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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 29 septembre 2005 - Vol. 38 N° 19

Consultation générale sur le projet de loi n° 113 - Loi modifiant la Loi sur les appellations réservées


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Bonjour, chers collègues. Alors, je constate que nous avons quorum; je déclare donc la séance ouverte. Et je rappelle le mandat de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui consiste à procéder à une consultation générale et tenir des auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 113, intitulé Loi modifiant la Loi sur les appellations réservées.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Charbonneau (Borduas) est remplacé par M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Bienvenue au député des Îles-de-la-Madeleine. Alors, je vous donne lecture de l'ordre du jour. Aujourd'hui, jeudi le 29 septembre, à 9 h 30, nous avons l'Union des producteurs agricoles, qui sont déjà là; à 10 h 30, l'Association des détaillants en alimentation du Québec; à 11 h 30, La Table de concertation agroalimentaire du Québec; à 12 h 30, il y aura une suspension; à 14 heures, nous reprenons avec le Conseil des appellations agroalimentaires du Québec; à 15 heures, le Bureau de normalisation du Québec se fera entendre; et la commission ajournera ses travaux à 16 heures.

Auditions (suite)

Alors, les invités de l'Union des producteurs agricoles, je constate qu'ils ont déjà pris place. Bienvenue. Je voudrais rappeler le temps qui est alloué pour la période de présentation et la période d'échange. Alors, selon l'horaire convenu, chaque audition dure une heure, dont 20 minutes pour la présentation et 40 minutes partagées également entre les groupes parlementaires pour les échanges avec la commission.

Alors, je demande à M. Laurent Pellerin, président de l'Union des producteurs agricoles, à présenter les personnes qui l'accompagnent et son mémoire. Bienvenue, M. Pellerin.

Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Pellerin (Laurent): Bonjour, Mme la Présidente. Un bonjour aussi à chacun et chacune d'entre vous de cette commission. Mme Judith Lupien m'accompagne; elle est au Service de la commercialisation à l'UPA et elle suit le dossier des appellations et de toute cette réflexion, même le comité qui avait suivi le Forum sur l'agriculture il y a quelques années. Donc, elle suit ce dossier-là depuis plusieurs années et elle est à la base de plusieurs des réflexions que je vais vous transmettre aujourd'hui, et c'est aussi elle qui a fait mon épicerie, hier, en se promenant à Québec en attendant parce qu'elle était durant les commissions ici la journée précédente. Alors, hier, elle a eu un peu de temps dégagé puis, comme tout le monde cherche à s'occuper quand ils n'ont rien à faire...

Alors, on voulait satisfaire, dans un premier temps, la demande du ministre, M. Lessard, qui a demandé en commission, au cours de la semaine: C'est-u si pire que ça, ça, cette question des appellations? Alors, j'en ai emmené quelques-unes, à matin, pour lui donner un échantillon de ce que ça peut avoir l'air sur le terrain. Il y a même la SAQ qui se promène avec un Chicoutai et qui est produit du terroir mais fait à la Maison des futailles; il me semble que c'est à Montréal. Un autre produit fort intéressant fait au Québec, et c'est un savon du terroir mais à la mangue juteuse. La compagnie que je connais bien, Tour Eiffel ? le domaine du jambon, je connais un peu ça aussi, pas mal ? jambon à l'érable de Tour Eiffel fait à la main. J'aimerais voir l'usine, ça pique ma curiosité un peu. J'ai vu pas mal de fabrication de jambon au Québec.

Alors, ça passe de la farine de sarrasin au gâteau Reine-Élizabeth fait à la main, donc artisanal. C'est ça qui est marqué sur l'enveloppe «artisanal», un gâteau Reine-Élizabeth artisanal. Peut-être que c'est vrai. C'est tous d'excellents produits.

Je connais celui-là personnellement, c'est le président de la Fédération d'agriculture biologique, M. Bouchard, du Saguenay?Lac-Saint-Jean; lui, il n'a pas pris de chance, c'est: cheddar fermier artisano-biologique pasteurisé à basse température. Et probablement que c'est vrai qu'il remplit toutes ces caractéristiques-là.

Alors, oui, il y a une nécessité de mettre de l'ordre, et c'est le principe principal de notre propos ce matin. Oui, il y a nécessité de mettre de l'ordre dans ce paquet d'appellations là et de dénominations et de tentatives d'identification de produits. Le consommateur pour le moment, je suis sûr, ne s'y retrouve absolument pas.

En passant, on n'a pas été capables de racheter du ragoût de boulettes Cordon Bleu recette du terroir. Ils ont compris que ça n'allait pas, ils l'ont retiré des tablettes il y a cinq, six mois, mais ça faisait un peu terroir terreux.

n (9 h 40) n

Alors, il y a nécessité de légiférer, et je suis très heureux d'être ici ce matin pour illustrer notre propos. Vous savez tous que le développement de ces appellations-là va de pair avec le développement régional. La difficulté qu'on a maintenant, c'est qu'aucun de ces produits-là ou de ces appellations-là ne peut garantir l'authenticité des produits. Si la loi est adoptée, on pense qu'il y a quelque chose d'intéressant là pour protéger le savoir et le travail des entreprises. Ça permettrait sûrement un développement à long terme de ce secteur ou de ces secteurs d'activité là, fournir aussi une reconnaissance régionale, nationale et internationale à nos produits de haute qualité faits ici, réprimer les utilisations abusives, stopper aussi l'imbroglio dans lequel le consommateur peut se retrouver. Il n'y a rien de pire que d'induire le consommateur en erreur et après ça être obligé de faire du rattrapage pour recorriger ces perceptions ou ces appellations-là.

De façon générale, l'UPA est favorable à l'introduction des attestations de spécificité à la Loi sur les appellations réservées. Il y a un besoin criant pour les entreprises et les consommateurs, un engouement pour ces nouveaux produits là. C'est un système de référence fiable, mais, comme je le disais, un ménage s'impose.

Si le MAPAQ, dans son projet de loi, a réussi à faire l'unanimité sur quelque chose, pour en avoir parlé à plusieurs intervenants et avoir eu rapport des mémoires qui ont été présentés depuis quelques jours, c'est sûrement sur l'élément de retirer le projet de règlement concernant les nominations «fermier» et «artisanal». Je pense que vous avez réussi à faire l'unanimité là-dessus.

On vous demande parallèlement de baliser d'autres appellations qui ne sont pas mentionnées dans le projet de loi, tels que la définition de qu'est-ce que c'est, un produit équitable. Il y a des références internationales, mais le projet de loi ne fait référence à aucune définition, et c'est un secteur ou un créneau qui aussi est en développement. Alors, je pense que, tant qu'à être dans la loi ? on sait qu'on n'aime pas rouvrir les lois à tous les jours ? nous autres, on pense que ce serait une bonne idée d'introduire une définition plus claire, ou québécoise, ou référence aux barèmes internationaux sur ce mot-là.

L'UPA demande que l'utilisation du mot «terroir» soit restreinte aux seuls produits d'appellation géographique. Le projet de loi ne prévoit pas de limitation à l'utilisation du terme «terroir». Pour nous, il y a un lien fondamental entre terroir et permanence géographique. Si on ne limite pas l'utilisation du terme, l'appellation proliférera à travers d'autres produits. Je pense que mon savon à la mangue est une bonne illustration de ce qu'il ne faut pas faire, je pense.

L'UPA demande que soit ajouté un article précisant que toute appellation réservée ou attestation de spécificité reconnue demeure de propriété publique. Actuellement, une demande d'appellation doit se faire en collectivité; le projet de loi prévoit qu'elle puisse se faire individuellement aussi. Il importe, si elle est faite individuellement, que la propriété demeure publique, c'est-à-dire que d'autres, plus tard, pourraient utiliser cette appellation-là, qu'elle ne soit pas réservée à un individu. Pour s'en satisfaire... c'est-à-dire pour s'en prévaloir, à ce moment-là, il faudrait que le demandeur satisfasse à un cahier de charges et à une certification.

Dans un autre registre, l'UPA demande que le CAAQ, conseil d'accréditation, obtienne un réel pouvoir d'enquête, d'inspection et de saisie parce que... Mettez-vous après l'adoption du projet de loi, et que vous retournez faire votre épicerie et que vous retrouvez le même éventail sur les tablettes, si on veut... Comme dans d'autres pays qui ont utilisé ? en Europe particulièrement, en France ? qui ont utilisé ce vocabulaire-là, il y a un pouvoir d'enquête et de saisie et même de fermeture de restaurants quand des utilisations sont faussement utilisées. Donc, pour le conseil d'accréditation, des pouvoirs supplémentaires d'inspection et de saisie. Ce n'est pas un précédent, l'inspection et la saisie, au Québec, ça existe déjà en vertu de la Loi de la mise en marché des produits agricoles; donc, il s'agirait de donner des pouvoirs équivalents au conseil d'accréditation.

Un système d'appellation dans le fond n'est crédible que s'il ne peut compter sur des mécanismes de contrôle, ce qui inclut des pouvoirs dans la loi et des ressources consacrées à l'application des mesures que celle-ci prévoit. Il faut imposer les mêmes règles à tous les produits, qu'ils soient d'ailleurs, du Canada ou de l'étranger. J'ai plusieurs produits qui sont d'appellation biologique là-dedans. Selon nos informations, nos chiffres, nos enquêtes, autour de 70 % des produits biologiques sur les tablettes du Québec viennent de l'extérieur du Québec, du pays même. Et la certification, dans ces autres pays là, est-elle conforme, est-elle en ligne avec qu'est-ce que, nous autres, on fait ici, aujourd'hui? Personne ne peut le dire. Si on veut le développement de ces produits-là chez nous, je pense qu'il faudrait appliquer à ce qui vient de l'extérieur les mêmes règles que qu'est-ce qui passe sur notre propre marché, sinon on continuerait à nous sortir du marché, comme ça arrive dans plusieurs domaines agroalimentaires. Il s'agit de protéger nos entrepreneurs, notre expertise et nos spécificités.

L'UPA demande que l'article 1 du projet de loi soit revu pour inclure les boissons alcooliques de production artisanale. Écoutez, on a consulté ces gens-là, c'est des gens qu'on suit, et Judith les suit depuis plusieurs années, ces groupes-là, on les a rencontrés à plusieurs occasions, et là aussi c'est unanime: ils veulent être inclus dans le projet de loi, et, nous, on souhaite qu'ils le soient aussi. On doit leur réserver le même traitement que les produits alimentaires. Elles offrent un grand potentiel de croissance et de rayonnement.

Comme Judith, elle n'avait pas un gros budget hier, elle n'a pas pu acheter de cidre de glace, mais c'est un peu plus dispendieux. Mais le cidre de glace, c'est un excellent exemple de ce qui pourrait se copier et qui est vraiment un produit de chez nous, inventé ici, avec des gens qui ont eu une innovation, un génie fort intéressant, qui est produit d'extrême haute qualité, quatre, cinq, cinq, six entreprises au Québec qui font ce produit-là maintenant, et c'est reconnu mondialement assez rapidement. Alors, je pense qu'il faut protéger... il ne faut pas qu'un imposteur arrive et importe du jus de pomme de Chine, supposons, et le garde dehors l'hiver, une escousse, pour le faire congeler, et réussisse à en extraire une espèce de cidre de glace ou de jus de pomme réfrigéré et essayer de berner le consommateur et d'enlever aux gens qui ont développé ces produits-là toute la reconnaissance pour les efforts qu'ils ont faits.

Alors, il y a lieu d'introduire ces produits-là artisanaux, produits, que ce soient les vins, ou les produits de la pomme, ou d'autres produits alcooliques, de boissons alcoolisées de d'autres productions, des petits fruits, il y en a... ils sont toute une gang dans ce groupe-là, et on les a tous entendus de notre côté. Les vins français, les vins californiens se sont développés, ils ont une reconnaissance mondiale parce que leur notoriété vient d'un système qui mise sur des appellations réservées. Alors, il ne faut pas essayer d'inventer quelque chose de nouveau ici, il faut, je pense, appliquer ce qui s'est fait ailleurs. Et la preuve est faite, ça a donné des résultats concluants.

L'obligation d'un permis par la Société des alcools, c'est quelque chose qui est très acceptable pour nous autres. Et peut-être soit de créer un conseil d'accréditation avec les intervenants du secteur des boissons alcooliques artisanales dont la SAQ devrait être partie, les gens du milieu, ou un sous-comité, ou une branche, un bras du conseil d'accréditation; ça pourrait, je pense, revamper ou reconsolider le conseil d'accréditation en le joignant là. Donc, une ou l'autre des options, soit un conseil indépendant ou un conseil sous la gouverne ou associé au conseil d'accréditation actuel.

L'UPA considère que le conseil d'accréditation doit être le seul organisme d'accréditation pour toutes les appellations de type alimentaire. C'est la logique qui nous amène à dire: La loi, ça va, mais le règlement, ça ne va pas du tout. Le conseil est un pionnier avec une certaine expertise qui s'est bâtie au fil des ans, et je pense que, si on veut consolider cette affaire-là, il faut remettre nos oeufs dans ce panier-là au lieu d'éparpiller nos oeufs dans plusieurs autres paniers. Il est déjà habitué à travailler avec les partenaires, le conseil d'accréditation, partenaires du milieu. Sa notoriété auprès des partenaires, elle est reconnue. Je pense qu'il y a encore de l'argent à mettre pour le faire connaître au grand public, mais, au niveau des partenaires, je pense qu'il est bien connu. Et particulièrement dans le secteur bio, il a fait la job sans aucun doute de la part des gens de ce secteur-là.

Une gestion unique des appellations serait plus efficace que bicéphale. Il lui faudrait à cet égard ? et nous l'appuyons en ce sens ? une nouvelle structure juridique et de fonctionnement pour le conseil d'accréditation. L'UPA demande aussi au gouvernement d'élaborer, pour minimalement les cinq prochaines années, une stratégie de communication. Le but, c'est de soutenir le développement des appellations réservées et leur notoriété. D'abord, vulgariser le système auprès des entreprises, sensibiliser les acteurs économiques locaux, informer la population de cet encadrement-là aussi ? il y a un bon effort à faire de ce côté-là ? en informant les autres gouvernements avec lesquels on travaille, en faisant la promotion des produits sur les marchés, et cette communication-là pourrait se faire en collaboration avec les organismes du milieu.

Nous tenons à privilégier Aliments du Québec pour le volet promotion au grand public, vu son expertise et sa notoriété. On sort d'une session de réflexion sur Aliments du Québec, et je dirais que, chez nous, même si la réponse n'est pas définitive, il faudrait être très prudent sur le développement d'un autre ou d'autres ? au pluriel ? logos. Il serait peut-être mieux de consolider celui qui existe au Québec avec Aliments du Québec et même à y donner des déclinaisons Aliments du Québec bio ou Aliments du Québec fermier; ça nous apparaît, à tout le moins, à ce moment-ci, quelque chose qu'il faudrait explorer de façon extrêmement sérieuse. Je ne vous dis pas que notre réflexion est définitive sur ce sujet-là, de même que celle des partenaires qui sont avec nous autres d'Aliments du Québec, mais, à tout le moins, ça mériterait qu'on fasse un petit détour dans cette réflexion-là pour s'assurer que c'est quelque chose qui serait intéressant ou pas intéressant, mais, nous, on pense qu'il y a une piste au moins à explorer.

n (9 h 50) n

L'UPA demande que le MAPAQ prévoie des ressources techniques et financières appropriées dans la loi n° 113 comme dans son plan d'action pour la mise en valeur des produits régionaux et de niche. Le MAPAQ doit prévoir un soutien technique aux entreprises pour les premières années de développement ? plus ou moins cinq ans; la reconnaissance de l'expertise et la crédibilité des tables de concertation régionales; l'octroi d'un rôle de première ligne à celles-ci aussi ? elles sont proches des clients ? et revoir à la hausse le budget consacré au développement des appellations réservées; annuler le projet réglementaire P-29 et transférer les sommes qui étaient prévues au développement des appellations; et le gouvernement doit assurer, à tout le moins au départ, une large part du financement du CAAQ. Peut-être qu'après une génération il pourra faire ses frais et, avec des utilisateurs qui pourraient se multiplier ? on voit que le potentiel est là ? qu'il pourrait utiliser le centre d'accréditation. Peut-être qu'un jour il pourrait être plus autosuffisant, mais c'est sûr qu'au départ il y a un gros coup de barre à donner.

Il y aurait des gens qui sont passés devant la commission, ici, qui avaient la prétention de penser que ce régime-là serait mieux administré ailleurs, et qu'il ne fallait pas confier l'administration de la Loi sur les appellations réservées à des gens qui avaient développé l'agriculture du Québec aujourd'hui, entendre productions porcines ou autres, et je pense que le MAPAQ était ciblé là-dedans, et j'en ai pris un petit bout pour moi-même. Moi, je vous dirais, il est probablement fort mieux de confier à ceux qui ont développé quelque chose le développement d'appellations réservées qu'à ceux qui n'ont fait qu'en parler pendant les dernières années. Alors, moi, j'ai bien confiance à ceux qui développent, alors ils ont aussi la capacité de développer dans ce secteur-là. Si le chapeau fait, qu'on se le mette.

En conclusion, une vision claire, un cadre précis, des ressources, c'est essentiellement nos demandes pour ce projet de loi là. Les appellations sont une voie d'avenir, leur développement exige une vision claire du gouvernement ? ça a été comme ça dans les pays qui ont développé les appellations. En plus d'un cadre, il faut des ressources appropriées; nous appuyons son intention, l'intention du gouvernement de légiférer. Nos propositions sont une plus-value parce qu'elles sont largement partagées par le milieu. Alors, c'était essentiellement les commentaires qu'on voulait vous transmettre ce matin, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Pellerin, et j'ai apprécié la démonstration. Je me demandais, à un moment donné, si vous ne nous aviez pas apporté le menu pour le dîner aujourd'hui.

Alors, je cède la parole à M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je saisis cette occasion pour le féliciter pour sa nomination, et j'en profite aussi pour souhaiter un prompt rétablissement à notre collègue Yvon Vallières. Je sais que ce projet de loi lui tenait à coeur, et il est avec nous évidemment par l'esprit.

M. le ministre, vous avez 20 minutes pour votre formation. Et si vous le souhaitez, on pourrait procéder par des blocs de 10 minutes, par alternance. Est-ce que ça vous convient?

M. Lessard: C'est parfait.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Parfait. M. le ministre.

M. Lessard: Alors, merci, Mme la Présidente, et bienvenue donc aux gens de l'UPA pour cette présentation. Évidemment, ça nous permet aussi de resituer le cadre dans lequel nous sommes, sur les consultations sur un projet de loi, rappelant essentiellement qu'il y a déjà une loi sur les appellations réservées au Québec avec un règlement. Il y a une loi aussi sur les produits alimentaires du Québec et son règlement.

Alors, c'est nécessairement dans ce cadre-là, suite au rapport Desjardins principalement, un engagement aussi de donner l'opportunité, parce que l'UPA, ça représente, entre autres... Si je lisais bien dans vos documents, on dit 16 fédérations régionales, on parle de 25 groupes spécialisés et 43 400 personnes, agriculteurs et agricultrices ? on parle donc de beaucoup de monde ? 31 000 exploitations au Québec. Cette loi-là, c'est à eux autres qu'on s'adresse aujourd'hui, à ces gens, à ces personnes qui veulent développer, donner une valeur ajoutée à leurs produits et être capables de les mettre en marché tout en respectant, tout en... C'une façon d'informer le public, mais en donnant aussi une valeur à leur produit régional, diversifiant ainsi les sources de revenus à la ferme et bonifiant en plus une production locale.

Quand je regarde donc les propositions qu'avaient apportées mon collègue Yvon Vallières lorsqu'il a lancé son plan d'action, l'objectif était de, un, simplifier, bonifier, améliorer, et c'est dans ce contexte-là qu'on aborde l'exercice d'aujourd'hui. Alors, nécessairement qu'il y a une modification de la loi, il y a un renforcement au niveau des modes de... Donc, la loi prévoit trois modes, c'est-à-dire par région, par mode de production, excusez, et spécificité. Il y a un renforcement dans la loi, on vient repréciser que... et on tient compte des appellations comme du terroir, du lien au terroir au lieu de la région de production, et on dit que les indications géographiques protégées ainsi que les appellations d'origine sont d'authentiques produits du terroir. Alors, oui, on essaie d'encadrer, d'une certaine façon, en témoignant cette appartenance particulière que sont les appellations d'origine, et ainsi que les indications géographiques protégées.

D'un autre côté, on va aussi du côté des spécificités en mentionnant particulièrement les appellations de type fermier et artisanal. Dans le cadre aussi, ça amène d'autres modifications qu'on... quand, un, la possibilité aussi pour une personne de déposer, de faire une démarche avec un cahier de charges, et on n'a pas à s'inquiéter sur le fait que, même si c'est un individu au lieu d'un groupe, le cahier de charges, une fois qu'il sera certifié, sera rendu donc public, il sera donc sujet à appropriation par tous, ça deviendra un bien collectif à condition qu'on respecte les mêmes règles. Je pense qu'il y a lieu de l'établir qu'il n'y a pas de crainte possible dans ce volet-là nécessairement sans modifier aussi une réglementation sur les produits alimentaires qui nous permettait d'amener une certaine flexibilité. Et là on reviendra, ça fera peut-être l'objet de mon propos, à savoir les types fermier ou production fermier, donc il y avait un autre mode d'attestation, d'enregistrement avec des règles. Et par la suite il y avait donc, dans le plan d'action, un guide qui allait accompagner donc ces gens-là vers de la production en respectant les règles et nécessairement, dans le budget, il y avait une annonce de 1 million de dollars par année pour trois ans pour encadrer le processus, et on est à déterminer actuellement les règles qui pourront donc être connues par la suite.

Alors, c'est dans ce volet-là, Mme la Présidente, que ça a été abordé. J'apprécie le travail que vous avez fait, et toutefois, comme je m'adresse aux producteurs, productrices, je me dis tout le temps: Est-ce que les outils... Parce qu'on nous dit dans votre présentation: Le règlement, il faut l'abolir, alors il faut retourner à la structure. Donc, vous suggérez que, un, on fait du renforcement nécessairement en abolissant la souplesse, toutefois on vient encadrer et on exige donc des gens, des petits producteurs comme des plus grands, tout en respectant les champs d'activité, d'avoir un cahier de charges, d'initier des demandes, etc. Et au net-net, M. le président, on voit qu'il y a une seule appellation réservée depuis des années. Est-ce qu'on va être capable d'atteindre l'objectif?

M. Pellerin (Laurent): Écoutez, si l'objectif, c'est de clarifier dans l'esprit du consommateur c'est quoi, ces produits-là, et d'éviter ce qui se passe aujourd'hui, je pense qu'on n'a pas le choix d'aller vers quelque chose d'un contrôle unique. Il ne peut pas y avoir... On ne peut pas perpétuer cette confusion-là auprès du consommateur. Il nous apparaît que deux têtes, ça continuerait à perpétuer cette confusion-là dans l'esprit du consommateur. Il y a comme un coup de barre à donner pour shaker la patente pour dire: Regarde, si tu veux utiliser «terroir», si tu veux utiliser «fermier», «artisanal», «géographique», ça ne peut pas être comme ça, ça ne peut être laissé à l'improvisation de chacun, là, ça n'a comme pas d'allure. Et on est en dehors de l'inspection pour la qualité des aliments. Je suis convaincu que ces aliments-là sont tous de qualité, là, moi. Ce n'est pas dans l'inspection alimentaire qu'il y a le problème, c'est dans l'utilisation des appellations. Alors, il ne faut pas mêler les genres non plus, faire relever d'une instance de contrôle de qualité des aliments quelque chose qui n'a rien à voir avec la qualité des aliments. Ce n'est pas ça que je mets en doute, moi, à matin, dans les aliments que j'ai amenés ici, là. Je n'ai pas de problème à manger aucun de ces aliments-là, puis je suis qu'ils ont été inspectés, ils ont été produits dans les normes du Québec, ça, il n'y a aucun trouble avec ça. Sauf que je trouve... ça me fait rire quand je vois des mots ou la combinaison de mots sur ces choses-là, je ne sais pas qu'est-ce que ça veut dire moi-même. Il y en a un que je suis capable de démêler parce que je connais le monsieur en question, les autres, aucune idée. Alors, je pense que le gouvernement, il a un rôle à éclairer le consommateur dans ses choix. Le consommateur est capable de faire des choix, encore faut-il que ce soit clair, et pour le moment ça ne l'est pas.

Si ça n'a pas levé, écoutez, on était des promoteurs, nous ? ça, il y a des gens qui ne s'en rappellent pas ? mais on était les grands promoteurs, probablement les premiers promoteurs de l'adoption de la loi en 1995 sous le ministre Julien, et à l'époque on avait dit: C'est un départ. Il n'y a jamais eu le support financier nécessaire, adéquat pour lancer, pour booster ce conseil d'accréditation là, c'est toujours un peu le balbutiement. Alors, moi, je pense que, si on donne le coup de barre en renforçant la loi, en engraissant un peu le conseil d'accréditation en lui donnant d'autres fonctions dans le fond, je pense qu'on le rend encore plus visible. À la limite, nous, on est assez favorables avec l'idée, comme je disais tantôt, peut-être d'y coller le logo Aliment du Québec qui a une certaine notoriété, et consolider dans un tout nos efforts qu'on fait ou qu'on a faits dans les 10 dernières années de façon un peu éparpillée. C'était probablement normal que ce soit éparpillé, on était un peu à un stade exploratoire.

n (10 heures) n

Le fromage Pied-De-Vent des Îles-de-la-Madeleine, l'ex-ministre de l'Agriculture se réclame d'un produit du terroir. J'ai visité les Îles en 1970 et un peu plus tard, il n'y avait pas de production de fromage là. Qu'est-ce qu'il y avait là de particulier de terroir? Peux-tu utiliser l'expression «terroir»? Il faut que ça soit connu, ces choses-là dans... il ne faut pas que quelqu'un s'en aille s'implanter de toutes pièces artificiellement à un endroit puis à partir de ce moment-là il dit: Je suis géographique, moi, là. Il y a quelques règles de base qu'il faut éclaircir dans la perception des entrepreneurs même et dans la perception du consommateur. Et la consolidation nous apparaît une voie incontournable. Ça va prendre un peu de pétrole. Il est cher, mais ça va prendre un peu de pétrole.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il reste peut-être quelques minutes, M. le ministre.

M. Lessard: Oui. Je veux revenir sur «terroir» justement parce que, au fil des groupes qui ont défilé ici... Et on essaie de trouver. On a fait quand même des vérifications. Il appert que le mot «terroir» n'a pu être défini, même internationalement, ou encadré. Parce que, lorsqu'on veut réserver quelque chose, on dit: Il y a autant de terroirs qui.... Ça ne cadre pas du tout avec les régions administratives du Québec. C'est son lien, son attachement, sa spécificité, ses sols, des modes de production, etc. Alors, d'encadrer et de fixer une fois pour toutes, il n'y a aucune législation, même étrangère, qui a pu le faire.

La seule affaire, ce qu'on vient concrétiser dans la loi, c'est que les appellations d'origine et les indications géographiques protégées seraient des authentiques produits du terroir. Donc, c'est comme on réaffirme ce volet-là sous deux vocables. Parce que, quand on veut nécessairement encadrer «terroir», il faut être capable de le protéger et de le défendre. Alors, c'est là... Qu'est-ce que vous suggérez? Parce que vous avez quand même assez voyagé, et je veux quand même ramener ça, parce que ça paraît probablement sur pratiquement tous les produits que vous avez sur la table.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Pour nous autres, il y a un lien indissociable entre «terroir» et «provenance géographique». Dans votre projet de loi, vous faites un lien entre les produits du terroir et quelque chose d'un peu historique. Là-dessus non plus notre réflexion n'est peut-être pas définitive, mais il faudrait faire attention, au Québec, sur l'élément historique.

Notre histoire est quand même relativement courte. Alors... Je reviens avec l'exemple du Pied-De-Vent des Îles-de-la-Madeleine ? excellent produit, en passant. Si on ne pouvait pas l'appeler «terroir» parce que ça ne fait pas assez longtemps qu'il est là, ce serait peut-être dommage. Alors, il faut peut-être faire attention à... Et, dans le projet de loi, vous faites référence à: Ça doit être quelque chose d'historique. Mais, peut-être en Europe, historique, ça veut dire quelque chose, là, 200, 300, 400, 500 ans. Mais ici on n'a peut-être pas cet héritage-là. Historique, c'est peut-être les 15 dernières années, c'est peut-être les 10 dernières ou c'est peut-être vraiment le fait que quelqu'un s'installe en région, utilise les ressources du milieu. Il s'est identifié comme ça et il ne va pas recombiner son produit... Il ne prend pas les petits fruits de la Côte-Nord pour venir les transformer à la Maison des futailles, à Montréal. Ça, ça ne m'apparaît pas terroir. Il faudrait peut-être que vous rencontriez la SAQ.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup, M. Pellerin. Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'agriculture et d'alimentation.

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. Mme Lupien, M. Pellerin, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue à ces audiences de la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation du Québec sur un projet de loi qui est très important pour le développement, les progrès que peuvent faire justement le domaine, la production des créneaux dans les régions. On en parle tellement. Je pense c'est un projet de loi très important.

Votre mémoire est très complet, il est très bien fait. Et j'ai lu avec beaucoup d'attention, j'ai aimé aussi vos remarques, M. Pellerin, en ce qui concerne le terroir, l'explication en regard du Pied-De-Vent, entre autres. Je pense que l'exemple est très bien. Si on fait référence à l'historique pour le terroir, je pense le terroir, c'est beaucoup plus vaste que ça.

Moi, je veux vous amener à un élément clé parce que vous employez, dans votre mémoire, très peu souvent ces termes très forts, très puissants. Vous dites à la page 7, par exemple: «L'UPA exige que soit retiré le projet réglementaire du MAPAQ concernant les dénominations "fermier artisanal".» Et, à la fin de cette page-là ? parce que là j'ai lu ce qu'il y avait à droite dans la colonne ? mais la dernière phrase de la page 7: «Cela ne saurait être accepté.»

Je pense c'est important, pour que les gens comprennent ? et j'aimerais que vous reveniez là-dessus ? pourquoi vous utilisez ces expressions aussi fortes. Parce qu'il faut que les gens comprennent qu'on a un projet de loi en avant de nous qui est le projet de loi n° 113, qui vise à réserver des appellations, donc à définir, que ce soit très clair dans le projet de loi. Et en même temps, dans le plan d'action du gouvernement, il y a la possibilité, au niveau réglementaire, de ramener certaines appellations avec des dénominations de type fermier et de type artisanal.

Alors, est-ce que, pour vous, cette demande très ferme ? parce que, nous, on vise à améliorer le projet de loi n° 113 ? est-ce que c'est conditionnel, est-ce que c'est une exigence formelle? Parce que tous les groupes qui sont venus jusqu'à maintenant nous ont demandé la même chose, et j'aimerais vous entendre là-dessus, là, sur l'utilisation que vous faites de ces termes aussi forts.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Bien, on croit tellement à l'utilité du renforcement de la loi et à l'adoption de celle-ci, la Loi sur les appellations, et à son renforcement qu'on pense qu'il ne faut pas faire d'autre chose. Il ne faut pas le diluer. Je disais tantôt un peu en caricature: Si le MAPAQ a réussi à faire l'unanimité sur quelque chose, il a fait l'unanimité sur ce point-là, il n'y a personne qui en veut.

Et pourquoi on exige? C'est parce que ça fait quand même, dans les derniers... depuis un ancien gouvernement à aller jusqu'à aujourd'hui, ça fait quand même trois fois qu'on voit circuler ce projet de loi là pour le renforcement du système des appellations, et à chacune des fois on a dit non à cet artifice supplémentaire là de réglementation relié plus à la qualité alimentaire. Alors, je pense qu'on n'a pas été compris, personne, et c'est pour ça que tout le monde revient devant la commission pour dire: Ça, là, faites-le pas, on n'en veut pas. Et cette fois-ci, on dit: On exige qu'elle ne soit plus là, parce que je pense qu'on n'a pas été compris les deux dernières fois. J'espère que, cette fois-ci, on va être compris. Et ce n'est pas une demande capricieuse de l'UPA, vous le constatez, à peu près tous les autres partenaires du secteur agroalimentaire sont à la même place là-dessus.

Alors, consolidation autour de la loi, on y croit à la loi, mais consolidons nos efforts autour de ce renforcement-là, équipons le conseil d'accréditation correctement pour qu'il puisse fonctionner. Puis c'est sûr qu'il y a de l'investissement à faire. On pense, on est convaincus que c'est un investissement collectif qu'il faut faire, gouvernemental, et on aura le retour sur cet investissement-là au fil des prochaines années. Ce n'est pas un système qui se bâtit, ça, là, à court terme, c'est un système dont probablement la prochaine génération pourra se revirer de bord et rendre grâce à ceux qui étaient là à ce moment-là pour dire: Bien, regarde, il y avait une certaine vision, puis ça a pris du temps, mais ça a donné ça comme résultat, puis il y avait des capotés à l'époque qui pensaient que ça devait être ça. Je pense que c'est comme ça qu'il faut le voir pour que, dans cinq ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans d'ici, les gens du milieu québécois et de nos acheteurs se retournent de bord pour dire: Au Québec, ils ont un système qui se tient debout.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. Je ne veux pas, ce n'est pas une publicité gratuite que je veux faire au Pied-De-Vent, je pense qu'au Québec il est très bien connu, vous l'avez utilisé vous-même, M. Pellerin, comme exemple. Mais si justement je prends le fromage au lait cru Pied-De-Vent qui est fabriqué aux Îles-de-la-Madeleine, bon, ça pourra être, peut-être, ça pourrait être un produit du terroir ou en tout cas avec une identification, un produit d'origine, le milieu rattaché aux Îles-de-la-Madeleine, ça pourrait être aussi un produit fermier, en tout cas, d'après la description qu'on nous dit, parce que selon les producteurs ou l'industrie laitière, juste d'un même troupeau, etc., juste d'un troupeau.

