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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 24 mai 1979 - Vol. 21 N° 94

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

La réunion de la commission des affaires intergouvemementales a pour but d'étudier les crédits du budget 1979/80.

Les membres de cettte commission sont M. Bertrand (Vanier), M. Biron (Lotbinière), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent) remplacé par M. Rivest (Jean-Talon), M. Godin (Mercier), M. Guay (Taschereau), Mme Leblanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), M. Levesque (Bonaventure), M. Morin (Louis-Hébert).

Les intervenants sont: M. Charbonneau (Verchères), M. Couture (Saint-Henri), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Johnson (Anjou), M. Morin (Sauvé), M. Rancourt (Saint-François), M. Raynauld (Outremont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).

Il est proposé que M. de Bellefeuille soit rapporteur.

M. Raynauld: M. Roy (Beauce-Sud) est décédé.

Le Président (M. Laplante): Excusez, c'est vrai. M. Roy (Beauce-Sud) n'appartient plus à l'Assemblée.

Le rapporteur sera M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes). Maintenant, M. le ministre, si vous êtes prêt pour les préliminaires?

Remarques préliminaires M. Claude Morin

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord, avant d'aller plus loin, mentionner que non seulement nous avons fourni aux partis de l'Opposition les documents qui étaient demandés de tous les ministères, mais nous avons également préparé à leur intention, un peu pour répondre d'avance à des questions qui viennent normalement à un dossier contenant plusieurs documents qui ont l'air disparates mais qui se raccrochent un tant soit peu quand même à des éléments du budget. Alors, on pourrait s'y référer à l'occasion au cours de la réunion.

Je voudrais, avant d'aller plus loin, faire une brève entrée en matière, quitte à laisser aux partis de l'Opposition ensuite la possibilité de s'exprimer. Je reviendrai s'il y a des questions que leur exposé soulève.

Je veux seulement dire, au point de départ, que l'objectif général du ministère est celui qui est implicite dans sa loi, bien sûr, c'est non seulement de s'occuper des relations intergouvernementales du Québec, ce terme étant compris dans son sens le plus large, mais, fondamentalement, de s'occuper de la défense et de la promotion des intérêts du Québec et des Québécois. C'était cet objectif qui existait dans le ministère sous d'autres gouvernements et c'est encore le même aujourd'hui.

Un tel objectif se réalise en gros par deux séries de moyens ou deux séries de tâches: il y a des tâches courantes et des tâches qu'on peut juger prioritaires. Je voudrais dire deux mots des tâches courantes, deux mots aussi de certaines priorités que nous avons et à propos desquelles, peut-être, on aimera, au cours de la réunion, avoir des renseignements complémentaires.

Les tâches courantes, tout le monde les connaît; il y en a deux, au fond. Il y en a une de coordination intergouvernementale, c'est-à-dire que le ministère est chargé de toutes les relations du gouvernement du Québec avec tous les autres gouvernements, quels que soient ces gouvernements, c'est-à-dire aussi bien celui d'Ottawa que celui des autres provinces ou que celui des autres pays, le cas échéant. Le ministère ici est un peu le ministère des relations extérieures du Québec et, à ce titre, il accomplit les tâches que normalement des ministères de cette nature accomplissent. (10 h 15)

Cette tâche de coordination n'en est pas seulement une qui consiste à éviter les contradictions intergouvernementales d'un ministère à l'autre — ne serait-ce que ça, c'est déjà une tâche difficile — mais aussi il en est une de participation à l'élaboration des politiques intergouvernementales, même sectorielles. Je veux dire par là que nous prenons part — et je pourrai donner tantôt, quand ça viendra, des détails sur l'organisation interne du ministère — à la préparation de toutes les rencontres intergouvernementales, quelles qu'elles soient, de tous les dossiers intergouvernementaux.

La deuxième tâche courante, à part la coordination intergouvernementale, est celle qui touche la nécessité dans laquelle nous sommes et quasiment l'obligation d'accumuler, en ce qui concerne les dossiers et les problèmes intergouvernementaux, fédéraux, provinciaux, interprovinciaux ou internationaux, la meilleure connaissance possible dans tous ces dossiers, que ceux-ci se rapportent au présent, au passé ou à l'avenir. Cela veut donc dire que le ministère est aussi un instrument de réflexion et de recherche, pas dans le sens académique du terme, bien sûr, mais dans le sens peut-être un peu plus dynamique, recherche visant à élaborer des politiques adaptées aux besoins. Ce sont les tâches courantes: coordination et meilleure connaissance des faits.

Il y a aussi quelques priorités — je vais en nommer quelques-unes ici — que nous avons adoptées l'année dernière et que nous avons l'intention de continuer à suivre pour l'exercice financier qui vient de commencer. Il y a quatre de ces priorités. Je les ai groupées en quatre; maintenant, elles se subdivisent, on verra. Ce sont:

diffusion, coopération, participation et exploration.

Quand je parle de diffusion, je veux dire une meilleure connaissance, une meilleure information à l'extérieur sur nous-mêmes, sur le Québec et sur l'évolution du Québec. C'est une tâche essentielle dans le monde interdépendant dans lequel on vit. Il existe en ce qui a trait au Québec, comme cela existe en ce qui a trait à bien des pays les uns par rapport aux autres, une ignorance qui peut conduire à une mauvaise interprétation de notre réalité et si on ne s'en occupe pas, bien sûr, on peut en subir des effets négatifs.

Nous avons mis une priorité de ce côté, diffusion d'une meilleure connaissance quant au Québec, priorité qui ne date pas de ces jours-ci, mais qui a déjà commencé à être mise en oeuvre l'an dernier.

La deuxième priorité, c'est coopération avec les autres, les autres étant, selon les cas, aussi bien le gouvernement fédéral, le gouvernement d'autres provinces, des associations à l'extérieur du Québec — je vais donner un exemple tantôt — que des gouvernements d'autres pays. Pour ce qui est des gouvernements d'autres pays, réglons ça tout de suite, on aura l'occasion d'y revenir aussi, il y a plusieurs accords qui existent entre le Québec et divers États, des programmes d'échange très variés, beaucoup plus variés qu'on a l'habitude de le croire, peut-être qu'on n'en a pas suffisamment parlé, très stimulants, autant sur le plan économique que sur le plan culturel.

Cette coopération, nous avons l'intention non seulement de la maintenir, mais de l'accroître dans la mesure de notre potentiel budgétaire et humain. J'ai dit que j'utiliserais un exemple de coopération et c'est à cet égard que j'ai pensé vous donner un rapport complet sur les relations qui existent quant à divers programmes d'échange entre le Québec et des minorités francophones d'autres provinces. Vous avez le rapport complet, détaillé, très bien fait, à mon avis, dans le cahier noir qui vous a été distribué. Je n'en parle pas davantage pour le moment, j'utilise cette coopération à titre d'exemple seulement.

En ce qui a trait au gouvernement fédéral, vous avez aussi dans votre cahier, la liste de toutes les ententes fédérales-provinciales qui ont été signées et qui sont au greffe du ministère, de même que celles qui, sans être au greffe, sont en instance de l'être et qui ont été signées et adoptées. Comme vous le verrez, ça concerne divers autres ministères. S'il y a des questions qui concernent l'une ou l'autre de ces ententes, j'aurai peut-être à vous référer à ce qui a été dit lors de l'étude des crédits des autres ministères ou on aura l'occasion d'en parler peut-être davantage ici.

L'autre priorité — deux ont été mentionnées jusqu'à maintenant, diffusion et coopération — c'est participation. Participation à quoi? Aux décisions qui nous concernent, nous les Québécois. C'est pour cette raison que nous insistons chaque fois que l'occasion se présente, par exemple, pour participer nous-mêmes et directement à diverses rencontres internationales auxquelles le gouvernement fédéral peut être invité, mais qui traitent de questions relevant de notre compétence.

Là-dessus, nous sommes très vigilants et on ne laisse pas passer beaucoup d'occasions de nous représenter nous-mêmes, en vertu du principe qu'on n'est jamais si bien servi que par soi-même. Cela peut créer, à l'occasion, des disputes Québec-Ottawa, mais je pense que nous avons adopté, à cet égard, une attitude pragmatique et que plusieurs rencontres ont eu lieu sans trop de problèmes. Cependant, il y a un tas de frustrations dont on pourra parler plus tard, mais qui font que cette participation que nous désirons n'est pas toujours, au fond, souhaitée par ceux qui pourraient l'assurer, dans le cadre constitutionnel actuel.

Quant à l'exploration, dernière priorité, il s'agit pour nous d'explorer partout tout ce qui peut se présenter d'occasions avantageuses pour le Québec et de faire preuve de dynamisme et d'esprit d'invention, de ne pas laisser passer d'occasions qui ont l'air de se présenter et qui peuvent être, à divers points de vue, soit culturels, économiques ou autres, avatageuses pour le Québec.

Deux cas tout à fait disparates. Nous sommes établis depuis quelque temps — et il est avec nous aujourd'hui — au Venezuela, par une délégation. C'est nouveau, c'est un continent dans lequel nous n'étions pas et dont les potentialités sont énormes. Nous avons aussi entrepris — il y avait des questions du chef de l'Union Nationale là-dessus il n'y a pas très longtemps — d'explorer, par exemple, la Chine, ce qui pourrait être intéressant pour nous. Ce sont deux exemples, et ce ne sont pas les seuls. Il y en a beaucoup d'autres. Mais je les mentionne parce qu'ils ont peut-être été plus remarqués au cours des derniers mois et ils sont peut-être plus d'actualité.

Dans cet effort d'exploration aussi, on se tient constamment au courant de ce qui se passe ailleurs et qui peut nous intéresser, que ce soit institutionnellement, ou que ce soit culturellement ou économiquement, parce que, je l'ai dit tantôt, on vit dans un monde interdépendant et qu'il n'y a pas lieu, nécessité, ni même désir de notre part, bien sûr, au contraire, de faire abstraction de ce qui se passe à l'extérieur, quand cela peut nous être utile et quand cela peut nous servir — quand je dis "nous", je ne veux pas nécessairement dire le gouvernement, je veux dire les Québécois — de source d'inspiration et peut-être même de source de nouvelles politiques. On essaie de voir comment on règle ailleurs les problèmes et on essaie de les adapter à nos propres situations.

En gros, ce sont les quatre priorités. Pour y arriver, évidemment, il y a un budget. Il y a un budget que, personnellement, j'aurais voulu plus abondant, mais, qu'est-ce que vous voulez, il y a des contraintes auxquelles tout le monde est soumis et nous le sommes également. Ce budget, vous l'avez; on le regardera en détail, tantôt.

Pour l'examen de ce budget, je n'hésiterai pas — je pense que tout le monde est d'accord d'ailleurs — quand il s'agira de questions plus

particulières, à demander à l'un ou l'autre de mes collaborateurs, d'y répondre, assumant, du même coup, en tant que ministre ce qu'ils diront. Par conséquent, comme il y en a plusieurs avec moi aujourd'hui, je vous demanderais de ne pas hésiter à poser les questions qui peuvent vous venir à l'esprit, parce que je pense qu'il est important qu'on sache comment le ministère fonctionne, ce qui s'y passe et ce que nous y faisons. C'est dans cet esprit d'ailleurs que vous est distribuée — c'est la première fois qu'on le fait — une documentation aussi abondante sur notre action.

Je n'ai pas parlé, dans ce que j'ai dit, de questions strictement constitutionnelles, pour la bonne raison que je l'ai indirectement mentionné dans l'objectif général du ministère: défense et promotion des intérêts du Québec et des Québécois. Je ne l'ai pas mentionné non plus comme Driorité, parce que c'est une priorité avec un "P" majuscule, qui est inhérente à l'action d'un ministère comme le mien, c'est à peu près équivalent, comme priorité, à celle qu'un ministère comme celui des Transports peut avoir quant à la voirie, cela va de soi. C'est pour ça que je ne l'ai pas retenue particulièrement, mais je ne veux pas que l'on pense que nous nous en désintéressons.

M. le Président, pour le moment, c'est tout ce que je dirai, je reviendrai tantôt, si c'est nécessaire, préciser des choses.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le ministre. Au nom de l'Opposition libérale, M. le député de Jean-Talon.

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: M. le Président, je voudrais, au début de l'étude des crédits, remercier le ministre du document qui a été préparé par le ministère. Je pense qu'il est extrêmement complet et très bien fait. Cela va sans doute nous permettre d'accélérer l'étude des crédits du ministère. Par contre, en lisant ça, chaque page nous donne de nouvelles idées et nous ouvre la porte à des questions auxquelles on n'avait peut-être pas pensé.

M. Morin (Louis-Hébert): Que ça vous donne des idées, ça ne me surprend pas.

M. Rivest: D'abord, dans les priorités qui vont de soi et que le ministre vient d'exprimer, je voudrais lui demander — il pourra répondre ultérieurement — quel est le rôle — il a parlé des questions de relations fédérales-provinciales, de l'action internationale, de l'information, etc. — du ministère des Affaires intergouvemementales au titre de l'option constitutionnelle du Parti québécois, c'est-à-dire de la souveraineté-association.

Deuxièmement, je voudrais faire part, d'une façon générale, d'une inquiétude sur le fonctionnement du ministère des Affaires intergouvernementales depuis deux ans et sur le rôle particulier que le ministre s'est lui-même attribué, au moins extérieurement, de la façon qu'on peut le percevoir à l'extérieur du ministère. Depuis l'adoption de la Loi du ministère des Affaires intergouvernementales en décembre 1974, on constate, et les documents du ministre le démontrent très bien, que le ministère a maintenant pratiquement achevé de se doter, voire de roder ses structures et les mécanismes internes nécessaires à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la politique du Québec en matière de relations intergouvernementales telles que définies dans les termes mêmes de la loi, enfin ce qui constitue effectivement le mandat du ministère.

D'une manière assez paradoxale, cependant, sans doute à cause du contexte politique québécois présent et de la conception que je qualifie de hautement politique que le présent ministre des Affaires intergouvernementales se fait de son rôle, on a grand-peine à voir et à cerner exactement les éléments concrets d'une réelle amélioration de la productivité des relations du Québec avec l'extérieur, autant l'extérieur entendu dans le sens du Canada qu'à l'étranger, et de la contribution particulière, à cet égard, du ministère des Affaires intergouvernementales. Il me semble qu'un ministre des Affaires intergouvernementales devrait au moins prendre la peine d'établir clairement, bien sûr, pas à tous les jours, mais quand même publiquement, ce que le Québec retire effectivement des actions extérieures du gouvernement et d'établir comment son ministère y participe ou entend dans l'avenir y participer. D'une façon générale, depuis deux ans et demi, le ministre des Affaires intergouvernementales, à cet égard, est toujours extrêmement silencieux.

L'actuel ministre n'a jamais, que je sache, dit quoi que ce soit là-dessus. Il s'est, depuis deux ans et demi, à peu près exclusivement contenté de parler, comme c'était probablement son rôle à d'autres égards, de l'option constitutionnelle du Parti québécois, en donnant à tout le moins l'impression — le ministre me corrigera si c'est injuste comme jugement — de laisser le ministère des Affaires intergouvernementales voir aux choses courantes et voir en somme à toute l'administration des relations extérieures du Québec sans qu'il y ait vraiment une direction ministérielle qui, en tout cas, de l'extérieur, paraisse suivie et conséquente.

Le ministre a, en effet, établi publiquement — je crois que c'est à l'étude des crédits, dès la première année, dès sa nomination — une distinction qui m'apparaît dangereuse pour le fonctionnement du ministère des Affaires intergouvernementales, lorsque le ministre a dit qu'il se chargeait de la politique et que l'administratif, c'est-à-dire la gestion des choses, des programmes et l'élaboration des politiques, demeurait la responsabilité du ministère. (10 h 30)

On sent bien qu'en pratique, cette distinction peut — c'est le résultat que ça donne, je pense qu'on peut le dire après deux ans et demi — nuire aux efforts d'innovation et d'imagination du ministère et de l'ensemble de ses effectifs et que, dans ces conditions, le ministère, c'est-à-dire la structure administrative, ne peut ni ne veut manifes-

tement heurter, d'une façon ou d'une autre, les considérations politiques que le ministre se réserve sur une base qu'il a déjà dite exclusive.

Ce n'est pas ainsi, en tout cas, dans mon esprit, qu'un ministère aussi important que le ministère des Affaires intergouvernementales peut travailler. Ce n'est pas ainsi, dans cette distinction entre le politique et l'administratif qu'un ministère peut fonctionner et être pleinement productif. Je pense que la distinction du ministre entre le politique et l'administratif pose au ministère des Affaires intergouvernementales ou comporte, pour le ministère, des rigidités et des contraintes qui apparaissent absolument évidentes et qui, de l'extérieur, donnent l'impression d'un ministère qui est devenu totalement routinier.

En effet, la distinction que le ministre a faite entre l'administratif et le politique ne peut pas être, en pratique, une simple distinction de raison. Voilà, en effet, un ministère, le ministère des Affaires intergouvernementales, avec ses effectifs, ses programmes, son budget, un ministère dont les termes du mandat ont été écrits dans la perspective de la participation la mieux ordonnée possible et la plus productive au progrès du régime fédéral canadien. Cela, c'est le sens premier de la Loi du ministère des Affaires intergouvemementales. Ce doit être ça et pas d'autre chose que ça, pour l'instant, le projet politique du ministère des Affaires intergouvernementales. Et en inscrivant l'action du ministère et du ministre dans cette perspective, c'est la seule façon, à mon point de vue, de permettre au ministère des Affaires intergouvernementales de sortir un peu — du moins, dans la perception extérieure qu'on en a — de cette atmosphère plus ou moins grise dans laquelle il baigne depuis deux ans.

