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Étude des crédits du ministère
des Affaires intergouvernementales
(Dix heures onze minutes)
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La réunion de la commission des affaires intergouvemementales a
pour but d'étudier les crédits du budget 1979/80.
Les membres de cettte commission sont M. Bertrand (Vanier), M. Biron
(Lotbinière), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget
(Saint-Laurent) remplacé par M. Rivest (Jean-Talon), M. Godin (Mercier),
M. Guay (Taschereau), Mme Leblanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), M.
Levesque (Bonaventure), M. Morin (Louis-Hébert).
Les intervenants sont: M. Charbonneau (Verchères), M. Couture
(Saint-Henri), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Johnson (Anjou), M.
Morin (Sauvé), M. Rancourt (Saint-François), M. Raynauld
(Outremont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce).
Il est proposé que M. de Bellefeuille soit rapporteur.
M. Raynauld: M. Roy (Beauce-Sud) est
décédé.
Le Président (M. Laplante): Excusez, c'est vrai. M. Roy
(Beauce-Sud) n'appartient plus à l'Assemblée.
Le rapporteur sera M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes). Maintenant, M.
le ministre, si vous êtes prêt pour les préliminaires?
Remarques préliminaires M. Claude Morin
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, M. le Président. Je
voudrais d'abord, avant d'aller plus loin, mentionner que non seulement nous
avons fourni aux partis de l'Opposition les documents qui étaient
demandés de tous les ministères, mais nous avons également
préparé à leur intention, un peu pour répondre
d'avance à des questions qui viennent normalement à un dossier
contenant plusieurs documents qui ont l'air disparates mais qui se raccrochent
un tant soit peu quand même à des éléments du
budget. Alors, on pourrait s'y référer à l'occasion au
cours de la réunion.
Je voudrais, avant d'aller plus loin, faire une brève
entrée en matière, quitte à laisser aux partis de
l'Opposition ensuite la possibilité de s'exprimer. Je reviendrai s'il y
a des questions que leur exposé soulève.
Je veux seulement dire, au point de départ, que l'objectif
général du ministère est celui qui est implicite dans sa
loi, bien sûr, c'est non seulement de s'occuper des relations
intergouvernementales du Québec, ce terme étant compris dans son
sens le plus large, mais, fondamentalement, de s'occuper de la défense
et de la promotion des intérêts du Québec et des
Québécois. C'était cet objectif qui existait dans le
ministère sous d'autres gouvernements et c'est encore le même
aujourd'hui.
Un tel objectif se réalise en gros par deux séries de
moyens ou deux séries de tâches: il y a des tâches courantes
et des tâches qu'on peut juger prioritaires. Je voudrais dire deux mots
des tâches courantes, deux mots aussi de certaines priorités que
nous avons et à propos desquelles, peut-être, on aimera, au cours
de la réunion, avoir des renseignements complémentaires.
Les tâches courantes, tout le monde les connaît; il y en a
deux, au fond. Il y en a une de coordination intergouvernementale,
c'est-à-dire que le ministère est chargé de toutes les
relations du gouvernement du Québec avec tous les autres gouvernements,
quels que soient ces gouvernements, c'est-à-dire aussi bien celui
d'Ottawa que celui des autres provinces ou que celui des autres pays, le cas
échéant. Le ministère ici est un peu le ministère
des relations extérieures du Québec et, à ce titre, il
accomplit les tâches que normalement des ministères de cette
nature accomplissent. (10 h 15)
Cette tâche de coordination n'en est pas seulement une qui
consiste à éviter les contradictions intergouvernementales d'un
ministère à l'autre ne serait-ce que ça, c'est
déjà une tâche difficile mais aussi il en est une de
participation à l'élaboration des politiques
intergouvernementales, même sectorielles. Je veux dire par là que
nous prenons part et je pourrai donner tantôt, quand ça
viendra, des détails sur l'organisation interne du ministère
à la préparation de toutes les rencontres
intergouvernementales, quelles qu'elles soient, de tous les dossiers
intergouvernementaux.
La deuxième tâche courante, à part la coordination
intergouvernementale, est celle qui touche la nécessité dans
laquelle nous sommes et quasiment l'obligation d'accumuler, en ce qui concerne
les dossiers et les problèmes intergouvernementaux,
fédéraux, provinciaux, interprovinciaux ou internationaux, la
meilleure connaissance possible dans tous ces dossiers, que ceux-ci se
rapportent au présent, au passé ou à l'avenir. Cela veut
donc dire que le ministère est aussi un instrument de réflexion
et de recherche, pas dans le sens académique du terme, bien sûr,
mais dans le sens peut-être un peu plus dynamique, recherche visant
à élaborer des politiques adaptées aux besoins. Ce sont
les tâches courantes: coordination et meilleure connaissance des
faits.
Il y a aussi quelques priorités je vais en nommer
quelques-unes ici que nous avons adoptées l'année
dernière et que nous avons l'intention de continuer à suivre pour
l'exercice financier qui vient de commencer. Il y a quatre de ces
priorités. Je les ai groupées en quatre; maintenant, elles se
subdivisent, on verra. Ce sont:
diffusion, coopération, participation et exploration.
Quand je parle de diffusion, je veux dire une meilleure connaissance,
une meilleure information à l'extérieur sur nous-mêmes, sur
le Québec et sur l'évolution du Québec. C'est une
tâche essentielle dans le monde interdépendant dans lequel on vit.
Il existe en ce qui a trait au Québec, comme cela existe en ce qui a
trait à bien des pays les uns par rapport aux autres, une ignorance qui
peut conduire à une mauvaise interprétation de notre
réalité et si on ne s'en occupe pas, bien sûr, on peut en
subir des effets négatifs.
Nous avons mis une priorité de ce côté, diffusion
d'une meilleure connaissance quant au Québec, priorité qui ne
date pas de ces jours-ci, mais qui a déjà commencé
à être mise en oeuvre l'an dernier.
La deuxième priorité, c'est coopération avec les
autres, les autres étant, selon les cas, aussi bien le gouvernement
fédéral, le gouvernement d'autres provinces, des associations
à l'extérieur du Québec je vais donner un exemple
tantôt que des gouvernements d'autres pays. Pour ce qui est des
gouvernements d'autres pays, réglons ça tout de suite, on aura
l'occasion d'y revenir aussi, il y a plusieurs accords qui existent entre le
Québec et divers États, des programmes d'échange
très variés, beaucoup plus variés qu'on a l'habitude de le
croire, peut-être qu'on n'en a pas suffisamment parlé, très
stimulants, autant sur le plan économique que sur le plan culturel.
Cette coopération, nous avons l'intention non seulement de la
maintenir, mais de l'accroître dans la mesure de notre potentiel
budgétaire et humain. J'ai dit que j'utiliserais un exemple de
coopération et c'est à cet égard que j'ai pensé
vous donner un rapport complet sur les relations qui existent quant à
divers programmes d'échange entre le Québec et des
minorités francophones d'autres provinces. Vous avez le rapport complet,
détaillé, très bien fait, à mon avis, dans le
cahier noir qui vous a été distribué. Je n'en parle pas
davantage pour le moment, j'utilise cette coopération à titre
d'exemple seulement.
En ce qui a trait au gouvernement fédéral, vous avez aussi
dans votre cahier, la liste de toutes les ententes
fédérales-provinciales qui ont été signées
et qui sont au greffe du ministère, de même que celles qui, sans
être au greffe, sont en instance de l'être et qui ont
été signées et adoptées. Comme vous le verrez,
ça concerne divers autres ministères. S'il y a des questions qui
concernent l'une ou l'autre de ces ententes, j'aurai peut-être à
vous référer à ce qui a été dit lors de
l'étude des crédits des autres ministères ou on aura
l'occasion d'en parler peut-être davantage ici.
L'autre priorité deux ont été
mentionnées jusqu'à maintenant, diffusion et coopération
c'est participation. Participation à quoi? Aux décisions
qui nous concernent, nous les Québécois. C'est pour cette raison
que nous insistons chaque fois que l'occasion se présente, par exemple,
pour participer nous-mêmes et directement à diverses rencontres
internationales auxquelles le gouvernement fédéral peut
être invité, mais qui traitent de questions relevant de notre
compétence.
Là-dessus, nous sommes très vigilants et on ne laisse pas
passer beaucoup d'occasions de nous représenter nous-mêmes, en
vertu du principe qu'on n'est jamais si bien servi que par soi-même. Cela
peut créer, à l'occasion, des disputes Québec-Ottawa, mais
je pense que nous avons adopté, à cet égard, une attitude
pragmatique et que plusieurs rencontres ont eu lieu sans trop de
problèmes. Cependant, il y a un tas de frustrations dont on pourra
parler plus tard, mais qui font que cette participation que nous
désirons n'est pas toujours, au fond, souhaitée par ceux qui
pourraient l'assurer, dans le cadre constitutionnel actuel.
Quant à l'exploration, dernière priorité, il s'agit
pour nous d'explorer partout tout ce qui peut se présenter d'occasions
avantageuses pour le Québec et de faire preuve de dynamisme et d'esprit
d'invention, de ne pas laisser passer d'occasions qui ont l'air de se
présenter et qui peuvent être, à divers points de vue, soit
culturels, économiques ou autres, avatageuses pour le Québec.
Deux cas tout à fait disparates. Nous sommes établis
depuis quelque temps et il est avec nous aujourd'hui au
Venezuela, par une délégation. C'est nouveau, c'est un continent
dans lequel nous n'étions pas et dont les potentialités sont
énormes. Nous avons aussi entrepris il y avait des questions du
chef de l'Union Nationale là-dessus il n'y a pas très longtemps
d'explorer, par exemple, la Chine, ce qui pourrait être
intéressant pour nous. Ce sont deux exemples, et ce ne sont pas les
seuls. Il y en a beaucoup d'autres. Mais je les mentionne parce qu'ils ont
peut-être été plus remarqués au cours des derniers
mois et ils sont peut-être plus d'actualité.
Dans cet effort d'exploration aussi, on se tient constamment au courant
de ce qui se passe ailleurs et qui peut nous intéresser, que ce soit
institutionnellement, ou que ce soit culturellement ou économiquement,
parce que, je l'ai dit tantôt, on vit dans un monde interdépendant
et qu'il n'y a pas lieu, nécessité, ni même désir de
notre part, bien sûr, au contraire, de faire abstraction de ce qui se
passe à l'extérieur, quand cela peut nous être utile et
quand cela peut nous servir quand je dis "nous", je ne veux pas
nécessairement dire le gouvernement, je veux dire les
Québécois de source d'inspiration et peut-être
même de source de nouvelles politiques. On essaie de voir comment on
règle ailleurs les problèmes et on essaie de les adapter à
nos propres situations.
En gros, ce sont les quatre priorités. Pour y arriver,
évidemment, il y a un budget. Il y a un budget que, personnellement,
j'aurais voulu plus abondant, mais, qu'est-ce que vous voulez, il y a des
contraintes auxquelles tout le monde est soumis et nous le sommes
également. Ce budget, vous l'avez; on le regardera en détail,
tantôt.
Pour l'examen de ce budget, je n'hésiterai pas je pense
que tout le monde est d'accord d'ailleurs quand il s'agira de questions
plus
particulières, à demander à l'un ou l'autre de mes
collaborateurs, d'y répondre, assumant, du même coup, en tant que
ministre ce qu'ils diront. Par conséquent, comme il y en a plusieurs
avec moi aujourd'hui, je vous demanderais de ne pas hésiter à
poser les questions qui peuvent vous venir à l'esprit, parce que je
pense qu'il est important qu'on sache comment le ministère fonctionne,
ce qui s'y passe et ce que nous y faisons. C'est dans cet esprit d'ailleurs que
vous est distribuée c'est la première fois qu'on le fait
une documentation aussi abondante sur notre action.
Je n'ai pas parlé, dans ce que j'ai dit, de questions strictement
constitutionnelles, pour la bonne raison que je l'ai indirectement
mentionné dans l'objectif général du ministère:
défense et promotion des intérêts du Québec et des
Québécois. Je ne l'ai pas mentionné non plus comme
Driorité, parce que c'est une priorité avec un "P" majuscule, qui
est inhérente à l'action d'un ministère comme le mien,
c'est à peu près équivalent, comme priorité,
à celle qu'un ministère comme celui des Transports peut avoir
quant à la voirie, cela va de soi. C'est pour ça que je ne l'ai
pas retenue particulièrement, mais je ne veux pas que l'on pense que
nous nous en désintéressons.
M. le Président, pour le moment, c'est tout ce que je dirai, je
reviendrai tantôt, si c'est nécessaire, préciser des
choses.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le ministre. Au nom
de l'Opposition libérale, M. le député de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, je voudrais, au début
de l'étude des crédits, remercier le ministre du document qui a
été préparé par le ministère. Je pense qu'il
est extrêmement complet et très bien fait. Cela va sans doute nous
permettre d'accélérer l'étude des crédits du
ministère. Par contre, en lisant ça, chaque page nous donne de
nouvelles idées et nous ouvre la porte à des questions auxquelles
on n'avait peut-être pas pensé.
M. Morin (Louis-Hébert): Que ça vous donne des
idées, ça ne me surprend pas.
M. Rivest: D'abord, dans les priorités qui vont de soi et
que le ministre vient d'exprimer, je voudrais lui demander il pourra
répondre ultérieurement quel est le rôle il a
parlé des questions de relations fédérales-provinciales,
de l'action internationale, de l'information, etc. du ministère
des Affaires intergouvemementales au titre de l'option constitutionnelle du
Parti québécois, c'est-à-dire de la
souveraineté-association.
Deuxièmement, je voudrais faire part, d'une façon
générale, d'une inquiétude sur le fonctionnement du
ministère des Affaires intergouvernementales depuis deux ans et sur le
rôle particulier que le ministre s'est lui-même attribué, au
moins extérieurement, de la façon qu'on peut le percevoir
à l'extérieur du ministère. Depuis l'adoption de la Loi du
ministère des Affaires intergouvernementales en décembre 1974, on
constate, et les documents du ministre le démontrent très bien,
que le ministère a maintenant pratiquement achevé de se doter,
voire de roder ses structures et les mécanismes internes
nécessaires à l'élaboration et à la mise en oeuvre
de la politique du Québec en matière de relations
intergouvernementales telles que définies dans les termes mêmes de
la loi, enfin ce qui constitue effectivement le mandat du ministère.
D'une manière assez paradoxale, cependant, sans doute à
cause du contexte politique québécois présent et de la
conception que je qualifie de hautement politique que le présent
ministre des Affaires intergouvernementales se fait de son rôle, on a
grand-peine à voir et à cerner exactement les
éléments concrets d'une réelle amélioration de la
productivité des relations du Québec avec l'extérieur,
autant l'extérieur entendu dans le sens du Canada qu'à
l'étranger, et de la contribution particulière, à cet
égard, du ministère des Affaires intergouvernementales. Il me
semble qu'un ministre des Affaires intergouvernementales devrait au moins
prendre la peine d'établir clairement, bien sûr, pas à tous
les jours, mais quand même publiquement, ce que le Québec retire
effectivement des actions extérieures du gouvernement et
d'établir comment son ministère y participe ou entend dans
l'avenir y participer. D'une façon générale, depuis deux
ans et demi, le ministre des Affaires intergouvernementales, à cet
égard, est toujours extrêmement silencieux.
L'actuel ministre n'a jamais, que je sache, dit quoi que ce soit
là-dessus. Il s'est, depuis deux ans et demi, à peu près
exclusivement contenté de parler, comme c'était probablement son
rôle à d'autres égards, de l'option constitutionnelle du
Parti québécois, en donnant à tout le moins l'impression
le ministre me corrigera si c'est injuste comme jugement de
laisser le ministère des Affaires intergouvernementales voir aux choses
courantes et voir en somme à toute l'administration des relations
extérieures du Québec sans qu'il y ait vraiment une direction
ministérielle qui, en tout cas, de l'extérieur, paraisse suivie
et conséquente.
Le ministre a, en effet, établi publiquement je crois que
c'est à l'étude des crédits, dès la première
année, dès sa nomination une distinction qui
m'apparaît dangereuse pour le fonctionnement du ministère des
Affaires intergouvernementales, lorsque le ministre a dit qu'il se chargeait de
la politique et que l'administratif, c'est-à-dire la gestion des choses,
des programmes et l'élaboration des politiques, demeurait la
responsabilité du ministère. (10 h 30)
On sent bien qu'en pratique, cette distinction peut c'est le
résultat que ça donne, je pense qu'on peut le dire après
deux ans et demi nuire aux efforts d'innovation et d'imagination du
ministère et de l'ensemble de ses effectifs et que, dans ces conditions,
le ministère, c'est-à-dire la structure administrative, ne peut
ni ne veut manifes-
tement heurter, d'une façon ou d'une autre, les
considérations politiques que le ministre se réserve sur une base
qu'il a déjà dite exclusive.
Ce n'est pas ainsi, en tout cas, dans mon esprit, qu'un ministère
aussi important que le ministère des Affaires intergouvernementales peut
travailler. Ce n'est pas ainsi, dans cette distinction entre le politique et
l'administratif qu'un ministère peut fonctionner et être
pleinement productif. Je pense que la distinction du ministre entre le
politique et l'administratif pose au ministère des Affaires
intergouvernementales ou comporte, pour le ministère, des
rigidités et des contraintes qui apparaissent absolument
évidentes et qui, de l'extérieur, donnent l'impression d'un
ministère qui est devenu totalement routinier.
En effet, la distinction que le ministre a faite entre l'administratif
et le politique ne peut pas être, en pratique, une simple distinction de
raison. Voilà, en effet, un ministère, le ministère des
Affaires intergouvernementales, avec ses effectifs, ses programmes, son budget,
un ministère dont les termes du mandat ont été
écrits dans la perspective de la participation la mieux ordonnée
possible et la plus productive au progrès du régime
fédéral canadien. Cela, c'est le sens premier de la Loi du
ministère des Affaires intergouvemementales. Ce doit être
ça et pas d'autre chose que ça, pour l'instant, le projet
politique du ministère des Affaires intergouvernementales. Et en
inscrivant l'action du ministère et du ministre dans cette perspective,
c'est la seule façon, à mon point de vue, de permettre au
ministère des Affaires intergouvernementales de sortir un peu du
moins, dans la perception extérieure qu'on en a de cette
atmosphère plus ou moins grise dans laquelle il baigne depuis deux
ans.
