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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 13 décembre 1996 - Vol. 35 N° 57

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67 - Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Organisation des travaux

Auditions

Remarques finales


Autres intervenants
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. Réal Gauvin
*M. Frank Zampino, CUM
*M. Sammy Forcillo, idem
*M. Marc Sauvé, Barreau du Québec
*M. Jean-Marie Pâquet, idem et Comité des entreprises sur la fiscalité
municipale
*M. Richard Laflamme, idem
*M. Daniel Chénard, idem
*M. Pierre Pelletier, idem
*M. Michel Fernet, UMRCQ
*Mme Isabelle Chouinard, idem
*M. Gilles Vaillancourt, UMQ
*M. Jean-Guy Mercier, AEMQ
*M. Gilles Racicot, idem
*Mme Céline Viau, OEAQ
*Mme Francine Guérin, idem
*M. Mathieu L'Écuyer, idem
*M. Cameron Charlebois, IDU
*M. Michel Dumais, idem
*M. Pierre Turcotte, Comité des entreprises sur la fiscalité municipale
*M. André Bélisle, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures quarante-huit minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des équipements débute ses travaux. Le mandat de la commission, ce sont des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui. M. Middlemiss (Pontiac) est remplacé par Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys); M. Poulin (Beauce-Nord) est remplacé par M. Thérien (Bertrand); et M. Quirion (Beauce-Sud) est remplacé par M. Gauvin (Montmagny-L'Islet).


Organisation des travaux

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, j'aimerais vous donner l'ordre du jour. Évidemment, on commence avec trois quarts d'heure de retard. Le premier groupe, c'est la Communauté urbaine de Montréal; le deuxième groupe, le Barreau du Québec; le troisième groupe, l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec. À 13 h 15, on est censé suspendre.

À 15 heures, Union des municipalités du Québec; à 15 h 45, Association des évaluateurs municipaux du Québec; à 16 h 30, Comité des entreprises et Institut de développement urbain du Québec; et, à 17 h 15, c'est censément la fin des auditions.

Alors, je demanderais au porte-parole de la Communauté urbaine de bien vouloir se présenter et présenter la personne qui l'accompagne.

M. Trudel: Un instant, s'il vous plaît. Quelques précisions, peut-être, Mme la Présidente, si vous y agréez. Nous avons donc consenti à ces consultations particulières et on va tenter d'ajuster au maximum les travaux. Écoutez, de façon très simple, d'abord, on a eu de nouvelles représentations pour entendre le Conseil scolaire de l'île de Montréal. On en a convenu avec l'opposition et nous pourrions ajuster notre ordre du jour de façon que ce soit à la fin de la journée, sans préjudice au restant de l'organisation de la journée. Théoriquement, puisque nous avons l'ordre de la Chambre jusqu'à 18 heures, il nous resterait de la place pour entendre, à 17 h 15, le Conseil scolaire de l'île de Montréal.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, j'aimerais vous faire remarquer que nous commençons déjà avec trois quarts d'heure de retard.

M. Trudel: Alors, charge à nous d'économiser ce temps.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va.

M. Trudel: À bon entendeur, salut, vous allez me dire?

La Présidente (Mme Bélanger): Exact.

(11 h 50)

M. Trudel: Très bien. Deuxièmement, Mme la Présidente, j'ai une représentation – il faut rendre à César ce qui est à César – de la représentante de l'opposition, la députée de Jean-Talon, pour que puisse se joindre, à 15 h 45, à l'Association des évaluateurs municipaux du Québec l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec qui pourrait se joindre et que l'on pourra contacter pour qu'il puisse être autour de la table. Ces gens-là ont des choses à nous dire également. Alors, à 15 h 45, lire l'Association des évaluateurs municipaux du Québec et également l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec. Dans ce contexte-là, nous serions prêts à débuter les travaux de notre côté, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. le ministre. Je demanderais au porte-parole de la Communauté... Vous voulez la parole, Mme la députée de Jean-Talon?

Mme Delisle: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Ah, je m'excuse. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Juste préciser qu'en ce qui a trait à l'Ordre des évaluateurs agréés on avait compris, nous ici, dans l'opposition, étant donné quand même que le temps pressait, que l'Ordre des évaluateurs municipaux et l'Ordre des évaluateurs agréés pourraient prendre conjointement le temps qui a été alloué. C'était ce qu'on avait compris. Or, semble-t-il qu'il y a eu un quiproquo à ce niveau-là. Donc, c'est pourquoi on tient à ce que, si ces gens-là ont le temps, aujourd'hui, de se présenter devant la commission, on puisse entendre les éléments qui justifient leur position. C'est tout ce que j'avais à dire, Mme la Présidente. Merci.


Auditions

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Alors, pour une troisième fois, je demanderais au porte-parole de la Communauté urbaine de Montréal de bien vouloir se présenter et de présenter la personne qui l'accompagne. Vous avez 15 minutes pour faire vos représentations; ce sera suivi d'une période de questions de 15 minutes du côté ministériel et de 15 minutes du côté de l'opposition, maximum, évidemment. Alors, vous avez la parole.


Communauté urbaine de Montréal (CUM)

M. Zampino (Frank): Merci, Mme la Présidente. D'abord, je tiens à vous remercier ainsi que M. le ministre et l'ensemble des membres de la commission qui nous ont accordé ce temps, ce matin, pour venir présenter la position de la Communauté urbaine de Montréal en ce qui concerne le projet de loi n° 67.

Alors, ce matin, au niveau de la représentation de la Communauté urbaine de Montréal, j'aimerais, tout d'abord, excuser Mme la présidente du comité exécutif, Mme Danyluk, qui devait normalement nous accompagner, mais qui, à cause d'autres engagements, n'a pas pu se joindre à nous. M. Forcillo m'accompagne. M. Forcillo est vice-président du comité exécutif à la ville de Montréal, vice-président du comité exécutif à la Communauté urbaine de Montréal ainsi que vice-président de la Commission d'administration et des finances de la Communauté urbaine de Montréal.

Mon nom – je me présente – est Frank Zampino. Je suis maire de Saint-Léonard, également vice-président du comité exécutif de la Communauté urbaine de Montréal ainsi que président de la Commission d'administration et des finances de la CUM. Alors, est-ce qu'on peut débuter immédiatement avec la présentation?

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, allez-y, M. Zampino.

M. Zampino (Frank): Ma compréhension, c'est que le sujet porte principalement sur l'article 53 du projet de loi, qui est la proposition de la CUM sur la désynchronisation des rôles d'évaluation. Alors, si vous me permettez, brièvement, un rappel sur la mesure. La mesure qui a été demandée par la Communauté urbaine de Montréal vise à répartir le dépôt des rôles d'évaluation des 29 municipalités de notre territoire sur trois ans. Actuellement, le système qui est utilisé à la CUM est un dépôt simultané des 29 municipalités et, comme je l'ai mentionné, la proposition veut que, avec la désynchronisation, on puisse déposer ces rôles sur trois ans, c'est-à-dire répartir les municipalités sur trois ans, répartir les unités d'évaluation qui doivent être confectionnées sur trois ans et les déposer toujours en suivant les mêmes règles qui nous régissent actuellement.

Les objectifs de la Communauté urbaine, objectifs qu'on essaie évidemment de réaliser d'abord, c'est une meilleure répartition du temps de nos évaluateurs, de nos professionnels à l'intérieur du service d'évaluation de la CUM. Le fait de pouvoir les déposer sur trois ans pourrait les décharger pour se consacrer à d'autres travaux, notamment à la défense des valeurs qui, actuellement, représentent au moins 80 %, je dirais, de leur temps au travail.

Et l'autre objectif: évidemment, avec la désynchronisation du rôle d'évaluation, ça va permettre à la Communauté urbaine de pouvoir évacuer, je dirais, l'ensemble des plaintes qui sont encore devant le BREF. Au moment où on se parle, on a environ pour 12 000 000 000 $ de contestations d'évaluation qui ne sont pas entendues. Le fait de pouvoir déposer, dans la première année de ce cycle triennal, seulement 10 villes plutôt à caractère résidentiel permettra au service d'évaluation de pouvoir évacuer l'ensemble de ces 12 000 000 000 $ avant le dépôt des rôles d'évaluation des municipalités à plus grande vocation non résidentielle, c'est-à-dire celles qu'on a ciblées dans le bloc 2, ainsi que Montréal qu'on a dans le bloc 3.

Ce qui est également important dans les objectifs qu'on recherche avec ces représentations, c'est que ce répit va nous donner également le temps nécessaire pour amorcer une réflexion élargie sur le système d'évaluation lui-même ainsi que l'ensemble des dispositions fiscales. Une partie très importante de notre résolution du conseil de la Communauté urbaine de Montréal du mois de novembre prévoit une demande au gouvernement du Québec de pouvoir former un comité tripartite où, on considère, devront siéger, d'abord, les élus de la Communauté urbaine de Montréal, les représentants du gouvernement du Québec ainsi que des représentants du milieu, c'est-à-dire de ceux qui travaillent dans le domaine de l'évaluation foncière avec nous. Alors, ce comité aura évidemment pour objectif de pouvoir présenter, dans un délai assez raccourci, des recommandations qui vont venir appuyer la démarche qui est une démarche beaucoup plus globale.

Un autre avantage pour la Communauté urbaine avec cette proposition, mais c'est quand même un avantage qui est très ponctuel, actuellement: le fait de pouvoir retarder d'un an ou de deux ans le dépôt de rôles de villes à plus grande vocation non résidentielle nous permettrait de pouvoir éliminer certaines réserves qu'on prévoit actuellement dans le remboursement des taxes suite à des contestations d'évaluation. Alors, je dis bien que c'est un avantage qui est quand même ponctuel. Le fait qu'on désynchronise maintenant le rôle d'évaluation fait en sorte que, pour les villes dans le deuxième bloc, le rôle actuel devient un rôle de quatre ans et que, pour la ville de Montréal qui est dans le troisième bloc, le rôle actuel redevient un rôle de cinq ans. Alors, évidemment, en devenant des rôles de quatre ans ou de cinq ans, il n'y a aucune nouvelle contestation qui s'ajoute, aucune nouvelle plainte qui s'ajoute pour une période donnée; et ça représente quand même une économie assez importante pour les municipalités, qui quand même est non négligeable.

Au niveau de ces économies, la Communauté avait déjà mentionné, dans la documentation qui a été envoyée au ministère des Affaires municipales, qu'à chaque dépôt de rôles d'évaluation on a pour environ 225 000 000 $ de remboursements de taxes suite à des décisions devant le BREF. Alors, ces 225 000 000 évidemment, si on peut les répartir sur trois ans, représentent des remboursements annuels d'environ 75 000 000 $ par année pour l'ensemble de ces municipalités. Parmi ce 75 000 000 $ par année en remboursements de taxes, il faut dire qu'il y a environ 50 000 000 $ ou le deux tiers qui sont remboursés directement par la ville de Montréal, la ville-centre; 50 000 000 $, alors, c'est quand même non négligeable. De ce 50 000 000 $, c'est également important de préciser que 95 % de ces remboursements de taxes suite à des contestations et suite à des auditions et à des jugements devant le BREF sont versés au secteur non résidentiel. Il y a seulement 5 % de ce 75 000 000 $ qui est versé suite à des contestations dans le secteur résidentiel; 95 % s'en va directement au secteur non résidentiel.

(12 heures)

Ce que j'aimerais ajouter évidemment, en concluant sur les objectifs de notre démarche: La Communauté urbaine de Montréal est très consciente que ce n'est pas la désynchronisation du rôle d'évaluation qui règle de façon durable la problématique qui est la fiscalité municipale. On a des problèmes qui sont ponctuels actuellement, et je pense qu'on ne peut pas négliger l'importance pour la Communauté urbaine de Montréal d'avoir une disposition comme celle-là sur le territoire. Il y a des avantages qui sont non négligeables à court terme, mais on prétend, on est conscients que ce n'est pas la désynchronisation qui réglera le problème qui est beaucoup plus global.

Le système d'évaluation lui-même, si on a de la difficulté à cause de tout ce qu'on a mis de l'avant... On a parlé de l'industrie de la contestation, on a parlé de la qualité du rôle. Beaucoup de personnes évidemment ont questionné la qualité du rôle. On convient que le système d'évaluation aussi doit être revu, mais c'est à l'intérieur d'un comité – ce qui est la deuxième partie de notre demande – qui pourra se pencher sur ce dossier avec les représentants du gouvernement, avec les représentants du milieu, qui pourra faire en sorte qu'on pourra trouver des solutions durables au dossier et faire en sorte qu'on pourra, dans l'avenir, vivre dans un système qui fera l'affaire de tous les intervenants et qui sera un système qui est équitable.

Il est également important pour nous de mentionner qu'aucunement dans notre proposition on ne veut remettre en cause le fondement même sur lequel le système d'évaluation est basé. On va continuer à déposer des rôles d'évaluation sur des unités en fonction de leur juste valeur marchande; on n'a jamais remis cette question en principe. Je sais qu'on a parlé souvent de gel de rôles d'évaluation. J'ai eu l'occasion d'entendre les interventions des membres de l'Assemblée nationale, la semaine passée, sur ce dossier et je pense que c'est important: on ne doit pas mélanger les cartes. Ce n'est pas un gel de rôles d'évaluation qu'on a dans la proposition qui est devant nous; c'est une désynchronisation des rôles d'évaluation.

Ce qu'il est important, par contre, de mentionner, c'est que je pense que c'est normal, quand on change de système... On a un système de dépôt simultané actuellement des 29 municipalités de l'île. Quand on change de système pour une désynchronisation de rôles d'évaluation, il y a une période transitoire et évidemment, avant de pouvoir entrer dans le rythme, le cycle normal de la désynchronisation, c'est la période de transition qui fait que, pour un an ou pour deux ans, les rôles actuels sont prolongés ou reportés pour certaines municipalités.

Et c'est important de faire ces distinctions: ce n'est pas le gel; c'est la période de transition qui, forcément, va exiger que les villes du bloc 2 vont se retrouver avec le même rôle pour un an additionnel. Alors, ce sera devenu un rôle de quatre ans et, dans le cas de la ville de Montréal, dans notre proposition, le rôle actuel sera devenu un rôle de cinq ans. Mais c'est la période transitoire afin de changer de système de dépôt simultané pour 29 villes à un rôle désynchronisé, à un dépôt désynchronisé qui fait en sorte que les rôles actuels sont reportés.

Mais c'est important de noter qu'on ne remet pas en cause la notion de la valeur marchande. Et l'exemple, c'est que déjà, en 1998, on a 10 municipalités à plus grande vocation résidentielle qui vont déposer leur rôle d'évaluation toujours en fonction de la valeur marchande, et ces 10 municipalités devaient, de toute façon, déposer un rôle d'évaluation pour l'année 1998. Mais, si on accepte les principes de la désynchronisation, c'est important quand même de reconnaître qu'il y a une période transitoire qui fera en sorte qu'il y aura un report de rôles d'un an pour certaines villes et un report de rôle de deux ans dans le cas de la ville de Montréal.

Ce que j'aimerais ajouter à la fin, c'est que la désynchronisation des rôles d'évaluation, la proposition qu'on a devant nous, la Communauté urbaine de Montréal ne réinvente pas la roue avec ce dossier. Toutes les municipalités du Québec, sauf de très peu d'exceptions – je pense qu'il y a peut-être six municipalités – ont la désynchronisation des rôles d'évaluation. On ne réinvente pas la roue. Ne parlons pas de gel si c'est une désynchronisation qu'on demande. La désynchronisation, c'est utilisé à travers la province, et on demande le même processus pour les villes de l'île.

C'est sûr, comme on vous l'a bien démontré, qu'il y a des avantages qui sont très ponctuels pour nous. Dans cette période transitoire, on va pouvoir permettre d'évacuer l'ensemble des plaintes, on va mieux répartir le temps des évaluateurs et évidemment il y aura un avantage par le fait que, pour certaines municipalités, il n'y aura pas de nouvelles plaintes qui vont s'insérer dans le système ou dans l'inventaire des plaintes pour une période d'un an ou de deux ans, ce qui fera en sorte qu'on n'aura pas, pour ces périodes de temps, à rembourser des taxes suite à des contestations d'évaluation. Alors, on considère que c'est d'abord un cheminement, un processus qui est équitable. C'est utilisé partout ailleurs au Québec, et on demande la même chose sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Zampino. M. le ministre.

M. Trudel: M. Zampino, M. Forcillo, bienvenue au nom de la Communauté urbaine de Montréal. Bon, alors, on va économiser les formules pour utiliser chaque minute parce qu'on a une très grosse journée. Effectivement, l'article 53 a été prévu à ce projet de loi spécifiquement à la demande des 29 municipalités de la Communauté urbaine de Montréal. Alors, je dirais que c'est comme ça que ça se présente; le fardeau de la preuve est à nous et nous devons faire la démonstration de la nécessité, pour une meilleure harmonisation et de la fiscalité et du travail au niveau de l'évaluation et de l'efficacité du régime, de l'exigence que nous avons d'introduire la nouvelle synchronisation des dépôts de rôles, et il faut que ce soit extrêmement clair.

M. Forcillo, la question est assez claire quant à la présentation. L'effet majeur, c'est pour la ville de Montréal. Ce n'est pas négligeable, vous venez de nous l'expliquer, le geste pour les autres municipalités d'instaurer cette resynchronisation des rôles, sauf que pour la ville de Montréal... On peut le dire autrement: 50 % des unités d'évaluation, c'est la ville de Montréal. Alors, comme la proposition de la CUM, c'est l'année 3 de la resynchronisation, il faut que vous nous disiez ce que ça signifie pour Montréal. Et aussi, dans votre réponse, M. Forcillo, j'allais dire, vous allez être obligé de nous indiquer, avec ce que M. Zampino vient de nous dire, comment on en arrive à concevoir qu'on ne s'éloigne pas de la sacro-sainte notion de la valeur marchande. Alors, dites-nous l'impact pour Montréal, pourquoi vous vous êtes joints à la CUM pour faire cette demande-là, les influences, l'importance au niveau de la contestation et également cette dernière dimension sur la notion de valeur marchande.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Forcillo.

M. Forcillo (Sammy): Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, concernant la désynchronisation, du moins pour la ville de Montréal, de deux ans, c'est-à-dire que nous passons dans le bloc 3, les impacts, c'est environ... Tantôt, M. le maire Zampino nous exprimait le fait qu'il y avait, à peu près, au moins une douzaine de milliards qui étaient en contestation. Uniquement pour la ville de Montréal, le rôle 1992-1993-1994, il y en a encore 3 000 000 000 $ qui sont encore, si vous voulez, au niveau des plaintes de contestation et, pour le rôle 1995-1996-1997, ça totalise 8 000 000 000 $, c'est-à-dire à peu près environ, au niveau du territoire de la CUM, 11 000 000 000 $.

Depuis une dizaine d'années, depuis 1986, à la ville de Montréal, il y a 450 000 000 $ qui ont été déboursés en capital et en intérêts sur 10 ans, c'est-à-dire que la moyenne, c'est à peu près 45 000 000 $ par année que la ville de Montréal doit débourser en remboursement de capital pour la taxe et pour les intérêts qui s'accumulent sur ces montants-là qui prennent du temps avant de passer devant le BREF ou, du moins, des fois, on ne s'entend pas tellement au niveau des valeurs qui ont été contestées.

Un élément qui est bien important pour nous, c'est aussi les frais qui sont rattachés quand même à cette contestation-là, à cette industrie de la contestation, ce qui fait en sorte que la ville de Montréal a en parallèle un bureau d'avocats qui la défend et il y a un bureau au niveau de la Communauté urbaine de Montréal; vous avez une duplication au niveau des coûts. Et ce qu'il ne faut pas perdre de vue, non plus, c'est que, si je prends juste pour la ville de Montréal, 45 000 000 $, chaque sou d'évaluation, nous, à Montréal, de compte de taxes qu'on augmente, ça correspond à 5 000 000 $ de revenu. Vous pouvez figurer que 45 000 000 $, ça correspond à peu près à 0,09 $ du 100 $ d'évaluation qu'on doit charger à nos contribuables sur l'ensemble de la ville de Montréal. Notre taux est le plus élevé sur le territoire, si vous voulez, du Québec à 1,99 $. J'ai fait des mains et des pieds pour le réduire d'à peu près 0,005 $, partir de... Oui?

(12 h 10)

M. Trudel: M. Forcillo, vous venez de dire 45 000 000 $...

M. Forcillo (Sammy): Oui, 45 000 000 $ par année que ça nous coûte en capital et en intérêts...

M. Trudel: Ah, sur 10 ans.

M. Forcillo (Sammy): ...si vous voulez, pour ce que j'appelle, moi, de la contestation. C'est 450 000 000 $ sur 10 ans et la moyenne... J'ai dit: De 1986 à 1996, c'est 450 000 000 $.

M. Trudel: O.K.

M. Forcillo (Sammy): Mais, par contre, si vous le mettez sur un an, c'est 45 000 000 $ par année au niveau de ce qu'on appelle la dotation globale, les remboursements d'intérêts et les dépenses contingentes.

M. Trudel: Ça va.

M. Forcillo (Sammy): On ne rentrera pas dans les technicalités. Mais, nous, ce qu'on demande tout simplement, c'est si on peut être dans le troisième bloc. Et il y a un élément qui est très important aussi, c'est que l'ensemble des municipalités qui font partie de la Communauté urbaine de Montréal unanimement, comme le disait tantôt M. le maire, ont adopté une résolution à l'effet que le comité exécutif, à 100 %, a donné son accord pour qu'il y ait une présentation des trois blocs, du moins étalée un an, deux ans. Et il y a aussi le fait qu'à l'assemblée du conseil de la Communauté urbaine de Montréal unanimement, unanimement, les gens se sont prononcés en faveur de la désynchronisation.

Et je vais abonder dans le même sens que M. le maire. C'est évident que, pour nous, ce n'est pas un gel. Un gel, ce serait trop facile; M. le ministre dirait, avec l'ensemble de l'Assemblée: Bon, on gèle un an. Mais là on contesterait toute la question de la valeur marchande, et c'est ça qui était votre question principale, M. le ministre, lorsque vous nous demandiez si cette vache sacrée là – je dis bien le mot – devait demeurer. Oui, effectivement, nous sommes conscients que la juste valeur marchande des biens, on devrait la conserver, mais, par contre, c'est une période transitoire et on est conscients aussi que ce n'est pas la solution la plus magique. Et on ne veut pas, non plus, créer de précédent sur l'ensemble du Québec. Il y a plusieurs municipalités qui ont eu des rôles désynchronisés et la dernière, c'est la CUQ qui l'a fait et ça fonctionne très bien.

M. Trudel: Pour la ville de Montréal, mis à part la partie de contestation dont vous venez de nous parler, là, les indications sont donc clairement à l'effet qu'il y aurait modification quant à l'évaluation dans le secteur non résidentiel en particulier. Est-ce que vous avez fait des évaluations de combien ça peut représenter pour les deux années à venir, la proposition qui nous est faite par la Communauté urbaine de Montréal? Est-ce que vous avez fait une projection? Parce qu'il faut savoir vraiment de quel chiffre on parle ici pour bien fonder notre décision comme membres de l'Assemblée nationale.

M. Forcillo (Sammy): Bien, regardez, dans mon budget de 1997, c'est à peu près une quarantaine de millions de dollars qu'on a pour les contestations de taxes. Regardez, juste au niveau de certaines figures financières, c'est que ça permettrait à la ville de Montréal, si vous voulez, qui a 54 % de la quote-part au niveau de la Communauté – excusez l'expression parce que je suis assez clair sur les expressions, moi – de purger les contestations que nous avons à peu près de 11 000 000 000 $. Nous, on prétend que de passer en troisième bloc, ça permettrait de nettoyer totalement, si vous voulez, les contestations ou les plaintes que nous avons actuellement au niveau de la Communauté.

M. Trudel: Oui, mais ce n'est pas tout à fait ça, M. Forcillo, ma question. Je sais que vous n'êtes pas le genre d'homme pour passer à côté de la question.

M. Forcillo (Sammy): Non.

M. Trudel: Vous êtes franc et vous y allez directement.

M. Forcillo (Sammy): On m'a toujours admiré pour mon franc-parler.

M. Trudel: Quand on conserverait la méthode actuelle, la prévision pour Montréal en termes de manque de revenus ou de modification de revenus, parce qu'on aurait une nouvelle évaluation qui donnerait moins de rendement, ça veut dire combien? Avez-vous fait des projections ou des évaluations?

M. Forcillo (Sammy): Oui, oui. Mais, regardez, c'est difficile pour nous d'évaluer actuellement, sur un rôle qui pourrait être déposé, si vous voulez, en 1998, sur la date de référence du 1er juillet 1996, quels seraient les impacts. Mais il est évident qu'il y aurait sûrement un déplacement fiscal qui pourrait être fait du secteur non résidentiel au secteur résidentiel. Je pourrais vous répondre comme ça. Mais, au niveau des chiffres, on ne connaît pas totalement encore, M. Trudel, quelle serait la tendance au niveau des pourcentages dans le secteur non résidentiel versus le résidentiel. Est-ce que c'est 5 %? Est-ce que c'est 10 %? Est-ce que c'est 15 %? Il semblerait que les tendances, ça pourrait être, dans le secteur résidentiel, 5 % et, dans le secteur non résidentiel, de 15 %. Mais on s'aperçoit quand même qu'il y aurait un déplacement. Mais pour nous, ce n'est pas ça qui est notre mission; notre mission, c'est beaucoup plus de nettoyer, de purger toutes ces plaintes-là qui nous créent de jolis problèmes lorsqu'on prépare le budget.

M. Zampino (Frank): M. le ministre, est-ce que vous me permettez peut-être...

M. Trudel: Oui, oui.

M. Zampino (Frank): ...de rajouter? Parce que vous soulevez quand même...

M. Trudel: Regardez, comme le temps est précieux, je vais en rajouter une par-dessus, là.

M. Zampino (Frank): Oui, O.K.

M. Trudel: Gardez bien votre réponse, je vais en rajouter une par-dessus, et, en même temps, essayez de me répondre. Est-ce que vous n'avez pas l'impression au niveau de la Communauté urbaine – on dirait, des fois, que je m'ennuie de mon rôle d'opposition – qu'on se tire dans le pied avec une mesure comme cela, là? C'est-à-dire que la mesure apporterait une alourdissement – on va dire un alourdissement artificiel – du fardeau fiscal qui sera un désincitatif pour l'installation, on va le dire carrément, sur l'île. Vous avez certainement examiné cette question-là. Le fait d'adopter la proposition, d'avoir une resynchronisation, donc d'avoir une valeur ajustée sur cinq ans, par exemple, à Montréal, sur quatre ans pour un autre groupe et sur trois ans pour le premier groupe, est-ce que vous n'avez pas l'impression que ça créerait une espèce de fardeau fiscal supplémentaire qui serait comme un désincitatif à quiconque voudrait venir s'installer sur l'île?

M. Zampino (Frank): M. le ministre, c'est un peu relié à votre question tantôt à M. Forcillo. C'est un point extrêmement important et c'est là-dessus que, bon, on apprend, comme vous l'apprenez, la réaction de tous ceux qui s'objectent à ce principe. C'est que souvent on fait affaire avec des perceptions. Des perceptions parce que le secteur non résidentiel, il réclame: On a subi des baisses importantes en termes d'évaluation; alors, on serait traité injustement avec un scénario comme celui-là parce que vous nous demandez de prolonger le rôle actuel ou la valeur actuelle. Et, souvent, on utilise cette mauvaise perception ou cette fausse perception aussi dans le secteur résidentiel.

J'ai écouté certains députés de l'opposition en Chambre qui disaient: Bien, voici, le petit propriétaire qui a une évaluation de 100 000 $ va se retrouver, sur le territoire de la ville de Montréal, avec la même évaluation en 1998 et 1999, quand il sait que la valeur réelle de sa propriété est de 80 000 $ ou de 90 000 $. On laisse sous-entendre qu'il va payer 20 % ou 10 % de plus de taxes parce qu'on n'a pas rajusté son évaluation à la hausse. C'est une fausse perception et c'est extrêmement dangereux de laisser sous-entendre sur la place publique des perceptions comme cela, quand on sait clairement que, quand des valeurs baissent dans les municipalités, peu importent les baisses de valeur, les municipalités doivent forcément réajuster les taux à la hausse pour pouvoir au moins, minimalement, recevoir les mêmes revenus d'une année à l'autre.

Alors, en réponse à votre question tantôt: Est-ce qu'il y aura un impact sur les revenus de la ville de Montréal? il n'y en aura pas d'impact, dans le sens que Montréal sera toujours tenue à préserver ses revenus et ils seront obligés de hausser leur taux. Alors, au contraire, surtout quand on s'adresse aux petits propriétaires, j'aimerais faire la mise en garde suivante. C'est qu'avec les déplacements qui risquent de se produire entre le secteur non résidentiel et résidentiel – parce que effectivement les valeurs du secteur non résidentiel ont baissé plus que les valeurs du secteur résidentiel – ça sera justement le contraire pour le petit propriétaire. Si on dépose le rôle d'évaluation, c'est le petit propriétaire résidentiel qui peut se retrouver, comme il s'est retrouvé souvent depuis 20 ans, avec des hausses de taxes de 5 % ou de 10 % et de 15 %.

(12 h 20)

Et c'est important de le mentionner parce qu'une question que je me pose, c'est qu'on a... Et là j'ai entendu les listes de personnes qui doivent évidemment se présenter devant la commission et je me pose la question: Comment ça se fait qu'on n'a pas appelé des groupes qui représentent les petits propriétaires résidentiels qui seront ceux qui pourront être les plus affectés par un dépôt de rôle d'évaluation en 1998 et qu'on invite – et je respecte ces groupes – le Barreau du Québec, l'Institut de développement urbain, la chambre de commerce? Il y a évidemment des intérêts financiers dans ce dossier qui sont majeurs et qui ne sont pas négligeables, et je pense qu'il faut que vous puissiez poser des questions à ces groupes pour leur demander quels sont les intérêts financiers.

Parce qu'on peut évidemment prétendre que c'est le principe d'équité qui est remis en cause. Oui, on peut le prétendre, que c'est un principe d'équité. On va vous dire qu'on a un...

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. Zampino.

M. Zampino (Frank): Oui. On va vous dire que ça doit être basé sur la valeur marchande, mais c'est qu'il y a des intérêts financiers qui sont extrêmement majeurs. Et je peux vous démontrer clairement que, depuis 20 ans, à la Communauté urbaine, les évaluations résidentielles ont été majorées de plus de 750 %. C'est de plus de 750 %, le secteur résidentiel, depuis 1976, depuis 20 ans sur le territoire de la ville de Montréal, quand, dans le secteur commercial et industriel, les évaluations ont augmenté d'environ 200 % en moyenne. Alors, il y a une différence de 500 % entre les valeurs unifamiliales ou résidentielles de plus... Les augmentations ont été plus que dans le secteur commercial et industriel, et on sait ce que ça représente sur le compte de taxes. Ils ont payé et, dans ces mêmes calculs, ces mêmes taxations... Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Zampino, vous pourriez poursuivre avec les autres.

M. Zampino (Frank): Oui, peut-être avec les autres questions. Je pourrais terminer sur ce point.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Je vais essayer d'être brève pour qu'on puisse aller au coeur du débat aussi, pour continuer ce débat-là. D'abord, une précision au tout début. Je suis une de celles qui croient – puis je le pense profondément – que c'est, d'abord, un gel et, ensuite, la désynchro. Si la Communauté urbaine de Montréal avait souhaité la vraie désynchro, je suis persuadée que vous auriez pu faire ceci – c'est une proposition que je vous fais très respectueusement, M. le maire – c'est que vous auriez pu, je pense, prendre votre bloc de 10, faire un nouveau rôle pour un an et, ensuite, faire le rôle de trois ans. Votre deuxième bloc de 18 municipalités, le faire dès cette année; en même temps que vous faisiez le bloc d'un an, pour votre deuxième bloc, faire un rôle de deux ans et, ensuite, un rôle de trois ans. Et Montréal, étant le troisième bloc, aurait pu avoir son évaluation pour trois ans et, ensuite, trois ans.

Remarquez que je ne passe pas de commentaire sur les choix qui ont été faits. Vous avez sans doute de bonnes raisons. Je les ai écoutées. Il n'en demeure pas moins que je vais vous poser la question suivante: Vous parliez, tout à l'heure, que c'était une question de perception. J'avais comme l'impression que vous nous disiez, aujourd'hui, que, de toute façon, la valeur réelle, la valeur marchande, elle n'existe pas. Je ne vous fais pas dire ce que vous n'avez pas dit, mais – on dit le «nutshell» en anglais – c'est un peu l'impression que j'ai eue qu'on était complètement à côté de la coche puis que les citoyens, de toute façon, leur valeur de propriété n'était pas évaluée à 100 %.

Je voudrais que vous me répondiez succinctement à la question suivante: Que répondez-vous justement à celui qui a une propriété de 100 000 $ sur l'île de Montréal et dont l'évaluation a été faite il y a quatre ans, ou trois ans, et dont la valeur va rester à 100 000 $ alors qu'on sait que la maison vaut 92 000 $ – ayons des chiffres justes, à peu près – et qui va être taxé en fonction de ce 100 000 $ alors que sa maison ne vaut plus ça? S'il souhaite vendre sa maison, il ne la vendra jamais 100 000 $; il va la vendre peut-être 90 000 $ – je mets toutes les chances de votre côté – et ce nouveau propriétaire va devoir payer des taxes sur 100 000 $, les droits de mutation sur 100 000 $. J'aimerais que vous m'expliquiez ce que vous allez répondre à ces gens-là, qui sont des contribuables.

M. Zampino (Frank): O.K. Alors, vous parlez de quelqu'un qui est situé sur le territoire de la ville de Montréal. C'est ça?

Mme Delisle: Bien, vous nous avez fait la démonstration que, pour Montréal, c'était une question de revenus, c'était une question de l'industrie de la contestation, c'était une question de...

M. Zampino (Frank): O.K.

Mme Delisle: Vous ne m'avez pas fait, je ne pense pas...

M. Zampino (Frank): Alors, ce que je réponds à ce propriétaire, d'abord, je lui dis que, pour les deux prochaines années – on parle de 1998 et 1999...

Mme Delisle: Oui, oui.

M. Zampino (Frank): ...pas de 1997 parce qu'on est toujours dans le rôle – en 1998 et en 1999, il va recevoir au moins une garantie d'avoir un gel de taxes en présumant que la ville de Montréal gèle son budget, ou une réduction de taxes si la ville de Montréal réduit son budget, ou une augmentation de taxes si Montréal augmente son budget. Alors, c'est ça qu'on lui dit et c'est la même chose que je dis aussi au secteur non résidentiel. Parce qu'on m'a posé la question: Qu'est-ce qu'on répond au gros propriétaire non résidentiel qui a vu son évaluation baisser peut-être de 15 %, ou de 20 %, ou de 25 %, peu importe? On lui dit: Patientez avant de contester à nouveau, mais, pour deux ans, on va au moins vous rassurer – et, quand on parle d'inéquité, j'aimerais qu'on fasse ce point – tout le monde, l'ensemble des contribuables, que ça soit la Place Ville-Marie ou que ça soit le petit propriétaire de Rosemont, que vous serez traités équitablement avec un gel de compte de taxes. C'est ça qu'on leur dit.

Par contre, si on laisse entendre à ces gens: Vous avez une évaluation de 100 000 $; la vraie valeur est de 90 000 $ et, en principe, vous devez payer sur 90 000 $, ce qui veut dire une réduction de taxes, vous savez, Mme la députée, comme ancienne mairesse aussi, que ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. C'est que c'est vrai que les valeurs baissent, mais les villes rajustent les taux. Alors, ce n'est pas vrai que cette personne aura nécessairement bénéficié d'un compte de taxes. Évidemment, là, je parle en moyenne quand je réponds à la question.

