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Version finale

39e législature, 2e session
(23 février 2011 au 1 août 2012)

Le mercredi 18 janvier 2012 - Vol. 42 N° 69

Consultation générale sur le Livre vert pour une politique bioalimentaire : Donner le goût du Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Paradis): ...oui, c'est vrai, Montmagny-L'Islet, c'est bon d'avoir bravé la tempête, tout comme nos invités, d'ailleurs.

Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Tous les gens munis de bidules électroniques, s'il vous plaît, veuillez les mettre en mode silencieux et tenter de ne pas vous en servir.

Le mandat de la commission est de tenir des audiences publiques dans le cadre de la consultation générale sur le livre vert pour une politique bioalimentaire du Québec intitulé Donner le goût du Québec.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Ouellet (Vachon) est remplacée par M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) et M. Trottier (Roberval), par M. Villeneuve (Berthier).

Le Président (M. Paradis): Et nous souhaitons la bienvenue au député de Beauce-Nord. Il était pris dans la neige hier. Je pensais que vous aviez commencé vos sucres, vous.

Auditions (suite)

Ce matin, nous recevons l'UPA de Weedon, de Valcourt, de Sawyerville et de Richmond. Sans plus tarder, je demanderais aux représentants de l'UPA de Weedon de bien vouloir se présenter et de nous présenter leur exposé. Bienvenue.

Syndicat du secteur de l'UPA de Weedon

M. Marcoux (Réal): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, les membres de la commission. D'abord, je me présente, je suis Réal Marcoux, producteur depuis 1973 dans le secteur vaches-veaux. Je possède 350 têtes. J'ai été producteur acéricole de 1975 à 1998, année du verglas. Le verglas a détruit passablement mon boisé, à un point tel que je n'ai jamais réentaillé. Je possède 600 acres de terre et, pour combler mes besoins, je loue des prairies dans les alentours, là, j'ai des fermes jusqu'à 20 km de chez nous, 25 km de chez nous. Mon fils est employé, employé à plein temps sur la ferme depuis 1998 et il possède un D.E.P. en production bovine.

À mes côtés, M. Alain Brouard, qui est le vice-président de l'UPA Estrie. Il vous présentera lui-même son entreprise dans quelques instants.

Tout d'abord, pour vous aider à nous situer, Weedon est une municipalité située sur la route 112, à mi-chemin entre Sherbrooke et Thetford Mines, dans la MRC du Haut-Saint-François.

Le syndicat du secteur de Weedon regroupe les producteurs et productrices de la municipalité de Lingwick, Weedon, Dudswell, Stratford, Beaulac-Garthby, Disraeli et Sainte-Praxède.

Les principales productions sont la production laitière, la production bovine, porcine, production acéricole et forestière. On retrouve aussi chez nous plusieurs autres petites productions, comme exemple des sapins de Noël, la production ovine, la production en serre. On a de l'aquaculture, on a des petits producteurs de... des petits producteurs de... excusez, des producteurs de petits fruits. Alors, on a du sanglier, de l'alpaga. On a un producteur de tourbe. On a même un producteur de chevaux. On a des producteurs de... un producteur de bison et quelques autres petites productions diverses aussi.

En juillet 2011, le secteur comptait 293 producteurs sur 182 fermes. À noter que le taux d'adhésion à l'Union des producteurs agricoles, dans mon secteur, à ce moment-là, était de 100 %, tout comme en 2008, où nous avons eu aussi 100 % d'adhésion de tous les producteurs à l'UPA.

Sur le territoire du secteur de Weedon, on compte peu d'industries importantes. Donc, l'agriculture tient lieu de base économique importante pour plusieurs municipalités. La MRC du Haut-Saint-François est même reconnue comme une MRC dévitalisée. Elle est donc désignée dans le programme du MAPAQ sur la multifonctionnalité, ce qui lui a permis, par le soutien de l'UPA, d'utiliser le programme pour valoriser le circuit touristique la route des Cantons.

Le secteur de Weedon, comme partout en Estrie, est sillonné de sentiers de VHR. Les relations avec les responsables des clubs ont toujours été faciles, et, pour nous, accorder aux adeptes de la motoneige et de quad le privilège d'utiliser nos terres est une autre façon pour les agriculteurs de soutenir un pan important de l'économie locale. À titre d'exemple, chez nous, sur une de mes fermes, j'ai les deux sentiers, de motoneige et de quad, puis, comme ils ne s'entendent pas pour passer à la même place, bien, j'ai le plaisir d'avoir deux routes, deux autoroutes, parce que c'est le circuit provincial. Ça fait au-delà de 15 ans que cette ferme-là reçoit ces adeptes-là. Moi, je la possède depuis 2000, donc depuis 12 ans. Ça a toujours été facile, les relations. Par contre, moi, j'absorbe les pertes et les inconvénients.

Alors, quand on se fait dire qu'on devrait avoir des sentiers permanents, je pense que ça, ça ressemble à des sentiers permanents. Et on a rencontré les présidents de nos... de ces clubs-là quand il y a eu la consultation, et le président des sentiers de motoneige a dit: Moi, ça fait 32 ans que je vais voir vers les cultivateurs -- parce que, lui, il appelle ça encore les cultivateurs, c'est correct, je n'ai pas de problème -- et il a dit: Ça fait 32 ans que je n'ai pas de problème à avoir des autorisations. Ça, j'appelle ça des sentiers permanents.

Donc, accorder, comme je disais, accorder aux adeptes de la motoneige le privilège d'utiliser nos terres, c'est une autre façon pour les agriculteurs de soutenir un pan important de l'économie locale.

**(9 h 40)**

Si la topographie et le climat font chez nous des paysages magnifiques, pour l'agriculture ce n'est pas nécessairement l'idéal. Il y a bien sûr de belles fermes, mais, comme l'a dit M. André Tessier hier, du secteur de Wotton, qui est un secteur voisin de l'UPA Weedon, on parle souvent de petites parcelles de terre, souvent vallonnées, rocailleuses, en pente, avec des unités thermiques pas très élevées, ce qui fait que la culture de maïs et de céréales est donc souvent réservée aux besoins de la ferme. C'est pourquoi on retrouve les productions animales... surtout des productions animales.

Et, comme exemples, je peux vous donner quelques chiffres. Dans le secteur de Weedon, sur 182 fermes, 90 fermes sont dans le secteur bovin. Donc, la moitié des fermes sont des producteurs de bovins. 15 fermes sont des producteurs d'agneau et mouton. Donc, ces deux productions-là totalisent 105 fermes sur 120. À ça, si on ajoute les producteurs de porc, un autre 15 fermes, on se retrouve avec 120 fermes sur 180. Donc, les deux tiers de nos fermes sont sur trois productions animales, toutes soumises à l'ASRA, donc c'est les deux tiers de nos fermes qui sont vraiment dépendantes de l'ASRA.

Vous comprendrez donc, pour nous, le... vous comprendrez donc l'importance pour nous de programmes de soutien adéquats et fiables à long terme. Des programmes courts ou individuels habillent finalement peu de personnes. La stratégie d'adaptation avec beaucoup d'argent... envoie quand même beaucoup d'argent pour les consultants. Malheureusement, ces programmes courts et qui arrivent un peu ad hoc, bien, on se retrouve avec beaucoup de consultants qui sont souvent peu formés. On a un syndicat de gestion chez nous, qui est là depuis tout près de 30 ans, lorsque la demande est sensiblement pareille, lorsqu'il part quelqu'un, il arrive un nouveau... il part un employé, un nouvel employé, il peut être encadré, il peut être vraiment suivi, et on en fait des personnes compétentes. Lorsqu'arrive un programme comme celui-là où, dans une région, il y a cinq conseillers qui font ce travail-là et, tout d'un coup, avec ce programme-là, il en faut 25, on comprendra que les 20 nouveaux sont souvent peu formés, ont souvent peu de connaissances et peu de compétences. Donc, les aides ne sont pas nécessairement toujours à point.

Et, exemple, dans ce programme-là, ça arrive tellement vite qu'il y a même de l'argent pour l'UPA là-dedans. On avait perdu un locataire, donc on a loué à un consultant qui loue toute la surface qu'on avait à louer. Ça fait que finalement, moi, j'aime bien qu'il y ait de l'argent à l'UPA, mais je l'aimerais mieux dans mes poches de producteur.

Donc, je passe maintenant la parole à M. Brouard.

M. Brouard (Alain): Bonjour, M. le Président, membres de la commission, messieurs dames. Mon président m'a pris pas mal de mon temps, je vais essayer d'être bref, moi aussi.

Je suis Alain Brouard, producteur depuis 1974 d'une ferme familiale en production porcine, en production bovine, puis je fais aussi, en ce moment, de la forêt pour être capable de survivre à la crise présentement.

La raison pourquoi ça se fait que nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour parler de l'Union des producteurs agricoles, notre accréditation. Je me demande pourquoi que vous vous attardez à ce sujet. Est-ce pour nous diviser entre nous, quand on sait bien que l'union fait la force et en plus que, dans notre secteur, nous avons 100 % d'adhésion?

Parlons d'autres sujets d'actualité aussi importants. L'ASRA, La Financière agricole qui, avec ses coupures, nous affecte directement, nous, producteurs de porc, de bovins et d'ovins, qui traversons des périodes très, très difficiles. Plusieurs producteurs pensent à abandonner, et certains ont dû fermer leurs portes, faute de liquidités.

Un autre dossier aussi, c'est le zonage agricole. Pour les municipalités, l'important, c'est d'aller chercher de plus en plus de nouvelles constructions pour aller chercher de plus en plus de taxes, sans se soucier de l'agriculture -- parce que je siège sur un comité dans la MRC des Appalaches, puis on parle souvent d'un petit peu de dézonage ici puis un petit peu de dézonage là. Pour l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants... en même temps que le ministère de l'Environnement nous empêche de remettre de nouvelles terres en production.

Pour un meilleur avenir, ça prend plus de cohérence dans la politique agricole pour que les producteurs puissent planifier leurs investissements. Je parle de la stratégie d'adaptation mise sur pied, ce programme qui fait travailler les agronomes, les vétérinaires. Ça ne nous apporte aucune liquidité pour le moment. C'est comme la multifonctionnalité, c'est illogique, ce programme-là, c'est de l'argent qui est gaspillé pour rien, c'est juste pour faire embellir la vue des gens de la ville.

En conclusion, Mmes, MM. les membres de la commission, j'espère que mes commentaires ne tomberont pas entre deux chaises et qu'on aura de bonnes politiques agricoles pour aider la jeune relève, qui a à reprendre confiance en l'agriculture afin de continuer ce que nous avons commencé. Merci de m'avoir entendu.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. Brouard. Merci, M. Marcoux. On va procéder maintenant à l'étape des questions des députés, en commençant par M. le ministre. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Marcoux, M. Brouard. Tantôt, M. Marcoux, vous disiez que vous aviez 600 acres de terre, je présume, peut-être, soit en pâturage ou en culture.

M. Marcoux (Réal): Et en bois.

M. Corbeil: Et en?

M. Marcoux (Réal): Et en boisé.

M. Corbeil: Et en bois. O.K. pour... Là, le secteur acéricole, vous l'avez abandonné parce qu'il y a eu le verglas en 1998.

Moi, je voudrais qu'on se ramène au niveau du livre vert, et juste vérifier avec vous si vous êtes d'accord avec les enjeux auxquels le secteur fait face et si la lecture que l'on fait des défis qu'on a et qui se dessinent à l'horizon se mesure dans le secteur de Weedon, que vous représentez. Ces enjeux-là sont énumérés à la page 13, qui parle des changements démographiques, donc, c'est-à-dire, moins de jeunes puis l'âge augmente, diversification de la demande du consommateur, l'alimentation et la santé, la mondialisation et le défi de la compétitivité, la capacité d'attraction de la main-d'oeuvre, les valeurs environnementales et les générations montantes, la vitalité du milieu rural et les progrès de la science et de l'innovation.

Est-ce que vous pensez que la lecture qu'on fait des problématiques auxquelles sera confronté le secteur bioalimentaire ou agroalimentaire demain est juste et vous êtes capables de vérifier ça dans votre coin?

M. Marcoux (Réal): Vous m'excuserez, je n'ai pas eu le temps de prendre note de tout. Voulez-vous me redonner la page, s'il vous plaît?

M. Corbeil: Page 13, les changements démographiques, est-ce que ça se mesure dans le coin de Weedon, la diversification de la demande du consommateur, l'alimentation et la santé, la capacité d'attraction de la main-d'oeuvre, les valeurs environnementales et les générations montantes, la vitalité du milieu rural et le progrès de la science et de l'innovation?

Le Président (M. Paradis): En caractères gras, au milieu de la page.

M. Corbeil: C'est en plein milieu du paragraphe.

M. Marcoux (Réal): Disons que, oui, en gros, on partage évidemment ça, avec quand même des bémols dans certains coins, là. Les changements démographiques, ça nous affecte surtout pour la main-d'oeuvre. Moi, chez nous, si je fais la comparaison dans les premières années que j'ai été en production, les années 1973, 1974, 1975 jusqu'en 1980 quelques, à tous les printemps il y avait des jeunes qui venaient se présenter chez nous pour venir travailler. Il y avait quand même trois, quatre, cinq, six jeunes qui étaient prêts à faire du temps, pas à plein temps, là, mais, si j'ai besoin pour la roche, j'ai besoin pour les foins, il y avait toujours quelqu'un qui venait. Depuis, je vous dirais, au moins une dizaine d'années, peut-être même plus, c'est fini, ça, il n'y a plus personne qui se présente. Il faut vraiment aller la chercher. Ça fait qu'à ce niveau-là, oui, il y a moins de jeunes, et les jeunes sont moins intéressés à venir travailler sur les fermes. Quand on dit «travailler», c'est vraiment des travailleurs, là.

Par contre, pour la relève de l'agriculture, dans mon secteur, des jeunes, je n'ai pas vraiment de problème. Si je regarde les... Et on a une génération qui est pas mal... beaucoup de producteurs qui sont alentour de mon âge, là, qui sont sur la retraite ou prêts à partir, dont plusieurs producteurs de lait. Et, pour eux, les jeunes qui sont de l'âge de mon garçon, qui sont entre 25 et 35 ans, ils sont tous en train de prendre la relève de leurs pères, en production laitière.

Par contre, en production bovine... Et, je l'ai mentionné tantôt, mon garçon, il est employé. Ce n'est pas qu'il n'a pas d'intérêt, il a un D.E.P., puis l'intérêt est là. Il est chez eux, il aime ça. Par contre, la capacité de l'acheter... Contrairement à mon ami François Marcotte, hier, qui vous disait que, lui, il a donné quasiment le deux tiers de sa ferme à son garçon pour prendre la relève, moi, j'ai trois enfants puis je suis moins généreux que lui, ça fait que je ne la donnerai pas à Daniel, ma ferme, il va devoir l'acheter et la payer si... Je veux bien lui faire un prix de père à fils, mais je ne peux pas la donner. Mes deux autres enfants, ils ont droit aussi à leurs parts d'héritage. Et, moi, j'ai encore, j'espère, un petit bout de vie, là, devant moi, là. Ça fait que j'en ai de besoin aussi. J'ai travaillé trop fort pour la donner. Ça fait qu'à ce titre-là la relève, oui, elle est là, mais la capacité de l'acheter, dans certaines productions elle n'est pas là.

**(9 h 50)**

Pour ce qui est de la diversification de la demande des consommateurs, bien, je pense que ça réfère un peu à avoir le produit et le consommateur au centre de la politique. Là-dessus, j'ai aussi un certain bémol -- puis je ne vous en veux pas personnellement, vous n'étiez pas là quand ça a été écrit, là. Je comprends un peu difficilement, quand on regarde, par exemple, Donner le goût du Québec... Dans le deuxième paragraphe, on lit: «Il faut saisir toutes les occasions du marché à partir des besoins du consommateur, puis produire en conséquence. Ce nouvel "angle d'attaque" est incontournable pour favoriser le développement et la prospérité de l'industrie bioalimentaire ainsi que la création de richesse au profit de toutes les régions...»

C'est beau quand on le lit, là, mais, quand on lit ce qui suit: «Par le passé, l'accent a généralement été mis pour présenter une offre de produits dans l'espoir que la demande soit au rendez-vous», là j'ai pas mal plus de problèmes. On a-tu de l'air, nous autres, là, je ne sais pas, moi, des bibittes qui vivent dans des casernes dans... en haut du Plan Nord, puis qui n'est pas connecté avec le monde? On est aussi des consommateurs. On le sait, ce que les consommateurs, ils veulent, on consomme aussi et on lit aussi les journaux.

On est capables de s'adapter. Et, exemple, il y a 50 ans, pour ceux qui étaient là, les porcs, ils étaient longs de même, ils étaient larges comme ça, ils avaient ça d'épais de gras sur le dos. Ça se vendait bien, du gras de lard, ça allait dans les bines, ça allait... ça faisait de quoi d'utile dans d'autres nourritures, et puis mon grand-père, il en mettait sur ses toasts. Lui, il n'avait pas de beurre, c'était du gras de lard. En 2000, la demande, ce n'est plus ce porc-là. Bon. Bien, les porcs, aujourd'hui, ce n'est plus ça qu'ils sont non plus. Ils sont longs de même, ils sont larges comme ça. La «slappe» de bacon, elle est longue de même, les tranches sont longues comme ça. Je pense qu'ils ont connu le marché, ils se sont adaptés.

En 1978, moi, j'avais des taureaux... des bovins Hereford, et la demande pour ce genre de viande là... Pour ceux qui s'en souviennent, là, le gras, c'était maintenant du... versus cholestérol, c'était poison, puis là il fallait aller vers des viandes maigres. Depuis ce temps-là, j'ai des Charolais. Il y a du Simmental, il y a du Limousin au Québec. Et je pourrais continuer les exemples comme ça, là. Je pense que les producteurs se sont adaptés. Moi, quand je lis, là, que, par le passé, on espérait que les demandes... qu'on produise et qu'ils aillent le demander... Non, on a produit en version de ce que c'est que les gens voulaient.

Et, quand on regarde aussi: placer le consommateur... qu'on va répondre à leurs demandes, ça, oui, mais il faut faire attention. Les consommateurs, ce qu'ils demandent et ce qu'ils achètent, des fois ce n'est pas toujours la même chose. Quand on regarde la télévision, quand on regarde les journaux, le bio, ça a pris beaucoup, beaucoup d'espace, tous les programmes... Puis il y en a-tu, des programmes, là, de chefs cuisiniers actuellement, là? Je pense que c'est presque un sur trois, là. Et, les produits santé, les produits bios, je n'ai rien contre, moi, il y a des acheteurs pour ça. Sauf qu'il y a 15 ans ça représentait 2 % de la consommation. L'an passé, il y avait une présentation qui a été faite au Delta à Sherbrooke et il y avait une personne qui est venue faire une conférence, et il a mentionné qu'on est encore à 2 % de la consommation pour le bio. Oui, il en faut. Les gens à qui il en faut, il faut leur donner, il faut... il y a des producteurs qui sont prêts à en faire.

Par contre, si on avait écouté les consommateurs à ce moment-là et qu'on se serait tous en allés à du bio, on en aurait 20 %, 30 %, 40 %, de produits bios, qui n'auraient pas d'acheteur. Je connais des producteurs dans mon secteur, dans la région de l'Estrie, qui, au printemps, n'avaient pas encore vendu leurs grains biologiques. Il y a des acheteurs, il y a des demandes, et, oui, on va vous l'acheter, mais là le prix, il n'est pas tellement haut, là. Dans un mois ou deux, on s'attend que ça va se replacer. Je peux vous l'acheter aujourd'hui, mais c'est presque le prix du blé conventionnel. Mais là, regardez, on n'est pas intéressés à en faire trop, trop, là, si on a ces prix-là. Ça fait que, oui, il faut faire attention à la demande des consommateurs, mais en même temps il faut s'assurer que, s'ils le demandent, ils vont le manger.

Moi, quand on regarde l'environnement, qu'on me demande de faire un boeuf où il va respecter l'environnement, il va être maigre, il va avoir toutes les qualités, sans hormone, sans antibiotique, puis tout, tout, tout, je suis prêt à le produire. Mais, quand je m'achète une auto, par contre, si je m'assis devant un concessionnaire puis je dis: Je veux une petite Cavalier à 16 000 $, par contre je veux l'air conditionné, les vitres électriques, tu vas me mettre un toit ouvrant, tu vas me mettre sur... tu vas me le chausser sur 16 pouces, puis: Il n'y a pas de problème, il n'y a pas de problème, mais, à toutes les fois, lui, il met un chiffre, puis, à la fin, bien là il dit: Ça coûte 36 000 $. Non, non, regarde, 16 000 $, ton auto, que tu me l'as faite. Oui, mais là tu es rendu à 36 000 $, mon homme! Bien, moi, ce qui arrive avec mon boeuf, c'est qu'on m'en demande, on m'en demande, on m'en demande, et finalement on le mélange dans le même moulin que le boeuf du Brésil, et du Nicaragua, et de l'Australie, et puis, finalement, bien, il sort à 16 $, au prix du boeuf que... auquel on n'a aucune garantie que ce boeuf-là a été produit dans des conditions semblables aux miennes.

Alors, oui, moi, je n'ai pas de problème à ce qu'on m'en demande, mais, si on me le demande, on va l'acheter, par exemple. Ça fait que, quand on mise sur le consommateur pour nous dire quoi acheter, je pense qu'on est mieux de s'assurer qu'il va l'acheter avant de commencer à le produire.

**(10 heures)**

Pour ce qui est des autres... La mondialisation, le défi de la compétitivité, ça, c'est clair que, oui, on n'y échappera pas. L'alimentation, la santé, bien, regarde, je pense que j'en ai assez dit, on est dedans.

La capacité d'attraction de la main-d'oeuvre, c'est un secteur que je connais quand même assez bien aussi, étant sur le collectif en formation et sur d'autres projets semblables, là. Comme je vous ai dit, actuellement, en tout cas chez nous, la capacité d'attraction, elle est là, et c'est souvent de la relève de la ferme. Il y en a aussi, des gens de la ville qui veulent le faire, mais c'est le même principe, les capacités, ils ne l'ont pas et souvent, à ce moment-là, ils vont aller dans des plus petites productions. Ils vont s'essayer dans des productions où ils sont moins réglementés, moins bien structurés, et, après un an, deux ans, trois ans, bien, c'est bien de valeur, mais ils sont découragées puis ils sont repartis en ville; des petits maraîchers qui arrivent puis qui vont faire un hectare de carottes puis de concombres, après ça il faut les revendre aussi et puis il faut aller chercher suffisamment d'argent pour faire vivre la famille. Ça fait que souvent, après trois ans, le rêve est fini, puis ils s'en retournent en ville. Donc, ça, c'est à faire attention aussi. Il y en aurait, de la possibilité de main-d'oeuvre et d'attraction pour les fermes, mais ils n'ont pas nécessairement les capacités de le faire.

Valeurs environnementales et générations montantes, bien, en environnement, là, je pense que... en tout cas en production bovine puis porcine, là, arrêtez de nous en demander, là. On peut-u être capable de vivre aussi, là? Je pourrais vous faire un exemple. Juste pour gérer nos fumiers, il y avait un jeune homme que son père est producteur agricole, et puis, lui, il travaille dans la dynamite, il dit: Puis je pars avec mon camion bien plein de dynamite, je signe un petit papier, puis je m'en vais avec ça. Mon père, pour gérer du fumier, il a des papiers longs de même puis ça d'épais. La logique est où à un moment donné, là? Ça fait qu'arrêtez de nous en mettre, s'il vous plaît, en environnement.

La vitalité du milieu rural, bien, vous avez vu hier que, chez nous, on n'a quand même pas diminué tant que ça. Juste dans mon secteur, c'est 10 fermes. Il y a eu passablement de transferts. Je pense que le gros des fermes qu'on a perdues, il faudrait se reculer de quelques années de plus. Dans le Haut-Saint-François et dedans le secteur du Granit, entre 1990 et 2000, c'est 20 % des fermes qui ont disparu. Ces chiffres-là, vous ne les avez pas, là. Entre 2000 et 2010, dans le début des années 2000, on en a perdu énormément aussi, pour diverses raisons, là, pour pas nécessairement de... Le gouvernement n'est pas responsable de tout ça, quand même, là. On va vous en exclure quelques-unes, là, il y a des gens... beaucoup de producteurs de lait qui ont transféré au boeuf, questions fiscales et de finir une carrière, et ensuite, bon, ils ont vendu.

Et, chez nous, on a la chance aussi d'avoir beaucoup de baby-boomers qui se... On a beaucoup de lacs dans le secteur de Weedon, lac Louise, lac Saint-François, etc. Il y a beaucoup de lacs, donc, et de rivières, beaucoup de chalets. Ça amène beaucoup de monde de l'extérieur, ce qui a fait monter énormément le prix des fermes. Moi, de chaque côté, les fermes sont à vendre. S'il y a des petits producteurs qui veulent s'établir, ils sont disponibles, ces fermes-là. Mais ils ne seront pas capables de les acheter.

Moi, ça m'intéresserait d'acheter le voisin, mais jamais au prix qui est là. Moi, si j'achète une ferme, c'est pour faire de l'agriculture. Il faut qu'à court terme, moyen terme et surtout qu'à long terme elle soit rentable, alors que les gens qui les achètent, qui viennent de Montréal, qui ont vendu leurs maisons un demi-million puis qui ont de l'argent cash, ils ont des REER, ils ont tout ce qu'ils ont besoin pour finir leur carrière, ça ne leur fait rien de payer 200 000 $, 300 000 $, 400 000 $ pour une ferme, même si elle ne le vaut pas pour l'agriculture. Pour eux, pour faire du quatre-roues, pour faire du cheval, pour faire de la balade, elle le vaut, ce n'est pas... La question agronomique, elle ne rentre plus en conséquence. Donc, ça aussi, il faut l'avoir à l'esprit.

Le progrès de la science et l'innovation, bien, ça, je pense que là on ne l'est plus pantoute, là. Là, on a un gros problème dans ce secteur-là. C'est clair qu'on avait beaucoup d'expertise au MAPAQ et qu'on l'a perdue, comme dans bien des secteurs, là. Je vous disais tantôt que, chez nous, il y a plusieurs producteurs qui ont mon âge, mais, au MAPAQ en Estrie, les gars, ils ont aussi mon âge et, malheureusement pour moi, eux autres, ils ont pu partir bien avant moi, donc toutes ces connaissances qui étaient accumulées depuis 20, 30 ans, des fois plus... Ils sont partis, ils n'ont pas été remplacés ou ils sont remplacés après que les autres sont partis. Donc, ce mentorat-là, ce suivi de connaissances là, le mentorat ne se fait pas, le suivi des connaissances, il est perdu. Alors, on repart avec une nouvelle génération qui vont recommencer à faire leurs classes, et ça, c'est extrêmement malheureux. Parce que ce n'est pas vrai que l'agriculture, elle change d'une génération à l'autre, là. Ce suivi-là, il devrait se faire.

Le Président (M. Paradis): À ce moment-ci, un...

M. Corbeil: On a passé pas mal... Je ne pensais pas qu'une question...

Le Président (M. Paradis): C'étaient des questions portes de grange ouvertes avec des réponses-fleuves. M. le...

Une voix: ...à votre question.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Merci aussi pour cette présentation efficace et sans complaisance. Je pense que c'est important qu'on entende aussi les vraies choses, comme on dit.

Dans votre territoire où le syndicat, ce que vous aviez dit d'entrée de jeu, les deux tiers des productions sont sous ASRA. Donc, c'est quand même...

M. Marcoux (Réal): Deux tiers des fermes.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Des fermes, pardon, des fermes. Ce que je comprenais, là, 120 sur 182, hein, c'est à peu près ça, qui se répartissent, là, comme vous l'avez présenté.

M. Marcoux (Réal): Ça pourrait même être un peu plus, parce que, moi, je vous ai parlé de trois productions animales: le boeuf, l'ovin et le porc, mais il y a quand même des producteurs qui font des céréales pour leurs fermes mais qui sont quand même assurables à l'ASRA, avec les superficies nécessaires, 10 hectares et plus. Maintenant, ça va passer à 15, là, mais ceux qui ont les superficies nécessaires et qui le font... Il y a même des producteurs de lait qui sont sous ASRA pour cette partie-là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Une autre partie.

M. Marcoux (Réal): Donc, il y a plus que le deux tiers des fermes qui reçoivent de l'ASRA.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Vous avez abordé directement le programme de soutien à l'adaptation qui vient compenser les mesures de resserrement de l'ASRA. Il y a combien de producteurs actuellement, là, qui sont... qui ont réussi à passer à travers et qui réalisent le projet?

M. Marcoux (Réal): Ce n'est pas beaucoup. Il y a beaucoup de demandes... malheureusement je n'ai pas les chiffres. Il y en a beaucoup qui ont fait des demandes qui sont acceptées. Par contre, il y en a beaucoup... la majorité sont encore au niveau de l'étude. C'est long, l'étude là-dedans, là. Vous savez, les comités... comment ils appellent ça, là, les comités multidisciplinaires, là, d'être capable d'asseoir en même temps le vétérinaire, le consultant, le technicien ou le responsable en gestion, l'agronome et tout le monde, asseoir tout ce monde-là à la même place avec La Financière et le MAPAQ, ce n'est pas facile d'avoir un agenda pour mettre tout le monde en place. Et ensuite tout le monde doit préparer chacun leur dossier. Ça fait que des dossiers qui sont vraiment sortis et qui sont rendus chez le producteur, il y en a très peu.

Après que toute l'étude est faite, bien, il faut aussi que le producteur, il l'accepte, là, là. Parce qu'on vous l'a dit hier, le producteur qui est déjà dans... Ceux qui sont éligibles, bien, c'est déjà des producteurs qui sont en difficulté, là. Le producteur qui n'est pas en difficulté, qui ne peut pas démontrer une difficulté, il n'est pas éligible. Donc, celui qui est déjà en difficulté, les finances, là, s'il est en difficulté, c'est parce qu'il n'en a pas beaucoup dans ses poches, là, là. Et, lorsqu'on lui redemande de réinvestir en plus, bien, souvent, on a beau vouloir emprunter... Je comprends M. le ministre qui dit: On va emprunter puis on va lui prêter, on va lui prêter sans intérêt pour trois ans, et ensuite ce qu'il va avoir économisé... Mais, quand on a en même temps, de l'autre côté, un programme de stabilisation qui vient réduire l'aide, bien, je ne suis pas sûr, malheureusement, que ce qu'il va économiser... ce qu'il perd avec l'ASRA, peut-être qu'il peut le récupérer sur ce programme-là, pour celui-là. Ceux qui ne sont pas éligibles, c'est des pertes nettes, là, là. Mais, lui, s'il récupère juste ce que c'est que c'est qu'il a perdu, dans trois ans il n'est pas plus avancé, là. Donc, il y a des producteurs qui n'ont pas vraiment l'argent pour le mettre.

Et ensuite, quand ce programme-là, il sort, bien, il y a des producteurs qui n'ont plus non plus le goût de le mettre. Et malheureusement, là -- je ne veux pas critiquer le programme, mais j'en ai mis un petit peu tantôt, là -- il y a des gens qui vont sur le terrain, puis je ne les blâme pas, ils ont une offre d'emploi tout d'un coup, puis c'est... Ils ont suivi une formation là-dedans, donc l'ouvrage, elle les intéresse. Mais de sortir de l'école, et t'embarquer sur une ferme, et de faire le bilan de la ferme, et d'être capable de trouver tous les problèmes qu'il y a dans cette ferme-là, les identifier puis trouver des solution, là, on n'apprend pas ça dans une semaine non plus, là. Donc, il y a des solutions des fois qui sont amenées que les producteurs ne sont pas prêts à accepter. Ça fait que, même si l'étude est terminée, il y a des producteurs qui n'embarqueront même pas là-dedans, là. Mais, pour vous dire le nombre de producteurs, dans mon secteur, qui ont adhéré et qui ont déjà eu de l'argent, s'il y en a, c'est infiniment peu.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Alors, ceux qui ont eu de l'argent, un peu comme vous dites puis que j'entends aussi un peu partout, c'est les consultants, bien sûr. Actuellement, c'est eux qui profitent, là, du programme.

M. Marcoux (Réal): Je pense que M. Brouard pourrait élaborer un petit peu là-dessus.

**(10 h 10)**

M. Brouard (Alain): Bien, c'est justement, moi, je me suis inscrit un petit peu avant les fêtes, puis j'ai reçu juste... au mois de novembre, je pense, puis j'ai reçu, un petit peu avant les fêtes, la confirmation comme quoi que mon dossier est à l'étude. Mais il reste que c'est infiniment loin avant qu'on touche une cenne de ça.

On en avait un, bon programme, à l'ASRA, qui nous garantissait notre coût de production, puis je ne comprends pas comment ça se fait qu'on est venu massacrer ça. Moi, il y a une année, là, l'année... je pense que c'est l'année 2010, là, j'ai 75 000 $ de moins en ASRA. Si je n'avais pas eu ce... Si j'avais eu mon argent que j'aurais dû avoir, je ne serais pas inscrit à la stratégie d'adaptation.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Vous êtes producteur de porc indépendant?

M. Brouard (Alain): Je suis producteur de porc directement puis je suis producteur de boeuf aussi, dans le vache-veau, ça fait que...

Le Président (M. Paradis): On a un cas pratique, là, le ministre m'a indiqué qu'il souhaitait réagir.

M. Corbeil: J'ai une petite question.

Le Président (M. Paradis): Si vous le permettez, je vais le faire, puis je vous accorderai le même privilège à un moment donné, si ça survient aussi, là. Oui, M. le ministre.

M. Corbeil: Vous avez mentionné, M. Brouard, que vous vous êtes inscrit au programme en novembre, un an plus... après son lancement. Qu'est-ce qui explique que vous avez attendu un an?

M. Brouard (Alain): Bien, je vais vous le dire bien franchement, là, en 2005, mon gendre a voulu peut-être prendre la relève de ma ferme. Ça fait que là c'est ton gendre, ce n'est pas ton gars, ça fait que... Mais, en 2005, j'ai rempli le volet... un volet 1, qu'ils appelaient, là, pour être capable de voir qu'est-ce que la ferme regroupait puis les forces, les faiblesses...

Une voix: Le programme du fédéral.

M. Brouard (Alain): Le programme du fédéral. Puis là je le sais que... Moi, jouer dans la paperasse, je déteste ça pour m'en confesser, tu sais, ça fait que j'aime bien mieux aller bûcher dans le bois, c'est pas mal plus rentable pour moi. Ça fait que je voulais... Je savais que je faiserais face à ces affaires-là, ça fait que, moi, perdre mon temps avec ça, c'est... J'ai de la misère avec ça. Ça fait que c'est pour ça. Mais là je me suis dit: Si le gouvernement, à un moment donné, il donne des programmes à ceux qui sont inscrits, bien, je vais passer au bout du pont. Ça fait que c'est pour ça que je me suis inscrit pareil.

Mais là je suis chanceux parce que j'ai d'autres productions qui m'aident, comme un peu dans le bois, même si ce n'est pas rigolo effrayant, là, j'y vais pareil, tu sais. Ça fait que... Mais il y a des producteurs qui ont juste le porc, là, puis qui attendent après leurs chèques, là, puis qui... ils ont vraiment, là... Moi, en tout cas, j'ai un de mes amis, là, sa corde, elle commence à serrer pas mal. Puis c'est déplorable, rendu après tant d'années de travail qu'on a... On est rendus quasiment à notre retraite puis on n'a rien en avant de nous autres. Parce que ma porcherie, demain matin... Il ne faut pas se le cacher, là, moi, j'ai rien que 100 truies, là, ça fait que ça ne fait pas vivre une famille complètement, ça. Moi, j'ai une ferme familiale. Ma porcherie, elle ne vaut rien demain matin si je la vide, contrairement à un producteur de lait qui a son quota puis, tu sais, qui a une valeur, qu'il veut prendre sa retraite. Ça fait que, nous autres, on mange directement notre fonds de pension.

Ça fait que c'est illogique de voir comment est-ce qu'on se fait massacrer, dans le programme ASRA, qu'est-ce qu'on arrivait à vivre avant.

Le Président (M. Paradis): Moi, je vais retourner au député de Kamouraska-Témiscouata. Ça va?

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Vous vouliez apporter un complément?

M. Marcoux (Réal): Oui. Est-ce que vous me le permettez?

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Oui. Rapidement, là, j'ai des questions.

M. Marcoux (Réal): Vous me le permettez, M. le Président, de compléter?

Le Président (M. Paradis): Oui, oui.

M. Marcoux (Réal): Moi, j'ai rencontré le directeur de La Financière en Estrie, qui malheureusement est décédé, M. Nicol Lemieux, et je lui avais dit: M. Lemieux, vous ne verrez pas ma ferme sur votre liste rouge, parce que je pense que je ne pourrais même pas être éligible. Mais le problème avec la nouvelle ASRA, le 25 % et toute les mesures qui en sont venues... Et je ne suis pas contre tout, là, là. Moi, j'ai été un des ceux qui, voilà 20 ans, disaient: Regardez, on peut-u maintenant être payés pour le boeuf qu'on fait? Je vais te payer pour des vaches. Non, moi, je fais des veaux, payez-moi pour les livres de veaux. Je ne suis pas contre ça.

C'est sûr qu'il y a des producteurs qui vont me lancer des tomates, là, là. Il y en a qui ont eu de la difficulté puis qui vont avoir de la difficulté à s'adapter à ça. Mais, moi, je me dis: Regardez, dans la vie, généralement on est payé pour ce qu'on fait, donc payez-moi pour des livres. Je ne suis pas contre tout ce qui s'est fait, mais la mesure du 25 %, elle est vraiment de trop. Et il y a quelques mesures comme ça qui n'ont pas d'allure, qui font que, chez nous, un peu comme chez eux, c'est des milliers de dollars en moins. Même si le prix des veaux augmente, on est coupés... l'ASRA, c'est les dernières piastres qui rentrent, on le sait, donc je vais être coupé de plusieurs milliers de dollars.

Donc, ce qui fait que ce beau programme de stratégie là est intéressant; il aurait dû être là voilà trois, quatre ans avant les coupures, prendre les producteurs qui ne sont pas capables de faire du veau de 600 lbs, les accompagner, leur aider à faire des veaux de 500, 600, 700 lbs, et, ensuite que tout le monde devrait être capable de les faire, là on dit: Maintenant, regarde, on a une nouvelle orientation dans l'ASRA et on va payer selon le produit qui sort. Alors que là on met des coupures puis on dit: Devenez efficaces. Mais ceux qui sont efficaces, avec toutes ces coupures-là, à la fin de l'année, on devient négatifs. Ça fait que tranquillement on s'en va sur le bord du trou. Puis là vous nous mettez un câble dans le cou puis vous dites: On vous tient avec ce beau programme là. Ça fait que vous nous étouffez quand même sur le bord du trou, là. Ceux qui sont rentables, en en faisant de moins en moins, on va devenir éligibles au programme. Moi, je ne veux pas devenir éligible au programme, je veux juste continuer à vivre chez nous avec ce que j'ai là. Et le programme d'adaptation, en principe il est correct, mais il est très mal placé. Il arrive trop tard. Merci.

Le Président (M. Paradis): Ça va. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Corbeil: ...j'étais là, mais, pour le programme, je n'étais pas là.

Le Président (M. Paradis): Mais peut-être une petite parenthèse là-dessus, si vous le permettez, là. Quand on regarde le contexte historique de l'ASRA, quand même, au début, l'ASRA a été sous-budgétée, là, quand on regarde le programme à travers le temps. Et le gouvernement a réussi à doubler la mise dans le programme de l'ASRA comme tel, là. C'est quand même un effort au moment où tous les autres ministères, sauf Santé et Éducation, ont été un petit peu passés dans ce qu'on appelle vulgairement le «crusher», là. Et on se retrouve dans une situation où... après avoir doublé le montant qui a été mis à l'ASRA, assumé la dette accumulée de 1 milliard, dans une situation où des producteurs se retrouvent dans la situation où vous vous retrouvez, là. Il y a quelque chose qu'on essaie de comprendre ici, là, tout le monde ensemble. Il faut dégager une solution à ça rapidement, parce que les fermes indépendantes, là, il y en a un petit peu moins. En tout cas, moi, j'essaie de comprendre qu'est-ce qui s'est passé puis je n'ai pas encore mis le doigt dessus. C'est parti de 325 millions à 650 millions. Puis on a doublé la mise puis on dirait qu'il y a moins d'argent dans le système.

M. Marcoux (Réal): C'est la réalité.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kam-Témis, je m'excuse.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Vous êtes président, M. le Président, donc vous avez des privilèges de présidence.

J'aimerais vous entendre un petit peu plus sur le programme de multifonctionnalité, parce que vous l'avez brièvement abordé, mais je ne sentais pas beaucoup d'appréciation, alors qu'on entend ailleurs, dans d'autres régions, quand même, que c'est quelque chose qui permet de développer certains axes. Quelques mots, brièvement, sur ça.

M. Marcoux (Réal): Oui. Bien, oui, je vais essayer d'être bref. C'est sûr que c'est un programme où on ne peut pas être contre la vertu. Là où, moi, ça m'agace un peu, c'est un programme qui vient quand même de l'enveloppe du ministère de l'Agriculture et qui ne vise pas vraiment, actuellement en tout cas, à... Mais on sait que c'est un projet, il y a de la place à l'amélioration, donc on peut... soyons confiants quand même, là. Mais actuellement, quand je vous parlais tantôt du programme de la route des Cantons, ça sent beaucoup plus le tourisme, la vision que... vraiment mettre de l'argent dans les poches des producteurs.

Dans certains cas, on va leur aider. Moi, j'ai un silo en bois, là, je ne l'utilise plus. Si j'avais déposé un projet, peut-être que j'aurais pu avoir de l'argent pour le rénover, mais, comme je ne l'utilise plus, pour le garder... parce que là tout le monde, ils disent: Des petits silos de même, il n'y en a plus, ça serait le fun que tu le laisses là. Peut-être que je serais éligible. Mais je ne m'en sers pas, du silo. Donc, je vais payer 30 % du coût juste pour le fun que les gens le regardent. Ça ne me met pas d'argent dans mes poches, ça.

Si on fait un exemple avec d'autres pays, par exemple en Suisse, si je me rappelle bien -- on avait eu un colloque en Estrie, mais sous toutes réserves de chiffres, parce que je n'ai pas eu le temps de ressortir... je n'ai pas pensé de ressortir les vrais chiffres, là -- il me semble que c'est 1 300 $ que les producteurs ont pour envoyer leurs animaux dehors une fois par année. Chaque tête, chaque vache qui sort une fois dans l'année, le producteur reçoit 1 300 $. Nous, à l'ASRA, quand on a reçu 300 $ par année pendant quelques années, on est des gros bandits. Ça n'a plus de bon sens, on ne peut pas payer éternellement. Bon, bien, à quelque part, là, moi, je... On l'utilise, cet argent-là, non pas pour le tourisme, mais on l'utilise pour faire venir les gens. Mais ailleurs le programme de multifonctionnalité, c'est de l'argent qui rentre dans les poches des producteurs. On ne les oblige pas à débourser, c'est une façon de reconnaître ce qui se fait sur les fermes, notre apport comme paysage, notre apport à la société, qui, d'une autre façon, n'est pas rémunéré.

Où est-ce que c'est qu'il y a beaucoup d'agneaux, là, en Nouvelle-Zélande, il y avait des montagnes, et les producteurs traversent le village, là, au printemps pour aller mener leurs brebis dans les montagnes. Ça entretient le paysage. À l'automne, ils les ramènent, c'est une fête dans le village. Ça, c'est une... historique, là, quand les bergers traversent le village, il y a toujours une fête. C'est en train de se perdre. Le gouvernement, maintenant, fournit gratuitement la montagne et paie les producteurs pour amener les agneaux là. C'est de l'argent qui rentre dans les poches des producteurs.

Ça, c'est des vrais programmes multifonctionnalité pour reconnaître l'apport des producteurs dans la société. Mais, le programme de multifonctionnalité qu'on a là, moi, je regrette, je ne l'appelle pas un programme de... En tout cas, il n'est pas dans cet esprit-là. Ça ne nous amène pas vraiment d'argent, là. Espérons qu'il va s'améliorer et qu'on va pouvoir faire en sorte que les producteurs vont vraiment pouvoir l'utiliser.

**(10 h 20)**

Des voix: ...

Le Président (M. Paradis): Oui, je comprends, là. J'ai des demandes d'un petit peu partout, c'est captivant, c'est intéressant, mais je suis obligé de gérer le temps également. Je vais reconnaître, à ce moment-ci, M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Alors, merci, M. le Président. Mais, si on se pose, là, la question: Comment ça se fait qu'on est rendu là en agriculture?, moi... Parce que je suis un producteur agricole, moi aussi, là. Je me dis, à chaque fois qu'on fait un règlement au Québec, on ne se soucie pas de ce qui... de nos voisins, que ça soit l'Ontario, que ce soient les États-Unis. On demande à nos Québécois, nos agriculteurs québécois d'être plus blancs que blancs, mais par contre le prix... C'est sûr que, quand on met des normes, bien, on met des normes, ça remonte le prix. Mais on se revire de bord, puis on achète de l'extérieur à un prix moindre, puis on l'emmène sur nos tablettes dans nos magasins. Alors, c'est sûr qu'on va toujours avoir un problème.

Moi, je pense en tout cas que, que ça soit n'importe quel ministère, quand il va arriver pour mettre une nouvelle réglementation, il va falloir regarder l'impact que ça va avoir sur toute la production. On voit aujourd'hui... La compétition aujourd'hui, elle vient du Brésil, elle vient de l'Argentine, de la Chine, de n'importe où. Puis ici, au Québec, on se met des normes très sévères, mais on achète des produits qui ont... qu'on ne sait pas qu'est-ce qui... comment est-ce qu'ils ont été...

Alors, moi, je pense qu'il va falloir aller à nos frontières puis dire: Écoutez, là, si vous rentrez du stock au Québec, bien, il va falloir qu'il ait les mêmes normes que les... que vous exigez aux producteurs québécois. Parce que, tant qu'on ne fera pas ça, là, on a beau parler ici puis emmener tout ce qu'on voudra, on reste dans le même trouble. Je ne sais pas, vous, comment... Vous en avez parlé un petit peu, là, de cette vision-là. Mais je crois qu'il va falloir aller jusque-là pour que les exigences soient les mêmes, que les produits québécois et les produits qu'on va vendre dans nos tablettes aient les mêmes exigences que les produits du Québec.

M. Marcoux (Réal): Ça fait des années qu'on a, à l'UPA, des demandes qu'on appelle la réciprocité des normes. Ça fait des années qu'aux niveaux provincial et fédéral on demande que ça s'applique, la réciprocité des normes. Et c'est sûr que, si on avait ça, ça changerait énormément la norme. Bon, il faudra faire attention, du boeuf au Québec, on n'en produit pas assez pour tout le monde, là, là, ça pourrait augmenter la production. Mais il faut penser aussi qu'on est là par rapport à la vache folle en 2002 et qu'au Québec on n'en a jamais eu, de vache folle.

Malgré toutes les normes qu'on nous met, on ne supporte pas non plus ces... avec les inconvénients qu'on nous amène, là, là. On a un abattoir, et on nous met des normes de MRS qui sont supérieures à celles des États-Unis. On est en train de la faire... peut-être la faire exploser s'il ne se passe rien, là, là, et puis, bon, bien, ça a de l'air à être correct comme ça. Mais, non, ça ne se peut pas, là. Vous mettez des normes supplémentaires, bien, en quelque part... puis on vend le produit le même prix, bien, ayez au moins l'obligeance de trouver une façon de combler les manques d'argent par un autre moyen que ce soit.

Moi, j'avais espérance que la commission Pronovost aille beaucoup plus loin là-dedans et qu'elle fasse vraiment un travail de commission puis demander aux consommateurs: En voulez-vous, du porc, au Québec, en voulez-vous, du boeuf? Si la réponse, c'est non, bien, regarde, on va y aller graduellement et puis, finalement, bien, on laissera faire ceux qui seront capables comme gentlemen-farmers de passer au travers. Sinon, on arrête. Ou bien on décide qu'on la supporte. Mais là arrêtez de nous dire: Ça fait 20 ans ou 30 ans qu'on paie dans le porc puis dans... ou dans le boeuf. Dans le porc, ce n'est bien pas le cas. C'est une des productions, d'ailleurs, qui s'en est sortie le mieux par rapport à l'ASRA, sauf les dernières années. Mais, dans le boeuf, oui, c'est vrai que, depuis 1978, ça paie. Mais, si on en veut, c'est le coût à payer. Et j'aurais aimé que M. Pronovost fasse le débat à savoir si on les supporte réellement, ces productions-là, ou si on les laisse aller, parce que, dans mon secteur, moi, c'est 50 % des fermes qui ferment si on laisse aller la production bovine.

M. Grondin: Une petite question.

Le Président (M. Paradis): Une petite dernière, parce qu'il y a un autre groupe qui attend, là.

M. Grondin: Une petite dernière. Vous parlez des fermes parce que... les fermes qui ferment leurs portes, mais, dans le fond, il y en a, des fermes, beaucoup, au Québec, dans les dernières années, qui ont fermé, mais la production n'a pas baissé. Alors, c'est les gros qui avalent toujours les petits. Puis les gros deviennent de plus en plus gros, alors ils contrôlent plus, puis le petit là-dedans va toujours être perdant. Je ne sais pas, chez vous, si vous avez vu une baisse de la production même si les fermes ont fermé.

M. Marcoux (Réal): Il y a quand même une baisse de production.

M. Brouard (Alain): Si on considère... Dans le porc, comme c'est là, là, à chaque fois qu'il y a des fermes qui ferment, souvent... des fois, les intégrateurs cherchent des bâtisses à rabais, puis c'est eux autres qui prennent la production. Vois-tu, la production, elle a augmenté de 1 point quelque chose pour cent au niveau intégration, tandis que, dans les fermes indépendantes, ça a baissé quasiment de 20 %. Ça fait que c'est très inquiétant.

M. Marcoux (Réal): En production bovine, dans le secteur finition, en Estrie, on avait huit ou 10 finisseurs. Aujourd'hui, il en reste deux. Ça fait que c'est vraiment une baisse. Et ils n'ont pas grossi, là, c'est les mêmes qu'il y avait là, avec le même potentiel. Ça fait que c'est sûr que, oui, chez nous, il y a une diminution importante.