De toute évidence, ce même ministère, le ministère des Affaires intergouvernementales, n'a maintenant, à notre avis, en plus de son rôle originel, que celui de la défense plus ou moins politiquement intéressée d'ailleurs, de ce qu'on appelle et de ce que le ministre a appelé tantôt l'autonomie provinciale, en excluant, bien sûr, à l'avance — on a l'impression — toute démarche positive et constructive à l'égard du fédéralisme en tant que tel, en assujettissant ainsi, d'une façon expresse ou implicite, tout le ministère des Affaires intergouvernementales aux projets politiques, sans doute légitimes, du ministre.

Il faut dire ici que ni le gouvernement, ni le ministre n'a reçu de quiconque, certainement pas de la population, non plus que de l'Assemblée nationale qui n'a pas changé la vocation première du ministère des Affaires intergouvernementales, le mandat de littéralement ainsi réduire à sa plus simple expression, c'est-à-dire à la défense de l'autonomie provinciale, le mandat du ministère des Affaires intergouvernementales, non plus que de lui faire jouer — on peut certainement avoir des craintes à ce titre — un rôle plus ou moins camouflé de soutien à une option constitutionnelle, l'option de la souveraineté-association qui, à ce jour, n'est rien d'autre que l'option d'un parti politique.

Ce n'est certainement pas être injuste à l'endroit des gens qui travaillent au sein du ministère des Affaires intergouvernementales que de dire ces choses. Je répète que je veux simplement établir qu'on a l'impression que l'action de ce ministère est actuellement littéralement bloquée et qu'elle est largement dominée par ce que j'appellerais des considérations politiques futures qu'impose, d'une façon ou d'une autre, d'une façon réelle ou indirecte, la distinction ou l'attitude du ministre qui, comme je le disais, s'est réservé la dimension politique et laisse au ministère les fonctions purement administratives ou routinières.

Je vais vous donner simplement trois illustrations de cet élément de réflexion que je veux amener ce matin au début de l'étude des crédits. Combien éloquente, à cet égard, a été l'attitude du présent gouvernement à l'occasion de la dernière conférence des premiers ministres sur la révision constitutionnelle. Absolument aucune proposition n'est venue du Québec. On s'est délibérément contenté d'une attitude défensive et passive. On a tout simplement fait un glossaire des propositions antérieures du Québec, sans même prendre la peine de les mettre à jour. De toute évidence, on peut porter ce jugement: le ministre des Affaires intergouvernementales n'a absolument rien demandé aux officiers de son ministère, si ce n'est, comme je le disais, de produire le résumé des positions antérieures du Québec. Il ne leur a pas demandé de formuler quelque nouvelle proposition que ce soit au titre de la révision constitutionnelle, alors même que la loi du ministère confère au ministère et au ministre la responsabilité expresse d'élaborer et de proposer une politique pour le gouvernement dans le domaine des relations intergouvernementales et, singulièrement, dès lors qu'il est question de révision constitutionnelle et de modernisation du fédéralisme canadien.

Le ministre viendra peut-être nous dire qu'au fond, il se réserve la politique administrative et que cela n'a pas d'influence, mais on voit, dans des exemples pratiques comme celui-là, comment le ministère peut être amputé, dès le départ, d'une de ses fonctions essentielles. Or, le ministre, lors de la dernière conférence, n'a même pas demandé au ministère des Affaires intergouvernementales de mettre à jour les propositions précises de 1976, le consensus qui avait été obtenu après un travail extrêmement sérieux et élaboré du ministère des Affaires intergouvernementales, le consensus d'Edmonton et de Toronto. On a laissé ces choses complètement en plan; le Québec n'en a, pour ainsi dire, à peu près pas parlé.

C'est le premier exemple pour simplement illustrer qu'à mon avis le contexte politique actuel, la conception que le ministre se fait de son rôle en tant que ministre, contribue à détourner ou à diminuer, à détourner certainement le ministère des Affaires intergouvernementales de sa vocation première, celle-là même qui est inscrite dans sa loi et cette vocation, pour l'instant, jusqu'à preuve du contraire, ne peut être autre chose que de s'inscrire dans la valorisation du système fédéral cana-

dien. C'est l'essentiel du mandat de ce gouvernement et il ne peut pas, je pense, abandonner cette dimension de son mandat ou l'oublier pour des raisons politiques que le ministre peut avoir.

Tout aussi éloquent de cette espèce de politisation de l'action du ministère des Affaires intergouvernementales est ce silence à peu près complet que le ministre des Affaires intergouvernementales maintient depuis son arrivée au ministère, sur l'évolution des différents dossiers dans le domaine des relations fédérales-provinciales devenu le domaine des affaires canadiennes. Le ministre nous dit qu'il laisse cela — il nous l'a répété ce matin — aux ministres sectoriels. Il y a pourtant, au sein de son ministère, une Direction générale des relations fédérales-provinciales ou des affaires canadiennes, qui a la responsabilité d'élaborer les mandats en vue de la participation des représentants du Québec aux différentes conférences fédérales-provinciales et interprovinciales.

D'ailleurs, dans le document que le ministre nous a remis, dont il a fait état, on nous donne une description absolument passive ou, enfin, une description purement mécanique de l'action de la Direction générale des relations fédérales-provinciales, sans indiquer quels sont les objectifs du ministère, où en sont rendus les dossiers... On nous donne simplement une énumération et je compte bien qu'au cours de l'étude des crédits, le ministre pourra nous donner d'autres détails, afin de voir exactement où cela mène.

C'est, par ailleurs, le ministre des Affaires intergouvernementales qui a la responsabilité — il donne les mandats — deuxièmement, de coordonner l'ensemble des activités du gouvernement, de ses ministères et de ses organismes dans ce domaine tout à fait central du fonctionnement du présent système fédéral, c'est-à-dire celui des relations fédérales-provinciales. À ce titre, après près de trois ans, nous attendons toujours de la part du titulaire du ministère des Affaires intergouvernementales un premier exposé sur l'évolution réelle des relations fédérales-provinciales en tant que telles.

On dit, par exemple, depuis maintenant près de trois ans, que l'objectif prioritaire de ce gouvernement est la relance économique. Il me semble, simplement à titre d'exemple, qu'il serait indiqué que le ministre des Affaires intergouvernementales nous dise un jour ou l'autre les directives données par la direction des relations fédérales-provinciales aux différents ministères à vocation économique dans la conduite de dossiers économiques de négociations avec le gouvernement fédéral et, le cas échéant, avec les autres gouvernements provinciaux. Qui d'autre, en effet, que le ministre des Affaires intergouvernementales peut donner simplement au public, à l'Assemblée nationale, le portrait général de l'évolution des relations fédérales-provinciales dans un domaine comme celui de l'économie?

Quels sont les objectifs poursuivis par le gouvernement du Québec dans ses négociations à caractère économique avec le gouvernement fédéral et les autres gouvernements? Comment la poursuite de ces objectifs se traduit-elle au niveau, par exemple, de la participation du Québec aux accords du GATT, ou à celui de la signature d'ententes de développement avec le gouvernement fédéral, ou à celui des effets au Québec des politiques économiques ou fiscales du gouvernement fédéral, ou encore à celui de la conduite de dossiers particuliers extrêmement importants, comme ceux dans le domaine de l'énergie, des mines, des forêts, de l'agriculture, des pêches, de l'industrie manufacturière, du transport et du tourisme?

En somme, ce que je voudrais demander au ministre, c'est qu'il prenne cette responsabilité de nous dire, en tant que ministre des Affaires intergouvernementales, quelle est la politique réelle du Québec dans le domaine des relations fédérales-provinciales, sur le plan économique par exemple. On pourrait adresser le même reproche au ministre dans le domaine social et également dans le domaine culturel.

Qui d'autre que le ministre des Affaires intergouvernementales peut le dire, en toute connaissance de cause, en situant en perspective chaque élément particulier du dossier ou chaque élément sectoriel dont ses collègues ont la responsabilité? Qui d'autre que lui en effet a une responsabilité de direction, de coordination et de détermination des mandats de négociation des différents ministères et organismes gouvernementaux? Lui seul, d'ailleurs, a en sa possession des études, des expertises au niveau du ministère sur tous et chacun des éléments du fonctionnement du système fédéral canadien.

Je pense bien que le ministre des Affaires intergouvernementales ne peut certainement pas continuer de garder, sur un aspect aussi fondamental que celui des relations fédérales-provinciales, le silence à peu près complet dans lequel il s'est réfugié depuis près de trois ans, pour ne jamais avoir à dire — c'est l'impression qu'on a — ce qu'apporte au Québec, sur le plan économique comme sur le plan social ou culturel, notre appartenance au régime fédéral.

Le ministre, en tout cas, d'une façon certaine, ne peut sûrement pas se contenter, ici et là, comme il l'a fait, de laisser tomber, au fil des jours, quelques dossiers noirs qui n'ont le plus souvent d'intérêt réel que celui des intérêts politiques forcément partisans que ces dossiers noirs sont manifestement destinés à servir.

Depuis près de trois ans, la distinction que le ministre des Affaires intergouvernementales a faite entre la dimension proprement administrative de son ministère et la dimension politique n'est, en réalité, c'est mon impression, que l'expression d'une volonté forcément inavouable d'empêcher le ministère des Affaires intergouvernementales de jouer normalement le rôle actuel que la loi, tant qu'elle ne sera pas changée, lui donne, c'est-à-dire celui d'une participation éclairée, transparente, positive et valorisante à l'évolution du fédéralisme canadien.

M. le Président, il y a au moins une chose que l'on ne peut certainement pas relier à cet effacement du ministère des Affaires intergouverne-

mentales sous le poids des considérations politiques présentes et futures du ministre et du présent gouvernement. Là où le ministère des Affaires intergouvernementales paraît le plus, si je peux m'exprimer ainsi, c'est ce que, dans le rapport annuel 1977/1978 du ministère, on appelle, dans ce que je qualifierais d'un euphémisme remarquable, l'effort soutenu et systématique d'information de la réalité québécoise à l'étranger, ou encore, là où le ministère paraît le plus, c'est à l'occasion d'activités de prestige telles qu'illustrées par la visite du premier ministre de France au Québec ou celle même du premier ministre du Québec en France. (10 h 45)

On informe en effet beaucoup l'étranger, en ce moment, sur la réalité québécoise. Cela semble être là, le ministre l'a rappelé ce matin, une des priorités du ministère des Affaires intergouvernementales. Mon propos de ce matin veut simplement demander au ministre et au ministère d'informer un peu plus les Québécois sur la réalité des relations fédérales-provinciales québécoises et canadiennes. On informe d'ailleurs l'étranger sur la réalité québécoise, encore faudrait-il voir de quelle réalité il s'agit et qui, exactement, de la direction politique du ministère, du cabinet du premier ministre, ou du ministère en tant que tel, définit cette réalité québécoise que l'on diffuse aussi largement à l'étranger.

On nous demande, M. le Président, de voter les crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. Je pense qu'il convient que les membres de cette commission obtiennent, de la part du ministre, l'assurance que ces crédits sont bien ceux d'un ministère des Affaires intergouvernementales ou enfin, de ce ministère des Affaires intergouvernementales qui fonctionne à l'intérieur d'une loi précise, adoptée par l'Assemblée nationale et encore toujours inchangée.

Que le ministre nous dise, ou qu'il nous rassure sur le fait qu'il va permettre à son ministère, premièrement, de jouer véritablement, d'une façon libre et pleine, le rôle que la loi lui donne, c'est-à-dire celui d'apporter une contribution positive et constructive à la modernisation et au renforcement du régime fédéral canadien; deuxièmement, de définir clairement et publiquement les objectifs précis d'une politique de relations fédérales-provinciales orientée sur rien d'autre que le progrès et le développement de la société québécoise, à l'intérieur du régime fédéral canadien et, troisièmement, de diffuser à l'étranger une image vraie et exacte de la réalité québécoise et de toute la réalité québécoise.

N'ayant absolument pas le mandat de la part de la population d'agir autrement, non plus d'ailleurs que de l'Assemblée nationale, le ministre ne peut légitimement avoir d'autre choix que de réconcilier au plus tôt la direction politique et la direction administrative du ministère des Affaires intergouvernementales; l'une et l'autre, jusqu'à avis contraire et avis référendaire contraire, ne peuvent s'inscrire dans d'autre perspective que celle de la réalité et de la permanence du régime fédéral canadien.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le chef de l'Union Nationale, député de Lotbinière.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: Merci, M. le Président. Mes propos, ce matin, seront d'une approche certainement beaucoup plus pragmatique ou économique que ceux de mon ami et collègue du comté de Jean-Talon. Je demanderai simplement ce que le ministère des Affaires intergouvernementales rapporte au Québécois, au Québécois ordinaire, le Jean-Baptiste québécois lui-même, qui dit: Ce ministère me coûte $35 millions cette année, qu'est-ce que cela me donne à moi? Comment cela peut-il m'aider à me développer économiquement ou à avoir un meilleur niveau de vie, à m'aider dans ma vie personnelle?

Si je me fie à l'organisation administrative ou à la charte d'organisation administrative soumise par le ministre, il y a deux grandes orientations, en plus de l'administration bien sûr: il y a les orientations internationales et il y a les orientations canadiennes, avec les autres provinces canadiennes et le gouvernement canadien.

Quant aux relations internationales, c'est sûr que le ministère des Affaires intergouvernementales a à planifier, à aider, à collaborer avec tous les autres gouvernements à travers le monde. Je voudrais savoir du ministre, parmi toutes ces actions du ministère, ce qu'on fait précisément du côté économique. Est-ce qu'il y a aussi des dédoublements ou des chevauchements de juridiction avec le gouvernement fédéral? On sait que le gouvernement fédéral est responsable du commerce international, interprovincial. Comment le ministère des Affaires intergouvernementales ou le gouvernement du Québec peut-il intervenir, en vue d'amener chez nous des investissements nouveaux, des entrepreneurs nouveaux, ou en vue de créer de nouveaux marchés pour les entreprises québécoises et finalement, de nouveaux emplois pour les travailleurs québécois?

Dans les domaines de juridiction provinciale, du Québec, en particulier la culture, l'éducation, je ne m'inquiète pas trop. On sait que jusqu'à maintenant, les gouvernements du Québec, non seulement celui du Parti québécois, tous les autres gouvernements avant lui, depuis que ces relations intergouvernementales existent, ont voulu faire un effort pour la promotion, ou faire connaître exactement la vie québécoise, particulièrement la vie francophone au Québec.

Là où je me pose des questions, c'est comment on intervient vis-à-vis du gouvernement fédéral sur le commerce international. Qu'est-ce qu'on fait de spécial vis-à-vis du gouvernement du Québec avec les maisons du Québec à l'étranger? Qu'est-ce qu'on fait de spécial pour stimuler la vie économique? Est-ce qu'on fait concurrence au gouvernement canadien? Est-ce qu'on se sert véritablement de toutes les ambassades canadiennes à l'étranger, même si on n'a pas de maison du Québec dans des endroits précis, pour justement aider à développer l'économie au Québec? Est-ce

que, de la part de notre gouvernement, on se contente tout simplement de faire quelques appels pour essayer de vendre nos ressources naturelles à l'étranger, nos richesses naturelles à l'étranger ou est-ce qu'on s'occupe véritablement d'amener chez nous des convertisseurs de matière, des gens qui voudraient investir au Québec et convertir cette matière-là et faire travailler un peu plus de nos Québécois?

On sait que, dans le courant de l'année, on a ouvert une nouvelle maison du Québec à Caracas, au Venezuela. Est-ce qu'on a l'idée d'ouvrir d'autres maisons du Québec à l'étranger? Est-ce qu'on va nous parler de Mexico? Est-ce qu'on va nous parler de pays qui commencent justement, comme le Mexique, à s'enrichir avec la richesse naturelle qu'est le pétrole? Est-ce qu'on va faire des efforts de ce côté-là pour, justement, ouvrir un peu plus le Québec à l'étranger, surtout ces nouveaux marchés qu'on a un peu partout et gui se développent, l'Amérique latine, l'Afrique, l'Asie?

Il y a peut-être un effort de ce côté-là, mais je voudrais savoir, de la part du ministre, comment fonctionnent nos relations internationales et quelle sorte de chevauchement, de dédoublement de services on a avec le gouvernement fédéral. C'est important, parce que le Québécois Jean-Baptiste qui travaille, cela lui coûte de l'argent, il est peut-être prêt à investir de l'argent dans l'avenir, mais il ne voudrait pas non plus que cela coûte deux fois le prix, que le Québec fasse quelque chose et que le gouvernement canadien, son gouvernement aussi, fasse autre chose et que, finalement, il s'aperçoive qu'on est obligé de payer deux personnes pour faire exactement le même travail.

Ce sont des questions précises. Le côté culturel, comme j'ai dit tout à l'heure, d'éducation, c'est très clair, c'est de juridiction provinciale, mais le côté du commerce international, c'est de juridiction fédérale. Comment fait-on pour aider davantage nos entreprises et nos travailleurs québécois?

