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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 5 juin 1996 - Vol. 35 N° 10

Consultation générale sur la Loi sur les valeurs mobilières


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Table des matières

Auditions


Autres intervenants
M. Jacques Baril, président
M. Bernard Landry
M. Jacques Chagnon
M. François Gendron
M. Jean Campeau
M. Rosaire Bertrand
M. Benoît Laprise
M. François Beaulne
M. Claude Lachance
* M. Michel Mailloux, IQPF
* M. Jean Martel, Commission des valeurs mobilières du Québec
* M. Guy Massé, Conseil des assurances de personnes
* Mme Nathalie Drouin, idem
* Mme Myrella Beaulieu, idem
* Mme Suzanne Vadboncoeur, Barreau du Québec
* M. Gérard Coulombe, idem
* M. André P. Asselin, idem
* M. Marcel Vachon, ACIM
* M. Rodrigue Julien, idem
* M. Robert Frances, idem
* M. Gilles Seguin, idem
* M. Hubert T. Lacroix, Comité consultatif juridique auprès
de la Commission des valeurs mobilières du Québec
* M. Pierre Raymond, idem
* M. Terry Wright, Groupe Investors
* M. Maurice Lejeune, idem
* M. Jean-Claude Bachand, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures quatorze minutes)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, mesdames, messieurs! La commission du budget et de l'administration poursuit sa consultation générale et ses auditions publiques pour étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières.

Est-ce que, M. le secrétaire, il y a des remplacements qui vous ont été suggérés?

Le Secrétaire: Non, il n'y a aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Donc, chaque membre de la commission a en sa possession l'ordre du jour. Nous avons une dizaine de groupes, je crois, à entendre aujourd'hui. Et, avant d'appeler le premier groupe, on m'a informé qu'il y aurait un court échange, des discussions pour planifier les travaux entre le représentant de l'opposition officielle et M. le ministre. Donc, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Fort brièvement. Et je m'excuse auprès des membres de l'Institut québécois de planification financière, ce sera fort bref.

M. le ministre, il y a des mémoires que nous avons reçus et pour lesquels les gens ne se présenteront pas ici, parfois des sociétés qui ne sont pas des plus petites. Et je pense à Hydro-Québec, entre autres.

J'ai ici le mémoire d'Hydro-Québec à la commission du budget et de l'administration, qui requiert une modification à la Loi sur les valeurs mobilières. Je voulais savoir: Est-ce que le ministère entend acquiescer à cette demande, puisque nous n'aurons pas le loisir de voir la société d'État? Et, si oui – parce que vous ne serez peut-être pas capable de répondre à ça, c'est un peu inopiné, là, comme question – est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'ajouter, dans le cadre de... Parce que le sujet qui est soulevé par Hydro-Québec, c'est le marché secondaire des titres d'Hydro-Québec. Est-ce que ce ne serait pas aussi vrai pour les cités et villes, dans leurs émissions d'obligations, le cas soulevé par Hydro-Québec?

M. Landry (Verchères): On peut regarder ça. En vérité, de par mes fonctions, je suis le seul actionnaire d'Hydro-Québec.

M. Chagnon: Ah! oui, oui.

M. Landry (Verchères): Alors, ça doit me donner un certain pouvoir sur ces matières. Est-ce qu'on a des commentaires à...

M. Chagnon: C'est-à-dire que vous êtes le seul actionnaire, mais ils émettent des obligations.

M. Landry (Verchères): On est plutôt favorable. La chose est à l'étude. Si nous sommes plutôt favorables, c'est parce que ce sont des titres garantis par le gouvernement du Québec, contrairement aux municipalités.

M. Chagnon: Alors, ce serait vrai pour Hydro, mais moins vrai ou moins possible pour le cas des municipalités.

M. Landry (Verchères): Bien, les municipalités, ce n'est pas la même qualité de papier, évidemment.

M. Chagnon: Ce n'est pas la même garantie. Oui, oui, ce n'est pas la même garantie. Ça va. Merci beaucoup, M. le Président.

M. Landry (Verchères): Ça ne veut pas dire que certaines ne sont pas absolument solides, là.

M. Chagnon: Non, non, je n'ai pas...

M. Landry (Verchères): Ce n'est pas du tout une insinuation que je fais.

M. Chagnon: Je n'ai pas laissé entendre que vous insinuiez que les municipalités étaient sous...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je voudrais aussi spécifier que les mémoires qui ont été déposés et qui ne seront pas entendus seront annexés au rapport final de la commission parlementaire.


Auditions

Donc, si vous en convenez, j'inviterais les représentants de l'Institut québécois de planification financière.

D'abord, je vais leur souhaiter la bienvenue, et j'inviterais possiblement M. Mailloux...

M. Mailloux (Michel): C'est ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...à présenter les personnes qui l'accompagnent, et après à nous faire un exposé. Je vous rappelle les règles de procédure. Chaque groupe a 20 minutes pour nous présenter son mémoire et chaque parti a 20 minutes également pour échanger avec vous. Le président est assez souple sur les délais, sur le temps alloué, c'est-à-dire. Plus vous prenez de temps et moins les gens ont de temps pour vous poser des questions. Donc, je vous laisse présenter votre mémoire, M. Mailloux.


Institut québécois de planification financière (IQPF)

M. Mailloux (Michel): Merci beaucoup. Alors, mon nom est Michel Mailloux. Sont présents avec moi aujourd'hui: Mme Anne-Marie Girard-Plouffe, A.V.A., à ma gauche; M. Robert Lafond, A.V.A., président sortant, qui est à l'extrême droite; et M. Paul Turcot, administrateur agréé, à ma droite immédiate, qui est premier vice-président de l'Institut. Bien entendu, nous sommes tous aussi planificateurs financiers.

Alors, permettez-moi d'abord de vous remercier en mon nom personnel et au nom des 2 000 planificateurs financiers du Québec d'entendre aujourd'hui les remarques de l'Institut québécois de planification financière dans le cadre de la révision de la Loi sur les valeurs mobilières. Permettez-moi aussi de vous signaler que notre intervention actuelle se fait dans le double contexte de la révision de cette loi et de la révision en cours de la Loi sur les intermédiaires de marché. Nous reviendrons spécifiquement sur les articles concernant la Loi sur les valeurs mobilières, les articles 8, 9 et 10 du rapport quinquennal, et le point 1.3 du document d'accompagnement.

Par la planification financière et aussi par d'autres aspects importants, ces deux lois sont fortement interreliées. En effet, dans les documents gouvernementaux qui ont été déposés à l'Assemblée nationale et dont je faisais mention tantôt, le rapport quinquennal et son document d'accompagnement, on voit une forte implication de la planification financière, de sa régie et de sa pratique. C'est donc ces points-là dont on va discuter un peu plus tard au cours de la présentation.

Notre mémoire, le mémoire qui vous a été présenté se divise en quatre parties, soit: un descriptif de la planification financière, une courte présentation de l'Institut, de ses réalisations ainsi que nos remarques de clôture, qui porteront spécifiquement sur les articles 8, 9 et 10 qui nous concernent.

Nous avons jugé utile de prendre un peu de votre temps pour vous présenter la planification financière ainsi que l'Institut, puisque, à la fois, la planification financière demeure un terme un peu méconnu et que l'Institut est un très jeune organisme qui avait été créé par la loi 134.

(11 h 20)

La raison d'être de notre activité professionnelle qu'est la planification financière se retrouve dans les besoins nouveaux des consommateurs. Des marchés financiers de plus en plus complexes avec des risques nouveaux, l'essoufflement des finances publiques, la remise en question des programmes sociaux, une fiscalité plus complexe, des lois et des réglementations en changement perpétuel, une population vieillissante conduisent l'ensemble des baby-boomers vers la construction de patrimoines qui sont beaucoup plus substantiels que pour les générations précédentes.

Ces nouveaux besoins, ces multiples changements, tant par leur complexité que par les choix qui en découlent, sont les principaux facteurs qui ont créé le besoin d'une planification financière personnelle intégrée. Les mondes économique et professionnel dans lesquels nous vivons n'ont jamais été aussi difficiles que présentement. Le planificateur est là pour aider le consommateur à mieux assumer ces risques nouveaux. La gestion patrimoniale devient aussi un élément prépondérant de la sécurité personnelle et, à long terme, de la stabilité de toute notre société. De plus, comme dans tous les cas où se produit une accumulation patrimoniale importante, la question de transmission aux héritiers prend aussi une dimension encore plus importante. Là encore, le planificateur financier a un rôle à jouer.

Ce monde est en constante et profonde mutation. Il a provoqué le besoin d'avoir des approches intégrées, donc nécessairement multidisciplinaires. C'est cette nouvelle génération de professionnels qui se compose à la base d'individus en provenance d'une mosaïque de professions, de formations et d'expériences différentes. Cette richesse est la plus grande de notre profession, mais elle comporte aussi certains risques. Mais le législateur québécois y a veillé en créant, en 1989, l'Institut québécois de planification financière, le seul organisme du genre en Amérique du Nord.

La pluridisciplinarité, puisqu'on parlait de ça il y a deux minutes, implicite au domaine de la planification financière, est la source même de la création de l'Institut. Personne ne pouvait régir exclusivement ce domaine, mais de nombreux ordres professionnels et organismes de contrôle, dont la Commission des valeurs mobilières du Québec, avaient la compétence et l'expertise pour prétendre, avec justesse, régir une partie de la pratique de la planification financière. Cette situation était vraie et demeure encore vraie aujourd'hui.

La loi 134 est la pierre angulaire d'un dynamisme qui met notre marché à l'avant-garde de tout ce qui se fait à travers le monde. L'Institut québécois de planification financière est un des chaînons importants. Cette réponse originale – l'Institut – qui a été faite par le législateur québécois, doit faire l'objet d'une révision à la lumière de l'évolution très rapide du monde financier moderne. De plus, l'engagement à revoir la loi après cinq ans allait dans le même sens. Une nouveauté comme celle que représente l'Institut québécois de planification financière et les multiples partenariats doit normalement être revue à la lumière de l'expérience.

Nous sommes, aujourd'hui, entrés dans la première phase d'une remise à l'heure des pendules. On doit régler une partie des inconforts et des irritants qui découlent de la mise en place de la loi 134, qui découlent de certaines interventions de certains de nos partenaires et qui pourraient découler des modifications à la Loi sur les valeurs mobilières.

On doit cependant conserver à l'esprit que la loi 134 voulait doter le Québec d'un cadre législatif à l'avant-garde, sachant nous prémunir contre des mutations profondes. Ceci vaut d'autant plus que, dans le cadre de la révision sur la Loi sur les valeurs mobilières, on nous propose des modifications explicites et implicites à la Loi sur les intermédiaires de marché. Ces modifications risqueraient de remettre en question certains acquis de la loi 134.

Si on désirait résumer succinctement ce que représente l'Institut québécois de planification financière, nous devrions le faire sur trois thèmes: une approche unique en Amérique du Nord, des critères de qualification professionnelle les plus élevés et une perspective pluridisciplinaire.

Une approche unique en Amérique du Nord, qui a permis au Québec d'éviter les problèmes vécus dans le reste du continent quant à la prétention à la planification. En effet, à l'extérieur du Québec, tous peuvent porter le titre de planificateur financier. L'encadrement légal en est à ses premiers balbutiements. Nous avons quelques années d'avance dans ce domaine et c'est un acquis que nous avons le devoir de protéger.

Les critères professionnels que nous avons sont les plus hauts au Canada avec 450 heures de cours de niveau universitaire qui assurent une compétence de base des plus complètes, ce qui est, en soi, un gage de meilleure protection du grand public. Nous avons exigé encore plus dans le cadre de la révision de la loi 134.

Une approche pluridisciplinaire tout aussi unique, qui repose sur plusieurs partenaires ou organismes de régie, dont la Commission des valeurs mobilières. Tous les partenaires sont, dans notre esprit, égaux quant à l'importance de leurs apports et de leurs champs de compétence, qui sont différents mais complémentaires.

L'actuelle révision de toutes les lois pertinentes doit réaffirmer cette vision originale du Québec, qui nous assure déjà des plus hauts niveaux de compétence au Canada tout en respectant un contexte pluridisciplinaire qui respecte lui-même les compétences historiques de chacun des partenaires.

Nos recommandations, que vous retrouverez intégralement et qui couvrent donc, en partie, ce qu'on dit ce matin, se retrouvent aux pages 32 à 40 de notre mémoire sur la modification de la loi 134 et portaient sur sept groupes d'éléments: la formation de base, la formation continue, la déontologie, la surveillance, notre conseil, le financement et le forum national.

Avant de regarder ces éléments, parce que ces éléments sont reliés à la Loi sur les valeurs mobilières, nous devrons les réinscrire dans le contexte du mémoire qui les contient. Il y a deux grandes lignes de force pour l'Institut québécois de planification financière: la protection du public et des actions régionales.

Au niveau de la formation de base, malgré les lacunes ou les difficultés à obtenir un nouveau programme universitaire pour la formation des planificateurs financiers, nous avons préféré jouer la carte de la collaboration en créant une synergie qui permette aux deniers de l'État québécois d'être utilisés d'une manière optimale.

Au cours du dernier mois, nous avons signé un protocole d'entente avec l'Université Laval, protocole qui permettra, dès septembre prochain, dans toutes les régions du Québec, à toutes les Québécoises et les Québécois, d'avoir accès à la formation universitaire requise dans le cadre de nos règlements. Pas de dédoublement des efforts, moins de deniers publics et un service disponible partout au Québec par des cours magistraux et par correspondance. Voilà une des réalisations de l'Institut, qui s'inscrit parfaitement dans le rôle que nous a confié le législateur.

En matière de formation continue, l'Institut québécois de planification financière tend à mettre de l'avant cette formation dans toutes les régions du Québec, comme pour la formation de base. De plus, nous ne voulons pas reprendre ce que d'autres organismes font de manière intéressante, du moment qu'ils demeurent à l'intérieur de leurs compétences reconnues et respectives.

La formation continue doit aussi devenir une nécessité réglementaire, surtout pour les planificateurs financiers. C'est pour cette raison que nous croyons qu'elle devrait être obligatoire, sous peine de perte de droit de pratique.

Au niveau de la déontologie et des règles de pratique, devant, soit l'inaction de certains de nos partenaires ou devant l'empressement de certains autres à occuper un certain territoire, l'Institut québécois de planification financière a dégagé les sommes nécessaires à la rédaction, dans le respect de ses partenaires, d'un Code de déontologie et de pratique. Encore une fois, dans les limites strictes de la loi actuelle, mais dans la perspective d'une vision à long terme, nous tentons de provoquer un consensus nécessaire à la protection du public et à l'exercice serein de la profession.

Nous avons aussi proposé une vision plus moderne et responsable tant de notre conseil d'administration que des modes de financement associés à d'éventuelles responsabilités de coordination. Nous profitons spécifiquement de ce point pour souligner que l'Institut a pris sa place sans qu'aucuns fonds de l'État ne soient requis directement ou indirectement. Ce sont les planificateurs financiers qui assument la totalité des frais de fonctionnement de l'Institut.

Notre dernier fleuron, à date, sera la création d'un forum national de la planification financière, dont la mission sera l'éducation du public. Nous entendons lui faire débuter ses activités d'ici la fin de l'année.

(11 h 30)

Cette mise en situation brossée à grands traits, un peu longue, j'en conviens – mais il fallait revenir un petit peu sur la planification – donc cette mise en situation nous permet de mettre en relief les enjeux que nous avons relevés dans le «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières». Certaines recommandations du rapport ne prennent pas en compte la complexité de marché. On tente de réduire implicitement la planification financière à la vente et au conseil à propos de produits sur les valeurs mobilières. Et c'est là un des principaux irritants actuels non seulement dans les propositions présentées, mais aussi dans les faits, la Commission ayant mis de l'avant certaines dispositions qui ne tiennent aucun compte des autres intervenants de marché. Cette position de la Commission va dans le même sens que l'esprit dans lequel Mme Stromberg a rédigé son rapport pour la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, mais elle contient aussi les mêmes faiblesses.

La planification financière touche ces aspects de valeurs mobilières, tout comme elle recouvre des aspects comme les assurances de personnes, la fiscalité, le droit, la gestion financière, les fonds de pension et tous les produits d'intermédiation financière en général.

Globalement, le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre, et le document complémentaire, est très positif, et nous le supportons sans réserve. Les trois thèmes directeurs qui sont la plus grande efficacité, une meilleure stabilité et une croissance soutenue, nous ne les passerons pas en revue, sauf, bien entendu, pour les trois articles qui nous concernent, les articles 8, 9 et 10 du premier rapport et le point 1.3 du document d'accompagnement, qui touchent directement la planification financière et son encadrement.

Historiquement, dans le cadre de l'exercice de représentation en fonds communs de placement, la Commission a autorisé, sous certaines conditions, que certains représentants ne soient pas employés de courtiers reconnus. On retrouve ces gens dans nos grandes institutions financières. Par son nouveau règlement, la Commission oblige ce même représentant à devenir un employé du courtier s'il veut pratiquer la planification financière. Malgré nos représentations et les représentations de plusieurs partenaires de l'industrie, à cause des conséquences inopportunes du règlement, la Commission a maintenu ce règlement. Qui plus est, ceci peut entraîner un problème plus grave.

Le planificateur qui se retrouve dans cette position est alors soumis à deux codes de déontologie différents, puisque la Commission déclare que le sien doit être appliqué comme planificateur. Cependant, si le planificateur est membre d'un autre organisme de régie, il est soumis aussi à un autre code de déontologie.

Dans certains cas, comme le port du titre, on retrouve des contradictions entre les codes de déontologie. La protection ultime du public, que tous se doivent de protéger, passe alors au second plan. On dirait jusqu'à un certain point une passoire. Une autre thèse de ce point de vue là voudrait qu'on édicte une préséance des différents codes de déontologie. On se retrouverait alors avec un code qui aurait préséance sur un autre code d'un autre organisme de régie mais qui ignorerait totalement des thèmes qui sont traités par l'autre code de déontologie. La passoire devient un trou béant. J'ouvre une petite parenthèse. Donc, quelqu'un qui s'est soumis à deux déontologies, une en matière d'assurances et une en matière de valeurs mobilières, se trouverait, à ce moment-là, à devoir respecter un code, celui des valeurs mobilières, l'autre code devenant désuet, puisqu'il y a préséance de code. On pourrait imaginer des mécanismes complexes de négociation pour savoir quels articles s'appliquent dans chacun des deux codes.

Admettons que des mécanismes d'arbitrage existent, qui en seront les responsables? Un nouveau tribunal administratif? L'Office des professions? Un autre organisme gouvernemental? Chose certaine, il devrait y avoir négociations perpétuelles entre tous les partenaires de régie. Cette situation est un peu ridicule, mais c'est le consommateur qui en subit les principaux contrecoups. À qui devra-t-il s'adresser en cas de problème? À force de vouloir trouver une série de solutions relativement simples, on génère plus de problèmes.

La préséance des codes de déontologie et des règles de pratique est l'antithèse de l'esprit de la loi 134. La planification financière est et demeure dans son essence multidisciplinaire. La doctrine de la préséance d'un code ne tient donc pas longtemps face aux principes mêmes voulus par le législateur. Tous, tous les organismes doivent participer à un consensus. Ce consensus pourrait être celui qui passe par l'Institut québécois de planification financière et qui n'a d'autre attache que la protection du public et la formation meilleure de ses membres.

C'est à la lumière de cet exemple réel d'irritants inutiles et contreproductifs qu'on doit examiner les délicates modifications à apporter à la loi actuelle. Dans notre esprit, la loi devrait inclure une seule disposition nouvelle à cet égard: l'obligation de devenir un partenaire actif avec les autres organismes de régie sous le regard bienveillant de l'Institut, tant pour rédiger une déontologie que des règles de pratique communes.

Nous sommes conscients des enjeux économiques énormes, alors que tous les intervenants de régie aimeraient avoir la main haute sur la planification. L'Institut est et doit demeurer un organisme indépendant. La planification doit, elle aussi, demeurer neutre mais non indifférente par rapport à chacun des organismes de régie.

Avant de terminer, permettez-moi d'aborder un dernier problème. Le consommateur est face à deux éléments soulevés dans le cadre de la présente commission parlementaire. On y soulèvera les problèmes de commissionnement ou de rémunération des planificateurs et le problème du titre de planificateur. Les consommateurs ont beaucoup plus de questions que de réponses et la planification financière représente une partie de leurs réponses.

Le marché des valeurs mobilières doit être encadré correctement, et c'est une responsabilité exclusive, nous en convenons. Nous convenons aussi de l'importance croissante de l'intérêt des consommateurs pour les valeurs mobilières. Ces dernières prennent de plus en plus la place qui doit leur revenir dans le cadre du marché de l'épargne.

Les modes de rémunération des planificateurs sont aussi au centre de ce que certains voudraient voir nommé une polémique. Il n'en est rien et c'est, à notre humble avis, un faux débat. Nos membres perçoivent trois types de rémunération: certains sont salariés, d'autres reçoivent des honoraires, certains encore recevront des commissions. De là certains concluent au grand danger face aux commissions, puisqu'elles pourraient provoquer des abus. Remarquez que ces abus pourraient survenir quel que soit le mode de rémunération ou le lien d'emploi qui existe avec un planificateur.

C'est pourquoi nous croyons que la seule voie acceptable soit une déontologie et des règles de pratique communes qui exigent de manière très précise un mode de divulgation du ou des modes de rémunération du planificateur. Chacun des organismes de régie pourra alors restreindre, s'il le désire, les modes de rémunération, s'il le juge utile, mais toujours à partir de règles communes et claires pour le consommateur.

D'autres prônent des titres différents selon les modes de rémunération. Cette pratique pourrait provoquer un marasme, à notre avis, complet. Imaginons deux minutes qu'il y ait trois titres pour chacune des professions, puisque, par exemple, un administrateur agréé pourrait être ou salarié, ou à commissions, ou à honoraires. Si on avait un titre différent, on devrait imaginer trois titres professionnels pour accompagner ces titres-là. Si on appliquait ce même principe là à tous les organismes de régie, on arriverait au total impressionnant de 27 titres différents, selon la profession d'appartenance et le mode de rémunération. Le consommateur ne s'y retrouverait plus et personne n'y gagnerait. Il n'y a, à notre avis, qu'une seule et unique voie simple, des règles déontologiques et de pratique communes, avec la capacité pour un organisme de régie d'en restreindre la portée.

L'Institut québécois de planification financière est probablement l'instrument le plus adapté pour cette mission de concertation essentielle. Si on voulait résumer un petit peu notre mission, on a une mission de cohérence, de transparence et de protection du consommateur.

Merci du temps que vous nous avez accordé.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Mailloux, d'avoir, d'abord, respecté le temps de 20 minutes de présentation. Ça tombe pile. Je laisserai la parole maintenant au ministre de l'Économie et des Finances.

(11 h 40)

M. Landry (Verchères): Merci beaucoup, M. Mailloux, et à vos collaborateurs et collaboratrice, de nous avoir fait profiter de votre expérience très directe de la vie de ceux et celles qui exercent votre profession, et des grandeurs et des misères, si je peux dire. Porter tant de titres, ça doit être très lourd pour certaines personnes, surtout quand elles sont plutôt dans une jungle administrative.

Alors, globalement, les analyses préliminaires que nous avons faites de votre mémoire tendent à reconnaître avec vous qu'il y a un problème. Il a tellement été reconnu que, si je comprends bien, la Commission des valeurs mobilières a essayé de trouver un expédient, une solution provisoire...

M. Martel (Jean): Supplétive.

M. Landry (Verchères): Supplétive, me dit le président, qui est un homme érudit. Mais on peut faire mieux que le supplétif, je n'en disconviens pas. Et la meilleure façon d'aborder la question de front serait sans doute de travailler dans le cadre de la loi 134, ce qui veut dire que, peut-être, nous aurons le plaisir de vous revoir dans le cadre des travaux sur cette loi et au mois d'août en particulier. Mais, pour stimuler vos réflexions d'ici cette prochaine rencontre, si vous venez, je vous dis d'avance que nous ne sommes pas enclins à accepter totalement votre façon de voir, puisque l'autoréglementation est une chose, et le contrôle et la surveillance, c'en est une autre. Et une convergence trop grande entre un organisme d'autorégulation et la Commission des valeurs mobilières qui n'en est pas un risquerait de créer un mélange des genres qui ne serait peut-être pas la meilleure façon de sortir de la jungle que vous nous avez décrite. Mais soyez sûrs que, comme nos analyses du problème convergent, on devrait avoir des solutions qui, en bout de course, convergeront assez pour vous donner satisfaction.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous avez fini vos commentaires, M. le ministre? Oui?

M. Landry (Verchères): Oui, parce que le mémoire est bien fait puis il est limpide et, comme on n'a pas de querelles... S'il me reste du temps après, je pourrai poser des questions secondaires qui n'ont pas été abordées et pour lesquelles j'aimerais entendre des opinions, mais qui ne sont pas au coeur du sujet.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je voudrais remercier l'Institut de sa présentation ce matin et j'en profiterai pour lui poser quelques questions. À partir des mémoires que nous avons reçus, vous avez peut-être pris connaissance de certains autres mémoires, peut-être avez-vous pris...

Une voix: ...

M. Chagnon: Pardon?

M. Landry (Verchères): Oh! je m'excuse d'avoir dérangé.

M. Chagnon: Non, non, non, excusez-moi.

M. Landry (Verchères): J'étais en conversation technique avec le président.

M. Chagnon: Non, non, il n'y a pas de problème. Alors, pour reprendre le sens de mes propos, peut-être avez-vous assisté, hier, à des présentations de mémoires ou peut-être avez-vous eu copie des mémoires que nous avons reçus. Je pense à l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec qui, à la page 14 de son mémoire, écrivait ceci: «L'Institut québécois de planification financière décerne, de son côté, le titre de planificateur financier mais n'en assume pas l'encadrement.» Est-ce que vous êtes d'accord avec cette...

M. Mailloux (Michel): C'est-à-dire, dans le cadre de la loi 134, à l'heure actuelle, c'est tout à fait vrai. L'Institut a été créé pour décerner le diplôme de planificateur et s'assurer des qualités professionnelles des gens qui peuvent porter ce titre-là. Donc...

M. Chagnon: Alors, votre... Je m'excuse, allez-y.

M. Mailloux (Michel): L'Institut, donc, chapeaute, en ce sens-là, le titre. Maintenant, quand le planificateur veut pratiquer, c'est là qu'il revient vers un organisme de régie, qui peut être soit une corporation professionnelle soit une autre, qui en assume la déontologie et les règles de pratique.

M. Chagnon: Alors, si je comprends bien, la protection du consommateur dont vous nous avez parlé repose sur la préparation ou la façon dont vous faites vos cours, l'information que vous donnez à vos membres.

M. Mailloux (Michel): La formation.

M. Chagnon: La formation.

M. Mailloux (Michel): C'est effectivement ce qui est dit spécifiquement.

M. Chagnon: Plutôt que, a posteriori, sur l'éthique de vos membres.

M. Mailloux (Michel): Oui. Bien, remarquez que ça nous a amenés à faire des interventions, dans certains articles de journaux où on retrouvait... à la fin de l'année dernière, on retrouvait la liste de pseudo-planificateurs financiers, et l'Institut québécois est intervenu pour signaler à tous les organismes ceux qui ne détenaient pas un diplôme de l'Institut. Donc, la loi, bien entendu, ne nous permet pas nous-mêmes d'enclencher un processus mais plutôt de le faire enclencher par nos partenaires.

M. Chagnon: Est-ce que, parmi les gens qui participent à la formation de l'Institut, on ne retrouve que des spécialistes, c'est-à-dire des avocats, des comptables ou des gens qui ont une spécialité déjà, ou même des courtiers d'assurances ou des gens qui sont dans l'assurance, qui ont déjà la prétention, si j'en juge par ceux qui sont passés ici, de faire de la planification financière?

M. Mailloux (Michel): Vous voulez dire les gens qui sont appointés pour les cours?

M. Chagnon: Oui, bien, les gens qui reçoivent de la formation chez vous, qui s'inscrivent à la formation chez vous.

M. Mailloux (Michel): Oui, bien, il y a des gens qui viennent du domaine de l'assurance, bien entendu. Actuellement, ils forment à peu près 40 % du corps... des membres ou des diplômés. Mais il y en a aussi qui viennent du milieu professionnel. Il y a six ordres professionnels qui sont inclus. Il y en a qui viennent naturellement, aussi, du domaine des valeurs mobilières.

M. Chagnon: Est-ce que c'est un prérequis que de venir soit des valeurs mobilières, de l'assurance ou de l'un des six ordres professionnels?

M. Mailloux (Michel): Non, ce n'est pas un prérequis. On peut suivre un cours universitaire qui mène au diplôme de planification. Cependant, après avoir reçu son diplôme de planificateur, la personne qui veut exercer doit être régie par un des organismes, que ce soit la Commission des valeurs mobilières ou un ordre professionnel, si elle détient un titre professionnel qui est prévu par la loi.

M. Chagnon: Est-ce qu'il y a des gens qui sont simples citoyens mais intéressés à la question de la planification, ne serait-ce que de leurs propres finances, qui vont prendre un cours comme celui que vous donnez?

M. Mailloux (Michel): Ils pourraient. Cependant, on ne doit pas cacher que ce sont des cours de niveau universitaire. Donc, il y a de simples citoyens qui s'inscrivent dans des programmes de certificat et qui peuvent suivre toute une série de cours qui sont du domaine de la planification. Par exemple, avec l'Université Laval, dès cet automne, tout le monde pourra s'inscrire au certificat en planification sans nécessairement vouloir devenir planificateur. Cependant, c'est un investissement personnel assez prenant, 450 heures de cours pour les connaissances personnelles, c'est un petit peu...

Deuxième élément, il y a aussi le fait que l'Institut a donné, historiquement, le cours synthèse. C'est le seul cours, depuis l'institution, la création de l'Institut, que l'Institut donnait, parce qu'il ne se donnait pas dans les universités québécoises. À ce moment-là, les gens qui s'inscrivent au cours synthèse sont des gens qui ont des connaissances, des prérequis, qui sont quand même spécialisés, donc M. et Mme Tout-le-Monde ne gagneraient rien à venir suivre le cours synthèse, à moins d'avoir suivi, au préalable, une série de cours ou, encore, d'avoir une expérience professionnelle pertinente.

M. Chagnon: Le cours synthèse, c'est un cours de 50, 60, 100 heures, je suppose?

M. Mailloux (Michel): Actuellement, c'est un cours de 90 heures.

M. Chagnon: C'est ça. Vous n'êtes pas les seuls dans ce marché-là à donner le cours synthèse ou un cours synthèse dans ce type de formation là au Québec?

M. Mailloux (Michel): Il n'y a actuellement aucun autre organisme qui donne un cours synthèse en planification financière. Il n'y a qu'un autre organisme qui le fera à partir de la session hiver 1997, il s'agit de l'Université Laval. Mais il n'y a pas d'autre cours synthèse du même type.

M. Chagnon: J'ai le malheur de vous annoncer que, dans le Financial Post de ce matin, «A course for serious investors», qui sera donné par le Canadian Securities Institute à Toronto, Montréal, Vancouver et Calgary. À Montréal, à 878-3591, vous pouvez vous inscrire...

M. Mailloux (Michel): Non, je connaissais ce cours-là, c'est un cours qui...

M. Chagnon: Ce n'est pas la même chose?

M. Mailloux (Michel): Bien, qui n'est pas tout à fait aussi élaboré que le cours de l'Institut.

M. Chagnon: Que le cours synthèse?

M. Mailloux (Michel): Que le cours synthèse.

M. Chagnon: O.K. Ma troisième question, mon troisième ordre de questions, M. le Président, porte sur des commentaires qu'un autre organisme nous a amenés hier, l'ACCOVAM. Vous avez peut-être lu le document de l'ACCOVAM. Je comprends que les gens qui portent le titre de planificateur financier, une fois qu'ils ont réussi les cours et leur formation chez vous, vendent des produits financiers. On se comprend là-dessus. Vous avez énoncé la problématique de la rémunération de ces gens-là. Mais l'ACCOVAM nous dit ceci: «Nous sommes fermement convaincus – ce n'est pas mou, ça, comme approche, «nous sommes fermement convaincus» – qu'aucun d'eux – aucun d'eux, ça ne laisse pas beaucoup de chances à bien du monde – ne peut, dans un tel contexte, prétendre à l'objectivité. En effet, selon le produit financier que vend un planificateur financier, la planification financière sera nécessairement orientée dans le sens de ce produit financier, que ce soit le courtage en valeurs mobilières, l'assurance de personnes, les services juridiques ou toute autre activité compatible.» Comment vous réagissez à ça?

M. Mailloux (Michel): Bien, je ne crois pas que l'objectivité soit reliée au mode de rémunération. On pourrait trouver des cas où quelqu'un qui est à honoraires pourrait manquer d'objectivité. Je pense que, par leur spécialisation, les gens, effectivement, ont une certaine déformation.

(11 h 50)

M. Chagnon: En fait, la question qui se pose, ce n'est pas le mode d'honoraires, c'est le fait de s'appeler «planificateur financier» et de vendre un produit financier, et, évidemment, de prioriser le produit financier que l'on vend. C'est à cela que fait référence l'ACCOVAM. À ce moment-là, l'ACCOVAM fait une suggestion aussi, pour être bien honnête. La suggestion, c'est qu'on devrait désigner ceux qu'on désigne comme planificateurs financiers aujourd'hui, on devrait les désigner comme planificateurs-conseils plutôt que comme planificateurs financiers.

M. Mailloux (Michel): Moi, je ne pense pas que le fait d'avoir un titre différent améliorerait la situation. Je pense qu'on pourrait se retrouver dans le cas de la multiplicité des titres et on pourrait ultimement... Le consommateur ne comprendrait pas ce qui se passe.

Au niveau de la planification, la planification, ce n'est pas un geste indépendant et philosophique. La planification, quand un planificateur fait celle de son client ou du consommateur, touche tous les aspects de sa vie financière. Il va donc toucher les produits, il va donc commenter les produits là-dessus.

M. Chagnon: Alors, je comprends que...

M. Mailloux (Michel): Dans la dernière phase ou dans l'avant-dernière phase, selon les écoles de pensée... Mais, selon notre école de pensée, dans l'avant-dernière phase, donc, il va aller jusqu'au conseil de certains produits et, ensuite, il va faire le suivi, mais en fonction des objectifs du client. Alors, est-ce qu'il pourrait ne pas être objectif? Oui. Est-ce que c'est particulier à la planification? Non.

M. Chagnon: Alors, si je comprends bien, vous ne seriez pas d'accord avec la suggestion de l'ACCOVAM à l'effet que: «La distinction entre les deux catégories de planificateurs aurait pour avantage de prévenir le client quant au degré d'objectivité de son conseiller. Nous croyons que cette réforme s'impose dans les plus brefs délais, compte tenu de la crédibilité qu'accorde le titre de planificateur financier.»

M. Mailloux (Michel): Alors, ma réponse est simple: Non, je ne suis pas d'accord avec mes confrères de l'ACCOVAM, et mes consoeurs.

M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup. Peut-être une dernière question rapide.

M. Mailloux (Michel): Certainement.

M. Chagnon: On sait que vous êtes des intermédiaires de marché. On sait que le marché se «désintermé...»

M. Mailloux (Michel): «Désintermédie».

M. Chagnon: Enfin, vous comprenez le néologisme, se «désinterméditarise».

Des voix: «...dialise».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: C'est à peu près comme se «décharlottetowne», ou se «démeeche», enfin...

M. Landry (Verchères): C'est ça.

M. Chagnon: ...on a eu des néologismes particuliers en période de questions, c'était...

Une voix: ...

M. Chagnon: Bien oui, c'était drôle. Comment, vous, je dirais, vous réagissez en fonction de vos membres face à cette attitude, je dirais, de plus en plus populaire?

M. Mailloux (Michel): Cette relative désintégration des structures qu'on connaît, au contraire, du point de vue planification amène un besoin plus grand pour le consommateur d'avoir une vue d'ensemble de ses affaires. Donc, s'il reçoit des services moins complets, plus «désintermédiés» ou «désintermédilisés»...

Une voix: «...dialisés».

M. Chagnon: Enfin, disons qu'on se comprend.

M. Mailloux (Michel): Enfin...

M. Landry (Verchères): J'ai pratiqué pendant deux heures, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Un chasseur sachant chasser...

M. Mailloux (Michel): Disons, pour utiliser un bon terme, la balkanisation des marchés provoque un besoin au niveau d'avoir une vue d'ensemble, et les planificateurs peuvent donner cette vue-là.

M. Chagnon: Alors, le titre de planificateur financier représente quel segment du marché? La clientèle que vous avez, ça représente quoi comme...

M. Mailloux (Michel): Vous voulez dire, les clients des planificateurs?

M. Chagnon: Oui, oui, oui.

M. Mailloux (Michel): Écoutez, je n'ai pas de statistiques là-dessus. Je peux vous dire que, dès 1996, il y aura environ 2 000 planificateurs financiers reconnus au Québec.

M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup, M. le Président, je n'ai pas d'autres questions. Je remercie en même temps l'Institut de sa grande coopération.

M. Landry (Verchères): Mesdames et messieurs.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Merci, M. le ministre. Merci aux représentants de l'organisme, l'Institut québécois de planification financière.

J'inviterais les représentants du Conseil des assurances de personnes à s'approcher lentement de la table. Je vais suspendre quelques minutes en attendant que l'échange se fasse.

(Suspension de la séance à 11 h 54)

(Reprise à 11 h 56)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Très bien. Bienvenue aux représentants du Conseil des assurances de personnes. J'inviterais M. Massé, probablement, à présenter les personnes qui l'accompagnent et, par la suite, à nous présenter son mémoire.


Conseil des assurances de personnes

M. Massé (Guy): M. le Président, MM. les députés, Mme la députée, mesdames et messieurs. La commission du budget et de l'administration a entrepris hier un exercice important, celui d'évaluer l'opportunité de maintenir en vigueur ou de modifier, le cas échéant, la Loi sur les valeurs mobilières. Le Conseil des assurances de personnes s'intéresse à cette question et, à titre de président, j'aimerais remercier, d'abord, bien sincèrement les membres de cette commission de nous avoir offert l'opportunité de faire entendre notre point de vue à l'heure où le monde de l'assurance vit de profonds changements. Et, pour m'accompagner dans cette réflexion, j'ai fait appel à des personnes-ressources du Conseil, M. le Président: d'abord, à Mme Myrella Beaulieu, à ma droite, qui agit à titre de directrice générale depuis bientôt cinq ans, et à Mme Nathalie Drouin, avocate du Conseil.

Vous avez reçu notre mémoire. Nous avons préparé un document pour compléter la pensée du Conseil. Alors, ce ne sera pas nécessairement toujours en parallèle avec le mémoire. D'entrée de jeu, je vous disais l'importance que nous accordions à la présente démarche. Je vais donc, au cours des prochaines minutes, vous faire connaître le point de vue du Conseil des assurances.

Afin de bien comprendre les enjeux de cette commission, nous ne pouvons passer sous silence que, vers la fin des années quatre-vingt, le gouvernement du Québec a entrepris une réforme significative de l'encadrement législatif de son secteur financier. Il a ainsi éliminé les traditionnelles barrières entre les quatre grands piliers financiers. Et, à cette époque, les compagnies d'assurances étaient décloisonnées, mais leurs intermédiaires de marché ne l'étaient pas. C'est ainsi que, le 22 juin 1989, la Loi sur les intermédiaires de marché a consacré le second volet de la réforme du secteur financier québécois, soit le décloisonnement des intermédiaires de marché. Cette loi innovatrice à l'époque – nous étions la première province au Canada à faire une loi semblable – visait à favoriser la multidisciplinarité.

Rappelons que le décloisonnement des intermédiaires devait permettre aux consommateurs d'accéder plus rapidement à une large gamme de produits financiers via un seul intermédiaire. Rappelons aussi que le ministre Fortier avait envisagé, en 1989, l'hypothèse de la création d'un organisme d'autoréglementation encadrant la distribution de tous les secteurs financiers, incluant les valeurs mobilières – déjà, à cette époque-là, on y songeait – cet organisme devant être sous la responsabilité de l'IGIF. Cette suggestion n'a pas reçu application en outre parce que l'ouverture des lois ne concordait pas. Ainsi, bien que l'on ait décloisonné les activités, on a gardé un système d'encadrement hermétique et non intégré, dont nous parlerons plus tard.

Le Conseil des assurances de personnes est né de cette réforme. Les intermédiaires en assurance de personnes et les compagnies sont représentés en nombre égal au sein du Conseil; il y a quatre représentants d'intermédiaires, quatre représentants de compagnies, et, évidemment, il y a une représentante des consommateurs qui, souvent, détient, dans bien des occasions, la balance du pouvoir. Alors donc, c'est 4, 4, 1 et le président. Ainsi, nous pouvons affirmer qu'au Conseil les décisions sont majoritairement le résultat de consensus entre les intermédiaires, les compagnies et les consommateurs.

(12 heures)

Depuis sa fondation, le Conseil a entrepris de nombreuses actions et posé des gestes concrets qui ont permis au consommateur d'être mieux servi, mieux informé, mieux considéré par les intervenants en matière d'assurances de personnes. C'est fort de cette expérience que le Conseil souhaite, dans le mémoire qui vous a déjà été déposé, vous faire partager sa vision et vous exposer les problèmes engendrés par une révolution cloisonnée qui s'impose en frein à l'évolution des marchés.

Nous portons à l'attention des membres de la commission les incohérences dues au dédoublement dans les structures d'encadrement des autres secteurs, notamment celui des valeurs mobilières. À cet égard, le Conseil ne croit pas qu'il soit dû au résultat d'une quelconque mauvaise foi, mais plutôt au fait des limites imposées par l'actuelle législation.

Dans un tel contexte, l'augmentation des coûts qui résulte des chevauchements cause un préjudice au consommateur à qui, en bout de piste, on refile toujours les factures. On a beau dire que c'est l'industrie qui paie, on a beau dire que c'est l'intermédiaire qui paie, on le sait, dans la société ça marche comme ça, la facture se rend toujours d'une façon ou d'une autre au consommateur.

Je vous donne un exemple impliquant un intermédiaire cumulant valeurs mobilières, assurances de personnes et planification financière. Prenons un cas-exemple. Parlons de Pierre, qui est un agent d'assurances de personnes qui cumule la planification financière et qui désire s'inscrire auprès de la Commission des valeurs mobilières en tant que représentant en épargne collective pour le compte d'un courtier restreint. Alors, Pierre devra se voir autoriser par la Commission à exercer son activité en assurance. En effet, celle-ci – la Commission – se réserve le dernier mot en matière de cumul. De plus, Pierre devra demander l'autorisation du conseil de la Commission pour porter le titre de planificateur financier.

Comme vous l'a démontré si bien M. Mailloux de l'IQPF, les directives de la CVMQ ne sont d'aucune façon harmonisées avec le Conseil. Les directives de la Commission font en sorte de réduire implicitement la planification financière à une seule activité de vente et de conseil, liée aux valeurs mobilières seulement. Ça revient à dénier, en quelque sorte, la juridiction des autres organismes en cette matière. De plus, c'est une source de confusion pour l'intermédiaire. Les intermédiaires, je vous le dis franchement, ils n'arrivent pas à comprendre ça; on a beau le leur expliquer, ils ont bien de la difficulté à comprendre.

Finalement, ce faisant, on oublie surtout qu'une planification financière complète implique nécessairement une vue d'ensemble du patrimoine. Il s'agit essentiellement d'une activité multidisciplinaire. Ça touche tous les produits d'assurances, les produits financiers, etc.

Autre conséquence plus importante encore, le consommateur a désormais plus de difficultés à identifier à qui il a affaire – celle-là, elle est très sérieuse – à identifier les bonnes structures d'encadrement, puis les recours à sa disposition. Là-dessus, le consommateur est dans la brume complètement. Comment voulez-vous que le consommateur se sente respecté?

Prenons un autre exemple. Notre Pierre de tantôt, notre intermédiaire planificateur financier, c'est une exception à la règle, il faut le dire; c'est un personnage, disons, peu scrupuleux. Et, par un subterfuge quelconque, il fraude ses clients. Qui indemnisera ces derniers? Où ceux-ci devront-ils s'adresser? Si Pierre portait le chapeau d'agent en assurance de personnes lors de la fraude, le consommateur pourrait bénéficier de la protection du Fonds d'indemnisation, créé au sein du Conseil des assurances de personnes, lequel s'avère un recours accessible, gratuit et simple au consommateur. Mais, si Pierre agissait plutôt comme un représentant en épargne collective, le consommateur pourrait s'adresser à l'assurance-responsabilité professionnelle de la boîte de courtage impliquée. On sait que ça représente des coûts légaux, des frais, et ainsi de suite. Il n'existe malheureusement pas de fonds couvrant les cas de fraudes dans les valeurs mobilières, ce qui veut dire que le consommateur, il faut qu'il aille, évidemment, utiliser les tribunaux de droit commun.