Le Président (M. Paradis): À ce moment-ci, là, je tiens à vous remercier. Vous avez été francs, vous avez été directs, vous avez été intéressants. Maintenant, on doit procéder, là, à l'intérieur de l'enveloppe de temps qui nous est allouée. Au nom des membres de la commission, je vous dis merci. Si, concernant ce que j'appelle... ce que vous avez appelé, là, le manque d'efficacité des mesures d'adaptation ou la bureaucratie, vous avez des propositions à faire à la commission -- vous en avez parlé, là, à coeur ouvert -- on est ouverts à recevoir de votre part des suggestions que vous jugerez à propos de nous envoyer. Est-ce que ça va auprès des membres, ça? Oui, ça va? Merci beaucoup.

À ce moment-ci, j'inviterais l'Union des producteurs agricoles de Valcourt à prendre place à la table. Je suspends les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 26)

 

(Reprise à 10 h 28)

Le Président (M. Paradis): ...l'Union des producteurs agricoles du secteur de Valcourt, s'il vous plaît, veuillez vous présenter, en identifiant votre production, qui vous êtes exactement, et faites la présentation, tel que convenu. Merci.

Syndicat du secteur de l'UPA de Valcourt

M. Brien (Michel): Merci. Bonjour, M. le Président, M. le ministre, les députés. Je me présente, Michel Brien. Je suis producteur laitier à Racine. À côté de moi, c'est Jean Tétreault, producteur de boeuf et de porc. Il est associé avec son frère depuis... bien, ils ont la ferme depuis 25 ans. Et, moi, je suis producteur laitier avec ma conjointe depuis neuf ans. Notre rêve s'est réalisé quand nous avons acheté notre entreprise d'un producteur étranger à notre famille, car nous ne sommes pas de la relève conventionnelle. Nos parents respectifs, ils n'avaient pas de ferme. Pour rendre notre financement possible par La Financière agricole, le vendeur a fait un prêt avec du capital patient, ce qui nous a permis d'avoir notre financement et ce qui nous a permis de démarrer. Puis aujourd'hui, bien, on a une ferme de 250 acres avec 130 têtes, 75 vaches en... bien, 70 en lactation, 75 vaches laitières. On a trois enfants, dont deux sont intéressés à prendre la relève, dont j'ai une fille qui est à l'ITA à Saint-Hyacinthe actuellement.

**(10 h 30)**

Je ne lirai pas le mémoire intégral. Je vais plus commenter deux, trois points, et puis... mais on est ouverts à toute question, là.

Dans notre secteur, il y a 194 fermes, dont toutes les productions sont représentées. Les principales productions sont le bovin, le sirop, le lait, le bois, le porc et l'agneau, puis on a des... un peu toutes les productions aussi.

L'UPA de Valcourt est un outil de cohésion au bénéfice de sa communauté. Au fil des ans, le syndicat a permis aux producteurs agricoles sur son territoire de s'accomplir dans de grandes réalisations.

L'an passé, avec la MRC et la Commission de protection du territoire agricole, on a fait l'entente avec les articles 59, et, dans le secteur du Val-Saint-François, bien, ça donne environ 1 000 droits de construction en zone agricole. Ça fait que, c'est ça, c'est... Puis, ces droits-là, bien, on s'est assurés que ça ne nuit pas à l'agriculture.

On a aussi participé à la campagne pour protéger l'eau potable. On a installé 296 pancartes pour identifier les puits pour que, quand on engage quelqu'un pour faire étendre le fumier, bien, il sache où sont les puits des voisins, pour ne pas... prévenir les risques de contamination.

On a participé aux portes ouvertes.

On a expérimenté, on a essayé de trouver des moyens de récupérer les plastiques agricoles et on a fait une expérience avec les sacs, bacs, si on veut. On mettait des sacs dans les bacs de récupération, puis on mettait tous les plastiques agricoles, on fermait ça, et c'était le même camion qui ramasse la récupération aux deux semaines qui ramassait nos plastiques agricoles. Puis, au centre de tri, bien là ils les séparaient.

Et puis, au bout de deux ans, bien, ça a changé de gestionnaire, le centre de tri, puis là ils ont dit qu'ils n'en voulaient plus. Mais, à la MRC, ils gardent un endroit pour... à l'écocentre, un endroit pour justement que les producteurs aillent les porter. Mais ce n'est pas toujours pratique parce que le territoire est quand même grand, puis, quand... Si tu es à 20 kilomètres du centre de tri, mettre ça dans la boîte du pick-up pour emmener ça, ce n'est pas pratique. C'est beaucoup plus simple...

Il faut... il va falloir qu'on trouve un moyen pour tout récupérer ce plastique-là parce que, bien, en Estrie, avec les plastiques qui sont utilisés pour les fourrages, les tubulures d'érablières, les plastiques utilisés par les maraîchers, bien, ça peut représenter 500 tonnes de plastique qui... Selon moi, actuellement, il y en a peut-être le trois quarts qui vont direct à l'enfouissement. Et provincialement c'est 4 000 tonnes de plastique qui est utilisé pour les fourrages, 1 600 tonnes pour les érablières puis 600 tonnes en culture maraîchère, ce qui fait 6 257 tonnes qui est utilisé au Québec. Puis, si on transformerait tout ça en diesel, ça pourrait représenter 6 millions de litres de diesel, qui pourrait être transformé avec ces plastiques-là.

Je crois qu'il y a des possibilités de récupérer ça puis pas... faire autre chose que d'envoyer ça à l'enfouissement. Puis, même, il y a des petites presses aussi qui se vendent, qu'on peut compacter ça pour mettre dans les bacs de récupération pour que... Mais il faut... ça prend une volonté des MRC puis des régions pour qu'on fasse quelque chose. Puis ça pourrait être utilisé aussi par les entreprises, parce qu'il y a beaucoup d'entreprises qui jettent du plastique aussi. Je pense qu'il y aurait quelque chose à faire à ce niveau-là.

Je suis aussi membre fondateur de la Coopérative de solidarité agroalimentaire de Racine et membre du conseil d'administration du Marché Locavore. Puis j'avais la conviction que le marché pouvait contribuer à l'économie de la MRC puis de la municipalité, et c'est pour ça que... Puis aussi l'UPA soutient le marché puis a contribué financièrement aussi. Et la mission du marché, bien, c'est contribuer au développement socioéconomique de Racine et du Val-Saint-François en priorisant l'offre de produits régionaux et naturels de qualité qui répondent aux critères de l'agriculture durable tout en apportant un contexte commercial convivial favorisant la rencontre entre les consommateurs et les producteurs.

Puis ça, je suis un peu celui qui a mis ça en place. Et je ne l'ai pas fait pour moi, parce que, moi, je suis producteur laitier puis j'ai la chance d'avoir un système de gestion de l'offre, un système de mise en marché excellent. Je ne suis pas inquiet: à toutes les deux semaines... à tous les deux jours, le camion ramasse mon lait, il l'emmène chez Agropur, il est transformé, j'ai ma paie aux quinze jours. Puis je trouve qu'on a la chance, les producteurs de lait, d'avoir un très bon système, tandis que, les autres, dans les autres productions, bien, c'est beaucoup plus difficile, puis particulièrement les petits maraîchers. J'ai eu des amis qui sont partis dans la production maraîchère, puis, au bout de deux, trois ans, bien, ils fermaient. Et c'est pour ça que je me disais: En partant un marché, bien, ça va aider ces petits producteurs là.

Le terme... Le pourquoi on a choisi le mot «locavore», bien, ça signifie une personne qui se nourrit d'aliments produits localement. Et c'est pour ça que maintenant on l'entend de plus en plus, mais c'est à partir du moment où on a parti le marché, là les... on commence à l'entendre un peu plus.

À Racine, c'est 30 producteurs qui viennent vendre leurs produits au marché, qui dure durant 16 semaines. 50 % de ces producteurs-là, c'est des petits producteurs en démarrage d'entreprise, puis c'est des fermes qui n'ont pas nécessairement le volume pour aller sur des grands marchés; puis je pense que les marchés peuvent aider à ces petits producteurs là à démarrer.

Et puis, au marché à Racine, il y a 300... C'est un petit village de 1 300 de population, puis il y a 360 personnes qui passent au marché tous les samedis, parce que ça dure... c'est juste le samedi matin, de 8 h 30 à 1 heure. Et, en moyenne, les gens achètent pour 53 $ par client. Puis c'est un chiffre... Ce qui est dépensé au marché à Racine, ça représente à peu près 350 000 $.

Puis le marché aussi aide en même temps les commerces de Racine. On a une boucherie puis un dépanneur qui, le samedi matin, sont obligés d'engager du personnel supplémentaire parce qu'ils ne fournissent pas... parce qu'ils ne fournissaient pas à la demande à cause de l'achalandage du marché, qui automatiquement aidait les commerces aux alentours.

Je vous ai fait remettre le napperon de la carte des Cantons-de-l'Est, et puis, là-dessus, bien, on voit qu'il y a 13 marchés publics, six marchés de solidarité, puis c'est environ 200 fermes qui participent à ces marchés. Puis ça, ça ne s'est pas fait tout seul, c'est des producteurs, des citoyens, avec la collaboration de l'Union des producteurs agricoles, le MAPAQ, les municipalités. Mais les citoyens et les producteurs qui ont investi... bien qui ont mis... c'est carrément... Ils ont mis des milliers d'heures de temps bénévole pour partir ces marchés-là.

Puis, c'est ça, ces marchés-là, c'est des bons leviers pour les entreprises, un endroit pour vendre leurs produits. Mais ce n'est pas dû à tous les producteurs d'être... parce que tu peux être bon producteur mais pas nécessairement bon pour... avec la clientèle, avoir de l'entregent, puis tout ça. C'est pour ça que ce n'est pas dû à tout le monde. Puis aussi il y a certains coûts, aussi: les coûts de permis de vente, permis de transformation, les assurances. Souvent, ça coûte 3 000 $, 4 000 $, 5 000 $ juste pour t'équiper, avoir tes permis pour aller à un marché. Ça fait que ce n'est pas évident pour des petites entreprises qui démarrent, tous ces frais-là.

Et puis, aussi, c'est sûr que ça ne peut pas sauver tout l'ensemble des producteurs. Parce que, juste dans le secteur de Valcourt, il y a 76 producteurs de sirop d'érable, mais, tu sais, au marché, on peut peut-être vendre la production de un, là. Mais à quelque part ça prend des systèmes, aussi, là, pour les autres producteurs, là, pour qu'ils puissent vendre leurs produits. Mais c'est une belle place, une belle promotion pour nos produits, puis je trouve que c'est des beaux échanges entre les consommateurs puis les producteurs.

Mais actuellement tous les marchés sont supportés par des bénévoles, des producteurs, des citoyens qui croient à ces marchés-là, mais ils n'ont pas d'argent. Et actuellement ce qu'ils souhaiteraient puis ce qu'on souhaiterait, c'est avoir des sous pour engager un coordonnateur, quelqu'un qui peut faire un peu la... aider à la gestion de ces marchés-là, parce que les bénévoles, à la longue, mais ils s'épuisent, puis, si on n'est pas capables d'avoir des gens pour nous supporter là-dedans... Puis aussi, au niveau publicité, on aurait besoin de sous aussi, parce que, veux veux pas, il faut se faire connaître. Pour se faire connaître, bien, ça prend de la publicité, et la publicité coûte très cher. Et actuellement, bien, il y a un urgent besoin d'argent pour engager des coordonnateurs. Puis un coordonnateur peut peut-être coordonner quatre, cinq marchés, là, ce n'est pas... ce n'est peut-être pas énorme, mais il y a un besoin à ce niveau-là, puis actuellement, s'il n'y a pas rien de fait...

Mais je trouve qu'en Estrie puis dans les Cantons-de-l'Est on est pas mal bien servis au niveau des marchés. Mais ça va prendre un coup de main pour pouvoir... des programmes pour pouvoir maintenir ces marchés-là, pour continuer à augmenter l'achalandage et augmenter le nombre de producteurs qui vont dans ces marchés-là. Ça ferait pas mal le tour.

**(10 h 40)**

Le Président (M. Paradis): Ça va? À ce moment-ci, est-ce que, M. Brien, vous avez terminé votre présentation, puis M. Tétreault n'ajoute pas ou... Parce que je pense qu'il est dans des productions un petit peu plus...

M. Tétreault (Jean): Oui. Mon nom est Jean Tétreault. Je suis producteur de bovins et de porc. Nous avons 70 vaches pour faire du veau d'embouche, et, sur ces 70 vaches là, j'ai une quarantaine de vaches en race pure, donc j'ai... J'ai un autre côté aussi, de la production, qui est pour le bovin. Du côté du porc, je suis sous contrat avec un intégrateur, et présentement on fonctionne avec à peu près 1 420 porcs à l'engrais.

Ce que je peux dire, c'est que, pour ma part, dans le porc, c'est sûr qu'on ne vit pas tous en étant sous contrat, on n'a pas tout ce que les indépendants peuvent vivre, sauf que, depuis les trois dernières années, on a subi des coupures dans nos contrats par rapport aux autres... aux coupures qui sont manifestées à l'ASRA. Ce que je peux dire, c'est que, le porc, depuis le temps que j'en fais, depuis 15 ans, la production a évolué très vite, et ça s'est... ça se remarque. Il y a peut-être moins de producteurs, enfin peut-être un petit peu moins de têtes par production, sauf que les performances des animaux ont été augmentées par les améliorations de génétique et de... pour produire plus de viande par animal.

Du côté du bovin, comme j'ai dit, j'ai de la race pure, on fournit... En fait, les races pures, c'est la tête des pyramides. Dans le bovin, on fournit de la génétique pour produire des animaux qui vont fournir... ils vont devenir de la viande. Et présentement, pour ma race, au Canada, on est très optimistes, puisque, depuis deux, trois ans, les marchés... il y a des marchés d'exportation d'animaux vivants. Donc, pour ce côté-là de la production, on peut dire qu'on est très bien servis par ce marché d'exportation, puisque, dans la dernière année, je pense qu'il y a eu au-dessus de 10 000 têtes qui ont été exportées, principalement dans les pays de l'Est, Russie et Kazakhstan.

Donc, c'est sûr que, moi, dans ce domaine-là, je reçois... c'est un niveau canadien. Et je vois les autres confrères producteurs dans le reste du Canada, eux autres, ils sont... ils n'ont pas de sécurité du revenu. Mais ils ont passé à travers, puis ils voient des marchés qui se débouchent. Puis, eux autres, je peux dire qu'ils ont les mêmes soucis, les marchés s'améliorent, mais ils ont les même soucis de relève: Qui c'est qui va prendre la... puis dans... pour les employés aussi. Il ne faut pas se cacher, les producteurs de l'Ouest, ils ont des gros compétiteurs dans les... avec les pétrolières.

Pour ma part, je peux dire que, la production bovine au Québec, depuis 25 ans, je l'ai vue évoluer. Au début, c'était, je pourrais dire, amusant, instructif, car le MAPAQ soutenait le développement, avait une sorte de vision. Mais, depuis 2000, il n'y a plus de vision au MAPAQ. On n'a plus de vision, on n'a plus... Puis maintenant ça s'en vient qu'on n'a plus de conseil neutre pour pouvoir prendre nos décisions, surtout dans l'élevage.

Les programmes. On parle des programmes d'adaptation. Au début, je me suis dit: Je vais-tu en profiter ou je n'en profiterai pas? Je me suis dit... Quand le programme a été annoncé, ce n'était tellement pas clair que j'ai dit: Ça ne mènera à rien, c'est trop de... on va donner l'argent aux consultants, puis ça va finir là. Puis dernièrement j'ai eu à faire des investissements, et on m'a conseillé de... au programme d'adaptation, voir si certains volets du programme pourraient me toucher. Après ça... Avec ça, on peut dire que j'ai... Je ne suis pas tout à fait confiant au programme, mais, avec le travail qui va se faire, on verra. Je pense que je vais terminer ma présentation pour l'instant.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. Tétreault. Merci, M. Brien. Je vais déséquilibrer un petit peu le temps parce que j'avais... j'ai une hypothèque du côté de l'opposition officielle, là, sur la dernière comparution. M. le ministre, en débutant, mais je vais tenter de rééquilibrer.

M. Corbeil: Bien, en fait, d'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais juste transmettre de l'information concernant la multifonctionnalité. C'est une enveloppe qui a été allouée à chacune des régions, donc qui est gérée sur une base régionale, gérée et administrée sur une base régionale. L'aide apportée varie en fonction du bénéfice aux producteurs. Quand les bénéfices sont élevés, le pourcentage d'aide peut être réduit, mais, dans certains cas, l'aide aux projets peut atteindre jusqu'à 100 %. Autrement dit, dans le cas de monsieur, là, qui parlait de son silo qu'il ne se sert pas mais qui pourrait être retenu comme projet de rénovation pour une question paysagère ou je ne sais pas quoi, là, alors, à ce moment-là, ce serait sans frais pour lui.

Le Président (M. Paradis): Qui c'est qui prend la décision sur le plan pratique?

M. Corbeil: C'est le ministère. C'est une table de coordination de sélection des projets qui a été formée dans chacune des régions par les gens de la MRC, les gens du ministère, les producteurs, etc. Alors, le programme est populaire avec 71 projets déposés, plus de 200 producteurs impliqués dans ces projets. Ces projets-là sont dans... 21 des projets sont collectifs et 50 projets sont issus d'entreprises uniques.

Quand je dis «collectif», je veux rajouter ceci, c'est que, s'il y a plus de trois producteurs qui sont concernés par un projet, à ce moment-là il peut y avoir une bonification de 5 000 $ par producteur. Et il peut même y avoir aussi une enveloppe d'allouée de 10 % de la valeur du projet déposé, pour la coordination, quand il est collectif. Je suis allé au Bas-Saint-Laurent, à l'automne, présenter une vitrine, et ça concernait neuf producteurs dans un projet collectif déposé par une communauté et les producteurs concernés. Alors, c'est fait en fonction que, si le bénéfice est pour autrui, c'est-à-dire pour autre que le producteur concerné, les frais pour le producteur sont nuls.

Et ma question, vite, puis j'espère que la réponse... Parce que, moi, je pense que, dans le livre vert, où on parle de distinguer les produits québécois... Et, la fenêtre que vous avez ouverte concernant le marché public, j'aimerais avoir... ça, pour moi, c'est parlant, ça se développe vitesse grand V. Dans une localité comme Val-d'Or, en Abitibi-Témiscamingue, il y a un marché public qui existe depuis cinq ans, la direction régionale du ministère supporte l'initiative. Il y a plusieurs partenaires qui sont concernés. C'est en expansion, c'est en développement.

Je voudrais juste, M. le Président, savoir combien il y a de vos membres qui sont au marché et qui proposent des produits?

Le Président (M. Paradis): M. Brien.

M. Brien (Michel): Juste au marché à Racine, c'est 30 producteurs.

M. Corbeil: 30 producteurs.

M. Brien (Michel): Et la plupart, comme je disais, bien, je dirais 50 % des producteurs, c'est des producteurs, ça fait un an, deux ans, trois ans, qui démarrent en production agricole.

M. Corbeil: Dans votre mémoire, vous faites référence au nombre de fermes qu'il y avait chez vous en 2004, 197, et en 2011, 194. Donc, il y a une relative stabilité chez vous. Vous expliqueriez ça comment?

**(10 h 50)**

M. Brien (Michel): Bien, je dirais que probablement, en 2004, j'avais zéro producteur maraîcher, puis actuellement on en a trois. Et ces petites fermes là, en réalité, ont... bien, substituent... ils ont pris un peu la place de d'autres fermes qui ont disparu.

M. Corbeil: Alors, si je me rapporte au mémoire, vous me parlez de production laitière, porcine, bovine, ovine et acéricole. Et, pour le mémoire qui nous a été présenté précédemment pour le secteur de Weedon, M. le président de ce secteur-là a rajouté: sapins, ovins, serres, aquaculture, petits fruits. Donc, chez vous, il y a d'autres productions qui se sont ajoutées, là.

M. Brien (Michel): Oui. Oui, j'ai une aquaculture, un sapin... Là, j'en ai... bien, de toutes, bien, j'ai toutes les productions, là. Bien, des fois, tu sais, il y en a juste un ou deux, ou... Comme là, je pense que j'ai dit «trois», mais je pense que c'est cinq maraîchers. Puis, en réalité, j'ai vraiment de toutes les productions, même un producteur de sanglier. En tout cas, on a pas mal toutes...

M. Corbeil: Donc, vous voyez apparaître de...

M. Brien (Michel): Des productions qui n'étaient pas là avant.

M. Corbeil: ...des productions qui n'étaient pas là et des nouveaux types. Sur des superficies moins grandes, je suppose?

M. Brien (Michel): Oui, oui.

M. Corbeil: O.K. Comment vous percevez ce phénomène-là? Est-ce que c'est une tendance qui est lourde? Est-ce que c'est initiateur de petites... plus petites productions plus nombreuses? Comment vous voyez... Quelle lecture vous faites de ça?

M. Brien (Michel): Bien, souvent, ces petites entreprises là, ce que je trouve déplorable, c'est justement, c'est: ils vont faire de la production deux ans, trois ans, quatre ans, à un moment donné ils s'épuisent. Tu sais, ils ont des... Souvent, il y a une ou deux jobs à l'extérieur pour aider à ce que ces gens-là puissent vivre. Ça fait que c'est pour ça que, ces petites productions là, moi, je... bien, ils ont besoin d'aide pour justement pouvoir mettre leurs produits en marché, puis pour pouvoir prendre de l'expansion, puis pour pouvoir vivre de ça.

M. Corbeil: C'est des jeunes qui débarquent à Racine ou...

M. Brien (Michel): Oui, la plupart, c'est des jeunes, parce que... Bien, même, dernièrement, une rencontre avec le CLD et un programme Place aux jeunes, il y avait encore deux jeunes qui seraient intéressés de partir en production maraîchère. Mais à quelque part, à un moment donné, il faut vendre ces produits-là puis, si à Racine on a encore deux autres producteurs maraîchers, bien, à quelque part, à un moment donné, il va y avoir un problème de... Ça fait qu'il faut vraiment trouver des solutions pour peut-être faire de la transformation ou faire... bien, pour qu'ils puissent... s'ils veulent faire ça...

Puis c'est sûr qu'on n'est pas autosuffisants dans la plupart des productions au Québec, et puis il y a de la place pour ces producteurs-là. Mais il faut vraiment essayer de les aider pour qu'ils puissent mettre en marché leurs produits puis qu'ils puissent vivre de ces productions-là aussi.

Le Président (M. Paradis): Je vais le terminer...

M. Corbeil: Là, je veux vous aider dans votre... avant que vous ayez un grief, là.

Le Président (M. Paradis): Merci, M. le ministre, je l'apprécie. M. le député de Kam-Témis ou de Saint-Hyacinthe?

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Donc, je vais prendre la parole.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci. Bonjour. Alors, c'est impressionnant, votre présentation sur les marchés publics, en tout cas en ce qui me concerne, parce que je trouve ça vraiment... C'est une réussite, puis bravo, hein, d'avoir mis... D'ailleurs, vous avez initié cela comme président.

J'ai quelques questions. J'aurais pu le demander aux autres groupes, là, de l'UPA de l'Estrie, mais ça me vient ici. On présente dans les mémoires un encadré sur l'adhésion, hein, la variation de l'adhésion au syndicat, bien sûr. Pour les gens qui nous écoutent, pouvez-vous expliquer c'est l'adhésion à quoi, qu'est-ce qui fait qu'il y en a qui n'adhèrent pas, puis c'est quoi, la différence, c'est quoi, l'impact d'y être ou de ne pas y être, puis adhérer à quoi, juste en résumé, là.

M. Brien (Michel): L'adhésion... Bien, la cotisation, elle est obligatoire, mais l'adhésion, elle est volontaire. Et, c'est ça, chaque producteur est libre de signer, d'adhérer s'il veut. Puis je pense que, nous, c'est près de 95 %, 94%. Et c'est ça qui est la différence, c'est que chaque producteur est libre d'adhérer ou pas à l'union.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Puis, en adhérant, ça donne des avantages.

M. Brien (Michel): Oui. Bien, de toute façon, c'est... En cotisant, ils ont les avantages de tous les programmes, là, avec le MAPAQ, les remboursements de taxes, etc.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Et ceux qui n'adhèrent pas, est-ce que c'est parce qu'ils adhèrent ailleurs ou bien...

M. Brien (Michel): Pas nécessairement. Bien, je sais que, dans notre secteur, j'ai quelques producteurs, des fois, qui ont deux fermes, puis ils en ont une dans un autre secteur puis ils n'ont pas signé leurs adhésions avec le syndicat de base. Mais des fois c'est peut-être des oublis ou des choses... Ce n'est pas nécessairement... Mais il y en a que c'est volontaire qu'ils n'y adhèrent pas. Parce que c'est sûr que... Je pense que, dans toute organisation, il va toujours y avoir des gens qui ne seront pas d'accord avec l'ensemble des producteurs puis je pense que, quand on... Même dans des comités, quand on est six autour de la table, on n'est jamais tous unanimes. Puis je pense que c'est normal d'avoir toujours quelques pourcentages de membres qui ne sont pas toujours en accord avec nous, puis c'est... Je pense que c'est tout à fait normal, puis on le voit aussi par rapport à ce qui se passe, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci pour les précisions. Je peux poursuivre?

Le Président (M. Paradis): Oui.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. Tétreault, vous avez apporté un point important, un peu nouveau, qui fait du bien à entendre: le marché de l'exportation des animaux vivants. Vous êtes producteur de bovins race pure, c'est ça?

M. Tétreault (Jean): Oui.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Alors, pouvez-vous... Est-ce que vous fondez de l'espoir pour l'avenir? Parce que là il y a une ouverture à cet égard. Vous en parliez en tout cas, il me semble, avec passion.

M. Tétreault (Jean): Oui, j'en parle avec passion, parce que, pour la race, ça a donné un coup pendant que les marchés du veau d'embouche étaient... les marchés étaient plus bas. C'est sûr que c'est un marché qui est exploité depuis trois ans. On pense qu'il va peut-être durer un autre trois années, sauf qu'on fait toujours affaire... Dans ces pays-là, ce n'est pas tout le temps clair, puis, eux autres aussi, ils vivent... leur économie dépend de...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): ...à quel endroit, là, si vous voulez nous...

M. Tétreault (Jean): Il y a eu des exportations en Russie, puis dernièrement il y en a eu au Kazakhstan aussi.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Puis vous fonctionnez avec quelqu'un qui prend en charge tout ça? Pouvez-vous nous dire un peu, en gros, comment ça fonctionne?

M. Tétreault (Jean): Les associations de races fournissent les noms des éleveurs, puis c'est des exportateurs au pays qui, eux, ont des contacts avec les pays importateurs. Puis c'est eux qui s'occupent de tout ce qui est sanitaire et toutes les autorisations pour exporter. C'est eux autres... c'est les exportateurs qui s'occupent des affaires.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Et, l'autre point, vous êtes un producteur de porc intégré, hein? Parce qu'on a entendu... bien sûr, hier, on a entendu le syndicat du côté de l'Outaouais, où on parlait des indépendants et des intégrés. Et, comme intégré, vous dites aussi que vous vivez des difficultés, vous sentez l'effet des mesures de resserrement.

M. Tétreault (Jean): Oui. Ah! c'est sûr que les effets des mesures se font sentir. Les intégrateurs, il ne faut pas oublier, eux autres aussi... C'est eux autres... Le programme ASRA paie une grande partie des coûts, là, avec... Ils en retirent un bénéfice, mais ils en paient un très grand coût avec le nouveau modèle d'ASRA.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, bonjour, messieurs. Moi, je voudrais vous amener sur la relève. La relève, vous n'en avez pas parlé beaucoup, mais je veux savoir... On a une politique qui s'en vient, Une vision d'avenir, avec la relève. On va produire des produits de qualité, mais ça va prendre des personnes pour les produire ici. Alors, je veux savoir: Au niveau de la relève, est-ce que vous avez des problèmes de recrutement, de transfert, des choses comme ça? Puis, si vous avez des suggestions à nous suggérer à ce sujet-là, au gouvernement, est-ce que vous pourriez le faire, là, à ce moment-ci?

M. Brien (Michel): C'est un domaine que, moi-même, j'ai parti à zéro. Ça fait que je connais un peu toutes les difficultés que les jeunes aujourd'hui rencontrent, parce que ça ne fait pas tellement d'années que j'ai démarré en production laitière, puis il n'y a vraiment rien de facile au niveau agricole. Puis c'est sûr qu'il y a une partie que...

Puis c'est difficile aussi d'aller chercher des subventions. Parce que, moi-même, je travaillais à l'extérieur pendant quelques années puis je n'étais pas éligible à la subvention Financière agricole parce que je n'étais pas producteur à temps plein. Puis c'est difficile parce que tu as besoin des fonds au début pour démarrer. Puis souvent ça prend quelques années avant que la ferme soit assez rentable pour que tu puisses quitter ton emploi pour vivre de ça, et souvent, bien, on... Bien, tu sais, je me suis rendu à 39 ans, là, avant de pouvoir avoir ma subvention à l'établissement. Et je pense, à ce niveau-là, qu'il va... bien, il faudrait essayer de faciliter, là, les subventions, parce que souvent les... bien, la plupart des producteurs...

Bien, la relève, aujourd'hui, ils ont de la formation, ils ont tous des qualifications, mais souvent c'est juste une question de... Il faut qu'ils conservent un emploi pour pouvoir démarrer, puis ce bout-là, là, ce n'est pas facile. Puis, dans toutes les productions, c'est toujours la même chose: quand ils arrivaient pour... bien, qu'ils arrivent au niveau de La Financière, bien, ils ont de la misère à avoir leurs subventions, même s'ils ont la formation et l'expérience. Mais, tant et aussi longtemps que la ferme ne peut pas prouver que le producteur puisse vivre de ça, bien, ils n'ont pas la subvention. Puis, je vais vous dire, il y a des producteurs que ça faisait 20... bien, 20 ans qu'ils étaient dans des productions puis qu'ils perdaient de l'argent à tous les ans. Mais, le jeune, lui, il faut qu'il prouve la rentabilité de son entreprise pour avoir le droit aux subventions. Il y a ça qu'il faut vraiment améliorer.

**(11 heures)**

Le Président (M. Paradis): M. le député de...

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Est-ce qu'il existe des associations de relève dans votre coin? Et puis est-ce qu'il y a des groupes-conseils aussi qui peuvent accompagner les jeunes dans leurs démarches?

M. Brien (Michel): Oui, il y a une association de la relève agricole en Estrie, je ne peux pas vous dire le nombre de membres, là, mais c'est sûr qu'aussi on a un syndicat de gestion qui peut aider aux transferts de ferme puis aux jeunes à démarrer, là, avec leurs entreprises.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): S'il y avait quelque chose à améliorer, ce serait à peu près... ça serait quoi au juste, là, si vous pouvez cerner quelque chose de précis, là?

M. Brien (Michel): C'est vraiment l'aide financière, qu'elle puisse être disponible au départ, parce que tu as beaucoup d'investissement à faire, puis souvent tout est conditionnel à ce que tu puisses vivre de l'agriculture pour avoir tes subventions. Ça fait que ce n'est comme pas toujours facile. C'est peut-être un assouplissement à ce niveau-là qui serait nécessaire.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Vous avez parlé beaucoup... bien, pas beaucoup, mais vous avez parlé de l'article 59, la construction en zone agricole. Je trouve tellement que... Moi, je proviens d'une petite municipalité puis je trouve que c'est un problème que toutes les petites municipalités vivent aujourd'hui. Quand ils veulent un peu prendre de l'expansion en zone agricole, c'est un problème. Nos enfants qui proviennent du monde rural et qui ne veulent pas nécessairement être un agriculteur peuvent s'installer chez nous quand même. Mais, si on ne leur permet pas de s'installer chez nous, ils s'en vont s'installer en ville.

Toutes les villes n'ont aucun problème à faire de l'expansion. Allez dans toutes les grandes villes, ça construit à la journée longue. Mais, nous autres, dans les petites municipalités, pour construire une maison ou deux par année, des fois ça peut aller jusqu'à 10 maisons, c'est tout un problème et tout un combat. Alors, je trouve que... Vous avez dit que vous aviez réussi à faire en sorte de permettre des constructions. C'est quoi, votre recette?

M. Brien (Michel): Mais, en Estrie, toutes les MRC ont fait ce travail-là avec l'UPA, avec la commission, et la dernière, c'est Memphrémagog qui sont en train de compléter le travail. Et je trouve ça le fun parce que, pour chaque municipalité... Juste comme nous, Racine, tu sais, c'est 100 droits de construction de plus dans la municipalité. Puis je pense que c'est un travail que toutes les municipalités, toutes les MRC au Québec devraient faire, ils devraient s'assire avec l'UPA, la commission et faire une entente avec l'article 59 pour permettre des droits de construction en zone agricole.

M. Grondin: Je vous...

Le Président (M. Paradis): Peut-être... M. le député de Beauce-Nord, si vous permettez. Vos petits producteurs maraîchers, là, qui s'installent comme tel, est-ce qu'ils ont les autorisations de la CPTAQ? Est-ce qu'ils peuvent...

M. Brien (Michel): Il y a des secteurs... Bien, il y a des secteurs, justement, qui permettent ces petits producteurs là, et, dans la démarche, on a un peu tout prévu ça dans ce dossier-là.

Le Président (M. Paradis): Ça va. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Alors, pour vos marchés publics, je trouve ça fantastique. J'imagine que vous en avez parlé à la CRE de l'Estrie pour avoir un support.

M. Brien (Michel): C'est... Oui.

M. Grondin: Parce qu'ils ont des fonds.

M. Brien (Michel): Mais ça reste que c'est toujours... Ce n'est pas toujours facile. Puis, encore là, il y a des programmes aussi que, mettons, c'est 50 %, il faut que le marché fournisse 50 % puis... Tu sais, ce n'est pas toujours... Puis souvent les marchés comme tels, c'est tous des organismes à but non lucratif puis ils n'ont pas d'argent. Puis aussi la plupart des producteurs qui sont membres puis qui vont à ces marchés-là, eux non plus n'ont pas beaucoup d'argent, et, à ce niveau-là, il faut... Pour maintenir ces marchés-là, ça va prendre une aide, là...

M. Grondin: Puis l'autre que je vous ai entendu, que je trouve formidable, c'est votre vision vers l'énergie verte avec les déchets des plastiques. J'espère que vous ne lâcherez pas ce morceau-là.

M. Brien (Michel): Non, il faut absolument...

M. Grondin: Puis essayez de le communiquer aux autres comtés, qu'on travaille là-dedans.

M. Brien (Michel): Mais je pense... régionalement, je pense qu'il y a un gros travail à faire avec ça pour pouvoir tout récupérer ça puis... parce que... Mais, tu sais, ça se transforme soit pour le chauffage ou carrément en diesel. Ça prend juste la machine, puis c'est parti. Et un peu de sous.

M. Grondin: Félicitations!

Le Président (M. Paradis): Juste une question. Tantôt, moi, il y a un commentaire qui est assez percutant de la part de M. Tétreault. Vous avez dit: Dans la production du boeuf, le ministère avait une vision jusqu'au début des années 2000, puis, après les années 2000, il a fermé la télévision. C'est quoi...

M. Tétreault (Jean): Je dirais, peut-être, c'est venu suite aux restrictions budgétaires. Comme le groupe précédent a dit, en Estrie, on a vu partir les employés avec une longue expérience un après l'autre.

Le Président (M. Paradis): Vous parlez des bureaux régionaux?

M. Tétreault (Jean): Oui. Bien, il y avait les bureaux locaux, puis, en Estrie, il y a eu des regroupements, en fait c'est le bureau régional qui regroupe le local pour la majorité de la région. Il reste quelques bureaux locaux, mais la majorité, c'est rendu... c'est le bureau régional qui fait le local. Mais on perd des... au niveau régional, tu perds des spécialistes, puis c'est là que... Ces spécialistes-là, il y en a qui avaient vraiment un amour pour la production, puis ils voulaient que les producteurs réussissent à s'en sortir, et à être plus performants, et tirer... En étant plus performant, tu tires plus de revenus du marché.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui, M. le Président. Dans la même ligne de pensée que vous, M. Tétreault a dit: Plus de vision, puis il y a quelque chose que j'ai mal saisi: Plus de conseil neutre. Qu'est-ce que c'est, ça?

M. Tétreault (Jean): Le conseil neutre, c'est en référence à ce qui... On voit ce qui s'en vient aussi dans... C'est déjà parti dans le bovin laitier, dans le bovin de boucherie, ça s'en vient aussi, ce qu'on appelle la génomique. Puis c'est principalement ceux qui veulent nous fournir ces services-là de génomique qui permettent, disons, à accélérer... avec l'ADN, de voir si les animaux sont performants dans certains secteurs ou si, ces lignées d'animaux là, on peut... on les oublie parce qu'ils ne sont pas performants. Mais c'est des compagnies, c'est des multinationales, Merial, Pfizer, qui veulent s'emparer de ça, parce que c'est quand même technologique, mais, eux autres, ils arrivent, ils disent... Ils ont fait une recherche, mais ils sont là pour vendre leurs produits.

Tandis que, quand je dis «un conseil neutre», ça prend... Parce que, quand on parle de génomique, moi, j'en suis un bout, mais, quand c'est des spécialistes, des doctorats, puis tout ça, des fois ils te perdent, là, dans le technique, ça nous prend quelqu'un qui puisse nous l'expliquer puis comment se servir de ces techniques-là, pas juste le vendeur du service.

Le Président (M. Paradis): Ça va, M. le député de Montmagny-L'Islet? Oui. M. Brien, vous voulez compléter?

M. Brien (Michel): Oui. Au niveau conseil neutre, c'est bon pour tous les genres de services, même chose au niveau de l'alimentation des bovins, porcs, laitier et même chose pour les conseils au niveau fertilisation. C'est important de garder des gens neutres, des agronomes neutres, parce que la plupart des agronomes ou des techniciens qui viennent nous visiter à la ferme, ils ont des choses à nous vendre. Et ce n'est pas toujours... Ils ne veulent pas toujours juste notre bien, mais ils veulent nos biens aussi. Ça fait que disons qu'il y a des fois des choses qui pourraient être utilisées pour améliorer la situation financière des fermes, mais, eux, ils sont là pour vendre un produit, puis des fois ce produit-là, il ne viendra pas toujours améliorer la situation financière des fermes.

Une voix: ...

M. Brien (Michel): Ils vont améliorer, c'est ça, leur situation, mais pas nécessairement celle des fermes.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord, il faut demander la parole, s'il vous plaît.

M. Brien (Michel): Et c'est pour ça que c'est important d'avoir des agronomes, des techniciens au niveau des MAPAQ... au niveau du ministère puis, au niveau des organismes, avoir des organismes comme les conseils en gestion, les agronomes neutres, pour aider aux producteurs, des fois, à faire... bien, faire attention puis pas... En tout cas, des fois, il faut faire attention dans les achats qu'on fait dans les fermes.

Le Président (M. Paradis): Merci beaucoup. M. Brien, M. Tétreault, on vous remercie de votre présentation, de vos propos.

À ce moment-ci, nous invitons l'Union des producteurs agricoles de Sawyerville à bien vouloir s'approcher. Et je suspends les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 9)

 

(Reprise à 11 h 15)

Le Président (M. Paradis): La commission reprend, à ce moment-ci, ses travaux et accueille l'Union des producteurs agricoles de Sawyerville, représentée par M. Doyon et Mme Martel Bégin. S'il vous plaît, en vous présentant, suivant vos types de production, occupation, etc., et présentez-nous votre mémoire. Bienvenue à la commission.

Syndicat du secteur de l'UPA de Sawyerville

Mme Martel Bégin (Lynne): M. le Président, mesdames messieurs, bonjour. Alors, tout d'abord, je me présente, Lynne Martel Bégin, présidente du secteur de Sawyerville. Je suis une productrice agricole depuis 32 ans. Nous sommes présentement, moi et mon conjoint, en processus de transfert à notre fils aîné. Il sera la quatrième génération sur la ferme chez nous. Je veux aussi... Bien, notre entreprise est spécialisée en laitière et forestière, comme j'ai dit tout à l'heure.

Et je veux également vous présenter mon collaborateur, M. Antoine Doyon, producteur de veau de grain dans notre secteur aussi, à qui je vais céder la parole un petit peu plus tard.

Notre syndicat, à Sawyerville, regroupe 11 municipalités. Je vais... je n'ai pas besoin de les mentionner, vous les avez dans le mémoire, de toute façon. En 2004, l'UPA de Sawyerville comptait 280 fermes, le taux d'adhésion était de 95 %. En juillet 2011, notre secteur compte sensiblement le même nombre de fermes, là, c'est-à-dire 279, et le taux d'adhésion volontaire est passé de 95 % à 99 %.

Dans notre MRC, celle du Haut-Saint-François, on peut observer un déclin du secteur agricole. En 10 ans, la superficie en culture a diminué de 21 %. Ça, c'est une perte, là, de 5 976 hectares. Quand on pense à ça, la question qu'il faut se poser, c'est: Que dire du garde-manger des Québécois si la tendance se poursuit à plus long terme?

L'UPA de Sawyerville soutient votre démarche présentée dans le livre vert Donner le goût du Québec dans la mesure où elle reflète notre vision sur la future politique agricole et agroalimentaire du Québec. Le pouvoir de se nourrir repose sur une agriculture réalisée par une multitude de fermes ancrées dans toutes les régions du Québec, ainsi fournissant à la population des aliments sains, produits dans une perspective de développement durable et d'équité.

Il faut placer au centre de la politique le producteur agricole. Ces gens veulent produire des aliments sains et de qualité, mais ne croyez-vous pas qu'il faut les soutenir et leur donner les moyens de le faire? Lorsque j'ai accepté le poste de présidente au sein de mon secteur, d'envisager devoir visiter des producteurs et des productrices en détresse était loin de ma pensée. Permettez-moi de vous souligner un cas vécu. Imaginez-vous visiter un producteur qui s'écroule en pleurs devant vous, et je le cite: J'ai honte, je ne sais plus quoi faire, je suis en train de perdre ma ferme. Que lui auriez-vous répondu ce matin-là? Malheureusement, c'est la réalité de beaucoup de producteurs présentement au Québec.

Nous sommes à l'heure de faire des choix. Deux options s'offrent à nous pour voir la lumière au bout du tunnel. Est-ce qu'on joue à l'autruche, ne rien faire, perdre notre agriculture québécoise, en fait perdre notre autonomie alimentaire, ou l'idéal serait de créer un genre de partenariat, les producteurs agricoles, l'UPA, le consommateur et, bien entendu, le gouvernement, un partenariat à court, moyen et long terme qui... dépendamment du contexte et de l'environnement, où tous nous serions gagnants?

Cela étant dit, l'accréditation unique est souvent... est un soutien et une force pour les producteurs. Elle est également un outil de cohésion qui facilite la tâche de tous ceux qui y travaillent et transigent avec les agriculteurs. La force de l'UPA de Sawyerville, c'est d'être capable de guider, de supporter et mobiliser les producteurs pour accomplir des actions concrètes sur le terrain, et ce, au bénéfice de la communauté.

Le projet d'identification des puits démarré dans notre secteur en est un, bel exemple de mobilisation. Je vais refaire un petit résumé, même s'il est mentionné dans le mémoire. L'aventure débute lorsqu'un producteur, M. Marie-Antoine Roy, constate qu'une vingtaine de puits de ses voisins sont à proximité de ses terres agricoles. Il sait qu'il doit respecter des distances séparatrices lors des épandages, mais il y a un problème, le hic, c'est qu'il ne connaît pas où sont situés ces puits-là.

**(11 h 20)**

Donc, en 2001, le projet pilote de notre secteur de base permet d'identifier, à ce moment-là, 100 puits dans la municipalité de Newport. Trois ans plus tard, grâce au soutien financier du CDAQ, l'UPA régionale investit une ressource et forme un comité en agroenvironnement: 2 500 puits sont identifiés dans la région de l'Estrie à ce moment-là, dont 335 sur notre territoire. Cela démontre bien l'importance de maintenir l'accréditation unique.

Au Québec, c'est maintenant 10 000 pancartes bleues que l'on peut apercevoir lorsqu'on sillonne les routes dans nos campagnes. Le projet a même débordé aussi en Ontario. L'identification des puits évite de contaminer accidentellement les sources d'eau potable, rend plus sécuritaires les épandages d'engrais et de pesticides. Ce projet contribue à la qualité de vie en milieu rural.

Née et grandi à la ville, j'ai entendu toutes sortes de propos concernant l'UPA: la grosse UPA, le monopole de l'UPA, etc. Je crois souvent que c'est par manque d'information. J'en suis une preuve vivante, au début des années quatre-vingt, lorsqu'on a acheté la ferme de mes beaux-parents, si on peut dire ça, j'étais un peu anti-UPA. J'étais contre, en fait, l'UPA, contre ses valeurs et tout ce qu'elle préconisait. J'ai décidé de m'informer, d'assister aux réunions, de m'intéresser justement à ce qui se passait là, puis finalement, bien, je me suis impliquée. Cela m'a permis de comprendre tout le travail qui peut se faire pour promouvoir, pour défendre, pour développer les intérêts économiques, sociaux et moraux de tous les producteurs et les productrices agricoles du Québec. Maintenant, je comprends plus... En fait, je comprends qu'il est essentiel de maintenir une accréditation unique. L'organisation a cette capacité de soutenir, d'orienter et d'aider les producteurs sur le terrain, peu importe sa production, peu importe la grosseur de la ferme.

Merci de votre écoute. Sans plus tarder, je vais passer la parole à M. Doyon.

Le Président (M. Paradis): M. Doyon.

M. Doyon (Antoine): Bonjour. M. le ministre, M. le Président, et chers... les députés, et mesdames et messieurs, ça me fait plaisir aujourd'hui de venir vous parler un peu de... vous parler de ma ferme pour commencer puis, après ça, de la production en général.

Pour ma part, j'ai rentré en agriculture par accident. J'ai été réparer la couverture de mon oncle qui était vieux garçon, puis je travaillais sur la construction, puis il m'a offert sa ferme, j'étais sur le toit de la grange. J'ai fait un... Je lui ai donné un «bill» de 100 $, puis on a fait un contrat en arrière d'une feuille de calendrier. C'est de même qu'a commencé l'aventure.

J'ai séparé une société, c'était une société, on l'a séparée. Mon oncle s'est reconstruit au côté, mon autre oncle. Et je suis devenu producteur laitier en 1976, la veille qu'on coupe les quotas de 20 %. J'ai compris ce que c'était, un syndicaliste, et je me suis impliqué tout de suite au début. Et, en 1980, lorsque, le programme diversification de l'agriculture au Québec, Nourrir le Québec, on a lancé le veau de grain, j'ai été un des premiers à embarquer, avec une personne... un personnage de votre comté, monsieur... -- ça va me revenir, là, tout à l'heure, son nom -- mais où est-ce qu'on a parti la production de veau de grain au Québec. Le programme était... il était juste pour l'Estrie et le Lac-Saint-Jean. On a démarré la production dans aucune connaissance de cause, avec des bâtiments qui étaient inadaptés aussi.

Ça fait 31 ans que je suis en production, je suis encore là. J'en ai vu du monde arriver puis partir à cause que la... les difficultés qu'on rencontrait dans une nouvelle production. Pour ma part, aujourd'hui, je souhaite vous passer un message très important, une ligne directrice qui devrait, il me semble, guider toutes vos décisions dans le domaine de l'agriculture: Arrangez-vous pas pour viser le noir et tuer le blanc. Et là je m'explique.

Quand on fait des programmes puis qu'on veut faire des économies, qu'on vise... qu'il y a trop d'argent qui a été donné dans l'assurance stabilisation, qu'on ne va pas... On n'étudie pas à fond ce qui s'est... l'effet que ça va avoir sur l'ensemble des producteurs, ce qui fait... C'est qu'on veut protéger les petites entreprises, et c'est tous ceux-là qu'on fait mourir et qu'on a fait mourir.

La solution pour ça, c'est de consulter les producteurs avant de modifier les programmes ASRA. Il aurait fallu qu'ils soient consultés jusqu'à la base. Il faut analyser les impacts de chaque changement avant d'appliquer. Et je ne suis pas en train de vous dire de régionaliser les critères, nécessairement. Parfois, ça pourrait être pertinent, mais ce n'est pas la solution idéale. Je peux vous donner un exemple concret.

Je suis un producteur de veau de grain en Estrie, et, depuis deux ans... Quand on a eu le nouveau modèle, on a inséré, à l'intérieur du modèle, les cultures associées et on a presque doublé la taille du modèle. Mon entreprise était comme le modèle existant, 458 veaux, je produisais 458 veaux. On l'a monté à 700 quelque chose, 738, je pense, et on m'a attribué 79 hectares de maïs-grain. À Saint-Isidore, il gèle le 9 septembre, le 4 au 9 septembre et des fois le 6, 7 de juin; le maïs-grain, là, on n'en cultive pas beaucoup. On est dans les côtes, sur le bord de la frontière américaine. En plus, c'est un village qui n'a même pas de route numérotée. Et le maïs nous coûte beaucoup plus cher parce qu'on est loin, et je suis obligé de soutenir le même coût de production qu'un producteur qui est dans la Montérégie. Moi, quand je me suis... Puis, tous les producteurs, que ce soient les producteurs de porc, de bovins et d'agneau, quand on s'est assurés à l'assurance stabilisation et qu'on a fait nos prêts à La Financière en même temps, on nous a fait des prêts avec un modèle qui nous donnait tel revenu selon notre coût de production. Mais les critères des cultures associées n'étaient pas là. Aujourd'hui, je me réveille avec des prêts qu'il faut que je paie, mais j'ai des cultures associées qui font que ça a coupé mes revenus de 50 %. Ça fait qu'on se retrouve avec une ferme qui est en difficulté.

