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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 9 décembre 1997 - Vol. 35 N° 25

Consultations particulières sur le projet de loi n° 171 - Loi sur le ministère des Régions


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. Gabriel-Yvan Gagnon, président suppléant
M. Gérard R. Morin
M. Normand Poulin
Mme Danielle Doyer
M. Claude Béchard
M. Robert Benoit
M. Réal Gauvin
M. Camille Laurin
Mme Liza Frulla
*M. Michel Audet, CCQ
*M. Pierre Martin, idem
*M. Réal Moffet, idem
*M. Gérald A. Ponton, AMEQ
*M. Michel Philibert jr., CPJ
*M. Stéphane Leclerc, ASAJEQ
*M. Jacques Proulx, Solidarité rurale du Québec
*M. Mario Laframboise, UMQ
*M. Florian Saint-Onge, UMRCQ
*M. Michel Fernet, idem
*M. Peter F. Trent, CMBM
*M. Georges Bossé, idem
*M. Marc-André Vaillancourt, idem
*M. Harry Schwartz, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures trente minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît. La commission de l'aménagement du territoire déclare sa séance ouverte. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, Mme le Présidente. Mme Delisle (Jean-Talon) est remplacée par M. Vallières (Richmond).

La Présidente (Mme Bélanger): Ah, M. Vallières (Richmond) est ici? Alors, je pense qu'on doit commencer, avant les consultations, par des remarques préliminaires.

M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente. D'ailleurs...

(Consultation)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, est-ce que la commission convient que l'exposé de ces organismes soit du tiers du temps prévu et que la période d'échanges soit des deux tiers séparés également entre chacun des groupes parlementaires, comme c'est l'usage?

M. Chevrette: Ça fait longtemps qu'on s'est entendu là-dessus, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Mais il fallait que tous les membres soient au courant. Parce que probablement que vous êtes entendus entre vous et le porte-parole?

M. Chevrette: Non, non, tout le monde savait ça.

La Présidente (Mme Bélanger): Tout le monde savait ça. Alors...

M. Vallières: Mme la Présidente, je voulais vous le confirmer, là. Effectivement, je pense que ça répond à ce que nous voulons comme répartition équitable du temps.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va comme ça. Alors, M. le ministre, pour les remarques préliminaires.


Remarques préliminaires


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, Mme la Présidente. Tout d'abord, j'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue, à cette commission parlementaire, aux différents intervenants intéressés au développement des régions du Québec et qui pourront, d'ailleurs, ces intervenants, faire part de leurs propositions et commentaires sur le contenu du projet de loi sur le ministère des Régions. Les groupes invités à faire une présentation devant cette commission sont représentatifs, j'en suis convaincu, des intervenants qui agissent au niveau du développement local et régional sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous entendrons chacun de ces groupes avec un grand intérêt et prendrons en considération les commentaires et recommandations qui nous seront adressés.

Comme vous le savez déjà, le projet de loi n° 171 créant le ministère des Régions découle de l'importance que le gouvernement du Québec accorde au développement des régions. Il est l'aboutissement d'une longue démarche qui a été marquée au printemps dernier par la publication de la politique de soutien au développement local et régional. L'adoption de cette politique répondait à l'engagement du Parti québécois lors d'un conseil national qui se tenait à Rivière-du-Loup en 1993, puis c'était d'entreprendre une véritable démarche vers la décentralisation et la régionalisation. C'est pour que les communautés locales et régionales disposent d'une plus grande marge de manoeuvre dans le développement de leur territoire que le gouvernement leur confie la responsabilité des services locaux de soutien à l'entreprenariat et des stratégies régionales de développement.

La régionalisation répond au large consensus qui s'est exprimé en 1991 lors de la commission Bélanger-Campeau. Cette volonté s'est à nouveau, d'ailleurs, manifestée dans toutes les régions du Québec lors des commissions sur l'avenir du Québec. Le principal objectif de cette politique est de rendre les services plus accessibles en les rapprochant des citoyens.

Actuellement, celui ou celle qui désire démarrer une entreprise ou consolider ses activités est confronté à une multitude de programmes et de structures. J'en ai pour preuve le FIL, la SADC, les CDE, la SOLIDE, le FAE, le SAJE, le CRES, le FRS, le BFDR(Q) – et je pourrais continuer encore – les SRI, etc. Au fédéral, ça représente environ 70 structures ou organismes dépensant une douzaine de millions de dollars en frais d'opération. Au Québec, c'est près de 400 organismes et structures occasionnant plus de 80 000 000 $ en frais d'opération. De toute évidence, il faut faire cesser les chevauchements et les dédoublements de programmes.

Le projet de loi pour lequel nous sommes en commission parlementaire aujourd'hui constitue donc le reflet de la volonté du gouvernement de doter le Québec d'un cadre législatif cohérent et nécessaire à la mise en application de la politique de soutien au développement local et régional. Cette loi veut aussi donner aux organismes locaux et régionaux auxquels elle reconnaît un statut les moyens de participer de première main au développement économique, social et culturel de leur milieu, de devenir les éléments moteurs de la mise en oeuvre de cette politique gouvernementale.

La politique de soutien au développement local et régional, je vous le rappelle, a été le fruit d'un large consensus. Elle a été élaborée en lien constant avec les intervenants du milieu concerné. Le projet de loi sur le ministère des Régions s'inspire de cette politique et traduit dans un cadre législatif cohérent les éléments essentiels et les principes qui la sous-tendent.

Au coeur du projet de loi se trouvent la primauté du citoyen, la responsabilisation accrue des milieux locaux et régionaux et le principe de la subsidiarité visant à confier la responsabilité de dispenser les services au palier le mieux placé pour l'assumer efficacement et au meilleur coût tout en suscitant des partenaires intéressés à une participation aux décisions.

Ces principes que nous intégrons à notre approche reflètent, d'une part, les attentes qui nous ont été exprimées par les intervenants impliqués dans le développement local et régional du Québec et, d'autre part, la nette volonté des milieux d'assumer pleinement la responsabilité d'orienter et de participer aux mesures associées à leur développement. En définitive, ce que va signifier l'adoption du présent projet de loi, eh bien, c'est la concrétisation de la volonté de l'État de voir s'établir au Québec une nouvelle dynamique de développement régional, et, désormais, l'État devra être considéré comme associé à des régions, mais à des régions responsables.

C'est dans cet esprit que le gouvernement a décidé de consacrer une enveloppe de 60 000 000 $ au financement des centres locaux de développement en utilisant des critères permettant une répartition équitable sur l'ensemble du territoire du Québec. Ainsi, chacun des CLD disposera d'une enveloppe de base uniforme pour son fonctionnement. Les autres critères retenus faisaient appel à la taille de la population desservie par chacune des MRC ou communautés urbaines, au nombre de personnes, également, à faibles revenus dans les unités familiales résidant sur le territoire et enfin au nombre d'emplois à créer pour atteindre le plein-emploi sur le territoire.

D'ailleurs, à cet effet – il faut plutôt en rire, là – il est important de clarifier le concept du «nombre d'emplois à créer pour atteindre le plein-emploi». Il ne s'agit pas d'un objectif que le gouvernement demande aux CLD d'atteindre, comme certains médias ou certains députés de l'opposition l'ont laissé entendre, il s'agit tout simplement d'un critère sur lequel nous sommes basés pour répartir l'enveloppe de 60 000 000 $. Au lieu d'avoir utilisé le taux de chômage de chacune des régions, nous avons pris le nombre d'emplois à créer pour atteindre le plein-emploi, c'est-à-dire le nombre d'emplois qu'il faudrait créer pour que tous les chômeurs du Québec actuels travaillent. Je pensais que ça aurait été compris spontanément par tout le monde, d'ailleurs. Si jamais les CLD créaient 500 000 emplois, Mme la Présidente, nous serions tous des plus heureux. Probablement que nous pleurerions de joie. Les objectifs de création d'emplois de chacun des CLD seront fixés par le milieu, vous l'aurez bien compris, lorsque chacun précisera son plan d'action.

Le gouvernement compte sur une implication tout aussi engagée de la part du monde municipal – à titre de partenaire, d'ailleurs – pour assurer aux futurs CLD le financement qui leur est nécessaire pour intervenir efficacement dans leur milieu respectif. Nous estimons que la contribution des municipalités au financement des CLD devrait, en 1998, correspondre minimalement au montant déjà consacré pour l'exercice 1996 au soutien de tout organisme local, incluant les services municipaux ayant pour mission la promotion et le développement économique sur leur territoire visé.

Pourquoi 1996? Parce que, pour 1997, ça prend des vérifications comptables et des vérifications ministérielles et qu'on n'avait pas ces données-là. Donc, on a pris la donnée vérifiée et contre-vérifiée. Les municipalités qui, sur le territoire d'une MRC, n'auraient pas effectué une telle contribution pour l'exercice 1996, eh bien, devraient, en 1998, payer la même chose que les municipalités de cette MRC payaient en 1996. C'est aussi clair que ça. Enfin, dans l'hypothèse où aucune municipalité de la MRC n'aurait contribué au cours de l'exercice financier 1996, ce qui peut être plausible – en tout cas, on ne prend pas de chance, on le fixe – on a dit: À ce moment-là, dans ces municipalités, ce sera une cenne du 100 $ d'évaluation pour l'ensemble de ces municipalités de cette MRC.

Les CLD seront les partenaires des institutions municipales qui – et j'en ai la ferme conviction – veulent participer activement à la responsabilisation des intervenants du milieu, et ce, dans un objectif de prise en main des moyens d'assurer pour leur milieu et leurs répondants les outils permettant le développement de l'économie et de l'emploi.

Le ministère des Régions. Eh bien, le gouvernement est conscient de l'importance d'instaurer un cadre cohérent permettant d'asseoir une stratégie de développement local et régional partagée par les intervenants. Il veut accompagner efficacement ces partenaires des milieux locaux et régionaux dans l'exercice de leurs responsabilités vis-à-vis de cette démarche. Ce projet de loi apporte donc une réponse concrète aux attentes exprimées à maintes reprises par les régions du Québec de doter nos institutions québécoises et de les mandater du dossier du développement des régions via un ministère des Régions.

(11 h 40)

La volonté des gens du milieu de prendre leurs responsabilités et d'assurer la gestion des outils de leur développement est claire. Il faut cependant leur donner les moyens pour le faire. L'une des voies pour atteindre cet objectif est de procéder à la réorganisation des services liés au développement économique et au développement de l'emploi en confiant aux communautés une plus grande autonomie dans la gestion des moyens que l'État leur accorde. Pour répondre à cet objectif, le présent projet de loi prévoit que le ministre pourra agréer un centre local de développement par territoire de MRC, par association de MRC ou par territoire équivalent dans le cas des communautés urbaines. Chaque CLD aura pour mandat, notamment, d'élaborer un plan d'action local et une stratégie en matière de développement économique et de soutien à l'entrepreneuriat, y compris celui de l'économie sociale. Le CLD devient l'unique porte d'entrée pour appliquer les mesures de soutien aux entrepreneurs individuels et collectifs par la création d'un guichet multiservices à l'entrepreneuriat.

Le gouvernement veut aussi, bien sûr, s'assurer de la pleine participation de tous les éléments dynamiques des milieux à la nouvelle stratégie qu'il propose. Ainsi, le conseil d'administration d'un CLD doit comprendre au moins un représentant de chacun des milieux suivants: affaires et commerce, travailleurs, municipal, coopératif, communautaire et institutionnel ainsi que le ou les députés de l'Assemblée nationale. Aucun de ces groupes ne devra détenir la majorité, et ce, pour assurer une représentation équitable de tous les secteurs interpellés pour le développement de leur milieu.

Le conseil d'administration aura également comme membres, mais sans droit de vote, le directeur du centre local d'emploi, le sous-ministre adjoint du CRD et le responsable administratif du CLD, en raison des liens très directs qui existent entre développement régional, développement économique et développement de l'emploi. De plus, une attention particulière devra être apportée à une représentation équitable entre les hommes et les femmes de même qu'à une représentation significative des jeunes.

Les CLD seront présents sur l'ensemble du territoire québécois et assureront la gestion et la dispense des services de première ligne. En ce sens, ils auront pour mandat de mettre en place un guichet multiservices, de gérer l'enveloppe budgétaire qui leur est octroyée, d'élaborer des stratégies locales de développement favorisant un plan local de développement de l'emploi. À cette fin, en raison de leur mandat de développement, d'entrepreneuriat et de création d'emplois, les CLD agiront comme comités consultatifs auprès des centres locaux d'emploi.

Lorsque formellement crédités, eh bien, dans le respect des règles de leur reconnaissance, les CLD concluront une entente de gestion avec le gouvernement et l'instance municipale. Cette entente précisera les droits et obligations de chacun des partenaires. Le gouvernement fixera certaines attentes, par exemple en ce qui concerne l'aide particulière que les CLD devront apporter aux jeunes promoteurs désireux de lancer une entreprise. À cet effet, il importe que les CLD voient à maintenir l'expertise déjà existante, comme celle des SAJE, qui s'est développée dans chaque région du Québec en regard de cette clientèle jeunesse. Les CLD seront imputables également, en ce sens qu'ils devront produire annuellement leurs états financiers ainsi qu'un rapport d'activité. Le ministre aura le pouvoir d'exiger tout autre renseignement qu'il juge opportun.

Au-delà des exigences minimales jugées nécessaires par le gouvernement pour l'accréditation d'un CLD, eh bien, les communautés locales peuvent mettre en place leur propre modèle à partir des caractéristiques qui leur sont propres, des acquis, également, qu'elles souhaitent préserver et des éléments fonctionnant bien sur leur territoire. En Gaspésie, par exemple, les guides qui existent.

Les CRD, les conseils régionaux de développement, quant à eux, forment, depuis plus de 25 ans dans certains cas, des partenaires majeurs dans le développement régional. Les conseils régionaux de développement sont des instances représentatives reconnues par décret gouvernemental dans chacune des régions administratives du Québec. Ces conseils, dont la création remonte pour un certain nombre au début des années soixante-dix, regroupent les forces vives des différents secteurs d'activité dans chacune des régions.

Le projet de loi renforce en les précisant les pouvoirs et le rôle essentiel et unique qu'exercent les conseils régionaux au Québec. Le législateur réaffirme qu'un CRD est l'interlocuteur désigné sur le plan régional pour le gouvernement. Il est reconnu comme seule structure de concertation des intervenants et des partenaires dans chacune des régions du Québec, et, en regard des dispositions de la loi, les mandats confiés aux CRD consistent en l'élaboration d'une stratégie régionale de développement et de la mise en oeuvre d'une nouvelle génération d'ententes-cadres avec le gouvernement. Les conseils régionaux auront également un mandat accru pour l'élaboration d'ententes spécifiques avec d'autres ministères ou avec d'autres ministres et autres organismes du gouvernement qui supportent le développement de leur région.

Enfin, le projet de loi institue, aux fins du financement des mesures prévues, le cas échéant, d'ailleurs, par les ententes spécifiques, un fonds de développement régional. Parce qu'il y aura également un fonds de développement régional pour suppléer, peut-être, à la petitesse des fonds de développement locaux pour partir. Les CRD concluront des ententes de gestion avec le gouvernement aux fins de la gestion des sommes que le gouvernement leur confie et les CRD continuent et continueront à jouer un rôle primordial dans le développement régional du Québec.

Donc, le projet de loi que nous avons en main aujourd'hui assure la mise en oeuvre de la politique qui favorise la prise en charge par le milieu de son propre développement et surtout une politique qui signifie la fin du mur-à-mur en proposant un modèle qui s'adapte aux spécificités des régions. Nous ne procéderons plus par programme, amendant les programmes par un autre programme, mais nous procéderons par fonds. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de Richmond.


M. Yvon Vallières

M. Vallières: Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez d'abord de remercier le ministre qui a permis que nous puissions procéder à une consultation de nature particulière à l'endroit de certains organismes, tout ça, vous comprendrez, Mme la Présidente, dans le but d'améliorer notre perception de la conception que les gens se font du développement régional chacun dans leur milieu, de voir également quel est le point de vue de ces gens qui vont venir témoigner sur des propositions contenues dans le projet de loi que nous présente le ministre.

Vous comprendrez également, Mme la Présidente, que je ne reprendrai pas le discours de deuxième lecture de près d'une heure que j'ai effectué à l'Assemblée nationale. Vous me permettrez néanmoins d'indiquer que, à l'intérieur de cette allocution, j'ai eu l'occasion de signifier au gouvernement sur certains points avec lesquels nous partagions les préoccupations gouvernementales... Qu'on pense, par exemple, au rôle, aux responsabilités que le ministre se propose de confier aux conseils régionaux de développement et, finalement, à leur reconnaissance à l'intérieur d'une loi, nous sommes plutôt d'accord avec ce que le ministre propose.

Pour ce qui est des CLD, les centres locaux de développement, on a déjà indiqué, de notre côté, que nous avions beaucoup de questions sur cette structure que veut implanter le ministre. Pour ce qui est du ministère des Régions, bien, j'ai déjà indiqué que nous aurions préféré une structure plus souple, davantage légère et qui se calquerait plus sur un organisme qui serait en lien direct avec le ministère du Conseil exécutif plutôt que la création d'une nouvelle structure que serait le ministère des Régions.

Le ministre, Mme la Présidente, nous parle assez souvent des 60 000 000 $ qui auraient été consentis pour l'implantation des centres locaux de développement. Vous me permettrez d'indiquer, pour ceux qui auront à prendre la parole après nous et ceux qui nous écoutent, qu'il s'agit là, ce 60 000 000 $, d'argents qui sont recyclés, et je ne voudrais pas non plus que cette générosité apparente du ministre soit vue comme, finalement, quelque chose qui arrive de nouveau dans le décor. C'est vraiment des argents qui étaient déjà utilisés au gouvernement du Québec. Et tout ça, évidemment, je ne peux pas m'empêcher de vous dire que ça se passe au même moment... Au même moment où on dit: On va vous donner 60 000 000 $, devant cette Assemblée, on a un projet de loi qui n'a pas encore été adopté et qui vise à aller chercher 375 000 000 $ dans la poche des contribuables locaux. Alors, vous comprendrez qu'il est de mon devoir, ici, d'indiquer qu'il s'agit là d'une générosité plutôt apparente du gouvernement du Québec à l'endroit des régions.

C'est sûr également, Mme la Présidente, que les groupes que nous allons recevoir pourront très certainement nous donner un éclairage important de leur point de vue du cadre législatif qui est proposé par le ministre, et nous tenterons, de ce côté-ci de la Chambre, de savoir si ce qui est proposé par le gouvernement va assurer un service ou des services supérieurs aux intervenants du milieu. Est-ce que ça va mieux servir les citoyens et citoyennes dans chacune des régions du Québec? Quel va être le niveau d'efficacité des structures proposées sur la simplification des démarches des différents intervenants d'un milieu? Quel va être l'impact réel des mesures proposées sur la création d'emplois dans les différentes régions du Québec?

(11 h 50)

Vous me voyez, Mme la Présidente, un peu surpris de voir le ministre prendre ses distances par rapport aux objectifs de création d'emplois qu'on retrouve dans beaucoup de documents qui ont circulé en région. Je sais que le ministre n'aime pas ça qu'on parle d'objectifs de création d'emplois, mais je veux simplement lui indiquer qu'un peu partout... Et il suffit de lire quelques articles de journaux pour se rendre compte que, si ce n'est pas ça que le ministre a voulu dire, ce n'est pas comme ça que ça a été perçu. Donc, il faudrait au moins que la... Peut-être que la commission puis les propos du ministre vont ramener à sa juste mesure ces 500 000 emplois qui ont été mentionnés comme étant un objectif de création d'emplois dans l'ensemble des régions du Québec.

Je pourrais peut-être indiquer aussi au ministre que la campagne promotionnelle qui a précédé ou qui a coïncidé avec le dépôt, à l'Assemblée nationale, de son projet de loi aurait peut-être pu comprendre également des précisions sur ses objectifs de création d'emplois, ce qui aurait évité que soit interprétée de la façon que ça l'a été dans les différentes régions, cette capacité que semble vouloir se donner le gouvernement de créer autant d'emplois. Et je pense que le ministre, dans le fond, a probablement bien raison de dire que c'est mission impossible, là, 500 000 emplois.

Il serait intéressant – probablement qu'on l'entendra au cours de l'étude article par article – de savoir où se situe maintenant le ministre face à l'engagement que son gouvernement avait pris pour se faire élire lors de la dernière campagne électorale, où on promettait le plein-emploi et où on promettait de mettre en place une politique de plein-emploi à l'intérieur des 100 premiers jours du gouvernement. Ça fait maintenant plus de 1 000 jours, et ce que nous avons devant nous est un projet de loi qui représente une bien infime partie, Mme la Présidente, de cet objectif que proposait le gouvernement à l'ensemble des Québécois et Québécoises lors de la dernière campagne électorale.

Vous comprendrez également que, de ce côté-ci, nous voudrons connaître le point de vue des organismes que nous allons entendre sur le rôle ou comment les gens verraient les jeunes de même que les femmes, en région, jouer un rôle peut-être accru par rapport à ce qui se passe présentement et comment, à l'intérieur des structures qui sont imposées par le ministre, on envisage cette possibilité de voir participer de plain-pied, je dirais, et les femmes et les jeunes. Et ça semble être une carence actuellement à l'intérieur du projet de loi du ministre. Nous pourrons considérer également comment on entrevoit le rôle du député à l'intérieur de ces structures qui sont proposées.

Alors, somme toute, Mme la Présidente, je crois bien que les auditions que nous allons tenir devraient être, je l'espère, très révélatrices et qu'elles pourront nous être très utiles dans la poursuite de nos travaux, dans l'article par article que nous allons entreprendre ultérieurement et faire en sorte que, de ce côté-ci de la Chambre, nous puissions, à l'intérieur des balises qui nous sont imposées, faire profiter au maximum le ministre et le gouvernement des améliorations que nous voudrions voir apporter à ce projet de législation que nous avons devant nous.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Richmond. Alors, avant d'appeler le premier groupe, j'aimerais donner lecture de l'horaire du jour. Alors, à midi, dans quelques minutes, la Chambre de commerce du Québec, représentée par le président M. Michel Audet; à 15 heures, nous aurons l'Alliance des manufacturiers et exportateurs du Québec, dont le président-directeur général est M. Gérald A. Ponton; à 16 heures, nous aurons le Conseil permanent de la jeunesse, avec M. Michel Philibert, président; à 17 heures, nous aurons la Solidarité rurale, représentée par M. Jacques Proulx, président. Il y aura suspension des travaux à 18 heures pour revenir à 20 heures avec l'Union des municipalités du Québec, avec le président M. Mario Laframboise; à 21 heures, nous aurons l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, représentée par M. Florian Saint-Onge, premier...

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): Michel Fernet va être là, mais M. Florian Saint-Onge est premier vice-président.

M. Chevrette: C'est parce que je cherchais le vrai pouvoir.

La Présidente (Mme Bélanger): Je suis d'accord avec vous, M. le ministre. Et, à 22 heures, la Conférence des maires de la banlieue, représentée par le président, M. Peter F. Trent.

Alors, je demanderais à la Chambre de commerce du Québec de bien vouloir...

M. Vallières: Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui

M. Vallières: Peut-être pourrions-nous convenir... Nous en avions discuté avec le ministre, dans les organismes qui seront entendus, il y en avait quelques-uns à qui on donnait une chance de préparer un peu plus leur positionnement. On a pensé à la ville de Québec de même qu'à la Communauté urbaine de Québec, à la ville de Montréal et à la Communauté urbaine de Montréal qui pourraient ultérieurement, à l'intérieur, probablement, de l'étude du projet de loi article par article, venir rencontrer les membres de la commission et échanger avec nous sur les objets du projet de loi. Alors, j'aimerais peut-être...

La Présidente (Mme Bélanger): Pendant l'étude article par article?

M. Vallières: Oui.

M. Chevrette: Oui, effectivement, on en a parlé. Et on se reparlera parce que peut-être que la situation des villes-centres pourrait être une solution aussi. On regardera ensemble. Je ne suis fermé à rien, là. J'avais pris l'engagement d'ailleurs...

M. Vallières: O.K. Parce qu'il faudrait, à ce moment-là, convenir que, une fois que les auditions ont été tenues...

M. Chevrette: Ça ne changera pas.

M. Vallières: ...on pourrait éventuellement surseoir à l'étude article par article pour procéder à l'audition de certains organismes.

M. Chevrette: Exact.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Richmond, quand il y a consentement des deux côtés, ça va très bien.

M. Vallières: Ça va bien.


Auditions

La Présidente (Mme Bélanger): Je demanderais à la Chambre de commerce du Québec de bien vouloir s'approcher à la table. Alors, bienvenue à la Chambre de commerce du Québec. M. Audet, président, si vous voulez bien présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Audet (Michel): Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): Avant, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, ce qui sera suivi d'une discussion avec chacun des groupes parlementaires pendant 20 minutes également.


Chambre de commerce du Québec (CCQ)

M. Audet (Michel): Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, j'ai le plaisir, aujourd'hui, d'avoir avec moi mon président du conseil d'administration qui est Pierre Martin, qui est un élu. Donc, vous savez, on l'a dit dans notre mémoire, mais il faut être conscient que le mouvement des chambres de commerce, c'est un mouvement qui est démocratique. Donc, les présidents, tant de la Chambre que des chambres locales, sont élus, et c'est cette base démocratique qui fait notre force. Alors, aujourd'hui, c'est lui qui vous présentera notre mémoire, Mme la Présidente, et j'aurai le plaisir de répondre aux questions un peu plus tard. M. Martin. Et, à côté, à ma gauche, il y a Maurice Turgeon, qui a contribué également à la préparation du mémoire.

La Présidente (Mme Bélanger): Très bien. Merci, M. Audet. Alors, M. Martin.

M. Martin (Pierre): Alors, la seule différence avec les membres de la commission, c'est que, moi, j'ai un mandat d'un an, alors je dois être efficace dans une seule année. Ha, ha, ha

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Martin (Pierre): Alors, ceci étant exprimé, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. membres de la commission, je comprends évidemment que, n'ayant pas reçu copie du mémoire avant notre présentation, je vais en faire la lecture, et on pourra commenter par la suite.

La Chambre de commerce du Québec est une fédération de 205 chambres de commerce qui comptent au-delà de 50 000 adhérents composés pour une très grande part de PME créatrices d'emplois. De plus, la Chambre de commerce du Québec peut compter sur le membership direct de 4 000 membres corporatifs. C'est dire que la Chambre est présente dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs de l'activité économique et qu'elle est en droit de se considérer comme l'organisme le plus représentatif de l'ensemble des gens d'affaires du Québec dont le fonctionnement s'appuie, comme M. Audet vient de le dire, sur des règles démocratiques.

La Chambre est d'autant plus satisfaite de participer à cette commission que le développement régional était à l'ordre du jour de son congrès d'octobre dernier. La présentation du document d'orientation du Secrétariat au développement des régions a d'ailleurs été un moment fort du congrès et a suscité un intérêt marqué de tous les participants. C'était, il faut bien le dire, la première fois que les chambres de commerce de toutes les régions se faisaient expliquer par les représentants gouvernementaux les objectifs et le fonctionnement des centres locaux de développement, ce qui explique les réactions assez vives qui ont été exprimées.

La Chambre, cela va de soi, ne s'oppose pas au développement régional. Au contraire, elle est même largement d'accord avec les principes et les objectifs énoncés dans le document sur la politique de soutien au développement local et régional. De plus, la Chambre tient à saluer la pertinence du choix du ministre qui fait de l'économie et de l'emploi son champ prioritaire d'intervention.

Là où la Chambre a de multiples réserves, c'est sur les moyens qui sont mis en oeuvre pour atteindre les objectifs mis de l'avant. Aussi, c'est à ce niveau que nous ferons porter notre intervention d'aujourd'hui. En conséquence, après quelques remarques préliminaires, nous discuterons surtout des CLD, qui constituent de toute évidence l'assise de la réforme proposée dans le projet de loi n° 171.

Bien que la Chambre de commerce du Québec ne soit pas opposée à ce que l'État apporte son support aux entrepreneurs, elle soutient cependant que le rôle obligé de l'État en matière économique est d'abord et avant tout de fournir aux entreprises et aux entrepreneurs un environnement concurrentiel. Au Québec, cela est particulièrement crucial en matière d'éducation et de formation professionnelle, de fiscalité et de réglementation. Pour la croissance économique et l'emploi, ce sont là les priorités indiscutables.

Historiquement, c'est la création d'emplois qui a poussé l'État moderne à intervenir directement dans l'économie de marché. Toutefois, le passé récent nous a démontré que l'État doit demeurer modeste dans ses prétentions. À cet égard, la Chambre tient à rappeler ici quelques évidences qui sont parfois oubliées. Ainsi, il est souvent utile de rappeler que, dans une économie de marché, la création d'emplois ne peut pas être dissociée de la création de richesse. Si la création d'emplois est trop faible, ce n'est pas parce que la croissance économique ne crée pas d'emplois, mais parce que la croissance économique est trop faible. C'est vrai non seulement pour l'économie québécoise, mais c'est également vrai pour chacune des régions du Québec.

(12 heures)

Dans l'économie de marché, seules les entreprises rentables créent de l'emploi et de la richesse. Les entreprises non rentables engendrent le chômage et la pauvreté. La décision d'investir dans des entreprises rentables est donc capitale, car c'est elle qui décidera, en fin de compte, de la création d'emplois. L'histoire récente nous a aussi appris que l'État connaît de nombreux problèmes quand il veut se faire entrepreneur. Il est donc essentiel que l'État appuie les entrepreneurs sans se transformer lui-même en entrepreneur.

La création des CLD s'inscrit dans un débat sur le développement régional qui dure depuis des décennies. Elle s'inspire, selon notre compréhension, de trois grandes préoccupations: regrouper des services de l'État pour en simplifier l'accès, stimuler la participation des citoyens aux décisions qui les concernent et faciliter les actions de développement entreprises par les citoyens. Les CLD, par leur mandat et leur mode de gestion, constituent une tentative pour concilier ces trois objectifs dans le domaine de l'économie et de l'emploi.

En fait, si les voeux du ministre se réalisent, les CLD rempliront de nombreuses fonctions. Ils serviront de guichet unique ou, comme l'appelle le document gouvernemental, de «guichet multiservices» pour les services gouvernementaux dits de première ligne offerts aux entrepreneurs. Ils décideront de l'affectation des sommes qui leur seront allouées en lieu et place des programmes que le gouvernement finance actuellement. Ils élaboreront toute stratégie locale liée au développement de l'entrepreneuriat et des entreprises, incluant les entreprises de l'économie sociale. Ils élaboreront un plan local d'action en matière de développement économique et de développement de l'emploi. Ils serviront aussi de comité aviseur auprès des CLE.

C'est un programme ambitieux. C'est probablement le concept de guichet unique qui correspond le mieux à la volonté gouvernementale en matière d'accessibilité aux services publics. En effet, les guichets uniques limitent le nombre de points de services et simplifient les structures organisationnelles de l'État, ce qui procure des économies au trésor public. D'autre part, le guichet unique simplifie la tâche des citoyens et des entreprises en regroupant dans un même lieu l'ensemble des services qui leur sont offerts dans un domaine donné.

Si notre vision est fondée, il est clair que les CLD ne peuvent être qualifiés de guichet unique qu'à titre virtuel. En effet, une relecture du chapitre 2.2 du document Décentralisation: un choix de société , publié en 1995, chapitre de la situation actuelle des structures locales et régionales, suffit à en faire la preuve. En effet, aucun des organismes ou des points de services mentionnés dans ce document n'est menacé de façon immédiate par la mise en place des CLD. Non seulement le nombre de points de services n'est pas diminué, mais, en imaginant les services de deuxième ligne aux entreprises, on a évité de mettre en cause la quinzaine de points de services du ministère de l'Industrie et du Commerce qui auraient fait duplication pour les nouveaux CLD. On peut également se demander ce que le ministre entend faire des 21 points de services du Secrétariat au développement des régions.

Dans son énoncé de politique, le ministre mentionne: «Cette volonté et cette nécessité de rapprocher les services publics des citoyens impliquent des transformations dans le fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Ces transformations se traduisent essentiellement par une intégration et une rationalisation des services dans les territoires régionaux et locaux en vue d'éliminer les lourdeurs et contraintes bureaucratiques et de raccourcir les délais dans la livraison des services.» Nous partageons cet objectif du ministre. Cependant, si notre compréhension des intentions du ministre est correcte, il y aura, d'ici avril 1998, plus d'une centaine de points de services accrédités par le ministre pour les entreprises et les entrepreneurs. Notre question est simple: Combien d'organismes actuels et de points de services gouvernementaux seront remplacés ou fondus dans cette nouvelle structure afin de simplifier l'accès aux services gouvernementaux?

Le cas de Montréal. Dans certaines régions, les CLD constituent une greffe qui entraîne certaines réactions de rejet, pour employer une expression médicale reconnue. Ainsi, selon le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, M. Godbout, il existe, dans la région montréalaise, pas moins de 50 structures de développement économique, dont 25 commissariats industriels, cinq conseils régionaux de développement, six structures de promotion paramunicipale et de nombreux CEDEC, SAJE, SOLIDE, etc. Et M. Godbout de conclure: «Nous avons tout ce qu'il nous faut, et peut-être même avons-nous déjà trop de structures. Nous comprenons que ce dossier est fort complexe et que le ministre responsable du Développement des régions et le ministre de la Métropole devront rencontrer les divers intervenants et assurer un arrimage entre les structures de la région métropolitaine et celles prévues au projet de loi n° 171.»

Alors, je vous présente Réal Moffet qui est président de la Chambre de commerce & d'industrie du Québec métropolitain, mais qui est ici à titre de président de notre comité sur la fiscalité municipale et de développement des régions.

M. Chevrette: ...toujours en retard.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Martin (Pierre): Il faut dire que c'est un homme fort occupé. Alors, la difficulté de regroupement de services. Pour la Chambre de commerce du Québec, par définition, un guichet unique devrait s'accompagner d'une simplification des points de services actuels et des structures de développement économique financés en tout et en partie par l'État. Or, ces opérations sont toujours très difficiles à mener, même dans le secteur privé et, a fortiori, dans le secteur public. L'expérience du ministère des Ressources naturelles en matière de guichets uniques parle d'elle-même. Les forêts et les terres vivent côte à côte depuis plus d'un siècle et avec les mines depuis plus de 40 ans. Quelques adresses communes, sans plus, et au-delà de 70 points de services. À chacun son guichet unique.

Entendons-nous bien, il ne s'agit pas ici de blâmer le ministre. Là, je vais prendre une pause. On peut comprendre les difficultés multiples que les gouvernements rencontrent quand ils veulent fusionner ou regrouper des services en région: résistance des employés qui ont peur de perdre leur emploi; crainte des propriétaires locaux de perdre leurs meilleurs clients; pressions des citoyens et des élus municipaux qui veulent garder des emplois bien rémunérés dans leur milieu et protéger l'achalandage des commerces et des services, etc.

En général, surtout en dehors des grands centres, on finit par accepter comme compromis d'annexer au bureau principal des points de services. C'est la solution qui a été retenue pour les CLD. En effet, on peut lire dans le document d'orientation que, dans les territoires des MRC plus populeuses et dans les territoires plus étendus, le CLD peut créer autant de points de services que nécessaire pour faciliter l'accessibilité des services. La Chambre de commerce du Québec ne dénie pas pour autant la valeur du concept de guichet unique, notamment en matière de services aux entrepreneurs et aux entreprises. Au contraire, la Chambre estime que le guichet unique devrait regrouper non seulement les services offerts par le gouvernement du Québec, mais aussi ceux du gouvernement fédéral et des autres gouvernements et institutions qui sont disposés à contribuer. La disponibilité d'informations complètes sur les programmes offerts par toutes ces instances constituerait déjà un programme majeur pour la clientèle.

Avec les moyens de communication qui existent actuellement, rien n'empêcherait que les informations soient relayées aux associations de gens d'affaires qui pourraient, à leur tour, en assurer une diffusion encore plus large. C'est ce que la Chambre de commerce du Québec est en train de réaliser avec son réseau de plus de 200 chambres affiliées. Ces dernières seront dotées sous peu de moyens technologiques pour donner le même type de services de première ligne aux entrepreneurs que le fait actuellement la Chambre de commerce du Montréal métropolitain avec son service Info-entrepreneurs. Il va de soi que ce service doit inclure ceux offerts par le gouvernement, qu'ils proviennent d'Ottawa, de Québec ou des municipalités. Ce développement ouvre la fenêtre à une collaboration beaucoup plus large entre le réseau des chambres de commerce et les CLD.

L'idée de s'en remettre à une instance locale pour redistribuer les sommes que le gouvernement affecte aux programmes d'assistance aux entreprises et aux entrepreneurs n'est pas nouvelle et n'est pas sans mérite. En effet, en dépit de tous les artifices et de toutes les modulations dont les concepteurs de programmes gouvernementaux ont fait preuve pour répondre aux attentes, des organismes locaux de développement économique, des organisations de citoyens et de nombreux élus ont revendiqué depuis longtemps une participation plus déterminante dans l'élaboration et la gestion de programmes reliés au développement économique. Le gouvernement du Québec est déterminé, depuis quelques années déjà, à donner suite à cette requête. Cependant, il semblait que l'on n'arrivait pas à identifier un organisme qui puisse servir de véhicule à cette opération sans trop susciter la controverse. La création des CLD fournit une bonne partie de la solution, du moins en dehors de la région de Montréal.

La Chambre de commerce du Québec est favorable à la participation des citoyens aux décisions qui les concernent. Cependant, c'est sur cet aspect du projet du ministre que nos objections sont les plus sévères. Comment concilier l'objectif de créer un organisme dont la mission est d'aider les entrepreneurs avec l'absence quasi totale de ces derniers au niveau décisionnel? Certains CLD sont déjà mis en place avec la présence d'au moins 50 % de maires, auxquels s'ajoutera la participation de députés avec droit de vote. C'est dire que les élus locaux et provinciaux auront la majorité absolue dans les votes, sans compter le poids moral que leur présence impose aux autres participants.

Malgré ces difficultés, un certain nombre de chambres de commerce locales acceptent de collaborer à la mise en place de CLD, mais rares sont celles qui le font sans réserve. Une participation aussi peu enthousiaste de la part d'organismes d'affaires profondément enracinés dans le milieu local est révélatrice d'un malaise majeur. Les chambres de commerce et les gens d'affaires qu'elles représentent ne sont pas suffisamment mis à contribution dans le projet de loi n° 171.

(12 h 10)

On relève deux difficultés majeures à un véritable engagement des chambres de commerce eu égard aux CLD. C'est la représentation du milieu des affaires, en général, et des chambres de commerce, en particulier, aux conseils d'administration et le mode d'affectation des fonds entre les différents domaines d'intervention des CLD. Aussi bizarre que cela puisse paraître, la composition des C.A. des CLD semble tout à fait en contradiction avec la priorité dans le domaine de l'économie de l'emploi, priorité que le ministre s'est donnée. Il n'y a rien qui empêcherait un tel C.A. de coiffer un CLSC ou une régie régionale de la santé. Le C.A. doit être avant tout un mécanisme de décision chargé de garder le cap sur les objectifs de l'organisation. Pour ce faire, il doit réunir des expertises diversifiées, particulièrement lorsqu'il s'agit d'évaluer des projets de nature industrielle ou commerciale qui viendront concurrencer d'autres entreprises déjà en opération. Il n'est pas là pour échafauder des compromis entre des défenseurs d'intérêts divergents. Normalement, une fois nommé, un membre d'un C.A. engage sa responsabilité et n'a pas de comptes à rendre à personne d'autre qu'aux actionnaires ou aux pourvoyeurs de fonds. Il est donc clair que l'idée de réunir des gens qui sont, à toutes fins utiles, des délégués d'institutions ou de groupes de pression aux intérêts divergents convient davantage à un organisme consultatif qu'à un organisme décisionnel.

La Chambre de commerce du Québec, tout en s'interrogeant sur l'opportunité de doter les CLD de ce genre de C.A., ne met pas en doute la bonne foi du gouvernement. Nous estimons plutôt que la composition des C.A. reflète la difficulté de concilier un objectif de participation populaire avec un objectif d'efficacité, difficulté que les élus connaissent mieux que quiconque.

Compte tenu qu'elle constitue la seule association d'employeurs présente dans toutes les régions et dans toutes les MRC du Québec, la Chambre de commerce du Québec estime que les chambres de commerce membres de son réseau devraient pouvoir déléguer un membre C.A. dans chaque CLD et insiste pour que cette participation soit spécifiquement prévue par la loi. Une résolution en ce sens a d'ailleurs été adoptée à l'assemblée générale annuelle de la Chambre de commerce du Québec le 4 octobre dernier, et il convient, à cet égard, de rappeler que les chambres de commerce affiliées regroupent de nombreuses entreprises de commerce et de services très importantes pour la création d'emplois en région. La Chambre ne s'oppose évidemment pas à ce que d'autres groupes patronaux délèguent eux aussi des représentants, au contraire. En effet, nos membres trouvent pour le moins étrange que la communauté d'affaires soit, à toutes fins utiles, marginalisée dans la gestion d'un dossier dont l'objectif principal est l'assistance aux entreprises et aux entrepreneurs privés.

Le deuxième point sur lequel la Chambre de commerce du Québec s'interroge en ce qui concerne le mandat des C.A. a trait à l'affectation de l'enveloppe attribuée à chaque CLD. Encore une fois, nous avons été un peu surpris d'apprendre dans le document d'intervention que les budgets des CLD comprendraient des enveloppes dédiées à l'économie sociale et à l'opération des CLD. La Chambre de commerce insiste pour que l'on ne confonde pas l'ensemble de l'économie de marché et l'économie sociale. Pour certains, l'impression qui se dégage de tout cela, c'est que les membres qui proviennent du milieu des affaires n'auront rien à dire sur les projets d'économie sociale, alors que les représentants des milieux sociaux pourront décider seuls, s'ils le désirent, des projets à caractère économique. De plus, la participation avec droit de vote des députés, dont certains sont ministres ou ministres régionaux, et des élus municipaux risque de politiser les débats, de handicaper l'analyse rigoureuse des dossiers et surtout d'être perçue comme une tentative d'intimidation des opposants aux velléités gouvernementales.

La Chambre espère que le ministre voudra bien clarifier les faits en ce qui concerne les enveloppes dédiées. En effet, depuis la parution du document d'orientation, toutes sortes de nouvelles sont apparues, notamment à l'effet qu'il n'y aurait plus d'enveloppes dédiées, mais des enveloppes approuvées par le Secrétariat au développement des régions, qu'il pourrait y avoir, d'autre part, des enveloppes dédiées sous l'autorité directe du ministre pour des programmes s'adressant à des groupes particuliers. Avec la représentation qu'il y aura au C.A., le débat autour du budget risque de prendre des proportions sans commune mesure avec les ressources relativement modestes qui seront disponibles. Il n'est pas évident que l'économie et l'emploi y trouveront leur compte. En vérité, si le rôle de tous les intervenants dans le processus d'approbation des budgets est conforme à la description qu'on en fait dans notre document d'orientation, il se peut très bien que les C.A. bénéficient d'une longue période de réchauffement avant d'être vraiment plongés dans l'action. Les CLD, la MRC, le CRD, le CAR, la Solidarité rurale, le Secrétariat au développement des régions et le ministre, évidemment, auront leur mot à dire.

En résumé, la Chambre de commerce du Québec maintient ses réserves en ce qui concerne la composition et l'efficacité des C.A. des CLD et espère que ses remarques seront entendues. Nous proposons de façon spécifique que, pour les dossiers d'assistance aux entreprises et aux entrepreneurs privés, l'analyse se fasse par des comités restreints avec toute la discrétion et l'expertise qui s'imposent.

Parmi les nombreuses tâches dévolues aux CLD, il y a ce que l'on pourrait appeler la «planification locale». C'est, du moins, ce qu'on lit dans le document d'orientation: «Élaborer toute stratégie locale liée au développement de l'entrepreneuriat et des entreprises, incluant les entreprises de l'économie sociale, et qui tienne compte des stratégies nationales et régionales. De plus, élaborer un plan d'action en matière de développement économique et de développement de l'emploi.» Tout ce jargon a un tel goût de réchauffé et de déjà vu qu'on croit rêver. M. Michel Bélanger, à qui on vient de rendre un vibrant hommage et avec raison, avec le brin d'humour dont il avait le secret, disait, un jour, que les seules choses que les gouvernements n'étaient pas intéressés à prévoir et à planifier, c'étaient leurs propres activités. Il avait, semble-t-il, bien raison.

Il ne faudrait pas pousser trop loin le scepticisme, aussi nous contenterons-nous de dire que, avant de consacrer trop d'efforts à ses activités, il est souvent salutaire de relire quelques poussiéreux documents des années soixante. Les gouvernements disposent de masses incommensurables d'informations, mais, bizarrement, ils manquent souvent d'informations stratégiques qui leur permettraient de prendre la bonne décision au bon moment. Les CLD pourraient peut-être faire oeuvre utile en la matière.

Nous partageons, sans réserve – et nous le répétons – la priorité du ministre pour l'économie et l'emploi. Cependant, nous sommes déçus, pour ne pas dire très déçus, du peu de place que le réseau des chambres de commerce ou le monde des affaires en général occupe dans ce projet. Les chambres de commerce du Québec sont, à toutes fins utiles, absentes des C.A. des CLD même si elles sont présentes dans toutes les régions et dans les secteurs de l'économie locale et qu'elles sont en train de développer de nouveaux services aux entrepreneurs.

La Chambre de commerce, en conclusion, demande donc au ministre de modifier son projet de loi n° 171 pour y intégrer les modifications suivantes: la garantie d'une place au C.A. de chaque CLD pour les chambres de commerce membres de la Fédération des chambres de commerce du Québec, seul organisme patronal signataire de la charte pour l'emploi et à compter des membres dans tous les secteurs de l'économie et dans toutes les MRC du Québec; une clause qui prévoit expressément la sous-traitance auprès des chambres de commerce affiliées ou d'autres organismes de certains services destinés aux entreprises et aux entrepreneurs; une solution aux problèmes particuliers de la région métropolitaine de Montréal; la création de comités d'experts indépendants chargés d'analyser les projets d'aide aux entrepreneurs avant de les soumettre pour approbation aux C.A.; une clarification du processus d'allocation des ressources, notamment en ce qui concerne les enveloppes dédiées; l'exclusion ou, à tout le moins, la participation sans droit de vote des députés aux C.A. des CLD compte tenu du poids considérable du ministre des Régions dans tout le processus décisionnel et du fait que plusieurs députés sont des ministres et que certains sont même des ministres régionaux.

Avec de tels amendements, la Chambre de commerce du Québec et ses chambres de commerce affiliées seraient en mesure d'apporter leur concours à la mise en place et au fonctionnement des CLD pour favoriser le démarrage d'entreprises et la création d'emplois en région. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Martin. Alors, un petit changement à l'horaire. M. le député de Richmond.

M. Vallières: Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez d'abord de remercier ceux qui nous ont présenté ce mémoire qui, malgré les très courts délais qui leur ont été donnés, me paraît très substantiel. Vous posez, dans le fond, beaucoup de questions qu'on entend un peu partout présentement. Donc, pour moi, votre témoignage est indicatif que le gouvernement se devra, au cours de nos travaux en commission, de fournir de nombreuses réponses aux questions qui sont posées non pas sur les objectifs ou sur les voeux du gouvernement... Généralement, les objectifs, c'est toujours louable dans ce qu'on retrouve dans les projets de loi. J'indiquais, lors de mon discours de deuxième lecture, que je pense qu'on peut contribuer, dire qu'on est d'accord avec des objectifs, mais, quand on arrive à regarder les moyens que le gouvernement nous propose, bien, là, on se met à douter rapidement de l'efficacité de ce qui nous est proposé.

Alors, évidemment, vous adressez toute la question de Montréal, je vais y revenir un petit peu tantôt. J'aimerais peut-être dans un premier temps vous poser une question sur quelque chose que vous n'avez pas traité dans votre document qui est la création d'un ministère des Régions. On nous a, à ce jour, indiqué qu'on créait un ministère des Régions, en gros, parce qu'il existait un ministère de la Métropole, puis pourquoi il y n'y en aurait pas un ministère des Régions également? Compte tenu de votre expérience, j'aimerais ça que vous m'indiquiez d'abord comment ça marche, à date, ce ministère de la Métropole. Et puis est-ce que c'est volontairement que vous n'avez pas traité du sujet de la création d'un ministère des Régions à l'intérieur de votre mémoire? Et, à tout le moins, pourriez-vous nous indiquer comment c'est que vous voyez que la création d'un ministère des Régions, donc un ministère qui est attitré à un territoire en particulier, qui exclut celui de la métropole, là, en vertu de l'article 61 du projet de loi, ça va être un outil additionnel pour atteindre l'objectif qu'on poursuit de rapprochement des décisions du citoyen et d'atteindre également la création d'emplois additionnels sur l'ensemble du territoire québécois?

M. Audet (Michel): Vous avez raison, nous n'avons pas traité comme tel de la création du ministère parce que, évidemment, la préoccupation principale des chambres... Et j'en profite pour dire que, hier, malgré le court laps de temps, nous avons fait une conférence téléphonique avec les chambres des régions, justement, pour s'assurer que cette perception était bien partagée, et c'est le cas. Donc, nous sommes davantage interpellés par ce projet-là.

(12 h 20)

Ceci dit, la question, je pense, qui se pose en ce qui a trait au ministère des Régions, sans mettre en cause la nécessité de coordonner les actions, c'est toujours le problème d'une disposition semblable – je pense à Montréal – qui va se poser: Quelle est la responsabilité réelle du ministre responsable de la coordination, en fait – parce que c'est ça que ça va être principalement – en regard des ministères sectoriels? C'est toujours, je pense, un problème qui existe. On pense qu'il y a déjà des mécanismes de concertation. Est-ce qu'ils vont être renforcés par ce biais-là? J'avoue que je ne saurais pas répondre comme tel à votre question. D'ailleurs, on n'a pas soulevé la question parce que, précisément, on n'avait pas les éléments non plus pour soit la critiquer ou soit proposer quelque chose de plus précis. Mais je pense qu'une bonne question, c'est de se poser: Qu'est-ce qui manque au Secrétariat des régions actuellement pour qu'on arrive à la conclusion de créer un ministère? Qu'est-ce que ça va ajouter? J'avoue que c'est une question qu'on s'est posée, mais qu'on n'a pas soulevée aujourd'hui parce qu'on n'avait pas, justement, les éléments pour le faire.

