, c'est prévu dans le règlement, ne peuvent être demandés que sur des questions qui sont inscrites au feuilleton. Et, dans les circonstances, quoique la question de la députée... que je respecte la question de la députée de Marie-Victorin, mais, malheureusement, elle pourra poser cette question-là à la période de questions, la semaine prochaine.

Le Vice-Président (M. Sirros): Effectivement, M. le leader du gouvernement, vous avez raison, c'est prévu dans le règlement, c'est par rapport à un feuilleton qu'on fait des demandes de renseignements aux travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

Projet de loi n° 19

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Alors à l'article 21 du feuilleton, alors l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études. M. le ministre de l'Éducation.

M. Pierre Reid

M. Reid: M. le Président, le projet de loi n° 19 a été étudié les 11 et 26 novembre ainsi que le 1er décembre dans le cadre des travaux de la commission parlementaire de l'éducation. Ce projet de loi qui modifie la Loi sur l'aide financière aux études représente la première étape visant à rendre possible la modernisation du Programme de prêts et bourses.

Je désire profiter de l'occasion, M. le Président, pour souligner la précieuse collaboration de tous les membres de la commission, députés du gouvernement comme députés de l'opposition. Je tiens à remercier de façon particulière, M. le Président, Mme la députée de Taillon de sa contribution tout au long des travaux. Les échanges de vue positifs que nous avons eus ont été très fructueux, principalement en ce qui touche les règles d'application, les mesures qui découleront du projet de loi.

Les membres de la commission conviendront avec moi, j'en suis certain, que les travaux ont été l'occasion de confirmer l'aspect essentiel de la modernisation du Programme de prêts et bourses ainsi que de ses nombreux avantages pour la population étudiante. Depuis près de 40 ans, ce programme permet aux étudiantes et aux étudiants qui en ont le désir et le talent de poursuivre des études, et ce, même si les ressources financières sont insuffisantes. Tout au long de cette période, le programme a été constamment renouvelé pour s'adapter aux besoins évolutifs de la population étudiante.

Cette fois-ci, il fallait relever un défi important, celui de continuer d'améliorer les services de l'aide financière aux études. Cela ne pouvait se faire sans une intégration accrue des technologies de l'information et de la communication. À l'aide de ces technologies, les étudiantes et les étudiants du secondaire à la formation professionnelle, du collégial ou de l'université connaîtront le montant d'aide auquel ils auront droit le plus tôt possible. Ils recevront leur aide financière dès le début des cours et ils pourront gérer plus facilement leur budget.

Il fallait également relever le défi d'adapter le Programme de prêts et bourses à des réalités indéniables, comme l'offre de formation. Cette offre se renouvelle constamment pour s'ajuster aux demandes de la population étudiante, que ce soit pour lui faciliter le retour aux études, la conciliation des études et de la famille ou le maintien en emploi. Cela se fait d'ailleurs particulièrement sentir en formation professionnelle au secondaire, alors que des programmes d'études débuteront à tout moment de l'année.

Le projet de loi renferme un ensemble de mesures qui sont le reflet des nombreuses consultations qui ont été menées par l'Aide financière aux études depuis quatre ans auprès de représentants et de représentantes du milieu étudiant, des établissements d'enseignement et des établissements financiers. Je suis donc persuadé que la collaboration soutenue de tous les intervenants, chacun à leur niveau, procurera un succès réel à cette modernisation. Ils sauront faire en sorte que leurs efforts convergent vers un seul but, celui de consolider un des piliers du système d'éducation au Québec, le Programme de prêts et bourses.

Parmi les intervenants se retrouvent plus de 700 personnes du réseau des établissements d'enseignement, qui joignent quotidiennement leurs efforts à ceux du personnel de l'Aide financière aux études dans la livraison des services à la clientèle étudiante. Au total, ce sont au moins 1 000 personnes à travers le Québec qui soutiennent annuellement plus de 130 000 étudiantes et étudiants dans la réalisation de leurs projets d'études. Je lève mon chapeau pour tout ce beau travail d'équipe, M. le Président.

L'apport fourni dans les établissements d'enseignement et au ministère est formidable. La modernisation du Programme de prêts et bourses représentera pour eux un changement stimulant qui leur donnera une nouvelle motivation à poursuivre leurs efforts en matière de prestation des services à la clientèle. Ils pourront compter sur des outils performants pour les supporter dans leur travail afin qu'ils puissent simplifier, clarifier et accélérer les communications avec la clientèle étudiante.

Je tiens également à souligner la précieuse collaboration de nos partenaires des établissements financiers. Ils continueront de prendre une part active dans la nouvelle façon de remettre l'aide aux étudiantes et aux étudiants. Grâce à leur collaboration, l'aide financière pourra être versée de façon mensuelle, directement dans leur compte de banque. Plus que jamais, ils joueront un rôle important dans le financement des études, et je les en remercie.

Les efforts déployés par les intervenants donneront des résultats concrets, j'en suis certain. M. le Président, les services de l'Aide financière aux études et le Programme de prêts et bourses seront mieux adaptés aux besoins évolutifs de la population étudiante. L'équité entre les catégories de clientèles sera respectée et les acquis de ceux et celles qui vivent des situations financières plus difficiles seront préservés. À l'aide du projet de loi n° 19, la modernisation du programme deviendra une réalité. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Taillon et porte-parole de l'opposition en matière d'éducation.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous en sommes rendus à l'étape d'adoption du projet de loi n° 19, qui vise à modifier la Loi sur l'aide financière aux études. Je veux dire au ministre de l'Éducation, qui a déposé ce projet de loi sur lequel notre gouvernement d'ailleurs avait commencé à travailler, que nous sommes en accord avec les grandes lignes du projet de loi, notamment évidemment en ce qui a trait au meilleur contrôle que l'étudiant aura sur son budget, puisqu'on lui versera les sommes plus régulièrement. Et, en ce sens, je remercie le ministre d'avoir souligné notre contribution à la commission. Comme toutes les fois, il aura l'occasion de se rendre compte que nous pouvons travailler à bonifier les projets de loi, à les améliorer, à les mieux comprendre ensemble dans leur implication, entre autres, au quotidien.

Alors, ce projet de loi permet aussi de moderniser, d'actualiser l'aide financière aux études pour répondre aux besoins qui ont évolué, pour correspondre davantage à la réalité moderne, entre autres, en utilisant les techniques de communication électroniques. On sait que cela facilitera de beaucoup la vie des étudiantes et des étudiants. C'est, de fait, ce que nous souhaitons à tout point de vue, soit faciliter la gestion du prêt par l'étudiant lui-même.

n(12 h 20)n

Le ministre ne s'étonnera pas, cependant, M. le Président, que je lui rappelle que j'aurais apprécié qu'il tienne une consultation. En effet, nous sommes élus pour représenter la population et nous croyons qu'il est de notre devoir de nous assurer que les lois que nous présentons en cette Chambre correspondent aux attentes exprimées, aux besoins vécus par ceux et celles que ces mêmes lois touchent. Et de pouvoir entendre les premiers concernés, cela facilite la tâche des parlementaires par la suite.

D'ailleurs, je vous rappelle, M. le Président, que le gouvernement donne actuellement un bien mauvais exemple de ce qu'est l'écoute. Je pense aux projets de loi qui réorganisent la santé, la sous-traitance, les régions, les centres de la petite enfance. Je crois que la population ne se sent pas écoutée et encore moins, ce qui est plus lourd de conséquence, encore moins entendue. En ce qui concerne, en effet, l'ensemble de ces projets de loi, il est important de rappeler au gouvernement qu'il doit être le gouvernement de tout le monde, pas seulement celui des électeurs qui ont voté libéral. C'est son devoir d'État d'écouter tout le monde.

Je me permets de souligner un autre fait à cette Chambre, aux membres de cette Assemblée, et que j'ai souligné au moment où nous avons étudié le projet de loi. Certains projets s'étudient moins bien lorsque nous n'avons pas accès aux projets de règlement. Et je me souviens, il n'y a pas si longtemps de cela, que, lorsque j'ai eu l'occasion de présenter, comme membre du gouvernement, des projets de loi ici, à l'Assemblée, et en commission parlementaire, l'opposition réclamait alors et de façon systématique, réclamait que nous déposions le projet de règlement. Alors, maintenant que cette opposition forme le gouvernement, j'imagine qu'on pourra constater une certaine cohérence et que les projets de règlement vont nous être soumis au moment où nous adoptons la loi. Et donc, en ce sens-là, j'invite le ministre à être, la prochaine fois, prêt à présenter ses projets de règlement.

Pourquoi faire ça? Pas simplement pour le plaisir de dire: On veut avoir le projet de règlement. Parce que souvent la loi définit le principe, le grand cadre, mais c'est le règlement qui dit exactement comment va s'appliquer la loi et c'est le règlement souvent qui nous indique quel va être l'impact au quotidien sur ceux qui sont concernés par la loi. Et, dans le cas présent, ce sont les étudiantes et les étudiants. Je ne doute pas de la bonne foi du ministre ni de ses collègues qui nous ont présenté la loi telle qu'on a pu la comprendre ensemble et en adopter les différents articles, mais il reste qu'un éclairage apporté par un règlement aurait pu nous faciliter la tâche.

Nous avons eu certaines réticences à l'égard d'articles particuliers, notamment en ce qui concerne des définitions un peu vagues ? je pense à la définition des études à temps plein dans les universités ? des séquences dans les procédures qui n'étaient pas tout à fait au point et certaines dispositions rétroactives qui pourraient causer certains désagréments. On l'a discuté, certains amendements ont été retenus, d'autres pas, mais nous verrons, lorsque les règlements seront prépubliés, si nos craintes étaient justifiées ou non et nous verrons dans l'application de la loi, évidemment, ce qui mériterait éventuellement d'être corrigé.

Mais, dans l'ensemble, M. le Président, c'est un bon projet de loi et il devrait aller dans le sens d'une amélioration des conditions de vie et de la situation des étudiantes et des étudiants, et c'est ce que nous souhaitons. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, Mme la députée. M. le ministre de l'Éducation, votre droit de réplique.

M. Pierre Reid

M. Reid: Oui, juste quelques mots, M. le Président. J'ai bien pris note, effectivement, lorsque nous avons tenu la commission parlementaire, des souhaits de la députée de Taillon. Néanmoins, je pense qu'il est important de dire des informations que j'ai eu l'occasion de dire auparavant. Nous ne voulions pas retarder l'adoption du projet de loi pour être certains que nous puissions implanter cette nouvelle façon d'amener l'aide aux étudiants et aux étudiantes du Québec et, par ailleurs, nous savions que les étudiants ne demandaient pas d'être entendus de façon, disons, subséquente à leur consultation, à la consultation qui avait déjà été faite l'année dernière par le gouvernement précédent d'ailleurs.

D'ailleurs, les déclarations du président de la FEUQ à cet égard étaient très claires. Ce qu'ils souhaitent et ce qu'ils savent qu'ils vont faire, c'est de travailler au niveau du règlement lui-même, et ils auront le temps de le faire, et ils le savent parce que les étudiants du Québec, les associations d'étudiants du Québec sont présentes dans le Comité consultatif sur l'accessibilité aux études, qui est un comité, en fait un sous-comité du Conseil supérieur de l'éducation, donc très autonome, et que c'est vraiment à cette tribune-là que se discutent les éléments du règlement, qui sont ce qui intéresse le plus les associations étudiantes. Et, dans ce sens-là, je pense que les étudiants ont eu satisfaction. Et c'est tout simplement la précision que je voulais apporter, M. le Président.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le ministre de l'Éducation. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Sinon, est-ce que le rapport de la commission de l'éducation portant sur le projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: M. le Président, j'appelle...

Le Vice-Président (M. Sirros): En vertu de l'article 35, M. le leader de l'opposition.

M. Boisclair: Tout à l'heure, vous et moi avons eu une discussion sur de vos paroles, de vos propos que j'estimais inappropriés. Je comprends que vous vous êtes, d'une certaine façon, excusé et que je me suis bien fait entendre. Lorsque j'ai quitté, cependant, ce salon et que je vous ai croisé sur la droite, j'ai entendu quelques mots. Je n'étais pas certain de ce que j'ai entendu, mais ce que j'avais cru entendre, c'était «watch out», venant de votre bouche. Je me suis fait confirmer ces paroles par deux de mes collègues, qui, plus clairement que moi, l'ont entendu.

M. le Président, quand vous m'avez dit «watch out», que vouliez-vous dire? Quel genre de menace étiez-vous en train d'exercer à mon endroit? Quelles sont ces paroles dans la bouche d'un président de l'Assemblée nationale qui s'adresse à un collègue qui, dans le silence, quitte l'Assemblée nationale? Que vouliez-vous dire, M. le Président, par «watch out» comme menace au leader de l'opposition officielle?

Le Vice-Président (M. Sirros): Premièrement, je n'ai aucune intention de proférer aucune menace à qui que ce soit. Deuxièmement, quand, effectivement, vous avez quitté cette Chambre, ce n'était pas dans le silence, vous m'avez également adressé des paroles et des mots. Vous m'avez adressé des mots en me faisant indiquer que je n'avais pas agi correctement. Si j'ai proféré quelques mots, c'est tout simplement dans le sens de dire que c'était une affaire close pour moi. Je ne veux pas donner d'autre suite à cette affaire-là. Et, si vous avez véritablement des questions sur mon impartialité, je vous demande d'utiliser le règlement et de procéder comme vous savez que vous pouvez le faire. Quant à moi, cette question est close. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, j'apprécierais que vous preniez en considération l'article 22 du feuilleton.

M. Boisclair: Question règlement, M. le Président...

M. Dupuis: M. le Président, question de règlement aussi, alors...

M. Boisclair: ...question de règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Écoutez, là, je ne peux pas tenir deux questions de règlement à la fois. Je vous ai expliqué que, quant à moi, cette question est close. Je ne voudrais pas que vous reveniez sur cette question-là, à moins que vous vouliez le faire correctement, comme vous permet le règlement de le faire.

M. Boisclair: M. le Président, avant de faire une motion comme celle-là, vous comprenez toute la portée de cette nuance, si vous m'offrez vos excuses pour m'avoir dit, en passant, «watch out», cette affaire est close. Mais je vous demande...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement... M. le leader de l'opposition, je m'excuse...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader de l'opposition, je vous ai expliqué le contexte et de mon intervention première, qui n'avait aucunement l'intention d'attribuer quelque motif que ce soit aux députés autrement que le désir de rencontrer leurs électeurs, vous m'avez indiqué votre façon de percevoir cette question-là, j'en ai pris note. Vous avez quitté l'Assemblée par la suite en me réindiquant que je n'avais pas agi correctement. J'ai réagi en disant simplement, dans le sens de... Si j'ai utilisé des mots que je n'aurais pas dû, le sens de mon intervention était tout simplement de vous dire: Ce n'est pas nécessaire qu'on donne une plus grande importance à des choses qui n'avaient pas, manifestement, l'intention d'avoir ce genre de portée. Alors, quant à moi, cette question est close. Si vous voulez le poursuivre, faites-le selon le règlement. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: M. le Président, en vertu de 35.5°.

M. Dupuis: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, un instant. Un instant, parce que, manifestement... 35.5°. Paroles interdites et propos antiparlementaires: Le député qui a la parole ne peut attaquer la conduite d'un député, si ce n'est par une motion mettant sa question en conduite.

35.9°, auquel vous référez maintenant, prévoit qu'on ne peut pas adresser des menaces à un député. J'ai... Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

n(12 h 30)n

M. Dupuis: M. le Président, M. le Président, j'invite le leader de l'opposition officielle à faire preuve d'un petit peu plus de calme. Ce que j'ai compris de l'intervention est tout à fait clair. Il a fait une remarque suite au fait que j'aie indiqué que nous ne siégions pas lundi prochain, comme c'était son droit de le faire, d'une façon que j'ai trouvée plus ou moins habile, mais il l'a fait. Vous avez émis un commentaire qui était, selon ma connaissance, de bonne foi, qui a été fait de bonne foi et qui ne se voulait insultant pour aucun des membres de l'Assemblée nationale. Vous venez d'indiquer ce qui s'est passé. Le leader de l'opposition officielle a fait valoir son point de vue en ce qui me concerne, et je souhaite que ce soit terminé.

Il se plaignait, il y a quelques instants, du fait que nous ne siégions pas lundi. Nous siégeons aujourd'hui, il y a un feuilleton, il y a des projets de loi qui sont au feuilleton, le leader du gouvernement souhaiterait continuer les débats. En ce qui me concerne, j'invite le leader de l'opposition officielle à accepter vos excuses. J'ai compris que vous aviez fait des excuses. J'ai compris que vous aviez fait des excuses, et je l'invite à les accepter, ces excuses-là, et que le débat soit clos.

J'en fais une question de règlement pour la raison suivante. Il m'apparaît ? et c'est une opinion que je vous émets sur ma question de règlement ? il m'apparaît que cet incident clairement ne vaudrait pas qu'on mette en branle une procédure qu'on pourrait regretter, d'autant plus qu'il y a, à l'issue de cette procédure qui pourrait être intentée, évidemment l'article 322 qui peut s'appliquer, mais, moi, là, je ne voudrais pas qu'on entre dans ces débats-là. Je suggère donc que le leader de l'opposition officielle, qui a bien expliqué son point de vue, je suggère donc que vous, qui aviez bien expliqué votre point de vue, que tout cet incident-là soit clos et qu'on reprenne les débats le plus sereinement possible.

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader du gouvernement, c'est effectivement ce que j'essayais de faire. Alors, l'importance de l'institution pour moi est plus grande que mon orgueil. Alors, si c'est ce que le leader de l'opposition a besoin d'entendre, je m'en excuse s'il a interprété mes paroles comme étant des menaces. Mais je trouve manifestement qu'on a des travaux qu'on doit faire ici, et j'inviterais le leader du gouvernement de procéder à indiquer quelles sont les suites de ces travaux.

M. Dupuis: Alors, j'apprécie...

M. Boisclair: Juste un petit mot... M. le Président, en gentleman, j'accepte vos excuses.

M. Dupuis: Alors, j'apprécierais, M. le Président, que vous preniez en considération l'article 22 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 22

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, à l'article 22 de notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant la Loi sur les coopératives. Y a-t-il des interventions? M. le ministre du Développement économique.

M. Michel Audet

M. Audet: Merci, M. le Président. Alors, nous en sommes rendus à l'étape de l'adoption de la loi n° 22 portant donc sur les modifications à la Loi sur les coopératives. Je voudrais brièvement souligner les grands objectifs des modifications à cette loi, des modifications considérables de plus de 180 articles, fortement d'ailleurs parfois techniques et qui ont donné du fil à retordre à la commission, mais je le soulignerai tout à l'heure. Ça s'est fait dans un climat extraordinaire de bonne entente de part et d'autre de la table.

Les grands objectifs bien sûr de cette loi, c'est d'abord d'alléger, de faire un allégement réglementaire de ce secteur des coopératives. C'était une loi qui datait de 20 ans, qui n'avait pas été revue depuis, qui a été... et donc le ministère avait fait beaucoup de travail de consultation qui avait commencé d'ailleurs avant que le gouvernement actuel soit au pouvoir, qu'on a poursuivi depuis, et on est heureux du résultat, je pense, qui, encore une fois, nous a donné lieu à une loi modernisée et qui va comporter beaucoup d'allégement et également d'autoréglementation nouvelle de la part des principaux intéressés. Il y a beaucoup de réduction de paperasse également; c'était un des objectifs.

Donc, on revoit d'ailleurs autour de ça des éléments qui touchent nos grandes priorités, d'autres éléments également qui renforcent les coopératives, et, particulièrement également, donnent de nouveaux moyens aux fédérations de coopératives, tout en également rassurant et en donnant plus d'assurance aux coopérateurs et de protection à ces derniers. Donc, cette étude s'est faite dans le plus grand respect, de part et d'autre, et avec beaucoup, je dois dire... une approche très constructive de la part de l'opposition, je tiens à le souligner.

Je voudrais, évidemment, particulièrement remercier les équipes du ministère: mon sous-ministre Jean Pronovost; le sous-ministre associé aux politiques de sociétés d'État, Yvon Boudreau; les membres de la Direction des coopératives dont je voudrais souligner particulièrement la compétence, le dévouement et particulièrement dans ce travail très, encore une fois, technique, mais qui avait des conséquences importantes pour tout le mouvement coopératif. Donc, Mmes Lise Jacob, Guylaine Morin et Nathalie Latulippe, particulièrement.

Je veux souligner la grande collaboration du Conseil de la coopération avec qui nous avons été en consultation continue et avec lequel nous avons profité d'une excellente collaboration bien sûr, comme son nom le veut, mais particulièrement souligner le travail de la présidente, Mme Hélène Simard, de M. Michel Rouleau, le président du conseil d'administration. Les coopératives fédérées et l'ensemble du milieu coopératif s'est également investi beaucoup dans ce projet de loi, et je voudrais souligner que, même s'il ne touchait pas directement les coopératives financières, je voudrais même saluer le travail et la coopération également du Mouvement Desjardins à cet égard.

De plus, je me dois de mentionner le travail exceptionnel des membres de l'équipe parlementaire bien sûr et des députés libéraux qui ont participé à la commission parlementaire concernant l'étude détaillée de ce projet de loi n° 22. Je vais les nommer: le député de Roberval, qui est mon adjoint parlementaire; le député d'Arthabaska, vice-président de la commission; la députée de La Peltrie, le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, le député de Saint-Jean et le député de LaFontaine; et, évidemment, les membres de l'opposition officielle qui ont fait des commentaires et des interventions très constructives, bien sûr le député de Labelle, qui était critique en matière d'industries, la députée de Matapédia et le député de René-Lévesque. On me permettra de souligner également la participation très constructive du vice-président de la commission de l'économie et du travail, le député d'Arthabaska, qui, pour la circonstance, a présidé la commission.

Alors, en terminant, donc, je remercie donc l'équipe de mon cabinet pour leur étroite collaboration, leur travail assidu tout au long du processus ayant mené aujourd'hui à l'adoption de ce projet de loi. Merci beaucoup à tous ceux qui y ont collaboré.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le ministre. M. le député de René-Lévesque.

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, j'apporte ma voix à ce projet de loi. Alors, je confirme au ministre également que ça m'a permis de comprendre le milieu coopératif un peu mieux.

Alors, pour plus de précision, c'étaient 185 articles qui étaient assujettis à amendements. Je tiens à souligner le travail remarquable de tout le personnel qui a gravité autour du ministre au niveau du ministère du Développement, et, bien entendu, nous appuyons l'adoption du projet de loi n° 22. Merci beaucoup.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. Alors, est-ce que... Étant donné qu'il n'y a plus d'autre intervenant, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant la Loi sur les coopératives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: J'apprécierais que vous preniez en considération l'article 20 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 13

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Sirros): À l'article 20 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant la Loi sur les mines. M. le ministre des Ressources naturelles et des Mines.

M. Sam Hamad

M. Hamad: Merci, M. le Président. Je vous remercie de m'accorder la parole. Je le fais après que les parlementaires membres de la commission de l'économie et du travail aient étudié, article par article, le projet de loi visant à modifier la Loi sur les mines. Et, par la même occasion, j'aimerais remercier mon collègue le député de René-Lévesque pour son excellente collaboration lors de l'étude article par article, et c'était grandement apprécié.

Le projet de loi n° 13, en quelques mots, M. le Président, est un projet de loi qui va faire en sorte d'établir de nouvelles règles facilitant la gestion des titres miniers et d'ajuster certaines dispositions concernant l'implantation du régime de désignation sur carte. L'objectif que nous poursuivons est de maintenir et d'accroître l'attrait du Québec par rapport aux autres régimes miniers existant ailleurs en améliorant le mode d'acquisition du claim désigné sur carte.

n(12 h 40)n

M. le Président, il s'agit d'un projet de loi qui renferme beaucoup de dispositions techniques. Pour bien comprendre les assises de ce projet de loi, il faut savoir, M. le Président, qu'à l'automne 2000 la Loi sur les mines a fait l'objet d'une réforme majeure en introduisant notamment le concept de l'acquisition du claim par désignation sur carte à l'extérieur des parcs de jalonnement. Ces modifications majeures ont entraîné des nouvelles pratiques pour l'industrie minière et le ministère et, après quelques années de mise en oeuvre, il est apparu nécessaire d'apporter certains ajustements à la Loi sur les mines.

Aussi, ce projet de loi vise essentiellement à ajuster certaines dispositions concernant l'implantation du régime de désignation sur carte des claims et établit de nouvelles règles facilitant la gestion des titres miniers. M. le Président, les modifications que nous proposons à la Loi sur les mines ne changent en rien les principes qui servent d'assise au régime minier québécois, principes qui font toujours l'unanimité.

En conclusion, M. le Président, je vous dirai que ce projet de loi a fait l'unanimité en commission. J'invite maintenant les membres de cette Assemblée à en disposer de façon à améliorer le mode d'acquisition du claim désigné sur carte et ainsi accroître l'attrait de notre régime minier. M. le Président, merci. Chers collègues, merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de René-Lévesque.

M. Marjolain Dufour

M. Dufour: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je réitère au ministre l'appui par rapport au projet de loi n° 13. Je dirais que, après consultation au niveau de l'Association d'exploration minière, l'Association minière du Québec, les fonds régionaux, c'est un projet de loi, M. le Président, qui était en réforme, qui était commencé depuis plusieurs années. C'est un projet de loi qui fait consensus au niveau de tout le milieu. Alors, c'est avec plaisir, étant porte-parole de l'opposition officielle au niveau des mines et terres, que notre parti va appuyer le projet de loi n° 13 concernant le dossier des mines. Merci beaucoup, M. le Président.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. S'il n'y a pas d'autre... Oui. S'il n'y a pas d'autre intervenant, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant la Loi sur les mines, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Sirros): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, j'apprécierais que vous preniez en considération l'article 6 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 34

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Sirros): À l'article 6 de notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat, ajourné par le leader du gouvernement le 28 novembre 2003, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional. Et je serais prêt à reconnaître le prochain intervenant, qui serait le député des Îles-de-la-Madeleine. M. le député.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je veux intervenir sur l'adoption de principe du projet de loi n° 34. J'aurais aimé pouvoir parler avec autant de positivisme, je dirais, que mon collègue de René-Lévesque en ce qui concerne le dernier projet de loi devant nous, en ce qui concerne la prise en considération, mais vous comprendrez, M. le Président, que ça ne pourrait être le cas, puisque le projet de loi n° 34 est un projet de loi très important, car il aura des conséquences extrêmement importantes dans toutes les régions du Québec.

Essentiellement, pour rappeler aux gens en quoi consiste le projet de loi n° 34, c'est un projet de loi qui va modifier les structures, dans toutes les régions du Québec, les structures de concertation et de développement au niveau régional et au niveau local.

En ce qui concerne le niveau régional, essentiellement, on va abolir les CRD ou les CRCD, que nous connaissons maintenant, pour créer une conférence régionale des élus, qui aura à remplacer, à faire le travail que faisaient les CRD, essentiellement, les CRCD. Et on modifie donc les conseils d'administration de façon importante, aussi, en donnant une place prépondérante, majeure, aux élus et en excluant la société civile en bonne partie. Au niveau local, on va assister au transfert des CLD aux MRC. Donc, toute la responsabilité du développement économique local sera donnée aux MRC, et le CLD va relever directement de cette MRC, et le C.A. du CLD sera nommé par la MRC. Et, là aussi, on peut penser que ce sont les élus municipaux qui auront tous, tous les pouvoirs.

Alors, M. le Président, pour bien faire comprendre la position que nous prendrons et l'opposition que nous ferons à ce projet de loi là, je voudrais donner l'exemple des impacts de ce projet de loi sur une région que je connais particulièrement bien, puisque j'ai été le ministre responsable de la Gaspésie et des Îles pendant plus de quatre ans. Et je veux mettre en relief ce que nous avons réussi à faire avec la structure qui était là.

Et essentiellement, par cette démonstration, bien, je vais retourner la question aux gens du gouvernement, à la ministre responsable de la Gaspésie et des Îles maintenant, qui est la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme, députée de Bonaventure, qui connaît très bien ce qu'on a réussi à faire en Gaspésie avec la structure et lui demander: Pourquoi changer la structure pour une structure, alors qu'on avait quelque chose qui fonctionnait très bien? Je veux mettre en évidence, M. le Président, l'expérience du CRCD de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, puisque c'est peut-être, dans toutes les régions du Québec, l'exemple de réussite pour une région qui avait énormément besoin de soutien, d'appui, de concertation. Et je pense que nous avons démontré la pertinence des structures que nous avons.

Alors, malheureusement, M. le Président, je n'aurai pas le temps de faire tout l'historique, mais on sait que cette région du Québec, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, a été frappée de plein fouet par, d'abord, un moratoire sur le poisson de fond à compter de 1994, des modifications majeures au régime d'assurance emploi fédéral qui touchaient en particulier les travailleurs saisonniers, qui a permis, bien sûr, au gouvernement fédéral canadien d'économiser, d'engorger des surplus à l'assurance chômage qui lui ont permis d'éponger son déficit et qui font aujourd'hui qu'il peut se permettre, avec son pouvoir de dépenser, de faire à peu près ce qu'il veut, mais ça a causé des torts considérables à l'économie de la région de la Gaspésie et des Îles.

Alors, vous savez, M. le Président, ce que nous avons vécu en Gaspésie et aux Îles au cours des cinq dernières années fait en sorte que, lorsque je parle de ce qu'on s'apprête à faire aux structures que nous avions en place pour d'abord assurer la concertation du milieu, assurer les partenariats avec l'État, ça fait en sorte que j'en parle de façon presque émotive, et je dis «presque» parce qu'il faut garder en tête qu'on doit absolument, en tant qu'État du Québec, démontrer, pour les régions du Québec qui sont les plus en difficulté, autant de capacité de répartition de la richesse autant entre les citoyens du Québec qu'entre les régions du Québec. Et, lorsque nous avions... lorsque nous allions procéder à des annonces en Gaspésie et aux Îles et que nous avions derrière nous ce slogan Relançons la Gaspésie, justement, c'était plus qu'un slogan, et on le voit dans les résultats des effets qu'ont eus les programmes de relance de la Gaspésie et des Îles avec les taux de chômage, et ça continue encore maintenant.

M. le Président, le CRCD a connu des succès et possède aujourd'hui une très grande maturité. C'est, en plus, le fruit d'une longue concertation régionale, de planification stratégique, de plans de relance collés à la réalité des gens de la région, de mesures fiscales et de l'aboutissement de projets concrets pour le développement économique. Une des preuves de cette maturité qu'avait atteinte le CRCD de la Gaspésie et des Îles, c'est ce projet qui a réuni l'unanimité de tous les intervenants, c'est-à-dire ce projet de gouvernance régionale que nous avions finalement mis dans des papiers, élaboré et mis de l'avant lors du Rendez-vous national des régions qui s'était tenu il y a quelques mois à peu près, huit mois finalement, juste avant le dernier scrutin. Et jamais cette proposition de gouvernance régionale ne prévoyait l'abolition, bien sûr, du CRCD.

Alors, pourquoi abolir une structure qui fonctionne, qui donne des résultats? C'est uniquement une modification de structures, M. le Président, que propose Québec, que propose le gouvernement, et cette modification coûte cher, nous fait perdre du temps. On aurait été gagnants de consacrer ces sommes d'argent et ces énergies à développer de nouveaux dossiers, développer de nouveaux projets et faire en sorte que le développement régional continue à se faire.

n(12 h 50)n

J'aimerais aborder ce sujet, puisque c'est un des éléments-clés, finalement, de ce qu'on retrouve dans ce projet de loi n° 34, le fait qu'on donne le pouvoir très net à un petit groupe d'individus et qu'on exclut pratiquement la société civile des conférences régionales des élus. Ce fait est inacceptable. Nos structures de développement régional viennent de s'affaiblir. La représentation de la société civile dépendra maintenant de la bonne volonté des élus municipaux. Ce projet est indéfendable. C'est un recul pour la démocratie participative.

Le ministre du Développement économique et régional plaide qu'il faut faire confiance aux élus, que c'est ça, la démocratie, mais le ministre devrait réaliser ce qu'est la démocratie participative, devrait aller dans les régions du Québec pour voir que, lorsqu'on a autour de la table les gens des organismes de l'environnement, du développement communautaire, du tourisme, ces gens qui s'assoient pour élaborer des plans de développement, en concertation, ça, c'est la démocratie participative. Et c'est valable, et c'est une forme de démocratie qui permet de faire en sorte que les actions gouvernementales, que les gestes que pose le gouvernement, soit par des ententes spécifiques avec le milieu, sont des gestes qui répondent à des volontés, à des plans d'action, à des désirs qui viennent de cette population, qui viennent de ces organisations qui représentent des gens, qui représentent la population; et ça, ça s'appelle la démocratie participative.

Faire confiance aux régions, M. le Président, pour ce parti qui s'est dit, en campagne électorale, le parti des régions, ça signifie que faire confiance aux régions, ça signifie qu'il faut impliquer des gens du milieu, les autres forces vives régionales, avec bien sûr les élus. On n'a pas d'objection à ce que les élus municipaux même soient majoritaires, mais, de passer à une très faible minorité dans les conférences régionales des élus, c'est inacceptable.

En Gaspésie et aux Îles, dans cette immense région du Québec, on aura 16 personnes à la Conférence régionale des élus: 12 élus municipaux, quatre personnes représentant la société civile. Il y a deux ATR dans la région Gaspésie et les Îles. Quelle Association touristique régionale ? je pose la question à la ministre déléguée au Tourisme, responsable de ce dossier ? allons-nous retrouver sur les sièges pour exprimer les volontés et les désirs de développement de ces deux régions différentes au niveau touristique?

La même chose au niveau de l'environnement, M. le Président, puisque, de toute évidence, quand on regarde par exemple dans la forêt, bien, les problèmes qu'on rencontre au niveau de la forêt en Gaspésie ne sont pas les mêmes que ceux des Îles-de-la-Madeleine. Il n'y aura, pour défendre l'ensemble de la société civile de la Gaspésie et des Îles, que quatre personnes, alors qu'on en retrouve aujourd'hui, M. le Président, peut-être sept fois plus.

C'est un projet de structure, M. le Président. C'est un projet où on exclut même les gens d'affaires, les représentants des milieux de l'éducation, de la santé, du tourisme, de l'environnement, de l'agriculture, les jeunes, les femmes, les aînés. Salut! ce sont maintenant les élus municipaux qui décideront.

Le projet de loi no° 34 constitue un net recul pour le développement de la démocratie participative, puisque les intervenants régionaux ne sont plus du tout considérés à part égale et ne pourront participer de plain-pied au développement de leur région.

La députée de Bonaventure, qui a vu la démocratie participative en action dans sa région, dans son comté, que j'ai entendu dire, M. le Président, à chaque fois... et c'est peut-être normal parfois qu'il y ait de la partisanerie, mais j'ai moi-même entendu la députée de Bonaventure, à chaque fois qu'on l'interrogeait, dire: Bien, voyez, les péquistes, quand il y avait un problème, ils disaient: On va mettre en place une structure.

On peut comprendre ça. Peut-être que, quand on a des difficultés, parfois on regarde si une structure pourrait être adéquate pour répondre au problème. Peut-être même qu'il y en a trop, M. le Président; je suis prêt à reconnaître ça. Mais cette même personne qui disait cela arrive aux affaires et aux responsabilités et, comme solution au développement économique régional et local dans nos régions du Québec, elle propose de modifier des structures qui fonctionnent pour mettre d'autres structures. Vraiment, là, je pense qu'elle a un problème, M. le Président, et je pense que ce gouvernement a un problème, puisque, à chaque fois qu'on étudie un projet de loi, on s'aperçoit qu'il s'adresse et qu'il touche aux structures pour changer les structures. Quand les structures ne fonctionnent pas très bien... quand les structures fonctionnent, pensons à d'autre chose, parce que les structures seules ne suffisent pas, M. le Président.

Et qu'a fait ce gouvernement dans les régions? Il a coupé les moyens qu'on avait donnés aux régions du Québec en termes de crédits d'impôt, en termes de fonds de diversification, en termes de fonds de développement, il les a coupés dans son premier budget et maintenant il dit: Voilà la solution, changeons les structures, apportons des structures qui ne fonctionnent pas. C'est un projet de structurite aiguë, M. le Président, qui n'a rien en fonction ou en rapport avec les engagements de ce parti concernant les régions du Québec. Plutôt que de présenter un véritable plan d'action, M. le Président, pour soutenir le développement économique et régional, c'est un gouvernement qui joue dans les structures, qui abolit le Conseil régional de concertation et de développement. Ce gouvernement oublie un mot important, et ça s'appelle la concertation.

Il faut rappeler aussi, M. le Président, qu'il y avait eu un Rendez-vous national des régions, où toutes les régions du Québec avaient été conviées ici, à Québec, et les gens de l'opposition, à l'époque, étaient présents et avaient même reconnu la pertinence des démarches et des engagements, puisque c'était tout le Québec réuni dans un geste de démocratie peu commun, où l'ensemble des régions du Québec étaient présentes pour penser des façons d'aller plus loin dans le développement économique régional. Et on avait dit à ce moment-là... et nous étions engagés à aller plus loin, vers une possibilité pour les régions de décider du modèle qu'ils prendraient pour leur développement. Ça, ça s'appelle à la carte, et les libéraux ont repris ça, M. le Président. Qu'est-ce qu'il y a à la carte, puisque nous avions, en Gaspésie, décidé d'un modèle de gouvernance régionale qui est mis de côté pour une structure uniforme dans toutes les régions du Québec? La Mauricie avait montré la direction en se donnant elle-même, déjà en application, un modèle de gouvernance régionale. Salut, c'est uniforme, c'est mur à mur, avec moins de moyens, M. le Président.

Contrairement à ce que laissent entendre le ministre et la ministre déléguée au Développement, le projet de loi n'offre pas la décentralisation à la carte, puisque les régions se font imposer une législation rigide qui remet tout le pouvoir, en matière de développement économique, entre les mains des élus. M. le Président, pour en rajouter, comme si ce n'était pas assez, au niveau des CLD, le CLD vient de perdre son autonomie. Ces CLD avaient des conseils d'administration autonomes; maintenant, ils vont relever de la MRC et des élus. Quelle assurance aura l'entrepreneur qui a un projet auquel il tient comme à la prunelle de ses yeux, et il veut aller chercher des moyens pour développer son projet, quelle assurance a-t-il qu'il y aura étanchéité entre le monde municipal, entre les élus et les organismes qui doivent soutenir le développement économique et les organismes d'aide aux entreprises? Aucune garantie d'étanchéité, aucune garantie que son projet ne va pas passer, par exemple, à un ami des amis des élus municipaux qui sont en place. Aucune garantie.

En conclusion, M. le Président. En conclusion, je peux dire que l'on décrète en haut lieu de nouvelles structures sans véritable consultation de la base. On défait ce qui allait bien, qui avait le vent dans les voiles, qui était sur une lancée de reprise économique, et on devra remettre du temps sur les structures, la formation de nouvelles alliances, la redéfinition de qui fait quoi ? toute cette perte de temps et d'énergie est inacceptable ? au lieu de reconnaître ce qui va bien et d'injecter les moyens et les argents nécessaires, pas de structures, mais des projets concrets, viables, définis, définis par la région même grâce à la démocratie participative.

Ce qui me peine, M. le Président, ce qui me peine le plus dans le projet n° 34, c'est de risquer 20 ans d'efforts pour impliquer tout le monde d'une région à la recherche de solutions, pour développer de façon harmonieuse une région. En changeant ce qui va bien, ce qui réussit, ce gouvernement est en train de décourager au lieu d'encourager le succès. On valorise les structures au lieu de valoriser les gens. Et je pense que c'est devenu, M. le Président, plus on voit, plus ça avance, l'habitude de ce gouvernement de dire quelque chose et de revenir sur les engagements, de partir d'une prémisse pas tout à fait certaine et solide, des lieux communs, comme, par exemple, que la sous-traitance, si on permet, qu'on élargit la sous-traitance, comme s'il ne s'en faisait pas, que ça va créer des jobs au Québec. Quand on arrive dans le concret, quand on arrive dans le concret, on s'aperçoit que ça ne marche pas, que ce n'est pas certain, puis là on recule, comme sur 25, comme sur d'autres sujets, M. le Président.

En conclusion, M. le Président, non à tout le pouvoir aux élus municipaux. Je pense que c'est de l'improvisation et que, de toute évidence, les libéraux n'étaient pas prêts à prendre le pouvoir le 14 avril, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député. Étant donné l'heure, on va ajourner nos travaux à aujourd'hui, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 8)

La Vice-Présidente: Mmes, MM. les députés, bonjour. Veuillez prendre place. Alors, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant, le député de Johnson. M. le député, à vous la parole.

M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux de prendre la parole sur un projet de loi qui concerne le développement régional. Une partie de ma vie de professionnel a été consacrée justement au développement régional dans des structures qui fonctionnaient d'ailleurs très bien, et qui ont fait leurs preuves, et que nous voulons bouleverser maintenant.

Mon travail dans le développement régional a commencé dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie où, dans les années 1975, nous avons mis sur pied, grâce à l'intervention du CRD, de la conférence administrative régionale, de tous les intervenants qui se concertaient merveilleusement bien dans ces activités que nous faisions, que nous avions pour favoriser le repeuplement de l'arrière-pays du Bas-Saint-Laurent, pour concerter les gens dans différentes opérations... Vous vous rappelez, Mme la Présidente, c'est vrai que vous êtes relativement jeune, mais des gens, ici, se rappellent les opérations Dignité dans le Bas-Saint-Laurent où la population s'était mobilisée pour stopper la population qui quittait l'arrière-pays faute d'emploi et qui s'en allait vers les grandes villes comme Montréal et Québec, et parfois arrêtait à Rimouski.

n(15 h 10)n

Et, à cette étape, à cette époque-là, Mme la Présidente, les CRD existaient. Les CRD étaient composés en majorité de gens de la société civile. Il y avait aussi des élus municipaux, il y avait aussi des fonctionnaires qui participaient aux activités du CRD par le biais de la conférence administrative régionale. Et, grâce à ce merveilleux partenariat, grâce à cette concertation extraordinaire, nous avons mis sur pied des sociétés agroforestières, celle de la Matapédia qui est mieux connue, des groupements forestiers comme Rivière-du-Loup, le JAL, Auclair, Lejeune, Saint-Juste-du-Lac, un coin que vous connaissez peut-être, Mme la Présidente. Et nous avions à cette époque des structures de concertation, mais surtout des actions de concertation qui étaient tout à fait efficaces.