Tout à l'heure, vous parliez des programmes d'adaptation avec M. Marcoux. Je suis une personne qui a appliqué au programme d'adaptation au mois d'avril. Jeudi passé, on a eu la première rencontre multidisciplinaire. Pour faire ça, là, il faut tout faire l'analyse, et les syndicats de gestion, ils ont beaucoup de travail, avant que tout ton dossier soit monté puis soit présenté, on est à la première rencontre, et ça va se terminer autour du 20 mai, je pense. Là, on a un petit investissement, là, de changer des fans pour améliorer l'efficacité énergétique, là, mais c'est... il va venir à peu près 4 000 $ de ça, ce n'est pas ça qui relance, mais il faut que j'en mette autant, là, même si je suis dans une zone déstructurée comme le Haut-Saint-François.

Ça fait que ce n'est pas ça qui va relancer l'agriculture. Ça aurait été pas mal plus bénéfique que La Financière nous laisse l'argent dans le veau de grain. Parce que là, cette année, c'est nous qui faisons un chèque à La Financière. Il faut que je retourne 53,40 $ par veau que j'ai produit l'an passé. Ça fait que ce n'est pas là... ce n'est pas avec ça qu'on va donner des liquidités aux producteurs.

Ces programmes-là, les programmes de l'ASRA, ça avait été fait pour des productions sans sol, et là, aujourd'hui, avec tous ces changements-là, on va déplacer la production indirectement. Là, si ça continue, on va déplacer les productions vers le centre. Et, en région, qu'est-ce qui va nous rester? Bon, la petite agriculture, faire des légumes, aller au marché. J'en suis un, là, depuis...

Ça fait 30 ans que je vends du veau aux consommateurs. J'ai été membre fondateur des Ami-e-s de la Terre de Sherbrooke, je sais c'est quoi, vendre des produits aux petits paquets, là, ce n'est pas avec ça qu'on réussit à vivre. Je passe à peu près 10 % de ma production dans ça. Mais, moi, je suis obligé d'avoir les mêmes permis que Metro dans son magasin, je paie le même prix, là. Je suis obligé d'avoir un permis pour vendre. Si je fais des... je vais à des occasions pour faire des dégustations, je suis obligé de reprendre un autre permis. Les assurances responsabilité nous coûtent 150 $ par année de plus parce qu'on va avec du public, qui rajoute à nos fermes. Tout ça fait qu'on est obligés aussi à rencontrer les même normes que n'importe quel abattoir, qu'Olymel, là. Moi, je suis obligé de rencontrer les mêmes normes au niveau sanitaire, là. Je suis obligé de suivre des cours. Tout ça, on l'a fait, mais ce n'est pas avec ça qu'on va réussir à garder nos villages ouverts.

Chez nous, là, le village, il a eu un méchant coup, là, on a perdu un gros producteur de boeuf. Bon, il n'a pas fait faillite, il a remis ses clés à la banque. Là, c'est un producteur qui va faire du foin. Bien, il va faire du foin, ça n'aura pas les revenus, là. C'est quelqu'un qui a de l'argent qui a acheté les fonds de terre. Il avait 600 acres à peu près avec deux parcs d'engraissement puis deux maisons. Tout ça se retrouve avec quelqu'un qui ne va retirer des revenus que de la vente du foin. Ça ne fait pas un client à la coop.

**(11 h 30)**

Notre coop -- j'étais administrateur à la coop -- cette année, on a dû se résigner à se fusionner avec la coop de Coaticook mais par absorption. Vous savez, ce mot-là, ce n'est pas très populaire. «Absorption», tu sais, ça veut dire qu'on s'est fait avaler. On n'avait plus le choix. C'est le seul commerce qui reste dans le village. Il y a une petite accommodation, deux petits restaurants, deux scieries qui viennent de reprendre, là. Ils avaient fermé, mais ils ont repris, là.

Ça, si on ne fait rien... Puis notre village, c'était l'agriculture. Si on ne fait rien, là, pour maintenir les producteurs de boeuf, parce que c'est presque tous des producteurs de boeuf qui restent... On n'avait plus de producteur de lait, on n'a même aucun producteur de porc, là; il y a une jeune fille qui a décidé de reprendre et de racheter du quota puis repartir dans le lait. C'est tout à son honneur, mais, quand j'ai acheté ma ferme, on était 38 producteurs de lait à Saint-Isidore, puis là, aujourd'hui, il en reste un.

Ces programmes d'assurance stabilisation, c'est sûr que, quand ils se trouvaient à donner un peu de -- on va dire un mot en anglais -- «gravy» au Centre-du-Québec, au... Mais on n'était pas jaloux de ça, là. Nous autres, ça couvrait notre coût de production. Parfois, on réussissait à battre le modèle, parce qu'on était efficaces au niveau de la mortalité. Mais aujourd'hui, avec les mesures d'adaptation, ils ont remis, les producteurs de Saint-Hyacinthe, leurs compteurs à zéro, puis la Montérégie, mais le reste, c'est des moins que vous nous avez obligés d'avaler.

C'est très difficile. Les producteurs, ils n'ont pas de moral. Cette année, ils ont un petit regain de pep parce que, les veaux d'embouche, ils ont eu des prix raisonnables dans les encans spécialisés. Mais, mais qu'ils reçoivent leurs assurances stabilisation, je vais vous voir que le moral va leur descendre. Parce que, moi, les modèles, je les ai vus, là, puis je connais ça. Quand on a fait le modèle veau de grain, c'est moi qui l'ai négocié avec les études économiques, ça fait que je connais ça, les modèles d'assurance stabilisation. Puis j'ai été enquêté puis je peux vous dire que les enquêtes sont bien faites. Tu sais, on n'a rien à dire là-dessus. Mais c'est quand on insère des nouveaux critères dans un modèle, ça change tout, et il faudrait qu'on réfléchisse beaucoup quand on fait ça.

Une autre chose, c'est quand on parle de mesures d'adaptation. Moi, dans mon idée à moi, là, les mesures d'adaptation, ça vient avant les coupures, qu'on ait le temps de s'adapter. Mais là, deux ans après, on n'est pas... on ne peut plus s'adapter, là, on est sur le respirateur. Ça fait que, si le gouvernement aurait mis les... nous aurait avisés des nouveaux modèles qu'on avait, qu'ils auraient mis les mesures d'adaptation avant, je pense qu'on ne serait pas là, ici, aujourd'hui. Pour ma part, c'est tout.

Le Président (M. Paradis): Ça va. Merci beaucoup de vos témoignages. On a pratiquement doublé le temps de présentation, là, ça fait que je mets les députés un petit peu en garde, je vais limiter le nombre de questions. Je n'ai pas voulu interrompre parce que le témoignage était intéressant. À ce moment-ci, M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Martel Bégin et M. Doyon. J'aurai une question pour chacun de vous deux. La première: Quand vous avez mentionné, sur 10 ans, moins 5 976 hectares de superficie cultivée dans le secteur que vous représentez... Quand on voit votre mémoire, ici, on voit 280 fermes qui ont passé, sur sept ans, de 2004 à 2011, à 275. Est-ce qu'on assiste à un phénomène comme il a été mentionné par un interlocuteur avant vous, où il y a moins... il y a autant de producteurs mais sur des plus petites surfaces, dans d'autres productions? Est-ce que c'est ça à quoi on assiste comme phénomène chez vous? C'est la lecture qu'on doit faire des deux données qui sont... une écrite puis l'autre que vous nous avez transmise?

Mme Martel Bégin (Lynne): Oui. Oui. Puis la dernière donnée, fraîche d'hier, là, c'est 279 fermes sur notre territoire.

M. Corbeil: Donc, c'est presque équivalent...

Mme Martel Bégin (Lynne): C'est, bon an, mal an...

M. Corbeil: ...à ce qui était en 2004.

Mme Martel Bégin (Lynne): Exact, oui. Plus ou moins une ferme de moins, là.

M. Corbeil: O.K. Donc, vous voyez arriver des nouvelles productions, des nouveaux producteurs, peut-être plus jeunes aussi, mais dans d'autres choses que ce qui se faisait historiquement dans votre secteur.

Mme Martel Bégin (Lynne): Les productions principales restent quand même les mêmes, là. C'est peut-être des productions plus marginales un petit peu, ou maraîchères, là, qui commencent aussi dans notre secteur, aussi, là, mais, bon an, mal an, là, non, c'est sensiblement les mêmes productions.

M. Corbeil: Ma question pour M. Doyon, puis je l'ai posée à quelqu'un d'autre hier. On travaille dans un système de modélisation, et, vous le dites, vous avez été enquêté, c'est fait correctement, puis, dans votre présentation, vous plaidez pour de la modulation. Ce n'est pas pareil, produire un veau chez vous qu'à Acton Vale, par exemple. Moi, je pense qu'on devrait regarder dans le sens de la modulation, mais c'est comme tabou. C'est comme quelque chose qu'on ne devrait pas parler, parce que, la modélisation, c'est ça, la situation actuelle, puis il ne faudrait pas que ça change. Et j'ai entendu M. Saint-Pierre dire: Il faut arrêter de penser notre histoire comme s'il y avait un seul veau d'un seul producteur, dans une seule région. Il faut commencer à regarder pour la modulation.

Hier, il y avait un producteur de porc de Lanaudière qui nous parlait de modulation mais qui voulait garder la modélisation. Et, vous, là, j'ai senti comme... je ne sais pas si c'est une invitation à la regarder ou quelque chose que... Je voudrais vous entendre là-dessus. Parce que, moi, ça ne me rentre pas dans la tête, ce n'est pas vrai qu'au Témiscamingue, chez vous, au Saguenay--Lac-Saint-Jean, faire un veau, faire un porc, ça représente les mêmes coûts.

Le Président (M. Paradis): M. Doyon.

M. Doyon (Antoine): Il y a deux choses. Si on garde la modélisation comme c'est là, il faut qu'on ait des programmes adaptés pour compenser les coûts supplémentaires que les producteurs ont. On va parler... Comme l'ancien programme du Nid-de-Corbeau, si vous vous souvenez de ça, transport des grains, il y avait des programmes d'aide pour les régions. C'est des choses comme ça qu'il faudrait qu'on fasse. Soit ça ou l'autre. Mais l'autre, c'est sûr que... c'est où qu'on trace la ligne? C'est là qu'est le problème. C'est où est-ce qu'on trace la ligne que ça change le taux de coût de production. Ce bord-ci de la clôture, c'est 2,10 $, de l'autre bord, c'est 2,20 $. Il dit: Non, non, moi, c'est la même affaire que toi, là. Et là on le voit dans l'assurance récolte, ce système-là où est-ce que ça fait beaucoup d'insatisfaction, avec les stations de météo, là, dire: Regarde, chez nous, il pleut, puis, de l'autre bord, c'est... C'est plus ça qui est difficile. De le dire, c'est facile, mais de l'appliquer, ça devient compliqué. Là, si on fait d'autres programmes pour soutenir les producteurs parce que leurs coûts de production sont plus élevés, je pense que ça serait plus facile.

M. Corbeil: O.K. Donc, ce que je décode, là, c'est qu'on devrait garder le système qui fonctionne sur la base de modèle, un modèle unique...

M. Doyon (Antoine): Oui.

M. Corbeil: ...et qu'on ajoute de la modulation selon certaines...

M. Doyon (Antoine): Selon certains critères où est-ce que les grains... où le transport est plus dispendieux. C'est sûr que, moi, quand que je pars avec 10 veaux de grain, comme je fais à toutes les semaines, presque... Je viens livrer au Centre-du-Québec. Bien, moi, quand c'est La Plaine qui achète mes veaux de grain, là, ou bien donc Forget, là, à Terrebonne, je pars de Saint-Isidore, là, ça me prend une journée pour venir mener mes 10 veaux. Puis ça, c'est quand je suis chanceux de traverser la ville de Montréal dans le mois d'août, à plus 30°, là, ça fait que tu es obligé d'arrêter, tu ne sais pas si les veaux vont être morts mais que tu arrives là-bas. Aujourd'hui, on fait affaire avec un autre... On dumpe nos veaux à Saint-Théodore-d'Acton, puis un autre transporteur les prend puis... Parce que, nos veaux, nous autres, dans le veau grain, on a cinq gros abattoirs qui achètent, ça va partout au Québec.

Puis une chose que je voulais rajouter, si vous permettez...

M. Corbeil: Oui, oui.

M. Doyon (Antoine): Dans le veau de grain, ça fait cinq, six ans qu'on a un fonds en surplus à La Financière. Puis là, cette année, avec ce que... l'argent qu'on va retourner, là, vous allez pouvoir nous refaire des prêts.

M. Corbeil: Je veux laisser la parole à mon...

Le Président (M. Paradis): Oui. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, pour l'annonce de prêts.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Martel Bégin, M. Doyon. J'ai bien senti, notamment M. Doyon, pratiquement votre cri de détresse, hein? Mme Martel Bégin, 5 000... ça m'a frappé, là, 5 967 hectares de perdus, pourquoi?

Mme Martel Bégin (Lynne): En friche. Oui, c'est ça, 5 976 hectares qui sont présentement, là... Quand on se promène dans la MRC, là, c'est en friche un peu partout, c'est à l'abandon.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K., laissés à l'abandon.

Mme Martel Bégin (Lynne): Oui.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K., pas perdus pour des...

Mme Martel Bégin (Lynne): C'est des superficies en culture qu'on a de perdues, oui.

Le Président (M. Paradis): Excusez, ils étaient dans quels types de culture avant, ces superficies-là?

Mme Martel Bégin (Lynne): Là, je ne pourrais pas tous vous dire. Mais ce n'est pas tous... des abandons de culture aussi. M. Doyon, il a quelque chose à rajouter là-dessus, là, je vais lui laisser...

Le Président (M. Paradis): M. Doyon.

**(11 h 40)**

M. Doyon (Antoine): Bien, je vais prendre mon village, il n'y en a pas, de terre en friche, dans mon village. On a regardé pour en trouver. Les groupements forestiers sont bien... sont dynamiques aussi, puis on les a toutes reboisées. Ça fait que ce n'est plus des terres qui sont disponibles pour l'agriculture. Ceux qui sont en friche, on peut quand même retourner les chercher, là, mais la majorité, hein, sont en épinettes.

Mme Martel Bégin (Lynne): Est-ce que je peux rajouter autre chose?

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Non, elle voulait parler, madame.

Mme Martel Bégin (Lynne): Est-ce que je peux rajouter là-dessus?

Le Président (M. Paradis): Oui.

Mme Martel Bégin (Lynne): C'est que tout à l'heure on parlait avec M. Marcoux, la multifonctionnalité, tout ça. Dans la MRC, on l'a fait, ça, l'exercice de partir du début de la municipalité, aller à la fin, avec le Chemin des Cantons, justement pour essayer de les cibler, puis on s'est rendu compte qu'effectivement il y en avait beaucoup, de terres en friche, qu'on peut récupérer. Le problème de ce programme-là... C'est un bon programme en soi, sauf que c'est la provenance de l'argent, je pense, qui fait un petit peu, là, la faiblesse du programme. C'est qu'on ne le prend pas au niveau du Tourisme mais plus au niveau de l'Agriculture. Peut-être que, s'il était pris dans le ministère du Tourisme pour aider justement au tourisme, il serait probablement encore meilleur, le programme, si je peux dire ça comme ça.

Le Président (M. Paradis): Oui. M. le député de Kam-Témis.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci. Vous avez déclaré tantôt que vous étiez une anti-UPA, et je comprends que vous êtes une convertie. Pourquoi étiez-vous anti-UPA?

Mme Martel Bégin (Lynne): Bien, vous savez, moi, je viens de la ville, je ne venais pas de la campagne, puis tout ce qu'on entendait ou que je pouvais lire dans les journaux, que je pouvais entendre à la télévision, les gens qui contestaient l'UPA, des fois des producteurs aussi, là... Puis, même encore aujourd'hui, quand je me promène avec les producteurs puis que j'en parle, il y a des producteurs, des fois, qui sont contre l'UPA, puis, quand tu leur expliques puis quand tu leur montres tout le travail qui a été fait puis les bien-fondés, les gains pour les producteurs, bien, des fois, ils changent un petit peu leur fusil d'épaule. Ça fait que je pense que c'est vraiment un manque d'information qui fait qu'on entend souvent, comme je disais tout à l'heure: la grosse UPA, le monopole. Mais je pense que ça a sa raison d'être. L'accréditation unique est importante pour l'agriculture du Québec.

Le Président (M. Paradis): Oui, allez-y.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci. Par rapport au livre vert en soi, j'ai bien noté, vous avez dit: Bien, il faut mettre le producteur au centre, au coeur de la future politique agricole. Bien sûr que je pense que le livre vert ne l'exclut pas, mais on voit bien qu'il y a une orientation qui est plus en aval, c'est-à-dire plus près d'où il se consomme, pour qu'il y ait un ajustement. Sur le fond, est-ce que vous avez quand même... Qu'est-ce que vous pensez du livre vert à cet égard? Parce que ce n'est pas tout à fait ça, là, qui est l'axe central.

Mme Martel Bégin (Lynne): Bien, moi, la perception que j'ai du livre vert, ce que j'en ai compris, là... Je ne suis pas une pro dans tout ça, là, mais, quand je dis qu'il faut mettre plus le producteur que le produit au centre, c'est... Je vais vous donner un exemple. Moi, je peux être un producteur de... faire de la relish pour les hot-dogs, mais je peux faire un produit de qualité, je peux faire un produit sain pour la santé, mais je peux acheter mes cornichons ou mes concombres à l'extérieur du Québec pour le faire. Ce que je trouve important, c'est que les produits soient du Québec, le produit premier, si on veut, le concombre, il faut qu'il vienne du Québec et pas d'un autre pays. On peut faire des produits sains, mais il faut le faire avec ce qu'on a ici, au Québec.

Le Président (M. Paradis): Ça va? M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. On va continuer sur les concombres. Moi, je...

Le Président (M. Paradis): Il faut qu'ils viennent de Saint-Marcel, là, moi...

M. Grondin: Écoutez, je connais l'agriculture un petit peu, mais je me dis: Les agriculteurs, on est tellement obligés de suivre toutes sortes de normes, que ça soit en santé animale, traçabilité, et tout ça, pourquoi qu'on exige tout ça aux producteurs? Puis là vous parlez des concombres, ils peuvent venir de n'importe où, mais il me semble que, quand on met un produit qui vienne en dehors de l'agriculture, tout devrait être marqué, on devrait avoir les mêmes exigences. Si le concombre, il vient de... s'il vient des Indes, on devrait le marquer sur le pot: Il vient des Indes. Il a été transformé au Québec, mais ce concombre-là, il n'a pas été cultivé de la manière du Québec.

Moi, je pense que, si on veut aller dans le sens, là, du livre vert puis dire: On va consommer Québec, bien, il va falloir être... il va falloir dire la vérité aux gens. Toutes les provenances de tous les produits, il va falloir qu'ils soient identifiés. Et je reviens toujours à mon affaire de tantôt, les produits qui rentrent ici, il faudrait qu'ils aient les mêmes exigences qu'on exige aux Québécois. Si on ne fait pas ça, le consommateur se sent un petit peu lésé, il dit: Ah! c'est comme d'autres choses, ils vont continuer à nous mentir. Moi, je pense qu'il faut dire la vérité, il faut que tout soit inscrit, ou on met un contrôle aux frontières pour dire: On garantit aux Québécois que les produits qui sont sur les tablettes, ils sont faits sur les mêmes normes que les produits québécois. Quand on va faire ça, là, pour moi, on va redresser bien des choses. Je ne sais pas si vous allez dans le même sens que moi.

Puis je... Monsieur, sur les veaux de lait, les veaux de grain, je veux dire, le problème que vous semblez soulever, c'est quand ils ont mis... l'ASRA a été mettre des sols avec la... votre production, avec les... pas juste la vôtre, là, mais toutes les productions. Parce qu'il reste que le maïs... Parce que je sais que des veaux de grain, c'est fait pas mal avec du maïs, là, le maïs est au même prix partout dans... Le maïs, c'est... Il y a juste le transport qui peut changer, parce que c'est un prix à la bourse, le maïs, alors on sait qu'il y a peut-être des fluctuations à cause du transport. Mais le gros de votre problème, est-ce qu'il part de quand on a rajouté des sols ou si c'est le prix des grains qui a changé?

Le Président (M. Paradis): M. Doyon.

M. Doyon (Antoine): C'est quand on a rajouté les sols. Écoutez, le 15 $, 20 $ de la tonne de maïs que je vais payer de plus... Souvent, aussi, ça va être à cause qu'on n'a pas les entreposages, quand on a un producteur qui produit 450 veaux par année, tu n'as pas des silos de 600 tonnes chez vous, là, tu as des silos de 80 tonnes, puis, tu sais, il faut que tu fasses venir à tous les mois, mois et demi du maïs.

Puis c'est surtout l'inclusion de nouveaux critères puis d'avoir aussi doublé... Quand tu doubles la production au niveau des charges fixes, ça change quelque chose, là. Diviser les charges fixes par 458 ou par 700 quelque chose, ce n'est pas pareil, par veau, là, ça fait une méchante différence, là.

Le Président (M. Paradis): M. Doyon, moi, j'ai compris que vous avez déjà participé à l'établissement, là, comme...

M. Doyon (Antoine): J'étais celui qui l'a négocié avec la... On était trois personnes, dont M. Raymond Lanctôt, le nom que je cherchais tout à l'heure.

Le Président (M. Paradis): Chemin Des Rivières.

M. Doyon (Antoine): Il y a Germain Lalumière.

Le Président (M. Paradis): Ça va. Qu'est-ce qui est arrivé, vous ne le négociez plus?

M. Doyon (Antoine): Non. À cette heure... Avant ça, bien, c'était... On avait négocié un modèle de production. On a établi un modèle, on a dit: Le modèle, dans le temps, c'était un veau de 320 lbs, c'était ça qu'on produisait en... 1980 qu'on a fait le modèle de production, puis on le gardait en moyenne 13, 14 semaines. Aujourd'hui, on fait un veau de 640 lbs, vivant, puis on le garde 26 semaines. Ce n'est plus le même veau, mais c'est parce que, le marché, on a fait qu'on a mis de la viande sur un veau holstein, qui fait qu'il est pas mal plus rentable pour le commerce d'avoir 350 lbs, 360 lbs de carcasse au lieu de 200 lbs. Tu manipules toujours la même carcasse, puis l'os n'a presque pas changé, là.

Ça fait que ça a été... Année après année, on a monté à 425, 475, 500, puis aujourd'hui on est rendu à la limite, là, de ces... 353 lbs, dépassé ça, ce n'est plus considéré comme... 401 lbs, ce n'est plus considéré comme un veau au niveau d'Agriculture Canada. C'est ça qui a fait que... l'évolution du marché qui a fait ça. Ça a été bénéfique qu'on augmente quand même le poids, mais ceux qui ont construit, dans les années quatre-vingt... Quand je faisais 500 veaux dans les années quatre-vingt, aujourd'hui j'ai été obligé de refaire une grange pour faire 458, construire une étable froide, c'est tout... La production, c'est une production qui s'est adaptée avec le marché.

Et, dans le veau de grain, on le suit, le marché. C'est une des seules productions où est-ce qu'on a mis des historiques de production trois ans avant que La Financière... quatre ans avant que La Financière le demande. Les producteurs, comme groupe, on s'est dit: Ça ne donne rien d'en rentrer 20 nouveaux quand on en meurt 20 par année puis on n'a pas de prix, on surproduit. On a un prix plancher, puis, si on n'obtient pas notre prix plancher, tous les producteurs qui ont vendu dans la semaine se partagent l'écart de prix, et on paie, ça peut être 2 $, 10 $, 20 $, 30 $. Mais on ne laisse pas flotter le marché parce que, si on le laisse flotter, quand ça part en descendant, le plus bas, c'est presque... ça descend tout le temps. Ça fait que...

Le Président (M. Paradis): Merci beaucoup de votre témoignage. Merci, Mme la présidente, également de vous être déplacée, là, et de venir nous informer des situations que vous vivez.

À ce moment-ci, j'inviterais l'Union des producteurs agricoles de Richmond à bien vouloir s'approcher. Et je suspends les travaux pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 49)

 

(Reprise à 11 h 53)

Le Président (M. Paradis): S'il vous plaît! M. le député de Montmagny-L'Islet, vous êtes toujours exemplaire, comme le député de Beauce-Nord.

À ce moment-ci, la commission reprend ses travaux et reçoit l'Union des producteurs agricoles de Richmond. M. Tremblay et M. Roy, s'il vous plaît, veuillez vous... Vous avez assisté aux autres présentations, là, vous vous présentez, vous nous dites dans quels domaines vous oeuvrez et vous faites la présentation au nom de votre groupement. Bienvenue.

Syndicat du secteur de l'UPA de Richmond

M. Tremblay (Laurent): Bonjour, M. le Président et membres de la commission. Je vous rassure tout de suite, ma présentation ne sera pas trop longue. Je me présente, Laurent Tremblay, producteur laitier, et de bovins de boucherie, et de grandes cultures. Je suis aussi maire de la municipalité de Val-Joli. Je suis aussi impliqué au sein de la Fédération des producteurs de bovins du Québec, division veau d'embouche. Je suis également administrateur du Club agroenvironnemental de l'Estrie. Je suis devant vous aujourd'hui en tant que président de l'UPA de Richmond.

Je suis accompagné de Martin Roy, producteur laitier et deuxième vice-président de l'UPA de Richmond.

Notre syndicat regroupe les producteurs et productrices agricoles des municipalités de Kingsbury, Melbourne, Ulverton, Windsor, Val-Joli, Richmond, Saint-Claude, Cleveland, Stoke, Saint-François-Xavier-de-Brompton, Saint-Denis-de-Brompton et Bromptonville.

La plus grande part de nos revenus agricoles de la région proviennent des productions bovines, porcines, laitières, ovins et acéricoles.

Le pouvoir de se nourrir. L'UPA de Richmond soutient la démarche représentée dans le livre vert Donner le goût du Québec dans la mesure où elle reflète notre vision de la future politique agricole et agroalimentaire du Québec. Le pouvoir de se nourrir repose sur une agriculture réalisée par une multitude de fermes ancrées dans toutes les régions, fournissant à la population des aliments sains, produits dans une perspective de développement durable et d'équité.

Nos producteurs agricoles contribuent à l'essor économique du Québec et à la vitalité de notre région.

Si l'accréditation unique permet de rééquilibrer les forces en présence, elle est également un outil de cohésion qui facilite la tâche de ceux qui travaillent ou transigent avec les producteurs agricoles.

L'UPA de Richmond est un outil de cohésion au bénéfice de sa communauté. Au fil des ans, le syndicat a permis aux producteurs agricoles sur son territoire de s'accomplir dans de grandes réalisations. Je vais vous en énumérer ici quelques-unes.

Prévention. Pour les familles de producteurs, la ferme est à la fois un terrain de jeu et un milieu de travail. Il y a trop d'accidents impliquant des enfants sur des fermes. L'UPA de Richmond a accueilli 80 enfants de l'école Arc-en-Ciel de Saint-François-Xavier-de-Brompton lors d'un atelier Sécurijours sur le terrain de balle et au centre communautaire de la municipalité, le 4 juin 2009.

Verglas. Durant la crise du verglas qui a frappé le Québec en janvier 1998, les administrateurs de l'UPA de Richmond, avec l'aide du MAPAQ, ont livré des génératrices et autres équipements aux fermes privées d'électricité. Rappelons que la panne dans ce secteur a duré quatre semaines.

Suite au verglas, l'UPA de Richmond a travaillé comme facilitateur dans la lutte qui a monopolisé des efforts du secteur sur plusieurs années, soit la ligne d'énergie électrique Hertel-des Cantons qui passait sur plusieurs terres agricoles. La collaboration UPA et Hydro-Québec a permis d'obtenir que dorénavant, lorsqu'il faut faire passer des lignes de transport électrique au bénéfice de toute la population, un représentant de l'UPA est présent sur le chantier afin de s'assurer que les impacts sur les terres agricoles sont les moins dommageables possible et que les producteurs touchés sont compensés adéquatement.

Réseautage. Chaque printemps, l'UPA de Richmond rassemble ses membres pour une partie de tire, à la fin du temps des sucres, dans le but de permettre à tous de se retrouver et d'échanger après une année de travail. Cet événement de réseautage nous est bien utile quand vient le temps de mobiliser notre monde.

Protection de l'eau potable. Comme l'UPA de Sawyerville, précurseur en la matière, l'UPA de Richmond s'est engagée à identifier de façon volontaire plusieurs puits d'eau potable sur les terres agricoles et chez les voisins de celles-ci afin d'éviter la contamination par inadvertance. Depuis 2002, 332 pancartes ont été installées sur le territoire.

Représentation. L'UPA de Richmond s'est impliquée au niveau aménagement notamment suite au suivi de la demande à portée collective, article 59 de la Loi sur la protection du territoire agricole. Nous avons d'ailleurs un représentant qui siège à la MRC du Val-Saint-François. En plus, deux représentants sont nommés au COGESAF, le Comité de gestion du bassin versant de la rivière Saint-François. Et finalement l'UPA de Richmond s'implique socialement, par exemple en encourageant financièrement la relève et en offrant de l'aide aux agriculteurs sinistrés pendant des incendies.

Toutes ces belles réalisations seraient plus difficiles si nous n'étions pas unis au sein d'une même organisation. Cela nous permet de travailler à conserver des fermes à dimensions humaines qui nous permettent d'occuper l'ensemble du territoire. Cela fait en sorte de stimuler l'économie locale tout en jardinant le paysage dans le respect de l'environnement, notre gagne-pain. Merci de votre écoute.

Le Président (M. Paradis): Ça va. M. Roy, est-ce que vous désirez ajouter quelque chose?

M. Roy (Martin): Bon. Ça fait pas mal le tour de notre présentation, de notre mémoire, mais je peux en rajouter un peu sur moi-même, là. Je suis membre de la relève agricole. Je suis membre de La Coop Fédérée. Cette année, en 2012, je suis récipiendaire de la bourse de la relève au niveau de ma coop. Je suis itou administrateur dans le Club Holstein de Richmond, puis je suis deuxième vice à l'UPA de Richmond.

Le Président (M. Paradis): O.K. Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue, MM. Tremblay et Roy, M. le maire.

Une voix: ...

M. Corbeil: Pardon?

Le Président (M. Paradis): ...deux chapeaux.

**(12 heures)**

M. Corbeil: Oui. Bien, il en a plusieurs, il a fait une présentation tantôt. Tout d'abord, puisque le mémoire en fait mention, chez vous, on parlait, en 2004, de 269 fermes et, en juillet 2011, de 256 fermes. Est-ce qu'on assiste à un phénomène similaire aux autres régions ou aux autres secteurs qui ont été présentés au préalable, c'est-à-dire la venue de nouvelles productions, de morcellements, des productions sur des plus petites superficies, ou si c'est relativement stable chez vous?

M. Tremblay (Laurent): Ce que j'ai remarqué, c'est quand même assez stable. On a quelques entreprises qui disparaissent, mais on en a d'autres qui prennent de l'expansion. De la multiplication de petites entreprises, dans mon secteur il y en a mais pas majoritairement. J'ai vu plus des producteurs prendre de l'expansion, des fois un producteur acheter le voisin. C'est ça qu'on voit. Des fois, ce n'est pas tout le temps ça qu'on souhaite, on veut rester, comme je le disais, à des dimensions plus humaines, ça fait que... Mais c'est ce qui se produit dans le champ aujourd'hui.

M. Corbeil: Est-ce qu'il y a un marché public dans votre secteur?

M. Tremblay (Laurent): Il n'y en a pas dans mon secteur, mais j'en... il y en a alentour de mon secteur, il y a celle de Racine, il y en a un à Sherbrooke, qui est juste au côté de chez nous, puis il y en un à Drummond, à Drummondville. Justement, à Drummondville, c'est là que je livre mes bouvillons, parce que, moi, je suis producteur vache-veau et je finis les bouvillons, et ils sont livrés à Drummondville. Je fais affaire avec un boucher que, lui, il représente... il a un comptoir au marché public de Drummond.

M. Corbeil: Le président de l'Association des marchés publics est justement installé au marché de Drummondville, c'est un pomiculteur de la région de Rougemont, que j'ai eu l'occasion de rencontrer et de visiter, de visiter son kiosque au marché public à Drummondville l'automne dernier. Avoir su que vous étiez dans ce coin-là, j'aurais été faire un tour.

Ça m'amène au livre vert, dans la deuxième orientation, qui est: Renforcer notre capacité concurrentielle. Dans l'objectif 3 du livre vert, on touche toute la question de favoriser la diversification de l'offre de produits mettant en valeur le potentiel bioalimentaire régional: «...la politique bioalimentaire privilégiera notamment -- c'est à la page 31 -- l'appui à la diversification et à la commercialisation en circuit court en région; l'appui au développement des secteurs en émergence [et] le soutien à l'essor d'entreprises de transformation de produits locaux et régionaux.» Est-ce que vous pensez qu'on est dans la bonne direction avec ces objectifs-là et cette orientation-là?

M. Tremblay (Laurent): Je crois que c'est une bonne orientation. Je vais faire un petit peu un parallèle, parce que j'ai deux productions, j'ai le bovin et j'ai le laitier, c'est complètement différent, là, à l'opposé, là. C'est beaucoup plus facile financièrement dans le laitier que dans le bovin. Dans le bovin, ce n'est vraiment pas facile, puis, c'est justement, j'ai eu cette idée d'essayer de viser le marché local pour essayer d'améliorer l'efficacité économique de cette partie de mon entreprise là. On ne va pas vraiment tant chercher plus monétairement dans le marché, quand même qu'on est local, mais par contre c'est beaucoup plus difficile. À long terme, j'espère que ça va être bénéfique pour mon entreprise que d'envoyer sur le marché régulier, mais pas... côté travail, c'est beaucoup, beaucoup... ça demande beaucoup d'heures, beaucoup d'implication, c'est très...

Quand, en tout cas, on compare les deux productions, des fois on a tendance à dire: Le boeuf va prendre une débarque, là, parce que c'est beaucoup d'ouvrage. Quand tu compares les deux productions... Tu sais, une production que tout est organisé puis tout fonctionne, c'est beaucoup plus facilitant pour le producteur. Parce qu'il ne faut pas oublier qu'on est des producteurs. Tu sais, partir, puis aller commencer à faire du porte à porte, puis essayer de vendre nos produits, puis vendre notre salade, comme on dit, là, c'est une autre game, ce n'est pas évident, puis je me dis: Des fois, je dis, j'aimerais bien ça que quelqu'un d'autre le fasse à ma place.

Mais, dans le boeuf, étant... je me disais: Je veux aller chercher un petit peu plus pour ce que je produis. J'ai dit: J'ai essayé cette lignée-là, ce tir-là, j'ai dit: il ne faut pas lâcher, ça fait quand même cinq ans que je vise le marché local. Je dis: Là, ça tend à vouloir déboucher, mais vraiment ce n'est vraiment pas facile puis ça prend... Si on veut aller dans ce sens-là, ça va prendre du monde alentour de la table pas à peu près, parce que c'est très... Quand tu as une plus grosse organisation, quand on parle, comme le laitier, qu'on fonctionne avec système de quotas puis... Tu restes chez vous, tu fais ton ouvrage, tu tires tes vaches, ça va bien. Mais, quand il faut que tu commences à faire du commerce, c'est une autre game.

M. Corbeil: Donc, vous êtes à même de... Vous êtes un témoin de l'effort qu'il faut déployer, le défi qu'il faut relever quand on passe de la production à la transformation, à la commercialisation et à la mise en marché, là. On a une plus-value, mais on a travaillé pour.

M. Tremblay (Laurent): Oui. Quand tu comptes le final, si tu mets toutes les heures travaillées en surplus, tu te dis: Ce n'est pas si tant intéressant que ça, là. Il faudrait justement qu'il y ait...

M. Corbeil: M. Roy veut rajouter là-dessus ou bien il veut nous parler de la relève?

Le Président (M. Paradis): M. Roy, oui.

M. Roy (Martin): Oui. Mais, du point de vue concurrentiel, on va chercher une diversification des produits, oui, mais est-ce qu'on amène réellement des revenus supplémentaires dans le monde agricole? C'est très nuancé puis c'est très faible, tu sais. Ce qu'on va remarquer, c'est des très jeunes motivés qui partent maraîchers. Mais ils ne pourront pas faire vivre une famille avec ça. Ils vont s'épuiser, ils vont se brûler. Il va falloir qu'ils changent carrément de stratégie ou, sinon, il va falloir qu'ils continuent à s'amuser avec ça puis qu'ils aient encore un revenu qui vient de l'extérieur. Et là, à ce moment-là, tous les programmes de La Financière agricole viennent de tomber. C'est soit que tu es producteur agricole ou soit qu'on ne t'aide pas. Puis là...

Ou, sinon, ce qu'on remarque beaucoup, ça va être des producteurs qui... c'est des personnes qui viennent de prendre leur retraite ou des préretraités qui commencent à s'amuser, tu sais. Ou ils vont commencer itou à offrir vraiment des produits de qualité, oui, ils vont amener des nouveaux produits, ils diversifient, mais ils ne vont pas vivre de cette production-là, ils vont réellement se trouver un divertissement, un loisir, une passion là-dedans, mais leur famille est déjà faite puis elle est déjà établie.

Ça fait que le nombre, oui, de producteurs n'a pas tant diminué que ça, mais ce qu'on a remarqué, c'est qu'on est rendu avec beaucoup de «gardeux» de chevaux qui ont... en fin de compte, qui ont des écuries. Là, on a vu apparaître beaucoup, là, de manèges intérieurs, des choses comme ça. Oui, c'est des producteurs, mais est-ce que c'est réellement quelque chose qui nous amène plus de nourriture sur les tables? Est-ce que c'est vraiment... qu'ils vont amener à faire travailler nos meuneries, tous nos fournisseurs d'intrants? Je ne suis pas certain.

M. Corbeil: Vous soulevez quelque chose d'intéressant parce que, dans l'objectif dans le livre vert, on parle de l'appui au développement des secteurs en émergence, et vous évoquez le terme «amusement», «divertissement», «passion», en tout cas vous avez utilisé plusieurs expressions, pour des gens qui auraient une vocation à temps partiel dans la production. Alors, est-ce que vous pensez qu'on fait fausse route dans cet objectif-là, ou si on pense qu'on pourrait les aider pour qu'ils passent de l'amusement à la profession, ou si c'est peine perdue? Puisque vous êtes de la relève, là, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Roy (Martin): Bien, présentement, quand je parle d'amusement ou de choses comme ça, la plupart des producteurs de petits fruits réussissent à pouvoir être rentables, car la plus-value est le plaisir qu'a le client à venir récolter les fruits, tu sais. Ils vont vendre peut-être leurs bleuets, leurs fraises, leurs framboises un petit peu plus cher, mais... parce qu'il a amené un côté agrotourisme. Ça fait que... Est-ce que... L'entreprise, oui, amène à la société, au milieu local, mais elle n'apportera pas réellement à nourrir à la population ni vraiment à une montée du revenu très importante, là. Ça fait que c'est là que, oui, ça fonctionne, sauf que là, à un moment donné, il faut voir itou à avoir plus de revenus, ça fait que réellement voir grand puis voir plus gros, tu sais.

Réellement, quand on regarde itou... Pas très loin de nos secteurs, c'est les tomates Savoura, c'est un bel exemple, là. Ils ont réussi réellement, là. Ça fonctionne, puis ils en produisent beaucoup, puis ils nourrissent. Sauf que la majorité de ceux qui partent jeunes restent au niveau embryonnaire puis ils ne pourront pas se développer, là, parce qu'il y a un manque d'appui, là, pour pouvoir grossir. Il manque autant de capitaux, là, à risque, il manque d'appui, là, au niveau peut-être MAPAQ, des choses comme ça.

**(12 h 10)**

M. Corbeil: Est-ce que vous pensez qu'on est en train d'assister... ou, à tout le moins, d'observer un phénomène d'agriculture à deux vitesses, une agriculture... je n'aime pas le mot «marginale», mais plus petite, plus familiale, plus... et l'autre agriculture, plus développée, plus industrielle, plus axée sur la production, nourrir, etc., des volumes, des quantités? Est-ce que vous pensez que c'est à ça qu'on s'en va... vers ça qu'on s'en va, ou c'est ça qui se dessine, ou c'est...

M. Tremblay (Laurent): Je pourrais peut-être...

M. Corbeil: Tu sais, quelle lecture que vous faites?

M. Tremblay (Laurent): ...peut-être répondre un peu à cette question. C'est justement parce qu'on parle beaucoup... C'est axé beaucoup, ce que j'ai remarqué depuis que je suis arrivé tantôt, marchés publics, petites productions, tout ça. Il ne faudrait pas tout mettre nos oeufs là-dedans pour sacrifier l'autre agriculture. C'est ça, là, qu'il faut faire attention. Parce que là on tend à vouloir pousser les producteurs, dire: Allez-vous-en vers là, c'est ça, l'avenir, puis tasser, dire: Bien, les autres, rangez-vous, là. C'est ça qu'il faut faire attention, là. C'est là-dessus que je veux...

M. Corbeil: Je peux vous rassurer, ce n'est pas l'intention qu'il y a derrière le livre vert, parce qu'on pense qu'il y a de la place pour des petites, des moyennes, des grandes entreprises qui soient dans des domaines différents de production, mais qu'elles soient rentables, efficaces et qu'elles fassent vivre les gens qui travaillent dessus. La dimension, ça concerne... c'est un choix, c'est le choix du producteur lui-même ou de ses associés. Le format, on l'a vu hier avec les producteurs d'oeufs, ça peut être un petit, un moyen ou un gros producteur d'oeufs, ça peut être, chez vous, une ferme laitière de 40, 60, 80, 100 vaches. Le format de l'entreprise, ça appartient à l'entrepreneur, ce n'est pas au gouvernement, là, qui va dire: Tu as trop de vaches, ou: tu n'en as pas assez, pour prendre l'exemple des vaches.

Le Président (M. Paradis): M. Tremblay.

M. Tremblay (Laurent): Oui. C'est sûr que la petite ferme va avoir besoin de plus de soutien de l'État qu'une plus grande ferme, c'est là que je veux dire. Si tu dis: Oui, on veut investir là-dedans, c'est sûr qu'il faut investir dans les petites fermes, ils ont plus de besoins, ils commencent. Peut-être qu'ils vont rester petits, peut-être qu'ils vont prendre de l'expansion, ça, on ne le sait pas. Mais, dans les débuts, puis je pense que mes prédécesseurs ont dit la même chose, c'est là qu'on a besoin d'aide, quand on commence, quand on est petit. Il ne faut pas non plus l'enlever, cette aide-là, il faut la bonifier. Mais il faut aussi... Si les plus grandes entreprises ont de l'aide, il ne faut pas l'enlever au bénéfice des petits non plus. Il faut qu'aussi eux autres aussi puissent continuer à bénéficier de l'aide s'ils en ont besoin, là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Ça va?

M. Corbeil: Oui, ça va.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Vous avez parlé, en introduction, de relève, d'un programme d'aide à la relève. Je voudrais savoir: Est-ce que c'est un programme spécifique que vous avez concocté pour votre région ou bien c'est... Je voudrais vous...

M. Tremblay (Laurent): ...une petite aide qu'on offre, nous autres, le syndicat de base de Richmond, qu'on dit... Quand il y a de la relève, un jeune qui s'établit, qui rentre membre à l'UPA, nous autres, on dit: Bon, les deux premières années, on te crédite ta cotisation, on te fait un rabais, on te rembourse tes deux premières années de cotisation, pour aider au jeune. C'est une forme d'aide financière qu'on apporte à la relève.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K. Ça touche plus... C'est vraiment de ça qu'il s'agit, là?

M. Tremblay (Laurent): Oui. C'est un programme, là, qui est strictement lié au secteur de Richmond. Les autres, ils font d'autres choses; nous autres, c'est ça qu'on fait.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Alors, on va -- merci -- profiter de la présence d'un jeune ici aujourd'hui, M. Roy. Vous faites partie de la relève, bien sûr. Est-ce que je présume qu'il y avait... C'est en production laitière, je crois. C'est ça?

M. Roy (Martin): Oui.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Donc, c'est une relève où il y avait déjà une ferme familiale. Vous avez quoi comme formation?

M. Roy (Martin): Moi, j'ai un D.E.C. en gestion, exploitation d'entreprise agricole que je suis allé chercher au cégep de Sherbrooke, là. Puis présentement j'ai un frère, là, qui est en train d'étudier itou, il est en train de faire un D.E.C. en gestion, exploitation d'entreprise agricole mais à l'ITA de Saint-Hyacinthe, là, ce qui est intéressant parce que c'est deux visions, quand même, là, c'est deux programmes, là, qui diffèrent un peu. Ça fait que c'est ma formation, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K., c'est votre formation. Puis parlez-moi un peu de... Là, c'est réalisé, ça, la... Est-ce que vous êtes maintenant actionnaire en partie? Comment ça fonctionne, là, au niveau de... Êtes-vous en, mettons... pas en transition, là, mais en transfert, en transfert, actuellement? Est-ce que c'est réalisé ou c'est en voie? Comment ça marche pour vous, là?

M. Roy (Martin): Je suis présentement en société avec mon père, on a 50 %-50 % dans les parts. Ça fait déjà cinq ans et demi qu'on a signé ensemble, là. C'est certain que, nous autres, tu sais, il y a eu un débourré rapidement parce que mes parents sont divorcés, c'est en société, ça fait qu'il fallait que mon père trouve un nouveau sociétaire. Mais, d'une façon ou de l'autre, c'est ce qui s'en venait, là, c'était réellement mon but, là, c'était de reprendre l'entreprise. Puis ça fait que là ça fait déjà presque six ans, là. Ça fait que là, en même temps, j'ai eu le droit au prêt de quota au niveau de la Fédération des producteurs de lait du Québec. J'ai déjà commencé à rembourser. Ça fait que je suis vraiment, là, quasiment déjà plus qu'intégré, là, dans l'entreprise.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Avez-vous fait appel aux services, par exemple, du CREA dans votre région pour vous accompagner dans le transfert?

M. Roy (Martin): Oui, on a fait appel aux services du CREA. Ils nous ont référés à tous les moyens... à toutes les personnes-ressources qu'on avait besoin. Parce que c'est vrai qu'au niveau d'un transfert d'entreprise, je peux spécifiquement parler en production laitière, là, le nombre de personnes à rencontrer est faramineux, et c'est vraiment terrible, là, parce que nous avons eu à rencontrer autant, disons, la caisse populaire, au niveau de La Financière agricole, notre représentante au CREA. Ensuite, on a eu une personne qui est ressource sociale, avec laquelle on a aussi fait affaire. Après ça, bien, tu as toutes les compagnies, entreprises avec lesquelles on fait qu'il faut qu'on revoie notre société. C'est parce que, puisque je devenais sociétaire, il y a certaines places que notre nom d'entreprise est tombé vraiment à zéro, on n'avait plus de cote de crédit, rien, là, même si mon père était encore là. Ça fait qu'il y a réellement une vision d'une nouvelle entreprise qui a démarré, là. En plus, au niveau gouvernemental, puis tout ça, puis tout... le comptable qu'il a fallu qu'on aille voir, il y a eu itou le notaire. Ça fait qu'il fallait que ça se fasse rapidement, on s'entendait déjà, mais c'est quelque chose de très compliqué qui se fait sur plusieurs mois, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci. Dans le même ordre d'idées, vous savez que l'ARASH à Saint-Hyacinthe s'occupe de la relève depuis trois ans. Ils se sont associés avec le CLD et puis la MRC, et puis on a commencé à distribuer des bourses, des bourses pour la relève agricole, réservées pour la relève. Cette année, ils en ont distribué 10, mais, à la grandeur des neuf MRC de la région... de la fédération de Saint-Hyacinthe, neuf bourses de 10 000 $, pour encourager, et ça, ça a créé une émulation au niveau des entreprises qui font affaire avec l'agriculture. On fait la sélection de jeunes et c'est... Je sens que, depuis quelques années, grâce au... Justement, on a un commissaire à l'agriculture à Saint-Hyacinthe, un des seuls CLD, je pense, qui a un commissaire, puis c'est un M. Corbeil, justement, Claude Corbeil qui est... Et puis il s'agit, je pense, de créer un genre de... Ça donne une valorisation à la relève, une valorisation à l'agriculture, et je pense qu'il y a une émulation qui s'est faite dans la région puis je pense que ça serait bon que ça se propage. En tous cas, nous autres, on essaie que ça se propage à la grandeur du Québec, ça serait bon.

Mais j'ai une question aussi pour M. Tremblay. Vous parliez tantôt de fermes à dimensions humaines, oui, et vous parliez aussi que vous produisiez du boeuf mais que la commercialisation était difficile. Je me pose la question: Est-ce que la commercialisation, quand on devient un gros producteur, là, pas nécessairement juste un petit producteur, là, pour alimenter un marché ou quelque chose de même, mais un producteur, quand il ne peut pas tout écouler sa... Est-ce que c'est le rôle réellement du producteur de faire sa propre commercialisation ou si ce n'est pas... ça ne serait pas plus avantageux d'avoir un organisme qui puisse faire la mise en marché et puis dégager?

M. Tremblay (Laurent): C'est beaucoup plus facilitant quand tu as un organisme qui fait la commercialisation. Mais, justement, pour avoir, là, essayé d'aller chercher une plus-value quand on... j'ai visé le local, mais c'est sûr que je me dis que... Je faisais les deux comparatifs. Dans le lait, je l'ai, l'organisation de la Fédération de producteurs de lait, puis qui font la job, comme on dit, puis c'est beaucoup plus facilitant pour le producteur. Mais, dans le boeuf, j'ai voulu essayer de le faire moi-même, puis c'est beaucoup plus d'ouvrage. Mais pouvoir... Parce qu'on se faisait toujours dire: Le boeuf, c'est moins rentable, tu sais, le marché, on est en compétition avec le marché international, ça fait que tu n'as pas... Ce n'est pas comme le lait, ce n'est pas un marché uniquement au Canada, ça fait que ce n'est pas nous autres qui dicte les prix. C'est ce prix-là, c'est ce prix-là, tu n'as pas un mot à dire. Ça fait que c'est pour ça que j'ai essayé moi-même de faire ma commercialisation, pour aller chercher une plus-value. Mais c'est sûr que, s'il y a un organisme alentour pour la faire, merci, hein, pas de problème avec ça.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): O.K. Mais c'est quoi qui manque actuellement qui pourrait permettre...