Maintenant, il y a des gens qui sont venus devant la commission pour nous dire: Il faudrait peut-être faire attention à l'expression «artisanal» ou peut-être même le sortir de ces dénominations-là sous prétexte que ce n'est pas juste dans l'alimentaire ou encore il faudrait prévoir ces choses-là. Qu'est-ce que vous en pensez en ce qui concerne l'expression «produit artisanal»?

M. Pellerin (Laurent): On pense la même chose que pour «terroir» et «fermier» et même chacune des appellations régionales qui pourraient être utilisées. Si c'est bien défini. Vous savez, ça veut dire quoi «artisanal»? C'est pour ça que j'aimerais visiter cette fabrication de jambon artisanal. Ils le tapochent-u à la main? Qu'est-ce qu'ils font avec? Parce que c'est ? faudrait que je retrouve le mot technique ? c'est baratté, ça, les jambons, pour venir à bout de faire prendre la saveur du pigment de fumage, et tout ça. Alors, je ne sais pas s'il est tapoté à la main. «Artisanal» me donnerait un peu ce réflexe-là, c'est pour ça que ça me fait sourire un peu, je voudrais voir. C'est probablement issu d'une bonne méthode industrielle, un petit peu en moins grand volume que d'autres, c'est peut-être ça, mais je ne le sais pas, là. Alors, s'il est bien encadré, le mot, bien défini, «artisanal», ça veut dire que, en comparaison avec d'autres produits de la même catégorie, celui-là est fait plus à la mitaine que quelque chose qui est un procédé complètement industriel à grand volume. Il faudrait, je pense qu'il faudrait le garder.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Arseneau: En plus, votre jambon, M. Pellerin, je pense que le terroir de La Tour Eiffel, c'est La Tour Eiffel?

M. Pellerin (Laurent): Ils ne disent pas qu'il est du terroir, ils disent juste qu'il est artisan.

M. Arseneau: O.K. Vous demandez aussi, dans votre mémoire, que le pouvoir d'enquête, en fait, là, en ce qui concerne le conseil d'accréditation ou le conseil d'appellations alimentaires du Québec, vous plaidez pour qu'il ait plus, qu'il ait même un pouvoir d'enquête. Est-ce qu'il y a beaucoup de différence entre ce qui existe pour le conseil actuellement en place et ce que vous souhaitez qu'il ait comme pouvoir? Vous voulez qu'il ait plus de dents, qu'il puisse faire des enquêtes plus poussées, hein?

n(10 h 10)n

M. Pellerin (Laurent): Qu'il ait plus de... qu'il ait plus de pouvoir et qu'il ait les budgets pour pouvoir le faire. Parce que, s'il a des budgets pour qu'il y ait une seule personne puis qu'elle est assise dans un bureau, ça ne fait pas un pouvoir d'enquête bien, bien fort, ça prend quelqu'un sur la route qui va au hasard chercher... Et en mettre quelques-uns à l'ordre, je ne sais pas si vous vous rappelez il y a quelques années, il y avait eu une boulangerie dans le domaine bio, là, qui avait été questionnée sur la véracité de son appellation bio. Ça a sonné la cloche pas à peu près, là, puis il y en a une gang qui sont devenus un peu plus nerveux, puis il y a un peu d'ordre qui s'est mis là-dedans.

Alors, ponctuellement, moi, je pense qu'il faut aller faire des vérifications, rappeler le monde à l'ordre. Et aux acheteurs des compagnies qui mettent ça sur les tablettes aussi, on pourrait faire des vérifications plus générales en disant: Quand vous vous approvisionnez à l'étranger, vous ne pouvez pas accepter n'importe quelle sorte d'appellation sur les produits pour que ça réponde aux critères québécois. Alors, si, par exemple, les trois grands distributeurs ou les détaillants sont de connivence un peu avec l'application de la loi, ça pourrait donner des résultats rapides assez intéressants, ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député...

M. Arseneau: J'ai encore du temps? Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Deux minutes.

M. Arseneau: Maintenant, en ce qui concerne les boissons alcooliques, vous proposez qu'il y ait un autre conseil d'accréditation. En fait, vous plaidez pour que le CAAQ actuel soit renforcé et élargi, pouvoir d'enquête, mieux financé; je pense que c'est certain que ça demande ça pour qu'ils puissent faire un bon travail. Mais en même temps vous demandez, pour les boissons alcooliques, un conseil d'accréditation spécifique, particulier. Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi?

M. Pellerin (Laurent): Bien, c'est probablement à cause des discussions des dernières années où on a été, du côté gouvernemental, réticents à inclure les boissons alcoolisées dans ce projet de loi là, et une des raisons qu'on nous servait, c'est que l'accréditation ne relevait peut-être pas de la même expertise que l'accréditation de produits alimentaires, entre autres avec le rôle que la SAQ peut jouer.

Le compromis qu'on propose, c'est d'avoir un conseil qui va regrouper des gens du milieu, donc plus experts dans le domaine des boissons alcoolisées, et je pense que la SAQ a besoin de formation aussi. Alors, que la SAQ soit autour de ce conseil-là, qu'elle soit même elle-même critique de ses propres utilisations. Idéalement, nous souhaitons qu'il soit rattaché d'une façon ou d'une autre au conseil d'accréditation, et s'il y avait la volonté gouvernementale de tout mettre ça dans la même boutique, c'était notre premier choix. Le compromis qu'on faisait, c'est d'en faire deux; le compromis idéal, si on veut protéger les susceptibilités de tout le monde, c'est peut-être d'en faire un, un différent, mais de le faire rattaché au conseil principal pour que ce monde-là se parle. Ça ne pourra pas être des définitions de terroir différentes pour des boissons alcoolisées que pour les autres produits alimentaires, ou pas nécessairement juste alimentaires parce qu'il y a peut-être d'autres produits que l'alimentaire dans les produits du terroir. Pour la même chose, artisan et fermier, il y a les mêmes distinctions, là. Il y a sûrement lieu que ces gens-là travaillent ensemble.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Pellerin. Alors, si vous permettez, je vais céder la parole au député de Beauce-Nord. Vous avez deux minutes, M. le député.

M. Grondin: Merci, Mme la Présidente. M. Pellerin. Moi, on a parlé beaucoup, mardi, là, quand la commission a commencé, puis j'aimerais vous entendre, j'aimerais savoir qu'est-ce que l'UPA pense de ça comme on parle, pour développer l'occupation du territoire, que les produits du terroir soient, comme vous le disiez tout à l'heure, attachés à une région. Est-ce que c'est bien vu dans l'UPA? Parce que c'est sûr que, les produits du terroir, c'est des petites fermes, peut-être que c'est un autre genre de ferme qui n'est pas nécessairement ce qu'on voit présentement, là, aux grosses fermes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Ça aussi, il faut peut-être tuer le préjugé sur cette question-là. Regardez ce qui s'est développé dans le domaine des fromages fins, au Québec, dans les 10 dernières années. Ça s'est fait à l'intérieur d'un système de mise en marché collectif. Ça s'est fait dans une production contingentée. Il y a des gens qui vont venir vous dire que ça ne se peut pas que ça se fasse dans un système comme ça, il faudrait éclater la mise en marché collective et les systèmes de contingentement pour pouvoir développer les produits régionaux. J'espère que vous allez les revirer de bord en disant: Regardez donc le passé, là, il est assez garant de l'avenir.

Dans le secteur laitier, au Québec, on a développé au-delà de 300, 350, 400 sortes de fromages différents dans le système de mise en marché collective tel qu'il existe. Donc, les compromis, la flexibilité est là, elle est possible. Le secteur de la volaille qu'on connaît un peu moins, là, il y a aussi un paquet... Il n'y a pas un poulet qui est produit de la même façon, au Québec, dépendamment du marché où il va, si c'est pour telle rôtisserie ou telle autre utilisation, ils ont déjà des cahiers de charges assez précis. Donc, ça existe même dans les grandes entreprises.

Oui, il y a, dans notre réflexe collectif, il y a toujours une association entre produit du terroir et petite entreprise. Malheureusement, dans la réalité des choses, malheureusement pour certains, heureusement pour ceux qui sont impliqués dans ces produits-là, le Pied-De-Vent ne se fait pas juste deux, trois meules par semaine, sans ça, on serait juste quelques-uns à y avoir goûté. Alors, ça demande quand même un certain volume.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Pellerin. Alors, je retourne du côté du gouvernement. M. le ministre.

M. Lessard: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais maintenant qu'on teste peut-être deux, trois produits dans la façon de faire, dans l'arbre de décision que vous proposez, à savoir, un, je reviens... Vous parlez que le conseil d'accréditation actuellement alimentaire du Québec soit l'instance. Quoiqu'après le commentaire du député des Îles, vous prévoyez qu'il y avait comme deux têtes: alcoolique et alimentaire. Quoique vous seriez capable de vivre avec une modification qu'au niveau de... la réputation du conseil d'accréditation a largement dépassé, vous pensez, l'expérience pour prévoir que ce sera sur toutes les attestations. Il pourrait y avoir CAAQ en haut qui permettrait, avec une modification pour les attestations soit du terroir, du mode de production et de spécificité.

Vous avez fait après ça appel au plan marketing parce que vous me parlez sur l'identification parce que, dans notre plan d'action, on prévoit dans la modification de la loi ? excusez ? on prévoit: un, un label alors une façon de s'identifier. Et vous prévoyez qu'avec Aliment Québec... Alors, je voudrais peut-être aussi vous entendre là-dessus. Et, à la fin, les dents. Alors, les dents, c'est-à-dire l'inspection, conférer des pouvoirs que la Loi sur les produits alimentaires a peut-être pour les inspections et le conférer, le donner au CAAQ. Alors donc, j'aimerais ça que vous me parliez un peu de... parce que dans le fond c'est la façon de procéder. Est-ce que ça ? excusez... Est-ce que ça fonctionne avec l'appellation biologique?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre. M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Ce qui a été mis en place dans le secteur biologique, au fil des dernières années, donne les résultats. Je pense que le secteur est relativement satisfait, là, c'est des bons mots qu'on entend de la part du secteur biologique. Il y a encore des choses à améliorer, là, mais je pense qu'on a fait un grand pas en avant. D'abord, on a regroupé les écoles de pensée, les religions qu'il y avait là-dedans parce que c'était presque religieux, cette affaire-là. Et là je pense que les gens se sont entendus pour dire: Bien, il y a une référence unique qu'on va avoir. Et, si mon information est bonne, on est en train de faire le même exercice au niveau canadien où finalement il y aurait un vocabulaire ou une définition assez semblable à la grandeur du pays. Parce que, quand ces gens-là vont sur le marché de l'exportation, par exemple, soya bio qui est vendu au Japon, quand il vient du Canada, il faut que les acheteurs sachent que c'est la même référence que ce soit de Saskatchewan ou du Québec. Ça, c'est en train de se faire, et je pense que le Québec a été d'une grande aide dans la réflexion canadienne dans ce secteur-là. Et on pourrait même être d'une grande aide dans les autres secteurs si on faisait notre job correctement, on est les pionniers là-dedans le Québec, là, au Canada.

L'autre partie, sur le conseil d'accréditation, je vais le répéter autrement en disant que notre premier choix, ça aurait été un conseil d'accréditation unique, mais peut-être que ce n'est pas possible ou ce n'est pas souhaitable. Et le compromis qu'on proposait dans notre mémoire, qu'on propose dans notre mémoire, c'est d'en faire à la limite deux, idéalement qu'ils soient connectés. On n'est pas très forts sur les bicéphales, là. Idéalement qu'il y ait une connexion pour les raisons que je disais tantôt; ça va être les mêmes définitions de produits, alors il faut que ces gens-là se parlent.

Par ailleurs, on pense que c'est incontournable que les boissons alcoolisées soient incluses dans le projet de loi, et je pense que ce serait une bonne action de leadership de la part du MAPAQ d'aller chercher ce secteur-là. Ce sont des productions agricoles; même s'il y a des gens qui peuvent prétendre que ça relève d'un autre ministère, je pense que c'est un bon exercice d'être les premiers à aller chercher ce secteur-là et de les attacher au secteur agricole et agroalimentaire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le ministre.

M. Lessard: Oui, merci. Ça me permet peut-être aussi d'en profiter pour faire le point là-dessus, la Loi sur les appellations réservées permet de faire des réservations pour les boissons alcoolisées actuellement.

M. Pellerin (Laurent): Ces propos m'ont été rapportés, vous en avez parlé dans les audiences au cours des auditions de la commission dans les derniers jours. Ça nous surprend un peu que le MAPAQ ait créé cette lecture-là, et c'est notre surprise agréable. Si c'est ça qui est écrit à quelque part, on voudrait d'abord se le faire expliquer plus clairement parce que nous autres on ne l'avait pas perçu comme ça, et, si on ne l'a pas perçu comme ça, peut-être que d'autres ne le percevront pas comme ça. Puis, si c'est l'intention, pourquoi ne pas le mettre plus clair encore?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le ministre.

M. Lessard: Parfait. Je pense que oui et je pense que ça nous permet de faire le point sur bien des aspects sur parfois la méconnaissance du pouvoir qu'a actuellement la Loi sur les appellations réservées et sur ses précisions, comme on l'avait fait sur le mode de spécificité qui permettait quand même, sous ce volet-là, d'aller chercher des produits fermiers ou artisanaux. Alors donc, on fait renforcement positif dans ce volet-là. Nécessairement qu'on s'aperçoit qu'à l'international c'est le fromage et le vin qui ont fait beaucoup et voyager les produits, et connaître les régions, et connaître les particularités. Alors donc, et sur ce point-là, tout à l'heure on disait: Oui, mais quand les produits étrangers rentrent chez nous, la sécurité que c'est bien, exemple, biologique? Il y a quand même un processus sur la reconnaissance des organismes de certification, sur notre pendant, exemple, en Europe, notre pendant en Allemagne, notre pendant aux États-Unis. Il y a quand même des conseils d'accréditation.

n(10 h 20)n

Et ça se passe comment quand le produit américain rentre ici? Il y a eu donc son accréditation américaine reconnue par le conseil d'accréditation ici? Et, quand quelqu'un va dans les tablettes, c'est qui qui va dans les tablettes pour voir si le produit est correct, il respecte ou s'il doit être retiré? Prenons pour le biologique.

M. Pellerin (Laurent): Regardez, on n'a pas insisté beaucoup sur ce paragraphe-là, mais il y a un paragraphe où c'est assez clair: il faut imposer les mêmes conditions aux produits qui vont venir de l'étranger que ceux qu'on fait ici. Et là-dessus on a une grande crainte parce que, même dans la sécurité et dans la qualité alimentaire, on ne la fait pas, cette vérification-là.

Et vous m'ouvrez la porte pour reparler de mes petits concombres encore. Je veux dire, cette année, on va avoir des concombres, dans les pots, qui viennent de l'Inde. On a perdu 50 % de la production de pickels, au Québec, parce que la compagnie a décidé d'aller chercher sa matière première en Inde. Est-ce qu'il y a quelqu'un, au Québec, qui sait comment des petits concombres, c'est produit, en Inde? C'est quoi, les conditions de fertilisation, avec quelle sorte de stock ça se fertilise, dans quelles conditions c'est récolté, est-ce que les cueilleurs ont accès à des lavabos à tous les bouts de champ, comme c'est des exigences ici, là, ça? Ce n'est pas martien, là, c'est ça qu'on exige, nous autres, ici, là, que les gens soient propres, il faut qu'ils soient... Y a-tu les mêmes exigences en Inde? Peut-être; on ne le sait juste pas.

Alors, imaginez-vous dans les... Puis ça, c'est la sécurité alimentaire, là. Ça fait qu'imaginez-vous, dans les appellations, comment ça va être difficile de faire ces vérifications-là. Alors, les dents, c'est sûr que ça va en prendre, il va falloir probablement mettre quelques personnes, ramener quelques personnes à l'ordre, dans ces produits importés là pour, à un moment donné, sonner la cloche, pour dire: Regardez, là... Et c'est dangereux, cette partie-là, hein? C'est dangereux, pas juste pour la santé, c'est dangereux pour qu'est-ce qu'on fait ici. On est en train de saboter tout ce qu'on fait ici. Ça a été le textile dans les derniers mois. On fait venir des guenilles de n'importe où à travers le monde, la qualité, le prix. Dans les conditions dans lesquelles c'est fait ? c'est-u fait par des enfants, c'est-u fait par du monde qui est maltraité, c'est-u fait par... ? ça nous importe peu; personne ne pose de questions. Et, dans l'alimentaire, il est en train de se passer la même affaire.

Hier, c'était les ? je ne sais pas si vous avez lu les coupures, hier, là; c'était les ? bicycles, l'intention canadienne de mettre une douane ou une taxe de 30 $ par bicyclette parce que les Chinois, c'est des experts en production de bicycles. Et là il y a une opposition canadienne qui est en train de se développer à cette taxe-là, en disant: Écoute, si les fabricants canadiens, particulièrement québécois, ne sont pas capables de faire face aux Chinois en production de bicycles, qu'ils disparaissent. Bien, en agroalimentaire, c'est ça qui nous guette. Si on n'est pas capable de faire face à la compétition étrangère avec les mêmes outils, s'ils ne rencontrent pas nos mêmes standards, vous êtes en train de nous mettre en dehors du marché.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Il reste deux minutes, M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Pellerin. Question première très rapide. Si je me rappelle, dans votre discours, vous aviez parlé que le CAAQ, le Conseil des appellations agroalimentaires, pourrait éventuellement être un organisme qui s'autofinance. Est-ce que c'est ça que vous avez bien dit?

M. Pellerin (Laurent): Peut-être qu'on ne sera plus en vie, là.

M. Bernard: Parce que c'est...

M. Pellerin (Laurent): Je vous ai dit que c'est moyen terme, long terme. Il faudrait rêver un jour qu'il s'autofinance, ça, il n'y a pas de doute dans mon esprit, mais à court terme ça va prendre une contribution, je pense, musclée de la partie publique parce que les premiers utilisateurs, là, c'est des petites entreprises, les moyens sont extrêmement limités. Alors, si on leur refile la facture totale de la vérification, de l'accréditation, tout ça, ça ne startera jamais, ça ne lèvera jamais.

M. Bernard: C'est ça.

M. Pellerin (Laurent): D'ailleurs, les gouvernements en Europe, le gouvernement français particulièrement met beaucoup d'argent dans le contrôle des appellations. Et vous voyez la France, la réputation qu'ils ont sur les produits d'appellation, là. Il y a des... Je ne sais pas, je pense qu'il y a 70 sortes d'appellation: poulet, il y a... vous connaissez les vins, vous connaissez les fromages. Et, malgré tout ça, ça ne représente que... c'est inférieur à 20 % de la production totale française, les produits qui sont sous appellation. Mais pourtant leur réputation mondiale, c'est les produits d'appellation. Alors, je pense qu'il y a un effort à faire de ce côté-là. Et peut-être qu'un jour, quand vous et moi serons pépères, on verra que le conseil s'autofinance, mais ce n'est pas pour demain.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Très courte question...

M. Pellerin (Laurent): Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): ...du côté du député de Portneuf et très courte réponse du côté de M. Pellerin, s'il vous plaît, pour moins d'une minute.

M. Soucy: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Pellerin, dans votre discours, dans vos façons de faire antérieures, l'UPA était vue comme quelqu'un qui favorisait la production de masse, hein. On l'a vu, puis ça a été une volonté qui a été très bien exprimée. Là, nous autres, on veut faire du développement régional, puis tantôt vous avez parlé du fromage des Îles, puis vous souhaitez que tout le monde en mange. Mais, quand on a un produit de niche, un produit de créneau, ce n'est pas tout le monde qui en mange, c'est seulement ceux qui ont les moyens d'en manger. Il y a certains vins qu'on n'est pas tous capables de boire. Alors, si on veut se démarquer, comment concilier la spécificité puis la masse?

M. Pellerin (Laurent): Le fromage des Îles, je n'ai pas dit qu'il faudrait que tout le monde en mange, je veux dire, qu'il y en ait au moins pour notre gang, toujours.

Ce sera toujours un combat, et même les gens qui sont impliqués dans ces productions-là, ils ont toujours la même limite des tentations d'aller un petit peu de volume, un petit... Bon. Nous autres, on a été les promoteurs depuis toujours, je me rappelle, au milieu des années quatre-vingt, on donnait des cours de formation aux producteurs agricoles pour la vente en kiosque à la ferme, il faut se rappeler ça aussi. L'UPA, on a... je pense, on est un large forum où les gens viennent partager leurs idées, où à peu près toutes les tendances se retrouvent. Et, nous autres, si vous voulez, notre grande foi ou notre grande croyance, c'est que tous ces créneaux-là, tous ces marchés-là, s'ils existent, on veut les occuper. On veut faire du bio, on va l'occuper.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Pellerin. Du côté de l'opposition, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour. J'aurais peut-être deux points à vouloir clarifier. Tout à l'heure, vous avez parlé des importations comme telles et vous avez parlé à la fois de sécurité alimentaire. Donc, si je reviens... parce que là c'est préparer quelque chose sur des produits d'appellation contrôlée, produits du terroir, etc. À l'heure actuelle, au niveau du biologique, qu'est-ce qui se passe véritablement? Parce qu'on voit, à l'heure actuelle, la demande est très forte, on le sait, et le développement ne suit absolument pas la demande. Donc, il y avait question de nos saisons, et tout ça, donc les gens se tournent vers les importations. Ce que vous sembliez nous dire tout à l'heure, il y a quelque chose de fait au niveau de la sécurité alimentaire, mais au niveau du biologique comme tel, on se fie aux critères des autres pays ou des autres... Alors, ça, j'aimerais vérifier ça; ce n'était pas clair pour moi.

M. Pellerin (Laurent): Je pense que... Tantôt, je parlais des religions, il y a comme quatre, cinq, six, sept, huit, neuf grandes écoles de définition bio à travers le monde, qui ont chacune leur cahier de charges. La difficulté qu'on avait au Québec, c'est qu'on a parti avec ce stock-là, il y avait déjà des producteurs dans chacune de ces écoles-là, et c'était de les regrouper ensemble pour dire: Ça va être quoi, un produit québécois bio? Cet exercice-là, il est fait au Québec. Il n'est peut-être pas fait à la grandeur du Canada, ça s'en vient, mais, au Québec, il est fait. Les gens ont choisi le conseil d'accréditation comme étant celui qui va, en haut de la pyramide, reconnaître que telle, telle pratique, c'est vraiment une pratique bio.

Vous dites: La consommation s'est développée et la production n'a pas suivi. La production n'a jamais suivi parce qu'il y a toujours eu un marché de bio, puis on n'était pas là. Ce qu'on s'est donné comme objectif dans les dernières années, c'est de le remplir avec des produits québécois. Donc, avec le conseil d'accréditation, je pense que ça a aidé. J'ai de la misère avec l'affirmation générale qu'on n'est pas là, par ailleurs, dans les secteurs de produits alimentaires.

Dans certains secteurs, je prendrai deux exemples. Dans le secteur des produits laitiers, c'est vrai qu'on n'était pas là. Il y a tellement de producteurs qui se sont convertis au bio dans les dernières années qu'à un moment donné, il a fallu livrer du lait bio en Ontario parce que nos transformateurs québécois ne fournissaient plus. Alors, ils ont augmenté leur volume de transformation, ils ont rejoint ce qu'on produisait au Québec. Il y a de nouveaux producteurs qui entrent en production cette année, ça va peut-être dépasser la capacité de transformation des usines du Québec, donc ça s'ajuste comme ça. On importe 70 %; l'idéal, c'est que, comme je disais tantôt, nous autres, on souhaite produire tout ce qui se mange ici. Si les gens veulent manger une salade chez McDo, on va la faire. S'ils veulent manger un produit bio, on va le faire. Ils veulent un produit haute gamme, on va le faire. Ils veulent une boisson alcoolisée artisanale, on va la faire. C'est notre job, nous autres, de produire.

Le secteur du sirop d'érable. Le sirop d'érable bio, la réserve de sirop d'érable bio, elle est présente aussi. Il y a trop de stock en réserve, donc la demande n'est pas tout à fait là pour répondre à ce qu'on a déjà produit. Là aussi, il y a un équilibre qui se fait dans le temps. Dans d'autres secteurs, on n'est absolument pas là. Quel secteur qu'on n'est pas là, pantoute, pantoute, les pires, les plus bas? Secteur maraîcher, dans le maraîcher, on exporte certains produits. Qu'est-ce que je pourrais vous donner comme exemple, un secteur où on n'est absolument pas là, dans le bio? Ils viennent-u en audience, les gens du bio? On va vous retourner l'information, mais on en a, des secteurs où on n'est à peu près... Enfin, l'affirmation générale, elle n'est pas véridique, je pense qu'il faut y aller secteur par secteur.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord, M. Pellerin. Alors, du côté de l'opposition, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Évidemment, pour peut-être aller un petit peu plus loin. Effectivement, quand vous me parlez du sirop, du lait, donc c'est très clair qu'au niveau du bio, à l'heure actuelle, on ne fournit pas le marché du tout, du tout de la demande ou quoi que ce soit.

n(10 h 30)n

Quand vous me parlez de la sécurité, vous dites qu'on a fait nos normes à partir des normes qui étaient au niveau des autres pays, mais est-ce que ces normes-là, à l'heure actuelle, on s'assure qu'elles sont respectées ailleurs, comme on l'a pour la sécurité alimentaire? C'est dans ce sens-là que je posais la question.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Bien, est-ce qu'on s'assure qu'ils sont respectés ailleurs, sur les produits qui sont consommés ailleurs, on n'a aucun outil pour le faire. Est-ce qu'on s'assure qu'ils sont respectés ailleurs sur les produits qui rentrent sur nos marchés actuellement? Très peu, et c'est pour ça qu'on demande que le conseil d'accréditation, il ait des dents pour aller surveiller ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci.

M. Pellerin (Laurent): Il y a certains produits, là, bios qu'on ne produit que pour l'exportation, ou essentiellement presque juste pour l'exportation. Je prends le soya bio, ça s'en va presque à 100 % à l'exportation, il n'a à peu près pas d'utilisation sur le marché domestique. Alors, vous voyez que c'est très varié d'un produit à l'autre.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Oui, merci, Mme la Présidente. Toute cette question des importations et des exportations aussi des produits, soit biologiques, je pense, parce qu'on a l'exemple du bio, mais pour les appellations réservées qui viendront, j'aimerais que vous précisiez: en regard des produits biologiques qui sont vendus au Québec sur les tablettes, c'est aussi le conseil d'accréditation qui accrédite des organismes, qui valide, qui certifie que les produits sont bios, ça, c'est vérifié, et ces produits étrangers qui sont vendus sur les tablettes comme bios sont selon les règles québécoises, oui ou non?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Ce n'est pas tout à fait comme ça. Le conseil d'accréditation n'accrédite pas les normes extérieures, là. Si des gens avaient des normes différentes un peu à l'extérieur, le conseil d'accréditation du Québec n'a pas...

M. Arseneau: Bien, pour qu'ils soient vendus au...

M. Pellerin (Laurent): Il vérifie s'ils sont en ligne avec qu'est-ce que, nous autres, on a fait comme choix au Québec.

M. Arseneau: C'est ça.

M. Pellerin (Laurent): Et là, si vraiment on veut vérifier, bien, il faut aller sur la tablette, prendre le produit puis regarder. Bon, il est OAC, là, qui est une des organisation internationale, là, O.K., OAC, c'est conforme à nos appellations québécoises. Mais, si c'est «natural beef» de l'État du Wyoming qui a mis un «sticker»«natural beef» sur son morceau de boeuf, bien là, «natural beef» du Wyoming, je ne sais pas, moi, si c'est accrédité, ça. Ce n'est sûrement pas accrédité en fonction de cadre d'accréditation québécois, là.

Mais ça, pour le vérifier, il faut qu'il y ait des gens qui aillent voir dans les magasins. Et actuellement, le pouvoir d'enquête dans les magasins, ou juste la capacité humaine d'avoir des gens dans les magasins pour aller vérifier ça, elle n'est pas vraiment là.

M. Arseneau: Mais il n'a pas les moyens, mais il a les pouvoirs... il n'a pas le pouvoir d'enquête mais, en principe, normalement, un produit qui est vendu bio, qui s'étiquette bio sur les tablettes au Québec doit correspondre aux normes établies par le Québec?

M. Pellerin (Laurent): Oui.

M. Arseneau: En ce qui concerne maintenant l'exportation, vous avez mentionné qu'il y avait des normalisations à faire avec les autres composantes du Canada. On sait que, dans le bio, par exemple, bon, ils n'ont pas les mêmes définitions, les mêmes normes. Quand on venait pour exporter des produits bios sur le marché européen, par exemple, on avait des problèmes parce que ce n'était pas... les normes fédérales, ils ne reconnaissaient pas les normes québécoises. Est-ce que ça, c'est en train de s'aplanir? Est-ce que ça va se régler finalement?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse, M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Bien, vous savez que ? ce n'est pas à vous autres que je vais l'apprendre ? le Québec n'est pas un pays, aujourd'hui encore, hein.

M. Arseneau: Non, c'est à faire. C'est comme le projet de loi n° 113, ça s'en vient.

M. Pellerin (Laurent): Bon, alors, quand on va à l'international, les acheteurs étrangers, ils regardent les normes du pays, et les normes canadiennes dans le bio sont inexistantes. Ça fait qu'on arrive, nous autres, pour exporter des produits bios du Québec: Vous êtes qui, vous autres, le Québec? Ça répond à quelle définition, ça?

Alors, on a un problème avec ça, et il y a deux façons ? je connais la vôtre ? de régler le problème, et l'autre façon, c'est qu'il y ait une norme canadienne qui s'applique, et le travail est en train de se faire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien.

M. Pellerin (Laurent): Consultation cet automne, consultation cet automne sur cette uniformisation canadienne là sur la norme bio.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Pellerin, merci, Mme Lupien, de l'Union des producteurs agricoles, pour votre éclairage. Merci.

M. Pellerin (Laurent): ...ça fait plaisir.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, j'invite l'Association des détaillants en alimentation du Québec à prendre place, s'il vous plaît, à prendre place. Les collègues, s'il vous plaît.

Alors, M. Yves Labrecque, auriez-vous la gentillesse de présenter la personne qui vous accompagne? Et vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire.

Association des détaillants
en alimentation du Québec (ADA)

M. Labrecque (Yves): Bonjour. Alors, mon nom est Yves Labrecque, et la personne qui va présenter le mémoire est ici, à ma gauche, et je le laisse se présenter, M. Pierre-Alexandre Blouin.

M. Blouin (Pierre-Alexandre): Pierre-Alexandre Blouin, coordonnateur aux affaires publiques pour l'Association des détaillants en alimentation.

Juste pour vous situer rapidement, l'ADA représente tous les détaillants propriétaires en alimentation au Québec, indépendamment de leurs commerces, de leurs bannières ou du type de surface qu'ils peuvent avoir; c'est autant des Métro, des GP, comme M. Labrecque, des dépanneurs Ami, Bonichoix, etc.

M. le ministre, Mme la Présidente, Mmes et MM. les députés. L'ADA est très contente de pouvoir se prononcer sur le projet de loi puisque ça fait longtemps qu'on travaille sur ces dossiers, tout ce qui a trait à la mise en marché des produits régionaux, le développement de l'économie régionale. Le secteur alimentaire peut sembler simple, mais pourtant la chaîne alimentaire est loin d'être linéaire. Le marché intérieur côtoie maintenant celui de l'international, les produits dans les épiceries proviennent de partout dans le monde, alors que ceux fabriqués ici voyagent au sud, à l'est et à l'ouest. L'histoire de la fermeture de la frontière américaine au boeuf n'est qu'un exemple de cette nouvelle réalité. Une large part de notre production intérieure dépend fortement des marchés d'exportation. Comme ailleurs dans le monde, la grande majorité des entreprises agroalimentaires québécoises se sont tournées vers la production de masse à bas prix où l'on recherche les économies d'échelle et répondent d'ailleurs à la demande des bas prix de la majorité des consommateurs. Seule une faible proportion de la population, comme on a pu le dire tout à l'heure, est à la recherche de produits de créneaux spécifiques plus dispendieux.

Ainsi, pour les petites entreprises alimentaires incapables de rivaliser en termes de prix, une appellation réservée ou une certification peut sembler la solution ultime de mise en marché. L'aventure est pourtant périlleuse, puisqu'il faut convaincre les consommateurs de la valeur ajoutée d'une appellation ou d'une certification, alors que le respect d'un cahier de charges fait certainement augmenter le coût du produit en comparaison avec une production régulière. Présentement au Québec, plusieurs produits utilisent des appellations géographiques, alors qu'ils ne sont pas fabriqués dans cette région donnée. M. Pellerin en a donné un très bon exemple. D'autres produits revendiquent un mode de production artisanale alors qu'ils sont fabriqués à la chaîne. Les consommateurs québécois sont lésés, puisqu'ils se retrouvent à payer plus cher des produits auxquels ils attribuent à tort une valeur ajoutée.

Pour nous, le projet de loi est un bon pas, un pas dans la bonne direction pour le développement des produits régionaux. Les appellations réservées, c'est une opportunité dont le Québec ne peut pas se passer. À vrai dire, c'est l'axe essentiel de développement des régions à notre avis. La chaîne agroalimentaire emploie énormément de personnes dans toutes les régions du Québec, et ce moteur-là doit être privilégié pour son développement. Dans notre mémoire, on fait état de plusieurs problématiques que l'on trouvait dans le processus qui nous a été démontré.

Tout d'abord, la protection des appellations et des inspections. À notre avis, des mesures coercitives sont nécessaires puisque, dans l'état actuel des choses, on voit facilement plusieurs exemples de façons de contourner la loi pour utiliser, par exemple, un terme comme fabrication de type artisanal pour pouvoir contourner une appellation artisanale d'un produit.

n(10 h 40)n

Il y a aussi la question de l'inspection. Puisqu'il a été question de confier cette tâche-là au CQIASA, le Centre d'inspection des aliments, nous, notre facture, comme le CCDA l'a bien dit hier, mardi, notre facture a augmenté. On nous demande de financier à 50 % les frais d'inspection des aliments.

