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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 24 septembre 1996 - Vol. 35 N° 23

Consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
M. Jacques Baril, président
M. Henri-François Gautrin
M. François Gendron
M. Jacques Chagnon
M. Rosaire Bertrand
M. Jean Campeau
M. Michel Côté
M. Yvan Bordeleau
M. François Beaulne
* M. Denis Savard, AIAPQ
* M. Jacques Gauthier, idem
* M. Claude Béland, CCPEDQ
* M. John Harbour, idem
* M. Humberto Santos, idem
* M. Guy Massé, Conseil des assurances de personnes
* Mme Michèle Barbier, idem
* M. Yves Michaud, APEIQ
* M. Réjean Belzile, idem
* M. Yves Millette, ACCAP
* M. Normand Pépin, idem
* M. Pierre Delisle, CIQ
* M. Richard Gagnon, idem
* M. Robert Frances, idem
* M. Réal Sureau, idem
* M. Jean LaCouture, RACQ
* M. Jacques Desbiens, idem
* M. Gilbert Maltais, idem
* M. Marcel Marcouiller, idem
* M. André Gaudreault, idem
* M. Jean-Yves Desrosiers, Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins
* M. Conrad Julien, idem
* M. Robert Proteau, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, messieurs de la commission!

La commission du budget et de l'administration est réunie afin de procéder à des consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché intitulé «La distribution de produits financiers aux particuliers: relever résolument le défi du changement».

Est-ce que, M. le secrétaire, vous avez des changements à nous suggérer?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Donc, pour ce qui est de l'ordre du jour, il y aura, au début, des remarques préliminaires. Ensuite, nous entendrons les représentants de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec. Nous entendrons, par la suite, La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec. À midi trente, il y aura une suspension, pour reprendre, à 14 heures, avec le Conseil des assurances de personnes, l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, le Conseil interprofessionnel du Québec. Il y aura une suspension à 18 heures, et nous reprendrons, à 20 heures, avec le Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec et le Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins. Et il y aura ajournement à 22 heures.

Est-ce que l'ordre du jour vous convient pour cette fois-ci? Si oui, je vais d'abord souhaiter la bienvenue à tous nos invités. Je vois que la commission parlementaire suscite beaucoup d'intérêt.


Remarques préliminaires

Et je laisserai la parole au ministre pour ses remarques préliminaires. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): Vous avez raison, M. le Président, de souligner que cette commission suscite beaucoup d'intérêt. C'est la raison pour laquelle votre commission siège dans cette salle plutôt que dans une autre, pour reconnaître non seulement le besoin d'espace physique, mais l'importance du sujet.

Nous avons parmi nous divers intervenants et intervenantes à qui je souhaite la plus cordiale bienvenue à nos travaux. Je les remercie d'avance pour l'effort intellectuel qu'ils ont fait et qu'elles ont fait pour éclairer notre commission. Il y a beaucoup d'intervenants ici directement impliqués, et, dans la vie quotidienne, dans la vie économique quotidienne, bien, il y a des millions de personnes qui sont impliquées par ce que nous faisons et ce que nous allons faire. Il n'est donc pas étonnant, M. le Président, que cette commission suscite un grand intérêt, et je souscris évidemment à vos remarques.

Comme je l'ai souligné déjà dans le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché qui fait l'objet de cette commission, l'industrie des produits financiers, notamment la partie de cette industrie qui effectue la distribution, a subi, au cours des dernières années, de profonds changements. De plus, selon les analyses que nous faisons ou que nous pouvons lire, cela se continuera et même s'amplifiera. C'est en tenant compte de ce phénomène que doivent se tenir nos délibérations.

Je trouve donc très sain l'exercice que nous entreprenons ce matin. C'est ensemble en discutant et en ayant, chacun de nous, députés et participants, un esprit ouvert et non corporatiste que nous pourrons en arriver à ajuster la Loi sur les intermédiaires de marché pour en faire une loi adaptée à la réalité, tout en rencontrant les grands objectifs énoncés dans ce rapport. Vous avez remarqué que ce rapport n'est pas un rapport doctrinaire et que ni le gouvernement ni les députés de la majorité ministérielle en tout cas, et probablement ceux de l'opposition officielle, ne sont ici avec des doctrines campées et rigides qui ne souffriraient pas d'ajustements.

Nous sommes ici pour écouter les intervenants, rechercher les consensus, ce que nous souhaitons évidemment au plus haut point. Il y en aura beaucoup, il y en a déjà qui se dessinent, on le voit par des positions écrites, en se souvenant que, quand il n'y aura pas de consensus, la responsabilité du gouvernement est de gouverner. Donc, il devra arbitrer.

Si je vous demande de rechercher des consensus, ce n'est pas pour échapper à la responsabilité gouvernementale, puisque le gouvernement les assumera, ses responsabilités. Mais c'est pour vous permettre, à une étape antérieure à la décision que pourrait avoir à prendre le gouvernement, de décider vous-mêmes. Si vous faites des consensus, c'est que vous décidez vous-mêmes. Et, comme vous êtes, les uns et les autres et les unes et les autres, des experts très pointus de ce domaine, bien, ce que vous décidez de façon consensuelle a plus de chances encore de correspondre aux besoins de la population que ce que le gouvernement lui-même pourrait décider.

Alors, les grands objectifs, j'y reviens. Les grands objectifs du rapport sont assez simples. D'abord, renforcer la protection du consommateur et de l'investisseur tout en leur permettant un accès aux produits et services financiers au meilleur coût possible. Alors, on voit bien que l'objet de nos travaux, c'est la population, la population qui consomme, et on veut qu'elle décide et on veut qu'elle en ait pour son argent.

Deuxièmement, optimiser le décloisonnement des réseaux de distribution de produits et services financiers, tendance bien établie non seulement dans notre juridiction, mais dans les juridictions qui nous entourent et dans notre continent et, on pourrait dire, dans le monde occidental.

Troisièmement, réduire les coûts inhérents à l'encadrement et à la réglementation de la distribution des produits et services financiers, puisque ces coûts sont supportés globalement par la collectivité et que ça devient une question de concurrentialité de l'ensemble de notre économie que de réduire les coûts inhérents.

Quatrièmement, simplifier et uniformiser l'encadrement des intermédiaires de marché. Tout le monde veut la simplification, tout le monde veut l'allégement des règles, et, en même temps, tout le monde veut que l'encadrement se fasse, qu'il soit le plus uniforme possible sans viser à l'uniformité totale.

Cinquièmement, affirmer et préserver la compétence du Québec dans la distribution de produits et services financiers. La constitution qui nous régit a établi, dès 1867, un certain nombre de domaines réservés à un ordre de gouvernement ou à l'autre, ou des domaines mixtes. Et le gouvernement du Québec, les gouvernements du Québec à travers l'histoire, mais singulièrement celui d'aujourd'hui, évidemment, n'ont eu aucune intention de renoncer à leur juridiction en ces matières. Et, jusqu'à ce jour, à chaque fois qu'il y a eu un conflit de juridictions, généralement les professionnels et l'industrie ont supporté totalement la position des gouvernements du Québec successifs à exercer pleinement les juridictions qui sont les leurs.

C'est donc dans cet esprit que je désire aborder la présente commission parlementaire, et je suis convaincu que c'est le même esprit qui anime tous ceux et toutes celles qui présenteront un mémoire et participeront aux discussions. Je remercie toutes les organisations et associations pour l'effort et l'énergie qu'elles ont consentis dans la préparation des documents qui nous sont présentés.

J'invite, par la même occasion, tous mes collègues à participer à ces discussions en n'ayant pas peur du changement et de l'insécurité qu'elles provoquent. L'adaptation de nos lois relatives au secteur financier est nécessaire pour permettre au Québec et à ses citoyens de bénéficier d'un environnement législatif et réglementaire qui les serve bien et les protège bien tout en permettant aux entreprises québécoises de maintenir une bonne rentabilité, ce qui est le meilleur gage de leur solvabilité et de leur pérennité pour faire face à la concurrence et pour continuer à croître. Ce dont nous avons besoin, c'est donc d'un véritable «aggiornamento», une mise à jour.

La lecture des mémoires qui ont été préparés pour cette commission laisse présager que nos discussions seront intéressantes, puisque les points de vue que nous entendrons seront tantôt opposés les uns aux autres et tantôt convergents.

De même, la députation – en tout cas, je parle pour celle du parti ministériel et, vraisemblablement, celle de l'opposition officielle – s'est bien préparée à cette commission et entend jouer, comme c'est son droit et son rôle premier, un rôle actif. Et, dans cette députation, il y a des gens qui connaissent bien la question, soit pour l'avoir pratiquée sur le plan professionnel, soit pour l'avoir pratiquée sur le plan public et politique, ou, à tout le moins en tout cas, pour avoir été en contact avec l'industrie d'une façon ou d'une autre. Et je pense que, comme c'est le cas généralement dans les commissions parlementaires, les parlementaires joueront un rôle déterminant. Et ces parlementaires qui participent pleinement à la commission aujourd'hui seront consultés par le gouvernement à toutes les étapes d'une prise de décision ultérieure.

(10 h 20)

L'objectif poursuivi par ce rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché, laquelle fut sanctionnée le 22 juin 1989, est d'ouvrir plusieurs pistes pour l'avenir, dont la principale est de transformer la Loi sur les intermédiaires de marché en une loi sur la distribution, c'est-à-dire adapter la Loi sur les intermédiaires de marché pour en faire une loi qui englobe toutes les facettes de la distribution, avec ou sans intermédiaire. Le gouvernement désire discuter publiquement des enjeux d'une telle orientation qui, à mon sens, est importante si l'on veut maintenir à un niveau adéquat la protection des consommateurs lorsque ces derniers se procurent un produit sans intermédiaire d'un agent. Le rapport offre également plusieurs options soit pour modifier la structure d'encadrement actuelle des intermédiaires soit pour encadrer la distribution d'assurances dans les institutions de dépôts. Je sais pertinemment que ce sont des sujets susceptibles de susciter des discussions passionnées, ce qui veut dire qu'en plus nous ne devrions pas nous ennuyer durant cette commission.

Mais c'est à dessein que j'ai voulu, à ce stade de notre processus, présenter des options. Cela indique que notre gouvernement désire débattre publiquement de ces enjeux plutôt que d'effectuer un choix derrière des portes closes. Les options présentées sur ces deux sujets sont perfectibles. Elles veulent principalement identifier des grandes avenues possibles. Plusieurs variantes de ces options auraient pu être illustrées, mais, dans un document de cette nature, il faut évidemment se limiter. Cela ne signifie en rien que le choix doive se limiter entre les options suggérées. Nous sommes ouverts. Ce que nous avons voulu, c'est provoquer une discussion publique, saine et franche où les intérêts des uns et des autres pourront se confronter et amener, si possible, un consensus.

Si le titre du rapport mentionne de façon explicite la distribution aux particuliers, ce n'est pas que le gouvernement a une quelconque intention d'évacuer de la réglementation le domaine de la distribution d'assurances aux entreprises, particulièrement l'assurance vendue aux PME, mais plutôt parce que les consultations qui ont été tenues auprès des représentants de l'industrie, en 1994 et 1995, relativement à la préparation du rapport quinquennal n'ont aucunement fait état de difficultés particulières lorsqu'il a été question des entreprises. Ce que le gouvernement désire faire, c'est d'ajuster mutatis mutandis la réglementation de la distribution des produits d'assurance aux entreprises selon ce qui sera fait à l'égard des particuliers. Si des commentaires spécifiques nous sont faits concernant cet aspect précis, nous serons particulièrement heureux de les entendre, car aucun ne nous a été signifié jusqu'à ce jour.

Une autre raison également pour laquelle nous avons mis l'accent sur l'individu, c'est que nous avons perçu lors de nos consultations que toutes les organisations rencontrées, sans exception, invoquent la protection du consommateur comme motif premier pour justifier leur prise de position. Il nous est apparu que chacun semble avoir sa vision particulière des besoins des consommateurs et que ceux-ci forment pour certains même un bloc monolithique. Nous aurons l'occasion d'entendre lors de cette commission au moins deux groupes qui parleront directement au nom des consommateurs. Nous aurons l'occasion de leur poser des questions pour mieux comprendre leur point de vue, car, en bout de ligne, c'est principalement pour assurer leur protection que nous désirons apporter des ajustements à la Loi sur les intermédiaires de marché et la transformer.

Le consommateur, selon ce que nous nous faisons dire, désire garder une liberté de choix quant aux moyens à prendre pour se procurer un produit ou un service financier. Nous supportons globalement cette vision. Le rôle du gouvernement, c'est de fournir au consommateur un environnement où il est capable d'effectuer en toute connaissance de cause un choix quant aux moyens qu'il privilégie pour se procurer un produit ou service financier. Le gouvernement ne peut lui imposer un modèle dans une société basée sur la liberté économique comme la nôtre.

J'ai aussi émis l'idée de la création d'un poste d'ombudsman. Soyez rassurés, il n'est nullement dans mon intention d'ajouter un niveau d'intervention supplémentaire mais plutôt de donner au consommateur une alternative ultime en cas d'échec des mécanismes usuels actuels et futurs lorsqu'il se sent lésé.

Le rapport quinquennal fait aussi état que les institutions financières sont devenues des centres de distribution de produits financiers très diversifiés, et il semble qu'auprès des consommateurs cette formule, dans certains cas, ait eu un succès et, dans d'autres situations, que le succès ait été plus mitigé. Le rapport souligne également que tant les intermédiaires que les institutions ont développé la notion de conseil comme support à leur activité de vente.

La rapport quinquennal évoque aussi l'avènement de la technologie dans le domaine de la distribution. Tous ces phénomènes ne sont pas exclusifs au Québec. Si ce dernier doit adapter sa législation pour encadrer ces phénomènes, il ne faut pas qu'il le fasse en vase clos. Il doit considérer ce qui se fait ailleurs non pas pour se faire dicter ce qu'il doit faire, tout particulièrement dans un domaine entièrement de sa compétence, mais pour permettre aux citoyens et citoyennes du Québec de bénéficier en toute confiance des moyens qui leur sont offerts par les technologies contemporaines.

Le Québec ne peut faire moins que ce qui se fait ailleurs. Le Québec, par sa législation, ne peut ériger un mur autour de ses citoyens et leur enlever des libertés de choix ni brimer la liberté de commerce des entreprises. Le législateur doit fournir un environnement et un encadrement à la hauteur des objectifs qu'il se fixe en matière de protection du consommateur.

Dans le cadre, aussi, d'un univers économique beaucoup plus unifié et beaucoup plus homogène ne serait-ce qu'en raison des grands traités qui ont uni l'Europe de l'Ouest, d'abord, le Canada et les États-Unis et l'Amérique du Nord et de plus en plus les deux Amériques, le décloisonnement des institutions financières s'est prolongé dans le décloisonnement des intermédiaires. Les statistiques démontrent que de plus en plus les intermédiaires veulent, à l'instar des institutions financières, devenir polyvalents et servir les clients qui leur font confiance. À titre d'exemple, plus de 40 % des intermédiaires en assurance de personnes sont à la fois habilités et possèdent les qualifications requises pour offrir des produits en assurance IARD en même temps que des produits d'assurance-vie.

L'expérience des dernières années démontre qu'il y a une place pour tous les distributeurs et modes de distribution. Les études démontrent qu'il y a, au niveau des clientèles, une segmentation. Il y a des consommateurs qui privilégient l'utilisation d'un intermédiaire. Il y a des consommateurs qui désirent s'occuper eux-mêmes de la transaction. Enfin, il y a les consommateurs qui s'ajustent selon les coefficients de complexité de leurs besoins et la valeur ajoutée que peut leur fournir l'intermédiaire. Nous retrouvons le même phénomène dans le commerce de détail en général. Il y a des boutiques spécialisées avec service et de grandes surfaces sans service. Cette mutation des marchés nécessite donc un environnement souple et capable de s'ajuster rapidement et qui garantit au consommateur la protection qui lui est nécessaire et qu'il est en droit d'obtenir.

Dans le rapport, on discute d'encadrement et de l'exercice de l'autoréglementation et de l'autodiscipline. Outre les difficultés qui se sont manifestées en raison de certains chevauchements ou du manque de clarté dans les responsabilités confiées aux organismes actuellement en place, il y a la question du rôle que doit jouer le gouvernement et celui qui doit incomber aux intermédiaires eux-mêmes. Le rapport propose un partenariat entre les offreurs originels de produits, soit les institutions généralement, les intermédiaires et le gouvernement, ce dernier se conservant un rôle important mais limité au choix des administrateurs de ou des organismes d'autoréglementation et à l'approbation de certains règlements.

Cette approche ne doit pas être perçue comme un déni à l'autoréglementation mais une volonté d'être partenaire, de préserver un rôle au consommateur et, enfin, de constituer l'intervenant de dernier recours en matière de réglementation. C'est le rôle même du gouvernement. De plus, comme le rapport préconise une réglementation de la distribution avec ou sans intermédiaire, serait-il souhaitable que seuls les intermédiaires établissent les règles à l'égard de la distribution? C'est une question tout à fait pertinente.

Quant au rôle que peuvent jouer les institutions de dépôts, si – et j'insiste – si une capacité élargie leur était donnée dans la distribution de produits d'assurance, il est primordial que ces dernières suivent les mêmes règles du jeu que les autres distributeurs. Ce n'est pas parce qu'une institution financière est réglementée et surveillée quant à sa solvabilité que cela lui confère une capacité de distribuer des produits qui ne sont pas les siens sans être encadrée et devoir se plier aux mêmes exigences que les autres distributeurs. Cela m'apparaît aussi important qu'élémentaire.

(10 h 30)

Je voudrais faire un commentaire sur la distribution de produits d'accommodation tels que l'assurance-voyage, par exemple. Ce produit rend service à plusieurs personnes et il est abordable en termes de prix. Il ne faut donc pas l'affubler d'une réglementation trop lourde pour le rendre inaccessible en raison des coûts de la réglementation qu'il doit porter. Toutefois, cela ne justifie pas l'absence d'un minimum d'information à être divulguée au consommateur, comme le suggère d'ailleurs le rapport.

Enfin, en ce qui a trait à la planification financière, le rapport soumet pour discussion quelques idées, dont deux options d'encadrement. Dans les deux cas, toutefois, les règles seront applicables à tous ceux qui utilisent et sont habilités à porter les titres. Les propositions soumises tentent également de solutionner les conflits existant entre la Loi sur les valeurs mobilières et la Loi sur les intermédiaires de marché.

Je viens donc d'évoquer brièvement des sujets que nous aurons l'occasion de discuter. Je sais aussi que le rapport quinquennal est silencieux sur d'autres points. Ce n'est pas que nous ne nous y intéressons pas, mais plutôt que le rapport a voulu toucher les principaux points d'une réforme importante sans devoir entrer dans trop de détails, car, selon les options ou variantes des options qui seront retenues, plusieurs choses peuvent encore changer.

Par conséquent, notre commission a maintenant, M. le Président, toute la latitude pour faire son travail, et ce travail – et je suis sûr que toutes les personnes présentes dans cette salle et qui viendront à la commission partagent cet objectif – doit se résumer à servir la population, à servir les consommateurs, en leur donnant la juste protection nécessaire sans alourdir au-delà de ce qu'il faut nos règlements et nos lois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre, pour vos remarques constructives, positives. Maintenant, je donne la parole au représentant de l'opposition officielle, M. le député de Viger.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. C'est très clair qu'aujourd'hui nous étudions un sujet très important, qui concerne justement la population du Québec. Comme le disait le ministre, c'est exactement la protection du consommateur qui est très importante pour nous aujourd'hui.