M. Vallières: Sur la notion de guichet unique que vous discutez à l'intérieur de votre mémoire. Enfin, vous faites la nuance parce que le ministre, lui, parle plutôt d'un guichet multiservices, ce qui est très différent, énormément différent. Est-ce que vous nous confirmez ce que vous entendez, là, de par les membres que vous représentez? Nous, ce qu'on entend présentement dans différentes régions, c'est qu'il y a bien des gens qui essaient de mettre en place des CLD en s'assurant qu'ils ne dérangeront pas les organismes qui fonctionnent bien. Il y a bien du monde qui dit: Bien, là, on a des choses qui marchent puis on veut que ça continue à marcher. Celles-là, elles sont efficaces, on veut qu'elles continuent à marcher. Comment est-ce qu'on va faire avec les CLD pour contourner le guichet unique? Parce que ce que crée le ministre, dans le fond, c'est ça – votre document, en tout cas, moi, me le confirme, là – c'est que ce n'est pas un vrai guichet unique. Et votre question – tantôt, le ministre pourra y répondre possiblement – c'est: Combien d'organismes actuels, qui sont en place, vont disparaître? Je constate avec vous qu'il y a beaucoup de questionnements sur la notion comme telle de guichet unique, multiservices qui est présentée par le ministre, et jusqu'à quel point on atteindra l'objectif qui est donné de réduire considérablement la lourdeur, la multiplicité, je dirais, des organismes sur le territoire? Je ne suis pas sûr, moi non plus, que l'objectif pourrait être atteint.

Une autre question que vous posez – et celle-là, j'aimerais vous entendre à nouveau dessus – vous semblez, dans votre mémoire, nous indiquer que, de par la composition des conseils d'administration des centres locaux de développement, c'est quelque chose dont le fonctionnement va être difficile à cause des intérêts divergents du communautaire, du social, des travailleurs, enfin que l'économie, dans le fond, se trouve minorisée à l'intérieur des centres locaux de développement. Je vous ramènerais à une expérience qui a été faite depuis déjà plusieurs années que sont les conseils régionaux de développement, qui fonctionnent avec des tables à multiples représentants. Et je ne veux pas vous donner la réponse, mais, selon vous, est-ce que ça a donné de bons résultats? Est-ce que ces gens-là ont appris à travailler ensemble? Est-ce qu'ils se sont apprivoisés pour faire en sorte que, finalement, c'est des conseils d'administration qui peuvent livrer la marchandise en fonction des objectifs qui leur ont été donnés de concertation dans le milieu et de gestion de certaines enveloppes budgétaires? Alors, est-ce que vous voyez une quasi-impossibilité, dans le contexte actuel ou dans la définition qu'on retrouve des conseils d'administration dans le projet de loi, qu'on arrive à atteindre un bon niveau d'efficacité dans les régions du Québec?

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous voulez bien vous identifier pour le bénéfice du Journal des débats .

M. Moffet (Réal): Oui, Mme la Présidente. Alors, je suis Réal Moffet, le président de la Chambre de commerce & d'industrie du Québec métropolitain, et je suis le président des affaires municipales de la Chambre de commerce du Québec.

Alors, mon intervention sur la région de Québec. D'abord, au niveau de la composition des membres du conseil d'administration des CRD, c'est qu'on croit que, évidemment, il devrait y avoir une meilleure représentation des gens d'affaires. Et, en ce qui concerne le nombre de CLD, notre préoccupation est au niveau de la structurite. On trouve que, dans la région de Québec comme ailleurs, il y en a beaucoup. Il y a déjà des structures qui donnent des services, et en créer quatre additionnelles, on trouve que c'est beaucoup. Donc, nous aussi, nous sommes d'accord avec l'objectif de création des CLD en termes de guichet unique, mais on croit qu'un conseil d'administration, une corporation de CLD dans la région, ce serait suffisant pour administrer la région, quitte à avoir des points de services pour répondre aux besoins de la population. Ce qu'on pense, c'est que les gens d'affaires, la jeune entreprise, ce n'est pas de conseils d'administration dont elle a besoin, c'est de services pour l'aider à démarrer son entreprise, la conseiller, l'aider à gérer sa croissance, etc. Donc, un conseil d'administration peut très bien tout gérer ces points de services là, et, à ce moment-là, un seul CLD serait nécessaire, selon nous, serait adéquat avec, évidemment, les points de services en conséquence.

M. Martin (Pierre): Sur ce point, simplement...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui.

M. Martin (Pierre): ...qu'il exprime, quand ils partent comme ça, moi, je veux juste faire une réserve, c'est que, évidemment, on est très démocratique, c'est l'opinion de la Chambre de commerce de Québec quant aux CLD. On sait qu'il y a d'autres chambres dans notre mouvement qui sont des chambres locales qui, elles, parlent d'avoir d'autres... Il y a même un débat chez nous. Évidemment, vous voyez que ce n'est pas facile à régler.

M. Chevrette: ...ça peut arriver ici aussi de temps en temps.

M. Martin (Pierre): Il y a même un débat entre les chambres sur le nombre de CLD. Donc, ce n'est pas établi comme tel. Parce que, évidemment, la difficulté du projet et en même temps, peut-être, sa grande légitimité démocratique, c'est qu'on laisse beaucoup de liberté aux gens du milieu. Donc, ça, c'est une vertu. On parlait de vertu, ça, c'est une vertu, on laisse beaucoup... Mais, évidemment, à partir de là, on crée également des difficultés quant à l'implantation. Les questions de territoire en sont un bel exemple. Mais, indépendamment de ça, quant au fonctionnement des CRD actuels, on doit vous dire que les gens d'affaires et les chambres de commerce, à moins de certaines exceptions – il y a certains cas où ça a fonctionné où ils étaient présents – se sont toujours sentis un peu marginalisés dans les conseils d'administration mêmes des CRD actuels. Je veux dire, pour nous, c'était plutôt un organisme qui représentait des gens de la communauté, mais, nous, on ne peut pas dire qu'on se sentait très à l'aise à l'intérieur de ces conseils d'administration là. C'est une question de philosophie. C'est une question d'efficacité. Pour nous, évidemment, les gens d'affaires, lorsqu'on participe, on veut des résultats, on veut que ça soit efficace, on veut que ça fonctionne. Alors, évidemment, on n'est pas habitué à des débats de 10 heures pour arriver à régler le problème d'une piste cyclable. C'est ça qu'on veut vous dire.

M. Audet (Michel): Si vous me permettez, il y a la première question que vous aviez soulevée en ce qui a trait aux centres multiservices en regard des services actuels du gouvernement. Je pense que le document, que j'ai relu d'ailleurs, qui a été publié – non pas la loi, mais le document d'orientation qui avait été publié – est assez clair sur la façon dont le gouvernement distingue précisément les services déconcentrés en région – les ministères, évidemment – puis les services décentralisés. Au fond, les CLD, comme je les perçois, ça va être un petit peu un mélange des deux, et je pense que c'est ce qui, peut-être, complique les choses, d'avoir à la fois un regroupement de services des ministères dans les régions qui se retrouveraient un peu sur un toit avec des chapeaux, peut-être, un peu différents. Donc, je comprends très bien que les ministères sectoriels et les ministres sectoriels veuillent garder la responsabilité en région, c'est tout à fait légitime, mais, en même temps, évidemment, ça va forcer, ça va ajouter. Donc, si on accepte cette légitimité-là, par contre, ça veut dire qu'on ajoute un guichet. Donc, il y a le service de première ligne, comme on dit, pour l'appui aux entrepreneurs qui semble concentré assez bien là, quoique, siégeant moi-même au conseil des partenaires, des questions se posent aussi sur un autre guichet qu'on est en train de créer, qui est le centre local d'emploi, où les entreprises aussi vont s'adresser pour leurs besoins en main-d'oeuvre. Donc, là aussi, il y a des questions d'arrimage à trouver.

Donc, je pense que la difficulté, elle ne vient pas du projet, peut-être qu'elle vient un peu de la nature des choses. Quand on crée un organisme qui va être, en bonne partie, basé sur les structures locales, donc décentralisées, puis qu'on essaie d'arrimer ça avec des structures déconcentrées du gouvernement dans les régions, je comprends que c'est difficile. Mais, pour le client, lui, qui va là, qui va avoir deux guichets un à côté de l'autre, lui dire: Ça, c'est un organisme déconcentré. Ça, c'est un organisme décentralisé ou... Enfin, ce n'est pas évident pour lui. Il va dire: Écoute, comme ça porte la fleur de lys, pourquoi ce n'est pas sous le même toit? La question va se poser, je pense, pour les clients, et puis il y a un souci, il y a un besoin de clarification.

M. Vallières: Mme la Présidente, on pourrait convenir de se réserver un peu de temps après avoir passé la parole au ministre.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, c'est correct. Alors, merci, M. le député de Richmond. M. le ministre.

(12 h 30)

M. Chevrette: Oui, merci beaucoup. Merci à l'opposition d'avoir accepté de commencer. Tout d'abord, je voudrais rectifier certains propos et, après ça, vous questionner. Je voudrais, dans un premier temps, vous dire merci de vous être prêtés... J'aurais préféré vous laisser beaucoup plus de temps – c'est d'ailleurs ce que je vous avais dit – mais la vie parlementaire, des fois, même le ministre ne fait pas ce qu'il veut. Ceci dit, je vous ai lu, j'ai lu vos recommandations, j'ai lu vos remarques, j'ai écouté vos remarques aussi sur la composition du conseil d'administration et j'ai quelques rectificatifs à faire.

Tout d'abord, pour la composition des C.A., moi, je pense que vous avez des démarches à faire, vous autres aussi: vous présenter dans les comités provisoires puis défendre la place que vous voulez y prendre. Moi, je peux vous dire que ce n'est pas le ministre qui va vous empêcher de prendre la place qui vous revient. Au contraire. Allez-y, puis battez-vous.

Puis, quand vous me dites qu'il y a des CLD de formés puis qu'ils sont déjà 50 % des maires, je «peux-tu» vous dire qu'ils ne sont pas accrédités au moment où on se parle. Il y a une nuance entre ceux qui se voient et ceux qui sont accrédités. Pour votre information, ils ne sont pas accrédités. D'autant plus que le «power trip» de certains élus municipaux a été fait à partir du fait qu'ils payaient. Puis je «peux-tu» vous dire que, quand on regarde leur pitance que ça va représenter par rapport à l'enveloppe réelle, il y a peut-être des représentations, soit dit en passant, qui seront plaidées à ce moment-là au poids de l'argent qu'ils mettront et probablement que la représentativité va devoir baisser dans certains cas. Là-dessus, je vous encourage à vous en servir. Et, si vous voulez avoir les proportions, on vous les fournira, à part ça.

Deuxième chose que je voudrais dire, c'est que les manufacturiers du Québec aussi vont faire en sorte d'être présents. Et j'espère qu'il va y avoir une diversité d'employeurs. Il n'y a pas de cachette dans ça. Ce n'est pas dit qu'il va y avoir un seul employeur parce que c'est marqué «entrepreneur». Il peut y avoir différentes catégories. Donc, pour moi, autant je ne peux pas dire: La CSN puis la FTQ, ils «vont-u» se battre sur le terrain pour représenter chacun un travailleur? il y a des milieux où on va devoir constater qu'il y a une nette majorité en faveur d'un autre groupe par rapport à tel autre groupe. Je suppose qu'il va y avoir un clivage qui va se faire dans le milieu très, très correctement.

Également, je dois vous dire que je voudrais clarifier immédiatement la question des enveloppes dédiées versus les enveloppes protégées. Ce qu'on a imaginé au départ, mais on a dit qu'il n'y avait pas de mur-à-mur, c'était environ la moitié de l'argent investi qui devait être immédiatement dans le fonds local d'investissement. Si on met 500 000 $ – je vous donne un chiffre – il y a automatiquement 250 000 $ qui doit être au fonds local d'investissement; pour l'autre moitié, la dimension devrait être à peu près la suivante – c'est toujours en prenant l'exemple de 500 000 $: un 100 000 $ à l'administration et un 150 000 $ d'enveloppe protégée – et je dis bien «protégée», cette fois-ci, et non pas dédiée – pour l'économie sociale.

Pourquoi la différence? C'est que, en économie sociale, c'est souvent la mise de fonds qui n'est pas là. C'est pour une question de services, bien souvent, mais c'est un emploi, par exemple. C'est une personne de moins sur l'aide sociale, sur la sécurité du revenu. C'est parce qu'il y a des subventions, ce que vous ne retrouvez pas dans l'économie traditionnelle. L'économie traditionnelle, c'est des prêts avec intérêts, capital de risque, peut-être du capital-actions dans certains cas s'ils veulent en définir, mais c'est localement qu'ils vont décider comment.

Donc, vous voyez que la majorité de l'argent est au fonds local d'investissement, qu'il y a une portion pour l'enveloppe protégée d'économie sociale parce que la mise de fonds, c'est nécessairement des subventions dans leur cas, et ils n'ont pas à se soucier, dans des petites entreprises de services, bien souvent, des traités internationaux de libre-échange, etc. On va essayer de garder les mêmes proportions dans l'argent que le monde municipal mettra, pour ne pas que ça devienne non plus... Si c'est pour créer 20 jobs ou 30 jobs puis qu'il n'y a pas d'argent pour le développement, ça ne marche pas, ça!

On va éliminer 400 structures. Et je veux répondre, par le fait même aussi, au député de Richmond, parce que l'article 13.1°, je vais lui lire et automatiquement je vais vous le lire: «Chaque centre local de développement a principalement pour mandat de regrouper ou de coordonner les différents services d'aide à l'entreprenariat et d'assurer le financement de ces services.»

Je n'en accréditerai qu'une seule, structure, et je n'en financerai qu'une seule. Je les accréditerai dans les proportions que je viens de décrire. C'est bien regrettable, mais, s'ils sont là en pensant qu'ils vont faire vivre toutes les structures existantes puis qu'ils mettent tout l'argent dans les structures existantes, ça ne marchera pas, ils ne seront pas accrédités. C'est aussi simple que ça. Il y a nécessairement un ménage qui se fait. Il y en a un nécessairement, sinon il n'y aurait pas d'accréditation. C'est clair de même. On en accrédite une qui a le mandat. S'ils veulent garder les bonnes ressources du milieu qui fonctionnent bien puis leur donner un sous-contrat, comme la notion de sous-traitance dont vous parlez, ça, c'est leur problème, mais il faudra qu'ils respectent les proportions d'argent qu'on met à la disposition.

Ça, c'est très, très, très clair, et ils le savent très bien, à part de ça. Ils peuvent s'essayer. Je ne vous dis pas qu'ils ne s'essaieront pas. Comme certains élus municipaux qui voulaient aller chercher le gars de la chambre de commerce pour dire que c'est lui qui choisit son entrepreneur, puis il choisissait son travailleur, ou bien c'était le commissaire industriel qui faisait ça. Ça, c'est fini, ça aussi. Vous êtes assez vieux, assez grands tout le monde pour avoir vos propres collèges électoraux et nommer vos représentants. Ça, c'est clair et net et ça a été écrit noir sur blanc pour enlever l'appétit de pouvoir à certains préfets ou à certains commissaires industriels.

D'autres petits points que je voulais traiter. Vous avez fait allusion au ministère des Ressources naturelles. Je suis très heureux que vous l'ayez fait, M. le président, parce que c'est le ministre le premier qui a commencé à faire son ménage chez lui. Sur la même rue à Val-d'Or, j'avais trois bureaux, un pour les terres, un pour la forêt et un pour l'énergie. Ça n'a pas d'allure. Je suis plus qu'entièrement d'accord avec vous autres. Une téléphoniste peut répondre, Terres, Mines, Forêts et Énergie à part de ça. Une Xerox, ça ne demande pas de quelle section du ministère que t'es pour imprimer, puis l'informatique, c'est la même chose. Soyez assurés que je serai un des leaders, comme ministre, dans le réaménagement.

Il y a quelques contraintes. Je vous en donne une, par exemple, comment ça peut être stupide. À Rouyn-Noranda, c'était plus coûteux pour le temps du bail de rapprocher mes gens que de les laisser dans des bâtisses différentes. Il n'y a pas toujours des bons baux qui se signent, vous savez ça. Mais la directive est donnée, l'ordre est donné de bien fonctionner en fonction d'un regroupement des forces. Il est temps qu'on enlève les dédoublements et les dépenses inutiles, à mon point de vue. Clair de même.

Enfin, l'économie sociale. Je suis heureux, d'ailleurs, que vous n'ayez pas affiché un dédain que certains affichent. Je suis content et je vous en félicite, parce que vous pourriez être portés à faire ce que certains ont fait. Par exemple, comme le préfet Poirier de la Gaspésie qui parle de l'économie sociale en riant un peu. Je ne suis pas sûr que c'est brillant de faire ça, puis que c'est très intelligent non plus. Parce que, à mon point de vue, un emploi, qu'il soit dans quelque secteur que ce soit, c'est une personne de plus qui a retrouvé la fierté du travail puis qui a droit à une lueur d'espoir. Ça, là-dessus, je ne tolérerai pas, en tout cas, devant moi, par qui que ce soit, qu'on se permette de ridiculiser quel que soit le type d'emploi qui se crée au Québec. Et j'ai hâte de voir si ces gens-là vont se présenter la bette avec autant d'audace et d'arrogance qu'ils le font quand ils sont dans les corridors.

Dernier point avant de passer à vos recommandations. C'est un voeu que je formule. Je souhaite vraiment que vous impliquiez très fortement dans la composition et ameniez des débats localement dans la composition des CLD. Parce que, effectivement, on peut très, très bien, je pense, éviter le danger que vous craignez, que le communautaire, par exemple, vienne traiter des dossiers d'affaires et que l'inverse ne se produise pas. Moi, je pense que c'est au contraire. On veut développer le réflexe qu'un dossier il est rentable ou il n'est pas rentable, qu'une création d'emploi, ce n'est pas une forme de sécurité de revenu ou de BS déguisé répétitif à chaque année. La rentabilité d'un projet qui soit de l'ordre de l'économie sociale ou de l'économie tout court, «c'est-u» valable? «Ç'a-tu» des chances de vivre et de survivre? C'est ça. Je pense que les hommes d'affaires vont pouvoir jouer un rôle très important puis qu'il y en a d'autres qui vont devoir apprendre aussi à conduire des dossiers.

Mais une affaire sur laquelle je voudrais vous rassurer tout de suite, c'est la confidentialité des dossiers pour l'économie en général, parce qu'un homme d'affaires qui dépose un dossier en fonction de l'expansion de son entreprise ou autre, c'est sous le sceau de la confidentialité; ce n'est pas un dossier d'ordre public où les subventions sont d'ordre public pour subventionner un dossier d'ordre public. Il va falloir qu'on fasse la nette distinction. Je trouve que la suggestion est heureuse, de la création d'un comité, là, que vous proposez à l'intérieur de cela, création d'un comité d'experts, là. Ça peut se faire dans le milieu très facilement, puis ça peut éviter qu'il y ait des fuites précisément de données précises, parce que les gens ont l'habitude, ils connaissent ça, ils savent ce qui est public et ce qui n'est pas public.

(12 h 40)

Pour Montréal. Bien, Montréal, vous savez que c'est M. Perreault qui est en train de discuter, puis il a tout un contrat dans les mains, effectivement. Pour ce qui est de Québec, je dirai à votre représentant que je suis d'accord avec lui, moi. Il devrait convaincre les Ralph Mercier, les Jacques Langlois et autres, mais, moi, je suis d'accord avec lui, votre représentant. Un très bon CLD avec des points de services, ça pourrait même être plus efficace que trois, quatre CLD. Je vous donne mon opinion. Vous l'avez émis. Moi, je vous donne raison et je vous dis: Je serais d'accord avec vous.

Quant à Montréal, ça va être beaucoup plus compliqué, effectivement. La Chambre de commerce de Montréal va devoir aider le ministre, aider les gens du coin à se définir un modèle qui leur est propre. Parce qu'à Montréal il y a le territoire des CDEC dont on parle comme possibilité, sauf que les CDEC font à la fois du développement et à la fois de la formation ou de l'encadrement. Et ça, il y a une discussion de fond à faire sur l'île de Montréal là-dessus.

Personnellement, je serais même ouvert, et je vous le dis, à des expériences-pilotes où on intégrerait les deux dimensions sur l'île. Ça fait deux fois que je le dis, puis, si ça peut simplifier les choses, je vous dis, moi, que ça ne me dérangerait pas. S'il n'y a pas de modèle unique, on peut trouver des modèles très particuliers pour les gens puis un fonctionnement peut-être... Parce qu'il devra y avoir un partage. Montréal, voyez-vous, on accorde 14 000 000 $ pour les CLD. On me dit que la ville, bon an mal an, donne 28 000 000 $, déjà, dans ses structures à elle. Donc, il y a nécessairement un genre de partage à faire, puis des missions peut-être spécifiques et pointues qu'ils vont vouloir garder dans un réseau. Si vous pouvez aider au dénouement, je pense que même le ministre Perreault serait heureux d'avoir des suggestions pour tirer son propre modèle montréalais.

Quant aux territoires des MRC, je ne dis pas qu'il n'y a pas de problème, mais, au moins, les territoire des MRC, ils savent plus... Le territoire est défini. C'est une affinité les trois quarts du temps, sauf quelques territoires qui ne sont pas d'accord. C'est plus, à ce moment-là, d'équilibrer les forces en présence sur lesquelles il va falloir jouer. Mais ce n'est pas comme à Montréal, ou la Communauté urbaine de Québec, ou la Communauté urbaine de l'Outaouais. L'Outaouais a déjà fait connaître son modèle et y travaille. On devrait avoir très prochainement la proposition finale. Québec, j'ai bon espoir qu'on puisse continuer les discussions puis arriver avec quelque chose de correct, de solide. Mais Montréal, c'est un défi que l'on a en soi, et j'ose espérer qu'on pourra jouer un rôle important.

Je voudrais vous entendre parler maintenant du rôle des députés, comment vous voyez ça, parce que vous permettez, d'entrée de jeu... Vous êtes le premier groupe, puis vous dites: Les députés, «y ont-u» d'affaire ou «y ont» pas d'affaire là? Donc, moi, je veux vous entendre. Parce que c'est bien enrobé, vous parlez d'influence, mais j'aimerais vous entendre, d'être plus loquace, M. le président, d'être plus démonstratif dans votre démonstration.

M. Audet (Michel): Si vous me permettez, j'ai eu moi-même déjà à siéger sur des comités où il y avait précisément des élus, et il faut se rendre compte que, surtout quand ils ont le droit de vote, ça change la dynamique. Surtout dans un petit milieu, dans un milieu local, c'est évident que tout le monde va se regarder avant de voter sur un projet, de quel côté va voter le député. Qu'on le veuille ou non, c'est un réflexe naturel. Je pense que ça risque de perturber la dynamique un peu du groupe.

Ce qu'on propose, à tout le moins, c'est que le député, s'il siège, c'est qu'il ne soit pas votant. Je pense que c'est la façon de lui rendre service également, si vous me permettez, parce qu'il va lui-même parfois être très embarrassé de voter. Et, s'il s'abstient tout le temps, les autres vont lui dire: Bien, écoute, tu n'as pas d'opinion. Alors, peut-être même que c'est à son propre avantage qu'il n'ait pas à se prononcer sur chacun des projets, sans compter le fait que vis-à-vis également les élus locaux, c'est assez délicat, je pense, pour un député. Donc, pour plusieurs raisons, nous, on proposerait que, s'il reste membre du conseil, il soit à titre d'observateur, donc qu'il puisse effectivement savoir ce qui se passe, regarder les projets, mais qu'il n'ait pas de droit de vote parce que ça va changer, à mon avis, la dynamique, complètement, du comité.

Si vous me permettez, M. le Président, je voudrais peut-être évoquer deux petits commentaires en regard des réponses de M. le ministre, et peut-être que M. Martin voudra ajouter quelque chose. Vous avez évoqué précisément l'importance que les chambres et les gens d'affaires s'impliquent en région. Une des difficultés, c'est que, vous savez, un homme d'affaires qui est dans une entreprise, il n'a pas rien que ça à penser le soir. Il va s'en aller dans une réunion, même s'il a une convocation, une assemblée au cégep pour constituer justement un comité d'élection ou bien donc... Il n'y ira pas naturellement. Je pense qu'il faut être conscient que...

C'est pourquoi, nous, on dit: Il faut s'appuyer sur des structures qui vont faire en sorte qu'on va s'assurer qu'il y ait une représentation des gens d'affaires. Parce que ma crainte, c'est que la première nomination, il va y en avoir peut-être au début des gens d'affaires de nommés, mais, au bout de six mois, ça arrive souvent, d'ailleurs, vous allez voir, il va y avoir un désenchantement et tout à coup les gens n'iront pas. S'il n'y va pas, bien il va falloir que quelqu'un lui dise, du côté des gens d'affaires: Écoute, tu n'y vas pas, ça va prendre un autre représentant des gens d'affaires parce que tu n'es pas présent.

Et ça, ce qu'on dit, c'est que, dans les régions, le seul organisme qui a une structure régionale et locale pour suivre ça, c'est les chambres de commerce du Québec. Vous avez mentionné l'AMEQ. Je n'ai aucun problème avec l'AMEQ. J'ai rencontré justement il y a quelques jours Gérald Ponton puis M. Beauregard également du CPQ. On s'est mis d'accord là-dessus. On est d'accord pour qu'il y en ait le plus possible. Donc, il n'y a personne qui va s'opposer à ce que... Puis, soit dit en passant, tous les membres de l'AMEQ, pratiquement, sont membres de la Chambre de commerce du Québec. Je vous signale ça en passant. Donc, les centaines de membres de l'AMEQ sont membres de la Chambre de commerce du Québec. Je suis très à l'aise là-dessus. Il n'y a pas de contradiction interne dans notre positionnement, au contraire.

Ce qu'on vous dit cependant, c'est que c'est important de s'appuyer régionalement et localement sur des structures qui vont être capables de suivre dans le quotidien ce qui va se passer dans les régions. C'est pour ça qu'on dit: Qu'on le veuille ou non, c'est le seul organisme qui est là présent et qui peut vous rendre ce service-là puisqu'il pourra alerter précisément la locale, ou la régionale, ou la Chambre de commerce du Québec au fait qu'il n'y a plus de représentants de gens d'affaires sur le CLD. On ne s'attend pas à ce que ce soit le président qui appelle régulièrement du nouveau CLD pour nous faire part de ça.

C'est pourquoi on fait état de cette préoccupation-là, pour assurer un équilibre non pas seulement dans le démarrage, mais dans la continuité des opérations. Je pense qu'il faut bien s'entendre là-dessus. Et, encore une fois, ça n'exclut personne. Tant mieux s'il y en avait trois, gens d'affaires. Je pense que, là-dessus, on n'a aucun problème sur ce point-là.

M. Martin, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Martin (Pierre): Oui. Juste un autre point. Évidemment, on avait conçu, on avait compris, nous, que...

M. Morin (Dubuc): M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Morin (Dubuc): ...est-ce que vous seriez assez gentil pour inviter les gens à être plus court dans leurs réponses afin de permettre davantage de questions? Parce qu'on sait que le temps qu'ils vont chercher, c'est au détriment des questions qu'on peut poser.

Le Président (M. Gagnon): Vous avez entendu également, lorsque M. le ministre a parlé, il a demandé d'être plus loquace dans l'explication qui était recherchée.

M. Morin (Dubuc): Oui, mais ça a l'air qu'il faut le répéter. On va manquer de temps.

Le Président (M. Gagnon): Il nous reste combien de temps? Peut-être si on pouvait conclure rapidement, parce que...

M. Martin (Pierre): Alors, je vais attendre une prochaine question.

Le Président (M. Gagnon): O.K. M. le député de Beauce-Nord.

M. Vallières: J'aurais aimé qu'on puisse entendre ce qu'on se préparait à nous dire, qui était en continuité avec ce qu'on vient de nous donner, quitte à ce qu'on convienne de cinq minutes de plus avec l'organisme, là.

M. Martin (Pierre): Le seul point que je voulais ajouter. Le jour où on parle d'un des principaux objectifs, c'est le service de première ligne aux entreprises et à l'entrepreneuriat, nous, on trouve ça inconcevable que les chambres ou les gens d'affaires, les gens du milieu principalement concerné soient presque absents. Comme tel, on ne comprend pas ça. On a beaucoup de difficultés à comprendre. On se dit que, si, par exemple, on allait créer une coopérative de travailleurs, il nous semblerait qu'il serait malvenu que la grande majorité soit toute autre personne autre que les représentants des syndicats ou du milieu ouvrier. C'est ça qu'on dit.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Beauce-Nord.

M. Poulin: Merci, M. le Président. Permettez-moi de saluer les représentants de la Chambre de commerce...

Le Président (M. Gagnon): ...du groupe pour que M. le député pose sa question.

Une voix: Je pense qu'il y a une entente.

M. Chevrette: Parce qu'il y a du temps. On s'est entendu. Beaucoup de souplesse.

Le Président (M. Gagnon): Non, parce que monsieur n'est pas membre. C'est pour ça que je disais ça.

M. Chevrette: Ah! Il n'y a pas de problème.

M. Poulin: Mais je pense qu'on s'est entendu pour pouvoir participer à la commission. C'est ça, M. le ministre?

Le Président (M. Gagnon): C'est beau, s'il y a entente. Allons-y.

M. Chevrette: En prenant votre temps.

M. Poulin: M. Audet, M. Martin, M. Turgeon, M. Moffet, moi, j'aimerais savoir actuellement le bilan des chambres de commerce en province, à savoir comment elles se sont impliquées à la formation des CLD. Est-ce qu'il y a des difficultés qui sont rencontrées? Est-ce que, dans l'ensemble des régions ou l'ensemble des MRC, il y a une participation de chambres de commerce? C'est un peu le bilan de vos chambres de commerce en région, à savoir c'est quoi, leur rôle actuellement dans la formation des CLD.

M. Audet (Michel): On a eu hier un petit tour de piste là-dessus. C'est variable. Il y a des régions où, par exemple, il y a des représentants régionaux qui ont été invités effectivement dans la constitution du conseil au départ, du conseil d'électeurs. Il y a d'autres régions où ils ont été très actifs: je pense, par exemple, à la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean; à Sherbrooke, il y a un représentant régional qui est là; je crois qu'il y en a un dans la région de Mirabel, d'après ce que j'ai cru comprendre. Dans plusieurs régions, il y a des représentants qui ont été demandés.

Mais, comme on le disait tantôt, M. le ministre, des fois il faut que les gens fassent état eux-mêmes de leur intérêt, et ce n'est pas nécessairement... Il faut comprendre que, dans certains cas, si les gens n'y pensent pas nécessairement, ils ne sont pas tous au courant aussi de la façon dont ça se bâtit. Je pense que cet aspect-là est en train de se faire sur le territoire. Nous, on les alerte à ça, qu'il faut qu'ils soient présents. Mais j'avoue qu'il y a effectivement une grande variété d'implications. Peut-être que M. Martin pourrait – il a parlé à beaucoup d'autres présidents de chambres – évoquer davantage de...

(12 h 50)

M. Martin (Pierre): Non, je pense que c'est la réalité qu'exprime M. Audet. Ça se fait de façon, je dirais, sporadique, d'initiatives. Certaines chambres ont été plus près des CRD qui existaient, certaines chambres, mais la majorité ne l'était pas. Donc, évidemment, à ce moment-là, si on faisait le bilan, si on ne fait pas d'autres pressions ou interventions, il me semble que notre rôle va être marginal.

M. Poulin: O.K. Comme ça, il y a très peu, actuellement, de chambres qui sont impliquées, on va dire, dans la formation des CLD, si on peut en conclure, là, sauf peut-être exception des grandes municipalités.

M. Martin (Pierre): Très peu. Je ne dirais pas nécessairement très peu. Je veux dire, elles sont consultées, mais, de façon active, arriver avec des résultats concrets de représentation, on pense que ça ne serait peut-être pas un résultat si positif à ce point de vue là.

M. Poulin: Dans votre mémoire, vous demandez à ce qu'il y ait des sièges de réservés aux CLD pour les chambres de commerce en région. On sait que, dans des MRC, par exemple, on retrouve quatre chambres de commerce. Est-ce que, à ce moment-là, on demande un siège? Quatre sièges? Puis j'aimerais ça que vous parliez de la composition du CLD. On parle qu'il y a quand même beaucoup de représentants municipaux. On a très peu, on va dire, de gens d'affaires comme tels. J'aimerais avoir votre concept de ce que serait le CLD idéal pour être très efficace dans un milieu.

M. Audet (Michel): Écoutez, comme on dit, compte tenu de la nature des projets, évidemment, on ne prétend pas, nous, avoir la solution idéale là-dessus, mais je pense que – ce que vous évoquez, et c'est ce qu'on dit dans notre mémoire – ce qui serait important, c'est qu'il y ait dans une région effectivement un interlocuteur désigné. On dit dans la loi; ça peut être par règlement ou ça peut être par directive. Mais, du côté des gens d'affaires, pour interpeller les gens d'affaires et s'assurer qu'ils soient là et qu'ils se nomment un représentant précisément ou quelqu'un de représentatif de leur région. Ça peut être le président – il y a des régionales – de la région, parce que la chambre a des régionales, donc ça peut être ça. Ça peut être aussi le président d'une chambre locale. Ça peut être aussi quelqu'un qui est membre, un entrepreneur qui est membre de sa chambre depuis longtemps et qui est désigné. Donc, c'est eux qui feraient le choix.

Tantôt, M. le ministre disait, avec raison, qu'il faut éviter justement que ce soit quelqu'un qui soit choisi plus ou moins par cooptation puis que ça ne soit pas représentatif justement du milieu des affaires. Alors, c'est précisément pour éviter ça, nous, qu'on propose justement un mécanisme de cette nature-là, pour forcer les groupes, les chambres précisément, à prendre leurs responsabilités en région. Parce que je suis conscient qu'ils pourraient être les leaders puis dire: On va y aller. On va être là à toutes les réunions. Mais, vous savez, les gens d'affaires ne sont pas nécessairement là-dedans... ce n'est pas trop leurs méthodes. Ils aiment bien y aller s'ils se sentent invités puis s'ils sentent qu'ils ont un rôle à jouer. C'est un petit peu le sentiment actuellement qu'on a dans la plupart des régions.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le directeur général. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, moi, j'aurais quelques remarques à vous faire, peut-être quelques questions aussi relativement au point, quand vous faites la recommandation de l'exclusion ou, à tout le moins, la participation sans droit de vote des députés.

Je peux vous dire que, dans le Bas-Saint-Laurent, l'ensemble des municipalités du Bas-Saint-Laurent mettent environ 770 000 $ au niveau du financement du développement local. Le ministre a annoncé 2 862 000 $, et on a décidé, avec la table des préfets et les partenaires du CRD justement – et ça n'a pas pris des débats de 10 heures, je peux vous l'assurer, j'étais présente – d'une répartition intrarégionale entre les diverses MRC.

Moi, je vous poserais la question sur la légitimité des députés d'être là ou non, parce que, bien sûr que c'est toujours le ministre qui reste responsable des budgets, mais il y a quand même un tiers des sommes qui viennent des municipalités, deux tiers du gouvernement du Québec et il va y avoir autour de la table environ – en tout cas, moi, c'est ce qui se dessine dans mon comté – 15, 20 personnes. Lorsque vous parlez du fait que plusieurs députés sont des ministres et certains ministres régionaux, moi, dans mon comté, j'ai la Matapédia, j'ai la Métis, et le ministre régional, mon collègue, M. Rioux, est ministre de deux municipalités d'une partie de mon comté pour ce qui est de la Matapédia, de quatre municipalités pour la Métis et je considère que je représente les citoyens de Pointe-au-Père qui sont environ 4 000 personnes au CLD de Rimouski– Neigette. Je verrais que ma place est là aussi.

Sur le droit de vote, je conviens avec vous qu'il y a des discussions qui peuvent se faire, que ça peut devenir inconfortable, mais je pense qu'on n'élit pas des députés pour qu'ils se ferment la trappe. On élit des députés... Moi, la plupart des dossiers d'affaires de mon comté, je suis au courant, quand on n'essaie pas de m'en exclure. Parce qu'il y a aussi, des fois, la stratégie de certains adversaires politiques d'exclure les députés pour ne pas qu'ils aient le crédit de réaliser des... En tout cas, ça, vous le savez, la politique étant politicienne. Alors, moi...

Le Président (M. Gagnon): En concluant.

Mme Doyer: En concluant, je vous trouve quand même... Une remarque. De demander l'exclusion, la participation sans droit de vote, nous ne sommes pas élus pour devenir muets, aveugles et... En tout cas, c'est ma remarque. Moi, je tiens à prendre ma place. Et vous conviendrez que de participer à trois CLD, c'est déjà difficile pour nous.

Le Président (M. Gagnon): ...ministériel est écoulé.

Mme Doyer: Mais je vais la prendre, ma place.

Le Président (M. Gagnon): Merci, madame. M. le député de Richmond, il reste deux minutes à votre formation.

M. Vallières: Oui. Ma question, M. le Président, s'adresse à ce qu'on retrouve en page 8 de votre mémoire. C'est sérieux, là, parce que ce que vous nous dites là-dedans, c'est que, dans le fond, vous n'êtes pas d'accord avec la planification locale, ce mandat qu'on donne aux centres locaux de développement. Vous semblez, en tout cas, remettre en cause l'opportunité de confier aux centres locaux de développement le soin d'élaborer un plan d'action en matière de développement économique et de développement de l'emploi. Si on ne leur fait pas faire ça, qu'est-ce que vous leur faites faire? Parce que, là, c'est l'essence même de la création des CLD.

M. Audet (Michel): Si vous me permettez, je pense que ce n'est pas ça qu'on a voulu dire. Ce qu'on a voulu dire, c'est qu'il faudrait être modeste quand même dans ce que peut obtenir... C'est qu'on ne peut pas diriger, on ne dirige pas le développement économique d'un territoire, même d'une communauté locale. On peut toujours fixer les grandes orientations, mais ce qu'on dit, c'est qu'il faut quand même... On le sait, j'ai participé moi-même déjà, autrefois... Madame parlait de la région du Bas-Saint-Laurent. J'ai été moi-même au fameux Bureau d'aménagement de l'Est du Québec dans une carrière antérieure, puis on nous en parle encore de tous ces projets, ces plans qui ont été faits et qui justement ont créé des illusions pour la population. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut être modeste et éviter justement peut-être de faire des plans qui finalement vont peut-être créer des problèmes plus que des solutions.

Mais, au contraire, on dit, on conclut là-dessus, que le CLD pourrait être utile, même pour peut-être bâtir, ramasser ensemble des informations stratégiques pour peut-être orienter, dire pourquoi on prend telle décision plutôt que telle autre. Ça pourrait être utile. Mais on dit qu'il ne faudrait pas imaginer qu'au niveau de chaque localité, de chaque CLD on va être capable de faire des plans intégrés. Les CRD ont des problèmes à le faire, le gouvernement lui-même... On vit dans une économie de marché. Les processus décisionnels étant ce qu'ils sont, je pense que c'est ce qu'on veut dire là-dessus. Il faut être limité dans nos ambitions.

Le Président (M. Gagnon): Nous devons conclure. Le temps alloué est maintenant écoulé. Nous vous remercions de la présentation que vous avez faite. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

M. Chevrette: Moi, je voudrais, M. le Président... Vous avez été nos premiers à briser la glace. Je voudrais vous remercier, m'excuser encore du délai, mais c'est les fins de session, on est habitué à ça. On va regarder cela avec beaucoup d'intérêt sur plusieurs points. Merci.

M. Vallières: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Richmond.

M. Vallières: ...c'est la même chose de notre côté. Nous vous remercions de votre apport à nos travaux et nous n'excluons pas, au cours de nos travaux, de peut-être avoir des échanges additionnels par voie téléphonique ou autre pour des précisions à votre mémoire. Merci.

M. Audet (Michel): Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 15 h 14)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et à des auditions publiques sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions.


Alliance des manufacturiers et exportateurs du Québec (AMEQ)

Nous avons, cet après-midi, comme invitée l'Alliance des manufacturiers et exportateurs du Québec. Alors, M. Ponton, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui seront suivies d'une discussion entre les deux groupes parlementaires, 20 minutes d'un côté, 20 minutes de l'autre, et je vous demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Ponton (Gérald A.): Mme la Présidente, je vous remercie beaucoup. M. le ministre, membres de la commission, d'abord, à ma gauche, M. Manuel Dussault, qui est directeur de la recherche et de l'analyse à l'Alliance des manufacturiers, et, à ma droite, M. Rémi Boudreault, qui est directeur du développement de l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Québec.

Alors, Mme la Présidente, l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Québec représente plus de 600 entreprises au Québec. Elle est une constituante de l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada qui compte 2 500 membres et, comme son nom l'indique, a 80 % des entreprises manufacturières et exportatrices. Les manufacturiers et les exportateurs sont les principales sources de richesse de notre économie, et l'augmentation des exportations et des livraisons a alimenté, au cours des dernières années, la croissance de notre produit intérieur brut. À lui seul, le secteur manufacturier représente 18 % des emplois au Québec et 23 % du produit intérieur brut.

Les exportations internationales et interprovinciales représentent maintenant 53 % de toute notre économie au Québec. De plus, les livraisons et les exportations continuent de croître, ce qui nous laisse espérer pour 1997 un taux de croissance encore pas atteint depuis de nombreuses années. En effet, les expéditions manufacturières ont augmenté de 10,8 % en 1995, de 2,3 % en 1996 et de 5,1 % jusqu'à maintenant, en 1997. Les exportions internationales ont, pour leur part, crû de 7,8 % en 1995, de 5,1 % en 1996 et, en 1997, jusqu'à maintenant, de 7,5 %. Si la performance des manufacturiers et des exportateurs a été à la source de la croissance de notre économie, qui n'augmentait que de 1,3 % en 1995, et de 1,2 % en 1996, il faut se rappeler que ces secteurs sont soumis à une concurrence de plus en plus féroce.

Bien que les régions du Québec doivent relever des défis économiques communs, soit ceux de la mondialisation, elles possèdent aussi chacune des caractéristiques propres. Chaque région se spécialise en tenant compte de ses avantages comparatifs aux niveaux québécois et international. Si les entreprises à forte teneur technologique sont davantage présentes à Montréal, qui est, par exemple, responsable de 43 % des livraisons de produits électriques et électroniques de tout le Québec, le secteur des ressources naturelles, qui contribue aussi à l'avancement de la technologie par l'achat de machinerie et d'équipement, joue le rôle de locomotive économique dans plusieurs autres régions. Deux tiers des livraisons manufacturières du Québec proviennent de régions autres que Montréal.

Reconnaissant l'importance des régions, l'Alliance des manufacturiers a mis sur pied plusieurs divisions régionales. Celles-ci permettent aux PME et aux grandes entreprises de collaborer afin d'augmenter la compétitivité et la prospérité de leur région en tenant compte de sa structure industrielle, de ses défis et de ses forces. L'AMEQ compte donc 12 sections régionales qui sont Québec, Montréal–Saint-Laurent, Montérégie–Rive-Sud, Outaouais–Communauté urbaine de l'Outaouais, Saguenay-Chicoutimi, Montérégie-Granby, Montérégie– Saint-Jean, Alma–Lac-Saint-Jean, Laval, Trois-Rivières–Mauricie, Drummondville–Centre-du-Québec et Chaudière-Appalaches–Thetford-Mines. Les présidents des sections régionales sont membres du conseil d'administration de l'Alliance et permettent ainsi à l'association de promouvoir les intérêts régionaux dans son travail au niveau québécois.

L'Alliance appuie le projet de création du ministère des Régions. Notre mémoire traite donc d'améliorations qui peuvent être faites au projet de loi n° 171 et, indirectement, à certains éléments de la Politique de soutien au développement local et régional afin de tenir davantage compte de l'importance de la compétitivité, de la création d'emplois et de la croissance et de s'assurer, Mme la Présidente, que les structures mises en place seront efficaces à valeur ajoutée et ne constitueront pas simplement un palier additionnel qu'on ajoute en termes de coût et d'inefficacité.

Mme la Présidente, le développement local et régional doit reposer d'abord sur un meilleur climat d'affaires et une plus grande compétitivité permettant aux entreprises d'augmenter leurs ventes et de continuer à prospérer. La compétitivité n'est nullement incompatible avec la concertation entre les différents secteurs de la société dont les syndicats, les groupes sociaux et les gouvernements font partie. L'Alliance croit à la concertation et participe, par exemple, au comité de suivi du Sommet. C'est pourquoi elle salue la création des centres locaux de développement qui contribueront à la concertation en région.

(15 h 20)

La concertation, cependant, Mme la Présidente, doit donner des résultats pour continuer à recevoir l'appui de l'Alliance et de ses membres manufacturiers à travers le Québec et ainsi donc dépasser le stade de la simple discussion. La croissance et la création d'emplois sont les objectifs ultimes qui doivent servir à son évaluation. Le projet de loi n° 171 devrait, selon nous, tenir compte davantage de la réalité économique et avoir comme priorité claire la création d'emplois. La concertation doit aussi se faire dans un cadre efficace. Le ministre responsable du Développement des régions a identifié, dans sa Politique de soutien au développement local et régional, deux des conditions de l'efficacité de la concertation, soit la simplification des structures et le principe de la subsidiarité. Il est ainsi essentiel que les structures de concertation créées par le gouvernement ne dédoublent pas ce qui se fait déjà dans le secteur privé et le secteur à but non lucratif associatif comme le nôtre ou ailleurs. Le projet de loi n° 171 devra ainsi offrir des garanties aux organismes qui contribuent déjà au développement local et régional que les actions des centres locaux de développement seront harmonisés avec leurs efforts. De plus, une participation active et engagée du secteur privé, et particulièrement de l'industrie, constitue une condition essentielle du succès des centres locaux de développement. Pour ce faire, les CLD auront la responsabilité d'offrir une valeur ajoutée aux participants.

L'article 1 devrait, Mme la Présidente, être modifié, selon nous, de façon à refléter que le développement régional vise la création d'emplois qui repose sur la croissance et la compétitivité. Loin d'être timide, la Déclaration sur l'emploi signée par le gouvernement, les syndicats, et les associations patronales lors du Sommet de Montréal, en 1996, dit très clairement que la création d'emplois passe par la croissance et la compétitivité. Ces phrases devraient faire partie de l'article 1 du projet de loi. C'est parce que, lorsqu'on parle des régions, les dernières statistiques de novembre, malgré le progrès réalisé jusqu'à maintenant, sont assez éloquentes. Cinq régions ont un taux de chômage en bas de 10 %: entre autres, Chaudière-Appalaches, 6 %, Laurentides, 8,1 %, Montérégie, 8,9 %, Estrie, 9,7 % et Laval, 9,7 %. Par ailleurs, des régions ont plus de difficultés: Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, de 17 % à 23 %; Côte-Nord et Nord-du-Québec, de 15,3 % à 17 % Abitibi-Témiscamingue, de 11,7 à 12,4 %.

Il y a urgence, Mme la Présidente, que le projet de loi serve de mobilisateur à l'ensemble des régions pour que tous les intervenants se mobilisent autour de la création d'emplois et de l'établissement nécessaire à l'éclosion des emplois, soit la croissance et la compétitivité. Les manufacturiers, qui représentent 23 % de l'économie du Québec, sont des partenaires incontournables du développement régional et local. Je parlais d'ailleurs avec un député qui me disait que, chez lui, dans Chaudière-Appalaches, le chômage à 6 % est en grande partie attribuable à l'ensemble... et aux très nombreuses activités manufacturières qui se déroulent sur son territoire. À notre avis, nous souhaiterions beaucoup que l'ensemble du Québec s'inspire de cette stratégie.

Selon nous, pour garantir le succès, il serait important que l'article 10 mentionne que «le conseil d'administration d'un centre local de développement est composé de membres représentatifs du milieu des affaires», non seulement du commerce, mais également du secteur manufacturier. On suggérerait au ministre de substituer «milieu des affaires» par les mots «secteur industriel» ou encore «secteur manufacturier» de façon à bien refléter l'équilibre des deux grandes composantes de notre dynamique économique du Québec, le secteur des services, soit le commerce et le secteur industriel ou manufacturier que nous représentons au Québec.

La troisième modification, Mme la Présidente, porte sur l'article 7 qui, selon nous, devrait être modifié de façon à ce que le ministre ait le devoir de présenter un rapport économique annuel sur le développement régional et local. Nous proposons un rapport annuel, mais nous serions aussi à l'aise avec un rapport triennal qui ferait le point sur les forces, les faiblesses de chacune des régions, les gains réalisés, les obstacles rencontrés et quels sont les plans mis de l'avant de façon à assurer la croissance économique et la création d'emplois. Ce rapport ferait un bilan de la création et de la croissance en région et identifierait les principaux défis à venir.

Selon nous, ce rapport est loin du rapport d'activité demandé aux CLD et encore aux CRD, un peu plus loin dans le projet de loi, mais serait vraiment une analyse économique, de la part du ministre des Régions, des retombées des actions des CLD de façon à permettre la discussion dans un cadre où l'ensemble des intervenants du Québec pourraient donner leurs orientations lors d'une commission parlementaire annuelle ou triennale concernant le succès des programmes initiés en région. Ceci permettrait d'évaluer l'impact réel des CLD et des conseils régionaux de développement sur le développement régional et local et de stimuler ces organismes face aux défis qui demeurent. En d'autres termes, un suivi de la mise en place de la loi, des effets positifs ou même négatifs qu'elle aura suscités sera en même temps une excellente occasion, lors de ces audiences, pour apporter les correctifs nécessaires.

Les entreprises souhaitent également que les CLD contribuent concrètement au développement régional et local. Leur mandat devrait, selon nous, Mme la Présidente, être précis et mener à des actions pratiques. Le mandat des CLD doit donc être, à l'article 13, alinéas 2° et 3°, non seulement d'élaborer des plans et des stratégies, mais également de s'assurer de leur mise en oeuvre.

Et j'attirerais l'attention du ministre sur certaines des dispositions de la loi 150 créant le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et la Commission des partenaires du marché du travail, laquelle impose aux partenaires du marché du travail une obligation de résultat sur la mise en place des programmes. Il faut que les partenaires en région qui consacrent temps et énergie dans les CLD soient commis par l'atteinte d'objectifs et qu'on puisse ensemble examiner l'atteinte de ces résultats et déterminer les correctifs à apporter de façon à permettre qu'elle soit réalisée. C'est uniquement de cette manière que la mobilisation autour de l'emploi et de la croissance pourra se réaliser dans chacune et toutes les régions du Québec.