On le fait déjà à contrecoeur; c'est une très grosse augmentation pour certains marchands. Ça peut faire une facture de 260 $ qui devient 1 200 $ pour un seul des permis qu'on a besoin pour opérer un magasin d'alimentation. C'est assez important, surtout avec la marge de profit qu'on retrouve dans le secteur alimentaire, qui est probablement la plus basse dans le milieu. Pour nous, le CQIASA n'a pas non plus les compétences de base qu'il faut pour ce type d'inspection. Un groupe comme le CAAQ, qui travaille sur des appellations spécifiques, à notre avis, serait beaucoup plus à sa place.

Il y aussi toute la question des marques de commerce existantes. Il y a déjà beaucoup de produits sur le marché qui ont des appellations qu'ils se sont données puis qu'ils ont enregistrées de façon privée. Qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là qui ont des termes qui sont protégés légalement? Puis de plus c'est une compétence fédérale. Donc, une loi provinciale qui arrive, qu'est-ce qui arrive avec ça? On ne le sait pas, puis ça nous inquiète beaucoup.

Il y a aussi toute la question de la gestion et la sélection des appellations. L'ADA redoute une surenchère de l'offre de produits similaires qui auraient de la difficulté à se démarquer les uns des autres. Il ne faut pas que l'on se retrouve avec des tonnes de produits, des tonnes d'appellations, que le consommateur n'arrive plus à faire la différence entre celui qui est certifié par le projet de loi et celui qui est une marque privée qui était déjà enregistrée avant. Il va falloir clarifier cette question-là.

Également, il est important de s'assurer d'harmoniser non seulement nos définitions mais également nos normes, puisqu'il existe de nombreuses différences entre les exigences applicables aux aliments vendus au détail au Québec par rapport aux autres provinces canadiennes et aux autres pays. Il serait ridicule que des aliments importés puissent contourner notre législation ou qu'à l'inverse nos appellations réservées restreignent l'accès aux marchés extérieurs. Parce qu'il ne faut pas se leurrer. Beaucoup de nos produits qui sont fabriqués ici ne sont même pas mangés ici. M. Pellerin aurait pu beaucoup élaborer là-dessus. Souvent, nos produits sont d'une qualité telle qu'on exporte toute notre production, puis on importe des produits pour les remplacer sur nos tablettes.

Il y a aussi tout l'axe de la commercialisation. Pour nous, c'est le noeud du problème. On peut mettre autant d'argent qu'on veut en amont de la chaîne, si les produits ne se retrouvent pas sur les tablettes, tout notre travail va être vain. Le secteur agroalimentaire est très important. Il y a déjà des maillages qui se font dans les différentes régions du Québec. La chaîne GP est un exemple à suivre dans ce domaine-là. J'espère que Yves va avoir l'occasion d'en discuter tout à l'heure. Pour eux, pour les commerçants québécois, les propriétaires, la différenciation, c'est la seule façon de lutter dans le marché, qui est devenu extrêmement concentré. Les producteurs, les transformateurs comme les détaillants doivent miser sur ce type d'approche, puis ils le font déjà. Sauf que c'est certain qu'un coup de pouce ne peut pas faire de tort.

Pour nous aussi, il est très important d'avoir une certaine forme d'uniformité visuelle par rapport au «label» ou les appellations, puisque c'est très difficile de mettre en marché un produit. Il y a des compagnies qui font des campagnes, des campagnes de lancements de produits avec des milliers et des milliers de dollars, puis que le produit est retiré au bout d'une seule année. Ce n'est pas automatique, lorsqu'on place un produit sur une tablette, qu'il va être vendu.

Pour nous, la proposition de prendre Aliments du Québec comme logo de base sous les différentes déclinaisons nous apparaît très intéressante. Puisque le produit a maintenant huit ans de vécu, il a bâti une bonne ? comment on dit? ? une bonne notoriété, puis il serait un peu ridicule de créer une nouvelle appellation, un nouveau terme que le consommateur prendrait, je ne sais pas, cinq ans à s'habituer au produit. Il faut aussi éduquer le consommateur, puisque c'est de cette façon qu'il va reconnaître le produit, qu'il va l'acheter, qu'il va l'adapter dans son alimentation quotidienne ou mensuelle, etc.

Il faut mettre beaucoup d'énergie dans la mise en marché, puis il reste une dernière étape qui est très importante, dont je n'ai pas encore entendu parler malgré que j'aie suivi les premiers débats, la question du référencement, qui est incontournable. Les produits doivent être référencés chez les différentes bannières pour qu'un marchand propriétaire puisse ensuite l'implanter dans son magasin.

En terminant, j'aimerais rajouter un mot sur les alcools artisans. L'ADA a tenté de faciliter la mise en marché de certains producteurs artisans, on s'est butés à des réglementations internationales. C'est un dossier assez difficile à suivre, sauf que pour nous c'est très important de reconnaître ces produits-là à leur juste valeur. Ils sont reconnus à travers le monde, ils sont distribués dans des restaurants, dans des pays un peu partout, et puis ici on a de la difficulté à les retrouver, ces produits-là. Les cidres de glace en particulier ont une notoriété puis sont des produits purement québécois, il va falloir qu'on les encadre. La question de leur mise en marché, c'est un autre débat, je le comprends, sauf qu'il va falloir que l'on insère ce produit-là à l'intérieur de la législation, si possible. On est ouverts aux questions.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter, M. le vice-président?

M. Labrecque (Yves): Non, ça va, excepté le fait que j'aimerais quand même me présenter et présenter aussi le contexte dans lequel, moi, j'évolue et je travaille. Alors, je suis administrateur de l'Association des détaillants du Québec, et ça, c'est un chapeau. J'ai un autre chapeau aussi où je suis, dans mes fonctions actuelles, vice-président alimentation pour Supermarchés GP.

J'aimerais présenter Supermarchés GP parce que peut-être ça peut orienter les questions. Supermarchés GP, c'est le plus important détaillant indépendant au Québec, et nous avons 14 points de vente et nous avons sept points de vente en région, la région du Bas-Saint-Laurent, et nous avons aussi sept points de vente dans la région métropolitaine de Québec.

Alors, à ce moment-là, nous faisons connaissance avec essentiellement deux cultures différentes: soit une culture régionale et aussi une culture urbaine, si vous voulez. Et ça, ça fait un petit peu toute la différence au monde au niveau de la perception des consommateurs, des produits qui se différencient par leur région ou par leur mode de production ou par autres facteurs de différenciation possibles.

Pour aller plus avant, chez nous, Supermarchés GP, nous avons l'expérience de mettre en valeur les produits régionaux, les produits artisans et les produits qui sont faits, qui sont fabriqués en plus petit volume, et non pas nécessairement sur des bases qui sont industrielles. Et par rapport à nos 14 sites, à nos 14 points de vente, nous avons débuté il y a quatre ans ce qu'on appelle, nous, à l'intérieur de nos supermarchés, dans un endroit privilégié, c'est-à-dire à l'entrée du supermarché, ce qu'on appelle, nous, un «prime spot», nous avons fait étalage, nous avons construit un concept qui peut être comme un concept de fruits et légumes et de viande, mais qui est un concept aussi de produits du terroir. On appelle ça, nous, notre marché du terroir, et nous avons développé le concept, nous avons commencé par un supermarché en 1999, 2000, 2001 à peu près, et nous sommes rendus maintenant à la moitié de nos supermarchés où on a développé cet espace de mise en marché là des producteurs au profit des producteurs locaux ou régionaux.

Donc, nous avons environ 750 produits actuellement qui sont référencés dans cet espace de mise en marché là. Alors ça, c'est une expérience pour nous, et concrètement ça nous fait la démonstration qu'il était quand même assez difficile de mettre en marché les produits des artisans, des produits artisanaux, mais qu'avec la bonne volonté de tout le monde on est capables de mettre en marché et de générer cette fierté-là aussi au niveau des producteurs et des transformateurs artisans et de développer aussi le goût de la découverte pour nos consommateurs.

n(10 h 50)n

Alors, nous sommes très contents et très, très satisfaits que finalement le gouvernement balise, à tout le moins, les notions de terroir, les notions d'artisan, parce que n'oubliez pas que nous sommes sur la ligne de front et souvent, les questions, c'est nous qu'on a à y répondre. Et on a vu aussi ce que, dans les produits que M. Pellerin a amenés ici, que souventefois il peut être très difficile pour nous de répondre à certaines questions concernant la nomenclature de ces produits-là. Alors, nous, on voit ça d'un très, très bon oeil, autant comme détaillants puis autant comme association de détaillants, que finalement on mette les règles en place, on éclaircisse les règles du jeu et qu'on commence à éduquer aussi la population en rapport avec tout ce qui s'appelle produit du terroir.

Voici. C'est à peu près ce qu'on avait à dire de notre côté.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Labrecque et M. Blouin. Alors, M. le ministre, vous avez un premier bloc de 10 minutes.

M. Lessard: Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, merci beaucoup de votre présentation. Et je pense qu'on est au coeur même de l'action. Vous représentez 9 000 détaillants au Québec, des points de vente. On a reçu le Conseil canadien de la distribution alimentaire, qui représentait 80 % à peu près des volumes de ventes dans l'ensemble de ces marchés-là. Vous êtes dans les régions du Québec, marchés GP, donc vous faites la promotion et le développement des produits qu'on pourra qualifier du terroir, ou artisanal, ou, bon, on voit qu'il y a plusieurs définitions. Mais on va essayer de se concentrer sur le comportement du consommateur, parce que vous m'en avez parlé. On regardera le... Je vais vous parler d'inspection, de... puis des labels, nécessairement.

Alors, comme on est dans un marché de différenciation, souvent on nous parle de l'international, mais il y a plusieurs produits qui vont demeurer souvent locaux. Si on parle d'une production artisanale, donc qui n'est pas automatisée, nécessairement qu'il y aura quelque part une limitation. Les produits qui sont dans vos tablettes, ils viennent des producteurs du Bas-Saint-Laurent. Est-ce que, cette appropriation-là, est-ce qu'on est capable d'identifier des producteurs locaux qui se retrouvent en tablette, chez vous?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

M. Labrecque (Yves): Oui, absolument. D'ailleurs, nous, on a... Ici, il y a une question de règles de référencement de produits, et quand on... Nous ne sommes pas un grand distributeur, alors il est beaucoup plus facile, pour nous, de rencontrer directement les producteurs, transformateurs locaux, régionaux et de leur privilégier un accès à nos tablettes et à nos systèmes de référencement. Cependant, en faisant ceci, comme nous faisons partie aussi d'un groupe qui a rapport avec un des grands distributeurs, nous nous pénalisons un petit peu à cause de notre obligation de concentrer un certain nombre d'achats chez notre grand distributeur qui, lui, n'a pas référencé et ne peut pas référencer ou souvent, les gens, les producteurs ne sont pas intéressés à se référencer aussi à ces grands réseaux là.

Alors, on est capable de vivre avec cette pénalité-là, si on veut, en référençant des gens chez nous, dans nos petits systèmes, qui ne sont pas référencés dans les grands réseaux de distribution, parce que nous croyons que nous en tirons, au niveau de notre bannière à nous, une valeur ajoutée qui est importante.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. le ministre.

M. Lessard: Merci. Alors donc, tantôt, je vous entendais dire que dans le fond vous êtes en première ligne. Je vous félicite en tout cas pour donner une chance à tous les producteurs agricoles qui veulent donner une valeur ajoutée à leurs produits. Ça, c'est un premier temps.

Deuxièmement, c'est vous qui répondez aux questions sur c'est quoi que ça veut dire, fabrication artisanale de type fermier, etc. Est-ce que vous suggérez donc, selon ce que le projet de loi prévoit, un encadrement de ces deux appellations-là, fermier ou production fermière ou artisanale, pour éviter peut-être la multiplicité des appellations?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Blouin.

M. Blouin (Pierre-Alexandre): À vrai dire, on prône un encadrement général de toutes les appellations possibles. C'est que plus on laisse de champ libre à des utilisations fallacieuses, plus il va y avoir d'abus. Je veux dire, tant qu'on laisse un peu de corde, on prend ce qu'on peut prendre. Puis, je veux dire, il y a des compagnies pour qui c'est un «trademark», si on veut. Je veux dire, on a vu des produits qui se réclamaient de nos grands-mères ou des choses comme ça, puis c'est certain que ce n'est pas fabriqué sur le poêle à bois.

Je voudrais juste spécifier une autre chose. On parle de GP ici parce qu'on a amené GP avec nous, mais GP n'est pas le seul exemple au Québec. GP est un bon exemple au Québec. Mais il y a énormément de détaillants propriétaires à la grandeur du Québec qui font des sections réservées pour les produits régionaux, pour les produits biologiques, pour d'autres types de produits qui arrivent à leur permettre de se différencier.

Parce qu'il ne faut pas se le cacher, c'est certain qu'il y a un intérêt derrière tout ça. On est dans les affaires; il faut réussir à payer le loyer à la fin de l'année. C'est une démarche qui assure la survie des détaillants propriétaires en même temps. Puis les producteurs régionaux sont à la fois les clients de nos marchands. Donc, c'est normal qu'il y ait un échange de bons services entre eux. C'est beaucoup plus facile d'aller rencontrer un propriétaire dans son magasin en région que de se rendre au siège social, qui peut être dans n'importe quel grand centre.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le ministre.

M. Lessard: Oui. En terminant, sur l'aspect de l'inspection. Actuellement, on a donc le Centre québécois des inspections des aliments et en santé animale qui fait la vérification sur l'hygiène, la salubrité et l'innocuité. On nous a demandé: Est-ce que les pouvoirs d'inspection ne seraient pas transférés sur ce volet-là quant aux appellations d'origine ou réservées, ou etc., au CAAQ? Qu'est-ce que vous en pensez? C'est qui qui a le nez dans vos tablettes, actuellement? Quand ils passent, ils regardent tous ces volets-là ou vous faites votre autoinspection des produits régionaux? Est-ce qu'il y a comme une règle d'éthique, à savoir que les fraises grand-mère, vous n'en prenez pas parce que vous avez de la misère à l'expliquer, etc.? Alors, les pouvoirs au CAAQ puis...

M. Blouin (Pierre-Alexandre): On voit...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Blouin.

M. Blouin (Pierre-Alexandre): Excusez-moi. On souhaite que le CAAQ ait à s'occuper de l'inspection pour la simple et bonne raison qu'on trouve que le CQIASA a déjà un mandat très large à respecter puis à remplir. Puis déjà que ses coûts sont élevés, assez pour que le ministère décide de partager la facture. J'imagine qu'on n'a pas besoin de lui en rajouter.

Il y a aussi la question de la Loi sur l'étiquetage qui est fédérale, qui entre en vigueur cet automne. Le mandat est déjà énorme pour le nombre d'inspecteurs qu'il y a dans les commerces. Puis, à notre avis, la question de la salubrité puis de la sécurité des aliments doit passer avant la question des appellations alimentaires. On ne veut pas utiliser le temps de ces inspecteurs-là pour faire d'autres choses qui sont valables, mais qui pourraient être bien menées, à notre avis, par le CAAQ.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Vous voulez ajouter quelque chose?

M. Labrecque (Yves): En complément...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui. Allez-y.

M. Labrecque (Yves): ...de réponse. Oui, effectivement. Au niveau de la sécurité ou de la salubrité des aliments, évidemment c'est les gens qui sont dédiés à ça qui viennent faire les inspections. Et je peux vous confirmer que les aliments qui sont présentés en supermarché répondent aux normes, qu'ils soient artisanaux ou industriels ou peu importe, répondent aux normes d'hygiène et de salubrité. Ça, sans aucun doute. Et les inspecteurs font très bien leur travail à ce niveau-là. Aucun problème.

Par contre, il serait très difficile, pour nous, de concevoir que ces mêmes inspecteurs là puissent, à l'intérieur d'un supermarché, faire la vérification du respect des règles du jeu d'un fabricant ou d'un transformateur au niveau de ce qui respecte la Loi sur les appellations. Je pense que ça se fait à l'origine et ça se fait chez celui qui énonce que voici un produit du terroir, tu sais. Parce qu'on prend pour acquis que le produit qui a une appellation réservée, à partir du moment où il utilise cette appellation réservée et qu'il est maintenant dans nos tablettes, c'est qu'il a été quand même... il a été à l'origine ou à la source, il a été inspecté de façon à ce qu'il respecte les règles du jeu à ce niveau-là, au niveau des appellations réservées.

On ne peut pas être responsable d'un fournisseur qui dit: Bien, voici un produit régional alors que ce n'est pas un produit régional. Donc, on n'est pas placés, nous, pour faire toutes ces vérifications-là, de toute façon.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Labrecque. M. le député de Portneuf, une minute et demie.

n(11 heures)n

M. Soucy: Merci, Mme la Présidente. J'ai une question qui me brûle les lèvres. Tantôt, vous avez... Vous faites état... On parle d'étiquetage, et est-ce qu'on a fait des études pour savoir combien de temps les gens passaient à lire les étiquettes? Parce que...

Puis, ma deuxième question, c'est: L'étiquetage puis l'emballage, est-ce que c'est régi de la même façon? Est-ce qu'on ne doit pas avoir une étiquette qui donne certaines informations obligatoires? Puis, sur le reste de l'emballage, on arrive avec la mode puis le marketing? Parce que, si l'important c'est de savoir ce qu'on mange, pourtant, là, si on regarde vos dépliants promotionnels, le prix est en gros, puis le reste est en très petit. Alors, comment on peut concilier ça? Puis, comment passer à travers les modes? Comme le pain, exemple, n'a jamais eu, exemple, de cholestérol, puis parce que c'est à la mode on marque «zéro cholestérol», puis là c'est super. Il n'y en a jamais eu dedans, mais là on trompe le consommateur, en fait. Il y a des gens qui font des pieds et des mains pour tromper le consommateur, pour l'amener à faire des choix sans égard évidemment à l'étiquette ou au contenu des aliments. Alors...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député.

M. Soucy: ...est-ce que c'est régi, étiquetage puis emballage, de façon différente?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse, s'il vous plaît.

M. Labrecque (Yves): Je pense que, nous, nous recevons les produits des fournisseurs qui, eux, indiquent sur leurs labels ce qu'ils veulent bien indiquer. Je ne peux pas entrer dans ce sujet-là faute de connaissances au niveau de, tu sais, ce qui leur est permis de faire puis qu'est-ce qui est une stratégie commerciale pour eux. Alors, tu sais, nous sommes les détaillants, là, qui recevons ces produits-là et qui avons quand même à répondre à ces questions-là, par exemple, là. Tu sais, le «sans gras trans» puis les modes, il y a beaucoup de monde qui utilise, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Labrecque. Alors, je vais du côté de l'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Labrecque, M. Blouin, bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec.

Je dirais d'abord que le ministre a tout à fait raison en disant qu'avec le Conseil canadien des distributeurs en alimentation et vos membres on a pas mal fait le tour de tous les magasins d'alimentation du Québec. Alors donc, on a un excellent point de vue sur ce qui se fait et sur ce que les distributeurs et les commerçants, les détaillants pensent de ce projet de loi.

Je veux aussi rendre hommage aux Supermarchés GP pour la place qu'ils font aux produits régionaux et du terroir. J'ai eu l'occasion de participer à des événements où vous avez... entre autres dans la région de Québec, je pense, c'était le premier îlot à l'entrée du magasin où vous mettiez en valeur ces produits, et c'est très bien. Et je sais que ça se fait dans d'autres ? vous avez raison, M. Blouin ? dans d'autres magasins tout partout dans le Québec. Les marchés en région, par exemple, par chez nous, les marchés Coop utilisent, font des îlots spéciaux pour les labels que se sont donnés certaines régions, par exemple Le Bon Goût frais de la Gaspésie, ces choses-là, et c'est une façon pour les consommateurs de se reconnaître dans les produits qu'ils recherchent.

Comme première question, je voudrais aborder un point que vous avez vous-même amené, qui est extrêmement intéressant, qui lève le voile un petit peu sur comment ça se passe dans vos magasins. Pour le producteur ou le petit transformateur qui veut aller chez vous pour avoir un accès aux tablettes, vous avez parlé de référencement, et j'aimerais que vous nous expliquiez comment ça se passe. Ce serait très utile pour les membres de la commission... que pour les gens qui nous écoutent. Quelles sont les avenues possibles qui s'offrent à un petit producteur ou quelqu'un qui introduit des fraises, hein, nature, ou quelque chose comme ça, ou les tartes aux pommes grand-mère, quelles sont les avenues qui s'opposent à ces producteurs? Quelles sont les difficultés qu'ils peuvent rencontrer? Puis, je comprends que vous dites: Si on fait trop de place à un, on est pénalisés parce qu'on fait référence avec les autres. Expliquez-nous ça, ça m'apparaît intéressant.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

M. Labrecque (Yves): Oui. Simplement, je vais tenter de vous dire simplement ce qui est un petit peu compliqué. À partir du moment où nous avons une bannière d'un grand distributeur, et là je vais prendre... Et ce n'est pas le cas, tous les chiffres que je vais vous donner ici sont à titre illustratif, alors ce ne sont pas des vrais chiffres, là. Bon. Admettons que j'ai une bannière quelconque que tout le monde connaît, ça peut être IGA, ça peut être Métro, je suis un détaillant et j'ai un contrat d'approvisionnement avec ce grand distributeur là ? peu importe qui il est ? en vertu duquel je m'engage à acheter 90 % de tout ce que je vais vendre ou de ce que je vais acheter à ce grand distributeur là. Et donc, c'est ce qu'on appelle un contrat d'approvisionnement.

Alors, je suis lié pour 90 %, si on veut, de mes achats à ce grand distributeur là. Donc, il me reste un 10 % de marge de manoeuvre, que je peux utiliser soit pour encourager justement des produits, ou des producteurs, ou des productions régionales ou artisanales, ou peu importe, ou soit pour encourager aussi une production industrielle que je pourrais acheter directement au lieu de passer par mon grand distributeur, et en achetant directement, bien, il y a une profitabilité additionnelle. Alors là, j'ai le choix, je vais acheter directement d'un grand transformateur une production qui va être beaucoup plus payante pour moi, ça, c'est pour mon 10 %, ou je vais acheter, pour mon 10 %, une production régionale avec laquelle je vais me démarquer en faisant un petit peu moins d'argent.

Et là c'est un petit peu la façon dont ça fonctionne. Pour un producteur ou un transformateur régional, à ce moment-là, lui, il a le choix soit de venir nous rencontrer, le détaillant, pour nous demander: Est-ce que tu pourrais mettre mon produit en tablette? Et alors, le détaillant a le choix de dire: Bien non, je n'ai plus de la place, j'ai de la misère à respecter ma concentration d'achat avec le grand distributeur. Je n'ai plus de marge de manoeuvre du tout pour toi. Ou il va rencontrer d'autres marchands ? de plus en plus de marchands d'ailleurs ? qui vont leur dire: Oui, ma petite marge de manoeuvre que j'ai au niveau de mes achats, je vais t'en consacrer une partie. Ça, c'est un des choix que le petit entrepreneur a.

L'autre choix que le petit entrepreneur a ou l'entrepreneur artisan a, c'est d'aller se faire référencer chez les grands distributeurs. Alors là on prend l'auto, on s'en va à Québec, on prend l'avion, on s'en va à Toronto ou à Montréal peut-être. Et là, on rentre dans la grosse machine, et la première question que ces gens-là vont avoir, c'est: Combien tu as d'argent dans tes poches et c'est quoi, ta capacité de production ou de nous fournir? Alors, à ce moment-là, on prend le billet de retour puis on s'en revient à la maison. On prend l'auto puis on s'en retourne dans notre région, généralement. Là, c'est à titre illustratif...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est très intéressant, M. Labrecque, très intéressant.

M. Labrecque (Yves): C'est anecdotique, ce que je vous dis. Alors, à ce moment-là, bien, la beauté... et ça, c'est évidemment que le projet de loi ne prévoit pas ça. On ne le demande pas non plus parce qu'on joue dans autre chose. S'il était possible de par la loi, de faciliter l'accès aux tablettes à ces petites productions là, il serait très utile, à tout le moins, pour la mise en valeur, en tout cas, des produits du terroir... Parce que nous, comme bannière d'alimentation et comme groupement de détaillants, nous croyons que la différenciation, faciliter les spécificités et les différenciations des produits de chez nous, bien, ça s'inscrit dans une perspective de développement durable et de développement des régions. Parce que là on se met à ajouter de la valeur dans nos régions, on se met à créer des mouvements de valeur ajoutée. L'argent additionnel reste en région, la profitabilité additionnelle reste en région, et c'est durablement valable, tout ça, alors...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est très intéressant comme illustration, M. Labrecque. Si vous permettez, une courte question pour le député de Nicolet-Yamaska. Très courte, très courte.

n(11 h 10)n

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Rapidement peut-être pour continuer votre illustration. Quand vous dites: Il nous reste une petite marge de manoeuvre pour les produits locaux, comment ça se passe dans la vraie vie, chez vous? Et le producteur local qui produit, exemple, je ne sais pas, moi, des fraises ou de la confiture de fraises s'en va vous voir ou voir quelqu'un chez vous, puis il dit: Est-ce que vous avez de la place sur vos tablettes pour mon produit? La réponse, c'est oui ou non. Si c'est oui, comment ça se passe? Est-ce qu'il arrive avec ses produits, comme ça, puis c'est écrit, je ne sais pas, moi: Confitures de fraises de ma tante Laura, puis c'est tout?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

M. Labrecque (Yves): Non, ce n'est pas tout à fait simple comme ça. Effectivement, il y a quand même des règles de base à respecter tant au niveau de ? puis c'est des règles qui sont normées, là ? tant au niveau de, effectivement, hygiène et salubrité alimentaires qu'au niveau de l'étiquetage.

Ce qu'on fait qui est différent un petit peu pour faciliter l'accès aux produits de Mme Tartempion ou de peu importe, ce qu'on fait, c'est que: un, nos achats, notre département d'achats est ici à Québec, puis il est à Mont-Joli. Donc, la proximité est très importante; deux, on va quand même, on participe aux organismes régionaux comme, je dis, les tables de concertation régionales. On en a parlé tout à l'heure, j'ai moi-même été président de la Table de concertation agroalimentaire du Bas-Saint-Laurent. Donc, on crée des proximités aussi avec ces gens-là.

On a des règles beaucoup moins strictes au niveau du référencement des produits, on facilite les choses au producteur local ou régional. Parce qu'on se dit ? et l'expérience nous fait cette démonstration-là ? quand tu vas aller entrer dans un vrai réseau si tu veux grandir, voici les règles du jeu. Ça fait qu'on va tenter... Évidemment, tu ne respectes pas toutes les règles du jeu parce que tu n'as jamais fait affaire avec un grand réseau, donc on va apprendre ensemble, on a cette flexibilité-là parce qu'on est tout petit, on va te le montrer.

Et au fur et à mesure, puis on a vu ça aussi, c'est qu'on ouvre les portes d'un magasin, à un moment donné la personne prend du volume, prend de l'expérience, de l'expertise, deux magasins, trois magasins, et maintenant on a des gens qui sont référencés, qui ont commencé chez nous et qui sont référencés avec les grands distributeurs et qui sont maintenant à l'exportation. Donc, dans le fond, c'est peut-être juste faciliter avec... faciliter les choses pour ces gens-là en...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. On aura l'occasion de revenir par l'intermédiaire d'une autre question. M. le député de Beauce-Nord, pour deux minutes.

M. Grondin: Merci, Mme la Présidente. Dans mon jeune temps, j'ai déjà travaillé dans une épicerie, alors je sais un petit peu comment ça se passe. Quand les gens sont appelés à donner des conseils aux consommateurs sur les étiquettes, je vais vous dire que ce n'est pas tous les gens qui sont formés à donner des réponses. Alors, c'est un peu le métier de vendeur qui commence, hein, tu vends la salade comme tu peux.

Moi, je pense que, dans le projet de loi qu'on est en train d'étudier, là, il me semble qu'on devrait mettre beaucoup d'accent sur une étiquette facile à lire, claire et comprenable pour tout le monde. On va prendre les étiquettes qu'on a là, là, puis je suis certain qu'il y a au moins 50 % de nous autres qu'on ne sait même pas qu'est-ce qu'il y a dedans, même après avoir lu l'étiquette. Alors, c'est tout ça qui est rendu un problème aujourd'hui, c'est que, on le sait, c'est de même que ça se passe, les annonces, puis tu peux vendre ton produit.

Puis dans les magasins, là, vous marchez, le petit producteur qui arrive, là, vous devez, question finances, là, comment ça coûte 1 pi de tablette, 2 pi de tablette, 5 pi de tablette? Ce doit être mis en... il doit y avoir, à un moment donné, un problème là. Si le producteur veut avoir 5 pi de tablette, comment ça lui coûte pour mettre ses produits là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque? Moins d'une minute.

M. Labrecque (Yves): Oui, oui, oui, très, très dispendieux. C'est très dispendieux dans les grands réseaux. Par contre, quand on a... c'est une philosophie que les petits détaillants, souvent, ont à permettre cette accessibilité-là sans frais énormes pour ces petits-là. Parce que, pensez-y deux minutes, tous ces producteurs-là ou ces transformateurs-là qui sont près de chez nous, ce sont aussi nos clients, et ils ont aussi des familles, ils ont aussi des cousins, des cousines, et puis ils sont fiers de leurs produits, donc ils vont dire à tout le monde... pas nécessairement besoin de payer pour ça, là, mais ils vont dire à tout le monde: Bien, va là parce que mon produit est là. Donc, dans les grands réseaux, il y a... coûte très cher; dans nos réseaux à nous, je n'ai pas encore vu personne, petit producteur, qui est reviré de bord parce que ça coûtait trop cher.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup.

M. Labrecque (Yves): Disons que je peux laisser ça comme ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Labrecque. Alors, du côté du gouvernement, il reste 8 min 10 s. M. le député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue.

M. Bernard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Labrecque et M. Blouin. J'ai très bien... j'ai aimé vos explications tantôt, quand vous parliez des détaillants, les grandes chaînes à 90 % versus 10 %, parce que c'est la réalité. Et ça m'amène à un débat... Peut-être que les gens vont se rappeler, l'année dernière, à Rouyn-Noranda, il y a eu un référendum sur la venue du Maxi à Rouyn-Noranda, et avec le marché Metro et A. de la Chevrotière, M. Robert Cloutier, que plusieurs connaissent. Et l'enjeu autour du débat était la commercialisation des produits régionaux, parce que A. de la Chevrotière, chez nous, en région, se sont fait un devoir de faire la promotion des produits régionaux. Et tantôt, quand vous parlez de volonté, je pense que c'est vraiment... pour les petites entreprises artisanales, la volonté et le milieu est le premier support pour rentrer sur le marché de la distribution. Et, quand on revient par exemple... Je vais prendre l'exemple d'un des marchés, chez nous, Métro Giroux. Quand tu rentres dans le marché, tu as le grand panneau qui liste tous les produits de la région qui sont disponibles sur ses tablettes, puis ça, c'est déjà quelque chose de majeur, de dire: Regardez, ici, vous allez trouver tels, tels, tels produits qui sont fabriqués ici, en région, en Abitibi-Témiscamingue.

La volonté est importante des gens là, puis le débat du Maxi, ça a été un bel exemple parce qu'A. de la Chevrotière permettait entre autres de prendre les produits artisanaux, locaux et les rentrer après ça dans la grande chaîne de Metro. Si ça ne se fait pas souvent de cette manière-là, ça va être très difficile parce que, vous l'avez bien dit, un petit producteur est contraint à des quantités d'approvisionnement, et en plus, souvent, les produits n'ont pas de préservatifs, donc durent moins longtemps sur les tablettes et autres. Donc, c'est un enjeu majeur à cet égard-là.

Je vais faire une petite publicité. Il y a une firme, chez nous, qui sont venus rencontrer les gens du gouvernement, ça s'appelle Agrotic. C'est une firme de technologies de l'information qui a développé un logiciel de mise en marché pour les produits régionaux, c'est-à-dire ils offrent le service, le support pour les petits producteurs de rentrer dans les fameux systèmes IDE des grands marchés, pour l'étiquetage et les normes. Et ils vont arriver avec un plan d'affaires, puis c'est un très, très beau projet qui correspond entre autres aux produits régionaux. Si ça vous intéresse, je vais vous mettre en contact avec eux parce que c'est pour la grandeur du Québec; même, il y a des entreprises de l'extérieur du Québec qui font affaire avec eux pour la commercialisation des produits. Tout ça pour vous dire que la volonté régionale, le support régional est le premier critère. Si on ne l'a pas, une entreprise ne pourra jamais percer sur les marchés d'alimentation.

Dans votre page 7 du mémoire, vous parlez du rôle... de l'expertise d'Aliments du Québec, qui pourrait jouer un rôle majeur au niveau de la promotion des produits et de l'information. Croyez-vous qu'Aliments du Québec devrait avoir un mandat élargi, être plus impliqué? Quel est votre... Comment voyez-vous le rôle d'Aliments du Québec dans tout ce domaine-là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

M. Labrecque (Yves): Oui. 30 secondes. Peut-être... Effectivement, en Abitibi, nous sommes tout à fait conscients et proches des gens d'ADA parce que nous partageons un petit peu cette philosophie-là... et de Robert Cloutier en particulier, que nous connaissons très bien. Alors, nous sommes au courant de cette problématique-là. Félicitations à La Fraisonnée, d'ailleurs, où on vient de rentrer leurs produits dans l'ensemble de notre réseau. Alors, là, La Fraisonnée est rendue à Sainte-Anne-des-Monts.

M. Bernard: Ils sont ici, à l'Assemblée nationale, aussi.

n(11 h 20)n

M. Labrecque (Yves): Ah! Voilà. Sur ce... Aliments du Québec. On a travaillé quand même beaucoup avec Aliments du Québec, et je parle au nom de l'ADA et au nom de notre entreprise aussi. Et Aliments du Québec a développé une expertise, et une proximité, et un «know-how», et avec les distributeurs, et avec les fournisseurs, et avec les détaillants. Et nous croyons important de protéger ce réseau-là qu'Aliments du Québec a su créer, avec autant les grands distributeurs ? c'est un beau lien ? autant les fournisseurs, ou les producteurs, ou les transformateurs, et autant avec les détaillants. Alors, pourquoi réinventer la roue alors que nous avons déjà un bon départ? Vous savez, quelqu'un ? une organisation ou un organisme ? qui est à l'aise à tous les niveaux de la grande chaîne de distribution?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Blouin, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Blouin (Pierre-Alexandre): Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Allez-y.