De toute évidence, ce même ministère, le
ministère des Affaires intergouvernementales, n'a maintenant, à
notre avis, en plus de son rôle originel, que celui de la défense
plus ou moins politiquement intéressée d'ailleurs, de ce qu'on
appelle et de ce que le ministre a appelé tantôt l'autonomie
provinciale, en excluant, bien sûr, à l'avance on a
l'impression toute démarche positive et constructive à
l'égard du fédéralisme en tant que tel, en assujettissant
ainsi, d'une façon expresse ou implicite, tout le ministère des
Affaires intergouvernementales aux projets politiques, sans doute
légitimes, du ministre.
Il faut dire ici que ni le gouvernement, ni le ministre n'a reçu
de quiconque, certainement pas de la population, non plus que de
l'Assemblée nationale qui n'a pas changé la vocation
première du ministère des Affaires intergouvernementales, le
mandat de littéralement ainsi réduire à sa plus simple
expression, c'est-à-dire à la défense de l'autonomie
provinciale, le mandat du ministère des Affaires intergouvernementales,
non plus que de lui faire jouer on peut certainement avoir des craintes
à ce titre un rôle plus ou moins camouflé de soutien
à une option constitutionnelle, l'option de la
souveraineté-association qui, à ce jour, n'est rien d'autre que
l'option d'un parti politique.
Ce n'est certainement pas être injuste à l'endroit des gens
qui travaillent au sein du ministère des Affaires intergouvernementales
que de dire ces choses. Je répète que je veux simplement
établir qu'on a l'impression que l'action de ce ministère est
actuellement littéralement bloquée et qu'elle est largement
dominée par ce que j'appellerais des considérations politiques
futures qu'impose, d'une façon ou d'une autre, d'une façon
réelle ou indirecte, la distinction ou l'attitude du ministre qui, comme
je le disais, s'est réservé la dimension politique et laisse au
ministère les fonctions purement administratives ou
routinières.
Je vais vous donner simplement trois illustrations de cet
élément de réflexion que je veux amener ce matin au
début de l'étude des crédits. Combien éloquente,
à cet égard, a été l'attitude du présent
gouvernement à l'occasion de la dernière conférence des
premiers ministres sur la révision constitutionnelle. Absolument aucune
proposition n'est venue du Québec. On s'est
délibérément contenté d'une attitude
défensive et passive. On a tout simplement fait un glossaire des
propositions antérieures du Québec, sans même prendre la
peine de les mettre à jour. De toute évidence, on peut porter ce
jugement: le ministre des Affaires intergouvernementales n'a absolument rien
demandé aux officiers de son ministère, si ce n'est, comme je le
disais, de produire le résumé des positions antérieures du
Québec. Il ne leur a pas demandé de formuler quelque nouvelle
proposition que ce soit au titre de la révision constitutionnelle, alors
même que la loi du ministère confère au ministère et
au ministre la responsabilité expresse d'élaborer et de proposer
une politique pour le gouvernement dans le domaine des relations
intergouvernementales et, singulièrement, dès lors qu'il est
question de révision constitutionnelle et de modernisation du
fédéralisme canadien.
Le ministre viendra peut-être nous dire qu'au fond, il se
réserve la politique administrative et que cela n'a pas d'influence,
mais on voit, dans des exemples pratiques comme celui-là, comment le
ministère peut être amputé, dès le départ,
d'une de ses fonctions essentielles. Or, le ministre, lors de la
dernière conférence, n'a même pas demandé au
ministère des Affaires intergouvernementales de mettre à jour les
propositions précises de 1976, le consensus qui avait été
obtenu après un travail extrêmement sérieux et
élaboré du ministère des Affaires intergouvernementales,
le consensus d'Edmonton et de Toronto. On a laissé ces choses
complètement en plan; le Québec n'en a, pour ainsi dire, à
peu près pas parlé.
C'est le premier exemple pour simplement illustrer qu'à mon avis
le contexte politique actuel, la conception que le ministre se fait de son
rôle en tant que ministre, contribue à détourner ou
à diminuer, à détourner certainement le ministère
des Affaires intergouvernementales de sa vocation première,
celle-là même qui est inscrite dans sa loi et cette vocation, pour
l'instant, jusqu'à preuve du contraire, ne peut être autre chose
que de s'inscrire dans la valorisation du système fédéral
cana-
dien. C'est l'essentiel du mandat de ce gouvernement et il ne peut pas,
je pense, abandonner cette dimension de son mandat ou l'oublier pour des
raisons politiques que le ministre peut avoir.
Tout aussi éloquent de cette espèce de politisation de
l'action du ministère des Affaires intergouvernementales est ce silence
à peu près complet que le ministre des Affaires
intergouvernementales maintient depuis son arrivée au ministère,
sur l'évolution des différents dossiers dans le domaine des
relations fédérales-provinciales devenu le domaine des affaires
canadiennes. Le ministre nous dit qu'il laisse cela il nous l'a
répété ce matin aux ministres sectoriels. Il y a
pourtant, au sein de son ministère, une Direction générale
des relations fédérales-provinciales ou des affaires canadiennes,
qui a la responsabilité d'élaborer les mandats en vue de la
participation des représentants du Québec aux différentes
conférences fédérales-provinciales et
interprovinciales.
D'ailleurs, dans le document que le ministre nous a remis, dont il a
fait état, on nous donne une description absolument passive ou, enfin,
une description purement mécanique de l'action de la Direction
générale des relations fédérales-provinciales, sans
indiquer quels sont les objectifs du ministère, où en sont rendus
les dossiers... On nous donne simplement une énumération et je
compte bien qu'au cours de l'étude des crédits, le ministre
pourra nous donner d'autres détails, afin de voir exactement où
cela mène.
C'est, par ailleurs, le ministre des Affaires intergouvernementales qui
a la responsabilité il donne les mandats
deuxièmement, de coordonner l'ensemble des activités du
gouvernement, de ses ministères et de ses organismes dans ce domaine
tout à fait central du fonctionnement du présent système
fédéral, c'est-à-dire celui des relations
fédérales-provinciales. À ce titre, après
près de trois ans, nous attendons toujours de la part du titulaire du
ministère des Affaires intergouvernementales un premier exposé
sur l'évolution réelle des relations
fédérales-provinciales en tant que telles.
On dit, par exemple, depuis maintenant près de trois ans, que
l'objectif prioritaire de ce gouvernement est la relance économique. Il
me semble, simplement à titre d'exemple, qu'il serait indiqué que
le ministre des Affaires intergouvernementales nous dise un jour ou l'autre les
directives données par la direction des relations
fédérales-provinciales aux différents ministères
à vocation économique dans la conduite de dossiers
économiques de négociations avec le gouvernement
fédéral et, le cas échéant, avec les autres
gouvernements provinciaux. Qui d'autre, en effet, que le ministre des Affaires
intergouvernementales peut donner simplement au public, à
l'Assemblée nationale, le portrait général de
l'évolution des relations fédérales-provinciales dans un
domaine comme celui de l'économie?
Quels sont les objectifs poursuivis par le gouvernement du Québec
dans ses négociations à caractère économique avec
le gouvernement fédéral et les autres gouvernements? Comment la
poursuite de ces objectifs se traduit-elle au niveau, par exemple, de la
participation du Québec aux accords du GATT, ou à celui de la
signature d'ententes de développement avec le gouvernement
fédéral, ou à celui des effets au Québec des
politiques économiques ou fiscales du gouvernement
fédéral, ou encore à celui de la conduite de dossiers
particuliers extrêmement importants, comme ceux dans le domaine de
l'énergie, des mines, des forêts, de l'agriculture, des
pêches, de l'industrie manufacturière, du transport et du
tourisme?
En somme, ce que je voudrais demander au ministre, c'est qu'il prenne
cette responsabilité de nous dire, en tant que ministre des Affaires
intergouvernementales, quelle est la politique réelle du Québec
dans le domaine des relations fédérales-provinciales, sur le plan
économique par exemple. On pourrait adresser le même reproche au
ministre dans le domaine social et également dans le domaine
culturel.
Qui d'autre que le ministre des Affaires intergouvernementales peut le
dire, en toute connaissance de cause, en situant en perspective chaque
élément particulier du dossier ou chaque élément
sectoriel dont ses collègues ont la responsabilité? Qui d'autre
que lui en effet a une responsabilité de direction, de coordination et
de détermination des mandats de négociation des différents
ministères et organismes gouvernementaux? Lui seul, d'ailleurs, a en sa
possession des études, des expertises au niveau du ministère sur
tous et chacun des éléments du fonctionnement du système
fédéral canadien.
Je pense bien que le ministre des Affaires intergouvernementales ne peut
certainement pas continuer de garder, sur un aspect aussi fondamental que celui
des relations fédérales-provinciales, le silence à peu
près complet dans lequel il s'est réfugié depuis
près de trois ans, pour ne jamais avoir à dire c'est
l'impression qu'on a ce qu'apporte au Québec, sur le plan
économique comme sur le plan social ou culturel, notre appartenance au
régime fédéral.
Le ministre, en tout cas, d'une façon certaine, ne peut
sûrement pas se contenter, ici et là, comme il l'a fait, de
laisser tomber, au fil des jours, quelques dossiers noirs qui n'ont le plus
souvent d'intérêt réel que celui des intérêts
politiques forcément partisans que ces dossiers noirs sont manifestement
destinés à servir.
Depuis près de trois ans, la distinction que le ministre des
Affaires intergouvernementales a faite entre la dimension proprement
administrative de son ministère et la dimension politique n'est, en
réalité, c'est mon impression, que l'expression d'une
volonté forcément inavouable d'empêcher le ministère
des Affaires intergouvernementales de jouer normalement le rôle actuel
que la loi, tant qu'elle ne sera pas changée, lui donne,
c'est-à-dire celui d'une participation éclairée,
transparente, positive et valorisante à l'évolution du
fédéralisme canadien.
M. le Président, il y a au moins une chose que l'on ne peut
certainement pas relier à cet effacement du ministère des
Affaires intergouverne-
mentales sous le poids des considérations politiques
présentes et futures du ministre et du présent gouvernement.
Là où le ministère des Affaires intergouvernementales
paraît le plus, si je peux m'exprimer ainsi, c'est ce que, dans le
rapport annuel 1977/1978 du ministère, on appelle, dans ce que je
qualifierais d'un euphémisme remarquable, l'effort soutenu et
systématique d'information de la réalité
québécoise à l'étranger, ou encore, là
où le ministère paraît le plus, c'est à l'occasion
d'activités de prestige telles qu'illustrées par la visite du
premier ministre de France au Québec ou celle même du premier
ministre du Québec en France. (10 h 45)
On informe en effet beaucoup l'étranger, en ce moment, sur la
réalité québécoise. Cela semble être
là, le ministre l'a rappelé ce matin, une des priorités du
ministère des Affaires intergouvernementales. Mon propos de ce matin
veut simplement demander au ministre et au ministère d'informer un peu
plus les Québécois sur la réalité des relations
fédérales-provinciales québécoises et canadiennes.
On informe d'ailleurs l'étranger sur la réalité
québécoise, encore faudrait-il voir de quelle
réalité il s'agit et qui, exactement, de la direction politique
du ministère, du cabinet du premier ministre, ou du ministère en
tant que tel, définit cette réalité
québécoise que l'on diffuse aussi largement à
l'étranger.
On nous demande, M. le Président, de voter les crédits du
ministère des Affaires intergouvernementales. Je pense qu'il convient
que les membres de cette commission obtiennent, de la part du ministre,
l'assurance que ces crédits sont bien ceux d'un ministère des
Affaires intergouvernementales ou enfin, de ce ministère des Affaires
intergouvernementales qui fonctionne à l'intérieur d'une loi
précise, adoptée par l'Assemblée nationale et encore
toujours inchangée.
Que le ministre nous dise, ou qu'il nous rassure sur le fait qu'il va
permettre à son ministère, premièrement, de jouer
véritablement, d'une façon libre et pleine, le rôle que la
loi lui donne, c'est-à-dire celui d'apporter une contribution positive
et constructive à la modernisation et au renforcement du régime
fédéral canadien; deuxièmement, de définir
clairement et publiquement les objectifs précis d'une politique de
relations fédérales-provinciales orientée sur rien d'autre
que le progrès et le développement de la société
québécoise, à l'intérieur du régime
fédéral canadien et, troisièmement, de diffuser à
l'étranger une image vraie et exacte de la réalité
québécoise et de toute la réalité
québécoise.
N'ayant absolument pas le mandat de la part de la population d'agir
autrement, non plus d'ailleurs que de l'Assemblée nationale, le ministre
ne peut légitimement avoir d'autre choix que de réconcilier au
plus tôt la direction politique et la direction administrative du
ministère des Affaires intergouvernementales; l'une et l'autre,
jusqu'à avis contraire et avis référendaire contraire, ne
peuvent s'inscrire dans d'autre perspective que celle de la
réalité et de la permanence du régime
fédéral canadien.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le chef de
l'Union Nationale, député de Lotbinière.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Merci, M. le Président. Mes propos, ce matin,
seront d'une approche certainement beaucoup plus pragmatique ou
économique que ceux de mon ami et collègue du comté de
Jean-Talon. Je demanderai simplement ce que le ministère des Affaires
intergouvernementales rapporte au Québécois, au
Québécois ordinaire, le Jean-Baptiste québécois
lui-même, qui dit: Ce ministère me coûte $35 millions cette
année, qu'est-ce que cela me donne à moi? Comment cela peut-il
m'aider à me développer économiquement ou à avoir
un meilleur niveau de vie, à m'aider dans ma vie personnelle?
Si je me fie à l'organisation administrative ou à la
charte d'organisation administrative soumise par le ministre, il y a deux
grandes orientations, en plus de l'administration bien sûr: il y a les
orientations internationales et il y a les orientations canadiennes, avec les
autres provinces canadiennes et le gouvernement canadien.
Quant aux relations internationales, c'est sûr que le
ministère des Affaires intergouvernementales a à planifier,
à aider, à collaborer avec tous les autres gouvernements à
travers le monde. Je voudrais savoir du ministre, parmi toutes ces actions du
ministère, ce qu'on fait précisément du côté
économique. Est-ce qu'il y a aussi des dédoublements ou des
chevauchements de juridiction avec le gouvernement fédéral? On
sait que le gouvernement fédéral est responsable du commerce
international, interprovincial. Comment le ministère des Affaires
intergouvernementales ou le gouvernement du Québec peut-il intervenir,
en vue d'amener chez nous des investissements nouveaux, des entrepreneurs
nouveaux, ou en vue de créer de nouveaux marchés pour les
entreprises québécoises et finalement, de nouveaux emplois pour
les travailleurs québécois?
Dans les domaines de juridiction provinciale, du Québec, en
particulier la culture, l'éducation, je ne m'inquiète pas trop.
On sait que jusqu'à maintenant, les gouvernements du Québec, non
seulement celui du Parti québécois, tous les autres gouvernements
avant lui, depuis que ces relations intergouvernementales existent, ont voulu
faire un effort pour la promotion, ou faire connaître exactement la vie
québécoise, particulièrement la vie francophone au
Québec.
Là où je me pose des questions, c'est comment on
intervient vis-à-vis du gouvernement fédéral sur le
commerce international. Qu'est-ce qu'on fait de spécial vis-à-vis
du gouvernement du Québec avec les maisons du Québec à
l'étranger? Qu'est-ce qu'on fait de spécial pour stimuler la vie
économique? Est-ce qu'on fait concurrence au gouvernement canadien?
Est-ce qu'on se sert véritablement de toutes les ambassades canadiennes
à l'étranger, même si on n'a pas de maison du Québec
dans des endroits précis, pour justement aider à
développer l'économie au Québec? Est-ce
que, de la part de notre gouvernement, on se contente tout simplement de
faire quelques appels pour essayer de vendre nos ressources naturelles à
l'étranger, nos richesses naturelles à l'étranger ou
est-ce qu'on s'occupe véritablement d'amener chez nous des
convertisseurs de matière, des gens qui voudraient investir au
Québec et convertir cette matière-là et faire travailler
un peu plus de nos Québécois?
On sait que, dans le courant de l'année, on a ouvert une nouvelle
maison du Québec à Caracas, au Venezuela. Est-ce qu'on a
l'idée d'ouvrir d'autres maisons du Québec à
l'étranger? Est-ce qu'on va nous parler de Mexico? Est-ce qu'on va nous
parler de pays qui commencent justement, comme le Mexique, à s'enrichir
avec la richesse naturelle qu'est le pétrole? Est-ce qu'on va faire des
efforts de ce côté-là pour, justement, ouvrir un peu plus
le Québec à l'étranger, surtout ces nouveaux
marchés qu'on a un peu partout et gui se développent,
l'Amérique latine, l'Afrique, l'Asie?
Il y a peut-être un effort de ce côté-là, mais
je voudrais savoir, de la part du ministre, comment fonctionnent nos relations
internationales et quelle sorte de chevauchement, de dédoublement de
services on a avec le gouvernement fédéral. C'est important,
parce que le Québécois Jean-Baptiste qui travaille, cela lui
coûte de l'argent, il est peut-être prêt à investir de
l'argent dans l'avenir, mais il ne voudrait pas non plus que cela coûte
deux fois le prix, que le Québec fasse quelque chose et que le
gouvernement canadien, son gouvernement aussi, fasse autre chose et que,
finalement, il s'aperçoive qu'on est obligé de payer deux
personnes pour faire exactement le même travail.
Ce sont des questions précises. Le côté culturel,
comme j'ai dit tout à l'heure, d'éducation, c'est très
clair, c'est de juridiction provinciale, mais le côté du commerce
international, c'est de juridiction fédérale. Comment fait-on
pour aider davantage nos entreprises et nos travailleurs
québécois?