L'autre direction générale, celle des affaires canadiennes, là aussi, je peux poser des questions au ministre. Bien sûr, je voudrais lui en poser tout à l'heure sur le fédéralisme renouvelé, la souveraineté-association, le nouveau gouvernement canadien qui vient d'être élu, mais, avec les autres provinces canadiennes, est-ce qu'on fait un effort vis-à-vis de ces provinces-là aussi pour stimuler l'économie? En particulier, on sait qu'on a un pied-à-terre à Toronto, mais est-ce qu'on fait un effort du côté des provinces de l'Ouest, en Colombie-Britannique, en Alberta en particulier, qui est une province extrêmement riche? Est-ce qu'on fait tout simplement des visites au point de vue culturel ou constitutionnel ou est-ce qu'on fait un effort pour développer le marché dans ces provinces-là pour nos entreprises québécoises? Dieu sait que le marché de l'Alberta, à l'heure actuelle, c'est un marché riche. Ces gens-là ont de l'argent et on peut, je pense bien, facilement créer quelque chose.

Est-ce qu'on fait un effort dans le domaine de l'automobile en particulier? On sait que le Québec, depuis toujours, est déficitaire dans le domaine de l'automobile. Dans les dernières années, on a un déficit, chaque année, d'au moins $3 milliards. Pour cette année, c'est $3 milliards. L'an prochain, ce sera un peu plus et l'année d'après encore un peu plus. Il est déficitaire dans le domaine de l'automobile. Est-ce que le ministère des Affaires intergouvernementales fait des efforts, avec le gouvernement canadien et les autres provinces canadiennes, pour qu'on puisse attirer chez nous des usines de transformation d'automobiles et, après cela, essayer d'exporter les produits qu'on fait déjà dans le domaine de l'automobile? Il y a beaucoup de moyennes entreprises au Québec qui font des produits d'automobiles. Est-ce qu'on fait un effort de ce côté-là pour en envoyer en Alberta, en Ontario, en Colombie-Britannique au moins un minimum dans les provinces canadiennes, sinon dans les États américains? Il y a un effort à faire de ce côté-là.

Qu'est-ce qu'on fait comme entente de réciprocité avec les autres provinces canadiennes? Est-ce qu'on se contente de discuter d'un fédéralisme ou de nouvelles juridictions ou est-ce qu'on fait véritablement un effort sérieux pour avoir des ententes de réciprocité dans tous les domaines avec les gouvernements des autres provinces canadiennes? Est-ce qu'on dit aux autres provinces canadiennes ce qu'on fait au Québec vis-à-vis de l'économie, vis-à-vis de la langue, vis-à-vis de la culture et est-ce qu'on fait des efforts vis-à-vis de ces provinces-là pour dire: Si, nous autres, on fait cela au Québec, vous autres, vous devriez faire la même chose. On va signer une entente de réciprocité. On a le droit, même avec le système actuel de la constitution canadienne, de signer des ententes de réciprocité avec les autres provinces canadiennes. Qu'est-ce qu'on fait de ce côté-là? Ce serait intéressant pour Jean-Baptiste canadien, Québécois — s'il travaille au Québec tant mieux — s'il ne pouvait pas travailler au Québec, de pouvoir aller travailler en Alberta. Est-ce qu'il va pouvoir aller à l'école française en Alberta et des choses comme cela?

Je pense que c'est intéressant de savoir quels sont les efforts que le gouvernement du Québec va faire vis-à-vis de l'expansion économique, sociale, culturelle du Québec vis-à-vis des autres provinces canadiennes. Ce n'est pas tout d'avoir une maison à Toronto, il faut en avoir ailleurs et savoir exactement où on va. Quelles sortes de relations constantes a-t-on avec les autres provinces canadiennes? On sait que l'alliée par excellence du Québec, comme province, ou les alliées par excellence, ce sont les provinces. Les provinces veulent aujourd'hui de plus en plus avoir leurs pouvoirs, avoir leur juridiction, pouvoir s'administrer elles-mêmes. Ce sont des alliées naturelles pour le Québec. Est-ce qu'on fait des efforts systématiques de ce côté pour faire en sorte qu'on devienne alliés naturellement avec l'Ontario, avec l'Alberta, avec la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, le Manitoba, et ainsi de suite, finale-

ment, pouvoir avoir le système que les Québécois veulent avoir, pour lequel les Québécois se sont toujours battus, pour avoir un petit peu plus de respect à l'intérieur de leur propre pays? C'est important de le savoir de la part du ministre.

Je voudrais savoir aussi pourquoi, dans son organigramme, on a une Direction générale des affaires canadiennes, et que, dans la Direction générale des affaires internationales, on a aussi une Direction des relations avec le gouvernement fédéral. Est-ce que le gouvernement fédéral est considéré comme un gouvernement international ou si ce n'est pas du tout la même chose que la Direction générale des affaires canadiennes? Ce serait important de savoir cela et de savoir si cette Direction des relations avec le gouvernement fédéral consiste tout simplement en nos négociations avec le gouvernement fédéral, mais sans s'occuper de négociations avec les autres provinces canadiennes, que les négociations avec les autres provinces canadiennes, ce serait la Direction générale des affaires canadiennes.

Est-ce que la Direction des relations avec le gouvernement fédéral s'occupe de la thèse de la souveraineté-association ou du fédéralisme renouvelé, tout cela? Est-ce que ce sont deux choses différentes? Ce serait important de savoir cela, parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, les provinces étant nos alliées naturelles, c'est sûr qu'il y a des chicanes entre les provinces et le gouvernement central.

Ce n'est pas seulement le gouvernement du Québec qui se chicane avec le gouvernement d'Ottawa. On a vu en Saskatchewan, M. Blakeney être réélu parce qu'il a fait la lutte dans son élection provinciale contre des interventions directes du gouvernement fédéral dans des domaines de juridiction provinciale. On a vu M. Lougheed faire la lutte contre le gouvernement fédéral et être élu dans sa province. Donc, ce sont tout simplement les provinces canadiennes qui critiquent le système fédéral actuel ou le gouvernement fédéral qui existait ou ceux qui étaient là avant le 22 mai, avant-hier. Il y a peut-être des changements à venir de ce côté, donc des questions se posent au ministre vis-à-vis de ces directions de relations avec le gouvernement fédéral et la Direction générale des affaires canadiennes.

La dernière question que je me pose, c'est quelles seront les relations du gouvernement du Québec maintenant qu'à Ottawa, on a changé de gouvernement et on a foutu dehors un gouvernement qui ne voulait pas négocier avec les provinces, qui voulait tout simplement écraser les provinces avec un gouvernement fédéral très fort, même au risque de détruire notre pays. On s'aperçoit que, maintenant, on a un gouvernement qui arrive là beaucoup plus ouvert, en disant: J'en veux un véritable fédéralisme renouvelé. Il n'a pas encore défini cela clairement, le Parti conservateur, c'est vrai, il ne l'a pas encore défini.

M. Morin: Lui non plus.

M. Biron: Quand même, c'est important de noter qu'on a au moins un premier ministre qui arrive là avec une ouverture d'esprit nouvelle, qui veut s'entendre avec les provinces, et qui ne tient pas à écraser les gouvernements provinciaux, alors que l'autre parti qui était là, avec l'autre chef de parti, voulait tout simplement un affrontement constant avec les gouvernements provinciaux, en disant: On va essayer d'être élus sur le dos du Québec.

Je voudrais savoir l'attitude du gouvernement du Québec, maintenant qu'arrive à Ottawa un chef de gouvernement qui dit: Je veux négocier, je suis prêt à m'asseoir à la table des négociations et voir ce qu'on peut faire pour avoir un fédéralisme renouvelé qui réponde davantage aux besoins des citoyens, non seulement des citoyens du Québec, mais des citoyens des autres provinces canadiennes. Est-ce que les relations qui vont devoir commencer, d'une façon ou d'une autre, avec le gouvernement fédéral seront meilleures, seront plus souples?

À court terme, est-ce qu'on peut s'attendre à des négociations sérieuses de la part du présent gouvernement du Québec, en tant que gouvernement provincial, pour réclamer ce qu'historiquement, tous les gouvernements du Québec ont toujours réclamé et ce qui a toujours été refusé, et, en particulier, refusé d'une façon très sérieuse au cours des dix dernières années par un Québécois qui était en même temps premier ministre du Canada?

Est-ce que ce sera une ouverture? Est-ce que c'est une bouffée d'air frais qu'il y a dans les relations fédérales-provinciales avec l'arrivée d'un nouveau premier ministre plus ouvert et plus flexible, à la tête du gouvernement canadien? Je pense que c'est une question importante, parce que c'est l'avenir même du Québec et du Canada qui est en jeu.

Est-ce qu'on veut un affrontement constant? Est-ce qu'on veut faire en sorte que le Québec et le Canada anglais s'affrontent constamment ou si on veut faire en sorte de régler les problèmes une fois pour toutes et, après cela, qu'on passe aux vrais problèmes du vrai monde au Québec, non pas seulement des problèmes constitutionnels? (11 heures)

Les vrais problèmes du vrai monde au Québec, non seulement les problèmes constitutionnels, mais les vrais problèmes du vrai monde, des problèmes d'emploi, des problèmes d'investissements, le problème de savoir ce que coûtera le panier de provisions en fin de semaine et si, constamment, il va être obligé de payer pour un dédoublement, un chevauchement de juridictions entre deux paliers de technocrates et de fonctionnaires, même si on a d'excellents fonctionnaires ici. Je ne veux pas critiquer les fonctionnaires en particulier, mais, quand même, on sait qu'on est obligé de payer à deux paliers à l'heure actuelle. On a de nombreux exemples dans ce domaine!

Est-ce qu'on va continuer à se chicaner constamment ou si le gouvernement actuel du Québec est prêt à s'associer avec le gouvernement canadien et les autres provinces canadiennes pour dire: Qu'est-ce qui va être de juridiction provin-

ciale? Qu'est-ce qui va être de juridiction fédérale? Où va-t-on s'arrêter dans cette chicane et où va-t-on arrêter de percevoir des taxes qu'on n'aurait pas d'affaire à percevoir normalement des contribuables du Québec et du Canada? On en a eu un exemple au cours des derniers mois avec la guerre de la publicité. Le gouvernement du Québec faisait de la publicité ou de la propagande d'un côté pour sa thèse, alors que le gouvernement fédéral faisait de la publicité et de la propagande pour sa thèse. Il y a une limite à faire de la propagande avec l'argent des citoyens et je pense bien qu'il faut que cela arrête. Pour que cela arrête, il faut savoir où ça commence et où ça finit. Il y a beaucoup de Québécois... La grande majorité de nos Québécois se posent des questions dans ce domaine et ce sont justement ces questions que je voudrais poser au ministre. J'aimerais bien avoir une réponse là-dessus et en particulier sur cette ouverture nouvelle qu'on a maintenant à Ottawa, avec un gouvernement qui se dit ouvert pour négocier avec les provinces canadiennes.

Le Président (M. Laplante): C'est tout. M. le député? Est-ce qu'il y a d'autres membres qui veulent se faire entendre avant que le ministre réponde aux questions?

Réponse du ministre

M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, je reprends la parole. J'ai noté, autant que j'ai pu, les diverses questions qui ont été soulevées par les deux intervenants. Je vais essayer de répondre à toutes ces questions. Il se peut que j'en oublie en cours de route, parce que je n'ai pas pris ça dans un ordre exemplaire. Je compte sur eux pour me poser des questions à nouveau si je n'ai pas apporté des réponses à des interrogations qui ont l'air d'être lancinantes, du moins chez mon collègue libéral.

Je voudrais, avant d'aller plus loin, mentionner une chose que j'ai oublié de dire tantôt, qui n'a rien à voir avec le sujet que nous allons aborder maintenant. Il y a que M. Charron voudrait, si vous êtes d'accord, que nous examinions des crédits de l'Office franco-québécois pour la jeunesse de 12 heures à 12 h 30, ce qui le libérerait et ce qui nous permettrait quand même, dans l'heure qui reste, de passer à travers d'autres sujets. Je pense que ça ne présente pas de difficulté. De toute façon, si on ne le fait pas aujourd'hui, il va falloir le faire demain et on prendra une demi-heure demain plutôt qu'aujourd'hui; mais je suggérerais et proposerais que nous prenions la demi-heure de 12 heures à 12 h 30 pour ça, si tout le monde est d'accord.

Le Président (M. Laplante): Tout le monde est d'accord?

M. Rivest: On peut les adopter tout de suite, si vous voulez.

M. Morin (Louis-Hébert): D'accord, aimes-tu mieux ça?

M. Rivest: Oui.

M. Morin (Louis-Hébert): D'accord.

M. Biron: Non...

M. Morin (Louis-Hébert): Bien, voyons donc! Cela aurait accéléré les choses.

M. Biron: On va y revenir un peu plus tard. J'ai seulement quelques questions très brèves.

M. Morin (Louis-Hébert): De toute façon, je considère que c'est réglé du côté libéral. J'aime autant, d'ailleurs, que ce soit réglé tout de suite, étant donné que j'ai certaines critiques à formuler quant à son intervention.

Ce que le député de Jean-Talon a dit est fondamentalement appuyé sur deux choses: un malentendu et une ignorance. Non, mais je vais vous expliquer ça.

Le malentendu — s'il avait revu l'intervention que j'ai faite l'an dernier, je crois, ou avant, à cet égard... — provient de ce qu'il estime être une distinction trop subtile entre le politique et l'administratif. J'ai deux choses à dire à ce sujet.

Dans tous les ministères de tous les pays démocratiques du monde, dans notre genre de régime politique, il va de soi que c'est le ministre qui s'occupe de la politique et l'ensemble du ministère, c'est-à-dire les fonctionnaires, s'occupe plutôt de l'administration, ça va de soi. Quand j'ai dit ça, je n'ai fait que répéter une évidence flagrante et je ne vois vraiment pas pourquoi il soulève une question aujourd'hui, puisque ça me semble aller de soi.

Si j'avais dit que les fonctionnaires doivent s'occuper de politique et le ministre d'administration, là, je comprendrais qu'on me pose des questions et qu'on soulève des objections. Mais comme je n'ai dit que l'évidence et une vérité de La Palice, je ne vois pas en quoi ça justifie les interrogations qui ont été posées. Cela, c'est la première partie de ce que je veux dire quant au malentendu.

La deuxième chose que je veux dire, c'est que j'avais en tête à l'époque, quand j'ai parlé de ça et je crois que je répondais à une question, le rôle du ministère dans la préparation du référendum. Ce que j'avais dit à l'époque, c'est que ce n'était pas le ministère qui était chargé, ni les fonctionnaires du ministère, de préparer le référendum qui était une opération de consultation populaire sur une option politique, et que cette responsabilité m'appartenait, ce qui veut dire, par exemple, que ce n'est pas le ministère qui prépare la question référendaire. Ce peut être le ministre avec d'autres ministres, parce que c'est une opération politique qui nous revient à nous, cela va de soi. Cela ne veut pas dire qu'on ne parle pas du référendum dans le ministère et qu'on n'en parle pas dans les

autres ministères du gouvernement. Si c'était le cas, ce serait le seul endroit au Québec où on n'en parle pas. Alors, comme il y a des citoyens du Québec dans mon ministère, c'est certain qu'on en parle. Mais ce n'est pas le rôle du ministère, nous nous conformons à cet égard à la loi. Ce qui m'amène à l'ignorance du député de Jean-Talon qui me frappe, d'autant plus, qu'il était conseiller, à l'époque, de M. Bourassa, quand la Loi du ministère des Affaires intergouvernementales a été sanctionnée. Or, cette loi décrit la responsabilité du ministre et, à aucun endroit — je peux la lire, il y a cinq ou six articles qui sont en cause — contrairement à ce que laisse entendre le député, il n'est dit que la fonction du ministère, à toutes fins utiles, c'est de faire la défense et l'illustration du beau et grand fédéralisme canadien. Au contraire, il y a une formulation dont je ne suis pas responsable, qui est celle du gouvernement libéral antérieur et qui est très bien faite, parce qu'elle laisse toutes — c'est ça qui est intéressant — les options ouvertes. On donne, par exemple, comme responsabilité du ministre ceci, à l'article 10 de la loi du ministère: "Le ministre a pour responsabilité d'élaborer et de proposer au gouvernement une politique en matière de relations extérieures et de mettre en oeuvre la politique adoptée par ce dernier". On n'a jamais défini dans quel cadre c'était. "Il établit — le ministre — et maintient avec les autres gouvernements et leurs ministères les relations que le gouvernement du Québec juge opportun d'avoir avec eux". Imaginez-vous, ça peut être des relations d'État souverain! "... il coordonne toutes les activités du gouvernement à l'extérieur du Québec, ainsi que celles de ses ministères et organismes. Il conseille aussi le gouvernement sur toute question ayant trait aux relations intergouvernementales." Il y a encore cinq autres articles qui précisent ce que je viens de dire et, à aucun endroit, on ne parle de la défense et de l'illustration du fédéralisme.

Par conséquent, dans le travail que nous faisons actuellement, nous nous conformons à une loi du ministère qui est très ouverte et qui, contrairement, à beaucoup des attitudes du Parti libéral actuellement, est une sorte de porte ouverte sur l'avenir. C'est important de le mentionner.

M. Rivest: Me permet-on une question sur un point? Cette loi du ministère que vous citez a été adoptée par l'Assemblée nationale du Québec, n'est-ce pas?

M. Morin (Louis-Hébert): Le 24 décembre 1974.

M. Rivest: Non, mais par l'Assemblée nationale du Québec.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, elle n'a pas été adoptée par l'Assemblée nationale de l'Alberta, que je sache.