**(12 h 20)**

M. Tremblay (Laurent): Bien, disons, on parle de mettre des produits, faire du développement local, là, comme c'est là, on se fait dire: Bien, si tu veux mettre du boeuf sur le marché localement, il n'y a pas grand-chose qui se fait aujourd'hui. Il faut que le producteur se prenne en main. Sinon, justement, c'est le gros marché, c'est le marché mondial, les prix sont fixés à la bourse, puis c'est ça, puis tu envoies tes veaux à l'encan, c'est chargé dans des vans. Puis, les abattoirs, il n'y en a plus au Québec. C'est abattu aux États, puis c'est le prix qu'ils te donnent; tu n'as pas aucun contrôle là-dessus. Ça fait que c'est sûr qu'au Québec il y aurait de quoi à développer si on veut mettre notre boeuf qu'on produit au Québec en marché au Québec. Tout est à faire, là. Tout est à faire, là.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Au niveau des fermes à dimensions humaines, j'aimerais juste que vous reveniez là-dessus. Une ferme à dimensions humaines, dans votre schème à vous, c'est quoi? Ça serait quoi, là, quand vous parlez de dimensions humaines? Mais, c'est sûr, il faut permettre de faire vivre une famille, élever vos enfants, tu sais, mais, pour ne pas travailler... Pour vous, c'est-u travailler 50 heures-semaine, travailler 100 heures-semaine? Une ferme à dimensions humaines, c'est... il y a le loisir, il y a la famille, il y a les vacances.

M. Tremblay (Laurent): Bien, une ferme à dimensions humaines, c'est une ferme... Moi, j'appelle une ferme familiale d'être capable... Moi, présentement, j'ai quatre enfants. Quand j'ai acheté la ferme chez nous, j'étais tout seul. Ma femme... Je me suis rencontré une conjointe. Elle est venue s'établir avec moi. Là, on a formé une famille, on a monté l'entreprise, mais je l'ai fait tout seul avec ma conjointe. Puis j'ai quatre enfants puis j'aimerais bien les établir, les quatre, sur l'entreprise, parce qu'ils ne vivraient pas comme, moi, je l'ai vécu.

Comme vous disiez tantôt, là, on travaille à peu près 100, 110 heures par semaine, là. Tu sais, ça n'a pas de bon sens. Ça fait qu'il faut être plus que deux personnes pour gérer une ferme. Il faut être la famille, soit un frère, une soeur, deux frères, ou deux frères, deux soeurs, des cousins, deux, trois, quatre. Moi, j'ai quatre enfants. S'ils peuvent s'installer sur l'entreprise, ça va être une ferme familiale à dimensions humaines pareil, mais il faut du revenu pour faire vivre quatre familles. On ne parle pas, là, de 30 vaches, là, tu sais, ça va prendre 150 vaches, 200 vaches. C'est pour ça qu'on a développé d'autres productions, là. On a le côté laitier, on a le côté boeuf, si on peut le développer.

Puis, si ça peut... si toute la même entreprise, ça peut faire vivre deux familles, trois familles, quatre familles, bien, tant mieux, plus qu'il y a de monde, plus c'est facilitant, là, pour justement vacances, fin de semaine, puis tout ça, là. Parce que l'agriculture, ce n'est pas comme un autre métier. Samedi, dimanche, oublie ça, là, tu as de l'ouvrage, là. Un deux semaines à Noël, oublie ça, tu as de l'ouvrage. Juillet, les vacances, là... Les vacances! Moi, je connais... j'ai connu un producteur qui a arrêté de produire, puis il est rentré sur la construction, puis il dit: Imagine toi donc... Il a été obligé de prendre des vacances cet été. Il dit: Je n'avais jamais fait ça de ma vie. Mais l'agriculture, c'est un autre monde.

Le Président (M. Paradis): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci. Vous parlez des fermes à dimensions humaines, là. Dans le même domaine, qu'est-ce vous pensez, là, quand, comme les programmes, là, l'ASRA, de l'assurance, on donne les mêmes montants pour les intégrateurs et puis le même montant... Si on part avec les têtes de porc ou de boeuf, là, quelqu'un qui a 1 000 vaches ou bien qu'il en a 50, il a le même montant à la tête, là, avec l'assurance. Vous ne pensez pas qu'on pourrait faire une... on pourrait catégoriser ça puis dire: Après un certain nombre, là, tu vas avoir moins, ou mettre un montant maximal? Parce que là on se rend compte que, nos produits d'assurance, à l'heure actuelle, qu'on a en place, il y a peut-être... 80 % de toute la somme va à peu près à 15 %, 20 % des producteurs. Puis la balance des 80 autres pour cent des producteurs ont ce qui reste. Vous ne pensez pas qu'on pourrait mettre un équilibre pour essayer d'aider plus les plus petites puis mettre un break aux plus grosses?

M. Tremblay (Laurent): C'est sûr que les... Comme je l'ai... Je vais le répéter, je l'ai dit tout à l'heure, c'est sûr que les plus petites fermes ont besoin de plus de soutien, mais il ne faut pas non plus couper les vivres aux grosses. Tu sais, il faut un juste équilibre. Il ne faut pas prendre l'argent à Pierre puis la donner à Paul, parce que là peut-être que Pierre va aller moins bien, là. Ça fait que, si on reste le soutien de façon correcte pour les grosses fermes puis si on a de l'argent pour aider plus les petites fermes, bien, tant mieux, là. Je n'ai rien contre ça, là. Oui, les petites fermes ont besoin de plus d'aide, c'est normal, tu sais, les revenus sont moindres.

M. Grondin: Mais vous parlez de ne pas prendre l'argent à Pierre puis la donner à Paul, mais il faut penser que c'est tous les Pierre et Paul de la province qui paient. Qu'on ait un équilibre... Si on est capable de sauver l'agriculture dans nos régions, les petites fermes, je pense, moi, que c'est tout le monde qui en profite aussi. Si c'est juste les... Si on aide juste les gros, c'est sûr que les gros vont toujours continuer à grossir, puis les petits vont s'en aller. Mais, quand on fait ça aussi, on dévitalise tous nos milieux, là, nos petites municipalités. Je le vis chez nous, vous devez le vivre chez vous. Les petits agriculteurs... La terre, vous en avez parlé avant-midi, la terre est là, il n'y a plus personne qui l'habite. Elle va être peut-être plantée en sapins ou en épinettes ou elle reste en friche. Mais, si on veut protéger toutes ces terres-là, il va falloir trouver quelque chose tantôt. Parce que, c'est sûr, moi, je sais bien, un gros producteur, il va rentrer dans ses coûts, lui, là. Le coût de production est moins cher pour lui, plus que tu as de têtes, moins c'est cher, on comprend tous ça. Mais c'est où trouver l'équilibre.

M. Tremblay (Laurent): Une bonne question, une bonne question parce que... Écoute, c'est sûr, je ne peux pas faire autrement que de me répéter puis dire: C'est sûr que les petits ont besoin, ils ont besoin de soutien, ils ont besoin d'aide, c'est important. Puis, comme vous le mentionnez, pour les petites municipalités, c'est là qu'on en a vraiment de besoin aussi, ça dynamise, ça revitalise les petites municipalités. Les producteurs, il en faut à la grandeur du Québec, il ne faut pas juste des producteurs au Centre-du-Québec. Et où est-ce qu'on prend l'argent pour faire plaisir à tout le monde? Bien là, je pense que c'est à vous d'y répondre.

Le Président (M. Paradis): Oui, M. Roy, brièvement.

M. Roy (Martin): Quand on parle de l'ASRA, c'est réellement... on utilise les termes «assurance». Comme toute assurance, on veut diminuer nos risques, et, bien sûr, pour diminuer les risques, il faut diversifier. Ça fait que là c'est certain qu'on parle réellement d'une assurance qui est bien gérée, ça fait qu'il serait tout à fait logique qu'il y ait, à un moment donné, des plafonds maximums pour qu'il y ait plus de personnes qui puissent en profiter. Là, il ne faut pas dire que c'est pour étouffer quelqu'un ou quelque chose, c'est réellement pour augmenter le nombre d'entreprises pour pouvoir nous donner une garantie puis une sécurité à la population.

Le Président (M. Paradis): Ça va?

M. Grondin: Je suis d'accord avec vous.

Le Président (M. Paradis): Alors, il y a moins de jours en février qu'en janvier, hein? Je ne sais pas comment on va départager ça. À ce moment-ci, je voudrais remercier les représentants de l'UPA de Richmond. Merci de vos témoignages. Deux jeunes, c'est encourageant de voir qu'il y a de l'avenir, puis de l'avenir dynamique dans le secteur agricole.

À ce moment-ci, la commission va suspendre ses travaux, mais la commission a un autre mandat dont elle doit s'acquitter sur l'heure du midi, c'est le mandat qui concerne la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers. J'inviterais donc les membres à traverser dans le RC.161, de l'autre côté. Et la commission, sur ce mandat-ci, va reprendre ses travaux à 14 heures. Est-ce que ça va? Je suspends. Vous pouvez laisser des papiers ici.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bon après-midi, mesdames messieurs. Je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Comme à l'habitude, veuillez surveiller vos téléphones cellulaires pour qu'ils soient en mode silence.

Nous allons poursuivre, sans plus tarder, les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le livre vert pour une politique bioalimentaire du Québec qu'on intitule Donner le goût du Québec. Cet après-midi, nous recevons l'UPA de Magog, de Lac-Mégantic, de La Patrie, de Coaticook, Solidarité rurale du Québec et enfin M. Raymond Rouleau.

Maintenant, je demanderais aux représentants de l'UPA de Magog de bien vouloir nous présenter leur exposé ainsi que se présenter... la personne qui vous accompagne.

Syndicat du secteur de l'UPA de Magog

M. Beauvais (Serge): Bonjour, cher Président, chers membres de la commission. Je me présente: Serge Beauvais, et mon collègue: Marc Chiasson.

L'Union des producteurs agricoles du secteur de Magog est heureuse de participer à cette audience et espère pouvoir aider, à sa façon, à la finalité du livre vert Donner le goût du Québec et que ce livre vert puisse habiller tout le monde, y compris les agriculteurs.

Je suis producteur laitier et acéricole à Magog. Nous sommes très fiers, ma famille et moi, d'exploiter une ferme familiale de la troisième génération, et mes deux fils ambitionnent de continuer pour une quatrième génération.

L'Union des producteurs agricoles de Magog regroupe les producteurs et productrices agricoles de 23 municipalités. C'est à peu près l'ensemble de la MRC Memphrémagog. Les zones agricoles occupent à peu près 50 % de notre MRC.

L'UPA de Magog comprend 279 fermes, et le taux d'adhésion volontaire à notre organisation est de 95 %. La plus grande part des revenus agricoles de la région proviennent de la production de lait, de bovins de boucherie, de l'horticulture et des grandes cultures. Reconnue pour sa vocation touristique, notre région offre une grande diversité de productions agricoles.

Notre conseil d'administration est composé de un producteur de pommes, de deux producteurs de bovins de boucherie, de un producteur de sapins de Noël, de un producteur maraîcher, trois producteurs laitiers et de un producteur de grandes cultures. Six d'entre nous produisons du sirop d'érable et du bois. Vous voyez très bien comme une même organisation syndicale arrive à réunir plusieurs productions et à nous aider à être plus efficaces à travailler en collaboration et en se servant de l'expertise de l'une ou l'autre des spécialités, pour en résulter à l'amélioration de la situation de tous les agriculteurs et agricultrices.

L'Union des producteurs agricoles salue l'initiative de cette future politique et on croit que les producteurs agricoles contribuent tellement à l'économie de nos régions et du Québec en entier que notre vision d'une future politique agricole qu'on intitule Le pouvoir de se nourrir devrait inspirer l'élaboration du livre vert Donner le goût du Québec.

L'UPA de Magog est un outil de cohésion au bénéfice de sa communauté. Au fil des ans, on a réalisé plusieurs grandes choses, notamment au niveau de la prévention auprès des enfants.

On considère qu'il y a beaucoup trop d'accidents impliquant des fermes... impliquant des enfants sur les fermes. Donc, l'UPA de Magog a participé à un atelier qu'on appelle Sécurijours le 16 juin 2008. Sécurijours, c'est une journée organisée pour sensibiliser les enfants à la prévention et la sécurité sur les fermes. En tout, 99 élèves de tous les niveaux de l'école primaire de Saint-Barthélémy d'Ayer's Cliff ont participé aux différents ateliers. Les membres du conseil d'administration se sont impliqués dans chaque atelier afin d'avoir un contact direct avec les enfants. La municipalité d'Ayer's Cliff a mis à leur disposition le terrain de l'exposition et quelques pompiers avec leur camion. De plus, des pompiers de la Sûreté du Québec ainsi que des ambulanciers de Stanstead et de Magog se sont joints aux bénévoles pour animer les ateliers.

Un autre projet, qu'on a réalisé avec beaucoup d'acharnement, ce sont des arbres pour protéger nos champs et nos cours d'eau. L'UPA de Magog étant très sensibilisée à la qualité de l'eau en zone agricole, on a donc donné notre appui à un projet de plantation d'arbres et d'aménagement de bandes riveraines, ce qui a un impact positif sur la qualité de l'eau dans le bassin versant du lac Massawippi. La participation des entreprises agricoles au projet était volontaire. Ce projet a permis aux entreprises agricoles de réaliser des aménagements productifs et rentables, entre autres contrôle d'accès des animaux aux cours d'eau, aménagement d'aires d'abreuvement, des haies d'arbres pour les... comme brise-vent, et des installations de ponceaux, et la stabilisation des berges. En tout, c'est 3 000 arbres qui ont été plantés sur 4 kilomètres, et des haies brise-vent, et des bandes riveraines, 18 sites d'abreuvement et plusieurs traverses à gué.

L'UPA de Magog a obtenu l'appui financier du Programme des mises en valeur des ressources du milieu forestier de la MRC de Memphrémagog. La Fédération de l'UPA-Estrie, Berge et brise-vent de l'Estrie et Natur'Eau-Lac ont aussi collaboré. Elle a de plus joué un grand rôle dans la promotion du projet auprès de ses membres et du grand public.

En lien avec ce projet, l'UPA de Magog et Coaticook ont remporté le prix Jean-Paul Raymond remis au 84e congrès de l'UPA. Ce prix vise à récompenser et à mettre en valeur une équipe d'agricultrices et d'agriculteurs ayant mené à bien une action collective en vie syndicale. Cette action doit permettre l'amélioration des conditions d'exercice de la profession agricole et l'amélioration de l'image de la profession agricole auprès du public.

**(14 h 10)**

Plus récemment, l'UPA de Magog a participé activement aux négociations dans l'élaboration de la demande à portée collective, article 59, dans la MRC Memphrémagog, négociations qui se sont très bien déroulées, avec la collaboration de plusieurs maires, de la MRC, la CPTAQ et de l'UPA régionale de l'Estrie. Je vais maintenant passer la parole à mon collègue.

M. Chiasson (Marc): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, merci de bien vouloir accueillir nos suggestions constructives face au développement du livre vert Donner le goût du Québec.

Mon nom est Marc Chiasson. Je suis producteur de pommes sur une petite ferme familiale, le Verger familial CR, à Magog, que j'opère avec ma famille. Nous effectuons l'ensemble des activités de commercialisation à la ferme, c'est-à-dire qu'on ne travaille pas à travers le programme du plan conjoint de la Fédération des producteurs de pommes. Nous faisons la transformation d'une bonne proportion de notre production, qu'on transforme dans des produits audacieux et authentiques, tels notre coulis de pommes et notre crème glacée aux pommes unique, qu'on fabrique en collaboration avec la Laiterie de Coaticook, dont la réputation n'est plus à faire. Alors, il y a moyen de faire des choses innovatrices.

L'objectif de mon intervention vise à complémenter le mémoire qui a été déposé devant cette commission. Alors, je me permettrai de poursuivre dans la même optique que mon président a commencée.

Les opportunités de s'impliquer dans le milieu sont très importantes pour notre syndicat local, car elles sont une fenêtre où il nous est possible de démystifier et faire valoir des valeurs fondamentales, telle l'importance des achats locaux. Hein, on a une proportion de producteurs au sein de notre organisation qui sont des petites entreprises, puis ils ont besoin des circuits courts, des marchés publics.

Alors, pour stimuler puis faire connaître davantage cette importance-là auprès de la clientèle potentielle, on a participé à l'exposition d'Ayer's Cliff en tenant un kiosque où on a présenté un dépliant informatif, Saviez-vous que?, où on traitait de l'importance de l'achat local et des pratiques agricoles durables. Alors, évidemment, l'impact que cela a pour les petites exploitations qui effectuent leur commercialisation à travers les circuits courts, marchés publics et ventes directement au consommateur à la ferme est très important, puis on s'est fait le porte-parole de ces petites entreprises là. Par le fait même, il nous est possible de profiter de ces occasions-là de recueillir les commentaires des gens de façon à bien informer les producteurs de la réalité que les consommateurs vivent.

Différents projets qu'on réalise dans d'autres perspectives. Dans notre région, on a connu, pendant plusieurs années, une population de cerfs de Virginie bien au-delà de la moyenne, et plusieurs de nos producteurs se plaignaient des dommages aux récoltes causés par la faune. En plus des cerfs de Virginie, la corneille et les goélands vont percer les plastiques agricoles servant à enrober les balles de foin, ce qui provoque un endommagement de la ressource. Les cerfs de Virginie vont agresser les pommiers, vont manger les pommes, vont se nourrir de manière alternative parce qu'ils sont en surpopulation. Ils ne peuvent pas subvenir, dans le milieu immédiat, à leurs besoins, donc ils envahissent les productions agricoles.

Puis évidemment, bien, comme plusieurs producteurs voyaient leurs efforts anéantis en partie par une faune croissante, on s'est sentis responsables d'initier une démarche auprès du ministère des Ressources naturelles et de la Faune afin de trouver une façon adéquate de réduire cette population de cerfs là. Alors, la requête des producteurs aura été approuvée par le ministère de la Ressource et de la Faune, et ça aura mené, pendant deux années consécutives, à l'émission de permis SEG. C'est des permis spéciaux qui nous permettent d'avoir un double abattage. Ce que ça a eu comme conséquence, c'est que ça a permis de réduire cette densité trop élevée. On a constaté une réduction au niveau des dommages aux récoltes, mais aussi ça a eu des effets indirects, parce que les propriétaires qui ont des aménagements paysagers sur leurs domaines voyaient les cerfs les envahir, eux aussi. Ça fait que l'impact n'a pas été non seulement au niveau de l'agriculture, elle a rayonné sur les autres concitoyens qui sont avec nous dans la même réalité, hein?

Alors, pour réaliser ça, il a fallu travailler avec... avoir la collaboration des municipalités environnantes. Puis toutes les municipalités impliquées dans notre MRC ont contribué à nous simplifier l'accès aux propriétaires, parce que ça passait à travers les propriétaires fonciers. Donc, c'était bien important d'être... Ça démontre la façon que l'UPA est organisée pour rayonner dans son milieu puis influencer.

La participation aux portes ouvertes est aussi très, très, très importante, et l'UPA de Magog est fière d'avoir participé à cinq des neuf éditions. Cet événement national est très important pour... a été très important pour nous. Nous avons eu 11 fermes qui ont accueilli une moyenne de 700 visiteurs. Et l'Union des producteurs agricoles de Magog aura supporté ces fermes en offrant un coup de main soit pour la tenue des stationnements, pour gérer l'accueil des visiteurs ou encore comme guides accompagnateurs. Il est primordial de bien maintenir un bon contact avec les consommateurs et nos voisins de la ville. Pour le participant à cet événement-là, se familiariser avec ce qui se passe à la ferme, bien, ça permet au visiteur de bien discriminer plusieurs préjugés, particulièrement en ce qui a trait à la pollution.

Toujours plus au niveau de la sensibilisation puis de l'implication, en 2008, l'Union des producteurs agricoles de Magog a tenu une importante opération de sensibilisation des consommateurs sur le prix du lait et l'importance de l'achat local. À cette occasion, nous avons remis près de 250 dépliants qui renseignaient le consommateur sur les avantages d'une consommation de proximité -- hein, la réduction des gaz à effet de serre puis tout ce qui en découle -- et sur la répartition du prix du lait entre le producteur, les transformateurs puis les détaillants. C'est un modèle, je pense, qui doit inspirer nos législateurs parce que tout le monde tire son compte, c'est équitable, puis c'est raisonnable, puis ça permet aux consommateurs d'avoir accès à des produits abordables.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Je vous invite à conclure, M. Chiasson.

M. Beauvais (Serge): Oui. Je vais conclure. Il nous restait des petits messages, mais on les... on aura sûrement l'occasion de... O.K.

En conclusion, vous aurez compris sans aucun doute que notre exposé se voulait un plaidoyer du maintien de l'accréditation syndicale dans sa forme actuelle. L'Union des producteurs agricoles de Magog aura démontré, par le biais de quelques exemples, l'enracinement dans le milieu et l'implication pour réaliser des projets significatifs tant pour nos producteurs que pour nos concitoyens.

Cependant, soucieux des conditions de succès des entreprises de nos producteurs, nous sommes anxieux de voir comment sera opérationnalisée la réalisation du nouveau livre vert Donner le goût du Québec. Les axes d'intervention nous apparaissent intéressants à prime abord, mais, de grâce, n'oubliez pas les producteurs dans vos mesures de soutien, car la compétitivité des entreprises passe d'abord par l'amélioration du produit, et de son mode de production, et puis, évidemment... en plus, évidemment, des améliorations que vous nous proposez pour nous donner le goût du Québec. Nous vous remercions de nous avoir permis d'exprimer ces différents points. Merci beaucoup.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Beauvais. M. le ministre, à vous la parole.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, M. Beauvais, M. Chiasson. Je suis agréablement surpris de vous entendre cet après-midi parce que vous rejoignez plusieurs des orientations du livre vert. Vous avez commencé votre présentation en nous parlant d'assurer un développement respectant l'environnement. Vous nous avez donné des exemples: contribuer à la production de bénéfices environnementaux par la plantation d'arbres en situation riveraine, etc., valoriser l'occupation dynamique du territoire.

Quand on regarde votre mémoire, en juillet 2004, il y avait 278 fermes et aujourd'hui il y en a 279. Alors, dans votre secteur, on peut parler d'une stabilité, peut-être d'une modification de ses... En nombre, c'est équivalent, mais peut-être qu'il y a eu des départs, des arrivées, des concentrations, des acquisitions, de l'expansion, du morcellement, en tout cas toutes sortes de phénomènes qui ont amené d'autres choses. Parce que vous nous parlez de production de lait, de bovins de boucherie, d'horticulture, de grandes cultures, pomiculteurs. Il y a un vignoble, au moins un, si ce n'est pas plus qu'un dans votre coin. Alors, on assiste à une espèce de virage ou de phénomène.

Et vous rejoignez aussi... mais en fait toutes les orientations, là, mais: distinguer nos produits alimentaires, promouvoir les produits québécois sur les marchés. Les marchés, bien entendu, à la ferme, en ce qui vous concerne, M. Chiasson, et probablement au marché public aussi, là, ou dans différentes activités. J'aimerais vous entendre un peu plus sur le fait que, M. Chiasson -- vous me permettez que je commence par lui? -- vous ayez intégré l'ensemble de l'oeuvre, c'est-à-dire de la production à la commercialisation et à la vente, parce que vous le faites chez vous, dans ce que vous faites.

**(14 h 20)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Chiasson?

M. Chiasson (Marc): C'est une très bonne question, c'est tout à fait pertinent, particulièrement dans le sens du développement du nouveau livre vert. Nous, c'est un choix qui nous est apparu assez évident dès les premières années où on a fait l'acquisition de la ferme. L'ancien opérateur commercialisait une partie de sa production à travers les circuits conventionnels du plan conjoint de la pomme, puis on s'est rendu compte qu'avec la superficie de culture... Parce que, pour gérer un verger de pommes avec moi, mon épouse puis la contribution partielle de mes enfants, on ne peut pas avoir 50 hectares en culture. Donc, notre production est répartie sur une très petite superficie, puis, pour réussir à rentabiliser l'opération, il fallait s'assurer d'avoir une production à plus grande valeur ajoutée. Alors, pour moi, le calcul était très simple, tu sais, avoir de la valeur ajoutée, c'est transformer le produit. Ça fait qu'on a commencé par mettre en place la production de jus de pomme brut, à partir duquel on a développé la production du coulis, puis de là s'est ensuit... ça s'est mis à débouler puis c'est arrivé jusqu'à la production de la crème glacée aux pommes.

Bon. C'est un choix qu'on a fait. À cause de la dimension, à cause de la réalité économique de notre ferme, c'est un choix qui... Je ne revirerai pas en... je ne reviendrai pas en arrière, ça a été le bon choix. Sauf qu'on a profité du fait qu'on avait des habiletés. Comme on a entendu un petit peu plus tôt ce matin, la difficulté que certains producteurs peuvent avoir avec l'exercice de la commercialisation. Bien, chez nous, ça adonne bien, tu sais, mon épouse est en marketing, puis, moi, bien, j'ai le verbe facile. Donc, ça amène des conditions gagnantes pour accueillir adéquatement les gens, leur présenter nos produits, leur présenter la façon qu'on s'est différenciés pour que ça soit attrayant pour le consommateur de nous visiter à la ferme, tu sais. Alors, c'est un peu dans cette optique-là, tu sais.

Maintenant, est-ce qu'on fait exception? Je ne pense pas. Je pense qu'il y a plusieurs autres fermes pomicoles de petite envergure au Québec qui réussissent très bien. Mais ils sont en mesure de le réaliser parce qu'ils ont été adéquatement supportés, ou ils vont l'être, pour réussir à se différencier. Puis je pense que ça, c'est le critère le plus important. Je ne sais pas si ça répond à votre question, M. le ministre.

M. Corbeil: Oui, mais... M. le Président?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui.

M. Corbeil: Oui, parfaitement, parce que finalement vous rejoignez toutes les orientations et les objectifs du livre vert. Là, j'ai parlé du troisième, du premier, orientation. Là, je parle du deuxième. Un des objectifs, c'est: Favoriser la diversification de l'offre de produits mettant en valeur le potentiel bioalimentaire régional.

Et vous n'êtes pas le seul. Je peux vous rassurer là-dessus. Le Verger Bilodeau à l'île d'Orléans, avec 3 500 pommiers, ils font vivre 11 personnes, papa, maman, fiston, la bru et autres personnes qui sont soit en commercialisation au verger, à l'île ou au marché public ici, dans le Vieux-Port de Québec. Est-ce que vous utilisez les facilités d'un des marchés publics, là, des Cantons-de-l'Est? Pas du tout.

M. Chiasson (Marc): On fait 100 % de notre commercialisation à la ferme. On a développé un volet agrotouristique qui complémente nos activités de production puis qui rend attrayant pour le client. Donc, à partir du moment qu'on a vu la croissance de nos ventes à la ferme s'estomper, on s'est dit: Pourquoi qu'on aurait des frais de transport, des frais de location de kiosque ou l'embauche d'un employé pour s'occuper d'un marché public, alors qu'on écoule tout à la ferme? Ça fait que c'est la beauté.

M. Corbeil: Merci...

M. Chiasson (Marc): J'aimerais par contre ajouter un commentaire. Oui, c'est vrai que la commercialisation puis les éléments accessoires environnementaux sont importants pour donner le goût du Québec, mais ça ne se serait pas réalisé si, au préalable, je n'avais pas été, comme petite entreprise, adéquatement soutenu. On a entrepris une démarche il y a 13 ans sur une réduction massive et intensive de l'utilisation des pesticides afin de se démarquer des autres opérateurs du milieu.

Si jamais le coeur vous en dit, ce soir, à 20 heures, à RDI, l'émission Les artisans du changement, ils vont diffuser un épisode qui s'appelle Jardiner la Terre, puis, pour vous permettre un peu de comprendre l'essence du petit producteur qui cherche à se différencier, on participe à cet épisode-là avec deux autres producteurs, un producteur de bois de Gaspésie puis un pêcheur de Nouvelle-Écosse. Ça résume l'approche qu'on a prise pour se différencier. Si on n'avait pas eu les programmes de soutien adéquats pour éliminer l'usage de tels produits, remplacer par une méthode alternative pour combattre un insecte nuisible, on produirait des pommes de la même manière que tout le monde le font. Par valeur, par principe, on a choisi une autre avenue, puis heureusement, d'un point de vue marketing, ça nous a permis de nous différencier. C'est à partir de ça qu'on a pu envisager une commercialisation à la ferme, avec tous les avantages que ça peut avoir pour assurer la viabilité économique de l'entreprise.

Alors, s'occuper de l'environnement, c'est important, mais il faut aussi s'occuper du comment on effectue notre production puis du produit comme tel, puis je vous demanderais d'être vigilants puis de ne pas oublier ça, c'est très, très important. N'eut été du support que j'ai eu, je ne suis pas sûr que je serais encore en production conventionnelle, que je réussirais à me différencier puis à faire les choses différemment de mes confrères pomiculteurs.

M. Corbeil: Donc, vous êtes d'accord avec l'objectif 3 qui parle d'appuyer le développement de secteurs en émergence.

M. Chiasson (Marc): Oui.

M. Corbeil: Objectif 3 de l'orientation 2. Excusez, hein, c'est un petit peu...

M. Chiasson (Marc): Oui, tout à fait. C'est important, mais ça doit faire partie d'un tout. Puis il ne faut pas oublier le produit puis la façon qu'on génère ce produit-là. Dans mon cas, c'est la pomme. La façon que je le fais, je le fais avec des méthodes alternatives qui sont beaucoup plus respectueuses de l'environnement, qui n'ont peu ou pas d'impact. Alors, c'est un choix que j'ai fait, mais j'ai été adéquatement soutenu dans cette recherche d'une manière innovatrice de produire ma production.

M. Corbeil: Et vous avez même poussé l'audace à faire des partenariats avec un autre gagnant, qui est Coaticook, la crème glacée, à faire de la crème glacée aux pommes. Et vous m'avez donné l'envie d'essayer d'en trouver, parce que je connais bien la crème glacée à la vanille, alors j'ai hâte d'avoir celle-là aux pommes. Mais, blague à part...

M. Chiasson (Marc): Malheureusement, j'ai une mauvaise nouvelle pour vous...

M. Corbeil: Il n'y en a...

M. Chiasson (Marc): ...c'est un produit d'appel pour nous. On a décidé de faire une commercialisation...

M. Corbeil: À la ferme.

M. Chiasson (Marc): ...s'en servir comme produit d'appel, alors vous pouvez... Si vous venez nous visiter en Estrie, ça me fera plaisir...

M. Corbeil: On va aller...

M. Chiasson (Marc): ...de vous servir une bonne dose de notre crème glacée.

M. Corbeil: ...on va faire un détour. M. Beauvais, je ne vous ai pas oublié, je voulais juste voir avec vous si vous avez des suggestions à me faire quant aux interventions gouvernementales que vous considérez qui seraient les plus porteuses à long terme. Parce que finalement ce qu'on propose dans le livre vert, c'est de d'abord doter le Québec d'une première politique bioalimentaire, mais sous différents axes, avec différents objectifs à atteindre. Mais, si vous étiez à ma place, par exemple, cet après-midi, avec le mémoire que vous m'avez déposé, les problématiques que vous connaissez, par où on commencerait?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Beauvais.

M. Beauvais (Serge): Bon, bien...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): C'est la question qui tue?

M. Beauvais (Serge): Non, ce n'est pas la question qui tue, c'est: Par quel bout on commence? Tantôt, cet avant-midi, plusieurs en ont parlé, les programmes de soutien, c'est ce qui presserait le plus, d'avoir des bons programmes, bien adaptés, qui puissent réagir rapidement si le besoin s'en fait sentir. Dans mon secteur, même si le nombre de producteurs semble rester pareil, là, on en a perdu, des producteurs, à cause des programmes de soutien qui étaient... On pense encore à La Financière, là, qui a réagi ou pas réagi, qui a modulé sa façon de compter.

On a perdu des bons producteurs puis, entre autres, on a mis toutes nos énergies pour sauver un producteur de porc. Plus tôt, on recule de deux ans, là, une municipalité qui voulait creuser un puits pour pomper l'eau pour la municipalité... Tout le monde pensait que c'était important de sauver ce producteur-là. On s'est assis avec le député, avec les gens de la municipalité, avec l'environnement, avec l'UPA, on s'est assis pour trouver un moyen de protéger ce producteur-là, c'était important qu'il reste en production. Là, il a fermé, là, parce que les... Il n'a pas fait faillite, il a fermé avant de faire faillite. Mais c'est déplorable, là.

On en a perdu, puis il va s'en perdre encore, des productions comme ça qui sont fragilisées par le marché. On pense que c'est des bons programmes de soutien qui vont... qui sont les plus pressants à maintenir ou à retravailler, mettre en place

C'est sûr que, nous, on produit, hein, ça fait qu'on est des producteurs, on produit, ça doit être, il me semble, mis de l'avant dans notre politique, là, la future politique. Avoir des produits de proximité à offrir, c'est correct. Avoir des produits diversifiés, mais il faut commencer par les produire puis il faut que les producteurs soient en santé financière pour les produire. Ça fait que je pense que c'est le mot que je vais vous laisser cet après-midi, ça commencerait là.

**(14 h 30)**

M. Corbeil: Juste pour une vérification, M. le Président, je ne veux pas emprunter trop sur le temps de...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous n'empruntez sur rien, mon cher monsieur.

M. Corbeil: O.K. O.K. Alors, juste pour vérifier, M. Chiasson, tantôt, vous mentionniez de l'aide au démarrage, de l'aide à la conversion, si on passe d'un mode de production avec... utilisant des intrants chimiques et qu'on change, on évolue vers un autre mode de production; ça, vous l'avez eu au départ. Est-ce que vous avez... Vous n'avez plus de programme de soutien d'aucune nature, là, à ce que je sache, si ce n'est peut-être des choses dans la politique de la ruralité ou autre, là, ou Agri-Québec, peut-être, si vous y avez...

M. Chiasson (Marc): Bien, c'est plus à travers les programmes de soutien à l'innovation technologique du ministère de l'Agriculture qu'on a eu... à travers ces programmes-là qu'on a bénéficié. On va bénéficier encore, pour une dernière année, d'un projet assez spectaculaire et osé: de confondre les insectes en utilisant son désir de se reproduire, par la confusion sexuelle. Il aurait été absolument impossible de financer ce type de projet là pour une entreprise de ma taille. Sauf que ce qu'on est en train de faire la démonstration, puis qu'on a vu dès la première année, c'est que... Souvent, quand on pratique l'agriculture, on va dominer l'environnement puis on va espérer ne pas trop causer de dommages pour réussir à maximiser la performance de notre produit qu'on veut... qu'on génère. Mais on va faire la démonstration que, si on utilise ces méthodes alternatives là, on va arriver exactement au même résultat avec zéro impact. Alors, on en a bénéficié.

À titre d'administrateur au sein de l'UPA de Magog... Puis j'arrive à 50 ans, évidemment il en reste moins en avant de moi qu'il y en a eu en arrière, à un moment donné je me préoccupe pour... Vous savez, l'innovation, ce n'est pas un «one-shot deal», puis tout est fini après, là. On innove, puis, si on veut maintenir notre position concurrentielle et compétitive, il faut toujours chercher à innover. À la ferme, on a essayé de travailler sur l'axe de la protection de l'environnement puis générer une production qui est respectueuse de cette planète-là. Mais le prochain opérateur qui va opérer ma ferme, si ce n'est pas moi, il va avoir d'autres défis à relever d'un autre ordre.

Alors, mon point, c'est: c'est très important d'avoir les bons programmes de soutien au bon moment. Si on n'avait pas eu accès à ces programmes-là, au risque de me répéter, je suis convaincu que mon entreprise n'existerait pas, puis elle n'aurait pas la prestance qu'elle a actuellement. Puis sa viabilité a été assurée à long terme parce qu'on a été en mesure de se différencier puis de développer cette clientèle-là.

Les gens viennent chez nous, ils n'achètent pas un produit, ils achètent une expérience d'achat au sein d'une entreprise qui est respectueuse de l'environnement puis qui leur est transparente. Quand vous achetez une pomme à l'épicerie, là, tout ce que vous avez, c'est l'indication «origine du Québec» ou «origine canadienne», vous ne savez pas son histoire. Si, pour vous, c'est important d'avoir certains critères face à l'utilisation des pesticides, vous ne l'aurez jamais, cette certitude-là. Alors que les gens qui viennent nous visiter, s'ils veulent absolument voir mon registre d'application de pesticides, bien, on va aller voir, puis on va aller voir dans les périodes de pointe puis regarder: il n'y a pas eu de traitement contre tel insecte nuisible parce qu'on a utilisé telle technique alternative ou on a implanté tel insecte parasite qui va s'occuper de la population.

Ça fait que l'insistance que j'ai au niveau du soutien de l'entreprise comme telle, du développement des choses qui font qu'elle se différencie, c'est capital, c'est capital. Puis ça, je ne le sens pas vraiment dans... je n'ai pas lu l'exposé au complet, mais j'ai lu ça, ici. Puis pourquoi j'insiste tant? Parce que ce n'est pas totalement transparent qu'on va continuer à soutenir l'entrepreneur qui va vouloir se différencier en sortant des sentiers battus. Évidemment, si j'avais demandé à faire des choses impossibles à réaliser, j'imagine... Puis c'est la responsabilité du représentant du ministère de l'Agriculture, qui nous a permis d'avoir accès à ces programmes-là, de nous dire: Regarde, ne rêve pas trop, là; on a marché sur la lune, mais, regarde, tes pommes, tu les produis sur le plancher de la terre. Mais il faut être capable de supporter au bon moment les entrepreneurs qui veulent innover.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Moins d'une minute, M. le ministre.

M. Corbeil: Bien, en fait, pensez-vous qu'il y a des... votre façon de faire... ou de quelle façon votre exemple pourrait s'appliquer à d'autres secteurs, M. Chiasson?

M. Chiasson (Marc): C'est certain que, dans les productions maraîchères, on peut faire une explosion du même principe parce que le principe de base, c'est regarder l'écosystème puis s'intégrer à travers un écosystème existant. La démarche requiert du temps, requiert des ressources pour... Est-ce que l'insecte nuisible qui pourrait nous... qui pourrait être combattu avec un insecte utile, est-ce que l'insecte utile est présent? C'est quoi, la démarche qu'on a à faire? Si on élimine le traitement insecticide pour s'occuper de ça, bien, on va générer une plus belle population. Oui, c'est tout à fait applicable. Ça demande... Mais ça ne sera pas des démarches qui peuvent être généralisées parce que c'est fonction des valeurs du producteur comme tel, tu sais. Si, moi, je me satisfais d'une production conventionnelle, c'est tout à fait correct aussi, ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Chiasson. Merci, M. le ministre.

M. Corbeil: Tantôt, vous avez excité les amis d'en face, là, avec la confusion sexuelle. Je pense qu'ils vont vouloir avoir des éclaircissements.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Kamouraska-Témiscouata, c'est à vous.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. Beauvais et M. Chiasson. Alors, merci d'être avec nous aujourd'hui.

M. Beauvais, à la fin de votre exposé tout à l'heure, vous avez porté un regard d'ensemble sur le livre vert puis lequel vous dites: Oui, il y a des axes sur lesquels on souscrit, mais, mais en autant -- puis j'ai noté, là -- de ne pas oublier les producteurs dans les mesures de soutien. Et vous le dites, puis vous n'êtes pas le seul à le dire, à peu près, là, c'est le point commun à cet égard. Mais, quand vous dites ça, c'est... Pourquoi vous le dites ainsi, puisque... Est-ce que c'est en lien un peu à ce qui se vit en termes de mesures de resserrement ou par rapport aussi au contenu? Quelle est la nature, le fondement vraiment de... Parce qu'on regarde sur du plus long terme pour une politique, là. Quelle est votre préoccupation quand vous dites ça?

M. Beauvais (Serge): ...en mesure de toute la saga qu'on a eue avec La Financière puis les difficultés que les producteurs ont eues. On est tellement solidaires entre producteurs que ça nous fait presque aussi mal que celui qui ferme ses portes, là. Mais il faut aussi prévoir ces affaires-là pour plus tard, là, parce que, les cerises, dans l'alimentation, dans les productions agricoles, il va y en avoir encore comme il y en a eu. Puis il faut avoir des programmes pensés qui... pour réagir rapidement.

Puis, moi, c'est mon opinion personnelle, ce que je peux penser, c'est qu'à partir du moment où les producteurs agricoles ont été mis en minorité au niveau de La Financière ça a commencé à boiter puis à prendre une autre orientation. Peut-être que ça aurait pu rester comme ça, mais... Le jugement a-tu manqué? C'est-u l'expertise qui a manqué? Ça a commencé à déraper à ce moment-là, puis il y a tellement de producteurs qui ont perdu des plumes. On voulait peut-être faire une petite épuration de ceux qui n'étaient pas efficaces. On a fait une grosse épuration. Puis, dans chaque domaine, il y a des gens qui sont moins efficaces, puis on ne les met pas tous à la rue pour autant, là. Ça fait que c'est dans ce sens-là que je dis que...

Puis, quand je parle de programmes de soutien, là, c'est pour la relève agricole aussi. C'est quand même assez timide, ce qu'on voit au niveau de la relève. Mais ça a été signalé, ça a été pensé, c'est correct, là. Mais il ne faudrait vraiment pas, là, les... prendre ça à la légère. Parce qu'on s'en rend compte qu'il y a des producteurs qui ferment les portes parce qu'ils n'ont pas de relève, parce que la relève est plus ou moins intéressée et voit la crise, la crise qui perdure depuis plusieurs années, puis la relève qui se dit: Bon, bien, je ne suis pas sûr que j'ai envie de vivre cette expérience-là. Ça fait que c'est un problème. On se rend compte qu'il y a une partie de la relève qui se désintéresse par les difficultés qui sont présentement en cours, depuis plusieurs années, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Comment ça se présente, là, le programme de soutien à l'adaptation? Est-ce que vos producteurs y adhèrent? Est-ce que ça fonctionne assez bien dans votre...

M. Beauvais (Serge): C'est assez long, le cheminement. Moi, je me suis... Moi, je n'ai pas eu à appliquer là-dessus, là, mais j'ai des producteurs qui m'ont dit que le cheminement est très long et puis ardu, puis beaucoup de producteurs qui ne rentrent pas dans les balises du programme. On devrait-u l'élargir, l'assouplir, là? Je ne pourrais pas vous donner trop de détails là-dessus, là, je ne serais pas correct de...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Vous avez parlé d'une activité de sensibilisation concernant le prix du lait aux consommateurs. Je voudrais savoir qu'est-ce qui a motivé de s'investir dans cette activité-là auprès du grand public? Parce qu'on sait que le prix du lait, il est fixé par la régie. Et je voudrais voir un peu quels sont les... quel est le motif principal de le faire.

**(14 h 40)**

M. Beauvais (Serge): Bien, nous, on pense, dans notre secteur... Et puis je pense que les producteurs en général... On pense qu'il y a une désinformation, hein, au niveau des consommateurs puis les... Quand on entend aux nouvelles que le prix du lait a augmenté de tant de sous l'hectolitre, les gens ont l'impression qu'on vient de faire un coup d'argent supplémentaire, étant donné que... C'est vraiment faux, là. Quand il y a une augmentation qui est décrétée, souvent il y en a une partie qui va pour la transformation, une partie pour le transport. En tout cas, ce que le producteur a en bas, là, ce n'est pas tout le temps la réalité, là, ce qui est annoncé.

Et puis, même si le litre, au magasin, se vend 2 $, 3 $ le litre, là, 1,50 $ le litre, là, aucun rapport avec ce qu'on a dans nos poches, nous, hein? Ça, vous êtes tous au courant que, quand on vend du lait à 0,75 $ le litre, là, 0,70 $ le litre puis qu'on paie le transport, la publicité, et tout par-dessus ça, il n'en reste pas épais. Le verre de lait qui se vend au restaurant, là, 1,50 $, 2 $, là, il n'y en a vraiment pas épais. Puis ça, on voulait que les consommateurs réalisent ça.

On avait l'exemple du lait, on avait l'exemple du boeuf, quelques exemples comme ça dans notre exposé avec les consommateurs à l'exposition, là, puis on a eu une bonne écoute, puis plusieurs consommateurs étaient vraiment surpris de voir la proportion qui allait au producteur. Puis je pense qu'il faut commencer par là, les instruire, les sensibiliser, là, à ça, là, que, le dollar qu'ils mettent à l'épicerie pour un produit, là, il y en a très peu qui va au consommateur... au producteur, ça fait que de là l'importance d'essayer de concentrer les achats sur les produits québécois, puis ça commence quelque part, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Je comprends bien. Non seulement vous avez quand même à justifier pour obtenir un meilleur prix, vous avez aussi à le justifier auprès de ceux qui l'achètent, vous sentez... en tout cas à le défendre.

M. Beauvais (Serge): On entend des préjugés. On entend des préjugés, effectivement, là, que... Je fais 100 heures par semaine puis je n'ai pas la Mercedes, puis c'est comme ça, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci. Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Continuez, M. le député de Kamouraska.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. M. Chiasson, bravo, en tout cas, pour votre présentation, c'est stimulant. C'est quoi, le défi dans le secteur de la pomme?

M. Chiasson (Marc): Dans le secteur de la pomme?

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Les grands défis.

M. Chiasson (Marc): Ah, évidemment, de minimiser l'impact environnemental, c'est primordial, puis ça, ça va passer par une compréhension sans équivoque. Il y a déjà des organismes qui sont très intimement liés à ces orientations-là. L'Institut de recherche et de développement en agroenvironnement contribue énormément par les différents projets de recherche. Sauf qu'il faut, à un moment donné, opérationnaliser avec des démarches ou des pratiques qui vont avoir un impact concret au niveau du milieu, qui peuvent avoir des impacts concrets au niveau de l'exercice de la production de pommes. Puis le défi, ça va être de continuer à supporter adéquatement, là, ce pont-là qui est fait entre la recherche fondamentale puis le pratico-pratique qui se pratique sur nos fermes. Ça, pour moi, c'est capital.

Dans le secteur de la pomme, je vous dirais aussi de cadencer nos améliorations, notre compétitivité mondiale. Vous savez, voilà quelques années, cinq, six ans, quand on achetait une pomme Honeycrisp, ce n'était pas produit au Québec. Puis les nouvelles variétés qui sortent, les nouveaux cultivars qui sont en production sont tellement différents de ce à quoi on a été habitués au fil des années, ça a comme impact qu'il y a un engouement des consommateurs directement. Ça fait qu'on s'est «gearés», il y a eu le Programme de modernisation des vergers, on a arraché des vieux arbres de pommiers McIntosh, qui sont très sensibles aux maladies, donc très sujets à l'utilisation des pesticides, on a remplacé ça par des nouveaux cultivars résistants. Il faut garder la cap là-dessus parce qu'on va toujours, de plus en plus, avoir la menace de l'importation qui vient envahir notre marché intérieur, tu sais.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Dernière question en ce qui me concerne. M. Chiasson, vous vous adonnez... vous faites, en tout cas, de la R&D, de l'innovation, vous en avez parlé tantôt. Est-ce que vous faites appel au crédit d'impôt de R&D pour votre entreprise?

M. Chiasson (Marc): Lorsque c'est nécessaire, oui, on va faire appel à ces différents leviers là qui nous permettent d'amortir...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): ...bénéficiez?

M. Chiasson (Marc): Pas toujours, mais, mettons, comme dans nos prévisions de 2012, on va avoir accès à ça, ça, c'est certain.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Excellent.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, bonjour, M. Chiasson, M. Beauvais. Ma question, c'est: Au niveau de la protection du territoire agricole chez vous, est-ce qu'il y a des pertes de territoire ou si c'est pas mal... ça se maintient ou s'il y a des municipalités qui font des pressions énormes pour essayer de dézoner des terres, des parties? Comment ça se vit chez vous?

M. Beauvais (Serge): Comme dans toutes les municipalités, il y a une certaine pression qui se fait, là, pour dézoner, agrandir le périmètre urbain, ces choses-là. Surtout moi, dans notre région à nous, hein, dans la MRC Memphrémagog, il y a beaucoup, beaucoup de spéculation qui se fait, des gens assez à l'aise, de l'extérieur, qui viennent acheter un bon coin de terrain seulement pour pouvoir se bâtir une maison. Ils vont acheter 100 acres et plus pour pouvoir se bâtir une grosse maison au fond, et ils ne la cultivent même pas, la terre. Ça fait qu'il faut être en compétition un petit peu avec ces gens-là. Ça vient fausser un peu le prix des terres, aussi. Ça fait que ça fait artificiellement gonfler le prix des terres.

Au niveau de la superficie en culture, en tout cas, on en perd un peu. Parce que c'est sûr qu'il y a un peu de friche qui se fait, étant donné la vocation un peu agrotouristique et touristique de certains secteurs de la MRC, là, où est-ce qu'il y a plus de friche qui se développe, là, mais, au niveau du zonage blanc ou vert, là, on en perd un peu tout le temps. Plus vite que les autres? Je ne penserais pas là.

Mais la loi a tellement son importance de rester en force. C'est sûr que les spéculateurs, eux, ça joue dans leur... ça vient leur mettre des bâtons dans les roues, là, mais, quand on vit de l'agriculture puis qu'on veut qu'il y en ait encore, là, on se rend compte de l'importance de cette loi-là. Même, il faudrait vraiment lui redonner de la force au lieu d'essayer de répartir ça avec les municipalités, là, il faudrait vraiment donner de la force à cette loi-là, puis, moi, c'est mon idée.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Dans la perspective du livre vert, actuellement on garde une vision à long terme pour maintenir justement la surface agricole qui est cultivable. Qu'est-ce que vous verriez qu'on puisse ajouter justement à la loi, puis c'est quoi que vous pensez qui pourrait contraindre le maximum là pour qu'on garde toutes les terres agricoles le plus possible?

M. Beauvais (Serge): Qu'est-ce qu'il faudrait rajouter...

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Oui. Qu'est-ce qu'il faudrait rajouter dans la vision qu'on a actuellement du développement?

M. Beauvais (Serge): Je pense qu'avec de la rigidité, parce qu'on voit ce qui vient de se faire autour de Montréal, là, c'est le... je pense que de geler... de dégeler le développement... Puis on ne pourra pas nécessairement le geler ad vitam aeternam. Mais, si on peut geler le périmètre urbain dans chaque municipalité, remplir vraiment ça, densifier au maximum... Je pense qu'il va falloir que la loi aille dans ce sens-là.