L'autre direction générale, celle des affaires
canadiennes, là aussi, je peux poser des questions au ministre. Bien
sûr, je voudrais lui en poser tout à l'heure sur le
fédéralisme renouvelé, la souveraineté-association,
le nouveau gouvernement canadien qui vient d'être élu, mais, avec
les autres provinces canadiennes, est-ce qu'on fait un effort vis-à-vis
de ces provinces-là aussi pour stimuler l'économie? En
particulier, on sait qu'on a un pied-à-terre à Toronto, mais
est-ce qu'on fait un effort du côté des provinces de l'Ouest, en
Colombie-Britannique, en Alberta en particulier, qui est une province
extrêmement riche? Est-ce qu'on fait tout simplement des visites au point
de vue culturel ou constitutionnel ou est-ce qu'on fait un effort pour
développer le marché dans ces provinces-là pour nos
entreprises québécoises? Dieu sait que le marché de
l'Alberta, à l'heure actuelle, c'est un marché riche. Ces
gens-là ont de l'argent et on peut, je pense bien, facilement
créer quelque chose.
Est-ce qu'on fait un effort dans le domaine de l'automobile en
particulier? On sait que le Québec, depuis toujours, est
déficitaire dans le domaine de l'automobile. Dans les dernières
années, on a un déficit, chaque année, d'au moins $3
milliards. Pour cette année, c'est $3 milliards. L'an prochain, ce sera
un peu plus et l'année d'après encore un peu plus. Il est
déficitaire dans le domaine de l'automobile. Est-ce que le
ministère des Affaires intergouvernementales fait des efforts, avec le
gouvernement canadien et les autres provinces canadiennes, pour qu'on puisse
attirer chez nous des usines de transformation d'automobiles et, après
cela, essayer d'exporter les produits qu'on fait déjà dans le
domaine de l'automobile? Il y a beaucoup de moyennes entreprises au
Québec qui font des produits d'automobiles. Est-ce qu'on fait un effort
de ce côté-là pour en envoyer en Alberta, en Ontario, en
Colombie-Britannique au moins un minimum dans les provinces canadiennes, sinon
dans les États américains? Il y a un effort à faire de ce
côté-là.
Qu'est-ce qu'on fait comme entente de réciprocité avec les
autres provinces canadiennes? Est-ce qu'on se contente de discuter d'un
fédéralisme ou de nouvelles juridictions ou est-ce qu'on fait
véritablement un effort sérieux pour avoir des ententes de
réciprocité dans tous les domaines avec les gouvernements des
autres provinces canadiennes? Est-ce qu'on dit aux autres provinces canadiennes
ce qu'on fait au Québec vis-à-vis de l'économie,
vis-à-vis de la langue, vis-à-vis de la culture et est-ce qu'on
fait des efforts vis-à-vis de ces provinces-là pour dire: Si,
nous autres, on fait cela au Québec, vous autres, vous devriez faire la
même chose. On va signer une entente de réciprocité. On a
le droit, même avec le système actuel de la constitution
canadienne, de signer des ententes de réciprocité avec les autres
provinces canadiennes. Qu'est-ce qu'on fait de ce côté-là?
Ce serait intéressant pour Jean-Baptiste canadien,
Québécois s'il travaille au Québec tant mieux
s'il ne pouvait pas travailler au Québec, de pouvoir aller
travailler en Alberta. Est-ce qu'il va pouvoir aller à l'école
française en Alberta et des choses comme cela?
Je pense que c'est intéressant de savoir quels sont les efforts
que le gouvernement du Québec va faire vis-à-vis de l'expansion
économique, sociale, culturelle du Québec vis-à-vis des
autres provinces canadiennes. Ce n'est pas tout d'avoir une maison à
Toronto, il faut en avoir ailleurs et savoir exactement où on va.
Quelles sortes de relations constantes a-t-on avec les autres provinces
canadiennes? On sait que l'alliée par excellence du Québec, comme
province, ou les alliées par excellence, ce sont les provinces. Les
provinces veulent aujourd'hui de plus en plus avoir leurs pouvoirs, avoir leur
juridiction, pouvoir s'administrer elles-mêmes. Ce sont des
alliées naturelles pour le Québec. Est-ce qu'on fait des efforts
systématiques de ce côté pour faire en sorte qu'on devienne
alliés naturellement avec l'Ontario, avec l'Alberta, avec la
Saskatchewan, la Colombie-Britannique, le Manitoba, et ainsi de suite,
finale-
ment, pouvoir avoir le système que les Québécois
veulent avoir, pour lequel les Québécois se sont toujours battus,
pour avoir un petit peu plus de respect à l'intérieur de leur
propre pays? C'est important de le savoir de la part du ministre.
Je voudrais savoir aussi pourquoi, dans son organigramme, on a une
Direction générale des affaires canadiennes, et que, dans la
Direction générale des affaires internationales, on a aussi une
Direction des relations avec le gouvernement fédéral. Est-ce que
le gouvernement fédéral est considéré comme un
gouvernement international ou si ce n'est pas du tout la même chose que
la Direction générale des affaires canadiennes? Ce serait
important de savoir cela et de savoir si cette Direction des relations avec le
gouvernement fédéral consiste tout simplement en nos
négociations avec le gouvernement fédéral, mais sans
s'occuper de négociations avec les autres provinces canadiennes, que les
négociations avec les autres provinces canadiennes, ce serait la
Direction générale des affaires canadiennes.
Est-ce que la Direction des relations avec le gouvernement
fédéral s'occupe de la thèse de la
souveraineté-association ou du fédéralisme
renouvelé, tout cela? Est-ce que ce sont deux choses différentes?
Ce serait important de savoir cela, parce que, comme je l'ai dit tout à
l'heure, les provinces étant nos alliées naturelles, c'est
sûr qu'il y a des chicanes entre les provinces et le gouvernement
central.
Ce n'est pas seulement le gouvernement du Québec qui se chicane
avec le gouvernement d'Ottawa. On a vu en Saskatchewan, M. Blakeney être
réélu parce qu'il a fait la lutte dans son élection
provinciale contre des interventions directes du gouvernement
fédéral dans des domaines de juridiction provinciale. On a vu M.
Lougheed faire la lutte contre le gouvernement fédéral et
être élu dans sa province. Donc, ce sont tout simplement les
provinces canadiennes qui critiquent le système fédéral
actuel ou le gouvernement fédéral qui existait ou ceux qui
étaient là avant le 22 mai, avant-hier. Il y a peut-être
des changements à venir de ce côté, donc des questions se
posent au ministre vis-à-vis de ces directions de relations avec le
gouvernement fédéral et la Direction générale des
affaires canadiennes.
La dernière question que je me pose, c'est quelles seront les
relations du gouvernement du Québec maintenant qu'à Ottawa, on a
changé de gouvernement et on a foutu dehors un gouvernement qui ne
voulait pas négocier avec les provinces, qui voulait tout simplement
écraser les provinces avec un gouvernement fédéral
très fort, même au risque de détruire notre pays. On
s'aperçoit que, maintenant, on a un gouvernement qui arrive là
beaucoup plus ouvert, en disant: J'en veux un véritable
fédéralisme renouvelé. Il n'a pas encore défini
cela clairement, le Parti conservateur, c'est vrai, il ne l'a pas encore
défini.
M. Morin: Lui non plus.
M. Biron: Quand même, c'est important de noter qu'on a au
moins un premier ministre qui arrive là avec une ouverture d'esprit
nouvelle, qui veut s'entendre avec les provinces, et qui ne tient pas à
écraser les gouvernements provinciaux, alors que l'autre parti qui
était là, avec l'autre chef de parti, voulait tout simplement un
affrontement constant avec les gouvernements provinciaux, en disant: On va
essayer d'être élus sur le dos du Québec.
Je voudrais savoir l'attitude du gouvernement du Québec,
maintenant qu'arrive à Ottawa un chef de gouvernement qui dit: Je veux
négocier, je suis prêt à m'asseoir à la table des
négociations et voir ce qu'on peut faire pour avoir un
fédéralisme renouvelé qui réponde davantage aux
besoins des citoyens, non seulement des citoyens du Québec, mais des
citoyens des autres provinces canadiennes. Est-ce que les relations qui vont
devoir commencer, d'une façon ou d'une autre, avec le gouvernement
fédéral seront meilleures, seront plus souples?
À court terme, est-ce qu'on peut s'attendre à des
négociations sérieuses de la part du présent gouvernement
du Québec, en tant que gouvernement provincial, pour réclamer ce
qu'historiquement, tous les gouvernements du Québec ont toujours
réclamé et ce qui a toujours été refusé, et,
en particulier, refusé d'une façon très sérieuse au
cours des dix dernières années par un Québécois qui
était en même temps premier ministre du Canada?
Est-ce que ce sera une ouverture? Est-ce que c'est une bouffée
d'air frais qu'il y a dans les relations fédérales-provinciales
avec l'arrivée d'un nouveau premier ministre plus ouvert et plus
flexible, à la tête du gouvernement canadien? Je pense que c'est
une question importante, parce que c'est l'avenir même du Québec
et du Canada qui est en jeu.
Est-ce qu'on veut un affrontement constant? Est-ce qu'on veut faire en
sorte que le Québec et le Canada anglais s'affrontent constamment ou si
on veut faire en sorte de régler les problèmes une fois pour
toutes et, après cela, qu'on passe aux vrais problèmes du vrai
monde au Québec, non pas seulement des problèmes
constitutionnels? (11 heures)
Les vrais problèmes du vrai monde au Québec, non seulement
les problèmes constitutionnels, mais les vrais problèmes du vrai
monde, des problèmes d'emploi, des problèmes d'investissements,
le problème de savoir ce que coûtera le panier de provisions en
fin de semaine et si, constamment, il va être obligé de payer pour
un dédoublement, un chevauchement de juridictions entre deux paliers de
technocrates et de fonctionnaires, même si on a d'excellents
fonctionnaires ici. Je ne veux pas critiquer les fonctionnaires en particulier,
mais, quand même, on sait qu'on est obligé de payer à deux
paliers à l'heure actuelle. On a de nombreux exemples dans ce
domaine!
Est-ce qu'on va continuer à se chicaner constamment ou si le
gouvernement actuel du Québec est prêt à s'associer avec le
gouvernement canadien et les autres provinces canadiennes pour dire: Qu'est-ce
qui va être de juridiction provin-
ciale? Qu'est-ce qui va être de juridiction
fédérale? Où va-t-on s'arrêter dans cette chicane et
où va-t-on arrêter de percevoir des taxes qu'on n'aurait pas
d'affaire à percevoir normalement des contribuables du Québec et
du Canada? On en a eu un exemple au cours des derniers mois avec la guerre de
la publicité. Le gouvernement du Québec faisait de la
publicité ou de la propagande d'un côté pour sa
thèse, alors que le gouvernement fédéral faisait de la
publicité et de la propagande pour sa thèse. Il y a une limite
à faire de la propagande avec l'argent des citoyens et je pense bien
qu'il faut que cela arrête. Pour que cela arrête, il faut savoir
où ça commence et où ça finit. Il y a beaucoup de
Québécois... La grande majorité de nos
Québécois se posent des questions dans ce domaine et ce sont
justement ces questions que je voudrais poser au ministre. J'aimerais bien
avoir une réponse là-dessus et en particulier sur cette ouverture
nouvelle qu'on a maintenant à Ottawa, avec un gouvernement qui se dit
ouvert pour négocier avec les provinces canadiennes.
Le Président (M. Laplante): C'est tout. M. le
député? Est-ce qu'il y a d'autres membres qui veulent se faire
entendre avant que le ministre réponde aux questions?
Réponse du ministre
M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, je
reprends la parole. J'ai noté, autant que j'ai pu, les diverses
questions qui ont été soulevées par les deux intervenants.
Je vais essayer de répondre à toutes ces questions. Il se peut
que j'en oublie en cours de route, parce que je n'ai pas pris ça dans un
ordre exemplaire. Je compte sur eux pour me poser des questions à
nouveau si je n'ai pas apporté des réponses à des
interrogations qui ont l'air d'être lancinantes, du moins chez mon
collègue libéral.
Je voudrais, avant d'aller plus loin, mentionner une chose que j'ai
oublié de dire tantôt, qui n'a rien à voir avec le sujet
que nous allons aborder maintenant. Il y a que M. Charron voudrait, si vous
êtes d'accord, que nous examinions des crédits de l'Office
franco-québécois pour la jeunesse de 12 heures à 12 h 30,
ce qui le libérerait et ce qui nous permettrait quand même, dans
l'heure qui reste, de passer à travers d'autres sujets. Je pense que
ça ne présente pas de difficulté. De toute façon,
si on ne le fait pas aujourd'hui, il va falloir le faire demain et on prendra
une demi-heure demain plutôt qu'aujourd'hui; mais je suggérerais
et proposerais que nous prenions la demi-heure de 12 heures à 12 h 30
pour ça, si tout le monde est d'accord.
Le Président (M. Laplante): Tout le monde est
d'accord?
M. Rivest: On peut les adopter tout de suite, si vous voulez.
M. Morin (Louis-Hébert): D'accord, aimes-tu mieux
ça?
M. Rivest: Oui.
M. Morin (Louis-Hébert): D'accord.
M. Biron: Non...
M. Morin (Louis-Hébert): Bien, voyons donc! Cela aurait
accéléré les choses.
M. Biron: On va y revenir un peu plus tard. J'ai seulement
quelques questions très brèves.
M. Morin (Louis-Hébert): De toute façon, je
considère que c'est réglé du côté
libéral. J'aime autant, d'ailleurs, que ce soit réglé tout
de suite, étant donné que j'ai certaines critiques à
formuler quant à son intervention.
Ce que le député de Jean-Talon a dit est fondamentalement
appuyé sur deux choses: un malentendu et une ignorance. Non, mais je
vais vous expliquer ça.
Le malentendu s'il avait revu l'intervention que j'ai faite l'an
dernier, je crois, ou avant, à cet égard... provient de ce
qu'il estime être une distinction trop subtile entre le politique et
l'administratif. J'ai deux choses à dire à ce sujet.
Dans tous les ministères de tous les pays démocratiques du
monde, dans notre genre de régime politique, il va de soi que c'est le
ministre qui s'occupe de la politique et l'ensemble du ministère,
c'est-à-dire les fonctionnaires, s'occupe plutôt de
l'administration, ça va de soi. Quand j'ai dit ça, je n'ai fait
que répéter une évidence flagrante et je ne vois vraiment
pas pourquoi il soulève une question aujourd'hui, puisque ça me
semble aller de soi.
Si j'avais dit que les fonctionnaires doivent s'occuper de politique et
le ministre d'administration, là, je comprendrais qu'on me pose des
questions et qu'on soulève des objections. Mais comme je n'ai dit que
l'évidence et une vérité de La Palice, je ne vois pas en
quoi ça justifie les interrogations qui ont été
posées. Cela, c'est la première partie de ce que je veux dire
quant au malentendu.
La deuxième chose que je veux dire, c'est que j'avais en
tête à l'époque, quand j'ai parlé de ça et je
crois que je répondais à une question, le rôle du
ministère dans la préparation du référendum. Ce que
j'avais dit à l'époque, c'est que ce n'était pas le
ministère qui était chargé, ni les fonctionnaires du
ministère, de préparer le référendum qui
était une opération de consultation populaire sur une option
politique, et que cette responsabilité m'appartenait, ce qui veut dire,
par exemple, que ce n'est pas le ministère qui prépare la
question référendaire. Ce peut être le ministre avec
d'autres ministres, parce que c'est une opération politique qui nous
revient à nous, cela va de soi. Cela ne veut pas dire qu'on ne parle pas
du référendum dans le ministère et qu'on n'en parle pas
dans les
autres ministères du gouvernement. Si c'était le cas, ce
serait le seul endroit au Québec où on n'en parle pas. Alors,
comme il y a des citoyens du Québec dans mon ministère, c'est
certain qu'on en parle. Mais ce n'est pas le rôle du ministère,
nous nous conformons à cet égard à la loi. Ce qui
m'amène à l'ignorance du député de Jean-Talon qui
me frappe, d'autant plus, qu'il était conseiller, à
l'époque, de M. Bourassa, quand la Loi du ministère des Affaires
intergouvernementales a été sanctionnée. Or, cette loi
décrit la responsabilité du ministre et, à aucun endroit
je peux la lire, il y a cinq ou six articles qui sont en cause
contrairement à ce que laisse entendre le député, il n'est
dit que la fonction du ministère, à toutes fins utiles, c'est de
faire la défense et l'illustration du beau et grand
fédéralisme canadien. Au contraire, il y a une formulation dont
je ne suis pas responsable, qui est celle du gouvernement libéral
antérieur et qui est très bien faite, parce qu'elle laisse toutes
c'est ça qui est intéressant les options ouvertes.
On donne, par exemple, comme responsabilité du ministre ceci, à
l'article 10 de la loi du ministère: "Le ministre a pour
responsabilité d'élaborer et de proposer au gouvernement une
politique en matière de relations extérieures et de mettre en
oeuvre la politique adoptée par ce dernier". On n'a jamais défini
dans quel cadre c'était. "Il établit le ministre et
maintient avec les autres gouvernements et leurs ministères les
relations que le gouvernement du Québec juge opportun d'avoir avec eux".
Imaginez-vous, ça peut être des relations d'État souverain!
"... il coordonne toutes les activités du gouvernement à
l'extérieur du Québec, ainsi que celles de ses ministères
et organismes. Il conseille aussi le gouvernement sur toute question ayant
trait aux relations intergouvernementales." Il y a encore cinq autres articles
qui précisent ce que je viens de dire et, à aucun endroit, on ne
parle de la défense et de l'illustration du
fédéralisme.
Par conséquent, dans le travail que nous faisons actuellement,
nous nous conformons à une loi du ministère qui est très
ouverte et qui, contrairement, à beaucoup des attitudes du Parti
libéral actuellement, est une sorte de porte ouverte sur l'avenir. C'est
important de le mentionner.
M. Rivest: Me permet-on une question sur un point? Cette loi du
ministère que vous citez a été adoptée par
l'Assemblée nationale du Québec, n'est-ce pas?