Par la suite, Mme la Présidente, je suis revenu dans mon pays natal, l'Estrie, et je me suis impliqué de nouveau dans le développement régional, dans différents organismes, et particulièrement pendant neuf ans et demi où j'ai été le délégué régional de ma région pour le gouvernement. Alors, j'avais mes bureaux avec le ministère des Régions, et nous travaillions de façon étroite avec toute la conférence administrative régionale. Et, avec le CRD, nous avons mis sur pied, grâce à une politique qui a été, vous le savez, mise en place par notre ami Guy Chevrette, qui n'est plus ici, la politique qui a créé les CLD, les CLE, cette espèce de merveilleuse concertation entre les chercheurs de l'emploi... les chercheurs d'emplois et les créateurs d'emplois. Et nous avions, pendant ces neuf ans et demi là, avec une structure qui fonctionnait merveilleusement bien, qui n'était contestée par personne, où tout le monde avait sa place selon le pouvoir qu'il représentait, une place de choix pour pouvoir faire la promotion de projets. Nous étions axés sur des projets, nous étions axés, Mme la Présidente, sur des réalisations.

Si vous allez en Estrie aujourd'hui, Mme la Présidente, et si vous demandez aux gens de l'Estrie comment ils ont vécu ces années-là de concertation, comment ils ont vécu ces années-là de pouvoir régional qu'ils se sont donné par le travail, parce qu'un pouvoir ça se donne par des lois, mais ça s'acquiert par le travail, par la concertation, et toutes les personnes que vous rencontrerez en Estrie, sauf peut-être quelques élus municipaux, vous diront: C'était la formule qui marchait bien, c'était une formule extraordinaire. Même les députés participaient activement. J'ai eu le bonheur de siéger d'ailleurs au CRD avec non pas le regretté député, puisqu'il est toujours bien vivant, mais enfin il est regretté parce qu'il n'est plus ici, Robert Benoit, député libéral, qui, avec moi...

Des voix: ...

M. Boucher: Oui, je suis fier, je suis fier, Mme la Présidente, que nos collègues, nos amis d'en face l'applaudissent, et je ne sais pas s'ils l'applaudiraient autant s'il était ici et qu'il leur dirait qu'il voterait contre le projet de loi n° 34. Parce qu'il est en désaccord avec ce projet, Mme la Présidente, parce qu'il bouleverse des structures dans lesquelles il a eu du succès, dans lesquelles il s'est impliqué, dans lesquelles il a réussi. Alors, Robert Benoit, qui était député libéral, a travaillé pendant toutes ces années-là avec moi et avec d'autres députés libéraux au bon fonctionnement du développement régional.

Alors, Mme la Présidente, j'ai fait toute cette mise en scène parce que je me dis que, quand une chose va bien, quand personne ne réclame autre chose que ce qu'il y a en place, pourquoi changer? Et je me pose une deuxième question, Mme la Présidente: Non seulement pourquoi changer, mais pour qui changer? Et je me pose une troisième question, Mme la Présidente: Et de quelle façon changer?

Actuellement, dans ma région, si on faisait une véritable consultation auprès de l'ensemble des élus, auprès des organismes paragouvernementaux qui y participent, auprès de la société civile en général, syndicats, hommes d'affaires, chambres de commerce, si on allait les voir, là, puis on leur disait: Écoutez, écoutez, là, on pense à changer des choses puis on ne sait pas trop pourquoi, là... Mais on a promis du changement, alors il faut en faire, comprenez-vous, il faut en faire. Alors, aidez-nous à en faire, parce qu'il faut bien rencontrer nos promesses. Enfin, on pense qu'on peut essayer de réaliser une promesse, parce que les derniers jours nous ont appris qu'on n'en réalise pas beaucoup, de promesses, du côté du gouvernement, on n'en réalise pas beaucoup, Mme la Présidente. Au contraire, on va à l'encontre des promesses qu'on a faites.

Encore hier, le premier ministre a dit qu'il ne réduirait les impôts que des familles avec enfants. Évidemment, son ministre des Finances l'a contredit aujourd'hui en disant: Non, non, non, non, pendant que le premier ministre est à Ottawa en train de se concerter sur une espèce de structure constitutionnelle, sans l'appui des Québécois, sans avoir consulté les Québécois.

Des voix: ...

M. Boucher: Il est à Terre-Neuve, je m'excuse. Il est à Terre-Neuve. Quand il s'en va là, des fois, on ne sait même pas où il va. Alors, Mme la Présidente, pendant que le premier ministre est...

Une voix: ...

M. Boucher: ...est ailleurs, justement, ailleurs... Enfin, tout le monde sait très bien que le premier ministre a des responsabilités qui peuvent l'emmener ailleurs, Mme la Présidente. Alors, si j'ai commis un impair diplomatique, je m'en excuse, hein?

Alors, pendant, donc, que le premier ministre disait justement hier qu'il allait baisser les impôts seulement des familles avec enfants, aujourd'hui le ministre des Finances dit: Non, non, non, non, nous allons réaliser notre promesse de 1 milliard. Évidemment, il ne dit pas à la population qu'il a déjà augmenté les tarifs, augmenté les impôts, augmenté un peu partout, de sorte qu'il a déjà une augmentation de 1 milliard de toute sorte qu'il va pouvoir redonner dans une baisse d'impôts à ceux qui en ont probablement moins de besoin d'ailleurs, Mme la Présidente.

Mais, ceci étant dit, personne, Mme la Présidente, si vous allez voir les gens de ma région, personne... Et pourtant, dans ma région, Mme la Présidente, il y a le premier ministre, la vice-première ministre, le ministre de l'Éducation, le whip en chef du gouvernement, le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est de ma région, qui pratiquait au Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke. Je ne comprends pas que ces gens-là qui ont le pouvoir ici, à Québec... D'ailleurs, du côté ministériel ou, enfin, du côté du Parti libéral, des fois, j'entends les mots «township power». Ça se dit, hein, ça se dit que... Mais, peu importe, Mme la Présidente, moi, j'en suis très heureux, hein, qu'on ait le premier ministre, la vice-première ministre, le ministre de l'Éducation, le ministre de la Santé, le whip en chef du gouvernement dans ma région, j'en suis très fier parce que ça donne à ma région un poids énorme au gouvernement. Et c'est important, le pouvoir, vous le savez, dans les grandes décisions qui doivent se prendre.

Mais, ceci étant dit, je ne comprends pas que ces gens-là qui forment le coeur du Conseil des ministres n'aient pas compris que la population de ma région n'en veut pas, de changement au niveau des structures de développement régional. La population n'en veut pas. Il y a seulement les élus du gouvernement actuel qui veulent des changements. Et je pourrais vous citer, Mme la Présidente, plein d'interventions de plein de monde dans ma région, qui disent: On ne sait pas quoi, on ne sait pas pourquoi, on ne sait pas de quelle façon, mais on n'en veut pas; ça va bien, on a une formule qui est formidable, et ça va très bien.

Mme la Présidente, évidemment, ceci étant dit, j'aimerais revenir au projet de loi lui-même et citer un peu les faits saillants qui sont autour de ce projet-là et pourquoi le gouvernement veut le faire, enfin ce qu'il nous dit, ce qu'on peut lire. Au niveau des CLD, par exemple, le gouvernement veut transférer des responsabilités du développement économique local aux MRC. On ne sait pas pourquoi. On sait qu'il y avait déjà des élus sur les conseils d'administration des CLD, on sait que c'est une formule qui marchait bien, puis là, tout à coup, on apprend que ça va être transféré aux MRC. Alors, le CLD, le centre local de développement, va relever directement de la MRC.

Les membres du conseil d'administration, Mme la Présidente, du CLD seront nommés par la MRC. Le conseil d'administration va comprendre, donc, des élus municipaux, en grande majorité, et pourra aussi comprendre des membres de la société civile ainsi que des députés. Notons que ces derniers sont sans droit de vote, comme c'est actuellement le cas, alors que, évidemment, à l'exécutif du CRD, ils étaient avec droit de vote. Ils ne le seront plus. Les députés, évidemment, on peut le comprendre, sont moins importants que les autres élus, ce sont des gens qui sont moins imputables, selon le gouvernement. Il y a une forme, un peu, de mépris par rapport aux élus gouvernementaux eux-mêmes dans cette directive-là qui vient du projet de loi, mais, enfin, c'est la vision du gouvernement.

Aucune garantie quant à la protection de l'implication de la société civile non plus. Or, on sait jusqu'à quel point la démocratie participative est très importante pour le développement social, politique, culturel d'une société; on sait jusqu'à quel point les démocraties électives ne suffisent pas à assurer une vie démocratique dans une société. Tout le monde sait ça. Et la société québécoise est particulièrement exemplaire à ce niveau-là: nous avons une société qui a été construite dans la concertation. Et le projet de loi, lui, met de côté et, même, risque de mettre de côté, au niveau des CLD, toute la société civile.

n(15 h 20)n

Au niveau des CRD, Mme la Présidente, on abolit les CRD, comme ça, alors que c'est une institution qui fonctionne bien, qui existe depuis des années, qui a été mise sur pied sous le régime libéral d'ailleurs, dans les années soixante-dix, vous vous rappelez, et on l'abolit, comme ça. Et les membres du C.A., je veux dire... Et on crée une conférence administrative régionale des élus dont la responsabilité sera d'établir un plan quinquennal et de signer des ententes spécifiques. Nous avions déjà des plans quinquennaux, nous avions déjà des ententes spécifiques, nous avions tout ça, et tout ça fonctionnait parfaitement bien.

Le conseil d'administration d'une conférence régionale des élus sera composée des membres suivants, Mme la Présidente: des préfets des MRC ? ils le réclamaient d'ailleurs, c'était les seuls à réclamer d'être là; les maires des municipalités locales de 100 000 habitants et plus.

En Estrie, il y en aura un, évidemment si sa ville n'est pas défaite, hein? Le maire de Sherbrooke n'est plus sûr du tout, maintenant, de pouvoir siéger au CRD, parce que probablement qu'avec la défusion forcée que nous amène le gouvernement, Mme la Présidente, Sherbrooke sera forcée de défusionner. Et, dans ce contexte, le maire de Sherbrooke pourra ne pas avoir sa place au conseil d'administration à cause d'une décision de son gouvernement, d'ailleurs lui-même qui est organisateur politique du député de Sherbrooke et premier ministre.

Les maires des villes-centres ? d'ailleurs, il y a des maires des villes-centres qui vont probablement aussi perdre ce statut-là; les maires des municipalités locales énumérées à l'annexe de la présente loi; des présidents d'arrondissement des villes de Montréal et de Québec.

La Conférence régionale des élus peut nommer à son C.A. des membres additionnels de la société civile, dont le nombre ne peut excéder celui correspondant au tiers de ses membres qui sont des élus municipaux. La Conférence régionale des élus détermine elle-même la durée du mandat de ses membres et s'ils ont un droit de vote. Imaginez-vous qu'on laisse à la bonne volonté des élus la décision qu'il y ait des membres de la société civile ? enfin, un pourcentage significatif ? et qu'ils aient le droit de vote, Mme la Présidente. Alors, vous comprendrez, là, pourquoi les gens de ma région sont étonnés et s'opposent farouchement à ce projet de loi. Les élus, je vous le disais tout à l'heure, vont avoir le droit de participer, mais sans droit de vote, aux délibérations du conseil d'administration de la CRE.

Il y aura maintien d'une enveloppe budgétaire régionale pour les ententes spécifiques seulement. Alors, des fonds qui peuvent venir pour d'autres types de... pour le développement régional ne seront plus là. Vous savez, Mme la Présidente, que la ministre déléguée souhaitait qu'il y ait 35 % de membres de la société civile. Mais ce matin, déjà, là, la Fédération des municipalités du Québec voulait qu'il n'y en ait pas plus que 25 %. Alors, ça commence bien, Mme la Présidente, le projet de loi n'est pas adopté, et déjà, là, les maires en veulent de moins en moins.

Les partenaires socioéconomiques. Mme la Présidente, faire confiance aux régions, c'est effectivement faire confiance aux élus bien sûr, mais nous n'avons jamais nié ce fait, en dépit de ce que laissent sous-entendre les libéraux. Nous sommes d'accord à ce qu'il y ait des élus au conseil d'administration du CRD, sur les CLD. C'est sûr que nous sommes d'accord. Il y en avait d'ailleurs déjà. Cependant, faire confiance aux régions, c'est faire aussi confiance aux élus scolaires, aux élus autochtones qui sont écartés, aux députés qui sont aussi, je le disais tout à l'heure, tout aussi imputables que les maires de municipalités. Faire confiance aux régions, c'est aussi choisir de garantir une place aux partenaires socioéconomiques qui s'investissent avec ardeur dans le développement régional et qui le font bien souvent sur leur temps de travail, qui le font bénévolement, Mme la Présidente.

Faire du développement régional, c'est impliquer les autres forces vives régionales, dont les organismes communautaires et d'économie sociale, les gens d'affaires, les représentants du milieu de l'éducation et de la santé, du tourisme, de l'agriculture, de l'industrie forestière, enfin de tous ceux qui sont impliqués et concernés par le développement régional, les femmes, notamment, et les aînés, les jeunes.

Le projet de loi déposé par le gouvernement du premier ministre constitue un net recul pour la démocratie participative, je le disais tout à l'heure. Puisque les intervenants régionaux ne sont pas tous considérés à parts égales, ils ne pourront participer de plain-pied au développement des régions. Ce projet de loi ne peut que démobiliser ces partenaires.

Mme la Présidente, j'aimerais vous citer un extrait d'un discours de Michel Venne, bien connu dans le milieu journalistique et politique, qu'il a prononcé récemment: «La reconnaissance d'un rôle à la société civile découle d'une préoccupation de répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État en leur faisant une place plus grande au sein du même processus de décision politique. Il s'agit de prendre les moyens pour reconstruire des liens entre les citoyens et les institutions, d'aménager des passerelles, de se mettre à l'écoute des préoccupations des gens. Il s'agit aussi de contrer le désengagement social, de combattre l'apathie des citoyens et leur indifférence face à la chose publique.»

Mme la Présidente, nous l'avons constaté d'ailleurs à la dernière élection, les gens ont tendance à se désintéresser de plus en plus de la chose publique parce qu'ils perdent confiance dans nos institutions. Les gens ont tendance à se désintéresser parce qu'on ne fait pas appel à eux, de moins en moins. Ce projet de loi vient consacrer cette tendance. On fait de moins en moins appel à eux dans le développement régional et dans l'ensemble des activités de l'État. Les gens se désintéressent, et c'est dangereux pour la démocratie. Or, la démocratie participative, l'implication des gens dans le développement régional notamment, vient contrer cette désaffectation-là de la démocratie élective, vient compenser. Et voilà qu'on accentue la tendance du désengagement des gens. Depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir, ces leaders socioéconomiques, qui représentent des milliers de citoyens dans chaque région du Québec, sont inquiets, inquiets et fortement déçus de ne pas avoir été consultés.

Et je vais continuer une citation, Mme la Présidente, de M. Venne: «Au lieu de travailler ensemble sans nier leurs divergences et leurs conflits, patrons, leaders syndicaux, organisateurs communautaires, artistes, étudiants et agriculteurs, au lieu de ça, le premier ministre a choisi un camp, il a choisi le camp de ceux qui sont déjà les plus puissants. Les autres, à ses yeux, défendent des intérêts corporatistes, et, au lieu de les inviter à sa table, il les incite à descendre dans la rue. Au niveau local et régional, le premier ministre est en train de tuer les réseaux et les forums de concertation qui incluaient les centres locaux de développement et les conseils régionaux auxquels participait la société civile.»

Mme la Présidente, le gouvernement est constant et fidèle à lui-même, il continue dans sa lancée, dans sa lancée, et je l'évoquais hier quand je disais qu'avec ce gouvernement les gros grossissent en plus petit nombre et les petits rapetissent en plus grand nombre. Et, aujourd'hui, on peut dire ceci, Mme la Présidente: Par ce projet de loi, ceux qui ont du pouvoir, les forts, se fortifient de plus en plus en plus petit nombre et, Mme la Présidente, ceux qui ont moins de pouvoir, les plus faibles, les plus faibles, madame, s'affaiblissent en plus grand nombre. Voilà le résultat de ce projet de loi, Mme la Présidente, et je voterai évidemment contre, avec l'ensemble des gens de ma région. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Saint-Maurice, à vous la parole.

M. Claude Pinard

M. Pinard: Alors, merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, il me fait plaisir, en ce vendredi après-midi, de prendre la parole en cette Chambre sur un projet de loi excessivement important pour les régions du Québec. Je dis excessivement important pour les régions parce que, depuis quelques années, les régions du Québec avaient réussi véritablement à se prendre en main et à connaître un développement qui était rapide selon les régions. Certaines débutaient, certaines commençaient à se prendre en main, tandis que d'autres qui avaient déjà depuis plusieurs années ? notamment la Beauce a toujours été le phare pour l'ensemble des autres régions du Québec ? tandis que d'autres régions avaient déjà cette façon de faire, cet esprit d'entrepreneuriat, cette concertation, et les résultats étaient probants dans certaines régions. D'autres régions, c'était beaucoup plus difficile.

n(15 h 30)n

Je crois que je peux cet après-midi vous livrer un peu le témoignage d'un député qui, avant d'être député, a eu à s'impliquer très activement dans les différents organismes de sa région, de sa ville, au niveau politique, au niveau social, au niveau économique. Je me rappelle fort bien, Mme la Présidente, que, en 1985, lorsque j'ai adhéré à la mairie, nous avions sur le territoire du Centre-de-la-Mauricie trois villes distinctes, je dis distinctes, oui, parce que légalement c'étaient trois villes différentes: la ville de Grand-Mère, la ville de Shawinigan et la ville de Shawinigan-Sud, une belle banlieue de 12 500 habitants. Une ville distincte de par ses budgets, une ville distincte de par sa fonction publique, une ville distincte de par ses citoyens, par ses organismes et son organisation interne. À l'époque, chacune de ces trois villes, Mme la Présidente, avait son commissaire industriel, chacune de ces trois villes, également, avait son parc industriel et chacune de ces trois villes essayait dans la mesure du possible de quérir des entreprises à gauche et à droite pour bien vouloir venir meubler leur parc industriel. Alors, souvent, ça se transposait par une lutte, je dis une lutte interne parce que c'est une sous-région qu'est le Centre-Mauricie, mais par une lutte qui faisait mal, parce que souvent, face à trois dépôts de propositions, l'industriel, le promoteur, voyant qu'il pouvait créer une certaine zizanie à l'intérieur de la sous-région, préférait adhérer à une quatrième proposition qui venait de l'extérieur et souvent des deux grands pôles attractifs que sont Montréal et Québec.

Nous avons été suffisamment lucides, Mme la Présidente, pour créer une corporation de développement économique, une corporation de développement économique qui réunissait à ce moment-là les principaux intervenants industriels, les principaux intervenants économiques, mais également les principaux partenaires politiques que constituaient d'abord les villes, mais également la Chambre de commerce, également le monde de la finance, mais surtout les industriels.

De cela, année après année, nous avons établi des relations de plus en plus intimes, mais des relations de plus en plus cordiales entre les différents partenaires municipaux, et c'est ainsi que graduellement nous avons adhéré, si vous voulez, à une organisation qui nous a été soumise par le gouvernement du Québec à l'effet de créer des pouvoirs à la fois régionaux et à la fois locaux. Régionaux, parce qu'on convenait tous qu'il fallait absolument qu'on ait un organisme qui soit en mesure de prendre des décisions où l'ensemble des sous-régions de la belle Mauricie ? du Centre-du-Québec à l'époque ? prenaient ces décisions pour le mieux-être de l'ensemble de la collectivité, surtout lorsqu'un dossier pouvait toucher une, deux ou trois sous-régions.

Nous avons plaidé à ce moment-là ? je me rappelle fort bien ? nous avons plaidé à ce moment-là qu'il fallait d'abord et avant tout que le développement économique, que la porte d'entrée devait être les CLD, les conseils locaux de développement. Mais qui faisait partie de ces conseils locaux de développement? Nous retrouvions à ce moment-là les gens qui composaient antérieurement les corporations de développement économique, les gens qu'on allait quérir au niveau de la chambre de commerce, au niveau des PME, au niveau de la grande industrie, au niveau également social. Nous avons intégré ces gens, en ayant, bien entendu, une place pour le monde municipal et scolaire.

Or, graduellement, nous avons tout simplement transposé une structure existante, que nous avons essayé d'améliorer, et, chez nous, ça l'a donné un résultat très, très probant, un résultat qui a fait en sorte de faire cesser les luttes fratricides entre trois villes qui avaient les ressources, qui avaient le pouvoir financier, qui avaient chacune son parc industriel, mais là on créait un élan où ensemble, avec les gens socioéconomiques, avec nos partenaires sociaux, on faisait en sorte de faire avancer notre sous-région, le Centre-Mauricie.

En même temps, il y avait là aussi la formation d'un conseil régional de développement, un conseil régional qui devait être l'endroit propice, l'endroit par excellence pour... comme lieu de discussion, comme lieu de ralliement, comme lieu où la convergence des idées pouvait se faire. Et là les tables sectorielles s'installaient, la table de l'agriculture, la table de la forêt, la table de l'industrie, la table du tourisme, la table de la santé. Nous avons connu ce phénomène.

Bien entendu, la création de ces différents organismes, en plus d'être financée à la fois par les villes, était aussi financée par le gouvernement du Québec, dans sa politique de développement des régions. Et ces budgets d'opération étaient également assortis d'un budget d'investissement, et c'est là que nous avons retrouvé, par exemple, les FLI, fonds locaux d'investissement, le fonds d'économie sociale. Et ça, c'est localement, au niveau des CLD, mais, au niveau régional, nous retrouvions aussi des ententes qui étaient signées entre la région et les différents ministères du gouvernement du Québec.

Alors, Mme la Présidente, en politique, il faut être patient, et je pense que, dans le développement économique, il y a patience également. Lorsqu'on met en place une structure, il faut dompter cette structure, il faut se l'apprivoiser, il faut l'apprivoiser. Il faut que cette structure devienne le véhicule de tous les acteurs de la collectivité. Ce n'est pas facile. C'est long, c'est long; c'est énormément de discussions, c'est des soirées de rendez-vous, de rencontres, des fins de semaine de colloques. Qui n'a pas fait ça ici, là, parmi nos membres? Tous ont participé, j'en suis persuadé, à ces innombrables rencontres. Mais ces rencontres ont débloqué sur des instruments qui étaient des instruments adaptés à chacune des régions ou encore des sous-régions. Le CLD de Montréal n'a aucune espèce de point de comparaison avec celui, j'en suis persuadé, de Saint-Georges de Beauce ou de Shawinigan. Celui de Sept-Îles ne ressemble en aucune façon à celui d'Orford, de Granby.

n(15 h 40)n

Alors, oui, il y avait cette petite couleur locale, mais une couleur locale qui faisait en sorte que chacun des individus qui travaillait à l'intérieur ? je ne parle pas des permanents, je parle des bénévoles qui donnent temps, dévouement ? s'était identifié et se l'était approprié, le CLD, et également au CRD.

Mais je vais terminer mon retour en arrière, Mme la Présidente, parce que, nous, nous avons vécu, à l'automne 2002, ici même, à Québec, au Centre des congrès, un rendez-vous mémorable: le Rendez-vous des régions. C'était la première fois que ça se faisait. On assistait, à l'époque... Je m'en rappelle très bien, des sommets économiques par région. Le dernier auquel j'ai assisté était présidé par le ministre Yvon Picotte, à Victoriaville. Et là on assistait à une nomenclature de projets qui étaient présentés à tour de rôle, qui étaient plaidés à tour de rôle devant plusieurs ministres du gouvernement qui se déplaçaient. Et, par la suite, ces projets, adoptés ou non... mais, à partir des projets adoptés, on pouvait dire: On va concentrer nos efforts pour les deux, trois, quatre prochaines années vers cette cible.

Au Sommet des régions l'an passé, Mme la Présidente, la Mauricie était prête. La Mauricie était prête parce que nous avions travaillé, nous avions consulté, nous avions discuté avec nos intervenants, et cela, de neuf à 12 mois antérieurement au Sommet. Nous avions même eu l'audace, nous avions même eu l'audace de déposer un projet-pilote sur la gouvernance de la Mauricie.

Qu'y avait-il dans ce projet-pilote? Un projet qui incluait les élus, les députés, la ministre régionale en était le président d'office, les présidents de commission scolaire étaient assis à la table avec droit de vote, et des représentants socioéconomiques provenant du CRD et des CLD. Nous avions établi d'un commun accord ce projet, de sorte que, ensemble, nous étions tous le porteur de cette proposition au Sommet des régions.

Nous avons été acceptés. La région de la Mauricie s'est vue décerner, attribuer le pouvoir, le droit d'établir une gouvernance régionale telle que présentée au Sommet, et cela, à l'automne, au début de l'hiver. Or, malheureusement, ce projet, actuellement, a été tout simplement rejeté, rejeté du revers de la main. Pourquoi? Parce que le gouvernement actuel veut y aller d'une politique mur à mur. Si le gouvernement libéral actuel acceptait le principe, un principe évident pour l'ensemble des membres ici présents, des deux côtés de la Chambre, qu'il n'y a pas une région qui ressemble à une autre... Il n'y en a pas une qui ressemble à une autre. À ce moment-là, si on part de cette prémisse, ça voudrait dire qu'il ne peut pas y avoir un CLD ou un CRD ou un CRE qui ressemble à la région voisine. Qui seront nos intervenants, à l'intérieur de notre CRE?

Nous, c'est sûr et certain que, chez nous, ce ne sera pas les pêcheurs, parce que l'industrie maritime, chez nous... Bien, la morue, là, on n'en pêche pas dans la rivière Saint-Maurice. On n'aura pas de mines, on n'aura pas de gens nous provenant du secteur minier. Des mines, on n'en a pas chez nous, mais, par contre, les mines, peut-être qu'en Abitibi et sur la Côte-Nord, eux vont vouloir... les représentants miniers vont désirer faire partie.

Les forestiers chez nous auront toujours eu une place prépondérante; alors j'imagine qu'on va continuer. Bien, ce n'est pas ça qu'on est en train de faire. Nous, on était décollés... on avait décollé, on avait franchi la piste au complet, et, en novembre dernier, la région avait décollé. On était accepté comme région-pilote. On avait accepté notre plan de gouvernance, on avait accepté que la société civile et socioéconomique fasse partie... l'éducation en fasse partie, les maires, les députés, enfin l'avion était levé.

Que se passe-t-il? Un gel absolu, un gel absolu. Depuis le mois d'avril, on se pose la question suivante: Qu'est-ce qui va se passer avec nos CLD? Qui est notre premier organisme de développement économique, touristique, social? C'est le CLD. Qu'est-ce qui va se passer? Est-ce qu'on va renouveler le FLI? Est-ce qu'on va renouveler le budget d'économie sociale? Là on a entendu dire qu'il y aurait un moratoire. Alors, oui, on va vous renouveler votre gestion, les frais de gestion, mais, les fonds, oubliez ça. Seigneur!

Vous savez, combien... Est-ce que vous pouvez vous imaginer combien un investissement du CLD dans une entreprise, ne serait-ce que de 10 000 $, 15 000 $, 20 000 $, 25 000 $, peut être souvent...

La Vice-Présidente: ...

M. Pinard: Pas déjà, madame? Seulement que deux minutes? Là vous me prenez vraiment au dépourvu. Vous savez, ce sujet est tellement important que j'aurais presque le goût de vous demander un privilège, de m'accorder un peu plus de temps pour essayer d'instruire davantage mes collègues d'en face. Mais je vais quand même accepter les règlements de l'Assemblée nationale, puisque j'en fais partie, que je m'y suis souvent astreint. Je pourrais plaider, je pourrais plaider...

La Vice-Présidente: ...

M. Pinard: Mais tout cela pour dire, Mme la Présidente, que, vous savez, on fait actuellement une tournée d'information, mais j'ai l'habitude de dire: Trop fort casse pas. J'ai l'habitude de penser et de me dire souvent: Avec la ceinture, pourquoi pas une paire de bretelles? Pourquoi que la séance d'information ? oui, elle se devait de se faire, possiblement. Mais pourquoi qu'on ne continue pas? On n'est pas mûrs actuellement pour changer de nouveau ces structures-là. Pourquoi qu'on ne prend pas la période entre Noël et Pâques pour vraiment consulter nos gens, consulter le milieu, au lieu d'attiser cet esprit de guerre qu'on sent dans le milieu actuellement, cet esprit de combativité là, cette combativité qui existe entre le social, entre l'économique, entre les forestiers, entre les miniers, entre les pêcheurs, entre les industriels?

Alors, madame, en conclusion, c'est un projet de loi qui demande un report, et, moi, avec le projet de loi tel quel, je ne pourrai absolument pas voter en sa faveur.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, maintenant, je céderais la parole au député de Vachon. À vous la parole, M. le député.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Merci, Mme la Présidente. J'aimerais en tout premier lieu souligner le fait que, à travers ce projet de loi sur lequel vient d'intervenir mon collègue de Saint-Maurice, qui de fait a, je pense, brossé un tableau très intéressant de l'évolution de la participation de la société civile dans l'aménagement, le développement économique, social et aussi sanitaire... Parce qu'il ne faut pas oublier que, par exemple, à partir même de Marc-Yvan Côté et de la réforme de la santé, à partir de la création des conseils d'administration dans le milieu de la santé, dans les CLSC, etc., nous avons encouragé les Québécoises et les Québécois à participer à l'aménagement de leur environnement, que ce soit l'environnement social, l'environnement économique, l'environnement sanitaire, et c'est un mouvement qui n'a eu de cesse de se développer, comme l'a souligné mon collègue de Saint-Maurice, à travers les quelques dernières années.

n(15 h 50)n

Et je veux, Mme la Présidente, d'entrée de jeu dénoncer, le plus respectueusement possible, mais dénoncer fermement cette disposition, cette nouvelle disposition législative, la loi n° 34, qui, qu'on le veuille ou non, et quelque mot qu'on puisse y accoler, va arriver, dans ses effets si ce n'est pas dans ses intentions, à écarter la société civile, à museler la société civile uniformément, partout au Québec, dans sa capacité de participer au développement de sa communauté. J'aimerais en ce faisant premièrement souligner que, comme l'ont fait sans doute plusieurs de mes collègues ? Mme la Présidente, j'étais à la commission des affaires sociales, donc je ne peux assister à toutes les interventions ? comme sans doute ont pu le faire un certain nombre de mes collègues, souligner le fait qu'il n'y a pas, contrairement à l'engagement de la ministre le 29 mai 2003, de consultations ouvertes, de consultations rigoureusement menées auprès de la population au sujet de la loi n° 34.

Mme la ministre disait à l'époque ? non, Mme la Présidente, je n'ai pas confondu, cette fois-ci, avec Mme la ministre ? Mme la ministre disait à l'époque: «Je sais que plusieurs d'entre vous avez des inquiétudes en regard des orientations que nous privilégions. Je comprends vos inquiétudes. Cependant, j'ai le devoir aujourd'hui de vous rassurer: nous entreprenons une démarche dans laquelle nous vous convions. Le développement, c'est l'affaire de tous. Vous serez appelés à travailler avec les élus municipaux à l'élaboration d'un nouveau modèle d'organisation dans votre région. Il n'est pas pour nous question de vous imposer une façon de faire; les choix vous appartiendront.»

Eh bien, Mme la Présidente, Mme la ministre fait une tournée d'information, elle ne fait pas une tournée de consultation. Et ça nous rappelle... Cette forme de contact avec les citoyennes et les citoyens, ça nous rappelle les pseudoconsultations relativement à la loi n° 32, consultations qui se sont faites sur invitation, dans un hôtel de Montréal, et la consultation écourtée sur la loi n° 25; une autre consultation écourtée sur la loi n° 30; la loi n° 30, notamment, et la loi n° 25 qui sont d'énormes pièces législatives qui vont chambarder l'environnement de l'organisation des soins de santé et des services sociaux au Québec et qui vont chambarder aussi l'organisation du travail dans ces services, Mme la Présidente. Et le temps qui nous est imparti dans l'écoute de témoignages de la société organisée, institutionnelle et civile, Mme la Présidente, est extrêmement court. Donc, la tournée d'information à laquelle on fait référence n'est pas vraiment une tournée de consultation, quoi qu'en dise le ministre au Développement économique et au développement des régions, que je salue, en passant.

Autrement dit, Mme la Présidente, les bottines ne suivent pas les babines, comme on dit à Paris. On promet une tournée qui va faire en sorte que les gens vont pouvoir, avec les élus, avec le gouvernement, vont pouvoir dessiner un mode d'intervention collectif relativement au développement économique, social, au Québec. On veut revisiter, on veut réingénier cette façon de faire, et on annonce une période de consultation. Mais, finalement, ce à quoi on assiste, Mme la Présidente, c'est à une tournée d'information dans laquelle il y a un kit de vente qui est mis à la disposition des communautés. Qu'ils le prennent ou qu'ils ne le prennent pas, le kit est là, il informe et il veut séduire.

Dans le fond, ce qui arrive avec ce nouveau projet de loi, ce qu'on nous annonce, c'est une exclusion des partenaires socioéconomiques. Et là j'aimerais souligner quelque chose. Les partenaires socioéconomiques, on pense toujours ? et j'en prends à témoins mes collègues du parti gouvernemental ? très souvent, l'image qui nous vient à l'esprit, c'est les groupes communautaires. Mais on sait très bien que ce ne sont pas que les seuls groupes communautaires dont on parle, ce sont aussi les hommes et les femmes d'affaires, ceux qui prennent sur leurs épaules quotidiennement le développement économique de leur région, ceux qui font commerce, ceux qui donnent des services, ceux et celles qui risquent leurs investissements dans la communauté; ce sont aussi des gens de la communauté civile qui vont voir leur place dans les CLD réduite à un tiers, sinon moins, de la participation. Nous savons que, dans les nouvelles conférences des élus, ce sera un tiers; dans les CLD, ce sera sur invitation aussi et, selon la bonne volonté de la MRC ou de la Conférence régionale des élus, on leur donnera ou non le droit de vote.

Mme la Présidente, c'est un changement très important. C'est un changement important, et on se demande pourquoi on fait ce changement. Nous n'avons jamais entendu ? nous n'avons jamais entendu ? la rhétorique, la théorie qui sous-tend ce changement. Nous n'avons jamais vu les études, chers collègues du parti gouvernemental, et si vous les avez, s'il vous plaît, faites-nous-les connaître, nous n'avons jamais vu les études, Mme la Présidente ? et je m'adresse aux collègues du côté gouvernemental à travers vous ? nous n'avons jamais vu les études qui feraient la démonstration que ce modèle n'est pas efficace, qu'il n'est pas efficient, qu'il n'engendre pas un dynamisme aux niveaux local et régional qui permet le développement adéquat, le développement optimal de nos communautés. Nous n'avons jamais entendu de la part du parti gouvernemental l'expression d'un modèle de rechange qui viendrait réparer quelque chose qui est brisé.

Mais, de fait ? mais, de fait ? on est en train peut-être de réparer quelque chose qui n'est pas brisé. On est en train peut-être de changer quelque chose au nom d'une réingénierie qu'on voudrait appliquer partout, pour bien marquer le coup, comme un architecte veut laisser son empreinte sur un édifice dont on lui a confié la tâche de rénovation. On voudrait bien faire ça à la manière de quelqu'un qui voudrait d'un coup d'éclat changer l'environnement sans aucune espèce d'analyse convaincante.

Et, Mme la Présidente, je suis un scientifique; je viens du milieu universitaire. J'ai fait de la recherche durant au moins 25 ans et j'apprécie, j'apprécie la rigueur, j'apprécie lorsqu'on vient me dire: Tu n'as pas raison, et voici pourquoi. Voici la démonstration des faits, voici ce qui ne fonctionne pas, voici nos données, voici nos observations. Non, Mme la Présidente, nous n'avons jamais eu cette démonstration.

Nous n'avons jamais eu non plus le remplacement d'un modèle par un modèle connu de ce qui existe déjà. Vous savez, lorsqu'on veut changer un paradigme, lorsqu'on veut changer une manière de voir, de faire, de concevoir le monde, et de changer les opérations du monde, nous faisons un changement très important de paradigme, hein? La vision, les opérations, les modèles et les théories qu'on utilise sont prétendus désormais mauvais; on cherche une alternative et on présente le nouveau modèle, la nouvelle alternative en fonction des problèmes qu'on a identifiés. Mais on ne nous a pas montré ce qui ne fonctionnait pas. Et je vous le dis très sincèrement, très sincèrement, je vous parle du fond du coeur, si on l'avait fait, je tiendrais sans doute un autre discours. Mais on ne l'a pas fait, et ça, là, c'est attristant, parce que, quelque part, le soupçon qui nous vient à l'esprit, c'est qu'il y a une facture strictement idéologique derrière tout ça et qu'il y a un agenda caché qui n'a rien à voir avec le bien-être de la population, qui n'a rien à voir avec le développement social et économique.

J'aimerais ça que quelqu'un me convainque du contraire, remarquez, parce que je pense que tous les élus sont de bonne foi lorsqu'ils interviennent, mais c'est comme si, quelque part, le vrai agenda n'était pas connu. Et je ne me hasarderai pas à poser des hypothèses; je pourrais être méchant. Mais ce que je demande, c'est qu'on vienne rigoureusement faire la démonstration que ce qui a été mis en place ne répond pas aux besoins de la population et n'a pas eu ses effets.

Ce matin, Mme la Présidente, nous apprenions dans les journaux qu'il y a eu des milliers d'emplois créés durant le dernier mois, ou le dernier trimestre, je ne sais plus, au Québec. Alors...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Bon. M. le ministre a retenu ce chiffre magnifique que je ne citerai pas au micro.

n(16 heures)n

Alors, Mme la Présidente, pouvons-nous croire un instant, pouvons-nous croire un instant que ces emplois dont on parle ont été créés d'un effet spontané dans les régions? Bien, voyons! Voyons donc! C'est parce qu'il y avait déjà, dans les régions, d'implantés des réseaux de connivence, des réseaux de complicité, des hommes et des femmes qui bénévolement et avec les élus et avec les agents de développement payés à titre de permanents dans les organisations... il y avait de ces hommes et de ces femmes qui, formant des réseaux de complicité, des réseaux d'échange d'information, des réseaux d'investissement, se sont mis à la tâche, et ils se sont donné la capacité d'intervenir aussitôt que l'occasion ou l'opportunité se présente. Parce que c'est comme ça que ça se fait, le développement. On a un grand plan d'action, on a des priorités, mais il faut saisir l'occasion ? il faut saisir l'occasion.

Et les communautés, au niveau mondial, madame... et j'en ai, Mme la Présidente, et j'en ai pour témoignage une recherche et un document, que je pourrais déposer si on me le demandait, produit par l'OCDE, sur le bien-être des nations, dans lequel on discute du rôle du capital humain et du capital social. Et ce qu'on dit à propos du capital social dans ce document est très important.

On nous dit: À travers le monde, les communautés où la démocratie fonctionne le mieux sont les communautés où la prospérité économique est la plus grande. Et comment la démocratie fonctionne-t-elle? Elle fonctionne à travers des réseaux de complicité, à travers des réseaux de connivence, à travers un équilibre entre ces réseaux, un équilibre entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui ne l'ont pas, c'est-à-dire ceux qui font office de contre-pouvoir, ceux qui font office d'empêcheurs de tourner en rond, si vous voulez, madame. Autrement dit, il n'y aurait pas d'opposition active ici puis on n'aurait pas un gouvernement démocratique, n'est-ce pas?

Alors, dans les communautés, c'est la même chose. Il faut qu'il y ait des groupes qui soient investis de missions différentes, d'intérêts différents, mais qui soient dans une espèce d'environnement qu'on pourrait appeler de «coopétition», autrement dit, dans un environnement où il y a de la coopération mais en même temps où chacun fait valoir ses propres intérêts. Et de cette interaction se développent des réseaux, des réseaux de complémentarité, des réseaux de complicité, des réseaux d'investissement qui font en sorte que, lorsque se présente l'occasion, la communauté est prête.

Mme la Présidente, l'OCDE, dans les études qu'elle a pu mettre au jour, fait la démonstration que dans ces communautés où il y a de ces réseaux, où les élus travaillent avec la société civile, où la société civile participe activement au développement de sa communauté, il y a dans ces communautés un niveau de bien-être et de santé supérieur aux autres, il y a un niveau de bien-être ressenti supérieur aux autres; le soin accordé aux enfants est supérieur aux autres communautés ? et ça nous rappelle les CPE au Québec, n'est-ce pas, où les parents bénévoles travaillent avec les éducateurs et les éducatrices dans l'aménagement, le maintien et le développement d'un réseau ? il y a un taux de criminalité et un taux d'abus et de négligence envers les enfants qui sont plus bas et il y a de meilleurs gouvernements.

Alors, voyez-vous, Mme la Présidente, ce qu'est en train de faire le gouvernement avec sa loi no° 34? C'est de perturber l'aménagement de cette dynamique, c'est d'affaiblir le capital social de nos régions et, désormais, à travers les CDEC qu'on va mettre en tutelle sous les élus des arrondissements, c'est en même temps de menacer la dynamique du capital social dans nos quartiers, dans nos quartiers urbains, dans nos quartiers de grands centres.

Mais, Mme la Présidente, il y a plus que ça, il y a plus que ça. Je vais vous citer Michel Venne et, ensuite, je vais tenter d'expliquer pourquoi cette citation est importante. Venne écrit ceci: «La reconnaissance d'un rôle à la société civile découle d'une préoccupation de répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État en leur faisant une place plus grande au sein du même processus de décision politique. Il s'agit de prendre les moyens pour reconstruire des liens entre les citoyens et les institutions, d'aménager des passerelles, de se mettre à l'écoute des préoccupations des gens. Il s'agit aussi de contrer le désengagement social, de combattre l'apathie des citoyens ? l'anomie ? et leur indifférence face à la chose publique.» Mme la Présidente, ce n'est pas rien, ça. Ce que Michel Venne nous dit, c'est que nous sommes en train de désarticuler, d'affaiblir l'acquisition d'un sentiment de puissance, de pouvoir chez nos citoyens qui s'impliquent, qui s'engagent dans l'aménagement, le développement de leur territoire.

Vous avez sans doute entendu parler, chers collègues, du concept d'impuissance acquise. L'impuissance acquise, c'est ce qui fait que, lorsque quelqu'un se rend compte que, quoi qu'elle fasse, cette personne, quoi qu'elle dise, quoi qu'elle entreprenne, il n'y a rien qui change dans son milieu. Et la meilleure façon d'arriver à vaincre l'impuissance acquise ? et Seligman, madame... Parce qu'il y a des collègues qui sourient, pensant que je fais référence à une sorte d'impuissance autre que celle dont je parle. Mais l'impuissance acquise dont Seligman a parlé, c'est une forme pernicieuse ? pernicieuse ? d'impuissance qui fait que les gens pensent que leur rôle dans la société est nul, que, bien qu'ils puissent émettre leur opinion, bien qu'ils puissent exprimer les perceptions ou les sentiments qui les animent, rien ne change. Or, la meilleure façon de contrer ça, c'est de s'assurer que la participation ? leur participation ? aboutit à des impacts, aboutit à des effets. Et, si vous les écartez, les citoyennes et les citoyens, des centres de décision, vous les écartez de ce chemin-là de l'acquisition d'un sentiment de pouvoir, d'un sentiment de contrôle dans leur environnement.