Sur votre proposition originale, qui est quand même intéressante, sur votre façon de voir la désynchronisation, d'abord, ce que vous me confirmez, c'est que vous êtes d'accord avec la désynchronisation.

Mme Delisle: Absolument.

M. Zampino (Frank): Vous ne vous objectez pas à la...

Mme Delisle: Pas du tout.

M. Zampino (Frank): ...désynchronisation du rôle d'évaluation.

Mme Delisle: J'ai toujours dit ça, M. Zampino.

M. Zampino (Frank): Par contre, ce que vous nous demandez de faire dans votre proposition, qui est également, on va l'admettre, une désynchronisation, vous nous demandez, d'abord, de déposer les rôles d'évaluation des 29 municipalités...

Mme Delisle: Oui.

M. Zampino (Frank): ...pour l'année 1998, c'est-à-dire ceux qui seront déposés le 15 septembre 1997, et, ensuite, de refaire un rôle pour 10 villes l'année suivante, de refaire un rôle de 18 villes...

Mme Delisle: Oui.

M. Zampino (Frank): ...la deuxième année et, la troisième année, on va refaire la ville de Montréal, ce qui est aussi la désynchronisation...

Mme Delisle: Bien non!

M. Zampino (Frank): Oui. Mais regardez ce que vous êtes...

Mme Delisle: Oui, la désynchro, oui.

M. Zampino (Frank): ...en train de demander à la Communauté urbaine de faire, en vous rappelant toujours les objectifs qu'on avait, ce qu'on voulait rechercher au moins dans cette période transitoire de deux ans. Vous nous demandez – maintenant, vous savez qu'il y a 400 000 propriétés qu'on doit évaluer sur le territoire de l'île – d'abord, de confectionner 400 000 propriétés pour le 15 septembre 1997 et vous nous demandez encore de confectionner...

Mme Delisle: Mais c'est votre choix!

M. Zampino (Frank): ...un autre 400 000 propriétés dans les deux ans qui suivent. Alors, on va devoir...

Mme Delisle: Monsieur...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Zampino.

M. Zampino (Frank): ...confectionner 800 000 unités d'évaluation dans un espace de quatre ans...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Zampino.

M. Zampino (Frank): ...quand on a dit qu'on a un problème d'engorgement dans le système.

La Présidente (Mme Bélanger): Est-ce que vous pourriez donner des réponses plus courtes pour que les membres de la commission aient la chance de poser plus de questions?

M. Zampino (Frank): Mais j'aurais aimé avoir plus de temps, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Mais, malheureusement, le temps est limité et...

M. Zampino (Frank): Oui, je comprends.

Mme Delisle: Il est écoulé?

La Présidente (Mme Bélanger): Non, non, il est limité.

Mme Delisle: Ah! Mais rassurez-vous, là. Je dois vous dire quand même, M. Zampino et M. Forcillo, qu'on vous a rencontrés; on a quand même à tenir compte, c'est certain, des arguments que vous avez utilisés dans les rencontres qu'on a eues avec vous. Ce n'est pas resté lettre morte et ce n'est pas parce qu'on n'a pas compris.

Sur le 12 000 000 000 $ – réponse courte – de combien de dossiers parle-t-on lorsque vous dites qu'il y a pour 12 000 000 000 $ de dossiers en contestation actuellement devant le BREF?

M. Zampino (Frank): Le nombre de dossiers, c'est environ...

Mme Delisle: Est-ce qu'on parle de 40 dossiers, de 4 000 dossiers? De quoi parle-t-on?

M. Zampino (Frank): C'est environ 5 000, je pense, 5 000 dossiers.

Mme Delisle: C'est 5 000 dossiers?

M. Zampino (Frank): Oui.

M. Forcillo (Sammy): C'est 5 300.

M. Zampino (Frank): C'est 5 000 dossiers, c'est ça, pour une valeur de 12 000 000 000 $.

Mme Delisle: Combien dans le résidentiel?

M. Forcillo (Sammy): Dans le résidentiel?

Mme Delisle: Résidentiel.

M. Forcillo (Sammy): C'est 1 500 à peu près.

Mme Delisle: Et la balance est...

M. Forcillo (Sammy): La différence, 3 500 et quelques, là.

Mme Delisle: ...dans le commercial?

M. Forcillo (Sammy): Oui.

M. Zampino (Frank): Oui.

Mme Delisle: Dans le commercial.

M. Forcillo (Sammy): Mais le plus gros montant, 95 % sont au niveau non résidentiel.

M. Zampino (Frank): Par contre, j'aimerais peut-être juste ajouter, en 15 secondes...

Mme Delisle: Ha, ha, ha!

M. Zampino (Frank): ...qu'il n'y a pas une cause en meurtre au premier degré sur le territoire de la ville de Montréal qui prend le nombre de temps qu'on prend pour écouter une cause de contestation d'évaluation pour ces gros bâtiments non résidentiels, qui dure parfois quatre semaines et cinq semaines d'auditions. C'est ça, je pense, la difficulté qu'on a dans le système actuel.

(12 h 30)

Mme Delisle: Bon. M. Zampino, je vous reconnais d'être aussi passionné dans votre point de vue et déterminé évidemment à tenter de nous convaincre, et ça, je vous en félicite. Je voudrais juste rappeler brièvement, là, que la difficulté, en tout cas, que, moi, j'ai, je vous dis honnêtement, c'est que je comprends très bien qu'il y a des problèmes financiers pour Montréal – vous en avez fait la démonstration, M. Forcillo aussi – et je n'ai certainement pas la prétention de penser que Montréal peut être traitée toujours sur le même pied que les autres régions du Québec. Je sais très bien qu'il n'y a pas de Place Ville-Marie dans la région de Québec et je sais très bien qu'il n'y a pas de Place Ville-Marie en Gaspésie. Ceci étant dit, la difficulté que nous avons, c'est celle de l'équité. Si la valeur marchande ne vaut plus, bien, elle ne vaut plus ailleurs non plus. Et toute l'argumentation que nous avons utilisée a été basée là-dessus.

J'aimerais céder la parole à ma collègue de Marguerite-Bourgeoys qui, elle, est responsable des dossiers de Montréal, qui pourra, elle aussi, questionner nos invités.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci, Mme la Présidente. Juste pour bien comprendre – parce que effectivement c'est Montréal, le problème, honnêtement, on va se le dire, là, parce que la majeure partie de la contestation puis ça, c'est à Montréal – une question courte, Sam: Est-ce que c'est vrai, ce que certains du service d'évaluation de Montréal nous ont dit, que les causes seraient finies d'être entendues en 1997? Ça, ça vient du service d'évaluation. Autrement dit, vous allez passer au travers de l'ensemble des causes qui sont – ce que tu disais, là – «pending»; en 1997, là, ça va être réglé?

M. Forcillo (Sammy): Moi, ici, j'ai un cahier d'information, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Juste celles de 1992, 1993 et 1994 – aujourd'hui, on est 1996, on va fêter Noël bientôt – il m'en reste à peu près pour 3 000 000 000 $ à régler. En tout cas, je suis bien surpris...

Mme Frulla: Non, non, je te parle d'un nombre de causes, là.

M. Forcillo (Sammy): Non, mais, je vous dis, moi, je serais...

Mme Frulla: Parce que, tu sais, tu peux avoir un gros building, puis, là, déjà, c'est...

M. Forcillo (Sammy): ...la personne la plus étonnée... D'ailleurs, c'est une des raisons pourquoi on a demandé aux gens de la Communauté d'être en troisième. On a voulu favoriser comme premier bloc le résidentiel. Moi, je vous dis non.

Mme Frulla: Non. Alors, le service d'évaluation de la ville de Montréal nous dit: Oui, nous autres...

M. Forcillo (Sammy): On n'a pas de service d'évaluation à la ville de Montréal.

Mme Frulla: Pas le service d'évaluation, mais les évaluateurs à la ville de Montréal, puis tout ça nous ont dit, à nous autres, que la plupart des causes...

M. Forcillo (Sammy): À la CUM, à la Communauté.

Mme Frulla: Pas à la ville de Montréal, mais à la CUM. Ils nous ont dit que la plupart des causes vont être entendues, ou finies d'être entendues, ou réglées en 1997.

M. Forcillo (Sammy): Bon. Mais, si eux vous disent ça, moi, je vous dis que, pour le rôle 1992, 1993, 1994, il m'en reste encore pour 3 000 000 000 $, puis 1995, il n'est même pas réglé à peu près à 20 %. En tout cas, je ne sais pas s'ils ont plus de personnel.

Mme Frulla: Donc, c'est impossible, là.

M. Forcillo (Sammy): Nous autres, on coupe les budgets à la ville.

Mme Frulla: Frank, «c'est-u» vrai ça ou non? C'est parce que c'est l'information qu'on nous donne, là.

M. Zampino (Frank): L'information que je peux vous donner... Je ne sais pas à qui vous avez parlé personnellement, mais les documents qu'on a soumis sont faits par le service d'évaluation qui a donné originalement un échéancier de fin 1999 pour la fin d'audition de toutes les causes et c'est un échéancier qui vient d'être rajusté à la fin de 1998. Alors, on n'a jamais parlé de 1997; c'est le service d'évaluation qui dit que c'est à la fin de 1998.

Mme Frulla: O.K.

M. Trudel: Il y a le service d'évaluation et les évaluateurs. Il y a d'autre monde qui peut parler, là.

M. Zampino (Frank): Ah, c'est sûr. Je ne sais pas qui a parlé, mais...

Mme Frulla: Non, mais, en tout cas... C'est parce que c'est l'information qu'on a, là.

M. Zampino (Frank): ...le service d'évaluation officiellement a parlé dans son document qu'il avait un échéancier original de fin 1999. Là, on parle pour le rôle de 1995, 1996, 1997.

Mme Frulla: C'est correct. L'évaluation qui a été faite en 1993 – on va parler du non-résidentiel – si, par exemple, pour implanter la désynchronisation, on prolonge le rôle de cinq ans, ça, ça veut dire que, dans le non-résidentiel, les évaluations qui ont baissé de 35 % à 40 % vont avoir encore pour deux ans la même valeur aux livres qu'elles avaient en 1993. Bon.

Là, Frank, on sait que la ville de Montréal n'est pas compétitive vraiment au niveau de ses valeurs, là, présentement, quand on regarde le coût de location, etc., même par rapport à ces villes environnantes de la CUM. Est-ce que ça ne vous rend pas inconfortables, vous autres, là, de maintenir finalement aux livres cette perception artificielle? Là, je parle du non-résidentiel; je ne veux pas parler du transfert dans les... juste ça, là. Parce que effectivement il y a des buildings – on dit de 30 % à 40 % – de classe B qui sont rendus à 50 % de moins. Donc, ça veut dire que vraiment, pour deux ans, là, il faut tous s'entendre que la valeur aux livres de la plupart des buildings dans le centre-ville puis tout ça est fausse. Est-ce que vous n'êtes pas inconfortables, vous autres, à la ville de Montréal, par rapport à ça?

M. Zampino (Frank): Pour nous, je pense que ce qui est important pour ces individus, pour ces investisseurs, c'est le compte de taxes. Pour nous, c'est ça qui est important. C'est sur le compte que la personne va décider: Est-ce que je suis capable de me rendre acquéreur d'une propriété? Parce que ce que vous sous-entendez par ces valeurs artificiellement haussées, c'est que, si on doit les rajuster avec un dépôt de rôle... En principe, ça ne sert à rien de rajuster le rôle si, en contrepartie, on hausse le taux et que c'est la même facture à la fin, ce qui est quand même la réalité, vous le savez.

Mme Frulla: Oui, mais, Frank...

M. Zampino (Frank): Vous le savez que, si on dépose le rôle, même si la valeur baisse de 30 %...

Mme Frulla: Je veux juste continuer.

M. Zampino (Frank): ...si tu hausses ton taux de 30 %, alors ils auront peut-être la vraie valeur, mais le compte de taxes est toujours le même.

Mme Frulla: Oui, Frank...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Forcillo voudrait rajouter quelque chose.

M. Forcillo (Sammy): Oui, je voudrais juste apporter un point qui est important. C'est que, depuis 1994...

Mme Frulla: O.K.

M. Forcillo (Sammy): ...lorsque la nouvelle administration est arrivée à l'hôtel de ville, on a aboli, en tout cas progressivement, la question de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, et c'est 87 000 000 $ qui ont été injectés dans l'économie en réduction, uniquement dans le secteur non résidentiel. De plus, il y avait une quarantaine de millions de dollars au niveau du foncier, ce qui fait 127 000 000 $. Et je dois vous dire aussi qu'au niveau des valeurs locatives c'est 18 000 000 $ de moins. Ça veut dire qu'on a donné à peu près 145 000 000 $ uniquement dans le secteur non résidentiel, au niveau de la réduction des taxes. Donc, je pense...

Mme Frulla: Oui, mais...

M. Forcillo (Sammy): ...qu'on a fait beaucoup d'efforts, nous, en tout cas. Je suis d'accord avec vous, madame, qu'on est loin d'être compétitifs quand même vis-à-vis des grands centres urbains, mais je dois vous dire...

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste une minute.

M. Forcillo (Sammy): ...que, quand on a pris le pouvoir, c'était à 64 %...

Mme Frulla: O.K.

M. Forcillo (Sammy): ...puis, aujourd'hui, on est rendus à 40 % quand même au niveau des régions.

Mme Frulla: Excuse-moi, là. Rapidement...

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste une minute.

Mme Frulla: ...puis ça, c'est juste pour nous éclairer, là, on commence...

M. Forcillo (Sammy): Oui.

Mme Frulla: ...quand un investisseur décide de venir investir et d'acheter, habituellement il va considérer l'ensemble. Si, par exemple, la valeur aux livres d'une propriété non résidentielle est à 40 % plus élevée, d'une part... Et les taxes effectivement vont suivre la valeur du non-résidentiel aux livres, parce que, vous autres, vous ne pouvez pas, s'il fallait avoir le vrai rôle – et c'est de ça, là, qu'on parle – baisser les taxes en fonction, parce que, là, dans vos revenus, ça va éclater, les proportions. Donc, ça, ça veut dire que tu as ton investisseur qui regarde un building dont la valeur aux livres est à 40 %, là, plus élevée qu'elle ne le devrait. Ça ne vous rend pas inconfortables – c'est juste ça, là – ...

M. Forcillo (Sammy): Non.

Mme Frulla: ...par rapport à ces deux ans-là? Puis les taxes suivent la valeur aux livres, là.

M. Forcillo (Sammy): Oui, mais, regardez, Mme la députée, Mme Frulla, c'est la combinaison de deux éléments qui fait un compte de taxes. Vous avez le taux et vous avez l'évaluation. Même si je la baissais de 40 %, l'évaluation, nous, à la ville de Montréal, c'est notre prérogative d'augmenter le taux.

La Présidente (Mme Bélanger): Le taux.

M. Forcillo (Sammy): Donc, je vais augmenter le taux puis je peux aller chercher le même compte de taxes. Puis, plus encore, si on est là pour représenter, comme le disait notre maire tantôt, les petits propriétaires, toutes ces réductions-là massives, si vous voulez, au niveau des évaluations... J'aime autant, moi, avoir une ville bien peuplée que d'avoir des industries qui sont vides aussi, dans le fond. Parce qu'il faut rechercher la juste combinaison, là, le juste équilibre. Et c'est dans ce sens-là que, pour nous, une politique de désynchro pour la ville, en passant au troisième bloc, ne va faire qu'avantager l'ensemble des gens, autant au niveau du non-résidentiel, parce que, nous, l'administration, on a donné 127 000 000 $ jusqu'à date, d'autant plus qu'on va préserver le patrimoine pour tous nos petits propriétaires, parce qu'il n'y aura pas d'augmentation de taux. On va le stabiliser, du moins.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on vous remercie. Malheureusement, c'est très intéressant, mais c'est terminé.

M. Forcillo (Sammy): O.K.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on vous remercie... Bien, là, si on commence à retarder de cinq minutes à chacun des groupes... Pardon?

M. Trudel: Bien, écoutez, Mme la Présidente, je...

La Présidente (Mme Bélanger): Écoutez, c'est le...

M. Trudel: Comme on dit, là...

La Présidente (Mme Bélanger): Il faut bien comprendre qu'on a un mandat jusqu'à 18 heures, qu'il y a trois commissions qui siègent ce soir et qu'on n'a pas le droit de siéger.

M. Trudel: Bon, ça va. Ça va. Très bien.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors...

M. Trudel: Très bien. Très bien.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est très intéressant. Il y aurait d'autres questions...

M. Trudel: On va remercier les gens de la Communauté urbaine, si vous nous permettez, de leur...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci.

M. Trudel: ...défense et illustration du dossier...

M. Zampino (Frank): On vous remercie, Mme la Présidente, M. le ministre et les membres...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci.

M. Trudel: ...et on dira, pour le restant de la journée: Tenez-vous pas loin.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on va suspendre pour une minute, pas plus, là, le temps... S'il vous plaît, là, si vous voulez accélérer le processus.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

(Reprise à 12 h 41)

La Présidente (Mme Bélanger): La commission reprend ses travaux. S'il vous plaît, à l'ordre! Le mandat, ce sont des consultations particulières... S'il vous plaît! M. Maciocia, Mme Frulla, si vous voulez bien reprendre vos places. M. le ministre. Allez parler dans les corridors.

Alors, je demanderais au Barreau du Québec de bien vouloir prendre place.

S'il vous plaît, M. Maciocia. Aïe, Cosmo, va parler dans le corridor! À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: À l'ordre!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent. Et, comme le groupe précédent, vous voyez que c'est très serré: vous avez 15 minutes pour faire votre présentation et ce sera suivi d'une période de 15 minutes par les ministériels et de 15 minutes par l'opposition. Alors, le porte-parole, vous avez la parole.


Barreau du Québec

M. Sauvé (Marc): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, mon nom est Marc Sauvé; je suis avocat au service de la législation au Barreau du Québec. Je suis accompagné pour la délégation du Barreau, à ma droite, de Me Daniel Chénard qui va vous entretenir du processus administratif de révision qui est proposé dans le projet de loi; à ma gauche, de Me Pierre Pelletier, de Québec, qui va vous entretenir de la question des immeubles à vocation unique; à mon extrême-gauche, de Me Richard Laflamme qui va aussi traiter de cette question importante des immeubles à vocation unique; et de Me Jean-Marie Pâquet, de Montréal, qui va aborder la question de la désynchronisation des rôles ou – le mot tabou – le «gel» des rôles.

Alors, sans plus tarder, écoutez, à l'instar de la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics, le Barreau du Québec considère que l'équité constitue le principe premier qui doit sous-tendre le régime fiscal local. Or, nous croyons que certaines dispositions du projet de loi sont de nature à porter atteinte à ce principe. Il est facile d'admettre que l'équité fiscale n'est pas un concept objectif. Ce principe est largement tributaire de la perception qu'ont les contribuables du régime d'imposition. Un régime fiscal perçu comme équitable aux yeux des contribuables amène son acceptation, ce qui, en dernier lieu, constitue la condition essentielle pour son fonctionnement efficace.

En fiscalité municipale, il est généralement admis que la capacité contributive des contribuables est liée à la valeur marchande ou économique de leur propriété. L'introduction, en 1988, des rôles d'évaluation foncière triennaux a eu pour effet de diminuer l'équité du régime fiscal municipal ainsi que la confiance du public dans ce régime. Comme le mentionnait à juste titre la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics, ce système fait en sorte d'éloigner la valeur imposée de la véritable valeur marchande des propriétés, laquelle valeur évolue constamment. Or, pour être équitable, la taxation foncière doit imposer le plus possible les immeubles sur leur valeur marchande au moment où la taxation s'effectue.

La stabilisation des finances publiques ne doit pas s'effectuer au détriment de l'équité. Les mesures qui plafonnent les hausses démesurées des comptes de taxes, mesures déjà prévues d'ailleurs par la législation, apparaissent préférables pour atteindre cet objectif, particulièrement dans un contexte où une baisse des valeurs foncières fait en sorte que les contribuables ont plutôt tendance à s'attendre à des réductions de taxes. Alors, afin de rétablir l'équité du régime fiscal local, nous croyons qu'il est nécessaire d'amender la Loi sur la fiscalité municipale pour délaisser le régime des rôles d'évaluation foncière triennaux et revenir aux rôles d'évaluation annuels.

Alors, sans plus tarder, Me Jean-Marie Pâquet va aborder la question de la désynchronisation en quelques minutes.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pâquet.

M. Pâquet (Jean-Marie): Mme la Présidente, pour nous, essentiellement, le mot tabou de «gel» des rôles est la description exacte de ce qu'on vous propose. Ce qu'on lit dans le projet de loi n° 67 et qui est la demande de la CUM, c'est de geler pour un an ou pour deux ans un rôle de 1995 qui reflète des niveaux de valeur de juillet 1993.

Je veux simplement partager avec vous l'expérience d'un avocat qui fait de la fiscalité municipale depuis au-delà de 30 ans. C'est essentiellement qu'on n'a pas de problème à conseiller à nos clients de payer leur juste part de fiscalité dans la mesure où ils sont en face d'un système qu'ils comprennent, où ils paient sur la valeur de leurs immeubles et où il y a un système juste et connu de révision avec des droits qu'ils peuvent faire valoir.

Or, moi, je me trouve devant des clients à qui j'ai conseillé de régler des dossiers – et ça va dans le sens du processus de déjudiciarisation – en leur disant: Écoutez, de toute façon, pour 1995, vous avez un plancher de taxation à 90 % de 1994; pour 1996, vous avez un autre plancher de taxation de 5 % de moins. Il reste un an au rôle, il n'y aura peut-être pas de plancher de taxation. Vous pouvez accepter un règlement. De toute façon, les baisses de marché vont se refléter dans le prochain rôle en 1998. Et ces gens-là, de bonne foi, ont accepté des règlements. Et je serais obligé de leur dire maintenant: Bien, «it's too bad», c'est encore bon pour deux ans, votre affaire. J'ai énormément de difficultés avec ça pour faire en sorte que des justiciables gardent confiance au système en vertu duquel ils doivent payer leur juste part de taxes. Et c'est ce que j'avais à vous dire là-dessus, sur la question du gel.

M. Sauvé (Marc): Parfait. Me Laflamme, maintenant, sur la notion d'immeubles à vocation unique.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Laflamme.

M. Laflamme (Richard): Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mme et MM. les députés, à l'article 48 de votre projet de loi n° 67, vous proposez de venir inclure le paragraphe 10°, lequel énonce que le gouvernement pourra ultérieurement procéder à une réglementation afin de «prescrire une méthode d'évaluation pour les immeubles à vocation unique qu'il définit».

Je ne sais pas dans quelle mesure vous avez été informés de l'espèce de bibite à laquelle vous vous attaquiez. Je ne peux également savoir ce que vous avez en tête au moment où vous visez ces éléments. Alors, qu'il me soit permis uniquement de vous énoncer ceci: Des immeubles à vocation unique sur le territoire de la province de Québec, il peut y en avoir, à maints égards, de toutes sortes. On peut parler de l'immeuble de la Caisse populaire de Saint-Apollinaire, on peut parler de l'aluminerie de Lauralco, on peut parler également de l'église, on peut parler de l'école, on peut parler d'une multitude d'immobilisations qui se retrouvent un peu partout disséminées sur le territoire du Québec.

Il y a une chose qui est certaine cependant: ces immeubles à vocation unique sont tributaires d'une notion également de marché, d'une notion de marché qui est peut-être un peu plus difficile à palper, qui nécessite peut-être une expertise plus particulière, mais qui est également l'apanage de l'assiette fiscale juste et équitable, quel que soit le type de citoyens.

Nous savons que, depuis longtemps, dans le milieu, dans certaines sphères du milieu, se véhiculent des éléments aux termes desquels certaines personnes voudraient mettre de côté toute notion de valeur marchande quant à ce type d'immobilisations. Nous vous mettons en garde contre cet élément du processus, puisque, encore là, il s'agit d'une attaque directe à l'équilibre juste et équitable d'une assiette fiscale, attaque qui, si, à premier terme, cette stigmatisation peut paraître alléchante pour certains corps publics, va vite devenir un méchant état de débalancement qui a déjà été vécu dans plusieurs États américains, qui a déjà été vécu dans d'autres provinces canadiennes et pour lequel un peu tout le monde revient à la juste valeur marchande telle que nous la connaissons présentement.

Alors donc, juste sur cet élément, il nous semble que c'est avec beaucoup d'attention que le gouvernement devrait procéder à une législation dans ce domaine, d'autant plus que, dans divers comités qui avaient déjà prévalu, il avait été fait mention de recommandations de tables tripartites qui n'ont jamais eu lieu, à ma connaissance, comme telles pour vraiment donner l'heure juste et d'autant plus que, dans la perspective actuelle, on est dans l'impossibilité matérielle, n'ayant aucun projet de règlement entre les mains, de voir ce que effectivement ce type d'article peut définir ou viser.

M. Sauvé (Marc): Parfait, Me Laflamme. Maintenant, sur la révision administrative et la cohabitation entre le projet de loi et la réforme de la justice administrative proposée par le ministre de la Justice, Me Daniel Chénard.

(12 h 50)

La Présidente (Mme Bélanger): Me Chénard.

M. Chénard (Daniel): Merci, Mme la Présidente. Très brièvement, je pense que, sur le terrain, la situation est très simplement résumée de la façon suivante: c'est qu'au niveau de la Communauté urbaine l'insuffisance de ressources humaines fait en sorte qu'il y a un certain délai. Et nous craignons – vous voulons le souligner à la commission – que ce mécanisme ne puisse en réalité fonctionner. J'ai entendu les représentants antérieurs de la Communauté urbaine. Les évaluateurs de la Communauté urbaine sont fort affairés à défendre les valeurs, à faire leurs dossiers, et le reste.

En fait, le processus de révision vise à permettre aux contribuables de s'adresser directement à l'évaluateur pour lui parler, pour obtenir des éclaircissements, et ainsi de suite. Dans la plupart des municipalités à l'extérieur de la Communauté urbaine, le dialogue est fructueux et génère approximativement 85 % de règlements hors cour devant le Bureau de révision, et il y a un nombre extrêmement limité de causes qui sont plaidées grâce à ces dialogues fructueux. En raison d'un manque de ressources, la Communauté urbaine – on doit le savoir – délègue un évaluateur responsable du dossier deux semaines avant le procès. Alors, avant de penser que votre processus de discussion préalable ou de révision administrative va générer quelque chose de positif, il y a un manque de ressources actuellement.

Sur le plan des droits fondamentaux maintenant, j'ai deux dernières remarques. La première, c'est que ce processus de révision est présenté comme une étape sine qua non pour sauvegarder le droit de plainte. Le droit de plainte naîtra à partir de la décision qui devra être rendue le 1er septembre suivant et le droit de plainte n'existera que pour 30 jours. Nos consultations entre mes collègues m'indiquent que nous craignons que ces droits puissent être perdus en raison du fait que ça devient extrêmement technique de faire valoir ce genre de situation. On n'a qu'à penser au niveau des demandes d'accès à l'information où parfois le greffier ou le responsable de l'accès ne donne pas la réponse immédiatement et peut faire perdre des droits à la personne. Alors donc, il y a un problème au niveau des droits fondamentaux.

Maintenant, si vous me permettez de faire un dernier parallèle, vous vous apprêtez à adopter une législation extrêmement importante sur la justice administrative dans laquelle vous avez dégagé des principes relativement à la gestion des dossiers dont ceux du Bureau de révision qui sera fusionné sous l'étiquette du Tribunal administratif du Québec. Je crains que nous soyons en train de parcourir deux objectifs contradictoires. Je m'explique. La Loi sur la justice administrative va dégager finalement des règles générales applicables au Tribunal administratif du Québec, comment il fonctionne, comment on dépose une plainte, comment on demande une révision d'un geste, dont l'évaluation municipale.

Parallèlement à ça, ce que vous faites aujourd'hui, vous étudiez un projet de loi qui a pour but de rendre le recours à cette Loi sur la justice administrative conditionnel à une première étape qui est la révision administrative. Alors donc, si vous me permettez un jeu de mots, la Loi sur la justice administrative propose un prêt-à-porter, alors que, là, au niveau de la fiscalité municipale, vous avez du sur mesure. Alors, je pense qu'il peut y avoir, au niveau du citoyen, un problème de s'y retrouver à l'égard d'une loi qui lui propose un cheminement, la Loi sur la justice administrative, et d'une autre qui ne lui rend pas le recours possible à la justice administrative s'il n'a pas satisfait à la révision administrative que vous proposez ici qui est essentielle. Il faut la faire d'abord avant d'aller à la deuxième étape.

Une dernière chose. Quand j'ai commencé à pratiquer, il y a malheureusement 25 ans, la Loi sur l'évaluation foncière faisait en sorte que le contribuable déposait sa plainte à l'hôtel de ville. On a trouvé que c'était un peu bizarre qu'on aille porter sa procédure chez la partie adverse. Dans certains cas, il y a des greffiers qui trouvaient la façon simple d'oublier qu'il y avait une plainte, puis on ne la transmettait au Bureau de révision. Ici, avec ce que vous avez comme processus, on revient un peu 25 ans en arrière, aux débuts de ma pratique, où on allait porter sa procédure à la partie adverse. Je pense que, sur le plan de l'équité, on devrait, au moins, la déposer dans un endroit neutre et je pense que, dans l'ensemble, il y a un devoir ou une nécessité d'harmonisation entre la loi n° 130 que vous vous apprêtez à adopter et le projet de loi d'aujourd'hui. Je vous remercie.

M. Sauvé (Marc): Quelques mots additionnels, si vous permettez, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui.

M. Sauvé (Marc): ...sur le processus de révision administrative, Me Pelletier.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pelletier.

M. Pelletier (Pierre): Au fond, on se retrouve deux avocats à intervenir devant vous sur ce sujet-là qui, jusqu'à maintenant, ne m'a pas semblé faire l'objet de beaucoup d'interventions. Il faut dire qu'il y a peu de mots. On se retrouve peut-être à deux parce que mon collègue Laflamme pratique à l'occasion du côté des municipalités et à l'occasion du côté des entreprises. De mon côté, je me retrouve toujours du côté des entreprises. Mais nous avons des vues communes sur cette question-là, à savoir que, par ces quelques mots anodins qu'on retrouve à l'article 48, ce qu'on demande à l'Assemblée nationale finalement, c'est de se désister de ses fonctions au profit du gouvernement.

Ce qu'on dit, c'est: Dorénavant, pour ce qui est de l'évaluation des immeubles à vocation unique, ce ne sera plus la valeur marchande qui va présider; ça va être autre chose, et c'est autre chose qui va être défini ultérieurement par le gouvernement et à l'égard des immeubles que le gouvernement décidera d'assujettir à cette procédure-là. Ce qui veut dire que ce qu'on vous suggère par ces quelques mots là, c'est de prévoir que, pour des immeubles dont vous ne connaissez même pas l'identité ni la quantité, ce ne sera pas le même système que pour les autres qui va prévaloir.

Malheureusement, on ne sait pas ce que seront les règles que le gouvernement voudra substituer à celles qui sont actuellement dans la loi. Il y a eu des discussions préalables, auxquelles on a été associés, où on a pu constater que ce qui était envisagé dans l'ensemble des cas, c'était à la fois de simplifier le processus pour réduire les coûts, mais également de s'assurer que toutes les règles qui seraient prescrites feraient en sorte que les immeubles en question auraient une valeur au rôle supérieure à leur valeur marchande.

Ça peut être les immeubles du gouvernement, ça peut être les immeubles des communautés religieuses, ça peut être les immeubles des entreprises; on ne le sait même pas, quels sont ces immeubles-là. Mais ce qu'on sait, c'est qu'on veut s'assurer qu'ils ne seront pas évalués à la valeur marchande et qu'on veut s'assurer également que l'évaluation sera faite d'une façon simple, peu coûteuse, mais au détriment de l'équité qui voudrait que toutes les propriétés soient évaluées à la valeur marchande.

Alors, ce n'est pas peu, ce qui est devant vous par ce tout petit article 48 qui suggère de vous enlever le pouvoir de déterminer comment les propriétés des gens seront évaluées pour le remettre entre les mains du gouvernement qui, animé de bonnes intentions, très certainement, pourra, dépendant de l'heure ou de l'humeur qui prévaudra, intervenir ou non sur différentes catégories d'immeubles. Or, c'est très important, ce qui vous est demandé comme modification législative par ce petit article 48.

M. Sauvé (Marc): En conclusion, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, il reste 30 secondes.

M. Sauvé (Marc): Parfait. Alors, écoutez, avant d'envisager l'adoption de ce projet de loi, on croit opportun, nous, qu'un comité d'experts multipartite soit formé afin d'examiner les problèmes contemporains en matière de fiscalité municipale, de réfléchir sur les solutions globales appropriées et de formuler des propositions au gouvernement. À ce sujet, le Barreau vous offre toute sa collaboration. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Me Sauvé. Alors, M. le ministre.

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais souhaiter la bienvenue au Barreau. Merci de vous présenter rapidement devant nous aujourd'hui pour nous aider à avoir davantage d'éclairage parce que la situation qui est devant nous par le projet de loi n° 67, ça veut dire que, quand tu gouvernes, il faut que tu décides. Alors, pour décider, il faut avoir le maximum d'éclairage. Mais ça ne veut pas dire traîner, par exemple. Ça ne veut pas dire toujours pelleter en avant. À un moment donné, il faut que tu décides parce que c'est ça aussi. Parlant de la stabilité puis de l'équité, c'est aussi de décider pour savoir où l'on s'en va et être capables d'en arriver à un résultat qui fasse en sorte qu'on soit toujours sur, je dirais, la pente du développement, l'orientation du développement et non pas l'inverse.

Alors, abordons cette première dimension à l'égard de l'équité, je dirais, versus la stabilité. Vous avez bien vu tantôt l'argumentation qui est présentée par la Communauté urbaine à l'appui de sa demande, de sa requête. Au nom de la stabilité, mais aussi au nom de l'équité dans la capacité de traitement de nos dossiers, vous voyez, ce qui est présenté, c'est aussi une demande de resynchronisation pour en arriver à être capables de réduire substantiellement ce qui exige beaucoup d'énergie au niveau des rôles d'évaluation.

(13 heures)

L'équité à l'égard de la première dimension dont vous nous avez parlé, à l'égard de la juste valeur marchande, est-ce qu'elle ne peut pas se compenser quelque part par l'équité entre les catégories de payeurs, c'est-à-dire le résidentiel versus le non-résidentiel? Et aussi, au nom de la stabilité, compte tenu du rapport que nous avons – et j'arriverai, en conclusion, à la vôtre, votre conclusion – est-ce qu'on ne peut pas se dire, dans la période où nous sommes, en ce qui concerne l'île de Montréal, eh bien, nous devons réorganiser notre séquence de travail de façon à ce que nous puissions en arriver à la juste valeur, parce qu'il y a un très grand nombre de dossiers, on va le dire comme cela, qui traînent dans le décor et que, par ailleurs, l'équité entre le résidentiel et le non-résidentiel sera maintenue à terme, et on va vivre, pour tout ça, avec – on va l'appeler une stabilité, mais je sais que ce n'est pas le mot que vous avez appris dans ce contexte-là – une stabilité des valeurs et du taux annoncé pour une période relativement plus longue?

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, avant que vous répondiez, étant donné qu'il est 13 heures, ça me prend le consentement des membres pour poursuivre les travaux. Est-ce qu'il y a consentement? Oui? Alors, allez-y.

