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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 5 février 2004 - Vol. 38 N° 7

Consultation générale sur les nouveaux enjeux de la sécurité alimentaire au Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'ordre, s'il vous plaît! Ça va?

Une voix: Est-ce qu'on va être en ondes?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ça vient.

À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte. La commission est réunie aujourd'hui pour poursuivre les auditions publiques dans le cadre de son mandat d'initiative sur les nouveaux enjeux de la sécurité alimentaire.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements aujourd'hui?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Chenail (Beauharnois) est remplacé par M. Blackburn (Roberval).

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. le président. Alors, je donne lecture de l'ordre du jour de ce 5 février 2004. Nous commencerons par le Bureau de normalisation du Québec; à 10 h 30, le Conseil de l'industrie laitière du Québec; à 11 h 30, l'Union des consommateurs. On suspendra nos travaux à 12 h 30 pour reprendre à 14 heures avec le Conseil canadien des distributeurs en alimentation; à 15 heures, Viewtrak Technologies inc.; à 16 heures, le Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation; à 17 heures, la Commission de l'éthique de la science et de la technologie, et nous ajournerons nos travaux à 18 heures.

Alors, je propose l'adoption de l'ordre du jour.

Des voix: Adopté.

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, nous entamons donc l'audition et nous avons avec nous, ce matin, les représentants du Bureau de normalisation du Québec. M. Jaques Girard, directeur du Bureau de normalisation du Québec, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et 20 minutes d'échange avec chaque groupe parlementaire, pour un total d'une heure. Je vous cède la parole, en vous demandant de présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Bureau de normalisation du Québec (BNQ)

M. Girard (Jacques): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je voudrais vous présenter bien sûr Christine Dupuis, qui est gestionnaire du programme HACCP au BNQ; ici, mon collègue M. Jean Rousseau, qui agit comme chef de la normalisation et de la certification au BNQ; et, en remplacement de M. Allard, Mme Drouin, qui nous accompagne et qui est du Service juridique du Centre de recherche industrielle du Québec, Marie-Claude Drouin.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Allez-y, monsieur.

M. Girard (Jacques): On procède?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui.

M. Girard (Jacques): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, M. le vice-président, mesdames, messieurs, il nous fait plaisir de faire part à cette commission des principaux constats découlant de nos expériences sur le terrain, auprès de notre clientèle du Québec et à l'étranger, en matière de sécurité alimentaire et de donner notre point de vue sur les nouveaux enjeux de la sécurité alimentaire au Québec. Comme organisme impliqué dans le domaine, il nous apparaît essentiel de transmettre aux parties intéressées les préoccupations en matière de sécurité alimentaire qui nous sont communiquées aussi par les membres des différents comités techniques et consultatifs.

Le BNQ, créé par le gouvernement du Québec en 1961, est, depuis 1990, une direction du Centre de recherche industrielle du Québec. Par son décret constitutif, le gouvernement du Québec reconnaît au BNQ le statut d'organisme central de normalisation, de certification et de diffusion d'information sur les normes et le reconnaît aussi comme porte-parole du Québec auprès du Conseil canadien des normes ou de tout autre organisme de normalisation.

Le BNQ a pour mission d'agir comme partenaire des milieux d'affaires, industriels, sociaux et réglementaires afin de favoriser l'amélioration de la qualité des produits et services ainsi que leur acceptation sur tous les marchés. Le BNQ est un organisme membre du Système national de normes du Canada et exerce ses activités dans l'élaboration de normes, la certification de produits, et de processus, et de services, la certification de systèmes de gestion de la qualité et de gestion de l'environnement, la certification de personnel.

De plus, en vertu d'un accord conclu avec le Conseil canadien des normes, le BNQ est habilité à évaluer les laboratoires au Québec qui désirent se faire accréditer dans le cadre du Programme d'accréditation de laboratoires du Canada, PALCAN. Cet accord est d'ailleurs accepté par l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans le cadre de l'évaluation des laboratoires alimentaires. Le BNQ compte parmi les rares organismes accrédités par le Conseil à la fois en élaboration de normes, en certification de produits et en enregistrement de systèmes de gestion.

Nous oeuvrons dans un grand nombre de secteurs, notamment ceux de l'environnement, de la construction et des travaux publics, de la santé et de la sécurité, du tourisme, de l'agroalimentaire et des services en général. Nous comptons sur le soutien d'une équipe de plus de 50 employés, 70 sous-traitants et sur plus de 700 bénévoles qui sont membres de nos divers comités.

Depuis février 2001, le BNQ est l'organisme reconnu par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec comme guichet unique à titre d'organisme de certification des systèmes HACCP et d'élaboration de normes et programmes de salubrité alimentaire. Le partenariat MAPAQ-BNQ s'inscrit dans la stratégie québécoise de reconnaissance gouvernementale des programmes HACCP et offre à l'industrie alimentaire québécoise un modèle de reconnaissance unique en Amérique du Nord. En alliant leurs expertises et leurs forces, le MAPAQ et le BNQ fournissent l'infrastructure nécessaire pour rendre disponible aux entreprises du Québec une reconnaissance gouvernementale crédible et de portée nationale et internationale.

Le BNQ travaille également à l'élaboration de programmes de salubrité auprès de diverses associations du Québec et participe aux comités gouvernementaux ou du milieu qui interviennent en innocuité, en traçabilité et sur d'autres sujets d'intérêt connexe. À titre d'exemple, le BNQ démarre actuellement un programme de reconnaissance pour les chefs cuisiniers et les chefs pâtissiers du Québec. Il a également développé ou développe présentement des normes dans le domaine alimentaire, comme la norme sur le sirop d'érable, celle sur la production de veau de grain et de veau de lait et celle sur le porc. Il travaille de plus sur un projet pilote sur les appellations réservées et sur un programme de salubrité des oeufs de consommation.

Si on parle de sécurité, c'est qu'il y a un risque. Et comment aborde-t-on un risque? Il faut d'abord l'évaluer puis le gérer et le communiquer. Parlons d'abord de l'évaluation des risques. Bien que ce ne soit pas une préoccupation particulière du document de consultation, nous souhaitons que la commission en recommande aussi l'examen. Ce point en est un essentiellement à caractère scientifique, et c'est une activité qui se fait partout dans le monde. Nous croyons que l'on doit s'assurer de posséder toute l'information disponible et qu'on y applique les critères d'impartialité et de transparence essentiels à sa crédibilité. À ce chapitre, de nouveaux sujets apparaissent, qu'on pense par exemple à la biosécurité, au bioterrorisme, aux OGM et à la résistance aux antibiotiques.

L'étape qui suit combine les résultats de l'évaluation des risques aux besoins et attentes exprimés par la société. L'organisme gouvernemental utilise ces intrants pour fonder sa législation et mettre en place un système de contrôle efficace qui inspire la confiance du public. C'est là qu'intervient la gestion du risque. Le cadre législatif et réglementaire actuel, l'approche d'inspection centralisée déjà en place et le partage des responsabilités entre les deux paliers gouvernementaux nous semblent adéquats pour relever les défis à venir. Toutefois, l'absence inévitable de moyens requis pour suffire à la tâche de contrôle devrait continuer à être compensée par l'ouverture et l'implication de l'État envers l'adoption et la reconnaissance de systèmes complémentaires, tels la certification par une tierce partie des systèmes HACCP ou de programmes issus de la normalisation.

n (9 h 40) n

Nous croyons que nous n'avons rien à envier à d'autres pays, bien au contraire, lorsque l'on considère les principaux faits suivants: d'abord, la décision du MAPAQ d'introduire une méthode d'inspection basée sur le risque, d'offrir aux entreprises du Québec une reconnaissance gouvernementale de leurs systèmes de sécurité HACCP et, plus récemment, d'inclure le principe de précaution lors de la révision de la loi P-29.

Ensuite, soulignons tous les efforts déployés par l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour aider l'implantation des bonnes pratiques alimentaires et les principes du Codex Alimentarius via son programme PASA. Enfin, mentionnons la collaboration entre ces deux instances pour éviter, par le biais d'ententes... pour éviter, par le biais d'ententes auxiliaires, dis-je, fédérales-provinciales, la duplication de leurs activités respectives.

À la question de la commission touchant l'importance de généraliser l'utilisation de la méthode HACCP à l'ensemble de l'industrie alimentaire québécoise, nous répondons qu'il s'agit à notre avis d'un incontournable et que le défi à relever pour assurer la compétitivité des entreprises du Québec consiste à aider celles qui désirent satisfaire les exigences de leurs clients, tant à l'étranger que sur les marchés locaux.

Le modèle québécois s'inspire de celui déjà bien implanté en Australie et en Nouvelle-Zélande. Le recours à des systèmes HACCP certifiés par tierce partie se répand aussi un peu partout dans le monde sur une base commerciale. Des transformateurs alimentaires veulent s'assurer de la sécurité de leurs intrants. Ils demandent à leurs fournisseurs de leur démontrer cette sécurité plutôt que d'aller eux-mêmes constamment les vérifier.

Nous sommes, pour notre part, persuadés que le choix du MAPAQ d'utiliser ce modèle de certification pour aider ces activités d'inspection constitue une excellente décision, à preuve, l'arrivée, d'ici environ deux ans, d'une norme internationale ISO 22000, laquelle devrait aider substantiellement à l'harmonisation des systèmes de sécurité alimentaire. Cette norme prend pour base les référentiels qui nous sont familiers, notamment le Codex et le PASA. Donc, nous croyons que les entreprises qui répondent déjà aux exigences de l'un ou l'autre de ces référentiels seront en mesure de respecter celles de la norme ISO 22000 assez facilement. L'arrivée de cette norme pourrait aussi ouvrir substantiellement la possibilité de reconnaissance par tierce partie neutre et indépendante. En effet, toute une structure internationale d'accréditation d'organismes de certification basée sur la neutralité, l'impartialité de même que sur les compétences du personnel qui réalise les audits sera disponible et pourra être ajustée aux besoins spécifiques du secteur agroalimentaire.

Mais, aujourd'hui, dans les faits, nous devons constater un faible taux d'adoption de la démarche HACCP par les entreprises du Québec, nonobstant bien sûr les cas connus dans les secteurs des viandes et des produits marins, où il y a obligation pour l'exportation. Selon nos consultations et nos propres observations, cela s'explique principalement par: d'abord, la confusion quant aux termes «exigence» et «référentiel» utilisés; le manque d'information sur les étapes de la démarche HACCP, les efforts réels à déployer et les bénéfices qui peuvent en découler; l'importance de la tâche et du temps requis pour l'implantation de la démarche lorsqu'il y a une faiblesse inhérente des bonnes pratiques d'hygiène; le manque de support technique et financier lors de la phase d'implantation du système HACCP, particulièrement en contexte de PME, là où les ressources internes sont très limitées; et, probablement plus que tout, l'absence d'obligation d'implanter cette démarche dans la majorité des secteurs.

Abordons maintenant le thème de la traçabilité. On a longtemps associé la nécessité de la traçabilité en sécurité alimentaire au seul cas des rappels. Toutefois, si on parle de système de gestion de la sécurité alimentaire, la traçabilité devient un élément tout à fait essentiel. Ainsi, si on pense développer un système de gestion de la ferme à la table, on devrait aussi tenter de concevoir la traçabilité avec la même vision. Force est de constater qu'il y a d'importantes différences entre l'approche adoptée par l'Europe, une approche obligatoire, globale et intégrée de la gestion des risques, et celle adoptée ou en développement présentement en Amérique du Nord.

Le document de consultation traite principalement de la traçabilité d'un des premiers maillons de la chaîne alimentaire, soit la production animale. Nous croyons qu'il y a plus d'avantages que d'inconvénients à progresser vers une approche et un cadre réglementaire global en matière de traçabilité. Pour nous, il est clair qu'un système de traçabilité doit être complémentaire et intégré au système de sécurité alimentaire HACCP.

Cette position semble d'ailleurs partagée par l'Europe, par les exigences aussi qui sont actuellement contenues dans le PASA aussi, au Canada, et par l'étude de Zins Beauchesne et associés présentée au Fonds québécois d'adaptation des entreprises agroalimentaires en mars 2003. On y mentionne, et je cite: «La traçabilité est souvent associée dans l'esprit des répondants à la notion de qualité et de salubrité: la moitié des entreprises ayant entendu parler de traçabilité ont été informées lors de la mise en place d'un système de qualité, et nombre de répondants déclarent vouloir faire certifier leur système de traçabilité avec [...] HACCP, ce qui indique bien le parallèle qu'ils font entre reconnaissance HACCP et programme de traçabilité.»

Une trace dans un maillon de la chaîne ne suffit pas. Le producteur ou le fabricant doit non seulement être en mesure d'identifier son ou ses produits, mais aussi d'assurer au consommateur par exemple que le mode d'alimentation des bêtes est conforme aux prescriptions sanitaires, que ses produits sont transportés dans des conditions de salubrité adéquates, que son produit, identifié par exemple avec une appellation réservée, est bien celui-là et non tel autre. On doit donc, en traçant un produit, y associer à la fois tout ce qui en assure sa sécurité mais aussi sa qualité.

Pour pouvoir se déployer efficacement, on doit penser à un système qui ajoute de la valeur et non à une nouvelle paperasse administrative lourde à gérer. L'absence d'une approche globale au Québec risque de conduire à une solution incomplète, puisque la traçabilité demeure pour l'instant sectorielle. Les efforts d'implantation de la traçabilité, plutôt limités pour l'instant aux animaux vivants, risquent évidemment de ne pas entraîner de résultats d'amélioration de la sécurité alimentaire de façon globale. Il faut donc étendre la démarche aux autres maillons de la chaîne.

À la question de la commission relative au degré de réalisme de l'objectif visé par rapport à l'implantation d'un système dans les secteurs bovin, ovin, porcin et horticole au Québec d'ici 2005, nous répondons que tout est possible lorsque les ressources sont allouées en fonction des priorités établies et que, même si cet objectif peut paraître ambitieux pour certains, il demeure quand même limité à un nombre assez restreint de secteurs.

Au-delà de la problématique de la sécurité alimentaire et des outils minimaux de traçabilité dont le gouvernement doit disposer pour gérer les situations de crise, le positionnement vers une approche plus globale de traçabilité procurerait, entre autres, les principaux avantages suivants: rejoindre les préoccupations des consommateurs pour les produits à tous les maillons d'une filière donnée; encourager une saine gestion, une responsabilisation et de l'interaction entre les producteurs, les fabricants et les distributeurs; permettre aux producteurs et fabricants d'amener des produits à valeur ajoutée en favorisant la différenciation des produits sur le marché, par exemple dans le cas des appellations réservées.

En ce qui concerne l'étiquetage, que nous associons, dans notre cas, plus... davantage ou plus étroitement à la communication des risques ? le troisième élément dont je parlais au début de la présentation ? davantage bien sûr qu'à la gestion, le BNQ est moins présent à ce niveau, si ce n'est, pour les entreprises qui le certifient, l'obligation d'apposer une marque distinctive sur leurs produits. On peut bien sûr trouver quelques exceptions, comme la présence potentielle d'allergènes, qui fait l'objet actuellement d'un projet auquel participe aussi le BNQ.

Nous comprenons aussi l'importance accordée à la problématique des OGM, compte tenu des inquiétudes soulevées par les consommateurs à ce sujet. À ce stade-ci, nous sommes d'avis que les études scientifiques réalisées jusqu'à maintenant n'ont pas encore réussi à dissiper les craintes des consommateurs sur le risque pour la santé humaine. Nous préconisons davantage de transparence et d'information dans ce dossier. Nous suggérons également que les représentants gouvernementaux et autres du Québec poursuivent leur implication dans le projet, présentement en cours d'élaboration, d'une norme nationale sur les OGM. En fait, le risque OGM ne pourra être bien géré que si on s'entend surtout sur son analyse.

n(9 h 50)n

Dernière considération avant de conclure, il s'agit d'un point qui pourrait être examiné, éventuellement, ultérieurement en commission, car, à notre avis, il peut avoir, lui aussi, un impact important sur la sécurité des aliments: les risques associés à la dégradation de l'environnement. On n'a qu'à évoquer les problèmes de contamination des nappes phréatiques ou des sols de même que l'utilisation d'herbicides et de pesticides pour illustrer le lien direct avec la problématique de la sécurité alimentaire. Le BNQ, le monde agricole et les organismes de réglementation, tels le MAPAQ et le ministère de l'Environnement, travaillent actuellement sur différents projets, tels des programmes de gestion de conformité réglementaire, de certification à la norme environnementale ISO 14001, en passant par le développement de programmes dits d'agriconditionnalité. C'est un travail de longue haleine, mais il aura, lui aussi, un bénéfice certain sur la sécurité alimentaire.

En conclusion, Mme la Présidente, la consultation de la commission sur les nouveaux enjeux de la sécurité alimentaire du Québec pose un regard important sur les défis existants dans un domaine critique de l'économie et de la vie des Québécois: dans le domaine alimentaire. Selon nous, ces défis sont à notre portée, et nous devons les relever. Dans un contexte où les règles, normes et outils disponibles n'ont plus de frontières, le Québec, pour faire face à ces défis, doit utiliser tout ce qui est disponible pour être efficace. En travaillant de concert, les organismes réglementaires, les maisons d'enseignement, les centres de recherche, les associations de producteurs et fabricants alimentaires, les organismes de normalisation et de certification reconnus et bien sûr les consommateurs peuvent apporter un soutien qui facilitera et enrichira la démarche visant une sécurité alimentaire accrue. Ce défi de la sécurité alimentaire devient donc l'affaire de tous.

Le BNQ désire également informer le gouvernement du Québec que sa contribution lui est assurée pour relever les défis posés. Nos champs d'expertise et d'intervention variés ainsi que nos diverses reconnaissances comme organisme soit d'élaboration de normes soit de certification, notre reconnaissance avec le MAPAQ pour le système HACCP au Québec, les activités de partenariat que nous entretenons avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments et la représentation de nos clients du domaine alimentaire sont parmi les facteurs qui nous motivent en ce sens.

De façon plus ciblée, le BNQ s'engage à maintenir sa participation au comité qualité du MAPAQ et de ses sous-groupes HACCP et traçabilité ainsi qu'à collaborer à toute initiative sérieuse du milieu. Sa participation soutenue aussi aux différents comités du Conseil canadien des normes, et plus spécifiquement au comité ISO TC 34, qui est responsable des avis émis sur la norme ISO 22000, permettra également d'exercer une veille sur le développement des normes internationales en sécurité alimentaire.

En conclusion, nous souhaitons que le Québec se dote d'une politique en matière de sécurité alimentaire qui soit cohérente et fondée sur cinq notions essentielles: l'évaluation juste du risque, la précaution, l'intégration, l'impartialité et la transparence. Nous devons réfléchir à un développement durable et solidaire de l'agriculture tout aussi respectueux des intérêts des consommateurs que de ceux qui en vivent. Nous attendons avec impatience les résultats des consultations que va effectuer cette commission. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Girard. Fort intéressant. Alors, on procède aux échanges. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames, messieurs. Bonjour, bienvenue. Merci de votre présentation.

Et, pour aller tout de suite dans le vif du sujet, je vais commencer par une question sur les normes HACCP. Vous avez dit dans votre mémoire et vous l'avez répété lors de votre présentation... Vous dites que les normes HACCP sont un incontournable. Vous avez probablement suivi peut-être nos travaux depuis mardi matin. Il y a des groupes qui sont venus nous faire des présentations ici, puis, en même temps, tout le monde est assez unanime, je dirais, que les normes HACCP devraient être introduites à toute la chaîne alimentaire. Le hic, c'est: Qui va payer les coûts? Puis je pense que c'est important de se poser la question.

Et aussi, bon, tout le monde est pour la vertu, puis vous avez, dans votre présentation, dit tantôt: Il y a des choses qui viendraient soit enrichir... ou il y a certains manques, entre autres manque d'information sur la démarche. Vous avez ensuite ajouté: manque de ressource, si je vous ai bien suivi, là, et, troisièmement, absence d'obligation. Moi, j'aimerais vous entendre sur ces trois points-là et peut-être ensuite, si c'est possible pour vous de répondre à la question que tout le monde se pose: qui paiera?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci, madame. Merci, M. le député, de votre question. En fait, revenez à votre première affirmation: HACCP est un incontournable, c'est ce que l'on voit sur le marché actuellement. On constate que, un peu sur le modèle comme est venu ISO 9000 ? puis on sait qu'ISO 9000 est maintenant, je dirais, beaucoup un incontournable ? quand les grandes chaînes vont demander à leurs fournisseurs d'implanter HACCP parce qu'ils ne veulent plus aller les vérifier, quand eux autres vont vérifier leurs coûts, c'est cette industrie-là qui, en descendant, va être obligée de le faire.

Quant à votre réponse: Qui va payer? ça va être une question beaucoup de: je le fais ou je ne le fais pas. Si je reviens, par exemple, à l'exigence ISO 9000 ? mais comme modèle, là, puis ça ne se compare pas directement, mais juste en termes de philosophie ? quand, par exemple, Hydro-Québec, quand, par exemple, Bell Canada, quand, par exemple, la ville de Montréal ont exigé, pour avoir des contrats chez eux, d'être ISO 9000 ? le Conseil du trésor le fait avec Rosalie aussi ? bien, vous avez vu arriver beaucoup d'entreprises qui tout à coup ont trouvé des fonds, ont trouvé des argents. Mais il y a eu aussi une certaine aide qui a été amenée. Donc, qui doit payer? Je pense que ça va être une facture partagée, puis finalement le coût de ça va être traduit à quelque part vis-à-vis les consommateurs. Il faut en être certains, ça ne restera pas là, en l'air comme ça. Bon.

Revenons à ceux qui veulent implanter. Quand on parle de manque d'information, de manque de ressources, de manque d'obligations, en fait, je pourrais vous dire qu'on a parlé à des entreprises, il y a deux ans, et même signé des contrats avec elles disant: Je vais me faire certifier dans six mois. Et, quand on parlait avec ces entreprises-là, on disait: Vous n'êtes pas au courant exactement de ce à quoi vous allez devoir faire face, parce que je ne pense pas que vous allez être là dans six mois. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit: Il manque d'information.

Nous, ce qu'on peut faire, c'est donner une information générale, mais, en aucune façon, étant un tiers impartial, on ne peut agir comme consultant pour lui dire comment faire. Donc, Mme Dupuis fait et d'autres gens chez nous font des présentations, des déjeuners-causeries, transmettent de l'information via les organisations, comme le CTAC par exemple, qui va venir ici aussi déposer un mémoire. On fait un effort, mais à la mesure de nos moyens bien sûr, mais on constate l'information relative à ce que c'est exactement, HACCP, comment ça s'implante, c'est quoi, les prérequis, etc. L'entreprise privée, de façon générale, en agroalimentaire et, je dirais même, une bonne partie à la ferme n'ont pas l'information adéquate.

Quand on parle de manque de ressources, c'est que ça ne se fait pas tout seul non plus, et, l'entreprise qui désire mettre en place un système de sécurité alimentaire, elle doit y allouer des ressources, notamment des ressources humaines, mais qui se traduisent par des ressources financières. Si une entreprise a 50 employés puis qu'elle doit affecter une personne à demi-temps pour un an à travailler sur le projet, c'est de l'argent au bout du compte. Donc, quand on parle de ressources, je n'ai pas voulu le préciser, mais, certainement il va y avoir des ressources financières qui vont être impliquées.

J'oserais ajouter, sous toutes réserves, qu'au cours des dernières années aussi il y a eu longtemps un montant, qui était un peu dans l'air, d'aide à l'industrie. On parlait que le gouvernement du Québec trouverait 5 millions à donner pour l'implantation de systèmes HACCP et comptait être capable de faire jumeler ce montant-là par le gouvernement du Canada. Malheureusement, ce n'est pas venu, et donc des entreprises qui peut-être attendaient l'annonce du programme avec une subvention ont retardé aussi leur implication dans le secteur.

Finalement, bien, obligations, juste pour revenir à ce que je disais, il y a deux façons. Ça peut être une obligation réglementaire avec un échéancier, avec des étapes qui peuvent se développer. On peut dire aussi: Bon, bien, on commence par des bonnes pratiques, après on va venir établir ce qu'on conçoit comme plan HACCP, donc on peut échelonner dans le temps. C'est peut-être une bonne façon, obliger de façon réglementaire, avec un échéancier qu'on pense être capable de rencontrer, parce que, d'un autre côté, il est possible aussi que, par exemple, une firme américaine chez qui on exporte les aliments dise: Moi, d'ici un an, tous mes fournisseurs devront être HACCP, et là le délai ne sera pas long, puis il va falloir les trouver, les fonds. Donc, les obligations peuvent venir de deux côtés.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Je prends la balle au bond. Ce que vous nous dites, c'est: Il y a des obligations qui, à plus ou moins court terme, vont venir probablement peut-être des autres pays. Mais est-ce que vous êtes en train de nous dire qu'il faut se préparer le plus rapidement possible si on veut prendre le virage, si on peut s'exprimer ainsi, et rapidement?

n(10 heures)n

M. Girard (Jacques): C'est notre opinion. Il faut se préparer le plus vite possible, et, quand on est prêts aussi, selon les lois du commerce international, on peut exiger aux autres ce qu'on a réussi à faire nous-mêmes. Et c'est ce qui s'est passé, par exemple, dans le domaine des viandes transformées et dans le domaine maintenant des jus de fruits que l'on exporte aux États-Unis. Les États-Unis, quand ils ont implanté HACCP dans leurs abattoirs, ont dit: Maintenant, au Canada, si vous voulez traverser la frontière, vous devez faire de même. Et, si c'est conforme aux lois du commerce international, vous avez le droit d'exiger quelqu'un... une particularité sur votre commerce, mais quand vous faites ça déjà à l'intérieur de vos propres frontières.

Maintenant, je ne dis pas, là, qu'on doit ? comment dire? ? partir en guerre contre les États-Unis puis on va monter notre système HACCP dans tel secteur, je pense que ça doit être plus réfléchi que ça, mais c'est la base de la réflexion.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Et votre base de réflexion justement, est-ce que vous avez un certain nombre de délais que vous prévoyez? Est-ce que vous suggérez au législateur, ou au gouvernement, ou aux entreprises de faire le virage, comme vous le disiez tantôt, le plus rapidement possible? Et est-ce que, mettons, dans deux ans, cinq ans, est-ce que... Dans le temps, ça pourrait ressembler à quoi?

M. Girard (Jacques): Si on parle d'obligations réglementaires, celles-là peuvent être un peu mieux suivies, entre guillemets, parce que, notamment, comme avec les États-Unis, ils vont annoncer un an, deux ans, trois ans d'avance que: On va vous obliger à. Comme, je pense, l'obligation sur les jus de fruits est venue à la fin 2003 et a été annoncée deux ans auparavant ou à peu près.

Maintenant, il y a aussi d'autres conditions. Même si ce n'est pas notre client majeur, mais l'Europe va à grand pas dans ce secteur-là. On travaille présentement à transférer notre connaissance en certification de système HACCP, du côté de la Tunisie, et eux le font pour l'intégration avec le marché européen. Donc, ça nous permet d'avoir une certaine... Puis je laisserais peut-être Mme Dupuis décrire un petit peu... peut-être plus... pas nécessairement de donner une date précise qui est connue, parce qu'elle n'est pas connue, mais de décrire l'avancement de l'Europe sur ce secteur-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme Dupuis.

Mme Dupuis (Christine): Oui. Bonjour, Mme la Présidente. Pour ce qui est du HACCP, ce qu'on constate, c'est que l'obligation vient souvent lorsqu'on doit exporter le produit. Dans le cas de l'Europe, il y a une obligation, pour ceux qui exportent en Europe, de se conformer à ce qu'eux-mêmes sont en train de faire, donc étendre la démarche HACCP à l'ensemble de leur chaîne alimentaire. Donc, dans un pays comme la Tunisie, dont les exportations vont beaucoup en Europe, il y a déjà une exigence qui est appliquée pour les produits marins qui sont exportés en Europe et une autre exigence au niveau de l'implantation du système HACCP, pour d'autres types de produits, qui doit prendre cours en 2004 et 2005. Donc, l'obligation vient souvent à ce niveau-là.

Et la problématique de prendre le virage rapidement, c'est que les délais d'implantation d'un système HACCP sont assez longs. Ça prend environ deux ans, pour une entreprise, d'implanter ce genre de système, en supposant qu'on y applique les ressources autant humaines, techniques et financières tout de suite. Donc, si les ressources ne sont pas mises de façon efficace, ça peut durer encore plus longtemps que deux ans. Certaines entreprises réussissent à le faire en un an, mais lorsqu'on y applique vraiment des moyens au niveau des ressources humaines, à temps plein. Donc, c'est une question d'y penser à l'avance, parce que le jour où vous êtes obligé de le faire, vous ne pouvez pas le faire tout de suite, vous devez amorcer une démarche qui est assez longue.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup. Alors, je veux continuer avec vous sur ce même sujet, puisque vous êtes des experts. Je voudrais tout d'abord, M. Girard et les personnes qui vous accompagnent, vous féliciter pour votre mémoire. Vous avez répondu rigoureusement aux questions que la commission s'est posées dans son document de consultation, dans votre domaine d'expertise, cela va de soi, et cela va aider la commission certainement, le point de vue que vous apportez.

Pourriez-vous nous expliquer comment fonctionne le système HACCP, pour le bien des gens qui écoutent? On leur dit HACCP, mais ça veut dire quoi? Et lorsqu'on implante ça dans une entreprise, ça signifie quoi, exactement?

M. Girard (Jacques): Je vais amorcer la réponse puis je laisserai Mme Dupuis, qui est vraiment la spécialiste du secteur, y répondre. Mais, ce qu'elle a réussi à me transmettre puis que j'essaie de transmettre à d'autres en termes de vulgarisation, c'est que, quand on parle d'une démarche HACCP, il y a deux parties qui peuvent se distinguer. La première partie, c'est de regarder l'ensemble de vos processus, tout ce que vous faites avec vos employés, votre équipement, et d'essayer d'appliquer à cette partie-là des pratiques d'hygiène soutenues, des pratiques d'hygiène qui se répètent, par exemple: mettre des filets, enlever des bijoux, se laver les mains. C'est tout ce qu'on appelle des zones de bonne pratique d'hygiène où on forme le personnel, où on modifie des installations, où on apprend à toujours agir d'une façon adéquate, je dirais, hygiénique.

L'autre partie, elle, est davantage scientifique. Par rapport à votre processus et par rapport aux produits que vous traitez, il y a des incontournables que vous devez constamment vérifier. Si on est, par exemple, en pasteurisation du lait, il y a des conditions de température et de pression qui sont des incontournables, donc ça devient un point critique, et vous devez le contrôler. Mais avant que l'ensemble, par exemple, dans une entreprise alimentaire, l'ensemble des employés soient familiers avec une démarche hygiénique tout à fait rigoureuse, qu'on ait produit ou modifié des installations pour qu'ils soient désinfectées facilement, pour qu'ils soient... là, il y a du temps et là il y a beaucoup d'énergies à mettre. Par la suite, la partie scientifique, bien, l'entreprise doit elle-même analyser son processus, identifier tous les points critiques et dire comment elle va les contrôler. Christine... Mme la Présidente.

Mme Dupuis (Christine): Mme la Présidente, je me rends compte que...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, Mme Dupuis, vous complétez la réponse?

M. Dupuis (Christine): Oui. Je me rends compte que ce que j'ai transmis à mon patron a été bien compris, ce qui est une bonne chose.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Et restitué.

M. Girard (Jacques): C'est la première...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dupuis (Christine): L'intérêt de la démarche HACCP dans une entreprise, c'est qu'on tourne toute l'entreprise vers un élément qui est très important dans le domaine alimentaire, c'est le risque alimentaire. Donc, la démarche HACCP est beaucoup orientée sur l'analyse de risque, mais elle a des prérequis à cette analyse de risque là, ce qu'on appelle communément les bonnes pratiques d'hygiène, les programmes préalables, les principes généraux d'hygiène, et c'est une partie où on doit travailler avec toute l'entreprise, tous les employés qui sont impliqués dans la fabrication et où on doit mettre l'accent sur la responsabilisation et la formation du personnel.

Donc, cette partie que M. Girard a décrite s'attarde beaucoup à tout ce qui est environnement de fabrication, donc les locaux, le personnel, les programmes de nettoyage et d'assainissement, toutes nos procédures de rappel de produit, tout ce qui est incontournable quand on est dans le domaine alimentaire, mais on le fait en profondeur et on le fait en s'assurant de l'adhésion de tous les gens qui travaillent dans l'entreprise. C'est une partie très importante et cruciale et c'est une partie où on constate parfois des faiblesses dans certaines entreprises, parfois aussi des faiblesses assez importantes, pas tellement parce que l'hygiène n'est pas appliquée ? parce que l'hygiène est appliquée et, au Québec, on a une partie de bonnes pratiques ? mais c'est de systématiser tout l'ensemble qui demande une amélioration.

La seconde partie, qui consiste en la partie au coeur du système HACCP, ce qui est l'analyse de risque, elle est toujours faite en fonction du type d'aliments que vous fabriquez. Et là on se penche vraiment sur la fabrication d'un aliment précis et on analyse le risque en fonction de cet aliment-là. Et il y a des données scientifiques qui existent partout dans le monde, sur un aliment donné, qui vous permettent de faire cette analyse de risque là. Il y a des modèles, mais vous devez toujours l'appliquer à votre procédé à vous.

Donc, c'est le travail d'adaptation des modèles scientifiques à votre propre usine, à votre propre environnement de production, à votre propre restaurant, à votre propre système de transport qui est le travail technique de l'implantation HACCP et qui demande souvent ou bien des ressources techniques internes importantes ou bien de l'aide extérieure de consultants spécialisés. C'est pas mal le mode de fonctionnement, là, du système en général.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Bien, écoutez, vous nous avez éclairés. Merci beaucoup, hein! Ça nous permet de mieux saisir un peu le concept HACCP, ce que ça signifie.

Vous êtes le premier groupe, depuis trois jours maintenant qu'on est dans cette consultation, à avoir fait une proposition originale: vous demandez qu'on se dote d'une politique de la sécurité alimentaire et vous suggérez qu'il y ait cinq notions qui fonderaient cette politique: l'évaluation du risque, la précaution, l'intégration, l'impartialité et la transparence.

n(10 h 10)n

Compte tenu que vous soumettez une proposition originale, j'aimerais vous entendre, un, sur la nécessité pour laquelle vous avez jugé opportun de nous soumettre cette proposition. Est-ce que cela veut dire que ce que nous avons actuellement en place n'est pas suffisant? Est-ce que les efforts sont éparpillés? Est-ce que vous souhaitez qu'on donne une orientation? Est-ce que vous souhaitez qu'on priorise la sécurité alimentaire? C'est quoi, le message, derrière votre proposition d'une politique de la sécurité alimentaire? M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci, madame. En fait, la politique peut venir sous-tendre un peu ce que monsieur disait tantôt: si on se donne un alignement, il va y avoir des choix à faire. On a parlé de... Les systèmes peuvent être intégrés ou peuvent être parcellaires. On peut dire qu'on fait de la traçabilité sur les oeufs. On peut dire... puis sur les oeufs au couvoir, sur les oeufs... Mais, pour ma part puis pour ce qui est du BNQ, malgré les relations assez étroites qu'on a avec le MAPAQ... et je ne dis pas que ça n'existe pas, mais je n'ai jamais entendu parler d'une politique de traçabilité, mais vraiment, là, quelqu'un se recule et dit: De la ferme à la table, comment on peut faire que cette trace se reprenne à travers les différents maillons? On fait des efforts, on sait que, bon, on va aller chez Métro, il y a des codes à barres; on va aller dans une ferme d'élevage, il va y avoir des puces à l'oreille ou... Mais est-ce que c'est la façon pour que... Si on veut sécuriser la chaîne ou augmenter la confiance dans l'ensemble de la chaîne, avant de dire: On fait telle action sur telle partie, est-ce qu'on l'a regardé de façon complète, c'est-à-dire prendre un peu de recul et se donner le temps de le regarder? Alors, je pense que c'est un élément de la politique.

L'autre élément de la politique, si je touche un autre point précis, c'est que ? on le mentionne dans le mémoire, dans la présentation, ce matin ? nous sommes persuadés que ni l'agence ni le ministère ne vont avoir les ressources disponibles si on va avec HACCP puis le nombre d'établissements qui devront être vus, visités, rencontrés pour faire l'inspection sur la base de ce qui se fait présentement. Il va y avoir un besoin assez important en ressources additionnelles.

Alors, qu'est-ce que le gouvernement doit faire dans ce cas-là? Pour le Québec, il a choisi ? puis ce qu'on souhaite, c'est que ça se continue ? de faire affaire avec un tiers impartial, neutre qui va vérifier des systèmes HACCP, mais ce n'est pas nécessairement la partie réglementaire, sauf que le MAPAQ se dit: S'il y a un système HACCP qui fonctionne dans cette entreprise-là, peut-être qu'après avoir tourné quelques années et avoir établi une confiance dans le système, cette entreprise-là pourrait être visitée moins souvent. C'est un peu l'histoire du base risque, là, qu'on veut implanter, donc l'importance de mettre en lien très étroit celui qui fait de la certification HACCP et l'organisme de réglementation. C'est une donnée importante ici, au Québec. C'est une donnée que l'Agence canadienne d'inspection des aliments est en train de regarder aussi. L'agence nous a déjà contactés pour savoir, bon: Comment vous faites pour qualifier des auditeurs? Comment vous faites pour ci? Comment vous faites pour ça? Donc, il y a un mouvement possible vers ça.

Et, si on pense à l'idée de partenariat, bien, effectivement, le BNQ a des façons de faire, le BNQ a déjà des partenariats avec du secteur privé, mais il les contrôle comme organisme neutre et impartial et, lui, son lien est directement avec l'organisme de réglementation. Donc, ça peut être un élément d'une politique. Est-ce que finalement on dit: On continue dans cette politique-là, parce que ça peut-être intéressant de faire affaire avec de l'externe mais dont on est sûrs que l'on contrôle bien, dont on est certains aussi de la façon dont ils travaillent? Ça fait qu'il y a plusieurs éléments comme ça à travers le rapport, mais toujours on ramenait ces points-là qui nous semblent essentiels, parce que, si on parle de HACCP, on parle d'un système scientifique, donc l'évaluation du risque, cette partie-là est cruciale.

Puis je faisais référence aux OGM, je pense que c'est un constat, je n'ai pas la solution, mais, s'il y avait vraiment des études scientifiques qui démontrent hors de tout doute qu'il n'y a pas de problème, dans trois ans, ce serait chose du passé. Prenons... Je donne un exemple. On a, il y a quelques années, dit: Vous ne devez absolument pas rester près d'une tour à haute tension d'Hydro-Québec. Ça a fait un tollé, puis il y avait des maisons à vendre, il y avait des gens... On n'en entend plus parler aujourd'hui. Pourquoi? Parce que ce n'est pas Hydro-Québec lui-même qui a dit: Mon service de recherche, IREQ, ou, etc., va publier une... Non. On s'est tourné vers des organismes impartiaux et on a dit: Pouvez-vous faire une recherche exhaustive? Le résultat démontrant ça, bien, ça a été...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Girard. Dernière petite question. À la page 9 de votre mémoire, vous faites référence à l'étude de Zins Beauchesne. S'il était possible pour vous de nous envoyer une copie au secrétariat de la commission, s'il vous plaît. Et je cède la parole... Donc, je comprends que vous allez le faire?

M. Girard (Jacques): On prend note, bien sûr. Oui, tout à fait.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour à tous et à toutes. Merci pour votre apport à la commission. Moi, je vais poursuivre sur cette... comme vous êtes au plein coeur des HACCP, là, de cette organisation, de ce principe-là. Tout à l'heure, ma collègue a posé la question sur qu'est-ce que vous faisiez, qu'est-ce que ça voulait dire, HACCP, comme vérification, et tout. Quand je vous entends comme tel, si on regarde la question de la sécurité alimentaire, pour ma population du Québec, les citoyens, ou comme consommatrice, c'est vraiment d'être capable de choisir des aliments qui sont... que je sais de quoi ils sont composés, que c'est-à-dire qu'il n'y a pas dedans, ou dessus, ou tout ce que vous voulez, des choses à un risque que je ne veux pas courir ou que... ou du moins je connais.

L'HACCP, de la façon que vous en parlez, oui, c'est une série de normes, c'est une série de façons de faire, des façons d'analyser, d'étudier, de regarder, de suivre au niveau des différents... de facteurs, d'être... avec de l'information, et tout ça, pour rendre un produit encore plus sain. Mais il reste que ça me semble beaucoup orienté sur ? comment je dirais? ? de l'exportation, pour que ce soit qualifié, accepté par les autres. Moi, comme consommatrice, je m'en fous, que l'Europe l'accepte. Ça peut me sécuriser un peu. Je m'en fous, parce que... Surtout, si je réfère à d'autres groupes qui sont venus, on a parlé de biologique, on a parlé de... plus proche des gens, et tout ça, et c'est dans cette perspective-là que je me pose la question.

Parce que, aussi, comment arriverez-vous à nous sécuriser sur un sol qui est complètement délavé, qui n'a à peu près plus rien dedans, et ainsi de suite, qui a été bourré d'engrais chimiques, et ainsi de suite? Il aura beau prendre deux ans, mais je sais fort bien que le potassium, entre autres, ça prend 15 ans à s'intégrer au sol ? je n'en connais pas beaucoup, mais j'en connais un petit peu. Ensuite, qu'est-ce que je vais faire, moi, avec mes cueilleurs de fraises et mes cueilleurs de framboises? Je veux bien la laver, ma fraise, O.K., mais il va falloir que je la lave tellement qu'il n'y aura plus de fraise, quand je vais avoir fini à rejoindre tous les...

Alors, c'est des méthodes qui font que, comme consommatrice, les questions que je me pose... Bon, toute la question des OGM. Vous avez dit, entre autres: Il faudrait qu'il y ait des études poussées. Mais comment ça se fait que c'est sur le marché, alors qu'il n'y a pas d'études poussées? Est-ce que cette vérification-là, ce suivi-là, ces méthodes vont vraiment sécuriser le consommateur? Moi, je vous écoute, puis ça ne me sécurise pas pantoute. Je pense que ça sécurise les acheteurs éventuels, extérieurs. Alors, est-ce que c'est davantage orienté sur des intérêts économiques comme tels d'exportation ou d'import ? parce que c'est des entreprises à caractère économique, là, je... ou est-ce qu'il n'y aurait pas un aspect, là, qui nous échappe qui devrait être rejoint d'une certaine façon? Voilà.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée. M. Girard.

n(10 h 20)n

M. Girard (Jacques): Merci, madame. Et votre question couvre beaucoup de volets et est particulièrement intéressante. D'abord, je voudrais dire: HACCP n'est pas un intérêt économique en soi. Ce système-là a été développé pour assurer la sécurité alimentaire des gens qu'on envoie dans l'espace. Donc, ce n'était pas pour le plaisir de dire: Je suis Pillsbury, et c'est moi qui va le faire. C'était pour s'assurer que ces gens-là ne soient pas atteints d'intoxications alimentaires; parce que perdre deux journées sur une mission comme ça, c'est épouvantable. Donc, c'est un système essentiellement de salubrité et de sécurité.

Maintenant, cette sécurité-là qu'on va faire appliquer, elle ne peut pas aller plus loin que l'état de la science actuel. Et c'est pour ça que je parlais... un des premiers points à la question de Mme Houda-Pepin, l'évaluation du risque. Si le risque n'est pas connu, ou n'est pas géré de façon réglementaire, HACCP ne peut pas le reprendre, si l'étude n'est pas là. Vous parliez tantôt en référence à vos fraises que vous cueillez; si la réglementation autorise, exemple, telle teneur de résidus d'un pesticide, on n'est pas, en aucune façon, placés pour aller dire: Non, nous, on va accepter seulement la moitié de cette teneur-là, parce que c'est un système qui se base aussi sur les données scientifiques et sur la réglementation en place.

Les choses que vous amenez vis-à-vis par exemple des produits biologiques, il n'y a rien qui empêche un produit biologique d'être aussi dans un système HACCP, d'être aussi... d'un côté de salubrité. Il n'y a pas d'opposition entre les deux. C'est une autre façon de faire, c'est une autre façon qui amène ? et un autre constat dont on parlait ? des considérations environnementales à incidence sur la sécurité alimentaire aussi.

Donc, si vous voyez une installation affichant ou arborant une bannière HACCP, ce que ça devrait vouloir dire, pour vous, c'est qu'à l'intérieur de... chez cet éleveur-là, dans cette usine de transformation là ou chez ce distributeur-là, il y a en place des mesures d'hygiène et de sécurité alimentaire qui répondent à des critères généraux de bonnes pratiques hygiéniques qui sont à peu près universels dans les pays industrialisés, et en plus la réglementation, l'état de la science qui dicte la réglementation y est respectée. Mais ça ne veut pas dire qu'ils vont au-delà de ça nécessairement. Je ne sais pas si ça répond.

Mme Robert: Oui. Mais est-ce que l'état de la réglementation évolue suffisamment rapidement, avec les résultats d'études qui se font, et tout ça? On a beaucoup d'études qui sortent tous les jours, et tout ça, mais est-ce que les réglementations suivent? C'est quoi, le laps de temps, généralement?

M. Girard (Jacques): Écoutez, je ne pourrais pas vous dire le laps de temps généralement, mais il y a des gens à l'intérieur de... soit de l'Agence canadienne ou à l'intérieur de services d'inspection comme le MAPAQ, qui sont constamment à l'affût des études de... Et j'imagine qu'ils vont ajuster la réglementation rapidement là-dessus et non pas aller... On ne parle pas de modifier une loi ou de faire quelque chose.

