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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le vendredi 10 septembre 2010 - Vol. 41 N° 55

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 109 - Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Morin): Bon matin, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande donc à tout le monde de vérifier vos téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 109, Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale.

Mme la secrétaire, est-ce qu'on a des remplacements, ce matin?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Beaudoin (Mirabel) est remplacée par M. Tremblay (Masson); M. Ferland (Ungava), par M. Villeneuve (Berthier), et M. Pagé (Labelle), par M. Ratthé (Blainville).

Le Président (M. Morin): Merci beaucoup. Ce matin, comme ordre du jour, nous avons, à 9 h 30, M. Denis Saint-Martin, professeur de l'Université de Montréal; par la suite, à 10 h 30, nous avons M. René Villemure, Institut québécois d'éthique appliquée; à 11 h 30, Alliance des professionnels et des professionnelles de la ville de Québec; et, 12 h 30, l'ajournement.

Donc, j'inviterais maintenant M. Denis Saint-Martin à venir, à exposer son mémoire, en vous disant que vous avez 15 minutes et que par la suite, bien, on aura 45 minutes avec les échanges du côté tant ministériel que de l'opposition. Donc, M. Villemure...

Auditions (suite)

M. Denis Saint-Martin

M. Saint-Martin (Denis): Saint-Martin.

Le Président (M. Morin): M. Saint-Martin, excusez. Bonjour.

M. Saint-Martin (Denis): Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, je voudrais tout d'abord remercier votre commission de l'invitation à venir discuter avec vous du contenu du projet de loi n° 109 sur l'éthique en milieu municipal. Je suis honoré d'être en votre présence ce matin, et je voudrais aussi vous exprimer toutes mes condoléances pour la perte de votre collègue, le député de Kamouraska.

En guise d'introduction, permettez-moi de vous présenter brièvement mes travaux sur la régulation de l'éthique en politique et de vous faire part des grandes conclusions que l'on peut tirer de la recherche en sciences sociales sur cet important sujet. Et ensuite j'aborderai plus en détail mon analyse des différents problèmes et des questions que soulèvent, à mon avis, le projet de loi n° 109.

Depuis une vingtaine d'années, on observe, dans la plupart des régimes démocratiques développés, ce qu'on peut appeler une crise de l'éthique. À travers les sondages, on sent, dans l'opinion publique, dans les médias, dans les débats politiques, une préoccupation de plus en plus forte en ce qui concerne les questions d'intégrité dans la vie publique. On cherche de plus en plus à soumettre les gouvernements, les hauts fonctionnaires, les élus à toute une série de règles, de codes de conduite, de procédures légales et administratives qui ont pour objectif de renforcer l'éthique, dans le monde gouvernemental et politique, afin de restaurer la confiance des citoyens dans les institutions.

Il y a donc tout un mouvement de légalisation, d'institutionnalisation ou même de bureaucratisation de l'éthique en politique. On peut dire que ce mouvement a commencé, dans les années soixante-dix, aux États-Unis, avec le scandale du Watergate et, à partir de l'expérience américaine, cela s'est ensuite diffusé à travers la planète, dans la plupart des régimes démocratiques avancés.

En même temps, lorsqu'on regarde la plupart des études qui existent au plan international et dans la recherche universitaire, on voit que, de nos jours, les hommes et les femmes politiques sont beaucoup moins corrompus, sont beaucoup plus honnêtes et intègres qu'ils ne l'ont probablement jamais été auparavant dans l'histoire.

Par exemple, dans toutes les études de l'organisme Transparency International, le Canada est, bon an, mal an, l'un des deux, trois premiers pays avec la Suède où les taux de corruption et de malversation sont vus comme étant les plus faibles au monde. Mais malgré cela, lorsqu'on observe l'opinion publique, on constate que les citoyens ont des préoccupations de plus en plus fortes en ce qui concerne l'éthique de leurs représentants politiques. Et c'est ce paradoxe, cette contradiction qui est le point de départ de mes recherches.

Les États-Unis sont le pays où les règles d'éthique sont les plus développées et c'est là où il y en a le plus, hein? Les codes d'éthique, aux États-Unis, ont l'épaisseur de bottins téléphoniques. Et c'est aussi là où les règles sont les plus sévères. Mais, en même temps, la société américaine exprime un profond malaise éthique à l'endroit de ses politiciens et de son gouvernement.

Dans mes recherches, ce paradoxe, je l'explique par la politisation des règles d'éthique. Et c'est précisément sur ce point que je veux attirer votre attention ce matin.

La réglementation de l'éthique en politique n'est absolument pas une panacée. Ce n'est pas la solution miracle à tous les problèmes d'intégrité. La recherche est très claire là-dessus: il n'y a aucune relation de cause à effet entre les codes d'éthique et la confiance du public dans les institutions politiques. Et aussi les règles d'éthique ne rendent pas les gouvernements et les élus plus intègres et plus honnêtes.

En fait, et je sais que c'est un peu contre-intuitif, on retrouve plutôt la relation inverse: plus il y a de règles d'éthique, comme aux États-Unis ou au Royaume-Uni par exemple, plus la confiance des citoyens est faible. Pourquoi en est-il ainsi? À cause justement de la politisation des règles d'éthique. Lorsque les règles sont utilisées comme des armes de combat partisan où on cherche à gagner des points en discréditant ses adversaires, c'est à ce moment-là qu'on affaiblit la confiance des citoyens.

Plus il y a de règles, plus cela fournit des munitions aux forces partisanes qui vont s'en servir pour faire des allégations contre leurs adversaires, et alors, tout ce que les citoyens voient et entendent dans les médias, tout ce qu'ils observent dans l'arène politique, ce sont des politiciens qui s'accusent mutuellement d'avoir violé telle ou telle règle d'éthique. Ce n'est pas surprenant, dans ce contexte, que les citoyens expriment de nos jours des préoccupations plus fortes en ce qui concerne les questions d'intégrité en politique, parce que c'est de ça qu'ils entendent toujours parler lorsqu'ils regardent la télévision ou lisent les journaux.

On pourra, si vous voulez, revenir sur ces questions d'ordre plus général lors de notre période d'échange. Mais, dans ce que je viens de vous dire, le problème fondamental, c'est celui de la politisation des règles d'éthique. C'est donc sur cet aspect que j'ai concentré mon attention dans l'analyse du projet de loi n° 109.

Je vois trois grands types de problèmes avec ce projet de loi. Premièrement, le plus important problème et de loin, c'est le rôle que le projet de loi accorde au ministre dans le processus d'évaluation de la validité des plaintes qui peuvent être reçues du public. Pourquoi le ministre, une entité politique et partisane, devrait-il jouer le rôle d'arbitre ou d'intermédiaire entre les plaintes du public et la Commission municipale?

Je ne comprends absolument pas cette logique-là. Pourquoi a-t-on besoin d'un politicien pour déterminer du caractère bien fondé ou non des demandes d'enquête émanant du public? Pourquoi cette évaluation ne serait-elle pas réalisée par les bureaucrates de la Commission municipale indépendante? Les articles 21 et 22 vont inévitablement placer le ministre dans des situations de conflit d'intérêts politique. En anglais, on dirait que c'est un «Accident Waiting to Happen».

Imaginez la situation suivante: disons qu'une plainte du public concerne la ville d'où vient le ministre, la ville où se trouve le gros de son entourage politique et, dans cet entourage, disons qu'il y a des individus qui font aussi partie ou qui ont des liens avec l'administration municipale. Le ministre reçoit donc une demande d'enquête et, en toute bonne foi, il la juge irrecevable. Mais pensez-vous que les adversaires politiques du ministre vont aussi présumer de sa bonne foi? Ils vont bien sûr l'accuser d'être juge et partie -- d'être en conflit d'intérêts; ils auront bien raison, parce qu'il n'y aura pas eu apparence d'impartialité dans le processus.

**(9 h 40)**

Qu'il le veuille ou non, la présence du ministre dans l'évaluation du caractère bien fondé des plaintes vient complètement politiser le processus. Mon collègue Dennis Thompson, de l'Université Harvard, qui a longuement étudié ces questions, dirait des articles 21 et 22 qu'ils créent des mécanismes qui sont institutionnellement corrompus, c'est-à-dire des mécanismes qui placent ceux et celles qui en sont responsables dans des situations inévitables de conflit d'intérêts. Je n'ai aucune raison de croire que le ministre n'agirait pas de bonne foi. Et vous le savez beaucoup mieux que moi: en matière d'éthique en politique, ce sont les apparences qui comptent, d'abord et avant tout.

À mon avis, vous devez absolument supprimer le rôle du ministre dans le processus d'évaluation du bien-fondé des plaintes reçues du public. Ce pouvoir-là devrait être exercé par les bureaucrates de la Commission municipale. La commission ne devrait plus attendre le feu vert du ministre avant de procéder à une enquête. Elle doit avoir le pouvoir autonome de décider par elle-même du bien-fondé des plaintes. J'irais même plus loin: la commission devrait aussi avoir le pouvoir de lancer des enquêtes par elle-même, sans attendre que le processus soit déclenché seulement par une plainte du public ou par le ministre.

Vous savez, personnellement, j'ai autant confiance dans les politiciens que dans les bureaucrates qui travaillent dans des commissions indépendantes. Là n'est pas du tout la question. La question en est une de légitimité: vous devez créer un processus légitime qui donne confiance au public qu'il y a bel et bien eu apparence d'impartialité dans le traitement des plaintes.

L'article 28 est aussi potentiellement problématique. La commission peut recommander une sanction en cas de violation des règles, mais ne dispose d'aucun pouvoir de sanction. Ce pouvoir appartient au conseil qui, après un vote majoritaire, peut décider d'imposer ou non une sanction.

Le rôle du conseil dans cette procédure constitue un autre élément qui peut venir politiser le processus et donc le rendre moins légitime aux yeux du grand public. Si la personne visée par la sanction est quelqu'un qui a du pouvoir, des contacts, des réseaux, de l'influence, il se peut que, pour ces raisons-là, le conseil décide de ne pas la punir. Mais, si la personne visée a peu d'influence, alors on décidera de la punir parce que personne n'a rien à perdre. Donc, on voit comment des relations de pouvoir inégales pourraient créer un régime d'éthique arbitraire et politisé. À mon avis, on doit éviter cela à tout prix. Peut-être que le pouvoir de sanction devrait appartenir à la commission indépendante et non au conseil municipal, qui est une entité politique. C'est une piste de réflexion que je vous invite à considérer sérieusement.

Le second point qui me semble important, c'est le droit que le projet de loi accorde au public de formuler des plaintes quant à d'éventuels manquements au code d'éthique. Certains voient là-dedans une forme de démocratisation, d'autres y verraient plutôt du populisme. Quant à moi, je n'ai pas d'opinion forte sur cette question. Mais il ne faut pas être trop naïf non plus: vous savez plus que moi qu'en politique rien n'est un hasard. Que souvent les choses sont très bien chorégraphiées, planifiées et organisées à l'avance.

La recherche aux États-Unis, où la plupart des États ont octroyé aux citoyens le droit de porter des plaintes sur l'éthique de leurs représentants, montre que parfois le citoyen Jos Bleau, qui dépose une plainte, le fait en complicité avec des adversaires politiques de la personne visée par la plainte. Donc, si, en politique, on ne peut présumer que le ministre est neutre, comme je l'ai dit tantôt, la même logique s'applique aux citoyens. Le citoyen qui dépose une plainte contre un élu ou un fonctionnaire et qui ensuite organise une conférence de presse pour dire qu'il a demandé une enquête sur telle ou telle personne vient, lui aussi, complètement politiser le processus. Il vient d'utiliser le droit que la loi lui octroie comme une arme de combat politique pour salir la réputation de quelqu'un. Peut-être que la demande de ce citoyen sera ensuite refusée parce qu'elle est non fondée, mais entre-temps, les médias auront parlé de l'affaire, on aura fait courir des rumeurs à propos d'un représentant municipal qui n'a peut-être rien à se reprocher.

Donc, si la loi crée un droit pour les citoyens, elle doit aussi prévoir des obligations. Le citoyen qui dépose une demande d'enquête devrait faire le serment qu'il gardera le silence jusqu'à temps qu'une décision soit rendue sur le bien-fondé de sa demande. S'il y a du coulage dans les médias, on va encore potentiellement politiser le processus. On doit donc prévoir un guide de procédures qui informe le citoyen de ses droits et de ses obligations, et des règles à respecter lorsqu'on décide de déposer une plainte contre un représentant municipal. C'est ce que font la plupart des États américains qui permettent aux citoyens de déposer des plaintes.

Je dois aussi vous dire que les États américains qui permettent aux citoyens de porter plainte en matière d'éthique, comme le Connecticut, la Floride, le Massachusetts ou Washington, dans tous ces États-là, c'est presque le deux tiers des plaintes reçues du public qui sont rejetées parce que non fondées. C'est beaucoup, et cela n'est évidemment pas gratuit. On peut donc se questionner sur l'utilité réelle de cette procédure. C'est pour cela que certains parlent d'une forme de populisme, car c'est bien souvent pour mettre de la poudre aux yeux, car, dans les faits, cela a très peu d'impact.

Ce qui m'amène à mon troisième et dernier point. En anglais, on dit: «What's good for the goose is good for the gander.» Quand je regarde le projet de loi n° 48, celui qui concerne votre propre code d'éthique, et le projet de loi n° 109, je constate que l'Assemblée nationale a décidé de créer un double standard: on permet aux citoyens de porter plainte contre leurs représentants municipaux, mais on ne leur accorde pas le même droit pour leurs députés. Pourquoi? Peut-on m'expliquer la raison qui sous-tend cette différence de traitement?

Généralement, du moins aux États-Unis où la pratique a vu le jour, on a voulu donner un rôle aux citoyens dans le processus d'éthique justement pour briser l'esprit de club, hein, l'esprit de corps qui fait en sorte que les grands partis politiques organisés peuvent parfois s'entendre entre eux pour dire: Je n'utiliserai pas les règles d'éthique contre toi si tu ne les utilises pas contre moi. Il peut parfois y avoir une sorte de conspiration du silence, une forme de collusion politique qui fait en sorte que des manquements à l'éthique graves, surtout lorsqu'ils concernent des personnes seniors qui ont du pouvoir au sein du parti, ne font jamais l'objet d'enquête, parce que seuls les députés eux-mêmes peuvent déclencher le processus. C'est donc pour apporter un élément externe à l'Assemblée législative que l'on a donné un droit d'intervention aux citoyens afin de briser la mentalité de «Old Boys Network» qui peut parfois exister lorsque des personnes se connaissent et doivent régulièrement travailler ensemble au sein d'une même institution.

La question du double standard que je soulève avec vous vient donner au public l'impression que les députés de l'Assemblée nationale auraient des choses à cacher. Et c'est pour cela que leur processus d'éthique, du moins lorsqu'on le compare avec le projet de loi n° 109, ne permet pas aux citoyens d'intervenir et de porter plainte. Et cela vient encore une fois créer un problème politique de légitimité du régime d'éthique que vous voulez mettre en place pour les députés. Et c'est pour éviter ce type de problème que je vous invite à créer un régime d'éthique municipal et provincial qui soit semblable, sinon dans son contenu, du moins dans son mode de fonctionnement.

Donc, voilà, j'ai déjà trop parlé, merci de votre patience. À mon tour de vous écouter, maintenant.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Saint-Martin. Vous n'avez pas trop parlé, il vous restait une minute, si vous auriez voulu.

M. Saint-Martin (Denis): Ah! C'est bien.

Le Président (M. Morin): Donc, merci beaucoup. Maintenant, j'invite M. le ministre à questionner sur votre mémoire qui me semble très, très intéressant.

**(9 h 50)**

M. Lessard: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Saint-Martin, merci d'être venu. C'est très intéressant, ce volet politisation, on aurait dû tous le suivre, il y a 10 ans, sur le fait d'amener la politisation, nécessairement, d'une dénonciation ou une plainte au regard des droits et des obligations, autant du dénonçant que de l'intimé. Parce qu'il semble que, dans notre système actuel, seul celui qui dénonce semble avoir des droits, l'autre est obligé de les faire valoir. Alors, ça met une question très intéressante entre le populisme, effectivement, et la forme de démocratisation qu'on semble vouloir donner au fait de porter grief. Très, très intéressant. Ça met, en tout cas, en lumière beaucoup, beaucoup d'aspects. Vos études sont utiles, rassurez-vous.

On est au coeur d'un débat lancé l'an dernier. Vous dites: Plus il y a de règles d'éthique, moins il semble y en avoir à cause de la politisation -- donc l'usage qu'on en fait -- pour dénoncer ou, donc, pour contre-attaquer ou se draper derrière une règle d'éthique, peut-être vue aussi comme étant non éthique, au fait de dire: Bien, vois-tu, je me suis servi du guide pour atteindre ou protéger mes droits. Ça semble que, quand tu te protèges, tu as de quoi à te faire reprocher. Mais, en même temps, je me suis dit: J'ai vu que, pas de règle non plus, ça n'a pas l'air beaucoup mieux.

Donc, même si, au Canada, en général... puis en Suède, vous disiez, il semble que c'est là qu'on a le moins de problèmes d'éthique en général, mais la perception semble que c'est encore trop, et les événements de l'an dernier concernant l'élection municipale générale a semblé, en tout cas, révéler certains problèmes. Non, ce n'est pas nécessairement tout relié à l'éthique, il y a eu l'adjudication des contrats, qu'on a dû faire des lois d'encadrement au niveau du ministère du Travail aussi concernant l'émission de licences, qui finance les compagnies de construction, etc., au niveau des règles du Conseil du trésor, dont une série de mesures autres que l'éthique, parce qu'on comprend que ça ne peut pas tout régler. Mais force est d'admettre qu'on voyait que ce n'est pas égal: plusieurs ont des codes d'éthique, mais aucune sanction. Alors, la population nous disait: Comment est-ce que vous pouvez avoir une série de règles qui se terminent par une tape sur une main en disant: Vous avez enfreint toutes les règles sur l'adjudication des contrats, sur l'utilisation d'informations privilégiées concernant telle chose, puis à la fin le ministre des Affaires municipales, tout ce qu'il peut faire... Parce qu'on n'a pas, d'une certaine façon, judiciarisé l'éthique ou les comportements non éthiques, ce qui fait qu'à la fin on n'a aucun pouvoir légal de leur faire... sauf, dans une lettre parfois, leur indiquer que peut-être qu'ils devraient se doter d'autres règles, mais ça s'arrête là, alors que l'employé municipal qui pige dans la petite caisse un 50 $, lui, il se fait congédier sur-le-champ. Alors donc, il y a une autre sorte de jugement, c'est le jugement populaire aussi. Mais souvent, il semble y avoir deux poids deux mesures.

Donc, on a décidé de l'encadrer, comme l'Assemblée nationale aussi n'avait pas de règles d'éthique officielle. Et on a suivi les travaux de 48 donc, et vous le mentionnez, là, au commencement, les élus municipaux disaient: On veut comme 48. On comprend que les élus provinciaux auront un commissaire à l'éthique, donc ils disaient: On ne veut pas des commissaires, mais un commissaire. Le commissaire à l'Assemblée nationale, toutefois -- puis là j'aimerais vous entendre là-dessus -- vous voyez, il ne rend pas une décision, il rend une recommandation à l'Assemblée nationale dans laquelle les élus auront à statuer sur la portée aux deux tiers des votes pris à l'ensemble des 125 députés. Donc, est-ce que c'est une forme de politisation d'une sanction?

Parce que 109, c'est... les élus nous ont dit: Ayons le même traitement. Alors, ce qu'on a fait, on a mis un commissaire à l'éthique à la Commission municipale, qui va rendre une décision, une recommandation au conseil qui, lui, va statuer aux deux tiers. On a entendu toutes sortes d'affaires, puis je vous dirai à peu près ce qu'on veut peut-être changer. Mais ça, cet aspect-là concernant 48, moi, je n'ai pas suivi tous les débats de 48, mais on a attendu de déposer à la fin de juin pour voir quelle est l'évolution. Plusieurs des collègues de tous les partis siègent sur cette commission-là, et je ne sais pas si ça a été relevé, le fait que: Est-ce que toute personne peut porter grief contre un député et pourquoi seulement les députés entre eux autres? Et pourquoi ce n'est pas une décision et plutôt une recommandation? Qu'en pensez-vous?

M. Saint-Martin (Denis): Bien, merci, M. le ministre.

Le Président (M. Morin): Oui, M. Saint-Martin.

M. Saint-Martin (Denis): Merci, M. le ministre. Pour répondre à votre question sur le pouvoir de sanction, hein? Comme vous dites, le projet de loi n° 48, le commissaire à l'éthique qui serait créé a un pouvoir de recommander à l'Assemblée nationale: Voici, tel député a manqué à telle règle et voilà l'éventail des sanctions possibles. Alors que, moi, je dis, dans 109, c'est la même logique, on dit: On laisse ça au conseil exécutif, à un vote majoritaire, d'imposer ou non une sanction.

La différence que je ferais... et je comprends que 48 ait voulu faire cette distinction-là, parce que c'est celle qui existe dans la plupart des assemblées législatives souveraines, c'est-à-dire que l'Assemblée nationale, comme le Parlement canadien, sont des entités qui jouissent de ce qu'on appelle de la suprématie du Parlement, et, dans cette théorie-là de la suprématie du Parlement, le Parlement est souverain de se doter des règles qu'il veut pour gérer ses affaires à l'interne. Les cours, les tribunaux n'ont pas d'affaire là-dedans, parce que, si les cours avait d'affaire là-dedans, il y aurait une confusion dans la séparation des pouvoirs. Donc, je comprends que des entités souveraines comme l'Assemblée nationale disent: Là, ce n'est pas un bureaucrate qui va décider de punir un député; c'est nous, les députés, qui allons décider de le punir ou non.

Les conseils exécutifs municipaux ne sont pas des entités souveraines et de là la distinction que je ferais où je dirais: Bien, peut-être que là il y aurait peut-être une application différente. Vous voyez la... C'est ce que je veux dire.