M. Sauvé (Marc): Je vais céder la parole à Me Pâquet là-dessus.

M. Pâquet (Jean-Marie): Au niveau du volume de plaintes à traiter, M. le ministre, M. Zampino vous a dit que, fin 1998, toutes les plaintes devront avoir été entendues de 1992 et 1995; c'est également l'information que j'ai. Et, quand je mets ça en parallèle avec les mécanismes de révision qui sont proposés dans le projet de loi, qui feraient qu'on pourrait retarder jusqu'au 1er novembre le droit de plainte sur un rôle 1998, je me dis: Où est le problème? Elles seront réglées, les plaintes, au moment où on devrait commencer à entendre les plaintes 1998. Ça, c'est le premier élément de réponse.

Le deuxième élément de réponse, le déplacement de fardeau fiscal ou l'équité entre le résidentiel et le non-résidentiel. Vous avez déjà dans la loi des moyens de contrer un déplacement. Vous avez, au départ, dans la ville de Montréal, la taxe d'eau, la taxe d'affaires, la taxe sur les immeubles non résidentiels, la surtaxe sur les immeubles non résidentiels qui n'est applicable qu'au secteur non résidentiel. Voilà une première façon de traiter d'un déplacement possible de fardeau fiscal.

Dans la loi, vous avez également un mécanisme d'étalement des variations de valeur. Vous avez également un mécanisme de dégrèvement des augmentations de taxes, et c'est à l'article 253.36 de la loi qui, amendé par le chapitre 7 des lois de 1995, avait fixé à 3 % le seuil au-delà duquel il pourrait y avoir un dégrèvement de l'augmentation de taxes qui résulterait d'un déplacement de fardeau fiscal. Alors, les mécanismes sont dans la loi pour permettre de garder un équilibre et d'éviter un déplacement de fardeau fiscal.

Et, troisièmement, au niveau de la stabilité du budget des municipalités, si vous avez un rôle annuel bien fait à la valeur marchande et des mécanismes de cueillette de données, des rencontres avec les contribuables, etc., qui vont permettre d'éliminer le problème à la source dans la qualité du rôle, vous avez déjà atteint une bonne mesure de stabilité au niveau des finances municipales.

D'autant plus qu'avec la notion de rôle annuel que vous recommande la commission D'Amours on n'est plus nécessairement obligé d'avoir une date de référence d'évaluation un an et demi avant et on n'est plus nécessairement obligé de déposer le rôle en septembre. On pourrait le déposer au mois de mai et avoir un processus de révision administrative qui commence au mois de mai et qui va se prolonger pour une période d'un an et qui va permettre à l'élu municipal, qui fait son budget au mois de novembre et de décembre, de savoir, quand il aura des demandes de révision dans les mains depuis le mois de mai ou le mois de juin, exactement c'est quoi qui est contesté et de pouvoir faire des budgets en ayant une beaucoup meilleure idée de sa réserve pour dépenses contingentes qu'il doit faire, parce qu'il va avoir en main l'ensemble des évaluations qui sont en plaintes, alors que, dans le mécanisme que vous avez dans le projet de loi, M. le ministre, M. Forcillo, qui fait son budget à la ville de Montréal en décembre 1997 pour le rôle 1998, va avoir une idée des demandes de révision seulement le 30 avril, après qu'il aura adopté son budget, puis il aura ses plaintes vraiment qui restent au mois de septembre ou au mois de novembre 1998, donc presque un an après l'adoption de son budget.

Résultat, c'est que, pour la disposition des plaintes qui vont être des plaintes et non pas qui seront réglées par le processus de révision administrative, eh bien, on vient de retarder d'un an la possibilité pour le Tribunal de s'en saisir. Il ne peut pas commencer, le Tribunal, à travailler au mois d'avril, mai, juin; à toutes fins pratiques, si on va jusqu'à l'extension novembre, il est obligé d'attendre à l'année deux du rôle pour commencer à les entendre.

Moi, ce qui me préoccupe comme avocat qui oeuvre dans ce domaine-là, c'est que, loin de simplifier, on va complexifier le traitement des plaintes par le mécanisme de révision tel qu'il est dans le projet de loi. Cependant, je dois vous dire que le Barreau est tout à fait favorable à un mécanisme pratique et efficace de révision administrative. Ce n'est pas contre le principe qu'on en a; c'est contre la mécanique telle qu'elle est là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Trudel: Je reviendrai, Mme la Présidente, si vous permettez, sur la dimension fondamentale de la demande de resynchronisation. Mais, comme je ne veux pas oublier les autres dimensions que touche le Barreau aujourd'hui, là, et que je ne veux pas m'en priver, je veux parler bien évidemment aussi de l'article 48, là, bon, de la possibilité réglementaire du gouvernement d'adopter et de pratiquer une méthode à l'égard de l'évaluation des immeubles à vocation unique.

C'est un peu gros de dire qu'on supprime le pouvoir à l'Assemblée nationale, là, parce que vous connaissez très bien la mécanique, vous êtes en droit, là. Vous savez très bien que, oui, il y aura une décision de procéder par règlement parce que c'est plus souple et, deuxièmement, il y a les délais de prépublication qui obligent à la consultation, puis je vais vous faire remarquer qu'à l'Assemblée nationale ce n'est pas toujours le cas formellement. Si, aujourd'hui, on a accepté, par exemple, des consultations particulières, c'est pour avoir davantage d'éclairage, mais ce n'est pas prescrit par la loi qu'il y ait 45 jours de consultations, ce que prévoit le mécanisme de réglementation.

Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que nous avons à travailler – je pense que vous avez ouvert une porte là-dessus – avec les spécialistes du secteur, à la détermination d'une méthode? Êtes-vous prêts à collaborer, dans une équipe de travail, avant que nous procédions à la prépublication d'un règlement, à ce qu'on puisse aller jusqu'au fond de la question, qu'on travaille avec les professionnels et qu'on se dise: Nous allons prépublier, dans la Gazette officielle , un règlement – et ça, je peux m'y engager – qui sera suite à un comité de travail tripartite ou multipartite pour qu'on en arrive au résultat? Ce n'est pas l'imposition ou la prescription qui nous intéressent. Ce qui nous intéresse, c'est le résultat avec les spécialistes du secteur. Êtes-vous prêts à collaborer à un tel mécanisme? Est-ce que vous êtes prêts à dire ouvertement: Oui, on va travailler pour en arriver à un résultat qui tient compte de ce que, entre autres choses, vous venez de mentionner ce matin?

M. Pâquet (Jean-Marie): Me Sauvé vous a dit, dans sa présentation, qu'il offrait la collaboration du Barreau. La collaboration du Barreau, oui, elle vous est offerte. Oui, nous sommes prêts à travailler à l'intérieur d'un comité multipartite pour déterminer, d'abord, c'est quoi, les immeubles à vocation unique, de quoi on parle, le contenu de cette histoire-là.

La question qu'on se pose, c'est: Pourquoi est-ce qu'on doit, maintenant, de façon urgente, transformer ça en pouvoir réglementaire, alors que le comité pourrait être mis sur pied, travailler, arriver avec un produit et là, à ce moment-là, ça pourrait être ou dans la loi ou dans le règlement, mais on saurait de quoi on parle? Actuellement, les immeubles à vocation unique, là, «c'est-u» la Caisse populaire de Saint-Apollinaire, «c'est-u» l'Assemblée nationale, «c'est-u» un hôpital? Il n'y a même pas de définition. On ne sait même pas de quoi on parle.

M. Trudel: Alors, Mme la Présidente, voilà précisément pourquoi nous allons travailler avec les professionnels du secteur. Et pourquoi on retarderait de se donner l'assise pour en arriver à un résultat? Je vous dis d'entrée de jeu – soyons très clairs, parce que gouverner, c'est ça: Il y a une situation qui demande une solution. Les voies à utiliser pour en arriver à cette solution sont diverses. On dit ceci: Nous aurons la possibilité et la capacité de solutionner la dimension qui fait problème. Nous allons le faire avec les professionnels du secteur, avec les gens qui ont dans cette discipline des connaissances qui doivent nous amener au résultat recherché en termes d'efficacité.

Et on n'attendra pas de se le dire à l'occasion de la révision de certains éléments de la Loi sur la fiscalité municipale. Donnons-nous la capacité, l'habilitation, travaillons ensemble. Quand on sera arrivés au résultat, on va même soumettre ce résultat à la consultation en vertu des dispositions sur la prépublication. Il me semble que, là, ça donne suffisamment de garanties pour qu'on arrive à un résultat qui soit du type d'un résultat concerté.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pâquet.

M. Sauvé (Marc): Me Chénard aurait quelques mots à dire.

M. Chénard (Daniel): M. le ministre, si vous me permettez de répondre à votre question, sur la problématique de l'immeuble à vocation unique, il ne faut pas oublier, M. le ministre, que le ministère des Affaires municipales publie un volume de coûts de remplacement depuis 1972 qui, je pense même, a été exporté dans différents pays, qui est une des gloires d'ailleurs de votre ministère. Et ce volume de coûts est un volume de coûts détaillés relativement à l'évaluation de propriétés, qui ne sont pas normalement présents sur le marché des acheteurs et des vendeurs.

(13 h 10)

Alors, il y a déjà un manuel extrêmement important que vous publiez et que les évaluateurs de la Communauté urbaine utilisent tous les jours. Alors, ce document existe. Dans la problématique que mes confrères ont traitée des bâtiments à vocation unique, je pense que c'est le problème de l'application de la méthode prescrite par le ministère dans son manuel de coûts qui pose problème, mais le manuel existe déjà.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pâquet, est-ce que vous avez quelque chose à rajouter?

M. Laflamme (Richard): Sur... Excusez.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pâquet.

M. Pâquet (Jean-Marie): Mme la Présidente, M. le ministre parle de moyens. J'ai réitéré l'offre de collaboration du Barreau; elle est là, je n'ai rien d'autre à ajouter. Les moyens, c'est l'Assemblée nationale qui va en décider.

La Présidente (Mme Bélanger): Ah, c'est M. Laflamme. Bon, je m'excuse.

M. Laflamme (Richard): Il n'y a pas de problème.

La Présidente (Mme Bélanger): C'était à vous que je voulais donner la parole.

M. Laflamme (Richard): Il n'y a pas de quoi.

M. le ministre, j'admets votre propension à vouloir, comme vous le dites, régler un problème, à vous donner un moyen, à l'intérieur de la loi, pour régler un problème. Mon problème à moi, c'est que, toujours dans la recherche générale de ce qu'on appelle une assiette équitable, on ne le connaît pas, le problème que vous voulez régler, on ne le sait pas. On est dans ce milieu-là – et, je vous le dis, c'est un très petit milieu – et on n'a aucune espère d'idée du problème que vous voulez régler. Par contre, pour être honnêtes, on a des informations à savoir ce que d'autres personnes veulent régler comme problème.

Il faudrait, dans un premier temps, établir où est le problème avant de voir quel est le meilleur moyen, qu'il soit législatif ou réglementaire, mis à la disposition du gouvernement dans le but de le régler. Et, dans cette toute petite phrase, comme le disait mon collègue Pelletier, vous avez toute une boîte de Pandore. Et je trouve curieux qu'il y ait eu des consultations. On s'est déjà offerts d'ailleurs, on est connus dans le milieu, là.

M. Trudel: Je sais ça.

M. Laflamme (Richard): On s'est déjà offerts et, comme par hasard, on n'a jamais été consultés, pas sur l'essence même de ce qu'est le problème qui vous a été soumis. Et c'est ça qui est dangereux.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Trudel: Ce que je vous indique à l'égard du processus à employer en vue d'en arriver à une réglementation, c'est que vous serez formellement non seulement dans la consultation, mais dans la préparation parce qu'on doit le faire avec vous autres. Moi, j'ai différentes sources qui m'indiquent qu'il y a eu différents types de consultations. On peut les qualifier d'insuffisantes. On peut en arriver à dire: Ça n'a pas été à un niveau assez élevé, on n'a pas suffisamment retenu ce que les gens de la profession ont dit, ce qu'on a émis comme commentaires ou comme indications.

Mais je vous dis ceci: Pour en arriver à augmenter l'efficacité à l'égard de l'évaluation des immeubles à vocation unique, nous souhaitons pouvoir en arriver à une entente au niveau de la méthode et qu'on puisse en arriver, avec cela, à un résultat en termes d'efficacité pour les concernés. Et on ne veut pas le faire tout seuls; on veut le faire avec les gens qui ont des connaissances dans ce secteur-là, avec ce qu'on vit aussi du côté, je vais le dire en gros, du secteur municipal, au niveau de la fiscalité municipale. Alors, c'est une demande de collaboration qui, il me semble, pourrait nous amener à des résultats qui soient productifs pour le secteur, pour vous autres, pour les concernés directement, pour l'ensemble de la société.

Avant que mon temps se termine, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): Deux minutes.

M. Trudel: ...j'aimerais bien, évidemment, revenir sur la troisième dimension qui a été touchée: le mécanisme de l'étape de révision administrative qui est prévue au projet de loi n° 67. Si je comprends bien, vous vous montrez en accord avec la formalisation de cette étape qui, vous le reconnaissez, existe, à toutes fins utiles, déjà, puisque le contribuable peut aller rencontrer la municipalité ou son évaluateur et énoncer l'objet de sa contestation, disons, de façon sommaire, et le professionnel ou la municipalité modifie sa décision tout simplement, je dirais, sur le moment avec cette présentation.

Qu'est-ce qui fait en sorte que vous contestez cette déjudiciarisation de la première étape? Vous dites: On est, par ailleurs, en désaccord avec le projet de loi n° 130 – parce que vous l'avez manifesté largement, là – mais, à l'égard de la loi n° 130, là, nous autres, ici, on serait en train d'introduire une étape qui, même malgré votre désaccord sur 130, irait en contradiction avec cela. Qu'est-ce qui fait que de vouloir simplifier les affaires pour le citoyen, là, et qu'on lui dise: Première étape, va voir ton monde...

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste 30 secondes pour la réponse, M. le ministre.

M. Trudel: Je vais attendre la réponse.

M. Chénard (Daniel): Est-ce que je peux répondre? La réponse est simple, M. le ministre, c'est que, je pense, le processus de révision administrative pose un problème uniquement sur le territoire de la Communauté urbaine, d'une part. Deuxièmement, les ressources ne sont pas là. Troisièmement, vous allez dire à un contribuable dans une loi: Faites une plainte, l'évaluateur va vous recevoir et va réviser votre dossier. Ce n'est pas vrai, ça ne se fera pas: ils n'ont pas le temps. Alors, je pense qu'on a l'obligation de ne pas mettre dans une loi un recours qui ne fonctionnera pas, parce que, dans les faits, ça ne fonctionne pas.

D'autant plus qu'actuellement on donne au contribuable jusqu'avant le 1er mai qui suit le dépôt du rôle pour faire une plainte, puis là il aura 30 jours. Et, s'il ne le fait pas dans les 30 jours entre le 1er septembre puis la fin septembre, il y aura une déchéance de son droit. Alors c'est sous cet angle-là. Alors, je pense que le recours fonctionne ailleurs, mais, sur le territoire de la Communauté urbaine, il y a des problèmes structurels qui ne peuvent pas être traités par cette loi-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Me Chénard.

M. Trudel: C'est pour ça qu'il faudrait avoir du temps par la désynchronisation.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui.

Une voix: Peut-être.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci. Ma question, Mme la Présidente, s'adresse à Me Pâquet. Il a fait référence, tout à l'heure, à une liste – je ne veux pas appeler ça des taxes, là – d'éléments dont les municipalités peuvent se servir pour essayer d'équilibrer finalement le compte de taxes. J'aimerais juste lui rappeler que l'intervention de M. Zampino et de M. Forcillo a porté beaucoup, beaucoup sur le compte de taxes, sur les revenus. Même M. Zampino – je n'ai pas le libellé là, parce que c'est trop tôt pour le faire sortir – a bien dit, en réponse au ministre, que c'était une question de compte de taxes. Je pense que tout le monde l'a entendu.

Est-ce que vous avez des propositions que vous pourriez nous faire, à nous, ici, à la commission, en regard d'autres moyens? Parce que, pour nous, là, toute l'argumentation qu'on a faite depuis le début – et ça, ça remonte en juin – c'est sur le respect des droits des citoyens. Moi, je ne suis pas une avocate, alors, je ne ferai pas de longs débats, là; il y en a d'autres qui peuvent le faire. Sauf que je pense que c'est important de vraiment rappeler à cette commission-ci que, pour nous, c'est important que les contribuables, qui sont des citoyens, puissent, eux, voir leurs droits protégés.

Bon. On nous a fait une grande démonstration de la possibilité d'augmenter le compte de taxes; on peut jouer avec le taux. Puis c'est vrai; je veux dire, moi, j'ai été là pendant 12 ans, je sais comment ça fonctionne. Mais, d'après vous qui êtes dans le milieu, est-ce qu'il y d'autres moyens pour à la fois peut-être répondre au problème, aider à trouver la solution pour Montréal – parce que c'est une solution pour Montréal qu'on a devant nous, là; ce n'est pas pour le reste de l'île, là, c'est Montréal, c'est clair – et aussi tenter de nous rassurer ou de rassurer le gouvernement que, par la disposition qu'il entend prendre, les droits des citoyens ne seront pas brimés?

La Présidente (Mme Bélanger): Me Pâquet.

M. Pâquet (Jean-Marie): M. Zampino a insisté beaucoup sur le fait qu'on baisse l'évaluation, on augmente le compte de taxes et le résultat est le même. C'est vrai pour le taux de taxes général...

Mme Delisle: Oui.

M. Pâquet (Jean-Marie): ...et c'est le seul qui s'applique au résidentiel. Au non-résidentiel s'applique en plus la taxe d'affaires sur la valeur locative, qui va augmenter uniquement pour le non-résidentiel. Il y a la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, dont le taux s'applique uniquement au non-résidentiel; il y a une taxe sur les immeubles non résidentiels, au lieu de la surtaxe, qui peut être imposée; et il y a, à Montréal, en plus, une taxe d'eau et de services qui n'est imposée qu'au secteur non résidentiel.

Alors, vous avez là divers éléments fiscaux qui font en sorte qu'il y a de la marge de manoeuvre fiscale sans être obligé de camoufler ça derrière l'évaluation. Dans un deuxième temps, pour ce qui est de la taxe générale elle-même, il y a des mécanismes d'étalement, il y a des mécanismes de dégrèvement qui sont déjà prévus dans la loi pour éviter que même au niveau de la taxe générale il y ait des brusques transferts de fardeau fiscal. C'est déjà dans la loi.

C'est à peu près la réponse que je peux vous donner pour tenter de répondre à la question: Est-ce qu'il y a d'autres mécanismes de prévus? Pour le reste, la commission d'Amours, suite au sommet économique, a proposé que les municipalités devraient diversifier leurs sources de revenus et aller vers la tarification. Il y a toute la question de l'impartition qui est possible, mais là on entre dans un autre débat qui sort carrément du contexte du projet de loi n° 67.

Mme Delisle: Mme la Présidente, Me Pâquet ou quelqu'un d'autre, là, est-ce qu'il n'aurait pas été souhaitable finalement, avant d'aller de l'avant avec l'article 53, d'attendre le dépôt... Apparemment, il y a un comité qui a été nommé pour assurer le suivi des recommandations de la commission D'Amours, puis il y a quand même plusieurs recommandations là-dedans qui sont intéressantes et qui doivent être non seulement étudiées, mais qui doivent faire partie d'une réforme sur la fiscalité. On sait que ça en prend une; on a assez amendé de lois depuis près de 15 ans, à telle enseigne qu'on ne reconnaît plus la Loi sur la fiscalité municipale. Bon.

(13 h 20)

Est-ce que vous auriez souhaité ou auriez-vous trouvé préférable finalement que ce débat-là se fasse – qu'on pense au dépôt annuel ou à d'autres mesures, là – dans le cadre plus général et qu'on revienne finalement avec des mesures qui peuvent aider Montréal?

M. Pâquet (Jean-Marie): C'était notre souhait, Mme la députée. Je vais comparaître, cet après-midi, au nom d'un autre organisme qui n'est pas le Barreau et pour lequel je serais plus à l'aise pour en parler, parce que ça ne fait pas nécessairement partie de la présentation du Barreau, et je suis ici ce matin au nom du Barreau.

Mme Delisle: O.K.

M. Pâquet (Jean-Marie): Mais, essentiellement, oui, moi, je ne vois pas l'urgence de ce projet de loi là, sauf le gel de rôles pour régler le problème de Montréal. Pour le reste, là, je ne vois pas l'urgence. Ça pourrait faire l'objet d'un groupe de travail et ça pourrait faire l'objet d'une législation qui vous serait présentée au printemps et qui ferait suite au suivi des recommandations de la commission D'Amours. Après tout, il y a beaucoup de citoyens, dont je suis avec mon groupe, qui se sont tapé la présentation d'un mémoire pour faire part de leur réflexion et de leurs recommandations, dont neuf sur 10 ont été retenues par la commission D'Amours, soit dit en passant, et qui trouvent qu'il n'y a pas vraiment urgence à légiférer maintenant alors qu'on pourrait légiférer peut-être dans quelques mois, selon la suggestion que vous faites, suite à une réforme qui tiendrait compte des recommandations de la commission D'Amours, entre autres.

Mme Delisle: Mme la Présidente, ma question suivante s'adresse à Me Laflamme qui a un peu aiguisé ma curiosité, et la réponse du ministre aussi, à l'égard de la possibilité que le gouvernement pouvait se réserver le droit, par voie de règlement, de décider en ce qui regardait l'évaluation des unités à vocation unique. Le ministre, tout à l'heure, nous a mentionné qu'il y avait quand même une procédure à suivre, mais j'aimerais juste rappeler qu'il y a des exceptions dans cette loi-là sur les règlements. Et ce qui m'inquiète, puis je voudrais savoir si c'était à ça que vous faisiez référence, c'est qu'il y a des exceptions à l'application du règlement dont il parlait, et le ministre pourrait, en vertu de l'urgence de la situation qui s'impose ou si le projet vise à établir, modifier ou abroger des normes de nature fiscale, tout simplement décider de passer outre aux exigences de cette loi-là sur les règlements. Est-ce que c'est à ça que vous faisiez référence?

M. Laflamme (Richard): Il y a cet élément-là, mais il y a également l'élément, Mme la députée – et M. le ministre en conviendra – que la publication, dans la partie 2 de la Gazette officielle , d'un projet de règlement est quand même l'apanage de l'Exécutif. Il est vrai que le délai d'entrée en vigueur et le délai de consultation est de l'ordre de 45 jours, mais il n'y a aucun élément coercitif inhérent à ce délai-là. De sorte que ce que je comprends, c'est qu'on laissera éventuellement entre les mains de l'Exécutif, quel qu'il soit, et la définition ou l'identification de l'immeuble à vocation unique et – et c'est ce qui est dramatique – la méthode d'évaluation.

Ce qui voudrait donc dire qu'on pourrait par anticipation... Et je ne prête pas l'intention à M. le ministre actuellement; je dis juste: Voici là la potentialité, sans que l'Assemblée nationale ou quiconque puisse intervenir, pour un exécutif éventuellement de venir donner ce qu'on appelle une méthode d'évaluation qui n'a rien à voir avec la valeur marchande ou la valeur réelle telle qu'on l'applique présentement. C'est uniquement le danger que nous soulignons selon la phraséologie qui est utilisée ici.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Je veux revenir au projet de loi n° 130 versus celui-ci. On est en troisième lecture du projet de loi n° 130; il va être adopté. Moi, j'aimerais savoir clairement – tant qu'à aller jaser dessus pendant six minutes, on va dire les vraies affaires – la problématique, vraiment, là, pour qu'on soit tous conscients, que cause le projet de loi n° 130 par rapport au projet de loi n° 67, dans des cas très précis, pour la Communauté urbaine.

Vous nous dites: Un, c'est pour donner un cadre général. Ce que, nous, on veut, c'est du sur mesure, effectivement. Si je comprends bien, vous nous dites aussi que le problème de la Communauté urbaine, c'est le manque de ressources, autant pour faire des évaluations puis tout ça, parce qu'ils sont toujours finalement en train de régler des cas de contestation. C'est ça qu'on entend de partout, là. Mais pourriez-vous juste nous réexpliquer, là, vraiment, concrètement: Moi, je suis un citoyen et je conteste mon rôle d'évaluation maintenant par rapport au projet de loi n° 130, puis par rapport à la solution apportée par le projet de loi n° 67?

La Présidente (Mme Bélanger): Me Chénard.

M. Chénard (Daniel): Bon. Là-dessus, j'ai deux points à mentionner. La loi n° 130 prévoit une procédure à suivre pour demander une révision administrative – je pense c'est une requête, ça s'appelle une requête, et je pense qu'il y a un délai de 45 jours – d'une décision. Il y a un paragraphe qui suit qui dit: à moins de dispositions contraires dans d'autres lois. C'est ce paragraphe-là qui, à ce moment-là, force le contribuable – le document sera rendu, je pense, avec la loi d'application, à 840 articles – à aller voir dans la loi d'application, la Loi sur la fiscalité municipale, s'il y a des dispositions dérogatoires.

Or, il va y en avoir, puisque le recours qui est décrit dans la loi n° 130 sera gelé dans certains cas et, d'autre part, le recours à la loi n° 130 sera impossible si on n'a pas satisfait à l'obligation de demander une révision administrative en vertu du projet de loi que vous étudiez aujourd'hui. De telle manière qu'il y aura deux projets de loi pour comprendre le cheminement pour aller obtenir une révision d'évaluation au nouveau Tribunal administratif qui est proposé. Donc, ce que je veux dire, c'est que la loi d'aujourd'hui pourrait rendre impossible un recours que vous allez adopter dans la loi n° 130 sur la justice administrative.

Mme Frulla: Autrement dit, de deux choses l'une. Ou on amende la loi n° 130 en fonction de ça où on exclut, par exemple, la Communauté urbaine dans des exceptions, si je comprends bien, là. Mais là, comme je vous dis, elle va être adoptée. Ou encore, pour ne pas qu'il y ait une espèce de vide – pas un vide, mais, en fait, un empêchement juridique, dans vos termes, là – on amende ce projet de loi là pour prévoir les effets de la loi n° 130. C'est un peu ça?

M. Chénard (Daniel): Je pourrais peut-être vous faire une suggestion, si vous permettez, M. le ministre. Ça serait de faire en sorte qu'il n'y ait pas de déchéance de droit, que le fait de déposer la plainte pour demander la révision administrative puisse simplement ouvrir le dossier et que, si, à la date d'échéance, l'évaluateur de la Communauté urbaine n'a pas eu le temps de regarder le dossier, le dossier est immédiatement déféré au Bureau de révision et là il suivra son cours. Donc, on aura satisfait à l'objectif que poursuit le ministre et on n'aura pas empêché un contribuable d'avoir son droit garanti à une plainte. Parce que, dans la structure actuelle, vous devez faire deux gestes: en vertu de la loi n° 67, le projet d'aujourd'hui, déposer une demande de révision, surveiller le délai et, après ça, déposer une autre plainte pour sauvegarder votre droit. Là, je pense qu'il y aurait une mesure de concordance à mentionner pour éviter que des droits soient sacrifiés. C'est une suggestion, M. le ministre.

Mme Frulla: Ça marche, Rémy?

M. Trudel: Bien, on est là pour écouter.

Mme Frulla: On est là pour pousser. Ha, ha, ha! Autre chose aussi: au niveau des immeubles – parce que je reviendrai, cet après-midi, au niveau de la désynchronisation, etc., et des techniques – à vocation unique, la définition même de l'immeuble à vocation unique, c'est ce qui manque, si j'ai bien compris?

M. Laflamme (Richard): Selon le texte du règlement, le gouvernement la définira. Lorsque vous allez à votre projet d'article 48, paragraphe 10°, «à vocation unique qu'il définit». Alors, c'est le gouvernement éventuellement, l'Exécutif qui viendra dire qu'est-ce qui est un immeuble à vocation unique. Est-ce que ce sont seulement des églises, des écoles? Est-ce que ce sont des industries? Est-ce que ce sont des immeubles détenus par des propriétaires du parapublic ou du public...

Une voix: Ou un bungalow?

M. Laflamme (Richard): ...ou un bungalow, ou la caisse populaire parce que c'est un bâtiment particulier pour lequel il y a peu ou pas de marché dans nos municipalités rurales? Écoutez, vous avez autant de perspectives.

Mme Frulla: C'est large. Autrement dit, on a beau vouloir décider ou enfin procéder, l'idéal aurait été de définir préalablement les immeubles à vocation unique, de dire: Bon, bien, voilà les catégories, puis, ensuite de ça, on agit en fonction de ça.

(13 h 30)

M. Laflamme (Richard): Pour l'instant, un immeuble à vocation unique, c'est une question de fait, c'est un cas par cas et c'est tributaire tant d'un raisonnement de l'évaluateur municipal qu'éventuellement d'une décision du Bureau de révision de l'évaluation foncière. La qualité de ce geste, c'est que, dépendamment de la fluctuation du marché, vous pouvez avoir, dans certains cas, certains immeubles qui vont ainsi se qualifier. Si vous le stigmatisez, à partir de là ce monde qui est en perpétuelle évolution et qui, en théorie, correspond à notre assiette fiscale, vous l'avez stigmatisé. Si vous me permettez l'analogie même grossière, c'est un peu comme si on disait à un contribuable: Je prends ta meilleure année de revenus des cinq dernières années et, dorénavant, ça sera ton revenu imposable pour les cinq prochaines.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? Alors, il reste 30 secondes, M. le ministre. Êtes-vous capable de poser une question en 30 secondes?

M. Trudel: Ah! Juste le temps de dire que – vous disiez tantôt que, dans ce processus, il n'y a pas d'éléments coercitifs – pour l'Exécutif, il y en a toujours un: ça s'appelle des élections.

M. Laflamme (Richard): Oui, M. le ministre.

M. Trudel: Merci de vos suggestions.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui. Alors, nous vous remercions, Mes Chénard, Sauvé, Laflamme, Pelletier et Pâquet, pour votre participation. Alors...

Tel qu'entendu entre les deux partis, nous allons recevoir avant le lunch l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec. Je leur demanderais de bien vouloir s'approcher à la table. Alors, je demanderais à l'UMRCQ de bien vouloir s'approcher à la table. Là, le temps que vous allez vous préparer, nous allons suspendre pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 13 h 32)

(Reprise à 13 h 35)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous reprenons les travaux: consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives. Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent. Et c'est toujours la même procédure: 15 minutes pour la présentation qui sera suivie d'une période de questions de 15 minutes du côté ministériel et de 15 minutes du côté de l'opposition.


Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec (UMRCQ)

M. Fernet (Michel): Merci, Mme la Présidente. Je vous présente donc, à ma droite, Mme Isabelle Chouinard qui est conseillère juridique à l'UMRCQ; M. Denis Michaud, à ma droite, qui est conseiller politique à l'UMRCQ; moi-même étant Michel Fernet, directeur général de l'Union.

Mme la Présidente, essentiellement, notre critique sur ce projet de loi se veut positive et enlignée dans un groupe de propositions, comme en conviendra probablement M. le ministre quand il aura entendu ce que nous avons à dire, concernant davantage les allégements au projet de loi. M. le ministre et nous, nous sommes rendus maintenant des spécialistes d'allégements et non seulement on les demande après les projets de loi, mais on les demande maintenant pendant qu'on en discute. Alors, c'est bien. Notre propos va être également très bref, très fonctionnel. Alors, si vous me permettez de lire le petit texte que vous avez devant vous, je commence immédiatement.

Le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives, apporte une réforme importante en matière de traitement des dossiers d'évaluation. Il rétablit, sous une autre forme, un système que le législateur avait aboli au début des années soixante-dix malgré l'objection des municipalités. Il avait, en effet, décidé, en 1973, d'abolir les bureaux de révision des conseils de comté pour imposer le Bureau provincial qui était alors facultatif. Le but recherché était d'uniformiser la jurisprudence. Les municipalités s'étaient donc objectées à ce transfert parce qu'elles perdaient l'occasion d'expliquer au contribuable la teneur de son avis d'évaluation et les motifs des modifications.

Aujourd'hui, le projet de loi n° 67 tente de rétablir le lien entre l'organisme responsable de l'évaluation et le contribuable. L'UMRCQ souscrit à cet objectif, mais suggère dans les pages qui viennent certains assouplissements aux mesures proposées pour y parvenir. Parmi les modifications proposées, nous rappelons au ministre que ce transfert de responsabilités ne doit pas se faire aux frais de l'ensemble de contribuables municipaux.

Trois objectifs semblent être poursuivis dans la procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière. Selon la loi actuelle, les corrections au rôle d'évaluation se font par le BREF ou par l'évaluateur sous la surveillance du BREF. Les consultations menées par l'UMRCQ auprès de certains évaluateurs ont permis de constater qu'ils procèdent déjà à la révision de nombreux dossiers, mais les ententes qui interviennent doivent être homologuées par le BREF, souvent via la procédure de correction d'office. La réforme vise donc à faciliter les ententes avec le contribuable à partir des pratiques existantes. L'UMRCQ souscrit entièrement à ce premier objectif.

Pour atteindre ce résultat, nous sommes d'avis qu'il aurait suffi d'introduire un pouvoir habilitant permettant à l'évaluateur de modifier le rôle avec l'assentiment de la municipalité suite à une entente avec le contribuable. Par exemple, l'article 27 du projet de loi prévoit que les évaluateurs auront dorénavant jusqu'au 1er octobre pour procéder à une requête en correction d'office. Une modification additionnelle permettant les corrections d'office sans requête au BREF, lorsqu'il y a entente avec le contribuable, aurait été un allégement suffisant pour faciliter les ententes hors cour.

Mais la réforme vise également le déjudiciarisation du traitement des plaintes au BREF et l'élimination des plaintes inutiles qui sont portées devant le Bureau. Selon l'information obtenue du ministère des Affaires municipales, près de 40 % des plaintes devant le Bureau de révision de l'évaluation foncière ne procèdent pas au fond, principalement parce que le plaignant ne se présente pas le jour de l'audition. Cette déjudiciarisation nécessite une procédure de révision obligatoire telle que celle prévue au projet de loi. L'UMRCQ convient que la révision comportera certains avantages pour le monde municipal; notamment, elle permettra aux municipalités d'être fixées plus tôt quant au nombre de contestations des inscriptions au rôle.

Les frais de procédure. La révision administrative comporte toutefois des coûts additionnels au plan du service d'évaluation, puisque celui-ci devra examiner systématiquement durant une courte période de l'année toutes les demandes de révision. Il n'est pas souhaitable que la déjudiciarisation du BREF se fasse aux frais de l'ensemble des contribuables municipaux. Cela serait perçu comme un nouveau transfert de responsabilités sans compensation. Le projet de loi ne propose pas de dédommagement financier aux municipalités, mais un ticket modérateur qui devrait être conservé pour le compte distinct et remis au BREF en totalité si une plainte est ensuite déposée. Non seulement cette mesure ne permet pas de compenser adéquatement les municipalités, mais elle alourdira leur gestion administrative.

(13 h 40)

En vertu de ces premières impressions, l'UMRCQ recommande qu'il soit clairement permis aux organismes municipaux responsables de l'évaluation foncière d'imposer une tarification pour le traitement des demandes de révision. Le règlement pourrait être pris en vertu des articles 244.1 et suivants de la Loi sur la fiscalité municipale, et ainsi correspondre aux dépenses attribuables au niveau services. Le tarif perçu serait évidemment conservé par l'organisme, qu'il y ait entente ou non.