Mais, un point important: l'introduction du principe de précaution maintenant, dans la loi, est un outil important selon moi pour aider justement à... où il y a un doute raisonnable, de dire: Bien, on devrait peut-être modifier, s'abstenir, changer préférablement. Ce concept-là n'était pas dans la loi précédemment. Donc, je pense que là c'est une partie intéressante ou un concept intéressant qui pourrait guider dans vraiment une saine précaution.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Mme la députée? Merci beaucoup, M. Girard. Je vous prie de faire un petit effort de synthèse pour permettre aux collègues d'échanger avec vous. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci beaucoup. Merci de votre présentation. Je vais avoir trois questions, donc qui vont être courtes et, comme la présidente vient de le signifier, les réponses aussi devront être courtes pour que mes collègues puissent avoir la chance aussi d'intervenir.

La première chose, si je comprends bien, c'est que la norme HACCP, c'est une certification internationale. Et vous nous disiez tout à l'heure: On pourra l'exiger des autres pays si effectivement on l'applique ici. Donc, c'est le corrélataire qu'on devra connaître. Quels sont, dans nos principaux partenaires, les pays qui l'appliquent et à quel degré? Ça, c'est la première question.

La deuxième. Plusieurs des intervenants qui sont venus présenter des mémoires ont dit: Cette norme-là, par ses coûts et aussi par le besoin, ne devrait pas nécessairement être appliquée par toute l'industrie agroalimentaire. Qui, d'après vous, devrait l'appliquer, si on parle des producteurs, des transformateurs, restaurateurs, les chaînes d'alimentation, puis je pourrais peut-être dire, avec ironie, le consommateur, parce qu'on nous disait que 50 % des intoxications ou des problèmes se passent à la maison?

Troisième question, puis c'est peut-être celle-là qui ? c'est du factuel, les deux premières ? qui mérite une plus grande réflexion: quand vous nous dites que ce sont des normes qui gèrent le risque, est-ce que, dans ces normes-là, on va jusqu'à gérer la qualité fondamentale du produit?

Je vous donne un exemple: On a connu le cas de la vache folle. On sait qu'il y a... Au Canada, on y va par échantillonnage, contrairement à ce qui se fait... pour tester les animaux, contrairement à ce qui se fait en Europe, où tous les animaux ont été testés. L'entreprise de transformation qui a la norme HACCP, est-ce que cette industrie-là peut confirmer qu'effectivement la viande bovine qu'elle traite n'est pas touchée par l'ESB? Est-ce que ça va jusque-là? Ou ? tout à l'heure, ma consoeur parlait des OGM ? est-ce qu'on peut dire au consommateur qui achète ce produit-là: Il en contient ou il n'en contient pas? Est-ce que la norme va jusqu'à ce point-là ou c'est juste la gestion à l'intérieur de l'entreprise?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci. Je vais commencer avec votre dernière... Non, la norme ne peut pas vous dire: Vous devez obligatoirement marquer les OGM ou: Vous devez garantir qu'il n'y a pas d'OGM. Mais, si vous dites, vous, qu'il n'y a pas d'OGM, la norme va dire: Il fait tout ce qu'il a à faire pour garantir qu'il n'y a pas d'OGM. Je ne sais pas si ça s'intègre... La norme ne peut pas vous obliger à ne pas en avoir, parce qu'il n'y a aucun règlement qui vous oblige ici, au Québec ou au Canada, à ne pas en avoir. Donc, la norme ne peut pas aller plus loin qu'une réglementation. Mais, si, vous, vous prétendez quelque chose, par exemple, bien, vous devez démontrer pourquoi vous le prétendez et le prouver.

M. Rioux: Ça va.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): La deuxième.

M. Rioux: Mme la Présidente, juste...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui.

M. Rioux: Mais au niveau de... l'ESB, de savoir si la viande a été atteinte, est-ce que ça, l'entreprise doit le garantir? Parce qu'on dit: On doit assurer une viande saine à chaque consommateur.

M. Girard (Jacques): On doit assurer à chaque consommateur une viande saine, mais l'entreprise, dans ses opérations, doit se plier à un taux d'échantillonnage prescrit par la loi. Ça, c'est la base. Si elle veut en faire plus, tout à fait correct, mais ce n'est pas à l'entreprise de garantir cela. Un peu dans le même sens que, si l'entreprise A disait: Moi, je le garantis, la loi ne m'y oblige pas, mais je le fais, puis ça me coûte 500 000 $ par année en analyses bactériologiques ou biochimiques, additionnels, qu'est-ce qu'il fait pour compétitionner avec l'entreprise B qui, lui, n'en parle pas puis qui en vend autant, mais qui, lui, ne fait pas le même type d'analyses?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Pour les autres questions, M. Girard.

M. Girard (Jacques): Parfait. Est-ce qu'on peut l'appliquer partout? Oui, on peut l'appliquer partout, bien sûr, si on se donne du temps pour l'implanter et si on le fait rapidement. Il y a des secteurs où il y a plus de problématiques. Par exemple, une ferme où les animaux vont à l'extérieur, où vous recevez des gens, ça peut être plus problématique. Mais il y a des fermes qui le font puis qui l'ont.

Mais il peut y avoir des secteurs... J'ai entendu un fermier de l'Ouest, la première chose qu'il me disait: Je ne pourrai pas appliquer HACCP, parce qu'il faut que je contrôle les pesticides... pas les pesticides, mais les rats, souris, etc. Moi, je fais ça avec des chats, puis, si je produis du lait, je ne devrais pas avoir des chats dans ma laiterie. Ça fait qu'il dit: D'abord, si je n'ai plus de chats, je vais avoir des rats. Mais il y a d'autres façons de contrôler la...

Donc, si les gens veulent constamment trouver des façons de dire: Je ne peux pas le faire, je ne peux pas le faire, ils vont en trouver 5 000, mais c'est faisable. Je ne dis pas que c'est le même degré de facilité partout, mais c'est faisable.

Puis votre première question était qui... en lien avec le consommateur. Oui, vous avez raison. D'ailleurs, il y a des efforts de vulgarisation qui ont été faits par le MAPAQ là-dessus ? puis je pense que c'est une initiative qui date d'il y a un an, deux ans ? de prévenir les gens de bonnes pratiques de sécurité alimentaire à la maison. C'est excellent. Moi, je vous dirais que j'ai un coach à côté de moi. Quand je vais dans un restaurant, le cours que j'ai en me présentant devant un buffet, c'est phénoménal. Ça fait que je vous propose à un moment donné de l'appeler là-dessus, c'est... Mais, oui, le consommateur est tout à fait responsable, et ça a fait partie de notre mémoire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Girard. Mme la députée de Soulanges.

M. Rioux: Mme la Présidente, la première question, à savoir, la certification, quels sont...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il a répondu, M. le député. Vous permettez que votre collègue pose sa question? Il a répondu aux trois. Mme la députée de Soulanges.

n(10 h 30)n

Mme Charlebois: Merci, Mme la Présidente. Je vais abonder un petit peu... Je vais poursuivre la discussion autour de ce que ma collègue a débuté au niveau des consommateurs québécois. HACCP, on parle d'augmenter la confiance et... bon. Ce que je constate, en tout cas mon interprétation, dans votre mémoire et dans les mémoires de certains autres intervenants, c'est qu'on parle beaucoup de la confiance internationale par rapport à la confiance des Québécois en notre système alimentaire, et je me demande si, dans le faible taux d'adoption des démarches faites pour avoir des entreprises qui se conforment aux normes HACCP, si ce n'est pas un facteur justement, le manque de... la perception des Québécois vis-à-vis les normes HACCP. Est-ce que ça pourrait faire un plus? Est-ce qu'on met assez d'emphase sur le bienfait d'HACCP vis-à-vis des consommateurs québécois et non pas juste l'étranger?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Probablement qu'on n'y met pas effectivement suffisamment d'emphase. Et je dirais, à titre d'exemple, on a organisé un petit-déjeuner l'autre jour où on a demandé à une entreprise certifiée de venir exposer les bienfaits du système HACCP qu'il a eu dans son entreprise. Mais l'audience n'était pas majoritairement des consommateurs, au contraire c'était plus peut-être des jeunes, mais eux ont commencé à comprendre que, par l'exemple donné, oui, il pouvait y avoir des bienfaits aussi dans l'entreprise.

Ce serait intéressant de le poursuivre à un autre niveau aussi et de dire comment le consommateur peut peut-être avoir un degré d'assurance accru. Pas que ça change tout complètement vis-à-vis le système de sécurité alimentaire, parce qu'un qui bénéficie beaucoup aussi de l'implantation de HACCP, selon moi, c'est l'organisme de réglementation quand il gère ces risques. Il y a le volet inspection et il y a un volet de dire aussi à l'entreprise: Prends-toi en main, prends tes responsabilités, avertis ton monde de ce qu'il faut faire, parce que, nous autres, on ne veut pas constamment faire la police et taper sur les doigts. Ça va être beaucoup plus facile si tu es responsabilisé et si tu es capable, toi-même, d'appliquer ces principes-là.

Et on ne devrait pas avoir deux classes, je suis entièrement d'accord avec vous. Comme citoyen du Québec, on a droit d'avoir des aliments tout aussi salubres que ceux qui sont exportés.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très rapidement, Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Très rapidement, à la page 7 de votre mémoire, vous nous parlez de conformité des produits alimentaires importés aux normes canadiennes, québécoises. Est-ce qu'on devrait faire des inspections, à votre avis, avant d'arriver à la frontière, avant d'arriver au Québec, ou une fois les produits arrivés sur place?

M. Girard (Jacques): En fait, ça, c'est le terrain de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, tout ce qui touche... et habituellement ça se fait. Si ce n'est pas fait sur place, c'est qu'il y a des ententes et que l'Agence garantit ? puis je dis bien «l'Agence garantit», là ? que ce qui est fait à l'étranger comme inspection est satisfaisant selon ce qu'elle demande.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. On vient d'évoquer le fait que finalement, lorsque le consommateur exige quelque chose, on lui donne. Ne pensez-vous pas que de demander au gouvernement d'imposer une norme, c'est ajouter des charges supplémentaires, je vous dirais, un petit peu contre la volonté des gens, tandis que, si le consommateur, lui, fait état de ses besoins, les entreprises vont adopter la norme HACCP? Un petit peu comme dans le cas des normes ISO. Les normes ISO évidemment ont été transférées d'Europe vers l'Amérique, les entreprises y ont adhéré, et finalement on a découvert là-dedans qu'il y avait de la formation, on améliorait la qualité, la productivité, puis tout d'un coup les municipalités les ont adoptées, le gouvernement l'a adopté aussi, puis finalement, comme ça n'a pas été imposé, bien, tout le monde y adhère parce que ça ne venait pas du gouvernement. Donc, c'était plus facile.

Là, si le consommateur l'exige, lui, en tant que client, ne pensez-vous pas qu'on devrait plutôt se tourner soit vers le client et faire les liens entre les clients et les entreprises plutôt que d'arriver avec une norme imposée, sachant très bien que de toute façon tout le monde a intérêt à bien faire son travail et à produire des produits d'une excellente qualité?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci, M. Soucy. En fait, à votre question, je pense qu'on ne demande pas spécifiquement demain matin au gouvernement d'imposer ça. Ce que l'on met en garde par contre, c'est que les États-Unis l'imposent et à eux puis ils l'imposent à la frontière, et, si on n'est pas au courant, on ne pourra plus exporter. Ça, c'est un risque.

Mais l'obligation, elle ne viendra pas nécessairement du gouvernement, elle peut venir d'un groupe qui commerce avec nous. Et ça, il faut être très, très attentif avec ça. Ce qu'on disait par contre: si on sent qu'une partie importante de notre économie risque d'être affectée par ça et que, tôt ou tard, on va y arriver, c'est le moment. Et c'est là que je rejoins l'autre partie de l'exposé, de dire: Établissons une politique, donnons-nous un horizon, un échéancier, mais ne se demandons pas: On y va-tu? On n'y va-tu pas? Je pense qu'on va devoir y aller, mais faisons-le clairement puis pas en se cachant à moitié.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Girard. Alors, le temps alloué à votre groupe étant dépassé, je vous remercie. Je remercie M. Rousseau, Mme Drouin et Mme Dupuis pour votre contribution aux travaux de la commission et j'invite les représentants du Conseil de l'industrie laitière du Québec inc. à se présenter, s'il vous plaît. Merci.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): S'il vous plaît, vous pouvez vous asseoir. À l'ordre, s'il vous plaît! Vous pouvez vous asseoir, les représentants du Conseil de l'industrie laitière du Québec.

M. Nadeau. Alors, M. Pierre Nadeau, président-directeur général du Conseil de l'industrie laitière du Québec, s'il vous plaît nous présenter la personne qui vous accompagne, et vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et 20 minutes d'échange avec chaque groupe parlementaire.

Conseil de l'industrie laitière
du Québec inc. (CILQ)

M. M. Nadeau (Pierre): Je vous remercie, Mme la Présidente. J'ai à mes côtés Charles Langlois, vice-président du Conseil de l'industrie laitière du Québec. J'aimerais aussi vous présenter, derrière moi, comme observateurs, plusieurs membres de notre conseil d'administration.

Le Conseil de l'industrie laitière du Québec est une association d'entreprises industrielles et commerciales qui, au Québec, s'occupent des différentes phases de la fabrication, de la transformation, de la distribution du lait, et des produits laitiers, et de tout produit alimentaire dérivé principalement du lait. Notre association compte plus de 70 entreprises laitières qui traitent de près de 50 % du lait produit au Québec et une cinquantaine d'entreprises de services à titre de membres associés. Nos entreprises laitières représentent l'éventail le plus complet d'entreprises, allant de la très petite locale et régionale à la très grande implantée au pays et à l'étranger oeuvrant sur des marchés internationaux.

Maintenant, quant aux systèmes d'inspection. Le système canadien et québécois d'inspection des aliments a contribué, dans le secteur laitier, à la bonne renommée de nos produits sur le plan international et auprès des consommateurs canadiens et québécois. Toutefois, nous estimons que l'inspection et le contrôle vont devenir de plus en plus nécessaires, complexes et dispendieux, car l'évolution de la technologie demandera une emphase non plus seulement sur l'aspect salubrité et innocuité, mais sur l'authenticité du produit et sa valeur nutritive. Afin de pouvoir travailler avec compétence, les services gouvernementaux d'inspection devront investir dans les moyens de détection, d'analyse, dans le savoir et la formation. Les principaux enjeux, quant à nous, sont celui de la connaissance et celui de la collaboration internationale. Pour connaître le succès, l'emphase doit être mise sur la prévention.

n(10 h 40)n

Les produits alimentaires de synthèse, composés à partir d'ingrédients, seront de plus en plus nombreux pour des raisons de fonctionnalité et de coût, et ici nous ne parlons par d'OGM, mais tout simplement d'aliments recomposés à partir de protéines, d'huile, de glucides, etc. La capacité de produire des aliments à vocation ou fonction déterminée est avantageuse, et nous voulons nous assurer que le Québec demeure un chef de file dans ce secteur.

Le Québec devrait être un chef de file également dans la recherche d'harmonisation avec les autres provinces, sur le plan national et sur le plan nord-américain. Les pourparlers entre le Canada et les États-Unis pour l'établissement d'équivalences devraient être plus transparents. Nous devrions connaître les enjeux et être consultés au cours de ces négociations. De plus, nos systèmes d'inspection devraient faire l'objet d'audits par des firmes indépendantes et d'évaluation de performance à tous les cinq ans pour s'assurer de demeurer à l'avant-garde dans ce domaine. Nous favorisons de façon générale la méthode HACCP, mais nous croyons qu'elle peut être adaptée selon les situations spécifiques.

Finalement, nous souhaitons que les changements réglementaires s'inspirent le plus possible des normes internationales pour des raisons de commerce, mais aussi pour la mise en place de contrôles efficaces. Le Québec et le Canada ne pourront pas, dans l'avenir, agir seuls. Toutefois, une question demeure importante: devons-nous nous harmoniser avec les règles américaines, notre plus important partenaire commercial étant les États-Unis, ou nous harmoniser avec les normes internationales, du genre Codex, celles-ci devant à plus long terme être la norme de commerce? Dans le domaine laitier, la position du Québec, quant à nous, devrait être d'inciter le Canada à négocier des normes harmonisées avec les Américains sur la base des normes Codex, en général, faute de quoi, de s'entendre pour adopter ces normes-là au moins à long terme.

Maintenant, sur la question de la traçabilité. L'expérience des crises alimentaires en Europe a mis à jour l'interdépendance des filières et a créé un besoin de garantie sur les produits alimentaires achetés. La traçabilité est un système qui permet de maîtriser les risques a posteriori grâce à un retrait ciblé de produits non conformes, mais qui ne doit en aucun cas se substituer pour une analyse des dangers a priori, grâce notamment au système HACCP. Nous estimons que l'industrie laitière est déjà passablement prête pour un système de traçabilité, puisque chaque producteur de lait est identifié, des échantillons de lait sont prélevés à chaque livraison, les citernes de camions livrant sont analysées et les producteurs composant ce chargement connus. À l'usine, les silos de lait sont identifiés, les productions, de même, les produits sont codés et les lieux de livraison sont connus.

Le Québec doit donc s'intéresser à cet enjeu et mettre en place un cadre général volontaire sur la traçabilité au niveau de tous les secteurs de l'agroalimentaire, qui jetterait les bases communes. Le défi sera de mettre en place un système compatible avec celui instauré par le Canada et répondant aux exigences au niveau international. Un travail important devra également être fait pour informer et former les entreprises à ce nouveau concept, surtout les petites et moyennes entreprises. La traçabilité en industrie laitière n'est pas une question très débattue, car, en toute humilité, nous considérons, chez nous, qu'elle est déjà là. La question plus préoccupante pour nous est celle de la biosécurité qui nécessitera des procédures de contrôle beaucoup plus poussées et générera des coûts importants pour contrer le risque terroriste.

Sur l'étiquetage. La juridiction est partagée concernant l'étiquetage entre Santé Canada, pour les questions d'étiquetage nutritionnelles et allégations santé, et le Québec, en ce qui concerne... a trait aux dénominations du produit, déclarations de teneurs, entre autres les gras, les vitamines, etc., les volumes, les poids, nom et adresse du manufacturier, numéro d'usine et autres. De façon générale, l'industrie s'est adaptée aux exigences québécoises tout en souhaitant une harmonisation entre les réglementations des différentes provinces. Plusieurs entreprises vendent sur l'ensemble du marché canadien, et les exigences des différentes provinces, tant pour l'étiquetage que pour les autres normes, génèrent des coûts qu'on considère non justifiables.

Plusieurs normes au système de reconnaissance existent pour les produits biologiques. La norme québécoise semble être bien acceptée. La problématique n'est pas au niveau de l'étiquetage, mais dans celui du contrôle des déclarations par des manufacturiers plus ou moins biologiques.

Il y a encore beaucoup de questions à résoudre avant de normaliser les déclarations concernant les OGM. Comme les producteurs laitiers mettent en commun le lait, la source du lait peut varier considérablement, et par conséquent il sera toujours difficile, voire impossible d'affirmer avec certitude légale qu'un produit laitier est libre d'OGM. L'Office des normes générales du Canada a créé un comité sur l'étiquetage volontaire et publicité des aliments qui sont ou ne sont pas des produits du génie génétique. Ce comité existe depuis cinq ans et est composé de représentants de tous les secteurs intéressés: industriels, consommateurs, producteurs, gouvernements, commerces au détail, et ainsi de suite. Le comité a déjà établi des distinctions entre les différents aliments selon des aliments mono-ingrédients, pluri-ingrédients, auxiliaires de fabrication, génie génétique, ingrédients issus de génie génétique, produits biologiques vétérinaires, etc. Le rapport final du comité sera publié en février, nous croyons, et il constituera, pour nous, la meilleure base scientifique et politique pour toute étude future. Le CILQ est conscient du sérieux de ce comité et supporte son travail et ses conclusions.

Notre conseil remercie la commission de l'opportunité qui lui est donnée de soumettre ses observations concernant les systèmes d'inspection, la traçabilité et l'étiquetage. Nous demeurons convaincus que les défis de demain relèvent de la compétence et du savoir, de la capacité de s'harmoniser tant à l'échelle canadienne qu'internationale. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Nadeau. Alors, je cède la parole à mon collègue le député de Nicolet-Yamaska pour les échanges.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. M. Nadeau, M. Langlois, bonjour. Permettez-moi aussi de saluer la présence de M. Désilets, qui est de la région de Nicolet, ici. Ça me fait plaisir de le saluer. Puis je sais qu'il est membre de votre conseil d'administration.

Premièrement, j'aimerais vous poser la question suivante. À propos de l'inspection des aliments, vous dites que vous vous attendriez à une meilleure transparence dans les pourparlers entre le fédéral, c'est-à-dire le gouvernement canadien, et les États-Unis en matière d'inspection des aliments. Voulez-vous un peu élaborer là-dessus, s'il vous plaît.

n(10 h 50)n

M. M. Nadeau (Pierre): Oui, je vous remercie. La question soulevée portait sur les normes d'équivalence qui sont négociées entre le Canada et les États-Unis. Et les normes d'équivalence sont négociées par l'Agence canadienne d'inspection des aliments avec l'appui d'un représentant du Québec et un représentant d'une autre province, je crois que c'est l'Ontario. Ces pourparlers-là se font généralement entre fonctionnaires, mais, contrairement à d'autres domaines, il n'a pas donné lieu à des négociations ou des consultations préalables, c'est-à-dire qu'on ne connaît pas la teneur détaillée des négociations au niveau équivalences. Et, comme nous sommes dans un domaine qui est assez technique en termes de négociation d'équivalences, on croit que ce serait extrêmement utile pour les négociateurs canadiens et québécois de s'inspirer de l'industrie avant chacune des négociations et de les tenir informés.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Vous dites aussi, dans votre mémoire, que les systèmes d'inspection sont performants mais devraient faire l'objet d'une évaluation de performance par une firme indépendante à tous les cinq ans. Ma question est simple: pourquoi?

M. M. Nadeau (Pierre): Bien, c'est parce que, essentiellement, pour nous, c'est qu'il y a une question de principe: plus le système d'inspection va être efficace, plus nous allons assurer une industrie forte et avec une réputation qui va permettre d'exporter. Alors, comme vous le savez sans doute, comme nous sommes membres de l'OMC, il y a des inspections qui se font entre les différents pays, et ces inspections-là, elles sont faites généralement de façon très détaillée. Et on fait des comparaisons. C'est pour établir une certaine équivalence et c'est pour aussi reconnaître si, oui ou non, l'inspection des différents pays rencontre des normes minimales.

Ce qui est recommandé dans notre soumission, c'est de s'assurer qu'on va au-delà de ça et qu'on pourrait nous-mêmes, de façon très stratégique, décider que: Ah! on a un système d'inspection, mais pourquoi on ne fait pas nous-mêmes un audit à tous les cinq ans pour s'assurer que ça répond à nos exigences de toujours être à la tête, en avant des autres? Et un système d'inspection qui est de plus en plus performant. C'était la suggestion, la recommandation.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Puis, selon vos informations ou vos connaissances, pourquoi cinq ans? Est-ce que ce ne serait pas mieux trois ans, supposons? Parce que, quand on veut protéger la sécurité alimentaire, on dit: Bon, bien là on n'attendra peut-être pas cinq ans parce que cinq ans, c'est quand même assez long. Mais je ne suis pas un expert dans le domaine, là, j'attends votre réponse là-dessus.

M. M. Nadeau (Pierre): Moi, non plus, M. Morin. Cinq ans, trois ans, je pense que l'essentiel, là, c'était de donner la suggestion, la recommandation et de dire peut-être: Il faudrait s'y attarder. Et de décider nous-mêmes si trois ou cinq ans, c'est mieux, ce n'est pas si important que ça. Je pense que c'est le principe qui comptait.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ça va, je comprends bien. Je voudrais aussi vous poser une question sur la traçabilité. Pouvez-vous élaborer un peu le système de traçabilité dans le domaine du lait?

M. M. Nadeau (Pierre): Oui. J'ai bien peur que je vais répéter un peu ce que je vous ai dit un peu tôt...

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Bien, d'abord, pour éviter que vous répétiez, tantôt je vous écoutais dans votre présentation, et vous disiez: Bon, notre système de traçabilité de l'étable jusqu'à la table... À partir du moment où le lait est recueilli par le transformateur à la ferme, est-ce que le suivi qu'on fait de ce lait-là, qui vient de la ferme X, et est-ce que... On fait un suivi jusqu'à la transformation. Mais, quand on le recueille avec le camion ou l'immense camion, est-ce qu'on peut faire un suivi de traçabilité après avoir mélangé avec la ferme suivante? Je ne sais pas si vous comprenez bien ma question, là?

M. M. Nadeau (Pierre): Oui, très bien. Oui. D'abord, je vais répondre... ou je vais en profiter pour soulever une question, et c'est celle que la traçabilité, telle qu'on la décrite, répond à nos besoins avant et jusqu'à ce que le produit soit fait chez nous. Après, aucun contrôle; avant, contrôle quand même assez limité. Et je pense que vous avez soulevé ça, c'est vrai, il y a un contrôle limité avant en termes de traçabilité. On peut savoir... Par la mise en commun dans le même camion, on peut retracer qu'il y a du lait provenant de trois ou quatre producteurs dans le même camion. Après analyse, on peut savoir... s'il y a un problème, on peut retourner auprès des quatre producteurs théoriquement et leur demander leurs échantillons. C'est à ce moment-là qu'on peut faire les études et conclure d'où vient le problème, si problème il y a.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ce qui veut dire aussi que, quand il y a cueillette du lait à la ferme X, celui qui va faire la cueillette prend un test, s'il a une qualité... Supposons que la qualité est altérée, là, du lait, on s'en aperçoit tout de suite?

M. M. Nadeau (Pierre): Je vais demander à M. Langlois d'élaborer un peu là-dessus.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Langlois.

M. Langlois (Charles): Merci. De la façon que ça fonctionne pour les fins de l'approvisionnement, c'est qu'à chaque fois que le camion arrête chez un producteur il prend un échantillon de lait. Et normalement le camionneur, selon notre réglementation, qu'on appelle l'essayeur, doit évaluer la qualité du lait d'un point de vue organoleptique: est-ce qu'il y a des senteurs? est-ce qu'il y a des éléments en suspension? Il en fait une évaluation, là, de visu. Et normalement, quand qu'un lait a des problèmes... Parce qu'il faut avoir à l'esprit que le lait est dans un contenant fermé qu'on appelle le gros réservoir. Quand qu'on le rouvre, s'il y a des problèmes, souvent on le voit tout de suite juste par l'odeur.

Donc, il y a un échantillon, là, que le lait est mis dans le camion, il est ramassé. On fait ainsi tout le circuit. On va mener le camion à l'usine, et tous les échantillons sont restés à l'usine, de sorte que l'usine, à cette heure, une fois qu'elle reçoit le camion, elle peut faire un certain nombre d'analyses pour vérifier la qualité du lait, entre autres au niveau des antibiotiques, et accepter ou rejeter le camion. Et, bien entendu aussi, la personne responsable à l'usine, quand le camion arrive, fait sa propre évaluation organoleptique du lait. Donc, elle rouvre, elle regarde: y a-tu des éléments en suspension? y a-tu des odeurs qui sont problématiques? Et, après ça, bien, une fois que le lait est rentré à l'usine, qu'il a été accepté, normalement on sait, ce camion-là, qui était dedans, quel était le volume de lait pour chacun des producteurs, et ça, c'est répertorié. Après ça, bien là on rentre dans le processus de fabrication à l'usine, et ça aussi, c'est suivi. Il y a des lots de produits et c'est tout comptabilisé par les rapports de production.

Donc, au bout de la chaîne, il est possible, pour nous, s'il y a un problème avec un produit donné sur la tablette, de reculer à l'usine, d'identifier dans quel camion c'est venu puis éventuellement peut-être dire: Bien là il y a un problème avec ce groupe de producteurs là. On l'a déjà vu dans le passé avec certains types de produits, là.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): De retracer effectivement le...

M. Langlois (Charles): Je vous donne un exemple. On a déjà vu dans le passé, dans des produits biologiques, où ce qu'on ne comprenait pas comment il se fait que certains produits ne duraient pas le nombre de jours qu'ils devaient durer en tablette. Mais, quand qu'on a fait le suivi par en arrière, on s'est aperçus qu'il y avait un groupe de producteurs qui produisaient un lait qui avait des bactéries dedans et qui ne pouvaient pas être tuées par la pasteurisation, et là ils ont travaillé avec ce groupe-là pour éliminer cette problématique-là. Donc, c'est possible.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Je ne sais pas si vous avez suivi hier la commission. Les médecins vétérinaires de pratique sur les fermes sont venus ici, puis un des médecins vétérinaires a dit que, dans certaines fermes ? sans accuser personne ? il retrouvait quelquefois des médicaments qui n'avaient pas été prescrits et des médicaments qui passaient par les frontières, qui se retrouvaient dans les étables. Bon. N'accusons pas personne, on n'est pas là nécessairement pour ça. Mais, si, mettons, le producteur détecte une maladie quelconque chez l'animal et utilise, selon sa propre technique, le médicament en question sans avoir certaines normes, il y a des conséquences. Il y a des conséquences, exemple, pour le lait, supposons. Est-ce que vous êtes capables de détecter... Vous m'avez dit tantôt qu'on peut détecter à l'odeur, mais est-ce que c'est détectable?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Rapidement, s'il vous plaît.

M. Langlois (Charles): Sur les pratiques à la ferme, dans la ferme, on n'a pas de contrôle dessus. Parce qu'il faut avoir à l'esprit que le lait, au Québec, il est mis en marché collectivement par les producteurs, les usines n'ont aucun lien directement avec les producteurs individuels. Donc, tout le contrôle de la qualité à l'intérieur de la ferme, que ce soit au niveau vétérinaire, que ce soit à d'autres niveaux, c'est les organismes de producteurs, comme la Fédération des producteurs de lait ou la coopérative, qui donnent les services aux producteurs. Donc, ces pratiques-là, nous, comme industriels, on n'a pas autorité pour aller à l'usine faire... aller à la ferme faire les outils, les contrôles. On n'a pas cette autorité-là.

n(11 heures)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie. Ça termine le bloc de 10 minutes.

M. Nadeau, vous avez dit dans votre présentation qu'il fallait aller vers un cadre volontaire de traçabilité. Je souligne le mot «volontaire». Est-ce possible d'avoir un système de traçabilité volontaire? C'est quoi à ce moment-là, la raison d'être du système lui-même si on n'est pas capable de tracer l'origine de chaque vache, dans le cas actuel, là, puisqu'on parle de la traçabilité dans le domaine bovin? Et aussi vous savez très bien qu'au Québec, puisque vous interpellez le Québec pour agir à l'avant-garde, on n'a pas attendu justement qu'il y ait un système volontaire et qu'on a procédé systématiquement à la traçabilité de tous les bovins au Québec.

M. M. Nadeau (Pierre): La question va se limiter au domaine du lait, mais il n'y a pas de doute que la traçabilité au niveau des bovins influence éventuellement notre industrie. Alors, je suis bien d'accord, la recommandation qui a été faite au niveau volontaire, c'était pour permettre à la majorité des membres chez nous de s'y conformer de façon, disons, adaptée à leurs besoins, à leurs capacités.

Le Conseil de l'industrie laitière représente un très grand nombre de très petits fromagers, et, pour la question de traçabilité, je pense que la recommandation que nous avons faite était plus dans le sens de respecter leurs capacités de se rendre à ce niveau-là. Mais il est évident que le plus rapidement possible, le mieux ça va être pour nous d'avoir un système de traçabilité dont on va tous être fiers.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous avez aussi dit que vous ne pouvez pas garantir que les produits laitiers sont libres d'OGM. Mais, en même temps, vous avez dit tantôt, dans une réponse, que vous êtes capables de détecter... Lorsque le lait est mélangé dans les citernes, vous êtes capables de détecter s'il y a un problème, de remonter à la source. Est-ce que vous ne savez pas si les producteurs qui vous fournissent du lait ont aussi des OGM? Est-ce que cette information ne vous est pas disponible?

M. M. Nadeau (Pierre): Non, l'information n'est pas disponible, parce que la détection des OGM, comme vous savez, est très difficile, et il faut s'entendre d'abord sur une définition et quel est le seuil qu'on va accepter pour la déclaration d'avoir ou non des OGM. Le problème que nous avons, c'est que, si on produit des étiquettes à l'effet que telle fromagerie... Si on prend une fromagerie comme exemple, telle fromagerie a un produit qui est libre d'OGM, et la mise en commun du lait fait que, aujourd'hui, on reçoit du lait d'un certain nombre de producteurs, mais, demain, ça peut varier. Bon. C'est le système de mise en commun. On peut retracer le lait, mais, à ce moment-là, il faudrait refuser le lait sur la base de ce qui est mesurable, un; deux, sur la base de l'OGM. Et présentement notre convention collective ne nous permettrait pas de refuser du lait pour des raisons de... qu'elle contient des OGM. C'est ce qui cause les difficultés...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mais vous pouvez demander cette information et vous pouvez l'obtenir que... Vous pouvez l'obtenir, mais c'est juste la convention qui vous interdit de refuser le lait pour cause d'OGM, c'est ça?

M. M. Nadeau (Pierre): Oui, bien, c'est ça, mais il y aurait possibilité à la limite de demander une déclaration formelle de chaque producteur, et, lorsque votre camion arrive, vous avez la déclaration formelle de chaque producteur: libre d'OGM. Le problème que nous avons au niveau des OGM, c'est que... c'est la question de si, oui ou non, on peut le mesurer, et, en toute bonne foi, le producteur pourrait dire qu'il est libre d'OGM, mais, en réalité, on peut en recevoir, des OGM.

Le problème qu'on a avec les OGM, c'est un problème de légalité. C'est qu'on veut être capables d'informer le consommateur. On croit que c'est notre devoir de dire au consommateur si, oui ou non, ce qui paraît sur l'étiquette est vrai. Mais, si on dit qu'on a un produit libre d'OGM, il faut être absolument sûr qu'il est libre d'OGM. Et, s'il n'est pas libre d'OGM, le problème retombe sur les épaules du fabricant, et c'est malheureux et ce n'était pas intentionnel. Ce n'était pas l'intention du fabricant de déjouer le consommateur ou de tricher le consommateur. L'intention, à l'heure actuelle, c'est de donner une information qui est aussi claire et aussi limpide que possible.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Nadeau. Je voudrais souligner que, parmi vous, parmi les gens qui vous accompagnent, il y a M. Donat Roy, qui travaille avec Saputo depuis de nombreuses années et qui a été honoré pour le mérite... cette année, le mérite agricole. Alors, félicitations. Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci, Mme la Présidente. Bonjour et merci pour votre présentation. Et je vais descendre quelques points, faire un portrait global, un résumé en trois lignes ? ça va être très résumé ? et vous me direz ensuite ce que... juste commenter mon observation.

À la question: Croyez-vous qu'il est important de généraliser l'utilisation de la méthode HACCP? vous nous répondez que oui. Si on vous demande: Est-ce que le système québécois d'inspection est suffisamment harmonisé? vous nous parlez de s'harmoniser avec les règles des États-Unis. Et, si on vous parle d'étiquetage, bien là, vous nous parlez d'une base volontaire.

Je vous ramène un petit peu la question que j'ai posée aux intervenants précédents: Est-ce que la méthode HACCP, est-ce que l'inspection et la traçabilité est faite seulement en fonction de notre commerce à l'étranger ou préconise aussi certaines normes de qualité, si on peut dire, pour nos consommateurs québécois? Est-ce que cette base-là a été davantage développée du fait qu'on fait beaucoup de commerce à l'étranger? Et je pense que le commerce du lait et des produits transformés doit être assez grand à l'étranger. Est-ce que ces questionnements-là se font sur la base de nos consommateurs québécois d'abord et ensuite le commerce à l'étranger ou l'inverse?

M. M. Nadeau (Pierre): Je vais parler pour notre industrie. D'abord, la première chose, c'est que vous avez soulevé une certaine incongruité, et, oui, on peut dire que, dans une certaine mesure... mais, ça s'explique par le style de membres que nous avons. Il ne faut pas, et c'est très important, penser que, quand on pense exportation, on ne pense qu'aux gros manufacturiers. Nous avons des gens qui ont des petites usines et qui exportent à l'étranger et nous en sommes fiers. Néanmoins, avec la décision de l'OMC, de l'année passée... ou de décembre 2002, l'exportation des produits laitiers est très limitée, et c'est surtout en fonction du fait qu'on ne peut plus exporter en ayant des prix qui sont moins que les prix domestiques. Alors, à ce moment-là, il faut exporter aux mêmes prix que les prix domestiques. Donc, on doit acheter le lait au même prix que le prix domestique pour l'exportation. Ça a limité et ça a limité considérablement les exportations qu'on faisait.

Néanmoins, on se dit que non seulement est-il encore possible d'exporter dans des créneaux bien particuliers, parce qu'il y a encore beaucoup d'Américains qui s'intéressent aux fromages québécois, même s'ils les paient quand même assez cher... L'avantage que nous dérivons d'avoir des normes généralisées ou harmonisées avec les autres provinces, c'est que l'échange avec les autres provinces pourrait nous avantager grandement. Et il y a des aspects de notre industrie, qui est bien au-delà des autres industries dans les provinces canadiennes... entre autres, pour les fromages fins, il est possible pour nous d'avoir une longueur d'avance qu'il est presque impossible pour les autres d'atteindre. Et, s'il faut, à chaque fois qu'on traverse une province avec des populations qui varient grandement... Si on vend en Ontario, ça va parce qu'il y a quand même 11 à 12 millions de personnes, mais, si on veut avoir des règles qui sont différentes puis on veut aller en Saskatchewan, bien là, vous tombez à beaucoup moins de personnes.

n(11 h 10)n

Alors, en réalité, ce qu'on demande, c'est qu'il y ait d'abord une harmonisation des règles à tous les niveaux pour pouvoir en profiter. Notre secteur industriel pourrait en profiter grandement dans les autres provinces. C'est la raison pour quoi on favorise l'harmonisation au niveau canadien. Pour les mêmes raisons et dans l'espoir qu'éventuellement on arrivera à des solutions qui vont nous permettre d'exporter, on espère avoir des règles harmonisées avec les Américains, dans un premier temps, et avec le reste du monde ultimement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Nadeau. Alors, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, messieurs. Moi, je me réfère au début de votre présentation. Ça m'a beaucoup intéressée parce que... C'est sûr que vous nous avez répondu sur toutes les questions de sécurité alimentaire, la question par rapport à la traçabilité, et tout ça.

Le début de votre mémoire, à la fin de la page 4, vous nous dites que «l'inspection et le contrôle vont devenir de plus en plus nécessaires, complexes et dispendieux, car l'évolution de la technologie demandera une emphase, non plus seulement sur l'aspect salubrité et l'innocuité, mais sur l'authenticité du produit et sa valeur nutritive». Fondamentalement, qu'est-ce que vous nous dites par ça?

M. M. Nadeau (Pierre): Deux choses: on va parler d'authenticité et ensuite de valeur nutritive. Authenticité, c'est qu'il y a des normes bien spécifiques pour les produits laitiers. Les normes existent, elles sont dans la réglementation. Alors, quand vous avez un fromage, il y a une limite dans ce que vous pouvez faire et, quand vous avez un lait, il y a des limites dans ce que vous pouvez faire. Si vous avez un lait, par exemple un lait de consommation, et, si vous ajoutez un grain de sel, un simple grain de sel, dans votre litre de lait, vous n'avez plus la possibilité de l'appeler lait.

Une voix: C'est merveilleux.

M. M. Nadeau (Pierre): Oui. Alors, ce sont des normes qui ont été encouragées par l'industrie pour s'assurer de l'intégrité, hein, du produit. Le problème par contre, c'est que, aujourd'hui, avec les aliments fonctionnels, où on pourrait ajouter des éléments importants dans nos produits laitiers, c'est un peu comme si on s'était dit: On s'est doté d'instruments favorisant le produit laitier et la reconnaissance du produit laitier comme étant extrêmement pur, mais, par contre, si on voulait ajouter des éléments fonctionnels pour redoubler la valeur, si on veut, du produit, on serait limités, on ne pourrait pas à l'heure actuelle.

Mme Robert: ...ajouter des choses fonctionnelles pour doubler la valeur...

M. M. Nadeau (Pierre): Si, par exemple, on voulait... Ah! bien, si on voulait ajouter, par exemple, des oméga-3.

Mme Robert: C'est quoi, ça? Des antioxydants, des trucs comme ça?

M. M. Nadeau (Pierre): Des oméga-6 qui sont reconnus comme... Là, je ne suis pas technique, madame, des oméga-3, ce sont des aliments fonctionnels qui permettent aux personnes de limiter... Charles, peux-tu m'aider?

M. Langlois (Charles): Essentiellement, madame, c'est que, de plus en plus, avec le développement des technologies, on peut modifier les produits par soit l'ajout ou soit par la segmentation de certaines composantes du produit pour en améliorer les vertus, soit qu'elles apportent des vertus pour réduire les taux de cancer, réduire le taux de cholestérol ou encore augmenter certaines capacités contre les maladies, etc., là. Les produits probiotiques par exemple, c'est des yogourts qu'on peut rajouter des bactéries dedans, qui va faire favoriser le développement de bactéries internes, qui va aider la personne qui en mange à avoir une meilleure santé, globalement.

Donc, il y a tout un développement qui se fait, technologique, qu'on appelle les aliments fonctionnels ou les nutriments, qui sont à la base de produits laitiers, mais que, compte tenu qu'on les bonifie de d'autres éléments pour augmenter notre lutte contre des maladies quelconques, bien, à ce moment-là, bien, on a un nouveau produit devant nous, mais il faut l'appeler autrement. Je pense que c'est sur ce que M. Nadeau voulait venir, et ça, à ce moment-là, l'industrie va devoir mettre en place tout un mécanisme pour s'assurer que le contenu du produit est vraiment là et que les vertus qu'on lui donne, à ce produit-là, sont vraiment là aussi. Est-ce que ça répond à votre question?

Mme Robert: Oui, je comprends. Donc, c'est dans ce sens-là, l'authenticité du produit puis sa valeur nutritive. Cette chose-là, qui est apparue, les questions de vitamines ajoutées, de calcium par exemple, qui ont été rajoutés. Bon, c'est des trucs, des choses qu'on a vu arriver ces dernières années, qui émanent beaucoup de la publicité, beaucoup plus que si on regarde notre grand guide canadien de nutrition, ils n'en parlent pas du tout. Alors, c'est ça, là, il va falloir, comme enjeu de société, se poser la question.

Parce que c'est ça, le problème. Je pense que notre problème de consommateur... La salubrité, l'innocuité, etc., pour le consommateur, règle générale, ça ne lui pose pas de problème, au Québec. Pour lui, c'est réglé, c'est là. Mais, pour ce qui est de ce que contient le produit, là il se pose de plus en plus de questions, parce que ça évolue très vite, ça se complexifie très vite, etc. On est rendus là d'une certaine façon. En tout cas, merci de votre réponse, on n'a pas de... C'est l'explication comme telle que je voulais avoir là-dessus.

À la page 10, lorsque vous parlez des OGM, vous notez: «Il n'y a pas lieu de traiter les OGM de façon différente des autres aliments.» Vous voulez dire par là?

M. M. Nadeau (Pierre): On veut dire qu'il faut faire une analyse de risque. Il faut étudier les aliments sur sa base scientifique. Au fait, les OGM sont traités de façon différente mais sur une base scientifique. La seule différence qu'on peut voir, c'est parce qu'on traite d'un aliment ou d'une forme de transformation d'aliments qui dépasse la connaissance de la plupart des Canadiens. Donc, pour nous, pour les gens qu'on représente, ça évoque toutes sortes d'idées, des idées qui peuvent être acceptables, d'autres idées qui scientifiquement ne sont pas acceptables. Alors, l'essentiel, pour nous, c'est de répondre aux besoins des consommateurs, de répondre aux attentes des consommateurs et de leur donner essentiellement, pour continuer à survivre, ce que les consommateurs demandent.

Quant aux OGM, idéalement, hein, si on faisait abstraction des perceptions qui sont peut-être erronées ou pas erronées, ce qu'on dit tout simplement, c'est qu'on devrait être guidés par les mêmes principes: le principe de précaution, le principe de la science. C'est la science qui détermine si, oui ou non, il y a risque inhérent avec certains produits ou un grand risque versus un plus petit risque. Alors, ce qu'on dit tout simplement avec les OGM, c'est: qu'est-ce qui fait que les OGM seraient différents? Restons froid d'esprit et assurons-nous d'être guidés le plus possible par la science.

Mme Robert: Donc, dans le fond, la problématique se résume: cet organisme modifié qui apparaît, on n'a pas eu le temps très souvent de mesurer les conséquences ou des choses que ça peut entraîner, qu'on n'a pas pu mesurer scientifiquement. Alors, si on dit: Laissons la science, donc il faudrait attendre qu'il soit essayé, qu'on ait pu observer les conséquences, quelque chose du genre?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): En quelques secondes, M. Nadeau, parce qu'on a écoulé...

M. M. Nadeau (Pierre): Oui, bien, ce que je vais faire... Ce que je veux vous dire, madame, c'est que, en ce qui concerne le lait et les produits laitiers, il y a peu ou pas d'OGM, il n'y a presque pas d'OGM. Donc, pour nous, ce n'est pas une question qui est très majeure, hein? Alors, pour nous, j'aime autant vous laisser là-dessus: ce n'est pas très important pour nous.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, Mme la Présidente. M. Nadeau, M. Langlois, merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Je pense que c'est un sujet qui est extrêmement intéressant, et bien sûr qu'au cours des dernières semaines on a eu l'occasion d'avoir différents événements qui nous font apprécier davantage ce genre de travail que nous sommes en train de faire ce matin.