Un autre changement, Mme la Présidente, que nous recommandons au ministre afin d'éviter la bureaucratisation et de garantir l'harmonisation des actions est à l'effet de modifier l'article 2 pour ajouter aux responsabilités du ministre l'harmonisation des actions fédérales, provinciales et municipales et la coordination des CLD et des CRD. Il est essentiel que les initiatives québécoises et canadiennes soient harmonisées et que les actions des CLD et des CRD soient cohérentes les unes avec les autres. De plus, il serait indiqué, selon nous, que les entreprises établies en région, mais dont les activités ont des impacts autres que locaux et régionaux continuent à recevoir l'appui de tous les ministères sur des questions d'intérêt général. À ce sujet, nous suggérons que l'article 2 soit amendé de façon à ajouter les mots «de concert avec les ministères sectoriels du gouvernement» de façon à bien refléter que le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, le ministère des Finances et le ministère de l'Emploi continueront toujours aussi d'exercer une responsabilité en région. Une telle disposition aurait également pour avantage d'éviter que les instances gouvernementales sectorielles ne déchargent l'ensemble de leurs responsabilités sur les frêles épaules des CLD, parce que vous allez comprendre qu'on ne saurait prétendre que les CLD vont apporter les réponses à tous les problèmes qui vont se soulever au niveau des régions.

Pour l'Alliance, le mandat du CLD devrait être accompli en tenant compte des services offerts par le secteur privé et les organismes à but non lucratif. C'est le principe de la subsidiarité publié dans les documents d'information du ministère des Régions et du Secrétariat au développement des régions, qui proposent la création d'un ministère avec le projet de loi n° 171, mais dont on devrait tenir compte dans le rédigé de la législation à cet effet. L'article 13 devrait, selon nous, offrir la garantie que le mandat des CLD sera accompli en respectant le principe de subsidiarité qui vise à confier une responsabilité au palier le mieux placé, que celui-ci soit le secteur privé ou public, pour l'assumer avec efficacité et aux meilleurs coûts. Il est essentiel que les CLD capitalisent sur les forces du milieu et n'offrent pas déjà des services offerts par des organismes tels notre association ou d'autres. Dans le domaine des représentations gouvernementales ou autrement, ils travaillent avec, par exemple, notre association en ce qui concerne les services à l'exportation et les autres domaines relatifs à la compétitivité des manufacturiers et des exportateurs. Il faut qu'on ait un rôle de complémentarité, il ne faut définitivement pas qu'on passe notre temps à se piler sur les pieds.

Une autre modification pourrait être apportée aux articles 15 et 23 de la loi qui, en ce qui concerne le rapport présenté annuellement, deviennent un instrument de gestion efficace; je parle ici des rapports des CLD et des CRD. Ce rapport, étant donné l'importance de la participation des membres du conseil d'administration, devra obligatoirement consentir un portrait de la composition par milieu des conseils d'administration des CLD et des CRD et du taux de participation des personnes nommées. Ces renseignements permettront de vérifier que ces instances répondent aux besoins du milieu. Les situations problématiques où le milieu est sous-représenté ou lorsque la participation n'est pas adéquate pourraient également être identifiées.

(15 h 30)

En conclusion, Mme la Présidente, l'Alliance appuie le projet de loi n° 171 créant le ministère des Régions. Elle croit que le projet doit cependant être modifié de façon à donner la priorité à la création d'emplois, à la croissance dont la compétitivité est la clé. Un élément additionnel des recommandations proposées viserait peut-être à accorder aux secteurs industriel et commercial une représentation de 25 % des sièges disponibles. Si on ne veut pas noyauter les milieux d'affaires, si on veut assurer une participation adéquate et une plus-value, on croit important que des blocs qui ne détiendraient pas la majorité, mais qui seraient les artisans des objectifs que l'on poursuit, soit la création d'emplois et la croissance, puissent être mieux représentés, dans la mesure où cet amendement pourrait être reçu de la part du ministre responsable des Régions.

Les structures de concertation, à notre avis, pour être un gage de succès, devraient également offrir une valeur ajoutée aux manufacturiers et aux exportateurs, c'est-à-dire dépasser le simple niveau du plan de discussion pour amener des plans d'action, la mise en oeuvre des plans d'action et le suivi de résultats nécessaires à encourager l'initiative et une participation additionnelle à tous les membres qui composeront les conseils d'administration des CLD et des CRD.

Alors, nous avons joint un résumé des recommandations par articles visant les modifications proposées et nous vous remercions de votre attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Ponton. M. le ministre.

M. Chevrette: Oui. Merci également à l'Alliance pour son mémoire qui m'apparaît être fouillé, même dans le peu de temps qu'on lui a donné. On voit que vous l'avez lu très sérieusement, et je voudrais faire quelques commentaires. Il m'apparaît intéressant, le rapport économique. Annuel, c'est peut-être difficile à cause des rapports de fin d'année, mais regarder cela sur une échéance un peu plus longue, ça m'apparaît positif. D'ailleurs, vous l'avez ajouté vous-même dans vos commentaires, si j'ai bien compris, en allant de un à trois, de sorte qu'il y a une marge, une marge pour s'arrêter à deux ou bien pour aller à trois. Ha, ha, ha!

M. Ponton (Gérald A.): On ne veut pas vous enterrer dans le papier. Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Non, mais je trouve ça intéressant comme approche, effectivement, pour qu'on puisse évaluer la marche globale de tout ça et non pas seulement avoir 120 rapports individuels sans rapport ou vision global de ce que ça donne. Je trouve ça fort intéressant.

L'harmonisation des actions fédérales-provinciales, c'est ce qu'on essaie de faire, même présentement. J'ai personnellement même offert à M. Cauchon, dans une rencontre qui va lui être maintenant officialisée sur papier d'ici quelques jours, l'intégration, par exemple, des ressources sur le plan régional pour éviter les doublements, également une entente de développement régional tout comme il a fait avec l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, et on sait ce que le Nouveau-Brunswick fait avec notre argent, avec 25 % de l'argent qu'il a reçu, il maraude des entreprises du Bas-Saint-Laurent, présentement, et il ne se gêne pas. Même, j'ai vu des lettres personnellement adressées à des manufacturiers québécois et à des industriels québécois, signées de la main-même de M. McKenna et d'un nommé Thériault qui s'occupe de développement économique régional au Nouveau-Brunswick, de sorte qu'on doit être tout aussi important, comme province, que ces régions-là et qu'on peut espérer, nous aussi, avoir une entente de développement économique régional pour éviter les doublements, harmoniser les argents.

Je suis allé plus loin que ça, je lui ai dit qu'on pouvait laisser la bataille de la feuille d'érable et de la fleur de lys et laisser flotter le drapeau ou le flambeau des régions. Ce serait peut-être une preuve qu'on pourrait se placer au-delà des partis politiques puis au-delà des gouvernements et laisser à ceux qui véritablement veulent se prendre en main le soin d'administrer ou de gérer des enveloppes budgétaires qu'on leur confie, avec le principe de subsidiarité, et de façon efficace, etc.

Pour la représentativité de votre association, je ne me cacherai pas pour vous dire que j'étais inquiet que vous ne participiez pas. Vous rappellerez, M. le président, que je vous en ai parlé à moult reprises. On s'est même appelés. J'ai même fait des démarches personnelles auprès de vous pour que votre association soit dans le feu de l'action parce qu'il y a beaucoup de vos membres qui peuvent jouer un rôle fort important au niveau de plusieurs de nos petites MRC et que c'est souvent le manufacturier du coin qui va être l'homme d'affaires du coin dans certains territoires de MRC qui ont à peine 12 000, 13 000 âmes. Ça dépend des MRC, bien sûr, mais... Et je voudrais vous remercier publiquement d'avoir accepté de relever le défi et d'essayer d'organiser le plus possible au niveau du Québec une saine représentativité de vos membres au sein de ces CLD qui, à mon point de vue, vont avoir un rôle important à jouer, en particulier pour la première ligne.

Si j'avais eu plus de temps ce matin, j'aurais peut-être argumenté plus avec la Chambre de commerce du Québec qui a bien daigné présenter un mémoire, elle aussi. Mais il est évident, quand on tombe dans des projets de 75 000 000 $, 100 000 000 $, 200 000 000 $, que ça se déplace vite du milieu local, même par-dessus le régional, pour aller directement au national. Leurrons-nous pas, c'est soit à la SGF, soit à la Caisse de dépôt et placement, ou soit à la SDI, ou encore au gros Fonds national de solidarité, mais ce n'est pas beaucoup plus une entrée de première ligne où le monde du milieu ensemble va chercher à appuyer tous les petits projets possibles et imaginables dans la petite et moyenne entreprise québécoise, et vous avez un rôle extrêmement important à jouer, j'en suis convaincu.

Également, quand vous me dites, à l'article 13, que le mandat du CLD doit être non seulement d'élaborer des plans, mais aussi d'assurer leur mise en oeuvre, c'est ce que je souhaite de tout coeur. Si c'est juste d'élaborer des plans, là, puis qu'on mette 500 000 $ ou en moyenne 500 000 $ par CLD, on est aussi bien de ne pas le faire, parce qu'on a déjà des ententes-cadres, on a déjà des plans stratégiques au niveau des régions. Tu sais, à part de faire un plan d'action puis de se donner des obligations de résultat, là, dire: On vise à créer 30 emplois dans tel secteur du tourisme parce qu'on a un créneau de développement qui est intéressant, un potentiel de développement touristique, un autre, c'est en agriculture, mais on vise, cette année, 400 emplois, quelque chose du genre, je pense que ça, là, c'est ça qui va compter dans le milieu. Il va y avoir une émulation, une certaine saine concurrence entre les CLD d'une même région, à part ça. Ils vont dire: Bien, moi, je l'ai atteint. L'autre va dire: Bien, il ne m'en manquait pas gros, mais, l'année prochaine, je vais me reprendre. Localement, il y a beaucoup qu'on peut faire, et, moi, je vais le regarder sous cet angle-là, mais, si ce n'est pas clair... Dans mon esprit, en tout cas, chose certaine, c'est que c'est clair que ce n'est pas seulement là pour faire des programmes ou des plans, c'est d'étudier des dossiers, de faire la promotion des dossiers, de faire les montages financiers qui s'imposent, de susciter des projets puis de développer l'entrepreneuriat au maximum.

J'aimerais vous entendre sur un point, la présence des députés. Je pense que c'est important que je vous pose la question à vous autres aussi parce que la Chambre de commerce voit ça différemment. Moi, je pourrais avoir une opinion qui m'est personnelle, Mme la députée de Matapédia pourrait avoir son opinion. Je pense bien que, au stade où on en est, on n'en est pas encore à l'adoption finale. Ce serait bon d'entendre les groupes qui viennent sur ce qu'ils voient comme rôle des députés au niveau d'un CLD.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Ponton.

M. Ponton (Gérald A.): Si vous me permettez, très brièvement, sur les remarques ou les commentaires que vous avez apportés aux suggestions, il serait quand même bon que la loi précise la portée des objectifs. Quand, par exemple, vous dites: Moi, je suis d'accord, il ne faut pas seulement concevoir, mais réaliser les plans d'action, moi, je vous suggère, M. le ministre, de changer la loi et de modifier l'article pour dire «concevoir et réaliser les plans d'action avec les résultats escomptés». Encore une fois, si vous voulez assurer l'engagement des participants autour de la table, il faut les commettre à des attentes précises, faut leur dire ce que, vous, comme ministre, comme gouvernement, vous attendez des participants au conseil d'administration des CLD, et il n'y a rien de mieux comme d'indiquer des résultats pour stimuler l'enthousiasme des troupes.

J'irais même jusqu'à dire que certaines des sommes disponibles au développement régional pourraient, outre un certain montant de base, être rattachées à l'atteinte d'objectifs et même au dépassement des objectifs. Pourquoi pas récompenser les régions qui ont un bas taux de chômage puis qui ont réussi, mettons, qui ont mieux amélioré leur score dans une année? Parce qu'il y en a qui sont favorisées par rapport à d'autres, qui sont plus gâtées, mais qui ont d'autres problèmes; la région de Montréal en est un exemple. Mais, si Chaudière-Appalaches a 6 % de chômage puis si la Gaspésie part de 22 % puis elle baisse à 18 %, bien, il y a tout un effort qui a été fait, et, à ce moment-là, la région de la Gaspésie mériterait d'avoir des argents additionnels pour poursuivre dans la voie engagée.

(15 h 40)

L'Alliance est quand même conséquente avec son discours. On dit au gouvernement de cesser de réglementer les virgules, les points sur les i, les barres sur les t et de nous demander de rencontrer des résultats, des résultats en bouts de tuyau, entre autres, en matière d'environnement. Alors, on pourrait s'inspirer de la même démarche qui, à mon avis, est drôlement stimulante non seulement pour le gouvernement puis l'ensemble de la population du Québec, mais également pour tous les participants autour des tables des CLD parce que la concertation va vouloir dire l'action et que l'action se mesure en termes de résultats. À ce moment-là, la mobilisation va se faire, à notre avis, beaucoup plus facilement.

Quant à la présence des députés, le ministère des Régions constitue certes une implication personnelle du député dans sa région et va le sensibiliser à la dynamique économique et à la croissance des entreprises. En d'autres termes, il y a beaucoup de députés qui n'ont jamais engagé un employé dans leur vie, qui ne savent pas c'est quoi, les déductions à la source. Je m'excuse, mais, dans beaucoup de cas, ça nous a été dit par personnes interposées, même dans des témoignages personnels. Donc, ce serait une excellente initiative économique, je pense, pour sensibiliser l'ensemble de l'Assemblée nationale aux exigences de la compétitivité puis de la croissance. Il y a des choses qu'on ne peut pas se permettre de faire si on veut réussir à créer de l'emploi. Donc, de ce côté-là, ce serait positif.

Ce qu'il faudrait éviter, c'est la politisation du processus parce que, si ça devient des organismes trop politisés, bien, M. le ministre, vous allez perdre l'intérêt des gens d'affaires. Puis, s'il n'y a pas de valeur rajoutée en termes de résultats pour l'ensemble de la population québécoise, vous risquez aussi de perdre l'intérêt des gens d'affaires et des manufacturiers. Donc, dans la mesure où on a une participation du politique dans un contexte qui n'est pas une surreprésentation pour orienter les enjeux et les discussions, il n'y a aucune espèce de problème, mais il faut que le milieu ne se sente pas influencé d'une côté ou de l'autre, parce que, à ce moment-là, vous n'aurez pas l'heure juste puis que la vérité des chiffres, vous ne l'aurez jamais. Alors, oui à la participation des députés, je pense que ça va de soi, mais dans un contexte de neutralité partisane et de sensibilité au développement économique.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Oui. Je vais vous revenir sur ce point-là pareil. Vos autres points sont tellement clairs, en ce qui me concerne, là... Je veux revenir sur le rôle du député. J'ai un problème qui est le suivant. Le découpage des MRC fait en sorte qu'il y a quatre députés qui peuvent toucher à un territoire de MRC, par exemple. Moi-même, je pense que c'est ça: Matawinie, Montcalm, Joliette, Berthier. C'est bien évident que, moi, je n'irai pas siéger sur quatre CLD. J'en suis physiquement incapable, d'abord. S'il fallait qu'on en ajoute un peu plus à ce que j'ai – ha, ha, ha! – c'est aussi bien de dire que le génie côtoie la folie, donc je me ferais incarcérer ou interner, un des deux, parce qu'on parlait d'actes de présumés criminels, ce matin.

Ceci dit, croyez-vous qu'il y a possibilité de distinguer un rôle de représentation par rapport à un rôle de membre de plein droit avec droit de vote, etc.? Et comment vous concevez ça?

M. Ponton (Gérald A.): Un compromis serait de nommer les députés d'office membres et sans droit de vote. Parce que l'objectif qui est recherché, là – à mon avis, en tout cas, si j'étais député, ce qui n'est pas le cas – ce serait de savoir ce qui se passe dans ma région puis de connaître les projets qui vont alimenter le pipeline politique. Le fait que le député vote comme tel dans les CLD, ce n'est peut-être pas nécessaire, parce que son rôle, c'est d'être le témoin de la dynamique de son milieu puis de supporter l'action au niveau gouvernemental pour que les projets se réalisent. Ce n'est pas de dire: On tourne à gauche ou on tourne à droite, il peut certainement émettre des opinions, ce que son droit de participation lui conférerait. Mais de là à voter, je pense que ce ne serait peut-être pas nécessaire à la clairvoyance du débat, honnêtement.

M. Chevrette: Maintenant, vous avez parlé d'une chose qui m'intéresse beaucoup. Si j'ai bien compris, vous parliez de conversion de certaines mesures passives actuellement en mesures actives. Vous avez parlé d'émulation ou de motivation. S'il y avait une entente entre... parce que vous êtes sur les partenaires de la politique active du marché du travail, de quel oeil verriez-vous le fait suivant? On accorde 60 000 000 $ à l'ensemble des CLD et on conclut une entente avec vous autres, les partenaires du marché du travail, et la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et on place un autre pool, ou un fonds, ou un projet d'une quarantaine de millions qui viserait à venir bonifier les fonds locaux d'investissement que l'on crée dans les CLD, mais qui pourrait être bonifié ou gonflé, par rapport au 60 000 000 $, d'un 40 000 000 $ ou 50 000 000 $, par exemple, de votre part. Appuieriez-vous ça, vous, un genre de démarche de négos entre deux ministres qui amènerait une partie des mesures passives à être converties en des mesures actives parce que ça génère la création d'emplois?

M. Ponton (Gérald A.): Moi, je dirais que c'est une question qui devrait être posée à l'ensemble des partenaires de la Commission des partenaires du marché du travail, de laquelle l'Alliance des manufacturiers fait partie avec les centrales syndicales et d'autres instances patronales, de même que le milieu communautaire, pour avoir une opinion définitive. Mais, d'entrée de jeu, je vous dirais que ce qui nous importe à nous, c'est d'avoir des résultats en termes de création d'emplois.

Je vous rappelle les données de l'entente conclue avec le fédéral sur le transfert des mesures actives, de l'ordre de 525 000 000 $ annuellement. C'est à l'effet d'adresser les programmes de mesures actives avec l'atteinte des résultats escomptés, parce que l'entente est cancellable après un certain nombre d'années – je ne pense que pas qu'elle va l'être, mais théoriquement elle est cancellable si les résultats ne sont pas atteints – et on doit s'adresser à la clientèle chômeurs et à la clientèle sécurité du revenu depuis moins de deux ans. Alors, dans la mesure où les CLD prendraient des initiatives avec l'engagement d'atteinte de résultats, je ne vois pas pourquoi le CLD local ou la Commission des partenaires aurait problème avec la dynamique du milieu axée sur l'atteinte des résultats.

Mais il ne faudrait pas que ça soit du fonctionnement, il faudrait que ça soit vraiment des emplois créés. On pourrait même escompter, avec les résultats anticipés, une collaboration du ministère de l'Emploi et de la Solidarité au niveau des économies pouvant résulter de l'aide sociale, dans la dynamique où un bénéficiaire de la sécurité du revenu serait en emploi de façon dynamique dans une région. Alors, le moins déboursé que le gouvernement ferait pourrait également être une contribution versée aux CLD de façon à les inciter à atteindre des objectifs de résultat, des objectifs de création d'emplois, parce que le meilleur service qu'on peut rendre à n'importe quel Québécois ou Québécoise ou à un bénéficiaire de la sécurité du revenu, c'est de lui trouver un emploi, puis idéalement un emploi de la qualité la plus durable possible.

Moi, d'entrée de jeu, je n'aurais pas d'hésitation à regarder de façon très favorable – sujet à voir les réserves puis les implications, là – une telle orientation puis encore une fois à avoir un pourcentage pour les régions les plus performantes. Je pense que ce serait normal que ceux qui obtiennent des meilleurs résultats aient droit à une participation additionnelle au niveau des budgets pour poursuivre sur leur lancée. En tout cas, nous, du côté de l'Alliance, on verrait ça de façon assez positive.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? Alors, M. le député de Richmond.

M. Vallières: Oui. Alors, M. Ponton, d'abord je veux vous féliciter pour votre mémoire, moi aussi, malgré les très courts délais qui vous étaient donnés. Peut-être une première question rapide, M. Ponton: Est-ce que votre association avait été consultée lors de la création du ministère de la Métropole?

M. Ponton (Gérald A.): À l'époque, non. Peut-être parce qu'on n'avait pas encore atteint un statut de notoriété suffisant, dans le temps, mais, non, ça nous est passé en dessous du nez, comme on dit.

M. Vallières: Étiez-vous favorable à sa création?

M. Ponton (Gérald A.): Bien, moi, je connais personnellement le ministre Perreault et je crois que le ministère de la Métropole est un instrument qui va permettre de mobiliser la Rive-Nord, la Rive-Sud puis tous les élus de la région de Montréal.

M. Vallières: Alors, vous étiez favorable.

M. Ponton (Gérald A.): Bien, définitivement. Il va créer une masse critique susceptible d'amener les résultats escomptés.

(15 h 50)

M. Vallières: Bien. Alors, dans le mémoire que vous nous présentez, vous nous dites être favorable à la création d'un ministère des Régions. Vous nous avez parlé beaucoup des CLD, des CRD, des modifications au niveau des structures, de certains articles, mais très peu, en réalité, sur les bienfaits ou les avantages que pourrait constituer la création d'un ministère des Régions. Par rapport à la situation qu'on connaît actuellement, qu'est-ce que ça ajoute de plus?

M. Ponton (Gérald A.): Bien, écoutez, c'est sûr que le moins de ministères possible, le mieux ce serait parce que qui dit ministère dit encore dépenses gouvernementales, puis on sait tous la difficile lutte au déficit qui est menée actuellement par le gouvernement. Puis c'est à s'interroger si, sur le fond, ces ministères sont vraiment requis. Mais vous êtes vraiment, vous, les députés, les plus aptes à juger du mérite de passer une loi ou pas.

Moi, ce que je peux vous dire, c'est que, à la minute qu'on m'annonce un projet de loi qui va être voté, mon rôle, c'est de contribuer à le bonifier puis à l'améliorer. Même si je vous disais mon opinion personnelle... Puis, dans le cas du ministère des Régions, je n'en ai pas. Mais ça va rétablir un équilibre que je perçois dans l'ensemble des régions vis-à-vis du rôle de la métropole, ça va donner aux régions des outils pour rivaliser et avoir leur place au soleil. Mais elles ne prendront jamais la place de 48 % des établissements manufacturiers qu'on retrouve dans la région du Grand Montréal. C'est 52 % de la population qui est concentrée sur 10 % du territoire, alors Montréal va toujours constituer le coeur-poumons du Québec. Puis ce que je souhaite avec le ministère des Régions, c'est qu'on ait un équilibre entre les ministères qui va permettre une meilleure collaboration entre ces deux ministères pour développer le Québec au complet.

M. Vallières: Bien. Pour ce qui est des outils que sont les CLD éventuellement et les CRD présentement, vous êtes informé que, même s'il n'y avait pas cette loi-là, ça pourrait fonctionner, ça, là. Le CRD existe; le CLD, c'est un type d'organisation qui pourrait être créé sans la création d'un ministère des Régions. Ce pour quoi j'insiste, c'est que, quand vous nous dites que vous appuyez un projet de création du ministère des Régions, faut que vous soyez conscient que ça va être utilisé ultérieurement pour dire que vous étiez d'accord, favorable à la création d'un ministère. C'est pour ça, là, mon insistance à savoir, si vous êtes favorable à ça, quels sont les avantages que vous avez décelés pour appuyer pareil projet.

Vous pourriez y revenir tout à l'heure, parce que j'ai toute une série de questions à vous poser, dont l'une qui pour moi est superimportante, parce que, à quelques reprises dans votre texte, vous faites part à la commission qu'il faudrait que le projet de loi n° 171 se donne comme priorité claire la création d'emplois. Ça veut dire que ce n'est pas clair, présentement, en tout cas qu'on ne retrouve pas suffisamment d'objets dans cette loi-là qui vous incitent à croire que l'accent est suffisamment mis sur la création d'emplois.

Est-ce que les propositions que vous nous faites, les propositions d'ajout, selon vous, de modification à la loi vont contribuer à rendre ces structures-là qui sont mises en place suffisamment performantes au niveau de la création d'emplois? Ceux qui vous ont précédé ce matin ont insisté, eux autres aussi, là-dessus, sur les moyens qu'on doit se donner pour vérifier l'atteinte d'objectifs. C'est toujours louable, des objectifs de création d'emplois, on ne peut pas être contre ça, mais est-ce que, au bout d'un certain temps, avec les outils qu'on se sera donnés, on sera en mesure de retirer vraiment les attentes qu'on s'était données comme parlementaires et comme également intervenants dans les différentes régions? Est-ce que ça suffit? Puis est-ce qu'il y a autre chose qui devrait être pensé à l'intérieur du projet de loi actuel pour privilégier vraiment cette création d'emplois à laquelle vous semblez accorder beaucoup d'importance dans votre mémoire?

M. Ponton (Gérald A.): Bon, je vous dirais, M. le député, que, en ce qui concerne la création du ministère des Régions, bien, il y en a un au fédéral, le BFDR(Q), qui s'adresse aux régions. Moi, je trouve que c'est pertinent dans la mesure où on a des économies. Le ministre, dans une lettre à La Presse le 3 novembre 1997, nous disait: «Avec le CLD, le gouvernement fait le ménage de ses structures. Alors, moi, j'escompte de cette création du ministère des Régions et du ménage qui va se faire dans les structures régionales qu'il va y avoir des économies ou, à tout le moins, une plus grande efficacité dans les instances de concertation dans les régions.»

En ce qui concerne la création d'emplois, je pense que ça devrait être dit plus clairement à l'article 1 ou à l'article 2 que la raison d'être des CLD, c'est d'assurer la croissance économique, la compétivité de nos entreprises, parce que ce n'est pas le gouvernement qui crée de l'emploi puis que ce n'est pas les syndicats, c'est les entreprises qui créent de l'emploi. Alors, il ne faut pas avoir peur des mots. Puis vous avez une belle déclaration sur l'emploi, qui a été signée au Sommet de novembre 1996 à Montréal, qui vous donne un beau texte pour reprendre puis assurer la mobilisation des troupes.

Quant aux résultats, M. le député, avec la recommandation qu'on fait au ministre de déposer un rapport économique, c'est quoi que ça a donné, sa loi puis les bilans? Les députés seront à même de l'interroger puis de poser des questions sur les retombées de la mesure. On a proposé dans d'autres lois comme l'équité salariale qu'après trois ans la ministre responsable mandate un enquêteur indépendant pour dire: Bien, est-ce qu'on atteint les résultats qu'on vise? Est-ce qu'on veut réduire l'écart entre les hommes et les femmes? «Ç'a-tu» marché, le projet de loi? Bien, je propose la même chose. Moi, je ne suis pas devin, je ne suis pas capable de vous dire si c'est une bonne affaire ou pas, mais ce que je sais, par exemple, c'est que, en mobilisant les troupes dans les régions, vous allez avoir des meilleurs résultats qu'en ayant des troupes morcelées.

M. Vallières: C'est intéressant, votre proposition de rapport économique annuel sur le développement qui peut être présenté par le ministre. Je pense que ça crée l'obligation de résultat et de retour sur notre action. Alors, je pense que ça peut être intéressant. En tout cas, certainement que cette proposition pourra faire l'objet de l'appréciation des parlementaires dans l'étude article par article.

Vous parlez, en page 7 de votre mémoire, de la proportion que vous demanderiez de sièges – 25 % des sièges devraient être réservés aux gens d'affaires sur les conseils d'administration des CLD – puis, un peu plus loin, vous mentionnez même que le secteur manufacturier devrait être...

Une voix: De façon spécifique.

M. Vallières: ...de façon spécifique, mentionné. Si c'est 25 % pour vous autres, on sait qu'aussi dans le domaine commercial il se crée beaucoup d'emplois. Est-ce que vous avez une idée de quel pourcentage de sièges devrait être réservé au secteur commerce à l'intérieur des CLD?

M. Ponton (Gérald A.): On propose 25 % pour les gens d'affaires. Ça inclut les deux, selon nous. On réalise très bien qu'un des principes dans la loi, c'est: aucun groupe n'a une majorité. Puis on ne peut pas non plus constituer un déséquilibre parce qu'il faut faire de la place aux intervenants syndicaux et sociaux, de même qu'aux municipalités, j'ai compris. Mais 25 % garantirait une représentation adéquate pour les deux niveaux, soit industriel ou commercial, en autant que c'est clair que ça peut être l'un ou l'autre. Il y a des régions où ça peut être: le plus dynamique, la personne la plus compétente est un représentant du commerce. Pas de problème avec ça, ce type-là peut très bien parler pour les manufacturiers. Mais, dans une autre région... Dans le bout de North Hatley, des usines, il n'y en a pas trop, il n'y en a pas beaucoup. Dans ce cas-là, ça peut être davantage un manufacturier qui va se rendre disponible. Il serait important que les deux piliers de l'économie, l'industrie et le commerce, soient les deux représentés, qu'il n'y ait pas de monopolisation par les gens de services, que j'aime beaucoup, mais qui ne sont pas des manufacturiers puis qui ne sont pas l'ossature de l'économie québécoise, parce que les emplois les plus payants, c'est les manufacturiers qui les créent. Le salaire industriel moyen est de 29 000 $, puis le salaire moyen au Québec est de 18 000 $. Alors, il faut reconnaître les participations puis les avantages de chaque niveau.

M. Vallières: Bien, ça précise, parce que, à la page 8 de votre mémoire, là, vous disiez de modifier l'article 10 en mentionnant le secteur manufacturier explicitement.

M. Ponton (Gérald A.): En plus du secteur commerce, parce qu'on dit «le secteur dont le secteur commerce»... Je n'ai pas l'article 10 ici avec moi. Oui, je l'ai. Voyez-vous, à l'article 10, on dit «le milieu des affaires et du commerce». Moi, je trouve ça redondant, «du milieu des affaires et du commerce», ça veut dire la même chose, parce que le commerce fait partie des milieux d'affaires. Mais, si on disait «du milieu industriel et du commerce», on réglerait le problème.

M. Vallières: Toujours dans le même secteur...

M. Ponton (Gérald A.): Ou rien dire du tout.

M. Vallières: ...oui, pensez-vous qu'on devrait réserver un certain nombre de sièges de façon précise à la clientèle jeunesse à l'intérieur des conseils d'administration?

M. Ponton (Gérald A.): Moi, je ne pense pas, de façon spécifique, non. Ils font partie de la dynamique sociale et communautaire comme tous les intervenants, et c'est leur dynamisme qui va leur gagner des places au soleil, ce n'est pas un nombre de sièges prévu dans une loi. Je pense qu'on n'atteindra pas de résultats de cette façon-là.

M. Vallières: Est-ce que vous avez le même point de vue en ce qui a trait à la répartition du nombre de sièges hommes et femmes?

(16 heures)

M. Ponton (Gérald A.): Bien, je ne ferais pas non plus de différence là-dedans. Je pense qu'à trop vouloir préciser vous allez attacher le milieu. Pourquoi vous ne laissez pas les gens décider? On vous donne un organisme; voici les paramètres dont vous devez tenir compte. Vous pouvez dire «une représentation adéquate ou proportionnelle d'hommes et de femmes», je n'ai pas de problème avec ça, mais, s'il n'y en a pas, de femmes dans la région qui veulent s'impliquer, on fait quoi? Il ne faudrait pas non plus que ce soient des critères qui vont venir paralyser. Moi, le conseil que je vous donnerais, c'est: Faites donc confiance aux gens du milieu, qui vont se donner une représentation qui va refléter leur dynamisme puis leur composition locale. À trop vouloir préciser, vous allez les étouffer.

M. Vallières: Dont 25 % pour le secteur des gens d'affaires?

M. Ponton (Gérald A.): On pourrait l'enlever si ça vous fatigue puis dire: Une représentation adéquate des gens d'affaires. Moi, ça ne me dérange pas, mais, si vous voulez que ça marche, ça va vous prendre des gens d'affaires. Si vous n'en avez pas, à mon avis, ça va être plus difficile.

M. Vallières: Bien. Ce n'est pas la question que ça nous fatigue, c'est la question qu'on essaie de trouver une façon qui colle le plus à la réalité du terrain et à reconnaître votre point de vue sur le sujet. Parce que, nous, comme parlementaires, on aura à se prononcer éventuellement là-dessus. Il y a également une proposition que vous faites concernant l'arrimage entre les différents niveaux d'intervention. Vous parlez beaucoup de complémentarité, vous parlez de modifier l'article 2, d'ajouter aux responsabilités du ministre l'harmonisation des actions fédérales et provinciales. Est-ce que je vous lis bien ici quand vous parlez d'harmonisation? Vous parlez d'agir en complémentarité avec ces organismes-là, le ministre se verrait donner le mandat de s'assurer que les gens travaillent en complicité, ce qui reconnaît à ce moment-là les interventions qui se font présentement dans le milieu, et incluant celle du gouvernement fédéral dans ce secteur d'activité.

M. Ponton (Gérald A.): Bien, je ne veux pas naturellement, là, rentrer dans le débat politique du fédéral et du provincial, ça ne fait pas partie du mandat de l'Alliance. On est là pour développer le Québec, on n'est pas là pour se chicaner. Ce qu'on souhaite cependant c'est que les deux gouvernements s'entendent puis qu'ils harmonisent leurs programmes pour le plus grand bien des Québécois et des Québécoises. C'est ça qu'on souhaite. Je pense que le sondage de ce matin était assez clair, les gens veulent de l'emploi, veulent la création de richesse – du moins c'est ce qu'ils souhaitent le plus – puis on pense que le ministre des régions devra avoir une responsabilité de coordonner puis d'harmoniser les actions fédérales. C'est bien évident que, s'il ne peut pas s'entendre avec son homologue fédéral, pour différentes considérations qui lui sont propres, c'est un autre problème, puis je ne me porte pas juge là-dessus, mais idéalement le ministre des régions devrait s'assurer que, sur le territoire, les deux ordres de gouvernement ont des actions concertées et harmonisées.

M. Vallières: Bien. Très rapidement, M. Ponton, une association des manufacturiers du Québec, quand vous fournissez des services à des entreprises, est-ce que vous le faites avec une charge, avec des coûts reliés aux services que vous dispensez?

M. Ponton (Gérald A.): Ça dépend dans quoi. Si c'est des services d'information sur des lois et des règlements puis qu'ils sont membres chez nous – c'est certain qu'il y a un tarif à payer pour être membre de l'Alliance – on ne demande pas de coût pour ces services-là. Des fois, des non-membres nous appellent; on leur donne également l'information dans l'espoir de les convaincre de recruter puis de joindre nos rangs. Mais, lorsqu'on organise des activités, on les organise pour tous les manufacturiers qu'ils soient membres ou non-membres et à ce moment-là on a un tarif uniforme, non discriminatoire, pour l'ensemble des entreprises à travers le Québec.

M. Vallières: Bien. Je vous posais la question parce que vous disiez qu'il faudrait éviter que les CLD prennent la place de certains organismes qui donnent déjà des services. Donc, je voulais m'assurer que, si les CLD ne le font pas, que vous pourriez le faire, mais avec ou sans frais à ce moment-là? Vous avez répondu à ma question.

M. Ponton (Gérald A.): Oui, je vais vous donner un exemple. On a un test, on appelle ça un test d'analyse du positionnement d'une entreprise pour évaluer sa compétitivité au niveau nord-américain ou européen. Bien, ça, il y a un coût de 4 000 $ qui est rattaché à ce programme-là, à titre d'exemple, puis c'est fait avec la compagnie IBM de Bromont. Les membres bénéficient d'un rabais; ceux qui ne sont pas membres y ont également droit, mais ils payent un petit peu plus cher.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va?

M. Vallières: Ça va pour moi, oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saguenay. Il reste trois minutes. Une question courte si vous voulez avoir une réponse.

M. Gagnon: Merci, Mme la Présidente. Vous faites référence dans votre présentation au principe de la subsidiarité pour éviter des dédoublements. Quels seraient les secteurs d'activité qui, dans ce contexte-là, pourraient être confiés au secteur privé dans le contexte de l'avènement des CLD?

M. Ponton (Gérald A.): Bien, je vais vous donner l'exemple du programme Exportation 2000. Bon, l'Alliance a piloté des journées d'information, colloques ou séminaires sur l'exportation dans 12 villes à travers le Québec, l'an dernier. Puis on a l'intention de rééditer ça cette année encore. Alors, dans la mesure où un CLD veut organiser... Puis aussi l'Alliance était l'organisateur de la logistique de la mission du Québec en Chine, qui s'est déroulée du 1er au 12 novembre de cette année. Je ne vous réclame pas de dire que ça doit être l'Alliance obligatoirement, mais ça pourrait être un autre organisme qui est spécialisé dans un domaine, auquel on fait appel pour éviter qu'on se pile sur les pieds. Ça, c'est un exemple que je vous donne.

L'autre exemple, c'est celui des alliances stratégiques. Je verrais mal comment un organisme qui se spécialise dans le développement de la valeur ajoutée au Québec ne pourrait pas se voir attribuer la responsabilité de réaliser un programme d'alliance stratégique dans une région spécifique. C'est ça que j'appelle le principe de la subsidiarité: utiliser les ressources existantes, ne pas réinventer le bouton à quatre trous à chaque fois. Parce qu'on met tous des efforts puis à un moment donné, à trop mettre d'efforts, bien, là, on se pile sur les pieds, on fait du sur place puis on n'avance pas.

Alors, il faudrait miser, pour une plus grande efficacité, à travailler avec les partenaires, que ce soient les sociétés de développement économique ou d'autres organismes professionnels qui existent dans le milieu pour l'atteinte des programmes d'action que les CLD vont se donner.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Ponton.

M. Ponton (Gérald A.): Merci, madame.

Une voix: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Merci. Moi, il y a une petite chose qui m'a surpris en lisant le mémoire. C'est qu'on a l'habitude d'entendre le milieu des affaires dire que des structures il y en a déjà trop, qu'il faut faire attention, il ne faut pas créer trop de nouvelles structures. Il y avait le Secrétariat aux affaires régionales qui était là, et je pense qu'on a démontré et tout le monde s'entend pour dire que la poursuite et la mise en place des CLD n'est pas reliée comme telle à la mise en place du ministère des Régions.

Moi, j'aimerais savoir: Qu'est-ce qui, selon vous, ne fonctionnait pas au niveau du Secrétariat aux affaires régionales pour justifier ce changement de structure là?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Ponton.

M. Ponton (Gérald A.): Honnêtement, M. le député, je n'ai pas la réponse à votre question. Je pense qu'il faudrait la poser au ministre. Parce que, moi, je me serais contenté du Secrétariat au développement des régions, si ce n'est, avec les changements à la loi n° 150, l'arrimage qu'il faut faire avec les CLE, les centres locaux d'emploi. Est-ce que les CLE auraient pu fonctionner à l'intérieur de la dynamique des CRD? Parce qu'actuellement des CLD, des centres locaux de développement, il n'y en a pas. Il aurait fallu – j'imagine – les transformer. Je n'ai pas regardé la question de près. Mais, moi, je ne me suis pas arrêté à la pertinence de remplacer le Secrétariat au développement des régions par un ministère des Régions, pour être bien honnête avec vous.

M. Chevrette: ... pour lui dire que l'on passe de 400 structures à 120; on en accrédite 120, puis on ne s'occupe plus des 260 autres – 260, 280 autres. Deuxièmement, pourquoi un ministère et un secrétariat? Je suis persuadé que pour un député qui vient d'une région, qui veut l'équilibre des forces morales politiques... Et, s'il ne comprend pas tout à fait ce que je veux dire, je lui expliquerai plus longuement.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: J'ai toujours fait énormément confiance au ministre, mais sur la liste des organismes abolis, je ne sais pas si ce serait possible d'avoir une liste à un moment donné qui serait déposée pour voir exactement de qui on passe de quoi à quoi, mais de toute façon c'est plus sur la structure du Secrétariat comme tel. Je pense qu'on aurait pu faire le même ménage dans les structures, en créant les CLD, en ne changeant pas le Secrétariat aux affaires régionales pour un ministère des Régions. Il y a des choses qui auraient pu se faire puis je pense que le ministre a assez d'expérience en politique pour... Il y a des ajustements qui auraient pu être faits sans qu'on change au complet la structure puis qu'on la sorte. C'est une volonté politique, on la respecte. On a à se faire une idée là-dessus.

M. Chevrette: Quand je suis allé à Kamouraska-Témiscouata, les maires puis les développeurs du coin m'ont dit: Mais pourquoi la métropole a son ministère puis que les régions n'ont pas le leur? J'espère qu'ils vous disent ça. Parce qu'ils m'ont dit ça.

M. Béchard: Ce qui les inquiète, c'est...

M. Chevrette: Et ils m'ont dit ça partout. Il ne s'agit pas de créer une structure pour une structure, c'est de lui donner l'autorité morale d'un ministère – c'est correct – par rapport à un secrétariat; 16, 17 régions contre une et une a un ministère qui est à l'horizontal, puis l'autre avait un secrétariat. Et il y a une question d'équilibre politique versus un pouvoir moral politique important – je pense – dans les circonstances. En tout cas, j'ai reçu ça partout.

M. Béchard: Oui, c'est ça.

M. Chevrette: C'est peut-être sauf chez vous, mais chez nous, dans toutes les autres régions du Québec, j'ai entendu ça. Quant aux structures...

M. Béchard: C'est ça.

M. Chevrette: ...c'est 400 structures qui sont scindées en 120.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci.

M. Béchard: Juste une petite question.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est fini.

M. Béchard: Même pas?

(16 h 10)

La Présidente (Mme Bélanger): Même pas une petite question parce qu'on a déjà du retard de pris. Alors, vous allez avoir l'occasion, dans un autre groupe, de pouvoir questionner. Nous vous remercions, M. Ponton et M. Dussault.

Nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 11)

(Reprise à 16 h 12)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous reprenons nos travaux. À l'ordre, s'il vous plaît!


Conseil permanent de la jeunesse (CPJ) conjointement avec l'Association des services d'aide aux jeunes entrepreneurs du Québec (ASAJEQ)

Je demanderais maintenant au Conseil permanent de la jeunesse, conjointement avec l'Association des services d'aide aux jeunes entrepreneurs du Québec, de bien vouloir s'approcher.

Je demanderais à M. Philibert de bien vouloir présenter les personnes qui vous accompagnent et, comme les autres groupes, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire qui sera suivi d'un questionnement de 20 minutes pour chacun des groupes parlementaires.

M. Philibert (Michel jr.): Mme la Présidente, nous avons des documents à déposer.

La Présidente (Mme Bélanger): Nous allons les accueillir avec plaisir.

M. Philibert (Michel jr.): Donc, l'ASAJEQ de leur côté, et le Conseil, on a... Tous les parlementaires ont reçu notre avis sur l'exode des jeunes. J'en ai quelques copies pour le bénéfice des parlementaires, donc j'en ai de disponibles ici.

Avant de commencer, permettez-moi de vous présenter les gens qui m'accompagnent: à ma droite, M. Stéphane Leclerc, qui est président de l'Association des services d'aide aux jeunes entrepreneurs du Québec – c'est l'ASAJEQ – et son directeur général, M. Patrice Gagnon; à ma gauche, Mme Louise Bisson, agente de recherche au Conseil permanent de la jeunesse, et, moi, Michel Philibert, je suis le président du Conseil permanent de la jeunesse.

Je vous ferai remarquer que c'est la dernière commission parlementaire auquel le Conseil permanent de la jeunesse actuel va participer. Le Conseil va se renouveler en totalité en fin de semaine prochaine. Donc, c'est avec émotion que je fais cette dernière commission parlementaire.

M. Chevrette: ...

M. Philibert (Michel jr.): Non, malheureusement, moi, je ne serai pas présent. Donc, notre présentation sera faite en deux parties. Premièrement, je présenterai la position du Conseil qui s'inspire des recommandations de notre dernier avis sur l'exode des jeunes et par la suite je céderai la parole aux représentants de l'ASAJEQ qui présenteront leur mémoire.

Pourquoi le Conseil s'intéresse-t-il à ce projet de loi? Eh bien, c'est bien simple. Premièrement, parce que le Conseil s'est penché dernièrement sur la question de l'exode des jeunes vers les centres urbains et que cette question est très liée au développement local et régional. Deuxièmement, parce que le Conseil a toujours été préoccupé de la participation et de la représentation des jeunes au sein des instances de notre société et que ce projet de loi reconnaît des instances locales et régionales qui sont déterminantes pour le développement des communautés au sein desquelles les jeunes sont et seront, encore une fois, potentiellement absents.

En fait, si vous avez lu notre avis sur l'exode, vous avez pu constater qu'une des conclusions des consultations que nous avons menées auprès d'une centaine de jeunes provenant de différentes régions, c'est qu'au-delà des raisons traditionnelles de quitter sa région, comme le fait de poursuivre des études, le goût d'aller voir ailleurs ou le manque d'emploi, il existe un sentiment partagé chez les jeunes à l'effet qu'ils ne se sentent pas considérés dans leurs communautés. Ils estiment qu'à plusieurs égards les décisions et les actions prises en matière de développement économique, social ou culturel ne prennent pas en considération la situation et les conditions des moins de 30 ans, ce qui en pousserait plusieurs à quitter leur région ou du moins à ne pas y revenir. C'est un constat qui est dur, certes, mais il devrait inciter plus d'un décideur à réfléchir et à repenser leur façon d'agir s'ils sont le moindrement conscients et inquiets du fait que les communautés se vident de leurs jeunes.

Repenser leurs façons d'agir, c'est ce à quoi le Conseil convie les décideurs locaux et régionaux dans son avis, avec une série de recommandations qui visent à renouveler la vie démocratique et à orienter les décisions et les actions en faveur des jeunes, et ce, à tous les niveaux. Les municipalités doivent entre autres s'ouvrir aux moins de 30 ans et agir avec eux pour développer l'emploi, améliorer leur qualité de vie et, pour ce faire, le Conseil propose aux municipalités de se doter d'outils: un conseiller responsable de la question jeunesse et une politique jeunesse développée à l'échelle de la MRC.

Les structures proposées dans votre projet de loi sont évidemment aussi visées par le Conseil. En fait, il s'agit d'une occasion privilégiée de dépasser les discours et d'agir concrètement pour donner voix au chapitre aux jeunes des régions. Bien qu'il soit prévu dans votre guide d'implantation des CLD qu'une attention particulière doit être apportée à une participation significative des jeunes, le Conseil estime que cela ne comporte aucune garantie pour les jeunes, d'autant plus que votre projet de loi ne traduit pas cette volonté à l'article 10. À moins, M. le ministre, que vous nous affirmiez que vous n'accorderez aucune accréditation aux CLD qui ne comportent pas de représentation significative des jeunes. Est-ce que c'est de cette façon que vous comptez garantir la présence de jeunes? Et, si c'est le cas, pourquoi ne pas le rendre officiel dans la loi, comme nous le recommandons dans notre avis?

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à réclamer de désigner officiellement des postes pour des représentants de moins de 30 ans au sein des CLD, la jeunesse du Parti québécois le demande aussi. Car en cette matière le Conseil est d'avis qu'il faut forcer les choses parce qu'il n'y a pas chez les décideurs de quelque niveau que ce soit le réflexe de s'associer des jeunes. D'ailleurs, la preuve, c'est qu'il a fallu forcer la note pour être entendus à cette commission; et, comme les jeunes c'est moins important, eh bien on leur accorde une moitié d'audition.

Autre preuve, c'est que nous avons demandé à vous rencontrer, M. le ministre, pour discuter en profondeur des constants et des conclusions de notre avis sur l'exode, question pourtant éminemment importante pour le développement des régions. Nous attendons toujours. À l'échelle locale et régionale, c'est la même chose. Pour les jeunes, il ne leur suffit pas de vouloir faire leur place au soleil, on connaît la propension des autres à s'accaparer le soleil, les portes sont souvent fermées, d'autant qu'ils n'ont pas de poids politique, et ce, de moins en moins dans les régions à déclin.

Concernant les CLD, le Conseil est aussi d'avis que leur mandat est trop restreint au développement de l'entrepreneuriat. Le développement local suppose toute une gamme d'actions dans des domaines plus larges. Ainsi, les CLD devraient s'occuper de la coordination d'actions qui visent spécifiquement le rajeunissement des régions touchées par l'exode. L'arrimage entre l'économie régionale et la formation professionnelle offerte dans les régions devrait également faire partie du mandat des CLD.

Dans cette opération de régionalisation, et cela d'autant plus si les jeunes n'ont pas de représentants pour veiller à ce que leurs besoins soient pris en compte, le Conseil craint donc pour la spécificité jeunesse. La menace qui plane sur les services d'aide aux jeunes entrepreneurs en est un exemple. L'intégration prévue des SAJE aux CLD ne contient encore une fois aucune garantie que les services spécifiques aux jeunes seront offerts et que des budgets actuellement dévolus aux SAJE seraient obligatoirement injectés dans des services aux jeunes. Les jeunes qui souhaitent démarrer leur entreprise ont encore beaucoup trop d'embûches à surmonter pour risquer de perdre les services d'aide adaptés à leurs besoins et à leur situation offerts par les SAJE.

C'est pourquoi le Conseil appuie la l'ASAJEQ dans ses revendications pour maintenir les services d'aide aux jeunes entrepreneurs en une entité distincte. Nous proposons également d'augmenter les ressources financières accordées aux SAJE, car les besoins en aide financière sont loin d'être comblés, notamment en matière d'entreprises coopératives et d'économie sociale.

C'était là quelques-unes des recommandations émises par le Conseil dans son avis «Y'a pas d'avenir ici» -- L'exode des jeunes vers les grands centres urbains . Le Conseil propose non seulement d'améliorer les services d'aide aux jeunes qui ont des projets d'entreprise mais aussi de soutenir la relève en agriculture. Le programme Place aux jeunes, qui a pour objectif de contrer l'exode des jeunes, devrait être aussi mieux soutenu financièrement. D'autres recommandations concernent également le milieu de l'éducation et visent une meilleure accessibilité à l'enseignement de niveau post-secondaire et à la formation professionnelle dans les régions périphériques de même que l'amélioration des services d'intégration professionnelle.

(16 h 20)

Pour nous, il demeure évident que le développement local et régional passe par des gestes concrets en faveur des jeunes, des actions pour eux mais surtout avec eux.

M. Leclerc (Stéphane): Mme la Présidente, M. le ministre et membres de la commission. Je tiens en premier lieu à vous remercier de nous permettre de donner le point de vue de l'Association des services d'aide aux jeunes entrepreneurs du Québec sur la politique de développement local et régional et sur l'implantation des CLD. Nous représentons 100 groupes SAJE membres qui sont situés dans toutes les régions du Québec. Actuellement, c'est 102 SAJE qui sont répartis dans chacune des MRC dans les communautés urbaines afin de donner un service de première ligne aux jeunes entrepreneurs.

Pourquoi avoir créé un service particulier pour les jeunes en 1985? Je vous raconterai une anecdote, une question qu'on m'avait posée il y a quelque temps. Quelle est la différence entre un jeune de 25 ans qui se part en affaires et quelqu'un de 45 ans? La réponse que je donne, moi, c'est: 20 ans. C'est 20 ans où les gens peuvent se bâtir une crédibilité auprès des institutions financières, peuvent accumuler du financement pour démarrer en affaires, peuvent se créer un réseau de contacts aussi. Donc, notre service vise à accompagner le jeune face à ces problématiques particulières reliées notamment au financement, à l'expérience, aux réseaux de contacts peu développés et la crédibilité face aux différents intervenants.