M. Lessard: C'est sûr que, dit comme ça, expliqué de façon constitutionnelle, juridique... les pouvoirs, etc...

M. Saint-Martin (Denis): ...une question...

M. Lessard: ...pour l'individu qui porte plainte, lui, il ne comprend rien de ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lessard: Lui -- lui -- c'est du chinois, votre affaire: Voyons donc! Porte plainte, députés... C'est ça qui est difficile aussi dans la compréhension publique en général. C'est pour ça qu'on a voulu se coller à 48. Ce n'est pas parfait. Plusieurs sont venus nous dire aussi: Écoutez, là, si le conseil est majoritaire... Parce que, dans le rapport Gagné sur l'éthique, l'an dernier, il disait: Écoutez, il y a une responsabilisation de l'individu. Tout le monde... Vous allez avoir... Un comportement éthique, c'est plus important souvent que d'avoir un code d'éthique. Deuxièmement, si tu as un code, tu connais au moins les règles dans lesquelles tu vas jouer. La population qui veut te dénoncer, par populisme plutôt que par démocratisation, on mettra au moins à l'abri l'élu, sachant: il connaît le territoire.

Dans la façon de faire, donc, à la fin, est-ce que... Plusieurs sont venus nous dire aussi: Peut-être que vous devriez l'imposer, que ça soit une décision plutôt qu'une recommandation, en disant: Bien là, ça ne sera pas ambigu s'ils ne devaient pas l'appliquer. Là, on a dit: Bien, peut-être qu'on devrait changer les règles; au lieu d'être aux deux tiers -- parce qu'on monte le niveau d'adhésion -- si c'était à majorité simple, dans tous les cas il y aurait une décision. Si ce n'est pas oui, c'est non. Alors donc, dans tous les cas, ils appliqueraient ou pas ou par défaut, parce qu'ils pourraient, avec les deux tiers peut-être d'un conseil, dire: On n'a pas atteint le niveau des deux tiers, le niveau d'adhésion n'est pas assez... on est à 50-50, mais on n'est jamais capables de se rendre aux deux tiers. Alors, peut-être qu'il y a ce test-là qui ferait en sorte que, dans tous les cas, il y aura une décision. Ou de le rendre obligatoire; ça, c'est l'autre aspect.

Maintenant, concernant l'examen au préalable, parce qu'il y a... vous disiez qu'aux États-Unis c'est là où est-ce qu'il y a le plus de codes et c'est là aussi où les deux tiers des plaintes en général, griefs, sont non fondés, rejetés, ce qui porte un préjudice terrible au fait de l'avoir dénoncé. Maintenant, vous dites: Est-ce qu'on devrait encadrer le fait qu'avoir le droit de porter grief ça entraîne l'obligation de ne pas le rendre public?

Je ne sais pas dans la population en général. Hier, ils sont... Puis d'aucuns sont venus nous dire: Bien, on ne va pas commencer à brimer le monde du fait qu'ils ont porté plainte, parce qu'en général la plainte, avant qu'elle arrive au bureau du ministre des Affaires municipales, on le lit dans le journal. Il dit qu'il va écrire au ministre ou qu'il a écrit au ministre, et là les torts sont faits à savoir que je porte plainte, je rends public le fait que j'ai porté plainte.

Comment encadrer ça sans avoir l'impression de bâillonner le droit d'expression, parce que... c'est un peu difficile. L'examen au préalable semble, en tout cas au niveau des élus municipaux, comme tout le monde peut se plaindre... Puis là 48, sur l'autre tribune, ils discuteront est-ce que c'est des députés seulement ou la population en général, comme on avait choisi le fait qu'un élu municipal, tu représentes tes citoyens avant tout, que les gens en général, les 7 700 000 personnes pourraient porter grief.

L'examen au préalable, on l'a fait au ministère pour une raison. C'est que déjà il y a un service des plaintes au ministère, qui fonctionne, que tout le monde comprend. C'est toujours le service des plaintes qui traite et non pas le ministre. On dit tout le temps: Le ministre, parce qu'il répond, il est responsable de son ministère, mais il y a un département que pour le traitement des plaintes. On avait choisi ce forum approprié là avant de le remettre à la Commission municipale.

Et pourquoi ne pas avoir choisi immédiatement la Commission municipale? Parce qu'en partant, quand tu es à la Commission municipale, tu as l'air déjà d'un condamné parce que là tu as l'air d'un procès. Alors, est-ce qu'on le judiciarise en partant? Les élus municipaux étaient très, très réticents à dire: Quand tu es à la Commission municipale, ça a l'air que c'est commencé, le procès, tu sais? Même s'ils devaient te le dire trois jours après, c'est comme déposé à la Cour supérieure; puis, que le juge rejette sur le banc votre requête, tu es dans un procès, là, tu sais, c'est le juge de la Cour supérieure, il t'entend au rôle puis tu vas comparaître.

Alors, l'aspect de comparaître, dans la société, est quand même vu comme étant assez dur, et tu ne peux plus expliquer que tu n'es pas sous enquête. Même si ce n'est pas une enquête, tu ne peux pas... Alors donc, on avait choisi le même mécanisme en faisant l'examen au préalable, mais en montant le niveau de préparation, à tout le moins, pour dire: Je te dénonce, je dénonce ton comportement par rapport à ton code d'éthique.

Alors donc, d'autres sont venus nous dire: Est-ce que ça pourrait être fait par la commission? Ça aussi, ça va être sûrement regardé pour éviter donc tout le populisme effectivement, parce que, probablement nous autres aussi, en général il y a beaucoup de requêtes qui sont rejetées, même dans les autres plaintes qui sont non fondées, parce que c'est souvent des questions plus d'opportunité que de fondement en droit. Alors, l'opportunité de faire regarder a été souvent évoquée.

**(10 heures)**

Maintenant, dans les règles minimales, il semble qu'on a un code. Là, on n'a pas un code d'éthique qu'on impose aux municipalités. On ne voulait pas avoir comme 48; 48, c'est le code. Pour les municipalités, on dit: Un contenu minimal, toutefois. On ne peut pas... Et, à l'usage, ville de Montréal, ville de Québec, ville de Sherbrooke avaient présenté... il semble que les deux unions municipales s'occupent de faire un code puis de s'inspirer de différentes pratiques. On dit: Bien, il y aura un contenu minimal. Peut-être qu'on doit l'augmenter, suite aux représentations qu'on a eues, pour être plus clairs c'est quoi, les règles, qu'est-ce qu'on s'attend du comportement. Parce qu'éviter... l'éthique ça se décrit assez bien: Je m'attends à ce que ça, tu ne fasses pas ça. Pour le reste, fais-le, fais-le bien. Alors donc, on veut laisser de la latitude.

Le but n'est pas de forcer, et d'avoir, et de surmultiplier les codes, etc., d'une certaine façon, et pensant que, derrière tous les codes, le salut s'y trouve. La ville de Lévis, qui était très caustique par rapport au fait d'avoir un code, semble dire: Nous autres, on a des comportements éthiques puis on a encadré nos pratiques de tous les jours, ce qui fait qu'on n'a pas besoin de ça, un code. Alors donc, pour eux autres, mais, pour la population qui les questionne, ce n'est pas clair.

Alors, on s'est dit: Un début, du formalisme sans une imposition mur à mur, une procédure dans laquelle aussi le justiciable ou le citoyen payeur de taxes s'y retrouve dans une certaine justice de proximité ou d'efficacité, parce que les décisions doivent être rendues en dedans de 90 jours. Ça, c'est l'élément qui est très manquant dans la société. Quand on part en requête en inhabilité contre un élu, écoute, il va se passer trois ans. Pour moi, il a le temps de se faire élire entre les deux. Alors donc... Puis tu dois assumer en plus tous les frais pour faire déclarer inhabile une personne qui, lui, va se débattre avec les frais payés par la municipalité. Alors, le combat est un peu injuste. Alors donc, on a sanctionné parce qu'on a ajouté aussi le fait qu'on pouvait suspendre quelqu'un allant jusqu'à 180 jours, donc ce qui est nouveau. Alors, si, dans la gradation, il y a un problème, ça arrive.

J'ai beaucoup aimé votre analyse des 30, 40 dernières années sur le fait de la politisation de l'éthique, mais en même temps on ne peut pas rien faire. Et quel est ce dosage utile? En tout cas, si vous avez d'autres... Aujourd'hui n'est pas une fin en soi, M. Saint-Martin. Si vous avez des propositions, je suis très favorable à les entendre, là. J'ai aimé votre analyse de ce qu'on en fait.

Le Président (M. Morin): M. Saint-Martin.

M. Saint-Martin (Denis): Oui. Merci, M. le ministre, M. le Président. Je comprends tout à fait la logique qui sous-tend le choix qui a été fait dans le projet de loi de garder la question de l'évaluation du bien-fondé des plaintes par le public au ministère, puisque vous le faites déjà, vous avez déjà une certaine expertise, on s'y connaît. Donc, ce que je comprends, c'est qu'on a privilégié, ce que je dirais, la norme d'efficacité. Ça, on le sait, on est assez efficace. On le fait depuis plusieurs années. Moi, je vous répondrais qu'en matière d'éthique en politique il faut penser en termes de légitimité. Et ce qu'on voit depuis les 30, 40 dernières années dans la régulation de l'éthique, dans la vie publique, c'est qu'au départ les mécanismes gardaient toujours une certaine marge d'intervention politique, c'est-à-dire que c'était un conseiller à l'éthique qui était redevable au premier ministre, c'était un commissaire à l'éthique qui n'était pas indépendant de la chambre législative.

Et là c'est un peu la même chose que vous faites avec le processus d'évaluation du bien-fondé des plaintes qui proviennent du public. Mais, à un moment donné, il va y avoir un scandale, il va y avoir un petit malin dans vos adversaires politiques qui va orchestrer une façon de vous mettre dans une situation impossible, et là il y aura un conflit d'intérêts, et vous devrez prendre une décision rapidement, dire: O.K., on va rendre ça indépendant.

Donc, moi, ce que je vous dis: Évitez-vous cet accident-là, parce que c'est écrit dans le ciel que ça va arriver, cette affaire-là. Donc, je sais que... Et, moi, je vous parle en termes de... je suis un politologue. Donc, je vous dis: Privilégiez la norme de la légitimité parce que, de nos jours, ce que les citoyens perçoivent comme étant légitime, c'est lorsque souvent ce genre de questions là sont administrées par des bureaucrates qui ont l'air neutres, objectifs et indépendants. Est-ce qu'eux sont plus efficaces qu'un ministère pour gérer ces choses-là? Pas sûr de ça du tout. Mais, moi, je vous parle des perceptions et d'une norme de légitimité. De nos jours, la légitimité, c'est de déléguer vers des agences plus ou moins indépendantes.

M. Lessard: Hier... ou la première journée, on est vendredi, oui, c'est ça, la première journée, je pense, on avait Me Dion, un éthicien de l'Université de Sherbrooke. On a testé sur ce volet-là parce que ça appartenait au ministère, et, lui, il disait que... à cause de la nature de l'analyse, à savoir que le seul pouvoir qui est au ministre, c'est: Est-ce que c'est vexatoire? Est-ce que... Bon, probablement s'il n'a pas présenté la documentation tel que formulé, par écrit, assermentée, etc., le côté vexatoire, le côté -- il n'y a pas le détail -- frivole ou mal fondé. Puis là il y avait la question peut-être où il n'apparaît pas d'intérêt public, là, dépendamment. Ça, cette question-là pouvait un peu plus être travaillée peut-être.

Alors, il disait: Bien, écoutez, c'est assez simple, à la vue même on peut rendre une décision. Même on pensait encadrer en dedans de deux semaines, exemple, si c'est aussi simple que de voir: Tu as-tu rempli le formulaire -- on va dire ça comme ça -- tu t'es assermenté, as-tu fourni la documentation des pièces auxquelles tu fais référence? Et si... à la lumière de voir si c'est frivole, vexatoire ou manifestement mal fondé, le rejet, il ne semblait pas dire que ça causait un problème d'éthique. En tout cas, il ne le voyait pas. Mais je comprends. Un peu plus loin sur la question de légitimité plutôt que la question... l'apparence semble parfois... Mais, de son côté, il n'y voyait pas de problème vraiment, du point de vue éthicien. Mais je comprends votre position.

M. Saint-Martin (Denis): Oui, c'est ça. C'est que l'éthique étant politique justement, donc on ne peut pas demander à des politiciens de ne pas se comporter en politiciens. Donc...

M. Lessard: Mais je veux dire qu'en général les 400 plaintes qu'il reçoit par année puis qui est analysé par le comité des plaintes est retourné avec des lettres signées par le sous-ministre, en général, ou du comité des plaintes. Jusqu'à maintenant, on n'a jamais eu vraiment de grief. Toutefois, a-t-on donné toute l'opportunité aux gens de... Les gens qui ont perdu ne sont jamais contents. Même celui-là pour lequel, moi, je trouvais que c'était frivole, là, il n'est pas heureux, puis il retourne à ses journaux, puis il dénonce encore le fait qu'il n'y avait pas de frivolité ou ce n'était pas vexatoire, etc., toutes les perceptions étant personnelles.

Alors, c'est un débat très important qu'on est en train de faire là. C'est à une étape pour la première fois ou depuis très longtemps que le monde municipal n'a pas été confronté à ça. Tout le monde veut faire quelque chose sans faire n'importe quoi, tout en laissant la liberté aussi aux élus municipaux d'agir comme leader dans sa communauté. Quel est l'espace dans lequel il se sent maintenant plus confortable? Parce qu'actuellement tout le monde est sur ses talons.

L'éthique, c'est que, quand on remet en doute, en question ton éthique, quand on doute de ton éthique, c'est que tu n'es plus capable d'avancer. Tu n'es plus capable d'être le même fonceur, tu n'es plus capable d'être le même entrepreneur, tu n'es plus capable d'être... C'est que si, la crainte, des fois on dit: Trop fort... il faut être trop fort pour craindre, d'autres diront: La crainte est la mère de la sagesse. Mais, s'il y a un déséquilibre trop important entre les deux, tu n'es plus capable d'agir au nom de l'ambition, à tout le moins, de tes citoyens.

Alors, on essaie de trouver le passage où est-ce que la population sait qu'on a fait quelque chose de différent, de nouveau et... mais qu'en même temps il en appartient à la responsabilisation des individus nommés conseillers ou maire d'une ville aussi d'assurer leur propre probité. Alors donc ça, c'est le meilleur gardien de valeurs. C'est toi-même dans ta responsabilisation.

Mais on voit qu'il y a un conseil qui n'en a pas, de règles, qui ne le suit pas puis qui n'en fait pas la formation puis la prévention. Donc, la formation, la culture de l'éthique est aussi importante. Ce n'est pas quelque chose qu'on doit voir seulement aux quatre ans, c'est quelque chose qu'on doit être préoccupé à tous les jours dans sa fonction. Quand tu te questionnes, peut-être que déjà c'est le début d'une certaine sagesse, si je devrais être là ou faire telle affaire.

Alors donc, si vous avez des... Comme je sais que vous n'avez pas eu le temps de déposer un mémoire, si vos travaux le permettaient, on apprécierait recevoir un papier de vous. Merci.

Le Président (M. Morin): Ça va? Terminé, M. le ministre? Oui, ca va. M. le député de Blainville, à vous la parole.

M. Ratthé: Oui, merci. Tout d'abord, à mon tour, à titre de porte-parole en matière d'affaires municipales pour l'opposition officielle, de vous souhaiter la bienvenue.

Vous nous apportez ce matin en tout cas un éclairage drôlement intéressant. Et vous soulevez des questions que, je vous dirais, au cours des deux derniers jours nous avons un peu soulevées aussi. Entre autres, à un moment donné, j'indiquais au ministre qu'effectivement il pourrait se trouver en position du moins d'apparence de conflit d'intérêts et suite à certaines représentations qui avaient été faites par certains organismes actuellement.

Plusieurs des organismes qui sont venus nous voir ont fait une remarque peut-être pas avec l'éclairage que vous apportez ce matin mais en disant: Bien, on se demande pourquoi ça devrait aller au ministère effectivement. Vous nous suggérez ce matin la Commission municipale. Je voulais simplement vous faire remarquer qu'entre autres le Commissaire au lobbyisme, Mme Louise Harel, qui est la chef de l'opposition officielle à la ville de Montréal, et quelques journaux hier soulignaient le fait qu'au sein de la Commission municipale il y a aussi des nominations qui sont dites partisanes. Donc, il y a un peu de politique, on va dire, là-dedans, des nominations qui sont là normalement pour cinq ans, qui pourraient permettre à n'importe quel parti, là, peu importe qui est au pouvoir, de pouvoir changer un peu de commissaire au gré de leur volonté.

Alors, un certain nombre de groupes nous ont dit: Nous, on préférerait qu'il y ait vraiment un commissaire indépendant, un commissaire peut-être nommé aux deux tiers de l'Assemblée nationale. Alors, j'imagine que, si je suis votre logique, ce serait vraiment la solution idéale, là, selon vous.

**(10 h 10)**

M. Saint-Martin (Denis): ...merci, M. le député. Je pense que, si le pouvoir d'évaluation du bien-fondé des plaintes formulées par le public était délégué à la Commission municipale, il faudrait probablement revoir les nominations, le processus de nomination pour qu'il soit plus transparent, et avec des règles de majorité peut-être beaucoup plus fortes, ou sinon on ne touche pas à la Commission municipale, mais on crée une espèce de supercommissaire à l'éthique qui s'occupe à la fois de l'Assemblée nationale, du gouvernement et des administrations municipales, ce qui est aussi une autre option, bien sûr.

M. Ratthé: ...le ministre nous disait: Bien, je vais créer un siège spécial, là, dédié au niveau d'un commissaire à l'éthique. À la limite, j'imagine que, même s'il était au sein de la Commission municipale, ce poste-là pourrait en soi aussi être un poste indépendant. Si on ne veut pas tout revoir le système, on pourrait... Mais est-ce que je vous entends bien en disant: Écoutez, tentez de dépolitiser au maximum ce processus-là...

M. Saint-Martin (Denis): Au maximum, au maximum.

M. Ratthé: ...pour justement que la perception de la population soit une perception qui vienne... On parle qu'on veut faire des codes d'éthique justement parce qu'on veut rehausser la confiance de la population, on veut que les gens perçoivent que leurs politiciens, là, font des efforts puis se plient à des règles, là, qui sont acceptables aux yeux de la population.

Je trouve ça d'ailleurs très intéressant, votre étude, en disant: Plus il y a de règles, inversement, on dirait, plus il y a de plaintes aussi au niveau de la population. Vous apportez un... Bien, je vais poursuivre là-dessus. Vous nous dites aussi que deux tiers des plaintes, je pense, aux États-Unis, si j'ai bien compris, sont rejetées ou du moins non fondées.

M. Saint-Martin (Denis): Oui, c'est ça.

M. Ratthé: Est-ce qu'on devrait quand même ouvrir la porte à... Parce que vous sembliez dire, bien, que vous n'aviez pas une opinion précise.

M. Saint-Martin (Denis): Non, en effet. En tout cas, la recherche n'a aucune réponse claire à offrir sur cette question-là. Et j'imagine que, d'un point de vue politique, comme vous vivez dans un monde où les perceptions sont déterminantes, ne pas l'accorder, c'est problématique. Sauf qu'on peut l'accorder, mais on s'aperçoit que c'est un petit peu de la poudre aux yeux parce que ça a une inefficacité.

C'est efficace lorsqu'il n'y a pas de compétition politique, c'est-à-dire: je ne serais pas inquiet au niveau provincial, par exemple, parce qu'il y a une vraie concurrence politique. Donc, il n'y aura jamais de collusion où des manquements à l'éthique vont être cachés sous le tapis parce qu'il y a une espèce de conspiration du silence. Ça n'arrivera pas au niveau provincial, c'est une véritable concurrence politique. Sauf qu'on sait bien qu'au niveau municipal, dans certains endroits, c'est très monopolistique, hein? Il y a des familles qui sont là depuis longtemps, depuis longtemps. Donc, la possibilité de cacher des choses parce qu'il y a une espèce de conspiration du silence est quand même une réalité très fortement possible. Donc, à ce moment-là, avoir un oeil extérieur, celui du citoyen qui peut déclencher le processus, peut être utile, bien sûr.

M. Ratthé: Et je comprends bien votre point de vue, parce que je pense qu'on parle actuellement, là, de droit démocratique, on peut l'appeler comme ça, de droit à la population de jeter un regard, de pouvoir... je n'aime pas le mot «juger», mais en tout cas du moins avoir la possibilité d'en appeler de certains agissements de leurs politiciens ou politiciennes.

Ce que vous semblez nous recommander toutefois, puis je pense qu'il y a un mécanisme de toute façon qui est déjà prévu, mais qu'on s'assure qu'au départ, avec peut-être des serments, des preuves, pour éviter justement peut-être un débordement de plaintes dites non fondées, qu'il y ait peut-être un bon processus, là, très...

M. Saint-Martin (Denis): Tout à fait.

M. Ratthé: ...de vérification, là, qui soit là, mis en place, avec serment peut-être du citoyen. Parce que la notion également de ne pas propager cette plainte au départ est importante, parce qu'on mentionnait: Le jugement de la population est très rapide, hein? Qu'on soit coupable ou non, même si on est dans une société où on nous dit qu'on n'est pas coupable tant qu'on ne l'a pas prouvé, évidemment la population va juger rapidement, et les délais deviennent importants.

M. le ministre nous disait qu'actuellement il y a un département de plaintes qui traite à peu près 400 plaintes par année. Je sais que l'objectif actuel est à peu près, au niveau des plaintes, là, de 60 jours. On vise 60 jours, je pense, au niveau des plaintes. Nous, on disait: Il faudrait que ce soit pas mal plus rapide que ça, du moins sur le bien-fondé de la plainte, parce qu'il n'y a rien qui empêche quelqu'un de pouvoir dire, comme vous disiez tantôt, d'ameuter les journalistes, dire: J'ai porté une plainte, ou d'en parler à son voisin, à des amis, puis on sait que ça peut faire boule de neige. Alors, les délais, j'imagine, d'adresser le bien-fondé d'une plainte doivent être extrêmement importants, là?