Vous savez, on a parlé beaucoup de fromage. Tantôt, je regardais dans la liste des gens qui sont membres chez vous, il y en a quelques-uns qui sont de ma région ? moi, je proviens de la région du Saguenay? Lac-Saint-Jean ? et bien sûr qu'on a eu l'occasion de parler beaucoup de fromage. Mais, aussi ? on n'a pas eu l'occasion d'en entendre parler, mais j'aimerais vous entendre un peu là-dessus ? vous savez, il y a un dossier dans lequel, moi, personnellement, j'ai été impliqué au cours de la dernière année: le dossier de l'usine de Nutrinor à Chambord, qui a été fermée, et la saga qui s'en est suivie, et bien sûr les projets de relance qui ont fonctionné ou qui n'ont pas fonctionné, et bien sûr que, durant ces moments-là, j'ai eu l'occasion de parler avec différents intervenants, du milieu du lait entre autres, parce que ça a été particulièrement intense à ce moment-là.

n(11 h 20)n

Et je vous avouerais que, pour ce qui est des normes et des contrôles de sécurité, ces différents items là, en ce qui a trait à la production du lait ou des produits dérivés du lait au Québec, ça, je ne suis pas tellement inquiet, parce qu'à quelque part effectivement il y a des contrôles qui se font, puis il y a du suivi, puis il y a beaucoup d'échantillons qui sont pris.

On me faisait remarquer par contre, pour procéder à l'importation de différents produits laitiers, encore une fois, de d'autres pays, puis on me mentionnait entre autres l'Australie, la Nouvelle-Zélande qui, grâce à des procédés simples, diminuaient un certain pourcentage de matières qui composaient le lait pour pouvoir arriver à faire des exportations ? bien, pour nous, de l'importation ? et bien sûr que, rendus ici maintenant, il restait à compléter, si on veut, la recette, entre autres pour faire de la crème glacée ou pour faire différents autres produits, mais que ces producteurs de lait là n'étaient peut-être pas nécessairement soumis aux mêmes normes que nous le sommes ici, au Québec ou au Canada. Dans ce contexte-là, tantôt vous avez eu l'occasion... Vous avez ouvert un peu une porte lors de votre présentation de mémoire, mais j'aimerais vous entendre là-dessus, M. Nadeau, sur les produits laitiers, les différents produits laitiers, transformés ou non, qu'on importe ici, au Québec et au Canada.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Nadeau, une réponse un peu synthétique pour permettre à d'autres collègues de poser des questions.

M. M. Nadeau (Pierre): Je vous remercie, madame. Et, si vous me permettez, je vais consulter mon collègue avant de répondre à la question.

(Consultation)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Nadeau, peut-être que... Oui, c'est M. Langlois, hein?

M. Langlois (Charles): Je vais ? M. Langlois ? peut-être tenter une réponse, parce que, effectivement, sur le contrôle des produits à l'importation, je ne suis pas pleinement connaissant de qu'est-ce qui se passe dans les autres pays puis quelles sont les exigences. Ce que je peux dire de façon générale, c'est que l'industrie laitière internationale, elle est développée à peu près dans tous les pays de niveau de développement, là, élevé, qu'on parle de l'Australie, Nouvelle-Zélande, en Europe, qu'ils ont quand même des normes de sécurité alimentaire qui sont en haut de la moyenne internationale. Ce sont des pays aussi qui sont impliqués dans les organisations internationales de contrôle de l'industrie laitière ou etc., de sorte qu'ils se comparent. Donc, à ce niveau-là, moi, c'est le niveau de sécurité que j'en ai. Ce serait peut-être différent si on parlait de produits qui viendraient de pays en voie de développement ou etc. où ce qu'on sait qu'ils ne sont pas tout à fait au même niveau. Mais, effectivement, de notre point de vue ici, je n'ai pas beaucoup de contrôle sur ce que les producteurs font dans les autres pays au niveau de la ferme.

M. M. Nadeau (Pierre): Grosso modo, si vous permettez d'ajouter que le Canada, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et l'Australie grosso modo ont les mêmes qualités, les mêmes normes. Ils acceptent les mêmes additifs, refusent les mêmes contaminants. En général, ces quatre groupes ont des approches pas mal semblables et des niveaux de qualité de produits au même niveau. De plus, vous parlez de l'Australie spécifiquement, l'Australie vit selon les normes Codex. Alors, tout produit qui est importé, qui serait importé de l'Australie, serait un produit tout à fait acceptable.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Nadeau. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Bonjour, M. Nadeau, M. Lavoie. Donc, bien heureux de vous recevoir aujourd'hui, surtout que vous représentez des gens de mon comté, des producteurs de fromage, je pense Au gré des champs, avec M. Gosselin, Fritz Kaiser et Parmalat, donc des gens avec qui on travaille régulièrement.

Le lait, pour l'ensemble des citoyens, c'est un aliment de base qui commence dès la naissance, mais aussi qui nous permet d'analyser la sécurité, parce que, un, l'industrie céréalière est touchée, ensuite vous avez la viande et, finalement, le produit lui-même, fini, au consommateur. Moi, depuis le début des audiences, ce que je constate, c'est que, la traçabilité, on en parle énormément, on en met énormément l'emphase, mais, dans le fond, c'est seulement un mécanisme et un système. Ça ne nous dit absolument rien sur la qualité même du produit.

Tout à l'heure, vous avez avancé, vous avez dit: On va faire, nous, ce qui est le plus important. Puis, dans votre texte, là, vous me direz qu'on dit sensiblement la même chose, vous nous disiez: «Il est donc important de se donner un objectif précis et de ne pas avoir trop d'attente d'un système de traçabilité.» Puis, dans votre cas, vous êtes les premiers, ça a été impliqué dans votre industrie, c'est déjà quelque chose qui est établi, vous en voyez aujourd'hui les résultats.

Mais, nous, aujourd'hui, ce qu'on essaie de chercher, ce n'est pas de s'assurer qu'il y ait un mécanisme, mais ce qu'il y a dans l'assiette du consommateur ou, dans votre cas, dans le verre du consommateur, qu'il y ait de la qualité et que ce soit sécuritaire. Est-ce que cette partie-là, quand vous avez parlé de biosécurité, on devrait mettre... qu'est-ce qu'on devrait faire pour l'améliorer? Parce que il y a des...

Puis je vais vous donner ce que M., Mme Tout-le-monde, là, se posent de questions sur le lait, les antibiotiques: Est-ce qu'il y a un contrôle là-dessus? Parce qu'on sait qu'il commence à y avoir une résistance. Est-ce qu'il y a une garantie qui est donnée aux consommateurs? Et il faut aller plus loin parce que il y a tout un débat au niveau des OGM, à savoir: Est-ce que c'est positif ou c'est négatif? Les éléments scientifiques nous manquent. Je n'irai pas jusque-là, mais les antibiotiques, c'en est un. Mais la question principale: Est-ce que... La biosécurité, c'est quoi, pour vous, que ça signifie?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Nadeau.

M. M. Nadeau (Pierre): Merci beaucoup. Vous avez soulevé plusieurs questions. La question de la traçabilité n'est pas équivalente à la qualité ou n'est pas garantie de qualité, vous avez parfaitement raison, parce que la traçabilité, c'est l'élément à la fin, c'est-à-dire que, s'il y a problème, comment peut-on le retracer, le limiter, le contrôler, et ainsi de suite?

Vous avez parlé aussi des antibiotiques, et je vais demander à Charles Langlois de vous expliquer un peu plus en détail les termes de notre entente avec les producteurs laitiers sur cette question-là.

Mais, quant à la biosécurité, la biosécurité est difficile à définir à l'heure actuelle... c'est-à-dire que, non, on peut la définir, mais ce qu'on ne peut pas définir, c'est quelles vont être les exigences. Parce que, à mesure qu'on avance dans le temps, on se rend compte que, si on veut être absolument sécures au niveau biosécurité, il y a de plus en plus de choses qu'on doit faire, et on est à la remorque des Américains à l'heure actuelle, parce que ce sont eux qui sont les plus concernés par cette question-là. Alors, étant à la remorque des Américains, on regarde surtout ce qui se passe à l'étranger et on se dit: Bon, bien, voilà, ils s'en vont dans telle direction, on comprend pourquoi, et nous allons aller dans cette direction-là.

Je vais vous donner un exemple, le scellage des camions, bon, alors, pour s'assurer que, entre le point A et le point B, les camions sont scellés. Si les camions doivent arrêter en cours de route, les camions sont scellés, le scellé ne peut pas être brisé. Bon. Ça, c'est un exemple. Mais, si on ajoute tous les éléments de la biosécurité, ce que nous disions dans notre soumission, c'était que, oui, on est parfaitement conscients que ça va ajouter aux coûts, aux coûts de faire affaires, et tout ça éventuellement, malheureusement, là, se retrouve au niveau du prix au consommateur.

Quant à la question sur les antibiotiques, je vais demander à Charles Langlois de vous donner un peu de détail sur comment se fait le contrôle.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Langlois.

M. Langlois (Charles): Merci. Au Québec, tous les laits qui sont reçus en usine sont systématiquement testés pour les fins d'antibiotiques. Et, lorsqu'un camion-citerne est décelé comme étant... testant positif à un niveau de sensibilité très élevé, il y a systématiquement une analyse de tous les échantillons de tous les producteurs pour identifier quel est le producteur qui a contaminé le camion, et à ce moment-là le camion est jeté. Et il y a des mécanismes qui imposent les conditions aux producteurs qui ont contaminé le produit.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. Vous avez parlé... Dans le mémoire et dans vos propos aussi, vous utilisez souvent la norme Codex, qui est une norme plus internationale, voire européenne. Puis hier on avait les gens de l'UPA qui nous disaient: Bien, nous autres, là, on va essayer de s'en tenir aux normes américaines puis on ne fera pas de démarches pour appuyer des normes autres. Alors, j'aimerais ça que vous me disiez en gros quelles sont les différences entre les deux normes en question et puis comment vous allez intervenir auprès de l'UPA pour les faire avancer vers l'acceptation de normes plus internationales.

M. M. Nadeau (Pierre): Les normes Codex ne sont pas limitées à des normes européennes. Par contre, il y a des gens qui pourraient dire que, oui, les Européens ont été tellement à l'avant-garde dans le développement des normes qu'ils ont eu toute l'influence à Codex, ce qui n'est pas nécessairement vrai. Je peux vous dire que le Canada se tire très bien d'affaire à l'intérieur des normes Codex. Et, pour vous rassurer, sachez que la Fédération des producteurs de lait s'intéresse grandement à cette question-là. Il y a des gens qui sont participants à des comités. Et, pour ce qui concerne, de façon isolée, le côté laitier, les normes de lait et de produits laitiers, elles sont généralement développées par un groupe international de pays qui sont impliqués dans le lait, en particulier je pense à 35 à 40 pays, et ces pays-là se rencontrent de façon informelle et régulière avec une association qui est l'association... la Fédération internationale de lait. La Fédération des producteurs de lait est très impliquée dans la Fédération internationale de lait.

n(11 h 30)n

Alors, je pense que ça répond entièrement à nos besoins, parce que toute norme Codex nouvelle ou toute norme Codex qui doit être changée passe d'abord par la Fédération internationale de lait parce que c'est elle qui amène ça à Codex. C'est inhabituel, mais c'est reconnu comme l'association qui fait le travail le plus sérieux. Et chacune des normes qui est changée ou chaque nouvelle norme est d'abord présentée par la Fédération internationale de lait.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Nadeau. Nous, on a épuisé largement le temps qui vous a été alloué. Alors, M. Nadeau, M. Langlois et tous les représentants qui vous accompagnent et du Conseil de l'industrie laitière du Québec, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission. Et j'invite les représentants de l'Union des consommateurs à prendre la parole. Merci beaucoup, M. Nadeau.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. Tanguay, Charles Tanguay, responsable des communications et chargé de projet à l'Union des consommateurs, je vous souhaite la bienvenue. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et 20 minutes d'échange avec chaque groupe parlementaire. Vous avez la parole.

Union des consommateurs

M. Tanguay (Charles): Merci, Mme la Présidente. Merci, Mmes, MM. les députés, de nous recevoir. À ma gauche, je suis accompagné d'une membre du comité agro de l'Union des consommateurs, il s'agit de Mélanie Rioux, de l'ACEF Rive-Sud de Québec, à Lévis; et, à ma droite, je suis accompagné d'un autre membre de ce comité, M. Alain Robert, de l'ACEF Estrie, à Sherbrooke. J'aimerais également mentionner que nos positions ont été élaborées également par les autres membres du comité agro de l'Union des consommateurs: Denise Sicard, de l'ACEF Lanaudière, et Micheline Côté, de l'ACEF de l'île Jésus, à Laval.

Alors donc, merci encore, Mme la Présidente. L'Union des consommateurs, pour vous la présenter brièvement, c'est une fédération qui regroupe, entre autres, huit associations coopératives d'économie familiale, les ACEF, des organisations qui ont une existence d'une trentaine d'années, donc assez bien connues et implantées dans les différentes régions du Québec. Cette particularité nous permet d'avoir des antennes dans les communautés, d'avoir un enracinement local et de nourrir des réflexions des constatations que font sur le terrain les ACEF à travers, notamment, les services de consultations budgétaires auprès des familles qui ont des problèmes de budget et/ou d'endettement.

Alors, au sein de la fédération, on fonctionne par comité et on traite de différentes questions d'envergure nationale comme la santé, l'énergie, les politiques sociales et fiscales, les produits et services financiers, les questions de budget, de crédit, d'endettement, les questions de télécommunication et aussi, évidemment, la question de l'agriculture et de l'agroalimentaire. À ce chapitre, l'Union des consommateurs s'est intéressée, notamment, à plusieurs dossiers comme le prix du lait, la question des hormones de croissance pour les vaches laitières, la question des OGM, etc.

Alors, aujourd'hui, nous venons ici... Oh, excusez-moi! Auparavant, j'aimerais mentionner également que l'Union des consommateurs s'intéresse évidemment de plus en plus aux questions, aux enjeux d'envergure mondiale. On travaille notamment avec Consumers International, qui est le mouvement mondial des consommateurs. Et, à cet égard, nous avons participé l'an dernier, le 15 mars, lors de la Journée mondiale des consommateurs, aux événements organisés par Consumers International et dont le thème était justement les menaces agroalimentaires qui pèsent à cause d'une trop grande concentration et d'une trop grande mainmise de l'industrie agroalimentaire à l'échelle planétaire.

C'est à l'occasion de cette journée du 15 mars que nous avons élaboré et rendu publique une charte des droits alimentaires, que vous retrouverez en annexe à notre mémoire. Cette charte énonce certains droits que nous croyons important de promouvoir et de faire adopter par les nations du monde: en premier lieu évidemment, le droit de se nourrir, mais aussi certains principes qui nous paraissent importants en matière agroalimentaire et qu'on devrait tendre à respecter, comme le principe du développement durable, le principe de précaution, le principe du respect de la biodiversité. On juge également important ? et c'est inscrit dans notre charte ? de permettre aux consommateurs d'avoir toute l'information requise sur leur alimentation, sur comment sont produits les aliments, comment ils sont transformés et d'avoir une plus grande voix au chapitre dans les décisions qui entourent le monde agroalimentaire.

Nous avons également basé nos réflexions et notre mémoire sur des droits reconnus au niveau international ? les droits des consommateurs ? comme le droit de pouvoir combler nos besoins essentiels, le droit à la sécurité, le droit à l'information, le droit au choix, le droit d'être entendu, le droit à la justice et à la réparation, le droit à l'éducation et également le droit de vivre dans un environnement sain.

D'entrée de jeu, j'aimerais soulever nos réserves par rapport à l'approche qui a été retenue par la commission sur la définition de la sécurité alimentaire. Pour nous, la sécurité alimentaire, c'est un concept plus large, et la question ne saurait se limiter à une question sanitaire ou à une question de qualité des aliments. Évidemment, on comprend que la commission ait choisi cet angle-là. On aimerait cependant attirer l'attention de la commission sur le fait que, en premier lieu, la sécurité alimentaire, ça devrait être aussi le droit de chacun de pouvoir se nourrir suffisamment et adéquatement.

Et on rappelle à cet égard qu'au Québec il y a encore des familles, des enfants qui ne mangent pas à leur faim et que c'est une préoccupation très grave, qui se retrouve d'ailleurs également à l'échelle planétaire, et où ? on pourra le voir un peu plus loin ? certaines questions par rapport à l'industrie agroalimentaire sont en partie responsables du fait que des populations soient affamées aujourd'hui. Donc, nous vous suggérons bien humblement de tenir compte de cet aspect-là dans l'analyse des différents enjeux agroalimentaires, dans leur globalité mais aussi dans le détail, afin qu'on reste préoccupé par la question de la faim.

Alors, il y a eu beaucoup de changements, depuis les 30 ou 40 dernières années, dans nos modes alimentaires. Les revenus per capita se sont accrus, le rythme de vie moderne s'est accéléré, est un peu infernal, il y a une urbanisation également, il y a eu l'industrialisation de la production, la concentration des industries de la transformation alimentaire. Bref, ce sont tous des phénomènes inquiétants et qui conduisent à des constats qui nous inquiètent.

On voit par exemple l'accroissement de certaines maladies, l'apparition de risques inconnus, par exemple les OGM, les répercussions des fertilisants, des pesticides, des biotechnologies, la transformation qui diminue la qualité des aliments, les additifs nombreux que l'on retrouve dans les aliments également avec le phénomène de la globalisation, une certaine perte d'autonomie alimentaire des peuples et une perte de contrôle sur ce que nous consommons. Par exemple, il est très inquiétant de constater que, par le génie génétique, certaines grandes compagnies alimentaires seraient éventuellement en position de contrôler les semences, bref de contrôler carrément la vie et le vivant.

La crise de la vache folle, c'est certainement un symbole de ce qui a contribué à rendre les gens inquiets. C'est apparu de façon très, très violente, si on peut dire. Et on remarque évidemment, depuis, un plus grand intérêt des consommateurs sur les questions d'alimentation, une volonté plus grande de surveiller ce qu'on mange, de se nourrir autrement, une grande soif d'information aussi. On remarque que les consommateurs veulent savoir de plus en plus ce qu'ils mangent et comment a été produit ce qu'ils mangent. Il y a également tout ce phénomène de la lutte contre la malbouffe, contre la mauvaise nutrition, qui n'est pas propre à l'Europe, qu'on retrouve un peu partout.

n(11 h 40)n

Mentionnons simplement qu'au début du siècle les fermiers touchaient environ la moitié de tous les revenus découlant de l'agriculture et qu'aujourd'hui... ou en fait en 1990 ? c'est peut-être moins encore aujourd'hui ? en 1990, ils ne touchaient plus que 10 % des revenus du monde agricole. Ça illustre en fin de compte les grandes transformations qu'il y a eu.

Nous vous avons soumis dans le mémoire l'exemple de l'Iowa, qui serait, selon ce qu'on en sait, le deuxième État agricole aux États-Unis, après la Californie, et qui est aussi le plus gros producteur de porc aux États-Unis, sinon dans le monde. Alors, le cas de l'Iowa nous a été relaté lors du dernier congrès de Consumers International, à Lisbonne, et il est assez frappant. On s'est inquiété là-bas du nombre de plus en plus important de suicides chez les fermiers ? c'est tout dire ? et on a fait certains constats à propos de l'industrialisation de l'agriculture.

D'abord, il faut voir que les animaux sont élevés dans des conditions extrêmement déplorables et inhumaines, en particulier le porc, qui est un animal intelligent et sympathique, qui est élevé dans des conditions absolument horribles. Le mode agricole industriel entraîne également les cultures intensives qui appauvrissent les sols, qui contribuent à l'érosion des sols, qui emmènent une surutilisation des fertilisants qui, à leur tour, entraînent un appauvrissement des sols et qui rentrent dans un cercle vicieux. Il y a tout le phénomène de la pollution qui est causée, entre autres, par les lisiers, les résidus agricoles, l'inquiétude aussi soulevée par l'usage massif d'antibiotiques et l'apparition de bactéries résistantes aux antibiotiques.

Finalement, les gens de l'Iowa ont déploré l'étranglement des fermiers finalement qui en sont réduits à l'état pratiquement de serfs au service d'une industrie qui contrôle les prix, qui leur dicte les façons de faire et qui leur fournit les produits à gros prix, et dont ils sont finalement prisonniers. Pour les consommateurs de l'Iowa, finalement, on se retrouve avec un porc de médiocre qualité et le reste de l'alimentation qui doit être importé dans un ordre de grandeur de 80 %.

Donc, qui est gagnant dans un système comme celui-là, un système finalement qu'on retrouve... dont le modèle se retrouve presque à l'échelle planétaire? On nous disait que l'agriculture moderne permettrait d'enrayer la faim. Or, aujourd'hui, on se retrouve avec des pays complets qui ont abandonné des cultures de subsistance pour plutôt faire place à des monocultures dédiées à l'exportation et qui doivent en contrepartie importer la majorité de leurs aliments à des coûts souvent trop chers pour ce qu'ils peuvent payer.

On nous avait dit aussi que l'industrialisation permettrait de réduire les coûts de l'agriculture. Or, c'est absolument faux. On sait aujourd'hui que l'agriculture à travers le monde vit largement de subventions et qu'on ne compte même pas les coûts de santé, les coûts environnementaux liés à tout ça.

On nous avait dit finalement que les nouvelles techniques, les technologies agricoles, allaient solutionner les problèmes du monde agricole. Eh bien, on peut en douter parce qu'il y a des nouveaux problèmes qui apparaissent. Nous sommes dépendants de ces technologies. Il y a des menaces à la biodiversité et il y a toutes sortes de facteurs inconnus pour la santé, comme l'influence des fertilisants, des pesticides, des hormones, des antibiotiques, etc.

Alors, face à ces problèmes-là, nous suggérons, et les gens de l'Iowa ont compris également, que la recette du rapport Brundtland demeurait tout à fait pertinente, c'est-à-dire: penser globalement et agir localement. Alors, on a vu en Iowa s'organiser des espèces de cellules de sensibilisation qui visent à revoir l'organisation des communautés rurales et revoir aussi les modes de production agricole avec des recettes toutes simples comme rapprocher les consommateurs des fermiers, multiplier les liens entre les marchés locaux, respecter davantage l'environnement.

C'est un mouvement qu'on pourrait voir de plus en plus appliqué à l'échelle de la planète, un mouvement qui favorise l'agriculture biologique, qui favorise les produits du terroir, qui favorise des fermes à dimension plus petite. On le voit ici, il y a un engouement pour ce genre de solution là, et nous espérons que cet engouement-là va continuer à progresser, parce qu'il y a des dangers économiques et environnementaux réels liés à l'industrialisation à outrance du monde agricole, et il y a des menaces évidemment réelles sur la santé.

Nous recommandons donc en général à la commission et au gouvernement du Québec d'adopter une vision agricole où on doit faire primer la logique du développement durable sur la logique de marché. Nous sommes conscients qu'une telle approche pourrait nous fermer certains marchés, pourrait poser des problèmes économiques. Mais, en revanche, nous croyons qu'il s'agit aussi peut-être d'opportunités d'avenir pour le marché, d'un créneau nouveau, et également que cette approche-là permettrait de diminuer certains effets néfastes de la surindustrialisation agricole, par exemple la diminution du nombre de fermes, la stagnation et le dépeuplement des régions rurales, l'appauvrissement des terres et les autres nuisances environnementales, et aussi la diminution de notre dépendance alimentaire. À notre avis, on devrait faire moins voyager les aliments, consommer davantage de produits locaux. N'est-ce pas là le meilleur gage de sécurité alimentaire, que de pouvoir manger la carotte qui a poussé dans son propre jardin?

Alors, nous recommandons plus particulièrement au gouvernement du Québec de ne pas favoriser les gros producteurs agricoles au dépens des plus petits producteurs agricoles, entre autres dans les politiques de subventions; de soutenir la diversification agricole; de soutenir l'agriculture biologique et en faisant attention de ne pas créer une alimentation à deux vitesses, donc de permettre aussi aux familles les plus démunies d'avoir accès à des aliments et des produits sains; de favoriser des modèles comme le commerce équitable, et le modèle coopératif, et les initiatives qui visent à accompagner les agriculteurs vers le changement d'un nouveau mode de production plus respectueux de l'environnement; on doit également soutenir les initiatives qui permettent de rapprocher les fermiers des consommateurs, également les initiatives qui permettent de diffuser plus d'information sur la qualité des aliments, sur la nourriture saine, etc.; finalement, favoriser des programmes de sensibilisation aux achats chez nous. Est-ce qu'il me reste du temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): ...très bien.

M. Tanguay (Charles): Je pourrais continuer encore quatre minutes? Bon, bien, je continue. J'aimerais également attirer votre attention sur les constats assez troublants qui ont été faits récemment par l'Organisation mondiale de la santé et la FAO sur les liens de plus en plus évidents entre la mauvaise alimentation et des problèmes de santé très graves. Alors, il faut voir là-dedans des coûts économiques énormes en termes de soins de santé, et nous incitons fortement la commission à tenir compte de ces aspects-là aussi de la sécurité alimentaire qui nous apparaissent fondamentaux.

L'OMS se lance dans une stratégie mondiale pour une meilleure alimentation et... en fait The Global Strategy on Diet, Physical Activity and Health, et il serait très important que les gouvernements, le gouvernement du Québec en particulier, regardent ce qui se fait de ce côté-là et s'engagent dans une lutte contre la mauvaise nourriture aussi importante que celle qu'on a menée contre l'industrie du tabac. On sait finalement très bien quels sont les mauvais aliments et les mauvaises habitudes alimentaires qu'on doit corriger. Essentiellement, il s'agit d'aliments qui proviennent de l'industrie de la transformation alimentaire et où on retrouve en trop grande quantité du sel, du sucre et des mauvais gras. Et je pense que le gouvernement doit envisager par tous les moyens des façons de lutter contre ces mauvais aliments là. On en suggère quelques pistes dans notre mémoire.

Finalement, nous croyons que l'information aux consommateurs est très importante et que le Québec devrait s'enligner sur les meilleures normes en matière d'étiquetage et d'information sur les produits alimentaires qui existent dans le monde. On reconnaît dans notre mémoire que l'Union européenne semble avoir de l'avance là-dessus, qu'il peut s'agir dans certains cas d'approches qui nuisent au commerce à court terme, mais, à long terme, je pense que les consommateurs veulent savoir ce qu'ils mangent de plus en plus et qu'il y a de l'éducation et de l'information à faire à cet égard. Merci.

n(11 h 50)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Tanguay. Je cède maintenant la parole à mon collègue le député de Nicolet-Yamaska pour débuter les échanges pour le premier 10 minutes. Et je vous demanderais de fermer les cellulaires, s'il vous plaît.

Une voix: Je m'excuse. Je pensais qu'il était fermé.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Bonjour, madame, messieurs. Merci de votre présentation. Et j'aimerais vous demander, vous qui représentez des consommateurs, les ACEF, huit ACEF... Et, depuis deux jours et demi ou presque, la commission entend des groupes, lit des mémoires. Vous avez probablement suivi un peu les délibérations, je ne sais pas. Mais j'allais vous demander une question simple: est-ce que, depuis le début de la commission, ce que vous avez entendu vous a rassurés vis-à-vis vos consommateurs? Parce que vous nous disiez tantôt que, bon, vous informiez nos consommateurs et vos consommateurs; est-ce qu'on vous rassure, avec une commission comme celle-là? Est-ce qu'on vous... je ne dirais pas énerve, mais est-ce qu'on vous trouble? J'aimerais vous entendre là-dessus si c'est possible. Sinon, bien, j'aurai une autre question, là.

M. Robert (Alain): Ce n'est pas...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Auriez-vous la gentillesse de vous identifier?

M. Robert (Alain): Bien sûr, madame. Alain Robert, de l'ACEF de l'Estrie, membre du Comité agroalimentaire de l'Union des consommateurs. Ce n'est pas simple, de répondre à votre question, alors il faut y aller par la caricature.

Au départ, dès qu'on a su que cette commission-là existait, je pense que le premier réflexe, ça a été: Mais quelle tâche énorme! Quelle tâche énorme! Et ce que j'en ai compris à date, des débats ici, dans le fond, c'est qu'on n'en voyait qu'une toute petite partie; la tâche est encore plus énorme que je le pensais. Alors, oui, c'est inquiétant. On est un peu bouleversés de voir à quel point c'est complexe. Et, nous, on vous arrive en souhaitant contribuer à ce que votre vision soit encore plus complexe, parce qu'on vous dit: On ne peut pas parler de sécurité alimentaire sans commencer vraiment en amont, c'est-à-dire à la production, alors que le document commençait peut-être un peu plus en aval. La tâche est énorme. C'est gargantuesque. C'est des travaux d'Hercule.

Et dans le fond c'est peut-être ce qui motive un peu notre conclusion, c'est qu'il faudra arriver à envisager des états généraux de l'agriculture, parce que ça touche tellement, tellement, tellement de choses, de la ferme, du producteur, jusqu'au consommateur. Il y a tellement de volets. Les gens qui étaient ici, devant nous, parlaient de traçabilité du lait. Bien, nous, les consommateurs, on n'y connaît pas grand-chose, mais simplement en entendant ces gens-là on réalise la complexité de tout ça. Et cette complexité-là peut faire peur bien sûr et peut faire en sorte que finalement les recommandations finissent un peu dans le champ.

M. Tanguay (Charles): Si je peux ajouter. De ce que j'ai pu entendre, parce qu'on n'a pas...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Tanguay.

M. Tanguay (Charles): Merci, Mme la Présidente. On n'a pas pu beaucoup suivre vos travaux malheureusement parce qu'on préparait nous aussi nos choses. Mais, de ce que j'ai pu entendre sur certains aspects, il y a beaucoup de choses rassurantes. Par exemple, on voit qu'il y a beaucoup d'efforts qui sont faits en inspection, que le côté sanitaire de l'alimentation est assez bien protégé. Mais, d'un autre côté, on craint qu'il y ait peut-être trop d'accent mis sur les moyens de contrôle et les moyens sanitaires et pas assez sur la base même, c'est-à-dire la production saine et le retour à des méthodes plus respectueuses de l'environnement.

Entre autres, on a beaucoup parlé de traçabilité, mais, je veux dire, ce que je peux en comprendre, ce ne sont que des moyens pour pallier à des problèmes spécifiques. Mais de savoir qu'un poulet aux hormones a été produit à tel endroit spécifique et transformé à tel autre endroit, il va rester poulet aux hormones et peut-être pas très bon pour la santé. Alors, la traçabilité, oui, c'est intéressant, mais j'ai l'impression qu'il ne faudrait pas tout mettre nos oeufs dans ce panier-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Tanguay. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Vous parlez dans votre mémoire, là, de dangers économiques et environnementaux que représente l'industrialisation, là, dans le secteur agroalimentaire. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur les alternatives que vous proposez, sur l'impact en fait sur l'économie, l'impact aussi sur l'environnement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Allez-y.

M. Robert (Alain): Alors, je vais tout de suite...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert.

M. Robert (Alain): Oui, Alain Robert, de l'ACEF Estrie. Dans le magazine Québec Science de février, il y a une page qui s'intitule Des pesticides laissent des traces dans l'eau potable, et il y a des commentaires, d'ailleurs, d'une dame, Isabelle Giroux, attachée à la Direction du ministère de l'Environnement. Et le dernier paragraphe, c'est très court, je vous le cite: «Les solutions au problème ne sont pas légion, il n'y en a qu'une seule: pour réduire les altérations récurrentes à la qualité de l'eau souterraine, il importe de réduire la quantité des pesticides utilisés.»

Alors, c'est évident que n'importe qui, d'après moi, qui étudie toute cette question-là depuis un certain temps, il y a, quant à nous, un besoin pressant de déchimifier l'agriculture à la production. Et ça va très loin: on pourrait parler longtemps de l'effet des engrais aussi, là, qui sont moins toxiques, quand même. Et c'est évident que, sur le plan économique, ce n'est pas simple pour les agriculteurs. Alors, ça demande... ça demanderait énormément de délicatesse pour éviter que ça crée, disons, des petites catastrophes locales.

La nécessité de retourner vers une agriculture, vers une production agricole plus saine, ce n'est pas nouveau. On note un regain, je pense, de popularité dans la population, entre autres avec des éléments comme... des anecdotes, là, dans le fond, comme la vache folle. Je dis bien «anecdote», parce que, au fond, au Québec, il n'y a pas grand-monde qui en a souffert, sauf des producteurs, là, pour des raisons complexes, encore là. Mais c'est évident que, sur le plan économique, on ne pourrait pas demander à des producteurs, dans l'espace de six mois: Bien, diminuez... ou éliminez complètement ou diminuez les intrants chimiques. Ce n'est pas simple. Et il y a énormément là aussi d'effets un peu secondaires à tout point de vue là-dessus.

Mais, pour nous, la tendance est nécessaire et depuis longtemps. Dès que l'utilisation des engrais chimiques, et pesticides, et tout ça, dès que ça a commencé, fin des années quarante, il y avait déjà, partout dans le monde, des gens lucides qui ont, dans le fond, prédit ce qui allait arriver et ce qu'on a pu constater quelques années plus tard, comme des choses semblables.

Prenons aussi l'exemple des OGM. Les OGM, c'est un problème en soi, mais pourquoi les OGM sont utilisés? Dans bien des cas, c'est pour permettre l'utilisation de cet herbicide qui s'appelle le Roundup. Vous connaissez... vous avez sûrement entendu parler. Bien là, de plus en plus, on voit venir des nouvelles, entre autres d'Europe, où on retrouve en quantités non négligeables le Roundup dans des nappes phréatiques, alors que le fabricant dit que c'était biodégradé très, très rapidement. Alors, ce n'est pas vrai. Un des problèmes avec les OGM... Alors, c'est évident... Alors, je vous explique un peu pourquoi économiquement ce ne serait pas simple.

Et le développement de l'agriculture biologique peut être vu un peu comme de fournir cette portion du marché, de la population, des consommateurs, qui veut s'alimenter sainement. Alors, à nous, ça pose un premier... Le premier problème, c'est que le coût de ça, c'est évident pour les consommateurs, là, ordinaires, c'est, pour bien des familles, difficilement abordable. On craint un système d'alimentation à deux vitesses. Mais c'est pour ça qu'on pense que c'est finalement tout le monde agricole qui doit aller vers une agriculture de plus en plus saine.

On multiplie les problèmes souvent lorsque, pour augmenter des rendements, des rendements qui se mesurent au poids, on... on n'améliore pas nécessairement la qualité nutritive, mais enfin pour alimenter... pardon, pour augmenter du rendement, on utilise un paquet de produits chimiques. Bien, les revenus de ces gens-là vont être affectés dans une période de transition. Ce n'est pas simple, de faire une transition, et ce ne serait pas, quant à nous, la solution, s'il y avait demain matin 10 %, 20 %, 30 %, 40 % de plus de fermes biologiques, mais que le reste continue à travailler selon les paradigmes actuels. Le problème est beaucoup là pour une bonne partie de la population.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Il nous reste deux minutes? Une minute. M. le député.

n(12 heures)n

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Bien, vous parlez d'agriculture à deux vitesses. Je vous comprends parfaitement bien, puis effectivement vous avez raison parce que, quand on se promène dans nos marchés d'alimentation et on veut acheter du biologique, les coûts sont plus élevés. Bon. Ça veut aussi dire qu'un groupe comme le vôtre, qui représente des consommateurs... ça pourrait vouloir dire aussi une agriculture à deux vitesses et aussi deux sortes de nourriture: une nourriture biologique pour les bien nantis puis une nourriture non biologique, entre guillemets, pour les plus démunis, ce qui ne serait pas très gai pour un État comme le nôtre, là.

M. Robert (Alain): Le seul exemple qui me vient en tête pour illustrer ça: s'il y a des gens qui ne l'ont pas fait à date, regardez le prix des oeufs biologiques comparé à des oeufs, disons, plus industriels, vous allez voir, le pourcentage est énorme, la différence. Alors, pour les familles avec plusieurs enfants, c'est pratiquement impossible, à moins d'avoir des revenus vraiment supérieurs à la moyenne, de nourrir ces gens-là en toute sécurité, puisque c'est de ça qu'il s'agit ici.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Tanguay, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Tanguay (Charles): Oui, si je peux ajouter. Il faut contrer ça par des initiatives nouvelles visant à ne pas exclure les familles pauvres d'une saine alimentation, par l'éducation, mais aussi par le rapprochement des familles et des fermiers, si on veut, par la constitution de nouveaux canaux de distribution et de vente des produits.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Alors, cela termine le premier bloc de 10 minutes.

Puisque vous nous interpellez, vous interpellez la commission sur la définition que nous avons adoptée de la sécurité alimentaire, je voudrais d'une part vous rassurer que les membres de la commission sont très sensibles au volet social de la sécurité alimentaire. C'est une préoccupation que nous avons. Si nous avons fait un découpage au niveau de la sécurité alimentaire comme nous l'avons fait dans notre document de consultation et dans cette consultation, c'est parce que nous avons une Commission des affaires sociales dont le mandat est justement d'analyser, entre autres, toute la question de la lutte à la pauvreté, et on ne veut pas en commission dédoubler nos travaux. Ça, c'est la première chose.

Deuxièmement, vous l'avez dit dans une de vos réponses, M. Robert, vous avez dit que vous constatez que la commission est face à une tâche énorme. Alors, la tâche est déjà énorme en ayant précisé notre mandat, s'il fallait qu'on aborde l'ensemble de la problématique dans le sens que vous nous suggérez, vous imaginerez que ce serait assez laborieux. Donc ça, c'était, pour moi, important que vous soyez assurés et rassurés que vos préoccupations sont les nôtres, mais qu'on a déjà beaucoup sur les bras avec les enjeux que nous avons définis.

Vous avez présenté un mémoire fort complet, qui représente la perspective des consommateurs, qui rejoint aussi la sensibilité et la perspective d'autres groupes, notamment Greenpeace et autres, dont certains nombres de recommandations se recoupent. Je voudrais reprendre là où vous l'avez laissé, M. Tanguay... parce que je trouve cette recommandation fort intéressante. À la page 9 de votre mémoire, parmi les recommandations que l'Union des consommateurs nous propose, ce serait de soutenir les initiatives visant à rapprocher les producteurs et les consommateurs, tel le jumelage familles urbaines, familles maraîchères ou les marchés publics.

Je trouve ça fort intéressant, parce que certains groupes qui sont venus devant nous nous ont dit que les gens, non seulement ils ne savent plus ce qu'ils mangent, dans le sens du contenu de ce qu'ils mangent, mais ils ne savent pas d'où ça vient. Ils ne savent pas finalement quelle est la forme initiale du produit. On mange le poisson, mais on ne voit pas le poisson, et la même chose pour les autres produits. Et les gens disent: Il faut quand même que les consommateurs soient informés aussi sur d'où viennent ces produits-là et prendre le contact avec la nature.

Option consommateurs nous ont même dit qu'il n'y a plus de lien finalement au niveau de la famille. Avant, chacun... ou enfin la plupart des gens avaient un membre de la famille à la campagne, donc ils pouvaient y aller. Ils voyaient les poules, ils voyaient tous les animaux dans la nature, et là ce contact-là se perd de plus en plus. Mais, vous, vous venez, avec cette recommandation, nous interpeller et dire qu'il faut faire le lien.

Maintenant, ma question est: comment on peut mettre en pratique cette recommandation? Qui va le faire? Je sais, par exemple, que l'Union des producteurs agricoles a commencé, je crois, cette année ? c'est une première ? une ouverture sur les fermes, où les citoyens sont invités à la Maison de l'UPA, et les autobus les amènent sur les fermes pendant une journée. Comme ça, ils visitent la ferme, ils sont un peu jumelés avec le monde agricole. C'est une formule. Mais y en a-t-il d'autres? Et qui doit le faire, ce travail-là? Est-ce que c'est quelque chose qui doit se faire au niveau des écoles? Est-ce que c'est quelque chose qui doit se faire... C'est un mandat que l'Union des consommateurs se donne? Qui doit faire ça?

M. Tanguay (Charles): C'est une bonne question, Mme la Présidente. Vous avez sûrement aussi entendu parler de l'initiative d'Équiterre par rapport à ça, qui a tout un système en place de paniers de légumes biologiques livrés directement dans les villes. Ce sont mille et une petites initiatives, je pense, qui peuvent nous amener vers ça. Et le rôle du gouvernement, c'est peut-être de soutenir les efforts financièrement, peut-être aussi d'organiser des campagnes de sensibilisation, que ce soit à l'école ou ailleurs.

L'Ordre des diététistes, je crois, vous a fait des propositions intéressantes par rapport à ce qui doit se faire, même dès le tout jeune âge à l'école. J'ai de la difficulté à répondre précisément à votre question. Je pense que ce sont plein de petites initiatives qui peuvent aller vers cette direction-là. Je ne sais pas si Alain a autre chose.

M. Robert (Alain): Moi, pour un ? puis je suis convaincu que tout le monde ici ou à peu près a vu, a connu les marchés publics ? j'ai été élevé dans une toute petite ville, 5 000, 6 000 personnes, et le marché public, le samedi matin, il y avait autant de monde là que devant l'église le lendemain, dimanche. Mais c'est disparu. Je travaille à Sherbrooke, qui est entourée... enfin, la région de Compton, c'est très agricole, Coaticook et tout ça, et il n'existe pas de marché public là. Il y a besoin... Et les gens ont délaissé les marchés publics pour aller vers le supermarché à une époque où ces inquiétudes-là n'existaient pas beaucoup. Et, maintenant que les inquiétudes reviennent ? on en est témoins ? moi, je suis convaincu, et on l'entend souvent, les gens souhaiteraient pouvoir acheter fruits, légumes, fromage ? dans notre coin aussi, il se produit des bons fromages ? avec un contact direct avec les producteurs, producteurs de miel, et tout, nommez-les.

Il y a certainement moyen d'encourager le retour des marchés publics. Comment? Mais, bien sûr, là, on parle de discussions avec les municipalités, avec l'UPA. Il y a toute une mécanique à mettre en place. Mais certains incitatifs, certains encouragements de la part... simplement un mot d'ordre du ministère qui souhaiterait que ça revienne. Probablement qu'il en existe... on ne parle pas des grands marchés à Montréal, là, probablement qu'il en existe encore. Il faudrait voir pourquoi ils fonctionnent, s'il y en a. Moi, je ne sais plus s'il y en, à part des... Mais on ne parle pas, là, des grands marchés de Montréal. Ailleurs en province, qu'est-ce qui fait qu'ils fonctionnent? Je suis convaincu personnellement que, dans quelques années, il va en avoir et que ça va fonctionner.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup. Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci, Mme la Présidente. Ma question va un peu dans le même sens, mais au-delà de ça. Lorsque vous nous parlez de soutenir des campagnes d'information et d'éducation aux consommateurs... puis il en a été question par d'autres intervenants au préalable, qui nous ont dit justement qu'il y avait un manque d'information et que les consommateurs, même si on met plein de choses sur les étiquettes, ils manquent d'information sur la qualité et les ingrédients et qu'est-ce que c'est, un OGM puis, bon.

Mais, moi, je veux revenir aussi... Vous nous avez fait une... bien, pas une recommandation, vous avez fait un commentaire à l'effet que vous êtes conscients que les changements que vous proposez risquent d'entraîner des conséquences négatives sur les échanges commerciaux, et là je vous ramène à l'information, est-ce que, pour le consommateur, même s'il est informé qu'il y aura des conséquences négatives pour les échanges commerciaux internationaux... se devront d'être réduits selon la formule que vous proposez, est-ce que les consommateurs vont être...

Vous savez que c'est les consommateurs qui vont payer en bout de ligne, parce que, si on revient... la période de transition... Est-ce que les consommateurs sont favorables à payer plus cher un panier d'épicerie pour avoir ce qu'on pense qu'ils veulent? Parce que, au moment où on se parle, on n'a pas eu de statistiques, on manque, nous aussi, d'information, c'est-à-dire le comportement du consommateur, qu'est-ce qu'il veut, le consommateur. Il y a un autre intervenant qui nous a parlé de ça. Eux manquent d'information, mais, nous aussi, on manque d'information sur ce que le consommateur désire. Est-ce que, vous, vous avez déjà des informations, des statistiques à cet effet-là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert.

M. Robert (Alain): On pourrait passer toute la journée sur votre question, madame, c'est immense. Mais, moi, je...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mais vous n'avez que deux minutes à prendre.

n(12 h 10)n

M. Robert (Alain): Bien, voilà! Alors, l'ensemble des consommateurs, ce n'est pas un tout homogène, et, oui, on remarque, c'est évident actuellement, une inquiétude grandissante, hein? Il y a des statistiques qui sortent régulièrement. La demande pour les produits bios augmente de façon importante. Ceci dit, il y a aussi... Et on en est témoins, et je suis convaincu que tout le monde aussi l'a entendu, on entend de plus en plus de gens dire: De toute façon, ils nous laissent manger à peu près n'importe quoi, alors on n'a pas besoin de s'attaquer à ça. C'est ce que j'appelle, moi, une inquiétude cynique. Et il y a aussi ceux qui disent: Bien là, tout est bon parce que les gouvernements surveillent ça. Il y a une espèce d'ignorance naïve qui s'imagine que tout va bien.

Ce que veulent les consommateurs dans le fond, là, ce n'est pas compliqué, ils veulent être sécurisés, ils veulent savoir que ce qu'ils mangent est bon. Et, quand tout à coup on apprend que, dans les chips, il y a des huiles qui sont dangereuses, ce n'est pas intéressant. Mais il y a une certaine quantité de consommateurs qui n'iront pas chercher cette information-là seulement, qui ne sont pas vraiment intéressés, d'où l'importance qu'on veut mettre sur la malbouffe, là, l'importance de campagnes d'information et, si possible même, d'incitation des compagnies.

J'aimais bien l'exemple de cette compagnie de biscuits ? j'oublie le nom à chaque fois que je veux la nommer, parce que ce n'est pas une compagnie que je connais ? qui a annoncé tout récemment qu'ils allaient, mais alors complètement, modifier quelle sorte d'huile... Ils vont utiliser finalement de l'huile qui n'est pas hydrogénée, là. Et souhaitons que ça serve d'exemple. Mais, pour que ça serve d'exemple, il faut que la machine gouvernementale l'utilise, cet exemple-là, et fasse la promotion de cette transformation de l'industrie de la transformation.