Or, Mme la Présidente, le développement passe par l'acquisition d'un sentiment de contrôle sur son environnement, hein? Le fait...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Enfin, le fait, Mme la Présidente, de percevoir son environnement dans toute sa complexité, le fait de pouvoir graduellement y intervenir pour l'aménager pour répondre à ses besoins, ce sont les traits caractéristiques de quelqu'un qui est dans un processus de développement.

Et ce qu'on est en train de faire, c'est de refuser, à travers le projet de loi n° 34, c'est de refuser à un ensemble de citoyennes et de citoyens, un ensemble de collectivités, cette capacité ? bonjour, M. le ministre ? de s'investir et de faire l'acquisition de ce sentiment de contrôle de son environnement.

Autrement dit, Mme la Présidente ? et ça me rappelle aussi l'attaque frontale que fait le gouvernement à l'égard de la syndicalisation ? on est en train d'affaiblir les outils, les instruments qui font que de plus en plus de Québécois se sentent capables de contrôler leur propre environnement, communautaire dans le cas des CRD, dans le cas des CLD, et de travail dans le cas de la syndicalisation.

Et, Mme la Présidente, je ne peux pas éviter que me vienne à l'esprit cette idée que nous sommes en train d'affaiblir la capacité des citoyens et des citoyennes du Québec de contrôler leur territoire, de se donner une capacité de contrôler leur environnement national. Il y a nettement un lien à faire ? et un lien qu'on pourra éventuellement approfondir, Mme la Présidente ? entre les dispositions qu'on prend à l'égard des syndicats présentement et à l'égard des gens qui s'investissent socialement dans leur communauté, qu'on écarte des décisions; il y a un lien à faire entre la marginalisation de ces gens-là, leur affaiblissement dans leur capacité de contrôler leur communauté, de contrôler leur environnement de travail et la capacité des Québécois de se donner un pays et de se donner une capacité de contrôler leur environnement national. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, vous avez une question de règlement, M. le député de Montmagny, ou une intervention?

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Ce n'est pas une... Peut-être une question de directive. J'aimerais que M. le député de Vachon dépose son document qu'il nous a parlé durant sa...

Document déposé

La Vice-Présidente: Alors, acceptez-vous de déposer votre document? Oui. Alors, c'est accepté. Merci. Je reconnais un prochain intervenant, le député de Drummond.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, merci, Mme la Présidente. J'interviens cet après-midi relativement au projet de loi n° 34, la Loi sur le ministère du Développement économique et régional. Nous en sommes à l'adoption de principe. Je veux, dans mon allocution, Mme la Présidente, peut-être m'attarder sur deux éléments qui m'apparaissent les plus importants dans ces projets de loi là, c'est la composition des futurs CLD, des conseils d'administration des futurs CLD, et la composition du conseil d'administration des futures conférences régionales des élus, les conseils d'administration des conférences régionales des élus.

n(16 h 10)n

Présentement, de la façon que ça fonctionne sur le terrain, nous avons... dans les MRC du Québec, nous avons des CLD. Ça a été mis sur pied en 1998. La vocation de ces CLD, c'est le développement local, et sur ces conseils d'administration, Mme la Présidente, siègent des élus municipaux, mais siègent aussi des représentants de la société civile. Et, quand on parle de représentants de la société civile, ça veut dire que... Moi, je préfère l'expression, Mme la Présidente, de partenaires socioéconomiques. Alors, on y retrouve des représentants du milieu des affaires, de l'éducation, des groupes communautaires, des jeunes, du milieu de la santé, du tourisme, de l'agriculture, des groupes de femmes et des aînés. Alors, en fait, Mme la Présidente, ce qu'on s'était dit lorsque, le gouvernement du Parti québécois, nous avons mis ça sur pied, en 1998, on se disait: Bien, ceux qui sont bien placés pour s'occuper du développement économique d'une MRC, d'une région, c'est, entre autres, oui, les élus municipaux avec les partenaires socioéconomiques. Et ça, c'est du côté des CLD.

Et, par ailleurs, bien, les CRD existent, eux, depuis déjà plusieurs années. Et, encore là, moi, je pense à la région Centre-du-Québec, là ? le comté de Drummond fait partie de la région Centre-du-Québec ? on a là aussi des élus municipaux, de l'Assemblée nationale qui siègent et également, là, des représentants des groupes... des partenaires socioéconomiques, là, qu'ils viennent du milieu des affaires, de l'agriculture, du tourisme, de la culture, de l'éducation. Alors, dans un cas comme dans l'autre, Mme la Présidente, c'était et c'est encore une formule gagnante, une formule qui a fait ses preuves et une formule qui a réussi.

Et là le gouvernement nous arrive avec un changement, avec le projet de loi n° 34, et il est en train de vouloir changer ce qu'on appelle une formule gagnante. Et, moi, tout de suite, la première question que je pose par rapport à ça, c'est: Pourquoi changer ce qui fonctionne bien? Parce que les preuves du bon fonctionnement et des excellents résultats des CLD ou des CRD, ces preuves-là, elles sont faites tant et plus, Mme la Présidente, et je constate que le ministre du Développement économique et régional veut changer cette façon de faire. Et, comme l'a dit celui qui a parlé avant moi, le député de Vachon, on ne sait pas pourquoi, mais on change ça. Ça fonctionne bien, mais on le change. On n'a jamais saisi... Ça ne nous a jamais été dit d'ailleurs clairement: Voici pourquoi on fait ces changements-là.

Et les changements qu'on veut apporter, Mme la Présidente... Et je le dis, là, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, les CLD demeurent des CLD, mais c'est le conseil d'administration qui va changer de composition, et dorénavant ce seront des élus municipaux que l'on retrouvera. Et l'article pertinent ? j'en donne lecture rapidement ? c'est la municipalité régionale de comté, la MRC qui va désigner les membres du conseil d'administration d'un centre local de développement qu'elle constitue, puis, dans le cas d'un organisme existant, parce qu'il y a déjà des CLD qui sont en place, là ils vont devoir s'ajuster à la nouvelle formule. Et ce qu'on dit, c'est que «le conseil d'administration d'un centre local de développement comprend des élus municipaux. Il peut ? il peut, c'est facultatif ? il peut aussi comprendre, entre autres, des personnes issues notamment du milieu des affaires et des milieux associatif et communautaire ainsi que, sans droit de vote, le député de l'Assemblée nationale de toute circonscription sur le territoire» en question.

Alors, ça veut donc dire, Mme la Présidente, alors que présentement, dans nos CLD, les conseils d'administration sont composés et d'élus municipaux et de représentants des groupes sociocommunautaires, dorénavant ce seront uniquement des élus municipaux. Et, si les élus municipaux désignés, là, par la MRC et si les élus municipaux le veulent, s'ils le veulent, ils pourront inviter d'autres personnes, là, des milieux associatifs ou du milieu des affaires à se joindre à eux, alors qu'auparavant... Déjà, là, les partenaires socioéconomiques sont là avec les élus municipaux. Là, ça va être les élus municipaux, et c'est les élus municipaux qui vont dire: Oui, on s'adjoint d'autres personnes, ou, non, on ne s'adjoint pas d'autres personnes. C'est facultatif. Ça, c'est au niveau des CLD.

Au niveau des CRD, Mme la Présidente, parce que je regarde chez nous, entre autres, au Centre-du-Québec, bien il y a des élus municipaux et les élus de l'Assemblée nationale qui siègent là, avec droit de vote, et il y a des représentants des groupes sociocommunautaires. Et là ce qu'on prévoit, et là je vous réfère à l'article 99, l'article 99 dit que le conseil d'administration va être composé: préfets, maires. Alors donc, ce sont les élus municipaux. Et là je vous réfère plus loin, à l'article 100 du projet de loi qui dit: «Une conférence régionale des élus peut nommer ? là aussi, c'est facultatif, Mme la Présidente, "peut nommer" ? à son conseil d'administration des membres additionnels dont le nombre ne peut excéder celui correspondant au tiers de ses membres qui sont des élus municipaux.» Puis on dit: «Ces membres additionnels sont choisis après consultation des organismes que la conférence considère représentatifs des divers milieux présents dans la collectivité à desservir.»

Alors donc, c'est le changement que l'on fait au niveau du conseil d'administration: alors que présentement on a des élus de l'Assemblée nationale, on a des élus municipaux et des représentants des groupes socioéconomiques, là ce sera facultatif. Les maires pourront décider: oui, on invite ces personnes-là, ou, non, on ne les invite pas. Moi, je dis, la première chose que je dis, Mme la Présidente: Ces CRD, conseil régional de développement, et les CLD sont en place depuis déjà plusieurs années et ça fonctionne bien. Et là on modifie ça. Je le répète: Pourquoi? On ne le sait pas au juste.

Mais le premier élément que je veux porter à votre attention, c'est de la façon que ça se fait. Et là je vais vous lire l'article 2. L'article 2 du projet de loi dit: «Le ministre a pour mission de soutenir le développement économique et régional en favorisant notamment la coordination et la concertation des différents acteurs des domaines économiques, scientifiques, sociaux et culturels dans une perspective de création d'emplois, de prospérité économique, de développement scientifique, de développement durable et de prise en charge de ce développement par les collectivités locales et régionales dans le cadre d'un partenariat entre elles et l'État.» Alors, il n'y a rien de nouveau. J'entends le ministre qui dit: C'est bon. Oui, c'est bon, c'est... on fait ce qui était déjà là, Mme la Présidente.

Mais l'ironie, l'ironie qu'on retrouve dans cet article-là, Mme la Présidente, c'est qu'on dit que le ministre veut favoriser la coordination et la concertation. Il veut tellement favoriser la coordination et la concertation que, la moitié des gens qui siègent là, il les met dehors en partant. Je vais vous dire, Mme la Présidente, que, comme exemple de coordination et de concertation, on a déjà vu mieux. Et la question que je pose au ministre: Pourquoi, par ce projet de loi là, les partenaires socioéconomiques, il les met dehors? Et je le répète, c'est une formule gagnante, c'est une formule qui fonctionne bien. Ces gens-là, les partenaires socioéconomiques ont bien travaillé avec les élus municipaux. Alors, pourquoi le ministre du Développement économique et régional, ces gens-là, il les met dehors?

Je vais vous dire, Mme la Présidente, là, comme manque de reconnaissance puis comme affront qu'on peut faire à des gens, j'ai rarement vu pire. Parce qu'on a des représentants de ces groupes-là qui se sont impliqués depuis plusieurs années dans le développement de leur collectivité, et le ministre du Développement économique et régional du nouveau gouvernement, la première chose qu'il trouve à faire, il dit: On vous met dehors, puis les élus municipaux vous réintégreront s'ils le veulent bien.

n(16 h 20)n

Alors, je reviens sur les mots, le ministre disait... je l'entendais quand je lisais l'article, il dit: C'est bon, ça. Oui, la coordination et la concertation, c'est bon, c'est excellent. C'est ça que ça prend dans notre société si on veut que ça fonctionne, notre développement économique, notre développement social, notre développement culturel. Mais, par contre, il ne faut pas juste écrire les mots, il faut agir en conséquence. Puis, quand on remercie des gens puis qu'on leur dit: Prenez la porte, puis on vous rappellera si on le veut bien, bien, moi, je dis que ça va exactement, comme comportement, à l'encontre de la coordination et de la concertation. Et, moi, je pense, Mme la Présidente, que c'est le premier élément qu'il faut condamner dans ce projet de loi là.

Le gouvernement libéral puis le ministre, ça fait quelques fois qu'il nous dit ça, il nous dit, il dit: Pourquoi vous ne faites pas confiance aux élus municipaux? Moi, je dis: Nous faisons confiance aux élus municipaux, mais, plus que ça, nous, nous faisons confiance aux élus municipaux et nous faisons confiance aux partenaires socioéconomiques. Nous faisons confiance, Mme la Présidente, aux gens qui représentent ce qu'on appelle la société civile. Et la question que je pose au ministre: Pourquoi lui ne fait pas confiance à la société civile? Pourquoi ne fait-il pas confiance aux groupes sociocommunautaires? Pourquoi ne veut-il pas que ces gens-là soient à ces endroits-là, surtout qu'ils se sont impliqués puis ils ont fait du bon travail? Les CLD, c'est une histoire à succès, Mme la Présidente, puis le ministre, lui, dit: Ah non! moi, je change ça. Et, je le répète, sans jamais nous avoir dit pourquoi, sans jamais nous avoir fait la preuve que ça va être un meilleur développement économique et social qu'on va connaître dans nos régions avec ce projet de loi n° 34.

Alors, moi, ce que je dis, Mme la Présidente: le gouvernement du Parti québécois, nous avons fait confiance aux élus municipaux et nous avons fait confiance à la société civile. Nous avons fait confiance aux deux. Et ce que je demande au ministre, c'est qu'il modifie son projet de loi et que la confiance qu'il dit avoir envers les élus municipaux, bien, qu'il nous prouve qu'il a confiance aussi aux partenaires socioéconomiques et qu'il les invite d'emblée à faire partie des conseils d'administration des CLD et des conférences régionales des élus, et à ce moment-là il nous fera preuve de coordination et de concertation, là, au sens de l'article 2. Et il montrera de la reconnaissance envers les groupes sociocommunautaires, des partenaires sociocommunautaires, les partenaires socioéconomiques et... confiance, et aussi il prouvera, somme toute, qu'effectivement le développement économique et régional a bien fonctionné de cette façon-là, et c'est de cette façon-là aussi qu'il faut continuer, parce que, je le répète, quand quelque chose fonctionne bien, Mme la Présidente, pourquoi le modifier? Pourquoi se lancer dans une autre formule alors que celle en place a déjà fait ses preuves?

Je pense qu'en fait, Mme la Présidente, je la sais, la raison. Le ministre ne l'a jamais dite, mais ce que l'on constate depuis que le gouvernement libéral est en place, c'est un gouvernement atteint de structurite aiguë. C'est un gouvernement qui est pris dans les structures et qui fonctionne par les structures, puis on en a un exemple encore aujourd'hui: le fameux Conseil de la fédération, ou de la confédération, là, qui est ce que j'appelle une farce monumentale, là. Alors... Mais ça, on dit: il y a une autre structure dans le domaine constitutionnel. Puis on voit le ministre de la Santé, plutôt que de travailler à la première priorité ? vous vous rappelez, Mme la Présidente, à quel point on nous a dit ça que la santé, c'était la première priorité du gouvernement libéral, puis qu'il allait s'attaquer aux urgences, au désengorgement des urgences, qu'il allait faire en sorte que les soins de première ligne soient mieux et que les listes d'attente soient réduites ? bien, le gouvernement libéral, Mme la Présidente, la première chose qu'il trouve à faire, c'est de s'attaquer aux structures dans ce domaine-là aussi.

Et dans le développement économique et régional, bien, c'est la même affaire, il se lance dans les structures. Et il y en a déjà, des structures en place, puis qui fonctionnent bien, mais non, il dit: Moi, je change ça puis on se lance vers autre chose. Alors, je trouve ça malheureux, Mme la Présidente, qu'on en soit pris avec un gouvernement qui, plutôt de penser à l'efficacité, plutôt de penser à ce que les choses avancent, que le développement économique et régional avance, bien, qu'il se lance plutôt dans les structures.

L'autre élément aussi, Mme la Présidente, qu'il faut dire là-dedans, alors que ça m'apparaît être une pièce majeure dans la législation actuelle, ça se fait sans consultation. Là on va nous dire: Ah! Aïe! la ministre déléguée est sur le terrain, puis elle rencontre les gens dans les régions, puis elle leur explique ce qu'il en est. Quand on parle de... premièrement, ce qu'il faut dire par rapport au périple de la ministre déléguée à travers le Québec, Mme la Présidente, c'est un périple d'information. Ce n'est pas de la consultation qu'elle va faire, c'est de l'information, elle rencontre les gens puis elle leur donne de l'information.

Une véritable consultation, Mme la Présidente, ça se ferait ici, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire. Et que l'on fasse des consultations publiques. Mais le gouvernement libéral, encore une fois, ferme les portes du Parlement, il dit: Nous autres, c'est par là que ça va passer, puis c'est ça qu'on veut, puis vous allez passer par le trou de la serrure. C'est comme ça qu'il traite les citoyens et citoyennes du Québec. Mais je pense que les citoyens et citoyennes du Québec réalisent de plus en plus, là, que le 14 avril aura été un jour triste, le 14 avril 2003 aura été un jour triste dans l'histoire du Québec. On s'en aperçoit sur toutes les tribunes présentement, là, ce qu'on entend un peu partout, ce qu'on lit dans les journaux, les gens le réalisent.

Mais je suis d'autant plus inquiet, Mme la Présidente, de cette tournée de la ministre à travers le Québec que j'ai entendu son discours lorsqu'elle l'a prononcé ici, en Chambre. Puis je veux vous citer textuellement ce qu'elle a dit, puis, après ça, eh bien, je vous ferai part de mes commentaires. Elle nous a dit, en parlant des élus municipaux... Puis, elle aussi, elle invoquait l'argument, elle invoquait l'argument qu'elle faisait confiance aux élus municipaux. Moi, je lui dis: Oui, puis la société civile, vous ne lui faites pas confiance, madame? Mais elle nous a dit à ce moment-là, en disant qu'elle faisait confiance aux élus municipaux: Ils ont le devoir et l'obligation de s'entourer de gens qui sont au quotidien appelés à travailler au développement de leur communauté et de leur région, qui sont animés de convictions et qui ont développé au fil des ans une expertise. C'est ce qu'on appelle la société civile.

Alors, elle disait donc, Mme la Présidente: Ils ont le devoir et l'obligation de s'entourer des gens qui sont au quotidien appelés à travailler. Mais ce n'est pas ça que dit le projet de loi, les deux articles que je vous ai lus tantôt... les trois articles, 93, 99 et 100, c'est facultatif. Les élus municipaux vont s'adjoindre les partenaires socioéconomiques s'ils le veulent bien. Mais la ministre, là, ce qu'elle nous a dit ici, là, elle nous dit: Ils ont le devoir puis ils ont l'obligation de le faire. Bien, si c'est ça qu'elle pense, qu'elle l'écrive dans la loi, Mme la Présidente, plutôt que de le dire tout simplement comme ça, alors qu'il y a un texte de loi, il y a un projet de loi qui dit le contraire.

Et l'autre phrase sublime de la ministre déléguée, députée de Bonaventure, Mme la Présidente, c'est: «La démarche ? croyez-le ou non, et elle l'a dit, là, je vous réfère aux galées et je la cite textuellement ? est foncièrement inclusive.» On met la moitié du monde dehors, Mme la Présidente, puis la ministre déléguée a le front de venir nous dire dans cette Chambre: La démarche est foncièrement inclusive. Bien là il y a un problème, là. Elle ne le comprend pas, son projet de loi. Et là je vous dis, Mme la Présidente, que, moi, je suis très inquiet de cette tournée que la ministre fait, parce que, si son projet de loi, là, elle ne le comprend pas plus que ça puis elle le comprend de travers comme ça, il serait temps, là, que vous autres, là, ici, les libéraux, vous lui disiez: Bien, reviens-t-en, là, reviens à l'Assemblée nationale, assis-toi à ton pupitre puis lis ton projet de loi, là, parce que tu ne le comprends pas. Et elle est sur le terrain, Mme la Présidente, puis on peut penser, donc, que ce qu'elle a dit ici, bien, elle répète la même chose un peu partout à travers le Québec.

Alors, moi, je pense que la ministre, il faudrait qu'elle refasse ses devoirs, il faudrait qu'elle relise son projet de loi, il faudrait qu'elle le comprenne pour qu'elle puisse parler de son projet de loi selon les termes qui y sont contenus et non pas... et non pas... Je ne sais pas où elle peut prendre des choses comme celles-là, parce que le texte du projet de loi dit exactement le contraire de ce qu'elle est venue nous dire ici. Alors, je suis donc, je le répète, Mme la Présidente, très inquiet de cette tournée que la ministre fait, parce que je me dis: Quelle sorte d'information qu'elle donne au monde sur le terrain? Est-ce qu'on peut penser, Mme la Présidente... Si elle nous dit des choses comme ça ici, au salon bleu, bien, est-ce qu'on peut penser que sur le terrain elle dit des affaires qui sont de travers aussi, là? Mais, en tout cas, on est là pour rétablir les faits et on est là pour lire le texte de loi tel qu'il est là, tel qu'il est écrit.

Puis ce que je veux dire aussi en conclusion, Mme la Présidente, c'est que, en fait, là, ce que l'on constate, c'est que les CLD et les CRD, c'est une histoire à succès, ça fonctionne bien, et ce gouvernement-là qui est atteint de structurite aiguë ? puis j'ai donné l'exemple dans d'autres domaines, dans la santé et dans le domaine constitutionnel ? bien là il se lance encore dans des modifications, puis on ne sait pas au juste pourquoi. Alors, moi, je dis: Quand une formule est gagnante... Puis, les CLD, ils ont fait leurs preuves, Mme la Présidente, ils ont créé de l'emploi, ils ont géré les fonds qui leur ont été confiés d'une façon exceptionnelle, avec des résultats exceptionnels. Je donne l'exemple, chez nous, dans Drummond, où les résultats sont exceptionnels, le développement économique de Drummond est bien reconnu, puis grâce au CLD puis grâce au dynamisme du directeur général qui est là, Martin Dupont, mais grâce au dynamisme du conseil d'administration...

n(16 h 30)n

La Vice-Présidente: M. le député.

M. Jutras: Je termine, je termine. Je termine avec ma conclusion, Mme la Présidente. Alors, quand on a des histoires à succès comme ça, pourquoi qu'on change ça? Et c'est pour ça que ce projet de loi là n'a pas de sens et que je vais voter contre, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, M. le député de Marguerite-D'Youville, vous avez... Question de règlement?

M. Moreau: Oui, Mme la Présidente. En vertu de l'article 213, est-ce que le député de Drummond accepterait de répondre à une question?

La Vice-Présidente: Alors, M. le député, vous acceptez de répondre? Alors, si vous voulez poser votre question, M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Moreau: Merci. J'aimerais savoir, Mme la Présidente, si le député de Drummond estime que Mme Francine Ruest-Jutras, que le député de Drummond connaît bien, fait erreur lorsqu'elle dit ceci, et je cite: «Une première lecture du projet de loi nous permet cependant d'y constater une nette reconnaissance du rôle des élus et des municipalités dans le développement économique du Québec, ce qui rejoint la nécessité d'imputabilité lorsqu'il est question de la gestion des fonds publics.»

Et se trompe-t-elle lorsqu'elle ajoute: «La disposition du projet de loi qui permet d'inclure des personnes issues du monde des affaires et des milieux associatifs et communautaires dans la composition des conseils d'administration nous rassure, car la vitalité de nos communautés repose sur la prise en charge par les acteurs locaux de leur propre développement»?

La Vice-Présidente: Alors, tout en vous rappelant que... Je m'excuse, là. Tout en vous rappelant que la question doit être courte et la réponse doit être courte aussi. Je vous demande de répondre...

M. Jutras: En tout cas, je suis content de la... Je suis content de la question. Est-ce que je peux répondre?

La Vice-Présidente: M. le député de Drummond, à vous la parole.

M. Jutras: Non, mais je suis content de répondre à ça, je suis content de cette question-là. C'est exactement ce que j'ai dit au cours de mon allocution, j'aurais aimé ça que le député l'écoute davantage. Et je suis d'accord avec ce que la mairesse de Drummondville dit. Quand elle dit: C'est une reconnaissance envers les élus municipaux, bien oui, moi, je dis que c'est une reconnaissance aussi envers les élus municipaux.

Mais qu'est-ce qu'elle dit, la mairesse de Drummondville aussi? Elle dit que c'est important que les partenaires socioéconomiques soient là également. Et, vous autres, vous les mettez dehors. C'est ça qui est inacceptable et c'est à ça que je ne peux pas souscrire. Et la mairesse de Drummondville n'applaudit pas au fait que vous mettez les partenaires socioéconomiques dehors. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Je suis prêt à répondre.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? S'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre aux voix...

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Alors, s'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre aux voix la motion de... Alors, j'attends un message. Ça me faciliterait beaucoup les choses s'il y avait seulement qu'un député debout au moment où je reconnais le prochain intervenant. Ça vaut aussi pour vous, M. le leader de l'opposition officielle. Merci. Alors, maintenant je pense qu'on pourrait commencer. Mme la députée de Matapédia.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, le projet de loi n° 34 est constitué de trois étapes. La première consiste à la décentralisation et la déconcentration de l'État. La seconde consiste à l'étude des responsabilités et des ressources financières à décentraliser vers les régions. Et la troisième étape, prévue pour l'année 2005, est celle du transfert des pouvoirs.

Pour moi, il est sûr qu'il aurait été essentiel de faire des consultations auprès des acteurs socioéconomiques concernés avant de mettre le chaos dans les structures actuelles et pas seulement de les informer dans une tournée, alors que tout est déjà décidé d'avance. Le gouvernement en arriverait alors à une analyse éclairée de la situation d'où il tirerait les conclusions qui s'imposent, soit que le modèle n'est pas parfait mais qu'il y a des fondements auxquels il ne faut pas toucher.

Je me questionne, M. le Président: Est-ce que le gouvernement a fait une analyse de la situation? Non? Pourtant, c'est ce que l'on enseigne à nos jeunes dans les écoles. Peut-être que les membres du gouvernement libéral auraient intérêt à retourner sur les bancs d'école pour revoir les principes fondamentaux de la résolution des problèmes. Mais, encore là, M. le Président, cette méthode s'applique quand il y a des problèmes, il ne faudrait pas oublier.

Dans mon comté de Matapédia, ça va bien, ça va de mieux en mieux. En fait, la Matapédia est en train de devenir une véritable société innovante, et ce, particulièrement grâce à la présence des CLD entre autres partenaires. Je me rappelle, en 2001, on nous annonçait une baisse de 20 % à 30 % des approvisionnements forestiers publics dans notre région du Bas-Saint-Laurent. Les conséquences allaient être désastreuses pour les Matapédiens et les Matapédiennes, qui perdaient des centaines d'emplois.

Eh bien, ils se sont unis, les gens du milieu des affaires, de la santé, de l'éducation, élus municipaux, travailleurs forestiers, entrepreneurs, agents de développement. Il y avait plus de 1 000 personnes dans l'église de Causapscal alors que nous étions en train de ranimer le ralliement populaire matapédien. Les gens ont fait part de leurs revendications au gouvernement d'alors, gouvernement péquiste. Avec la collaboration du milieu des affaires, de tous les partenaires, des institutions locales, du ministère des Régions, ainsi que du ministère de l'Industrie et du Commerce, nous avons créé et mis en place une stratégie de diversification industrielle.

En 2003, toujours sous l'égide du CLD, ce fonds d'investissement est plus vivant que jamais. Que ce soit au niveau du secteur touristique, industriel ou promotionnel, l'innovation est au service de la population. Le rôle du CLD dans la mise en oeuvre de ce plan stratégique est crucial, car il favorise la concertation des intervenants socioéconomiques. Au-delà de la concertation, M. le Président, il y a plus encore, et ça, vous le savez, vous avez déjà été ministre responsable des Régions, vous avez été à l'origine du Choix des régions, M. le Président, un document essentiel de nos politique de développement régional. Donc, le rassemblement de tous ces gens de la société civile autour d'une même table, femmes et hommes, travailleurs et entrepreneurs, et ce, de tous les secteurs, agriculture, forêt, emploi, crée une véritable synergie qui augmente le dynamisme des régions.

Concrètement, M. le Président, le CLD de la Matapédia, par sa constante présence pour soutenir les promoteurs, a permis de créer ou maintenir pas moins de 977 emplois en investissant dans 215 projets d'avenir. Vous savez, M. le Président, les services du CLD auprès des entreprises matapédiennes se traduisent par un taux de survie plus élevé que la moyenne québécoise. Au cours des cinq dernières années, le taux de survie des entreprises matapédiennes fut de 12 % à 32 % supérieur au reste du Québec. Ça, c'est du dynamisme, et je suis très fière des gens de mon comté.

La Matapédia, dans son plan de diversification industrielle, elle avait quatre grands défis à relever et elle les a encore parce qu'on y travaille encore activement. Le premier, relever le niveau de vie et augmenter le niveau d'emploi, le taux d'emploi. Le deuxième, diversifier la structure industrielle. Vous savez, les ressources naturelles constituent la principale assise de l'économie de la Matapédia. Elle devra maintenant réussir à transformer davantage ses ressources et diversifier son économie vers d'autres secteurs pour se développer et prospérer. C'est mission accomplie, M. le Président. Cette stratégie poursuit aujourd'hui concrètement cet objectif de donner à nos régions les moyens d'accroître la place occupée par les entreprises de transformation à plus forte valeur ajoutée.

Troisième objectif de notre stratégie, développer de nouveaux atouts pour prospérer dans la nouvelle économie. Il est donc primordial de faire émerger et de mieux soutenir les initiatives entrepreneuriales qui visent à valoriser le patrimoine forestier, touristique et agricole ainsi que le savoir-faire de cette si belle Vallée de la Matapédia. Quatrième objectif, et c'est un des objectifs que vous avez aussi dans votre coin de pays, M. le Président, mettre un frein à l'exode de la population, et ça, c'est en créant de l'emploi qu'on peut le faire.

Donc, notre stratégie de diversification industrielle dans la Matapédia, elle est basée sur ces quatre grands axes, donc l'accélération des investissements, le rehaussement de la compétitivité des entreprises, la promotion de l'investissement étranger et la diversification de l'économie. Pourquoi briser tout cela? Je ne vous expliquerai pas notre stratégie en détail aujourd'hui, mais je vous assure que nous avons tous les outils en place dans le milieu pour parvenir à nos objectifs communs. J'ajouterai que cette stratégie, en conclusion, les solutions proposées reposent sur l'engagement du milieu des affaires et des intervenants socioéconomiques du milieu.

Donc, suite aux pertes d'emplois, M. le Président, dans l'industrie forestière, ce sont plus de 2 millions qui ont été débloqués par le gouvernement antérieur pour diversifier l'exploitation industrielle de la Matapédia. Et, d'ici 2005, nous avons l'opportunité de dépenser cet argent-là pour la réaliser, 2 056 500 $ exactement, M. le Président, pour notre plan de diversification industrielle. Et, pour promouvoir l'investissement étranger, nous avons eu 800 000 $, qui ont été utilisés et qui vont l'être pour rehausser la compétitivité des firmes matapédiennes. J'en suis fière. C'était une première, M. le Président, c'est une première au Québec que d'avoir une stratégie pour une MRC. On a réalisé ça, j'ai réalisé ça avec les gens de mon comté. Et cette réduction de la capacité forestière, possibilité forestière, de 20 % à 30 % de la capacité forestière sur les boisés publics, elle a fait mal aux entreprises, mais, depuis l'été 2001, près de 50 % des emplois perdus ont été regagnés. Ça, c'est du travail.

n(16 h 40)n

Et la question que je me pose... Et, dans La Mitis, partout... Regardez, dans La Mitis, M. le Président ? M. le Président, c'est ça ? le bilan de l'année du CLD de La Mitis, dans mon comté, ce sont plus de 13 millions qui ont été investis, des investissements générés de plus de 13 millions. On dit: «Le centre local de développement de La Mitis a connu une année 2002 sans précédent. Fort d'investissements accordés de l'ordre de 582 888 000 $, l'organisme a généré des investissements totaux de 13 028 000 $.» Et ça, c'est pour une année. Alors, vous voyez, c'est un succès dans mon comté.

Le centre local de développement a également bien fait en 2002, je disais, près de 500 000 $ ont été investis, générant des investissements de 6 millions et créant ou maintenant, M. le Président, 295 emplois dans la MRC ? alors, ça, ce sont des résultats ? 59 projets ont été financés. Et, quand on regarde...

Regardez, ce beau jeune homme, là, c'est Gino Ouellet. On veut bien le garder, il a un beau projet, là, puis j'espère qu'il va le faire dans le comté de Matapédia parce qu'on en a besoin des emplois. Et c'est un homme... Il y a cinq, six ans, ça n'existait pas, pratiquement, dans le parc industriel, et actuellement c'est un des entrepreneurs les plus dynamiques de mon comté. Regardez, Norcast, à Mont-Joli, et j'en suis fière aussi de cette entreprise-là, Norcast approvisionne les cinq continents, les cinq continents. Alors, ça, c'est une fonderie.

Ici: «La Mitis intensifie l'offre touristique.» Et c'est avec les CLD, avec les partenaires qu'on fait ça. Et on dit: «Trois nouvelles entreprises, la Fromagerie Lavoye, de Sainte-Luce ? dans mon comté ? une pâtisserie fine à Saint-Donat et Produits Danco qui se spécialise dans le poulet de grain en pot, ont vu le jour en 2003. Deux autres entreprises, Ateliers Cèdre Val-Garnier, Finition Plus Design, ont démarré leurs opérations.» La Mitis, M. le Président, compte 1 099 entreprises, dont 206 dans le secteur primaire, 117 dans le secteur secondaire et 776 dans le domaine du tertiaire, et quelque 8 400 travailleurs. Et là, moi, je suis tellement fière de mon comté, M. le Président, les Boiseries du Bas-Saint-Laurent, Bois BSL, Norcast, Soudure Gilles Roy, Lulumco, Félix Huard, toutes les PME de mon comté, et c'est avec la synergie de tous les gens ensemble, qui se mettent à travailler ensemble.

Vous savez, quand j'ai commencé comme députée, en 1994, les gens venaient dans mon bureau ? parce qu'il y en a plusieurs qui n'étaient pas ici, mais, moi, j'y étais; vous, ça fait longtemps que vous y êtes ? ils nous demandaient de l'argent pour mettre de l'essence dans les véhicules pour aller faire du développement, les municipalités me demandaient du discrétionnaire de 1 000 $, 2 000 $ pour qu'on puisse les aider pour faire payer l'agent de développement économique, et c'était comme ça que ça fonctionnait. Et c'est par la mise en place des centres locaux de développement que nous avons réglé cette problématique d'avoir des agents de développement sur le terrain. Alors, M. le Président, je n'ai pas inventé cela, on vit dans mon comté comme ça se passe ailleurs dans le monde et plus particulièrement en Europe. On a besoin d'avoir une synergie de tous les partenaires pour faire du développement. Et, M. le Président, la question se pose: Pourquoi briser ce qui fonctionne, ce qui est déjà là? Je vous le répète, je tiens quand même à vous partager notre recette gagnante, notre stratégie, c'était ça, c'était la mobilisation du milieu, c'est par la mobilisation du milieu qu'on arrive à avoir des résultats.

Alors, je vous dis, la composition actuelle des conseils d'administration des CLD, elle est basée sur les principes qui guident le développement économique local. À ce sujet, lors d'une conférence tenue dans le cadre des rencontres internationales Démocratie et management local, Michel Venne a dit, et je le cite: «Les nombreux experts qui se sont penchés sur ce sujet ont montré que le développement naît de la capacité d'une communauté de mailler les ressources locales, de les voir coopérer, de tirer profit des synergies qui en découlent et de renforcer les réseaux naturels communautaires, professionnels, industriels, financiers et commerciaux. Le développement se fait à partir d'une logique de réseau.»

Avec ce projet de loi, c'est cette synergie que vous allez détruire. Et non seulement au niveau local, ça va être plus difficile, mais au niveau régional, cette réflexion que je viens de faire, cet extrait de ce que Michel Venne disait, il vaut aussi au niveau régional. Au niveau régional: un tiers-deux tiers. Il y avait, dans ma région, le Bas-Saint-Laurent, pratiquement égalité entre les élus, un petit peu plus des gens issus de la société civile que des élus, et ça fonctionnait bien. Et il y avait eu la capacité, et il y a encore, de développer en parallèle des tables sectorielles extrêmement dynamiques, le bioalimentaire, la forêt, l'agriculture, la culture, le tourisme. On était capables très bien de s'occuper de nos affaires. Alors, pourquoi briser, déranger ce qui va bien? La question se pose.

Alors, n'oubliez pas qu'il est de votre responsabilité, tel qu'il est inscrit dans le projet de loi n° 34, de soutenir le développement économique et régional en favorisant notamment la coordination et la concertation des différents acteurs des domaines économiques, scientifiques, sociaux et culturels dans une perspective de création d'emplois, de prospérité économique, de développement scientifique durable et de prise en charge de ce développement par les collectivités locales et régionales dans le cadre d'un partenariat entre elles et l'État.

Et je continue. Je veux vous parler, M. le Président, de M. Normand Gagnon, qui est président du Conseil central du Bas-Saint-Laurent de la CSN. Il a déposé un document de travail produit par la CSN à mon bureau de comté, à Mont-Joli. À propos de ce projet de loi, on ne se contente pas, selon lui, de chambarder l'ensemble des structures existantes. Le projet de loi n° 34 s'attaque aussi aux rapports entre l'État ? et ça, c'est important ? il s'attaque aux rapports entre l'État, les élus municipaux et les acteurs socioéconomiques. Il instaure un rapport privilégié entre l'État et les élus municipaux, qui monopoliseront de plus en plus le pouvoir, un rapport de méfiance entre les deux paliers de gouvernement et la société civile, qui se verra marginalisée, M. le Président. Le projet de loi n° 34 transfère donc les responsabilités et les ressources en matière de développement économique aux MRC, donc aux élus municipaux. Le conseil d'administration du CLD sera composé aussi d'élus municipaux ? il l'était déjà ? avec des membres de la société civile. Il pourra également comprendre des personnes issues notamment du milieu des affaires et des milieux associatifs et communautaires, ainsi que le ou la députée et les directeurs du CLE sans droit de vote.

Et c'est le «peut» et le «doit». Dans ce projet de loi, c'est le «peut» et le «doit». Nous, c'était «doit», «doit». «Doit», hein, parce qu'on avait... Par exemple, la place des femmes, c'était important, on avait... Dans les CLD, on avait dit: Il faut qu'il y ait des femmes. «Doit», «doit». Et c'est toute la différence du monde entre pouvoir et devoir.

Contrairement à la Loi sur le ministère des Régions, la nouvelle loi ne prévoit pas, selon M. Normand Gagnon toujours, de dispositions pour assurer un équilibre adéquat entre les différents milieux représentés au sein du conseil d'administration. Dans l'ancien régime, aucun milieu représenté au sein du C.A. ne devait constituer la majorité. Les élus municipaux représentaient en moyenne le tiers des administrateurs. Dans le nouveau régime, les CLD sont des créatures des MRC et les élus municipaux détiendront la majorité absolue, voire la presque totalité des sièges. Les ressources financières accordées aux CLD, 62 millions, en 2003, seront versées directement aux MRC. Il faut cependant noter que le financement paritaire État-municipalité des CLD n'a pas été inscrit formellement dans le projet de loi, ce qui laisse présager d'un désengagement complet de l'État au cours des deuxième et troisième étapes du processus de décentralisation. Les budgets nécessaires devront suivre, M. le Président.

«Lorsque nous parlons de budgets nécessaires, nous rejoignons ici une inquiétude des dirigeants et dirigeantes du CLD.» C'est l'avis de Mme Annick Marquis, qui est directrice générale du CLD de La Mitis. «C'est bien, de responsabiliser les MRC, et, dans notre cas, nous avons toujours eu d'excellentes collaborations et concertations avec notre MRC. Ce qui nous inquiète, cependant ? selon Mme Marquis ? c'est l'éventuel retour des conférences régionales des élus au palier local, si on se réfère à l'article 98, section II. Dans quelle proportion la CRE aura-t-elle ce pouvoir? C'est sécurisant de savoir que nous pourrons maintenir la structure en place, mais ce n'est pas tout. Cette situation nous a fait réfléchir sur nos priorités, mais nous devons absolument avoir des précisions sur le rôle et le pouvoir de la Conférence régionale des élus.»

Le préfet de La Mitis, M. Gaston Gaudreault, rejoint également Mme Marquis dans cet ordre d'idées, et la conviction qui l'habite est que personne n'est prêt, dans le Bas-Saint-Laurent, à balayer du revers de la main les expertises développées par le CRCD. Il faudra, selon lui, trouver une façon de conserver ces expertises développées. Et le défi à relever est de conserver nos acquis, nos concertations et nos expertises. Nous travaillerons ensemble sur ces points. Mais est-ce que le projet de loi va permettre cela? C'est ça, la question.

Alors, je vois que le temps file, M. le Président, et j'ai quand même le goût de vous parler des types d'organismes que la Conférence va pouvoir considérer comme représentatifs des divers milieux présents dans la collectivité, M. le Président, au niveau du CRCD. Le gouvernement libéral, il répond à cette question. Selon M. Gagnon, en proposant une définition de la société civile qui s'éloigne de la définition sociologique et politique usuelle, il définit la société civile par les domaines d'activité ? on est habitués à ça ? éducation, culture, économie, science, et non par les groupes socioéconomiques, comme le milieu des affaires, institutionnel, communautaire, des travailleurs, coopératif, agricole, forestier, entre autres.

n(16 h 50)n

Sur les conseils d'administration des conférences, les sièges additionnels ne seront pas alloués d'office et comblés directement par les groupes en question, dont les syndicats. En résumé, la nomination des représentants de la société civile, la durée de leur mandat, la nature de leurs pouvoirs dépendront ? hein, «peut» et «doit», «peut» ? de la bonne volonté politique des maires, des réseaux personnels ? je tiens à le dire ? d'influence et des rapports de force institués dans chacune des régions du Québec, l'ensemble du processus pavant la voie à l'arbitraire, au clientélisme et au patronage, hein? Mais, si ? je dis bien si ? les élus présents à la CRE, par souci d'impartialité, souhaiteraient donner réellement plus de pouvoirs aux représentants des groupes socioéconomiques, eh bien, la loi ne le leur permettrait pas.

Nous, on se l'est posée, la question: Est-ce qu'on pourrait garder les choses comme elles sont? Je le disais tantôt, ça marche, ça fonctionne. Bien non. La loi, c'est un tiers, deux tiers. Alors, c'est ça, la fin du mur-à-mur, hein? Ça fait 20 ans qu'on en entend parler, de ça, de la fin du mur-à-mur. C'est ça, la fin du mur-à-mur, selon eux, hein: la même recette, la même médecine, puis vous allez vous couler dans le moule.