Créés en 1985 par le gouvernement du Parti québécois, les SAJE sont financés par le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie qui investit annuellement 5 700 000 $ pour assurer ce service. Le MICST, ministère de l'Industrie, finance également le programme Jeunes Promoteurs pour une somme de 4 500 000 $ par année. Dans certaines régions du Québec, la gestion de ce programme est déjà assumée au plan local par des SAJE. Les SAJE ont contribué, depuis leur création en 1985, au démarrage de plus de 15 000 entreprises qui ont entraîné la création de plus de 34 000 emplois. Ces entreprises ont nécessité des investissements de près de 707 000 000 $.

Il faut vous dire que plus de 80 % des SAJE sont des services, comme leur nom l'indique, et donc des services à l'intérieur de structures de corporations ou de sociétés de développement local. Notre réflexion portera donc sur la qualité et l'accessibilité des services auprès des jeunes entrepreneurs et non sur les structures en tant que telles.

Le gouvernement actuel a, à plus d'une occasion, interpellé et manifesté sa confiance envers l'important réseau que constituent les 102 SAJE à travers le Québec, notamment lors de consultations prébudgétaires. On nous avait demandé de siéger à titre de commissaire aussi lors de la Commission des jeunes sur l'avenir du Québec. On était un des représentants jeunesse lors du Sommet sur l'économie et l'emploi notamment.

L'ASAJEQ appuie la démarche de décentralisation du gouvernement. Les programmes SAJE et Jeunes Promoteurs ont depuis longtemps pris les couleurs locales et, bien que les mandats de base demeurent les mêmes partout, les activités, les actions et les projets d'entreprise retenus varient au gré, bien sûr, des priorités régionales et locales; c'est pour ça qu'on dit que ces deux programmes-là font déjà l'objet en partie d'une décentralisation.

Cependant, la décentralisation actuelle prévoit le regroupement en un seul chèque des sommes accordées au développement économique régional, sans spécification des mandats à prioriser. Nous croyons que cela met directement en péril la prestation des services de première ligne aux jeunes. Plus rien ne garantit en effet que la portion du PADER, jusque-là attribuée à la réalisation du mandat jeunesse et à l'embauche d'une personne exclusivement affectée à ce mandat, continuerait à servir les jeunes.

Le même sort attend le programme Jeunes Promoteurs dont les sommes seraient incluses au fonds local d'investissement, je vous rappelle que Jeunes Promoteurs, on parle ici du seul programme provincial d'aide financière spécifiquement adressé aux jeunes entrepreneurs. Diluées à l'intérieur de cette polyvalente structure, les sommes originalement destinées au développement de l'entrepreneurship jeunesse pourraient facilement se retrouver ailleurs.

Des 60 000 000 $ promis par le gouvernement pour l'instauration des CLD, je rappelle que c'est 10 200 000 $, soit 15 %, qui proviennent des seuls programmes Jeunesse. Il nous apparaît donc inadmissible qu'on ne puisse pas, dès lors, réserver leur utilisation pour ces fins spécifiques.

Le contexte actuel nous amène à nous poser des questions, notamment celle-ci: Les argents qui appartenaient auparavant aux jeunes, soit 10 200 000 $, seront-ils toujours dévolus à la jeunesse si aucun mécanisme n'est prévu pour s'en assurer? Actuellement, permettez-nous d'en douter. Déjà, des mouvements, dans certaines MRC, laissent voir l'abolition de postes jeunesse et même la modification de mandat des Ressources Jeunesse. Aucune indication n'a été stipulée aux milieux locaux quant à l'importance de conserver un mandat jeunesse à l'intérieur de leur projet de CLD. Notre inquiétude est d'autant plus grande dans le contexte où le gouvernement fédéral investit massivement dans l'entrepreneurship jeunesse au Québec en créant un fonds d'investissement jeunesse dans chaque MRC du Québec – un fonds de 100 000 $ – en plus de financer une ressource jeunesse pour, entre autres, opérer le fonds.

Par ailleurs, les municipalités cherchent à rationaliser les coûts depuis les dernières négociations avec Québec. Nous estimons donc que le mandat de l'entrepreneurship jeunesse, dans ce contexte, est sérieusement compromis. En effet, sans directives claires quant à la protection du mandat jeunesse, les milieux locaux pourraient bien élaborer leur projet de CLD en assumant que le mandat jeunesse sera assumé désormais entièrement par le fédéral. Les milieux pourraient alors utiliser les sommes auparavant dédiées aux jeunes afin de financer d'autres priorités locales.

Suite à l'arrivée du gouvernement fédéral dans l'entrepreneurship jeunesse, le gouvernement du Québec a réagi par la voix du ministre délégué à l'Industrie, au Commerce, de la Science et de la Technologie, M. Roger Bertrand, qui a dit, par voix de communiqué, le 17 octobre dernier, et je cite: «Le ministre a confirmé le maintien de son appui au développement d'entreprises par les jeunes à travers ses programmes SAJE et Jeunes Promoteurs. Il était important que soit confirmé par notre gouvernement le maintien de ces programmes afin que les jeunes continuent à assurer leur part du développement de l'emploi dans toutes les régions du Québec.» Fin de la citation.

Par la suite, le gouvernement a pris soin de reconfirmer sa position alors que M. David Payne, adjoint parlementaire au premier ministre, M. Lucien Bouchard, affirmait, lors de son allocution au Sommet de la jeune entreprise du Québec, le 22 novembre dernier que, et je cite encore une fois: «Le gouvernement conservera intacte sa préoccupation envers l'entrepreneuriat jeunesse dans le cadre de la mise en place des centres locaux de développement, les CLD. L'accompagnement des nouveaux entrepreneurs constituera plus que jamais pour nous une priorité dans toutes les régions du Québec, puisque nous voulons poursuivre de façon concrète notre soutien à la relève.» Fin de la citation. Enfin, au dernier Conseil national du Parti québécois, le Comité national des jeunes a présenté une résolution demandant au ministre responsable du Développement des régions de s'assurer que les CLD conservent l'expertise d'aide aux jeunes entrepreneurs.

Devant toutes ces actions, nous serions en droit de penser que la position du gouvernement est claire quant à l'importance de préserver un mandat et une ressource jeunesse dans les CLD du Québec. Pourtant, au plan local, rien n'est moins clair. Les échos circulant dans les secrétariats au développement des régions partout au Québec annoncent clairement la disparition des programmes SAJE et Jeunes Promoteurs et l'absence de protection du mandat jeunesse, et ce, dès le 1er avril 1998. Vous comprendrez donc que chaque milieu compose avec l'information dont il dispose. Or, l'information dont il dispose actuellement est qu'il est libre de se doter d'un mandat jeunesse ou non, et la même chose s'applique aussi pour la ressource jeunesse.

Au risque de se répéter, il nous apparaît inconcevable qu'une somme de 10 200 000 $, soit 15 % du budget total alloué aux CLD, provienne des programmes jeunesse et qu'aucune directive ne soit donnée aux différents milieux locaux quant à la priorité qu'ils doivent donner à l'entrepreneurship jeunesse. En conséquence, pouvez-vous aujourd'hui, M. Chevrette, confirmer des moyens que vous comptez utiliser pour vous assurer du maintien des services envers les jeunes entrepreneurs à l'intérieur des CLD? Et pouvez-vous confirmer que les sommes provenant du programme Jeunes Promoteurs, soit 4 500 000 $, seront disponibles sous la même forme et aux mêmes conditions qu'auparavant, et ce, à compter du 1er avril 1998? Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Leclerc. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Merci, Madame, messieurs. Tout d'abord, j'ai annoncé, je crois que c'est il y a 15 jours – je ne suis pas certain des dates, là, je n'ai probablement pas assez de dossiers – un certain lundi matin, que je réclamais pour les jeunes et pour les femmes une représentativité équitable. C'est à peu près les termes que j'ai utilisés, si vous avez eu la chance d'écouter. J'ai réitéré ces propos ce matin à l'ouverture de la présente commission parlementaire. J'ai également ajouté à peu près dans toutes les questions que j'ai eues depuis le début que l'entente de gestion me donnait suffisamment d'outils pour négocier une protection minimale quant au secteur jeune, parce qu'il y a une entente de gestion à conclure avec chacun des CLD.

(16 h 30)

Deuxièmement, mes collègues ministres m'ont demandé la protection d'enveloppes dédiées, ce à quoi j'ai répondu oui – d'enveloppes protégées, non pas dédiées mais protégées – au Conseil des ministres et au caucus des députés. J'ai fait plus que ça, à part ça. Pour éviter la surenchère, j'ai proposé à M. Cauchon l'intégration des enveloppes de développement économique, l'intégration des personnels des SADC en plus. Et l'intégration, je n'ai pas proposé une sélection, j'ai proposé une intégration pour éviter des dédoublements, de un, utiliser l'expertise puis les compétences qu'il y a là, de deux – parce que vous savez très, très bien qu'il y a des compétences réelles, là – et, troisièmement, éviter des chevauchements, des dédoublements, puis avoir une politique cohérente au niveau de chacun des CLD pour qu'on tire dans le même sens.

S'il faut que l'on fasse des enveloppes protégées parce qu'elles s'adressent à une clientèle, on fera des enveloppes protégées. Je suis ouvert à toute négociation. S'ils ont été capables d'en conclure pour la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick puis qu'on prend 25 % de notre argent tout le temps, on doit être capable de négocier, nous autres aussi, une entente de développement économique régional encore plus poussée qu'on fait ailleurs, puisqu'on offre même l'intégration des personnels. Donc, des fois, on se désole en se regardant, mais c'est en se comparant qu'on se trouve pas pire. Je trouve qu'on a fait un bon millage de ce côté-là.

On va confirmer par écrit les échanges qu'on a eus et par la voie de la négociation entre M. Brassard, le ministère des Relations intergouvernementales canadiennes, et moi-même, nous allons le proposer formellement. Nous espérons d'ailleurs avoir des appuis de groupes comme le vôtre pour l'intégration des personnels, pour l'intégration des enveloppes et qu'on cesse les guerres de drapeaux et que ce soit le drapeau des régions qui flotte au niveau du développement économique local et régional.

C'est ce que j'ai déjà dit à Rivière-du-Loup, et je l'ai réitéré à plusieurs reprises, mais à mon point de vue, c'est de la très petite politique que de procéder à du dédoublement, à des chevauchements. Le fédéral donne pour 12 000 000 $ présentement dans 70 structures, 12 000 000 $ de gestion; nous, on avait 400 structures pour à peu près 85 000 000 $, 86 000 000 $ en frais de gestion. Ce qu'on propose, tout en gardant... c'est accréditer 120 structures – vous le savez, ou à peu près 120 structures – mais en gardant l'expertise.

Puis à l'article 13.1, je crois, du projet de loi, vous allez voir que l'objectif, c'est précisément de réduire le nombre de structures. Mais il y a bien des façons de réduire. Ça peut être en intégrant une structure qui rend service ou bien en sous-traitant avec; il y a bien des façons. Dans votre cas, vous êtes presque tous intégrés aux CDE, aux corporations de développement économique, donc ça ne crée aucun malaise de transformer la Corporation de développement économique en CLD. Je ne vois pas vraiment de problème. Je comprends l'inquiétude, là, mais je ne vois pas le problème en ce qui me concerne par rapport aux engagements pris, par rapport aux balises que je donne et aux poignées qui me restent dans l'entente de gestion puis dans l'accréditation des CLD. Je pense qu'on a suffisamment d'outils pour correspondre à vos demandes et à vos aspirations. En tout cas, c'est ma conviction au stade où j'en suis.

J'ose espérer qu'on pourra en plus – je vous le dis comme je le pense – ajouter une entente de développement régional et qu'on pourra – je l'ai suggéré tantôt à l'Alliance des manufacturiers québécois – transformer une forte partie d'argent consacré aux mesures passives qui émanent de l'entente fédérale-provinciale, la PAMT – bien, je pense que vous étiez ici, dans la salle, quand j'en ai parlé à M. Ponton, tantôt – convertir ça en mesures actives pour faire une création d'emplois, et je pense qu'il pourrait y avoir des critères discriminatoires positivement, quand on parle de ça, pour jeunes chômeurs ou jeunes assistés sociaux. En tout cas, regardons ça puis je suis prêt à travailler très fort dans ce sens-là.

C'était un commentaire. Quant à vos remarques, je les prends, j'avais déjà lu L'exode des jeunes , donc j'ai suivi assez vos... Tout politicien qui veut rester jeune doit vous suivre de temps en temps; j'ai essayé de demeurer jeune et de vous suivre. Donc, je vous remercie infiniment, je vais laisser plutôt la chance à mes collègues de questionner. Je vous remercie du travail que vous faites et de la détermination que vous montrez.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Richmond.

M. Vallières: Je vais d'abord vous remercier de votre présentation. J'aurais quelques questions de précision par rapport à ce qu'on retrouve à l'intérieur de votre mémoire, qui, il faut bien le dire, dresse un portrait assez réel de ce qui se passe en région au plan du chômage, chez les jeunes plus particulièrement, et d'un document qui traite de l'exode des jeunes des centres urbains, qui, à mon avis, devrait être une bonne source d'inspiration pour le gouvernement à l'intérieur des actions qu'il veut bien se donner pour s'adresser directement à cette problématique de la jeunesse dans les régions.

Quand je regarde ce qu'on retrouve à l'intérieur du projet de loi, en tout cas pour un et pour mes collègues qui se retrouvent alentour de cette table, on a besoin de connaître votre point de vue de façon un peu plus détaillée sur, par exemple, comment vous voyez l'installation d'un guichet multiservices à l'intérieur de chacune, parlons des MRC, parce qu'on parle beaucoup des centres locaux de développement, quand on sait que les SAJE existent, les carrefours jeunesse existent, les SADC existent, bientôt les CLD existeront. Comment vous voyez qu'on puisse opérationaliser ce qui est présenté à l'intérieur du projet de loi en tenant compte de ces diverses ressources et en nous permettant d'être efficaces face aux objectifs que vous poursuivez comme organisme et qu'on poursuit comme société, c'est-à-dire qu'on veut garder nos jeunes en région puis on veut qu'il y ait de l'emploi? Alors, comment vous voyez cette créature qui est la création d'un guichet multiservices à l'intérieur de vos préoccupations?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Leclerc, M. Philibert. M. Leclerc.

M. Leclerc (Stéphane): Ce qui est clair, c'est qu'actuellement, ce que je pense, les CDE, les corporations de développement local, sur le terrain vont devenir l'opérationalisation des CLD. À ce titre-là, j'ai mentionné que 80 % des SAJE sont déjà intégrés dans les corporations. Donc, on part du principe que le SAJE fait déjà partie du CLD, puisqu'il fait partie de la corporation. Pour ce qui est des carrefours jeunesse-emploi, c'est différent; ils ne font pas partie des CLD comme tels, ils font partie d'une enveloppe particulière au niveau des CLE. SADC est évidemment une problématique, à mon sens, parce que dans certains secteurs les SADC cohabitent avec la corporation de développement. Donc, évidemment, là je vois effectivement une problématique qu'on aurait intérêt à régler afin de...

À mon avis, le seul accroc qu'on va pouvoir avoir, c'est au niveau de la présence à la fois des SADC et des CLD qui ne peuvent pas cohabiter comme tel actuellement. Autrement, les SAJE, même ceux qui ne sont pas intégrés, peuvent fonctionner, comme l'a dit M. Chevrette tout à l'heure, soit à l'intérieur du guichet unique ou par entente de services; ils pourraient être situés à l'extérieur et pourraient avoir des références. Mais je ne pense pas que ce soit très problématique sur le terrain, l'opérationalisation des CLD.

M. Vallières: Bien. Quand vous parlez d'un pourcentage de 15 % de l'enveloppe de 60 000 000 $ qui provient des programmes Jeunesse, vous parlez du programme Jeunes Promoteurs, j'imagine, que vous avez converti...

M. Leclerc (Stéphane): Jeunes Promoteurs, 4 500 000 $ et SAJE, 5 700 000 $.

M. Vallières: Bien. Quand vous nous présentez votre mémoire, vous nous dites que vous aimeriez qu'il y ait un siège directement réservé aux jeunes sur les centre locaux de développement. Est-ce que pour vous – parce que tantôt je questionnais d'autres organismes et on me disait que normalement la dynamique du milieu va faire en sorte qu'on va retrouver des jeunes qui vont être sur les conseils d'administration – est-ce que pour vous c'est très important que la loi, comme telle, prévoie cette présence sur les conseils d'administration et... Parce que je tiens à vous l'entendre dire puis qu'on le précise, parce que le ministre tantôt qui a pris la parole pourrait s'engager. C'est bien clair que le gouvernement peut, dans une loi, s'engager à vous faire cette place que vous demandez. D'ailleurs, le ministre nous dit qu'il serait prêt à régler ça, qu'il va avoir du pouvoir par le biais des ententes de gestion; donc, il est prêt à le faire indirectement. Mais est-ce que ça vous suffit ou est-ce que vous tenez absolument à ce que ce ou ces sièges-là vous soient réservés et que ce soit inscrit dans la loi que nous allons voter?

(16 h 40)

La Présidente (Mme Bélanger): M. Philibert.

M. Philibert (Michel jr): Bien, moi, j'ai pris acte de ce que le ministre a dit. Mais c'est sûr que le Conseil préférerait que ce soit dans la loi, clairement. Parce que, vous savez, quand on a rencontré la centaine de jeunes, que l'on s'est promené en région, on a été les écouter, la première chose qu'ils nous disent, c'est: On n'a pas l'impression qu'on a de l'écoute, on n'a pas l'impression qu'on a notre place parmi les décideurs. Ils nous ont dit – puis ça vous devez le savoir dans toutes vos régions: Les jeunes ne font pas partie du club sélect qui va siéger sur les CLD, qui siège sur les CRD, qui siège sur le conseil d'administration de la caisse populaire, qui siège... Ce cercle fermé là ou cette petite gang qui siège aux différentes instances, les jeunes n'ont pas accès à ces postes-là, n'ont pas accès à un siège pour exprimer ce qu'ils vivent, ce qu'ils ressentent, puis exprimer aussi leurs besoins. Donc, les jeunes nous ont dit ça à nous.

Et, nous, on trouve ça extrêmement important que les régions – et puis même à un autre niveau – que le gouvernement du Québec donne un exemple que, pour lui, la jeunesse dans les instances de décision, c'est important. Donc, on voudrait que cet exemple-là soit transmis aux préfets des MRC, aux maires des municipalités, pour qu'on donne une importance aux jeunes, qu'on puisse les écouter, les entendre.

Moi, je suis convaincu que, si ces gens-là s'associent aux jeunes... On ne parle même pas de partenariat, parce qu'un partenaire, c'est distant, mais un associé, c'est drôlement proche. Donc, quand les gens vont s'associer aux jeunes, ils vont voir leur dynamisme, leur courage, leur force, leur ténacité. Nous, on fait le pari que le développement des régions, la revitalisation des régions, elle va se faire avec les jeunes et surtout par les jeunes.

M. Vallières: Croyez-vous que la création d'un ministère des Régions, comme proposée dans le projet de loi, apporte quelque chose de nouveau dans la problématique pour la solution des problèmes qu'on connaît dans le domaine jeunesse dans les différentes régions du Québec?

M. Philibert (Michel jr): On ne s'est pas vraiment penché sur la création d'un ministère comme tel. Je vais vous dire: Ce n'est pas un ministère qui va améliorer le sort des jeunes. Je ne pense pas. Mais selon nous, je pourrais vous dire que ça prend, pour les régions, une structure qui va être assez souple, une structure qui ne sera pas mur à mur, qui va prendre une certaine couleur régionale. Donc, est-ce que c'est un secrétariat, est-ce que c'est un ministère? Le Conseil ne s'est pas penché vraiment sur cette question-là.

M. Vallières: Iriez-vous jusqu'à dire qu'on devrait fixer des objectifs de création d'emplois par clientèle, dont la clientèle jeunesse, par région?

M. Philibert (Michel jr): Ça, c'est très difficile. C'est très difficile de faire ça. Je pense que les partenaires, quand ils vont... C'est peut-être de se donner des objectifs très élevés. Par contre, sans se donner un objectif de création d'emplois par clientèle, moi, je vois très bien peut-être les régions se doter d'une politique jeunesse régionale pour pouvoir prendre un certain leadership, pour s'assurer que les jeunes sont entendus, que les jeunes ont leur place, que les jeunes vont recevoir les services qui vont les concerner. Peut-être que les régions... Sans donner un objectif de création d'emplois, au moins se donner un bon objectif de réaliser une politique jeunesse. C'est déjà un très grand pas que les régions pourraient faire.

M. Vallières: Est-ce que je me trompe en disant que, suite à ce que vous nous avez dit aujourd'hui, vous subissez comme une grande crainte qu'avec l'introduction des structures qui sont proposées l'influence, la présence de l'élément jeunesse dans les différentes régions pourrait être remise en cause? On sent une inquiétude chez vous que vous pourriez ne plus être là ou presque plus être là, que vous ressortiriez moins présents, moins forts de l'exercice avec les structures qui sont proposées que ce qui existe présentement.

M. Philibert (Michel jr): Les SAJE vont compléter la réponse après moi. Ce qu'on sentait, nous, justement, c'est que, s'il n'y a pas d'enveloppes protégées d'argent qui étaient dévolues à la jeunesse, oui, la jeunesse va perdre quelque chose. On craignait que les CLD englobent les SAJE sans aucune protection au mandat jeunesse.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Leclerc, vous voulez compléter la réponse?

M. Leclerc (Stéphane): Bien, c'est que, effectivement, on avait des craintes parce qu'on prend 10 200 000 $ dans deux programmes jeunesse, on les envoie dans le CLD puis on dit que c'est les milieux qui décident à partir de ce moment-là. Moi, je pense qu'on a à se sentir menacé, effectivement.

L'autre élément, c'est que l'écho qu'on a aux plans local et régional est différent un peu de l'écho qu'on a de Québec, de dire que les mandats sont protégés et que les enveloppes sont protégées. Les secrétariats au développement des régions ne nous disent pas ça actuellement, et chacun des milieux qui font actuellement leurs projets de CLD n'ont pas cette information-là comme quoi les mandats sont protégés. Alors, ce qui arrive actuellement, comme je l'ai mentionné, c'est qu'il y a des milieux où ils élaborent des projets de CLD en n'ayant pas un mandat jeunesse ou en ne réservant pas une enveloppe jeunesse. Donc, c'est dans ce sens-là que, oui, on a à se sentir menacé; on a des réponses qui semblent être claires au niveau de Québec, du gouvernement, mais on n'a pas les ramifications qui se rendent au plan local pour signifier cette intention claire de ce gouvernement-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci.

M. Vallières: Bien, Mme la Présidente, ça confirme certaines appréhensions que nous avons de la mise en place de certaines structures localement avant que le législateur ne se soit prononcé. On a obtenu toutes sortes de précisions de bien des natures, et j'ai à quelques reprises – et je ne le dis pas méchamment au ministre – indiqué au ministre, localement, que la mise en place des structures se fait dans une certaine confusion. Et c'est ça que je voulais dire, confusion, imprécision, puis il y a de l'inquiétude qui se crée, que ce soit un manque d'information ou autre, mais il demeure qu'il y a des gens qui sont comme embrigadés dans l'éventualité d'une structure sans avoir la réponse aux questions fondamentales, dans certains cas, qu'ils se posent.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Leclerc.

M. Leclerc (Stéphane): C'est un élément important parce que, effectivement, dans la mesure où Québec mentionne qu'il y a un mandat clair au niveau des jeunes et qu'il y a des enveloppes protégées, si on pense que les échéances pour déposer les projets de CLD c'est au mois de janvier, ça serait le temps que les milieux le sachent pour qu'ils puissent en tenir compte dans l'élaboration de leurs projets.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Je vais répéter tout simplement et le plus calmement du monde ce que j'ai dit. Vous êtes à 80 % intégrés dans les corporations de développement économique. Dans 95 % des cas, ça va devenir des CLD. D'avoir au moins pour 80 % des cas qui sont protégés, c'est un minimum, ça.

Deuxièmement, j'ai dit qu'il y aurait une enveloppe protégée et j'ai dit qu'on avait une entente de gestion en plus et j'ai dit que j'ai un pouvoir d'accréditation en plus. Je pense que, à part d'une ceinture puis des bretelles... On peut bien essayer de gonfler un peur artificielle. Moi, des peureux de corneilles, je mettais ça dans le jardin pour ne pas que les corneilles viennent manger les graines. Mais, après que j'aie sorti ça du jardin par deux, trois assiettes d'aluminium, on avait la paix. Il ne faut pas amplifier les choses quand on a des outils. Par contre, je reconnais que, au départ, on puisse avoir certaines craintes, parce qu'on nage dans le neuf, on taille dans le neuf. C'est évident.

Puis il y en a qui font des luttes de pouvoir dans ça, vous le savez comme moi, sur le terrain. Vous avez vu des commissaires industriels vouloir attitrer le jeune, vouloir attitrer le travailleur, vouloir attitrer l'institutionnel, vouloir attitrer le représentant du monde coopératif. Je suis obligé d'écrire, leur dire: Non, vous allez respecter les collèges électoraux. Après ça, il y en a d'autres. Ce n'est pas le commissaire industriel qui s'est essayé, c'est le préfet. Bien là, j'ai dit: Le préfet non plus. Donc, ma sous-ministre a écrit au commissaire industriel puis, moi, j'ai écrit au préfet. Puis on est rendu à 79 questions qui rentrent tous les jours. On répond massivement aux questions pour essayer de clarifier, dégonfler des ballounes, enlever des peurs. Comme, par exemple, hier, on me dit que le commissaire industriel de la région de Thetford, de Frontenac, disait au monde que j'étais contre le communautaire. C'est en toutes lettres dans ma politique puis dans le projet de loi comme étant un siège minimum puis un groupe qui doit être là pour l'économie sociale.

(16 h 50)

Il va y avoir des peddleurs qui vont charrier toutes sortes de faussetés. Tout ce que je demande aux citoyens puis aux groupes structurés, c'est de questionner. On va répondre calmement. C'est toujours emmerdant de vouloir donner le pouvoir aux forces vives d'une région. Il y a des pouvoirs établis qui ont très peur de ça. Sauf que, quand on se fait élire avec l'engagement électoral de réaliser une régionalisation, de déconcentrer pour que les gens se responsabilisent puis se prennent en main, il va falloir accepter de facto que ce monde-là brasse des idées, fasse des arbitrages entre eux, surtout si on dit qu'il n'y a pas de modèle unique, qu'il n'y a pas de mur-à-mur. C'est au monde aussi à se mousser, hein? J'espère que vous allez pousser dans le dos des jeunes pour qu'ils aillent au comité provisoire, qu'ils aillent dire ce qu'ils ont à dire et qu'ils n'aient pas peur de dire ce qu'ils ont à dire, et, s'ils ne sont pas écoutés là, de se faire écouter à d'autres niveaux, comme vous avez commencé à le faire aujourd'hui. Moi, je n'ai pas peur de ça. La peur d'avoir peur, ça paralyse un cerveau, ça. Ayez peur un petit peu, mais pas au point de vous laisser paralyser le cerveau.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député d'Orford.

M. Benoit: M. Philibert, on apprenait vendredi qu'au Québec... La SQDM nous faisait part que chez les jeunes...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député d'Orford, ça me prend le consentement des membres étant donné que vous n'êtes pas membre de la commission.

Une voix: ...

La Présidente (Mme Bélanger): C'est beau? L'alternance. Alors, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Merci, Mme la Présidente. On apprenait dans le bulletin de la SQDM, vendredi, que chez les 15-24 ans il y a 16 000 jeunes de moins qui travaillent aujourd'hui qu'il y en avait il y a un an, au Québec. Vous qui en êtes, à quatre ans d'expérience comme président du Conseil permanent, pourquoi le gouvernement a tant peur de vous assigner une place claire, nette? Là, j'ai été invité, moi, sur deux MRC – la troisième doit rentrer, j'imagine, d'une journée à l'autre, peut-être aujourd'hui; dans mon cas, je sais que le ministre va être dans notre région jeudi – et dans aucune des deux invitations où j'ai... D'abord, il n'y en a pas une qui ressemble à l'autre, ça, c'est évident. Dans un cas, il n'y aurait à peu près aucun député; dans l'autre, il y en aurait, etc. Mais dans les deux cas que je peux voir chez nous, les jeunes, le mot n'est même là. Je veux dire, il y a des collèges électoraux pour tout le monde et son père, mais je ne vois nulle part le nom des jeunes. Le ministre a beau me dire: Par ricochet et entente, comment ça se fait qu'il y en a que ça va être si simple d'être là et qu'il y en d'autres ça va être si compliqué?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Philibert.

M. Philibert (Michel jr): Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il n'y a pas de réflexe encore d'ancré, puis de dire: Ah! On va mettre un jeune là, on va amener un jeune avec nous, on va travailler sur notre relève. Ce n'est pas un réflexe que je sens encore, qui est bien implanté au Québec. Et c'est ça dans toutes sortes de domaines, et puis ça, on l'a vu, on l'a vérifié encore dans nos consultations dans les régions où les jeunes nous le disaient, qu'ils se cognaient le nez sur des portes closes.

Donc, ça, ça a toujours été... En tout cas, ça fait quatre ans que je suis président du Conseil permanent de la jeunesse, ça fait à peu près 10 ans que le Conseil existe et ça fait à peu près 10 ans que le Conseil demande à tout le monde de faire une place pour les jeunes, de s'assurer qu'on s'associe à des jeunes; c'est un message qu'on répète depuis 10 ans, qu'on va répéter probablement... que mes successeurs vont encore répéter. Il vous reste encore quelques années à votre mandat; donc, les successeurs vont encore le dire. Mais ce n'est malheureusement pas un réflexe. Et puis je pense que le gouvernement doit donner l'exemple, doit prendre l'initiative et peut-être le montrer, et c'est pour ça que... C'est ce que je vous répondrais. Mais ce n'est peut-être pas de la mauvaise intention, mais ce n'est pas un bon réflexe.

M. Benoit: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saguenay.

M. Gagnon: Mme la Présidente, quand on regarde les mandats que le CLD aurait, soit l'élaboration du plan d'action en matière d'économie, en matière d'emploi, en matière de soutien à l'entrepreneuriat, et qu'on compare ces mandats-là avec les mandats des CJE, comment à votre point de vue l'arrimage devra se faire entre les CJE et l'avènement des CLD?

M. Leclerc (Stéphane): C'est une très bonne question. Au niveau des SAJE, la problématique que l'on vit, c'est qu'on nous demande de faire partie d'un guichet unique entrepreneurship et, d'un autre côté, sur le terrain, on a un guichet unique jeunesse qui n'est pas à la même place. Évidemment, nous, la position qu'on a, c'est de dire: Dans la mesure où on protège les mandats à l'intérieur des CLD, je pense que les SAJE ont leur place à l'intérieur des CLD tout en collaborant étroitement avec les CJE, comme ça se fait dans plusieurs régions du Québec.

Là où effectivement j'apporte une nuance, c'est de dire: Si, à l'intérieur des CLD, on ne prévoit pas de protection claire du mandat, est-ce qu'il y aurait lieu à ce moment-là de rapprocher les SAJE des carrefours plutôt que des CLD? Ça serait une bonne question, mais je n'ai pas la réponse actuellement.

M. Chevrette: Il y en a un de fusionné, un SAJE avec un CJE, «c'est-u» dans mon coin ou quelque chose du genre?

M. Leclerc (Stéphane): Effectivement, à Berthier, Joliette, les SAJE font partie du carrefour jeunesse-emploi et non du CLD. Physiquement parlant, on s'entend.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): T'as pas fini, excuse; il n'a pas fini. Mais attends une minute, là. Encore du temps? O.K.

M. Gagnon: Vous avez fait état des difficultés pour les jeunes d'avoir une place à l'intérieur de cette structure qu'est le CLD. Mais quels sont les mesures et les efforts que vous entendez faire afin de favoriser que des jeunes puissent prendre effectivement leur place dans ces structures naissantes? Je regarde dans une région comme la mienne, le comté de Saguenay, sur la Côte-Nord, j'ai deux MRC; j'en ai une qui est la MRC de la Haute Côte-Nord où c'est peu populeux, nos jeunes sont dispersés dans plusieurs localités, il n'y a pas véritablement de cohésion. Il y a des besoins qui sont criants, qui sont évidents, mais les instruments pour pallier aux besoins qui sont rencontrés, c'est assez difficile d'en prendre le contrôle. Mais, vous, quelles mesures, qu'est-ce que vous entendez faire pour favoriser, soutenir, les jeunes qui désireraient avoir un espace dans ces organisations-là?

M. Philibert (Michel jr): Moi, je vous répondrais que vous avez peut-être un bon mandat à accomplir, d'en trouver un bon jeune, que, si vous êtes au courant de... Vous connaissez bien votre comté, les gens de votre comté, c'est déjà un bon mandat pour vous. Et, deuxièmement, le Conseil étant en lien, lui, avec les 1 500 organismes jeunesse du Québec, c'est évident qu'on va le dire. On va le dire aux organismes jeunesse de faire en sorte qu'il y ait des jeunes sur ces places-là, de faire connaître des candidatures de jeunes. Il y a les réseaux des carrefours qui sont très bien implantés, il y a des tables de concertation jeunesse dans à peu près toutes les régions du Québec. Des jeunes pour siéger sur les instances décisionnelles, il y en a. Il y en a beaucoup. Ce n'est pas les jeunes qui manquent, c'est les places qui manquent. Ça, moi, je veux vous rassurer, s'il y a des places qui s'ouvrent pour des jeunes, il va y avoir des jeunes pour les occuper, puis des jeunes qui vont être articulés, des jeunes qui vont être dynamiques, qui vont apporter leurs nouvelles façons de faire, puis qui vont pousser un petit peu dans le dos de ceux qui voudraient ne pas être assez mobiles.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Leclerc, en complément de réponse.

M. Leclerc (Stéphane): Moi, effectivement, ce qu'on a constaté au niveau de l'Association, c'est que les jeunes, c'est difficile d'avoir une représentativité, qu'un jeune soit représentatif de tout le monde. Nous, on est présent partout au Québec. Vous pourriez vous servir du réseau des SAJE pour créer justement et pour solliciter la présence des jeunes au sein des CLD. Alors, chez nous, par exemple, le CLD prévoit une table jeunesse qui nommera un représentant jeunesse au sein du CLD. Il y a plein de mécanismes possibles, j'imagine, dans l'élaboration des CLD, des solutions pratiques sur le terrain qu'on pourrait appliquer.

Au niveau du réseau des SAJE, on a un réseau qui est très efficace. On pourrait effectivement suggérer aux milieux, aux différents SAJE, de prendre un leadership au niveau des jeunes pour assurer la présence des jeunes aux CLD. Encore faut-il qu'il y ait une place à l'intérieur du CLD.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Il reste trois minutes.

M. Béchard: Oui. Merci, Mme la Présidente. On a assisté, je pense, à beaucoup de beaux engagements de la part du ministre cet après-midi là-dessus. Moi, je me souviens très bien, le 17 octobre, justement dans le communiqué où le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie disait qu'il protégerait les sommes, et tout ça, qu'il continuerait, sauf qu'il ne disait pas nulle part le montant comme tel qu'il allait protéger. Moi, il y a encore des gens dans mon comté qui m'appellent régulièrement pour savoir: Bien, il a beau dire qu'il le protège, mais le montant est-il là?

Moi, tantôt, il y a une parole du ministre du développement des régions qui m'a vraiment accroché. C'est qu'il a dit, à un moment donné: J'ai démontré clairement que j'étais pour les groupes communautaires; je réserve une place, clairement, dans la loi pour les groupes communautaires. C'est pas juste de demander une place pour demander une place, je pense, parce qu'il y a beaucoup d'inquiétudes sur la façon dont tout ça va tomber en place, sur la façon dont les structures vont s'organiser entre elles, vont s'amalgamer entre elles. Moi, je pense que, si le ministre du développement des régions était pour les jeunes, ce serait si simple de prendre l'engagement, et surtout de poser le geste de l'inscrire à l'article 10...

Une voix: C'est ça.

(17 heures)

M. Béchard: ...qu'il y aura une place réservée pour les jeunes. Et en ce qui a trait à la représentativité des jeunes, moi, je fais parfaitement confiance au Conseil permanent de la jeunesse, aux CJE, aux SAJE, aux structures qui sont là pour trouver une personne dans chaque région qui va représenter les jeunes de cette région et qui va donner une voix aux jeunes sur cette instance régionale qui est des plus importantes.

Est-ce que ce type d'engagement là de la part du ministre serait, pour vous, satisfaisant, mais vraiment dans la loi? Deuxièmement, est-ce que, pour vous, ce n'est pas le seul moyen de s'assurer que ce qui concerne les jeunes, bien les jeunes vont avoir leur mot à dire et que ça ne sera pas, je ne dirais pas encore une fois, mais encore des gens qui vont dire: Regardez, ne vous inquiétez pas, on va s'en occuper de vos sommes et on va s'occuper des structures, nous autres, on est bon là-dedans; on va vous rappeler et on va vous dire ce qui va se passer avec? Est-ce que vous seriez d'accord pour que cet après-midi le ministre prenne l'engagement certain de l'article 10, le modifier pour réserver une place aux jeunes, pas uniquement pour le principe, mais surtout pour que les jeunes aient une voix, un pouvoir d'influencer et un pouvoir de rassembler aussi les autres intervenants des CLD autour de leurs idées?

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la réponse va être par un oui ou par un non. Le temps est terminé.

M. Philibert (Michel jr): La réponse, c'est oui. C'est évident.

M. Béchard: Bien compris la question.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on vous remercie beaucoup de votre participation. On va suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 1)

(Reprise à 17 h 2)


Solidarité rurale du Québec

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je demanderais à la Solidarité rurale du Québec de bien vouloir s'approcher à la table. Alors, bonjour, M. Proulx. J'allais dire: Présentez les personnes qui vous accompagnent, mais vous semblez être seul.

M. Proulx (Jacques): Alors, va m'accompagner... Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Ah bon. O.K.

M. Proulx (Jacques): Alors, va m'accompagner M. Pierre Desjardins, secrétaire général à Solidarité rurale. Jacques Proulx, président de Solidarité rurale.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Je pense que ça fait assez souvent que vous venez en commission pour savoir le déroulement de la commission.

M. Proulx (Jacques): Merci. Alors, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, je vous dirai que les ruraux en ont assez de l'improvisation des projets de loi omnibus passés à la vapeur, des convocations arbitraires et sans droit d'appel. Mesdames et messieurs, il vous faudrait trouver comment vous hâter lentement afin de devenir simultanément respectueux et expéditifs simplement parce que le temps vaut le travail particulièrement lorsqu'il est employé à bien faire les choses, à réfléchir, à créer les conditions essentielles à l'éclosion des solidarités et des consensus.

Mesdames et messieurs, malgré la méthode retenue, Solidarité rurale du Québec tenait à vous rencontrer afin de vous présenter son point de vue précis sur le projet de loi n° 171, mais il vous faudra considérer que celui-ci est une portion de notre opinion générale sur la Politique de soutien au développement local et régional rendue publique au printemps 1997.

Cela dit, considérons le nouveau-né, le ministère des Régions. Déjà, son nom invite au questionnement. Après avoir tranché le Québec en secteurs d'activité, voici qu'on le découpe en territoires. Car depuis la première Législature, singulièrement depuis les 50 dernières années, les gouvernements ont modifié la composition de base du cabinet des ministres d'abord pour s'ajuster à l'évolution des choses et à ce que l'on percevait comme un champ d'intervention de l'État. Ensuite, de façon plus technocratique, procédant par familles d'appartenance, selon l'idée que le parti au pouvoir se faisait du rôle de l'État, on a boudiné. On a donc connu les superministères, les ministères d'État, les ministères fourre-tout tel le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie et pourquoi pas également du Tourisme, du Loisir, de l'Éducation, de l'Emploi et de la Concertation. Simultanément ou parallèlement, on a connu les comités interministériels, les comités ministériels permanents dont l'objectif avoué était inlassablement d'harmoniser les interventions de l'État.

Aujourd'hui, fait intéressant, on nous propose un nouveau ministère qui serait, celui-là, non pas responsable d'une activité sectorielle, mais du développement du Québec géographique, un ministère horizontal. Un premier nuage se forme à l'horizon. Le projet de loi plante le local là où les Québécois et les Québécoises placent depuis une génération le régional, avec les municipalités régionales de comté. Or, le projet de loi n° 171 en remet en dessinant au régional un pourtour correspondant au découpage administratif étatique que peu de gens connaissent et auquel personne ne s'identifie.

Pour dire vrai et aller droit au but, Solidarité rurale considère que ce ministère vient tisser une nouvelle toile d'araignée sur le Québec dont le point central est toujours le gouvernement du Québec. Pourtant, on parle de simplifier la machine de l'État, on prétend rationaliser, harmoniser et on complexifie.

À preuve et selon les usages, nous devrions être ici pour vous dire que vous avez omis le rural. Je vous entends déjà me répondre que demain, dans six mois ou l'année prochaine le gouvernement adoptera une loi sur le développement du monde rural parce qu'il souhaite s'adresser plus spécifiquement à cette problématique particulière. Et nous revoilà engagés à découper, sectionner, réduire, isoler, distinguer, singulariser.

Globalement, avec le projet de loi n° 171, nous croyons que le gouvernement fait fausse route ou plutôt qu'il a ouvert une route de campagne entre lui et les autres alors que c'est de l'autoroute de la décentralisation dont le Québec a besoin. Nous ne sommes pas les premiers à le dire. Depuis la publication du rapport Deux Québec en un et des audiences de la commission Bélanger-Campeau, les leaders l'ont répété en ayant la générosité de participer au chantier régions-municipalités et à l'opération Villages prospères.

Alors, si, comme il est écrit dans la Politique de soutien au développement local et régional, le gouvernement adopte une approche résolument locale et régionale parce qu'il est convaincu qu'un Québec fort passe nécessairement par des régions fortes, nous devons vous prévenir que le ministère des Régions n'en sera pas le levier. À l'appui de notre prédiction, nous jugerons de la logique du parti gouvernemental selon laquelle un Québec fort doit disposer de tous les pouvoirs nécessaires à son développement et à son épanouissement, et ce, tout autant pour les pays, les coins de pays que les arrière-pays. Il faut décentraliser, pas décentraliser à la miette ou en désespoir de cause au fur et à mesure des factures impayables ou des dossiers sans issue prévisible comme le chômage ou la pauvreté.

Nous constatons avec inquiétude que l'État québécois a peu de vision d'ensemble. Le parti gouvernemental, sous prétexte d'avoir comme projet collectif, comme projet d'avenir, comme projet de société l'indépendance politique du Québec, gouverne au jour le jour. Au contraire, nous semble-t-il, si on accepte de s'inscrire dans sa logique, il faudrait faire le ménage, tirer un sillon bien droit qui mènerait à son projet et réorganiserait l'État en fonction de ce projet pour qu'il prenne un sens, pour qu'il donne aux Québécois et Québécoises le goût d'oser. Comme en démocratie on n'a pas le droit au silence, au désintéressement, alors, accrochés à nos espoirs, nous poursuivrons pour tenter de vous aider à faire mieux.

Avant de discuter des qualités et des défauts du projet de loi n° 171 et d'un éventuel ministère des Régions, il nous apparaît nécessaire de revenir sur les moments qui ont permis au monde rural, aux ruraux et à leur coalition d'établir un lien plus régulier avec le gouvernement du Québec.

Évitant volontairement de retourner jusqu'en 1991, soit lors de la tenue des États généraux du monde rural, notre chronologie débute avec la tenue à Québec de la Conférence sur le devenir social et économique convoquée par le premier ministre. À cette occasion, nous avions déposé un bilan moins morose que d'autres. Nous avions même nommé et identifié des villages où la prospérité était de retour. Alors, au début de son budget subséquent à la Conférence, le ministre des Finances commandait un rapport sur les villages prospères du Québec et confiait au président de Solidarité rurale la responsabilité de composer et de présider l'équipe de recherche. À la demande du ministre, l'équipe a déposé son rapport avant la tenue du Sommet sur l'économie et l'emploi. Le ministre a jugé bon et nécessaire d'appuyer cette étude par le dépôt lors du Sommet du rapport du chantier municipalités-régions auquel, rappelons-le, nous avions activement participé. Le ministre allait budgétiser son engagement à donner suite à l'ensemble des recommandations de l'opération Villages prospères au printemps 1997.

(17 h 10)

Parallèlement, la Politique de soutien au développement local et régional était rendue publique. La lecture de cette politique nous apprit que le gouvernement constatait l'existence de trois réalités particulières au Québec: la métropole, la capitale et le monde rural. Dans la foulée de ce constat, déjà connu quant à nous, nous lisions dans le livre blanc: «Pour permettre aux milieux ruraux de se faire entendre plus facilement auprès des autorités gouvernementales, Solidarité rurale sera mandatée par décret gouvernemental pour conseiller le gouvernement sur la problématique particulière des milieux ruraux et le développement des communautés en milieu rural.»

Si un protocole conjointement signé établit bien le rôle conseil de Solidarité rurale du Québec auprès du gouvernement du Québec, si le Secrétariat au développement des régions a mis sur pied trois programmes à la disposition du monde rural, comme nous l'écrivions précédemment, du projet de loi n° 171 suinte une ambiguïté qui illustre probablement la confusion qui règne dans les officines gouvernementales.

D'ailleurs, cette ambiguïté se drape dans l'usage de termes génériques et de pluriels mal venus, voire outranciers. À preuve, dès le chapitre premier du projet de loi, on observe que le gouvernement veut se doter d'une vision large et d'une manière d'intervention conséquente. Ainsi, l'article premier, dans ses deux premières lignes, confie au ministre une mission ouverte, englobante, qui malheureusement rapetisse comme peau de chagrin dès le deuxième paragraphe. L'État québécois assimilera-t-il le développement à la seule croissance économique et croit-il vraiment que l'entreprise privée, il va sans dire, peut nous sauver du maldéveloppement dont l'un des effets est le chômage endémique? Pour nous, l'important est non pas de chercher une priorité, mais de considérer la rotativité, le maillage des cibles, des objectifs comme des acteurs.

Malgré cette critique générale à l'endroit du projet de loi, nous encourageons le législateur à maintenir coûte que coûte son intention d'accroître l'efficacité des initiatives visant le développement local et régional en favorisant l'harmonisation, la simplification ainsi que l'efficacité des services. Faisant cela, il répond certes à une supplication de la société civile en plus d'accroître les effets de son action.

Au chapitre II, les membres de la commission auront compris combien nous questionnons le mandat des CLD. Nous laissons aux banlieues, à la métropole et à la capitale le soin de vous expliquer le rôle qu'elles aimeraient confier à cette nouvelle structure, mais, pour les milieux ruraux, nous affirmons qu'il faut retourner à l'opération Villages prospères qui suggérait une vision holistique du développement au gouvernement. D'ailleurs, un mandat élargi plus global induirait une composition sensiblement différente du conseil d'administration.

Plus précisément, nous tenons à porter à votre attention deux difficultés. La première: à chaque fois où l'État central confie un nouveau rôle ou une nouvelle mission aux MRC, il exige plus et mieux. Or, les résultats attendus sont improbables dans l'état actuel des choses, notamment parce que les règles démocratiques en vigueur sont discordantes. En clair, les élus décident à un niveau et acquièrent leur mandat populaire à un autre niveau de l'administration publique. Tôt ou tard, il faudra résoudre cette question de l'élection, en tout ou en partie, des décideurs au sein des MRC. En attendant, les technocrates en mènent large, et ce, sans mandat de la population.

La deuxième difficulté nous apparaît être la participation possible, avec droit de vote et selon un règlement interne, du député. Il nous semble que la mission et le mandat du député se marient mieux avec le rôle que le ministre veut confier au CRD, instance où il siège déjà, rappelons-le. Mais, quelle que soit la décision du gouvernement, la règle doit être transparente et universelle parce que les fonctions et le rôle du député ne peuvent varier d'un comté ou d'un CLD à l'autre.

La question de l'enveloppe. Si nous pouvions discuter des articles de la loi un à un après ces quelques commentaires généraux, nous préférerions discuter de l'enveloppe attribuée au CLD parce que l'argent est souvent le nerf de la guerre.

Aujourd'hui, donc, nous avons à étudier un ministère du développement local et régional pour lequel le Conseil des ministres a, de peine et de misère, réuni 60 000 000 $ de fonds publics qui devront trouver un appariement dans le monde municipal et auxquels on fixe comme priorité de créer des centaines de milliers d'emplois, alors que ces mêmes fonds n'ont pas cet impact actuellement. Nous doutons de la faisabilité et du réalisme de la démarche. Cependant, nous convenons que des fonds dépensés dans et par une structure plus près des citoyens pourraient améliorer les bénéfices, mais certainement pas les décupler.

Les CLD ne changeront pas l'ordre des choses demain matin, d'autant plus que la quasi-totalité des budgets de transfert et des programmes sont toujours de responsabilité gouvernementale. Bien que ne connaissant pas l'ensemble des programmes régionalisables et l'envergure des budgets qui y sont affectés, nous ne croyons pas nous tromper en affirmant que l'enveloppe des CLD est bien mince et que le concept du guichet unique est loin d'être à sa plénitude. Il faudra encore que les contribuables s'adressent à plusieurs ministères. Les CLD sont un premier pas, mais il faudra convenir qu'il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Sans que nous soyons exhaustifs, à l'appui de notre hypothèse, nous croyons qu'il faut soulever les questions et les paradoxes suivants qui ont amené le ministère des Affaires municipales à ne pas décentraliser le programme de subventions aux MRC pour leurs interventions en développement économique, le ministère de la Culture et des Communications à faire de même pour le Programme d'aide aux médias communautaires, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité à s'objecter à la décentralisation et la gestion du Programme d'aide à l'intégration en emploi, alors que la mission essentielle et principale des CLD est la création d'emplois.

La question de l'enveloppe dédiée. Le projet de loi n'en fait pas mention, mais le ministre a annoncé la création d'une enveloppe dédiée concernant la ruralité. Du jargon bureaucratique, nous retenons que certains programmes seront désormais gérés par les CLD, enfin par certains CLD. Une première question: Lesquels et comment?

Si le ministère, d'un côté, reconnaît que des sommes doivent être en priorité dévolues à certaines activités, il devrait prévoir les mécanismes de gestion de ces programmes par les CLD, ce qui n'est pas le cas. Prenons, par exemple, le programme de soutien aux milieux ruraux dont le budget est de 1 600 000 $ par année. Il se divise en trois activités: soit le programme des agents ruraux, 1 000 000 $ par année; le programme de soutien aux initiatives nouvelles, 300 000 $; et celui s'adressant aux étudiants, 300 000 $ par année. Nous savons que le volet initiatives nouvelles est centralisé, que le volet étudiants est géré actuellement sur une base régionale et que le volet agents ruraux ne touchera pas l'ensemble des CLD. Qu'arrivera-t-il de ce programme aux manières de faire multiples et variées, l'année prochaine?