Je ne vais pas m'allonger comme l'a fait le ministre, parce que je pense qu'il faut laisser le temps aux gens qui sont venus devant nous, à cette commission, qui ont pris le temps de préparer des mémoires. On a une vingtaine de mémoires, qui sont devant nous, à étudier dans les cinq jours que cette commission va être à l'écoute de ces personnes-là. Et je crois, M. le Président, que la première chose de la part des parlementaires de cette commission, c'est justement de faire cette commission-là avec un esprit ouvert, dans l'intérêt de la population.

Je pense que cette commission aurait dû avoir lieu même avant. Parce que c'est un rapport quinquennal, mais ça fait, en vérité, sept ans que la loi est déjà en vigueur, depuis 1989. On est en 1996. C'est le temps de vraiment voir les bienfaits et les méfaits de cette loi et les changements qu'il faudrait y apporter.

M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de dire seulement une chose, et on l'a vu par les remarques aussi du ministre, c'est que le gouvernement parle depuis son assermentation, depuis deux ans, de déréglementation. Si on regarde le rapport qui a été déposé devant nous, je pense que c'est complètement le contraire. Moi, j'espère que les gens qui vont venir devant cette commission vont justement aller dans le sens d'une déréglementation plutôt que dans le sens contraire que le gouvernement prévoit à l'intérieur de ce document qui a été déposé devant nous.

Nous sommes prêts à écouter ces gens-là. Nous les remercions tous pour l'effort qu'ils ont fait pour venir devant nous. Ces gens-là savent plus que nous – je pense plus que moi et les autres parlementaires qui sont ici. Ils vivent tous les jours ces problèmes ou ces situations que la loi 134 leur a imposés. Ces gens-là, j'en suis profondément convaincu, vont nous donner les arguments nécessaires et les solutions, que nous devrons sûrement prendre en considération, et arriver avec un commun accord. Parce que je pense que c'est, comme je le disais au début, dans l'intérêt de la protection du consommateur que nous puissions arriver à des conclusions avec lesquelles le consommateur va se sentir très à l'aise, va se sentir très bien protégé, parce que c'est la protection du consommateur, l'enjeu principal de cette commission. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Viger. Vous aviez raison de souligner le retard de la commission. Mais je dois vous rappeler qu'il y a eu élection en 1994. Il y a eu également changement de titulaire au ministère. Et, trois, on a convenu ensemble, les membres de la commission, de retarder ces travaux pour avoir une possibilité d'être encore plus objectifs et de répondre encore mieux au voeu... peut-être pas au voeu, mais au désir du ministre ou à la volonté du ministre. Ce n'est pas l'habitude de cette commission de prendre du retard dans ses travaux, mais, cette fois-ci, c'était, je pense, dans un objectif plus concret, plus positif.


Auditions

Donc, sans plus tarder, à moins qu'il y ait d'autres membres de la commission qui aient des remarques préliminaires à faire, sans plus tarder, s'il n'y en a pas d'autres, je vais inviter les représentants et représentantes de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec à s'approcher de la table pour nous faire la présentation de leur mémoire.

J'inviterais M. le président, M. Savard, je crois, à nous faire la présentation des personnes qui l'accompagnent, pour un meilleur échange avec les parlementaires et aussi pour la transcription des débats. M. Savard.


Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec (AIAPQ)

M. Savard (Denis): M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la commission, permettez-moi, tout d'abord, de vous présenter les membres qui m'accompagnent. À mon extrême gauche, M. Yvon Desrochers, planificateur financier et assureur-vie agréé, qui est un agent en assurance de personnes; il est vice-président et responsable de l'inspection professionnelle à l'Association. Me Jacques Gauthier, qui est procureur du Comité de surveillance de l'Association. Mme Lucie Granger, qui est notre directrice générale.

À mon extrême droite, Me Anne-Marie Beaudoin, qui est conseillère principale à la directrice générale. Et M. Alain Roy, qui est assureur-vie certifié, qui est courtier en assurance de personnes; il est vice-président à l'institut de formation de l'Association.

Je souhaite aussi souligner la présence ici, aujourd'hui, de plusieurs officiers de l'Association, anciens présidents et membres du conseil. La très large majorité de notre conseil d'administration est ici représentée. Je voudrais souligner particulièrement la présence de notre président fondateur, qui, en 1960, avait l'idée de mettre sur pied cette Association, M. Victor Dumais.

Ayant le privilège, M. le Président, d'être les premiers intervenants devant cette commission parlementaire sur la distribution de produits financiers aux particuliers, vous me permettrez de faire une mise au point extrêmement importante afin que la commission ne soit pas induite en erreur. À deux occasions jusqu'à maintenant, dans le cadre d'articles dans des médias, soit le journal Les Affaires et le journal Les Assurances , M. Guy Massé a fait valoir, à titre de président du Conseil des assurances de personnes, qu'il représentait le point de vue unanime de l'industrie, à savoir celui des manufacturiers et celui des praticiens reconnus et encadrés.

Le conseil d'administration de l'AIAPQ a adopté à l'unanimité une résolution par laquelle il indique clairement que le mémoire du Conseil des assurances de personnes ne représente pas le point de vue des praticiens. Ce mémoire représente le point de vue des manufacturiers, et nous n'y adhérons pas. Nos divergences ne sont pas cosmétiques mais fondamentales. Il est donc faux de prétendre que nous sommes d'accord pour que des manufacturiers siègent sur l'organisme unique d'encadrement des praticiens, alors que nous croyons, au contraire, que c'est un non-sens.

Il est faux de prétendre que nous pouvons appuyer quelque système de modulation des règles de pratique selon les différents réseaux de distribution, alors que nous estimons que le moment est enfin venu d'appliquer un seul système de règles pour tous les praticiens.

Il est faux de prétendre également que nous supportons l'idée que l'organisme d'encadrement des praticiens doit également encadrer les manufacturiers, alors que nous sommes convaincus que l'encadrement des compagnies ne doit pas être de la responsabilité de l'organisme professionnel mais de celle de l'Inspecteur général des institutions financières. Nous estimons, de surcroît, qu'une réouverture de la Loi sur les assurances s'impose pour ce faire.

(10 h 40)

Il est faux de prétendre également que nous appuyons le pastiche du modèle d'encadrement ontarien proposé par le Conseil des assurances de personnes, alors qu'avec la loi 134 et notre Code civil le Québec est déjà rendu plus loin et que nous ne voyons pas pourquoi il faudrait radoucir les règles et les responsabilités. Ces divergences sont fondamentales, et une seule question les résume: Faut-il privilégier la protection des consommateurs, oui ou non?

C'est pour tous ces motifs, M. le ministre, que notre président a démissionné du Conseil des assurances de personnes. Cette mise au point étant faite, je peux maintenant vous transmettre la réflexion de l'AIAPQ et de ses 13 000 membres dans le cadre de la révision de la loi 134.

M. le Président et distingués membres de cette commission, notre réflexion est inspirée du rapport quinquennal mais aussi de l'expérience de notre organisme dans l'exercice de son mandat. Nous reconnaissons aux auteurs de ce rapport une capacité à voir grand, mais nous voyons aussi dans ce rapport un projet qui fait trop vite trop de place aux besoins de croissance des institutions de dépôts et des manufacturiers de produits au détriment de la mécanique de protection du public. En ce sens, le rapport quinquennal manque d'équilibre.

Ce rapport comporte notamment trois faiblesses majeures: la première faiblesse, la volonté de moduler les règles de protection pour les consommateurs en fonction des différents réseaux de distribution; la deuxième faiblesse, l'absence de règles efficaces d'indemnisation des consommateurs en cas d'erreur des distributeurs; la troisième faiblesse, l'imprécision des règles d'encadrement des institutions financières, concessionnaires automobiles, agences de voyages.

L'AIAPQ vous propose donc de corriger la trajectoire vers une avenue qui aura comme résultat: de donner aux consommateurs un niveau uniforme de protection par la mise en place d'un seul jeu de règles de protection pour tous les consommateurs, peu importe le réseau de distribution; d'encadrer tous les praticiens, sans exception, par la voie professionnelle; de donner aux consommateurs un recours express, universel et sans frais pour indemniser les victimes de fautes professionnelles.

Revenons plus en détail sur les faiblesses de ce rapport. La première faiblesse: la modulation des règles de distribution. Dans toutes les options proposées, le rapport quinquennal suppose qu'un organisme va être créé et qu'il sera chargé de moduler les règles de la distribution en fonction des différents réseaux de distribution: par intermédiaires, par institutions de dépôts, dans les agences de voyage, en vente directe. Et même, on va jusqu'à vouloir moduler en fonction des produits.

Pourtant, rien ne justifie que les règles protégeant les consommateurs doivent varier d'un réseau à un autre et être modulées. Et, curieusement, rien dans le document lui-même ne vient justifier ce projet. Pourquoi faire varier les niveaux de protection pour le consommateur? À qui cela rapportera-t-il? Nous devons, au contraire, éviter de multiplier les trous et les vides. L'AIAPQ met en garde le gouvernement de ne pas multiplier les niveaux de règles, car, entre les niveaux, on va trouver ces trous et ces vides qui feront monter en flèche le nombre de victimes non indemnisées.

À cet égard, le dossier de l'assurance-hypothèque mis à jour par l'AIAPQ constitue un bel exemple du genre de désastre auquel on expose les consommateurs dans un système de protection modulé. Qu'en serait-il d'un système de protection modulé sur trois, quatre, cinq ou six niveaux? D'ailleurs, le rapport ne précise pas combien il y a de réseaux ni de niveaux de protection, mais on peut voir venir le monstre que deviendra l'organisme chargé de moduler.

Nous mettons en garde le gouvernement de ne pas céder devant les manufacturiers de produits d'assurance, puisqu'un tel environnement serait extrêmement trompeur pour le consommateur. Précisément sur ce point, le gouvernement sera heureux d'apprendre que l'AIAPQ s'est informée de l'opinion des consommateurs, spécifiquement concernant cet enjeu, au moyen d'un sondage. Nous leur avons demandé si les règles devaient être les mêmes pour les banques, les caisses, les compagnies d'assurances, les fiducies, peu importe le réseau. Or, 98 % des consommateurs disent que oui. Et, là-dessus, 90 % sont totalement en accord.

Donc, la première recommandation de l'AIAPQ est à l'effet d'établir clairement un seul système de règles de distribution pour tous les produits d'assurance, ce qui garantira une protection identique à tous les consommateurs.

La deuxième faiblesse du rapport quinquennal concerne le pouvoir dominant accordé aux manufacturiers sur les règles de distribution. Ce n'est pas par fantaisie que l'AIAPQ s'objecte à maintenir la présence de manufacturiers au sein d'un organisme mandaté pour définir les règles de distribution. Cette présence est contre nature pour la simple raison que l'objectif de protection du consommateur, d'une part, et les ambitions naturelles et légitimes du manufacturier, d'autre part, sont, par définition, à l'opposé.

Comment concilier marketing et éthique? Comment concilier contrôle des coûts et formation? Comment concilier la concurrence et le maintien de la discipline? Tôt ou tard, l'appel de la nature se fait entendre, et le manufacturier en revient à ce pour quoi il existe: les profits. Or, à nos yeux, il est devenu clair que la présence continue des manufacturiers au sein d'un superconseil ou d'un organisme réglementaire équivalent est malsaine, car la protection du consommateur devient subordonnée aux grands intérêts commerciaux.

C'est un peu comme si les compagnies pharmaceutiques avaient une position d'influence dominante au conseil de l'Ordre des pharmaciens. Que les compagnies soient consultées, oui, mais présentes et décisionnelles, non. Notre recommandation au gouvernement consiste donc à exclure les manufacturiers de produits d'assurance de tout rôle continu et décisionnel relatif à la réglementation et à l'encadrement en matière de distribution.

La troisième faiblesse du rapport: l'indemnisation rapide des victimes d'erreurs de distribution a été laissée pour compte. L'AIAPQ et ses membres sont parfois témoins de cas où le consommateur se voit refuser par la compagnie, la banque ou la caisse sa réclamation, ajoutant ainsi l'insulte à l'injure. Or, on sait que l'enquête sur l'assurance hypothécaire nous enseigne qu'une minorité des consommateurs ainsi lésés font valoir leurs droits en recourant aux tribunaux. Cette situation nous semble intolérable.

Le rapport quinquennal, plutôt que de chercher des solutions pour faciliter l'exercice des recours des consommateurs lésés et mobiliser à cette fin des ressources fraîches et aguerries, privilégie la multiplicité d'instances d'encadrement à l'égard des intermédiaires de marché.

Nous recommandons donc au gouvernement de confier à l'ombudsman le mandat unique d'agir comme recours gratuit et accessible des consommateurs insatisfaits du règlement des réclamations auprès des manufacturiers de produits. Nous recommandons aussi de viser l'indemnisation par une loi pour l'encadrement uniforme de tous les distributeurs qui garantit l'indemnisation.

La proposition de l'AIAPQ cherche à recentrer l'équilibre du projet davantage du côté de la protection du consommateur. Notre proposition se veut une option simple et étanche. Elle vise à garantir l'encadrement de tous les praticiens et à assurer l'indemnisation. Elle se présente en quatre volets.

Premier volet: il n'y a qu'un seul jeu de règles de protection pour le consommateur, et ce dernier, peu importe où il achètera son produit d'assurance, bénéficiera ainsi de la même protection et des mêmes avantages peu importe le réseau de distribution.

Deuxième volet: toute personne qui distribuera un produit d'assurance, qu'elle soit un intermédiaire traditionnel, un agent dans un cabinet appartenant à une caisse populaire, à un concessionnaire automobile ou à une agence de voyage, devra détenir un certificat d'exercice qui engage sa responsabilité personnelle et comporte l'adhésion obligatoire à un régime unique d'assurance-responsabilité professionnelle, l'assurance-responsabilité couvrant toutes les erreurs, omissions et fautes professionnelles imputables aux praticiens.

(10 h 50)

Troisième volet: tout consommateur victime d'une erreur professionnelle bénéficiera d'un recours nouveau et expéditif en déposant une réclamation devant le régime unique d'assurance-responsabilité professionnelle. Le comité de discipline sera désormais chargé d'ordonner ou de recommander l'indemnisation des consommateurs victimes de fautes professionnelles à l'issue du processus disciplinaire.

Quatrième volet: il n'y aura ainsi qu'un seul organisme responsable de l'encadrement de tous les praticiens, et cet organisme sera électif, inspiré par le Code des professions.

Nos priorités sont: un seul organisme pour encadrer tous les distributeurs d'assurance de personnes, d'assurance de dommages, les représentants en épargne collective ainsi que les planificateurs financiers.

Nous sommes favorables à l'objectif de simplifier la structure d'encadrement en réduisant le nombre d'organismes. Un seul organisme devrait demeurer, à condition que cet organisme soit électif. Ce dernier sera responsable de l'encadrement de la pratique de tous les intermédiaires actuels et de tous les nouveaux praticiens.

Cet organisme unique sera responsable de la protection du public, de la surveillance, de la discipline, du Fonds d'indemnisation, de l'inspection professionnelle, de l'assurance-responsabilité professionnelle, de l'accès aux professions et de l'élaboration des programmes de formation continue. Bref, nous croyons que cet organisme professionnel doit cumuler tous les pouvoirs d'autoréglementation et d'autodiscipline.

Notre priorité deux: un processus de discipline et d'indemnisation jumelé. Plutôt que de se présenter à ses frais devant les tribunaux réguliers, un consommateur pourra déposer sa plainte devant l'organisme d'encadrement. Sa plainte sera analysée par le comité de surveillance, et, si le comité estime qu'il y a faute professionnelle, l'organisme engagera une poursuite formelle devant le comité de discipline aux frais de ses membres cotisants. Le comité de discipline sera chargé du double mandat de sanctionner les erreurs professionnelles et d'ordonner ou de recommander l'indemnisation du consommateur.

Notre troisième priorité découle de la seconde: un régime unique et obligatoire d'assurance-responsabilité professionnelle. Le détenteur d'un certificat d'exercice devra débourser annuellement une prime pour sa couverture d'assurance-responsabilité professionnelle. Les sommes devront obligatoirement être canalisées vers un régime unique d'assurance-responsabilité professionnelle géré par l'organisme. C'est à même ce fonds d'assurance que les sommes seront puisées lorsque les consommateurs devront être indemnisés suite à la décision d'indemnisation du comité de discipline. Les frais de couverture d'un détenteur de certificat d'exercice ayant été sanctionné dans le passé et ayant entraîné des déboursés pour l'ensemble des cotisants pourront être majorés.

Qu'est-ce que notre proposition signifie pour le consommateur? Bien, simplement, être indemnisé sans frais. Cette approche a trois avantages marqués pour le consommateur. L'enquête et la constitution de la preuve sont aux frais de l'organisme d'encadrement et non plus aux frais du consommateur. La poursuite et les frais de poursuite sont également à la charge de l'organisme d'encadrement et non pas aux frais du consommateur. La nouvelle voie d'indemnisation jumelée au processus disciplinaire sera beaucoup plus rapide que le tribunal régulier. Ici, on parle d'un délai maximal de 12 à 24 mois, alors que, devant les tribunaux, les causes prennent entre 36 et 60 mois pour se régler. Dans ce nouveau contexte, le temps ne peut plus être utilisé comme arme contre les consommateurs. Dans l'enquête sur l'assurance-hypothèque, nous avons vu des causes qui ont pris jusqu'à sept ans pour se régler en appel.

Selon nous, la meilleure façon d'assurer la protection du public consiste à encadrer les praticiens. L'expérience démontre que la logique d'affaires des institutions financières ne leur permet pas d'assumer cette fonction d'une manière uniforme et rigoureuse, et la pratique de la loi a démontré que la meilleure façon d'assurer la protection du public consiste à encadrer les praticiens sur le modèle d'un ordre professionnel, et cela de trois manières: leur fournir une formation adéquate; les soumettre à des règles de pratique déontologiques obligatoires; et les tenir personnellement responsables des gestes qu'ils posent.

Quant à l'organisme d'encadrement lui-même, nous estimons que le conseil d'administration de cet organisme doit être formé selon un mode mixte: 80 % des membres du conseil d'administration devront être élus par l'assemblée générale des membres; le solde de 20 % est composé uniquement de consommateurs qui, eux, seront nommés par le gouvernement. Pour l'AIAPQ, nous l'avons déjà énoncé, il est inapproprié que les manufacturiers soient représentés à cette table.

L'adhésion obligatoire à un organisme qui encadre l'accès à la pratique constitue la meilleure garantie de protection du public et la meilleure garantie d'une pratique compétente, rigoureuse et responsable. Il ne devrait pas y avoir de privilèges pour les institutions de dépôts et les autres distributeurs.

Cette série de conditions assure la protection du consommateur... de bénéficier des mêmes garanties, peu importe l'endroit où il acquiert ses protections d'assurance, et permet à l'organisme responsable d'exercer ses fonctions uniformément. De plus, ces conditions permettront à l'organisme d'encadrement d'assumer sans encombre sa juridiction et d'affirmer la compétence du Québec en matière de distribution de produits financiers.

Vous trouverez dans notre mémoire l'ensemble de notre réflexion. Je viens de vous communiquer cependant le coeur de notre proposition sur l'encadrement de tous les praticiens. Nous sommes parfaitement conscients que le gouvernement subit la pression du milieu financier, des banques et de quelques manufacturiers de produits d'assurance qui préconisent la multiplication des réseaux de règles de protection par plusieurs voies: par la voie du mandat de modulation des règles de distribution, par la voie de permis restreints ou spéciaux, etc. Toutes ces avenues ont en commun un ramollissement des exigences de protection pour le consommateur en minimisant l'importance de l'intervention d'un professionnel dans le processus de distribution.