M. Saint-Martin (Denis): Oui, le plus court possible, évidemment. M. le ministre, tantôt, disait: C'est sûr que... Parce que, moi, j'ai dit: Si on crée un droit au citoyen, il faut lui créer des obligations aussi. Peut-être que ça va être politiquement un message qui n'est pas très sympathique à entendre, mais je pense que, les citoyens, on ne peut pas approcher un processus d'éthique de façon non éthique, hein? Si, moi, je suis un organisateur partisan d'un parti x puis je veux miner la crédibilité de mes adversaires, je vais déposer une plainte puis ensuite je fais une grosse conférence de presse, bien, j'étais mal intentionné au départ. Donc, il me semble que c'est... il faut que le message soit fort qu'avec des droits viennent des responsabilités, des devoirs, des obligations. Et c'est que les citoyens qui recourent à ce mécanisme-là le fassent de plus bonne foi possible. Évidemment, on ne peut pas aller voir dans leurs entrailles s'ils sont de bonne foi, mais on doit au moins se prémunir et mettre des mécanismes le plus raisonnables possible.

M. Ratthé: Ça me fait sourire, ce que vous dites. Parce que c'est bien fondé, mais ça... En vous écoutant, je me disais: Est-ce qu'il faudrait avoir un code d'éthique sur l'application du code d'éthique? Là, ça devient complexe. Mais je comprends votre point de vue. Il faut qu'on ait des processus en place qui vont permettre de dire: Ce n'est pas si facile que ça de porter plainte. Je peux me lever demain matin puis je vais porter plainte parce que mon conseiller municipal ne m'a pas donné une réponse satisfaisante, il n'a pas réglé mon cas. Des conseillers municipaux, des maires nous disaient: Bien, vous savez, à la veille d'une élection, là, ça pourrait être assez facile qu'il y ait plusieurs plaintes à l'endroit de différents conseillers juste avant une campagne électorale. Le temps qu'on réponde à la plainte, la campagne électorale est finie.

Alors, cet aspect-là est drôlement important, là. C'est sûr que... Et, même si c'est peut-être contraignant face aux citoyens, bien il faudra... justement c'est peut-être la bonne façon de venir régler ça.

M. le ministre en faisait allusion tout à l'heure, et j'aimerais vous entendre un peu là-dessus, parce que c'est... Vous avez peut-être eu l'occasion d'y réfléchir en regardant le projet de loi. Vous parliez d'une quantité assez importante, là, pour dire, la plus importante de codes d'éthique qui se trouve aux États-Unis, avec... Il y en a un et un autre, si on peut dire. Dans le projet de loi, au départ, M. le ministre nous disait: Bien, on voulait laisser une certaine latitude aux municipalités, parce que souvent les municipalités nous demandent justement d'intervenir le moins possible dans leur champ de compétence. Ce qui était intéressant de les entendre quand ils sont venus, en tout cas pour celles qu'on a entendues, c'est que, là, dans beaucoup de cas, on avait une espèce de discours inverse. On est venu nous dire: Écoutez... Et peut-être avec raison. Moi-même, je me suis questionné sur cet article-là où on dit: Il y aura quatre valeurs, quatre valeurs qui sont là et qui vont être, on va appeler ça, un peu le tronc commun, la base de... Et on demande aux municipalités, après ça, de faire leurs propres codes d'éthique. Et, à la limite, on pourrait en avoir 1 100 différents.

Certains sont venus, et on ouvrait cette porte-là. Le ministre nous dit: On ouvre la porte parce que, sur le principe que je disais tantôt, on veut laisser une certaine autonomie aux municipalités. Les municipalités viennent nous dire maintenant, en grande partie: Il devrait être soit être unique, un code, le même code pour tout le monde, ou du moins vous devriez ajouter, faire une armature, un canevas beaucoup plus consistant, un tronc commun où il y aura peut-être certains ajouts selon la municipalité, selon certaines spécificités de la municipalité.

Je voulais vous entendre là-dessus. Est-ce qu'on devrait laisser la possibilité d'avoir 1 000 codes différents? Est-ce qu'on devrait dire: Non, il y aura un code qui est proposé, par exemple, par l'Union des municipalités, la Fédération québécoise des municipalités, ou on s'en va dans une direction, là -- et ça, je vous le dis, on réfléchit, les deux groupes réfléchissent -- ou on va bonifier l'armature, puis il y aura un peu de latitude, mais il y aura... Alors, je voulais vous entendre un peu sur ce point-là.

M. Saint-Martin (Denis): Oui, merci, M. le député. La recherche, aux États-Unis sur cette question, il n'y en a pas des tonnes. D'abord, ça confirme tout à fait ce qu'un échevin vous a dit, c'est-à-dire qu'avant les élections les règles d'éthique sont activées au maximum. Ça, il y a souvent une corrélation. Donc, on voit encore une fois que c'est utilisé comme des armes de combat politiques. Ça, c'est très désolant.

Pour la question de la variété, c'est vrai que ce que je comprends du projet de loi, c'est qu'il établit des minima. Mais une municipalité qui veut aller au maximum, elle peut le faire. Donc, il y aura vraisemblablement beaucoup de variété au niveau de la mise en forme, hein, des différents codes d'éthique municipaux. Et ce que je connais de la recherche aux États-Unis là-dessus, c'est que généralement ça va varier en fonction des cultures politiques locales, c'est-à-dire qu'une ville où les citoyens sont très engagés, où le taux de participation aux élections est plus haut va généralement avoir des codes d'éthique plus hauts, et les villes où il n'y a pas beaucoup de monde qui votent, ils vont avoir des codes d'éthique minuscules.

Donc, il y a un lien avec la culture politique. Plus les citoyens sont engagés, sont impliqués dans leur communauté, plus, généralement, on va avoir des codes d'éthique étoffés. Et ça, à mon avis, c'est bien qu'il en soit ainsi, qu'on laisse les cultures politiques locales s'exprimer, sauf que je comprends que ça peut créer des difficultés en termes de mise en force, parce que, là, il va y avoir, comme vous dites, possiblement 1 100 codes d'éthique différents mais une seule structure centrale pour la mise en force, qui est la Commission municipale. Donc, je souhaite que... Les gens qui travailleront là et qui vont devoir justement travailler avec cette variété-là vont avoir besoin de ressources nécessaires pour faire leur job correctement, parce que, là, il y a une espèce de fossé entre la variété locale et la mise en force centrale. Donc, il faudra essayer de trouver un point d'équilibre entre ces deux choses-là.

**(10 h 20)**

M. Ratthé: Ce qu'on nous soulevait, c'est qu'avec cette grande variété, on va dire, de codes d'éthique, là, par exemple juste au sein d'organismes communs comme la conférence régionale des élus, à l'intérieur de la CMM, ces organismes-là aussi prennent des décisions, puis on disait: Bien là, certains conseillers municipaux pourraient être en conflit même avec leur propre code d'éthique, puis d'autres pourraient le faire, d'autres ne pourraient pas le faire.

En tout cas, ça nous interpelle. On se demande de quelle façon on devra le faire. Vous apportez un point intéressant sur les différences entre les municipalités, les disparités entre les populations. Il y aura beaucoup de points à considérer, je pense, de ce côté-là.

Un autre élément que vous apportez, qui n'est pas dans le projet de loi, et vous le soulignez en disant: Le commissaire, ou la Commission municipale, ou en fait l'organisme qui sera en charge de prendre en compte ces plaintes-là, de donner des sanctions, devrait aussi avoir la possibilité sans qu'il y ait une plainte, parce qu'il arrive souvent qu'on va apporter, même nous, comme députés, des cas peut-être au ministre. Puis, bon, dans le passé, je sais que le ministre, à un moment donné, nous avait dit... a dit, je pense, à mon collègue ici: Bien, le citoyen n'a qu'à porter plainte. Mais la notion de dire que sans même qu'il y ait une plainte, si l'organisme, le commissaire, le ministère voyait qu'il y a matière à porter plainte, ça, je trouve, c'est une notion intéressante et nouvelle, là, qui probablement pourrait peut-être même apporter encore plus de crédibilité, j'imagine, au...

M. Saint-Martin (Denis): Oui, c'est ça. Tout à fait. C'est surtout au plan de la crédibilité, parce que, généralement, ce pouvoir-là, si on regarde l'évolution de la réglementation de l'éthique aux États-Unis, ça a commencé dans les années cinquante, soixante et c'était très contrôlé politiquement. Mais à chaque fois qu'il y a un scandale, un conflit d'intérêts, là on va faire une réforme et on va donner plus d'indépendance et d'autonomie à l'organisme qui supervise l'application des règles d'éthique. Et là la coche finale, si je peux dire, le pouvoir final, c'est justement de donner un pouvoir autonome de déclencher des enquêtes par lui-même, un pouvoir comme celui du Vérificateur général, qui n'attend pas, qui n'attend pas le signe de l'Assemblée nationale pour décider qu'il va aller fouiller dans tel programme ou dans tel ministère.

Est-ce que ce sont des pouvoirs qui sont fréquemment activés par les bureaucraties de l'éthique? Presque jamais. Mais le fait de savoir que c'est là, ça envoie un message positif au public. Et, dans ce business-là, on est encore dans la question de la légitimité.

M. Ratthé: Si vous le permettez, M. le Président, je laisserais la parole à mon collègue de Berthier.

Le Président (M. Morin): Oui. Mon cher député de Berthier, à vous la parole.

M. Villeneuve: Merci, M. le Président. M. Saint-Martin, bonjour. Écoutez, extrêmement enrichissant. Merci d'être là puis de nous apporter cet éclairage-là. Honnêtement, là, c'est très, très intéressant.

Une voix: ...

M. Villeneuve: Oui, effectivement. Si vous pouvez déposer des documents relatifs à votre propos de ce matin à la commission, ce serait fort apprécié.

Vous savez, on entend souvent de la part d'élus ou même de gens, même des citoyens, dire: Bien, écoutez, ce n'est pas illégal, mais ce n'est pas moral. Est-ce que je me trompe en disant qu'un code d'éthique... Bon, on verra ce dont la commission... ce dont le gouvernement accouchera en bout de ligne, là. Mais donc est-ce que je me trompe en disant qu'un code d'éthique va, d'une certaine façon, venir faire taire ce propos-là qu'on entend régulièrement: Ah, ce n'est pas illégal, ce n'est pas moral, mais ce n'est pas illégal, donc le signal en adoptant un code d'éthique? Parce que j'ai bien saisi tout ce que vous avez dit tantôt concernant le fait que, dans certaines démocraties occidentales, etc., où il y a des codes d'éthique, ce n'est pas nécessairement mieux sur le plan de la perception parce qu'on l'utilise souvent comme une arme entre adversaires politiques, etc., mais, moi, je pense qu'un code d'éthique comme ça va venir faire en sorte que les gens, et c'est ce qu'on espère tous finalement, que les gens vont reprendre goût à la vie politique, vont reprendre goût aussi et vont redonner les lettres de noblesse, parce que ça vient d'abord et avant tout de la base, là, des citoyens, les lettres de noblesse d'une démocratie et la crédibilité des politiciens. Alors, est-ce que je me trompe en pensant que c'est beaucoup sur la morale aussi que ça va jouer?

M. Saint-Martin (Denis): Merci, M. le député. Oui et non, en ce sens que restera le fait que, dans la vie publique, dans une démocratie digne de ce nom, la moralité de ces hommes et de ces femmes politiques sera toujours jugée de façon politique en bout de ligne. D'accord? Ce que je veux dire par là, c'est qu'aux États-Unis, dans plusieurs grandes villes, Chicago d'ailleurs, il y a des codes d'éthique très développés. Le maire a été trouvé coupable d'avoir violé son code d'éthique. Il a fait campagne; il a gagné une plus forte majorité.

M. Villeneuve: Ah bon!

M. Saint-Martin (Denis): Alors, vous voyez que c'est ça, c'est le tribunal de l'opinion publique, et donc ce n'est pas si facile de dire que ce qui est moral n'est pas politique aussi. Et bien, là, on se trouve avec le jugement des citoyens, et ça, c'est le test en démocratie, n'est-ce pas? Donc, on est toujours dans ces eaux-là.

Moi, ce que je trouve un peu déplorable, lorsqu'on parle d'éthique en politique, c'est qu'on a une approche très punitive. On fait des codes d'éthique pour coincer puis sanctionner, alors qu'on devrait avoir une approche beaucoup plus préventive, éducative, etc., parce qu'en politique, vous le savez beaucoup mieux que moi, c'est difficile de toujours pouvoir trancher dans le blanc et dans le noir. On est souvent dans les zones grises, n'est-ce pas? Et puis, en bout de ligne, on fait ce qu'on pense qui est le mieux. Mais vouloir toujours réglementer, bureaucratiser...

Parce que réglementer l'éthique, c'est vouloir bureaucratiser une dimension de la vie en société qui est fondamentalement très subjective, hein? Des valeurs, il n'y a rien de très objectif avec ça, hein? Moi, comme citoyen, je trouve que le monsieur aux États-Unis qui veut brûler des corans... je trouve ça dégueulasse, ma valeur me met contre lui, mais je sais qu'en démocratie je dois vivre avec quelqu'un comme ça. Donc, même si ses idées sont complètement contraires aux miennes, je ne peux pas dire que, lui, ce qu'il fait, c'est mauvais et ce que, moi, je fais, c'est bon. Ça va être la majorité qui va décider de ces choses-là.

Donc, souvent, tout ça pour dire qu'en matière d'éthique en politique -- et je pense que c'est ce que le projet de loi a voulu faire aussi -- c'est de laisser le dernier jugement aux élus. C'est à eux de faire sanction ou non et à l'opinion publique de se faire une idée. Mais difficile de savoir si on agit de façon morale ou non, n'est-ce pas?

M. Villeneuve: D'accord. Je veux revenir sur l'aspect sanction, parce que, vous savez, on se rappellera la commission Gomery, et ce qu'on entendait beaucoup comme commentaire de la part des citoyens, c'était de dire: Ça n'a rien donné. Les élus, encore une fois, s'en sont tiré. J'ai été élu municipal, moi aussi, bon, pendant quelques années, et Dieu sait que le mot «imputabilité» est utilisé de toute façon, je dirais, à outrance, à la limite, là, d'une certaine façon. Mais, la population, je pense qu'elle réclame, d'une certaine façon -- puis je comprends votre point de vue là-dessus, là, mais j'aimerais vous entendre davantage -- la population réclame d'une certaine façon qu'il y ait des sanctions, qu'il y ait des sanctions qui soient vraiment, là... que ce soit concret, que ce soit réel. Le politicien qui est reconnu pour avoir transgressé ou violé un code d'éthique ou d'autres lois, je pense que la population s'attend aujourd'hui à ce que l'aspect sanction soit beaucoup plus présent.

**(10 h 30)**

M. Saint-Martin (Denis): C'est vrai qu'il y a cette forme d'attente chez les citoyens, forme d'attente qui est aussi en partie nourrie par certains discours politiques, bien sûr. Mais je pense que vous avez une obligation aussi d'éducation envers nos citoyens que, nous, à l'université, on essaie de faire dans nos cours de sciences politiques avec nos étudiants, de montrer que la politique, c'est l'art du compromis et que faire des compromis, ce n'est pas manquer d'éthique, que faire des compromis, en politique, c'est de faire vivre la démocratie, parce que, quand on n'a pas de compromis, bien, c'est la guerre civile, n'est-ce pas? Donc, il y a une espèce... un travail d'éducation d'éthique aussi à faire envers la population qui voit dans l'éthique seulement une arme de sanction et non pas aussi une façon de... parce que...

Je recule un peu, je passe du coq à l'âne. Mais, dans le projet de loi, je vois qu'il y a tout l'aspect formation, que j'applaudis, qui est très bien. Mais je me demande: l'élu qui, je ne sais pas, moi, qui est invité à aller voir un match de hockey dans une loge et qui se dit: Bien, si j'y vais, je vais pouvoir rencontrer trois, quatre personnes qui sont stratégiques pour m'aider à développer une garderie dans ma communauté, donc l'élu va à cette invitation-là de toute bonne foi. Il fait son travail d'élu pour aider au développement de sa communauté. Mais là on dira: Bien oui, mais il y est allé avec des lobbyistes, et tout ça. Vous voyez ce que je veux dire? Donc, comment... Il faudrait aussi prévoir en amont, c'est-à-dire que: Moi, est-ce que c'est correct pour moi d'aller assister à ce match de hockey là? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui va me dire: Bien, vas-y donc pas, ou: Vas-y donc, etc.? Et c'est donc un rôle de conseiller à l'éthique aussi plutôt qu'un rôle de commissaire qui, lui, vient taper sur les doigts. Les élus, souvent de toute bonne foi, ne savent pas trop, trop.

M. Villeneuve: ...

Le Président (M. Morin): Oui, c'est...

M. Villeneuve: Terminé?

Le Président (M. Morin): ...presque terminé. Allez-y, oui.

M. Villeneuve: Rapidement, rapidement, parce que j'aimerais vous entendre là-dessus, ça a été amené en commission, on en a discuté, à savoir s'il y avait un commissaire à l'éthique, est-ce que celui-ci pourrait et être conseiller au niveau des élus municipaux et en même temps être celui qui fera le jugement ultime si jamais il y avait dérogation ou transgression du code d'éthique. Selon vous, est-ce que c'est conciliable?

M. Saint-Martin (Denis): C'est la norme, c'est la norme...

M. Villeneuve: C'est la norme? D'accord.

M. Saint-Martin (Denis): ...dans tous les commissaires d'éthique aux provinces et au fédéral.

M. Villeneuve: O.K.

Le Président (M. Morin): Merci. Merci, M. Saint-Martin. Comme les membres de la commission vous ont demandé, j'aimerais que... si c'est possible de déposer vos documents. Et vos échanges ont été si intéressants que le temps a passé très rapidement. Je voudrais vous remercier de vous être impliqué, de vous être investi dans ce projet de loi qui est essentiel pour toute notre communauté. Donc, merci beaucoup, bon retour chez vous.

Je suspends quelques instants, en invitant les gens de l'Institut québécois d'éthique appliquée à se préparer.

(Suspension de la séance à 10 h 31)

 

(Reprise à 10 h 36)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux. J'inviterais les représentants de l'Institut québécois d'éthique appliquée à se présenter. Allez-y, messieurs.

Institut québécois d'éthique appliquée

M. Villemure (René): Bonjour. Mon nom est André Villemure, je suis éthicien, président de l'Institut québécois d'éthique appliquée. Je suis accompagné de Michel Quintal, qui est un conseiller senior à l'institut, expert en déontologie et en enquête.

M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les membres du comité, je vous remercie pour l'invitation qui nous a été faite de participer au projet de loi, à l'évaluation. On est toujours heureux de contribuer aux efforts qui participent à faire augmenter la charge éthique dans l'administration publique. On a participé au projet de loi n° 48 aussi, alors c'est un sujet qui nous préoccupe.

Moi, je suis éthicien, je ne suis pas juriste, je ne suis pas lobbyiste, je ne suis pas membre d'un groupe de pression, rien de ça, alors je vais vous entretenir d'éthique et de culture plutôt que de droit et de procédure. Au fil des années, on a entendu souvent et beaucoup parler d'éthique, mais, si vous remarquez bien, on a souvent entendu parler de manque à l'éthique, et c'est ce qui retient l'attention. C'est d'ailleurs les manquements allégués qui amènent souvent la préparation d'un projet de loi, ou d'un code, ou quelconque effort en la matière.

Alors, aujourd'hui, je vais vous entretenir du projet de loi en faisant quatre observations à son sujet et en y ajoutant quatre recommandations qui sont assorties aux observations. Moi, je dis souvent que l'éthique n'a pas la vie facile, elle est souvent masquée par tout ce qui se prend pour elle, et qu'on l'utilise trop souvent pour justifier des normes, des codes, pendant qu'on ne parle pas d'éthique comme telle. Et cette conception de l'éthique, elle est très populaire bien qu'élémentaire, mais c'était quand même celle qui animait le projet de loi n° 48. Ce n'est pas rien, mais on ne lui donne pas la force qu'elle pourrait avoir.

Le projet de loi n° 109, pour moi, est très différent. J'y ressens, à la lecture, une plus grande charge éthique, même si, en bout de ligne, c'est un projet à saveur plus déontologique qu'éthique, ça demeure. Puis je ne ferai pas de grand détour conceptuel, vous en avez sûrement entendu suffisamment, mais je vous dirai en deux mots que la déontologie étant un discours sur le devoir assorti de sanctions qui relèvent de la logique du «surveiller» et «punir», la déontologie inspire par la crainte, elle définit ce qui est mal. L'éthique, de son côté, c'est une réflexion sur les valeurs avant une action, qui vise à déterminer quoi faire pour bien faire. Moi, dans toutes mes activités en éthique, quoi faire pour bien faire, ça résume bien qu'est-ce qui en est. L'action donc se situe en amont et vise à éclairer la prise de décision. Ce sont les seules distinctions conceptuelles que je ferai aujourd'hui.

Maintenant, interrogeons-nous sur la place de l'éthique dans un contexte d'administration municipale. Au-delà du «quoi faire pour bien faire», il faut bien voir: Ça sert à quoi, ça? Et le fondement de l'éthique dans l'administration publique, municipale dans ce cas-ci, ça sert à générer, à maintenir et à augmenter la nécessaire confiance des citoyens envers les élus. À quelque part, si ces projets-là surviennent, c'est parce qu'il y a un déficit de confiance. Puis la confiance, c'est quoi? C'est la légitimité de prendre des décisions au nom des citoyens de la collectivité.