M. Morin (Louis-Hébert): Le 24 décembre 1974.
M. Rivest: Non, mais par l'Assemblée nationale du
Québec.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, elle n'a pas
été adoptée par l'Assemblée nationale de l'Alberta,
que je sache.
M. Rivest: L'Assemblée nationale du Québec, sa base
juridique, c'est bien l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, n'est-ce
pas?
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je vous vois venir, mais
j'ai une réponse.
M. Rivest: La loi de l'Assemblée nationale a
été adoptée probablement en vertu des pouvoirs qui sont
conférés aux provinces par l'article 92 et suivants. Cette
constitution est fédérale, n'est-ce pas? Alors, l'application,
l'interprétation de cette loi ne peut se faire en dehors du contexte
fédéral. Même si vous aviez le référendum,
tant et aussi longtemps que le Québec fonctionnera à
l'intérieur du régime fédéral, votre mandat
premier, c'est le seul point que j'ai démontré, ce n'est pas de
travailler à défendre, à étayer ou à
promouvoir la souveraineté-association, c'est simplement de travailler
dans le cadre du régime fédéral. La panoplie de vos petits
dossiers noirs et de toutes les petites actions que vous faites, c'est
complètement en dehors de votre mandat en tant que ministre et c'est en
dehors du mandat du ministère des Affaires intergouvernementales. C'est
le seul point que j'ai voulu exprimer.
M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, je
souhaiterais que le député de Jean-Talon jouisse d'un droit de
parole privilégié, parce que chaque fois qu'il parle, il se cale
davantage.
M. Rivest: M. le Président, je suis d'accord.
M. Morin (Louis-Hébert): Voici la raison pour laquelle il
se cale davantage. Si on avait voulu, par cette loi, condamner en quelque sorte
le ministère à défendre, comme vous le faites, vous
autres, le statu quo, on l'aurait dit.
M. Rivest: M. le Président, est-ce qu'on n'aurait pas de
question de privilège? Je ne connais pas beaucoup notre
règlement. C'est dommage, M. le Président, parce que j'en
invoquerais une à ce moment.
M. Morin (Louis-Hébert): Je vois que le
député de Jean-Talon a subi une sorte d'influence de l'ancien
premier ministre du Canada, parce qu'il utilise un sophisme. Je vais en
utiliser un autre pour répondre, parce qu'à ce moment, il faut se
parler à armes égales. Cela n'a pas plus de sens de dire ce qu'il
vient de dire, donc, de bloquer l'avenir, que de dire que, parce que moi, je
suis né au Québec, je n'ai pas le droit de voyager à
l'extérieur. C'est aussi stupide que ça. Je m'excuse.
M. Rivest: Cela veut dire quoi? Vous êtes ministre des
Affaires intergouvernementales dans un régime fédéral.
Comment pouvez-vous vous inscrire en dehors de ce régime? Dans vos
responsabilités...
M. Morin (Louis-Hébert): De la même façon
que, chez nous, au Québec...
M. Rivest: Dans vos responsabilités ministérielles.
Je ne parle pas de vos discours politiques et de vos opinions personnelles,
mais en tant que ministre. Ici, ce sont les crédits du ministre des
Affaires intergouvernementales.
M. de Bellefeuille: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Je me rends compte, M. le Président,
que notre sympathique ami, le député de Jean-Talon, n'est pas
encore tout à fait versé dans nos moeurs parlementaires.
M. Rivest: Heureusement!
M. de Bellefeuille: Je souhaiterais vivement que nous
procédions dans l'ordre, qu'il demande la parole et que vous la lui
accordiez s'il souhaite intervenir.
M. Rivest: Oui, mais le ministre me dit des choses
désagréables.
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Jean-Talon! Il est coutume, dans
l'étude des crédits, lorsqu'un membre demande au ministre de
poser une question, que le ministre accepte de le laisser aller. Cela
dépend du ministre. S'il dit qu'il veut continuer son intervention, sans
être interrompu...
M. Morin (Louis-Hébert): Comme il n'y a pas de
procédure d'amendement à la constitution actuelle en vertu du
sophisme du député, on ne pourrait pas la changer. Non, mais
c'est ça!
M. Rivest: Vous n'avez qu'à travailler avec vos
collègues, les autres premiers ministres du pays...
M. Morin (Louis-Hébert): Mais non, on n'a pas le
droit.
M. Rivest: ... pour travailler à la changer.
M. Morin (Louis-Hébert): Ce n'est pas prévu dans la
constitution actuelle. Je veux continuer à répondre...
M. Biron: M. le Président, est-ce que je peux demander au
ministre...
M. Morin (Louis-Hébert): ... le député n'est
peut-être pas versé, c'est vrai, mais il est renversé.
M. Biron: M. le Président, je voudrais demander au
ministre si je peux intervenir pour lui dire un peu ce qu'il y a dans la loi.
En fait, ça dépend si vous la lisez en anglais ou en
français. Si vous la lisez en anglais, je pense que le
député de Jean-Talon a raison. Si vous la lisez en
français et c'est la même loi dont parle le
député de Jean-
Talon on dit: "Le ministre assure en outre la participation du
gouvernement à l'élaboration, à la mise en oeuvre des
politiques et programmes fédéraux ayant des incidences sur le
développement du Québec". En anglais, on dit: "He shall
furthermore insure the participation of the Government in the preparation and
implementation of federal policies and programs affecting the development of
Québec." Cela veut dire que ce n'est pas du tout la même chose en
anglais qu'en français. En anglais, c'est le fédéral qui
est protégé, en français, il semble que ce ne soit pas le
fédéral qui soit protégé.
M. Morin (Louis-Hébert): C'est très troublant.
J'aurais aimé mieux ne pas apprendre comme ça que le
député de Jean-Talon s'est inspiré de la version anglaise,
mais enfin... Voilà! Voici un problème de
réglé.
Donc, j'ai dit qu'il y avait un malentendu et qu'il y avait une
ignorance. L'ignorance, c'est celle qui consiste à ne pas
connaître la portée de notre loi. D'ailleurs, le
député de Jean-Talon le sait très bien, mais comme il
devait meubler son discours de ce matin, il fallait qu'il se trouve des
arguments.
M. Rivest: ... Je n'ai le droit de rien dire là?
M. Morin (Louis-Hébert): Non, vous n'avez pas le droit de
répondre.
Le Président (M. Laplante): Vous aurez votre tour encore
tout à l'heure.
M. Morin (Louis-Hébert): Je voudrais continuer. Il y a une
question qui a été soulevée je ne voudrais pas en
oublier et je ne veux pas prendre tout le temps non plus à propos
de la position constitutionnelle que le gouvernement du Québec a fait
valoir aux différentes conférences constitutionnelles. C'est
très intéressant et la façon dont le député
a abordé la question démontre clairement que nous avons
effectivement participé à ces conférences-là et que
nous avons apporté à ces conférences des positions qui
étaient celles des gouvernements antérieurs. Cependant, ce qu'il
a négligé de dire et je pense que c'est assez important de
le rappeler c'est que la série de conférences
constitutionnelles qu'on a eues jusqu'en février dernier, a
montré hors de tout doute, à mon avis j'en ai parlé
à l'époque et je le répète que non seulement
les positions traditionnelles du Québec n'avaient eu aucune suite
je parle de celles qui avaient été présentées par
les gouvernements antérieurs mais aussi que toute tentative de
renouveler vraiment le fédéralisme avait été
rejetée.
Je prends un cas précis, je pense au rapport Pépin-Robarts
qui a été, croyons-le ou non, surtout utilisé par nous et,
à la fin, l'ancien premier ministre du Canada s'est cru obligé
d'y faire référence, parce qu'on était les seuls à
en parler.
Le fédéralisme renouvelé a été
rejeté déjà. Il n'y a personne je souligne personne
et si j'étais capable verbalement de mettre des traits rouges
en dessous, pour que ça paraisse davantage, ou bleus pour que
tout le monde soit content que j'aie des traits nous avons maintenant
établi indirectement que personne au Canada ne veut de ce genre de
fédéralisme renouvelé, auquel une partie des
Québécois continue d'aspirer. Je pense que c'est établi
clairement et je réponds tout de suite, par ce ricochet, à une
des questions posées par le chef de l'Union Nationale, à propos
de l'attitude de M. Clark et de la bénédiction que semble
constituer son arrivée au pouvoir pour les Québécois qui
tiennent à une rénovation en profondeur du système
fédéral.
On a dit longtemps à propos de M. Clark, que je respecte par
ailleurs, "Joe Who", c'est-à-dire "Joe qui"? Maintenant je pense qu'il
faut dire "Joe quoi"? La raison est la suivante: Je n'ai pas la moindre
idée de ce que sont ses options constitutionnelles précises.
C'est peut-être un des points où j'étais d'accord avec
l'ancien premier ministre du Canada lorsqu'il a demandé, au cours du
débat télévisé: II veut quoi, M. Clark? Je ne le
sais pas. Par conséquent, comment peut-on présumer, ne sachant
pas ce qu'il veut, de ce qu'il va nous proposer et comment supposer, à
partir de ce qu'il va nous proposer, que ça va être meilleur que
ce que les autres nous ont suggéré avant?
Je pense qu'à ce moment-là, la chose la plus sage à
faire, comme le disait le premier ministre hier, elle est double:
premièrement, on donne la chance au coureur et, deuxièmement, on
va voir à quel moment le coureur va s'enfarger. Pour le moment, il n'y a
aucun élément sérieux dans la position du chef
conservateur et maintenant premier ministre du Canada qui me permette de
croire, sauf une attitude verbalement gentille, qu'il y a vraiment et
profondément ancrée chez lui une volonté de
révision fondamentale du fédéralisme. Il s'appuie, il l'a
dit encore hier, sur pas mal d'éléments politiques du Canada qui
n'ont jamais particulièrement brillé, à mon avis, par leur
caractère innovateur en matière constitutionnelle, sauf dans un
domaine, celui qui les intéresse, les autres moins, celui des richesses
naturelles. Je pense aux premiers ministres de l'Ouest canadien en
général.
À cet égard, la réponse, c'est que je ne sais pas
quelle est son attitude et, par conséquent, on va attendre qu'il nous
dise quelque chose.
Maintenant, on a mentionné, quand le député de
Jean-Talon a parlé, ce qu'il qualifiait de mon silence. Il va falloir
être logique. De deux choses l'une, ou je fais des discours ou je n'en
fais pas. Quand j'en fais, on dit que je parle de ce dont je ne devrais pas
parler et, quand je n'en fais pas, on me reproche de ne pas avoir parlé.
Je dois dire à cet égard, parce que, là aussi, il faut
être logique, qu'en ce qui concerne les politiques
fédérales-provinciales du gouvernement, elles sont quasiment
chaque jour mentionnées à l'Assemblée nationale. Qu'il
s'agisse de pâtes et papiers, qu'il s'agisse de questions agricoles,
qu'il s'agisse de questions de travail, qu'il s'agisse de n'importe quoi, il y
a pratiquement tous les jours, et, en fait, je pense, tous les jours, une
question adressée à un ministre, qui touche justement les aspects
fédéraux-provinciaux de son action sectorielle à lui.
Je ne vois pas pourquoi, à ce propos, il faudrait que moi, je
répète. Par exemple, l'autre jour, il y a eu une excellente
intervention de Pierre Marois sur le revenu minimum garanti qui a justement
fait état des difficultés fédérales-provinciales
que nous avions. Il y en a eu une du ministre des Richesses naturelles sur les
pâtes et papiers, ça fait à peu près deux ou trois
semaines. On en parle constamment, comme d'autres en parlent, parce qu'il
s'agit de leur domaine. J'espère que le député de
Jean-Talon ne souhaite pas que mon ministère parce que c'est
déjà assez compliqué dans un gouvernement devienne
une autre sorte de goulot d'étranglement et que personne n'agisse,
personne ne parle, à moins que j'aie donné mon approbation sur
chacune des virgules de chacune des phrases de l'intervention possible des
autres ministres.
Je pense que nous sommes une équipe et que, par
conséquent, comme d'autres ministres s'occupent de domaines sectoriels,
c'est à eux qu'il revient d'en faire état, y compris dans les
domaines fédéraux-provinciaux qui les touchent. À cet
égard, nous suivons constamment ces dossiers. De toute façon, ce
qu'ils disent est conforme à la politique gouvernementale
d'ensemble.
C'est peut-être mon humilité naturelle qui fait que je ne
suis pas intervenu plus souvent sur ces questions, mais, comme d'autres en
parlaient, j'ai cru que c'était suffisant. Je tiens compte de la
suggestion du député et je le remercie, peut-être que,
dorénavant, il va se rendre compte que je vais en parler davantage,
ça rn'étonnerait qu'il soit d'accord sur ce que je vais
dire...
M. Rivest: Vous avez tellement peu raison d'être
humble.
M. Morin (Louis-Hébert): Je sais, c'est ce qu'on me dit
souvent.
M. Rivest: Je veux vous aider, M. le ministre, c'était le
seul sens de ma démarche.
M. Morin (Louis-Hébert): J'imagine. Ensuite, parmi les
autres questions qui ont été soulevées, j'ai fait le
tour... Je continue dans le domaine fédéral-provincial, je
toucherai l'international après, en me greffant sur les deux.
Les autres provinces. Je m'adresse au chef de l'Union Nationale, je
pense qu'il y a une sorte de mythologie qui existe, c'est défendable et
compréhensible, c'est la suivante, à savoir que les autres
provinces sont les alliées naturelles du Québec,
c'est-à-dire qu'il suffit que leur qualité de province les fait
nécessairement être d'accord avec ce que veut le Québec.
C'est arrivé chaque fois... c'est-à-dire que ce qui s'est
passé dans les années déjà écoulées,
c'est que, lorsqu'il y a eu des accords interprovinciaux des fronts communs,
ces fronts
ont deux caractéristiques, ils portent, d'une part, sur des
questions très précises qui ne mettent pas en cause de
façon sérieuse le cadre constitutionnel actuel.
Ce que je veux dire en français et clairement, c'est que chaque
fois que le Québec a pris une position même
fédéraliste, mais qui modifiait fondamentalement et
sérieusement le système tel qu'il existait, les autres provinces
n'ont pas suivi. Premier caractère, donc, cela ne porte que sur des
aspects que j'appellerais non dynamiques, même s'il s'agit de questions
parfois importantes, du fédéralisme.
La deuxième observation, c'est que ces fronts communs ont une
autre caractéristique, c'est d'être
éphémères. Ils ne durent jamais longtemps. Je pense que la
moyenne de vie d'un front commun interprovincial doit être quelque chose
quelque part entre deux semaines et deux mois. Il y en a quelques-uns qui ont
duré un an. C'est parce qu'il n'y pas eu de conférence
entre-temps, parce qu'ils auraient duré moins longtemps. Cela n'est
jamais arrivé. C'est toute mon expérience. Cela fait partie du
bilan personnel que j'ai fait, que j'ai décrit d'ailleurs sur le
fédéralisme canadien.
J'aborde maintenant la partie interprovinciale. Il y a une vieille
question que le chef de l'Union Nationale pose et partiellement avec raison, je
pense. Qu'est-ce que cela rapporte? Il y a là un principe fondamental.
On vit dans un monde interdépendant. Tous les gens, que ce soient des
gouvernements ou des entreprises privées, aujourd'hui, s'efforcent
d'intéresser les autres à soi. Je veux dire que, partout dans le
monde, il y a des représentants, dans chacune des capitales et des
grandes villes, soit de gouvernements étrangers, soit d'entreprises
privées étrangères. Il y a une chose qui est sûre.
Si, d'une part, il est difficile d'évaluer, dans certains cas, la
rentabilité que j'appellerais strictement économique d'un geste
extérieur, il est sûr, d'autre part et cela est absolu
que, si nous ne sommes pas là, nous n'en tirerons rien. Nous
manquerons des occasions.
Je prends un petit exemple dans notre relation avec le Japon. Je cite
ici un texte de M. Normand Bernier devant l'Institut canadien des affaires
internationales, le 12 mars. "Nos ventes de viande de porc au Japon
c'est très terre à terre à ce moment-ci, sont
nulles. Zéro. Savez-vous ce qu'elles sont devenues? En 1976: $22
millions; en 1977: $31 millions; en octobre 1978: $45 millions." Il parlait
d'une époque et il montrait une progression au cours des
dernières années: de $22 millions à $31 millions, à
$45 millions. C'est un énorme marché.
La Chine est aussi un énorme marché. L'Amérique du
Sud est aussi un énorme marché. Si on s'en tient seulement aux
aspects économiques, il faut quand même savoir, et cela de
façon absolue, que, si nous sommes absents, nous avons, en quelque
sorte, économiquement tort.
En plus de cela, sur le plan des actions économiques du
ministère, quant à ce qui concerne l'activité
internationale, nous avons participé aux négociations du GATT,
une participation active du Québec. Nous avions un représentant
permanent sur place. Nous participons à l'accord-cadre
Canada-Communauté économique européenne, il en a
été question aux crédits l'an dernier. Il y a un accord
qui existe maintenant entre l'Office de promotion industrielle de la Belgique
et la Société de développement indusriel du Québec,
que nous avons négocié. L'ouverture d'une
délégation économique à Caracas, qui est
récente. Il y a la création de l'Hydro-Québec
International, avec laquelle nous avons été directement
associés. Cela peut être capital pour l'avenir,
l'Hydro-Québec International, de même que Sidbec International,
mêmes commentaires. Nous avons des efforts de promotion au Japon, on en a
mentionné quelques-uns.
Nous avons, pour ce qui est de la coopération
franco-québécoise, par exemple, réorienté cette
coopération en vertu de quatre secteurs prioritaires: les mines, les
pêches, l'agroalimentaire et l'énergie.
Nous exerçons, si vous voulez, une action de promotion au
ministère, un rôle de planification aussi, un rôle,
indirectement parfois mais quand même réel, d'assistance aux
industries et surtout aux ministères qui sont intéressés
à agir vers l'étranger. On ne peut quand même pas assumer
toute l'économie du Québec nous-mêmes, parce qu'à ce
moment-là, on se ferait qualifier d'être un gouvernement
socialiste. Je sais qu'on ne penserait jamais à cela de l'autre
côté, mais...