On ne peut pas blâmer les manufacturiers et les institutions financières d'essayer, mais les consommateurs québécois ne blâmeront pas le gouvernement de refuser. Ils vous approuveront, au contraire, si les mêmes règles de protection étanches s'appliquent pour tous et si les détenteurs de certificats d'exercice sont des professionnels compétents et rigoureux, où qu'on les trouve: dans une compagnie d'assurances, dans un cabinet d'agents appartenant à une caisse populaire, à une banque ou ailleurs.

La libéralisation des réseaux de distribution peut ne pas être un bénéfice véritable pour les consommateurs si elle n'est pas assortie de la protection que lui assure l'application des mêmes règles de pratique et l'intervention d'un véritable professionnel de l'assurance dans cette transaction.

La multiplication des produits en vente sans intermédiaire peut entraîner des conséquences graves, notamment des pertes de protection, des achats inutiles, des protections inadéquates et incomplètes et des problèmes d'indemnisation.

L'absence d'encadrement et/ou de mécanismes de protection force le consommateur à recourir aux tribunaux quand il est lésé. L'expérience du dossier noir de l'assurance-hypothèque indique que peu de consommateurs lésés par une pratique incompétente ou laxiste font valoir leurs droits en recourant aux tribunaux. Les consommateurs doivent pouvoir compter sur un organisme professionnel pour les accompagner dans le cheminement de leur plainte, c'est pourquoi nous ouvrons une voie alternative. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie également, M. Savard, de votre présentation. Maintenant, pour la distribution du temps, habituellement c'est: 20 minutes de présentation; 20 pour chacune des parties pour le questionnement. Nous dépassons à peine de cinq minutes. Donc, j'essaierai de partager le temps équitablement et je sais que les parlementaires seront disciplinés. Donc, M. le ministre, pour votre questionnement, vos commentaires.

M. Landry (Verchères): Oui, M. le Président. D'abord, je vais me borner à poser deux questions, parce que je réitère que plusieurs des parlementaires autour de cette table connaissent bien le monde de l'assurance et je voudrais que leur participation soit plus importante encore que la mienne.

(11 heures)

Alors, je regroupe, dans une première question, un thème, celui de la responsabilité professionnelle. Si on raisonne par analogie, les professionnels dans notre société, traditionnellement, sont responsables, et eux seuls, de leurs décisions professionnelles. Il en va ainsi des médecins, des dentistes, des avocats et de ceux qu'on nomme généralement professionnels et qui sont couverts par une loi, d'ailleurs, à cette fin. Dans le cas complexe de l'assurance, que fait-on avec la responsabilité en amont de l'intermédiaire? Parce que la responsabilité peut être partagée. Que fait-on dans le cas de la responsabilité d'un cabinet regroupant divers intermédiaires? Qui est responsable? Alors, c'est mon premier thème.

Et le deuxième, je vous le mentionne tout de suite parce qu'il est central. Vous avez dit que les institutions financières font certaines pressions, dans un sens. Sans doute, les institutions financières sont très intéressées à s'impliquer dans la distribution. Certaines le font déjà. Mais, au-delà des institutions financières, nous croyons savoir que les consommateurs aiment ça aussi. Et diverses enquêtes, sous forme habituelle de sondages d'opinion ou analyses d'opinion, plus un certain engouement des consommateurs démontrent que, si les institutions financières sont intéressées, le monde a l'air d'aimer ça aussi. Et il faut que ça soit pris en compte, je crois. Voilà mes deux questions.

M. Savard (Denis): Je vais tenter, M. le ministre, de répondre à votre première question. D'abord, au niveau de la responsabilité des manufacturiers, cette responsabilité actuelle des manufacturiers est très bien décrite, d'une part, dans la loi des assurances et dans le Code civil. Toute approche qui amènerait à préciser certains aspects qui sont déjà très bien expliqués dans le Code civil et dans la loi des assurances, on pourrait craindre qu'elle amènerait à réduire cette responsabilité, ce qui est tout à fait inopportun.

Pour ce qui est du deuxième volet de votre question, à savoir pour ce qui est des cabinets, sachez que les cabinets sont des membres à part entière chez nous. Donc, ils ont à répondre de leurs actes au même titre que les individus, parce que chaque cabinet doit être détenu par un individu qui endosse totalement la responsabilité des actes de ce cabinet. Donc, pour nous, un cabinet est un membre régulier corporatif.

Pour ce qui est de votre deuxième question, les consommateurs veulent ça aussi, que les manufacturiers soient encadrés. Il est clair qu'il faut que les manufacturiers soient encadrés. Mais pourquoi vouloir mettre tout l'encadrement à la fois des professionnels et des manufacturiers dans la même loi? Actuellement, nous avons la loi des intermédiaires de marché qui a pour mission d'encadrer les intermédiaires, c'est une loi professionnelle. Et, actuellement, ce qu'on est en train de faire, c'est de faire glisser cette loi vers une loi qui, voulant tout englober, va créer des trous importants entre l'encadrement des professionnels et l'encadrement des manufacturiers. On pense que ça doit être maintenu distinct, et aucune industrie que nous connaissons n'est encadrée globalement de cette façon.

M. Landry (Verchères): Je pense que, pour la deuxième question, M. le Président, je me suis mal fait comprendre, parce que vous m'avez très bien répondu sur d'autres choses. Ma deuxième question, c'est que vous avez, dans votre exposé généralement très clair, et très clairement pour cette question, dit que les institutions financières faisaient des pressions sur le et les gouvernements pour le décloisonnement, donc pour avoir accès à la vente. C'est vrai, les institutions financières aiment ça. Mais ma question, c'était: Les consommateurs ont l'air d'aimer ça aussi parce que, d'après les sondages d'opinion que nous avons à l'intérieur du Québec et dans les juridictions qui nous entourent – donc, on peut faire des comparaisons – les consommateurs et les consommatrices ont l'air d'aimer utiliser les institutions financières pour ce genre de service. Alors, ce que nous avons bien établi au départ, que nous étions au service des consommateurs, doit nous éclairer aussi dans ce débat.

M. Savard (Denis): Je vous remercie, M. le ministre. Je comprends mieux votre question, en effet. Effectivement, nous reconnaissons que les consommateurs trouvent facilement accessible la distribution à l'intérieur des institutions financières. Notre position à cet égard n'est pas d'empêcher ou d'exclure ce mode de distribution qui est plus facile pour eux. Ce que nous disons, et nous avons un exemple concret, pratique, au Québec, où la distribution de produits d'assurance de dommages se fait actuellement à l'intérieur des institutions financières que nous appelons les caisses populaires. Elle se fait cependant dans un bureau distinct où le consommateur peut voir qu'il y a une différence, qu'il n'est pas en train de parler à un commis ou à un préposé de cette institution financière mais qu'il s'adresse bien à un professionnel qui a la même certification, qui a la même préparation et la même formation et qui a dû répondre aux mêmes exigences qu'un courtier d'assurances, même si, lui, il est un agent en assurance de dommages.

Donc, nous avons la preuve que c'est possible de concilier le respect des normes et des règles de pratique par des professionnels encadrés à l'intérieur d'un bureau distinct pour que le consommateur s'y retrouve. Imaginez le danger, si on mettait immédiatement la distribution dans les mêmes locaux, de quelqu'un qui aurait accès à l'ensemble de vos ressources financières en regardant sur son système informatique et qui, par la suite, irait vous proposer des produits d'investissement. Il est très important pour le consommateur qu'on garde une séparation étanche sur la protection des renseignements personnels, et, à l'intérieur des institutions financières, c'est là où le danger est le plus grand.

Ce que je veux ajouter à l'égard des petites assurances qu'on peut acquérir, vous avez fait mention tantôt, par exemple, des assurances-voyages, ou de toutes ces assurances qu'on vous envoie par la poste avec des cartes de crédit... Les gens qui font l'acquisition de ces produits... Prenons l'exemple de l'assurance-voyage. Lorsque vous allez pour acheter un voyage, on vous propose en accessoire une assurance-voyage. Bien souvent, vous allez sortir votre carte Or pour payer votre voyage, et on ne vous dira pas: Monsieur, puisque vous nous payez avec votre carte Or, votre assurance-voyage, vous l'avez déjà, elle est incluse dans les garanties qui vous sont offertes avec votre carte Or. Et on ne s'informera pas non plus si votre assurance collective... Parce que la plupart des gens ont une assurance collective, et cette assurance collective couvre aussi l'assurance-voyage. Vous me dites que les primes sont faibles; c'est toujours trop cher quand on acquiert un bien dont on n'a pas besoin.

En assurance, créer de faux sentiments de sécurité, avoir une assurance qui nous est offerte gratuitement par une carte de crédit, qu'est-ce que ça signifie? Ça signifie que je pense que j'ai une protection. À mon décès, la seule personne qui est au courant de cette protection, c'est moi. Personne ne va réclamer. C'est la façon de distribuer l'assurance la plus payante parce qu'il n'y a pas de réclamations. Il faut éviter ce genre de piège. Il faut qu'il y ait un professionnel encadré responsable des gestes qui sont posés.

Nous soumettons au gouvernement dans notre mémoire de créer un registre central des assurés au Québec. De sorte que, si vous vous retrouvez dans une situation où vous êtes exécuteur testamentaire, vous sachiez que vous pouvez vous adresser à un endroit au Québec pour savoir... où tous les assureurs devraient inscrire le nom de leurs assurés, de sorte que vous n'auriez qu'un seul endroit au Québec où, en ayant à régler une succession, vous pourriez vous adresser pour savoir combien cet individu a acheté d'assurances dans sa vie. Et on vient de mettre sur pied un régime tout à fait similaire à celui des testaments, qui est géré par les notaires.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Savard. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais limiter mes questions à une partie de votre mémoire qui touche essentiellement l'organisme d'encadrement et à la formation des gens dans votre secteur. Est-ce que vous pourriez, peut-être, nous expliquer quelle est la formation, actuellement, des gens qui sont des intermédiaires de marché?

(11 h 10)

M. Savard (Denis): D'abord, les exigences de base pour devenir un intermédiaire de marché en assurance de personnes ou de dommages au Québec sont les mêmes. La première exigence, c'est de posséder un niveau d'études collégiales, donc de posséder un D.E.C., un Diplôme d'études collégiales. Ensuite, cet individu fait la demande pour devenir un intermédiaire de marché. À ce moment-là, on lui remet un volume qui nécessite une soixantaine d'heures d'étude. Ayant passé à travers ce manuel préliminaire au niveau de sa formation, il a à subir un examen. S'il réussit cet examen, qui en fait un stagiaire dans la dénomination actuelle, il commence un stage qui dure de trois à 12 mois, et sous la supervision et la responsabilité d'un maître de stage qui l'accompagne dans sa formation.

Et, lors de son premier examen, avant même de devenir stagiaire, il doit aussi se soumettre à un examen de déontologie, des règles d'éthique. Il doit, dès le premier abord, être au courant de toutes les règles de déontologie qu'il devra respecter parce que, comme stagiaire, il va commencer à poser des gestes professionnels. Donc, après son stage, lorsque le maître de stage considère qu'il est en mesure de passer cet examen de fin de stage, là il devra témoigner qu'il est en mesure de faire une analyse des besoins du consommateur, est en mesure de faire le discernement sur les objectifs du consommateur auquel il va proposer des produits, est en mesure de tenir compte de l'ensemble des besoins financiers du consommateur. Donc, voilà la formation préliminaire.

Une fois qu'il est devenu un intermédiaire certifié, là commence un programme de formation continue qui peut durer plusieurs années. Il s'inscrit à un certificat en assurance de personnes à l'université, qui comporte 12 cours universitaires et conduit à un certificat en intervention financière.

M. Gautrin: Si je comprends bien, ça, c'est pour les membres de votre Association.

M. Savard (Denis): Oui.

M. Gautrin: Est-ce que les personnes qui donnent des produits dans le cadre des institutions financières, ce que vous appelez les manufacturiers, sont soumises au même type de formation?

M. Savard (Denis): Tous ceux qui sont des agents ou des courtiers en assurance de personnes ou de dommages au Québec respectent ces mêmes règles. À l'extérieur de ça, quand vous parlez d'une préposée qui offre de façon accessoire une assurance-hypothèque, par exemple, dans une institution financière, ces personnes ne sont soumises à aucune règle de déontologie et elles peuvent proposer de vous faire abandonner votre assurance individuelle pour une assurance accessoire qui ne comporte absolument pas les mêmes garanties. Et elle n'a à respecter, cette personne, aucune règle déontologique.

M. Gautrin: Je vous remercie. Là, je commence à cheminer avec vous vers la création d'un ordre professionnel des courtiers. Mais à ce moment-là vous mettez le holà et vous dites: Non, on n'est pas intéressé à devenir un ordre professionnel. Et là je ne comprends plus. Vous donnez deux raisons dans votre document. L'une touche le fait qu'il y a des cabinets qui sont membres de votre Association, mais vous avez répondu à M. le ministre que, dans le fond, la responsabilité d'un cabinet était quand même dans les mains d'un courtier. Donc, il y a... un peu comme il peut y avoir, par exemple, dans un cabinet de notaires, un notaire qui est responsable.

Puis vous parlez après de la question de l'indemnisation, c'est-à-dire... Évidemment, dans la loi des professions, la loi sanctionne l'activité professionnelle. Bon, évidemment, il y a la question de l'indemnisation. Mais vous savez bien que vous pourriez accompagner, par exemple, quelqu'un ou recommander une indemnisation. Ça n'aurait pas un effet judiciaire, mais vous pourriez accompagner aussi le citoyen devant un tribunal, le cas échéant, si votre ordre décide d'accompagner le citoyen contre un de vos membres. Donc, je ne comprends pas vraiment pourquoi, là, vous ne voulez pas devenir – ce qui simplifierait beaucoup – un ordre professionnel comme d'autres ordres qui existent, et soumis à la loi 142 comme les autres ordres.

M. Savard (Denis): Effectivement, nous ne disons nulle part que nous ne voulons pas devenir un ordre professionnel. Nous serions prêts à faire ce saut en autant que les conditions où nous pouvons garder nos membres corporatifs seraient respectées. C'est la principale condition. L'autre, comme vous le dites, peut être exercée même à l'intérieur de l'ordre professionnel.

M. Gautrin: Mais, vous permettez, je reviens dans la même... La réponse que vous avez donnée tout à l'heure... C'est le même genre de question que posait tout à l'heure le député de Verchères et ministre actuellement, c'est: Tous vos membres corporatifs ont – et vous avez répondu cela – un courtier en titre, et c'est lui qui porte la responsabilité. Ça ne poserait pas vraiment de problème que ce soit lui qui soit membre de votre ordre professionnel?

M. Savard (Denis): Ça peut ne pas causer de problème, mais sachez que... Je vous donne l'exemple de l'Ordre des ingénieurs, qui a dû avoir des dispenses particulières et qui est toujours en conflit du fait qu'il a des membres corporatifs. Et nous voulons y aller d'entrée de jeu en précisant que, chez nous, les membres corporatifs sont des membres tout à fait réguliers et qu'on puisse les encadrer au même titre que les autres. Donc...

M. Gautrin: Mais ce n'est pas une impossibilité majeure, d'après moi. Ce n'est pas une situation qui n'est pas réglable facilement. Et, donc, vous n'avez pas d'objection majeure, à part cela, à vous constituer et à devenir un ordre corporatif qui est l'ordre des courtiers, comme il y a l'Ordre des arpenteurs-géomètres et l'Ordre des ingénieurs, des médecins, des notaires.

M. Savard (Denis): Si vous voulez l'appeler «ordre». Dans notre mémoire, ce que nous proposons, c'est la «Corporation des conseillers financiers du Québec»...

M. Gautrin: On passe sur ce débat linguistique, si vous me permettez, là.

M. Savard (Denis): ...mais que ça soit l'ordre, il n'y a aucun problème. Ce que je dis, c'est qu'il y a une autre différence, une autre distinction. Et le deuxième point sur lequel vous dites: C'est possible d'accompagner, la distinction... J'aimerais peut-être confier la responsabilité de vous donner des explications complètes sur le volet de l'indemnisation tel que nous le proposons, et je demanderais à Me Gauthier de, peut-être, vous donner les explications à cet égard.

M. Gauthier (Jacques): Oui, voilà. Juste pour être sûr de la perception de notre proposition. Ce que nous proposons, ce n'est pas simplement d'accompagner un réclamant dans une démarche à la Cour supérieure, ce que nous disons, c'est que quelqu'un qui fait une plainte qui a un volet disciplinaire et qu'il y a une réclamation parce qu'il a subi une perte pourra voir sa réclamation adjugée par le comité de discipline, et le jugement du comité de discipline déclenchera un paiement par le fonds d'assurance-responsabilité qui sera créé. Puis vous avez sans doute vu le cas des notaires dans les journaux, la semaine dernière, où, depuis des années, on est en débats, on se ramasse devant le comité de discipline sachant qu'après ce ne sera pas fini, qu'il faudra en plus aller à la Cour supérieure et possiblement à la Cour d'appel.

Alors, notre proposition ferait en sorte qu'un jugement du comité de discipline déclencherait le versement d'une indemnité, et le consommateur qui a droit à une indemnité la recevrait très rapidement, sans frais, sans dépenser, souvent, des milliers et des milliers de dollars pour recevoir son dû. Parce que, évidemment, quand on gagne, c'est parce que c'est de l'argent auquel on a droit, et c'est tout à fait malheureux de devoir dépenser des milliers, parfois des dizaines de milliers de dollars, et d'attendre des années pour voir sa réclamation honorée. Alors, notre proposition ferait justement ça.

M. Gautrin: Merci. Est-ce que je peux rajouter une dernière petite question?

M. Savard (Denis): En complément de réponse, monsieur, j'aimerais préciser à cet égard que nous avons fait des vérifications dans deux fonds d'assurance. Dans l'un, 40 % des primes payées allaient en frais juridiques et 60 % en indemnisation. Et, dans l'autre fonds, c'est l'inverse: 60 % en frais juridiques et 40 % en indemnisation. Donc, on peut facilement voir que le fonds où il n'y a pas de représentations juridiques va être un fonds qui va être fait pour indemniser et que ça va coûter moins cher pour tout le monde.

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je rappelle... Oui, M. le ministre, mais, si vous permettez, avant...

M. Landry (Verchères): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous permettez? Je suis obligé de tenir le temps, moi, c'est ma fonction, et il reste 10 minutes, pour les deux partis, de débat. Donc, j'inviterais M. Savard à essayer d'être plus concis dans les réponses parce que le temps de votre réponse est cumulé sur le temps des parlementaires. Et votre document suscite beaucoup d'interrogations, puisqu'il y a quatre parlementaires qui attendent de vous poser des questions à ma droite, et il y en a deux à ma gauche encore, et M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Oui. Et, pour épargner du temps, Me Gauthier, qui est un juriste beaucoup plus pointu que je ne puis l'être – moi, ça fait 20 ans que je n'ai pas pratiqué le droit – pourrait peut-être nous éclairer par écrit, quelques pages, sur la fusion de la discipline et de l'indemnisation, parce que, à première vue, pour quelqu'un qui ne suit pas ça de très près, c'est un peu choquant. C'est comme si on confondait le droit pénal et le droit civil, la sanction et l'indemnisation. Puis, en général, le niveau de preuve n'est pas le même et puis le but recherché n'est pas le même. Dans un cas, c'est de rendre justice matérielle, dans l'autre cas, ça peut être tout à fait au niveau éthique, au niveau de la morale.