**(10 h 40)**

Le projet de loi n° 109 est donc bienvenu parce que, pour moi, c'est une avancée, ça démontre un désir d'éthique, mais, outre la composante punition éventuelle qui pourrait mettre en oeuvre ce désir d'éthique là, il faut dire que le projet se réduit rapidement à surveiller et punir. Sans être inintéressant, bien, je pense qu'on est encore pris dans la conception déontologique ou normative de l'éthique. Puis cette conception simpliste évacue l'assise du bien-faire, puis, vous savez, bien faire lorsque même aucune règle n'est présente. Ce n'est pas nécessairement affaire simplement de règle.

Alors, trois questions pour y voir plus clair en introduction. Le but du projet de loi n° 109 est-il de bien faire ou de faire croire que l'on fait bien? Non, mais c'est valable, hein? Le projet de loi en l'état est-il susceptible de faire migrer la culture politique actuelle et de favoriser la confiance du citoyen vers le monde municipal? Et la troisième, bien, si oui, comment? D'accord?

Tout comme pour l'éthique en général, le projet de loi résulte d'une prise de conscience du monde municipal à son propre égard. Parce que quand même on l'a souhaité soi-même, hein? Donc, ça prend une prise de conscience du monde politique à son égard et les attentes des citoyens envers les élus, ce qui démontre une bonne intention de la part de tous. Mais il faut savoir qu'une bonne intention ce n'est pas tout. Une bonne intention qui ne se réalise pas, c'est juste une intention. Des fois, ce n'est même pas une intention, alors, il faut faire attention.

Et puis, vous savez, force est de constater qu'il y a beaucoup de codes, qu'il y a beaucoup de normes, qu'il y a beaucoup de règles, puis qu'il reste encore de l'injustice, des abus, des malversations puis des fraudes. Alors, ces choses-là, aussi n'oublions pas que certaines sont déjà couvertes par le Code criminel, alors il ne faut quand même pas faire double emploi. Alors, c'est curieux parfois de voir que, si on a beaucoup de codes et de normes, la solution à une transgression, c'est de mettre plus de codes et de normes. L'exemple que je donne à tous les jours, vous savez: Vincent Lacroix ne s'est jamais posé la question si c'était bon de voler, il s'est dit: Je vais-tu me faire prendre? Je pense que non. Voilà. Tu sais, c'était l'attitude, ce n'était pas la présence d'une loi qui interdisait la chose. Donc, il faut voir que, pour migrer vers une culture éthique plus, il faut aller plus profondément que simplement des règles et des normes qui ont leur utilité.

Les quatre observations sont les suivantes. En premier lieu, les valeurs nommées en introduction du projet de loi sont de remarquables concepts humanistes. C'est extraordinaire. Cependant, ils ont peu de liens avec les normes et les règles énoncées dans le code. On les voit en façade, c'est tout. On ne voit, tout au long du texte, aucun «qu'est-ce que veut dire cette valeur-là» ou «comment je vais l'appliquer, cette valeur-là», il y a un déficit là-dessus. Les valeurs ne semblent servir que d'introduction, de façade, je vous dirai, d'idée reçue. Il y a un très grand risque d'éthique de vitrine, éthique pour faire bien, pour faire joli, même si ces valeurs-là sont fondamentalement très intéressantes, ce n'est pas parce que ce n'est pas bien. Le projet de loi manque de contenu en ce qui a trait aux valeurs. Donc, le risque d'éthique pour faire joli ou de «cosmétique» est très grand. Les liens entre les valeurs et les normes sont supposés, sont posés comme autant d'évidences, rien n'est dit, tout doit être su. Quand on dit intégrité, bien, c'est normal que... Il n'y a pas le lien explicite. Intégrité, honneur, prudence et respect, bien, des concepts intéressants. Sont-ce les meilleurs? Sont-ce les seuls? On pourrait y voir. Je comprends que vous n'êtes pas fermés là-dessus, mais c'est un départ à quelque part. Personne n'est contre la vertu, mais, dans les temps actuels, c'est difficile de savoir le lien entre la valeur x et la norme y, à part que d'une évidence, là.

Deuxième observation. L'essentiel du projet de loi représente un processus de plainte, ni plus ni moins. Rien n'arrive sans une plainte, c'est-à-dire lorsqu'on saisit le ministre. On ne dit pas mot sur les éventuelles difficultés à déposer cette plainte. Le document assermenté, les moeurs dans un milieu, la peur des représailles, l'intimidation, l'incompétence du citoyen ou quoi que ce soit. Le projet de loi suppose ainsi qu'aucun problème ou aucun cas problème n'existe s'il n'y a pas de plainte. S'il y a une plainte, là, on a quelque chose pour faire avec; mais, s'il n'y a pas de plainte, tout est beau. À mon avis, c'est un petit déficit. Le projet de loi ne prévoit pas qu'un commissaire ou une autre autorité, quelle qu'elle soit, puisse initier une plainte. Cette action, donc la plainte, ne repose lourdement que sur la vigilance des citoyens. Et outre la formation à l'éthique des élus dans le projet de loi, c'est juste des plaintes, il n'y a pas d'autre chose qu'on traite, il y a la formation et les plaintes. Les plaintes seront analysées par une équipe de la Commission municipale composée d'un avocat et/ou notaire et d'une autre personne. Écoutez, je vous la lance à tous ce matin: Pourquoi cette obsession juridique là: avocat, notaire? Pourquoi pas un éthicien? Ça existe. Alors, il n'y en a pas des tonnes, j'en conviens, là, mais ça existe.

Troisième observation. L'objectif de former 10 000 élus en 12 mois la première année de l'entrée de l'oeuvre du projet de loi, c'est un objectif irréaliste. Pour vous dire, je travaille beaucoup en formation, en travaillant du côté pratique, il n'existe pas assez de formateurs qualifiés en éthique au Québec pour supporter une telle charge dans un tel délai. À moins, bien sûr, que l'on offre une formation au contenu tronqué, d'une durée inadéquate, et enseigné par une personne non qualifiée. C'est ce qui pourrait arriver, là, on l'a vu souvent. Rappelez-vous que les éthiciens compétents sont une espèce rare et qu'il ne suffit pas de dire le mot «éthique» pour penser éthique. C'est pas mal plus que ça. Par contre, vous serez heureux d'apprendre qu'au Québec il y a quand même beaucoup de gens qui donnent des formations comme ça. Quatre genres que je vous ai identifiés pour votre bénéfice. On a les professeurs d'université, qui s'impliquent beaucoup. Ils sont qualifiés généralement, mais ils sont très éloignés de la réalité pratique, ce qui, des fois... pour un élu qui a les mains dedans, là, c'est un peu distant. On a des juristes compétents en droit qui ont tendance par contre à tout judiciariser en évacuant les valeurs au profit des règles. Ça, c'est un des pièges du projet de loi, en passant. Il y a quelques éthiciens, peu nombreux mais néanmoins existants. Et il y a ce qui est peut-être plus dangereux, c'est-à-dire, moi, je les appelle poliment «les charlatans». Je ne les ai pas écrits comme ça ici, mais c'est tous ceux qui prétendent savoir et pouvoir parler d'éthique sans en avoir le contenu. Ce sont les plus dangereux pour l'éthique elle-même, en partant.

L'éthique est une affaire de culture. Le projet de loi et la formation éventuelle de nos élus devraient considérer la meilleure manière d'insuffler un changement à la culture municipale. Les règles et la peur des sanctions, c'est un point important, mais ça ne suffira pas.

Quatrième observation. Le processus de plainte et d'enquête est long et laborieux. On a un paquet de détails. On y reviendra en questions si vous voulez, mais c'est assez complexe. Et le processus, selon nous, ne garantit en rien une préservation ou une augmentation de la confiance du citoyen envers la municipalité. En définitive aussi, le conseil agit comme juge et partie -- et ça, c'est embêtant -- ce qui rend difficile la confiance qu'on veut créer, là, parce qu'à la limite les deux tiers qu'on évoquait ce matin, là... La transparence que le processus prétend offrir en informant le citoyen à plusieurs reprises n'est pas réelle. Parce que la transparence, c'est l'accès à l'information, aux raisons de la décision, et pas seulement le fait d'être avisé que la démarche suit son cours. Dans le projet de loi, rien n'indique que ces exigences seront rencontrées.

Pour pallier à ces quatre observations, on y assortit quatre recommandations, la première étant la création d'un poste de délégué à l'éthique à la Commission municipale. Le délégué à l'éthique serait en lien direct avec le président de la Commission municipale et aurait sous son autorité l'équipe chargée des enquêtes. Le délégué aurait comme principale tâche, en amont, de sensibiliser et de conseiller les élus sur les problématiques éthiques qui pourraient survenir, ainsi que de diffuser les meilleures pratiques éthiques en gestion municipale. Le délégué devrait rencontrer chacun des maires une fois à tous les deux ans -- le conseiller sénatorial en éthique fait ça, à Ottawa, rencontre les gens une fois à tous les deux ans -- cette rencontre qui permet aux maires de mieux se familiariser avec l'éthique, les problématiques éthiques et la conduite à adopter en cas d'incertitude. Votre histoire de billet de hockey de tantôt, là, ça pourrait être couvert là. La posture du délégué à l'éthique serait celle de la prévention en amont des actions. Il serait l'ultime responsable de la migration culturelle du monde municipal. Le délégué aurait aussi la possibilité d'initier des enquêtes. Il ne les ferait pas lui-même, les enquêtes, mais il pourrait initier l'enquête, le geste d'enquête, qui serait fait par une équipe d'enquêteurs.

Deuxième recommandation. Il faut préciser les valeurs, leur nature, leur définition. Il faut donner aux valeurs un contenu moral. Une valeur, c'est une valeur morale, là. Puis présentement, en affirmant «intégrité», «respect», ou tout ça, on n'a pas de contenu. Il faut donner un contenu avec ça, sinon on tombe dans l'éthique de vitrine. Il faut également préciser des attentes éthiques qui vont être bien au-delà de l'absence de plainte. L'absence de plainte, c'est bien, mais des fois on ne se plaint pas puis il y a quelque chose qui se passe quand même.

Troisième recommandation. Il faut revoir le processus de plainte et d'enquête afin de le décomplexifier et surtout de ne pas faire peser sur le citoyen le fardeau. Il va falloir prévoir accompagner le citoyen aussi dans sa démarche, mettre plus de distance entre les élus et la décision finale afin d'assurer que le processus -- encore là, j'y reviens souvent, mais la confiance, c'est la marotte, en éthique -- ...afin d'augmenter la confiance.

Quatrième recommandation. Il faut énoncer des attentes précises et réalistes en matière de contenu et de déploiement de la formation à l'éthique, parce que tel quel vous n'y arriverez pas.

Je conclurais en disant que le projet de loi n° 109 doit être plus qu'un processus de plainte, mais il devra servir de guide et de modèle dans le développement d'une démarche éthique et dans l'application des règles déontologiques pour l'ensemble des municipalités. Donc, le projet de loi n° 109, c'est un modèle et un guide, selon ce qu'on préconise. Le projet de loi n° 109 doit aussi être garant d'une démarche d'enquête de qualité, assurant les meilleures chances de déterminer l'implication ou non d'un membre visé. L'enquête doit pouvoir prouver, si la personne est innocente, qu'elle l'est, là, pas juste encore là qu'on fasse un procès par intention.

Et enfin, il ne faut surtout pas oublier qu'en matière d'éthique, dans le développement d'une démarche, il y a un espace entre «il n'y a pas de code» et «il y a un code». Cet espace-là, ce vide au milieu, qui est là où se situe la culture de l'organisation, la transition en question. L'éthique est affaire de culture. Vous savez, si vous promulguez le projet de loi en l'état, dans la première année, tout le monde est formé, tout le monde fait son code. La culture n'est pas changée comme ça par magie. Il y a une migration, il y a une transition, et ça prend du temps.

Alors, il faudra assurer que cette transition-là vers une éthique plus, ou une éthique améliorée, si on veut, puisse se faire. Pour les élus, c'est la prise en compte des valeurs nouvelles ou d'une nouvelle façon de comprendre et d'appliquer les valeurs, un ou l'autre, dépendamment où on se situe.

La migration culturelle vers une éthique améliorée pour les municipalités, leurs citoyens, c'est une transformation silencieuse qui va pouvoir faire passer de la situation actuelle à la situation idéale qu'on peint dans le projet de loi, dans le fond, dans le code.

Entre ces deux moments, ce qu'on ne voit pas actuellement, c'est la culture politique municipale. On ne la voit pas, on ne la remarque pas. Puis vous savez pourquoi on ne la remarque pas, la culture politique municipale? C'est parce qu'elle ne se démarque pas, et, vu qu'elle ne se démarque pas, on remarque ses manquements, et c'est ça qui est dommageable pour l'instant. Alors, on remarque les manquements et les inconduites puis on oublie sa raison d'être de départ qui est le bien-être collectif.

Alors, j'espère que le projet aura un grand succès. J'ai, en fin de texte, une petite phrase qui dit de faire attention parce que s'habiller en blanc, c'est salissant. Bon succès. Je vous remercie. On répondra aux questions.

**(10 h 50)**

Le Président (M. Morin): Merci, M. Villemure. Je sens qu'on va avoir de bons échanges. M. le ministre.

M. Lessard: C'est intéressant puis ça permet aussi à l'Institut québécois d'éthique appliquée d'être présent dans nos commissions, de rappeler que c'est une institution importante. Alors, bienvenue. Votre propos est très intéressant. On n'a pas eu la chance d'entendre notre senior à l'éthique, mais peut-être que, dans nos questions, on pourra l'entendre aussi. M. Quintal, bonjour.

Je pense que tantôt, en allant dans le passage, je me suis dit: On aurait peut-être dû commencer par vous deux en ouvrant la commission. Ça jette un éclairage sur l'environnement éthique, sur autant le comportement, sur les attentes de la population ou des élus sur un encadrement, sur comment on politise le dossier, comment une démarche est importante. En fait, vous avez compris qu'il y a une démarche quand même dans le projet de loi n° 109, et je comprends que vous trouvez qu'après avoir énoncé les valeurs... Vous comprenez qu'il n'y a pas le code. La différence entre 48 puis 109, dans 109, ce n'est pas le code, c'est les valeurs pour lesquelles tu dois en bâtir un.

Bon. C'est sûr qu'on part... Quelque part, c'est sûr que, quand on ne la remarque pas, on ne se démarque pas. On ne part pas à zéro. Je pense qu'il y a des cultures éthiques pour les 8 100 élus municipaux dans le Québec. C'est rien que pas très organisé, en tout cas, dans la façon de le faire.

La démarche se veut que vous... Le rapport Gagné disait: C'est la responsabilisation personnelle, la responsabilisation d'un conseil qui doit encourager sa culture, surveiller et rappeler les règles de temps en temps en disant: Bien, regarde, tu ne peux pas fermer les yeux, là. S'il s'est passé telle affaire, tu étais le seul à avoir l'information, hein? Moi, j'ai siégé au conseil municipal comme maire de la ville de Thetford. On finissait à 0 h 30 le soir, puis le lendemain à 7 heures, au déjeuner de tel restaurant, j'entendais quasiment le compte rendu de mon procès-verbal. Là, je veux dire, il y a un problème. Il y a un problème, il y a quelqu'un qui donne de l'information... Il ne sait pas que l'information qu'il avait, il ne pouvait pas la divulguer comme ça, donc il y avait sûrement des problèmes. Alors donc de rappeler au conseil que chacun doit déclarer sous serment, là, que ce qu'on a comme information, on ne peut pas la partager comme ça. Ce n'est pas un livre ouvert, toute cette affaire-là.

Donc, la démarche. Donc, on dit: Vous devrez avoir un code d'éthique. Bon, voici les valeurs pour lesquelles... Ça peut être ajouté. D'autres nous parlaient de loyauté, puis d'autres... On peut quand même ajouter. Et nécessairement, comme il y a un contenu, on disait, c'est un contenu minimum dans le but que chacun donne sa... pas sa couleur, tu sais. Parce que, quand vous regardez le 48, on dit c'est quoi, un conflit d'intérêts, à peu près, parce que ça, c'est le code. C'est souvent les «ne pas», là, il y a beaucoup de «ne pas» là-dedans. Alors donc, est-ce qu'on va augmenter le contenu obligatoire de ce que seront les codes des municipalités? On nous a invités à le faire pour que chacun puisse l'adopter.

Dans la démarche, c'est sûr qu'il y a beaucoup d'articles, une quarantaine d'articles dans le projet de loi n° 109, qui visent à ce que les gens adoptent un code d'éthique après 12 mois d'entrée en vigueur, puis à défaut, ils s'en font imposer un. Je n'aimerais pas en arriver là, mais ça serait curieux qu'une municipalité ait un code d'éthique puis l'autre n'en ait pas. Ça fait que là tu as un commissaire, mais il ne peut pas être saisi des règles d'éthique parce qu'il ne peut pas juger en fonction des règles d'éthique qu'ils se sont données parce qu'ils n'en avaient pas. Alors ça, ce serait un peu aberrant.

Donc, la responsabilisation d'un conseil et la formation. Alors donc, avec les deux unions municipales, on s'est quand même donné l'ambition de faire de la formation continue. Donc, ils ont deux congrès par année. Bon. Vous doutez peut-être du fait d'atteindre l'objectif que tout le monde, que les 8 100 élus aient participé à des cours d'éthique, là. On a peut-être un défi à relever. Et qui donnera les cours? Et quelle est cette... pour une accréditation, là? Honnêtement, moi, quand ils ont changé le Code civil, en 1994, ils nous ont donné 18 mois, aux 3 000 et quelques cents notaires, pour apprendre un nouveau code, et retourner, et se faire accréditer le fait que j'ai reçu la formation; puis, les avocats, c'est pareil, ils ont de la formation continue, etc.

Alors, sûrement un défi ou une façon... Quelle est la meilleure façon appropriée? Qui devient l'enseignant de qui? Il n'y a pas à la fin une certification, là. Tu ne reçois pas ton diplôme que tu es encore inscrit à l'ordre parce que tu as suivi ton cours d'éthique. Toutefois, le fait de ne pas en suivre, en fait, le commissaire à l'éthique, lui, pourra décider que, peut-être, si tu en avais pris un... On en tiendra compte à tout le moins.

La question qui peut poser grief. On disait «toute personne». Est-ce que le commissaire à l'éthique lui-même peut entreprendre de... en voyant quelque chose... porté à sa connaissance... peut entamer lui-même? Alors, je pose la question aux services juridiques chez nous. On dit «toute personne». Est-ce que ça comprend la personne même qui est en charge de l'autorité à la Commission municipale? Est-ce que lui-même pourrait engager, de façon autonome, parce que ça a été porté à sa connaissance?

Moi, je présume que les gens qui vont essayer d'écrire directement au Commissaire au lobbyisme... pas au lobbyisme, excusez, à l'éthique à la Commission municipale, ils vont passer, oui, par le ministère ou le service des plaintes, mais ça se pourrait qu'ils écrivent directement au commissaire. Et là que fait-il avec l'information, sachant que, là, quelqu'un lui a dit: Il y a tel problème? Alors, comme nous autres, des fois, quand c'est porté à notre connaissance, parfois ils n'ont pas besoin de nous écrire. Étant porté à notre connaissance, on a une obligation d'entamer une procédure, de dire à la Commission municipale: Là, tu débarques. Écoute, moi, je ne peux pas vivre avec le fait que j'ai entendu ça de quelqu'un, et, si ça s'avérait fondé, on aurait de la difficulté.

Dans le traitement maintenant. Tantôt, on a entendu le fait de: Est-ce que c'est du populisme ou de la démocratisation du fait de pouvoir dénoncer? Est-ce qu'il y a des droits et des obligations? On a entraîné une obligation. Oui, tu peux dénoncer, nécessairement tu pourrais la rendre publique aussi, mais en même temps tu as une obligation d'avoir une déclaration formelle, assermentée, documentée, et sur le fait que, pendant toute cette période-là, on voudrait que la décision soit rendue le plus rapidement possible.

C'est sûr que... Je pense qu'à la discussion, rapidement, on est venus à la conclusion qu'en dedans d'une quinzaine de jours on devrait savoir si c'est vexatoire, si ça répond aux critères. Je pense que non seulement placé devant... Est-ce que c'est formel, tu es assermenté? Il y a la documentation et ça répond... les critères, ce n'est pas vexatoire, ce n'est pas superflu, etc. Donc, tu le remets, puis le traitement commence.

Quant au traitement lui-même, on s'est inspiré quand même de ce que fait la loi sur l'éthique et la transparence en matière de lobbyisme, c'est-à-dire tout le traitement de la plainte appartient... la preuve appartient au commissaire. Donc, à la fin, vous serez sanctionné sur le Commissaire au lobbyisme, mais vous ne connaîtrez pas toute la preuve. Il va vous dire ce sur quoi vous allez être sanctionné, mais tout l'élément de preuve ne sera pas rendu public comme tel. Ce que d'aucuns sont venus nous dire: Quand le commissaire à l'éthique rendra sa décision en dedans de 90 jours, à moins qu'il justifie des délais, parce qu'il y en a qui peuvent vouloir judiciariser aussi en disant: Mais, non, non, attends un peu, moi, j'ai trois, quatre avocats, on fait faire une preuve de... Je le vois au service des plaintes actuel. Des fois, ça dépasse les 90 jours de l'offre de service, parce que, là, on est rendu avec 12 avocats chacun. Et parfois il faut faire faire des documents, des expertises, puis il y a des études approfondies. Nécessairement, après ça, le conseil, qui reçoit, bon, la recommandation du commissaire, n'a nécessairement pas toute l'appréciation de la preuve que le commissaire a pu faire pour rendre sa décision. Il est devant une décision qu'il devra appliquer ou non.

Tantôt, M. Saint-Martin nous a dit: Bien, il y a une différence. L'État est souverain quand c'est les élus provinciaux. Puis, municipalement, ça pourrait causer un problème, à savoir qu'on ne se rend pas à ces arguments-là. Comment vous pensez que les élus municipaux, qui auraient à juger ou à prendre une décision ou non, est-ce que c'est correct, selon vous, à savoir est-ce que c'est éthique de juger sur l'éthique d'une recommandation?