Les consommateurs, si on oublie l'aspect économique, et ce n'est pas évident dire ça parce qu'on revient à la question de pauvreté, il y a une partie de la population qui va continuer à chercher ce qui est le moins cher, parce que c'est tout ce qu'ils peuvent... Ça, ce n'est pas...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Robert. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs dames. Dans votre présentation, au tout début, lorsque vous avez parlé que l'enjeu sécurité alimentaire englobe le principe, si vous voulez, de nourrir, accessible à tous, et ainsi de suite qui... vous l'avez mis... rendu plus large que ce qui avait été, si vous voulez, encadré dans la présentation pour cette étude-là. Est-ce que vous pensez qu'étant encadrés d'une façon très précise sur la question de traçabilité, OGM et tout ça, nous allons véritablement atteindre à une plus grande sécurisation du consommateur ou est-ce qu'il faudrait absolument englober plus large?

M. Robert (Alain): À mon avis, à moi, madame...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est M. Robert qui répond?

M. Robert (Alain): Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert.

M. Robert (Alain): C'est important d'effectivement englober beaucoup plus large. En m'en venant ce matin, avant qu'on soit ici, je disais à mon collègue Charles: Il faut se souvenir que le mouvement de protection du consommateur en Amérique du Nord a commencé avec M. Nader, Ralph Nader, et qui parlait de la qualité des automobiles. Le lien que je veux faire avec ça, c'est qu'on ne peut pas parler de sécurité routière si on ne se préoccupe pas de la production des automobiles. Alors, comment parler de sécurité alimentaire si on ne s'occupe pas d'abord de la production, ce qui est vraiment en amont?

Tout comme la démarche, disons, de la société québécoise sur l'assainissement des cours d'eau, c'était clair qu'il fallait commencer en amont, même s'il y a des gens dans les petits villages, en haut des montagnes, qui trouvaient ça fatigant: Pourquoi vous venez nous obliger à mettre des fosses septiques, alors que les gros pollueurs sont en bas? Il y avait une logique de commencer en amont, et, si on ne commence pas en amont... Que ce soit pour la sécurité routière, que ce soit pour l'assainissement des eaux, même chose pour la sécurité alimentaire, le travail doit se faire là d'abord, et, pour la suite des choses ? d'ailleurs ce sera plus facile quand il y aura moins d'hormones, etc., là, à surveiller ? d'avoir des systèmes d'inspection et de traçabilité alors qu'on aura d'abord sécurisé, que ? excusez-moi l'anglicisme ? les inputs dans le système sont le plus sécuritaires possible, tout en limitant les dégâts en termes d'environnement, etc., là, ce qui n'est pas vraiment notre propos ici aujourd'hui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme la députée.

Mme Robert: Oui. Une de vos propositions... En fait, vous encouragez beaucoup, si vous voulez, de rapprocher le consommateur de la production, le principe de mode cultural en agriculture biologique. La façon de l'aborder nous... Vous faites référence beaucoup à ce qui pouvait se passer il y a quelques années. Et, moi, face à des évolutions qui se sont faites...

C'est sûr qu'on peut regarder de la part des subventions, des aides et etc., mais il faut regarder aussi de la part des comportements des consommateurs. Vous vous êtes imaginés deux minutes que vous avez devant vous une personne qui a fait du marché, qui a été comme productrice agricole et qui a fait du marché. Vous êtes-vous imaginés ce que ça peut demander? J'étais la seule sur le marché à être la productrice agricole qui était sur le marché, les autres, c'étaient tous des commerçants. Alors, ça n'existe à peu près pas.

Allez dans les grands centres de Montréal, vous n'avez pas un producteur, là, sur le marché. Ils ont des produits qui viennent de producteurs qu'ils connaissent, pour la plupart, mais ce ne sont pas des gens qui sont producteurs. C'est parce que c'est à peu près inimaginable d'être à la fois en train de produire sur la ferme et en même temps aller vendre ton produit et d'être capable d'en vivre, parce qu'il y a une partie qui n'est pas monnayée, parce qu'il faudrait vendre le produit beaucoup plus cher. Alors ça, c'est en soi. Parce que, si ça n'existe pas à l'heure actuelle... Les producteurs adorent le contact avec... Vous savez, les producteurs sont fiers de ce qu'ils produisent, quoi qu'on en pense, quoi qu'on en dise, alors ils adorent le contact.

La formule Équiterre, qui est très, très intéressante, demande une information, une sensibilisation incroyable. Parce que avez-vous regardé c'était quoi, le tour de force d'amener le consommateur à venir travailler sur la ferme? C'est dans le principe Équiterre, c'est incroyable, ce n'est pas dans nos moeurs, etc. Alors, c'est des choses qui sont là, mais c'est vraiment un changement de mentalité, c'est vraiment un changement de rapport à la nourriture. Et je pense que c'est fantastique, ce qu'on met de l'avant, mais il ne faut pas demander... Quand vous nous dites que c'est au niveau de la production, je pense qu'il faut agir à beaucoup, beaucoup de niveaux, et tout le monde est concerné là-dedans. Et c'est pour ça que j'en arrive à votre proposition. Quand on parle des états généraux d'agriculture, ça veut dire quoi, ça?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert. Une autre question, là, qui va prendre peut-être deux jours.

M. Robert (Alain): Oui, bien, évidemment, vous le réalisez que c'est compliqué...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il reste deux minutes, en effet.

M. Robert (Alain): D'accord. Alors, enfin, dans mon esprit à moi ? enfin, vous me ferez signe si vous n'êtes pas d'accord ? quand on parle des états généraux, il s'agit vraiment de voir l'ensemble de la question. Mon avis à moi, c'est que cette commission-ci a une vision, que j'espère efficace, à moyen et long terme, mais qui est tellement limitée dans l'ensemble de la question. Je reprends encore mon exemple de la sécurité routière: d'abord s'assurer que les véhicules sont le plus sécuritaires possible, même chose pour ça.

Alors, les états généraux seraient de vraiment partir au niveau de la production: qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui ne se passe pas, qu'est-ce qui devrait se passer, qu'est-ce qui se passe ailleurs, qu'est-ce qui se passe de mieux ailleurs, tout en faisant attention que ce n'est pas parce que ça se passe comme ça aux États-Unis qu'on est obligés de faire pareil. Le Québec peut aussi à un moment donné se mettre le chapeau de leader en Amérique du Nord ? ce serait très intéressant, ça ? alors, en partant de la production, inspection des aliments, et tout ça, jusqu'à la mise en marché. C'est à ce point complexe, les états généraux... Et on parle aussi d'occupation de territoire quand on parle d'agriculture. Ce n'est pas beau toujours dans les campagnes, ce qui se passe actuellement. Ça pose plein de problèmes. C'est tellement vaste que ça ne peut pas se faire à l'intérieur de quelques heures.

Alors, pour moi, les états généraux, c'est quelques jours, sûrement quelques jours, et à des dates connues longtemps d'avance pour que tous les intervenants puissent venir suggérer des améliorations, mais de façon bien organisée pour qu'on le sache très bien, de la production jusqu'à la table et en incluant aussi une question de distribution.

Excusez-moi d'insister, mais la quantité de gens, d'enfants qui ne mangent pas à leur faim, quand les écoles sont obligées de s'en préoccuper, quand les banques alimentaires ont en même temps deux problèmes ? étrange dans le fond ? c'est: ils ne sont pas capables de suffire à la demande et en même temps ils luttent pour leur propre survie. Alors, l'alimentation au Québec, c'est vraiment tout ça, la sécurité alimentaire pour nous.

Alors, les états généraux, quant à nous, il s'agirait de voir vraiment chacun des secteurs, de faire le bilan: qu'est-ce qui va bien, qu'est-ce qui va moins bien, qu'est-ce qui peut être amélioré et comment on peut s'y prendre.

Mme Robert: Une petite question encore?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Allez-y.

n(12 h 20)n

Mme Robert: C'est parce que j'aimerais peut-être... Les états généraux, vous partez de la production, mais, si on partait de l'inverse, quel est le rapport du consommateur à son alimentation, à sa nourriture? Est-ce que notre consommateur... À l'heure actuelle, selon moi, l'industrie agroalimentaire répond aux besoins des consommateurs, et les produits se créent. Les produits, pour arriver à vendre, à percer sur le marché, ils répondent aux besoins des consommateurs comme tels.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée. M. Robert.

M. Robert (Alain): Bien, là aussi, on se cogne le nez sur le fait qu'une alimentation vraiment de qualité, compte tenu de la quantité, là, qui est proposée sur le marché, demande énormément d'information, et ça, ce n'est pas tout le monde qui va s'en donner la peine, il faut un peu pousser l'information.

Et le deuxième mur sur lequel on se cogne, c'est l'accessibilité pour les gens à petit budget. Bien se nourrir coûte actuellement trop cher par rapport à une alimentation strictement de subsistance. Excusez-moi, je vais finir avec cette image: quand la dame Bougon, il y a deux semaines, résume qu'il y a quatre catégories d'aliments: la viande, les patates, les liqueurs et les gâteaux Jos. Louis, c'est une caricature mais, quant à moi, qui illustrait très bien que, pour une quantité de gens, il n'y a pas de problème là, là.

Alors, il y a effectivement beaucoup d'informations à pousser. Mais les consommateurs, à mesure que leurs connaissances s'améliorent, un, développent beaucoup d'inquiétudes, comme je disais tantôt, un certain cynisme; d'autres font toujours confiance: Tout va bien, sinon ce ne serait pas sur les tablettes, là, si c'est dangereux, ce ne serait pas là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Robert. Comme vous voyez, nous, on est trop occupés ici à regarder Les Bougon, mais c'est bien d'être informés. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Tanguay, M. Robert, Mme Rioux, Mme la députée de Deux-Montagnes est issue du monde agricole et elle commerce un peu les produits du... Moi, je suis un fils d'épicier, et mon grand-père est épicier. Donc, le domaine de l'alimentation, je vous avouerais que j'ai grandi dedans.

J'ai eu l'occasion de le mentionner avec les intervenants qui étaient là avant vous, je suis originaire de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean. Et bien sûr qu'on voit actuellement qu'il y a des nouveaux marchés qui veulent être développés avec des plus petits producteurs. Parce que tantôt on a parlé de production, puis j'aimerais qu'on y revienne, sur ce sujet-là, par rapport aux plus grosses entreprises vis-à-vis des plus petites entreprises. Et souvent, lorsqu'on parle de petits producteurs, on parle de produits du terroir, combien souvent c'est difficile pour ces gens-là d'avoir accès aux marchés actuellement sans nécessairement se conformer à l'ensemble des normes qui sont exigées.

Et là j'ai un petit problème, parce qu'à quelque part on dit: Il faut qu'on soit capables d'être assurés qu'il y a une alimentation, qu'il y a des produits qui sont sains, qui sont sécuritaires, mais, de l'autre côté, on va parler aussi de faire un peu d'activités économiques avec des plus petits producteurs, qui, eux, s'ils avaient un accès à des pieds de tablette, s'ils avaient la possibilité de le faire à des coûts, je pense, qui seraient raisonnables pour ces gens-là, pourraient justement permettre de mettre sur le marché des produits sains. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur l'application «at large» des mêmes normes, où il pourrait y avoir des différences à l'intérieur des différents producteurs.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse, M. Robert.

M. Robert (Alain): Vous posez vraiment des bonnes questions, mais complexes dans leurs réponses. C'est évident qu'il faut des inspections un peu partout, mais, là comme ailleurs, il y a une question de souplesse. Et on a beaucoup d'exemples où des gens qui ont de ces produits de terroir souvent se font couper l'herbe sous le pied parce que ? je ne sais pas, je donne un exemple, là ? il n'y a pas suffisamment d'acier inoxydable dans leurs locaux ou il faut absolument que telle opération se fasse dans un local distinct de tel autre. Il y a des normes qui, tout en visant la perfection, deviennent tellement exigeantes lorsque appliquées à la lettre, sans souplesse et souvent à l'inverse de la logique. Alors... enfin, c'est sur le terrain... En termes d'adaptation de réglementations qui normalement visent le bon sens, là, c'est compliqué. Là aussi, j'ai un paquet d'anecdotes qui me passent par la tête. Mais, effectivement, on a empêché des boulangers qui faisaient du très bon pain de vendre leur pain parce qu'il manquait un local où certaines opérations auraient dû se faire là et non là. C'est à la fois logique et illogique d'être trop strict sur des applications aveugles.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Robert. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. Avant de peut-être poser ma question, j'aimerais quand même dire à ma collègue de Deux-Montagnes qu'ici, à Québec, on a un marché public, puis il y a beaucoup de producteurs qui viennent au marché y livrer leurs produits. Alors...

Mme Robert: Je vais vérifier.

M. Soucy: Oui, nous irons ensemble un bon samedi matin.

Mme Robert: On en reparlera.

M. Soucy: Alors, pour en revenir à ma question, vous avez pris des positions, je vous dirais, un peu à l'Union paysanne, hein, puis ça, je pense que c'est très évident dans vos propos, puis c'est assez catégorique en regard, exemple, des OGM. Vous avez fait référence aussi à Greenpeace. Puis ce qu'on a appris finalement, c'est que des organismes génétiquement modifiés, il y en a depuis fort longtemps qui ont été introduits dans la chaîne alimentaire, à un point tel qu'on ne peut plus savoir où est-ce qu'ils sont, puis ils sont difficiles à retracer, puis on ne sait pas comment s'en débarrasser. Donc, comment avoir une position aussi drastique d'être contre quand on sait que, dans la réalité quotidienne, bien, finalement, on vit avec depuis déjà des années?

Alors, comment ça, c'est conciliable, d'une part, puis, d'autre part, on vient d'introduire dans vos propos le mot «souplesse»? Parce que, là, ça va être des petits producteurs puis il va falloir être plus souple. Comment, d'un côté, on peut être souple puis apporter des allégements à certaines réglementations puis, d'un autre côté, assurer la sécurité alimentaire qui fait votre... en tout cas, votre cheval de bataille aujourd'hui?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Tanguay? M. Robert?

M. Robert (Alain): Je vais répondre à votre dernière question par une autre image. Si je veux assurer la sécurité sur une passerelle, exemple, je peux avoir une réglementation qui dit qu'il faut des garde-fous faits de tel matériau et de telle épaisseur, avec tant de points d'attache, etc., alors qu'il peut y avoir un autre système qui est parfaitement sécuritaire, mais qui n'est pas bâti avec les mêmes matériaux, n'a pas autant de points d'attache, et tout, mais qui... un système qui est parfaitement sécuritaire. L'idée est d'atteindre la sécurité et qu'une inspection prouve que ce producteur-là, de foie gras ou de quoi que ce soit, ne pose pas un problème. Sauf que l'application très sévère de normes très strictes amène parfois des situations illogiques, et on va se...

M. Soucy: J'en conviens là, mais, pour reprendre sur votre exemple, si on disait maintenant à n'importe quel ingénieur: C'est toi maintenant, avec ton sceau, qui vas approuver le pont ou la construction du pont et le choix des matériaux, on pourrait assister à une multitude de façons de construire le pont, une multitude de matériaux et on se fierait probablement au sceau de l'ingénieur, qui lui, évidemment, de par ses fonctions de professionnel, donne... C'est lui qui donne la sécurité et qui fait en sorte que plusieurs options seraient possibles, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui parce que la responsabilité a été transférée, je dirais, à un niveau un petit peu abstrait, gouvernemental. Mais, enfin, pour...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert.

M. Soucy: ...pour l'autre question, là...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Robert.

M. Robert (Alain): Bien, l'idée qui me vient tout de suite en tête, c'est que toute cette question d'inspection nécessaire, c'est évident qu'il faut des inspecteurs sur la route, il faut des ressources, il faut des gens compétents, mais qui sont capables effectivement de juger en situation. Cette façon de procéder peut poser un certain danger. Et d'avoir plusieurs inspecteurs, en bonne quantité, là, un peu partout sur le territoire, qui ont le droit de faire des visites à l'improviste, je pense que ce serait certainement un élément. Et les producteurs, de quoi, de quelque produit que ce soit, on parle de petite échelle, qui n'ont rien à cacher n'auraient rien à craindre non plus que tout à coup arrive un inspecteur qui vient vérifier, qui prend des échantillons ? des méthodes que, nous, on ne connaît pas vraiment comme consommateur, là ? mais qui s'assure que le produit qui est là était sécuritaire hier, le sera probablement demain, mais sans nécessairement ? et c'est là que ce n'est pas facile de répondre en quelques minutes ? sans nécessairement répondre à un code fermé, très strict, un cahier de charges qui souvent crée des situations illogiques.

M. Soucy: Par rapport aux OGM...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci.

M. Tanguay (Charles): Si je peux me permettre, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, allez-y, M. Tanguay, allez-y.

M. Tanguay (Charles): Sur les OGM, je pense que notre position, elle est très clairement ancrée dans le temps, c'est-à-dire qu'aujourd'hui, à l'heure où on se parle, il reste des incertitudes scientifiques. Aujourd'hui, à l'heure où on se parle, les consommateurs n'ont pas accès à l'information quand un produit contient des OGM, et ça, c'est le point sur lequel on insisterait le plus, c'est: à tout le moins qu'on le sache. Et finalement il n'est pas dit qu'on ne changerait pas d'idée dans un an, dans cinq ans, dans 10 ans sur la nécessité d'avoir des OGM. Mais on peut vous retourner la question: Qu'est-ce qu'ils nous apportent, ces OGM là? De notre point de vue, c'est davantage un danger de mainmise d'une certaine industrie sur le vivant et c'est, d'après nous, beaucoup plus qu'une question de santé. C'est là le véritable enjeu des OGM, c'est le contrôle de l'industrie agroalimentaire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Tanguay. M. le député d'Iberville.

n(12 h 30)n

M. Rioux: Merci, Mme la Présidente. Rapidement, parce que je sais que le temps nous est compté. Si on regarde en Amérique du Nord, jusqu'ici on peut dire qu'on n'a pas vécu de catastrophe majeure. Si on regarde, le cas de la vache folle a quand même été contrôlé, et on nous dit que possiblement les risques sur la santé sont aussi très limités.

Vous nous revenez en nous parlant de revenir à des fermes à dimension humaine, de revenir au marché public. Mais, en contrepartie, si on regarde, jusqu'ici, là, l'espérance de vie a augmenté en Amérique du Nord, le coût des produits est relativement bas si on regarde... L'UPA est venue hier, est venue dire: On est revenus aux revenus de 1983, donc c'est le consommateur qui en profite. On regarde aussi qu'une bonne partie de notre production est exportée, donc ça, c'est un avantage qu'on a pu faire grâce aux spécialisations. Et, au niveau du citoyen, vous disiez tout à l'heure: Oui, il y a des citoyens... il existe des petits déjeuners, des banques alimentaires, ainsi de suite, ça, je pense que c'est davantage un problème de redistribution qu'une question, là, de sécurité alimentaire.

Je ne pense pas qu'on va changer le système du jour au lendemain. Je pense que, même si on le voulait, on ne pourrait pas le faire. Est-ce qu'une orientation qui serait peut-être plus pensable, ce serait d'avoir une agriculture complémentaire, où les gens qui se sentent, dans le système actuel, insécuritaires pourraient compter sur ce système-là?

Et, si effectivement c'est l'ensemble de la population qui y croit, bien, le jeu du marché va s'établir, le jeu qui est la base de l'offre et la demande, si les gens disent vis-à-vis des OGM, comme vous l'avez bien dit tout à l'heure: Les OGM, on est inquiets. Sauf que c'est une inquiétude potentielle, parce que c'est le temps qui va nous le dire effectivement. Et peut-être que, dans 10 ans, comme vous disiez, bien, on va dire: On vient d'améliorer drôlement la qualité de vie de l'ensemble des citoyens par les OGM. Sauf qu'il y a une... Je pense qu'il reste que l'État ne doit probablement pas tout décider. Que les gens soient informés, oui, que le produit que tu consommes, il a des OGM, mais, après ça, est-ce que je vais le consommer ou non... ce qui est le plus important, je pense, c'est que la population après puisse avoir un choix de consommer des produits avec ou non OGM.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Tanguay.

M. Tanguay (Charles): Merci. Nous ne disons pas que, demain matin, il faut retourner 50 ans en arrière puis, tout le monde, se remettre à la fourche et à la faucille, évidemment. On est conscients que ce qu'on demande là, c'est beaucoup plus un virage lent d'un gros bateau qu'un changement radical demain matin. Alors, on suggère de tendre vers plus d'agriculture biologique, tendre vers plus d'autonomie alimentaire pour le Québec, etc.

À l'inverse, ne rien faire... Santé Canada a évalué les coûts de la malbouffe, semble-t-il, à 6,3 milliards de dollars par année. Donc, ça, c'est des coûts réels, là, qu'on paie dans nos systèmes de santé, et c'est énorme. De la même façon, si on s'oriente exclusivement vers l'exportation, on a vu ce qu'une vache folle aurait pu faire pour anéantir un marché d'exportation, on devient extrêmement vulnérables, et toute une industrie agricole devient finalement... perd le contrôle sur sa propre destinée, et c'est des communautés entières qui perdent aussi le contrôle sur leur destinée. Donc, on prône simplement un juste retour vers un meilleur équilibre. M. Robert a peut-être quelque chose à ajouter là-dessus?

M. Robert (Alain): Tu as tout dit.

M. Tanguay (Charles): Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): De façon très courte, si vous avez quelque chose à dire, parce que nous avons épuisé notre enveloppe du temps, M. Robert.

M. Robert (Alain): Souhaitons vous revoir aux états généraux.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bonne conclusion. Alors, M. Tanguay, M. Robert, Mme Rioux, je vous remercie infiniment pour votre présence parmi nous, pour votre contribution.

La commission ayant terminé son mandat pour ce matin, je suspends nos travaux à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

 

(Reprise à 14 h 5)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, la commission débute ses travaux. J'invite les représentants du Conseil canadien des distributeurs en alimentation à prendre la parole. M. Eric Claus, président du conseil d'administration du conseil et président et chef de la direction Les Supermarchés A&P Limitée, je vous prie de nous présenter les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et 20 minutes d'échange avec chaque groupe parlementaire, incluant les questions et les réponses. Alors, M. Claus, vous avez la parole.

Conseil canadien des distributeurs
en alimentation (CCDA)

M. Claus (Eric): Oui, bonjour, je vais passer les introductions à Andrée Delisle, qui est avec la CCDA.

Mme Delisle (Andrée): Alors, je me présente, je suis vice-présidente pour le Québec, Affaires publiques et services aux membres.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Voulez-vous vous nommer, s'il vous plaît?

Mme Delisle (Andrée): Andrée Delisle.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, Mme Delisle.

Mme Delisle (Andrée): Vous m'entendez bien? Peut-être que je dois monter le volume?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, oui.

Mme Delisle (Andrée): Je suis accompagnée, en plus du président de notre conseil, à ma gauche complètement, de Mme Christiane Chabot. Mme Chabot est ici à deux titres: d'abord, elle est directrice principale responsable de l'Assurance qualité, chez Provigo inc.; elle est également membre du comité interne du CCDA sur la sécurité alimentaire en plus de participer au sous-comité formé par le MAPAQ, un comité multipartite sur les travaux HACCP, sur la méthode HACCP. À ma droite, je suis accompagnée de Michel Bonenfant, qui est gérant de la sécurité et de la formation chez Métro-Richelieu. Michel également est membre du comité interne sur la sécurité alimentaire en plus d'être notre représentant au sein du sous-groupe sur la traçabilité, qui a été formé par le MAPAQ et qui est composé également de représentants de l'industrie.

Je passe la parole à mon président tout de suite pour vous faire une introduction. Et vous allez voir, tout au long de la présentation, on va s'échanger la parole. Avant d'arriver à la période de questions, donc c'est essentiellement M. Claus et moi qui allons parler. Lorsque viendra la période des questions, nous prendrons la peine de vérifier qui est en mesure, dépendant du niveau technique, là, de la question, d'y répondre dans les meilleurs... avec les meilleures chances de nous faire comprendre. Alors, Eric.

M. Claus (Eric): Bon après-midi à tout le monde. Premièrement, j'aimerais vous remercier de prendre le temps de nous écouter, d'écouter les opinions et les positions de notre organisation. Vivant à Toronto et en étant chef d'une entreprise assez anglophone, j'espère que vous allez m'excuser si parfois je fais des fautes dans mon français, surtout les anglicismes ou les acronymes. D'abord, je demande votre patience là-dessus. De temps en temps, si vous posez une question aussi, je pense que je devrais être bon, mais c'est... Comme j'ai dit, je n'ai pas souvent l'occasion.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce que tous les Ontariens parlent français comme vous?

M. Claus (Eric): Non. Malheureusement, non.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, soyez bien à l'aise.

M. Claus (Eric): C'est un plaisir. Et je peux vous dire aussi que les Ontariens... j'ai beaucoup de misère avec les clubs de hockey, je ne suis pas très populaire. D'ailleurs, mais quand même, quand on va dans les magasins dans le nord de l'Ontario, il y a beaucoup de francophones, donc c'est toujours un plaisir pour eux d'avoir quelqu'un qui vient de Toronto qui peut parler le français.

Donc, je ne perds pas notre temps avec mon français. Bien, premièrement, j'aimerais vous féliciter aussi sur le processus, parce que je crois beaucoup à un processus qui est ouvert et qui demande non seulement les opinions des gens d'entreprises, mais aussi de la population en général. Et je pense que, des fois, ça peut être pénible, des fois, c'est long, mais je pense à la fin, quand on a toutes les informations puis les opinions, on est toujours dans une meilleure place pour prendre une décision ou donner des bons conseils.

Ça fait à peu près huit ans que je suis sur le conseil de la CCDA et je peux vous dire que le sujet de la sécurité alimentaire, depuis huit ans... ça a toujours été quelque chose de très important, mais, depuis huit ans, je peux vous dire que ça a monté à peut-être le rang le plus élevé dans les priorités de notre organisation. Et, en tant que président du conseil... pas en tant que président du conseil, mais... Je porte vraiment deux chapeaux: un, c'est le CCDA, mais aussi je suis chef d'une entreprise. Je ne sais pas si vous connaissez A&P; c'est un petit peu comme, je pense, de la taille comme Métro-Richelieu; on a environ 4 milliards et demi de chiffre d'affaires, 30 000 employés en Ontario. Et je peux vous dire que, moi et mes collègues qui sont des chefs de direction des chaînes alimentaires au Canada, si vous nous aviez posé la question, il y a cinq, ou six, ou sept ans, où est-ce que la sécurité alimentaire est, au niveau des priorités, pour un chef de direction, c'était toujours assez élevé, mais aujourd'hui, je pense que ce serait toujours dans le numéro un ou le numéro deux. Numéros un et deux, ça peut s'échanger, c'est la sécurité et le bien-être de nos employés ou bien de la sécurité alimentaire.

n(14 h 10)n

Et comme on sait, depuis quelque temps, il y a eu des occasions, des crises qu'on a eues, surtout en Ontario, que ce soit avec le... je ne sais pas le bon terme en français pour «hepatitis»...

Une voix: L'hépatite.

M. Claus (Eric): ...l'hépatite ou bien l'empoisonnement avec la nourriture, qu'on a eu aussi dans nos magasins. Ça nous fait tous peur. On met beaucoup d'argent, beaucoup de ressources et beaucoup d'emphase sur le sujet, mais ce n'est jamais parfait. Mais je peux vous dire que sincèrement, de tout le monde, de tous nos membres, c'est vraiment rendu à un niveau vraiment des plus élevés dans nos intérêts puis nos efforts.

Je pense que je... on va essayer d'être bref dans notre présentation; comme vous avez dit, c'est 20 minutes. Le temps de question, ça va être le plus important, je pense, pour vous donner les réponses. Puis j'espère qu'on a les réponses. Ici, on a des experts, mes collègues qui sont ici avec moi. Moi, je ne suis pas l'expert technique, je pense que j'ai les grandes lignes, mais on va souvent appeler sur eux pour nous aider.

Juste pour vous dire brièvement ce qu'est la CCDA, on est une organisation sans but lucratif qui se consacre à l'avancement et à la promotion du secteur de la distribution des produits d'épicerie et des services alimentaires au Canada. Au Québec, c'est des noms que je pense que vous connaissez bien: un, peut-être, que vous connaissez moins bien, c'est A. de la Chevrotière, c'est le magasin sous la bannière de Loeb et de Métro, principalement dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue? Rouyn-Noranda; il y a la compagnie Colabor, qui est un gros distributeur en alimentation au Québec; ainsi que Jean-Paul Beaudry, qui est aussi distributeur; la compagnie Métro, donc que vous connaissez sous les bannières de Métro-Richelieu ou Super C et qui est aussi distributeur en alimentation, services alimentaires; Provigo, qui est une des compagnies de Loblaw's, que vous connaissez surtout sous les bannières de Maxi et Provigo; et Sobeys, que vous connaissez surtout sous la bannière de IGA.

Au Québec, les membres de la CCDA ont un chiffre d'affaires d'environ 15 milliards de dollars. Ils comprennent 7 300 magasins avec environ plus que 120 000 d'employés au Québec, avec des salaires payés de plus de 2,1 milliards. Au Canada, notre industrie est la... L'industrie de l'alimentation, c'est l'industrie la deuxième plus grosse en importance après l'automobile. Donc, on a une industrie qui a beaucoup d'emplois, qui fait un gros chiffre d'affaires, naturellement. Notre chiffre d'affaires de tous nos membres au Canada, c'est environ 64 milliards de dollars. À notre emploi, il y au-dessus de 400 000 citoyens canadiens, et les ventes de nos membres représentent environ 80 % de toutes les ventes en alimentation qui se font dans notre pays.

Si j'étais pour résumer la mission du CCDA, je dirais, c'est comme suit ? puis on a vraiment résumé dans quelque chose d'assez court ? premièrement, c'est d'être le principal centre d'information et de services de l'industrie pour nos membres. Donc, on est un petit peu le cerveau de l'industrie pour nos membres. Le deuxième, c'est de faire la promotion des meilleures pratiques et des normes de l'industrie. Donc, on essaie d'avoir une technologie qui est conforme à travers toutes nos compagnies, avec nos fournisseurs, ainsi que beaucoup d'autres choses, et on attaque les gros sujets qui ne sont pas compétitifs, tels que la sécurité alimentaire. On travaille très étroitement ensemble. Donc, autant qu'on peut se battre sur le champ de détail, sur les prix, les magasins, les promotions, quand ça vient des choses non compétitives, on travaille vraiment étroitement ensemble pour le bénéfice de l'industrie puis du consommateur.

Puis je dois vous dire aussi qu'en tant qu'organisation et en tant que président du conseil du CCDA, on a toujours pris la position, même si des fois ce n'était pas populaire avec certaines industries, que c'est le consommateur en premier. Puis dans notre pays, aujourd'hui, on est vraiment chanceux que, je crois, au niveau mondial, on est un des pays qui a peut-être le niveau de confiance du consommateur le plus élevé dans notre système gouvernemental, dans nos épiceries puis dans toute l'industrie. Donc, pour nous, c'est quelque chose de sacré, et on y travaille très fort, pour travailler étroitement ensemble.

Même des exemples que, si des fois on pense... On ne prendrait jamais avantage un membre sur l'autre à cause des problèmes ailleurs. Puis je vous donne l'exemple peut-être du boeuf, de la maladie de la vache folle, qu'on a eu cette année. Il n'y a pas un de nos membres qui ferait une publicité qui dirait que, notre boeuf, il ne vient pas de là, à la défense de quelqu'un qui a un problème, parce que hier c'était en Alberta, demain ça peut être au Québec puis le lendemain ça peut être au Nouveau-Brunswick ou en Ontario. Donc, on travaille ensemble puis je pense qu'on le fait d'une manière qui est vraiment... On a une bonne conscience sociale, en termes de notre consommateur puis aussi de notre industrie.

La quatrième chose, c'est: on aide aussi... on essaie d'aider à l'industrie d'améliorer sa capacité concurrentielle sans faire des choses qui ne sont pas... qui tombent dans le domaine de la concurrence entre nous autres, mais vraiment pour mettre notre industrie plus concurrentielle.

Nos priorités stratégiques, puis on en a plusieurs, mais je vais nommer les quatre plus importantes:

Premièrement, c'est d'intervenir dans les grands dossiers d'affaires pouvant avoir un impact sur notre industrie et en particulier sur nos consommateurs. Puis ça, c'est à l'échelle fédérale et provinciale.

La deuxième, c'est d'élaborer et mettre en oeuvre les meilleures pratiques dans le réseau d'approvisionnement.

La troisième, c'est de communiquer efficacement. Puis, en termes de communications, je vais juste dire rapidement que le CCDA est le porte-parole pour l'industrie, et on croit que, vu que sur toutes les issues qui sont non compétitives, on travaille tellement ensemble, c'est mieux d'avoir un porte-parole, une position et une position qu'on peut donner plus clairement donc avec les médias, avec le consommateur, avec les gouvernements puis tous les secteurs qu'on touche avec notre industrie.

La quatrième, c'est le mandat d'être hôte des forums d'industrie à des fins de réseautage et d'information. Puis ça, on en fait. À chaque année, on a des conférences régionales ainsi que des conférences nationales, qu'on a d'ailleurs eues à Québec, il y a quelques années. Et on essaie de prendre ces forums-là pour vraiment impliquer les gens de toutes les régions dans l'industrie puis les amener ensemble et faire quelque chose qui est bon pour l'industrie.

Ça, c'est, en résumé, nos priorités stratégiques. Autant que notre position, la position de la CCDA en ce qui concerne la sécurité alimentaire, en tête des listes de priorités du CCDA et de tous nos membres, c'est toujours la sécurité de toute la chaîne d'alimentation et de maintenir la confiance des consommateurs. Je n'en parlerai pas plus parce que j'en ai déjà parlé, puis c'est vraiment... comme je dis, c'est peut-être la première chose sur notre liste de priorités.

Deuxièmement, c'est d'avoir les politiques qui respectent les quatre principes suivants:

Le premier principe, c'est un principe qui est excessivement important pour nous, c'est l'harmonisation, puis ça, surtout au niveau provincial, fédéral. Puis, dépendamment des dossiers, il y a des dossiers qui doivent être une harmonisation pour tout le Nord de l'Amérique, puis même en certains dossiers globaux. Et on voit aujourd'hui que notre industrie puis nos partenaires en industrie, que ce soient les producteurs, que ce soient les personnes qui font la fabrication des aliments, la production, on devient vraiment... on devient beaucoup plus global. Et il y a certaines choses, en termes de technologie, qu'aujourd'hui on essaie de se mettre aux normes globales. Et dans tout... puis je pense qu'on va en parler plus tard dans les sujets qui sont plus techniques, avec Andrée, où est-ce que vous allez voir que l'harmonisation, pour nous, est excessivement importante, puis je pense c'est très important pour le Québec aussi.

Le deuxième, c'est l'universalité et uniformité d'application. Donc, si on parle ? je vous donne juste un exemple ? des inspections, ça, je pense que mes collègues, Christiane ou Michel, peuvent en parler plus tard, mais ce n'est pas nécessairement dans chaque région que les politiques ou les règles sont appliquées d'une manière qui est exactement pareille comme un autre secteur. Donc, je pense qu'il y a un petit peu d'inégalités là qui devraient être réglées.

Le troisième, c'est: équité. Puis, quand je parle d'équité, je pourrais en parler longuement, mais on essaie toujours, dans tout ce qu'on fait, de pousser des règles qui sont justes pour tout le monde, pour les petits puis pour les gros. Puis, je dois dire, dans nos membres, ce n'est pas juste des grosses fermes comme celles-là que gèrent un Métro, un Loblaw's; il y a beaucoup de plus petites fermes. Et pour nous, autant les votes dans notre organisation, Loblaw's peut avoir le même vote qu'une business qui est un centième de sa grosseur. Donc, on essaie toujours de garder la justesse gros, petit et aussi, quand ça vient à l'extérieur de notre organisation, que l'équité est vraiment pour tous les joueurs, que ça va de la ferme jusqu'au consommateur, et c'est un de nos principes.

Et le dernier que je veux mentionner, ça va être les règles basées sur des faits scientifiques avérés. Et ici on va parler plus longuement tantôt sur les OGM. J'utilise ça comme un exemple. On pense vraiment que les règles doivent être faites sur une base scientifique et non sur des opinions ou sur des perceptions.

n(14 h 20)n

On vous a soumis un mémoire. Ce mémoire, il y a beaucoup de gens qui ont travaillé très fort là-dessus, et on a vraiment essayé de répondre au mandat de votre comité et surtout de répondre aux questions qui étaient pertinentes à nous et notre industrie, qu'on trouvait dans vos 21 questions. Donc, j'espère que l'information qu'on va donner aujourd'hui est vraiment pertinente aux sujets qui sont dans le mandat que vous avez.

Donc, les trois grands titres sur lesquels on va parler sont: le premier, c'est l'inspection des produits alimentaires; le deuxième, c'est la traçabilité des produits alimentaires; et le troisième, c'est l'étiquetage des produits alimentaires. Sur chacun de ces trois points-là, Andrée va donner un petit peu plus de détails. Si ça ne vous dérange pas, de temps à autre, pendant qu'elle donne sa présentation, je vais rajouter quelques commentaires, et, quand elle aura fini, ça nous fera un plaisir de répondre à toutes vos questions. Merci.

Mme Delisle (Andrée): Je ne sais pas de combien de temps on dispose encore pour notre présentation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il vous reste à peu près quatre minutes, là, quatre à cinq minutes.

Mme Delisle (Andrée): Donc, je vais y aller au plus court. Donc, en ce qui concerne l'inspection, en général, notre organisation considère que les systèmes d'inspection au Canada... aussi au Canada qu'au Québec, sont fiables et sont crédibles, malgré quelques peut-être maillons un peu plus faibles alors sur lesquels j'aimerais insister.

Je reviens sur ce qui est pour nous un mot clé du début jusqu'à la fin: la nécessité donc d'une harmonisation plus poussée. Et ici, en ce qui concerne l'inspection, je pense que les récentes crises, l'épizootie, la crise de la vache folle, etc., nous ont montré que l'intégration à l'échelle nord-américaine est très grande dans l'industrie, d'où, pour nous, la nécessité d'avoir une harmonisation à cette échelle-là en matière d'inspection.

On considère également, pour ce qui est du Québec, que tous les commerces qui s'adonnent à la vente d'aliments devraient être soumis à l'obligation de détenir un permis. Pour ceux qui ont lu ? et je n'insisterai pas trop longtemps ? le mémoire, vous verrez qu'on recommande éventuellement la création d'un troisième type de permis pour couvrir les commerces qui actuellement vendent des aliments souvent secs ou d'épicerie, qui ne détiennent pas de permis, donc qui échappent au filet de la sécurité. Alors, lorsque survient théoriquement un problème de santé, si ces commerces-là ne sont pas répertoriés, ne détiennent pas de permis, c'est inutile de penser que, si on veut faire un rappel universel, ils puissent être visés ou interpellés. Donc, nous plaidons pour la nécessité de la détention d'un permis pour tous ceux qui vendent des aliments.

En ce qui concerne le niveau de contrôle et des inspections à travers la chaîne, nous, on a constaté qu'il y a des inégalités. Il y a des efforts qui sont moindres pour certains maillons, en termes de rigueur, en termes de fréquence des inspections. On pense ici, pour l'avoir constaté, que, par exemple chez les petits transformateurs, dans certains cas, il y a très peu de visites, on voit très peu souvent les inspecteurs, ce qui affaiblit l'ensemble du système, à notre avis.

Je ne sais pas si, à ce stade-ci, Eric souhaiterait ajouter un commentaire, mais, moi, j'avais un dernier...

M. Claus (Eric): Je pense qu'on va manquer de temps...

Mme Delisle (Andrée): On va manquer de temps?

M. Claus (Eric): Oui.

Mme Delisle (Andrée): O.K. Je voudrais faire un dernier commentaire sur la méthode HACCP. Nous sommes très en faveur de cette méthode-là dans la mesure où c'est la meilleure qu'on puisse avoir dans l'industrie, dans la mesure également où elle est déjà beaucoup en application. Mais on maintient qu'elle doit rester volontaire et qu'elle doit être adaptée aux différentes spécificités de chacun des maillons.

Quelques mots sur la traçabilité ? je vais essayer d'y aller très brièvement. Vous êtes sans doute au courant que notre organisation et une vingtaine d'autres organisations au Canada ont décidé, depuis moins d'un an, de faire une grande campagne nationale pour tenter de rallier tous les maillons de l'industrie à l'échelle donc canadienne autour de l'établissement de normes, de standards pour chacun des maillons, et on le fait actuellement. On est déjà sur le terrain à faire de la consultation, et je peux vous dire que, d'ici juin, en principe, si l'échéancier est suivi, on devrait arriver avec les premières normes génériques, notamment pour le boeuf. Michel pourra répondre à des questions plus spécifiques tout à l'heure.

Les grands principes auxquels on croit en matière de traçabilité, c'est: encore une fois l'harmonisation à l'échelle nationale; la compatibilité de quelque norme que ce soit mais à l'échelle internationale pour que les systèmes puissent se parler, donc pour ne pas nuire ni aux importations ni aux exportations; on croit aussi que c'est essentiel d'avoir une technologie ou des choix de technologies à coût abordable; l'efficacité aussi; et le tout devrait pouvoir être mis en oeuvre de façon... dans des délais raisonnables pour que l'industrie puisse s'adapter; on doit également prendre en compte les infrastructures existantes et les investissements déjà consentis; et on doit avoir un système qui respecte les données privées. Alors, il semble que je doive m'arrêter ici.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est bien, Mme Delisle, je vous remercie. C'est toujours une course contre la montre, hein, quand on est limité dans le temps. Vous aurez l'occasion de revenir sur les différentes parties du mémoire avec les échanges des députés. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Mesdames, messieurs, bonjour, bienvenue. Merci de la présentation.

Je veux faire suite à ce que vous venez de dire, Mme Delisle, à propos de la campagne nationale à propos de la traçabilité. J'aimerais avoir un peu plus de détails, parce que vous nous avez dit que, d'ici juin, les premières normes dans le domaine du boeuf, entre autres, seraient établies. J'aimerais ça que vous me fassiez un lien entre ce programme-là et le programme qui existe au Québec depuis plus de deux ans. Est-ce que les deux programmes se complètent, se concurrencent ou est-ce que la campagne nationale est axée ou ressemble un peu... la formule de traçabilité va ressembler à celle qu'on a établie au Québec?

Mme Delisle (Andrée): Je pense que je laisserais...

M. Morin (Nicolet-Yamaska): C'est ma première question.

Mme Delisle (Andrée): O.K. Je laisserais Michel aller plus en détail. Mais ce que je peux vous dire, c'est que ce n'est pas un système concurrent qu'on est en train de mettre en place, c'est un système où effectivement on tente de rallier toutes les initiatives, dont celles du Québec, à l'intérieur d'un plan beaucoup plus global. Pour plus de détails, je pense que je vais laisser Michel y aller de sa réponse et de ses explications.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bonenfant.

M. Bonenfant (Michel): Oui, bonjour. Merci. Alors, ce que Mme Delisle nous parlait tantôt, c'est l'initiative canadienne de la traçabilité. Bien, ça va essentiellement dans le sens de ce que le gouvernement québécois a mis de l'avant au niveau de la traçabilité. Donc, ça fait déjà plusieurs années qu'on parle de la traçabilité au Québec. Et, nous, comme industrie de la distribution et du détail, on est activement impliqués dans ce processus-là naturellement au Québec, pour moi-même faire partie du sous-comité de traçabilité qui représente les distributeurs, les détaillants à ce sous-comité-là. Donc, c'est un comité qui existe depuis quelques années et pour lequel on travaille beaucoup sur la façon de pouvoir réaliser la traçabilité, avec un objectif qui avait été fixé par le gouvernement précédent pour 2005.

Ce qu'il faut regarder au niveau des travaux qu'on a eus via ce sous-comité-là évidemment, dans le type d'industrie que nous avons, on doit regarder ça pas juste dans un contexte québécois, mais surtout dans un contexte au niveau canadien, puis on doit parler aussi à un niveau nord-américain, parce que la majorité de nos activités d'affaires se passent donc au niveau de l'Amérique du Nord, un peu moins au niveau de l'Europe.

Donc, suite à des discussions qu'on a eues via nos différentes associations, on a dû porter ces discussions-là au niveau national. Et, via le CCDA, qui est le Conseil canadien de la distribution alimentaire, et avec aussi le Conseil canadien du commerce électronique, nous avons des discussions pour justement agrandir le cercle des discussions et pour finalement arriver avec un grand projet national qu'on appelle aujourd'hui Can-Trace. Et tous les intervenants du milieu alimentaire canadien sont invités à participer.

Il y a eu, depuis déjà l'hiver dernier et tout récemment en janvier dernier, des rencontres à travers le Canada, notamment à Montréal à deux occasions. La dernière a eu lieu le mois passé. Et je sais qu'il y a des gens du MAPAQ qui ont participé d'ailleurs à ces consultations-là. Il y a même une personne de la Direction de l'inspection et des normes du Québec qui fait partie des travaux et du comité qu'on appelle le Comité des normes.

Alors, l'objectif du Comité des normes évidemment, c'est d'être en mesure de pouvoir trouver des points communs dans la façon d'assurer la traçabilité. Ce qu'il faut... Ma réponse est peut-être longue, mais je pense qu'elle mérite ce temps-là. L'objectif, c'est de trouver une façon d'assurer la traçabilité, et le point de départ de tout ça ? malgré les différentes questions qu'on peut avoir sur la traçabilité, il faut revenir toujours à la base dans n'importe quelle circonstance ? c'est de trouver la façon de communiquer. Alors, quel type de langage on doit utiliser? Est-ce qu'on doit utiliser des «bar codes», des radiofréquences, les puces électroniques? Et là je vous parle toujours dans un contexte où tous les gens, tous les maillons de la chaîne de la distribution y participent. Et évidemment les besoins de chacun ne sont pas nécessairement les mêmes au niveau des solutions. Alors, en résumé, j'espère avoir répondu à votre question.

n(14 h 30)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Bien, vous êtes des acteurs importants, et sûrement que la crise de la vache folle, pour faire suite à la question sur la traçabilité, avec un programme comme vous parlez, la crise de la vache folle peut-être aurait pu être évitée. Mais, compte tenu du moment où on l'a initiée au Québec, où elle aurait pu être initiée au Canada aussi... Vous savez comme moi qu'il y a eu des... Il y a toujours des victimes au Québec. Nos agriculteurs ont passé, je vous dirais, une année d'enfer, une année extrêmement difficile, des pertes de revenus énormes... M. Pellerin était ici il y a quelques jours. Il nous parlait, pas nécessairement à cause de la crise de la vache folle, mais des pertes de revenus ou des baisses de revenus nets de 50 % et plus.