Moi, là, j'ai fait une maîtrise en développement régional. J'ai passé deux ans de ma vie à étudier ces questions-là. J'ai passé deux ans de ma vie, M. le Président, à comparer les politiques et les programmes du Parti libéral à ceux du Parti québécois. Deux ans de ma vie, j'ai fait ça, hein? Puis je vous dis que là, là, on avance par en arrière, hein, comme dans les autobus, à Montréal. Je ne les prends pas souvent, mais quand je les ai pris, c'est ça, on avance par en arrière.

Alors, M. le Président, les citoyens et citoyennes de ma circonscription ont fait la démonstration que leur développement économique ne repose pas seulement sur des entreprises innovantes et performantes, mais aussi sur des apports humains significatifs, et c'est ça, là, qu'on est en train de briser. Et vous me faites signe, il me reste juste une minute.

Alors, dans ma minute, là, je vais l'utiliser pour vous citer un journaliste de ma région que je respecte beaucoup parce que, je vous dis, des fois, il n'est pas... Il n'est pas complaisant, ce journaliste-là, il dit les choses, je pense, comme elles sont. Gilles Gagné. Il dit: «Il y a mieux à faire que de changer les structures.» Il dit: «Comment le gouvernement de Jean Charest, élu en promettant d'appuyer les régions, peut-il commencer un mandat en réformant les structures de développement?» Il dit: «Cette décision canalise les efforts dans un exercice bien abstrait, alors que la Gaspésie, Les Îles, le Bas-Saint-Laurent, l'Abitibi-Témiscamingue ? chez vous ? le Saguenay?Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord ont besoin de gestes concrets pour relancer leur économie. Fallait-il être décroché des réalités ou cynique pour agir de cette façon? Sans doute un peu des deux.» Ce n'est pas moi qui l'ai dit, mais ça fait une belle fin pour ma... Hein, c'est très bien. Alors, c'est ça, le développement régional, selon les gens d'en face. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Matapédia. Et je reconnais maintenant M. le député du Lac-Saint-Jean, porte-parole en matière d'environnement et de jeunesse. M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Parler de développement régional est toujours, pour moi, quelque chose de très passionnant parce que le défi est grand, mais c'est un beau défi auquel j'ai toujours voulu travailler dans ce créneau-là. C'est peut-être un des éléments, avec la souveraineté du Québec, qui m'a amené en politique.

La structure économique actuelle ? et ça, ce n'est pas juste au Québec, je le dis régulièrement ? la structure économique actuelle dans laquelle nous sommes embarqués a un effet pervers, celui de tendre vers la concentration vers les grandes villes, hein? Que ce soit en France, que ce soit en Australie, ou au Québec, ou en Saskatchewan, il y a actuellement une tendance lourde de centralisation pour les entreprises et de se rapprocher des marchés.

Loin de moi de penser qu'il n'y a plus d'espoir pour les régions. Bien au contraire, je crois que les régions ont beaucoup à offrir en matière de qualité de vie. Par chez nous, par exemple, on a beaucoup de jeunes qui vont étudier à l'extérieur, mais, vers l'âge de 25, 30 ans, lorsqu'on commence à penser à fonder une famille, beaucoup d'entre eux réalisent que c'est leur patelin qui demeure le meilleur endroit pour élever une famille, et aussi pour plein de phénomènes. Je vous dirais juste...

Je prenais dernièrement une étude qui démontrait qu'un travailleur qui arrive au travail après avoir fait une demi-heure dans un bouchon de circulation arrive beaucoup plus stressé au travail et moins productif, et la même chose lorsque, pour retourner le soir à la maison... Probablement qu'à cette heure-ci, hein ? on n'a qu'à penser, Montréal, Québec ? les nombreux bouchons de circulation, on arrive à la maison tendu, stressé. Donc, juste à ce niveau-là, c'est un élément majeur.

Autre élément, le coût de la vie, le coût de la vie qui est beaucoup plus bas en région. Et puis je pense que c'est un des éléments d'ailleurs qu'on est en train de travailler comme argument attrayant pour les régions, c'est que le dollar du Saguenay?Lac-Saint-Jean n'a pas la même valeur que le dollar de Montréal, puisque passez un vendredi soir à Montréal et passez un vendredi soir en région, vous allez voir que le coût est nettement différent si on calcule le stationnement, la gardienne, le restaurant, et tout, et tout.

Beaucoup de gens pensent qu'il n'y a pas de vie culturelle en région. C'est totalement faux. C'est totalement faux. Moi, je mets tout le monde au défi de venir voir qu'est-ce qui se passe en région. Et même de ça, je dirais qu'à bien des égards nous sommes un incubateur à talents. Oui, bien souvent, hein, les créateurs s'exilent dans les grands centres, mais je pense que le Québec doit faire un effort majeur pour maintenir la vitalité dans les régions, puisque... Bon, moi, je concède que régulièrement il y aura des gens qui prendront la décision d'aller vivre dans les grands centres, c'est leur choix, et c'est d'ailleurs une contribution incroyable que les régions font et continueront de faire probablement pour les grands centres. Au-delà des ressources naturelles, il y a, bien entendu, et je le dis souvent, une forme de subvention incroyable que les régions font aux grands centres, c'est celle de parfois envoyer leurs meilleurs créateurs, leurs meilleurs cerveaux. Et ainsi c'est la raison pour laquelle je crois que le Québec entier doit être solidaire des régions.

Maintenant, pour arriver à faire un développement régional convenable, ça prend des organisations, ça prend des organisations régionales. Bon, bien entendu il y a les municipalités, que tout le monde connaît, il y a les MRC, municipalités régionales de comté, que peut-être les gens connaissent moins mais pas mal plus, et il y a les CRCD, les conseils régionaux de développement et de concertation. Dans certaines régions, on appelle ça des conseils régionaux de développement. Je vous dirais que, si on faisait un sondage, M. le Président, ce n'est certainement pas 100 % de la population qui connaissent c'est quoi, un CRCD. Je vous dirais même de ça que, lorsque j'ai commencé à m'impliquer en politique, et ça a été une de mes premières implications sur le plan du développement régional, lors des états généraux sur le développement de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean qui étaient organisés par la CRCD, bien, j'ai dû apprendre qu'est-ce que c'était, le développement régional, qu'est-ce que c'était, la concertation régionale, et c'est à partir de là que j'ai réalisé que, au-delà des municipalités, au-delà des municipalités régionales de comté, il y a dans chaque région un organe qui tente d'avoir une vision globale du développement régional, qui amène les gens à travailler ensemble et de tous les secteurs.

Et c'est ça, la beauté, je crois, de ces organisations, de ces structures, c'est que, au lieu que ce soient quelques personnes, un petit clan qui décide la direction que prendra une région, eh bien, on met alentour d'une table les principaux intervenants du développement régional. Et je n'ai qu'à penser, chez nous, la grande entreprise est présente à la table du CRCD, le milieu scolaire, la santé, l'éducation, l'environnement, les PME, les jeunes, les autochtones, le milieu communautaire, les femmes, les syndicats, le tourisme, la forêt, l'agriculture. Donc, tous ces gens-là sont amenés... ou peut-être forcés, peut-être certains diront que, hein, tout ce monde-là, ça va être dur à faire en sorte qu'il arrive à s'entendre. Mais, justement, le défi des régions, c'est qu'on arrive à travailler ensemble dans la même direction. Et l'organe du CRCD...

Une voix: ...

M. Tremblay: ...l'organisme du CRCD a justement cet objectif d'amener les gens à travailler ensemble dans la même direction. Et je vous dirais que, par chez nous, on s'est donné un créneau de développement qui est la vallée de l'aluminium, la transformation de l'aluminium, bien, c'est grâce au CRCD. Parce que, à un moment donné, tout le monde s'est dit: Bon, bien, O.K., d'accord, la grande industrie n'embauche plus comme avant, il faut trouver des créneaux de développement. Et c'est de cette façon que nous sommes parvenus à établir des consensus. Parce que, établir des consensus, ce n'est pas quelque chose de facile dans toutes les régions, hein? Il y a des petites guerres de clocher, chacun tire un petit peu la couverte de son bord. Mais justement l'organisme régional qu'est le CRCD a cet objectif-là.

n(17 heures)n

Un dernier événement récemment où on a vu cet organisme travailler de façon remarquable est lorsqu'il y a eu le Rendez-vous national des régions et où on a demandé à chaque CRCD d'établir des priorités. Et ça a été un exercice absolument très intéressant et qui donnait beaucoup d'espoir.

Maintenant, aujourd'hui, M. le Président, on se retrouve avec une autre vision du développement régional, vision que je ne partage pas, et j'espère me tromper, j'espère que le gouvernement actuel voit clair dans ça, mais, moi, je vous dirais et je vous fais le pari, et j'espère que c'est un pari que je vais perdre, sincèrement, j'espère que ça va marcher, mais, d'expérience, j'ai beaucoup d'inquiétude.

Bien, ce qu'il faut voir, c'est que le projet de loi que nous étudions aujourd'hui fait en sorte d'abolir le CRCD. Et le CRCD, ce n'est pas juste les représentants que je vous ai mentionnés tout à l'heure, les représentants de tous les secteurs d'activité, c'est aussi des gens compétents, des fonctionnaires, des gens permanents qui travaillent à la Maison des régions ? c'est comme ça qu'on l'appelle chez nous ? et qui ont une expertise du développement, qui ont une expertise de la forêt, qui ont une connaissance globale et régionale et faisant en sorte que, lorsque la région fait face à des défis ponctuels ou permanents, eh bien, ces gens-là sont sur le terrain et connaissent la réalité. Or, qu'est-ce qui va arriver avec ces gens-là? On ne le sait pas. On ne le sait pas, parce que ça va être maintenant... le nouveau conseil d'administration de cet organe décisionnel de la région, hein, d'abord, ce ne sera plus cette grande table où plusieurs secteurs d'activité sont représentés, mais ce sera la Conférence régionale des élus.

Donc, on abolit les CRCD, on crée un nouveau conseil d'administration qui sera composé des élus, et, quand on parle des élus, on parle des préfets des MRC, on parle des maires de municipalités locales de 100 000 habitants et plus, on parle des villes-centres et on parle des maires de municipalités locales énumérées à l'annexe dans la loi. Bref, chez nous, dans le comté Lac-Saint-Jean, le comté que je représente, ça voudra dire un préfet ? qui est le maire de L'Ascension ? et le maire d'Alma, qui siégeront sur cet organisme-là. Maintenant, deux tiers de cette Conférence sera constitué d'élus, comme je viens de vous énumérer, et l'autre tiers, eh bien, ce sera possiblement des gens de la société civile. Mais ça change la dynamique, ça change énormément la dynamique, puisqu'il faut comprendre qu'un maire, lorsqu'il est élu, il est élu pour défendre sa municipalité, défendre sa ville, avoir la vision pour sa ville, et là on va demander à des maires... Et je ne doute pas que certains maires arriveront à avoir cette vision régionale, cette vision globale, mais je suis très inquiet à l'effet que plusieurs maires auront tendance à avoir de la difficulté à avoir cette approche régionale, mais plus un réflexe de défendre leur municipalité. Et c'est normal, ils sont élus pour ça, donc... Mais il n'empêche que, là, on va les forcer à travailler de cette façon-là, et ça m'inquiète.

Un autre élément qui est inquiétant par rapport au fait que ce seront les maires, c'est que les élections... En 2005 ? ça veut dire très bientôt ? tous les maires seront, toutes les municipalités seront en élection. Alors là, le temps qu'on mette en place cette structure-là, hein, le temps qu'on rode la machine, eh bien là ça va devenir de plus en plus difficile de travailler dans une vision globale et régionale, puisque chaque maire va avoir la tendance à tirer davantage sa couverte, sentant les élections approcher, et donc tirer un peu de son bord pour avoir le plus possible pour sa municipalité, et ça, ça m'inquiète fortement. Donc, ça risque d'être un vecteur engendrant un ralentissement ou un déchirement à travers la Conférence régionale des élus qui ne sera pas sain. Déjà, je peux vous dire que, par chez nous, juste dans l'établissement de cette Conférence-là, on peut voir certaines distorsions, certains maires qui veulent prendre plus de place que d'autres, et ça m'inquiète fortement.

Un autre élément qui m'agace beaucoup dans ce projet de loi, c'est l'approche mur à mur que le gouvernement nous a amenée, cette nouvelle approche régionale. Je vous lirai en fin de compte ce que la ministre du Développement régional nous a dit lors de la conférence... à l'Association québécoise des régions: «Je sais que plusieurs d'entre vous avez des inquiétudes en regard des orientations que nous privilégions. Je comprends vos inquiétudes. Cependant, j'ai le devoir aujourd'hui de vous rassurer. Nous entreprenons une démarche dans laquelle nous vous convions. Le développement, c'est l'affaire de tous. Vous serez appelés à travailler avec les élus municipaux à l'élaboration d'un nouveau modèle d'organisation dans votre région. Il n'est pas question pour nous de vous imposer une façon de faire, les choix vous appartiendront.»

Encore une fois, M. le Président, en ce temps des fêtes, on s'est fait passer un sapin, puis pas à peu près, parce que, lors de cette conférence-là, bon, oui, il y avait des inquiétudes, mais le monde se disait: Bon, bien, la ministre nous a dit, hein, que ce ne sera pas du mur-à-mur, donc peut-être qu'on va pouvoir garder notre formule, à condition que les maires soient en appui par rapport à ça, puis on avait beaucoup d'espoirs qu'il en soit ainsi.

Mais là, surprise, le projet de loi est déposé, et qu'est-ce qu'on a? On a une formule mur à mur à travers le Québec: deux tiers d'élus, un tiers de non-élus, et c'est coulé dans le béton. Il n'y a plus rien à faire. Il n'y a pas de consultation... bon, certains diront qu'il y a une consultation, la ministre se promène, mais ce n'est pas une consultation, ce n'est pas une commission parlementaire. Hein, je veux dire, on paie des taxes, on est élus, nous, ici, pour faire des lois, pour améliorer des lois, ouvrir les portes du parlement à la population, qu'elle vienne bonifier les projets de loi, et c'est en commission parlementaire, lorsqu'on reçoit des experts, des gens du milieu qui peuvent nous dire: Bien, voici, vous devriez faire ça comme ça, vous devriez changer votre orientation, c'est à ça que ça sert, une commission parlementaire, M. le Président.

Bien, dans le cas de cet important projet de loi, encore une fois, les portes du parlement vont demeurer fermées. Et la ministre prétend qu'elle se promène à travers le Québec pour consulter, pour soi-disant consulter, mais je vous dirais que, par chez nous, là, là où... le moment où la ministre va venir chez nous, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, bien, trois jours plus tard, on va voter la loi. Donc, consultation mon oeil! C'est plutôt une tournée d'information et où les régionaux n'auront pas leur mot à dire.

Alors, le gouvernement actuel qui accusait le gouvernement antérieur de toujours vouloir faire du mur-à-mur, bien, je m'excuse, mais on s'est fait passer un sapin, puis pas à peu près. Donc, ça, c'est très déplorable. Sans consultation, du mur-à-mur, ce n'était absolument pas ce qu'on nous avait dit, et ça nous amène à penser que c'est très inquiétant, très inquiétant.

Bref, l'autre élément, c'est que ça... Bon, le gouvernement actuel amène l'argument qu'il faut que les personnes qui prennent les décisions dans cette instance régionale soient imputables et que les maires, étant des personnes élues, ils sont imputables envers la population. Mais, à ce que je sache, les gens qui constituaient la table du Conseil régional de développement et de concertation, le CRCD, étaient des gens élus, hein. Si on parle du monde scolaire, ce sont des gens élus, que la population peut élire. Dans le monde de la santé, bien, c'est encore un conseil qui est... où les gens peuvent avoir leur mot à dire; au niveau de l'environnement, c'est le Conseil régional d'environnement. Ce n'est pas des gens, là, qui sont dans leur petite gamique puis que, pouf! ils apparaissent sur ces tables-là, loin de là.

Au niveau des jeunes, hein, je suis particulièrement sensible à cette question-là parce que j'ai travaillé fortement, dans ma région, à s'assurer que nous puissions avoir un jeune qui siège à cette instance régionale, jeune qui est élu par les forums jeunesse régionaux, un représentant des communautés autochtones, représentant des groupes communautaires qui représentent des secteurs d'activité très importants pour nos communautés. Les syndicats, venez pas me dire que les représentants syndicaux, ce n'est pas des gens élus. C'est des gens qui sont élus de la part des travailleurs, puis d'autant plus que ces représentants-là, je vous le rappelle, ce sont des gens, bien souvent, qui sont élus par une sphère d'activité, oui, particulière, telle que le syndicat, l'éducation, mais qui sont élus sur une base régionale. Donc, qu'on parle d'imputabilité, bien, moi, je prétends que ces gens-là étaient imputables dans leur secteur d'activité, et c'était la beauté de la chose, c'était la beauté de la chose. Donc, ça faisait en sorte qu'il y avait ce que je pourrais appeler une démocratie participative.

n(17 h 10)n

Trop souvent, actuellement, les citoyens ont tendance à se désintéresser de la politique parce qu'ils sentent qu'ils n'ont à dire dans les décisions. Eh bien, avec cette formule-là, je prétends que ce qu'on appelle la société civile... les gens qui émergent des diverses sphères d'activité avaient leur mot à dire. Et, à cet égard, je vous lirai l'extrait d'un discours de Michel Venne, un discours qu'il a prononcé à la Conférence inaugurale des rencontres internationales de l'ENAP, et il cite: «La reconnaissance d'un rôle à la société civile découle d'une préoccupation de répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État en leur faisant une place plus grande au sein du même processus de décision politique. Il s'agit de prendre les moyens pour reconstruire des liens entre les citoyens et les institutions, d'aménager des passerelles, de se mettre à l'écoute des préoccupations des gens. Il s'agit aussi de contrer le désengagement social, de combattre l'apathie des citoyens et leur indifférence face à la chose publique.»

Donc, voilà. Il y a actuellement, je vous dirais, bien, peut-être pas partout dans le monde, mais certains endroits dans le monde qui tentent d'ouvrir plus grande la participation aux citoyens. Et un des exemples de ça, c'est Porto Alegre au Brésil où la grande ville de Porto Alegre fait même son budget municipal en collaboration avec les citoyens. On se déplace dans les quartiers, et c'est les citoyens qui construisent graduellement le budget ? ils appellent ça un budget participatif, d'ailleurs ? et c'est une tendance qui tente d'aller à l'encontre du phénomène actuel de concentration des pouvoirs économiques et politiques. Et c'est une formule que je trouve intéressante.

Or, la tendance de ce projet de loi, M. le Président, bien, elle va à l'inverse de cette approche moderne, selon moi. Elle va plutôt mettre de côté la société civile, donc mettre le pouvoir régional dans les mains d'élus... Bon, j'ai beaucoup de respect pour ces élus et je suis bien content que les représentants de mon comté siégeront sur cette Conférence. Ce sont des gens très dynamiques, mais, même de leur... même eux prétendent que nous allons avoir une perte majeure d'expertise.

Parce qu'il faut savoir que les maires n'ont pas les connaissances ? les députés non plus, d'ailleurs ? n'ont pas les connaissances que... dans tous les secteurs d'activité: forêt, agriculture, industrie, environnement, syndicat, tourisme, et tout ça. Donc, cette expertise, nous l'avions, nous l'avions. Et là qu'est-ce qu'il va en advenir? Qu'est-ce qui va se passer avec ça? Bien, c'est... on peut se poser des questions.

Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président... Je ne suis pas contre le projet parce que je suis dans l'opposition, là, mais c'est parce que ça fait sept ans que je fais du développement régional, puis j'ai une très grande inquiétude ? puis j'espère que je me trompe, j'espère que je me trompe ? mais sincèrement, là, j'ai l'impression qu'on fait de la structurite, on perd du temps alors que le temps nous est compté. On n'a pas de temps à perdre.

Alors qu'on avait fait un Rendez-vous national des régions, on était partis sur une erre d'aller, le premier ministre avait dit que ça avait du bon sens, ce qui s'était passé là, qu'il allait aller dans la même direction. Mais, aussitôt qu'il est arrivé au pouvoir, il a tout foutu ça par terre. On recommence à zéro, on refait une autre structure. Le temps que cette structure-là soit fonctionnelle, on va perdre du temps incroyablement.

Puis encore, imaginez, le fait qu'il y ait des élections en 2005... C'est tout le temps que j'avais, M. le Président? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Je reconnais maintenant pour la poursuite du débat, toujours sur l'adoption de ce principe du projet de loi n° 34, M. le député de Beauharnois. M. le député.

M. Serge Deslières

M. Deslières: Merci, M. le Président. Vous me permettez, en cette fin d'après-midi, de joindre ma voix à celle de mes collègues qui m'ont précédé pour dénoncer ce projet de loi n° 34, projet de loi n° 34 qui a comme titre Loi sur le ministère du Développement économique et régional.

Mais, avant d'aller au coeur de ce projet de loi, M. le Président, vous me permettrez d'aller un peu en amont, voir un peu l'histoire et le discours du Parti libéral qui était dans l'opposition dans le temps et qui est maintenant au gouvernement. Que nous disait le Parti libéral? Le Parti libéral se disait... il faisait le tour des régions: Maintenant, nous sommes un parti des régions. Nous avons compris les besoins, nous avons consulté, écouté la population dans tous les coins du Québec. Ça, c'était le discours avant les élections. Le 14 avril est venu, le Parti libéral a été élu.

Quelle ne fut pas notre surprise de voir le premier geste de ce gouvernement d'abolir, d'abolir le ministère des Régions. Premier geste, on abolit le ministère des Régions. Et, qui plus est, M. le Président, on envoie chez eux les 16 sous-ministres qui accompagnaient les régions dans leur planification, dans leur développement, qui les accompagnaient au jour le jour, faisaient un immense travail, un magnifique travail. Tous ces gens étaient considérés par les gens de leur milieu, qu'ils accompagnaient dans leur planification, leur développement.

Mauvais signal aux régions, M. le Président. Première déception des régions, c'était le premier ministère des Régions que le Québec s'était doté. On l'a volé, ministère qui avait dans sa mission de voir au développement régional, qui inclut bien sûr le développement économique, le développement social, le développement culturel dans toutes ses facettes. On abolit. On n'a plus besoin de l'expertise de ces personnes, de ces experts, de ces sous-ministres.

Mais deuxième surprise, et elle fut de taille, M. le Président, premier budget de ce gouvernement: réduction des sommes vouées au développement des régions, au développement régional. Coupure, pas de 3 %, pas de 5 %, M. le Président, croyez-le ou pas, de 23 % ? de 23 %. Le budget du ministère des Régions passe de 751 millions de dollars pour être réduit à 581 millions; perte sèche pour les régions pour le développement: 178 millions de dollars. Alors, les faits n'ont pas accompagné les paroles, les bonnes intentions de ce parti. On était pour les régions, premier geste, on abolit. On renvoie chez eux 16 sous-ministres puis on coupe de 23 % le budget. Comme il fallait s'y attendre, M. le Président, grande déception dans chacune de nos régions, on en a entendu parler.

Et on continue. On nous arrive, il y a quelques jours, avec la présentation du projet n° 34. Alors là on s'est dit: Bien là ils vont se reprendre, on va vraiment parler de décentralisation, on va vraiment parler de moyens, on va donner des responsabilités à ces gens-là suite au Rendez-vous national des régions. Hélas non, M. le Président! Tout ce qu'il y a dans ce projet de loi n° 34, un changement de structure. On abolit les CRD pour créer les conférences régionales des élus, et là, tenez-vous bien, au niveau local, on abolit les CLD pour les réinventer, pour les faire renaître à nouveau. Pourquoi changer? Qui a demandé ces changements de structurite, ces changements de structure? Ce qu'on demandait dans les régions, M. le Président, c'est qu'on poursuive ce qui avait été commencé au niveau du Rendez-vous national des régions, où les gens s'étaient mobilisés, où on avait mis ensemble 80... on avait pris ensemble ? société civile, élus, gouvernement ? 80 engagements, où on avait développé, dans plusieurs régions, une gouvernance régionale qui représentait la spécificité de chacune des régions qui en avait produit une.

Qui a demandé... J'ai fait le tour chez nous, M. le Président, dans mon coin de pays, est-ce qu'on demandait un autre changement de structure, les débats avaient été faits? Est-ce que les structures des CLD, des CRD, dataient de 25, 30, 40 ans, où, là, il aurait fallu sans doute faire des modifications, apporter des rafraîchissements, des modifications, des changements? Mais non, M. le Président, ça fait cinq ans que nous avons ensemble, comme société, comme gouvernement, lorsque nous étions au pouvoir, créé ces structures où étaient réunis des élus municipaux, scolaires, société civile. Et force est de constater, et avec quel regret, M. le Président, que, dans le projet 34 soumis par le ministre du Développement régional et économique, on en arrive à un constat désastreux en termes démocratiques: on exclut la société civile de ces lieux de pouvoir.

n(17 h 20)n

Quand on parle de société civile, on parle de qui? Vous allez me permettre de prendre quelques instants pour situer un peu où on la retrouve, cette société civile. Est-ce qu'elle avait d'affaire là, dans ces lieux de pouvoir et ces lieux décisionnels? Il y en a une panoplie, M. le Président. Ce sont des gens qu'on retrouvait au niveau du développement économique: entrepreneurs, chambres de commerce, entreprises, évidemment, secteur communautaire ? on sait tous l'importance du secteur communautaire dans l'organisation sociale et collective de nos communautés ? on parlait bien sûr des coopératives, qui faisaient partie des tables de décision, qui travaillaient de concert avec les élus, on parle bien sûr de nos partenaires du milieu syndical, des gens de l'agriculture, des gens qui portaient leur intérêt au niveau des questions environnementales, du tourisme, du loisir, de la culture, les groupes de femmes, les groupes des aînés. Alors, l'ensemble de la population était réunie et travaillait, travaillait à développer des dossiers structurants pour le développement économique, social, culturel, un développement intégré à un développement global.

Aujourd'hui, on leur montre la porte, on leur dit aujourd'hui, le gouvernement leur dit: On n'a plus besoin de vous autres. On exclut des gens de leur propre région, de leur propre centre de décision. M. le Président, je crois sincèrement que le gouvernement est mal parti. Qu'ont-ils fait, ces gens? Qu'ont-ils fait, ces gens? Ont-ils la peste? Ce sont des gens qui ont participé au développement économique, culturel... c'est des gens qui ont le droit de participer à leur développement. Tout d'un coup, ces gens-là, on les rejette du revers de la main, on leur dit: Par ici, la sortie. Je ne crois pas que ce soit une attitude très démocratique, M. le Président, on sait bien qu'il faut absolument que nos sociétés, pour réussir leur développement, on demande à tous d'apporter leur intérêt, leur expertise, leur volonté, leur détermination. Personne ne doit se sentir rejeté quand on parle de développement. Mais là le projet de loi n° 34 dit: Nous, on ne vous fait plus confiance, on va confier ça essentiellement aux élus municipaux.

Ces élus municipaux étaient là, M. le Président, ils étaient là aux tables de travail, aux tables de décision. Petite statistique: ils représentaient 42 % au niveau des conseils d'administration ? 42 %. Plus encore, ces mêmes élus représentaient 57 % au niveau des conseils exécutifs de ces mêmes structures, aux CRD, au niveau régional et au niveau local. Alors, 42 % et 57 % des élus étaient présents, participaient au niveau des conseils exécutifs.

Ce débat, M. le Président, on l'a déjà eu lors de la mise en place. On revient avec les mêmes débats. Est-ce que c'est uniquement l'opposition qui critique, qui s'inquiète, qu'on parle de recul? Le ministre du développement de l'emploi me fait signe que oui. Surprise, M. le ministre! Je vais continuer de m'adresser à vous, M. le Président, je sais, je ne dois pas déroger. M. le Président, ce n'est pas uniquement l'opposition officielle qui dit son désaccord à ce projet de loi.

Quelques déclarations prises au hasard d'une littérature importante fournie dans les médias au cours des dernières semaines: «Les jeunes s'inquiètent de l'arrivée des conseils régionaux des élus.»«Remplacement des conseils régionaux de développement perçu comme un recul.»«L'économie communautaire se sent menacée à son tour. Les corporations de développement économique et communautaire demandent au gouvernement de ne pas démanteler un modèle qui donne des résultats probants en milieu urbain.»«Pourquoi recommencer ce que nous venons de terminer?», nous dit Claude Larose, vice-président du comité exécutif et responsable des dossiers économiques à la ville de Québec. «Les créateurs d'emplois doivent être entendus et doivent participer au niveau des tables de la Conférence des élus.» C'est les chambres de commerce, ça. «Confusion sur la gouvernance.» Même au niveau municipal, M. le Président, on n'y voit pas clair. Je vous fais un exemple qui s'est passé en Gaspésie, Gaspésie?Les Îles, région de la ministre déléguée au développement régional: «Les préfets de la région en rencontre ne s'entendaient même pas sur les municipalités qui seront assises à la table une fois la loi adoptée.» Pas trop clair.

Le président du Conseil régional de concertation et de développement du Saguenay?Lac-Saint-Jean, M. Réjean Bergeron, affirmait... Il disait ne pas apprécier que le projet de loi donne beaucoup plus de pouvoir aux élus mais, comme les maires et les préfets, au détriment de la société civile. «Un aspect négatif de ce projet de loi est le risque que des rivalités parfois ridicules paralysent leurs efforts, ou que s'installe une concurrence malsaine dans les tentatives d'attirer les entreprises dans l'aide et dans l'aide au démarrage des entreprises», signale M. Jacques Samson. «Développement régional: moins de pouvoir aux femmes.»«Bas-Saint-Laurent: une réforme qui inquiète. Chaudière-Appalaches, le monde scolaire exige de la place à la future Conférence régionale des élus. Plusieurs questions et pas mal de déceptions.»

n(17 h 30)n

M. le Président, ce n'est pas uniquement les députés de l'opposition qui s'inquiètent. On l'a vu, toute la société civile est en émoi. Toute la société se sent rejetée, M. le Président. Pourquoi défaire ce qui allait, ce qui fonctionnait? Chez nous, M. le Président, le CLD de Beauharnois, depuis 1998, a contribué à des investissements de plus de 35 millions, tout en favorisant le maintien ou la création de plus de 600 emplois. Et, au début d'avril 2003, M. le Président, il s'est produit chez nous une rencontre extraordinaire où nous avons... où le CLD de Beauharnois avait réuni plus de 80 acteurs socioéconomiques. 80 acteurs économiques se sont réunis pendant deux jours pour ressortir avec un plan stratégique de développement.

Et là on est passé, là, je dirais, de l'étape du discours, de la parole, avec des niveaux d'action: 14 projets, 14 projets ambitieux mais combien importants. Laissez-moi vous en citer quelques-uns, M. le Président: la table sur la diversification industrielle propose deux projets; la création d'un projet agrothermique Beauharnois-Salaberry; la table sur le développement récréotouristique propose deux projets: le développement du parc régional du canal de Beauharnois et l'aménagement concerté d'un réseau créatif, touristique et culturel. Voyez, M. le Président, ces gens-là... puis il y en a une série dont le temps qui m'est imparti m'empêche de vous en faire une énumération complète.

M. le Président, perte complète pour la société civile. Et, qui plus est, M. le Président, les femmes, les femmes qui étaient nombreuses dans ces lieux de décision, aujourd'hui, avec cette loi n° 34, vont apprendre ou ont appris que, dans six régions, il n'y aura plus aucune femme dans les conférences régionales des élus. Il y aura une femme à une table de conférence régionale des élus, elle sera en Gaspésie?Les Îles. Alors, six régions où aucune femme n'apparaîtra au niveau des tables de décisions, ne sera présente aux tables des décisions.

M. le Président, le gouvernement doit stopper, doit stopper, doit arrêter, ne doit pas adopter ce projet de loi dans les circonstances actuelles. Il doit recommencer à faire ses devoirs, M. le Président. Un, on arrête le tout et on va véritablement consulter, consulter les gens pour voir et connaître leurs besoins. Il doit refaire ses devoirs dans ce projet de loi n° 34 pour en faire un véritable débat de société... de véritable décentralisation, d'une véritable décentralisation. Responsabilités, pouvoirs accordés à chacune des régions, mais également les moyens, les revenus. «Where is the money?», comme on dit, où est l'argent? Là, on a des structures. On ne sait même pas ce que les gens vont avoir comme éléments de responsabilité, éléments de décentralisation, mais surtout, surtout, on s'en cache pas mal. Oh! Plus tard, soyez patients. Ce gouvernement, qui était si près. «Où est l'argent?», demandent les gens, les élus. «Où est l'argent qu'on a promis, qu'on a promis?»

Non, M. le Président, nous, on dit non à ce projet de loi, oui à une véritable décentralisation, et nous voterons contre ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député de Beauharnois. Je suis prêt à reconnaître l'intervenant suivant. Je reconnais maintenant M. le député de Gaspé, critique en matière de revenu. M. le député de Gaspé, à vous.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais commencer mon intervention pour rappeler à la population la première décision du gouvernement du Québec, gouvernement libéral, qui a été d'abolir le ministère des Régions, M. le Président.

La Gaspésie avait un plan de relance, la Gaspésie avait des outils, la Gaspésie avait des fonds. Le gouvernement du Parti québécois, lorsqu'il était au pouvoir, M. le Président, avait mis en place une machine pour le développement de la région. Depuis que ce gouvernement est arrivé en poste, là, il n'y a plus rien qui se passe. Tout le monde est arrêté.

D'ailleurs, même dans le comté de la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme, hein, un projet important, le projet Aqua-Mer, est au point mort. Le gouvernement ne sait pas quoi faire avec le projet. On propose toutes sortes de solutions qui ne fonctionnent pas. M. le Président, heureusement, heureusement que la plupart des dossiers que nous avions, des gros dossiers majeurs... Je pense au dossier de la Gaspésia que nous avons mis en chantier ? c'est un projet de 550 millions ? jamais le gouvernement du Parti libéral n'aura été partenaire dans un projet comme ça avec la philosophie qu'ils défendent.

M. le Président, l'autre élément qui est important: nous sommes à l'étude du principe de ce projet de loi, comment se fait-il que la ministre déléguée au Développement régional se promène partout au Québec avec leur projet, présumant, présumant que ce projet de loi sera adopté? Les parlementaires, nous sommes ici, dans cette Assemblée à discuter, nous, du principe de ce projet de loi, ils présument qu'il sera adopté parce qu'ils détiennent la majorité, et les consultations se font dans les régions comme si c'était normal que ça se passe comme ça. M. le Président, est-ce que l'Assemblée nationale ne serait pas souveraine? Est-ce que ce n'est pas ici, le lieu de défense d'abord et avant tout d'un projet de loi aussi important? Oui, M. le Président. Et je vois le ministre du Développement économique et régional qui est ici et je pense qu'il est d'accord avec moi: c'est ici qu'ils devraient être, les deux ministres, et argumenter et défendre leur projet.

M. le Président, nous avions des outils de développement, nous avions une corporation de développement économique et régional, hein! Les CRCD étaient là, les conseils régionaux sont là pour faire du développement. Nous avions une formule qui fonctionnait. Et je dois rappeler à cette Chambre que ce n'est pas le Parti québécois qui avait créé les conseils régionaux, c'est le Parti libéral, c'est le parti à ce moment-là dont la responsabilité incombait à Marc-Yvan Côté. Les centres locaux de développement, oui, nous les avons créés, oui, nous avons améliorer la structure que le Parti libéral avait mise en place, mais, M. le Président, on n'a pas jeté par-dessus bord tout ce qui avait été fait. Comment se fait-il, comment se fait-il qu'on se retrouve, qu'on se retrouve aujourd'hui dans cette Assemblée à débattre, hein, à débattre pour faire de la place à des gens qui veulent faire du développement économique?

M. le Président, le premier ministre du Québec, lorsqu'il a fait son discours, hein, lors de l'inauguration de la Trente-septième Législature, qu'est-ce qu'il nous a dit? «Nous ferons confiance [...] aux [...] régions du Québec. Nous opterons pour le sur-mesure plutôt que[...] ? du ? mur-à-mur.» Qu'est-ce que dit le ministre du Développement économique et régional? On vous met en place une structure, vous allez rentrer dans ce moule, et ça finit là. Ce sont les maires qui vont diriger les CLD, ce sont les maires qui vont diriger les conseils régionaux, les conférences régionales des élus. Et, les autres, bien, on n'a pas besoin de vous. Si vous voulez, on peut toujours vous faire une place dans l'antichambre, sur des tables sectorielles. C'est ça, le projet de développement économique que le ministre nous prépare; c'est ça, la structure.

Et, lorsque je lis, M. le Président, les articles d'un journaliste de la région qui a écrit récemment: «Le gouvernement semble avoir pris la voie de la structurite»... et c'est effectivement ce que le gouvernement a fait, M. le Président. Le gouvernement semble ne pas savoir ce qui se passe dans les régions. Ils ont beau nous dire qu'ils ont sillonné le Québec, le premier ministre nous dit: J'ai sillonné le Québec, ses députés nous disent: J'ai sillonné le Québec, comment se fait-il qu'ils remettent en question les structures?

Est-ce que le ministre, par exemple, de l'Emploi est d'accord qu'on abolit, par exemple, les centres locaux d'emploi, hein? C'est inscrit dans le programme du Parti libéral: il y a trop de structures. Les carrefours jeunesse-emploi, ils veulent... Il y a trop de structures, c'est des jeunes qui sont là, M. le Président. Les corporations de développement économique et communautaire, c'est le monde communautaire qui est là.

n(17 h 40)n

Comment se fait-il qu'il n'y a pas un seul libéral ou une seule libérale qui se lève dans cette Assemblée pour dire à son gouvernement: «Vous êtes dans l'erreur»? Ce n'est pas nous qui disons que vous êtes dans l'erreur uniquement, hein! «La réforme Audet-Normandeau présente des vices de fond. Le vice de fond créé par la réforme est plus pernicieux. Il touche à long terme l'exercice même du pouvoir politique. Plutôt que de livrer sur un plateau d'argent tout le rapport de force régional à un groupe particulier, ce sont les comportements collectifs des intervenants qu'il faut secouer en priorité. Au lieu de mobiliser le potentiel humain, de respecter l'identité des régions et d'encourager la coopération, le gouvernement choisit de réduire le cercle d'influence autour d'un groupe. Déjà le jeu de pouvoir! Dans ce contexte, comment renouveler le leadership, comment favoriser l'émergence d'une nouvelle élite de décideurs?»

Le ministre du Développement régional peut-il nous dire comment il va mobiliser la société civile, comment il va mobiliser les acteurs dans les régions? Comment, par exemple, dans la MRC de Matane ? j'écoutais dernièrement les nouvelles, M. le Président ? la MRC la plus pauvre de la Gaspésie... Quel est son plan d'action, au ministre, pour ça? Quel est le plan d'action du ministre du Développement économique et régional pour la Gaspésie? Est-ce que le ministre est en mesure de nous en présenter un? Allons-nous avoir le même plan d'action que le gouvernement de M. Landry, M. le Président, le gouvernement du Parti québécois avait mis en place? Nous avons relancé l'économie, nous sommes sur l'élan. Mais attention! Attention! Le retrait du Parti libéral, le retrait du gouvernement libéral va nuire considérablement à la région. Vous allez voir les statistiques en décembre, en janvier, en février, les taux de chômage. Là, on se maintient à un niveau assez bas, mais déjà encore trop haut, à 16 % de chômage. Combien de régions du Québec ont un taux de chômage de 16 %? Et, en hiver, on monte à 25 %. Qu'est-ce que le ministre va faire avec ses solutions miracle de structurite?

Comment se fait-il, M. le Président, que tous les observateurs considèrent que... Le ministre lance sa réforme; Les CLD remis en question, alors que le ministre veut donner plus de pouvoirs aux élus; Une réforme qui fait des vagues. M. le Président, je pourrais lire une série d'articles, hein, la revue de presse est tellement riche de ce temps-ci qu'on ne pourra pas tout lire ces articles-là ici, à cette Assemblée, M. le Président.

Qu'est-ce qu'on a au niveau local? C'est quoi, la représentation des CLD? Je peux vous en parler, des CLD dans ma région, hein! Il y a quatre élus municipaux qui siègent au conseil d'administration; il y a les gens d'affaires, les gens qui sont dans le commerce; le monde de l'éducation est au CLD; la santé est au CLD; les travailleurs sont représentés; le monde coopératif est représenté; le monde communautaire est représenté; le monde agroalimentaire, la forêt y est, le culturel, les jeunes y sont. Pourquoi on veut défaire puis refaire? Et c'est la même procédure au niveau régional. Il y a des gens qui travaillent bénévolement sur des commissions sectorielles depuis des années. Ils sont dans le secteur de la forêt, ils sont dans les mêmes secteurs: dans la santé, dans l'éducation, dans le domaine communautaire, dans le domaine coopératif. Et là on va leur dire, à ces gens-là: Bien, écoutez, on va voir qu'est-ce que les maires vont décider. Peut-être qu'ils vont les garder, peut-être qu'on va changer la structure.

Même, vous savez, les gens de la Gaspésie ont été un petit peu plus ingénieux et ils ont pris au mot, hein, ils ont pris au mot ce que le chef du gouvernement leur a dit: Il n'y aura plus de mur-à-mur. Ils ont présenté un projet, M. le Président. Ils ont présenté un projet dans lequel il y avait des élus, il y avait les gens de la société civile, des représentants des commissions scolaires. Donc, pourquoi le gouvernement s'entête à refuser, dans le fond, à ces gens-là qui ont travaillé sur un projet de gouvernance régionale, à refuser leur modèle?

Quand le gouvernement dit et que les ministres disent: «Il n'y aura pas de mur-à-mur», le député de Kamouraska, qui est ministre aujourd'hui, je suis persuadé qu'il partage mon avis, qu'il doit être déçu de son gouvernement. Il doit être déçu, M. le Président, parce que, dans un document, hein, dans un document du Parti libéral, le document Nos régions: des acteurs de premier plan du développement économique régional, à la page 12, on y dit ceci: «Nous avons assisté au cours des dernières années à la multiplication d'organismes d'intervention. Citons[...] ? en ? exemple les CJE.» J'aimerais bien qu'ils se lèvent, les députés du Parti libéral, pour nous dire qu'ils sont contre les carrefours jeunesse-emploi. Il y en a dans leur région, il y en a dans leur MRC. Les centres locaux d'emploi... Le ministre, le député de Kamouraska, il est ministre de ce ministère. Il va-tu vouloir voir disparaître des centres locaux d'emploi, M. le Président? Les CLD ont fait leurs preuves, ils font du... il y a du développement local qui se fait, et, les gens qui y sont, ils travaillent bénévolement sur les conseils d'administration.