Toutefois, lequel des deux organismes interviendra pour aider le consommateur, si Pierre, en utilisant son titre de planificateur financier, a fraudé en effectuant une transaction non réglementée par le Conseil ni par la Commission? Exemple: un planificateur financier qui propose un placement privé, par exemple, il n'y a, à ce moment-là, aucune protection. Si au moins il avait pu – le client – disposer, pour régler son problème, d'un ombudsman... Mais, malheureusement, il n'y en a pas. Cet exemple démontre bien les difficultés réelles que comporte l'encadrement de la planification financière et du cumul de permis, lorsqu'il est question de protection du consommateur. C'est pourquoi nous ne pouvons qu'être d'accord avec toutes les recommandations quant à l'harmonisation des règles entourant cette activité.

Le but du Conseil, vous savez, n'est pas de dresser un portrait négatif de la multidisciplinarité, mais plutôt de constater que nous sommes face à une oeuvre inachevée. Dans une démarche résolument tournée vers l'avenir, le Conseil propose le défi de l'harmonisation de l'ensemble du secteur financier. Les avenues de changement envisagées par le gouvernement pour corriger les imperfections du cadre actuel et pour préserver le développement de son secteur financier, ça devrait être guidé par les principes suivants: d'abord, premier principe, la protection du consommateur; le deuxième, la cohérence et l'harmonisation des instruments normatifs; le troisième, la diminution des coûts et les lourdeurs administratives dont je viens de vous entretenir; restent, finalement, quatrièmement, l'autoréglementation et, cinquièmement, la protection des compétences du Québec dans le contrôle de son secteur financier.

J'arrive à l'autoréglementation. Le Conseil a le mandat de réglementer l'entrée dans la carrière des intermédiaires en assurance de personnes. Permettez-moi de vous rappeler qu'un individu qui désire faire carrière en assurance comme agent ou courtier doit se conformer à certaines exigences: posséder un D.E.C. ou l'équivalent, réussir l'examen d'entrée construit à partir de manuels de formation élaborés par le Conseil – une brique assez imposante – après ça, faire un stage d'une durée de trois à 12 mois – les gens font plus souvent huit, neuf, 10 mois, que trois mois; donc, il y a du travail à faire, et tout ça sous la supervision d'un maître de stage – et enfin réussir l'examen de fin de stage.

Alors, le Conseil est particulièrement fier aussi de l'attestation d'études collégiales en assurance de personnes qui va être dispensée à l'automne 1996 dans neuf cégeps de la province. Déjà, on essaie d'utiliser le réseau de formation publique pour former les intermédiaires. Alors, ce programme d'études de quelque 660 heures est le résultat d'un mariage étroit entre l'industrie de l'assurance et le monde de l'éducation. Alors, je peux vous dire qu'il y a beaucoup d'intermédiaires de marché, des gens de l'industrie qui ont prêté main forte et travaillé de concert avec le ministère de l'Éducation pour faire un cours de formation qui répond vraiment aux besoins de l'industrie.

Voilà ce qui nous amène à discuter de certaines critiques formulées à l'égard des compétences des intermédiaires en assurance de personnes qui offrent des fonds distincts. Permettez-moi, dans un premier temps, de vous présenter ce que sont les fonds distincts. Pour l'encadrement du produit, les fonds distincts sont toujours considérés comme étant des produits d'assurance, même s'ils sont vendus par le biais d'une rente. D'ailleurs, on le sait, les rentes aussi sont considérées comme des produits d'assurance. Ce produit offre au consommateur des garanties particulières, notamment quant à l'insaisissabilité. Même si l'actif de la rente – une autre garantie, ça – s'effondre, le titulaire est certain de récupérer au moins 75 % du capital qu'il a versé. On voit déjà que, dans la nature du produit, avec les garanties qu'on lui donne, c'est un produit d'assurance.

Pour l'encadrement du manufacturier, maintenant. Le consommateur bénéficie de l'encadrement général de l'IGIF. Évidemment, c'est un encadrement qui est très large, sur la gestion financière de la compagnie d'assurances. L'industrie de l'assurance, via l'ACCAP, entend mettre de l'avant les «Lignes directrices applicables aux contrats individuels à capital variable afférents aux fonds distincts». C'est tout un travail. Je pense que l'ACCAP vous en a fait part. L'IGIF a participé à l'élaboration de ces travaux. La Société canadienne d'indemnisation pour les assurances de personnes, la SIAP, protège le consommateur en cas de faillite des compagnies. Voyez-vous toutes les garanties qu'on retrouve dans le monde de l'assurance qui n'existent pas ailleurs.

(12 h 10)

Maintenant, pour l'encadrement des intermédiaires en assurance de personnes. Ceux-ci sont obligatoirement détenteurs d'une assurance-responsabilité professionnelle exigée par le Conseil des assurances de personnes à tout détenteur de certificat. Celui-ci couvre les erreurs et les omissions pour tous les produits qu'il offre. Tous les intermédiaires et les cabinets certifiés contribuent au Fonds d'indemnisation, administré par le Conseil. On sait que celui-ci offre une indemnité au consommateur en cas de fraude.

Maintenant, pour revenir à la formation. Le Conseil, conscient de la relative complexité de ces produits, a récemment bonifié son manuel de formation en ajoutant une section sur les fonds distincts. On entend vérifier les connaissances des candidats à l'entrée de la carrière en assurance de personnes. De plus, le Conseil a la ferme intention d'exiger des intermédiaires en exercice qu'ils complètent leur formation en fonds distincts, laquelle va être, à tout le moins, équivalente à celle exigée par la vente de fonds mutuels de placement. On va donner aux intermédiaires de marché une formation qui, à tout le moins, va être l'équivalent de celle qui est fournie par la Commission des valeurs mobilières à ses détenteurs de permis.

Comme vous le voyez, le secteur de l'assurance entend offrir au consommateur une sécurité adéquate qui se résumerait ainsi: un, la sécurité et l'encadrement du produit; deux, éthique et compétence de l'intermédiaire; trois, mécanismes de recours appropriés. Ça couvre passablement tout l'aspect. Vous savez, en conclusion, le Québec n'a rien à gagner à adhérer aux conclusions du rapport Stromberg. En effet, nous avons la ferme conviction que le consommateur qui se procure un fonds distinct au Québec bénéficie d'une protection en aucune façon inférieure aux fonds mutuels.

Maintenant, nous aimerions attirer votre attention sur le principe, sur l'un des principes qui doivent imprégner cette commission: la protection des compétences du Québec dans le contrôle de son secteur financier. Je pense qu'il y en a quelques-uns qui ont traité de ce sujet-là et je pense que ça vous tient à coeur, à juste titre.

M. Gendron: Toutes nos questions portent...

M. Massé (Guy): C'est vrai. Ha, ha, ha! C'est ça. Alors, on va tenter de vous apporter notre vision. Il est important de souligner que le Québec a su implanter des assises solides pour le contrôle du secteur de l'assurance – ça, c'est assez évident – sa juridiction en cette matière n'ayant jamais été remise en question nulle part par les tribunaux. Par contre, les assises de la province dans le secteur des valeurs mobilières sont plus précaires et sensiblement réversibles. On dit que le marché... Parce que le marché glisse de Québec vers Toronto. Et puis, à Toronto, on dit: Le marché glisse de Toronto vers New York. Ça, c'est les réalités du marché. Le fait que les organismes d'autoréglementation des commissions de valeurs mobilières soient pancanadiens constitue un environnement propice à la formation d'une commission nationale. Je pense que ça peut contribuer... Le Québec pourrait ainsi perdre le contrôle réel de cet important secteur financier de notre économie, ce qui, à notre avis, serait inconciliable avec les intentions de ce gouvernement.

Vous savez, de façon à réaffirmer la juridiction du Québec en matière de distribution de produits financiers, nous proposons donc au gouvernement un mécanisme d'autoréglementation encadrant toutes les formes de distribution de produits financiers, tous les canaux de distribution: le canal de distribution par intermédiaire de marché, le canal de distribution directe – on se réfère au publipostage, télémarketing et autres – puis le canal de distribution via Internet – parce que Internet, c'est un monde très à part, puis ça va requérir, évidemment, un encadrement très adapté à ces particularités. Cet instrument d'intégration regroupant manufacturiers, distributeurs et consommateurs pourra créer une véritable synergie de tous les secteurs et de tous les acteurs, on le sait, trop souvent en concurrence les uns avec les autres. Aussi, vous avez dû découvrir ça en cours de route, j'imagine.

Le Québec a été un leader et doit le demeurer. Il doit reprendre les devants et se faire l'initiateur de réformes essentielles, en matière, cette fois, de distribution de tous les produits financiers. Je dis souvent : Redevenir un leader, parce qu'on a été rattrapé. Ce qu'on a fait, les créations, la loi 134, le Conseil des assurances... Maintenant, en Ontario, ils sont en train de le mettre en place, leur nouveau conseil. Il ne va rester que les Maritimes qui travaillent pour en créer un pour les quatre provinces. Alors, ça a pratiquement couvert tout le Québec. C'est pour ça que je dis qu'il est temps de reprendre les devants, au Québec, et de faire une étape plus loin. L'industrie nécessite un instrument souple. Et j'invite le gouvernement à nous mettre – de l'industrie – d'urgence au travail pour relever avec vigueur, rigueur et cohérence le défit de l'autoréglementation réellement assumée pour toute l'industrie.

Et, ici, je voudrais vous dire ce que je pense... Ça signifie quoi, dans notre tête, l'autoréglementation? Parce que vous avez entendu dire, les compagnies ont dit: L'autoréglementation, c'est les compagnies qui se réglementent elles-mêmes. Ou vous avez entendu dire des intermédiaires de marché: L'autoréglementation, c'est qu'on se réglemente sans les compagnies. Alors, pour nous, du Conseil, l'autoréglementation de l'industrie doit se faire à partir de tous ceux qui ont une influence sur le marché de la distribution de l'assurance. L'autoréglementation, ça signifie, dans notre esprit, se rendre responsable, se rendre responsable ensemble pour protéger adéquatement le consommateur. Et c'est par la force de la concertation de tous les intervenants qu'on va parvenir à une solution.

Nous croyons qu'une véritable autoréglementation aura les effets suivants: d'abord, un, protéger mieux le consommateur, quelle que soit sa façon de se procurer le produit, parce qu'à ce moment-là on réglemente l'ensemble de la distribution des produits, tous les produits; protéger la juridiction du Québec, parce que son pouvoir de réglementation ne sera pas fractionné en plusieurs organismes qui souvent se font des luttes entre eux; troisièmement, stimuler et inciter l'industrie à la distribution des produits financiers et innover pour mieux adapter aux besoins du consommateur. Je pense que l'industrie doit avoir un cadre pour pouvoir innover, créer, puis être dynamique.

Je suis conscient de la complexité de la problématique à laquelle vous faites face aujourd'hui. Et, bien humblement, nous sommes convaincus que nous pouvons apporter notre humble pierre à la construction d'une solution durable. Et puis on est prêt à contribuer et à participer à tout forum que vous voudrez bien mettre de l'avant pour aller dans cette direction. Alors, je suis prêt à répondre à vos questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. Massé, de cette présentation et des recommandations très pointues. Je laisserais la parole au député de Crémazie.

M. Campeau: Mme Beaulieu, Mme Blouin, M. Massé, merci d'être venus réfléchir avec nous aujourd'hui, comme d'autres mouvements le font, comme d'autres organismes aussi. On apprécie beaucoup votre dynamisme, M. Massé. Et, devant un si bel exposé ou votre rapport si complet, ce qu'on peut dire, c'est que vous allez sûrement être réinvités quand va venir le temps de réviser la loi 134, cet été, parce que plusieurs de vos propos font en effet appel à cette loi 134. Là-dessus, M. le Président, on a avec nous autres le député de Charlevoix, qui est un expert en assurance. Peut-être qu'on pourrait lui passer la parole pour qu'il puisse continuer certaines questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je n'ai aucune difficulté avec ça, M. le député de Crémazie. Donc, allez, M. le député de Charlevoix.

Une voix: ...été réinvité.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): Alors, bonjour. La première question que j'aimerais vous poser, parce que, moi, je suis plus dans la Commission des valeurs mobilières aujourd'hui que sur la loi 134, et une très grande partie de votre rapport concerne vraiment la loi 134... J'en suis rendu à me demander si on va devoir mettre sur la glace la conclusion du rapport quinquennal des valeurs mobilières, avec ce que j'ai entendu hier et ce que j'entends ce matin; mais, en autant que je suis concerné, ce n'est pas mon intention.

Une première question, c'est quand on dit... Vous en avez parlé un petit peu, mais j'aimerais vous entendre beaucoup plus sur l'harmonisation et la coopération concernant la compétence du Québec, avant de toucher à l'autre élément. Vous n'avez pas élaboré suffisamment à mon goût là-dessus. Comment on peut s'assurer que le Québec garde sa compétence dans ce champ-là?

(12 h 20)

M. Massé (Guy): D'accord. On sait que les assises sur lesquelles repose la législation sur le monde de l'assurance, c'est très clair, ça n'a jamais été contesté nulle part par les cours fédérales. Je pense que c'est un des domaines – Dieu soit loué! – qui n'a pas encore été contesté par le fédéral, de sorte que les lois sont complètes en assurance, je pense, tant les lois qui encadrent les compagnies que la distribution de l'assurance, comme telle.

Alors, ce qui se produit. On sait qu'actuellement on a une assise solide. On peut construire à partir de cette assise solide, je dirais un organisme central qui intégrerait toute la réglementation de la distribution des produits financiers sur cette assise-là, parce que l'on sait qu'on n'aura pas d'interférence pour pouvoir tantôt nous voir envahir par la réglementation fédérale qui voudrait essayer de s'infiltrer, si on veut, dans la distribution de l'assurance.

M. Bertrand (Charlevoix): Qu'est-ce que...

M. Massé (Guy): Alors, on pense que c'est solide. Évidemment, on constate, par comparaison, que la situation est beaucoup plus fragile du côté de la Commission des valeurs mobilières, c'est bien évident. On se dit: S'il y a des choses à regrouper ensemble, le monde de l'assurance a des assises extrêmement solides, sur le plan des pouvoirs du Québec, alors, à ce moment-là, construisons à partir de ce qui est plus solide. Est-ce que, peut-être...

Mme Drouin (Nathalie): Peut-être en ajoutant... La position du Conseil est à l'effet que...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme Drouin.

Mme Drouin (Nathalie): Oui, je m'excuse. La position du Conseil est à l'effet qu'en respectant la distinction assurances et valeurs mobilières on renforce en quelque sorte l'assurance, puis on empêche de la mettre sous un secteur financier qui, malheureusement, est peut-être en condition de plus grande vulnérabilité, à l'heure actuelle. La position du Conseil, c'est de garder la distinction assurances et valeurs mobilières.

M. Bertrand (Charlevoix): Je vous avoue que j'ai de la misère à vous suivre. J'ai de la misère à vous suivre parce que, d'une part, je vous entends parler de garder ça distinct et, d'autre part, je vous entends parler de faire un organisme qui serait tout-puissant, qui, si je comprends bien, laisserait des pouvoirs différents à la Commission des valeurs mobilières. J'aimerais juste que vous me replaciez comme il faut, là. Moi, si je comprends tout ce que vous dites jusqu'à maintenant, même pour l'harmonisation au niveau du Québec via le Canada, ce serait un nouvel organisme ou une nouvelle organisation, une nouvelle structure, différente de la Commission des valeurs mobilières. Vous dites: D'une part, la Commission des valeurs mobilières a des pouvoirs restreints...

M. Massé (Guy): Disons... Je peux essayer de... Si vous permettez...

M. Bertrand (Charlevoix): Avant que vous y alliez, est-ce que mon inquiétude est partagée par tout le monde ou si... Si je suis le seul à partager ça, je ne poserai pas la question.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Il y a une inquiétude que je ne partage pas avec les membres du Conseil des assurances de personnes, c'est l'aspect de la vulnérabilité de la niche constitutionnelle québécoise en matière de valeurs mobilières. Je trouve qu'elle n'est pas plus vulnérable en matière de valeurs mobilières qu'elle ne l'est en valeurs d'assurances.

M. Bertrand (Charlevoix): Alors, je reviens. Si je comprends bien, là, la Commission des valeurs mobilières, elle resterait, mais elle resterait avec un pouvoir différent. Il y aurait une organisation, un nouvel organisme. C'est de ça que vous parlez?

M. Massé (Guy): Je pense qu'on ne veut pas commencer à établir et construire ici une structure. Où nous en sommes, l'idée que nous voulons avancer, c'est qu'il y ait un organisme central qui encadrerait toute la distribution... Là, je ne parle pas d'autre chose que de la distribution des produits...

M. Bertrand (Charlevoix): À la fois...

M. Massé (Guy): ...les produits...

M. Bertrand (Charlevoix): ...qui concerne les valeurs mobilières et qui concerne les autres produits.

M. Massé (Guy): ...qui engloberait tous les produits financiers.

M. Bertrand (Charlevoix): On s'entend bien: valeurs mobilières, assurance-vie, assurance de dommages, etc?

M. Massé (Guy): Dans un premier temps, ça pourrait englober une partie... Éventuellement, ça pourrait englober possiblement tous les produits financiers distribués par intermédiaire ou autrement.

M. Bertrand (Charlevoix): Oui, mais, compte tenu qu'il n'y a pas d'organismes, à l'heure actuelle, qui font ça, donc ce à quoi vous pensez, c'est à une nouvelle structure. Non?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme Beaulieu a l'air d'avoir un désir de répondre à cette question-là.

Mme Beaulieu (Myrella): On aimerait, au Conseil, ne pas aborder la question d'abord par la structure. On se dit: Regardons donc les résultats que nous voulons atteindre: la protection du consommateur, l'évolution du marché de la finance, etc. On dit: Il y a des produits qui sont différents, il y a une explosion des produits dans le domaine de l'assurance, un; mais, aussi, respectons la différence des produits, faisons de l'information et de l'éducation auprès du consommateur pour qu'il soit plus en mesure de faire des choix; mais, aussi, harmonisons la distribution, simplifions l'encadrement, l'autoréglementation, etc.

Ce qui est arrivé, c'est que les institutions financières se sont décloisonnées, les produits se sont complexifiés. On s'en va vers la multidisciplinarité, mais on a érigé beaucoup de structures et on a cloisonné, au niveau des structures d'encadrement. Alors, le Conseil ne veut pas préconiser une grosse structure centrale ou un organisme central; il veut travailler sur les contenus, sur le fond. Et on dit: Les structures tomberont d'elles-mêmes, à un moment donné, et parlons plutôt d'harmonisation de la distribution et de protection du consommateur, une protection intelligente.

M. Bertrand (Charlevoix): Je comprends la question d'harmonisation. Je comprends aussi la protection du consommateur. Je comprends aussi que tout le monde veut protéger le consommateur. Je comprends aussi que tous les groupes qui viennent devant nous autres semblent posséder à peu près totalement la vérité. Chacun pense qu'il a ce qu'il faut pour les autres. Mais, quand je lis votre document, je lis qu'il y a une structure proposée. Puis, cette structure-là, je connais le domaine et je ne la retrouve nulle part. Donc, vous parlez d'une nouvelle structure. Si vous parlez d'une nouvelle structure, qu'est-ce qu'on fait des structures existantes?

M. Massé (Guy): Je vais vous dire une chose. Quand on a commencé nos discussions, au Conseil – puis, au Conseil, nous avons les compagnies et les intermédiaires – la première chose qu'on a faite, on a dit: Si vous voulez et si on veut réellement intelligemment, objectivement élaborer, concevoir de quelle façon on va encadrer la distribution des produits financiers en répondant vraiment aux besoins du consommateur, on va oublier les organismes en place.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que, quand vous avez fait ça, vous pensiez en fonction de la Commission des valeurs mobilières où vous êtes aujourd'hui ou en fonction de la 134 à venir, ou en fonction de tout ça?

M. Massé (Guy): Moi, je pense que, quand on commence à vouloir se limiter dans notre réflexion pour accommoder toutes les structures, c'est peut-être la mauvaise façon d'entreprendre la réflexion. On a dit au départ: On va essayer de faire abstraction de ce qui existe; après ça, on verra comment ça se concilie, tout ça. Une fois qu'on aura établi, si on veut, les grands principes, on verra comment les organismes peuvent s'adapter, s'ajuster, se fondre, et ainsi de suite, pour répondre aux réels besoins d'aujourd'hui et de demain. Alors, c'est pour ça que nous sommes arrivés à la conclusion qu'il nous fallait regrouper et mettre sous un même parapluie tous ceux qui sont impliqués dans la distribution des produits, et ça comprend, évidemment, ceux... Parce que, dans la distribution des produits, vous avez le manufacturier et vous avez le distributeur direct, et puis vous avez...

M. Bertrand (Charlevoix): Mais, pour le jargon, pour ceux et celles qui ne connaissent pas ca, et ce n'est pas facile – comme disait le député de Crémazie hier, c'est difficile à comprendre, ce jargon-là – je veux être bien sûr qu'on s'entend bien. Quand vous parlez des distributeurs, vous parlez de la Commission des valeurs mobilières? Est-ce que vous parlez d'eux autres? Pour ceux qui sont alentour de la table et qui vont devoir prendre des décisions, tout à l'heure... On est devant l'analyse du rapport quinquennal de la Commission des valeurs mobilières. Et je pense, moi, qu'on déborde beaucoup, et je comprends pourquoi, parce que, dans la 134, il y a quand même des éléments proches.

Mais vous dites: Non, on ne parle pas d'une nouvelle structure, et vous parlez d'un organisme qui regroupe tout le monde. Puis, «qui regroupe tout le monde», pour l'information des députés, ici, bien, c'est la Commission des valeurs mobilières, c'est deux conseils en assurance, un de personnes et un de dommages, c'est des associations de vie, de courtiers d'assurances, de planificateurs, de conseillers, etc. Et vous parlez, en plus de ça, de joindre à ça les compagnies qui sont les assureurs – au niveau des valeurs mobilières, ce n'est pas toujours des assureurs, c'est des banques ou des caisses – puis le consommateur.

M. Massé (Guy): On n'est pas là.

M. Bertrand (Charlevoix): Alors, pour les députés qui ont à faire des recommandations au ministre...

M. Massé (Guy): On n'est pas là du tout. Je regrette...

M. Bertrand (Charlevoix): Vous n'êtes pas là?

M. Massé (Guy): ...vous poussez bien loin notre réflexion. On n'est pas là du tout.

M. Bertrand (Charlevoix): Bien oui, mais...

M. Massé (Guy): On en est, nous, à établir le concept qu'il y ait une table de réglementation qui regroupe tous ceux qui interviennent dans le marché de la distribution.

M. Bertrand (Charlevoix): Bien, tous ceux qui interviennent, puis une table...

(12 h 30)

M. Massé (Guy): Puis, de quelle façon ça pourrait se faire? Il y a bien des façons dont ça pourrait se faire. Il pourrait y avoir des ponts avec la Commission des valeurs mobilières pour certaines choses. Ça peut se faire de bien des façons. Moi, je ne veux pas, ici, commencer à entreprendre un débat qui va venir plus loin, à la 134.

Ici, on est venu vous dire, d'abord, un point: Les fonds distincts, ça ne devrait pas être. Je pense que les trois quarts de mon message ont porté là-dessus: les fonds distincts ne devraient pas être sous la Commission des valeurs mobilières, parce que le consommateur est tout à fait bien protégé par le monde de l'assurance, par toutes les garanties qu'on lui offre. Alors, ça, c'est, d'abord et avant tout, le point principal, et le deuxième point, c'est l'avenue de regrouper tout ce monde-là. Parce qu'on voit que ça n'a pas de bon sens, on constate qu'il n'y a pas de lien. On veut sortir, puis on veut harmoniser? Il faut regrouper les gens de l'industrie ensemble.

M. Bertrand (Charlevoix): Mais on peut parler de regrouper sans carrément parler de nouvelles structures.

M. Massé (Guy): Moi, je pense que c'est prématuré de commencer à parler des structures.

M. Bertrand (Charlevoix): C'est prématuré, mais vous...

M. Massé (Guy): Moi, je dis...

M. Bertrand (Charlevoix): ...le mettez là-dedans.

M. Massé (Guy): ...commençons la réflexion.

M. Bertrand (Charlevoix): Bien non, mais vous le mettez là-dedans.

M. Massé (Guy): On n'a pas parlé de structures là-dedans. On a...

M. Bertrand (Charlevoix): Bien...

M. Massé (Guy): ...fait une réflexion sur regrouper, mettre ensemble les gens qui influencent le marché. On a vu toute l'incohérence. On a vu toute l'incohérence dans tous les rapports de tous ceux qui nous ont dit tous les problèmes que crée la multidisciplinarité, le fait qu'il n'y ait d'arrimage nulle part, le fait de tous ces organismes séparés qui essaient de faire les choses ensemble.

M. Bertrand (Charlevoix): Moi, là, je m'excuse, mais il y a une très grande partie, dans ce que vous traitez, qu'on va retrouver à la 134. Je pense que vous allez garder une bonne partie du mémoire puis une bonne partie des argumentations, parce que, effectivement, à la 134, c'est clair qu'on va devoir faire ce débat-là. Ça m'apparaît assez évident. Mais pour la Commission des valeurs mobilières, qui siège aujourd'hui...

M. Massé (Guy): Oui.

M. Bertrand (Charlevoix): ...qui a un rapport pour que le ministre... C'est-à-dire, il y a des décisions que le ministre doit prendre pour la protection du consommateur. Vous dites qu'il y a une partie des fonds mixtes, par exemple, qui ne devrait pas être là, mais quel est l'élément important que...

M. Massé (Guy): Voulez-vous que je...

M. Bertrand (Charlevoix): ...le ministre doit savoir sur la Commission des valeurs mobilières?

M. Massé (Guy): Bon, M. Bertrand, je vais essayer de vous résumer ça le plus succinctement possible pour ne pas qu'on me prête des intentions que je n'ai pas. D'abord...

M. Bertrand (Charlevoix): Je lis, là.

M. Massé (Guy): Oui, je comprends, mais...

M. Bertrand (Charlevoix): Je n'interprète pas ce que vous dites. Je lis.

M. Massé (Guy): ...il y a des façons de voir les choses.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix, si vous voulez laisser répondre M. Massé.

M. Massé (Guy): Oui. Sans ça, je vais faire de la politique, moi aussi. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On s'aperçoit qu'il est en train de vouloir vous faire pomper l'huile, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): On a l'avantage d'être deux bons amis, ça fait qu'il n'y a pas de problème.

M. Massé (Guy): Si M. Bertrand veut me donner deux minutes, je vais essayer de résumer ma pensée. C'est la suivante: S'il vous plaît, n'englobez pas et n'ajoutez pas à la complexité que nous connaissons actuellement dans le monde de l'encadrement des intermédiaires en encadrant les intermédiaires, les fonds distincts par la Commission, où on exigerait que 13 000 personnes aient encore des démarches puis un autre organisme d'encadrement. N'ajoutez pas à la folie des organismes trop nombreux qui existent actuellement. Premier point, c'est celui-là.

Le deuxième point, c'est: Soyons à l'avant-garde au Québec. On a été rattrapé par l'industrie ces dernières années. Tout le monde a à peu près des structures comme les nôtres. Il est temps d'innover. Il est temps d'innover maintenant en se positionnant pour l'avenir. Pas seulement régler les problèmes d'hier, en se positionnant pour l'avenir. Moi, je vous dis une chose: La distribution des services financiers va être révolutionnée dans les années qui s'en viennent.

Alors, moi, je dis: Assoyons-nous, les gens de l'industrie. Donnez un mandat aux gens de l'industrie, tout le monde de l'industrie ensemble, de définir de quelle façon on peut s'autoencadrer, on peut s'autoréglementer, protéger le consommateur.

Je vais vous donner un exemple de ce qui peut être fait. Je reviens juste à l'Ontario, ce qu'ils ont fait dans la loi. Ils ont sorti un règlement où c'est très simple. On dit que les compagnies sont responsables du «duty of care». Alors, juste ça: «duty of care». Ça, ça signifie que la compagnie devient responsabilisée dans le choix de l'intermédiaire, responsabilisée dans sa formation, devient responsabilisée dans les outils de travail qu'elle utilise. On exige des compagnies une responsabilisation additionnelle.

Alors, ce que je veux dire, c'est qu'on voit que le mouvement se fait de ne pas seulement responsabiliser l'intermédiaire, il faut responsabiliser tous les intervenants pour protéger le consommateur. Moi, je dis: Tout ça, ça fait partie d'un bloc. Ça se travaille ensemble, puis il faut que les compagnies travaillent ensemble, que l'industrie intermédiaire travaille ensemble à concevoir une structure. Je ne sais pas laquelle, une structure centrale.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Massé. M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais remercier les membres du Conseil des assurances de personnes de leur mémoire et du rapport du mémoire qu'ils nous ont fait, qu'ils nous ont signifié.

Je disais tout à l'heure, lorsque le député de Charlevoix a commencé son questionnement et qu'il nous a posé une question, que je ne partageais pas le point de vue du Conseil concernant la vulnérabilité d'un véhicule financier par rapport à un autre véhicule financier, que je ne trouve pas plus vulnérable, par rapport à celui des assurances, celui des valeurs mobilières.

Que le gouvernement canadien ait dans son carquois une idée que nous avons, hier, sur le plan du Québec, rejetée, et qui avait été rejetée d'ailleurs dans le plan quinquennal il y a deux ans, deux ou trois ans, ça n'entache en rien la position très forte, je dirais, du Québec sur le plan constitutionnel en matière d'institutions financières; du Québec et de toutes les provinces en matière d'institutions financières.

En lisant votre document... On vient d'avoir une discussion intéressante sur des questions de structures. Mme Beaulieu, je pense, disait que les structures devront tomber d'elles-mêmes. Je veux bien, moi, que les structures tombent d'elles-mêmes et qu'elles soient comme la génération spontanée: tout d'un coup on a des structures et...

Hier, on avait d'autres groupes qui nous disaient: Bon, on aimerait ça être entre l'IGIF et la Commission des valeurs mobilières. On avait une vision peut-être un peu plus claire de ce que l'on envisageait pour s'autoréglementer éventuellement. Puis, quand vous répondez aux questions du député de Charlevoix, il me semble que vous vous éloignez de ce que votre mémoire dit en page 14, lorsque, sur la question des structures que le député de Charlevoix vous pose, vous dites: «Le Conseil propose que l'encadrement de la distribution des services et produits financiers soit assumé par une commission publique autonome à l'extérieur de la structure gouvernementale.» Ça m'apparaît clair, ça. Et: «Cette commission, supervisée par l'État, serait chargée de l'application de la loi.» Je comprends moins bien la supervision par l'État d'une structure à l'extérieur du gouvernement ou paragouvernementale, mais, enfin, c'est à vous de me l'expliquer, maintenant.

M. Massé (Guy): D'abord, ce que nous avions à l'esprit, que nous avons toujours à l'esprit, c'est qu'il y ait un organisme d'autoréglementation qui ne soit pas un organisme de fonctionnaires, qui soit un organisme composé de gens de l'industrie, à tous les niveaux de l'industrie, et un organisme qui s'autoréglemente, qui pourra être accroché – on ne l'avait pas défini – que ce soit en-dessous de l'IGIF, sous le ministre des Finances ou ailleurs. On n'en était pas rendu là.

M. Chagnon: Donc, supervisé par l'État. Vous voulez dire quoi?

M. Massé (Guy): Supervisé par l'État, parce qu'il n'y a aucun organisme... C'est normal, un organisme qui reçoit une délégation d'autorité doit répondre... Comme, exemple, le Conseil des assurances, que je préside. Ce Conseil-là est un organisme dont les gens sont nommés par l'État; les membres sont nommés par l'État. Les coûts de l'organisme sont défrayés par les intermédiaires et les compagnies, mais, vu que nous avons eu une délégation de pouvoir du gouvernement par la loi, nous faisons rapport à l'Inspecteur de toutes nos activités.

Alors, nous sommes, de cette façon-là, supervisés par l'État. C'est la beauté de ce mécanisme-là qui pourrait être élargi, qui ne coûte pas un sou aux consommateurs et qui permet à l'État d'avoir quand même un contrôle. Mais vous laissez aux gens du milieu le devoir de protéger le consommateur et les pouvoirs de le faire, mais tout en conservant, si on veut, le dernier droit de regard.

(12 h 40)

M. Chagnon: Deux autres questions courtes et rapides, M. le Président. La première concerne le statut – vous en parlez dans votre document – du planificateur financier. On a eu des discussions, depuis hier, sur le planificateur financier et son objectivité lorsqu'il vend un produit financier quelconque, de toute façon. On estime, comme l'ACCOVAM... L'autre école de pensée, comme on le disait hier, ferait en sorte de rechercher une objectivité plus grande chez celui qui s'affuble du titre de planificateur financier. Est-ce que c'est une opinion que vous partagez?

M. Massé (Guy): La question du planificateur financier, ce que nous croyons, c'est qu'il doit y avoir deux types de planificateurs financiers: un à honoraires et puis un qui puisse travailler à offrir des produits financiers.

M. Chagnon: Un planificateur-conseil, celui-là, comme l'ACCOVAM le suggère.

M. Massé (Guy): C'est ça, c'est dans cette direction-là que nous allons, oui. Parce que c'est exact, pour le consommateur, c'est peut-être très difficile de s'y retrouver.

M. Chagnon: O.K. Et ma dernière question – vous l'avez soulevée vous-même et on ne la retrouve pas dans votre document – c'est la «désintermédiatisation». Je pense que je l'ai dit vite, mais, en tout cas, j'ai essayé de le dire le plus vite possible pour que ça s'enregistre correctement. Vous avez parlé d'Internet, etc. Comment vous vivez ça, chez vous? Vous avez parlé d'autoréglementation. Comment vous voyez ça, comme autoréglementation? Hier, on était un peu au bout de nos moyens à cet effet-là. Si vous avez une solution miraculeuse, on serait bien enchanté de l'apprendre et de l'entendre.

M. Massé (Guy): Je pense que les problèmes que vous vous posez, nous nous les posons tous. Je n'ai encore rencontré personne qui avait des solutions à tout ça. Mais il m'apparaît évident que toute la réglementation qui va encadrer... C'est vrai que la distribution de l'assurance est appelée à se transformer radicalement. C'est vrai qu'autrefois on retrouvait 95 % ou 99 % de l'assurance qui était vendue par des intermédiaires de marché. Alors, ça n'était pas compliqué, on réglementait les intermédiaires, puis le reste était réglementé. Tandis qu'aujourd'hui ça n'est plus le cas. Puis on sait que les canaux de distribution prennent de l'ampleur et vont devenir de plus en plus présents et obtenir une part de marché plus grande.

La position qu'on a, ce n'est évidemment pas de réprimer ces canaux de distribution, d'essayer d'être protectionniste puis d'empêcher la vente de produits d'assurance qui ne soient pas...

M. Chagnon: Selon vous, c'est un marché qui s'en va grandissant?

M. Massé (Guy): C'est un marché qui s'en va grandissant, puis c'est un marché qu'il faut encadrer, c'est bien évident, de façon différente: par de l'information au consommateur, par de l'éducation, par une discipline du distributeur dans sa façon de présenter le produit, la publicité. Il faut réglementer ça. Je pense que toute cette réglementation-là, de tous les canaux de distribution, ça doit se faire sous un seul chapeau. Ça, c'est le message que je veux vous laisser. Si on veut qu'il y ait de la cohésion, si on veut qu'il y ait de l'harmonisation dans tout ça, si on veut qu'il y ait de la logique pour le consommateur, ne mettez pas tout ça dans des petites boîtes serrées et différentes, des petites boîtes qui ne se parleront pas. Moi, je dis qu'il faut mettre ça ensemble, dans un seul organisme. Qu'on règle tout cet encadrement-là.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le président. Je remercie en même temps le Conseil.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Il y a le député d'Abitibi-Ouest qui a demandé la parole. Après, ça sera le député de Crémazie.

M. Gendron: Oui, rapidement. Un premier commentaire. Ça a été fait, mais je le rappelle. Je pense qu'en analysant votre mémoire un peu plus à fond on constate qu'il y a beaucoup de suggestions qui sont faites qui ont davantage de portée sur le vocable de la Loi sur les intermédiaires de marché que sur l'autre, qui est toute la question de la Loi sur les valeurs mobilières. Mais c'est important de rappeler ça, parce que je pense qu'à l'autre étape vous serez également, comme ça a été dit, très utiles.

Commentaire également. Je vous écoutais attentivement. Vous avez répété à plusieurs reprises que vous invitiez le Québec à mettre un instrument souple d'autoréglementation de l'industrie. Et, ça, ça doit se faire avec tous; ça vous rendrait responsables. Ça se fait par la concertation. Donc, autrement dit, sur les objectifs, on n'a pas bien, bien de troubles, parce qu'en bout de ligne il faut viser à ce que le consommateur s'y retrouve mieux et ait plus de sécurité. Mais je n'ai pas eu beaucoup de détails sur l'instrument. J'ai de la misère à visualiser l'instrument dont vous parlez. Je ne sais pas si vous comprenez.

C'est très clair. Vous avez été très précis... Non. Je sais bien, c'est une image, madame, mais ce n'est pas facile à visualiser, je n'en disconviens pas, puisque vous avez conclu adéquatement en disant: On est dans un cadre compliqué, c'est complexe. Mais vous avez ajouté, en conclusion: Nous sommes là. Comptez sur nous. Nous, on connaît ça.

La question que je vous pose sincèrement: Il y «a-tu» moyen de voir un peu plus le type d'instrument, le comment, le pourquoi?

M. Massé (Guy): Je pense qu'à ce moment-ci... On va y arriver sur la loi 134. On va évidemment apporter beaucoup plus de détails là-dessus. Aujourd'hui, on essaie de s'en tenir au principe. Je pense que c'est au principe, à mon sens, qu'il faut réfléchir. Je pense que, si on arrive à concevoir de façon intelligente, on arrivera bien à créer un fonctionnement qui soit... Ça m'apparaît...

M. Gendron: Touchons-en deux, principes, rapidement. Je termine là-dessus moi aussi. Une question sur la divulgation, parce que, sans revenir là-dessus, il y a des tenants d'une thèse, de l'autre. Il y a plusieurs modes de divulgation de la rémunération. Est-ce que vous avez réfléchi là-dessus? Est-ce que vous favorisez un mode plutôt qu'un autre? On y va par collectif ou individuellement? Avez-vous une idée là-dessus?

M. Massé (Guy): La divulgation des commissions?

M. Gendron: Oui.

M. Massé (Guy): Nous aussi...

M. Gendron: Bien, pas juste des commissions, toute la divulgation de la rémunération...

M. Massé (Guy): C'est ça.

M. Gendron: ...des dirigeants...

M. Massé (Guy): Je comprends.

M. Gendron: ...sur les offreurs de services financiers.

M. Massé (Guy): Oui, on a commencé à y réfléchir. On a commencé à y réfléchir, et puis on va continuer de le faire. Vous savez que ça a beaucoup d'importance. Ça a beaucoup d'impact...

M. Gendron: Ça a de l'impact, oui.

M. Massé (Guy): ...pour l'industrie. Puis je pense que, à vous répondre, il faut y arriver. Ça, c'est certain. Maintenant, il s'agit de pouvoir donner le temps à tout le monde de se préparer pour le vivre, ce changement-là.

M. Gendron: Ce que vous dites: Ça prend quelque chose de neuf, mais on n'est pas rendu là. On ne le sait pas. On réfléchit encore là-dessus.

M. Massé (Guy): C'est inévitable. Je vous dis: Ça, c'est inévitable. On est en train de préparer l'industrie à aller dans cette direction-là.

M. Gendron: Vous avez également dit, puis, je pense, d'une façon très adéquate – là, je ne sais pas si, encore là, c'était une conclusion, mais c'était sûrement un commentaire de votre part: De grâce, gouvernement, n'ajoutez pas. Soyez innovateurs parce que les autres nous ont rattrapés. On avait un pas d'avance, puis on ne l'a plus et il faut s'adapter. Et ça, l'adaptation, exige de nombreux changements. Est-ce que ça pourrait aller jusqu'à vous «autoputscher»?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Massé (Guy): Nous autres, si c'est ça, oui, absolument. Écoutez, nous autres, on l'a dit dès le départ dans nos recommandations. On a dit: Dans le statu quo, si on ne change pas grand-chose, vous n'avez pas le choix que de garder le Conseil. Il m'apparaît impensable que vous ne gardiez pas le Conseil; ça serait un non-sens. Mais, si vous faites des changements, nous, on a dit: On disparaît.

M. Gendron: Non, c'est très sérieux, parce que, moi, c'est ce que j'ai...

M. Massé (Guy): C'est un fait.

M. Gendron: C'est ce que j'ai compris. Si le gouvernement travaille, selon vous, correctement, et que les changements sont à ce point significatifs, votre raison d'être est moins requise. Vous avez moins raison d'être là. C'est ça que vous dites.

M. Massé (Guy): Parce que, actuellement, nous, on est le seul organisme qui représente les compagnies, les intermédiaires, puis le consommateur. Nous, on pense que, si on veut vraiment être représentatif de ce que peut être de l'autoréglementation, on pense que c'est ça. À ce moment-là, on joue notre rôle, puis je pense qu'on le joue très bien. Ce n'est pas facile, mais on le joue très bien. Puis on pense que cette idée-là pourrait être poussée plus loin. On va disparaître. Mais cette idée-là, poussée plus loin, pourrait devenir un bel organisme où tous les impliqués y seraient, puis je pense qu'on ferait un très bon travail.

M. Gendron: Une offre de collaboration de gens qui sont prêts à se sacrifier, en tout cas, dans mon livre à moi, mérite d'être entendue. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Oui. Ça va être court, M. le Président. Quand vous parlez de disparaître, vous parlez de vous, là, vous ne parlez pas de vos deux adjointes, là?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Massé (Guy): Ha, ha, ha!

Mme Beaulieu (Myrella): Est-ce qu'on doit répondre?

M. Massé (Guy): Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beaulieu (Myrella): On fera application ailleurs. Ha, ha, ha!

M. Massé (Guy): Ha, ha, ha!

M. Campeau: Bon. Mais ma question s'adresse aux trois, en fait, et ça va être très simple, ça va être un oui ou un non. Je suggère déjà la réponse.

Une voix: Allez-vous revenir au mois d'août?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Non. On a vu à la télévision, hier, que le ministre des Finances du fédéral, M. Martin, a dit qu'il avait consulté plusieurs institutions financières. Puis je ne sais pas si c'est plusieurs; je ne veux pas l'interpréter. Mais, en tout cas, ça semblait presque unanime que les institutions financières, au Québec, souhaitaient qu'il n'y ait qu'une seule Commission des valeurs mobilières et qu'elle soit évidemment centralisée à Ottawa. Est-ce que vous ou un de vous trois avez été consultés?

M. Massé (Guy): On n'a pas été consulté. Non.

Mme Beaulieu (Myrella): Non.

M. Campeau: Et vos adjointes non plus?

Mme Beaulieu (Myrella): Non.

M. Campeau: Je vous remercie. Merci de votre contribution.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, Mme Beaulieu, Mme Drouin et M. Massé de vous être donné la peine de présenter un mémoire, et je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprise à 15 h 12)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! Mesdames, messieurs, bienvenue. Cet après-midi, la commission du budget et de l'administration poursuit sa consultation générale et ses auditions publiques pour étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières.

Nous en sommes rendus à entendre les représentants du Barreau du Québec. Donc, j'inviterais Mme Vadboncoeur, probablement, à nous présenter les personnes qui l'accompagnent et, par la suite, à nous présenter son mémoire.

Je vous rappelle les règles de procédure: vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et le gouvernement a 20 minutes pour vous questionner, vous interroger, et l'opposition également. Si vous dépassez votre 20 minutes, il reste moins de temps pour vous questionner. Donc, à vous, Mme Vadboncoeur.


Barreau du Québec

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Merci, M. le Président. Messieurs... Je ne vois pas de madame, alors Messieurs... Ah! Je m'excuse.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Mme, MM. les députés...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si vous me permettez, Mme Vadboncoeur.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre est absent parce qu'il doit présider le Conseil des ministres cet après-midi. Donc, c'est pour ça que c'est M. Campeau qui remplace le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Merci. Je ne doute pas de la valeur du remplaçant, aucunement. Ha, ha, ha! Alors, je vous remercie de nous donner l'opportunité de nous prononcer sur cette question des valeurs mobilières. Le Barreau du Québec, étant reconnu pour se prononcer sur différents types de législations, notamment celles qui peuvent porter atteinte ou, en tout cas, affecter les droits des citoyens... Celle-ci, sous un couvert un peu plus droit des affaires, est aussi importante, je pense, que toute autre, alors le Barreau du Québec est encore heureux d'être présent parmi vous aujourd'hui.