M. Blouin (Pierre-Alexandre): Bien, si on regarde Aliments du Québec, c'était difficile pour l'organisme d'arriver à rejoindre les objectifs lorsqu'il ne savait même pas si, l'année suivante, il y aurait un financement. C'est difficile pour un organisme qui se veut... faire la promotion des produits régionaux, d'une année à l'autre, de ne pas pouvoir être au même événement pour refrapper sur le même clou et dire: Les produits québécois sont sur vos tablettes, ils sont identifiés, ils sont là.

Nous, ce qu'on souhaite depuis longtemps, que ce soit sur la table filière agroalimentaire, que ce soit sur le conseil d'administration d'Aliments du Québec, c'est un financement récurrent et qui va lui permettre de rencontrer les objectifs qu'on veut qu'il ait. On souhaite le développement des régions québécoises par Aliments du Québec.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le député de Rouyn-Noranda, avez-vous fini?

M. Bernard: ...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, alors il n'y a plus de question de ce côté-là. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. C'est extrêmement intéressant, les échanges que nous avons actuellement. Il y a quelques instants seulement, avec M. Pellerin de l'UPA, on a abordé la question des importations, des exportations en regard des difficultés que ça pose avec le fait que le Québec, Mme la Présidente, se pose en leader. C'est le cas encore avec la loi n° 113 que nous avons devant nous. Même si elle est imparfaite et même si tout le monde vient nous dire qu'il faudra apporter des modifications substantielles, je pense qu'on a besoin de cette loi pour faire avancer le Québec, et le développement des produits régionaux et les produits de niche, parce que nos producteurs ont besoin de cela.

Et M. Pellerin a dit, évidemment en riant mais c'est une réalité, que le Québec n'était pas encore un pays, ce qui... et je sais que les solutions en regard de ça varient autour de la table. Cependant, ça nous pose des problèmes, ça pose des problèmes en ce qui concerne les producteurs ou les transformateurs qui veulent exporter leurs produits biologiques, ou qui voudraient faire la même chose avec les produits à appellation réservée.

Alors, Mme la Présidente, dans le mémoire qu'on a devant nous, à la page 4, il y a une allégation qui est extrêmement importante et lourde de conséquence. Lorsque l'ADA se questionne également sur ce qu'il adviendra des marques de commerce existantes... Et encore là on se bute à cette réalité, où on a des programmes, et des normes, et des lois fédérales. Et vous dites dans votre mémoire: «Les marques de commerce sont de juridiction fédérale, alors que la Loi sur les appellations réservées est de compétence provinciale. Normalement, dans ce type de situation, la loi fédérale prévaut. Cela signifie-t-il que le Québec ne pourra d'aucune façon inciter les entreprises détentrices de marques de commerce déposées préalablement à la loi québécoise à s'y conformer?» C'est intéressant, ce que vous soulevez là; c'est une problématique extrêmement importante.

Alors, je vous pose la question: Qu'est-ce qui risque de se produire à ce moment-là ? et, par la même question, je m'adresse au ministre ? est-ce que le MAPAQ a des avis juridiques en ce qui concerne ce qui arriverait à la loi québécoise, advenant qu'il y ait un problème avec une marque de commerce déposée au fédéral? Mais ma question s'adresse à vous: Comment vous voyez ça, qu'est-ce qui risque de se produire, là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

M. Labrecque (Yves): Oui. Évidemment, pour nous, lorsqu'il y a eu la préparation de cette commission parlementaire là, nous avons rencontré, à l'invitation du MAPAQ, nous avons rencontré des gens et nous avons posé cette question-là comme étant une question à laquelle nous n'avons pas nécessairement la réponse. Alors, la réponse, nous ne sommes pas des avocats; par contre, je crois que le gouvernement est très bien outillé à ce niveau-là.

Et nous avons posé la question, nous avons amené ce débat-là, parce qu'effectivement ça va arriver qu'un produit dont le nom est déjà réservé ne correspond pas aux critères qui ont été émis au niveau de la Loi sur les appellations réservées, mais que cette marque de commerce là, qui est enregistrée, est enregistrée dans une autre juridiction. Alors, nous avons posé la question, et effectivement nous n'avons pas cette réponse-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. M. le député des Îles.

M. Arseneau: O.K. Bon. Alors, peut-être que, du côté ministériel, on pourra nous donner un avis à ce sujet-là. Vous mentionnez à la page 6: Le certificateur, donc l'organisme qui va certifier, devra aussi s'assurer de restreindre le nombre de différents labels. Il faut éviter la confusion chez le consommateur... Bon. Parlons de confusion. Vous ne nous parlez pas directement dans votre mémoire du projet de réglementation en regard de la Loi sur les produits alimentaires québécois qui va amener des produits de type fermier et de type artisanal. Est-ce que c'est parce que vous pensez comme tout le monde qui est venu devant la commission ou bien vous avez un avis différent là-dessus?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Blouin.

M. Blouin (Pierre-Alexandre): A priori, les détaillants s'adaptent aux lois qui arrivent. Je veux dire, on nous impose des nouvelles normes sur la question du tabac, sur la vente de l'alcool aux mineurs, on doit s'y conformer. On a l'habitude de se conformer aux lois, on va appliquer les lois qui vont être en vigueur. C'est certain qu'on a des préférences. Ce que vous avez entendu des autres organismes avant nous, on partage la plupart des opinions qu'ils avaient. Nous, on se retrouve devant la situation où il va y avoir une loi puis, pour nous, notre problématique, c'est par rapport à nos consommateurs, c'est par rapport au client. Le client qu'est-ce qu'il va... comment est-ce que le client va saisir le problème, qu'est-ce qu'il va dire lorsqu'il va voir une étiquette Produit artisan? Nous, on veut s'assurer que ces définitions-là soient précises pour qu'on soit en mesure nous-mêmes de transmettre l'information à nos membres pour que ça circule. Je me dis, si on encadre bien au départ, peu importe l'appellation qu'il va y avoir puis qu'on s'assure qu'il n'y a pas des appellations, excusez-moi l'expression, ridicules avec, je ne sais pas, le Fromage fermier artisan du Bas-Saint-Laurent, à Cacouna, ou en tout cas je ne sais pas. Je veux dire, à un moment donné, il va falloir qu'on ait une certaine concision dans ce qu'on décide de préserver pour être capable de le respecter par la suite.

Donc, peu importe l'appellation qui vise la ou les appellations qui vont être réservées, on va s'y conformer, donc c'est pour ça qu'on en fait grand état dans notre mémoire.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il reste deux minutes, M. le député.

M. Arseneau: Deux minutes, c'est énorme, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui, bien sûr.

M. Arseneau: ...ce qu'on peut faire en deux minutes.

Je retiens de votre conclusion, vous dites que l'ADA est heureuse que l'on donne finalement suite aux recommandations du rapport Desjardins mais considère que la portée de la loi est trop faible et qu'elle laisse de la place à différents types d'abus. Alors, c'est ce que je retiens de votre présentation. Dans le fond, ce que vous venez un peu de nous dire, c'est que vous êtes d'accord, et vos membres avancent qu'il n'y a pas meilleure façon de procéder, je dirais, ou meilleure nouvelle que la collaboration entre les producteurs, les petits transformateurs et les détaillants, c'est ce que vous dites dans le dernier paragraphe de votre mémoire. Mais ce que je comprends, c'est que vous souhaitiez qu'il y ait plus de contrôle, que ce soit bien balisé, autrement dit que ça ne va pas assez loin. C'est ça?

M. Labrecque (Yves): C'est ça.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien.

M. Arseneau: Très bien, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, merci beaucoup. Vous avez été dans le temps. M. le ministre, vous avez été interpellé. Il vous reste trois minutes, alors je vous les redonne.

M. Lessard: Alors donc, quant à l'interpellation, le député des Îles faisait référence à que le gouvernement du Québec en 1996 avait outrepassé sa compétence en légiférant sur les appellations. J'espère que vous aviez un avis juridique au dossier, et quant à cette dualité-là sur la Loi sur les marques de commerce. Donc, je n'insisterai pas plus particulièrement, je présume que le travail avait déjà été fait.

Toutefois, je vais... Pour terminer, parce qu'on parle de simplification, je veux revenir quand même à la loi, on essaie de faire un exercice de simplification. Est-ce que l'utilisation des mots fermier et artisanal telle que proposée dans le mode de spécificité sur la Loi sur les appellations ferait en sorte, même avec la réglementation qui est de production fermière ou artisanale, ça simplifierait votre vie aussi quant à l'explication?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Labrecque.

n(11 h 30)n

M. Labrecque (Yves): Je vais répondre à titre personnel. Oui, il y a des choses des fois qui simplifient des choses, mais qui les complexifient beaucoup. Moi, je pense que, qu'on utilise l'appellation qu'on voudra, si elle est bien balisée, ce qui est important, c'est que le public comprenne, c'est que le consommateur comprenne. Et la multiplication des appellations réservées des fois, ça complexifie la compréhension de tout ça. Et c'est un petit peu pour ça aussi d'ailleurs qu'on a parlé, dans notre mémoire, d'investir des sommes au niveau de l'éducation du public puis de l'éducation du consommateur. Et ça, c'est sur la notion des appellations, qu'est-ce que ça veut dire une appellation puis qu'est-ce qui est appelable, qu'est-ce qui n'est pas appelable, et ça, c'est très important et c'est une... le consommateur... Nous, on est sur la ligne de front. Donc, on répond à ces questions-là. Mais il y a toute une notoriété que le Québec peut se développer puis toute une fierté aussi que le Québec puis la population québécoise peuvent se développer en investissant des sous dans l'éducation des consommateurs. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup, M. Labrecque et M. Blouin, de l'Association des détaillants en alimentation du Québec. Merci pour votre mémoire et surtout aussi pour l'expertise que vous nous avez donnée à la commission au niveau du processus par lequel vous mettez les produits sur les tablettes. Merci.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, j'appelle s'il vous plaît les représentants de la Table de concertation agroalimentaire du Québec à prendre place. Alors, M. Charles Proulx, président, vous êtes les bienvenus. Si vous voulez bien nous présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 20 minutes pour l'exposé de votre mémoire.

Les Tables de concertation
agroalimentaire du Québec (TCAQ)

M. Proulx (Charles): Merci, Mme la Présidente. On va le faire en deux parties. Je vais commencer par faire une première partie où on présentera qu'est-ce que c'est que les Tables agroalimentaires. Et Jean-Michel, qui m'accompagne, qui est directeur de la table chez nous, va présenter le contenu du mémoire.

Le réseau des Tables de concertation agroalimentaire du Québec est composé de 16 tables régionales ? vous avez la liste en annexe d'ailleurs qui vous a été remise ? indépendantes les unes des autres qui partagent des mandats et des dynamiques de travail en lien avec le développement agroalimentaire de leur région respective. Et je dois dire que la table que je représente, c'est la table qui couvre le territoire de la Chaudière-Appalaches.

À partir de la concertation permanente des forces vives de l'industrie et des organismes de développement de leur territoire, les Tables agroalimentaires élaborent et mettent en oeuvre des projets visant la promotion des produits, des entreprises et des territoires, l'accès aux marchés des produits, le maillage et la formation des personnes. Notre double enracinement dans les diverses régions du Québec et dans l'action quotidienne en faveur du développement agroalimentaire fait que nous exprimons ici un point de vue praticien attaché au terrain.

Je dois dire que, lorsqu'on parle d'un point de vue praticien, je suis tout d'abord un producteur agricole. Mon premier rôle, c'est d'être ça. Avec les moyens financiers des tables agroalimentaires, je n'ai pas le statut de permanent et je ne prévois pas l'avoir non plus, ce qui fait que j'oeuvre peu au sein de la table directement. Comme je vous ai dit, les moyens étant restreints, lorsque je fais des déplacements pour la table ou que je travaille, je suis à la table agroalimentaire, c'est toujours non pas sur le bras de la table, mais d'une façon plus personnelle. Et à ce moment-là c'est pour ça que tantôt, dans les questions que vous allez voir, que je n'ai pas en profondeur... Je ne suis pas quelqu'un qui oeuvre à tous les jours là-dedans, vous allez le constater vous autres mêmes.

Lorsqu'on parle aussi de l'agroalimentaire, moi, j'ai toujours aimé dire: L'agroalimentaire, il y a deux parties dans l'agroalimentaire. L'agriculture est dans l'agroalimentaire. Il se peut très bien que la restauration soit en parfaite santé, mais que les agriculteurs soient dans une situation financière catastrophique. D'ailleurs, on a vu l'année 2003, où qu'on tire à peine d'une situation de catastrophe, ça fait que c'est pour ça l'agroalimentaire, c'est tout ça en même temps.

L'agriculture et l'industrie agroalimentaire sont au coeur du développement de chacune des régions. Aujourd'hui encore, cette industrie constitue souvent le premier employeur et produit une part importante de la richesse régionale. À Montréal, les entreprises agroalimentaires constituent une large part du tissu social. Le devenir de cette industrie est donc au coeur de nos préoccupations et de nos mandats. Les Tables agroalimentaires travaillent particulièrement sur la dynamique des différenciations, et ce, depuis des années. Réflexions et actions sont conduites autour des spécificités territoriales en lien avec des entrepreneurs créatifs pour renouveler, élargir l'offre agroalimentaire qui sera faite aux consommateurs. Là-dessus aussi, on est des organismes qui sommes très jeunes. Je regarde la table agroalimentaire, on n'a que sept ans d'existence ou à peu près. On est en train de renouveler notre troisième mandat avec l'aide des organismes locaux.

Si on regardait les économies régionales. Les périls qui guettent l'industrie agroalimentaire québécoise sont chaque jour un peu plus forts. Découlant pour une large part de la mondialisation de l'économie, ces périls exigent des aptitudes et des réponses fortes de la part de l'ensemble des acteurs socioéconomiques et politiques. En première ligne de ces périls, nommons l'augmentation de la concurrence à travers le monde, qui accentue la pression sur les prix de vente des producteurs. Le Canada qui a, au cours des dernières décennies, construit un système d'organisation et de gestion des marchés agricoles aboutissant à protéger les revenus des producteurs agricoles et les prix payés aux consommateurs est fortement mis en cause devant l'Organisation mondiale du commerce, ce qui fragilise nos entreprises.

De son côté, le complexe agro-pédo-climatique ? ce n'est pas moi qui l'ai écrit, ce mot-là ? la constitution et le climat qu'on a au Québec ne nous permet pas, à l'égard de certains pays, d'avoir... on n'a pas les mêmes forces de ce côté-là. Le Québécois est beaucoup moins propice à l'agriculture comparativement à bien d'autres pays, cela conforte la montée de nouveaux pays producteurs qui viennent ajouter à la compétition mondiale. Lorsqu'on fait allusion à ça, j'ai eu le bonheur dernièrement de faire un voyage an Amérique du Sud, précisément au Brésil, où est-ce qu'ils se permettent de faire trois récoltes par année; ça fait que c'est les mêmes terres, c'est les mêmes machineries.

Le développement technologique associé à une mobilisation des capitaux multiplie les capacités de produire, facilite encore l'émergence de nouveaux produits concurrents. Avec cette mondialisation des marchés, les régions du Québec vivent des situations de plus en plus difficiles, et donc, de nouveaux défis à relever, défis qui ont pour nom, réponse au rehaussement des normes environnementales, diversification des productions, reconnaissance de la multifonctionnalité de l'agriculture, puis on pourrait en nommer d'autres. Cependant, les entreprises québécoises se caractérisent aussi par la maîtrise du savoir-faire spécifique et une offre originale des produits qui multiplient les opportunités d'affaires.

Devant la diversification des régimes alimentaires et la recherche de saveurs particulières et de produits authentiques que l'on observe dans le monde occidental, de nombreuses entreprises ont en effet développé de nouveaux produits qui peu à peu font leur marque sur les marchés. Notre industrie a donc des atouts à faire valoir. C'est pourquoi l'encadrement législatif des produits reposant sur des caractéristiques ou/et des processus de production particuliers revêt une si grande importance. Pour Les Tables agroalimentaires, la différenciation des produits et le développement des appellations sont de véritables outils de création de richesse et de développement régional.

Je demanderais à Jean-Michel de vous présenter un petit peu la partie technique du document.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, si vous voulez bien prendre la parole, c'est M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): Voilà. Merci beaucoup, Mme la Présidente, MM. et Mmes les députés. Avec ce projet de loi, l'ensemble des tables dit, dès le départ, que ça va dans le bon sens. Il y a ici matière à évolution, et nous voulons d'abord, en premier lieu, le saluer.

n(11 h 40)n

J'ajouterais que Les Tables de concertation agroalimentaire du Québec sont dans le dossier depuis très, très longtemps, parce qu'il y a déjà 10 ans bientôt, quand on a commencé à travailler ces choses dans la région de Charlevoix, la Table agrotouristique à l'époque était très, très impliquée.

Deuxième remarque que je voudrais faire, c'est qu'effectivement le système tel que décrit actuellement dans la loi A-20.02 ouvre la Loi qu'on appelle... dite des appellations réservées, ouvre des perspectives réelles, intéressantes, importantes pour les régions du Québec. Dans la mesure où le projet de loi n° 113 a pour objectif de compléter ce premier élément législatif, eh bien, c'est obligatoirement une bonne affaire. Dans le même temps, on a un certain nombre de réserves, et je voudrais, si vous voulez bien, m'en ouvrir auprès de vous ce matin de manière effectivement à apporter notre pierre à la construction.

La première des choses, je dirais, c'est que cette loi A-20.02 présente, pour un certain nombre d'intervenants, des difficultés parce qu'elle est contraignante, c'est son intérêt. J'ai envie de le dire: c'est parce qu'elle est contraignante qu'elle est intéressante. Et effectivement elle n'est pas ouverte à tout le monde et j'ai envie de dire un petit peu n'importe quoi parce que sinon on viderait de son sens la problématique.

Alors que le projet de loi n° 113 amène des compléments qui justement nous alertent. Le premier élément que nous ne comprenons pas et que nous remettons en cause, c'est effectivement le... j'ai envie de dire dans ce qui n'est pas écrit ou dans ce qui n'est pas dit, c'est que tous les documents, tout l'ensemble tente à accréditer une problématique de recherche du plus grand nombre d'appellations, et nous ne comprenons pas. Je vais le dire d'une autre façon, c'est l'aspect un petit peu marketing. J'entendais les intervenants précédents qui évoquaient également cette chose-là. Elle fait la part trop belle, je dirais, le projet fait la part trop belle à la dimension marketing au détriment de la dimension véritablement du développement territorial. Et je ne pense pas, nous ne pensons pas que l'enjeu pour les régions soit d'avoir un nombre x, y d'appellations; l'enjeu véritable est d'avoir des appellations qui soient véritablement défendables et défendues. J'y reviendrai, si vous voulez bien.

Alors, bien évidemment, le projet de loi ? et c'est là-dessus que je vais plus orienter mon propos; le projet de loi ? permet trois types d'appellations. Je ne les redirai pas ici, ce matin, d'abord pour le temps qui nous reste et puis, d'autre part, vous les connaissez bien. Mais le projet de loi n° 113 porte plus particulièrement sur la troisième catégorie prévue dans la loi A-20.02. C'est effectivement les dénominations «fermier» et «artisanal». Dans un cas, la loi, pour le troisième type, les attestations de spécificité, seraient permises des attestations de spécificité avec les appellations «fermier» et «artisanal» alors que de manière, je dirais, parallèle, un projet de règlement, le P-29, ajout au P-29, amènerait également la possibilité d'utiliser quasiment les mêmes termes mais dans une autre procédure, dans une autre forme, ce qui vient pour le moins brouiller le message et certainement compliquer la tâche des consommateurs. M. Labrecque, tantôt, parlait précisément des consommateurs. C'est également notre point de vue et l'angle par lequel nous nous positionnons.

Alors, maintenant revoyons dans les territoires. Entre une entreprise qui élabore des produits fermiers ou artisanaux ou une entreprise qui va mettre en marché des produits de type fermier ou de méthode artisanale, pour le consommateur, c'est ? excusez-moi l'expression ? mais ça va être rapidement du chinois. Et qui va subir les conséquences? Bien, c'est les entreprises et in fine les territoires. On n'a pas besoin, je pense... Nous pensons: on n'a pas besoin de développer des concurrences et des compétitions qui seraient injustes et puis surtout insurmontables pour les entreprises qui subiraient, qui s'ajouteraient des contraintes que les autres n'auraient pas à respecter.

Deuxième élément que je voudrais aborder, c'est la question, comment dire, de la protection et de la défense des appellations réservées. J'entends bien... On entend bien la problématique: il appartient au ministre de l'Agriculture de réserver les appellations. Ça nous amène à dire qu'il appartient au même gouvernement, au même État de prendre en charge la défense des appellations quand il y a usurpation parce qu'en aucun cas ça ne peut relever d'une entreprise de tenir un an, deux ans, cinq ans, 10 ans. On sait que ça va être très long, les procédures, et aucune entreprise, aucun territoire ne pourra sortir gagnant d'une telle épreuve. Alors, bien évidemment, à qui doit revenir cette défense? Bien, pour nous: au Conseil des appellations alimentaires du Québec, le CAAQ, qui doit être doté de ce pouvoir et, je dirais, qui doit être renforcé dans ce pouvoir.

Autre élément que je voudrais souligner, c'est la notion de produit de terroir. Le projet de loi dit: Dans la mesure où un projet bénéficiera soit d'une appellation d'origine, soit d'une IGP, il sera un authentique produit du terroir. Oui, on entend bien, mais il n'y a pas de symétrie dans la proposition qui est faite. Ça veut donc dire que, même sans AO, je pourrai, n'importe quelle entreprise pourra dire: C'est un produit de terroir, parce qu'effectivement l'appellation, la dénomination «produit de terroir» n'est pas strictement attachée, seulement, exclusivement, aux AO et IGP.

À ce propos, peut-être une parenthèse: ce débat-là est en train de monter partout dans le monde. On le voit bien à l'OMC. C'est, au même titre que l'eau ? mais ce n'est pas le débat ce matin; au même titre que l'eau ? un des combats des années qui viennent parce qu'effectivement c'est la défense des agricultures dans leur diversité qui est derrière.

Question du contrôle également, j'y reviens, pardon. La question du contrôle. Le projet de loi donne ce mandat de contrôle au CQIASA, au Centre québécois d'inspection des aliments et de santé animale, qui assure aujourd'hui, donc, le service dit d'inspection sanitaire des établissements alimentaires du Québec. L'expertise qui est sous-entendue par l'actuel mandat du CQIASA est d'une nature réglementaire des températures, des chaînes, du respect de procédures, etc. Le mandat de contrôle, celui qui est proposé maintenant, à savoir est-ce que cette entreprise a le droit d'utiliser telle affirmation, telle appellation, est d'une autre nature. Nous ne pensons pas que le CQIASA, dans ses moyens actuels, dans ses mandats actuels, puisse assurer adéquatement le contrôle. Et, à ce moment-là, on pose la question: Si on ne peut pas être assurés d'un contrôle assidu et véritable, quelle peut être la valeur de dispositions légales?

Autre remarque que je voudrais faire ? le temps commence à passer très vite ? c'est l'ouverture prévue dans le projet de loi, l'ouverture de la dynamique à des initiatives individuelles. Encore une fois, nous questionnons, nous remettons en cause cette chose-là, en particulier pour tout ce qui est des appellations liées à un territoire, parce que, d'une certaine manière, la démarche individuelle, si elle devait être reconnue, accueillie et reconnue comme... et dotée d'une appellation réservée, d'une certaine manière, ça revient à privatiser le territoire, d'une certaine façon, ça revient à privatiser le territoire ou en tout cas la référence au territoire, et ça nous inquiète un petit peu parce que le territoire n'appartient bien évidemment pas à ceux qui l'habitent, quand bien même... comment dire? Les actes de propriété peuvent aussi intervenir ici, parfois.

Alors, dans le même temps, on a déjà des outils pour protéger les initiatives individuelles, tels que la marque de commerce. Donc, nous questionnons fortement cette dynamique-là. Maintenant, développer également un produit, un cahier des charges, une recherche de nom pour aboutir à une appellation réservée représente des coûts, et nous pensons que ça se prête davantage à une démarche collective, tel que la procédure le reconnaît ailleurs.

n(11 h 50)n

Autre question qui nous interpelle également, c'est bien évidemment la multiplication des références, des, comment dire, dénominations sur les étiquettes. Certains produits qu'on voit à côté de nous, la surface des contenants, etc., n'est pas extensible à l'excès, et donc plus on multiplie les types d'appellation, les slogans, les labels, plus on va avoir de problèmes pour... Une fois qu'on aura également intégré l'étiquetage nutritionnel, qui est déjà commencé d'entrer en oeuvre et puis qui va continuer dans les mois qui viennent, on va avoir de sérieux problèmes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Il vous reste trois minutes.

M. Bordron (Jean-Michel): Merci. J'aimerais faire un petit commentaire également, comme nos prédécesseurs, sur l'outil actuel qui a déjà beaucoup travaillé depuis des années, qu'est Aliments du Québec. Pour nous, Aliments du Québec, qui a déjà le mandat de promotion, doit être conforté dans le mandat de promotion aussi des produits régionaux de niche, de terroir, de créneau, appelons-les comme on veut. Et puis le dernier élément qui nous questionne, c'est les aspects financiers pour les entreprises, quels vont être les coûts de ça. Actuellement, bien évidemment, il n'appartient pas au projet de loi de définir tout ça, mais nous sommes en attente d'éléments complémentaires pour cette question. Alors, je le disais en démarrant, nous saluons les avancées que le gouvernement montre ici, avec ce projet, mais cependant, nous voulons le voir évoluer.

J'ajouterais deux éléments. La première chose, c'est qu'on pourra se doter des meilleurs outils législatifs possible. Dans la mesure où ils ne seront pas connus, vulgarisés au sens premier du terme, eh bien, ils ne seront pas utilisés. Et, par exemple, la loi A-20.02, finalement elle a très, très peu avancé, elle a très, très peu produit en dehors de l'appellation biologique au cours des sept, huit, neuf dernières années. Donc, il y a un effort colossal à faire pour vulgariser ces outils, les amener à la connaissance à la fois du terrain, des entreprises, et à la fois des consommateurs. Donc, stratégie, outils de communication, et puis outils de promotion des mesures.

Et enfin, bien, peut-être... Je vais terminer avec, comment dire, cette partie, cette dimension-là, c'est que, on le voit, c'est un sujet extrêmement complexe, et il faut absolument que le consommateur soit informé, formé, éduqué en permanence pour qu'effectivement il se retrouve à travers cette complexité, dès lors que la complexité, on aura essayé de la simplifier au maximum, sans bien évidemment remettre en cause l'objectif principal. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Bordron, merci, M. Proulx. Je cède la parole à M. le ministre pour un premier bloc de 20 minutes.

M. Lessard: Alors, merci beaucoup, et merci, c'est un plaisir de vous rencontrer en commission. Principalement, ça nous permet de rappeler le travail important des tables de concertation donc pour l'ensemble des 16 organisations régionales pour lesquelles vous chapeautez. Alors donc, je veux... parce que vous avez aidé beaucoup à la promotion, à l'accès des marchés des produits, on a remis la priorité sur les développements locaux, et, dans un contexte de mondialisation, la différenciation, c'est quelque chose qui nous permet de... On ne peut délocaliser un terroir, on ne peut que le faire visiter à travers le monde. Alors donc, je voulais apporter ce petit complément d'information là.

Je regardais dans l'ensemble votre présentation, souvent ça nous permet de faire le point sur certains éléments, et j'en viens sur un qui toujours me rappelle l'importance de le rappeler immédiatement: dans le projet de loi, on ouvre, oui, sur des demandes individuelles, alors donc... Mais c'est quoi, le processus à l'intérieur de la Loi sur les appellations réservées? Ça fait suite, ça, au rapport Desjardins, qui en faisait une de ses recommandations, donc ça venait quand même du milieu.

Alors donc, c'est, oui, à travers la Loi sur les appellations réservées, je pourrai donc, pour une appellation, faire mon cahier de charges, donc assumer les coûts, le monter, aller chercher un organisme de certification, le rendre public; là, on le rend même à la consultation publique. Alors donc, à partir de là, une fois que c'est accrédité, la possession, donc c'est une action individuelle mais à portée collective, parce que le cahier des charges étant connu, étant publicisé, une autre personne, de la même région ou du même type de production, n'a qu'à devenir membre et automatiquement elle a accès à tout ce cahier des charges là, à tout ce volet-là. Donc, l'initiative, elle peut être individuelle, le produit final est à portée collective.

Alors donc, je pense que ça rencontre l'esprit de la loi sur l'adhésion à une façon de faire ou à un mode de production, une spécificité ou une appellation, un attachement au terroir. Alors donc, je pense que c'est important, et je pense que ça cible un des éléments.

Je regardais, dans l'ensemble de vos commentaires sur le... On dit: C'est un pas dans la bonne direction. On veut éviter la confusion. Je vais cerner plutôt l'aspect de produit fermier, type artisanal. Donc, la loi permettait quand même d'utiliser ces mots-là, en vertu de la Loi sur les appellations réservées. Nécessairement, on travaille avec des producteurs régionaux, locaux. Tantôt on a vu, avec l'Association des détaillants, ils ouvrent maintenant leurs magasins pour référencer ? je vais utiliser leur mot ? donc pour être capables de les mettre en tablette. Alors, pour éviter la confusion, vous avez des produits à côté de vous, là, qui font référence à différentes appellations, parce que là c'est non réglementé, on encadre, là, spécifiquement deux mots: fermier et artisanal. On a d'ailleurs produit un document, je ne sais pas si vous en avez pris connaissance, un document en vue de faire une réglementation et qui décrit c'est quoi, les notions d'«artisanal», les notions de «fermier». Est-ce que vous en avez pris connaissance? Est-ce que ça peut répondre quand même à un volet de ceux qui veulent être capables de mettre en tablette sans internationaliser nécessairement leurs produits?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): Oui, nous avons pris connaissance, hein, du document en question. Je crois que, dans votre question, si vous voulez bien remonter un petit peu en amont, ce qui nous préoccupe, comment dire, c'est la coexistence de deux systèmes qui sont source de confusion. Nous ne croyons pas que cette question des appellations, dans leur globalité, soit bien traitée quand elle est traitée par deux types de procédures. Il me semble, une seule doit suffire, et il faut qu'on convienne sur une seule, de notre point de vue.

Alors, on a un premier point qui peut être: On enlève, on supprime la loi A-20.02. Le deuxième, c'est qu'on enlève, on supprime le projet de loi P-29, en tout cas l'ajout au P-29. Il est clair que la loi A- 20.02 traite beaucoup plus de questions, donc c'est elle qu'il faut conserver, et le projet de règlement est trop source de confusion. Encore une fois, simplicité. Et puis surtout d'avoir un seul outil qui englobe le tout sera beaucoup plus facile, un, à véhiculer, deux, à promouvoir, trois, à expliquer, etc., tant aux entreprises qu'aux intervenants de développement dans les territoires, qu'aux consommateurs. Alors, il y a matière à confusion. C'est ça, à notre avis, qu'il faut travailler.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. M. le ministre.

M. Lessard: D'accord. Merci, pour le commentaire. Je pense, ça fait aussi référence, exemple, peut-être, ces produits-là, pour les spécificités donc sur les appellations réservées. Exemple, on a «fermier», «artisanal», et, dans le règlement, on dit «de type fermier», un peu à l'image du champagne et la méthode champenoise.

Est-ce que vous pensez qu'on n'est pas rendu à cette maturité-là pour faire ces distinctions? Parce que, comme... Si j'écoute votre propos, a contrario donc vous suggérez que, toutes les appellations réservées, ce soit en fonction des cahiers de charges, donc une méthode plus structurée qui ne fait pas référence seulement au nombre. L'important, ce n'est pas d'en avoir un grand nombre, mais c'est de bien les contrôler et de les faire respecter?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): Oui. Champagne et méthode champenoise, au-delà du fait que ce sont deux produits bien différents, on se comprend, c'est aussi deux appellations qui ont une partie en commun, «champa», on pourrait dire, mais c'est quand même deux noms suffisamment distincts. Et puis j'ai envie de dire que justement, s'il y en a une qui actuellement, à ma connaissance, est plutôt en, je dirais, pas en perte de vitesse, mais qui est très banalisée, c'est bien «méthode champenoise» parce que c'est quelque chose qu'on retrouve maintenant partout, alors que champagne, parce qu'AOC en l'occurrence dans la région de la Champagne, bien est unique. Je ne pense pas que ? pour répondre à votre question ? qu'on soit, avec «fermier» et «type fermier», dans le même cas de figure.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Une dernière question, M. le ministre? Ça va? Très bien. Alors, je vais aller du côté de l'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

n(12 heures)n

M. Arseneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Proulx et M. Bordron, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue devant cette commission. Mme la Présidente, je commencerai d'abord par rassurer le ministre, je veux que ce soit bien clair. À ce stade-ci, il n'est pas du tout dans mon intention d'embarquer dans un discours partisan en regard de la loi de 1996 ou ma question en regard des vérifications juridiques à faire peut-être en ce qui concerne l'inscription en regard de la loi fédérale en ce qui concerne des marques n'a rien de partisan. Je sais que la loi de 1996 était certainement imparfaite, qu'on devait la modifier.

Évidemment, dans le biologique, on a des avancées très intéressantes qui nous permettent même de nous y référer en regard des propositions qui sont apportées comme amendement à la loi actuelle. Alors, ce que je dis, je dis qu'en ce qui concerne, par exemple, le biologique, très certainement qu'on était dans la légalité puisqu'on a toute l'autorité pour légiférer en ce qui concerne l'étiquetage en particulier et ces choses-là, vous savez ça, Mme la Présidente. Alors, je veux rassurer le ministre là-dessus, il n'est pas question d'un débat, ou d'une chicane, ou d'une dispute partisane à ce moment-ci.