Un autre aspect: la gestion quotidienne de ce programme. Nous savons que, en ce qui concerne le programme des agents ruraux, un nombre important de projets retenus ou acceptés ne répondent pas aux objectifs du programme, que ce programme qui ciblait les petites municipalités a été utilisé par plusieurs MRC pour améliorer ou varier l'offre de leur commissariat industriel.

Les milieux ruraux sont perdants, d'abord, par l'envergure de l'enveloppe budgétaire et, ensuite, par le détournement de fonds vers des missions qui, bien que légitimes, ne répondent pas aux objectifs qui ont prévalu lors de la mise en place du programme. Le monde rural, par sa fragilité et sa dévitalisation appelle plutôt un support financier substantiel et une grande rigueur de gestion.

Les recommandations. Nous osons espérer que l'esprit général de notre mémoire pousse les membres de cette commission à envisager une révision importante du projet de loi. Cette révision devra obligatoirement tenir compte de deux aspirations du monde rural: faire partie de l'avenir du Québec, même si cela impose de faire autre chose autrement, et connaître une décentralisation des pouvoirs publics.

Plus précisément, nous souhaitons que l'intention du législateur de simplifier et de faciliter les relations entre l'État et le peuple soit globale et qu'il évite de s'adresser particulièrement à l'entrepreneuriat, parce que l'harmonisation, la simplification et l'accessibilité sont des ingrédients essentiels à l'objectif de cohérence des actions gouvernementales recherché par l'État.

Nous encourageons le ministre à persévérer dans sa volonté d'imposer aux CLD des conseils d'administration représentatifs des milieux de vie. Il faudra bien convenir que les fonds alloués à cette nouvelle structure sont des fonds publics provenant tantôt de nos impôts, tantôt de nos taxes. En conséquence, ils doivent être administrés par les délégués de la société civile.

Si le gouvernement devait identifier les CLD ruraux en accordant à certains la gestion de ressources humaines et financières spécifiques, il faudrait que les organismes voués au développement rural puissent être représentés aux conseils de ceux-ci. Dans le même esprit, les organisations professionnelles liées à l'agriculture, à la forêt et à la pêcherie devraient siéger aux CLD où ces activités sont déterminantes sur la vie des communautés.

Certains programmes de certains ministères doivent être inclus, de gré ou de force, à l'enveloppe des CLD, sans quoi les premiers jours de cette nouvelle structure seront pénibles et risibles. L'argent ne peut pas rester à Québec et les mandats être traités sur le territoire.

En conclusion, dans l'esprit de ce qu'il a défendu lors de la Cinquième conférence nationale, Riccardo Petrella a écrit: «Depuis le début des années quatre-vingt, j'ai essayé, comme de nombreux autres chercheurs et scientifiques de multiples pays du monde, de mettre en lumière les insuffisances et les dérives auxquelles allait conduire le choix de l'intégration-adaptation de l'économie nationale, subordonnée aux intérêts des entreprises les plus puissantes du pays, à l'économie mondiale laissée aux mains des libres forces du marché. Aujourd'hui, on ne peut plus lier les profondes dévastations qui touchent les fondements mêmes de nos sociétés. L'économie actuelle est en train de nous faire perdre le sens d'être, de faire et de vivre ensemble le sens du bien commun.»

(17 h 20)

À cela, Edgar Morin ajouterait: «Ici, il faut reconnaître l'inanité des trois dogmes de la vulgate économistique:

«L'idée que la croissance économique ne puisse être envisagée que du point de vue économique, alors qu'elle doit être aussi envisagée de plusieurs points de vue non économiques;

«L'idée que le bien-être et la prospérité sont d'eux-mêmes pacifiants – on cherche toujours des causes économiques aux troubles alors qu'il n'y a, pour les guerres, les révolutions, ni uniquement ni toujours des causes matérielles, mais aussi des causes culturelles, des motivations mythologiques ou religieuses;

«L'idée du développement illimité. Or, nous avons appris qu'au-delà de certaines limites, l'industrialisation produit et va produire des dégradations écologiques menaçant la biosphère et l'humanité dans son ensemble. Nous devons apprendre que le développement lui-même crée autant de problèmes qu'il n'en résout et qu'il conduit à la crise profonde de civilisation qui affecte les sociétés prospères d'Occident.»

Pour ces deux penseurs émérites, les difficultés du monde rural sont intrinsèquement liées à la crise profonde de civilisation qui évolue en Occident. Alors, après y avoir bien pensé, nous croyons que c'est davantage de décentralisation que de développement régional dont le Québec a besoin.

Pour mieux saisir notre affirmation précédente, permettez que nous vous fassions part de notre réflexion quant aux actions et orientations du gouvernement quant au développement du Québec. Contrairement à ceux qui, depuis une décennie, identifient comme un problème de structure les relations entre l'État et les milieux ruraux, nous sommes d'avis que c'est un problème de culture, d'une culture néolibérale que les gouvernements défendent avec acharnement, qu'ils inscrivent à répétition dans leurs objectifs et qui sert de catalyseur à leurs discours.

Si l'entrepreneurship était la solution à tous nos maux, nous comprenons mal que nous souffrions encore. Car, à ce que je sache, la libre entreprise fait partie de notre pacte social depuis la nuit des temps. Mais, au lieu d'examiner d'autres avenues, les gouvernements insistent et poussent plus en avant en invitant l'économie québécoise à s'adapter à la mondialisation des marchés. De ce fait, le gouvernement donne le signal clair que le salut passe par l'efficacité, la concentration, l'intégration, les économies d'échelle, les marchés de gros. Dans cette guerre rangée, oui une guerre rangée car l'économie mondiale est déjà montée sur les barricades, la loi des nombres veut que les petits ensembles disparaissent au profit des grands. L'économie québécoise n'est pas de taille pour cette guerre, elle est mieux adaptée et plus équipée pour la guérilla.

Le choix de cette stratégie induit qu'il faut transformer, occuper les créneaux, faire de la valeur ajoutée. Il faut se donner une personnalité, développer nos particularismes plutôt que de se laisser lessiver par les courants dominants. Pour ce faire, il faudra oser, il faudra permettre à chaque coin du Québec de se développer selon ses ressources, ses particularités.

S'il faut ranger dans des cartables les politiques intégrées mur à mur, il faudra s'assumer, se responsabiliser. Il faudra cesser de se tourner vers les gouvernements pour régler nos problèmes, pour convaincre une multinationale de rester chez nous et de s'enrichir avec notre argent, avec nos ressources tant humaines que naturelles. Il faudra que chacun de nous soit responsable, volontaire, organisé, maître de son destin et non servile, attentiste, dépendant de ce qui se décidera dans les officines secrètes pour des intérêts qui ne sont pas les nôtres. Il faudra que nos institutions nous servent, nous supportent. Et, soyons bien clairs, je ne parle pas ici de l'indépendance politique du Québec, je parle de l'indépendance de mon village, de sa prospérité, de sa capacité à se développer harmonieusement, de la mise en valeur de ses richesses et de l'épanouissement de sa communauté humaine. En somme, il faudrait aller au bout du concept Maîtres chez nous .

Quant au projet de loi n° 171, ce n'est que la création d'un autre ministère qui vient s'ajouter à la vingtaine qui existent actuellement. Il a comme mérite de relever d'une logique différente, il constitue une amorce de réflexion, mais il ne s'attaque pas au problème urgent qu'on a identifié: la décentralisation. Et, comme l'a dit Fernand Dumont lors des États généraux du monde rural, «la première condition pour une décentralisation véritable n'est pas d'abord de l'ordre de l'organisation et de l'administration, elle relève de la culture. Le problème le plus urgent, c'est celui du développement culturel des régions. Car à quoi pourrait bien conduire un réaménagement des structures si les régions se vident de leurs ressources créatrices, si elles sont dépourvues de moyens par lesquels s'affirment des genres de vie, s'alimentent des enracinements, se forment des prises de conscience? Car la culture, c'est tout cela, non pas le décor, mais le préalable de la vie en commun.»

C'est également ce qui nous fait dire et répéter que tant vaut le village, tant vaut le pays. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Proulx. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, M. Proulx, il y a une chose qui est claire, c'est que vous êtes rendus à la décentralisation pure et simple, alors que le gouvernement a clairement indiqué des orientations différentes à ce niveau-là. C'est tout à fait juste le constat que vous faites. Le gouvernement dit: Tant et aussi longtemps qu'on sera dans le régime actuel, une décentralisation forte ferait en sorte qu'on marginaliserait l'État du Québec. Parce que déjà, malgré qu'on ne décentralise pas, le pouvoir central va directement dans des instances, va directement dans des groupes, va directement dans des associations, passe par-dessus la tête de l'État par son pouvoir de dépenser, entre autres, et marginalise déjà l'État du Québec. Imaginez, avec une forte décentralisation, ce qui arriverait. Ça, c'est un choix politique, effectivement.

Mais, advenant que je vous suive sur la voie de la décentralisation, j'aimerais vous entendre. Je vais vous poser quelques questions. Est-ce que vous pouvez me dire si vous parlez de décentralisation directement dans les entités villages qu'on connaît présentement?

M. Proulx (Jacques): Il ne faut quand même pas exagérer, là, mais je pense qu'il faut vraiment apprendre au milieu à se prendre en main et donner le pouvoir graduellement au milieu. Quand je parle des entités villages, il y a des activités que les villages pourraient faire. Mais ne généralisons pas non plus, c'est une appropriation qui doit se faire graduellement. Mais, pour qu'elle se fasse, il faut la partir un jour.

M. Chevrette: Mais c'est parce que vous dites que les MRC constituent des entités régionales. C'est vous qui affirmez dans votre mémoire que la MRC constitue une entité régionale. Puis c'est vrai que ça s'appelle municipalité régionale de comté. Je ne nie pas que le terme «régionale» est... Mais, dans bien des entités régionales, il y a 12 000, 15 000, il y a même en bas de 20 000 personnes dans un bon nombre. Alors qu'on décentralise et qu'on donne un pouvoir financier s'y rattachant, est-ce que vous ne croyez pas qu'il doit y avoir une masse critique pour être capable de se donner une qualité de services et que les entités en bas d'une certaine masse critique sont non viables même dans un contexte de décentralisation?

M. Proulx (Jacques): Je ne suis pas capable d'affirmer ça puis je ne peux pas voir comment on peut affirmer que ces solutions-là soient trouvées uniquement d'une façon comptable. Moi, je pense que, si on apprend graduellement aux gens à faire des choix, à se responsabiliser, à devenir imputables, ils vont décider quels sont les services dont ils ont besoin et qu'ils sont capables de payer. Moi, je n'adhère pas à l'idée qu'on doive décider de tel ou tel service à partir d'une opération comptable. Il faut en tenir compte, je suis d'accord avec vous, il faut payer à quelque part. Mais, pour moi, une municipalité de 15 000 ou 20 000 personnes qui ont priorisé leurs besoins, qui se donnent des besoins en commun, ils vont se les donner. Ça ne veut pas dire qu'ils ne prendront pas entente avec d'autres régionales pour d'autres services peut-être plus dispendieux. Quand on parle de décentraliser, on ne veut pas dire d'établir de nouveaux murs puis de ne rien laisser entrer d'ailleurs.

Encore une fois, je pense qu'on essaie de faire définir par d'autres les besoins du milieu et comment on devrait définir ce besoin-là par le nombre. Je pense qu'on ne change rien de l'ordre des choses, à l'heure actuelle.

M. Chevrette: O.K. Procédons autrement. C'est le milieu qui décide qu'il est capable d'assumer tel service. Le milieu, d'un côté, n'est pas mûr. Comment on procède pour décentraliser le service que le milieu a décidé de se donner, alors que, à côté, ils ne sont pas mûrs, ni en arrière, ni devant, ni de côté, eux autres, isolément?

Je prends un exemple concret que je connais mieux dans mon milieu. Saint-Charles-Borromée, Joliette, est prête à assumer des responsabilités en matière d'eau potable, en matière d'assainissement, en matière de je ne sais pas quoi. Le reste dit non. Ils font la demande, l'État leur décentralise puis ils paient leur service. Est-ce que c'est de même ou si vous auriez une recette à me donner?

(17 h 30)

M. Proulx (Jacques): Vous faites quoi, à l'heure actuelle? Je ne suis pas capable de vous répondre à cette question-là, et vous le savez, M. le ministre. On ne peut pas, à ce moment-ci... Je ne vous ai pas dit qu'on avait toutes les solutions, je vous dis simplement qu'il faut changer la façon dont on a procédé jusqu'à aujourd'hui si on veut arriver au bout du chemin à une véritable décentralisation. Vous connaissez très bien notre opinion sur ça. On ne dit pas que demain matin tout, il faut qu'il soit décentralisé, mais amorçons le virage, il est important d'amorcer. Et, moi, je vous repose la question que vous m'avez posée: Vous faites quoi? On fait quoi à l'heure actuelle quand ces besoins-là s'expriment?

M. Chevrette: Bon. Au moment où j'étais ministre des Affaires municipales, j'ai entamé la phase décentralisation. On s'était entendu, on a même signé – le 14 septembre 1995, je crois – une entente pour décentraliser 155 000 000 $ de responsabilités auprès des municipalités. À ce que je sache, à date, ils s'entendent sur 3 000 000 $. Ils ne s'entendent pas sur le niveau. Est-ce que vous croyez que la décentralisation doit se faire nécessairement au niveau municipal et nécessairement avec les élus municipaux? Sinon, avec qui?

M. Proulx (Jacques): Ça va se faire avec l'ensemble des leaders du milieu, des intervenants du milieu, avec l'ensemble des gens qui ont des responsabilités dans l'ensemble des secteurs d'activité. Elle ne se fera pas uniquement avec les municipalités, avec les conseillers municipaux. Ce n'est pas ça. C'est une appropriation par le milieu et l'appropriation par le milieu, elle ne peut pas se faire uniquement par sept ou 12 conseillers et maires du milieu.

D'ailleurs, on appuie, sur la question des CLD... Qu'est-ce qu'on trouve intéressant dans les CLD? C'est justement un lieu où on va mettre de façon très claire l'ensemble des leaders, l'ensemble des intervenants et les obliger – parce qu'on les oblige – à s'entendre. Alors, à mon avis, non, ça ne revient pas juste à eux. Bien, non. D'ailleurs, vous venez de donner une preuve que ça n'ira pas vite à ce rythme-là.

M. Chevrette: Si je pose la question, c'est parce que dans toutes les consultations à travers le Québec les gens ont dit: Bien, il faut que ça soit des élus, sinon vous ne décentraliserez pas. Moi, j'ai toujours prétendu qu'il y avait deux types de décentralisation: une décentralisation politique puis une décentralisation administrative aussi. Moi, je prétends que ça se fait, ça aussi. Puis tu peux avoir une imputabilité d'élus, comme tu as une imputabilité de sous-ministre de la fonction publique présentement. Donc, il doit y avoir une imputabilité administrative qui existe, puisqu'on se fait servir à toutes les sauces: Rendez imputables vos sous-ministres, puis on n'a pas de trop de problème, ou on parle de subsidiarité. Vous savez très, très bien, il y a des gens qui ou bien délibérément mêlent des concepts ou ne veulent pas que la décentralisation puisse se faire effectivement par autre chose que par leur canal politique. Et, si le politique ne veut pas, tu ne peux pas décentraliser.

Moi, je suis d'accord avec vous qu'actuellement on pourrait même procéder à la décentralisation, puisqu'on a déjà au moins 150 000 000 $ pour commencer à se faire la main. On a la possibilité de prendre goût à la responsabilisation avec les CLD, de commencer à gérer ses propres affaires dans des domaines. Puis je suis sûr que ça développe un appétit beaucoup plus grand, moi, je suis sûr de ça, personnellement assuré de ça. Sauf que vous allez m'expliquer pourquoi on frappe ce mur ou cette volonté de contrôle exclusif par un seul type de clients, puis c'est la structure municipale. Expliquez-moi ça.

M. Proulx (Jacques): Bien, écoutez, vous êtes encore mieux placé que moi pour l'expliquer, vous avez été même ministre des Affaires...

M. Chevrette: Je ne suis pas sûr, des journées qu'il y a... je ne suis pas sûr.

M. Proulx (Jacques): Non. Je n'ai pas d'explications plus concrètes que celles qui existent à l'heure actuelle. On vit pareil comme vous autres dans ces milieux-là. Mais, moi, je pense que c'est parce qu'on a possiblement eu une approche à mon avis qui a donné l'impression, à tort ou à raison, de pelleter dans leur cour – sans vouloir prendre totalement leur défense – que de devenir de véritables gestionnaires de programmes et de graduellement s'approprier davantage leur milieu. Je pense que c'est ça.

Parce que vous allez admettre avec moi que depuis – et pas uniquement avec votre gouvernement, avec l'autre gouvernement antérieurement – c'est qu'à chaque fois qu'on a fait un mouvement, ça a été davantage du pelletage. Et c'est possiblement que ça a refroidi beaucoup d'ardeurs. C'est peut-être une des raisons. Il doit y en avoir beaucoup d'autres, parce qu'on ne leur a pas nécessairement démontré assez clairement leurs capacités, leurs pouvoirs, et je ne suis pas certain que les structures qui existent à l'heure actuelle peuvent permettre de changer fondamentalement cette façon de faire.

Encore une fois, c'est avec beaucoup de réserve que je vous dis ça parce que je ne suis pas au courant de toutes les subtilités, et toutes les choses. Mais je pense que c'est beaucoup aussi une question de structure, une structure mal adaptée. D'ailleurs, si vous remarquez dans notre mémoire, c'est qu'on est loin de critiquer le concept, mais on doute fort à cause de la réticence très grande de vouloir faire un mouvement important.

M. Chevrette: Est-ce que vous croyez que le fait de vouloir marier l'urbain et le rural dans les structures actuelles constitue une embûche au progrès de l'évolution, par exemple, de la décentralisation au Québec?

M. Proulx (Jacques): Ça dépend de ce que vous entendez par l'urbain.

M. Chevrette: Pardon?

M. Proulx (Jacques): Ça dépend de ce que vous considérez comme urbain.

M. Chevrette: Je vous donne un exemple très concret. La ville de Joliette chez nous, mariée à diverses municipalités rurales qui entourent Joliette, le grand Joliette, est-ce que vous croyez que ce mariage forcé de structures empêche la possibilité de décentralisation parce qu'on se guette carrément les uns les autres?

M. Proulx (Jacques): Non. Je ne pense pas, à condition qu'on indique très clairement... qu'on maintienne un équilibre dans les forces, dans les pouvoirs. Moi, je pense que c'est là que ça va être joué. Je reviens un peu à tout à l'heure. Je pense que beaucoup de difficultés à votre avant-dernière question provenaient de structures qui étaient possiblement mal adaptées. Et, moi, je pense que ce n'est pas une entrave si ce qu'on va mettre en place pour le faire maintient l'équilibre des forces, pas uniquement une question de comptabilité, mais une question des forces du milieu, véritablement les forces du milieu.

Si c'est pour faire un autre modèle de centralisation selon la méthode comptable, c'est sûr que ça ne fonctionnera pas. Mais remarquez que votre ville de Joliette ou la petite ville qu'il y a dans ma région, si vraiment on a pris soin de bien équilibrer ça... C'est beaucoup rural, ça porte le nom d'urbain, mais l'urbain n'est pas...

M. Chevrette: Disons semi-rural, semi-urbain.

M. Proulx (Jacques): C'est ça.

M. Chevrette: Mais ceci dit le fait, par exemple, que le développement et l'aménagement soient quand même deux éléments quasi indissociables, en ce sens que l'aménagement est un levier du développement, qu'on le veuille ou pas, il m'apparaît difficile dans la conjoncture actuelle de marier au sein d'une même MRC la volonté du développement commercial et industriel, par exemple, avec le maintien du rural, ou du tissu agricole par exemple. On sent très bien qu'il se développe des appétits de développer des parcs industriels dans des petites localités qui auraient tout avantage, à mon point de vue, à demeurer strictement agricoles non seulement pour leur bien à elles, mais pour le bien de la collectivité québécoise en entier. Parce que, plus on gruge dans le tissu agricole québécois, plus on se crée des problèmes à moyen et long terme.

Et je me rends compte qu'il s'est, par le fait qu'il y a eu des mariages un peu forcés dans ce type de MRC là qui n'avaient pas les mêmes missions, créé des tensions énormes quant aux volontés de développement. Concurrence d'abord, parce que le milieu urbain dit: Je ne veux pas d'étalement. Le milieu rural dit: Moi, je veux me développer, moi aussi. Comme si c'était exclusivement en changeant de créneau ou de mission que tu peux te développer. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a des discussions de fond à y avoir dans ce domaine-là avant de s'enligner dans une décentralisation avec les structures actuelles?

M. Proulx (Jacques): Quand est-ce qu'on les commence, M. le ministre, ces discussions-là? Ça fait longtemps qu'on parle de ça tout le monde.

M. Chevrette: Bien moi, ça fait longtemps qu'elles sont commencées chez nous.

M. Proulx (Jacques): Souvenez-vous de Bélanger-Campeau, souvenez-vous de la tournée qu'on a faite au Québec, vous avez eu partout le même raisonnement par 90 %, 95 % des gens qui étaient d'accord. C'est encore une question... Qu'est-ce qu'on dénonce aujourd'hui? On dénonce qu'on continue dans le même modèle dominant, c'est-à-dire qu'on ne parle qu'entrepreneuriat, qu'on ne parle que de développement économique et, encore une fois, on fait fi, ou presque totalement, qu'il y a des humains qui habitent ces territoires-là, qu'il y a d'autres ressources sur ces territoires-là.

(17 h 40)

Je vous dis, vous êtes à même de le constater, que le développement priorisé jusqu'à aujourd'hui... Parce qu'on ne parle que de développement économique, regardez les résultats. Moi, je ne dis pas qu'il faut l'anéantir, je dis simplement: On «est-u» capable de commencer à revenir à un certain équilibre? Pourquoi – et je reprends votre dernier exemple – les petites municipalités rurales veulent avoir leur parc industriel? Parce qu'elles se sentent complètement démunies vis-à-vis la ville proche, l'urbain proche.

Elles ont été flouées la plupart du temps au cours des dernières années; assez souvent le parc industriel de la ville est venu arracher dans le milieu les petites industries que le monde s'était données, qu'ils avaient dans bien des cas montées avec leurs deniers, avec leurs taxes. Le parc industriel est venu enlever ça. Alors, ne soyez pas surpris de ces demandes qui, je suis d'accord avec vous, n'ont pas d'allure, sauf qu'il faut comprendre parce qu'on a tout axé sur l'économique. Moi, je pourrais prendre l'exemple de ma MRC qui a son plan d'aménagement, où il y a un parc industriel dans la MRC. On s'est entendu, mais on n'a pas vidé le monde, floué, on n'a pas joué aux bandits pour venir enlever; on a laissé aux petites municipalités une part du gâteau, c'est-à-dire du développement secondaire de petites industries, et ainsi de suite, de services, et autres.

À partir de là, c'est possible, mais il faut insister sur ça et il faut mettre en place... Je le répète encore, ce que j'ai dit tout à l'heure, on ne croit pas à l'heure actuelle qu'on ose assez dans ça et on tente trop de vouloir continuer un peu tranquillement dans le même modèle. Il faut se hâter lentement. Et pourquoi ne pas commencer à en parler tout de suite, M. le ministre? Parce que c'est évident que demain matin, et vous connaissez notre position sur ça, on ne peut pas tout garrocher de même dans le monde. Ça ne changera rien. Mais commençons, Seigneur! Ça fait combien de fois qu'on vient en commission parlementaire sur des choses semblables, mais on refuse d'aborder cette question de décentralisation.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Proulx. M. le député de Richmond.

M. Vallières: Bien, d'abord, je vais saluer de façon particulière M. Proulx et le remercier de sa présentation qui, somme toute, détonne quelque peu avec d'autres mémoires qu'on a entendus à date. Je dirais que votre mémoire est pétant de vitalité et de santé. Je trouve ça intéressant qu'on puisse entendre un groupe représentant le monde rural plus particulièrement et qui nous convie à la recherche de solutions en choisissant des axes qui sont, je dirais, carrément différents de ceux qu'on a l'habitude d'entendre.

Je trouve rafraîchissant aussi de se faire rappeler, comme législateurs, que chaque fois qu'on intervient dans les structures ou autrement notre action devrait être toujours axée sur la personne humaine, sur le vécu des gens qui ont dans le fond à subir les législations que nous adoptons. Alors, c'est sûr que les réflexions que vous faites dans votre mémoire nous convient à beaucoup plus que ce que nous présente le projet de loi n° 171.

Ma première question à M. Proulx, ça serait de connaître davantage ses commentaires face à un résumé de son communiqué de presse qui nous a été remis et qui disait qu'il avait la ferme intention d'expliquer aux membres de la commission que le monde rural est dramatiquement absent du projet de loi n° 171. Ça, c'est comme beaucoup inquiétant, parce que les objectifs poursuivis par un projet de loi comme celui-là sont toujours louables – je l'ai dit à maintes reprises – mais est-ce que les moyens qu'on se donne atteignent la cible?

Est-ce que j'interprète mal votre mémoire, M. Proulx, en mentionnant... Quand on lit, par exemple, les notes explicatives du projet de loi, il y a bien des belles choses qu'on se propose de faire par le biais de cette législation, mais est-ce qu'on est à côté de la cible? Est-ce que c'est ça, le message que vous venez nous livrer aujourd'hui? Est-ce que non seulement on ne va pas assez loin, parce que, évidemment, le projet de loi part de certaines cibles qui sont bien différentes de celles que vous identifiez, mais est-ce que, par surcroît, on doit faire le constat... Et là rappelons que, quand on parle d'un ministère des Régions, des CLD, des CRD, on s'adresse directement au monde rural, on est en plein dans le domaine, on est en plein dans ce champ d'action. Est-ce qu'on est en train de manquer la cible complètement ou partiellement?

M. Proulx (Jacques): Moi, je pense qu'on perd des belles opportunités – je l'ai dit tout à l'heure, je le répète – de modifier substantiellement le cours des choses. C'est un effort intéressant au départ, je l'ai dit, je continue à le répéter; il y a des choses intéressantes dans ça, sauf que c'est beaucoup trop peu. Et notre peur c'est que ce soit rapidement annulé dans les faits. Il y a beaucoup trop d'ambiguïtés encore à l'intérieur de ça. On a peur de dire un certain nombre de mots depuis toujours. La notion de «ruralité», on a peur d'en parler parce qu'on essaie de la noyer dans la notion régionale. Et c'est ça qu'on reproche à l'heure actuelle. C'est des concepts intéressants, mais on dit: On veut vous aider à les rendre viables, avoir de la pérennité et rapidement.

Si on n'ose pas aujourd'hui, on n'osera pas plus demain. Et on va changer quoi? Il faut prouver des choses, il faut se sortir jusqu'à un certain point du modèle dominant à l'heure actuelle, sans l'oublier, il existe, il est là. Mais est-ce qu'on est capable de faire autrement? Et ça sent trop la continuité. Et, nous autres, ça nous fait de la peine de ne pas pouvoir lui donner, avec des enrichissements, permettre à ce projet de loi là d'arriver au résultat escompté.

M. Vallières: Tantôt, vous avez abordé la question de la décentralisation un peu plus globalement avec le ministre. Est-ce que, à votre connaissance, dans les milieux que vous connaissez, à travers le monde – et ce n'est pas une fleur que je veux vous envoyer en vous indiquant que je pense que vous avez une expertise, là, exceptionnelle à ce niveau-là – est-ce que vous voyez, quelque part ailleurs, des modèles qui auraient été appliqués et dont on pourrait s'inspirer?

M. Proulx (Jacques): Il y en a des modèles ailleurs, mais je ne veux pas qu'on copie, je veux qu'on s'en inspire. Puis vous les connaissez pareil comme moi, les modèles ailleurs. Vous connaissez pareil comme moi qu'il y a des pays qui sont allés assez loin dans la décentralisation. Inspirons-nous-en, mais bâtissons notre modèle à nous autres. Arrêtons de bâtir à partir du modèle qui est tout fait puis on va essayer d'adapter ça. Ça aussi, c'est un des reproches, c'est le rapiéçage qu'on fait depuis des décennies, de l'économie. Regardons les résultats aujourd'hui. Et on est tous pareil; ce n'est pas rien que les gouvernements qui sont de même à l'heure actuelle, nos organisations sont de même. On se raccroche tout le temps, tout le temps, tout le temps. Le premier ministre nous a dit l'année dernière et encore cette année, à plusieurs occasions, d'oser. Bien, osons donc.

M. Vallières: M. Proulx, évidemment, comme vous l'indiquez dans votre mémoire, c'est sûr que ça ne correspond pas à ce que vous aimeriez que ce soit, mais c'est comme si vous nous disiez: On va vivre avec puis on va essayer de voir ce qu'on peut faire à l'intérieur de ça. Quel serait à votre avis... Vous avez vu la définition que donne le ministre du guichet multiservices qu'on va retrouver dans les centres locaux de développement, comment, vous, vous le voyez, ce guichet-là? Est-ce qu'il correspond à vos attentes? Sinon, comment il devrait être organisé pour que ça corresponde davantage à la définition que vous faites d'un milieu rural en santé?

M. Proulx (Jacques): Moi, je ne vous définirai pas que ce que doit être un guichet unique idéal. Je pense que le concept du guichet unique est intéressant, que ce soit dans le rural ou que ce soit dans l'urbain: permettre dans des lieux où les gens vont retrouver tous les besoins qu'ils peuvent avoir, qu'ils vont avoir toute l'information nécessaire, qu'ils vont avoir accès à l'ensemble des services. Alors, on ne peut pas être contre ça, mais toujours les moyens qu'ils soient bien harmonisés puis qu'ils répondent le plus parfaitement possible aux besoins du milieu.

Et je veux juste répondre à votre première question: On va vivre avec. On vit toujours avec les décisions des autorités. On les a élues, on vit avec. Mais ça ne veut pas dire qu'on est content de vivre avec, par exemple, ça ne veut pas dire qu'on ne continue pas à pousser pour qu'elles soient meilleures, ces décisions-là.

M. Vallières: On a parlé, vous en parlé un peu, je pense, dans votre mémoire, des agents de développement en milieu rural. Comment vous voyez leur implication à l'intérieur des structures qui sont proposées dans le projet de loi qu'on a?

(17 h 50)

M. Proulx (Jacques): Quand on a défendu cette politique-là au niveau du ministère, qui nous a été accordée, dans une des politiques de centre, on dit que ça doit être des agents, des animateurs du milieu, du milieu rural. On est à même de constater à l'heure actuelle... Nos revendications d'aujourd'hui – je fais une petite parenthèse – elles ne partent pas rien que d'un constat d'aujourd'hui là, elles parlent d'années d'expérience avec ça. Les agents de développement rural, c'est un enrichissement qu'on doit faire dans le milieu, et ça doit être des gens qui vont être des animateurs du milieu rural, qui vont être là pour supporter, accompagner.

Malheureusement, malheureusement à l'heure actuelle, on constate – et ça on est, comment je dirais ça, démuni devant ça, jusqu'à un certain point – qu'une partie de ces agents-là acceptés, à l'heure actuelle, c'est de la récupération des commissaires industriels. En tout cas, ce n'est pas ça, nous autres, qu'on a cru. Et ça, je trouve ça malheureux, pas parce qu'il n'y a pas encore besoin d'enrichissements là, mais on se s'est pas battu pour avoir une politique particulière du milieu rural pour enrichir les commissaires industriels. Parce qu'on sait sur quoi, eux autres, ils travaillent, qui n'est pas négatif complètement, mais quand même ça n'a pas été positif pour le milieu complètement rural. Ça, c'est le constat qu'on fait aujourd'hui. Alors, d'avoir trop d'ambiguïtés dans les choses, parfois, c'est ça, on arrive assez souvent au bout que ça ne rend pas les services qu'on escomptait.

M. Vallières: Dans le contexte actuel où il y a législation et qu'elle sera adoptée, est-ce que vous voyez la possibilité ou la nécessité de vous assurer que le monde rural, entre guillemets, a une place assurée au conseil d'administration des CLD?

M. Proulx (Jacques): Bon, on vous a soulevé quelques questions sur ça à l'heure actuelle. On pense que ça peut présenter des difficultés dans certains endroits. En même temps, je ne suis pas certain que le correctif, c'est de nommer tout le monde. Je pense qu'il s'agit de mettre en place, de donner toutes les possibilités pour qu'il y ait une représentation qui soit équitable, très représentative des milieux, sinon on va encore une fois... Mais je pense qu'il y a des secteurs d'activité qu'il est important qu'on n'ait pas peur de les nommer.

M. Vallières: Le projet de loi prévoit un rôle assez bien défini pour les conseils régionaux de développement, les CRD en région, avec une propension assez forte pour la signature d'ententes spécifiques, avec des budgets à cette fin-là, un rôle également d'animation du milieu et de concertation. Comment vous voyez cette définition du rôle des CRD dans le projet de loi actuel?

M. Proulx (Jacques): J'ai peu d'opinions sur ça à l'heure actuelle. Je pense qu'il y a déjà une expérience, il y a déjà un vécu pour qu'on soit capable de l'enrichir, de l'améliorer, mais encore une fois j'en reviens, ce n'est pas une question de structure. C'est une question de motivation, de valorisation des milieux. Si on établit clairement les balises au départ, on va avoir non seulement un local qui va travailler et tirer dans la bonne direction, mais on va avoir un régional aussi qui va aller... Parce que ça va se répercuter ça au fur et à mesure. Je n'ai pas d'opinion plus précise que ça sur ça.

M. Vallières: Vous faites référence dans votre mémoire au morcellement et à la division du territoire. Évidemment, il y a eu la formation, la création du ministère de la Métropole qui est un ministère territorial. Aujourd'hui, on nous indique qu'on a un ministère des Régions parce qu'il y a un ministère de la Métropole, donc un ministère des Régions qui une fois de plus fait allusion à un territoire bien précis. La loi vient mentionner les lieux de responsabilité et du ministre de la Métropole et du ministre responsable du Développement des régions. Comment vous voyez cette définition de ministère dans le fond à partir du territoire?

Moi, je pousserais un petit peu plus loin la réflexion en me disant: Pourquoi Sherbrooke n'aurait pas son ministère? Pourquoi est-ce que la région de Québec n'aurait pas son ministère? Comment vous voyez ça, la répartition ou l'action gouvernementale définie en fonction du territoire, et que ce soit intégré, plus que ça, qu'on en fasse des lois éventuellement comme on a pour la métropole et le reste du territoire québécois par le biais de cette législation qu'on a ici aujourd'hui?

M. Proulx (Jacques): Bien, écoutez, vous avez probablement lu... Si vous avez pris connaissance du rapport Village prospère , on était des demandeurs assez forts d'avoir un ministère de la ruralité ou un ministre de la... plus un ministre de la ruralité avec un secrétariat pour qu'il y ait une voix forte au niveau du Conseil des ministres. Ce qui est intéressant dans ça, c'est que c'est un ministère horizontal. On n'est pas habitué de voir ça. Je pense – non seulement je pense, mais je suis convaincu – que ça peut être très, très intéressant pour le milieu rural, comme ça pourrait être intéressant dans d'autres secteurs d'activité.

Ce n'est surtout pas... Il ne faut pas que ce soit mis en place parce qu'il y a eu un ministère de la Métropole, là. On ne veut pas être en concurrence avec la métropole puis dire que le ministère des Régions, bon, c'est pour faire plaisir aux régionaux parce qu'on a fait plaisir – pas nécessairement – à la métropole. Je pense qu'il faut l'envisager sous un autre angle.

Mais, d'avoir un ministère du territoire ou régional ou appelez ça comme vous voudrez, ça peut être drôlement intéressant parce que, je me répète, c'est un ministère horizontal. Et, pour nous, si vous avez regardé aussi le rapport du chantier régions-municipalités, on a été très clairs dans ça aussi, les membres de ce chantier-là. Il fallait absolument en arriver à avoir des ministères qui arrêtent d'intervenir selon où tu passes puis quand tu passes, puis d'avoir une intervention beaucoup plus globale, beaucoup plus près des citoyens, puis ainsi de suite. Alors, il y aurait des bonnes chances avec ce ministère-là de pouvoir faire un certain nombre de choses.

M. Vallières: Maintenant, le rapport auquel vous faites allusion, le rapport du groupe Brunet – ce serait la dernière question – le rapport de M. Brunet, c'est un comité sur lequel vous avez siégé. Vous avez dû vous pencher, j'imagine sur... Parce que vous avez fait des recommandations dont l'une était non pas de créer un ministère des Régions, mais de créer... vous proposiez que ce soit un secrétariat qui relève de l'Exécutif directement et vous sembliez rattacher ça à l'efficacité de son travail horizontalement dans tout l'appareil gouvernemental. Ce serait intéressant de savoir quels sont les motifs qui vous ont invité à retenir cette formule plutôt que celle d'un ministère des Régions.

M. Proulx (Jacques): Bof! Les motifs qui nous ont... Je pense que c'est à partir des constats qu'on a faits de ce qui avait existé, de ce qui existait, puis les besoins qu'on aurait pour l'avenir. Alors, à partir de là, on a mis beaucoup de choses sur la table. On a regardé ça, on a discuté et on a considéré que, pour répondre le plus possible aux besoins de l'avenir du milieu, ce serait possiblement ça, parce que, une fois... Je pourrais prendre l'exemple que M. Brunet donnait dans le temps, qui faisait rire tout le monde, mais qui était très vrai. C'est qu'à l'heure actuelle on opère: les ministères sont en haut, il y a des tuyaux, puis le monde passe en dessous des tuyaux. Quand tu passes devant le bon tuyau, tu es correct; si tu as le malheur de passer un peu à côté, tu es fait. Alors, on dit: Essayons de changer l'ordre des choses avec une intervention horizontale où ça va être beaucoup plus facile d'être près des citoyens, des besoins des citoyens, des besoins de l'industrie aussi, des besoins en fait de tous ceux qui doivent être supportés, accompagnés, appuyés...

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, s'il vous plaît, M. Proulx. Malheureusement, c'est terminé.

M. Proulx (Jacques): Merci bien, madame, merci bien, messieurs, dames.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Desjardins et M. Proulx, de votre participation. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 5)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions.


Union des municipalités du Québec (UMQ)

Alors, nous aurons comme premier invité l'Union des municipalités du Québec. Je demanderais à M. le Président, M. Mario Laframboise, de bien vouloir s'approcher avec les personnes qui l'accompagnent. Alors, M. Laframboise, si vous voulez présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi par une période de questions simultanément du côté de l'opposition et du côté ministériel.

M. Laframboise (Mario): Oui, Mme la Présidente, m'accompagne M. Jean Therrien, qui est coordonnateur au développement économique à l'Union.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous pouvez commencer, M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Merci, Mme la Présidente. Donc, l'UMQ remercie les membres de cette commission de lui fournir l'occasion de commenter le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions, lequel prévoit la création du ministère des Régions et la reconnaissance des centres locaux de développement, CLD, et des conseils régionaux de développement, les CRD.

Ce projet de loi vise à rendre opérationnels les principaux éléments de la Politique de soutien au développement local et régional présentée le printemps dernier. Il s'agit, en quelque sorte, du dernier élément d'un vaste projet visant à simplifier l'intervention gouvernementale en région et à mobiliser tous les intervenants du milieu en faveur du développement économique et de l'emploi.

La rapidité d'intervention des autorités publiques et la simplicité des programmes de soutien constituent la clé du succès en matière de développement économique. Or, en cette matière, le Québec n'est pas toujours un exemple d'efficacité. C'est pourquoi il est urgent de simplifier l'intervention gouvernementale, de diminuer le nombre de programmes et les chevauchements en matière de soutien au développement économique.

Pour ces raisons, l'Union des municipalités du Québec avait accueilli favorablement, lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, les principaux éléments et recommandations du rapport du Groupe de travail régions-municipalités – groupe dont je faisais partie – qui témoignait, d'une part, de la volonté des intervenants locaux et régionaux de travailler à la revitalisation sociale et économique des différentes régions du Québec et, d'autre part, de la nécessité de rendre plus efficace l'intervention gouvernementale en région.

Par la suite, l'Union a suivi avec intérêt l'élaboration de la Politique de soutien au développement local et régional. L'UMQ voyait d'un très bon oeil cette volonté gouvernementale de simplifier et de rendre plus efficaces les activités de l'État en matière de soutien au développement économique local. La démarche nous apparaissait d'autant plus sympathique qu'elle visait à sortir du mur-à-mur et à accorder une plus grande liberté d'action aux autorités locales dans l'élaboration de leurs stratégies de développement de même que dans l'organisation des services de soutien à l'entrepreneuriat.

Malheureusement, il n'est pas certain que la Politique de soutien au développement local et régional et le projet de loi qui en découle permettront d'atteindre les objectifs de simplification et d'efficacité recherchés par le ministre responsable du Développement des régions et par tous ceux et celles qui travaillent activement au développement économique du Québec.

À la lumière des derniers développements, l'UMQ constate avec regret que le nombre d'organismes et de programmes que le ministre souhaitait regrouper au sein des centres locaux de développement a diminué comme une peau de chagrin au fil des mois et des pressions exercées par certains ministères et organismes gouvernementaux. À l'origine, les CLD devaient intégrer plusieurs structures de développement économique financées, en totalité ou en partie, par le gouvernement. Dans les faits, la Politique de soutien au développement local et régional se résumera, dans le meilleur des cas, à intégrer deux structures qui sont déjà largement intégrées l'une à l'autre: la corporation de développement économique et le SAJE. Le résultat concret de cette opération, en termes de structures, sera de remplacer 120 corporations de développement économique et quelques SAJE autonomes par environ 130 conseils locaux de développement. Où sont donc les gains?

Plus grave encore, si plusieurs CLD se développent en parallèle des organismes de développement économique déjà présents au niveau local, ce qui risque fort d'arriver, la réforme proposée va contribuer à accroître le nombre de structures de soutien au développement économique local et, par voie de conséquence, à disperser encore davantage les sommes dévolues au développement économique local, ce qui serait une véritable catastrophe. Et je ne parle pas ici encore des fameux CLE.

(20 h 10)

Au-delà de la question du nombre de structures se pose celle encore plus cruciale de la simplification et de la rationalisation des programmes gouvernementaux de soutien au développement économique local. Les résultats à cet égard ne semblent guère plus probants. Le 30 octobre dernier, le ministre annonçait qu'une somme de 60 000 000 $ serait consacrée au financement des centres locaux de développement. Ce montant, certes non négligeable, est cependant nettement inférieur au montant de 103 000 000 $ mis de l'avant dans le cadre de référence sur la déconcentration, la régionalisation et la décentralisation adopté par le Conseil des ministres le 18 décembre 1996.

Le montant de 60 000 000 $ consacré aux centres locaux aurait été établi en tenant compte d'un principe de parité globale gouvernement-municipalités. S'il est vrai que ce montant correspond globalement au montant investi par les municipalités dans le développement local, il ne faut perdre de vue que le budget du gouvernement du Québec est de 42 000 000 000 $, soit un montant quatre fois et demi supérieur au total des budgets municipaux du Québec qui atteint, pour sa part, 9 000 000 000 $. Toutes proportions gardées, l'effort consenti par l'État est nettement moindre que celui réalisé par les municipalités.

De plus, les sommes consacrées par les municipalités au développement économique via les corporations de développement économique demeureront, dans bon nombre de MRC, supérieures au montant qu'accordera le gouvernement aux centres locaux de développement dont la pérennité au fil des ans n'est pas assurée. De tels résultats laissent perplexe et songeur quant à la volonté gouvernementale d'atteindre les objectifs de simplification et d'efficacité tant recherchés par le ministre responsable du Développement des régions.

La MRC est devenue, au cours des années, la référence territoriale privilégiée par la majorité des municipalités en matière de développement économique. Une étude réalisée en 1993 par le ministère de l'Industrie et du Commerce démontrait que 72 % des MRC étaient, à ce moment, desservies par un organisme de développement économique qui couvrait l'ensemble du territoire et tout indique que ce pourcentage a progressé depuis.

Aujourd'hui, toutes les MRC du Québec, sauf une, ont au moins une corporation de développement économique oeuvrant sur leur territoire. Les municipalités sont également de plus en plus nombreuses à participer au financement de ces corporations, de sorte que la quasi-totalité du territoire québécois est desservi par une corporation de développement économique. Bien sûr, toutes ces corporations ne bénéficient pas d'un support financier important et stable, ce qui limite leur capacité d'action. D'autres, par contre, jouissent d'un soutien financier remarquable des municipalités.

Convaincue que la précarité financière de certaines corporations de développement économique constitue un handicap pour le développement économique de ces régions, l'UMQ a fait sienne la conviction exprimée par le Groupe de travail régions-municipalités à l'effet que la contribution de toutes les municipalités au financement de ces organismes est indispensable pour réaliser le développement économique de toutes les régions du Québec et s'assurer de l'engagement des partenaires locaux.

Nous avons donc appuyé, en mai dernier, lors de l'étude en commission parlementaire du projet de loi n° 137, le principe d'une contribution obligatoire de toutes les municipalités au financement d'un organisme régional voué à la promotion et au développement économique. L'accord unanime du monde municipal à une telle obligation témoignait, une fois de plus, de la volonté des municipalités à participer activement au développement économique du Québec.

Or, plutôt que de tabler sur ces structures déjà bien implantées dans leur milieu et sur l'engagement du monde municipal à les soutenir financièrement dans chaque MRC, le gouvernement a préféré créer un nouvel organisme, le centre local de développement, dont le mandat est de regrouper, de coordonner les différents services d'aide à l'entrepreneuriat et d'assurer le financement de ces services.

Le conseil local de développement devra être accrédité par l'État et sera soumis à une obligation de résultats et à des contraintes à l'égard de la composition de son conseil d'administration qui sera, par ailleurs, accessible aux députés provinciaux. Voilà autant de règles qui assurent au gouvernement québécois une vue imprenable sur le développement local.

En vertu de l'article 10 de ce projet de loi, le conseil d'administration d'un CLD devra être composé de membres représentatifs du milieu des affaires et du commerce, des travailleurs ainsi que des milieux municipal, coopératif, communautaire et institutionnel. Aucun des milieux représentés au sein du conseil d'administration, y compris la députation, ne peut en constituer la majorité. Ainsi, les élus municipaux ne pourront occuper la majorité des sièges au conseil d'administration de cette structure.

Sous prétexte d'une responsabilisation du milieu local et d'une simplification somme toute assez hypothétique des interventions gouvernementales, la Politique de soutien au développement local étend ainsi la tutelle gouvernementale jusqu'à l'échelle locale. Au nom de quel principe la participation des élus au conseil d'administration des CLD devrait-elle être limitée à un seuil précis? L'UMQ dénonce cette règle qui s'inscrit dans une tendance de plus en plus généralisée qui consiste à reléguer les élus municipaux dans des rôles minoritaires pour faire place aux représentants des divers organismes socioéconomiques, alors qu'il s'agit souvent de gérer des deniers publics. Ce fut le cas lors de la création de l'Agence métropolitaine de transport de la région de Montréal et de la Commission de développement de la métropole et maintenant à l'égard des centres locaux de développement.

Le gouvernement semble douter de la capacité des élus locaux à représenter une pluralité d'opinions, comme si les élus municipaux n'étaient pas représentatifs de leur milieu et incapables d'être à l'écoute des divers groupes socioéconomiques. Or, il existe dans le monde municipal de multiples mécanismes de consultation tels les comités consultatifs d'urbanisme ou encore les commissions de la culture ou des loisirs, pour ne nommer que ceux-là, qui ont pour mandat de consulter la population et de faire des recommandations au conseil de la municipalité sur les orientations à suivre dans ces domaines.

La même formule pourrait être appliquée aux centres locaux de développement où la participation des acteurs socioéconomiques s'exercerait via des comités aviseurs. Ces comités assureraient la participation des principaux intervenants dans l'élaboration du plan d'action local pour l'économie et l'emploi et des stratégies d'intervention tout en laissant les véritables décisions à ceux qui sont élus par la population et redevables devant elle.

Que l'on se comprenne bien, l'UMQ n'est pas contre la participation des acteurs socioéconomiques à des structures de développement régional et local, bien au contraire. Depuis toujours, l'UMQ véhicule le concept d'un développement régional fondé sur le respect et la reconnaissance des différents acteurs et décideurs régionaux.

En 1991, lors de la réforme sur le développement régional, la réforme Picotte, l'UMQ s'était clairement prononcée en faveur des conseils régionaux de développement ouverts à l'ensemble des décideurs régionaux. Aujourd'hui encore, l'Union croit que l'implication de tous les intervenants demeure fondamentale car le développement économique de nos régions ne peut être viable que s'il repose sur des consensus largement établis et une responsabilisation de chacun. Mais c'est une chose de mettre en place des mécanismes de concertation et une autre d'assurer des services de première ligne. Dans ce dernier cas, les élus municipaux doivent pouvoir assumer pleinement leur leadership politique.

Ainsi, l'UMQ demande que l'article 10 du projet de loi soit modifié afin que la participation des élus municipaux aux conseils d'administration des CLD ne soit pas préalablement limitée, mais plutôt établie en fonction des dynamismes et des choix locaux.

Par ailleurs, la règle voulant qu'une MRC ne puisse avoir plus d'un CLD sur son territoire, à l'article 11, doit également être modifiée afin de permettre aux MRC très populeuses d'avoir, à l'instar des communautés urbaines, plus d'un CLD si elles le désirent. Cette règle mur à mur ne tient pas compte de la grande diversité des MRC. Une MRC de 300 000 habitants n'est pas comparable à une MRC de 30 000 habitants.

Les règles devront également être plus souples à l'égard du financement des CLD. Dans le cadre de l'entente gouvernement du Québec-UMQ signée le 23 octobre dernier concernant la contribution municipale à l'assainissement des finances publiques, le gouvernement s'est engagé à n'adopter aucun règlement ayant pour effet d'ajouter des charges financières pour toute municipalité qui contribue déjà au soutien d'un organisme ayant pour mission la promotion et le développement économique à l'échelle régionale. L'UMQ juge également essentiel qu'une municipalité qui assume présentement une contribution très élevée puisse profiter de l'apport supplémentaire des autres municipalités pour diminuer légèrement sa contribution si tel est son voeu. Il est exagéré d'exiger, en toute circonstance, une contribution équivalente à celle versée en 1996.

Enfin, l'article 12 devrait énoncer clairement que l'accréditation d'un CLD doit faire l'objet d'une résolution de la MRC où ce dernier est implanté, tel qu'énoncé dans la Politique de soutien au développement local et régional. Par ailleurs, l'UMQ demande au ministre responsable du Développement des régions de retarder au 16 février la date butoir pour déposer le projet de CLD au sous-ministre adjoint concerné.