M. Rivest: L'Assemblée nationale du Québec, sa base juridique, c'est bien l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, n'est-ce pas?

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je vous vois venir, mais j'ai une réponse.

M. Rivest: La loi de l'Assemblée nationale a été adoptée probablement en vertu des pouvoirs qui sont conférés aux provinces par l'article 92 et suivants. Cette constitution est fédérale, n'est-ce pas? Alors, l'application, l'interprétation de cette loi ne peut se faire en dehors du contexte fédéral. Même si vous aviez le référendum, tant et aussi longtemps que le Québec fonctionnera à l'intérieur du régime fédéral, votre mandat premier, c'est le seul point que j'ai démontré, ce n'est pas de travailler à défendre, à étayer ou à promouvoir la souveraineté-association, c'est simplement de travailler dans le cadre du régime fédéral. La panoplie de vos petits dossiers noirs et de toutes les petites actions que vous faites, c'est complètement en dehors de votre mandat en tant que ministre et c'est en dehors du mandat du ministère des Affaires intergouvernementales. C'est le seul point que j'ai voulu exprimer.

M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, je souhaiterais que le député de Jean-Talon jouisse d'un droit de parole privilégié, parce que chaque fois qu'il parle, il se cale davantage.

M. Rivest: M. le Président, je suis d'accord.

M. Morin (Louis-Hébert): Voici la raison pour laquelle il se cale davantage. Si on avait voulu, par cette loi, condamner en quelque sorte le ministère à défendre, comme vous le faites, vous autres, le statu quo, on l'aurait dit.

M. Rivest: M. le Président, est-ce qu'on n'aurait pas de question de privilège? Je ne connais pas beaucoup notre règlement. C'est dommage, M. le Président, parce que j'en invoquerais une à ce moment.

M. Morin (Louis-Hébert): Je vois que le député de Jean-Talon a subi une sorte d'influence de l'ancien premier ministre du Canada, parce qu'il utilise un sophisme. Je vais en utiliser un autre pour répondre, parce qu'à ce moment, il faut se parler à armes égales. Cela n'a pas plus de sens de dire ce qu'il vient de dire, donc, de bloquer l'avenir, que de dire que, parce que moi, je suis né au Québec, je n'ai pas le droit de voyager à l'extérieur. C'est aussi stupide que ça. Je m'excuse.

M. Rivest: Cela veut dire quoi? Vous êtes ministre des Affaires intergouvernementales dans un régime fédéral. Comment pouvez-vous vous inscrire en dehors de ce régime? Dans vos responsabilités...

M. Morin (Louis-Hébert): De la même façon que, chez nous, au Québec...

M. Rivest: Dans vos responsabilités ministérielles. Je ne parle pas de vos discours politiques et de vos opinions personnelles, mais en tant que ministre. Ici, ce sont les crédits du ministre des Affaires intergouvernementales.

M. de Bellefeuille: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Je me rends compte, M. le Président, que notre sympathique ami, le député de Jean-Talon, n'est pas encore tout à fait versé dans nos moeurs parlementaires.

M. Rivest: Heureusement!

M. de Bellefeuille: Je souhaiterais vivement que nous procédions dans l'ordre, qu'il demande la parole et que vous la lui accordiez s'il souhaite intervenir.

M. Rivest: Oui, mais le ministre me dit des choses désagréables.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Jean-Talon! Il est coutume, dans l'étude des crédits, lorsqu'un membre demande au ministre de poser une question, que le ministre accepte de le laisser aller. Cela dépend du ministre. S'il dit qu'il veut continuer son intervention, sans être interrompu...

M. Morin (Louis-Hébert): Comme il n'y a pas de procédure d'amendement à la constitution actuelle en vertu du sophisme du député, on ne pourrait pas la changer. Non, mais c'est ça!

M. Rivest: Vous n'avez qu'à travailler avec vos collègues, les autres premiers ministres du pays...

M. Morin (Louis-Hébert): Mais non, on n'a pas le droit.

M. Rivest: ... pour travailler à la changer.

M. Morin (Louis-Hébert): Ce n'est pas prévu dans la constitution actuelle. Je veux continuer à répondre...

M. Biron: M. le Président, est-ce que je peux demander au ministre...

M. Morin (Louis-Hébert): ... le député n'est peut-être pas versé, c'est vrai, mais il est renversé.

M. Biron: M. le Président, je voudrais demander au ministre si je peux intervenir pour lui dire un peu ce qu'il y a dans la loi. En fait, ça dépend si vous la lisez en anglais ou en français. Si vous la lisez en anglais, je pense que le député de Jean-Talon a raison. Si vous la lisez en français — et c'est la même loi dont parle le député de Jean-

Talon — on dit: "Le ministre assure en outre la participation du gouvernement à l'élaboration, à la mise en oeuvre des politiques et programmes fédéraux ayant des incidences sur le développement du Québec". En anglais, on dit: "He shall furthermore insure the participation of the Government in the preparation and implementation of federal policies and programs affecting the development of Québec." Cela veut dire que ce n'est pas du tout la même chose en anglais qu'en français. En anglais, c'est le fédéral qui est protégé, en français, il semble que ce ne soit pas le fédéral qui soit protégé.

M. Morin (Louis-Hébert): C'est très troublant. J'aurais aimé mieux ne pas apprendre comme ça que le député de Jean-Talon s'est inspiré de la version anglaise, mais enfin... Voilà! Voici un problème de réglé.

Donc, j'ai dit qu'il y avait un malentendu et qu'il y avait une ignorance. L'ignorance, c'est celle qui consiste à ne pas connaître la portée de notre loi. D'ailleurs, le député de Jean-Talon le sait très bien, mais comme il devait meubler son discours de ce matin, il fallait qu'il se trouve des arguments.

M. Rivest: ... Je n'ai le droit de rien dire là?

M. Morin (Louis-Hébert): Non, vous n'avez pas le droit de répondre.

Le Président (M. Laplante): Vous aurez votre tour encore tout à l'heure.

M. Morin (Louis-Hébert): Je voudrais continuer. Il y a une question qui a été soulevée — je ne voudrais pas en oublier et je ne veux pas prendre tout le temps non plus — à propos de la position constitutionnelle que le gouvernement du Québec a fait valoir aux différentes conférences constitutionnelles. C'est très intéressant et la façon dont le député a abordé la question démontre clairement que nous avons effectivement participé à ces conférences-là et que nous avons apporté à ces conférences des positions qui étaient celles des gouvernements antérieurs. Cependant, ce qu'il a négligé de dire — et je pense que c'est assez important de le rappeler — c'est que la série de conférences constitutionnelles qu'on a eues jusqu'en février dernier, a montré hors de tout doute, à mon avis — j'en ai parlé à l'époque et je le répète — que non seulement les positions traditionnelles du Québec n'avaient eu aucune suite — je parle de celles qui avaient été présentées par les gouvernements antérieurs — mais aussi que toute tentative de renouveler vraiment le fédéralisme avait été rejetée.

Je prends un cas précis, je pense au rapport Pépin-Robarts qui a été, croyons-le ou non, surtout utilisé par nous et, à la fin, l'ancien premier ministre du Canada s'est cru obligé d'y faire référence, parce qu'on était les seuls à en parler.

Le fédéralisme renouvelé a été rejeté déjà. Il n'y a personne — je souligne personne et si j'étais capable verbalement de mettre des traits rouges

en dessous, pour que ça paraisse davantage, ou bleus pour que tout le monde soit content que j'aie des traits — nous avons maintenant établi indirectement que personne au Canada ne veut de ce genre de fédéralisme renouvelé, auquel une partie des Québécois continue d'aspirer. Je pense que c'est établi clairement et je réponds tout de suite, par ce ricochet, à une des questions posées par le chef de l'Union Nationale, à propos de l'attitude de M. Clark et de la bénédiction que semble constituer son arrivée au pouvoir pour les Québécois qui tiennent à une rénovation en profondeur du système fédéral.

On a dit longtemps à propos de M. Clark, que je respecte par ailleurs, "Joe Who", c'est-à-dire "Joe qui"? Maintenant je pense qu'il faut dire "Joe quoi"? La raison est la suivante: Je n'ai pas la moindre idée de ce que sont ses options constitutionnelles précises. C'est peut-être un des points où j'étais d'accord avec l'ancien premier ministre du Canada lorsqu'il a demandé, au cours du débat télévisé: II veut quoi, M. Clark? Je ne le sais pas. Par conséquent, comment peut-on présumer, ne sachant pas ce qu'il veut, de ce qu'il va nous proposer et comment supposer, à partir de ce qu'il va nous proposer, que ça va être meilleur que ce que les autres nous ont suggéré avant?

Je pense qu'à ce moment-là, la chose la plus sage à faire, comme le disait le premier ministre hier, elle est double: premièrement, on donne la chance au coureur et, deuxièmement, on va voir à quel moment le coureur va s'enfarger. Pour le moment, il n'y a aucun élément sérieux dans la position du chef conservateur et maintenant premier ministre du Canada qui me permette de croire, sauf une attitude verbalement gentille, qu'il y a vraiment et profondément ancrée chez lui une volonté de révision fondamentale du fédéralisme. Il s'appuie, il l'a dit encore hier, sur pas mal d'éléments politiques du Canada qui n'ont jamais particulièrement brillé, à mon avis, par leur caractère innovateur en matière constitutionnelle, sauf dans un domaine, celui qui les intéresse, les autres moins, celui des richesses naturelles. Je pense aux premiers ministres de l'Ouest canadien en général.

À cet égard, la réponse, c'est que je ne sais pas quelle est son attitude et, par conséquent, on va attendre qu'il nous dise quelque chose.

Maintenant, on a mentionné, quand le député de Jean-Talon a parlé, ce qu'il qualifiait de mon silence. Il va falloir être logique. De deux choses l'une, ou je fais des discours ou je n'en fais pas. Quand j'en fais, on dit que je parle de ce dont je ne devrais pas parler et, quand je n'en fais pas, on me reproche de ne pas avoir parlé. Je dois dire à cet égard, parce que, là aussi, il faut être logique, qu'en ce qui concerne les politiques fédérales-provinciales du gouvernement, elles sont quasiment chaque jour mentionnées à l'Assemblée nationale. Qu'il s'agisse de pâtes et papiers, qu'il s'agisse de questions agricoles, qu'il s'agisse de questions de travail, qu'il s'agisse de n'importe quoi, il y a pratiquement tous les jours, et, en fait, je pense, tous les jours, une question adressée à un ministre, qui touche justement les aspects fédéraux-provinciaux de son action sectorielle à lui.

Je ne vois pas pourquoi, à ce propos, il faudrait que moi, je répète. Par exemple, l'autre jour, il y a eu une excellente intervention de Pierre Marois sur le revenu minimum garanti qui a justement fait état des difficultés fédérales-provinciales que nous avions. Il y en a eu une du ministre des Richesses naturelles sur les pâtes et papiers, ça fait à peu près deux ou trois semaines. On en parle constamment, comme d'autres en parlent, parce qu'il s'agit de leur domaine. J'espère que le député de Jean-Talon ne souhaite pas que mon ministère — parce que c'est déjà assez compliqué dans un gouvernement — devienne une autre sorte de goulot d'étranglement et que personne n'agisse, personne ne parle, à moins que j'aie donné mon approbation sur chacune des virgules de chacune des phrases de l'intervention possible des autres ministres.

Je pense que nous sommes une équipe et que, par conséquent, comme d'autres ministres s'occupent de domaines sectoriels, c'est à eux qu'il revient d'en faire état, y compris dans les domaines fédéraux-provinciaux qui les touchent. À cet égard, nous suivons constamment ces dossiers. De toute façon, ce qu'ils disent est conforme à la politique gouvernementale d'ensemble.

C'est peut-être mon humilité naturelle qui fait que je ne suis pas intervenu plus souvent sur ces questions, mais, comme d'autres en parlaient, j'ai cru que c'était suffisant. Je tiens compte de la suggestion du député et je le remercie, peut-être que, dorénavant, il va se rendre compte que je vais en parler davantage, ça rn'étonnerait qu'il soit d'accord sur ce que je vais dire...

M. Rivest: Vous avez tellement peu raison d'être humble.

M. Morin (Louis-Hébert): Je sais, c'est ce qu'on me dit souvent.

M. Rivest: Je veux vous aider, M. le ministre, c'était le seul sens de ma démarche.

M. Morin (Louis-Hébert): J'imagine. Ensuite, parmi les autres questions qui ont été soulevées, j'ai fait le tour... Je continue dans le domaine fédéral-provincial, je toucherai l'international après, en me greffant sur les deux.

Les autres provinces. Je m'adresse au chef de l'Union Nationale, je pense qu'il y a une sorte de mythologie qui existe, c'est défendable et compréhensible, c'est la suivante, à savoir que les autres provinces sont les alliées naturelles du Québec, c'est-à-dire qu'il suffit que leur qualité de province les fait nécessairement être d'accord avec ce que veut le Québec. C'est arrivé chaque fois... c'est-à-dire que ce qui s'est passé dans les années déjà écoulées, c'est que, lorsqu'il y a eu des accords interprovinciaux des fronts communs, ces fronts

ont deux caractéristiques, ils portent, d'une part, sur des questions très précises qui ne mettent pas en cause de façon sérieuse le cadre constitutionnel actuel.

Ce que je veux dire en français et clairement, c'est que chaque fois que le Québec a pris une position même fédéraliste, mais qui modifiait fondamentalement et sérieusement le système tel qu'il existait, les autres provinces n'ont pas suivi. Premier caractère, donc, cela ne porte que sur des aspects que j'appellerais non dynamiques, même s'il s'agit de questions parfois importantes, du fédéralisme.

La deuxième observation, c'est que ces fronts communs ont une autre caractéristique, c'est d'être éphémères. Ils ne durent jamais longtemps. Je pense que la moyenne de vie d'un front commun interprovincial doit être quelque chose quelque part entre deux semaines et deux mois. Il y en a quelques-uns qui ont duré un an. C'est parce qu'il n'y pas eu de conférence entre-temps, parce qu'ils auraient duré moins longtemps. Cela n'est jamais arrivé. C'est toute mon expérience. Cela fait partie du bilan personnel que j'ai fait, que j'ai décrit d'ailleurs sur le fédéralisme canadien.

J'aborde maintenant la partie interprovinciale. Il y a une vieille question que le chef de l'Union Nationale pose et partiellement avec raison, je pense. Qu'est-ce que cela rapporte? Il y a là un principe fondamental. On vit dans un monde interdépendant. Tous les gens, que ce soient des gouvernements ou des entreprises privées, aujourd'hui, s'efforcent d'intéresser les autres à soi. Je veux dire que, partout dans le monde, il y a des représentants, dans chacune des capitales et des grandes villes, soit de gouvernements étrangers, soit d'entreprises privées étrangères. Il y a une chose qui est sûre. Si, d'une part, il est difficile d'évaluer, dans certains cas, la rentabilité que j'appellerais strictement économique d'un geste extérieur, il est sûr, d'autre part — et cela est absolu — que, si nous ne sommes pas là, nous n'en tirerons rien. Nous manquerons des occasions.

Je prends un petit exemple dans notre relation avec le Japon. Je cite ici un texte de M. Normand Bernier devant l'Institut canadien des affaires internationales, le 12 mars. "Nos ventes de viande de porc au Japon — c'est très terre à terre — à ce moment-ci, sont nulles. Zéro. Savez-vous ce qu'elles sont devenues? En 1976: $22 millions; en 1977: $31 millions; en octobre 1978: $45 millions." Il parlait d'une époque et il montrait une progression au cours des dernières années: de $22 millions à $31 millions, à $45 millions. C'est un énorme marché.

La Chine est aussi un énorme marché. L'Amérique du Sud est aussi un énorme marché. Si on s'en tient seulement aux aspects économiques, il faut quand même savoir, et cela de façon absolue, que, si nous sommes absents, nous avons, en quelque sorte, économiquement tort.

En plus de cela, sur le plan des actions économiques du ministère, quant à ce qui concerne l'activité internationale, nous avons participé aux négociations du GATT, une participation active du Québec. Nous avions un représentant permanent sur place. Nous participons à l'accord-cadre Canada-Communauté économique européenne, il en a été question aux crédits l'an dernier. Il y a un accord qui existe maintenant entre l'Office de promotion industrielle de la Belgique et la Société de développement indusriel du Québec, que nous avons négocié. L'ouverture d'une délégation économique à Caracas, qui est récente. Il y a la création de l'Hydro-Québec International, avec laquelle nous avons été directement associés. Cela peut être capital pour l'avenir, l'Hydro-Québec International, de même que Sidbec International, mêmes commentaires. Nous avons des efforts de promotion au Japon, on en a mentionné quelques-uns.

Nous avons, pour ce qui est de la coopération franco-québécoise, par exemple, réorienté cette coopération en vertu de quatre secteurs prioritaires: les mines, les pêches, l'agroalimentaire et l'énergie.

Nous exerçons, si vous voulez, une action de promotion au ministère, un rôle de planification aussi, un rôle, indirectement parfois mais quand même réel, d'assistance aux industries et surtout aux ministères qui sont intéressés à agir vers l'étranger. On ne peut quand même pas assumer toute l'économie du Québec nous-mêmes, parce qu'à ce moment-là, on se ferait qualifier d'être un gouvernement socialiste. Je sais qu'on ne penserait jamais à cela de l'autre côté, mais...