M. Gauthier (Jacques): Tout à fait.

M. Landry (Verchères): Vous voyez ce que je veux dire? Il me semble qu'il y a confusion des genres.

(11 h 20)

M. Gauthier (Jacques): Si je puis me permettre, 30 secondes... Ça me fera plaisir, par ailleurs, d'élaborer par écrit, si nécessaire, mais ce qu'on propose, c'est que, quand le comité de discipline rend jugement, l'indemnité soit payée par le fonds d'assurance. Et ce qu'on dit, c'est que les intermédiaires en assurance, comme payeurs de primes d'assurance-responsabilité, au net net, ça va être au moins aussi bien pour eux parce que, plutôt que de payer 60...

On a vérifié chez les dentistes, les notaires, les comptables, les comptables généraux agréés, les infirmières, les ingénieurs: les frais juridiques et de défense, les frais d'expertise représentent le même montant que ce qui est éventuellement payé en indemnités. Alors, nous, on dit: Payons tout de suite la réclamation. S'il y a des droits d'appel plus tard, l'intermédiaire les fera valoir, mais la réclamation sera payée. Notre fonds d'assurance peut payer la réclamation, et le professionnel pourra défendre son honneur par la suite en appel s'il le veut, mais ça ne préjudiciera pas au droit du réclamant si le comité de discipline lui donne droit à sa réclamation.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Rapidement. En tout cas, à coup sûr, ceux qui ont lu votre mémoire, je ne sais pas l'objet précis du litige que vous avez avec le Conseil des assurances de personnes, mais votre mise au point était appropriée. Au départ, pour ceux qui ont lu votre mémoire, c'est évident.

Deux, trois questions rapides. C'est évident que l'indemnisation est au coeur de nos travaux, c'est une partie importante au niveau de la protection du consommateur. Deux questions très rapides là-dessus. Premièrement, est-ce que vous partagez le fait que les intermédiaires en assurance, par des changements inappropriés à de nombreuses polices, ça occasionnerait à peu près, grosso modo, une perte de 150 000 000 $ pour les consommateurs? Est-ce que vous partagez cet estimé-là?

M. Savard (Denis): Nous ne partageons pas cet estimé parce que les chiffres que vous soumettez sont des chiffres qui proviennent de l'importation de données américaines dans un milieu où il n'y a pas d'encadrement du style de celui que nous avons au Québec.

M. Gendron: Donc, vous n'êtes pas d'accord avec cette évaluation-là?

M. Savard (Denis): Absolument pas.

M. Gendron: Indépendamment du chiffre, même si c'est évident que vous venez de l'amenuiser – puis je ne porte pas de jugement – qu'est-ce qui empêchait votre Association de préconiser des mécanismes pour tenir compte d'une façon d'indemniser les consommateurs? Autrement dit, à ce que je sache, votre Association devrait être en mesure d'avoir déjà proposé un certain nombre de recommandations là-dessus. Est-ce qu'elle l'a déjà fait? Est-ce que votre Association a proposé des mécanismes d'indemnisation des consommateurs?

M. Savard (Denis): Nous le faisons déjà. Mais, à ce moment-ci, la seule instance où nous pouvons le faire valoir, c'est auprès du Fonds d'indemnisation. Sachez que le Fonds d'indemnisation est un fonds où seuls les intermédiaires contribuent, mais, actuellement, il est géré par le Conseil, et majoritairement par les manufacturiers. Donc, à ce fonds, il est arrivé que le comité de discipline ait recommandé d'indemniser, et le comité de discipline s'est fait dire de se mêler de ses affaires.

M. Gendron: O.K.

M. Savard (Denis): C'est pourquoi, depuis de nombreuses années, nous demandons de rapatrier la gestion du Fonds dans lequel seuls les intermédiaires contribuent.

M. Gendron: Vous recommandez également, toujours sur le même sujet de l'indemnisation, que les consommateurs soient indemnisés sans frais. Est-ce que vous avez fait une évaluation? Qu'est-ce que ça pourrait représenter comme facture, puis qui devrait payer ça?

M. Savard (Denis): Ce sont les membres assurés de l'organisme regroupant l'ensemble des professions financières au Québec qui vont supporter l'ensemble des coûts de cette assurance-responsabilité professionnelle. Ça existe dans quatre ou cinq professions actuellement au Québec. Cependant, la distinction majeure avec ce que nous proposons, c'est que le volet de représentation de l'assuré va être confié à un autre assureur.

M. Gendron: Très rapidement, la dernière question, pour permettre aux collègues... Vous suggérez que toutes les personnes qui vendent un produit d'assurance – parce que, dans la vente des produits d'assurance, il y a beaucoup, beaucoup d'éléments d'accommodation – soient détentrices d'un certificat. Ça devient très, très compliqué et dispendieux parce que, si toute personne qui vend quelque chose a besoin d'un certificat... Alors, j'aimerais ça vous entendre. Est-ce que vous avez évalué l'impact potentiel d'une telle suggestion sur le coût du produit?

M. Savard (Denis): Actuellement, dans l'exemple que je vous donnais tantôt, l'agent certifié dans une institution financière, il a rencontré les mêmes exigences que le courtier de dommages dans son cabinet au niveau de sa formation et de ses études préliminaires. Pourquoi, en assurance de personnes, on ne peut pas rencontrer les mêmes exigences? Est-ce que ça a amené les coûts d'assurance de dommages dans les caisses populaires à être plus chers que ceux vendus dans un autre réseau de distribution? Je ne crois pas. Donc, pourquoi vouloir traiter de façon différente l'assurance de personnes et l'assurance de dommages alors que l'élément conseil et planification est d'autant plus important en assurance de personnes?

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. M. le député de Westmount–Saint-Louis, à vous.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Évidemment, on ne pourra surtout pas penser ou laisser croire que nous avons... que j'ai, en tout cas, la science infuse dans ce domaine. On a, comme l'a souligné le ministre, des personnes qui siègent autour de cette table-ci, des deux côtés de la table, qui sont des spécialistes de ces questions, qui en ont fait leur métier, et leur gagne-pain découle de cette question.

Il n'en demeure pas moins que, depuis l'adoption de la loi 134, et plus particulièrement depuis la publication du livre blanc du ministre, des grandes questions se sont posées, et qui seront les noeuds gordiens du débat qui nous occupe, et qu'on retrouve non seulement dans le livre blanc, mais aussi dans tous vos mémoires, et qui vont toucher, par exemple, la question concernant l'organisme pouvant avoir des pouvoirs autoréglementaires concernant les activités de tous et chacun d'entre vous mais aussi sûrement le rôle des institutions de dépôts.

Vous avez écrit, vous avez signifié l'intention de voir des modifications concernant le rôle des institutions de dépôts. Or, le livre blanc du ministre prévoit trois avenues concernant les institutions de dépôts. La première avenue en est une de statu quo, une seconde en est une d'élargissement de la gamme de produits financiers à être vendus et, troisièmement, éventuellement, un décloisonnement complet. Vous, vous vous situez comment là-dedans?

M. Savard (Denis): À l'égard des trois options proposées, il est bien clair que le statu quo, pour ce qui est de la dimension d'assurance de dommages, d'avoir un cabinet à l'intérieur qui distribue de l'assurance de dommages, c'est concevable. Le livre vert va quand même plus loin en proposant un cabinet multidisciplinaire d'agents, qui pourrait réunir à la fois l'assurance de dommages, l'assurance de personnes, les fonds distincts, les fonds mutuels, la planification financière. Toutes ces personnes pourront se retrouver dans un cabinet multidisciplinaire d'agents, et à l'intérieur, mais pas directement à l'intérieur mais dans un cabinet connexe à l'institution de dépôts pour faire en sorte de protéger les renseignements personnels des individus, pour qu'il n'y ait pas de connexité entre les informations qui sont contenues à l'intérieur de l'institution de dépôts et celles à l'intérieur de ce cabinet.

Ce que nous ne voulons surtout pas, c'est qu'il y ait du double emploi, qu'un employé... Ce n'est pas possible qu'un employé se fasse une lobotomie instantanée pour oublier ce qu'il vient de voir dans le compte du client, pour aller recommander des produits financiers. Donc, il faut nécessairement garder un cloisonnement étanche, mais ça peut être très près, comme on le voit en assurance de dommages actuellement.

M. Chagnon: Donc, vous êtes en faveur d'un statu quo.

M. Savard (Denis): C'est un statu quo pour... mais on élargit le statu quo, parce qu'en assurance de personnes ce n'est pas ce que nous vivons. Il ne faut plus que les dangers qui sont encourus en assurance de personnes dans les institutions financières se perpétuent. Et l'exemple de l'assurance hypothécaire en est un qui a été largement démontré.

M. Chagnon: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, pour bien situer le débat, étant donné que l'Association est le premier intervenant, j'aimerais avoir des commentaires sur une partie de ce qu'a dit M. le ministre tout à l'heure en disant: L'objectif, entre autres, est d'ouvrir plusieurs pistes pour l'avenir, dont la principale est de transformer la Loi sur les intermédiaires de marché en une loi sur la distribution... et ça continue. J'aimerais avoir des commentaires là-dessus. Autrement dit, j'aimerais que vous spécifiiez davantage par rapport à la loi 134 et vers quoi on semble vouloir aller dans le rapport.

Et j'aimerais aussi que vous spécifiiez de façon beaucoup plus précise pourquoi vous favorisez le choix de l'option 1, c'est-à-dire, moi, ce que je considère qui ne s'est jamais produit dans l'industrie, puis c'est assez extraordinaire, quand même, d'en arriver là, une espèce de consensus qui semble se dessiner sur un seul organisme, quitte à établir les détails après. Alors, quels sont les avantages, sur le plan des consommateurs et sur le plan gouvernemental, d'un seul organisme? Et, exemple, est-ce que l'Institut québécois de planification devrait être là-dedans? Est-ce que tout le monde se retrouverait là-dedans? Ça répondrait un petit peu aussi, en partie, à la question du député de Verdun.

(11 h 30)

M. Savard (Denis): Je vous remercie de me permettre de préciser cet aspect. Effectivement, il faut qu'un organisme unique puisse donner des recours facilement accessibles au consommateur. Nous avons déjà, concrètement, au moment où nous vous parlons, réuni sur le même étage, au 500, Sherbrooke Ouest, l'ensemble... l'association des courtiers de dommages et l'Association des intermédiaires de marché en assurance de personnes. Il y a une réception unique et, d'ores et déjà, le consommateur, que ce soit en assurance de dommages ou en assurance de personnes, peut s'adresser à un seul endroit pour obtenir non seulement l'information, mais, s'il a des problèmes de pratique professionnelle.

Pour ce qui est de la distinction au niveau du projet, c'est ce que nous trouvons particulièrement dangereux. Effectivement, la loi 134 était une loi des intermédiaires de marché, une loi de type professionnel. Actuellement, nous sommes en train de dévier d'une loi professionnelle vers une loi commerciale. On veut mettre de côté l'encadrement professionnel ou en faire une partie d'une loi commerciale et là faire jouer les grands enjeux commerciaux des manufacturiers de produits et des institutions financières, et ça, c'est au détriment de la protection des consommateurs. Et on s'est inscrit en faux dans notre mémoire à cet effet-là, parce que de vouloir tout mettre ensemble, dans un organisme unique, à la fois les manufacturiers et les praticiens, ça nous paraît excessivement dangereux. Et, récemment, j'entendais quelqu'un nous dire que la preuve que ça ne peut pas marcher est dans le pudding ou dans les ingrédients qui le constituent.

M. Bertrand (Charlevoix): Juste une partie de réponse qui n'a pas été donnée, là. Dans le mémoire de l'Institut, il ne semble pas vouloir faire partie de cet organisme-là. Est-ce que vous pouvez m'expliquer, par rapport au rôle que joue l'Institut, pourquoi il devrait, oui ou non, faire partie de l'organisme unique?

M. Savard (Denis): Il est indispensable que tous les organismes soient regroupés dans le même organisme. Il faut que l'IQPF autant que l'AIAPQ et l'ACAPQ, les organismes professionnels se retrouvent ensemble à l'intérieur d'un organisme unique, avec tous les pouvoirs de réglementation, d'autoréglementation et d'autodiscipline. Je pense qu'il faut faire attention pour ne pas jouer sur les mots, là. Autoréglementation, ça veut dire une réglementation faite par les praticiens à l'égard d'eux-mêmes. Moi, je ne comprends pas... En tout cas, s'il y en a qui veulent nous amener sur une piste où on appelle autoréglementation une réglementation qui est faite par les manufacturiers de produits qui ne s'adresse pas à eux, moi, là, j'ai des problèmes de compréhension.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger... Ah! M. le député...

M. Maciocia: Oui.

M. Gautrin: Non, non, Viger, j'interviendrai après.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger, il vous reste quatre minutes.

M. Gautrin: S'il te reste du temps...

M. Maciocia: Moi, j'ai une petite question, M. le Président. M. Savard, vous avez parlé des règles auxquelles tous les gens devraient se soumettre à un certain moment. Ma simple question est celle-ci: Qui devrait, disons, faire ces règles-là? Est-ce que ce serait le gouvernement? Est-ce que ce serait l'organisme en question? Ce serait fait par qui, ces règlements-là?

M. Savard (Denis): Les règles de pratique s'appliquant aux praticiens seraient élaborées par les praticiens eux-mêmes, par l'organisme de réglementation et de discipline. C'est évidemment comme toutes les règles professionnelles: elles sont soumises par la suite à l'approbation du gouvernement. Quand ce sont des règles qui doivent passer par l'Office des professions, elles font l'objet, d'abord, à ce niveau, d'une première acceptation.

Pour ce qui est des institutions financières, des manufacturiers de produits, ce qu'on dit, c'est qu'il y a une loi, qui s'appelle la Loi sur les assurances, au Québec, qui est responsable de la... où on décrit la solvabilité financière, où on décrit aussi un cas de déontologie à l'égard des manufacturiers de produits. On va présenter devant vous une espèce de... ce qui est présenté comme étant une nouveauté. On n'a même pas trouvé la façon de le traduire de façon décente; on appelle ça le «duty of care». Cette approche est une approche essentiellement des manufacturiers pour, sous le couvert de se responsabiliser, ultimement se déresponsabiliser. La démonstration de ça n'est pas évidente à faire, mais il suffit de voir devant les cours la façon dont, du côté américain, on utilise des règles pratiques de responsabilisation pour aller dire aux juges: Vous ne pouvez pas nous tenir responsables au-delà de ce que prévoit la loi, et ultimement on se dégage de sa responsabilité comme manufacturier.

Cette avenue est trompeuse et nous mettons en garde d'aller dans cette voie. Le «duty of care», qui est l'appellation avec laquelle on la recouvre, qui a été mise en place en Ontario actuellement, qui s'applique uniquement aux agents – on n'a pas encore trouvé les volets pour l'appliquer aux courtiers – est une tromperie manifeste parce qu'on se sert du fait d'avoir des règles précises.

Au Québec, nous avons un code civil. Nous avons la Loi sur les assurances, qui est claire et qui est très large en matière de responsabilité. Il est bien clair qu'aux États-Unis et en Ontario nous n'avons pas cette réglementation du Code civil. On a besoin de certaines règles, mais les règles qui sont adoptées actuellement... J'ai personnellement rencontré des vice-présidents en marketing qui ont élaboré la façon de contourner ou de satisfaire ces règles nominatives claires, elles se résument à trois, et ultimement de pouvoir se déresponsabiliser à l'égard du consommateur.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, monsieur. M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, M. le Président. Dans votre exposé du début, en fait, on retrouve ça à la page 14, au paragraphe 2.1.3, vous parlez du pouvoir décisionnel des manufacturiers. Alors, vous dites: «L'analyse des dossiers précités nous a conduits à une conclusion claire: la présence des manufacturiers au sein d'un organisme chargé de réglementer et d'encadrer les intermédiaires ou la distribution est inappropriée.» Vous dites donc que la «présence est contre nature pour la simple raison que l'objectif de protection du consommateur, d'une part, et les ambitions naturelles et légitimes d'une compagnie, d'autre part, sont souvent difficiles à concilier». Puis vous arrivez en disant, presque une conclusion: «...le manufacturier en revient à ce pour quoi il existe: les profits.» D'abord, je pense qu'il ne devrait pas arriver à cette conclusion-là, il devrait arriver aux profits, bien sûr, mais il y a aussi un service à la société ou un service au consommateur ou à la consommatrice.

Mais, vous, vous ne pensez pas – je me pose la question – que, pour les intermédiaires de marché, eux aussi, qui visent davantage une commission, certains en tout cas, une commission toujours plus élevée, puis qui recommandent même... On nous rapporte qu'ils recommandent même à ces derniers, les consommateurs, le remplacement de polices dont ils étaient très satisfaits. Vous ne pensez pas que les intermédiaires de marché aussi ont une position très délicate? Parce qu'on dit que, chaque année, les Québécois et les Québécoises sont lésés de quelque 150 000 000 $ – ça me paraît un chiffre très élevé – parce que les intermédiaires leur proposent de changer de police, ou quoi, là. Puis c'est les membres de votre Association. Alors, est-ce qu'il n'y a pas là un langage dangereux, pour ne pas dire un double langage, de ne pas vouloir avoir les manufacturiers au sein de votre organisme?

M. Savard (Denis): Je vais demander à Me Gauthier de répondre et j'irai en complément de réponse après.

M. Gauthier (Jacques): Oui. C'est intéressant que vous posiez cette question-là sur la question des remplacements, parce que je peux vous dire qu'il y a un article du règlement d'éthique du Code de déontologie des intermédiaires qui régit les remplacements. Je peux vous dire que le jugement par les pairs lorsqu'un remplacement d'une police est inapproprié, c'est un jugement qui est très sévère et qui est sévèrement condamné et sanctionné. Et je peux vous dire aussi qu'à ma connaissance il n'est jamais arrivé que la compagnie d'assurances qui plaçait la nouvelle police, elle, dénonce son agent pour l'avoir placée, je n'ai jamais vu ça, et Dieu sait que j'en ai plaidé un bon nombre de ces causes-là! Généralement, la dénonciation ou la plainte pour un remplacement inopportun, elle est faite par l'intermédiaire qui s'est fait remplacer. Je n'ai jamais vu la nouvelle compagnie qui place sa police faire la plainte. Or, le «duty of care», ça doit se regarder avec une très, très, très grande loupe.

M. Campeau: Je comprends vos explications, mais on nous rapporte quand même qu'il y en a qui sont faits. Et peut-être que, si on les voyait publiquement, s'ils étaient dénoncés publiquement, ça nous réconforterait, alors qu'on n'en entend pas parler souvent.

M. Savard (Denis): Le comité de surveillance, qui sanctionne les remplacements lorsque le consommateur se trouve lésé, défère sa décision au comité de discipline quand les mesures réglementaires ne sont pas suffisantes vu la gravité de la faute. Le comité de discipline, toutes ses décisions sont publiques. Le comité de discipline, jusqu'à maintenant, a radié à vie un certain nombre d'intermédiaires. Il en a radié plus de quelques centaines sur base temporaire. Quand on parle à l'égard des...

M. Campeau: Ça va.

M. Savard (Denis): Ça va?

M. Campeau: Ça va, M. le Président. Vu que le temps est fini, moi, ça me va. Parfait.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. Il resterait une minute au député de Verdun.

M. Gautrin: Alors, je vais revenir sur les ordres professionnels, et très brièvement. Si vous considérez un ordre professionnel, est-ce qu'il serait à pratique exclusive ou à titre réservé? Vous comprenez la différence? Pratique exclusive, c'est un champ qui vous est réservé complètement. Titre réservé, ça veut dire que c'est le titre que vous défendez, mais, dans le même champ, il peut y avoir d'autres personnes qui agissent. Et, si vous répondez: Oui, c'est à pratique exclusive – parce que je pense que c'est ça que vous allez me répondre – je voudrais savoir comment vous définissez votre champ de pratique par rapport à celui des agents qui sont nécessairement... qui agissent au nom de manufacturiers.