Je me suis fait accompagner, pour présenter le mémoire, à ma gauche, par Me Gérard Coulombe, qui est avocat de pratique privée au cabinet Desjardins, Ducharme, Stein, Monast, à Montréal, et qui oeuvre depuis bon nombre d'années en droit des affaires, valeurs mobilières, etc., sur le plan national et international – Me Coulombe résumera, en premier lieu, le mémoire du Barreau et pourra ensuite répondre à certaines questions plus précises – à ma droite, par Me André P. Asselin, qui est également avocat de pratique privée au cabinet de Grandpré, Godin, de Montréal, et qui oeuvre également en droit des affaires.

Alors, ces deux représentants de notre comité sur les valeurs mobilières seront tout à fait disponibles pour répondre à vos questions une fois que Me Coulombe aura résumé le mémoire du Barreau. Je vous remercie.

M. Coulombe (Gérard): Merci, Mme Vadboncoeur. M. le Président, Mme, MM. les députés, comme vous aurez pu le constater, le mémoire du Barreau n'est pas d'une complexité effarante. Comme quoi les avocats peuvent, à l'occasion, lorsqu'on le leur permet, être simples et, je l'espère, relativement clairs. C'est peut-être parce que les responsables de la rédaction du rapport quinquennal ainsi que du document d'accompagnement avaient déjà fait un excellent travail en étroite symbiose, pour reprendre l'expression du président de la Commission des valeurs mobilières du Québec, avec la Commission.

Alors, ceci étant dit, je prendrai deux minutes pour vous résumer un tout petit peu certains points saillants de notre mémoire. La recommandation n° 1 du rapport quinquennal ainsi que la recommandation n° 3, qui se retrouvent aux pages 13 et 14, et 15 et 19 du rapport quinquennal, font état à la fois de l'appui ou de l'idée de l'intérêt d'harmoniser la législation des valeurs mobilières du Québec avec celles des autres juridictions, non seulement canadiennes, mais nord-américaines, mais, également, insistent sur la nécessité de réaffirmer, là où nécessaire, les compétences du Québec dans ce domaine.

Le Barreau – et j'espère que c'était très clair dans son mémoire – appuie à la fois les deux volets de l'approche. C'est-à-dire que, en tant que praticiens et en tant que personnes qui, comme membres du Barreau, devons préserver l'intérêt public et aider à le défendre, il est évident que l'harmonisation de la législation québécoise est importante. Cependant, je pense que, comme ça vous a sûrement été souligné depuis le début de cette commission parlementaire, harmonisation ne veut certainement pas dire uniformisation, et harmonisation ne veut pas dire non plus abandon de la compétence du Québec, ne veut certainement pas dire abandon des particularités distinctives du Québec, surtout dans certains domaines où les sociétés québécoises et les épargnants québécois ne sont pas dotés des mêmes caractéristiques que ceux du reste du Canada ou du reste de l'Amérique du Nord.

Et je me permettrais peut-être d'ajouter ou d'apporter à cet égard deux commentaires additionnels par rapport à ce qui apparaît dans le mémoire proprement dit. Le premier, c'est que nous nous sommes penchés, au groupe de travail du Barreau, sur la question de la divulgation des rémunérations des dirigeants, et je dois vous dire que nous partageons...

J'ai eu l'occasion de prendre connaissance, tout comme mes collègues, du mémoire de la Bourse de Montréal et de celui du Conseil du patronat du Québec, et je dois vous dire que, pour les raisons qui sont mises de l'avant dans ces mémoires, nous croyons en effet que le respect des épargnants, au Québec, et la nécessité de les bien renseigner sur la masse salariale de la direction ne demandent pas, ne requièrent pas la divulgation individuelle des rémunérations des cinq dirigeants les mieux rémunérés d'une société.

La place financière de Montréal, malheureusement, n'est pas celle de New York ni même celle de Toronto, et la quantité de PME qui oeuvrent au Québec et qui sont inscrites à la cote de la Bourse de Montréal nous semble amplement justifier qu'on ne se livre pas à ce qui pourrait bien devenir un exercice de voyeurisme plus qu'un exercice de véritable renseignement des investisseurs. Ce qui importe, c'est que l'investisseur sache, si, pour un chiffre d'affaires de 10 000 000 $, on paie 3 000 000 $ en rémunération, qu'on a un problème. De savoir exactement si M. Tartempion gagne 92 000 $ ou s'il en gagne 122 000 $ ne nous semble pas nécessairement être essentiel à la protection de l'intérêt du public.

Donc, encore une fois, à cet égard-là, nous ne voyons pas la nécessité pour la législation québécoise de s'uniformiser par rapport à celle de l'Ontario ou même à celle de New York, et nous serions plutôt d'accord avec une recommandation qui voudrait que la rémunération agrégée, c'est-à-dire la somme totale payée aux cinq plus hauts dirigeants, les cinq dirigeants les mieux rémunérés, soit divulguée de façon à permettre à l'investisseur de distinguer les sociétés qui paient trop grassement leur direction plutôt que celles qui les paient de façon plus sommaire ou plus simple.

Je signale qu'il faudrait, bien sûr, dans le contexte des recommandations du rapport de la Bourse de Toronto et également des lignes directrices de la Bourse de Montréal, que le comité de ressources humaines ou de révision ou de régie d'entreprise, dépendant de comment on l'appelle, divulgue la politique appliquée par la société dans l'élaboration de la rémunération de sa direction. Donc, quelle est la politique qui est mise de l'avant? Est-ce que c'est une rémunération de base, incitative, etc., fondée sur le rendement? Ça, je crois que ça doit être divulgué, et le Barreau appuie cette démarche-là.

(15 h 20)

Dernier volet ou deuxième volet de notre nécessité, à nos yeux, de réaffirmer la compétence du Québec. Je ne prendrai que deux minutes pour vous dire que le Barreau du Québec est loin d'être convaincu que l'intérêt public québécois appelle la création d'une commission nationale des valeurs mobilières, dont le siège social serait fort peu probablement situé à Montréal.

Par conséquent, nous croyons que les efforts qui ont été déployés par les autorités canadiennes en matière de valeurs mobilières, depuis plusieurs années, pour harmoniser leurs pratiques, pour simplifier leur fonctionnement répondent amplement aux besoins des marchés financiers. Au fond, la création d'une commission, même par voie de délégation de pouvoirs, n'apporterait pas nécessairement, loin de là, les bénéfices escomptés et pourrait être, au contraire, porteuse d'une perte de spécificité, d'une perte de sensibilité aux caractéristiques propres à nos marchés et à notre culture juridique autonome. Donc, le Barreau n'appuierait certainement pas la création de cette commission nationale.

Le deuxième point que nous soulevons dans notre mémoire concerne la simplification de l'examen des prospectus. Encore une fois, je crois que, comme le rapport quinquennal le propose, il serait opportun que l'on simplifie encore davantage, dans la mesure du possible, l'examen des prospectus à l'échelle du pays. Encore une fois, cela ne requiert pas une commission nationale. Il pourrait se développer à travers ou au sein des autorités canadiennes en matière de valeurs mobilières une façon d'opérer, qui est déjà d'ailleurs pratiquement en place, qui permettrait de simplifier l'examen des prospectus et d'en accélérer surtout l'examen.

Remarquez qu'il faudra, encore là, que la Commission des valeurs mobilières du Québec conserve son droit de retrait ou son droit, le cas échéant, de se pencher plus spécifiquement sur des problèmes qui lui paraîtraient se dégager d'un prospectus donné. Mais, sur le plan du concept, ce qui harmonise et simplifie nous paraît mériter notre appui, tout en respectant les spécificités.

Troisième volet, à la page 5 de notre mémoire, ce sont les planificateurs financiers. Je crois que, là-dessus, le document d'accompagnement fait bien ressortir le fait que cette question doit être revue dans le contexte général de la révision de la Loi sur les intermédiaires de marché. Qu'il nous suffise de dire, pour le Barreau, que le titre même de planificateur financier évoque un statut de professionnel ou de quasi-professionnel. En tout cas, quelqu'un qui se présente en disant: Je suis planificateur financier, encore un peu croirions-nous que c'est mieux que d'être avocat ou comptable agréé. Et peut-être l'est-ce, d'ailleurs. Ha, ha, ha! M. Chagnon, je vous en prie.

Quoi qu'il en soit, ce qui nous inquiète, si vous permettez, c'est que, si cette personne a également le pouvoir et l'autorité en vertu d'une réglementation ou d'une émission de permis ou d'une immatriculation diversifiée de vendre elle-même des produits, nous croyons que c'est là courtiser la tentation de manière bien forte, puisque comment élaborez-vous la meilleure planification financière pour un client si, par hasard – et c'est clairement un malheureux hasard – la planification idéale de ce client appelait l'achat d'un produit que vous ne vendez pas, alors que pour un petit 3 % de moins bon rendement on pouvait vendre dans ce portefeuille des titres que vous pouvez vous-même vendre? Donc, ce risque de conflit.

Je n'accuse personne, le Barreau n'accuse personne, nous disons simplement, lorsqu'il y a occasion de péché: Mon Dieu, qui sait, peut-être y aura-t-il péché ou, en tout cas, il y a apparence de risque de péché. Il nous semble donc qu'il est dans l'intérêt public d'éviter que des regroupements d'intermédiaires en vente de produits financiers tirent des revenus à titre de redevances sur des produits vendus tout en prétendant, en même temps, offrir des services avec une certaine indépendance à titre de planificateur financier.

L'autre volet consiste à un double volet qui traite des modes non judiciaires de règlement des litiges ainsi que des nouveaux droits qui pourraient être accordés aux petits investisseurs. À cet égard, nous rappelons simplement que le Barreau du Québec a mis en place, depuis longtemps déjà, un programme de formation en médiation en matière commerciale, et un nombre considérable d'avocats pourraient fort valablement, croyons-nous, agir dans le contexte de ces modes de résolution non judiciaire des conflits. Je crois que mon collègue, Me Asselin, va s'adresser à cette question de façon un peu plus spécifique dans quelques instants.

De même en ce qui concerne les droits des petits investisseurs, là où nous sommes bien d'accord pour que les droits des petits investisseurs soient protégés. J'ai eu l'occasion ce matin, à Montréal, de discuter quelques minutes avec une personne qui vous a entretenus – je crois que le mot est bon – hier, c'est-à-dire le président fondateur de l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec, M. Yves Michaud, un collègue de travail à plusieurs égards.

Je veux bien que les membres de l'Association, dont M. Michaud est le fondateur, jouissent de protection, mais disons que nous avons tout de même un certain inconfort avec le risque que les experts qui sont associés au financement des entreprises ne deviennent pas les garants de l'émission de valeurs mobilières et qu'on s'assure que leur responsabilité ne sera engagée que dans la mesure des services professionnels qu'ils ont rendus et non au-delà. Et, évidemment, on aura, là-dessus, l'occasion d'entendre Me Asselin, qui, je crois, élaborera sur ce volet-là.

Dans un autre ordre d'idées, grâce notamment au document d'accompagnement qui a été publié en avril 1996, je crois que nous aimerions, comme membres du Barreau, simplement nous arrêter deux minutes sur un autre point qui est prévu comme un nouvel enjeu, et il s'agit là de l'octroi du pouvoir réglementaire à la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Vous avez sûrement entendu de la part d'autres intervenants – c'est à la page 13 du document d'accompagnement – le fait que la Commission des valeurs mobilières du Québec tout comme les autres Commissions à travers le Canada ou les autres autorités en matière de valeurs mobilières à travers le Canada ont souvent travaillé au moyen d'instructions générales applicables par chacune des juridictions. Une décision d'un tribunal ontarien dans l'affaire Ainsley Financial Corp. a remis en doute la validité de cette façon de procéder, et il est donc envisagé ou pris en considération d'octroyer un pouvoir réglementaire à la CVMQ.

Encore une fois, le Barreau, je crois, ne peut qu'appuyer une démarche qui vise à asseoir davantage la légalité des gestes et des politiques et des instructions qui régissent le marché des valeurs mobilières. D'un autre côté, il nous faut être conscients du fait que la flexibilité demeure un élément important aussi dans ces domaines et qu'il n'est pas assuré que le processus réglementaire, à proprement parler, est le meilleur gage de flexibilité dans ce domaine.

Et, par conséquent, nous encourageons le gouvernement et l'Assemblée nationale, au moment opportun, à bien étudier la nécessité de balancer, d'équilibrer le désir de flexibilité, qui paraît important pour que la place financière montréalaise et québécoise demeure intéressante, avec la nécessité de bien asseoir le pouvoir législatif et légal d'agir de la Commission.

Finalement – et nous le mentionnons en conclusion de notre mémoire – je pense qu'à une époque où le rôle de la Commission des valeurs mobilières du Québec est essentiel au bon fonctionnement des marchés financiers et des marchés de capitaux au Québec il faut résister à la tentation de la priver de moyens financiers. Il n'appartient pas au Barreau de recommander que les budgets de la CVMQ soient pris à même les fonds publics et augmentés ou diminués, mais une chose est claire: si nous voulons que la Commission des valeurs mobilières du Québec accomplisse l'importante mission qui lui revient, il est important de la doter des sources de financement, des moyens financiers qui sont nécessaires.

Donc, ça, vous direz que c'est peut-être étrange, mais ce n'est pas si étrange de la part des avocats, parce qu'il n'y a rien, dans l'intérêt public, encore une fois, de plus embêtant que de voir un dossier qui prend plus de temps peut-être que nécessaire et que ne le souhaiteraient les responsables de la Commission, parce que, justement, ils n'ont pas les moyens de leur mission.

Alors, à ce titre, le Barreau nous rappelle l'importance, et je m'en voudrais de ne pas voir le sourire du président de la Commission au bout de la table. Ce n'est pas pour vous encourager, M. le président, à dépenser à outrance en une période budgétaire difficile, mais simplement de s'assurer que votre Commission a les moyens d'accomplir la tâche qui lui revient.

Alors, je crois qu'il appartiendrait peut-être à mon collègue, Me Asselin, de compléter sur les deux volets ou d'autres sur lesquels il croit nécessaire de renchérir.

(15 h 30)

M. Asselin (André P.): M. le Président, deux remarques complémentaires aux remarques sur le mémoire que nous avons présenté. Quant au régime qu'on veut améliorer quant aux droits des petits investisseurs, le Barreau croit, en effet, que l'article 219 de la loi actuelle donne aux investisseurs, aux petits investisseurs, ouverture à tous les recours en dommages possibles contre les experts. Et on n'aimerait pas que des recours soient accordés aux petits investisseurs, qui portent sur d'autres choses que l'avis des experts: dans le cas des avocats, sur leur opinion juridique et non pas sur le reste du contenu du prospectus; de même que, pour le comptable, ça porte sur son expertise, les états financiers; ou l'ingénieur, sur ses plans. Mais d'aller donner, d'étendre les recours possibles contre tous les gens d'affaires qui sont intéressés dans une émission à ces experts, ça va bien au-delà de la pratique quand on sait combien les experts sont limités à leur champ spécifique d'activité et ne s'impliquent pas dans le projet d'affaires de l'émetteur, du courtier, du preneur ferme.

Par ailleurs, si on doit, je pense, s'en remettre au droit actuel en vertu du Code civil et de la Loi sur les valeurs mobilières quant aux recours, on pourrait concevoir de faciliter la vie aux petits investisseurs en accordant aux petits investisseurs un mode de recours alternatif dans le cas non seulement des courtiers, comme on l'a fait dans la ligne de l'entente qu'il y a eu entre l'ACCOVAM, la Bourse et le CACNIQ, créer un forum pour mode alternatif de résolution de litiges contre les courtiers... On pourrait faire la même chose et étendre ce mode alternatif – et je dis bien «alternatif» seulement – aux experts, de sorte qu'un petit investisseur qui croit avoir un recours à faire valoir contre un avocat – dans notre cas, ce qui nous intéresse – ou tout autre expert aurait alternativement le choix d'aller soit devant la Cour du Québec, la Cour supérieure ou de se prévaloir d'un mode alternatif de règlement de litiges dans un cadre organisé, tel que le CACNIQ.

Alors, ça pourrait sûrement faciliter... je pense que c'est plus important pour le petit investisseur d'avoir un forum alternatif comme celui-là, bien organisé, peu coûteux, rapide, que d'avoir un amoncellement de recours qui ne tiennent pas debout, qu'on va contester à fond, parce que les experts, en réalité, ont une responsabilité tout à fait limitée à leur champ d'expertise et non pas au projet d'affaires qui sous-tend le prospectus. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Coulombe, de votre présentation, ainsi que vos deux collaborateurs. J'inviterais le député de Crémazie, pour sa période de questionnement ou d'intervention.

M. Campeau: Mme Vadboncoeur, messieurs, merci de venir nous éclairer sur un sujet fort important, soit l'amélioration ou le perfectionnement de notre loi des valeurs mobilières.

J'écoutais M. Coulombe parler et je me demandais... Hier, on a cru comprendre, à la télévision, que le ministre des Finances, Paul Martin, aurait rencontré tous les gens importants de Montréal pour leur demander s'ils étaient pour une commission des valeurs mobilières nationale ou québécoise. Est-ce que, par hasard, il vous aurait oubliés ou si vous avez été consultés?

M. Coulombe (Gérard): Ha, ha, ha! M. le Président, que ce soit une question d'oubli ou de consultation, je crois que la position que j'énonçais au nom du Barreau est également celle que je défendrais très fortement personnellement et que mon cabinet mettrait aussi de l'avant. Nous ne voyons pas l'intérêt de la création d'une commission nationale des valeurs mobilières.

M. Campeau: Bon. Comment on peut démontrer que, à cause du caractère unique du Québec, il est profitable de garder notre propre Commission des valeurs mobilières? Vous avez un peu élaboré, mais êtes-vous capable d'aller plus profondément dans cette question-là?

M. Coulombe (Gérard): Je pense, M. le Président, que, la réalité, on la retrouve peut-être dans certaines statistiques qui nous rappellent que, parmi les sociétés inscrites à la Bourse de Montréal, une quantité considérable, plus de 200, sont, en fait, des sociétés qui ont de relativement petites capitalisations, à l'échelle nord-américaine en tout cas, et que ces entreprises n'auraient certainement pas envisagé – à tout le moins, c'est mon opinion – de s'adresser à une commission située à Toronto ou à Calgary ou à New York, pour ce que j'en sais, ce qu'elles pourraient très bien faire, puisqu'elles pourraient songer à aller au NASDAQ, par exemple, à New York... Ce ne sont pas des entreprises avec des capitalisations de 10 000 000 $, 15 000 000 $ ou 20 000 000 $ qui vont s'adresser à ça.

Or, la commission des valeurs mobilières nationale, et on l'a vu aux États-Unis, par le SEC, encourage, finalement, des tailles d'émetteurs considérables, elle encourage une concentration d'expertises, aussi bien chez les avocats, les experts-comptables, les courtiers, dans un centre qui est New York. Et, si vous êtes à Des Moines, Iowa, eh bien, vous avez besoin de manger pas mal de croûtes avant de songer à vous adresser au SEC pour faire une émission nationale aux États-Unis.

Et nous croyons – et, ça, je crois que le Barreau peut le croire, mais je peux aussi le croire personnellement facilement – que le Québec est fort bien servi en termes de création d'emplois et de développement économique durable par ses PME et que ses PME doivent avoir accès au marché de capitaux qu'offre l'appel public à l'épargne, que c'est avec une commission des valeurs mobilières du Québec, attentive aux particularités de son marché, que nous pouvons nous retrouver aujourd'hui avec 213 sociétés inscrites à la Bourse de Montréal, dont 185, je crois, ont une capitalisation de 50 000 000 $ ou moins. Pour nous, c'est un actif pour le Québec que d'avoir ces sociétés-là, et je ne crois pas que nous les aurions si elles avaient dû s'adresser et soumettre leur prospectus à Toronto pour le faire viser.

M. Campeau: Avant de passer la parole, M. le Président, si vous me permettez une autre remarque ou une autre question. On a parlé hier, notre premier intervenant, de la protection du petit investisseur, du petit investisseur ou du petit... En tout cas. Alors, quel problème résulterait, là... Parce que, vous autres, vous êtes des avocats, ce que je comprends. Madame aussi, au centre, vous êtes avocate vous-même? Bon. Je suis surpris parce que je vous ai vue ne pas parler beaucoup, alors j'ai dit, à un moment donné: Vous n'êtes pas avocate, mais je parlais...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Il ne faut pas se fier aux apparences.

M. Campeau: Remarquez bien que vous représentez l'inverse de ce qu'on a vu jusqu'ici, qui était tout du bien bon monde. Mais, d'habitude, le chef de délégation était un homme puis il parlait tout le temps, il ne laissait pas parler les autres, alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Je pourrai vous expliquer pourquoi.

M. Campeau: Merci, madame. Quel problème résulterait, là... Moi, je suis toujours pour la vulgarisation pour le petit emprunteur, pour la petite personne qui investit, le petit investisseur. Quel problème résulterait si les formulations très techniques que vous, les avocats, mettez dans les prospectus... Si on trouvait quelque chose qui serait accessible à tous, que les prospectus, quelqu'un pourrait les lire et dire: Je comprends... Parce que la majorité des individus, quand ils se donnent la peine de lire un prospectus, c'est toujours pour dire: Bien, je n'ai pas dépassé la page 3 parce que, de toute façon, je n'ai encore rien compris. Alors, est-ce qu'il y aurait moyen, est-ce que nos avocats, est-ce que ce ne serait pas le premier élément pour bien protéger le petit investisseur, s'ils écrivaient dans un langage compréhensible? C'est à vous, madame, la question.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Je ne peux évidemment pas répondre non à une telle question. D'ailleurs, le même problème se pose en assurance. Dans les polices d'assurance, on rencontre exactement le même problème. Vous me permettrez de bifurquer un peu là-dessus parce que je suis de formation civiliste et d'expertise civiliste également. Et je ne suis un peu ici que par accident, étant directrice de la législation au Barreau et ayant des adjoints qui sont présentement en grève...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Alors, j'ai un de mes adjoints qui était...

M. Campeau: Il y a des accidents heureux.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Pardon?

M. Campeau: Il y a des accidents qui sont heureux.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Merci. Donc, je ferai le parallèle qui m'est aisé avec les polices d'assurance. Depuis le nouveau Code civil, on a voulu simplifier le langage des polices d'assurance pour le mettre un petit peu plus accessible au consommateur. Je pense que c'est le même principe en ce qui concerne les prospectus. Et, nous-mêmes, on en parlait tout à l'heure, André et moi, on est quand même des consommateurs relativement avertis, avec une formation qui peut nous aider à comprendre peut-être un petit peu plus de choses, et, bien souvent, nous autres aussi, on trouve ça assez obscur. Alors, c'est sûr que le Barreau ne peut faire autrement que d'encourager une simplification du langage des prospectus, il n'y a pas l'ombre d'un doute là-dessus.

M. Campeau: Merci. M. le Président, je vais laisser l'opposition ou mes collègues continuer.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On en est au député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je remercie aussi le Barreau du Québec d'avoir soumis son mémoire et d'être venu défendre ses positions qui sont, comme l'a souligné Me Coulombe et Me Vadboncoeur, fort claires. C'est facile de comprendre ce que vous avez soulevé comme questions. J'en soulèverais quelques-unes que vous n'avez pas traitées dans le dossier et je vais commencer par celle qu'on retrouve dans le rapport quinquennal, lorsque, au début du rapport, on soulève la question de l'assujettissement de la couronne ou de ses mandataires à l'application de la Loi sur les valeurs mobilières. J'aurais aimé entendre votre opinion là-dessus.

(15 h 40)

M. Coulombe (Gérard): Je pense qu'il y a, évidemment, et je vais le dire parce qu'il est bon, je crois, que ces choses soient enregistrées... Comme praticien de pratique privée, je suis personnellement impliqué dans les litiges qui sont énumérés en bas de page. Je n'oserais croire que le député de Westmount a fait exprès de poser la question; son sourire me porte, cependant, à croire le contraire. Mais, quoi qu'il en soit, étant personnellement impliqué dans l'affaire de Société nationale de l'amiante contre Comité pour un traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos limitée, mes vues sont donc connues, et je crois que le Barreau, d'un autre côté, n'aurait le choix que de recommander que, lorsque l'État se fait commerçant, il s'assujettisse aux mêmes règles que les autres commerçants. Je crois que c'est une position du Barreau qui ne peut faire autrement que d'être défendue. J'ai préfacé mes remarques avec la mise en garde appropriée, je crois, que les explications fournies en bas de page du rapport quinquennal, à la page 7, expliquent assez bien.

Je vous dirai, cependant, M. Chagnon, qu'une chose qui, à mon point de vue et du point de vue, je crois bien, du Barreau, ne serait pas une bonne solution, c'est une solution mi-chair mi-poisson, comme celle dont on a déjà considéré l'adoption, un mécanisme de directives distinctes de l'assujettissement. Ou bien donc on fait en sorte que, comme c'est le cas, par exemple, en Ontario, une disposition précise, bête et méchante de la Loi sur les valeurs mobilières dise que la couronne est assujettie et elle est traitée comme n'importe quelle autre entreprise, ou on la laisse comme c'est le cas maintenant, où elle n'est pas liée par les dispositions de la loi parce qu'elle n'est pas visée spécifiquement par celle-ci. Mais je crois que l'adoption d'un régime intermédiaire sui generis ne serait pas dans l'intérêt des épargnants ni du public en général, parce que, justement, allant dans le sens d'une plus grande complexité.

M. Chagnon: Merci, c'est très clair. On a soulevé, dans votre mémoire, toute la question relative à la simplification de l'examen des prospectus. Lorsqu'on parle de la simplification des prospectus, j'imagine, évidemment, que c'est davantage un besoin, lorsqu'on pense aux émetteurs d'envergure. Lorsque Alcan établit son prospectus, c'est un petit peu plus compliqué que quand Arcon en fait un. C'est une formule qui vous agrée et qui, je pense, vient, dans le fond, confirmer votre vision de l'harmonisation des réglementations des différentes commissions de valeurs mobilières et qui passent par des moyens comme ceux-là. Toutefois, vous n'avez pas traité de l'harmonisation des déclarations d'initiés. Est-ce que vous avez la même vision en ce qui concerne les déclarations d'initiés?

M. Coulombe (Gérard): Je suppose, M. le Président, que le député de Westmount fait allusion à la différence, pour l'instant, des délais dans lesquels les déclarations d'initiés doivent être produites. Je dois avouer que le Barreau, là-dessus, prendrait la position, oui, que l'harmonisation est souhaitable. Mais, cependant, comme c'est indiqué dans le rapport quinquennal, il faudrait encore travailler, parce que la position du Québec est probablement la bonne, au fond. De sorte que, ainsi que le rapport quinquennal, si mon souvenir est exact, le mentionne, l'harmonisation ne devient qu'un moindre mal.

Parce que, finalement, si l'investisseur veut tenter de suivre le portrait de l'évolution de l'actionnariat d'une société au moyen des déclarations d'initiés, il devrait avoir un portrait à la même date, au même jour à l'échelle du pays. Et, en ce sens là, si nous n'avons pas d'autre choix, bien, pour protéger l'épargnant ou pour l'aider dans sa décision, une harmonisation vers les législations des autres provinces serait souhaitable à la situation actuelle. Par contre, il est clair que la véritable harmonisation la plus fructueuse serait que les autres s'harmonisent sur la disposition québécoise, qui nous paraît renseigner à meilleure date ou en temps plus opportun le petit épargnant sur les transactions qui se sont déroulées sur les titres d'un émetteur assujetti.

M. Chagnon: L'autre sujet que vous avez soulevé concerne les planificateurs financiers. Votre conclusion est très claire. Elle est la même que celle qu'on retrouve à l'ACCOVAM, entre autres. L'ACCOVAM stipule aussi que, si vous vendez n'importe quelle espèce de véhicule financier, vous ne devriez pas vous affubler du titre de planificateur financier. Avez-vous une autre appellation contrôlée que vous suggérez? L'ACCOVAM parlait de planificateur-conseil, mais ça me semblait faire un peu blanc bonnet et bonnet blanc.

M. Coulombe (Gérard): Personnellement, je n'en ai pas; peut-être que Mme Vadboncoeur en aurait. Mais je crois que c'est plus le principe que le titre même. C'est le fait d'une personne qui, quel que soit son titre, prétend jouir d'une indépendance quelconque. C'est ça, je crois, qui nous préoccupe.

M. Chagnon: On comprend le souci d'objectivité qui vous anime dans votre réflexion à cet égard-là. Vous savez que l'ACCOVAM, la Bourse de Montréal ont déjà mis sur pied, depuis le début de février, un centre d'arbitrage. Évidemment, un centre d'arbitrage... Lorsqu'on est membre du Barreau, comment on voit ça, un centre d'arbitrage comme celui mis sur pied par l'ACCOVAM?

M. Coulombe (Gérard): Peut-être que je demanderais à mon collègue, Me Asselin, de s'adresser à cette intéressante question.

M. Asselin (André P.): Je pense que le Barreau en général est tout à fait favorable au développement des modes alternatifs de solution des litiges, et en particulier dans le domaine des valeurs mobilières. Je pensais à la remarque de M. Campeau, au-delà du... Bien qu'il faille sûrement simplifier le prospectus et toujours se pencher sur son contenu, nous, la plupart d'entre nous, je pense, en dehors de ceux qui sont professionnels dans la rédaction ou l'émission de prospectus, on ne lit pas beaucoup les prospectus en rentrant chez soi le soir, bien qu'on ait tous des fonds de pension puis qu'on reçoit ça des courtiers. Il n'y a personne qui lit ça.

On aurait beau avoir une page et demie de simplifications sur le dessus, je pense que ce serait souhaitable, comme on devrait avoir une page. Puis on en a en matière d'assurance, mais on ne comprend rien... On pourrait avoir la même chose en matière de valeurs mobilières, puis ça dirait toujours que c'est un placement spéculatif et à fort risque, puis je ne pense pas que les petits investisseurs seraient beaucoup plus renseignés. On se fie beaucoup plus aux conseils qu'on reçoit du vendeur ou d'un planificateur.

Mais ce qui est très utile pour l'investisseur, le petit investisseur, c'est d'avoir un forum plus simple ou avoir un forum alternatif. Et, plutôt que de faire appel aux tribunaux de droit commun, il pourrait certainement y avoir un mécanisme de mise en place pour élargir non seulement au courtier, mais... En tout cas, au nom du Barreau, je pense qu'on envisagerait favorablement qu'un petit épargnant ait le choix soit de s'adresser aux tribunaux de droit commun soit à un mode alternatif de règlement de litiges, préférablement très bien organisé, comme celui du CACNIQ, et non pas à un mode qui prolongerait les litiges en ayant de la médiation et de la conciliation qui ne soient pas finales, qui nous forcent à dire des choses, puis, après, si on n'est pas satisfaits du résultat, on retourne devant soit des arbitres pour avoir une sentence finale ou devant les tribunaux. Il faudrait que ce soit un arbitrage simple et final.

M. Chagnon: C'est le cas de l'arbitrage qui est déjà mis en place, la formule d'arbitrage qui est déjà mise en place par l'ACCOVAM.

M. Asselin (André P.): C'est ça. On pourrait peut-être envisager, pour favoriser l'exercice des droits... Et c'est surtout l'exercice des droits plutôt que la lecture du prospectus. Le type qui a perdu, il sait qu'il a perdu 10 000 $, puis là il ne veut plus savoir ce qui était écrit dans le prospectus, etc., c'est plutôt d'exercer son recours. On peut simplifier la vie. Dans une procédure d'arbitrage, on peut ou pas être représenté par avocat. On peut l'être, on doit pouvoir l'être, mais pas nécessairement. On aurait sûrement des experts, des arbitres experts, et ça pourrait être, ça devrait être des sentences finales pour simplifier. Mais, pour les petits investisseurs, c'est très favorable.

(15 h 50)

M. Chagnon: J'ai compris que vous étiez d'avis qu'il fallait, comme le rapport quinquennal l'indique et contrairement à la suggestion que le ministre fait dans son document d'accompagnement... Vous suggérez la publication de la masse salariale globale des cinq dirigeants d'entreprises. C'est ce que vous suggérez.

M. Asselin (André P.): ...

M. Chagnon: En ce qui concerne les nominations, comme le suggère le ministre dans son document d'accompagnement, du président de la Bourse et de six gouverneurs de la Bourse par le gouvernement, est-ce que vous avez une opinion?

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Non. Alors, le Barreau ne s'est pas prononcé là-dessus.

M. Chagnon: O.K.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Je ne sais pas s'il y en a qui ont des opinions personnelles, ça n'engagerait certainement pas le Barreau.

M. Coulombe (Gérard): Sans engager le Barreau, M. le Président, j'avouerai que, pour ma part, je ne suis pas particulièrement enthousiasmé par cette proposition. Je crois que le fait que le président de la Commission des valeurs mobilières du Québec soit nommé par le gouvernement est tout à fait normal. La Bourse, tant et aussi longtemps qu'on la voit comme un organisme d'autoréglementation, me semble être capable d'élire ses représentants. Je comprends d'ailleurs que, même en Colombie-Britannique, ce n'est pas le gouvernement qui nomme le président. Il nomme des «public governors», je crois, et l'obligation des autres «governors» est de choisir le président parmi ces «public governors». Donc, même là, on ne se rend pas tout à fait jusqu'à la nomination par le gouvernement.

Et j'inviterais simplement le gouvernement à faire preuve de prudence dans ce domaine parce qu'on sait comment, à l'extérieur du Québec, les gens ne comprennent pas toujours ce qui me paraît être un plus, me paraît être un élément positif de la vie québécoise, à savoir une plus grande concertation entre le gouvernement, le monde des affaires et le monde des employés, le monde syndical. Et, en ce sens-là, si on apprenait à l'extérieur du Québec que c'est le gouvernement qui nomme le président de la Bourse, je pense qu'il faudrait bien l'expliquer parce que ça pourrait avoir des répercussions pas nécessairement favorables.

M. Chagnon: Vous avez fait une nuance que j'aurais dû faire. Vous avez raison. Une dernière question, M. le Président...

M. Asselin (André P.): Est-ce que je pourrais vous faire une remarque?

M. Chagnon: Oui.

M. Asselin (André P.): Vous avez fait allusion encore à la question de la rémunération des dirigeants.

M. Chagnon: Oui.

M. Asselin (André P.): Je voudrais souligner, parce qu'on en a discuté et, compte tenu de notre marché, on a bien souligné que le marché qui nous intéresse chez nous, ce n'est pas un marché d'entreprises de grande envergure. Alors, chez nous, il y a un effet pervers à la divulgation d'informations plus particulières des cinq dirigeants principaux dans le marché qui est le nôtre. On veut éviter l'effet pervers de l'escalade de la rémunération, certainement. Puis ça a un effet, ça a toujours eu un effet d'escalade des rémunérations. Puis une grande partie des entreprises chez nous sont de taille moyenne, on n'est pas les grosses compagnies américaines, puis on pense qu'on doit restreindre cet effet-là.

Mais un autre encore plus important, c'est la piraterie des cadres. D'aller donner le détail de la rémunération de chacun, il est certain que les grandes entreprises vont pirater nos cadres encore plus facilement. Parce que, quand on va dire qu'un tel gagne seulement tant par rapport à ce qu'il pourrait gagner ailleurs, ça encourage la piraterie de nos cadres. Et c'est une caractéristique de notre économie, d'avoir des entreprises de taille moyenne qui...

M. Chagnon: Ça encouragerait à changer de job. Ha, ha, ha!

M. Asselin (André P.): ...nous sont si importantes.

M. Chagnon: J'ai dit au sous-ministre que ça pourrait nous encourager, nous, à changer d'emploi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Asselin (André P.): Alors, voilà, c'est parce que c'est sous-entendu, mais je pense que c'est très québécois comme situation. Puis on n'a pas à envier. Je pense que, comme on l'a dit, on a peut-être des choses à apprendre aux autres et, si on veut étendre, harmoniser nos règles à celles des autres membres de l'ALENA, d'autres auraient sûrement à apprendre beaucoup de choses sur notre façon de faire, sur cette question-là en particulier, compte tenu de nos entreprises. On ne voudrait pas faire la règle pour leurs grosses entreprises, mais, pour les nôtres, on veut protéger nos règles de jeu.

M. Chagnon: Une dernière question, M. le Président. M. Coulombe a soulevé toute la... enfin, a imagé une de ses réponses en disant: Si j'habitais Des Moines, Iowa, j'aurais de la misère à m'en aller faire un prospectus pour l'ensemble du marché américain puis je passerais devant la SEC avec... On comprend ça. Maintenant, la SEC a des problèmes à réglementer au moment où on se parle, puis non seulement la SEC, mais nous aussi, puis tout le monde. Tout le monde a le problème de la réglementation de l'utilisation virtuelle des possibilités de contracter ou d'acheter ou de vendre des actions.

Vous avez parlé du marché NASDAQ, c'est un exemple. C'est le plus gros marché, c'est la plus grande bourse au monde. Je mentionnais ici, en commission, qu'il y avait maintenant 650 000 personnes qui ont un accès direct sur un marché comme celui de NASDAQ, privé, avec leur ordinateur, et on s'attend à ce que le nombre monte à 1 500 000 au début des années 2000. C'est documenté, si on peut l'utiliser comme source de documentation, mais, enfin, c'est un article qui a paru dans le Time de cette semaine: «Business, Investors Rush the Net».

Les marchés, la Commission des valeurs mobilières du Québec est prise avec le même problème. Je disais au début de nos travaux que j'ai moi-même pitonné sur mon Internet. Je suis allé chercher les prospectus NASDAQ, je suis rentré dedans, j'ai sorti ce dont j'avais besoin pour, entre autres, la commission parlementaire. Le Barreau doit se poser des questions sur ce genre de situation là qui est, pour nous, en tout cas, un peu hors contrôle. J'avoue que nous nous trouvions un peu impuissants face au type de législation que nous pourrions apporter soit pour soutenir les investisseurs qui, un jour, pourraient rentrer là-dedans sans savoir trop, trop ce qu'ils font ou encore pour permettre à la Commission des valeurs mobilières de conserver un contrôle sur les marchés financiers.

M. Coulombe (Gérard): Je crois, M. le Président, que la question est extrêmement importante et, d'ailleurs, le document d'accompagnement en fait un bon état. Le Barreau s'inquiète de cette question-là non seulement dans le domaine des valeurs mobilières, mais de toute la question de contracter. On peut se poser la question en droit civil, bête et méchante, de contracter par l'Internet: Peut-on acheter et vendre des choses sur l'Internet?

M. Chagnon: On peut le faire. On peut le faire.

M. Coulombe (Gérard): Exactement. Mais quel droit va s'appliquer, quel recours, de quel recours dispose-t-on? On peut ne même pas connaître le véritable emplacement géographique de la personne avec qui on contracte et, donc, il y a là quelque chose qui mérite d'être étudié de plus près. Et je prends sur moi de vous dire que le Barreau du Québec, même si, oui, il a commencé à se pencher sur la question, n'a pas la réponse magique que d'autres n'ont pas non plus. Cependant, dans le domaine des valeurs mobilières, nous comprenons que la Commission des valeurs mobilières du Québec a effectivement créé un groupe de travail pour se pencher là-dessus. Et ce que je crois pouvoir faire, c'est d'engager et de promettre que le Barreau apportera toute la collaboration que nous pouvons, si la Commission le juge à propos, pour assister, aider ce groupe de travail ou encore aider la Commission lorsqu'elle aura reçu ce rapport du groupe de travail.

Une chose, si vous me permettez, qui me semble ressortir de ça, c'est qu'il y a de bonnes chances pour qu'on constate une fois de plus que la réalité du monde de demain, c'est soit un monde planétaire soit un monde relativement près de sa région ou de son groupe – et, ça, je parle notamment sur le plan financier – où l'on traitera une PME et on fera ses affaires dans un relativement petit marché, ou, à partir d'une certaine taille – qui n'a pas à être énorme d'ailleurs, mais ça dépend des produits, des types de services qu'on vend – on aura accès à la planète. Et ce qui va rester comme étant moins important, ce sont les marchés nationaux traditionnels. Donc, on fera affaire, pour être brutal, soit dans la région de Montréal ou dans la région de Québec ou, à la limite, dans tout le Québec, et, ensuite, de là on sautera et on fera affaires au mieux dans l'ALENA ou au pire dans le monde entier. Mais on ne fera pas affaire simplement dans l'État américain voisin ou dans la province voisine, et, ça, il faudra qu'on s'adapte à cette réalité-là.

(16 heures)

M. Chagnon: Ah! bien, M. le Président, c'est quand même important comme mise en situation. Je ne peux vous en vouloir. C'est aussi notre cas. C'est un peu une espèce d'aveu d'impuissance, au moment où on se parle. On mentionnait le dossier NASDAQ. Mais même les petites sociétés sont sur NASDAQ. Il y avait, vendredi soir, 5 120 compagnies sur NASDAQ, qui ont un volume d'actions de deux trillions, 2 392 milliards de dollars. Et, lorsqu'on rentre sur le marché, par exemple, via NASDAQ, on a un service qu'on ne peut pas retrouver ailleurs. «Last Sale Reporting», 90 secondes: 90 secondes pour le «put» puis l'achat, c'est absolument extraordinaire. Et, demain matin, ce sera 30 secondes ou 15 secondes. On est dans les fractions, là. La problématique qui se pose est une problématique qui va devoir forcer non seulement le gouvernement du Québec, mais les gouvernements partout à se pencher sur cette question-là, parce que vous pouvez traiter sur NASDAQ de n'importe où. On parle de Québec, ici, de Montréal ou de l'Afrique du Sud; c'est aussi près.

M. Gendron: Même de l'Abitibi.

M. Chagnon: Même de l'Abitibi, même de Guyenne. Pas Guyane en Amérique du Sud, mais Guyenne en Abitibi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Alors, M. le Président, je voudrais remercier le Barreau d'avoir tenté et répondu aux questions que j'avais soulevées. Me Vadboncoeur a peut-être...

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Oui, j'avais juste peut-être un petit point d'information. L'an prochain, c'est-à-dire à pareille date en 1997, le Barreau entend faire son congrès sur l'unique thème de l'informatique et Internet et tout ce que vous voulez...

M. Chagnon: Vous pourrez tous rester chez vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Peut-être après, sûrement pas pour le congrès.

M. Chagnon: Sur Internet, ça va bien.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Donc, c'est certainement des questions qui vont être soulevées, j'en suis convaincue, parce que, comme disait Me Coulombe, on n'a pas encore la solution, je pense que personne ne l'a. Mais c'est une preuve, en tout cas, qui tend à démontrer que le Barreau s'intéresse fortement aux questions non seulement juridiques, mais de protection de la vie privée, d'accès aux renseignements, enfin de... Il y a une foule de problèmes que pose l'accès au monde d'Internet.

M. Chagnon: Je vous remercie encore une fois, les membres du Barreau. M. le Président, je remercie les membres du Barreau des conclusions et des réponses qu'ils nous ont données, tout en nous félicitant et en félicitant dans le fond la Commission des valeurs mobilières de pouvoir compter sur le concours du Barreau pour étoffer son rapport sur ces questions-là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Le député de Roberval m'a demandé la parole.

M. Laprise: M. le Président, je pense qu'on vient de répondre quand même pas mal à ma question. C'était surtout sur Internet. Je ne pensais pas que mon collègue avait 80 % du droit de parole à la commission.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il a fait son 20 minutes.

M. Laprise: Il sera peut-être un jour sur Internet, lui-aussi. Ça va lui donner un champ d'activité encore beaucoup plus grand. Je voudrais préciser quand même qu'au niveau des champs de...

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais tout de suite rassurer mon collègue de Roberval, je suis déjà sur le Web depuis un an et demi avec un site sur mon...

M. Laprise: O.K. Ça veut dire, à ce moment-là, qu'il y aurait de la place quand même pour un marché plus local. Entre autres, dans les régions, avoir un marché de prêts très sécuritaire, un marché financier, de placements financiers pour le petit investisseur... Avec les moyens de communications qu'il y a aujourd'hui, il peut y aller s'il veut y aller, mais, par contre, il peut rester dans son milieu aussi. Il faudrait, à ce moment-là, qu'il y ait des marchés locaux qui puissent être ouverts soit par les municipalités, comme on voyait autrefois... Les individus allaient prêter de l'argent, allaient acheter des débentures municipales ou des débentures de la fabrique, ou des débentures leur permettant d'avoir un marché plus local. Ça les protégerait, à ce moment-là. Ce n'est pas tout le monde qui va avoir l'information, les renseignements pour aller sur les grands réseaux de marché pour des petits montants.

M. Asselin (André P.): Ça va sûrement donner une grande profondeur aux régions. Plus il y a des moyens de communication étendus comme l'informatique... Alors que les régions, avant, étaient pénalisées, aujourd'hui, tout le monde... Plus on est petit, plus on est en région, plus on va pareil aux autres. Ça va être ça, l'avantage. Et en matière de valeurs mobilières, un peu la même chose, c'est moins nécessaire d'être dans le centre du grand centre pour opérer. Les règles vont probablement être semblables. Aujourd'hui, quelqu'un de votre circonscription peut très bien communiquer avec quelqu'un en Haïti, d'une petite communauté. Et c'est ça que ça va faire. Alors, en matière mobilière, de même, les gens des régions n'auront plus besoin d'opérer à partir des centres. Alors, ça va donner une...