M. Rivest: Un gouvernement bourgeois.

M. Morin (Louis-Hébert): Ensuite, nous assurons — et je pense que cela est important — le suivi des opérations. Il y a ce que j'appelle le syndrome de la patte en l'air, c'est-à-dire qu'on peut penser à des choses intéressantes, se convaincre ensemble que c'est bien de faire ceci ou cela, en concluant sans conclure, c'est-à-dire en oubliant d'attribuer des responsabilités et d'assurer le suivi. Cela, nous le faisons.

Et je conclus une chose, un peu de ce qui a été dit ce matin, cela va être un peu paradoxal; compte tenu des critiques que font souvent les partis d'opposition, peut-être que notre ministère ne fait pas assez de publicité. J'espère que, si nous nous mettons à en faire — et c'est une des choses que nous avons l'intention de faire — l'année prochaine, vous me remercierez d'avoir axé davantage notre action sur une meilleure connaissance de nos activités économiques...

M. Rivest: Publicité, oui, conforme à votre mandat, qui est de vous inscrire dans le régime fédéral canadien. Je n'ai pas d'objection. C'est vrai que vous n'en faites pas assez de ce côté-là.

M. Morin (Louis-Hébert): Je constate que le député de Jean-Talon, non seulement agit à partir d'un malentendu et de l'ignorance, mais qu'il renote ce qu'il a déjà dit tout à l'heure et qui a été réglé, je pense, à partir de l'intervention que j'ai

faite. Je ne pense pas que ce soit nécessaire d'y revenir. Notre mandat, c'est de défendre les droits et les intérêts des Québécois. Et la défense des droits et des intérêts des Québécois, il n'y a rien qui indique à partir de quoi que ce soit que c'est figé éternellement à l'intérieur d'un cadre conçu en 1867 dans une situation qui n'a strictement rien de commun avec celle que nous connaissons aujourd'hui. C'est au moins une des choses élémentaires qu'il faut reconnaître.

M. Rivest: Les Québécois sont également Canadiens.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Jean-Talon!

M. Morin (Louis-Hébert): M. le député de Jean-Talon, vous aurez peut-être l'occasion d'intervenir tantôt, mais pour le moment, je voudrais terminer. Vous avez posé plusieurs questions, mais vous me semblez appartenir à cette catégorie de personnes qui ont des questions pour toutes les réponses qu'on apporte.

Pour ce qui concerne les actions économiques, on parlait tantôt de l'automobile. Je pense qu'il en a beaucoup été question en Chambre. Les subventions fédérales à Ford, en Ontario, sont un élément justement de la politique fédérale-provinciale sur lesquelles nous sommes intervenus et qui démontrent que justement, à cet égard, nous avons eu une attitude dynamique et que nous avons essayé de tirer de l'action fédérale tous les avantages possibles avec le succès qu'on connaît.

On m'a demandé tantôt s'il y avait des chevauchements entre les actions internationales du Québec et les actions internationales du Canada. Il y a parfois des chevauchements, c'est évident. D'ailleurs, nous avons — je ne sais pas si vous vous en souvenez — publié au mois de juin dernier une étude sur les chevauchements fédéraux-provinciaux. On a été assez estomaqué de voir jusqu'à quel point il y en a, mais il y a aussi une complémentarité. Je dois dire qu'à cet égard, nous essayons dans la mesure du possible d'utiliser, lorsque nous ne sommes pas présents sur place, les services fédéraux qui existent sur place. Je vais vous donner un exemple. Quand nous avons ouvert la délégation du Québec à Caracas, nous avons utilisé les services de l'ambassade du Canada sur place pour procéder à cette inauguration. J'ai même demandé — ce sont des choses qui ne sont pas connues — à l'ambassadeur du Canada sur place, M. Rousseau, de me présenter à un groupe d'hommes d'affaires et de représentants gouvernementaux qui se trouvaient sur place lors d'une rencontre que nous avons eue avec lui, ce qui veut dire que, quand il y a moyen de se compléter, nous le faisons. À ce moment-là, nous utilisons tous les services possibles, mais il reste un principe de base, savoir que si nous ne sommes pas présents nous-mêmes, ce ne sont pas les autres qui vont s'occuper de nos intérêts à notre place, parce qu'il y a une caractéristique qui existe aussi, souvent — et cela a été dénoncé par bien d'autres que nous et bien avant nous — c'est que les institutions fédérales ont tendance à diriger peut-être un peu plus et même beaucoup plus les possibilités d'échanges vers l'Ontario que vers peut-être d'autres provinces, en tout cas pas tellement vers le Québec. C'est connu par passablement de gens.

D'ailleurs, il y a une chose frappante dans la politique canadienne: l'Ontario est toujours gagnant. On s'occupe de l'Ontario tout le temps. Quand il y a eu un gouvernement libéral à Ottawa, il avait élu assez de députés pour être représenté sur place et insister pour avoir un pouvoir de persuasion et un pouvoir d'infléchir les politiques gouvernementales. Il a réussi. Cette fois-ci, il a élu assez de conservateurs pour avoir le même avantage. En d'autres termes, l'Ontario gagne toujours. Je pense que c'est quasiment un symbole du système fédéral canadien qui a été axé en fait en fonction des intérêts du Canada central, plus particulièrement du Canada central géographiquement, c'est-à-dire justement l'Ontario. L'Ontario ne perd jamais. C'est une des caractéristiques fondamentales du système dans lequel on se trouve maintenant. Il a développé cette habileté historique à profiter de toutes les circonstances.

Je termine maintenant mon intervention seulement par un mot sur ce qu'on a appelé la réciprocité tantôt, c'est-à-dire l'offre de réciprocité qui a été faite par le Québec quant à l'enseignement en anglais au Québec et en français dans les autres provinces. Cette offre est maintenue. Je l'ai répétée verbalement il y a deux semaines au ministre des Affaires intergouvernementales de l'Ontario. J'en ai parlé dans une entrevue à la télévision diffusée dans les provinces maritimes, j'ai renouvelé l'invitation. Le dossier est toujours ouvert, nous sommes toujours disponibles. Il y a eu une réponse un peu vite — il aurait peut-être dû écouter davantage ce que j'avais à dire à ce moment-là — du premier ministre du Nouveau-Brunswick qui a dit: Jamais ou enfin, je ne sais pas, il n'était pas tellement d'accord. Il n'y a rien de moins permanent en politique que les "jamais". On peut supposer qu'éventuellement la lumière jaillira. De toute façon, le dossier que nous avons ouvert demeure ouvert et nous sommes toujours disposés à mettre en oeuvre ces accords de réciprocité. Nous sommes prêts à en parler à n'importe quel moment.

J'espère que je n'ai rien oublié. Si j'ai oublié quelque chose, je compte sur mes collaborateurs des deux partis de l'Opposition pour me le rappeler. Je cède la parole à qui que ce soit qui voudra la prendre maintenant.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Deux-Montagnes.

Discussion générale

M. de Bellefeuille: M. le Président, cela m'étonne toujours quand j'entends un homme politique, en l'occurrence le député de Jean-Talon employer le mot "politique" comme si c'était un

bien vilain mot, comme s'il avait un sens péjoratif. (11 h 30)

La politique, c'est une bien grande chose, la gouverne de la chose publique. On ne peut pas imaginer que le ministre ou le ministère même des Affaires intergouvernementales fasse autre chose dans ce sens, justement, que de la politique. Il n'y a rien de plus politique que de traiter des relations entre le gouvernement du Québec et tous les autres gouvernements. Il y a, bien sûr, des nuances à faire, des distinctions à faire, que le ministre a faites, entre un rôle plus proprement politique et un rôle plus proprement administratif, mais quoi qu'il en soit, je pense que la tendance actuelle, selon laquelle le ministre a une conception politique de son rôle, est infiniment préférable à ce qui a paru dans le passé être, de la part de prédécesseurs du ministre actuel, une conception de leur rôle qui était peut-être plus mondaine que politique. Il vaut beaucoup mieux que le ministre des Affaires intergouvernementales ait une conception politique de son rôle plutôt qu'une conception mondaine.

Je voudrais demander aussi ou je me le demande, M. le Président, ce que le député de Jean-Talon a en tête quand il revient constamment sur ce thème de la défense du fédéralisme canadien. Comme le ministre l'a indiqué, vu la nature même d'un régime fédéral, le rôle, dans le cadre actuel, d'un gouvernement provincial, c'est de soutenir les intérêts de la province dont il s'agit dans le cadre fédéral. Notre façon, comme Québécois, habitants d'une province canadienne, de soutenir le régime fédéral canadien ne peut pas être de soutenir les intérêts des gens de l'lle-du-Prince-Édouard. Ce doit être de soutenir les intérêts des gens du Québec.

Pourtant, le député de Jean-Talon donnait à entendre qu'en défendant les intérêts de la population québécoise, nous ne soutenons pas le régime fédéral canadien. Cela m'amène à me demander si le député de Jean-Talon pense que la politique que le Québec devrait pratiquer dans les affaires intergouvernementales dans le cadre fédéral, c'est une politique de chien couchant. Est-ce qu'il faut être chien couchant aux rencontres avec le gouvernement fédéral ou aux rencontres fédérales-provinciales? Est-ce que c'est d'être chien couchant qui va constituer pour vous la défense du fédéralisme canadien? Si ce n'est pas d'être chien couchant, il faut affirmer les besoins du Québec, comme le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale l'a indiqué, il faut le faire en collaboration avec les provinces qui sont nos alliées naturelles.

C'est ce que nous faisons, c'est ce que nous n'avons pas cessé de faire depuis deux ans et demi, c'est ce que nous avons l'intention de continuer à faire tant que nous serons au pouvoir. Il n'y a pas d'autre moyen de soutenir le régime fédéral canadien que de soutenir les intérêts du Québec. C'est très clair, nous ne considérons pas que les Québécois ont déjà voté au référendum, nous ne considérons pas que le Québec est déjà parvenu à la souveraineté. Nous nous rendons parfaitement compte que le Québec, malheureusement, n'est encore qu'une province canadienne et que la seule façon de soutenir les intérêts du Québec dans le moment, c'est de défendre ses intérêts dans le cadre fédéral actuel. Le fédéralisme repose dans son essence sur des tensions qu'on voudrait fécondes entre deux paliers de gouvernement. Nous y apportons la dose nécessaire de tension justement, nous y apportons la revendication des intérêts du Québec. Ce sera toujours notre rôle de le faire et, des gouvernements précédents, la plupart d'entre eux ont, eux aussi, compris leur rôle comme cela. Nous sommes, par conséquent, dans la plus grande continuité à cet égard.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière.

M. Biron: M. le Président, je voudrais...

Le Président (M. Laplante): Qui a demandé le premier la parole? Oui.

M. Biron: Je voudrais simplement poser brièvement quelques questions au ministre à partir d'exemples précis. Il a cité le marché du porc au Japon. Le ministre a dit: II y a possibilité d'avoir un autre marché immense en Chine. Or, on sait qu'au Québec on a beaucoup de producteurs dans le domaine du porc. On en a dans le domaine des produits laitiers, parce qu'on produit plus que notre autosuffisance dans ces deux domaines. Je voudrais que le ministre nous dise qui est responsable justement de faire la promotion des produits québécois. Est-ce que c'est le ministère de l'Industrie et du Commerce? Quelle sorte de responsabilité a-t-on ou quelle sorte de chevauchement a-t-on entre le ministère de l'Industrie et du Commerce et le ministère de l'Agriculture et les ministères fédéraux de l'Agriculture ou des Affaires extérieures, ainsi de suite, comme ça?

Il semble qu'on a un tas de chevauchements, un tas de ministères à travers ça. Est-ce que c'est le ministère de l'Industrie et du Commerce qui fait ça? L'Agriculture? Par quels canaux? Ou est-ce le ministère des Affaires intergouvernementales? Qu'est-ce qui arrive avec le gouvernement fédéral? Parce que, moi aussi, comme le ministre, je pense qu'on peut développer des marchés pour peut-être doubler notre production de porc au Québec si on peut trouver ces marchés. Je sais que, l'an dernier, en particulier, on a refusé une commande de $25 millions parce qu'on ne pouvait pas la produire au Québec, une commande qui venait d'Afrique. Il y a peut-être d'autre chose aussi, d'autres pays qu'on peut trouver dans ce domaine, parce qu'on sait qu'on a de plus en plus de producteurs agricoles québécois qui sont installés, qui ont investi $100 000, $200 000, jusqu'à $500 000 dans le domaine du porc au Québec. Dans le domaine de la production laitière, c'est la même chose, les fromages et tout ça. Je veux savoir du ministre, moi... C'est un exemple bien précis et on pourra prendre n'importe quel exem-

ple après ça, mais, une fois qu'on sait ce qu'on fait dans un domaine, on peut savoir ce qu'on fait dans les autres domaines, l'industriel et tout ça. Je veux savoir ce qu'on fait de particulier dans le domaine de l'agriculture, la production porcine et les produits laitiers, pour ouvrir de nouveaux marchés à l'extérieur, compte tenu qu'au Québec on produit beaucoup plus que notre autosuffisance et surtout que nous produisons une qualité extraordinaire dans ces deux domaines.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, merci, M. le Président. C'est une question intéressante. C'est le ministère de l'Industrie et du Commerce, pour répondre à votre première question, qui s'occupe de ce que j'appellerais la promotion commerciale à l'étranger par l'entremise de deux choses: premièrement, une direction qui s'en occupe à Québec et, deuxièmement, des représentants du ministère de l'Industrie et du Commerce dans les diverses délégations.

Les représentants du ministère de l'Industrie et du Commerce dans les diverses délégations s'occupent aussi des intérêts des autres ministères, c'est-à-dire, pour prendre le cas de l'Agriculture, comme il n'y a pas de représentant du ministère de l'Agriculture, c'est le représentant de l'Industrie et du Commerce qui s'occupe de l'agriculture. Par conséquent, au moment où viendront — je pense que c'est une suggestion qui s'impose dans les circonstances — les crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce, il y a toute une section qui porte là-dessus et je vous inviterais à reprendre en détail ces questions à ce moment-là. Mais je peux quand même vous donner un exemple au moins. J'ai parlé du Japon tantôt.

Prenez à New York. Pour l'année 1978/79, il y a plus de 100 firmes du Québec qui ont reçu l'assistance de notre délégation. Le chiffre d'affaires dans ce cas est estimé à $50 millions, dont $40 millions dans le secteur de la fourrure, pour vous donner un exemple. Il y en a d'autres, mais je ne veux pas entrer là-dedans trop en détail, parce que ça relève plus directement du ministère de l'Industrie et du Commerce. Je vous inviterais à faire une intervention plus détaillée à ce moment-là.

M. Biron: Je vous ai demandé aussi... M. Morin (Louis-Hébert): Bon!

M. Biron: ... les chevauchements qu'il y a entre le gouvernement fédéral...

M. Morin (Louis-Hébert): Deuxièmement... Excusez, j'ai oublié ça.

M. Biron: ... et provincial.

M. Morin (Louis-Hébert): Les chevauchements avec le gouvernement fédéral?

M. Biron: Dans ce domaine particulier. Est-ce que le fédéral s'en occupe en même temps ou si c'est tout simplement le provincial?

M. Morin (Louis-Hébert): II s'en occupe en même temps, mais il n'est pas sûr qu'il s'en occupe pour nous. C'est justement le point. Il a plutôt une tendance un peu naturelle, une sorte d'aimant politique qui fait que c'est peut-être l'Ontario qui a davantage de chances d'en profiter que nous. C'est pour ça que nous devons être sur place. Quand il y a moyen de le faire avec lui, d'agir avec lui, c'est sûr que nous collaborons et qu'il n'y a pas de chicane à l'extérieur systématiquement qui se déroule entre les représentants commerciaux du Québec et ceux du gouvernement fédéral.

Est-ce qu'il y a chevauchement entre notre ministère et le ministère de l'Industrie et du Commerce? La réponse, c'est non. Parce que nous avons — j'ai toujours eu ça même à l'époque où j'étais sous-ministre — comme politique de ne pas faire nous-mêmes ce que les autres ministères peuvent faire dans leur domaine sectoriel. Autrement, ça devient un bordel administratif et on ne sait plus qui a la responsabilité de quoi. Par conséquent, ce n'est pas notre ministère qui a, fondamentalement, comme responsabilité la représentation commerciale, industrielle et économique du Québec, c'est le ministère de l'Industrie et du Commerce; mais c'est coordonné par nous et c'est sous la direction politique générale du ministère des Affaires intergouvernementales; mais les actions sectorielles, ad hoc et ponctuelles appartiennent aux ministères d'origine.

M. Biron: Mais ma question tout à l'heure... Je reviens aux chevauchements avec le gouvernement fédéral. Vous m'avez répondu: On ne peut pas "truster" le gouvernement fédéral. C'est à peu près ça que vous avez dit. Cela va surtout en Ontario ou ailleurs. Je reviens toujours avec mon même produit laitier ou le porc.

On sait que la commission des grains, à l'Office canadien des grains, semble vouloir donner moins de subsides aux producteurs québécois. Cela va pénaliser les producteurs québécois. Mais comment peut-on faire, nous autres, pour nous protéger sur les marchés extérieurs? C'est ça que je vous ai demandé. Est-ce que le ministère des Affaires intergouvemementales intervient directement par des négociations au niveau du gouvernement fédéral pour dire: Dans tel et tel pays, ce sont des marchés qui sont à nous, ou on veut prospecter ces marchés. Qu'est-ce que vous pouvez faire pour nous aider? Ou est-ce qu'on n'en parle pas du tout au gouvernement fédéral?