En conclusion, l'UMQ souscrit à la création d'un ministère des Régions et au nouveau rôle confié aux CRD qui consiste essentiellement à favoriser la concertation entre les partenaires régionaux et à conclure une entente-cadre dans laquelle il convient avec le gouvernement des axes et priorités de développement des régions. Toutefois, au plan local, le gouvernement doit reconnaître que seuls les élus sont imputables de leurs décisions devant la population. Il appartient donc essentiellement aux élus de choisir collectivement, selon les besoins propres à leur région, le type de structures de soutien au développement économique local, y compris d'avoir recours à la MRC si les municipalités de cette entité le désirent ainsi. C'est la seule façon d'éviter le piège de la solution mur à mur et mal adaptée aux besoins locaux.

Pour ce faire, l'actuel projet de loi doit permettre une plus grande flexibilité à l'égard de la mise en oeuvre de la structure de développement local. À partir du principe d'imputabilité des élus locaux, le gouvernement doit permettre aux municipalités de déterminer la structure la plus apte à soutenir le développement économique, y compris la répartition des sièges au conseil d'administration de cette structure.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Laframboise. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Laframboise. J'ai d'abord quelques remarques, des correctifs à apporter à ce que vous avez affirmé. Vous dites: Bon nombre de MRC paieront plus que le gouvernement. Pour votre information, vous êtes rendus à cinq seulement sur 96. Ça fait un bon nombre dégraississant. C'est cinq seulement sur 96. Et, parmi celles qui auraient à peu près été égales, il y a même des règlements qui baissent énormément. Donc, à moins que nos chiffres soient tout fous – et on serait très surpris parce qu'ils sont pris très récemment, vérification – ...

M. Laframboise (Mario): ...avec vous, M. le ministre.

M. Chevrette: C'est bien. Mais c'est cinq sur 96. Parce que vous aviez Joliette dans les plus, puis ils sont rendus à 212 000 par rapport à 462 000. Vous comprendrez que ce n'est plus un plus. C'est même 200 000 de moins que l'apport gouvernemental. Et, dans plusieurs cas, c'est trois quarts-un quart. Donc, je «peux-tu» vous dire que c'est 75 % le gouvernement, 25 % MRC. Il faut faire bien attention à ce qu'on affirme, parce que...

(20 h 20)

D'ailleurs, je vais sans doute vous proposer une formule de représentativité. Si c'était au pourcentage de la participation par rapport au global, par exemple, si une MRC payait 20 %, elle aurait droit à 20 %; si elle payait 25 %, elle aurait droit à 25 %. Je vous demanderais de réagir tantôt à cette formule-là. Ça pourrait être intéressant de rechercher un pourcentage de représentativité équivalent au poids de la cotisation. Ça pourrait être intéressant de regarder ça, ce que ça donnerait.

Également, vous affirmez qu'il n'y a pas de changement de structures. Dans nos statistiques, nous, c'est 400 structures qui présentement oeuvrent dans le monde du développement économique. On va en accréditer 120. Alors, 400 moins 120, nous, ça fait quelque chose comme 280 de moins qui ne sont pas accréditées. Il y en a peut-être qui vont exister, mais c'est aux CLD soit à conclure une entente de principe, soit à les intégrer. Mais c'est un guichet multiservices, puis il n'est pas question qu'on les subventionne, les 280, là, qu'on les accrédite. On en accrédite que une par MRC. Ou il y a de l'incompréhension, ou manifestement on ne veut pas jouer le jeu, ou dans certains milieux on veut tous se donner un modus vivendi puis ne rien changer. Mais qu'on ne vienne pas accuser le gouvernement puis qu'on ne vienne pas accuser la volonté politique gouvernementale d'en arriver à faire un certain ménage puis à faire en sorte que le citoyen entrepreneur ou le groupe de citoyens entrepreneurs ait un guichet multiservices dans son secteur. Ça, là-dessus, ça commence à plutôt m'agacer.

Quant aux sommes, quand on a déjà parlé dans un cadre de référence de 103 000 000 $ ou à peu près, là, ça comprenait tout sur le plan régional, ça. Ça comprenait l'argent aux CRD, l'argent aux CLD, les enveloppes dédiées, comment on versait pour le développement local et régional. Et vous ferez le compte quand on aura fini, vous allez voir que ça va être largement ça et probablement dépassé en particulier si on réussit à conclure ce qu'on cherchait à faire en sorte, de transformer des mesures passives en mesures actives pour la création d'emplois.

Donc, je répète que c'est cinq MRC sur 96 qui donneraient ou l'équivalent ou un peu plus. Vous avez fait référence à la formule Picotte. Vous déclariez d'accord avec les CRD, à l'époque. La formule Picotte, c'était 3 000 000 $ par CRD indépendamment des populations, indépendamment du taux de pauvreté, de la richesse foncière ou de la richesse des coupes, indépendamment du chômage. C'était 3 000 000 $ «across the world» comme disent les anglais, «across the board». Ça veut dire que Montréal qui avait 1 000 000 de population avait 3 000 000 $. Une petite MRC, une petite région de 30 000 de population avait 3 000 000 $.

Vous irez demander à Montréal s'ils étaient heureux avec leur 3 000 000 $, parce qu'ils vont en avoir 14 000 000 $, là, au niveau des CLD. La Montérégie qui en avait 4 000 000 $ va en avoir 8 000 000 $. Là, on tient compte des facteurs fondamentaux de développement économique et de l'emploi, la population, le taux de chômage et la pauvreté. Ça n'a pas été contesté, à nulle part, sauf un peu, un petit peu dans Chaudière-Appalaches puis quelques régions qui ont dit: T'aurais pu mettre un quatrième facteur qui est l'isolement. Et ça ne veut pas dire qu'on n'en tiendra pas compte.

Donc, vous pouvez être d'accord avec des formules mur à mur, comme certains préfets font. On leur donne 5 000 000 $. Ils sont cinq préfets, ils se divisent 1 000 000 $ chaque indépendamment que dans une MRC il y a x % de population par rapport à l'autre. C'est ce qu'ils ont fait en Abitibi, par exemple. Il y a cinq MRC, divisez par cinq, bonjour Luc. On ne tient pas compte de l'indice de pauvreté, on ne tient pas compte du chômage, on ne tient compte de rien. Ça peut être une façon d'agir, ça, quand on ne veut pas faire des arbitrages, mais ça peut manquer de courage politique, par exemple, pour faire face à des réalités. Je préfère faire partie des courageux que de ceux qui sont simplistes.

Changer l'article 10 du projet de loi afin que les élus municipaux aux conseils d'administration des CLD ne soient pas préalablement limités mais plutôt établis en fonction du dynamisme et des choix locaux. Je ne changerai pas l'article 10, je vous le dis tout de suite. Je ne veux pas vous faire de rêves en couleur. Je vais faire jouer les dynamismes du milieu, mais je vais surtout... Faire en sorte, certain, que le dynamisme du milieu joue – ça, vous avez raison – et je ne suis pas certain que je ne devrais pas envisager précisément, pour ceux qui paient, un pourcentage représentatif, comme je le disais tantôt, de leur poids de participation financière.

Je pense que ça, ça pourrait peut-être être intéressant qu'on regarde ça comme Assemblée nationale. Ça va peut-être éviter qu'il y en ait qui rêvent en couleur: participer à 12 % et à 15 % et penser qu'ils vont aller chercher 50 % de représentativité. Parce que le souci de l'emploi n'est pas dans le monopole... ce n'est pas les députés de l'Assemblée nationale qui l'ont ni sans doute les élus municipaux, mais ce sont les forces vives d'un milieu qui veulent véritablement développer leur coin de pays. Ça prend des entrepreneurs pour ça, ça prend des travailleurs pour ça, ça prend du monde de l'institutionnel pour ça, ça prend du monde financier, du monde communautaire qui veut créer des emplois dans le domaine de l'économie sociale, effectivement. Je pense que je vais revoir ça, mais sous l'angle que je vous l'ai dit.

Quant à la date de recul, je suis d'accord pour accorder un délai. J'irais au 1er février, je vais l'annoncer formellement. Je ne me rendrais pas au 16, mais je me rendrais au 1er février pour permettre l'accréditation, un 15 jours de plus au moins. Ça, je vous concède ça immédiatement.

Pour ce qui est des MRC qui ont 300 000 ou 156 000, entre vous et moi, la meilleure formule, c'est les points de services. Ce n'est pas nécessairement de créer des CLSC. Tu peux avoir une très grande efficacité, une très grande cohérence, au lieu de multiplier les structures, tu fais les points de services. C'est tout relié par l'informatique aujourd'hui. On peut rendre un très grand service exclusivement par des points de services dans un seul territoire et c'est tout aussi efficace que de créer des CLD multipliés. Il y a un type de Québec, de la Chambre de commerce de Québec, qui est venu nous dire ça ce matin, puis j'ai abondé dans son sens. Créer un CLD sur la communauté urbaine avec des points de services, ce serait tout aussi efficace.

Quant à la cotisation de 1996, M. Laframboise, je ne pense pas que ce soit exagéré que de demander la cotisation de 1996. Au contraire, je pense que c'est plutôt réaliste. Quand le gouvernement, lui, va en mettre probablement plus à peu près partout, comme je vous l'ai démontré, il m'apparaît important de faire en sorte, à un moment donné, que des MRC qui voulaient avoir le contrôle... Je ne parle pas de l'UMQ en particulier, là. J'ai connu une union qui voulait avoir le contrôle total, moi, puis qui fait tout pour diminuer, même que c'est plus que de moitié dans certaines MRC qu'on baisse nos cotisations. Je «peux-tu» vous dire que je ne peux pas comprendre qu'on puisse faire un «power trip» pour tout diriger et pour à peu près rien donner. À ce compte-là, si le gouvernement arrive puis qu'il y a beaucoup plus... on pourrait donner une certaine forme de pouvoir aux députés à qui j'ai demandé, par exemple, en caucus ce soir, au contraire, de faire de la place pour les droits de vote aux gens du milieu. Donc, je comprends mal la situation. Probablement que c'est la fin de session, c'est difficile à comprendre, ces affaires-là, mais que je vais comprendre dans quelques heures sans doute.

M. Laframboise (Mario): Je peux répondre, Mme la Présidente? Est-ce que je peux...

M. Chevrette: Oui, je peux vous laisser un petit bout et, après ça, je vais revenir.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Écoutez, là, M. le ministre, disons que je connais très bien le dossier parce que je suis là depuis les premières heures. Quand on vous parle d'une participation du monde municipal, c'est dans le fonctionnement, là. Notre participation à nous, c'est dans le fonctionnement. Donc, on paie plus que le gouvernement dans plusieurs régions, et ce n'est pas juste cinq, quand on parle du fonctionnement.

Vous, vous me rajoutez ce que vous allez investir dans les CLD avec les programmes. Je suis d'accord avec vous. Quand vous rajoutez les programmes, on ne vous accote pas, mais, dans le fonctionnement, par contre, il reste que, dans les organismes, il y a beaucoup de communautés, uniquement pour le fonctionnement, où on met plus que votre participation présentement. Et ça, là-dessus, là, je veux qu'on se comprenne bien. C'est sûr que, si vous prenez les programmes du national, vous décidez de les diviser puis de les investir au point de vue local, évidemment vous avez les sous nécessaires pour investir dans des programmes qu'on n'a pas. Nous, on investit dans le fonctionnement de ces organismes-là et souvent, à plusieurs endroits, on investit plus que le gouvernement.

C'est pourquoi, si vous me dites: O.K., on va tout calculer le budget, parce que, là, vous avez une partie qui va à l'économie sociale puis vous avez une partie qui va à votre fonds local d'investissement, c'est sûr qu'on ne peut pas vous accoter, mais, dans le fonctionnement, à des endroits... Et la politique, la réalité, c'est que, dans plusieurs endroits... Parce que je viens de terminer une tournée du Québec pour défendre l'entente, donc je sais que, dans les budgets qui seront alloués aux CLD, il y a moins de sous de disponibles qu'il y en avait l'an passé dans les corporations de développement économique, ne serait-ce que parce que, à plusieurs endroits, les conseils régionaux de développement investissaient une partie des FIR pour faire fonctionner les corporations de développement économique. En tout cas, c'était le cas en Outaouais, c'était le cas en Gaspésie. Il y avait plusieurs endroits où on prenait d'autres sous pour faire fonctionner... Donc, évidemment l'argent que vous mettez dedans, il y a moins de sous disponibles dans plusieurs régions présentement que ce qu'il y avait pour faire fonctionner les corporations de développement économique. Ça, il y a quand même cette réalité-là. Je pense qu'il faut vivre avec.

(20 h 30)

Face à votre deuxième intervention, évidemment, nous, dans le nombre de programmes, vous savez... Parce que j'écoutais un de vos fonctionnaires qui nous a fait un historique de l'arrivée des CLD. Moi, mon historique à moi, il est parti au Sommet socioéconomique de M. Bouchard d'octobre 1996. C'est là qu'il est parti. La politique active du marché du travail, c'est là que c'est parti, puis le fameux comité régions-municipalités sur lequel j'ai siégé, c'est là que s'est discutée la politique qui est là présentement. La volonté, c'était d'avoir un guichet unique.

Le problème, M. le ministre, c'est que présentement chacun des ministères veut avoir un guichet unique. Vous allez avoir 12 ministères, il va y avoir 12 guichets uniques. Je veux dire, ce n'est pas ça qui était le but, là. C'est pour ça que je vous ai dit... Je n'ai pas parlé des CLE, mais tout le long, à toutes les fois qu'on a parlé de cette politique de développement régional, on voulait qu'il y ait un seul guichet unique. Puis ce n'est pas parce que vous n'avez pas essayé, M. le ministre, c'est parce que vous avez des collègues qui ne veulent pas lâcher du lest. Ça va faire qu'on va se ramasser, d'ici deux ou trois ans, avec des guichets uniques dans chacun des ministères; il y a 12 ministères, il va avoir 12 guichets uniques. Puis le citoyen, lui, il ne se retrouvera pas.

Donc, le blâme est juste de dire que présentement ce qu'on s'aperçoit sur le terrain, c'est que les SAJE et les corporations de développement économique deviendront des CLD. Avec le temps, j'espère qu'on va intégrer tout ça. Mais le principe de dire qu'on va avoir un CLE qui est indépendant avec... Ce n'est pas ça que la population voulait. La population voulait avoir un regroupement des organismes, puis vous le savez très bien. Ce qu'on n'a pas pu, encore une fois, parce qu'on n'a pas réussi à convaincre la fonction publique archaïque du Québec qu'à quelque part, à un moment donné, il faut donner les décisions au local.

Et concernant les sous de disponibles, bien, évidemment, quand on vous parle des enveloppes, M. le ministre, même vous, dès le départ, je ne pense pas que vous ayez rêvé qu'il y ait juste 60 000 000 $ qui soient transférés. On espère que tout le monde comprendra que ce que la population veut, c'est que le local prenne les décisions dans tous les programmes qu'administre le gouvernement et que ce 60 000 000 $, au plus vite, devienne 103 000 000 $ comme ça avait été dit au début, puis 200 000 000 $ comme on aurait rêvé tout le monde ensemble. C'est ça qu'est l'objectif. Sauf qu'à quelque part on ne peut pas, nous, en tant que représentant municipal, ne pas constater qu'encore une fois la fonction publique du Québec veut conserver l'administration de programmes puis encore une fois écarter le citoyen dans un dédale de procédures, ce qui n'était probablement pas mieux dans le temps de la réforme Picotte, ça je vous le donne, là. Vous n'êtes pas plus capable qu'eux autres étaient capables de convaincre les fonctionnaires qu'à quelque part ce n'est plus à Québec que ça se décide, c'est sur le terrain. Je pense que c'est un message qu'on veut vous livrer.

Puis le monde municipal, dans le développement économique, c'est celui qui a été le plus efficace au cours des 30 dernières années. Puis ça là-dessus il faut quand même que vous le reconnaissiez. Les commissariats industriels des villes ont fonctionné à plein et vont continuer à fonctionner. Pourquoi? Parce qu'à quelque part ces centres locaux de développement là n'ont pas été capables de réussir à amener sur le terrain le plus de programmes possible. Donc, présentement les villes vont, dans plusieurs cas, conserver leur commissariat industriel puis attendre de voir comment ça va fonctionner avant de tout investir leurs sous dans les CLD. Puis ça j'espère que vous allez le respecter, M. le ministre.

En attendant, ce n'est pas si bête que ça de confier, sur un conseil d'administration, la moitié des votes aux élus municipaux qui auraient tout avantage, un jour, à concentrer leurs argents aussi et leurs sous dans un même effort avec le gouvernement. Mais on n'attire pas des mouches avec du miel puis ce n'est pas en leur confiant deux sièges – comme on me l'a proposé chez nous – sur 14 qu'à quelque part on va réussir dans le monde municipal à essayer de faire confiance à tous les intervenants locaux, là. Nous, on veut bien travailler, on veut bien investir avec le milieu, mais il va falloir que ça se fasse tout en concertation. Et c'est pourquoi...

M. Chevrette: Mais, M. Laframboise, vous venez de dire quelque chose d'assez grave. Vous avez commencé par reprocher fondamentalement au gouvernement de faire des dédoublements, puis vous finissez votre intervention en disant: Nous autres, on va garder nos commissariats industriels, nous autres, ça nous est permis de faire des dédoublements parce qu'on n'a pas confiance en vous autres, mais vous autres, n'essayez pas d'enlever les dédoublements. Ça me fait... Je «peux-u» vous dire que ça fait dur, ça!

M. Laframboise (Mario): On a un seul organisme de développement économique dans les villes, qui sont les commissariats industriels. Vous rêveriez qu'on vous les transfère quand, vous, vous avez maints ministères qui ne veulent pas faire confiance à cette politique-là pour laquelle le monde municipal vous a appuyé.

M. Chevrette: Non. Là-dessus, je vous arrête, là. M. Laframboise, on va être honnête intellectuellement. Il n'y a plus de programmes, c'est par fonds. C'est des fonds qui vont vous être confiés, que vous allez vous-mêmes décider si vous faites des programmes locaux ou si vous allez faire des programmes de prêts ou des programmes de capital-actions. Pour une partie, je vous ai donné un modèle ou un exemple où la moitié d'un 500 000 $ devrait être consacré au fonds local d'investissement pour du développement. Si c'était seulement de vous engager des employés puis ne pas mettre une cenne dans le développement, je ne marcherais pas plus, moi, puis je n'en accréditerais pas un. J'espère qu'on se comprend bien, là.

On veut faire du développement, là, on n'est pas là pour créer des emplois à trois ou quatre jeunes futés – dans tous les sens du mot, là. On met de l'argent localement, c'est pour du développement local. Et vous étiez au Sommet pareil comme nous. On a dit qu'on mettrait un effort également dans l'économie sociale, parce qu'un emploi dans le domaine de l'économie sociale, c'est une personne de moins sur la sécurité du revenu ou sur l'aide sociale puis c'est une personne de plus qui a retrouvé toute la fierté du travail.

Donc, une partie de l'autre moitié en économie sociale et environ un 100 000 $, 20 % grosso modo, dans les frais de gestion. Si ce n'est pas ça, si c'est pour engager toute une galerie, bien, on ne les accréditera pas parce qu'on n'en a pas besoin. Après ça, on veut un guichet multiservices capable de donner des renseignements, de faire des montages financiers, faire des analyses, faire de la promotion de projet. C'est ça, fondamentalement. Si ce n'est pas ça, entre vous et moi, qu'est-ce qu'on fait là?

On veut éviter qu'il y ait 400 structures comme il y en avait avant, on en propose 120. On en accrédite un, vous nous dites: Il n'y a pas grand ménage de fait. Bien, bonne mère du ciel! Voulez-vous qu'on coupe de moitié? Suggérez-moi dans ce cas-là de ne pas faire trois, quatre CLD dans une municipalité régionale de comté. Il va falloir être logique. Si on en veut moins, dites-moi comment le faire, je vais vous suivre. Vous allez être capable de le vendre, par exemple, vous ne ferez pas ce que certaines unions ont fait: faire des propositions, puis après ça voter contre dans leur union. Minute, là! Moi, je ne me laisserai plus charrier là-dessus. On va exercer un leadership chacun de notre côté, à notre façon, de façon efficace.

M. Laframboise (Mario): Je pense que l'UMQ, au cours des derniers mois, a exercé son leadership.

M. Chevrette: Oui, monsieur; je vous féliciterai à la fin, soyez sans crainte, M. Laframboise.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Laframboise.

M. Laframboise (Mario): Ça va.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va, M. le ministre?

M. Chevrette: Non, je voudrais dire à M. Laframboise qu'au-delà de cela il a participé comme président de CRD, effectivement. D'ailleurs, j'attends le modèle de l'Outaouais. On me dit que ça discute sur un ou deux volets. Puis on ne veut pas de mur-à-mur, et vous le savez, ça. On a travaillé assez fort, autant vous, je pense bien, dans votre milieu, que nous à notre niveau. Ce n'est pas parfait effectivement. Personnellement, si j'avais été capable d'en restreindre encore plus de structures, je l'aurais fait. Je «peux-u» vous dire ça? Ce n'est pas moi qui a décidé que les CJE existaient puis que ça ne serait pas encadré. Vous le savez très, très bien. Ça appartient à un autre ministère sectoriel.

Moi, je l'ai dit, au moins 80 % déjà des SAJE sont intégrés aux CDE, aux corporations de développement économique. On a un bon bout de fait dans ça, mais il y a toutes sortes de structures qui se sont créées au cours des ans. S'il y en a qui veulent se donner des sous-contrats, il va falloir qu'ils se les donnent dans le cadre de la partie d'enveloppe qu'on va garder pour la gestion. On se comprend bien. Si on ne se donne pas ce genre de directive-là, vous avez raison, on va se ramasser avec la moitié des budgets exclusivement en sous-contrats puis en gestion. Et ce n'est pas ça que je veux, moi. L'entente ou le contrat de gestion qu'on va signer, je suppose qu'on va être capable de le discuter correctement. Si vous avez été capable d'ailleurs de vous entendre avec le gouvernement dans une entente, on doit être capable de s'entendre sur une entente de gestion.

M. Laframboise (Mario): Oui, probablement. La seule chose, c'est que, comme je vous le dis, M. le ministre...

La Présidente (Mme Bélanger): Une minute, M. Laframboise, pour répliquer au ministre.

M. Laframboise (Mario): Oui. Il faut quand même que vous reconnaissiez que le monde municipal, dans le développement économique, a fait de très grands efforts au cours des ans. Puis de dire qu'on les tasse parce qu'à quelque part on ne les considère pas comme étant les représentants de la population, puis que leur droit de vote quand dans une région on décide... Puis on était d'accord, on s'en est discuté, qu'il n'y ait pas une organisation qui prenne le contrôle, on était d'accord avec ça. Sauf que présentement, sur le terrain, vos fonctionnaires se battent pour réduire le plus possible la représentativité du monde municipal, et ça, on ne peut pas accepter ça.

On veut prendre notre place parce que, un jour, on espère, que ces organismes-là, cet organisme-là sera le seul véritable guichet unique au Québec. Donc, essayons donc de marcher tous ensemble puis essayez de passer le message sur le terrain que, si dans une région ce qu'on veut c'est une représentativité à 50 % du monde municipal, ça puisse se faire. Puis arrêtons de nous battre encore une fois avec la fonction publique qui essaie par tous les moyens de museler l'effort collectif du monde municipal.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Laframboise, M. le député de Richmond.

(20 h 40)

M. Vallières: Merci, Mme la Présidente. M. Laframboise, d'abord, je commencerai par la conclusion de votre mémoire, si vous me le permettez, pour revenir ensuite à d'autres questions. Vous nous indiquez que l'UMQ souscrit à la création d'un ministère des Régions et au nouveau rôle confié aux conseils régionaux de développement. Donc, j'aimerais connaître votre point de vue plus particulièrement sur les avantages que conférerait la création d'un nouveau ministère par rapport à la structure actuelle qui existe. Puisque vous prenez position pour la création d'un ministère, il serait intéressant de savoir ce que ça comporte comme avantages et comment il se fait, et vous-même y faisiez allusion au début de votre mémoire, que vous aviez participé, je pense, à l'élaboration de certaines recommandations du rapport Brunet et que cedit rapport, lui, recommandait le contraire. Et je vous en lis un texte en page 15 du rapport. On nous disait: «Pour assurer la concertation entre les différents ministères et favoriser l'harmonisation de l'action gouvernementale, il apparaît judicieux – donc, ça a dû être bien pensé – qu'une instance gouvernementale puisse avoir un droit de regard sur les actions gouvernementales en région et que cette instance s'assure de l'application des politiques selon une approche de véritable régionalisation. Il est recommandé que l'instance gouvernementale entre la région et le gouvernement du Québec soit sous la responsabilité du Conseil exécutif, relevant ainsi du premier ministre au Conseil des ministres, afin d'établir un lien hiérarchique facilitant l'action gouvernementale concertée.»

Vous comprendrez que, à quelques mois d'intervalle, c'est un peu difficile à suivre, à moins que ces recommandations-là aient été mises là...

M. Laframboise (Mario): ...peut-être répondre.

M. Vallières: Oui, mais j'aimerais de bonnes explications parce que c'est paradoxal un petit peu. J'aimerais également que, puisque nous y sommes, vous puissiez nous référer à certaines positions que vous avez prises par voie de communiqués au cours, à peu près, de la même période sur ledit sujet, sur les CLD plus particulièrement.

M. Laframboise (Mario): Concernant les allégations du rapport du comité Québec-régions, je me dois de vous dire ma position personnelle, parce que j'étais un des membres de cette commission-là, je n'étais pas celui qui a rédigé le rapport, et les décisions ne se sont pas toutes prises à l'unanimité. J'étais un de ceux des tenants qui voulaient un ministère des Régions. Donc, là-dessus, personnellement... Vous m'avez demandé mon opinion, je vous la donne, j'étais pour la création d'un ministère. Pourquoi? Parce que de la façon dont on voit fonctionner notre fonction publique archaïque, au Québec – excusez la redondance – ça marche par ministère puis c'est peut-être la meilleure façon de protéger les enveloppes puis d'essayer de se battre pour avoir quelque chose. C'est de valeur puis c'est triste à dire, mais c'est ça, et c'est pourquoi j'étais un des tenants; je pourrais même vous sortir des notes où j'ai fait des allocutions sur la formation d'un ministère des Régions. Pour le reste, concernant les communiqués sur les CLD, il faudrait voir lesquels.

M. Vallières: De toute manière, votre explication me satisfait. Ça explique le positionnement. Vous nous avez parlé de financement dans votre mémoire également, et je voudrais que vous nous reveniez sur l'effort prévu de 103 000 000 $ qui avait été prévu originellement par le gouvernement et qui là s'est traduit plutôt en 60 000 000 $ plus récemment. Ça semble être une préoccupation majeure. Que penser de cette implication? Selon vous, l'interprétation que vous faites, est-ce que ces argents-là qui sont consentis par l'État le sont sur une base régulière et permanente, et est-ce qu'ils s'inscrivent à l'intérieur de l'entente de deux ans qui a été signée avec le gouvernement du Québec, entre votre union et le gouvernement du Québec? Une entente qui vient fixer la contribution gouvernementale. En d'autres termes, est-ce que ce 60 000 000 $ vous reconnaissez qu'il est maintenant partie permanente ou va revenir de façon permanente dans le système ou si, après les deux ans d'entente que vous avez signée, il pourrait être remis en cause?

M. Laframboise (Mario): ...vient de signer, là. L'entente qu'on vient de signer avec le gouvernement, vous voulez dire?

M. Vallières: Exact. Qui est bonne pour deux ans, peut-être trois.

M. Laframboise (Mario): Deux ans, peut-être trois. Mais nous c'était plutôt dans le sens de limiter notre contribution plutôt que dans le sens de discuter de la contribuable gouvernementale. Nous, dans l'implication des CLD, ce qui nous inquiétait, c'est la participation du monde municipal et la croissance que le gouvernement aurait pu y voir dans cette participation-là étant donné qu'on ne connaissait pas encore les couleurs du gouvernement quand on a signé l'entente le 23 octobre. Nous, ce qu'on voulait limiter, notre participation, c'était celle de 1996. C'était ça qui était notre intervention.

Concernant le 103 000 000 $, c'est qu'il y a eu des documents sur lesquels on a travaillé puis il y a eu des projets de déposés dans lesquels il y avait 103 400 000 $ de fonds qui étaient disponibles. Le MIQ aurait dû injecter 40 000 000 $; la SQDM, 26 000 000 $; le SDR, 24 000 000 $, puis un autre, 12 000 000 $. Puis on travaillait sur un projet qui avait été déposé par le ministère. C'est ça.

M. Vallières: Dans le projet de loi qu'on a devant nous, est-ce que vous voyez certaines assurances du maintien de cette aide gouvernementale au financement du développement local? Est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans qui vous garantit que ça va être là?

M. Laframboise (Mario): Non, non. Non, ça, là-dessus, là... D'ailleurs, dans le mémoire ce qu'on mentionne, c'est que, étant donné que les fonds ne sont pas assurés, c'est pourquoi la participation du monde municipal est aussi importante, étant donné que c'est nous qui, par la force des choses, seront habilités un jour probablement à subventionner ces organismes-là. Comme notre participation dans les corporations de développement économique s'est toujours accrue avec les années, c'est pourquoi on voulait que la représentativité du monde municipal soit reconnue tout de suite, parce que, un jour, ça va être nous qui allons payer une bonne partie de la facture. C'est l'impression qu'on a, là.

M. Vallières: Oui. On pourrait référer à l'expérience européenne, là. Je ne sais pas si vous avez eu connaissance de ce qui s'est passé, mais on a assisté graduellement à un désengagement de l'État après la mise en place des formules, et c'est localement ensuite que les gens doivent contribuer pour les maintenir.

M. Laframboise (Mario): C'est ça.

M. Vallières: Avec un pouvoir de taxation, dans leur cas.

M. Laframboise (Mario): Mais là on est loin d'accepter ça, là.

M. Vallières: Bon, O.K. C'est ça. On veut vous l'entendre dire. Ha, ha, ha!

M. Laframboise (Mario): Sauf qu'on peut constater aujourd'hui que c'est une possibilité qui peut arriver, là.

M. Vallières: Est-ce que vous avez envisagé une formule différente de celle que l'État vous propose et qui serait plus satisfaisante pour les municipalités au niveau du financement?

M. Laframboise (Mario): Écoutez, la base de la position de l'UMQ, c'est celle des négociations ou de toute la polémique suite à la politique active du marché du travail. C'est un exercice pour lequel le monde municipal s'est impliqué à fond, d'après moi, là, de mémoire de politicien, l'un des plus grands exercices où le monde municipal s'est impliqué.

La volonté évidemment du monde municipal et des citoyens, c'est que toutes les décisions se rapprochent du niveau local, parce que c'est plus accessible, et la volonté du guichet unique, je pense qu'on n'a même plus à se poser la question sur le guichet unique. Le problème, comme je vous disais tantôt, c'est que chaque ministère a le goût d'avoir un guichet unique à cette heure qu'ils ont compris que ça en prenait un, alors que ce n'est pas ça qui devrait se vivre sur le terrain. Donc, est-ce qu'on a prévu une façon différente de financer? Probablement qu'il y aurait beaucoup de choses qui pourraient se regarder, à condition qu'il y ait une véritable volonté de la part des ministères de faire des guichets uniques; ce qui n'est pas le cas, là. On en fait des virtuels, puis tout le monde a des beaux discours. On lit des textes. C'est le cadre de référence, là, 103 000 000 $, qui a été signé par le gouvernement, discuté, et tout ça, qui revient à 60 000 000 $.

Je veux dire, on peut toujours se poser la question pourquoi c'est arrivé à 60 000 000 $, mais une chose qui est sûre, tout le monde, là, présentement, chaque ministère rêve d'avoir un guichet unique. Ils en veulent tous un, sauf qu'il y a plusieurs ministères; il va y avoir plusieurs guichets uniques et, encore une fois, la population va se ramasser à ne plus savoir où aller. Ça, si jamais on arrivait à une structure dans laquelle on pourrait, tout le monde ensemble, contribuer à en n'avoir qu'un seul, peut-être qu'il y aurait des choses à envisager. Nous, on ne l'a pas fait, là, parce que, d'ores et déjà, dès le départ, il y a beaucoup de représentants du monde municipal qui, encore une fois, ne croient pas aujourd'hui que le gouvernement va être capable de faire des guichets uniques, parce qu'il y a trop de pression qui vient de la part de l'appareil, puis à toutes les fois qu'on a essayé on s'est buté. C'est des efforts qui sont intéressants, là.

On s'aperçoit, puis les chiffres sont là, là, on commence haut puis on finit bas; puis c'est toujours comme ça alors que ça devrait être le contraire. Quand c'est une bonne idée, ça devrait commencer bas puis finir très haut. J'espère que c'est ça qui va arriver, là. Mais les fonctionnaires n'ont pas l'air à comprendre que c'est ça que les gens veulent. C'est juste ça.

M. Vallières: Maintenant...

M. Chevrette: ...

M. Laframboise (Mario): Pardon?

M. Chevrette: Ça dépend à quel niveau ils sont.

M. Laframboise (Mario): Oui. Ha, ha, ha!

M. Vallières: La cohérence gouvernementale, dans tout ça, vous parliez tantôt des carrefours jeunesse-emploi, même le ministre y faisait référence en disant: Bien, ça, ce n'est pas moi, les carrefours jeunesse-emploi. Sauf que, quand on parle de la création d'un ministère des Régions, est-ce que vous pensez qu'on va avoir une meilleure assurance que le gouvernement, puis que le ministre responsable du Développement des régions, joue pleinement son rôle de s'assurer de la cohérence de l'action gouvernementale? Ce pouvoir-là existe déjà, là. On n'invente rien en créant le ministère des Régions pour se donner ce pouvoir-là. Il existe, là, présentement, en fonction des pouvoirs qui sont dévolus au ministre responsable du Développement des régions.

Est-ce que ce projet de loi, qu'on a devant nous, vous rassure à ce niveau-là? Est-ce qu'on va être plus cohérent, là, comme dans l'ensemble du gouvernement par rapport aux gestes qu'on va poser avec l'existence d'un ministère des Régions?

M. Laframboise (Mario): Là, vous me posez la question: Est-ce qu'on va être plus cohérent?

M. Chevrette: Attention à ce que vous allez dire!

M. Laframboise (Mario): Oui, là, c'est... Mais, là, c'est parce que... Je me sens bien à l'aise, je vais viser les deux côtés de la table, c'est sûr, là. Ha, ha, ha! C'est pour ça que... Ha, ha, ha!

M. Vallières: Gênez-vous pas. Ha, ha, ha!

M. Laframboise (Mario): Non, non, mais c'est parce que je pense que... vous dire que les politiciens n'ont pas de volonté, là, vous avez tous de la bonne volonté. Dans le développement économique, autant M. Picotte, à l'époque, quand il a formulé la réforme, je pense que c'était intéressant, c'était un premier pas, M. Chevrette essaie beaucoup d'avoir des résultats, sauf que sur le terrain, ça tarde. Et le pire, c'est que c'est la population qui en souffre, là.

(20 h 50)

Le désir d'avoir des guichets uniques multiservices mais multiservices peu importe les ministères, ce n'est pas un rêve, c'est une réalité chez nos citoyens. Sauf qu'en quelque part, nous, les politiciens, on peut le comprendre, vous pouvez le comprendre, mais il y a quelqu'un quelque part qui ne comprend pas, puis c'est probablement, comme dit M. Chevrette, à un plus niveau de fonctionnariat qu'on a un petit peu de misère.

M. Vallières: Bien. Il reste du temps de l'autre côté, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Bélanger): Il n'y a plus de temps de l'autre côté.

M. Vallières: Il n'y a plus de temps? On va continuer, on va continuer.

La Présidente (Mme Bélanger): Bien, non, il n'y a plus de temps, là.

M. Vallières: Non, mais, s'il n'y a plus de temps, non, non, on a ce qu'il faut.

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste encore combien de minutes? Il reste huit minutes du côté de l'opposition.

M. Vallières: J'aimerais entendre M. Laframboise sur l'avènement des CLE. Il y aura les CLD, il y aura les CLE, un autre guichet unique. Comment envisagez-vous les rapports sur le terrain entre les CLE et les CLD compte tenu de ce qu'on retrouve dans le projet de loi actuel et compte tenu de ce qu'on sait des CLE?

M. Laframboise (Mario): Écoutez, je vous l'ai dit tantôt, nous, on était contre la formation des CLE; on aurait tout intégré ça avec les CLD, je veux dire... il n'y a pas de volonté, il n'y en a pas. Évidemment, un représentant qui va siéger, puis à titre de comité orienteur, ça ne fera pas des enfants forts, quant à nous. Je pense qu'on a encore manqué une belle occasion de faire un guichet unique puis ce n'est pas ce projet de loi là qui va le réaliser. Ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas demandé puis ce n'est pas parce que ça ne me ferait pas plaisir de vous le redemander aujourd'hui; il manque probablement un ministère autour de la table.

M. Vallières: Il y a des différences fondamentales qui s'expriment sur la réduction du nombre d'organismes. Vous n'êtes pas les premiers à nous dire ça, et il y a juste le ministre à date qui nous dit que ça va avoir un effet réel, puis important, là, parce qu'il mentionne même une réduction de 240 organismes.

Alors, ça, est-ce que c'est l'expérience du terrain ou l'expérience des transactions que vous avez déjà eues avec le gouvernement du Québec qui vous inspirent que la réduction comme telle du nombre d'organismes envisagée par le ministre, ça ne se traduira pas sur le terrain comme il pense? C'est sûr que les objectifs, c'est toujours louable quand on a un projet de loi comme ça, il y a toujours des objectifs qu'on partage, mais ce que vous semblez nous dire en même temps, c'est que vous doutez énormément que ça puisse véritablement donner l'effet escompté au niveau de la réduction du nombre de structures qui interviennent en développement économique dans les régions du Québec.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, quand on vous disait, tantôt, c'est parce que j'ai les chiffres, il y en a 400 organismes qui présentement végètent dans le domaine économique; ça, c'est ceux qui font affaire avec nous puis c'est à part de ceux dont on rêverait qu'ils fassent affaire avec nous.

Vous avez 120 corporations de développement économique qui, elles, seront intégrées; il y a sept CDEC, ça, les CDEC, ce n'est pas évident que ça va être intégré; 99 sociétés d'aide aux jeunes entrepreneurs, des SAJE, les SAJE devraient être intégrées, mais tout dépendant des régions aussi, mais elles étaient en partie déjà intégrées aux corporations de développement économique, à 80 %; 46 carrefours jeunesse-emploi qui, eux autres, ne le seront pas; 87 fonds d'investissement local, des FIL, les fameux fonds d'investissement local, qui ne le seront pas, parce qu'il y en a... en tout cas, le mien, chez nous, j'ai une participation avec le SADC, donc évidemment, quand le SADC est là puis que le fédéral est là, ça ne sera pas intégré à l'organisation provincial.

Donc, là, je vous en nomme 400 pour lesquels, sur les 400, bien on va en avoir probablement 200 d'intégrés; ça fait qu'il va en rester encore 200 sur le terrain. Tu sais, je veux dire, c'est uniquement dans les domaines qui nous touchent, on n'a pas parlé des autres ministères puis des autres choses, on parle de ceux avec qui on vit sur le terrain puis qui sont plus près de nous. Puis comme je vous dis, ça ne comprend pas ceux dont on rêverait qu'ils descendent en bas puis qu'ils viennent jaser avec nous autres.

M. Vallières: Quand, M. Laframboise, vous voyez la façon dont les CLD vont fonctionner, est-ce que vous êtes toujours content d'avoir donné l'aval de façon unanime au gouvernement du Québec, par le biais du projet de loi n° 137, sur une base volontaire, de financer les organismes de développement local?

Une voix: ...obligatoire.

M. Vallières: De façon obligatoire. Oui. Non, c'est vraiment obligatoire.

M. Laframboise (Mario): Bien, écoutez, oui, mais, si on avait eu à reprendre la décision avec les enveloppes... parce que le 103 000 000 $, c'est avec ce cadre de référence là qu'on a pris la décision à l'époque. Je veux dire, si on continue à les éplucher puis à ne plus en avoir, en quelque part... En tout cas, je vous le dis l'UMQ, le développement économique, elle y tient puis c'est pourquoi elle avait donner son aval à ça. Les centres locaux, les guichets uniques, on avait donné notre aval puis il ne faut pas oublier que c'était avant la conclusion puis avant qu'on forme des CLE puis des CLD. C'était dans l'époque de la politique active où on était supposé d'intégrer tout ça, puis finalement...

Je ne vous dis pas qu'on changerait d'idée. Je «peux-u» juste vous dire qu'il y aurait des questionnements, puis on jaserait, puis on signerait probablement des protocoles d'entente, puis on serait pas mal plus exigeant sur les signatures? C'est rarement la volonté du ministre responsable du développement économique régional.

C'est pour ça que je vous dis: Qu'il y ait un ministère des Régions, on ne peut que renforcer ça. Sauf qu'on s'aperçoit que dans plein de ministères il y a de l'argent pour le développement. Et puis ça, tous ces ministères-là n'ont pas de désir nécessairement à ce qui... Il y en a dans la Santé, il y en a au Revenu, il y en a dans toutes sortes de ministères, ces gens-là dépensent sur le terrain, puis, quand vient le temps d'avoir des bonnes idées puis de descendre ça en bas, bien, ils préfèrent se créer un guichet unique puis essayer eux autres aussi d'avoir trouvé la vraie solution. Puis là ça fait que chacun des ministères va avoir un guichet unique. Finalement, le citoyen va être encore aussi perdu qu'il était avant, jusqu'à temps qu'il y ait un autre gouvernement qui arrive probablement puis qui décide d'abolir les huit guichets uniques pour en faire un. Puis, il en restera quatre probablement. Puis ça en prendra un autre pour les diviser en deux. Puis... C'est comme ça.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Montmagny-L'Islet, deux minutes.

M. Gauvin: Merci, Mme la Présidente. M. Laframboise, on a traité les doutes que vous aviez envers la capacité de ce projet de loi là, la formation des CLD, d'atteindre leur objectif, soit de tenter de se regrouper autour d'un guichet unique. Je pense qu'on l'a traité. Vous avez des doutes. On a parlé du financement, là aussi où ce n'est pas évident et ce n'est pas clair pour tout le monde.

J'aimerais vous ramener sur ce que M. le ministre tantôt a semblé accrocher comme partie intéressante, une représentation à cette table en fonction des budgets de chacune des municipalités ou chacune des régions. Moi, je m'étais pris une note ici où on invitait tout le monde à la très grande prudence avec une formule comme celle-là. Comment vous voyez ça?

M. Laframboise (Mario): Écoutez, c'est parce que c'est comme je vous disais tantôt, c'est que, nous, on n'investit pas dans des programmes. Il y a de nouveaux programmes qui sont arrivés avec la nouvelle économie, comme l'économie sociale, on a des sous qui sont des programmes; la lutte à la pauvreté, on aurait un nouveau programme. Évidemment, c'est des choses que le monde municipal n'a jamais investi, en tout cas des sommes pour des subventions – ce que probablement notre population a un petit peu de difficulté à vivre avec, là – mais dans le fonctionnement de l'organisme... c'est pour ça que je disais à M. le ministre dans le fonctionnement de l'organisme, dans beaucoup d'endroits, on paie le même montant, si ce n'est pas plus, puis ça dans le fonctionnement d'une organisation régionale qui pourrait être un guichet unique.

Là, c'est sûr que je n'accepterai pas la représentativité si on nous dit 20 %. Là, évidemment, qui est-ce qui va venir sur les sièges? Si ce sont les élus provinciaux qui viennent, bien là on vivra avec les députés, le député, puis un représentant du monde municipal parce que le monde municipal paie; le député aura quatre votes puis le monde municipal aura un vote. Mais je veux dire, à ce moment-là, si on veut noyer la représentativité gouvernementale avec des représentants du socioéconomique communautaire, puis ci, puis ça, là on a un peu de problème.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Laframboise. Une minute pour le ministre.

M. Chevrette: Je voudrais remercier M. Laframboise. Merci de votre collaboration. Je vous le dis tout de suite, je suis même intéressé à la vôtre, vendredi, 12 h 30; 12 h 30, rendez-vous, avec votre Union, si vous voulez, au SDR. Vous avez fait une offre de collaboration; je suis prêt à la prendre au vol. Vendredi, 12 h 30.

Le 103 000 000 $, il sera dépassé. Je peux vous dire qu'actuellement, avec les enveloppes dédiées, c'est plus que 108 000 000 $. Ensuite, je vous dis tout de suite que nous ferons connaître publiquement l'offre de recul jusqu'au 1er février. Également, je vous dis tout de suite que j'apporterai des amendements, que les députés n'auront plus le droit de vote aux CLD.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Un mot de la fin, M. le député de Richmond.

(21 heures)

M. Vallières: Oui. Bien, je veux remercier l'Union qui, malgré encore une fois les courts délais, s'est présentée devant nous et l'inviter, au fil de nos travaux en commission parlementaire dans l'article par article – je sais qu'elle va suivre nos travaux avec attention – s'il y a des choses qu'elle jugerait utile de nous transmettre, à bien vouloir le faire. On est là pour arriver dans toute la mesure du possible à bonifier certains éléments qui sont contenus... Je dis bien «certains éléments», il y en a d'autres auxquels on s'oppose carrément, mais ceux qu'on veut bonifier, on pourra avec vous convenir qu'on puisse contribuer avec le gouvernement à les améliorer. Merci de votre contribution.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Laframboise. Merci, M. Therrien. Nous allons suspendre quelques instants, le temps de changer d'invités.

(Suspension de la séance à 21 h 1)

(Reprise à 21 h 5)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! MM. les députés et Mme la députée, la commission reprend ses travaux. Le mandat est toujours de procéder à des consultations particulières et à des auditions publiques sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions.


Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec (UMRCQ)

Nous recevons maintenant l'UMRCQ, représentée par M. Florian Saint-Onge, premier vice-président. Je demanderais à M. Saint-Onge de présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 20 minutes pour votre mémoire, qui seront suivies de 20 minutes de questionnement du côté ministériel et de 20 minutes du côté de l'opposition.

M. Saint-Onge (Florian): Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, à ma droite, notre conseillère juridique, Mme Isabelle Chouinard, et, à ma gauche, notre directeur général, M. Michel Fernet.

Considérant que vous avez un résumé de notre mémoire, Mme la Présidente, si vous me permettez, j'aimerais y faire un préambule. Ha, ha, ha! Je voudrais souligner que notre mémoire, comme vous le verrez dans le document plus complet, reflète un peu les revendications traditionnelles que l'UMRCQ a toujours posées lors des grandes discussions sur la décentralisation et particulièrement sur le leadership qui a été exercé et qui est encore exercé par les élus municipaux dans le développement local et dans la création d'emplois. Il ne faut donc pas vous surprendre que nous profitions de cette opportunité pour revenir à la charge dans certaines suggestions. Et, considérant que nous n'avons pas pu convaincre le ministre depuis un an, je dois souligner cependant que ce n'est pas le ministre ni les élus gouvernementaux que nous visions par nos prises de position, mais bien plutôt que nous avons toujours pensé que ce qu'on préconisait était encore la meilleure façon de répondre aux attentes des sans-emploi et de nos contribuables en général.

Alors, la Politique de soutien au développement local et régional, qui est à l'origine du projet de loi sous étude, a suscité de vives réactions chez les élus municipaux, qui ont acheminé par centaines les résolutions demandant des modifications. Après tant d'années d'efforts et d'actions concrètes en matière de développement local, après tant de promesses de décentralisation en matière de développement économique, les élus sont évidemment déçus de cette politique de régionalisation, ou déconcentration, si vous voulez, qui ne tient pas compte de leur imputabilité. Notre mémoire présente en premier lieu la position du monde municipal en matière de développement économique, et, dans un deuxième temps, de façon subsidiaire, nous suggérerons des modifications au cadre légal et administratif proposé.

La politique gouvernementale en matière de développement local et régional retient la création d'une structure additionnelle sur le territoire de la MRC que les MRC auront l'obligation de financer. Aucun des groupes représentés au conseil d'administration ne devra détenir la majorité des voix, ce qui implique qu'aucun groupe d'élus imputables n'aura de contrôle sur la gestion des 120 000 000 $ de fonds publics injectés annuellement.

L'intérêt des municipalités et des MRC pour le développement économique de leur territoire est incontestable; leur implication à cet égard parle d'elle-même. Il suffit de mentionner la création des corporations de développement économique et la mise sur pied de 86 sociétés d'investissement pour le développement de l'emploi, les SOLIDE, lesquelles ont permis de créer 3 155 emplois nouveaux, au 30 juin 1997. Malheureusement, nous n'avons pas les données depuis ce temps-là. Elles sont augmentées, cependant. Les MRC auraient donc pu prendre en charge le développement économique. Évidemment, il en aurait résulté des économies substantielles de gestion canalisées en aide directe au développement de l'emploi.

Le choix que fait le gouvernement avec l'implantation des CLD réduit les municipalités au rôle de bailleurs de fonds sans pouvoir décisionnel réel, c'est-à-dire des intervenants parmi d'autres. On retire une fois de plus aux élus le contrôle de deniers publics dont ils sont redevables devant leur population. De plus, on limite et on encadre le leadership dont ils ont fait preuve au cours des dernières années dans la mobilisation des forces vives du milieu.

(21 h 10)

Selon le ministre Chevrette, si la MRC ne doit pas détenir le contrôle du CLD, c'est pour assurer la représentativité des différents intervenants du milieu. Nous sommes évidemment en désaccord avec cet argument. D'abord, la prémisse selon laquelle les élus municipaux représentent un groupe au même titre que les autres est fausse, à notre avis. Les élus municipaux détiennent leur mandat de l'ensemble de leur communauté locale et sont imputables devant tous les citoyens, qu'ils soient travailleurs, gens d'affaires ou autres. De plus, les élus municipaux ont jusqu'à maintenant démontré qu'ils ne travaillent pas en vase clos pour le développement de leur milieu. Incidemment, ils sont passés maîtres dans la consultation et la concertation: à preuve, les nombreux villages prospères où les élus locaux ont réussi à créer un climat de coopération tel qu'on assiste à un abaissement des taux de chômage et à une croissance économique de ces milieux.