M. Laprise: Une vision plus grande.

M. Asselin (André P.): ...«exposure» beaucoup plus grande aux gens des régions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Très rapidement, parce que le temps imparti est écoulé. Mais, avant le parcours international sur Internet par les questions, par ailleurs très pertinentes, de notre collègue de Westmount–Saint-Louis – parce que là c'est moins approprié de dire: Revenons un peu plus sur la terre – j'avais une question très courte et très pratique. Je pense que c'est vous qui l'avez abordée, à une question du député de Westmount–Saint-Louis concernant le tribunal d'arbitrage. Il y a plusieurs intervenants qui nous ont suggéré une espèce d'ombudsman à créer, comme poste, pour assurer une meilleure protection du public globalement. Parce que, présentement, il y a un conseil d'arbitrage ou des procédures d'arbitrage. Entre cette suggestion d'un ombudsman ou le conseil d'arbitrage, avez-vous un avis, avez-vous une opinion là-dessus? Parce que vous n'en avez pas parlé dans votre mémoire, mais ça a été touché dans plusieurs mémoires de celles et ceux qui sont venus nous rencontrer et de celles et ceux qui vont venir nous rencontrer.

M. Asselin (André P.): L'ombudsman... Je pense que ce que le Barreau a voulu mettre en relief – je vais insister sur ça et on va comparer – c'est d'avoir un moyen alternatif efficace de solution de litige – pas d'avoir une opinion, puis de faire des manchettes – pour le petit investisseur, pour qu'il ait une décision si, oui ou non, il a raison, puis un dédommagement. Alors, l'arbitrage, ça fait ça. Dans la mesure où c'est tout à fait aussi valide que la justice publique, c'est une justice privée, puis elle est finale puis elle est exécutoire, alors ça donne ça. L'ombudsman est plus d'un domaine de reconnaissance, par quelqu'un de fonction publique, d'une situation par rapport à l'équité ou par rapport aux droits, mais ça ne solutionnera pas de problèmes. Ça permet à quelqu'un d'aller aux journaux, puis de dire: L'ombudsman pense ça. C'est comme en équité. C'est peut-être aussi utile, surtout quand il y a plusieurs organismes en cause, mais, au niveau du petit investisseur, il y a des praticiens pour solutionner les problèmes, c'est bien plus utile d'avoir soit des tribunaux ou l'arbitrage parce que c'est là où la personne va obtenir son dédommagement. Autrement dit...

M. Gendron: Je comprends bien.

M. Asselin (André P.): ...le petit investisseur, il n'obtiendra pas de dédommagement via l'ombudsman.

M. Gendron: Oui, mais c'est juste, d'après moi, en tout cas...

M. Asselin (André P.): C'est peut-être un outil alternatif utile, mais ça n'occupera pas la même fonction.

M. Gendron: Merci de votre point de vue, on voulait l'entendre. Mais, moi, je pense que, si on allait plus loin dans la législation – ça dépend comment la législation est faite – et qu'il y avait un ombudsman qui a des pouvoirs de recommandation qui ont à peu près les mêmes fonctions qu'un tribunal décisionnel d'appel, avec sanction et avec obligation de, quand il reconnaît qu'il y a eu mauvais traitement ou inconsidération...

M. Asselin (André P.): Peut-être, peut-être.

M. Gendron: Mais, moi, au nom de ma formation politique, je voulais vous remercier beaucoup parce que c'est une excellente contribution et ça éclairera sûrement la suite des choses. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je voudrais remercier également la représentante du Barreau ainsi que les représentants d'être venus échanger avec nous sur leurs préoccupations ainsi que d'avoir fait connaître leurs recommandations. Votre expérience sera sans doute utile aux membres de la commission pour améliorer le document. Merci beaucoup.

Mme Vadboncoeur (Suzanne): Merci, M. le Président. Au nom du Barreau, j'aimerais également vous remercier et encore une fois réitérer notre offre de collaboration la plus entière, comme on l'a toujours fait d'ailleurs, pour la bonification du fonctionnement des législations au Québec. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bienvenue. Je vais suspendre les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 8)

(Reprise à 16 h 15)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, messieurs! J'inviterais M. Jean-Guy Lambert à prendre place et à nous faire part de son mémoire. S'il vous plaît!

À titre d'individu, M. Lambert, vous avez une demi-heure pour, pas présenter votre mémoire, mais votre présentation, et les échanges devraient s'englober dans la demi-heure. Mais, s'il manque cinq minutes, on ne vous pénalisera pas pour autant. Donc, allez, M. Lambert, on vous écoute.


M. Jean-Guy Lambert

M. Lambert (Jean-Guy): Alors, M. le Président, membres de la commission, je profite d'abord de l'occasion qui m'est offerte pour remercier le ministre, qui, lors du dernier budget, a harmonisé la fiscalité relative à l'exploration pétrolière et gazière au Québec avec la fiscalité minière. Je remercie notamment M. Gendron pour son support dans ce dossier-là, alors qu'il était ministre des Ressources naturelles. En fait, je tenais à le souligner, cette décision va nous permettre, dès cette année, d'aller de l'avant avec un projet de forage de 4 200 m de profondeur, au coût de 5 300 000 $, dans la région de Saint-Léonard-d'Aston, créant environ une dizaine d'emplois. Je tiens à mentionner que ce projet présente un potentiel gazier très important en cas de succès. On parle d'une possibilité de quatre fois la consommation du Québec en gaz naturel. Alors, ce projet n'aurait jamais vu le jour sans cette harmonisation fiscale, parce qu'on s'est déjà essayé auparavant, alors, hein... Et je pense, avec la présentation précédente, que ça va bien s'imbriquer, parce que j'ai justement apporté un prospectus qu'on est en train de faire, et le projet est devant la Commission des valeurs mobilières présentement.

Alors, concernant le sujet à l'ordre du jour de la commission, soit l'étude de l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières, en fait, je suis particulièrement intéressé par le point 1.7 du document d'accompagnement, soit un marché organisé de capitaux pour les titres d'entreprises à petite ou moyenne capitalisation, et à la recommandation 32.

Depuis fort longtemps, je suis grandement impliqué dans l'activité économique, au niveau des petites et moyennes entreprises au Québec, et, au cours des années, j'ai développé une certaine expertise en gestion et financement d'entreprises privées et publiques, mais surtout dans l'assistance et le support au cheminement qu'elles doivent suivre pour avoir accès au marché public.

Alors, nous savons que les capitaux proviennent de trois sources principales. Premièrement, ce sont les grandes institutions financières, auxquelles les PME ont difficilement accès et, si oui, c'est sous forme de prêt ou de dette, ce qui n'est pas nécessairement avantageux pour les petites entreprises. Deuxième source de capitaux, ce sont les sociétés de capital de risque, qui sont de plus en plus sélectives dans leurs choix, ont un processus de décision relativement long et qui, à toutes fins pratiques, s'ingèrent carrément dans la gestion de l'entreprise, ce qui rebute nombre d'entrepreneurs. Donc, plusieurs entreprises n'y trouvent pas ce qu'elles recherchent ou se font simplement refuser le financement requis. Il reste la troisième source de capitaux, qui est le marché organisé de capitaux, c'est-à-dire l'appel public à l'épargne. C'est particulièrement sur ce point que je voudrais vous entretenir.

Présentement, ce marché est régi, au Québec, par la CVMQ et la Bourse de Montréal. Malheureusement, les petites entreprises n'y ont pas facilement accès, en raison des coûts et des critères exigés. Permettez-moi d'utiliser comme exemple le projet gazier auquel je viens de faire allusion, pour illustrer la procédure à suivre pour inscrire une société à la cote de la Bourse. Je vous rappelle que c'est un projet qui requiert un financement de 5 300 000 $ et qu'on procède par voie d'appel à l'épargne, car c'est la seule et unique façon de le financer, en raison du risque. De plus, l'investisseur éventuel bénéficiera d'un avantage fiscal, dans ce cas-ci de 175 %, en accord avec le dernier budget.

(16 h 20)

Alors, la procédure est un peu comme ceci. Donc, la première étape, c'est que le projet nécessite le montage d'un prospectus accréditif, ce qui nécessite l'intervention d'au moins – des fois c'est plus – deux cabinets d'avocats et d'un cabinet de comptables. Il faut compter au minimum un coût de 100 000 $ pour faire un prospectus comme celui que j'ai apporté avec moi, ici.

Une fois terminé, le prospectus est soumis à la CVMQ, pour revue et commentaires. Étant donné le niveau d'activité et la disponibilité du personnel, présentement, il faut compter entre six et huit semaines avant d'avoir ces commentaires, et je pense qu'on se dirige plutôt vers le huit semaines.

Troisième étape: lorsque les observations écrites nous parviennent de la Commission des valeurs mobilières, la société et les avocats doivent répondre aux commentaires et soumettre de nouveau le prospectus à la CVMQ, qui va examiner lesdites réponses et donner un visa si elle en est satisfaite. Le processus pourrait prendre une étape de plus parce que, souvent, il y a des commentaires sur les réponses qui sont données.

Alors, il peut donc facilement s'écouler entre huit et 12 semaines avant de pouvoir passer à la levée de fonds pour mettre le projet en marche. De plus, il en coûte 1 000 $, maintenant, pour déposer un prospectus à la CVMQ, et je me demande si ça n'en fait pas justement peut-être une activité rentable; pas rentable pour faire des profits, mais peut-être couvrir ses frais. Par la suite ou simultanément, il faut soumettre le projet à la Bourse, qui a ses propres critères et exigences, et obtenir une approbation conditionnelle d'inscription.

Alors, cette activité pointue qu'est la revue des prospectus et des autres formes de financement par la CVMQ, à mon point de vue, est névralgique au point de vue économique. Conséquemment, tout devrait être mis en oeuvre pour faciliter le processus, c'est-à-dire alléger le contenu des prospectus, du moins pour les PME, et réduire le temps de traitement et ainsi promouvoir davantage l'activité économique.

Il m'a été donné de connaître et d'utiliser depuis quelques années des programmes existant dans d'autres provinces, qui facilitent grandement l'accès au marché des capitaux publics et avec grand succès. Je fais référence ici en particulier au programme Junior Capital Pool, qui existe en Alberta depuis le milieu des années quatre-vingt. Ce programme permet un accès relativement facile aux capitaux publics à tout entrepreneur dont l'entreprise rencontre certains critères préétablis. Environ une centaine de petites entreprises se sont inscrites à la Bourse de l'Alberta, en 1995, par l'entremise de ce programme. Et j'ai été l'initiateur de deux sur cette centaine-là.

Depuis le début, plusieurs de ces entreprises sont devenues de taille pour s'inscrire même à la Bourse de Toronto ou sur NASDAQ. Il faut mentionner qu'il y a eu au départ – parce que j'ai appris à connaître les gens, surtout au niveau de la Bourse, en fait, toute la hiérarchie, ça fait plusieurs fois que j'ai des contacts avec eux – une concertation et une excellente collaboration entre le gouvernement, la Commission des valeurs mobilières et les membres de la Bourse afin d'alléger toute la procédure et d'éliminer les irritants. Toutes les politiques et procédures sont simples, clairement écrites et compréhensibles.

J'ai utilisé les modalités du programme albertin à plusieurs reprises, comme je le mentionnais, pour inscrire des sociétés québécoises qui en sont très satisfaites pour les raisons suivantes. C'est qu'une fois obtenue leur inscription sur une bourse, ça a grandement amélioré ou accru leur crédibilité. Elles ont plus de facilité à recruter du personnel compétent, elles ont un accès plus facile aux capitaux, elles conservent toute la flexibilité quant à la gestion, donc moins d'ingérence, et conservent le contrôle sur l'actionnariat. Les entreprises auxquelles je fais allusion n'auraient jamais réussi à grandir sans ce programme.

La question que je me pose, c'est: Pouvons-nous développer des mécanismes simples et moins coûteux d'accès au marché public de capitaux chez nous et ainsi contribuer à l'enrichissement du Québec? Il faut bien sûr prendre pour acquis et accepter le fait que, sur le nombre des PME qui s'inscriraient à la bourse, il y aurait des ratés. C'est inévitable. Mais, dans l'ensemble, l'impact serait très positif sur l'activité économique du Québec. Après avoir rencontré Me Jean Martel, président de la Commission des valeurs mobilières, et certaines personnes à la Bourse de Montréal, j'ai senti une volonté manifeste et évidente de faire des efforts dans cette direction. Je crois cependant qu'il faut agir rapidement pour éviter de perdre davantage au profit soit de Toronto, de Calgary ou des États-Unis. N'oublions jamais que les capitaux et les marchés financiers n'ont pas de frontières.

Je tiens à souligner que toute cette activité ne requiert pas de faveurs fiscales ou de nouveaux programmes quelconques de la part du gouvernement. Je ne formule donc pas de recommandations ou de suggestions particulières quant à une modification de la loi en vigueur. À mon avis et de façon générale, l'intervention doit se faire sentir dans l'allégement juridique des politiques et des procédures de la part de la CVMQ et des critères d'inscription de la part de la Bourse de Montréal, sans négliger nécessairement le risque au niveau des investisseurs.

En terminant, je vous remercie de l'opportunité que vous me donnez de participer au débat, ce qui est une occasion unique de contribuer au développement économique du Québec. Je suis disposé à collaborer à l'évaluation de la faisabilité d'établir au Québec un marché organisé pour les titres de sociétés à petite ou moyenne capitalisation et pour proposer, le cas échéant, les façons d'y parvenir.

En terminant, je voudrais simplement mentionner que j'ai apprécié la remarque de M. Campeau, lors de son intervention, quant à la compréhension des prospectus. Alors, je pense que je pourrais au moins faire une recommandation. Trouver une solution simple, ce serait de sortir les avocats des prospectus.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, M. Lambert, de votre suggestion. Je ne sais pas si tout le monde sera d'accord. En tout cas, elle est sur la table. Je laisserai à M. Campeau le temps de répliquer ou de commenter.

M. Campeau: Merci, M. le Président. D'abord, je veux vous féliciter parce que je trouve que vous êtes un entrepreneur vraiment dédié. C'est avec des entrepreneurs de votre calibre que le Québec va développer son économie. On en a beaucoup, mais on pourrait encore en augmenter le nombre. Et, si vous pouviez répandre cette ferveur-là à l'entrepreneurship, ce serait déjà beaucoup pour l'avancement du Québec.

Je vais maintenant à votre dernier commentaire sur les avocats. Il y a...

M. Lambert (Jean-Guy): Ils sont tous partis, je suppose?

M. Campeau: ...des avocats qui trouvent des solutions, puis il y a des avocats qui créent des problèmes. Des fois, en droit commercial, on va dans un bureau d'avocats et c'est toujours beaucoup plus compliqué qu'on pense que ça l'aurait été, alors qu'il y a des avocats qui, vraiment, sont des avocats à problèmes. Il y en a, le fait d'entrer, il y a toujours des problèmes et jamais de solutions. Alors, c'est un fait, là. Il faut se choisir le bon avocat. Ils ne sont pas tous bons. Ça reflète un peu la nature humaine. Dans chacune des professions, il y a du bon monde et d'autres qui sont moins bons. Mais arrêtons-nous juste aux problèmes des avocats. On disait que, par essence, «avocat» veut dire que ça va être compliqué. Il y a des rédacteurs de lois, au gouvernement. D'habitude, les rédacteurs sont des avocats. Vous ne pouvez pas savoir comment les lois sont compliquées. On vient vous présenter ça; on ne comprend même pas. Moi, j'ai déjà présenté des lois – les gens du Revenu ne m'en voudront pas – des projets de loi au Revenu, je lisais ça en Chambre, puis il fallait que je sois vraiment concentré pour comprendre ce que je disais. Mais je ne sais pas ce qu'il faut faire...

M. Chagnon: Il y en a encore.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Mais je pense qu'il faut faire un effort et il faut exiger de nos avocats que ce soit limpide. Et, si on l'exige, il finissent par s'y conformer. Il ne faut pas accepter le fait qu'ils vont nous dire: Bien, parce que c'est légal, il faut que ce soit compliqué. Je pense qu'il faut exiger d'eux une vulgarisation. Sur vos commentaires, puis ça rejoint un peu les miens, comme vous l'avez dit, il y a un problème qu'il nous reste à régler, peut-être, tous les deux, c'est: Comment concilier la protection des investisseurs avec le fait qu'on va donner moins d'information?

M. Lambert (Jean-Guy): À mon point de vue, on ne donne pas moins d'information. Le prospectus que j'ai ici – je voudrais juste peut-être retourner sur certains de vos commentaires – en 1994, on a fait exactement le même prospectus identique. On a eu un visa de la Commission des valeurs mobilières. C'était un projet de 6 000 000 $, exactement le même projet, le même forage, tout identique, les mêmes rapports géologiques qu'on resoumet cette fois-ci. On a eu un visa de la Commission des valeurs mobilières, donc ça veut dire qu'il y a deux firmes d'avocats qui ont passé sur ce prospectus-là. Sauf qu'il y a une date limite pour ça.

Cette année, à cause du changement de la fiscalité, on a réussi à trouver des gens qui vont nous appuyer pour financer le projet. Je resoumets identiquement, à quelques exceptions près, le même prospectus. Il y a deux nouvelles firmes d'avocats dans ça. Il y en a une qui avait accepté... qui a fait le prospectus. Et le problème que je vois... Et là c'est une question que je voulais demander à la Commission et je n'ai pas pu: Est-ce que ça prend vraiment deux firmes d'avocats? La Société a ses avocats et le courtier qui va vendre le prospectus a aussi sa firme d'avocats. Et, nous, on n'a pas le choix de ça.

(16 h 30)

Quand vous disiez, tantôt, qu'il y en a qui trouvent des solutions et il y en a qui... Alors, quand l'avocat du courtier a regardé ce prospectus-là, il n'aimait pas tout à fait le style. Alors, on a commencé à travailler sur le style. Sur les 30 pages que ça représente, ça, il y a neuf pages sur la fiscalité. On reprend les budgets depuis je ne sais pas combien de temps, Québec et Ottawa, pour décrire ce qu'il y a là-dedans, dans neuf pages, et il y a deux fiscalistes qui se sont penchés là-dessus. Je ne suis pas sûr qu'on a la réponse aujourd'hui, mais ça fait huit jours que les fiscalistes regardent ce projet-là.

Actuellement, ce qu'ils vont en faire, en bout de ligne, c'est qu'ils vont me faire signer comme promoteur, pour dire que ce qui est dans le prospectus représente fidèlement ce qu'il en est. Alors, moi, je ne lirai même pas ces neuf pages-là, je vais signer le prospectus, parce que je sais que, même si je trouve quelque chose... Je ne peux rien trouver là, donc je ne perdrai pas mon temps là-dessus.

Je pense que le petit investisseur... Premièrement, il y a juste les avocats qui ont fait le prospectus et l'analyste de la Commission des valeurs mobilières qui vont avoir lu ce prospectus-là. Je pense qu'on pourrait, sans rentrer dans la légalité comme on le fait présentement, établir les choses simples: c'est quoi, l'entreprise? c'est quoi, le produit? c'est quoi, le passé de cette entreprise-là?

Il y a des rapports qui sont vérifiés par des vérificateurs, des firmes. Comme nous, on a Price Waterhouse et Pétrie, Raymond, qui passent là-dessus, qui ont vérifié toutes les dernières années. Alors, pourquoi aller... Le prospectus qu'on a fait l'an passé, tous les titres étaient clairs, mais, actuellement, ça fait une semaine que je travaille parce que là certains avocats disent: Bien, il faudrait revoir les contrats, trois, quatre ou cinq contrats en arrière. Alors, jusqu'où il faut reculer, je ne le sais pas. Mais il reste qu'on a de la misère à sortir notre prospectus, même s'il est déjà à la Commission des valeurs mobilières, et je pense que c'est définitivement un frein, si vous voulez, là, à l'accélération du développement économique que d'avoir trop de monde, de spécialistes comme ça dans... Et la Commission des valeurs mobilières, évidemment, regarde le même prospectus que tout le monde. Elle va faire ses commentaires et on répond aux commentaires.

M. Campeau: Et puis dommage! la dernière nomination du président de la Commission des valeurs mobilières, bien, on a nommé un avocat!

Une voix: On n'apprendra jamais!

M. Campeau: Mais c'est un fait, là, ce que vous dites. Je pense qu'il faut simplifier. Qu'ils prennent des avocats, mais il faut les forcer à vulgariser, à simplifier.

M. Lambert (Jean-Guy): Mais, ça, on n'a pas le choix, M. Campeau. On n'a pas le choix. Quand vous donnez le prospectus à une firme d'avocats, vous venez de perdre le contrôle du dossier. Ça, c'est simple comme ça. Vous êtes là juste pour amener des dossiers et amener des contrats, répondre aux questions, mais vous avez définitivement perdu le contrôle du dossier à ce moment-là. Comme le petit investisseur ne lit pas ce prospectus-là, comment voulez-vous qu'il soit plus protégé si on le simplifie? Il ne le lit pas de toute manière. Peut-être qu'il le lirait un peu plus s'il était plus simple, mais il ne le lit pas.

Alors, quand il va y avoir un problème, là tout le monde va regarder le prospectus et va dire: C'est quoi, les... Vous voyez, au bout de ligne là, vous dites, ce qu'on appelle en anglais... Je ne sais pas le mot français, mais...

M. Campeau: Arrêtez, arrêtez, je pense qu'on est trop d'accord là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Ça va, M. le Président, je vais passer la parole à quelqu'un d'autre.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Ça ne vexe pas le député? Une phrase. D'abord, je tiens à vous remercier pour vos commentaires d'introduction, mais je le fais sincèrement parce que je croyais que c'était requis là de faire un effort de plus d'harmonisation pour favoriser la prospection gazière et pétrolière, et tant mieux si ça donne des effets concrets. Je suis heureux, moi aussi, de le voir dans le présent budget, comme membre de cette formation politique, que nous avons une harmonisation qui devrait permettre une exploration plus soutenue, et surtout plus économiquement rentable pour le Québec et pour les individus qui décident d'en faire. Alors, merci pour votre mot.

La seule question, c'est parce que je la trouvais liée à ce qui a été abordé tantôt. Vous avez terminé en disant que vous souhaiteriez... Si je ne me trompe pas – vous me corrigerez – vous avez dit: Je n'ai pas vraiment de recommandations précises, mais je souhaiterais qu'il y ait un allégement des politiques de la Commission des valeurs mobilières. Je me rappelle de votre finale.

Plusieurs mémoires vont dans ce sens-là, ce que j'appelle un objectif. Vous qui avez l'air assez pratique, est-ce que vous avez quelques exemples de choses qui contribueraient, si elles étaient éliminées à la Commission des valeurs mobilières... qui seraient interprétées comme un allégement, mis à part ce qu'on vient d'entendre là, parce que, ça, ça a été bien développé?

Avez-vous quelques mesures concrètes où on dirait: Bien, là, écoutez, ça, ça n'a pas d'allure. Il faudrait enlever ça, il faudrait enlever ça, il faudrait enlever ça. Parce que viser l'allégement des pratiques et des politiques de la Commission des valeurs mobilières et faire une liste de pratiques qui sont non vertueuses par rapport à l'objectif, ça, c'est contributif.

M. Lambert (Jean-Guy): Je vous avoue sincèrement, M. Gendron, que je n'ai pas regardé de cette façon. D'abord, manque de temps...

M. Gendron: Oui, vous avez moins de moyens que...

M. Lambert (Jean-Guy): ...et j'étais seul pour... J'ai voulu présenter ici plutôt en tant qu'entrepreneur et du côté pratique. Quand j'écoute les gens... et puis ce sont les seuls que j'ai écoutés, c'étaient trois avocats. En fait, par exemple, j'aurais pu avoir des souscriptions pour le prospectus qu'on met en marche, j'aurais pu avoir des souscriptions de l'Alberta, qui connaît bien le domaine du gaz et du pétrole. Par contre, je n'avais ni les moyens ni le temps de faire traduire un prospectus en anglais et de le déposer en Alberta, parce que là on est soumis à deux commissions des valeurs, avec deux observations, puis il faut répondre aux deux observations avant de procéder.

Moi, je suis administrateur d'une compagnie qui s'appelle Enerplus Resources, en Alberta, compagnie qui gère 1 100 000 000 $ d'actifs pétroliers. Un nommé Marcel Tremblay, qui vient du Québec, qui est installé là-bas maintenant... Et on fait des levées de fonds. La dernière, c'était 30 000 000 $ ou 40 000 000 $. On est obligé de déposer un prospectus dans toutes les provinces. Ce sont des coûts astronomiques.

Dans un cas, ici, la traduction des prospectus, je me demande si on pourrait, quand quelque chose se fait à l'extérieur du Québec ou on planifie faire quelque chose à l'extérieur du Québec, est-ce qu'on pourrait faire tout de suite un prospectus en anglais et ne pas le faire en français? Ce serait difficile, je pense, parce que la grande partie est vendue au Québec, mais on n'est pas capable de le vendre à l'extérieur. Si les autres provinces acceptaient... Puis, ça, c'est un point qui a été mentionné avant, une des questions: Est-ce que vous êtes en faveur ou non d'une commission nationale? Je ne prends pas position personnellement, sauf que je me dis: Si je suis obligé de faire des efforts et de dépenser beaucoup d'argent pour déposer en Ontario, en Alberta puis en Colombie-Britannique, bien, il y a bien des chances que je ne le ferai pas. Je vais aller directement là pour faire la levée, mais je ne le ferai pas dans toutes les provinces.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je vous remercie, M. le Président. Je suis heureux d'avoir entendu ce témoignage de M. Lambert qui nous a démontré, dans le fond, avec beaucoup d'éloquence les problèmes qu'un entrepreneur a pour passer à travers non seulement la Commission des valeurs mobilières pour faire adopter son prospectus, mais, comme futur émetteur, quels genres de problèmes il peut avoir pour réussir non seulement ici, au Québec, mais dans d'autres provinces, s'il a l'intention de le faire, pour faire l'émission d'un prospectus.

Est-ce qu'il y a des provinces où c'est plus facile qu'ici?

M. Lambert (Jean-Guy): Bien, en fait, j'ai mentionné, j'ai fait allusion à l'Alberta. C'est un programme particulier, parce que j'étais impliqué aussi dans des entreprises publiques en technologie, et, en Alberta, le programme qu'ils ont, c'est que vous pouvez faire un prospectus simplifié. Vous pouvez lever 300 000 $, 400 000 $, 500 000 $, avoir une compagnie publique. Il n'y a pas encore d'actifs dedans, il n'y a pas encore de projets, il n'y a pas encore de compagnies qui sont dedans, sauf que vous avez une compagnie publique et cette compagnie qui est listée en bourse a 18 mois pour aller chercher ce qu'ils appellent une transaction majeure, c'est-à-dire aller chercher un projet particulier. Un petit entrepreneur, ici, qui a peut-être fait deux, trois ans de recherche sur un produit...

M. Chagnon: Une coquille.

M. Lambert (Jean-Guy): C'est ça, qui est près de la commercialiser, à ce moment-là, on peut fusionner un échange d'actions entre les deux. Il devient public, comme on dit, par la porte d'en arrière. Par contre...

M. Chagnon: Un «shell», comme on dit en Alberta.

M. Lambert (Jean-Guy): Oui. Ça ne veut pas dire qu'il ne sera pas «successfull» en bout de ligne, qu'il n'aura pas de succès dans son entreprise. J'en ai fait deux à date, puis j'en ai une autre en marche présentement, puis ça va très bien.

M. Chagnon: Alors, vous trouvez que c'est plus rapide de passer à travers la Bourse...

M. Lambert (Jean-Guy): Bien, dans cinq semaines, là-bas. J'ai la démonstration que, dans cinq semaines... La journée que je décide que je veux en faire un puis le voir inscrit à la Bourse, ça peut prendre cinq semaines.

M. Chagnon: La Bourse de Vancouver?

M. Lambert (Jean-Guy): Non, à Calgary.

M. Chagnon: La Bourse de Calgary.

M. Lambert (Jean-Guy): Alberta.

M. Chagnon: Est-ce que c'est plus dispendieux?

(16 h 40)

M. Lambert (Jean-Guy): Non. Un prospectus comme ça, c'est... Ça coûte beaucoup moins cher d'avocats, parce que c'est toute la même formule. Alors, c'est sur ordinateur. On change les noms, on change les administrateurs, on change la capitalisation. Ça peut être un nouveau courtier, mais, à part de ça, c'est toute la même chose. Ça peut coûter environ 15 000 $.

M. Chagnon: Pour entrer junior, par exemple, à Vancouver, ça vous coûterait combien?

M. Lambert (Jean-Guy): À Vancouver, je n'ai pas essayé. C'est parce que le marché avait une réputation comme ça, puis je n'ai pas...

M. Chagnon: Surtout depuis une semaine.

M. Lambert (Jean-Guy): Mais il reste que, si on a satisfaction en Alberta... Je n'ai pas cherché ailleurs.

M. Chagnon: Avez-vous essayé sur NASDAQ?

M. Lambert (Jean-Guy): Non. Je connais des gens qui ont fait des démarches pour NASDAQ, oui.

M. Chagnon: Puis, ils ont passé?

M. Lambert (Jean-Guy): Oui.

M. Chagnon: Est-ce qu'ils vous ont dit que ça avait été compliqué, est-ce qu'ils ont dit que ça a été...

M. Lambert (Jean-Guy): C'est toujours le premier qui est long, parce qu'une fois qu'on connaît la procédure on peut accélérer le...

M. Chagnon: Bien, M. le Président, je voudrais remercier encore une fois M. Lambert, puis je voudrais lui souhaiter surtout, après le trouble qu'il a à faire ses prospectus, au moins lui souhaiter d'avoir tout le bénéfice et la possibilité de trouver tout le gaz voulu à Saint-Léonard-d'Aston. Ça va rendre le prospectus moins déplaisant.

M. Lambert (Jean-Guy): Mais je voudrais juste mentionner que, en fait, au niveau de la Commission des valeurs, c'est sûr qu'il y a... Je lisais dans le journal Les Affaires , je pense que c'est la semaine dernière, qu'ils ont reçu 132 prospectus depuis le début de l'année; une augmentation de 61 %. S'il y a le même personnel qui est là pour traiter ces prospectus-là, puis surtout au niveau des ressources naturelles, c'est un problème. Parce que, des analystes, au niveau des ressources naturelles, il y en a peut-être un ou deux. Alors, si tout le monde arrive en même temps... Puis, quand il y a des budgets, c'est toujours la même problématique. Avant le budget, tout le monde avait peur de perdre des abris fiscaux, tout le monde dépose un prospectus là, le personnel est débordé, puis ce n'est pas nécessairement...

M. Chagnon: Vous avez peut-être entendu hier, hier ou ce matin, le ministre dire que la Commission des valeurs mobilières lui amenait 8 000 000 $ de revenus à cause du prix des prospectus.

M. Lambert (Jean-Guy): Ah, fantastique!

M. Chagnon: Je suggérais hier au ministre de rendre sa Commission encore plus compétitive sur le marché canadien en diminuant le prix des prospectus ou en laissant à la Commission des valeurs mobilières le 8 000 000 $ de profits, dans le fond, générés par l'émission des prospectus.

M. Gendron: ...un, on aurait sauté dessus.

M. Chagnon: Un, vous auriez sauté dessus.

M. Lambert (Jean-Guy): Peut-être qu'une suggestion, ça serait...

M. Chagnon: Alors, ça serait une suggestion.

M. Lambert (Jean-Guy): ...d'utiliser des gens qui ont déjà passé à la Commission des valeurs ou des avocats à la retraite ou des gens qui ont de l'expertise dans ce domaine-là, puis de les engager une couple de jours par semaine.

M. Chagnon: On va demander à M. Campeau de transmettre votre message au ministre.

M. Gendron: ...des avocats, ça me surprend, parce que, même à la retraite, il y a encore des risques.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Bien, M. Lambert, encore une fois, merci. Comme je l'ai dit dès le début, vous reflétez un bon entrepreneur, et c'est comme ça qu'on va bâtir le Québec, avec des entrepreneurs comme vous. Alors, merci de vous être dérangé.

M. Lambert (Jean-Guy): Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. Lambert, également, au nom des membres de la commission, de votre témoignage. C'est du concret, c'est du réel, c'est du vécu. Malgré vos nombreuses occupations, par votre présence, vous nous démontrez que vous avez encore confiance d'améliorer le système et de le simplifier. Merci.

Je vais suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 44)

(Reprise à 16 h 57)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si vous voulez prendre place, messieurs. J'inviterais les représentants de l'Association des courtiers indépendants multidisciplinaires à nous présenter leur mémoire, et possiblement M. Vachon à nous présenter les personnes qui l'accompagnent.

M. Vachon (Marcel): C'est ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, M. Vachon.


Association des courtiers indépendants multidisciplinaires (ACIM)

M. Vachon (Marcel): Bonjour. Nous désirons tout d'abord vous remercier de nous avoir permis de venir présenter les points de vue de l'ACIM. Permettez-moi de nous présenter.

À mon extrême-gauche, Me Gilles Seguin, avocat en droit des valeurs mobilières et associé chez Mendelsohn. À ma droite, M. Robert Frances, qui est actif dans les produits financiers depuis 1986, président de Services financiers Peak depuis 1992, qui regroupe 75 représentants au Québec. Il est président du secteur de planification financière à l'Ordre des administrateurs agréés, il est membre du Comité réglementaire de l'Institut des fonds d'investissement du Canada et, bien sûr, membre de l'ACIM. À ma gauche, M. Rodrigue Julien, actif dans les produits financiers depuis 1974. Il est président de Investissements Courvie – dont le siège social est à Québec, en passant – depuis 1992, et qui regroupe 225 représentants au Québec, et il est vice-président fondateur de l'ACIM. Moi-même, Marcel Vachon, je suis actif dans les produits financiers depuis 1984 et je suis président de Les Planifications Plus Marcel Vachon inc. depuis 1985, et qui regroupe 101 représentants au Québec. Je suis membre du conseil d'administration de l'Institut québécois de planification financière et, à l'intérieur de l'Institut, président du service et support aux membres. Et je suis, finalement, président fondateur de l'ACIM.

Qu'est-ce que l'ACIM? L'ACIM veut d'abord dire l'Association des courtiers indépendants multidisciplinaires, qui a été fondée en début 1992. L'ensemble de nos 17 membres corporatifs représente 1 150 représentants et/ou employés de soutien, 5 250 000 000 $ d'actifs sous gestion – ici, on ne parle que de fonds mutuels et non des autres produits financiers que l'on peut avoir aussi – et environ 110 000 clients au Québec.

Peuvent devenir membres de l'ACIM uniquement les maisons de courtage ayant un permis d'exercice restreint de la Commission des valeurs mobilières qui ont un permis en épargne collective et qui ont possiblement d'autres permis, tels: contrats d'investissement, planification financière, SPEQ, sociétés en commandite et possiblement d'autres.

(17 heures)

Lorsque nous sommes réunis en assemblée, les membres de l'ACIM, on voit autour de la table exclusivement le président de la compagnie ou le principal actionnaire ou dirigeant, donc celui qui signe, celui qui décide, et seuls ces gens-là peuvent assister aux réunions. Donc, ce sont des entrepreneurs qui discutent ensemble de leur industrie.

Avant d'aller plus loin, j'aimerais vous mentionner que le mémoire que nous vous avons fait parvenir a été présenté un peu sous forme de commentaires au rapport quinquennal qui avait été présenté au gouvernement il y a quelques années, alors que la présentation verbale que nous vous faisons présentement est selon les principaux facteurs ou domaines que nous pensons très importants de soulever et de souligner.

En plus d'avoir ces permis d'exercice restreint de la Commission, comme on disait tout à l'heure, toutes nos firmes ont un deuxième permis qui est parallèle, dans le but d'offrir des services d'assurance de personnes. On y reviendra tout à l'heure. C'est important de savoir qu'on offre les fonds mutuels mais, à côté aussi, sous une autre corporation, de l'assurance de personnes, et possiblement d'autres produits aussi.

Nos représentants, qui sont des travailleurs autonomes, sont en contact direct avec leurs clients. Ces derniers, les clients, acceptent de faire affaire avec nous non pas parce que nos firmes ont un prestige comme des institutions bancaires ou caisses populaires et autres ont, comme prestige, mais tout simplement parce que le client a confiance en son représentant. Donc, c'est un contact direct qui est établi entre le client et le représentant. C'est très important de savoir cette situation dans laquelle nous sommes.

Je parlais hier avec un vice-président d'une importante firme en fonds mutuels, qui nous disait, selon les statistiques qu'il voyait... au fur et à mesure qu'il m'en parlait, j'ai noté que, de tous les fonds mutuels qu'eux vendent au Québec, 45 % de ces fonds mutuels sont vendus par des courtiers de plein exercice, alors que 55 % sont vendus par nous et ceux qui ne sont pas membres de l'ACIM aussi mais qui sont des courtiers d'exercice restreint; 55 %, ce qui est beaucoup.

Maintenant, on va aborder un autre sujet. Nous allons vous parler des huit recommandations que nous avons retenues et qui sont, selon nous, les plus importantes, la première étant l'organisme d'autoréglementation. De toutes les firmes ayant un permis à la Commission des valeurs mobilières, à notre connaissance, seules celles ayant un permis de plein exercice se rapportent à un organisme d'autoréglementation, c'est-à-dire...

Une voix: ...

M. Vachon (Marcel): Oui, de plein exercice, qui se rapportent soit à la Bourse de Montréal ou à l'ACCOVAM. Nous, de l'ACIM, on pense qu'il y a place pour un autre organisme d'autoréglementation obligatoire pour les courtiers d'exercice restreint. Voici six points reliés à ce futur organisme d'autoréglementation.

Premièrement, nous avons fait une approche, depuis quelques mois, avec l'Institut des fonds d'investissements du Canada, qui semble très intéressé à discuter, en tout cas, avec nous, de l'ACIM, pour voir comment on pourrait collaborer en vue d'instaurer un tel organisme: qui pourrait faire quoi et dans quelles circonstances, et qui paierait quoi.

Deuxièmement, on aimerait rapatrier la gestion à un fonds de protection des épargnants, tel que choisi par cet organisme d'autoréglementation, qui serait géré au Québec et qui pourrait s'accroître selon un mécanisme qui serait à être établi.

Troisièmement, établir une procédure d'inspection sur une base régulière pour éviter des feux. Présentement, les inspections se font sur une base irrégulière, on ne sait pas à quel rythme et pourquoi, mais on pense que l'objectif est d'aller éteindre un feu ou ce qu'on pense qui est un feu, alors que nous pensons qu'il serait important de faire des inspections sur une base régulière dans le but de prévenir, faire de la prévoyance, et de voir arriver un potentiel de problèmes à l'horizon et, ensuite de ça, établir un contact et non pas uniquement travailler sous forme de punition, mais aussi collaborer en vue d'aider un organisme qui pourrait, éventuellement, avoir des difficultés temporaires.

Quatrièmement, instaurer un processus de formation continue, et ce, tant pour les dirigeants, les administrateurs que les représentants. Et, à ce sujet, le même individu avec qui je parlais hier, il m'annonçait qu'à partir de maintenant, ou dans les prochains mois... Il semble dire que plusieurs millions pourraient être disponibles dans l'orientation de la formation. Il est ouvert à ce que, si l'ACIM organise quelque chose d'une façon officielle, il pourrait participer financièrement. On y reviendra s'il y a des questions à ce sujet-là.

Cinquièmement, que cet organisme d'autoréglementation soit obligatoire pour tous ceux qui ont un permis, qui ont un permis, oui, du style du nôtre.

Et, sixièmement, que le niveau minimal de scolarisation soit un niveau de cégep.

Un autre plan, un autre sujet, qui serait la planification financière. Nous considérons que l'Institut québécois de planification financière joue très bien son rôle dans le cadre de la loi 134 sur les intermédiaires de marché. Nous soupçonnons qu'il va y avoir des modifications qui seront apportées quelque part cette année et nous pensons que les législateurs vont prendre les bonnes décisions. Nous pensons qu'elles devraient être orientées dans le sens que l'Institut, qui est venu faire une présentation ce matin, pense. Nous l'appuyons et nous pensons que la Commission des valeurs mobilières du Québec devrait se retirer de cette activité parce que les organismes en place font très bien leur travail.

Et on devrait, finalement, laisser libre choix à ceux qui ont plusieurs permis, choisir leur organisme de réglementation en planification financière. Comme on a dit, je crois, ce matin, celui qui a le permis de courtier en valeurs mobilières, qui est assureur de personnes et qui veut faire aussi de la planification financière parce qu'il a son permis, devrait être chapeauté, à son choix, sous la coupole d'un des deux organismes, soit la Commission des valeurs mobilières ou les assureurs de personnes, mais pas obligatoirement, prête pas prête, avec la Commission des valeurs mobilières.

Sur ce, je vais passer la parole à Rodrigue Julien.

M. Julien (Rodrigue): Oui, bonjour. Ça me fait plaisir de vous adresser la parole. Moi, je vais vous entretenir spécifiquement de la vente d'obligations. Les courtiers à exercice restreint, nous, les firmes, et nos courtiers qui sont spécialisés dans la vente de fonds mutuels, nous aimerions que la Commission des valeurs mobilières nous autorise à vendre des obligations qui seraient principalement des obligations gouvernementales et municipales.

Nous croyons que cette opportunité de pouvoir les vendre directement – on verra tout à l'heure qu'on peut en vendre mais indirectement – nous permettrait de rendre un meilleur service aux consommateurs parce que, si notre courtier a seulement des produits de fonds mutuels à vendre... On sait que, dans des périodes où les taux d'intérêt sont élevés, il peut être intéressant de vendre des obligations et, à ce moment-là, le consommateur ne pourrait en être que mieux servi. Ça permettrait aussi au gouvernement, qui cherche beaucoup, de ce temps-ci, des canaux de distribution pour ses produits financiers, telles les obligations gouvernementales, les obligations municipales, d'avoir une force de vente, qu'ils puissent distribuer directement ces produits.

Actuellement, comme je le mentionnais, il est possible de référer nos clients qui veulent acheter des obligations à des firmes de courtage de plein exercice et d'obtenir une commission de référencement, qu'on appelle. Il nous est possible seulement de le référer, on ne peut pas en parler, on ne peut pas le publiciser. Nous autres, ce qu'on demande, c'est d'avoir la possibilité de le faire.

D'ailleurs, on a fait un sondage, on a payé quelqu'un pour faire un survol de ce qui se fait dans les autres provinces canadiennes. En Ontario, entre autres, il est possible de faire, aux courtiers d'exercice restreint, des coupons détachés et, s'ils obtiennent une autre inscription, de vendre des obligations. En Alberta, il est possible, entre autres, de vendre des coupons et tout titre d'obligation. Et, en Colombie-Britannique, eux autres, ils disent: Tout titre de dette.

Et ce qui est bizarre, ce que nous disait notre avocat, dans la loi actuellement, c'est que, nous, les courtiers d'exercice restreint, il y a seulement nous qui sommes exclus de vendre des produits d'obligations. Ils nous excluent spécifiquement de vendre des obligations alors que toute personne ou toute corporation peut en vendre. On trouve un peu bizarre cette situation que nous vivons et qui, je pense, n'est pas à l'avantage soit du gouvernement ou de nos consommateurs.

Je vais laisser la parole maintenant à M. Robert Frances qui va vous entretenir d'un autre sujet.

M. Frances (Robert): Merci, Rodrigue. Bonjour. J'aimerais traiter de deux recommandations, sur les procurations et les transactions électroniques.

Premièrement, les procurations. En ce moment, les représentants de courtiers d'exercice restreint ne peuvent pas accepter des commandes de transfert ou de rachat qui sont transmises par téléphone. Cette limitation présente, évidemment, un problème pour certains clients. Nous comprenons, évidemment, le besoin de contrôler cette activité et de contrôler l'élément de risque pour le client. Cependant, l'ACIM propose que la Loi sur les valeurs mobilières soit modifiée pour permettre l'acceptation de commandes téléphoniques moyennant une procuration signée au préalable par le client qui désire se prévaloir de ce service. Ce ne serait pas pour tout le monde, mais les clients qui, absolument, veulent ça ne se sentiraient pas dans un grand désavantage en faisant affaire avec un courtier d'exercice restreint.

(17 h 10)

Deuxièmement, le traitement de commandes électroniques. L'ACIM souhaite voir des règlements précis permettant... des règlements qui pourraient encadrer les transactions effectuées par le biais de médias électroniques, tels que le télécopieur, l'Internet. On en entend tous parler un peu trop, de l'Internet, ces jours-ci. Ce qui se produit dans notre domaine, c'est que, pour les courtiers d'exercice restreint, c'est très difficile de savoir comment s'y prendre quand on reçoit des commandes par télécopieur. En ce moment, toute transaction qui n'est pas sur papier est refusée.