En ce qui concerne le mémoire, je dois vous dire, M. Proulx, que j'ai trouvé votre mémoire non seulement bien fait, mais extrêmement dur, extrêmement... Moi, je le vois comme un mémoire extrêmement critique et extrêmement sévère. Même si vous saluez les avancements qui sont dans le projet de loi, je pense que vous avez des réserves, et il s'agit de prendre le résumé que vous nous avez déposé avec le mémoire, et, quand on connaît l'importance des tables de concertation agroalimentaire dans toutes les régions du Québec, je pense qu'on ne peut pas faire autrement que de prêter beaucoup d'attention à votre mémoire et à vos recommandations. Et, dans le résumé que vous nous faites, là, on dit: «Si le projet soumis va dans le bon sens, il recèle aussi de multiples ? de multiples ? sources d'inquiétude.»

Et je ne lirai pas tout ce qu'il y a dans le résumé, Mme la Présidente, mais je pense que les membres de la commission doivent être bien conscients que le message que nous envoient Les Tables de concertation agroalimentaire du Québec est un message au ministre à l'effet qu'il y a des inquiétudes qui sont soulevées dans toutes les régions. Et, comme notre projet et comme notre intention est à l'effet d'aider ces régions à développer des créneaux, etc., je pense qu'il faut porter attention donc à ce mémoire et à ces recommandations qui nous sont faites.

Alors, Mme la Présidente, comme j'ai fait avec les gens de l'ADA il y a quelques instants où on leur a demandé de nous expliquer comment ça se passait, et ils nous l'ont très bien expliqué, c'était très clair, moi, je demanderais à M. Proulx ou à M. Bordron, peu importe, de nous parler de compte tenu... Si, supposons, là, que le gouvernement, le ministre donne réponse à toutes vos inquiétudes, retire son projet de règlement en regard de la Loi sur les produits alimentaires, j'aimerais que vous nous disiez de quoi ont surtout besoin les petits producteurs, les petits transformateurs pour pouvoir bénéficier et tirer bénéfice, là, des modifications qu'on s'apprête à apporter à la loi. Tracez-nous un portrait de ce que vous pensez que si le ministre se rend à vos... calme vos inquiétudes compte tenu des avancées qu'on pourrait faire avec la loi, à ce moment-là, quels seraient les besoins de vos petits producteurs en région et de vos petits transformateurs?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Proulx.

M. Proulx (Charles): Il faut faire attention lorsqu'on parle de petits producteurs. Première des choses, j'aimerais revenir sur votre premier commentaire lorsque vous dites qu'on est très durs. C'est peut-être ma nature qui a inspiré Jean-Michel aussi à la dureté; j'ai toujours été une personne peu flatteuse, et la fois que je l'ai fait ça a fini par une basse messe. Ça fait qu'à partir de là, bien, je pense qu'on devait sortir les points qui nous paraissaient un petit peu à remettre en surface et en faisant de cette façon-là, bien, ça permet justement de dire: Aïe, ils sont durs, il faut y aller.

Au niveau des petits producteurs, moi, je veux revenir sur tout l'aspect de la mondialisation. Je suis convaincu que le Québec, c'est un petit producteur dans le marché de la mondialisation. Et, pour les fois que j'ai sorti puis que je suis allé voir à l'extérieur, j'ai toujours oeuvré, ça fait au-delà de 30 ans que je suis en production agricole, je suis un producteur de porc en premier, j'ai toujours été connu comme ça, lorsque je suis allé voir les pays qui en produisaient, entre autres, le Danemark où ils produisent cinq porcs par habitant, au Québec on est loin de ça. Et dans ce sens, dans ce contexte-là, nous sommes des petits producteurs. Depuis quelques années, avec l'âge qui s'est accumulé, j'ai de la relève actuellement à la maison, et mon garçon est devenu un petit producteur à l'intérieur de la ferme parce qu'il a développé une production type biologique. Et un des problèmes qu'on vit, ça va être la mise en marché de ça. L'organisation de la mise en marché, ça va être un problème important. Tout à l'heure, j'entendais une question puis ça me faisait sursauter parce qu'on disait: l'agriculture biologique est en demande, il y a des demandes, c'est abominable, les demandes. On a une certification biologique, on a été capable de produire des pommes de terre biologiques. L'année dernière, mon garçon, il y a la moitié de sa récolte qu'il a envoyée sur le tas du fumier, même si c'est certifié biologique Québec. Il y a une demande grandissante, énorme, c'est vrai, mais sur un petit pourcentage, une augmentation de 20 % sur 0,2 %, ça ne veut pas dire grand-chose, entre guillemets. Ça fait que c'est un petit peu le rôle de table agroalimentaire aussi d'essayer de mettre en lien ces petits producteurs là comme on pourrait dire avec des distributeurs puis des transformateurs.

Ça fait que je ne sais pas... Moi, j'aimerais que Jean-Michel peut-être, il aurait sûrement des compléments à apporter parce que, comme je vous ai dit, de par ma nature je ne suis pas souvent là-dedans, puis Jean-Michel, vous voyez qu'il parle de ça bien plus avec ses tripes. Tantôt la réponse sur le champagne, j'aurais été mal à aise d'y répondre; je pense que Jean-Michel vous l'a bien tournée, là, ça fait que...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. Bordron, vous voulez compléter?

M. Bordron (Jean-Michel): Quelques éléments, effectivement. Dans l'hypothèse où effectivement le projet de loi vient nourrir, régler effectivement les inquiétudes que l'on manifeste ici... À ce propos, «dur», vous avez dit; «vous êtes extrêmement dur», vous n'avez pas dit féroce, mais je l'entendais entre les autres mots. Non. Non, en tout cas ce n'est pas du tout ce qui nous a motivés. Simplement, nous devons, au quotidien, gérer des demandes extrêmement diversifiées, des attentes extrêmement nombreuses et diversifiées, et on sait qu'il y a, dans cet outil de la différenciation, des éléments de réponse, pas la totalité, mais des éléments de réponse à bon nombre des problèmes que se posent les entreprises dans les régions. Alors, on voudrait ? on voudrait ? que ça avance, on voudrait que des choses aillent beaucoup plus vite, et en particulier on attend depuis longtemps, avec une grande impatience, des outils de formation, d'information, de vulgarisation, je l'ai évoqué tout à l'heure. Ça, on les attend, et il faut absolument qu'on produise collectivement. Et on est prêts nous-mêmes à apporter notre pierre, on a participé à un comité du ministère il y a encore quelques mois et on a déjà sur cette ligne à l'époque. Ça nous prend des outils pour faire connaître les procédures tant au consommateur qu'au producteur.

Deuxième élément. M. Labrecque tout à l'heure évoquait l'entrée des produits dans les grandes chaînes. J'irai rapidement sur la concentration. On la connaît, hein, la concentration de la distribution alimentaire au Québec qui est extrêmement forte; un des défis, c'est d'entrer chez eux. Les chaînes commencent à bouger parce qu'effectivement la demande des consommateurs est là, même si elle est encore tout à fait réduite, mais elle augmente. La difficulté majeure, ça va être comment les chaînes habituées à régler, à traiter avec un intervenant, un interlocuteur pour des quantités, des volumes importants, comment on va régler cette question du multiple. Et le multiple, il faut le prendre vraiment très, très large, multiples interlocuteurs, multiples procédures, multiples états de développement interne de l'entreprise avec des outils d'EDI, de code à barres, etc. Il y a là énormément de choses, ça nous prend... est-ce que c'est des programmes, est-ce que c'est des investissements? Asseyons-nous et reparlons-en le moment venu, mais ça va nous prendre véritablement des moyens pour travailler sur cette interface-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, si vous permettez, je voudrais céder la parole à M. le député de Beauce-Nord pour deux minutes.

n(12 h 10)n

M. Grondin: Merci, Mme la Présidente. Alors, moi, j'aimerais ça vous entendre aussi sur le développement territorial. Je ne sais pas si je rêve, moi, mais il me semble que... parce que je demeure dans une petite municipalité, puis on voit la grande entreprise agricole se développer, puis ça va bien, là, je n'ai rien contre ça, mais, par contre, on voit beaucoup de fermes qui sont laissées un peu à l'abandon puis... Dans la Beauce, c'est un problème, mais on voit aussi qu'en Gaspésie ou en dehors, c'est un problème. Commet est-ce que vous voyez ça? Est-ce que les produits du terroir, avec le développement régional, le développement des petites fermes, vous parlez de votre fils s'en va en biologie, biologique. Est-ce qu'il y a un avenir là-dedans?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Proulx.

M. Proulx (Charles): Quand vous faites allusion à mon fils, il faut bien dire qu'on a une production de masse aussi qui l'accompagne. Je pense qu'il faut bien dire ça. Lorsqu'on parle des productions, les petites fermes, en même temps je pense qu'on peut faire aussi allusion aux fermes à temps partiel. Et je regarde dernièrement puis je ne sais pas si ça va être un bon exemple, mais c'est le premier exemple qui m'est venu à la tête lorsque vous avez parlé du développement régional.

On a vécu dernièrement, dans une situation complètement différente de ça, où ce qu'on a fait un règlement sur, entre autres, le déboisement. Et on connaît quelques municipalités où on avait une motivation de certaines petites fermes ou certains petits propriétaires terriens qui voulaient développer une production dite de bleuets. Et toute la notion qui encadrait le développement venait freiner le développement de ces petites fermes là dans des paroisses peu occupées par l'agriculture. Ça, à l'intérieur des règlements, on venait de freiner ça.

Là-dessus, les petites fermes, moi, je pense toujours, je vais toujours être persuadé de ça, puis Jean-Michel en a fait allusion sans le dire, mais, dans le cas des petites fermes, tout le mécanisme de la mise en marché, l'organisation de la mise en marché, lorsqu'il faisait allusion que c'est problématique pour le petits producteurs de rentrer dans les magasins, il y a toute la dynamique de la mise en marché qui est innée là-dedans. L'agriculture qui est grande au Québec, les grosses productions, la production de masse, regardez comment qu'elles sont faites. La mise en marché est structurée, est bien organisée.

Dans ce cas-là aussi, je pense qu'il devra y avoir un pas là-dedans qui sera fait pour permettre et favoriser ça. Je sais que Jean-Michel a sûrement des compléments. Je ne sais pas. Non?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Proulx. Merci. Le temps est écoulé. Je reviens au ministre. Pour le dernier bloc, il vous reste 13 minutes.

M. Lessard: Merci. Alors, merci, Mme la Présidente, de votre façon de tenir le temps. C'est important.

Alors donc, deux volets. C'est sûr qu'avec la Loi sur les appellations réservées, ce qu'on veut faire, c'est nécessairement qu'il y ait des réservations pour interdire les utilisations de ce même nom qui n'auraient pas été réservées.

Il faut quand même constater qu'avec les produits que vous avez à côté de vous il y a quand même une prolifération de toutes sortes d'usages. Un, avez-vous des solutions à nous proposer pendant qu'il y a d'autres réservations d'appellations? Puis deuxièmement je reviens parce que j'avais posé aussi la question tantôt. Parce que vous me demandez de mettre de côté le règlement ou les définitions de «fermier» et de «artisanal» qui est contenu dans le document qui pouvait sous-tendre une réglementation. Est-ce qu'on pourrait quand même, après la lecture de ces descriptions-là ou éléments de description, les inclure toutefois dans un cahier de charges? Est-ce que ça pourrait quand même atteindre un certain objectif qui ne soit pas dans une réglementation éventuelle, mais plutôt dans un cahier de charges sur une définition de «fermier» et notion «artisanale»? Alors, deux volets.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): Premier élément de réponse, si vous voulez bien. Vous disiez, vous évoquiez la prolifération des produits. Je vais redire que, oui, il y en a effectivement beaucoup; la prolifération, elle est là. Il y a un petit peu de tout. Nous persistons à dire que la coexistence des deux systèmes va concourir à entretenir cette prolifération et cette confusion. Ça, c'est clair. Donc, les risques de dérive, d'usurpation, etc., d'abus. Ça, c'est le premier élément que je voudrais apporter.

Le deuxième, il est clair que, même quand il n'est pas dit, il n'existe pas de produit qui ne repose pas sur un cahier des charges. Dans la majorité des cas, effectivement, il n'a pas été formalisé, mais il y a toujours... Une recette est une ébauche de cahier des charges. Donc, il existe toujours. La référence ou le passage par la loi A-20.02 va contraindre, obliger à passer à une phase de formulation et, de notre point de vue, c'est une bonne chose parce qu'effectivement ça va venir... C'est un outil, d'une certaine manière, de moralisation des pratiques. Donc, c'est intéressant.

Si vous me permettez, j'aurais le goût de ? je ne sais pas si c'est... vous allez me le dire ? j'aurais le goût d'ajouter un mot en référence ou en réponse à la question de M. Grondin, si ma mémoire est bonne.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui. Allez-y.

M. Bordron (Jean-Michel): Tout à l'heure, c'était sur la question du développement territorial. M. Proulx évoquait en entrée tout à l'heure, disant: Bien, le Québec est un petit producteur, c'est évident que, quand il m'arrive, moi aussi, d'être un petit peu fâché, j'ai envie de dire que, demain matin, l'agriculture du Québec disparaît, j'aurai, en tant que consommateur, pas moins de produits sur mes tablettes.

Donc, autrement dit, en tant que consommateur, je ne serai pas véritablement pénalisé. Les producteurs, les transformateurs, oui, les régions encore plus et auquel cas, l'enjeu, à ce moment-là... Il faut quand même que l'agriculture, l'agroalimentaire, c'est le secteur majeur de nos régions, et ça veut donc dire qu'à ce moment-là la problématique se déplacerait vers les grandes villes, vers Montréal, où la concentration de la population serait encore exacerbée, et ce qui poserait d'autres types de problèmes à la société. Je ferme la, si vous voulez bien, ma parenthèse. Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Alors, du côté du gouvernement. M. le ministre, est-ce que vous avez d'autres questions? M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Oui. Merci, Mme la Présidente. Puis je vais continuer sur vos propos, M. Bordron puis M. Proulx, parce que je veux être certain de bien comprendre quelque chose.

Quand on avait parlé du projet de règlement, entre autres, un des objectifs, quand je parlais... Je suis l'adjoint parlementaire du ministre, en passant, donc j'ai eu l'opportunité de discuter beaucoup avec les gens du ministère. Un des objectifs du règlement était de permettre rapidement à des gens qui faisaient des petites productions artisanales ? comme j'ai en Abitibi-Témiscamingue, il y en a plusieurs ? de rapidement pouvoir identifier un produit, qui est fait selon certaines manières, qui correspond à une définition artisanale, sans être obligé de s'embarquer dans un processus de cahier de charges qui est plus long et plus dispendieux. O.K. C'était en gros l'objectif de ça pour permettre à plusieurs petites personnes, alors... Puis, moi, je trouvais que c'était bien sensé parce que je pense que ça correspondait au désir de plusieurs petits producteurs de ma région.

Si je comprends bien, si on parle, à ce moment-là, de tout inclure dans le volet d'appellation réservée, les termes «fermiers» et «artisanaux» ou, si on fait l'abandon du règlement, ça veut dire qu'un demandeur individuel... je prends quelqu'un, par exemple, qui fait un fromage particulier en région, chez moi, qui a une recette particulière qu'il veut garder, entre guillemets, secrète, mais qui veut avoir une certaine valeur ajoutée à son produit en ayant une appellation... Comme on a dit, le demandeur individuel, à ce moment-là, le cahier de charges devient public, un bien public qui fait que la personne, à ce moment-là, il n'a pas le choix. Il va falloir donc qu'il partage sa recette, et quelqu'un va pouvoir venir s'installer le terrain à côté et prendre le cahier de charges et faire exactement le même type de production. Et, à ce moment-là, on va avoir plusieurs types fromages fermiers, de chèvre, mettons, de l'Abitibi-Témiscamingue.

Donc, la personne... C'est vers ça qu'on s'en irait en ayant des appellations, un cahier de charges qui devient un bien public. Donc, l'individu qui avait une spécificité, il va se créer, entre guillemets, des compétiteurs d'un produit similaire. C'est un peu vers ça qu'on s'en irait à cet égard-là. Si on prend le Pied-De-Vent, mettons, aux Îles-de-la-Madeleine, le producteur qui est là deviendrait une appellation, dépendamment du type, un cahier de charges... il va pouvoir créer donc plusieurs petits Pied-De-Vent autour, c'est un peu vers ça qu'on s'en irait. Et, à ce moment-là, c'était là que, moi, je voyais l'avantage du règlement pour permettre à des petits producteurs de s'identifier type fermier sans nécessairement passer par le gros processus du cahier de charges et avec les coûts. Est-ce que c'est comme ça que vous voyez un petit peu les choses?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): Premier élément. D'abord, le projet de loi n° 113 attache bien aussi aux appellations réservées, aux attestations de spécificité, en l'occurrence, les mentions «fermier» et «artisanal». Donc ça, dans le projet de loi, ça y est.

Maintenant, sur la dynamique «lourdeur», je ne suis pas sûr de bien vous comprendre, que ce soit par le règlement ou par la loi, un cahier des charges sera un cahier des charges, et il faudra bien qu'il soit formalisé dans les deux cas de figure.

n(12 h 20)n

Est-ce que maintenant... si je vous ai bien compris, vous apportez la question de l'initiative individuelle. Je l'ai dit déjà précédemment, il nous semble que ce producteur, ce transformateur, cet entrepreneur dispose d'outils déjà via la marque de commerce. Par exemple, il peut enregistrer sa marque et puis il va aller chercher une protection de son travail sans pour autant entrer dans la problématique des appellations. Mais était-ce votre question?

M. Bernard: Oui, bien, c'est ça. C'est effectivement la marque de commerce demeure, mais le cahier de charges devient public.

M. Bordron (Jean-Michel): Pour les appellations.

M. Bernard: Oui, l'appellation.

M. Bordron (Jean-Michel): Oui.

M. Bernard: C'est ça, comme un champagne, il y a plusieurs types de champagne, O.K. Mais ce sont tous... que ce soit Veuve Cliquot, etc., ce sont tous des champagnes produits avec un cahier de charges pour la région de Champagne. O.K. Donc, à ce moment-là, un individu... puis c'était là ma dynamique de la question à savoir: un individu qui fait un fromage, par exemple, particulier que je prends dans les Îles-de-la-Madeleine, le Pied-De-Vent, qui deviendrait une AO, il pourrait... quand je dis d'autres petits Pied-De-Vent, c'était dans le sens que la marque de commerce, oui, est réservée mais en partie le cahier de charges deviendrait qu'il pourrait avoir d'autres fromages similaires qui pourraient se fabriquer aux Îles-de-la-Madeleine.

M. Bordron (Jean-Michel): Oui. Mais d'abord il deviendra AO que si l'entrepreneur qui le fabrique le souhaite en partant. Donc, s'il rentre dans la dynamique, c'est qu'il accepte en partant qu'effectivement son produit qui lui appartient devienne une propriété collective sur un territoire donné, les Îles, pour garder le même exemple en l'occurrence.

M. Bernard: Exactement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député.

M. Bernard: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député, s'il vous plaît, vous laissez M. Bordron exprimer son opinion.

M. Bernard: Excusez. Mais c'était exactement ça que je voulais savoir, si ces gens-là qui font ça vont vouloir. C'est vraiment se rendre compte que c'est ça qui va arriver.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): C'est bien. Merci de votre commentaire, M. Bordron.

Est-ce que j'ai bien compris, M. le député ce Rouyn-Noranda?Témiscamingue? Je cherche à comprendre parce que l'échange est un peu ambigu. Est-ce que vous soutenez que les petits producteurs en région ne devraient pas avoir l'obligation d'avoir un cahier de charges? Est-ce que c'est ça, l'opinion que vous...

M. Bernard: Bien, c'était l'objectif du règlement initialement pour permettre à des gens d'avoir des productions de type artisanal ou fermier identifiés par un règlement, de dire: Regardez, on fait comme ça. Et à ce moment-là, le gouvernement, c'était une vérification, de dire qu'ils rencontraient certains critères pour dire: Oui, c'est vrai, il peut utiliser le terme, s'enregistrer. Ce n'était pas dispendieux, etc. Tandis qu'en retirant le règlement, on rentrerait dans un autre processus plus dispendieux et plus long, et c'est là qu'était le point.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord.

M. Bernard: Et au niveau individuel, à ce moment-là, que la personne se rend compte, par exemple, qui ferait une demande individuelle d'appellation, est-ce que les gens sont conscients que ça devient un bien collectif. Puis ça, ce n'était pas... Puis c'était ça, le but de la chose. Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, merci d'avoir clarifié les choses parce que ce n'était pas clair.

M. Bordron, très rapidement, avez-vous quelque chose à ajouter là-dessus? Êtes-vous en faveur de cette opinion ou pas?

M. Bordron (Jean-Michel): Je vais être franc, je ne suis pas sûr de bien vous comprendre.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, on va vous donner l'opportunité de ce côté-là peut-être de mieux comprendre.

M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Mon collègue, très rapidement... Je ne sais pas si vous aviez une question? Non. O.K.

Je suis très heureux, Mme la Présidente, que finalement on ait levé...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le député, il vous reste 8 min 30 s.

M. Arseneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente, vous êtes comme d'habitude très généreuse.

Je suis très heureux que cette ambiguïté ai été levée. Enfin, ça, même si vous dites que vous semblez ne pas avoir compris. Moi, ce que je comprends, c'est que ce qu'il faut éviter, c'est la confusion, c'est le système parallèle, c'est la possibilité qu'on se retrouve avec un produit avec une appellation réservée fermier et un autre produit de type fermier par règlement. Là, on place les gens dans une confusion très, très grande, et je pense que c'est ça que les gens viennent nous dire.

Je suis très heureux aussi que le ministre ait levé l'inquiétude qui était exprimée par les gens de l'UPA en ce qui concerne la propriété, la demande individuelle versus la propriété collective qui demeure. Ça, c'est important. Je pense que le ministre a bien expliqué que la demande est individuelle mais qu'après ça le processus est ouvert à tous les gens. C'est ça que je comprends, et c'est important.

Je veux faire une petite remarque, Mme la Présidente, sur les allégations de M. Proulx en regard du Québec petit producteur. Moi, en tout cas je n'ai jamais vu que la capacité de production au niveau agricole du Québec était limitée et qui faisait de nous des petits producteurs. Je parlais que, dans certaines régions et dans nos régions en particulier périphériques, il y a parfois des petits producteurs qui ont des produits de niche, de créneau à très haute valeur ajoutée qui ont une renommée nationale et qui pourraient déborder nos frontières, et c'est eux qu'il faut aider justement à pénétrer le marché. Mais, moi, je ne pense pas que le Québec soit un petit producteur. Je pense que le Québec est un petit marché, est un petit marché, cependant. Et, quand on veut, avec des appellations réservées, produit d'origine, terroir, etc., c'est parce qu'on veut permettre à ces producteurs de déborder du marché québécois, qui est lui-même petit, pour aller justement sur les marchés étrangers. Et, pour ça, il faut avoir des critères internationaux et rencontrer les normes internationales. Sinon, ce n'est pas utile de faire cet exercice. Le marché québécois, et en particulier dans nos régions, est trop limité pour pouvoir permettre un développement industriel intéressant.

Alors, ma question, Mme la Présidente, c'est en regard du marketing ? je n'aime pas employé le mot anglais, mais en tout cas c'est le mot que tout le monde connaît, et je sais que vous allez le connaître. Donc, l'opération marketing derrière cette loi bonifiée, améliorée, la loi n° 113 ? pour répondre à toutes les inquiétudes, on va de l'avant ? l'UPA est venue nous dire ? il me semble que c'est très gentil pour la reconnaissance du travail des tables de concertation agroalimentaire dans tout le Québec ? qu'en ce qui concerne l'utilisation des mécanismes pour faciliter le marketing et la promotion de ça, l'UPA nous dit... elle demande d'impliquer la filière, mais aussi de reconnaître la reconnaissance de l'expertise et de la crédibilité des tables de concertation. Tout ça, c'est dans les ressources qu'il faut mettre en place pour faire la promotion de ça.

De quelle façon vous pensez... Dites-nous de quelle façon vous voyez que les tables de concertation pourraient être mises à profit, quand on aura une bonne loi, pour faire en sorte d'aider nos gens, dans nos régions, à bénéficier des bienfaits de cette bonne loi.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Proulx.

M. Proulx (Charles): Comme on vous a dit, les tables sont réparties sur chacune des régions, puis notre nature, c'est une nature de concertation: c'est de mettre en lien producteurs, transformateurs, utilisateurs ou consommateurs. C'est dans ce sens-là qu'on... Je pense que notre rôle est grand dans ce sens-là. C'est que les petits producteurs que vous dites, là, ils ne sont pas... la plupart d'eux autres, là, ce qu'on a aujourd'hui ne s'applique pas directement à eux autres. Il faut trouver d'autres moyens de leur rendre service, de les aider, via les tables, qui est un mécanisme de concertation... Puis, on l'a vu, depuis que les tables existent, on a vu des produits rentrer dans des régions, à différents niveaux. C'est un des rôles majeurs que les tables se voient aussi.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Rapidement, M. le député des Îles.

M. Arseneau: Oui. Est-ce que les tables, vous pouvez apporter... parce que c'est une table de concertation, mais est-ce que vous apporter un soutien technique? Est-ce que... Parce que, bon, Aliments Québec, on sait que c'est le label pour reconnaître, faire la promotion, mais vos tables, essentiellement, est-ce que c'est par l'ajout de moyens financiers, ou techniques, ou... Comment... Parce que l'UPA, M. Pellerin... Et ça ne doit pas être simplement pour vous lancer des fleurs, même si ça va, là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bordron.

M. Bordron (Jean-Michel): J'évoquerai deux fonctions, dans l'ensemble de la procédure, que personnellement j'aimerais voir davantage reconnues et mises en oeuvre, même mises en oeuvre dans l'ensemble des tables.

D'abord, les tables sont, et peuvent l'être demain beaucoup plus, agents de promotion des outils législatifs que cette Assemblée se propose d'enrichir. Deuxième fonction: les tables sont, peuvent l'être demain davantage, agents de formation des interlocuteurs dans le milieu. Et, quand je dis les interlocuteurs, plus côté amont qu'aval, plus côté entrepreneurs que du côté des consommateurs, avec lesquels, aujourd'hui, c'est vrai que nous avons globalement peu de relations directes. On va les avoir dans des activités, dans des événements qui mettent en lien à la fois la production et les consommateurs, mais nous avons peu de prise, je dirais, peu de relations directes avec les consommateurs.

n(12 h 30)n

Alors, comment, maintenant... Bien, il est clair que les équipes des tables sont globalement fort réduites: deux personnes jusqu'à quatre, cinq, six, sept personnes, peut-être, et bien évidemment, la réalité de ces 16 tables, elle est fort diverse au gré des forces, des équilibres régionaux, de la vigueur, je dirais, de la concertation régionale, etc. Mais il est clair que les tables dans leur ensemble disposent aujourd'hui de moyens en particulier financiers et humains, mais les deux sont liés, extrêmement réduits.

Il y a un outil qui est beaucoup utilisé par les tables qui est l'outil «ententes spécifiques»: un certain nombre sont en cours, un certain nombre sont finies, des tables en sont à leur deuxième, voire leur troisième. Bon, c'est clair que nous attendons, de la part des ministères, des signaux forts pour, comment dire, l'engagement dans ces ententes spécifiques.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Bordron. Il est midi trente. J'ai besoin de votre consentement pour prolonger de cinq minutes afin de permettre aussi au député de Nicolet-Yamaska de poser une question. Ça va?

Une voix: Ça va aller. Mon collègue...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ou le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Arseneau: Moi, ça peut aller aussi, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Ça va aller?

M. Arseneau: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): O.K. Alors, est-ce que j'ai votre consentement pour laisser nos invités compléter leurs réponses? Allez-y, M. Bordron et M. Proulx, s'il vous plaît, pour conclure, deux, trois minutes.

M. Proulx (Charles): Bien, ma conclusion, c'est... j'ai demandé à Jean-Michel, j'en ai manqué un petit bout. Vous voyez, en vieillissant, des fois il y a des facultés qui se modifient.

J'ai énormément de difficultés du point de vue audition dans cette salle-ci. On est heureux que vous nous ayez demandé de se présenter devant vous, même si, au début, lorsque c'est arrivé à ça, Jean-Michel m'en parlait, il me disait: Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Bien, je lui ai dit: Écoute bien, on va regarder qu'est-ce que les autres tables font, on ne se présentera pas à 16 devant, on... puis finalement il est venu un consensus très rapide où est-ce qu'on s'est dit: On va envoyer un mémoire, ils en prendront connaissance, puis, pour nous autres, ça finissait là.

Notre grande surprise, ça a été lorsqu'on a eu un mot de nous inviter à venir se... Ça nous a surpris un petit peu parce qu'on ne s'y attendait pas. Et, personnellement, je ne m'étais pas préparé en conséquence aussi. J'avais d'autres choses à faire cette semaine, ça fait que... Mais je me fiais énormément sur Jean-Michel, comme vous avez dit. Je tiens à vous remercier pour ça, les parties que vous allez considérer, tant mieux, puis je vous remercie encore une fois de la diligence que vous avez faites avec nous autres.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup pour votre contribution. Alors, sur ce, je suspends nos travaux à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

 

(Reprise à 14 h 6)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation reprend ses travaux. J'invite les représentants du Conseil des appellations agroalimentaires du Québec à se présenter devant nous.

Alors, Mme Claire Bolduc, présidente, je vous prie de présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et 20 minutes de chaque côté pour les échanges. Bienvenue.

Conseil des appellations
agroalimentaires du Québec (CAAQ)

Mme Bolduc (Claire): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mmes, MM. de la commission. Je suis accompagnée aujourd'hui de M. Denis-Paul Bouffard, qui est le directeur général au Conseil des appellations agroalimentaires du Québec, et il est le pivot des actions qui ont été posées en matière d'accréditation et de reconnaissance de l'appellation biologique au cours des huit dernières années au Québec. On peut se fier sur son expertise et son savoir.

Alors, mesdames, messieurs, merci beaucoup de nous donner la parole dans le cadre de cette commission parlementaire. Et nous tenons à exprimer notre satisfaction en regard de l'intention qui a été posée par votre gouvernement d'encadrer la progression des produits agroalimentaires comportant des labels de qualité au Québec. Comme nous sommes l'instance chargée de la mise en application de la Loi sur les appellations agroalimentaires actuellement, comme nous sommes également l'instance qui possède l'expertise en la matière, nous nous faisions un devoir de participer à la présente commission et nous souhaitons mettre à la contribution de la commission et du gouvernement toute l'expertise qui a été accumulée dans nos façons de faire et dans nos mécanismes en relation avec l'actuelle loi pour bonifier, améliorer ou faire avancer les appellations de qualité au niveau des produits agroalimentaires.

Alors, vous le savez, le CAAQ, c'est un organisme sans but lucratif, et notre mandat a été d'assurer la mise en place des modes d'accréditation qui touchaient la seule appellation réservée par le ministre jusqu'à maintenant, soit l'appellation biologique. Nous avons convenu, dans un premier temps, de faire nos marques sur cette appellation, d'établir les fonctionnements requis et nous avons par la suite, dès 2003, constaté qu'il y avait plusieurs autres appellations possibles. Le conseil a donc élargi ses façons de faire à l'ensemble des appellations agroalimentaires, et nous sommes à ce moment-là passés du Conseil d'accréditation du Québec au Conseil des appellations agroalimentaires du Québec. De sorte que maintenant, dans les façons de faire du Conseil des appellations agroalimentaires, nous sommes en mesure de supporter, d'encadrer et de surveiller, dans la mesure de nos moyens évidemment ? on en parlera plus tard; donc, d'encadrer ? l'ensemble des appellations agroalimentaires qui pourraient être retenues par le ministre.

Notre façon de fonctionner, si on peut la dessiner, si vous pouvez être un peu plus visuels que de suivre sur un écrit, c'est d'établir des conseils d'accréditation pour les appellations qui seront réservées, conseils d'accréditation qui voient à la précision des normes retenues pour une appellation donnée qui fixe les cahiers de charges en conséquence, qui, eux, répondent de leurs actions, les conseils d'accréditation, auprès du Conseil des appellations agroalimentaires qui, lui, se charge de vérifier que les actions ont été posées en conformité, de façon transparente et claire pour définir les cahiers de charges et pour préciser les modes d'accréditation.

n(14 h 10)n

Rappelons également que les accréditations, une fois qu'elles sont définies par les conseils d'accréditation sous la responsabilité du Conseil des appellations agroalimentaires, ces cahiers de charges là sont vérifiés, validés par des organismes de certification. Les organismes de certification ne font pas les cahiers de charges, mais ils vérifient la conformité au cahier de charges, et la distinction entre les différentes façons de faire est très importante. Alors, depuis 2004, nous sommes en mesure d'offrir notre expertise à l'ensemble des appellations que le ministre de l'Agriculture retiendra, au niveau des appellations que le ministre de l'Agriculture réservera au niveau des appellations agroalimentaires.

Nous avons également mis en place les processus et les programmes pour conduire aux différentes accréditations en regard de critères très précis qui répondent aux normes internationales, qui reposent sur des processus de consultation auprès du public, auprès des producteurs, auprès des différentes instances concernées par les produits agroalimentaires. Nous avons également mis en place des façons de fonctionner, des mécanismes très clairs qui rendent tous les processus rigoureux et transparents.

Depuis cinq ans, évidemment nous avons été en mesure d'évaluer nos forces et nos faiblesses, d'améliorer celles-ci, et par conséquent nous pouvons suggérer quelques moyens d'améliorer l'actuel projet de loi que vous avez proposé. Dans les réactions générales, nous nous inquiétons de la confusion qui pourrait intervenir entre les labels de qualité qui pourraient être retenus par le ministre et les termes valorisant ces mêmes labels.

En fait, quand on pense à des appellations réservées dans le domaine de l'agroalimentaire, l'intérêt de réserver des appellations repose sur trois principes. D'abord, la reconnaissance des produits, que le consommateur sache clairement quels produits représentent quoi et qu'il puisse identifier facilement la valeur de ces produits-là et distinguer leur valeur par rapport aux autres produits. Un intérêt à l'endroit du consommateur. Il y a également un intérêt à l'endroit du producteur qui se soumet à un processus de production, de transformation qui correspond à des attentes précisées. En regard de ça, si un producteur fait l'effort nécessaire pour avoir une qualité de production particulière, pour avoir un mode de production particulier, il doit pouvoir faire reconnaître ce mode de production là et en retirer le bénéfice associé à son travail. Finalement, c'est également une reconnaissance de la valeur des produits sur les marchés locaux et sur les marchés internationaux.