M. Rivest: Un gouvernement bourgeois.
M. Morin (Louis-Hébert): Ensuite, nous assurons et
je pense que cela est important le suivi des opérations. Il y a
ce que j'appelle le syndrome de la patte en l'air, c'est-à-dire qu'on
peut penser à des choses intéressantes, se convaincre ensemble
que c'est bien de faire ceci ou cela, en concluant sans conclure,
c'est-à-dire en oubliant d'attribuer des responsabilités et
d'assurer le suivi. Cela, nous le faisons.
Et je conclus une chose, un peu de ce qui a été dit ce
matin, cela va être un peu paradoxal; compte tenu des critiques que font
souvent les partis d'opposition, peut-être que notre ministère ne
fait pas assez de publicité. J'espère que, si nous nous mettons
à en faire et c'est une des choses que nous avons l'intention de
faire l'année prochaine, vous me remercierez d'avoir axé
davantage notre action sur une meilleure connaissance de nos activités
économiques...
M. Rivest: Publicité, oui, conforme à votre mandat,
qui est de vous inscrire dans le régime fédéral canadien.
Je n'ai pas d'objection. C'est vrai que vous n'en faites pas assez de ce
côté-là.
M. Morin (Louis-Hébert): Je constate que le
député de Jean-Talon, non seulement agit à partir d'un
malentendu et de l'ignorance, mais qu'il renote ce qu'il a déjà
dit tout à l'heure et qui a été réglé, je
pense, à partir de l'intervention que j'ai
faite. Je ne pense pas que ce soit nécessaire d'y revenir. Notre
mandat, c'est de défendre les droits et les intérêts des
Québécois. Et la défense des droits et des
intérêts des Québécois, il n'y a rien qui indique
à partir de quoi que ce soit que c'est figé éternellement
à l'intérieur d'un cadre conçu en 1867 dans une situation
qui n'a strictement rien de commun avec celle que nous connaissons aujourd'hui.
C'est au moins une des choses élémentaires qu'il faut
reconnaître.
M. Rivest: Les Québécois sont également
Canadiens.
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Jean-Talon!
M. Morin (Louis-Hébert): M. le député de
Jean-Talon, vous aurez peut-être l'occasion d'intervenir tantôt,
mais pour le moment, je voudrais terminer. Vous avez posé plusieurs
questions, mais vous me semblez appartenir à cette catégorie de
personnes qui ont des questions pour toutes les réponses qu'on
apporte.
Pour ce qui concerne les actions économiques, on parlait
tantôt de l'automobile. Je pense qu'il en a beaucoup été
question en Chambre. Les subventions fédérales à Ford, en
Ontario, sont un élément justement de la politique
fédérale-provinciale sur lesquelles nous sommes intervenus et qui
démontrent que justement, à cet égard, nous avons eu une
attitude dynamique et que nous avons essayé de tirer de l'action
fédérale tous les avantages possibles avec le succès qu'on
connaît.
On m'a demandé tantôt s'il y avait des chevauchements entre
les actions internationales du Québec et les actions internationales du
Canada. Il y a parfois des chevauchements, c'est évident. D'ailleurs,
nous avons je ne sais pas si vous vous en souvenez publié
au mois de juin dernier une étude sur les chevauchements
fédéraux-provinciaux. On a été assez
estomaqué de voir jusqu'à quel point il y en a, mais il y a aussi
une complémentarité. Je dois dire qu'à cet égard,
nous essayons dans la mesure du possible d'utiliser, lorsque nous ne sommes pas
présents sur place, les services fédéraux qui existent sur
place. Je vais vous donner un exemple. Quand nous avons ouvert la
délégation du Québec à Caracas, nous avons
utilisé les services de l'ambassade du Canada sur place pour
procéder à cette inauguration. J'ai même demandé
ce sont des choses qui ne sont pas connues à l'ambassadeur
du Canada sur place, M. Rousseau, de me présenter à un groupe
d'hommes d'affaires et de représentants gouvernementaux qui se
trouvaient sur place lors d'une rencontre que nous avons eue avec lui, ce qui
veut dire que, quand il y a moyen de se compléter, nous le faisons.
À ce moment-là, nous utilisons tous les services possibles, mais
il reste un principe de base, savoir que si nous ne sommes pas présents
nous-mêmes, ce ne sont pas les autres qui vont s'occuper de nos
intérêts à notre place, parce qu'il y a une
caractéristique qui existe aussi, souvent et cela a
été dénoncé par bien d'autres que nous et bien
avant nous c'est que les institutions fédérales ont
tendance à diriger peut-être un peu plus et même beaucoup
plus les possibilités d'échanges vers l'Ontario que vers
peut-être d'autres provinces, en tout cas pas tellement vers le
Québec. C'est connu par passablement de gens.
D'ailleurs, il y a une chose frappante dans la politique canadienne:
l'Ontario est toujours gagnant. On s'occupe de l'Ontario tout le temps. Quand
il y a eu un gouvernement libéral à Ottawa, il avait élu
assez de députés pour être représenté sur
place et insister pour avoir un pouvoir de persuasion et un pouvoir
d'infléchir les politiques gouvernementales. Il a réussi. Cette
fois-ci, il a élu assez de conservateurs pour avoir le même
avantage. En d'autres termes, l'Ontario gagne toujours. Je pense que c'est
quasiment un symbole du système fédéral canadien qui a
été axé en fait en fonction des intérêts du
Canada central, plus particulièrement du Canada central
géographiquement, c'est-à-dire justement l'Ontario. L'Ontario ne
perd jamais. C'est une des caractéristiques fondamentales du
système dans lequel on se trouve maintenant. Il a
développé cette habileté historique à profiter de
toutes les circonstances.
Je termine maintenant mon intervention seulement par un mot sur ce qu'on
a appelé la réciprocité tantôt, c'est-à-dire
l'offre de réciprocité qui a été faite par le
Québec quant à l'enseignement en anglais au Québec et en
français dans les autres provinces. Cette offre est maintenue. Je l'ai
répétée verbalement il y a deux semaines au ministre des
Affaires intergouvernementales de l'Ontario. J'en ai parlé dans une
entrevue à la télévision diffusée dans les
provinces maritimes, j'ai renouvelé l'invitation. Le dossier est
toujours ouvert, nous sommes toujours disponibles. Il y a eu une réponse
un peu vite il aurait peut-être dû écouter davantage
ce que j'avais à dire à ce moment-là du premier
ministre du Nouveau-Brunswick qui a dit: Jamais ou enfin, je ne sais pas, il
n'était pas tellement d'accord. Il n'y a rien de moins permanent en
politique que les "jamais". On peut supposer qu'éventuellement la
lumière jaillira. De toute façon, le dossier que nous avons
ouvert demeure ouvert et nous sommes toujours disposés à mettre
en oeuvre ces accords de réciprocité. Nous sommes prêts
à en parler à n'importe quel moment.
J'espère que je n'ai rien oublié. Si j'ai oublié
quelque chose, je compte sur mes collaborateurs des deux partis de l'Opposition
pour me le rappeler. Je cède la parole à qui que ce soit qui
voudra la prendre maintenant.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Deux-Montagnes.
Discussion générale
M. de Bellefeuille: M. le Président, cela m'étonne
toujours quand j'entends un homme politique, en l'occurrence le
député de Jean-Talon employer le mot "politique" comme si
c'était un
bien vilain mot, comme s'il avait un sens péjoratif. (11 h
30)
La politique, c'est une bien grande chose, la gouverne de la chose
publique. On ne peut pas imaginer que le ministre ou le ministère
même des Affaires intergouvernementales fasse autre chose dans ce sens,
justement, que de la politique. Il n'y a rien de plus politique que de traiter
des relations entre le gouvernement du Québec et tous les autres
gouvernements. Il y a, bien sûr, des nuances à faire, des
distinctions à faire, que le ministre a faites, entre un rôle plus
proprement politique et un rôle plus proprement administratif, mais quoi
qu'il en soit, je pense que la tendance actuelle, selon laquelle le ministre a
une conception politique de son rôle, est infiniment
préférable à ce qui a paru dans le passé
être, de la part de prédécesseurs du ministre actuel, une
conception de leur rôle qui était peut-être plus mondaine
que politique. Il vaut beaucoup mieux que le ministre des Affaires
intergouvernementales ait une conception politique de son rôle
plutôt qu'une conception mondaine.
Je voudrais demander aussi ou je me le demande, M. le Président,
ce que le député de Jean-Talon a en tête quand il revient
constamment sur ce thème de la défense du
fédéralisme canadien. Comme le ministre l'a indiqué, vu la
nature même d'un régime fédéral, le rôle, dans
le cadre actuel, d'un gouvernement provincial, c'est de soutenir les
intérêts de la province dont il s'agit dans le cadre
fédéral. Notre façon, comme Québécois,
habitants d'une province canadienne, de soutenir le régime
fédéral canadien ne peut pas être de soutenir les
intérêts des gens de l'lle-du-Prince-Édouard. Ce doit
être de soutenir les intérêts des gens du Québec.
Pourtant, le député de Jean-Talon donnait à
entendre qu'en défendant les intérêts de la population
québécoise, nous ne soutenons pas le régime
fédéral canadien. Cela m'amène à me demander si le
député de Jean-Talon pense que la politique que le Québec
devrait pratiquer dans les affaires intergouvernementales dans le cadre
fédéral, c'est une politique de chien couchant. Est-ce qu'il faut
être chien couchant aux rencontres avec le gouvernement
fédéral ou aux rencontres fédérales-provinciales?
Est-ce que c'est d'être chien couchant qui va constituer pour vous la
défense du fédéralisme canadien? Si ce n'est pas
d'être chien couchant, il faut affirmer les besoins du Québec,
comme le député de Lotbinière et chef de l'Union Nationale
l'a indiqué, il faut le faire en collaboration avec les provinces qui
sont nos alliées naturelles.
C'est ce que nous faisons, c'est ce que nous n'avons pas cessé de
faire depuis deux ans et demi, c'est ce que nous avons l'intention de continuer
à faire tant que nous serons au pouvoir. Il n'y a pas d'autre moyen de
soutenir le régime fédéral canadien que de soutenir les
intérêts du Québec. C'est très clair, nous ne
considérons pas que les Québécois ont déjà
voté au référendum, nous ne considérons pas que le
Québec est déjà parvenu à la souveraineté.
Nous nous rendons parfaitement compte que le Québec, malheureusement,
n'est encore qu'une province canadienne et que la seule façon de
soutenir les intérêts du Québec dans le moment, c'est de
défendre ses intérêts dans le cadre fédéral
actuel. Le fédéralisme repose dans son essence sur des tensions
qu'on voudrait fécondes entre deux paliers de gouvernement. Nous y
apportons la dose nécessaire de tension justement, nous y apportons la
revendication des intérêts du Québec. Ce sera toujours
notre rôle de le faire et, des gouvernements précédents, la
plupart d'entre eux ont, eux aussi, compris leur rôle comme cela. Nous
sommes, par conséquent, dans la plus grande continuité à
cet égard.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, je voudrais...
Le Président (M. Laplante): Qui a demandé le
premier la parole? Oui.
M. Biron: Je voudrais simplement poser brièvement quelques
questions au ministre à partir d'exemples précis. Il a
cité le marché du porc au Japon. Le ministre a dit: II y a
possibilité d'avoir un autre marché immense en Chine. Or, on sait
qu'au Québec on a beaucoup de producteurs dans le domaine du porc. On en
a dans le domaine des produits laitiers, parce qu'on produit plus que notre
autosuffisance dans ces deux domaines. Je voudrais que le ministre nous dise
qui est responsable justement de faire la promotion des produits
québécois. Est-ce que c'est le ministère de l'Industrie et
du Commerce? Quelle sorte de responsabilité a-t-on ou quelle sorte de
chevauchement a-t-on entre le ministère de l'Industrie et du Commerce et
le ministère de l'Agriculture et les ministères
fédéraux de l'Agriculture ou des Affaires extérieures,
ainsi de suite, comme ça?
Il semble qu'on a un tas de chevauchements, un tas de ministères
à travers ça. Est-ce que c'est le ministère de l'Industrie
et du Commerce qui fait ça? L'Agriculture? Par quels canaux? Ou est-ce
le ministère des Affaires intergouvernementales? Qu'est-ce qui arrive
avec le gouvernement fédéral? Parce que, moi aussi, comme le
ministre, je pense qu'on peut développer des marchés pour
peut-être doubler notre production de porc au Québec si on peut
trouver ces marchés. Je sais que, l'an dernier, en particulier, on a
refusé une commande de $25 millions parce qu'on ne pouvait pas la
produire au Québec, une commande qui venait d'Afrique. Il y a
peut-être d'autre chose aussi, d'autres pays qu'on peut trouver dans ce
domaine, parce qu'on sait qu'on a de plus en plus de producteurs agricoles
québécois qui sont installés, qui ont investi $100 000,
$200 000, jusqu'à $500 000 dans le domaine du porc au Québec.
Dans le domaine de la production laitière, c'est la même chose,
les fromages et tout ça. Je veux savoir du ministre, moi... C'est un
exemple bien précis et on pourra prendre n'importe quel exem-
ple après ça, mais, une fois qu'on sait ce qu'on fait dans
un domaine, on peut savoir ce qu'on fait dans les autres domaines, l'industriel
et tout ça. Je veux savoir ce qu'on fait de particulier dans le domaine
de l'agriculture, la production porcine et les produits laitiers, pour ouvrir
de nouveaux marchés à l'extérieur, compte tenu qu'au
Québec on produit beaucoup plus que notre autosuffisance et surtout que
nous produisons une qualité extraordinaire dans ces deux domaines.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, merci, M. le
Président. C'est une question intéressante. C'est le
ministère de l'Industrie et du Commerce, pour répondre à
votre première question, qui s'occupe de ce que j'appellerais la
promotion commerciale à l'étranger par l'entremise de deux
choses: premièrement, une direction qui s'en occupe à
Québec et, deuxièmement, des représentants du
ministère de l'Industrie et du Commerce dans les diverses
délégations.
Les représentants du ministère de l'Industrie et du
Commerce dans les diverses délégations s'occupent aussi des
intérêts des autres ministères, c'est-à-dire, pour
prendre le cas de l'Agriculture, comme il n'y a pas de représentant du
ministère de l'Agriculture, c'est le représentant de l'Industrie
et du Commerce qui s'occupe de l'agriculture. Par conséquent, au moment
où viendront je pense que c'est une suggestion qui s'impose dans
les circonstances les crédits du ministère de l'Industrie
et du Commerce, il y a toute une section qui porte là-dessus et je vous
inviterais à reprendre en détail ces questions à ce
moment-là. Mais je peux quand même vous donner un exemple au
moins. J'ai parlé du Japon tantôt.
Prenez à New York. Pour l'année 1978/79, il y a plus de
100 firmes du Québec qui ont reçu l'assistance de notre
délégation. Le chiffre d'affaires dans ce cas est estimé
à $50 millions, dont $40 millions dans le secteur de la fourrure, pour
vous donner un exemple. Il y en a d'autres, mais je ne veux pas entrer
là-dedans trop en détail, parce que ça relève plus
directement du ministère de l'Industrie et du Commerce. Je vous
inviterais à faire une intervention plus détaillée
à ce moment-là.
M. Biron: Je vous ai demandé aussi... M. Morin
(Louis-Hébert): Bon!
M. Biron: ... les chevauchements qu'il y a entre le gouvernement
fédéral...
M. Morin (Louis-Hébert): Deuxièmement... Excusez,
j'ai oublié ça.
M. Biron: ... et provincial.
M. Morin (Louis-Hébert): Les chevauchements avec le
gouvernement fédéral?
M. Biron: Dans ce domaine particulier. Est-ce que le
fédéral s'en occupe en même temps ou si c'est tout
simplement le provincial?
M. Morin (Louis-Hébert): II s'en occupe en même
temps, mais il n'est pas sûr qu'il s'en occupe pour nous. C'est justement
le point. Il a plutôt une tendance un peu naturelle, une sorte d'aimant
politique qui fait que c'est peut-être l'Ontario qui a davantage de
chances d'en profiter que nous. C'est pour ça que nous devons être
sur place. Quand il y a moyen de le faire avec lui, d'agir avec lui, c'est
sûr que nous collaborons et qu'il n'y a pas de chicane à
l'extérieur systématiquement qui se déroule entre les
représentants commerciaux du Québec et ceux du gouvernement
fédéral.
Est-ce qu'il y a chevauchement entre notre ministère et le
ministère de l'Industrie et du Commerce? La réponse, c'est non.
Parce que nous avons j'ai toujours eu ça même à
l'époque où j'étais sous-ministre comme politique
de ne pas faire nous-mêmes ce que les autres ministères peuvent
faire dans leur domaine sectoriel. Autrement, ça devient un bordel
administratif et on ne sait plus qui a la responsabilité de quoi. Par
conséquent, ce n'est pas notre ministère qui a, fondamentalement,
comme responsabilité la représentation commerciale, industrielle
et économique du Québec, c'est le ministère de l'Industrie
et du Commerce; mais c'est coordonné par nous et c'est sous la direction
politique générale du ministère des Affaires
intergouvernementales; mais les actions sectorielles, ad hoc et ponctuelles
appartiennent aux ministères d'origine.
M. Biron: Mais ma question tout à l'heure... Je reviens
aux chevauchements avec le gouvernement fédéral. Vous m'avez
répondu: On ne peut pas "truster" le gouvernement fédéral.
C'est à peu près ça que vous avez dit. Cela va surtout en
Ontario ou ailleurs. Je reviens toujours avec mon même produit laitier ou
le porc.
On sait que la commission des grains, à l'Office canadien des
grains, semble vouloir donner moins de subsides aux producteurs
québécois. Cela va pénaliser les producteurs
québécois. Mais comment peut-on faire, nous autres, pour nous
protéger sur les marchés extérieurs? C'est ça que
je vous ai demandé. Est-ce que le ministère des Affaires
intergouvemementales intervient directement par des négociations au
niveau du gouvernement fédéral pour dire: Dans tel et tel pays,
ce sont des marchés qui sont à nous, ou on veut prospecter ces
marchés. Qu'est-ce que vous pouvez faire pour nous aider? Ou est-ce
qu'on n'en parle pas du tout au gouvernement fédéral?