Le Président (M. Morin): M. Villemure.

Une voix: M. Quintal.

Le Président (M. Morin): M. Quintal.

**(11 heures)**

M. Quintal (Michel): Oui, merci. Il faut faire attention au niveau du rôle qui va être accordé au niveau du commissaire et, exemple, au niveau du conseil municipal. Si effectivement la décision, comme vous dites, d'entériner une recommandation, ce n'est qu'un «rubber stamp», de dire on est d'accord ou pas avec la recommandation et on va l'appliquer, sans être au fait de toutes les informations qui découlent de l'enquête, je pense qu'on ne réglera pas le problème comment on va amener l'éthique dans cette municipalité-là avec les élus en leur faisant comprendre que, oui, il y a peut-être eu un manquement au niveau d'une règle mais, pire que ça, c'est qu'il y a eu une entorse à une valeur de la municipalité. Et c'est pour ça que les valeurs doivent avoir de l'importance dans la définition, dans les comportements attendus.

Et en plus de ça, exemple, comment on enquêterait un manque de respect? Ça ne veut pas dire que ça contrevient à une norme du code, mais ça contrevient à la valeur qui est exprimée dans le code. Alors, quelles dispositions est-ce qu'on va prendre avec ce manquement-là? Est-ce qu'on va le sanctionner? Est-ce qu'on va tenter d'amener une discussion puis de faire comprendre, un peu comme on... On mentionnait qu'il y a un aspect de formation, de sensibilisation, de coaching. Alors, il y a beaucoup de situations qui peuvent se régler par cette approche-là et il y a des situations qui, carrément, on ne pourra pas le traiter de cette façon-là. On va être obligé d'aller dans un processus d'enquête, de judiciarisation, de sanction, d'audition. Ça fait que ça, c'est un peu le risque qui va découler, là, des différentes situations qui vont être présentées au niveau du commissaire.

M. Villemure (René): Si je peux ajouter un point, Michel parlait de valeurs tout de suite. Dans le projet de loi, on a 45 occurrences du mot «respect», et il y en a quand même trois sens qu'on peut dégager des occurrences du mot «respect». Juste pour vous donner un exemple, là, on est tous d'accord que c'est une chose importante, le respect, mais, quand on dit: Je respecte la loi ou je respecte mon voisin, ça ne veut pas dire la même chose, là. Dans un cas, c'est se soumettre, et, dans l'autre cas, c'est une forme de considération.

Alors, le respect, en éthique, on dit que c'est un second regard porté afin de ne pas heurter inutilement. C'est le latin traduit en français, là, «re» qui est un doublon linguistique, «spec» qui est un regard, donc un second regard pour ne pas heurter inutilement. Ce second regard là a-t-il été porté? Oui? Non? Heurtait-il inutilement? Oui? Non? C'est ce qu'on appelle un contenu d'une valeur, ça, tandis que, si je vous dis: Il y a eu un manque de respect, non il n'y a pas eu de manque de respect, oui il y en a eu un, on peut être là, tu sais, toujours, là. Ça fait que chacune des valeurs, quelles qu'elles soient... Et les gens ont parlé cette semaine d'introduire la loyauté. Je vais vous dire, introduisez ce que vous voulez, mais donnez-leur un contenu. Et actuellement, les valeurs, elles sont mentionnées, elles font office de flash, d'enseigne, là, mais il n'y a pas de contenu.

Alors, c'est sûr que, si on arrive pour initier une procédure au nom d'une valeur, qui que soit le commissaire, l'enquêteur ou qui que ce soit, il n'y a pas de contenu pour aller de l'avant. Ce qui va finir par arriver, c'est que ça va n'être qu'une enquête sur les règles et sur les manquements aux règles, évacuant là l'éthique du processus, devenant de la déontologie simplement. Alors, le risque de dérive, il est là, là, avec la non-définition des valeurs. C'est pour ça qu'on en fait notre premier point là-dessus.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Villemure. M. le ministre.

M. Lessard: Oui. Et tout le monde est comme sur... on marche comme sur des oeufs là-dessus quand on veut vraiment l'encadrer. La plupart des... ils nous ont dit: C'est assez périlleux d'essayer d'encadrer, au nom des valeurs, des règles et des normes par rapport à ces valeurs-là, quoique nécessaire.

Alors, on comprend que ce n'est pas le code, 109. Le code, ce sera lui que la municipalité s'adoptera en fonction de ces valeurs-là. On va regarder ce qu'il y a dans 48, parce que, là, on fait une définition plus... on rentre dans la définition, là, qu'est-ce qu'un conflit d'intérêts, puis on descend, etc. On ne voulait pas se rendre jusque-là, mais on doit le faire. Je sens qu'on doit faire augmenter le contenu et les définitions, en tout cas, de... Puis, même si je voulais laisser beaucoup de latitude ou de l'autonomie et de la responsabilisation, nécessairement, aux élus municipaux, il y en a qui n'en veulent pas, mais il faut en prendre nécessairement pour que...

Puis, dans la démarche, tu sais, c'est: Tu as un code et tu le renouvelleras. Tu feras de la formation. Puis, à toutes les fois qu'il y aura une élection générale, n'oublie pas, là, tu as 120 jours, il faut que tu le reprennes. C'est peut-être un conseil nouveau, et peut-être que les règles ont changé aussi. Il y a des affaires aujourd'hui que, le monde, il y a plus de sensibilité pour ça, alors qu'il y a quelques années, c'était bien vu d'avoir été reçu à quelque part par un groupe pour lequel il pense que ses affaires pourraient avancer ou en tout cas dans lequel il est dans un environnement de prendre des décisions d'affaires. Maintenant, écoute, s'il faut que tu aies été vu au Centre Bell en train de regarder une partie de hockey dans la loge d'Investissement Québec, tu passes probablement pour quelqu'un qui profite du système, alors qu'il y avait peut-être là cinq, six personnes. Ils peuvent-u se rencontrer ailleurs que là? Ce que le monde se disent: Aïe, écoute, il n'y a pas rien qu'au hockey qu'ils peuvent se voir. Qu'ils fassent la réunion avant au restaurant pour discuter, ou à l'hôtel de ville, ou etc., où est-ce que ça ne coûte rien. Puis, s'ils veulent aller au hockey, ils iront au hockey, ils iront au football, ils iront n'importe où.

Mais là il y a une intolérance épouvantable, tellement que même les sociétés d'État ont dû requestionner leur participation dans ces organisations-là. Mais c'est évolutif. Et, quand on est trop décroché de ce que la société veut, c'est là que le jugement est sévère. On n'a même plus besoin des tribunaux. Actuellement, LCN fait la job. Il y a une petite ligne bleue en bas, puis, si ton nom apparaît là-dessus, c'est comme si tu étais sur la pinte de lait, tu sais. Ça fait que maintenant, quand ils disent: On t'a vu à la TV, tu leur poses toujours la question: Pourvu que ce soit pour les bonnes raisons, parce qu'il y a un tribunal qui n'est pas très organisé, qui s'appelle le tribunal médiatique.

M. Villemure (René): Mais, vous savez...

Le Président (M. Morin): M. Villemure.

M. Villemure (René): Oui, merci. Je m'excuse si je viens d'interrompre. Quand la confiance n'est pas là, la sanction, tu sais, à l'avance, le tribunal médiatique prend sa place. C'est pour ça que 109 et les codes éventuels doivent viser à restaurer la confiance, restaurer une balance, parce que présentement c'est quasiment coupable d'être élu municipal. Tu sais, ça n'a pas de sens, là, comme tel. Et puis je vais vous dire, autant on peut... L'exemple que vous donniez, M. le ministre, à savoir dans la loge au Centre Bell ça n'a plus de sens aujourd'hui, je vous dirai qu'il y a sûrement des cas où ça a de l'allure. Et c'est justement, là. On ne doit plus avoir la... Souvent, les gens ont peur d'exercer leur travail parce que les apparences ou l'apparence d'apparence va jouer contre eux. Il ne faut pas non plus mettre une psychose éthique, là.

Et ça, c'est pour ça que je reviens encore aux valeurs. 48 n'était pas beaucoup plus défini, honnêtement. Mais, si on a un contenu, puis je reviendrais à l'exemple du respect, un second regard pour ne pas heurter inutilement, bien, est-ce que j'ai porté un second regard avant d'aller au Centre Bell? Oui. Est-ce que ça heurtait inutilement? Oui? Non? Il y a une possibilité de jeu, c'est-à-dire qu'il y a à la fois une latitude et un contenu, tandis que, dans l'autre cas, bien, c'est: Tu es allé ou tu n'es pas allé? Bon.

Mais je sais une chose, la confiance étant tellement basse envers les élus, et plus on va au niveau près du peuple, donc au niveau municipal, c'est à regagner. Sont-ils coupables? Je ne crois pas. Je pense que la majeure partie des gens sont honnêtes, moi, honnêtement. Je suis peut-être naïf, là, mais il reste que, pour les actions de quelques-uns, la confiance est entachée pour tous. Et puis de mettre des outils en place, un code, par exemple, peut restaurer une partie de la confiance, mais ça ne fera pas tout le travail.

Je vais vous dire, moi, plus il y a de règles, moins il y a de confiance; plus il y a de confiance, moins il y a de règles. C'est un corollaire, hein? Alors, souvent, les codes, on veut prédire, on veut prévoir tout et leur contraire, et ce que ça me donne, c'est: Ils ne sont pas fiables, ce monde-là, ils sont obligés de se mettre des règles. Ça fait qu'il faut faire attention. C'est une démarche. Et c'est vivant, cet organisme-là.

M. Lessard: ...raison. Et évidemment j'appelle tout le temps ça la grosse TV. Et naturellement il y a 8 100 élus dans 1 100 municipalités du Québec. C'est très... Et, jusqu'aux événements de l'an dernier qui ont été rendus publics, nécessairement, les élus municipaux avaient la cote d'amour et de respect. Quand tu faisais l'analyse de 1 à 100, ils devaient être premiers, deuxièmes, quelque chose de même, après les médecins. Et, pour ces cas-là, tout le monde, là, que ce soit la municipalité très éloignée de Montréal ou etc., donc s'en sont retrouvés... Tout le monde est venu nous dire: Il y a effectivement un problème maintenant avec la population, qui n'a plus confiance ou moins confiance, pas plus confiance mais moins confiance globalement. Ça fait que, quand on retourne dans chacune des municipalités, les gens disent: Non, non, écoute, le conseil, on peut les voir. On lui parle, on le connaît. C'est Luc, c'est Marie, c'est Louise, etc. Alors, quand on se met au comportement individuel, qu'on connaît les individus, la confiance est là. Quand globalement on analyse la crise de confiance qu'il y a actuellement, là tout le monde y passe: provincial, scolaire, municipal. Être un élu, actuellement c'est... ils te demandent, tu sais: Qu'est-ce que tu fais? Puis ils disent: Ah oui, t'es-tu encore là-dedans? Alors donc, rapidement on passe en mode défense.

Alors donc, j'en reviens quand même, et tout ne passe pas... Moi, je crois à la vertu d'en faire, d'en avoir certainement un minimum allant promouvoir la valeur, et le respect est le gardien de ces valeurs-là. Mais c'est aussi à travers d'autres actions, l'encadrement de certaines lois, etc., encadrement de ceux qui répondent aux affaires municipales aussi. En passant, là, on est en relation avec des tiers quand on est un élu. Si quelqu'un triche l'autre bord, bien, regarde, là, on a fait des lois pour tout le monde. Alors, dans un environnement, c'est changer l'environnement d'affaires pour que les comportements changent ou en tout cas s'adaptent aussi à ce que la population veut avoir.

Alors, si vous avez des propositions quelconques -- je l'offre toujours à tout le monde qui viennent nous voir -- par écrit, documentées ou plus précises sur un point ou des points, on ne demande pas de vous prononcer sur tout. Mais, moi, je veux dire que j'ai beaucoup apprécié qu'on discute avec une instance de haut niveau sur l'éthique. Ce n'est pas un sujet... Tout le monde en parle. C'est comme le développement durable, tu sais, ça habille beaucoup de monde. O.K.? Seulement que des fois c'est trop grand comme vêtement pour la situation. Alors, merci. Et, si vous êtes capables de nous donner la dose appropriée qui nous donnerait un éclairage, ça nous guidera encore, parce qu'on reviendra article par article par la suite.

**(11 h 10)**

M. Villemure (René): Ce sera un grand plaisir. Merci beaucoup.

M. Lessard: Merci beaucoup.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le ministre. Maintenant, M. le député de Blainville, porte-parole de l'opposition officielle en matière municipale, à vous.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. Alors, messieurs, tout d'abord, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue.

Effectivement, j'abonde un peu dans le sens du ministre. C'est peut-être un travail qu'on aurait dû faire en amont avec des éthiciens au départ. Alors, je ne sais pas si vous avez été consultés ou si c'est la première fois, là, avant que le projet de loi soit là, mais vous apportez un élément qui... En fait, je dois dire que ce matin on a des éclairages, là, assez différents en fait sur, j'allais dire, la composition puis surtout la valeur du code d'éthique en tant que tel, tu sais. Parce que, là, ce que vous nous dites ce matin, on est pratiquement devant un code d'éthique qui est plus punitif, hein, qui vient nous dire: Bien, tu n'as pas le droit de faire ça, puis, si tu le fais, voici ce qui risque d'arriver, alors que ce que vous nous dites: Votre code d'éthique devrait être beaucoup plus éducatif, devrait être capable d'amener, hein, des pistes de réflexion, devrait changer une culture.

Et je me demandais en vous écoutant... Puis c'est un questionnement, mais peut-être que vous pourrez m'aider dans la recherche de la réponse. C'est peut-être pour cette raison-là que, quand les groupes viennent nous voir, ils nous disent: Écoutez, peut-être qu'il ne devrait pas y avoir 1 100 codes différents. Peut-être qu'il devrait y avoir juste un code unique. Peut-être que vous devriez bonifier le code. Parce que j'ai l'impression qu'ils ne savent pas par où s'y prendre, qu'est-ce que ça devrait contenir. Et je me demande effectivement si ça ne devrait pas être le rôle, un peu comme dans le 48, qui est en train de se bonifier puis il n'est pas adopté encore, si ça ne devrait pas être cette approche-là qu'on devrait prendre plutôt que de laisser, au nom de la latitude des municipalités, de laisser une très grande latitude. Alors, je voulais vous entendre sur ça, sur la diversité possible des codes, sur les buts qui ne seront peut-être pas atteints, parce que les municipalités, en toute bonne foi, vont tenter de faire quelque chose dont ils n'ont pas l'expertise. Alors, peut-être me donner votre avis là-dessus, s'il vous plaît.

M. Villemure (René): Vous évoquiez tantôt un code versus 1 100 codes. Tiens, c'est une très, très bonne question. Je vais vous donner un exemple pratique qui est actuel, qui est dans un monde qui est près du vôtre.

Alors, l'administration publique québécoise, il y a 13, 14 ans, a énoncé des valeurs qui étaient celles de l'administration publique, et puis on a dit aux ministères: Vous autres, là, vous prendrez ça, vous vous l'approprierez et vous ferez quelque chose pour vous avec. 13 ans plus tard, la plupart n'ont soit rien fait ou ont pris ce qui était là. D'accord? Ça fait que, tu sais... Et ils demandaient la possibilité de le faire. Ils détestaient qu'on leur impose quelque chose. Mais, dans la pratique, à peu près tout le monde a pris ce qui était là ou pas grand-chose bien loin, là.

Alors, je pense que d'avoir un code unique, je ne penserais pas, il y a une vastitude de municipalités, de contextes, mais d'en avoir 1 100 non plus. Je crois que l'ossature forte est essentielle. Je crois qu'il y a des valeurs communes. Vous savez, qu'on soit à Saint-Élie-de-Caxton ou qu'on soit à Montréal, il y a des valeurs qui sont reliées au fait que vous êtes un élu municipal, que vous représentez des citoyens, et la taille n'a rien à faire avec ça. Vous savez, si on prend un exemple, là, d'une définition appropriée de l'honnêteté, que vous soyez une grosse municipalité ou une petite municipalité, c'est de l'honnêteté, là, à quelque part. La forme de l'honnêteté va changer souvent dans la taille du contrat qui va être étudié ou qui est adjugé, mais ce n'est pas plus que ça, là.

Alors, je crois qu'il devrait y avoir un corps fort, et certaines formes, les feuilles dans l'arbre, pourraient varier un petit peu dans les municipalités. Ça aurait bien du sens. Ça ferait du sens également pour la personne à la Commission municipale, qui n'aura pas à interpréter 1 100 codes de 1 100 manières, là, ce qui serait en soi inapplicable. Alors, je crois qu'un corps fort, un tronc fort avec des feuilles de quelques couleurs qui vont être représentatives de la vie municipale comme les conseils le sont, c'est une très bonne idée. Mais fiez-vous à l'administration publique québécoise. Ils ont eu le choix; ils ne l'ont pas exercé. Ça fait que, moi, ça fait 15 ans que j'observe la vie en éthique, là, des organisations puis des ministères: c'est souvent le cas. Alors, on réclame de l'autonomie, et les gens me demandent après: Comment ça marche, l'autonomie? Bien là, tu sais... Tu sais, non, non, mais c'est une question rhétorique, là.

Une voix: Voici le guide.

M. Villemure (René): Oui, c'est ça, voici le guide de l'autonomie.

M. Ratthé: Oui. Je trouve intéressants, là, certains parallèles que vous faites aussi, par exemple en rapport aux règles de déontologie. Tantôt, vous disiez: Est-ce qu'à tous coups ce n'est pas se comporter avec éthique que d'aller, par exemple, dans une loge de hockey ou autres? Et, que ce soit cet exemple-là ou l'autre, je pense que, dans ces règles-là, il faut, je pense, à tout le moins laisser une certaine latitude aux municipalités, parce que, dans un certain contexte, dans une certaine municipalité, je pense que ce qui pourrait paraître peut-être pas éthique dans un certain contexte peut l'être dans un autre. Donc, d'imposer peut-être comme on l'a fait, là, à 48, où ça contenait les deux éléments, je pense que cet aspect-là devient intéressant. Mais ce que je retiens beaucoup puis, je pense, ce qu'on commence à retenir beaucoup, c'est cette fameuse ossature, armature forte, là, qui va donner...

Là où je trouve intéressant, vous dites, d'une part, que les éthiciens sont peu nombreux au Québec pour former tous les élus municipaux et vous dites également que les juristes ne sont pas suffisamment formés en éthique, malgré qu'ils reçoivent... les avocats sont formés en éthique à l'École du Barreau. Et vous avez sans doute raison là-dessus. Est-ce que la solution ne serait pas justement la collaboration entre les éthiciens et les avocats ou encore entre l'Institut québécois d'éthique et le Barreau pour arriver -- et je ne sais pas si ça peut se faire -- arriver peut-être même à la limite à un code, une formation d'éthique qui serait disponible, uniforme, et auxquels les municipalités pourraient se référer?

M. Villemure (René): Probablement que c'est la solution à adopter. Regardez bien, tantôt j'ai fait une petite boutade aux juristes. Je sais que vous êtes sûrement huit sur 10 ici. Je l'ai fait pour cette raison-là.

M. Ratthé: Ce n'est pas mon cas, en tout cas.

M. Villemure (René): Non, non, mais, le projet de loi et les codes qui vont en découler, on parle de codes d'éthique et de déontologie, donc il devrait y avoir les deux pans qui sont représentés dedans et non pas un pan qui parle pour l'autre. Moi, je ne parlerais pas pour le juriste, là. C'est ça, l'affaire. C'est que je pense qu'il y a une collaboration quelconque, d'une forme quelconque, qui serait bénéfique pour tous.

Pour reprendre à la première partie de votre question tantôt, vous disiez: Le Centre Bell, la loge, ce que j'avais amené, moi, à 48, c'est que ce qui fait problème là-dedans, ce n'est pas la présence au Centre Bell tant que la redevabilité qui est impliquée là-dedans. Et je vais vous donner un exemple d'une MRC, moi, où les gens de la MRC devaient se réunir pour faire une grosse rencontre avec d'autres MRC, et, dans le territoire de la MRC, la seule salle, c'était le St-Hubert. Ça fait que, bon, ils sont allés au St-Hubert, mais là, tu sais, on a-tu un problème parce que le gars du St-Hubert a fait un deal sur la salle? Non. Tu sais, ce n'était pas... ils ne pouvaient pas aller ailleurs, il n'y en avait pas d'autre. Mais je sais que, pour plusieurs élus, ce soir-là ils se sentaient très mal d'avoir la petite salade traditionnelle. Et à mon avis ça n'a pas de raison d'être.

Là, on s'habille de blanc, et c'est salissant là-dessus. Ça fait qu'il faut faire attention. Ce n'est pas un monde d'absolu, le monde éthique, là. Mais je crois que de collaborer, une instance juridique et une instance éthique, serait intéressant.

Maintenant, vous savez, les gens vont me dire... Je prends la peine de mentionner qu'il n'y en a pas beaucoup, d'éthiciens. Il n'y en a pas deux, là, il y en a quelques-uns. Mais il reste qu'il y a plus de gens qui prétendent savoir qu'il n'y en a qui savent. Moi, ça fait 15 ans que je suis éthicien. Je fais juste ça. Alors, le regard, je ne prétends pas porter un regard juridique, quoique j'en porte avec des juristes tous les jours. Ça fait qu'on vient qu'on a une communauté de vues quand même, là, et on est capables d'apprécier une loi, mais je ne l'écrirais pas à la place du juriste, carrément. Alors, je pense qu'il y a les deux dans le projet de loi, il y aura les deux dans les codes. Je pense qu'il y a une collaboration à envisager.