Et la crise de la vache folle, pour prendre cet exemple-là et un exemple pratique... L'été dernier, il y a des agriculteurs de mon comté qui sont venus me montrer des résultats de vente d'une vache de réforme qu'ils avaient... La vache de réforme pesait plus de 1 000 lb, et le chèque qu'on m'a montré était de 80 $, plus ou moins. La même journée, on allait à l'épicerie acheter du steak haché ou, peu importe, du boeuf et on payait 3,50 $ la livre. Je n'accuse pas personne puis pas votre organisme non plus, mais entre le producteur et le consommateur il y a un problème énorme, là.

Et, avec une crise comme on a connue là, avec la crise de la vache folle, au niveau de la traçabilité, vous nous recommandez d'être prudents, puis effectivement il faut l'être pour le bien-être des consommateurs, sauf que, dans un cas comme celui-là, c'est les producteurs et c'est les consommateurs qui ont payé la note, la facture la plus importante, à cause de cette crise-là. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus parce que... Je ne pense pas que vous soyez surpris de notre question aujourd'hui, là.

M. Claus (Eric): Du tout. Je l'ai entendue souvent, la question. Et la question... encore, je crois que ça va être une réponse longue, et ma réponse n'est pas nécessairement... n'aura pas justement rapport à la traçabilité, mais, je pense, à l'ensemble de qu'est-ce que vous avez dit, puis peut-être que ça vaut la peine de passer cinq minutes dessus.

Premièrement, un système de traçabilité ne va pas nécessairement prévenir une crise, mais un système de traçabilité va sûrement aider à trouver plus rapidement où est le problème, que ce soit avec un boeuf, un porc ou un légume. Et donc ça nous donne les méthodes d'aller trouver la source du problème et régler le problème beaucoup plus vite, que ça ne devienne pas quelque chose de nocif. Et, je crois aussi, de ce côté-là, ce qui est très, très important, c'est qu'on n'essaie pas de faire quelque chose de vite parce qu'on veut éviter une solution comme celle qui vient juste d'arriver au Canada, mais c'est de trouver la solution qui est la bonne solution et une solution...

Quand Michel, il parlait de différentes techniques, que ce soit un «bar code» ? je ne sais pas le bon terme en français, la petite étiquette qu'on scanne ? ou que ce soit à fréquences de radio, tout ça, il faut que ce soit décidé, puis il y a différents systèmes pour différentes parties de la chaîne alimentaire, et je crois qu'un délai raisonnable aussi pour le faire est nécessaire, parce que autrement on va faire quelque chose trop vite qui va être trop coûteux encore. Parce qu'il faut trouver un système qui est bon et harmonisé à travers le pays. Déjà, notre pays, en termes de population, n'est pas très gros, on est 10 % des États-Unis, et on ne peut pas se permettre de mettre des systèmes du côté des producteurs non plus qui vont hausser, soit juste au Québec ou même au Canada... quelque chose qui n'est plus abordable puis nous sort du marché, parce que notre marché a aussi beaucoup d'exportations. Surtout au Québec, le porc, c'est une grosse exportation avec Coop fédérée ou d'autres.

Quand vous me dites... Puis j'entends souvent aussi dans les médias... On montre le fermier, d'un côté, qui a 80 $ pour son bétail, puis on voit un steak sur la tablette qui vaut 8 $. Je ne pense pas que c'est une comparaison qui est nécessairement la bonne. Premièrement, quand il y a une crise comme on a eue avec la vache folle, on a un surplus de boeuf. Et, dans tous les marchés au monde, il y a toujours de la demande, la loi de la demande...

Mme Delisle (Andrée): De l'offre et de la demande.

M. Claus (Eric): ...l'offre et la demande. Et, quand il y a trop de boeuf et pas assez d'acheteurs, c'est sûr que le prix va baisser puis ce n'est pas rentable. C'est le contraire. Dans ce temps-là, les gens aux États-Unis faisaient beaucoup d'argent.

Une voix: ...

M. Claus (Eric): Mais je vais juste... si vous me permettez de finir. Si je prends... Et je dois vous dire qu'aussi, avant d'être chef de cette entreprise, j'étais chef de la direction de Coop Atlantique, dans les Maritimes, donc où est-ce qu'on avait aussi une business qui était agricole et une qui était les supermarchés. Votre question, je l'ai entendue fréquemment parce que, d'un côté, nos clients, c'est des fermiers, de l'autre côté, nos membres, c'étaient les gens qui étaient propriétaires des épiceries. Donc, tu ne pouvais jamais plaire à tout le monde.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Claus. Je sais que vous allez revenir sur ces questions-là, le temps de discussion étant terminé, le premier 10 minutes. Je vais vous donner la chance de poursuivre votre réflexion là-dessus. Concernant les distributeurs majeurs, Métro, Loblaw's et Sobeys, vous avez apporté une correction dans votre mémoire aux données que nous avons avancées, que nous avons prises du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Donc, ces trois distributeurs majeurs accaparent 74 % du marché, selon vos propres données. Quelle est la part des produits québécois qu'on retrouve dans ces trois chaînes d'alimentation? Mme Delisle?

Mme Delisle (Andrée): Je vais prendre la question. D'abord, je voudrais faire une rectification: ce ne sont pas nos propres données qui servent à établir le 74 %, mais au moins deux références auxquelles je songe, là, spontanément: d'abord, une étude qui a été faite par la Banque TD, qui arrive à cette conclusion-là pour, si je me souviens bien, l'année 2002, et je crois également que les données ou certaines des données compilées par le Pr Jean-Claude Dufour, de l'Université Laval, arrivent aux mêmes conclusions. Alors, c'est pour nos sources de données.

En ce qui concerne la part des produits du Québec sur les tablettes des épiceries, les dernières données dont on dispose sont celles de 2001, où ? j'y vais de mémoire ? ça atteint à peu près 51,3 %. Donc, c'est légèrement au-dessus de 50 %. C'est une progression constante depuis 1998, l'année zéro où on a commencé à essayer de calculer, développer cet indice-là. Donc, ça progresse constamment vers le haut. Donc, on est passé de 48 % à 51 % virgule quelques points.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Pour revenir à la question de la marge de profit qui est donnée aux producteurs versus les transformateurs et les distributeurs, si on suit une livre de boeuf de la ferme à la tablette de magasin, quelle est la part du profit qui revient au producteur versus le transformateur, versus le distributeur?

M. Claus (Eric): Je ne crois pas qu'il y ait une réponse simple à cette question-là, mais je peux vous dire que les gens ont toujours l'habitude de regarder l'exemple que vous m'avez donné, que quelqu'un a eu x nombre de dollars la livre. Il faut penser aussi que, quand un bétail s'en va à une usine de transformation, il y a une partie de la carcasse qui est très valable puis il y a beaucoup, beaucoup de livres qui n'ont quasiment pas de valeur. Même que, des fois, ça coûte de l'argent juste pour en disposer. Quand je me fais poser la question, souvent ma réponse est: si on regarde les grosses chaînes d'alimentation, il y a une chose que je peux vous dire catégoriquement, qu'il n'y a pas une chaîne qui permettrait à l'autre ? en anglais, le terme, c'est «gauge» ? de vraiment prendre avantage des prix, parce qu'on travaille tous à des marges... Puis il y a tellement de compétition pour avoir des parts de marché, pour augmenter les parts de marché ? puis c'est vraiment un jeu de parts de marché, l'alimentation ? qu'en fin de compte les marges ne sont pas là pour faire ça. Si, moi, je voudrais acheter du boeuf pour 0,60 $ la livre puis le vendre pour 4 $ la livre, je ne pourrais pas le faire parce que mes compétiteurs ne le feront pas.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, ça, ça, je comprends, M. Claus. Je comprends aussi, et on le comprend tous, que, une vache sur pattes et la livre de viande dans le magasin, il y a une perte qui reste à l'abattoir. Ça, on le comprend. Mais une vache qui rentre à l'abattoir, on sait combien va dans la carcasse et combien qui va pour la consommation, là, qui va être processé, traité et puis se rendre sur le marché. Sur cette base-là, combien il revient au secteur de production, combien reste comme marge de profit dans la transformation et combien va dans la distribution?

n(14 h 40)n

M. Claus (Eric): Je ne peux pas répondre pour les gens qui font la transformation parce que c'est leur...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, parlez-moi des distributeurs.

M. Claus (Eric): Les distributeurs, ça varie vraiment d'un distributeur à l'autre. Mais je peux vous dire que, à la fin de l'année...

Un magasin est fait de différents secteurs. Dans la viande, je ne sais pas c'est quoi, les chiffres exacts dans la viande, mais ce n'est pas quelque chose qui est moins proportionnel que les fruits et légumes, hein? Les fruits et légumes, les marges sont plus élevées que dans la viande. Souvent, quand on fait des promotions, ça peut être à perte. D'autres choses, naturellement, c'est à profit. À la fin de la journée, si vous regardez toutes les grosses compagnies au Canada, une réponse très simple ? je sais que ce n'est pas la réponse directement à votre question ? mais vous allez avoir de la misère à trouver une compagnie qui a plus de 3 % de profit, après taxes, net. Donc, je ne sais pas quelle partie des 0,03 $ le monde charge. Il y a 3 %. Donc, c'est très compétitif, puis je ne pense pas que c'est juste de dire que les distributeurs, c'est des gens qui essaient de profiter d'une situation comme ça. Des fois, ça prend du temps pour un changement de prix, parce que, s'il y a une crise de boeuf puis il y a déjà un inventaire en main, si aujourd'hui le prix du boeuf est de 2 $ la livre et puis demain matin il tombe à 1 $ la livre, qu'est-ce que j'ai en inventaire, je l'ai à 2 $, je ne l'ai pas à 1 $.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. On voulait avoir votre point de vue. C'est ça qui compte pour nous. Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: En préambule, juste poursuivre sur le même sujet. Au-delà de la gestion des stocks, il y a même la gestion des promotions de ce que vous parlez qui détermine... Les circulaires sont déjà imprimées, là, pour donner les prix de vente. Cependant, moi, j'ai parlé avec mes producteurs, dans le comté de Soulanges, de boeuf, et ceux qui avaient de la vache de réforme, ils disent le contraire de ce que vous avez dit à mon collègue. Ils retenaient le maximum de leur bétail, justement parce qu'il ne valait pas assez cher, puis ils se sont dit: Tantôt, le prix va baisser. Mais finalement le prix était déjà bas. Alors, je ne comprends pas qu'il y avait un surplus dans les abattoirs, là, au moment où la crise s'est passée, parce que tout le monde savait...

Moi, j'ai eu un producteur qui m'a montré un chèque de 0,10 $. Ça peut vous donner une idée. Vous, il a eu 80 $, vous avez dit? Alors, à ce niveau-là, j'ai certaines...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Réserves.

Mme Charlebois: ...réserves. Voilà.

Maintenant, ce que je voulais vous amener ? ça, c'était un petit commentaire en conclusion ? c'était à la page 7 de votre mémoire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Un éditorial.

Mme Charlebois: Oui, un éditorial, c'est ça. À la page 7 de votre mémoire, vous nous parlez de nos systèmes d'inspection au Canada et au Québec et vous semblez satisfaits, là, de la façon dont c'est géré, alors qu'il y a d'autres intervenants qui sont passés avant vous, ils nous ont dit que, non, ce n'était pas satisfaisant et que, nous, au Québec, c'était supérieur un peu à ce qui se passait ailleurs, mais que ce n'était pas encore à point.

Et, à la page 9 de votre mémoire, c'est un peu dans le même sens. Vous nous parlez de la traçabilité et vous nous dites que ça va très bien, alors que d'autres, même... Si ma mémoire est bonne, c'est l'UPA. M. Pellerin nous a dit qu'on n'était pas capable de tracer le boeuf jusque sur les tablettes, qu'à partir de l'usine de transformation vers chez vous, vers chez les détaillants, les codes à barres, là, les petites boucles d'oreille, il n'y a plus de suivi. Alors, j'aimerais ça que vous nous donniez un petit peu d'identification, là, que vous nous donniez un petit peu d'éléments là-dessus.

M. Claus (Eric): Je demanderais à Michel...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bonenfant.

M. Bonenfant (Michel): Je veux juste revenir au je ne suis pas un expert en mise en marché puis en niveau de la vache de réforme. Je veux juste bien dire que marketing, là, mais je voulais juste vous souligner que, au niveau de nos différents marchés de détail, ce que vous retrouvez au niveau des tablettes, au niveau des biftecks d'aloyau, ce qu'on appelle communément T-bones, là, ça, ce n'est pas de la vache de réforme. Le gros de ce qu'on vend au niveau de nos comptoirs, ce n'est pas ce qu'on appelle de la vache, hein? Donc, on parle surtout de bouvillon pour ces coupes-là.

Au niveau des parures de boeuf, bien, la majorité des parures de boeuf proviennent aussi de bouvillons, puis, au niveau du Québec, on a quand même une façon de faire au niveau des bouchers, c'est qu'on travaille encore, je vous dirais, la viande de façon encore beaucoup traditionnelle, contrairement à ailleurs, dans le sens qu'on a beaucoup de découpe à faire en magasin qui crée des parures et qui fait de la viande hachée. Donc, on n'est pas nécessairement de... Oui, on consomme beaucoup de viande hachée, mais la majorité des parures qui servent à produire les viandes hachées proviennent de la découpe qui se fait en magasin. Je vous dirais peut-être que la vache de réforme, ça va plus au niveau de la restauration, des choses comme ça, pour les hamburgers, les choses comme ça.

J'ai oublié la deuxième partie de votre question. Excusez-moi.

Mme Charlebois: Bien, c'est que vous nous parlez, comme je vous disais, là, au niveau de la traçabilité, au niveau du système de ? voyons! ? du contrôle de la qualité... pas du contrôle de la qualité, là...

Une voix: ...

Mme Charlebois: Non. À part la traçabilité.

Une voix: L'inspection.

Mme Charlebois: L'inspection. Voilà. Merci.

M. Bonenfant (Michel): Oui. Ce qu'on a souligné au niveau de notre mémoire, c'était surtout l'aspect qui nous concerne, c'est-à-dire au niveau de la distribution et du secteur détail. Oui, c'est sûr qu'on peut parler de l'abattoir. J'ai vu M. Michel Donnelly, qui est président de l'Association des médecins vétérinaires praticiens du Québec, qui a soulevé quand même des faiblesses au niveau des... qu'il pourrait y avoir des faiblesses au niveau des abattoirs, au niveau de la présence de vétérinaires puis la disponibilité des gens. Bon, ça, ça a été soulevé, puis donc c'est sûr que ça a été un point qui a été soulevé.

Par contre, je vous dirais, c'est au niveau de la distribution et de la vente au détail. Si on regarde au niveau canadien, au niveau de l'inspection des aliments pour le type d'industries qu'on a, si je regarde au Québec, au niveau du secteur détail, une chaîne, chacune de nos chaînes, que ce soit Sobeys, Métro, Loblaw's, en moyenne on a à peu près le même nombre de magasins. Puis je vous dirais que, sur un total annuel, on a peut-être environ 1 500 inspections par année au niveau des magasins, alors ce qui peut représenter trois, quatre, cinq visites d'inspecteurs par point de vente, et ça, ça ne comprend pas les audits que l'on fait à l'interne. On fait affaire avec des firmes privées qui auditent nos magasins deux fois par année, et ce n'est pas un secret, là, ce n'est pas une norme non plus, mais, en termes d'industrie, on se police nous autres mêmes avec des audits additionnels à l'inspection au niveau du MAPAQ.

Mme Charlebois: C'était à la page 7, c'était concernant les importations. Est-ce que les inspections sont comparables avec nos produits au Québec?

M. Bonenfant (Michel): Bien, au niveau de l'inspection, si on regarde au niveau... si on regarde la façon que l'inspection est faite, ce qu'on regarde, c'est au niveau... Ce que le gouvernement regarde au niveau de l'inspection, c'est qu'ils vont regarder vraiment... ils vont bonifier les compagnies et les importateurs qui ont des systèmes de vérification interne. O.K.? Les compagnies qui sont plus problématiques, effectivement ils vont être visités beaucoup plus souvent. Ceux qui n'ont pas de problème en termes de qualité, qui n'ont pratiquement pas de rappels de produits, bien évidemment ils vont être visités moins souvent. Puis, dans ce cadre-là, ce qu'on regarde, c'est si c'est adéquat.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Je vous remercie, M. Bonenfant. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Oui. Merci, Mme la Présidente. Je veux faire suite à ma question de tantôt parce que, quand vous avez parlé d'établir un système de traçabilité pancanadien, moi, je me suis dit à ce moment-là: Bon, tant mieux. Puis, c'est vrai, tous, on veut une meilleure sécurité alimentaire au Canada puis, j'en conviens avec vous, tant mieux s'il y a un bon système de traçabilité. Mais je me disais aussi que, venant de vous, ça... Parce que tous ceux qu'on a entendus depuis le début de nos auditions ont été plus ou moins les victimes d'une crise qu'on a connue cet été puis ils nous ont recommandé d'avoir un bon système de traçabilité, d'avoir un bon système d'étiquetage, etc. Entre autres, bon, pour la crise de la vache folle, là, ça a été vraiment difficile pour les producteurs et les consommateurs. Mais, venant de vous, je me disais: Ça doit être les derniers qui vont nous dire d'avoir un bon système de traçabilité, parce que...

En fait, la question directe que je veux vous poser: est-ce que la crise de la vache folle, ça a été difficile pour vous autres?

M. Claus (Eric): Moi, je peux répondre. Je n'ai pas la réponse pour tous, je vais mettre mon chapeau d'A&P, mais je pense que ça doit être une réflexion peut-être de la balance du pays aussi. C'est qu'on a eu une légère baisse dans la demande du boeuf, mais je peux dire que quasiment chacun de nos membres a essayé d'aider les producteurs en faisant des grosses promotions de boeuf pour acheter plus de boeuf. Donc, en réalité, on a fini par vendre plus de boeuf, sauf qu'il y avait une déflation des prix, naturellement. Donc, en termes économiques, ce n'était pas une bonne chose pour nous, puis on a vendu beaucoup de boeuf. Vous avez même des fermiers qui sortaient avec des prix... Excuse, je dis «des fermiers», ça c'est un... En français, je dois dire «des producteurs», je pense que c'est un meilleur français.

Donc, il y avait beaucoup de viande sur le marché qui n'était pas chère. Ce n'était pas... Bon, ce n'était pas une crise économique pour nous, parce que aussi, en magasin, les gens, s'il y a un problème avec le boeuf, ils vont manger plus de poulet, ou plus de porc, ou plus de poisson. Donc, en termes de... Si ça nous a vraiment fait mal économiquement? Je dirais non.

n(14 h 50)n

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Parce que, moi, ce que j'entendais la semaine dernière ? à la radio, je pense ? c'est les résultats financiers de Métro-Richelieu, entre autres. Je ne suis pas un expert dans le domaine puis je n'ai pas les bons chiffres, là, mais ce que j'ai entendu, c'est: tel trimestre, les résultats financiers de Métro-Richelieu ont été meilleurs, ont augmenté. Bon, ça ne veut pas nécessairement dire que Métro-Richelieu fait ses profits seulement qu'avec la viande non plus, là. Il n'y a pas juste ça. Sauf que le consommateur qui entend ça et le producteur qui entend ça, je ne sais pas, là, mais ils se posent de sérieuses questions, puis j'aimerais avoir quelques éléments de réponse à leur place, parce que finalement le législateur s'en pose, lui aussi, des questions.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Peut-être M. Bonenfant, qui représente justement Métro-Richelieu?

M. Bonenfant (Michel): Non. Bien, qui représente la CCDA dans la façon... pour ma réponse. Si je regarde effectivement, bon, ce que l'UPA a mentionné ? j'imagine que c'était hier ? quand on regarde au niveau de la traçabilité, bon, c'est sûr que le Québec est en avance au niveau de la traçabilité. Ce qu'il faut comprendre au niveau de la traçabilité, si on avait quand même beaucoup de temps, ce qu'il faut regarder au niveau de la traçabilité... On la divise... La traçabilité vise trois secteurs: l'aspect marketing, l'aspect santé et l'aspect économique. Bon, dépendamment dans quelle chaise on occupe, on va peut-être avoir plus d'intérêt dans un comme dans l'autre. Et, quand je parle de santé, il y a deux volets: il y a la santé animale et la santé des humains. Quand on parle de la santé des humains, en ce qui nous concerne, comme industrie, c'est d'être en mesure de pouvoir faire des rappels efficaces. Puis, dans le volet santé animale, bon, le volet santé animale, pourquoi la traçabilité existe au niveau des animaux? Mme Delisle en a parlé tantôt, c'est pour éviter justement que, si la maladie de la vache folle, donc la tremblante du mouton, des choses comme ça... Donc, c'est au niveau de l'animal vivant. Au niveau de la traçabilité des animaux vivants, c'est pour être en mesure de suivre un animal s'il a changé de parc, des choses comme ça.

Mais, au-delà du très bon système d'agritraçabilité au Québec, même si ce travail-là était fait, malgré la crise qui a existé, malgré tout ça, bon, on a pu voir qu'il y a eu une crise quand même du boeuf. Mais je vous dirais que, même s'il y avait... si l'outil était existant, hein ? donc, il y avait un outil qui existait au Québec, la traçabilité existait, on était capable de savoir l'animal avec tous les identifiants puis l'enregistrement qu'il avait ? ça n'a pas réglé le problème au Québec.

Moi, je vous dirais que, pour régler cette situation-là, ça devient davantage une décision politique à travers le Canada pour faire reconnaître la régionalisation. Parce que, même si on implante la traçabilité au niveau des animaux vivants et qu'il n'y a pas de reconnaissance de la régionalisation, bien le travail qui est fait au niveau de la traçabilité, de la façon qu'on peut le voir, ça ne donne pas de résultat par rapport à l'investissement, le travail qui a été fait, etc. Ça fait que, si, au niveau des gouvernements, au niveau canadien puis au niveau nord-américain, il pourrait y avoir une reconnaissance de la régionalisation puis même un niveau international, bien c'est sûr que la crise qui a existé aurait été de beaucoup réduite. Alors, c'était mon commentaire par rapport à ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Oui. Merci, Mme la Présidente. Juste pour vérifier, pour bien comprendre votre dernière expression, la régionalisation... ce qui voudrait dire que, si, à l'intérieur d'un périmètre, d'une région donnée, il n'y a pas de trace de contact de l'animal en question, il aurait pu être... qu'il pourrait sortir de la zone sans qu'il y ait tout...

M. Bonenfant (Michel): Ce ne serait pas, exemple, le Canada tout entier qui serait pénalisé par ça.

Mme Robert: Et voilà. C'est dans ce sens-là.

M. Bonenfant (Michel): Donc, il pourrait y avoir seulement qu'une région. Si ça se passe au Québec, bien ce serait le Québec qui serait pénalisé...

Mme Robert: Ça pourrait être limité.

M. Bonenfant (Michel): ...si c'est en Ontario, ce serait en Ontario, ou même, encore là, peut-être une partie seulement du Québec ou une partie seulement de l'Alberta.

Mme Robert: Bien, je vous remercie. Et, moi, je vais aborder la question des... certains aspects de la question de l'étiquetage. À la page 11, vous êtes en faveur de l'étiquetage. Vous dites que, en fait, le Québec est très emmerdant avec ses listes d'ingrédients et qu'il faudrait qu'il y ait une harmonisation ou quelque chose... Enfin, vous voudriez que les listes d'ingrédients soient simplement à la demande du consommateur. En tout cas, moi, comme consommatrice, en partant, vous allez travailler très, très fort pour me convaincre, alors je vous écoute.

M. Claus (Eric): Je vais dire quelques mots, après ça je vais le passer à Christiane. Sur l'étiquetage, seulement le Québec oblige que, dans chaque magasin, chaque ingrédient doive être marqué, les choses produites en magasin. Moi, je ferais l'argument que c'est très complexe, mettre les ingrédients, parce qu'il y a des réglementations qui vont alentour de ça. Pensez-y, si vous avez 7 000 points de vente puis, dans chaque magasin, il y a une dizaine de personnes qui sont chargées à faire quelque chose comme ça, vous avez 70 000 personnes qui prennent des décisions, quoi mettre sur l'empaquetage, au lieu que ce soit fait dans une usine où est-ce qu'il y a vraiment des personnes qui ont les connaissances pour faire quelque chose comme ça. Pour moi, je pense que c'est une recette pour avoir un problème. À un moment donné, quelque chose va arriver puis les gens vont se demander: Non, mais qui... Est-ce que, ces 70 000 personnes là, elles ont vraiment eu la formation? Je sais que Christiane va en parler plus.

L'autre chose, sur l'étiquetage, qu'on n'a pas parlé, que j'espère on a le temps aussi de donner la position avant le temps, c'est les OGM.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Claus, si vous voulez que votre collègue réponde, il reste une minute. Allez-y, madame. Pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

Mme Chabot (Christiane): Christiane Chabot.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, madame.

Mme Chabot (Christiane): Les lois de l'étiquetage sont très complexes. Il en existe plusieurs. Et, ailleurs qu'au Québec, les ingrédients pour les produits qui sont emballés en magasin, fabriqués en magasin, l'information circule à la demande du client, le Québec étant la seule juridiction où c'est obligatoire. Notre point de vue est que c'est des lois qui sont très complexes, qui ailleurs qu'au Québec sont mises en place par des spécialistes, qu'il est difficile d'obtenir le même niveau de spécialité et de qualité dans 7 000 points de vente et que d'essayer de vouloir le faire, ce que tout le monde fait, peut être aussi dangereux. Parce que de maintenir un niveau de connaissances aussi élevé que ça requiert dans tous les points de vente, c'est tâche impossible.

Ce qui arrive, c'est que les plus petits vont vendre sans préemballer. Si vous allez chez votre boucher, plus petit, il va vous servir et il n'aura pas de liste d'ingrédients parce qu'il vous sert et il est là pour vous répondre. Alors, certains commerces vont éviter de préemballer pour ne pas étiqueter.

Donc, ce qu'on dit, c'est que l'étiquetage pour étiqueter, c'est bien, on n'est pas contre ça, mais on dit que ça peut être aussi dangereux parce que c'est très complexe à mettre en place pour des petits détaillants ou des moyens détaillants.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, Mme Chabot. Alors, je cède la parole au député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, Mme la Présidente, M. Bonenfant, Mme Delisle, M. Claus, Mme Chabot. Tout d'abord, M. Claus, pour vous rassurer pour votre français, j'aimerais être en mesure de parler aussi bien l'anglais que vous parlez bien le français.

M. Claus (Eric): Merci. Bien gentil.

M. Blackburn: Alors, dans ce contexte-là, vous n'avez pas d'inquiétude à avoir.

J'aurais deux questions, une première sur l'étiquetage, ce que Mme Chabot vient de commencer à faire, et la deuxième sur la traçabilité avec M. Bonenfant tout à l'heure. Par rapport à l'étiquetage, Mme Chabot, à peu près dans les années... dans le milieu des années quatre-vingt, on avait la nourriture en vrac qui arrivait à ce moment-là, c'était vraiment laissé au libre choix des clients. Et, par la suite, on a commencé à faire des paquets dans lesquels, là, il a fallu indiquer qu'est-ce qu'on mettait à l'intérieur. Et bien sûr qu'à ce moment-là, dans les plus petites épiceries ? parce qu'on avait des plus petites épiceries ? on faisait des mets cuisinés. On faisait des mets cuisinés, on se faisait un coin à l'intérieur de la boucherie, on se faisait un coin à l'intérieur de la boulangerie pour faire justement des pâtés à la viande, de la tourtière, des pâtés au saumon, ces choses-là.

Au début, on avait rien qu'à marquer le prix et le poids, et par la suite il est arrivé des normes qui ont changé. Il a fallu évidemment inclure les ingrédients qui rentraient à l'intérieur de ces différents produits là. Et là je suis un peu... j'essaie de faire un peu le parallèle. Je comprends ce que vous venez de me dire, sauf qu'à quelque part vous mentionnez que, si je comprends bien, là, ça devrait être laissé à la discrétion des épiceries, d'inclure la liste des ingrédients, ou de ne pas le faire, ou de centraliser ça, de centraliser ça à quelque part dans un point de services, ce qui m'apparaîtrait excessivement difficile pour les plus petites épiceries.

n(15 heures)n

Pour ce qui a trait à la traçabilité... Vous pourrez peut-être tantôt répondre, parce que je sais que le temps court. Pour ce qui est de la traçabilité, M. Bonenfant, vous mentionnez qu'on devrait ralentir, si on veut, l'application au Québec pour se normaliser avec l'application de la norme au Canada, pour diverses raisons que je partage. Mais vous êtes quelqu'un qui est dans le domaine de la vente, du marketing, et bien sûr qu'un des avantages qu'on peut aller chercher par rapport à nos compétiteurs, c'est souvent la rapidité dans laquelle on implante un nouveau produit ou une nouvelle démarche. Et, dans cette perspective-là, il ne serait pas avantageux pour le Québec de pouvoir dire ou de pouvoir certifier les premiers que, le boeuf, on est capable de savoir, de la terre à l'assiette, d'où il passe et d'où il va? Et, dans cette perspective-là, ce ne serait pas un avantage marqué pour le Québec, pour justement éviter de se ramasser dans des situations comme celle-ci? Parce que, à partir du moment où le boeuf... ou la vache est prise en Alberta, les personnes du Japon ne disent pas que c'est une vache d'Alberta; c'est une vache du Canada. Et, dans ce contexte-là, si on avait un avantage de pouvoir dire qu'on est des plus sécuritaires et le plus rapidement possible, est-ce qu'on n'aurait pas un avantage sur les autres?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. le député de Roberval. Une réponse synthétique le plus possible, s'il vous plaît. Mme Chabot?

Mme Chabot (Christiane): Alors, pour ce qui et de l'étiquetage, je comprends très bien votre question. Notre point, c'est que les milliers de points de vente comprennent très mal la complexité des lois sur l'étiquetage et que ça peut être une fausse sécurité de les avoir sur nos emballages, par rapport à prendre une caisse où il y a des ingrédients et le montrer à la demande à des gens qui veulent le savoir. C'est le point qu'on amène. On est la seule juridiction où on doit faire ça, et nos milliers d'épiciers ne comprennent pas nécessairement la complexité de ces lois-là.

Une voix: ...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député, s'il vous plaît, oui. Et il y avait une deuxième question?

M. Bonenfant (Michel): Oui, pour la traçabilité.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui. M. Bonenfant, s'il vous plaît.

M. Bonenfant (Michel): Alors, très rapidement, très rapidement. Bon. Dans le sens de ce que vous disiez tantôt, je vous dirais, je serais tenté de vous suggérer d'aller vers la Loi sur les appellations réservées. Parce que ce volet-là, c'est un volet marketing, hein, on veut promouvoir un produit de tel type, de tel nom, de terroir ou de choses comme ça. Ça, c'est vraiment au niveau des appellations réservées.

Par contre, si on va au niveau de la... Autrement dit, ce que... de la façon dont nous le voyons, c'est que, si le gouvernement a à légiférer ou réglementer, il devrait le faire au niveau de la santé, que ce soit santé humaine ou santé animale. Par contre, quand vient le temps de parler de marketing, d'appellation réservée et de choses comme ça, il existe déjà des choses au niveau appellation réservée. Donc, je le fais très rapidement mais, oui, il peut y avoir un avantage pour un produit.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Bonenfant. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci. Dans votre rapport... je le trouve très sécurisant. Et effectivement, si on regarde la situation de l'alimentation en Amérique du Nord, ça l'est. Quand vous nous dites, là: «À l'instar des membres de la commission, nous reconnaissons, d'une part, que "peu de cas majeurs d'intoxication ou de contamination ont été déclarés au Québec" [...] et, d'autre part, que cette performance est attribuable à l'efficacité des systèmes de surveillance et de contrôle en vigueur au Québec.» Et les gens nous ont dit effectivement ? et vous reconnaissez ? que nous sommes en avance: traçabilité, étiquetage, et ainsi de suite.

Quand vous parlez des OGM, et dans le même cas... et c'est où est-ce que vous nous dites: Il ne faudrait pas créer la panique. Effectivement, il y a peut-être un risque potentiel, mais il y a peut-être aussi un avantage potentiel d'améliorer les quantités, la qualité, et ainsi de suite. Il y a une interrogation ? et scientifiquement on n'a pas pu y répondre, et ce qu'on peut savoir, c'est le temps qui va nous le dire effectivement: l'effet des OGM.

Vous avez une recommandation, et celle-là, elle m'inquiète un petit peu plus: «Nous traiterons plus en détail de la question d'étiquetage et des OGM[...], mais nous tenons à indiquer ici que la position du CCDA à cet égard est favorable à un étiquetage volontaire, dans la mesure où le consommateur a le droit de savoir, afin de pouvoir faire des choix éclairés.» Et là-dessus, d'avoir l'étiquetage volontaire, il me semble que là le consommateur perd un de ses droits vis-à-vis les OGM. Je pense que c'est un choix personnel que doit faire le citoyen, parce qu'on n'a pas la réponse scientifique, le choix de dire: Oui, j'en consomme ou je n'en consomme pas, mais, si c'est volontaire et ce n'est pas inscrit sur toutes les étiquettes...

Et, dans le même sens que l'ensemble de mes confrères et ce qu'on a entendu dans les mémoires, si on a un avantage, lorsqu'on fait nos exportations, qui est connu au Québec, est-ce qu'il y en a ou il n'y en a pas dans les produits, nous, on pense que c'est un avantage qui est majeur pour assurer les exportations de nos produits alimentaires. Donc, j'aimerais que vous me commentiez cette décision que votre groupe a faite de le limiter à l'étiquetage volontaire, parce que, moi, il me semble que, là, on enlève le droit et la responsabilité du consommateur de choisir ce qu'il va manger.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse, M. Claus?

M. Claus (Eric): Difficile, courte réponse. Ça fait cinq ans qu'on travaille là-dessus. En fait, il y a un principe que je crois qui est très simple, qui est très important aussi pour le Québec et pour le pays, c'est qu'il y a des lois déjà qui disent qu'est-ce qu'on doit étiqueter: donc les ingrédients, les nutritions, les additifs, les choses qui peuvent mettre en... les allergènes, les choses qui peuvent mettre en danger la santé humaine. Si on commence à étiqueter ou mettre... ou forcer, mettre obligatoire de mettre des choses sur les étiquettes qui ne tombent pas dans ces catégories-là mais qui tombent surtout dans les catégories d'opinion de certaines personnes ou de la perception de certaines personnes, on va faire quelque chose qui va créer un précédent qui peut être très dangereux. Donc, je peux vous demander si c'est assez répondu?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, c'est assez répondu. Merci beaucoup, c'est clair. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente.

Une voix: La suite.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): La suite?

M. Soucy: La suite. Bien, j'aimerais vous entendre puis je poserai ma question par la suite.

M. Claus (Eric): Je peux?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, allez-y.

M. Claus (Eric): Donc, je crois, du côté de l'étiquetage, si aujourd'hui il y a une grosse «fad» pour les diètes Atkins, pour les hydrates de carbone, on va avoir tellement de gens qui... Est-ce que tous ces gens-là vont mettre de la pression, et maintenant on va être obligé de mettre ça sur les étiquettes aussi? Bientôt, on ne pourra plus lire les étiquettes.

Puis je dois vous donner un exemple que j'ai donné au Parlement canadien, qui était le meilleur exemple de tous. Aussi, si j'enlève la question étiquetage, je dois parler de peut-être moins que 5 % des gens qui ont une voix très forte sur ce sujet-là. Puis je la respecte, cette voix-là, mais je ne pense pas que je dois réagir ou que le pays doit réagir, que 95 % des gens doivent se conformer à cause de 5 % des gens.

Et là-dessus ? si je peux ? dans l'Est, il y a quelques années, on était les premiers magasins au nord de l'Amérique puis, je pense, au monde même, de mettre six kiosques dans cinq provinces, incluant le Québec, aux Îles-de-la-Madeleine, des kiosques pour l'information sur les...

Une voix: OGM.

M. Claus (Eric): ...OGM. Et là-dessus on avait des pamphlets de Greenpeace, du Conseil des Canadiens, on en avait aussi du côté des biotechnologies, il y a une ligne 1-800 dans le kiosque qui reliait à quelqu'un à Ottawa qui les mettait en communication avec des experts, que ce soit... ou des gens avec des opinions soit que ce soit de gauche ou complètement à droite. Je dois vous dire sincèrement, après huit semaines, il n'y a personne qui était intéressé.

Et puis il y a beaucoup de gens qui font beaucoup de bruit, mais si vous allez parler avec les gens ordinaires qui magasinent dans les magasins, ils n'avaient aucun intérêt. Puis, après huit semaines, on a enlevé les kiosques.

Donc, moi, je vous dis, d'un côté, c'est le côté légal, puis je pense qu'on doit avoir de la discipline pour les étiquettes; du deuxième côté, je crois que tout un pays ne devrait pas réagir sur une minorité. Puis ça va être le consommateur qui va dicter, avec un système volontaire. Donc, s'il y a des milliers de personnes qui veulent acheter ça, on va être les premiers à le mettre sur les tablettes parce qu'on veut en vendre. Si les gens veulent l'acheter, on va le vendre.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Claus. Alors, M. Claus, Mme Delisle, Mme Chabot et M. Bonenfant, je vous remercie. C'est tout le temps qu'il nous reste. Vous avez dépassé l'enveloppe du temps qui vous a été réservé.

J'invite le groupe Viewtrak Technologies à se présenter. Merci beaucoup.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'ordre, s'il vous plaît!

O.K. Alors, je voudrais donc inviter le groupe Viewtrak Technologies inc. à se présenter. Dr Jake Burlet, je pense que vous êtes président du comité exécutif?

Viewtrak Technologies inc.

M. Burlet (Jake): Yes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Please, have a seat. And I was notified that you would like to do your presentation in English. It is correct?

M. Burlet (Jake): Yes, please.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Do you have somebody to translate for you or you want us to... Voulez-vous, s'il vous plaît, vous identifier?

M. Simard (Michel): Mon nom est Michel Simard. Je suis chef de l'exploitation de Technologies Interactives Mediagrif.

n(15 h 10)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Mr. Burlet, please, you have the... it's your time to speak.

M. Burlet (Jake): Thank you very much for the opportunity to allow us to participate in the discussion period. It is our understanding... Well, thank you for allowing us to be here and thank you for allowing us to submit our dossier of information relative to the discussion. It's our...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): I'd like to mention, please, that you have 20 minutes for your presentation, bilingual presentation, you know, and a 20-minute exchange with every side of the commission.

M. Burlet (Jake): Yes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Thank you very much.

M. Burlet (Jake): It is our understanding that you've had a complete read of our submission, so we're not going to go through that. How we would like to start is I'd like to introduce once again Mr. Michel Simard, the Chief Operating Officer of Mediagrif Interactive Technologies, located in Longueuil, Québec. Mediagrif is a technology partner of Viewtrak Technologies. I would also like to introduce Mr. Michael Conlon, from Ottawa. And Mr. Conlon is our Chief Technology Officer.

Our introductory comments I'd like to keep to four relatively distinct points, and then we'd like to have as much discussion and answer period as possible.

There is tremendous amount of debate whether this question of traceability is in fact a national or a provincial area of concern. I've just returned from spending four days in the United States, and they're very much grappling with the same issue right now, having had... having experienced one case of mad cow disease in December of 2003. It is abundantly clear that, from a market point of view, Canada is considered on a national basis as opposed to regionally.

And I think that's demonstrated that Québec, without question, has shown leadership with regard to the ATQ, with regard to animal identification and some of the initiatives here. While that is very, very, very commendable, Canada is judged by its weakest link. So, if there is a problem in another part of our country, it doesn't really matter how good the systems are in one part of the country. So, having just returned from very, very rigorous discussions in another marketplace, I can assure you that how we're judged here is very much from a national basis.

The second fundamental point that we'd like to spend just a moment on is that the delivery of traceability very much requires an integrated approach. And it's our belief that that integrated approach requires three elements: the first of which is individual animal identification, which we're well familiar with here in Canada; the second fundamental piece is to be able to collect information relative to individual animals out in the field where those animals exist, to be able to capture useful information when it's a day like today, when it's a little bit colder and snowy, as well as to be able to do it in different times of year; the third component is then to have a system that brings all those information pieces together, so that they're accessible and useful in a time frame that matters.

The case and point is Canada's experience with the BSE cow in Alberta. It took many weeks to find where that cow originated from. The United States is going through that process as well. Absolutely, time is of the essence when dealing with situations like this. The ability to deliver answers with regard to traceability in the international market context is taken clearly very seriously, and the quicker good answers can be provided the better it is for people whose marketplace is affected.

There is also a very... There is very often a misunderstanding that identification is a system, and just tagging animals by themselves does not necessarily bring together all the information that's required.

Our third introductory point is that one of the very, very most asked questions is: how to deliver on this promise of traceability and who will pay for it? Certainly, in the last seven and eight months, clearly Government, and private industry has paid dearly in the Canadian situation. Well over $1 billion of support payments have been put into the Canadian cattle industry, so there is a tremendous cost there. And certainly producers across the country have paid as well.

So, to the questions of how to deliver on and who will pay for it, I think that there are some clear roles to be played. Certainly, Government plays a key role in international market development, Government plays the key role in defining of standards and ongoing auditing and enforcement of traceability initiatives. I think that, then, there's also the opportunity for industry to uptake and enact and execute on some of the traceability. It is unreasonable to expect that either particular party would bear all the cost.

Our final opening comment, our fourth one, is that our desire to participate in this discussion area is that we were... we are very much here to offer a solution on a provincial and national basis, as opposed to coming in and stating that we are yet another victim of what's going on in the Canadian food production industry. So, we want to be very clear that, in times of crisis, there are also times of opportunity.

Food traceability has become very, very prevalent in terms of discussion and media coverage the last year. It was very important to us starting five and six years ago. We believed that food traceability would become of increasing importance both nationally and internationally and, as a result, we started down a path to build a solution that would deliver on the promise of source verification and traceability across the food chain.

So, our interest in having our discussion today is to spend some time articulating to you that solutions do exist that are proven, scaleable, cost-effective and market-driven, going beyond, starting with the preliminary requirements of what would be required for regulatory means, and then leveraging off those requirements and being focused on what the market demands. Certainly, the solutions that are available today are implementable immediately and can be done in a proactive manner.

An illustrative point of that is that in the United States, after their December 23rd case of mad cow disease, already, in our particular experience, we've had a US-based food production company adopt this technology platform, because they're taking a proactive approach to traceability and delivering what the market wants. And, to give you an idea of the order of magnitude, this is an integrated beef production company that touches between 400 000 and 500 000 beef animals a year.

I'd like to finish, on that point, in that Québec is a clear leader within the Canadian industry. Québec's approach to national identification, the adoption of electronic radio frequency identification, puts it above and beyond the other jurisdictions in Canada. There is an opportunity for Québec to further differentiate itself, like some other jurisdictions are doing currently, and to be moving proactively, leveraging the producers and the products from this area and still doing it within the context of a national consideration.

So, thank you for the chance to make those opening comments. During the question and answer period, we will respond, as appropriate, between the three of us that have come here today. Thank you.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. M. le député de Nicolet-Yamaska, vous pouvez poser vos questions en français, M. Simard va lui traduire.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup. Merci de votre présence, de votre présentation aussi.

Une question très simple, au début. Je regardais dans votre mémoire et, Viewtrak, je me demandais au début: C'est quoi, les orientations, c'est quoi, vos fonctions? Je lis ici: «...offre un mécanisme rapide et efficace de partage ininterrompu de l'information entre tous les intervenants de la chaîne de production alimentaire. Notre système de gestion accessible par Internet donne à chaque utilisateur la possibilité d'enregistrer et de retracer tous les renseignements pertinents sur la production, ce qui permet de vérifier la provenance de chaque produit fini. Ce système accroît la confiance des consommateurs et donne aux industries alimentaires un accès assuré aux marchés.» Je relis ce que vous avez écrit; ça, je ne vous apprends rien. Mais ceux et celles qui nous écoutent se doivent de savoir ça.

n(15 h 20)n

Moi, comme consommateur, quand est-ce que c'est que je pourrais faire affaire avec vous? Puis qu'est-ce que vous allez me donner comme information pour accroître ma confiance?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet, please.

M. Burlet (Jake): Thank you. Once again, when we recognize the importance of traceability, there were a number of choices that we believed that... a number of paths or roads that we could go down to an attempt to deliver that.

In the late 1990's, when we started Viewtrack as a company to try and address this question, the first choice we made was to choose the Internet as the business model and the delivery mechanism. And the primary reason for that is that in the Québec example, you've got primary producers from the Gatineau to the South Shore, from the Ontario-Québec border to the Maritimes. You've got a tremendous number of producers of varying size and scale, spread over a wide geographic region. And fundamentally all those people are not necessarily in the beef business, but they're in the food business. And our first part of our business model is: how might we put together a service or an application that could be delivered to everyone of those producers, irrespective of size or scale? How do we deliver a solution to somebody who has 10 cows and how do we deliver a solution to somebody who has 750 cows?

It was our decision that the Internet was mature enough to be able to deliver those services. We were very fortunate to find a technology partner whose sole focus is Internet-based business and Internet-based application development, a company which has a significant amount of programmers, a company that has a significant number of customer support. So our Internet-based model is to allow all producers to participate, irrespective of geography, on a cost-effective basis. That is the... that's the start of the story from the beginning of the food supply chain.