Donc, nous, on a travaillé beaucoup en regard de ce qui se fait ailleurs au niveau international ? mondial, ce serait un peu gros, mais au niveau international. C'est important de mentionner que le système québécois qui a été mis en place pour l'agriculture biologique est un système qui jouit d'une très grande réputation, d'une excellente réputation auprès des autres organismes de certification, partout dans le monde.

Donc, confusion entre les labels de qualité et les termes valorisants. Le projet de loi actuel confond les appellations géographiques, les attestations de spécificité et les modes de production et les termes qui les valorisent, fermier, artisanal, terroir. Et ça nous inquiète parce que ce sont des termes qui sont actuellement d'actualité, qui sont à la mode. Quand ces termes-là passeront ou quand ces termes-là seront inscrits dans des lois ou des règlements, il sera très facile d'adopter, pour qui voudra copier, il sera très facile d'adopter des termes similaires, par exemple «produit du terroir», «produit à saveur d'antan», «produit artisanal», «produit fait à la manière de chez nous», et, à ce moment-là, ça a comme conséquence de dévaloriser les mécanismes et les modes de production qui ont été mis en place. Et ça nous inquiète de voir qu'on ne se rabat pas sur les modes de spécificité de façon plus générale et globale, dans le projet de loi.

Un autre aspect du projet de loi qui nous inquiète particulièrement, c'est la mise en place de systèmes de contrôle parallèles et inégaux. Je vais vous faire une analogie entre le sérieux et le pas sérieux de certaines mécaniques ou de certains fonctionnements. Si on avait, au système d'éducation du Québec, deux modes d'atteinte du diplôme d'études secondaires, un mode où il y a des examens, il y a des façons de faire, il y a des objectifs précis qu'on doit atteindre qui sont validés par des examens, qui sont confirmés par une note, et un mode où les étudiants n'ont qu'à se présenter, cocher oui, cocher non, se présenter à un cours pour obtenir un diplôme quelconque. À votre avis, en tout cas, de façon assez évidente, ce qui se produirait, c'est que la plupart des étudiants choisiraient la voie facile, et la valeur du diplôme d'études secondaires deviendrait bien banale.

Dans les systèmes de contrôle parallèles inégaux, on craint un peu le même genre de fonctionnement. S'il y a deux systèmes de reconnaissance ou d'appellation des produits, deux façons d'atteindre une appellation quelconque, on craint que ce soit l'appellation la moins contraignante qui prenne le pas sur l'ensemble des autres mécanismes, et le plus petit dénominateur faisant souvent force de fonctionnement, c'est celui qui sera appliqué, de sorte que l'ensemble de la valeur des appellations du domaine agroalimentaire s'en trouve dévalorisé.

Nous, ça nous inquiète de façon particulière parce que, quand on a des appellations agroalimentaires qui ont une réelle valeur, c'est aussi un réel moteur de reconnaissance de ces produits-là, et on craint qu'on ne puisse plus faire le poids et qu'on ne puisse plus miser sur la valeur de nos produits, qu'ils soient reconnus d'une façon plus simpliste, et, à ce moment-là, on craint que ça ait un effet démotivant, voire un effet dévastateur sur le développement de ces produits-là.

Un autre élément du projet de loi qui nous a particulièrement inquiétés, c'est la confusion qu'on introduit entre l'accréditation des certificateurs et la reconnaissance d'une appellation. Quand j'ai expliqué la façon de fonctionner du CAAQ, du Conseil des appellations agroalimentaires, j'ai rappelé qu'un organisme peut proposer des normes, mais il ne doit pas être l'organisme qui les reconnaît et qui les approuve. Une fois qu'il les a proposées, il doit se retirer du processus pour qu'un organisme tiers qui travaille avec rigueur et transparence valide ces normes-là, fasse les exercices de consultation, de validation, de travail terrain avec les différentes instances, les différents interlocuteurs et que l'exercice soit fait dans un cadre connu de tous. Une fois les normes accréditées, que les normes seront reconnues, l'organisme de certification pourra faire la certification de la reconnaissance de l'application des normes, mais un certificateur doit se distancer de l'établissement de normes.

C'est pourquoi nous avons ? avec l'appellation biologique, on a démontré le bien-fondé du fonctionnement; nous avons ? proposé un mécanisme qui, à partir des appellations réservées, établit clairement que le Conseil d'accréditation d'une appellation qui regroupe peut-être plusieurs types d'appellations, plusieurs cahiers de charges, mais qu'un conseil d'accréditation d'un type d'appellation approuve les normes, approuve les cahiers de charges, que ce soient des certificateurs distincts qui les fassent appliquer, qui les valident dans l'application du quotidien chez les producteurs, par exemple, ou chez les transformateurs, et que le tout soit encadré par un conseil des appellations qui, lui, s'assure non pas que le cahier de charges comporte tel ou tel élément, mais que le processus pour conduire à un cahier de charges a bien été respecté. Et il faut reconnaître clairement les distinctions et les rôles des différents partenaires dans ce cadre-là.

D'autant plus qu'on parle toujours de normes publiques, alors il faut éviter de placer les certificateurs dans des situations où ils seraient juge et partie et où il y aurait absence de transparence. Rappelons-nous toujours l'essentiel: pourquoi on souhaite que des appellations agroalimentaires soient reconnues? Informer correctement le consommateur; s'il paie plus cher, qu'il sache pourquoi il le paie; plus-value auprès du producteur qui se donne la peine de respecter un cahier de charges; et valeur ajoutée de nos produits sur les marchés locaux et internationaux. Rappelons-nous aussi que des critères flous sont toujours faciles à déjouer.

n(14 h 20)n

Finalement, dans l'actuel projet de loi, ce qui a été la plus grande faiblesse de la loi actuelle sur les appellations agroalimentaires et toujours une des faiblesses du projet de loi, l'absence du pouvoir d'inspection formellement inscrit dans la loi. C'est la plus grosse lacune de l'actuelle Loi sur les appellations réservées, et c'est ce qui rend l'application ou la surveillance, l'application de cette loi-là très difficile. À court terme, s'il y a quelque chose à corriger, c'est sans contredit cet élément-là de la loi qui pourrait introduire, donner ou identifier des mécanismes formels d'inspection, de surveillance et donner aux instances appelées à surveiller justement les pouvoirs requis pour soit sanctionner, soit pour retirer les produits, soit pour poursuivre. C'est la principale faiblesse de l'actuel projet de loi et c'est perpétué... C'est l'actuelle faiblesse de la loi actuelle et c'est perpétué dans le projet de loi. On en est particulièrement inquiets.

Alors, dans les articles que nous avons soulevés, dans nos remarques spécifiques, on identifiait particulièrement l'article 21 de la loi actuelle qui pourrait être associé, pourrait faire en sorte que les contrôles soient directement associés à une contrainte juridique. Rappelons-nous qu'un avocat, lorsqu'il introduit une plainte, cherche toujours quelle a été l'infraction. Et actuellement on ne peut pas identifier clairement quelles sont les infractions. On a peu de mécanismes pour faire appliquer nos lois. Et on appelle ça effectivement... que les signes soient associés à une contrainte juridique.

Alors, je m'en tiendrai à la conclusion que nous vous livrions dans notre mémoire. Nous sommes très satisfaits de la préoccupation du ministre à l'endroit des appellations agroalimentaires, mais le projet de loi tel que soumis laisse transparaître une vision réductrice du régime des appellations réservées à des produits agroalimentaires. C'est d'autant plus dommage que c'est un secteur qui est un puissant moteur tout autant pour le développement régional que pour la reconnaissance de la qualité des produits agroalimentaires qui sont issus du Québec. En France, on le dira, il y a quelques très bons fromages. Mais, quand on réfère au fromage français, ils ont une très bonne réputation. Pourtant, il y a des fromages assez banals. Mais, quand on pense aux fromages français, ils ont une très bonne réputation. Cette réputation-là de leurs fromages, elle repose sur leurs produits de spécificité, leurs produits reconnus qui ont fait reconnaître leur nom, qui ont fait reconnaître leur... qui ont réservé des appellations. Alors, nous, on souhaite que, de la même façon, la réserve des appellations dans le domaine agroalimentaire puisse servir de moteur au niveau des activités agroalimentaires québécoises.

Et nous nous sommes beaucoup inspirés de ce qui se passe notamment en Europe parce qu'ils ont fait un travail assez important de ce côté-là, au niveau de la reconnaissance des produits. Et c'est d'autant plus important que ça fonctionne dans leur pays. Alors, ne pas s'inspirer de ce qu'ils ont fait serait à notre avis une erreur. Évidemment, la principale faiblesse de la loi est sans contredit l'absence de pouvoir d'inspection pour les agents chargés de surveiller l'usage commercial de toute appellation réservée, et nous souhaitons que le projet de loi inclue des propositions qui vont rectifier cette lacune. Il faut y remédier rapidement.

Si, dans les faits, on craint que le plan d'action actuel enlève beaucoup de valeur à la Loi sur les appellations réservées, qui ne pourrait devenir avec des appellations... avec deux systèmes d'appellation qui pourraient devenir finalement la Loi sur les appellations biologiques, nous, on craint l'apparition de systèmes parallèles et on souhaite que tous les modes de production se fassent sur une même base.

Et, contrairement à la croyance populaire, quand on parle de normes et cahiers de charges, un cahier de charges peut être très important, peut tenir sur une trentaine de pages. Dans le mode de production biologique, les cahiers de charges sont très élaborés, très importants. Mais, dans les faits, des cahiers de charges, ça peut être aussi court, ça peut être aussi concis qu'une page, deux pages. Le mécanisme pour aller au cahier de charges est clairement établi. Le processus est rigoureux et transparent, et surtout la qualité est validée par un organisme de certification qui n'a pas lui-même établi quelles sont les normes qu'il surveille. C'est ce qui nous apparaît gagnant dans les circonstances. Donc, nous nous questionnons sur les avantages réels que l'actuel projet de loi procurera aux utilisateurs et aux acheteurs de produits dans les circonstances actuelles.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): En terminant, Mme la présidente.

Mme Bolduc (Claire): En terminant, alors nous croyons pouvoir faire la démonstration qu'un système de réserve des appellations agroalimentaires réservées efficace peut contribuer à l'essor du secteur agroalimentaire, à la reconnaissance de la qualité de ses produits. Et nous vous invitons... nous proposons l'expertise du conseil et tout le savoir que nous avons déjà accumulé pour vous aider à avancer dans cette ligne-là. Nous sommes confiants qu'une loi forte sur les appellations agroalimentaires, c'est gagnant pour l'ensemble de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois. Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, Mme Bolduc. Et alors, M. le ministre, on entame avec vous le premier 10 minutes.

M. Lessard: Alors, merci, Mme la Présidente. Ça fait extrêmement plaisir de vous rencontrer aujourd'hui. D'ailleurs, j'avais hâte de vous voir parce qu'on a rencontré des consommateurs, des gens qui représentent des consommateurs, les détaillants, les distributeurs, on a rencontré des producteurs. Finalement, on parle toujours de ce mode, cette façon qui est déjà contenue dans la Loi sur les appellations réservées. On y identifie donc des structures, Conseil d'accréditation, organismes de certification, cahier de charges, référentiel. Et là je dois saluer ça parce que dans le fond vous avez été les pionniers, donc vous avez bâti un secteur, donc les attestations de modes de production.

Et j'ai posé beaucoup de questions, dans les dernières rencontres, sur c'est qui qui... Contez-moi l'histoire du biologique, là, parce que dans le fond c'est l'histoire de certains producteurs qui partent, de ce que je comprends, qui se définissent un cahier de charges, qui rencontrent tous les organismes, puis après ça, quand ça arrive dans la tablette, là, je veux savoir c'est qui qui fait le contrôle. Je vous écoute. Donnez-moi le cours 101 pour que toute la population, comme moi, puisse s'instruire sur comment on exerce ces contrôles-là et ces reconnaissances.

Mme Bolduc (Claire): ...le directeur général, qui a vu à la mise en place de tout ça, Denis-Paul.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. Bouffard.

M. Bouffard (Denis-Paul): Bon. D'abord, si on veut l'historique, c'est en... Je pense qu'il y a eu des producteurs biologiques, au Québec, depuis les années soixante-dix, les années quatre-vingt. Il n'y en avait pas un très grand nombre, là, ça a été jusqu'à quelques centaines. Et, au milieu des années quatre-vingt-dix, il y avait quelques organismes de certification biologique qui avaient des cahiers de charges inégaux, ils faisaient chacun leur propre cahier de charges. Puis ceux qui étaient regroupés autour de chacun de ces... les producteurs qui étaient regroupés autour de chacun de ces certificateurs-là, bien ils disaient: Mon bio est meilleur que le tien, puis évidemment c'était inégal.

Alors, la démarche d'uniformisation, elle a commencé avec la Loi sur les appellations réservées. Ils ont accepté de se regrouper autour d'un conseil d'accréditation, et autour de ce conseil d'accréditation, ça voulait dire: On va mettre en place une démarche unique, une norme qui est unique, qui va être en relation avec les normes internationales, une norme biologique qui est en relation avec celles qui sont inscrites dans le Codex; on va avoir également un processus d'accréditation des certificateurs, donc les certificateurs n'auront pas chacun leur manière de certifier, ils vont tous avoir la même manière. Et cette manière-là, elle est inscrite dans le Règlement sur les appellations. C'est basé sur ISO 65. En Europe, ça s'appelle EN 45011. C'est la même chose, mais c'est de niveau international.

Plus tard, on a uniformisé complètement les cahiers de charges. Ils ne touchent plus... Ils avaient le droit, au début, d'ajouter des exigences au niveau des cahiers de charges. Maintenant, le cahier de charges biologique, il est unique, c'est une norme de référence d'État ? on va l'appeler comme ça ? tout comme ça existe dans les pays d'Europe, au Japon, aux États-Unis, et les certificateurs ne se mêlent plus de normalisation. La normalisation est réalisée... L'élaboration puis les amendements sont faits par un comité des normes qui prépare ces normes en fonction d'un programme de normalisation qui, lui aussi, suit les exigences internationales, a des obligations de consultation publique. Alors, je ne sais pas si ça répond, là...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. M. le ministre.

M. Lessard: Alors, je fais partie du regroupement, exemple, des producteurs biologiques, on a monté un cahier de charges qui définit les règles du jeu, donc une norme unique à volet international, je suis allé voir des certificateurs, des organismes, c'est qui? Puis, deuxièmement, quand mon produit arrive dans les tablettes, c'est qui qui fait le contrôle de... Vous en rencontrez qui n'est pas biologique mais qui a le nom dessus. Y a-tu quelqu'un qui ramasse ça, là?

n(14 h 30)n

M. Bouffard (Denis-Paul): Actuellement, c'est nous qui faisons ça. On a attribué un petit budget de 50 000 $. On fait des tournées d'inspection, de vérification ? on va les appeler comme ça, là, parce qu'on n'est pas des inspecteurs, on n'a pas de pouvoir d'inspection ? des tournées de vérification dans les magasins. On a, au Québec, là, plusieurs milliers de points de vente, actuellement. Toutes les grandes chaînes ont des produits biologiques, les petites épiceries spécialisés, il y en a même chez Wal-Mart, chez Costco ou chez Jean Coutu. Donc, on fait un échantillon et on fait deux tournées par année, et on prélève à ce moment-là des produits qui sont non conformes. Et il faut dire qu'il y a 75 % de ces produits-là qui sont importés, alors il faut aussi contrôler ça.

À partir du moment où on a identifié, on a repéré ces non-conformités-là, on s'adresse aux responsables et on leur demande de corriger, ou bien de retirer l'appellation biologique ou bien de demander la certification dans les plus brefs délais. Et si ça ne se fait pas, à ce moment-là, on va poursuivre, on va adresser le dossier au ministère de la Justice.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le ministre.

M. Lessard: J'ai encore un peu de temps?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui.

M. Lessard: Ça m'intéresse, votre affaire, parce que, dans beaucoup de mémoires, on nous a dit: Le CAAQ devrait être l'instance, à cause de votre expertise, l'expérience, etc., la capacité, je vous dirais, quitte à faire des modifications pour les autres modes, soit les modes de production... là vous êtes sur le mode de production, excusez, mais pour les attestations liées au terroir, ou de région, ou de spécificité.

Et souvent le pouvoir d'inspection puis de contrôle, je pose toujours la question, puis on me dit: O.K., les inspecteurs du Centre québécois des inspections des aliments passent. Dans les tablettes, je leur pose la question, dans les tablettes, tu arrives, là, c'est... ils vérifient l'innocuité, etc., donc ils ont ce pouvoir-là, mais ce n'est pas eux autres qui vont regarder si c'est biologique, s'ils correspondent aux critères; ce n'est pas lui qui va le sortir de là, à moins d'avoir une plainte.

Alors donc, est-ce que vous vivriez bien avec ces pouvoirs de saisie, donc tout ce qui est lié finalement au pouvoir d'inspection, c'est-à-dire retirer, ou poursuivre, ou etc.?

Mme Bolduc (Claire): Il faut que le travail des uns et des autres se fasse en concordance. Si l'instance d'inspection est identifiée comme étant le CQIASA, par exemple, il faut que le travail des uns et des autres soit en concordance. Parce que, s'ils le font sans qu'on soit informés et qu'on ne puisse pas suivre, par exemple, quelles sont les infractions aux appellations réservées, c'est difficile pour nous de poursuivre le travail.

Alors, quelle que soit l'instance, le pouvoir d'inspection ou le devoir d'inspection doit être inscrit dans la loi, ainsi que les mécanismes d'échange entre les différents interlocuteurs. Si le pouvoir d'inspection est attribué au Conseil des appellations agroalimentaires, ça augmente énormément la charge aussi, alors il y a peut-être... Mais il faut qu'il y ait une concordance directe entre les instances, si on accorde à une autre instance le devoir, parce que je n'appelle pas ça un pouvoir mais un devoir d'inspection.

Je vous rappelle aussi, j'ai une vie antérieure dans les ordres professionnels où ce sont les ordres qui attribuent les permis d'exercice, qui reconnaissent les façons de faire et qui font l'inspection et la validation. Alors, les deux mécanismes sont possibles. La porte est ouverte.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous avez encore trois minutes, M. le ministre.

M. Lessard: Merci. On se pose souvent la question: On inscrit une norme, nos produits voyagent à l'étranger, et comme M. Bouffard le disait aussi, il y en a plusieurs qui rentrent de l'étranger chez nous. Alors, le caviar russe biologique, on contrôle ça comment?

Mme Bolduc (Claire): Encore là, Denis-Paul peut très bien répondre, mais on a un mécanisme qui nous permet de reconnaître les modes d'appellation biologique des autres pays. Je te laisse...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Bouffard.

M. Bouffard (Denis-Paul): O.K. Actuellement, on fonctionne par... on reconnaît des certificateurs qui certifient ces produits-là à l'étranger. Alors, on a une liste environ d'une cinquantaine de certificateurs présentement qui sont reconnus, on a leur dossier chez nous, on a fait un examen documentaire de leur cahier de normes, où généralement c'est des normes d'État qu'ils utilisent quand ils sont dans des pays avec certification obligatoire, et on connaît également leur fonctionnement. Alors, ils sont obligés d'être soit accrédités par l'autorité compétente d'État ou être accrédités ISO 65, selon la norme ISO 65, donc on essaie d'avoir un parallèle avec nos organismes de certification qui sont ici. Cette liste-là est disponible spécialement pour les acheteurs des magasins, parce que c'est eux autres surtout qui font les achats, qui introduisent les produits au Québec.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. Bouffard. Alors, si vous permettez, on va aller de l'autre côté. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci beaucoup, merci beaucoup, merci, Mme la Présidente. Mme Bolduc, M. Bouffard, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission parlementaire qui s'intéresse à un sujet qui vous préoccupe au premier chef.

Je pense qu'il faut, et tous les gens qui sont venus jusqu'à maintenant, en commission, ont souligné l'expertise du CAAQ, du Conseil d'accréditation du Québec, qui s'appelle maintenant le Conseil des appellations alimentaires du Québec, et je voyais, dans votre mémoire, à la page 3, où vous dites que: «Notons qu'en 2002 le CAAQ a été le tout premier organisme de contrôle étatique à être reconnu par le United States Department of Agriculture en ce qui concerne, là, l'application des produits agroalimentaires biologiques.» Alors, je pense qu'il faut reconnaître votre expertise.

Et je peux en parler en toute franchise, Mme la Présidente, on ne va pas ouvrir de débat partisan ou quoi que ce soit, mais je pense, par expérience, je peux vous dire qu'essentiellement, ce dont ont besoin les organismes accréditeurs comme le CAAQ, c'est essentiellement de besoins. Je pense qu'il faut reconnaître qu'au départ on dit que la loi, la première loi, la loi de 1996, avait des limites. Vous avez soulevé quelques lacunes. En fait, l'absence de pouvoirs d'enquête, etc., mais aussi il faut reconnaître que, si le départ a été lent, c'est à cause des moyens qui n'étaient pas là, et je me souviens des demandes pressantes, entre autres, de M. Gaudet, de la Fédération des producteurs biologiques du Québec, etc., qui insistait pour avoir des moyens pour financer le Conseil d'accréditation, comme on l'appelait à ce moment-là, sinon c'était impossible pour lui de faire son boulot. C'est certain qu'on ne peut pas vérifier tous les produits qui sont sur les tablettes, mais on a l'expertise et on a les mécanismes adéquats pour assurer la protection des consommateurs en ce qui concerne ça.

Je voudrais vous entendre sur ce que vous dites à la page 4, en regard du projet de loi. Vous dites, au deuxième paragraphe: «Le projet de loi soumis par le ministre confond les labels de qualité (appellations géographiques[...]) et les termes valorisants (fermier, artisanal, terroir)...» Donc, vous faites une distinction, là. D'après moi, c'est la première fois, Mme la Présidente, que des gens viennent nous faire cette distinction entre «labels de qualité» et les «termes valorisants».

Puis à la fin, dans le dernier paragraphe, là, je pense qu'il faut expliquer parce que votre phrase, moi, je l'ai lue deux fois. Je pense que je la comprends, mais je ne suis pas sûr que tout le monde va la comprendre. Vous dites: «Si son intention ? l'intention du ministre ? n'est pas de [...] supprimer, nous nous demandons ce qu'elles vont devenir.» C'est les appellations «terroir», «fermier», etc. «Dans le cas où elles seraient conservées, cela se traduirait malheureusement par l'inversion d'une équation uniformément acceptée à l'échelle internationale, à savoir qu'un produit portant une appellation géographique n'est pas forcément un produit du terroir mais qu'un produit du territoire est toujours associé à une région de production...» J'aimerais que vous nous expliquiez, là, qu'est-ce que vous entendez par là et qu'est-ce que vous voulez dire, la distinction que vous faites entre les termes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, Mme Bolduc.

Mme Bolduc (Claire): C'est M. Bouffard qui pourra... Puisqu'il a analysé de fond en comble ce dossier-là, je lui laisse la parole.

M. Bouffard (Denis-Paul): Bon. Ce que je voudrais dire, c'est que d'abord, dans le contexte des appellations, on essaie de... Les catégories d'appellations, ce sont des catégories génériques, des catégories qu'on va pouvoir retrouver dans la loi dans 30 ans, dans 40 ans. Les appellations géographiques, ça va probablement être là encore, les appellations de spécificité aussi, les appellations de mode de production. Par contre, quand on arrive avec les termes valorisants qui sont amenés au niveau de la loi, c'est des termes qui ont une durée de vie, qui vont être à la mode pendant un certain temps, et il va y en avoir d'autres qui vont survenir, qui vont surgir dans le cours. Alors, à notre avis, c'est plus facile d'insérer ça dans le règlement sur les appellations réservées, de les contrôler et de leur donner une niche à cet endroit-là, pour leur permettre de s'insérer dans l'une ou l'autre des grandes catégories d'appellations.

Puis je donne l'expérience française, là, où les produits du terroir s'insèrent présentement dans deux catégories: les appellations géographiques pour ce qui est de la certification obligatoire, et il y a aussi les marques collectives. Les marques collectives font partie de... En France, ils n'ont pas les appellations de spécificité. Ils ont éclaté ça en trois groupes: les certificats de conformité, les labels rouges que beaucoup de monde connaît, je suis certain, ici, puis les marques collectives. Alors, les marques collectives, c'est beaucoup utilisé au niveau régional. La Normandie, par exemple, utilise beaucoup les marques collectives pour valoriser ses produits du terroir, puis à l'échelle nationale, les produits du terroir rentrent dans les appellations géographiques, notamment les indications géographiques.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

n(14 h 40)n

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. D'une façon très pratique, j'aimerais que vous nous donniez un coup de main, à nous, de l'opposition officielle. Je ne sais pas si je peux parler au nom du député indépendant de Beauce-Nord, mais, compte tenu de ce qu'on entend depuis le début de la commission en ce qui concerne cette espèce de système parallèle que vous dénoncez aussi, où il y aurait une possibilité, là... qui amènerait de la confusion, on aurait des termes qui viendraient suite à une réglementation, donc c'est dans le plan d'action, et tout ça. Qu'est-ce que vous nous proposez? Est-ce que, dans le fond, on devrait exiger, comme opposition, une modification au plan d'action du ministre avant de donner notre support à ce projet de loi là? Parce que, somme toute, le projet de loi, je dirais, il est assez vague. On fait un bout de chemin, il n'est pas tellement compliqué, il a des modifications à apporter, mais l'essentiel de ce qu'on entend, comme critique, ça ne porte pas nécessairement sur le projet de loi, sur le plan d'action essentiellement.

J'aimerais ça que vous nous... et je sais que c'est une question qui n'est pas facile que je vous pose là, là, puis ce n'est pas un piège. Mais, moi, je me dis... je suis embêté parce que c'est le projet de loi qu'on étudie puis là, tout ce que c'est qu'on a comme critique, essentiellement c'est sur... à part des dents que vous souhaiteriez voir donner au projet de loi puis la question des alcools qui n'est pas incluse, qu'est-ce qu'on fait, nous? Est-ce qu'on retient notre soutien au projet de loi jusqu'à temps que le ministre change son plan d'action?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme Bolduc.

Mme Bolduc (Claire): En fait, ce qui est souhaitable, ce qui serait gagnant, c'est un guichet unique. Toutes les appellations réservées transitent par une seule instance qui pourrait être le CAAQ. On est même allé aussi loin dans certaines rencontres que de dire qu'ultimement la présidence du CAAQ pourrait être une nomination du gouvernement, mais que toutes les appellations transitent par une même porte d'entrée: le guichet unique. Et, à ce moment-là, c'est à l'intérieur du guichet unique où là on se dirige vers des mécanismes, le même mécanisme pour toutes les appellations. C'est la même façon de fonctionner, même si, dans l'application, il y a des degrés de difficulté au niveau de l'application.

Il pourrait y avoir des modes... Le mode biologique est un exemple de cahier de charges très complexe. Et il pourrait y avoir d'autres productions qui trouvent avantage à maintenir un cahier de charges très complexe; on parle de boissons alcoolisées. Je sais que certaines instances ont parlé de cidre de glace; alors, ça aussi, ça pourrait référer à des cahiers de charges plutôt complexes. Par ailleurs, il y a d'autres systèmes d'appellation qui, à l'intérieur d'un même processus reconnu d'un guichet unique, qui pourraient y aller selon une appréciation plus souple. On parlait de produits sur une base de petite production avec des caractéristiques très, très simples de reconnaissance, mais l'objectif ultime, c'est que l'ensemble des appellations ait une valeur significative. Et, pour ce faire, qu'il y ait un guichet unique pour acquérir ces attributions d'appellation là.

C'est un des mécanismes qu'on vous suggère fortement de retenir au terme de cette commission-là. Le guichet unique, les façons de faire uniformes; même si le degré d'application ou le degré de difficulté pour atteindre une appellation diffère, que le mécanisme pour l'atteindre soit le même pour tous.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Autres questions, M. le député?

M. Arseneau: Je pense, Mme la Présidente, que tout le monde s'entend pour reconnaître l'expertise du CAAQ, peut-être que vous êtes trop humbles pour demander plus de responsabilités, mais, je pense, l'ensemble des intervenants qui sont venus ici ont souhaité que ce soit votre organisme qui assume plus de responsabilités, avec plus de moyens. Bon. Je reviens, on fait exception au système parallèle, là, qui, vous le dites dans votre mémoire, a de quoi confondre les plus futés des consommateurs. Donc, on a besoin aussi d'information et de protection.

J'aimerais vous entendre sur les normes internationales parce que c'est extrêmement important, quand vous parlez de biologique, il faut référer à des normes internationales. Moi, je me disais ? c'est une réflexion un peu naïve ? mais les définitions, par exemple, du rapport Desjardins ne devraient-elles pas se retrouver dans le projet de loi? Qu'est-ce que c'est que terroir? Qu'est-ce que c'est que certains types de produits? Parce que je suis certain que vous en savez beaucoup plus que nous et que moi.

Mais, par exemple, sur le fromage feta, tout ce que c'est que l'Europe versus la France, versus... c'est la Grèce qui a exigé qu'on n'utilise pas l'expression fromage feta, puisque... Vous comprenez que, si on n'est pas sur les normes internationales, on va avoir de la difficulté à avoir la crédibilité à se reconnaître là-dedans. Est-ce que vous, comme organisme, vous êtes prêts d'abord à assumer plus de responsabilités? Est-ce que ça vous prendrait beaucoup plus de moyens pour rencontrer les objectifs de la loi? Et est-ce que vous êtes disposés justement à prêter votre expertise à cette loi actuelle, c'est-à-dire aux amendements qu'on s'apprête à apporter, là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse, Mme Bolduc, s'il vous plaît!

Mme Bolduc (Claire): Pardon?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte réponse.

Mme Bolduc (Claire): Courte réponse. Oui, on est prêts à assumer plus de responsabilités. De fait, on l'a mentionné, notre expertise devrait servir d'assise à l'ajout de réserves d'appellation dans le domaine agroalimentaire, d'assise et vraiment de base ferme et solide, puisqu'on a fait nos classes et on a fait nos preuves dans ce domaine-là.

En ce qui concerne les appellations et les définitions, la question se pose: Est-ce que les définitions devraient se retrouver dans une loi ou plutôt dans les règlements qui l'accompagnent, étant donné également que certains types d'appellations, on l'a mentionné tout à l'heure, les termes valorisants peuvent être soumis à certaines modes? Alors, en ce qui nous concerne, peut-être que les définitions, on préférerait les voir dans des règlements plutôt que dans la loi. Et finalement, pour ce qui est des moyens dont vous parlez, effectivement, les moyens actuels sont limités et limitants, et tout autant les moyens financiers. Alors, nous, il y a tout de même une portion du budget du CAAQ qui provient des utilisateurs de l'appellation. C'est quelque chose dont on pense qu'il faut absolument maintenir l'apport. Les gens qui utilisent le service doivent contribuer en partie, mais c'est aussi une responsabilité de l'État de supporter ce genre de développement là, et on pense qu'effectivement les moyens actuels sont un peu limitants. Mais évidemment, si on augmente nos responsabilités, j'imagine qu'il y aura une reconnaissance de la grandeur, du niveau de ces responsabilités-là qui se concrétisera en budgets sonnants.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, Mme Bolduc. Alors, M. le député de Beauce-Nord, pour deux petites minutes.

M. Grondin: O.K. Merci, Mme la Présidente. Moi, c'est la question que je me pose depuis qu'on étudie le projet de loi. Quand je vois «produit du terroir», «produit fermier», «produit artisanal», je me demande: Devant la justice, là, demain matin, même si les agriculteurs veulent mettre un produit en marché puis ils disent, ils marquent dessus leur produit: Bien, c'est un produit fermier, quand même qu'il ne sera pas biologique, quand même qu'il n'y aura aucune inspection, aucun cahier de charges, qui va débattre que ce produit-là n'est pas un produit du fermier? Il aura beau le faire de la manière qu'il voudra, le produit, on est sûr que c'est un produit du fermier, il vient de la ferme, tu sais, devant la loi, là. C'est ça que je me demande.

Quand on regarde des produits biologiques, c'est marqué: «Produit biologique», «Certification biologique», avec un numéro. Il pouvait s'appeler comme il voudra, mais on part du sceau. Dans tout ce projet de loi là, est-ce qu'on devrait faire une nouvelle certification au niveau... y donner un autre nom que «biologique» ou... Tu sais, on dit «produit du terroir», mais, à partir de là, le monde pourrait donner le nom qu'ils veulent à leurs produits. Mais une certification que c'est un produit du terroir, mais, après ça, ils donnent le nom qu'ils veulent.

C'est quelque chose qui me tracasse, et puis il y a une autre chose aussi. Je veux dire, j'ai travaillé beaucoup dans le domaine biologique, moi aussi, puis, dans le temps qu'on était sur des comités de certification, il me semblait qu'on travaillait tous bénévolement. Est-ce que, si on forme un autre comité puis... est-ce que tous les gens vont toujours accepter de travailler bénévolement là-dedans?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. Mme la présidente, courte réponse cette fois-ci.