M. Ratthé: Si je vous entends bien, puis je pense que c'est beaucoup le message qu'on a ce matin, en fait un code d'éthique devrait être là beaucoup plus pour changer une culture, pour faire en sorte que graduellement... Vous parliez d'une période de transition, là, plutôt... Effectivement, il y a des références, à savoir M. le ministre disait des «ne pas», là, qui font des choses qui... Mais je pense que, dans la version finale, je pense, du projet de loi, il faudra sûrement... Et j'appréciais ce que M. le ministre disait, dans le sens peut-être si vous avez des recommandations à nous faire. Je pense que vous dites clairement qu'il faut préciser les valeurs puis les attentes, qu'il faut faire en sorte qu'il y ait tout un aspect formation qui soit là. Mais je pense également qu'il y a sûrement une perception aussi, et peut-être, si on atteint l'objectif que vous nous suggérez, il y a aussi une perception, je pense, si la population a changé. Et je me demandais: Selon vous, quelle serait la façon de faire ou du moins des pistes pour dire: Bien... Parce que je reprends votre exemple du St-Hubert, là. Je suis sûr que le malaise du député ou de l'élu municipal face souvent à une question d'éthique, c'est plus aussi: Quelle sera la perception de la population?

M. Villemure (René): Absolument.

M. Ratthé: Mon geste en soi, je le fais de bonne foi, mais je suis en train de me demander pas nécessairement si j'ai enfreint le code ou si j'ai agi de façon éthique mais surtout: Est-ce que ce que je fais va déplaire à la population puis on va me juger là-dessus? Et...

**(11 h 20)**

M. Villemure (René): Bien ça, c'est réduire l'éthique à une question d'image, et on gère l'image. Bon, si vous n'y allez pas, au St-Hubert, vous, et votre collègue y va, dans l'image du public c'est un bandit et pas vous, pendant qu'en réalité ce n'est pas peut-être pas la bonne question. Et je pense que l'éthique, ça devrait être inspirant. Un code devrait être inspirant, pas épeurant, là, et puis il devrait inspirer les gens à bien agir. Et ça, ça fait boule de neige.

Moi, je l'ai vu dans les sociétés où je travaille depuis des années, là. Ce n'est pas parce qu'on a un code que demain c'est comme ça mais à force de donner l'exemple. Et, dans la municipalité, un élu devrait être exemplaire, parce que, si on veut exercer une autorité, il faut être exemplaire. Ça fait que c'est sûr que c'est exigeant. Et c'est la somme des comportements qui évoluent qui font que la culture migre. Ce n'est pas juste demain matin, là.

Alors ça, c'est un très bon début, 109, là, tu sais. Moi, je le salue. Mais je me dis: Bon, tant qu'à être ici, on va donner quelques petits «pointers» aussi. Mais c'est un début, puis on ne devrait pas oublier le côté éthique, le côté temps, le côté légitimité. Et l'appareil administratif ou les élus ont le temps de rendre ça vivant. Ce n'est pas comme une entreprise qui aux trois mois doit rendre des résultats à la bourse, sinon ils sont éjectés, là. Alors, il y a quand même un temps, le temps d'un mandat par exemple, et qui donne une légitimité au geste. Je crois qu'on devrait en prendre avantage.

Le citoyen -- moi, je fais beaucoup de forums publics -- il aime beaucoup se faire parler d'éthique et pas de manque à l'éthique. Par contre, quand on le convie à venir, il pense qu'on va lui faire la morale ou lui parler de manque d'éthique. Ils sont toujours surpris de dire: Ah, ça a l'air le fun, plutôt que: Ça a l'air plate. Mais il y a une popularisation du discours éthique qui devrait être faite.

Si quelqu'un est nommé -- moi, je suggérerais le délégué à l'éthique, là -- cette personne-là devrait être une personne visible qui intervient, qui est en amont, là, qui inspire le monde. Ne prenez pas quelqu'un qui a peur de sortir, là. Tu sais, ça va prendre quelqu'un qui va être capable de montrer l'exemple, d'indiquer, d'être un phare, si on veut, une balise, là. Et ça, de cette manière-là, le monde, la culture municipale que je vous disais qu'on ne remarque pas parce qu'elle ne se démarque pas, bien là, on pourrait la remarquer parce qu'elle se démarquerait. Et cette personne-là devra justement faire la promotion de bien des choses.

On en a vu, là, dans plusieurs fonctions. Le Commissaire au lobbyisme en est une, mais ce n'est pas nécessairement la seule. Mais il y en a ici, il y en a ailleurs. Moi, je trouve que le conseiller sénatorial en éthique fait une job intéressante et qu'on devrait, dans le cadre d'un éventuel délégué ici, s'inspirer des fonctions du conseiller sénatorial. Et je peux vous dire, les gens disent: Le Sénat, il ne se passe jamais rien, ça dort tous. Maintenant, moi, je travaille beaucoup, je peux vous le dire, c'est quoi. Il a un rôle bien réel, quoique discret, et puis les incidences problématiques ont chuté dramatiquement sans pour autant mettre une tonne de règles. Et ça, c'est drôle. Il a réussi à inspirer. Il est inamovible cinq ans, renouvelable une fois. Puis, moi, je ne le connais pas personnellement, je l'ai rencontré, mais je trouve que c'est très bien. La fonction, elle s'est insérée en douceur. Bon, c'est sûr que le citoyen moyen ne suit pas le Sénat, tu sais, il suit plus l'assemblée municipale, honnêtement. Mais je ne pense pas que ce soit une raison pour ne pas prendre les bons coups de la fonction.

M. Ratthé: Vraiment intéressant, parce que, jusqu'à maintenant, on avait entendu: Le commissaire à l'éthique devrait, en plus d'avoir cette fonction, là, que je vais appeler de juge et de sanctionner s'il y a lieu, devrait être aussi un conseiller. Vous, vous ajoutez: Non seulement il devrait être ça aussi, mais il devrait être aussi comme celui qui fait la promotion de l'éthique, qui interagit avec la population, en fait qui passe un message en disant: L'éthique, ce n'est pas uniquement de punir, là, puis la résultante d'un manquement à l'éthique n'est pas nécessairement... Ce que j'en comprends, bien, c'est que la résultante d'un manquement à l'éthique n'est pas nécessairement une sanction.

M. Villemure (René): Non. Vous savez, il y a des choses qui sont légales et injustes, d'autres justes et illégales. Il y a un paquet de choses à voir. Mais je vous dirai, et sans dévaloriser rien, là, mais vous avez ce matin l'opinion de gens qui sont des éthiciens, qui ne font que ça. Et puis c'est sûr qu'on a à coeur la promotion du sujet, mais on est témoins pour vous dire: Ça fonctionne aussi, parce que, dans nos attributions... Moi, je travaille au Conseil exécutif, au Conseil du trésor, dans à peu près tous les ministères où il y a eu des migrations culturelles éthiques qui ont été faites. Alors, ce n'est pas un chemin qui est proposé par quelqu'un qui a eu une vision, là, un matin. C'est fondé là-dessus également.

Puis je vous dirais que l'éthique, vous savez c'est quoi? C'est une portion de la philosophie qui s'occupe du juste. Et, nous, notre formation est en philosophie et non pas en droit ou en administration, quoiqu'on cumule toutes ces formations-là quand même, là. Mais il reste que la composante de base, c'est une composante plus conceptuelle. Le citoyen, il n'a pas besoin de le voir, le concept, là. Il faut qu'il soit réfléchi derrière la porte, si on veut, et ça doit être très, très mâché pour le citoyen. Mais, derrière un raisonnement vulgarisé, il y a un raisonnement, et c'est ça que souvent on tronque au profit d'une règle, ou d'une idée reçue, ou d'un: C'est sûr que oui. Alors, moi, je préfère vous offrir l'opportunité de le faire.

M. Ratthé: M. le Président, je pourrais continuer à discuter longuement là-dessus, mais je vais aussi laisser la chance, si vous le permettez, M. le Président, de donner la parole à mon collègue de Berthier.

Le Président (M. Morin): Ça va me faire plaisir, M. le député de Blainville, de donner la parole au député de Berthier.

M. Villeneuve: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs. Juste avant vous, on a eu la chance d'entendre M. Saint-Martin, et, moi, je vous amène... Je sais que M. le ministre est allé vers ça tantôt, mais je n'ai peut-être pas bien saisi la réponse. Je vous ramène au fait que, selon le projet de loi qu'on a actuellement devant nous, advenant une recommandation pour une sanction, c'est le conseil municipal qui devra, sans la changer, décider s'il l'applique ou non. Moi, en tout cas, ce que j'ai compris de M. Saint-Martin tantôt, c'était assez clair, en tout cas ce que j'en ai compris, c'était: Non, le conseil municipal ne devrait pas avoir à décider s'il impose ou non cette sanction-là.

Comme ancien élu municipal, moi, je vous dirais qu'honnêtement j'aurais beaucoup de difficultés à décider d'appliquer une sanction sans avoir toute la preuve, parce qu'on a toujours dit, en tout cas au niveau du conseil municipal et les gens avec qui je travaillais, les conseillères et les conseillers, on s'est toujours dit: Ne prenons une décision que lorsque nous aurons l'information nécessaire pour la prendre. Si on n'a pas l'information nécessaire, je pense qu'éthiquement on n'a pas à prendre une décision. Et, dans le cas qu'on regarde ici, le projet de loi n° 109, j'ai beaucoup de difficultés à voir un conseil municipal rendre une... en tout cas appliquer une sanction, une recommandation qui va à la sanction, qui sanctionne finalement, appliquer cela sans avoir le droit de poser les questions qui pourraient surgir, sans avoir toute la preuve devant soi.

Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que c'est... encore là, je pense que le monde municipal est un petit peu mal à l'aise avec cette obligation-là, finalement, ultimement de prendre la décision.

M. Villemure (René): Je vous donnerai deux...

Le Président (M. Morin): M. Villemure.

M. Villemure (René): Oui. Deux points. Je vais être mal à l'aise peut-être pas pour les mêmes raisons que vous. C'est-à-dire que votre raison est fort valable, je crois, et je vais laisser Michel la traiter. Mais, moi, là, où je suis mal à l'aise, c'est le concept que le conseil municipal soit en définitive juge et partie. Alors, tu sais, on lui dit: Vous devriez avoir la sanction x, et aux deux tiers on choisit ou non de l'appliquer. Vous, vous me dites: Je ne sais même pas si x, c'est bon, parce que je n'ai pas la preuve. Bon, je comprends très bien ce bout-là, et ça, c'est un bout d'enquête. Mais, en bout de ligne, d'être juge et partie, vous savez, si on est au conseil de Québec ou... Bien, quoique Québec, ce n'est pas un bon exemple là-dessus, 25 sur 27 avec le maire Labeaume. Mais, tu sais, des cas, il y a des endroits où c'est plus monopolistique. Il reste que qui va sanctionner son père pour quelque chose qui n'est pas odieux? Tu sais, on peut douter de ça. Et ça, c'est embêtant.

Ça fait que, moi, le concept juge et partie, j'ai un peu de difficultés. Je vais passer la parole à Michel pour le côté enquête et preuve.

Le Président (M. Morin): Oui, M. Quintal.

M. Quintal (Michel): Oui, merci. L'autre élément qui pourrait être pris en considération, c'est: Est-ce qu'on va recommencer le processus d'enquête, qui a été fait par des gens qui doivent suivre quand même une éthique au niveau de l'enquête, et que c'est circonscrit par des méthodes et des fonctionnements d'enquête? Alors, comme vous dites, on doit avoir accès, je pense, à un minimum d'information de la nature de l'événement en question, de la démarche, des éléments clés qui ont amené la Commission municipale à suggérer telle sanction, mais d'avoir tout le fardeau, autrement dit, de réévaluer cette recommandation-là de sanction en épluchant tous les témoignages, tous les éléments de preuve pour, comme vous dites, être réellement sûr qu'on est à l'aise avec la recommandation et d'appliquer la sanction.

Ça fait qu'il y a un élément de confiance, si l'enquête est faite par une institution qui est indépendante, qui est avec des gens qui ont une compétence en enquête, parce qu'il y a quand même un processus qui doit être respecté au niveau de l'intégrité de l'enquête, la crédibilité du processus, et de là, dépendamment des facteurs aggravants ou atténuants, on arrive avec une recommandation. Exemple: si on n'avait pas la clause que vous ne pouvez pas changer la sanction, à la lecture des faits vous pourriez arriver avec la conclusion que ça mérite plus que ce qui est recommandé. Et là comment vous allez débattre cette augmentation-là?

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier.

M. Villeneuve: Il faut bien... En tout cas, encore une fois pour l'avoir vécu, une situation où, lorsqu'on est en conseil municipal, à huis clos, puis on discute entre nous, inévitablement il y a une question qui est posée à laquelle on n'avait pas pensé, et on va souvent reporter le sujet en disant au directeur général: Écoute, effectivement, c'est une bonne question, il faut fouiller ça. Et même lorsqu'on arrive en conseil municipal et avant de voter la résolution sur un sujet, comme maire, moi, je demandais toujours aux gens: Est-ce qu'il y a des gens qui ont des questions? Avant de voter. Est-ce qu'il y a des questions par rapport à ce projet-là, cette résolution-là? Et c'est arrivé, en 10 ans, c'est arrivé à peu près huit fois où un citoyen a levé la main, a posé une question, puis j'ai dit: Oups! Effectivement, on n'a pas pensé à cet aspect-là.

Alors, ça va toujours revenir, ça. Alors, de laisser au conseil, à mon avis -- puis je vous dis mon avis, là -- de laisser au conseil le soin de prendre une décision, il y aura toujours, de la part des membres du conseil, un ou des membres du conseil qui va soulever un aspect qui va faire en sorte qu'on va douter finalement d'être en mesure de prendre la décision, d'appliquer la sanction ou d'appliquer la recommandation qui mène à la sanction. Moi, je vous dis ça comme ça. Puis je vous le dis honnêtement, là, avec l'expérience que j'ai vécue: Je vois mal comment on peut laisser ça. Et avec tous les arguments aussi que M. Saint-Martin a apportés tantôt, hein, qui étaient très, très intéressants, là, qu'on aura la chance de regarder encore plus à fond.

Le Président (M. Morin): M. Villemure.

**(11 h 30)**

M. Villemure (René): Mais, vous savez, monsieur, vous avez là le volet politique de votre réponse et vous avez le volet éthique de votre réponse qui, les deux, expriment un malaise à des endroits différents mais pour le même sujet. Alors, je pense que, dans ce cas-là, ça allume comme une lumière rouge, en disant: On va le regarder de nouveau peut-être, ce n'est peut-être pas une méchante idée.

À la limite, quelqu'un peut dire, aussi: Le conseil a l'odieux d'appliquer une sanction pendant qu'il ne l'a pas décidée. Et on peut dire un paquet de choses là-dessus. Mais je pense que, si le projet et le code instaurent un désir de bien faire une migration culturelle éthique et qu'à un moment donné on arrive à cette enquête-là, l'inconfort va être moins grand parce qu'il va y avoir eu tout ça avant. Tandis que, là, en l'état tel qu'il est, c'est sûr que j'aurais la même réserve que vous, probablement. Mais, moi, je propose de bonifier beaucoup, à l'entrée du projet et des codes, de sorte que...

Vous savez, un effort éthique, là, ce n'est pas très, très spectaculaire, en bout de ligne. Rien n'arrive quand ça va bien; tu sais, c'est un peu ça. Ça fait que ce n'est pas comme si on disait... Ce n'est pas comme un gardien de but, là. Tu sais, rien n'arrive, il n'y a pas eu de problème, c'est ça. Ça fait que ce n'est pas juste ça, mais il reste que c'est une grande partie. Ça fait que je pense que cette question-là devra être débattue dans le cadre d'une réflexion globale que vous aurez, parce qu'à la prendre à la pièce ce matin, la réponse de M. Saint-Martin, celle de Michel, la mienne vaut... se valent toutes un peu.

M. Villeneuve: D'accord.

Le Président (M. Morin): Ça va, M. le député de Blainville?

M. Ratthé: Oui, ça va.

Le Président (M. Morin): M. le député de Berthier.

M. Villeneuve: ...M. le Président, merci.

Le Président (M. Morin): Bon. Messieurs de l'Institut québécois d'éthique appliquée, on vous remercie beaucoup, beaucoup, beaucoup, et on vous invite à continuer vos réflexions et à nous en faire parvenir de nouvelles si vous avez l'occasion.

M. Villemure (René): Merci de...

Le Président (M. Morin): Donc, bon retour chez vous. Merci.

M. Villemure (René): Au revoir.

Le Président (M. Morin): Suspension. Et j'invite l'Alliance des professionnels et des professionnelles de la ville de Québec.

(Suspension de la séance à 11 h 32)

 

(Reprise à 11 h 36)

Le Président (M. Morin): Nous reprenons nos travaux. Et nous recevons l'Alliance des professionnels et professionnelles de la ville de Québec. Et j'inviterais le représentant à se présenter.

Alliance des professionnels et des
professionnelles de la ville de Québec

M. Lavallée (Denis): Oui, bonjour. Mon nom est Denis Lavallée. Je suis président de cette association-là qui, au premier paragraphe de notre court mémoire, vous indique qu'elle représente environ 450 professionnels dans toutes sortes évidemment de matières: le droit, le notariat, l'ingénierie, l'architecture, etc. Alors, ils font partie un peu du coeur de la ville et qui sont évidemment, au coeur des projets importants de la ville, comme conseillers et comme professionnels.

Le Président (M. Morin): Bienvenue à cette commission, M. Lavallée. Et vous avez 15 minutes pour vous exprimer, selon votre mémoire.

M. Lavallée (Denis): Parfait. Alors, écoutez, le premier constat que nous faisons par rapport au projet de loi, c'est cette idée de permettre ou d'inciter les municipalités, d'obliger les municipalités à adopter autant de codes qu'elles sont... Évidemment, vous savez qu'il y a au-delà de 1 000 municipalités au Québec. Ça, nous pensons que c'est une avenue, avec respect, douteuse puisque complexe, complexe à appliquer et sur le principe également qu'on va devoir vivre avec des variantes infinies.

Nous croyons que les règles de base, qui sont un peu des règles universelles que vous avez édictées -- il peut y en avoir d'autres, je vous en parlerai tout à l'heure; elles sont là pour tout le monde, et, nous, nous privilégions plutôt l'adoption d'un code unique.

Je vous dis au départ qu'il existe, au Québec et au Canada, de nombreux exemples dont on aurait pu et sans doute vous vous en êtes inspirés. J'ai l'impression que le projet de loi est un peu en réaction à des événements qui se sont passés, je dirais, assez localement. On ne parle pas des non-événements, c'est-à-dire on ne parle pas des endroits, qui sont nombreux au Québec... et le principe que nous préconisons, c'est que l'honnêteté prévaut et non la malhonnêteté. On ne parle pas des exemples qui ont eu lieu et qui ont fait boule de neige, mais dans le silence et dans la pratique.

Évidemment, je suis employé de la ville de Québec, mais, si je ne pouvais prendre comme exemple la municipalité, je me tairais, mais je suis quand même assez fier de vous dire que la ville de Québec, vers 1989... C'est le premier mandat d'ailleurs sur lequel j'ai travaillé lorsqu'on m'a engagé. Je venais de Rimouski, je venais d'une région... C'était le mandat du maire L'Allier, c'était de faire un code d'éthique. Et pas parce que ça allait mal du temps de Lamontagne, parce que le maire L'Allier, pour des raisons qui lui sont propres, voulait une administration municipale et des élus au-dessus de tout soupçon. Et la première mouture, si je puis dire, qui est restée sensiblement la même en date d'aujourd'hui, a été faite vers 1990, ça fait au-delà de 20 ans.

**(11 h 40)**

Depuis 20 ans, il y a eu de nombreux maires et mairesses à la ville de Québec -- parfois majoritaires, parfois minoritaires, donc il n'y a comme aucun rapport -- des dizaines et des dizaines de conseillers. C'est une ville quand même assez importante et qui fait son faire-faire, enfin, qui fait tout à l'interne au niveau des contrats notamment, l'adjudication des contrats, et ce qui a été décidé à l'époque, ce n'est pas d'avoir un élément coercitif, que l'on retrouve dans le projet de loi, c'est d'abord d'établir... de rappeler, ne serait-ce que de le rappeler mais par écrit, des règles fondamentales de bonne conduite pour les élus, de se les rappeler non seulement annuellement, mais également de les adopter et en insistant et en forçant les gens, les élus, à déclarer sur l'honneur -- c'était un code d'honneur, le maire l'a toujours dit: C'est un code d'honneur, c'est encore un code d'honneur -- et de rappeler ces règles-là. Et ces règles-là, il y en a sept, en ce qui concerne la ville de Québec, ça ressemble sensiblement au projet de loi. Et il y a des règles d'interprétation qui sont souples, parce qu'il faut aussi avoir une certaine souplesse, pas parce qu'un mot veut dire plusieurs choses, mais ils peuvent avoir des applications différentes, selon les milieux.

Cet exemple-là, qui n'est pas coercitif et qui évite toute la panoplie d'enquêtes, de surenquêtes, de plaintes, et tutti quanti, ce modèle-là, c'était un code sur l'honneur. Ça fait au-dessus de 20 ans... et, vous le savez comme moi, vous lisez les journaux, depuis 20 ans, malgré les maires minoritaires, majoritaires, les décès, et tout, ça a très bien fonctionné, ça a très bien fonctionné parce que c'est entré dans la culture. Quand c'est entré dans la culture chez les élus, ça rentre également chez les employés.

Il y a eu une plainte, à ma connaissance. On a eu des problèmes à Québec, notamment avec les cartels de béton puis de neige. Quand c'est arrivé, on a poursuivi, on a vérifié à l'interne, si tel mandat, pour voir s'il y avait soit des élus, soit des fonctionnaires qui étaient acoquinés, la réponse était non. On les a poursuivis devant les tribunaux, ils nous ont remboursé, et la vie a continué. Chacun des maires, chacun des mandats, chacun des conseillers qui revenait à chaque année devaient produire une déclaration assermentée.