What that accommodates, by building a foundation at that level, is to ultimately be able to allow access to consumers that are interested to similar type of information via the Internet, to have a series of stand-alone systems that are at the cow-calf level, or at the feedlot level, or at the process level, and those systems that don't communicate, that fundamentally do not deliver on traceability, and providing the kind of information and safety questions that consumers want.

So, our business model, the foundation of the primary producers to deliver at the farthest end of the spectrum is to have that Internet... have that information available on an individual animal basis, collectible by data collection tools that work, and then in a Internet... very secure, proven, scaleable Internet-based system that delivers the information to those who want it when they want it.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Thank you.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ce qui veut dire que, moi, je pourrais éventuellement être un client, comme consommateur, et en même temps un État aussi, un gouvernement. Pour établir un système de traçabilité, supposons, avoir un programme, imaginons-nous qu'on ne l'aurait pas au Québec, là, mais qu'on veut en faire la promotion, un organisme comme vous, est-ce que vous pouvez faire la promotion?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): So, two questions. The first question is: Could consumers be users of the system? Once again, a basic decision that we made was that the owner of the information within the system is the owner of the product. So, whoever the owner of the animal is owns the information in the system. They then enable the next person in the supply chain to access that system. It's secure and it's an animal owner driven decision to share that information as the product and the information moves along the supply chain.

From the consumer's point of view, I think that there's little argument that it's in the best interest of the supply chain to provide the information that consumers want. So, the consumer purchasing the end product absolutely would be able to look at an identifier and look at the story behind the food that they're eating. So that's my response to the first question.

And the second one was...

Une voix: ...

M. Burlet (Jake): Yes. A very, very key consideration is they'd be able to deliver the service on a national basis. And I've already made my first comments with regard to the infrastructure that our Québec-based technology partner delivers. As an illustrative example, Mediagrif provides services in 60 countries around the world to 30 000 different customers with millions and millions of pieces of information.

With regard to Viewtrak Technologies, that internal infrastructure accommodates a national roll out. It accommodates scaleability robot... security.

Perhaps most importantly is that right from the outset, we recognize the need to have an application that serves all areas of Canada. And the Viewtrak Internet-based application can be accessed in English and can be accessed in French. All parts of Canada. Because we participate in a national market, we have to be able to deliver a service that meets the needs of all Canadian producers.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Il me reste encore du temps, oui?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci. Troisième question, à propos des OGM. Dans votre mémoire, vous dites que la gestion du risque associé aux OGM doit se faire par la gestion des risques dans la réalité mais également par la gestion de la perception du risque par les consommateurs. Moi, c'est surtout la deuxième partie, la gestion de la perception du risque, j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que les médias, pour ne pas les nommer, ou ceux qui donnent de l'information la donnent plus ou moins correctement? Ou est-ce qu'elle est perçue incorrectement? J'aimerais vous entendre sur la perception. Est-ce qu'on exagère? Est-ce qu'on veut nous rassurer ou nous alarmer?

M. Burlet (Jake): I think there is two ways to look at the question. There is the way to look at it from the supply chain, but also to look at it from the consumer marketplace.

From the consumer marketplace point of view, perception is reality, irrespective of what the supply chain thinks. Some illustrative examples are genetically modified foods. There is... Probably the largest body of evidence for any product on the marketplace is relative to genetically modified foods. Irrespective of that is that the consumer marketplace isn't accepting and willing to purchase those products. It doesn't really matter how good the body of evidence is that supports it. So, I think that perception number one clearly rules today, and the first example is genetically modified foods.

The second one which we have the most recent and most current experience with is that, in the Canadian example, one cow with BSE that did not make it into the food chain, never made it close to the consumer food chain, has created a perception in the global marketplace that Canada has a beef herd that's less than acceptable. And I think it's also... hard done by as we felt as Canadians, when that happened, exactly the same thing that's happening in the United States. So, marketplace perception is critical. Whether we choose to agree with it or not, it's very critical.

I think what then comes with that or that adds on to that is that it's incumbent upon the supply chain and the production chain to have traceability systems that are effective and perhaps effective, transparent and auditable. And that goes back to some of my earlier comments of having an Internet-based application which, in our terminology, we say it bridges time and space: it connects producers and consumers over a wide geographic area, it addresses the time issue and it's transparent. People can go look at the information, and in our particular case the architecture supports an audit trail of all the information entered into the system.

So, in summary, perception is reality, and I think the logical industry and Government approach to that is to have a system that's effective, transparent and auditable.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Thank you.

n(15 h 30)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. M. Burlet, je vais peut-être continuer la discussion que vous avez amorcée sur la question de la traçabilité. Vous avez dit que le Canada... le Québec joue au sein du Canada un rôle de leadership et vous avez aussi parlé que, pour ce qui est de la traçabilité, il faudrait que ce soit fait dans une approche intégrée qui tiendrait compte de l'identification individuelle de l'animal, de la collecte de l'information dans le champ, dans la ferme, et également de l'accessibilité de l'information.

Nous avons entendu des groupes qui sont venus nous dire que la traçabilité à elle seule ne suffit pas, et par conséquent il faudrait procéder même en amont à l'identification des animaux et à l'identification en fait des maladies animales parce que la chaîne de traçabilité ne fait que transmettre finalement, remonter à l'origine de l'animal sans nécessairement dire si le produit est de qualité. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous estimez que le système de traçabilité en soi est une garantie pour la sécurité alimentaire ou si vous trouvez qu'il y a d'autres gestes qui doivent être posés avant, pendant et après pour réellement assurer la sécurité animale?

In short, what I would like to say is that, in your comments, you say that delivery of traceability integration should be implemented, including individual animal identification, collect of information in the field and accessibility of information. And we heard other groups who say that traceability by itself is not sufficient to secure food safety, and we have to intervene. For instance, medical doctors need to intervene before the system of traceability to identify if there is a disease with the animals. And we have to intervene also along the chain, including the consumers, to make sure that the food is really safe. And traceability by itself, even if it is technologically advanced, is not a guarantee, it is not a guarantee for food safety. What do you have to say about that?

M. Burlet (Jake): Well, I think that goes right back to our fundamental premise of having a solution that's very integrated, and I'll use an illustrative example. An integrated solution encompasses data collection and information management in every segment of the supply chain. And when I say, when we talk about data collection and information management, what we're speaking to is beyond the minimum requirement, beyond the minimum requirement, for example individual animal I.D., beyond premises I.D., beyond date of birth. Adding to that, additional production record information, for instance: how animals were vaccinated, what medical treatments they received, what feedstuffs were given to them. I think that that's been brought home very, very succinctly yesterday.

The international organization that reviewed the BSE investigation in the United States made six or seven recommendations. So they had an international body just like... came to Canada and they reviewed the United States investigation of the Washington mad cow. And there was six or seven recommendations. The three most important ones were: absolutely a requirement on an individual animal basis for identification and, we've crossed that bridge in Canada, that I think is de facto standard; the second one is an absolute requirement to have additional information above and beyond what's being stated as the minimum; and they spoke very clearly to be able to... the need to be able to collect feeding information. The specific statement in that international review committee yesterday was: there needs to be a ban on the feeding of animal protein between species and there has to be a way to document that.

So, traceability for traceability's sake without additional production record information doesn't deliver the complete solution. And in the Canadian example in May of 2003, the kinds of records that the international community was looking for, the investigators were sifting through shoe boxes of production records, sales transactions and other information that's considered relevant. So, once again, in summary, the importance of having an integrated solution that encompasses not just identification and date of birth but production record information as well.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Thank you very much. Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci. Ma question se situe au niveau de l'étiquetage. Vous nous dites, dans votre mémoire, que rendre disponible l'information sur la valeur ajoutée peut aider à la promotion des produits ? et là surtout quand c'est fait avec Internet ? mais par ailleurs vous nous dites aussi: Étant donné la demande croissante des... Bien, ce n'est pas que vous nous dites, c'est que je m'interroge plutôt: étant donné la demande croissante des consommateurs en ce qui a trait à l'étiquetage obligatoire, est-ce qu'on ne suscite pas plus de méfiance de la part des consommateurs à l'égard des OGM en refusant de les indiquer? Si on se permet d'étiqueter et de faire la promotion des valeurs ajoutées, pourquoi on ne pourrait pas se permettre justement d'inscrire en ce qui touche les OGM et peut-être que le consommateur s'en trouverait rassuré?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): That's an excellent question and it takes me back to my dinner conversation last night. After a long day in Toronto yesterday, I had dinner with an old friend, and we spoke specifically about this question, and the response I offered was: O.K., it's very easy for you to be reading Business Week and Maclean's magazine that talk about the need, and requirement, and interest for more labelling. And the question I posed was: If that was delivered, what are you prepared to pay for? And the response I got was: Well, I'd be prepared to pay 50% to 100% more for that. I said: O.K., though, that's... I can understand that concept, but there's only so much room on the label. You're asking for many, many things to back up the promises that are on these products but there's only so much stuff that you can put on there.

And, absolutely, the Canadian Medical Association and Canadian Health, their... is that the primary information that should be on there is nutrition-oriented and then some of the product quality attributes. What the Viewtrak system can provide in addition to that, to deliver on that promise but also meet evolving market requirements and consumer requirements for more information, is to have a reference that points them to the place where that can be obtained, because it's unrealistic to think that you could put the entire story of a New York piece of steak on a particular label.

But, absolutely, the ability exists to use identifiers on that product, whether they be bar code or radio frequency, that provide the point or the place where the information is. And I would continue to concur and submit that the most important initial information is the nutrition information and for those who desire and are interested and for those producers who want to provide it to have the story behind a product and have it in a place that's accessible, easy to understand and people can get it whenever they want it. And that could be in the comfort of their own home or it could be at a kiosk in a retail food outlet. The Internet-based type technology allows that type of situation to occur, and as it evolves it could be via wireless technology and wherever you are.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Thank you very much. M. le député de Nicolet-Yamaska.

n(15 h 40)n

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci. Dans votre mémoire, vous mentionnez qu'il est réaliste de penser que le Québec pourrait implanter son système de traçabilité à l'ensemble de la chaîne alimentaire. Puis, durant la dernière campagne électorale, le parti gouvernemental actuel avait promis d'étendre le système de traçabilité à la chaîne... à tous les niveaux de la chaîne alimentaire. Est-ce que vous pensez que le Québec peut faire cavalier seul en matière de traçabilité ou qu'il doit le faire au rythme du gouvernement fédéral ou du Canada, du gouvernement du Canada?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): Thank you. I think that there's a local, a regional opportunity as well as a national obligation. So, let me speak to the opportunity first. I'll go back and reiterate that once again, in the context of the cattle industry, and likely the dairy industry, and hog industry as well, Québec producers, food processors have set themselves apart. I don't live in Québec, but I readily acknowledge that Québec producers have gone above and beyond what the current national requirement is. I think what that does is put Québec producers and Québec as a province in a position to proactively gain a reestablished market share. There is no question that there are markets that want what this geography will provide if it comes with some of these other things, meaning traceability, source verification, the story behind the product. So, that's the opportunity.

I believe what also comes with that is the obligation to share the regulatory or internationally accepted and required information in the national context. And I refer back to when there's a problem in Borden, Prince Edward Island, Japan doesn't care that it was in Prince Edward Island, they close the border to the entire Canadian producers. So, I think that there's an opportunity, but I also believe that there's a clear obligation to have systems that interface. There may be some customization and uniquenesses that are applicable to this jurisdiction that allows for differentiation, and value added, and building of the agriculture economy, but I do not think we want to overlook the obligation to be able to participate in a national response mechanism.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci. D'après la réponse qu'on me donne, est-ce que vous pensez que le fait d'avoir établi notre propre système de traçabilité au Québec fait en sorte qu'il faudrait presque attendre pour qu'un autre palier de gouvernement développe le sien ou est-ce qu'on continue dans la même veine et on continue d'être proactifs, comme M. Burlet le dit?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): Thank you. I think the opportunity is for leadership. Once again, Québec is further ahead, and there's an opportunity to not just lead local producers, but lead the country. And when I put it in a leadership context... is that I don't think that there's anything to be afraid of by sharing the knowledge, sharing the experience, sharing the opportunities that have been gained in this marketplace. And my illustrative point of that is Maple Leaf Foods with their initiative for genetic identification of hogs. Maple Leaf Foods business model is to use that for themselves but also to license it to other hog producing entities in the country, because that's good for all of Canadians.

So, I think there's a role for the leadership point of view and to share that. One thing that Québec is very well set up for today ? and I emphasize today with a capital T ? is that, because of the existing infrastructure, because of the existing total identification of cattle animals with radio frequency, is that there's the opportunity today to have nation leading, not just nation leading, but world leading, pilot projects, demonstration products that prove beyond the doubt that this promise of traceability can be delivered, both to the supply chain and to the consumer marketplace, that it works, it's valuable and it's cost-effective. So, I think it's very key to not ignore the fact that Québec has some unique opportunities here to be out in front of the nation but also out in front of the world.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Dans votre mémoire aussi, vous dites que ce serait recommandable d'implanter le système HACCP à l'ensemble de la chaîne alimentaire. Depuis trois jours, il y a plusieurs représentants qui viennent nous rencontrer et nous disent la même chose, puis je pose toujours la même question. Tout le monde, je pense, est d'accord avec ce grand principe d'établir un système ou une méthode HACCP à tous les niveaux de la chaîne, sauf que la grande question qu'on se pose tous, c'est: qui va en défrayer les coûts? Est-ce que vous avez regardé ça ou est-ce que vous avez des suggestions à nous faire?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): It's a question in Québec, it's a question in Alberta, it's a question in Montana, I assure you, having just come back and listened to them. There are... and I am going to go back to our component approach. In 2001, the Canadian cattle industry made the decision proactively... Remember, in 2001, we had not yet had a domestic case of mad cow disease. So, proactively the Canadian industry decided that there should be a system of national identification because that was the first building block to be able to build on traceability.

That was a useful thing to do because it extended what a lot of producers were doing already. Many producers were identifying their animals with a management tag. So, the change in concept from a voluntary identifier to a mandatory identifier at really little net cost to the production chain, replacing one with the other, that cost has been born. So, the first fundamental piece upon which to build traceability is already very much considered to be the cost of doing business.

So, now we move to the next step in the chain which is: how do we have data collection tools? how do we collect that information in a reasonable cost-effective way? The way that we responded to that is that people can chose how they'd like to do it. Those who are paper- based record systems ? and pen and paper, don't cost very much money ? we are able to accommodate the submission of their records to our central bureauing office. And for a very small fee on an hourly basis, the information will be taken from the supply chain partner and entered into this greater integrated system.

For those producers who are larger scaled and would like to take advantage of more automated data collection technologies, we have developed those tools as well. They have specifically been developed from the context of people in the industry. Those things have to work in all environments, they have to be reliable, they have to be secure and they have to be cost-effective. So, there are tools that cater to each one of the sectors.

In summary, with regard to the total overall cost, we know that we can deliver on an individual animal basis the minimum information, and I've spoken many times today about... there's what might be defined as the minimum information and there's more market-oriented information.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Thank you very much. M. le député de Portneuf.

n(15 h 50)n

M. Soucy: Alors, merci, Mme la Présidente. Dans le mémoire que vous avez déposé, vous nous dites que le Québec et le Canada avaient la possibilité de développer un modèle susceptible d'être présenté comme solution immédiate advenant la découverte d'un cas d'ESB aux États-Unis. Et, à plusieurs reprises dans vos propos, vous avez dit: Le Québec assume un leadership au Canada, même que le Canada en entier devrait adopter le modèle québécois. Maintenant, ma question, c'est: est-ce que vous pensez sérieusement que le Canada peut développer un modèle, avec évidemment le Québec, là, qui puisse être adopté par notre principal partenaire économique que sont les États-Unis? Est-ce que vous pensez qu'on peut les influencer? Si, nous, on est capables d'influencer «the rest of Canada», comme on dit, est-ce qu'on peut, nous, influencer les Américains et leur faire adhérer au programme de traçabilité en utilisant les moyens technologiques, là, que vous mettez de l'avant aujourd'hui?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): Thank you for a very excellent question. The first part is very, very easy. I don't think that there's any doubt that Québec can significantly influence the rest of Canada. So much so that the use of... Québec was a leader having across-the-board implementation of radio frequency identifiers. So, so strong a message that that sent that this time next year, January of 2005, all of Canada will move to radio frequency identification. So there's a very clear example of how Québec demonstrably led the rest of Canada.

Having returned last week from the United States, they're where Canada was four years ago. What are we going to identify our animals with? The conclusion at the end of that four-day meeting is: Let's not even have this discussion. Let's look North of the border and learn from the experience of Quebeckers in Canada. Let's not travel the road of bar code technology because, while it's a minimum standard, it doesn't deliver all the possibilities. So, there's a very tangible example of Québec leading Canada, and Canada, without question, has the opportunity to influence the United States. Because, as we've heard so much since the end of December, BSE is no longer a Canadian problem, it's not a United States problem, it's a North American situation. So that it's happened already, and I think there's only more good things that could happen. Thank you.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Monsieur... Vous avez terminé, M. le député de Portneuf?

M. Soucy: Bien, j'en ai une autre qui est en banque, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, allez-y, si vous voulez la poser, pour compenser pour tantôt.

M. Soucy: Bien, justement, elle est en banque, là, puis... Mais passez au suivant, là, puis je vais revenir.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ah, d'accord. Vous ne me ferez pas de reproche.

M. Soucy: Non, non.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci. Vous nous dites... Je vais parler de l'industrie bovine. Vous nous dites effectivement, vous confirmez que le système canadien et québécois sont mondialement reconnus. Sauf que, si on compare avec l'Europe, on se rend compte que, dans l'industrie bovine, tous les animaux sont testés pour l'ESB. Donc, ils sont tous testés. Tandis qu'ici on y va par échantillonnage. Est-ce qu'effectivement c'est suffisant si on veut soutenir la compétition et la concurrence internationale? Est-ce que c'est justifié?

Deuxième chose, est-ce que la crise de la vache folle que nous avons connue, qui s'est passée dans l'Ouest canadien et qui s'est passée aussi dans une partie des États-Unis, est-ce qu'il pourrait être pensable que l'Amérique du Nord pourrait être compartimentée pour que finalement, quand il arrive un cas de ce type-là ou qu'il pourrait arriver dans d'autres productions, que ce ne soit pas l'ensemble de l'Amérique du Nord qui soit pénalisé?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

M. Burlet (Jake): The first question with regard to testing is that it's a reactive, versus a proactive approach. It's done in response to the marketplace and it carries a very heavy cost. In Canada, if we were to test all slaughtered animals for BSE, that would come with an annual price tag of $320 million to $350 million at the current cost for that test. So, it's a reactive thing to do and it's done in response to already having had a case. So, I think the question is: Is that a justifiable amount of money for industry to spend in a reactive manner?

And I don't say that from the point of view that testing is negative, I think that testing is good. Testing helps build the marketplace. It's our perspective that a better investment is to proactively deliver to the marketplace what they're asking for. And our marketplace is not just domestic, but international. And it doesn't matter where their suppliers come from, if their suppliers are in the United States, Canada or South America. They're asking the suppliers: Provide us with the story behind the product. And there's absolutely no doubt that, from a proactive point of view, to be able to deliver on this promise of traceability and value-added information can be done for a fraction of the cost of testing all the animals.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Thank you. Est-ce que vous avez une autre question?

M. Rioux: Second question.

M. Burlet (Jake): Currently, once again having returned from this discussion in the United States, the solution to the Canadian, the United States and the North American problem, I believe, will be dealt with as a whole. When the solution, when the answer is delivered, it will apply both to Canada and the United States, and I believe that our market, our closed borders will open accordingly. I don't believe today that Canada will still be separated from the United States.

The follow-on to, I think, kind of the second part of that question is that, if we don't do something either in Canada or the United States in the North American context, does that potentially isolate us and put us at risk in the future? There's... I was going to say there's a clear indication, but it's very, very... it's well known that the other major food-producing and exporting nations, most notably South America, huge producers of cereal grains, citrus crops and meat products, they're not waiting for their first case of BSE, they're positioning selves with national identification, information gathering and access to information. So, if we don't act proactively, absolutely, if we continue to not be able to deliver what the marketplace asks for, we will be isolated. I don't think that's what any of us likes to hear, but that's how the global marketplace for food works.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. M. le député de Portneuf, il nous reste deux minutes.

M. Soucy: Oui. Bien, vous venez de faire état justement d'une situation importante. La crise de la vache folle évidemment a mis le boeuf d'Amérique du Sud encore davantage sur la carte américaine. Alors, est-ce que... Là, vous nous dites que l'Amérique du Sud est en train aussi de se préparer à toute éventualité. Est-ce qu'elle s'enligne vers les normes HACCP? Est-ce que la norme HACCP va être introduite ou est déjà introduite en Amérique du Sud, en Argentine particulièrement?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Burlet.

n(16 heures)n

M. Burlet (Jack): Thank you. Yes, South America is very rapidly moving there, and the reason why is that the large United States-based multinationals are locating significant businesses in that geography. So, they're taking the lessons and the infrastructure from our geography and putting it there, number one, because that's what the marketplace desires. The second reason they're doing it is because, as multinational corporations, they know that it doesn't really matter where food gets exported from, it hedges their bets to be able to produce and export products to the marketplaces that want them. An illustrative example is that North America ships almost no beef products to the European Union, because the European Union has a concern about the use of hormones and antibiotics. South America has stepped into that void to access those markets. So there is nothing saying that we couldn't have geographies like Québec or pieces of North America that could meet those market demands.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Burlet, thank you very much for your participation. You contributed to the understanding of the traceability system. Merci beaucoup, M. Simard et monsieur qui vous accompagnait, et à la prochaine.

Je suspends pour cinq minutes ? cinq minutes ? et on reprend immédiatement après pour entendre le groupe qui nous attend. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 1)

 

(Reprise à 16 h 10)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, on va reprendre nos travaux, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. J'invite maintenant les représentants du Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation à prendre la parole. Nous avons plusieurs représentants qui vont être présentés individuellement. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire et vous avez 20 minutes d'échange avec chaque groupe parlementaire. Alors, je vous souhaite la bienvenue. La parole est à vous.

Conseil de la transformation agroalimentaire
et des produits de consommation (CTAC)

M. Gattuso (Jean): Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour. Mon nom est Jean Gattuso. Je suis président-directeur général de A. Lassonde inc. et président du conseil d'administration du CTAC.

Tout d'abord, nous tenons à remercier la présidente et les membres de la commission de nous offrir la chance de présenter la position du Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation, soit le CTAC, sur les nouveaux enjeux de la sécurité alimentaire au Québec. Les membres du CTAC sont très conscients de leurs responsabilités, et leur première priorité est d'assurer la salubrité et la sécurité des aliments. Nous sommes très heureux d'être ici aujourd'hui.

J'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent: à ma gauche, M. Jacques Légaré, qui est permanent et président du CTAC; M. André Beaudoin, ici, à ma droite, qui est directeur Assurance qualité d'Aliments Carrière; Mme Jocelyne Filion, directrice Assurance qualité de Saputo, division boulangerie; et Mme Christine Jean, directeur technique du CTAC.

Le CTAC est une consolidation des forces de l'industrie, qui regroupe l'Association des manufacturiers de produits alimentaires du Québec, soit l'AMPAQ, le Conseil de la boulangerie du Québec, le CBQ, et l'Association des abattoirs avicoles du Québec, l'AAAQ, et qui représente près de... plus de 425 entreprises, pour un volume annuel d'affaires de 12 milliards de dollars, dans une industrie globale de 17 milliards de dollars. C'est l'industrie la plus importante au Québec au niveau transformation. Si on regarde les industries manufacturières au Canada, au Canada tout entier, c'est l'automobile, mais quand on regarde... suivie de l'industrie alimentaire. Mais en tout cas, au Québec, c'est la transformation alimentaire qui est numéro un.

Le CTAC représente aussi le secteur des services alimentaires, qui regroupe des entreprises de la transformation agroalimentaire, des distributeurs, des gestionnaires d'approvisionnement, des seconds transformateurs ? hôtels, restaurants, cantines, centres d'hébergement scolaire et santé ? ainsi que des entreprises de services. Il s'agit du seul regroupement québécois des différents maillons de la chaîne agroalimentaire dédiés au service alimentaire.

L'industrie de la transformation agroalimentaire québécoise représente plus de 73 000 emplois directs, qui se retrouvent dans plus de 1 300 établissements, et plus de 125 000 emplois indirects, parce que c'est sûr qu'à travers nos usines, après, les produits nécessitent du transport et nécessitent divers services. De plus, le nombre d'emplois dans ce secteur croît à un taux annuel de 3 % depuis 1997, comparativement à 2,1 % par année pour l'ensemble du Québec. Donc, l'agroalimentaire, la transformation alimentaire passe à travers des périodes même de récession.

Près de 85 % de la production agricole du Québec compte sur cette industrie comme principal débouché commercial. Donc, on est un gros client des productions agricoles. En croissance depuis 1996, l'industrie de la transformation agroalimentaire constitue le premier secteur manufacturier au Québec, avec 4,9 milliards de dollars de produit intérieur brut, représentant 36 % du PIB total de l'industrie bioalimentaire québécoise.

La croissance du secteur de la transformation agroalimentaire dépend largement des exportations, qui croissent à un taux plus rapide que les expéditions. Le Québec a enregistré une bonne augmentation d'exportations du secteur de la transformation agroalimentaire, à 3 milliards de dollars, et un taux de croissance annuel de 8,5 %. Ainsi, les exportations internationales ont contribué à plus de 30 % de la croissance des expéditions de notre secteur au Québec, depuis 1997. Les États-Unis représentent le principal marché à l'étranger, totalisant plus de 74 % des exportations.

Près de la moitié des transformateurs agroalimentaires québécois sont présents sur les marchés internationaux. Les marchés internationaux desservis par le secteur de la transformation agroalimentaire sont très diversifiés, soit plus d'une centaine de pays.

À l'amorce d'une nouvelle décennie, les entreprises canadiennes et québécoises de transformation agroalimentaire doivent composer avec des défis de taille, notamment le rythme de la mondialisation, et doivent gérer aussi la hausse des coûts et les pressions à la baisse sur les prix. L'accès au marché américain et les risques reliés à la loi sur le bioterrorisme ainsi que la non-harmonisation des lois sont des enjeux du secteur de la transformation alimentaire qui mettent de la pression sur les coûts et les marges bénéficiaires. On sait que notre secteur a des marges bénéficiaires de la moitié de celles des américains.

Entre tous les défis d'adaptation auxquels l'industrie est confrontée, les exigences en matière de qualité et de sécurité alimentaire sont parmi les plus importantes. Seules les entreprises pouvant se conformer à toutes ces demandes sont susceptibles de maintenir et d'accroître leur part du marché. Désormais, les clients du monde entier désirent voir leur fournisseur faire la preuve de leur capacité de rencontrer ces exigences qui sont basées sur une norme commune et internationale. Et l'industrie agroalimentaire se doit donc d'être compétitive dans la gestion de la qualité et de la sécurité alimentaire si elle ne veut pas risquer de voir ses accès à l'étranger limités.

Les membres du CTAQ sont très conscients de leurs responsabilités, et leur première priorité est d'assurer la qualité, la salubrité et la sécurité des aliments. Le CTAQ offre aux transformateurs au Québec, depuis 1998, un service de formation et d'aide au développement de notre système de qualité et d'HACCP. Le CTAQ s'implique activement au sein de plusieurs comités et filières agroalimentaires.

Nous encourageons le gouvernement du Québec à s'harmoniser avec le fédéral et les autres provinces canadiennes et à encadrer la réglementation sur la traçabilité, l'étiquetage et les OGM pour ne pas défavoriser notre industrie et maintenir la confiance de consommateurs.

Si nous parvenons à harmoniser notre réglementation à celle des autres provinces, du fédéral et même des États-Unis, éventuellement de l'Union européenne, nous serons considérés comme un partenaire stratégique important prêt à faire des affaires. Si les normes exigées des importateurs par le Canada sont conformes à celles exigées des producteurs locaux, bien, la compétitivité de ces derniers sur le marché domestique augmentera significativement.

J'aimerais maintenant céder la parole à M. André Beaudoin.

M. Beaudoin (André): Merci, Jean. Bonjour, Mme la Présidente, bonjour aux membres commissaires. Notre mémoire porte sur les trois principaux enjeux des membres du CTAQ en regard de la sécurité alimentaire au Québec, soit: l'inspection des produits alimentaires, la traçabilité des produits alimentaires et l'étiquetage des aliments.

Nous aimerions, dans un premier temps, présenter notre position sur la définition de la sécurité alimentaire. Cette définition, telle que définie selon les normes de l'AFNOR, est: l'assurance que les aliments ne causeront pas de dommages aux consommateurs quand ils sont préparés et/ou consommés conformément à l'usage auquel ils sont destinés.

Le communiqué de l'Assemblée nationale, à la page 1, précise que les membres de la commission se sont donné le mandat d'examiner «les nouveaux enjeux du secteur bioalimentaire de la ferme à la table, notamment au chapitre des OGM, de la traçabilité et de l'étiquetage, afin d'améliorer le niveau de la sécurité alimentaire au Québec». Également, à la page 12 du document de consultation, on mentionne que «la commission considère que la question des OGM fait partie des enjeux importants de la sécurité alimentaire au Québec». En ce sens, les OGM soulèvent plusieurs questions légitimes d'ordre scientifique, social, économique, éthique sur lesquels il faut poursuivre collectivement notre réflexion et nos recherches afin d'améliorer la sécurité alimentaire au Québec et maintenir la confiance des consommateurs.

À notre avis, l'enjeu de l'étiquetage des aliments issus de génie génétique est crucial, et les consommateurs sont en droit de s'attendre à une information utile sur la qualité des ingrédients et leur provenance, de façon à pouvoir choisir en toute connaissance de cause. Cependant, il est pour le moment prématuré de prétendre qu'une réglementation ou un étiquetage obligatoire des OGM aura comme effet d'améliorer la sécurité alimentaire au Québec.

Il pourrait être également trompeur pour le public d'associer les OGM à une question de sécurité alimentaire, car cela sous-entend un risque réel pour la santé. En effet, la Société royale du Canada, constituée de scientifiques et de chercheurs réputés, rapporte que les OGM sont aussi sécuritaires que les aliments traditionnels et peut-être même plus sécuritaires en raison du processus rigoureux d'approbation par Santé Canada. De plus, la littérature scientifique ne rapporte aucun cas d'infection, d'intoxication ou de décès relié directement à la consommation d'aliments modifiés génétiquement.

Le terme «sécurité alimentaire» invoque pour les consommateurs et le public en général des conséquences éventuelles nuisibles à la santé. Pour ces raisons, nous proposons de dissocier le terme «sécurité alimentaire» des sujets traités par la commission et que les consultations portent plutôt sur les nouveaux enjeux de l'agroalimentaire au Québec.

Le premier enjeu: l'inspection des produits alimentaires et les systèmes qualité de type HACCP. Le CTAQ croit, en règle générale, que les systèmes canadien et québécois d'inspection des aliments sont efficaces, même si des lacunes sont présentes. Par contre, nous croyons qu'une meilleure harmonisation est souhaitable afin d'éviter la confusion et une perception négative auprès de la population en raison du partage des juridictions fédérales-provinciales. L'harmonisation est également souhaitable pour favoriser les échanges commerciaux plutôt que de créer des barrières additionnelles au commerce.

Le CTAQ est aussi d'avis que le Québec et le Canada ont un bon système, bien que perfectible, d'inspection des aliments importés, basé sur le risque, qui est en mesure de garantir un approvisionnement sain et sécuritaire. Ces systèmes d'inspection sont généralement complémentaires, mais, là encore, une harmonisation accrue faciliterait le commerce.

n(16 h 20)n

Le système actuel d'inspection des importations, basé sur un régime de bonne conduite, privilégie et encourage les importateurs et les transformateurs qui sont dotés de contrôles efficaces et efficients. À l'opposé, des inspections plus fréquentes et approfondies sont effectuées chez les délinquants peu soucieux de respecter les bonnes pratiques alimentaires et les cadres réglementaires en vigueur dans l'industrie.

De plus, les juridictions fédérale et provinciales complètent l'inspection à l'entrée du pays par divers programmes d'échantillonnage et de vérification de la qualité et de la salubrité des aliments, par exemple: vérification des substances allergènes, des résidus de pesticides, etc.

Enfin, les forces du marché font en sorte que les importateurs, comme tous les autres maillons de la chaîne alimentaire, investissent de plus en plus de temps et de ressources à la vérification des aliments importés et des opérations des transformateurs concernés par des audits qualité et sécurité.

Le CTAC a offert, depuis 1998, un service de formation et d'aide à l'implantation de systèmes qualité et systèmes HACCP à 75 entreprises alimentaires. Huit ont déjà obtenu la certification HACCP et 16 sont en démarche de l'obtenir d'ici la fin de 2004.

Le CTAC estime que les transformateurs alimentaires devront inévitablement se diriger vers le système HACCP. Considéré comme le meilleur système d'assurance de la salubrité, de l'innocuité et de la sécurité des aliments, il supporte leur engagement. La prise de conscience des consommateurs sur les enjeux de l'innocuité et de la salubrité alimentaire ainsi que les demandes croissantes des marchés d'exportation ont incité les transformateurs à se conformer à ces exigences internationales parmi les plus sévères au monde.

Nous croyons que la meilleure façon de supporter les entreprises, et en particulier les PME du Québec, est de faciliter l'admissibilité aux programmes de formation et d'aide financière et d'augmenter les incitatifs afin qu'elles puissent s'intégrer davantage dans un marché de plus en plus compétitif et exigeant.

Malgré une certaine évolution, beaucoup d'entreprises ne sont toujours pas convaincues de la nécessité d'implanter des systèmes HACCP. Les principaux arguments invoqués dans 50 % des situations sont les coûts élevés de mise à niveau des installations et des bâtiments et la complexité des exigences des programmes préalables. Les exigences d'implantation et de maintien des systèmes HACCP devraient être modélisées en fonction des risques réels par établissement et non par des modèles génériques et des exigences sectorielles de type mur-à-mur.

L'harmonisation, et non la duplication, en Amérique du Nord, des lois, règlements, normes, guides et bonnes pratiques de fabrication est un objectif ambitieux mais souhaitable. Cette harmonisation est une condition essentielle pour que les transformateurs alimentaires du Québec maintiennent leur position de leaders et de joueurs majeurs sur l'échiquier agroalimentaire national.

À cette fin, Mme la Présidente, nous avons déposé à votre attention un document sur lequel... qui s'intitule Le guide des principes généraux d'hygiène à l'intention des services alimentaires, un guide qui a été préparé avec plusieurs participants. Alors, nous vous en remettons, pour votre information, bien sûr.

Alors, ma collègue va maintenant poursuivre avec l'enjeu de la traçabilité des produits alimentaires. Merci.

Mme Jean (Christine): Alors, bonjour aux membres de la commission...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Voulez-vous vous identifier, madame?

Mme Jean (Christine): Christine Jean.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci.

Mme Jean (Christine): Donc, pour enchaîner avec le thème de la traçabilité, j'aimerais d'abord souligner que le CTAC croit qu'il est indispensable que la traçabilité aux fins de salubrité soit généralisée dans l'industrie alimentaire. Il est important de préciser que la traçabilité ne rend pas le produit plus sécuritaire, mais qu'elle permet une réactivité accrue pour un retrait des produits touchés lorsque le risque pour la santé est élevé. Pour le consommateur, cet aspect est essentiel, et nous croyons que l'industrie a le devoir de lui garantir que ses produits contaminés seront rapidement identifiés et retirés du marché.

Ceci dit, comme la traçabilité est un outil en cas de problème, il est plus judicieux de prévenir ces problèmes par l'adoption des normes HACCP chez les transformateurs. Avant de généraliser la traçabilité, il faut d'abord généraliser l'implantation du système qualité HACCP. L'industrie alimentaire est déjà sensibilisée à l'importance d'assurer une traçabilité. Notons qu'environ 50 % des entreprises peuvent déjà assurer une traçabilité de leurs produits. Les auteurs de différentes allégations bios, appellations contrôlées ou autres doivent déjà, par des mécanismes de traçabilité, en assurer la validité.

Déjà, les échanges commerciaux hors Québec obligent les compagnies et intervenants dans la chaîne alimentaire à considérer la traçabilité non seulement comme un outil de gestion de crise, mais, dans certains cas, comme une exigence commerciale. À cet effet, notons les exigences de la réglementation américaine sur le bioterrorisme. Nous croyons que graduellement de plus en plus d'entreprises assureront une traçabilité de leurs produits.

Les transformateurs s'entendent sur l'objectif, mais la façon d'y arriver peut parfois poser des problèmes, car le système de traçabilité de chaque segment de la chaîne d'approvisionnement doit être compatible avec les autres segments. C'est pourquoi les transformateurs du Québec n'ont aucun intérêt à investir précipitamment vers des systèmes de traçabilité pour se rendre compte que ces systèmes ne sont pas adaptés aux besoins de leurs acheteurs, que ceux-ci soient au Québec, au Canada ou ailleurs en Amérique du Nord.

C'est pourquoi le terme «harmonisation» est extrêmement important, et chacune des démarches vers un processus de traçabilité dans l'agroalimentaire doit être exécutée afin que les systèmes mis en place soient compatibles entre tous les maillons canadiens de la chaîne alimentaire.

À cet effet, le CTAC appuie l'initiative canadienne Can-Trace, qui vise à élaborer des normes minimales dans toute la chaîne d'approvisionnement. Cette initiative a également pour avantage de créer un groupe de travail qui se penchera sur les besoins spéciaux des petites et moyennes entreprises. L'efficacité de ces normes devrait être évaluée à l'aide de projets pilotes. Il est important de mentionner que ces normes devront également être compatibles pour le commerce à l'extérieur des frontières. Les résultats de cette initiative seront cruciaux pour le futur de la traçabilité au Canada.

Pour terminer, et avant de laisser la parole à ma collègue, j'aimerais souligner qu'arriver à une traçabilité des produits alimentaires est un objectif louable. Cependant, dans un contexte où l'industrie alimentaire doit être de plus en plus compétitive, la traçabilité est un ajout aux nombreux défis que doit relever l'industrie alimentaire. Notons: l'étiquetage nutritionnel, l'implantation de systèmes HACCP, programme de prévention du bioterrorisme, C-TPAT, et bien d'autres. Toutes ces exigences occasionnent des coûts qui ne seront pas toujours répartis équitablement de la ferme à la table.

Mme Filion (Jocelyne): Merci, Christine. Pour enchaîner avec le thème de l'étiquetage...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

Mme Filion (Jocelyne): Jocelyne Filion.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme Filion.

Mme Filion (Jocelyne): Pour enchaîner avec le thème de l'étiquetage, nous sommes d'avis que l'information essentielle quant à la santé ou à la sécurité est déjà livrée aux consommateurs. Les renseignements inscrits sur l'étiquette des aliments permettent aux consommateurs de faire un choix éclairé grâce à la composition incluant la déclaration obligatoire des ingrédients à risque, tels les allergènes, qui sont susceptibles de présenter un danger pour les personnes sensibles, et grâce à l'information sur la valeur nutritive, qui sera affichée sur une majorité de produits d'ici la fin décembre 2005.

Les règlements alimentaires en place au Canada prescrivent ce qui peut et ce qui doit être inscrit sur les étiquettes ainsi que les conditions requises pour rencontrer toute allégation énoncée. Ainsi, l'étiquetage obligatoire est requis pour des produits qui se distinguent des sources traditionnelles par un changement nutritionnel, ou une modification de composition, ou lorsque des risques potentiels pour la santé ou la sécurité doivent être identifiés. Cet étiquetage obligatoire inclut les aliments issus de la biotechnologie.

Nous aimerions porter à votre attention le fait que nous retrouvons sur les tablettes d'épiceries des produits importés qui ne répondent pas aux normes d'étiquetage en vigueur présentement. Pourtant, nous avons les mêmes consommateurs à protéger.

Je vous amène maintenant à la question d'harmonisation des règles d'étiquetage. Nous nous sommes réjouis du fait que les règles d'étiquetage ayant trait aux informations nutritionnelles, aux allégations sur la valeur nutritive et aux allégations sur la santé soient harmonisées à celles du fédéral. Par contre, nous sommes d'avis que les normes d'étiquetage du Québec ayant trait aux informations obligatoires auraient avantage à être harmonisées aux normes canadiennes.

À cet effet, au Québec, les instances gouvernementales ont légiféré, il y a plusieurs années, afin d'exiger davantage d'information sur l'étiquette des produits. L'addition de ces multiples exigences supplémentaires et particulières sur les étiquettes apporte des coûts additionnels importants pour les transformateurs du Québec. Nous sommes d'avis que nous devrions tendre vers une harmonisation des normes d'étiquetage pour le marché nord-américain dans le but de donner une constance dans la façon dont les informations sont livrées aux consommateurs et aussi dans le but de réduire les coûts de maintien de systèmes différents par les fabricants et transformateurs, des coûts qui finissent par être transférés aux consommateurs.

En ce qui concerne les produits biologiques, leurs normes d'étiquetage sont conformes à nos attentes. L'identification des produits biologiques est claire, puisque le consommateur est en mesure d'identifier le certificateur clairement sur tous les produits. Par contre, l'imposition d'un logo unique est à proscrire. Cette exigence devient une barrière commerciale pouvant rebuter les fournisseurs de produits biologiques de vendre au Québec, et ce, alors que nous sommes dans un marché en pleine expansion. Nous sommes fiers que la norme biologique ait obtenu la reconnaissance des États-Unis, car cela permet l'exportation des produits québécois vers les États-Unis.

n(16 h 30)n

Quant à la question des OGM, nous sommes en faveur d'un étiquetage volontaire de ces produits parce que notre infrastructure agricole n'a pas de moyens actuellement en place permettant la ségrégation des cultures de manière à se conformer à 100 % à un étiquetage obligatoire sur la présence ou l'absence d'OGM. Nous croyons aussi fermement que le consommateur a le droit d'être informé et qu'il vaut mieux avoir une norme volontaire avec un seuil de tolérance de 5 % plutôt que d'attendre indéfiniment d'avoir un consensus sur un taux inférieur de 0,9 % comme en Europe. Ce seuil de 5 % s'harmonise avec le Codex Alimentarius et aux normes internationales d'étiquetage alimentaire, et nous avons en main une norme volontaire qui peut être mise en application.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, Mme Filion. Merci de votre collaboration. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames, messieurs. Bienvenue. Merci de votre présentation aussi. Et tout de suite j'enchaîne sur ce que, Mme Jean, vous avez présenté au niveau de la traçabilité et les recommandations que vous faites aussi à propos des normes HACCP.

Dans votre mémoire, vous recommandez, vous mentionnez qu'il serait pertinent que le principe de la traçabilité soit implanté à l'ensemble de la chaîne alimentaire. Mais vous dites aussi dans votre mémoire: Ce serait encore mieux si on avait les normes HACCP. Je pense que tout le monde s'entend là-dessus. Et, depuis trois jours, tout le monde s'entend là-dessus. S'il y a une chose qu'on ne s'entend pas vraiment ou qu'on entend régulièrement, c'est: Qui assumera les frais et qui assumera les coûts?

Puis on se fait dire par les consommateurs: Regardez, nous autres, on veut être protégés, on veut avoir une alimentation sécure. Les distributeurs nous disent: On veut que nos clients à qui on distribue des aliments aient de la bonne nourriture. Les transformateurs nous disent la même chose. Mais tout le monde veut aller au ciel, mais personne ne veut mourir. Mais, moi, la question que je veux vous poser, ce n'est pas nécessairement: est-ce que vous seriez prêts à assumer les coûts? ? peut-être un peu ? mais, à partir du moment où vous représentez les clients puis les entreprises qui font un chiffre d'affaires annuel assez important ? et tant mieux ? est-ce que votre organisation ou votre organisme ne serait pas prêt à encourager vos entreprises à dire: Nous allons faire notre part? Parce que le consommateur, je pense... Et le législateur souvent et la plupart du temps représente, selon moi, assez bien le consommateur, ou ses clients, ou ses électeurs.

Puis on entend souvent dire, surtout dans un comté comme le mien qui est un comté agricole: les producteurs, cet été, avec la crise de la vache folle, ils ont subi... ils ont eu un été difficile, une année difficile aussi. Les consommateurs aussi. On vendait le bovin à quelques sous la livre, pour des peccadilles finalement, une vache, et le consommateur, lui, achetait et payait le même prix que l'année passée ou à peu près. Grosse question. Et, en même temps, je pense que les consommateurs ont raison, et les producteurs, de se demander: Où va l'argent? Puis, moi, je n'accuse pas personne, mais je me demande si la crise de la vache folle qu'on a eu à subir... est-ce qu'elle vous a affectés beaucoup?

M. Gattuso (Jean): Oui, mais... Bon. Vous avez couvert plusieurs points, là...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, c'est M. Gattuso?

M. Gattuso (Jean): C'est bien ça. Nous, je vais dire, les transformateurs, déjà on a déjà des coûts extra, c'est-à-dire... Puis, faire de la traçabilité, faire du HACCP, on le fait et on le continue. Nous, ce qui est important, vous en avez parlé, c'est que les normes soient identiques pour tout le monde. Parce que, en bout de ligne, les coûts vont aller, dans la chaîne alimentaire, à tout le monde, O.K.? Puis, à un moment donné, écoute, les lois du marché vont peut-être... ou vont... vont obliger qu'augmentent ces coûts-là. Ça fait que, je vais dire, en bout de ligne, je pense que ça, ce qui est important, c'est qu'on est pour ça, je vais dire.

Mais, je vais dire, nous, là, déjà, je vais vous dire que les transformateurs alimentaires sont déjà soumis à des pressions énormes. J'avoue que les marges des transformateurs de produits alimentaires au Canada sont la moitié de celles ? des marges ? des Américains. Ça fait que, je vais dire, déjà, là... Puis, moi, quand je vous dis que le panier d'épicerie le moins cher en Amérique du Nord, il est à Toronto et à Montréal, ça fait que, moi, je vous dis que les transformateurs alimentaires d'ici font des miracles, O.K.? Ça fait que la chaîne alimentaire fait des miracles pour être capable de continuer d'être compétitive.