Mme Bolduc (Claire): Alors, la réponse... Je vais répondre à la dernière partie de la question: Il y a la présidente qui travaille bénévolement. C'est comme un mauvais pli chez moi. Mais, autrement que ça, quand vous posez la question sur pourquoi il y aurait... poser la question comme ça, c'est y répondre. C'est évident qu'on a besoin d'un processus qui va certifier que ce produit-là respecte une certaine progression. À la limite, Saputo pourrait écrire sur son fromage Mozzarella: «Produit fermier», parce que le lait, il a été produit à la ferme. Alors, ça répond à quoi exactement, un produit fermier? Le cahier de charges peut tenir sur une page, mais on comprend qu'il y a eu un mécanisme, il y a eu un processus de fabrication ou de production, de fabrication ou de transformation qui répond à certains critères précis qui sont connus, qui sont mis en valeur et qui sont promulgués et qui sont certifiés, nécessairement, qui sont donc reconnus, et, auprès de cette reconnaissance-là, le consommateur peut s'y fier. Alors, quand vous posez la question: N'importe qui peut écrire: Mon produit de la ferme, c'est des fèves fermier ou c'est des betteraves fermier, mais c'est d'autant plus important à ce moment-là de reconnaître, de retenir, d'associer le nom qu'on donne à un produit à un processus clair et transparent de certification.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. Alors, du côté du ministre.

n(14 h 50)n

M. Lessard: Alors, merci. J'entendais tantôt un de vos commentaires qui disait, concernant le conseil d'accréditation, à savoir qu'on pourrait l'étendre, d'avoir le même processus, mais pas le même degré. Alors, ça veut-u dire qu'exemple, pour les modes de spécificité, ce serait peut-être plus léger? Parce qu'on me dit: Quand même, c'est assez lourd, là, sur le mode de production. Ça a été quand même laborieux, puis c'est sûr que c'était premier, puis on a importé quelque chose, probablement qu'on l'a retravaillé... puis on a introduit une culture pour travailler à l'intérieur de ça. Est-ce que ce degré-là de souplesse, est-ce que ce serait plus facile pour certains ou moins onéreux ou plus court? Y a-tu une façon de diminuer le temps, le délai, etc., tout en gardant ce produit à valeur ajoutée là?

Mme Bolduc (Claire): Tout à fait. Je donne l'exemple, par exemple, du boeuf, du boeuf de créneau, boeuf à l'herbe. Alors, la production de boeuf à l'herbe, le cahier de charges pourrait être très simple: nourri essentiellement à partir de fourrage x, de fourrage de tel type de plante fourragère. Ça pourrait être aussi simple que ça. Et à ce moment-là l'organisme de certification va valider que c'est le producteur qui se fait reconnaître, qui produit du boeuf à l'herbe, respecte tel, tel, tel critère et il a utilisé telle, telle, telle plante. Mais le processus a été clairement établi, les producteurs se sont prononcés. C'est simple, ils ont consulté, la consultation a été faite auprès des consommateurs, des transformateurs, et tout ça. C'est simple, et on arrive à une certification qui est rapide et relativement simple. Alors qu'à côté on peut avoir d'autres types de productions, on parle des productions alcoolisées ou les AOC deviennent très complexes, les raisins doivent venir de tel type de cépage, de telle façon, cultivés à tel endroit, bon. Ce peut être très simple.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le ministre. Oui.

M. Lessard: Alors donc, on s'inspire beaucoup de ce qui se fait en Europe puis, là, on disait: En Europe, c'est simple. Mais là il me semble qu'il y a comme deux, trois degrés aussi. Il y a les appellations d'origine contrôlées mais il y a les certificats, ceux qui reçoivent la certification, mais il y a aussi ceux qui ont des marques de commerce régionales, ce que j'entendais. Donc, l'inquiétude vient du fait que, par le règlement sur la Loi sur les produits alimentaires introduit les mots «fermier» ou «de type fermier», tel que le prévoit le règlement éventuellement.

Alors, est-ce que vous nous suggérez plutôt qu'ils reviennent sous la loi? Donc, dans la loi, on aurait un pouvoir de faire une réglementation. Tout ce qu'on aurait à déterminer, en vertu de cette loi-là sur les appellations réservées, des règles qui définissent que c'est «fermier» un peu en fonction dans ce qu'on avait dans le document qui accompagnait une éventuelle réglementation ou vous me suggérez que plutôt de le mettre dans un cahier de charges ce qu'est «fermier», ce qu'est «artisanal»?

Mme Bolduc (Claire): Ce que, nous, on pense, c'est que la loi doit rester à un haut niveau des appellations de tel type, par exemple, des modes de production comme l'huile biologique, des appellations géographiques et que ce sont les cahiers de charges qui définissent et les règlements qui pourraient accompagner. Mais que les règlements donnent une certaine définition et que les cahiers de charges complètent le mode, complètent la façon, les exigences d'atteindre le degré de production qu'on souhaite, qui correspond au nom qu'on donne au produit.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, M. le député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue.

M. Bernard: Oui. Plusieurs questions. Je vais continuer là-dessus parce que je veux quand même comprendre. Si actuellement, quand on regarde, par exemple, dans les règlements, qu'est-ce qu'on appelle les appellations, le 1, le troisième alinéa: «Les appellations, les attestations de spécificité, un produit doit posséder un élément ou ensemble d'éléments qui le distingue nettement d'autres produits similaires appartenant à la même catégorie.» O.K. Le règlement, c'est ça qu'il dit.

Alors, moi, je reviens, par exemple, on parle de fromage, etc. Un exemple de quelqu'un, dans une région, produit, fait des tartes artisanales. Une tarte aux pommes, elle pourrait, selon l'attestation de spécificité, la seule chose qui la caractérise, c'est qu'elle est faite à la main, etc., mais elle n'a pas nécessairement un goût qui la distingue des autres produits de la même catégorie, sauf le mode de fabrication. À ce moment-là, est-ce qu'en éliminant le règlement P-29 et en amenant ça dans la Loi des appellations, on vient restreindre les petits producteurs qui, eux, font un produit artisanal mais qui se ne distinguent pas par un... C'était pour donner l'exemple du boeuf à l'herbe qui est un exemple.

Alors, comment qu'on peut s'assurer que les petits producteurs qui font des petites productions, des transformateurs, un produit, un cheddar qui se distingue rien que par le type artisanal ? je prends celui-là parce qu'il est facile ? comment le faire et s'assurer qu'il ne sera pas brimé puis qu'il peut rentrer sur les tablettes avec une étiquette quelconque?

Mme Bolduc (Claire): Moi, j'aimerais savoir...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme Bolduc.

Mme Bolduc (Claire): Merci. J'aimerais savoir pourquoi il serait brimé ou empêché? Qu'est-ce qui ferait qu'il l'empêcherait d'accéder à cette appellation-là? C'est parce qu'il trouverait ça trop complexe?

M. Bernard: Non, c'est que... mais pas...Peut-être, peut-être... C'est parce qu'actuellement la loi dit de l'attestation de spécificité: C'est un produit qui se distingue par peut-être son goût, par un procédé de fabrication, etc., qui se distingue des autres produits similaires, qui lui donne une spécificité. C'est pour ça, je me dis, quand on parle de produit artisanal, quand je regardais le règlement, c'étaient des règles qui étaient quand même sommaires de dire: Voilà une production artisanale. Très simple, mais ce n'est pas nécessairement une spécificité pour avoir une attestation de spécificité.

Mme Bolduc (Claire): Qu'est-ce qui complique la chose de le faire passer par le seul guichet du CAAQ? Qu'est-ce qui compliquerait la chose de façon...

M. Bernard: Est-ce qu'il faudrait revoir, à ce moment-là, les attestations de spécificité pour alléger, pour être certain que plusieurs autres choses puissent rentrer dans cette catégorie-là?

Mme Bolduc (Claire): Mais, la porte est ouverte à l'ensemble des produits qui pourraient être... Par exemple, les produits spécifiques, la porte est ouverte, c'est vraiment au niveau des producteurs puis quand on va établir les cahiers de charges et les normes que ça va se dessiner, que ça va se décrire et, à ce moment-là, les organismes de certification vont seulement valider que, si cette appellation-là, c'est ce mode de production là qui est retenu ou ces façons de faire là qui sont retenues pour la production, la transformation ou la... et c'est à ce moment-là, c'est ce que le certificateur confirme, et le produit peut porter le nom, mais il a été reconnu au départ. Le mécanisme n'est pas plus complexe.

M. Bernard: Donc, on pourrait prendre la proposition de règlement tel qu'amené puis l'amener selon vous dans la Loi des appellations ou ce serait suffisant?

Mme Bolduc (Claire): On aurait un seul mode de... Le mode de fonctionnement serait le guichet unique pour tous et il serait applicable à tous, à des degrés divers comme on l'a dit, parce que, comme on expliquait, il y a des...

M. Bernard: ...ou ces choses-là, etc.

Mme Bolduc (Claire): Oui. Puis, il y a des façons... des noms qui seraient retenus en concordance avec l'ensemble des gens qui sont appelés à l'utiliser qui permettraient de l'utiliser et les normes établies pour utiliser cette dénomination-là se feraient... elles seraient établies selon un processus clairement identifié, rigoureux et transparent. C'est la seule distinction...

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Oui. Allez-y, M. le député.

Mme Bolduc (Claire): ...et le fait que ça passe par un guichet unique ne complique pas la chose. C'est vraiment...

M. Bernard: Je pense qu'il y a moyen... Question rapide: Ce matin, des organismes ont dit que la CAAQ pouvait avoir le mandat d'inspection. Est-ce que ça vous intéresserait d'avoir le mandat d'inspection ou que ce serait plus le MAPAQ ou...

Mme Bolduc (Claire): Nous, on souhaite qu'il y ait clairement un pouvoir d'inspection qui soit associé aux appellations agroalimentaires. Si le législateur, le gouvernement nous attribue le pouvoir d'inspection, on est prêts à l'assumer. Si le législateur préfère qu'une instance qui est déjà autorisée à faire de l'inspection, le CQIASA, par exemple, qui fasse ces inspections-là, nous, on aimerait, on exige même qu'il y ait une concordance formelle entre les deux instances parce qu'on doit être informés de ce qui se voit au niveau des inspections. Mais, si vous nous posez la question, si on veut les faire, certainement. On est prêts à les faire. C'est les moyens pour le faire qui nous manquent actuellement, et les moyens juridiques qui seraient associés à l'inspection dont on ne dispose pas pour le moment.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup, Mme Bolduc. Alors, on va du côté de l'opposition, M. le député de Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. J'étais pris par les questions du député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue. Je pense que ? je ne sais pas si c'est une appellation contrôlée, le nom de votre comté ? mais je pense que les questions apportent un éclairage sur la nécessité ou non pour le ministre, dans son plan d'action, d'aller vers une réglementation en fonction d'une autre loi. Je pense que, là, les réponses sont tout à fait adéquates.

J'aimerais aller plus loin parce que dans le fond l'objectif de cette loi-là et des amendements qu'on apporte à la Loi sur les appellations réservées, c'est pour faire en sorte de développer, par des producteurs ou des transformateurs, des produits dans certaines régions de niche, des créneaux, des spécialités. Mais je pense que le mot clé là-dedans, c'est le mot... il y a deux mots clés: il y a le mot «qualité» et il y a le mot «authenticité» qui permettent finalement à ces produits d'obtenir une renommée, une reconnaissance sur la marché québécois bien sûr, mais on l'a dit précédemment, que c'est un petit marché, donc prétendre à l'exportation, donc des normes internationales. Je pense qu'il faut être absolument vigilant là-dessus. Moi, c'est ma conviction la plus profonde.

n(15 heures)n

Tantôt, j'ai abordé le fromage feta parce que je pense que c'est un bel exemple. Il y a une bataille, je ne sais pas si elle est terminée, peut-être que vous en savez plus que moi, mais, en 2002, la Grèce a obtenu que le fromage qu'on appelle fromage feta soit un fromage de brebis fabriqué exclusivement sur un territoire de la Grèce. Alors, bien sûr les Français n'ont pas aimé ça. Alors, bien sûr il y a eu des contestations, les États-Unis et, je pense, l'Australie, et, après ça, l'Allemagne. Et cette bataille se poursuit, parce que vous comprenez que c'est extrêmement important que ces marques, ces appellations contrôlées et réservées qui sont beaucoup plus fortes et qui... Il y a des impacts énormes en termes d'argent, par exemple en ce qui concerne le foie gras, les vins, etc.

Alors, la question que je vous pose, c'est une question technique. Vous pouvez peut-être nous conter l'histoire du feta si vous en connaissez la résultante. Mais qui, d'après vous, puis ce n'est pas prévu dans la loi, qui, d'après vous, devrait avoir la responsabilité de défendre le respect et le contrôle même sur le marché québécois, mais aussi, peut-être, à l'international, où quelqu'un pourrait usurper les bleuets du Lac-Saint-Jean ou je ne sais pas trop, là, tu sais, le fromage cru, le cru des Îles-de-la-Madeleine? Ça peut représenter des batailles extrêmement importantes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Mme Bolduc.

Mme Bolduc (Claire): Alors, à notre avis, le gouvernement a deux responsabilités lorsqu'il édicte une loi: c'est d'en faire la promotion et de la défendre. Et à cet égard-là, si vous nous posez la question, ça s'est fait au moment... Il y a eu d'autres batailles que le feta, le Roquefort, entre autres, où des producteurs d'autres pays que le Sud de la France appelaient leur fromage le Roquefort et, depuis les années cinquante, c'est une réserve d'appellation qui a été faite, là, pour protéger leur production. Et à notre avis, non seulement au moment où l'État fait la réserve d'un titre, d'une appellation, il devrait en faire la promotion et, s'il y avait une bataille à livrer, l'État devrait supporter cette bataille-là de façon importante. Parce que, si on fait une réserve d'appellation, c'est qu'il y a un enjeu autour de cette appellation-là qui est important pour les consommateurs, les producteurs et pour la réputation des produits. Si l'État juge qu'une appellation doit être réservée, il doit être en mesure et prêt à la défendre également, s'il y a des litiges au niveau international. Et le CAAQ, à ce moment-là, ou l'instance ? mais on souhaite fortement que ce soit le CAAQ ? a les compétences pour alimenter la position gouvernementale et pour aider à cette défense-là.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Deux petites minutes.

M. Arseneau: On a abordé aussi la question des boissons et des alcools. Ce matin, il y avait comme un débat. Bon. On a parlé de la Chicoutay et peut-être les bleuets du Lac-Saint-Jean, et je ne sais pas si en Abitibi... il y a peut-être...

Une voix: ...

M. Arseneau: Voilà. Et chez nous, on a aussi notre...

Une voix: ...

M. Arseneau: Alors, ce sont des gens du même coin, je comprends, c'est une concitoyenne.

Maintenant, quelle est votre position à vous en ce qui concerne un conseil d'accréditation spécifiquement pour les boissons, là, comme il était question. C'était une proposition de l'UPA, je crois, mais qui aurait, semble-t-il, préféré que ce soit vous aussi qui... Est-ce que vous avez une position là-dessus?

Mme Bolduc (Claire): C'est Solidarité rurale du Québec qui a fait une avancée, entre autres, sur les boissons alcoolisées, et il y aurait un intérêt à ce que l'ensemble des appellations qui touchent le domaine agroalimentaire transitent par une seule et même instance. On ne s'est pas positionnés formellement, on n'a pas fait de proposition formelle, c'est-à-dire, sur les boissons alcoolisées, mais il nous apparaît qu'il y aurait intérêt, si toutes les appellations agroalimentaires transitent par une seule instance, que les boissons alcoolisées transitent par la même instance, et clairement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup, Mme Bolduc. Merci, M. Bouffard, pour votre présentation et votre contribution aux travaux de la commission. Merci.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, j'invite les représentants du Bureau de normalisation du Québec à prendre place, s'il vous plaît. Bienvenue. M. Jacques Girard, directeur, est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, nous présenter les personnes qui vous accompagnent? Et vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire.

Bureau de normalisation du Québec (BNQ)

M. Girard (Jacques): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de vous présenter M. Jean Rousseau, qui travaille au BNQ à titre de chef de groupe pour la normalisation et la certification, ainsi que Me Marie-Claude Drouin, qui travaille au BNQ aussi à titre de conseillère au développement des affaires.

Alors, on vous remercie infiniment de nous recevoir ici aujourd'hui. C'est notre deuxième présence à la Commission de l'agriculture. La première fois, c'était sur la sécurité alimentaire. Il faut croire qu'on y prend goût, alors.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous avez fait un bon travail.

M. Girard (Jacques): Merci. Alors, on va vous présenter celui qu'on a fait sur les appellations réservées. Et sans plus tarder, c'est M. Rousseau qui va présenter le mémoire qu'on a déposé à la commission.

M. Rousseau (Jean): Merci. Donc, bonjour, Mme la Présidente. Bonjour, chers membres de la commission. Je vais d'abord présenter notre organisation. Le Bureau de normalisation, c'est un organisme qui a été créé par le gouvernement du Québec en 1961 et, depuis 1990, il est une direction autonome du Centre de recherche industrielle du Québec.

Le gouvernement du Québec reconnaît le BNQ comme l'organisme central de normalisation, de certification, de diffusion d'information sur les normes et comme porte-parole du Québec auprès du Conseil canadien des normes ou de tout autre organisme de normalisation.

Le BNQ a pour mission d'agir comme partenaire des milieux d'affaires, des milieux industriels, sociaux et réglementaires afin de favoriser l'amélioration de la qualité des produits, des processus et des services ainsi que leur acceptation sur tous les marchés.

Le Bureau de normalisation est un organisme membre du Système national de normes du Canada et exerce ses activités dans les secteurs suivants: le premier, qui concerne l'élaboration de normes; le deuxième, la certification de produits, de services et de processus; le troisième, l'enregistrement de systèmes de gestion; et le quatrième, l'évaluation des laboratoires du Québec pour leur accréditation auprès du Conseil canadien des normes.

Donc, plus précisément, pour le premier secteur d'intervention, en matière d'élaboration de normes, les activités du BNQ permettent d'établir des critères de performance pour définir notamment la qualité, la sécurité et l'attitude à l'emploi de produits, de processus ou de services dans un contexte de développement durable.

L'approche distinctive du BNQ à cet égard est d'assurer un consensus entre toutes les parties concernées. D'autres services sont également disponibles en normalisation, tels que la rédaction de documents normatifs ? et là on pense par exemple aux cahiers des charges, à des spécifications techniques ou à des guides ? ainsi que des travaux qui sont de l'aide à la rédaction de documents.

Le deuxième grand secteur d'intervention chez nous, c'est en matière de reconnaissance de conformité. On dit que l'approche du BNQ vise à garantir qu'un produit, qu'un processus, qu'un service ou un système respecte de façon continue les exigences des normes ou autres référentiels qui les concernent. Les différentes associations, accréditations et reconnaissances détenues par le BNQ garantissent à ses clients que les mandats qui lui sont confiés sont réalisés selon les critères internationaux qui définissent les meilleures pratiques en matière de normalisation, de certification et d'enregistrement de systèmes.

Le BNQ compte parmi les rares organismes qui détiennent à la fois des accréditations du Conseil canadien des normes en matière d'élaboration de normes, en certification de produits et services et en certification de systèmes. Et le BNQ exerce ses activités dans un grand nombre de secteurs, notamment dans ceux de l'environnement, de la construction, des travaux publics, de la santé et de la sécurité, du tourisme, de l'agroalimentaire et des services. Il compte sur une équipe de plus de 50 employés avec 70 sous-traitants et appuyée par près de 700 bénévoles membres des divers comités et par la structure administrative et de soutien du Centre de recherche industrielle. Cette équipe lui permet de desservir les entreprises de toutes tailles, que ce soit de très grandes entreprises ou de très, très petites entreprises.

n(15 h 10)n

Plus précisément dans le secteur alimentaire maintenant, il existe un long historique de collaboration entre le BNQ et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Il y a plus de 25 ans, le BNQ, formé du personnel du MAPAQ, pour agir comme secrétaire de plusieurs comités d'élaboration de normes dans le domaine des pêcheries. Plus récemment, le BNQ était mandaté pour la rédaction d'une norme sur les composts, devenue maintenant une norme nationale du Canada. Nous avons aussi à notre catalogue plusieurs normes reliées aux amendements de sol, par exemple, pierres à chaux agricole, amendements de sol calciques et magnésiens, boues municipales granulées, et nous nous préparons à lancer un tout nouveau programme pour la qualification des entreprises offrant aux agriculteurs des services de drainage souterrain agricole. Aussi, avec le MAPAQ et également avec le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs et l'UPA, le BNQ a contribué à la mise sur pied du programme AGRISO, qui vient reconnaître les efforts des agriculteurs en matière de gestion environnementale.

Depuis février 2001, le BNQ est reconnu par le MAPAQ comme guichet unique à titre d'organisme de certification des systèmes HACCP et d'organismes d'élaboration de normes et de programmes de salubrité alimentaire. Le partenariat MAPAQ-BNQ s'inscrit dans la stratégie québécoise de reconnaissance gouvernementale des programmes HACCP et offre à l'industrie alimentaire québécoise un modèle de reconnaissance unique en Amérique du Nord. En alliant leur expertise et leur force, le MAPAQ et le BNQ fournissent l'infrastructure nécessaire pour rendre disponible aux entreprises du Québec une reconnaissance crédible de portée québécoise, canadienne et internationale. Ce programme de certification pourra migrer maintenant vers l'international avec la publication de la norme ISO 22000, qui vise les systèmes de management de la sécurité des produits alimentaires.

Mentionnons enfin que le BNQ et l'Association québécoise des allergies alimentaires ont uni leurs efforts pour créer un programme de certification d'aliments transformés avec contrôle optimal d'allergènes, lequel vise une reconnaissance aux entreprises qui ont déployé un tel système de gestion. Je vous ai présenté maintenant notre organisation et nos services.

Passons maintenant plus précisément à nos commentaires au sujet du projet de loi n° 113. Donc, le BNQ est l'organisme qui a été mandaté pour réaliser le premier cas pilote qui vise a reconnaître l'agneau de Charlevoix en tant qu'indication géographique protégée. En tant qu'organisme engagé dans ce domaine, il nous apparaît essentiel de transmettre aux parties intéressées nos commentaires, et je vais le faire plus précisément en deux sections: premièrement, le projet de loi n° 113, et ensuite l'expérience du projet pilote.

Nous sommes favorables d'abord à l'existence d'une loi sur les appellations réservées. Le Québec agit ainsi à titre de chef de file en Amérique et continue d'innover. C'est bien important. Nous croyons cependant qu'il est important de se doter d'un système cohérent qui aidera les producteurs et les transformateurs à faire valoir la qualité et les particularités de leurs produits. L'existence d'un tel système est également nécessaire pour les consommateurs qui cherchent à valider les déclarations des producteurs. Bien important. Malheureusement, le système actuel, à cause de la lourdeur de la loi et de son règlement, fait en sorte que seule l'appellation biologique a été reconnue jusqu'à maintenant. Nous croyons qu'un système efficace, transparent et qui s'inscrit dans la foulée internationale doit exister. Notre statut actuel d'organisme de normalisation et de certification, reconnu dans un système international, nous permet de contribuer et d'aider à définir un tel système.

Il est important en ce moment de présenter la notion de reconnaissance de conformité au sein de l'organisation internationale de normalisation. Si je veux vous donner un cours au niveau de cette reconnaissance de la conformité, cours 101, on dit que l'organisme définit trois niveaux de reconnaissance de conformité. Le premier niveau présente, pour le consommateur du produit, le degré de confiance le plus faible alors que le troisième niveau présente le degré le plus élevé.

Le premier niveau est l'autodéclaration de conformité. Il s'agit de la procédure par laquelle une entreprise fait la déclaration que ses produits sont conformes aux exigences d'un référentiel, soit une spécification, un cahier des charges, une norme, etc. On dit alors que c'est le fournisseur qui fait la déclaration de conformité.

Le deuxième niveau de reconnaissance de conformité est atteint lorsque l'acheteur du produit ? en général, c'est un intermédiaire de la chaîne de distribution ? fait l'évaluation de la conformité aux exigences du référentiel.

On parle de troisième niveau de reconnaissance de conformité aux exigences du référentiel lorsque c'est une organisation non reliée au fournisseur et non reliée aux acheteurs qui prend charge de l'évaluation. On parle alors de certification par une tierce partie indépendante, le terme «indépendant» étant relié à la neutralité, l'impartialité de l'organisation.

Nous sommes favorables au projet de loi n° 113 en ce qui a trait à cette volonté d'établir clairement que des produits qui obtiennent une appellation d'origine ou une indication géographique protégée sont d'authentiques produits du terroir et que la certification de produits par tierce partie indépendante est le moyen efficace et transparent pour le garantir. Nous comprenons également qu'il est proposé d'établir dans un règlement pris en vertu de la loi P-29 des conditions d'utilisation des mentions «fermier» et «artisanal» et que la personne qui prépare le produit alimentaire serait obligée de s'enregistrer auprès du ministre pour utiliser ces mentions. L'enregistrement se ferait par le dépôt d'une déclaration que celui-ci respecte les conditions applicables à la mention utilisée. Selon l'ISO ? je vous ai parlé de quelques notions d'ISO ? selon l'ISO, il s'agit alors d'une autodéclaration de conformité à un référentiel. Donc, c'est le producteur qui déclare que ses produits sont conformes aux exigences du référentiel.

Nous proposons que l'attestation de spécificité pour soit un produit fermier ou un produit artisanal puisse se faire aussi par l'intermédiaire d'une certification par tierce partie indépendante comme le seront l'IGP ou l'appellation d'origine. Ainsi, l'attestation de spécificité serait accessible par deux moyens: premièrement, comme je vous mentionnais, par l'autodéclaration de conformité, tel que prévoit le règlement en vertu de P-29, c'est-à-dire qu'on parle du processus d'enregistrement selon... défini auprès du ministre, qui permettra seulement l'utilisation des mentions «fermier» ? et là je dis bien «seulement» ? des mentions «fermier» ou «artisanal» et par la certification par tierce partie qui devrait permettre l'usage d'une appellation réservée de type «spécialisé traditionnel garanti» et d'un logo réservé. C'est bien important, on ne parle pas juste de mention, mais on parle également de logos sur lesquels la publicité sera faite. La connaissance... On parlait tout à l'heure d'informer le consommateur. Bien, il faut vraiment faire une campagne d'information que ce logo-là qui serait commun à tous les produits qui sont certifiés par tierce partie indépendante, il faut vraiment que le consommateur puisse le reconnaître.

Nous sommes d'avis donc qu'un logo enregistré devrait être développé pour les produits appellation d'origine, un autre logo enregistré pour les produits IGP et un autre logo enregistré pour les produits de spécificité «fermier» ou «artisanal» certifiés par une tierce partie. Ces trois logos enregistrés devraient avoir un lien commun et une certaine ressemblance tout en affichant clairement leurs distinctions. Les produits fermiers ou artisanaux non certifiés par un organisme de certification mais enregistrés au MAPAQ pourraient porter une mention «produit fermier» ou «produit artisanal», mais le logo enregistré n'y serait pas présent.

Maintenant, je vais vous parler de l'expérience du cas pilote. Étant donné que le projet pilote est en cours et le fait que l'appellation n'a pas été soumise pour reconnaissance, nous ne pouvons pas, pour l'instant, donner notre vue complète et formuler des recommandations détaillées. Cependant, nous jugeons utile à ce stade de partager avec la commission nos premiers commentaires. Beaucoup de travail a été réalisé depuis que le BNQ a obtenu le mandat du projet pilote de l'agneau de Charlevoix. Nous avons réussi à faire travailler pour un même but plusieurs maillons de la production en commençant par la meunerie, les fermes d'élevage, l'abattoir, l'usine de transformation et la fonction de transport.

Toutefois, tant pour la rédaction du cahier des charges que pour la mise en application sur le terrain, les intervenants ont pu constater divers problèmes. Notre expérience nous amène à constater entre autres la lourdeur du système de reconnaissance. Nous jugeons important que le MAPAQ base son système de reconnaissance des appellations d'origine, des IGP et des STG sur un modèle différent de celui retenu pour les produits biologiques. Je parle bien d'un modèle différent. Les produits autres que les produits biologiques qui seront reconnus selon le système d'appellations réservées, c'est-à-dire certification par tierce partie indépendante et avec identification de marques enregistrées, sont uniquement des produits québécois, et nous n'avons pas besoin d'un système de reconnaissance mutuelle avec des produits étrangers. Il faut cependant avoir un système simple, efficace, peu coûteux, reconnu internationalement et crédible pour le gouvernement et les consommateurs en raison de sa transparence et de sa neutralité.

n(15 h 20)n

Nous croyons que, pour alléger le processus prévu par la loi, il faut revoir le rôle des conseils d'accréditation. Actuellement, pour mettre en oeuvre l'utilisation d'une appellation réservée, la loi prévoit la formation ou la restructuration d'organismes pour chacune des appellations à être reconnues plutôt que d'utiliser les expertises normatives présentes au Québec et accréditées selon les règles internationales.

Notre expérience dans le cadre du projet pilote nous a également amenés à constater certains problèmes de fond dans la loi actuelle. À ce titre, nous désirons soulever à la commission trois points importants. Le premier constat concerne l'article 2 de la loi. Je parle bien de la loi qui existe actuellement. Cet article restreint l'utilisation de l'appellation réservée aux seuls membres de l'organisme de certification. Cette exigence de la loi rentre en contradiction avec l'exigence de l'article 4 du règlement sur les appellations réservées. Le texte de cet article stipule, entre autres, que l'organisme de certification doit se conformer aux exigences du Guide ISO/CEI 65. Le guide en question est le document qui régit l'ensemble des organismes de certification et reconnu selon les critères internationaux. Or, il est spécifié, dans l'article 4.1.2 de ce guide, que l'organisme de certification ne doit pas limiter l'accès à ces services de certification pour une condition d'association ou de regroupement. La loi et le règlement ne doivent pas imposer l'obligation de regroupement ou d'association parce qu'ainsi on contrevient au Guide ISO 65.

Un accréditeur ou un conseil d'accréditation, comme le décrit l'article 11 de la loi, qui respecte les règles internationales ne pourrait alors venir reconnaître le travail de tels organismes de certification. Il y a une cohérence. Ainsi, l'organisme de certification doit, selon les règles internationales, donner accès à la certification, c'est-à-dire l'appellation réservée, à tout demandeur qui satisfait aux exigences, sans égard à son appartenance à un groupe quelconque. Ce point est crucial afin que l'organisme de certification puisse en toute transparence démontrer sa neutralité et son impartialité tant auprès de ses clients certifiés qu'auprès de ceux qui achètent des produits certifiés.

Maintenant, notre deuxième constat concernant la loi actuelle, il vise l'article 11 de la loi. Cet article stipule qu'un organisme de certification doit être constitué en personne morale. Nous nous interrogeons sur l'obligation pour l'organisme de certification d'être constitué en personne morale. Dans le système canadien d'accréditation d'organisme de certification qui est géré par le Conseil canadien des normes et qui est reconnu par la communauté internationale, cette contrainte relative à la constitution en personne morale de l'organisme de certification n'existe pas, car elle n'est pas présente dans le Guide ISO 65.

De plus, j'en ai parlé précédemment, le BNQ détient une entente de services avec le MAPAQ pour fournir la certification de salubrité alimentaire avec reconnaissance gouvernementale. Cette entente est basée en grande partie sur nos accréditations de portée internationale, et aucune exigence en ce qui concerne la notion de personne morale n'a été soulevée. Or, l'introduction de ces critères pourrait inutilement exclure le BNQ du champ d'activité des appellations réservées. L'exigence stipulant que l'organisme de certification doive être constitué en personne morale devrait être retirée de la loi, et le but recherché en décrivant ainsi cet organisme devrait être reformulé autrement et conformément au Guide 65 de l'ISO.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): En conclusion, M. Rousseau, il vous reste une minute.

M. Rousseau (Jean): Oui, d'accord. Je vais rapidement pour le troisième constat. Le troisième constat, c'est qu'on dit que les promoteurs d'une appellation réservée doivent s'adjoindre un organisme de certification, et ces deux groupes doivent former un conseil d'accréditation. L'article 3 de la loi actuelle confie au conseil d'accréditation le soin d'accréditer l'organisme de certification selon les exigences que celui-ci a établies conformément au règlement du ministre. Ainsi, en d'autres mots, l'on demande au groupe qui veut une appellation réservée de créer un conseil d'accréditation toujours avec un organisme de certification, et ce dernier viendra accréditer l'organisme de certification. Nous croyons que les notions du Guide ISO 65 ne sont pas prises en compte et qu'il y a apparence de conflit d'intérêts. Il existe déjà au Canada un accréditeur dont une partie du mandat consiste à garantir l'absence de conflit d'intérêts réel ou apparent au sein des organismes accrédités.

Je vais aller directement avec la conclusion, étant donné que le temps presse. On dit: Compte tenu de la différence importante entre les concepts et les marchés des produits biologiques et ceux du terroir, nous croyons qu'il faille aussi penser à des modèles de reconnaissance différents. Le rôle dévolu au conseil d'accréditation à être formé pour des appellations réservées devrait être ainsi revu.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. On va arrêter là, M. Rousseau, et puis vous aurez l'occasion de revenir sur les autres éléments du mémoire.

M. le ministre, premier bloc de 10 minutes.

M. Lessard: Alors, merci, merci de votre présentation. Je suis content de voir le travail que vous avez fait aussi avec l'agneau de Charlevoix, parce qu'on se disait: Depuis une dizaine d'années, il y a eu, bon, l'aspect, le mode de production, maintenant sur une indication géographique protégée. Vos travaux sont en cours, et, quand on aura été capables d'établir des filières de production rattachées à tous les beaux mots qu'il y a dans cette loi-là, on sera plus capables d'identifier le chemin parcouru par tout le monde.

Toutefois, il y en a un, groupe, qui a quand même parcouru tout ce chemin qui est le mode de production biologique sous le couvert de la CAAQ. Et quand je regarde vos premiers commentaires, c'est de dire que c'est un système qui était plutôt lourd. Qu'est-ce que vous... comment on peut l'alléger?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Rousseau? Non. M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci. Si vous permettez, je vais amorcer la réponse, puis mon collègue pourra compléter au besoin. En fait, quand on parle de lourdeur, c'est que, si on examine la loi, des conseils, un ou des conseils d'accréditation peut ou doivent être formés dépendant qu'on est soit sur l'appellation biologique, sur des appellations d'indice géographique, sur des appellations... Donc, on vient créer des structures additionnelles éventuellement. Par la suite, on demande, pour une appellation géographique, aux gens de se constituer un groupe et de joindre un organisme de certification ou de créer un organisme de certification. Cet organisme de certification là avec un conseil d'accréditation va recommander une appellation. Alors, à chaque fois qu'il va y avoir une appellation nouvelle où il y a des nouveaux membres qui vont apparaître, éventuellement un nouvel organisme de certification qui va venir soit grossir, soit modifier un ou des conseils d'accréditation. Alors, c'est dans ce sens-là qu'il peut s'installer une lourdeur à l'utilisation. Tant qu'il y en a juste une, il y a un conseil d'accréditation puis il peut y avoir un ou des organismes de certification, mais, à mesure que le système va prendre de l'ampleur, il peut y avoir une certaine lourdeur. Et on est rendus à peu près là dans le projet pilote, et c'est là qu'on constate qu'il y a de la lourdeur, effectivement.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Oui, M. le ministre.