Ça a été et c'est encore une approche, qu'on appelle, de code d'honneur. Aujourd'hui, on fait grand plat de ce qui se passe ailleurs et là on arrive avec un projet mi-figue, mi-raisin, de grandes -- avec respect -- de grandes orientations fondamentales, mais on laisse le soin à des municipalités non équipées, hein, non équipées... Bien, allez aux Méchins, allez où vous voulez, là, à Trois-Pistoles, et tout, ils n'ont pas 30 juristes à leur porte, ils n'ont pas... C'est déjà très complexe, les lois municipales, et on leur demande: Conservez les valeurs fondamentales, mais vous pouvez jouer avec. Alors, je vais avoir ville de Québec avec 30 articles, puis je vais en avoir, tu sais, un autre avec 10, et tout, et il va falloir que quelqu'un examine le tout à savoir si c'est conforme. C'est une approche qui est coercitive et qui aurait pu être différente.

On aurait pu, première des choses, faire entrer -- et l'objectif de la loi est là, il est fondamental -- entrer par écrit, mettre par écrit des valeurs fondamentales applicables à tous. Pour ce faire, on pourrait être un peu plus précis, adopter un code unique pour l'ensemble des gens, avec des règles d'interprétation. Il y a un exemple, vous pouvez aller le voir, je pense que vous le connaissez, les juristes ont dû le voir, ce sont les règles d'éthique applicables à la ville de Québec, qui sont en vigueur depuis 1989.

L'avantage de ça, c'est d'éviter de passer aux autres problématiques de la loi, c'est-à-dire le côté coercitif: qui doit faire qui, tu sais, le principe des plaintes et l'espèce de paranoïa, chez les gens, à l'effet que le monde municipal est un monde dans une ébullition avec un bouillon douteux, ce qui n'est pas le cas, ce qui n'est pas le cas dans la très grande majorité. Alors, c'est ça qu'il faut dire et c'est ça, le message: le principe d'un code d'honneur applicable à tous et semblable à tous aurait été, à notre sens, une démarche plus positive et qui arriverait aux mêmes fins et qui laisse la porte ouverte à d'autres démarches si ça ne fonctionne pas.

Et il y a des recettes, je vous le répète, et cette recette-là a été appliquée non seulement par la ville de Québec, par d'autres villes qui ont appliqué le même code que celui de la ville. Alors, l'idée de la loi, ne serait-ce que pour la multitude de codes, ne nous semble pas une très bonne idée, et c'est un terreau fertile pour les tribunaux, comme nous l'avons mentionné.

Le deuxième élément, c'est la protection d'un dénonciateur. C'est beau, dénoncer, et je comprends qu'on ne peut pas dénoncer n'importe comment, il faut éviter, et la loi le prévoit, les dénonciations vexatoires, futiles, etc., mais qu'est-ce qu'on a pour protéger les dénonciateurs? Alors, évidemment, quand ce sont des journalistes, ils bénéficient de leur droit à l'information et leur obligation d'informer. Mais, quand ce sont, par exemple, les employés ou les cadres... enfin, les cadres comprenant, tu sais, les employés évidemment, qu'est-ce qu'on a comme mesure de protection? Nous sommes tous liés par des codes internes de loyauté, de confidentialité, d'obéissance. Et, quand les employés sont au coeur, sont témoins au coeur de malversations, lorsqu'il y en a, ils sont pris entre le désir de le dénoncer, mais évidemment ils savent que leur emploi est en jeu. Alors, il n'y a rien... On veut favoriser ça, mais on ne protège pas les dénonciations. Là, je parle ici de dénonciations franches, honnêtes, assermentées, documentées. Ça, la loi évidemment le prévoit.

L'autre parti, c'est le dénoncer au ministre. Je pense qu'il y en a d'autres qui vous en ont parlé avant. Je pense que c'est une très mauvaise idée. Les ministres seront... Dès qu'on tombe sur une analyse faite par un politicien, on ouvre la porte à des reproches. Et, quelle que soit sa décision, elle sera ou partisane ou non. Tu sais, partisane, je pense qu'il y a déjà suffisamment de problèmes comme ça, au Québec, sans mettre les politiciens en plein coeur d'un débat, tu sais, qui est inutile. Donc, le forum approprié devait être quelqu'un d'autre, que ce soit un commissaire, un commissaire à l'éthique, une personne neutre et qui va avoir suffisamment de pouvoir.

L'autre aspect, avant de parler des employés... de boucs émissaires, c'est la sanction par les pairs. Nous pensons que c'est une très mauvaise idée, également. C'est difficile pour un pair de sanctionner un autre pair. Vous avez des conseils qui sont majoritaires, ça sera aussi difficile pour eux de le faire. Vous avez des conseils minoritaires où la décision serait teintée de partisanerie.

Écoutez, si vous faites confiance à celui ou celle, enfin, ou l'organisme qui va analyser les plaintes, donnez-lui... et qui doit enquêter, qui doit faire un travail honnête et compétent, bien, il rend une décision. Quand je reçois une décision de la Commission municipale, je reçois une décision de la cour, il y a eu une enquête, et j'applique la décision. Je n'ai même pas besoin de l'appliquer... On n'a même pas besoin de dire aux gens: Veuillez l'appliquer. La loi devrait prévoir que la décision est applicable, point à la ligne. Pourquoi demander... pourquoi obliger un conseil à servir tout simplement de caution morale à... Alors, ça va éviter le questionnement et le mal à l'aise des membres du conseil, en disant: Oui, mais, moi, je n'ai pas vraiment toute la lumière.

Alors là, si on leur donne toute l'enquête, là ça devient public et ça devient une espèce de bouillon, vous vous engagez dans un foisonnement de bouillonnement de dénonciations intempestives. Je vous le répète, l'aspect coercitif qui a été pris dans l'orientation n'est pas, à notre sens, le meilleur. C'est l'ouverture à un foisonnement de dénonciations, de plaintes, d'interprétations devant les tribunaux, de vérifications, tu sais, des codes.

Il me semble, et je répète encore qu'un code sur l'honneur, encadré dans une loi et complet pour tous, arriverait dans d'aussi bons résultats, en partant de la présomption que les élus ne sont pas des bandits mais qu'ils peuvent fauter. Et on donne des guides pour éviter les ornières. Ça sert à ça, un code d'éthique; et ça a servi avec succès, depuis plus de 20 ans, dans la capitale. Je me demande pourquoi il y a tant de presse, ou il y a une espèce de peur. Est-ce qu'on veut... On n'a pas à satisfaire la population, on n'a pas à punir l'ensemble pour une situation particulière, on a à ramener et servir de guide. Alors, ce qu'on demande au gouvernement, dans le fond, c'est de servir de guide, et cette première étape là serait peut-être la meilleure.

Et, en ce qui concerne les employés boucs émissaires, bien, dans l'item 3, nous suggérions que, d'autant que vous alliez dans votre idée d'un projet qui est coercitif, il faut permettre à quiconque... Alors, toute personne, étant un élu autant qu'un employé, bien, a le droit de se plaindre de bonne foi, on le sait, d'une situation contraire au code d'éthique. Mais, ce faisant, elle ne peut être sanctionnée ou poursuivie. Parce que, soyons réalistes, là, et tous ceux qui ont le sens pratique et qui ont déjà vécu, comme conseillers, qui ont été maires d'une municipalité, quand arrive un événement contraire au code d'éthique, il y a ostracisation des employés, sinon on les met dehors.

Récemment, on a eu une problématique, à la ville de Québec, qui concernait, mettons, le directeur général -- je ne répète que ce qu'il y a dans les journaux. La réaction: au lieu de faire enquête quant à un manquement possible au code d'éthique -- possible, j'ai bien dit -- la réaction des élus et de la direction, c'est: Qui a dévoilé cette source confidentielle, qu'on considère confidentielle? On vous demande de ne rien dire de ce qui se passe, et là on recherche les employés pour pouvoir, évidemment, soit les... Alors, on tourne en rond. Alors, si on n'a pas de protection pour une affaire aussi bénigne, alors vous vous imaginez, et on multiplie par 1 100, multiplié, tu sais, par tous les employés à la grandeur du Québec, si on n'a pas de protection, ça ne sert à rien de mettre trop en place des éléments pour permettre la dénonciation, bien, en fait, pour permettre de faire ressortir les éléments fautifs qui sont, tu sais, qui sont contraires à l'esprit, l'orientation que veut donner le gouvernement à savoir bonne conduite et respect pour tous.

Alors, l'objectif, si c'est vraiment, au départ, d'orienter le débat et d'informer les principaux intéressés. Je pense que la meilleure des choses, premièrement, ce n'est pas d'avoir 1 100 codes, c'est d'en avoir juste un, avec un guide d'interprétation souple, comme ça a été fait anciennement à la ville de Québec, et qui est encore en vigueur depuis là, de 22 ans.

Pour ce qui est...

**(11 h 50)**

Le Président (M. Morin): ...à conclure, M. Lavallée.

M. Lavallée (Denis): Oui. Alors, ça concluait. Quand je disais pour les employés boucs émissaires, je suis un peu surpris de retrouver dans la loi que, pour les employés, on parle de congédiement, alors que, pour les élus, il pourrait y avoir la remise d'un don, etc. Ça fait comme un petit peu un poids, deux mesures, mais, encore une fois, l'important, c'est un seul code et, si possible, non de façon coercitive.

Le Président (M. Morin): Merci, M. Lavallée. M. le ministre.

M. Lessard: Merci beaucoup, M. Lavallée, d'être venu au nom de l'Alliance des professionnels de la ville de Québec. C'est drôle, dans votre présentation, vous m'aviez convaincu que ça ne prenait pas une loi pour avoir un code parce que c'est une culture. En fait, tantôt, M. Villemure, de l'Institut québécois d'éthique, est venu le dire: C'est une démarche. Vous l'avez prouvé, M. le maire L'Allier, croyant ça, la ville se l'est dotée, alors qu'il n'y a pas de loi qui obligeait d'avoir un code d'éthique et de déontologie. Il l'a fait par adhésion puis il l'a fait renouveler.

Puis tous les gens qui sont venus à sa suite ont adhéré à ces valeurs-là et l'ont appliqué. C'est vrai qu'on n'en a pas entendu beaucoup de la ville de Québec sous cet aspect-là dans les 20 dernières années, puis ce que disait M. Villemure, c'est probablement ça qu'on veut aussi, c'est qu'en général on pense qu'ils font bien, puis ils suivent des règles, des valeurs en fonction de normes et... Et c'est une démarche d'adhésion. Alors, la loi, avec un code obligatoire, ça ne crée pas un comportement éthique. Tu sais, il semble... Moi, ils m'ont quasiment... puis vous m'avez convaincu, pendant les sept premières minutes de votre plaidoyer, de ne pas avoir un contenu obligatoire, parce qu'obligatoire c'est trop facile, je n'ai même plus besoin de me questionner: je suis a, b, c; bon, on en a un, code; mettez ça.

Montréal avait un code d'éthique. Imaginez-vous s'ils n'en avaient pas eu! Ce n'est pas parce qu'ils avaient un code ça d'épais, mais heureusement qu'il y avait un code ça d'épais, d'une certaine façon, puis probablement qu'ils en faisaient. Puis là, avec tout ce qu'on a entendu, il y en a qui s'en étaient quand même assez éloignés, peut-être, si les comportements rapportés sont vrais.

À la fin, quand quelqu'un faisait défaut au code d'éthique... à Québec, on n'en a jamais entendu parler, mais qui c'est qui donnait la sanction et... Est-ce qu'il y avait une sanction, là?

M. Lavallée (Denis): C'était très simple: si un employé ne respectait pas le code d'éthique, dans les conventions collectives il y a une phrase, assez forte...

M. Lessard: Pour les employés, ça, c'est assez clair.

M. Lavallée (Denis): Et, en ce qui concernait les élus, c'était amené au conseil et on questionnait la personne et...

M. Lessard: Oui. Oui, c'est ça. Bien, voyez-vous, c'est ce que la population ne veut plus, hein...

M. Lavallée (Denis): ...il donnait ses explications.

M. Lessard: ...la tape sur la main, ils n'en veulent plus, de ça.

M. Lavallée (Denis): Pardon?

M. Lessard: La théorie de la tape sur la main, ils n'en veulent plus. Ils disaient: L'élu, vous, vous êtes dehors... L'employé est dehors, hein? Pour un manque à l'éthique, lui, il est dehors.

M. Lavallée (Denis): Bien, pas nécessairement, là.

M. Lessard: L'élu, lui, ça prend un dépôt; on veut l'encadrer. Il y a un nouveau processus, que vous dites, c'est peut-être deux poids, deux mesures: l'élu est dehors... l'employé est dehors, puis l'élu, il pourrait être suspendu. Mais il y a d'autres recours de requête en habilité aussi: il pourrait perdre son siège. Mais on a vu... Puis, en général, ils doivent assumer... lui qui dénonce puis qu'ils doivent assumer les frais pour une requête en inhabilité, etc., à moins que le Procureur général prenne sur lui d'entamer la procédure.

Mais, depuis le début que j'ai entendu les éthiciens tantôt parler, ou M. Saint-Martin, l'enseignant à l'université, qui disait: La démarche -- l'appropriation -- la démarche est plus importante que le résultat de l'avoir. Donc, on prévoit une démarche, et vous devrez en avoir un. Il y a un contenu obligatoire, moi, j'en conviens parce qu'on est, je pense, encore jeunes dans cette culture éthique là et des valeurs auxquelles on adhère. Il y a beaucoup de formation à faire, autant du côté éthique que du côté déontologique, là. J'ai bien compris le côté entre la loi puis ceux qui prêchent les valeurs. Deuxièmement, ils devront le renouveler après des élections, donc pour les nouveaux, etc., puis ils devront avoir de la formation, tout au long, en l'espèce, avec les unions.

Moi, ça ne m'inquiète pas, là, que Saint-Irénée-de-Matane... Saint-Ulric-de-Matane soit une plus petite municipalité par rapport à vous, c'est les mêmes valeurs d'honnêteté, etc. Et on travaille avec les unions municipales. Quand même, les unions ont quasiment plus de 100 ans chacune, on a développé ensemble, depuis le début, pour la formation de codes, là... Tantôt, ils disaient: Bien, un contenu obligatoire, ça va, puis il y aura des particularités pour d'autres, compte tenu des sensibilités locales ou régionales. Donc, on travaille avec les unions, rassurez-vous.

Je voulais vous rassurer, les deux unions municipales vont offrir quelque chose à leurs municipalités en général, ce qui va faire qu'on va être capables d'atteindre une certaine homogénéité dans l'ensemble, puis en augmentant le contenu obligatoire, ça, je l'entends bien de votre part, mais on se ne rendra pas. Moi, je pense que j'ai atteint la conviction, après le nombre, que d'imposer un code: trop facile. Trop facile, parce que la démarche d'appropriation est plus importante que l'adoption de son propre code. Et le fait que le conseil devienne aussi le gardien de ses propres valeurs et ait un suivi de mise à jour est aussi important. Ça fait partie de la formation de maintenir à jour, là, ce code-là et de le revoir au besoin si les pratiques ont changé.

Quant au traitement maintenant des plaintes, bon, évidemment, est-ce que ça devient une décision, bon, le traitement, recevoir, on voit la futilité tantôt entre le populisme -- vous avez assisté un peu à la présentation des deux éthiciens avant -- entre le populisme puis la démocratisation, qui porte plainte. Si c'est un employé municipal, a-t-il droit à la confidentialité? A-t-il droit de ne pas se faire poursuivre même si c'était vexatoire ou futile? Il y a d'autres lois sur la diffamation qui existent aussi concernant les gens mal intentionnés. Si les recours ou la nature... Il y a d'autres lois, hein, que... criminel, on l'a rappelé, quelqu'un qui pense avoir de l'information que quelqu'un a trompé, il peut appeler la police, aussi; là, il est protégé. Mais, si c'est très, très, très proche, du fait de sa position, qu'il est la seule personne qui pouvait savoir ça, nécessairement ça met beaucoup de pression sur l'employé qui est pogné avec ça. Alors donc, il y a tout un regard à jeter là-dessus.

Quant au fondement d'en faire une, je pense, c'est nécessaire. Quant à la destination de la décision, là, est-ce que les pairs peuvent, donc le conseil municipal, adjuger à nouveau d'une décision ou d'une recommandation du conseil, on essayait de se coller le plus possible à ce qui se faisait sur 48 concernant les employés... les élus provinciaux. Maintenant, d'aucuns sont venus nous dire: Imposez-le, il n'y aura plus d'autre question; puis, peu importe la formation, majoritaire ou minoritaire... C'est sur, chez vous, il n'y aurait pas de problème, ils sont majoritaires ou minoritaires, il n'y a pas de sanction légale, nécessairement. Même si on le questionnait, il peut toujours se débattre, mais, à la fin, il n'y a pas une sanction d'avoir à dire: Bien, j'appose une sanction ou pas. Alors, le conseil, majoritaire ou minoritaire, n'a pas eu à se prononcer sur... pas la destitution, mais la suspension d'un de leurs collègues en période d'exercice. S'il y avait eu les pouvoirs d'aujourd'hui, majoritaire ou minoritaire, on aurait vu peut-être une certaine jurisprudence chez vous qui aurait été portée à l'attention du public.

M. Lavallée (Denis): Oh oui!

M. Lessard: Alors, moi, j'entends vos recommandations, mais vous m'avez presque convaincu que la démarche d'appropriation était aussi importante que le code lui-même. Mais je ne pense pas qu'il y aura un code imposé aux municipalités, je recherche l'adhésion, la responsabilisation, mais je suis sensible à votre élément d'augmenter le contenu obligatoire, à tout le moins, si on ne devait va se rendre à ce code-là.

Le Président (M. Morin): Oui. M. Lavallée, avez-vous...

M. Lavallée (Denis): Pas du tout.

Le Président (M. Morin): Ça va?

M. Lavallée (Denis): Oui.

Le Président (M. Morin): Est-ce que vous avez terminé, M. le... Oui?

M. Lessard: Oui, j'ai terminé, moi...

Le Président (M. Morin): M. le député de Blainville, porte-parole officiel en matière municipale.

M. Ratthé: Merci, M. le Président. M. Lavallée, bienvenue.

M. Lavallée (Denis): Merci.

**(12 heures)**

M. Ratthé: Intéressant de recevoir... On a reçu les élus municipaux, hein, de la ville de Québec et puis on vous reçoit aujourd'hui au niveau des professionnels, et ce que je trouve intéressant dans votre démarche...

Et ce sera peut-être ma première question. Juste avant vous -- vous étiez là d'ailleurs -- on nous mentionnait, notre éthicien, nos deux éthiciens spécialistes nous disaient: Écoutez, le rôle du commissaire à l'éthique ou de la personne, là, qui sera choisie -- je pense qu'on est en train de débattre comment ça va se passer -- n'est pas seulement un rôle de sanction, mais un rôle aussi de faire la promotion, de faire comprendre c'est quoi, l'éthique, de changer la culture, d'aider... Parce que, vous le dites bien, il y a une adhésion à faire. On peut bien avoir un code d'éthique qui a 100 pages, si personne n'y adhère, ça ne changera pas grand-chose.

Et je voyais, vous nous avez démontré, vous l'avez devant vous, que vous avez... on va appeler ça une plaquette, hein, vous avez quelque chose qui a été publié, votre code d'éthique est là, déontologie. Est-ce que justement la ville de Québec se... Est-ce que ça a été diffusé de façon plus large qu'au conseil municipal? Est-ce que, par exemple, la population de Québec sait que ce code-là existe, s'y réfère? Est-ce qu'on en fait un peu la promotion? Est-ce que...

M. Lavallée (Denis): Il y a eu beaucoup de... Au départ, il y a eu beaucoup de publicité, chacun des élus s'en est, entre guillemets, vanté. Il est disponible dans tous les bureaux d'arrondissement, disponible partout où il y a des brochures municipales, c'est connu de façon générale à la ville de Québec, évidemment. Quand il a été adopté, il y a eu beaucoup de demandes d'autres municipalités, je me souviens de Rimouski notamment, je me souviens d'autres municipalités canadiennes, et évidemment il y a des échanges avec le greffe. Mais on a moins besoin de publiciser lorsque l'exemple vient d'ailleurs et lorsque c'est une culture, évidemment. On a besoin d'un peu plus de publicité lorsque la culture est plus absente. Ça ne veut pas dire que, dans la pratique, ce ne l'est pas, mais la culture de se rappeler un peu son catéchisme.

M. Ratthé: Oui. C'est intéressant parce que ça vient un peu... Vous démontrez par l'exemple, là, qu'effectivement, pas uniquement de mettre en place un code d'éthique et un code de déontologie, mais d'en faire la promotion, de s'assurer qu'il y a une adhésion. Et je penche de plus en plus, moi aussi, à savoir... On s'est beaucoup questionné, hein? Vous nous amenez l'avenue d'avoir un code unique, d'autres, comme ce matin, on parlait d'une ossature beaucoup mieux structurée, on nous a parlé d'un canevas, on nous a parlé... Et je penche de plus en plus à l'idée, et surtout avec ce qu'on entend ce matin, d'avoir dans notre projet de loi -- on va pouvoir en discuter plus abondamment quand on arrivera dans l'article par article -- mais d'avoir une meilleure définition de, par exemple, ce que c'est que l'honneur, ce que c'est que la loyauté, bonifier la notion peut-être d'apparence de conflit d'intérêts, je pense que c'est ce qu'on entend beaucoup, là. Donnez-nous une meilleure compréhension de tout ça. Et ça pourrait être très bonifié, puis ça pourrait devenir à ce moment-là peut-être le tronc unique, l'ossature mieux saturée de ce que... au moins une source, un élément qui pourrait dire: Bien là, on va venir, j'allais dire, greffer la couleur locale ou l'adapter mieux. Mais je pense que... Et ce que vous nous dites aujourd'hui, bien, c'est peut-être un peu plus que vous souhaiteriez qu'il y ait un code unique, puis, moi aussi, j'ai soulevé beaucoup ce point-là.