On supporte l'HACCP, on supporte la traçabilité, mais, je veux dire, en autant que les niveaux des règlements sont les mêmes partout. À ce moment-là, on est sûrs au moins qu'on se bat avec les mêmes outils. Parce que je peux vous dire que, moi, j'ai visité les usines aux États-Unis puis des gens qui disent qu'ils sont HACCP, je vais vous dire une chose, la règle HACCP, les normes HACCP au Canada sont beaucoup plus élevées à ce qu'on voit ailleurs, définitivement. Ça fait que, je vais dire, ce qui est important, c'est qu'on puisse au moins... bien, on est heureux d'avoir des normes élevées, mais aussi qu'on se batte avec notre compétition... qu'ils sont obligés de rencontrer aussi les normes élevées.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Mais vous comprenez bien ma question aussi, je suis convaincu, du fait que le consommateur se pose d'énormes questions actuellement à propos du prix du boeuf, entre autres ? l'exemple que je donnais ? qu'il a payé durant tout l'été ou même actuellement par rapport au prix de vente. Et là la question qu'il se pose et qu'on se pose, c'est: Qui ramasse les profits? Puis je pense que cette question-là, elle est pertinente à poser.

M. Légaré (Jacques): Si vous permettez. Jacques Légaré.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Légaré.

M. Légaré (Jacques): La question, elle est très pertinente. Nous, au niveau du Conseil de la transformation agroalimentaire, on a très peu de viande transformée fraîche. On a de la viande transformée dans les produits en conserve, et autres. Mais, à part ça, on n'a pas de pas de membres comme le Conseil des viandes du boeuf comme tel, là. On ne transige pas, on n'a Québec. Alors, pour répondre à votre question, là, on est mal placés pour répondre à cette question-là pertinemment.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Mme Jean, oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui...

Mme Jean (Christine): Peut-être ajouter un élément au sujet de l'impact de la crise de la vache folle. Moi, j'ai l'occasion d'aller dans plusieurs industries, et puis il y en a que j'ai rencontré et qui ont dû suspendre leurs exportations de viande transformée ? là, on parle de pepperoni, de charcuterie ? aux États-Unis parce que justement leurs produits contenaient du boeuf. Alors, ça les a affectés, là, ils n'étaient pas nécessairement membres de notre association, il y a eu un impact, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Autre question, sur les OGM. Vous avez dit tantôt que c'était une question éthique aussi le fait de l'étiquetage des OGM. Par contre, vous avez dit aussi dans votre présentation qu'il serait prématuré actuellement d'établir un étiquetage obligatoire, et j'aimerais vous entendre là-dessus parce que ceux et celles qui viennent nous voir ici ou nous présenter des mémoires ont bien hâte d'être sécurisés à ce niveau-là. Vous nous dites tantôt: Peut-être qu'on n'a pas de preuve actuellement que c'est si dangereux que ça, on n'a pas eu de conséquences malheureuses, peut-être que... il ne faut pas le souhaiter non plus, mais n'attendons pas non plus. Mais j'aimerais avoir votre position là-dessus: pourquoi vous n'êtes pas d'accord avec l'étiquetage obligatoire?

M. Beaudoin (André): Très bonne question. Nous, notre position, puis c'est la même qu'on défend depuis plusieurs années, c'est qu'on n'est pas contre c'est-à-dire la mise en place d'une norme d'application obligatoire, c'est qu'on préfère y aller par la démarche de petits pas. Et actuellement ça a été difficile de développer, au niveau canadien, un consensus sur une norme volontaire d'application de l'étiquetage des aliments issus de génie... c'est-à-dire des OGM. Donc, on préfère avoir une norme d'application volontaire actuellement, avec un seuil de détection de 5 %, plutôt que de tenter, ou de négocier, ou de viser à avoir une norme nationale obligatoire dans laquelle on aurait un secteur ou une norme de tolérance avec un seuil de 0,9 %, comme il existe en Europe.

La difficulté, c'est qu'on n'est pas capables actuellement, selon les méthodologies disponibles, selon la science, selon les seuils de détection, d'atteindre ces seuils-là et de détecter jusqu'à 0,9 %. Donc, par souci de transparence et par souci de rassurer les consommateurs, on préfère s'engager et on supporte à ce moment-là le Conseil national... ou l'Office général des normes du Canada qui a mis en place, par consensus, le développement de cette norme d'application volontaire.

Mme Jean (Christine): Et j'ajouterais... Est-ce que tu as terminé? J'ajouterais...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme Jean.

Mme Jean (Christine): Christine Jean. J'ajouterais un élément. On parlait tout à l'heure de traçabilité et du HACCP, donc il serait préférable, avant de parler de traçabilité, bien, de prévenir avec l'implantation du système HACCP. Quand on parle des OGM, on peut étiqueter les produits, mais encore faut-il que le transformateur soit capable de le prouver. Donc, il doit assurer une traçabilité, là, de ce qu'il y a dans son produit. Alors là on revient à l'inverse: on doit d'abord implanter une traçabilité avant de mettre des étiquettes avec ou sans OGM, sinon on doit valider ce qu'on indique sur les étiquettes. Et, si les transformateurs ne sont pas en mesure de remonter à l'origine, alors l'information qu'on a sur l'étiquette est peut-être difficilement vérifiable.

n(16 h 40)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, je continue sur la même veine, concernant cette question-là, par rapport à la transformation et le juste prix pour les agriculteurs. C'est une préoccupation qui nous a été apportée à la commission. Dans votre mémoire, vous dites: «Près de 85 % de la production agricole du Québec compte sur cette industrie ? l'industrie de transformation ? comme principal débouché commercial.» Sur ce 85 % de production québécoise que vous transformez ici, il y en a combien qui est destiné au marché intérieur et combien qui est destiné à l'exportation?

M. Légaré (Jacques): Jacques Légaré. Notre volume d'affaires, pour les membres du CTAC, pour l'industrie, est de 17 milliards. L'exportation est de 3 milliards, 3,5 milliards. Alors, c'est la portion, là, qui est vouée à l'exportation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Nous avons entendu les gens de l'UPA nous dire, et on a aussi pris connaissance de ça dans différents textes, que la viande, particulièrement la viande hachée, par exemple la livre de viande hachée qu'on achète dans le magasin, elle peut contenir de la viande qui viendrait de l'Argentine et qui viendrait de l'Alberta, qui viendrait de tout partout. Quelle est la part des produits importés que vous transformez au Québec et qui sont destinés au marché intérieur?

M. Gattuso (Jean): On n'a pas cette statistique-là. Ça dépend tellement du secteur d'activité.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Seulement la viande.

M. Gattuso (Jean): Dans la viande... On n'a pas cette statistique-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous ne l'avez pas.

M. Gattuso (Jean): On n'est pas dans le secteur de la viande. On a des transformatrices qui vont utiliser de la viande pour les mettre dans des cannes de conserve, dans la sauce à spaghetti, ces choses-là, mais on n'a pas, exemple, les statistiques sur la viande. Il faudrait vous adresser vraiment au Conseil des viandes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. Et la question du juste prix, est-ce que ça vous préoccupe quand vous entendez les producteurs agricoles dire que, eux, ils continuent toujours à vendre au même prix, mais qu'en bout de ligne, lorsque la viande se retrouve sur les tablettes, le prix augmente ou il reste relativement stable, mais, eux, finalement ils sont perdants dans la chaîne d'alimentation?

M. Gattuso (Jean): Je vais vous revenir avec la même réponse que tout à l'heure. Je veux dire, le juste prix, nous aussi, les transformateurs, on aimerait l'avoir, mais l'industrie, la compétitivité, la mondialisation, il y a plusieurs faits qui font, exemple, qu'on a... Dans plusieurs secteurs d'activité au niveau des transformateurs, plusieurs segments des transformateurs, plusieurs n'ont pas bougé leurs prix depuis 20 ans. Alors, je veux dire, il a fallu, exemple... il a fallu gagner sur l'efficacité dans nos usines, il a fallu faire des choses... exemple travailler différemment. Mais je peux vous dire que, je veux dire, on est dans les mêmes dilemmes que les producteurs. Donc, je veux dire, on fait face...

Quand on parle des pressions, on est... Nous, on dit, les transformateurs, on est mis... on est un peu en sandwich, parce que, d'un côté, je veux dire, les producteurs sont là, mais les producteurs, eux, sont regroupés, nous, les transformateurs, on est là, puis, de l'autre côté, il y a la mondialisation. Il y a aussi le consommateur qui veut tout le temps aussi des nouveaux produits. On est soumis à des grands challenges, et je peux vous dire que nos prix... Regardez dans plusieurs secteurs... Regardez votre circulaire d'épicerie et sortez-en une d'il y a 20 ans passés, vous allez voir, il y a de la soupe encore à 0,99 $, comme il y a 20 ans passés, des pâtes alimentaires à 0,99 $, à 0,69 $ puis du jus à 0,79 $, à 0,99 $. La même chose que... Donc, on est dans le même «bandwagon» que les producteurs.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. Merci pour votre explication. Je cède la parole au député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. Je comprends, là, que vous vous faites le défenseur de votre organisation. Avant de poser ma question, j'aimerais ça avoir une précision. On nous dit que vous représentez l'industrie de la transformation agroalimentaire, puis là je comprends que le volet des viandes n'est pas sous votre gouverne, c'est ça?

M. Légaré (Jacques): Bien, il y a une partie des viandes: dans le poulet, l'Association des abattoirs de volaille. On a aussi des membres qui sont dans le secteur de la viande, comme le Groupe Brochu Lafleur ou Olymel, dans d'autres... pour le porc, qui font partie de ça. Donc, on a des membres dans chacun des secteurs, mais on n'a pas l'ensemble des membres d'un secteur en particulier.

M. Soucy: O.K. Alors, j'aurai deux question. Une première que... Je vais faire un petit peu de suivi, là, sur le collègue... c'est de Saint-Maurice, c'est bien ça?

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Nicolet.

M. Soucy: Nicolet. Nicolet-Yamaska. Pourtant, je l'ai entendu tellement souvent. Alors, c'est parce que curieusement, nous, comme députés, on rencontre les producteurs, puis on les rencontre des fois devant leurs tables de cuisine puis avec un groupe, puis là on nous a parlé de la crise de la vache folle, je vous dirais, en long et en large. On nous a montré des chèques qu'ils ont reçus pour des bêtes, et puis c'était quand même très bas. Des fois, c'était en bas de 1 $. C'était même ridicule d'émettre le chèque, là.

Puis on a rencontré avant vous les gens qui font la distribution, puis nous autres... ils disaient: La distribution, nous autres, là, ça n'a pas changé, la crise de la vache folle, on payait le même prix ou presque avant puis on vendait le même prix. Puis, finalement, entre les deux, il y avait vous autres, puis là, bien, la question que les... En tout cas, c'est tout à fait normal que la question s'adresse à vous. Bien, remarquez que vous avez beau vous défendre aussi ? peut-être que c'est les distributeurs qui nous ont joué un tour tantôt ? mais il y a quelqu'un qui a profité du fait qu'il y a des animaux qui sont vendus à peu cher, et puis, dans la chaîne... au bout de la chaîne, ça se vendait le même prix.

Alors, je veux bien croire qu'il y avait des produits, le boeuf, qui se retrouvaient dans d'autres produits avec de la viande dedans, d'autres produits carnés, qui ont fait en sorte qu'ils ont eu des pertes, ça, on peut en comprendre jusqu'à un certain bout, mais est-ce que ça a été exploré chez vous, cette question-là? Puis, si ça ne l'a pas été, est-ce que vous pensez qu'il y aurait lieu de rassurer à tout le moins nos producteurs? Parce que, nous, on est en lien avec eux de façon directe. Alors ça, c'est ma première question.

Ma deuxième question: Dans le volet général de la transformation que vous développez, certains nous disent: Bien, par autorégulation... puis on va chacun s'assurer qu'on respecte les normes, on va adhérer à la norme HACCP, puis on va tous adhérer à ça, puis on va faire de l'autosurveillance, de l'autorégulation. Puis là on a un groupe qui est venu hier nous dire: Bien, nous autres, on aimerait ça avoir un privilège supplémentaire qui soit inscrit dans nos conventions collectives. On aimerait ça avoir le devoir... le droit et le devoir d'alerte parce qu'on pense qu'à certains égards certains transformateurs... bien, en tout cas, oublient peut-être de nous signaler certains indices, certains phénomènes.

Alors, il y a des organisations d'employés, de travailleurs qui nous disent: On aimerait ça avoir un devoir d'alerte pour... exemple, si on juge que, sur la chaîne, il y a une pièce qu'on juge impropre, on arrête la chaîne puis on va attendre l'inspecteur. Alors, j'aimerais ça avoir votre réaction par rapport à ces demandes-là qui nous ont été adressées ici, à la commission.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Gattuso.

M. Gattuso (Jean): O.K. Au niveau de la première question sur les viandes puis l'information, je veux dire, on n'a pas... écoute, on n'a pas cette information-là, à savoir, écoute, s'il y a des gens qui ont profité. Comme Jacques vous a expliqué tantôt, je veux dire, c'est... comment qu'on est constitués, on n'a pas cette information-là.

M. Soucy: Excusez-moi, mais ce n'est pas qu'on en a profité. On veut juste savoir... on veut juste qu'on nous explique qu'est-ce qui s'est passé. Puis, vous, comme organisme, vous êtes capable de demander à vos gens: Peux-tu nous donner un certain point de vue qu'on puisse partager?

M. Gattuso (Jean): On n'a pas le point de vue. Je vais vous dire, on n'a pas cette information-là, puis je veux dire, de la façon dont on est structurés... Puis notre représentation, elle n'est pas assez complète au niveau de la viande pour essayer de vous donner des données là-dessus.

Au niveau de votre deuxième question, sur les volets... au niveau du volet transformation, les droits et devoirs d'alerte, je pense que, écoute, comme gestionnaires, notre premier pouvoir puis notre premier objectif, c'est de donner au consommateur un produit, un produit de qualité, et, je veux dire, c'est ce qu'on fait à tous les jours. Puis on a des gens d'Assurance qualité dans nos usines qui s'assurent, exemple, qu'on respecte ces normes-là. Alors... Sinon, ce qui va arriver si on doit vous donner des droits et devoirs d'alerte, c'est comme dire que les gestionnaires ne font pas leur travail. Je pense que ce serait ouvrir... et, je pense, exemple, c'est vraiment dire que les gens qui gèrent les usines au Québec ne sont pas capables de faire leur travail.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Beaudoin.

M. Beaudoin (André): J'aimerais compléter là-dessus aussi. C'est qu'on est soumis, dans le cadre de la transformation des aliments, à un cadre réglementaire très, très sévère, probablement parmi les plus sévères au monde, c'est-à-dire en termes de normes de fabrication des produits, en termes d'établissement ou d'équipement de transformation, de normes de mise en conserve ou de stérilisation des équipements ou autres. Bref, l'ensemble des exigences actuelles, telles qu'on les connaît, plus les exigences de formation de notre main-d'oeuvre, parce qu'on doit s'assurer d'avoir des manipulateurs d'aliments qui sont formés, qui connaissent les règles de santé et sécurité, qui connaissent les règles de salubrité, alors, lorsqu'on met toutes ces règles-là en place, on s'assure de mettre toutes les mesures nécessaires et de mettre tous les efforts nécessaires pour s'assurer que les produits soient sécuritaires et rencontrent les plus hautes exigences pour les consommateurs québécois et canadiens. Ça, là-dessus, il n'y a pas de doute.

M. Gattuso (Jean): Je ne sais pas si vous me permettez, Mme la Présidente, je vais rajouter au...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, un complément.

M. Gattuso (Jean): Oui, un complément à M. Beaudoin. Vous savez, notre pays, Québec, Canada, on a les normes les plus élevées de l'industrie. Quand je vois... Visitez des usines aux États-Unis, là, puis revenez chez vous, vous allez dire: Câline! on a vraiment des très bonnes, très bonnes usines. Les normes sont plus élevées ici. Et, je vous le dis, au gouvernement, il y a une... Je veux dire, vous avez devant vous, là, je veux dire, un secteur qui peut vraiment réduire aussi vos coûts de santé, O.K., je veux dire, avec la facture de la santé. On vend des produits nutritifs, et, si vous mettez les Québécois à manger... à manger mieux et au sport, vous allez voir que la facture de santé du gouvernement va baisser.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Gattuso. Mme la députée de Deux-Montagnes.

n(16 h 50)n

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Alors, salutations à tous. Vous venez de faire une belle publicité sur acheter québécois. Je vais revenir, avant de passer à quelques questions sur l'étiquetage, sur la question du droit d'alerte. Vous avez répondu à mon collègue que, pour vous, le droit d'alerte, c'est-à-dire que des gens qui travaillent sur les chaînes, ou peu importe, à l'intérieur de l'entreprise, qui participent à assurer une sécurité alimentaire à l'intérieur de l'entreprise en pouvant signaler ou en pouvant informer de l'intérieur de l'entreprise, et tout ça... pour vous, ce serait comme désavouer votre responsabilité comme chef d'entreprise. Mais on sait fort bien que des cadres, ou des chefs, ou les surveillants, et tout ça, sur du personnel... ce qu'on nous a expliqué cette semaine, que c'est du personnel... une ressource informée, qui est une qualité ajoutée dans la participation à la fabrication. Parce qu'on sait fort bien qu'on nous a dit que les gens qui travaillent dans ces entreprises de transformation là sont très fiers des produits qui sortent de là, et tout ça. Alors, c'est pour ça que ça m'a surprise un petit peu, votre réaction vis-à-vis sa question.

M. Gattuso (Jean): Écoutez, ce n'est pas une question de gestion, c'est une question d'équipe. Nos gens sont très impliqués dans nos usines. Nos gens sur nos lignes sont très impliqués. Ils reçoivent de la formation sur la qualité des produits, etc., et sont encadrés par, exemple, des gens d'Assurance qualité qui font équipe avec eux. Je veux dire, l'objectif premier, c'est de mettre sur le marché des produits de qualité, sauf qu'en bout de ligne, O.K., il y a des gens qui sont responsables, qui sont superviseurs de l'Assurance qualité. Ça, à ce moment-là, vous allez vous ramasser sur des lignes de production avec un paquet de gens qui seront décideurs. Donc, ça ne pourra pas tenir, là. Je pense que, André, tu pourrais un peu parler comment ça fonctionne, là, donner un peu plus de précisions de ce côté-là.

M. Beaudoin (André): C'est que de la façon dont ça fonctionne dans nos usines, c'est que les employés, en tout temps, ont le droit de signaler toute éventualité de problème potentiel, soit sur la qualité, la sécurité, la salubrité, mais la décision finale ne leur revient pas. La décision finale revient aux gestionnaires qui sont sur place, en collaboration bien sûr avec les personnes qui sont sur place: les experts, les groupes d'Assurance qualité, et tout. Mais, les employés, bien sûr qu'ils sont tenus d'avertir s'ils voient un problème. Parce qu'on ne peut pas avoir... Par exemple, s'il y a un directeur du contrôle de la qualité dans une usine puis il y a 100 employés, les 100 employés représentent 100 opportunités de détecter des problèmes potentiels. Alors, bien sûr qu'on les utilise de façon intelligente, mais la décision finale revient au gestionnaire.

Mme Robert: Dans le fond, la... Oui, je continue... Mais est-ce que... Dans vos entreprises, est-ce que vous avez des employés syndiqués?

M. Beaudoin (André): Nous, dans nos entreprises, on a deux types d'employés: on a les employés qui sont syndiqués et d'autres groupes qui ne le sont pas. Et, dans les deux situations... Moi, je vais parler pour mon entreprise, c'est-à-dire les Aliments Carrière, dans laquelle on transforme des légumes, conserves et surgelés. Dans l'ensemble de nos sept établissements, on a les deux types d'employés, soit des syndiqués, soit des non-syndiqués. Et ça fonctionne exactement de la même façon, on fonctionne sur des programmes de formation. C'est les mêmes programmes de formation, c'est les mêmes normes, c'est les mêmes programmes qui sont à respecter, et les employés, en tout temps, sont invités à nous signaler toute éventualité de problème potentiel, sans égard de la syndicalisation.

Mme Robert: Est-ce que vous verriez des inconvénients ou des problèmes éthiques majeurs à ce que ce soit, par exemple, inclus dans leur propre convention collective comme une espèce de droit?

M. Gattuso (Jean): Moi... si vous permettez, c'est parce que...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Gattuso.

M. Gattuso (Jean): Oui. Parce que, comme André vous faisait la démonstration, je veux dire, la façon que ça fonctionne dans les usines, je veux dire... Il y a une personne qui est superviseur de qualité, et les problèmes des fois qui peuvent être signalés par les employés sur la ligne... le superviseur de qualité a les qualifications aussi pour prendre la décision. Il a été... Écoute, on engage des gens qui ont des formations universitaires, qui ont... exemple, qui ont des... information. C'est sûr qu'on écoute nos employés, mais, je veux dire, en bout de ligne, des fois, je veux dire, la décision, il faut que...

Exemple, le superviseur a, lui, l'ensemble... regarde l'ensemble du problème, je veux dire, c'est son rôle, sinon on va se ramasser avec, comme je le disais, plusieurs décideurs. Ça ne pourra pas fonctionner.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui?

Mme Jean (Christine): Moi, je voudrais ajouter un commentaire à ce sujet-là puis je voudrais revenir aussi à la norme HACCP, parce que, dans notre mémoire, on parle aussi que c'est une norme à atteindre, mais ce n'est pas tout le monde qui l'atteint déjà. Il y a encore du travail à faire. Il y a la grande entreprise. Il y a la moyenne et il y a la petite entreprise. Donc, on ne vous cache pas que, dans la petite entreprise, il y a encore du travail à faire à ce niveau-là, pour toutes les raisons qu'on a citées précédemment, donc des coûts, bon, l'investissement en personnel, en main-d'oeuvre, en modification des installations et des usines qui n'ont pas encore de contrôle de qualité en place.

Donc, est-ce que ces choses-là ont pu arriver et qu'elles ont pu être contées, bon, aux gens que vous mentionniez tout à l'heure? Peut-être que c'est arrivé. Mais, nous, ce qu'on essaie de vous dire, c'est qu'à l'intérieur des normes HACCP c'est une exigence. Donc, la formation, l'employé... Moi, un jour, j'ai passé une entrevue, puis on m'a posé comme question: Qui est responsable de la qualité en usine? La réponse n'était pas: l'équipe de contrôle qualité, mais c'était: les employés. Parce que c'est eux qui sont sur la ligne de production, donc c'est eux qui sont en mesure de détecter les problèmes.

Donc, dès qu'une entreprise s'en va vers les exigences HACCP, ça devient une condition essentielle. Et, quand ces gens-là sont audités, on leur demande: Avez-vous formé vos employés? Et on va sur la ligne, on demande aux employés: Qu'est-ce que tu fais? Qu'est-ce qui arrive en cas de problème? Et, même, ils sont encouragés, lorsqu'il arrive un incident, à le dénoncer, à le déclarer, à aviser le responsable qualité, le responsable de production. On les encourage à le faire parce qu'on vise, tout le monde, la même chose, le même but, là: produire un aliment sécuritaire.

Donc, peut-être qu'il y a eu des incidents, des cas d'exception comme ça qui sont arrivés, mais en général ces choses-là, dans une installation où les normes HACCP sont implantées... Moi, je ne vois pas comment on pourrait pénaliser un employé qui déclare que, bon, il y a un produit qui vient de passer, puis il n'est pas certain, là, que la qualité... ou que c'est tombé par terre et puis qu'on lui a dit de le remettre sur la chaîne de production. Puis, même, ils sont fiers de venir le dire aux gens, là, la plupart du temps.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme Jean. Vous avez encore trois minutes, à peu près.

Mme Robert: Oui. Je vais continuer sur l'étiquetage. Je pense que ce débat-là va sûrement... Mais j'ai été fort intéressée par votre réponse là-dessus. Bon.

On nous a parlé beaucoup, là, de l'harmonisation des normes d'étiquetage avec le reste du Canada. Bon. On peut croire la problématique. Si on se réfère à votre mémoire, à la page 21, dans le fond, ce serait une harmonisation pas simplement de normes québécoises-canadiennes, mais aussi normes américaines, en termes d'étiquetage comme tel, qui pourrait être l'idéal, d'une certaine façon.

Est-ce que vous voyez un moyen, une façon ? il y en a qui nous parlent d'indices, là, ou de... je ne sais pas ? d'en arriver à certaines... rapidement à ces normes sans pour autant perdre... Parce que je pense qu'au Québec on s'est donné un mode d'étiquetage, c'est-à-dire la description des produits, auquel on tient énormément, et je pense qu'ailleurs il y a beaucoup moins... c'est par consultation, on nous a expliqué ça, où tu peux sur demande, et tout. Est-ce que vous voyez une possibilité, c'est-à-dire qu'il y ait harmonisation, mais sans perdre les valeurs? Moi, je parle du côté consommateur, là, c'est-à-dire les valeurs auxquelles le consommateur attache le plus d'importance. Et il va aller en attachant de plus en plus... c'est-à-dire: Que contient le produit? Ils veulent savoir ce que ? les gens ? contient le produit.

Mme Filion (Jocelyne): Je peux peut-être essayer de répondre à votre question, si je l'ai bien saisie.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, c'est Mme Filion?

Mme Filion (Jocelyne): Oui, exactement. Si on regarde... Vous avez parlé de composition, c'est la liste des ingrédients, une harmonisation, d'avoir une liste canadienne. Présentement on a la Loi des aliments et drogues loi... C'est extrêmement complexe, cette façon-là de qui dicte la façon de déclarer les ingrédients. C'est une déclarer. Et puis, normalement, ça devrait être uniformisé sur l'ensemble des produits vendus au Canada, c'est évident, pour que le consommateur s'y retrouve. On parle de normes aussi au niveau des allégations nutritionnelles. On parle de normes au niveau de la valeur nutritive. Tout ce qui doit être déclaré sur les emballages, quand c'est harmonisé, si on parle...

n(17 heures)n

Je reviens à la valeur nutritive. Il y a eu... La loi est passée en décembre 2003, hein, les allégations sur la valeur nutritive, sur la santé, et puis, de cette façon-là, dans tout le travail qui a été fait, ça a été de chercher une harmonisation autant que possible avec les États-Unis pour essayer de mettre des normes un peu similaires pour que le consommateur puisse s'y retrouver, pour retrouver une information qui est à la fois valide et crédible et que ce soit plus simple pour le consommateur. Puis on a parlé aussi du fabricant. Ça devient extrêmement complexe. Pour être certain que l'information soit juste et adéquate, c'est plus facile de se référer à une seule norme.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Je vous remercie beaucoup, Mme Filion. Vous êtes à point. Alors, je cède la parole à Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci. Bonjour. Merci pour votre présentation. La partie que je vais toucher, moi, concerne l'inspection. On lit, à la page 5 de votre mémoire: «Le CTAC croit, en règle générale, que les systèmes canadiens et québécois d'inspection des aliments sont efficaces», et vous nous avez rajouté verbalement, ce n'est pas écrit au mémoire: «même si des lacunes sont présentes». Par ailleurs, vous nous parlez qu'une meilleure harmonisation est souhaitable. D'un coup, j'aimerais que vous m'entreteniez, me donniez quelques exemples de lacunes et me donniez aussi des exemples de manque d'harmonisation.

En deuxième partie, parce que ça touche toujours l'inspection, je lis... j'ai fait lecture au troisième paragraphe, où vous nous parlez des importateurs, où, eux, le système actuel d'inspection parle de bonne conduite, privilégie les importateurs et manufacturiers qui ont des contrôles efficaces et qu'on... Ceux qui sont soucieux des bonnes pratiques finalement sont moins visités que ceux qui sont un petit peu délinquants. Est-ce que, nous, on a les mêmes normes? Ça fait comme trois questions.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. Gattuso.

M. Gattuso (Jean): M. Beaudoin va répondre.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ah, très bien. Vous êtes le bienvenu.

M. Beaudoin (André): Concernant votre première question, concernant les impacts et les lacunes, c'est qu'on s'aperçoit, lors, par exemple, du contrôle des importations... C'est un système qui était en place, c'est-à-dire que l'Agence canadienne d'inspection des aliments a déjà mis en place des programmes d'inspection, et de vérification, et d'échantillonnage des produits qu'on importe. Nous, on pense que c'est un bon pas dans la... c'est-à-dire, c'est un bon pas dans la bonne direction, par contre ce n'est pas assez, c'est-à-dire que ce n'est pas encore assez poussé. Et on croit, parce qu'on le voit tant au niveau de l'étiquetage des aliments que de la qualité des produits, que des normes d'emballages, que ces produits importés là ne sont pas soumis aux mêmes règles que les produits domestiques fabriqués par les transformateurs canadiens et québécois. Alors, ça, c'est le premier point.

En termes d'harmonisation, on s'est rendu compte, souvent, c'est qu'à vouloir développer des mécanismes ou des normes très, très sévères sur le marché québécois, on en arrive à se soustraire... ou à exiger des transformateurs québécois et canadiens des normes beaucoup plus sévères que qu'est-ce qui existe à l'extérieur. Un exemple, c'est qu'on a, nous, au niveau des fabricants de mise en conserve, une réglementation très, très pointue sur les défauts de conserve, si bien que tous les produits mis en conserve sur le marché canadien doivent rencontrer ces exigences de mise en conserve là sur les défauts de conserve qui pourraient causer, par exemple, des problèmes à la santé des consommateurs.

Les produits importés ne sont pas soumis à cette réglementation-là. Tout ce qu'on fait, c'est de faire de l'inspection visuelle pour apprécier visuellement si les produits en conserve bombent ou non, par exemple, et, si ça ne bombe pas, c'est correct. Alors que, nous, les transformateurs, on est soumis, par des vérifications, par des audits, par des inspections de l'Agence canadienne ? et dans le cadre du MAPAQ, c'est la même chose ? à des programmes beaucoup plus sévères d'inspection et de vérification non pas seulement que des produits en conserve, mais de tous les équipements de stérilisation, pour s'assurer qu'on rencontre tout le cadre de la réglementation canadienne.

Au niveau des importations, concernant est-ce qu'il y a des importateurs qui s'en soucient ou non, on s'est aperçu aussi qu'une bonne partie des importateurs connaissent bien la réglementation canadienne. Ils sont bien au fait des exigences de qualité, de sécurité, d'emballage, d'étiquetage, etc. Par contre, on appelle ça souvent des importateurs «by the fly», c'est-à-dire qui s'improvisent importateurs de produits alimentaires demain matin et qui tentent de mettre en marché des produits alimentaires qui ne rencontrent pas les exigences canadiennes. Et ça, c'est dangereux. C'est dangereux pour la crédibilité des entreprises et c'est dangereux également pour la santé et la sécurité des consommateurs, parce que, actuellement, on n'a pas toutes les ressources pour faire appliquer la réglementation telle qu'elle est.

Alors, en guise de conclusion là-dessus... puis je terminerais en disant qu'on n'a pas besoin de règles supplémentaires, on n'a pas besoin de duplication de la réglementation actuelle. Tout ce qu'on a besoin, c'est une harmonisation de la réglementation actuelle mais de bien s'assurer que qu'est-ce qui est présent, en termes de cadres réglementaires, est appliqué de façon équitable et partout à travers tous les maillons de la chaîne, et pour les importateurs et pour les produits domestiques.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Messieurs, dames, merci d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer cet après-midi. Ma question s'adresserait particulièrement à Mme Filion, concernant l'étiquetage des produits.

J'ai eu l'occasion, avec les groupes qui vous ont précédés cet après-midi, de poser une question qui était, je pense, importante pour des gens provenant de régions comme la mienne, particulièrement où on veut tenter d'aller de l'avant dans des nouveaux marchés, dans des nouveaux procédés de transformation de nos produits agricoles, bien sûr, sur notre territoire. Et on a des exemples de personnes et d'entreprises qui réussissent. Je n'ai qu'à penser, chez moi, par exemple, à Saint-Prime, la Fromagerie Perron, qui est reconnue, je vous dirais, internationalement de par les cheddars qu'ils produisent, et surtout Le Doyen, qui est d'une qualité exceptionnelle. Et bien sûr qu'on tente de trouver des nouveaux débouchés. On a essayé avec des plus grosses entreprises ou des plus gros projets, au cours des dernières années, de faire davantage de transformation, mais ce n'est pas toujours évident.

Et là ma question viendrait sur le fait de l'étiquetage. Parce que là vous voulez... ce que vous mentionnez dans votre mémoire, qu'il devrait y avoir une harmonisation d'étiquetage des produits transformés. Vous êtes des gros transformateurs de produits, mais, lorsqu'on veut arriver puis donner une chance ou tenter d'aller chercher des nouveaux procédés ou des nouveaux marchés avec des plus petits transformateurs, entre autres les produits du terroir ? où j'ai donné l'exemple cet après-midi, dans des épiceries, lorsqu'on tente de maximiser les retombées ou les marges de profit pour chacun des commerçants, et on sait que des produits transformés ou des produits cuisinés maison génèrent généralement des marges de profit intéressantes ? est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'avoir, je dirais... D'après vous, est-ce qu'on ne pourrait pas avoir un système d'étiquetage différent pour les plus gros et pour les plus petits?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Une courte réponse, s'il vous plaît, parce qu'on a besoin d'une autre intervention. La question était adressée à Mme Filion, je crois, non?

M. Blackburn: Bien, par rapport à l'étiquetage, oui. Mais si quelqu'un d'autre veut répondre...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Gattuso.

M. Gattuso (Jean): Oui, je vais répondre là-dessus puis, peut-être, Mme Filion, vous... On ne pourrait pas commencer à avoir deux niveaux, parce que si... Pourquoi en fait on pousse sur une harmonisation? C'est que, si on veut faire, qu'ils soient gros ou petits, plus d'affaires, écoute, c'est parce que le marché québécois, le marché canadien est petit. Il faut être capable de se développer non seulement aussi chez nous puis avoir aussi des gens qui nous supportent chez nous, mais aussi il faut être capable de faire des affaires à l'extérieur. Donc, si on peut s'entendre avec d'autres, au moins... Aussi, on sait que ceux qui essaient, après, de vendre dans notre pays ou vendre sur notre territoire, au moins, ils arrivent à... ils travaillent avec les mêmes normes que nous quand on essaie de vendre chez eux. Disons que c'est ce qu'on appelle, exemple... Le niveau de bataille, là, il est pareil pour tout le monde.

Puis pour revenir pour ce qui est des... on ne pourrait pas avoir deux... commencer à avoir deux normes, parce qu'à ce moment-là, si on essaie de faire ça, l'autre partie aussi, de l'autre côté, qui va être le client, dans son pays, va dire: Bien, écoute, moi aussi, ça me prend deux niveaux. Puis je pense ça ne finira plus. Je pense que plutôt c'est qu'on ait un niveau d'étiquetage puis égal pour tout le monde, et puis à ce moment-là, je veux dire, on fait des affaires puis au moins, exemple, à ce moment-là, on se bat avec les mêmes outils. Parce que je pense que c'est ça, le voeu des industriels.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci. Donc, ça me fait plaisir d'accueillir des citoyens corporatifs du comté d'Iberville, que je pense à Lassonde ou encore les gens d'Aliments Carrière, des voisins qui nous séparent par une rivière, le Conseil de la transformation. Puis Saputo, bien, on espère de vous avoir dans le comté d'Iberville bientôt. Donc...

Une voix: ...

Une voix: On s'excuse de te déranger.

M. Rioux: Oui, oui. Mais je vais revenir sur le sujet que tout le monde, ici, a parlé avec vous beaucoup, c'est l'harmonisation. Parce que ce qu'on a entendu dans les mémoires, jusqu'ici, c'est que les gens nous disaient: Écoutez, on a un avantage au niveau de nos normes, que ce soit au niveau de l'étiquetage, que ce soit au niveau de la traçabilité, etc., et on s'en va vers des normes pour les OGM, et ainsi de suite. Alors, en fait, ce que les gens nous disent: Il faudrait que le consommateur puisse faire le choix. On n'est pas... Les gens sont inquiets de savoir le potentiel des OGM, et c'est le temps qui va nous le dire est-ce que c'est un plus ou c'est un moins.

n(17 h 10)n

Ce qui est peut-être surprenant de vous entendre nous dire: On veut avoir une normalisation. Surprenant dans un sens, oui et non, parce qu'en normalisant, c'est que vos coûts diminuent. Puis vous nous parlez de la globalisation. Mais l'approche de penser que le Québec, au niveau international, serait reconnu comme ayant des normes qui dépassent la compétition et la concurrence, ça ne peut pas devenir un plus pour se tailler une niche, des créneaux finalement, par rapport à la compétition nord-américaine, puisque la compétition est féroce? Ça ne pourrait pas devenir à ce moment-là un tout pour nous autres, à ce moment-là?

Et, de l'autre côté, puis là je vais aller contre la norme... la mondialisation, est-ce que... Vous nous disiez tout à l'heure qu'il y a beaucoup de produits qui rentrent ici et qui ne respectent pas nos normes. Est-ce que, en ayant des normes plus sévères, en étant connues puis en pourrait pas donner un avantage à l'industrie de la demandant aux autres de les respecter, est-ce que ça ne transformation?

M. Beaudoin (André): ...peut-être commencer. M. Beaudoin.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Beaudoin, oui, s'il vous plaît.

M. Beaudoin (André): Je suis heureux de votre question. C'est une excellente question. On est déjà soumis, comme vous le savez, à un cadre réglementaire qui est très sévère, avec les normes probablement les plus sévères au monde. Donc, on fait déjà plus en termes d'encadrement réglementaire que l'ensemble des autres pays, c'est-à-dire toutes proportions gardées, donc ce qui nous a permis d'atteindre des niveaux de qualité, et de réputation, et de crédibilité sur les marchés d'exportation de façon exceptionnelle. C'est pour ça que les produits québécois et les produits canadiens jouissent sur la scène internationale d'une réputation qui est exceptionnelle, c'est parce qu'on s'est mis en place des programmes, des normes beaucoup plus sévères que qu'est-ce qui existe ailleurs.

Nous, on ne veut pas faire un nivellement des normes ou des exigences par le bas. On veut s'assurer que tout le monde va être capable de monter et de respecter les exigences qui sont déjà en vigueur, sans en rajouter de façon davantage.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Merci, M. Gattuso et toutes les personnes qui vous ont accompagné, représentant le Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation. Votre contribution nous a éclairés, merci beaucoup.

Et j'invite le prochain groupe, les représentants de la Commission de l'éthique de la science et de la technologie, à se présenter, s'il vous plaît.

À l'ordre, s'il vous plaît! Alors donc, j'invite les représentants de la Commission de l'éthique de la science et de la technologie à prendre place, s'il vous plaît.

Bonjour, Mme Édith Deleury, présidente du comité de travail sur les OGM et membre du Conseil de l'éthique de la science et de la technologie. Si vous voulez bien nous présenter les membres qui vous accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter le mémoire et 20 minutes d'échange avec chacun des groupes parlementaires, incluant les questions et les réponses. Vous avez la parole.

Commission de l'éthique de la science
et de la technologie (CEST)

Mme Deleury (Édith): Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi de...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est automatique, ça va s'allumer dès que vous parlez.

Mme Deleury (Édith): Merci, j'ai constaté. Alors, permettez-moi de vous présenter tout d'abord les deux personnes qui m'accompagnent: à ma droite, Mme Diane Duquet, qui est la coordonnatrice de la Commission d'éthique de la science et de la technologie, et, à ma gauche, M. François Pothier, qui est également membre de la Commission de la science et de la technologie et qui répondra aux questions d'ordre plus scientifique que vous pourriez avoir à nous poser dans le cadre de la période de questions.

Si vous le permettez, Mme la Présidente, dans un premier temps, je demanderais à Mme Duquet de vous présenter brièvement la commission. Je vous présenterai ensuite le mémoire, en fait, que nous vous avons soumis. Et nous passerons ensuite à la période des questions.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien.

Mme Deleury (Édith): Alors, Mme Duquet, si vous voulez bien.

Mme Duquet (Diane): Merci. Diane Duquet, coordonnatrice de la Commission de l'éthique de la science et de la technologie. Mme la Présidente, mesdames, messieurs, ça me fait un grand plaisir de vous présenter la Commission de l'éthique de la science et de la technologie. C'est un organisme consultatif qui a été créé en septembre 2001, donc relativement jeune encore, et qui a été créé dans la foulée de la Politique de la science et de l'innovation, Savoir changer le monde.

La commission est rattachée au Conseil de la science et de la technologie sur le plan administratif, mais jouit d'une totale indépendance morale dans ses travaux et dans la teneur des recommandations qui en découlent.

La Commission de l'éthique est un lieu de réflexion et de discussion sur les grandes questions éthiques qui sont suscitées par le progrès de la science et de la technologie. La commission agit comme un organe de sensibilisation en matière d'éthique auprès du grand public, du gouvernement et des milieux spécialisés. Elle se compose de 13 membres, dont le président qui est nommé par le gouvernement et qui est membre d'office du Conseil de la science et de la technologie. Les 12 autres membres sont répartis de la façon suivante: quatre représentants des domaines de la science et de la technologie en provenance des milieux universitaire ou de l'industrie; quatre spécialistes de l'éthique qui viennent des milieux de pratique, soit dans le cadre des hôpitaux ou des universités, dans les comités d'éthique de la recherche, par exemple; quatre personnes qui viennent des milieux de la pratique ou, comme on dit souvent, de la société civile, et qui peuvent être, par exemple, des membres de groupements de consommateurs, des gens des médias ou du milieu étudiant. À titre d'exemple, nous avons jusqu'à présent toujours un membre étudiant de maîtrise ou de doctorat en matière d'éthique.

À ces 13 membres de la commission s'ajoutent également deux membres invités qui viennent de la fonction publique, dans des organismes où l'on pense qu'il peut y avoir des préoccupations du même ordre que celles de la commission en matière de science et de technologie. Alors, voilà, ça m'a fait plaisir de vous présenter la Commission d'éthique.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, madame.

Mme Deleury (Édith): Permettez-moi tout d'abord, Mme la Présidente et aux membres de la commission également, de vous remercier pour nous avoir invités à vous faire part de nos commentaires et de nos recommandations, et aussi de féliciter le gouvernement de cette initiative qui vise à déterminer des enjeux et soulever des questions en rapport avec le système québécois et canadien de sécurité alimentaire. Pour la CEST, il s'agit là d'un exercice de consultation qui, sans rejoindre nécessairement l'ensemble de la population, permet à tout le moins l'amorce d'un débat de société qui nous apparaît essentiel en matière d'alimentation auprès de la société québécoise.

De par sa raison d'être, on vient de le rappeler ? un organisme qui a pour mission de réfléchir aux enjeux éthiques que posent les progrès de la science et de la technologie afin de conseiller l'État dans ses orientations et sa prise de décision ? la CEST ne se présente pas devant vous en tant qu'expert sur le strict plan de la sécurité alimentaire. Elle le fait dans la foulée d'un avis qu'elle a remis au gouvernement au mois de décembre 2003, Pour une gestion éthique des OGM. Et la CEST entend donc répondre aux questions soumises dans le document de consultation en fonction des éléments sur lesquels a porté sa propre réflexion et dans le sens où elle a mené elle-même son évaluation, c'est-à-dire sur le plan éthique et conformément à une approche de précaution.

C'est donc dire que les propos de la CEST qui concernent le système d'inspection, la traçabilité ou l'étiquetage sont le reflet d'une réflexion intimement liée aux valeurs qu'elle estime fondamentales dans la prise de décision relative aux OGM en tant que produits destinés à l'alimentation humaine ou animale, c'est-à-dire la santé, l'environnement, la confiance de la population envers les instances décisionnelles et l'économie, qui est une valeur que nous n'avons pas non plus négligée.

Il nous apparaît toutefois important d'attirer l'attention des membres de la commission parlementaire sur deux aspects qui ne sont pas couverts dans le document de consultation et qui ne peuvent être occultés dans le développement d'une vision holistique du sujet: les impacts sociaux qu'entraîne la culture d'organismes génétiquement modifiés, que ce soit dans le monde agricole ou dans la société dans son ensemble. Je comprends, pour vous avoir entendu, Mme la Présidente, le rappeler à certains intervenants, qu'il existe d'autres commissions qui se penchent sur ces aspects. Mais, pour nous, il est important de saisir toute la question des OGM dans un tout, et nous aimerions vous le rappeler.

Avant donc d'aborder chacun des points sur lesquels le document de consultation nous a invités à nous prononcer, vous me permettrez de vous rappeler brièvement, en fait, les principales recommandations de notre avis, un avis qui s'appuie sur trois constats au départ: celui de l'incertitude scientifique quant à l'innocuité des produits OGM au plan alimentaire, bon, et à ses impacts sur l'environnement; celui de la méfiance du public vis-à-vis les organismes d'évaluation et d'approbation, et donc de son inquiétude; et celui aussi du peu d'importance qui est généralement attachée au processus en tant que tel, c'est-à-dire la méthode qui conduit au produit. Très brièvement, je reviendrai sur ces trois points.

n(17 h 20)n

La question de l'incertitude. Le bilan que la CEST a dressé quant aux risques fait clairement ressortir les lacunes dans les connaissances scientifiques actuelles relativement aux effets pléiotropiques et inattendus des OGM de même que leurs effets à long terme sur la santé et l'environnement. La quête d'information de la CEST sur les modalités d'évaluation des risques aux fins d'approbation des produits génétiquement modifiés montre, elle aussi, que les évaluations telles qu'elles se pratiquent actuellement n'offrent pas toutes les garanties nécessaires ou souhaitées quant à l'innocuité des produits génétiquement modifiés.