L'UMRCQ émettrait, par ailleurs, deux suggestions visant l'allégement de la procédure. La première. Le projet de loi indique que le dépôt de la demande de révision se fera auprès de la municipalité locale, à moins qu'une entente soit intervenue entre cette dernière et l'organisme municipal responsable de l'évaluation foncière; auquel cas, demande sera déposée à la MRC. S'il n'y a pas d'entente sur le lieu du dépôt et que la municipalité locale n'a pas compétence en matière d'évaluation, elle devra alors acheminer la demande à la MRC qui la transmettra à l'évaluateur.

L'Union suggère que la demande n'ait pas à transiter par la municipalité locale, qui n'a pas compétence en matière d'évaluation. D'abord, la MRC doit percevoir le tarif, le cas échéant, puisque c'est elle qui veille à l'administration du service d'évaluation. Elle constitue, de plus, un niveau de gouvernement suffisamment près du citoyen pour répondre à l'impératif d'accessibilité. Rien n'empêchera, par ailleurs, la municipalité locale de donner de l'information sur la procédure, d'être un point de distribution des formulaires de demande de révision et d'aider le citoyen à compléter la formule. En conséquence, l'UMRCQ recommande que le projet de loi soit modifié pour que les demandes de révision soient adressées directement à l'organisme municipal d'évaluation foncière.

Les parties à la demande. Il est prévu que l'entente sur la modification au rôle doit intervenir entre les parties au dossier et l'évaluateur. Les parties au dossier comprennent notamment la municipalité locale, la MRC et, dans quelques cas, le ministre des Affaires municipales et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, s'ils interviennent. La conclusion d'une entente entre ces parties, à chaque fois que l'évaluateur proposera d'accueillir la demande, peut s'avérer une procédure assez lourde.

Afin d'alléger ce processus, l'UMRCQ suggère que l'évaluateur convienne seul de la modification avec le contribuable concerné. Les autres parties devraient en être informées dans un court délai et la municipalité locale devrait avoir un droit de regard sur la modification. Il importe, en effet, que la municipalité conserve un pouvoir de surveillance, puisque plusieurs contrats d'évaluation prévoient que le prix soumis par l'évaluateur comprend la défense du rôle devant le Bureau de révision. Il faudrait éviter que certains soient tentés de régler à rabais pour éviter les frais.

De plus, compte tenu de l'impact fiscal, les municipalités surveillent de près les variations du rôle d'évaluation après son dépôt parce qu'il a servi à établir le taux de taxation. Ce droit de regard pourrait se traduire par l'envoi d'un avis préalable de l'évaluateur à la municipalité locale sur la proposition de modification au rôle qu'il entend soumettre au contribuable. Si la municipalité ne s'est pas prononcée dans un délai imparti, elle serait présumée accepter la proposition. C'est simple. L'évaluateur pourrait ensuite l'acheminer au contribuable.

Dans un tel contexte, il serait possible d'éliminer l'étape de l'entente. Par exemple, la proposition transmise par l'évaluateur pourrait être réputée acceptée si le contribuable ne répond pas dans les 30 jours ou s'il ne dépose pas, dans ce délai, une plainte au BREF. En conséquence, l'UMRCQ recommande que la municipalité, l'organisme municipal responsable de l'évaluation, le membre et le MAPAQ n'aient pas à signer l'entente concernant la modification du rôle. Ils doivent cependant être avisés rapidement de la modification et de ses motifs, et la municipalité locale doit conserver un droit de regard sur la modification apportée.

Maintenant, les compensations pour services municipaux applicables à certains immeubles. Autre mesure: l'article 42 du projet de loi propose de hausser la compensation pour services municipaux imposable aux immeubles appartenant à une communauté urbaine et à une MRC, à leurs mandataires et à ceux des municipalités locales de même qu'à une société de transport. Cette compensation, qui est actuellement plafonnée à 0,50 $ par 100 $ d'évaluation, pourra représenter – on devrait dire désormais – jusqu'à 100 % des taxes, tarifications ou compensations qui seraient normalement payables sans exemption, à l'exception des taxes d'affaires, de la surtaxe et de la taxe sur les immeubles non résidentiels.

Cet article permet, de plus, l'imposition d'une compensation à l'égard de la construction destinée à abriter des personnes, des animaux ou des choses faisant partie d'un système d'aqueduc ou d'égouts ou d'un système de traitement de l'eau ou d'ordures ainsi que des terrains en constituant l'assiette. Cette compensation pourra représenter le total des sommes découlant de modes de tarification qui seraient payables à l'égard de ces immeubles s'ils n'étaient pas exemptés.

L'UMRCQ demande au ministre des Affaires municipales de surseoir à l'adoption de cette disposition, et ce, pour deux raisons. D'une part, un groupe de travail créé par le ministère des Affaires municipales doit faire rapport, au tout début de l'année 1997 d'ailleurs, sur la question de la fiscalité des équipements régionaux, et il serait prématuré de modifier les compensations payables pour ces immeubles avant d'avoir pris connaissance des recommandations globales de ce comité. D'autre part, les MRC sont d'accord pour agir en bons citoyens corporatifs et payer leur part de compensation pour les services municipaux dans le but de venir en aide aux villes-centres.

Cette mesure ne doit cependant pas être adoptée isolément, et le gouvernement devrait agir équitablement en faisant sienne la recommandation n° 54 du rapport de la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics, qui se lit comme suit: «Le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec devraient verser aux municipalités de pleines compensations tenant lieu de taxes foncières à l'égard de tous leurs immeubles et, dans le but de venir en aide aux villes-centres, prioriser à ce titre les immeubles des réseaux de l'éducation postsecondaire, de la santé et des services sociaux.»

En conséquence, l'UMRCQ recommande donc au législateur de surseoir à l'article 42 du projet de loi n° 67 jusqu'au dépôt du rapport du groupe de travail sur le financement des équipements, des infrastructures et des services régionaux. De plus, une telle disposition devrait être adoptée de concert avec celle ayant pour effet d'obliger le gouvernement à se conduire en contribuable à part entière.

Je vous remercie, Mme la Présidente, et vous amène maintenant la conclusion. L'UMRCQ aurait préféré un simple pouvoir habilitant permettant la conclusion d'ententes pour faciliter le travail qui se fait déjà plutôt que l'instauration de mécanismes formels de révision administrative. Elle comprend néanmoins que cette modification ne satisferait pas tous les objectifs visés par la réforme, dont la déjudiciarisation du traitement des plaintes en évaluation foncière. Dans cette optique, l'Union suggère que la procédure soit allégée et que les organismes responsables d'évaluation puissent s'indemniser des coûts engendrés auprès des plaignants. Ce changement important dans le quotidien des MRC et municipalités nécessitera une information adéquate auprès de ceux qui auront à gérer la procédure, soit les secrétaires-trésoriers et les évaluateurs. Dans cette optique, une tournée de formation en région des spécialistes du ministère des Affaires municipales devrait être envisagée et serait assurément appréciée par les fonctionnaires municipaux. Merci de votre écoute.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Fernet. M. le ministre.

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. M. Fernet, maître et maître, bienvenue à notre présentation et aux représentations que vous nous faites aujourd'hui à l'égard de certaines dimensions du projet de loi n° 67. On comprend qu'on parle moins de désynchronisation, ici, des rôles d'évaluation, parce que, je dirais très sérieusement, c'est un acquis pour vous autres, puisque ça existe déjà comme possibilité; c'est en exercice dans la quasi-totalité des MRC, là, sans que je l'aie dénombré très exactement. Donc, c'est une procédure avec laquelle vous êtes familiers et, sauf erreur, les MRC et les municipalités s'en montrent très satisfaites.

Bon, d'abord, je suis heureux que vous souscriviez une nouvelle fois aux efforts que l'on doit sans cesse renouveler en termes d'allégement. Viser l'efficacité passe inévitablement par l'allégement et la simplification. Et c'est effectivement cela que l'on vise par cette première étape qui se fait largement déjà, mais qu'on voudrait formaliser davantage pour faire en sorte qu'il y ait comme un prétamis, si vous voulez, sans perte de droits quant à la façon de procéder.

Vous suggérez donc, au tout départ, qu'il y ait une modification qui soit apportée pour que les corrections d'office soient faites sans requête au BREF lorsqu'il y a entente entre le contribuable et l'organisme qui fait l'évaluation. Donc, vous voulez dire: Si on s'entend à cette première étape là, rendons ça encore plus léger, si vous me permettez l'expression, et on n'a pas besoin de formaliser davantage la procédure. Je pense qu'on pourra se rendre – je vais vous le dire tout de suite – assez facilement à ça parce que c'est l'objectif poursuivi, et le moyen que vous suggérez va en plein dans la direction où l'on est.

(13 h 50)

Là où j'aurais une question supplémentaire, au tout départ, c'est à l'égard, je dirais, du lieu de dépôt de la plainte. Vous suggérez qu'on aille directement à la MRC. Bon. Comme vous êtes l'organisme qui représente plus spécifiquement les municipalités en milieu rural, on est dans la zone d'appartenance, ça va, là, mais vous ne craignez pas qu'en disant d'aller déposer toujours de façon obligatoire la plainte à la municipalité régionale de comté on soit en train d'imposer au citoyen – ça peut paraître minime – pour contester sa valeur soit un déplacement ou un éloignement du centre? Pourquoi ne pas le permettre au niveau local, au niveau de la municipalité locale, tel que vous le suggérez? J'aimerais ça que vous étayiez ça davantage un peu.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Fernet.

M. Fernet (Michel): Oui. C'est une question évidemment extrêmement pertinente. On parle souvent des MRC puis on comprend aisément qu'on est dans une province immensément grande par rapport à tous les petits pays européens dont on parle. C'est sept fois la France. Alors, déjà, une MRC, dans bien des cas, effectivement ça peut paraître très, très grand en termes de déplacements. Dans la majorité des cas, c'est une relation relativement conviviale parce que les citoyens à l'intérieur d'une MRC se déplacent déjà pour l'ensemble de leurs services collectifs, notamment pour la santé, pour l'éducation et pour le travail. Donc, selon les recherches qui avaient été faites à l'époque, ils font 80 % de leur vie active à l'intérieur de la grandeur de l'échelle territoriale MRC.

Ça nécessiterait donc, une modification dans ce sens-là – je pense qu'on en a parlé d'ailleurs dans notre rapport – une entente entre l'organisme qui s'occupe d'évaluation et la municipalité locale comme point de chute, mais ça serait un petit peu plus compliqué. Vous avez dans une MRC – parlons de Bellechasse – si ma mémoire est bonne, approximativement 24 municipalités. Est-ce qu'on serait en train, avant de vous recommander ça, de faire une évaluation des coûts administratifs de la gestion de 24 points de services par rapport à un? Je répugne un peu à ce genre d'arguments là parce que c'est sûr que notre coeur va toujours aux meilleurs services aux citoyens. Par contre, l'équilibre se fait entre le coeur et l'esprit. L'esprit va avec le chèque et les coûts. Avec une gestion administrative, ça serait, à mon avis, à débattre. Mais il n'y a pas là un contentieux, je dirais, vraiment énorme.

Maintenant, j'aimerais, si madame veut ajouter un petit mot sur cette question...

La Présidente (Mme Bélanger): Me Chouinard.

Mme Chouinard (Isabelle): Merci. Simplement, Mme la Présidente, M. le ministre, les évaluateurs que nous avons consultés et les municipalités régionales que nous avons consultées nous ont signifié qu'ils préféraient que ce soit directement acheminé au niveau de la municipalité régionale de comté et il me semble qu'il y a deux arguments supplémentaires que j'ajouterais. D'une part, comme c'est elle qui est responsable du service d'évaluation et qui le gère, il faudrait, à tout le moins, que l'enveloppe avec le chèque lui soit remise à elle pour qu'elle puisse percevoir les frais qui sont reliés à ça. D'autre part, le citoyen va forcément avoir à se déplacer s'il veut rencontrer l'évaluateur, qui parfois même n'est pas du tout dans le territoire de la MRC. L'évaluateur peut avoir à se déplacer, mais on peut penser que, dans plusieurs cas, le citoyen devra se déplacer pour le rencontrer s'il veut discuter avec lui. Sinon, on peut imaginer que la municipalité locale puisse servir de boîte aux lettres, entre guillemets, pour acheminer les documents à la municipalité régionale de comté sans avoir elle-même à ouvrir et à traiter les dossiers.

M. Trudel: Très bien. On pourrait atteindre l'objectif probablement si nous inversions le processus actuellement prévu à la loi, c'est-à-dire à la MRC sous réserve d'une entente possible, pour gérer donc l'accessibilité au plan local, parce qu'il y a la géographie, effectivement. Si, en moyenne, 80 %, on va dire, de la vie quotidienne se passe dans le territoire de la MRC, le citoyen, il n'est jamais dans une vie moyenne, lui, là, hein; il est toujours dans une séquence de travail. Le citoyen qui est à 75 km, à 100 km, lui, il se fout un peu... Ce n'est pas une statistique, le citoyen; c'est quelqu'un qui a un besoin. On pourrait inverser et on va, je dirais, comme d'habitude, faire confiance à nos élus locaux au plan du territoire d'appartenance afin de conclure ces ententes pour en arriver à mieux servir les citoyens.

Vous réclamez aussi une espèce de pouvoir de tarification pour l'organisme municipal responsable de l'évaluation foncière. Je veux bien comprendre, là. Ce serait sur décision des élus, cette tarification-là. Est-ce que ce serait la décision des élus? Parce que je ne voudrais pas qu'on se méprenne et qu'on laisse à une entreprise qui aurait été mandatée pour faire le travail le soin de déterminer la tarification. Il en est, dans ce domaine-là du contrôle public, comme dans d'autres. C'est un objectif extrêmement fondamental: on doit garder le contrôle, quant à moi, des élus. Est-ce que ça va dans ce sens-là, votre suggestion?

M. Fernet (Michel): Bien, tout à fait. D'ailleurs, dans tout ce système-là, il y en a un seul qui paie, il y en a un seul qui taxe pour les citoyens, c'est l'élu. Alors, c'est un processus qui, comme vous en convenez, va causer de légères augmentations de coûts, et, pour payer son propre bureau d'évaluation, payer les démarches ou payer des gens à contrat pour faire l'évaluation foncière, c'est quand même l'élu qui paie. Donc, ça serait l'élu qui, comme organisme public, emmagasinerait le tarif demandé et l'utiliserait à des fins de gestion de ces modifications que l'on propose. Incontestablement, on parle des élus.

M. Trudel: Très bien. L'autre modification que vous nous apportez, vous demandez que, pour le ministère des Affaires municipales et le MAPAQ, on n'ait pas à signer l'entente concernant la modification. Je pense qu'il s'agit là effectivement d'un effort d'allégement supplémentaire auquel on va souscrire, parce que, encore une fois, il faut tenter d'en enlever le plus possible et le plus rapidement possible pour y arriver.

Une toute dernière question, quant à moi, qui va appeler un commentaire, bon, c'est sur l'article 42 à l'égard de l'imposition des immeubles administratifs régionaux qui pourront être imposés dans les villes-centres en compensation, en termes d'«en lieu» de taxes égaux à 100 % du taux qui serait imposable. D'abord, un, je vais me réjouir de votre phrase: vous vous montrez d'accord avec la compensation pour les services municipaux dans le but de venir en aide aux villes-centres, bon. Il y a toujours un début à la bonne volonté et il faut le souligner, il faut le rappeler.

Est-ce que vous ne pensez pas cependant que nous pourrions, compte tenu de la situation – et vous la connaissez très bien – franchir une étape supplémentaire, qui n'est pas la totalité de l'étape? Je le rappelle, c'est sur les immeubles administratifs que nous permettrions l'augmentation à 100 % des «en lieu» de taxes et non pas sur les équipements régionaux, parce que nous attendrions le résultat du groupe de travail là-dessus. Est-ce qu'on ne pourrait pas franchir une étape supplémentaire quant aux immeubles administratifs, montrant là un signe... Et je n'ose pas évidemment vous mettre les mots dans la bouche, mais ceci servirait à appesantir votre argument pour nous presser à avoir un comportement aussi responsable.

M. Fernet (Michel): M. le ministre, je reconnais là votre versatilité dans ces bons mots, mais, comme vous avez reçu nos propos sur ce commentaire, c'est l'idée que, en principe, nous ne sommes pas contre. Il y a des choses qu'on n'a pas dites, non plus, dans ce texte-là, parce que les impératifs temporels des commissions parlementaires nous empêchent de faire de longues études. Mais je ne pense pas que, dans le monde de la planification, marcher à la pièce, introduire des éléments très, très, très sensibles comme la fiscalité...

(14 heures)

Et là vous savez que ce petit changement-là, il ouvre non seulement une porte de Pandore, comme un individu l'a dit avant moi dans un autre moment, mais il introduit un changement de mentalités et il est précurseur peut-être de choses beaucoup plus lourdes que l'on pense quand on discute la notion d'équipements régionaux et tout, et tout. Et je ne suis pas convaincu du tout que fonctionner comme le ministre des Affaires municipales l'a dit, en d'autres temps, en d'autres lieux, en d'autres décennies, par petits morceaux ne nous a pas causé un certain nombre de problèmes relativement importants. On peut penser à toutes sortes de lois, la 125, la fiscalité, et tout ça. On a eu comme processus trop souvent – entre nous, là – de marcher ça à la graine. Comme si un cultivateur, tu sais, disait: Le lundi, je plante une vingtaine de graines dans ce champ-là, puis, le mardi, une vingtaine de graines dans l'autre champ. Quand il prend un champ, il fait le champ puis, bon, la job est bien faite.

Qu'est-ce qui va maintenant ressortir... Comment on va ressortir du fameux comité dont nous sommes partis? Peut-être avec rien. On s'est rendu compte, à l'étude de la problématique des équipements régionaux, que c'était un morceau qui choquait même souvent les partenaires au fil de la conversation et au fil de la mise en valeur de la problématique. Et on est loin d'être convaincus qu'on va avoir quelque chose à vous proposer sur quoi ce soit là-dedans, de sorte que, dans ce comité-là, en plus de peut-être aboutir à des choses relativement timides, on aurait peut-être quelque chose à vous recommander, au mois de mars, qui serait cet amendement-là ou on pourrait peut-être saisir cette opportunité-là en troc à d'autres choses dans le cas des équipements.

Ça me met à la gêne parce que c'est un processus de planification qui est, avouons-le, douteux: un petit quelque chose cet automne, peut-être un autre petit quelque chose au printemps puis un autre petit quelque chose à l'automne prochain. C'est ça qui fait les lois sur la fiscalité. Souvent, on s'est laissé aller à ce genre de planification là. Alors, on se répète, on était d'accord avec le principe; la preuve, c'est qu'on est d'accord pour en étudier beaucoup plus large. Et qu'est-ce qui pressait tant que ça, au fond, pour ce petit amendement là, soit dit en passant, qui ne représente pas des fortunes dans le monde municipal au Québec? Je ne suis pas convaincu qu'on va boucler le budget d'aucune ville-centre au Québec avec les édifices administratifs.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Fernet.

M. Fernet (Michel): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Merci, Mme la Présidente. Dans un premier temps, M. Fernet, Mme Chouinard, M. Michaud, je pense que votre mémoire le dit si bien: Ça ne doit pas se faire aux frais de l'ensemble des contribuables municipaux. J'aurais eu le goût de dire: Ça ne doit pas se faire aux frais des contribuables. Et j'aimerais vous entendre dire comment il se fait – je me place à la place du contribuable – qu'on ne pourrait pas souhaiter que ce projet de loi là tente d'améliorer la procédure, de soulager et de permettre au contribuable d'aller, dans un premier temps, auprès de sa municipalité – ça, on y reviendra – et, ensuite, de transférer à la MRC ou auprès des instances responsables de l'évaluation.

C'est un service qu'ils ont déjà; peut-être pas aussi complet, là, qu'on pourrait le souhaiter, mais ils l'ont déjà sans frais. Et là l'UMRCQ, votre organisme, propose qu'il y ait des frais imposés. Donc, j'essaie de comprendre. Est-ce que ça a été demandé par les MRC? Les municipalités, est-ce qu'elles ont pris connaissance du projet de loi ou si, par cette mesure, vous allez au devant de ce que pourraient souhaiter les MRC? Je sais que c'est peut-être votre responsabilité d'être vigilants au nom des membres que vous représentez, mais, ici, je me place dans la situation d'un contribuable.

M. Fernet (Michel): Vous m'arrachez un petit peu les mots de la bouche, parce qu'on a fait des petits sondages. On a appelé des gens, par exemple, de votre région, de Montmagny, de L'Islet. Il y a des gens qui performent beaucoup en évaluation foncière dans ces MRC là et quelques autres. Donc, notre sondage est vraiment très bref avec le temps qui nous était imparti. Par ailleurs, vous avez mentionné vous-même – dans le texte, c'est marqué «les contribuables municipaux» – vous avez fait l'observation, à juste titre, que les contribuables en général, dans le fond, ne devraient pas être...

C'est parce que, dans un système comme celui-là et comme dans beaucoup d'autres systèmes, rien ne se perd, rien ne se crée. La gestion, qu'elle soit locale, régionale ou nationale, comporte un certain nombre de coûts. Nous, on vise à ne pas alourdir, au global, les taxes, ou les tarifs, ou les sous à sortir de la poche des contribuables en général. S'ils en sortaient un petit peu plus en bas – alors, on parle de choses, éventuellement, probablement minimes – le contribuable municipal plaignant, lui, il est touché. Les non-plaignants... Tu sais, quand on fait un procès à quelqu'un, ce n'est pas l'ensemble de la société qui paie, habituellement. Quand on fait un procès à une compagnie parce qu'on a été lésé comme individu, habituellement, tu sais, on y met un peu d'argent de sa poche. Les tribunaux en assument.

Une voix: Les villes paient.

M. Fernet (Michel): Donc, là, il y a le contribuable municipal puis il y a le contribuable en haut. Dans ce système-là, le contribuable municipal va mettre quelques sous, mais le contribuable à l'échelle du Québec est censé avoir une facture de moins par la pression sur le Bureau de révision de l'évaluation foncière qui, lui, est payé par la province. Alors, vous voyez, les vases communicants un petit peu. Et on pense, nous, qu'au total ça ne devrait pas coûter un sou de plus à l'intérieur du système. Il y aurait, normalement, un petit déplacement et un allégement relativement important, là.

On parle de pourcentages très forts de plaintes qui ne passeraient plus au BREF. On parle d'un circuit où il faut qu'il approuve, actuellement, des corrections d'office qui ne passeraient plus par là, non plus. Alors, là, on s'en va vers un système très, très responsabilisé vers le niveau local, très, très, très rapide aussi, avec de petits frais. Mais imaginons que les coûts très élevés de l'engorgement du BREF depuis des années, ça fait jaser pas mal de monde au Québec.

M. Gauvin: D'abord, M. Fernet, je vais revenir à ce point-là, mais on va les prendre par étapes.

Une voix: C'est ça.

M. Gauvin: Moi, je pense qu'il serait souhaitable que le contribuable puisse, d'abord, s'adresser à sa municipalité, que ce soit un comptoir de services. Parce que vous allez comprendre, et vous l'avez décrit tantôt, au niveau de certaines régions, le bureau d'évaluation foncière de la MRC se déplace. M. Fernet, quand on se déplace pour aller prendre connaissance de l'évaluation ou de la modification apportée sur une résidence, puis qu'on se déplace pour aller faire le rôle, on peut se déplacer pour aller recevoir les plaintes, avec un agenda spécifique. Ça, ça s'appelle un service aux contribuables, d'une part.

D'autre part, M. Fernet, Mme Chouinard et M. Michaud, au nom de votre organisme, on devrait comprendre qu'il ne faut pas que le nouveau service que le bureau d'évaluation de la MRC va donner devienne un service qui va s'autofinancer, dans le sens – ça pourrait peut-être être souhaitable – d'en faire un service actif qui vise justement à plus d'activités, pour la simple raison qu'on s'intéresse moins aux plaintes verbales. Dans les échanges qui se font au sein de la municipalité locale, on dit: Ah! Il y a toujours une instance; ça va être le milieu. En un mot, ce que je veux dire, là, c'est que j'ai peur que ça devienne un service commercial sur lequel la municipalité puisse compter pour améliorer ses activités économiques. C'est très clair. Ça pourrait être ça, d'une part.

Mon autre question: Est-ce que l'argent qu'ils déposeraient en première instance pour les frais, exemple, s'il y en avait, pourrait, à défaut de s'entendre, être transféré au BREF?

M. Fernet (Michel): Il devait, mais, nous, on dit non.

M. Gauvin: Les frais du BREF s'ajouteraient s'ils ne s'entendent pas. Mais vous voyez qu'on entre dans un processus peut-être plus laborieux et légèrement plus coûteux.

M. Fernet (Michel): Avant de passer la parole à Mme Chouinard, je voudrais vous dire quelque chose. Ça fait penser aux hôpitaux. Ça ne coûte rien, les hôpitaux. Bien oui, vous ne payez pas. Ça ne coûte rien, les hôpitaux. Bien, c'est exactement ce qu'on est en train de se dire, là. Il y a une chose qui est certaine, absolument certaine: c'est que les plaintes vont être étudiées par notre évaluateur. Ce n'est pas parce qu'on ne charge pas au citoyen qui se plaint que l'évaluateur ne nous causera pas des frais. Alors, il y a quelqu'un qui va payer. Ça, c'est officiel. Alors, c'est l'ensemble des citoyens qui vont le payer dans la taxe foncière qui, elle-même, va être donnée comme quote-part à la MRC. On s'entend bien là-dessus?

Si on mandate l'évaluateur pour 10 heures de plus que le système actuel pour étudier un certain nombre de plaintes, bien, c'est 10 heures à tant de dollars de l'heure. Alors, là-dessus, que vous passiez la facture à qui vous voulez, nous, il va falloir la passer à quelqu'un. Est-ce qu'on peut mettre ça, au moins, clair sur la table?

(14 h 10)

M. Gauvin: Ça se fait déjà, mais de façon plus informelle.

Une voix: Mais pas la tarification.

M. Gauvin: Il n'y a pas de tarification, mais, je veux dire, l'évaluateur est déjà au service du contribuable qui se plaint, de façon informelle, et il accepte, des fois, sur le coin de la table, parce que le propriétaire est de bonne foi, qu'il amène de l'argumentation qui est raisonnable; l'évaluateur, sans se référer au conseil de la MRC, de par sa profession, est en mesure de réviser. Donc, ça se fait déjà, peut-être à une échelle moins importante que si on publicise ce processus. Donc, c'est ça qui m'inquiète.

M. Fernet (Michel): Avant d'ajouter quelque chose, je voudrais passer la parole à Mme Chouinard, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Bélanger): Me Chouinard.

Mme Chouinard (Isabelle): Alors, je vous remercie. Je voudrais simplement vous faire part des réflexions qui m'ont été transmises par les évaluateurs des MRC. Évidemment, on n'a pas étudié ça tout seuls, ce projet de loi là. Je ne pense pas que ça va affecter la nature ou la qualité du service qui est offert actuellement. Je pense que l'information va se donner, sans frais, de la même façon. En tout cas, peut-être qu'il y aurait lieu de mettre des balises à ce niveau-là pour que la tarification ne porte que sur la demande de révision comme telle. Mais je pense que l'information va se poursuivre de la même façon de la part des municipalités. Même si on le met pas dans la loi comme tel, je pense qu'il y a un souci de service des contribuables, que ce soit par la municipalité locale ou la MRC.

Par ailleurs, la demande d'un pouvoir de règlement qu'on a évidemment est balisée, dans la Loi sur la fiscalité municipale, au niveau des profits qui peuvent être faits, là. Ça ne peut pas excéder le coût du service ou le bénéfice qui est reçu du contribuable. Donc, ce ne sera pas un tarif qui peut être très élevé pour la demande de révision. Ça vise simplement à compenser pour effectivement la dépense qui va être occasionnée supplémentaire. Dans certaines MRC, peut-être que ce ne sera pas beaucoup, il y aura négociation avec les évaluateurs. Dans d'autres, ça peut être supérieur.

M. Gauvin: Et ça, je m'adresse et à vous et à M. le ministre; je pense qu'il faut vraiment y penser deux fois. Dépendamment du tarif qu'imposera le conseil des maires – ça deviendra un tarif pour un service; ils n'ont pas le droit de taxer, d'imposer encore la taxation – ça pourrait peut-être empêcher certains contribuables d'aller formuler une plainte qui pourrait être tout à fait justifiée et raisonnable. Dans le moment, ils le font et ils sont tout à fait à l'aise de le faire parce qu'ils ont la complicité et la complaisance des municipalités locales, leur collaboration d'abord, et de l'évaluateur, parce que l'évaluateur, en fait, pour ce que je connais de certaines régions, veut vraiment démontrer qu'il est au service de la population. Il n'a pas l'intention de voir son rôle, dans un pourcentage très élevé, contesté, d'une part.

Donc, moi, là – et je m'adresse à nouveau à M. le ministre – je pense qu'il est important qu'on puisse permettre au propriétaire de pouvoir se référer à sa municipalité pour émettre une plainte et on le réfère à l'évaluateur ou au bureau de l'évaluateur qui peut se déplacer en région. Ce n'est pas tenu d'être fait au bureau de la MRC et que ce soit un service vraiment contrôlé par la MRC; c'est ce que j'en pense.

J'aurais une autre question, peut-être, avant que ma collègue ajoute. Ici, je voudrais vraiment que vous m'expliquiez à nouveau de quelle façon vous voyez ça à la page 6, là: «Alléger le processus. L'UMRCQ suggère que l'évaluateur convienne seul de la modification avec le contribuable». Ça va, c'est un professionnel puis il est allé constater, il a des données techniques pour démontrer qu'en fait il en est arrivé à cette valeur-là, et c'est à la preuve de faire... Ça, ça peut aller. Un peu plus loin, deux lignes plus loin là, on dit: «La municipalité locale devrait avoir un droit de regard sur la modification que l'évaluateur va apporter.» Qu'est-ce qui vous amène à présenter ça de cette façon-là? «La municipalité locale doit avoir un droit de regard», ce n'est pas ce qui m'inquiète, mais est-ce que ça n'ouvre pas la porte à ce que le niveau politique se mette le nez trop fréquemment dans les processus de modification?

M. Fernet (Michel): Essentiellement – il y en a plusieurs autres – deux raisons principales. La première, c'est que la municipalité est le payeur de tout ce système-là. On a un superbe système national, tout va bien, tout le monde détermine comment on doit faire, quels gestes on doit poser, il y a des livres ça d'épais en évaluation, mais n'empêche que le payeur, c'est la municipalité locale.

Imaginez que, dans votre région, le deuxième, le troisième ou le quatrième plus gros édifice de toute la MRC, qui est une grosse coopérative agricole – ou n'importe quoi qui est important dans le rôle d'évaluation foncière – fasse une démarche auprès de l'évaluateur et puis, dans un petit coin, la maison, la bâtisse, le commerce, à la place de valoir 12 000 000 $ d'évaluation foncière, ils s'entendent entre eux pour dire: Dans le fond, c'est bien vrai, ça devrait valoir juste 8 000 000 $. Un instant! Est-ce que la municipalité pourrait jeter une petit coup d'oeil? Ce qu'on demande, ce n'est pas de se mettre à discuter, à tester le travail de l'évaluateur, à voir ses motivations dans tout ça. C'est d'être au courant puis même pas sur les lieux quand ils se sont parlé, là. On demande juste un petit avis pour se mettre au courant.

Parce que, là – et là est ma deuxième raison – si la municipalité dit: De 12 000 000 $ à 8 000 000 $, ça n'a pas de bon sens, qu'est-ce qu'il va arriver? Il va arriver que l'évaluateur puis la compagnie se sont entendus pour une baisse importante. La municipalité n'est pas d'accord pantoute. Elle s'en va au Bureau de révision de l'évaluation foncière. C'est évident, quand elle va apprendre ça un jour ou l'autre, qu'elle va se plaindre. Elle va être obligée d'engager un autre évaluateur, compétitif avec son propre évaluateur, puis de s'en aller au Bureau de révision pour laver le linge sale de tout le monde en même temps.

Alors que, si elle dit à l'évaluateur: Écoute bien, là, laisse l'individu se plaindre parce que, moi, je vais aller contre toi, je ne m'entends pas, là, ça n'a pas de bon sens que tu passes de 12 000 000 $ à 8 000 000 $, on fait un système encore plus convivial, moins coûteux avec tout le monde et on n'empêche pas du tout, du tout, du tout le droit de l'individu de se plaindre. Ça ne touche pas du tout pour l'individu le droit de se plaindre. Mais, si la municipalité...

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous plaît. Si vous voulez, Mme la députée de Jean-Talon aurait une question à poser, puis il reste une minute. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Peut-être un commentaire, puisqu'il ne me reste pas de temps pour une question puis une réponse. C'est étonnant, puis remarquez que ça me laisse un petit peu perplexe aussi, parce que l'UMQ et les municipalités des communautés urbaines ont signifié finalement qu'elles avaient un peu de problèmes avec justement cette notion de tarification. Elles souhaitaient qu'il n'y ait aucune tarification à partir des communautés urbaines et que la seule tarification qui soit adoptée soit celle qui existe déjà et qui émane de la représentation devant le Bureau de révision.

Vous autres, vous dites: Bien, c'est vrai qu'on donne le service, mais il faudrait que, si les gens se plaignent et viennent, ils paient pour ce service-là. Donc, ils paieraient en plus... Parce que, s'ils vont devant vous, si j'ai bien compris, gagne ou perd, l'argent reste chez vous et, ensuite, s'ils perdent, ils doivent payer aussi devant le Bureau révision. Est-ce que ça ne commence pas à être un peu coûteux?

Une voix: Un petit montant.

Mme Delisle: Bien, un petit montant... Qui va contrôler le montant d'argent? Le ministre vous l'a demandé tantôt. La mécanique n'était pas établie trop, trop.

La Présidente (Mme Bélanger): Dix secondes.

M. Fernet (Michel): Dix secondes? On a marqué dans ce livre-là que 40 % des plaintes au BREF qui sont en 27 copies, managées par tout le monde, brassées par tout le monde, les gens n'y vont même pas. Mais par ailleurs, en bas, il ne faut pas ouvrir un système où on va recevoir des plaintes à l'infini et charger, nous, en termes de coûts, pour ce qui n'ira plus au BREF. Alors, on veut diminuer des coûts au BREF pour le citoyen. C'est le même citoyen qui... Si vous diminuez des coûts au niveau de la province, c'est l'impôt des particuliers qui y gagne et, en bas, c'est les plaignants.

Mais, s'il n'y a pas un petit ticket modérateur, savez-vous une chose? C'est que passer devant sa municipalité le matin, là, puis déposer une plainte, puis que le système se mette à produire des tonnes de plaintes, on a vécu ça, il y a des années. On «va-tu» mettre un autre système de ce genre-là sur pied demain matin? C'est ça qu'on se pose comme question.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Fernet. Merci. La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 14 h 19)

(Reprise à 15 h 11)

La Présidente (Mme Bélanger): La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de faire des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives.

J'aimerais vous faire part du nouvel horaire; il y a encore un changement de dernière minute. Pour 15 heures, nous avons l'Union des municipalités du Québec; à 15 h 45, Association des évaluateurs municipaux du Québec et Ordre des évaluateurs agréés du Québec; à 16 h 30, nous avons le Comité des entreprises et l'Institut de développement urbain du Québec; à 17 h 15, nous devions avoir le Conseil scolaire de l'île de Montréal, mais Mme Ranger vient d'appeler pour dire qu'elle ne pourrait pas être ici avant 18 h 30. Alors, nous lui avons demandé de rester à Montréal.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): À 18 h 30, c'est trop tard.

M. Trudel: Mme la Présidente, à cet égard, en toute équité pour le Conseil scolaire de l'île de Montréal, nous pourrions cependant, à titre de commission, déposer officiellement le document, le rapport qui nous a été présenté...