Le gouvernement prétend également que ce n'est que dans un Québec souverain qu'on pourra décentraliser aux institutions locales des leviers indispensables pour leur développement économique. En dépit de ses engagements antérieurs, le gouvernement veut éviter cette voie au prix d'un accroc important à la démocratie. Pourtant, la différence est ténue entre, d'une part, confier le pouvoir décisionnel à un groupe de citoyens non élus, et donc ne représentant que des intérêts sectoriels, et, d'autre part, confier le même pouvoir aux élus imputables. Peut-être que la collaboration entre les MRC et les sociétés d'aide au développement des collectivités est un élément qui a incité le ministre à créer une nouvelle structure. Il a en effet annoncé que l'implication des SADC au sein des CLD serait refusée. Bien sûr, nous condamnons cette surenchère du gouvernement fédéral en développement local, mais pouvons-nous réellement nous permettre de rejeter l'aide additionnelle d'un autre gouvernement tant que nous y contribuons et refuser l'alliance de toutes les expertises du milieu? L'UMRCQ répond par la négative.

La MRC de Mékinac a développé une approche originale qui répond aux préoccupations du milieu. Nous suggérons donc que les balises du projet de loi soient modifiées pour permettre l'implantation de ce modèle qui relie l'ensemble des municipalités régionales de comté. Cette MRC a créé une commission consultative de développement économique relevant directement du conseil de la MRC. Cette Commission joue en quelque sorte le rôle que confie le projet de loi au CLD, mais sous l'autorité décisionnelle des élus au conseil de la MRC. La Commission est composée de représentants de l'ensemble des secteurs d'activité socioéconomique du territoire, à l'instar de ce que propose le projet de loi pour la composition du CLD.

On a également mis en place un service de développement économique offrant directement de l'aide aux entrepreneurs et aux entreprises. La gestion de la SOLIDE, du SAJE et des autres programmes relatifs à l'entrepreneurship et à la création d'emplois auraient été sous la responsabilité de ce service. Ainsi, plutôt que de créer une structure additionnelle, le conseil de la MRC prend en charge ce qui tient lieu de CLD. Les élus conservent donc la responsabilité de la gestion des deniers publics dont ils sont redevables tout en respectant l'objectif visé par le ministre Chevrette d'allier les forces vives du milieu.

Si le gouvernement refuse de confier aux élus locaux la gestion du développement économique selon le modèle que nous venons de décrire, nous suggérons que les modifications suivantes soient à tout le moins apportées au cadre législatif et administratif proposé.

Le projet de loi prévoit que le centre local de développement aura notamment pour mandat de regrouper et de coordonner les différents services d'aide et d'assurer le financement de ces services. La fonction de coordination des différents services d'aide sur le territoire n'offre pas de garantie d'un guichet unique pour l'entrepreneur. Ce terme laisse plutôt planer la possibilité d'un service qui aiguillera l'entrepreneur dans le labyrinthe des services existants sans réellement les intégrer. Nous suggérons donc un amendement à l'article 13 du projet de loi afin de prévoir que le CLD regroupe ou intègre les différents services d'aide à l'entrepreneuriat sur le territoire. Cette modification offrirait la garantie que les services d'aide à l'entrepreneuriat soient offerts en un même endroit.

Au sujet des services qu'aura à financer le CLD, permettez-nous quelques suggestions, bien qu'elles ne concernent pas le libellé législatif comme tel. Ce n'est pas le capital de risque qui fait défaut, M. Chevrette a déjà annoncé 29 200 000 $ pour les fonds locaux d'investissement des CLD. Les quelque 80 SOLIDE déjà en opération disposent d'au moins 500 000 $ chacune. La principale lacune à combler est plutôt la disponibilité de spécialistes en soutien à l'entrepreneurship sur le terrain. Il faut d'abord développer la culture entrepreneuriale pour susciter l'émergence de nouveaux projets de démarrage d'entreprises. Le capital humain est donc la base à privilégier, au cours des prochaines années, afin d'offrir les services spécialisés indispensables pour supporter le prédémarrage, le démarrage et l'expansion de l'entreprise qui demandent chacune une intervention particulière. Nous suggérons aussi que le ministre incite les CLD à favoriser la voie du soutien à l'entrepreneuriat plutôt que d'injecter de nouvelles sommes importantes en capital de risque. Cette orientation pourrait être inscrite dans l'entente tripartite qui sera signée entre la MRC, le CLD et le ministre.

Concernant les autres mandats que lui confiera le gouvernement, l'UMRCQ souhaite obtenir l'assurance du ministre que le CLD ne se verra pas attribuer de responsabilités devant relever de la MRC. Incidemment, l'annonce du ministre à l'effet que le CLD administrerait une enveloppe dédiée à la forêt habitée, dans le cadre d'un programme gouvernemental actuellement en élaboration, inquiète plusieurs MRC, particulièrement celles qui bénéficient déjà d'ententes avec le ministère des Ressources naturelles concernant la gestion des baux de villégiature et des lots intramunicipaux.

Le CLD sera financé presque à 50 % par le monde municipal. Pour cette raison, il nous semble légitime de demander les amendements suivants au projet de loi: une modification à l'article 8 afin que le CLD soit agréé par le ministre et la MRC pour pouvoir agir à ce titre; une modification à l'article 15, maintenant, afin que le CLD produise annuellement à la MRC et au ministre un rapport de ses activités ainsi que ses états financiers.

Pour ce qui est de l'entente déterminant les conditions que le CLD s'engage à respecter et qui sera conclue avec le ministre et la MRC, nous demandons au ministre une grande ouverture pour que cette dernière puisse y inscrire les attentes qu'elle juge raisonnable, compte tenu du financement qu'elle assure. Particulièrement, la MRC devrait pouvoir y fixer ses objectifs globaux de création d'emplois.

Les principales informations notamment sur le financement gouvernemental du CLD sont arrivées très tardivement dans les MRC, soit à la fin de novembre. En conséquence, la date du 16 janvier pour la transmission du dossier complet par la MRC semble poser problème, compte tenu notamment du congé des Fêtes. Nous demandons au ministre de prolonger ce délai d'un mois.

Le gouvernement a réduit considérablement son aide pour 1998 en matière de soutien à l'entrepreneuriat. De plus, près de 14 000 000 $ sont consentis pour la région métropolitaine, laissant sur leur appétit les intervenants des autres régions avec les 46 000 000 $ restants. L'UMRCQ est préoccupée par les enveloppes réservées dans le financement des CLD. Selon la ventilation annoncée le 24 novembre dernier, il y aurait davantage d'argent dans l'économie sociale – 17 500 000 $ – que dans le fonctionnement des CLD – 13 000 000 $. Or, c'est cette dernière enveloppe qui permettra l'embauche de ressources humaines essentielles dans le soutien aux entreprises. Compte tenu de la diminution des sommes injectées en développement économique en région, les enveloppes transférées ne doivent pas être dédiées à un domaine particulier. Il faut laisser les CLD gérer les sommes selon les particularités et les besoins propres dans chaque MRC. C'est là l'utilité d'une régionalisation ou d'une décentralisation.

Le ministre responsable du Développement des régions doit relever un triple défi pour la mise en oeuvre des CLD: d'abord, leur implantation dans un délai très court, soit le 1er avril; ensuite, l'avènement d'une nouvelle culture entrepreneuriale et son intégration dans la gestion du développement local; finalement, l'implication active des élus locaux dans un contexte de gestion de la décroissance. L'UMRCQ offre ses services pour initier une courte formation – supposons deux jours – pour les futurs membres des conseils d'administration des CLD. Elle croit que la formation demeure la meilleure façon de diffuser la nouvelle culture des CLD et de favoriser la collaboration du milieu. D'ailleurs, l'expérience avec les SOLIDE le démontre très clairement. Notre service expérimenté de formation croit pouvoir relever ce défi si une décision est prise rapidement et si des budgets appropriés sont consentis à cette fonction. Si nous le soulignons, c'est que nous avons d'agréables échos de la part de nos gens qui ont suivi des cours avec les gens des conseils des SOLIDE, et ils ont trouvé très pertinente cette formation.

Alors, en conclusion, maintenant, le principe démocratique à la base de notre société selon lequel les élus doivent pouvoir exercer un contrôle sur les deniers perçus de la population aurait été respecté si le gouvernement avait confié la gestion des CLD au monde municipal. Nous l'avons répété à plusieurs reprises dans le mémoire, le développement économique est une priorité pour les élus municipaux. Sortir leur milieu du marasme économique est souvent l'objectif qui les motive à poursuivre leur implication dans le secteur municipal malgré le contexte de plus en plus difficile occasionné par les transferts de factures des dernières années.

(21 h 20)

Bien que la réforme ne réponde que partiellement à leurs attentes, nous sommes convaincus que les élus occuperont toute la place qu'on leur réserve pour le mieux-être de leur population et sauront faire des CLD le meilleur instrument possible dans l'encadrement actuel. L'UMRCQ travaillera en ce sens et s'offre à nouveau pour assurer une formation adéquate aux intervenants. Je vous remercie, Mme la Présidente, mesdames, messieurs.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Saint-Onge. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Ce soir, j'ai failli envoyer mon attaché politique à ma place. J'ai eu peur que vous fassiez les gorges chaudes. Ça m'a tenté de nommer ma sous-ministre, mais j'ai compris, comme le disait si bien votre D.G., qu'un élu, ça parle à un élu, donc j'ai décidé de m'asseoir pour vous parler.

Je voudrais tout d'abord vous parler de décentralisation. La décentralisation, vous semblez la réclamer, et, à ce que je sache, il y a un accord de 150 000 000 $ entre le gouvernement et deux grandes unions puis il y a un accord sur 3 000 000 $ entre les deux Unions depuis le 14 septembre 1995. Est-ce qu'on ne pourrait pas commencer, avant de réclamer de la décentralisation, par s'entendre sur comment décentraliser le 150 000 000 $? Ça serait déjà un pas dans la bonne direction, au lieu de reprocher au gouvernement de ne pas aller vers la décentralisation.

Deuxièmement, c'est vrai que le gouvernement a décidé de ne pas décentraliser après le référendum. D'abord, on ne décentralise pas ce qu'on n'a pas. On a toujours dit qu'on décentraliserait le 29 000 000 000 $ si on le récupérait, mais que, dans les circonstances, on risquerait de marginaliser l'État du Québec parce que le gouvernement central aurait tendance à passer par-dessus la tête du gouvernement et à aller directement aux groupes. Et vous me donnez la preuve écrite de cela dans le paragraphe de la page 3 où vous dites que vous aimeriez donc vous entendre avec les SADC puis ne pas être privés des argents gouvernementaux fédéraux. On ne l'est même pas, on n'a même pas obtenu ce qu'on voulait et vous êtes déjà prêts à nous laisser passer par-dessus la tête pour qu'on aille directement à vous et à faire fi de toutes les politiques qu'on pourrait avoir au Québec. Déjà, on avait peur de la marginalisation, et vous nous donnez la preuve noir sur blanc, à votre page 3, que vous êtes prêts à faire ça en tout temps. On «avait-u» raison en mosus de s'inquiéter? Parce que vous nous l'écrivez même ce soir. Je vous remercie, au moins, de votre franchise.

Vous parlez également des mandats du CLD et que ça veut devenir un labyrinthe. Je ne sais pas pourquoi vous dites ça. Pourquoi, si c'était vous qui faisiez la coordination ou l'intégration, ce serait possible puis ce serait beau sans labyrinthe puis que les autres ne peuvent pas faire de même avec une directive? Est-ce que c'est le monde de l'institutionnel, les employeurs, les entrepreneurs, les travailleurs, le monde coopératif, le communautaire qui ne sont pas habitués à faire, eux autres aussi, un mandat comme c'est prévu à l'article 13.1° de la loi que vous avez devant vous? Il me semble que ce n'est pas si mal. Ils ont déjà fait la preuve dans le passé que de façon simpliste ils pouvaient régler des choses, eux autres aussi.

Ce qui m'épate, c'est que vous dites qu'il sera financé à 50 % par le monde municipal, alors que mon décompte aujourd'hui même fait en sorte que seulement cinq MRC sur 96 paieront ou l'équivalent ou un petit peu plus, puis que 91 vont payer beaucoup moins que le gouvernement. C'était le décompte d'aujourd'hui dans chacune des MRC du Québec.

Je ne sais pas comment vous pouvez affirmer, à la page 5: «Le CLD sera financé presque à 50 % par le monde municipal.» En tout cas, on pourra confronter nos chiffres. Mais, quand on affirme quelque chose, ce n'est pas de l'inflation verbale qu'on veut avoir, c'est des faits. Je vous dis, moi, par vérification aujourd'hui même, que ce n'est pas la réalité, que c'est cinq sur 96. Le sens de la mesure, s'il vous plaît.

À la page 6, vous me faites une proposition qui me semble le fun, là, une modification à l'article 15 afin que les CLD puissent produire annuellement un rapport. Je pense que oui et même je pense qu'on a eu une suggestion cet après-midi de rapport plus global aux deux ans ou trois ans, mais sur le nombre d'emplois. Ça a été fait par la Chambre de commerce, je crois...

Une voix: Les manufacturiers.

M. Chevrette: ...ou les manufacturiers québécois, et je trouve ça intéressant comme formule.

Quant au financement par le gouvernement, on donnera les chiffres textuels, là, parce que tout le monde s'essaie sur les chiffres. Je peux vous dire que, sur le plan du développement des régions, on a annoncé 103 000 000 $, il y aura plus que ça, même. Il y aura quelques enveloppes dédiées, il y aura des enveloppes pour le CRD, il y aura des enveloppes pour les CLD, il y aura des enveloppes également venant des politiques de la PAMT, conversion de mesures passives en mesures actives, il y aura des sommes très précises qui seront annoncées, le moment venu.

Mais, quand on dit dans un mémoire que plus de 14 000 000 $ sont consentis pour la région métropolitaine, oui, je m'excuse, c'est vrai. C'est vrai, puis, à Montréal, il y aurait 1 000 000 et quelques 100 000 personnes. Puis 3 000 000 $ à Montréal, 3 000 000 $ en Montérégie, 3 000 000 $ à Laval, 3 000 000 $ à Lanaudière, 3 000 000 $ dans la Basse-Côte-Nord, 3 000 000 $ partout, je ne suis pas sûr que ce soit très, très intelligent et je ne suis pas sûr que l'UMRCQ ne devrait pas me suggérer plutôt une banque de péréquation. Je ne suis pas sûr que l'UMRCQ ne devrait pas préconiser qu'on se base sur des critères très objectifs comme la population – c'en est un – comme l'indice de pauvreté – c'en est un deuxième – comme le taux de chômage – c'en est un troisième. Il me semble qu'on doit chercher collectivement à trouver des critères qui soient un tantinet objectifs. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que je trouve ça pour le moins – comment dirais-je – une insinuation souterraine du fait que c'est beaucoup trop pour Montréal, 14 000 000 $. Ce n'était peut-être pas assez, 3 000 000 $ comme tout le monde, au moment où on a mis 3 000 000 $ à tout le monde. C'est peut-être plus intelligent, la formule qu'on préconise aujourd'hui, qui n'est pas contestée à la grandeur du Québec, d'ailleurs, en passant, hein? Il y a juste une région au Québec qui a mis des nuances, parce que, dans 95 % des cas, c'est accepté presque unanimement, les trois critères qu'on a mis de l'avant. J'aimerais vous entendre là-dessus, voir si vous contestez ça aussi.

Et je pense que, au stade où on en est, vous savez très bien que le gouvernement a fait son lit sur la politique de développement régional. Vous savez très, très bien que ça a fait le tour du Québec puis que ça fait consensus. J'aimerais savoir pourquoi vous accrochez de façon très persistante à quelque chose qui n'est plus en processus de décision, qui est décidé! Est-ce que votre participation, à ce moment-là, ne doit pas être spontanée à la bonification plutôt qu'à l'acharnement?

Et, comme vous le savez, j'ai l'habitude de donner l'heure juste. Quand il est 21 h 30, moi, il n'est pas 20 h 27 et, quand je rencontre une union, que ce soit à huis clos ou que ce soit public, sans journalistes, j'aime bien ça que, le lendemain, on reconnaisse les propos que j'ai dits, si on se permet de les dire. J'ai eu des expériences très fâcheuses avec vous autres. Je me rappelle quand j'ai transféré le 47 000 000 $ aux municipalités, j'avais rencontré Mme Simard et M. Fernet. On m'avait dit devant deux témoins: Dérange-nous donc pas pour des «peanuts» de même. Le lendemain, le sac de «peanuts» était devenu plus gros que le transfert de 500 000 000 $ fait par M. Ryan. Je n'aime pas ce genre d'attitude, et c'est un peu pour ça aujourd'hui que j'aimerais qu'on soit très clairs, très fair-play, très transparents dans nos propos et qu'on agisse de façon à se bâtir une crédibilité mutuelle.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Saint-Onge.

M. Saint-Onge (Florian): Mme la Présidente, je sais que le ministre a été distrait, au début. Lorsque j'ai fait mon préambule avant d'aborder le résumé, je vous ai dit que c'était dans nos revendications passées et que nous avions ce style direct, cette franchise, et c'est la raison pour laquelle je disais qu'on se reprenait, ce soir; vous nous en donnez une opportunité. Évidemment, il n'y a peut-être pas tout le monde qui a compris ce à quoi faisait allusion le ministre, tantôt, concernant sa sous-ministre ou son délégué, mais, M. le ministre, je vous donnerai une copie de lettre tantôt, à moins que vous l'ayez déjà lue.

(21 h 30)

J'aimerais souligner d'abord que, lorsque vous faites allusion à la décentralisation, M. le ministre, je vais être très objectif parce que les deux gouvernements avaient fait leur élection, je me souviens très bien, en campagne électorale, sur la décentralisation. Et je crois que, par cet engagement ou ces promesses, vous avez créé de l'espoir, vous avez créé des attentes de notre côté, et évidemment nos gens se sont fait dire qu'on n'enverra pas de responsabilités, parce qu'on réclamait, oui, des responsabilités mais avec les ressources.

Alors, il va sans dire que, quand on avance évidemment un tel programme de décentralisation, on a l'espoir et on est prêt à s'engager dans cette voie-là; évidemment on s'attend aussi que les ressources vont venir. Alors, je pense que c'est peut-être dans ce sens-là qu'on a toujours continué. Et évidemment on s'en vient dans une commission parlementaire, on espère que les décisions ne sont pas toutes prises, et c'est pour ça dans le fond que... D'avance, vous nous annoncez que la décision est prise.

Remarquez bien, on essaie jusqu'à la dernière minute de vous influencer, c'est notre rôle, et on se base sur les revendications... Je suis ici comme porte-parole, vous le savez de toute façon, et ce que j'entends de mes collègues, c'est bien évident que c'est ça qu'on nous a dit, et ça a toujours été le même engagement. Alors, c'est donc la raison pour laquelle on espère encore pouvoir influencer.

Dans la question de labyrinthe, je crois que, oui, il y a eu beaucoup d'interrogations, M. le ministre, et il y en a encore. D'ailleurs, ça a pris un certain temps avant d'avoir beaucoup de réponses. On faisait des réunions, même avec les gens qui ont représenté le gouvernement, on a eu de grandes réunions, on a posé des questions, on n'avait pas toujours des réponses. On n'en voulait pas aux gens qui étaient devant nous, mais seulement que les gens voulaient avancer dans ce sens-là, et on ne pouvait pas avancer. C'est donc la raison pour laquelle encore aujourd'hui, même quand je regarde ce que j'ai vécu vendredi avec des collègues qui me donnaient des échos, il y a encore des espèces de lutte ou de chicane pour avoir encore de plus en plus de place dans les CLD. Écoutez, on ne veut pas créer des CLD avec 50 personnes autour de la table et on sent ça actuellement encore. C'est peut-être parce que ça pris du temps, peut-être qu'à ce moment-là aussi vous n'étiez pas prêt, mais de toute façon.

Oui, je vais faire allusion à Montréal, M. le ministre. Vous avez fait allusion au taux de chômage, à la population, à des critères, je pense que nous sommes d'accord sur le principe de trouver ces critères-là. Vous nous demandez de réagir, je pense que là-dessus on est capable de comprendre ça. D'ailleurs, si vous souvenez, dans la prise de position concernant le 500 000 000 $ dans le temps, on avait même souligné et montré du doigt que nous étions favorables à ce que Montréal et Québec soient aidées et non pas l'ensemble des municipalités-centres. Alors, de ce côté-là, ce n'est pas à cause de ça qu'on a soulevé cette question, c'est du fait qu'on croit, à moins qu'on ne se trompe, que c'est une réduction des chiffres que vous avez. Parce que nous pensions qu'en 1996 il y avait eu 128 000 000 $ et actuellement du fait d'avoir le 14 000 000 $, donc à ce moment-là on se dit: Il va donc y avoir une réduction pour l'ensemble. C'est dans ce sens-là. Alors, je réagis spontanément. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter d'autre chose.

M. Chevrette: J'ai deux questions additionnelles. Que diriez-vous d'être représenté au pourcentage de votre participation financière globale?

M. Saint-Onge (Florian): Là, vous prenez un critère seul.

M. Chevrette: Pardon?

M. Saint-Onge (Florian): Vous prenez un seul critère.

M. Chevrette: Je vous pose une question, là. Votre représentation au niveau des CLD, supposons qu'une MRC participe à 20 %, seriez-vous d'accord pour qu'elle ait une représentativité de 20 %?

M. Saint-Onge (Florian): Avec le gouvernement ou 20 % de quoi?

M. Chevrette: Non, non. Je suppose que je paie 80 % comme gouvernement et que vous payez 20 %, êtes-vous d'accord d'être représenté à 20 %?

M. Saint-Onge (Florian): Premièrement, je ne pense pas que ça arrive.

M. Chevrette: Non, mais, si ça arrivait, si on vous donnait par exemple... Pour les sommes globales versées par le gouvernement dans Pabok, 80,39 % par le gouvernement, 20,92 %, mettons, excusez, pas 20,92 % mais 19 % et quelque chose par la MRC, est-ce que vous seriez d'accord dans ces proportions-là? On établirait le montant que vous donnez et le montant qu'on donne, ça fait tel pourcentage, vous avez telle représentativité. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Saint-Onge (Florian): Bien, écoutez, M. le ministre, Mme la Présidente, je pense que le ministre pose une question peut-être hypothétique, je ne le sais pas, mais d'un autre côté je crois que, si on considère, je ne sais pas, quand on regarde l'ensemble du territoire du Québec, si c'est une forme de péréquation, par exemple, d'en avoir moins ou de participer moins pour une MRC, moi, je me dis, c'est vous qui avez ce point de vue-là comme gouvernement.

M. Chevrette: Je vous pose une question sur ce que vous en pensez; avez-vous une idée?

M. Saint-Onge (Florian): Bien, à ce moment-là, 20 %, ce n'est pas fort, là, remarquez bien, mais, si pour vous autres vous acceptez que le 20 % ça fasse partie de votre péréquation d'aider des milieux qui sont en difficulté, qui sont pauvres – je prends vos critères de tantôt – à ce moment-là, je me dis: C'est correct, ça.

M. Chevrette: O.K. Non, mais c'est parce qu'il va falloir trouver des solutions au cul-de-sac que nous avons dans certains milieux. Certains milieux sont accrochés à 50 % puis ils ont baissé leurs cotisations de 1996, par exemple une MRC qui payait 400 000 $ en 1996, qui veut payer 200 000 $ en 1998; non seulement on respecte l'entente signée avec l'UMQ de ne pas hausser les cotisations, mais il y a une baisse de 50 %. D'abord, il faut que j'examine la possibilité, parce vous rappellerez que le comité du sommet régions demandait de tenir compte de la participation financière du monde municipal. Donc, il faut que je m'ajuste à ça. Je ferai connaître dans les prochaines heures comment je baisserai. Est-ce que je baisserai en pourcentage ou en dollars, je ne le sais pas, on verra, mais je le ferai connaître. Mais ça m'intriguait de voir le pourcentage de participation. Il y a du monde qui s'accroche à 50 % puis qui baissent leur participation alors qu'ils disaient que le développement économique relevait d'eux autres, presque exclusivement d'eux autres. Puis ça baisse les cotisations arrangé de même, alors que... je ne sais pas, là, je concilie mal...

L'autre question que je voudrais vous poser, c'est: Vous m'avez posé des questions vendredi, qui ont été prises en note par mes attachés politiques – il y en avait deux sur place – même vous, M. Saint-Onge, vous en avez posé une et même le vice-président de l'UMQ, M. Poirier, de la Gaspésie, M. Poirier posait des questions sur l'économie sociale. Est-ce que l'UMQ a fait son lit là-dessus? Est-ce que vous considérez que l'économie sociale ne doit pas faire partie des CLD ou pas? Parce que je n'aime pas bien, bien, que, quand on veut diriger tout, on ridiculise l'économie sociale. Pour moi, une job en économie sociale, c'est un emploi de plus, c'est un chômeur ou un assisté social de moins et c'est une personne de plus qui a retrouvé la fierté du travail. C'est quoi qui se passe là-dessus, pourriez vous m'expliquer ça?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Saint-Onge.

M. Saint-Onge (Florian): Mme la Présidente, je vais commencer par la première question, d'abord. Moi, ce qui m'intéresse dans votre question, ça serait de savoir pourquoi telle MRC a baissé de 400 000 $ à 200 000 $. Ça serait intéressant de savoir ça. Je sais, pour avoir eu certains échos, que nos collègues qui revendiquaient ce qu'on vous met sur la table, et qui le revendiquent depuis longtemps, ils s'attendaient justement qu'on puisse intégrer le CLD à l'intérieur. Si on voit le futur, est-ce que les gens n'auraient pas dit: Étant donné qu'on n'a pas ça à l'intérieur on va diminuer le montant? Puis il va peut-être diminuer encore. Moi, ce qui m'intéresserait, c'est de savoir le pourquoi. Parce que je ne suis pas capable de répondre.

M. Chevrette: Vous êtes quasiment aussi bien placé que moi pour le savoir.

M. Saint-Onge (Florian): Quant à l'autre question sur l'économie sociale, effectivement je pense que... vous avez parlé de l'UMQ, je ne sais pas s'ils l'ont fait, leur nid; en ce qui nous concerne, là...

M. Chevrette: Je me suis trompé, je voulais dire UMRCQ.

M. Saint-Onge (Florian): D'accord. En ce qui nous concerne, on a toujours travaillé dans le milieu, avec les partenaires, quels qu'ils soient. Je tiens à vous dire que chez nous même le ministre Rochon est venu les rencontrer. On a un comité multisectoriel – en fait vous souvenez aussi qu'on avait eu une MRC désignée dans le temps – on a toujours travaillé avec les partenaires et on n'a jamais mis personne de côté. Donc, les groupes communautaires, les gens sont tous là; les gens d'affaires, les secteurs sont là. Alors, sur ce côté-là, non, en fait ce n'était pas négatif, pas du tout.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est beau? Alors, M. le député de Richmond.

(21 h 40)

M. Vallières: Oui, merci, Mme la Présidente. Quelques questions, M. Saint-Onge, sur le mémoire comme tel. Déjà, en page 2, vous parlez au niveau des organismes locaux qui existent présentement, vous citez même des exemples de création d'emplois. Est-ce qu'on doit interpréter ce passage-là comme étant un jugement que vous portez déjà sur le niveau d'efficacité des CLD qui seraient, quoi, moins performants que les structures qui sont déjà en place, dont les corporations de développement économique, pour générer des emplois dans les régions au Québec?

M. Saint-Onge (Florian): Je pense qu'on ne veut pas présumer d'avance de ce qui va arriver. Ce n'est pas ça, l'idée. C'était une question de principe d'imputabilité. C'est une question de principe d'avoir confiance aux élus, parce qu'ils ont prouvé dans le passé qu'ils se sont impliqués. Si on ne l'avait pas fait puis qu'on commençait aujourd'hui, bien, vous auriez peut-être raison de dire: On a des doutes. Mais ils l'ont fait. C'est fait actuellement. Alors, dans ce sens-là, je ne peux pas présumer que ça va mal aller nécessairement, mais par contre on se dit: Ça aurait été facile. On visait justement, on a tellement visé...

J'entendais M. Laframboise tantôt qui disait qu'il avait travaillé dans le comité préparatoire au Sommet. J'étais là, moi aussi, et on a tellement visé un guichet unique. On était fier de ça. Et évidemment ce n'est pas ce qui nous arrive nécessairement. Alors, évidemment on va attendre. Encore une fois, je vous disais dans le préambule qu'on va revendiquer ce soir et essayer de faire corriger des choses dans le projet de loi, mais évidemment on va essayer de travailler quand même... On travaille pour nos citoyens; on ne travaille pas pour un gouvernement, pour un ministre ou peu importe. Je pense qu'on a fait nos preuves dans le passé, et c'est dans ce sens-là. On veut avoir quand même l'intérêt de nos contribuables, surtout nos sans-emploi, là-dedans.

M. Vallières: Vous parlez dans votre mémoire de l'expérience proposée par la MRC de Mékinac. On en a pas mal entendu parler comme parlementaires. Beaucoup de résolutions nous sont parvenues de différentes régions du Québec appuyant cette démarche-là et qui, au départ, dès l'annonce des centres locaux de développement, semblait se dessiner une voie de compromis qui serait acceptable au monde municipal, qui serait viable localement, parce que semble-t-il que certains milieux étaient déjà en train de l'expérimenter. Est-ce que, à votre connaissance – ou peut-être que le ministre pourra nous l'indiquer – la formule qui a été présentée par Mékinac, où vous demandez en fait une modification au projet de loi pour qu'elle soit intégrée, est-ce que cette formule-là a été l'objet d'un refus à ce jour par le gouvernement du Québec?

M. Saint-Onge (Florian): Remarquez bien qu'en ce qui nous concerne je pense que le ministre avait répondu justement à la MRC, et pour nous autres c'était une réponse négative. Puis effectivement, je pense que... J'ai échangé beaucoup avec des collègues qui auraient été prêts à mettre sur pied une telle structure. Et pour nous autres, lorsqu'on parle justement de l'intégrer, je pense que c'était un projet qui intégrait à l'intérieur, ce qui n'empêchait pas... Et, si le ministre avait mis dans son projet l'obligation pour nous autres d'avoir les autres partenaires, tel qu'il l'a présenté actuellement, on n'a pas de problème avec ça, pas du tout. Et je pense que dans ce projet-là effectivement, c'est la réponse négative qui a fait que, pour nous autres, on ne pouvait plus avancer là-dedans. Alors, évidemment on a continué quand même à revendiquer, si vous voulez, et encore ce soir; mais remarquez bien que, pour nous autres, on sait fort bien que, si le ministre voulait le faire, on va collaborer à 100 %.

M. Vallières: Il serait intéressant ultérieurement d'entendre le ministre sur les motifs de son refus d'accepter ou d'accréditer une formule comme celle de Mékinac qui, selon ce que nous entendons ici, représentait un compromis qui aurait été accepté par le monde municipal puis qui aurait permis en même temps de respecter l'implication des différents milieux, que ce soit social ou de travailleurs ou de coopératives. Comme c'est une formule qui faisait boule de neige rapidement, parce qu'il y a de nombreuses résolutions qui nous sont parvenues d'un peu partout sur le territoire québécois, il serait intéressant de savoir pourquoi le ministre aurait refusé de travailler autour de cette démarche-là qui était proposée et qui évidemment permettait, en bout de piste, aux élus municipaux d'exercer la décision finale sur ce qui était recommandé par le milieu.

Je ne demanderai pas, Mme la Présidente, au ministre de répondre maintenant parce que je ne voudrais pas que ça soit pris sur notre temps, mais je pense que ça serait intéressant. Il y aura d'autres occasions de le faire, mais il faudrait que nous le sachions, parce que tout le monde nous le demandait par voix de résolution puis tout d'un coup, probablement suite au refus du ministre, on a arrêté de recevoir des représentations du monde municipal en ce sens.

Alors, évidemment dans votre mémoire vous faites également référence au guichet unique et puis à la garantie que les services d'aide à l'entrepreneuriat soient offerts sous un même toit. On voit là, un peu, la définition que, vous autres, vous entendiez par guichet unique. Et je veux bien comprendre que votre définition de «guichet unique» est très différente de la définition de «guichet multiservices» qu'on retrouve dans la politique gouvernementale actuelle. Est-ce bien le cas?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Fernet.

M. Saint-Onge (Florian): Je vais demander à M. Fernet... Si vous me permettez de souligner cependant, par rapport à la question que posait M. Chevrette, quand je regarde le gouvernement qui nous oblige à avoir un comité consultatif d'urbanisme, un comité consultatif agricole, et tout ça, dans le fond, c'est exactement la même chose; c'est une commission à l'intérieur, et on est obligé de travailler avec des partenaires. Mais on va revenir à votre question.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Fernet.

M. Fernet (Michel): Merci. Quand le ministre parle de consensus, là, ça dépend comment on l'interprète. Nous, on est bien obligé de représenter nos membres. On ne représente pas la présidente, les deux vice-présidents de l'UMRCQ puis les permanents de l'UMRCQ, on représente l'ensemble des membres, des 1 085 municipalités membres de l'UMRCQ. Puis le consensus qu'on a entendu, là, c'est le consensus des 263 résolutions qui ont été passées par le monde municipal puis qui ont été envoyées au gouvernement; ces résolutions-là, ce n'est pas nous qui les avons votées dans l'ensemble du Québec, dans toutes les régions du Québec, ça a été fait par la volonté des élus locaux.

Et ça, c'est basé sur une démarche d'une dizaine d'années qui n'a pas été inventée au Québec, puis ce n'est surtout pas le gouvernement québécois qui a inventé le développement local. Ça se vit un peu partout dans le monde entier depuis fort longtemps. Et dans tous les pays du monde, les élus locaux sont très, très, très fortement responsabilisés dans le développement régional, que ça soit la santé, l'éducation ou le développement économique.

Alors, tranquillement pas vite, nous, le Québec, on émerge puis on essaie un petit peu de prendre notre place là-dedans, d'autant plus que la plupart des «success stories» québécoises en développement local sont accolées aux efforts des élus. Qu'on soit à Sherbrooke, qu'on soit dans les Villages prospères où Jacques Proulx a sorti le nombre de villages prospères où les taux de chômage ont été baissés, les élus locaux sont à la base de la dynamique; les élus locaux ne font pas de développement local, pas plus que le gouvernement du Québec fait le développement, mais on fait ça ensemble, au départ. Par contre, les élus locaux, dans la plupart des pays européens, sont responsabilisés, puis après ça s'organisent avec leur clientèle et animent ce milieu-là. Donc, Mékinac, c'était ça. Et, s'il y avait eu un mandat aux MRC, aux élus, de faire un guichet unique, il y aurait eu 96 guichets uniques dans le Québec, pas, comme a dit l'UMQ tout à l'heure – puis il avait parfaitement raison – 300, 400, 500, qui vont rester encore.

J'apporterais une petite précision, là. Je ne suis pas sûr que les corporations de développement économique, je n'affirmerais jamais ça ce soir en tout cas que les corporations de développement économique, les 120, là, vont être intégrées dans le CLD. Moi, j'ai des avis bien contraires là-dessus, parce qu'il y a un paquet de CLD qui vont être des coquilles vides et qui vont mandater l'ancienne corporation de développement économique. Et à certaines MRC ils vont mandater les deux qu'il y a, puis les trois qu'il y a – si on veut s'en aller dans le Fjord, il y en a trois – puis ils vont probablement rester avec une coquille vide.

Donc, il va rester combien... Quel guichet unique, comme une caisse pop qui peut vous prêter de l'argent, à partir de l'âge, vous savez, cinq ans, puis qui peut vous faire un petit compte, puis qui peut vous montrer à gérer votre budget, puis qui peut vous vendre même des façons de vous enterrer à la fin de votre vie? Ça, c'est un guichet unique où le citoyen n'a pas besoin d'aller à une dizaine de places pour avoir un service communautaire. Mékinac, c'était ça. Amenons tous les gens, les forces vives de la société dans un organisme de consultation qui donne ses avis au conseil de la MRC et, comme le gouvernement du Québec, comme les CLE... Pourquoi le gouvernement du Québec va utiliser ses fonctionnaires, lui, de haut, en passant par le régional puis en passant par le niveau local, qui sont les CLE, pour donner des services à la population? Pourquoi la MRC ne peut pas donner un service à une population de par ses services directs en développement économique, sous les conseils effectivement des gens de l'économie sociale, des gens de l'éducation, et tout ce monde-là?

(21 h 50)

Donc, Mékinac, c'était beau. Par contre, je finirai en disant une chose. Le gouvernement va être obligé de trancher une demande, en tout cas très particulière, de certaines MRC qui ont déjà eu le mandat d'une assemblée générale de 100, 150 personnes pour former le CLD et qui ont déjà exprimé leur volonté de dire: Nous, dans le CLD, là, on va demander au gouvernement de mandater la MRC pour donner le service. Alors, le gouvernement répondra. Puis dans la salle c'est venu de la population et non pas des élus, naturellement. Alors donc, dans certains coins, ça va se passer comme ça, puis le gouvernement rendra jugement là-dessus.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Richmond.

M. Vallières: En ce qui concerne maintenant, je croyais un peu plus... Ça aurait été intéressant, là, d'échanger davantage sur la formule de Mékinac, mais j'aimerais savoir de l'UMRCQ si vous avez – vous avez parlé beaucoup du CLD, à travers votre mémoire – si vous êtes penchés sur la pertinence de la création d'un ministère des Régions, comme tel. Si tel est le cas, quels sont les avantages que vous voyez à la création d'un nouveau ministère, au Québec? Vous savez déjà comment cela fonctionne avec le Secrétariat aux affaires régionales, vous connaissez également les recommandations ou la recommandation du rapport Brunet, qui ne retenait pas la création d'un ministère, mais qui préférait une formule plus souple et considérée comme étant peut-être plus avantageuse, est-ce que vous êtes penchés là-dessus, sur le fait que le gouvernement du Québec propose de créer un ministère des Régions?

M. Saint-Onge (Florian): Mme la Présidente, à ce sujet-là, justement, comme je faisais partie du comité Brunet, je dois vous dire qu'on ne pouvait pas, avec le rythme des réunions, aller consulter tous nos membres préalablement. Cependant, nous étions questionnés, les membres, et personnellement ce que j'avais soulevé: Comment se fait-il que, lorsqu'on parle de schéma d'aménagement – qui dépend du ministre des Affaires municipales – on a à penser maintenant, avec la deuxième phase, au développement? Donc, on se disait: La MRC est obligée de penser, de prévoir «développement» dans le schéma, et là maintenant on crée un autre ministère, qui va être un autre ministre, parce que ce n'est plus ministère des Affaires municipales, qui va penser développement. Alors, personnellement, j'avais dit: Si ça se fait, peut-être que ça serait bon d'avoir le même ministre, parce qu'on aura affaire au même ministre pour parler en même temps de schéma avec son développement et parler de développement concrètement aussi en création d'emplois.

Alors, quand je suis arrivé avec mes collègues cependant, pour expliquer de temps en temps quelle position on a, mes collègues se sont abstenus de se prononcer là-dessus. Alors, évidemment on n'a pas le point de vue du gouvernement, et, s'il veut en créer un, c'est lui qui le sait. Mais en ce qui nous concerne on n'avait pas pris de position là-dessus.

M. Vallières: Avec ce que vous avez lu comme projet de loi, est-ce que, à votre avis, vous disposez de suffisamment de garanties face au financement à long terme des structures qui vous sont proposées?

M. Saint-Onge (Florian): Bien, remarquez bien, dans notre mémoire, on a marqué annuellement. Mais ça, la garantie comme telle, écrite, demain matin, je ne l'ai pas, là. C'est évident. Et c'est la raison pour laquelle, vous savez... J'entendais M. Chevrette tantôt qui disait qu'il y a des MRC qui ont... une MRC en tout cas, selon l'exemple, qui a diminué de 400 000 $ à 200 000 $. Alors, les gens, c'est peut-être... Quand je disais tantôt que... Ce qui me préoccupe, c'est de savoir pourquoi ils ont diminué. S'ils regardent l'avenir puis qu'ils arrivent seuls dans le portrait, bien, ils ont peut-être commencé tout de suite. C'est ça qu'on ne sait pas. Ça, évidemment, ce n'est pas clair.

M. Vallières: Si le gouvernement se retirait progressivement du financement, est-ce que, selon l'expérience que vous avez du milieu, les municipalités seraient prêtes à taxer pour maintenir un service de cette nature?

M. Saint-Onge (Florian): Bien, écoutez, je pense que c'est la raison pour laquelle on insiste tant. C'est qu'on ne veut pas que ce soit, disons, une question d'une année ou deux. Je vous disais tantôt que les MRC, en fait, les élus ont fait des preuves là-dedans en exerçant leur leadership puis en investissant dans des fonds d'investissements. Il va sans dire que, si on l'avait eu, c'est clair qu'on aurait pu assurer qu'on va poursuivre.

Est-ce que maintenant le fait de ne pas avoir toute la responsabilité, et qui est partagée avec d'autres qui n'ont pas à les taxer, probablement aussi qu'on aura des demandes de leur part d'augmenter le fonds... là je ne vous garantis pas, par exemple, que les élus vont maintenir indéfiniment le montant qu'ils ont mis. C'est la raison pour laquelle, nous, on avait espoir que, si on l'intégrait à l'intérieur de la MRC tout en nous obligeant à travailler avec les partenaires, là je crois qu'on aurait eu l'assurance de poursuivre. M. Fernet voudrait continuer.

M. Fernet (Michel): Le ministre, je pense, le sait très bien, la position très franche de l'UMRCQ depuis 18 mois était bien sûr d'intégrer davantage les élus locaux, les 10 000 élus locaux du Québec. D'ailleurs, on est sorti, il y a un petit peu plus d'un an maintenant, au Sommet économique du premier ministre, on avait fait une offre comme quoi les élus locaux, et l'UMQ était à côté de nous, s'offraient pour faire davantage que ça dans chacun de leur coin de pays.

La question que vous posez, c'est: Est-ce que, si l'État du Québec se désengage, ou même pourquoi actuellement, selon peut-être des données justes qui ont été fouillées, les élus semblent ne pas vouloir mettre autant que ce qu'ils mettaient l'an passé? Il y en a beaucoup qui ont pris ça comme étant un recul, c'est-à-dire qu'ils ont mis au monde des corporations de développement économique qu'ils, à toutes fins pratiques, contrôlaient et avec lesquelles ils avaient une relation de convivialité certaine. Et puis là bien on veut leur faire un effort puis essayer peut-être d'espérer que le montant que les élus mettent croisse d'année en année pour grossir les possibilités de créations d'emplois, et tout. Nous, en tout cas, on était dans cette vision-là et on pensait d'obtenir des résultats extraordinaires d'ici cinq ans à 10 ans avec ces principes-là, mais conditionnellement à ce qu'on leur fasse confiance.

Là on ne peut pas interpréter ça, nous, on n'a pas de questionnaire encore là-dessus, mais on sent que tout le tiraillement de la mise en place de ça, la façon dont ils sont obligés de faire pour tout organiser ça, et ils sont obligés de contribuer financièrement à tout ça, c'est bien évident que ça a créé, et on entend ça, ça crée des liens qui sont plus difficiles. Et ils se sentent moins responsables, puis tout ça s'en suit avec le financement et le financement éventuel si un jour ou l'autre l'État coupe.

Moi, je pense que ça aurait été d'aller les chercher, ça aurait été d'aller leur faire confiance et de faire route avec eux autres pour espérer obtenir éventuellement des montants d'argent plus importants, et qu'ils taxent ou qu'ils ne taxent pas, selon leur volonté.

M. Vallières: Supposons que le ministre ne change pas d'avis et puis que les CLD sont créés, tel que prévu dans le projet de loi, est-ce que vous pensez qu'on devrait réserver un siège entre autres aux jeunes? Est-ce que le conseil d'administration devrait nécessairement prévoir dans la loi qu'un siège soit attribué aux jeunes? On s'en est fait parler aujourd'hui, je vérifie avec vous quel est votre point de vue là-dessus.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Saint-Onge.

M. Saint-Onge (Florian): En fait, on a toujours désiré travailler justement... quand on vous parlait tantôt de la préoccupation des élus, de l'implication qu'ils se sont donnée pour créer de l'emploi, on pensait surtout aux jeunes. Parce que, quand on regardait le taux de chômage puis le décrochage scolaire, on disait: Il faut créer quelque chose un moment donné pour aller les chercher. Alors, dans ce sens-là, je ne pense pas...

Le problème, par rapport à votre question, c'est que tout le monde voudrait avoir une place. Et vous allez voir actuellement... J'ai commencé chez nous, et c'est passablement avancé, pour l'assemblée, pour créer... et on a des réclamations, il faudrait quasiment être 40 autour de la table parce que chacun veut venir; ça n'a pas d'allure. Et, si on ajoute... S'il y en a qui sont déjà avancés dans leur représentation, tant mieux si un des travailleurs ou si un des élus est relativement jeune, bien j'espère qu'on va en avoir, mais, si on a déjà des MRC qui sont avancées et qu'on ajoute le nombre qu'ils ont convenu ensemble, c'est là qu'est le problème. Ce n'est pas sur le fait d'avoir des jeunes, au contraire.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Saint-Onge. M. le ministre, il vous reste une minute et demie.

(22 heures)

M. Chevrette: J'ai quelques remarques. Plus le C.A. sera gros, ça sera parce que vous aurez voulu avoir plus de sièges possible. Moins vous allez en avoir, moins le C.A. va être gros. C'est à votre demande qu'il n'y a plus d'«opting-out». Quand vous dites, M. Fernet, qu'on vous oblige à financer, c'est vous autres qui l'avez demandé. Il faut dire les choses telles qu'elles sont! Vous ne vouliez plus d'«opting out» précisément parce qu'il y en avait qui ne payaient pas. Comme la Matawinie, chez nous, il y avait deux municipalités qui payaient sur 15 ou sur 17. Ça n'avait pas de maudit bon sens! Vous êtes objectés à ça. Ne dites pas qu'on les force. On les force, oui, mais avec votre complicité puis votre collaboration. Vous l'avez demandé légalement, puis on l'a donné. Vous dites qu'il augmentait de plus en plus; c'est faux, cette année il y a un mouvement à la baisse dans la participation financière. Donc, faut regarder les faits tels qu'ils sont.

Les MRC vont jouer un rôle, oui. Elles vont signer une entente de gestion, et, plus que ça, ça me prend une résolution de recommandation de leur part. Saint-Roch-de-Mékinac, ce n'est pas consultatif, c'est un plus qu'on veut, soit un pouvoir décisionnel. Ce n'est pas des gens qui vont être consultés, c'est des gens qui vont décider, qui vont se prendre en main, qui vont se responsabiliser dans le milieu. C'est un plus, ça, pour la participation, la responsabilisation et l'action dans le milieu. Et les «success stories», on en a eu une avec l'UMQ. On a signé une entente parce qu'on s'est respectés, on a eu de la bonne foi, on ne s'est pas traités de quoi que ce soit.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Merci, M. Saint-Onge et vos invités. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 22 h 1)

(Reprise à 22 h 3)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et à des auditions publiques sur le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions, et nous avons comme invitée la Conférence des maires de banlieue, représentée par le président, M. Peter F. Trent.


Conférence des maires de la banlieue de Montréal (CMBM)

Alors, tel que prévu, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui seront suivies d'une période d'échanges entre le groupe parlementaire ministériel et le groupe de l'opposition pendant 20 minutes également. M. Trent, si vous voulez nous présenter les personnes qui vous accompagnent, vous pourrez commencer à nous présenter votre mémoire.

M. Trent (Peter F.): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, j'aimerais commencer juste par vous présenter la délégation de la Conférence. J'ai, à ma gauche, Marc-André Vaillancourt, qui est le vice-président exécutif de la Conférence; j'ai M. Bossé, qui le maire de Verdun et vice-président de la Conférence; et puis, à ma droite, c'est M. Harry Schwartz, qui est le maire de Mont-Royal et un vice-président de la Conférence aussi. Et, moi, je suis président de la Conférence.

Donc, les 15 minutes dont nous disposons nous semblent bien courtes pour vous partager notre point de vue sur un enjeu aussi majeur et complexe que le devenir du financement et l'organisation du développement économique local et régional, car c'est bien de cela qu'il s'agit, et le titre du projet de loi n° 171 sur le ministère des Régions est en ce sens trompeur. C'est pourquoi nous avons déposé un mémoire substantiel, et nous vous invitons fortement à le lire.

Venons-en maintenant à l'essentiel. Quel est l'état de santé de notre économie: critique, sévère, stable, prospère? Faisons-nous les bonnes interventions pour redresser l'économie de façon durable? Ciblons-nous nos efforts et nos investissements là où ça compte? C'est autant de questions auxquelles tous les partenaires publics comme privés tentent désespérément de répondre, souvent par des initiatives isolées. Deux certitudes nous animent, cependant: nous vivons une transformation substantielle de l'économie, et ça, à l'échelle mondiale, et nous devons adapter nos structures comme nos interventions à cette nouvelle économie; deuxièmement, nous souhaitons parvenir à assurer une croissance de la richesse et des emplois, ce qu'on appelle «la prospérité». Ceci étant dit, les 27 municipalités que nous représentons saluent comme maîtres d'oeuvre du développement économique local les intentions à l'origine de la Politique de soutien au développement économique local et régional.

La Conférence partage à 100 % avec le gouvernement les principes énoncés et les objectifs visés par la politique. Nous ne voulons pas de politique et de programmes mur à mur, nous revendiquons la simplification et la régionalisation des structures. Nous souhaitons regrouper les services par clientèle et nous devons travailler résolument pour des résultats concrets. M. Bossé.

M. Bossé (Georges): Cependant, mesdames et messieurs, il y a un hic, une distorsion entre l'intention que nous venons d'énoncer et l'action. Pour la CMBM, ce que propose le gouvernement dans son projet de loi n° 171 va à l'encontre des principes et des objectifs visés, et voici pourquoi. Il y a à peine un an, ce même gouvernement créait un ministère de la Métropole. Il reconnaissait de facto l'existence et l'importance d'une région pas comme les autres, et on confiait même au nouveau ministre la mission de susciter et de soutenir l'essor économique, culturel et social de la métropole et d'en favoriser le progrès, le dynamisme et le rayonnement.

Aujourd'hui, si l'on jumelle les article 61 et 62 du projet de loi n° 171, on doit comprendre que l'on met le ministre de la Métropole sous la tutelle du ministre responsable des Régions. En effet... Ça va?

Une voix: Oui, ça va.