M. Morin (Louis-Hébert): Non, on en parle. A priori et
systématiquement, on essaie de s'entendre pour les missions, les
exportations, les importations et tout ça, avec des représentants
fédéraux. C'est une politique que nous avons. Nous n'avons pas
toujours les mêmes vues. Cependant, nous essayons de nous entendre.
Deuxièmement, quand nous ne sommes pas sur place, nous demandons
à l'ambassade du Canada de s'en occuper. Exemple, quand on
n'était pas à Caracas et qu'on n'était pas sur place, on a
demandé à ces gens de travailler avec
nous pour l'implantation de notre délégation, ce qu'ils
ont fait.
Cependant, il y a une chose je répète toujours
ça, parce que ça me paraît fondamental c'est que, si
nous ne sommes pas sur place, c'est sûr qu'il y a moins de chances
d'avoir des avantages économiques que si nous y sommes. Il n'y a pas de
risques. La cible est aussi large qu'une grange à dix pieds, on ne peut
pas la manquer. Je ne vous dis pas qu'on vise toujours droit, mais au moins on
attrape l'objectif en gros. Par conséquent, c'est une politique de
présence qui s'impose.
Vous aviez posé une question tantôt j'ai
oublié d'y répondre, je m'en excuse et ça m'amène,
ce que vous venez de dire, à y répondre Est-ce qu'on songe
à de nouvelles délégations à l'étranger? Le
problème est que, chaque fois que nous voulons ouvrir une
délégation à l'étranger, sauf dans le cas de
certains pays très précis, en l'occurrence, je vous en mentionne
un, les États-Unis, il faut toujours avoir en quelque sorte "la
permission" du gouvernement fédéral. Nous ne sommes pas un
État souverain et nous sommes contrôlés, dans nos actions
à l'extérieur du Québec, même quand il s'agit de nos
intérêts immédiats, par la bienveillante surveillance
fédérale.
Par conséquent, je vous donne un cas qui est arrivé... Ce
n'était pas dans le domaine économique, mais ça nous
touche quand même de près; c'était dans le domaine
culturel, parce que le domaine culturel a des retombées
économiques. On oublie toujours ça et il ne faut surtout pas non
plus penser que, pour chaque dollar investi à l'étranger, il faut
nécessairement qu'il y ait un taux de rendement de 10% par année;
on ne peut pas calculer comme ça. On voulait ouvrir une
délégation à Dakar au Sénégal, parce qu'il y
a beaucoup de Québécois en Afrique francophone; il y a beaucoup
de Québécois dans le monde. On est un peuple qui a, en quelque
sorte, des ambassadeurs itinérants non formels un peu partout, et il
faut quand même prendre contact avec ces gens; de sorte que nous voulions
être à Dakar. Il y avait des possibilités d'échanger
avec ce pays. Il y a toutes sortes de marchés culturels et autres qui
peuvent s'ouvrir. On nous a refusé d'y être pour une raison que
j'expliquais à l'époque, mais sur laquelle je reviens
aujourd'hui. L'ambassade du Canada sur place donnait l'image que le Canada est
un vaste et grand pays francophone, ce qui va peut-être se
révéler un peu plus difficile dans les prochains mois, mais en
tout cas. Les fonctionnaires fédéraux sont payés assez
cher pour inventer des explications. Toujours est-il qu'on ne voulait pas une
délégation du Québec à Dakar, parce qu'à ce
moment, ça aurait en quelque sorte reflété davantage la
réalité canadienne telle qu'elle existe maintenant,
c'est-à-dire celle de deux sociétés, deux
communautés ou deux nations qui s'y trouvent. On nous a
empêchés de nous installer à Dakar, c'est clair.
Par conséquent, si, d'une part, nous avons comme politique, comme
les autres gouvernements l'avaient, mais nous avons vraiment comme politique
d'être présents à l'extérieur et davantage, d'autre
part, la plus grande erreur que je pourrais faire maintenant, ce serait de
dire: Oui, nous pensons nous établir dans tel ou tel pays. Nous essayons
vraiment d'étudier le plus possible les situations, voir quels sont les
intérêts du Québec, ce que le Québec peut en
retirer. Par exemple, si vous dites: Comment ça se fait qu'on n'est pas
établi en Indonésie? On n'a jamais pensé à la
réponse et on ne voit pas ce que ça donnerait. Seulement, il peut
y avoir un tas d'autres pays. Il y a des secteurs du monde où nous ne
sommes pas et on s'en va vers un univers je ne l'apprends à
personne où, de plus en plus, les choses vont se faire ensemble,
où, de plus en plus, il va y avoir je ne voudrais qu'on me
comprenne de travers une sorte de souveraineté-association
mondiale. Par conséquent, il faut y être, nous autres. Si on n'y
est pas, ce ne sont pas d'autres...
M. Rivest: Y être...
M. Morin (Louis-Hébert): Bien oui, c'est la formule de
l'avenir.
M. Rivest: Commencez donc par faire la locale avant.
M. Raynauld: Elle existe depuis dix siècles.
M. Morin (Louis-Hébert): II serait à peu
près temps qu'on l'ait nous aussi.
M. Raynauld: II y a toujours eu des ententes entre les
postes...
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Morin (Louis-Hébert): Je suis très heureux de
cette intervention historique du député. Si ça existe
depuis dix siècles, c'est à peu près le temps que
ça s'applique à nous aussi.
M. Raynauld: ... voyons donc!
M. Rivest: Essayez de faire la locale avant.
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Rivest: Venir nous dire des affaires pareilles!
M. Raynauld: C'est épouvantable.
M. Morin (Louis-Hébert): Alors, je m'aperçois que,
chaque fois qu'on ouvre des perspectives vers l'avenir, ça vous fait
sursauter, chers collègues de l'opposition libérale. Je
comprends, en ce qui concerne...
M. Rivest: De ce temps-ci, elles se ferment les unes
auprès les autres, vos perspectives.
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît! Vous avez demandé le droit de parole. Je vais vous
l'accorder tout à l'heure, messieurs. M. le ministre, continuez s'il
vous plaît. (11 h 45)
M. Morin (Louis-Hébert): Ce que je voulais dire, c'est
oui, nous avons l'intention comme politique, d'établir des relations
plus étendues avec toutes les communautés possibles au monde, en
tenant compte de nos intérêts et, pour le moment, en tenant compte
de la contrainte qui existe dans le système où on se trouve et il
faut, par moments, procéder avec beaucoup de prudence et même
d'astuce pour arriver à défendre activement les
intérêts du Québec.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Merci, M. le Président. J'ai deux questions.
La première est à propos des priorités que le ministre a
exprimées tout à l'heure, priorités que j'ai
trouvées, pas suffisamment concrètes. Il a dit que son
ministère avait quatre priorités: la diffusion, la
coopération, la participation et l'exploration. Je trouve que c'est de
la littérature dans les circonstances. Je voudrais qu'il nous dise de
façon un peu plus concrète, ce que cachent ces expressions
très générales. D'abord, en ce qui concerne la diffusion.
Quelle est l'image que le ministère donne à l'étranger
à l'heure actuelle? Est-ce que le ministre pourrait nous donner des
textes là-dessus? Est-ce qu'il pourrait nous indiquer ce qu'est cette
image? Qu'il nous parle un peu de contenu et pas simplement dire j'explore, je
participe, je coopère et je diffuse. Ce ne sont pas des choses
opérationnelles, ce ne sont pas des concepts opérationnels. Quand
il s'agit de diffusion à l'extérieur, d'information et de
publicité, je vois que dans le budget il y a une augmentation de 39%
cette année. Une augmentation de 39% quand on est censé
être très serré...
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, mais 39% par rapport
à quoi, il faudrait quand même...
M. Raynauld: Par rapport au budget de l'année
passée.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, par rapport à des
chiffres qui sont...
M. Raynauld: C'est ainsi que ça s'exprime. C'est 1979/80
$290 000...
M. Morin (Louis-Hébert): Ah, oui!
M. Raynauld:... par rapport à $214 000, ce qui fait une
augmentation de 35%. C'est dans le livre qui nous est donné.
M. Morin (Louis-Hébert): Une pinotte dans l'ensemble du
budget.
M. Raynauld: Donc, une augmentation de 35% sur la diffusion. Je
voudrais savoir quel est le contenu de cette diffusion. Qu'elle est l'image que
l'on donne à l'extérieur? Vous vous rappellerez que l'on a
soulevé quelques questions en Chambre à un moment donné
au printemps dernier, M. le Président sur une publication
qui paraissait à New York et qui provenait, je crois, de la
délégation de New York ou peut-être du ministère
ici, je n'en sais rien. Cette publication avait quand même soulevé
sinon des interprétations abusives de la situation
québécoise, au moins un peu de confusion dans l'esprit d'un
certain nombre de personnes.
Ma deuxième question se rapporte...
M. Morin (Louis-Hébert): Est-ce que je peux
répondre à la première?
M. Raynauld: Si vous voulez.
M. Morin (Louis-Hébert): Parce que vous avez posé
exactement la question à laquelle je m'attendais et, comme je m'y
attendais, j'avais préparé quelque chose pour vous
répondre. Alors, ça arrive bien, pour une fois que les papiers
qu'on a préparés vont servir.
J'ai l'honneur et le plaisir de vous distribuer une copie à
chaque parti de l'Opposition parce que c'est quand même assez
volumineux d'un exemplaire de chacune des 18 éditions du bulletin
d'information hebdomadaire il est mensuel au Japon qui est
publié par la direction des communications du ministère des
Affaires intergouvernementales. La liste comprend un exemplaire de chacun des
bulletins suivants: Quebec Hebdo, qui est fait ici; Quebec Up Date;
Québec... je ne commencerai pas à les
énumérer dans toutes les langues, il y en a en japonais,
ça va vous intéresser, il y en a en allemand aussi, vous qui avez
une vaste culture, je suis sûr que vous allez sauter là-dessus, il
y en a en hollandais, ce qui est évidemment, plus que vous en
demandiez.
M. Rivest: II y en a en anglais.
M. Morin (Louis-Hébert): II y en a en anglais, c'est
même la deuxième qui est là, et il y en a...
M. Rivest: Merci.
M. Morin (Louis-Hébert): ... sept; un, deux, trois,
quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix. Il y en a dix en anglais sur 18. Je
m'aperçois que vous vous préoccupez beaucoup de l'anglais et, de
ce fait, vous allez être heureux de voir qu'on a dix publications sur 18
qui sont en anglais.
M. Rivest: II y a un million de Québécois qui sont
des anglais.
M. Morin (Louis-Hébert): Ce n'est pas pour le
Québec, ici, c'est pour l'étranger. Vous allez voir par
là, et je vous invite à vous en rendre compte, que nous essayons
de refléter je réponds à votre question la
réalité québécoise telle qu'elle est. Voilà.
C'est la réalité telle qu'elle est.
M. Raynauld: C'est quoi, ça?
M. Morin (Louis-Hébert): Vous allez voir par la
réponse, par le document.
M. Raynauld: J'aurais aimé que le ministre nous dise un
peu ce qu'est la réalité québécoise, comment il la
définit cette réalité québécoise...
M. Morin (Louis-Hébert): Je suis très content de
cette question...
M. Raynauld: ... quand il doit donner des directives aux
fonctionnaires. Il doit dire aux gens quelle est cette réalité
québécoise?
M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, j'ai eu
l'occasion de me rendre compte par moi-même que le gouvernement
précédent avait totalement négligé de renseigner
par exemple je vais utiliser ce cas-là nos voisins
Américains sur la réalité canadienne et
québécoise. J'ai eu l'occasion de m'en rendre compte par
moi-même lors de conférences que j'ai faites là-bas.
Donc, il a fallu faire l'ABC de la situation constitutionnelle
canadienne pour expliquer aux Américains qu'une province du Canada, ce
n'est pas comme un État américain, pour expliquer aux
Américains que la minorité francophone du Canada, ce n'est pas
l'équivalent de la minorité des Cajuns en Louisiane. Il a fallu
expliquer aux Américains qu'il n'y avait pas ici le mécanisme ou
la philosophie du "melting pot" qui existait chez eux. En d'autres termes, il a
fallu expliquer que si on transposait en termes américains la situation
canadienne, ça voudrait dire que tous les États de la
Nouvelle-Angleterre, celui de New York, celui de la Pennsylvanie et celui du
New Jersey peut-être, pourraient parler une langue comme l'espagnol,
l'allemand ou le français, le reste étant anglophone.
Quand on leur donnait des exemples aussi simples que ça, ils se
sont rendu compte d'une chose, c'est que l'évolution
québécoise des dernières années, et celle qui s'en
vient, n'est pas une sorte de mouvement qui vise à rétablir une
langue morte, ce qui est un peu le cas du gaélique dans d'autres pays,
mais, au contraire, un mouvement fondamental qui est très sain et qui
s'inscrit parmi les plus grands courants mondiaux à l'heure
actuelle.
Il a fallu remettre les choses en perspective et je l'ai fait
moi-même; j'ai expliqué le projet politique du gouvernement du
Québec dans ses grandes lignes et j'ai aussi d'autres l'ont fait
présenté le Québec d'une façon positive, de
sorte que certaines des préventions qu'on pouvait avoir contre nous sont
en train de disparaître. Je pense qu'on peut, par la lecture de la presse
américaine, se rendre compte que certaines idées qui circulaient
sur le caractère un peu folklorique du Québec ou hautement
subversif de quoi que ce soit qu'on fasse ici, tout ça s'est fortement
atténué.
C'est une des conséquences de notre action, ne serait-ce que pour
les États-Unis. Dans le monde entier aussi, l'arrivée de notre
gouvernement a attiré plus d'attention qu'à peu près tout
ce qui s'était passé ici avant et, par conséquent, nous
répondons aussi honnêtement que possible à ceux qui nous
posent des questions. Nos délégations à l'étranger
le font aussi. Non seulement elles le font dans leurs fonctions courantes, mais
elles doivent le faire, car c'est leur devoir de le faire. Ces gens doivent
expliquer le Québec tel qu'il se présente et telles que sont ses
aspirations.
Les ambassades du Canada ne se gênent pas et les ambassadeurs ne
se gênent pas non plus pour faire des discours politiques à
l'étranger. Nous n'en faisons jamais, nous. Je voudrais bien qu'à
cet égard, on n'ait pas deux poids, deux mesures et que chaque fois que
le Québec explique un peu ce qu'il a cornme perspective par rapport
à l'avenir en tenant compte du fait que tout le monde n'est pas unanime
là-dessus, je ne voudrais pas qu'on oublie qu'au même moment, vous
avez le gouvernement fédéral qui, par l'entremise de ses
ambassades, distribue et diffuse à l'étranger une image de la
réalité canadienne qui n'est pas conforme aux faits.
Cela, nous le corrigeons et je pourrais vous apporter bien des exemples.
Il y a même le discours d'un ambassadeur en Grèce à un
moment donné qui était quasiment une distorsion totale de la
réalité.
M. Raynauld: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): Une autre question, M. le
député?
M. Raynauld: Oui, M. le Président, sur cette
dernière affirmation. Je pense que le ministre ne devrait pas accuser,
de façon générale, les ambassadeurs canadiens à
l'étranger de faire de la propagande qui est fautive...
M. Morin (Louis-Hébert): Je n'accuse pas, je constate.
M. Raynauld: Alors, je demanderais que le ministre apporte des
preuves de ce qu'il avance. Je pense que ce sont des accusations qui, aussi
longtemps qu'elles ne sont pas appuyées par des faits, sont gratuites et
qui n'ont pas leur place en commission parlementaire et de la part d'un
ministre qui prétend, de son côté, ne faire que des choses
vertueuses et ne faire que des choses des plus factuelles lorsque nous
savons... Je m'excuse, M. le ministre, je n'ai pas terminé.... les
choses les plus factuelles lorsque nous avons relevé de notre
côté des affirmations faites à New York qui étaient
assez loin de la réalité.
Je pense qu'il ne faudrait pas négliger le fait que les ministres
et le premier ministre de la province de Québec ne se gênent pas
pour aller à l'extérieur du Québec et faire des discours
politiques. Je ne sache pas que ce soit interdit, mais je ne sache pas non plus
que les ministres se gêneraient de quelque manière que ce soit
pour
déclarer, comme c'est déjà arrivé, que la
séparation du Québec était déjà faite, que
c'est un mouvement inéluctable de l'histoire.
À ce moment-là, aller accuser le gouvernement
fédéral de faire de la propagande qui serait contraire aux faits,
je pense que ce sont des accusations qu'on ne peut pas accepter ici, à
moins qu'on nous apporte des preuves à cet effet.
C'était ma première question, M. le Président. J'en
aurais une seconde.
M. Morin (Louis-Hébert): Voulez-vous que j'y
réponde?
M. Raynauld: Je veux bien.
M. Morin (Louis-Hébert): Qu'est-ce que vous diriez si on
vous en apportait?
M. Raynauld: J'en serais très heureux. Apportez-en. On
aura l'occasion de les examiner et on verra...
M. Morin (Louis-Hébert): Vous seriez heureux. Vous prenez
allègrement la défense des déclarations qui ont pu
être faites à l'étranger par des représentants
officiels du gouvernement fédéral, dans lesquelles on qualifiait,
en quelque sorte, l'évolution politique du Québec d'un
façon qui ne nous paraît pas conforme aux faits. Il ne s'agit pas
de ministres, il s'agit de fonctionnaires, des ambassadeurs.
M. Raynauld: M. le Président, je ne prends pas la
défense de quiconque, je ne connais pas ces déclarations.
M. Morin (Louis-Hébert): Quand on ne les connaît
pas, on ne parle pas.
M. Raynauld: Je demande au ministre ou de déposer les
documents nécessaires, on bien de cesser de faire des accusations,
à tort et à travers, comme s'il s'agissait de choses que tout le
monde devrait connaître. Je ne les connais pas, ces choses-là, je
ne prends donc pas la défense de quiconque, en disant cela.
M. Morin (Louis-Hébert): J'ai été
amené à en parler à cause de vous.