La Présidente (Mme Bélanger): ...par la commission.

M. Trudel: ...par le Conseil scolaire de l'île, soit à titre de parti gouvernemental ou à titre de parti de l'opposition, pour que les gens du Conseil scolaire de l'île soient bien conscients que nous allons prendre en compte, en considération le rapport qui nous a été déposé. Et, si on a des délais qui sont extrêmement courts, ce n'est pas la volonté de les entendre qui souffre du manque qu'ils vont avoir.


Mémoire déposé

La Présidente (Mme Bélanger): Très bien, M. le ministre. Alors, je demanderais à M. le président de l'UMRCQ de présenter les personnes qui l'accompagnent.

Une voix: De l'UMQ.

La Présidente (Mme Bélanger): Pas de l'UMRCQ, je m'excuse, je m'excuse, de l'UMQ.


Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Vaillancourt (Gilles): Je vous dirais que la présidente de l'UMRCQ serait bien fâchée de se faire appeler M. le président.

Mme la Présidente, M. le ministre des Affaires municipales, Mmes et MM. les membres de la commission, d'abord, je suis accompagné, à ma droite, par M. le directeur général de l'Union des municipalités, M. Raymond L'Italien, et, à ma gauche, par la conseillère en fiscalité, Mme Manon Charron. Je me présente aujourd'hui devant vous au nom des membres de l'Union des municipalités du Québec, le principal regroupement municipal au Québec. Ses 300 membres représentent près de 80 % de la population totale du Québec et gèrent 88 % des budgets municipaux. L'UMQ remercie les membres de cette commission pour l'occasion qui lui est offerte de contribuer au débat sur le projet de loi n° 67.

Nous désirons attirer l'attention des membres de la commission sur trois aspects particuliers de ce projet de loi: la procédure de révision et les articles 42 et 48. En ce qui a trait à la procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière, l'UMQ est favorable à l'introduction de cette mesure dont l'objectif est de déjudiciariser le processus de traitement des plaintes. Les amendements par papillons, qui ont été apportés à la suite d'échanges avec le personnel du ministère nous apparaissent satisfaisants.

En second lieu, c'est l'article 42 du projet de loi n° 67 qui a retenu notre attention. Cet article propose de hausser la compensation pour les services municipaux pouvant être imposée aux immeubles appartenant à une communauté urbaine, à une MRC, à un mandataire d'une communauté urbaine, d'une MRC ou d'une municipalité locale, ou à une société de transport dont le budget est soumis à un collège d'élus municipaux. Cet article prévoit également que certaines catégories de constructions ainsi que les terrains en constituant l'assiette pourront être assujettis au paiement d'une compensation pour services municipaux.

En septembre dernier, lors du dépôt de son mémoire à la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics, l'Union avait donné son accord à cette proposition de modification. Toutefois, cet accord était conditionnel à une révision complète des régimes fiscaux, dans l'espoir de mettre fin au régime d'exception que le gouvernement a décrété à l'égard des immeubles de ses réseaux de l'éducation, de la santé et des services sociaux. L'Union estime qu'une révision d'ensemble de ces particularismes est nécessaire et que ça s'impose. Le gouvernement doit d'abord agir en bon citoyen corporatif s'il veut que les élus soient disposés à revoir la compensation pour les services municipaux.

Nous aimerions bien entendre, au cours des débats entourant l'adoption de ce projet de loi, le ministre des Affaires municipales s'engager, dans un échéancier qui soit précis, à hausser à 100 % les «en lieu» de taxes du gouvernement et de ses réseaux, permettant ainsi de corriger une inéquité envers l'ensemble des contribuables fonciers. Nous serions également heureux de l'entendre s'engager à légiférer pour abolir les divers autres régimes d'exception à la fiscalité municipale, alors qu'une entente à ce sujet est intervenue à la Table Québec-municipalités, en même temps que sur la question des compensations pour les immeubles municipaux.

Ce qu'il faut comprendre à ce sujet, c'est que la méthode choisie par le ministre nous apparaît bien peu appropriée, puisqu'elle scinde un ensemble de propositions, dont l'effet aurait été d'élargir la base de la taxation de l'ensemble des municipalités, pour ne retenir que la portion qui fait assumer de nouvelles charges financières à la majorité d'entre elles au bénéfice d'une minorité. Notre opposition ne se situe donc aucunement sur le principe de la mesure, mais bien sur la façon d'y arriver et sur l'échéancier.

Je vous rappelle que les municipalités se débattent depuis deux semaines avec une nouvelle coupure, absolument injustifiée à nos yeux, décrétée par voie de déclaration ministérielle par le ministre des Finances, votre collègue, et c'est l'abolition du remboursement partiel de la taxe de vente aux municipalités. Le ministre serait sage de revenir au consensus de la TQM, puisque, pour une première fois en matière de fiscalité, il existait un réel consensus qui était prêt à être mis en oeuvre.

Enfin, l'article 48 a retenu notre attention. Le pouvoir réglementaire permettant au gouvernement de prescrire une méthode d'évaluation s'appliquant spécifiquement aux immeubles à vocation unique n'est pas clairement défini. Ce principe serait mieux servi si la mécanique en était prescrite dans la loi. De plus, la définition de ce qu'est un immeuble à vocation unique devrait se retrouver dans la Loi sur la fiscalité municipale.

L'évaluation de ces immeubles pose de nombreuses difficultés à nos évaluateurs et génère une industrie de la contestation dont les coûts astronomiques doivent être assumés par les citoyens. Il nous faut mettre un terme aux dépenses exorbitantes qu'occasionnent ces contestations. Afin de corriger cette situation, l'UMQ a proposé de ne plus recourir à la valeur marchande comme base d'évaluation de ces immeubles, mais plutôt de retenir la technique du coût de reproduction déprécié et d'introduire un taux de base pour le secteur non résidentiel, qui soit distinct du taux pour le secteur résidentiel. Nous, de l'Union, croyons que le moment est favorable pour agir dans ce sens.

Je vous remercie de votre attention et je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le président. M. le ministre.

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. M. le président de l'UMQ, M. L'Italien, Mme Charron, bienvenue. Merci d'avoir réagi rapidement, je dirais, comme d'habitude. À l'UMQ, on a la réaction rapide quant à toutes sortes de dimensions. On ne peut pas être vivace dans un secteur et ne pas l'être dans l'autre. Alors, il y a une consistance.

M. Vaillancourt (Gilles): On veut que le ministre comprenne qu'on est de bons partenaires.

M. Trudel: Je suis prêt, oui, à accompagner votre jugement que vous êtes un bon partenaire. Quand vous nous dites que vous voulez contribuer à l'effort que nous devons tous faire pour atteindre les équilibres financiers dans lesquels nous nous sommes engagés, tous et chacun ici autour de la table, bien, c'est vrai, il y a des gestes à poser. Et notre partenaire peut parfois nous poser des questions et nous faire des remarques sur la façon d'y arriver, mais je n'ai pas senti qu'il y avait une espèce de front du refus de participer à l'effort collectif que nous devons faire – mais un effort collectif, c'est un effort de chacun aussi – au niveau des municipalités.

(15 h 20)

Bon, d'abord, à l'égard du projet de loi n° 67 qui est devant nous, je vais noter – parce que vous avez passé rapidement, mais c'est important pour nous – votre appui à la mécanique et au processus de révision administrative que nous instaurons, que nous voulons instaurer, avec, vous avez raison, un certain nombre de correctifs que nous avons apportés. Et nous avons eu des échanges là-dessus avec le personnel de l'UMQ pour nous assurer que, sur le terrain, ça se vive correctement et qu'on ne soit pas en train de mettre sur pied une procédure qui aurait pour résultat le contraire de ce que nous poursuivons comme objectif: de simplifier et déjudiciariser sans perte de droits pour les uns et pour les autres. Alors, on note ça: donc, vous êtes favorables et en appui à ce morceau-là.

Maintenant, l'article 42. Évidemment, M. le président, vous nous passez aussi un certain nombre de messages. Vous nous dites: Avant de procéder à l'élément que vous déposez sur la table, d'autoriser pour les immeubles administratifs des «en lieu» qui équivalent à la pleine imposition, eh bien, vous devriez plutôt faire ça de façon globale et, en particulier, vous-mêmes, comme gouvernement, vous comporter comme des citoyens responsables, puisque vous nous invitez à l'être, en particulier, pour les villes-centres.

Est-ce que, M. le président, on peut aller jusqu'à convenir que ce que nous montrons comme signes en termes de résultat financier, c'est beaucoup plus de l'ordre du symbole que nous reconnaissons qu'il y a une problématique des villes-centres, qu'il y a une problématique d'un certain nombre de pôles urbains au Québec qui ont à assumer des responsabilités particulières et qu'il faut trouver des mécanismes adaptés au plan fiscal en particulier pour assumer ces responsabilités? Je vais revenir avec autre chose, je pense bien que vous vous en doutez, mais est-ce que vous pourriez convenir avec nous qu'il faut montrer des signes que nous reconnaissons cette problématique et qu'il faut, au fur et à mesure, adapter les instruments, les outils pour en arriver à avoir des effets correcteurs? En somme, reconnaissez-vous la problématique des villes-centres?

La Présidente (Mme Bélanger): M. le président.

M. Vaillancourt (Gilles): M. le ministre, non seulement nous reconnaissons la problématique des villes-centres et nous n'en avons pas reconnu que six, parce qu'il n'y en a pas que six au Québec, il y en a au moins 32. Alors, à partir du moment où le gouvernement n'en reconnaît que six, moi, je suis obligé de dire au gouvernement: Votre reconnaissance devrait, au moins, s'étendre aux autres noyaux d'agglomération, parce que des villes-centres, il n'y en a pas que six au Québec. Il y en a six qui ont réussi à faire suffisamment de tapage pour attirer l'attention de leur gouvernement, mais il y en a encore 26 autres qui ont toujours à trouver de quelle façon elles pourraient faire leur tapage pour être sûres que leur gouvernement les entendra, et, à ce niveau-là, ce n'est pas facile.

Si vous dites: Est-ce qu'on ne devrait pas reconnaître symboliquement, quelque part, que ça existe, cette réalité-là des villes-centres? je vous dirais que nous l'avons déjà reconnue dans une première entente, entre autres l'entente où nous avons tenté de préserver le mieux possible ce qui nous restait de TGE et dans laquelle nous avons accordé à six villes-centres, qui n'avaient pas été reconnues par nous, c'est une distinction, mais par le gouvernement, une certaine aide.

Vous voulez, dans le projet de loi d'aujourd'hui, franchir un pas de plus en disant: Si on reconnaissait ça, ce serait un autre élément de la reconnaissance des villes-centres. Je dirais qu'on perd notre temps, M. le ministre. Si le gouvernement veut vraiment reconnaître et aider les villes-centres, qu'il paie ses «en lieu» sur ses bâtiments. Et, quand on regarde la distribution, d'abord, il va y en avoir beaucoup plus que six qui vont en avoir, mais, étrangement, celles qui en demandent le plus, celles qui s'estiment les plus lésées sont également celles qui en recevraient le plus.

Alors, si vous voulez poser un geste tangible comme gouvernement vis-à-vis de la reconnaissance de cette centralité d'un certain nombre de villes, les «en lieu» seraient le message le plus clair, seraient la reconnaissance la plus directe et seraient le geste le plus transparent que pourrait poser le gouvernement. Parce qu'à toutes fins pratiques refuser de payer ses taxes, c'est pratiquer de l'évasion fiscale d'une façon ou d'une autre et le gouvernement le fait agréablement depuis la réforme de 1980, alors qu'il avait été le premier à dire qu'il paierait 100 % de ses taxes. Il avait été le premier à dire ça. Ce n'est pas nous qui demandons au gouvernement de faire autre chose que ce que le gouvernement avait dit qu'il ferait.

Si vous voulez faire quelque chose, c'est un peu ce qu'on tente de vous dire dans le projet de loi. Nous, on reconnaît qu'on doit payer nos taxes et que, s'il y a un équipement dans une autre communauté, ce n'est pas parce qu'il est dans l'autre communauté que l'autre communauté doit absorber à elle seule le fardeau qui, normalement, serait dû à l'ensemble. Mais on dit au gouvernement: On ne veut pas que tu nous le fasses faire avant que, toi, tu le fasses et fais-le donc dans tes «en lieu», parce que ça, c'est le vrai problème. Celui dont on parle aujourd'hui, c'est un problème, quand on le quantifierait, qui est beaucoup moins important.

On reconnaît le principe, mais on dit, dans le fond, ce que les maires nous disent, ce que les maires nous demandent de vous dire: On ne sera pas plus transparents que le gouvernement et on ne sera pas plus fermés à l'évasion fiscale que le gouvernement l'est. Et, quand le gouvernement donnera l'exemple, nous accepterons l'exemple et nous y souscrirons. C'est ça que je vous dis.

M. Trudel: Très bien. Tout en notant – et je ne veux pas que ça soit un objet de division ou de discorde – qu'en disant: Ce que nos maires nous demandent de vous dire, c'est vos maires moins six municipalités.

M. Vaillancourt (Gilles): Ça, je comprends...

M. Trudel: Et, là-dessus, en tout respect...

M. Vaillancourt (Gilles): ...et je n'ai pas de difficulté. Les six qui ont réussi, en faisant leur bruit à leur façon, à être capables d'attirer l'attention du gouvernement et d'obtenir des compensations, non seulement ils s'estiment bien servis; ils voudraient être encore mieux servis et ne voudraient surtout pas que le gouvernement reconnaisse les autres, parce qu'ils reconnaissent qu'il y a un climat de rareté et, s'il fallait que le gouvernement décide de reconnaître la centralité des autres, probablement que ça finirait par...

Mais, dans le plein paiement des «en lieu» – et je vous incite, M. le ministre, à sortir vos tableaux de simulation – vous allez régler bien plus de problèmes, et c'est un principe inattaquable: un bâtiment soit-il occupé par le gouvernement ou soit-il occupé par IBM à côté, dans la même municipalité sur la même rue, devrait rapporter à la municipalité la même compensation de taxes. Là, on n'a plus besoin de s'attacher à qui est ville-centre par rapport à l'autre, laquelle qui est plus centrée dans le centre de quoi; c'est beaucoup plus facile comme ça. En fait, c'est une suggestion que je vous fais. Si jamais il vous reste du temps, avant la période des fêtes, pour regarder les tableaux que votre ministère possède, vous allez voir que c'est assez éloquent.

M. Trudel: Oui, effectivement, sur le raisonnement, disons que le sens commun invite à avoir ce raisonnement-là, y compris le total de la dernière colonne à droite en bas sur ce que ça signifie pour les équilibres financiers de l'État comme pour tout le monde. Mais, sur le raisonnement, on ne saurait éviter de développer des efforts pour en arriver à être en toute équité un bon citoyen corporatif à l'égard d'un régime fiscal dont on vanterait les principes d'équité. Il faudrait que cela soit inclus.

M. Vaillancourt (Gilles): On est parfaitement d'accord avec vous. Tout le monde veut être absolument équitable, tout le monde veut arrêter de pratiquer l'évasion fiscale, parce que c'en est une forme, dans le fond.

M. Trudel: Tout à fait.

M. Vaillancourt (Gilles): Sauf que les maires vous disent: On va le faire le même matin que le gouvernement le fera. Et on ne voudrait pas qu'il nous oblige à faire, nous autres, quelque chose que lui ne veut pas encore faire. C'est juste ça qu'ils nous disent.

M. Trudel: Mais, comme on avait déjà commencé à le faire et que d'autres l'ont restreint à 25 % sur les édifices du réseau scolaire primaire et secondaire, et qu'on le fait déjà à 75 % et 85 % sur les réseaux supérieurs: collèges, universités et établissements de santé, disons qu'on avait déjà commencé à démontrer notre bonne volonté lorsqu'on est partis dans cette direction-là.

M. Vaillancourt (Gilles): M. le ministre, un bon gouvernement – et je suis convaincu que vous en êtes un – n'hésitera jamais à corriger une erreur d'un précédent. Et un gouvernement d'ailleurs ne peut jamais invoquer l'erreur de son précédent.

M. Trudel: Alors, comme on a...

M. Vaillancourt (Gilles): Il n'a qu'à apporter le correctif et le plus rapidement possible, surtout s'il l'a constatée.

Une voix: D'un précédent?

M. Vaillancourt (Gilles): D'un précédent gouvernement.

M. Trudel: Très bien. Mais ce que je notais surtout, c'est...

M. Vaillancourt (Gilles): Parce que, pour nous, les gouvernements, ils se ressemblent tous, ici.

M. Trudel: Ça dépend de l'intensité des moyens qu'on veut prendre pour obtenir des résultats. Je pense que c'est ça, la différence.

Très bien sur cette dimension. Je veux aborder aussi, bien sûr, l'aspect de l'article 48. Vous nous suggérez...

M. Vaillancourt (Gilles): Mais, si vous me permettez, avant le 48, M. le ministre, si vous revenez au 25 %, ça me fera plaisir de vous envoyer nos communiqués de presse qu'on avait émis, à l'époque, contre la proposition de M. Ryan, et vous allez voir qu'on était vraiment sévères. Mais fermons cette parenthèse et regardons l'avenir.

(15 h 30)

M. Trudel: Je m'en souviens très bien. Non, je ne veux pas cependant éviter de me commettre sur une question que vous soulevez dans votre présentation: Est-ce que le ministre des Affaires municipales, le gouvernement, est prêt à s'engager dans la mécanique de révision? Lorsqu'on a annoncé, le 29 novembre dernier, que nous demandions aux municipalités, en termes d'effort, ce qui a été fait en 1996, c'est-à-dire 76 000 000 $ de recouvrement de 43 % de la TVQ pour un certain nombre de municipalités, ce qu'on a également dit, c'est que, suivant les recommandations pour entreprendre l'opération que vous soulevez et qui sont largement contenues dans le rapport sur la fiscalité, nous allions entreprendre rapidement ces travaux, d'abord, au niveau de consultations prébudgétaires pour le prochain budget du gouvernement du Québec et, par ailleurs, que nous entamions aussi, très intensément, une période où le gouvernement désirait revoir la fiscalité et le financement des instances locales.

Alors, ça veut donc dire que l'opération que vous souhaitez est déjà amorcée. Je vous indique qu'elle va s'intensifier de façon remarquable, au cours des prochaines semaines, en termes de résultats recherchés. Et la date d'échéance à laquelle nous souhaitons pouvoir produire des résultats très concrets, ça serait la date du prochain budget du ministre des Finances du gouvernement, puisque, si on veut en arriver à mieux définir, à définir autrement les responsabilités et le financement des instances locales pour occuper ces responsabilités, le moment idéal pour le faire, le moment réel, en termes concrets et en termes d'action, ce sera à l'occasion du prochain budget.

Alors, non seulement on s'engage dans cette opération, non seulement on y met une date d'échéance, mais je terminerai en disant: On vous y invite aussi, comme vous l'êtes déjà, et avec autant d'intensité que nous allons y mettre pour obtenir des résultats.

M. Vaillancourt (Gilles): M. le ministre, je n'ai aucune raison de douter de votre bonne foi et de vos bonnes intentions, mais il y a une réalité. C'est que, 260 000 000 $ plus tard, on commence à discuter d'une réforme fiscale puis on commence à discuter d'une marge de manoeuvre permettant aux villes d'absorber le 260 000 000 $ qui est déjà facturé. Et il y a une réalité aussi: même si vous passez ça dans votre projet de loi, je suis convaincu, vous connaissant, en homme responsable que vous êtes, que vous ne voudrez pas changer les budgets des villes qui sont déjà adoptés. Donc, comment on ferait pour appliquer cette mesure-là en 1997, à toutes fins pratiques, sans se ramasser avec la même difficulté qu'on a vécue avec l'abolition d'un remboursement sur une taxe à la douzième heure? Alors, ça ne s'appliquerait, à toutes fins pratiques, pas en 1997.

Vous avez dit vous-même que ça va aller vite, que le gouvernement a une volonté que ces travaux de révision de la fiscalité soient terminés à temps pour le budget du ministre des Finances, au mois d'avril. Alors, faites une chose bien simple: sortez ça de votre projet de loi. Vous reviendrez après la révision, après le discours du ministre des Finances et vous le réglerez, tout en même temps, en un seul coup. Nous aurons atteint tous nos objectifs d'un seul coup.

M. Trudel: Et...

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre.

M. Vaillancourt (Gilles): Le gouvernement se sera donné l'occasion de monter ses «en lieu» à 100 %.

La Présidente (Mme Bélanger): Comme ferait le président de l'Assemblée nationale.

M. Trudel: Écoutez, j'ai parlé de signes, tantôt, qu'il fallait montrer et, par ailleurs, de l'intensité quant à la vitesse à laquelle on veut aller pour atteindre ces objectifs-là. Vous savez très bien que, si on veut faire des choses pour 1998, il faut prendre les décisions tôt en 1997.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Je suis bien contente d'entendre le ministre parler d'échéancier et de date; il n'a pas dit date butoir, mais il y a quand même un échéancier. J'aimerais le ramener à l'échéancier du 11 octobre 1995 pour l'accord de principe qui avait été signé entre les unions et le ministère sur la décentralisation de nombreuses responsabilités; il y avait 155 000 000 $, si je me souviens bien. On retrouve dans ce document-là certaines activités qui devaient être transférées, entre autres, traitement des demandes de révision de l'évaluation foncière.

Si je soulève cet élément-là, Mme la Présidente, c'est que j'ai beaucoup de difficultés à comprendre – et je ne suis pas la seule à le dire; je l'ai dit dans mes commentaires lorsqu'on a commencé la commission, je l'ai dit aussi en Chambre lorsqu'on a fait l'adoption de principe – pourquoi faire à la pièce ce qu'on pourrait faire à l'intérieur d'une grande réforme. Alors, je suis bien heureuse, M. le maire et président de l'UMQ, que vous adhériez finalement à cette volonté du monde municipal. Non seulement vous y adhérez, mais, en fait, vous êtes le porte-voix finalement d'une réforme fiscale qui ne soit pas faite à la pièce.

Et on a retrouvé dans plusieurs projets de loi, que ce soit du municipal ou de la sécurité publique, les transferts de factures et de manque à gagner des dernières semaines, qui sont, ma foi, des diachylons, à gauche et à droite, qui font en sorte qu'on essaie d'empêcher la fiscalité de s'effondrer. Moi, je dis que la fiscalité, en fait, municipale est en phase terminale et je pense que je ne suis pas loin de la vérité.

Ceci étant dit, bon, vous avez dit ce que vous aviez à dire sur l'article 42. Est-ce que, pour les municipalités, les villes-centres, d'après vous, le fait que l'article 42 ne soit pas adopté, peut vraiment leur causer préjudice pour l'année qui vient?

M. Vaillancourt (Gilles): Oui, 1997...

Mme Delisle: Par l'adoption, mais le retrait de l'article 42 peut-il causer préjudice aux six villes-centres?

M. Vaillancourt (Gilles): Bien, je ne pense pas. De toute façon, leurs budgets sont adoptés...

Mme Delisle: O.K.

M. Vaillancourt (Gilles): ...et je ne crois pas que le ministre prendrait le risque d'introduire une mesure budgétaire en cours d'exercice. Donc, à toutes fins pratiques, si ça devait s'appliquer, ça s'appliquerait pour 1998.

Mme Delisle: Ce qui n'est pas dans la loi.

M. Vaillancourt (Gilles): Sinon, ce serait une autre façon de défaire des budgets qui sont déjà fraîchement adoptés. Il n'en reste à peu près plus de budgets qui ne sont pas adoptés à ce temps-ci de l'année, là. Donc, à toutes fins pratiques, cette mesure-là, même si elle était dans la loi, il faudrait qu'il y ait une disposition qui fasse qu'elle ne s'applique pas en 1997. Les municipalités, de bonne foi, à partir des règles qui étaient connues, ont adopté leurs budgets. Il ne faudrait quand même pas intervenir une autre fois dans les budgets de villes.

Mme Delisle: Il y a une réalité qui est quand même assez criante, là. On se rappellera qu'avec l'abolition du remboursement partiel de la taxe de vente il y a quand même plusieurs millions qui sont en jeu pour le mois de décembre seulement, parce que les budgets évidemment avaient été votés l'an dernier. Il y a également plusieurs municipalités qui ont dû réajuster le tir, mais, suite à ça, il y a aussi la décision d'inclure dans le projet de loi l'article 42 qui va faire en sorte qu'il y en ait qui vont être obligées de rouvrir leurs budgets, là. C'est certain. Alors, je pense qu'on est d'accord avec vous pour dire que le retrait de l'article 42, je pense que c'est bien important.

M. Vaillancourt (Gilles): Je pense que...

Mme Delisle: Je suis d'accord.

M. Vaillancourt (Gilles): En tout cas, s'il n'y avait pas retrait, je pense qu'il devrait, au moins, y avoir une disposition...

Mme Delisle: Je suis d'accord. Ha, ha, ha!

M. Vaillancourt (Gilles): ...pour dire que ça ne peut pas s'appliquer en 1997 parce qu'on ne peut pas intervenir dans les budgets des villes après qu'ils sont adoptés compte tenu que les villes ont l'obligation de présenter des budgets équilibrés et que toute intervention vient changer l'équilibre, donc, amène une révision du budget chaque fois.

Mme Delisle: O.K. Ça va.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Oui, juste pour revenir, encore une fois, à l'article 42. Est-ce que ce serait plus, je dirais, acceptable pour vous si, quand on demande aux autres municipalités d'être des bons citoyens corporatifs, à l'intérieur même d'une réforme globale, le gouvernement décidait de payer, lui aussi, ses «en lieu» de taxes à 100 %?

M. Vaillancourt (Gilles): C'est la seule condition que le monde municipal pose.

Mme Frulla: Parce qu'on parlait tantôt, bon, enfin, des diminutions précédentes faites par M. Ryan, mais il faut quand même se rappeler qu'en plus de garder les mêmes politiques on a quand même aussi pelleté 260 000 000 $ en plus. Alors...

M. Vaillancourt (Gilles): J'ai eu l'occasion, Mme la députée...

Mme Frulla: Oui, j'ai vu.

M. Vaillancourt (Gilles): ...de le dire et je le répète parce que c'est public: Le monde municipal a décidé de faire sa part, à l'intérieur de sa capacité, vis-à-vis de l'assainissement des finances publiques. Mais, pour nous autres, 260 000 000 $ plus tard, aucun des items à notre agenda qui nous auraient permis de dégager des espaces pour ne pas alourdir le fardeau du contribuable, n'est encore réglé. Et ça, c'en est un des items, les «en lieu» de taxes, entre autres. Ce n'est pas réglé.

Le monde municipal reconnaît que, quand on ne paie pas nos taxes sur une usine d'épuration qui est située dans une ville par rapport à l'autre qui reçoit le service, effectivement on fait de l'évasion fiscale. Mais on se dit: Celui qui en fait le plus, c'est le gouvernement du Québec. De quelle autorité morale pourrait-il nous demander, à nous, d'arrêter l'évasion fiscale que nous pratiquons alors que lui le fait après qu'il avait pris l'engagement même de ne pas le faire? Alors, c'est pour ça. On répète toujours la même chose. On n'a pas un langage des deux côtés de la bouche; c'est bien direct, c'est le même axe que nous poursuivons. Pour nous, ce n'est pas acceptable.

Mme Frulla: Et je ferai remarquer aussi que, là, c'est parce qu'on ajoute un article qui, dans le fond, oblige les municipalités, d'une certaine façon, à être des bons citoyens corporatifs. Je pense que le principe est bon, que le principe d'équité est bon. Mais effectivement, avant de le demander, il faudrait aussi donner l'exemple. C'est donnant, donnant.

(15 h 40)

Cela dit, on sait qu'il y a un comité qui travaille fort, présentement, sur les conclusions du rapport D'Amours et qui est censé, dans un avenir rapproché, en arriver avec des pistes de solution, si ce n'est pas des solutions. Alors, à ce moment-ci, est-ce que, selon vous, ce serait peut-être aussi très acceptable de dire: Parfait, on se donne un an, d'un budget à un autre, parce que, comme vous dites, les budgets sont fermés? Et, comme le comité travaille déjà et qu'il y a déjà eu un autre comité qui a soumis son rapport, on pourrait en arriver – et pensez-vous que c'est possible? – à une réforme fiscale globale, puisque c'est à peu près la seule chose, en tout cas, dans la grande région de Montréal, qui a fait consensus lors du forum sur la Commission de développement, entre autres, de M. Ménard, du ministre de la Métropole.

Mais est-ce que vous pensez que c'est faisable, compte tenu qu'on est déjà avancé, de dire: Parfait, dans un an, on arrive avec une réforme fiscale globale pour les municipalités? Parce qu'on en parle depuis très longtemps. On en parlait dans notre temps; il y a eu des choses qui ont été faites puis tout ça. Excepté, comme ma collègue disait, qu'au lieu de mettre des bandages à gauche et à droite on soigne le bobo pour une fois, puis qu'on passe à autre chose. Mais est-ce que c'est possible, en un an, selon vous, par rapport à ce qui a été fait jusqu'à maintenant?

M. Vaillancourt (Gilles): Les gens qui sont devant moi sont probablement mieux capables de vous répondre que moi, mais je vous dirais que, logiquement, si M. Landry, à l'occasion du dépôt du budget... Son comité va avoir siégé et ses décisions vont être prises; elles vont faire partie du budget du gouvernement. Le budget est adopté en avril ou en mai au plus tard. À partir du mois d'avril ou du mois de mai, à partir du moment où le gouvernement va adopter son budget, les mesures fiscales touchant d'autres instances vont donc être l'objet de lois. Alors, ça veut dire qu'il y aura l'adoption de projets de loi pour donner suite aux décisions du budget quelque part entre le mois de mai puis le 31 décembre.

Ce que j'ai dit, tout à l'heure, au ministre, c'est: De toute façon, il va y avoir des lois qui vont être changées sur la fiscalité. Si effectivement il y a une réforme de la fiscalité, l'article 42 peut aussi bien se retrouver dans la prochaine que dans celle-là. Ça ne changera rien, et on va tous arriver au 31 décembre avec la nouvelle réalité qui découlera du budget de M. Landry. Sinon, on est tous dans le trouble. Mais je laisse au gouvernement l'initiative.

Moi, je pense qu'un article 42 qui ne s'appliquerait qu'en 1998 va tout simplement créer des espoirs pour un, des tensions pour les autres et ne s'attaquera pas au vrai problème de fond qui est actuellement en discussion pour donner suite au comité D'Amours et qui verra sa conclusion plus tard, dans le discours du budget de M. Landry. Alors, je dis: Est-ce qu'on est en train de parler pour ne rien dire, de rajouter un élément quand, au fond, c'est peut-être cinq ou 10 éléments qu'on touchera à l'occasion du prochain budget? Je ne le sais pas. Ce n'est pas moi qui mène le gouvernement, ce n'est pas moi qui aurai la lourde responsabilité de présenter le prochain budget puis les lois conséquentes.

Mme Frulla: Ça va.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va?

Mme Frulla: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous vous remercions de votre participation.

M. Vaillancourt (Gilles): Mme la Présidente, M. le ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, merci beaucoup et bonne fin de journée.

M. Trudel: Merci de votre collaboration.

La Présidente (Mme Bélanger): Bonne fin de journée à vous aussi et bon retour. On va suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 44)

(Reprise à 15 h 48)

La Présidente (Mme Bélanger): La commission reprend ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Nous en sommes toujours à des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives.

S'il vous plaît, à l'ordre! Alors, j'appellerais maintenant l'Association des évaluateurs municipaux et l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec à bien vouloir prendre place.

Alors, messieurs dames, nous vous souhaitons la bienvenue. Étant donné que, malheureusement, nous avons un groupe, et heureusement pour vous autres, qui a annulé l'audience, nous allons vous donner 10 minutes chacun pour faire votre présentation. Alors, je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et de présenter les personnes qui l'accompagnent. Alors, est-ce qu'on commence par l'Association des évaluateurs municipaux?


Association des évaluateurs municipaux du Québec (AEMQ) et Ordre des évaluateurs agréés du Québec (OEAQ)

M. Mercier (Jean-Guy): Bonjour. Mon nom est Jean-Guy Mercier, le président de l'Association. Je suis accompagné, à ma droite, de M. Benoît Roy, le vice-président, et de M. Gilles Racicot, le directeur.

La Présidente (Mme Bélanger): Très bien. Et l'Ordre des évaluateurs; est-ce que le porte-parole veut se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent?

Mme Viau (Céline): Oui, bonjour. Je suis Céline Viau, la secrétaire générale de l'Ordre des évaluateurs. J'ai, à ma droite, Mme Francine Guérin, qui est présidente et, à ma gauche, M. Mathieu L'Écuyer, qui est président du comité des affaires légales.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, si vous voulez y aller pour votre présentation, 10 minutes.

Mme Viau (Céline): Parfait. Alors, d'entrée de jeu, je vous dirai ceci: L'Ordre des évaluateurs, comme tous les ordres professionnels, est mandaté pour assurer la protection du public en contrôlant l'exercice de la profession. C'est à ce titre-là et avec cet angle d'analyse que nous avons étudié le projet de loi n° 67 et que nous allons vous faire nos commentaires.

(15 h 50)

Deux points avec lesquels on est fermement en désaccord. D'une part, la désynchronisation des rôles. Ce que l'Ordre préconise – Mme Guérin aura l'occasion de vous détailler ça tantôt – c'est le retour au rôle d'évaluation annuel. Nous pensons que les rôles triennaux posent un problème et sont la cause d'un ensemble de problèmes de la fiscalité municipale. Deuxième point avec lequel on est fermement en désaccord, c'est l'habilité législative de déterminer par règlement comment évaluer des immeubles à vocation unique. C'est un point avec lequel on est vraiment farouchement en désaccord.

Sur le processus de révision, on est capables de vivre avec quelques aménagements. Le point qui nous apparaît le plus problématique, c'est le fait d'imposer un ticket modérateur aux contribuables. On considère que les contribuables paient déjà pour leur service d'évaluation. C'est comme si on les taxait pour identifier les erreurs des autres. Qu'au moins, si on imposait des frais à ce titre-là, ils soient remboursables si effectivement il y a eu une erreur de la part de l'évaluateur municipal. On considère que, quand on achète un produit ou un service dans la société d'aujourd'hui et que le produit ou service fait défaut, ça ne coûte rien au consommateur, normalement, pour identifier le problème.

Je vais laisser la parole à la présidente qui pourra peut-être vous détailler un petit peu plus chaque point.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Guérin.

Mme Guérin (Francine): Oui, bonjour. Bon, je vais aller directement à l'habilitation législative, à l'article 48 du projet de loi, où le gouvernement veut se donner un chèque en blanc pour on ne sait pas trop quel type d'immeubles qu'il n'a pas encore définis. Et disons que, comme disait Mme Viau, on est en total désaccord avec ça, on ne peut admettre ça parce que, vraiment, c'est se donner tous les pouvoirs et ça serait même, je dirais, se soustraire lui-même à la loi, à l'article 48, qui dit que le gouvernement est soumis à la Loi sur la fiscalité municipale. Et, comme beaucoup de ses immeubles sont institutionnels, en même temps il pourrait se soustraire à cette loi-là.

On est en désaccord parce que ce n'est pas au gouvernement à réglementer l'évaluation, de prescrire une méthode d'évaluation pour quelque type d'immeubles que ce soit. C'est le devoir de l'Ordre. D'ailleurs, je le rappelle, c'est le ministère de la Justice qui a mandaté les ordres pour établir des règlements et des normes de pratique dans chacun de leurs domaines. Alors, l'Ordre est là pour justement normer, encadrer la pratique de l'évaluation pour tous les types d'immeubles et tous les types d'évaluation immobilière.