M. Morin (Louis-Hébert): Non, on en parle. A priori et systématiquement, on essaie de s'entendre pour les missions, les exportations, les importations et tout ça, avec des représentants fédéraux. C'est une politique que nous avons. Nous n'avons pas toujours les mêmes vues. Cependant, nous essayons de nous entendre.

Deuxièmement, quand nous ne sommes pas sur place, nous demandons à l'ambassade du Canada de s'en occuper. Exemple, quand on n'était pas à Caracas et qu'on n'était pas sur place, on a demandé à ces gens de travailler avec

nous pour l'implantation de notre délégation, ce qu'ils ont fait.

Cependant, il y a une chose — je répète toujours ça, parce que ça me paraît fondamental — c'est que, si nous ne sommes pas sur place, c'est sûr qu'il y a moins de chances d'avoir des avantages économiques que si nous y sommes. Il n'y a pas de risques. La cible est aussi large qu'une grange à dix pieds, on ne peut pas la manquer. Je ne vous dis pas qu'on vise toujours droit, mais au moins on attrape l'objectif en gros. Par conséquent, c'est une politique de présence qui s'impose.

Vous aviez posé une question tantôt — j'ai oublié d'y répondre, je m'en excuse et ça m'amène, ce que vous venez de dire, à y répondre — Est-ce qu'on songe à de nouvelles délégations à l'étranger? Le problème est que, chaque fois que nous voulons ouvrir une délégation à l'étranger, sauf dans le cas de certains pays très précis, en l'occurrence, je vous en mentionne un, les États-Unis, il faut toujours avoir en quelque sorte "la permission" du gouvernement fédéral. Nous ne sommes pas un État souverain et nous sommes contrôlés, dans nos actions à l'extérieur du Québec, même quand il s'agit de nos intérêts immédiats, par la bienveillante surveillance fédérale.

Par conséquent, je vous donne un cas qui est arrivé... Ce n'était pas dans le domaine économique, mais ça nous touche quand même de près; c'était dans le domaine culturel, parce que le domaine culturel a des retombées économiques. On oublie toujours ça et il ne faut surtout pas non plus penser que, pour chaque dollar investi à l'étranger, il faut nécessairement qu'il y ait un taux de rendement de 10% par année; on ne peut pas calculer comme ça. On voulait ouvrir une délégation à Dakar au Sénégal, parce qu'il y a beaucoup de Québécois en Afrique francophone; il y a beaucoup de Québécois dans le monde. On est un peuple qui a, en quelque sorte, des ambassadeurs itinérants non formels un peu partout, et il faut quand même prendre contact avec ces gens; de sorte que nous voulions être à Dakar. Il y avait des possibilités d'échanger avec ce pays. Il y a toutes sortes de marchés culturels et autres qui peuvent s'ouvrir. On nous a refusé d'y être pour une raison que j'expliquais à l'époque, mais sur laquelle je reviens aujourd'hui. L'ambassade du Canada sur place donnait l'image que le Canada est un vaste et grand pays francophone, ce qui va peut-être se révéler un peu plus difficile dans les prochains mois, mais en tout cas. Les fonctionnaires fédéraux sont payés assez cher pour inventer des explications. Toujours est-il qu'on ne voulait pas une délégation du Québec à Dakar, parce qu'à ce moment, ça aurait en quelque sorte reflété davantage la réalité canadienne telle qu'elle existe maintenant, c'est-à-dire celle de deux sociétés, deux communautés ou deux nations qui s'y trouvent. On nous a empêchés de nous installer à Dakar, c'est clair.

Par conséquent, si, d'une part, nous avons comme politique, comme les autres gouvernements l'avaient, mais nous avons vraiment comme politique d'être présents à l'extérieur et davantage, d'autre part, la plus grande erreur que je pourrais faire maintenant, ce serait de dire: Oui, nous pensons nous établir dans tel ou tel pays. Nous essayons vraiment d'étudier le plus possible les situations, voir quels sont les intérêts du Québec, ce que le Québec peut en retirer. Par exemple, si vous dites: Comment ça se fait qu'on n'est pas établi en Indonésie? On n'a jamais pensé à la réponse et on ne voit pas ce que ça donnerait. Seulement, il peut y avoir un tas d'autres pays. Il y a des secteurs du monde où nous ne sommes pas et on s'en va vers un univers — je ne l'apprends à personne — où, de plus en plus, les choses vont se faire ensemble, où, de plus en plus, il va y avoir — je ne voudrais qu'on me comprenne de travers — une sorte de souveraineté-association mondiale. Par conséquent, il faut y être, nous autres. Si on n'y est pas, ce ne sont pas d'autres...

M. Rivest: Y être...

M. Morin (Louis-Hébert): Bien oui, c'est la formule de l'avenir.

M. Rivest: Commencez donc par faire la locale avant.

M. Raynauld: Elle existe depuis dix siècles.

M. Morin (Louis-Hébert): II serait à peu près temps qu'on l'ait nous aussi.

M. Raynauld: II y a toujours eu des ententes entre les postes...

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Morin (Louis-Hébert): Je suis très heureux de cette intervention historique du député. Si ça existe depuis dix siècles, c'est à peu près le temps que ça s'applique à nous aussi.

M. Raynauld: ... voyons donc!

M. Rivest: Essayez de faire la locale avant.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivest: Venir nous dire des affaires pareilles!

M. Raynauld: C'est épouvantable.

M. Morin (Louis-Hébert): Alors, je m'aperçois que, chaque fois qu'on ouvre des perspectives vers l'avenir, ça vous fait sursauter, chers collègues de l'opposition libérale. Je comprends, en ce qui concerne...

M. Rivest: De ce temps-ci, elles se ferment les unes auprès les autres, vos perspectives.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît! Vous avez demandé le droit de parole. Je vais vous l'accorder tout à l'heure, messieurs. M. le ministre, continuez s'il vous plaît. (11 h 45)

M. Morin (Louis-Hébert): Ce que je voulais dire, c'est oui, nous avons l'intention comme politique, d'établir des relations plus étendues avec toutes les communautés possibles au monde, en tenant compte de nos intérêts et, pour le moment, en tenant compte de la contrainte qui existe dans le système où on se trouve et il faut, par moments, procéder avec beaucoup de prudence et même d'astuce pour arriver à défendre activement les intérêts du Québec.

Le Président (M. Laplante): Merci. M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Merci, M. le Président. J'ai deux questions. La première est à propos des priorités que le ministre a exprimées tout à l'heure, priorités que j'ai trouvées, pas suffisamment concrètes. Il a dit que son ministère avait quatre priorités: la diffusion, la coopération, la participation et l'exploration. Je trouve que c'est de la littérature dans les circonstances. Je voudrais qu'il nous dise de façon un peu plus concrète, ce que cachent ces expressions très générales. D'abord, en ce qui concerne la diffusion. Quelle est l'image que le ministère donne à l'étranger à l'heure actuelle? Est-ce que le ministre pourrait nous donner des textes là-dessus? Est-ce qu'il pourrait nous indiquer ce qu'est cette image? Qu'il nous parle un peu de contenu et pas simplement dire j'explore, je participe, je coopère et je diffuse. Ce ne sont pas des choses opérationnelles, ce ne sont pas des concepts opérationnels. Quand il s'agit de diffusion à l'extérieur, d'information et de publicité, je vois que dans le budget il y a une augmentation de 39% cette année. Une augmentation de 39% quand on est censé être très serré...

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, mais 39% par rapport à quoi, il faudrait quand même...

M. Raynauld: Par rapport au budget de l'année passée.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, par rapport à des chiffres qui sont...

M. Raynauld: C'est ainsi que ça s'exprime. C'est 1979/80 $290 000...

M. Morin (Louis-Hébert): Ah, oui!

M. Raynauld:... par rapport à $214 000, ce qui fait une augmentation de 35%. C'est dans le livre qui nous est donné.

M. Morin (Louis-Hébert): Une pinotte dans l'ensemble du budget.

M. Raynauld: Donc, une augmentation de 35% sur la diffusion. Je voudrais savoir quel est le contenu de cette diffusion. Qu'elle est l'image que l'on donne à l'extérieur? Vous vous rappellerez que l'on a soulevé quelques questions en Chambre à un moment donné — au printemps dernier, M. le Président — sur une publication qui paraissait à New York et qui provenait, je crois, de la délégation de New York ou peut-être du ministère ici, je n'en sais rien. Cette publication avait quand même soulevé sinon des interprétations abusives de la situation québécoise, au moins un peu de confusion dans l'esprit d'un certain nombre de personnes.

Ma deuxième question se rapporte...

M. Morin (Louis-Hébert): Est-ce que je peux répondre à la première?

M. Raynauld: Si vous voulez.

M. Morin (Louis-Hébert): Parce que vous avez posé exactement la question à laquelle je m'attendais et, comme je m'y attendais, j'avais préparé quelque chose pour vous répondre. Alors, ça arrive bien, pour une fois que les papiers qu'on a préparés vont servir.

J'ai l'honneur et le plaisir de vous distribuer une copie à chaque parti de l'Opposition — parce que c'est quand même assez volumineux — d'un exemplaire de chacune des 18 éditions du bulletin d'information hebdomadaire — il est mensuel au Japon — qui est publié par la direction des communications du ministère des Affaires intergouvernementales. La liste comprend un exemplaire de chacun des bulletins suivants: Quebec Hebdo, qui est fait ici; Quebec Up Date; Québec... — je ne commencerai pas à les énumérer dans toutes les langues, il y en a en japonais, ça va vous intéresser, il y en a en allemand aussi, vous qui avez une vaste culture, je suis sûr que vous allez sauter là-dessus, il y en a en hollandais, ce qui est évidemment, plus que vous en demandiez.

M. Rivest: II y en a en anglais.

M. Morin (Louis-Hébert): II y en a en anglais, c'est même la deuxième qui est là, et il y en a...

M. Rivest: Merci.

M. Morin (Louis-Hébert): ... sept; un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix. Il y en a dix en anglais sur 18. Je m'aperçois que vous vous préoccupez beaucoup de l'anglais et, de ce fait, vous allez être heureux de voir qu'on a dix publications sur 18 qui sont en anglais.

M. Rivest: II y a un million de Québécois qui sont des anglais.

M. Morin (Louis-Hébert): Ce n'est pas pour le Québec, ici, c'est pour l'étranger. Vous allez voir par là, et je vous invite à vous en rendre compte, que nous essayons de refléter — je réponds à votre question — la réalité québécoise telle qu'elle est. Voilà. C'est la réalité telle qu'elle est.

M. Raynauld: C'est quoi, ça?

M. Morin (Louis-Hébert): Vous allez voir par la réponse, par le document.

M. Raynauld: J'aurais aimé que le ministre nous dise un peu ce qu'est la réalité québécoise, comment il la définit cette réalité québécoise...

M. Morin (Louis-Hébert): Je suis très content de cette question...

M. Raynauld: ... quand il doit donner des directives aux fonctionnaires. Il doit dire aux gens quelle est cette réalité québécoise?

M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, j'ai eu l'occasion de me rendre compte par moi-même que le gouvernement précédent avait totalement négligé de renseigner par exemple — je vais utiliser ce cas-là — nos voisins Américains sur la réalité canadienne et québécoise. J'ai eu l'occasion de m'en rendre compte par moi-même lors de conférences que j'ai faites là-bas.

Donc, il a fallu faire l'ABC de la situation constitutionnelle canadienne pour expliquer aux Américains qu'une province du Canada, ce n'est pas comme un État américain, pour expliquer aux Américains que la minorité francophone du Canada, ce n'est pas l'équivalent de la minorité des Cajuns en Louisiane. Il a fallu expliquer aux Américains qu'il n'y avait pas ici le mécanisme ou la philosophie du "melting pot" qui existait chez eux. En d'autres termes, il a fallu expliquer que si on transposait en termes américains la situation canadienne, ça voudrait dire que tous les États de la Nouvelle-Angleterre, celui de New York, celui de la Pennsylvanie et celui du New Jersey peut-être, pourraient parler une langue comme l'espagnol, l'allemand ou le français, le reste étant anglophone.

Quand on leur donnait des exemples aussi simples que ça, ils se sont rendu compte d'une chose, c'est que l'évolution québécoise des dernières années, et celle qui s'en vient, n'est pas une sorte de mouvement qui vise à rétablir une langue morte, ce qui est un peu le cas du gaélique dans d'autres pays, mais, au contraire, un mouvement fondamental qui est très sain et qui s'inscrit parmi les plus grands courants mondiaux à l'heure actuelle.

Il a fallu remettre les choses en perspective et je l'ai fait moi-même; j'ai expliqué le projet politique du gouvernement du Québec dans ses grandes lignes et j'ai aussi — d'autres l'ont fait — présenté le Québec d'une façon positive, de sorte que certaines des préventions qu'on pouvait avoir contre nous sont en train de disparaître. Je pense qu'on peut, par la lecture de la presse américaine, se rendre compte que certaines idées qui circulaient sur le caractère un peu folklorique du Québec ou hautement subversif de quoi que ce soit qu'on fasse ici, tout ça s'est fortement atténué.

C'est une des conséquences de notre action, ne serait-ce que pour les États-Unis. Dans le monde entier aussi, l'arrivée de notre gouvernement a attiré plus d'attention qu'à peu près tout ce qui s'était passé ici avant et, par conséquent, nous répondons aussi honnêtement que possible à ceux qui nous posent des questions. Nos délégations à l'étranger le font aussi. Non seulement elles le font dans leurs fonctions courantes, mais elles doivent le faire, car c'est leur devoir de le faire. Ces gens doivent expliquer le Québec tel qu'il se présente et telles que sont ses aspirations.

Les ambassades du Canada ne se gênent pas et les ambassadeurs ne se gênent pas non plus pour faire des discours politiques à l'étranger. Nous n'en faisons jamais, nous. Je voudrais bien qu'à cet égard, on n'ait pas deux poids, deux mesures et que chaque fois que le Québec explique un peu ce qu'il a cornme perspective par rapport à l'avenir en tenant compte du fait que tout le monde n'est pas unanime là-dessus, je ne voudrais pas qu'on oublie qu'au même moment, vous avez le gouvernement fédéral qui, par l'entremise de ses ambassades, distribue et diffuse à l'étranger une image de la réalité canadienne qui n'est pas conforme aux faits.

Cela, nous le corrigeons et je pourrais vous apporter bien des exemples. Il y a même le discours d'un ambassadeur en Grèce à un moment donné qui était quasiment une distorsion totale de la réalité.

M. Raynauld: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Une autre question, M. le député?

M. Raynauld: Oui, M. le Président, sur cette dernière affirmation. Je pense que le ministre ne devrait pas accuser, de façon générale, les ambassadeurs canadiens à l'étranger de faire de la propagande qui est fautive...

M. Morin (Louis-Hébert): Je n'accuse pas, je constate.

M. Raynauld: Alors, je demanderais que le ministre apporte des preuves de ce qu'il avance. Je pense que ce sont des accusations qui, aussi longtemps qu'elles ne sont pas appuyées par des faits, sont gratuites et qui n'ont pas leur place en commission parlementaire et de la part d'un ministre qui prétend, de son côté, ne faire que des choses vertueuses et ne faire que des choses des plus factuelles lorsque nous savons... Je m'excuse, M. le ministre, je n'ai pas terminé.... les choses les plus factuelles lorsque nous avons relevé de notre côté des affirmations faites à New York qui étaient assez loin de la réalité.

Je pense qu'il ne faudrait pas négliger le fait que les ministres et le premier ministre de la province de Québec ne se gênent pas pour aller à l'extérieur du Québec et faire des discours politiques. Je ne sache pas que ce soit interdit, mais je ne sache pas non plus que les ministres se gêneraient de quelque manière que ce soit pour

déclarer, comme c'est déjà arrivé, que la séparation du Québec était déjà faite, que c'est un mouvement inéluctable de l'histoire.

À ce moment-là, aller accuser le gouvernement fédéral de faire de la propagande qui serait contraire aux faits, je pense que ce sont des accusations qu'on ne peut pas accepter ici, à moins qu'on nous apporte des preuves à cet effet.

C'était ma première question, M. le Président. J'en aurais une seconde.

M. Morin (Louis-Hébert): Voulez-vous que j'y réponde?

M. Raynauld: Je veux bien.

M. Morin (Louis-Hébert): Qu'est-ce que vous diriez si on vous en apportait?

M. Raynauld: J'en serais très heureux. Apportez-en. On aura l'occasion de les examiner et on verra...

M. Morin (Louis-Hébert): Vous seriez heureux. Vous prenez allègrement la défense des déclarations qui ont pu être faites à l'étranger par des représentants officiels du gouvernement fédéral, dans lesquelles on qualifiait, en quelque sorte, l'évolution politique du Québec d'un façon qui ne nous paraît pas conforme aux faits. Il ne s'agit pas de ministres, il s'agit de fonctionnaires, des ambassadeurs.

M. Raynauld: M. le Président, je ne prends pas la défense de quiconque, je ne connais pas ces déclarations.

M. Morin (Louis-Hébert): Quand on ne les connaît pas, on ne parle pas.

M. Raynauld: Je demande au ministre ou de déposer les documents nécessaires, on bien de cesser de faire des accusations, à tort et à travers, comme s'il s'agissait de choses que tout le monde devrait connaître. Je ne les connais pas, ces choses-là, je ne prends donc pas la défense de quiconque, en disant cela.