M. Lessard: Est-ce que votre suggestion, parce que ça a été repris dans plusieurs des mémoires qui semblaient reconnaître... cette, en tout cas, cette notoriété-là d'avoir passé à travers le processus et est-ce que... J'ai entendu, on m'a même invité à modifier la loi en ce sens-là, de créer l'organisme en haut, et selon les modes, c'est plutôt les organismes de certification qui changeraient au bénéfice de dépendamment que c'est des appellations spécifiques, etc., alors dans le but d'éviter de recréer un conseil d'accréditation par mode de production, origine, etc. Alors donc, c'est parce que c'est... Je vous vois, je vois que vous avez travaillé sur cet aspect-là, et tout le monde réfère au CAAQ. Alors, je vous pose la question parce que vous semblez peut-être vouloir faire la même chose.

M. Rousseau (Jean): En fait, je pense que ce qu'on veut vous présenter ici, c'est que la notion de production biologique est bien différente. Au Québec, il y a dû être formé un conseil d'accréditation parce que, dans le cas du biologique, il y a un besoin de reconnaître les produits qui proviennent de l'étranger. Une des vos questions tout à l'heure, les gens qui nous ont précédés, était à l'effet: Comment on reconnaît les produits qui proviennent, par exemple, avec votre exemple du caviar de Russie, comment on va reconnaître ces produits-là? Donc, il y avait un besoin, au Québec, d'avoir un organisme qui s'occupe de l'aspect d'accréditation. On dit quand même d'accréditation ou de reconnaissance des organismes, qui pouvait faire de la certification biologique à l'étranger.

Dans le cas des produits où on parle de produits du terroir, de produits fermier, c'est différent. À notre avis, ce dont le Québec a besoin, c'est d'avoir un système cohérent, crédible, qui va assurer les consommateurs québécois que les produits locaux sont bel et bien des produits qui répondent au cahier des charges stipulées et également... parce que nos producteurs également veulent aussi exporter ces produits-là, bien, c'est important qu'au niveau international on soit capables de pointer que l'organisme qui est là est vraiment reconnu dans le cadre d'un système international, et c'est le cas du Bureau de normalisation.

Je vous parlais du lien du Bureau de normalisation avec le Conseil canadien des normes, le Conseil canadien est le représentant du système national de normes au sein de l'ISO, l'Organisation internationale de normalisation. Donc, on est capable de faire tous les liens et les étapes comme ça. Dans le cas du bio, c'était différent, c'est un système qui est complètement différent. C'est pour ça que notre approche, on dit: Bien, voilà, il y a l'appellation biologique et il y a les autres appellations, puis on dit qu'on pense que le Québec doit avoir un système qui est absolument différent.

n(15 h 30)n

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Vous voulez ajouter quelque chose, M. Girard?

M. Girard (Jacques): Si vous permettez, Mme la Présidente, en complément.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Allez-y. Bien sûr.

M. Girard (Jacques): Quand aussi on a commencé ? puis on l'a mentionné dans le mémoire, le Québec innove souvent dans des secteurs comme l'agroalimentaire, puis etc. ? et, quand on a commencé à reconnaître le biologique ici, au Québec, il n'y avait pas encore de système canadien pour le faire. Maintenant, le Conseil canadien des normes, depuis plusieurs années, a un système pour reconnaître des organismes de certification qui, à leur tour, vont chez des firmes ou des entreprises pour reconnaître et attester, donner la certification en fait de produits biologiques. Alors, il existe maintenant un système canadien qui est aussi à utiliser. Ce que le Conseil canadien fait pour nous, comme BNQ, c'est notre accréditeur, et cet accréditeur-là, c'est lui qui a, par loi, le mandat de représenter le Canada auprès de la communauté internationale de normalisation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le ministre.

M. Lessard: Je reviens à la démarche qu'on a entreprise, soit de modifier la loi. Donc, dans le plan d'action, on modifiait la Loi sur les appellations réservées. On a fait des précisions et un rattachement par rapport au terroir, on a défini que, dans un règlement pour les définitions de produits fermiers, etc., pour donner une souplesse, donc pour ventiler une autre façon de faire, on se demandait, à l'écoute de tout le monde: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de ramener, si on nous dit peut-être de ramener ce volet-là sur la Loi sur les produits alimentaires, en vertu d'un éventuel règlement plutôt dans un règlement sous la Loi sur les appellations réservées, de façon à encadrer, même dans un cahier de charges, ces appellations-là de type fermier ou artisanal, alors dans le but d'avoir une gradation, un encadrement et, évidemment, l'interdiction pour les autres qui utilisent ces termes-là sans en avoir une réservation?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Donc, nous, ce qu'on présente effectivement, il pourrait y avoir deux possibilités. C'est-à-dire que je vous parlais du système d'autodéclaration de conformité et la certification tiers parti indépendante. On pourrait très bien définir dans des normes ou même dans un règlement, puis on parle beaucoup d'allégements réglementaires. C'est souvent ce que les ministères tentent de faire au fur et à mesure, puis on travaille avec ces ministères-là pour faire en sorte que, finalement, les règlements ou les lois réfèrent à des normes qui, ces normes-là, sont faites de façon consensuelle. On a plusieurs exemples au sein de ministères québécois qui réfèrent à des normes du Bureau de normalisation du Québec, et donc, à ce moment-là, on peut très, très bien définir dans une loi: Est-ce qu'il y a un besoin d'avoir un tiers parti indépendant ou est-ce qu'on peut se contenter d'une autodéclaration de conformité. Donc, on dit: Les possibilités sont là, sont toutes possibles.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Vous voulez ajouter quelque chose?

M. Girard (Jean): Oui. Peut-être en complément aussi. Il y aurait aussi moyen, mais là, ça fait une très grande différence par rapport à l'alignement qui est donné, là, mais, quand on mentionnait tantôt qu'il y a 25 ans on formait au MAPAQ des secrétaires de comités de normalisation, c'est que, par règlement, une loi peut référer à une norme consensuelle établie selon le principe international. Quand Jean parlait tantôt, on a à peu près une quarantaine d'exemples de nos normes citées dans les lois ici, au Québec. Alors, il serait tout à fait possible, dans une norme de terminologie, comme, dans le temps, il y avait une norme qui définissait toutes les catégories puis nommaient les espèces halieutiques vendues ici, au Québec, il serait tout à fait possible de définir, par une norme consensuelle, quelle est la définition aujourd'hui puis ce qu'on veut dire par «fermier», par «artisanal», et en ajouter si les modes changent dans le temps, et que le règlement réfère à la norme NQ 2628, tel numéro, qui vient, elle, régulièrement être mise à jour.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Alors, je vais passer du côté de l'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, M. Girard, M. Rousseau, Mme Drouin, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier d'être venus devant cette commission pour faire votre présentation sur le projet de loi n° 113.

Moi, je dois vous dire d'entrée de jeu que j'ai un petit peu de misère avec vos avancées. Bon, on a une dizaine de minutes pour en débattre, là, mais... D'abord, en ce qui concerne le biologique, vous dites actuellement, maintenant, que le fédéral... enfin, les normes fédérales se sont rattrapées. D'après ce que l'UPA nous disait ce matin, ce n'est pas tout à fait le cas. C'est en voie de se régler, mais encore les normes et la façon dont le fédéral procède, ça ne nous permet pas, à nous, même si notre système est à point, d'exporter sur le marché européen.

L'autre affaire avec laquelle j'ai un petit peu de difficultés, c'est quand vous dites que les produits qui nous viendront de l'étranger, en regard de ces appellations-là, que ça ne nous pose pas de problème. Je regrette, mais, lorsque, par exemple, un produit français va s'appeler «produit fermier», si on ne prend pas des mesures pour qu'il réponde à certaines normes, à certains critères, on va avoir des problèmes, là, le consommateur ne sera pas plus rassuré et il n'aura pas plus de... pas moins de confusion, je voulais dire.

Par ailleurs, dans votre mémoire... Bon, je comprends très bien que... Vous, vous nous dites, vous nous expliquez, à la page 7, en regard du projet n° 113, qu'il y a trois façons, il y a trois niveaux de reconnaissance de conformité. Alors, vous dites qu'il y a l'autodéclaration de conformité. Je me demande si, à Ottawa, ils n'ont pas utilisé ça au niveau fédéral, pour le biologique, un petit bout. Vous dites, le deuxième niveau, lorsqu'il y a un intermédiaire, soit le distributeur, qui fait l'évaluation de la conformité, et le troisième, lorsque c'est une organisation non reliée. Bon, je comprends ça.

Alors, après que vous avez expliqué ça, vous nous expliquez comment, avec le projet de loi n° 113, pour sortir de la lourdeur de ce qui existe maintenant, on pourrait faire en sorte de trouver des appellations ou des logos en fonction des différentes propositions du projet de loi n° 113, appellations d'origine, lieu géographique, spécificité, et tout ça. Mais vous êtes les seuls jusqu'à maintenant, là, à ne pas craindre la confusion avec les deux niveaux, c'est-à-dire la loi et le règlement en fonction d'une autre loi sur les traités. Je comprends que, pour vous qui êtes du bureau des normes, c'est facile à comprendre et que vous ne serez pas confus avec ça, mais je me dis: Comment se fait-il que votre bureau, votre organisme soit le seul à ne pas voir un danger, un risque de confusion pour le consommateur? Expliquez-moi donc ça.

M. Girard (Jacques): Merci.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci, Mme la Présidente. Effectivement, si vous avez noté, on a parlé qu'il pouvait y avoir un risque, et c'est dans cet esprit-là qu'on dit: Si on développe un logo qui identifie clairement les produits qui sont certifiés par tierce partie indépendante par rapport à une simple, entre guillemets, simple mention «fermier» ou «artisanal» sur un produit, on pense qu'il peut y avoir vraiment quelque chose de très, très, très visuel pour montrer qu'il y a une différence, mais ça peut demander... Quelles dimensions, quelles couleurs? Ça, là, on n'en est pas là. Mais on ne vient pas dire que ça élimine toute cause, sauf qu'on pense qu'il y a aussi des gens pour qui, je dirais, d'avoir une certification de tierce partie, il y a un coût associé à ça, et, si ces gens-là, peut-être parce que le produit qu'ils font n'est pas le produit qui occupe 45 heures de leur semaine en production mais une courte partie, puis qui n'ont pas le moyen de se payer une certification de tierce partie, mais qui font un produit valable, défini dans un cahier de charges... Est-ce que ça pourrait être accessible? C'est une proposition dans le sens de ne pas éliminer tout le monde qui ne pourrait pas avoir accès à une certification de tierce partie en raison de coûts, par exemple, ou de...

Je voudrais revenir sur votre première remarque par rapport au système canadien, M. Arseneau. Je ne reprendrai pas... puis mon intention n'est pas de dire: L'UPA ne s'est pas informée, mais vous pouvez aller sur le site Internet du Conseil canadien des normes, vous allez voir depuis quand ce système-là existe. Ce système-là a de la difficulté à devenir national canadien effectivement parce que certaines provinces ont précédé et ont mis en place des systèmes chez eux. Et ce n'est pas mauvais du tout, je ne le dis pas négativement puis qu'on n'aurait pas dû ? au contraire, on fait bien d'innover, puis on fait bien de se servir de ça ? mais le système canadien est là et il fonctionne. Il y a des entreprises qui sont certificateurs et qui donnent de la certification au Manitoba, dans les provinces des prairies. Elles le font sur la base de la norme nationale du Canada, qui a été développée par l'Office des normes générales du Canada. Il y a sûrement certaines différences, mais généralement, là, on doit regarder à peu près les mêmes choses.

n(15 h 40)n

Un jour, comme on a fait avec HACCP dans la sécurité alimentaire puis qu'on a parlé tantôt, puis maintenant il y a la norme ISO 22000 qui régit tous les pays, il va y avoir très probablement une norme qui définit c'est quoi, un produit bio, puis qui va être acceptée par tous les pays. Mais ce n'est pas pour demain matin encore, mais peut-être que, dans 10 ans, on va être rendus là.

Donc, quand on parlait que c'était différent au départ, de dire aujourd'hui: Le bio, oui, il y avait, à cause justement du fait que plusieurs référenciels sont différents, on ne vérifie peut-être pas toujours à la même fréquence à la ferme. C'est important qu'on sache, si on importe des produits, est-ce qu'ils sont au moins à peu près équivalents à notre système? Dans le cas des produits ? pour revenir à ce que vous parliez ? fermiers, on va exporter peut-être un produit fermier, mais je ne vois en aucune façon comment on va interdire à quelqu'un d'inscrire «fermier» sur son produit qu'il veut nous vendre ici.

Les gens qui font du bordeaux, on n'a pas à les régir sur leur appellation, mais, eux, s'ils voient qu'ici on peut faire un vin dans la région de Dunham puis l'appeler bordeaux, je suis certain qu'on va se faire ramasser, ça ne sera pas long. Donc, celui qui habituellement développe son expertise ou sa façon de faire et qui va vers une appellation, il est habituellement celui aussi qui va aider ? je dis bien «aider» pas faire seul; mais ? à surveiller cette appellation-là. Et ce que je voulais dire tantôt, c'est que, nous, ici, on n'a pas à se beaucoup préoccuper davantage du bordeaux qui entre, à savoir il vient-u vraiment de Bordeaux ou...

Vous parliez du feta tantôt. La dispute va avoir lieu, puis finalement quelqu'un va nous vendre un produit donné. Mais je pense que c'est important d'offrir à la communauté d'abord québécoise puis notre communauté où on peut exporter, qu'elle soit canadienne, américaine, européenne, la garantie d'un produit de haut standard.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Vous voulez ajouter quelque chose? M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Un complément d'information parce que la première intervention de M. Arseneau concernant l'exportation, on parle, entre autres, de cette notion-là de logo commun. Du côté européen, c'est bel et bien ce qui est utilisé, entre autres. Il y a possibilité d'un logo pour le IGP, donc qui fait en sorte que... Je parlais tantôt de baser toute l'information aux consommateurs en fonction de ces logos-là.

Il peut y avoir un produit à coté qui vient de la France, qui porte la notion «fermier», «produit fermier», mais il ne porte pas le logo qui, lui, est réservé au Québec aux gens, aux organismes qui détiennent un certificat d'un organisme de certification. C'est tout simple que ça. Puis on parlait aussi de... Je pourrais vous expliquer au niveau des... On parlait des problèmes d'inspection tout à l'heure. Il y a des notions dans ça qui sont intéressantes.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. À la page 8, dans votre mémoire... C'est parce que je vois comme un... Je vous le dis, j'apprécie vos explications. Je les reçois aussi très bien. Mais c'est parce que vous mentionnez des lourdeurs, et tout le monde reconnaît que la loi actuelle n'est pas parfaite, qu'il faut apporter des modifications, et tout ça. Donc, vous avez probablement raison.

Mais vous dites: «Il est important que le MAPAQ base son système de reconnaissance [...] sur un modèle plus simple que celui retenu pour les produits biologiques.» Mais en même temps les gens qui vont venus nous voir nous disent: Ça ne va pas être plus simple. Ça va être plus compliqué, ça va être plus confus, ça va être plus difficile pour les consommateurs de se retrouver à cause de la multitude et la duplication des systèmes. On aura «produit fermier», «produit de type fermier», et etc.

Vous, vous proposez même des solutions et des logos pour ces différentes distinctions là, dépendamment que ce soit le règlement en fonction de la Loi sur les produits alimentaires ou encore en fonction de la Loi sur les appellations réservées. Alors, je vois comme une petite contradiction entre le fait que vous dites: Ça prendrait un système plus simple parce que l'autre système est plus lourd. Mais il me semble vous êtes un petit peu en contradiction. Mais je vous laisse avec ça.

Ma question, c'est celle-ci: Vous demandez d'être le seul organisme reconnu par le MAPAQ pour la certification. Ça, c'est clair dans votre demande. Par contre, les gens qui sont venus nous voir, tout le monde nous dit: Il faudrait que les mandats, les pouvoirs, les rôles, les moyens du Conseil d'appellation agroalimentaire du Québec soient élargis. Est-ce que vous pourriez fonctionner en étant le seul organisme reconnu pour certifier avec un seul organisme reconnu pour accréditer? Alors, je ne comprends pas c'est quoi, votre demande.

Votre demande n'est pas quand même pour devenir l'organisme accréditeur; elle l'est pour devenir l'organisme qui va certifier. Pourquoi avoir ce monopole? Pourquoi demander ce monopole?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Girard.

M. Girard (Jacques): Je vais amorcer la réponse, si vous permettez, Mme la Présidente. En fait, on demande non pas un monopole. On demande que, pour débuter, on essaie de centraliser l'expertise. Puis malheureusement c'était dans la conclusion aussi que vous avez peut-être été moins clair dans le document qu'on présentait que dans la présentation qu'on avait maintenant.

C'est un peu comme dans le cas du système de sécurité alimentaire. Le MAPAQ, par entente avec le BNQ, a donné une exclusivité. C'est une entente qui est renouvelable à périodicité mais qui n'est pas à vie non plus. Ce qu'on dit, c'est qu'on est en train de rédiger le projet pilote, on a vu plusieurs écueils. On n'est pas rendu au conseil d'accréditation, on va y arriver. On n'est pas rendu à l'organisme de certification, on va y arriver. Mais vu qu'on regarde un peu en avant, on voit tout de suite qu'il y a des choses qui sont différentes puis difficiles à conjuguer. Ne serait-ce que ce que mon collègue M. Rousseau parlait tantôt, si on dit qu'un organisme doit répondre ? puis c'est écrit dans la loi ? au Guide ISO/CEI 65, puis que ? pour certifier ? cet organisme-là, dans le même guide, on dit: Il ne doit pas restreindre sa certification à ses seuls membres puis surtout pas, puis qu'à côté la loi vient dire: Bien, pour former un organisme de certification puis un conseil d'accréditation, vous devez rentrer comme membres ceux à qui vous allez donner le service. C'est ça qu'on dit qui est difficile.

Or, ce qu'on dit aussi, vous parlez d'une accréditation, il existe déjà un accréditeur au Canada, il s'appelle le Conseil canadien des normes; c'est un accréditeur reconnu au niveau international. Il est présent dans tous les secteurs d'activité économique ou à peu près. Il a accrédité, j'imagine, au-delà d'une trentaine d'organismes de certification, à part des organismes d'enregistrement de... à part... mais strictement au point de vue certification, qui oeuvrent dans différents domaines. La valeur de son accréditation est déjà reconnue à l'international. Ça fait que ce qu'on dit: On détient déjà une accréditation, est-ce qu'il nous en faut une autre pour continuer à travailler ici? C'est sur cette base d'accréditation là qu'on a déjà une entente avec la MAPAQ. Est-ce qu'il nous en faut une additionnelle pour faire les appellations réservées? C'est ça un peu la question qu'on pose.

On ne dit pas qu'il y a ci, il y a ça, on dit, pour les appellations réservées, la loi dit: On va former un conseil d'accréditation. Je le répète, quand ça a été fait pour le biologique, le programme canadien n'existait pas, maintenant, il existe. Il n'y a aucun problème à continuer avec le conseil qui a été formé là pour l'instant. Mais là on part un nouveau système: Est-ce qu'on a besoin de conseils d'accréditation? Est-ce qu'on a besoin de nouveaux organismes de certification? C'est ça, la question que je pose.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup, M. Girard. Alors, du côté du ministre, le dernier 10 minutes.

M. Lessard: Je vais prendre une petite question ? mon collègue après ça, de loin, qui a hâte d'en parler aussi. Une simple... Dans votre page 8 de votre document, on dit: «Les produits, autres que les produits biologiques, qui seront reconnus selon le système des appellations réservées [...] sont uniquement des produits québécois et nous n'avons [pas donc] besoin d'un système de reconnaissance mutuelle avec des produits étrangers. Il faut cependant avoir un système [...] fort qui démontre sa transparence et sa neutralité au niveau international...»

C'est-u votre importation de normes, c'est quoi? Donc, parce que vous semblez dire, là, qu'on n'a pas besoin de système de reconnaissance mutuelle avec des étrangers, là. Je veux vous entendre là-dessus.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Oui. Comme nous mentionnions, en fait, c'est important de voir que des produits sont au Québec, faits par les producteurs québécois, puissent être certifiés par une tierce partie indépendante, et que ces mêmes produits là peuvent porter un logo sur lequel... un logo qui est réservé, qui est réservé seulement aux gens qui détiennent des certificats de conformité. Et, à ce moment-là, le produit qui par contre, lui, provient de l'étranger ne portera pas ce logo-là. Et le consommateur, même s'il porte la mention de produit du terroir, le consommateur devrait être informé que, lui, étant donné que le produit ne porte pas le logo de certification, bien, ce n'est pas un produit reconnu dans le cadre du système d'appellations réservées au Québec. Et c'est pour ça qu'on dit: Bien, les produits... le besoin qu'on a, c'est d'avoir un système qui soit très fort pour faire en sorte que les produits québécois sont reconnus sur le marché local et sur les marchés internationaux. Mais on n'a pas besoin d'un système de reconnaissance des produits qui proviennent de l'étranger, donc des importations qui sont ici parce qu'eux ne porteront pas le logo en question.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. le ministre.

M. Lessard: Est-ce que je comprends que les produits de la France qui vont arriver ici, puis qui regardent notre réglementation, puis qui seraient assujettis à la même réglementation ne pourront pas avoir le même label?

n(15 h 50)n

M. Girard (Jacques): En fait, à moins qu'on ait mal compris la loi, M. le ministre, on n'a jamais compris que la loi s'appliquerait à des produits qui sont faits en France. On a toujours compris que les produits qui seraient touchés par la loi seraient des produits typiquement québécois, mais peut-être qu'il y a une mauvaise interprétation de notre part.

On ne pense pas que, quand on parle d'agneaux de Charlevoix, on va aller penser certifier les vaches du Limousin ou... Je pense que c'est des Français qui vont s'occuper de donner de la valeur à leurs produits pour les exporter, mais le projet de loi, au sens où le comprend, est strictement pour des produits québécois auxquels on veut donner une valeur ajoutée pour développer notre économie québécoise. Et c'est dans ce sens-là que les pays qui nous vendent des produits d'appellation réservée, c'est sur la base de leur règlement, de leur force de marché qu'ils viennent nous les offrir, mais ils peuvent entrer en compétition de marché sur base de marché libre. Mais je ne pense pas qu'ils puissent entrer en compétition sur base d'appellation réservée au sens de la loi, parce que la loi devrait toucher les appellations.

Pour préciser, dans le cas du biologique, si vous permettez, Mme la Présidente, c'est que la loi sur les produits biologiques disait que tout produit sur les tablettes qui porte la mention «biologique», il doit y avoir une certification, et dans ce sens-là, tous les produits importés qui comportaient le mot «biologique» devaient l'avoir.

Maintenant, on parlait tantôt «fermier», il peut venir d'ailleurs, mais «biologique», je ne sais pas comment ça pourrait être, mais le jour où il serait contesté, est-ce que «biologique» réfère vraiment à un produit sans engrais, sans pesticide, sans ci, sans ça? Un produit vivant a une certaine caractéristique d'être un produit biologique, mais je ne veux pas aller plus loin là-dessus. Mais par rapport au biologique, la loi spécifiait que tout produit sur une tablette qui porte cette mention-là doit l'avoir. Maintenant, est-ce que la loi, si on parle d'avoir une inscription «fermier», un produit qui vient de l'étranger puis qui a dans son titre, je ne sais pas, moi, un pâté de foie gras du Périgord, s'il y a, à quelque part sur l'étiquette, marqué «terroir», on va l'interdire. Mais dans ce cas-là, c'est à la loi tout simplement, ce n'est pas à une entente entre organismes de certification, comme c'est le cas par contre entre organismes d'accréditation, comme c'est le cas dans le biologique.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. M. le ministre, vous avez fini?

M. Lessard: Oui.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): D'accord. M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Deux petites questions très simples. À la page 8 justement, votre dernier paragraphe, avant le point 4, vous dites: «Les partenariats que peut mettre en place le BNQ au sujet des visites de certification...» Est-ce que, pour vous, la notion de visite de certification voudrait en même temps dire visite d'inspection?

M. Rousseau (Jean): Oui. Bon, effectivement, la première chose, c'est de vérifier: est-ce que les exigences qui sont contenues dans le cahier des charges sont bel et bien rencontrées par le producteur. C'est la première chose à vérifier. Maintenant, l'organisme de certification, en tant qu'organisme accrédité Guide 65, doit également faire une surveillance de sa marque? Je parlais de marque, là, tantôt, quand on réserverait une marque vraiment pour ces produits-là, bien c'est important de faire en sorte qu'il y ait une surveillance de faite de la marque par l'organisme de certification, et au même moment donc, mes inspecteurs, quand je parle d'inspecteurs au BNQ, ils ont vraiment à vérifier la question de conformité des produits aux exigences d'une norme et aux exigences de marquage également. Quand je pense aux exigences de marquage qui sont contenues dans les normes, incluant la marque de conformité du BNQ ou toute autre marque de conformité. Et donc c'est important, là, cette notion-là.

Dans le bio, c'est, je dirais, un peu plus... c'est encore là différent parce qu'il y avait plusieurs organismes de certification avec des marques, plusieurs marques. Chaque organisme a sa marque, et là, c'est chaque... un organisme donné est responsable de sa marque mais n'est pas responsable de toutes les autres marques, puis il n'est pas responsable des notions des mots «biologique» ou «organique», et là donc, c'est différent. On parle d'une notion d'inspection. Mais effectivement il faudrait voir comment ça peut être combiné. Il y a un certain donc degré qu'il faut examiner dans le cadre des visites d'inspection, des visites de certification quant à l'inspection, mais il y a quand même une limite ou il y a... mais il faut adapter le système en conséquence, et c'est ce qu'on veut faire, nous aussi.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Courte question, M. le député.

M. Bernard: Oui. On ne l'a pas encore abordé aujourd'hui, mais je sais que les gens ont beaucoup parlé du volet restauration, O.K.? Parce qu'on parle souvent que les restaurateurs utilisent aussi des termes dans leurs menus, etc. Alors, comment vous voyez ça, vous? Parce que, là, on parle de certification chez le producteur ou le transformateur, mais aussi sur celui, à l'autre bout, qui fait des menus. Comment vous voyez ce volet-là?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Donc, rentre la notion d'inspection justement, là, parce que là, on est chez un utilisateur de ces produits-là donc, qui, lui, pourrait dire: Bien, à partir du moment où il y a vraiment... Il achète un produit qui, lui, ce produit-là, est vraiment certifié, qui porte le logo de certification, bien, il faut qu'il s'assure que, par exemple, sur son menu, c'est bel et bien juste des produits qui proviennent vraiment de produits certifiés, et donc, je pense qu'intervient la notion d'inspection.

C'est pour ça que je vous dis qu'il y a une partie de l'intervalle d'inspection qui doit couvrir ces aspects-là sur... ou en ce qui concerne l'utilisation des notions d'appellation réservée chez les utilisateurs.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci. Alors, du côté de l'opposition, j'aimerais vous aviser qu'il vous reste 5 min 10 s, à l'opposition, et je sollicite votre collaboration pour qu'on réserve deux minutes au député indépendant. Donc, vous avez 3 min 10 s.

M. Arseneau: Alors, d'accord. Je vais faire un bref commentaire. Ce que je comprends, c'est que vous nous dites, en ce qui concerne le Conseil d'accréditation du Québec: On n'a pas besoin d'élargir ses responsabilités ou d'augmenter ses moyens, on a juste à faire référence au bureau des normes du Canada, qui va nous accréditer. C'est ça? Je comprends bien, là, quand je vous résume? Mais je sais que ma collègue a une question qu'elle voudrait poser, et peut-être qu'il pourra répondre aux deux en même temps.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Oui, merci, Mme la Présidente. Écoutez, depuis... j'écoute, je dois vous dire que je ne suis pas entièrement tout ce qui se dit ici, et c'est pour ça que je vous pose directement la question. Ça fait quand même plusieurs intervenants qui viennent nous parler ? des consommateurs, des producteurs, différents organismes ? jamais personne n'a parlé du BNQ dans l'étude de ce projet de loi, ou comme suggestion, ou quelque chose du genre. Pourquoi, vous pensez?

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, M. Girard.

M. Girard (Jacques): Merci, Mme la Présidente. En fait, madame, on n'a jamais fait un lobby auprès de la population, des producteurs ou de... pour dire: Écoutez, ça devrait être le BNQ, ça devrait être ci, ça devrait être ça. Je pense qu'on a toujours réservé nos commentaires, et on a fait les mandats pour lesquels on a été mandatés.

Ceci étant dit, bien, c'est pour ça qu'on a accepté le mandat de l'agneau de Charlevoix, et c'est pour ça qu'on vient témoigner aujourd'hui par rapport à notre expertise. Ce qu'on a vu là, on pense que, par rapport à exactement ce mandat-là, on pourrait travailler très avantageusement sur les appellations réservées.

Maintenant, je pense que vous n'en avez pas entendu parler parce que, par exemple, avec les agriculteurs, on travaille au niveau environnemental, avec les transformateurs alimentaires, on travaille au niveau... avec les... mais on est présents à peu près à tous les maillons de la chaîne, puis comme on l'a mentionné tantôt, l'agneau de Charlevoix nous a permis de voir les liens qu'il y a à faire aussi avec tous ces gens-là. Parce que, si on doit sortir une appellation réservée, une fonction transport, une fonction production dans les champs de céréales, et une fonction meunerie, une fonction éleveur, une fonction abattoir, découpage et transport dans le restaurant, peut-être pour en venir en complément de réponse à la question de M. Arseneau, qui vous dit que, par rapport au menu, l'agneau de Charlevoix, c'est vraiment de l'agneau de Charlevoix? Bien, là on vient à une valeur ajoutée. Il devrait avoir un goût distinctif, une couleur distinctive, ou quelque chose qui lui donne une valeur ajoutée. Alors, est-ce que c'est reconnaissable, est-ce que c'est, je ne dirai pas facilement reconnaissable, mais il faut qu'il y ait une caractéristique.

Dans ce sens-là, est-ce qu'on doit faire l'inspection? Il y a déjà des inspections qui se font des restaurants. Est-ce que c'est cette fonction-là qui doit être chargée de ça en même temps, je pense que ça, ça reste à répondre par la suite. Mais je pense, d'abord, continuons le projet pilote, puis voyons s'il y a d'autres embûches, s'il y a d'autres inconvénients.

Mais nous n'avons pas été nommés nommément parce que des gens peut-être ont fait leurs devoirs, puis ils sont déjà du côté biologique. Nous, on a fait notre travail par rapport à un mandat qu'on avait, on est sur différents aspects, puis, dans ce secteur-là, on pense qu'on peut être excessivement utiles.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci beaucoup. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, Mme la Présidente. Je vais être court, mais... Vous avez parlé des produits biologiques et puis vous m'avez un petit peu... vous m'avez un petit peu froissé parce que vous avez... vous semblez mettre en doute les accréditations biologiques. Moi, écoutez, je suis un producteur biologique, et puis je peux vous garantir que, quand on marque «produit biologique», «certifié biologique» sur un contenant, il n'y a pas de chimique qui a été produit avec juste la nature. Et si les producteurs biologiques sont rendus là aujourd'hui, c'est que les consommateurs en ont demandé, des produits naturels. Les consommateurs voulaient avoir, dans les magasins, des produits qui étaient faits sans chimique et sans... tout ce qu'on peut retrouver sur le marché aujourd'hui. C'est ce petit bout là, là, que j'ai de la misère avec vous, là, de trouver ça.

n(16 heures)n

Et vous semblez vouloir que le projet de loi soit administré par le BNQ face aux administrateurs biologiques, là, je ne sais pas, le CAAQ. En tout cas, moi, je trouve, et je vais vous le dire franchement, jamais je ne serai d'accord avec ça. Je pense que les certificateurs biologiques, ils ont démontré à l'heure actuelle qu'ils ont fait un excellent travail dans la province, et puis on devrait, je pense, leur faire confiance.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. M. Girard.

M. Girard (Jacques): Bien ? merci, madame ? je m'excuse si j'ai pu faire comprendre que cette certification-là pouvait être une certification de bas niveau ou quoi que ce soit, mais ce n'était absolument pas le but ou l'intention puis, je pense, ni la lettre du propos. Ce qu'on a tout simplement mentionné, c'est qu'il existe déjà des accréditeurs, il existe des ententes entre des accréditeurs. Et est-ce qu'un certificateur qui travaille doit détenir 10 accréditations différentes ou si une seule de valeur internationale est suffisante? C'est, un, la première question.

Deuxièmement, quand on fait référence à des points comme celui qu'on a amené, qu'on ne peut pas réserver, selon les critères internationaux, la certification à ses seuls membres, c'est une valeur internationale. Je dis ça dans le sens où ça existe à l'international. Je ne sais pas comment ça se vit à tous les jours dans le biologique, puis peut-être qu'on ne l'applique pas exactement, ce qui est marqué dans la loi, puis peut-être que l'organisme de certification le donne à d'autres que ses membres. C'est purement et simplement un amené sur des critères qui sont admis partout en matière de certification, puis on les cite exactement, ces critères-là, ils sont cités dans la loi, on dit: le guide 65. Alors, c'était tout simplement de faire valoir ça, si ça n'avait pas été vu ou si ça n'avait pas été remarqué, mais ce n'est surtout pas une attaque à la réputation ou à la valeur de l'accréditation ou de la certification, et, si quelqu'un l'a compris comme ça, je m'en excuse beaucoup, ce n'était pas le but du tout de la présentation.

La Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien. Merci beaucoup, M. Girard, merci, M. Rousseau, Mme Drouin, du Bureau de normalisation du Québec, et merci, M. le ministre, chers collègues et membres du personnel qui ont facilité nos travaux. Et j'ajourne nos travaux au 20 octobre 2005, 9 h 30. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 2)


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