Or, l'Ordre a fait, à deux reprises, des offres au ministère, au MAM, pour justement lui offrir que la chicane de toasts se passe chez nous. Et on est prêts, nous, à prendre un engagement ferme de voir à encadrer la pratique de l'évaluation de ce type d'immeubles. On est conscients du problème, mais on pense que le mettre dans une habilitation législative n'est pas là la solution. Alors, on accepte, nous, l'Ordre, de le faire, on est prêts à en prendre la responsabilité et, s'il y a des dates, on est prêts à fonctionner avec les dates qu'on nous mettra. Alors, nous, on pense que le groupe de travail devrait être formé autant de l'Ordre et de gens qui sont aussi des intervenants dans le milieu.

Pour ce qui est de la désynchronisation des rôles, vous le savez, on est en désaccord. Les contribuables de la ville de Montréal ont eu une charge supplémentaire au niveau fiscal, dans les dernières années, parce qu'il y a eu, pour Montréal, déjà des choses qui ont été acceptées: de geler une baisse de valeur à 10 % la première année du rôle, à 5 % la deuxième année. Et le contribuable est suffisamment, à ce moment-là, pénalisé. Or, nous, on pense qu'il faut absolument revenir, le plus rapidement possible, au rôle annuel, puisque c'est là demander d'avoir un rôle quinquennal.

En ce qui concerne l'ensemble du projet de loi qui touche ce qui est l'OMREF et l'avis d'évaluation envoyé de façon séparée, bon, on est d'accord avec le principe d'une révision avant le dépôt d'une plainte. Là où on a vraiment des objections, c'est que, de la façon dont le projet de loi est écrit présentement, c'est du formalisme. C'est rendu très lourd. C'est mettre des empêchements, disons, au contribuable d'accéder plus directement à l'évaluateur et de pouvoir faire réviser une valeur à laquelle il a droit, si c'est justifié. Alors, pour nous, on est complètement en désaccord, d'avoir justement, en premier, un ticket modérateur. Et, si tant est qu'il en faut un, il faudrait absolument qu'il soit remboursable lorsqu'ils ont raison de faire réviser leur valeur.

Il faut absolument qu'on enlève certains formalismes tels que d'exiger que, si ce n'est pas sur un tel formulaire, la demande de révision va être rejetée. Il faut enlever aussi d'autres formalismes tels que, je vous dirais, là... Tout simplement, je pense qu'il aurait pu y avoir une demande de révision qui soit faite sans qu'on soit obligé de mettre un palier administratif supplémentaire. Lorsqu'on fait une demande de révision de nos impôts ou d'une cotisation à l'impôt, on n'a pas besoin de passer par tout un autre mécanisme. On a accès directement quand même aux gens qui ont établi la cotisation. On est capables de demander une révision sans qu'on ait à payer. On aurait pu, tout simplement, mettre dans la loi l'obligation à l'évaluateur municipal de répondre aux motifs de demande de révision dans les 120 jours, après analyse avec le contribuable, sans commencer par un formalisme aussi détaillé. Alors, c'est, disons, l'ensemble qui fait pas mal...

Aussi, on est conscients que, tel que c'est établi présentement dans la loi, certaines municipalités ou communautés urbaines principalement ne pourront répondre à une demande de révision dans le délai qui est prescrit. Il faut absolument que le délai soit rallongé d'une façon ou d'une autre parce que ça va être impossible de répondre. Et on ne voudrait pas qu'à ce moment-là les évaluateurs municipaux viennent, tout simplement, à cause qu'ils n'ont pas le temps d'analyser la demande de révision, rejeter et dire qu'il n'y a pas lieu d'avoir une entente et que, à ce moment-là, le contribuable soit obligé de cheminer par le même cheminement qu'il était obligé de faire qui est de judiciariser, et tout ça. Alors, ça l'aurait obligé à faire une démarche supplémentaire pour en finir par arriver à la même chose.

Aussi, dans la loi, on n'a mis rien qui dit que, si la demande de révision est rejetée, on peut déposer une plainte immédiatement avant la fin du délai. Or, c'est fort important que le contribuable puisse ne pas nécessairement attendre le 1er septembre, tel que c'était dans la loi, pour déposer une plainte, à ce moment-là. Aussi, dans la loi, il faudrait absolument que ce soit bien détaillé qu'il a droit à une révision externe de son dossier, la révision externe étant, à ce moment-là, le dépôt de la plainte qui cheminera devant un tribunal administratif. Or, il n'y a rien dans la loi qui dit que son droit peut y être. L'obligation aussi...

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Guérin.

Mme Guérin (Francine): Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion.

(16 heures)

Mme Guérin (Francine): Or, en conclusion, je reviendrai principalement sur le point que, si on veut prescrire une méthode d'évaluation, c'est à l'Ordre de prescrire la méthode d'évaluation et de l'encadrer; ce n'est pas au gouvernement. Puis ce n'est pas à la mettant dans un règlement qu'on va nécessairement régler le problème. Le problème est beaucoup plus, on pense, de l'ordre de l'échange d'informations entre le contribuable et l'évaluateur municipal, et ça, dès le début de l'établissement du rôle d'évaluation, alors, avant le processus d'envoi d'avis d'évaluation. C'est là, je pense, qu'il faut aussi travailler. Et, s'il y a quelque chose à mettre dans la loi, je pense que c'est beaucoup plus de venir contraindre, à ce moment-là, un échange d'informations entre les deux parties que de prescrire une façon d'évaluer.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Guérin. Alors, M. Mercier, je suppose.

M. Mercier (Jean-Guy): Oui, c'est bien ça. Alors, évidemment, la position de l'Association des évaluateurs municipaux du Québec est différente de celle de l'Ordre des évaluateurs agréés. Ce n'est pas parce que essentiellement on est totalement en désaccord avec ce que l'Ordre propose, évidemment non, sauf qu'on vit dans un monde qui est celui de l'évaluation municipale avec toutes les contraintes que cela amène.

Si on faisait deux blocs, le bloc au niveau de la révision administrative, au traitement des plaintes, et aussi le coin particulier où on est complètement je ne dirais pas à l'opposé, ce n'est pas vrai, l'article 48 qui parle de la réglementation, alors, je veux dire peut-être d'une façon globale qu'on est d'accord avec les avis d'évaluation surtout dans les immeubles de 1 000 000 $ et plus où, dans les 60 jours du dépôt du rôle, on va les émettre. Ça, je pense que, pour nous, ça va amener ce type de contribuables là à avoir immédiatement un aperçu de leur évaluation et à poser les gestes nécessaires à demander la révision de ces propriétés-là.

Maintenant, en ce qui concerne la demande de révision, on sent que le gouvernement veut la structurer. Moi, je peux vous dire que ça existe pratiquement partout; en tout cas, dans le milieu que je connais, il y a des endroits où les gens font appel à l'évaluateur municipal pour le rencontrer, lui téléphoner. Et ça, ça fait des années que ça se fait, et on élimine avec ça quantité de plaintes. On est d'accord avec ça, mais ce n'est peut-être pas... Je pense – comment je pourrais vous le dire – que le fait de l'instaurer ne vient pas nous amener personnellement une contrainte supplémentaire. Je pense que c'est bon que ce soit fait de cette façon-là.

Au niveau de la révision administrative, on est tout à fait d'accord avec ça, mais je vais revenir au bloc principal qui est les immeubles à vocation unique. En mai 1995, nous avions présenté un mémoire au ministre Chevrette et on disait, à ce moment-là, que notre Association préconisait une réglementation dans l'évaluation de ces immeubles. Et notre position, elle n'a pas changé; malgré tout ce qu'on entend, cette position-là, elle demeure la même. Toutefois, nous sommes conscients des diverses opinions divergentes du milieu à cet égard et c'est pourquoi il nous apparaît opportun de nous assurer que les modalités suivantes soient prises en considération.

Premièrement, que des dispositions de la loi permettent au gouvernement de réglementer l'évaluation de cesdits immeubles; deuxièmement, que la loi ou la réglementation définisse clairement les immeubles visés, pas n'importe quoi, clairement; que la réglementation soit rédigée après consultation des intervenants concernés – et là on est d'accord avec l'Ordre: il faut qu'il y ait du monde autour d'une table qui puisse se parler – et que les méthodes retenues tiennent compte à la fois de la rationalisation des coûts reliés au rôle d'évaluation, de la qualité de l'acte professionnel qui sera posé et, enfin, de l'équité qui devra être assurée en fin de processus.

Maintenant, pourquoi réglementer? Pourquoi on prend cette position-là? J'avais un petit texte ici qu'on pensait vous présenter. Je pense qu'il me reste assez de temps pour vous dire ça. Je pense que ça traduit très bien notre ligne de pensée. Commençons, d'abord, par affirmer qu'à notre avis, comme de l'avis de plusieurs autres intervenants devant cette commission, l'évaluation à la valeur marchande reste la façon idéale de préparer un rôle d'évaluation. Toutefois, nous sommes conscients que la réalité économique actuelle oblige les administrations, et particulièrement celles des organismes publics, à diminuer leurs coûts. Il faut donc atteindre nos objectifs à des coûts moindres. Or, l'expérience nous démontre clairement que l'évaluation des immeubles à vocation unique est devenue très onéreuse, et ce, en raison des coûts associés au traitement des plaintes pour ce type d'immeubles. L'expression n'est pas nouvelle. Il faut appeler les choses par leur nom. On parle maintenant de l'industrie de la contestation et ça existe.

Si on a cru bon de réglementer la forme et le contenu des rôles d'évaluation en obligeant, entre autres, l'évaluateur municipal à poser des gestes et à appliquer des méthodes qui étaient d'ailleurs reconnues par les normes professionnelles, c'était pour s'assurer de l'uniformité et de l'équité horizontale, c'est-à-dire l'équité entre tous les contribuables. Force nous est maintenant de reconnaître qu'une catégorie de contribuables est moins uniforme et génère des transferts fiscaux importants qui ont, comme conséquence, de briser l'équilibre fiscal.

C'est au point où les remboursements de taxes sont devenus une dépense incontrôlée et incontrôlable pour les municipalités. Et c'est nos patrons. C'est pour ça qu'on en parle de même, parce qu'on l'entend, on sait ce qui se passe chez nous. Sachant que celles-ci ne peuvent faire de déficit d'opération, ces coûts sont directement redistribués aux petits contribuables. Les coûts dont nous parlons sont non seulement le coût des dépenses des municipalités pour services aux citoyens, mais les millions de dollars que coûte annuellement aux contribuables du Québec la contestation des immeubles à vocation unique.

Il y a certainement place, à notre avis, à réglementer l'évaluation de ce type d'immeubles à un point milieu, sur un continuum dont les pôles sont, d'un côté, l'évaluation à la valeur marchande pure et, de l'autre côté, un calcul mathématique ne laissant aucune place à l'acte professionnel. On n'est pas d'un bord, on n'est pas non plus de l'autre bord, dans le sens où on pense qu'il y a quelque chose qui peut être raccommodé ensemble, là.

Il faut donc préciser par la réglementation les balises qui permettront d'évaluer à des coûts acceptables ces immeubles à vocation unique et surtout limiter les point litigieux donnant ouverture à la contestation. On doit d'abord définir clairement les immeubles visés. Leur traitement prévu dans l'éventuelle réglementation pourra être différent selon, par exemple, qu'il s'agit d'immeubles institutionnels ou industriels. La définition devra aussi être suffisamment précise pour ne pas inclure des catégories d'immeubles non visées par la problématique, exemple les commerces de restauration de la chaîne McDonald's. Puis on pourrait même rajouter ce que Me Laflamme nous disait ce matin: la Caisse populaire de Lotbinière ou, en tout cas, dans ce coin-là. On n'en veut pas de ça. O.K.

Alors, les dispositions du projet de loi n° 67 autorisant le gouvernement à réglementer ces évaluations sont donc justifiées. Nous espérons – et puis on le dit fortement – que la consultation des organismes tels que l'Ordre des évaluateurs agréés, l'Association des évaluateurs municipaux du Québec et les professionnels du secteur privé se poursuive afin de trouver la solution la plus adéquate dans le contexte. Nous vous remercions.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Mercier. Alors, M. le ministre, vos questions s'adressent soit à l'Ordre ou à l'Association. Vous avez 15 minutes.

M. Trudel: Ou les deux.

La Présidente (Mme Bélanger): Ou les deux en même temps.

M. Trudel: Très bien. Mesdames, messieurs de l'Ordre et des évaluateurs municipaux, bon, alors, intensément, autour de l'article 48, on voit bien qu'il y a, le moins que l'on puisse dire, différents points de vue, assez... J'allais dire curieusement, mais c'est une situation normale, par ailleurs. Vos professionnels se retrouvent donc, je dirais, de chaque côté de l'élément principal qui s'appelle l'évaluation. Bon!

Le Parti libéral, au gouvernement, à l'époque, en 1988, a introduit les rôles triennaux d'évaluation. C'est l'ex-ministre des Affaires municipales, le député de Brome-Missisquoi, qui a modifié par législation cet aspect de l'évaluation en introduisant les rôles triennaux. Aux évaluateurs municipaux: Pouvez-vous, là, nous dresser un diagnostic? «Ç'a-t-y» marché, ça, le fait de passer à des rôles triennaux? Et, aujourd'hui, là – je veux bien croire que l'évolution évolue, parce que ça a l'air que, du côté de l'opposition, on n'est plus d'accord avec ça, là – ça a été quoi, le résultat de modifier ça et d'avoir des rôles triennaux, pour vous autres qui êtes dans l'action?

Une voix: Où vous avez pris ça?

M. Trudel: C'est une impression que j'ai.

Une voix: Il fabule.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Mercier.

M. Mercier (Jean-Guy): Alors, pour nous, les rôles triennaux ont été un dégagement de la pression occasionnée par les rôles annuels. C'est évident que la situation idéale serait des rôles annuels. Nous en sommes conscients. Mais vous vous imaginez un petit peu ce que peut être une évaluation distincte pour chacun des immeubles. On parle d'évaluation de masse, ça va? Lorsqu'on parle d'évaluation de masse, nous parlons de bungalows, de blocs-appartements de peu de logements. Mais, lorsqu'on arrive au niveau d'une industrie, d'un hôtel, d'un centre d'achats et de certains types d'immeubles, ça prend une expertise précise. Ça demande l'analyse, dans ces cas-là, des états financiers de ces immeubles-là. Et, physiquement, ça prendrait énormément de personnel pour être capables de passer au travers de ça.

Alors, les rôles triennaux nous ont permis, aux trois ans, d'être capables de satisfaire cette demande et cette façon professionnelle de travailler. Alors, en rôle annuel, on ne pourrait pas le faire, sauf en analysant le comportement global d'un type d'immeubles dans un secteur de la ville afin d'ajuster par facteur ces immeubles-là pour traiter la quantité qu'on a à traiter. Alors, ça amènerait que certains types d'immeubles pourraient avoir des fluctuations identiques et que, dans les faits, ces immeubles-là ne se comportent pas de la même façon dans le marché immobilier actuel, surtout que certains ont des taux de vacance qui sont plus élevés que d'autres; d'autres ont des taux de location qui sont différents. Alors, chacun de ces immeubles-là, dans un cas de rôle triennal, est analysé en fonction de ces critères-là. On ne pourrait pas le satisfaire en rôle annuel.

(16 h 10)

M. Trudel: Très bien. On va aller du côté de l'Ordre maintenant. Vous avez quelque chose à ajouter, monsieur?

M. L'Écuyer (Mathieu): Oui, M. le ministre. Voici, évidemment, il est clair que, pour les gens qui confectionnent les rôles, c'est beaucoup plus simple de les confectionner une fois par trois ans plutôt qu'une fois par année. J'entends évidemment les propos du président de l'Association, puis évidemment c'est tout à fait raisonnable que, si on n'a pas besoin, par exemple, de faire les états à chaque année, si on fait l'inventaire à chaque trois ans, c'est beaucoup plus simple, c'est évident.

Le problème, évidemment, il ne se situe pas au niveau de la confection; il se situe de l'autre côté, celui des gens qui se font confectionner un rôle. Il faut bien comprendre que, lorsqu'on dresse un rôle triennal, avec une date de référence qui est de 18 mois antérieure à l'entrée en vigueur du rôle, on parle de la valeur d'un immeuble, donc, un an et demi avant l'entrée en vigueur du rôle; si on a des discussions suite à l'entrée en vigueur du rôle, on est rendu à deux ans; après l'entrée en vigueur du rôle, si on est en révision externe, au Bureau de révision pour entendre une plainte, on est trois ans après la date à laquelle on mesure la valeur. Alors, vous comprenez pourquoi il y a des gens qui ont défoncé les portes de l'hôtel de ville, à un moment donné, à Montréal: c'est parce qu'il n'y avait plus de lien entre la réalité des valeurs inscrites au rôle et le moment où on recevait des comptes de taxes. On disait: Ça n'a pas de sens, on ne comprend pas.

Vous avez été privés de cet éclairage là, malheureusement, parce qu'il y a une commission qui avait été nommée pour faire une étude sur ces questions-là qui a vu son mandat invalidé pour des raisons obscures et qui, malheureusement, n'a pas repris ses travaux. Je ne veux pas m'allonger longtemps sur ce thème-là, mais il faut bien comprendre que les gens qui ressentent le problème au niveau des rôles triennaux, ce sont, d'abord et avant tout, les contribuables et non pas ceux qui dressent les rôles.

Mme Viau (Céline): Juste une dernière chose: c'est évident que l'évaluation d'immeubles à vocation unique, ça demande une expertise précise. Ça ne veut pas dire pour autant qu'il ne faut pas la faire, l'expertise précise; ça veut dire qu'il faut donner aux évaluateurs municipaux, dans les municipalités, les moyens de bien faire cette expertise précise. Le problème de l'industrie de la contestation, c'est aussi le problème de la qualité des rôles. Et ce n'est pas d'arrêter d'en faire; c'est d'en faire de qualité qui importe, et c'est ça qui, à nous autres, nous importe. À cet égard-là, il y a peut-être des ressources à donner aux évaluateurs municipaux.

M. Trudel: Vous manifestez... Oui, monsieur, allez-y.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Mercier.

M. Mercier (Jean-Guy): Pour ajouter un petit peu à ce que madame disait, c'est que l'évaluateur municipal voudrait avoir le plein contrôle de l'évaluation, on s'entend là-dessus. Lorsqu'on arrive dans un immeuble à vocation unique, le problème qu'on a présentement, c'est que l'évaluateur municipal et même l'évaluateur qui vient contester ces immeubles-là au nom de son client n'ont pas – puis ça, je dis ça en toute humilité – les connaissances nécessaires pour être capables de mesurer, à l'intérieur de ces immeubles-là, qu'est-ce qui se passe exactement. C'est pourquoi on demande des crédits qui sont pratiquement sans fond, parce que ce qui nous arrive, c'est qu'on est obligés d'aller chercher un autre professionnel, un ingénieur ou une autre personne, qui va venir dire à l'évaluateur municipal puis à l'évaluateur qui est en contestation: Ici, ce n'est pas fonctionnel parce que, parce que, parce que. Et l'évaluateur qui, lui, dit: Moi, je veux vraiment faire de l'évaluation, il se promène à côté puis il prend des notes. Ah ouais! C'est comme ça, comme ça, comme ça. Et c'est comme ça.

Alors, on dit: S'il y a une réglementation, aussi minime soit-elle – et ça, ce sera les discussions puis les échanges qui le trouveront – pour qu'on puisse éviter qu'un troisième intervenant ou un autre professionnel puisse dicter la façon d'évaluer les immeubles, là, on va embarquer. Je pense que c'est ça qu'on cherche, qu'on puisse travailler avec des balises qui nous sont propres dans notre domaine de l'évaluation.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Guérin.

M. L'Écuyer (Mathieu): Si vous me permettez, M. le ministre, de donner un...

M. Trudel: C'était Mme Guérin qui...

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Guérin avait demandé la parole.

M. L'Écuyer (Mathieu): Excusez-moi.

Mme Guérin (Francine): C'est là qu'à l'Ordre on dit: C'est l'échange d'informations avant le dépôt du rôle. Au moment où on commence à vouloir penser à faire l'évaluation de ce type d'immeubles, c'est là qu'il faut obliger le contribuable, exiger qu'il donne l'information à l'évaluateur municipal pour qu'il puisse faire son évaluation comme il faut. Si ça prend un ingénieur, bien, que, quelque part, il puisse permettre à l'évaluateur de parler avec l'ingénieur de la compagnie ou quoi que ce soit pour qu'il puisse lui donner les informations nécessaires. S'il a besoin d'informations, qu'il le fasse avant le dépôt du rôle.

La Présidente (Mme Bélanger): M. L'Écuyer.

M. L'Écuyer (Mathieu): Nous vous soumettons, M. le ministre, qu'il y a des moyens d'investigation puissants qui sont donnés à l'évaluateur municipal. Dans la Loi sur la fiscalité municipale, j'attire particulièrement votre attention sur l'article 18 qui établit formellement que «le propriétaire ou l'occupant d'un bien ou son mandataire doit fournir ou rendre disponibles à l'évaluateur ou à son représentant les renseignements relatifs au bien, dont ce dernier a besoin pour l'exercice de ses fonctions, selon que ce dernier lui demande de les fournir, au moyen d'un questionnaire ou autrement, ou de les rendre disponibles». Alors, il faut bien voir qu'on a un pouvoir, là, très important d'investigation.

On est conscients, par ailleurs, que les mandats qui sont donnés à l'évaluateur municipal puis la faisabilité de cette disposition-là... On ne peut pas se livrer à des enquêtes très exhaustives. Il y a une réalité. Il y a une certaine quantité de dépenses qu'on peut autoriser pour dresser un rôle. Et, évidemment, on ne peut pas se livrer à des enquêtes, dans certains cas peut-être, très approfondies. Mais je crois que les moyens sont là, mais il y a peut-être, là, des modalités à définir.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Racicot.

M. Trudel: Mme la Présidente, je pourrais peut-être poser quelques questions?

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, mais là...

M. Racicot (Gilles): M. le ministre, si vous me le permettez – merci, Mme la Présidente – je vais essayer de faire un résumé de la chance que vous avez d'avoir un débat entre évaluateurs devant vous, à l'Assemblée nationale.

M. Trudel: Et voilà! Alors donc...

M. Racicot (Gilles): Chose que l'on fait normalement dans les corridors.

M. Trudel: Donc, ce règlement sera fait en consultation. Allez-y!

M. Racicot (Gilles): Ha, ha, ha! Ce qu'on vient d'entendre à partir des questions du ministre puis à partir des réponses que vous avez entendues de part et d'autre, c'est ceci: idéalement, on fait un rôle annuel, ce qu'on faisait au moment de la fiscalité municipale; idéalement, l'évaluateur a droit à toutes les informations lui permettant de faire un rôle d'évaluation; et, idéalement, il a le temps et les outils nécessaires pour les analyser et produire un rôle annuel. Là, on est dans un monde idéal. Ce matin, à la période des questions, on entendait parler de l'Assemblée nationale virtuelle; ici, on parlerait de l'évaluation virtuelle, parce que, ça, ça ne peut pas se produire.

La réalité est celle-ci: en 1990, on l'a dit tantôt, les évaluateurs ne pouvaient pas suffire à la tâche de préparer des rôles d'évaluation et de continuer à faire la défense des causes devant le Bureau de révision. Je vous reporterai en 1990, au moment où on défendait des causes, dans le cas de l'industrie pétrolifère par exemple, de 1967. Ça, c'était un retard. C'est ça qu'on appelle un retard: 1967 à 1990. Alors, on est passés à un rôle triennal pour laisser plus de temps aux évaluateurs de faire leur travail et tenter de débourber le Bureau de révision; et, comme le président de l'Association vous le disait, on a réussi jusqu'à un certain point.

On se rend compte que toujours la même problématique, soit l'évaluation des immeubles à vocation unique, est ce qui accapare le plus de temps des évaluateurs. Une statistique des évaluateurs de la Communauté urbaine de Montréal démontrait que les évaluateurs de la division commerciale et industrielle pour les industries consacraient 85 % de leur temps à préparer et à défendre des causes au Bureau de révision. Ça, c'est annuellement: 85 % de leur temps. Ça, c'est des coûts énormes pour tous les citoyens.

Alors, ce qu'on dit maintenant, c'est: Dans un monde comme celui dans lequel nous sommes présentement, où on veut diminuer les coûts de l'administration, particulièrement de l'administration publique, tentons de trouver d'autres solutions. Et, comme on l'a dit, on pense que la solution qui est mise sur la table par le gouvernement présentement, c'est-à-dire de légiférer de façon à ce que le gouvernement puisse passer une réglementation pour faire en sorte de circonscrire la façon d'évaluer les immeubles...

On n'est pas d'accord avec, mettons, une série de chiffres. Je vais reprendre des arguments qui ont été invoqués par un de nos collègues, cette semaine: Le nombre des fenêtres du côté est, moins le nombre de fenêtres du côté ouest, multiplié par deux; pèse sur le piton de l'ordinateur, c'est quoi, la réponse? Voici la valeur de l'immeuble. On n'est pas d'accord avec ça.

Mais on n'est pas d'accord non plus avec la valeur marchande pure, telle qu'on la connaît présentement. Parce que ça fait des lunes que c'est ça qui existe et qu'il n'y a personne qui ait mis son pied à terre pour le régler. Depuis la fin de la décennie soixante-dix, il y a eu des comités où on s'est assis, les représentants du milieu municipal et les représentants de l'industrie, qui sont toujours, toujours arrivés au même résultat, soit rien!

Alors voici, maintenant, qu'un gouvernement décide de dire: Il est temps qu'on fasse quelque chose. Et nous levons notre chapeau à cette décision-là. Et nous pensons qu'effectivement il faut passer par la réglementation. Et, comme il a été dit maintes fois par les intervenants aujourd'hui, l'essentiel, c'est qu'on puisse s'asseoir ensemble pour trouver la façon médiane; entre le continuum de la valeur pure et l'automatique du piton de l'ordinateur, il y a un médium en quelque part sur ce continuum-là qu'on peut trouver puis qui va satisfaire l'ensemble des parties.

(16 h 20)

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, deux minutes.

M. Trudel: Je n'aurai pas besoin de mon deux minutes avec ce que je viens d'entendre. Une minute seulement pour dire: Écoutez, la volonté, c'est d'en arriver à avoir un instrument simplifié et qui va nous conduire à l'efficacité. J'ai noté, par exemple, tantôt, de la part de l'Ordre, l'expression très claire de participer au processus pour en arriver à ce que le résultat obtenu, ce ne soit qu'une confirmation par la procédure réglementaire du gouvernement. C'est ça, la volonté du gouvernement; c'est de marquer le point aujourd'hui et à la présente session en disant: Peut-on faire en sorte qu'on va tendre vers une plus grande efficacité et qu'on va se donner un canal formel qui s'appelle le pouvoir réglementaire pour le faire, et qu'on ne le fera pas en dehors de la considération des professionnels de tous les horizons du même secteur d'activité?

À l'égard de 48, c'est ça, la volonté; c'est ça, la décision que nous avons prise de dire: On veut en arriver à une simplification et, en conséquence, à plus d'efficacité. Ça fait un bon nombre de mois, sinon d'années qu'on vient d'évoquer, qu'on en discute. Et là on pense qu'en resserrant un peu le processus et le moment terminal on va arriver à des résultats. On a comme une obligation de résultat. On se la donnera ensemble, on peut y arriver et on commencera intensément ces travaux-là dès le moment où nous pourrons adopter notre projet de loi. Merci de vos précisions.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Viau.

Mme Viau (Céline): Oui. J'entendais M. Racicot, tantôt, dire que le débat durait depuis longtemps, qu'il y avait eu différentes consultations pour savoir comment régler cette problématique-là. À ma connaissance, à tout le moins – puis ça fait six ans que je suis là – l'Ordre des évaluateurs n'a jamais été formellement, à tout le moins, consulté là-dessus. C'est peut-être pour ça que ça n'a abouti. Je vous dirai que, si, M. le ministre...

M. Trudel: Alors, comme vous allez être formellement invités, ça va aboutir, là.

Mme Viau (Céline): C'est ça. Alors, comme M. le ministre souhaitait avoir un canal réglementaire pour régler ce problème, nous vous offrons le nôtre. Nous, nous imposons à nos membres, par voie réglementaire, par leur code de déontologie, de répondre à des normes de pratique. Ce qu'on vous propose, c'est: On va la faire, la chicane dans notre cour; on va la faire avec nos amis de l'AEMQ, il n'y a pas de problème, et on va vous en produire une façon d'encadrer l'évaluation des immeubles à vocation unique. C'est sûr que ça va prendre plus de temps, c'est sûr que ça va prendre plus d'énergie. Une transplantation cardiaque, c'est un peu plus long que d'arranger une verrue; c'est un peu normal.

Mais on va établir des moyens professionnels et on va aussi établir qu'est-ce que c'est un immeuble à vocation unique. Parce que, moi, je peux vous dire – on parlait de McDonald's tantôt – qu'on entend des cas comme des papetières, bien sûr, des grosses industries lourdes, bien sûr, mais on nous dit aussi que des Canadian Tire, c'est aussi un immeuble à vocation unique, puis qu'un centre d'achats, c'est un immeuble à vocation unique. Moi, je peux vous dire, si vous n'en avez pas, qu'au tableau des membres de l'Ordre des évaluateurs agréés il y en beaucoup de professionnels qui sont habilités puis qui ont les ressources puis qui savent comment évaluer des Canadian Tire – je dirais même qu'il y en a dans la salle, ici – et qui savent comment évaluer des centres d'achats, et il y a des façons d'évaluer des centres d'achats.

Mais ce que, actuellement, le projet de loi nous propose, c'est un chèque en blanc. On ne sait pas de quelle sorte d'immeubles on parle puis on ne sait pas comment on va leur demander de les évaluer. Et l'Ordre ne peut pas signer un chèque en blanc; on n'a pas le droit de par notre mission.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Viau. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Si on restait sur le même sujet, madame, j'ai juste un petit questionnement, là. Si j'ai bien compris, vous offrez vos services, vous offrez votre expertise et votre grande connaissance du milieu, puis j'imagine que l'Association fait la même chose. Est-ce que je comprends qu'il faut retirer du projet de loi n° 67 l'article 48 pour y revenir à la prochaine session s'il le faut, mais avec une réglementation et des dispositions finalement qui collent à la réalité et dont vous ferez partie, là? C'est ça que je comprends?

Mme Viau (Céline): Tout à fait.

Mme Delisle: Bon. Je passe par-dessus vocation unique. Je pense que vous avez fait une bonne démonstration, les deux groupes, là, de comment vous voyez cette réalité-là. Je voudrais revenir à l'article 53. Ça a fait l'objet, je dirais, d'un virulent débat ce matin. Les gens, je pense, sont restés un petit peu sur leur position. Si j'ai bien compris, vous êtes contre la désynchronisation. C'est ça? Mais est-ce que vous êtes contre l'article 53, tel que libellé, qui, à notre point de vue, signifie d'abord un gel du rôle avec la désynchro après, ou bien seriez-vous d'accord avec uniquement la désynchro sans gel?

Et je m'explique. J'ai fait la démonstration ce matin, là. La CUM pourrait déposer – et je suis loin d'être une spécialiste, là – dès 1997, pour 1998, pour les 400 000 unités d'évaluation à évaluer, un premier bloc qui serait pour un an, avec une nouvelle évaluation pour trois ans par la suite; le deuxième bloc pourrait avoir, dès cette année, une évaluation pour deux ans et, ensuite, les trois ans qui suivraient, et Montréal trois ans tout de suite et trois ans... pour aller avec la désynchro, mais la désynchro telle qu'on la connaît ici, dans la région de Québec, à la Communauté urbaine de l'Outaouais aussi et dans de nombreuses MRC, je pense.

Une voix: Absolument.

Mme Delisle: Vous rallieriez-vous à la désynchro, telle que je viens de la décrire?

Mme Viau (Céline): C'est-à-dire que ce à quoi on se rallie, nous, c'est au rôle d'évaluation annuel.

Mme Delisle: O.K.

Mme Viau (Céline): Ce avec quoi on est capables de vivre, c'est avec un délai qui permettrait à la ville de Montréal – parce que, fondamentalement, le problème de la désynchro, c'est le problème de la ville de Montréal – de se revirer de bord. Ça, on vit dans la réalité, on est capables de vivre avec ça, à la condition de revenir à des rôles annuels.

Mme Delisle: Est-ce que j'ai compris aussi de vos interventions que, dans le fond, malgré ce qui m'a été rentré à coups de pioche sur la valeur réelle puis la valeur marchande pendant des années lorsque j'étais au conseil municipal, nos rôles ne sont pas vraiment basés sur la valeur marchande? Je pense que c'est monsieur qui a dit que c'était presque se faire une illusion que de penser qu'on était vraiment à la valeur marchande. Est-ce que j'ai mal compris?

M. Racicot (Gilles): Je pense que oui. Je pense que vous n'avez pas compris tout à fait le sens de mon intervention. Ce que le président de l'Association a dit, c'est qu'au départ on est d'accord avec le fait que, idéalement, tout devrait être fait à la valeur marchande. Mais, dans la réalité cependant, ce qu'on réalise, c'est que la valeur marchande, c'est un système qui est trop onéreux, auquel les municipalités ne peuvent plus souscrire et qui fait en sorte que ce sont surtout certaines catégories de citoyens, soit les propriétaires d'industries – surtout les propriétaires d'immeubles à vocation unique, mais on parle non pas d'institutionnel, mais plutôt de commercial – qui en tirent profit.

Permettez-moi de vous donner un petit exemple de jusqu'où va la valeur marchande: le premier jugement qui a reconnu qu'en établissant la valeur marchande d'une industrie à vocation unique on pouvait aller jusqu'à ne pas évaluer l'immeuble qu'on avait devant les yeux, mais évaluer un immeuble hypothétique qui satisferait mieux la production industrielle...

Mme Delisle: Ah oui.

M. Racicot (Gilles): ...le jugement de la Cour d'appel dans Molson. Admettons ça, là, qu'on prépare les rôles toujours à la valeur réelle; ça voudrait dire que l'évaluateur, quand il se présente devant une industrie, toutes les industries de tout acabit, devrait se poser la question suivante: Est-ce que l'immeuble que je vois, est-ce que le bâtiment que je vois correspond à la productivité optimale pour cette industrie-là? Probablement que non. Donc, je vais retourner dans mon bureau, je vais sortir ma table à dessin puis je vais essayer de dessiner ce serait quoi, le bâtiment qui répondrait idéalement, et c'est celui-là que je vais évaluer plutôt que l'autre en face.

On n'a pas ces moyens-là puis on n'a pas les moyens non plus de consulter, puis encore moins dans un rôle annuel – permettez-moi de diverger d'opinions avec mes collègues de l'Ordre là-dessus, mes confrères de l'Ordre, devrais-je dire – parce que, si annuellement non seulement on a à faire l'évaluation, mais qu'il faut consulter chacun des ingénieurs de chacun des types d'industries pour savoir ça va être quoi, le bâtiment idéal pour être capables de faire le bâtiment hypothétique, écoutez, on n'en sort pas du tout, du tout. On n'en sort plus du tout. Alors, c'est pour ça qu'on dit: Oui, légiférer dans le sens qu'on veut le faire, c'est-à-dire réglementer puis tenter de trouver une solution entre les deux, entre la valeur marchande puis pas quelque chose d'automatique non plus, il y a place pour ça.

Mme Delisle: Vous êtes à l'aise, vous autres, avec le maintien de l'article 48 dans le projet de loi...