M. le Président, on est en train de détruire, de détruire l'énergie que les gens mettent dans leur développement dans leur communauté. L'engagement de ces gens ne vise pas à leur rapporter un profit personnel; ce sont des personnes bénévoles qui veulent faire en sorte que leur milieu se développe correctement dans toutes les sphères d'activité.

Les CRD. Qu'est-ce qu'ils ont contre les CRD? Qu'est-ce qu'ils ont contre les personnes qui sont désignées par des collèges électoraux pour être sur les CRD? Chez nous, ça fonctionne comme ça. Les aînés y étaient, les jeunes y étaient, les femmes y sont ? elles y étaient à tout le moins ? et là, aujourd'hui, bien, on se retrouve qu'on n'a pas... on n'a plus ce que nous avions.

Les dernières nouvelles, M. le Président, hein, les nouvelles qui arrivent de la région sont inquiétantes. Les nouvelles sont inquiétantes parce que la région est en train de livrer, hein... elle est en train de se déchirer pour savoir qui va siéger, qui va siéger à la future Conférence régionale des élus. Il y a des maires qui ont été désignés, hein, dans une annexe, là, qui est à la fin du projet de loi; il y a des municipalités qui sont totalement oubliées. Comment s'est fait le choix?

Et d'ailleurs ils le disent, hein, ils le disent, les maires. Ils le disent dans les nouvelles, hein! «La structure devra fonctionner dans...» Excusez-moi. La ministre est venue en région pour nous dire: Ah! Les maires, ils pourront adapter leur structure. Mais elle rajoute du même souffle ? écoutez bien ceci, M. le Président, les nouvelles du 2 décembre 2003: «Les maires devront fonctionner à l'intérieur du cadre financier qu'on leur aura fixé.» Et là on vient d'annoncer, on vient d'annoncer, M. le Président, aux CLD et aux CRD «qu'ils auront à vivre avec des compressions de 10 %. Cependant, il faudra vivre avec cette compression pour 2004-2005.» À ce que je sache, le budget du gouvernement du Québec n'est pas encore déposé pour 2004-2005, et déjà, déjà on ajoute des compressions, M. le Président, dans le développement économique.

Le gouvernement libéral abandonne les régions du Québec. Il s'est fait élire en disant à la population: Nous allons vous donner les moyens, nous allons vous donner les ressources, et dans tous les secteurs: dans la santé, dans l'éducation... Les cégeps en région, on va les supporter. Dans la santé, on va vous donner des services. On va rapprocher les services des citoyens. Quel rapprochement, M. le Président!

M. le Président, je regarde la réforme en question, et ça m'inquiète. Les régions qui sont bien structurées, qui ont un tissu industriel très développé ou bien développé auront plus de facilité malgré les difficultés qu'ils vont rencontrer. Ils vont avoir des difficultés, mais ils vont pouvoir s'en sortir plus facilement parce que leur économie est plus forte. Mais qu'advient-il des régions ressources? Qu'est-ce qu'on a pour les régions ressources? Comment se fait-il qu'il n'y a aucun député libéral dans cette Assemblée qui ne se lève pas, qui ne se lève pas pour venir dénoncer ce projet de loi?

La ministre est sur le terrain. Elle se promène partout au Québec en disant qu'elle fait de la consultation, alors que, rendue à la réunion, elle dit: Je suis ici pour vous informer. Il n'y a aucune consultation sur le contenu de ce projet de loi. On nous dit tout simplement: L'Assemblée nationale est en train d'étudier le principe, on pense le faire adopter bientôt, et, au 1er avril, les CRCD sont abolis et l'argent s'en ira au fonds consolidé. Comment se fait-il qu'il n'y a personne de cette Assemblée du côté du gouvernement libéral qui se lève pour dénoncer ça? Ils n'y trouvent que des vertus, que des bienfaits.

n(17 h 50)n

Je vois le député de Shefford. Le député de Shefford, M. le Président, c'est un homme ici, dans cette Assemblée, que j'ai entendu au cours des dernières années parler de développement régional, appuyer les régions. Et le député de Kamouraska-Témiscouata se faisait le défenseur des régions. On attend encore son plan de redistribution des redevances sur les ressources naturelles. J'espère qu'il va réussir à convaincre le ministre des Ressources naturelles d'aller dans cette direction parce que ça va être encore une promesse qu'ils vont renier. Ils en ont renié depuis le début de cette session, M. le Président. On est ici depuis le mois d'octobre, et, bon Dieu! à chaque semaine, il y a toujours une promesse qui s'envole. On la reporte. C'est comme la baisse des taxes, hein, des impôts.

Les régions ressources avaient des crédits d'impôt; ils les ont coupés, les crédits d'impôt. Ils les ont réduits. Et qu'est-ce qui va arriver pour le prochain budget? Est-ce que les députés de régions, le député de Matane, de d'autres régions, vont se lever, les députés qui viennent de l'Abitibi vont se lever à l'Assemblée pour dire au ministre, lorsqu'on va faire l'étude puis on va intervenir sur le budget... Est-ce qu'ils vont venir se réjouir parce qu'il y a une ligne de parti de ce côté-là qui va dire: Oui, M. le Président, on est heureux des mesures que le gouvernement va adopter alors que le gouvernement est en train de nous dire déjà que des compressions vont s'appliquer? Ce sont des bonnes nouvelles qu'on entend. Ce sont des excellentes nouvelles. Des coupures, des coupures partout, M. le Président.

M. le Président, le maire de Gaspé, après l'annonce du projet de la ministre du Développement économique, ministre déléguée, le maire de Gaspé digère mal de ne pas être nommé d'office au C.A., au C.A. des nouvelles conférences régionales des élus, contrairement à certains maires de la Baie-des-Chaleurs. Le préfet de la MRC est encore plus cinglant. Lui, il se demande comment ça se fait que la ville de New Richmond est dans la liste, alors que d'autres n'y sont pas. Il se pose des questions très sérieuses, M. le Président.

En décembre, le 5 décembre ? c'est aujourd'hui, ça ? Conférence régionale des élus dans la région: «D'autres voix appuient la MRC de Bonaventure dans sa démarche pour faire reculer le gouvernement concernant des nominations au C.A. de la future Conférence régionale des élus.» C'est dans ma région, ça, la région de la députée qui est ministre déléguée au Développement économique et régional. Et je peux vous dire que c'est des amis anciennement du Parti libéral qui sont là, M. le Président. M. le préfet, il est connu, il s'affiche, il est membre du Parti libéral. C'est clair. On le connaît, c'est un ami. On discute puis on travaille ensemble. Mais là il est rendu, M. le Président...

D'autres voix s'élèvent. Les maires de la MRC, les maires de la MRC, le président du CRCD, ils ne sont pas nécessairement... Ces gens-là qui vont siéger au conseil d'administration de la Conférence régionale des élus, eux-mêmes constatent que ce n'est pas tout le monde qui va être intéressé à y aller au niveau des maires, mais qu'il y en a, des maires, qui sont intéressés au développement. Alors, pourquoi ne pas laisser aux personnes de décider en collégialité, par des collèges électoraux, qui sera au conseil d'administration?

M. le Président, le temps passe, et je dois vous dire que ce n'est pas dans la joie que j'interviens sur ce projet de loi, mais plutôt avec une certaine tristesse de constater que le gouvernement du Québec abandonne les régions. Le premier ministre n'est pas... le gouvernement n'est pas celui qui vient en région. On nous dit: C'est l'axe Montréal-Québec-Sherbrooke...

Le Vice-Président (M. Gendron): Veuillez conclure, M. le... M. le député, vous devez conclure.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Gaspé, et je reconnais maintenant M. le député de Montmorency. M. le député de Montmorency.

M. Bernier: M. le Président, en vertu de l'article 113, est-ce que le député de Gaspé accepterait une question?

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, juste une seconde, M. le député. Toujours la même règle: il faut que la question soit courte et précise ainsi que la réponse. Alors, M. le député de Montmorency pour votre question en vertu de 213.

M. Bernier: Oui. Je vais respecter vos directives, M. le Président. Donc, on a pu voir que le député de Gaspé est fort inquiet. Sauf que j'ai des données statistiques récentes en ce qui regarde le marché de l'emploi qui nous mentionnent que, en ce qui regarde la Gaspésie?Îles-de-la-Madeleine, un taux de chômage de 15,6 %, soit un taux de chômage en baisse de 3,6 points de pourcentage par rapport au mois de novembre 2002, où le taux de chômage était de 19,2 %... Est-ce que le député de Gaspé pourrait m'expliquer le contexte de la situation où il y a une baisse actuellement et pourquoi il est si inquiet?

Le Vice-Président (M. Gendron): M. le député de Gaspé. Pour ce qui est de la réponse, alors, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le Président, c'est très clair. C'est très clair, M. le Président. C'est que ce sont les mesures mises en place par le gouvernement du Parti québécois qui font en sorte que, actuellement, le taux de chômage a été réduit. Et puis ce n'est pas le député de Gaspé qui l'a dit, ce n'est pas le député de Gaspé. Vous lirez et vous écouterez sur Internet l'entrevue qu'a donnée M. Gilles Gagné à Bernard Tremblay, Radio-Canada, Matane, le 2 décembre à 16 h 40: «Les mesures mises en place par le plan de relance de la Gaspésie, par le gouvernement Landry, ont permis, encore à ce jour, d'avoir une baisse du taux de chômage, mais l'avenir est inquiétant», M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député. Je suis prêt maintenant à entendre le prochain intervenant pour la poursuite du débat. Est-ce qu'il y a un intervenant? Oui. M. le député.

M. Paquin: ...article 213 pour poser une question au député de Gaspé, est-ce que...

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, parce que l'article 213, règle générale, on ne doit l'invoquer qu'une fois, à moins que je fasse erreur. Est-ce que... C'est bien ça?

Alors, oui, effectivement, M. le député, à moins qu'il y ait consentement unanime des deux parties pour... Mais la règle veut que, normalement, à la fin d'une intervention, un député pose une question en vertu de 213.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Il y a consentement? Je n'ai pas de trouble. Il y a consentement. Alors, M. le député, posez votre question en vertu de l'article 213. Vous savez qu'avec des consentements on peut faire ce que la Chambre veut que nous fassions. Alors, M. le député, pour votre question.

M. Paquin: Merci, M. le Président. Merci pour le consentement aussi. Ma question au député de Gaspé: Comment peut-il expliquer avec tout qu'est-ce qu'il vient d'élaborer, comment peut-il expliquer que, pendant que son gouvernement était au pouvoir, pendant qu'il était député de Gaspé pendant neuf ans, comment peut-il expliquer que jamais autant de jeunes n'ont quitté la région de son comté par manque d'emploi?

Le Vice-Président (M. Gendron): M. le député.

M. Lelièvre: On sait que les jeunes, lorsqu'ils quittent la région, ce n'est pas toujours parce qu'ils s'en vont travailler, ils s'en vont étudier. Et, malheureusement, le pouvoir d'attraction des villes est très fort. Nous avions mis, dans notre dernier budget, des mesures pour faciliter le retour des jeunes en région, vous les avez enlevées, le ministre du Développement économique et régional les a sorties. Il a décidé que les mesures que la ministre des Finances, Mme Marois, avaient mises dans son budget... il ne les a pas reconduites, et c'est ça qui fait que, M. le Président, qu'on avait des mesures pour permettre aux familles et aux jeunes travailleurs, des mesures à l'égard aussi des entreprises pour les recevoir. Et ça, M. le ministre du Développement économique et régional, je vous invite à réfléchir là-dessus parce que ce serait une mesure certainement efficace pour le retour des jeunes en région, dans les régions ressources.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le député. Pour l'ensemble des membres de cette Assemblée, quand il arrivera que la présidence fera une erreur, elle va corriger immédiatement. Le règlement est très clair: à la fin d'une intervention, plusieurs députés... Ce n'est pas la règle que j'ai connue, mais, effectivement, le règlement est clair: pas besoin de consentement des membres de cette Assemblée; il peut avoir quelques questions posées en vertu de l'article 213. Donc, vous étiez parfaitement dans votre droit de poser une autre question même s'il y en avait déjà une de posée.

Moi, compte tenu de l'heure, je ne crois pas que c'est pertinent pour 30 secondes de commencer une intervention, donc je propose à ce moment-là la suspension des travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Sirros): Veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Alors, MM. et Mmes les députés, l'Assemblée va reprendre le débat ajourné par le leader du gouvernement, le 28 novembre 2003, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional. Je serais prêt à entendre le premier intervenant ce soir sur le projet de loi n° 34, M. le député de Dubuc.

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, j'espère que mes collègues d'en face auront la gentillesse et la politesse de m'écouter jusqu'à la fin sans faire des interventions. M. le Président, mon intervention, ce soir, se situe dans le sens d'un devoir, un devoir comme député d'intervenir dans ce débat, dans ce projet de loi. Un devoir aussi comme législateur parce que je considère que le projet de loi que nous avons devant nous, M. le Président, nécessite des interventions de la part des députés de ce côté-ci de la Chambre, des interventions importantes, des interventions solides parce que, M. le Président, nous faisons face à un projet de loi qui est très important pour l'avenir des régions du Québec.

Le projet de loi n° 34, M. le Président, Loi sur le ministère du Développement économique et régional, qui a été présenté par le ministre du Développement économique et régional, nous dit, M. le Président, au début, dans les notes explicatives, qu'il institue le ministère du Développement économique et régional et qu'il définit la mission de ce nouveau ministère du Développement économique et régional en y insérant des fonctions qui étaient auparavant exercées par le ministère de l'Industrie et du Commerce, de la Recherche, de la Science et de la Technologie.

En plus d'instituer de nouvelles instances locales et régionales, dont les conférences régionales des élus, M. le Président, le projet de loi maintient des dispositions relatives au Conseil de la science et de la technologie ainsi que de la Loi du ministère de la Recherche qui sont intégrées à la Loi sur le ministère du Développement économique et régional.

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, je m'excuse. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bédard: Oui, excusez-moi. Simplement pour me confirmer... Je crois que nous n'avons pas quorum. Est-ce que c'est possible, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Sirros): ...vérifier, M. le député, en vous avisant, à tout le monde, que le quorum, c'est 21, incluant le président. Donc...

Il y a effectivement quorum.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors... Écoutez... S'il vous plaît! Alors, l'article 32: que chacun prend son siège. Seulement le député qui a la parole a le droit d'être entendu en cette Chambre. Alors, M. le député de Dubuc, je vous prierais de continuer votre intervention.

M. Côté: Alors, M. le Président, je pense que...

Alors, l'intervention, M. le Président, que je vais faire ce soir, vous comprendrez qu'elle se limitera à l'essentiel de ce projet de loi, c'est-à-dire à la création de la Conférence régionale des élus de même qu'aux CLD. Et je pense qu'il faut se rappeler aussi... Il faut faire un retour sur le passé, un retour sur le passé lorsque le gouvernement actuellement au pouvoir a aboli le ministère des Régions. Je pense que ça, ça a été le premier geste, un premier geste d'importance, un premier geste significatif qui nous a un petit peu, là, amenés vers ce fameux projet de loi n° 34 que nous avons présentement. Alors, c'est pour ça que je devrai m'attarder sur l'essence même du projet de loi, savoir la création de la Conférence régionale des élus de même que l'intégration des centres locaux de développement aux MRC.

J'aimerais, M. le Président, au début de cet exposé, rappeler les propos de la ministre déléguée au Développement économique et régional qui, lors du congrès de l'Association des régions du Québec, congrès auquel j'assistais et auquel assistaient également le député de Blainville, le député de Chicoutimi, le député de Lac-Saint-Jean, congrès qui a eu lieu d'ailleurs au Saguenay?Lac-Saint-Jean, dans l'arrondissement de Chicoutimi, dans cette nouvelle ville de Saguenay... Mme Normandeau, à cette époque, avait, M. le Président, fait des déclarations qui étaient sans équivoque. Et j'aimerais ici vous citer, M. le Président, les déclarations que Mme Normandeau faisait...

n(20 h 10)n

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, je m'excuse. Alors, M. le député, j'ai l'impression qu'il va falloir tous qu'on se tienne rigoureusement au règlement. Alors, les gens qui siègent en cette Chambre sont identifiés par leur comté ou leur fonction. Alors, M. le député de Dubuc.

M. Côté: M. le Président, je m'excuse et je vais tenir compte de cet avertissement.

Et la ministre déléguée au Développement économique et régional nous a dit, depuis six mois qu'elle affirme qu'elle devrait consulter les régions, qu'elle s'engageait à consulter les régions sur cette importante question du développement régional. Soudainement, la notion de consultation qu'elle a toujours mise de l'avant est disparue pour faire place, M. le Président, à une tournée d'information. Elle informe maintenant les parties, alors que le projet de loi est déjà déposé.

Or, en mai, justement lors du congrès de l'Association des régions du Québec qui regroupe l'ensemble des CRD, la ministre avait été très, très claire à ce sujet, et j'y assistais, j'y étais présent, et je me souviens très bien. Et je vais vous citer les textes de la ministre. Et je cite: «Je sais que plusieurs d'entre vous avez des inquiétudes en regard des orientations que nous privilégions. Je comprends vos inquiétudes. Cependant j'ai le devoir aujourd'hui de vous rassurer. Nous entreprenons une démarche dans laquelle nous vous convions[...]. Le développement, c'est l'affaire de tous. Vous serez appelé à travailler avec les élus municipaux à l'élaboration d'un nouveau modèle d'organisation dans votre région. Il n'est pas question pour nous de vous imposer ? il n'est pas question pour nous de vous imposer ? une façon de faire. Les choix vous appartiendront.» Et ça, c'est un extrait du discours de la ministre déléguée au Développement régional qui date du 29 mai 2003.

Alors, M. le Président, aujourd'hui nous sommes devant le fait, c'est que la ministre malheureusement n'a pas traduit en termes concrets les paroles qu'elle avait dites. La ministre déléguée au Développement régional, je pense, doit respecter sa parole. Ce n'est pas une tournée d'information que nous voulons, ce sont des consultations. Il faut qu'elle écoute les citoyens, il faut que les groupes et les divers organismes... Il faut qu'elle consente à des consultations générales. Je pense que c'est normal dans le cas d'un tel chambardement de structures, M. le Président.

J'aurai l'occasion tout à l'heure de vous lire le communiqué de presse que j'ai émis en date d'aujourd'hui, communiqué de presse qui a d'ailleurs été publié dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean et qui, je pense, résume bien les intentions de l'opposition officielle à ce sujet. Je pense que c'est quand même ironique, M. le Président, de constater que, pour le gouvernement, l'avis des citoyens... Alors qu'on se targue de consulter les citoyens, M. le Président, c'est qu'on leur demande leur avis lorsqu'ils partagent la vision des choses, mais, lorsque c'est dans le cas d'un consensus, c'est que le gouvernement agit seul et qu'il met un cadre législatif, et c'est après seulement qu'il vient consulter, informer les citoyens, après que le projet de loi a été déposé.

Et pourtant, M. le Président, Mme la ministre déléguée au Développement général avait promis cette consultation, elle l'avait promise devant les gens du CRCD. Je me souviens très bien que M. Réjean Bergeron, le président du CRCD du Saguenay?Lac-Saint-Jean, avait manifesté de grandes inquiétudes à ce sujet et que la ministre l'avait rassuré en lui disant que, bon, il n'y aurait pas de mur-à-mur, que ce serait à la carte, qu'on accepterait ce que les élus, ce que les citoyens voudraient bien que ce soit dans leur région, et c'est comme ça que la nouvelle Conférence régionale des élus fonctionnerait. Or, ce n'est pas du tout ce qui arrive.

Et je vous citerais, M. le Président, en plus un document qui est important aussi, et c'est la Déclaration solennelle de Mont-Tremblant, une déclaration solennelle qui avait été signée par le premier ministre d'aujourd'hui, la ministre déléguée au Développement économique et régional, de même que le président du Parti libéral du Québec d'alors, M. Marc-André Blanchard, déclaration solennelle dans laquelle on disait que: «Nous, du Parti libéral du Québec, prenons l'engagement solennel [...] de reconnaître les différences entre chacune des régions dans l'application des politiques et programmes gouvernementaux.» Alors, M. le Président...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, j'apprécierais avoir la collaboration de tous pour que le député de Dubuc puisse terminer son intervention dans le calme et de façon à être compris et entendu par tout le monde en cette Chambre.

M. Bédard: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Sur ce même sujet? Parce que je pense que j'ai fait un rappel sur cette question-là, à moins qu'il y ait un fait nouveau que vous voulez souligner, M. le leader adjoint.

M. Bédard: Tout simplement, je vous demanderais d'appeler l'article 32, de faire en sorte que l'article 32 soit respecté.

Le Vice-Président (M. Sirros): En fait, de façon plus précise, effectivement, l'article 32 requiert que tout le monde soit à son siège, que tout le monde reste tranquille, sans prendre la parole quand il n'est pas reconnu par la présidence. Pour l'instant, c'est juste le député de Dubuc qui a la parole. J'apprécierais que tous s'en tiennent à cette règle-là.

M. Mulcair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Mulcair: Sur la question que vous venez de soulever, je dois vous dire qu'il y a une jurisprudence par ailleurs constante que, lorsqu'il y a des débats comme celui-ci ce soir et que les gens effectivement sont en train de maintenir le décorum, l'article 32 ne veut pas dire que, du côté de l'opposition, on peut insister que les gens se déplacent d'un mètre à l'autre. Ça, c'est une jurisprudence constante qui a été appliquée à venir jusqu'au printemps de cette année, lorsque nous étions à l'opposition. J'aimerais juste avoir la même indulgence. Donc, je répète que, tant qu'il n'y a pas d'interruption, le décorum est maintenu et les gens peuvent continuer à siéger même si ce n'est pas nécessairement identiquement à la place qui leur est assignée.

Le Vice-Président (M. Sirros): ...sur cette même question.

M. Bédard: Question de règlement, simplement. J'ai toujours cru effectivement que les places qui nous étaient assignées, sur lesquelles d'ailleurs on retrouve nos noms, étaient les places où on devait être lorsqu'une personne intervenait en cette Chambre. Alors, je souhaite effectivement que ce règlement soit respecté.

Deuxièmement, article 32 aussi parce que, lorsque mon collègue a parlé, on entend quand même un bourdonnement quand même assez généralisé dans cette enceinte. Et, vous savez, à cette heure, nous sommes vendredi, le député a besoin de toute sa concentration. Et, moi, je souhaite d'ailleurs... Et pourquoi on invite les gens à aller à leur place, c'est justement pour éviter les bourdonnements.

Et, si vous me référez à une décision à l'effet qu'on peut décider de ne pas être à notre place, j'aimerais bien savoir quel article du règlement est invoqué ou quelle décision pour voir effectivement s'il y a un précédent.

Dernièrement, j'aimerais aussi vous dire, M. le Président, que le temps compte, et j'aimerais savoir si le temps sur la question de règlement va être retranché de l'intervention de mon collègue le député de Dubuc.

M. Mulcair: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Moi, j'en ai entendu suffisamment sur les questions de règlement, honnêtement. Écoutez, je veux tout simplement vous dire que les débats, ici, en cette Chambre, ne peuvent pas se dérouler sans qu'il y ait de la collaboration de part et d'autre. Si les députés sont déterminés à faire dérailler les débats, vous pouvez toujours le faire. La présidence n'est pas un préfet de discipline. Vous êtes tous ici en tant qu'adultes, on est tous des députés, et nous avons une responsabilité, face au décorum de cette Chambre, de permettre que les débats se tiennent correctement.

Correctement, ça veut dire également qu'il y a une certaine tolérance que la présidence juge par rapport au décorum qui se tient dans cette Chambre. Si tout le monde tient à ce qu'on applique rigoureusement le règlement à tous points et tous égards, vous allez trouver que ça va être extrêmement difficile de part et d'autre de procéder aux débats au bénéfice de nos concitoyens. Alors, j'appelle à la collaboration de tous pour qu'on puisse terminer cette soirée correctement, en laissant le député de Dubuc terminer son intervention. M. le député de Dubuc.

n(20 h 20)n

M. Bédard: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bédard: Je veux bien comprendre par rapport au fait que, effectivement... Est-ce que chacun des députés doit être à sa place lorsqu'on appelle l'article 32, M. le Président? Il me semblait que c'était une question qui avait été tranchée à de nombreuses reprises.

Le Vice-Président (M. Sirros): Voilà, écoutez, je vais être clair également, M. le leader adjoint. J'ai dit que la présidence tolère un certain écart, si vous voulez, à l'égard de l'article 32. Mais, si un député veut faire appliquer le règlement et si vous vous levez pour l'appliquer, je serai dans l'obligation de l'appliquer. Mais je vous indique tout simplement que, dans le bon déroulement de nos travaux, de part et d'autre, une certaine tolérance qui ne contrevient pas au droit de parole de personne a toujours été de coutume dans cette Assemblée. Mais, je répète, et je veux que ça se tienne là, si quelqu'un se lève pour demander l'application de l'article du règlement, le président va l'appliquer.

Alors, ceci étant dit, le temps qui court est pris sur le temps de parole du député de Dubuc. J'apprécierais que le député de Dubuc puisse terminer son intervention.

M. Bédard: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Bédard: Les questions de règlement ne sont pas comptées sur le temps d'intervention de mon collègue, premièrement. Et...

Le Vice-Président (M. Sirros): Toujours, toujours. Je m'excuse, M. le leader adjoint, une correction...

M. Bédard: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Mais une correction avant que vous bâtissiez une argumentation.

M. Bédard: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint, il y a un autre point du règlement qui dit: Quand le président est debout, tout le monde est assis. Alors... pour que je puisse tout simplement vous rappeler que le règlement indique clairement que les rappels au règlement sont pris justement sur le temps de parole des personnes qui ont la parole. Alors, tenant compte de ça, M. le leader adjoint de l'opposition...

M. Bédard: ...mon troisième appel au règlement. Quant à la tolérance sur l'article 32, c'est moi qui juge de la tolérance, M. le Président. Alors, j'ai demandé l'application de l'article 32, et ce n'est pas par hasard.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, comme j'ai dit, s'il y a un rappel à l'article 32, je vais l'appliquer et je demande qu'on applique l'article 32. Donc, s'il vous plaît, tout le monde aux sièges assignés, s'il vous plaît, et gardez le silence, à moins que la présidence vous avait reconnu. Alors, M. le député de Dubuc.

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je suis déçu de comprendre que le temps qui vient de s'écouler est pris sur mon propre temps. Mais je vais quand même essayer, là, dans un court laps de temps, de résumer les quelques idées que je voulais transmettre à cette Assemblée, et surtout les transmettre aux citoyens de mon comté, et surtout les transmettre également aux citoyens du Saguenay? Lac-Saint-Jean, et aux citoyens du Québec au complet, M. le Président.

Je reprends la Déclaration solennelle de Mont-Tremblant, M. le Président, et on aura beau applaudir et se pavaner de ces déclarations, mais, moi, M. le Président, je serais gêné, parce que, lorsqu'on dit dans cette déclaration qu'on veut soutenir et qu'on veut respecter les spécificités, les potentiels et les forces des régions et des milieux ruraux, bien, M. le Président, c'est complètement le contraire de ce que fait le projet de loi n° 34.

Je rappellerai également, dans le programme du Parti libéral, dans l'item, dans le...

M. Gautrin: ...

M. Dubuc: M. le Président, s'il vous plaît...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je m'excuse, M. le député de Dubuc. M. le député de Verdun, sur une question de...

M. Gautrin: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, qu'on applique l'article 32, s'il vous plaît. Vos sièges. M. le député de Dubuc.

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, je rappellerai simplement que, dans le...

M. Mulcair: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Mulcair: Pourriez-vous appliquer le règlement en ce qui concerne le décorum et demander à la députée de Bourget de cesser de bourdonner?

Le Vice-Président (M. Sirros): Écoutez, là, honnêtement, ça suffit de part et d'autre. Assoyez-vous, s'il vous plaît! Assoyez-vous, le président est debout. On va garder le calme, on va permettre au député de Dubuc de terminer son intervention. De part et d'autre, on va appliquer le règlement comme des adultes et on va se comporter comme des adultes. M. le député de Dubuc.

M. Côté: M. le Président, je vous rappellerai que j'ai parlé à peu près quatre minutes, et nous sommes rendus à 18 minutes écoulées. Alors, écoutez, c'est...

Je voudrais simplement rappeler, M. le Président, que, dans le programme du Parti libéral, à l'item Faire confiance aux régions, c'est qu'on dit dans un paragraphe: «De cette façon, on pourra libérer le dynamisme régional et rural et l'affranchir des contraintes qui empêchent nos régions de se développer à la hauteur de leur potentiel.»

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Sirros): J'appelle... J'appelle à votre collaboration à tous. M. le député de Dubuc.

M. Côté: Alors, M. le Président, vous voyez que ce n'est pas sérieux. Alors, ce qu'on fait, M. le Président, on ne libère pas, on menotte présentement les régions. C'est ce qu'on fait avec ce projet de loi n° 34. Et, aujourd'hui, M. le Président, dans un communiqué de presse que j'ai émis, je disais que «l'agenda caché qui anime le sentiment d'urgence du gouvernement à restreindre au minimum le nombre de personnes ayant droit de parole dans les régions...»

M. le Président, on fait fi de la société civile, on ignore complètement la société civile. Quel intérêt, M. le Président, ce gouvernement trouve-t-il à ignorer l'implication des forces vives du milieu? Pourtant, ces forces, M. le Président, ont fait leurs preuves depuis 15 ans, depuis 20 ans; ces gens ont travaillé au développement économique de nos régions. La société civile, M. le Président, les représentants des syndicats, du monde scolaire, du monde communautaire, de la jeunesse, le député du Lac-Saint-Jean en a parlé hier, ces gens-là ont travaillé pour que la région puisse être de plus en plus forte pour pouvoir atteindre son développement.

Malheureusement, M. le Président, avec ce projet de loi n° 34, nous n'arrivons pas aux fins auxquelles nous nous sommes conviés. C'est pourquoi, M. le Président, il faudrait absolument qu'une commission parlementaire soit convoquée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci beaucoup, M. le député.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Pardon?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): En question en vertu de l'article 213. M. le député de Dubuc, est-ce que vous acceptez qu'une question vous soit posée en vertu de l'article 213?

M. Côté: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, il y a consentement. Allez-y.

M. Bédard: Alors, j'aimerais connaître du député de Dubuc qui, vous le savez, oeuvre depuis des années dans notre région à différents niveaux, dans son ancienne vie, comme député...

Des voix: ...

M. Bédard: Est-ce que je peux poser ma question, M. le Président?

Des voix: ...

M. Bédard: Est-ce que l'Assemblée est rendue un cirque?

Le Vice-Président (M. Sirros): Vous avez le droit de poser votre question. Alors, allez-y, M. le député. Faites-le... Faites-le de façon correcte et rapidement, et je vous ai reconnu.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Et je ne me souviens pas d'avoir... Pardon? Qu'est-ce que j'ai entendu?

Une voix: ...

M. Bédard: Niaiseux... Moi, j'ai entendu des paroles, M. le Président, là, qui sont indignes, là. Aujourd'hui, on a entendu aboyer. Maintenant, on entend d'autres mots, et je trouve ça...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, effectivement, j'apprécierais...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il se peut fort bien que le climat soit un peu surchauffé. J'apprécierais, de part et d'autre, qu'on permette aux gens de s'exprimer. Selon le règlement, le député a demandé la permission de poser une question en vertu de l'article 213. Il a eu consentement à cet effet par celui qui prononçait le discours. M. le député de Chicoutimi, vous avez la parole.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Simplement, j'aimerais demander à mon collègue député de Dubuc: Quels ont été les effets bénéfiques de la concertation par le CRCD dans notre région mais plus particulièrement dans son comté?

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député de Dubuc. Rapidement, s'il vous plaît.

M. Côté: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, nous avons, depuis 20 ans au Saguenay? Lac-Saint-Jean, travaillé pour le développement économique de notre région. Nous sommes rendus, M. le Président, à une étape où nous ne sommes plus... ce n'est plus le temps de faire des structures, de parler de structures. Nous sommes rendus à l'action. Nous étions rendus à l'action. Nous avions demandé, avec le Sommet des régions, un fonds régional d'investissement, et c'est ça qui nous permettait de travailler. Nous avons eu la Vallée de l'aluminium, M. le Président, nous avons eu des effets concrets qui viennent d'être produits, et, c'est ça, la région. Et nous avons obtenu des cours pour les cégeps, pour les jeunes en éducation. Et c'est comme ça que la région se développe, c'est avec la concertation de tous les gens du milieu pas seulement qu'avec les élus. Et, quand on parle d'élus, M. le Président, c'est qu'on fait une discrimination, c'est qu'on laisse de côté les élus provinciaux, on laisse de côté les élus scolaires, et, en plus, le gouvernement veut présentement mettre une chicane entre une région, entre deux pôles d'une région: le Saguenay et le Lac-Saint-Jean.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci. Alors, je vais reconnaître le prochain intervenant qui serait Mme la députée de Bourget.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, j'interviens ce soir au sujet de l'adoption de principe du projet de loi n° 34 qui concerne le développement régional, et je le fais par devoir et par conviction.

M. le Président, je suis frappée d'abord d'une chose, ces discussions à l'étape d'adoption de principe ont débuté le 27 novembre dernier dans ce salon bleu, et je constate que, depuis, je suis la 24e députée du côté de l'opposition qui s'est exprimée sur ce projet de loi qui bouscule et qui charcute des structures régionales, alors qu'il n'y a que trois députés du côté ministériel qui se sont prononcés.

n(20 h 30)n

Alors, M. le Président, je sens bien que le climat, ce soir, il est un peu tendu. J'émets une hypothèse, M. le Président, je crois honnêtement que les députés du côté ministériel n'ont pas le courage de donner un appui clair et de vendre les objectifs correctement de ce projet. Pourquoi? Parce que ce projet n'a pas de bon sens, M. le Président. Je peux comprendre que c'est difficile pour eux et elles de se lever, mais c'est dur de faire un témoignage convaincu et convaincant au sujet de quelque chose qui n'a pas de sens.

Que pense le député de Roberval alors qu'il est dans une région qui a une longue tradition de concertation ? on vient de l'entendre de la part du député de Dubuc? Que pense la députée de Jean-Talon qui est dans la région de Québec, là aussi où il y a une longue tradition de concertation et là aussi où ces dernières années un resserrement des organismes de concertation s'est fait? La députée d'ailleurs de Taschereau l'a évoqué à plusieurs reprises. Que pense la députée de Lévis qui est dans une région, celle de Chaudière-Appalaches, au sujet de ce branle-bas de combat qui est amené par le projet de loi n° 34? Que pense le député d'Orford, ministre de l'éducation, qui est dans une région qui s'appelle l'Estrie, une région qui est ma région natale, M. la Président, une région formidable et qui a aussi, là, des longues pratiques, une longue histoire de concertation? Et le député de Groulx? Et le député de Gatineau? M. le Président, ces députés ne se prononcent pas. Ils ne se prononcent pas parce qu'ils ne peuvent pas défendre l'indéfendable.

Alors, M. le Président, nous allons faire notre travail, et c'est ce que nous faisons depuis plusieurs jours, nous allons faire notre travail. À défaut, pour les députés libéraux, de défendre l'indéfendable, nous allons dire clairement que ce projet de loi, il est indéfendable.

Alors, M. le Président, je crois que certains collègues ont expliqué en long et en large les mesures ? imaginez, c'est nous qui devons expliquer les mesures de ce projet de loi, c'est quand même incroyable ? alors les députés de notre côté ont expliqué, avec leurs mots, à leur manière, à partir de leur expérience, les faits saillants de ce projet de loi. Et ce qui me frappe, M. le Président... Vous savez, quand on dépose un projet de loi, c'est parce qu'on veut régler un problème. Alors là, quand on gratte un peu et on cherche un peu, on finit par ne pas trouver le problème. Quand on n'est pas capable de dire clairement: C'est ça, et ça, et ça qu'on veut corriger, eh bien, vraiment, on se demande où on va. Or, ce projet de loi, on a l'impression que ça sort de nulle part. Une lubie peut-être du ministre, enfin, je ne sais pas, mais ça sort de nulle part. Et on n'est pas au clair, le gouvernement n'est pas au clair sur les problèmes à corriger.

Est-ce qu'on peut me faire la démonstration, M. le Président, de qui a dit, qui a démontré que les structures en place ne fonctionnaient pas, qu'elles étaient dysfonctionnelles, inefficaces, inadéquates? Est-ce que quelqu'un a parlé de ça au Québec ces dernières années? Que ces structures sont parfaites? Non, M. le Président, je ne dis pas que ces structures sont parfaites. Tout peut s'améliorer dans la vie. Mais est-ce qu'il y a un mouvement, est-ce qu'il y a eu, je ne sais pas, moi, un certain nombre d'événements qui ont mis le doigt sur des problèmes incroyablement difficiles à résoudre? Non, M. le Président. Il y a eu, au contraire, par exemple, un événement important dans l'histoire du Québec, le Rendez-vous des régions, où on a discuté très sérieusement, avec force, sans condescendance, sans complaisance des réalités des régions et des attentes que les régions exprimaient envers le gouvernement du Québec. Et, oui, à partir de ça, on avait là une banque de mesures, une série d'améliorations à portée de main qu'on pouvait mettre en application.

Mais, M. le Président, personne n'est parti en guerre contre les structures actuelles. Oui, il y a certes des choses à corriger, mais il n'y avait pas de problèmes qui ont été, de manière précise et minimalement rigoureuse, exposés à la population. Mais, malgré ça, M. le Président, on arrive avec un projet de loi qui provoque un branle-bas de combat absolument pas nécessaire au sujet des structures de gouvernance régionale.

Il y a plusieurs problèmes que pose ce projet de loi. Ce projet de loi n° 34 d'abord, à mon avis, comme premier problème, pose le problème donc de l'exclusion des partenaires socioéconomiques. Qu'est-ce qu'on fait, en gros? Je ne crois pas que j'ai besoin de donner de très longues explications, les gens ont bien compris que le gouvernement veut remplacer, abolir des structures déjà en place pour remplacer cela par la Conférence régionale des élus qui regrouperait essentiellement des élus municipaux. Donc, on abolit les structures en place pour en créer une nouvelle ? premier problème, on ne comprend pas pourquoi il faut abolir ça, on aurait pu les améliorer, ça aurait été pas mal plus simple ? et on les remplace par la Conférence des élus régionaux. Et, à mon point de vue, et c'est, à mon avis, vraiment un des éléments les plus critiques, au sujet duquel j'ai le plus de critiques d'ailleurs, c'est l'exclusion des partenaires socioéconomiques.

C'est sûr que la ministre déléguée aux Régions actuellement est en train de faire une tournée ? on ne sait plus comment qualifier cette tournée-là, semble-t-il que c'est une tournée d'information ? et qu'elle dit aux gens: Écoutez, oui, on n'est pas insensibles à ça, puis on va essayer de trouver des moyens. Ceci étant dit, ce n'est pas dans la loi, ce n'est pas... Actuellement, des modalités quant à la participation efficace des partenaires socioéconomiques ne sont pas inscrites dans la loi. Et pourtant, c'est vraiment bête de se priver de cette contribution-là.

L'enjeu... Et je sais très bien que, de l'autre côté, on tente de nous faire dire que, si on plaide pour une présence des partenaires socioéconomiques, c'est parce qu'on n'a pas confiance envers les élus municipaux. C'est un peu un raccourci, M. le Président, de la part du gouvernement d'évoquer ce type d'argument. Ce qu'on plaide, c'est de dire: Pourquoi se priver et, surtout, pourquoi priver les élus municipaux des talents, du leadership, des expériences des partenaires socioéconomiques? C'est l'agencement entre le talent et l'expérience, les compétences des élus municipaux et celles des partenaires socioéconomiques, c'est la rencontre entre ces expériences, ces talents, ces compétences qui fait en sorte qu'on peut prendre des décisions judicieuses, pertinentes, qui font la différence quant au développement régional. C'est donc cette complémentarité, la rencontre entre des gens, entre ceux qui ont des fonctions différentes, qui ont des réalités différentes, qui ont des réalisations à leurs actifs qui sont différentes qui fait une valeur ajoutée.

M. le Président, si je peux me permettre cette comparaison, c'est un peu lorsque nous avons des travaux ici, à l'Assemblée nationale, et que, par exemple, au moment où est déposé un projet de loi, un gouvernement décide ? souvent à la demande de l'opposition d'ailleurs, et je dois dire que ces temps-ci on doit le demander souvent, parce que ce gouvernement ne verse pas dans la consultation, mais ceci est un autre sujet ? alors lorsqu'un projet de loi est soumis à la consultation et que nous faisons, au salon rouge, à la salle La Fontaine ou peu importe, dans une des pièces à la disposition du public et des députés, des consultations. Alors, qu'est-ce qu'on fait, comme parlementaires? On a une pièce législative qu'on essaie d'améliorer, et là viennent des gens qui nous expriment un certain nombre d'opinions et qui nous permettent de bien mesurer les mesures qui sont proposées. Alors, c'est un peu le même argument. Ce serait bête que des parlementaires se privent, par exemple au moment de l'adoption d'un projet de loi, des connaissances de ceux et celles qui ont des pratiques, qui ont des histoires, qui ont des réalisations qui peuvent contribuer à l'amélioration d'un projet de loi. Alors, c'est comme si, nous, on se privait de ces compétences-là.

Alors là on fait en sorte de mettre les élus municipaux dans ces structures de conférences régionales des élus et on les isole. D'ailleurs, M. le Président, cette conviction-là qu'on est en train d'isoler des élus municipaux, elle commence à s'exprimer de la part des élus municipaux eux-mêmes. Parce que quel est le plus grand risque? À court terme, les élus municipaux, M. le Président, peuvent se dire: Wow! C'est formidable, on aura plus de pouvoirs, plus de responsabilités. Oui, ça peut apparaître un gain à court terme, mais, à moyen terme, M. le Président, quand ça va aller mal dans une région, quand il va y avoir une grosse entreprise, par exemple, qui ferme ou un secteur d'activité qui est en péril à cause d'une conjoncture économique mondiale, ou peu importe le motif, M. le Président, est-ce qu'on peut comprendre que tous ont besoin de se donner la main, tous ont besoin de partager un diagnostic, tous ont besoin de mettre sur la table des solutions? Et là on aura abandonné nos élus municipaux puis on leur aura dit: Bien, arrangez-vous avec ça. De toute façon, nous, on nous a exclus. On aura créé des brisures, et, quand les coups seront plus durs, bien, ce sera difficile à rattraper. Et c'est ça, ma crainte la plus grande. Il faut que des compétences se rencontrent. Et, oui, il y a des compétences, des pouvoirs et des responsabilités qui sont inhérents aux fonctions d'élus municipaux, mais il y a aussi des pratiques, des compétences ailleurs, et on doit maintenir cette rencontre entre ces deux réalités.

n(20 h 40)n

Alors, M. le Président, l'autre élément qui nous frappe de plein fouet, et c'est en lien avec ce que je viens de dire, c'est à quel point on balaie un peu du revers de la main cette valeur qui, à mon avis, au Québec est assez fortement enracinée, cette valeur qui est la concertation. La concertation. M. le Président, la concertation, ce n'est pas de la complaisance, ce n'est pas se parler pour se dire qu'on est fins. La concertation, c'est de mettre les efforts de tout le monde ensemble et de s'assurer d'aller dans une même direction. Ça ne veut pas dire qu'on n'a pas des désaccords, M. le Président, et ça ne veut pas dire d'ailleurs que les partenaires socioéconomiques qui sont dans les structures comme les conseils régionaux de développement, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des discussions de temps en temps assez fortes, M. le Président. Ce n'est pas ça dont je parle. Je dis que nous avons cette habitude au Québec qui s'est développée au fil des années, dans toutes sortes de forums, au sujet de plusieurs thèmes de notre vie collective. La concertation a été un outil qui nous a sortis du trouble, M. le Président.