M. Savard (Denis): Effectivement, un ordre professionnel devrait nécessairement être à pratique réservée, mais il faudra définir avec l'ensemble des intervenants soumis à cet ordre, parce qu'il n'y aura pas que des courtiers ni des agents en assurance de personnes... Ça, il faudrait que l'ordre en question regroupe à la fois les conseillers en épargne collective, c'est-à-dire les représentants en fonds mutuels, les planificateurs financiers, les courtiers et les agents de dommages, les courtiers et les agents d'assurances de personnes. Donc, cette pratique serait très diversifiée. Par contre, une réglementation peut prévoir une description précise de l'ensemble de ces pratiques.

M. Gautrin: Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il me resterait le député de La Peltrie, qui avait signalé son intention de poser des questions. Déjà, les deux partis ont dépassé de quelques minutes. Si vous me permettez, peut-être que ce serait intéressant, puisqu'il s'est préparé. Allez donc, M. le député de La Peltrie.

(11 h 40)

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, ma question. Nous savons que les moyens électroniques se développent aujourd'hui très, très rapidement et puis qu'il y a certains produits financiers puis des services qui sont déjà offerts par ces moyens-là. Pourquoi l'assurance serait la seule exception, justement, pour avoir accès à ces moyens-là également? Est-ce que vous pouvez m'expliquer ça rapidement? Ça, ce serait ma première question.

Ma deuxième, c'est justement pour faire suite un petit peu à mon collègue de Crémazie tout à l'heure. Lorsque vous dites dans votre mémoire que, concernant les compagnies d'assurances qui devraient être exclues de l'autoréglementation parce que le but, c'est de faire des profits, mais... en quoi le travail d'un intermédiaire est-il différent? Au fond, j'imagine qu'il doit y avoir une partie de profits aussi qui doit faire partie du travail d'un intermédiaire également. Alors, en quoi la différence existe, s'il vous plaît?

M. Savard (Denis): Je vais répondre à votre deuxième partie de question: Pourquoi il y a une différence? L'intermédiaire... Quand on vous parle de l'organisme, ici, on débat davantage de l'organisme d'encadrement, l'organisme d'encadrement professionnel dont la responsabilité est la protection du consommateur, comme tous les ordres professionnels. L'organisme que nous sommes, l'AIAPQ, a été créé par la loi 134 pour encadrer les intermédiaires pour la protection du consommateur. C'est directement dans cet axe-là. Sur base... Et, comme organisme, c'est très différent de la volonté légitime des manufacturiers de faire des profits. Comme assuré, j'ai besoin que la compagnie d'assurances dans laquelle je place le risque fasse ses profits pour la sécurité de mon placement, pour être sûr qu'ultimement elle va pouvoir m'indemniser. Donc, ce n'est pas contre nature qu'elle fasse des profits, c'est une entreprise de services. L'assurance est le plus vieux produit virtuel du monde. N'allons pas dire que la virtualité, c'est quelque chose de nouveau. L'assurance-vie est un produit tout à fait virtuel.

Les nouveaux moyens auxquels vous faites référence, j'aimerais ça voir ici combien parmi vous se sont assurés par Internet récemment. Je ne pense pas, ce sont des... Lorsque la téléphonie a été inventée – parce que c'est un moyen de communication, Internet – est-ce que ça a empêché qu'il y ait à chaque bout du fil un individu qui échange la communication? Nous, on dit que peu importe... Si le gouvernement du Québec trouve à percevoir des taxes sur les primes des assurances vendues par Internet, nous trouverons bien le moyen de constituer, quand un assureur voudra distribuer au Québec, un cabinet qui sera responsable éthiquement à l'égard du consommateur. C'est ça, l'objectif. Toutes les avenues n'ont pas été explorées, mais ce qu'il faut, c'est garantir la protection du consommateur, quel que soit le moyen de communication.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça va, M. le député?

M. Côté: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie. Maintenant, M. le ministre, pour les mots de conclusion.

M. Landry (Verchères): Simplement pour vous remercier très chaleureusement de votre participation. Vous lancez un petit défi. Vous avez parlé avec conviction. Même quand vous avez parlé de produit virtuel, vous avez parlé avec un certain lyrisme, et je vous crois. Dans ces conditions, je pense qu'on a un problème de langage. Vous avez parlé beaucoup de manufacturiers, et, nous aussi, on en parle dans nos textes. Mais, pour un produit aussi noble et aussi virtuel, on ne pourrait pas trouver une autre expression que celle qui fait appel à la transformation matérielle d'un produit, voire manuelle, si on veut parler d'étymologie? Alors, on pourrait tous se lancer un défi et peut-être avoir recours à des experts en la matière pour que, dans la loi qu'on va faire, on ne parle pas de manufacturiers. Il me semble que le terme est impropre à un produit aussi peu lié à la matière que le vôtre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Savard (Denis): Et la notion qui recouvre tout ça, c'est la création de patrimoine et la conservation de patrimoine.

M. Landry (Verchères): Donc, ce n'est pas de la manufacture.

M. Savard (Denis): Pardon?

M. Landry (Verchères): Donc, ce n'est pas de la manufacture.

M. Savard (Denis): La dimension importante, c'est le conseil, et un conseil... Je pense qu'au Québec, avec les désengagements de l'État, les citoyens du Québec ont de plus en plus besoin d'être en mesure de compter sur des conseillers compétents pour les aider à préparer non seulement leur retraite, mais aussi l'éventualité d'un décès ou d'une invalidité.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. M. le député de Viger, pour les mots de la fin.

M. Maciocia: Oui, merci. M. Savard, sûrement que vos réflexions et vos réponses aux questions qui ont été posées vont enrichir notre réflexion pour arriver à un consensus, je l'espère ardemment, à la fin, pour qu'on puisse arriver toujours, disons, dans l'intérêt de la protection des consommateurs. Merci beaucoup.

M. Savard (Denis): Merci, M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la commission.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci aux représentants de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, et je m'excuse d'avoir un peu pressé ou compressé le temps.

J'inviterais maintenant les représentants de La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec à prendre place. Je suspends pour deux petites, courtes minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 47)

(Reprise à 11 h 50)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, s'il vous plaît! J'invite les membres de la commission à reprendre place. À l'ordre, s'il vous plaît, mesdames... pas mesdames, mais messieurs, puisqu'il y a seulement des messieurs. Messieurs de la commission, je vous invite à reprendre place pour ne pas prendre trop de retard sur nos travaux.

Je souhaiterais, d'abord, la bienvenue à nos invités, les représentants de La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec, et j'inviterais immédiatement son président à nous présenter son mémoire.


La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins du Québec (CCPEDQ)

M. Béland (Claude): Merci, M. le Président. M. le vice-premier ministre, MM. les membres de la commission.

D'abord, laissez-moi vous présenter ceux qui m'accompagnent ce matin. À l'extrême gauche, M. Simon Caron, qui est président de la Fédération des caisses populaires Desjardins du Bas-Saint-Laurent; ensuite, Mme Madeleine Lapierre, qui est présidente de la Fédération des caisses populaires Desjardins de Richelieu-Yamaska; à ma gauche, M. John Harbour, qui est directeur général de La Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins; à l'extrême droite, M. Yvan Caron, qui est président de la Fédération de Québec et aussi président du conseil d'Assurance vie Desjardins-Laurentienne; et, à ma droite immédiate, M. Humberto Santos, qui est président et chef des opérations de la Société financière Desjardins-Laurentienne. Évidemment, derrière moi, il y a les différents présidents des filiales qui constituent le Mouvement Desjardins.

Je tiens d'abord à vous remercier de donner ainsi l'occasion au Mouvement Desjardins de faire entendre son point de vue sur un rapport extrêmement important, le rapport quinquennal concernant la Loi sur les intermédiaires de marché, et, comme le dit si bien le titre de ce rapport, nous devons maintenant relever résolument le défi du changement. On en parle partout, du changement. Effectivement, on vit dans un monde qui est en grand changement, et c'est principalement vrai dans le monde des produits et des services financiers. Les institutions financières évoluent dans un univers où la concurrence est de plus en plus vive et globalisée. Tout à l'heure, on faisait référence aux nouveaux modes de communication. Il est certain qu'on en sent les effets tous les jours.

En peu de temps, les règles du jeu ont considérablement changé. On ne vit plus au temps des quatre piliers financiers cloisonnés d'une façon étanche, et ça, il ne faut pas retourner dans l'antiquité pour retrouver ça, c'était il y a à peine 15 ans. Et, pour qu'elles puissent faire face à ces réalités nouvelles, on a permis il y a quelques années de cela, il n'y a pas tellement longtemps, le décloisonnement de la propriété des institutions financières. L'idée avait été lancée par M. Parizeau à l'époque, reprise ensuite par le ministre Fortier un peu plus tard, où il décidait de favoriser le décloisonnement pour donner plus de muscle, disait-il, aux institutions financières québécoises.

On a alors assisté à des acquisitions, à des fusions, à des regroupements, chacun cherchant à se donner les moyens de mieux affronter les concurrences nouvelles. Ce changement – il faut le dire – a été bénéfique aux consommateurs – les gens ne sont pas en affaires pour nuire aux consommateurs, ils sont là évidemment pour leur rendre service, et le changement a été bénéfique aux consommateurs – et a permis aux institutions financières et aux intermédiaires de marché d'élargir leur champ d'activité. Les chiffres sont là pour le démontrer.

Depuis 1989, qui est l'année de l'adoption de la Loi sur les intermédiaires de marché, les changements continuent à se faire sentir et de nouveaux développements bousculent l'industrie des services financiers. L'évolution toujours accélérée des technologies, la globalisation des marchés, les nouvelles alliances entre les institutions, l'arrivée de nouveaux concurrents de même que les exigences toujours croissantes des consommateurs qui sont beaucoup mieux informés, tout cela exige un remodelage constant de l'offre et de la distribution des produits et services financiers. Une chose est sûre: dorénavant, nous ne pourrons plus nous limiter à recevoir le consommateur en un lieu unique et obligatoire. Ce n'est pas nous qui dictons les règles du jeu. Ce temps-là est complètement révolu.

Aujourd'hui, le consommateur se voit offrir de plus en plus d'occasions de faire des affaires à distance, de sa résidence ou de son lieu de travail, de profiter, en somme, des facilités que mettent à sa disposition les nouvelles technologies: ordinateurs, centres d'appel. Et parfois on ne sait même pas où se situe celui qui nous répond à l'autre bout de la ligne. Et, devant la multiplicité des produits concurrents, le consommateur a appris à comparer – il voit ça sur son écran – à exercer son esprit critique, à faire ses choix en toute autonomie sans nécessairement se préoccuper de faire en sorte que son épargne serve au développement de son milieu.

Pour toute institution financière, surtout pour une coopérative, il importe donc aujourd'hui de rejoindre le membre ou le consommateur là où il se trouve, car, si nous ne le faisons pas, d'autres s'empressent déjà et s'empresseront de le faire à notre place. Dans ce contexte, nous ne pouvons plus envisager un système où il y aurait un modèle unique de distribution, où le consommateur serait obligé de frapper à une porte pour un service, à une autre pour un autre service, et ainsi de suite. Si nous devions imposer un tel modèle, qui est déjà périmé, autant aux intermédiaires de marché qu'aux institutions financières d'ici, ces entreprises seraient vite dépassées de toutes parts par des concurrents qui, eux, ne sont pas soumis aux mêmes contraintes.

Ce qu'il faut désormais dans le monde financier québécois, ce sont des intervenants qui sont en mesure de réajuster constamment leur offre de produits et services et de développer les multiples réseaux de distribution qui s'avéreront essentiels pour la poursuite de leurs affaires. C'est là, selon nous, une condition nécessaire de la pérennité et de la réussite de tous les intervenants québécois.

Le gouvernement, à notre avis, devra donc légiférer de façon à faciliter leur développement en leur permettant de mettre en oeuvre les stratégies qu'ils jugeront eux-mêmes les plus susceptibles de les aider à progresser. Selon nous, il faudra laisser le marché déterminer quel sera l'agencement des différents modes de distribution du système financier. L'enjeu est important, nous devons prendre le virage qui nous permettra d'être tous gagnants.

Heureusement, le gouvernement manifeste clairement, dans le rapport quinquennal qui nous a été soumis, sa volonté de stimuler plutôt que de freiner le dynamisme des entreprises québécoises. Je tiens donc d'abord à souligner que le Mouvement Desjardins appuie tous les grands objectifs qui sont visés par les modifications proposées dans le rapport.

En premier lieu, la protection du consommateur. C'est évidemment le premier objectif. Le rôle le plus important du gouvernement du Québec dans un marché dorénavant ouvert devra être d'assurer la protection du consommateur. Mais cette protection sera davantage assurée par l'application de saines mesures à l'intérieur des divers modes de distribution existants ou à venir plutôt que par la prohibition de certains modes. Un repli à ce chapitre serait néfaste pour le développement du marché financier québécois.

Pour assurer la protection du consommateur, il nous semble que le rôle du gouvernement doit être de veiller à ce que, premièrement, les intermédiaires, y compris ceux oeuvrant dans une institution financière, soient qualifiés et qu'ils possèdent les permis appropriés; deuxièmement, que l'offre de service identifie clairement le producteur de chacun des services – quand on se présente chez Desjardins, par exemple, on sait que ce sont des produits Desjardins qui sont offerts et qui seront offerts; il n'y a pas de cachette dans ça, et je pense que ça doit s'appliquer à tous – et, troisièmement, le client devra être informé des différents chapeaux que porte l'intermédiaire dans le cadre de l'offre de service et d'où il tire ses revenus.

Le Mouvement Desjardins est aussi d'accord avec un deuxième objectif, celui de faire en sorte que le consommateur ait accès aux produits et services financiers au meilleur coût possible. Or, une réglementation trop lourde et tatillonne entraîne, on le sait tous, des coûts supplémentaires que le consommateur finit toujours par assumer. C'est la libre concurrence qui, au contraire, favorise une baisse de coûts. Je pense que l'expérience de la vente des produits d'assurance générale en direct dans les caisses en constitue la meilleure preuve. En 1987, j'ai vécu ça, j'entendais les mêmes arguments que j'entends aujourd'hui: les courtiers vont disparaître, les consommateurs vont se faire avoir, les prix vont augmenter. C'est tout le contraire qui est arrivé, tout le contraire.

D'ailleurs, l'option présentée par le gouvernement à l'effet qu'un seul organisme soit désormais responsable de la réglementation et de la discipline en matière d'intermédiation financière va, selon nous, dans le sens de la simplification et de l'uniformisation préconisées. Une réglementation s'appliquant à tous de la même façon assurera l'équité entre les divers intervenants, ce qui est certainement souhaitable. Nous espérons donc que le changement aille en ce sens, car nous sommes convaincus que cela se ferait au bénéfice des intermédiaires de marché, des institutions financières et, par voie de conséquence, de tous les consommateurs.

Nous appuyons aussi le gouvernement dans son désir d'affirmer et de préserver sa compétence dans le domaine de la distribution des services financiers. Le Québec a exercé un leadership incontestable au pays en matière de décloisonnement du secteur financier. Si, il y a quelques années, il a fallu décloisonner la propriété des institutions financières, ce que le gouvernement du Québec du temps a eu la sagesse de faire, il faut désormais, et cela devient urgent, décloisonner la distribution des services financiers. Le rapport sur lequel nous nous prononçons ici nous rassure quant aux intentions du gouvernement. Nous regardons tous dans la même direction et, à notre avis, c'est la seule bonne.

(12 heures)

Nous nous permettons cependant d'exprimer une réserve quant à l'un des moyens envisagés pour atteindre les objectifs recherchés. Je veux parler ici de l'obligation qui pourrait être faite au Mouvement Desjardins de constituer des cabinets d'agents multidisciplinaires pour la distribution des services d'assurance, de planification financière et de courtage en valeurs mobilières. Appliquée telle que proposée ou telle que nous la comprenons, cette nouvelle obligation nous forcerait à transférer un certain nombre d'opérations des caisses au sein d'une nouvelle structure que nous devrions créer à l'intérieur du Mouvement Desjardins, alors que vous savez tous qu'on nous dit souvent qu'au contraire nous avons dans Desjardins beaucoup trop de structures. Cette proposition s'adapte mal à la réalité coopérative de Desjardins, en plus de contredire l'objectif de réduction des coûts, ce qui est loin d'être négligeable dans un contexte de concurrence accrue de la part de tous les grands conglomérats financiers faisant affaires au pays et où on a justement simplifié au maximum les structures.

Nous pensons que la proposition gouvernementale serait difficile d'application dans une structure aussi décentralisée que Desjardins. Elle obligerait la création d'une nouvelle bureaucratie tout à fait inutile. Ce serait, à notre avis, affaiblir les caisses Desjardins, ce qui, dans le contexte où le nombre des institutions financières sous juridiction québécoise ne cesse de diminuer... Quand je regarde les institutions de dépôts, il y a Desjardins et... il y a Desjardins. Ha, ha, ha! Il n'y en a pas beaucoup, ça diminue de plus en plus. Alors, dans ce sens-là, je pense que ce n'est sûrement pas le meilleur moyen de favoriser le développement de l'économie québécoise et d'assurer la compétence du Québec sur la distribution des produits financiers et sur ses institutions financières, en lui imposant une structure additionnelle.

Moi, je pense que, si Québec veut défendre sa compétence en cette matière, il a tout intérêt plutôt à faciliter la pénétration du marché par les entreprises qui sont soumises à sa juridiction, à faciliter leur essor plutôt que de leur imposer de nouvelles contraintes, contraintes, d'autant plus, qui nous paraissent inutiles parce qu'elles ne protègent pas davantage le consommateur, ne contribuent pas à réduire les coûts et ne facilitent en rien la distribution des produits financiers.

Nous n'avons pas besoin, comme organisation financière, de cabinets multidisciplinaires qui devraient aussi être des cabinets de vente. Les quelque 1 320 caisses Desjardins constituent déjà un réseau de vente suffisant, d'autant plus que ces caisses ne sont pas de simples succursales d'un bureau-chef, elles appartiennent aux gens du milieu, qui en exercent le plein contrôle.

C'est pourquoi nous proposons plutôt au gouvernement que toute institution de dépôts désirant offrir et vendre des produits et services financiers nécessitant la détention d'un permis puisse créer à cette fin un cabinet, un seul, pour l'ensemble du Mouvement Desjardins, un cabinet qui devrait être dûment enregistré au Québec, dont le rôle serait de répondre de la formation et de la compétence des employés agissant à titre d'intermédiaires et qui veillerait au respect des règles déontologiques qui s'appliquent à l'industrie.

Ce cabinet verrait aussi à ce que la réglementation adoptée par l'organisme gouvernemental de surveillance soit appliquée. Ce serait lui, aussi, qui recevrait les plaintes des consommateurs et qui coordonnerait les démarches en vue de leur règlement. De cette façon, nous éviterions de créer une structure additionnelle qui viendrait contredire la mission coopérative de Desjardins, tout en permettant au gouvernement et à tous les distributeurs de services financiers d'atteindre les grands objectifs qui guident la modernisation de la loi.

Je le répète, nous partageons les objectifs du gouvernement en matière de distribution des services financiers au Québec. Nous sommes pour l'équité de traitement entre les institutions financières et les intermédiaires de marché. Nous sommes aussi prêts à partager, avec l'ensemble des intervenants de ce secteur, des règles déontologiques communes ainsi que les attestations requises au plan de la formation de notre personnel. Et, bien sûr, nous voulons que soit assurée le mieux possible la protection du consommateur et que celui-ci, pour tout secours qu'il estime nécessaire, sache clairement à qui s'adresser.