M. Racicot (Gilles): Absolument.

Mme Delisle: ...sans savoir quelle est la définition, sans connaître les normes et en sachant que la réglementation, le règlement viendrait par la suite ou que la définition viendrait par la suite, et que ça peut être laissé...

M. Racicot (Gilles): Savez-vous ce qui me satisfait, Mme la députée? C'est parce que ça fait 20 ans qu'on dit: On va faire un comité, puis on va en parler, puis on va trouver une solution...

Mme Delisle: Ça ne se fait pas.

M. Racicot (Gilles): ...puis il n'y a personne parmi ceux qui vous disent ça qui en a trouvé de solution, ni l'Ordre, ni les industries, ni les comités. Même s'il n'y a pas eu d'invitation comme telle de faite – il n'y a pas eu d'invitation spéciale de faite à l'Association des évaluateurs municipaux non plus – je peux vous dire que, par contre, au nom de l'Association, j'ai participé à de nombreux comités. À titre d'évaluateur, j'ai été impliqué dans de nombreuses discussions. Puis, aujourd'hui, on n'a toujours pas de solution.

(16 h 30)

Ce qu'on nous dit maintenant ou ce qu'on nous fait voir maintenant, c'est l'ombre d'une réalisation. Alors, à ça, je dis oui. Il y aurait un pas de fait dans le bon chemin. De toute façon, je pense que le gouvernement a signifié son intention de s'asseoir avec les intervenants du milieu pour, premièrement, comme on le dit dans notre mémoire, nous aussi, définir de quels immeubles à vocation unique on parle et définir les règles qui vont les régir. Puis on reconnaît qu'on ne veut pas avoir un automatique de peser sur le bouton pour avoir une valeur.

La Présidente (Mme Bélanger): Attendez. M. L'Écuyer veut rajouter là-dessus.

M. L'Écuyer (Mathieu): Oui, si vous me permettez, Mme la députée.

Mme Delisle: Oui, oui, oui.

M. L'Écuyer (Mathieu): Merci, Mme la Présidente. Ça fait quelques fois que j'entends des éléments, de l'autre bout de la table, qui suscitent chez moi de vives réactions que je tente de réprimer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. L'Écuyer (Mathieu): Tant qu'à être sur le point, allons-y gaiement. M. Racicot vient de vous dire que la Cour d'appel a inventé un système d'évaluation par des méthodes de remplacement, il y a une dizaine d'années. Je vais vous préciser de façon bien plus précise que c'est le Bureau de révision de l'évaluation foncière qui a reconnu ce qui existait dans la doctrine et que le signataire de cette décision- là n'était pas un juge de la Cour d'appel, mais bien la personne qui est en train de vous parler maintenant. Cette décision-là de la Brasserie Molson contre la ville de Montréal n'est jamais allée en appel devant aucun forum, et la méthode qui a été privilégiée par le service d'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal, c'est de faire pression pour obtenir des amendements législatifs.

Il faut bien comprendre que les enjeux, ce sont des enjeux de nature de la qualité du geste professionnel qui est posé et évidemment, si on donne un règlement qui prescrit une recette, on n'a plus à se soucier de faire face à la musique et de rencontrer le niveau professionnel qui est requis, même si, dans certains cas, ça peut être très difficile, qu'il faut faire des investigations puis que ça demande des travaux considérables.

Il est clair que nous sommes positionnés – et c'est la pensée fondamentale de l'ordre professionnel dont je suis l'administrateur – comme un ordre qui examine la valeur des immeubles d'un point de vue économique et non pas d'un point de vue physique et matériel. Et il est très clair que, s'il y a des services d'évaluation qui comptent des briques et des pierres, il est possible qu'ils aient des déconvenues lorsque va arriver le temps de faire des révisions de l'évaluation municipale. Alors, il y a de vieux problèmes dans ce dont on vous parle maintenant. Il faudrait être capables de démêler un certain nombre de choses.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Guérin, vous avez quelque chose à rajouter?

Mme Guérin (Francine): C'était quelque chose à répondre à M. Racicot lorsqu'il a parlé que les municipalités n'avaient plus les moyens de faire de l'évaluation sur la valeur marchande. Je poserais la question: Est-ce que c'est parce que ces valeurs-là baissent? Avant, elles avaient les moyens de le faire sur la valeur marchande et ça faisait leur affaire. Alors, il faut faire attention un peu là-dessus. Il faut regarder le contribuable; si c'est la façon la plus équitable de le faire pour le contribuable, je pense que c'est ça qu'il faut regarder.

Aussi, on parle que ça fait 20 ans que ça se discute, mais ça fait 20 ans qu'on discute en vase clos. Alors, je pense que, quand on veut arriver à des solutions, il ne faut pas toujours discuter en vase clos; c'est fort important d'avoir l'ensemble des intervenants.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Guérin. M. le député Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Merci, Mme la Présidente. Je pense que, les deux groupes, vous allez nous aider à bien comprendre s'il y a de la différence sur la formation professionnelle ou les connaissances professionnelles d'un membre de votre groupe par rapport à un membre de l'autre groupe. Nous autres, il faut nous aider à comprendre, là, parce qu'on entend le débat. Une courte réponse, si vous êtes capables; on va comprendre ça très vite si vous nous dites oui ou non.

Mme Viau (Céline): C'est très simple, c'est que les évaluateurs agréés qui sont membres de l'Ordre des évaluateurs agréés doivent détenir un baccalauréat. Ce sont donc des études de niveau universitaire avec un stage, un examen d'entrée et tout ça. Il y a beaucoup de nos membres qui sont dans l'Association des évaluateurs municipaux. Il y a aussi beaucoup de techniciens, je pense, et il y en a, je ne sais pas, d'autres, des avocats, je pense.

M. Mercier (Jean-Guy): Lorsqu'on parle...

M. Gauvin: Comment est-ce qu'on voit ça, de l'autre bord?

M. Mercier (Jean-Guy): Si vous permettez? O.K. Alors, au niveau de notre membership, nous avons des évaluateurs agréés qui sont signataires de rôles; d'autres qui, selon l'article 22 de la Loi sur la fiscalité municipale, peuvent détenir un permis de la Commission municipale en étant habilités à signer un rôle d'évaluation. Pourtant, on regroupe les gens qui oeuvrent dans le domaine de l'évaluation municipale; ça va inclure des avocats et ça va inclure aussi des techniciens.

Maintenant, au niveau de la formation, dont vous parliez tout à l'heure, moi, je suis évaluateur agréé, mon collègue Roy est aussi évaluateur agréé, M. Racicot détient un permis de la Commission municipale. Je pense qu'on a suivi les mêmes cours, qu'on est allés aux mêmes forums et je pense qu'on ne se dit pas: Tu n'es pas compétent ou, si tu es compétent, je le suis plus et tu l'es moins.

Il est vrai que l'évaluateur municipal doit avoir une connaissance générale sur l'ensemble des propriétés. O.K.? Mme Viau disait, tout à l'heure, qu'elle connaissait des évaluateurs agréés qui oeuvraient dans un type d'immeubles en particulier. Exemple, on me dit: J'ai des gens qui sont capables d'évaluer des Canadian Tire. L'évaluateur municipal, lui, il faut qu'il le sache, comment évaluer un Canadian Tire, l'hôtel Le Concorde, l'édifice du Parlement, le centre d'achats Place Laurier, etc. L'évaluateur municipal doit connaître tout ça. Et, lorsqu'il fait face à des gens de l'Ordre qui sont, eux autres, spécialisés dans une domaine, là, à un moment donné, ça devient un petit peu plus «touchy». Mais, lorsqu'on arrive dans les immeubles à vocation unique, c'est là qu'on dit: La valeur marchande, on ne veut pas que ça soit transgressé. Cette règle-là, on y croit dur comme fer, autant que l'Ordre peut y croire.

Et Mme la députée de Jean-Talon disait, tout à l'heure: Est-ce que, pour vous autres, la valeur marchande n'existe plus? Au contraire. Mais je vous ai dit que la valeur marchande, nous, on est capables de la mesurer. On est capables de la mesurer dans les centres d'achats, dans les hôtels, dans les édifices à bureaux, dans les bungalows, dans les blocs à logements. Pas de problème de ce côté-là. Mais, lorsqu'on arrive dans les immeubles à vocation unique où on sait qu'une papetière, ça ne se vend pas, qu'une cimenterie, ça ne se vend pas ou ça se ferme, qu'une aluminerie, ça ne se vend pas, puis qu'on dit: Cherchez la valeur marchande, bien, entre nous autres, là, amenez-moi-en du marché puis, si on peut en analyser avec des comparables, on va en faire de la valeur marchande. Mais on est démunis parce qu'il n'existe pas, ce marché-là. C'est aussi simple que ça.

Mme Delisle: O.K. Vas-y donc avec ta question, là.

La Présidente (Mme Bélanger): Allez avec les questions, puis, après ça, les réponses viendront, là. Parce qu'il ne reste pas tellement de temps. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Oui. En fait, ce qu'on retient, là: vous divergez sur deux points. Un groupe, c'est le rôle annuel qu'il souhaite et, pour l'autre groupe, le rôle triennal peut être une formule. En fait, l'autre, c'est la réglementation... En tout cas, je pense que j'avais noté deux divergences, là. Sur la réglementation, un groupe ne souhaite pas avoir de réglementation préparée par le ministère ou, du moins, ils veulent absolument y participer. Et vous insistez fortement pour que les services du ministère des Affaires municipales aient la responsabilité de préparer une réglementation pour encadrer les critères pour les édifices à vocation unique. Donc, il y a une différence. Je me demandais, et ça va peut-être vous permettre de répondre... Et de là était ma question: Quelle est la formation qui diffère les deux groupes? Il y en a peu.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Viau.

Mme Viau (Céline): Si je peux continuer à vous éclairer, enfin j'espère, la différence fondamentale entre les deux groupes, c'est que l'Association des évaluateurs municipaux est une association de membres d'intérêts convergents, dont le but est la défense des intérêts de ses membres, là, comme toute association, et c'est très bien ainsi, là.

Dans le cas de l'Ordre des évaluateurs agréés, l'Ordre regroupe autant – 500-500, à peu de chose près, là – d'évaluateurs municipaux qui confectionnent des rôles, qui se retrouvent souvent à l'AEMQ, que d'évaluateurs agréés qui contestent les rôles, qui sont en pratique privée, ou d'évaluateurs agréés qui sont membres du Bureau de révision de l'évaluation foncière, qui ont à trancher des valeurs. Et ce qui est différent, c'est que, nous, notre mission n'est pas l'intérêt de nos membres. Il peut arriver que ça aille bien ensemble, et tant mieux. Mais notre mission, c'est d'encadrer l'exercice de la profession au bénéfice du public, comme le Barreau le fait pour les avocats au bénéfice du public, comme l'Ordre des ingénieurs le fait pour ses membres, comme l'ensemble des ordres professionnels.

Alors, on réglemente l'admission à la pratique, la façon de pratiquer l'évaluation, que ce soit l'évaluation municipale aux fins d'assurance, aux fins de valeur marchande, de transactions, n'importe quoi, et la façon aussi d'inspecter et de policer, si vous me permettez, via le droit disciplinaire, nos membres qui ne pratiquent pas en conformité avec les règles de l'art. Alors, c'est vraiment deux missions complémentaires – c'est pour ça qu'on travaille régulièrement sur des dossiers et que, bon... – mais qui sont vraiment très différentes et qui éclairent nos points de vue différemment aussi, là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Mercier, là, en conclusion. Le temps est terminé.

M. Mercier (Jean-Guy): O.K., je vous remercie. Alors, j'entendais Mme Viau dire que l'Ordre a l'intérêt du public et aussi de ses membres. Maintenant, nous aussi, on a l'intérêt de nos membres, mais il ne faut pas oublier qu'on a aussi l'intérêt de nos employeurs et, par le fait même, l'intérêt du public qui est en arrière d'eux autres. À chaque fois qu'il y a un déplacement d'un immeuble – puis, moi, je reviens toujours à l'immeuble à vocation unique – il y a quelqu'un en bas qui doit payer la note, et c'est notre employeur qui est obligé de faire face à des remboursements qui sont énormes. Je vous remercie.

(16 h 40)

La Présidente (Mme Bélanger): Un petit mot, M. L'Écuyer.

M. L'Écuyer (Mathieu): Peut-être juste un mot là-dessus, parce qu'on a dû vous parler souvent des glissements de fardeau fiscal, très rapidement. Il faut comprendre que, si les valeurs de certains biens ne focussent pas dans le même sens que la valeur d'autres, si on taxe sur la valeur du patrimoine, il faut que ça se reflète au niveau de la taxation. Si ça cause un problème au niveau de la taxation, il y a des avenues différentes qui peuvent être celles de la tarification. Mais là c'est complètement... Il y a une distinction fondamentale à faire, croyons-nous, entre la pratique de notre profession et la fiscalité municipale.

La Présidente (Mme Bélanger): Un dernier commentaire, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Un tout dernier commentaire, parce que...

La Présidente (Mme Bélanger): Juste un commentaire, pas de réaction.

M. Gauvin: En fait, en mon nom personnel et peut-être du groupe de l'opposition, c'est que M. le ministre a fait allusion, tantôt, que l'opposition était contre les rôles triennaux. Je pense que c'est un problème que nous allons régler ensemble – parce qu'il est faux de croire ça – à l'occasion de l'article...

La Présidente (Mme Bélanger): De l'étude article par article.

M. Gauvin: ...de l'étude article par article du projet de loi.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Messieurs de l'Ordre des évaluateurs agréés et de l'Association des évaluateurs, nous vous remercions de votre participation, et on vous souhaite un bon retour.

M. Trudel: J'espère qu'on va vous retrouver au sein du même comité...

La Présidente (Mme Bélanger): On aimerait bien.

M. Trudel: ...pour le même objectif.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 42)

(Reprise à 16 h 45)

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous plaît. S'il vous plaît. À l'ordre. Alors, nous recevons le groupe du Comité des entreprises et Institut de développement urbain du Québec. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent.


Comité des entreprises sur la fiscalité municipale et Institut de développement urbain du Québec (IDU)

M. Pâquet (Jean-Marie): Alors, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous plaît! Si vous voulez attendre une petite minute pour qu'on se calme. Alors, ceux qui ont des discussions à faire, je leur demanderais d'aller les faire à l'extérieur. Alors, le porte-parole a la parole.

M. Pâquet (Jean-Marie): Mme la Présidente, au nom du Comité des entreprises sur la fiscalité municipale, Jean-Marie Pâquet, avocat. J'ai à ma droite, Pierre Turcotte, évaluateur, et, à mon extrême droite, M. André Bélisle, ingénieur, MBA et qui est président d'une société multidisciplinaire qui oeuvre, en très grande partie, en matière d'évaluation industrielle et commerciale. Et je laisse la parole à M. Charlebois pour l'IDU. Veux-tu te présenter?

M. Charlebois (Cameron): Tout de suite?

La Présidente (Mme Bélanger): Et nous présenter le monsieur au bout de la table.

M. Charlebois (Cameron): D'accord, je m'appelle Cameron Charlebois, président-directeur général de l'Institut de développement urbain, et je suis accompagné de M. Michel Dumais qui est président de la compagnie immobilière Securespace.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, comme le groupe précédent, on va vous donner à chacun 10 minutes pour faire votre présentation.

M. Charlebois (Cameron): D'accord.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Pâquet.

M. Pâquet (Jean-Marie): Mme la Présidente, j'ai assisté, depuis le matin, à vos travaux et la première question que je me pose à votre table, c'est: Où réside exactement l'urgence d'adopter maintenant le projet de loi n° 67, quand le gouvernement a formé un groupe de travail, je pense, sous l'égide du ministère des Finances, pour étudier quelle suite il donnerait aux recommandations de la commission D'Amours? Ce groupe de travail existe au niveau du ministère des Finances, et il y a une dizaine de recommandations de la commission D'Amours sur lesquelles le gouvernement ne s'est prononcé encore. Et il nous apparaît, à première vue, qu'il serait utile que la plus grande partie du contenu du projet de loi n° 67 soit adoptée dans le cadre de ce que d'aucuns devant vous ont appelé une réforme globale de la fiscalité municipale et que, quant à moi, je préférerais nommer suite aux recommandations de la commission D'Amours.

Pour ce qui est du bien-fondé d'un groupe de travail pour régler un paquet des problèmes qui se soulèvent en fiscalité municipale, il y a la CUM, ce matin, dans la bouche de M. Zampino, qui vous a dit qu'elle trouvait que c'était une bonne idée. Il y a le Barreau qui vous a dit qu'il trouvait que c'était une bonne idée. Il y a l'Ordre des évaluateurs qui vous a dit qu'il trouvait que c'était une bonne idée. J'ai entendu l'Union des municipalités du Québec qui vous disait que c'était une bonne idée.

Mon Dieu! pour une fois qu'en fiscalité municipale il semble y avoir une belle unanimité sur le fait que ce serait utile d'avoir un groupe de travail où, enfin, tous les intervenants se parleraient et mettraient sur la table des solutions pratiques, pourquoi ne pas laisser quelques mois à un groupe de travail comme celui-là pour produire un consensus sur un certain nombre de mesures qui fonctionneraient parce qu'elles seraient mises en place avec le concours de tous ceux qui sont appelés, dans la vraie vie, à oeuvrer quotidiennement avec ce domaine-là?

Où est l'urgence, Mme la Présidente? La seule question qui pourrait peut-être apparaître urgente c'est le gel des rôles d'évaluation pour permettre à la ville de Montréal de possiblement passer à travers un problème de liquidités. Et le gel de rôles, ça suppose qu'on reste avec le rôle triennal. On ne gèle pas un rôle annuel. Un rôle annuel, il est là à tous les ans. Bon, à ce moment-là, s'il y avait un gel de rôles comme mesure transitoire pour revenir à un rôle annuel en gardant la valeur marchande, ça serait une approche complètement différente que le gel de rôles baptisé désynchronisation qu'on voit dans le projet de loi n° 67.

(16 h 50)

Et, là-dessus, sur l'effet d'un gel de rôles, il y a deux éléments que j'aimerais soumettre à votre réflexion. J'entendais M. Zampino et M. Forcillo, ce matin, vous dire qu'on parle de 450 000 000 $ de remboursements sur 10 ans ou de 45 000 000 $ par année et que, donc, si on gelait le rôle de 1995 pour deux ans, on économiserait, pour deux ans, deux fois 45 000 000 $. Mais, si, pour 1995, 1996 et 1997, le rôle de 1995 fait l'objet de plaintes et que ça entraîne des remboursements de 45 000 000 $ par année, en le gelant pour deux années de plus, il va y avoir deux années de plus à 45 000 000 $ par année à rembourser; elle est où, l'économie? J'ai de la misère à la voir, Mme la Présidente.

Pour ce qui est des immeubles à vocation unique, je vous répète ce que je vous disais ce matin: Je crois encore que le groupe de travail pourrait rapidement, selon l'échéancier que le ministre pourrait établir et qui serait le nôtre, vous produire un package qui serait applicable et qui atteindrait l'objectif que M. le ministre poursuit. Et, au niveau de la révision administrative, également il serait très utile d'avoir un groupe de travail qui en arriverait à produire un package de révision administrative qui fonctionne.

Après avoir participé à des discussions et à des consultations sur la mécanique de révision administrative – j'ai participé moi-même à de telles consultations, et il y a eu des consensus d'établis avec le service d'évaluation de la CUM – je note avec beaucoup d'étonnement que le service d'évaluation de la CUM n'est pas présent devant vous. Pourquoi? Je me pose la question.

Et, pour ce qui est de l'industrie de la contestation, ce que j'ai entendu mentionner à quelques reprises par quelques intervenants, c'est drôle qu'on parle de l'industrie de la contestation quand il s'agit d'aider des citoyens, qu'ils soient corporatifs ou des personnes, à faire valoir des droits qui leur sont reconnus par des lois du Québec; tout d'un coup, on emploie avec un ton méprisant le terme «industrie de la contestation». Est-ce qu'il y a aussi une industrie de la défense et une industrie des droits de l'homme qui sont des ennemis publics?

Et, finalement, le dernier point, on a parlé de la décision Molson. M. L'Écuyer vous en a reparlé ce matin. J'ai entendu M. Racicot vous parler de la décision de Molson que je connais bien; c'est mon bureau qui l'a plaidée, et j'y ai participé moi-même. C'est drôle qu'on ne vous ait pas posé la question: L'évaluateur municipal a-t-il demandé, a-t-il constaté s'il y avait, chez Molson, de la désuétude fonctionnelle? Il y en a une forme de dépréciation qui s'appelle de la désuétude fonctionnelle. Et c'est ça, la question que l'évaluateur municipal doit poser. Et il n'a pas besoin de faire des modèles économiques ou de dépenser 100 000 $ en frais d'ingénieurs pour se poser la question: Y a-t-il de la désuétude, et est-ce que je dois en tenir compte? C'est mes remarques, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Pâquet. Alors, monsieur...

M. Charlebois (Cameron): Charlebois.

La Présidente (Mme Bélanger): ...Charlebois.

M. Charlebois (Cameron): C'est ça. Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, messieurs dames membres de la commission, je vous ai distribué un mémoire. D'abord, c'est une lettre vous transmettant le mémoire que nous avons déposé devant la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics. Le but, aujourd'hui, c'est de vous présenter surtout la lettre, si vous voulez; le mémoire, c'est pour votre lecture plus tard.

Alors, je viens à la lettre puis je pense que la manière la plus facile, c'est juste, tout simplement, de la lire. Puis, s'il y a des points que je peux ajouter en y allant, je vais le faire. D'abord, merci pour l'opportunité de vous présenter aujourd'hui nos points de vue sur le projet de loi, notamment, comme vous allez voir, par rapport à la désynchronisation du rôle d'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal.

Alors, l'Institut de développement urbain est un organisme indépendant et sans but lucratif qui regroupe des promoteurs, gestionnaires, propriétaires, investisseurs et professionnels de l'industrie immobilière au Québec. Nous avons pour mandat évidemment de défendre les intérêts de nos membres. À titre d'exemple – calcul vite fait, j'avoue – les membres de l'IDU versent au-delà de 125 000 000 $ à 150 000 000 $ par année en taxes foncières sur l'île de Montréal. Alors, ce n'est pas juste pour dire que nous sommes des compagnies fortes et solides; c'est pour dire que nous croyons avoir droit à la parole dans la question de la fiscalité, et nous vous remercions d'ailleurs, nous apprécions l'opportunité d'être entendus.

Le mode de financement des municipalités affecte particulièrement la viabilité même des investissements immobiliers au Québec. Conséquemment, le système de fiscalité municipale constitue l'enjeu premier qui mobilise l'IDU depuis 1991, d'abord; c'était la réforme Ryan, dans le temps.

Les membres de l'IDU s'opposent vivement à certaines dispositions du projet de loi sous étude, notamment à celles afférentes à la désynchronisation des rôles d'évaluation foncière. En ce sens, la Chambre de commerce du Québec, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le Conseil du patronat du Québec et le Conseil international des centres commerciaux – International Council of Shopping Centres – appuient nos représentations et, très particulièrement aujourd'hui, en plus de représenter nos membres, l'IDU Québec est le porte-parole nommément de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et du Conseil international des centres commerciaux.

Les points suivants énoncent nos principales préoccupations. Tout d'abord, comme ça a été dit souvent depuis le début des audiences, la désynchronisation représente, en fait, un gel ni plus ni moins des rôles d'évaluation. Le gel du rôle d'évaluation foncière fausse les règles du marché et crée une illusion de richesse foncière. Toutes les taxes foncières en sont affectées, y compris particulièrement les surtaxes sur les terrains vagues, les taxes et surtaxes non résidentielles, les taxes de mutation et les taxes d'affaires qui sont toutes basées sur la valeur au rôle. Alors, si on prolonge le rôle avec des fausses valeurs, on maintient ces taxes à des niveaux qui ne sont pas véritables.

Nous soulignons que les taxes sur terrains vagues et les taxes et surtaxes non résidentielles sont imposées sur la quasi-totalité des municipalités des régions de Montréal et de Québec. Croire que la surtaxe n'est un problème qu'à Montréal ou dans la ville de Montréal, ce n'est pas vrai; c'est une taxe qui est imposée dans la CUQ et à travers la Communauté urbaine de Montréal, et qui cause autant de problèmes à l'extérieur de la ville de Montréal. La valeur d'un immeuble est fonction de ses revenus, et ceux-ci sont sujets à une fluctuation qui, sous le système d'évaluation trisannuel, n'est déjà pas suffisamment prise en considération. Une désynchronisation des rôles pour retarder la considération de ces fluctuations ne vient, en fait, qu'aggraver une situation qui est déjà très mauvaise.

Les dispositions du projet de loi sous étude engendreront 75 000 000 $, aux dires de Mme Danyluk et M. Forcillo, en revenus annuels additionnels pour les municipalités, et ce, par le biais d'excédents de taxes perçues en fonction de valeurs foncières gonflées. Ces taxes, comme vient de dire M. Pâquet, qui normalement seraient remboursées aux contribuables, ne pourront être contestées, et les autorités qui les collectent n'auront aucun compte à rendre.

Les membres de l'IDU reconnaissent que tous et chacun doivent acquitter une juste part des coûts municipaux. Aussi, sans même avoir recours aux dispositions prévues au projet de loi, les municipalités ont déjà tous les outils nécessaires à la révision de la répartition des charges fiscales entre les secteurs résidentiels et non résidentiels qui semblent être le début ou la source même du débat sur la désynchronisation.

Des améliorations significatives et des solutions durables dans le financement municipal au Québec s'imposent et sont possibles par le biais d'une réforme mettant à profit le savoir et les efforts du gouvernement, des villes et du secteur public. Nous réitérons notre demande, d'ailleurs déjà acheminée au ministre, que cette disposition du projet de loi soit réfutée, que les municipalités déposent les rôles dans les délais prévus par la loi et que l'on procède sans plus tarder à une refonte fondamentale du système de fiscalité municipale afin de réduire la dépendance excessive qu'ont les municipalités sur les valeurs foncières.

Juste quelques exemples – deux secondes – que j'ai apportés; ça peut paraître «anecdotal», mais c'est tout à fait commun. Un terrain vacant à Pierrefonds, à Montréal, dont l'évaluation municipale est de 5 225 000 $, vendu cet été pour 600 000 $, sauf que l'évaluation ne va pas descendre. Si on prolonge le rôle ou si on gèle le rôle, cette valeur va rester comme elle est. L'édifice sur l'autoroute Décarie à Montréal, évaluation municipale de 8 813 000 $, a été vendu cet été pour 800 000 $. Cette valeur ne va pas baisser, c'est sur le territoire de la ville de Montréal. J'ai ici des livrets d'une compagnie d'encan d'immeubles. Il n'y a pas un exemple d'une mise à prix qui est de plus que 60 % de l'évaluation municipale. Ça, c'est tout dans la région de Montréal.

Et aussi j'ai une étude ici non vérifiée, j'avoue, qui indique, en effet, que, sur un échantillonnage du marché de Montréal, les valeurs marchandes des immeubles sont systématiquement de 15 % à 30 % inférieures à la valeur municipale et aussi ces valeurs-là fluctuent entre catégories d'immeubles. Alors, un gel du rôle va sérieusement désavantager différentes catégories de propriétaires. C'est pour ces raisons d'ailleurs que l'IDU, au nom des ses membres, qui sont des contribuables, comme je l'ai mentionné tantôt, est fortement contre un gel du rôle, et on vous demande à nouveau de revenir à la réforme que vous avez promise à maintes reprises durant les dernières années. Merci.

(17 heures)

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Charlebois. Alors, non, le temps, là... On est rendus à la période des questions. M. le ministre.

M. Trudel: Bon, merci de vous présenter devant nous. J'ai eu l'occasion, M. le président de l'IDU et M. le président du Comité des entreprises sur la fiscalité, de vous rencontrer plusieurs fois. Bon, on est évidemment dans un domaine extrêmement sensible et puis on n'a pas, oui, effectivement, à forcer trop les mots pour l'industrie de la contestation, d'un côté; on va mettre ça dans la balance avec la loyauté des employeurs, de l'autre côté. Bon, écoutez, quand on est à déterminer la valeur du bien sur lequel on va être taxé, c'est normal qu'il y ait deux parties pour représenter les deux aspects de la question, celui qui veut en avoir pour sa juste valeur, l'autre qui veut avoir la juste valeur, et un troisième qui ne veut pas en payer plus que la juste valeur. Bon, c'est normal qu'on soit dans ce processus-là et, si c'est vigoureux quelquefois, je pense bien que ça appelle justement les mécanismes qu'on souhaite installer pour en arriver à ce qu'il y ait le moins de frictions possible et le plus d'équité possible, parce que les deux grandes notions, c'est équité et valeur marchande en soi, payer, mais payer sa juste part sur la valeur marchande du bien que l'on possède.

Par ailleurs, vous n'êtes pas que des professionnels du domaine de l'évaluation, ou des professionnels développeurs, ou des entrepreneurs; vous êtes aussi des citoyens, des citoyens corporatifs, mais des citoyens de la scène québécoise. C'est clair que, dans la question qui nous est posée et dans ce qui est avancé pour fins de discussion ici, il y a la volonté de se retrouver sur une plaque tournante pour modifier un système pour atteindre les objectifs d'équité et de valeur marchande.

Je dirais qu'un des bouts du continuum, ce serait de revenir, comme le suggère la commission D'Amours, à l'évaluation annuelle, puis, par ailleurs, on est installés dans un processus, actuellement, de rôles triennaux et une situation assez particulière sur l'île de Montréal. Est-ce que, vous, vous avez déjà réfléchi sur, je dirais, le moyen terme qui fasse en sorte qu'en toute responsabilité sociale, en toute compréhension de la situation... Comment on peut virer, comment on peut tourner pour en arriver à cette espèce d'objectif d'équité et à se rapprocher toujours de la sacro-sainte notion importante, qu'on doit protéger, je le répète, de la valeur marchande, en particulier sur l'île de Montréal? Est-ce que vous avez examiné comment on pourrait exercer ce tournant – je vous le dis tout de suite, là – autrement qu'en pelletant en avant, autrement qu'en disant: Plus tard, plus tard? Est-ce que vous avez regardé cela et avez-vous des suggestions à nous faire?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Pâquet.

M. Pâquet (Jean-Marie): J'ai une suggestion précise à vous faire, M. le ministre, et c'est peut-être d'expliciter celle que je vous ai déjà faite non pas de pelleter vers l'avant pour un an ou pour deux ans, mais de donner l'occasion aux divers partenaires qui vivent la fiscalité municipale, qui vous ont dit à cette table, depuis le début de la journée, du moins je les ai entendus: On va s'asseoir ensemble, donnez-vous un échéancier d'un mois, un mois et demi, deux mois, puis on va vous en trouver des solutions par consensus. C'est ça qu'on vous propose, autant pour les mécanismes de révision administrative que pour une période transitoire, si besoin est, pour revenir aux rôles annuels, que sur les mécanismes d'évaluation d'immeubles plus difficiles à évaluer, qui commenceraient d'abord par de la bonne information aux évaluateurs pour leur permettre de faire un travail qui va diminuer le nombre de plaintes, etc.

La solution qu'on vous propose, c'est: Permettez-nous de nous asseoir ensemble autour d'une table, avec la CUM, avec la ville de Montréal, avec les unions, avec les évaluateurs qui représentent tout ce beau monde là, et on va vous en trouver une solution. On va vous en «packager» une; c'est une histoire d'une couple de mois. La solution la plus pratique qu'en mon âme et conscience je peux vous suggérer, c'est celle-là.

M. Trudel: J'aurais bien le goût de vous dire: Mais comment ça se fait que... Il n'y a personne qui vous a empêchés de vous asseoir ensemble jusqu'à maintenant pour la dégager, cette piste-là, mais je comprends très bien que c'est de redécrire la totalité du problème que de dire cela. Et je ne veux pas qu'on ait, non plus, une fuite en avant. Si on dépose le projet de loi aujourd'hui, à la présente session, et qu'on insiste vraiment pour montrer la volonté, c'est parce qu'on est saisis avec une problématique qui n'est pas qu'une problématique fiscale; c'est une problématique sociale importante sur l'île de Montréal. On n'est pas rien que sur les coins en termes de situation problématique; nous vivons une situation cruciale pour l'île de Montréal et on ne peut pas juste dire: Oui, bon, plus tard, on va regarder cela.

Je veux bien qu'on intensifie les efforts au cours des prochaines semaines, mais peut-être que nous pourrions examiner aussi le fait de dire: Si on n'arrive pas au résultat, bien, le projet de loi sera là pour s'appliquer, s'il est promulgué. Parce que, ça aussi, on peut réfléchir sur cette question-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Turcotte.

M. Turcotte (Pierre): Oui. M. le ministre, à plusieurs reprises, on vous a rencontré et, je reprends votre expression, on n'est pas là pour pelleter par en avant. Vous savez très bien qu'un gel de rôle, pour la ville de Montréal, M. Forcillo était ici ce matin pour vous le dire – M. Zampino a corroboré ça – lui, il pense que c'est une économie de 50 000 000 $ par année; c'est ce qu'il vient vous demander. Il s'en fout de l'évaluation puis de la valeur marchande. Il nous parle de vache sacrée, de sacro-sainte valeur marchande, mais ce qu'il veut vous dire, c'est: J'ai des problèmes financiers, ça me permet d'économiser 50 000 000 $ par année.

Ça permet, comme M. Charlebois vous l'a décrit tout à l'heure, à un nouveau propriétaire d'immeuble, qui a payé l'immeuble à 10 %, 25 % ou 50 % de la valeur au rôle d'évaluation, de continuer pour deux ans supplémentaires à payer sur une valeur qu'il n'a pas. Chacun de nous, ici, autour de la table, on a à faire notre rapport d'impôts sur le revenu. On est imposés sur ce qu'on a gagné dans cette année-là, pas quatre ans puis cinq ans avant. Si on ne l'a pas, l'argent, si le centre commercial, il est à 50 % occupé, M. le ministre, pourquoi paierait-il comme s'il était occupé à 100 %? Parce que, pour M. Forcillo, M. Zampino, il y a un problème de 50 000 000 $ par année? L'injustice...

Gelons les rôles. Faisons une offre – et, vous le savez, je vous l'ai déjà faite – à la Communauté urbaine de Montréal: On gèle les rôles pendant que vous vous organisez, mais on rouvre le droit de plainte. Ça, ce serait la justice, ce serait reconnaître au nouveau propriétaire de cet immeuble-là, qu'il a payé 600 000 $ et qui était porté au rôle à 5 000 000 $ ou 6 000 000 $, le droit de dire: Si je ne suis pas content, au moins, je vais avoir le droit de me plaindre.

Ça va permettre aussi – ce dont on n'a pas parlé autour de la table, et vous le savez très bien – de rééquilibrer la justice sur les droits de mutation. On paie des droits de mutation. Vous le savez, ça a été fait sous le gouvernement précédent; à un moment donné, pour remplacer la taxe de vente, on a mis un droit de mutation, on a caché, on a camouflé... On est rendus avec des droits de mutation sur les immeubles non résidentiels qui ont augmenté de 450 % en un an. C'est incroyable. C'est incroyable. Les gens ne se rendent pas compte.

Dans la crise économique où on est, quand les gens viennent vous dire, ici autour de la table – je répète encore: La CUM ce matin vient vous le dire – que les immeubles vont baisser dans le non-résidentiel de 25 % à 30 % dans le dernier rôle 1995 et que, s'ils avaient déposé, possiblement ce serait 15 % à 20 %, donc, si j'additionne les deux, ça fait que le propriétaire d'un immeuble non résidentiel, il a perdu en valeur 50 %. C'est ça qu'ils vous ont dit ce matin, hein, mais ils disent: On va continuer à les taxer sur 100 % de la valeur que ça valait au 1er juillet 1993. C'est incroyable.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Charlebois.