M. Morin (Louis-Hébert): J'ai été amené à en parler à cause de vous.

M. Raynauld: Je m'oppose à ce que le ministre fasse des accusations comme celle-là, des accusations générales, qui laissent entendre que les autres font de la publicité et de la propagande et que lui, de son côté, il n'en fait pas, et je pense que c'est absolument faux.

M. Morin (Louis-Hébert): Je n'ai pas dit que, comme ministère, nous n'allions pas expliquer notre politique. J'ai même dit que nous le ferions. Je vous dit qu'il ne faut pas confondre les ambassadeurs et les représentants officiels du gouvernement fédéral, qui ont instruction de diffuser une image qui ne nous paraît pas conforme à la réalité et je peux vous envoyer des preuves. Je n'ai pas apporté cela ce matin, je ne pensais pas que vous alliez aborder ce sujet.

M. Raynauld: C'est vous qui l'avez soulevé, ce n'est pas moi.

M. Morin (Louis-Hébert): Je m'excuse, vous avez posé des questions sur notre diffusion à l'étranger. Je l'ai...

M. Raynauld: J'ai posé des questions sur votre activité. Je n'ai pas posé des questions sur les activités du gouvernement fédéral.

M. Morin (Louis-Hébert): Mais c'est utile, quelquefois, de savoir ce que les autres font.

M. Raynauld: C'est vous, M. le ministre, qui, maintenant, accusez les fonctionnaires fédéraux de manquer à leur mandat.

M. Morin (Louis-Hébert): Ils ne manquent pas à leur mandat, c'est justement le mandat qu'ils ont du gouvernement fédéral.

M. Raynauld: J'ai hâte de voir.

M. Morin (Louis-Hébert): C'est comme tout le Comité sur l'unité canadienne qui existe, financé par le Secrétariat d'État. On en viendra peut-être à cela tantôt.

M. Raynauld: Vous en avez un, vous aussi, un comité.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, vous verrez tantôt.

M. Raynauld: Et vous, vous n'avez pas de mandat. Eux autres, ils en ont un.

M. Morin (Louis-Hébert): N'oublions pas cela. Tantôt, cela peut être intéressant. Il faudra revenir à cela. J'aimerais cela. Il n'y a pas de propagande dans les bureaux de poste, c'est vrai.

M. Raynauld: Mon problème n'était pas celui-là non plus, je voulais passer à un second problème.

M. Morin (Louis-Hébert): II y en a plusieurs problèmes.

M. Raynauld: En ce qui concerne les relations entre le Québec et la France, j'ai vu dans les documents qui nous ont été distribués — le ministre y a fait allusion tout à l'heure — que le gouvernement avait adopté un certain nombre de priorités dans quatre domaines particuliers l'agro-alimentaire, les pêcheries, l'équipement minier et les énergies nouvelles.

Je voudrais savoir si ces priorités nouvelles sont des priorités qui ont donné lieu déjà à des actions quelconques, et que le Québec retire de ce nouveau pro-

gramme d'activités, en ce qui concerne les relations entre la France et le Québec. Est-ce que le ministre pourrait nous donner des exemples, citer des cas particuliers où ces domaines auraient donné lieu déjà soit à des investissements, soit à des activités qui pourraient nous éclairer sur ces intérêts que nous avons dans ces relations?

M. Morin (Louis-Hébert): C'est une question que j'attendais. J'avais aussi la réponse. Ce sont des orientations qui ont été déterminées par les deux premiers ministres, celui de France et celui du Québec, au mois de février dernier. Une des raisons pour lesquelles on a l'étude des crédits ce matin, et vous vous en souviendrez, cher collègue de Jean-Talon, c'est que, la semaine prochaine, le sous-ministre et le sous-ministre adjoint vont participer à une réunion avec les Français, justement pour la suite de cette décision politique et pour la mise en oeuvre de ces priorités dont j'ai parlé.

Cependant, je veux signaler ceci, en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises et en ce qui concerne les fabrications sous licence et autres activités du genre: il y a énormément, entre la France et le Québec, beaucoup plus qu'on ne le croit. Cela a déjà été décrit dans des publications qui existent déjà, que je n'ai pas apportées ce matin, mais qu'il me fera plaisir de vous faire parvenir. Pour ce qui est des priorités nouvelles, elles seront justement abordées la semaine prochaine, dans une réunion qui aura lieu entre la France et le Québec.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Mercier. (12 heures)

M. Raynauld: M. le Président, je n'avais pas terminé sur ce point, si vous le permettez. Lorsque les premiers ministres se rencontrent et qu'ils adoptent un document en disant qu'ils vont dorénavant axer leurs efforts sur un certain nombre de secteurs. D'habitude, il y a quand même des indications dans le sens que ces secteurs-là pourraient donner lieu justement à des activités additionnelles qui devraient susciter un peu plus d'intérêt. Je voudrais demander de nouveau au ministre s'il pourrait nous dire, ici à la commission parlementaire, ce qu'il y a en arrière de ces quatre secteurs-là, ce qu'on envisage de faire avec le gouvernement français, quelles sont les activités précises qui pourraient être entreprises au Québec en relation avec ces secteurs-là.

M. Morin (Louis-Hébert): II y a un problème que vous allez reconnaître tout de suite à cet égard. On pourrait donner des réponses très précises. La difficulté est la suivante: c'est que cela implique des entreprises particulières. C'est en voie de négociation. Je ne crois pas qu'elles seraient enthousiastes d'apprendre que nous avons discuté de leur cas précis ici. J'aime mieux attendre que ce soit concrétisé pour en parler. Je pense que, comme brillant économiste, vous allez comprendre ce que je veux dire.

M. Raynauld: Est-ce que, de façon plus générale, vous pouvez nous donner des indications quant à l'intérêt que cela peut représenter, dans quel secteur cela se trouve exactement? Est-ce qu'il y a des projets?

M. Morin (Louis-Hébert): On a donné les secteurs.

M. Raynauld: Non, je veux dire dans l'agro-alimentaire. L'agro-alimentaire, est-ce que c'est pour vendre du lait en France? Est-ce qu'il a beaucoup d'argent d'impliqué là-dedans?

M. Morin (Louis-Hébert): Justement...

M. Raynauld: Est-ce que c'est pour des exportations? Est-ce que c'est pour des investissements français au Québec? Il me semble qu'il y a des...

M. Morin (Louis-Hébert): Si vous vouliez être un peu plus patient, il y a deux considérations. La première, ce sont les entreprises particulières que cela touche, la deuxième, dans certains cas, c'est que nous avons des propositions précises à faire aux Français et ils ne sont pas encore au courant. Cela implique des tierces parties et j'aimerais mieux ne pas en parler davantage.

M. Raynauld: Si c'est comme cela, M. le Président, est-ce qu'on pourrait connaître quels ont été les résultats des relations entre le Québec et la France sur le plan économique, depuis deux ans par exemple, depuis les deux dernières années, à part les accords avec la SGF qui ont été faits depuis un certain temps? En dehors de cela, y a-t-il d'autres choses qu'on peut évoquer pour indiquer un peu l'intérêt économique de ces relations avec la France, pour justifier aussi les 76 personnes qu'on a à Paris? Si nous ne parlons pas des projets, parlons donc des réalisations passées. Vous pourriez probablement parler de cela.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, on pourrait en parler et on peut même vous envoyer une documentation abondante là-dessus. Il existe l'association de coopération technique et industrielle qu'on appelle ACTIM, à laquelle nous participons et qui intéresse un grand nombre de petites et de moyennes entreprises. On pourrait peut-être donner des exemples du passé. Évidemment, on va répéter ce qu'on a déjà dans nos rapports annuels du ministère, même pour l'année 1977/78. Si vous voulez qu'on en parle davantage, on peut vous faire des listes.

M. Raynauld: Dans le document qui, on fait allusion simplement à une entente entre la SGF et la Compagnie générale d'électricité, un programme d'exploration minière.

M. Morin (Louis-Hébert): Voici ce qu'on va faire, si vous êtes d'accord; on va vous apporter des exemples. On ne les a pas tous ici. Comme on

reprend demain, de toute façon, et qu'on va avoir un poste au budget là-dessus, à ce moment-là, on pourra vous donner une liste très détaillée de choses qui se font, parce qu'on n'a pas tout apporté ce matin, sachant que cela s'échelonnait sur deux jours. D'accord? Je croyais que la question viendrait à l'intérieur d'un des postes.

Le Président (M. Laplante): Le député de Mercier.

M. Morin (Louis-Hébert): Un instant! Est-ce qu'on peut parler, monsieur?

On a justement un résumé ici. Je m'excuse, mais on n a pas le document complet. Je vais demander à M. Pouliot, qui est sous-ministre adjoint aux relations internationales, de vous en faire état. On a plusieurs exemples là-dedans. Je pense que cela va répondre à votre question. Si vous voulez d'autres choses, on apportera des documents plus complets.

Il est évident, M. le Président, qu'il serait extrêmement long de faire la liste, l'énumération de tout ce qui s'est fait dans le domaine de la coopération industrielle et technique avec la France. Cela fait quand même déjà un certain temps que l'accord existe. Il date de 1964. C'était l'ASTEF à l'époque, mais, de façon plus récente, je pourrais quand même signaler une chose: Nous avons organisé avec l'ACTIM, à la fin de 1977 un séminaire de petites et moyennes entreprises, qui a eu lieu à Montréal et qui a donné lieu, en fait, à toute une série d'accords industriels entre la France et le Québec. C'est d'ailleurs la façon dont nous procédons avec la France jusqu'ici, ce qui permet à la fois aux entreprises québécoises d'avoir accès à une technologie nouvelle et de développer également des marchés nouveaux pour des produits québécois. L'exemple le plus illustre ou le plus intéressant, c'est tout ce qui s'est produit dans le domaine d'un marché comme celui du yogourt au Québec. Il y a dix ou douze ans, il n'y avait pas de marché au Québec. C'est grâce, en grande partie, à la coopération entre la France et le Québec que ce marché a été développé.

Je pourrais donner toute une série d'exemples qui ont été publiés récemment quant au travail sur le plan des implantations d'entreprises, par exemple, PromeCam, Leroy Somer, Gauthier Meubles, Compagnie générale de radiologie, la télé-mécanique, etc. On pourrait citer toute une série d'entreprises qui ont été amenées à investir au Québec, à la suite d'actions non exclusives, mais efficaces dans le cadre de la coopération franco-québécoise. Je pourrais également donner, mais c'est une liste confidentielle jusqu'ici, le nom des entreprises qui ont signé des accords techniques avec des entreprises québécoises. Je pourrais vous dire qu'au cours des dernières années et depuis trois ou quatre ans, la tendance des accords de caractère technique avec la France s'accroît considérablement, et au cours de la dernière année, il y en a à peu près 25 qui ont été signés entre entreprises françaises et québécoises. Il s'agit, en fait, des ac- cords qui touchent principalement l'échange en matière de technologie ou autre, mais la liste quand même commence à être assez impressionnante sur ce plan. Je ne sais pas s'il y a lieu de citer des entreprises. Évidemment, c'est peut-être un peu délicat, compte tenu qu'il s'agit de sociétés.

J'ai un détail intéressant à ajouter ici dans un document qu'on me remet, et cela ne touche pas seulement la France, cela va vous intéresser: En trois ans, 180 ententes de fabrication sous licence ont été conclues par des sociétés québécoises. De ce nombre, il y en a 68 avec des sociétés françaises, 29 avec des sociétés italiennes, 21 allemandes, 18 américaines, 10 belges, 8 japonaises, 5 britanniques, 5 finlandaises, 3 suisses, 3 suédoises, 2 danoises, 2 norvégiennes, 1 hollandaise, 1 roumaine, 1 hongroise, 1 autrichienne, 1 chinoise à Hong-Kong et 1 de Trinidad et Tobago.

Cela répond à une question qui a été posée tantôt. La très grande majorité de ces ententes de fabrication sous licence interviennent de pays où on est directement représenté: France, Italie, Allemagne, États-Unis, Belgique, Japon, Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne couvre le territoire de la Finlande, ce qui explique peut-être aussi...

M. Rivest: Combien pour les États-Unis? M. Morin (Louis-Hébert): Les États-Unis, 18. M. Rivest: C'est considérable.

M. Morin (Louis-Hébert): Je pense que c'est intéressant, mais on aborde un peu le budget à l'envers. Je voulais qu'on parle de cela à un autre moment quand on arriverait au budget précisément, mais puisqu'on en parle tout de suite, faisons-le. C'est une illustration très concrète de ce que donnent nos relations avec divers pays. On ouvre des marchés. On s'en ouvre ici. On en découvre, les autres en découvrent. Ces fabrications sous licence sont avantageuses pour des fabricants québécois.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Mercier.

M. Godin: C'est sur la motion de mandat. On a entendu le député de Jean-Talon, et ensuite celui d'Outremont, reprocher à ce ministère de n'avoir pas le mandat de faire ceci ou de faire cela. Je pense que le mandat général, c'est quand même de se poser des questions sur les ententes qui existent, sur le régime qui est le nôtre. Si on retourne un peu dans le passé, en 1792, les Québécois n'avaient pas le mandat de se donner un Parlement au Québec, et pourtant, ils l'ont fait. En 1867, ils n'avaient pas non plus le mandat de se redonner une province, mais pourtant, ils l'ont fait. La tâche de n'importe quel gouvernement du Québec, c'est de poser des questions sur ce qui se passe ici et sur la façon dont c'est réparti.

L'attitude des libéraux, ce matin, que je trouve un peu grincheux pour avoir soi-disant obtenu une

confirmation éclatante mardi de leur option... La tâche est dans la ligne historique de 1954 quand le premier ministre de l'époque, M. Duplessis, avait voulu rapatrier à Québec, 15% des impôts. Le Parti libéral s'est totalement opposé à cela. M. Georges-Émile Lapalme a fait des discours menaçant le Québec de perte d'entreprises et de capitaux si jamais le Québec faisait ça, un peu comme le député de NDG aujourd'hui. C'est une cassette qui revient presque cycliquement à tous les dix ans.

M. Scowen: Excusez, M. le Président...

M. Godin: Quand ils sont dans l'Opposition...

M. Scowen: ... jusqu'ici, je suis muet. Je ne sais pas ce qu'il dit...

M. Godin: Restez muet.

M. Scowen: Ecoute, je n'ai rien dit, jusqu'à ce que... De quoi parles-tu?

M. Godin: Restez muet! Restez muet! Restez muet!

M. Scowen: Le député de Notre-Dame-de-Grâce écoute attentivement. Je ne suis pas là-dedans.

M. Godin: Oui, mais continuez, ça va bien.

Le Président (M. Laplante): Je vous conseille de rester muet, parce que votre droit de parole s'en vient après.

M. Scowen: II m'accuse de quelque chose et je n'ai rien dit.

M. Godin: Je ne vous accuse pas, je constate. M. Scowen: Autrefois... M. Godin: Je cite...

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mercier, continuez!

M. Godin: Merci.

M. Ri vest: C'est intéressant!

M. Scowen: ... sensible, ce bonhomme.

M. Godin: Le régime de Duplessis n'avait pas de mandat probablement de faire ça. Il l'a fait. Il a voté une loi et les libéraux se sont opposés à cette mesure en 1954, en disant: 15% de rapatriement d'impôt, c'est trop. Limitons ça à 5%.

Une voix: C'est toujours trop.

M. Godin: L'éditorialiste du Devoir dans le temps, Gérard Filion, avait dit: Donc, ils sont pour le Québec à 5% seulement. M. Marier et M.

Lapalme sont pour le Québec à 5% seulement. Ils défendent, par conséquent... À chaque fois que ces gens se retrouvent dans l'Opposition, ils sont une extension du régime fédéral au Québec, pas plus que ça. Ils veulent choisir le Canada d'abord, ça saute aux yeux. Mais je pense qu'il appartient au gouvernement du Québec de se poser des questions sur la nature du régime qui est le nôtre, sur tous les sujets, et nous le devons au peuple du Québec de se poser des questions, de faire le bilan, au nom, tout simplement peut-être, de la protection des consommateurs, qui est un principe maintenant reconnu.

Nous voulons savoir, nous, où on s'en va. Nous voulons savoir comment le fédéral dépense nos taxes et ce n'est pas le fédéral qui va nous le dire, ça. C'est nous qui devons faire cette analyse. Je m'étonne de voir le député de Jean-Talon...

M. Rivest: Non, je trouve vos remarques intéressantes.

M. Godin: ... ne pas sembler d'accord et reprocher au gouvernement de laisser tomber, dit-il, des dossiers noirs sur le fédéralisme. Mais si ce n'est pas nous qui faisons ces analyses du fédéralisme dans une perspective québécoise, c'est qui? La famille Rockefeller? M. Clark? M. Trudeau? Qui va la faire? Il n'y a que nous qui nous donnions cette fonction critique à l'égard des institutions qui sont les nôtres.