Donc, un client qui nous envoie un avis par télécopieur nous demandant de transiger dans son compte, de vendre ses fonds mutuels, de mettre ça en fonds de marché monétaire, parce qu'il trouve le marché trop élevé, puis il se trouve à être un client éloigné, on n'accepte pas sa commande. Cependant, la réalité, c'est que le client se retourne de bord souvent, envoie le même fax à un organisme de placements collectifs, une compagnie de fonds mutuels qui se trouve à Toronto, et la compagnie, elle, procède avec la commande. Il y a un risque important pour le client et, dans notre opinion, il y a un risque important pour nous en tant que courtiers, parce que nos livres ne sont plus à jour. C'est un problème qui pourrait être très sérieux.

Donc, ce qu'on propose, c'est que les courtiers d'exercice restreint puissent accepter certaines autorisations de clients, encore peut-être sous forme de procurations, seulement pour les clients qui désirent faire accepter leur commande par télécopieur ou par l'Internet. L'ACIM serait prête à travailler avec la CVMQ pour établir un encadrement adéquat et certains formulaires qui seraient nécessaires pour faire avancer cette cause-là.

Je repasse la parole à Marcel Vachon.

M. Vachon (Marcel): Un petit mot sur les actions qui sont distribuées par le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec et Fondaction. Ces deux produits ont des dispenses d'inscription annuellement. Les rendements qui sont affichés par eux sont des rendements avant les frais, alors qu'on nous oblige ou on oblige les fonds mutuels à afficher des rendements après les frais, donc deux poids, deux mesures. Et ils sont distribués par des gens qui ne sont pas inscrits et qui n'ont donc pas la formation que nous avons pour offrir au public ce genre de produits. En Ontario, ce type de produits est offert via des courtiers tels que nous. Au Québec, ce n'est pas le cas.

Un autre point que j'aimerais soulever, qui est la contradiction entre l'article 30 de la loi des valeurs mobilières et l'Instruction générale n° C-39. Je ne parlerai pas de loi, je vais vous donner un exemple qui va expliquer très bien la situation.

Le vendredi après-midi, un client place 100 000 $ chez nous. On fait le placement et, à 16 heures, les bourses ferment, les commandes sont placées et tout devient officiel. En fin de semaine, il se produit quelque chose, une catastrophe quelconque. Le lundi, répercussions sur le milieu boursier, le marché s'écroule. Le mardi, le client appelle puis il dit: J'arrête ma transaction. L'article 30 de la loi des valeurs mobilières dit que le client a deux jours pour annuler une transaction, donc le client est en droit de réclamer son 100 000 $ qu'il a placé le vendredi. Mais l'Instruction générale n° C-39 dit que la commande qui a été placée et qui est faite et terminée à 16 heures le vendredi, il y a 100 000 $ qui a été placé, il y a 100 000 $ qui doit être payé. Donc, le courtier doit payer, en date du vendredi, le 100 000 $. Mais il place une autre commande, en disant: On veut vendre en date du mardi à 16 heures, et le 100 000 $ est devenu 70 000 $, par exemple.

Donc, cette loi dit... Nous, on est obligés de rembourser le 100 000 $ parce qu'on nous oblige à le faire, donc on doit sortir de nos poches 30 000 $ pour satisfaire le client. Par contre, si le 100 000 $ est devenu 120 000 $, le fonds mutuel conserve le 20 000 $ et on rembourse le 100 000 $ au client. Donc, quand ça va bien, les fonds mutuels en profitent et, quand ça va mal, nous payons. Il y a quelque chose qui ne marche pas quelque part. Il faudrait qu'il y ait une certaine... enfin, un équilibre quelque part pour ne pas nous mettre dans cette situation.

M. Chagnon: Ça ressemble au ministère du Revenu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Vachon (Marcel): Je vais passer la parole à Rodrigue Julien.

M. Julien (Rodrigue): Je voudrais vous parler brièvement des fonds distincts, juste pour y revenir. Ce matin, vous en avez entendu parler un peu par le CAP. Ce sont des fonds qui sont distribués par les compagnies d'assurance-vie. On connaît très bien ce secteur.

Pour nous, les fonds distincts, ce sont essentiellement des fonds mutuels. Écoutez, ceux qui ont suivi l'actualité financière depuis un an, la grande majorité des compagnies d'assurance-vie, maintenant, font administrer leurs fonds mutuels par des compagnies qui sont connues de tous, par des plus grosses compagnies canadiennes. Ce qui veut dire que... Dans les faits, ils appellent ça souvent des fonds miroirs: c'est que tu es un fonds distinct, mais tu reflètes le miroir du fonds mutuel qui est sur le marché.

Nous, nous pensons que les gens qui distribuent ces fonds-là devraient être soumis au même encadrement puis à la même formation auxquels sont soumis les courtiers à exercice restreint. D'ailleurs, il est sûrement arrivé des situations où un représentant a été suspendu par la Commission des valeurs mobilières puis il pouvait continuer à vendre des fonds distincts par une compagnie d'assurance-vie. Il serait possible de trouver un cas de cette nature.

L'objectif, évidemment, pour nous, ce n'est pas de limiter la distribution des produits de fonds mutuels. Nous croyons que c'est un produit qui est très bien mis en marché et qu'avec la diversité des fonds qui existent un client peut trouver le produit qui lui convient. Mais nous pensons que les fonds distincts devraient être un peu mieux encadrés.

Je repasse la parole à M. Vachon, qui va terminer.

M. Vachon (Marcel): Dernier point, le huitième. On aimerait que la Commission des valeurs mobilières soit obligée de répondre lorsqu'on lui pose des questions. Lorsqu'on a une situation qui est embarrassante, qui est nouvelle pour nous et qu'on ne sait pas si on doit aller à gauche ou à droite, il nous arrive de poser la question aux gens de la Commission des valeurs mobilières et, quelquefois, on n'a pas de réponse, même lorsque les questions sont écrites. Alors, on pense qu'il serait important que des questions écrites par un dirigeant d'un courtier inscrit aient obligatoirement une réponse écrite. Je ne parle pas de questions qui peuvent venir de n'importe qui, mais je pense que, lorsqu'on parle d'un dirigeant d'un courtier inscrit, il devrait avoir une réponse.

Une voix: ...

M. Vachon (Marcel): Ah! O.K. Je m'excuse. Il y a aussi un élément qu'il serait peut-être, je pense, intéressant de mentionner ici. On parle des intérêts dans le compte en fidéicommis. Ça va prendre une minute. On sait que, nous, lorsque... Je prends un cas: un client nous envoie 100 000 $. Qu'est-ce qu'on fait avec le 100 000 $? On le place dans le compte en fidéicommis, on place la commande au fonds mutuel, on reçoit une facture de lui et on fait un chèque de... 100 000 $, disons qu'il y a 2 % de commission, donc on envoie au fonds mutuel 98 000 $ et on verse dans notre compte courant 2 000 $. Grossièrement, c'est ce qui se passe. Il est évident que, dans le compte en fidéicommis, il y a 100 000 $ qui va rester là trois jours, et puis il y a 20 000 $, plus, plus, plus, ce qui fait que, sur une période d'un an, il y a un montant d'argent qui demeure dans le fonds en fidéicommis, qui varie selon l'importance de la firme et selon l'époque de l'année. Ça peut varier de 50 000 $ à 2 000 000 $. C'est tout à fait normal, chez nous en tout cas.

Ce que la banque fait, évidemment, avec cet argent, l'argent de chez nous et de chacun de nous, elle ne garde pas les bras croisés, elle le place à ses clients ou à d'autres organismes, à court terme. Donc, la banque fait de l'argent avec ce dépôt en fidéicommis. Ce que la banque dit, elle nous approche puis elle dit: Est-ce que vous voulez une partie de l'argent que nous faisons, de toute façon? Et la Commission des valeurs mobilières nous dit: Ta, ta, ta! Vous n'avez pas le droit d'accepter ce qui vient de la banque. La banque met 100 $ dans ses poches, elle veut partager le 100 $, on est obligé de dire non.

Ce que nous proposons, c'est que la partie qui est offerte par la banque, au lieu de l'envoyer au fonds, dans un fonds commun de placement, avec les milliards qu'il gère déjà, ce qui représente des pinottes, en général, mais, pour nous, beaucoup d'argent... Ce que nous proposons, c'est que ces argents puissent être envoyés dans un fonds particulier, et ce cumul de fonds pourrait servir soit à la formation de nos gens soit à la formation du public ou soit à une formation quelconque. Enfin, c'est une proposition, ça pourrait être d'autres objectifs, d'autres buts. Mais nous pensons que la formation pourrait être un élément où les argents pourraient servir très, très bien sans qu'aucun client n'en voit la couleur, ne soit pénalisé et perde un sou. Parce que c'est de l'argent qui, de toute façon, va dans les poches des banques. Ce n'est pas de l'argent qui est envoyé ailleurs, nulle part ailleurs. Alors, c'est une dernière proposition que nous avions.

(17 h 20)

On vous remercie beaucoup de nous avoir écoutés, puis, si vous avez des questions, ça nous fera plaisir d'y répondre. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Vachon, il va sans doute en venir, des questions. M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. C'est, bien sûr, un exposé fort intéressant pour nous tous. Ça nous fait voir aussi... Vous n'avez pas hésité à faire voir les choses que vous n'aimiez pas dans les lois de la Commission des valeurs mobilières et les points qui pourraient, selon vous, être corrigés ou pour lesquels il y a matière à amélioration.

Je fais tout de suite un commentaire sur les obligations du Canada et sur les obligations du Québec. On me dit que n'importe qui peut vendre des obligations du Canada et des obligations du Québec. D'autre part, je me permets de souligner que le ministère des Finances a déjà changé son mode de vente des obligations d'épargne du Québec. Ça, vous pouviez en vendre avec les comptes désignés, l'ouverture de comptes, et, à partir de septembre, je ne sais pas comment ça va se faire au juste, mais il va y avoir une plus grande variété de genres de certificats de dépôt garantis, autrement dit, comme des obligations, échéance à un an, deux ans, trois ans, quatre ans ou cinq ans, où je pense que vous pourrez être intermédiaires là-dedans. Ça vous donnera au moins cette possibilité-là. Je ne dis pas que c'est parfait. C'est quand même une amélioration.

Quant aux municipalités, bien, définitivement, vous n'avez pas l'autorisation d'en vendre. Peut-être y aurait-il lieu d'étudier le problème et de voir s'il y a quelque chose à faire là-dessus. Je n'en sais rien.

Vous avez parlé tout à l'heure de votre exemple de 100 000 $. La fin de semaine, il y a un krach boursier, c'est resté à 70 000 $. Donc, vous êtes à risque pour deux jours. Je comprends mal, sur l'autre côté, si ça monte à 120 000 $, que ce soit le fonds mutuel qui fasse l'argent, parce que n'importe quelle personne intelligente qui a acheté le vendredi à 100 000 $, si ça vaut 120 000 $ le mardi, il va le garder.

Une voix: Il ne vend pas.

M. Campeau: Il ne vend pas ou bien, s'il vend, il va voir le profit, il va aller chercher le 20 000 $.

M. Vachon (Marcel): C'est écrit dans la loi.

M. Campeau: C'est écrit dans la loi?

M. Vachon (Marcel): Oui.

M. Campeau: Alors, le législateur, là-dessus, il n'a pas dû avoir compris que quelqu'un peut avoir de l'allure puis encaisser le 20 000 $ lui-même.

M. Vachon (Marcel): D'accord.

M. Campeau: Bon. Je suis d'accord avec vous, vous avez, je pense, simulé des avantages fiscaux, des fois, qu'il peut y avoir à investir... Vous avez parlé du Fonds de solidarité. Le Fonds de solidarité, le système là-dessus, c'est que les vendeurs du Fonds de solidarité n'ont pas de commission pour vendre. Or, c'est un peu différent d'un courtier, ou d'un courtier indépendant comme vous, qui fait quand même une commission, pour qui il est tout à fait normal et légal, logique d'avoir une commission. Eux n'en ont pas, de commission. Donc, ça les couvre peut-être... L'individu qui vend a moins une incitation à vendre. S'il avait une commission, ce serait peut-être discutable, encore plus là. Je dis juste la distinction, quoiqu'on retienne votre commentaire là-dessus.

Et je me permets de souligner quand même qu'avant d'investir on ne doit jamais investir parce que c'est un abri fiscal. On doit s'assurer que, d'abord, l'investissement est bon, et tant mieux s'il nous procure un abri fiscal. Et je pense que, ça, vous l'avez souligné, je fais juste le rapporter.

Là-dessus, M. le Président, je pense que mon collègue le député de Charlevoix brûle de poser des questions dans ce domaine-là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez-y, M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Je vais probablement surprendre le député de Crémazie, je n'ai pas beaucoup de questions, mais quelques précisions.

Selon vous autres, peut-on gérer les situations de conflits... Vous en avez parlé, mais je voudrais qu'on aille un petit peu plus loin. Peut-on gérer les situations de conflits d'intérêts pour les intermédiaires de marché en assurance ou en valeurs mobilières qui sont également autorisés à porter le titre de planificateur financier ou devrait-on exiger que les planificateurs financiers ne fassent que de la planification financière? On sait que c'est à la mode de se poser au moins cette question-là puis d'avoir des grands titres. Alors, j'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu plus. On retrouve, dans votre mémoire, quelques commentaires là-dessus.

M. Frances (Robert): C'est un très bon point, c'est une très bonne question, c'est une question très populaire ces jours-ci dans les journaux puis un peu partout. Je crois que la réponse vient de la définition de la planification financière. Et, si on s'en tient à la définition internationale, la définition nationale, la définition qui a été proposée dans la loi 134, on voit que l'activité de planification financière doit s'arrêter là où la vente ou la recommandation de produits spécifiques débute. Ça, c'est évidemment très théorique. Côté pratique, il y a également des adaptations qui pourraient être très intéressantes.

Il n'existe pas de définition pour une planification financière à commission. Un planificateur financier à commission n'existe pas, c'est impossible. C'est quelqu'un qui va faire une planification financière gratuite dans ce cas-là, donc c'est des honoraires de zéro, dans l'espérance de gagner une commission plus tard. Cette nuance est très importante parce que ça va bien nous qualifier ce qu'est un planificateur financier et ce qu'il n'est pas.

Également, il est très important de reconnaître que, dans le moment, en planification financière, le client n'a pas nécessairement de mandat qui est signé. Certains ordres professionnels le proposent, ou le font, certains organismes le font, et, ça, c'est une façon de protéger le consommateur dans ce cas-là. Mais tout consommateur qui s'engage dans une planification financière, dans mon opinion personnelle et dans l'opinion de plusieurs membres de l'ACIM, devrait au moins accuser réception d'un mandat qui va bien spécifier son travail et que son travail s'arrête là où la représentation d'un autre produit débute.

M. Bertrand (Charlevoix): On a vu dans le passé, particulièrement en assurance collective de personnes, et à une époque, particulièrement aussi, sur une planification, avant que la planification financière arrive vraiment plus... avec plus de profondeur qu'elle est là, depuis quelques années... On a vu des actuaires qui se servaient de leur titre d'actuaire pour conseiller, entre guillemets, les clients, et on se rendait compte que, finalement, il y avait de l'assurance qui était carrément transigée. Est-ce que vous ne craignez pas, si on ouvrait beaucoup dans ce sens-là, qu'on pourrait voir des planificateurs qui, sous leur grand titre ronflant, pourraient être des portes ouvertes carrément pour le système bancaire ou même carrément pour de l'assurance, ou même des valeurs mobilières, sans toujours avoir de la réglementation à suivre, une cotisation à payer, une règle d'éthique à suivre, etc.?

M. Frances (Robert): Ce risque va toujours exister. Il y aura potentiel d'abus, peu importe la façon dont on réglemente ça. Mais je crois que l'alternative sera beaucoup moins favorable aux représentants, aux entrepreneurs en planification financière – c'est un domaine qui croît énormément – et ce sera une approche qui ne sera pas nécessairement plus intéressante pour le consommateur.

Voici l'exemple. Si je suis représentant en valeurs mobilières et que je vends des actions, des obligations, mais que je porte le titre de planificateur financier et que mon client est en réception d'un document comme quoi il reconnaît que je ne vais pas effectuer de planification financière. Cependant, j'ai des connaissances en planification financière. On pourrait se prononcer comme quoi je pourrais peut-être amener plus à la relation, et peut-être même suggérer au client d'aller vraiment voir un planificateur financier. C'est un peu comme un pharmacien, qui oeuvre comme pharmacien, qui ne veut faire que de la pharmacie, mais il est également diplômé en médecine et en droit et en d'autres choses, ça pourrait apporter plus à la relation. Un planificateur financier qui est habilité à porter d'autres titres pourrait apporter plus à la relation, pour son client, que quelqu'un qui ne l'est pas. Et je crois que notre défi, c'est de trouver un encadrement pour bien gérer ça au lieu d'éliminer la permission à ces gens-là de s'inscrire doublement.

M. Bertrand (Charlevoix): Je ne pense pas qu'il y ait de comparaison tellement avec le pharmacien. Mais votre planificateur financier ne serait-il pas tenté d'élargir ses recommandations à de la vente de produits dont il n'est pas autorisé?

M. Vachon (Marcel): Il est évident qu'on ne pourra jamais éliminer les abus dans quelque domaine que ce soit. Je pense que les gens qui sont dans nos firmes qui ont un permis en planification financière font de la planification financière mais sur une base de conseils gratuits à leurs clients, espérant, comme M. Frances disait tout à l'heure, avoir une commission, qu'il y ait un produit à vendre. Mais, seulement, les clients, je pense qu'ils ne sont pas dupes. La personne qui va faire faire une planification financière à son représentant, en général, c'est qu'elle dispose d'une somme relativement importante ou de biens, en général, relativement importants. Et je pense qu'avant de faire une planification financière il va y avoir un mandat, au moins verbal, qui va être établi entre les deux personnes pour déterminer dans quelles circonstances et dans quelles règles du jeu les choses vont être faites: Ça commence où et ça finit où et à quelles conditions financières? À ma connaissance, c'est comme ça que les choses se font.

M. Bertrand (Charlevoix): Ma grande préoccupation, c'est que... Et à l'étude de la Commission des valeurs mobilières, le rapport quinquennal, et à l'étude du rapport quinquennal de la 134, notre grande préoccupation, c'est la protection du client. Et une des préoccupations qu'on a, c'est comment on va réussir à couvrir des domaines d'assurances qui, actuellement, ne sont pas couverts, qui échappent soit par l'électronique, soit par la vente de l'assurance-voyage, etc. Alors, je voudrais quand même qu'on retienne que, si on élargit à ce niveau-là, il faudra quand même s'assurer en fonction de la protection du consommateur, puis en fonction, aussi, des gens qui, eux, paient des cotisations, détiennent des permis, etc., mettons-en.

(17 h 30)

Vous recommandez la création d'un organisme d'autoréglementation lié au Fonds canadien. Est-ce que vous recommandez la création d'un fonds québécois ou pancanadien ou canadien? J'aimerais vous entendre un peu plus spécifiquement là-dessus.

M. Vachon (Marcel): D'un organisme d'autoréglementation?

M. Bertrand (Charlevoix): Oui.

M. Vachon (Marcel): Cana... québécois, pardon.

M. Bertrand (Charlevoix): C'est québécois?

M. Vachon (Marcel): Essentiellement.

M. Bertrand (Charlevoix): Sans discussion là-dessus. C'est ça, on s'en va?

M. Vachon (Marcel): Aucune discussion.

M. Bertrand (Charlevoix): Non, mais j'aime ça, les réponses précises.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): Peut-être que mon collègue étirera la question tout à l'heure, pour aller un peu plus loin, mais, en autant que je suis concerné, ça me satisfait.

Êtes-vous favorable à octroyer un pouvoir réglementaire à la Commission des valeurs mobilières, et à quelles conditions et à quelles limites?

M. Vachon (Marcel): En ce qui concerne...

M. Bertrand (Charlevoix): Parce qu'on analyse, on est sur le rapport de la Commission des valeurs mobilières.

M. Vachon (Marcel): En ce qui concerne la planification financière?

M. Bertrand (Charlevoix): Non, dans le cadre de ses fonctions et de ses responsabilités.

M. Vachon (Marcel): Je m'excuse? J'ai mal saisi, je m'excuse.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Répète la question.

M. Bertrand (Charlevoix): Actuellement, le gouvernement réglemente certaines choses. Est-ce que le gouvernement pourrait transférer... Seriez-vous favorable à ce que la Commission des valeurs mobilières ait des pouvoirs plus forts de réglementation? Dans le sens général du mot, tiens.

M. Vachon (Marcel): C'est difficile, pour nous, de se prononcer sur un sujet comme celui-là, on préfère rester dans les sphères d'activité qui nous concernent. Les points qui sont, selon nous, les plus importants, on les a soit écrits ou soit dits. S'il y a d'autres éléments, on n'ose pas se mettre les pieds puis...

M. Bertrand (Charlevoix): Deux dernières questions, M. le Président, si vous me le permettez, rapidement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez-y.

M. Bertrand (Charlevoix): Très rapidement, j'aimerais vous entendre davantage sur l'organisme d'autoréglementation dont vous parlez et j'aimerais ça que M. Rodrigue revienne sur la question, même si le député de Crémazie en a parlé un peu, de la vente d'obligations. Parce que je pense qu'on devra se pencher, nous, de plus en plus sur cette question-là, la vente d'obligations. Alors, d'abord, l'organisme d'autoréglementation, très rapidement.

M. Vachon (Marcel): Bien, concernant la vente des obligations soit municipales ou provinciales, je crois que, si on se base sur ce qui se passe dans plusieurs autres provinces au Canada, ce n'est pas un produit qui est très spéculatif. Les obligations, je comprends que la valeur d'une obligation peut varier dans son histoire, mais je pense que, si on regarde le terme de l'obligation, je pense que c'est tout de même sécure. C'est notre opinion. De telle sorte que les gens, chez nous, devraient avoir la possibilité de s'afficher comme tel: Voici, si vous êtes intéressés à acheter des obligations, venez nous voir. L'afficher, le publiciser.

Alors que, présentement, on est obligé un peu de passer sous la table, en se disant: Va voir un courtier de plein exercice, et puis lui va me refiler officiellement et légalement une partie de la commission. Mais on joue un peu à la cachette et à la tague avec certains représentants de plein exercice alors que, nous, on pense qu'on peut très bien le faire, très ouvertement et publiquement.

M. Bertrand (Charlevoix): Et l'ouverture manifestée par le député de Crémazie, ça ne semble pas être exactement ce que vous voulez ou visez.

M. Julien (Rodrigue): Ce qui arrive, nous autres... Évidemment, tu sais, Rosaire... Vous savez, Rosaire... M. Bertrand. Tu m'as appelé M. Rodrigue. Moi, c'est M. Julien. Ce n'est rien, c'est pour ça que je me permets de l'agacer. Ha, ha, ha!

Notre avocat nous dit que, effectivement, selon la loi actuelle, tout le monde peut vendre des titres d'emprunt du gouvernement, des gouvernements du Canada ou du Québec, sauf nous autres, à partir du moment où on a un permis d'exercice restreint. On l'a, la loi, ici. Elle est juste ici. Ça fait que c'est ça que ça dit. Ça fait que nous autres, on dit: Ce n'est pas normal que tout le monde puisse en vendre puis que, nous autres, on soit exclus spécifiquement de pouvoir en vendre.

On ne veut pas vendre des options, on ne veut pas vendre des produits financiers élaborés, si on peut dire, on pense que le consommateur serait mieux servi si on pouvait vendre des obligations des gouvernements et possiblement des municipalités. Ce n'est pas plus que ça, notre demande.

M. Campeau: Je me demande si vous devriez changer d'avocat, parce que peut-être qu'ils peuvent en vendre. Ha, ha, ha! Vous, vous arrivez à la conclusion que vous ne pouvez pas en vendre.

M. Julien (Rodrigue): Effectivement, on n'a pas le droit.

M. Campeau: Ni du Canada ni du Québec.

M. Julien (Rodrigue): Non, on ne parle pas des obligations d'épargne.

M. Campeau: Non, non, on parle des obligations ordinaires.

M. Julien (Rodrigue): Non, vraiment pas.

M. Vachon (Marcel): Du Québec, oui, conditionnel à ce qu'on vende un minimum, c'est-à-dire qu'on ne peut pas prendre en bas de 100 000 $, par exemple.

M. Julien (Rodrigue): Non, non, ça, c'est d'épargne. Les obligations tout court, on ne peut pas en vendre. On n'en vend pas. On n'a pas le droit.

M. Seguin (Gilles): Le problème, c'est que ce sont des courtiers d'exercice restreint en fonds mutuels, et les interprétations qu'on a eues de la Commission, c'est que c'est restreint en fonds mutuels. Les seules choses que vous pouvez vendre, c'est des fonds mutuels, c'est votre licence. Et, si vous voulez en vendre...

M. Campeau: Oui, mais n'importe qui, n'importe quel individu a le droit de vendre des obligations du Canada et du Québec. Vous êtes n'importe quel individu.

M. Seguin (Gilles): C'est ça, sauf les personnes qui ont une inscription de courtier en exercice restreint de vente de fonds mutuels. Parce que leur inscription...

M. Campeau: Bien, faites-les changer. Vous avez un bon point.

M. Seguin (Gilles): Parce que leur inscription, c'est restreint aux fonds mutuels. C'est un peu une aberration, mais c'est comme ça. Alors, la solution qu'ont ces gens, c'est de tout simplement incorporer une nouvelle compagnie pour les vendre. C'est quand même bête un peu, là.

M. Vachon (Marcel): C'est comme si on incluait tout le monde sauf nous. Il y a une parenthèse, là, pour toute la population, et c'est nous.

M. Campeau: Vous êtes chanceux, on tient compte de vous autres. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: C'est sûr qu'il faut faire des pressions pour changer ça, celle-là.

M. Bertrand (Charlevoix): Ce qu'on peut faire – je parlais avec le sous-ministre – on va définitivement le vérifier en profondeur. On va définitivement l'analyser, en tout cas. Maintenant, il y a juste une spécification différente. Quand vous dites que le client serait mieux servi, j'aimerais mieux vous entendre ajouter: Nous, on pourrait ajouter une gamme de services aux qualités de travail qu'on fait et qualités des services qu'on offre. Ce serait plus ça.

M. Julien (Rodrigue): Non, je trouve qu'il est mieux servi, parce que, lorsqu'on a une gamme élargie de produits... Écoutez, quand les taux d'intérêts deviennent élevés...

M. Bertrand (Charlevoix): C'est à ce moment-là que le client est le mieux servi.

M. Julien (Rodrigue): Oui, je pense qu'il serait mieux servi.

M. Bertrand (Charlevoix): L'organisme, je n'en ai pas entendu parler.

M. Julien (Rodrigue): L'autoréglementation, oui.

M. Campeau: M. le Président, j'aimerais ça que nos deux avocats, l'avocat de la Commission des valeurs mobilières, ici, et l'avocat des représentants se rencontrent après notre entrevue pour clarifier ce point-là.

M. Julien (Rodrigue): Absolument. Merci.

M. Bertrand (Charlevoix): J'aimerais juste, comme dernière intervention, les entendre, si M. le député est d'accord, sur l'organisme d'autoréglementation.

M. Vachon (Marcel): Ce que nous proposons?

M. Bertrand (Charlevoix): Oui, détaillez un petit peu plus ce dont vous parlez par rapport à ce qui existe pour la Commission des valeurs mobilières, ce que vous avez en tête par organisme d'autoréglementation.

M. Vachon (Marcel): Ah! O.K. Il est évident qu'un organisme d'autoréglementation va recevoir de la Commission des valeurs mobilières un certain nombre de réglementations qu'on devra appliquer. Nous pensons, étant directement reliés avec le marché, qu'on serait plus en mesure, à moindres frais, je pense, de surveiller ce marché, mais aussi de collaborer avec l'ensemble du marché pour améliorer collectivement un certain nombre de choses et d'attitudes face au public, et non pas agir comme présentement, c'est-à-dire éteindre des feux, et puis, je ne sais pas, moi, être un peu la police ou quelque chose du genre. Être un collaborateur aussi avec l'industrie.

M. Bertrand (Charlevoix): Et cet organisme serait sous la responsabilité de?

M. Seguin (Gilles): La Commission.

M. Bertrand (Charlevoix): La Commission des valeurs mobilières?

M. Vachon (Marcel): Oui.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci. J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je tiens à souhaiter la bienvenue à l'ACIM et, en même temps, les remercier pour la présentation de leur mémoire.

Plusieurs des questions, évidemment, qui sont un peu dans l'ordre des générales que nous posons à peu près à tous les invités que nous recevons ont été posées. Toutefois, j'aimerais, M. le président, en poser quelques-unes qui ont trait, d'une part, à votre mémoire et, d'autre part, à l'orientation, certaines des orientations que la «désintermédiatisation» du marché risque de provoquer chez vous. Je vais finir par être capable de le dire comme du monde.

À la page 15 de votre mémoire, vous dites: «L'ACIM recommande que la loi sur les petites créances soit utilisée afin de régler les litiges pour des sommes n'excédant pas le maximum prévu par cette loi.» Vous n'êtes pas sans savoir, j'imagine, que la loi des petites créances a un plafond à 5 000 $. 5 000 $, ça parle de petits épargnants, je veux bien croire, de petits investisseurs, mais on parle de petites pertes aussi.

(17 h 40)

M. Vachon (Marcel): Oui. Il est évident qu'on n'est jamais à l'abri d'une poursuite, ou d'une erreur ou d'une croyance d'erreur qui peut être faite dans la tête d'un investisseur. Mais, peu importe le montant de la perte, pour certaines personnes, 2 000 $, c'est beaucoup d'argent.

M. Chagnon: Je n'en doute pas.

M. Vachon (Marcel): Pour d'autres, c'est moins d'argent. Mais, peu importent les montants d'argent, ce que nous avons fait ici, c'est qu'on a tout simplement réagi à la proposition qui a été faite dans le rapport quinquennal, qui parlait de 5 000 $, 20 000 $. Nous, on a voulu simplifier les choses en disant: Il y a la Cour des petites créances, et l'organisme d'autoréglementation pourrait instaurer un système qui permettrait d'avoir, comment dire, un endroit où les gens pourraient régler des problèmes ensemble.

M. Chagnon: Un peu plus un centre d'arbitrage.

M. Vachon (Marcel): Un centre d'arbitrage, oui.

M. Chagnon: Vous avez dit, un peu plus tôt: Nous aimerions être reconnus, finalement, comme l'ACCOVAM, pour le type d'intermédiaires de marché que nous sommes. L'ACCOVAM a mis sur pied, au début février, un centre d'arbitrage permettant à toutes les personnes qui se sentent lésées de pouvoir y recourir jusqu'à concurrence de 50 000 $. Pourquoi n'en faites-vous pas de même?

M. Vachon (Marcel): On n'est pas rendu là. Il faut dire une chose aussi, c'est que les risques, chez nous, sont très différents. On parlait avec des gens de la Commission des valeurs mobilières, il y a quelque temps, qui nous disaient que, à date, le fonds de prévoyance qui est prévu ou le fonds de 50 000 $ qui est prévu, de liquidités, n'a jamais dû être utilisé dans le passé, à ce qu'on nous a dit. Alors, il est évident que, lorsqu'on reçoit de l'argent d'un client... Dans certains cas, en passant, les chèques sont faits directement au fonds, de telle sorte qu'on est presque une boîte à lettres. On enregistre les transactions, sauf que le chèque est fait directement au nom de Talvest, par exemple. On l'envoie à Talvest, et les commissionnements et les confirmations, tout ça, sont faits directement avec Talvest.

M. Chagnon: Altamira ou n'importe quoi.

M. Vachon (Marcel): Etc., exactement. De telle sorte que le risque qu'on encourt d'avoir une perte est très minime, c'est très peu existant. Et, si le fonds en fidéicommis est bien géré, comme il doit l'être et comme, à date, il l'est toujours, à ce moment-là, on ne voit pas la possibilité d'erreur. Le plein exercice, lui, peut faire des mauvaises recommandations, est dans une situation où la marge d'erreur ou de fraude, si on veut, peut être énorme, ce qui n'est pas notre cas tout à fait.

M. Chagnon: Les sociétés bancaires ont mis sur pied, les unes après les autres, des espèces de fonds mutuels. Banque Royale, entre autres. Même les caisses Desjardins, Mouvement Desjardins en a. Ce sont des concurrents, dans le fond, et des gens qui ne requièrent pas l'«intermédiatisation» que, vous, vous offrez. J'imagine que ça prend une part de plus en plus grande du marché. Comment vous réagissez à cela?

M. Vachon (Marcel): Les banques, les gens qui offrent des produits financiers à l'intérieur des banques ou des caisses populaires – les individus, je parle – ont un permis de la Commission des valeurs mobilières, comme nous. Ils prennent effectivement un apport de plus en plus important, et puis, on doit dire, c'est non seulement notre principal compétiteur, mais quelquefois un compétiteur déloyal. Est-ce que tu voulais donner un exemple?

M. Julien (Rodrigue): Oui, je voudrais élaborer un peu sur cette question-là, parce que, moi, j'ai fait des représentations, entre autres au niveau fédéral, lorsqu'il a été question que les banques puissent vendre de l'assurance dans les succursales. Mais il y a des situations – moi, je suis en train de colliger beaucoup de dossiers – où les institutions financières – je ne vise pas une institution en particulier – se servent de leurs produits en disant: Bien, si tu veux une marge de crédit, si tu veux ci, si tu veux ça, amène-moi tes REER, amène-moi tes fonds. Et il y a beaucoup de situations.

Moi, je suis très inquiet. Je peux vous dire que la plus grande inquiétude que j'ai, comme firme d'exercice restreint, par rapport à la compétition... Moi, je suis ouvert à la compétition. Ça, je pense que la compétition, ça rend meilleur. Mais, quand le compétiteur a quelque chose que je n'ai pas, qui est important... Le consommateur veut emprunter pour une maison, il veut se partir en affaires. J'ai des cas que je pourrais vous nommer, ici, à Lévis. Ils ont dit: Si tu n'amènes pas tes REER, on ne te prête pas. Et, ça, on a beaucoup de cas. Je vais vous en colliger beaucoup de cas aussi. Nous allons vous en colliger, si vous voulez.

Nous pensons, à l'ACIM, qu'il doit y avoir des lois... Même une loi. Pas juste un code d'éthique qui va être adopté par les banques en disant: Nous autres, on a un code d'éthique, nous ne faisons pas ça. Mais plutôt une loi qui va être très, très sévère. D'abord, ils lisent tout ce qui se passe dans les comptes de banque. Ça, ce n'est pas une cachette pour personne. Dans la plupart des caisses populaires, tout chèque de 1 000 $ et plus est lu. Ça fait que la confidentialité dans les villages – moi, je viens d'un village – je vais vous dire une affaire, elle n'est pas forte.

Une voix: Qui lit ça? Il est lu par qui?

M. Julien (Rodrigue): Ça fait que je peux vous dire, nous pouvons vous dire que les ventes liées, ça existe. Peu importe ce qu'on dit. J'ai un cas, ma femme s'est fait appeler: Nous avons un chèque en main, madame, fait à l'ordre de Investissements Courvie, en fiducie. Nous aussi, nous en faisons, des placements.

C'est un exemple que je vous donne, qui m'est arrivé personnellement. Puis, actuellement, dans les règles du marché, nous ne pouvons rien faire. Nous avons fait des démarches et il n'y a aucun organisme, que ce soit la Commission des valeurs mobilières, que ce soit le ministère des Finances, qui peut intervenir à ce niveau-là.

Notre inquiétude, nous autres, c'est qu'on n'a pas de pouvoir. Évidemment, on ne fait pas de prêt, on ne veut pas en faire non plus, mais nous voulons que ce soit réglementé sévèrement au niveau des ventes liées.

M. Chagnon: Merci, c'est intéressant. L'ACIM soutient que toute personne qui transige des fonds avec Fondaction ou le fonds de la FTQ devrait détenir un permis de la Commission des valeurs mobilières. Le député de Crémazie disait: Bien, ce n'est pas nécessaire, parce qu'ils n'ont pas de commission. Mais ils ont un salaire, un salaire comme les employés des banques.

M. Vachon (Marcel): On ne sait pas comment ça fonctionne à l'interne. J'imagine que, les gens qui offrent ces produits, ils doivent passer via un réseau que j'ignore. Il est évident que ces gens-là ont un salaire. J'imagine qu'ils ont des objectifs à rencontrer et, s'ils ne les rencontrent pas...

M. Chagnon: On veut bien être bon, on imagine qu'ils ne vendent pas ça uniquement par idéal!

M. Vachon (Marcel): Je n'ai pas compris.

M. Chagnon: Je dis: On veut bien être bon, mais on imagine qu'ils ne vendent pas ces véhicules financiers là uniquement par idéal.

M. Vachon (Marcel): Oui, c'est ça, c'est ce qu'on pense. Ils ont un patron au-dessus d'eux, ils ont des objectifs, et puis on pense qu'il y a une pression qui est exercée sur tout le monde. Il n'y a personne – qu'on soit payé à salaire, etc. – dans cette salle qui n'a pas un minimum de pression qui vient de quelque part.

Et on pense que les gens qui offrent ces produits sont sûrement de bonne foi. Ça, on n'en doute pas un quart de seconde. Sauf que ce que, nous, on pense, c'est que nous avons une formation derrière nous, nous avons une certaine expérience et nous avons une clientèle qui peut avoir besoin de ces produits-là et qui pourrait être approchée pour bénéficier de ce que ces produits, qui sont bien particuliers, peuvent apporter comme abri fiscal et comme qualité de placement.

Au moment où on se parle, on ne les offre pas, parce qu'il est évident qu'il n'y a pas de commission qui est rattachée à ces produits-là. Ils sont vendus dans un réseau interne fermé. On ne sait pas comment, on ne sait pas dans quelles circonstances. Il y a un numéro de téléphone qui est affiché dans le journal et puis on ne sait pas ce qui se passe derrière les bureaux.

On est convaincu que ça se passe bien, on n'en doute pas, mais on pense que, si c'était plus ouvert, on soupçonne qu'il y aurait une plus grande distribution peut-être, mais aussi une meilleure information auprès du client qui investit. Parce qu'il ne faut pas oublier que ces fonds ont des restrictions bien particulières. On n'est pas sûr que tout est expliqué. On pense qu'ils le sont, mais on pourrait informer les clients éventuels de tous les positifs et les négatifs de ces placements, comme on le fait dans le cadre des fonds mutuels, par exemple.

M. Chagnon: L'ACIM souhaite des règlements précis concernant les transactions effectuées par le biais des médias électroniques, et, particulièrement, elle cite Internet. Moi, je veux bien. Ici, disons qu'on ne s'est pas arraché les cheveux, mais on se sent un petit peu impuissant à cet égard-là. Est-ce que vous pourriez nous indiquer quel type de réglementation vous privilégieriez pour encadrer, par exemple, l'utilisation d'Internet? Ce n'est pas évident.

M. Frances (Robert): On privilégierait toute réglementation qui fonctionne.

M. Chagnon: Ça, ça, ça...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Nous aussi! On partira un club.

M. Frances (Robert): On est complètement d'accord avec vous, c'est difficile, mais je crois que l'inaction, ce serait la pire des choses devant cette situation-là. C'est une machine qui roule très vite. Notre préoccupation, c'est qu'on voit les manufacturiers de produits financiers offrir des solutions sur Internet. Ils sont allés de l'avant, ils offrent la possibilité de transiger sur les comptes de fonds mutuels de nos propres clients. Les clients peuvent aller directement pour ça, et on a des craintes.

(17 h 50)

Peut-être établir un processus où aucune transaction ne peut être effectuée sur ces mécanismes-là, c'est peut-être ça, la solution. Mais on croit que, dans le moment, il devrait y avoir un processus pour le client qui le veut, avec tous les risques qui y sont rattachés.

M. Chagnon: Quand même vous feriez un règlement qui dirait ça, comment le feriez-vous appliquer?

M. Frances (Robert): Il n'y a pas de transaction, dans le monde des fonds mutuels, qui n'est pas enregistrée. La source doit être enregistrée. La provenance des documents, les preuves à l'appui et le cautionnement de signature, quand c'est un transfert ou un rachat, doivent être là pour les organismes d'exercice restreint. Donc, il y a toujours de la documentation quelque part.

M. Vachon (Marcel): Peut-être que je pourrais ajouter ceci. On a mentionné, un peu plus tôt, qu'il y a des clients qui sont un peu éloignés de certains centres. Si on avait une autorisation écrite, au départ, du client et du représentant, qui dirait: Moi, je veux faire des transactions par informatique, à ce moment-là, je pense qu'il y aurait possibilité de le faire pour corriger une situation géographique et de courrier qui, au moment où on se parle, est obligatoire et qui peut pénaliser le client. S'il y avait une autorisation qui nous permettrait ce genre de transaction, à ce moment-là, Internet faciliterait la vie de tout le monde, accélererait les démarches et éviterait des délais. Et il y a possibilité d'imprimer ce qu'il y a sur l'écran. Ça, c'est une chose.

L'autre chose, aussi, c'est qu'une maison de courtage comme les nôtres, on pourrait échanger de l'information, échanger des ventes ou des achats pour des clients par Internet, conditionnel à ce que, au préalable, il y ait eu des autorisations ou des permissions ou des ententes, soit par formulaire, pour permettre tel représentant. Parce qu'il habite à tel endroit ou parce que tel client habite à tel endroit, on peut accepter des transactions par Internet, par exemple.

On a tous des boîtes, des représentants qui sont à Québec, à Montréal, à Trois-Rivières, un peu partout clairsemés au Québec, et il faut, au moment où on se parle, qu'on attende que le courrier arrive physiquement entre nos mains, ce qui occasionne, comme vous pouvez, comme on peut tous l'imaginer, des délais qui peuvent être très pénalisants pour les clients qui voient le marché soit s'affaisser ou augmenter. Alors, parce que le client est loin, on pourrait accélérer les choses.

Puis il y a aussi le fait que certaines boîtes ont des représentants dans d'autres provinces, de telle sorte que les transactions pourraient se faire plus rapidement. Au-delà de ça, c'est quelque chose qui dépasse nos types de permis, et on pense que d'autres auraient une opinion plus valable.

M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup, M. le président. Je remercie l'ACIM pour avoir répondu à ces questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. S'il n'y a pas d'autre membre de la commission qui demande la parole... M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Je voudrais simplement les remercier et dire qu'on est content de voir leur dynamisme, répéter que c'est avec des entrepreneurs comme vous qu'on bâtit un pays.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Julien.

M. Julien (Rodrigue): Nous voudrions juste souligner, à la fin, que, évidemment, l'ACIM, ce nom était probablement méconnu ou moins connu de la plupart d'entre vous. Juste resouligner que, actuellement, nous représentons 90 % du marché des indépendants au Québec dans les fonds mutuels. Nous sommes une organisation qui est jeune, et nous voulons nous donner des structures et établir un processus de communication avec la Commission des valeurs mobilières, parce que, il y a seulement deux ans, nous n'étions pas un interlocuteur valable au niveau de la Commission. Et nous voulons, aujourd'hui, dire à la Commission que nous voulons être l'interlocuteur au niveau des fonds mutuels par les indépendants, parce que nous représentons 90 % du marché. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, et votre message a été entendu. Et je suspends les travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 54)

(Reprise à 20 h 10)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): La commission du budget et de l'administration poursuit sa consultation générale et ses audiences publiques pour étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières.

Nous recevons, ça nous fait plaisir de recevoir les représentants du Comité consultatif juridique auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Je vous rappelle que vous avez environ 20 minutes pour nous présenter le projet de loi, et chaque parti a 20 minutes pour échanger avec vous. Donc, je vous invite, je ne sais pas si c'est M. Lacroix... oui, M. Lacroix, peut-être à présenter celui qui vous accompagne et à nous présenter votre mémoire.


Comité consultatif juridique auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec

M. Lacroix (Hubert T.): Merci, M. le Président. Bonsoir. Alors, oui, mon nom est Hubert Lacroix, je suis un associé du cabinet McCarthy Tétrault, au bureau de Montréal. À ma droite, à mes côtés, je vous présente Pierre Raymond, un associé de Stikeman Elliott, également du bureau de Montréal.

Nous sommes deux membres du Comité consultatif juridique auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec et c'est en portant ce chapeau que nous nous présentons devant vous ce soir. Pour votre information, le Comité consultatif, formé en 1990 sous la gouverne de l'ancien président de la Commission des valeurs mobilières, M. Paul Fortugno, consiste en un groupe de sept avocats qui pratiquent principalement en valeurs mobilières, et nous provenons tous de sept cabinets différents, évidemment très actifs dans ce domaine d'activité là. Le Comité consultatif sert de forum privé au sein duquel certaines initiatives législatives ou différents problèmes particuliers peuvent être discutés entre nous, les sept avocats, et les membres de la CVMQ ou même les dirigeants de la CVMQ.