Mais je me demande... Même à ce moment-ci, surtout avec tout ce qu'on a entendu, c'est... Oui, je pense qu'il va falloir qu'il y ait un modèle, qu'il y ait une structure qui va être assez semblable, là, dans sa base. Mais effectivement, comme l'aspect appropriation, comme l'aspect d'adhésion est important, je pense qu'il faudra laisser peut-être un peu cette couleur locale au soin des municipalités. Puis je suis peut-être porté à croire, mais on va voir, là, que peut-être il n'y aura pas nécessairement 1 100 codes, je pense que les unions ont commencé à nous dire: Bien, peut-être qu'on aura des modèles de référence.

Mais où je m'interroge beaucoup... En fait, je trouve ça intéressant, ce que vous nous présentez actuellement, c'est effectivement la longue expertise de la ville de Québec. Vous nous parlez d'adhésion, vous parlez d'un changement de culture, vous nous parlez de promotion, hein, du code qui a été mis à la disposition. Et ça, je trouve ça drôlement intéressant parce que ça apporte un angle nouveau, que le code n'est pas nécessairement qu'une référence en forme, en ce qui a trait aux sanctions, j'allais dire.

Vous apportez à la page 3, puis je voulais vous... C'est plus une question à ce moment-ci. À la page 3, vous nous dites qu'il y a une forme de protection qu'il faut apporter, j'allais dire, aux gens qui portent plainte. Vous n'êtes pas le premier organisme qui nous en parle, je pense qu'il y a également l'Association des professionnels, là, qui est venue nous parler de la même chose. Les syndicats des employés municipaux nous disent: Écoutez, il faut protéger, parce qu'il y a un lien proche, hein, il y a un lien. Par exemple, entre un directeur général et son maire, il y a un lien qui est propre, hein? Il y a des notions de loyauté. Envers qui on est loyal? Est-ce qu'on est loyal envers les élus municipaux, parce que l'administration municipale travaille de très près avec eux, ou, si on se rend compte qu'il y a un manquement à l'éthique... On est souvent un petit peu pris entre deux feux, si on peut dire, et on nous mentionnait même que souvent on se rend compte que, bien, il y a des gens qui prennent congé quand la pression est trop forte, quand on est tiraillé, bien, on prend un congé de maladie, parce que la pression est trop forte, le stress. Alors, il y a une indisposition qui est là.

Vous nous dites: Écoutez, il faudrait prévoir, entre autres, un mécanisme de protection. Et je me demande, je vous pose la question: Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir dans la loi une présomption qui dit que, s'il y a une sanction qui est prise très près d'une plainte, la loi pourrait présumer qu'il y a un effet, là, de malversation de la part de la direction ou de l'élu face à... ou qu'il y a quelque chose qui est fait face au dénonciateur en tant que tel?

Alors, je me posais la question, à savoir: Est-ce qu'effectivement il ne devrait pas y avoir une présomption à l'effet qu'une sanction qui survient juste après une dénonciation est liée à cette dénonciation, puis que ça pourrait être une bonne forme de protection? Je ne sais pas si je suis assez clair, si vous me comprenez, là, dans...

M. Lavallée (Denis): Oui. Je vous suis très bien. C'est comme l'emballage des médicaments un peu, là. Le médicament étant davantage la protection. Et que vous rajoutiez une présomption à l'effet qu'une sanction, quels que soient les termes, est une indication que... Oui, les deux, mais juste ça, c'est comme une grosse plaie avec une petite gaze qui vole au vent. Ce n'est pas dit, là... Je vous le dis avec respect, là, mais juridiquement, ce n'est pas fort, fort, fort puis c'est un frein...

M. Ratthé: En fait, il faut que ça s'ajoute à l'interdiction. Ce n'était pas un versus...

M. Lavallée (Denis): O.K. Oui, oui. Je pense que, oui, si ça s'ajoute, ça complète parfaitement...

M. Ratthé: Oui.

M. Lavallée (Denis): Mais juste un sans l'autre, c'est comme si... C'est ça, l'infirme ne suit pas la canne, ni la canne l'infirme. Alors, c'est un duo ou un solo, mais ce solo-là tout seul, non, pas vraiment.

M. Ratthé: Est-ce que vous avez eu le temps de penser, même basé sur votre expérience, à quel genre de mesure pourrait être mise en place justement pour protéger... vous parlez de protéger...

**(12 h 10)**

M. Lavallée (Denis): J'avais donné comme exemple, mais c'est une suggestion, nous n'avons pas de... C'est une suggestion amicale. C'est au paragraphe... article 3, à la page 3: «Toute personne a droit de se plaindre de bonne foi...» C'est important, la bonne foi, parce que je comprends qu'elle se présume, là, mais il faut insister, parce que les gens ne savent pas, tu sais, quelle se présume, puis il y a des idées des fois malveillantes. Alors: «Toute personne a droit de se plaindre de bonne foi d'une situation contraire au code d'éthique et de déontologie. Ce faisant, elle ne peut être sanctionnée ou poursuivie.»

Alors, ce faisant, dans cette démarche-là, il y a une autre obligation qui est prévue par la loi, qui est importante, c'est-à-dire que la démarche doit être assermentée, documentée, ne pas être vexatoire, et tout. Ça, c'est parfait. Mais il manque cette protection-là, parce que je peux bien dire: Toute démarche ne doit pas être vexatoire. C'est bien beau de le dire, mais une fois que j'ai fait la démarche de façon non vexatoire, non futile, documentée et assermentée, une fois que j'ai fait ça, c'est le sens commun que l'employé, à quelque niveau que ce soit, qui est l'initiateur d'une dénonciation va le payer. C'est automatique.

S'il faut être pratique, là, que ce soit une petite municipalité ou une grande municipalité, alors il va être rejeté par ses pairs, on va le soupçonner, on va faire une enquête royale sur lui et on va faire comme certaines décisions maladroites, des déclarations maladroites: Je veux savoir qui est la source, au lieu de s'attaquer au problème. Alors, s'il n'y a pas de protection, alors qu'est-ce qui va rester? Un grand principe de dénonciation, et un journaliste qui va recevoir une déclaration anonyme, ou une démarche qui est contraignante, parce qu'il faut contraindre les personnes qui se plaignent à être non seulement de bonne foi, à enlever ce... C'est pour éviter, tu sais, la suspicion. Autrement dit, quand on fait une dénonciation, on la fait à visage découvert, découvert, parce qu'on va voir une personne nommée par le gouvernement et on doit... on impute sa décision en s'assermentant, en agissant, entre guillemets, publiquement. Et alors on va éviter les petites plaintes anonymes, puis là ça passe par les journalistes, et là on voit les bandes défilantes, comme disait le ministre, et là c'est parti. Alors, en donnant cette protection-là et en exigeant évidemment, comme le prévoit, tu sais, la loi, que ce ne soit pas vexatoire, on oblige les gens à agir, entre guillemets, à visage découvert, de façon franche et entière, parce que l'intérêt... tu sais, on parlait de loyauté, et tout, là, l'intérêt de tout le monde...

Moi, je travaille, ça fait plusieurs années que je travaille à la ville de Québec, depuis 1988, j'ai toujours dit, j'ai toujours répété devant tous les maires, puis quel que soit le chapeau que je porte, comme avocat ou comme président du syndicat: Mes clients, c'est l'ensemble des contribuables de la ville. On est au service de l'ensemble des contribuables, c'est ça, l'ensemble des contribuables qui élisent des élus, et tout. Mais le bien commun, lorsqu'il y a un problème de malversation pour adjudication de contrat, par exemple, qui coûte plus cher qu'il ne devrait coûter, ce n'est pas moi qu'on blesse, ce n'est pas les élus, c'est l'ensemble des contribuables. Une corporation municipale, c'est un ensemble, c'est un ensemble de gens qui est constitué en corporation. Alors, le client étant toujours là, c'est... Tu sais, des fois, on se demande à qui on doit être loyal. Au départ, à l'ensemble; après ça, on suit les règles, lorsqu'il y a des règles. Évidemment, quand tu te mets trop le doigt, puis que tu dénonces une situation, puis que tu te fais congédier, bien, évidemment, c'est... Alors, c'est pour ça qu'on demande évidemment... C'est beau, l'encadrer dans la loi, il faut donner un minimum de protection.

M. Ratthé: Oui. C'est pour ça que, tantôt, je vous mentionnais... Bien, probablement que la combinaison de l'interdiction...

M. Lavallée (Denis): Exactement.

M. Ratthé: ...et de la présomption est fort intéressante.

M. Lavallée (Denis): Tout à fait.

M. Ratthé: Il y a une autre notion qui nous a été apportée. Vous nous parliez que, quand on est dénonciateur puis qu'on va devant le commissaire ou qu'on va au ministère, dépendamment du processus qui aura été mis en place, bon, il y a tout un processus pour démontrer le sérieux de notre plainte. Vous dites: On va devant le commissaire, donc on le fait à visage découvert. Et vous apportiez la notion aussi que, même s'il y avait une protection dans la loi, il y a toujours la relation humaine, hein? Vous disiez tantôt: Bien là, les gens qui travaillent avec nous vont commencer à nous regarder puis il va peut-être y avoir une distance.

Et là, moi, je vous apporte la notion, on nous en a parlé quand même passablement, d'une certaine forme d'anonymat au départ, tout en ayant un mécanisme serré de contrôle sur la véracité de la plainte ou sur sa recevabilité, j'allais dire. Les gens nous disaient: Bien, jusqu'à temps qu'on ait prouvé que cette plainte-là soit fondée, il devrait y avoir un mécanisme d'anonymat pour ne pas que justement... On va assumer que la personne fait une plainte de bonne foi, mais qu'en bout de ligne on se rend compte que finalement elle n'est pas vraiment fondée, on nous dit: Bien, si c'est le cas, puis que c'est connu qu'on a fait une plainte, puis que ça s'avère n'être pas fondé, bien, il y a un manque aussi au niveau de la protection de la personne qui dénonce. Alors, je voudrais peut-être vous entendre aussi là-dessus.

M. Lavallée (Denis): Bien, la clause que je vous ai lue répond à votre question.

M. Ratthé: C'est ça.

M. Lavallée (Denis): Alors, à ce moment-là, toute personne a le droit de se plaindre de bonne foi d'une situation contraire au code. Ce faisant, elle ne peut être sanctionnée ou poursuivie. Parce qu'effectivement, vous avez raison, il peut arriver que la plainte étant portée, elle n'est pas vexatoire, elle n'est pas futile, mais elle n'est pas retenue, hein, elle n'est pas retenue, parce qu'il y a des règles de preuve fondamentales dans la vie, là, tu sais, ça peut avoir du bon sens, ce que je dis, je peux être sincère puis je peux être assermenté, mais, si on n'est pas capable de le démontrer, est-ce que le commissaire... C'est la même situation qu'un juge: les deux parties ont l'air crédibles, parce que déjà là on recherche pour miner la crédibilité, si on peut, etc., mais, quand deux parties ont l'air crédibles ou une version a l'air crédible, mais je ne peux pas la démontrer, bien, le recours ne sera pas accueilli. Alors...

M. Ratthé: Je comprends bien votre proposition en disant: Ce faisant, elle ne peut être sanctionnée ou poursuivie. Mais, à mon sens, et corrigez-moi si ma compréhension n'est pas là...

M. Lavallée (Denis): C'est que vous voulez que ce soit anonyme.

M. Ratthé: Oui. C'est qu'au départ on dirait: Bien, moi, si, bon, je pense que j'ai une plainte qui est bien fondée, je veux me plaindre contre mon maire parce que je pense qu'il a posé un geste qui, à mon sens... parce que tantôt on parlait des valeurs, à mon sens, des valeurs, ce n'est pas éthique.

M. Lavallée (Denis): Alors, vous voulez dire...

M. Ratthé: Ce qui m'empêche de le faire, c'est qu'il va savoir que je viens de déposer une plainte, puis je préférerais, avant qu'il le sache, qu'on me dise si ma plainte est fondée ou pas, tu sais, c'est un peu ça, là.

M. Lavallée (Denis): Ce que vous voulez, c'est que son identité reste protégée. En fait, c'est ça, c'est ça.

M. Ratthé: En fait, l'identité restera protégée jusqu'à... Évidemment, si c'est fondé, évidemment, l'identité de la personne devra être...

M. Lavallée (Denis): Voilà, c'est ça.

M. Ratthé: Et je pense que ça serait une mesure additionnelle intéressante, en tout cas.

M. Lavallée (Denis): Alors, durant l'analyse... Tout à fait, c'est ce qu'on appelle bonifier, tu sais, un texte. Si son anonymat est protégé durant l'enquête.

M. Ratthé: Bien, écoutez, moi, je... Ça complète mes questions. Je trouve drôlement intéressant, là, qu'on ait eu l'opportunité à deux reprises de pouvoir regarder ce qui se fait dans la ville de Québec et ce qui s'y fait depuis plusieurs années. Je pense que, M. le Président, ce serait intéressant que les membres de la commission, on puisse avoir peut-être une copie de votre plaquette, là, qui est disponible assez facilement.

M. Lavallée (Denis): Oui, je vous le laisse. O.K.

M. Ratthé: Alors peut-être qu'on pourrait le laisser puis qu'on pourrait avoir des copies, qu'on puisse s'y référer. Ce sera sûrement quelque chose de fort intéressant pour nous de regarder comment les choses ont été faites. Je ne sais pas si, de votre côté... En ce qui me concerne, M. le Président, moi, c'est complet. Peut-être mon collègue...

Le Président (M. Morin): Merci, M. le député de Blainville. Je crois que M. le député de Berthier...

M. Villeneuve: Oui.

Le Président (M. Morin): Oui, allez-y.

M. Villeneuve: Merci, M. le Président. Alors, d'abord bonjour. Bonjour. Et peut-être le dire et le redire, parce que je pense que ça vaut la peine, là, on comprend tous ici, à cette commission, que la très, très grande majorité des élus du Québec, des citoyens d'ailleurs agissent tous de façon naturelle de bonne foi, agissent tous de façon naturelle, ont tous, d'une certaine façon, un code d'éthique en soi. Je pense que c'est indéniable. Et effectivement il y a quelques cas qui nous ont obligés à aller vers un code d'éthique. D'une certaine façon, moi, pour avoir vu des gens être obligés de démissionner ou perdre leur poste d'élu par manque d'information -- et pas de mauvaise foi, là, manque d'information -- manque justement de repères, ont commis des gestes qui effectivement s'avéraient, là, condamnables, malheureusement pour eux, là, mais ce n'était pas de mauvaise foi qu'ils les ont posés.

Donc, d'avoir un code, comme disait mon collègue, un corps quand même très, très complet, un code d'éthique, de déontologie très complet pour l'ensemble des élus du Québec, je pense qu'on peut y souscrire bien évidemment.

Moi, j'aimerais parler avec vous, si vous me permettez, là, parce que, dans votre mémoire, vous dites notamment à la page 3: «la retenue d'un filtre -- le ministre -- qui ne devrait pas être un politicien...» La retenue d'un filtre, donc. Ce que je comprends aussi, de la part de plusieurs intervenants, c'est que l'adage dit: On n'a pas une deuxième chance de faire une première bonne impression. On a vu aussi, dans certains mémoires, nous dire qu'on doit s'assurer que, dans ce projet de loi là, lorsqu'il deviendra une loi, qu'on tente d'éliminer le plus possible l'influence du politique, la partisanerie. Hein? Bon. Et qu'il y ait le moins de zones grises possible.

Moi, j'aimerais vous entendre sur le fait, et ça a été relevé par Mme Harel, par le Commissaire au lobbyisme... au niveau de la Commission municipale. Parce que vous dites aussi... puis je pense que c'est l'avis de tout le monde qui sont venus ici, à savoir que la Commission municipale, elle a une très bonne réputation. Ça, il faut le dire, il faut le dire. Par contre, on sait aussi qu'à la Commission municipale il y a des nominations politiques qui se font. Moi, j'aimerais vous entendre sur cet aspect-là, sur...

M. Lavallée (Denis): Sur le côté d'une nomination politique de la Commission municipale?

M. Villeneuve: Oui, sur le fait que la Commission municipale...

M. Lavallée (Denis): Alors, j'aurais des déclarations à faire. Mais là c'est une blague.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Villeneuve: À moins que vous ayez perdu la mémoire.

M. Lavallée (Denis): C'est une blague. Oui, oui. Alors, si c'est approprié que la commission puisse agir même si elle est... bon, j'ai beaucoup de réserves là-dessus. Je suis personnellement à l'aise avec... Vous savez, la Commission municipale, au cours des 20 dernières années, a eu à enquêter sur des sujets pas toujours jojos et qui impliquent des élus, qui impliquent des sujets très variés. On a tendance d'ailleurs à se servir de la commission en disant: Écoutez, la Commission municipale... tu sais, on lui donne.

À ce que je sache, ça n'a jamais causé de problème, et puis je... Alors, n'ayant jamais causé de problème, lorsqu'une recette fonctionne, alors... C'est parce que tant qu'à ça je vais dire: Si je dis qu'à la Commission municipale on devrait faire attention étant donné que, je devrais le dire à peu près à tous les autres tribunaux ou quasi-tribunaux. Alors, c'est un gouffre sans fin. Est-ce qu'il y a un problème à la Commission municipale côté pratique? Vu de mon côté, du côté municipal, disons, il n'y en a jamais eu. Alors, il s'agit de trouver la bonne personne à la Commission municipale qui va être aguerrie cependant, qui va avoir la formation requise au niveau de l'éthique, au niveau des règles d'enquête, et tout.

Lorsqu'on fait affaire avec la Commission municipale ou d'autres organismes comme celui-là, lorsqu'il arrive un sujet plus pointu, par exemple une taxation ou un autre sujet, on essaie de mettre sur le banc des gens qui sont au minimum formés et qui ont un intérêt. Alors, c'est évident, moi, le seul bémol que je mettrais, c'est sûr qu'à la commission ça prend quelqu'un qui s'y connaît en règles de preuve, en enquête, en éthique et qui est également, entre guillemets, capable un peu de percer des coeurs, hein, et, pour ça, il faut avoir beaucoup d'empathie, d'écoute, et il faut avoir quelques petites techniques puis il faut avoir un petit peu d'expérience. Alors, la bonne personne au bon endroit.

Puis, à la commission, le fait que la personne... D'abord, premièrement, elles ne sont pas nommées par les municipalités, elles sont nommées par le gouvernement. Alors, déjà en partant, compte tenu qu'on traite du monde municipal, ça ne cause pas vraiment de problème. C'est mon point de vue.

**(12 h 20)**

Le Président (M. Morin): Il reste encore quelques minutes, M. le député de Berthier.

M. Villeneuve: Oui. Bien, je vous soulevais la question étant donné que, dans votre mémoire, vous faites expressément référence au fait qu'il y a donc cet aspect... il y a donc... toujours à la page 3: «Il y a donc sur cet aspect deux problèmes...»

M. Lavallée (Denis): Oui. Tout à fait. Alors, je vous suis.

M. Villeneuve: Donc, alors je me suis dit: Bon. Allons-y. Posons-lui la question. Parce que d'autres sont venus nous dire: Bien, on doit s'assurer qu'il y aura le moins de zones possible et s'assurer aussi que... Parce que, oui, je comprends très bien et puis d'ailleurs, à ce titre-là, je vous dirais que tout le monde dit à peu près la même chose: la Commission municipale a une très bonne réputation, ça, on ne remet pas ça en cause. Mais, dans la mesure où la perception parfois est aussi forte et dommageable finalement que les faits, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, à ce moment-là... Bien, vous avez répondu à ma question quand même à ce niveau-là.

M. Lavallée (Denis): Mais c'est ça, en fait, est-ce qu'on doit agir suivant les perceptions à tout prix, constamment? Vous n'êtes pas sorti du bois. La seule chose que je voulais dire sur le ministre, c'était le ministre des Affaires municipales qui est en charge des municipalités. Alors, c'est important, de quelque allégeance qu'il soit, évidemment, de quelque parti, de l'enlever, à cause justement de la problématique des perceptions. Au Québec, comme vous savez, aujourd'hui, là, il y a comme... aujourd'hui, et cette dernière année, la perception, ça devient un gros problème, mais il ne faut pas non plus agir pour contrer... je veux dire, en réaction, tu sais, aux perceptions, il faut continuer de façon... de façon...

M. Villeneuve: Si je comprends bien, donc...

M. Lavallée (Denis): ...froide et neutre, tout en évitant, évidemment... Puis, évidemment, comme le ministre est celui qui serait le plus placé, qui est le plus mal placé en fait pour trancher, on va toujours le lui reprocher. Alors, pour protéger l'objectif de la loi, c'est mieux, dans ce cas-là, d'enlever le ministre et de confier ça à la commission qui est peut-être... bien, pas qui est peut-être, mais qui est... ce ne sont pas... on peut difficilement lui faire des reproches, alors je pense que c'est une question de mettre à l'abri.

M. Villeneuve: Juste dire que, si je comprends bien le volet de votre réponse de tantôt, à savoir... En tout cas, à tout le moins, l'efficacité étant reconnue, de la commission, par contre elle devra s'adapter au nouveau mandat qui éventuellement pourrait lui être confié.

M. Lavallée (Denis): Tout à fait. Tout à fait. Oui.

M. Villeneuve: D'accord.

Le Président (M. Morin): Merci, M. le député de Berthier, Merci, M. Lavallée, et je vous prie de remercier ceux chez vous qui se sont penchés sur cette question. On les remercie. Faites le message.

M. Lavallée (Denis): Merci de nous avoir reçus.

Le Président (M. Morin): Et je vous dis: Bon retour chez vous. Ce n'est pas loin, très loin, mais quand même.

M. Villeneuve: Ah, mais les rues sont bloquées partout, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Morin): Oui. C'est ça. Bonne chance dans le trafic.

M. Villeneuve: S'il est venu en vélo, il est correct.

Le Président (M. Morin): J'ajourne les travaux au mardi 21 septembre 2010, à 10 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 12 h 23)

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