Les Québécois ont vécu sous quatre constitutions. Le BNA Act, ce ne sont pas les tables de la loi que Moïse est allé chercher sur la montagne fédérale. C'est un essai de constitution qui a été fait par les Canadiens il y a 110 ans, mais c'était la quatrième forme de constitution que les Québécois avaient. Il y a eu 1840, cité hier par la sibylle de Cumes du comté d'Argenteuil qui a laissé tomber aussi un exemple, disant qu'à l'époque de l'Acte d'Union, c'était merveilleux, puisque les Anglais se présentaient à Rivière-du-Loup et ils étaient élus, les Français à Kingston et ils étaient élus. Or, ce qu'il n'a pas dit, comme s'il n'avait pas lu l'histoire au complet, comme s'il était myope en partie — c'est possible aussi — c'est que l'Acte d'Union de 1840... Cela m'étonne, d'ailleurs, qu'il cite cette époque, qui est l'époque la plus noire pour les Québécois, parce que nous avons vécu sous un régime où, malgré que les Québécois formaient les deux tiers de la population, ils n'avaient qu'un tiers des députés en Chambre. La loi qui a créé cet Acte d'Union a été dénoncée à Londres, pas par les maudits séparatistes, par les Lords et les députés de Londres, comme étant une loi tyrannique, injuste et qui violait les droits de la majorité française du Canada uni, mais ça, la sibylle de Cumes d'Argenteuil n'a pas évoqué ça. Elle a sélectionné, la sibylle, la tête d'épingle qui justifiait qu'il y a eu un temps où il y avait une entente parfaite entre les Anglais et les Français, mais uniquement à l'époque où les Anglais avaient une majorité de députés confisquée à la majorité de population des Français. Alors, si c'est cela l'idéal de la sibylle de Cumes comme régime,

qu'elle le dise tout de suite, on n'attend que cela. Maintenant, je termine sur la question du mandat, encore une fois, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez faire rapidement, à cause...

M. Godin: Je termine, oui très rapidement.

Le Président (M. Laplante): ... d'une entente intervenue tout à l'heure pour aborder le programme 3.

M. Godin: Très rapidement.

M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, j'aurais un petit renseignement à fournir qui va me prendre onze secondes tantôt.

Le Président (M. Laplante): Oui, pour finir avec le député de Mercier.

M. Rivest: ... très intéressante.

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je veux qu'on finisse, mais à la condition...

M. Godin: Oui, M. le ministre, sur la question du mandat, je dis que le Québec n'a jamais réussi à marquer des points à ce système en demandant des mandats à d'autres qu'à lui-même de le faire. Si on attendait que les provinces anglaises nous donnent des mandats pour modifier quoi que ce soit ici, comme disait le poète André Frénaud: L'éternité c'est long, surtout vers la fin. (12 h 15)

M. Rivest: Si vous attendiez que ce soient les Québécois qui vous le donnent, ce mandat?

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez, M. le député de Jean-Talon, un moment, s'il vous plaît. Nous allons suspendre la période d'exploration des crédits...

M. Rivest: Le ministre a une annonce importante en onze secondes. Pour une fois qu'il va la faire en onze secondes.

Le Président (M. Laplante): On le lui donnera après. Pour aborder le programme 3 — oui, vous allez le dire quand même, monsieur, de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, vous aviez quelque chose, M. le ministre?

M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je ne veux pas l'oublier, parce que ça va tout briser mon programme-Le Président (M. Laplante): Une annonce!

M. Morin (Louis-Hébert): Je viens d'apprendre que je n'ai pas le droit de déposer de documents à une commission parlementaire. Je ne connais pas tous vos règlements ici. Cependant, ce que je vais faire...

Le Président (M. Laplante): Je vais distribuer les documents.

M. Morin (Louis-Hébert): C'est ça. Je rends publiques aujourd'hui, les deux dernières études de la série que nous avions entreprise sous la direction de Bernard Bonin l'année passée et je les ai ici. J'ai un petit communiqué qui a été émis, que les journalistes ont reçu ou vont recevoir. C'est imminent. Ce sont deux briques très complexes et très complètes aussi, en gros, sur les relations commerciales Québec-USA, Québec-Canada, de même que sur tout le problème des industries et le commerce interrégional Québec-Ontario et le reste du Canada. Alors, ça va certainement fasciner — il est parti — le député d'Outremont, de prendre connaissance de ça. Considérez-les distribués, d'accord? Parce que je n'ai pas le droit de les...

M. Rivest: Est-ce que c'est la dernière? Il n'y en a pas une sur l'assurance-chômage?

M. Morin (Louis-Hébert): Non, je ne sais pas de quoi au juste M. Ryan parlait l'autre jour — ça m'arrive souvent, d'ailleurs — mais je n'ai pas compris; je voulais le lui demander. Il a fait allusion à une étude...

M. Rivest: II n'existe pas d'étude au ministère sur l'assurance-chômage en ce moment?

M. Morin (Louis-Hébert): Mais j'ai regardé ça. J'aimerais vraiment savoir de quoi...

M. Rivest: Regardez donc encore.

M. Morin (Louis-Hébert): Je ne sais pas de quoi il parle.

M. Rivest: D'accord.

M. Morin (Louis-Hébert): Alors, ces études sont considérées distribuées, M. le Président. Elles sont donc publiques dorénavant et je suis certain que tout le monde va se garrocher.

M. Rivest: Est-ce que le ministre s'engage à regarder de nouveau s'il n'y a pas une étude sur l'assurance-chômage?

M. Morin (Louis-Hébert): II y a bien plus que ça, mais non.

M. Rivest: Est-ce qu'il y en a une?

M. Morin (Louis-Hébert): Je ne le sais pas; je n'ai rien trouvé encore précisément là-dessus.

M. Rivest: Mais vous allez regarder de nouveau et, si elle existe, vous allez la rendre publique?

M. Morin (Louis-Hébert): Je regarderai. Vous êtes donc bien inquiet de votre avenir, M. le député.

M. Rivest: Disons que le ministre devrait s'inquiéter de son passé récent dans Jean-Talon.

Office franco-québécois pour la jeunesse

Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le programme no 3, l'Office franco-québécois pour la jeunesse. La parole est au ministre. Je sais qu'il y a eu une entente pour finir ce programme à 12 h 30, à cause du leader du gouvernement. S'il vous plaît, j'ai votre nom pour les prochaines interventions. M. le ministre.

M. Charron: D'accord. Merci, M. le Président, je veux vous dire d'abord que je suis très heureux d'apporter ma modeste contribution à une commission qui regroupe d'aussi importants personnages. Je vais essayer d'être à la hauteur de la situation jusqu'à la fin de la commission ce matin.

M. le Président, c'est à titre de coprésident du conseil d'administration de l'Office franco-québécois pour la jeunesse que chaque année, je me greffe quelques instants à l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. Je n'ai à présenter à nouveau, avec plaisir, cette année, aux membres de la commission qu'un bilan très satisfaisant, à la fois clairement exprimé par les délégués français et les délégués québécois lors de la dernière réunion du conseil d'administration, sur la performance de l'office au cours de la dernière année. J'ai de plus le privilège de présenter aux membres de la commission cette année le nouveau secrétaire général de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, du côté québécois, M. André Tétreault. M. Pierre Bernier, qui a occupé ce poste depuis cinq ans, je crois, les cinq ans auparavant, est devenu mon sous-ministre au haut-commissariat depuis la fin de septembre dernier.

M. le Président, le budget que nous réclamons cette année de la commission comporte une augmentation de 11% par rapport aux crédits de l'année dernière. Comme les députés le savent, il s'agit d'un budget paritaire avec la France. La France ayant déjà augmenté sa contribution de 11%, il a semblé normal au gouvernement, vu l'entente qui règne depuis maintenant onze ans, de faire la même étape. Cette augmentation n'a qu'une justification: maintenir l'objectif de 1500 jeunes Québécois qui se rendent en France et recevoir 1500 jeunes Français au cours de l'année.

Évidemment, la hausse des coûts de transport, comme chacun le sait, l'inflation en général font que, pour maintenir cet objectif auquel tiennent les deux gouvernements, il nous a fallu réclamer ces crédits supplémentaires pour cette année.

Je donne en 30 secondes, si ça m'est permis, le tableau des stages prévus pour cette année: dans le secteur agro-alimentaire, 15% des stages; dans le secteur industriel et technologie, 16%; dans le secteur des services qui sont des secteurs tertiaires de l'économie, 19%; en éducation, 6%; en affaires sociales, 15%; en loisirs, 7%; sports et plein air, 9%; arts, 9%, et syndicalisme, 4%. Si je les regroupe sous les grandes familles d'activités étatiques comme on a l'habitude de les considérer, la mission économique prend 54% des stages cette année; la mission sociale, 14%, et la mission éducative et culturelle, 32%.

L'année dernière, en 1978, nous avons reçu 321 projets de stages émanant de citoyens du Québec, comparativement à 285 l'année dernière, ce qui était une progression. Nous en escomptons cette année 383. Le nombre de gens, une fois que les stages sont accueillis par les jurés — les gens qui demandent de faire partie des stages reconnus — augmente aussi à chaque année. Il a été de 3500 jeunes Québécois qui ont essayé d'être parmi les 1500 l'année dernière, comparativement à 3200 l'année précédente et nous en attendons 3850 au cours de l'année. Ce qui veut dire — les chiffres sont là pour le dire — la popularité auprès des jeunes Québécois de l'office et de son caractère éducatif quant au séjour qu'il offre aux jeunes Québécois en France.

Donc, depuis son existence jusqu'à la fin de l'année 1979, si les crédits nous sont accordés pour permettre les réalisations prévues, ce sera, en onze ans, 17 348 jeunes Québécois qui auront, d'une manière ou d'une autre, dans un stage ou dans un autre, connu un coin de la France et nous aurons accueilli à peu près l'équivalent en jeunes Français dans tout le territoire du Québec.

Voici le tableau principal que je pouvais donner. Maintenant, si les députés ont des questions, je me ferai un plaisir d'y répondre en compagnie du secrétaire général.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le Président, je remercie le ministre de ce bilan de l'Office franco-québécois. Je pense qu'on ne peut que féliciter le ministre et tous ses gens du bon fonctionnement... Pratiquement à chaque année qu'on a discuté de l'Office franco-québécois, il ne semble pas y exister tellement de problèmes, sauf celui d'une volonté — je pense bien que c'est partagé par le ministre et probablement par son correspondant français — d'essayer d'accroître, compte tenu des contraintes budgétaires qu'il a lui-même évoquées, le volume de ces échanges. Car, effectivement, dans le cadre des échanges France-Québec, depuis une dizaine d'années, c'est certainement l'un des programmes qui a été !e plus productif, non seulement en termes économiques, mais en termes d'ouverture d'horizons pour un nombre considérable de jeunes.

Quant à moi, je n'ai pas de questions précises, parce que le ministre a quand même donné des éléments d'information qui me satisfont. Je veux simplement souligner de nouveau notre appréciation du travail du ministre et des gens de l'office.

Le Président (M. Laplante): Le député de Lotbinière.

M. Biron: Je remercie le ministre aussi. J'aurais quelques questions très brèves à poser au ministre vis-à-vis d'une évolution du rôle de l'Office franco-québécois pour la jeunesse. Est-ce que le ministre entrevoit pour les années à venir un rôle accru pour l'office ou si on va continuer à faire ce qu'on faisait au cours des dernières années.

Il y aurait aussi une autre question intéressante. Est-ce que le ministre entrevoit la création d'autres offices semblables à celui-là? On sait que les relations privilégies entre pays francophones, c'est bien sûr avec la France. Est-ce qu'à l'office, on planifie en vue de la création d'autres offices du même genre dans d'autres pays francophones? Ce serait intéressant de savoir cela de la part du ministre.

Est-ce qu'il y a eu, par le processus et le mécanisme de recrutement, de préparation des stagiaires québécois ou de ceux qui les reçoivent, des changements de critères? Est-ce que ce sont les mêmes critères de choix qu'on avait autrefois? En particulier, le ministre nous dit 54% dans le domaine économique. Cela me plaît. Je voudrais savoir si, l'an dernier, on avait autant ou moins, dans quelle direction est-ce qu'on évolue dans ce sens?

Le ministre a répondu à ma question, mais je voudrais aussi l'entendre confirmer. Est-ce que ce qu'on dépense, $1 871 000 qu'on nous demande comme budget, c'est exactement le même budget en France? Parce que je remarque qu'on a le recrutement en préparation de stagiaires. Ici, on paie une partie pour ça, de même que la préparation du stage et l'accueil, l'encadrement.

C'est probablement le budget divisé en deux, mais en même temps, en France, fait-on la même chose, exactement la même chose pour nos jeunes, la préparation de leurs cadres, de l'encadrement de stagiaires qu'on va recevoir là-bas? C'étaient là mes questions.

M. Charron: Rapidement, M. le Président, avec plaisir, je vais répondre aux questions du député de Lotbinière, en remerciant le député de Jean-Talon de son intervention. Effectivement, la parité est totale avec la France. Il s'agit, cette année, d'un montant de 8 510 510 francs français qui, si on prend le taux de change retenu, de 4,55 francs le dollar, est équivalent à ce que nous accordons cette année.

C'est pour les mêmes services: préparation, accueil, exactement la même chose que le côté français offre.

Le député a posé trois questions: Est-ce qu'on va changer un peu le modèle des stages au bout de onze ans? Est-ce qu'on va étendre cela à d'autres pays éventuellement? Et est-ce qu'on va changer les critères d'acceptation aux stages? Je dois dire que le député de Lotbinière est plus que sur une bonne piste et sur une bonne intention. La dernière réunion du conseil d'administration de l'office a eu lieu en janvier, en France. C'était au tour de la France à recevoir le conseil. Le conseil a pris la décision suivante: sur le budget de 1979, celui que vous devez adopter ce matin, 10% des sommes doivent être attribuées à ce qu'on appelle des stages d'innovation. Le bilan fait par les membres, de part et d'autre, de la France et du Québec, concluait, sans dire qu'il était venu le temps de bousculer l'office, puisque le succès est là, le taux de participation est là, qu'il fallait peut-être élargir un peu son champ d'action, si on ne veut pas découvrir qu'il est périmé, sans avoir fait attention.

On a pris sur nous, les deux présidents, le ministre français et moi-même, de mandater nos secrétaires généraux respectifs à prendre une partie des sommes pour innover. Ceci pourrait être, par exemple, de changer les critères. Actuellement, les critères, pour participer à un stage en France, sont: avoir un certain bagage minimum de connaissances pour le stage en question, ne pas y aller simplement comme touriste, avoir entre 18 et 35 ans et le stage est limité à trois semaines. Il ne peut pas être de moins et il ne peut pas être de plus de trois semaines. Ce sont des groupes de 20, automatiquement.

On a dit: Peut-être que dans certains cas, dans certaines disciplines, il peut se trouver de jeunes Québécois, au nombre de 5 ou 6 ou de 25, qui — l'exemple qui avait été cité au conseil avait été repris par tout le monde — sur l'énergie nucléaire, seraient intéressés à aller voir ce qui se produit du côté français ou vice versa. L'état du développement de l'énergie nucléaire n'est pas du tout le même ici que ce qu'il a déjà atteint en France, chacun le sait; il est possible qu'on n'ait pas l'équivalent pour venir ici. Est-ce que c'est une raison pour interdire le stage? Si on reste dans nos critères fixes, où il faut absolument qu'il y ait une contrepartie française qui vienne par la suite, c'est certain qu'on va priver des jeunes Québécois d'aller s'instruire au cours d'un stage à l'intérieur de cette enveloppe. L'idée intéressante, c'est d'étendre à un autre pays de langue française, peut-être, un caractère de stage, c'est-à-dire que plutôt que d'avoir des jeunes Québécois qui vont en France, on pourrait avoir des jeunes Québécois et des jeunes Français qui vont faire un stage au Sénégal par exemple.

C'est l'exemple sur lequel on travaille actuellement. Je ne peux pas annoncer à la commission sur quoi le choix est arrêté. C'est le conseil d'administration de septembre qui se tient au Québec qui sera appelé à prendre la décision, mais je sais, de la part du secrétaire général québécois, qu'on est déjà en train d'extrapoler la possibilité d'un stage étendu à un tiers pays de langue française ou même, parce qu'on est à examiner au niveau des Affaires intergouvernementales cette possibilité-là, aux jeunes Franco-Américains de la Louisiane, où de jeunes Français — le Québec a déjà des relations, il y a déjà une délégation ou enfin un bureau des Affaires intergouvernementales qui est à Lafayette qui peut être mis à contribution dans ce domaine — et de jeunes Québécois iraient ensemble vivre l'expérience d'un stage, d'un échange de culture, mais en un tiers pays. (12 h 30)

Nous avons déjà pris la décision de garder 10% du budget pour faire sauter les critères peut-être au besoin, pour innover, pour étendre cela à d'autres pays, et c'est le conseil d'administration, en septembre prochain, qui retiendra ou refusera les suggestions que nos secrétaires généraux ont été mandatés de nous faire pour ce moment-là. Je crois que le député de Lotbinière a raison de souhaiter que peut-être on élargisse ce fonctionnement-là, et c'est aussi notre intention.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Lotbinière, d'autres questions?

M. Biron: Non, M. le Président.

M. Rivest: Quand on a un bon ministre, M. le Président, on n'a pas de problème.

Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'on peut dire que le programme 3 est adopté?

M. Biron: Ma dernière question porte sur le pourcentage dans le domaine économique l'année d'avant.

M. Charron: Ce n'était pas de 50% l'année dernière. Cette année, c'est 54%. C'était de 49% ou de 48%.

M. Biron: Dans le domaine économique.

M. Charron: Là, c'est la contribution des Affaires sociales qui a diminué. On a augmenté du côté économique.

Le Président (M. Laplante): Programme 3, éléments 1 et 2, adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Laplante): La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 12 h 31

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