À cet égard, d'ailleurs, j'aimerais faire une mise en garde. Vous avez déjà entendu ce matin et vous entendrez encore au cours des travaux de cette commission nombre de propositions et de commentaires présentés par différentes associations. Et, quoique ces propositions prétendent être uniquement motivées par la volonté d'assurer une plus grande protection du consommateur, je pense que certaines méritent un examen attentif qui démontrera, bien souvent, qu'elles visent surtout la protection des intérêts de ces associations ou encore visent à affaiblir le Mouvement Desjardins. On a l'habitude de ça au Québec: quand on a quelque chose qui réussit, il faut le ramener au dénominateur commun.

Il n'est pas vrai qu'on va améliorer la situation en brisant l'équité de traitement entre les institutions financières et les intermédiaires de marché. C'est faux. Cela se ferait au détriment des consommateurs qui ont déjà fait le choix d'utiliser leur institution financière pour acquérir des produits et des services. Si ça devient trop compliqué au Québec, les consommateurs d'ici n'hésiteront pas à utiliser le téléphone ou encore l'ordinateur pour sortir du Québec et acquérir plus simplement les produits recherchés. Et c'est le marché québécois qui en souffrira, et ce sont les institutions de juridiction québécoise qui en souffriront.

Alors que certains groupes pourront être tentés de se servir de cette tribune pour passer des messages qui ne relèvent pas de cette commission, alors que certains groupes viendront vous parler de fiscalité de Desjardins, de gestion de Desjardins, de surveillance ou de contrôle de Desjardins et des institutions financières, je vous dis que, nous, nous avons voulu nous centrer sur l'avenir du décloisonnement de la distribution des produits et services financiers, et cela, conformément au mandat qui a été confié à cette commission.

En somme, ce que nous disons au gouvernement, c'est ceci: À l'heure de l'ALENA, de la libération du commerce et des services dans le monde, à l'heure des mégafusions bancaires chez nos voisins du sud, à l'heure de l'Internet et de la multiplication des changements rendant difficile toute prévision sur le moyen terme, il faut laisser aux intermédiaires de marché et aux institutions financières d'ici toute la souplesse nécessaire pour qu'elles puissent s'ajuster constamment aux changements qui se succèdent au rythme rapide que vous connaissez.

La concurrence de plus en plus vive à laquelle nous faisons face impose déjà ses propres contraintes. Il ne faudrait pas que la législation et la réglementation deviennent des contraintes additionnelles. Si tel est le cas, les institutions financières qui sont de juridiction québécoise auront du mal à faire face à des concurrents qui jouissent, pour leur part, d'une très grande liberté, et les intermédiaires de marché d'ici devront se faire les vendeurs de produits venant d'ailleurs.

Nous privilégions donc pour l'avenir un environnement qui permettra encore le développement de tous les modes de distribution et qui fera place, encore demain, à tous les acteurs de l'industrie. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le président. Maintenant, je laisse la parole au ministre.

M. Landry (Verchères): Une seule question, M. le Président, au président du Mouvement Desjardins: Lorsque le législateur doit modifier une situation par son action, en termes de lois, ou de règlements s'il s'agit de l'Exécutif, les effets à venir sont toujours l'objet d'une spéculation. Si on fait ça, il peut arriver telle chose, telle chose. Vous, vous en faites une, chose, depuis 1987, vous l'avez bien évoquée. Et, lorsque vous avez commencé à la faire, plusieurs ont évoqué l'Apocalypse ou divers mouvements qui auraient nuit soit aux consommateurs soit à d'autres intérêts.

Vous semblez très content de ce que vous faites depuis 1987. Voulez-vous nous dire en quoi les consommateurs ont été mieux servis? Est-ce que les consommateurs ont apprécié cette formule de distribution? Et qu'est-ce que vous répliquez, vous en particulier, qui êtes très implanté dans les régions du Québec et dans les villages, qu'est-ce que vous répliquez quand on dit que, depuis 1987, 30 % des cabinets de courtage seraient disparus? Et est-ce que c'est un mouvement naturel? Est-ce qu'il est positif ou négatif?

M. Béland (Claude): Bien, je vous dirais que l'expérience qu'on a vécue depuis 1987, oui, on en est content, nos membres en sont très contents, quand on regarde évidemment la progression qu'on a connue. À l'époque, on nous disait que les primes n'allaient pas baisser, que les cabinets de courtiers diminueraient. C'est vrai que le nombre de cabinets de courtiers a diminué parce que, évidemment, ça a forcé les cabinets à s'organiser un peu mieux. Aujourd'hui, les primes sur le marché font que, dans certains cas, même pour l'assureur en direct, on se fait dépasser parfois par la concurrence, même celle qui agit par un courtier.

(12 h 10)

Ce que je peux vous dire, c'est – et je prends les rapports annuels de l'IGIF – qu'on note, par contre, si les cabinets ont diminué... Mais ce n'est pas ça qui est important, c'est le nombre de courtiers. Or, le nombre de courtiers, depuis 1989, a augmenté tant du côté des assureurs-vie que des assureurs en dommages, et le nombre de cabinets multidisciplinaires a fortement progressé ces dernières années, passant de 778 en 1993 à 1 029 en 1996, soit une augmentation de plus de 32 % en trois ans.

Et, quant aux régions, on nous disait: Ça va être terrible, ça va créer du chômage. Bien, c'est le contraire. Notre expérience de la vente en direct – j'ai les chiffres ici, et ça simplement dans le domaine de l'assurance de dommages – démontre qu'au total les employés de notre entreprise ont plus que triplé depuis 1987. On est passé de 450 et, aujourd'hui, c'est 1 625, dont 500 en région, et sans qu'on note, en contrepartie, une diminution du même ordre du nombre de courtiers ou d'agents en assurance générale.

Et j'allais dire: Grâce au réseau de Desjardins, quand même, qui n'a pas été décidé par le bureau-chef mais par les gens du milieu, ça permet à des milieux plus éloignés que les autres d'avoir droit aux mêmes services d'assurance générale sans être obligés de faire 30 km, 50 km pour aller rejoindre un bureau de courtiers. Ça a aidé aussi la distribution des produits d'assurance générale. L'expérience en ce sens-là est extrêmement positive.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais limiter mon intervention sur la question de la formation et sur la question qui touche l'ordre professionnel. Mes collègues interviendront sur le décloisonnement et sur les autres questions.

Sur la formation, dans votre mémoire, vous êtes en faveur d'une formation qui est à la base sur le D.E.C. comme tel, comme élément de base, mais, après, une formation en entreprise et où les examens seraient non pas les mêmes pour tout le monde, donnés par un organisme extérieur, mais gérés par votre propre Mouvement. C'est bien ça?

M. Béland (Claude): Bien, c'est-à-dire à l'intérieur du cabinet multidisciplinaire. C'est ce que nous faisons actuellement, d'ailleurs, oui.

M. Gautrin: Est-ce que vous seriez opposés réellement à ce qu'il y ait, disons, comme il peut y avoir, par exemple, pour le Barreau ou la Chambre des notaires, un examen général donné par un corps extérieur?

M. Béland (Claude): On disait tout à l'heure qu'on appuie la formation qui pourrait être offerte par l'industrie. On ne veut pas de privilège à ce point de vue; on veut la même et on essaie toujours, d'ailleurs, de faire un peu mieux, parce que, aujourd'hui, la formation, c'est un avantage concurrentiel. C'est ce qui fait la différence.

M. Gautrin: Je reviens toujours dans le même type d'intervention que j'avais avec les gens qui étaient avant vous, c'est: Est-ce qu'on pourrait avoir une forme d'ordre professionnel responsable pour au moins la certification de la qualification?

M. Béland (Claude): Je pense qu'il faut faire des distinctions aussi quant aux produits. On avait la même discussion, vous vous souvenez, quand on parlait de l'assurance générale. Quand on vend des polices d'assurance-habitation, des polices d'assurance automobile, des polices qui se vendent aux États-Unis, dans certains États, par guichet automatique, je pense qu'on n'a pas besoin d'avoir un doctorat à l'université.

M. Gautrin: Non, non, on n'est pas...

M. Béland (Claude): Il faut faire des distinctions.

M. Gautrin: Vous exagérez aussi un peu de l'autre côté.

M. Béland (Claude): Mais j'ai dit: Il faut faire des distinctions. Il y a des produits de commodité, et c'est vraiment des produits de commodité qui plaisent énormément à la clientèle et qui peuvent facilement être accessibles chez les intermédiaires de marché ou dans les institutions financières, et qui ne réclament pas nécessairement une formation très poussée. Alors, je pense qu'il faut faire des distinctions à ce point de vue là.

M. Gautrin: Donc, vous répondez en partie à ma deuxième question, qui était... Vous plaidez pour moins de distinction entre les courtiers et les agents. Et, dans votre document, vous dites: Les agents et les courtiers devraient petit à petit être identifiés parce que...

M. Béland (Claude): C'est parce qu'on veut se coller à la réalité.

M. Gautrin: Il faut se coller sur la réalité. Quelle est votre position par rapport à un ordre professionnel des courtiers d'assurances ou des agents d'assurances avec une pratique, un champ de pratique réservé ou exclusif?

M. Béland (Claude): Le Mouvement n'a pas vraiment de position sur cette question-là. Mais notre réaction: je suis sûr que, si j'en parlais à mes collègues, plus on assurerait la compétence du personnel, on serait tout à fait d'accord. Nous, on va se conformer. Comme je le disait tantôt, on ne dirait pas: Nous, on n'a pas besoin des gens... S'il y a un ordre professionnel et que c'est nécessaire que nos employés soient membres de l'ordre, je pense qu'on s'y conformerait.

M. Gautrin: Autrement dit, vous n'avez pas d'objection de principe...

M. Béland (Claude): Non.

M. Gautrin: ...mais vous voulez qu'il soit suffisamment large pour pouvoir inclure à l'intérieur ce qu'on qualifie actuellement d'agents par rapport aux courtiers.

M. Béland (Claude): Exact.

M. Gautrin: Je comprends bien votre position.

M. Béland (Claude): C'est ça.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci, M. le Président. J'ai quelques questions. Par contre, je veux laisser du temps aussi à mes collègues, je vais procéder le plus rapidement possible. Vous dites, au début de votre intervention: Il y a des gens qui sont venus ici; il y en a qui vont venir, qui vont dire un peu toutes sortes de choses. Je pense que vous nous passez le message: Qu'on discerne ce qui se dit. J'imagine que c'est la même chose aussi pour votre groupe, j'imagine.

M. Béland (Claude): Oui, oui. Mais je pense qu'on s'en est tenu au décloisonnement.

M. Bertrand (Charlevoix): O.K. Il y a différentes affirmations qui me chicotent, et je vais en poser deux, trois, quitte à revenir s'il nous reste un petit peu de temps. Sur le cabinet multidisciplinaire, vous êtes d'accord avec un cabinet multidisciplinaire pour les intermédiaires de marché seulement, si j'ai bien compris ce qui est écrit dans le mémoire.

M. Béland (Claude): C'est-à-dire...

M. Bertrand (Charlevoix): Si oui, si vous êtes d'accord avec ça, est-ce qu'à ce moment-là il n'y aurait pas deux règles, c'est-à-dire une pour vous et une autre pour les autres?

M. Béland (Claude): C'est-à-dire, nous, on pense qu'on n'a pas besoin d'un nouveau cabinet pour faire la vente. On dit oui au cabinet multidisciplinaire. On n'en veut pas 1 320, on pense que ce n'est pas nécessaire. On dit: On peut en avoir un qui s'occupe des règles déontologiques, de la formation, etc., mais le réseau de vente, on l'a déjà. Pourquoi faudrait-il passer à travers une nouvelle structure pour offrir ces produits-là? C'est ça, la question qu'on pose.

M. Bertrand (Charlevoix): On parle d'un organisme; il semble se dessiner dans le milieu. Ça semble assez évident, en tout cas, à la lecture des mémoires: s'orienter vers un seul organisme. Par contre, il y en a qui veulent carrément que votre Mouvement cesse de vendre de l'assurance à l'intérieur des caisses. Je pense que ça a été mentionné, vous l'avez mentionné un petit peu aussi. C'est sûr que le gouvernement aura une décision à prendre dans un sens ou dans l'autre.

Vous ne semblez pas être contre la création d'un organisme. Je voudrais savoir: Si le gouvernement optait pour un organisme – on se comprend bien, qui inclurait tout le monde de l'assurance à quelque niveau que ce soit – je voudrais savoir si votre Mouvement accepterait que celles et ceux qui vendent, à l'intérieur de chacune des caisses, de l'assurance, quel que soit le type d'assurance, soient membres de cet organisme-là, qu'ils en paient la cotisation comme tout le monde, qu'ils respectent le même code d'éthique que tout le monde et qu'ils aient la même formation que tout le monde?

M. Béland (Claude): Oui. M. Harbour va répondre à cette question-là.

M. Harbour (John): C'est exactement le cas présentement. Je pense que le groupe avant nous a cité l'exemple des agents d'assurances IARD, qui sont des agents d'assurances qui passent le même permis que tout le monde – qui n'ont pas tous la même formation que tout le monde – parce qu'ils passent les mêmes examens. Je crois que notre président vient de dire que la formation est un avantage concurrentiel. Donc, ils ont la formation Desjardins. Mais je peux vous dire que nos taux de succès sont à 98 %, sur la réussite des examens. Et, sur ce point-là, on ne cherche pas de distinction avec l'industrie.

Ce que notre président dit, c'est très clair: On ne veut pas que, dans chaque caisse, on mette un bureau multidisciplinaire en plus et qu'on fasse du partage de temps de travail pour le multipermis sur nos employés.

M. Bertrand (Charlevoix): Je répète ma question parce que vous n'y avez répondu qu'en partie. C'est vrai que vous passez actuellement un permis dans certains cas. Mais je suis plus spécifique, je veux dire: Et l'assurance-vie et l'assurance de dommages, est-ce que vous accepteriez que ces gens-là soient membres d'une nouvelle organisation ou d'un organisme – appelons-le de n'importe quel titre que ce soit – qu'ils en paient les cotisations sur une base individuelle, que ce soit par la corporation ou autre, qu'ils soient responsables d'une même éthique – à ma connaissance, ce n'est pas le cas actuellement – et qu'ils aient la même formation, même si c'est une formation qui sera déterminée par cet organisme-là pour rencontrer, évidemment, les capacités et les possibilités de chacun?

Et je vais juste un petit peu plus loin en vous disant que ma question ne vise pas nécessairement ou uniquement Desjardins, ma question, moi, c'est dans le sens de dire que, si un jour ou l'autre d'autres vendent de l'assurance, que tout le monde soit sur le même pied et au même niveau.

M. Béland (Claude): Bon. C'est ce qu'on dit, mais, quand on parle de l'organisme, je comprends que c'est chacun des secteurs qui est représenté. Il y en a, comme vous l'avez entendu tout à l'heure, qui voudraient exclure ceux qui sont des concepteurs de produits. Nous, on dit: Non, un seul organisme, mais chaque intervenant va en faire partie.

(12 h 20)

M. Bertrand (Charlevoix): Vous dites: On serait d'accord qu'il y ait un organisme, on aimerait en faire partie, et les quatre conditions que j'ai mentionnées, vous seriez prêts à les respecter.

M. Béland (Claude): Tous les intervenants devraient être là.

M. Bertrand (Charlevoix): Il y a un groupe qui va présenter un mémoire un peu plus tard, et vous ne serez pas là pour vous défendre, vous ne serez pas là pour en débattre. On a toujours, nous, je pense, la commission, le privilège de vous faire revenir pour en parler, mais, compte tenu que je vous ai devant moi, j'aime autant tout de suite avoir vos opinions.

Le groupe, là, des victimes des caisses disent, entre autres: Que le personnel du Mouvement Desjardins vendant de l'assurance soit astreint à des normes et à des exigences de qualification professionnelle similaires à celles des vendeurs d'assurances – donc, c'est ce qu'on vient de traiter – qu'on enlève au Mouvement Desjardins tous les privilèges accordés et qu'on le traite exactement sur le même pied – ça, j'aimerais ça vous entendre – et que le ministre des Finances mette en place dans les plus brefs délais une commission parlementaire ou une commission d'enquête sur l'éthique dans le Mouvement Desjardins. J'aimerais juste vous entendre sur ces deux sujets-là, pour vous donner quand même la chance, là, de...

M. Béland (Claude): Bien, les privilèges, j'aurais aimé qu'on les spécifie, là. C'est facile de dire «des privilèges». Tout le monde nous parle des privilèges de Desjardins. J'aimerais ça les connaître. C'est ça. Autrement, je ne suis pas capable de répondre à la question.

Ce n'est pas un privilège de se conformer à une loi que le Québec a faite en disant: Moi, je veux que mes institutions financières puissent vendre de l'assurance générale dans le réseau des institutions financières québécoises, de juridiction québécoise, mais vous ne le ferez pas avec un employé de la caisse, vous le ferez avec un employé d'une compagnie d'assurances. C'est ce qu'on a fait. Si c'est ça qu'on appelle un privilège, de se prévaloir d'une loi, là, je ne comprends plus.

M. Bertrand (Charlevoix): On pourra, nous, leur demander quelle sorte de privilèges ils veulent dire, c'est bien sûr.

M. Béland (Claude): Oui, c'est ça.

M. Bertrand (Charlevoix): J'imagine que vous n'aurez pas d'objection si on décidait, pour le bien de la commission, que ce serait intéressant de vous faire revenir. Vous allez sûrement accepter. Mais il y a une chose qui est dite là-dedans. Moi, je vous avoue que je suis profondément touché et affecté, puis vous devez l'être vous autres aussi en lisant ce rapport-là. Quand on dit, exemple: Qu'on enlève au Mouvement Desjardins le pouvoir de récompense et que, pour des raisons d'intégrité, aucun transfert de personnel entre les ministères et organismes chargés d'appliquer des lois ou des règlements touchant le Mouvement Desjardins ne puissent avoir lieu à l'intérieur d'une période de cinq ans après la décision d'une personne de changer d'emploi, on sait tous ce que ça veut dire. On ne peut pas nier que ça s'est fait. Au niveau fédéral, il y a déjà des règles. Je veux savoir si vous favoriseriez ce paragraphe-là, qui semble dire: Donnons-nous donc, au niveau du Québec, une espèce de code d'éthique pour les employés du gouvernement.

M. Béland (Claude): S'il en existe un, on va s'y conformer.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Bien, en fait, je voudrais revenir un petit peu sur des sujets qui ont été discutés. Vous parlez, pour l'avenir, disons, de votre accord à vous soumettre aux mêmes règles qui affecteraient les autres intermédiaires de marché. Depuis un certain nombre d'années, vous faites quand même de l'assurance, de l'assurance-vie, tout ça, avec des agents à l'intérieur des caisses. Ce que j'aimerais savoir...

M. Béland (Claude): Pas de l'assurance-vie.

M. Bordeleau: Pas de l'assurance-vie, l'assurance...

M. Béland (Claude): Seulement de l'assurance générale.

M. Bordeleau: O.K. Alors, ce que j'aimerais savoir, c'est quelle est la formation exacte... Vous avez fait référence, vous avez parlé de la formation Desjardins, ça consiste en quoi exactement et de quelle façon cette formation-là, dans le passé, au cours des années... Parce que, pour l'avenir, on en a parlé tout à l'heure. Mais, pour ce qui est du passé, quelle a été la formation des agents, exactement, et en quoi cette formation-là se compare à celle qui nous a été décrite tout à l'heure par les gens qui ont fait la présentation précédente?