Et j'aimerais qu'on se rappelle collectivement de cet exemple: lorsque le premier ministre de l'époque, Lucien Bouchard, a eu cette préoccupation forte d'atteindre le déficit zéro, s'il l'avait fait du haut de son bureau, M. le Président, on ne serait jamais passés au travers. Et d'ailleurs le premier ministre actuel devrait tirer des leçons de ceux et celles qui ont géré le Québec avant lui. Enfin, ceci est un autre sujet, je pourrais en parler longtemps. Alors, qu'est-ce qu'il a fait, le premier ministre? D'abord, il a convaincu son propre Conseil des ministres qu'il fallait faire ça. Et, deuxièmement, il a convoqué les partenaires à un exercice pour que collectivement nous convenions de l'importance de cet objectif-là. Ça a été dur, le déficit zéro, mais, imaginez, si ça n'avait pas été fait dans un contexte de concertation, on serait encore dans les conséquences dramatiques de ça. Le premier ministre actuel n'a pas compris ça dans ses fonctions de premier ministre. Un premier ministre a le devoir de faire en sorte qu'il y ait un dialogue, qu'il y ait un dialogue constant entre les différentes forces d'une société. Il ne doit pas faire ce qu'il fait, mettre de l'huile sur le feu, faire des appels au calme, exprimer des attentes envers les autres et ne pas avoir d'attentes envers lui-même.

Alors, la concertation, c'est une valeur qui est partagée, elle est partagée dans les petits villages, dans les petites villes, dans les grandes villes, dans les régions au niveau du Québec. Pourquoi certains villages dépérissaient, M. le Président, et ont réussi à se trouver un créneau formidable pour survivre, pour être vivants? Parce qu'il y a eu de la concertation. Quand l'auteur-compositeur Richard Séguin a décidé de partir ses Sentiers de la poésie, M. le Président, dans un tout petit village en Estrie, pourquoi il a réussi? Il a réussi parce que le maire était là, parce que les leaders économiques étaient là puis parce qu'un promoteur comme lui, un rêveur comme lui était là. Et aujourd'hui il y a des «bed-and-breakfast» dans ce village qui n'existaient pas il y a quelques années, il y a une petite structure économique qui s'est développée autour de ce village. Pourquoi? Parce que les gens se sont concertés. Pourquoi on se priverait de cet ingrédient important de la concertation?

Par ailleurs, je dirai aussi au plan peut-être plus philosophique, mais je crois qu'il y a là une perte pour le Québec, c'est le fait que ce projet de loi va à contre-courant de toutes les tendances que nous observons dans les pays qui peuvent prétendre à une démocratie. Les pays qui peuvent prétendre à une démocratie, M. le Président, ce sont les pays qui ont des systèmes parlementaires, comme le nôtre ou d'une forme différente, mais qui ont des systèmes de représentation. Et les pays qui peuvent maintenant prétendre à des démocraties modernes, M. le Président, sont les pays qui sont capables d'allier cette démocratie représentative ? alors le fait que, nous, à des périodes de notre histoire, à des paliers différents également, nous puissions choisir les gens qui vont nous représenter ? les pays qui peuvent prétendre à une démocratie moderne sont les pays qui sont capables d'avoir un bon système de représentation et une rencontre également avec la démocratie participative. Et vous le savez, M. le Président, de quoi je parle, vous êtes vous-même très au fait de ça, puisque vous gravitez dans des réseaux de parlementaires internationaux, et ça se discute, là aussi, à ces niveaux. On le sait très bien, que ça fait partie maintenant d'une démocratie moderne. Or, ce projet de loi va tout à fait à l'encontre de ces grandes tendances, de ces grands courants qui démarquent les pays qui sont exemplaires quant à leur démocratie.

Je dirais également que l'autre problème assez important qu'il nous faut souligner, c'est: pendant ce temps, pendant ces similitournées d'information, pendant que le monde écrivent des lettres aux journaux, essaient de faire comprendre au gouvernement ce qu'il devrait faire, ce qu'il ne devrait pas faire, les gens, vous avez constaté le phénomène, M. le Président, les gens, là, ces partenaires socioéconomiques, là, essaient de plaider de toutes sortes de manières. On ne sait pas s'il est bon ou il n'est pas bon, ce projet de loi. Alors, la plupart disent qu'il n'est pas bon, on en convient, mais on dit: Peu importe la structure, il faudra que les groupes du milieu des affaires y soient. C'est le plaidoyer qu'a fait d'ailleurs la Fédération des chambres de commerce. La Fédération des chambres de commerce, là, il n'y a pas beaucoup de péquistes là-dedans, M. le Président, ils ont dit, ils ont dit, M. le Président: Les gens d'affaires...

Des voix: ...

Mme Lemieux: Ce n'est pas un relais du PQ, là, la Fédération des chambres de commerce, pas du tout. Ils ont dit: Les gens d'affaires, il faut qu'ils soient là, il faut qu'ils soient dans les structures de développement économique locales et régionales. Et c'est ça, ce qu'ils nous ont dit. Alors là tout le monde fait son plaidoyer. Ça devient ridicule et ça oblige les gens à faire ça. C'est le gouvernement qui met ses partenaires dans une situation qui finit par friser le ridicule. Les gens disent: Oui, mais il faudrait trouver une manière que les gens d'affaires soient là, que les gens qui se préoccupent de développement durable soient là, et d'environnement, que ceux qui sont dans le domaine de l'économie sociale... On le sait, c'est tout un champ d'activité qui s'est ouvert ces dernières années au Québec, qui est vraiment extraordinaire parce qu'il réconcilie l'économie et le social. Les groupes... Par exemple, les jeunes veulent y être, les femmes veulent y être, dans une région comme Montréal, les communautés culturelles veulent y être. Alors là tout le monde essaie de faire son plaidoyer sur sa présence.

Savez-vous ce qui est dommage, M. le Président, c'est que ces questions-là, elles étaient en partie réglées ou, à tout le moins, sur une très, très bonne voie. Alors, M. le Président, pendant que les gens font ça, là, pendant que les gens essaient de se dépêtrer dans ce projet de loi là, là, il y a des choses qu'ils ne font pas. On a tous 24 heures par jour, M. le Président. Il faut dormir, en général, six heures, sept heures, huit heures, ça dépend des personnes. L'énergie que les gens font, déploient pour faire des stratégies pour essayer de faire comprendre le bon sens au gouvernement, là, cette énergie-là, elle n'est pas utilisée à autre chose, M. le Président. Pendant ce temps-là, il y a des projets qui ne voient pas le jour, il y a des projets de développement qui ne peuvent pas s'exprimer, se déployer. Pendant ce temps-là, là, les gens font des réunions pour avoir des stratégies pour convaincre le gouvernement. Bien, le monde devrait faire des réunions pour avoir des stratégies pour susciter des projets et réaliser des projets.

Alors, le gouvernement nous entraîne, avec ce projet de loi, avec du surplace. On s'éparpille. Et, pendant ce temps-là, nos régions ne se développent pas. Et là le temps qu'on mette tout ça en place, M. le Président, on en a pour quelques mois. Jumelez à ça tous les changements provoqués par le dossier des défusions municipales, je vous dis qu'on en a pour quelques mois. Pendant tous ces mois, les gens ne seront pas concentrés sur ce qu'ils devraient faire, c'est-à-dire identifier des projets et faire en sorte qu'ils évoluent bien.

Alors, M. le Président, je voudrais, dans les quelques secondes qu'il me reste, conclure sur deux choses. Un, une préoccupation pour Montréal. Montréal, l'ensemble des partenaires qui sont au coeur de la vie et du développement socioéconomique de Montréal sont fortement ébranlés par l'existence de ce projet de loi, et honnêtement, à Montréal, on aurait autre chose à faire que de se préoccuper de ce branle-bas de combat. Et je finis en disant que, finalement, le gros, gros défaut de ce projet de loi, c'est qu'on essaie de déterminer un contenant alors qu'on ne sait même pas quel est le contenu. On ne comprend pas le sens, les motifs de ce projet de loi sont ténus, sont fragiles. Et même des maires commencent à nous dire: Pourquoi, pourquoi on se soumettrait à ce projet de loi? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Pour intervenir sur le projet de loi?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, je vais... Sur le 213, je pense que le député de Chicoutimi avait indiqué une question sur le 213. Est-ce qu'il y a consentement pour une question sur le 213, Mme la députée?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il y a consentement. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Ma collègue, M. le Président, qui a assumé, vous le savez, dans une ancienne vie, entre autres, d'être présidente du Conseil du statut de la femme, j'aimerais savoir de sa part si elle trouve acceptable que les groupes et associations de femmes soient exclus de la concertation et autrement dit des décisions au niveau du développement régional.

n(20 h 50)n

Le Vice-Président (M. Sirros): Mme la députée de Bourget.

Mme Lemieux: Et je m'en veux de ne pas...

Le Vice-Président (M. Sirros): En rappelant à tous que les questions en vertu de l'article 213 et les réponses doivent être brèves.

Mme Lemieux: Le député a eu raison de me poser cette question, M. le Président, parce que j'aurais pu en parler longuement. J'ai présidé le Conseil du statut de la femme avec plaisir, et j'ai vu des femmes impliquées dans leurs structures régionales, des femmes qui ont réussi et qui se sont intéressées, par leur simple présence et le contact avec les autres, des femmes qui étaient là au début pour représenter les femmes puis finalement qui se sont mises à s'intéresser à l'économie sociale, à l'environnement, au développement du réseau du transport, à tout ce que vous voulez. Et, à l'inverse, des spécialistes, hein, des pros de l'économie, du monde des affaires, du monde de l'éducation se sont mis à s'intéresser aussi à l'apport des femmes et à la place des femmes dans une communauté...

Le Vice-Président (M. Sirros): En conclusion.

Mme Lemieux: C'est ça. C'est de ça, M. le Président, dont le projet de loi n° 34 va nous priver dorénavant.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Une question en vertu de 213 pour Mme la députée de Bourget.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, est-ce qu'il y a un consentement, Mme la députée, pour une autre question?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Il n'y a pas de consentement. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant pour la prochaine intervention. M. le député de Charlevoix.

M. Rosaire Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. J'apprécie pouvoir intervenir sur le projet de loi n° 34. Mes commentaires toucheront de façon un peu plus... de façon particulière les CLD et ce qu'on appelait les CRCD. Et je me permettrai, M. le Président, de me servir du document qui a été préparé par le gouvernement, de le commenter et donner certaines interprétations sur ce qu'on veut bien écrire dans ce document-là.

Je dois d'abord vous dire, M. le Président, que je trouve tout à fait normal qu'un nouveau gouvernement veuille faire sa marque, tout à fait normal qu'un nouveau gouvernement veuille établir ses règles et veuille continuer ? je dis bien continuer ? d'améliorer ce qui existe déjà. D'ailleurs, de tous les gouvernements dans l'histoire d'un pays, c'est la démocratie qui le veut. Et je veux aussi réaffirmer ma foi la plus complète dans le rôle des élus, dans le travail qu'ils font, mais en même temps dans le rôle et le travail que font les gens, les représentants des sociétés, d'organismes au Québec, peu importe dans quel secteur. On a des gens au Québec qui font un travail d'une façon exceptionnelle dans des organismes, que ce soient les chambres de commerce, que ce soient les ATR, que ce soient les groupes de femmes, que ce soient les jeunes, peu importe. Et je ne pense pas qu'on doit... nous, de ce côté-ci, parce qu'on donne notre opinion sur le projet de loi, parce qu'on n'est pas d'accord sur certains éléments du projet de loi, qu'on veuille faire interpréter qu'on est contre les élus, au contraire.

Je prends le document, M. le Président, et on dit dans le préambule: «La ministre déléguée au Développement régional et au tourisme entreprendra une tournée des régions afin d'expliquer les éléments du projet de loi sur le ministère du Développement économique et régional.» Donc, on dit clairement dans le document que ce qu'on va faire, c'est des explications. Et, pour avoir assisté à une réunion, il y a, oui, un échange. Quand tu donnes des explications, tu t'attends à ce qu'il y ait des gens qui demandent des détails supplémentaires sur les explications. Donc, c'est tout à fait normal. Pourquoi je le souligne, M. le Président? Je vous le dis à ce moment-ci, et le ministre étant ici, j'en profite, j'apprécierais de beaucoup et je crois qu'il serait beaucoup plus efficace si on avait des vraies consultations parlementaires, même à la suite des rencontres que les ministres ont actuellement, où ils vont revenir, j'en suis persuadé, avec beaucoup de commentaires, beaucoup de questionnements et beaucoup de suggestions pour apporter des amendements. Donc, il n'est pas trop tard pour faire une commission parlementaire.

On dit: «Le Québec s'est bâti à partir des forces de ses régions, de ses villes, de ses villages et du dynamisme des gens qui les habitent.» On reconnaît ça, quels que soient les partis, quels que soient les gouvernements dans l'histoire. «Ces acquis doivent nous servir de tremplin pour franchir une nouvelle étape en matière de développement local et régional. Un Québec qui affirme sa place et son originalité dans ce siècle nouveau doit mettre à profit la pleine contribution de toutes ses régions.»

M. le Président, moi, je pense que... C'est sûr qu'au Québec il y a certaines régions, certains comtés, certaines MRC, ce qu'on est portés à appeler «régions» ? parce qu'on a des régions administratives, parfois on va appeler «région» un comté, parfois une MRC ? mais partout... Il y en a où, sur le plan économique, ça va bien, d'autres ont plus de difficultés, il y a des cycles, c'est en dents de scie, comme je dis souvent, mais on reconnaît que le Québec s'est bâti des forces dans toutes les régions. S'il s'est bâti des forces et ça existe encore actuellement, c'est qu'il y a des organismes en place actuellement qui s'appellent, par MRC, un CLD, qui s'appellent dans une région CRD, et dépendamment dans la région on continue.

Pourquoi arrive-t-on, au moment où le taux de chômage n'a pas été contesté ? j'aime mieux le taux d'emploi ? le taux d'emploi n'a pas été contesté dans les derniers mois, puis ça va bien dans plusieurs régions, dès qu'on améliore un petit peu... Aujourd'hui, le gouvernement ne s'est pas gêné de dire: On a amélioré de 0,2. Bravo, c'est bon pour tout le monde. Mais il y a des organismes déjà en place qui, à mon sens, sont responsables de cette situation-là. Donc, qu'on veuille améliorer ces organismes-là pour continuer d'améliorer la situation dans chacune des régions du Québec, je trouve ça tout à fait normal. Mais qu'on arrive et qu'on dise, dans le cas d'un CLD, par exemple: On va laisser à la MRC le soin de se choisir un organisme, qu'elle appellera CLD ou autre, et là on donne des règles, c'est là-dessus que je vais me permettre d'élaborer un petit peu.

Mais, juste avant d'élaborer, on dit dans le diagnostic de la situation actuelle, on résume, j'en passe des grands bouts bien sûr: «Nécessité d'améliorer l'efficacité et la qualité des services aux citoyens en région.» Reconnaissons que, dans quatre ans, peu importe ce que fait le parti au pouvoir à l'heure actuelle, dans quatre ans, il y aura, il restera toujours des choses à améliorer pour améliorer l'efficacité des services aux citoyens. «Rapprochement des lieux de décision des citoyens pour donner une réponse mieux adaptée à la variété des besoins qui se manifestent en région.» Encore là, M. le Président, la création que ce soit des CLD, que ce soit des régies de la santé, que ce soit des CRD dans des régions avait cet objectif-là. Ils le rencontrent, cet objectif-là. «Élargissement des responsabilités des milieux locaux et régionaux afin de leur assurer une meilleure emprise sur le développement de leur territoire.»

M. le Président, les CLD, s'il sont des jeunes... Les CLD sont des jeunes organismes, à peu près quatre à cinq ans, cinq ans, si ma mémoire est bonne, et qui s'améliorent, je pense, continuellement, qui ont... Dans chacune des MRC, ils ont un bon rayonnement, ils ont une bonne implication, je dirais, de toute la société. On sait comment fonctionne un CLD: le gouvernement du Québec met de l'argent, et la MRC, chaque MRC met de l'argent. Donc, la MRC est déjà impliquée dans le fonctionnement du CLD. Elle a déjà des gens à l'alentour de la table, elle a déjà des pouvoirs de décision, des pouvoirs d'influence dans chacun des CLD. Moi, j'ai trois CLD avec qui je travaille, et, dans les trois cas, ça fonctionne bien. Dans les trois cas, il y a une bonne relation entre le milieu des élus et le milieu de la société civile. Les gens font des efforts pour s'assurer que tous les milieux de la société civile sont représentés le plus possible dans chacune de leur MRC.

n(21 heures)n

Dans la nouvelle formule de CLD, ce qui m'inquiète beaucoup, parce que ce n'est pas partout pareil que les gens ont les mêmes opinions, le même fonctionnement: quand on dit les élus «pourront inclure» des gens de la société civile au lieu de «devront inclure», je trouve que c'est une grande différence dans l'expression. Il faut s'assurer aussi que tous les milieux soient vraiment, vraiment représentés. Je pense, dans mes trois CLD, je ne peux pas dire que, dans les trois, les représentations sont les mêmes parce que le milieu en décide autrement. Là où l'agriculture est plus forte, bien, il y a des représentants plus d'agriculture, là où la culture est plus forte, là où le tourisme, enfin, chacun des... il y a des jeunes de représentés, il y a des femmes, ce sont des gens dans cette MRC là qui décident en fonction du bien de chacune de leur MRC.

Donc, moi, je voudrais voir ? je pense qu'il va y avoir, j'espère qu'il va y avoir des amendements d'apportés au projet de loi ? et je voudrais donc voir, dans les CLD, gardée cette implication-là du milieu qui décide lui-même. On dit: On ne fait pas de mur-à-mur. Bien, si on ne fait pas de mur-à-mur, n'obligeons pas tant de personnes du municipal, tant de personnes de la société civile; laissons-leur, à chacune des MRC, le soin de décider.

Je suis inquiet aussi quant au financement des CLD. On sait qu'à l'heure actuelle les MRC ne contribuent pas toutes de la même façon à leur CLD et, ce qu'on dit: On va en assurer le financement. Mais je suis bien inquiet, moi, quant à la partie financement. Si on laisse uniquement à la MRC le côté financement, bien, je pense qu'on va avoir des problèmes à court terme, là. Pourquoi? Parce que plusieurs MRC financièrement n'ont pas beaucoup de moyens, il faut être... je pense qu'en région, là, de façon particulière et dans certaines régions...

Quand j'arrive au niveau des... comme des centres de... la Conférence régionale des élus, et je vais me permettre évidemment de prendre la région de la Capitale-Nationale comme exemple, M. le Président, j'ai été un des premiers présidents lorsque a été créé le CRD... CRCD de Québec et, à ce moment-là, oui, on avait certains élus qui s'impliquaient, mais le CRCD, surtout au début, a été vraiment créé, vraiment fonctionné, vraiment tenu à bout de bras par des gens de la société civile.

Et, en cours de route, je dois admettre qu'en cours de route il y a eu beaucoup plus d'élus, et le CRCD de la région de Québec, pas plus tard que l'année dernière, a fait une révision de ses statuts pour le rendre encore plus efficace, mais ils étaient rendus, M. le Président, à au-delà de 75 personnes qui siégeaient. On peut discuter de la difficulté d'avoir des consensus, de la difficulté sur le plan administratif, mais ça démontrait un intérêt de la société civile. Quand ils ont voulu réduire à 26 ou 27, ce qu'ils ont fait, ils ont eu beaucoup de misère, M. le Président, à s'entendre sur les choix des personnes qui demeuraient. Tout le monde voulait rester parce que c'était devenu un organisme de concertation très fort où les gens de la région de Québec s'y retrouvaient.

Il faut expliquer davantage pourquoi. C'est que, quand vous prenez, dans la région de la Capitale-Nationale, de Charlevoix à Portneuf, vous avez 11 comtés et vous avez des comtés avec, évidemment, des priorités différentes, des situations économiques différentes, et je vous donne juste un petit exemple de ce que ça peut représenter. Quand vous avez quelqu'un qui représente, exemple, l'agriculture ? je pense à une Mme Gagnon qui représente l'UPA dans toute la grande région de Québec ? qui reste dans une petite municipalité tout près de La Malbaie, qui part de son coin de pays très souvent pour venir travailler avec les gens du CRCDQ, travailler avec les gens, des intervenants de la région de Québec, c'est exigeant, c'est exigeant sur le plan familial, c'est exigeant sur le plan financier, c'est exigeant à tous les niveaux.

C'est le même phénomène pour le préfet qui reste à un bout de cette grande région-là, qui doit gagner sa vie, qui travaille très souvent dans des métiers difficiles. Même chose pour la culture. Je pense à une personne qui s'occupe de la culture, qui est la directrice du Domaine Forget, une personne d'une compétence incroyable en culture, qui doit faire exactement la même chose.

Tu sais, pourquoi ces gens-là le font? Ces gens-là le font parce qu'ils sont fiers de leur appartenance dans la région de la Capitale-Nationale. Mais ces gens-là le font aussi parce qu'ils veulent.. Il faut qu'ils se battent ? je vais employer l'expression «se battre» ? il faut qu'ils viennent sur les lieux ? qui est à Québec, la grande ville ? pour convaincre les gens, que ce soit du CRCDQ, que ce soit de la régie de la santé et tout autre organisme, parce qu'on est dans la région, on appartient à cette région-là et on veut qu'elle grandisse et, oui, en même temps, on veut que notre petit coin de pays, notre MRC grandisse. Tout ça pour vous dire que, dans le CRCD actuel, ça le permettait.

Là, ce qu'on veut faire avec la Conférence régionale des élus, si je prends le cas de Charlevoix, si ma compréhension est bonne, on aurait le droit à six sièges, mais les six seraient des sièges d'élus. Première question que, moi, je me pose sur le plan pratique ? puis ça, c'est applicable, M. le Président, dans tous les endroits où il y a de grandes distances à franchir: Comment je peux demander à des maires qui travaillent déjà très fort dans leur propre travail régulier, des maires qui n'ont pas des grosses entreprises ou des gros salaires puis qui vont venir à Québec de façon régulière? Première question. Et, en plus... Et ça, moi, je suis parfaitement d'accord, là, je suis convaincu que, de plus en plus, on va donner des responsabilités aux élus, je suis convaincu de ça et je n'ai rien contre ça. Mais c'est justement, on va leur en donner en plus, ils n'ont quand même pas un gros, gros salaire, il faut qu'ils gagnent leur vie autrement. Moi, je pense que, déjà là, on a un élément qui est extrêmement difficile. Ça, c'est une chose. Mais qu'est-ce qui arrive pour mes gens de Charlevoix en culture, en agriculture, tous les autres domaines où, dans la grande région de Québec, tout ce qui est permis, c'est un tiers par rapport aux élus? Ça va être des batailles absolument épouvantables entre les différentes MRC et comtés et les gens de la ville de Québec pour avoir la représentation, que ce soit, là, dans les domaines que je viens de donner.

Alors, tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'on a travaillé très fort dans les années pour bâtir où on en est rendu, et, à moins de faire de la politique partisane vraiment, là, il faut admettre que, dans la région de Québec, avec les années, tous gouvernements confondus, il y a eu de grandes améliorations et il y en a eu particulièrement au niveau de la concertation, et je ne vous cache pas qu'il est très difficile de la maintenir tout le temps. Mais là, d'après moi, on va la rempirer. Combien de fois, moi, j'ai dû travailler fort pour convaincre mes gens dans Charlevoix que, pour notre développement à Charlevoix, c'était vers Québec, vers la Capitale-Nationale? Parce que, à cause de cette difficulté-là, le petit par rapport au gros, à cause de cette difficulté-là, combien de fois les gens me disaient: Bon. Nous, là, on aimerait mieux aller vers la Côte-Nord; à une autre occasion, c'est: On aimerait mieux aller vers le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Toujours dans des longues distances, là, puis tout aussi intéressant dans chacune des régions. Je veux juste démontrer que, si on fait une conférence régionale d'élus, qu'on ne se préoccupe pas de ces éléments-là, M. le Président, je pense que, dans la région de la Capitale-Nationale, on va avoir de sérieux problèmes, et je suis profondément convaincu qu'on risque de reculer 25, 30, 35 ans en arrière.

Dans la loi, il y a un article qui disait ? l'article 96, je pense ? ça permettait, dans soit la région de Montréal ou de Québec, la création de plus qu'une conférence régionale d'élus. Ça, je vais vous dire une affaire, ce serait le désastre encore plus grand. Là, on verrait vraiment, à l'entour de la ville de Québec, des MRC formées de conférences régionales d'élus et avoir continuellement, continuellement à discuter, à se battre, à travailler en compétition avec celle de Québec. Après avoir parlé au ministre, je pense qu'on va avoir un amendement à cet article-là ? je le souhaite de tout coeur ? pour que, dans la région de la Capitale-Nationale, on ait seulement une conférence régionale des élus.

n(21 h 10)n

En terminant, M. le Président, je me permettrai... Je regardais ce matin un article dans Le Soleil ? qui a été écrit par un élu! ? qui s'intitule: Pourquoi recommencer ce que nous venons de terminer? Et c'est écrit par Claude Larose, du comité exécutif de la ville de Québec. Et je ne le lirai pas tout, M. le Président, mais je pense qu'il est bon, un élu qui parle exactement de ce que je viens de parler, c'est-à-dire que, pour la région et pour la ville, il termine en disant: «Je ne vois pas pourquoi, dans la région et la ville de Québec, il faudrait recommencer ce que nous venons de terminer.»

Alors, M. le Président, je prends l'occasion de voir le ministre ici, qui, je pense, peut être qualifié d'être un ami, je prends l'occasion qui m'est donnée de le supplier d'apporter les modifications à son projet de loi, les modifications dans le sens que j'ai... les éléments que j'ai énumérés, c'est-à-dire, entre autres, «doit» au lieu de «peut», puis des droits de vote, de participation et un meilleur équilibre entre les élus et la société civile. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député de Charlevoix. La parole est à la députée, maintenant, de Mirabel. Mme la députée.

Mme Denise Beaudoin

Mme Beaudoin: M. le Président, le père Noël est triste aujourd'hui, le vrai, pas celui du Parti libéral du Québec. Il est triste parce que, comme de plus en plus de Québécois et de Québécoises, Noël s'annonce triste pour de nombreux foyers québécois face à leurs perspectives d'avenir. Moi aussi, M. le Président, comme de plus en plus de Québécois et de Québécoises, j'ai mal aujourd'hui à notre société, j'ai mal à notre démocratie, j'ai mal à notre volonté de construire ensemble dans la recherche de consensus.

Le Québec a besoin de toutes ses forces vives pour se construire. Le projet de loi n° 34 sur le développement régional vient briser la synergie que les différentes forces vives du Québec s'emploient, depuis plusieurs années, à activer pour le développement le plus harmonieux possible de chacune des régions du Québec, M. le Président. Le projet de loi n° 34 sur le développement régional vient mettre du sable dans l'engrenage, dans le moteur de l'économie de chacune de nos régions. Ce que le projet de loi n° 34 fait, c'est qu'il met en danger la dynamique de concertation et de collaboration dans chacune des régions du Québec. Il relance inutilement un débat de structures et, par le fait même, une lutte de pouvoir inutile pour notre économie.

En effet, M. le Président, le gouvernement pave la voie à la chicane. Il met les élus municipaux dans une position très inconfortable de devoir eux-mêmes éliminer une grande partie de leurs partenaires socioéconomiques, avec qui ils travaillent présentement dans chacune des régions du Québec. Récemment, dans sa réponse à l'un des mes collègues des Laurentides, la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme disait: «Nous mettons donc la table pour instaurer une nouvelle dynamique, une nouvelle coopération entre l'État et les régions.» Fin de la citation. M. le Président, je partage entièrement cette préoccupation, cette priorité de la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme, mais c'est dans sa concrétisation à l'intérieur du projet même de loi n° 34 que je ne retrouve pas ce qui apparaît pourtant essentiel à la ministre déléguée. C'est dans sa concrétisation à l'intérieur du projet de loi n° 34 que les différents intervenants de la société civile de ma circonscription de Mirabel et de toute la région des Laurentides... qu'ils ne retrouvent pas les liens de cohérence avec les propos de la ministre déléguée.

M. le Président, or, une des nouvelles tendances mondiales de moderniser l'État, c'est l'implication justement plus grande, de plus en plus grande de la société civile. C'est pour qu'elle s'implique. Elle doit se sentir d'abord à part égale et non seulement selon le bon vouloir des élus municipaux, c'est-à-dire d'abord décisionnelle et dans un rapport de force quand même équilibré. La grande faiblesse du projet de loi n° 34, M. le Président, ce n'est pas le poids qu'on accorde aux élus municipaux, ce n'est pas ça, le problème, c'est le poids qu'on n'accorde pas à la société civile, qu'on n'accorde pas aux élus scolaires, qu'on n'accorde pas non plus aux députés. En effet, le projet de loi n° 34 ne garantit aucunement la présence de la société civile, ni dans les CLD ni dans les CRD. Quand on parle, M. le Président, du risque d'un retour à des guerres de clocher, ce n'est pas par manque de respect pour les élus municipaux. Tout le contraire, c'est parce qu'on les respecte. On connaît toute leur volonté et leur légitimité à défendre leurs intérêts locaux, d'où le risque de confrontations.

M. le Président, par contre, l'implication de la société civile et de tous les niveaux d'élus vient assurer un meilleur équilibre. Elle vient favoriser l'obligation de concertation et surtout favoriser une planification, une vision régionale et, quelquefois, permettre un arbitrage mieux équilibré. Voilà pourquoi, M. le Président, je crois, avec mes collègues du Parti québécois, que le projet de loi n° 34 entraînera un net recul de la démocratie participative, un net recul de la concertation régionale, un net recul de l'implication tant souhaitée du citoyen dans la dynamique sociale et économique de sa localité et de sa région. M. le Président, je rappellerai que le citoyen n'est pas qu'un électeur qui contribue une fois par quatre ans. Le citoyen veut contribuer régulièrement. C'est notre devoir de lui fournir véritablement les outils qui lui permettront d'avoir droit au chapitre.

Un des messages majeurs que véhiculent d'ailleurs les régions et qui est rempli de gros bon sens, c'est: Pourquoi réparer ce qui n'est pas brisé? Car, dans plusieurs régions, les CLD ont eu des résultats extrêmement intéressants, M. le Président. On a maximisé les investissements publics, on a multiplié par quatre ou par cinq au niveau du rendement. Les CRD, incluant les CRD des Laurentides, ont fait un travail de planification stratégique régionale remarquable. Dans plusieurs régions, les gens s'entendent pour affirmer qu'il y a un consensus pour maintenir la structure et la façon de faire. Le projet de loi n° 34, M. le Président, ne permet pas de maintenir ce qui marchait bien, de maintenir ce consensus. Quand il y a un consensus dans une région, incluant le consensus chez les élus municipaux, le projet de loi devrait permettre la reconduction intégrale du statu quo, autant pour les CLD que pour les CRD. On les appellera CRE s'il le faut, mais, si on fait juste changer de lettre, ce serait un moindre mal.

M. le Président, permettez-moi maintenant d'attirer votre attention ainsi que celle des ministres concernés sur une dimension très importante des conséquences que pourra avoir le projet de loi n° 34 sur la voix et l'importance de la place des femmes dans ce développement régional. Nous savons qu'il existe depuis 10 ans, au Québec, une politique gouvernementale en matière de condition féminine adoptée lors de la dernière année du mandat du gouvernement de Robert Bourassa, en 1993. Cette politique veut illustrer la volonté gouvernementale de poser les jalons d'une société dans laquelle les femmes et les hommes pourront réaliser leur plein potentiel et participer à part entière au développement du Québec, M. le Président.

La cinquième orientation de cette politique traite spécifiquement de la place des femmes dans le développement des régions et pose les principes suivants: les femmes doivent participer pleinement en tant que partenaires du développement. Permettez-moi d'insister sur ces derniers mots, «participer pleinement en tant que partenaires du développement», M. le Président. Donc, on doit créer les conditions nécessaires à la participation de femmes aux décisions, accroître leur présence au sein des lieux de décision locaux et régionaux, inciter les instances locales et régionales à agir en ce sens.

Les femmes doivent également profiter autant que les hommes des avantages du développement. Est-il nécessaire d'insister sur ce principe, M. le Président? Donc, on doit inciter les instances locales et régionales à prendre des mesures qui tiennent compte des intérêts et des réalités vécues par les femmes. Cette volonté gouvernementale, M. le Président, n'est pas exclusive à un parti. Elle est liée au travail et aux interventions des personnes concernées, telles les femmes engagées dans des groupes de défense de droits, les gestionnaires et les membres des conseils d'administration de diverses instances locales et régionales, les fonctionnaires, les membres des conseils municipaux. Tout ce beau monde, M. le Président, a permis de faire des avancées significatives dans la participation des femmes en tant que partenaires du développement dans chacune des régions, et en particulier dans la région des Laurentides.

En ce qui a trait aux avantages que les femmes retirent du développement de notre région, il reste encore beaucoup de travail à faire. Notons simplement que les femmes de la région gagnent en moyenne 18 907 $ par année, alors que la moyenne pour les hommes est de 29 939 $, soit un écart, M. le Président, de plus de 10 000 $, ce qui fait dire aux membres de la commission de condition féminine du CRD des Laurentides que, malheureusement, encore aujourd'hui, à l'aube de 2004, la pauvreté a un sexe.

n(21 h 20)n

En octobre 2003, plus de 700 personnes, M. le Président, ont été sollicitées dans la région des Laurentides afin de donner leur avis sur cette future instance de gouvernance régionale que le gouvernement veut mettre en place dans notre région. Clairement, il est ressorti de ces assises que, premièrement, le principal consensus qui se dégage porte sur la présence obligatoire des partenaires de la société civile comme codécideurs au niveau de la gouvernance régionale.

Le projet de loi n° 34, M. le Président, dans sa forme actuelle, laisse tout le pouvoir et beaucoup de place aux élus municipaux en leur donnant le choix d'assumer seuls la représentation aux futures instances de gouverne régionale. Ils peuvent aussi partager, s'ils le veulent, cette représentation avec des membres de la société civile. Ces derniers ne devront pas occuper plus du tiers, seulement le tiers des sièges de l'instance. Inacceptable, M. le Président. Il s'agit là d'un net recul démocratique, important en particulier pour les femmes, et d'une vision très étroite du développement des régions, car, selon un portrait effectué par le ministère des Affaires municipales, du Sport et du Loisir en 2002, sur 87 MRC, on retrouve six préfètes, soit 6,9 % des élus à ce poste, seulement. Sur 1 084 municipalités, on compte 118 mairesses, ce qui représente seulement 10,9 % des élus à ce poste, ainsi que 1 659 conseillères, soit 24,1 %. Il s'agit là d'un très faible pourcentage de représentation des femmes, qui se reflétera dans la composition des futures instances de gouverne régionales et dans les décisions qui y seront prises.

Si le projet de loi n° 34, M. le Président, est accepté tel quel, nous verrons donc diminuer considérablement le nombre de femmes au sein des instances vouées au développement local et régional. De plus, le projet de loi n° 34 menace les avancées obtenues en condition féminine dans le développement local et régional en ne précisant pas que les femmes doivent occuper la place qui leur revient dans cette instance.

En effet, M. le Président, comment les femmes pourront-elles participer pleinement en tant que partenaires du développement si l'on remet ce pouvoir décisionnel aux seuls élus municipaux? À ce jour, dans les Laurentides, les femmes représentent 26 % des membres des conseils municipaux, et tout au plus 10 % des maires et des mairesses. S'il y a 6 préfètes au Québec, il n'y en a aucune dans la région des Laurentides, M. le Président. Il y a là une disproportion importante dans la représentation hommes-femmes qui nous inquiète et qui nous fait croire que les femmes seront tout simplement écartées de la nouvelle structure de gouvernance régionale. C'est pourquoi les membres de la Commission de condition féminine du CRD des Laurentides demandent que le gouvernement actuel modifie le projet de loi n° 34 pour que les changements structuraux qu'ils s'apprêtent à mettre de l'avant ne se fassent pas aux dépens des femmes et de la société civile, M. le Président.

Au niveau local et régional, il ne faut pas tuer les réseaux et les forums de discussion et de concertation qui incluaient les centres locaux de développement et les conseils régionaux auxquels participait la société civile. Il ne faut pas remettre le pouvoir aux seuls élus, consacrant ainsi une conception élitiste et partisane du développement. La ministre déléguée au développement régional et au tourisme ne disait-elle pas, en mai dernier, que le développement, c'est l'affaire de tous, qu'il n'était surtout pas question pour le gouvernement de nous imposer une façon de faire, que les choix appartiendraient aux élus municipaux et aux CRD? Je l'invite donc aujourd'hui même, M. le Président, elle et son gouvernement, à respecter sa parole.

Le gouvernement se doit d'être à l'écoute des préoccupations des gens selon les particularités des régions. Quand des entrepreneurs, des chambres de commerce, des entreprises, des gens impliqués dans le secteur communautaire, des coopératives, des gens oeuvrant dans l'économie sociale, l'éducation, la santé, des syndicats, des agriculteurs, des gens des ressources naturelles, des artistes, des gens de la culture, de l'environnement, du tourisme, des loisirs, des sports, des représentantes des groupes de femmes, des groupes de jeunes, des groupes d'aînés, des autochtones, et j'en passe, M. le Président, désirent s'impliquer activement dans le développement local et régional de leurs régions, la moindre des choses, le respect le plus élémentaire est de les accueillir dans des instances où ils ne seront pas considérés comme de simples figurants, M. le Président. Tous ces hommes et toutes ces femmes veulent bâtir le Québec moderne. Ce n'est pas l'apanage exclusif des élus municipaux. Le gouvernement ne doit pas faire un pied de nez aux forces vives de nos régions.

Les inquiétudes ne sont pas exclusives aux femmes, M. le Président. Le Conseil régional de développement des Laurentides est tout aussi inquiet des répercussions du projet de loi n° 34. On se questionne, entre autres, sur l'imprécision des articles 170 et 171, qui devraient définir davantage les obligations et les droits transférés au CRE. Il faudrait prévoir ou préciser les mécanismes de liquidation des CRD et les budgets pour ce faire. Il faudrait préciser, M. le Président, les modalités de transfert de l'actif, du passif, et des employés des CRD vers les CRE. Présentement, M. le Président, le projet de loi n° 34 transfère, au 31 mars 2004, les budgets d'opération aux CRE, lesquels contiennent déjà des obligations et des engagements. Nous n'avons à penser ici qu'au personnel, aux loyers et aux différentes locations d'équipement, entre autres. L'obligation et la responsabilité de les respecter semblent absent du projet de loi n° 34, M. le Président.

Il y aurait encore beaucoup de choses à dire à ce sujet, mais, à ce stade-ci, le gouvernement est-il en mesure de répondre au moins à Mme Blanche Paradis, du Réseau des femmes des Laurentides, qui est très inquiète, M. le Président. Le gouvernement est-il en mesure de répondre à M. Michel Gagné, président du CRD des Laurentides, qui, lui aussi, est très inquiet, M. le Président. Le père Noël a bien raison d'être triste, et je suis très inquiète également, M. le Président. Les Québécois et les Québécoises sont également inquiets, et les nombreuses manifestations le démontrent bien. Je suis contre ce projet de loi n° 34, car le Québec a besoin de toutes ses forces vives. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je me sens dans l'obligation de me lever pour corriger les mauvaises interprétations qui sont faites actuellement, par les parlementaires de l'opposition, du projet de loi n° 34. Alors, il y a un certain nombre de questions auxquelles je vais répondre: Pourquoi faut-il passer rapidement ce projet de loi? Qu'est-ce qu'il y a dans ce projet de loi qui touche la société civile? Et, troisième élément, pourquoi, à l'heure actuelle, il est important de soutenir la ministre dans ses consultations non pas au Parlement, mais en région?

La vraie réelle question, c'est que nous croyons profondément au développement des régions, M. le Président, et c'est le choix que ce gouvernement a fait: ce gouvernement a fait le choix de croire au développement des régions. Pour cela, il entend décentraliser une partie des fonctions qui étaient traditionnellement assumées par le gouvernement provincial, en collaboration dans le développement avec les régions; c'est l'objectif, actuellement, du projet de loi. Pour pouvoir faire de la décentralisation, il faut que vous décentralisiez vers quelque chose et, pour permettre aux régions du Québec de pouvoir se concerter, on a mis sur pied cette Conférence régionale des élus qui regroupe essentiellement des gens qui sont élus.

n(21 h 30)n

Et, M. le Président, il est bien important de comprendre l'importance d'être élu parce que, lorsque vous êtes élus, vous avez des comptes à rendre. Vous avez des comptes à rendre envers les personnes qui vous ont donné un mandat. Vous êtes imputables régulièrement devant vos électeurs. Et c'est le choix que nous faisons actuellement de dire: la Conférence régionale doit être principalement formée, en région, par des personnes qui ont un mandat, un mandat qui leur est donné par un vote qui est donné par leurs électeurs.

Sur ce, M. le Président, j'ai entendu des parlementaires de l'opposition s'exprimer en disant: Oui, mais la société civile ne participera pas à ces conférences régionales des élus. Je me permets de leur dire: ils sont dans l'erreur. Ils se trompent dans leur interprétation, actuellement, du projet de loi n° 34. Ils se trompent, M. le Président, dans l'interprétation du projet de loi n° 34, parce que le projet de loi n° 34 permet actuellement à la Conférence régionale des élus, c'est-à-dire aux gens réellement de la région, de s'adjoindre, de s'adjoindre des personnes, ce qu'on appelle... venant de ce qu'on appelle couramment la société civile, c'est-à-dire les personnes du secteur de l'éducation, de la santé, voire des groupes de pression, des chambres de commerce, de pouvoir s'adjoindre aux CRE.