Je crois que le Comité consultatif – en fait, je sais – vous a déjà transmis son mémoire et, ce soir, on n'a pas l'intention de vous le relire mais plutôt, simplement, de vous en souligner les grands faits saillants. Il nous fera plaisir, cependant, évidemment, de répondre à toute question que vous pourriez avoir sur notre document.

Alors, nos têtes de chapitres correspondent, pour faciliter votre lecture et votre référence, à celles du document d'accompagnement récemment publié en support au rapport quinquennal de décembre 1993.

Évidemment, le premier point, 1.1, c'est l'harmonisation et la coopération. De façon très claire et unanime, tous les membres du Comité consultatif appuient les efforts démontrés à travers les dernières années par les gouvernements du Québec pour établir ou réaffirmer, selon les différentes circonstances, la compétence du Québec en matière de valeurs mobilières.

Cependant, dans un même souffle, nous vous disons que nos clients veulent pouvoir se financer dans la province de Québec de façon efficace, évidemment, à un coût minimal et raisonnable, et à l'intérieur de délais qui ne les pénaliseront pas ou ne les ralentiront pas s'ils choisissent notre province au lieu d'une autre juridiction ou en même temps qu'une autre juridiction, quelle que soit cette juridiction en Amérique du Nord.

Les marchés de capitaux, vous le savez, ne connaissent plus de frontières, et ces entreprises, nos clients, ne sont plus prêtes à perdre, dans un marché aussi rapide, des avantages concurrentiels pour se financer chez nous. Il faut donc absolument continuer et accélérer l'harmonisation de nos règles avec celles des autres provinces canadiennes. C'est pourquoi nous avons accueilli avec beaucoup d'enthousiasme les récentes initiatives du président de la CVMQ, Jean Martel, qui permettront prochainement au Québec de s'intégrer de façon pleine et entière au régime accéléré des prospectus simplifiés.

Évidemment, cette introduction nous amène à aborder le sujet de l'heure, ressuscité encore une fois, le projet de mettre sur pied, semble-t-il, une commission nationale des valeurs mobilières. Vous avez lu notre mémoire. Vous connaissez déjà notre conclusion. Nous vous suggérons que, pour désamorcer cette idée, il faut investir dans l'harmonisation des règles et, ainsi, grandement diluer les arguments qui sont avancés par les partisans de la commission nationale. Le système actuel fonctionne. Oui, pas de doute, des améliorations doivent lui être apportées pour continuer à retirer les irritants qu'on y retrouve et améliorer son efficacité.

Mais nous sommes très inquiets des efforts et des ressources financières qui devraient être investis pour créer une nouvelle structure qui regrouperait, dans une même niche, imaginez, dans un même secteur d'activité, une commission nationale, certaines autres commissions provinciales qui choisiraient de ne pas adhérer au système national et, évidemment, le Québec qui n'acceptera jamais, à ce qu'on comprend, de s'intégrer dans un tel régime. Nous n'avons pas la marge nécessaire pour des batailles juridictionnelles dans le moment. Nos clients le craignent, car ils considèrent qu'il est bien plus facile d'ajuster un système qui fonctionne que de tout mettre vraiment dans la poubelle puis de recommencer. Pierre.

M. Raymond (Pierre): On croit essentiel de souligner ici l'attrait des marchés des capitaux américains vis-à-vis de nos clients, les entreprises, qui cherchent à se financer sur les marchés. Il y a quelques années, seulement quelques entreprises publiques très matures pouvaient ou allaient tester les marchés américains lorsqu'elles cherchaient du financement. Aujourd'hui, quelle que soit la taille de l'entreprise, on ne peut pas envisager, on ne peut pas discuter de faire un placement sans qu'il y ait une discussion sur le fait d'avoir ou pas une tranche américaine qui ferait partie du placement, et, de plus en plus même, les entreprises québécoises envisagent de faire un placement entièrement aux États-Unis.

Il faut donc réduire au maximum les irritants réglementaires, qui ne sont pas les éléments essentiels qui poussent nos clients à aller vers d'autres marchés, mais il faut quand même réduire au maximum ces irritants-là. Et on pense que la meilleure façon de réduire ces irritants, comme le disait Hubert, est d'avoir une harmonie, la plus parfaite possible, des exigences réglementaires non seulement avec les exigences des autres provinces canadiennes, mais également avec les exigences américaines.

Les tenants de la commission ou d'une commission des valeurs nationale font valoir des avantages à une telle commission, tels que, naturellement, les coûts réduits, la réduction du nombre d'intervenants réglementaire lorsqu'on fait un placement ou lorsqu'on fait appel aux marchés, la rapidité d'exécution, qui est conséquente, les ressources financières, qui permettraient une meilleure compétence du personnel des commissions. Et, évidemment, c'est attrayant comme proposition pour plusieurs, surtout dans le contexte de la nord-américanisation des marchés.

Cependant, comme le mentionnait tout à l'heure Hubert, nous sommes convaincus qu'à moins d'avoir l'absolue unanimité entre les provinces et un enthousiasme de chacun des participants, ce qui n'est pas le cas, on perd notre temps à envisager une telle structure, qui aboutirait probablement à une série de compromis et qui aboutirait également probablement à un niveau additionnel de réglementation ou d'autorité réglementaire, ce qui est absolument la bête noire de nos clients à un niveau comme on est en ce moment.

On croit sincèrement, dans les circonstances actuelles, avec le contexte qu'on a, que le système, tel qu'il est utilisé, fonctionne surprenamment bien. C'est évident qu'on a besoin de mettre un peu d'huile et d'ajuster quelques pièces du moteur, mais, dans les circonstances et devant le manque d'unanimité qui existe, on pense qu'il est beaucoup plus efficace et productif de concentrer nos efforts à huiler le moteur plutôt qu'à le changer.

Mais il est absolument très important que la Commission des valeurs mobilières du Québec n'ait aucune réserve dans son objectif d'harmoniser ses règles avec celles des autres provinces et, ultimement, avec celles de la commission américaine. Un exemple tangible de la nécessité d'harmoniser les règles est le point qui est soulevé à l'item 2.4, qui touche l'exigence de présence sur le territoire québécois pour les courtiers et les consultants et leurs représentants. Comme Hubert le mentionnait, et c'est rendu un cliché, le monde des marchés de capitaux est un monde sans frontières aujourd'hui, et l'Ontario a pris une initiative, il y a quelque temps, en reconnaissant la possibilité, pour des courtiers étrangers qui voulaient faire affaire dans sa province, de leur donner un permis restreint pour un exercice restreint. C'est une initiative qui, au Québec, je pense... qui est sous examen, mais qui n'a pas été encore adoptée et qui est très importante pour permettre aux courtiers étrangers, justement, de pouvoir venir faire affaire au Québec, tout comme ils peuvent venir faire affaire dans certaines autres provinces du Canada.

Veux-tu continuer?

(20 h 20)

M. Lacroix (Hubert T.): Oui. Alors, évidemment, vous avez entendu nos vues et on conclut de façon unanime qu'une commission des valeurs mobilières nationale, ce n'est pas une thèse que nous sommes prêts à soutenir et, au contraire, on considère que c'est absolument contreproductif à tout ce qui se fait dans le moment et aux ajustements minimums que l'on devrait plutôt faire pour continuer à travailler dans nos marchés.

Un des points qu'on veut soulever ce soir également, 1.2, la diminution des coûts de respect de la réglementation. Aucun doute, on applaudit très fort, probablement moins fort que nos clients parce que c'est eux, évidemment, qui paient les factures, mais sûrement avec autant d'enthousiasme, à une idée de voir ces coûts réduits dans le respect de la réglementation.

Mais il y a un passage du document d'accompagnement qui nous a grandement inquiétés, et je vous le cite: «Une préoccupation importante dont il faudra tenir compte dans ce processus est celle d'examiner dans quelle mesure et par quels moyens, dans l'intérêt de l'ensemble des intervenants – et je lis à la page 7 – on pourrait accroître la responsabilité des dirigeants d'entreprises, surtout des administrateurs, à l'égard de principes directeurs en contrepartie d'un assouplissement réglementaire, offrant la souplesse requise pour faire face à des situations fort variées.»

Madame, messieurs, il ne faut absolument pas transformer nos dirigeants d'entreprises, surtout les administrateurs, en des polices d'assurance. Plus on ajoute à leurs responsabilités, si on est prêt à faire ça, plus il faut leur donner des moyens de défense, dont celle de la diligence raisonnable, et leur permettre, à ces personnes-là qui font tous les efforts requis, de reposer leurs conclusions et leurs jugements sur des opinions d'experts indépendants qu'elles auront engagés, parce que, comme vous le savez, même dans ce cas-là, la législation ou certains statuts vont leur imposer une responsabilité automatique.

On peut vous assurer qu'un grand nombre d'excellents dirigeants hésitent maintenant, de façon automatique, à accepter des postes d'administrateurs. Il y en a plusieurs qui démissionnent parce que la responsabilité qu'ils encourent n'est absolument plus proportionnelle au rôle qu'ils jouent ou à la contrepartie qu'ils retirent de leur poste. Ils sont prêts à jouer, mais il faut leur donner toutes les chances d'être les meilleurs possible.

Dans notre mémoire, on vous parle de 1.4 et 1.5. Ça se passe de commentaires ce soir.

Un commentaire, toutefois, à 1.7. Il semble qu'il y ait un intérêt pour organiser un marché de capitaux pour les petites entreprises, petites et moyennes entreprises, à des capitalisations de ce genre. L'initiative, on la croit très louable, sûrement très attrayante pour les dirigeants de ces entreprises-là, de pouvoir accéder aux marchés avec un minimum d'information et un support de tous les instants.

Franchement, nous nous interrogeons sur la profondeur, au Québec, des joueurs qui doivent supporter ce marché-là. Évidemment, nous ne sommes que des conseillers juridiques. Nous ne sommes pas des joueurs des marchés financiers. Mais notre expérience collective démontre que, dans nos dossiers, ce sont toujours les mêmes institutions financières québécoises qui supportent les petites et moyennes entreprises dans leur phase de développement, toujours les mêmes joueurs, et il n'y en a pas beaucoup. Ça nous laisse donc très perplexes quant à la liquidité soutenue qui devrait, en fait, être disponible pour ces titres-là dans un marché où il y a très peu de joueurs.

Initiative louable. On s'inquiète cependant de la profondeur des joueurs. Et on a lu avec beaucoup d'intérêt à cet égard les conclusions ou les informations que le mémoire de la Bourse de Montréal contient et qui, je comprends, va vous être présenté demain.

Pierre, pour les derniers points.

M. Raymond (Pierre): Le dernier point sur lequel on voudrait ajouter quelques commentaires à ceux qui étaient déjà fournis dans le document qu'on vous a fourni touche l'item 2.6, qui est le pouvoir habilitant de la Commission à récupérer auprès des personnes concernées les frais payés à un tiers.

Un organisme comme la Commission des valeurs mobilières, qui taxe les utilisateurs de ses services, devrait, selon nous, avoir la compétence à l'interne pour remplir ces fonctions. Dans certaines circonstances, on peut comprendre que cette compétence-là ne puisse pas être à l'interne dans des situations pointues et qu'il soit nécessaire d'utiliser des ressources extérieures.

On comprend mal cependant pourquoi la Commission pourrait taxer, de façon ad hoc, les utilisateurs de ses services dans des circonstances où elle n'a pas la compétence en l'occurrence, particulièrement si la Commission, en raison des droits qu'elle perçoit, est en situation de surplus.

Dans les situations où elle ne serait pas en situation de surplus, on voit mal également qu'on puisse taxer de façon ponctuelle une personne qui amène, en raison de son expertise personnelle ou en raison de son temps d'activité qui est non connu par la Commission... pourquoi cette personne-là devrait être pénalisée directement. On pense, dans de telles circonstances, si la Commission n'est plus en situation de surplus, qu'elle devrait tout simplement augmenter, de façon générale, les droits perçus, mais qu'il est très dommageable pour l'entreprise qui oeuvre dans un secteur d'activité précis, pour lequel la Commission n'a pas de compétence... qu'on devrait lui charger ou lui taxer un montant spécifique pour aller chercher l'expertise à l'extérieur.

Sur un point connexe, on doit reconnaître que la compétence du personnel de la Commission est un élément très important pour lui assurer la considération et le respect des utilisateurs et des autres commissions des valeurs mobilières en Amérique du Nord. Les sommes générées par les droits perçus par la Commission devraient être utilisées, entre autres, pour embaucher et retenir du personnel compétent. Le manque de compétence d'une autorité réglementaire contribue, en grande partie, à sa marginalisation, et, a contrario, sa grande compétence va contribuer à sa reconnaissance, chose que nous, naturellement, qui pratiquons au Québec, pensons très importante dans le contexte.

En conclusion, ce soir, on tient naturellement à répéter le thème principal de notre intervention, de nos interventions plutôt, à savoir: la nécessité d'investir beaucoup de temps et d'énergie à harmoniser les règles qui gouvernent notre quotidien avec les règles des autres autorités réglementaires, au Canada et aux États-Unis. On vous remercie, donc, pour le temps que vous nous avez accordé pour présenter notre point de vue, et, naturellement, nous sommes à votre disposition si vous avez des questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Lacroix et M. Raymond. J'accorderai la parole au député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. Messieurs, merci de l'intérêt que vous apportez à la bonne marche du commerce des valeurs mobilières au Québec. On voit, d'après votre discours, que vous êtes des experts dans le domaine et que ça vous tient à coeur. Puis, même si c'est votre métier, même si vous gagnez votre vie, à l'intérieur de ce commerce-là, en conseillant les clients qui viennent sur les marchés, je pense que votre démarche est tout à fait louable, de vouloir améliorer les conditions dans lesquelles ce commerce-là est exercé.

Je me permets, d'attaque, une question d'actualité. Hier, à la télévision, on voyait que... ou la perception, c'était que le ministre des Finances M. Martin avait consulté les gens importants de Montréal – je veux juste tester si vous êtes importants ou non...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: ...avait consulté les gens importants du commerce des valeurs mobilières pour savoir s'ils souhaitaient une commission nationale et que la réponse avait été oui. Vous venez de nous dire que votre réponse est non. Alors, peut-être que vous avez été consultés puis vous êtes dissidents, ou bien vous n'avez pas été consultés du tout, ou bien M. Martin n'a consulté personne. Alors, sans rien nous divulguer, vous pouvez nous dire si vous avez été consultés?

M. Raymond (Pierre): C'est une leçon d'humilité, mais, en fait...

Une voix: ...

M. Raymond (Pierre): Oui. Personnellement, je n'ai pas été consulté, mais je ne peux pas dire, naturellement, si d'autres personnes n'ont pas été consultées.

M. Campeau: O.K. Et votre collègue?

M. Lacroix (Hubert T.): M. le député, on a lu les mêmes propos que vous. Ça nous a fait sourire parce qu'on savait qu'on se présentait ici avec une thèse qui était un peu différente de celle qui était véhiculée dans les journaux. On croit savoir que certains des commentaires de M. Martin visaient ou reposaient sur une étude, qui a été faite il y a quelques mois, sur les coûts d'un système réglementaire unique au Canada, et nous savons qu'au Québec il y a quatre cabinets qui ont été consultés, qui ont reçu les questionnaires en question. Chez moi, dans le cabinet, nous n'avons pas été consultés, à Montréal, et je peux vous assurer que, ayant appris ça, nous avons tenté de faire connaître, par les voies habituelles, le même genre de commentaires que vous entendez ce soir. Ça vous indique qu'on n'est peut-être pas aussi importants que certaines des personnes identifiées dans les journaux.

(20 h 30)

M. Campeau: Ça dépend du jugement de la personne. Je vais partager l'humilité avec vous: Nous autres non plus, on n'a pas été consultés. Et, d'ailleurs, d'autres de vos collègues, qui étaient ici cet après-midi, n'avaient pas été consultés non plus, et eux aussi, tout comme vous, font partie d'importants cabinets d'avocats.

D'abord, je voudrais aussi excuser l'absence du ministre d'État de l'Économie et des Finances, qui est retenu, par son poste de vice-premier ministre, au Conseil des ministres ou quelque part. On me dit qu'il ne sera malheureusement pas ici ce soir. Mais vos commentaires vont lui parvenir, puis il va travailler avec le président de la Commission des valeurs mobilières, M. Martel, et avec M. Dumont, qui est sous-ministre, à bien recueillir tous les commentaires des témoignages de ce soir.

Vous nous parliez des administrateurs, tout à l'heure. Là-dessus, je demeure sceptique quand vous dites, M. Lacroix, que les administrateurs refusent les postes sur les conseils d'administration parce que c'est trop risqué. Moi aussi, on me disait ça. J'ai essayé d'en trouver, mais je n'en ai jamais trouvé.

M. Chagnon: Avant ou après...

M. Campeau: Avant, après et pendant. Alors, moi aussi... Maintenant, il y a quand même des polices d'assurance, pour les conseils d'administration, qui protègent, et c'est la compagnie qui paie la police d'assurance. Elle prend l'assurance pour protéger l'administrateur, qui, généralement, est assez bien rémunéré, compte tenu des services qu'il rend à la compagnie ou à l'entreprise.

M. Lacroix (Hubert T.): M. le député, les nouveaux principes de régie d'entreprises, que vous connaissez bien, je le sais, vous indiquent que le rôle d'un administrateur, maintenant, c'est bien plus que d'être présent à quatre ou peut-être cinq réunions du conseil d'administration durant l'année. La plupart des administrateurs qui sont invités sur ces conseils-là doivent s'impliquer dans différents comités du conseil.

Ils prennent des charges qui leur demandent un, deux, parfois, trois jours par mois pour bien faire leur travail. Il y a des suivis à faire avec les dirigeants d'entreprises, et, tout dépendant du domaine dans lequel la société ouverte oeuvre, vous avez, et je vous en assure, des réponses négatives à un grand nombre d'invitations à des conseils de nouvelles entreprises qui viennent au marché.

C'est très facile d'être invité au conseil d'une entreprise qui a fait ses preuves, où on est capable de bien connaître nos risques et où les racines financières sont très solides. C'est une tout autre histoire... et c'est là que, les dirigeants, on en a besoin. On en a besoin dans les nouvelles entreprises. Et, cette année, vous avez lu les journaux, il y en a une centaine qui frappent les marchés.

Dans la province de Québec, il y a 25 ou 28 nouvelles compagnies publiques qui ont besoin de se faire encadrer. Il y a d'excellents entrepreneurs dans notre province. On a besoin de les encadrer avec des gens d'expérience qui, à la première journée de leur nouvelle vie comme société ouverte, vont pouvoir leur donner l'heure juste et les aider. Je vous assure que mettre sur ces conseils d'administration là des personnes d'expérience, c'est très difficile.

M. Campeau: M. le Président, ça me console. Ça me console d'être devenu député. Je pensais que j'avais laissé tomber des avantages, mais là je vois que je suis plus en sécurité comme député que comme membre d'un conseil d'administration.

M. Lacroix (Hubert T.): M. le député, vous avez laissé tomber beaucoup de responsabilités aussi.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a M. Raymond qui semblait vouloir aussi compléter.

M. Raymond (Pierre): Je pourrais peut-être ajouter, M. Campeau, qu'il ne faut pas faire en sorte, en raison des règles qu'on adopte, que le premier souci des administrateurs qu'on retient soit de protéger leur responsabilité personnelle. Comme vous l'avez souligné, les administrateurs, avant d'accepter un poste sur un conseil d'administration, prennent les mesures nécessaires pour que leur responsabilité personnelle soit très limitée, et j'espère qu'ils le font de façon efficace.

Donc, ce n'est pas en ajoutant un autre niveau de responsabilité personnelle qu'on va vraiment atteindre, je pense, les buts qu'on cherche. On croit que la responsabilité personnelle va être évitée en raison des assurances, comme vous l'avez souligné, et on pense qu'on peut arriver à améliorer le système ou à rendre les entreprises plus responsables sans avoir nécessairement à mettre une épée de Damoclès sur la tête des administrateurs, qui, de toute façon, vont prendre toutes les mesures pour faire en sorte que l'épée ne tombera pas.

Alors, je pense que c'est un cercle vicieux: plus on ajoute de responsabilités, plus on ajoute d'assurances, puis, finalement, on y gagne peu, dans ce jeu-là.

M. Campeau: Je suis d'accord avec vous. M. le Président, je vais laisser la parole à qui vous voudrez bien la céder.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. M. le député de Crémazie a été gentil avec vous. Il aurait pu vous parler de ce qu'il mentionnait à l'égard des avocats. Il trouvait qu'ils chargeaient trop cher, qu'ils compliquaient trop les prospectus.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il n'aime pas se répéter.

M. Chagnon: Il n'aime pas ça se répéter. Alors, vous avez évité ce bout-là. Ha, ha, ha!

M. Campeau: Vous permettrez que je revienne tout à l'heure.

M. Chagnon: Oui, oui, oui. Mais vous pouvez revenir tout de suite, si vous voulez. Allez, allez! Vous pouvez leur dire exactement ce que vous avez dit aux précédents.

M. Campeau: Non, je vais le dire tout à l'heure. Je vais vous écouter, pour le moment.

M. Chagnon: O.K. Bon. Puisque vous êtes des spécialistes, d'abord, je tiens à vous remercier, comme Comité consultatif juridique auprès de la Commission des valeurs mobilières, de participer à ces audiences, d'avoir écrit ce mémoire, de venir le défendre. Mais, puisque vous êtes les experts juridiques dans ces matières et que vous nous avez dit que vous aviez été inspirés, d'abord, par le document d'appoint, le document d'accompagnement, il n'en demeure pas moins, comme l'a signalé le ministre après que je l'eus questionné, hier, que le document de questionnement n'est que la suite, selon lui, logique du rapport quinquennal. Et, dans le rapport quinquennal, il y a d'autres choses qu'on retrouve, sur lesquelles vous ne vous êtes pas prononcés.

En la matière juridique qui est votre expertise, lorsque l'on retrouve, dans le rapport quinquennal, une suggestion à l'effet, par exemple, d'assujettir la couronne et ses mandataires à l'application de la Loi sur les valeurs mobilières, j'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Lacroix (Hubert T.): Les vues de notre Comité consultatif juridique sont des vues personnelles, comme notre mémoire l'indique, et je veux vous assurer que ce genre de question là, quant à la responsabilité élargie en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières pour venir frapper les mandataires de la couronne ou les sociétés de la couronne, ce n'est pas un sujet sur lequel on s'est penché.

Si vous voulez avoir mes vues personnelles, est-ce qu'on devrait ou on ne devrait pas, c'est une chose qu'on pourra faire tout de suite, si vous voulez...

M. Chagnon: Je vous écoute.

M. Lacroix (Hubert T.) ...mais ce n'est pas quelque chose qui est discuté au sein de notre Comité consultatif juridique. Alors, vous allez avoir les vues d'Hubert Lacroix, avocat, qui fait ça depuis 20 ans en valeurs mobilières. Je ne sais pas si ça va vous être d'une utilité quelconque, mais ça me fera plaisir de vous les donner.

M. Chagnon: On verra.

M. Lacroix (Hubert T.): Alors, dans une situation comme ça, avec peu de temps de réflexion et la question sur la table, les mandataires de la couronne, tout dépendant des situations dans lesquelles nous sommes, ont des lois qui, à l'intérieur de ces lois-là, ont encadré leurs – et je suis loin d'être un expert en droit administratif – droits et leurs pouvoirs, et leurs responsabilités.

À partir du moment où une loi viendrait, de façon générale, teinter chacun des joueurs en vertu de chacune des lois, il faudrait, à ce moment-là, tout dépendant des circonstances, venir se demander si c'est à propos ou pas de venir ouvrir les joueurs à ce genre de responsabilités.

M. Chagnon: La question n'est pas là, M. le Président. Ma question est la suivante: Est-ce que la Loi sur les valeurs mobilières devrait assujettir la couronne et ses mandataires? Point à la ligne. C'est ça, ma question.

M. Lacroix (Hubert T.): Ma réponse, M. le député, est aussi simple et peut-être qu'elle était... Je ne peux pas vous répondre oui ou non pour une raison très simple, parce qu'il va y avoir sûrement, dans certaines circonstances, des raisons qui feront, par exemple, qu'en matière de confidentialité et en matière d'information privilégiée...

M. Chagnon: Alors, vous pensez que, quand l'État est sur le marché, par le biais de Placements Québec ou par le biais, par exemple, d'autres dossiers antérieurs comme la question de l'amiante, vous trouvez que c'est normal que l'État ne soit pas assujetti à la Loi sur les valeurs mobilières?

M. Lacroix (Hubert T.): Non. M. le député, ce que je vous suggère, c'est que, dans certaines circonstances, une divulgation, par exemple, de certains dossiers pourrait rendre très difficile la gouverne de l'État. Ce que je vous réponds, donc, c'est que, si on est dans un marché de valeurs mobilières, évidemment, on veut avoir un terrain, une plateforme uniforme et un terrain de jeux égal pour tous les joueurs qui sont en train de jouer avec les mêmes règles dans les mains. Il n'y a aucun doute là-dessus.

(20 h 40)

Cependant, la Loi sur les valeurs mobilières, elle a plus que simplement la divulgation. Il y a certains aspects de la Loi sur les valeurs mobilières qui viennent toucher la gestion d'entreprise, sa possibilité d'entrer dans le marché, la divulgation qu'il faut en faire de ses projets d'avenir, et tout le reste.

Alors, moi, je vous dis qu'avant de choisir d'emblée d'assujettir l'État à la Loi sur les valeurs mobilières il faut réfléchir.

M. Chagnon: Pourquoi le Barreau est d'accord?

M. Lacroix (Hubert T.): Le Barreau a le droit, comme je vous ai dit, d'avoir ses vues et ses opinions. Vous m'avez demandé ce que, moi, j'en pensais, M. le député, et je vous réponds de cette façon.

M. Chagnon: M. le Président, je suis tout à fait d'accord avec les principes d'harmonisation et de coopération qui sont soulevés par les représentants du Comité consultatif, et je crois aussi, pour les mêmes raisons, d'ailleurs, que ce sont là les meilleurs pare-chocs quant à la position du Québec à l'égard d'une éventuelle commission canadienne des valeurs mobilières.

J'ajouterai que, quant à l'harmonisation concernant la simplification de l'analyse des prospectus pour les émetteurs d'envergure, il y aurait lieu d'harmoniser aussi les déclarations d'initiés, dont vous ne faites pas cas dans votre mémoire. Mais je présume, voyant l'air, que vous êtes d'accord.

M. Raymond (Pierre): Il y a non seulement cette question-là, mais il y a également plusieurs autres questions qui sont divergentes...

M. Chagnon: Vous avez mentionné SEDAR.

M. Raymond (Pierre): Oui. On peut sûrement ajouter la question des rapports d'initiés. Les rapports d'initiés, d'ailleurs, il y a eu des efforts qui ont été faits, il y a peut-être cinq ou six ans, pour harmoniser la forme des rapports d'initiés au fédéral et dans chacune des provinces.

M. Chagnon: Comment, comme avocats, comme membres de ce Comité consultatif, avez-vous accueilli l'initiative de l'ACCOVAM et de la Bourse de Montréal d'offrir aux investisseurs un tribunal d'arbitrage leur permettant de poursuivre leurs compagnies, leurs représentants à tout le moins, jusqu'à la limite de 50 000 $, depuis le 1er février 1996?

M. Raymond (Pierre): Ce n'est pas une question qu'on a discutée au Comité.

M. Lacroix (Hubert T.): Évidemment, le principe – et Pierre a raison, on n'en a pas discuté au Comité – de pouvoir avoir accès à une cour des petites créances assez facilement pour faire valoir ses droits, de 3 000 $ à 50 000 $, c'est une initiative qui ne nous a pas fait réagir d'un côté comme de l'autre.

M. Chagnon: Vous favorisez l'harmonisation à travers tout le Canada d'une réglementation qui soit cohérente, dans le fond, entre chacune des commissions des valeurs mobilières. Toutefois, outre l'Ontario, quelle autre province exige la divulgation de la rémunération individuelle plutôt que globale, dans toutes ses formes, de leurs cinq dirigeants les mieux rémunérés?

M. Lacroix (Hubert T.): Oui, les commissions de l'Ouest, évidemment, suivent le pas et exigent ce genre de divulgation. Les Américains exigent une divulgation encore bien plus poussée et c'est pour ça...

M. Chagnon: Qu'est-ce qu'ils exigent, les Américains, parce que les Américains... État par État ou par la SEC?

M. Lacroix (Hubert T.): Par la SEC, étant donné que le système américain est différent du nôtre et que, si on veut y avoir accès, encore une fois, les mesures d'accommodement qui ont été mises en oeuvre à travers un système qui s'appelle MJDS, qui vous permet, si vous êtes une...

M. Chagnon: Comment vous l'appelez?

M. Lacroix (Hubert T.): MJDS, Multi Jurisdictional Disclosure System. C'est un système qui vous permet d'avoir accès, à travers le Canada et vos documents d'information et vos documents d'offre publique, aux marchés américains, à certaines conditions, si vous êtes d'une certaine taille. Alors, toutes sortes de possibilités. Et, si vous voulez avoir accès à ces marchés-là, vous allez devoir vous plier au dénominateur commun le plus sérieux, le plus difficile. Donc, vous avez certaines obligations qui s'ajoutent à toutes les autres obligations de divulgation.

M. Chagnon: Mais l'obligation de divulgation des cinq salaires personnels...

M. Lacroix (Hubert T.): Oui.

M. Chagnon: ...des cinq agents se retrouve à la SEC.

M. Lacroix (Hubert T.): Aux États-Unis. Et, comme disait tantôt...

M. Chagnon: Et en Ontario.

M. Lacroix (Hubert T.): Oui, exactement.

M. Chagnon: Mais où, ailleurs, au Canada?

M. Lacroix (Hubert T.): Je m'excuse, simplement vous ajouter quelque chose. L'obligation de divulguer les cinq salaires principaux vient d'une initiative américaine calquée en Ontario, on présume, parce que c'est ce qu'on voit, c'est ce qu'on lit, et est venue influencer les autres dirigeants de valeurs mobilières à travers le Canada. Les marchés étant ce qu'ils sont, vous me dites: Lacroix, vous suggérez qu'on se conforme au reste du Canada.

M. Chagnon: Non!

M. Lacroix (Hubert T.): En fait...

M. Chagnon: Pas nécessairement!

M. Lacroix (Hubert T.): ...nous, on vous suggère, M. le député, qu'il y a plus que ça. Il faut regarder maintenant les marchés comme étant nord-américains. Alors, il faut réfléchir, lorsqu'on choisi d'être différent, aux conséquences de cette différence-là pour nos marchés, parce que, dès qu'on va vouloir mettre le pied à l'extérieur de notre juridiction pour continuellement lever des fonds, il va falloir frapper ces règles de divulgation.

Alors, on parle d'harmonisation. On parle donc de mettre toutes les personnes sur le même pied, c'est l'objectif qui est recherché. C'est pour ça qu'on vous suggère, dans notre mémoire, que c'est une bonne idée d'avoir, pour toutes les entreprises, le même genre de divulgation.

M. Chagnon: Le Conseil du patronat, qu'on recevra demain, M. le Président, la Bourse de Montréal, le Barreau, l'ACCOVAM s'y opposent. Pourquoi, pensez-vous?

M. Lacroix (Hubert T.): C'est une très bonne question. Je sais qu'ils s'y opposent. Et, il y a quelques années, les vues des praticiens étaient peut-être de ne pas venir dans la province de Québec changer nos règles à cet effet-là. On était inquiet. On était inquiet parce qu'on pensait que les salaires de nos dirigeants québécois étant moins élevés... En fait, moins ou plus élevés. Mais, étant maintenant à découvert, on allait se rendre compte rapidement que, lorsqu'on les comparaît avec les autres juridictions, nos dirigeants allaient peut-être devenir des proies faciles pour des entreprises dans les juridictions avoisinantes.

On était également inquiet du déplacement de ces joueurs-là, très critiques à notre développement. Et je me souviens très bien d'avoir été une des personnes qui soutenaient cette thèse-là, et j'ai changé d'opinion.

Maintenant, lorsque je vois ce qui se passe et que je réalise l'importance, pour certains joueurs dans les marchés, certaines institutions financières, d'avoir cette information-là, je pense que l'harmonisation de nos règles fait en sorte que, de toute façon, pour convaincre les institutions de venir investir dans nos entreprises québécoises, il faut leur donner des points de comparaison. Ça, c'est un point de comparaison. Est-ce que, Pierre, tu as des choses?

M. Raymond (Pierre): J'aimerais peut-être ajouter une ou deux choses. Ce qu'on vise à dire, c'est que ces règles à l'égard de la rémunération, de divulguer la rémunération des cinq dirigeants n'ont peut-être pas eu les conséquences qu'on cherchait, à savoir de rendre les dirigeants plus «accountable» aux actionnaires. Je pense que c'est une discussion qui est intéressante, puis il y a probablement beaucoup de vrai à cet égard-là.

Cependant, d'où, nous, nous venons, c'est qu'une entreprise québécoise qui utilise comme source de capitaux le marché ontarien, ce qui est dans la plupart des cas, ou qui utilise comme source de capitaux les marchés américains devra se conformer à cette règle. Et le marché dominant, qui est le marché américain, exige cette divulgation-là. En conséquence, les institutions financières qui sont les participants les plus importants dans le marché des capitaux sont habituées à avoir cette divulgation et recherchent... Et ce n'est pas simplement à l'égard de la divulgation de la rémunération, c'est à plusieurs égards. Les facteurs de risque, par exemple, dans un prospectus, sont un point très important pour les institutions financières américaines.

Alors, ces institutions financières, qu'on le veuille ou non, cherchent des documents comparables et cherchent à pouvoir s'assurer que l'autorité réglementaire qui gouverne notre entreprise québécoise applique des standards semblables à ceux auxquels elles sont habituées. Que ce soit valable ou pas, ou que ce soit défendable ou pas, c'est une autre question. Cependant, nous, nos clients ont à rechercher des capitaux auprès de ces mêmes institutions et on ne devrait pas les mettre dans une situation qui est défavorable.

C'est évident que nos clients, les individus, n'apprécient pas d'avoir à mettre dans un prospectus leur rémunération personnelle. Toutefois, moi, je n'ai rencontré aucune difficulté, dans aucuns des prospectus que j'ai eu à faire, sérieuse avec un client qui cherchait à cacher une rémunération. Les règles du jeu sont telles en Ontario, les règles du jeu sont telles aux États-Unis, on s'y plie, tout simplement.

(20 h 50)

M. Chagnon: L'ACCOVAM et le Barreau nous ont mentionné que les deux principales raisons qui les motivaient à demander une divulgation de la rémunération globale plutôt qu'une rémunération individuelle, c'étaient, sauf erreur, premièrement...

M. Gendron: L'escalade.

M. Chagnon: ...l'escalade et puis, deuxièmement, le piratage. Vous dites quoi à ça?

M. Raymond (Pierre): C'est une vue qui...

M. Chagnon: Excuse-moi.

M. Raymond (Pierre): À ce moment-là...

M. Chagnon: C'était la question du député d'Abitibi-Ouest, qu'il vous aurait posée s'il avait pu la poser.

M. Raymond (Pierre): C'est un point de vue qui est défendu et qui est défendable. Et puis, moi, je ne suis pas en mesure de commenter sur la valeur de ce point de vue là. Je pense que les gens de l'ACCOVAM sont beaucoup plus en mesure de commenter sur la valeur de ce point de vue là.

Tout ce que je dis, c'est qu'on doit uniformiser les règles. Si on uniformise les règles vers le bas, si notre Commission peut convaincre, pour les motifs soulevés par l'ACCOVAM, la commission de l'Ontario et la commission des États-Unis de réduire vers le bas les règles, nous serons très favorables. On n'a pas de point de vue sur le fond.

M. Chagnon: Même opinion tous les deux?

M. Lacroix (Hubert T.): Moi, je vous ai dit que je savais qu'une des inquiétudes, M. le député, c'est de voir le salaire d'un dirigeant d'une compagnie d'informatique, à Montréal, monter à 125 000 $, alors que le même dirigeant pourrait faire trois fois peut-être ces dollars-là sur la côte ouest américaine. Mais la vie sur la côte ouest américaine, ce n'est peut-être pas la vie dans la province de Québec. Alors, il y aura un choix pour cette personne-là. C'est la vie. Alors, si les règles, c'est de mettre tout le monde sur le même pied d'égalité, je ne suis pas inquiet par cette divulgation additionnelle.

M. Chagnon: En tout cas, c'est moins pire le printemps que l'hiver, disons.

M. Lacroix (Hubert T.): Ça dépend pour qui, je présume.

M. Chagnon: Vous avez aussi mentionné, et je pense que vous avez raison, que l'octroi d'un pouvoir réglementaire à la CVMQ lui permettrait, par rapport à l'Ontario, d'être sur un pied d'égalité. Peut-être que vous pourriez nous signaler davantage les différences qui déterminent le pouvoir, je dirais, de la CVMO par rapport à la CVMQ.

M. Lacroix (Hubert T.): Par où commencer?

M. Raymond (Pierre): Vous cherchez à savoir en quoi le pouvoir réglementaire ontarien, ou comment le pouvoir réglementaire a été accordé à la commission de l'Ontario?

M. Chagnon: Non. Je voudrais m'assurer de...

M. Raymond (Pierre): Ou quelle est l'étendue du pouvoir réglementaire?

M. Chagnon: Je voudrais m'assurer de convaincre le gouvernement de l'importance de donner un pouvoir réglementaire à la CVMQ, comme l'a la CVMO déjà. Si vous aviez à le plaider rapidement, vous diriez quoi?

M. Raymond (Pierre): Ce qu'on dirait, c'est que nos contacts quotidiens ou hebdomadaires avec la Commission ou avec des membres de la Commission nous révèlent que les instructions générales ou la réglementation au Québec est parfois déficiente. Même si le personnel de la Commission ou les commissaires voient favorablement la modification proposée, qu'on reporte aux calendes grecques la modification de la loi.

Un exemple de ce genre de situation là, c'est l'exemple que je vous soulignais tout à l'heure, qui est celui des courtiers étrangers qui veulent venir pratiquer au Québec. La Commission n'a pas le pouvoir de modifier la situation en ce moment, et le pouvoir réglementaire lui permettrait probablement d'ajuster ses exigences pour permettre de s'ajuster, selon les demandes du marché, à une présence étrangère des courtiers.

M. Chagnon: Ce qui nous amène à une autre exigence de votre mémoire à l'effet que nous devrions exiger des courtiers ou de n'importe quelle maison de courtage qu'ils aient leur place d'affaires au Québec.

M. Raymond (Pierre): Non, c'est le contraire.

M. Chagnon: Vous êtes contre. Allez-y.

M. Raymond (Pierre): Le contraire. Ce qu'on...

M. Chagnon: Ah! «Il n'est plus raisonnable d'exiger...» Excusez-moi. Je trouvais ça un peu particulier, que vous ayez cette opinion-là, compte tenu de l'opinion que vous aviez précédemment dans toute la question de la réglementation du marché électronique des valeurs mobilières.

En ce qui concerne le marché électronique des valeurs mobilières, la Commission des valeurs mobilières a mis sur pied un comité de travail pour étudier cette question-là, qui dépasse l'entendement, en tout cas, des parlementaires qui sont ici devant vous, et qui semble dépasser l'entendement de tous ceux qu'on a rencontrés à date.

M. Raymond (Pierre): Qu'est-ce qui dépasse l'entendement? Je m'excuse.

M. Chagnon: La capacité de pouvoir réglementer le marché virtuel des valeurs mobilières.

M. Raymond (Pierre): Je pense que c'est parce qu'on ne sait pas comment le réglementer, qu'on s'interroge. J'ai eu l'occasion de travailler sur ce dossier-là l'an dernier et je dois vous avouer que pas plus... enfin, sûrement pas nous, on était en mesure de suggérer des moyens absolus à la Commission pour assurer la protection des épargnants dans le contexte de transactions virtuelles.

Ce qui ne veut pas nécessairement dire qu'il n'existe pas des moyens d'accommodement ou des moyens de mettre quelques paramètres autour de cette situation-là. Et, si on y réfléchit et si le Comité de la Commission qui s'interroge sur cette question-là entre en contact avec des gens qui opèrent dans ce domaine-là, qui utilisent les marchés virtuels, on pourra sûrement être plus à même de voir comment on peut l'encadrer qu'actuellement, alors que je pense qu'ils sont complètement dans le noir, avec tout le respect.

M. Lacroix (Hubert T.): M. le député, je veux simplement ajouter une chose à ce que Pierre disait tantôt sur le pouvoir réglementaire. La dernière chose que l'on veut, c'est voir une personne s'attaquer à un énoncé de politique ou venir diminuer la crédibilité de notre institution financière principale, la Commission des valeurs mobilières du Québec, dans son marché, et remettre en jeu ses habilités de légiférer ou d'organiser les transactions dans son marché. C'est ce qui s'est passé en Ontario, vous le savez.

Pour cette raison-là, lorsqu'on vient, par exemple, par le biais d'un énoncé de politique comme Q-27, qui régit quatre sortes de transactions... Si on vient un jour dire qu'on n'avait pas le droit ou que tel énoncé de politique débordait le cadre de ce qui était permis, des pouvoirs de la Commission, là on vient d'entrer dans une situation très inconfortable. On ne veut même pas donner ce genre de prise. La façon la plus claire, la plus limpide et la plus rapide, c'est de donner ce pouvoir réglementaire à la CVMQ.

M. Raymond (Pierre): Je pense qu'on peut ajouter également qu'en donnant ce pouvoir réglementaire... De façon historique, je ne pense pas que la Commission ait utilisé ses pouvoirs de façon abusive, et les participants dans le marché reconnaissent la compétence, la spécialisation des membres du personnel ou des membres de la Commission, des commissaires, et, selon mon expérience, c'est toujours avec circonspection qu'on a utilisé ce pouvoir-là et qu'on devrait pouvoir continuer de l'utiliser.

M. Chagnon: Finalement, M. le Président, une dernière question sur le sujet du mémoire. Vous avez soulevé des inquiétudes à l'égard de voir la CVMQ... je dirais plutôt le gouvernement que la CVMQ, faire des propositions – et là je pense plus particulièrement à la Bourse – de voir une partie des gouverneurs de la Bourse comme étant les représentants, moi, je dirais du gouvernement – mais le gouvernement dirait du public – pour ni plus ni moins copier la modification législative qui est apparue au gouvernement de la Colombie-Britannique il y a un an, et vous avez des hésitations à cet effet-là.

M. Lacroix (Hubert T.): Aucun doute. C'est peut-être la seule fois ce soir où on va être du même avis. La dernière chose que...

M. Chagnon: Ça prend au moins une fois avant de se quitter.

M. Lacroix (Hubert T.): Avant de se quitter ce soir. Aucun doute dans notre esprit que la dernière chose que l'on veut voir, c'est l'intégrité de ces organismes-là affectée par une perception qu'il y a de l'ingérence dans les joueurs qui travaillent au niveau de son conseil d'administration et de sa direction. On espère que l'indépendance de ces membres-là et leur sélection ne seront pas teintées par une révision, une approbation, une permission réglementaire quelconque.

M. Raymond (Pierre): Je pourrais peut-être juste ajouter un point à cet égard-là, M. le député. Il est, selon nous, essentiel que ces organismes d'autoréglementation aient le respect absolu de leurs membres. Si le conseil d'administration... En ce moment, les conseils d'administration de ces organismes d'autoréglementation là sont composés de membres qui sont choisis de l'interne par les membres eux-mêmes, et, s'il y a une ingérence dans la composition du conseil d'administration, on pourrait affecter la crédibilité du conseil d'administration et, en conséquence, affecter le respect de l'organisme lui-même, des membres qui sont censés suivre la marche indiquée par le conseil.

(21 heures)

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je conclus en disant qu'il y a plus qu'un élément sur lequel nous sommes d'accord. On a dit qu'on était d'accord sur l'harmonisation.

M. Lacroix (Hubert T.): Vous avez raison.

M. Chagnon: Je vous ai même suggéré de s'harmoniser sur les déclarations d'initiés, etc.

M. Lacroix (Hubert T.): Vous avez raison, M. le député.

M. Chagnon: Dans le fond, on n'est pas si pire.

M. Lacroix (Hubert T.): Oui, c'est bon.

M. Chagnon: On va se chercher une bonne moyenne, je pense bien. Alors, M. le Président, je voudrais remercier le Comité consultatif juridique de sa prestation et remercier aussi ses représentants pour leur participation à cette commission, ce soir, au nom de ma formation.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Il y a le député d'Abitibi-Ouest et le député de Marguerite-D'Youville qui ont demandé la parole. Donc, allez, M. le député d'Abitibi-Ouest. Il resterait 10 minutes.