M. Raynauld: Je m'oppose à ce que le ministre fasse des
accusations comme celle-là, des accusations générales, qui
laissent entendre que les autres font de la publicité et de la
propagande et que lui, de son côté, il n'en fait pas, et je pense
que c'est absolument faux.
M. Morin (Louis-Hébert): Je n'ai pas dit que, comme
ministère, nous n'allions pas expliquer notre politique. J'ai même
dit que nous le ferions. Je vous dit qu'il ne faut pas confondre les
ambassadeurs et les représentants officiels du gouvernement
fédéral, qui ont instruction de diffuser une image qui ne nous
paraît pas conforme à la réalité et je peux vous
envoyer des preuves. Je n'ai pas apporté cela ce matin, je ne pensais
pas que vous alliez aborder ce sujet.
M. Raynauld: C'est vous qui l'avez soulevé, ce n'est pas
moi.
M. Morin (Louis-Hébert): Je m'excuse, vous avez
posé des questions sur notre diffusion à l'étranger. Je
l'ai...
M. Raynauld: J'ai posé des questions sur votre
activité. Je n'ai pas posé des questions sur les activités
du gouvernement fédéral.
M. Morin (Louis-Hébert): Mais c'est utile, quelquefois, de
savoir ce que les autres font.
M. Raynauld: C'est vous, M. le ministre, qui, maintenant, accusez
les fonctionnaires fédéraux de manquer à leur mandat.
M. Morin (Louis-Hébert): Ils ne manquent pas à leur
mandat, c'est justement le mandat qu'ils ont du gouvernement
fédéral.
M. Raynauld: J'ai hâte de voir.
M. Morin (Louis-Hébert): C'est comme tout le Comité
sur l'unité canadienne qui existe, financé par le
Secrétariat d'État. On en viendra peut-être à cela
tantôt.
M. Raynauld: Vous en avez un, vous aussi, un comité.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, vous verrez
tantôt.
M. Raynauld: Et vous, vous n'avez pas de mandat. Eux autres, ils
en ont un.
M. Morin (Louis-Hébert): N'oublions pas cela.
Tantôt, cela peut être intéressant. Il faudra revenir
à cela. J'aimerais cela. Il n'y a pas de propagande dans les bureaux de
poste, c'est vrai.
M. Raynauld: Mon problème n'était pas
celui-là non plus, je voulais passer à un second
problème.
M. Morin (Louis-Hébert): II y en a plusieurs
problèmes.
M. Raynauld: En ce qui concerne les relations entre le
Québec et la France, j'ai vu dans les documents qui nous ont
été distribués le ministre y a fait allusion tout
à l'heure que le gouvernement avait adopté un certain
nombre de priorités dans quatre domaines particuliers
l'agro-alimentaire, les pêcheries, l'équipement minier et les
énergies nouvelles.
Je voudrais savoir si ces priorités nouvelles sont des
priorités qui ont donné lieu déjà à des
actions quelconques, et que le Québec retire de ce nouveau pro-
gramme d'activités, en ce qui concerne les relations entre la
France et le Québec. Est-ce que le ministre pourrait nous donner des
exemples, citer des cas particuliers où ces domaines auraient
donné lieu déjà soit à des investissements, soit
à des activités qui pourraient nous éclairer sur ces
intérêts que nous avons dans ces relations?
M. Morin (Louis-Hébert): C'est une question que
j'attendais. J'avais aussi la réponse. Ce sont des orientations qui ont
été déterminées par les deux premiers ministres,
celui de France et celui du Québec, au mois de février dernier.
Une des raisons pour lesquelles on a l'étude des crédits ce
matin, et vous vous en souviendrez, cher collègue de Jean-Talon, c'est
que, la semaine prochaine, le sous-ministre et le sous-ministre adjoint vont
participer à une réunion avec les Français, justement pour
la suite de cette décision politique et pour la mise en oeuvre de ces
priorités dont j'ai parlé.
Cependant, je veux signaler ceci, en ce qui concerne les petites et
moyennes entreprises et en ce qui concerne les fabrications sous licence et
autres activités du genre: il y a énormément, entre la
France et le Québec, beaucoup plus qu'on ne le croit. Cela a
déjà été décrit dans des publications qui
existent déjà, que je n'ai pas apportées ce matin, mais
qu'il me fera plaisir de vous faire parvenir. Pour ce qui est des
priorités nouvelles, elles seront justement abordées la semaine
prochaine, dans une réunion qui aura lieu entre la France et le
Québec.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mercier. (12 heures)
M. Raynauld: M. le Président, je n'avais pas
terminé sur ce point, si vous le permettez. Lorsque les premiers
ministres se rencontrent et qu'ils adoptent un document en disant qu'ils vont
dorénavant axer leurs efforts sur un certain nombre de secteurs.
D'habitude, il y a quand même des indications dans le sens que ces
secteurs-là pourraient donner lieu justement à des
activités additionnelles qui devraient susciter un peu plus
d'intérêt. Je voudrais demander de nouveau au ministre s'il
pourrait nous dire, ici à la commission parlementaire, ce qu'il y a en
arrière de ces quatre secteurs-là, ce qu'on envisage de faire
avec le gouvernement français, quelles sont les activités
précises qui pourraient être entreprises au Québec en
relation avec ces secteurs-là.
M. Morin (Louis-Hébert): II y a un problème que
vous allez reconnaître tout de suite à cet égard. On
pourrait donner des réponses très précises. La
difficulté est la suivante: c'est que cela implique des entreprises
particulières. C'est en voie de négociation. Je ne crois pas
qu'elles seraient enthousiastes d'apprendre que nous avons discuté de
leur cas précis ici. J'aime mieux attendre que ce soit
concrétisé pour en parler. Je pense que, comme brillant
économiste, vous allez comprendre ce que je veux dire.
M. Raynauld: Est-ce que, de façon plus
générale, vous pouvez nous donner des indications quant à
l'intérêt que cela peut représenter, dans quel secteur cela
se trouve exactement? Est-ce qu'il y a des projets?
M. Morin (Louis-Hébert): On a donné les
secteurs.
M. Raynauld: Non, je veux dire dans l'agro-alimentaire.
L'agro-alimentaire, est-ce que c'est pour vendre du lait en France? Est-ce
qu'il a beaucoup d'argent d'impliqué là-dedans?
M. Morin (Louis-Hébert): Justement...
M. Raynauld: Est-ce que c'est pour des exportations? Est-ce que
c'est pour des investissements français au Québec? Il me semble
qu'il y a des...
M. Morin (Louis-Hébert): Si vous vouliez être un peu
plus patient, il y a deux considérations. La première, ce sont
les entreprises particulières que cela touche, la deuxième, dans
certains cas, c'est que nous avons des propositions précises à
faire aux Français et ils ne sont pas encore au courant. Cela implique
des tierces parties et j'aimerais mieux ne pas en parler davantage.
M. Raynauld: Si c'est comme cela, M. le Président, est-ce
qu'on pourrait connaître quels ont été les résultats
des relations entre le Québec et la France sur le plan
économique, depuis deux ans par exemple, depuis les deux
dernières années, à part les accords avec la SGF qui ont
été faits depuis un certain temps? En dehors de cela, y a-t-il
d'autres choses qu'on peut évoquer pour indiquer un peu
l'intérêt économique de ces relations avec la France, pour
justifier aussi les 76 personnes qu'on a à Paris? Si nous ne parlons pas
des projets, parlons donc des réalisations passées. Vous pourriez
probablement parler de cela.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, on pourrait en parler et on
peut même vous envoyer une documentation abondante là-dessus. Il
existe l'association de coopération technique et industrielle qu'on
appelle ACTIM, à laquelle nous participons et qui intéresse un
grand nombre de petites et de moyennes entreprises. On pourrait peut-être
donner des exemples du passé. Évidemment, on va
répéter ce qu'on a déjà dans nos rapports annuels
du ministère, même pour l'année 1977/78. Si vous voulez
qu'on en parle davantage, on peut vous faire des listes.
M. Raynauld: Dans le document qui, on fait allusion simplement
à une entente entre la SGF et la Compagnie générale
d'électricité, un programme d'exploration minière.
M. Morin (Louis-Hébert): Voici ce qu'on va faire, si vous
êtes d'accord; on va vous apporter des exemples. On ne les a pas tous
ici. Comme on
reprend demain, de toute façon, et qu'on va avoir un poste au
budget là-dessus, à ce moment-là, on pourra vous donner
une liste très détaillée de choses qui se font, parce
qu'on n'a pas tout apporté ce matin, sachant que cela
s'échelonnait sur deux jours. D'accord? Je croyais que la question
viendrait à l'intérieur d'un des postes.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Mercier.
M. Morin (Louis-Hébert): Un instant! Est-ce qu'on peut
parler, monsieur?
On a justement un résumé ici. Je m'excuse, mais on n a pas
le document complet. Je vais demander à M. Pouliot, qui est
sous-ministre adjoint aux relations internationales, de vous en faire
état. On a plusieurs exemples là-dedans. Je pense que cela va
répondre à votre question. Si vous voulez d'autres choses, on
apportera des documents plus complets.
Il est évident, M. le Président, qu'il serait
extrêmement long de faire la liste, l'énumération de tout
ce qui s'est fait dans le domaine de la coopération industrielle et
technique avec la France. Cela fait quand même déjà un
certain temps que l'accord existe. Il date de 1964. C'était l'ASTEF
à l'époque, mais, de façon plus récente, je
pourrais quand même signaler une chose: Nous avons organisé avec
l'ACTIM, à la fin de 1977 un séminaire de petites et moyennes
entreprises, qui a eu lieu à Montréal et qui a donné lieu,
en fait, à toute une série d'accords industriels entre la France
et le Québec. C'est d'ailleurs la façon dont nous
procédons avec la France jusqu'ici, ce qui permet à la fois aux
entreprises québécoises d'avoir accès à une
technologie nouvelle et de développer également des
marchés nouveaux pour des produits québécois. L'exemple le
plus illustre ou le plus intéressant, c'est tout ce qui s'est produit
dans le domaine d'un marché comme celui du yogourt au Québec. Il
y a dix ou douze ans, il n'y avait pas de marché au Québec. C'est
grâce, en grande partie, à la coopération entre la France
et le Québec que ce marché a été
développé.
Je pourrais donner toute une série d'exemples qui ont
été publiés récemment quant au travail sur le plan
des implantations d'entreprises, par exemple, PromeCam, Leroy Somer, Gauthier
Meubles, Compagnie générale de radiologie, la
télé-mécanique, etc. On pourrait citer toute une
série d'entreprises qui ont été amenées à
investir au Québec, à la suite d'actions non exclusives, mais
efficaces dans le cadre de la coopération
franco-québécoise. Je pourrais également donner, mais
c'est une liste confidentielle jusqu'ici, le nom des entreprises qui ont
signé des accords techniques avec des entreprises
québécoises. Je pourrais vous dire qu'au cours des
dernières années et depuis trois ou quatre ans, la tendance des
accords de caractère technique avec la France s'accroît
considérablement, et au cours de la dernière année, il y
en a à peu près 25 qui ont été signés entre
entreprises françaises et québécoises. Il s'agit, en fait,
des ac- cords qui touchent principalement l'échange en matière de
technologie ou autre, mais la liste quand même commence à
être assez impressionnante sur ce plan. Je ne sais pas s'il y a lieu de
citer des entreprises. Évidemment, c'est peut-être un peu
délicat, compte tenu qu'il s'agit de sociétés.
J'ai un détail intéressant à ajouter ici dans un
document qu'on me remet, et cela ne touche pas seulement la France, cela va
vous intéresser: En trois ans, 180 ententes de fabrication sous licence
ont été conclues par des sociétés
québécoises. De ce nombre, il y en a 68 avec des
sociétés françaises, 29 avec des sociétés
italiennes, 21 allemandes, 18 américaines, 10 belges, 8 japonaises, 5
britanniques, 5 finlandaises, 3 suisses, 3 suédoises, 2 danoises, 2
norvégiennes, 1 hollandaise, 1 roumaine, 1 hongroise, 1 autrichienne, 1
chinoise à Hong-Kong et 1 de Trinidad et Tobago.
Cela répond à une question qui a été
posée tantôt. La très grande majorité de ces
ententes de fabrication sous licence interviennent de pays où on est
directement représenté: France, Italie, Allemagne,
États-Unis, Belgique, Japon, Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne couvre
le territoire de la Finlande, ce qui explique peut-être aussi...
M. Rivest: Combien pour les États-Unis? M. Morin
(Louis-Hébert): Les États-Unis, 18. M. Rivest: C'est
considérable.
M. Morin (Louis-Hébert): Je pense que c'est
intéressant, mais on aborde un peu le budget à l'envers. Je
voulais qu'on parle de cela à un autre moment quand on arriverait au
budget précisément, mais puisqu'on en parle tout de suite,
faisons-le. C'est une illustration très concrète de ce que
donnent nos relations avec divers pays. On ouvre des marchés. On s'en
ouvre ici. On en découvre, les autres en découvrent. Ces
fabrications sous licence sont avantageuses pour des fabricants
québécois.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mercier.
M. Godin: C'est sur la motion de mandat. On a entendu le
député de Jean-Talon, et ensuite celui d'Outremont, reprocher
à ce ministère de n'avoir pas le mandat de faire ceci ou de faire
cela. Je pense que le mandat général, c'est quand même de
se poser des questions sur les ententes qui existent, sur le régime qui
est le nôtre. Si on retourne un peu dans le passé, en 1792, les
Québécois n'avaient pas le mandat de se donner un Parlement au
Québec, et pourtant, ils l'ont fait. En 1867, ils n'avaient pas non plus
le mandat de se redonner une province, mais pourtant, ils l'ont fait. La
tâche de n'importe quel gouvernement du Québec, c'est de poser des
questions sur ce qui se passe ici et sur la façon dont c'est
réparti.
L'attitude des libéraux, ce matin, que je trouve un peu grincheux
pour avoir soi-disant obtenu une
confirmation éclatante mardi de leur option... La tâche est
dans la ligne historique de 1954 quand le premier ministre de l'époque,
M. Duplessis, avait voulu rapatrier à Québec, 15% des
impôts. Le Parti libéral s'est totalement opposé à
cela. M. Georges-Émile Lapalme a fait des discours menaçant le
Québec de perte d'entreprises et de capitaux si jamais le Québec
faisait ça, un peu comme le député de NDG aujourd'hui.
C'est une cassette qui revient presque cycliquement à tous les dix
ans.
M. Scowen: Excusez, M. le Président...
M. Godin: Quand ils sont dans l'Opposition...
M. Scowen: ... jusqu'ici, je suis muet. Je ne sais pas ce qu'il
dit...
M. Godin: Restez muet.
M. Scowen: Ecoute, je n'ai rien dit, jusqu'à ce que... De
quoi parles-tu?
M. Godin: Restez muet! Restez muet! Restez muet!
M. Scowen: Le député de Notre-Dame-de-Grâce
écoute attentivement. Je ne suis pas là-dedans.
M. Godin: Oui, mais continuez, ça va bien.
Le Président (M. Laplante): Je vous conseille de rester
muet, parce que votre droit de parole s'en vient après.
M. Scowen: II m'accuse de quelque chose et je n'ai rien dit.
M. Godin: Je ne vous accuse pas, je constate. M. Scowen:
Autrefois... M. Godin: Je cite...
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mercier, continuez!
M. Godin: Merci.
M. Ri vest: C'est intéressant!
M. Scowen: ... sensible, ce bonhomme.
M. Godin: Le régime de Duplessis n'avait pas de mandat
probablement de faire ça. Il l'a fait. Il a voté une loi et les
libéraux se sont opposés à cette mesure en 1954, en
disant: 15% de rapatriement d'impôt, c'est trop. Limitons ça
à 5%.
Une voix: C'est toujours trop.
M. Godin: L'éditorialiste du Devoir dans le temps,
Gérard Filion, avait dit: Donc, ils sont pour le Québec à
5% seulement. M. Marier et M.
Lapalme sont pour le Québec à 5% seulement. Ils
défendent, par conséquent... À chaque fois que ces gens se
retrouvent dans l'Opposition, ils sont une extension du régime
fédéral au Québec, pas plus que ça. Ils veulent
choisir le Canada d'abord, ça saute aux yeux. Mais je pense qu'il
appartient au gouvernement du Québec de se poser des questions sur la
nature du régime qui est le nôtre, sur tous les sujets, et nous le
devons au peuple du Québec de se poser des questions, de faire le bilan,
au nom, tout simplement peut-être, de la protection des consommateurs,
qui est un principe maintenant reconnu.
Nous voulons savoir, nous, où on s'en va. Nous voulons savoir
comment le fédéral dépense nos taxes et ce n'est pas le
fédéral qui va nous le dire, ça. C'est nous qui devons
faire cette analyse. Je m'étonne de voir le député de
Jean-Talon...
M. Rivest: Non, je trouve vos remarques intéressantes.
M. Godin: ... ne pas sembler d'accord et reprocher au
gouvernement de laisser tomber, dit-il, des dossiers noirs sur le
fédéralisme. Mais si ce n'est pas nous qui faisons ces analyses
du fédéralisme dans une perspective québécoise,
c'est qui? La famille Rockefeller? M. Clark? M. Trudeau? Qui va la faire? Il
n'y a que nous qui nous donnions cette fonction critique à
l'égard des institutions qui sont les nôtres.
Les Québécois ont vécu sous quatre constitutions.