Au niveau du programme, je n'ai pas le détail de ce que le programme prévoit, là, au niveau de... le nouveau livre vert, dans cette orientation-là, là, mais c'est la rigidité qu'il va falloir garder, là. Il y a des espaces... Dans l'article 59, on fait un bout de chemin, les espaces qu'on accepte qu'ils aillent à la construction, on les concède, là, mais, les parties qui sont vertes, il faut être rigide. Moi, à Magog, aux alentours de la ville, il y a des belles terres agricoles qui ont été laissées pour agrandir le parc industriel, là. Il aurait dû y avoir d'autres endroits disponibles pour ça, là, mais c'est des terres, belles terres agricoles, avec un bon potentiel, qui ont été gaspillées pour ça, là. Le parc est à moitié rempli. L'espace qu'ils ont pris, en plus, est à moitié rempli. C'est un gaspillage incroyable. Parce que la pression des municipalités est très forte au niveau de la CPTAQ, il faut mettre les barrières serrées.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça vous va, M. le député de Saint-Hyacinthe?

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Tu sais, je vous écoute sur le dézonage agricole, mais vous vivez ça peut-être à Magog parce que, Magog, il faut le dire, dans ces coins-là, c'est un site touristique, c'est assez... mais, dans toutes les... beaucoup d'autres petites municipalités où les fermes sont abandonnées, il n'y a plus d'agriculture. Moi, je regarde chez nous, il y a des rangs complets, il n'y a plus d'agriculteur. Toutes les terres... Si on ne permet pas l'habitation du territoire, comment est-ce que les municipalités vont faire pour payer les taxes puis entretenir les routes, garder les écoles ouvertes, garder... Ça va tout ensemble, ça. Il y a peut-être des secteurs où c'est plus problématique puis il y en a d'autres qu'il faudrait peut-être ne pas avoir une loi mur à mur, qu'elle soit modulée.

M. Beauvais (Serge): Bien, possiblement. Mais, dans le...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Beauvais.

M. Beauvais (Serge): Excusez. C'est ça. Dans le cas des municipalités, il faudrait aussi voir pourquoi c'est rendu en friche. L'agriculture n'est plus présente là, c'est... Nous autres, dans la MRC, on a des endroits comme ça que ça se dévitalise au niveau agricole. Là, on est à regarder voir qu'est-ce qu'on peut faire pour encourager l'agriculture à reprendre dans ces secteurs-là, là. On veut regarder pour des comptes de taxes spéciaux pour ces gens-là; on commence à regarder ça avec la MRC. Puis je trouve ça vraiment plaisant que la MRC soit ouverte à ça, de revitaliser la zone agricole.

Mais, les régions qui sont déjà dévitalisées, puis à un trop gros niveau, je ne pense pas que de bâtir une rangée de maisons sur le bord du chemin va... ça va aider à la municipalité à rester en place. Mais je pense qu'il y a d'autres avenues avant de laisser bâtir trop de maisons, là, ramener de l'agriculture sûrement, avec des programmes d'encouragement, des locations de terrain ou des rabais de taxes, là.

**(14 h 50)**

M. Grondin: Moi, j'aimerais, dans le livre vert... Est-ce que vous êtes... Comme, moi, ma vision, c'est qu'avec tous les produits, là... Je vous vois, là, vous, vous êtes pas mal dans le domaine biologique. Le monde agricole... J'ai été un producteur de lait biologique, moi, mais j'étais trop en avant de mon temps, et ça... je n'étais pas capable de vendre le lait, dans le temps. Ça fait que c'est un monde vivant, le milieu agricole. Travailler avec ça, ça prend des gens passionnés, parce qu'on sait que ça coûte plus cher, ça prend plus de temps, et tout ça. Mais c'est sûr qu'on est capable de tout... on est capable de tout combattre les bibittes, même en passant par le sexe, là. On leur vendra du Viagra, je ne sais pas trop quoi, là.

Mais, moi, j'aimerais, dans le livre vert, si on avait... On peut prendre toute la ressource, là, qui... le gaspillage qui se fait... On parlait, à matin, des plastiques, le bois, la biomasse, et tout ça. Moi, il me semble que, la vision à long terme, là, on pourrait transformer ça en énergie, en... Mais c'est sûr que, quand on regarde à court terme, on dit: Faire de l'électricité, mettons, à partir du purin de porc, ça coûte plus cher. C'est vrai que ça coûte plus cher, mais par contre on ne le retrouve plus à nulle part dans l'environnement. Si on regarde à long terme, on ne le reverra pas dans l'environnement. On a l'idée qu'en l'envoyant dans l'environnement, en ne le traitant pas, ça ne nous reviendra jamais. Mais la terre est ronde, hein? Tout ce qu'on envoie en haut, ça nous revient à un moment donné, un jour ou l'autre, on ne sait pas quand, mais on va l'avoir.

Alors, moi, il me semble que, dans une politique, là, de... on devrait regarder tout ce qu'on peut faire d'énergie et qu'on peut utiliser, il me semble qu'on devrait mettre ça dans... et encourager les gens qui vont travailler dans ce sens-là. Parce qu'on sait très bien... Je vous vois aller avec vos pommes, là, vous, là, je suis certain que de produire des pommes chez vous ou produire... ce que vous produisez coûte plus cher, à l'autre qui va arriver avec un insecticide, puis il va régler le problème dans l'espace de... 15 minutes, c'est réglé. Vous, vous devez travailler des fois une semaine puis deux semaines pour régler votre problème, mais...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Beauce-Nord...

M. Grondin: C'est beau.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): ...vous devez vous arrêter là. Merci beaucoup. Notre temps est écoulé. M. Beauvais, M. Chiasson, merci. Ça a été très intéressant, l'échange qu'on a eu ensemble.

Et j'inviterais maintenant l'Union des producteurs agricoles de Lac-Mégantic à se présenter. Je suspends quelques minutes.

(Suspension de la séance à 14 h 52)

 

(Reprise à 14 h 55)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Nous reprenons nos travaux. Nous recevons l'Union des producteurs agricoles du Lac-Mégantic, j'inviterais les personnes en place à se présenter.

Syndicat du secteur de l'UPA de Lac-Mégantic

Mme Girard (Lyne): Bonjour, M. le Président, ainsi que les membres de la commission. Merci de nous donner l'occasion de venir vous partager notre point de vue de la vie agricole.

Je me présente, Lyne Girard, productrice et transformatrice en production acéricole biologique ainsi qu'administratrice au syndicat de l'UPA de Lac-Mégantic. Avec moi, M. Pierre Leblond, producteur acéricole et président du syndicat de Lac-Mégantic.

J'ai grandi sur une ferme en production laitière. Mon parcours a été en foresterie et en agriculture. Je suis copropriétaire avec mon conjoint d'une érablière depuis 1997. Je fais de la transformation de produits de l'érable depuis le début des années quatre-vingt-dix sur une base artisanale. Avec la venue du marché public, en 2005, à Lac-Mégantic, j'ai mis sur pied une petite entreprise de transformation de produits d'érable, et, à la fin de l'année 2011, avec deux autres productrices acéricoles de la région, nous avons décidé de nous unir pour la mise en marché commune de nos produits. Il est clair, pour moi, que l'union des forces nous permet de construire de belles choses.

Nous venons vous présenter quelques-unes des réalisations du syndicat de l'UPA de Lac-Mégantic, qui regroupe les productrices et les producteurs agricoles des municipalités de Saint-Augustin-de-Woburn, Val-Racine, Piopolis, Frontenac, Lac-Mégantic, Marston, Milan, Nantes, Sainte-Cécile-de-Whitton, Audet, Saint-Romain et Stornoway.

La plus grande part des revenus agricoles de la région provient des productions laitières, acéricoles et forestières.

En 2004, on comptait 260 fermes, et le taux d'adhésion était de 94 %. En 2011, nous en avons 264, puis le taux d'adhésion est de 98 %.

L'Union des producteurs agricoles de Lac-Mégantic soutient la démarche présentée dans le livre vert Donner le goût du Québec dans la mesure où elle reflète notre vision de la future politique agricole et agroalimentaire du Québec. Le pouvoir de se nourrir repose sur une agriculture réalisée par une multitude de fermes ancrées dans toutes les régions, favorisant à la population des aliments sains, produits dans une perspective de développement durable et d'équité.

Donner le goût du Québec commence par la mise en place de marchés de proximité pour des gens qu'on connaît, par des gens qu'on connaît, impliquant la confiance de l'un envers l'autre, de la production à la consommation de produits sains pour les familles dans toutes les régions du Québec.

Nous, productrices et producteurs agricoles, contribuons à l'essor économique du Québec et à la vitalité de notre région par la vente de produits locaux. La qualité de vie s'en voit améliorée, le rapport entre les individus est resserré entre ces derniers, et ces derniers sont plus généreux entre eux.

L'Union des productrices et producteurs agricoles facilite les échanges entre les différents intervenants et le monde agricole. Il s'agit d'une union qui agit partout au Québec et dans tous les secteurs de production, au sein de laquelle les agricultrices, agriculteurs et forestiers concertent leurs efforts pour bien vivre de leurs professions et nourrir sainement la population.

L'union de Lac-Mégantic, c'est un outil de cohésion au bénéfice de sa communauté. Au fil des ans, le syndicat a permis aux productrices et producteurs agricoles sur son territoire de s'accomplir dans de grandes réalisations.

Dans nos implications, les agricultrices et agriculteurs, à l'aide de leur organisation syndicale, s'impliquent dans leur communauté en temps régulier ou en temps de crise. C'est le cas du syndicat, en voici quelques exemples.

En janvier 1998, le verglas. Notre région est grandement touchée, le syndicat est mis à contribution, des équipes de travailleurs sont formées pour le nettoyage des érablières lourdement endommagées. La secrétaire du syndicat est allée prêter main-forte aux employés du MAPAQ tellement la demande était nombreuse. L'UPA de Lac-Mégantic a oeuvré en concertation avec sa fédération régionale et les gouvernements afin de trouver une façon raisonnable de dédommager les productrices et producteurs acéricoles.

**(15 heures)**

En 1996, un comité agroforestier est créé au CLD du Granit. Deux sièges sont réservés pour des représentants de l'Union des producteurs. Résultat: la MRC embauche un premier agent agroforestier. L'union participe, contribue financièrement à cet organisme-là.

Un voyage en France est organisé par le CLD du Granit en 1999 pour connaître le fonctionnement d'une école par alternance travail-études. Thérèse Vallée, la présidente du syndicat de l'époque, était du voyage, et le projet s'est concrétisé la même année. La maison familiale rurale de Saint-Romain a ouvert ses portes. Le syndicat a collaboré financièrement et bénévolement au projet.

En 2002, le syndicat a déposé un mémoire et a été entendu par la Commission des affaires municipales dans le dossier des fusions des municipalités.

En 2004, l'UPA de Lac-Mégantic est intervenue dans le dossier de captage de l'eau potable par la ville de Lac-Mégantic. Compte tenu des impacts anticipés, principalement en matière de protection du territoire et des activités agricoles ainsi que de la disponibilité de l'eau en quantité et en qualité suffisantes pour les entreprises agricoles à proximité du puits de captage, l'UPA de Lac-Mégantic défend l'intérêt des producteurs auprès de la ville, de la CPTAQ et du MDDEP. Depuis l'implantation du puits, un représentant participe activement aux travaux d'un comité de vigilance qui s'assure de traiter les plaintes en lien avec l'exploitation du puits.

L'UPA de Lac-Mégantic donne son appui aussi aux partenaires, par exemple, par le projet d'implantation et de démonstration de cultures de plantes forestières non ligneuses en érablière en 2008. En partenariat avec le CLD du Granit, le MAPAQ et La Clef des Champs, une ferme de Saint-Camille, l'UPA de Lac-Mégantic a appuyé le projet et invite ses membres à y participer. Le but est d'offrir un site expérimental de culture servant au MAPAQ, qui organise des visites terrain et de démonstration.

L'UPA participe aussi, collabore avec le club agroenvironnemental à un projet de contrôle de fougères dans les érablières depuis 2011. Les études sont en cours.

Le marché public. En 2005, le syndicat démarre un marché public à Lac-Mégantic avec l'aide des productrices et producteurs de la région, du MAPAQ et du CLD. Le marché public ayant bien pris son envol à l'automne 2007, les démarches sont entamées afin de devenir une coopérative de producteurs dès le début de l'année 2008. La nouvelle coop permettra de dégager l'UPA de Lac-Mégantic du rôle de coordination et d'organisation du marché public et des événements mensuels.

Les productrices et producteurs agricoles qui ont soutenu le marché public et qui, de cette façon, ont contribué à l'amélioration de l'image de la profession auprès du public furent récompensés par le congrès de l'UPA de 2008 en recevant le prix Jean-Paul--Raymond pour cette initiative. Le rôle du marché public dans une communauté est, entre autres, de resserrer les liens entre les individus d'une même communauté.

Pour les portes ouvertes, en Estrie, l'UPA de Lac-Mégantic est le syndicat qui a participé au plus grand nombre d'éditions de l'événement Portes ouvertes sur les fermes du Québec depuis sa première édition en 2003, soit huit années sur neuf. Cette activité est très appréciée autant des productrices et producteurs que du grand public, qui en apprennent toujours plus sur le monde agricole. Les échanges permettent de rapprocher les gens.

En prévention. Pour les familles des productrices et producteurs, la ferme est à la fois un terrain de jeu et un milieu de travail. Il y a trop d'accidents impliquant des enfants sur les fermes.

En juin 2009, sur la Ferme Agribouf, l'UPA de Lac-Mégantic réalise son premier atelier Sécurijours, qui consiste en un camp de prévention en sécurité sur les fermes. 74 enfants de la troisième à la sixième année des écoles avoisinantes, Milan, Lambton, Nantes, Saint-Romain et Stornoway, ont participé à cette activité. La journée s'est déroulée sous forme d'ateliers où les jeunes ont participé à tour de rôle. Nous les avons sensibilisés sur les dangers de la prise de force du tracteur, des dangers du VTT, de la circulation des tracteurs et bien d'autres sujets. Nous avons aussi profité de l'occasion pour sensibiliser les enfants à la consommation locale et responsable à l'aide d'un dîner à saveur locale servi dans de la vaisselle compostable.

En conclusion, pour moi, il est clair que, si nous voulons construire quelque chose avec une vision à long terme, nous devons être unis et marcher ensemble dans la même direction. Le fait d'avoir une seule association qui nous représente est un avantage; cette dernière qui est composée de l'ensemble des productrices et producteurs agricoles que nous avons élus ainsi que des employés qui ont à coeur l'avenir de l'agriculture. Imaginez s'il y en avait deux ou même trois, associations! Alors, si nous voulions être certains d'être bien représentés, est-ce qu'il faudrait siéger partout puis payer partout pour arriver à quelque chose? Moi, c'est la question que je me pose. Puis comment comptez-vous augmenter nos revenus en nous enlevant le droit d'avoir une association qui nous représente efficacement, alors que les productrices et les producteurs agricoles manifestent clairement, à 94 % d'adhésion, leur volonté d'être représentés par une seule union, qui est l'Union des productrices et producteurs agricoles du Québec? Ça termine.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci beaucoup, Mme Girard. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, Mme Girard. À ce que je vois dans votre présentation, vous nous avez mentionné que vous avez fait un virage pour une production acéricole biologique. Est-ce que c'est depuis le début, en 1997, ou si ça a évolué? C'est juste...

Mme Girard (Lyne): En fait, ce n'est pas un virage. Moi, j'ai grandi sur une ferme laitière, qui est toujours en production, ça se trouve à être mon frère qui a repris la ferme familiale. Et, moi, avec mon conjoint, dans une autre municipalité, on a démarré une entreprise ensemble.

M. Corbeil: O.K. Dans votre secteur, le nombre de fermes, selon l'énoncé que vous nous donnez, est stable. Est-ce qu'on assiste à un même phénomène que les autres endroits? Il y a eu évolution, il y a eu virage, il y a eu changement de propriétés... de propriétaires, je veux dire, pas de propriétés, là. Parce que 260, 264, là...

Mme Girard (Lyne): C'est sûr que, chez nous, le secteur, c'est beaucoup acéricole, forestier. Ça fait qu'il y a quelques... Il y a des entreprises laitières, des entreprises bovines, il y a des maraîchers, mais le gros du secteur, c'est vraiment dans ces productions-là.

M. Corbeil: J'aimerais vous entendre davantage... D'abord, juste une précision, dans votre mémoire, vous nous parlez de l'implication de votre organisation dans la maison familiale rurale de Saint-Romain, qui a ouvert ses portes en 1999. Est-ce qu'elle est encore opérante aujourd'hui?

Mme Girard (Lyne): Oui.

M. Corbeil: Oui. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus sur maison familiale rurale? Moi, j'ai découvert ça au Bas-Saint-Laurent l'autre jour. Je voudrais juste savoir comment ça fonctionne chez vous.

Mme Girard (Lyne): O.K. Bien, c'est une école qui fonctionne en alternance travail-études. Les jeunes qui se retrouvent dans ce type d'école là, c'est qu'ils sont deux semaines à faire des travaux théoriques et deux semaines à aller appliquer sur le terrain ce qu'ils viennent d'apprendre. Ça fait que c'est une autre façon d'obtenir le diplôme d'études secondaires, le diplôme dans une spécialité qui les amène ensuite vers le cégep ou l'université sans aucun problème.

M. Corbeil: Et ça contribue... C'est rattaché à la commission scolaire chez vous.

Mme Girard (Lyne): Oui.

M. Corbeil: Ça contribue probablement à contrer le décrochage.

Mme Girard (Lyne): Effectivement. Oui. Oui, parce que c'est sûr qu'il y a des jeunes qui vont... Aller s'asseoir de façon assidue puis d'écouter de façon magistrale, là, le professeur, il y en a pour qui c'est très difficile, qui préfèrent être capables de toucher à ce qu'ils apprennent plutôt que de juste l'entendre, effectivement.

M. Corbeil: Deux autres éléments que vous avez donnés dans votre mémoire qui attirent mon attention et qui piquent un peu ma curiosité: le projet d'implantation et de démonstration de cultures de plantes forestières non ligneuses en érablière, et le club agroenvironnemental a un projet de contrôle des fougères dans les érablières. Pourriez-vous élaborer un peu plus là-dessus?

**(15 h 10)**

Mme Girard (Lyne): Pour le projet de plantes forestières non ligneuses, moi, j'y ai participé personnellement, là, avec mon entreprise, et le but, c'est vraiment de... Bon, il y a eu différentes plantes d'implantées, tels le ginseng, l'actée, la sanguinaire, et c'est de voir à... c'est de diversifier le potentiel. Les arbres sont là. C'est sûr qu'on fait la récolte de l'eau d'érable au printemps, mais, le reste de l'année, bien, il y a une diversification de nos revenus qu'on peut aller chercher. Et c'était le but de cet exercice-là, pour faire des études pour par la suite arriver à des résultats concrets, à plus grande échelle. Parce que là les parcelles, ce n'est pas immense. On ne parle pas d'hectares, on parle de parcelles de 100 mètres. On s'en tient à ça pour l'instant.

M. Corbeil: Et est-ce que les résultats obtenus actuellement sont encourageants pour maintenir, ou agrandir, ou développer davantage?

Mme Girard (Lyne): Bien, chez moi, oui, effectivement. Il y en a pour qui ce n'est pas le cas, le terrain ne s'y prête pas bien.

M. Corbeil: J'aimerais que vous me... M. le Président, je ne veux pas abuser du temps.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous n'abusez en rien, monsieur. Vous êtes dans votre temps.

M. Corbeil: O.K. Alors, je voudrais qu'on élabore davantage sur... parce que ça, ça rejoint aussi le livre vert, un peu tout ce qu'on a discuté, la formation des jeunes, la relève, la diversification. On est dans ça dans le livre vert. Marché public, vous avez lancé ça, vous avez contribué au démarrage en 2005. Vous avez entrepris des démarches pour qu'il soit converti en coopérative. Marché public Lac-Mégantic, je le vois sur la carte qui nous a été remise ce matin, dans les marchés des Cantons-de-l'Est. Je voudrais que vous nous donniez un état de la situation de votre marché public aujourd'hui.

Mme Girard (Lyne): Bien, je peux vous dire que c'est assez troublant.

M. Corbeil: L'été dernier.

Mme Girard (Lyne): Oui. C'est assez troublant.

M. Corbeil: Ah, oui?

Mme Girard (Lyne): Chez nous, bon, on l'a démarré en 2005, et je faisais partie de ce projet-là. C'est un projet qui me tenait à coeur énormément, sauf que, dans le temps, on s'essouffle, parce qu'il faut voir à tout, il faut tout faire au niveau de la gestion, mais on a... Chacun a son entreprise personnelle, mais là, en plus, il faut embarquer une autre entreprise. Les bénévoles sont là un bout de temps, ils ne sont plus là. Les producteurs, les productrices, bien, c'est sûr qu'avec les années, à un moment donné, si on veut s'occuper de ce qui nous fait vivre le plus, bien, forcément, on s'essouffle, on délaisse.

Donc, ça prendrait des ressources au niveau des marchés publics pour... au niveau de la gestion, de la coordination des marchés, de faire en sorte que, dans une région comme la nôtre, avec... Il y en a plusieurs, marchés publics. Mais, si on avait de l'aide pour les structurer comme il faut, pour que ces entreprises-là... finalement, ça devient une entreprise, mais qu'ils arrêtent de vivoter, mais qu'ils permettent aux gens qui s'y déplacent de vraiment faire des affaires qui sont intéressantes. Sinon, il y a comme un retrait qui se fait, là. En tout cas, chez nous, à Lac-Mégantic, c'est ce qui est en train de se faire, malheureusement.

M. Corbeil: Donc, vous soulevez une problématique d'organisation, là.

Mme Girard (Lyne): Oui. Oui, tout à fait, qui devient trop lourde à porter tout seul.

M. Corbeil: Mais est-ce que vous avez quand même... Mettons qu'il y a un problème d'organisation, est-ce que les bonnes années où il n'y en avait pas, de problèmes d'organisation, il y avait un élan, il y avait un engouement, la population était au rendez-vous? Est-ce que ça a donné des résultats ou bien si c'est...

Mme Girard (Lyne): Bien, oui. Moi, ce que je disais aussi quand... dans ma présentation, au tout début, moi, c'est ce qui a fait en sorte que j'ai démarré une entreprise vraiment, là, je suis sortie du côté qui était très artisanal au départ, vraiment d'avoir mon atelier de transformation, de développer des produits, d'intégrer le marché. J'ai des produits qui se retrouvent dans différents marchés. Le marché de solidarité qu'il y a à Sherbrooke, mes produits sont là. Je suis dans des boutiques, j'en ai même à Montréal. C'est ce qui m'a permis de venir au monde, finalement, en transformation de sirop d'érable, à travers toute une structure qui permet le développement, là. Même si elle est encadrée, cette production-là, on est capable de se développer pareil.

M. Corbeil: Vous avez eu du soutien pour démarrer votre... en 1997, là, ou dans les années où vous avez pris de l'expansion de votre entreprise de produits acéricoles biologiques? Du soutien gouvernemental, je parle, de l'aide...

Mme Girard (Lyne): Pour mon entreprise à moi, non. Non. Ça, je l'ai fait...

M. Corbeil: Dans vos efforts de commercialisation non plus?

Mme Girard (Lyne): Bien, en 2011, oui, là où je me suis associée avec deux autres productrices en transformation. On s'est unies ensemble pour développer une entreprise qui va s'occuper de notre mise en marché, et là on s'est tournées vers les circuits courts. Là, on a eu du soutien du ministère pour développer cette entreprise-là.

M. Corbeil: M. Leblond, vous êtes dans la production acéricole également, probablement traditionnelle, qu'on appelle, là, pas biologique, par opposition.

M. Leblond (Pierre): Je suis biologique aussi, en production biologique aussi.

M. Corbeil: Biologique aussi? Ah! O.K. Ça n'avait pas été mentionné.

M. Leblond (Pierre): Mais, moi, je me contente de faire du vrac seulement.

M. Corbeil: Vous êtes dans le vrac?

M. Leblond (Pierre): Oui.

M. Corbeil: O.K. Est-ce qu'il y a des difficultés auxquelles vous avez été confronté qui mériteraient qu'on apporte des solutions à travers notre projet de politique bioalimentaire?

M. Leblond (Pierre): Bien, ce serait de nous aider à supporter la réserve stratégique, la réserve mondiale de sirop d'érable. Parce que présentement, en Estrie, juste en Estrie, il y a 36 millions de dollars qui dorment en inventaire.

M. Corbeil: Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur votre suggestion d'aider à supporter la réserve mondiale de sirop d'érable?

M. Leblond (Pierre): Présentement, ce sont les...

M. Corbeil: La réserve stratégique.

M. Leblond (Pierre): Oui. Présentement, ce sont les producteurs acéricoles qui se sont regroupés dans une mise en marché ordonnée et qui supportent à eux seuls la réserve stratégique de sirop mondiale, présentement. Parce que le Québec, c'est le plus grand producteur de sirop au monde, donc c'est nous autres qui supportent la réserve, et on aimerait beaucoup...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez-y, continuez, monsieur.

M. Leblond (Pierre): O.K. Nous aimerions beaucoup avoir un support gouvernemental pour nous aider à supporter cette réserve-là.

M. Corbeil: Justement, un des premiers plans sectoriels qu'on a lancés, c'est avec la Fédération des producteurs acéricoles, pour développer les marchés, supporter la mise en réserve de sirop d'érable.

Que pensez-vous des dernières modifications de la loi M-35 qui ont été apportées à travers le projet de loi n° 21? Et en voyez-vous d'autres, modifications, qu'on devrait apporter à la loi M-35, puisqu'on est dans ça, là, avec le livre vert?

M. Leblond (Pierre): Je sais que la loi n° 21, ça a été bienvenu, là, parce que la fédération en avait vraiment besoin, puis en même temps ça a aidé toutes les autres productions agricoles, tous les autres plans conjoints. Vite comme ça, là, il y en a sûrement, là, mais qui ne me viennent pas à l'idée.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le ministre, je crois que le député de Rivière-du-Loup veut mettre son grain de sel.

M. D'Amour: Non, une parenthèse, simplement, monsieur. Le... non pas le rôle de la fédération, mais le message de la fédération à l'égard de ce que vous soulevez maintenant, là, lorsque vous parlez de soutenir... Mais la fédération dit quoi? Les solutions qui ont été envisagées, on en est où là-dessus?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Leblond.

M. Leblond (Pierre): Présentement?

M. D'Amour: Oui.

M. Leblond (Pierre): Je ne comprends pas, là, votre question.

M. D'Amour: Bien, vous soulevez une problématique. Alors, cette problématique, la fédération y répond de quelle manière à ce moment-ci?

M. Leblond (Pierre): Ce serait par un apport, d'une façon quelconque, là, gouvernemental, là, pour nous aider à supporter cet inventaire. Lyne, je crois que tu as de quoi à rajouter.

Mme Girard (Lyne): Bien, oui.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, oui, Mme Girard.

Mme Girard (Lyne): Je pourrais peut-être ajouter une information.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez, Mme Girard.

Mme Girard (Lyne): Au niveau des programmes gouvernementaux, il y a le programme Agri-investissement qui est utilisé, comme c'est là, par une portion de producteurs. Puis ce qui reste dans les coffres, là, c'est 2 millions de dollars qui annuellement n'est pas utilisé par les producteurs, faute de... Bon, dans certains cas, il y a des producteurs qui, bon, font affaire avec... le comptable, c'est le voisin, c'est l'ami, puis ce n'est pas une personne qui est accréditée au niveau de La Financière agricole pour être capable de compléter le fameux document en question pour aller chercher ces argents-là. Puis le comptable, s'il le dit, bien, il perd son client. Donc, il y a une problématique là.

Mais cet argent-là qui dort dans les coffres pourrait très bien être utilisé pour financer ne serait-ce que les intérêts d'une marge de crédit. Il y a ça comme solution potentielle, là, qui pourrait servir à ramener de l'argent aux producteurs, que... Cette portion-là, comme c'est là, il y a 19 % de la production qui est là, en inventaire, mais, s'il n'y en avait que, mettons, 50 % qui étaient... qui nous revenaient, bien, c'est certain que c'est de l'argent qui est réinvesti dans l'économie. Parce que là, bon, on a tous des investissements à faire, puis là tout le monde est comme un petit peu en arrêt parce qu'on a un manque d'argent à ce niveau-là. Ça fait que, s'il y avait un soutien, ce serait intéressant pour l'ensemble de la production.

**(15 h 20)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député... M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: Écoutez, je me fais non pas l'avocat du diable, mais est-ce qu'il n'y aurait pas une façon non plus d'améliorer le marché, parce que finalement ce serait peut-être une façon plus simple, moins coûteuse pour tout le monde aussi, puis on arriverait au même résultat si le marché se déroulait un peu mieux au niveau de la vente et de la transformation?

Mme Girard (Lyne): Bien, je pense qu'au niveau de nos prélevés qu'on verse, bien, c'est... il y a déjà des argents. Le fameux 0,12 $ de prélevé qu'on verse à notre fédération pour chaque livre de sirop qui est vendue, bien, il y en a une portion qui s'en va au niveau de la recherche, du contrôle de la qualité, de la gestion des surplus puis au niveau des ventes. C'est sûr qu'il faut continuer à travailler les marchés, il faut continuer à développer. Mais par contre, si on veut être capable de développer... Parce qu'une année on peut avoir une bien grosse production, l'année suivante il n'y en a presque pas. Ça fait qu'il faut qu'il y ait un inventaire, c'est stratégique, c'est important.

Puis, même au niveau des prix du sirop d'érable, si vous vous rappelez, en 2009, les prix, bon, là, les gens disaient: Bien, le sirop, il se vend jusqu'à 10 $, 11 $ et 12 $ la canne de sirop d'érable au niveau des consommateurs. Mais il n'y en avait plus, de sirop, en inventaire à ce moment-là. En 2010, on a commencé à constituer une réserve, et le prix a baissé autour de 8,80 $, d'après les études. Et, en 2011, on est rendu à 37 millions de livres en inventaire, et le prix, à la baisse, encore au niveau du consommateur, il est rendu à une moyenne de 2,20 $ environ. Ça fait que ça a un impact qui est très positif, cet inventaire-là, pour le consommateur, puis, pour les producteurs, bien, nous autres, on n'a pas une baisse de prix, on a une stabilité dans nos prix qui nous sont versés.

Ça fait que, si on avait ce soutien-là de l'État qui nous aide à supporter ça, bien, ce serait davantage... tout le monde serait encore plus gagnant dans cette affaire-là.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va? M. le député de Kamouraska, il reste une minute. Rivière-du-Loup.

M. Corbeil: Bien, en fait, j'aimerais juste mentionner à madame que, lors de la rencontre qu'on a eue au mois de novembre, je pense, ou début décembre dernier, à Saint-Antoine-de-Tilly, avec la fédération, c'est un dossier qui a été soulevé, et les officiers au ministère travaillent en collaboration avec votre fédération pour trouver une piste de solution là-dessus. C'est des liquidités, qu'elles soient en sirop dans des barils dans un entrepôt ou qu'elles soient en dollars dans vos poches, pour continuer à développer vos entreprises. Je pense que c'est quelque chose qui mérite d'être très sérieusement regardé, étudié et solutionné. Alors, on est en mode solution là-dessus.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. le ministre.

M. Corbeil: Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Kamouraska-Témiscouata, à vous la parole.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Girard. Bonjour, M. Leblond... c'est bien ça. Vous êtes... Le secteur de l'érable, c'est un marché d'exportation, c'est clair, globalement c'est un marché d'exportation. Qu'en est-il pour le produit biologique, le sirop biologique? Est-ce qu'il est aussi un... Est-ce qu'il y a un marché d'exportation pour ça, ou il prend plutôt un marché local? Je voudrais savoir du côté du sirop biologique.

Mme Girard (Lyne): Je pense que c'est les deux, et il est en développement de plus en plus, mais autant... l'exportation, beaucoup vers l'Europe. Je pense que c'est plus vers ces marchés-là que le sirop d'érable biologique s'en va.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K. Mais il ne se mélange pas, votre sirop d'érable biologique, là? Est-ce qu'il suit... Il reste toujours biologique, il est identifié, il a un canal...

Mme Girard (Lyne): Oui, effectivement.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): ...qu'il n'est pas mélangé, là?

Mme Girard (Lyne): Il n'est pas mélangé. La beauté du système acéricole, c'est que, chez nous, chaque producteur, on... Ce n'est pas une citerne, là, c'est des barils de, bon, différents gallonages, là. Comme chez nous, c'est 34 gallons par baril, il y a un numéro d'identification, puis, quand le sirop part de chez nous -- même, c'est un numéro qui est encavé dans le baril, donc il ne peut pas être trafiqué, ce numéro-là -- il s'en va soit chez un acheteur soit à la fédération, dépendant où on l'envoie pour la portion de vrac qu'on fait, et il est étiqueté. Puis ce produit-là, c'est un produit biologique, puis il va suivre la chaîne biologique au complet, là.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Et est-ce que vous avez un prix distinct parce qu'il est biologique?

Mme Girard (Lyne): Oui. Oui, il y a une majoration de 0,15 $ la livre pour le sirop biologique.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K. M. le ministre, tout à l'heure, il parlait du projet de loi n° 21, qui a été adopté à la fin de la période des travaux. Lors de cette étape, une des étapes entre autres, il y avait des préoccupations de producteurs acéricoles, d'inquiétudes par rapport à de futurs producteurs mondiaux qui nous menacent, qui sont plus de... au sud, là, du Québec, là, dans les États du nord. Est-ce que ça vous inquiète en termes de potentiel de vif concurrents éventuellement?

Mme Girard (Lyne): Bien, c'est sûr que oui, mais... Bon. L'automne dernier, on a eu une conférence. Lors de l'assemblée générale, il y a toujours une demi-journée de conférence. Et il y a... Je ne me souviens pas du nom du conférencier, mais il est venu nous présenter le portrait, là, de l'influence climatique. Bon, des fois, bon, c'est positif, peut-être que ça ne l'est pas. Mais il y a comme une migration qui se fait. C'est que les températures réchauffent.

C'est sûr que les Américains, oui, ils en ont, des érables, puis ils pourraient nous enterrer de sirop d'érable rien qu'en masse. Sauf que, comme c'est là, ils utilisent... La portion de sirop d'érable qu'eux produisent, là, c'est 30 millions de livres, puis, dans l'émission de contingents qu'il y a eu dernièrement, là, dans les dernières années, on en a émis autant qu'eux autres. De ce qu'eux autres produisent annuellement, nous autres, c'était juste... c'était de la relève, là, qui s'installait en acériculture.

Ça fait qu'il y a une certaine menace, sauf qu'avec le réchauffement climatique ce qu'on nous expliquait aussi, c'est que la saison migre, donc les volumes vont diminuer aux États-Unis, tranquillement. Puis c'est sûr qu'éventuellement ça va nous toucher aussi, là. Il prévoyait, je pense, il me semble, c'est 50 ans, que les érables vont migrer vers le nord, finalement.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. C'est à vous la parole.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci. Vous avez abordé la question, Mme Girard, des produits forestiers non ligneux, hein, dans une érablière, ce qui est très intéressant puis qui semble vouloir se développer. Êtes-vous accompagnée d'une expertise par rapport à ce que vous êtes en train de faire comme études ou comme... Bien, je vous dis ça, je vais vous dire pourquoi, parce qu'il y a un centre de transfert justement qui est sur les bioproduits et qui est spécialisé dans les produits forestiers ligneux. Et, quand une entreprise fait affaire avec un centre de transfert de technologie, bien, il y a des conditions de crédit d'impôt et de mesures allant jusqu'à 40 % des coûts d'investissement. Est-ce que vous êtes au fait de cela? C'est des mesures de soutien qui existent mais qui ne sont pas souvent connues par les gens qui sont dans les secteurs.

Mme Girard (Lyne): Effectivement, non, je n'étais pas au fait de ça.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): O.K. Bien. Émilien?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Oui, merci. Dans votre entrée de jeu, vous mentionnez qu'il y a des productions laitières, acéricoles et forestières. Mais j'aimerais savoir la proportion, combien il y a de fermes forestières chez vous, combien il y a de fermes laitières? Et quelle est la proportion que vous pouvez donner à chacune et l'importance qui est pour votre région?

Mme Girard (Lyne): Bon, la production laitière, je ne pourrais pas vous le décortiquer complètement, mais, au niveau acéricole et forestier, la moitié des entreprises déclarent des revenus, déclarent vivre de produits acéricoles et forestiers. Ça fait que, sur 264, il y en a 132 dans notre secteur qui ne vivent que de ça.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Les autres productions, c'est plus laitier.

Mme Girard (Lyne): C'est réparti au niveau de la production laitière, production bovine. Il y a quelques maraîchers, il y a aussi une entreprise ovine.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): O.K. Chez vous, au niveau de la relève, la relève agricole, que ce soit pour les fermes forestières, les fermes acéricoles ou bien les fermes laitières ou bovines, est-ce que la relève est importante? Est-ce que vous avez de la difficulté au niveau... Parce qu'il semble que vous avez plus de fermes aujourd'hui qu'il y en avait il y a sept ans. Donc, ça semble être quand même viable. Est-ce qu'il y a des pertes dans certaines productions puis des gains dans d'autres? J'aimerais savoir.

Mme Girard (Lyne): Bien, oui, au niveau laitier, au niveau bovin, il y a des pertes. Mais, chez nous, c'est que c'est beaucoup forestier, donc des érablières, et c'est là la croissance. C'est pour ça qu'il y a eu une augmentation. Sinon, on verrait une diminution des entreprises. Celles qu'il y a... laitières, bovins, il y en a moins qu'il y en avait. Mais je n'ai pas les chiffres.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Au niveau de la relève, est-ce qu'il y a des difficultés, à ce moment-là, chez vous?

**(15 h 30)**

Mme Girard (Lyne): Bien, oui, je pense que ça explique en partie pourquoi il y a des entreprises qui ont fermé.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): O.K.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va? M. le député de Kamouraska-Témiscouata, ça va? M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, je vois que j'ai deux compétiteurs devant moi. Je suis un producteur de sirop d'érable, moi aussi.

Mme Girard (Lyne): On a le meilleur.

M. Grondin: C'est vrai qu'on a le meilleur. Et, pour en faire des tests, quand vous me parlez du sirop américain... Remarquez, chaque érablière a son propre goût. Mais, quand vous allez en dehors, en voyage, achetez une canne de sirop pour le fun et goûtez-y, vous allez voir, la réponse, vous l'avez tout de suite.

Je trouve que votre idée de support à l'inventaire... je trouve qu'elle est très importante, parce qu'il faut calculer que le sirop d'érable, c'est une production qui dure un mois, un mois, un mois et demi, maximum, et là il faut supporter toute cette production-là. Alors, si on est chanceux, que la température est bonne, ça va bien, si on est moins chanceux, ça va moins bien.

Vous parlez que vous avez 0,15 $ la livre, de plus, quand on est biologique, mais il faut que vous continuiez votre phrase: ça coûte plus cher aussi faire du sirop biologique. Parce que, moi aussi, j'ai été certifié biologique dans le sirop d'érable, et il y a des coûts à ça. C'est plus facile dans le conventionnel où on règle des problèmes peut-être, des fois, plus rapidement dans le nettoyage de nos contenants, mais, quand on est biologique, il faut s'y prendre autrement, alors il y a des coûts, il y a des coûts à supporter.

J'aimerais ça... Les érablières dans votre secteur, c'est quoi... Concernant les pluies acides, l'acidité des sols, comment est-ce que vous réglez ça? Est-ce que vous avez fait des tests dans le secteur de l'Estrie? Est-ce qu'il y a beaucoup d'acide? Est-ce que vous êtes obligés de mettre des chaux ou si vous ne mettez rien? C'est quoi que... Est-ce que vous avez des tests de faits?

Mme Girard (Lyne): Bien, je pense que ça se fait plus de façon individuelle, par entreprise, mais de plus en plus avec le Club acéricole du Granit, qui dessert l'Estrie et va dans différentes régions aussi, là, il y en a de plus en plus. Les gens sont de plus en plus sensibilisés au fait que nos érablières, si on ne veut pas les perdre, ils dépérissent, donc il faut intervenir. Et c'est sûr que la venue du club d'encadrement, ça, c'est une bonne chose.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Leblond, vous n'avez pas envie de rajouter quelque chose? Non? J'ai senti ça, là.

M. Leblond (Pierre): Oui, c'est ça, c'est... Bien, de plus en plus, on constate l'établissement du hêtre dans les érablières. Ça fait que l'érable a une feuille qui est acide, le hêtre a une feuille qui est acide, et puis ça acidifie plus le sol, ça fait que, de plus en plus, l'érable a de la difficulté à s'établir. Ça fait qu'il faut être vigilant et puis faire faire des analyses de sol appropriées par des gens qui connaissent ça, faire étudier ça par des ingénieurs forestiers qui connaissent ça pour faire les bons amendements. Parce que, si on fait un amendement qui n'est pas... qui est recommandé mais qui n'est pas bon, mais ça peut accélérer le dépérissement. Alors, il faut être vigilant et puis aller voir les bonnes personnes pour faire ce qu'il faut faire.

M. Grondin: Très intéressant. Continuez, c'est bien.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Monsieur... c'est-à-dire Mme Girard, M. Leblond, merci beaucoup.

M. Leblond (Pierre): Ça fait plaisir.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça a été un échange très intéressant, et bon retour chez vous.

Mme Girard (Lyne): Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): J'inviterais l'Union des producteurs agricoles de La Patrie à se préparer à venir à la table. Et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

 

(Reprise à 15 h 39)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Nous revenons à nos travaux. Nous recevons l'Union des producteurs agricoles de La Patrie, et j'inviterais les gens à se présenter et à nous déposer leur mémoire.

Syndicat du secteur de l'UPA de La Patrie

Mme Prévost (Chantal): Alors, bonjour, M. le Président, Mmes et MM. les députés. Je me présente: Chantal Prévost. Je suis productrice de bovins à La Patrie. Voici mon collègue Claude Morin. Il est producteur laitier. On fait tous les deux partie du C.A. du secteur de La Patrie à l'UPA.

Notre syndicat regroupe des producteurs, productrices agricoles des municipalités de Bury, Scotstown, Chartierville, Notre-Dame-des-Bois et de La Patrie. Pour vous situer, ces municipalités se trouvent au pied du parc national du Mont-Mégantic.

La plus grande partie de nos revenus agricoles proviennent des productions bovines, laitières, acéricoles, forestières ainsi que quelques piscicultures.

Nous sommes heureux d'être ici pour appuyer et soutenir notre organisation et de pouvoir conserver notre accréditation unique.

**(15 h 40)**

Comme dit le dicton, pour savoir où l'on s'en va, il faut savoir d'où l'on vient. En 1924, l'UPA secteur La Patrie a été fondée et s'appelait l'UCC, c'est-à-dire l'Union des cultivateurs catholiques, qui comptait une centaine de membres. Pour faciliter la vente de bovins, les producteurs qui faisaient partie de l'UCC ont fondé une coopérative de transport vers Montréal. Celle-ci a évolué avec le temps pour devenir la coopérative agricole de La Patrie, chiffre d'affaires annuel de 6 millions, qui emploie présentement une trentaine de personnes et qui est membre de La Coop fédérée. Celle-ci possède un chiffre d'affaires annuel de plus de 4 milliards.

En 1947, l'UCC de La Patrie a acheté une beurrerie pour la somme de 25 000 $. Par la suite, il y a eu plusieurs fusions de coops laitières, exemple, La Patrie avec Weedon, Weedon avec Granby, aujourd'hui devenue Agropur, une coopérative d'envergure internationale.

En mars 1937, l'UCC a contribué à la fondation de la caisse populaire du village de La Patrie. Plusieurs de ses producteurs faisaient partie du conseil d'administration.

Le nom de l'UCC a changé en 1972 pour l'Union des producteurs agricoles, secteur La Patrie. Par contre, la mission de l'UPA a dû s'adapter et suivre le progrès rapide de l'agriculture en mettant les efforts nécessaires pour être plus efficace pour défendre les droits des producteurs et productrices de la région. Voici quelque gains réalisés par l'UPA depuis ces dernières années.

Ristournes des prêts agricoles. Le C.A. de la Caisse populaire de La Patrie avait décidé de ne plus payer de ristournes aux producteurs sur les prêts venant, à l'époque, de l'Office du crédit agricole du Québec sous prétexte qu'ils recevaient des subventions du gouvernement. Les producteurs, se sentant lésés dans leurs droits, ont demandé l'appui de l'UPA. Après discussion avec les dirigeants de la caisse, cette décision injuste a été renversée.

Amendes des contrôleurs routiers. Selon la loi en vigueur, les machineries étaient trop lourdes et trop larges pour la catégorie classe agricole. Cette loi n'avait pas évolué avec la réalité agricole. Suite à ces informations, vu que tous les producteurs du Québec étaient pénalisés par cette loi, une résolution fut présentée au congrès annuel de l'UPA à Québec afin de modifier la loi auprès du gouvernement et qu'ensuite le problème soit résolu pour les producteurs.

Litiges pour l'assurance récolte pour le foin. L'UPA de La Patrie a eu une rencontre avec La Financière agricole dans le but de faire réviser le calcul de l'assurance récolte dans la zone de Notre-Dame-des-Bois. Les producteurs jugeaient que le taux de cette zone était trop bas, et il n'y avait pas de compensation d'assurance possible. Cette rencontre fut bénéfique, car, l'année suivante, les taux ont été révisés.

Abus des parts des inspecteurs à la ferme. Suite à plusieurs plaintes de nos membres sur un inspecteur trop excessif dans ses tâches, nous avons rencontré le MAPAQ pour régler la situation, et, après plusieurs discussions positives, cette situation est revenue à la normale.

Promotion de l'achat local. L'UPA de La Patrie ont fait de la promotion des produits locaux lors d'un méchoui, en collaboration avec le Club Lions, à l'été 2010. Tous les aliments présentés au souper, les viandes, les salades, le pain et les délicieux desserts à l'érable, étaient des produits agricoles de la région. Ce fut un grand succès avec 350 participants à cette soirée. Tout le monde a bien aimé cette formule qui a encouragé l'achat local.

L'UPA du futur. En 2010, les consultations pour l'UPA du futur ont débuté. Le syndicat secteur La Patrie deviendra celui de la MRC du Haut-Saint-François, qui inclura ainsi les syndicats de Weedon et de Sawyerville. Cela démontre l'évolution de l'UPA depuis 1924.

L'UPA a toujours su améliorer sa façon d'appuyer, d'écouter, de défendre et de représenter toutes les différentes productions agricoles afin de suivre les changements rapides dans l'évolution de l'agriculture. Nous sommes fiers d'appartenir à cette grande famille d'agriculteurs qui s'unissent afin de mieux nourrir le monde.

En conclusion. Cela fait 86 ans que notre organisation travaille pour le bien-être des producteurs et productrices au Québec. Avec le temps, elle a su évoluer afin de répondre le mieux possible aux besoins de ses membres. Avec tous ses changements rapides, ses méthodes diversifiées et son administration bien organisée, l'UPA est encore une force dont personne ne pourrait se passer. Cette union fait bien... va bien au-delà des responsabilités d'un simple syndicat de travailleurs. Avec ses partenaires, elle a développé une mise en marché collective unique et efficace. Pourquoi vouloir démanteler ou affaiblir une organisation qui a fait ses preuves et sur laquelle tous ses membres peuvent compter? Ce serait une grande erreur d'abolir l'accréditation unique, nécessaire plus que jamais. Laissez-nous continuer notre mission pour que le Québec puisse passer au travers les différentes crises mondiales sur l'alimentation, et nous serons fiers de nos accomplissements. Merci de votre attention.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, chère madame. Ça va? M. Morin, ça va? O.K. M. le ministre.

M. Corbeil: M. Morin n'a pas de présentation à faire?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Non, hein?

Une voix: Non.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): C'est bien.

M. Corbeil: O.K. Je voudrais vous entendre parler davantage d'une des initiatives que vous avez prises chez vous et qui cadre très bien avec le livre vert, quand vous faites la promotion de l'achat local. Vous n'êtes pas sans savoir, puisqu'on parle, nous, de donner le goût du Québec, distinguer les produits québécois, identifier... la campagne qui a été amorcée, Mettez le Québec dans votre assiette, qui a été suivie par Aliments du Québec: toujours le bon choix! Est-ce que vous êtes satisfaits des résultats, de ce que vous avez mis en place sur une base plus locale, au niveau de promotion de l'achat local?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. M. Morin.

M. Morin (Claude): Oui. Ça a été une très belle activité qu'on a eue. Ça a été l'UPA qui a mis une mise de fonds un peu pour pouvoir acheter les aliments, parce que certains aliments qui viennent de la région, c'est un petit peu plus dispendieux que si tu le prends au supermarché. Parce que, si vous parlez comme les bleuets qui venaient de Bury, et puis les petits fruits qui venaient de Mégantic, et ensuite la viande... Il y avait du mouton. Ça fait que c'est une viande qui est plus dispendieuse. Ça fait que l'UPA, elle a mis... a contribué financièrement, et puis ensuite on l'a organisée, demandé des commandites à nos magasins puis à nos entreprises, et puis ça a fait une très belle réussite. Il y a beaucoup de personnes qui n'avaient jamais mangé de mouton, ça fait qu'ils ont su qu'est-ce que c'était. D'ailleurs, ça a parti assez vite, le mouton. Ça fait que c'est pas mal ça, oui.

M. Corbeil: Je remarque que l'initiative s'est réalisée en 2010. Est-ce qu'il y a eu récidive en 2011? Est-ce que c'est quelque chose que vous entendez répéter?

M. Morin (Claude): Non. On ne répétera pas parce que, c'est comme vous avez lu plus bas, le secteur de La Patrie va fusionner avec la MRC, ça fait que ça va... Là, ce ne sera plus du ressort du secteur de La Patrie, ça va être plus régional, dans la MRC. Eux autres, ils vont peut-être reprendre l'idée, là, mais actuellement ce n'est pas en...

M. Corbeil: M. le président, on vous a présenté tantôt comme étant un producteur laitier, est-ce que vous faites d'autres productions?