M. Gendron: Oui, il va falloir faire vite. Alors, très rapidement. Moi, je voulais vous remercier également. Mais ce qui m'a frappé, c'est que, dans l'introduction, vous aviez affirmé que, parce que vous avez une pratique, disiez-vous, concentrée en valeurs mobilières, et là je vous cite dans l'introduction, «nous croyons que nous sommes bien placés pour présenter certains point de vue», puis, moi, je prétends que, par vos réponses, ça paraissait. Alors, je vous en remercie.

Moi, j'ai deux questions. Il y en a une qui a été posée. Très clairement, vous avez laissé savoir votre préférence concernant la divulgation individuelle plutôt que collective. Les explications, vous les avez données. Et ce qu'on sent, c'est que, peu importent les objections qu'on présenterait, puis je veux juste vérifier si c'est bien ça, vous croyez que l'harmonisation étant une volonté plus forte que les inconvénients que pourrait représenter une représentation, une divulgation de la rémunération à titre individuel, bien, l'harmonisation l'emporte à cause de ça. Ça ne veut pas dire que d'autres n'ont pas d'objections. Mais ce n'était pas votre piste. C'était: l'harmonisation, c'est plus fort que ce qu'ils ont présenté comme objections.

M. Lacroix (Hubert T.): C'est exact.

M. Gendron: Deuxième question...

M. Lacroix (Hubert T.): Juste pour rajouter, peut-être, à cet égard-là. Et, de toute façon, les entreprises québécoises sont, pour la grande, très, très grande majorité, des émetteurs assujettis. Au moins en Ontario, ils sont assujettis aux règles. Alors, s'il faut le déclarer pour l'Ontario, il faut le déclarer pour les investisseurs québécois.

M. Gendron: Bon point. Deuxième question. Dans votre présentation, au début – et je crois, encore là, vous citer adéquatement – vous aviez indiqué: «Les entreprises québécoises, canadiennes et autres doivent pouvoir faire des opérations dans des délais qui ne pénalisent pas et qui ne ralentissent pas.» Est-ce à dire que vous portez un jugement? Parce que, quand on souhaite ça, qui est un objectif, est-ce que vous portez le jugement que ce n'est pas le cas, ce n'est pas le cas actuellement avec la Commission des valeurs mobilières du Québec, pour ce qu'on appelle les opérations financières qui doivent se faire dans des délais? J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus.

Et, éventuellement, si c'était le cas, est-ce que vous croyez qu'on peut y arriver uniquement par de l'harmonisation? Moi, il me semble qu'il n'y a pas assez d'éléments. Si c'était votre jugement à l'effet que les délais, présentement, ils pénalisent puis ils ralentissent, en conséquence, il faut apporter des correctifs qui dépassent strictement l'aspect de l'harmonisation avec un certain nombre de choses.

M. Lacroix (Hubert T.): Deux points rapides, et Pierre pourra ajouter. L'harmonisation du régime, accélérée, vient de régler un problème important dans notre vie quotidienne. Et, même si le Québec faisait des pieds et des mains, et il le faisait vraiment, pour coller sur les délais qui étaient imposés dans les autres juridictions, le fait de ne pas avoir un système intégré inquiétait grandement les joueurs dans ces marchés-là. Alors, les délais, ce sont des délais de ce genre dont on parle.

Deuxième chose. Il y a des ressources financières qui sont importantes. Parce que, quand s'accumulent, sur le bureau, des joueurs que nous savons être des analystes dans les différentes juridictions, parce qu'on n'a pas les ressources financières, peut-être, pour avoir autant de flexibilité qu'on voudrait en avoir à l'intérieur d'une enveloppe raisonnable, les délais, c'est là qu'on commence à les sentir. On les sent sur les premiers appels publics à l'épargne, on les sent sur les demandes de dispenses. Mais à l'impossible nul n'est tenu. Alors, quand vous dites: Lacroix, est-ce qu'il y a d'autres choses? le message de tantôt, quand on parlait de ressources financières et d'essayer de conserver une partie des fonds pour l'efficacité de la CVMQ, il n'y a aucun doute que c'est de ça qu'on parle.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Dans vos commentaires, vous avez émis certaines choses qui m'ont laissé quelque peu perplexe et qui soulèvent un débat de fond.

D'abord, sur la question de la divulgation en fonction du maraudage ou de la comparaison des salaires, je pense que c'est un argument assez superficiel, puisque les chercheurs de têtes et les compagnies spécialisées dans ce domaine-là sont parfaitement au courant des niveaux de salaires qui se paient en Amérique du Nord dans les différents secteurs et dans les différentes entreprises. Et je vous donne comme exemple ce qui se fait dans le domaine de la santé avec les infirmières et avec les médecins. Alors, ce n'est pas parce que quelque chose n'est pas divulgué que ceux qui sont véritablement intéressés à avoir un administrateur chevronné peuvent se priver de ses services et se priver surtout de lui faire une offre alléchante.

Deuxièmement, vous avez mentionné que les administrateurs sont de plus en plus réfractaires à... d'abord, qu'on a de la misère à trouver des administrateurs et qu'ils sont de plus en plus réfractaires à voir leurs salaires exposés sur la place publique. Bien, je vous dirai que c'est plutôt la tendance inverse que l'on sent dans l'opinion publique. D'une part, lorsqu'on exige des administrateurs politiques, c'est-à-dire des ministres, des politiciens, des députés, que leurs salaires, leurs conditions de travail soient divulgués à la cent près sur la place publique, il me semble qu'il est tout à fait normal que les avantages, que les salaires des administrateurs d'entreprises, entre autres des entreprises qui vivent de subventions généreuses du gouvernement, le soient également.

Troisièmement, lorsqu'on fait valoir que les administrateurs vont devenir de plus en plus difficiles à trouver, ça me fait poser une question de fond substantielle: Est-ce dire véritablement que les actionnaires devront laisser à des fonctionnaires d'entreprises, c'est-à-dire des salariés d'entreprises, l'administration de l'entreprise? Et j'ai en mémoire la contestation de M. Yves Michaud, présentement, sur certains agissements de la Banque Nationale.

Alors, il me semble, et c'est un commentaire que j'émets, que toute cette question de divulgation des salaires, et les réticences qu'expriment certains administrateurs, va à contre-courant de ce qu'exigent, à l'heure actuelle, l'opinion publique et à la fois les actionnaires.

M. Raymond (Pierre): Est-ce qu'il y a un commentaire... Est-ce que vous demandez un commentaire de notre part?

M. Lacroix (Hubert T.): Est-ce que c'est une question?

M. Beaulne: Oui, peut-être que vous voulez réagir à ça, parce que vous disiez que vous faisiez part des commentaires que vous entendiez, enfin, ou de l'impression qui se dégageait de certains de vos clients et des réticences qu'ils pouvaient avoir.

M. Raymond (Pierre): Non, mais je pense que nos clients ont des réticences, mais ces réticences-là sont repoussées pour toutes sortes de raisons. Et puis ils s'accommodent des règles.

M. Lacroix (Hubert T.): Moi, également, je n'ai jamais eu, et Pierre le disait tantôt, une difficulté à faire divulguer un salaire à un dirigeant. Puis je voudrais faire la distinction, parce que vous avez utilisé le mot «administrateurs». Les administrateurs, eux autres, ne sont jamais gênés de dire ce qu'ils font dans les compagnies publiques, parce que la rémunération qu'on leur verse est tellement insignifiante vis-à-vis des risques qu'on leur fait supporter sur leurs épaules que, eux, ils sont très contents de vous dire qu'ils font 5 000 $ par année, puis 750 $ de jetons de présence par rencontre. Alors, ça, ce n'est pas inquiétant du tout.

Les dirigeants d'entreprises, les personnes qui sont les présidents, les officiers, les personnes de ce genre, à partir du moment où ils choisissent d'entrer dans les marchés avec leur entreprise, bien ils sont obligés de jouer avec les règles d'une société ouverte. On n'a jamais de contestation sur: Est-ce qu'il faut divulguer les régimes de retraite? Est-ce qu'il faut faire ci? Est-ce qu'il faut faire ça? Non. Les règles sont très limpides et on tente d'y être les plus transparents possible.

M. Beaulne: Mais ne pensez-vous pas que c'est le rôle du gouvernement de s'assurer, d'une certaine manière, que les bénéfices de l'entreprise et que les salaires qui sont versés aux dirigeants d'entreprises soient en juste mesure avec les bénéfices de l'entreprise, et surtout dans un contexte où on vit une transition économique importante? J'ai en mémoire ce que je lisais, il n'y a pas si longtemps, où on a augmenté de 50 % les avantages du président d'Air Canada alors que les bénéfices de la compagnie ont baissé.

(21 h 10)

M. Raymond (Pierre): Peut-être pour répondre à ça. Je ne pense pas que ce soit le rôle du gouvernement d'imposer aux entreprises ou d'imposer aux dirigeants l'obligation de divulguer leurs salaires. Je pense que c'est le rôle du marché d'imposer les règles nécessaires. On assiste à toutes sortes de conférences depuis quelques années où on entend clairement que les investisseurs institutionnels veulent savoir, et c'est les investisseurs institutionnels qui établissent les règles du jeu aujourd'hui. Puis je pense qu'il faut laisser le marché dicter ce genre de règles là. Le marché l'exige aujourd'hui. Mais je ne pense pas que ce soit le rôle du gouvernement de...

M. Lacroix (Hubert T.): De fixer les salaires.

M. Raymond (Pierre): Sûrement pas de fixer les salaires, et de s'assurer... Parce que les entreprises sont des entreprises privées, quand même. Ce sont des entreprises qui font appel au public pour des fonds. Mais ce ne sont pas des entreprises d'État. Vous avez dit tout à l'heure que plusieurs d'entre elles ont des subventions importantes. Je ne pense pas que ce soit quand même la majorité. Et, en conséquence, je pense que c'est une entreprise qui oeuvre dans le marché et que ça devrait être le marché qui dicte les règles. Je ne pense pas que ce soit au gouvernement de dicter les règles à cet égard-là.

M. Beaulne: Non, mais ce n'était pas mon point. Ce n'est pas au gouvernement à dicter les salaires et les règles de l'entreprise privée. Mais ne pensez-vous pas que c'est au gouvernement de s'assurer que les actionnaires, qui ne sont pas au fait de tous les détails des règlements, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il existe certains règlements encadrant les transactions d'initiés à la Bourse, justement pour que les actionnaires, qui ne sont pas au courant des opérations quotidiennes de l'entreprise, sachent quand même un peu ce qui se passe là-dedans... Les règles du jeu, vous convenez quand même que c'est le rôle du gouvernement d'établir les règles du jeu.

M. Lacroix (Hubert T.): Oui.

M. Beaulne: Et, si c'est le rôle du gouvernement d'établir les règles du jeu, le gouvernement peut bien se donner comme mission d'établir des règles du jeu qui soient les plus transparentes possible, à la fois pour l'État et à la fois pour les actionnaires. Parce qu'une grande partie des compagnies dites publiques sont des compagnies à actionnariat très diffus, entre autres les banques, et, d'ailleurs, c'est prévu par la loi des banques. Donc, ce ne sont pas des compagnies... Je ne parle pas de compagnies, ici, qui appartiennent principalement à une famille ou à un individu, mais surtout les compagnies qui sont à actionnariat très diffus.

M. Raymond (Pierre): Je pense que le rôle du gouvernement, c'est de s'assurer que les épargnants sont protégés dans l'aventure dans laquelle ils s'engagent lorsqu'ils investissent dans les compagnies. Fixer les règles du jeu, je ne suis pas sûr que c'est la bonne expression, mais le gouvernement doit sûrement faire en sorte que ce soit un domaine où tout le monde est informé de la situation de l'entreprise, de la situation financière. C'est pour ça, comme vous dites, qu'il y a des règles sur les divulgations des transactions d'initiés, et c'est à un organisme comme la Commission, qui est spécialisée dans le domaine des valeurs mobilières, de déterminer si, à son jugement, il est approprié, à l'heure actuelle, en 1996 – peut-être que ce sera différent en l'an 2000 – que les salaires ou les revenus des dirigeants soient divulgués aujourd'hui ou que d'autres divulgations soient exigées l'an prochain, parce que le marché l'exige ou que c'est nécessaire pour l'intérêt général des gens qui investissent dans ces entreprises-là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien, M. le député de Marguerite-Bourgeoys... Marguerite-D'Youville, je vais finir par m'habituer. S'il n'y a pas d'autres membres qui demandent la parole, je vais...

M. Chagnon: Moi, je trouve la députée de Marguerite-Bourgeoys beaucoup plus jolie.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ah! ça, ça pourrait faire un long débat, parce que j'ai entendu plaider le député de Marguerite-D'Youville pour que, justement, son comté change de nom il y a quelques années, et c'était un plaidoyer enflammé, je dois vous dire.

MM. Lacroix et Raymond, je vous remercie beaucoup de nous avoir fait connaître vos préoccupations à cette commission et sans doute que, lors de l'élaboration de la loi, on prendra bonne note de vos remarques. Je vous remercie.

Je vais suspendre pour quelques minutes seulement.

(Suspension de la séance à 21 h 14)

(Reprise à 21 h 18)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si les membres de la commission veulent reprendre leur place. M. le député de Westmount–Saint-Louis! À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, j'inviterais M. Pierre Gauthier à prendre place pour nous faire connaître son mémoire.

Et je dois informer les membres de la commission que M. Gauthier a fait connaître son désir au secrétaire d'être assermenté avant de procéder.


M. Pierre Gauthier


Procédure d'assermentation du témoin

Donc, j'inviterais M. le secrétaire à assermenter M. Gauthier.

Le Secrétaire: Je vais vous lire la déclaration d'assermentation et vous allez me la répéter par la suite.

M. Gauthier (Pierre): Oui.

Le Secrétaire: Donc, vous allez répéter la phrase suivante: Je, Gauthier Pierre, jure que je dirai toute la vérité et rien que la vérité.

M. Gauthier (Pierre): Je, Gauthier Pierre, jure que je dirai la vérité, rien que la vérité.

Le Secrétaire: O.K. Parfait.

M. Lachance: M. le Président, une question d'information.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Disons que cette procédure m'intrigue un peu. Est-ce que c'est une procédure qui est prévue dans nos règlements ou si...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est une procédure qui est prévue dans les règlements, c'est parce que M. Gauthier veut s'assurer de l'immunité complète. Il y a déjà eu un jugement de cour à l'effet qu'un invité ou un témoin, si on peut dire, même si notre règlement prévoit l'immunité des parlementaires et des témoins, s'ils ne portent pas serment ou un engagement solennel, devant le droit, c'est... Il y a un jugement qui dit que la personne qui vient ici, du fait qu'elle n'avait pas porté serment, elle peut se parjurer possiblement. Donc, c'est pour ça que M. Gauthier a voulu prêter serment comme quoi il ne vient pas ici pour se parjurer; il vient ici pour nous dire la vérité, rien que la vérité.

M. Lachance: Donc, c'est une question de protection.

(21 h 20)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Une question de protection. J'aurais pu vous lire tout un avis juridique de cinq pages, mais, avec ce que j'ai entendu cet après-midi sur les avocats, j'ai essayé de vous le résumer dans mes mots.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais, si ça ne vous satisfait pas... Ha, ha, ha!

M. Lachance: Ça m'éclaire, monsieur...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si ça ne vous sastifait pas, je vais vous le lire, M. le député de Bellechasse.

Une voix: Non, non, non.

M. Lachance: Ça m'éclaire, M. le Président.

Une voix: C'est par curiosité.

M. Lachance: Vous allez reconnaître que la question se posait, étant donné que c'est très inhabituel en cette commission.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, vous avez raison. Mais je dois tout de suite dire que, même si, à cette commission-ci, on semble, en tout cas, s'amuser tout en travaillant, on travaille avec le plus grand sérieux du monde aussi.

Donc, M. Gauthier, on vous écoute et, comme je vous l'ai dit, je vous en ai fait part, normalement vous avez 10 minutes, mais, si vous dépassez, c'est parce que vous grugez sur votre temps et les membres auront moins de temps pour vous poser des questions. Donc, prenez le temps que vous désirez. Allez.

M. Gauthier (Pierre): Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais faire des remarques préliminaires à mon mémoire parce qu'il s'est passé des événements aujourd'hui, entre autres un que je calcule très important. Le Devoir , dans son édition d'aujourd'hui, en première page, en haut, le titre, on ne peut pas le manquer: «Air Canada et Canadien ont du plomb dans l'aile», et l'encadrage: «Air Canada et Canadien ont du plomb dans l'aile. Au regard des normes américaines, nos deux transporteurs nationaux sont mal en point». J'inviterais les membres de la commission à regarder et à lire cet article-là. C'est très important.

Le 13 mars 1996, j'ai rencontré M. Yves Michaud dans le cadre de l'assemblée annuelle des actionnaires de la Banque Nationale du Canada. Le 6 mai 1996, j'ai rencontré personnellement M. Yves Michaud à son bureau, sur la rue Versailles, à Montréal. M. Michaud m'a indiqué deux contacts: M. Yvon Boivin, qui est ici présent, l'actuel secrétaire de la commission, et Me Maxime Bernier, conseiller politique, responsable du dossier des institutions financières, qui est ici présent aussi. J'ai rencontré Me Bernier le 13 mai dernier, au bureau du vice-premier ministre à Montréal. Me Bernier et moi avons discuté qu'il serait important de faire valoir mes représentations devant votre commission. C'est ce qui m'a amené à préparer le présent mémoire que je vais vous présenter.

Mais là, je me répète, dans l'édition du Devoir de ce matin, il y a un article intitulé «Air Canada et Canadien ont du plomb dans l'aile». Cet excellent article a modifié quelque peu ma présentation. J'aimerais donc témoigner davantage en insistant sur chacune de mes recommandations, tout en permettant aux membres de la commission qui ont pris connaissance de mon mémoire d'échanger sur certains passages qui pourraient peut-être surprendre, si vous l'avez lu.

Donc, M. le Président, MM. les commissaires, Mme la commissaire, mesdames et messieurs, à l'occasion de la consultation générale portant sur l'étude de l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas échéant, de modifier la Loi sur les valeurs mobilières, je désire apporter, à titre de citoyen, une contribution personnelle. Le but de mon intervention est de sensibiliser la commission sur une démarche personnelle vieille de huit ans et de suggérer humblement certaines recommandations concernant les leçons que j'ai tirées de cette expérience.

Mon nom est Pierre Gauthier. Je suis comptable agréé de profession et je me suis surtout spécialisé dans des dossiers de redressement d'entreprises. Je fus donc, au cours de ma carrière, confronté à des situations parfois délicates et inhabituelles. Je suis à mon compte depuis le mois d'octobre 1982. Avant cette date, je fus administrateur de dossiers chez Raymond, Chabot, Martin, Paré. J'ai été particulièrement choyé dans mes mandats. J'ai agi, entre autres, à titre d'expert-conseil au bureau du Vérificateur général du Canada et je fus assigné à des dossiers spéciaux à la Banque Nationale du Canada.

Particulièrement, à l'époque où j'intervenais, c'était la fusion entre la Banque provinciale du Canada et la Banque canadienne nationale du Canada. J'ai aimé oeuvrer au sein de cette firme, car on m'a fait confiance et on m'a permis de développer certains talents en toute liberté. Je veux préciser à la commission que j'avais, entre autres, M. Jean-Pierre Roy, je pense, de notoriété publique et ancien président du Parti libéral du Québec, comme associé, dont je dépendais, et je travaillais beaucoup pour M. Serge Saucier, qui est encore, à ce que je sache, d'une grande renommée au Québec.

De 1982 à 1985, je me suis impliqué dans le redressement financier du mouvement des sociétés d'entraide économique du Québec. Je veux spécifier à la commission que je suis arrivé après le plan de transformation. Donc, j'ai participé à l'élaboration d'un rapport, qui s'est appelé «Rapport constat», qui recommandait des régionalisations de sociétés d'entraide, et ainsi de suite, et ça avait pour but de protéger l'implication de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, ce qui a été le cas.

En novembre 1985, je débute un dossier pour une cliente dentiste et je commence alors à attaquer sans le vouloir un système de financement établi et puissant, le système de la location à long terme. C'est ainsi qu'à titre personnel j'ai initié diverses démarches qui ont amené le projet de loi 133, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur, sur l'aspect des contrats de louage de biens. Il y a eu des articles de journaux, des entrevues à la radio, à la télévision et des démarches politiques.

Voilà succinctement le cheminement qui m'a amené, au printemps 1988, à m'intéresser, à titre de citoyen, au dossier de la privatisation de la société Air Canada. Dans ce dossier, j'ai donc entrepris plusieurs démarches, plus particulièrement au début, auprès de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Il me serait très facile de critiquer vertement l'attitude de la Commission à mon égard, mais je ne le ferai pas. Je crois qu'il est toujours plus louable de conserver une approche positive et constructive, malgré le passé.

Votre consultation m'offre une opportunité en or d'apporter ma contribution, et je considère comme un privilège l'occasion qui m'est donnée de pouvoir y être entendu. Il va sans dire que mes observations sont exprimées en mon nom personnel et ne reflètent pas nécessairement la position que pourrait présenter mon ordre professionnel provincial.

L'article 352 précise que «le ministre doit, au plus tard le 19 janvier 1988, et par la suite tous les cinq ans, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi, sur l'opportunité de la maintenir en vigueur et, le cas échéant, de la modifier». Ce rapport a été déposé en décembre 1993, avec un retard de près d'un an. La loi précise que «le président convoque, dans un délai d'un an à compter du dépôt du rapport, la commission de l'Assemblée». Selon ma compréhension de l'article 352, la présente consultation générale aurait dû se tenir vers le mois de janvier 1994. Nous sommes donc plus de deux ans en retard, selon les dispositions de la loi.

En préparation de mon intervention, j'ai lu le «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières», de décembre 1993, et le document d'accompagnement du «Rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les valeurs mobilières», d'avril 1996. Je veux souligner que ce document-là m'a été transmis par M. Boivin et j'ai continuellement apprécié la relation, à titre de citoyen, qui s'est passée entre le secrétaire de la commission et moi-même. C'est à la lumière de la compréhension de ces rapports que je vais débuter mes observations.

Mission de la Commission. L'article 276 de la loi précise la mission de la Commission. La Commission a pour mission «d'assurer la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses». La Commission a pour mission «de régir l'information des porteurs de valeurs mobilières et du public sur les personnes qui font publiquement appel à l'épargne et sur les valeurs émises par celles-ci». Ma compréhension de la mission de la Commission est d'assurer le bon fonctionnement du marché et, surtout, de protéger le public investisseur. Des personnes peuvent penser que cet organisme existe pour donner un faux sens de sécurité aux gens.

Je recommande de réaffirmer la mission de la protection du public investisseur. Voir à le présenter par un préambule à la loi. Je ne veux pas insister. Le préambule, ça a sorti l'année passée, ça. On a mis quelque chose en préambule. Je demanderais à la commission de le mettre en préambule. On protège le public ou on ne protège pas le public. Pas dans un article 276, là. En haut. Pour ne pas qu'il y ait de doute.

L'information aux investisseurs. À la page 13 du rapport quinquennal de décembre 1993, nous disons ceci: «La stabilité dans ce secteur, qui dépend notamment de celle des intermédiaires de marché, requiert une réglementation et une supervision capables de maintenir un niveau de confiance élevé chez l'investisseur. Cette confiance reposera également sur une conviction que l'information offerte sur les émetteurs et leurs titres est complète, claire, véridique et accessible à tous.» Et, à la page 9 du document d'accompagnement du rapport quinquennal, d'avril 1996, nous disons ceci: «Les exigences réglementaires de divulgation pour le marché primaire des capitaux en rapport avec la protection des épargnants constituent des éléments que le ministre d'État de l'Économie et des Finances considère d'intérêt majeur.»

Le 6 septembre 1988, j'ai transmis à la Commission des valeurs mobilières du Québec mes commentaires sur le prospectus provisoire de la première émission publique d'Air Canada. En voici quelques extraits:

«J'ai fait des démarches personnelles aux autorités d'Air Canada, et j'attends toujours. La lecture du prospectus provisoire ne m'a pas permis d'en savoir plus. Plusieurs questions restent sans réponse et je crois que l'épargnant ne possède pas toute l'information pour pouvoir juger de son placement dans les actions de cette Société.

«Je vous écris donc afin d'attirer à votre attention certaines inquiétudes concernant ce prospectus. J'agis à titre de citoyen dans cette démarche et j'espère que ce document vous sera d'une quelconque utilité.

(21 h 30)

«Il est essentiel de comprendre que plusieurs de mes commentaires sont à l'effet que l'on a sous-estimé le passif de la Société et qu'une analyse de mes prétentions me semble essentielle.»

Voilà, M. le Président, le point majeur et fondamental de ma démarche de fin août 1988. J'ai dénoncé à titre de citoyen l'image qui fut présentée de la situation financière de la société Air Canada au moment de la privatisation.

À ce stade de mon mémoire, j'aimerais préciser que je n'ai rien contre la société Air Canada. Air Canada est mon transporteur. En avril 1989, j'ai eu une rencontre avec deux membres de la haute direction de cette société. Cette rencontre a été cordiale. On a répondu à certaines de mes interrogations d'une manière acceptable. On m'a cependant posé une seule question précise à la fin de l'entretien: «Why us?» Pourquoi nous autres? Air Canada est un symbole. Air Canada est la compagnie porte-drapeau du pays. Air Canada me permet de toucher plusieurs volets du problème de la divulgation de l'information financière, au pays. Air Canada n'est pas un dossier-comptable, c'est un dossier d'ordre public. Quelques années plus tard, M. Claude Taylor, qui était à cette époque-là président du conseil et président-directeur général d'Air Canada, avait fait publier un texte intitulé «Réaliser l'excellence est toujours louable». J'ai souvent pensé qu'il avait rédigé ce texte à mon intention.

Appels publics à l'épargne. Au cours des huit dernières années, la société Air Canada a fait quatre appels publics à l'épargne – c'est ici.

Le premier appel à l'épargne a eu lieu le 26 septembre 1988. Il se chiffrait à 246 500 000 $. Les actions ont été émises à 8 $. Le deuxième appel à l'épargne a eu lieu le 5 juillet 1989. Il se chiffrait à 493 500 000 $. Les actions ont été émises à 12 $. Le troisième appel à l'épargne a eu lieu le 15 novembre 1993. Il se chiffrait à 250 100 000 $. Air Canada a émis 43 500 000 unités. Chaque unité se compose d'une action ordinaire et d'un demi-bon de souscription. Air Canada a attribué 5,25 $ à l'action ordinaire et 0,50 $ au demi-bon de souscription qui compose chaque unité.

Finalement, dans le cadre de son dernier appel public à l'épargne, en 1995, l'émission de 178 572 unités de la société se chiffrait à 500 000 000 $. Chaque unité est composée de 200 actions de catégorie A sans droit de vote au prix de 7 $ l'action et de 1 400 $ de capital de débentures subordonnées non garanties convertibles. Le total des quatre appels publics se chiffre à 1 489 000 000 $ – 1 500 000 000 $, 1 500 millions. En date du 28 mai 1996, la cote en bourse des actions ordinaires avec droit de vote était de 4,96 $ et celle des actions de catégorie A était de 4,50 $. Depuis la privatisation, la société Air Canada n'a jamais versé de dividendes. Les actionnaires qui ont toujours conservé leurs actions subissent des pertes importantes sur papier, puis ils n'ont jamais de rendement.

Pressions politiques et temporelles auprès de la CVMO. Le 1er octobre 1988, le très honorable Brian Mulroney annonce que le pays s'en va en élections. Le même jour, je lis à ma stupéfaction un titre du journal Finances : «Air Canada: des failles demeurent dans le prospectus», «Des pressions politiques expliquent que l'émission...», et ainsi de suite. Dans la semaine suivant cet article, j'ai eu plusieurs conversations téléphoniques avec la secrétaire de la CVMO. Elle prenait très au sérieux l'ensemble du dossier et me précisait que l'attitude de la CVMQ était à l'état de scandale, qu'en plus du politique des banques à charte auraient exercé des pressions. Quel charmant tableau, n'est-ce pas!

C'est ainsi que, depuis cette époque, je multiplie les démarches afin de comprendre ce qui s'est passé. Je n'ai plus rien à dire pour l'instant sur ce chapitre. Le dossier de la privatisation d'Air Canada est pour moi un incroyable gâchis. Il est possible qu'un jour je publie un livre pour raconter mon implication depuis huit ans dans ce dossier. Qui sait?

Le 2 août 1990, j'écrivais au Protecteur du citoyen du Québec et je lui demandais de faire la lumière sur l'implication de la CVMQ dans le dossier Air Canada. Le 9 août 1990, on acceptait ma demande. Le numéro de mon dossier est le 90-51830. Le dossier est toujours ouvert et il fêtera prochainement son sixième anniversaire. J'ai rencontré personnellement Me Daniel Jacoby à deux reprises, et j'ai hâte d'entendre ses conclusions sur mon dossier.

Recommandations. Première recommandation. Je l'ai dit tantôt, je recommande de réaffirmer la mission de la protection du public. Pour moi, là, il n'y a pas autre chose que ça. On protège le public ou on ne protège pas le public.

Deux, d'amender la loi et les règlements afin d'encadrer une démarche comme celle effectuée dans le dossier de la privatisation d'Air Canada à la fin août 1988. Bon. Je vais peut-être expliquer un peu ce qui est arrivé. Je pense que la date, de mémoire, c'est le 31 août 1988. Effectivement, j'avais le prospectus provisoire daté du 25 août 1988 et j'ai demandé deux jours avant à rencontrer des autorités de la Commission, et on m'a reçu. Il y avait, je pense, trois analystes de présents.

Une des premières choses que ces gens-là m'ont dite, et c'est ça qui m'a surpris, dans mon souvenir, c'est: M. Gauthier, on ne sait pas comment faire avec vous. J'ai dit: Comment ça? Ce n'est jamais arrivé dans les annales de la Commission, une situation comme ça; il n'y a rien au règlement. J'ai dit: Écoutez, on n'a pas grand temps, là, le feu est pris, à mon idée; je n'ai pas le temps de discuter. Puis je peux vous dire que, dans ma carrière, j'ai eu certains problèmes avec l'Inspecteur général des institutions financières, des difficultés avec l'Office de la protection du consommateur; ça s'est réglé. Mais j'ai dit: La Commission des valeurs mobilières, là, vous êtes mon troisième taureau; je n'ai pas le temps. Vous autres, si vous me décevez, là, je vous fais le serment que... En tout cas. Donc, ce n'était pas encadré. Si ça avait été encadré, je pense qu'il y aurait eu des règles. «C'est-u» de l'arbitrage? Je ne sais pas. On pourrait en parler tantôt; vous me questionnerez. Il y a des idées là-dessus.

De redéfinir le processus actuel d'approbation du prospectus. Ça, là, on pourra en parler; vous me questionnerez. Je ne pense pas qu'on va régler ça ce soir. C'est déficient.

De réfléchir sur le contenu de l'article 296 de la loi. Ah bien, là, je vais vous permettre... À moins que tout le monde le connaisse par coeur, là...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Le temps passe, M. Gauthier.

M. Gauthier (Pierre): Pardon?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Votre temps passe, votre temps s'écoule.

M. Gauthier (Pierre): Bon, O.K. D'abord, vous me questionnerez là-dessus. Vous avez raison, M. le Président, ça achève. Le 6 novembre 1990, le député de Gouin a écrit au président de la CVMQ. En réponse au quatrième point de la lettre du député de Gouin, le président de la CVMQ a invoqué l'article 296 de la Loi sur les valeurs mobilières. La question concernait l'obtention de la lettre du 13 septembre 1988 par la CVMQ à Air Canada et la réponse d'Air Canada à celle-ci.

Cinq, d'amender la loi et les règlements afin d'encadrer le processus du dépôt d'une plainte. Le 3 décembre 1990, le député de Gouin a de nouveau écrit au président de la CVMQ. Il se posait les questions suivantes: Quel est le processus pour porter plainte à la CVMQ? Est-ce que ce processus est réglementé? Deux, quel mécanisme d'enquête est enclenché après le dépôt d'une plainte? Trois, de façon plus générale, est-ce que vous disposez des ressources nécessaires pour donner suite à toutes les plaintes reçues?

Six, de réfléchir sur l'emploi par les preneurs fermes d'émissions de l'usage du «green sheet» – je m'excuse de le dire en anglais, on appelle ça un mémo confidentiel; vous l'avez tous, en annexe à votre document. Le 3 décembre 1990, le député de Gouin, dans sa lettre, écrivait ceci: «De plus, je m'interroge toujours sur l'allégation faite par certains que tous les investisseurs n'ont pas bénéficié de la même information financière.» Le document confidentiel préparé par la firme RBC Dominion Securities tend à démontrer ce fait. En conséquence, compte tenu du document préparé par RBC Dominion Securities, est-ce que la Commission estime que tous les investisseurs ont bénéficié de la même information?

Sept, de réfléchir sur la rubrique 31 traitant des contrats importants à être divulgués dans le cadre d'une émission. Dans mon mémoire daté du 6 septembre 1988, je fais mention que les contrats de crédits-baux de la société Air Canada ne sont pas mentionnés comme contrats importants à la page 48 du prospectus provisoire. C'est la page 53 du prospectus final. On y liste... M. le Président, je vais prendre quand même deux secondes pour montrer ce que ça veut dire. «Contrats importants – c'est une rubrique du prospectus. À l'exception des contrats conclus dans le cours normal des affaires, les seuls contrats importants que la société a conclus au cours des deux dernières années précédant la date des présentes sont les suivants...», et on les liste. Et on dit: «Des copies de ces contrats ou des sommaires de leurs principales dispositions peuvent être consultés au siège social d'Air Canada.»

Lors de ma rencontre d'avril 1989 avec deux membres de la haute direction d'Air Canada, ce point fut abordé. On m'a précisé que ces contrats étaient secrets: M. Gauthier, on n'a pas, en soi, d'objection à la divulgation, mais le problème, c'est que nos principaux concurrents seraient allés lire ces contrats-là, et ce sont des contrats qu'on calcule d'importance et secrets. Et puis là je rajoute, dans mon mémoire: «comme les contrats secrets d'Hydro-Québec, quelques années plus tard». Si on me demande... je ne sais pas, moi... L'impôt vient me voir, tout ça, est-ce que je vais leur répondre: Vous savez, c'est secret? Ça m'achale. De toute façon, qu'est-ce que j'aurais fait si je les avais eus, les contrats? Je les aurais actualisés, j'aurais sorti les dettes. En tout cas.

Donc, je dis de réaffirmer par tous les moyens appropriés la compétence du Québec relativement au secteur des valeurs mobilières. Ça, c'est essentiel, surtout par rapport à ce qui est là, au niveau, peut-être, d'allégations de pressions politiques, là. Il ne faut pas institutionnaliser ce que je dis qui est peut-être arrivé dans Air Canada et que vous avez en annexe, quand même.

(21 h 40)

Conclusion. J'ai, par ce document, établi un diagnostic peu flatteur de ma perception du rôle de la Commission des valeurs mobilières du Québec. L'Assemblée nationale ou d'autres instances devraient y apporter une attention et pousser plus loin mon diagnostic. Il faut comprendre que je me suis placé dans la peau d'un investisseur averti et que, malgré les nombreuses démarches que j'ai faites auprès d'organismes et de plusieurs personnes, je n'ai toujours pas trouvé de réponses satisfaisantes à mes questions. Qu'en est-il pour tous les autres investisseurs?

Je partage les préoccupations du ministre d'État de l'Économie et des Finances, qui considère d'intérêt majeur les exigences réglementaires de divulgation pour le marché primaire des capitaux en rapport avec la protection des épargnants. Car, en effet – et ça, M. Chagnon, c'était dans le document de Mme Robic, je ne l'ai pas mis «quote», mais c'était ça qu'on disait – la Loi sur les valeurs mobilières et son règlement d'application forment un ensemble normatif qui affecte quotidiennement la plupart des citoyens. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Gauthier, de la présentation de votre mémoire. J'accorde la parole au député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. M. Gauthier, merci...

M. Gauthier (Pierre): Bonjour, M. Campeau.

M. Campeau: Merci d'avoir pris la peine de venir présenter votre mémoire devant la commission, devant cette commission du budget et de l'administration. Ce que je peux vous dire, c'est que nous allons traiter votre témoignage de la même façon, peut-être pas exactement, mais, en tout cas, d'une façon similaire à la façon dont nous avons traité le témoignage de M. Michaud. Ce que vous apportez ici, c'est que vous faites appel à la Commission des valeurs mobilières pour qu'elle protège l'investisseur. Alors, votre témoignage va être pris en mémoire. Et je pense que c'est là-dessus que nous allons réfléchir pour mieux protéger, suite à votre témoignage et suite au témoignage de M. Michaud, s'il est possible, l'investisseur, l'acheteur, le consommateur de biens financiers. Je vois que vous vous êtes donné beaucoup de peine pour préparer tout ça, beaucoup d'efforts. On voit vraiment que vous n'êtes pas quelqu'un qui abandonne au moindre obstacle, et je pense que ça doit être considéré.

J'aurais peut-être quelques questions à vous poser. Est-ce que, pour vous, c'est plus important de mettre de l'importance sur la mission de la Commission des valeurs mobilières dans son rôle de protéger les épargnants que sur celle d'un développement ordonné du marché, ou si vous voyez ça dans la même veine?

M. Gauthier (Pierre): Je ne sais pas comment vous répondre, M. Campeau, mais je pense que, si vous me laissez 30 secondes, je vais vous répondre. Quand il y a eu des modifications à la loi de la protection du consommateur concernant la location, au tout début, je me battais, je me battais. Il y avait des avocats, Me Valois, ainsi de suite. Puis, à un moment donné, Me Valois m'a dit: Pierre, ils n'ont jamais eu de plainte, ici. Tu dis des choses, ça a de l'allure, effectivement, il faut le divulguer, puis ainsi de suite, mais il n'y a jamais eu de plainte. J'ai dit: Faites attention, le train, il s'en vient.

Or, à peu de choses près – M. Bérubé l'a écrit, comme journaliste – au moment où je parlais, 2,9 % des transactions se faisaient de cette nature-là, M. Campeau. Et, un peu plus tard, deux années plus tard, on était rendu à 13 %, 14 %. Mais là, dernièrement, je lisais, justement en attendant au bureau du vice-premier ministre, que c'est rendu presque à 40 %.

Je veux souligner, parce que c'est important, M. Campeau, que la loi de la protection du consommateur a été modifiée depuis trois à quatre ans, et là ce qu'on dit, c'est qu'on va faire... On s'est entendu. Ils ont travaillé en collaboration avec les gouvernements fédéral et provinciaux «pour se conformer à l'obligation de divulguer le taux de crédit, conformément à l'Accord sur le commerce intérieur – imaginez-vous, là, ça va loin, à travers le Canada – intervenu en janvier 1994. L'entrée en vigueur de l'entente est prévue pour 1997, mais on croit répondre aux besoins des consommateurs...», et ainsi de suite. Donc, l'industrie automobile... Et là on parle de Ford, on parle de crédit de Chrysler. Donc, c'est parti de quelque chose de très anodin, M. Campeau.

Et le Québec a fait sa job. J'ai convaincu l'Office. Mais, après ça, tout le monde s'est attaché au Québec, M. Campeau. Donc, répétez votre question. Je ne veux pas perdre le fil de ce que vous disiez. Mais on est capable de le faire. O.K.? Et ça n'enlève pas le marché. Je vous le dis, Ford s'est adapté, ainsi de suite, Chrysler, les gros. Ils veulent faire des affaires, M. Campeau. Le problème que je dirais qu'ils ont, à l'heure actuelle, M. Campeau, c'est que les contrats sont nuls.

M. Campeau: C'est que...

M. Gauthier (Pierre): Les contrats sont nuls. C'est que quelqu'un qui dirait: Bien, écoute, là, la loi de la protection du consommateur dit ça, voilà mon contrat de Credit Ford; bien, il y a un problème. Et, ça, ils en sont conscients. Donc, peut-être, ce que je reprocherais à l'Office, c'est de tolérer. Mais, encore. Écoutez, c'est Chrysler, c'est Ford, ainsi de suite, comme Air Canada, en fin de compte. Je ne veux quand même pas empêcher le marché, moi. Mais je veux protéger le public. Parce que, justement, ce que vous avez dans un autre article, là, il y a des charges supposément de l'ordre de 400 $ par contrat qui ne sont pas divulguées. On parle de 260 000 contrats qui sont signés annuellement: 100 000 000 $, O.K.? C'est de l'argent. Ce qu'on est en train de dire... On dupe le public.

M. Campeau: Quand vous dites «le public», est-ce que vous faites une distinction entre le consommateur ordinaire et les institutions financières comme la Caisse de dépôt?

M. Gauthier (Pierre): La Caisse de dépôt, dont vous avez été président, c'est la Caisse de dépôt. O.K.? Mais quelqu'un qui investit dans un REER autogéré ou n'importe quoi, que ce soit 5 000 $ ou 10 000 $, se fie à son courtier. Il ne lit même pas ça, un prospectus. Tout le débat que j'ai fait, dans le fond, peut-être que c'est complètement inutile. Les gens n'en ont pas besoin. Donc, simplifions, M. Campeau. Si ce n'est pas nécessaire, donc que tout le processus réglementaire tombe. Les gens, ils ne se mettront pas avec des pancartes à dire: On veut nos prospectus, puis on veut nos règlements. Puis, la Commission des valeurs mobilières, dans le fond, si l'exigence, c'est de déposer des documents, bien, qu'il y ait juste une secrétaire, avec, vous savez, l'affaire pour mettre le temps de la réception, là: Ça a été reçu telle date, et c'est tout, on classe. Mais je pense que c'est plus que ça. Je pense qu'on peut changer des choses. Puis tout le monde peut s'en contenter. Puis, si, dans le fond, tout le monde veut la vertu, c'est-à-dire que le public soit protégé, il n'y a pas de problème. Mais je vais vous montrer quelque chose...

M. Campeau: Avant que vous alliez plus loin...

M. Gauthier (Pierre): Oui.

M. Campeau: ...je tiens à vous faire remarquer que, si la commission ou le ministre d'État de l'Économie et des Finances a accepté de vous recevoir...

M. Gauthier (Pierre): Oui.

M. Campeau: ...c'est parce qu'il voulait bien vous entendre...

M. Gauthier (Pierre): Oui.

M. Campeau: ...qu'il trouvait important de vous entendre, tout comme il trouvait important d'entendre M. Michaud.

M. Gauthier (Pierre): Oui.

M. Campeau: Alors, on va sûrement tenir compte de votre témoignage.

M. Gauthier (Pierre): Mais, monsieur...

M. Campeau: Je veux bien vous expliquer que votre témoignage n'est pas fait pour rien.

M. Gauthier (Pierre): Non, non, non, mais je vous crois. Mais, M. Campeau, je vais vous donner un exemple. Je ne parlerai pas d'Air Canada, je vais parler de Canadian. Ça va être juste, ça va balancer, à soir. Bon. Ici, j'ai un prospectus simplifié provisoire daté du 22 février 1991. Ça, c'était la première fois, M. Campeau, que je voyais ça. Je savais que ça existait d'après la loi, mais c'était la première fois que j'avais connaissance de me pencher là-dessus. Bon. J'aurais pu faire la même critique qu'à Air Canada, là. Mais 105 000 000 $, 12 millions d'actions émises à 8,75 $; M. Campeau, ces actions-là valent 0,15 $ aujourd'hui. Il s'est lavé plus de 103 000 000 $. Flac! Pensez-y. Ce n'est pas la Caisse de dépôt qui a investi là-dedans. Bien, à moins... J'espère. Puis, le point que je soulève, c'est: la Caisse de dépôt, là, je suis persuadé que les vice-présidents ou autres analystes sont aussi compétents que moi, M. Campeau, et les chiffres que, moi, je dénonce, c'est leurs chiffres.

Quand M. Harris a témoigné devant l'Office national des transports, à Hull, il y a trois ans – là, il faudrait que je fouille un petit peu, mais je vais me trouver; j'ai des extraits du «transcript» de cette chose – et M. Harris était sous serment... M. Harris dit: «We had a condition in the pre-merger agreement all along that our board had to have an investment banker's finest opinion. The problem we ran into was a problem with the debt structure. The $9 000 000 000 debt»... Ça, là, c'était la dette combinée estimative de Canadian et Air Canada s'il y avait fusion: 9 000 000 000 $. Ça, ce n'est pas l'addition des dettes déclarées des deux compagnies, là; c'est parce qu'il manquait les contrats de location-exploitation qui n'avaient pas été capitalisés. Mais M. Harris, quand il s'exprime, il dit: C'est 9 000 000 000 $. Puis là je me dis: Il s'est trompé.

À un moment donné, il continue. Harris: «Certainly, I can tell you that $9 000 000 000 is a weighed balance sheet». Puis là Harris continue, une page plus loin dans son témoignage: «It was not in the dark»... Ah, oui! C'est qu'à un moment donné quelqu'un lui dit... L'avocat Low dit: «And you were kept completely in the dark as to know how much that might need to be. I was not in the dark, sir. I knew it could be all the way up to anywhere under the $9 000 000 000 total.»