M. Béland (Claude): En résumé, c'est la même. Je dirais même qu'on l'améliore parce que, nous, on sait très bien que c'est très important d'assurer la qualité du service; on en fait un peu plus. M. Harbour, d'ailleurs, qui était le président de GDAG, à ce moment-là, pourrait sans doute vous en dire davantage.

M. Harbour (John): Disons qu'on prend une personne. Il y a un cours de formation qui est donné. Dans mon temps, c'était trois semaines. Je crois que c'est rendu maintenant à deux mois de formation. Et, au bout de cette formation-là, dans le milieu de la formation, il passe les examens réglementaires. Comme je vous le mentionnais tantôt, les taux de succès étaient de 99 % dans mon temps, ils sont de 98 % aujourd'hui, pour montrer un peu la qualité de la formation.

Après ça, on complète la formation de nos agents. Nos agents sont mis dans la centrale de télémarketing, supervisés par des agents d'expérience, pour qu'on soit sûr que la formation est bien assimilée, et, après ça, ils sont envoyés dans une caisse pour desservir la clientèle des milieux. Très souvent, ces agents-là proviennent du milieu dans lequel ils vont travailler, oeuvrer après. Et on a un système de formation continue aussi pour la formation: produits, clients, services, motivation de vente, etc.

M. Béland (Claude): Et, si je peux ajouter, quand on fait nos sondages, 97 % de ceux qui sont servis dans l'assurance auto, dans les caisses, 97 % des membres sont satisfaits, 95 % dans l'habitation, et 98 % seraient prêts à recommander ça à leur ami.

M. Bordeleau: Ça va. Merci.

M. Landry (Verchères): Vous avez parlé de l'assurance-vie. Est-ce qu'il n'y a pas la petite exception, quand même, de l'assurance-vie liée à une hypothèque?

M. Béland (Claude): C'est l'assurance collective, là, oui. Oui. Mais c'est une assurance, je dirais, que l'employé de la caisse n'a pas à fignoler ou à modifier. C'est un produit standard, qui est l'assurance-hypothèque qu'on retrouve dans les institutions financières. C'est ça.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui. Merci, M. le Président. M. Béland, vous avez parlé de décloisonnement. Je pense que vous êtes d'accord avec le décloisonnement, c'est clair dans votre mémoire. Plus clair que ça, ça ne peut pas être.

Vous savez sans doute qu'il y a des banques qui ont fait et qui font actuellement beaucoup de pressions auprès du gouvernement fédéral justement pour avoir la même facilité ou les mêmes possibilités que vous dans ce domaine-là. Et vous savez que, à date, le gouvernement fédéral a répondu non à cette demande de la part des banques justement pour... Une des raisons, c'est pour protéger, disons-le clairement, aussi les bureaux de courtage qui sont partout, que ce soit au Québec, que ce soit partout au Canada.

Est-ce que vous seriez, vous – étant donné que vous êtes d'accord avec le décloisonnement – d'accord pour qu'aussi les banques puissent rentrer dans ce domaine-là aux mêmes conditions et avec les mêmes privilèges?

M. Béland (Claude): L'épargne?

M. Maciocia: Les banques.

M. Béland (Claude): Les banques. Ah! Ah, bien non! Moi, je laisse les banques faire leur lobby. Je ne ferai pas de recommandations aux banques. Mais il y a une chose certaine, c'est que, quand le Québec a été avant-gardiste dans ce domaine-là, sur le décloisonnement de la propriété, on a vu ensuite les banques être autorisées à faire le même décloisonnement quant à la propriété. Qu'est-ce qui arrivera quant à la distribution des services? Je ne le sais pas.

Mais je pense que vous avez sûrement regardé les Jeux olympiques il n'y a pas tellement longtemps. Il y avait un commanditaire, une grande banque canadienne qui faisait de la publicité trop souvent à mon goût. Et on n'annonçait pas la banque, on annonçait les services financiers et le nom de la banque. Et vous aviez sur l'écran: assurance générale, assurance-vie, valeurs mobilières, gestion. Tout était là. Même les banques, aujourd'hui, malgré les contraintes auxquelles elles ont à faire face, font du décloisonnement des services financiers. Ça, il n'y a aucun doute. Elles le font par des moyens détournés, mais... L'affichage, c'est: Nous sommes maintenant une banque, et nous ne faisons pas simplement du dépôt et du crédit, de l'épargne et du crédit, nous offrons l'ensemble des services financiers.

M. Maciocia: Mais elles ne vendent pas d'assurances, actuellement.

M. Béland (Claude): Pardon?

M. Maciocia: Elles ne vendent pas d'assurances, actuellement.

M. Béland (Claude): Mais elles ont des compagnies d'assurances qui leur appartiennent.

M. Maciocia: Oui. Oui, mais...

M. Béland (Claude): Et elles les annoncent.

M. Maciocia: Mais elles n'ont pas le droit de le faire à l'intérieur...

M. Béland (Claude): Pas dans la succursale, c'est la seule différence.

M. Maciocia: Exactement, oui.

M. Béland (Claude): Exactement.

M. Maciocia: Ma deuxième question, je vais revenir sur la question du 30 %, dont le ministre a parlé tout à l'heure, de courtiers ou de bureaux de courtage qui sont disparus depuis la loi 134. Vous dites, si j'ai bien compris la réponse, que ce n'est pas vrai et que probablement que ce n'est pas 30 %, que c'est un montant plus restreint ou que ces courtiers-là, si j'ai bien compris la réponse, se sont...

M. Béland (Claude): Regroupés.

M. Maciocia: ...regroupés avec d'autres bureaux de courtage pour, disons, avoir un meilleur service, un meilleur rendement, que ce soit pour les clients ou pour eux-mêmes.

Je doute un peu de cette affirmation parce que je sais pertinemment que, spécialement en région et aussi dans certaines parties de Montréal, il y a des bureaux de courtage qui sont complètement disparus, pas parce qu'ils se sont regroupés avec d'autres bureaux, mais ils sont carrément disparus à cause, justement – et je le répète, spécialement en région – du fait que, dans les succursales des caisses populaires Desjardins, il y avait cette possibilité que la personne en question, qui était à l'intérieur de la succursale, pouvait justement vendre toutes sortes de polices d'assurance.

M. Béland (Claude): Je vais demander à M. Harbour de compléter.

(12 h 30)

M. Harbour (John): Quand on a vu le nombre de bureaux de courtiers, il y a des bureaux de courtiers qui ont été achetés par d'autres; d'autres ont fusionné. Vous savez que les coûts informatiques, maintenant, puis les relations avec les compagnies d'assurances exigent une mécanisation plus poussée. Et, pour avoir les masses économiques, le réseau, qui était très morcelé avant, donc s'est regroupé pour pouvoir faire face aux nouvelles prérogatives du marché. Il y a aussi certains assureurs directs – ce qui n'a pas été trop le cas de Desjardins – qui ont acquis quelques bureaux de courtiers pour augmenter leur pénétration dans certains segments de clientèle. Donc, la disparition pure et simple de bureaux peut être un cas isolé, mais, à ma connaissance, je n'en ai pas vu sur le marché actuellement.

M. Béland (Claude): J'ai le rapport, ici, de l'IGIF, et, en 1993, on avait 12 838 courtiers, et, au 31 décembre 1995, 13 207. Il y en a plus, il n'y en a pas moins.

M. Maciocia: Mais vous savez très bien, M. Béland, que le nombre de courtiers, ça ne veut pas dire qu'il y a, dans le même sens, un nombre x de bureaux de courtage. Des courtiers, c'est sûr qu'ils peuvent encore avoir une licence de courtier et continuer à la payer, cette licence-là, mais sans exercer la profession parce que, justement, ils ont été mis dans cette situation qu'ils ne pouvaient pas compétitionner avec le Mouvement Desjardins. Que ce soit bien clair, je n'ai rien contre ça, mais, seulement, je voudrais quand même que ce soit très clair que cette possibilité qui a été donnée au Mouvement Desjardins a eu des répercussions un peu, si je peux dire, un peu néfastes sur certains, spécialement en région, je répète.

Je peux dire que je suis un courtier d'assurances, que ce soit bien clair, mais je ne me défends pas moi-même parce que, nous, on n'a pas été touchés par cette situation-là du Mouvement Desjardins. Même, je peux dire qu'on a augmenté au lieu de diminuer. Mais je sais pertinemment, par exemple, qu'en région il y a beaucoup de bureaux de courtage, certains bureaux de courtage qui ont été obligés de fermer leurs portes à cause, justement, de l'intervention qui les lie de la part du Mouvement Desjardins dans les succursales. Parce que les gens, ils se rendaient à la succursale et à un certain moment ils se faisaient, si je peux dire, solliciter. Ils se faisaient solliciter pour aller chercher de l'assurance.

M. Béland (Claude): Moi, je ne pense pas que ça soit à cause de l'intervention du Mouvement Desjardins, ça a été probablement à cause de leur incapacité à s'ajuster au marché nouveau. Parce qu'il y en a qui l'ont très bien réussi et qui sont des concurrents coriaces de l'assurance en direct de Desjardins. Il y a des bureaux qui ont réussi, devant la nouveauté, à s'ajuster. Ils le font très bien. Ceux qui n'ont pas réussi ça, évidemment, c'est comme dans tout autre domaine, ils sont disparus.

M. Maciocia: Dans votre mémoire, vous prévoyez, à un certain moment, aussi, si je peux dire, des assouplissements des règles dépendamment du produit qu'on va vendre aux consommateurs. Je pense que, dans la page 4 de votre mémoire, quand vous parlez de la protection du consommateur, vous dites:

«Comme on l'a déjà mentionné au chapitre I, le rôle le plus important du gouvernement est d'assurer la protection du consommateur.

«Pour ce faire, il doit veiller à ce que:

«les intermédiaires soient qualifiés;

«l'offre de services identifie clairement le producteur de chacun des services;

«le client soit informé des différents chapeaux que porte l'intermédiaire dans le cadre de l'offre de service.»

Mais, par après, vous dites: «Il est possible d'assouplir les règles relatives à l'offre de produits et services financiers pour répondre à des besoins minimaux des consommateurs sans négliger leur protection.» Et, au fait, ces activités seraient la référence, la sollicitation ou la cueillette des renseignements pour une autre institution financière. Je pense que c'est un peu à l'encontre de ce que disait un peu le député de Charlevoix quand il vous a posé la question sur si vous étiez d'accord pour que tout soit réglementé et que les mêmes règles s'appliquent pour n'importe quel produit, que ce soit vendu à l'intérieur de, disons... que ce soit de la succursale Desjardins ou dans les bureaux.

M. Béland (Claude): Mais l'assouplissement des règles, c'est de permettre qu'un employé d'une caisse, peut-être, puisse vendre les produits en question en autant qu'il a le permis, qu'il a été qualifié. Ça, c'est un assouplissement. On vous a très bien expliqué tout à l'heure, même les intervenants avant nous, qu'aujourd'hui il faut faire un détour. Il faut que ça soit la compagnie d'assurance générale qui loue un espace dans la caisse, mette un de ses employés. Ça, c'est le statu quo. Évidemment, on n'est pas pour le statu quo parce qu'on pense que ça, c'est dépassé, ces méthodes-là. Pourquoi on n'aurait pas un employé de la caisse, qualifié, qui pourrait vendre ces produits? C'est ça, la question.

M. Maciocia: Mais qui devrait avoir aussi un certificat de compétence, et tout ça?

M. Béland (Claude): Oui, oui, absolument. Ça ne l'empêche pas d'être un employé de la caisse et d'être qualifié par un organisme reconnu qui dit: Oui, il a la compétence pour vendre ce produit ou ces produits-là.

M. Maciocia: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, très rapidement, M. Béland, deux questions précises. Tout comme d'autres, vous êtes assez précis quant à votre recommandation qu'il y ait un seul organisme d'autoréglementation et d'autodiscipline. Certains privilégient le mode nominatif par rapport à la composition des membres, d'autres prévoient le mode électif. Vous autres, vous dites: On souhaiterait que ça soit nommé par le gouvernement. J'aimerais que vous soyez un petit peu plus explicite. Pourquoi vous avez retenu cette option plutôt que le mode électif?

M. Béland (Claude): Bien, je ne sais pas qui peut répondre à ça. Moi, je ne suis pas rentré dans ces détails-là. Oui, monsieur...

M. Harbour (John): C'est parce que, quand c'est un mode électif, la personne s'engage à représenter l'association qui l'a élue pour être sur le comité en question, alors qu'on pense que la personne devrait mettre le chapeau de la table sur laquelle elle est nommée pour représenter cette table-là dans la protection du consommateur et les règles qui doivent régir cette industrie-là. Et c'est pour ça qu'on est allé sur le nominatif plutôt que l'électif.

M. Gendron: Je voulais savoir pourquoi. Deuxième question, je pense qu'on l'a abordée pas mal. Ça ne fait aucun doute que vous souhaitez... pas souhaitez, mais vous indiquez clairement que vous voulez être assujettis aux mêmes règles que tous les autres. Cependant, en termes très précis, s'il y a un officier ou un membre du Mouvement Desjardins, quelque part au Québec, qui vend une assurance-voyage – c'est un exemple précis; ça arrive, ça, vous en avez qui vendent de l'assurance-voyage – est-ce que, selon vous, il devrait être membre de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes? Est-ce qu'il devrait être membre de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes?

M. Béland (Claude): Je vais demander à M. Santos, c'est son domaine.

M. Santos (Humberto): Je pense que M. Béland vous a parlé tout à l'heure du type de produits, et vous avez des produits de convenance et vous avez des produits qui sont beaucoup plus sophistiqués. Et ce que le consommateur nous demande aujourd'hui, vraiment, c'est d'avoir la possibilité, d'avoir l'accès à tous les réseaux de distribution, que ce soit rapidement... La personne qui arrive pour l'agence de voyages, c'est la cinquième fois qu'elle va en Floride, elle sait exactement que c'est 8 $ multiplié par le nombre de jours moins la carte...

M. Gendron: Je n'ai pas de trouble avec ça. Je n'ai pas de trouble avec ça. Je veux savoir: Est-ce que, selon vous, elle devrait être membre de l'Association ou pas?

M. Santos (Humberto): C'est tellement de convenance qu'on n'aura pas besoin de ça. C'est vraiment d'imposer une autre lourdeur pour un produit qui est très de convenance.

M. Gendron: Donc, la réponse, c'est non, et ça fait partie de votre première préoccupation. Il y a des gens qui vont venir nous donner un certain nombre d'indications, mais ça s'apparente davantage à du protectionnisme de leur association qu'au cadre général pour lequel on est mandatés ici.

M. Béland (Claude): Non, non, mais ce n'est pas pour protéger Desjardins, c'est pour la commodité du... Il va aller ailleurs, il va le faire ailleurs, il va l'avoir, la simplicité, ailleurs.

M. Gendron: Ça va. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Très brièvement, parce qu'il n'y a plus de temps tellement. J'ai l'impression que vous êtes d'accord pour avoir un seul organisme réglementaire. Bon. Vous ne vous êtes pas prononcés à savoir si ça devait être un ordre ou pas un ordre. Vous n'étiez pas contre le fait que ça puisse être un ordre.

Néanmoins, il y a eu l'Association des intermédiaires en assurance de personnes, qui était juste avant vous, qui s'est prononcée très clairement, que, sur cet organisme de surveillance, c'étaient des individus qui devaient siéger et non pas – ils les avaient qualifiés – des manufacturiers ou des organismes comme le vôtre et que, éventuellement, si vous aviez des membres, chez vous, qui étaient membres de ce cas, ils seraient évidemment des électeurs, mais, vous, le Mouvement comme tel ne pourrait pas être représenté sur cet organisme. Je voudrais connaître, un peu plus élaborée, votre position sur cette question-là. J'imagine que vous n'avez pas la même position, mais je veux savoir un peu plus vos arguments.

M. Béland (Claude): Bien, c'est-à-dire, nous, on pense qu'on doit faire partie de cet organisme-là, c'est évident, et on pense que ceux qui siègent sur cet organisme doivent être nommés et non pas élus par le Mouvement Desjardins ou le domaine... Oui?

M. Gautrin: Mais pourquoi donc nommer plutôt... On l'a abordé tout à l'heure en réponse au député d'Abitibi-Ouest, mais aussi pourquoi pas... Quels sont vos arguments, à ce moment-là?

M. Béland (Claude): Bien, pour que l'individu en question se prononce en fonction de l'objectif de l'organisme, qui est d'autoréglementer et d'autodiscipliner et non pas d'aller chercher un mandat chez celui qui l'a élu pour savoir quelle position il doit prendre autour de cette table-là. Ça nous apparaît, à ce moment-là, lui enlever beaucoup de liberté. Prenons des gens compétents qui sont capables d'autoréglementer et d'autodiscipliner et laissons-les jouer leur rôle. Autrement, ça fait une table qui n'est pas décisionnelle.

M. Gautrin: Mais regardez, quand même... Si vous me permettez, sans vouloir faire d'argument ici, l'Ordre des comptables, vous avez des comptables, bien sûr, au Mouvement Desjardins et ils sont membres, à titre individuel, de l'Ordre. Vous avez des avocats membres de l'Ordre...

M. Béland (Claude): Oui, oui. Mais là vous n'avez que des avocats et que des comptables.

M. Gautrin: Oui, et...

M. Béland (Claude): Tandis qu'ici c'est très multidisciplinaire.

M. Gautrin: Alors, c'est tout le débat du champ de la pratique et de la pratique dans cet ordre, à ce moment-là, que vous ouvrez.

M. Béland (Claude): Exactement.

(12 h 40)

M. Gautrin: Je comprends.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai d'autres questions. Juste une petite dernière.

M. Gautrin: On pourrait débattre plus longtemps, mais j'ai compris votre point de vue.

M. Bertrand (Charlevoix): Dans le même ordre d'idées...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): ...que le député de Verdun, je voudrais juste aller un petit peu plus loin dans ça. S'il y a un organisme, évidemment, il va y avoir des administrateurs. Dans le mémoire, c'est mentionné qu'ils devront être nommés par le ministre. D'autres vont venir, puis ils vont probablement dire – d'ailleurs, on l'a retrouvé dans plusieurs mémoires, je pense – qu'ils veulent que ce soit choisi par le milieu, etc. Voulez-vous préciser un petit peu plus quand vous dites «nommés»? Vous dites: Nous, on voudrait qu'ils soient nommés. Est-ce que c'est nommé uniquement... exemple, si vous avez droit à un siège, c'est vous autres qui le nommez? C'est le ministre qui le nomme ou c'est...

M. Béland (Claude): Non, non, c'est le ministre.

M. Bertrand (Charlevoix): Vous, vous favorisez que tous les administrateurs...

M. Béland (Claude): La nomination par le ministre.

M. Bertrand (Charlevoix): Tous les administrateurs de l'organisme en question?

M. Béland (Claude): C'est ça. On souhaite une représentation égale des divers groupes au sein du conseil d'administration de ce bureau-là.