La grande différence qu'il y a, M. le Président, entre la position défendue par l'opposition et celle du gouvernement, c'est que, nous, nous disons aux régions: Vous allez choisir, nous vous faisons confiance. Nous faisons confiance aujourd'hui aux élus municipaux pour pouvoir dire qui vont-ils, pensent-ils et vont-ils s'adjoindre venant de la société civile pour être le plus aptes à participer au développement de leurs régions. C'est un choix qui est fait par ce côté-ci de la Chambre, M. le Président. C'est un choix que nous faisons de dire: Les régions, les élus municipaux sont parfaitement capables aujourd'hui de dire qui, de la société civile, doit s'adjoindre, ils peuvent s'adjoindre à leurs CRE, c'est-à-dire conférences régionales des élus. Alors, la différence, si on suivait la piste que nous suggèrent les interventions des parlementaires de l'opposition, ça voudrait dire que d'une manière centrale, ici, nous déciderions, à la place, M. le Président, à la place des régions, qui on doit placer dans les conférences régionales des élus.

Notre choix, M. le Président, le choix du gouvernement, c'est de faire confiance aux régions, c'est de faire confiance aux élus municipaux pour pouvoir s'adjoindre les personnes les plus compétentes à participer en région au développement économique. Et ce ne sera peut-être pas les mêmes personnes, M. le Président. Comprenez-moi bien, nous avons choisi de ce côté-ci de ne pas faire du mur-à-mur, nous avons choisi de dire: Il pourrait y avoir un CRE qui, dans la région de Gaspésie, des Îles-de-la-Madeleine, soit différent, en termes de composition, du CRE qu'il y aurait dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean parce que la réalité locale peut être différente. Et ce que nous faisons ici, c'est que nous allons dire, nous disons: Nous faisons confiance, M. le Président, au choix qui soit celui des régions.

J'ai énormément de difficultés, j'ai énormément de difficultés lorsque j'entends les parlementaires de l'opposition parler de recul démocratique, alors que nous faisons essentiellement le geste de dire: Il faut que ce soient des élus, M. le Président, il faut réellement que ce soient des élus qui soient majoritaires à l'intérieur de cette nouvelle structure vers laquelle nous allons décentraliser une partie de l'activité du gouvernement. Il faut que ce soient des gens qui ont un mandat électif. Et, lorsque qu'on me dit, parce qu'on dit «il faut qu'il y ait des gens qui aient un mandat électif»: Ce n'est pas un geste démocratique, j'ai énormément de difficultés à comprendre la logique des parlementaires de l'opposition, M. le Président.

En dernier lieu, les collègues de l'opposition ont plaidé pour dire qu'il faudrait à l'heure actuelle qu'on tienne des consultations ici, à l'Assemblée nationale, sur le projet de loi pour que ça se fasse dans les murs de l'Assemblée nationale. Le gouvernement, M. le Président, a choisi, encore une fois, de faire confiance aux régions. Au lieu de demander, au lieu de demander, M. le Président, aux représentants des régions de venir se déplacer à Québec, au parlement, pour venir faire valoir leur point de vue sur ce projet de loi, nous avons choisi exactement le contraire. La ministre est en train de se déplacer. Elle se déplace en région pour aller écouter les partenaires régionaux. Nous ne disons pas aux gens: Déplacez-vous pour venir nous voir, nous disons: Nous allons aller vous voir. Nous allons nous déplacer. La consultation, nous allons la faire réellement en région parce que nous voulons avoir le pouls de chacun des partenaires de la région. S'il n'y a pas un geste plus démocratique, il y a quelque chose que je ne comprends pas, M. le Président.

Au lieu de forcer les gens locaux de la Côte-Nord ou les gens de la Gaspésie de payer des billets d'avion importants pour venir se déplacer à Québec et faire valoir leur point de vue sur le projet de loi, nous choisissons le contraire. La ministre est en train d'aller les voir dans leur milieu de vie. Elle se déplace pour aller les voir sur la Côte-Nord, M. le Président. Elle se déplace. Et on nous ferait croire, M. le Président, que ce geste actuellement n'est pas un geste démocratique? Au contraire, bien au contraire, parce que nous croyons aux régions, parce que nous croyons que les élus locaux dans leur milieu peuvent faire valoir leur point de vue et parce que nous tenons réellement à avoir le point de vue de l'ensemble des partenaires potentiels dans la région, nous allons les voir dans leur milieu. C'est ça que fait la ministre, M. le Président.

Alors, il n'y a vraiment pas lieu de s'énerver avec ce projet de loi, M. le Président. Comprenons-nous bien, c'est un projet de loi qui est fondamental parce que nous allons créer une structure vers laquelle nous voulons décentraliser une partie de l'activité gouvernementale, premièrement.

Deuxièmement, cette structure, nous y tenons, cette structure doit être imputable à la population de la région, et la manière d'être imputable, c'est d'avoir une majorité de personnes élues à l'intérieur de cette structure-là, et c'est le choix qui est fait par le gouvernement. Nous voulons que les gens qui vont s'occuper du développement de leur région soient principalement des élus. Oui, M. le Président. Parce que nous faisons confiance justement aux élus locaux, nous disons: les élus locaux pourront s'adjoindre des gens de ce qu'on appelle la société civile pour pouvoir compléter, participer le mieux possible au développement de leur région, et chaque région, chaque groupe d'élus locaux pourra s'adjoindre des personnes différentes, c'est-à-dire que nous ne leur imposons pas nécessairement qu'il faudra y avoir le directeur de l'hôpital, ou le directeur du cégep, ou le président de la chambre de commerce, nous disons: Chaque région, chaque groupe d'élus locaux pourra choisir, choisir ceux qu'il pense être nécessaires à s'adjoindre à l'intérieur du CRE, M. le Président.

Et réellement, je ne comprends pas, à l'heure actuelle, lorsqu'on parle de bris de démocratie, lorsqu'on dit qu'on n'est pas en train de soutenir ou d'aller de l'avant avec les régions, je n'arrive pas à comprendre la logique de mes amis de l'opposition à l'heure actuelle. M. le Président, nous faisons un choix, un choix qui est de faire confiance aux régions. C'est un choix que nous avons annoncé.

Le député de... je crois que le député de Dubuc avait cité tout à l'heure la charte que nous avons signée au Mont-Tremblant, M. le Président. Cette charte était importante, nous la respectons aujourd'hui. Nous allons faire un développement des régions qui ne sera pas nécessairement un développement mur à mur, M. le Président, et la ministre est en train d'aller dans chacune des régions pour prendre le pouls de la région, pour être en mesure d'expliquer la portée du projet de loi.

Et, comprenez bien, actuellement, c'est une structure qu'on met sur pied. Une fois que la structure sera mise sur pied, lorsqu'on aura ce vers quoi nous pouvons commencer la décentralisation, commencera réellement le choix de la décentralisation, M. le Président. C'est simple comme tout, c'est ça que nous allons faire, c'est vers ça que nous sommes engagés et c'est ça que nous allons réaliser. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Merci, M. le député. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Article 213. J'aurais une question à poser à mon estimé collègue le député de Verdun.

Le Vice-Président (M. Sirros): Je comprends qu'il y a consentement, M. le député.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député de Chicoutimi, il y a consentement, j'ai cru comprendre.

n(21 h 40)n

M. Bédard: Oui, j'ai toujours du plaisir, M. le Président, à écouter mon collègue le député de Verdun d'ailleurs. J'aimerais vraiment lui poser une question que j'ai eu l'occasion d'étudier et j'aimerais avoir son commentaire relativement à l'imputabilité aux élus.

Le député, dans sa présentation, nous dit: Oui, il faut les élus... Donc, on confie les pouvoirs et les sommes aussi à être administrées par les instances régionales à des gens qui sont élus, donc qui seraient normalement imputables.

Or, peut-il me dire... Et là, c'est là que ça me pose un problème. L'imputabilité d'un maire, par exemple, qui représente une population, qui peut être préfet d'une MRC, c'est tout à fait normal, d'un village de, disons, 1 000 personnes ou 600 personnes, quelle imputabilité a-t-il de plus vis-à-vis la population régionale qui, elle, peut être de 200 000, 300 000, 400 000, 500 000 personnes?

Alors, quelle est l'imputabilité? Comment on peut s'assurer, effectivement, que le principe que défend mon collègue, qui est tout à fait défendable d'ailleurs, soit...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Un instant, M. le député de Verdun. Tranquillement, un à un. La question est posée. La réponse aussi doit être brève...

M. Gautrin: ...il vient de défendre, à l'heure actuelle, l'importance actuellement d'avoir des gens qui ont un mandat électif. Leur mandat électif n'est pas évidemment par tous les gens de la région. Il n'est pas question ici, dans notre projet, d'avoir une nouvelle structure de gouvernement régional, mais il est important que ceux qui vont prendre les décisions soient imputables, c'est-à-dire redevables, devant ceux qui les ont élus, des choix qu'ils vont faire à l'intérieur du CRE, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, M. le député de Verdun. Pour ce qui est de la prochaine intervention, c'est le député de Mercier. M. le député.

M. Daniel Turp

M. Turp: Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir sur ce projet de loi n° 34, qui vise à créer une loi sur le ministère du Développement économique et régional. Et ma première remarque, M. le Président, sera de dire comment j'étais déçu hier de ne pouvoir assister à la séance d'information, d'information, de la ministre. Elle était à Montréal, et, moi, j'étais ici au parlement, et je ne suis pas le seul à n'avoir pu assister à une séance d'information. D'information. D'ailleurs, c'est ce que mon assistant, mon attaché politique m'a dit: Il s'agissait d'information et très peu de consultation, des séances de questions et de réponses un peu improvisées.

Alors, M. le Président, vous comprendrez que beaucoup de députés de l'opposition ? et j'imagine que ça pourrait être aussi, et ça devrait être le cas de députés du parti gouvernemental et des députés indépendants ? sont très déçus de n'avoir pu être associés à ce processus qui semble tellement important, qui leur a justifié l'absence de la ministre pendant presque l'ensemble de cette session. Et c'est quelque chose qui est regrettable, M. le Président.

Je crois que c'est dans ce parlement, ici même à l'Assemblée, à l'occasion de la période des questions, que nous aurions dû pouvoir interroger la ministre et le gouvernement, représenté par elle, sur le contenu de ce projet de loi, sur ses intentions, sur ce qu'elle voulait faire avec ce projet. Et il aurait été aussi beaucoup plus approprié que de vraies consultations aient lieu en commission parlementaire, ici même à l'Assemblée nationale, et que ces groupes, ces personnes, ces représentants qui siègent dans les conseils locaux de développement, et à Montréal dans les centres de développement économique et communautaire, ces CDEC, puissent venir à Québec et faire part de leurs vues, étudier de façon attentive le projet de loi n° 34.

Et il ne suffit pas de dire, comme l'a dit le député de Verdun, que la ministre allait auprès des personnes et auprès des groupes. Je crois que c'est dans l'enceinte de l'Assemblée nationale que de véritables consultations auraient dû être faites, d'autant que l'on veut changer, de façon très majeure, la façon de faire du développement économique et local. On veut changer ceux et celles qui décideront, prendront des mesures pour favoriser le développement économique et local. Puisqu'on veut remettre dans les mains d'une conférence ou de plusieurs conférences régionales des élus cette question du développement économique et local, il aurait été essentiel que puissent être entendus les gens, ici même, dans l'enceinte, en présence des députés que nous sommes et qui avons à déterminer le contenu de cette loi et à voter en faveur ou contre ces dispositions.

Alors, c'est la première faille d'un processus qui veut conduire à modifier de façon significative les règles du jeu lorsqu'il s'agit du développement économique et local, et, dans ce sens-là, il sera encore plus ? comment dire? ? tragique que ce projet de loi soit adopté rapidement. On laisse entendre qu'il le sera, qu'il pourrait même être inclus dans un bâillon, et il serait vraiment navrant que ce projet de loi soit adopté sans qu'il y ait eu de débat en commission parlementaire, sans que nous ayons pu entendre, nous, les députés, y compris ceux de l'opposition officielle, ceux qui n'avons pas pu assister à ces tournées de consultation et d'information, les vues des groupes, les vues des personnes qui agissent au niveau local, qui, dans leur travail quotidien au sein des CLD, au sein des CDEC, font du développement local. Nous n'aurons pas pu, nous, les députés, les entendre, et je crois que c'est regrettable. Ce n'est pas la bonne façon de faire des lois, ce n'est pas la bonne façon d'entreprendre une réforme qui vise à favoriser pourtant le développement local.

Et, M. le Président, moi, j'ai eu l'occasion de rencontrer dans mon bureau de circonscription le directeur général du Centre de développement économique et communautaire du Plateau Mont-Royal? Centre-Sud, Michel Doray, un homme inquiet, un homme inquiet pour l'avenir de son CDEC, un homme inquiet pour l'avenir des projets que sa CDEC a engendrés, que sa CDEC a mis sur pied, un homme inquiet parce qu'il a des employés. Et, dans le projet de loi, dans l'état où il est, il me disait qu'il voyait au-dessus de sa tête une épée de Damoclès parce qu'il ne sait pas si, demain, sa CDEC existera encore. Il n'a pas d'assurance, il n'a pas de garantie que sa CDEC survivra à cette réforme. Il ne sait pas si ses employés auront, demain, un emploi, pourront continuer de mettre à contribution et de mettre à la contribution de la communauté leur expertise, l'expertise acquise ces dernières années dans ce centre local de développement ou ce centre de développement économique et communautaire.

Et d'ailleurs, je recevais, comme député, une lettre qui est datée du 3 décembre dernier et qui était adressée au ministre du Développement économique et régional, une lettre qui est signée de Pierre Richard, du directeur général du réseau, au nom des CDEC du Québec, lequel rapporte une rencontre d'une délégation des représentants des corporations de développement économique et communautaire, les CDEC, une rencontre qui avait lieu d'ailleurs en présence de la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, au sujet des réformes relatives aux structures du développement régional et local, et de cet échange, M. Richard retenait ? et, je le lis, je le cite ? il retenait que l'on voulait décentraliser aux élus municipaux un certain nombre de pouvoirs en matière de développement local et régional, mais qu'il ne voulait pas ? le ministre ? défaire ce qui marchait bien sur le terrain. Il ajoutait que, dans le cas de Montréal, le pouvoir d'orientation sur le développement régional et local serait confié à la ville et à son conseil municipal, et non pas aux arrondissements. C'est ce qu'il comprenait aussi de sa rencontre avec la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne et le ministre du Développement économique et régional.

n(21 h 50)n

Il dit et écrit que le ministre était, semble-t-il, prêt à examiner un libellé d'article qui permettrait aux CDEC qui agissent comme CLD à Montréal d'échapper à l'obligation de porter le nom de CLD afin de ne pas compromettre d'autres financements. Et il disait qu'à deux reprises, en réponse aux questions de ses collègues directeurs de CDEC, il avait été assuré que les ententes de cinq ans signées par neuf CDEC de Montréal à titre de CLD avec le gouvernement du Québec seraient respectées. Mais que concluait-il à la lecture du projet de loi n° 34 que nous examinons? Il concluait que le projet de loi n° 34 ne contient pas les assurances que le ministre avait données aux directeurs de CDEC. La compréhension qu'ils en avaient, dit-il, c'est que les changements proposés par le projet de loi n° 34 risquent de bouleverser les dynamiques de concertation et de développement qui ont été mises en place depuis 15 ans à Montréal, en particulier dans le réseau des CDEC, et qui donnent des résultats probants, et c'est ce qui semble le plus déplorable, M. le Président.

Les CDEC sont un moteur de vitalité économique à Montréal et de lutte, notamment, contre la pauvreté urbaine par la création d'emplois. Et, depuis la création de ces CDEC, des entreprises nombreuses ont été soutenues. Et, par exemple, on peut porter au crédit des CDEC des réalisations extraordinaires, comme la conversion du site Angus, dans la circonscription de ma collègue de Rosemont, et c'est grâce à l'initiative de ces CDEC que ces réussites ont pu être possibles. Il en va de même pour le Technopôle Angus, M. le Président. Et, si les CDEC aujourd'hui se voient privées de la capacité de continuer à faire du développement économique parce qu'une conférence régionale des élus choisirait une autre voie que les CDEC, toute cette expertise qui aura été créée puis qui aura été à l'origine d'un développement local sans précédent, tous ces efforts auront été mis à néant par un gouvernement qui aura mis l'accent sur des structures, la création de nouvelles structures, la création de structures dont, je vous rappelle, M. le Président, et c'est une de mes collègues qui l'a souligné à plusieurs reprises devant cette Assemblée... des structures qui pourraient avoir comme conséquence qu'un nombre infinitésimal de femmes puissent participer aux travaux de ces conférences régionales des élus et puissent participer au développement local de cette façon-là.

Lorsqu'on regarde la composition des conseils de ville et des municipalités, des personnes qui ont la qualité de maire, on se rend compte que très peu de femmes détiennent de telles positions, et, lorsqu'il s'agira de les rassembler autour d'une conférence régionale des élus, elles seront si peu nombreuses. Et je crois que c'est là une faille majeure d'un projet de loi, puisqu'il va priver des personnes qui ont un mot à dire sur le développement économique et local, priver ces gens d'une voix au chapitre, priver les femmes d'une voix qu'elles doivent avoir lorsqu'il s'agit de développement.

Et le modèle proposé par le gouvernement libéral est un modèle aussi qui laisse beaucoup d'incertitude sur la place que la société civile devrait occuper dans le développement local et dans le développement communautaire. M. le Président, une levée de boucliers est évidente dans les milieux communautaires, parce que, après avoir participé de façon intime aux travaux des CLD, aux travaux des CDEC, la place qui leur est réservée est encore très incertaine. On laisse entendre qu'ils pourraient avoir, dans les CLD, une voix au chapitre, mais elle ne sera pas aussi importante que dans les structures actuelles, et les élus seront à ce point majoritaires et nombreux que la voix de la société civile aura de la difficulté à se faire entendre.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Sirros): ...M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): ...collègue de Mercier puisse passer comme il faut, j'aimerais qu'on vérifie le quorum.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, on va vérifier le quorum. Il n'y a effectivement pas quorum. Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

n(21 h 55 ? 21 h 56)n

M. Turp: ...là, tout à coup, le quorum revient, nous voyons tous ces élus reprendre leur siège à l'Assemblée. Et je suis content d'ailleurs de constater que le ministre du Développement économique et régional s'est joint à nous et qu'il pourra entendre...

Des voix: ...

M. Turp: Je constate seulement la...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, si vous permettez, sur le règlement, on n'a pas le droit de constater l'absence de députés en cette Chambre. On a constaté le quorum. Le quorum étant établi, on est revenus au débat. Alors, M. le député de Mercier, je vous prie de continuer sur votre intervention, c'était très bien parti.

M. Turp: Merci, M. le Président. Je suis en fait très, très heureux de pouvoir rappeler au ministre responsable de cette loi que plusieurs personnes dans la circonscription de Mercier, et notamment les directeurs de CDEC, ne sont pas rassurés par les propos que tient sa collègue qui circule et informe les gens du projet de loi n° 34, qui informe les gens de son contenu, qui prétend les consulter mais qui, pour l'essentiel, parle et présente son projet, expose le contenu du projet de loi n° 34. Et les forces vives du Québec, du Québec des régions, les organismes communautaires, les organismes d'économie sociale, les gens d'affaires, les représentants du milieu de l'éducation, de la santé, de la culture, du tourisme, de l'agriculture, les jeunes, les aînés, les femmes, comme je le disais tantôt, dont le poids dans les conférences régionales des élus sera très, très limité, diminué par rapport aux structures qui existent actuellement, ces gens, qui représentent des dizaines de milliers de Québécois et de Québécoises qui travaillent au développement local, sont des personnes qui ne peuvent vraiment apprécier la portée des dispositions. Et, comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, nous-mêmes, les députés de cette Chambre, ne pouvons assister à ces tournées de consultation, ne pouvons entendre les représentations qui sont faites auprès de la ministre, parce qu'elles sont faites ici et là au Québec et elles ne sont pas faites devant les députés, qui devraient pouvoir entendre les gens se prononcer sur le projet de loi dans le cadre d'une commission parlementaire.

M. le Président, ce projet de loi dit d'ailleurs proposer une décentralisation à la carte. Mais, si on le lit comme il faut, il impose un cadre législatif qui n'assure guère cette représentation à la carte, que l'on puisse vraiment suggérer que les diverses régions, par leurs conférences régionales des élus et les autres instances qui lui seront rattachées...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Je vous prierais tous de garder le silence un peu plus rigoureusement. S'il vous plaît. M. le député.

M. Turp: Ah! j'apprécie votre appel au silence, M. le Président. Le silence est d'or et la parole est d'argent.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci, merci pour ce silence. Alors, pour que le député de Mercier puisse terminer son intervention...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Sirros): M. le député, s'il vous plaît! Allez-y, M. le député de Mercier.

n(22 heures)n

M. Turp: ...les députés du Parti libéral sont bien excités en ce vendredi soir, on dirait, et j'apprécierai leur silence jusqu'à la fin de mon intervention.

Alors, M. le Président, on se demande quelle est l'urgence, quelle est l'urgence, quelle est la pertinence de modifier des structures, de modifier rapidement les structures, de mettre l'accent sur les structures. Parce que c'est ce dont il s'agit, de créer une nouvelle structure, la Conférence régionale des élus, de remettre en question des structures qui existent et qui fonctionnent bien. En tout cas, l'expérience montréalaise est une expérience qui révèle que, pour ce qui est du développement local et communautaire, les CDEC sont une expérience concluante, une expérience qui a enrichi la ville de Montréal, enrichi le Plateau Mont-Royal. Et les CDEC de Montréal et ceux de la circonscription que je représente sont inquiets, M. le Président, sont inquiets de voir un gouvernement ne pas se soucier de l'expérience qu'ils ont acquise, du travail incessant qu'ils ont fourni pour assurer un meilleur sort aux travailleurs, aux entreprises, aux jeunes qui ont pu démarrer des entreprises dans les dernières années et qui ont pu compter sur des CDEC dont l'existence est aujourd'hui en péril, remise en cause.

Alors, M. le Président, je dois ajouter ma voix à celle de mes autres collègues pour dire jusqu'à quel point, en parlant de l'incertitude et de l'insécurité que provoque ce projet de loi, que je représente bien les gens de ma circonscription, les groupes de ma circonscription, et en particulier les CDEC. Et je sais que Michel Doray, le directeur du CDEC du Plateau Mont-Royal, est l'un de ceux qui croient que cette réforme, elle est inacceptable. Elle est d'autant plus inacceptable qu'elle n'aura pas fait l'objet des consultations appropriées. Pour ces raisons, M. le Président, je voterai contre ce projet de loi, comme le feront mes collègues de l'opposition officielle. Merci.

Le Vice-Président (M. Sirros): Alors, merci beaucoup, M. le député de Mercier. Pour la prochaine intervention, Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Ce soir, M. le Président, j'interviens sur le projet de loi n° 34, Loi sur le ministère du Développement économique et régional, concernant la création des conférences régionales des élus, et je me permets de dénoncer l'instauration d'une nouvelle structure par ce ministère.

Le dépôt de ce projet de loi, M. le Président, entraînera un recul important pour le développement des régions. Un recul, oui, mais aussi de l'immobilisme, car, selon la ministre déléguée du ministère du Développement économique et régional, qui était dans notre région, la région des Laurentides, hier, elle nous a informés ? informés, je dis bien ? que la mise en oeuvre de toute cette démarche ne se ferait qu'au début de 2005. En attendant, on fait quoi? On attend quoi? On arrête tout développement dans les régions en attendant de savoir ce qu'on va faire avec ces nouvelles structures qui, semble-t-il, prendront 12 mois pour se mettre en place? Ce qu'elle a fait, Mme la Présidente, elle n'a qu'accentué l'incertitude.

Comme tout le monde le sait, le Québec se définit par ses régions. Pour que le Québec rayonne à l'échelle mondiale, il faut absolument que celles-ci soient développées d'une façon convenable. Ce gouvernement tente une autre réforme, mais malheureusement, encore une fois, il fait fausse route. Comme dans tous les présents dossiers, le gouvernement actuel pense que la seule façon d'améliorer les choses, c'est en enrayant ce qui existe déjà et fonctionne bien, très bien. Cependant, ce gouvernement semble oublier les succès et les projets que les régions ont obtenus depuis 10 ans et, malheureusement, Mme la Présidente, le gouvernement ne sait pas dans quoi il s'embarque et tente de créer quelque chose trop rapidement, sans vraiment comprendre ce que ça implique. À trop vouloir bâtir vite, la fondation tombera, et ce sera tout à recommencer.

Ce projet de loi, Mme la Présidente, est déposé sans aucune consultation ? et je tiens à le redire: sans aucune consultation. Et, parce que la ministre se promène dans les régions pour expliquer, informer de son projet de loi, si on pense que c'est une consultation, bien, on se trompe. C'est de l'information. Et, si elle est vraiment sérieuse quand elle dit que tout ce qui est apporté comme problème ou difficulté dans ce projet de loi par les partenaires socioéconomiques sera évalué ou pris en considération, bien, elle n'aura jamais le temps, en deux semaines, de faire un projet de loi qui ne casse pas tout, qui ne brise pas tout, mais qui répondra adéquatement aux besoins des régions, surtout quand sa dernière rencontre se fera quelques jours avant la fin de cette session.

Ce projet de loi comporte de nombreux points nébuleux et vagues, ce qui inquiète les partenaires socioéconomiques des régions. Mais c'est vrai, Mme la Présidente, qu'ils ne sont pas très importants pour le Parti libéral, ces partenaires socioéconomiques. Comme vous le savez, le Parti libéral du Québec n'accorde aucune place à ces partenaires de longue date. Mais il faut impliquer ces partenaires qui apportent un apport et une ardeur importante au développement de leur région. De plus, le gouvernement veut donner plus de pouvoirs aux élus, mais seulement aux élus municipaux, pas aux élus scolaires ni aux autochtones. Même nous, députés libéraux et péquistes, nous n'aurons qu'un rôle très minime. Il est complètement farfelu que des élus au suffrage universel doivent se battre pour avoir une place décisionnelle à cette table régionale d'élus pour le développement de leur région. Même la Fédération des chambres de commerce du Québec, qui s'est réjouie du projet, apporte un bémol important et se dit préoccupée par cette absence de participation obligatoire et significative des représentants des milieux d'affaires au sein de cette nouvelle structure de développement. Ce projet de loi, Mme la Présidente, ouvre la porte à une exclusion des partenaires socioéconomiques; mais ces partenaires doivent avoir un rôle décisionnel et non seulement consultatif. Ce gouvernement ne se disait-il pas le gouvernement d'un peuple?

Mme la Présidente, j'ai un très grand respect pour les élus municipaux; ce sont des gens qui travaillent très fort pour le mieux-être de leurs citoyens et de leurs citoyennes. Mais il ne faut pas oublier que les maires de ces municipalités sont élus par leurs citoyens. Comment est-ce que ces administrateurs de municipalités vont se justifier d'aller établir un projet dans une ville ou une autre municipalité autre que la leur? Comment vont réagir leurs citoyens, puisqu'ils sont imputables devant leurs citoyens et leurs citoyennes? Et les maires sont élus aux quatre ans, et dorénavant ce sera tous les maires des municipalités du Québec en entier qui seront élus en même temps. Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux instaurer une instance régionale avec les partenaires socioéconomiques comme actuellement pour s'assurer d'une continuité? Et quel sera l'avenir des projets si ces gens ne sont pas réélus? Qui d'autre seront les mieux placés pour être porte-parole des besoins en développement régional que les partenaires? Et cela inclut bien sûr les élus municipaux, mais pas seulement les élus municipaux.

De plus, et on en est très conscient, il y a de fortes probabilités que des rivalités naissent entre municipalités, des efforts peuvent être paralysés, voire même échouer, et une concurrence malsaine peut s'installer pour tenter, exemple, d'attirer des entreprises. Pour faire de la concertation, il faut du monde, il faut des gens neutres qui suivent les dossiers. Autrement, Mme la Présidente, ça peut devenir catastrophique pour une région pendant des années.

n(22 h 10)n

Hier, Mme la Présidente, les maires des plus petites municipalités de notre région se sont montrés très inquiets, très inquiets également parce qu'ils ne se retrouvent pas dans ce projet de loi. Ils craignent de devoir se battre beaucoup plus fort pour parvenir à se faire entendre. Le Parti québécois a toujours favorisé une approche de concertation entre les partenaires, et le Parti libéral vient de rejeter l'une des plus grandes forces du Québec moderne. C'est la preuve que le Parti libéral se fait un malin plaisir de défaire les acquis de l'État. Tout au long de la campagne électorale, le Parti libéral se disait un parti des régions, ce qui ne l'a pas empêché de couper de 23 % le budget alloué aux régions, et ce projet de loi ne prévoit pas plus d'argent pour les régions.

La ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme a clairement dit en début de mandat, lors d'une entrevue à l'émission Québec express, qu'elle ne voulait pas faire disparaître les CRD et les CLD. Bien, aujourd'hui, les CRD sont à toutes fins pratiques disparus au profit des CRE, et les CLD continueront d'exister, mais avec des exigences du gouvernement auxquelles les régions devront se conformer. Encore une fois, on exclut du conseil d'administration les partenaires socioéconomiques et, au lieu de laisser la région décider, le gouvernement impose ses façons de faire. A-t-elle oublié cette entrevue à Québec express? La ministre serait-elle à l'image de son gouvernement, et elle oublierait ses engagements?

Pour lui rafraîchir la mémoire, Mme la Présidente, voici, de plus, ce qu'elle a dit: Elle voulait faire une décentralisation à la carte. Mais ce n'est pas l'avis de l'Association des régions du Québec, qui dit que le gouvernement ne laisse pas aux régions le soin de se définir un nouveau modèle selon leur spécificité, mais plutôt leur impose une structure identique partout, avec en plus une liste de municipalités, en annexe, qui pourraient siéger. En imposant un moule aux régions, on détruit, on détruit, Mme la Présidente, la diversité qu'elles apportent au Québec. Le gouvernement tente-t-il de faire imposer ses idées au prix de la diversité régionale du Québec? La législation n'est pas une législation à la carte mais bien une législation de mur-à-mur, Mme la Présidente.

Plutôt que de présenter un plan d'action structuré pour soutenir le développement des régions, le gouvernement a opté de jouer dans des structures déjà existantes, en abolissant des acquis, pour recréer des structures sans mandat clair. Il n'y a aucune nouvelle source de revenus et de précisions sur les nouvelles responsabilités déléguées aux municipalités. La ministre s'est bien gardée d'être précise là-dessus. Pourtant, au Rendez-vous national des régions 2002, organisé par le Parti québécois, toutes les régions avaient un plan d'action concerté, détaillé et précisé... priorisé; elles étaient prêtes à agir sur tous les fronts et avaient des outils afin de se réaliser. Jamais, jamais, Mme la Présidente, elles n'ont mentionné que des chambardements de structures étaient une priorité. Au contraire, ça allait tellement bien.

Le Québec est-il plus fort uni ou morcelé? Le Québec serait tellement plus compétitif sur la scène internationale avec un plan d'action précis pour ses régions. Le Parti libéral, qui aime se faire appeler le parti des régions, sème de l'incertitude et beaucoup d'inquiétude en région. Il n'offre que peu de vision d'avenir pour le développement régional et coupe dans le budget qui leur est consacré. En fait, Mme la Présidente, le Parti libéral a peu de vision pour l'avenir du Québec.

Lors du Rendez-vous national des régions, qui fut, Mme la Présidente, un franc succès, plus de 80 engagements ont été pris. Nous pouvons mentionner le développement des créneaux d'excellence afin de bien positionner les régions sur les marchés extérieurs, la mise en place de fonds de développement régionaux, la création d'un fonds régional d'investissement jeunesse et des projets-pilotes, comme en Maurice et en Gaspésie. D'autres objectifs sont aussi importants à mentionner, comme la mise en oeuvre et le suivi d'une stratégie de développement économique des régions-ressources, du plan de relance des MRC du Bas-Richelieu et de Gaspésie?Les Îles, d'assurer la mise en oeuvre et le suivi d'une stratégie de développement économique des régions ressources, du plan de relance des MRC du Bas-Richelieu et de Gaspésie?Les Îles, d'assurer le mise en oeuvre et le suivi de la politique nationale de la ruralité,

de la politique de développement du Nord-du-Québec ainsi que de concevoir et de mettre en oeuvre des projets ACCORD. Nous voyons ici des exemples d'une vraie décentralisation.

Un autre point est très important à soulever. Dans l'introduction du document du Parti libéral Faire confiance aux régions, le premier ministre du Québec affirmait ce qui suit: «Nous allons coopérer avec les élus municipaux et les communautés pour construire une nouvelle alliance. Notre gouvernement désire s'associer avec les milieux pour mieux servir les citoyens des régions[...]. Nous garantissons aux femmes et aux hommes du Québec, peu importe leur lieu de résidence, l'égalité dans l'accès aux services de santé, d'éducation, de transport et de développement. C'est une question d'équité et de droit.» Dixit le premier ministre.

Le projet de loi n° 34, Mme la Présidente, nous semble en contradiction avec cet énoncé de principe. En n'incluant pas d'office la place de la société civile dans la future instance de gouvernance régionale, le projet de loi minimise le principe de coopération avec la communauté. En effet, comment la communauté pourra-t-elle coopérer au développement local et régional si elle est exclue de l'instance décisionnelle qui sera responsable? De plus, le projet de loi menace les avancées obtenues en condition féminine dans le développement régional et local en ne précisant pas que les femmes doivent occuper la place qui leur revient dans cette instance. En effet, comment les femmes pourront-elles participer pleinement en tant que partenaires de développement si l'on remet ce pouvoir décisionnel aux seuls élus municipaux?

Dans la région des Laurentides, Mme la Présidente, chez moi, la directrice de l'hôpital est une femme, la présidente de la commission scolaire est une femme, la P.D.G. de la régie régionale est une femme, la présidente de la chambre de commerce, c'est une femme, la députée, c'est une femme. Qu'est-ce qu'on a contre les femmes, Mme la Présidente, pour les exclure? Pourquoi est-ce qu'on les exclut de ces instances décisionnelles? À ce jour, dans les Laurentides, les femmes représentent 26 % des membres des conseils municipaux et tout au plus 10 % des maires et des mairesses, aucune n'est préfet. Il y a là une disproportion importante dans la représentation hommes-femmes, qui est inquiétante et qui fait croire que les femmes seront tout simplement écartées de la nouvelle structure de la gouvernance régionale.

Au Québec, Mme la Présidente, six régions n'auront aucune femme, zéro, sur le conseil d'administration de la Conférence, six régions en auront une, une femme, Mme la Présidente, et d'autres régions en auront deux. Qu'est-ce que mes collègues femmes libérales pensent de ce projet de loi? Et je les interpelle ce soir sur ce point pour qu'elles demandent à la ministre de modifier ce projet de loi. Ça n'a pas de bon sens qu'on évacue, Mme la Présidente, 50 % de la société dans ce projet de loi. Et, pour vous montrer comment ce gouvernement ramène la société des années en arrière, la région des Laurentides, s'étant donné une politique d'équité entre les genres, n'aura, avec le nouveau projet de loi, que trois femmes, comparativement à 24, assises à la table de la Conférence régionale des élus. Si ça ne s'appelle pas reculer, ça, Mme la Présidente, je me demande c'est quoi. De plus, il n'y aura pas de jeunes de moins de 35 ans qui représenteront la jeunesse; toute cette tranche de population sera laissée sans voix, sera laissée sans alternative. Les décisions touchant les services de garde, les industries à développer, les priorités sociales et économiques, l'environnement, les transports et la qualité de vie de nos communautés seront prises sans qu'une femme ou qu'un jeune et aussi sans que les partenaires socioéconomiques puissent y prendre part.

n(22 h 20)n

Le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail est clair et donne un sérieux avertissement au gouvernement: «Les femmes sont en colère, et il entendra parler d'elles. Hier, Mme la Présidente, dans les Laurentides, ce fut le cas. Ces femmes, par le plaidoyer de Mme Paradis, ont invité la ministre à ne pas aller de l'avant avec ce projet de loi sans qu'on y ait apporté des amendements majeurs. Ça n'a pas de bon sens de laisser de côté tant de femmes, tant de jeunes et tant d'hommes qui au cours des dernières années ont tant donné à la société, pour tout d'un coup les laisser tomber. Quel manque de respect!

Et la transition. Lors de la rencontre d'hier dans les Laurentides, le président du CRD a souligné l'incertitude créée au niveau régional par l'absence de mesures transitoires entre l'organisme régional existant et celui qui sera mis en place par la loi n° 34. On travaille avec des humains, Mme la Présidente. Le personnel du CRD n'a aucune idée de ce qui l'attend. Les centaines de bénévoles qui donnent leur temps pour le développement de la région et même les élus municipaux qui prendront la relève ne savent pas à quoi s'en tenir. La ministre répond: On est en train de regarder ça. Bien oui, on va s'asseoir avec elle puis on va regarder ça. On va le regarder, ce chambardement. Pourquoi aller si vite? Et d'où vient la nécessité de procéder rapidement et de tout briser?

Finalement, Mme la Présidente, ce projet de loi a été fait sans consultation et trop rapidement. Si le gouvernement avait pris le temps d'écouter, il aurait su faire de bons choix afin de développer les régions et non pas de ralentir leur développement. C'est une gifle que le gouvernement donne aux milliers de bénévoles qui ont consacré des centaines de milliers d'heures à travailler pour un développement dynamique et une meilleure qualité de vie.

En terminant, la Fédération québécoise des municipalités a fait parvenir un mémoire à la ministre ces derniers jours. J'espère qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures. Alors, pourquoi ne pas permettre aux partenaires socioéconomiques des régions de se faire entendre, eux aussi, au moyen de mémoires en commission parlementaire ou tout simplement de reporter l'adoption de ce projet de loi? Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, je reconnais immédiatement la députée de Deux-Montagnes. Mme la députée, à vous la parole.

Mme Hélène Robert

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. À mon tour... Et, je n'ai pas beaucoup de voix, il est tard, mais c'est une intervention à laquelle je tiens énormément. Je me souviens, à l'époque, que j'étais productrice agricole, et j'ai occupé le premier siège pour les femmes au CRD des Laurentides. Ce fut une expérience où non seulement j'ai énormément appris avec les groupes qui se trouvaient là, ça a été parmi les premiers contacts avec ce monde de la politique et ce fut aussi pour moi l'occasion... Parce que, à l'époque j'étais impliquée dans la formation des syndicats d'agricultrices, et ça été pour moi aussi l'occasion de faire connaître et d'échanger, au niveau de ma région, le travail qui était fait par ces femmes, par ces entreprises aussi, et en même temps de passer nos façons de faire au niveau de ce groupe, au niveau de ces gens qui y travaillaient déjà.

Un peu avant, j'avais été impliquée au niveau de l'UPA des Laurentides. J'ai commencé par mon syndicat de base et, ensuite, au niveau de l'UPA, justement comme représentante du syndicat des femmes une fois qu'il a été formé. Je suis arrivée là au moment où il y avait une commission qui se préparait sur l'alimentaire, sur l'agroalimentaire au Québec. C'est monsieur... c'est la fameuse commission qui a duré énormément de temps, c'est vers les années 1984, 1985. C'est une des premières fois où j'ai pu rencontrer le député, qui siège toujours ici, M. le député de...

Une voix: ...

Mme Robert: On va chercher le nom. Ça fait très longtemps, il a fêté son anniversaire, là, qu'il siège en Chambre, il n'y a pas beaucoup de temps.

La Vice-Présidente: ...

Mme Robert: Richmond! Merci, Mme la Présidente.

Des voix: Bravo!

Mme Robert: Et vous savez qu'aussi... C'est pour m'aider que vous faites ça, je vous remercie. Et vous savez qu'aussi, au niveau de cette UPA, on n'était pas beaucoup de femmes. Je pense que, quand je suis arrivée, il y en avait peut-être une autre, et je pense que c'est peut-être des aides. Et il reste que nous avons été revendiquer au niveau de cette commission. Et je dois vous dire que finalement c'est nous qui avons pris l'initiative, avec les autres, et finalement nous avons été déposer des mémoires. Et cette façon de faire, c'est les femmes qui l'ont introduite.

Tous ces petits cheminements un peu... plus personnalisés, c'est pour vous démontrer qu'au-delà de toutes les revendications, de toutes les choses que mes collègues relèvent avec beaucoup de pertinence, ce que je veux démontrer, c'est que, à travers cette concertation, ces façons de faire qui se sont développées dans nos MRC, dans nos régions, on ne peut pas, on ne peut pas rejeter ça, mettre ça de côté.

Vous savez que, quand j'ai commencé à travailler... Vous venez aussi de ces milieux-là. Moi, je me souviens de la corporation de développement économique de mon coin; ils étaient sept maires. Alors, finalement, il y en a eu deux, corporations de développement économique, parce qu'ils se sont chicanés. À un moment donné, ça reprenait quand ça changeait de maire. Les maires représentent leur municipalité. Et depuis que le CLD s'est installé, il y a une harmonisation qui s'est faite, justement à cause de cette société civile là qui est venue, si vous voulez, centrer sur un projet, qui est venue recentrer sur un projet de société, sur un projet de développement, parce que ces gens-là sont arrivés avec des expertises différentes. Ça amène du vent frais.

Nos maires, ils sont fantastiques. Ils ont à être élus à tous les quatre ans ? ça va? ? ils ont aussi à faire une gestion de leur municipalité, de répondre à leurs propres citoyens. Ils n'ont pas la préoccupation... Je voyais qu'on avait la question de qualité de vie, sanitaire, différents objectifs qu'on met dans la loi; ce n'est pas dans la culture de nos municipalités à l'heure actuelle. Je pense qu'il est beaucoup trop tôt, si éventuellement on pouvait aller à ça, ça prend une transition beaucoup plus grande, si on veut décentraliser les pouvoirs comme tels.

n(22 h 30)n

Un autre aspect. Je suis députée depuis neuf ans. Auparavant, j'ai été enseignante, j'ai été aussi pomicultrice. Et une des préoccupations qui a toujours été importante ? et c'est encore les choses qui se font... des manières de faire ? c'était la prise en charge, que chaque individu se prenne en charge. Par exemple, j'ai écouté ce matin, on a fait des... au niveau de la violence. J'étais un peu gênée, j'ai réalisé... J'étais un peu gênée vis-à-vis moi-même, d'une certaine façon: nous venions de sortir d'une période de questions où, de part et d'autre, nous nous sommes accablés de tout, de toutes les suppositions ? vous savez dans quel genre nous pouvons discuter de part et d'autre durant la période des questions ? et, aussitôt sortis de là, nous faisons un plaidoyer sur la non-violence.