(21 h 50)

M. Campeau: Oui, je comprends ce que vous voulez dire.

M. Gauthier (Pierre): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Roberval.

M. Laprise: Vous avez parlé des transactions d'Air Canada. Maintenant, de quelle façon la société immobilière pourrait intervenir dans un cas comme ça?

M. Gauthier (Pierre): Bien, j'ai cogné à la porte au tout début. C'est le problème que je vous dirais... O.K., je vais sortir la loi. Je m'excuse de faire ça, là. Je ne suis pas avocat, mais je peux sortir la loi.

D'abord, je pense, ma perception, M. le député, c'est: entre le moment du prospectus provisoire et du prospectus final qui est visé, il y a des analystes qui se penchent, il y a des lettres de «déficience», qu'on appelle – on pourra me corriger – qui sont envoyées, des demandes d'information aux avocats, surtout des émetteurs, et on peut faire des changements. Je pourrais vous montrer...

Moi, à un moment donné, j'ai écrit à M. Fortugno, dans la troisième émission, et puis il y a eu des modifications au prospectus, pour essayer d'encadrer mes points. La Commission a dit que j'étais satisfait. Mais, ça, ce n'est pas moi qui l'ai dit. Mais on a fait des changements. Donc, ça devait être important, M. le député, si un simple citoyen écrit et puis qu'il y a des changements à un prospectus. Bon.

La loi dit ceci: «"information fausse ou trompeuse": toute information de nature à induire en erreur sur un fait important, de même que l'omission pure et simple d'un fait important.» Et il y a des conséquences à ça dans les articles de loi 196, 197, un petit peu plus loin. Bien, je pense que ça accroche, là. «15. Refus du visa». Une des raisons du refus du visa: la protection des épargnants l'exige. Je n'ai pas plus à dire à votre réponse, O.K.?

M. Laprise: Maintenant, s'ils ont vendu 1 500 000 000 $ d'actions, ça veut dire qu'en réalité elles ne valent pas ça, 1 500 000 000 $ comme vous dites. Ça n'a pas cette valeur-là.

M. Gauthier (Pierre): Bien non. Puis, d'ailleurs, lisez l'article du Devoir d'aujourd'hui. Il va probablement y avoir des questions à la Chambre des communes dès lundi. C'est majeur. Et ce n'est pas ça, c'est qu'aussi il y a une harmonisation. C'est que, dans l'article, on harmonise des normes canadiennes par rapport à des normes américaines et, à ce moment-là, on coupe quasiment l'équité de l'ordre de 800 000 000 $, d'Air Canada, d'une claque. Écoutez, si c'est une farce...

M. Laprise: C'est du vol direct.

M. Gauthier (Pierre): Ah! non, non, ne dites pas des gros mots comme ça. Le but, là, ce n'est pas de mettre quelqu'un en prison. Le but, c'est qu'il faut faire des affaires. Moi, je suis d'accord. Je suis consultant en gestion, je vais chercher du financement pour mes clients, puis je veux qu'ils vivent. Mais la divulgation, c'est important, c'est fondamental. D'ailleurs, c'est dans le document, je l'ai dit tantôt, c'est dans mon mémoire. Et, excusez-moi, je reprends le point que je disais tantôt, dans le rapport quinquennal de 1993: «Cette confiance reposera également sur une conviction que l'information offerte sur les émetteurs et leurs titres est complète.» Bon.

Par rapport à ce que je viens de vous dire, est-ce qu'on peut prétendre que l'information pour les investisseurs chez Air Canada était complète – je ne le sais pas – claire – bien, moi, j'ai eu des problèmes – véridique – j'accroche – puis accessible à tous? Bien là je vous l'ai conté, la rubrique, tout le kit, là... Donc, dans le fond, moi, je ne veux pas empêcher Air Canada ou les autres d'avoir de l'argent, mais qu'on oublie la réglementation, à ce moment-là, qu'on laisse tout tomber pour ces gens-là. C'est tout. Je ne veux rien empêcher, moi.

Une voix: Moi non plus.

M. Gauthier (Pierre): Mais qu'on dise aux gens: Bien, pour eux autres, là, ils peuvent faire ce qu'ils veulent. Et, d'ailleurs, on pourrait voir ce qui est arrivé l'année passée. Moi, j'ai de la misère à accepter ça. Ils sont allés chercher 500 000 000 $ dans le public, prise ferme. D'ailleurs, ça a été un échec, hein, «Bay Street, big bungle», là, on pourrait en parler. Ça a été l'enfer pour eux autres. Elles ont perdu de l'argent, les banques. Mais ce n'est pas là qu'est la question. Imaginez la pression que les commissions ont. Les preneurs fermes font tous le deal: c'est 500 000 000 $, c'est annoncé. Il y a un prospectus à approuver pareil. Aie! ce n'est pas drôle. Si j'étais dans La Petite vie : Ce n'est pas drôle. Comment vous voulez? Je me mets à la place de... Je ne sais pas vraiment qui autorise. Mais comment vous voulez? La pression doit être intenable.

D'ailleurs, c'est ce que j'allègue ici. Quand Mme Farrell m'a dit: Les pressions politiques..., elle ne m'a pas dit de qui. Je veux être honnête, là, elle ne m'a pas dit: Le fédéral, le provincial ou n'importe quoi; elle ne m'a pas dit quoi. Puis, quand elle a dit: Les banques..., elle ne me l'a pas dit, non plus. Mais, par contre, vous le savez, les courtiers appartiennent aux banques. Je ne veux pas... C'est marqué, c'est «quoted», je vous l'ai dit, dans le document. Je peux vous le montrer, Le Devoir revient continuellement avec ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Gauthier...

M. Gauthier (Pierre): Oui, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Gauthier, c'est parce que votre temps, déjà...

M. Gauthier (Pierre): Bien, je m'excuse, je m'emballe. Puis j'aime ça, puis je veux vous parler, puis je vous aime, puis tu sais...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça paraît, ça paraît, on sent tout ça, M. Gauthier.

M. Gauthier (Pierre): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais c'est parce que je voudrais laisser un peu de temps aussi à l'opposition pour questionner.

M. Gauthier (Pierre): Bien oui! Je veux surtout entendre l'opposition.

M. Chagnon: Il ne reste plus de temps. Vous avez tout pris.

M. Gauthier (Pierre): Mais prenez-le, M. Chagnon.

M. Chagnon: Le gouvernement et vous-même, vous avez tout pris. Mais je voudrais quand même signifier, M. Gauthier, que la situation que vous évoquez est tout à fait catastrophique, dans le fond.

M. Gauthier (Pierre): Je le pense.

M. Chagnon: Et, lorsque vous dites que la Commission des valeurs mobilières doit être beaucoup plus vigilante et diligente, je dirais, que ce que vous avez connu, j'ai l'impression qu'il faudra faire en sorte que, dans la modification de la Loi sur les valeurs mobilières, nous tenions compte de ce genre de précisions pour faire en sorte de protéger les droits des investisseurs, qu'ils soient petits, moyens ou gros.

Simplement une question. Je sais que je vais me faire pousser dans le dos pour conclure. La proposition est faite, c'est plus qu'une proposition, mais le tribunal d'arbitrage mis sur pied par l'ACCOVAM et par la Bourse, vous en pensez quoi? Rapidement parce qu'on est un peu pris dans le temps. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Gauthier (Pierre): Écoutez, M. Chagnon, je trouve que ça doit bien se faire. Ce n'est pas là qu'est l'histoire. Mais, si le leadership de la Commission est en conséquence d'instaurer, on pourrait dire un ombudsman de la Commission, ce n'est pas nécessaire. Je vous dis que ça fait six ans que le Protecteur du citoyen enquête là-dessus. J'ai hâte de l'entendre, là. Moi, je dis que, si le voeu des gens est de dire: O.K., il faut que ce soit transparent... Peut-être que le cas d'Air Canada est unique. C'est quelque chose semble-t-il d'assez, d'assez... Je ne le sais pas. Mais lisez aussi ce qui est... J'ai mis des textes en annexes, et vous allez vous apercevoir, entre autres, si vous allez dans le texte «Regulators plans raise lawsuit fears», «Regulators want honest assessment»... Ça, Mme Farrell m'avait expliqué – c'était à peu près à l'époque, un an et demi après – qu'il y a des commissions. Ils se font des meetings. Et ils avaient demandé des divulgations supplémentaires – M. Paul Guy est peut-être parti; peut-être qu'il pourrait l'expliquer – c'était la volonté. Mais regardez le texte. Les administrateurs avaient peur des poursuites.

Je pose la question avec ce qui est dans le journal Le Devoir aujourd'hui, et, ça, ce n'est pas Le Devoir qui le dit, c'est la note 14 des états financiers d'Air Canada, par voie de note. Écoutez, je «vas-tu» aller voir mon avocat et dire: Écoutez, j'ai investi dans ... Ce n'est pas ça, le but, monsieur. Il faut dire: «The buck stops here.» Le rétroviseur, c'est peut-être des choses pas jolies, mais, si on se place dans l'intérêt public, on est dans la voiture avec le peuple, et puis là on avance, et le meilleur est à venir, monsieur.

Et je dis que la Commission des valeurs mobilières et vous, vous avez un rôle à jouer là-dedans, vous pouvez la faire rayonner, MM. les députés, malgré ce que j'ai dit. Et ce que je n'ai pas ajouté, c'est que j'ai toujours fait ça à titre gratuit. Ça m'a coûté des frais, c'est l'enfer. Mais je peux vous dire une chose: Je veux collaborer. Si on a besoin de ma participation, je tends la main autant au ministre, autant au nouveau président de la Commission des valeurs mobilières. Si on veut travailler dans l'intérêt du public, ma main est tendue, M. le député.

M. Chagnon: Je vous remercie, moi, M. Gauthier. Je pense que votre message est entendu. Et votre offre de services aussi devrait être écoutée. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. Gauthier, d'avoir fait part de votre témoignage avec beaucoup de ferveur, beaucoup de conviction. Et les membres de la commission en tiendront compte à bon escient.

M. Gauthier (Pierre): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bienvenue. Je vais suspendre temporairement les travaux.

(Suspension de la séance à 21 h 59)

(Reprise à 22 h 3)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): J'inviterais M. Wright à présenter son mémoire et d'abord à présenter les gens qui l'accompagnent. On m'a informé que M. Wright désirait présenter son mémoire en anglais, mais on pourra poser toutes les questions en français. Donc, à vous, M. Wright.


Groupe Investors

M. Wright (Terry): Merci, M. le Président, et bonsoir à toutes et à tous. Je sais que c'est une longue journée de travail qui s'achève pour vous ce soir. Nous vous remercions de nous donner l'occasion de faire valoir notre point de vue. Mon nom est Terry Wright, je suis premier vice-président aux affaires juridiques et secrétaire général du Groupe Investors.

Based in Winnipeg, I have not had much opportunity to speak French. Therefore, I brought a couple of colleagues along with me, this evening, and I will turn much of my presentation to the gentleman on my right, Maurice Lejeune, who is the president of our Québec subsidiary Les Services Investors ltée. Also joining me, on my left, is Jean-Claude Bachand, counsel at Byers, Casgrain, in Montréal.

But I would like to open with a few remarks about our company. Investors Group is a Winnipeg-based personnal financial services company with assets under administration exceeding $30 000 000 000. Investors Group carries on business throughout Canada from 98 financial planning centers, with over 31 000 sales reprensentatives, the largest direct sales force in Canada, and a staff of over 14 000 people.

With mutual fund assets in excess of $22 000 000 000, Investors Group holds the largest market share in an industry that has now surpassed $170 500 000 000. It is important to note that the most significant development in the securities industry in Canada, indeed the entire financial services industry, over the past five years, has not been in the area of corporate finance, but rather in a rapid growth in mutual fund investing by new and relatively unsophisticated participants.

Our estimates show that in the last five years, the percentage of Canadian households investing in mutual funds has grown from less than 10 % to over 25 %. This has been reflected in the staggering growth of Canadian mutual fund assets in the same period, which have grown from $50 000 000 000 to $170 600 000 000. We know from our own experience that many of these new participants lack the experience of traditional investors and, in our view, require greater safeguards than those that presently exist. The traditional principles of investor protection need to be enhanced by higher standards of consumer protection. I am now pleased to let Mr. Lejeune continue.

M. Lejeune (Maurice): M. le Président, membres de la commission, vous avez déjà en main copie de notre mémoire. Donc, mes commentaires se limiteront à résumer ce dit mémoire.

Comme le disait M. Terry Wright, je m'adresse à vous ce soir en tant que président des Services Investors ltée, filiale du Groupe Investors au Québec. Notre siège social est situé à Montréal. Le Groupe Investors dispose au Québec de plus de 16 centres de planification financière où travaillent 488 représentants, aidés par plus de 100 employés. À eux tous, ils gèrent des capitaux au Québec dépassant les 2 400 000 000 $. Le Groupe Investors est également un important fournisseur d'hypothèques résidentielles au Québec, avec des encours totalisant plus de 340 000 000 $.

Dans notre présentation d'aujourd'hui, nous souhaitons soulever un certain nombre de points qui nous apparaissent devoir faire l'objet d'une attention particulière et que je me permettrai de vous énoncer rapidement. Nos préoccupations générales touchent l'avenir de la distribution des produits financiers et soulèvent la question de la réglementation par fonction. Viennent ensuite les préoccupations reliées à la protection de l'investisseur, qui nous apparaissent liées à des éléments tels que l'exigence de résidence, l'information sur les produits et les pratiques commerciales. Dans notre mémoire, trois points retiennent particulièrement l'attention: la planification financière, la réglementation des intermédiaires et le projet de commission nationale des valeurs mobilières.

Pour revenir aux perspectives d'avenir dans la distribution des produits financiers, le Groupe Investors est très préoccupé par l'impact qu'aurait la concentration de l'avoir des ménages entre les mains de quelques joueurs dominants. Même s'il y a bien des avantages à avoir des institutions fortes comme les grandes banques canadiennes, il est aussi bénéfique d'avoir un système financier qui permet aux autres acteurs du secteur financier de prospérer et de concurrencer les banques.

En réalité, les institutions ne provenant pas du domaine bancaire sont souvent la principale source d'innovation et offrent de meilleurs services que les banques, à des prix plus concurrentiels. Pourtant il est difficile de concurrencer des organismes bénéficiant d'importants avantages structurels. À vrai dire, les intermédiaires de marché qui ne sont pas issus du milieu bancaire sont de plus en plus préoccupés par leur capacité de survie, particulièrement si les législateurs continuent à offrir de plus grands pouvoirs aux banques ou refusent de reconnaître et de considérer le pouvoir et l'influence que les banques possèdent déjà. Les banques étant de juridiction fédérale, la définition de leurs pouvoirs ne devrait pas excéder leurs activités traditionnelles. Les provinces devraient appliquer la même législation sur tous les produits financiers, qu'ils soient offerts par les banques ou bien par les intermédiaires de marché.

(22 h 10)

Le Groupe Investors croit que le système financier canadien a évolué. Il a évolué au point où le gouvernement devrait maintenant considérer une réglementation par fonction. On devrait laisser aux provinces, selon leurs pouvoirs constitutionnels actuels, la réglementation par fonction des questions contractuelles, comme les valeurs mobilières, les hypothèques, les assurances, etc., alors que le gouvernement fédéral devrait continuer de réglementer les activités bancaires dans leur sens traditionnel. Des produits financiers similaires, tels les fonds communs de placement, qui sont commercialisés en concurrence les uns avec les autres, devraient faire l'objet d'une réglementation identique.

Dans le même esprit, il est particulièrement important d'examiner les facteurs favorisant une saine concurrence entre les acteurs présents sur le marché, faute de quoi des mesures législatives conçues pour promouvoir la concurrence risquent d'avoir les effets contraires. Il apparaît donc indispensable que les règles du jeu soient harmonisées pour tous les types de distribution afin d'assurer une réelle concurrence.

En ce qui concerne la protection de l'investisseur, le Groupe Investors estime que l'exigence de résidence pour les intermédiaires de marché constitue un élément important dans la livraison de services financiers personnels. En effet, les consommateurs investisseurs sont mieux servis par des personnes d'expérience et compétentes intégrées à leur communauté, et qui, par le fait même, sont en mesure de bien connaître leurs clients et leurs besoins en matière d'investissement. D'autre part, l'exigence de résidence garantit davantage la supervision efficace de la négociation des valeurs mobilières dans chaque juridiction. Elle sauvegarde également le recours civil efficace pour les investisseurs. Elle permet la création d'emplois à l'intérieur de chaque province. Enfin, l'exigence de résidence aide les législateurs à maintenir le niveau élevé de compétence pour les intermédiaires non résidents qui font des affaires dans les provinces.

Au sujet de la protection de l'investisseur, je mentionnais tout à l'heure l'importance de la qualité de l'information sur les produits. Il faut que le consommateur soit bien informé des caractéristiques essentielles et des risques encourus avec chaque produit ou service acheté. Quant aux pratiques commerciales, des comportements corrects doivent être privilégiés pour tous les types de produits financiers, alors que les ventes liées, l'utilisation de données confidentielles à l'insu du client et les conflits d'intérêts non révélés ou nuisibles au client doivent être bannis.

Le secteur de la planification financière nous préoccupe tout particulièrement. Prodiguer des conseils de planification financière à nos clients est la pierre angulaire de notre travail. Les représentants du Groupe Investors font la partie du secteur conseil, étant donné les qualifications que nous exigeons et la formation que nous leur fournissons. La planification financière a toujours été le fer de lance du développement des affaires du Groupe Investors. Nous la prenons vraiment au sérieux et veillons à rendre l'ensemble de nos représentants aptes à prodiguer des conseils judicieux. Nous croyons que nos représentants enregistrés selon la loi des valeurs mobilières devraient pouvoir continuer de se présenter comme planificateurs financiers, puisque chacun ou chacune exerce sa profession à partir d'une région ou d'un bureau du Groupe Investors. En d'autres termes, la réglementation de la planification financière n'a pas besoin de s'appliquer aux personnes qui sont déjà soumises à un organisme gouvernemental, une commission ou un organisme d'autoréglementation.

Parallèlement à la question de la planification financière, je voudrais aborder rapidement la réglementation des intermédiaires. Il va sans dire que l'élargissement du système de distribution des services financiers incite les responsables de la réglementation à se préoccuper des questions de compétence et de protection des investisseurs. Même si les systèmes de distribution offrent de plus en plus de produits par l'entremise d'un seul intermédiaire, il est difficile de concevoir que cet intermédiaire unique puisse être compétent dans tous les produits offerts.

Cependant, l'intermédiaire unique peut recourir à d'autres ressources offrant des services spécialisés pour des produits particuliers. De cette façon, le consommateur est servi par une personne ayant fait preuve de ses connaissances et compétences devant un organisme de réglementation provinciale ou un organisme d'autoréglementation. Le Groupe Investors est d'avis que les divers produits financiers sont mieux réglementés par les autorités provinciales concernées travaillant de concert pour constituer un marché national efficace et ainsi garantir la protection du consommateur.

Ceci m'amène, naturellement, à notre dernier point, soit le projet de commission nationale des valeurs mobilières. Le Groupe Investors appuie fortement l'objectif d'harmoniser à travers le Canada la réglementation sur les valeurs mobilières, mais soutient qu'il y a d'autres moyens d'atteindre cet objectif que de passer par les transferts draconiens de juridiction qu'impliquerait une commission nationale des valeurs mobilières. L'un de ces moyens est la coopération interprovinciale, telle qu'illustrée par les importantes réalisations des autorités canadiennes en valeurs mobilières au cours des dernières années. Celles-ci ont permis l'élimination de certains irritants du système actuel et lui ont donné, par une plus grande harmonisation, l'efficacité qu'on lui connaît aujourd'hui. C'est pourquoi le Groupe Investors n'endosse pas la proposition du gouvernement fédéral dans sa forme actuelle, mais appuie plutôt la poursuite des efforts des autorités canadiennes en valeurs mobilières pour harmoniser et simplifier tout le système actuel.

Je m'explique. Même imparfaite, la structure décentralisée actuelle fonctionne généralement bien. Le marché canadien des capitaux est efficace et dynamique, et notre système de réglementation est reconnu comme l'un des plus efficaces au monde. La majorité des éléments considérés comme des facteurs d'inefficacité sont plutôt de simples irritants du système et peuvent être corrigés par une meilleure coordination des autorités des valeurs mobilières.

Par exemple, de grands progrès ont été réalisés au cours des dernières années, à travers les directives nationales, sur des sujets aussi divers que le dépôt national, l'approbation accélérée de prospectus ou le concept de juridiction désignée. Prochainement, la mise en place du système SEDAR permettra, par dépôt électronique, de satisfaire en une seule fois aux exigences de toutes les juridictions.

De plus, le système actuel respecte la diversité du marché canadien des capitaux tout en s'adaptant aux variations de niveaux d'activités de financement dans les différentes régions. Avec des autorités proches de leurs marchés respectifs, le système actuel sert mieux les besoins des investisseurs consommateurs tout en favorisant l'expertise provinciale. Finalement, les enjeux de l'information et de la protection de l'épargnant sont très différents des questions de solvabilité des institutions qui préoccupent les autorités fédérales. Le rôle des banques comme intermédiaires et agents du processus financier soulève des questions de conflits d'intérêts que nous croyons pouvoir être mieux gérées par des autorités relevant de plusieurs juridictions.

Notre expérience nous démontre que les nouveaux investisseurs n'ont pas l'expérience des investisseurs aguerris. Et nous sommes d'avis que la situation exige davantage de mesures de protection que celles qui existent présentement.

Compte tenu de la croissance du marché, le travail de votre commission arrive à point. Il faut le poursuivre avec toute l'énergie nécessaire afin d'en arriver à mettre en place des normes de protection de l'épargnant adaptées aux exigences de la réalité d'aujourd'hui. Mesdames, messieurs, merci.

(22 h 20)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Lejeune et M. Wright de votre exposé, de votre présentation. J'accorde la parole au député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. M. Wright, merci d'avoir pris la peine de venir nous rencontrer ici, ce soir, si tard, et puis peut-être si loin. On apprécie beaucoup votre présence.

M. Lejeune, la clarté de votre exposé est exemplaire. Quand vous parlez, on ne se demande pas si c'est peut-être. De la façon dont vous exposez le sujet, on voit tout de suite si c'est oui ou non. Et, franchement, comme mes collègues, je me demande si vous avez une formation d'avocat ou si vous ne l'avez pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lejeune (Maurice): Ha, ha, ha! Mieux que ça, M. Campeau.

M. Campeau: Non, c'est parce que, aujourd'hui, j'ai dit, au sujet des avocats, qu'il y avait, comme dans le monde, comme partout dans la nature humaine, des bons avocats et des mauvais avocats. Il y en a qui cherchent les problèmes, d'autres cherchent les solutions. Souvent, certains sont très clairs, et on comprend très bien ce qu'ils veulent dire; d'autres, on comprend moins, comme on retrouve dans toutes les professions. Mais, vous, là, mon collègue d'Abitibi-Ouest m'a présenté une phrase tout à l'heure qui s'appliquerait bien à vous, c'est un adage: Les choses simples s'expriment facilement, puis les mots pour le dire arrivent aisément. C'est votre cas.

M. Lejeune (Maurice): Vous savez, j'ai l'avantage d'être accompagné de deux avocats de profession, alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lejeune (Maurice): ...je suis bien entouré. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous êtes surveillé.

M. Lejeune (Maurice): Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Et l'adage en question, c'est une mauvaise citation de Boileau.

M. Campeau: Alors, je me demandais... Vous parlez des exigences de présence sur le territoire, là. Est-ce que ça a encore du sens, alors que les moyens de télécommunications permettent de transiger à distance? Est-ce que vous y tenez quand même aussi fort ou si vous y tenez encore d'une façon aussi...

M. Wright (Terry): M. Campeau, if I could answer, I believe that it does. And I think it falls within the theme that we have tried to put forward in the mutual fund world where we're dealing largely today with more unsophisticated investors than we've ever had. And, notwithstanding the electronic advances that we have made, our theme is that, where you have registered people making their livelihoods day in, day out in the communities where they have to be present, it brings a market discipline to the business practices that will go on, and it also gives the investor, the consumer a more effective way to get a complaint dealt with fairly. If you allow commerce technologically across the country or internationally without having an attachment to the community, how does one get effective recourse under our provincial court systems as they exist today? You know, and this is one of our platforms on the national securities commission, if there are no representative offices in the various provinces where people have to bring their actions these days, how do you get effective recourse? I don't know.

You can sit in Moosomin, Saskatchewan, and take a complaint against somebody selling from Toronto, but how does that person get effective recourse? He can't bring an action in the courts of Saskatchewan; there's no assets there to attach. Should he be forced to go to Ontario and try and bring reciprocal enforcement of proceedings? I don't think so, with the particular... We're not in the corporate finance world; we're in the day-to-day personal finance world. People are talking of $1 000, $2 000, $5 000. And we think that it brings an effective market discipline to the participants in the world we live, if they must be registered, have assets and live in the communities where they intend to conduct their business.

M. Lejeune (Maurice): Pour compléter, si vous permettez, M. le Président, nous vivons dans une industrie qui est en pleine évolution. Il y a quelques années, nous partions d'un volume national de l'ordre d'environ 30 000 000 000 $ ou 40 000 000 000 $. L'industrie est d'environ, présentement, 160 000 000 000 $, 170 000 000 000 $. Nous nous dirigeons vers un volume national de l'ordre d'environ 400 000 000 000 $. Les contraintes, ce qu'on peut appeler contraintes, au niveau soit des commissions des valeurs mobilières ou des autres autorités réglementaires, on n'a aucun problème à vivre avec ça parce qu'on a des règles à l'interne qui nous permettent d'avoir des standards de qualité, d'autoréglementation. Alors je ne sais pas si ça répond, M. Campeau, à votre question.

M. Campeau: Oui, oui, ça répond très bien. Revenons, si vous le voulez, avec la question que je posais tout à l'heure à ceux qui vous précédaient, d'autres qui sont venus plus à bonne heure. Est-ce que, vous, pour la commission nationale, quand le ministre des Finances Paul Martin dit qu'on devrait avoir une commission nationale au-dessus de toutes les provinces... Je comprends que vous dites non, que ça devrait être réglementé par chacune des provinces. Mais M. Martin disait qu'il avait consulté – tout à l'heure, je disais «les gens importants», en fait, c'était une boutade – les principales institutions ici, au Québec. Est-ce que vous vous avez été consultés?

M. Lejeune (Maurice): Non, nous n'avons pas... Je parle en mon nom personnel. Moi, je suis président de la société qui est responsable des activités au Québec et je n'ai pas été consulté.

M. Campeau: Est-ce que ça voudrait dire que, pour M. Martin, Investors, ce n'est pas assez important?

M. Lejeune (Maurice): Je ne sais pas si le siège social, à Winnipeg...

M. Campeau: Bon, je peux passer quand même à une autre question, là. Go ahead.

M. Wright (Terry): If you want, on the process of consultation, we were not consulted, in Winnipeg, as a corporation. I have been to Ottawa and talked to members of the Department of Finance on the issue of a national securities commission, and with everybody I have talked to, both provincially and federally, I have suggested that the process of this bilateral negotiation that appears to be going on is not the proper process. There are a multitude of issues involved in this wholesale transfer of jurisdiction, and they deserve a full, true, and proper debate. Those comments have been echoed both by my president, to his speech at our annual meeting in April. They were also echoed by Mr. Gratton at the annual meeting of Power Financial which followed in early May. And I think that if you talk to any of the provincial people, as I do, across this country, the lack of a proper debate on this issue is the thing that is probably upsetting people the most.

M. Campeau: Alors, revenons, si vous voulez, un seul organisme... Les règles d'éthique dont vous parlez dans votre rapport, certaines règles d'éthique, est-ce qu'elles devraient être établies par un seul organisme ou si on devrait tâcher d'harmoniser le plus possible?

M. Bachand (Jean-Claude): Vous faites référence à un point précis, M. le député, de l'exposé de M. Wright? J'essaie juste de...

M. Campeau: Non, à un point dans son mémoire, après lecture. On parle de règles d'éthique qui devraient être établies. En fait ça revient à la même question qu'auparavant. Si vous dites que ça devrait être des commissions provinciales, bien évidemment, les règles d'éthique vont être établies par chacune des provinces, parce que vous allez chercher à promouvoir une certaine harmonisation parmi les provinces, pour les règles d'éthique?

M. Lejeune (Maurice): Il va de soi que nous favorisons l'harmonisation. Nous sommes tout à fait à l'aise avec les règles d'éthique ou l'environnement qui nous est proposé, si vous voulez, par les commissions de valeurs mobilières ou autres autorités réglementaires qui réglementent notre commerce. Comme j'ai dit plus tôt, nous sommes tout à fait à l'aise avec ce genre de situation, d'autant plus que nous avons des standards relativement élevés.

M. Campeau: Ça va.

Une voix: You want to add anything to that?

M. Wright (Terry): No.

M. Campeau: Merci. Merci, M. le Président.

(22 h 30)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Je vous remercie beaucoup, M. le Président, et je remercie le Groupe Investors de sa présentation et de son mémoire et de la présentation de M. Wright et de M. Lejeune. On dit ici que votre siège social est à Winnipeg, évidemment, mais, à Montréal, vous êtes à quel endroit? J'ai l'impression que vous êtes dans le centre-ville, vous.

M. Lejeune (Maurice): Effectivement, dans le centre-ville.

M. Chagnon: C'est bien ce que je pensais. Des citoyens de mon comté.

M. Lejeune (Maurice): On se rapproche de l'argent, M. le député. Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Bien, c'est ce que je me disais. Je savais que, quand vous vouliez être en affaires, il fallait que vous soyez quelque part autour.

M. Lejeune (Maurice): Mais ça n'empêche pas... Si vous permettez, M. le député, nous sommes fiers de pouvoir dire que nous avons une distribution tout à fait équitable de nos directions régionales à travers le Québec. Et, ça, ça comprend l'Abitibi, ça comprend le Saguenay–Lac-Saint-Jean. Nous avons une présence dans le Bas-du-Fleuve, la Mauricie.

M. Chagnon: Les Bois-Francs?

M. Lejeune (Maurice): Nous sommes à Sherbrooke. Alors, ce que je veux dire, c'est que nous sommes près, nous pensons être près du marché et nous avons une présence importante à travers tout le réseau québécois.

M. Chagnon: Et je vous en félicite.

M. Lejeune (Maurice): Merci.

M. Chagnon: M. le Président, ceci étant dit, Mr. Speaker – je ne t'ai pas souvent appelé comme ça – I would like, first of all, to welcome Mr. Wright to be here tonight, in this National Assembly. I know that you are coming from Winnipeg, and it's a long way from here. We really appreciate the fact that you are here with us tonight.

M. Wright (Terry): Merci beaucoup.

M. Chagnon: And, may I say also that both the Government and the Opposition are sharing your view in terms of what you see in the question of the national securities commission. We do believe that sometimes, I should say, we feel that we are alone to think the way we think here. And it's obvious that we are very happy to hear and to understand that people from other provinces are sharing what we see and what we believe. And when you write, in the letter you just sent us, at the article 8: «Regulation of securities, constitutionally, is a provincial matter and has worked well throughout our history without significant problems», we do think the same way. And when you conclude with saying that «unilateral action by one or more jurisdictions without a countrywide solution is not a desirable result and we would urge you to support providing the Canadian securities administrators with the appropriate level of resources and encouragement to fulfill their mandate, and create a unified harmonization of securities laws throughout the country», we do share the same thing.

But we hope that in the securities commission, in Winnipeg, for instance, and also in other provinces... And I know personally, because I have spoken to people from Alberta and B.C., that they are following your example and they are believing that the principles that we are fighting for here are shared not only by you in Winnipeg, but also by other people, in B.C. and Alberta, for instance, and probably somewhere else in this country. But could you say a few words concerning this question which is particularly important here not only these days, but also for the workable vision not only of this country, but from every province in this country, I guess?

M. Wright (Terry): Thank you. I have actually traveled this country a fair amount in the last few months and just two weeks ago I was in Vancouver for a meeting that took place with representatives from Manitoba, Saskatchewan, Alberta and B.C. It was not really politically attended. It was mostly the administrators and some of their staff, and members of the IDA, and local Bar professionals, and the like. But the consensus really sympathizes with the views that you've expressed, the views that I outlined in my letter of March 22nd, which I had sent across the country. And I believe I sent it to selective people in the Federal Government. There was much support in response to that letter, from all across the country, as to the views expressed there.

Ultimately, our company cannot make this decision, but we are very serious in the views that we have put forward. We feel that the Canadian securities administrators have made great strides in the last couple of years, have worked harmoniously together. There have been a number of achievements that certainly have been made. There are a number of things on the drawing board that they would like to achieve. And there are some very important issues in our mutual fund industry along with the Stromberg Report and the Hoyt Committee in Québec that we feel must be put forward. And we don't want this debate to sidetrack those issues, because we think they're very important and timely in our particular industry. So, reflecting even a few months later than when I wrote that letter in March, we still are of the same view. We think there's a lot of strength in the interprovincial relationships that carry on, and we feel that that's the preferable way to go at this point. And I know there is a lot of support for those views across the country.

M. Chagnon: Even in Ontario?

M. Wright (Terry): Maybe there is one exception.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Well, obviously, we do believe that the only province which should profit from this national securities commission could be Ontario, and every other province as well would pay a hard price for that kind of, I would say, experience. That's why we are believing and we will fight for not only the existence, but the harmonization of our regulation in every provincial securities commission, as we do work right now in the Québec Securities Commission.

I have some other questions concerning your paper, comme, par exemple, la question qui touche la résidence et... Well, you won't mind if I transfer from English to French...

M. Wright (Terry): No, sir.

M. Chagnon: ...as you could see, or as you... La résidence: «Le Groupe Investors estime que l'exigence de résidence pour les intermédiaires de marché – M. Lejeune – constitue un élément important dans la livraison de services financiers personnels pour les raisons suivantes...» Et là vous en énumérez cinq – page 3, Mr. Wright. Les cinq raisons que vous mentionnez sont contestées par d'autres groupes qui sont venus ici, en nous disant que, de toute façon, la condition de la résidence est secondaire, compte tenu des facilités électroniques, des moyens de communication électroniques et même virtuels que nous connaissons aujourd'hui. Comment vous réagissez à ça?

M. Lejeune (Maurice): Bien, vous savez, il y a encore un volume extrêmement important de fonds mutuels ou d'autres véhicules financiers, qui se font par l'entremise d'une vente et qui résultent d'une planification financière faite par un représentant qui est formé. Et, ça, ce sont des choses que nous vivons, nous, quotidiennement. Et je pense que demain n'est pas la veille où on va voir, si vous voulez, les volumes se transférer du point A au point B. Je pense que ça va prendre beaucoup plus de temps que ça.

Des gens avant nous ont évoqué l'existence d'Internet. On n'est pas étranger, on est très sensible à l'évolution d'Internet, mais, comme tout le reste des intervenants dans le secteur d'activités, nous sommes aussi aux premiers balbutiements de ce nouveau phénomène électronique. Nous allons vivre avec, nous allons évoluer avec ce phénomène, mais on n'est pas encore rendu là. Nous avons des représentants à travers le Canada, à travers le Québec, qui, eux, ont une clientèle, et il s'agit de parler à cette clientèle pour voir à quel point ils reconnaissent l'importance de la personne qui leur fournit des conseils au niveau financier, au niveau de l'organisation, de la planification de leur patrimoine.

(22 h 40)

Il est intéressant de voir des gens qui viennent chez nous comme clients, qui commencent avec des épargnes de 5 000 $, 10 000 $, 50 000 $, qu'on voit évoluer au fil du temps et qui atteignent une autonomie financière. Ça ne s'est pas fait en activant des boutons; ça s'est fait par le biais de la planification, de la patience, des investissements sages et de la confiance qui existe entre un représentant et un individu. D'ailleurs, nos valeurs fondamentales y font référence de façon très éloquente, et il s'agit de l'intégrité, il s'agit de la qualité. Et nos normes, nos standards sont là pour le justifier et le prouver.

M. Wright (Terry): If I may... just one add-on. I think if you look at number 1 of the provisions... There's two hallmark principles to me in securities regulation and that's: know your client and suitability of investment. And whatever technological age we get into... We are now into the Internet, you have a worldwide communication field. And I know this question has come up here earlier and how to regulate in that environment. But if those are the hallmark principles we started from, how far are we going to move? You move one provincial border and you can go all over around the world. And I don't know, on the electronic dissemination or distribution of securities, how you fulfill those obligations and responsibilities if you are not dealing face to face with your client.

M. Chagnon: Sorry, Mr. Speaker. But you have asked yourself a very important question. How to regulate a virtual environment? We have to work on this question and we feel very bad about it.

M. Wright (Terry): Well, you know, I think a provincial regulator has a responsibility to look after its residents. And you come up with a code of regulation, and you publicize that, and you operate with it, and your residents know what that is. And if they choose not to adhere to that system, then I'm not sure that you have an obligation to those people. So, whether it's a... Everybody's registered, and up until this time, we've not been able to advertize the fact that we have a stamp of approval from a local securities commission, but maybe that's something we have to think about. We hold out those people who we've now approved as being able to deal with our publics, and if you go beyond that list, well, you do so at your peril. But, I don't know... You're right, it's an open question, it's a tough one and...

M. Chagnon: It's not a simple question.

M. Wright (Terry): Absolutely not.

M. Chagnon: La question concernant les intermédiaires de marché, mais surtout la «désintermédiatisation» des marchés... C'est la quatrième fois que j'essaie de le dire.

Une voix: Tu vas finir par l'avoir.

M. Chagnon: Je vais finir par l'avoir, désintermédiation... Président Martel, je vais prendre un cours. Désintermédiation du marché...

Une voix: C'est ça.

M. Chagnon: Ah! Je l'ai eu! Il y a un «s» que je mettais quelque part là-dedans, je ne sais pas pourquoi. Mais ça sera enregistré pour le restant de nos jours et puis même après. La désintermédiation du marché, actuellement, dans le marché des valeurs mobilières, prend une signification de plus en plus grande, et comment, chez vous, vous voyez ça? Quelle est la protection des investisseurs, dans un cas comme celui-là, qui vous apparaît comme étant plausible? M. Lejeune.

M. Lejeune (Maurice): Oui, je crois que la Commission des valeurs mobilières du Québec a institué une commission qui a pour but justement d'étudier toute cette question. Il serait malvenu de ma part d'anticiper des conclusions de cette commission. Soit dit en passant, nous favorisons évidemment une capitalisation la plus importante possible, une couverture d'assurance, etc. Il y a une chose qui est importante, à la fin de la journée, c'est la protection de notre clientèle. Et, si le public n'est pas bien protégé, eh bien, c'est tout le monde qui va payer la note. Encore une fois, je reviens à nos standards. On a des vérifications internes qui se font par des groupes du siège social, nous en avons à l'interne, et tout ça c'est dans le but de protéger le public. Et qu'on appelle ça harmonisation, désintermédiation, quelque soit le terme, c'est le client, en fin de course.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais remercier le Groupe Investors d'avoir répondu à mes questions. Je n'en ai effectivement plus d'autres.

I'd like again to thank Mr. Wright for his trip and I hope he will have a good trip back to Winnipeg. I feel his presentation was very interesting and we have appreciated it, not only his participation because of what he said, but we have appreciated his participation, point.

Je voudrais aussi remercier M. Lejeune et M. Bachand de leur participation. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Mr. Wright, I'd like to thank you for contributing to our discussions, particularly since your Group's name has almost become a household word in every middle-class Canadian home. I have three questions, one directed mostly at every one of you. I'll address the first one to you. Where do you stand on this issue that we've been discussing on the disclosure of salaries for administrators and senior management?

M. Wright (Terry): In which sector, monsieur?

M. Beaulne: As part of the requirements of the Securities Commission.

M. Wright (Terry): For public companies or...

M. Beaulne: For public companies. Yes.

M. Wright (Terry): ...for the Securities Commission? Well, we really haven't taken a stance on public disclosure at crown agencies. I know the trend across the country is that it is moving in that vein. I guess that, since there is a requirement both at the public and company level, and it seems to be coming the trend, I don't see why it really should be treated any differently than what public companies are required to do in the trend I see across the country. You know, if it's valid in one sector of the economy, I sense that it's valid in the other. If the thrust is for accountability and a public disclosure, you know, either whether the taxpayer is supporting the agency or the shareholder, there's still an element that seems to me of public disclosure that becomes worthy.

M. Beaulne: Thank you. Ma prochaine question, je l'adresserai à M. Lejeune. M. Lejeune, dans votre présentation, vous avez fait abondamment état de la nécessité de maintenir la juridiction provinciale en matière de contrôle des valeurs mobilières. Mais vous avez également dit qu'il était souhaitable d'avoir une harmonisation entre les différentes juridictions. J'aimerais savoir quels sont les principaux éléments d'harmonisation que vous avez en tête.

M. Lejeune (Maurice): I think you should be answering the question.

M. Bachand (Jean-Claude): M. le député, je pense que ce sont tous les éléments d'harmonisation qui ont été déjà mentionnés entre les administrateurs de la Commission des valeurs mobilières pour rendre le processus d'appel à l'épargne le plus simple et le plus flexible possible. On a parlé du dépôt national, de la juridiction désignée, de l'examen accéléré des prospectus et surtout du système électronique d'envoi des données, qui feront, encore une fois quand ça fonctionnera, cet automne ou l'année prochaine, que vous ne serez pas obligé d'envoyer des documents à 12 commissions, à 12 endroits différents. C'est le genre d'harmonisation dont on parle et qui fonctionne relativement bien, actuellement.

M. Beaulne: Merci. La troisième question s'adressait à vous, à qui je souhaite une bienvenue tout à fait spéciale, puisque votre présence ici me rappelle les bons moments que nous avons partagés dans le merveilleux monde de la finance, au moment où vous étiez secrétaire général du Montréal Trust. M. Lejeune a mentionné qu'il était plus prudent et plus sage pour la protection des investisseurs et du public que l'on maintienne une saine compétition entre les institutions financières et que, par conséquent, il n'était pas souhaitable que l'on élargisse davantage les zones d'interférence des banques.

(22 h 50)

Je vous pose la question à vous parce que vous avez justement été impliqué dans le transfert de la charte du Montréal Trust d'une charte fédérale à une charte provinciale, parce qu'à l'époque plusieurs institutions financières voyaient au Québec un climat de décloisonnement des institutions financières qui leur semblait attrayant. Alors, je me demandais jusqu'à quel point le climat, je dirais, l'environnement favorable au décloisonnement des activités des institutions financières qui prévaut au Québec depuis un certain temps est compatible avec les préoccupations qu'a exprimées M. Lejeune?

M. Bachand (Jean-Claude): Je pense que les préoccupations du Groupe Investors relativement à la saine concurrence ont trait principalement au pouvoir des banques à charte, qui, depuis 10 ou 15 ans, sont entrées dans des secteurs, et, quand elles ont eu l'autorisation d'entrer dans ces secteurs-là, elles ont pris la part de lion du marché. Ça a commencé avec, évidemment, les courtiers en valeurs mobilières, en 1987: 98 % du domaine des courtages de valeurs mobilières est dominé par les banques. Ensuite, ça a été pour les sociétés de fiducie: 90 % du secteur des sociétés de fiducie est dominé par les banques.

Il y a eu, comme vous le savez, un très grand débat jusqu'à récemment: Est-ce que les banques ont le droit de vendre des produits d'assurance directement en utilisant le réseau? Je pense que toute la position du Groupe Investors, comme celle du Groupe Greatwest et comme celle d'autres qui n'étaient pas dans le domaine bancaire, c'était qu'il était très important d'éviter un système, au Canada, où les actifs financiers des individus et des Canadiens seront dominés par cinq ou six grandes institutions. Alors, c'est sûrement l'un des thèmes du Groupe Investors, qui est un concurrent certainement de ce que les banques font, de maintenir, mais autant au niveau du Québec qu'au niveau fédéral, des lois qui permettront, dans les 25 prochaines années, d'avoir quand même des joueurs et des intervenants autres que quatre ou cinq grands intervenants au Canada, ce qui n'est pas sain, généralement.

M. Beaulne: Merci. Mr. Wright, thank you for your presentation. And, in conclusion, I was amazed to learn that Mr. Martin did not consult your Group on his proposal. It makes me wonder what is important enough for Mr. Martin, since a group which manages more than 30 000 000 000 $ worth of assets does not seem to be important enough. So, thank you for your contribution and I hope you have a nice stay in Québec City.

M. Wright (Terry): Thank you.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. S'il n'y a pas d'autres membres de la commission qui ont des commentaires ou des questions, je vais remercier moi-même M. Wright et ses invités de s'être déplacés, d'abord de si loin. On va lui souhaiter un beau et bon séjour au Québec. On vous remercie d'être venus nous faire part de vos commentaires pour mieux élaborer le projet de loi.

J'ajourne les travaux au jeudi 6 juin, après les affaires courantes, soit environ à 11 heures.

(Fin de la séance à 22 h 54)


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