Le BNA Act, ce ne sont pas les tables de la loi que Moïse est allé
chercher sur la montagne fédérale. C'est un essai de constitution
qui a été fait par les Canadiens il y a 110 ans, mais
c'était la quatrième forme de constitution que les
Québécois avaient. Il y a eu 1840, cité hier par la
sibylle de Cumes du comté d'Argenteuil qui a laissé tomber aussi
un exemple, disant qu'à l'époque de l'Acte d'Union,
c'était merveilleux, puisque les Anglais se présentaient à
Rivière-du-Loup et ils étaient élus, les Français
à Kingston et ils étaient élus. Or, ce qu'il n'a pas dit,
comme s'il n'avait pas lu l'histoire au complet, comme s'il était myope
en partie c'est possible aussi c'est que l'Acte d'Union de
1840... Cela m'étonne, d'ailleurs, qu'il cite cette époque, qui
est l'époque la plus noire pour les Québécois, parce que
nous avons vécu sous un régime où, malgré que les
Québécois formaient les deux tiers de la population, ils
n'avaient qu'un tiers des députés en Chambre. La loi qui a
créé cet Acte d'Union a été dénoncée
à Londres, pas par les maudits séparatistes, par les Lords et les
députés de Londres, comme étant une loi tyrannique,
injuste et qui violait les droits de la majorité française du
Canada uni, mais ça, la sibylle de Cumes d'Argenteuil n'a pas
évoqué ça. Elle a sélectionné, la sibylle,
la tête d'épingle qui justifiait qu'il y a eu un temps où
il y avait une entente parfaite entre les Anglais et les Français, mais
uniquement à l'époque où les Anglais avaient une
majorité de députés confisquée à la
majorité de population des Français. Alors, si c'est cela
l'idéal de la sibylle de Cumes comme régime,
qu'elle le dise tout de suite, on n'attend que cela. Maintenant, je
termine sur la question du mandat, encore une fois, M. le
Président...
Le Président (M. Laplante): Si vous voulez faire
rapidement, à cause...
M. Godin: Je termine, oui très rapidement.
Le Président (M. Laplante): ... d'une entente intervenue
tout à l'heure pour aborder le programme 3.
M. Godin: Très rapidement.
M. Morin (Louis-Hébert): M. le Président, j'aurais
un petit renseignement à fournir qui va me prendre onze secondes
tantôt.
Le Président (M. Laplante): Oui, pour finir avec le
député de Mercier.
M. Rivest: ... très intéressante.
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je veux qu'on finisse, mais
à la condition...
M. Godin: Oui, M. le ministre, sur la question du mandat, je dis
que le Québec n'a jamais réussi à marquer des points
à ce système en demandant des mandats à d'autres
qu'à lui-même de le faire. Si on attendait que les provinces
anglaises nous donnent des mandats pour modifier quoi que ce soit ici, comme
disait le poète André Frénaud: L'éternité
c'est long, surtout vers la fin. (12 h 15)
M. Rivest: Si vous attendiez que ce soient les
Québécois qui vous le donnent, ce mandat?
Le Président (M. Laplante): Si vous voulez, M. le
député de Jean-Talon, un moment, s'il vous plaît. Nous
allons suspendre la période d'exploration des crédits...
M. Rivest: Le ministre a une annonce importante en onze secondes.
Pour une fois qu'il va la faire en onze secondes.
Le Président (M. Laplante): On le lui donnera
après. Pour aborder le programme 3 oui, vous allez le dire quand
même, monsieur, de l'Office franco-québécois pour la
jeunesse, vous aviez quelque chose, M. le ministre?
M. Morin (Louis-Hébert): Oui, je ne veux pas l'oublier,
parce que ça va tout briser mon programme-Le Président (M.
Laplante): Une annonce!
M. Morin (Louis-Hébert): Je viens d'apprendre que je n'ai
pas le droit de déposer de documents à une commission
parlementaire. Je ne connais pas tous vos règlements ici. Cependant, ce
que je vais faire...
Le Président (M. Laplante): Je vais distribuer les
documents.
M. Morin (Louis-Hébert): C'est ça. Je rends
publiques aujourd'hui, les deux dernières études de la
série que nous avions entreprise sous la direction de Bernard Bonin
l'année passée et je les ai ici. J'ai un petit communiqué
qui a été émis, que les journalistes ont reçu ou
vont recevoir. C'est imminent. Ce sont deux briques très complexes et
très complètes aussi, en gros, sur les relations commerciales
Québec-USA, Québec-Canada, de même que sur tout le
problème des industries et le commerce interrégional
Québec-Ontario et le reste du Canada. Alors, ça va certainement
fasciner il est parti le député d'Outremont, de
prendre connaissance de ça. Considérez-les distribués,
d'accord? Parce que je n'ai pas le droit de les...
M. Rivest: Est-ce que c'est la dernière? Il n'y en a pas
une sur l'assurance-chômage?
M. Morin (Louis-Hébert): Non, je ne sais pas de quoi au
juste M. Ryan parlait l'autre jour ça m'arrive souvent,
d'ailleurs mais je n'ai pas compris; je voulais le lui demander. Il a
fait allusion à une étude...
M. Rivest: II n'existe pas d'étude au ministère sur
l'assurance-chômage en ce moment?
M. Morin (Louis-Hébert): Mais j'ai regardé
ça. J'aimerais vraiment savoir de quoi...
M. Rivest: Regardez donc encore.
M. Morin (Louis-Hébert): Je ne sais pas de quoi il
parle.
M. Rivest: D'accord.
M. Morin (Louis-Hébert): Alors, ces études sont
considérées distribuées, M. le Président. Elles
sont donc publiques dorénavant et je suis certain que tout le monde va
se garrocher.
M. Rivest: Est-ce que le ministre s'engage à regarder de
nouveau s'il n'y a pas une étude sur l'assurance-chômage?
M. Morin (Louis-Hébert): II y a bien plus que ça,
mais non.
M. Rivest: Est-ce qu'il y en a une?
M. Morin (Louis-Hébert): Je ne le sais pas; je n'ai rien
trouvé encore précisément là-dessus.
M. Rivest: Mais vous allez regarder de nouveau et, si elle
existe, vous allez la rendre publique?
M. Morin (Louis-Hébert): Je regarderai. Vous êtes
donc bien inquiet de votre avenir, M. le député.
M. Rivest: Disons que le ministre devrait s'inquiéter de
son passé récent dans Jean-Talon.
Office franco-québécois pour la
jeunesse
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le
programme no 3, l'Office franco-québécois pour la jeunesse. La
parole est au ministre. Je sais qu'il y a eu une entente pour finir ce
programme à 12 h 30, à cause du leader du gouvernement. S'il vous
plaît, j'ai votre nom pour les prochaines interventions. M. le
ministre.
M. Charron: D'accord. Merci, M. le Président, je veux vous
dire d'abord que je suis très heureux d'apporter ma modeste contribution
à une commission qui regroupe d'aussi importants personnages. Je vais
essayer d'être à la hauteur de la situation jusqu'à la fin
de la commission ce matin.
M. le Président, c'est à titre de coprésident du
conseil d'administration de l'Office franco-québécois pour la
jeunesse que chaque année, je me greffe quelques instants à
l'étude des crédits du ministère des Affaires
intergouvernementales. Je n'ai à présenter à nouveau, avec
plaisir, cette année, aux membres de la commission qu'un bilan
très satisfaisant, à la fois clairement exprimé par les
délégués français et les
délégués québécois lors de la
dernière réunion du conseil d'administration, sur la performance
de l'office au cours de la dernière année. J'ai de plus le
privilège de présenter aux membres de la commission cette
année le nouveau secrétaire général de l'Office
franco-québécois pour la jeunesse, du côté
québécois, M. André Tétreault. M. Pierre Bernier,
qui a occupé ce poste depuis cinq ans, je crois, les cinq ans
auparavant, est devenu mon sous-ministre au haut-commissariat depuis la fin de
septembre dernier.
M. le Président, le budget que nous réclamons cette
année de la commission comporte une augmentation de 11% par rapport aux
crédits de l'année dernière. Comme les
députés le savent, il s'agit d'un budget paritaire avec la
France. La France ayant déjà augmenté sa contribution de
11%, il a semblé normal au gouvernement, vu l'entente qui règne
depuis maintenant onze ans, de faire la même étape. Cette
augmentation n'a qu'une justification: maintenir l'objectif de 1500 jeunes
Québécois qui se rendent en France et recevoir 1500 jeunes
Français au cours de l'année.
Évidemment, la hausse des coûts de transport, comme chacun
le sait, l'inflation en général font que, pour maintenir cet
objectif auquel tiennent les deux gouvernements, il nous a fallu
réclamer ces crédits supplémentaires pour cette
année.
Je donne en 30 secondes, si ça m'est permis, le tableau des
stages prévus pour cette année: dans le secteur agro-alimentaire,
15% des stages; dans le secteur industriel et technologie, 16%; dans le secteur
des services qui sont des secteurs tertiaires de l'économie, 19%; en
éducation, 6%; en affaires sociales, 15%; en loisirs, 7%; sports et
plein air, 9%; arts, 9%, et syndicalisme, 4%. Si je les regroupe sous les
grandes familles d'activités étatiques comme on a l'habitude de
les considérer, la mission économique prend 54% des stages cette
année; la mission sociale, 14%, et la mission éducative et
culturelle, 32%.
L'année dernière, en 1978, nous avons reçu 321
projets de stages émanant de citoyens du Québec, comparativement
à 285 l'année dernière, ce qui était une
progression. Nous en escomptons cette année 383. Le nombre de gens, une
fois que les stages sont accueillis par les jurés les gens qui
demandent de faire partie des stages reconnus augmente aussi à
chaque année. Il a été de 3500 jeunes
Québécois qui ont essayé d'être parmi les 1500
l'année dernière, comparativement à 3200 l'année
précédente et nous en attendons 3850 au cours de l'année.
Ce qui veut dire les chiffres sont là pour le dire la
popularité auprès des jeunes Québécois de l'office
et de son caractère éducatif quant au séjour qu'il offre
aux jeunes Québécois en France.
Donc, depuis son existence jusqu'à la fin de l'année 1979,
si les crédits nous sont accordés pour permettre les
réalisations prévues, ce sera, en onze ans, 17 348 jeunes
Québécois qui auront, d'une manière ou d'une autre, dans
un stage ou dans un autre, connu un coin de la France et nous aurons accueilli
à peu près l'équivalent en jeunes Français dans
tout le territoire du Québec.
Voici le tableau principal que je pouvais donner. Maintenant, si les
députés ont des questions, je me ferai un plaisir d'y
répondre en compagnie du secrétaire général.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le Président, je remercie le ministre de ce
bilan de l'Office franco-québécois. Je pense qu'on ne peut que
féliciter le ministre et tous ses gens du bon fonctionnement...
Pratiquement à chaque année qu'on a discuté de l'Office
franco-québécois, il ne semble pas y exister tellement de
problèmes, sauf celui d'une volonté je pense bien que
c'est partagé par le ministre et probablement par son correspondant
français d'essayer d'accroître, compte tenu des contraintes
budgétaires qu'il a lui-même évoquées, le volume de
ces échanges. Car, effectivement, dans le cadre des échanges
France-Québec, depuis une dizaine d'années, c'est certainement
l'un des programmes qui a été !e plus productif, non seulement en
termes économiques, mais en termes d'ouverture d'horizons pour un nombre
considérable de jeunes.
Quant à moi, je n'ai pas de questions précises, parce que
le ministre a quand même donné des éléments
d'information qui me satisfont. Je veux simplement souligner de nouveau notre
appréciation du travail du ministre et des gens de l'office.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Lotbinière.
M. Biron: Je remercie le ministre aussi. J'aurais quelques
questions très brèves à poser au ministre vis-à-vis
d'une évolution du rôle de l'Office franco-québécois
pour la jeunesse. Est-ce que le ministre entrevoit pour les années
à venir un rôle accru pour l'office ou si on va continuer à
faire ce qu'on faisait au cours des dernières années.
Il y aurait aussi une autre question intéressante. Est-ce que le
ministre entrevoit la création d'autres offices semblables à
celui-là? On sait que les relations privilégies entre pays
francophones, c'est bien sûr avec la France. Est-ce qu'à l'office,
on planifie en vue de la création d'autres offices du même genre
dans d'autres pays francophones? Ce serait intéressant de savoir cela de
la part du ministre.
Est-ce qu'il y a eu, par le processus et le mécanisme de
recrutement, de préparation des stagiaires québécois ou de
ceux qui les reçoivent, des changements de critères? Est-ce que
ce sont les mêmes critères de choix qu'on avait autrefois? En
particulier, le ministre nous dit 54% dans le domaine économique. Cela
me plaît. Je voudrais savoir si, l'an dernier, on avait autant ou moins,
dans quelle direction est-ce qu'on évolue dans ce sens?
Le ministre a répondu à ma question, mais je voudrais
aussi l'entendre confirmer. Est-ce que ce qu'on dépense, $1 871 000
qu'on nous demande comme budget, c'est exactement le même budget en
France? Parce que je remarque qu'on a le recrutement en préparation de
stagiaires. Ici, on paie une partie pour ça, de même que la
préparation du stage et l'accueil, l'encadrement.
C'est probablement le budget divisé en deux, mais en même
temps, en France, fait-on la même chose, exactement la même chose
pour nos jeunes, la préparation de leurs cadres, de l'encadrement de
stagiaires qu'on va recevoir là-bas? C'étaient là mes
questions.
M. Charron: Rapidement, M. le Président, avec plaisir, je
vais répondre aux questions du député de
Lotbinière, en remerciant le député de Jean-Talon de son
intervention. Effectivement, la parité est totale avec la France. Il
s'agit, cette année, d'un montant de 8 510 510 francs français
qui, si on prend le taux de change retenu, de 4,55 francs le dollar, est
équivalent à ce que nous accordons cette année.
C'est pour les mêmes services: préparation, accueil,
exactement la même chose que le côté français
offre.
Le député a posé trois questions: Est-ce qu'on va
changer un peu le modèle des stages au bout de onze ans? Est-ce qu'on va
étendre cela à d'autres pays éventuellement? Et est-ce
qu'on va changer les critères d'acceptation aux stages? Je dois dire que
le député de Lotbinière est plus que sur une bonne piste
et sur une bonne intention. La dernière réunion du conseil
d'administration de l'office a eu lieu en janvier, en France. C'était au
tour de la France à recevoir le conseil. Le conseil a pris la
décision suivante: sur le budget de 1979, celui que vous devez adopter
ce matin, 10% des sommes doivent être attribuées à ce qu'on
appelle des stages d'innovation. Le bilan fait par les membres, de part et
d'autre, de la France et du Québec, concluait, sans dire qu'il
était venu le temps de bousculer l'office, puisque le succès est
là, le taux de participation est là, qu'il fallait
peut-être élargir un peu son champ d'action, si on ne veut pas
découvrir qu'il est périmé, sans avoir fait attention.
On a pris sur nous, les deux présidents, le ministre
français et moi-même, de mandater nos secrétaires
généraux respectifs à prendre une partie des sommes pour
innover. Ceci pourrait être, par exemple, de changer les critères.
Actuellement, les critères, pour participer à un stage en France,
sont: avoir un certain bagage minimum de connaissances pour le stage en
question, ne pas y aller simplement comme touriste, avoir entre 18 et 35 ans et
le stage est limité à trois semaines. Il ne peut pas être
de moins et il ne peut pas être de plus de trois semaines. Ce sont des
groupes de 20, automatiquement.
On a dit: Peut-être que dans certains cas, dans certaines
disciplines, il peut se trouver de jeunes Québécois, au nombre de
5 ou 6 ou de 25, qui l'exemple qui avait été cité
au conseil avait été repris par tout le monde sur
l'énergie nucléaire, seraient intéressés à
aller voir ce qui se produit du côté français ou vice
versa. L'état du développement de l'énergie
nucléaire n'est pas du tout le même ici que ce qu'il a
déjà atteint en France, chacun le sait; il est possible qu'on
n'ait pas l'équivalent pour venir ici. Est-ce que c'est une raison pour
interdire le stage? Si on reste dans nos critères fixes, où il
faut absolument qu'il y ait une contrepartie française qui vienne par la
suite, c'est certain qu'on va priver des jeunes Québécois d'aller
s'instruire au cours d'un stage à l'intérieur de cette enveloppe.
L'idée intéressante, c'est d'étendre à un autre
pays de langue française, peut-être, un caractère de stage,
c'est-à-dire que plutôt que d'avoir des jeunes
Québécois qui vont en France, on pourrait avoir des jeunes
Québécois et des jeunes Français qui vont faire un stage
au Sénégal par exemple.
C'est l'exemple sur lequel on travaille actuellement. Je ne peux pas
annoncer à la commission sur quoi le choix est arrêté.
C'est le conseil d'administration de septembre qui se tient au Québec
qui sera appelé à prendre la décision, mais je sais, de la
part du secrétaire général québécois, qu'on
est déjà en train d'extrapoler la possibilité d'un stage
étendu à un tiers pays de langue française ou même,
parce qu'on est à examiner au niveau des Affaires intergouvernementales
cette possibilité-là, aux jeunes Franco-Américains de la
Louisiane, où de jeunes Français le Québec a
déjà des relations, il y a déjà une
délégation ou enfin un bureau des Affaires intergouvernementales
qui est à Lafayette qui peut être mis à contribution dans
ce domaine et de jeunes Québécois iraient ensemble vivre
l'expérience d'un stage, d'un échange de culture, mais en un
tiers pays. (12 h 30)
Nous avons déjà pris la décision de garder 10% du
budget pour faire sauter les critères peut-être au besoin, pour
innover, pour étendre cela à d'autres pays, et c'est le conseil
d'administration, en septembre prochain, qui retiendra ou refusera les
suggestions que nos secrétaires généraux ont
été mandatés de nous faire pour ce moment-là. Je
crois que le député de Lotbinière a raison de souhaiter
que peut-être on élargisse ce fonctionnement-là, et c'est
aussi notre intention.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Lotbinière, d'autres questions?
M. Biron: Non, M. le Président.
M. Rivest: Quand on a un bon ministre, M. le Président, on
n'a pas de problème.
Le Président (M. Laplante): Est-ce qu'on peut dire que le
programme 3 est adopté?
M. Biron: Ma dernière question porte sur le pourcentage
dans le domaine économique l'année d'avant.
M. Charron: Ce n'était pas de 50% l'année
dernière. Cette année, c'est 54%. C'était de 49% ou de
48%.
M. Biron: Dans le domaine économique.
M. Charron: Là, c'est la contribution des Affaires
sociales qui a diminué. On a augmenté du côté
économique.
Le Président (M. Laplante): Programme 3,
éléments 1 et 2, adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): La commission ajourne ses
travaux sine die.
Fin de la séance à 12 h 31