M. Charlebois (Cameron): Oui. Si vous me permettez, en réponse à la question du ministre, en effet, nos membres, les propriétaires d'immeubles, sont des citoyens et ils reconnaissent leurs devoirs. On l'a dit devant vous, on l'a dit depuis 1991 qu'on est prêts à payer notre part. Il s'agit que le gouvernement établisse des politiques qui fixent, ou qui réglementent, ou qui établissent les parts entre les secteurs résidentiel et non résidentiel, et qu'on travaille avec équité à l'intérieur d'un système comme ça. Mais qu'on revienne au rôle annuel, qu'on revienne à la pleine reconnaissance de la valeur d'un immeuble en fonction de ses revenus et qu'on cesse les distorsions. Je me rends compte que j'ai sauté ce petit paragraphe là dans ma lettre, mais qu'on cesse les distorsions entre propriétaires.

Comme l'explique M. Turcotte, j'ai un immeuble, cette année, qui est plein et je paie des taxes en fonction de ça. Mon voisin a un immeuble qui est vide; il paye des taxes en fonction de ça. D'ici un an et demi, ma bâtisse se vide; la sienne se remplit, sauf que mes taxes ne baissent pas et que les siennes ne montent pas. Puis ça, ça fausse les règles du marché fondamentalement. Que ce soit le marché de la location d'espaces, que ce soit le marché de la vente d'immeubles, que ça soit n'importe quel marché touchant l'immobilier, ça le fausse. Alors, on a dit depuis longtemps qu'on est prêts à accepter notre part.

(17 h 10)

Et d'écouter la CUM... Je ne veux pas être critique en l'absence de ces gens-là, mais je me suis présenté personnellement devant le conseil de la CUM, en 1993, quand il entretenait une motion demandant un gel du rôle d'évaluation, un gel permanent. Il y a trois ans de ça. C'est revenu à quelques reprises depuis et, maintenant, M. Zampino, en parlant avec moi personnellement, a dit: Ah non, c'est pas un gel qu'on veut; c'est vraiment la désynchronisation. C'est facile de le dire, quand la désynchronisation, ce n'est qu'un gel.

Alors, vous parlez qu'on n'a pas eu le temps de trouver des solutions. Ça fait depuis 1991 qu'on demande de s'asseoir avec le ministère, avec le gouvernement, avec les municipalités et de trouver cette solution. Il n'y a jamais eu réponse à l'appel. Pas une fois. Puis, aujourd'hui, de dire: C'est la onzième heure, c'est une crise, il faut faire quelque chose, on a de la misère à accepter ce raisonnement-là, parce que ça bouillonne depuis cinq ans. Puis ce n'est plus acceptable de continuer de même.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dumais, vous avez quelque chose à rajouter?

M. Dumais (Michel): Oui, Mme la Présidente. M. le ministre, en réponse à votre question, à nouveau, simplement pour appuyer et ajouter peut-être mes commentaires à ceux de mes collègues. Le projet de loi n° 67, jusqu'à quel point ça tente de régler les problèmes de Montréal, jusqu'à quel point, dans ce document-là, on tente de régler les problèmes de Montréal, ça représente peut-être 50 % du contenu. Moi, je vous répondrais de la façon suivante à votre question: Montréal, c'est peut-être une priorité et ça ne règle pas tout, mais, si on tente de trouver une solution pour Montréal, on va peut-être régler en bonne partie le reste des questions qui sont débattues maintenant devant cette commission-là.

Pour moi, en tant que citoyen de Montréal, nouveau citoyen, en tant que propriétaire foncier aussi depuis quelques années, je suis à même de constater l'étendue des problèmes de cette ville-là. Non pas que je ne l'aime pas, je l'apprécie à tous les jours, mais, en même temps, je me dis qu'il y a des urgences. On peut parler de temporiser et de tenter temporairement de régler les problèmes de cette ville-là. Vous parliez, tout à l'heure, de fuite en avant. Je l'avais écrit avant que vous le mentionniez et je trouvais qu'on ne faisait que transporter des problèmes auxquels on devra faire face un jour, dans deux ans, dans trois ans.

Pour moi, le constat de Montréal, aujourd'hui, M. le ministre et Mme la Présidente, c'est que, si on parle d'eau – parce qu'on parlait d'eau au cours des derniers mois; ça faisait le sujet des manchettes des journaux – il se consomme per capita deux fois et demie plus d'eau à Montréal qu'à Toronto. Il y a une raison pour ça. On pourra en parler. Mais je veux juste vous dire ça. Le plancher d'emploi coûte au moins 25 000 000 $ de plus par année. La tarification pourrait être imposée davantage. Ça fait longtemps qu'on en parle, mais il n'y a pas grand-chose de fait. On parle de privatisation. Je sais que c'est dans l'air depuis quelques mois, et vous êtes très conscients de ce qui se dit et très préoccupés aussi par les tentatives de la direction actuelle de privatiser certains services.

On voit aussi que, globalement, depuis quelque temps, il y a un fort manque de leadership, un fort manque de vision. Quand on pense à Montréal, avec les problèmes que Montréal vit, c'est le cancer du Québec. C'est une grosse partie, c'est l'avenir du Québec qui est accroché à ça. Peut-être que j'exagère, mais, pour moi, si Montréal ne connaît pas une certaine relance, un certain dynamisme dans les prochaines années, c'est tout le Québec qui va en souffrir.

Selon une dernière étude – pour vous donner des informations dont les gens, ici, ne sont peut-être pas au courant – conduite par un service de la ville de Montréal, 90%, M. le ministre, des futurs acheteurs qui veulent s'acheter une maison, des jeunes couples, ont l'intention de le faire en dehors de la ville de Montréal. Donc, l'image que présente actuellement la ville de Montréal est négative aux yeux de la plupart des citoyens de la région. Je ne pense pas qu'avec ce que vous proposez là vous allez régler ces problèmes-là et que vous allez changer les tendances, à savoir qu'il y a plus de gens qui vont avoir le goût de s'en venir à Montréal demain matin.

Finalement, je vous dirais ceci, un peu comme l'Ordre des évaluateurs vous l'a suggéré tout à l'heure: Il y a peut-être un cas particulier, Montréal est un cas particulier. Montréal doit être traitée différemment, on en convient. Montréal, c'est finalement le résultat de ce que je viens d'expliquer. C'est, pour nous, 25 ans de mauvaise administration, de suite d'erreurs, etc. C'est malheureux, mais, je veux dire, un jour ou l'autre, il va bien falloir que quelqu'un au niveau politique – et je suis conscient que ça prend un courage énorme; vous pensez peut-être que c'est à votre successeur que ça devrait incomber, cette responsabilité-là – quelqu'un mette ses culottes puis qu'il dise: C'est fini.

Si Montréal a besoin de 50 000 000 $ cette année, comme ça semble être le cas, pour régler son problème de budget, bien, faisons-le. Mais, entre-temps, par ce qu'on essaie de faire, en plus de vouloir protéger une ville, puis on ne règle rien, on crée énormément d'injustices et d'inéquités. L'IDU que je représente ici...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dumais, le temps avance, puis je pense que le ministre a une autre question à poser.

M. Dumais (Michel): Oui, mais juste pour finir, là, l'inéquité et l'injustice...

La Présidente (Mme Bélanger): Parce que le temps est limité.

M. Dumais (Michel): ...ce n'est pas juste pour les grandes sociétés; c'est aussi pour les petits propriétaires. On parle de 25 % à 30 % de l'évaluation qui est trop élevée. On vit dans un milieu artificiel; il va falloir qu'à un moment donné la réalité revienne sur terre pour tout le monde.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Dumais. M. le ministre, une petite question.

M. Trudel: Oui, bien, très brièvement. Bon, je laissais aller M. Dumais sur cette description où on a, au moins, la même perception des choses au niveau de la réalité de Montréal. Et je ne pense pas qu'il y ait aucun autre gouvernement qui ait pris autant d'actions que, nous autres, on en a pris pour en arriver à solutionner ça. Par ailleurs, on ne peut pas tout solutionner, non plus, sans, oui, effectivement, en appeler au concours de tout le monde, à toutes les capacités sur l'île de tous les intervenants. Et c'est pour ça qu'il faut essayer de trouver les meilleures méthodes, les meilleures approches, les meilleurs facteurs à mettre en jeu pour en arriver à repartir la roue du développement avec davantage de création d'emplois et davantage de personnes, d'entreprises qui vont réhabiter l'île de Montréal.

Quand on met 21 500 000 $ à Montréal dans l'habitation, c'est précisément pour en arriver à avoir du logement de qualité à un prix abordable sur l'île. Quand on tâche d'en arriver à une solution pour faire en sorte que ce soit fiscalement aussi attrayant sur l'île de Montréal, que, nous, la taxe de vente, on va la retourner à 100 % et qu'on a pris ces politiques au niveau des villes-centres qui vont retourner 14 000 000 $ l'an prochain supplémentaires dans la TGE pour la ville de Montréal, bien, c'est parce qu'on s'attaque aux situations, qu'on s'attaque aux problèmes et qu'on veut en arriver à des résultats. Ce à quoi on veut en arriver donc, ici, c'est à poser d'autres gestes où on serait davantage axé sur la production que sur un tiraillement qui nous amène finalement à gaspiller de l'énergie qui serait autrement investie au niveau du développement. C'est ça qu'on cherche ici et c'est pourquoi on a fait la Commission sur la fiscalité également.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Pour moi, le ministre, Mme la Présidente, a peur de ne pas avoir de cadeau de Noël, ça fait qu'il s'en fait lui-même. À l'entendre parler, c'est le seul gouvernement qui a fait... c'est-à-dire que son gouvernement a fait plus en deux ans et demi...

M. Trudel: Dans le Grand Montréal, pour son efficacité?

Mme Delisle: En pelletage, oui, sûrement.

Mme la Présidente, j'aimerais revenir aux petits propriétaires parce que je suis contente qu'on l'ait soulevé. Je pense qu'il doit y avoir une certaine équité, là, dans la discussion. Si, depuis le début, depuis juin dernier, nous avons été très, très, très mal à l'aise avec ce qui était à l'époque l'article 143 du projet de loi n° 24, qui est devenu textuellement sans même l'ombre d'un changement d'une virgule l'article 53 dans le projet de loi n° 67, c'est justement à cause des petits propriétaires. Mais, pour moi, petit propriétaire, ce n'est pas juste le propriétaire résidentiel; il y a aussi le petit propriétaire non résidentiel.

(17 h 20)

Je sympathise beaucoup avec le gros propriétaire parce que finalement toute la démonstration a été faite, je pense, aujourd'hui: je pense que c'est hors de tout doute que c'est inévitable partout. Mais il faut y penser, à ces gens-là et à leur droit, le droit de payer des taxes, puisque c'est basé sur du foncier, puisque les municipalités se financent à partir du foncier, «all the way». Je veux dire, il n'y en a pas d'autres, puis c'est des taxes; on a beau ne pas aimer ce mot-là, mais c'est comme ça que ça fonctionne dans une municipalité.

J'ai posé la question à M. Zampino ce matin: Qu'est-ce qu'il répondrait à ces gens-là, à quelqu'un qui aurait une propriété de 100 000 $? C'est l'exemple que j'utilise, je pense, de façon assez intelligente depuis le début: vous avez une propriété de 100 000 $, vous payez des taxes là-dessus. Votre propriété ne vaut pas plus que 90 000 $ – mettons que c'est réaliste de penser ça – ou 92 000 $; vous continuez de payer des taxes sur 100 000 $. Vous vendez à 92 000 $; vous payez des taxes sur 100 000 $ et les droits de mutation sont encore sur 100 000 $, et ainsi de suite pour deux, trois ans. M. Zampino, avec tout le respect que je lui dois, m'a dit que, en tout cas, je n'avais pas raison d'aller dans ce sens-là. Ce n'est pas tout à fait comme ça qu'il l'a dit, mais c'est comme ça que c'est ressorti.

Mais je pense qu'il faut y penser à ça aussi. Et, quand le ministre nous dit qu'il y a une problématique sociale, je suis d'accord avec lui. Je suis d'accord avec le ministre des Affaires municipales, il y a un problème majeur, puis ma collègue est encore mieux placée que moi pour parler de Montréal, puisqu'elle y vit et elle vit quotidiennement, comme vous d'ailleurs, ces problèmes-là.

Alors, le juste milieu, il est où? Ou les municipalités, dont Montréal, puis là c'est une hypothèse, vont devoir vivre avec la réalité qui est la suivante: un nouveau rôle qui reflète la réalité économique, donc une baisse importante, et réajuster... On peut réajuster le taux de taxes, on peut le faire avec tous les éléments dont a parlé M. Pâquet tout à l'heure, il y en a. Mais, si ça nous répugne à ce point, pour des raisons qui sont assez évidentes, bien, là, il va falloir qu'on se serve un peu de sa tête puis qu'on décide ce qu'on veut. On veut bien gérer ou on veut absolument rester là, au pouvoir. Je m'excuse, mais c'est ce que je pense.

Mais il n'en demeure pas moins que la réalité est là. Comment on vit avec la situation économique de Montréal, Montréal qui a un problème majeur au niveau des finances? Alors, c'est ça, la réalité; c'est comme ça que je la vois. Vous avez offert votre collaboration. Moi, je dirais au ministre: Je pense que, depuis ce matin, il y a Me Laflamme qui a mentionné que son groupe était prêt à le rencontrer, que ça faisait plusieurs fois et qu'il y avait eu une fin de non- recevoir, pas du ministre. Je ne dis pas que c'est le ministre; en tout cas, je ne sais pas de quelle façon ça s'est fait, mais il n'y a certainement pas eu de réponse à leur demande. Votre groupe l'a mentionné, vous vous êtes offerts à maintes reprises; les deux groupes qui vous ont précédé ont dit la même chose.

Moi, je pense que, si on a pu, dans un délai très court, pondre un rapport sur la fiscalité – le ministre l'avait tout à l'heure – qui est très bien fait par Alban D'Amours, donc quelqu'un qui était externe, pourquoi le ministre ne met pas sur pied, dès aujourd'hui, un comité composé d'experts? Ce comité pourra, dans un échéancier très serré, j'en conviens, puisque tout le monde s'entend pour dire: Retirons l'article 48, retirons l'article 53 et peut-être même la révision; en fait, excusez-moi, mais scrapons le projet de loi et revenons au printemps avec une législation qui corresponde à la réalité... C'est ça, je pense, que je retiens des messages.

Maintenant, les solutions magiques, je n'ai pas l'impression que tout le monde en a, mais, monsieur, je ne sais pas si vous pouvez répondre à mon allocution.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Turcotte.

M. Turcotte (Pierre): Pantoute, certainement pas.

Mme Delisle: Mais je voulais faire un «wrap-up».

M. Turcotte (Pierre): Mais, surtout, à votre premier intérêt, Mme la députée, sur les petits propriétaires.

Mme Delisle: Oui.

M. Turcotte (Pierre): On nous attaque, on nous nomme méchante industrie de la contestation, mais vous savez qu'il y a des petits propriétaires aussi qui contestent, qui vérifient. Comme, nous autres, on vérifie les impôts, les taxes qu'on paie, la TPS, la TVQ quand on va acheter quelque chose, quand on fait notre rapport d'impôts, il y a des gens aussi qui vérifient leur compte de taxes municipales. Vous avez été aussi mairesse; alors, je pense que vous savez c'est quoi, des citoyens qui pensent qu'ils paient trop cher de taxes.

Mais, moi, je suis évaluateur et je vous dis: Malheureusement, c'est votre gouvernement qui était là, à ce moment-là, quand vous avez amené les rôles triennaux. J'étais à l'Ordre, j'étais premier vice-président de l'Ordre des évaluateurs, à ce moment-là. J'étais de ceux qui disaient: C'est effectivement pelleter par avant. Personne n'avait prévu, en 1988, la récession, hein, ni moi; personne n'avait prévu ça. Les économistes disaient que ça allait bien; en 1988-1989, ça allait très bien. Puis on est arrivés avec les rôles triennaux. Malheureusement, on n'est plus dans une période inflationniste; on est dans une période déflationniste, Et là le banc de neige en avant, il ne grossit pas; il fond, il fond comme neige au soleil, et là on a des problèmes.

Parce que, quand on a une baisse d'évaluation de valeur marchande sur votre propriété de 100 000 $ qui baisse à 92 000 $, ça, c'est en un an. Alors, la manière de corriger pour ces petits propriétaires là, c'est d'avoir un rôle annuel pour corriger la situation tout de suite au bout d'un an. Si on attend trois ans, ce n'est plus 92 000 $ qu'elle vaut; c'est 75 000 $. Mais on est taxé sur 100 000 $. Ça, c'est un gros saut, madame; ça, c'est un problème.

Revenons aux rôles annuels. On nous dit qu'on n'a pas les équipes pour le faire. C'est drôle, hein, ce matin – puis ça, M. le ministre, il le sait – les fonctionnaires, tous les gens qu'on a rencontrés ont dit: On a un problème sérieux; les évaluateurs qui font les rôles municipaux sont rendus que 80 % de leur temps sert à défendre des contestations. Mais, moi, je vais vous dire une chose: Quand on a amené la réforme, en 1980, sur la fiscalité municipale puis qu'on avait des rôles annuels, savez-vous ce qu'ils faisaient, 80 % de leur temps, les évaluateurs municipaux? Ils faisaient de l'évaluation, parce qu'ils n'avaient pas autant de contestations.

Parce que, si vous êtes petit propriétaire d'une propriété de 100 000 $, mais qu'on vous dit qu'on va vous la geler pour trois ans, puis que vous voyez qu'on est en récession, bien, vous allez déposer une plainte au cas où. Alors, c'est pour ça qu'il y a tellement de plaintes qui sont déposées puis qu'il y a tellement de plaintes aussi où les gens ne se sont même pas présentés. Il y a eu du «au cas où». Reportez le problème sur la personne qui trouve que sa maison, à 100 000 $, est trop évaluée, puis qui dépose une plainte. Il y a un petit ticket modérateur puis tout ça. Vous savez, Mme la mairesse – je vous dis ça parce que vous avez été mairesse – que ces gens-là ne se plaignent pas sur le 100 000 $; ils se plaignent sur le compte de taxes qui est arrivé. Ils ne le savent pas, hein? C'est ça dans la vraie vie de tous les jours. Par contre, le propriétaire de 5 000 000 $ puis de 6 000 000 $ puis de 10 000 000 $, lui, il sait qu'il se plaint sur la valeur, puis il sait pourquoi aussi.

Mme Delisle: M. Charlebois...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bélisle.

M. Bélisle (André): Oui. Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, on a eu l'occasion de se parler quelques fois. Vous avez dit quelque chose de très important, tantôt: La fiscalité, c'est un problème de société et ça nous concerne tous. Je sais bien que je ne vais pas vous faciliter la tâche en vous disant ça, mais je pense que toutes les personnes dans la salle ici, on est tous fiers d'être québécois. J'étais à Toronto, hier, M. le ministre, dans un colloque sur la fiscalité municipale, qui renfermait des experts de partout au Canada et des États-Unis, des gens qui représentaient autant les corps publics. Alors, il y avait des gens de la Nouvelle-Écosse qui dressent les rôles là-bas, il y avait des membres de bureaux de révision de la province de l'Ontario. Je pense qu'il y avait là un groupe de personnes fort intéressant.

Et le système québécois est vu par ces gens-là, depuis longtemps, comme un très bon système. On est vus comme ayant... On était à l'avant-garde, sauf qu'on constate – puis, c'est un peu désolant d'entendre ça – que le système se dégrade depuis un certain temps. Je pense que je vous l'ai déjà dit, j'ai eu la chance de vivre la réforme de 1980 qui était évidemment mise de l'avant par votre parti, M. Parizeau en tête. C'était quelque chose d'assez extraordinaire qui s'est fait à ce moment-là, qu'on n'arrête pas de dégrader depuis.

Encore une fois, tout le monde ici, on est prêt à travailler. On pense qu'on a fait déjà énormément de bénévolat, on est prêt à en faire encore. Il me semble que c'est prématuré, et je répète ce qui a déjà été dit: Donnons-nous quelques mois pour regarder ces problèmes techniques là, et je pense qu'on pourrait y arriver. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Moi, je veux reprendre un peu sur la solution. Je pense qu'on ne peut pas... D'abord, il faut évidemment féliciter la volonté d'agir, honnêtement... Je pense que tout le monde, ici, après cette journée, réalise qu'il y a effectivement un problème majeur, et il est devenu encore plus gros à cause justement de cette crise qui, on nous disait même, est supérieure, au niveau de l'immobilier, à la dernière crise, hein? Parce qu'on disait que l'immobilier, à la dernière crise, avait baissé à peu près de 15 %; maintenant, on parle de 30 %, 35 %, 40 %. Alors, là, on fait face, tout le monde ensemble, à quelque chose, on s'en aperçoit, là, qu'on ne peut pas pelleter en avant, comme vous dites, qu'il faut absolument solutionner, parce que, je pense que tout le monde va y goûter. Et, si Montréal périclite, bien, c'est la CUM; après ça, ça s'élargit, hein, c'est les banlieues, puis, ensuite, aussi c'est les régions.

(17 h 30)

Alors, cela dit, moi, je pense que la lueur d'espoir dans tout ça, c'est effectivement le comité qui a été formé après la commission D'Amours. Puis ce que j'entends, Me Pâquet, ce que vous dites, c'est que, si on gelait pendant un an – on le dit à tout le monde – je pense que les gens seraient capables de l'accepter, si on en arrive à dire: On le fait, là, mais pour une solution permanente. Je pense que la pause d'un an serait même bien reçue si, quelque part, on en arrivait, justement avec un échéancier précis, à dire: Après cette année-là, on va arriver avec des solutions permanentes.

Est-ce que c'est le rôle annuel? À cause de la crise... Quand on a fait le rôle triennal... D'abord, M. Zampino nous a dit ce matin, si j'ai bien entendu, qu'ils avaient demandé le rôle triennal quelque part, à Montréal et ailleurs. Et on s'aperçoit aussi que, dans les autres municipalités en région, ils ne faisaient pas le rôle; ils le reconduisaient automatiquement. Alors, on s'est dit: Bon, bien, pourquoi, hein? Alors, on fait un rôle triennal, puis tout ça. Ça, c'est bon, là, quand on est en phase inflationniste. Mais, quand on est en crise, ce n'est pas évident. Puis peut-être que la solution effectivement ça serait de revenir à un rôle annuel. Mais, cela dit, il faut absolument le travailler avec les villes parce que les villes, ce matin, nous disaient qu'elles ne seront pas capables de fournir dans un rôle annuel, tu sais.

Alors, vous savez, nous autres, on est ici puis, quelque part, on a des opinions contradictoires. Puis je me mets à la place du ministre aussi qui entend ça, là, puis qui dit: Qui a raison là-dedans? Parce que, même nous, on parle à un groupe, on parle à un autre groupe, puis là on se dit: C'est où, le juste milieu et l'équilibre? Mais, si on prend cette pause-là pendant un an et qu'on est capable de mettre tout le monde ensemble – pourquoi? Parce qu'il y a un échéancier, puis il y a une crise; donc, il y a une obligation de résultat à cause de ça – puis que tout le monde y met sa bonne volonté, je pense qu'il y aurait une façon de trouver un moyen absolu de régler le problème.

Parce que c'est inacceptable, selon moi, de geler, surtout à Montréal, pendant deux ans des rôles qui ont été faits en 1993, avec des baisses, on parle de 50 % et, dans certains cas, c'est 60 %. D'un côté, ça, c'est inacceptable, puis, d'un autre côté, c'est aussi épeurant parce que, veux veux pas, on a beau avoir tous les moyens: taxe d'affaires, etc., d'ajustement, ce n'est pas vrai que la ville va être capable de dire au propriétaire qui voit, lui, son building réduit de 60 %: Bien, là, avec mon niveau, puis mon taux de taxe, je vais m'organiser pour que tu paies le même prix, au niveau des taxes, que tu payais quand c'était 100 %. Alors, il y a quelqu'un qui va être obligé de payer, puis ça va être le résidentiel, tu sais. On a beau tout essayer puis étirer l'élastique, qu'on le regarde d'une façon ou d'une autre, il y a quelqu'un, en quelque part, qui va payer plus cher.

Alors, si on était capables de mettre cette pause-là pendant un an, M. le ministre, je pense que la CUM serait prête à accepter ça aussi. Alors... Mais, au moins, il y a un élément de solution ici. Il n'y a pas juste des problèmes exposés; il y a aussi un élément de solution. Puis, en quelque part, bien, je pense que l'obligation de résultat est due parce que, en bout de ligne, si on ne fait rien, ça va nous péter dans la face. Ce n'est pas compliqué, là; c'est ça.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Charlebois.

M. Charlebois (Cameron): Oui, il y a deux éléments de réponse à Mme Frulla ainsi qu'au ministre. D'abord, dans les représentations publiques que nous avons faites, l'IDU, à la commission des finances de la CUM ainsi qu'au conseil de la CUM, la position que je vous ai énoncée aujourd'hui coïncidait exactement avec le point de vue des petits propriétaires qui étaient présents. Ils nous ont encouragés puis ils ont dit: Dans ce débat-là, il n'y a absolument aucune différence entre un gros propriétaire et un petit propriétaire parce que, quand vous perdez la moitié des revenus de votre immeuble, que ce soit un gros immeuble ou un petit immeuble, vous êtes dans le même trouble.

Pourtant, on avoue que le petit propriétaire est encore plus mal pris pour la simple raison que ses ressources pour toffer la crise sont moindres, puis il risque de perdre son immeuble plus vite que le gros propriétaire. C'est la seule différence. Mais, sur l'île de Montréal, on remarque bien que ces immeubles non résidentiels sont le patrimoine de ces gens-là et, quand ils voient la menace de voir disparaître leur patrimoine, là, ils réagissent comme on l'a vu à l'hôtel de ville il n'y a pas longtemps.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée...

Mme Frulla: Quand on parle de petits propriétaires, etc., c'est parce que c'est toujours le non-résidentiel versus le résidentiel. Parce que, en quelque part, quand on veut attirer des gens dans la métropole, il faut aussi que le taux de taxes soit acceptable; sinon, ce n'est pas compliqué, hein, il y a Laval d'un bord puis il y a la rive sud de l'autre, puis, bon, quand on est pris, c'est quoi, finalement de voyager puis de traverser le pont? On hait ça, c'est une heure de circulation puis tout ça, mais, tu sais, quand on est obligé, on est obligé. Puis on compense: il y a un terrain, il y a des fleurs; donc, on se fait une raison psychologique. Puis, une fois qu'on les a perdus, bien souvent, on les a perdus pour longtemps. Alors, c'est un peu ça, là, la crainte.

M. Charlebois (Cameron): Je comprends, mais ce que j'ai de la misère à comprendre, c'est ce qu'un gel va accomplir pour régler ce problème-là.

Mme Frulla: Ah, c'est ça.

M. Charlebois (Cameron): Tout ce qu'on demande et tout ce que tout le monde demande alors, à l'unanimité du côté des contribuables, c'est que les villes fassent face à la musique, dans le sens que, s'il faut lever des taux et même s'il faut pondérer les taux entre le non- résidentiel et le résidentiel pour empêcher le transfert dont vous avez peur, on est prêts à faire ce débat-là, mais faisons-le en transparence, ouvertement, avec un dépôt du rôle et l'adoption de taux de taxes que tout le monde va voir, et il pourra revendiquer devant son conseil municipal, s'il l'aime ou s'il ne l'aime pas.

Si toute cette démarche-là, c'est pour protéger les sensibilités politiques des municipalités pour ne pas devoir monter leurs taux, ce n'est pas la bonne manière de solutionner un problème d'une façon durable, et c'est ça qu'on dit. On ne dit pas: Baissez les taxes sur le côté non résidentiel. Ce n'est pas ça qu'on a dit; on ne l'a jamais dit, d'ailleurs. On dit: Trouvez une manière de réaliser l'équité à l'intérieur de cette enveloppe-là et modulez la répartition d'une façon juste et équitable, et on va en débattre. Un gel n'accomplit rien là-dedans.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Pâquet, en conclusion.

M. Pâquet (Jean-Marie): En conclusion, Mme la Présidente, j'aimerais dire à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys que ce que je retiens de la solution qu'elle propose, c'est que, tout le monde, on relève nos manches et on s'attaque aux vrais problèmes pour les solutionner et, si ça comprend d'autres sources de financement que la taxe foncière, on va s'attaquer à ça aussi. Mais, essentiellement, on va arrêter de camoufler le problème derrière l'évaluation, on va relever nos manches puis on va travailler ensemble pour trouver une vraie solution. Et, dans ce sens-là, je suis parfaitement d'accord avec vous, madame.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Alors, M. Pâquet, M. Turcotte, M. Bélisle, M. Charlebois et M. Dumais, nous vous remercions de votre participation.

Alors, nous en sommes à la fin de nos audiences; il reste les remarques finales. M. le ministre.


Remarques finales


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Alors, Mme la Présidente, maintenant, il faut aller réfléchir. On a eu donc une description des différents points de vue. D'aucuns ont dit ce matin qu'il nous manquait peut-être celui des citoyens, mais je pense que la réflexion a été... Tout au cours de la journée, le point de vue du citoyen du résidentiel était également présent dans les préoccupations des deux côtés. Je pense bien qu'on a les tenants et les aboutissants de la situation.

Et je pense qu'avec votre témoignage du Comité des entreprises et de l'IDU il y a comme une reconnaissance assez claire de la situation problématique, des avenues dans lesquelles on doit s'engager et de l'obligation de résultat que nous avons dans un très court laps de temps. Et, avec cela, on a à prendre en considération aussi la situation de cet autre palier de l'administration qui s'appelle le niveau municipal. Alors, il faut que notre solution, la piste sur laquelle nous sommes engagés, puisse être capable de respecter et de prendre en compte ces différentes dimensions.

Je pense qu'effectivement, avec les informations qu'on a eues aujourd'hui, on sent très bien qu'on a comme une espèce d'obligation d'engagement puis, en même temps, comme une période d'une année, au maximum, enclenchée immédiatement, qui permettra à tout le monde d'avoir l'obligation de s'engager, mais également la capacité de vivre cette année-là pour qu'on soit dans de meilleures conditions, dans les conditions équitables dans les mois à venir, dans des conditions qui respectent la notion de la valeur marchande, qui respectent la capacité de payer, qui respectent le principe de l'équité.

Et je pense qu'on se rapproche là d'une solution, qui n'est pas miraculeuse, mais qui serait respectueuse et qui engage le développement de l'avenir, qui engage l'avenir vers le développement, avec cette période charnière. Il faudrait essayer, au cours des prochaines heures, de traduire ça, mais on ne se refusera pas à intervenir pour engager l'action. On ne peut pas demeurer dans une situation ou dans une pose statutaire. On ne peut pas demeurer indifférents à la situation; il faut que nous engagions l'action. Et c'est ce qu'on va faire avec les précieuses informations qui nous sont parvenues aujourd'hui de toutes les parties. C'est tout.

(17 h 40)

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Jean-Talon.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Bien, moi, mes remerciements iraient d'abord au ministre. Ça va vous étonner, mais le fait qu'il ait accepté – d'ailleurs, je pense qu'il avait l'intention de le faire aussi – d'entendre les différents groupes qui avaient sollicité l'opportunité de se présenter aujourd'hui, je pense que, déjà, c'est un bon pas vers une solution; je souhaite personnellement qu'elle soit non pas temporaire, mais une solution, là, qui permette dès maintenant qu'elle devienne... Il n'y a jamais de solution définitive dans ce milieu-là, parce que ça bouge beaucoup. Donc, je pense que c'est important. Puis je remercie les groupes qui sont venus quand même un petit peu au pied levé, mais je pense que vous saviez ce que vous aviez à nous dire; alors, vous l'avez très bien fait.

J'ajouterais ceci: Notre démarche depuis le début, ça a été le sens de l'équité, cette équité qui est sous-entendue finalement dans la fiscalité municipale, dans l'évaluation foncière et qui a fait les beaux jours de l'évaluation foncière. Certains ont fait référence à mon passé municipal. Je fais souvent rire les gens en leur disant que ça m'a été rentré à coups de pioche, moi, ça, là, à la Communauté urbaine de Québec. Et je pourrais vous dire que j'y ai cru et que j'y crois encore. Alors, si c'est par le biais de rôles annuels, on verra si cette solution-là peut être acceptée.

Je retiens également qu'il faut revoir très rapidement et en profondeur la fiscalité municipale. M. D'Amours, qui a présidé le comité sur la fiscalité et financement des services publics, a été très clair là-dessus, et je ne pense pas, connaissant personnellement Alban D'Amours, que le temps qu'il a consacré avec toute son équipe signifie que ça doit être remisé. Ça doit être fait maintenant, et, nous aussi, on offre notre collaboration au ministre pour toute législation, comme on l'a toujours fait, d'ailleurs. C'est très rare qu'on s'est opposé à de la législation, parce qu'on sait que, lorsque ça vient du milieu municipal, c'est le gouvernement qui est le plus près du citoyen, c'est le gouvernement qui est le plus sensible finalement aux besoins des citoyens. Alors, ça va nous faire plaisir de le faire de façon sérieuse, mais, si on doit s'asseoir plusieurs heures puis plusieurs soirs pour discuter d'une réforme de la fiscalité, on le fera avec grand plaisir.

Et je réitère que je pense que ça va prendre plus que le comité de suivi qui a été nommé par le ministre. Je pense qu'il faudra aller vers l'expertise qui s'est présentée ici aujourd'hui, qui nous a offert sa collaboration la plus sincère, qui est prête à retrousser ses manches de chemise et à aller de l'avant pour qu'on cesse de parler d'une réforme, qu'on la fasse. S'il y a eu des erreurs de faites dans le passé, bien, bâtissons sur ce qui a été fait puis reconnaissons qu'il faut regarder vers l'avenir puis qu'il faut trouver des solutions concrètes. On s'en va vers l'an 2000, là. Alors, si on est capables de vivre avec Internet, je ne peux pas croire qu'on n'est pas capables de vivre avec des solutions sur la réforme de la fiscalité.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Rapidement, là, encore pour remercier l'ensemble des intervenants, d'une part, de nous avoir vraiment éclairés, de part et d'autre. Maintenant, le ministre a dit souvent, a répété souvent qu'il faut agir, et on lui fait confiance parce que c'est quelqu'un qui a la bonne volonté de dire: Je veux agir. Et on est prêts aussi à donner notre collaboration. Moi, je pense que, l'énergie du désespoir – on est en crise, là – aidant, un an, c'est amplement pour en arriver à des solutions qui sont durables. Et je suggère aussi, comme vous l'avez fait au Sommet, un «fast track», tout simplement – ça a marché dans le temps du Sommet, je ne vois pas pourquoi ça ne marcherait pas là – de gens de partout avec un échéancier extrêmement serré et précis, et qu'on dépose, d'ici un an maximum, en tout cas... Là, les budgets de la ville, de toute façon, sont fermés; alors, cette année qu'on gèle l'ensemble, donc qu'on fasse une pause et, finalement, bien, qu'on mette tout le monde ensemble pour en arriver à une solution effectivement durable. Je suis convaincue, moi, que ce qui est proposé dans l'article 53, honnêtement, là, ça, c'est pelleter en avant. Alors, l'article 53 se doit absolument d'être, je pense, mis sur la glace.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: C'est une petite boutade. Si on a longtemps parlé de la réforme Parizeau, j'espère qu'on pourra parler de la réforme Trudel.

La Présidente (Mme Bélanger): Bon, alors, ceci étant dit, la commission de l'aménagement et des équipements ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 45)


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