M. Bossé (Georges): En effet, le ministre de la... Je ne voulais pas vous déranger.

M. Chevrette: ...

M. Bossé (Georges): Bon, ça va. En effet, le ministre de la Métropole pourrait jouer un rôle dans le développement économique local et régional si le ministre responsable le veut bien. Bien, voyons! Pire encore, le terrain de jeu du ministre de la Métropole est passé de 111 municipalités, lors de la création de son ministère, aux seules île Jésus et île de Montréal dans le présent projet de loi. L'année prochaine, dans un autre projet de loi, sans doute que le ministre de la Métropole sera devenu le ministre de la rue Sainte-Catherine.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bossé (Georges): Mesdames et messieurs, soyons sérieux. La métropole, ce n'est pas une région comme les autres, reconnaissons-le une fois pour toutes. La métropole a une réalité, une dynamique, des besoins et des fonctions qui lui sont propres. Nous ne referons pas tout le topo là-dessus, mais, de grâce, que le gouvernement cesse de faire un pas en avant et deux pas en arrière sur la reconnaissance de cette réalité! Que le gouvernement travaille plutôt à développer la synergie, à arrimer le rôle de la métropole à celui de la capitale et des autres régions, qu'il consolide le ministère de la Métropole, qu'il lui donne les moyens de réaliser sa mission, qu'il lui permette de définir et d'adapter avec le milieu métropolitain les modalités particulières d'application de la Politique de soutien au développement économique local et régional, et ce, dans un délai raisonnable. Le gouvernement dit ne pas vouloir de mur-à-mur. Pourquoi alors imposer un modèle type d'organisation avec des CRD et CLD partout sur le territoire du Québec? Nous comprenons mal et lançons un cri d'alarme à la cohérence.

(22 h 10)

Parlons d'abord des CRD. Les territoires des CRD correspondent à ceux des régions administratives dont le découpage artificiel servait, à l'origine, à la distribution des programmes gouvernementaux. Or, le gouvernement est le premier à reconnaître que ce découpage ne correspond plus à rien, et c'est pourquoi il entamera dès le printemps prochain une réflexion en profondeur sur l'organisation territoriale au Québec. Cette réorganisation est d'autant plus urgente dans la métropole où la fragmentation de l'espace métropolitain en cinq régions administratives est absurde et quintuple les structures. Si l'on veut vraiment simplifier et réorganiser, faut faire de la métropole une seule région administrative et confier conséquemment à la Commission de développement de la métropole les responsabilités attribuées actuellement aux CRD.

Mais ce n'est pas tout ce que prévoit le projet de loi n° 171, parce qu'il est mur à mur et parce qu'ils institutionnalise les CRD. La venue des CLD, en voulant simplifier l'accès du citoyen aux différents programmes gouvernementaux – et, encore là, l'intention est louable – vient surtout bouleverser en profondeur le financement du développement économique local et régional. Est-ce que la CMBM supporte ce virage à 180 degrés? Est-ce que ces impacts seront positifs ou négatifs? Est-ce que la performance économique en sera d'autant améliorée? La réponse à toutes ces questions est prématurée, notamment parce que le montage financier de la contribution gouvernementale demeure toujours, à ce moment-ci, incomplet et imprécis.

Cependant, nous aimerions soulever les éléments suivants. Le financement gouvernemental de 60 000 000 $ annoncé par le ministre, M. Chevrette, n'est pas nécessairement et n'est pas récurrent. C'est inquiétant. L'enveloppe gouvernementale est constituée d'un regroupement de plusieurs programmes existants de soutien au développement économique qu'on a estimés à environ 128 000 000 $, la valeur actuelle, donc, des montants investis dans les différents programmes. Est-ce que le gouvernement coupe donc à 60 000 000 $ maintenant sa contribution et transfère l'obligation aux municipalités de combler de façon paritaire le manque à gagner? Et que se passera-t-il, dans les prochaines années? Et quels seront les organismes chez qui on doit puiser ces fonds de 60 000 000 $ qui, eux, se verront couper.

Deuxièmement, le gouvernement exclut toute possibilité, pour un CLD, de recevoir des subventions du gouvernement fédéral directement ou indirectement. Pouvons-nous, en tant qu'élus responsables, priver nos citoyens et nos emplois de cet apport important de subventions potentielles? Ou alors, est-ce que le fédéral devra créer un réseau parallèle de CLDF, «F» voulant bien dire «fédéral»? Troisièmement, les paramètres utilisés pour la répartition de l'enveloppe gouvernementale entretiennent une dichotomie: poches de pauvreté versus potentiel de développement. Si l'on ne pondère pas ces variables différemment, le gouvernement n'investira pas, ou peu, là où vont s'installer les entreprises et créer des emplois. C'est donc un détournement de sens et des fonds des programmes actuels de soutien au développement économique.

En ce qui concerne la contribution financière exigée de toutes les municipalités, nous avons beaucoup de difficultés à donner notre accord de principe à un investissement dont on ignore la nature, le montant et l'utilisation, et c'est le cas actuellement pour les villes que nous représentons, qui investissent déjà plus de 4 000 000 $ en soutien au développement économique local. De plus, les services que nous dispensons, qui comportent un large éventail d'activités, notamment pour soutenir l'entrepreneuriat, sont performants et nous ne voulons donc pas les mettre en péril. Mais, plus encore, l'obligation à contribuer constitue, pour la Conférence des maires de banlieue, une entrave à l'autonomie locale et aux principes de base de la fiscalité municipale.

Pour conclure, Mme la Présidente, la CMBM fait neuf recommandations spécifiques que vous retrouverez à la fin du mémoire qu'elle vient de vous déposer, et la synthèse des recommandations, M. Trent va vous la livrer.

M. Trent (Peter F.): Donc, recommandation n° 1: la Conférence recommande de soustraire les municipalités comprises dans le territoire du ministre de la Métropole du projet de loi n° 171 de façon à adapter les modalités d'application de la Politique de soutien au développement local et régional aux caractéristiques propres à la métropole, et ce, tout en respectant les principes énoncés et l'objectif fixé par la politique.

Recommandation n° 2: la Conférence recommande que le ministre de la Métropole soit responsable de la conduite de cet exercice d'adaptation et que la date butoir d'avril 1998 soit revue en fonction de l'avancement de ces travaux.

Recommandation n° 3: la Conférence recommande la constitution du territoire de la métropole en une seule région administrative. Les portions du territoire non comprises dans la métropole devraient être enregistrées, et ce, dans le respect des frontières des MRC.

Recommandation n° 4: nous recommandons la confirmation et la consolidation du rôle et des pouvoirs du ministre de la Métropole en matière de développement économique local et régional sur le territoire de la métropole, tel que défini dans la loi constitutive du ministre.

Recommandation n° 5: la Conférence recommande l'attribution des responsabilités actuellement confiées aux cinq CRD impliquées sur le territoire de la métropole à la Commission de développement de la métropole, dont la mission et la composition sont très similaires à celles des CRD.

Recommandation n° 6: nous recommandons de ne pas exclure systématiquement la possibilité d'inclure des fonds provenant du gouvernement fédéral dans le financement des CLD, et ce, selon les types de services qu'auront choisi de dépenser ceux-ci.

Recommandation n° 7: nous recommandons de pondérer la variable utilisée pour la répartition des enveloppes gouvernementales par d'autres facteurs tels que le nombre d'entreprises sur le territoire, et ce, afin d'enrayer la dichotomie des poches de pauvreté versus le potentiel de développement.

Recommandation n° 8: nous recommandons ou nous exigeons le respect de l'autonomie locale et des principes de base de la fiscalité municipale dans la détermination de la nature et des montants des contributions municipales au financement des CLD.

Et la dernière recommandation, n° 9: nous recommandons d'adopter les principes de travail suivants pour une organisation optimale des CLD arrimée aux services de développement économique local actuels. Première chose, réserver les activités et les services de soutien au développement économique municipaux complémentaires au mandat des CLD et les conserver sous contrôle municipal parce qu'ils ont fait la preuve de leur efficacité et de leur performance. Il ne faut pas, donc, «jeter le bébé avec l'eau du bain» ou «penser à réinventer la roue». Deuxièmement, éviter l'ajout de nouvelles structures et entreprendre la rationalisation des structures existantes pour des meilleurs résultats et plus de cohérence dans l'action. Troisièmement, respecter l'autonomie municipale et proscrire la tutelle des services et/ou corporations de développement économique local. Quatrièmement, privilégier l'approche-clients plutôt que l'approche territoriale et/ou par organisme. Reconnaître la réalité métropolitaine, son niveau complexe et avancé d'organisation de développement économique local. Et, dernièrement, ne pas prioriser la vitesse d'exécution au détriment de la qualité de l'organisation.

Nous sommes prêts maintenant à répondre à vos questions. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Trent. M. le ministre.

M. Chevrette: Je vais être très bref pour laisser à mon collègue de Bourget le soin de questionner. Je vous dirai que, si on avait suivi votre recommandation n° 7, la région de Montréal n'aurait pas eu 14 000 000 $, si on avait suivi exactement ce que vous nous recommandez en 7. C'est précisément le ministère de la Métropole qui nous a dit de ne pas suivre ce critère-là, parce que vous auriez eu moins. Donc, on a écouté le ministère de la Métropole pour vous donner plus. Je ne comprends que vous recommandiez cela à 7. Peut-être une incompréhension, mais je vous dis exactement ce qu'on a dû faire.

(22 h 20)

Quant aux autres recommandations pour le fédéral, j'ai déjà fait une offre à M. Cauchon d'intégrer les enveloppes, puis d'intégrer même les personnels des SADC – je pense que ça va de soi – puis de cesser les batailles de drapeaux feuille d'érable contre fleur de lys, puis de laisser flotter le drapeau de la région avec des enveloppes intégrées et le personnel intégré. Donc, je trouve que c'est une façon de voir les choses et, sur ce terrain-là, je pense que vous pourriez peut-être nous suivre.

Pour ce qui est du ministre de la Métropole, ce n'est pas à cause de la politique ou du présent projet de loi, c'est lors de l'adoption de la politique elle-même qu'on a décidé, au gouvernement, de mettre le ministre responsable de la Métropole responsable des deux îles, l'île Jésus et l'île de Montréal. Le projet de loi ne fait que respecter le consensus ou la décision gouvernementale qui date de quelque mois, parce que c'était M. Ménard qui était là. C'est un décret qui a eu lieu du premier ministre pour respecter le compromis qu'il nous avait demandé de faire.

Quant aux cinq CRD, je ne vous conseille pas d'aller les voir présentement pour leur demander de se faire hara-kiri. On a entrepris un vaste chantier. Dans le cadre de la politique, il y a trois grands chantiers, et un des chantiers, c'est précisément de revoir les structures. Mais ce n'est pas d'imposer des structures actuelles, c'est de commencer un débat pour voir où ça peut nous mener. Je considère, d'ailleurs, entre vous et moi, que, si le débat – puis je vous donne une conviction personnelle – s'était fait d'abord en concertation sur une commission au lieu de les braquer dans un texte de loi comme découpage, il y aurait peut-être eu une meilleure concertation. Je vous donne une opinion personnelle. Parce que je me souviens très bien que la concertation était tellement forte, à un certain moment, chez les maires de banlieue que M. Trent était même venu me voir pour voir s'il n'y avait pas lieu d'adopter une loi pour rendre juridique cette structure des maires de banlieue. Rappelez-vous. Il y avait une concertation très spontanée, puis cette concertation s'est effritée comme par enchantement le jour où on a voulu précisément y aller au niveau législatif. Mais, tant et aussi longtemps que c'était sur des objets communs, la concertation était très bonne. Je me souviens des réunions, je me souviens d'avoir même été parler à votre congrès comme ministre des Affaires municipales, à l'époque. Donc, il y a peut-être une question de perception, dans le cheminement, qui est importante dans ça.

Il me reste peut-être un petit point. Pour ce qui est des modèles, c'est loin d'être mur à mur. C'est vraiment le ministre de la Métropole qui va me donner ses modèles de CLD, c'est vraiment lui qui a la responsabilité, et je sais que ce ne sera pas facile, sur l'île, pour les motifs suivants: il se donne à peu près 28 000 000 $, me dit-on, grosso modo – c'est peut-être 30 000 000 $, c'est peut-être 26 000 000 $, je ne le sais pas – et, nous, on en met 14 000 000 $ en ce qui regarde l'île, ce qui, soit dit en passant, est pas mal mieux que 3 000 000 $ à tout le monde, comme ça s'est déjà fait avec la réforme Picotte, 3 000 000 $ à tout le monde, où que tu sois au Québec. Là, au moins, on tient compte de trois facteurs: population, indice de pauvreté et indice de chômage. Donc, on donne 14 000 000 $, et je pense que ça fait juste par rapport aux trois critères adoptés.

Mais le modèle, il peut être complètement différent, je partage avec vous votre point de vue dans votre mémoire là-dessus. Il peut être complètement différent. Moi, j'ai déjà dit même à Mme Harel et à d'autres de Montréal qu'il y a des CDEC qui existent, ce qui est à peu près unique. Il y en a peut-être une autre ailleurs dans le Québec, mais c'est vraiment typique à Montréal, ça. Il y en a neuf, je pense, ou quelque chose du genre, mais il n'y en a pas dans ville d'Anjou ou il y en a une en création, il n'y en a pas ailleurs. Moi, ça ne me dérange pas. Même les CLE et le CLD pourraient être ensemble, et ça ne me dérangerait pas non plus, je peux vous dire ça. Même au départ, rappelez-vous des conversations que j'avais eues avec le maire de Verdun; en tout cas, je lui avais dit ça. Je n'ai pas changé d'idée, moi, pas du tout. Beaucoup de souplesse là-dessus. Mais, comme je vous dis, faites-le avec le ministre de la Métropole, il a toute la latitude possible pour le faire et ce n'est pas moi... Même si je suis responsable de l'application de la politique, le décret confie la responsabilité au ministre de la Métropole véritablement de bâtir un modèle très spécifique.

Avec Laval, bien, Laval, c'est un cas particulier. C'est une île, c'est une ville, c'est un CRD, puis c'est une MRC, puis c'est un maire, puis il est tout. Ha, ha, ha! Donc, il peut bien y avoir rien qu'un CLD avec des points de services, ça, ça ne me dérange pas non plus. Il nous transmettra son modèle, puis on le prendra. Donc, j'ai beaucoup de souplesse.

Je vous remercie d'avoir pris le temps de rédiger un mémoire et de venir nous le présenter. Je demanderais à mon collègue, après...

M. Trent (Peter F.): Je veux répondre à plusieurs questions...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, M. Trent.

M. Trent (Peter F.): ...et je vais laisser à mes collègues le soin répondre à d'autres. Je vais répondre au moins à la question des différentes régions, la question des cinq CRD, et aussi à la question du statut juridique de la Conférence. En ce qui concerne la définition des régions, actuellement, il y a cinq régions dans la région de Montréal, et elles sont des régions concentriques. Il y a des régions qui peuvent être définies par les RMR, la région de Montréal, après ça on parle de la Commission de développement de Montréal – ça, c'est une région un peu plus petite – et après ça on s'en va avec la région de l'AMT – c'est encore un peu plus petit – et après ça on s'en vient avec les régions en ce qui concerne les CLD – ça veut dire Laval et l'île de Montréal, c'est encore plus petit – après ça on s'en va sur l'île de Montréal – ça, c'est la région 06. Donc, nous avons en effet cinq régions concentriques en une, et je pense que ce qu'on vise ou ce qu'on prône, c'est l'idée de faire un nettoyage là-dedans et puis d'avoir au moins une seule région en ce qui concerne la métropole.

En ce qui concerne la Conférence, oui, nous revendiquons et nous revendiquerons toujours l'idée d'avoir un statut juridique, comme Conférence. Et puis, surtout avec tout ce qui s'est passé cette année, c'est encore plus valide que jamais. Donc, notre position là-dessus n'a pas changé depuis que je vous ai vu il y a quelques années. Peut-être que M. Bossé ou M. Schwartz veulent répondre à d'autres questions que vous avez posées.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bossé.

M. Bossé (Georges): Simplement quelques remarques. 14 000 000 $ sur 60 000 000 $, c'est uniquement la juste part par tête de pipe. C'est 8 $ par tête de population à peu près à travers le Québec, et on n'a pas 0,25 $ de plus par tête de pipe, chez nous. Alors, les indices qui ont été pris, s'ils sont autres que par tête de population, je ne sais pas comment s'est fait le calcul, mais multipliez le nombre d'habitants au Québec par 8 $ puis multipliez ceux de l'île de Montréal par 8 $, vous allez arriver au même montant de 14 000 000 $. Ça fait qu'on n'a pas une cent de plus que les autres régions.

M. Chevrette: ...la Côte-Nord peut avoir 18 $, par exemple, la Basse-Côte-Nord, il y a quelques régions qui ont une péréquation à cause de l'étendue, parce qu'il ne se ferait rien. Mais, grosso modo, ce que j'ai voulu dire, c'est qu'on est sortis du piège où c'était 3 000 000 $-3 000 000 $-3 000 000 $ parce qu'elles étaient 17 régions.

M. Bossé (Georges): Pour une fois, on reconnaît le nombre de la population, ce qui n'était pas dans les programmes antérieurs, dans plusieurs niveaux. Pour ce qui est des CLD et des CLE, qu'il y ait des conseils d'administration identiques, vous nous référez au ministre de la Métropole. On va retourner vers le ministre de la Métropole en étant bien heureux de savoir qu'il a entière et pleine latitude dans la décision qui devra être prise, parce qu'il y a une problématique territoriale dans l'île de Montréal qui est importante. Ce sur quoi on veut revenir continuellement, c'est que je pense que, si un jour le gouvernement du Québec veut ajouter foi et loi à sa volonté d'avoir un territoire métropolitain, va falloir qu'il n'y ait pas cinq CRD, qu'il y en ait un seul, bien sûr. Je sais qu'au printemps le ministre va regarder toute la redistribution à travers le Québec. Vous savez, faut parfois joindre le geste à la parole. Je pense que, si on veut une région métropolitaine et si on veut y arriver, il ne faut pas juste créer des institutions, faut donner à ces institutions-là la capacité d'agir, et, dans le moment, on a des institutions sans capacité d'agir.

(Consultation)

M. Vaillancourt (Marc-André): Juste un commentaire sur le territoire de la métropole. Non seulement il y a la problématique des CRD, mais il faut toujours se rappeler que le ministère d'État à la Métropole a un territoire, que la Commission de développement de la métropole a un territoire, que l'Agence métropolitaine de transport a un autre territoire et que, finalement, la politique de développement local et régional donne un autre territoire et de plus en plus restreint. Je comprends que c'est la même décision et les mêmes décrets, mais, à la limite, concernant le commentaire qui était fait sur le ministère d'État à la Métropole responsable de la rue Sainte-Catherine, peut-être qu'il quêtera des trente-sous, on ne le sait pas, mais on peut se poser, à travers le cheminement gouvernemental, le questionnement, et il est réel, la problématique est connue, elle est reconnue d'ailleurs dans plusieurs publications gouvernementales.

M. Bossé (Georges): Concertation.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? M. le député de Richmond.

(22 h 30)

M. Vallières: Oui. Je procéderai rapidement aussi, Mme la Présidente, pour laisser à la députée de Marguerite-Bourgeoys l'opportunité de questionner les gens que nous recevons.

Ma première question, elle va porter sur le financement comme tel. En page 5 de votre mémoire, vous nous dites: Le financement gouvernemental de 60 000 000 $, annoncé par le ministre, n'est pas récurrent. Le ministre nous parlait tantôt du 14 000 000 $ dont vous allez disposer. Que se passera-t-il dans les prochaines années – c'est la question que vous posez?

Si on prenait pour acquis que le gouvernement se retire du financement – parce que, selon ce qu'on voit, après deux ans il n'y a aucune assurance que le gouvernement sera là – est-ce que dans votre milieu vous seriez prêt à lever une taxe pour financer les structures qui finalement, oui, vous auraient été imposées par le biais de la législation que nous avons devant nous?

M. Trent (Peter F.): Bien, absolument pas. Nous avons déjà goûté à cette expérience-là avec le délestage de M. Trudel, donc on ne veut pas qu'une affaire semblable se répète. C'est clair que ça nous inquiète énormément d'avoir une enveloppe x aujourd'hui, puis une enveloppe y dans deux ans d'ici, puis y est plus petite, et x peut-être peut aller à zéro. Donc, on ne veut pas que ce soit une façon de délestage déguisé, autrement dit. Donc, oui, ça nous inquiète énormément. M. Bossé?

M. Bossé (Georges): J'aimerais mentionner deux choses. Un, il faut reconnaître que la structure, elle est imposée par le gouvernement. Si dans deux ans il n'y croit plus pour la financer, on n'aura peut-être pas besoin d'y croire, nous, non plus. On aura le droit, nous aussi, de la remettre en question.

Actuellement, dans le financement, ce qui nous préoccupe, bien sûr, il y a la récurrence, mais on a également beaucoup de questionnement sur la provenance des fonds. Il n'y a pas de nouvel argent, là-dedans, là, à moins qu'on nous annonce de nouveaux argents; ce qu'on a compris, c'est qu'il n'y a pas de nouvel argent.

S'il n'y a pas de nouvel argent, il provient d'où? À qui on l'enlève? Ces gens-là en bout de ligne, si on l'enlève des SAJE, si on l'enlève des CEDEC, si on l'enlève du fonds FAE, ils vont se retrouver où, eux autres? Est-ce qu'on leur enlève également toute notion d'existence? Il y a beaucoup d'inconnus à nous. Peut-être que ça ne l'est pas pour M. le ministre, peut-être que, lui, tout est fait, tout est réglé, mais on ne le connaît pas. On n'a pas l'habitude, comme élus, de s'embarquer dans quelque chose qu'on ne connaît pas. Ce sont des fonds publics, on les gère, et on n'a pas le droit au déficit, nous.

M. Vallières: Depuis la semaine dernière, il y aurait peut-être des possibilités d'en faire.

Une voix: Il y a des pouvoirs depuis la semaine dernière.

M. Bossé (Georges): Non, il y a une ville qui a le droit, pas nous. Ha, ha, ha!

M. Vallières: Je pousserai un petit peu plus loin la réflexion sur la question du financement, parce que ça me paraît être comme très important de pouvoir s'assurer que des structures qui sont finalement imposées par l'État, avec des objectifs louables – on retrouve ça dans votre mémoire... Mais c'est toujours louables, des objectifs; il faut voir si les moyens qu'on se donne pour les atteindre vont demeurer dans le temps.

Quand vous nous dites que vous craignez, là, que le gouvernement puisse se retirer, comment vous verriez la possibilité de s'assurer qu'il ne le fasse pas? Est-ce qu'on peut intervenir selon vous, par le biais de la législation qu'on a devant nous, pour s'assurer que ça ne se produira pas?

M. Bossé (Georges): Idéalement, oui. Idéalement, oui, si dans la législation on garantit des sommes pour trois ans, cinq ans à venir. La capacité de légiférer, nous ne l'avons pas; c'est vous qui l'avez. On ne peut pas imposer, on doit subir et donc, si on subit la naissance de l'organisme, on aimerait que ça se fasse avec les argents qui sont déjà garantis pour un an, deux ans. Mais cette récurrence-là, elle remet, tout comme elle le fait dans la question que je soulevais tantôt et à laquelle j'espère qu'on va avoir des réponses, la provenance. Quand on les a créés, les autres organismes, avec des fonds, est-ce que leur existence est mise en péril aujourd'hui parce qu'on prend de ces fonds-là pour les envoyer ailleurs, d'une façon différente, ou si c'est du nouvel argent?

M. Vallières: Bien, j'imagine que le ministre répondra à cette question. Nous avons déjà eu l'occasion de souligner que, selon nous, l'implantation de ce qui nous est proposé se fait dans une certaine confusion dans les différents milieux. Le ministre semble prétendre le contraire. Beaucoup de gens qui se succèdent, là, à la barre nous indiquent que l'information n'est pas suffisante, au moment où on se parle, pour des prises de décision, mais on semble vous amener dans un entonnoir avec des dates butoirs, ce qui vous oblige à intervenir. J'aimerais, avant de passer la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, vous demander, puisque vous connaissez, vous autres, depuis que le ministère de la Métropole existe, comment ça marche, ce que ça donne sur le terrain; j'aimerais vous entendre... Comme, moi, je suis député dans une région, dans l'Estrie, puis on a beaucoup entendu parler du ministère de la Métropole, qu'est-ce que ça donné à ce jour?

M. Trent (Peter F.): Disons, à date, je pense qu'il n'y a aucun résultat concret. D'ailleurs, peut-être vous le savez, peut-être vous ne le savez pas, nous avons déjà écrit au ministre, à l'époque, M. Ménard, puis aussi à M. Perreault. Pour nous, si la Commission n'est pas décisionnelle, si les gens qui ne sont pas des élus peuvent voter sur les affaires qui impliquent de l'argent, surtout notre argent... Il y a une foule de raisons pour lesquelles on ne veut pas participer à ces affaires-là. D'ailleurs, notre crainte, ici, on va créer une structure ou des structures qui ont un mandat similaire.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Schwartz.

M. Schwartz (Harry): Effectivement, on vit ces dernières années des structures additionnelles, et c'est les mêmes gens qui doivent combler avec toutes ces structures-là. Dans le présent cas, avec le sens de la loi n° 171, il y a tant de questions qu'on a où on n'a pas de réponses. On ne peut pas s'embarquer dans quelque chose sans avoir des détails beaucoup plus qu'on en a aujourd'hui. Dans l'état où on est, c'est difficile, très difficile pour nous, de s'engager à ça sans avoir beaucoup plus de détails.

On apprend ici ce soir – justement ce soir – que le ministre de la Métropole a tous les moyens d'implanter cette structure-là. C'est la première fois qu'on en entend parler. Donc, j'imagine qu'il y a d'autres surprises pour nous. Dans ce cas-là, c'est une bonne nouvelle, mais il y a d'autres surprises sûrement dans ce projet de loi où il y a des choses qu'on ne connaît pas et, avant de s'embarquer, il va falloir avoir des réponses plus précises.

M. Bossé (Georges): En fait, la Commission de développement, tout le monde a demandé son report à cause du projet de loi n° 173 également. Tant qu'il n'y aura pas de pacte fiscal, il n'y a pas personne qui veut s'embarquer encore une fois dans un autre inconnu.

M. Vaillancourt (Marc-André): Il faut comprendre également que, au niveau de la Conférence des maires et de tout le territoire finalement de l'île de Montréal, lorsque la Table Québec-régions a élaboré des propositions qui ont présidé au livre blanc et à la politique gouvernementale, il faut réaliser que simultanément la région métropolitaine était invitée à un exercice fort différent qui était le renouvellement de la gestion métropolitaine. Alors, dans ce contexte-là, qu'il y ait des imprécisions actuellement dans l'opérationalisation de l'affaire, il faut réaliser qu'on est face à un projet de loi dans un premier temps et deuxièmement que l'opérationalisation sur le territoire de la région métropolitaine est fort différente qu'en régions. J'ai lu pour ma part la Table Québec-régions, à laquelle il n'y avait aucun représentant de la Métropole; il est évident que la base et les éléments, les principes qui ont guidé et présidé la rédaction de la politique sont inspirés de ça. Et on peut comprendre que le milieu est peut-être déjà rendu dans des phases de comités d'implantation.

Finalement, ce qu'on dit au ministre et au gouvernement c'est, dans le cas du ministère de la Métropole, il est évident qu'il y a une réalité qui est fort différente; les objectifs peuvent être atteints, mais l'application ne peut pas systématiquement se faire dans ce contexte-là compte tenu d'une réalité fort différente. Deuxièmement, l'organisation du développement économique local sur le territoire de l'île de Montréal, c'est complexe, et il y a des multiorganismes.

(22 h 40)

Alors, dans ce contexte-là, qui... On n'a pas nécessairement le goût de choisir les victimes. Alors, quand on demande de connaître les programmes desquels proviennent les sommes, on veut savoir aussi qui va être affecté par l'application, puis à qui on va faire mal, puis, quand on dédie des sommes, à qui ça va se faire. Mais par ailleurs ce qu'on dit également, c'est que l'échéancier est irréaliste par rapport à l'île de Montréal et au territoire de la région métropolitaine; somme toute, avant tout, créons des structures dans un contexte où la planification du développement métropolitain se fera sur son véritable territoire d'appartenance qui n'est plus l'île de Montréal.

L'île de Montréal a été imaginée en 1970 dans des contextes de gestion et de planification stratégique des années soixante. Alors, là, on est en l'an 2000 et c'est peut-être le temps qu'au Québec on se décide d'en faire une région administrative dans ce contexte-là. Le ministère des Régions est venu équilibrer – selon le ministre d'ailleurs – l'équilibre entre la métropole et l'ensemble des régions. Et la synergie est assurée, donc.

M. Vallières: Mme la Présidente, ce sera ma dernière question, parce que je n'ai pas eu de réponse à celle que j'ai posée. Ça fait un an que le ministère de la Métropole, ça existe. Qu'est-ce que ça a donné à date? C'était ça, ma question.

M. Bossé (Georges): Il existe sur papier, au moment où on se parle.

M. Vallières: Ah bon!

M. Bossé (Georges): Le ministère existe, la Commission... Si vous me demandez la question: Est-ce que la Commission... Le ministère, il existe; la Commission, elle n'existe pas encore. Et c'est un peu ce qu'on a dit tantôt, là. C'est tout simplement: on a créé un ministère, on a créé une commission, on est arrivé avec tellement de projets de loi, par après, qui venaient couper les jambes de la Commission. Regardez les responsabilités qu'on a données à la Commission, et dans le projet de loi n° 173 – avant le projet de loi n° 173, dans la réforme, soit dit la réforme Trudel – la moitié des responsabilités qui avaient été mises dans la loi n° 92, créant la Commission, était rendue dans la réforme Trudel. On a dit, à un moment donné: Écoutez, arrêtons de s'en aller comme ça, réglons un problème à la fois, réglons 173 – il va falloir qu'on le règle – et à un moment donné on verra aux autres. Mais dans le moment la Commission n'a pas siégé, n'est pas formée, n'existe pas puis c'est bien correct comme ça.

Une voix: Et pas personne en veut, d'ailleurs.

M. Bossé (Georges): Un pas à la fois, on va y arriver, j'espère.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Bourget.

M. Laurin: Merci, Mme la ministre. Je veux, moi aussi, remercier les représentants des maires de la banlieue pour leur mémoire. J'ai écouté avec soin leur allocution. J'aurais aimé avoir le mémoire avant pour pouvoir le lire avec attention, parce qu'il y a des pensées qui sont plus lentes que d'autres et, avant que les questions arrivent, ça demande une certaine décantation que je n'ai pas eu le temps de faire.

J'ai entendu défiler beaucoup de problèmes, aussi bien dans vos présentations qu'en réponse aux questions qui vous ont été posées, dont plusieurs touchaient Montréal. Plusieurs touchaient des institutions qui ont déjà été déjà mises sur pied et la façon dont elles n'ont pas encore fonctionné. Vous donnez tous les résultats voulus.

Évidemment, il faut bien se rappeler que ce projet de loi, c'est: soutien au développement local et régional, soutien à l'entreprenariat destiné surtout à une création d'emplois. Donc, il ne peut pas régler tous les autres problèmes reliés à l'économie aussi bien qu'au découpage des régions, les régions administratives. Ce n'est pas l'objet du projet de loi même si la réflexion est engagée sur chacun des problèmes que vous avez soulevés. Je sais que nous travaillons actuellement au découpage de nouvelles régions administratives, mais le fruit n'est pas encore mûr, et je ne pense pas qu'on le voie encore.

Nous travaillons également sur une sorte d'équité fiscale; le pacte fiscal n'en est qu'un des éléments. Nous réfléchissons aussi sur la fiscalité et une équité de fiscalité sur la grande île de Montréal et la région de Montréal également. Et déjà des positions ont été annoncées qui cependant méritent d'être approfondies afin qu'on en arrive à des résultats plus concrets. Par exemple, je pense à la réflexion, pour ne pas dire à la prise de décision qui a été prise en faveur d'une meilleure équité fiscale entre la «fidécouronne» de Montréal et l'île de Montréal, et même entre Montréal et les banlieues. Mais on ne peut pas régler ces problèmes-là ici.

Quant au CRD, il va continuer d'exister. Comme a dit le ministre, je ne pense pas qu'on réussirait à l'arracher maintenant qu'il est là même si, lorsqu'on a créé la Commission de développement de la métropole, on a conclu à une nécessité d'arrimage entre les deux et peut-être éventuellement à une absorption éventuelle du CRD de l'île par la Commission de développement. Mais ça, c'est encore à l'état de réflexion et de devenir.

Donc, on ne peut pas régler tous les problèmes réels – je l'admets avec vous – que vous avez soulevés par le biais de ce projet de loi qui est quand même plus spécifique et qui touche au soutien, au développement local et régional.

J'aimerais cependant poser quelques questions sur vos remarques de la page 5, et surtout les recommandations que vous nous faites. J'ai entendu les échanges sur la récurrence des fonds. Évidemment, je ne pense pas qu'un ministre oserait présenter un projet de loi d'une telle importance si les sommes qui y sont inscrites n'étaient que pour une année. Il me semble que ça tombe sous le sens que, quand on annonce un mode de répartition d'enveloppe et un montant d'enveloppe, il me semble que ce n'est pas pour l'année en cours, il me semble que c'est d'une façon permanente. On peut donc considérer ça comme un engagement pour l'avenir, destiné à la récurrence.

Quant au montant des sommes, on peut certes argumenter sur le montant plus ou moins suffisant des sommes en cause. Je pense, avec vous, que, idéalement, ces sommes devraient être plus importantes. Je pense aussi que les critères de répartition sont bons: la population, l'indice de chômage, l'indice de pauvreté. Vous recommandez d'en ajouter un: l'indice du nombre des entreprises. C'est à considérer, malgré qu'à première vue il m'apparaît moins important que les trois autres, puisque le but de la loi c'est de créer des emplois par l'entremise d'un soutien à l'entrepreneuriat local. Mais c'est à regarder, évidemment.

Pour revenir à la récurrence, je ne pense pas qu'il soit important de ne considérer que les montants en cause. Il y a aussi les façons, les méthodes de fonctionnement. La somme peut être la même, mais la façon dont elle est dépensée peut être beaucoup plus efficace selon le mode que l'on choisira de le dépenser. Comme, par exemple, actuellement, c'est vrai, vous avez raison, il n'y a pas d'argent nouveau; mais par contre l'argent de certains programmes, de multiples petits programmes va être agrégé dans une seule enveloppe, et c'est le nouvel organisme qui, avec la composante nouvelle qui sera la sienne et avec une conscience aiguë des problèmes de son milieu, verra à dépenser autrement cette enveloppe qui vient de programmes existants et dont certains sont peut-être inefficaces, dont certains ont été peu utilisés ou mal utilisés ou ne correspondent plus aux priorités que le milieu peut se donner. C'est le sens au fond de la prise en charge par le milieu de son propre développement. Et c'est dans ce sens-là que ça m'apparaît beaucoup plus souple et beaucoup plus riche de promesses que la fragmentation des multiples programmes que nous avons actuellement.

Quant à l'autonomie métropolitaine, je répète évidemment ce qui a déjà été dit, c'est que le ministère de la Métropole, en cohérence avec son collègue des Régions, va être totalement responsable de ces nouveaux CLD, bien sûr en cohérence avec son collègue mais quand même va être totalement directement responsable de ces CLD, comme il l'était d'ailleurs déjà du CRD, conseil régional de développement, et aussi du Secrétariat au développement des régions et de la Conférence administrative régionale également.

Je pense que ceci va permettre une cohérence, encore une fois, une cohésion qui commençait à exister déjà, mais qui sera encore plus grande du fait que les CLD et les CLE, éventuellement, arrimés l'un à l'autre vont pouvoir faire dans le milieu à la lumière justement du remue-méninges et des prises de décision qui seront prises par ces CLD. En tout cas, c'est comme ça que, moi, je vois cela, et j'aimerais ça savoir si, à la suite de mon illustration, vous pouvez pencher vers une vision analogue.

(22 h 50)

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Bourget, si vous voulez avoir une réaction, il vous reste une minute et demie. Alors, si vous voulez bien, M. Bossé ou M. Trent, réagir. M. Bossé.

M. Bossé (Georges): Tout simplement mentionner que vous avez soulevé des points qui sont excessivement importants. Vous avez dit: développement local, le CLD dans l'île de Montréal et comment on pourrait mieux utiliser les argents.

Le développement local, on s'y connaît là-dedans, je peux vous garantir qu'on s'y connaît. Il y a une ville au Québec qui a un commissaire au développement local, il y en a une, puis elle est chez nous. Alors, on sait ce qu'on veut dire quand on parle de développement local. Et ça serait peut-être important que M. le ministre dise bien au ministre de la Métropole que, même sur l'île de Montréal, il ne peut pas y avoir un modèle de CLD. Il pourrait y avoir peut-être 15 différents modèles, parce que les besoins sont différents d'un endroit à l'autre. Et le mur-à-mur, si on ne le fait pas au Québec, il ne faut pas plus le faire dans l'île, parce que les besoins sont totalement différents d'une région à l'autre, et je pense que vous connaissez assez l'île pour le savoir.

Notre problématique de vouloir, dans votre projet de règlement, confirmer l'existence et institutionnaliser – ce qu'on dit tout le temps – le CRD dans l'île de Montréal, on sait que c'est une structure qui aura à évoluer rapidement, beaucoup plus rapidement, je pense, que ce que vous avez mis dans votre tête de le faire. Et, si elle est institutionnalisée, c'est un barreau de plus à grimper pour qu'un jour ça soit plus performant que c'est dans le moment. Il faut quand même le réaliser, là...

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, en conclusion, M. Bossé, s'il vous plaît.

M. Bossé (Georges): En conclusion, je dirais très rapidement: On ne doit pas continuer à créer des organismes pour créer des organismes. Il faut que ça soit fonctionnel, il faut que ça rende à la population les services dont elle a besoin.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Bossé. Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Pour qu'elle ait la parole, il faut que j'aie le consentement, parce qu'elle n'est pas membre de la commission.

M. Chevrette: Avec plaisir...

Une voix: ...une date butoir.

M. Chevrette: ...une date butoir.

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste huit minutes, la date butoir, c'est huit minutes. Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci. Je ne veux pas prolonger indûment. Il y a juste une chose qui est fascinante ici, j'espère qu'on le réalise, c'est que la main gauche – puis sans blâmer la main gauche – ne sait pas ce que la droite fait, là. Il est clair qu'en voulant essayer d'organiser en quelque part l'ensemble du Québec, quand on arrive dans la région de la métropole, là on tombe... finalement, on fait face à un mur. Parce que dans cette grande volonté d'organisation on a créé un ministère de la Métropole qui, lui, a créé une Commission de développement de la Métropole qui, elle, ne siège pas. Mais par contre elle ne peut pas siéger avant la réforme de la fiscalité et la réforme du ministre des Affaires municipales, entre autres.

On l'avait dit, le député de Bourget était là, et on n'était pas très fier, au mois de juin, quand on est sorti, après l'étude de la Commission de développement de la Métropole, honnêtement. Ça n'a pas été peut-être notre plus brillante session, parce que, tout simplement, on savait pertinemment que le projet de loi tel que présenté ne s'appliquerait pas dans sa fonction même.

Cela dit, la Commission de la Métropole a pour mandat de regarder les structures et de les simplifier. Or, vu qu'elle ne siège pas et qu'elle ne siégera pas jusqu'à temps qu'il y ait une réforme fiscale, d'une certaine façon – parce que tout le monde est un petit peu mal à l'aise d'y aller – alors, là, on ajoute d'autres structures qui ne viennent pas de la métropole, qui viennent maintenant du nouveau ministère des Régions, qui, par contre, vont s'implanter sur le territoire. Mais il y a une difficulté sur le territoire parce qu'il y a d'autres organismes qui sont là qui peuvent faire aussi très bien l'affaire. Alors, c'est ça qui se passe, en gros, au niveau de la métropole.

Cela dit, depuis le mois de juin, l'ancien ministre de la Métropole, lui, avait le mandat de regarder l'ensemble, et force de se rendre compte que nous sommes au mois de décembre, deux ministres plus tard, puis il n'y en a pas, de solution. Alors, quand on dit qu'il a toute la liberté, moi, si je lis le projet de loi et que je vais aux articles 61 et 62, il a la liberté de les implanter; il n'a pas la liberté de dire: On va les remplacer. Ou encore: on a une Commission de développement de la métropole éventuelle, on va s'organiser pour la faire marcher, puis sur le territoire, bien, on va prendre cet argent-là puis on va l'organiser différemment. En tout cas, je ne sais pas, mais je ne vois pas à nulle part dans le projet de loi que le ministre – à moins que je me trompe – de la Métropole a cette liberté-là.

Et, quand on a rencontré la sous-ministre au développement régional, Mme Bégin, elle nous a bien dit, et clairement, qu'il y avait un problème au niveau de l'implantation de cette structure-là – elle-même, elle l'a dit – sur le territoire de la métropole, d'une part, mais il n'y avait pas de liberté pour le ministre de la Métropole de l'implanter ou de ne pas l'implanter. Alors, c'est ça. Donc, là, ce que j'entends, c'est que vous êtes pris avec une structure que vous devez implanter, même si... Si je vous disais, si je vous demandais la question: Avoir le choix, le ministre de la Métropole a le choix de l'implanter ou de ne pas l'implanter ou de travailler avec vous par rapport aux 14 000 000 $ qui existent déjà – ils existent déjà, ce n'est pas un ajout, là, et c'est déjà actif dans la région – alors, si vous aviez le choix de les avoir ou de ne pas les avoir, la réponse serait?

M. Trent (Peter F.): Les avoir, au moins on retarde la confection d'une telle structure, parce qu'il me semble que c'est primordial de regarder la métropole, la Commission de la métropole, le pacte fiscal, toutes ces questions-là, avant qu'on commence à créer des structures encore plus petites que justement la Commission de la métropole.

M. Bossé (Georges): La difficulté – je vais donner la parole tout de suite après à Marc – c'est quand je relis, moi, l'article 61 qui dit: «Le gouvernement peut déterminer dans quelle mesure et sur quel territoire le ministre d'État à la Métropole exerce les responsabilités prévues par la loi.» Puisque le gouvernement peut déterminer le territoire, pourquoi il ne détermine pas le territoire de la métropole comme étant le territoire de la métropole?

Une voix: Bien voilà.

M. Bossé (Georges): Je comprends ce que vous disiez tantôt, ce que M. le ministre disait tantôt, c'était la volonté de quelqu'un qui a fait ça à quelque part, il y a tant de temps. Bien, ce qui est dit dans 61, c'est que le gouvernement a le droit de changer d'idée, dans le fond. Il dit clairement, là-dedans: Il peut déterminer le territoire. Pourquoi, le territoire, ce n'est pas celui de la métropole? Sinon, on se dit, encore une fois, ça ne vaudra pas la peine. On va recommencer et demain matin, quand on va rechanger des structures, bien on va être encore avec deux ministres qui s'occupent de deux affaires différentes qui sont les mêmes, mais faites par du monde différent, dans le même territoire, qui n'est pas tout à fait le même, mais qui se ressemble. On ne finit plus.

M. Vaillancourt (Marc-André): Dans le mémoire, on mentionne qu'on partage les objectifs, alors, c'est assez difficile de dire qu'on est contre. Il y a un objectif de simplification des structures, cependant.

M. Chevrette: J'étais en train de lui dire qu'il y en a qui ont des appétits gargantuesques.

M. Vaillancourt (Marc-André): Je termine là-dessus d'ailleurs, ça va être bref.

M. Chevrette: Vas-y, mon grand.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Vaillancourt (Marc-André): Je pense qu'on a dit qu'on partageait l'ensemble des objectifs qui étaient visés. Il est difficile à priori de dire: C'est donc impossible d'application. Ce que l'on demande par ailleurs, c'est un exercice de réflexion en profondeur pour voir comment les adaptations qui sont à faire, si majeures soient-elles, qu'on ait le temps d'y réfléchir et de le faire en concertation avec le ministère d'État à la Métropole, de telle sorte que l'implantation des CLD se fasse de façon cohérente.

Mme Frulla: O.K. Une question vite, là. Vous n'avez rien eu jusqu'à maintenant? C'est-à-dire que le ministre d'État à la Métropole, jusqu'à maintenant... Parce que, là, ce n'est pas nouveau, ça, là, le ministre, ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il dit qu'il va déposer ça, c'est dans les plans, on sait ça. Alors, il y «a-tu» un ministre d'État à la Métropole qui s'est assis avec vous autres pour dire: Ça «fait-u» votre affaire ou pas et si ça ne fait pas votre affaire, on fera les représentations nécessaires?

M. Vaillancourt (Marc-André): On va être obligé de donner un bémol au ministère d'État à la Métropole, parce qu'il...

Mme Frulla: On a voté contre, ça fait qu'on est bien à l'aise.

M. Vaillancourt (Marc-André): Il faut le donner, parce que, de toute façon, nous avons été impliqués et toutes les machines municipales ont été impliquées dans plusieurs exercices, cette année. Il est évident que, du côté de l'île de Montréal, non seulement il y a un niveau complexe de dossiers, mais en même temps l'appropriation par les élus et par le personnel technique du même dossier a exigé et exigerait une période de réflexion aussi longue que la Table Québec-régions a prise pour développer le concept qui lui semblait approprié, et les principes, pour le ministre. Or, dans ce sens-là, je pense qu'il y a un crédit à donner.

Où le bât blesse un peu cependant, c'est que le décret 1483 duquel nous sommes soustraits, semble-t-il – on nous informe que nous sommes soustraits; officiellement, nous n'avons jamais eu confirmation de ça... Alors, dans ce sens-là, et je pense qu'au niveau de l'ensemble du ministère des Régions, ou du futur ministère des Régions, et des gens qui y sont responsables, qu'au ministère d'État à la Métropole, il y a eu de l'information qui était souvent imprécise et, dans certains cas, voire même de la désinformation parce que, d'une porte à l'autre, on n'avait pas toujours les mêmes informations. Ça rend plus complexe quand le pourtour du projet déjà renferme certaines inquiétudes et des incertitudes.

(23 heures)

Mme Frulla: En tout cas, juste en terminant, pour votre information personnelle, mardi, le 28 octobre 1997, 15 h 10, je demandais au ministre d'État à la Métropole s'il entend se faire imposer par son collègue, le ministre responsable du Développement des régions, maintenant ministre des Régions, la structure uniforme des CLD sur l'île de Montréal, oui ou non, et il m'a dit: Bon, quant aux modalités, on verra; j'ai bien l'intention et je vois l'occasion, dans ce projet de loi, de simplifier les structures de la région de Montréal et j'espère bien que nous y arriverons en collaboration avec le ministre des Régions. À ce que je vois maintenant – on est en décembre 1997 puis on s'en va en 1998 – on ne voit pas le jour encore, M. le ministre, on ne voit pas le jour de simplifier les...

M. Bossé (Georges): Si vous permettez une dernière intervention. Parce que, tantôt, M. le ministre a fait...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, M. Bossé.

M. Bossé (Georges): Tantôt, M. Chevrette, vous avez laissé aller un mot – puis vous et moi, on est pareils, on a de la misère à ne pas dire ce qu'on pense – vous êtes laissé aller à dire: Il y en a qui ont des appétits gargantuesques. J'aimerais juste savoir ce à quoi vous...

M. Chevrette: Vu que c'est la fin, est-ce que, de consentement, on peut...

La Présidente (Mme Bélanger): C'est la fin, tout le monde a terminé, mais on va faire un petit spécial parce que vous partez de loin.

M. Bossé (Georges): C'est parce que, dans le fond, si c'est dans le sens de dire qu'il ne faut pas donner au ministre de la Métropole son territoire complet dans ce projet de loi là – il faut que je le dise parce que je le pense – si M. Chevrette était ministre de la Métropole, je ne sais pas s'il serait ministre de la moitié.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Vous faites bien de dire ce que vous pensez. Ça ne me dérange pas, je suis habitué, je suis comme vous.

M. Bossé (Georges): Je le sais.

M. Chevrette: Mais je «peux-tu» vous dire que la crédibilité de quelque chose réside souvent dans les justes limites? Quand tu es rendu au canton de Gore, en haut de Saint-Colomban, tu y perds au change en termes de crédibilité quant à l'étendue et à la surface. Et ça je peux vous dire, M. Bossé, vous savez comment je peux parler avec ce monde-là, sur la rive nord comme sur la rive sud, je suis ministre des Régions, et je suis persuadé qu'un périmètre plus réaliste aurait reçu une crédibilité beaucoup plus grande et une spontanéité de collaboration; j'en suis profondément convaincu. Et je n'ai pas de cachette, je l'ai dit très ouvertement, très honnêtement.

Et ce n'est pas pour rien qu'on a dû avoir un compromis entre M. Ménard et moi à l'époque, lors de l'adoption de la politique, rappelez-vous. Mais les mandats ont été donnés simultanément... C'est moi qui ai écrit à l'époque parce que n'étant pas clarifié au niveau du Conseil des ministres et étant en vertu de la législation même de mon ministère – le Secrétariat au développement des régions – je demeurais avec la responsabilité ultime de l'application de la politique même si je n'avais pas les ressources et les budgets. C'est aussi clair que ça, et je l'ai dit en toute franchise à mon ami de Richmond. Donc, je lui ai dit ceci.

D'autre part, les ministres ont le mandat de réaliser ce que, moi, je fais dans les autres régions. Donc, quand je vous dis: Il y a M. Rochon qui a un mandat pour la Communauté urbaine de Québec; il y a M. Simard qui a un mandat pour la Communauté urbaine de l'Outaouais et il y a M. Ménard – maintenant Perreault – qui a le mandat de la Communauté urbaine de Montréal et de l'île de Laval à cause du décret dont vous parliez... Et on pourrait discuter longuement là-dessus, mais je suis même prêt à revoir des dates pour Montréal, connaissant la spécificité et les difficultés. Je ne suis pas bloqué là-dessus, je ne suis pas borné, moi, en autant qu'on joue au-dessus de la table comme on le fait là.

M. Bossé (Georges): Ça serait grandement apprécié.

M. Chevrette: Ce que je n'aime pas, moi, c'est les filandreux qui me disent quelque chose à huis clos puis ils me disent le contraire ici. Mais, quand on se parle de même, je n'ai aucun problème avec ça.

Il y a des particularités, il y a des modèles extrêmement spécifiques qu'il faut regarder; il y a des zones même à l'intérieur de Montréal, qui méritent une répartition monétaire différente même à l'intérieur de l'île que des modèles qu'on a pris, par exemple, en Abitibi, de cinq MRC divisées par cinq. Il y a des poches de pauvreté énormes, je suis très conscient de ça. Et c'est pour ça que, quand je dis que tous les mandats sont possibles, toute la liberté est possible, je dis la vérité et je suis prêt à n'importe quel modèle. Puis, si je demeure responsable de la politique, je vous dis que j'accepterai les modèles qu'on me suggérera; c'est pour ça que j'ai affirmé au départ, sans aucune contrainte, qu'il a tous les mandats.

Puis ça peut être très différent sur l'île de Laval parce que je vous ai expliqué que le contexte est tellement différent. Ça, là-dessus, je ne peux pas être plus ouvert, plus transparent, moi, en ce qui me concerne, puis je suis même prêt, indépendamment du fait que ce n'est pas de ma responsabilité en vertu du décret, je suis même prêt à mettre à profit mes 21 ans d'ancienneté.

M. Bossé (Georges): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Merci, MM. les maires de la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, bon retour. La commission ajourne ses travaux à demain, 11 h 30.

(Fin de la séance à 23 h 5)


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