Vous savez, Mme la Présidente, je suis une personne convaincue que la non-violence commence par ma propre non-violence. Le jour ? je ne l'ai pas atteint encore ? le jour où j'aurai vraiment développé totalement la paix, toute cette... de transformer cette non-violence, ce que j'appelle très souvent ma guérison, je pense qu'alentour de moi tout le monde s'en portera mieux, et ainsi de suite. Et un peu de cette façon-là, nous pouvons créer effectivement des choses pour aider, pour contrer la non-violence. Je pense que c'est un rôle de société de le faire. Mais il faut être bien conscient que cette non-violence-là part d'abord de nous. Et c'est pour ça que parfois je me pose certaines questions sur nos façons de faire que nous perdurons depuis de nombreuses, nombreuses années. Alors, je pense qu'il faudrait en prendre conscience.

Je pense que vous sentez, vous le voyez, que mon plaidoyer est surtout centré sur la place de la société civile. Et cette place-là, pour moi, c'est primordial qu'elle soit d'égal à égal.

Une voix: ...

Mme Robert: C'est dommage parce que M. le ministre est en train de tout rater mon plaidoyer, que je fais avec toute mon âme et toute ma passion. Vous savez que, comme enseignante, Mme la Présidente, j'ai travaillé avec mes étudiants pour justement une prise en charge et une prise de conscience. Et vous savez que nos étudiants qui réussissent le mieux, qui sont heureux à l'école, c'est-à-dire nos étudiants qui ne décrochent pas, d'une certaine façon, ce sont des étudiants qui ont pris pleine confiance en eux, parce qu'on arrive à ce que leur apprentissage, ils le prennent en main. Et, d'ailleurs, si vous avez travaillé avec des jeunes du primaire ou avec des plus jeunes enfants, de ce temps-là, on a ces méthodes-là de projets qu'on a développées parce qu'on se rend compte que nos jeunes vont beaucoup mieux réussir. Et vous savez que, si c'est vrai avec nos jeunes, avec nos étudiants, c'est aussi vrai avec la société en entier. Moi, ce que je pense...

Une voix: ...

Mme Robert: Vous me brisez l'inspiration quand vous parlez.

Une voix: ...

Mme Robert: On ne peut pas travailler avec des gens, éduquer, avec des gens, leur montrer des façons de faire, et ensuite, quand on arrive au niveau de l'État, on fasse autrement, qu'on fonctionne avec un pouvoir directionnel, on vient de briser la créativité et on vient... on risque d'amener les gens à rentrer chez eux, à se replier et à ne pas participer à la société.

Pour ceux qui... ça fait plusieurs années qu'ils sont députés, moi, ça a été une des choses que j'ai découvertes, c'est la richesse de nos groupes communautaires. Je pense qu'on le reconnaît tous et toutes, ce que ces gens-là peuvent apporter à notre société, comment ces gens-là peuvent prolonger, si vous voulez, ou aider à des coûts... ? ce sont des bénévoles ? ces missions de l'État. Et vous savez, Mme la Présidente, que ces gens qui siègent à l'heure actuelle sur les CLD, qui siègent sur les CRD, ce sont, pour beaucoup, des bénévoles, des gens qui participent à ces choses-là parce qu'ils croient que nous sommes tous interreliés et que, pour eux, aller travailler là, c'est de participer et bâtir le projet de société. Il ne faut pas passer à côté de ça. On ne peut pas se permettre de passer à côté de ça. On ne peut pas diriger un État, on ne peut pas faire de la politique comme si c'était une entreprise.

Vous savez, l'argent, on y donne beaucoup d'importance, et elle en a, mais il demeure que l'argent, c'est un moyen d'échange. Alors, il faudrait savoir ce que l'on échange. Il faudrait quand même avoir ce qui est mis là-dedans. Le contrôle, l'État a pour fonction, fortement hiérarchisée, il doit contrôler les choses. Mais on s'est rendu compte, avec les expériences qui se sont faites à l'heure actuelle, que nos CRD, nos CLD, avec des structures très souvent légères, nos groupes communautaires, avec des structures très légères, ont une efficacité incroyable, à peu de frais, d'une certaine façon, beaucoup plus que nos structures fortement hiérarchisées telles que sont souvent nos municipalités ou certains...

Je ne dis pas que, dans les endroits de services, il ne faut pas fonctionner d'une façon un peu plus hiérarchisée. Mais, quand on veut décentraliser des choses pour provoquer du développement, pour créer des emplois, pour développer des projets, je pense qu'il faut mettre des structures les plus légères possible, des structures où tout le monde qui, d'une certaine façon, veut mettre la main à la pâte y trouve sa place d'égal à égal et qui peut faire, de cette façon, profiter la société. Il ne faut pas oublier non plus, que le jeune ait 16 ans, 17 ans, 15 ans, même 10 ans, on ne travaille pas avec eux en termes d'autorité, on n'impose pas. Dans ce genre de projets là, dans ce genre de créativité là qu'on veut faire, si vous voulez, ressortir, on travaille d'égal à égal.

Je pense que la question du développement des régions est avant tout basée sur des communautés qui auront développé des projets où il fera bon vivre là et qui attireront, si vous voulez, d'autres populations pour se greffer à ces communautés-là et de cette façon-là. Dans nos régions du Québec, ce ne sera jamais comme Montréal, c'est très clair, et c'est pour ça, entre autres... Mais, pourtant, à Montréal aussi, dans les quartiers, il y a un foisonnement de petites entreprises et de petits projets très créateurs, qui portent, si vous voulez, énormément à créer de l'emploi, et de toutes les façons, qu'on ne peut pas passer à côté non plus.

Alors, la société civile doit être, à l'intérieur de ce projet-là, d'égal à égal. Et je pense que, si on passe à côté de ça, on vient de passer à côté du développement des régions, en tout cas, de ce qu'on veut mettre en place. Et c'est certain que, dans cette optique, je vous dirais, il faut consulter. On ne monte pas un projet comme ça, des modifications comme ça sans que les gens en fassent partie, sans que les gens en soient partie intégrante.

n(22 h 40)n

On dit, dans le cahier, qu'on commence par créer les CRE et, bon, les CLD en mettant le... en donnant aux MRC, et tout ça. On crée des lieux où ces nouvelles responsabilités là atterriront. Ensuite, dans un troisième temps, le gouvernement va procéder à un véritable transfert des responsabilités, 2005, 2006, 2007. À l'heure actuelle, on ne sait pas lesquelles, il paraît qu'on va les discuter. Alors, à ce moment-là, est-ce qu'on ne pourrait pas, comme société, est-ce que les régions ne pourraient pas discuter de ces responsabilités-là qu'elles pourraient prendre et comment elles pourraient prendre ces responsabilités-là? Et, quand il restera de savoir avec qui on peut les passer, là, ça, ça ne sera pas long à régler.

Je pense que ce qui est important, c'est de trouver quoi il faut transférer. J'ai travaillé sur la régionalisation. Un des problèmes, c'était de savoir qu'est-ce qu'on peut décentraliser, d'une certaine façon, comment on peut décentraliser. La question d'imputabilité, à l'heure actuelle, tout le monde s'entend, l'imputabilité des maires, ça ne vaut rien dans ce projet-là, là, ça ne veut rien dire, ils ne sont pas plus imputables que bien du monde dans la société. Les représentantes de nos tables de concertation des groupes communautaires qui étaient là, c'étaient parfois 100, 150 bénévoles qui les déléguaient à tel endroit. J'ai des municipalités qui n'ont pas plus de 1 000 habitants. Alors, l'imputabilité, telle qu'elle est mise là comme étant l'endroit pour décentraliser, non. Ce qu'il nous faut, c'est un endroit où la créativité pourra éclore, pourra se manifester avec des gens qui ont le goût de faire des choses ensemble. Alors, ce projet de loi, on devrait attendre pour l'adopter, prendre la peine de se parler, et je pense que tout le monde s'en porterait mieux. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant, le député d'Ungava. M. le député, à vous la parole.

M. Michel Létourneau

M. Létourneau: Merci. Merci, grand auditoire. Alors, merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi n° 34, projet de loi du ministère du Développement économique et régional, présenté par le ministre du Développement économique et régional. Et, aux notes explicatives, on peut lire: Ce projet de loi institue le ministère du Développement économique et régional. À cet effet, le projet de loi définit la mission du nouveau ministère du Développement économique et régional en y intégrant les fonctions qui étaient exercées par le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie et le ministre des Régions.

En plus d'instituer de nouvelles instances locales et régionales, dont les conférences régionales des élus, le projet de loi maintient les dispositions relatives au Conseil de la science et de la technologie et aux différents fonds constitués en vertu de la Loi sur le ministère de l'Industrie et du Commerce, de la Loi sur le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie et de la Loi sur le ministère des Régions, lesquelles sont intégrées à la Loi sur le ministère du Développement économique et régional. De plus, ce projet de loi contient des dispositions transitoires et de concordance.

Alors, Mme la présidente, je vais d'abord commencer par vous faire état des fait saillants de ce projet de loi n° 34, particulièrement au niveau des CLD, les centres locaux de développement. Alors, il y a transfert de responsabilités du développement économique local aux MRC, ce qu'on appelle les municipalités régionales de comté. Le CLD va relever directement de la MRC. Les membres du conseil d'administration du CLD seront aussi nommés par la MRC. Ce conseil d'administration comprendra des élus municipaux et peut aussi ? parce que ce n'est pas certain ? comprendre des membres de la société civile ainsi que des députés. Notons que ces derniers sont sans droit de vote, et aucune garantie quant à la protection de l'implication de la société civile.

Au chapitre des CRD, l'abolition des CRD et la création de la Conférence régionale des élus, dont la responsabilité sera d'établir un plan quinquennal et de signer des ententes spécifiques. Le conseil d'administration d'une conférence régionale des élus est composé des membres suivants: les préfets des MRC; les maires des municipalités locales de 100 000 habitants; les maires des villes-centres; et les maires des municipalités locales énumérées à l'annexe de la présente loi; les présidents d'arrondissement des villes de Montréal et de Québec, évidemment. Alors, chez nous, Mme la Présidente, juste pour vous indiquer brièvement ? j'aurai l'occasion de le faire plus tard ? il n'y a aucun de ces critères-là qui fait en sorte que les gens de la région se retrouvent à l'intérieur de ce projet-là.

La Conférence régionale des élus peut nommer à son conseil d'administration des membres additionnels ? qu'on appelle la société civile ? dont le nombre ne peut excéder celui correspondant au tiers de ses membres qui sont des élus municipaux. La Conférence régionale des élus détermine la durée du mandat de ses membres et décide s'ils ont droit de vote ou non. Les députés ont le droit de participer sans droit de vote ? alors que je participe actuellement aux travaux du Conseil régional de développement chez nous avec droit de vote depuis 1995 ? aux délibérations du conseil d'administration de la Conférence régionale des élus. Il y a aussi maintien d'une enveloppe budgétaire régionale pour les ententes spécifiques.

Au chapitre des partenaires socioéconomiques spécifiquement, selon moi, faire confiance... ou, selon nous, faire confiance aux régions, c'est effectivement faire confiance aux élus municipaux. Nous n'avons jamais nié ce fait, en dépit de ce que laisse sous-entendre nos adversaires. Cependant, faire confiance aux régions, c'est aussi faire confiance aux élus scolaires, aux élus autochtones, aux députés qui sont aussi imputables. Faire confiance aux régions, c'est aussi choisir de garantir une place aux partenaires socioéconomiques qui s'investissent avec ardeur dans le développement régional, c'est d'impliquer aussi, Mme la Présidente, les autres forces vives régionales, dont les organismes communautaires et les organismes d'économie sociale, du tourisme, de la santé, de l'éducation, de l'agriculture, de l'industrie forestière, du sport, du loisir, de l'environnement, des milieux syndicaux, de la culture, des coopératives, ainsi que les jeunes, les femmes et les aînés.

Or, le projet de loi déposé par le gouvernement libéral constitue à cet égard-là un net recul pour la démocratie participative, puisque les intervenants régionaux ne sont pas tous considérés à part égale et ne pourront participer de plain-pied au développement des régions. Ce projet de loi ne peut que démobiliser ces partenaires.

Je citerais Michel Venne, qui est un journaliste au Devoir, aussi directeur de l'Annuaire du Québec, publié chez Fides, et qui faisait une communication dans le cadre de la Conférence inaugurale des rencontres internationales de l'ENAP, École nationale d'administration publique. Et il s'exprimait ainsi: «La reconnaissance d'un rôle à la société civile découle d'une préoccupation de répondre au scepticisme grandissant des citoyens face à l'État en leur faisant une place plus grande au sein du même processus de décision politique. Il s'agit de prendre les moyens pour reconstruire des liens entre les citoyens et les institutions, d'aménager des passerelles, de se mettre à l'écoute des préoccupations des gens. Il s'agit aussi de contrer le désengagement social, de combattre l'apathie des citoyens et leur indifférence face à la chose publique. Or, depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir, ces leaders socioéconomiques qui représentent des milliers de citoyens dans chacune de nos régions sont inquiets, inquiets et fortement déçus de ne pas avoir été consultés.»

Personne ne conteste la légitimité des élus municipaux ? je l'ai dit tantôt ? cette légitimité d'assumer une plus grande responsabilité dans le développement local. Personne ne conteste non plus la notion d'imputabilité politique, mais cette notion d'imputabilité politique s'applique aussi, comme je le disais, aux élus scolaires, aux élus autochtones que le gouvernement a choisi d'écarter des futures conférences régionales des élus.

Des voix: ...

M. Létourneau: Il y a des fantômes dans l'édifice, là. Cette notion d'imputabilité est également valable pour les députés, qui n'auront pas le droit de vote, qui ne pourront pas se prononcer sur des questions touchant le développement régional. Le gouvernement doit modifier son projet à cet égard-là afin de garantir une plus grande place pour la société civile. Celle-ci doit avoir un pouvoir décisionnel. Et nous sommes en accord avec la notion de prépondérance des élus, mais de tous les élus. La notion d'imputabilité n'est pas divisible. Un maire est redevable aux citoyens de sa municipalité, qui l'a élu à cet effet, mais un maire n'est pas imputable du développement régional. Le nouveau gouvernement, qui se targue de faire du sur-mesure pour les régions du Québec, du sur-mesure alors qu'on impose aux régions une même structure... On impose un minimum de deux tiers d'élus municipaux et on impose un maire ou un préfet à la présidence.

n(22 h 50)n

Juste pour vous donner une idée... Et je dois dire aussi que je tente actuellement de convaincre le ministre et sa collègue déléguée d'adopter un modèle différent qui va tenir compte de la spécificité du Nord-du-Québec, évidemment, compte tenu de la région, et aussi du peu de population qui habite dans le Nord-du-Québec et de la présence des trois communautés, québécoise, crie et inuite. Juste pour vous donner un exemple, si, d'entrée de jeu, on appliquait ces mesures, qui sont censées être du sur-mesure pour la région, on retrouverait un maire, qui siège actuellement dans une organisation qu'on appelle la municipalité de la Baie-James et qui tient ses racines dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois, alors un maire qui ferait office, disons, de préfet, un deuxième maire qui serait celui de la municipalité la plus populeuse, ce qu'on voit à l'annexe du projet de loi, et un député, alors il y aurait...

Une voix: ...

M. Létourneau: Sans droit de vote. Alors, à nous trois, on aurait la... même pas à nous trois ? c'est les deux maires, parce que le député n'a pas le droit ? les deux maires devraient décider de joindre un tiers, parce que c'est le tiers des personnes, une tierce personne représentant la société civile pour se joindre à cette Conférence-là, alors que le Conseil régional de développement actuellement compte 35 membres issus de toutes les couches sociales et de tous les horizons dans la région. Alors, on voit tout de suite que ça ne va pas. Mais je dois vous dire que je pense qu'on va réussir à influencer le ministre, s'il continue de montrer de la bonne volonté, et de faire en sorte que ce 55 % du territoire que représente ma région et à nul égard comparable au reste du Québec... Mais c'est tout un travail qu'il faut mener à terme.

Alors, avec ce projet de loi là, le gouvernement, évidemment, a balayé du revers de la main l'une des plus grandes forces du Québec moderne, la concertation, la concertation entre les divers secteurs de la société. Un chroniqueur nous disait récemment, le 24 novembre, sous la plume de Michel Venne: «Au lieu de faire travailler ensemble, sans nier leurs divergences et leurs conflits, patrons, leaders syndicaux, organisateurs communautaires, artistes, étudiants et agriculteurs, le premier ministre a choisi un camp. Il a choisi le camp de ceux qui sont déjà les plus puissants. Les autres, à ses yeux, défendent des intérêts "corporatistes" et au lieu de les inviter à sa table, les incite à prendre la rue.»

«Au niveau local et régional, le premier ministre est en train de tuer les réseaux et les forums de concertation qui incluaient les centres locaux de développement et les conseils régionaux auxquels participait la société civile. Le premier ministre remet le pouvoir aux seuls élus, consacrant une conception élitiste et partisane du développement et renforçant, au niveau des capitales régionales, une logique de concentration qui laisse à l'abandon les milieux ruraux.»

Depuis six mois, la ministre déléguée affirme qu'elle consultera les régions sur cette importante question qu'est le développement régional. Or, soudainement, la notion de consultation est disparue pour faire place à une tournée d'information. En mai, lors du congrès de l'Association des régions du Québec, l'ARQ, qui regroupe l'ensemble des conseils régionaux de développement, la ministre avait pourtant été claire, et je la cite: «Je sais que plusieurs d'entre vous avez des inquiétudes en regard des orientations que nous privilégions. Je comprends vos inquiétudes. Cependant, j'ai le devoir aujourd'hui de vous rassurer. Nous entreprenons une démarche dans laquelle nous vous convions. Le développement, c'est l'affaire de tous. Vous serez appelés à travailler avec les élus municipaux à l'élaboration d'un nouveau modèle d'organisation dans votre région. Il n'est pas question pour nous de vous imposer une façon de faire, les choix vous appartiendront.» C'est un extrait du discours de la ministre déléguée, le 29 mai.

Pourtant, la ministre déléguée au Développement régional, à mon avis, doit respecter sa parole et écouter les citoyens, les groupes, les divers organismes et annoncer son intention de tenir des consultations générales. C'est quand même ironique, Mme la Présidente, de constater que, pour le gouvernement, l'avis des citoyens leur importe uniquement lorsqu'ils partagent leur vision des choses, comme c'est le cas des défusions.

Le débat de structures est la paralysie du développement économique régional. Plutôt que de présenter un véritable plan d'action pour soutenir le développement économique régional, le gouvernement joue dans les structures en abolissant les conseils régionaux de développement pour les remplacer par les conférences régionales des élus. Pourtant, à l'issue du Rendez-vous national des régions de novembre 2002, toutes les régions du Québec avaient en main un plan d'action concerté, détaillé et priorisé. Elles étaient prêtes à agir sur tous les fronts et avaient en leur possession des outils bien adaptés à leurs besoins. La modification des structures ne constituait aucunement une priorité. Plusieurs, d'ailleurs, députés qui étaient élus à ce moment-là ont participé à ces travaux-là.

Depuis leur élection, le gouvernement, qui se disait le parti des régions, n'a rien fait, évidemment, sauf pour semer l'incertitude et l'inquiétude en région. Au lieu de miser sur le travail qui avait été fait, au lieu de poursuivre le travail amorcé par les régions à la suite du Rendez-vous des régions, le gouvernement remet tout en cause et n'offre aucune vision de développement économique des régions, ce, après avoir coupé 23 % des budgets consacrés au développement régional.

Pourtant, à la suite du Rendez-vous des régions, rappelons-nous, le premier ministre actuel s'était rangé derrière le consensus des régions. Le premier ministre avait affirmé qu'il comptait respecter le chemin parcouru en région à la suite des engagements pris lors du Rendez-vous. Je le cite: «Le chef libéral ne compte pas remettre en question les projets qui découleront du Rendez-vous s'il devient premier ministre d'ici quelques mois. Plusieurs engagements, convenait-il à l'époque, correspondent déjà au programme libéral pour les régions, notamment en ce qui a trait à la décentralisation.» Extrait de La Presse, 15 novembre 2002.

Avant la tenue du Rendez-vous des régions, Mme la Présidente, une vaste opération de mobilisation et de réflexion s'était tenue dans toutes les régions du Québec, ce qui a amené le gouvernement et les milieux régionaux à convenir ensemble des priorités d'action pour les trois prochaines années, lors du Rendez-vous. Ces priorités ont été consignées dans un plan d'action Québec-régions qui a été adopté par l'ensemble des participants.

Le Rendez-vous fut un grand succès. L'ensemble des régions a entériné le Plan d'action Québec-régions comportant près de 80 engagements. Mentionnons, entre autres, les ententes de principe sur le développement des créneaux d'excellence, entre les ententes de principe... pardon, afin de positionner les régions sur les marchés nord-américains et mondiaux. Mentionnons aussi la place des fonds de développement régionaux, la création d'un fonds régional d'Investissement Jeunesse et les projets-pilotes Mauricie et Gaspésie d'une vraie décentralisation à la carte.

Je vous cite d'autres objectifs qui étaient au coeur de ce rapport, de ce projet: assurer la mise en oeuvre des suivis de la stratégie de développement économique des régions ressources, dont la région Nord-du-Québec; s'assurer de la mise en oeuvre du suivi de la politique de développement du Nord-du-Québec ? la seule région actuellement au Québec qui est dotée d'un plan de développement spécifique, c'est la région Nord-du-Québec; concevoir et mettre en oeuvre des projets ACCORD dans toutes les régions pour assurer leur développement.

Bref, les régions avaient en main tous les outils nécessaires afin d'agir sur un développement optimal de chacun des territoires, des outils qui tenaient compte des spécificités des régions et de leur potentialité. Le gouvernement n'a pas été en mesure de respecter les engagements pris au Rendez-vous. À titre d'exemple, la signature des ACCORD 1 n'est pas encore terminée, les sommes ne sont pas encore au rendez-vous pour les projets ACCORD 2.

Les gestes des derniers mois, les gestes en regard de cette politique de développement régional du nouveau gouvernement au Québec, ont suscité beaucoup de réactions. On pourrait être tenté de penser que ce sont les membres de l'opposition officielle actuellement qui sont les seuls à s'insurger contre cette façon de faire, mais non. Alors, je voudrais vous parler de certaines réactions que le dépôt du projet de loi n° 34 a suscitées.

Par exemple, voici ce qu'ils nous ont dit, l'Association des régions du Québec. S'il y a quelqu'un qui connaît les régions, c'est bien les représentants de ces régions-là. Alors, j'ouvre les guillemets: «Plutôt que de laisser à chacune des régions le soin de définir un nouveau modèle d'organisation à l'image de ses spécificités, les nouvelles orientations gouvernementales en matière du développement des régions prévoient plutôt la mise en place de structures identiques dans toutes les régions, sur une liste prédéterminée de municipalités qui pourront y siéger. À l'invitation du gouvernement précédent, les régions avaient commencé à élaborer de nouvelles propositions régionales ? Mme la Présidente. Qu'arrive-t-il avec l'expertise développée depuis près de 50 ans en région par les conseils régionaux de développement?» Qui disait ça? La présidente de l'ARQ, Mme Christine Émond Lapointe.

n(23 heures)n

L'Association des centres locaux de développement. Cette Association-là, par la voix de son président, M. Alain Longval, disait: «La création du ministère du Développement économique et régional enlève le pouvoir aux citoyens et le confie aux élus municipaux, lesquels composent déjà près de 40 % des administrateurs des CLD. Ce débat a déjà été fait en 1998. Nous ne comprenons pas pourquoi il faut le reprendre aujourd'hui.

Il est normal que les MRC votent le budget, mais nous trouvons anormal que ce soient eux qui nomment la société civile. Imaginons où cela peut nous mener. Si vous n'êtes pas un élu municipal, vous devrez dorénavant être nommé par l'un d'eux pour avoir droit au chapitre relativement au développement économique de votre région. Nous ne souhaitons pas dénoncer la place du monde municipal dans le développement économique local, bien au contraire, mais, si faire confiance aux régions signifie tout confier aux élus municipaux, sans aucun mécanisme assurant une mobilisation citoyenne élargie, nous sommes forcés de constater que les principes mêmes du développement local connus mondialement sont ici bafoués. Alors, je pense que c'est assez clair, et le verdict, assez difficile à digérer pour les membres de ce gouvernement qui sont au tout début de l'élaboration de cette législation.

La Fédération des... bon, la FTQ, par exemple, des gens que vous connaissez bien, par la voix de René Roy, secrétaire général: «Le ministre[...] ? du Développement économique et régional ? doit prendre le temps nécessaire pour consulter l'ensemble des partenaires, dans chacune des régions du Québec, plutôt que de faire adopter son projet de loi à la vapeur avant les Fêtes. En quoi y a-t-il urgence à adopter ce projet de loi n° 34 ? tous mes collègues ont posé la même question d'abord; projet ? qui chamboule [...] les règles du jeu en matière du développement régional? Voilà une affaire bien trop importante pour faire preuve de précipitation dans des modifications de structures. Nous n'avons même pas fait d'évaluation sérieuse de l'efficacité des structures actuelles», et ainsi de suite.

Même chose pour les corporations de développement économique communautaire, même chose pour le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail. Ma collègue en parlait tout à l'heure, il est inacceptable que la société québécoise actuellement se prive de la présence des femmes. Alors, c'est ce que le gouvernement libéral s'apprête à faire avec le projet n° 34.

Alors. vous me faites signe, Mme la Présidente, que je dois conclure. Alors, évidemment, si j'avais en conclusion une suggestion à faire à ce gouvernement, au ministre, je lui dirais en trois temps: un, de faire une véritable consultation publique en commission parlementaire; je lui recommanderais que le gouvernement garantisse une plus grande place pour la société civile; et je lui demanderais aussi de présenter un plan d'action pour les régions et non un débat de structures improductif. Or, comme j'ai bien peur de ne pas être entendu, je peux vous dire d'ores et déjà que j'ai l'intention pour toutes ces raisons, Mme la Présidente, de voter contre le projet. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je reconnais immédiatement le leader adjoint de l'opposition officielle et député de Chicoutimi. À vous la parole, M. le député.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Merci, Mme la Présidente, vous êtes bien gentille. Merci.

Alors, effectivement, à mon tour d'intervenir en cette belle soirée avant Noël pour faire état aussi de mes craintes et de mon indignation face à la position du gouvernement par rapport au projet de loi qui est devant nous actuellement et qui malheureusement entre directement en contradiction avec les paroles même de la ministre déléguée au Développement régional. Pourquoi? Parce que, dès la période estivale, la ministre avait indiqué aux gens, non seulement les gens de chez nous, mais de toutes les régions du Québec, que finalement les modulations ou réformes allaient se faire en concertation avec les gens du milieu, qu'eux allaient devoir présenter, Mme la Présidente, des propositions au gouvernement afin que les structures actuelles de concertation et de développement puissent faire en sorte d'améliorer leur mode de fonctionnement actuel.

Et, malheureusement... Je dis «malheureusement» actuellement parce qu'à l'époque c'était «heureusement». Les gens de ma région ont cru en cette promesse de la ministre déléguée, ont préparé ardemment des propositions très claires quant à la façon qui pourrait maintenant permettre à l'ensemble de notre région d'assumer elle-même son développement à partir des structures actuelles et de ne pas entrer, comme nous le faisons malheureusement actuellement, dans le débat de structures.

C'est d'autant plus malheureux chez nous que cette façon de se concerter, celle d'impliquer évidemment les élus mais aussi tous ceux et celles qui ont à coeur le développement régional, est une initiative qui date, Mme la Présidente, de plus de 40 ans, et presque de 50 ans dans ma région. Nous avons créé le modèle, ce modèle québécois, qui fait en sorte que, sur tous les territoires régionaux, les élus mais tous ceux et celles qui ont à coeur le développement ont un mot à dire, peuvent participer à la prise de décision, influencer et souvent se mobiliser autour de questions fort importantes pour son développement.

Et j'ai toujours été honoré et fier, parce que j'étais au gouvernement et même responsable de ma région, de siéger autour de cette table où je n'avais qu'une seule voix, la mienne, lorsque j'étais assis à cette table, et que tous ceux et celles, les groupes de femmes, les groupes environnementaux, les groupes de jeunes avaient le même poids que moi comme représentant de la population et comme responsable de la région. Et je n'ai jamais cru, Mme la Présidente, avoir la science infuse, soit: que les solutions que j'amenais étaient les seules valables pour ma région. Et cette façon de faire nous a amenés d'ailleurs, Mme la Présidente, à améliorer, à tout point de vue, le positionnement de la région dans les demandes que nous avons faites, je vous dirais, dans les 15 dernières années et même les 20 dernières années auprès des gouvernements qui se sont succédé.

Il est malheureux que la ministre ait finalement manqué à sa parole et ait décidé de ne pas écouter les propositions qui étaient acheminées par les différentes régions. Alors, chez nous, nous avons perdu un temps énorme à faire des propositions pour améliorer le fonctionnement actuel de notre conseil régional de développement et de concertation, et la ministre a fait exactement le contraire de ce qu'elle avait promis, soit faire du mur-à-mur.

Nous avions, souvenez-vous, Mme la Présidente, lors du Rendez-vous des régions, pris l'engagement solennel devant chacune des régions... et la ministre déléguée était là à l'époque comme porte-parole des régions pour le Parti libéral et elle avait consenti... elle était dans le concert unanime des régions du Québec pour faire en sorte que cette décentralisation et cette modulation du pouvoir régional allaient se faire à la carte, autrement dit, que chacune des régions allait proposer un mode de fonctionnement qui lui est propre et que ce choix allait être respecté par le gouvernement. Malheureusement, la première chose que ce gouvernement a fait lorsqu'il est entré en fonction, c'est de revenir sur cet engagement solennel qui avait été pris devant toutes les régions du Québec.

Et j'ai assisté pendant plus de deux jours aux débats qui se sont déroulés pendant ce Rendez-vous. Et ça a été, je vous dirais, Mme la Présidente, pendant les quatre années du dernier mandat, je pense, le plus beau moment que j'ai vécu comme parlementaire mais aussi comme personne qui a à coeur le développement de sa région. J'ai vu des gens de l'Abitibi, du Saguenay?Lac-Saint-Jean, de la Côte-Nord se réunir ensemble et de présenter des positions communes sur leur développement, de se parler, de faire front commun pour démontrer que notre réalité n'était pas la même, que même... que d'autres régions du Québec, qui n'ont souvent pas, parfois, je vous dirais, la même vision de leur développement ou ne cherchent pas le même type de solution, et c'est normal.

Il ne faut pas penser que chacune des régions voit les choses de la même façon. C'est pour cela que certaines régions s'étaient liées entre elles ? plus particulièrement, je vous dirais, à l'époque, c'étaient les régions ressources ? et avaient présenté plusieurs actions communes, plusieurs demandes communes pour faire en sorte de favoriser leur développement. Malheureusement, Mme la Présidente, toute cette belle concertation, tous ces engagements solennels se sont retrouvés à la poubelle par le dépôt du projet de loi actuel, et je suis fort déçu pour le gouvernement.

Mais je vous dirais que ma déception est beaucoup plus grande par rapport aux gens de ma région qui avaient pris au sérieux cet engagement, qui avaient travaillé ardemment à la mise en oeuvre d'outils particuliers. Parce que, au-delà des structures, les régions avaient présenté, en plus, des moyens pour assurer leur développement. Parce que, s'il y a une urgence de faire les choses actuellement, ce n'est pas dans le débat de structures auquel nous a conviés malheureusement la ministre, mais c'est plutôt dans les outils qui serviront aux régions à prendre un nouvel élan en termes de développement.

n(23 h 10)n

Nous sommes confrontés, vous le savez, à des problèmes démographiques graves, qui fait en sorte qu'un bon nombre de nos forces vives, de notre relève quittent la région pour des raisons qui, elles, sont complexes et qui ne sont pas uniques au Québec, mais qui sont souvent les mêmes un peu partout sur la planète. Si les gens prenaient la peine d'écouter les débats qui se déroulent en France, dans d'autres communautés, les mêmes problèmes se posent par rapport aux départs et aux problèmes démographiques qui se posent dans les régions du Québec.

Et c'est pour cela que j'ai personnellement d'ailleurs assisté à une rencontre avec plus particulièrement les gens de la Côte-Nord sur l'idée d'un fonds de développement régional. La Côte-Nord avait une idée, la Gaspésie avait fait une proposition, le Saguenay?Lac-Saint-Jean avait fait une proposition et une autre région aussi, et finalement nous avons ensemble réussi à présenter une position commune, qui était un amalgame des différentes positions des autres régions, pour la création d'un fonds, un fonds qui impliquait le secteur privé et les fonds de retraite dans les différentes régions du Québec, les fonds de retraite des travailleurs des différentes usines.

Vous savez, chez nous, la grande entreprise est très présente, entre autres Alcan, vous le savez, et le président du fonds de retraite, M. Yvon D'Anjou, était présent, ancien directeur d'usine, un gars d'ailleurs qui ne venait pas de la région, mais qui s'était, lors de sa nomination comme directeur des usines du Saguenay? Lac-Saint-Jean, s'était impliqué ardemment dans le développement régional. Et, lorsque le rendez-vous a été convoqué, il n'était plus, à ce moment-là, directeur d'usines, il était plutôt président du conseil d'administration du fonds de retraite des employés d'Alcan. Et il a pris le temps, il est venu avec nous présenter au gouvernement, au chef de l'opposition actuel, député de Verchères, ancien premier ministre du Québec, à la ministre des Finances, en ma présence... Nous avons argumenté avec eux pendant deux jours pour les convaincre de l'opportunité de créer ce fonds de développement, qui aurait été ? et, je le crois, devra être ? l'ultime moyen pour ma région de se développer, de créer des emplois, de relever des défis, on parle, dans la transformation d'aluminium, mais dans tous les autres domaines, plus particulièrement au domaine manufacturier qui demande des investissements souvent, vous le savez, majeurs, importants.

Et ce n'est pas à coups de quelques centaines de milliers de dollars qu'on peut retourner la situation. Vous le savez, une usine dans la transformation d'aluminium, un investissement en bas de 20 millions est presque impossible, il n'est pas suffisant pour assurer le développement de belles initiatives, d'où l'idée de créer ce fonds de capital de risque, géré d'ailleurs, et nous avons fait une proposition, géré par des gens qui auraient la compétence et l'expertise en matière de développement régional mais surtout en matière de capital de risque. Parce que, dans ma région, nous avions ces ressources formidables, d'ailleurs, qui n'avaient aucune couleur politique. C'étaient des gens... J'étais assis avec des gens qui, je suis convaincu, je vous dirais même, avaient même... la plupart du temps appartenaient, disons, de façon évidente à d'autres formations politiques, mais ils ont cru, eux, que c'était, avec nous, la seule façon de retourner la situation et de pouvoir à court terme présenter un bilan positif, migratoire pour la région, en créant des emplois, en permettant aux jeunes, aux jeunes femmes et aux jeunes hommes qui font le choix de faire carrière... qu'il y a dans la région un avenir prometteur.

Ce fonds aurait permis, par une participation gouvernementale, qui n'était pas d'ailleurs une subvention, qui était simplement de... par parité, autrement dit. Chaque montant mis par le fonds ou par un investisseur privé aurait été... le gouvernement aurait mis le même montant, ce qui aurait permis, seulement dans la première année, de créer un fonds dont on avait estimé, avec les engagements que nous avions, de plus de 60 millions de dollars, Mme la Présidente, 60 millions de dollars maintenant dont on ne parle plus, qui aurait servi au développement et qui ne sera malheureusement pas utilisé, du moins à court terme. Pourquoi? Parce que le gouvernement a décidé plutôt de convoquer les gens à un débat de structures, et même, je vous dirais, encore plus grave ? vous avez seulement à en parler au député de Roberval ? dans la proposition actuelle, de lever les gens du Saguenay contre les gens du Lac-Saint-Jean, de créer des dynamiques de confrontation à l'intérieur même de notre région, confrontation qu'on n'avait pas vécue depuis beaucoup d'années.

Et j'étais très fier d'avoir contribué, et je ne suis pas le seul, je vous dirais, mais de mettre fin aux esprits qui ont souvent animé pas seulement notre région, mais d'autres, qui font en sorte que souvent, pour des raisons un peu obscures, elles vont souvent s'opposer par rapport à des questions qui malheureusement demanderaient plutôt une concertation beaucoup plus grande.

Or, nous étions rendus à un point où tout le monde sur le territoire de Lac-à-la-Croix, en passant par Girardville jusqu'à Roberval et jusqu'au Bas-Saguenay, tous les gens ? le préfet de la MRC, d'ailleurs, du Bas-Saguenay était totalement en faveur ? tous les gens étaient d'accord pour dire que c'était la voie. Et nous avions même dit que cette proposition aurait pu être même la seule qui aurait été amenée par la région parce que nous avions cru et nous croyons encore que cela aurait insufflé l'énergie et les moyens requis pour relever le défi de la création d'emplois chez nous.

Malheureusement, exit, Mme la Présidente, les fonds de développement, exit, les moyens de développement. Nous avons été reconvoqués sans demande, personne n'a demandé ça au Rendez-vous des régions. Toutes les régions du Québec étaient présentes, Mme la Présidente, aucune n'a demandé ce que fait actuellement le gouvernement, aucune n'a réclamé ce grand bouleversement et cette grande messe de la confrontation auxquels nous avons été convoqués. Personne n'a fait de telle demande, et nous sommes pris actuellement à aller à l'encontre de la volonté exprimée par l'ensemble de nos partenaires régionaux.

Parce que, dans une région, oui, il y a des élus, Mme la Présidente, il y a aussi et, je dirais même, surtout des gens animés par le sentiment qu'ils doivent développer la région. Et, chez nous, vous le savez, le sentiment d'autonomie, de fierté est très fort, est même un, je pense, qui est un des plus particularisés, sans dire le plus fort. Mais nous avons atteint, je vous dirais, cette volonté d'autonomie qui est très ancrée chez nous, qui nous a amenés d'ailleurs à prendre collectivement des décisions, vous le savez, au cours des deux grands référendums, mais qui est animée plus profondément par cette conviction que nous avons les capacités, les ressources, les compétences pour développer nous-mêmes nos outils, pour développer notre région. Et nous demandons et nous demandions au gouvernement de mettre la main à la pâte, de créer des outils, de nous donner les outils dont nous avions besoin pour le développer et que les centres de décision soient dans la région.

Et, malheureusement, encore une fois, ce discours n'a pas trouvé bon entendeur de la part du gouvernement, et le ministre du Développement régional et économique ? économique et régional, mais je pense qu'on devrait y enlever régional, ce serait beaucoup mieux, Mme la Présidente ? n'a pas jugé bon ni même d'écouter, d'entendre, de lire, d'explorer ces formidables propositions. Et je souhaite que, comme le gouvernement a le dernier mot en matière de structures, du moins que nous puissions aller de l'avant avec cet important projet qui a mobilisé l'ensemble des intervenants de la région, y incluant les syndicats, le patronat. Parce que, chez nous, les deux se parlent très bien, Mme la Présidente. Les deux font front commun ensemble pour le développement régional et ne sont pas animés de guerres intestines lorsque vient le temps de parler de développement régional. Et, à la même table, j'avais un des plus hauts dirigeants d'une grande société à côté d'un leader syndical bien connu, et ensemble ils faisaient front commun pour demander, pour exiger, parce que nous l'avons exigé, ces outils pour la région.

J'ai fait ce combat jusqu'à la dernière minute, et nous avons obtenu de la part de l'ancien premier ministre, le chef de l'opposition, le député de Verchères, cet accord à la toute fin du Rendez-vous qui nous a permis de revenir chez nous en disant mission accomplie. Le mandat que la région, que les collèges... parce que cette proposition avait été pensée avec les collèges, avec l'Université du Québec à Chicoutimi, avec les groupes de femmes. Tous les intervenants s'étaient entendus pour dire: Voici la demande de la région, voici la principale demande, voici celle sur laquelle nous allons aller jusqu'au bout. Et nous étions prêts, moi y inclus, à aller jusqu'au bout et d'assumer les conséquences d'un refus, je l'aurais fait. Je me suis battu jusqu'au bout avec mes collègues, le député de Dubuc qui est encore ici, à cette Assemblée, le député du Lac-Saint-Jean. Nous avons fait un travail de tous les instants pour assurer une réponse positive et nous l'avons obtenue.

n(23 h 20)n

Malheureusement, ces combats maintenant sont vains, Mme la Présidente, et que l'urgence que nous avions d'agir sur les moyens est disparue parce que la ministre a décidé plutôt de convoquer... et le ministre, de convoquer, je vous dirais, sans même avoir pris le temps de regarder la situation, à un débat stérile entre les différentes composantes de la région et d'exclure ceux et celles qui avaient participé à l'élaboration de stratégies particulières.

Et c'est pourquoi qu'il est dramatique d'y exclure la société civile, de ne pas donner la même voix à quelqu'un... Un agriculteur de Lac-à-la-Croix... Pourquoi un agriculteur de Lac-à-la-Croix, Mme la Présidente, n'aurait pas la même volonté de vouloir développer sa région que le maire de Saguenay, que le maire de Roberval?

Nous avons été élevés dans cette tradition chez nous, que, peu importe d'où tu venais ou peu importent les fonctions que tu occupais, tu pouvais agir sur le développement, et la place était autour de la même table. Jeunes, moins jeunes, aînés, femmes, agriculteurs, syndicats, patrons, tous les gens ont un mot à dire, peuvent intervenir, ont une voix pour faire valoir et pour soutenir le développement régional.

Malheureusement, nous ne pourrons aller de l'avant et continuer cette belle tradition de concertation que nous avions chez nous. Et, déjà, vous avez vu dans les médias les vieilles chicanes ressortir entre le nombre de représentants qu'il y aurait entre telle et telle région, entre telle sous-région et sous-région, et ça, je pense que c'est autant de temps perdu par rapport aux outils qui auraient pu être mis de l'avant pour développer nos régions. Alors, je souhaite ardemment que le gouvernement entende raison.

Comme il me reste peu de temps, Mme la Présidente, à cette étape-ci et vu l'heure tardive, je vais faire motion, Mme la Présidente, pour laisser un peu plus de temps au gouvernement pour réfléchir sur ces importantes questions relatives au développement régional. Je ferai motion, en vertu de l'article 100 de notre règlement, que le débat en cours soit ajourné et permette effectivement au gouvernement d'aller un peu plus loin, alors, dans sa réflexion. Alors, je vais déposer ma motion.

La Vice-Présidente: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour cette motion? Adopté. Cette motion est adoptée? M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Dupuis: Je vais demander, Mme la Présidente, d'ajourner les travaux à mardi matin, 10 heures.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Alors, j'ajourne les travaux à mardi matin, 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 23 h 23)