Dans l'état actuel des choses, l'incertitude scientifique quant aux incidences des OGM sur la santé et l'environnement peut être attribuable: à l'absence ou à l'insuffisance de recherche sur certains aspects; à la rareté, sinon à l'absence de publications sur le sujet, pour des raisons qui peuvent tenir, par exemple, au secret industriel; à l'absence ou à l'insuffisance d'outils adaptés aux recherches requises ou à des évaluations scientifiques plus précises. Par ailleurs, la question de la seule évaluation scientifique des OGM, qui se fait sans préoccupation systématique à l'égard des valeurs en cause, pose un problème en soi au plan de l'éthique. Tous n'accordent pas la même importance ou le même statut à la question de l'incertitude ou à la présence d'un risque. Si certains s'en préoccupent peu, d'autres s'en inquiètent et s'estiment traités comme des cobayes en ce qui a trait à la consommation d'OGM, puisque c'est à l'usage, semble-t-il, qu'il sera possible de déterminer si les OGM sont nocifs ou ne le sont pas.

Deuxième élément: la méfiance et l'inquiétude de la population. La CEST a pu constater qu'il existe une inquiétude importante dans la population quant à la sécurité des processus mis en place pour assurer la protection en matière de santé de façon prioritaire mais aussi pour assurer la protection de la qualité de l'environnement. Divers rapports ou avis remettent en cause les mécanismes actuels et soulèvent des questions relatives au peu d'indépendance qui existe entre la fonction réglementation et la fonction promotion des biotechnologies agricoles, au gouvernement canadien, plus particulièrement en ce qui concerne l'Agence canadienne d'inspection des aliments, qui relève du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire du Canada, comme Santé Canada. Il y a là des enjeux de transparence et de légitimité des décisions qui sont prises, auxquels la population n'est pas indifférente.

Troisième élément: le peu d'importance accordée au processus. La plupart des documents que nous avons consultés font peu de distinction en général entre le produit génétiquement modifié et le processus qui mène à sa fabrication ou dans lequel il s'inscrit. Pourtant, comme en témoignent les différentes d'approche entre l'Amérique du Nord et l'Europe, la conception des OGM sur laquelle se fondent les organismes publics d'évaluation est déterminante dans la perspective d'une réglementation. Cette distinction nous est apparue importante au plan de l'éthique. Pourquoi? Parce que, au regard du processus associé à la production d'OGM, c'est sur la valeur du vivre-ensemble que nous avons jugé important de mettre l'accent dans l'évaluation éthique du processus induit par la transgénèse. Cette valeur est considérée dans le contexte d'une société pluraliste et démocratique qui encourage le respect de l'autonomie de tous les citoyens eu égard à leur culture, à leurs convictions, à leur croyance, à leur mode de vie.

À travers les valeurs du vivre-ensemble et de l'autonomie qu'elles supposent se dessinent en filigrane d'autres valeurs tout aussi importantes, comme la justice, l'équité et le respect du vivant. Plus qu'un compromis entre les intérêts de chacun, le vivre-ensemble est l'inscription de chacun dans un rapport de soi à l'autre et suppose une reconnaissance de l'autonomie de l'autre, ce qui, sur le plan éthique, est un enjeu fondamental. Par le truchement de cette autonomie est reconnue la capacité de faire des choix personnels et collectifs. Or, de la reconnaissance d'une telle compétence découle, au plan éthique, l'exigence d'une information claire, précise, véridique, nécessaire à l'élaboration d'un consentement libre et éclairé.

Je reviendrai maintenant sur les trois éléments en fait sur lesquels porte votre consultation: tout d'abord, les questions relatives au système d'inspection des aliments, la traçabilité ensuite, et l'étiquetage.

La réflexion de la CEST sur le système d'inspection et d'évaluation sanitaire des produits ou ingrédients alimentaires issus du génie génétique s'est appuyée sur deux valeurs fondamentales: la sécurité sanitaire et la confiance de la population envers les instances responsables de l'approbation, du contrôle et de la surveillance des OGM. La CEST n'est cependant pas en mesure d'apporter des réponses à chacune des questions énumérées dans le document de consultation en ce qui a trait au système d'inspection. Il lui apparaît cependant nécessaire de rappeler ici l'essentiel de ses commentaires et de ses recommandations en la matière afin que la commission puisse s'en inspirer et considérer attentivement les recommandations de la CEST dans ses propres recommandations à l'Assemblée nationale.

Au coeur de ces recommandations, bien sûr, une préoccupation première: la santé des consommateurs et de la population. À cet égard, la première recommandation de la Commission d'éthique de la science et de la technologie était à l'effet que le gouvernement du Québec fasse les démarches nécessaires auprès du gouvernement du Canada pour que les exigences réglementaires concernant le processus d'approbation, de contrôle et de surveillance à long terme des OGM soient supérieures à celles qui existent déjà pour les produits nouveaux. La population doit être convaincue qu'il n'existe aucune interférence entre les rôles de promotion et de contrôle des biotechnologies que peut assumer un même ministère au sein du gouvernement, qu'il soit fédéral ou provincial. Elle doit aussi être assurée que la protection de la santé n'est pas tributaire des retombées économiques escomptées du développement des biotechnologies. Les mécanismes mis en place doivent donc permettre à chacun d'avoir confiance que la société n'est pas considérée comme un laboratoire qui permettra, à l'usage, de déterminer si, oui ou non, les OGM sont nocifs pour la santé ou l'environnement.

Compte tenu des particularités des organismes génétiquement modifiés et de l'incertitude prédominante, la CEST considère que cela commande d'agir comme si les OGM pouvaient éventuellement engendrer des dangers graves, en adoptant une approche de précaution. Le recours à une approche de précaution en matière d'évaluation des produits transgéniques signifie que la détermination des mesures réglementaires ne doit pas se fonder uniquement sur le degré de certitude ou sur la capacité actuelle de mesurer un risque. Dans le cas des OGM, il existe aussi des risques appréhendés ou la crainte d'incidences potentielles, qui ne se mesurent pas nécessairement avec les outils dont la science dispose actuellement et qui pourraient apparaître à long terme ou résulter de l'interaction de divers produits transgéniques.

De là la recommandation que nous avons formulée en ce qui concerne l'intervention du gouvernement du Québec auprès du gouvernement du Canada à l'effet que l'approbation des organismes génétiquement modifiés soit assujettie à une évaluation scientifique qui tienne compte des incidences potentielles et ne soit pas limitée à une évaluation des risques prévisibles. De là également la recommandation à l'effet que les organismes réglementaires concernés appliquent aux risques potentiels ou appréhendés les règlements déjà prévus pour les risques réels ou avérés, quand bien même les tests disponibles ne permettent pas de cerner de tels risques avec un degré de certitude élevé ou de les mesurer de façon précise.

n(17 h 30)n

La transparence, maintenant. Ce processus, bien sûr, doit se faire de façon transparente. La transparence est une valeur démocratique essentielle à la gouvernance publique. Elle témoigne d'une approche non paternaliste qui invite à une responsabilisation des divers acteurs sociaux. En matière décisionnelle, comme de nombreuses critiques l'ont montré, il faut distinguer entre la question de la validité des faits qui permettent de reconnaître la présence d'un risque et celle des critères qui permettent d'évaluer le risque comme étant acceptable pour une population donnée. Ces deux aspects de la décision en matière d'OGM exigent des expertises appropriées et différentes dans toutes procédures décisionnelles. La CEST tient à souligner que ces exigences doivent être établies sur la base de considérations autant scientifiques que culturelles et que l'interdisciplinarité en ce domaine lui apparaît essentielle à une décision politique éclairée en ce qui a trait au processus d'évaluation des risques.

Par ailleurs, de l'avis de la CEST, le fardeau de la preuve doit être une responsabilité de l'industrie. En effet, étant donné que les entreprises de biotechnologie sont les premières à bénéficier des retombées économiques de la transgénèse, ce n'est pas à l'État d'assumer, à l'aide des deniers publics, la responsabilité de la preuve, mais bien plutôt à ces entreprises. La CEST croit que le principe de bonne gouvernance s'impose et que, pour l'appliquer, l'État doit avoir en main toute l'information lui permettant de vérifier la conformité des résultats soumis par l'industrie avec les exigences réglementaires qui ont été établies, y compris les résultats insatisfaisants qui auraient été obtenus lors de tests antérieurs. L'État doit pouvoir s'appuyer sur un bassin de chercheurs indépendants à des fins de contrôle, qui assureraient les vérifications spécifiques nécessaires. De là la recommandation n° 5 que nous avons formulée dans notre avis.

Enfin, la CEST recommande que le gouvernement du Québec intervienne auprès du gouvernement du Canada pour que soit mis en place un mécanisme de révision continue des processus et des modalités d'approbation des OGM en consultation ouverte avec la communauté d'experts et que ces divers organismes subventionnaires québécois et canadiens ainsi que d'autres instances offrent du financement de manière à parfaire les connaissances sur les impacts tant en fait sanitaires qu'environnementaux et culturels des OGM.

La question de la traçabilité. Dans le document de consultation, on fait clairement ressortir le point sur la question de la traçabilité des produits alimentaires à l'étranger, au Canada et au Québec. Dans son avis, la CEST s'est, elle aussi, efforcée de bien saisir la situation sans toutefois aborder le sujet sous le même angle que la Commission de l'agriculture, des pêches et de l'alimentation. Rapidement, nous voudrions faire état de notre réflexion et rappeler la teneur de la recommandation que nous avons formulée à cet effet à l'attention du gouvernement.

Les risques à long terme des OGM sont difficiles à évaluer en raison du caractère nouveau de la transgénèse et de la difficulté à appréhender des essais qui pourraient éventuellement se produire mais qui sont presque aussi impossibles à prévoir. Aussi, dans le contexte d'une évaluation qui s'appuie sur le principe d'équivalence substantielle, il apparaît important que celle-ci ne soit pas présumée mais démontrée, sinon l'apparition imprévue de nouvelles toxines ne pourrait pas être détectée.

C'est pourquoi, de l'avis de la CEST, il faut pouvoir exercer un suivi des produits de la transgénèse, en particulier par des contrôles périodiques, des effets à court, moyen et long terme. Il s'agit d'assurer une traçabilité sous une forme à la fois ascendante et descendante, une forme qui permet donc de remonter aux sources d'un produit génétiquement modifié advenant un problème sanitaire ou environnemental, et que pour... puissent être évalués périodiquement les effets à court, moyen et long terme des OGM sur l'environnement et sur la santé animale ou humaine.

La question de l'étiquetage...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Me Deleury, je vous prie de me pardonner...

Mme Deleury (Édith): Mon temps est terminé.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, effectivement, votre temps est terminé, mais vous allez revenir sur les autres éléments lors de la période de l'échange. Votre mémoire est tellement intéressant. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, Mme la Présidente. Mesdames, monsieur, bienvenue. Merci de votre présentation. Vous êtes, je pense, le 18e ou le 19e groupe à intervenir devant nous, mais je me dis depuis le début: peut-être que vous auriez dû peut-être être les premiers. Parce que, depuis le début, on entend du positif, du négatif. On nous dit: Il faudrait qu'il y ait de l'étiquetage, exemple pour les OGM. D'autres nous disent: Il n'y a pas d'obligation parce qu'on n'a aucune preuve actuellement qu'il y a des dangers. J'avais hâte de vous entendre.

Mme Deleury (Édith): Sur la question de l'étiquetage. Je vous remercie.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Et des OGM. J'avais hâte peut-être un peu de me faire rassurer aussi. Hier, nous avons eu devant nous les gens de Greenpeace. On nous a remis un petit dépliant, et j'ai été un peu surpris parce qu'on nous dit, dans ce petit dépliant là, que ce qui est en vert ne contient pas d'OGM et, en rouge, il en contiendrait. Je ne sais pas si on voit à la caméra, là, mais peut-être que vous voyez...

Une voix: C'est tout petit.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ça prend des lunettes.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): C'est tout petit. Mais, autrement dit, il y a trois fois plus de rouge que de vert ? puis on n'est pas en politique, là, mais j'ai été surpris. Et, en même temps, je m'interroge puis j'ai demandé à monsieur: Est-ce que j'ai raison de craindre? J'ai envie de me faire rassurer.

Mme Deleury (Édith): Alors, sur la question peut-être de la sécurité ou de l'innocuité, je passerais la parole à mon collègue François Pothier. Sur la question de l'étiquetage, vous me permettrez de revenir.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pothier.

M. Pothier (François): Merci. Bien, écoutez, c'est évident, là, que je n'ai pas réponse à tout, O.K.? Je suis, oui, scientifique qui travaille en transgénèse animale depuis plus de 15 ans. Je côtoie des confrères qui travaillent du côté végétal, qui produisent des plantes modifiées génétiquement, et même je me suis assis régulièrement avec Éric Darier de Greenpeace, devant grand public, pour discuter de la question. Il faut tout d'abord nuancer, O.K.? Donc, je suis un scientifique parmi des philosophes, parmi des éthiciens, parmi... Pourquoi est-ce qu'un scientifique va s'asseoir avec ces gens-là? C'est pour essayer de comprendre qu'est-ce qui dérange, O.K., qu'est-ce qui fait que finalement les OGM vont aller chercher autant... retenir autant l'attention. Et c'est dans ce sens-là que la démarche a été faite.

Pour répondre à votre question plus directement, écoutez ? et, encore une fois, il faut nuancer ? présentement, il y a quatre grandes cultures, on a dû vous le dire, qui sont OGM: maïs, canola, soya et du coton. La plupart des OGM sont destinés à l'alimentation du bétail. Depuis 1995, on nourrit des porcs et des vaches avec des plantes qui sont modifiées génétiquement. On ne retrouve pas de trace d'OGM dans le lait de ces vaches-là ni dans la viande du porc qui consomme ces plantes modifiées génétiquement. Quand on parle de tous ces aliments qui contiennent des traces d'OGM, on veut dire que la plupart de ces aliments sont dérivés de l'huile de canola, avec lequel on a pris un peu d'huile et on a fait des biscuits, puis ainsi de suite. Donc, c'est des traces de traces. O.K. Donc, c'est dans ce sens-là que vous consommez des OGM.

Maintenant, si cela peut vous rassurer, et là c'est personnellement que j'en parle et non pas au nom de la commission, mais je souhaiterais l'étiquetage, parce que, moi, je choisirais dans bien des cas l'aliment qui est OGM plutôt que l'aliment qui n'est pas OGM, parce que cet aliment OGM risque de contenir pas de pesticide et pas de trace de produits qui sont connus toxiques, O.K.? Ceci étant dit, oui, il y a encore... Et on nuance. Là où on aura besoin de plus d'information, c'est pour toutes les générations de modifications génétiques qui s'en viennent. Et là on peut soupçonner des modifications qui seront beaucoup plus complexes que celles qu'on a vues jusqu'à maintenant.

On vous a parlé du maïs Bt, par exemple. Le maïs Bt, c'est un maïs qui porte un gène qui vient d'une bactérie. La bactérie normalement est saupoudrée dans les cultures biologiques. On s'en sert pour combattre les insectes. C'est la même bactérie, de laquelle on a retiré un gène, on l'a introduit dans le maïs. Donc, c'est un gène dans le maïs. On connaît les effets du Bt et on sait que, sur la santé, il n'y a pas d'effet, surtout pas chez les humains. Maintenant, il y a toute une gamme de produits qui vont nous arriver, et c'est dans ce contexte-là et en prévision de toutes ces modifications-là qui nous arriveront, possiblement de la Chine ou d'ailleurs, et qui feront en sorte que, là, il y a des sentiers métaboliques qui seront modifiés.

n(17 h 40)n

Ça veut dire quoi? Bien, présentement, il y a des chercheurs qui ont travaillé sur du riz doré. C'est un riz dans lequel on a introduit tout ce qu'il fallait pour faire produire au riz de la vitamine A, parce que les gens en Asie, dans les pays défavorisés, entre autres, manquent de vitamine A. Ça mène à la cécité chez les enfants. Donc, il y a des chercheurs et même des chercheurs... il y a la France, il y a l'Institut Rockefeller qui a contribué à développer ce riz qui est modifié génétiquement et qui produit de la vitamine A. Mais là, là, ce sont des acrobaties puis des tours de passe-passe qui sont extrêmement complexes. Ce n'est plus un gène, mais toute une batterie de gènes. Qu'est-ce que ça induit dans cette plante, cette batterie de gènes qu'on introduit? Oui, là, il va falloir qu'on développe les outils pour aller vérifier correctement si on a des effets au niveau de cet OGM là. C'est pour ça qu'il faut faire encore une fois bien attention. C'est du cas par cas.

Quand on parle de patates modifiées génétiquement ? parce qu'il y en a déjà eu, on les a retirées du marché, McDo n'en voulait pas, McCain a dit: On n'en fera plus ? donc, quand on parle de patates, bien c'est la plante qui est à l'extérieur qui est attaquée par l'insecte, et c'est la patate qu'on mange. Il y a moyen de faire produire dans la plante elle-même un produit qui va faire que le doryphore va mourir quand il va manger, quand il va venir attaquer la plante. Mais, dans la patate, il n'y a rien de transgénique, il n'y a pas de... Ce produit qui est synthétisé dans le haut de la plante à l'extérieur n'est pas synthétisé dans la patate qu'on va manger. Alors, voyez-vous, c'est du cas par cas.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Oui. Je reprends ce que vous avez dit tantôt. Si, vous, vous nous dites et vous dites aux consommateurs et aux consommatrices, qui nous écoutent, là, si vous aviez... Si on écrivait: «Il y a des OGM» ou «Il n'y en a pas», vous, comme scientifique, vous dites: Moi, je préférerais ceux qui en ont, oui?

M. Pothier (François): Oui.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ce qui veut dire que ce que l'on entend, c'est des dangers potentiels, mais il n'y a aucune preuve. Vous nous dites qu'il n'y a pas de danger.

M. Pothier (François): De ce que j'en connais. Moi, comme père de famille, moi, comme scientifique, de tout ce que j'en ai vu et, encore une fois, pour toute l'expérience que j'ai acquise, dans les OGM qu'on a présentement sur le marché ? et, encore une fois, là, c'est minime ? je regarderais quelle est la modification génétique, quels sont les tests qui ont été donc exécutés sur ces plantes. Et définitivement, dans la plupart des cas, c'est une protéine qu'on introduit. Les protéines, on les digère. En tout cas, pour plein de raisons scientifiques, je préférerais donner à mes enfants des plantes qui sont modifiées génétiquement que des plantes...

Parce que, écoutez, si on veut un fruit qui est parfait, si on veut une pomme qui est belle, si on veut un maïs dans lequel il n'y a pas cet insecte, il faut intervenir, il faut les arroser. Or, quand on les arrose, ce sont des produits chimiques, et là on ne parle plus d'OGM, on parle de produits chimiques; il peut rester des résidus. Il y a un contrôle quand même sur ces résidus, sauf que, dans le cas de l'OGM, moi, j'y vois des avantages.

Maintenant, ce n'est pas parfait, hein, et là je rectifie. On parle de santé, on pourra parler d'environnement, on pourra parler des effets sur la culture, comme on l'a dit, et ça, je suis tout à fait d'accord. J'adhère avec donc des positions qui sont celles que: la transgénèse, ça dérange, ça dérange parce qu'on parle de gènes. Et la personne avant moi, le groupe qui était là avant nous vous a dit: C'est une question d'éthique. Et effectivement ça déborde... C'est un peu comme si les OGM avaient tout à coup fait réaliser aux gens comment est-ce qu'on produit l'agriculture. D'où vient la côtelette de porc qu'on achète chez IGA, par exemple? Alors, les citadins n'étaient pas familiers, et là, tout à coup, il y a un éveil, il y a une prise de conscience qui fait en sorte que, oups! au niveau qualité, c'est: Qui regarde la qualité des aliments qu'on mange? Comment ça se passe? Qui a accès aux rapports sur l'évaluation?

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Mais vous comprenez les interrogations qu'on se fait ici, là. En fait, on nous dit, sans être alarmistes: Faites attention. Puis même qu'il y en a qui sont alarmistes, tu sais, vis-à-vis les OGM: C'est dangereux, on ne sait pas, on ne sait pas ce qui peut arriver dans une génération, dans deux générations. Vous, vous nous dites: Calmez-vous, il y a de la désinformation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Rapidement, M. Pothier, parce que l'enveloppe du temps est terminée.

M. Pothier (François): Alors, je vous dirais que, écoutez, parce que c'est teinté, c'est... Donc, c'est un débat qui est très polarisé. C'est très émotif. Il y a des informations qui sont colportées qui ne sont pas toujours véridiques. Et effectivement, encore une fois, c'est très viscéral, là, O.K.? Et, dans ce sens-là, oui, vous avez des gens qui vont vous dire: C'est dangereux. Et maintenant il faut fouiller, il faut aller voir pourquoi.

Et c'est un peu l'exercice que j'ai fait en m'assoyant avec les gens de la commission. Qu'est-ce qui dérange? Pourquoi ça dérange tant que ça, alors que, pour nous, scientifiques, on faisait des croisements génétiques? Le kiwi, c'est un aliment qui n'existe pas dans la nature, qu'on a dérivé. C'est une noix qu'on ne peut pas manger, on l'a croisée, croisée, croisée, jusqu'à temps qu'on ait ce fruit-là. Et, nous, on trouve que c'est du brassage génétique qui est drôlement plus important que d'aller mettre un gène dans une plante, voyez-vous? Mais un gène qu'on vient introduire dans une plante, ça, dans l'imaginaire des gens, ça dérange ? et, encore une fois, tout à fait conscient que ça vient bousculer. Puis là on dit: Hé! l'agriculture, là, on l'a menée très loin puis on a industrialisé. Puis là, la prochaine étape, vous nous arrivez avec des gènes en plus de ça? C'est ça, l'agriculture de demain. Et c'est bon qu'il y ait une prise de conscience, c'est bon qu'il y ait cet éveil-là, encore une fois.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Pothier. Alors, je voudrais, Mme Deleury et les gens qui vous accompagnent, vous féliciter pour l'avis que vous avez soumis au gouvernement. Et en effet vous apportez une dimension fort importante à ce débat, qui est la dimension éthique, mais aussi c'est une dimension multidisciplinaire, parce que vous avez besoin des philosophes et vous avez besoin de scientifiques pour construire votre pensée, et c'est fort intéressant. Merci d'avoir partagé avec nous vos recherches. Je crois que ça a dû être difficile pour vous aussi de tracer certaines lignes parfois, parce que l'éthique, ce n'est pas une science exacte.

Mais, en même temps, il y a des enjeux qui se profilent à l'horizon et sur lesquels il faut se prononcer. Et, comme on taille dans le neuf, parce que les OGM, ce n'est pas quelque chose qui est connu... Et M. Pothier vient de nous dire que, lui, comme scientifique, dépendamment du cas par cas, il est en confiance avec les OGM. Je sais très bien qu'on rencontre d'autres scientifiques qui vont vous dire tout à fait le contraire: Dans le cas par cas ou dans tous les cas, il faut se méfier des OGM. Donc, nous sommes dans une zone assez grise, pour ne pas dire le moins, et ça contribue au constat que vous avez fait, la méfiance du public, parce qu'on gère l'imprévisible. C'est ça qu'on est en train de faire. Et gérer l'imprévisible, c'est une grosse responsabilité dans l'immédiat et dans le futur. Alors, ce n'est pas une chose tout à fait facile.

On a entendu, par exemple, l'Union paysanne qui sont venus nous parler des pratiques agricoles dangereuses, et l'une de ces pratiques-là qu'ils ont mentionnées, c'est celle du fameux herbicide Roundup qui a été développé pour le blé OGM. Et finalement on nous disait que ça ne posait aucun problème dans la nature ni pour l'alimentation. Mais, d'après l'Union paysanne, ça a un effet dramatique au niveau de la détérioration du sol, que le Roundup, ce n'était pas quelque chose qui était biodégradable, comme on le disait, mais que c'est quelque chose qui allait même dans la nappe phréatique. Alors, vous voyez à quel point les avis sont tellement partagés. Et nous qui sommes des parlementaires qui venons d'horizons tellement différents, on n'a pas nécessairement la science exacte pour pouvoir trancher ces questions-là. Mais le débat est assez difficile à faire, est très complexe aussi, et ça amène les décideurs politiques aussi à se questionner sur ces enjeux-là.

Vous avez... Dans votre mémoire, à la page 13, la recommandation 5 fait porter le fardeau, concernant justement les produits transgéniques, aux entreprises de biotechnologie. Et on a entendu les représentants de l'entreprise privée qui sont venus... et également du secteur de production qui super sollicités et que, s'il faut mettre en place des sont venus nous dire qu'ils sont systèmes de traçabilité, d'étiquetage, etc., l'entreprise ne devrait pas supporter seule ce fardeau-là. Qu'est-ce qui vous a amenés à faire ce constat?

Mme Deleury (Édith): De fait, bon, il faut quand même distinguer les différentes étapes au niveau de la production, je dirais. Bon. Nous, ce qui nous, en fait, préoccupait plus particulièrement, c'est de voir aussi, en fait, bon, l'emprise des grands semenciers à l'heure actuelle, parce qu'il faut quand même en tenir compte, là, en regard des producteurs locaux, qui sont dépendants en fait aussi de ces grands semenciers qui obtiennent des brevets effectivement, bon, suite à la mise au point de certains produits génétiquement transformés, d'organismes vivants génétiquement transformés. C'est en ce sens-là que nous avons appuyé en fait cette recommandation. Je ne sais pas si Mme Duquet veut rajouter quelque chose.

n(17 h 50)n

Mme Duquet (Diane): Ce qu'on peut ajouter pour le moment, c'est qu'on peut constater que les objectifs qui sont poursuivis par la transformation des cultures sont tout à fait louables dans de nombreux cas et pourront éventuellement, à la longue, bénéficier sans doute si on arrive aux objectifs qu'on souhaite atteindre, bénéficier aux producteurs agricoles probablement en diminuant le coût d'opération des cultures, en diminuant la quantité d'herbicides ou de pesticides qui sont utilisés, en diminuant les engrais et, on peut présumer, en diminuant le temps et l'énergie consacrés à produire les légumes, qu'on est heureux de manger. Alors, il y aurait énormément d'avantages prévisibles ou escomptés pour les producteurs agricoles.

Pour le moment, cependant, ces semences-là sont très coûteuses. Les agriculteurs ne peuvent pas réutiliser d'année en année les semences produites parce que soit qu'elles soient stériles, soit que les plantes soient stériles, ou que ce soit interdit par les semenciers qui leur vendent les cultures. Et ce qu'on constate, c'est que, pour le moment du moins, dans l'état actuel des choses, ce sont surtout les grands semenciers qui tirent profit du génie génétique. Alors, on estime que, s'il fallait mettre en place des systèmes qui sont coûteux, bien ce sont eux qui sont les plus à même de fournir les ressources nécessaires pour défrayer les coûts et que ce ne serait pas au gouvernement, avec les deniers publics, d'assumer les coûts de cela.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci. Bonjour et merci pour votre présentation de mémoire. J'entendais tantôt monsieur ? rappelez-moi votre nom ? ...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pothier.

Mme Charlebois: ...M. Pothier, nous parler de la transformation qui a généré un kiwi un jour, mais qui fait partie maintenant de notre alimentation. Ça fait combien d'années que le kiwi...

Une voix: 1970.

M. Pothier (François): Oui, ça fait... C'est en fait assez récent, c'est peut-être deux décennies environ, deux, trois décennies, où le kiwi est vraiment évidemment exporté aussi, là.

Mme Charlebois: Est-ce que vous pouvez me dire depuis combien d'années qu'ils ont introduit les OGM dans notre alimentation, à notre insu peut-être même?

M. Pothier (François): 1995 environ.

Mme Charlebois: Pas avant ça?

M. Pothier (François): Les premières plantes existaient en 1990, mais l'introduction dans les moulées... ont été commercialisées, là, c'est-à-dire dans les moulées pour animaux, autour des années 1995. Depuis 1995, 1994, on nourrit des animaux avec du maïs modifié génétiquement.

Mme Charlebois: O.K. M. Darier nous faisait mention hier que, 17 % de nos aliments, de notre culture seulement, il y avait des transformations à partir des OGM. J'ai trouvé ça peu, même que je vais aller me documenter davantage.

Vous nous parlez d'exigences réglementaires dans le processus d'approbation de contrôle de surveillance à long terme. Est-ce que vous pourriez un petit peu élaborer au niveau... Qu'est-ce que vous entendez par exigences supérieures à ce qui existe déjà?

Mme Deleury (Édith): C'est-à-dire que, comme vous le savez, en fait, actuellement, les aliments qui dérivent... ou qui s'inscrivent dans le processus de la transgénèse sont évalués comme tout autre aliment nouveau mis sur le marché. C'est Santé Canada en fait, bon, qui évalue et approuve en fait la mise en marché de ces aliments, et l'Agence canadienne d'inspection des aliments aussi. Et ils appliquent ce qu'on appelle le principe d'équivalence substantielle. À partir du moment où le produit est équivalant en substance à un produit qui existe déjà, on ne se pose pas ce problème, hein? Bon.

C'est une approche qui est différente de celle qui est utilisée, par exemple, en Europe ? on a les deux visions qui se confrontent ? où là on s'intéresse davantage au processus, hein, bon, qu'au produit lui-même. Bon. Et c'est en fait en regard justement du développement des OGM dits de deuxième et de troisième génération, où là les mécanismes vont être beaucoup plus complexes, où il sera beaucoup plus difficile de mesurer effectivement l'incidence, eu égard à l'utilisation de ce processus, que la Commission d'éthique de la science et de la technologie s'inquiète, en regard de l'utilisation de ce principe-là.

Et je ferais remarquer également aux membres de la commission que des organismes comme la Société royale du Canada ont critiqué assez vertement le mécanisme actuel, en fait, d'évaluation et d'approbation, bon, et particulièrement le principe d'équivalence substantielle tel qu'il est appliqué par les organismes de réglementation canadiens, qui sont d'ailleurs en train de se réajuster par rapport à ces commentaires qui ont été faits et aussi ceux qui ont été faits par le Conseil canadien des biotechnologies.

Mme Charlebois: Juste une petite dernière complémentaire, rapidement. Deux ou trois générations, vous me dites, d'OGM avant qu'on puisse vraiment évaluer l'impact, ça représente combien d'années pour le consommateur qui entend «deux, trois générations», là? En termes d'années, là, combien ça peut représenter? Comme notre kiwi, là, qui est arrivé en 1995, là, il va se transformer en quoi, en combien de temps?

Mme Deleury (Édith): Je laisserai M. Pothier répondre là-dessus.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pothier.

Mme Charlebois: En citrouille?

M. Pothier (François): En fait, on a déjà beaucoup de données sur les effets au niveau des animaux, O.K.? En fait, ces effets-là sont à peu près ou pratiquement négligeables, là. Et il y a des études qui sont bien documentées pour démontrer qu'est-ce qui arrive à l'OGM une fois consommé, par rapport à l'animal donc qui mange ces aliments-là, et il n'y a pas d'effet, O.K.? Pour revenir au kiwi, je vous dirais que, si le kiwi passait les mêmes tests qu'on fait passer aux OGM présentement, le kiwi n'aurait pas été mis sur le marché. Il est bourré d'allergènes, il est bourré de protéines qu'on sait être... causer des allergies. Et ça, ce n'est pas moi qui l'invente, là, c'est bien connu, il y a plein de gens qui sont allergiques au kiwi. Et maintenant on a des outils qui nous permettent de prédire qu'est-ce qui pourrait être allergène par rapport à tout ce qu'on connaît de molécules allergènes dans d'autres aliments. On peut, par ordinateur, dire: Ah! la molécule qu'on a introduite, elle va provoquer une allergie. Comprenez-vous? Donc, il y a des outils quand même qui se... mais ce n'est pas parfait.

Et je ne voudrais pas vous laisser sous l'impression que... Je ne suis pas un tenant à tout prix des OGM. C'est juste encore une fois d'essayer de vous dire: On va nuancer un petit peu, on va essayer de comprendre, et surtout développons les outils nécessaires pour être capables non seulement de tester des OGM... Il y a bien d'autres choses, là. Il y a des colorants, à chaque année, qui sont mis dans les bonbons pour les enfants. Ça va faire quoi dans 20 ans? Personne ne peut vous le dire parce qu'il n'y en a pas, de méthode pour dire ce que ça va faire dans 20 ans. Maintenant, on développe des outils qui vont non seulement nous permettre d'aller voir dans les OGM, mais de faire un retour en arrière et d'aller voir dans ce qu'on mange aussi, là. Vous savez quand on arrose la plante avec un insecticide ou un herbicide, il y a des gènes tout à coup qui s'allument, il y en a des transformations.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, M. Pothier, merci. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. M. Pothier, est-ce que vous... Merci pour votre présentation, à tous les trois et pour tout le groupe qui travaille, c'est vraiment d'une... un très grand apport, en tout cas, une très grande richesse pour nous. M. Pothier, est-ce que vous mangeriez du bio plus que de l'OGM? Vous avez dit tout à l'heure que vous prendriez de l'OGM, mais, si vous aviez un bio à côté, est-ce que...

M. Pothier (François): Ah! mais, écoutez, on est tous pour la vertu. Définitivement, dans la mesure où... et ce n'est pas une question de sécurité alimentaire, mais, dans la mesure où on est capable d'intervenir le moins possible sur ce qu'on va manger, oui, tout à fait. Et je ne vous cacherai pas que, oui, ça m'arrive de manger du bio, et ma femme me fait manger du soya, du tofu, entre autres, là, je vous dis, probablement plus que bien d'autres personnes au Québec. Mais ceci étant dit, ce n'est pas une question de sécurité alimentaire, c'est une question de bien équilibrer et puis... Mais le bio, il y a un prix à payer.

Le bio comporte aussi des effets sur l'environnement, dans le sens qu'on est obligé de cultiver dans des conditions particulières. Mais, encore une fois, si on était capable de se passer d'intervention, si on était prêt, par exemple, à consommer des fruits et des légumes qui sont de moins... qui ont une couleur ou une petite tache ou encore il faut en enlever un petit morceau parce que la pomme a été attaquée, bon, bien, probablement qu'on pourrait réduire de beaucoup les interventions qu'on fait sur donc les plantes que l'on consomme. Mais, encore une fois, on a habitué le consommateur à une qualité et à la fois en termes de présentation et en termes de saveur, etc., et ça, je ne suis pas sûr, moi, qu'on soit prêt à revenir en arrière. Donc, pour avoir quelque chose qui est beau, un fruit, un légume qui est beau, il faut avoir une intervention. Pour faire une intervention, c'est soit des pesticides, des insecticides, du bio ou encore des OGM, qui font partie de ce qu'on a développé au niveau des différentes approches.

n(18 heures)n

Mme Robert: Mais il reste... Tout à l'heure, quand vous avez parlé de la question de... pour la patate, là, le fameux... introduction dans la plante d'une qualité qui faisait mourir... ou répulsif...

Une voix: ...

Mme Robert: ...c'était le doryphore... qui faisait mourir le doryphore. Bon. Il y a une question de déséquilibre qui s'est créé d'ailleurs. En plus d'intoxiquer, avec les pesticides, les fongicides, en tout cas toutes les choses, là, pour arriver à une production de masse toujours de plus en plus grande et une production aussi très uniforme en termes d'apparence, et tout ça, on a créé un déséquilibre très, très grand. On a la fameuse bibite, là, qui est tuée, elle aussi. On sait que ça amène un déséquilibre, parce que ces bibites-là qui disparaissent... En tout cas, on connaît tous les cycles de la nature et tout ce que tu veux. Alors, c'est ça, c'est la notion d'équilibre dans tout ça, dans ces... l'implantation de ces choses-là, cette notion d'équilibre à maintenir, tout comme on veut maintenir un certain équilibre. Il est où?

M. Pothier (François): Encore une fois, on peut être pour la vertu, mais, vous savez, des champs de maïs, ça n'existait pas avant que l'homme sème le maïs et en plante des champs. On voudrait garder un équilibre, mais à partir du moment où vous modifiez cet environnement pour y faire pousser des rangées et des rangées de patates, des rangées... vous venez de créer un microenvironnement qui va faire en sorte que vous allez perturber les insectes qui y vivaient, etc.

Encore une fois, il n'y a pas rien de parfait, sinon qu'il faudrait revenir à chacun notre jardin, à chacun notre petite culture. Or, on sait très bien que ce ne sera pas atteignable, ça. On a dépassé le cap en termes de population mondiale. C'est... L'avis en parlait aussi. Sur des populations donc dans différentes régions du globe, on a dépassé la population, de telle sorte qu'il faut... on a développé des moyens pour se nourrir. Évidemment, là, les OGM, quand on dit que ça va permettre à la planète de manger, ce n'est pas vrai. Il y a une question de distribution, et ce n'est pas miraculeux à ce point-là.

Maintenant, je vous dirais ? et ce n'est pas moi, là, qui l'invente ? qu'on considère que les herbicides et les insecticides peuvent être même des agents importants anticancers. Pourquoi? Parce que présentement il y a deux choses qu'on sait à propos du cancer ? les gens de diététique sont venus vous parler ? il y a deux façons de prévenir le cancer: c'est ne pas fumer et de manger le plus possible de légumes et de fruits. Or, l'utilisation des insecticides et des herbicides nous permet d'avoir en abondance des fruits et des légumes, et ça, à longueur d'année.

Donc, si on fait le calcul et on se dit: Bien, les avantages, les risques... Oui, il y a des risques, c'est sûr qu'on perturbe et on ne vit plus dans un environnement comme celui qu'on connaissait il y a plusieurs siècles. Mais il faut voir. On vit combien d'années maintenant? On a allongé notre durée de vie. Nos adolescents au Québec mesurent 10 cm de plus qu'au début des années 1900. Et tout ça, c'est dû beaucoup à une meilleure nutrition, à l'accès à toutes sortes de fruits qu'on n'avait pas ici, au Québec, entre autres, il y a deux siècles. Donc, tout ça fait en sorte qu'il faut mettre dans la balance, encore une fois, les avantages, les désavantages.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ça va, Mme la députée?

Mme Robert: Oh, on pourrait discuter très, très longtemps, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup. M. le député de Portneuf.

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. Moi, j'ai deux questions; une première qui s'adresse à M. Pothier, à savoir s'il existait, avant qu'on intervienne de façon, je dirais, technique et volontaire, des modifications génétiques de la nature elle-même.

Et, ma deuxième question. Vous proposez... En fait, j'en ai trois. Vous proposez un débat public large sur les relations entre le génétique, l'agriculture et la société. Un débat public large, l'image que ça me donne, c'est qu'on va être un paquet de monde à parler de quelque chose qu'on ne connaît pas, encore une fois, parce qu'il me semble que ça appartient à des scientifiques, ces démarches-là. Puis, nous, tout ce qu'on peut être là-dedans, c'est, je vous dirais, des gens qui seraient attentifs, et on va écouter, mais de là à intervenir dans un débat où finalement la connaissance nous échappe, je me demandais jusqu'où on pourrait aller.

Et ma dernière question. On parle d'approbation d'OGM puis vous suggérez qu'elle soit sujette, là, «à une évaluation scientifique qui tienne compte des incidences potentielles de ces organismes sur la santé humaine ou animale et sur l'environnement et qu'elle ne soit pas limitée à une évaluation des risques prévisibles». Et là, quand je lis ça, est-ce que ça ne vient pas en contradiction avec le principe de précaution, là, dont vous faites état? Alors, il y a trois questions, là. Vous pouvez vous les partager.

Mme Deleury (Édith): Sur le dernier point, au contraire, c'est parce qu'on adopte une approche de précaution. On n'a pas voulu utiliser le mot «principe» pour une simple raison, c'est que le principe de précaution a fait l'objet de beaucoup de littérature et il est employé dans différents sens, bon, et il peut en fait, dans une interprétation restrictive, mener tout simplement à un processus d'abstention, d'accord? bon, ce qui fait qu'on élimine complètement une valeur qui est la valeur économique. Et, nous, on a essayé, dans l'équilibre des valeurs, si vous voulez, par la hiérarchie qu'on a faite, de faire en sorte qu'on porte le moins possible atteinte à certaines valeurs.

Ceci étant dit, quand on parle de l'évaluation des risques non seulement prévisibles, mais potentiels, c'est une approche de précaution, hein! Parce que, actuellement, si vous vous contentez des risques connus, ce n'est plus de la précaution, c'est de la prévention, hein! Bon. Donc, qui dit précaution, hein, dit qu'effectivement on puisse en fait mettre en place des mécanismes d'évaluation et d'approbation, même en l'absence de preuves scientifiques. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas, à la base, des évaluations scientifiques qui, sur le plan théorique, nous disent: Attention, mais on n'a pas la preuve, on n'a pas encore les mécanismes pour le prouver. Et c'est dans ce sens-là, si vous voulez, qu'on demande une évaluation plus rigoureuse. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question?

La question du débat, puis après ça, je reviendrai... je laisserai peut-être François... La question du débat public, je pense qu'il serait peut-être intéressant de faire un exercice, au Québec ? même si on a eu beaucoup de sondages, mais les sondages, ce n'est pas là-dessus qu'on bâtit un débat public, hein, bon ? de faire un peu l'exercice qui a été fait dans différents pays, il a été fait pour cinq pays en Europe. Dernièrement, la Grande-Bretagne a tenu une consultation publique assez intéressante dans sa forme mais qui malheureusement coûte cher ? c'est toujours la question. Mais vous semblez limiter, vous, la possibilité d'un débat public à la connaissance purement scientifique. Or, c'est quand même intéressant de voir quel type de questions les gens se posent: À qui ça sert? Bon. Est-ce qu'on en a vraiment besoin? Bon. Est-ce qu'on n'est pas sûr qu'on met davantage l'emphase sur l'économie que sur la prévention des risques? Ça aussi, c'est un élément à ne pas négliger. Bon.

Il y a aussi le fait que ? et j'en reviens au processus, et ça va me ramener à la question d'étiquetage aussi, bon... C'est qu'il faut tenir compte d'autres dimensions, et notamment toutes les dimensions symboliques, toutes les représentations. Or, le processus de la transgénèse comme tel vient heurter en fait un certain nombre de représentations. Puis ça interroge les rapports qu'on peut entretenir à la nature, comme individus. Bon. Ça interroge aussi certains préceptes sur lesquels peuvent reposer nos habitudes alimentaires.

J'entendais en fait, bon, effectivement l'Ordre des diététistes qui rappelait la symbolique alimentaire; je pense qu'il faut en tenir compte. Il y a effectivement des interdits alimentaires qui sont fondés sur des préceptes, eux-mêmes tirés, si vous voulez, des religions auxquelles on peut adhérer, de l'appartenance à une certaine vision du monde, hein, d'un mode de vie auquel on adhère. Et je pense que cette diversité culturelle là, elle doit être explorée, c'est un enjeu d'ordre démocratique. Alors, je m'arrêterai là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Merci. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter? Parce qu'on a trois minutes qui restent et on a une autre intervention.

M. Pothier (François): Oui. Il y a des échanges ? juste pour répondre rapidement ? il y a des échanges effectivement qui s'effectuent entre bactéries et plantes. Mais, au-delà de ça, vous comprendrez qu'il n'y a pas d'échange qui se fait entre une fraise et un maïs. Et ça, c'est le genre de possibilité qu'on a, quand même, avec la transgénèse, d'aller chercher des gènes, donc bien au-delà de ce qui se fait. Mais, oui, effectivement, il y a des échanges. Et, au cours de l'évolution, on a des exemples de ces échanges et des résultats de ces échanges qui faisaient partie, entre autres, de l'évolution.

n(18 h 10)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Alors, M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci. Question assez rapide. Tout à l'heure, on a eu le Conseil de la transformation agroalimentaire qui est venu ? je pense que vous avez assisté à leur présentation ? et ils ont fait référence que... puis je n'ai pas retenu le terme exact, mais un genre de conseil scientifique canadien qui valide finalement les produits OGM et qui semblait voir plus d'avantages que d'effets négatifs finalement à l'amélioration d'une alimentation saine. Est-ce que effectivement c'est le cas? Vous avez des rapports de cette référence-là?

M. Pothier (François): En fait, c'est l'Agence canadienne d'inspection des aliments, là, et Agriculture Canada qui évaluent, hein... même avec Santé Canada, qui évaluent l'introduction de nouvelles variétés. Mais ils évaluent d'un point de vue scientifique: ils évaluent est-ce qu'il y a quelque chose de différent dans cette plante-là par rapport à la plante correspondante qui n'est pas modifiée génétiquement, donc... Et normalement ils ne sont pas là pour porter un jugement sur la qualité ou sur... ils sont là pour dire: Ce que vous allez consommer, ce qu'on va mettre dans le champ ne sera pas dangereux pour le consommateur, entre autres, pour les animaux, etc., avec les techniques qu'on a, de mesure, actuellement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup. Alors, madame et monsieur de la Commission de l'éthique de la science et de la technologie, je vous remercie pour votre contribution à la commission. Et on va continuer à vous suivre parce que vous faites du bon travail. Merci beaucoup.

Des voix: ...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! On n'a pas fini. MM. et Mmes les députés! S'il vous plaît, MM. et Mmes les députés! S'il vous plaît!

Alors, je voudrais vous rappeler l'horaire de la commission pour la semaine prochaine. Vous vous rappelez qu'on avait initialement prévu six journées de consultation, mais, compte tenu que nous avons eu plus de mémoires qu'espéré, nous allons devoir prolonger nos travaux, avec le consentement évidemment de tous les parlementaires.

Alors, je voudrais donc vous donner lecture de l'horaire de la semaine prochaine. Nous allons reprendre le 10 février 2004, de 9 h 30 à 12 h 30 et de 14 heures à 18 heures; le 11 février, de 9 h 30 à 12 h 30, de 14 heures à 18 heures; et nous allons siéger le soir de 19 h 30 à 22 heures; le 12 février, de 9 h 30 à 12 h 30, de 14 heures à 18 heures; et nous siégerons le soir également, de 19 h 30 à 22 heures; et finalement, le 13 février, de 9 h 30 à 12 h 30. Alors, voilà l'horaire pour la semaine prochaine. Vous allez bien sûr le recevoir.

Sur ce, j'ajourne nos travaux au mardi 10 février, à 9 h 30. Merci pour votre collaboration.

(Fin de la séance à 18 h 14)


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