M. Morin (Claude): Oui. Je suis producteur laitier pour l'instant, parce que je suis en train d'abandonner la production laitière pour m'en aller sur la production de foin, le foin de commerce. Ça s'en va... La plupart du foin s'en va à l'extérieur du Québec, surtout aux États-Unis, et puis...

M. Corbeil: Puis vous abandonnez la production laitière...

M. Morin (Claude): Pas de relève.

M. Corbeil: Pas de relève.

M. Morin (Claude): Pas de relève.

M. Corbeil: O.K. Est-ce qu'il y a quelqu'un dans les environs de votre localité ou dans votre région qui est intéressé à...

M. Morin (Claude): Non. J'ai même parlé un petit peu de louer... vendre mon quota à une relève puis vendre mes établissements... louer mes établissements, ma grange, et puis il n'y a pas personne qui a été intéressé. Il faut dire que La Patrie, c'est un petit peu loin des grands centres, on est quand même à 40 milles de Sherbrooke. Et puis, les concessionnaires de machines agricoles, tout ça, on a du service, mais c'est assez dispendieux. Ça fait qu'il y a des contraintes assez... Et puis, côté climatique aussi, on est dans la limite pour faire du maïs ensilage. Il y a certaines années que, le maïs ensilage, on n'a pas de très bons rendements. Ça fait que c'est vraiment... La Patrie est le secteur... c'est vraiment fourrager, ce n'est pas fait pour vraiment les grandes cultures, là. Les petites céréales, c'est dans la limite pour avoir des bons rendements, là.

M. Corbeil: Et votre conversion vers le foin de commerce, sur une assez grande superficie, va être quand même en mesure de faire... de supporter votre entreprise, finalement?

**(15 h 50)**

M. Morin (Claude): Oui. Bien, actuellement, moi, c'est ça, j'ai été bien graduellement. J'ai commencé... J'ai lâché graduellement la production laitière en m'en allant vers le foin, parce que ça prend quand même un certain... Ça a l'air de rien de faire du foin, là, ça a l'air à être anodin, là, mais c'est toute une étude de faire du foin de commerce, faire du foin de qualité pour les Américains, parce qu'ils sont très exigeants. Et puis, pour la... Actuellement, cet été, j'ai fait 30 000 balles de foin, mais j'ai... Il y a du terrain que je pourrais aller chercher que je pourrais louer. En tout cas, il y en a en masse. C'est une question de possibilité de travailler avec la nature. Parce qu'à un bon moment donné, pour être capable de faire du foin de qualité puis en... on est limité en temps. Si la saison retarde trop, le foin, il est trop mature puis il n'est plus rentable pour les Américains.

M. Corbeil: Dans le document que vous nous avez présenté, le nombre de fermes semble stable aussi chez vous.

M. Morin (Claude): Oui, c'est ça. Le nombre, il reste stable en nombre. Mais c'est comme mes collègues qui ont passé en avant de moi, c'est qu'il y a... l'acéricole a pris le devant beaucoup, on l'a... Comme, cette année, on a trois nouveaux membres, puis c'est des nouveaux acériculteurs et puis c'est... Il y a eu des piscicultures qui se sont ajoutées à ça. Ça fait que...

Une voix: ...

M. Morin (Claude): Oui. On a quatre piscicultures sur notre territoire.

M. Corbeil: Pour de la truite?

M. Morin (Claude): Ils font l'élevage, c'est surtout vendu pour les pourvoiries.

M. Corbeil: Ensemencement?

M. Morin (Claude): D'ensemencement, oui.

M. Corbeil: Qu'est-ce que vous pensez du livre vert?

M. Morin (Claude): Bien, je crois que c'est un... ça peut être un excellent exercice, mais, c'est certain, c'est tout dépendant qu'est-ce qui va sortir de... le résultat, c'est sûr. Je crois que cette... Il faudrait... Il y a bien des petits détails qu'il faut qu'ils soient là, parce que la réussite se fait dans les petits détails. Parce que vous avez vu dans nos actions qu'on a eues, nos problèmes qu'on a eus, avec l'UPA, lorsqu'on parle au nom de l'UPA, puis on va rencontrer le ministère de l'Agriculture, et puis... ou bien les agents de la route, si c'est un individu qui va se présenter à notre... à eux, disons qu'on va revirer de bord assez vite. Mais, lorsqu'on est représenté, on dit qu'on représente l'UPA, c'est totalement la discussion qu'il peut y avoir, puis ensuite il y a un dialogue. Ça fait que là on... Suite à ça, nous autres, on donne l'information à nos membres, et puis, eux autres, ils ont eu de l'information, ils sont sensibilisés aux problèmes qu'on vit actuellement. Et puis c'est...

Actuellement, là, il y a un problème avec les vis à grain, parce que la batteuse... La vis à grain suit tout le temps la batteuse, et puis actuellement on n'a pas le droit de transporter la vis à grain sur la route, la voie publique. Ça fait que là il y a une démarche actuellement auprès du ministère, mais il faut qu'on soit écoutés et puis que ça soit réglé. C'est tous des petits détails que je crois que, si les producteurs sont écoutés et puis qu'il y a une bonne coopération, on peut trouver des solutions.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): C'est dans le dialogue, M. Morin.

M. Morin (Claude): Oui, c'est dans le dialogue.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): C'est comme ça. Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Depuis hier que nous recevons de vos collègues, et ce qui m'a frappée, c'est de voir que les fermes, la plupart, en tout cas dans les régions qu'on a rencontrées, restent à peu près les mêmes, des fois deux de plus, une couple de moins, trois de plus. Mais il semble y avoir un changement. Vous venez de le dire vous-même, vous allez vers le foin, un autre va aller dans... ou bien il arrive des nouveaux dans le maraîcher, ces choses-là. Ça fait qu'on sent qu'il y a quelque chose qui se passe à ce niveau-là.

Et, à chaque fois que je lis vos... l'ensemble des documents que nous recevons des différentes régions, il y a une phrase qui m'a... qui me chicote depuis le début. Vous dites que vous êtes d'accord avec la démarche du livre vert «dans la mesure où elle reflète votre vision de la future politique agricole». La vôtre. J'aimerais ça entendre parler de la vôtre, votre vision, qu'est-ce que vous... pour demain, quand on regarde un peu les changements qui sont en train de se faire dans les différentes régions, le type de culture aussi, les changements, il y en a qui vont de la vache laitière au boeuf. Et on sent qu'il y a un mouvement, là. Quand vous vous assoyez puis vous dites... Dans 10 ans, qu'est-ce que va être votre région au niveau agricole, qui va permettre de nourrir puis de donner le goût à nous, les consommateurs, de prendre les aliments du Québec?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Morin. Madame...

M. Morin (Claude): Oui. Toutes les portes, il faut qu'elles soient ouvertes. Je crois que le petit producteur, il doit se développer et puis il doit avoir de l'aide pour se développer, parce que ce n'est pas évident, les petits producteurs, à partir, les productions, il faut qu'ils développent leur marché tout en développant leurs connaissances dans leurs nouvelles productions.

Et puis aussi il y a les producteurs de produits qu'on pourrait dire de masse, producteurs de boeuf, producteurs laitiers, producteurs de porc, il ne faut pas qu'ils soient négligés non plus. Parce que, si vous négligez ces productions-là... Pour remplacer un producteur laitier de 50 vaches, si vous regardez l'argent qui va... son chiffre d'affaires, si vous voulez... et puis les heures d'ouvrage qu'ils développent alentour d'eux autres, les... et puis par rapport à un petit producteur, bien, ça va vous prendre 25 producteurs pour remplacer un producteur laitier. Ça fait qu'il faut que vous développiez beaucoup de petits producteurs, de petites productions pour réussir à compenser le producteur de boeuf que vous allez... bien, que vous allez, excusez, qui va quitter la production.

Mme L'Écuyer: Vous avez quelque chose à rajouter?

Mme Prévost (Chantal): C'est ça. C'est sûr...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez-y, madame. Mme Prévost.

Mme Prévost (Chantal): Oui. Moi, ça ne fait pas... bien, ça ne fait pas des années, mais, depuis 1994 que je suis en production, j'ai fait du lait, j'ai sauté au boeuf. Mais on veut en vivre, de nos productions, mais c'est tellement dur. On met des heures là-dessus. On est obligés de travailler à l'extérieur, avec mon conjoint et moi, on fait 60 heures à l'extérieur. Puis on essaie de dire: Ah, l'avenir, l'avenir. On travaille pour qui? Moi, j'ai quatre enfants, tu sais, c'est pour eux autres qu'on travaille, là. Mais ça vient... On ne veut pas lâcher, parce qu'on a dit... Si tout le monde dit: Bien, ce n'est pas payant, l'agriculture, on lâche, bien, demain matin, là, il n'en restera plus, de fermes.

Mme L'Écuyer: Vous avez combien de boeufs actuellement?

Mme Prévost (Chantal): Présentement, sur la ferme?

Mme L'Écuyer: Oui.

Mme Prévost (Chantal): J'ai 25 vaches.

Mme L'Écuyer: O.K., 25. Des vaches laitières?

Mme Prévost (Chantal): Non, des vaches à boeuf.

Mme L'Écuyer: Des vaches à boeuf.

Mme Prévost (Chantal): Pour moi, présentement, là, je me lève le matin, c'est un loisir. C'est un loisir parce que je ne peux pas en vivre, de ma ferme, tu sais. Ça fait que des fermes comme ça, là, il y en a des milliers au Québec que c'est... on dit des gentlemen-farmers, tu sais. Mais, moi, je ne me considère pas gentleman-farmer, parce qu'on fait ça parce qu'on aime ça. Je ne me lève pas le matin pour aller les battre, mes animaux, tu sais. Je me lève le matin parce que j'aime ça. Je le fais puis j'ai espoir que, dans quelques années, je vais pouvoir dire: Je vais augmenter. Mais on ne peut pas dire demain matin: Je vais augmenter à 50 vaches, puis je vais être mieux, puis je vais en vivre. Je vais être obligée d'aller travailler à l'extérieur, puis, mon conjoint, c'est pareil. Mon conjoint, il n'est pas avec moi sur la ferme, hein? C'est mes parents de 75 ans qui sont là pour me supporter parce que, mon conjoint, il faut qu'il travaille pour faire vivre la famille. Puis il y en a beaucoup au Québec comme ça, là. Il y en a beaucoup au Québec, tu sais. Ça fait que l'avenir, dans 10 ans...

Mme L'Écuyer: Très, très court. Dans le fond, ce que vous dites, il y aura des petites fermes, peut-être quelques grosses, mais on ne pourra jamais en vivre à 100 %, il faudra faire d'autre chose.

Mme Prévost (Chantal): Oui.

Mme L'Écuyer: C'est ça, votre vision.

Mme Prévost (Chantal): C'est ça, la... Bien, présentement, c'est ça, la vision, là. Sauf qu'on n'en entend pas beaucoup parler, là.

M. Corbeil: Qu'est-ce qui vous a fait passer de la production laitière à la production animale avec 25 animaux, là? Il y avait un jeune homme assis à votre place à matin qui disait... il mettait ça dans la catégorie amusement.

**(16 heures)**

Mme Prévost (Chantal): Bien, on le fait parce qu'on ne veut pas délaisser la terre. Demain matin, je n'ai plus d'animaux sur ma terre, je ne veux pas faire de foin, parce que ça en prend une trop grande quantité pour en faire. Puis, à un moment donné, il faut faire la coupure, de dire: Je vis ou je survis. Moi, j'ai décidé de vivre puis j'ai décidé d'avoir une qualité de vie avec mes enfants. Quand j'avais une production laitière, je me suis ramassée toute seule. Je venais de me séparer, j'avais trois enfants puis je ne voulais pas que ce soient mes parents qui me supportent, là. Ça fait que j'ai vendu mon quota de lait, tu sais. J'étais toute seule avec trois enfants, tu sais. Ça fait que je me suis dis... J'ai décidé de délaisser la production laitière puis de m'en aller dans le boeuf parce que je croyais que ce serait mieux, tu sais. Mais, quand tu es jeune, tu as 25 ans, avec trois enfants, tu vis encore d'espoir, mais, rendu à 40 ans, l'espoir est un petit peu en arrière. Là, on vit la réalité. Les enfants grandissent, on veut leur amener quelque chose, on veut qu'ils... on soit tout égal. L'école, on veut qu'ils aillent à l'école, au cégep, à l'université, mais il faut être capables de les amener jusque-là.

Mais j'ai passé de 30 vaches à lait, j'ai été jusqu'à 45 vaches à boeuf, puis on n'était pas capables plus d'en vivre. Ça fait que j'ai dit: Tant qu'à ne pas être capables d'en vivre puis de courir comme bien des producteurs courent, puis qu'ils arrivent à la fin de la semaine puis ils sont essoufflés, puis ils ne peuvent plus... bien, j'ai dit: On va diminuer, mais, j'ai dit, on va continuer à faire un petit peu d'agriculture pour essayer de faire vivre notre monde, là.

Parce que beaucoup de petits producteurs font vivre beaucoup de monde, là. Les animaux que j'envoie à l'abattoir, l'automne, là, ils vont faire manger du monde, là. Mais ça en prend, des petits producteurs comme nous autres. Même si on dit que c'est de l'amusement, là, moi, je ne prends pas ça pour de l'amusement, là, parce que... Quand je me lève à 6 heures le matin, que je fais une heure d'ouvrage, puis, après ça, je m'en vais travailler à l'extérieur, puis je reviens le soir, là, je ne pense pas que c'est de l'amusement, là. Il y en a qui feraient ça... Il y en a qui aimeraient bien mieux aller au gym puis faire de l'exercice. Moi, c'est ça, mon... c'est ça, mon... Mais je ne pense pas que c'est de l'amusement. Allez dire ça à du monde, là, qui...

M. Corbeil: Ça ne vient pas de moi, là, c'est quelqu'un qui était assis à votre place à matin qui a utilisé l'expression. Mais ça ne vous retente pas de retourner à la production laitière? Il y a un voisin pas loin, là, qui...

Mme Prévost (Chantal): J'aimerais ça. Si le gouvernement viendrait m'aider, il n'y aurait pas de problème, je serais la première à sauter dessus demain matin. Mais ça ne marche pas comme ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Rivière-du-Loup, vous avez un petit 30 secondes.

M. D'Amour: Très rapidement, le boeuf que vous produisez, madame, est vendu sur un marché local seulement?

Mme Prévost (Chantal): Oui.

M. D'Amour: Oui. C'est vous qui en faites la mise en marché?

Mme Prévost (Chantal): Bien, pas directement, quelques-uns, là, mais ça va dans les réseaux d'encans, puis ensuite c'est engraissé dans des parcs d'engraissement, là.

M. D'Amour: On a une passion en commun, M. le Président. Moi, j'ai trois vaches de boucherie, madame. Je suis obligé d'être député pour...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, je veux vous entendre.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, ça, c'est vraiment un amusement, trois.

Alors, bonjour. Merci d'être là. C'est touchant aussi, votre témoignage, parce que c'est important que, nous, comme parlementaires, aussi, on puisse être bien au fait de ça. C'est la réalité.

J'ai une question concernant le taux d'adhésion, puisque vous avez eu une... on voit une augmentation de l'adhésion, puisque vous avez fait un plaidoyer, on l'a bien entendu, là, sur l'histoire, l'historique depuis 1924 et tout. Mais qu'est-ce qui explique cette augmentation de l'adhésion? Est-ce que vous avez une explication?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Morin.

M. Morin (Claude): Bien, c'est comme j'ai dit tout à l'heure, c'est les nouvelles productions comme l'acéricole. Puis on avait un producteur de mouton, qu'on a perdu malheureusement, qui était au pied du mont Mégantic. Et puis il y a les piscicultures. Puis il y a beaucoup de petits producteurs qui ont parti... des petits producteurs un petit peu... bien, partis ou bien qui ont vendu leurs productions principales puis qui restent petits producteurs, qui font comme Chantal, là, quelques vaches à boeuf pour garder leurs terrains.

Parce que, pour les producteurs agricoles, le terrain agricole, les prairies, pour eux autres, c'est une question sentimentale aussi. Il y a une question d'argent, là, ils aimeraient bien en vivre, mais, lorsqu'ils ne sont plus capables d'en vivre, bien, ils veulent essayer... ils étirent l'élastique un peu, là. Ils vont garder une petite production pour pouvoir cultiver un petit peu leurs terrains pour ne pas qu'ils soient à l'abandon, parce que, pour eux autres, c'est une valeur sentimentale.

Moi-même, je me suis en allé dans le foin. Ça a été une des bonnes... une des raisons pour garder... Ça me donnait une occasion de cultiver tous mes terrains puis même en louer à l'extérieur pour garder les terrains alentour en culture. Parce que là j'ai fait... L'été passé, j'ai fait du foin à Notre-Dame-des-Bois, encore au pied au mont Mégantic, des vraies belles prairies. Laisser ça à l'abandon, ça amenait à brailler, là, si vous voulez, là. Mais ça ne faisait pas mon affaire, c'est beaucoup trop loin pour moi, voyager avec un tracteur agricole dans les côtes. Ça fait que... Mais je l'ai pris, puis, probablement, je vais le prendre encore l'année prochaine, c'est tout juste pour le garder en culture.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Pouvez-vous me parler de l'importance de la production bovine par rapport aux autres productions? Ça se situe comment, là, dans votre région?

M. Morin (Claude): La production bovine, je dirais, on a...

Une voix: Plus que 50 %?

M. Morin (Claude): Oui, 50 %, je dirais, dans les productions... des propriétaires, mais ça ne fait peut-être pas beaucoup de têtes si vous... parce qu'on avait plusieurs producteurs de boeuf qui ont laissé. Comme à Chartierville, on avait un producteur qui s'était parti... un jeune producteur qui s'était parti... qui s'était bâti une grange neuve, et puis il avait... il a monté jusqu'à 200 animaux, et puis là, bien, il a eu des problèmes financiers, ça fait que là il a rebaissé à une cinquantaine de têtes. Ça fait que... Il y en avait un autre, un jeune, encore à la même... encore à Chartierville, et puis, à peu près la même chose, il n'était plus capable d'en vivre, alors il s'est en allé mécanicien. Il est mécanicien, puis il garde encore un petit... quelques têtes chez eux, puis là, bien, il se pose tout le temps la question: Cette année, je garde-tu encore des animaux ou bien je m'en vais tout simplement comme mécanicien? Mais c'est encore la même chose, ils ne veulent pas laisser partir leurs terres, laisser la terre en friche.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Je vous écoute depuis le début, là, puis... mais, à travers vos propos, je ne sens pas beaucoup d'espoir, vraiment, ou d'engouement pour l'avenir. Est-ce que ma lecture et ce que j'entends, là, c'est juste? Sans être pessimiste, là, mais dans le sens que...

Mme Prévost (Chantal): Non. Bien...

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Non?

Mme Prévost (Chantal): ...il ne faut pas être pessimiste. Moi, ça fait 20 ans que je travaille là-dessus, tu sais, on ne veut pas être pessimiste, sauf qu'à un moment donné tu dis: Pourquoi qu'on continue, tu sais? Ça fait que là on prend du recul, on dit: Bien, il faut continuer pour que notre monde, il mange, puis qu'on soit capable de s'autosuffire. Tu sais, ils en parlent tellement qu'il y a des pays qui n'ont pas assez de nourriture, mais ici, au Québec, on a la capacité de pouvoir garder nos fermes actives. Peut-être qu'on n'en vit pas tous, mais on a une passion ici, au Québec, puis c'est ça qu'il faut essayer de développer.

Il y en a qui travaillent fort pour développer des marchés, des sous-produits à leurs fermes, pour pouvoir réussir à en vivre, mais ce n'est pas tout le monde, tu sais. Dans notre région, il y en a beaucoup de mon âge qui ont décroché, ils ont dit: Ce n'est pas payant. Oui, mais il ne faut pas regarder juste le payant, là. Oui, il y en a qui regardent pour faire trois voyages par année dans le Sud, mais tu es capable de vivre mais sans faire de voyage. Mais, il y en a, pour eux autres, c'est ça, la vie, faire des voyages. Mais, en agriculture, il faut travailler, puis travailler, puis encore travailler.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Bonjour, monsieur madame. Je vous trouve courageuse de continuer à faire de l'agriculture comme vous faites, parce que ça me rappelle des souvenirs, quasiment, de jeunesse, là, la façon que vous parlez, le père travaillait à l'extérieur pour pouvoir subvenir aux besoins des enfants; on avait des grosses familles. Mais il reste qu'on est en 2011.

Sur les 84 fermes qu'il y a dans votre secteur, il y en a combien qui vivent à peu près comme vous, là, qui ne sont pas capables de vivre pleinement de l'agriculture?

Mme Prévost (Chantal): Bien...

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Bien, en moyenne, là, c'est...

Mme Prévost (Chantal): Je ne le sais pas.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Êtes-vous la seule ou s'il y en a d'autres?

Mme Prévost (Chantal): Ah non! il y en a beaucoup.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Il y en a beaucoup?

Mme Prévost (Chantal): Il y en a qui sont acériculteurs, déneigeurs, faucheurs de foin sur le bord du chemin. Il y en a qui ont un garage. Moi, je travaille à l'extérieur, mon conjoint travaille à l'extérieur. Ceux qui ne travaillent vraiment pas à l'extérieur, tu as un acériculteur puis les producteurs laitiers. Les autres... On n'a pas de porcin dans notre région, là, nous autres, là. Dans l'agneau, il y en avait un... il y en a un qui a décidé d'abandonner parce que c'était trop dur, les dernières coupures que La Financière a faites, ça a été la goutte... Il était là, là, puis là, pfft! ils l'ont... ça l'a...

**(16 h 10)**

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Et puis, dans le type de production que vous avez, le bovin, j'imagine que vous avez des ambitions autres, j'imagine, vous voulez développer l'industrie bovine. Qu'est-ce que vous voudriez que le... avoir à votre disposition, les moyens que vous voulez avoir à votre disposition pour pouvoir vivre de votre ferme bovine, et non pas d'être obligée de faire deux métiers, là, pour arriver? C'est quoi qu'on pourrait... que le gouvernement ou que l'État pourrait mettre à la disposition des producteurs pour les aider justement à bâtir une industrie qui pourrait survivre dans les années futures?

Mme Prévost (Chantal): C'est sûr que, le gouvernement, avec l'assurance stabilisation, ça fonctionnait bien, là. Il y en a qui arrivaient à boucler la fin de l'année, puis c'était quand même... Tu sais, ce n'étaient pas les trois voyages dans le Sud par année, mais ils étaient quand même capables de... mettons, pour le nombre d'animaux qu'ils avaient, tu sais. Mais, avec les dernière coupures qu'ils ont faites pour... Ils ont tout rechangé le nouveau... la réforme sur l'assurance stabilisation, mais, les producteurs, il y en a... on va... Exemple, comme chez nous, on n'était pas beaucoup, mais se faire couper 5 000 $ dans une année... 5 000 $, ce n'est pas un autre 5 000 $ que je réinjecte dans ma municipalité, pour faire réparer, augmenter... améliorer ma machinerie. Ce n'est pas beaucoup, 5 000 $, parce que, moi, j'en ai juste 25. Mais quelqu'un qui en a 160, là, multipliez-le. Puis c'est le même ouvrage, c'est qu'à la fin de l'année...

Oui, le gouvernement n'avait pas le choix de faire des choses de même, parce que, les coffres, ça a l'air qu'ils étaient vides, sauf que ça a eu un impact direct sur le producteur. Il y en a que c'est leur coût de vie que ça leur a... qu'ils ont perdu, là. Tu sais, c'est bien beau dire: Qu'est-ce que c'est qu'on pourrait faire pour améliorer? Bien, il y avait des producteurs qui fonctionnaient bien avec ça puis qu'eux autres ils réussissaient à bien s'en sortir. Oui, peut-être qu'ils ont fait ça parce qu'il y avait des producteurs qui en ont abusé, du système, mais ceux qui n'en ont pas abusé, ils se sont fait pénaliser aussi, là, tu sais. On en aurait long à dire là-dessus, là, mais...

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Tu peux y aller.

Mme Prévost (Chantal): Je peux y aller, oui. Ça a été... Oui, ils l'ont peut-être étiré sur quelques années pour en venir à couper... Comme dans le vache-veau, avant ils assuraient sur le nombre de vaches que tu avais sur ton troupeau. Là, ils assurent sur le nombre de kilos que tu produis. Oui, il y a des producteurs, ou des encanteurs, ou d'autres personnes qui achetaient des vaches puis que, trois mois après, ils revendaient les vaches, ils ramassaient l'assurance. Je n'appelle pas ça des producteurs, moi, là. J'appelais ça des profiteurs. Mais c'est les profiteurs de qui? Du gouvernement.

Ils ont coupé parce que... Ils ont dit: Ah, on va mettre ça sur le nombre de kilos vendus à la fin. Mais les producteurs qu'eux autres, là, ils avaient le même nombre de vaches du début à la fin de l'année, là, bien, leur nombre de kilos vendus, là, ils ne pouvaient plus arriver avec ça, là, parce que ça ne représente plus le même montant. C'est des coupures qui peuvent être assez importantes à la fin de l'année, là. Ça fait qu'il y en a qui ne le verront pas tout de suite, mais c'est à long terme. 5 000 $ sur 10 ans, bien, c'est 50 000 $ que tu n'as pas réinjecté sur ta ferme puis que tu n'as pas pu faire d'investissement, parce qu'à un moment donné tu ne peux plus, là, absorber ça, là.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député de Beauce-Nord, une petite question?

M. Grondin: Bien, oui, j'en aurais quelques-unes.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez-y.

M. Grondin: Écoutez, là, je vous écoute religieusement, j'espère que... Vous dites: À 40 ans, des fois, on perd espoir. Arrêtez, là! Il faut garder...

Mme Prévost (Chantal): On est réalistes.

M. Grondin: Il faut garder l'espoir.

Mme Prévost (Chantal): On est réalistes, ce n'est pas pareil.

M. Grondin: Oui. Parce qu'à 60 ans on garde encore l'espoir. Écoutez, c'est sûr que, dans l'état où votre... Vous dites que vous avez 25 vaches. Mais vous avez des enfants, vous savez que l'agriculture, c'est un beau mode de vie aussi. Il y a bien des gens... Je vais parler pour moi, là, si vous me demandez d'aller passer deux semaines en Floride ou bien d'aller travailler dans ma sucrerie, je ne suis pas sûr que je ne choisirai pas la sucrerie. Mais il y en a qui aiment plus ça que d'autres. Moi, c'est mon choix à moi.

Mme Prévost (Chantal): C'est ça, parce que vous aimez ça.

M. Grondin: Mais il reste que c'est un beau mode de vie, puis, moi, j'ai toujours pensé que, quand on a un morceau de terre à nous, on n'est jamais mal pris. Demain matin, qu'il arrive n'importe quoi, vous, vous êtes capable de nourrir vos enfants, vous êtes capable de leur faire pousser de la nourriture. C'est sûr, des fois la ville nous apporte peut-être, financièrement, des sommes d'argent, mais, s'il arrive de quoi demain matin, vous n'êtes même pas capable de vous nourrir, vous êtes mal pris. Alors, vous, vous ne serez jamais mal prise, alors je vous incite à garder espoir.

Mme Prévost (Chantal): Nourrir notre Québec aussi, là.

M. Grondin: Oui. J'aimerais... Vous avez parlé que vous êtes... vous exportez votre foin aux États-Unis. Est-ce que vous êtes pris avec un paquet de réglementations quand vous exportez aux États-Unis?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Morin.

M. Morin (Claude): Bien, non, parce que, moi, je vends à des commerçants. C'est tout simplement des commerçants qui arrivent avec leurs camions-remorques, et puis je charge, puis, eux autres, ils s'en retournent chez eux. C'est eux autres qui s'occupent de la mise en marché puis de traverser les douanes.

Mais par contre je connais quelques producteurs qui transportent leur foin eux autres mêmes aux États-Unis, et puis en effet c'est tout un... de la paperasse incroyable pour réussir à passer, sans compter les assurances aussi qui... parce que... En tout cas, c'est assez complexe. Mais, lorsque tu es rendu à tant de milles plus loin que ta résidence, bien là les assurances, bien, ça redouble, tu deviens comme un commercial. Ça fait que c'est... Il y a beaucoup d'entraves, oui.

M. Grondin: O.K. Moi, je... On a ça ici, là, dans ce livre-là, le livre vert, qu'il va y avoir une portée sur plusieurs générations à venir, d'avoir... essayer d'avoir une vision où va être l'agriculture dans 20 ans, dans 30 ans, où on s'en va, est-ce que... Quand on regarde les jeunes, c'est sûr, la génération qui pousse, souvent ils sont... il y en a plusieurs qui sont portés à avoir des petites fermes, pas nécessairement faire des fortunes mais juste vivre avec ça. Est-ce que vous sentez ça, vous autres, par chez vous? Est-ce qu'il y en a, de la jeune... des générations qui... en arrière de nous, là, qui regardent juste pour... peut-être avoir moins, là, de... moins l'idée de la grosse entreprise mais d'avoir une entreprise seulement à dimensions familiales, juste pour vivre?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Morin.

M. Morin (Claude): Oui. Justement, il y en a une, ferme, à côté de chez nous, qui vient d'être achetée par des jeunes propriétaires et puis... mais ils ont 70 acres en culture, et puis là, bien là, ils sont venus me voir, il dit: Bon, bien, c'est quoi que je pourrais faire -- ils veulent que je laboure -- on pourrait-u vendre du foin? O.K. Ils veulent s'établir, ils veulent cultiver, mais où est-ce qu'on peut en vivre, c'est quoi qu'on peut produire pour en vivre? C'est ça qui est la question, oui.

M. Grondin: Il y a un bout de chemin à faire encore.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Merci, Mme Prévost, M. Morin, merci beaucoup, ça a été très intéressant. Bon retour à la maison.

J'inviterais l'Union des producteurs agricoles de Coaticook à se préparer. Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 17)

 

(Reprise à 16 h 23)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Nous reprenons nos travaux et nous recevons l'Union des producteurs agricoles de Coaticook. J'inviterais le porte-parole de l'Union des producteurs de Coaticook à s'identifier et à présenter la personne qui l'accompagne.

Syndicat du secteur de l'UPA de Coaticook

M. Stirnimann (Philipp): Alors, bonjour, M. le Président, M. le ministre puis les membres de la commission. Merci de bien avoir voulu nous recevoir, puis on est bien heureux de venir vous présenter notre mémoire aujourd'hui.

Je me présente, je suis le président de l'Union des producteurs agricoles secteur Coaticook, nouveau président depuis environ un an et demi. Avant ça, j'étais, depuis à peu près... Depuis environ 10 ans que je suis... que je m'implique auprès de l'organisation. Je suis producteur laitier dans la municipalité de Sainte-Hedwidge. Puis je présente... Mon nom, c'est Philipp Stirnimann. Je vous présente mon confrère Gérard Duteau, qui est vice-président à Coaticook, producteur de céréales et de foin.

Ça fait qu'en premier temps je vais présenter un peu le secteur où que ça se situe puis un peu par rapport au nombre d'entreprises, puis tout ça. Puis après on va vous décrire un peu nos principales réalisations, puis on répondra à vos questions.

Ça fait que, pour commencer, notre syndicat, il regroupe les producteurs et productrices agricoles des municipalités de Saint-Herménégilde, Dixville, Coaticook, Barnston-Ouest, Sainte-Hedwidge, Stanstead, Compton et Waterville. On est situés un peu au... c'est au sud de Sherbrooke, aller jusqu'à la frontière, pour vous situer. C'est ça, on est le plus gros secteur de l'Estrie, à peu près le tiers de la superficie de l'Estrie.

C'est ça, là, le secteur, il est constitué de 500 entreprises, 542, dont 444 fermes en 2011, puis le taux d'adhésion est de 99 %. Puis c'est ça.

Puis un peu... j'ai un peu de complément, qui n'est pas dans le mémoire, mais pour représenter un peu le secteur. Le lait, il constitue 40 % des producteurs, 40 %, 20 % environ de bovins de boucherie; 7 % l'acériculture; 12 % l'horticulture; 10 % les grandes cultures; puis le porc, 8 %; autres élevages, 3 %; ovins, 2 %; l'aviculture, 0,6 %; puis 0,6 % d'autres productions. Ça, c'est pour les... Ça, c'est les principales sources de revenus en 2007, selon le MAPAQ. C'est la distribution des principales... ceux qui ont déclaré c'était quoi, leurs principales sources de revenus.

En fait de superficie en culture, encore selon les chiffres du MAPAQ, en 2007, c'était près de 60 % qui était en fourrage, 25 % en céréales et soya, 13 % en pâturage, environ 5 % en arbres de Noël, puis, après ça, moins de 1 %, il y a légumes aussi, moins de 1 % fruits, puis d'autres cultures, culture abritée, horticulture, etc. Il y a quand même plusieurs cultures, c'est très varié. Mais c'est sûr qu'on est un peu le bassin laitier de l'Estrie, ça fait que c'est très... C'est quand même une agriculture très dynamique, puis c'est ça.

Ça fait qu'en 2007 on dénombrait 542 fermes, mais c'est sûr que ça varie, là. En 2004, vous voyez, on avait 455 fermes puis, en 2011, on se retrouve à 444. Ça a varié un peu, mais des fois c'est des changements de structure, c'est des... Mais, dans la région, je vous dirais que ça reste assez stable, c'est un peu à l'image de l'Estrie. C'est assez dynamique aussi. Ça fait que c'est ça.

Puis j'ai oublié de... en me présentant aussi, je suis originaire de la Suisse, puis on a immigré ici, c'est en 1978, dans la région de l'Estrie. Puis, c'est ça, c'est un peu... Je me suis tout le temps impliqué, puis, c'est ça, c'est... Je suis jeune comme président, c'est sûr, mais je suis un peu à l'image de la région qui est très dynamique, puis je suis fier de ça. Je fais partie de la relève aussi. On a plusieurs producteurs qui sont immigrés de l'Europe puis qui se sont très bien intégrés, puis je suis fier de ça, puis, c'est ça, c'est vraiment, un peu, l'image de notre région.

Ça fait que, pour présenter nos principales réalisations, je commencerais... C'est sûr qu'en tant qu'union on siège, comme partout au Québec, on siège à différents organismes. Tout ce qui a rapport à notre communauté, c'est sûr qu'on est invités à siéger, puis on participe activement. Nous, à Coaticook, on a 10 administrateurs puis on se partage la tâche. Puis on est autant des jeunes que des...

Une voix: Des vieux.

M. Stirnimann (Philipp): Des vieux! Non, pas des vieux, mais ceux qui sont plus près de la retraite. Ça fait que ça fait un bon mélange d'expérience puis de dynamisme. Ça fait que ça va très bien de ce côté-là. Puis c'est ça, l'image, un peu, de l'UPA, ce qu'il faut... Des fois, je trouve que l'image qui est projetée est un peu fausse, parce que l'UPA, en premier lieu, c'est les producteurs, puis les producteurs, c'est du monde de terrain, puis, dans nos syndicats de base, c'est ça qu'on fait. Notre travail, on veut... ça nous donne la chance de siéger à ces différentes structures là, ces niveaux-là, ça fait qu'on est impliqués. Puis, moi, c'est ça qui m'a donné le goût aussi de m'impliquer puis, c'est ça, c'est...

Il ne faut pas oublier ça. C'est qu'avant tout on est des producteurs, puis on travaille toujours pour le bien de la communauté, parce qu'on fait partie de la communauté. Souvent, on vient... on est nés là, on est allés à l'école là. Tous, on se connaît, on est un petit milieu. Ça fait que c'est sûr qu'on va être encore là dans 10 ans, bien, espérons-le, mais nos actions, c'est tout le temps dans ce but-là. C'est que tout ce qu'on fait, c'est pour protéger notre milieu. Puis on va être là encore, puis c'est pour nos enfants, surtout. Tu sais, on... Souvent, c'est... Ce qu'il faut faire attention, c'est qu'il y a souvent du monde qui passe ici, il y en a d'autres qui vont venir à la commission puis qui sont déjà venus, mais il y a une chose qui reste, c'est que le producteur, lui, il est là pour rester, puis ça va tout le temps prendre des producteurs, puis c'est ça qui... On travaille dans ce sens-là. Puis on pourra développer là-dessus tout à l'heure.

Pour continuer, comme je vous disais, nos principales réalisations, c'est sûr, on siège à tous ces comités-là. On fait comme la majorité au Québec: les portes ouvertes, toutes ces choses-là. En plus, à Coaticook, on a travaillé comme coopération internationale, parce que c'est important, c'est sûr, l'agriculture au Québec, mais on n'est pas... je veux dire, on est ouverts à tout le monde, ça fait qu'on voit ce qui se passe ailleurs. Puis, c'est ça, le 1er avril 2006, l'UPA de Coaticook, elle a organisé une soirée-bénéfice pour ramasser des fonds pour deux organisations d'agriculteurs du Sénégal. Cet événement, ça faisait suite à la visite de stagiaires sénégalais qui sont venus dans notre région, qui ont hébergé chez des producteurs puis des membres de l'UPA. Ils sont même venus à des séances qu'on avait de l'UPA pour un peu voir comment on s'organisait. Suite à ça, on a fait un souper pour amasser de l'argent pour ces gens-là avec l'UPA DI. L'événement, le souper qu'on a organisé, ça a permis d'amasser 500 000 $, puis la somme, elle a été doublée par l'ACDI.

**(16 h 30)**

Une voix: 5 000 $.

M. Stirnimann (Philipp): 5 000 $, excusez. La somme, elle a été... la somme, elle a été doublée par l'ACDI, puis en plus, avec d'autres organismes qui ont contribué, ça a fait une somme de 20 000 $ qui a été versée pour ces producteurs-là. Puis cet argent-là qui a été recueilli, ça a contribué à un fonds rotatif qui a permis aux familles participantes du programme Les savoirs des gens de la terre, au Sénégal, de financer des projets d'amélioration de leurs entreprises agricoles.

Puis en plus, c'est ça, ce n'est pas écrit dans le mémoire, mais notre ancien président, M. Jacques Masson, que je salue, qui a été président pendant 16 ans, puis qui s'est impliqué au-delà de 30 ans dans le secteur, puis qui est encore très actif, il est retourné par la suite là-bas pour aller rencontrer ces producteurs-là pour aller voir qu'est-ce que ça a permis de faire, puis, c'est ça, ça a été très positif. Puis, entre autres, ça a permis d'acheter... Eux, là-bas, ils prenaient tout le temps... Pour leurs céréales puis tout ça, ils prenaient tout le temps les semences de leurs produits, de leurs céréales pour réensemencer. Ça fait qu'à un moment donné ça a fait que ce n'est pas... les rendements, ils n'arrêtaient pas de baisser, les maladies, toutes sortes de choses. Puis, avec cet argent-là, ça leur a permis d'acheter des semences certifiées puis de fondation, qu'ils appellent, ça fait que ça a augmenté de beaucoup leurs rendements.

En plus, bien, c'est ça, les fonds rotatifs, c'est un peu... c'est des prêts qu'ils avaient... Parce qu'eux autres, là-bas, quand ils essayaient d'emprunter, c'était à des taux très élevés d'intérêt. Ça fait qu'avec cet argent-là ça a permis qu'ils pouvaient faire des prêts à taux... presque pas d'intérêt pendant... je pense que c'était sans intérêt pendant trois ans, puis, avec ça, ça leur permettait d'augmenter peut-être... Bien, il y en a qui ont acheté des chèvres, il y en a qui ont grossi un peu leurs productions. Ça leur a permis de vivre de ça au lieu d'aller mendier. Parce que des fois il y en a que, c'est ça, ils vendaient un peu leurs productions, mais il y a une partie de l'année qu'il fallait qu'ils mendient, puis pas beaucoup d'argent. Ça fait qu'avec ça ça leur a permis de continuer de plus... c'est ça, d'être plus efficaces puis de vivre plus d'agriculture.

Ça fait que je trouve que c'est un très... je vous dirais, c'est un... c'est quelque chose qu'il faut travailler pour que ça fasse un peu boule de neige. Parce que ça va dans le cadre de ce qu'on prime, on pourrait dire, c'est que, la souveraineté alimentaire, chaque peuple doit être capable de se nourrir en premier lieu, puis ça, c'était un peu dans ce sens-là.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Philipp, vous avez déjà 10 minutes d'écoulées. Je vais vous laisser chercher...

M. Stirnimann (Philipp): Je vais laisser la parole à...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): ...chercher le principal que vous avez dans votre rapport. Je vais vous laisser quelques temps, M. Duteau.

M. Duteau (Gérard): O.K. Je vais faire une énumération rapide des différentes réalisations de l'UPA de Coaticook. Pour faire suite à ça, disons qu'il y a au niveau de la prévention auprès des enfants, c'est-à-dire au niveau de Sécurijours, ça a été évoqué plusieurs fois ici aujourd'hui, c'est quelque chose que l'UPA régional a à coeur de faire... On a fait cet exercice-là au printemps 2010, et on le répète ce printemps avec un autre groupe d'étudiants, et on met l'accent... Et ça ne comprend pas seulement des gens qui viennent du milieu rural, mais aussi des gens de la ville, parce qu'on sait que les VTT, ce n'est pas exclusif au milieu rural, puis les produits dangereux, toutes ces choses-là, ça peut se retrouver facilement dans n'importe quelle tablette. Alors, on répète ça parce que ça a été très, très apprécié au niveau pédagogique. C'est ce qui nous a encouragés à le répéter. C'est moi qui étais en charge de ça, puis on a eu des félicitations des professeurs à cette époque-là.

Par contre, aussi, au niveau de la protection de l'eau potable, eh bien, ça a été mentionné aussi par l'UPA de Sawyerville, c'est eux autres qui ont été les précurseurs dans ce domaine-là, et on a emboîté le pas à ça parce que c'est quelque chose qui donne une image positive de l'agriculture, de protéger l'eau, surtout protéger l'eau de consommation, parce qu'on sait qu'avec la mutation vers les fumiers liquides ça a amené énormément de problèmes au niveau de... Du fumier solide, ça restait en place. Du fumier liquide, si vous en étendez 50 000 gallons dans une prairie puis qu'il pleut dans la nuit, bien, il y a des risques que ça coule en descendant, on va employer cette expression-là. Ça fait qu'avec ça, en mettant ces choses-là, ça a... En tout cas, ça n'a pas réglé le problème, mais ça a sensibilisé les gens, surtout les... Nous autres, on a beaucoup d'entrepreneurs à forfait qui font l'épandage des fumiers, puis ces gens-là, ils ne savent pas où sont les puits. Ça fait qu'avec ça ça a réglé... Je ne dis pas que ça a réglé le problème, mais on n'a presque pas eu de suites à ça.

Ensuite de ça, il y a eu un autre projet, la mise en valeur des plastiques agricoles. Ça devenait vraiment problématique, ça. Devant l'absence de solution pour récupérer le plastique agricole, des agriculteurs envoyaient parfois leurs plastiques à l'enfouissement, les déposaient sur la terre, les enterraient ou les brûlaient.

Consciente du problème, l'UPA de Coaticook a recherché activement une solution pour la mise en valeur de cette matière. Petit à petit, avec la collaboration des acteurs du milieu, il est arrivé à mettre en place un programme de récupération pour l'ensemble des agriculteurs situés sur le territoire de la MRC de Coaticook.

Suite aux projets menés individuellement par les municipalités de Compton, Saint-Herménégilde et de Coaticook, la MRC a entamé des travaux avec la Fédération de l'UPA de l'Estrie et de Coaticook... et de l'UPA de l'Estrie et de Coaticook afin d'offrir la collecte des plastiques à la ferme sur une base mensuelle, une première en Estrie. Le projet s'est donc élargi considérablement en janvier 2010.

Il a fallu composer avec différents facteurs: la difficulté à trouver un débouché, l'éparpillement des plastiques, l'éloignement des fermes, la quantité variable, l'utilisation saisonnière.

Résultat: En trois ans, la quantité de plastique récupéré est passée de 110 kilos en 2007 à 117 tonnes en 2010, et probablement que c'est en augmentation encore présentement. Pratiquement toutes, toutes les fermes ont adhéré à ça.

La MRC de Coaticook et l'UPA de... la MRC de Coaticook et l'UPA de Coaticook ont remporté le prix Phénix de l'environnement en 2011 pour cette initiative.

Entente de bon voisinage. Afin de mieux gérer les odeurs près de la ville de Coaticook -- il faut dire que la ville de Coaticook est située dans un creux, ses environnements, alors tous les vents dominants vont vers la ville de Coaticook -- une quinzaine d'entreprises agricoles se sont concertées à l'aide de l'UPA de Coaticook et de la fédération régionale afin de planifier les épandages au même moment au courant de la saison d'épandage. C'est une synchronisation. Elles ont signé une entente de bon voisinage qui précise le calendrier, que tout le monde respecte. Chaque entreprise a reçu une lettre présentant un rappel des modalités et des nouvelles dates prescrites pour l'épandage.

Encourager les producteurs à collaborer à des activités concrètes sur le terrain aura été plus rentable que d'appliquer des mesures coercitives.

Fonds pour la conservation des cours d'eau. 0,005 $, c'était l'objectif que s'est dit Jacques Masson, un agriculteur visionnaire, administrateur et président de l'UPA de Coaticook pendant plus de 20 ans, que Philipp a mentionné tout à l'heure. Celui-ci s'est dit que, puisque la ressource appartient à la communauté, il vaudrait mieux que la communauté y contribue. Avec sa taxe de 0,005 $ du 100 $ d'évaluation, la MRC de Coaticook est à l'avant-garde de la protection de l'eau, et ce, grâce à l'idée d'un agriculteur qui en a fait la promotion pendant plusieurs années durant avant que cela ne soit accepté. Cette taxe a rapporté 50 000 $ en 2010, et -- hier, j'ai eu les derniers chiffres -- la MRC met... mettra... a mis 30 000 $. Il y a un autre organisme paragouvernemental qui a mis 50 000 $. Et les utilisateurs mettent aussi la moitié de... s'il y a un projet de 10 000 $, il en coûte 5 000 $. Il faut que celui qui en fait la demande accepte de mettre 5 000 $ aussi pour que le projet soit réalisé. En tout et partout, ça a fait au-dessus de 100 000 $, ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Je vais vous demander de résumer la dernière étape, là, les arbres pour protéger les...

M. Duteau (Gérard): Pour protéger les arbres, les cours d'eau...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Résumez-moi ça, là, parce que...

M. Duteau (Gérard): Bien, je peux passer outre un peu à ça aussi, parce que c'est... en fin de compte, ça s'enchaîne dans ce qui a été dit tout au long de la journée, des... Il y a eu des plantations d'arbres, il y a eu ces choses-là. Bon, c'est ça, en fin de compte, là, je ne veux pas... Étant donné qu'on est un peu à court dans le temps, on va... Je vais m'en tenir à ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Parfait, merci. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bonjour, MM. Duteau et Stirnimann. Très enchanté d'entendre votre présentation et de voir que le secteur de Coaticook est un secteur très important dans l'Estrie en termes du nombre d'entreprises.

Juste clarifier, vous avez évoqué le nombre de 542 entreprises. À un moment donné, dans une fourchette de 455 à 444 entre 2004 et 2011, il y a une centaine d'entreprises, là, qui... Est-ce que c'est des entreprises de transformation qui s'ajoutent aux fermes qui sont sur votre territoire, ou c'est des entreprises qui ne sont pas membres, ou...

M. Stirnimann (Philipp): Non, moi, c'est...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): ...allez-y.

M. Stirnimann (Philipp): Oui. C'est les chiffres du MAPAQ, de 2007, puis des fois ce n'est pas pris sur les mêmes données des... Il y a différentes structures. Des fois, il y en a qui ont plus qu'une structure aussi, là, qui ont plus qu'une entreprise. Ça fait que des fois c'est des chiffres... Mais les chiffres à quoi on devrait s'en tenir, c'est le 444 fermes, selon l'union...

M. Corbeil: Le nombre de fermes.

M. Stirnimann (Philipp): ...oui, qui est répertorié à Coaticook.

M. Corbeil: Votre présentation met une emphase très, très importante sur l'orientation trois du livre vert, en ce qui a trait à valoriser l'environnement et le territoire du Québec. Vous le faites à travers la protection de l'eau potable, la mise en valeur des plastiques agricoles -- vous êtes nos champions, à ce que je peux voir, là, en termes de quantité récupérée, et c'est primordial -- d'entente de bon voisinage, ça va de soi, mais aussi la conservation, les cours d'eau, les arbres protégés, nos champs et nos cours d'eau. Chapeau. Et je pense que c'est tout à votre honneur. Et vous êtes à faire la démonstration qu'on peut assurer un développement du secteur agricole tout en respectant l'environnement.

Vous avez mentionné que vous êtes d'origine suisse. À l'âge que vous avez là puis à l'année que vous dites que l'entreprise a parti, probablement que c'est vos parents qui sont arrivés avant vous ou...

**(16 h 40)**

Une voix: ...

M. Corbeil: Non? Vous avez l'air très jeune.

M. Stirnimann (Philipp): Mes parents... Oui. Mes parents sont arrivés... Excusez. Mes parents sont arrivés en 1978, j'avais deux ans, deux ans, mais on était... C'est ça, donc, moi, j'étais le plus jeune. La famille est arrivée avec sept enfants en 1978.

M. Corbeil: O.K. Et, M. le Président, cette origine-là m'amène à témoigner que, quand je suis allé dans Soulanges, il y avait une famille belge qui a amené au Québec les endives, la famille Schryve. Je suis allé encore dans un autre secteur de Soulanges, et des gens d'origine européenne ont implanté de la culture du tournesol biologique. Ils font de l'huile de première pression de tournesol, de l'huile biologique. Une autre ferme, du côté de Sherrington, dans le maraîcher, est détenue par des gens qui sont hollandais d'origine mais qui sont bien établis au Québec. Et, vous, vous êtes Suisse. Ma question, c'est: Est-ce que vous croyez qu'il y a d'autres investisseurs étrangers qui pourraient être intéressés à s'implanter au Québec et à faire de l'agriculture?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Philipp.

M. Stirnimann (Philipp): Sûrement, oui, je crois que oui. Mais c'est sûr qu'il y a eu des années qu'il y a eu comme une immigration... Dans les années... fin des années soixante-dix, début quatre-vingt, il y a eu comme une vague d'immigration. Maintenant, c'est devenu plus difficile. Comme, je vous dirais... prendre l'exemple de la Suisse, parce que tous mes cousins, toute la famille habite encore là-bas, puis on a aussi beaucoup d'amis ailleurs au Canada qui ont immigré, puis c'est de plus en plus difficile aussi par rapport à ce que...

En Suisse, ça fait un peu le contraire d'ici. Quand mon père est parti en 1978 de la Suisse, il était producteur laitier. Mais ce n'était pas le plus vieux de la famille, ça fait qu'il n'avait pas la ferme familiale. Il était comme un peu locataire d'une ferme. Puis il avait 1 $... 1 F, c'était à peu près 1,40 $ du litre quand il est parti de là-bas. Les prix étaient élevés en 1978, ça fait que c'était plus facile de vendre là-bas puis s'en venir ici.

Puis maintenant, je dirais, 30, 35 ans plus tard, c'est le contraire. Là-bas, les prix ont chuté, c'est rendu à 0,60 $, à peu près, le litre, ils ont des surplus de fromage qu'ils ne savent plus trop quoi faire avec. C'est un peu le... Ils manquent un peu de structure. Ils ont déréglementé, ils ont perdu leur contingent producteurs laitiers. Puis c'est un peu le contraire d'ici.

Toute la famille, moi, sur le côté à ma mère, côté à mon père, la ferme familiale, bien, mes cousins sont obligés d'aller travailler à l'extérieur, ils ne sont plus capables de vivre de l'agriculture. Ça fait que c'est un peu... Ils ont changé de production aussi, il y en a un qui est rendu dans la production de lamas, puis c'est sa mère qui s'occupe des animaux, puis, lui, il travaille à l'extérieur. Puis c'est un peu ça.

Ça fait que c'est pour ça que c'est important... Ma conclusion, je n'ai pas eu le temps de vous en parler, mais c'est un peu ça, c'est que, c'est important, il faut se rendre compte qu'au Québec le modèle qu'on a choisi... Bien, tout le modèle par rapport à notre union, par rapport à l'encadrement un peu des REQ, puis tout ça, c'est très important parce que ça nous permet d'être tout ce qu'on est aujourd'hui. Tu sais, il y a des gens, depuis des années, qui travaillent là-dessus dans ce sens-là avec le gouvernement, avec tout le monde. C'est un bel exemple, c'est un modèle à suivre.

Puis je parle aux gens, je parle souvent à du monde ailleurs puis même en Ontario, qui se sont établis en Ontario, puis ils nous envient. Ils nous envient, puis ça, il faut en être conscients. Il faut en être conscients. Puis, au Québec, on est un peu... on est une société distincte. On est un peuple, on a le droit de faire les choses différemment, puis on l'a fait différemment. Puis ça, il faut être fiers de ça. Puis, c'est pour ça, dans la politique qui va être déposée, il faut que ça soit un signal fort qu'on continue dans cette direction-là. C'est sûr qu'il y a beaucoup de... Il faut évoluer. Il y a des changements à apporter, c'est normal. L'agriculture, elle a beaucoup évolué, mais il faut continuer dans ce sens-là. Il ne faut pas démolir ce qui a été fait pour rebâtir sur je ne sais pas quoi, puis ça, je trouve que c'est très important, oui.

M. Corbeil: M. le Président, si je peux rassurer M. Stirnimann, il n'est pas question de démolir, il est question d'améliorer puis de chercher à développer davantage.

Maintenant, je comprend que ces producteurs, ces amis des autres provinces canadiennes ou d'ailleurs dans le monde envient les producteurs québécois. Juste au Canada, présentement, on a un soutien... des programmes de soutien qui sont généreux, d'une certaine façon, si on veut, parce qu'ils sont presque trois fois plus que qu'est-ce que c'est que les autres provinces octroient dans le même cadre, si on veut. Alors, c'est pour ça qu'il peut y avoir un point de mire au Québec.

On n'est pas en mode nécessairement de tout balancer ça par-dessus bord. Au contraire, on essaie d'optimiser l'utilisation des fonds publics pour développer un secteur agroalimentaire, bioalimentaire le plus vivant, le plus stimulant, le plus agréable possible pour les producteurs, mais aussi source de fierté pour les communautés qui sont beaucoup développées autour du secteur agroalimentaire.

Mais, moi, je trouve intéressante l'opportunité qu'il y a des gens qui viennent s'établir ici, comme votre famille l'a fait, parce qu'il y a des dispositions qui le permettent. Je sais qu'il y a des espèces de légendes urbaines qui pensent que les Chinois vont débarquer au Québec, puis ils vont acheter toutes les terres, puis ils vont faire les légumes, puis ils vont les envoyer en Chine, là. La mécanique qui est en place, les lois qui sont existantes ici font en sorte qu'on achète ici, puis on s'installe ici, puis on développe ici, et, ça aussi, on n'a pas envie de remettre ça en question.

Donc, si ma collègue de Pontiac ou mon collègue de Rivière-du-Loup veut ajouter pour avoir des précisions...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va dépendre si le président le permet.

M. Corbeil: Si le président le permet.

Mme L'Écuyer: ...commence pas.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: ...tiens-toi tranquille.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez-y, Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président -- c'est un collègue. Je suis contente de vous entendre. Je viens d'un comté qui est frontalier avec l'Ontario et j'entends beaucoup ces commentaires-là: Si on avait ce que vous avez au Québec, on aurait peut-être moins de difficultés. Une chose aussi qui est assez surprenante, en Ontario c'est presque toutes des petites fermes, justement à cause des difficultés et le peu de support qu'ils peuvent recevoir.

Ce qui est intéressant, vous avez aussi une vision vers quoi on doit aller. Je trouve ça rafraîchissant d'entendre la relève qui dit: On veut être fiers de ce qu'on fait, on est fiers de ce qu'on fait, puis il faut continuer, puis il faut continuer à développer puis continuer à innover. Ça fait que ça, ça me réconforte beaucoup.

C'est vrai qu'on a fait des choses intéressantes au Québec, là. Je fais juste regarder quand on a commencé, en 2003, sur la traçabilité, comment les gens ont confiance dans les produits qui viennent de chez nous. Quand on prend de la viande, on n'est pas inquiets. Comment... Même s'il y a eu des erreurs... pas des erreurs, mais, je veux dire, on a eu l'incident du fromage, mais ça, c'est des choses qui arrivent. Mais, dans l'ensemble, quand on le regarde, nos produits sont bons, nos produits sont... les gens sont fiers de ce qu'ils font.

On a une famille de Suisse qui vient d'arriver dans mon comté, sept enfants, c'est un petit peu ce que vous avez vécu, ferme laitière. Et les gens les ont accueillis à bras ouverts. Ils s'installent puis ils sont... ils prennent le terrain. Et c'est vrai qu'on a beaucoup de terre agricole qui est disponible, en plus. Ça, ça aide beaucoup.

Quand on regarde un peu la situation, puis c'est la même question que j'ai posée à d'autres tantôt, on s'aperçoit qu'il y a... Quand j'écoutais tous les mémoires ou ce que les gens nous amenaient comme information, beaucoup changent de culture ou de production. Il semble y avoir une espèce de mouvance dans le monde agricole, les petites fermes qui vont essayer différentes productions, différents élevages. Est-ce qu'on a un indice ou des grandes tendances vers quoi s'en va notre agriculture au Québec d'ici les 10 prochaines années, quand on regarde un peu aussi, le livre vert, qu'est-ce qu'il veut amener comme support à nos producteurs? Avez-vous une vision des 10 prochaines années? On va commencer par le senior, puis après ça on ira au junior.

M. Duteau (Gérard): Mais, disons que...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Duteau, c'est vous...

**(16 h 50)**

M. Duteau (Gérard): ...on n'a pas plus de boule de cristal que d'autres, mais quand même c'est sûr que l'agriculture, elle est en mutation, comme beaucoup de choses dans la société. Les produits voués à l'exportation rencontrent une concurrence qu'ils n'ont jamais rencontrée antérieurement, si on prend le porc, avec les pays en émergence ou de l'Amérique du Sud en particulier. Le boeuf, c'est la même chose. Il faut vivre avec, on est dans un pays nordique. Alors, il est bon qu'on réfléchisse à ça socialement, tout le monde ensemble.

Mais il reste que, comme des fois je dis, il ne faut pas exploiter non plus l'amour que les gens portent vers l'agriculture, surtout au niveau des jeunes, tu sais, leur laisser miroiter des choses que si... vous pouvez vivre avec telle, telle chose; il va y avoir des grandes déceptions là-dedans. Mais, quand on est jeune, en général, on s'en relève. On se réessaie ailleurs, ça a été le cas quand on était jeunes aussi, on a du temps devant nous autres.

Mais elle est nécessaire, cette réflexion-là. Ça ne veut pas dire que je partage tout ce qu'il y a dans le livre vert. Moi, qu'on mette le consommateur au centre, j'ai un peu de réticences avec ça. Moi, je considère que c'est en partenariat producteur-consommateur qu'il faut tendre à développer ça. Parce qu'on va se retrouver, à un moment donné, avec un paquet de comités où il va y avoir plus de chefs que d'indiens au niveau des discussions, chacun... Parce qu'aujourd'hui on vit dans une période où beaucoup de gens voudraient faire les choses différemment, que ce soit en politique, que ce soit en religion, que ce soit n'importe quoi, et l'agriculture n'y échappe pas. À ce moment-là, c'est dans des tables comme aujourd'hui que le gouvernement présente et que le gouvernement maintient son soutien, aussi, financier, puis technique aussi. C'est très important de ne pas laisser des gens investir suivant leurs émotions.

Puis il faut aussi prendre le temps d'analyser, dans le développement des circuits courts qu'on appelle, la quantité de... la possibilité de consommation sur place. Tu sais, on n'est pas tous dans la région de Montréal ou on n'est pas tous dans la région de Québec. L'île d'Orléans peut vendre énormément de choses, elle a un bassin de population. On le voit. Nous autres, dans Coaticook, il y a des gens qui mettent beaucoup dans... Il y a ce qu'on appelle le Marché de la Vallée, là. Coaticook, c'est actif, quand les gens embarquent, ils embarquent. Mais on parle avec des producteurs qui ont embarqué là-dedans, puis, je dirais, ils n'ont pas l'idée de lancer la serviette, mais ils trouvent ça difficile; c'est de fidéliser l'acheteur.

Parce qu'une petite madame me disait ça dernièrement, je suivais des cours de perfectionnement en informatique, et c'est venu sur le sujet, puis elle me disait: J'ai acheté un bout de temps dans ce... -- là-dedans tu achètes par Internet -- mais, elle dit, j'ai quatre jeunes adolescents, quatre jeunes ogres autour de la table. Elle dit: Ça paraissait passablement sur le budget, tu sais, c'est des produits qui sont plus chers, ce sont des produits de terroir qui sont plus chers. Elle dit: On l'a évalué, moi puis mon mari, puis on a décidé de retourner à l'épicerie conventionnelle. Puis c'est une chose qui se produit de façon régulière, les budgets sont serrés partout. C'est dans ce sens-là que je veux amener ça.

Mais il ne faut pas... Il y a de quoi à faire là-dedans. Puis il y a beaucoup d'énergie qui se met, il y a de l'amour qui se met là-dedans. Moi, quand je vois des gens dans le biologique, vous savez, ce n'est pas facile d'entretenir un jardin la moitié de la grandeur de... ça, ce n'est pas pire, mais, quand le gars en a quatre acres puis la femme en a quatre acres à entretenir de ça, là, c'est de l'apostolat, carrément, tu sais, là. Les gens le font, là, ça mériterait le double de ce que ça vaut, qu'ils vendent ça dans l'épicerie quand tu vois la différence qu'il y a, à peu près 10 %, 15 %. En réalité, c'est 50 % de plus que ça prendrait. Mais ce n'est pas non plus à l'État à payer la différence. À un moment donné, il faut faire des choix, la société, aussi là-dedans, ce qu'on peut se permettre ou pas. Peut-être qu'un jour les conditions financières permettront qu'il y ait plus de latitude de ce côté-là. Moi, c'est la façon que je vois ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Duteau. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Alors, bonjour. Merci d'être là. Je vais... J'ai remarqué, dans le début de votre présentation -- puis vous avez quand même insisté sur cet aspect -- un plaidoyer sur l'image de l'UPA, votre présence. Vous avez donné aussi des exemples de dynamisme, là. Mais il reste que vous avez dit -- on en reparlera peut-être plus tard en échangeant: On est là pour rester, on sera là, demain on va être là. Il y a quand même une vision d'avenir, en tout cas d'être présents, mais il reste que ça dénote en même temps une position un peu défensive et justificatrice. Puis ce n'est pas un jugement que je porte, là, mais, quand on le fait ainsi, c'est parce qu'il y a une préoccupation, il y a une inquiétude. Quel est votre... Qu'est-ce que vous pensez vraiment du livre vert?

M. Stirnimann (Philipp): Du livre vert?

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Par rapport à cet aspect-là? Est-ce qu'il est là pour vous rassurer ou est-ce que vous pensez que, dans ses composantes, là... parce que c'est un projet de politique, hein, à venir, à établir.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Philipp.

M. Stirnimann (Philipp): O.K. Bien, non, c'est... Ça en prend, une politique, au Québec, agricole. Ça, les producteurs dans le champ, ils nous le disent, là, tu sais. Il y en a qui ont de la misère, des fois ça ne va pas bien, puis tout ça, puis des fois je les rencontre, puis ils disent: Tu sais, des fois, il y a de l'insécurité, on entend des choses. Tu sais, les producteurs, ce qu'ils veulent savoir: Au Québec, on en veut-u, de l'agriculture? On en veut-u, tu sais, des produits du Québec? On veut-u que de l'agneau du Québec, il en reste encore sur les tablettes? Le porc du Québec... C'est important.

Mais, si on en veut, bien, il faut que les actions, elles suivent par rapport à ça, tu sais. Puis on a beau tout le temps parler: Les petites fermes, il faut les encourager, mais il faut que ça paraisse dans les actions. Quand on instaure la mesure du 25 % dans l'ASRA, c'est sûr que ça fait mal aux petites fermes, ça fait mal aux producteurs d'agneau en Gaspésie. Ça coûte plus cher tout amener là-bas, mais, d'un autre côté, ça a une valeur, un producteur qui est là-bas, c'est toute la dynamique de la région, puis tout ça.

À l'UPA, c'est ça qu'on promouvoit, c'est que ça prend des producteurs partout. On ne peut pas tous faire du lait, on ne peut pas tous être sous production de la gestion de lait. Ça en prend, des producteurs de boeuf, ça en prend, des producteurs ovins. Ça prend de toutes les productions, c'est naturel.

Puis on est tous dans le même bateau. Ce que ça prend, c'est un capitaine qui dirige ça du bon côté. Puis on veut être tous dans le même bateau. C'est ça, l'important. Ce n'est pas de partir des chaloupes de tous les bords, là. Puis, tu sais, des fois, il y a des tempêtes, puis, quand tu es tout le monde ensemble qui vont dans la même direction, bien tu passes à travers la tempête. Puis on l'a vu avec les crises qu'il y a eu. Il y a eu des grandes crises en Europe. On l'a vu, les dernières années, aux États-Unis. Mais, au Québec, c'est sûr que ça a été dur, mais il reste qu'on est sortis gagnants, puis on s'en est mieux sortis que partout ailleurs, tu sais.

Moi, j'étais dans mon salon, je regardais ça puis je disais: Crime, on n'a plus à se justifier de nos systèmes, nos lois sur... toutes les lois qui nous encadrent, la mise en marché collective, puis tout ça. On n'a pas à justifier ça.

Moi, la question que je me posais, c'était ça, puis j'avais posé ça à mon président en Estrie, c'est: Pourquoi qu'on a à venir défendre ça? Les producteurs, quand ils signent à 95 % leurs cartes de membre, on ne leur tord pas le bras. Ils veulent que quelqu'un... Ils n'ont pas le temps de venir puis de se représenter, ça prend quelqu'un qui y va pour eux. Mais, moi, que ça soit un producteur de porc, de n'importe quoi, je vais le défendre, parce que c'est dans mes racines. Tu sais, c'est comme des artistes, on... l'agriculture, c'est un peu comme la culture, c'est propre à nous, aux Québécois, puis il faut s'en approprier, puis, ceux qui sont artisans de ça -- on est tous des artisans de ça -- bien, il faut les supporter.

Puis, quand je vois un producteur de porc -- mon voisin -- que ça fait des années, depuis que je suis petit, on va chercher le fumier là, on l'étend sur nos terres, puis je le vois, il est tout le temps dans sa porcherie à travailler, puis que, voilà deux ans, un an et demi, il a fait faillite puis il est allé habiter... à 63 ans, il a fallu qu'il aille à Coaticook, habiter dans un petit appartement, les enfants n'ont pas pu prendre la relève, ça, ça me fait mal, parce que je me dis: On ne la reverra pas, cette ferme-là. C'est sûr qu'il y a encore des porcs dedans, mais ça vient de plus loin. Tu sais, si on...

On peut parler un peu de l'intégration aussi, ce n'est pas ça qui va rendre nos communautés dynamiques, tu sais. Il y a une personne qui va être là pour s'en occuper, ce n'est pas elle qui décide comment que c'est géré, puis c'est plus une question d'argent. Nous, ce n'est pas ça qu'on veut, c'est des producteurs qui travaillent sur leurs entreprises puis qui sont... je veux dire, ils ne sont pas esclaves, là, ils sont partie prenante des décisions avec tout le monde qui nous entoure, là, tu sais. C'est ça, l'important. C'est dans cette direction-là qu'il faut aller. Le livre vert, j'espère qu'il va aller dans cette direction-là.

Parce qu'on n'a pas besoin de se défendre, je veux dire, avec... Ça a évolué, l'agriculture. Depuis des années, on voit comment que ça a évolué, les gens se sont spécialisés. Puis, nous, on a déjà eu du boeuf, on a déjà eu du porc, j'ai déjà eu une porcherie avec un intégrateur, mais, à un moment donné, tu ne peux pas être bon dans tout. À un moment donné, on s'est spécialisés. Nous, c'est dans le lait. On produit nos fourrages, nos céréales, puis on est bons là-dedans, puis c'est ça qu'on veut faire.

Puis, tu sais, je veux dire, on ne retournera pas 40 ans en arrière, puis avoir une couple de moutons chaque puis un peu de ci puis de ça, là, puis ne pas être capables d'en vivre. On l'a fait, ça, nos parents l'ont fait puis ils n'étaient pas capables d'en vivre; puis ils ne seront pas plus capables d'en... Tu sais, c'est difficile. Plus ça va, plus c'est difficile. Les marges sont petites, on ne se fera pas des accroires qu'on va tous se mettre à faire des... aller dans le circuit court, parce qu'on va tous mourir, là.

C'est sûr qu'il y a un débouché pour ça, mais il y a un équilibre dans tout, puis, l'équilibre, on l'a déjà atteint en partie, on l'a déjà... Comme dans le biologique, c'est pareil, là, on produit plus que ce qu'elle est, la demande. Tu sais, on ne dira pas: Ici, on va tous être dans le biologique. Ce n'est pas vrai, parce qu'on produit déjà ce qu'on a de besoin. Ça fait qu'on s'est adaptés, puis ça a évolué, puis il faut continuer comme ça, il faut continuer dans ce sens-là. C'est ça qui est important puis c'est ça qui fait que les jeunes, ils embarquent.

**(17 heures)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va? M. le...

M. Duteau (Gérard): Moi, j'aurais juste...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, vous pouvez y aller, M. Duteau.

M. Duteau (Gérard): Moi, j'ai été administrateur à la Fédération des producteurs de lait puis je n'ai pas... Je veux dire, ça a été un cheminement, là. J'ai été sept ans administrateur de la Fédération des producteurs de lait de Sherbrooke, et, à un moment donné, je dirais, ça, dans les années quatre-vingt-dix, quatre-vingt-quinze, on rencontrait les jeunes qui embarquaient dans la production laitière et on leur demandait leurs opinions vis-à-vis la mise à... voyons, la gestion de l'offre, et il y avait des réticences. Les jeunes disaient: Oh, on a l'impression que c'est peut-être passé date, ça, on devrait peut-être aller plus dans un libre marché. Mais il est survenu des... Il y a des choses qui sont différentes, là, il y a eu des problématiques qui se sont développées ailleurs, en Europe, puis ces choses-là. Et, à entendre la fougue avec laquelle Philipp défend ça aujourd'hui, je pense qu'on a bien fait de les maintenir.

Parce que, nous autres mêmes, on se questionnait à ce niveau-là: C'est-u vrai, là? Parce que, écoutez, on est conscients que ça demande des investissements énormes, le quota, et c'était un peu ce qui faisait peur à ces gens-là aussi: Investir 1 million sur le quota, il va-tu être là dans deux ans, dans trois ans? Moi, je suis de l'époque où est né le quota, dans les années 1967. Moi, je suis entré en production en 1973, et depuis 1973 que bien des gens se demandent s'il va être encore là dans deux ans, dans trois ans. Mais je pense qu'il est là pour durer, à moins... C'est sûr que c'est de juridiction fédérale, mais il n'y a pas... il n'y aurait aucune raison de l'enlever, je pense qu'il a fait sa preuve que ces structures-là profitent à l'ensemble de la population en général.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Saint-Hyacinthe, vous vouliez intervenir?

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): ...M. le Président.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Allez-y.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Alors, M. Stirnimann et M. Duteau, je veux savoir: Au niveau de la protection du territoire agricole chez vous, est-ce qu'il y a de la surface qui est arable et cultivable versus les pressions des municipalités pour développer, dézoner davantage, et tout ça? Vivez-vous ces problématiques-là dans votre région ou si c'est typique aux régions plus urbaines, là?

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Philipp.

M. Stirnimann (Philipp): Bien, c'est sûr que chaque région vit ça. C'est sûr que, nous, en étant plus en périphérie, c'est un peu moins important qu'en périphérie des zones plus urbaines. Mais c'est clair que, chaque municipalité, son but, c'est d'essayer de se développer, puis c'est un peu la job du maire de faire ça. Mais, à un moment donné, c'est la job des producteurs de leur dire: Bien là, vous en avez encore, du terrain, puis, tu sais...

Nous autres, à Coaticook, toute la MRC, quand il y a eu l'histoire de l'article 59, on a fait le tour puis, toutes les zones qui étaient propices à la construction, tout ça, on les a toutes établies. Mais tu regardes une couple d'années plus tard, puis ça ne s'est pas bâti, là. Tu sais, à un moment donné, il ne faut pas... Quand on voit des municipalités nous demander des 100 acres -- on l'a vu, là, encore l'année passée -- 100 acres pour dézoner de la belle terre pour faire... pour mettre en zone blanche, là... Tu sais, commencez par remplir ce que vous avez, puis après ça on en reparlera.

Ça fait que c'est pour ça que c'est important que la loi, elle reste, puis même qu'elle soit renforcée, parce que c'est sûr que, si on enlève ça, je veux dire, c'est le bar ouvert, là, tout le monde va se garrocher. Puis souvent c'est les plus belles terres. Comme nous, c'est Compton puis Coaticook, c'est tout le temps les plus belles terres. C'est là que la demande, elle est, la ville est autour de ça. Ça fait que, quand tu perds 100 acres autour de ces villages-là, ça, ça fait mal, puis tu n'iras pas le récupérer ailleurs. Ça fait que ça, c'est sûr qu'il y a de la pression.

Même dans notre région, il y en a, de la pression. C'est pour ça qu'on siège à des CCA, puis on donne notre appui ou pas. Quand ça a du bon sens... Tu sais, à un moment donné, il y a un... Il faut en donner mais tout le temps des quantités raisonnables. Quand tu vois que la municipalité, elle a encore plein de place à se développer, bien, on dit: Bien, commencez par développer ces coins-là, tu sais. C'est juste le bon sens, quant à moi.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Saint-Hyacinthe, une couple de minutes.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Au niveau de la relève, la relève chez vous, transfert de ferme, transfert d'établissement, est-ce que pas mal... la plupart des producteurs sont capables d'avoir une relève, puis s'il y a une émulation entre les jeunes pour pouvoir prendre la relève de leurs fermes familiales, mettons, dans le futur? Est-ce que ça existe, la problématique, chez vous?

M. Stirnimann (Philipp): La problématique? Oui, bien, c'est sûr que c'est normal, là. Je veux dire, sur la quantité de fermes qu'il y a, c'est normal qu'ils ne peuvent pas tous transférer, là. On ne peut pas... ça ne peut pas être 100 %. Bien, c'est sûr qu'on est un coin qui est plus laitier puis c'est sûr que... Toutes les productions sous gestion de l'offre, je ne pense pas que ça soit un problème, parce que, quand ils ont de la relève des jeunes, c'est à peu près sûr que c'est transféré. Puis même, souvent... Même dans ma municipalité, encore l'an passé, il y a eu une relève non apparentée. Ça fait que c'est quelqu'un qui travaillait pour Valacta puis son conjoint qui ont pris la relève. Le monsieur a été prêt à leur financer puis il reste là, puis ils font de la cogestion. Ça, c'est un exemple. Puis il y en a d'autres.

Moi, j'ai un voisin qui a une fromagerie, puis il n'a pas... c'est un vieux garçon, puis là il est rendu qu'il commence à être fatigué. Aller vendre ses fromages à l'extérieur, à Montréal, puis tout ça, c'est essoufflant. Puis j'ai beaucoup d'admiration pour ces gens-là, mais il m'a dit encore, l'automne passé: S'il y a quelqu'un, un jeune, qui est prêt... puis il a essayé quelqu'un, ça n'a pas marché, mais: S'il y a quelqu'un qui est prêt à produire mon fromage puis à venir s'occuper... Il a 30 vaches puis il s'en va vers le bio, il est ouvert à ça. Je veux dire, les producteurs sont ouverts à ça.

Des fois... On parlait du quota tout à l'heure. Il ne faut pas se tromper, là, le quota, il a une valeur. Mais c'est quoi, la proportion des contingents qui sont transférés, qui sont monnayables? C'est une petite, infime partie. Ce n'est rien. Ça fait que, tu sais, à un moment donné, là, le quota, il reste là, puis c'est la relève qui le prend. Ce n'est pas vendu, là. Tu sais, mon père, il est décédé... Comme aujourd'hui il est décédé, mais, moi, je prends la relève. C'est un patrimoine, puis, moi, j'espère pouvoir le reléguer à mes enfants. Ce n'est pas... Il n'y a pas un chèque qui se fait de x... de tel montant, là, c'est juste... Tu sais, à un moment donné, ce n'est pas tout transigeable, ces quotas-là. C'est juste quand c'est démantelé, puis ça, il y en a de moins en moins. Il y a de plus en plus de règlements qui font que c'est quasiment impossible ou c'est moins... je veux dire, c'est moins avantageux de démanteler.

Mais la relève est là. Nous autres, dans notre région, il y en a beaucoup. C'est plus les productions qui ne sont pas sous gestion de l'offre, puis, eux, bien, il faut les aider. C'est le... Je trouve que le plus gros problème, c'est les revenus. C'est sûr que, quand ils voient que les parents ont de la misère à arriver, ils n'iront pas prendre la relève. Ça prend... Il faut que les enfants soient capables d'en vivre, puis c'est juste normal, là. C'est là, définitivement, qu'est le problème.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Philipp.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): ...pour votre dynamisme. Puis je suis sûr que vous allez en motiver plusieurs dans votre région.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Voilà. M. le député de Beauce-Nord, vous n'avez rien à dire?

M. Grondin: Oui, j'aurais quelque chose. Si vous me permettez, M. le Président.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ah oui! je vous le permets.

M. Grondin: Il y a quelque chose qui m'intéresse dans votre document, vous avez parlé des sacs de plastique, là, la récupération, parce que, ça, on vit ça un peu partout. En tout cas, dans mon compté, on en a beaucoup. C'est quoi que vous faites avec?

M. Duteau (Gérard): Bien, ils sont expédiés à Sherbrooke, là. Honnêtement, je ne peux pas aller beaucoup loin là-dedans. Mais on nous garantit qu'ils ne retournent pas au site d'enfouissement. Ça, c'est la certitude qu'on a. Ils sont transformés, mais de quelle façon exactement, là... À un moment donné, c'est la régie intermunicipale des déchets qui a pris ça en main. Nous, la...

Disons qu'il faut rendre hommage, là. On a eu un président, M. Masson, là, que... La plupart des choses qui ont été réalisées là-dedans, on lui en doit le crédit. C'est un homme extrêmement dynamique, qui avait une large expérience du syndicalisme agricole puis qui voulait. Et il avait ça... Il en faisait des choses personnelles, là, de réussite, ces affaires-là. Et, même si ça ne réussissait pas du premier coup, comme l'histoire de la demi-cenne qui... Au début, c'est 0,01 $. Il s'est présenté plusieurs fois à la MRC -- j'y ai déjà été avec lui -- ça a été refusé. Mais, 100 fois sur le métier tu remets ton... avec des nouveaux arguments, puis, à un moment donné, ils ont dit: Oui, c'est potable.

Et ça a été la même chose, ça. Ils l'ont parti dans Compton puis avec deux autres municipalités. Les gens, les producteurs ont investi beaucoup, ils ont acheté des bacs énormes, ces affaires-là. Ça n'a pas fonctionné. Mais on a des militants aussi, environnementaux, qui nous ont aidés là-dedans, et graduellement, graduellement... C'était de trouver un débouché. Parce qu'ils étaient prêts à le prendre, mais ils auraient voulu qu'on le lave avant. On ne peut pas commencer à laver les plastiques sur les fermes. Il y a une limite, là, à un moment donné, à ce qu'on peut faire pour l'environnement. Et ça fonctionne, en tout cas. Et, nous autres, les producteurs, ça nous coûte... Cette année, ça nous coûte 76 $ de taxe spéciale pour me débarrasser de mes plastiques. C'est bon marché.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Pour l'année?

M. Duteau (Gérard): Pour l'année, oui.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ah! ce n'est pas cher.

M. Grondin: Votre 0,005 $ là...

M. Duteau (Gérard): Oui.

M. Grondin: ...c'est quoi, les projets concrets que vous avez faits, là, pour...

M. Duteau (Gérard): C'est une multitude... On peut dire qu'il y a une multitude de petits projets. Parce que, de la façon que ça se présente, là, les gens font la demande au comité, on se réunit, comme on s'est réunis hier, comme je le mentionnais, on étudie la demande. Il n'y a pas... On ne fait pas des projets de 100 000 $, là, parce qu'on a un budget limité. Et ça va se faire aussi bien dans la ville de Coaticook que ça va se faire en campagne. Aussitôt qu'il y a une détérioration de berges, un affaissement des berges, ces choses-là, qu'il y a danger que la bâtisse tombe à l'eau, on intervient, on dit à la personne: Bien, lui, il faut qu'il fasse... C'est sérieux, là, il faut qu'il fasse faire une étude d'ingénieur si ça présente un danger quelconque. Puis il nous présente ça, puis on évalue... ou, si on ne peut pas le faire, on essaie de le diriger vers d'autres structures qui peuvent l'aider. Et les gens sont très satisfaits de ça, et nous autres aussi.

**(17 h 10)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Duteau. Merci, M. le député de Beauce-Nord, pour votre intervention. Messieurs de Coaticook, ça a été fort intéressant, M. Stirnimann, bravo, M. Duteau. Puis bon retour chez vous, il fait beau.

M. Duteau (Gérard): Moi, je vous dirais que, quand Philipp a pris la présidence quand M. Masson a lâché, bien, il y a plusieurs yeux qui se sont tournés vers moi, vu que j'avais déjà une bonne expérience de ça. J'ai été rencontrer Philipp chez eux. Moi, j'avais 63 ans, j'ai dit: Je ne suis pas... je suis peut-être encore dynamique, mais je ne suis pas l'image de la région. J'ai dit: C'est un jeune comme toi qu'il faut qui prenne ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): On a besoin...

M. Duteau (Gérard): Moi, j'ai dit: Je t'encourage, parce que, j'ai dit, moi, j'avais un professeur qui me disait que la valeur n'attend pas les années puis, j'ai dit, c'est pour ça probablement qu'à 30 ans j'étais maire de ma municipalité. Ça fait que j'ai dit...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, mais vous êtes encore là pour le supporter. Ça, c'est bien. C'est intergénérationnel, ça, monsieur. C'est ce qu'on a besoin.

M. Duteau (Gérard): ...tu peux compter sur moi, sur mon support puis ma disponibilité.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bravo! Merci beaucoup. Je suspends quelques instants et j'invite Solidarité rurale du Québec à prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 11)

 

(Reprise à 17 h 15)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Nous reprenons nos travaux. Nous recevons Solidarité rurale du Québec. Bonjour, Mme Bolduc, bienvenue chez vous. Et je vous cède la parole.

Solidarité rurale du Québec (SRQ)

Mme Bolduc (Claire): Merci beaucoup. M. le Président, mesdames messieurs de la commission, merci de nous recevoir. Je suis accompagnée, pour cette présentation, de Caroline Jacob. Mme Jacob est agente de recherche chez Solidarité rurale du Québec.

Je profite également de l'occasion pour rappeler qui nous sommes, à Solidarité rurale. Nous sommes d'abord une coalition, une coalition qui regroupe des grandes organisations, une vingtaine, mais également des particuliers et des organisations locales et régionales, des gens, des organisations qui se sont engagés à l'endroit de la Déclaration du monde rural. Et donc notre action, depuis plus de 20 ans, elle est dédiée à la revitalisation des milieux ruraux, à leur droit à la différence et à leur droit à la prospérité.

Quand on traite de la ruralité, on parle de la réalité du village, on parle de l'espoir des communautés. On parle, en fait, de l'avenir du Québec. Et, quand on parle d'agriculture, on se parle de société québécoise. À cet égard, l'agriculture et l'alimentation constituent le coeur de ce qu'est une société. L'agriculture, c'est un mode de vie, c'est une activité noble qui nourrit la société non seulement en termes d'aliments, mais également en termes de santé. C'est une activité qui participe à la sécurité du garde-manger, à l'aménagement du territoire et à la préservation de la culture et des cultures locales.

L'agriculture et l'alimentation font donc partie de l'identité d'une nation, mais surtout ses activités constituent un pilier essentiel de l'économie rurale, et, pour jouer pleinement leur rôle dans l'occupation des territoires et dans l'économie rurale, ses activités devront s'adapter plus que jamais aux défis de ce siècle, défis qui touchent l'alimentation et l'aliment, les territoires, les communautés. C'est pourquoi il importe dès maintenant de revenir à la nature des choses, de mettre de l'avant que la politique attendue, c'est une politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire. Une politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire.

Un mot, un mot sur la ruralité pour corriger les perceptions véhiculées concernant les réalités du monde rural et les réalités qu'on a pu lire dans le livre vert.

Alors, précisons qu'à l'heure actuelle ce n'est pas 20 % de la population du Québec qui vit en milieu rural, mais 26 %. Cette population connaît un taux de croissance supérieur à celui des villes depuis 2006, et on assiste maintenant à un renversement des tendances migratoires vers l'espace rural. De fait, jamais, dans l'histoire du Québec, la population rurale n'a été aussi nombreuse, près de 2 millions de personnes, et ça, c'est méconnu de l'ensemble des Québécois.

**(17 h 20)**

L'agriculture, c'est aussi nos territoires, et Solidarité rurale du Québec est particulièrement heureuse de voir que l'occupation dynamique des territoires est une préoccupation qui a constitué un objectif de la future politique, politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire. Mais l'occupation dynamique des territoires ne peut pas survenir sans un cadre, sans une vision d'ensemble et sans une politique qui considèrent le développement du territoire non pas comme un effet d'entraînement automatique induit, mais plutôt comme une préoccupation qui va influencer, dès le départ, la façon de voir et de concevoir le développement du secteur agricole.

Ce n'est pas une incidence, l'occupation des territoires, parce qu'il va y avoir de l'activité agricole. Il faut réfléchir à nos territoires et voir comment l'activité agricole va y contribuer. Sans cette vision, on risque de déboucher dans un cul-de-sac très prévisible, parce qu'il est déjà connu. C'est ce à quoi ont conduit les actions, les politiques agricoles et les politiques de soutien des 30 dernières années, un développement qui creuse les disparités, qui délaisse de vastes régions pour se concentrer dans des régions à proximité des marchés urbains, qui pose de très grands défis à l'environnement, aux paysages et à la vitalité des villages et des territoires. Rappelons que, dans les dernières statistiques qui ont été évoquées par Solidarité rurale, notamment dans le mémoire préparé en 2006 pour la commission Pronovost, on relevait que 66 % des aides agricoles étaient dirigées dans trois régions et dans deux productions.

Évidemment, quand on parle de territoires, certains outils, certains éléments peuvent être amenés et supportés, notamment le zonage agricole. La ruralité du Québec est découpée par le zonage agricole. Le tiers de l'oekoumène est zoné agricole, mais la moitié de cette superficie-là, une superficie réservée à l'agriculture, est effectivement occupée par de l'activité agricole, par des fermes. Il y a donc là un très grand potentiel sous-utilisé et malheureusement souvent convoité pour d'autres usages.

La coalition se fait un devoir de rappeler à la commission qu'au Québec on a en main tous les outils nécessaires pour favoriser une réelle occupation du territoire et pour passer à l'action, ce qui est essentiel à notre avis, et elles sont résumées dans le rapport... les recommandations du rapport Ouimet, qui ont suivi le rapport Pronovost.

La coalition adhère aussi à l'idée que les plans de développement de la zone agricole, les PDZA, faits par les MRC en concertation avec le milieu soient largement adoptés. En fait, ce qu'on propose, c'est de passer du mot «projet pilote» à «on fait des plans de développement de la zone agricole», de passer à un mode qui capitalise sur l'enseignement des expériences des projets pilotes.

Enfin, les territoires, ce sont aussi des paysages, de l'environnement. Ces deux aspects de la ruralité sont fortement marqués par l'agriculture. Considérant que la ruralité d'aujourd'hui est plus complexe et qu'elle se décline désormais en une multitude d'activités et de fonctions qui reflètent la diversité des territoires, il importe d'apporter une attention particulière non seulement aux technicités qui touchent ces deux aspects, mais à une vision que l'on doit se donner pour bien camper le devenir de nos territoires, une vision qui va ensuite imprégner les techniques qu'on mettra en place.

L'agriculture, c'est également une activité économique. Les observations faites par Solidarité rurale depuis plusieurs années nous amènent à nous préoccuper de l'érosion de la contribution de l'agriculture à l'ensemble de l'économie rurale. Les politiques et les programmes mis en place depuis parfois 30 ans n'ont pas empêché ni même ralenti la concentration de la production. Et, je le mentionnais tout à l'heure, c'est 66 % des aides dans trois régions, dans deux productions. À ce constat s'ajoute que nous avons vu aussi la transformation, la valeur ajoutée et les emplois qui y sont associés quitter les zones rurales pour se concentrer dans le bassin de la métropole à hauteur de plus de 80 %. Ces données interpellent donc globalement la capacité de créer de la valeur ajoutée directement dans nos territoires et nous imposent de repenser le modèle agricole et agroalimentaire dans son ensemble.

Solidarité rurale du Québec est satisfaite de voir que le livre vert reconnaît l'importance de la diversification du potentiel agricole, agroalimentaire et bioalimentaire régional et qu'il reconnaît la pluralité des réalités territoriales.

Toutefois, la diversification revêt un caractère particulièrement important pour les territoires moins favorisés par la nature ou plus éloignés des marchés. C'est pourquoi il est impératif que le principe de modulation soit explicitement intégré aux objectifs de la future politique. Les aides qui seront élaborées devront être souples et démontrer une capacité à s'adapter aux différentes réalités et aux besoins inhérents aux territoires tant au niveau de la production que de la transformation locale. Les demandes exprimées dans plusieurs régions, dans plusieurs milieux démontrent l'importance de cette modulation pour tenir compte notamment de l'éloignement, de son impact sur le coût des intrants, des conditions de production et de l'accès aux marchés, pour n'en nommer que quelques-uns.

SRQ s'attend ainsi à des mesures adaptées et surtout à une politique cohérente, d'ensemble, en mesure d'encourager la transformation locale, et l'ancrage, et la valeur ajoutée partout sur les territoires.

Pour les gens de la ruralité, s'il y a une activité, un secteur en mesure d'assurer une meilleure distribution des retombées, une meilleure occupation de tous les territoires, c'est bien l'agriculture et tout le secteur agroalimentaire.

L'agriculture, c'est également notre santé. Nous sommes ce que nous mangeons. Il devient donc difficile de passer sous silence cet aspect des préoccupations dans un contexte de politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire. Au moment où se multiplient les études qui démontrent les impacts de certains choix de production ou de transformation alimentaire sur la santé des personnes et sur la santé globale de l'ensemble de la société, il importe de se donner des repères et des moyens suffisamment cohérents avec les stratégies de production pour assurer que les aliments produits et transformés demeurent source non seulement de nourriture, mais également de santé.

J'en appelle à des études récentes sur l'impact des pesticides sur la reproduction humaine, sur l'impact des pesticides dans l'incidence de plusieurs types de cancer. J'en appelle également à des études, nombreuses, qui parlent de l'impact, de l'incidence de la présence du maïs et de ses dérivés dans l'alimentation animale et dans l'alimentation humaine. Les informations sont suffisamment cohérentes et congruentes pour qu'on se préoccupe de ces aspects-là des choses non seulement pour notre santé, mais également parce que ça a un impact sur les territoires, sur les modes de production et sur les technicalités.

L'agriculture, c'est enfin et surtout un contrat social. La concertation va constituer un catalyseur essentiel pour la mise en oeuvre de la future politique si elle ne se limite pas à la seule perspective d'affaires. Solidarité rurale le dit et le réitère: L'agriculture et l'agroalimentaire méritent un contrat social large, non pas un contrat d'affaires. La dimension économique, bien sûr, elle est importante, mais réduire le projet de politique à cette seule perspective est un choix qui correspond mal aux réalités d'aujourd'hui. Une concertation centrée sur les seuls intérêts économiques des différents maillons de la chaîne alimentaire ne change en rien les pratiques et les habitudes du secteur, ça reste économique, alors que l'activité agricole est d'abord sociale.

L'agriculture et l'agroalimentaire possèdent des dimensions et des fonctions uniques sur le plan social, sur le plan culturel, sur le plan de la santé, sur le plan du territoire. Les négliger, c'est se priver également d'une attitude citoyenne fidèle et enthousiaste envers nos produits, une attitude qui ne peut pas être atteinte par le marketing et les campagnes de promotion, si performantes soient-elles. C'est aussi négliger le lien avec des communautés, avec l'espace territorial. C'est un ancrage qu'aucun autre secteur ne possède.

Nous sommes convaincus qu'un contrat social nous attend, un contrat par lequel notre agriculture assure une souveraineté alimentaire à sa population, un revenu équitable à ses agriculteurs et une occupation durable de ses territoires.

La mission du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec doit donc être centrée pleinement sur ce contrat. Elle doit être centrée sur le savoir, parce que le savoir, c'est l'information tant pour les praticiens que pour ceux qui choisiront les aliments. Le savoir. La distribution de ce savoir-là.

Il faut centrer la mission du ministère aussi sur la capacité pour les citoyens de faire des choix et en conséquence de s'exprimer, donc d'être entendus. Parce que choisir, savoir puis dire ce qu'on recherchait et avoir été certains qu'on a été entendus, c'est également partager. Et c'est ça, le contrat social, partager les risques et la beauté des choses.

Si on veut se donner le goût du Québec, et on veut se le donner, il faut que les Québécois de toutes les régions aient le goût de regarder notre agriculture et nos produits avec moins d'indifférence, avec plus de fierté, mais surtout avec un vrai sentiment d'appartenance. Ce sont nos valeurs communes que doit traduire une politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire, et ces valeurs sont la solidarité, le respect de l'environnement et l'éducation comme facteur d'épanouissement des individus, des sociétés et de son développement économique.

Se doter d'une première politique à l'endroit de ce secteur, c'est aussi une réelle occasion pour renforcer la légitimité sociale de soutenir une agriculture, année après année, qui répond aux attentes sociales et qui fasse vraiment l'occupation des territoires. À Solidarité rurale, on se dit: Tant vaut le village, tant vaut le pays. Ce village-là, il va toujours continuer de nourrir la ville et de nourrir notre société. Merci beaucoup de votre attention.

**(17 h 30)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, Mme Bolduc. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Bonjour, Mmes Bolduc et Jacob. D'entrée de jeu, vous me... ça m'intrigue un peu, et j'aimerais que vous m'éclairiez, quand vous faites expressément une distinction entre politique agricole, agroalimentaire, bioalimentaire. Vous le mentionnez deux fois en trois temps. Est-ce que vous pourriez me faire un peu de lumière là-dessus, cette distinction que vous faites entre les trois?

Mme Bolduc (Claire): En fait, comme je l'ai mentionné, M. le ministre, on a... on revient à la nature des choses. Or, la réalité agricole, elle est unique, elle est distincte, elle est très particulière. En matière d'économie, l'agriculture, c'est le seul secteur qui ne répond pas directement aux notions... aux principes de l'offre et de la demande. C'est une activité qui peut réagir très différemment sur les marchés.

Quand on regarde ce que sont les activités bioalimentaires, essentiellement dans la distribution et dans la restauration, ce sont des activités économiques qui répondent de façon très différente aux situations économiques, aux mandats d'influence, et ce sont des situations où l'intervention gouvernementale a bien peu de prise, a peu d'effet. L'intervention gouvernementale, l'impact reste très limité dans les activités de distribution et de restauration.

Quant à l'agroalimentaire, la transformation et peut-être les circuits courts, évidemment c'est aussi des secteurs qui sont très liés à la production.

Et, quand on revient à la nature des choses et qu'on reconnaît les choses dans leur essence même, on comprend qu'une politique agricole va toucher les secteurs de la production et des choix de production, une politique agroalimentaire va toucher également un lien avec la production mais surtout la transformation locale et les circuits courts. Là, deux secteurs où l'impact des mesures gouvernementales, des mesures du ministère peut jouer un très grand rôle, alors que, dans le bioalimentaire, il y a peu d'impact des interventions gouvernementales. Bien que ce soit un grand secteur -- ça appartient à quelques grand joueurs -- il y a très peu d'impact des mesures de soutien du gouvernement.

Il faut que les gens se reconnaissent aussi dans leurs politiques.

M. Corbeil: Il y a ici le fait que vous mentionnez expressément que, pour vous, bioalimentaire, ça ne concerne que la distribution, alors que, dans l'esprit du document qui a été soumis, nous, c'était... en fait, le message qu'on envoyait, c'était inclusif, de la terre et de la mer à la table à travers le travail de tous les artisans, qu'ils soient pêcheurs, producteurs, transformateurs, distributeurs, préparateurs, livreurs. Et en fait le lien était le produit de tous ces maillons, ces différents maillons là, le produit qui est sanctionné ultimement par le consommateur. Mais je comprends maintenant, avec les explications que vous venez de me donner, pourquoi vous faites une distinction au niveau agricole, production, choix de production, agroalimentaire qui inclut la transformation et bioalimentaire qui, dans votre lecture, est en lien avec la distribution.

Je reviendrai tantôt sur la dimension contrat social, mais vous avez mentionné qu'il faudrait amener les Québécois à regarder l'agriculture avec moins d'indifférence, et c'est tout un défi, parce qu'à l'heure actuelle... Je ne sais pas si... ça ne fait pas encore un an, mais bientôt presque un an, je ne comprends pas encore pourquoi les gens ne reconnaissent pas l'importance du secteur. Est-ce que c'est parce qu'on est dans l'abondance? Est-ce qu'on est inondés de circulaires qui nous donnent à penser que tout est disponible facilement, librement, simplement, alors qu'il n'en est rien?

Et je pense que vous êtes bien placée pour le savoir non seulement de par le poste que vous occupez, mais aussi par la profession que vous exercez. Comment on ferait pour amener les Québécois à regarder l'agriculture avec moins d'indifférence? Et c'est une des choses qu'on vise en voulant donner le goût du Québec puis en faisant... et en distinguant les produits québécois, etc. Je veux vous entendre là-dessus: Comment on s'y prendrait pour -- si vous étiez à ma place -- amener les Québécois à regarder le secteur alimentaire et l'agriculture avec moins d'indifférence?

Mme Bolduc (Claire): C'est intéressant comme question parce que vous posez la question, puis, moi, je vois la publicité, la très belle publicité avec Mme Fontaine pour se donner le goût du Québec et les aliments. Mais tous ces aliments-là sont préparés et bien transformés, c'est très loin du pâté chinois, hein? Et c'est très loin d'une pomme à croquer quand tu arrives de l'école. C'est peut-être... Et ce n'est pas nécessairement le marketing qui va faire le plus le travail de redonner le goût du Québec aux Québécois. C'est beaucoup dans l'exemple. Et l'exemple, c'est ce qu'on fait comme parents au quotidien, c'est ce que font, par exemple, les professeurs, par exemple les...

Une voix: ...

Mme Bolduc (Claire): Oui, pourquoi pas l'État? Mais c'est dans l'exemple. C'est aussi dans les propositions qu'on fait au niveau institutionnel, les mesures d'achat institutionnel. Quand on choisit déjà, dans les écoles, dans les hôpitaux, dans les garderies, de proposer des aliments qui viennent du Québec, de le dire et de donner l'exemple, c'est...

On a fait des belles campagnes... Puis j'étais membre de la fonction publique au moment où on a fait une campagne pour promouvoir la santé physique, l'exercice. Puis, comme directrice régionale, on me demandait de demander à mon personnel de faire plus d'activité physique. Moi, j'avais un bureau sur deux étages puis je les obligeais à monter les deux étages au moins quatre fois par jour. Au début, ils trouvaient ça un peu drôle, puis après ils ont compris que c'était... Finalement, ça permettait... Il y en avait même qui discutaient de leurs dossiers en se promenant dans l'escalier.

C'est l'exemple. C'est l'exemple pas seulement de ce qui est peut-être attirant, glamour, intéressant, c'est l'exemple de ce qu'on mange au quotidien. C'est l'exemple de ce qu'on retrouve sur nos tablettes qui est produit ici. Je ne sais pas si vous avez vu les publicités des pommes du Québec, mais on en retrouve à l'année. On mange beaucoup de brocoli -- l'hiver, le brocoli, on ne l'a pas conservé ici -- mais on oublie qu'il y a une plante de cette famille-là, qui est une plante naturelle, cultivée au Québec depuis tout le temps, qui est le navet, ou le rutabaga, puis que ça goûte à peu près la même chose, c'est les mêmes valeurs nutritives, c'est les mêmes ingrédients qui donnent son goût particulier. Qu'est-ce qu'on a ici comme... C'est l'exemple qui va nous permettre vraiment de changer des choses.

Et, par les institutions, par l'information aux parents, par l'échange d'information aussi et par l'écoute qu'on aura à l'endroit des Québécois, oui, on va leur donner le goût du Québec. En développant aussi les activités de transformation locale, en développant ce qu'on appelle l'économie résidentielle, l'économie des milieux, l'économie de proximité pour les gens autour, pas nécessairement un produit transformé pour l'exportation, on ajoute aussi à cette fierté-là.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): ...M. le ministre, le député de Rivière-du-Loup voulait intervenir, parce que...

Une voix: ...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, O.K. Non, mais il n'y aura plus beaucoup de temps par après.

M. Corbeil: Bien, juste quelque chose qui me préoccupait aussi: Pouvez-vous définir ce que vous entendez par «contrat social» entre le citoyen, le gouvernement et l'agriculteur?

**(17 h 40)**

Mme Bolduc (Claire): Les politiques agricoles, traditionnellement, elles ont été instaurées entre le ministère et les agriculteurs. Mais c'est une activité sociale, l'agriculture. C'est une activité où les citoyens, par le biais de leurs taxes et de leurs impôts, amènent, année après année... actuellement, c'est près de 700 millions de dollars sur une base annuelle. C'est une activité sur laquelle on doit se permettre d'écouter les citoyens sur ce qu'ils attendent de leur agriculture, de leurs produits alimentaires, mais aussi de leurs territoires, de ce qui se passe sur leurs territoires, d'où le contrat social.

Le contrat social, il doit interpeller l'État, le citoyen qui est un consommateur, qui peut être un producteur, et l'agriculteur. C'est un partage à trois, c'est non pas un contrat d'affaires entre deux personnes, mais c'est un partage à trois pour comprendre que c'est nos territoires, notre ruralité, nos villages. C'est aussi notre nourriture, notre santé. C'est dans ça qu'on investit. Quand on investit dans l'agriculture du Québec, c'est dans nous qu'on investit. C'est une façon de faire en sorte que les gens aient le goût du Québec.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bon, j'ai besoin peut-être de... Oui.

M. Corbeil: ...pour votre information, le budget au niveau du ministère, c'est 1 069 000 000 $.

Mme Bolduc (Claire): Mais les aides directes aux producteurs...

M. Corbeil: Les aides directes, c'est 775: 650 dans La Financière et la Stratégie de soutien à l'adaptation et 125 dans le Programme de remboursement de taxes foncières.

Mme Bolduc (Claire): Mais, moi, je pensais aux aides directes aux producteurs. Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bon, j'ai besoin des consentements des membres. Ma gestion de temps va être différente si vous me permettez de terminer à 18 h 30. Sinon, je vais gérer le temps autrement si... On est censés finir à 18 h 15.

Des voix: ...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Non? Bon, O.K. Donc, on continue du côté...

Une voix: ...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, ça va. C'est vous qui avez le gros bout du bâton. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. D'Amour: Dans le fond, M. le Président, je vais être bref à travers deux sujets qui m'interpellent particulièrement. Parce qu'on a eu l'occasion de siéger... On a eu l'occasion de siéger à compter du mois d'août dernier avec, bon, les gens de La Financière. On a parlé... L'UPA a parlé, à certains moments, de modulation de programmes. Puis là-dessus je voudrais que vous poussiez davantage votre réflexion, avec des exemples peut-être concrets. Je sais où vous voulez en venir puis je pense que c'est suffisamment intéressant pour qu'on puisse aller plus loin là-dessus.

Et sur la question des circuits courts, en deuxième temps, s'il nous reste du temps, la question des circuits courts, jusqu'où on peut se permettre d'aller, région par région. Est-ce qu'on va suffisamment loin? Les circuits courts, on n'en parle pas depuis 25 ans. Sans être un phénomène qui est nouveau, je pense que c'est porteur aussi pour les régions. Alors, je laisse aller votre réflexion là-dessus.

Mme Bolduc (Claire): Pour la modulation, c'est intéressant, c'est vraiment de tenir compte des milieux de production. Toutes les zones de... Rappelons-nous qu'on a des zones agricoles partout au Québec, excepté dans le Grand Nord, et que toutes les zones de production n'ont pas le même potentiel, la même capacité, n'ont pas le même potentiel de rendement mais n'ont pas la même proximité non plus avec les... ceux qui sont susceptibles d'acheter les produits.

La modulation, c'est une mesure qui permet de reconnaître les difficultés inhérentes dans un milieu et d'amener une aide en conséquence. Quand... Les aides antérieures, la façon dont elles ont été structurées, elles ont eu comme impact vraiment d'amener des productions à se développer et à se concentrer dans trois régions, dans deux productions. Les productions, ce n'est pas un secret, c'est le porc et le maïs, et c'est l'assurance stabilisation qui a amené ça, et les régions de production, c'était Beauce-Appalaches, Montérégie, Lanaudière. Alors, quand on a cet impact-là... La mesure, elle était une mesure unique pour l'ensemble des producteurs. C'était une mesure qui a mené à cette concentration-là. De sorte que 66 % de l'argent qui était distribué très également, de façon très universelle à l'endroit de tous les producteurs agricoles... Elle a amené cette concentration-là des avoirs, des actifs agricoles et de la production.

La modulation, c'est de reconnaître que c'est nécessaire de produire autant en Abitibi, en Gaspésie qu'en Montérégie et que, si c'est nécessaire de produire, il faut être capables, pour les producteurs agricoles, de supporter la production, d'en vivre et de bien la faire, avec des revenus décents. Donc, l'aide ne sera pas universelle, mais elle sera modulée et elle tiendra compte des difficultés particulières et du fait que les rendements peuvent être différents, que les intrants peuvent être plus chers et que la proximité des marchés est différente. Voici pour la modulation.

C'est vrai aussi en transformation. Parce que, quand on parle de transformation, et là c'est important, on avait ça dans une société rurale un peu... anciennement, la transformation des aliments se faisait sur une base très locale. On ne visait pas l'exportation, on visait l'économie résidentielle, l'économie locale. On visait à approvisionner localement les gens. C'est également une mesure qui peut être renforcée.

C'est ça, un circuit court, quand on produit quelque chose qui s'adresse à la population locale. On l'a avec les marchés publics, c'est intéressant, mais ça reste marginal sur l'ensemble de ce qui est transformé. Une économie... Une transformation modulée locale, qui répond à des besoins résidentiels, à l'économie résidentielle, c'est une économie... c'est une transformation, pardon, qui va avoir un impact réel dans les milieux, sur l'occupation des territoires, pour autant qu'on la soutienne de juste manière, non plus de façon universelle quand elle soutenue, parce que ce n'est pas toutes les activités de transformation qui le sont, mais, quand elle est soutenue, quelle soit soutenue de façon à tenir compte, encore une fois, des difficultés et des particularités des milieux où ça se passe.

On parle de circuits courts. On a identifié facilement et rapidement les marchés publics, vous et moi, on les connaît. Mais les circuits courts, c'est aussi quand on a une politique d'achat institutionnel, qu'on se donne le goût du Québec, qu'on donne le moyen aux institutions d'acheter les productions locales. Et ça, ce n'est pas seulement un circuit court consommateur, c'est un circuit court qui rejoint et qui sert à l'éducation d'une population.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Mme Bolduc...

Mme Bolduc (Claire): Il faut que je raccourcisse ma réponse. Voilà.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui... Non. C'est-à-dire que... Merci au député de Rivière-du-Loup de sa question, et je vais passer le flambeau au député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Bolduc, bonjour, Mme Jacob. Merci d'être là. Un mémoire fort intéressant. Écoutez, aussi, Solidarité rurale, coalition, vous l'avez bien présenté et rappelé, aussi, hein, 20 ans de parcours, une profondeur, une réflexion -- vous en avez vu -- alors c'est intéressant. Et, de la façon que vous le présentez, il y a des axes importants à tenir compte.

Ce que je comprends, entre autres, Mme Bolduc, c'est qu'en lisant notamment, là, dans l'introduction... En 2006, il faut savoir que le gouvernement, en raison de la difficulté du monde agricole, notamment, et de l'agroalimentaire, a jugé bon de mettre en place une commission. Et là on se retrouve cinq ans plus tard, et, ce que vous dites, au fond, par rapport à ce qui est proposé comme vision, il y a des pans qui manquent ou il y a des domaines, il y a des domaines fondamentaux, dont -- par exemple quand vous parliez de l'agriculture en soi, c'est que l'agriculture on avait parlé ou on... -- tout le monde s'attendait d'une politique agricole, alors que la politique bioalimentaire, elle est englobante. Mais, en raison des particularités... Et vous avez donné des exemples précis de la réalité de l'agriculture, qui n'est pas uniquement productrice, qui est aussi pour d'autres -- je n'y reviendrai pas, là -- dimensions, et qui est particulière -- et, le ministre, d'ailleurs, tout à l'heure, je l'entendais, et à bon droit. Au montant qui est investi annuellement par les fonds publics, je pense qu'une politique agricole serait bienvenue. Et bien sûr il y a la dimension alimentaire de la chose.

Alors, ce que vous dites, c'est qu'il faut absolument qu'il y ait quelque chose de distinctif pour qu'on puisse pouvoir travailler sur des changements ou de la mobilisation, ou en tout cas sur les différents axes, mais vraiment en amont, notamment, puisque c'est plus qu'un simple marché, c'est... Bon, c'est ce que j'en comprends et qui est aussi intéressant.

Il est englobant, le projet de livre vert. Mais, à vouloir satisfaire tout le monde, peut-être qu'aussi c'est difficile d'en arriver à porter de façon dynamique et pour l'avenir... Ce qui a été d'ailleurs ressorti... ce qui est ressorti notamment au rapport Pronovost et bien sûr les autres rapports qui ont suivi. Est-ce que ma lecture de ce que j'ai entendu correspond à votre... ce que vous avez livré?

**(17 h 50)**

Mme Bolduc (Claire): Tout à fait. J'ajouterais que les sociétés n'existeraient pas si l'activité agricole n'avait pas été développée, c'est la base d'une société. C'est pour ça que, et c'est peut-être ce que j'ajouterais également en réponse à la question du ministre sur la politique bioalimentaire, l'agriculture, si on veut vraiment donner le goût du Québec aux Québécois, le goût des aliments du Québec, on doit leur dire que c'est leur agriculture qui est derrière l'aliment qu'ils mangent. On doit leur dire qu'il y a quelqu'un pas loin de chez eux, autour de leur milieu de vie, qui a contribué à faire cet aliment-là, à le produire, à travailler pour le produire, qu'il y a peut-être quelqu'un qui l'a transformé près de chez eux. Et c'est là, la politique agroalimentaire.

On estime qu'il y a eu beaucoup de choses de dites. Vous savez que Solidarité rurale a été un peu à la source de cette Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire au Québec. Il y a beaucoup qui a été dit. On était heureux de voir que, quand on regarde la politique actuelle, le livre vert, mais... l'aliment, la nourriture au centre de la préoccupation. Mais ce n'est pas seulement l'aliment, la politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire, c'est ce qu'on veut exprimer, c'est ce qu'on a dit dans notre mémoire, ce n'est pas seulement l'aliment, c'est le territoire, c'est l'activité économique qui supporte un territoire, qui supporte la vitalité d'un village pour d'autres activités économiques également. C'est le paysage et c'est notre santé, et ça, ça, on ne peut pas l'échapper.

Puis c'est notre culture, c'est notre culture. Puis on est très imprégnés de ce que... L'agriculture a marqué toute l'histoire du Québec, autant dans nos façons de faire. À Noël, ce n'est pas des sushis qu'on mange, hein, c'est de ce qu'on produit ici, au Québec. Nos fêtes, nos activités, nos rencontres sont imprégnées des aliments traditionnellement produits dans un climat nordique. C'est notre culture, c'est notre identité. C'est ça, l'agriculture. D'où l'importance d'un contrat social, d'où l'importance, d'où l'urgence d'agir, d'où l'urgence d'agir.

On a un secteur qui est très déstabilisé depuis de nombreuses années. La Commission sur l'avenir de l'agriculture, ça a été lancé en 2006. On a un secteur qui a besoin de réponses, qui a besoin d'innovations. Innover, c'est avoir des nouvelles idées, mais c'est aussi avoir le courage d'arrêter de travailler sur les idées qui ne marchent plus. C'est ça aussi, une politique agricole qui réponde aux besoins du XXIe siècle.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. M. le député de Saint-Hyacinthe. Je devais dormir, moi, là, là.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Moi, j'ai lu votre mémoire, je vous entends depuis le début de l'exposé. Et, quand je lis le titre du livre vert, c'est Le livre vert pour une politique bioalimentaire. M. le ministre disait tantôt que ça englobait tout le monde, mais je sens quand même que ce que vous nous dites, c'est que le milieu rural ne s'identifie pas à ce titre-là ou à ce livre vert là. En tout cas, vous me corrigerez si j'ai mal compris, parce que, dans votre... à la page 4, vous mentionnez: «Enfin, ce projet démontre des lacunes du ministère quant à la compréhension de la réalité du monde rural.» Puis un petit peu plus loin, vous allez plus loin que ça, vous dites: Une présentation déficiente et misérabiliste des réalités rurales. «Ceci témoigne d'une incompréhension qui s'appuie sur des perceptions fausses sur la ruralité.» J'aimerais juste essayer de voir... si vous pouvez me dire si j'ai bien compris votre intervention ou si c'est... Moi, ce que je perçois, là, je perçois que vous n'êtes pas d'accord avec l'identification de la politique du livre vert sur...

Mme Bolduc (Claire): Sur le titre, effectivement, on pense que la nature des choses doit être mise de l'avant. C'est une politique agricole, agroalimentaire et bioalimentaire. On ne l'exclut pas, le bioalimentaire, mais la nature des choses fait que l'agriculture, c'est particulier et que ça doit être reconnu comme tel, l'agroalimentaire, c'est particulier, ça doit être reconnu comme tel. Et, pour donner le goût du Québec aux Québécois, je l'ai dit, je vais le répéter, il faut qu'ils sachent d'où ils viennent, leurs aliments, qu'il y a une activité de production, qu'il y a un travail de la terre, qu'il y a un élevage qui est derrière l'aliment qu'ils mangent. C'est ça, l'agriculture.

Quant à la présentation déficiente et misérabiliste des réalités rurales, oui, on était assez désolés de voir les données qui ont servi au ministère pour exprimer ce qu'est la ruralité en 2011. Ceci dit, on est instance-conseil auprès du gouvernement, on est instance-conseil non seulement auprès... non à l'endroit d'un seul ministère qui est porteur pour nous, qui est le MAMROT actuellement, mais on est également instance-conseil auprès de plusieurs autres ministères, tous ceux qui sont concernés par la ruralité, que ce soit le ministère de la Culture, des Transports, de l'Éducation ou de l'Agriculture. En ce sens-là, je pense que, comme coalition, on peut certainement enrichir les données et la vision que le ministère a de ce qu'est la ruralité maintenant, les particularités qui la composent, des différences qui la caractérisent et des tendances, des grandes tendances qui la touchent.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Berthier.

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe): J'aurais beaucoup d'autres questions, mais je vais laisser mon collègue...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. C'est bien, c'est du partage.

M. Villeneuve: Merci, M. le Président. Alors, Mme Bolduc, Mme Jacob, effectivement, moi aussi, j'aurais moult questions. Belle contribution en tout cas à la commission. Pour ma part, j'apprécie énormément ce que vous avez fait.

Mais je vais m'arrêter sur une question, à laquelle d'ailleurs un des collègues d'en face tantôt a plongé un petit peu, là, mais, moi, je... -- et je me pose la question: Est-ce que vous devriez avoir l'immunité parlementaire pour y répondre? Mais à vous d'en juger, mais je ne pense pas qu'on aille jusque-là -- à savoir: la modulation. La modulation, vous dites, dans votre mémoire, à la page 12, vous dites que la politique devrait nécessairement tenir compte de la modulation et l'appliquer, là, donc qu'elle ait vraiment préséance, qu'elle soit là, qu'elle soit... qu'on la sente bien et qu'on la... qu'on puisse enfin y avoir accès, et vous avez donné les raisons pour lesquelles tantôt.

Le projet de loi n° 34, qu'on va étudier à partir du 30 janvier prochain, sur l'occupation du territoire et la vitalité des territoires, en fait, du gouvernement parle de modulation mais en parle en disant que... non pas en l'obligeant, mais en disant: Bien, on verra si on module ou pas. Donc, il n'y a pas d'obligation dans le projet de loi n° 34. Peut-être arriverons-nous à faire changer d'idée le ministre? Et je parle pour moi et mes collègues.

Et, cette modulation-là, on ne la retrouve... je pense qu'on la retrouve dans la Politique nationale de la ruralité. Mais, à ce qu'on en comprend, c'est que ce n'est pas vraiment une réussite dans la Politique nationale de la ruralité.

Alors, ma question est la suivante: Qu'est-ce qui... Quel est le problème? Pourquoi est-ce qu'on a tant de difficultés que ça, au niveau du gouvernement, à faire en sorte que cette modulation-là puisse enfin s'appliquer mais vraiment de plein droit? Et je pense que... -- et je pense -- je suis tout à fait convaincu que, le jour où on va vraiment appliquer une modulation, qu'il y aura vraiment une volonté qu'elle soit appliquée... Je pense que ça fera une différence au Québec.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Mme Bolduc, vous avez moins de deux minutes, là, pour lui répondre correctement.

Mme Bolduc (Claire): Sur la modulation, et là je sais que, dans la politique de la ruralité... Ça fait deux politiques où on demande la modulation, et on laisse le fardeau de la preuve aux communautés qui demandent des mesures modulées. Le constat qu'on peut faire, et j'interpelle autant mon expérience comme personne qui a travaillé à l'interne d'une organisation gouvernementale que comme présidente de Solidarité rurale: la plus grande réticence à la modulation, elle n'est pas nécessairement du gouvernement, mais elle vient beaucoup de l'appareil gouvernemental. Ça prend une volonté extrêmement forte des gouvernants à ce moment-là pour dire qu'on fait la modulation, parce qu'une mesure très universelle, c'est aussi très facile à gérer.

Je vous vois regarder les fonctionnaires qui sont derrière vous, c'est effectivement à eux qu'on peut s'adresser. Mais la volonté, ça, c'est vous qui l'avez, ça, c'est les gouvernants qui l'ont et qui peuvent donner le ton. Alors, c'est vrai qu'il y a une réticence dans l'appareil gouvernemental, c'est là qu'est le plus grand frein.

M. Villeneuve: Maintenant, M. le Président, on...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous avez 15 secondes.

M. Villeneuve: ...on dit souvent... en tout cas, j'ai entendu, lors d'une rencontre justement de fonctionnaires, qu'ils disaient que les élus avaient le pouvoir mais qu'eux avaient le contrôle. Est-ce que la modulation, justement, c'est une peur de perdre le contrôle par rapport à ce qui se fait? Mais enfin ce sera une question...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Mme Bolduc, c'est terminé.

Mme Bolduc (Claire): Je ne répondrai pas à ça. Je ne répondrai pas à ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous n'avez pas le temps de répondre.

Mme Bolduc (Claire): Merci de ne pas avoir le temps.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci. Je viens de vous sauver la mise. M. le député de Beauce-Nord.

**(18 heures)**

M. Grondin: Oui, M. le Président. Alors, écoutez, moi, je trouve votre mémoire très rafraîchissant parce que je trouve que vous allez... C'est des questions que j'ai posées souvent, parce que je trouve que, pour donner le goût du Québec, il faut dire aux gens du Québec: L'agriculture qu'on fait, c'est une bonne puis c'est une belle agriculture, mais, quand elle est rendue dans l'assiette, on ne peut plus dire si elle vient du Québec ou non parce qu'on a oublié comment... On va prendre les bovins qu'on fait au Québec, puis on les envoie abattre aux États-Unis, et on revient: on ne sait pas si c'est du boeuf du Québec. Il y a beaucoup de... Aujourd'hui, si on ramenait ça plus régionalement, on aurait un meilleur contrôle puis on pourrait dire d'où viennent nos produits. Moi, je pense que, la journée où on va pouvoir identifier dans les épiceries que c'est un produit du Québec, ça va tout changer. En tout cas, moi, je suis comme ça, je vais acheter quelque chose, si c'est marqué du Québec ou du Canada, je suis plus porté... que si c'est marqué de la Chine, ou bien de l'Argentine, ou bien de l'Inde. Mais je pense qu'on a un bout à faire, on a un bout de chemin à faire, là.

La modulation, vous parlez de ça, à un moment donné il va peut-être falloir faire comme les producteurs de lait. Les producteurs de lait, si le lait... le producteur est en Gaspésie, ou bien s'il est dans la Beauce, ou bien si... pour transporter son lait, ça va lui coûter le même prix. La fédération dit: Bon, bien, peu importe où vous allez être, c'est tant du litre de lait que vous allez payer pour votre transport. Mais, si on faisait ça pour... si on faisait ça pour les autres, peut-être qu'on réglerait certains problèmes. C'est une... Les gens se sont mis ensemble, ils ont dit: C'est correct, que tu sois producteur n'importe où dans la province, on met un prix de base, puis vous allez tous payer le même prix. Alors, ce serait peut-être une façon.

Il y a une autre chose que j'aimerais, là... Quand vous parlez d'avoir un banc d'essai pour des activités et des projets, alors, moi, ça, ça me touche parce que, je me dis, il me semble qu'on pourrait faire des essais pour tout mettre en place pour des énergies vertes qu'on pourrait faire avec des produits agricoles, tous nos déchets qu'on peut... On regarde dans d'autres pays, là, c'est tout récupéré, ça, puis c'est tout transformé en énergie. Puis ici, au Québec, on traîne de la patte là-dedans. Il me semble qu'on aurait beaucoup de choses qu'on pourrait faire, des essais pour essayer de... En même temps qu'on améliorerait l'environnement, on ferait de l'énergie avec ça.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. le député de Beauce-Nord, j'étais pour vous dire: Laissez-lui le temps de réponse!

M. Grondin: Oui? Ah, O.K.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous avez une minute, Mme Bolduc.

Mme Bolduc (Claire): Alors, en ce qui concerne la modulation, effectivement, il y a plusieurs façons de la faire, ça peut être une modulation directe ou inverse, comme dans le cas des producteurs de lait, mais il faut se laisser... il faut vraiment avoir la volonté de le faire et l'appliquer.

En ce qui concerne les bancs d'essai, la précaution qu'on prend, quand on parle des bancs d'essai dans notre présentation, c'est de dire: C'est bien de se donner des moyens, des mécanismes pour essayer de nouvelles façons de faire, mais soyons conscients qu'on veut aller plus loin, que le banc d'essai sert surtout à peaufiner la façon de mettre en place de nouvelles technologies, de nouvelles pratiques, de nouvelles façons de faire et que ce sera transférable. Parce que malheureusement... et je l'ai vu, moi, en agroenvironnement, notamment, où on a réalisé plusieurs bancs d'essai très réalisables, très transférables, et il n'y a pas eu beaucoup de transférabilité. Alors, les bancs d'essai, c'est intéressant, c'est intéressant d'en faire, c'est surtout intéressant de le faire et de s'assurer que ça devient quelque chose qu'on peut appliquer par la suite.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, Mme Bolduc. Solidarité rurale peut être fière de sa porte-parole. Je vous félicite pour votre franc-parler. Et je vous souhaite un bon retour à la maison.

Et j'invite M. Raymond Rouleau à venir prendre place. Je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

 

(Reprise à 18 h 6)

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Nous sommes de retour à nos travaux. Nous recevons M. Raymond Rouleau. M. Rouleau, je vous cède la parole.

M. Raymond Rouleau

M. Rouleau (Raymond): Alors, bonjour. Merci...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous savez, M. Rouleau, que vous avez 10 minutes de présentation?

M. Rouleau (Raymond): Tout à fait, tout à fait. Oui, oui, je suis tout à fait au courant. Alors, merci de l'accueil, M. le ministre, M. le Président de la commission parlementaire, merci de l'accueil. Et aussi je voudrais féliciter les responsables de la mise en oeuvre de la politique d'avoir bien consenti à cet exercice d'audiences. Je pense que c'est tout à l'honneur des gens qui ont élaboré, mis en place... Je pense que l'écoute et le dialogue... Cet exercice de dialogue est vraiment, à mon avis, très structurant.

D'abord, je vous donne un aperçu de ma feuille de route. Je suis originaire d'une famille agricole du Centre-du-Québec. Le mémoire que je présente, c'est un mémoire à titre individuel. Je suis originaire d'une famille agricole du Centre-du-Québec et j'ai été pendant 30 ans producteur en serre au Saguenay--Lac-Saint-Jean. Et je suis toujours fortement impliqué dans le développement de l'horticulture ornementale au Québec. Outre mes années d'études universitaires et mes cinq années passées comme agent de développement régional, c'est plus de 50 ans d'implication en agriculture que je cumule. J'éprouvais donc un devoir de parole. D'autant plus, quand vous avez une belle fille de 35 ans qui a pris la relève de l'entreprise familiale, bien, ça nous donne comme une obligation justement de donner un coup de main.

Alors, j'ai aussi, parallèlement à mes activités agricoles, été pendant 20 ans impliqué dans une petite organisation qui s'appelle le Centre québécois du développement durable. Et cette implication m'a donné justement une vision de durabilité des choses, de sorte que ça donne vraiment le goût d'essayer de pérenniser un système, un modèle agricole.

C'est donc sous ces deux angles, celui de mon expérience personnelle comme producteur et celle de mon implication de plus de 20 ans en développement durable, que je vais articuler mon propos afin d'améliorer la compréhension fine du mémoire que j'ai déposé à la commission, et c'est sans prétention, mais avec la certitude que l'angle et la perspective peuvent amener des différences et peuvent enrichir le débat.

Dans un premier temps, je vous propose d'élever notre hélicoptère et, question de se donner une vision globale de la situation, de se donner quelques éléments de la situation agricole à l'échelle mondiale. Bon. La population a atteint depuis peu, on l'a vu, là, 7 milliards d'individus, et près de la moitié souffrent de la faim, en ce sens qu'on a 900 millions qui souffrent carrément de la faim et on a près de 2 milliards qui sont... ne mangent pas suffisamment pour les prévenir contre certaines maladies invalidantes. Donc, c'est presque la moitié de l'humanité qui sont en insuffisance d'aliments. Et ce n'est pas simplement dans les pays sous-développés, là. Dans l'arrondissement de Chicoutimi, on estime que 16 % des familles n'ont pas le budget suffisant pour se doter d'une alimentation qui prévient les maladies invalidantes.

Et la situation qui se passe à l'échelle mondiale. Les prix payés par les consommateurs sont en constante progression et les prix payés aux producteurs sont en constante régression, hormis quelques épisodes de fluctuation, mais la tendance, c'est en régression. Et, entre les deux, on a des grands industriels qui s'accaparent les profits, et ça devient une problématique. Les prix internationaux en général sont inférieurs aux coûts de production de la majorité des agriculteurs, qui constituent 75 % des pauvres de la planète, selon la FAO, et dont plusieurs ont été poussés au chômage par le libre-échange qui a mis en compétition des agricultures de force inégale alors qu'on aurait eu besoin de tout le monde pour combler le déficit alimentaire. Donc, on n'est pas en situation de surplus, là, on est en situation de déficit alimentaire à l'échelle du globe.

Si on revient à l'échelle du Québec maintenant, à l'échelle du Québec, 25 000 fermes, 25 000 à 30 000 fermes, avec un pourcentage de diminution qui est le double de la France, toutes proportions gardées, on décroche plus qu'aux États-Unis, on décroche plus qu'en Ontario. C'est une ferme par jour qu'on perd présentement au Québec. C'est, depuis 2008, 400 fermes porcines. Alors, même si la production se maintient, il reste qu'on perd trop de joueurs présentement. Et c'est le présage d'un essoufflement du modèle de gestion qui ne s'adapte pas assez vite.

**(18 h 10)**

Autre élément, une zone agricole relativement restreinte et convoitée qu'il nous faut protéger pour les générations futures, majoritairement des fermes familiales. Alors, quand la ferme ne va pas bien, c'est tout l'équilibre de la famille qui est affecté, d'où la très grande importance du facteur humain dans la mise en oeuvre de la nouvelle politique.

Un secteur de la transformation extrêmement dynamique, ça, on ne s'en cache pas, je pense, 22 milliards de vente, 170 000 emplois, c'est majeur, et c'est une grande force.

50 % de la production est exportée, alors c'est un bel atout pour nous.

Et enfin des coûts de production supplémentaires, estimés à 240 millions par année, dus à notre nordicité. Ce n'est pas nécessairement un facteur négatif, il ne faut pas le voir comme ça, mais c'est une réalité.

Alors, compte tenu du tableau que je vous donne, compte tenu d'une situation planétaire fragile, compte tenu d'une situation québécoise préoccupante, compte tenu que l'agriculture permet de combler un besoin qui se situe tout au haut de l'échelle parmi les plus essentiels et fondamentaux, qui est de s'alimenter trois fois par jour, cinq engagements fondamentaux m'apparaissent incontournables dans la mise en place de la nouvelle politique.

Un premier engagement, c'est de maintenir un secteur bioalimentaire fort et dynamique. Je pense que ça doit être un engagement de la nouvelle politique. Deuxième engagement, de traiter le monde du bioalimentaire ou de l'agroalimentaire... -- on en reparlera un petit peu plus tard, là, la terminologie, je pense qu'elle va être à ajuster -- traiter le monde de l'agroalimentaire différemment des autres secteurs. Troisième, encadrer mieux le marché. Je pense qu'on n'en sort pas, et je suis conscient que je jette un pavé dans la mare quand je dis ça, mais on y reviendra. Quatrième, supporter financièrement... Je pense que la politique actuelle, sur la table, est très bien construite, et elle est vraiment complète. Mais le défi, c'est toujours la mise en oeuvre. C'est facile avoir des belles idées, mais la mise en oeuvre, ça prend des moyens financiers à la hauteur, et ça va être mon quatrième élément. Et, cinquièmement, restaurer le climat de confiance entre le gouvernement du Québec et ses producteurs. C'est mes cinq éléments.

Le premier, un engagement en matière... un engagement à maintenir une production et une transformation bioalimentaires de propriété québécoise. En vertu des principes de prévention et de précaution contenus dans la Loi du développement durable, la mise en oeuvre d'une nouvelle politique bioalimentaire doit contenir les engagements et les mesures appropriés afin d'assurer la protection alimentaire de la population par le maintien d'une production et d'une transformation agroalimentaires dynamiques et de propriété québécoise, en guise de garantie de sécurité alimentaire accessible et abordable pour l'ensemble des consommateurs québécois.

Je pense que c'est incontournable. Maintenant, les produits arrivent d'un peu partout à travers le monde. Si on ne se méfie pas... Nos grands distributeurs, on a de moins en moins de pogne dessus. C'est sûr que, quand le produit américain est moins cher, le produit du Québec, il reste, il reste sur la tablette. Il reste, il ne rentre pas dans... Alors, je pense que là-dessus on a un devoir, le gouvernement du Québec a un devoir de vigilance et devra prendre l'engagement de maintenir une production dynamique et une production de propriété québécoise.

Deuxième engagement nécessaire, je pense, un traitement différent du secteur bioalimentaire. Compte tenu de la contribution du secteur bioalimentaire à l'occupation dynamique du territoire rural de même que la contribution à l'accès, à la protection et à la mise en valeur des ressources du territoire, à l'architecture des paysages et au maintien -- Mme Bolduc en parlait tantôt abondamment -- des patrimoines naturels, si chers aux citadins en quête de ressourcement, compte tenu de la contribution du secteur bioalimentaire au maintien du tissu social des régions, compte tenu qu'il s'agit d'un secteur stratégique pour la société québécoise en raison de son rôle de premier plan au regard de la santé des Québécois, toujours en vertu des principes de prévention et de précaution, la mise en oeuvre de la nouvelle politique doit contenir un engagement ferme de la part du gouvernement du Québec de traiter son agriculture et son secteur bioalimentaire différemment des autres secteurs économiques en raison de son incidence globale et transversale notamment au niveau de la santé et des coûts que cette dernière engendre. Et c'est là, le projet de société. Je pense que c'est plus qu'une politique que l'agriculture ou l'agroalimentaire réclame, c'est véritablement un projet de société.

Le troisième engagement, un meilleur encadrement des marchés. Une fois qu'on a convenu de nos priorités, il faut se donner les moyens de les mettre en oeuvre. Et c'est pourquoi, au nom du principe d'efficacité contenu dans la Loi du développement durable, la mise en oeuvre de la politique doit inclure un engagement ferme de la part du gouvernement du Québec à soutenir solidement le développement de son agriculture, d'où l'importance de réunir l'ensemble des conditions favorables afin de permettre aux producteurs de tirer le maximum de revenus du marché.

Et, comme le marché à lui seul ne peut pas régulariser toutes les situations et les épisodes critiques et sécuriser le modèle agricole... un modèle agricole durable, trois règles incontournables s'imposent pour nous permettre... permettre aux producteurs de tirer le maximum du marché: d'abord, bien outiller les producteurs afin qu'ils développent une culture de la commercialisation et de marchandisage efficace; deuxièmement, raffiner nos réglementations afin de favoriser un environnement d'affaires équitable, en limitant, par exemple, l'entrée de produits extérieurs quand le produit local est en quantité suffisante pour alimenter tout le marché, ou encore quand il ne répond pas à nos exigences environnementales ou sanitaires, garantissant ainsi que les producteurs et les transformateurs... garantissant ainsi aux producteurs et les transformateurs un encadrement du marché. Je suis conscient que c'est un pavé dans la mare, mais on y reviendra tantôt. Je pense... On a déjà des réglementations existantes. Si on les utilisait comme il faut, on serait en mesure de donner beaucoup plus de place aux produits québécois.

Et, en dernier recours, prévoir... troisième règle incontournable pour permettre de tirer le maximum du marché... Je disais, bon, bien: outiller le producteur, raffiner nos réglementations et, en dernier recours, prévoir un filet de sécurité qui permet de garantir des prix suffisamment élevés et stables pour que les producteurs puissent couvrir leurs coûts de production, vivre correctement de leur travail et investir et progresser en productivité et en compétitivité.

Bref, il nous faut développer une expertise d'excellence en commercialisation afin d'en arriver à prendre toute la place qui nous revient sur les tablettes des grands détaillants, défi de taille compte tenu de la concentration des joueurs. Et le gouvernement du Québec doit devenir un partenaire de premier plan auprès des producteurs dans l'édification de ce processus. La commercialisation, c'est le nerf de la guerre. Et le projet de politique ne met pas de l'avant suffisamment de mesures pratiques et concrètes afin d'atteindre rapidement des rendements efficaces en matière de commercialisation, ce qui aurait pour effet de diminuer l'effort de soutien du gouvernement du Québec à son secteur bioalimentaire. C'est ici, l'engagement le plus substantiel que devrait contenir la nouvelle politique, qui fait la différence entre une simple politique marchande et un véritable contrat social liant producteurs et transformateurs, distributeurs et consommateurs.

Quatrième élément...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Je vais vous inviter, M. Rouleau, à conclure, je suis déjà trois minutes dans le trou.

M. Rouleau (Raymond): ...un support financier -- ça va, très bien -- un support financier à la hauteur des ambitions de la nouvelle politique. Alors, la politique, elle est très bien faite. Je pense qu'elle était bien articulée, sauf qu'encore faudrait-il avoir les engagements du gouvernement du Québec à bien la soutenir. Alors, pour compléter ce tableau, il faudrait prévoir le renforcement de la capacité de gestion des entreprises, un ensemble de moyens visant à renforcer cette culture de pérennité, de durabilité chez nos producteurs et nos transformateurs.

Cinquième engagement... Rapidement, je termine.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui.

M. Rouleau (Raymond): Enfin, mon dernier point portera sur le climat à restaurer entre le gouvernement du Québec et ses producteurs, basé sur le dialogue, l'ouverture, la transparence, la franche collaboration assortie d'un engagement ferme de partenariat nécessaire à la mise en oeuvre de la nouvelle orientation. C'est un engagement ferme de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain, parce que tout n'est pas mauvais dans le modèle agricole québécois actuel. Plusieurs pays le considèrent comme un exemple à suivre d'un engagement ferme de ne pas céder à la tendance de plusieurs pays du G20 qui se désengagent du soutien de leur agriculture, assainissement des finances publiques oblige. Et j'avouerai que, sur ce plan-là...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Rouleau...

M. Rouleau (Raymond): ...je pense que la culture est en train de changer. M. le ministre, quand on voit un ministre qui commence à appeler les producteurs le soir, chez eux, pour bien s'informer de ce qu'il a vu dans la journée, je pense qu'on a un rapprochement qui est en train de se faire, et c'est tout à l'honneur du ministre actuel, je pense.

**(18 h 20)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): M. Rouleau, je me dois de vous demander de conclure.

M. Rouleau (Raymond): O.K. Je termine avec une petite citation.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Ça va. Ça va raccourcir la période de questionnement des membres.

M. Rouleau (Raymond): C'est ça. Une petite citation d'un éminent spécialiste américain, Nick Cullather, de l'Université d'Indiana et auteur du livre The Hungry World, qui dit: «Les investissements en agriculture sont beaucoup plus régénérateurs d'emplois et de richesse que les investissements dans les infrastructures. Une solution durable à la crise actuelle demandera plus qu'un simple ajustement permettant aux agriculteurs de survivre. Il va falloir en finir avec ce dogme qui, depuis un demi-siècle, relègue l'agriculture à une position de subalterne. L'économie mondiale englobe aussi les campagnes, et c'est dans ces campagnes que doit s'amorcer le retour à la prospérité.»

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Rouleau. Merci beaucoup.

M. Rouleau (Raymond): Une petite dernière.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Bien là... Je ne peux pas. M. Rouleau, c'est...

M. Rouleau (Raymond): Trois lignes. Trois lignes...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui, oui, mais vous abusez.

M. Rouleau (Raymond):«L'agriculture, c'est en quelque sorte le sang d'un pays, l'alimentation bien sûr, mais aussi l'occupation du territoire, la vie des villages et des régions, et finalement le dur travail patient d'hommes et de femmes qui persistent.» Merci.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Oui. Vos propos sont fort intéressants. M. le ministre.

M. Corbeil: Merci, M. le Président. Merci, M. Rouleau. On partage au moins une chose en commun, on est de la même alma mater. Mon collègue de Saint-Hyacinthe a vu ça.

Votre entreprise Serres Dame Nature, au Saguenay--Lac-Saint-Jean, produit, importe et distribue des plantes vertes et des potées fleuries à travers le Québec. Produire, je comprends. Importe et... Distribue, je comprends. Importe, vous importez d'où?

M. Rouleau (Raymond): Importe, quand on dit «importe», c'est les plantules, parce que, des fois, les producteurs du Costa Rica sont plus... mieux placés que nous pour produire les petites plantules, etc., et, importe, la plante de forte dimension qui n'est pas rentable à cultiver au Québec, alors, dont on refait la distribution. Voilà.

M. Corbeil: Vous avez présenté une... Vous faites une lecture du livre vert, vous avez présenté plusieurs aspects qui peuvent être... qui peuvent le bonifier. Il y a quelque chose qui me chicote, parce que vous mentionnez qu'avec des mesures de développement adéquates les mesures de soutien seraient moins nécessaires. Dans les faits, le Québec dépense trois fois plus pour le soutien de revenus agricoles que les autres provinces. Quelles seraient les mesures de développement qui permettraient de faire basculer cette tendance? Rapidement, là, je sais, parce qu'on pourrait partir pour une demi-heure juste là-dessus, là.

M. Rouleau (Raymond): C'est sûr que.. Bon, le projet de politique qui est sur la table présentement, il est centré sur le produit et il dit aux producteurs: Écoutez, faites un beau produit, et puis vendez-le, et puis tirez-en le maximum du marché, et puis tout va bien aller. Mais je pense que présentement... Je vais vous donner seulement un exemple. 1er juin, cette année, on est dans le pic de la tomate de serre du Québec. On a assez de serres... de tomates de serre pour alimenter tout le marché. Un grand distributeur... les grands distributeurs annoncent la tomate de Mexique en spécial à grand renfort de publicité. Ce genre de... Si le gouvernement du Québec nous aidait au niveau de la réglementation... Ça existe déjà dans la pomme. Ça existe déjà dans la pomme de terre. C'est une réglementation qui est gérée par l'agence canadienne d'importation des aliments et c'est une réglementation qui se gère par décret ministériel. On a déjà les outils qu'il faut pour être capables de tirer... d'encadrer le marché et discipliner le marché.

Et c'est certain que plus on va chercher dans le marché les argents nécessaires à couvrir nos coûts de production, moins les mesures de soutien sont nécessaires. Et voilà. Alors, tout est dépendant justement d'arriver à bien... Parce que, bon, les marchés courts, les marchés publics, c'est intéressant, oui, mais on n'est pas dans les grands volumes, là. Si on veut aller vraiment sur le marché, il faut vraiment, au niveau de la grande distribution, qu'on ait un soutien de tous les instants pour encadrer le marché, à mon avis.

M. Corbeil: Vous proposez une stratégie de collectivité agricole apprenante. Pouvez-vous nous dire en quoi ça consisterait? Puis je traduis un peu que c'est peut-être un des éléments du contrat social qui était proposé par Solidarité rurale avant vous, si on était capables de faire de la formation ou l'éducation de la population à la réalité de l'agriculture, de la production, etc. Est-ce que c'est ça, pour vous, une collectivité agricole apprenante ou si vous voulez que les gens se... J'aimerais ça avoir un peu plus de détails.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous avez deux minutes, M. Rouleau.

M. Rouleau (Raymond): Je pense que tout passe par le savoir, tout passe par l'amélioration du savoir chez nos producteurs. Et, à partir du moment où on rehausse l'information, on rehausse en même temps l'innovation, on... Et je pense qu'on ne parle pas de frais importants. Je regarde un exemple français, entre autres, chaque nouvel ingénieur agronome doit faire un stage à l'étranger, de sorte que ça donne une vision supplémentaire. Qu'est-ce que ça donne de réinventer la roue? Je pense qu'il faut permettre à nos jeunes d'aller voir ailleurs. Il faut leur permettre de voyager, de voir des systèmes différents. Et il faut donner le goût à nos communautés agricoles de, justement... Internet existe, on peut avoir toutes sortes de moyens. Je pense qu'il faut donner le goût d'en savoir plus et de relever leur niveau de savoir et leur niveau de compétence. Et je pense que là-dessus on a des institutions comme les ITA qui pourraient être très bien mises à contribution, à mon avis.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Vous avez encore... Ça va? Donc, merci, M. le ministre. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, vous avez 4 min 40 s.

M. Simard (Kamouraska-Témiscouata): 4 min 40 s. Alors, d'entrée de jeu, là, bravo, bravo, bravo! C'est très intéressant, c'est rafraîchissant. Puis d'avoir pris le temps... J'entends le citoyen, j'entends le... J'entends toute une vie d'expérience et le producteur en serre. Alors, c'est impressionnant.

Et vous avez une approche aussi positive à travers tout ça. Et ce que j'en comprends, c'est que vous nous rappelez l'importance de l'humain à la base et de l'humain qui est responsable de la matière première. Et, à partir de cela, vous nous proposez tout un jalon, mais qui devrait être audacieux, pour faire en sorte de valoriser tout ce travail à la base et tout cet investissement, cet appui.

Comment on renforce ou comment on... Quel déclic on pourrait provoquer pour faire en sorte qu'au Québec on soit beaucoup plus sensibles à nos produits, qu'on soit plus fiers encore de notre agriculture? Vous dites: Ça s'améliore, mais vous voyez qu'il y a des exemples incohérents, la tomate du Mexique, en production de tomates et tout, là. On ne peut pas tous les réglementer puis à tout moment, parce que ça devient comme invivable aussi. Mais est-ce que vous avez... Comment vous voyez ça, là? Comment on peut... je ne dirais pas «repartir», mais donner un élan pour faire en sorte qu'au Québec on sente vraiment la différence?

M. Rouleau (Raymond): Moi, je pense que le consommateur du Québec est prêt présentement à acheter le produit québécois. Le problème, c'est qu'il a de la difficulté à le retracer sur les tablettes. Regardez dans la viande. Dans les légumes, pas de problème. La réglementation est là, elle est claire. Le fruitier est obligé d'indiquer la provenance. Allez voir demain dans le comptoir de viande, vous n'avez aucune viande où c'est indiqué la provenance, à part l'étiquette de la compagnie qui, elle, veut le mettre, là, comme Maple Leaf ou encore comme la Ferme des Voltigeurs. Mais, la viande qui est préparée par le centre de découpe du grand distributeur, il n'y a aucune provenance.

Et 50 % du porc qu'on mange présentement au Québec vient des États-Unis, et on ne le sait pas. La majorité des producteurs ne le savent pas. Puis on a de la difficulté à vendre notre porc puis on laisse entrer le porc américain à pleine... Bien sûr, ils le font moins cher. Bon. Ils n'ont pas les mêmes règles environnementales que nous. Ils sont venus copier notre recette pour savoir comment est-ce qu'on faisait du bon porc, puis, au lieu de construire des porcheries de 1 000 porcs, ils en font maintenant des porcheries de 10 000 porcs. Alors, c'est ce qui fait qu'ils arrivent à des coûts beaucoup plus en bas de ceux du Québec. Mais il n'en demeure pas moins qu'on n'est pas capables de le trouver, de l'identifier, le porc du Québec, sur nos tablettes.

Et la politique marchande, je la qualifie... qui est déposée sur la table, c'est une politique marchande, oui, c'est une politique intéressante. Et je vous dirais que c'est le défi que ma conjointe et moi, on a relevé il y a 30 trente ans, je veux dire, on est sur un marché libre, on a bâti, en 30 ans, un marché de 2 millions de dollars dans la vente de plantes ornementales de serre, distribuées partout dans l'Est du Québec. Mais, si je vous disais que je ne suis pas certain qu'on serait capables aujourd'hui de recommencer l'expérience, parce que les grands distributeurs, de plus en plus...

Il faut bien comprendre le système. C'est l'entrepôt qui gère les stocks. Et, quand l'entrepôt, il peut acheter à beaucoup moins cher partout à travers la planète, le produit du producteur québécois a de plus en plus de difficulté à faire sa place. Et on a effectivement de plus en plus de difficulté. Il faut grossir, grossir. Et là grossir, c'est une solution, mais ce n'est pas notre modèle. Notre modèle, c'est petit, regroupé, c'est des grappes, c'est des chambres de coordination, c'est des plans conjoints. C'est ça, notre modèle, finalement. Et ça, si on... Il faut... À mon avis à moi, il y a un devoir de prendre un engagement de soutenir les producteurs dans leur commercialisation. Et plus on va être bons, moins le gouvernement du Québec va devoir nous supporter dans la commercialisation.

**(18 h 30)**

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Rouleau. C'est dommage, M. le député de...

Une voix: ...Villeneuve.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Pardon? Oui, mais on est rendus... Vous avez 15 secondes. Non? Ça va? Oui, mais vous... Oui, ça va. Donc, c'est terminé, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Oui, juste une petite question, parce que, écoutez, votre... ce que vous avez amené là... Comme votre mémoire, il va à peu près sur toutes les questions que j'ai posées, parce que ça va dans ce que, moi, je pense. Je me dis qu'il faut identifier les produits, il faut garantir à nos Québécois que le produit, il est fait ici puis il est de bonne qualité. Je suis certain que le marché va le... Et puis, la production de viande, vous dites: On ne sait pas d'où elle vient. Alors, tout le monde est dans...

Mais une chose que j'ai... Je veux dire, je ne sais pas si vous avez écouté La semaine verte dimanche, ils montraient les producteurs de framboises, les producteurs... les jardiniers du Québec qui disaient qu'ils jettent à peu près 25 %, 30 % de leur production, parce que la framboise n'est pas tout à fait assez grosse, elle n'est pas de la bonne couleur. Il me semble qu'on jette beaucoup. Je suis certain qu'il y a beaucoup de familles, ils auraient pris ces framboises-là, peut-être à 0,10 $ de moins la livre, mais ils auraient pris... Le marché peut-être exige beaucoup, mais on n'aurait pas un deuxième circuit qu'on pourrait passer...

M. Rouleau (Raymond): Qui, le marché? Le marché, là, ça se règle, ça se réglemente. Puis, quand on dit... On pense que le grand distributeur, là, c'est lui qui est le marché. On peut le baliser, on peut l'encadrer, puis on le fait dans certains domaines. Pourquoi qu'on... Je ne parle pas de virer... J'ai été entrepreneur, je sais qu'on ne vire pas une entreprise sur un trente-sous comme ça, là, puis on a des ententes de signées, de libre-échange, puis je pense qu'on se doit de les respecter. Mais, en y allant cas par cas, par des actions fines, des gestes ciblés, on serait capables de régler ce genre de problématique là. Je vais vous donner un chiffre: 40 %...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Je vais vous demander de terminer.

M. Rouleau (Raymond): ...40 % des aliments produits sont perdus avant d'être consommés. Si on réglait cette problématique-là, on réglerait le problème de la faim dans le monde. 40 %, c'est énorme! Mais c'est à tous les niveaux de l'échelle.

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Rouleau. Merci. Votre dernière réponse est assez dynamique.

C'est simplement une information que j'ai: le porc qui entre au Québec, c'est entre 15 % et 20 %. Je voulais simplement vous rajuster un petit peu.

M. Rouleau (Raymond): Oui, mais...

Le Président (M. Morin, Montmagny-L'Islet): Merci, M. Rouleau. La commission devait vous donner 30 minutes, j'ai été obligé de gérer le temps avec ça, mais on était partis avec 30 minutes. Merci beaucoup.

Je lève maintenant la séance, et la commission ajourne ses travaux au jeudi 19 janvier, à 9 h 30, pour la suite de ce mandat. Bonne soirée. Faites attention, couchez-vous pas trop tard, on travaille demain.

(Fin de la séance à 18 h 34)

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