M. Gautrin: Et avec, M. le Président, la consultation des organismes, j'imagine, là.

M. Béland (Claude): Ah bien, là! Le ministre, je ne le sais pas, là, ce qu'il fera.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Je pourrais verser des pièces intéressantes, là, au dossier de cette discussion. C'est un cas qui éclaire, je crois. De par mes fonctions, j'avais nommé, le 1er avril 1996, M. Jacques Foucault, en vertu de l'article 64 de la loi, comme membre du Conseil des assurances de personnes, pour deux ans. Et, le 23 septembre 1996, il m'a remis sa démission par lettre en soulignant, à très juste titre d'ailleurs – je crois qu'il est parmi nous ce matin, du reste – qu'il ne pouvait pas concilier le mandat que je lui avais donné avec... Je pense que le mieux, c'est que je lise sa lettre

«Dans votre correspondance, vous me confirmiez une nouveauté par rapport à mes collègues, à savoir que j'y siégeais à titre individuel. Je me suis prêté à l'exercice de bonne foi et je me suis rapidement rendu compte combien il était difficile de concilier votre volonté et celle de l'article 64 de la Loi sur les intermédiaires de marché, à savoir: "Les membres doivent être des personnes en autorité au sein des associations ou groupes qu'ils représentent." Dans le contexte actuel, il m'est difficile de soutenir deux positions totalement différentes.

«En effet, compte tenu de l'importance que j'ai toujours accordée, dit M. Foucault, et que j'accorde toujours au positionnement de la carrière et du rôle primordial que les 13 000 agents et courtiers en assurance de personnes jouent au sein de la société québécoise, il devient difficile de concilier les actions qui doivent être prises pour atteindre cet objectif et l'exercice libre et intègre des responsabilités qui me sont dévolues au Conseil en regard de la protection du public.

«En conséquence, parce que je crois que cette fonction doit être exercée par une personne libre de tout autre intérêt et par solidarité envers mon président, M. Jacques Labrecque, je soumets humblement à votre considération ma démission du Conseil des assurances de personnes.»

Alors, c'est un cas pratique très bien illustré. D'ailleurs, la lettre est très bien faite, avec un très haut niveau d'éthique et un très haut niveau de clarté qui démontre que, ultimement, l'État n'a pas été inventé pour rien. C'est pour synthétiser le bien commun. Il y a dans notre société, et pour le plus grand bien de cette société, divers groupes d'intérêts et associations. La société américaine, immédiatement au sud, a poussé le phénomène jusqu'à l'ultime, de divers lobbys qui font des pressions sur les législateurs individuellement, collectivement, sur l'exécutif, mais il faut ultimement que quelqu'un soit le dépositaire du bien commun. Et la lettre de M. Foucault, de ce point de vue là, fait réfléchir.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bien, s'il n'y a pas d'autres membres qui veulent poser des questions, on pourrait y aller pour les remerciements d'usage. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Bien, je vous remercie beaucoup. On est à court de mots parce que le Mouvement Desjardins, on travaille avec lui quotidiennement. Hier, on s'est rencontrés pour le Sommet, on va sans doute se rencontrer... Ce matin, vous êtes venus témoigner une fois de plus que ce Mouvement, qu'on le veuille ou pas et qu'on aime ça ou pas – et, moi, j'aime plutôt ça – est un rouage essentiel de la vie économique du Québec.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Je vous remercie encore une fois de votre présence, vous et vos collaborateurs et collaboratrices.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre. M. le député de Viger.

M. Béland (Claude): Merci bien.

M. Maciocia: Merci, M. Béland, et merci à vos collaborateurs aussi. C'est sûrement un sujet qu'on va avoir à discuter tout à l'heure quand le gouvernement aura une décision à prendre à ce sujet-là. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Oui, oui, M. le ministre, si vous voulez déposer la lettre dont vous avez pris connaissance.

M. Landry (Verchères): La mienne et celle de M. Foucault.


Documents déposés

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci. Les lettres sont reçues et déposées.

Donc, je remercie également les représentants du Mouvement Desjardins et je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise à 14 h 15)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! À l'ordre, mesdames, messieurs! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux afin de procéder à des consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché, intitulé «La distribution de produits financiers aux particuliers: relever résolument le défi du changement».

Immédiatement, j'inviterais les représentants et représentantes du Conseil des assurances de personnes à nous présenter leur mémoire et j'inviterais M. Massé à nous présenter d'abord les personnes qui l'accompagnent.


Conseil des assurances de personnes

M. Massé (Guy): Merci, M. le Président. M. le vice-premier ministre, Mmes, MM. les députés, le Conseil des assurances de personnes, dont l'unique mission est la protection du consommateur par la surveillance et le contrôle des intermédiaires de marché, est un organisme d'autoréglementation sous la supervision de l'État. À la table du Conseil, on retrouve des représentants des intermédiaires, des compagnies, des consommateurs. Ces personnes sont nommées par le ministre.

Et, pour m'accompagner dans ma présentation, je suis assisté, la première à gauche, de Mme Myrella Beaulieu, directrice générale du Conseil; la deuxième à gauche, de Mme Simone Bilodeau, de l'ACEF Rive-Sud, représentante des consommateurs et présidente du comité sur la réglementation du Conseil des assurances; à mon extrême droite, de M. Jean-Jacques Beldié, représentant des compagnies et vice-président de La Métropolitaine, il est également président du comité de formation du Conseil; et, finalement, à ma droite, de Mme Michèle Barbier, qui représente les intermédiaires, elle est agente en assurance de personnes pour L'Industrielle-Alliance, elle est présidente de notre comité sur le remplacement de polices.

J'aimerais peut-être, au tout début, M. le Président, situer un petit peu le Conseil. D'abord, je voulais vous dire que le Conseil a été créé par la loi 134. Les nominations des membres du Conseil se font évidemment par le ministre. Le Conseil a débuté ses opérations le 1er septembre 1991. La mission unique du Conseil est la protection des consommateurs par la surveillance et le contrôle des intermédiaires de marché.

Alors, le Conseil, concrètement, qu'est-ce que ça fait? D'abord, ça détermine les conditions d'exercice, les conditions d'entrée dans la carrière, les prérequis. On mentionnait tantôt un D.E.C.; c'est le Conseil qui décide ces choses-là, les conditions d'exercice, d'entrée dans la carrière. Il décide aussi de la formation initiale requise, dont la formation de base, pour, par la suite, établir les examens pour les nouveaux intermédiaires qui entrent au stage.

Évidemment, les conditions du stage et l'examen après le stage relèvent du Conseil, ainsi que les règles déontologiques des intermédiaires de marché, les conditions d'exercice telles que faillite, assurance-responsabilité, et ainsi de suite. Toute cette question-là, évidemment, est déterminée par le Conseil.

En son sein, le Conseil a également sous son contrôle le Fonds d'indemnisation et le Conseil sévit aussi dans des cas de pratique illégale. Ça vous donne une petite idée de la structure. L'association, elle, protège les consommateurs par la discipline, l'application des règles établies par le Conseil. Alors, les associations appliquent la discipline selon les règles déontologiques établies par le Conseil.

Depuis 1991, le Conseil a été le forum de décisions basées sur des compromis, des compromis entre les compagnies, les intermédiaires et les consommateurs. Aujourd'hui, c'est avec beaucoup de fierté que je vous présente notre mémoire. Lorsque le rapport quinquennal nous a été soumis, nous nous sommes engagés à respecter trois grands principes pour guider toutes nos discussions. Premièrement, nous nous sommes engagés à faire abstraction des autres et de tous les organismes de réglementation existants pour éviter de tomber dans le piège, évidemment, des jeux de pouvoir. Forts de cinq années d'expérience, nous sommes bien conscients que les organismes en place ne répondent plus aux besoins des attentes de l'industrie. Néanmoins, je veux ici le souligner, les conseils, les associations ont vraiment apporté une contribution précieuse à l'évolution de l'industrie. Par contre, travailler à conserver nos organismes aurait certainement biaisé notre réflexion.

Deuxièmement, nous avons convenu d'orienter nos débats sur des solutions adaptées aux problèmes d'aujourd'hui et capables de supporter les problèmes qu'engendreront les grands bouleversements – puis ils seront grands, les bouleversements qui nous attendent – que l'industrie subira au cours des prochaines années. Ces changements vont transformer la distribution des produits financiers. Ces changements-là sont aussi profonds que ceux qui ont affecté le commerce au détail. Nous étions conscients que la réforme actuelle serait majeure et que, pour nous, il fallait évidemment voir loin et trouver des solutions à long terme.

(14 h 20)

Troisièmement, nous nous sommes contraints à garder à l'esprit que notre unique mission demeurait la protection du consommateur; non pas la protection de nos compagnies, ni de nos agents, ni de nos courtiers, ni celle de nos organismes, chose qui n'est pas toujours facile, faut-il le reconnaître, étant donné que le Conseil est composé d'intermédiaires, de représentants de compagnie et que tous ces gens-là gagnent leur vie tantôt à commission, tantôt, évidemment, par les profits générés par les compagnies. Alors, tout le monde a des intérêts particuliers et tout le monde tire profit du travail de la distribution de l'assurance. Alors, d'une certaine façon, nous étions tous liés aux mêmes intérêts.

Bien entendu, nous favorisions tous la protection du consommateur, surtout lorsqu'il y a peu d'impacts négatifs sur les intermédiaires et sur les compagnies. En d'autres mots, c'est facile de protéger le consommateur. Quand ça coûte peu puis que ça ne dérange pas, il est facile d'être accommodant, généreux puis d'appuyer le consommateur, très facile.

Toutefois, je peux vous affirmer par expérience, lorsque ça touche nos pratiques de vente, notre portefeuille d'agent ou de courtier ou lorsqu'une proposition dérange le profit ou la marge de manoeuvre de nos compagnies, je veux vous dire une chose, on assiste à des déchirements qui ne sont pas faciles. Je peux vous dire en toute franchise combien il est difficile de conserver son objectivité dans ces situations-là. Alors, arrive la grande question classique que j'ai entendue souvent: Est-ce qu'on ne surprotège pas un peu trop le consommateur? Est-ce qu'on ne le prend pas un peu trop par la main? Heureusement, le représentant des consommateurs fait souvent pencher la balance. La présence du consommateur au sein de notre Conseil est un pouvoir moral omniprésent, un pouvoir qui influence tous les membres du Conseil.

Avant de vous livrer notre façon de concevoir l'encadrement, permettez-moi de faire un petit retour en arrière puis de vous situer un petit peu dans l'évolution de la distribution des produits financiers. Je pense que c'est important de se mettre ça à l'esprit. Autrefois, on vendait une police d'assurance pour couvrir un besoin spécifique: une assurance à la naissance, pour les frais funéraires, une assurance le premier jour de son emploi ou encore la veille de ses noces. Et puis, par la suite, le consommateur a été sensibilisé au besoin de programmer l'ensemble de sa protection pour couvrir les besoins de sa famille. Alors, là, les compagnies ont commencé à regrouper diverses protections dans un même produit, puis aujourd'hui c'est extraordinaire comme tout s'intègre, c'est extraordinaire. Puis l'intermédiaire, parce qu'il cumule plusieurs permis, peut désormais, lui, tout offrir.

Parallèlement, on assiste à l'intégration des compagnies, à la création de conglomérats, au regroupement de tous les piliers financiers. À titre d'exemple, tout récemment, vous avez dû lire comme moi dans le journal que les Fonds mutuels Trimark ont acheté une compagnie de fiducie, une petite compagnie de fiducie. Pourquoi? Pour avoir accès au système de compensation bancaire et ainsi pouvoir concurrencer les banques, d'une certaine façon.

Un autre exemple: l'association de la Banque Royale avec IBM afin de profiter de son expertise technologique en matière de distribution directe pour des produits et services financiers, donc pour développer de nouveaux marchés à la grandeur de l'Amérique du Nord. En tout cas, c'est ce qu'ils disaient. Plus proche de nous, rappelons-nous le partenariat créé entre La Métropolitaine et la Banque Nationale. L'objectif de ces conglomérats est d'utiliser tous les canaux de distribution pour une offre intégrée le plus possible de tous les produits et services financiers.

Bien entendu, on déplore que l'encadrement soit demeuré aussi compartimenté. Ainsi, le public, les intermédiaires et toute l'industrie sont aux prises avec des problèmes engendrés par la multiplication des organismes d'encadrement. Imaginez un peu comment ça peut être complexe pour un intermédiaire qui transige avec l'IGIF, l'IQPF, le CAD, le CAP, l'AIAPQ, l'ACAPQ, imaginez-vous un peu. Imaginez-vous la lourdeur et le coût élevé quand il renouvelle tous ses droits de pratique, sans compter les règles particulières s'il a un cabinet. Imaginez maintenant la confusion du consommateur qui souvent ne distingue même pas l'origine des produits qu'il achète et n'a donc aucune idée des recours qu'il a avec chacun de ces produits-là. Autant le système est étanche pour chacun des secteurs, autant on découvre tous les jours des trous qui tombent entre les secteurs. Alors, évidemment, ce phénomène tend à s'accroître au fur et à mesure que la multidisciplinarité augmente.

Alors, en conclusion, pour simplifier le système et bien protéger le consommateur qui acquiert son produit via un intermédiaire de marché, il faut regrouper tous les intermédiaires, quelle que soit leur discipline, sous un seul organisme, avec évidemment un seul fonds d'indemnisation, un seul comité de discipline. On réglerait ainsi une partie de la problématique, du moins.

Mais maintenant qu'est-ce qu'on fait avec les produits vendus sans intermédiaire? On en a parlé ce matin. Ces méthodes-là existent. Je peux vous dire une chose: Elles se développent rapidement. Puis malheureusement elles ne sont pas encadrées. Est-ce qu'il serait pensable d'exiger l'intervention de l'intermédiaire de marché dans toutes les méthodes de distribution? Bien sûr, si on le faisait, ce serait beaucoup, beaucoup, beaucoup plus simple.

Mais, si nous avions, au Conseil, écouté nos sentiments d'intermédiaires, de dirigeants de compagnie, qui sont tous favorables aux intermédiaires – ils travaillent avec les intermédiaires – nous aurions proposé aujourd'hui des contraintes énormes à la distribution directe de produits comme publipostage, télévision, Internet. Pourquoi? Nous aurions tenté d'en réduire l'impact, de la vente de ces produits-là. Puis même, si on poussait un peu plus, on serait même portés à vouloir anéantir l'existence de ces produits-là, parce que, il ne faut pas se le cacher, pour l'intermédiaire comme pour les compagnies qui transigent avec intermédiaires, le direct est très menaçant.

Nous ne l'avons pas fait, parce que nous sommes favorables à la liberté de commerce, parce que nous voulons offrir tous les choix au consommateur, régler cette question-là dès le début, puis on s'est entendus là-dessus. On laisse la porte au consommateur, la liberté complète de se procurer ces produits, même si on sait que la valeur ajoutée du conseil de l'intermédiaire lui est extrêmement précieuse. On ne nie pas ça; au contraire, on en est convaincus.

De plus, nous avons décidé de protéger le consommateur, qu'il fasse affaire avec un intermédiaire ou pas. On ne peut tout de même pas laisser tomber le consommateur quand il se procure ces produits sans nos conseils, hein! Alors, pour encadrer la vente directe sans intermédiaire, nous avions initialement songé... Puis peut-être que la solution, ce serait de créer un organisme indépendant, un autre organisme qui, lui, réglerait cette question-là. Il serait limité à la vente directe. Mais, dès le départ, nous avons éliminé cette idée, parce que, premièrement, on trouvait que ça complexifiait les recours du consommateur – encore d'autres organismes – et, deuxièmement, ça ne tenait pas compte de l'opportunité pour l'intermédiaire de marier les techniques répandues aujourd'hui dans la vente directe avec ses pratiques traditionnelles, ce qui permettrait éventuellement d'augmenter la productivité de l'intermédiaire. Il va y avoir un mariage des deux, à un moment donné, c'est un peu inévitable.

C'est pourquoi nous proposons un modèle d'encadrement qui englobe toutes les formes de distribution, c'est-à-dire le bureau d'encadrement proposé par le ministre, le BDPF, pour que les règles du jeu qui encadrent l'industrie soient équitables pour tous les secteurs de l'activité pour assurer intégrité et neutralité. C'est l'ensemble de l'industrie qui doit établir le grand cadre de la réglementation. Ça ne se fera pas avec une partie de l'industrie, il faut que ça se fasse avec l'ensemble de l'industrie.

(14 h 30)

À cet effet, certains intervenants vous ont fait part dans leur mémoire de leurs objections à ce que les compagnies d'assurances participent à la réglementation. Mais pourquoi donc exclure un participant actif dans la distribution? Et comment peut-on prétendre que les compagnies ne sont pas directement impliquées dans la distribution?

Je vais vous donner un exemple bien concret, tout récent. L'ACCAP, l'Association canadienne des compagnies d'assurances, vient tout juste de proposer des directives aux compagnies au sujet des illustrations de vente, vous savez, les projets de vente que les intermédiaires utilisent pour présenter leurs produits, et ainsi de suite, les illustrations de vente de leurs intermédiaires. Ces directives qui sont proposées vont jusqu'à dire que ces illustrations devraient être signées puis endossées par le consommateur avant que la police soit émise. Voyez-vous, là, la proximité dans la distribution du produit de la compagnie avec la distribution du produit de l'intermédiaire?

Puis ce n'est pas tout. Les compagnies en assurance de personnes, du moins – parce que je sais qu'il y a une différence avec les dommages – recrutent, encore aujourd'hui, plus de 90 % des nouveaux intermédiaires. Ce sont des compagnies d'assurances de personnes qui les recrutent. Ce sont encore les compagnies d'assurances de personnes qui forment, qui les forment, les intermédiaires, sur la connaissance du produit, sur les techniques de vente. En plus, les compagnies d'assurances proposent des stratégies de mise en marché qu'elles supportent par des programmes de promotion de vente, des congrès, des campagnes, et ainsi de suite. Vous voyez l'interrelation, comment c'est proche! Puis ces interventions influencent, sans l'ombre d'un doute, dis-je, le travail de l'intermédiaire.

Et maintenant – je pense avoir démontré que c'est très près l'un de l'autre – les compagnies étant impliquées dans la distribution, comme on vient de le voir, pourquoi les intermédiaires porteraient-ils seuls le poids de la responsabilité de satisfaire le client? Prenons un cas bien concret vécu au Conseil. Il y a quelque temps, une compagnie avait lancé une dynamique campagne de mise à jour du portefeuille d'assurances des clients. Dans les faits, cette campagne était une opération d'incitation au remplacement de polices, contrevenant directement au Code de déontologie des intermédiaires. Rappelons que l'intermédiaire a le devoir de favoriser le maintien en vigueur des polices de ses clients. C'est dans son Code de déontologie.

Nous avons toujours trouvé, au Conseil, inéquitable d'imposer aux seuls intermédiaires le lourd fardeau d'assurer une saine distribution. Si vous saviez combien il est difficile pour certains intermédiaires d'être coincés entre le Code de déontologie et les pratiques de vente mercantiles de leur compagnie. Aussi, le Conseil a convenu qu'il était impératif de responsabiliser les compagnies dans leurs activités de distributeurs, même si on le sait que, dans la plupart des cas, les compagnies ont quand même des hauts standards de déontologie et d'éthique.

Le Conseil s'est penché sur cette problématique et suggère au gouvernement de s'inspirer du modèle en vigueur en Ontario, et bientôt en Saskatchewan, et de l'adapter à la réalité québécoise. Depuis le 1er juillet 1995, les compagnies d'assurances faisant affaires en Ontario sont soumises à une nouvelle exigence, simple, exhaustive, obligation légale, les obligeant à prendre les moyens nécessaires afin de prévenir la conduite répréhensible de leurs intermédiaires. Puis cette responsabilité-là repose sur quatre devoirs. Ce n'est pas 75 règlements, c'est quatre devoirs.

Premier devoir, les compagnies doivent s'assurer que les distributeurs choisis sont aptes à bien servir le client. Actuellement, on le déplore souvent, si l'intermédiaire a un permis ou si l'individu semble avoir... On ne pousse pas toujours bien loin l'analyse du dossier d'un intermédiaire. On dit: Le devoir, d'abord, s'assurer que le choix de l'intermédiaire... soit apte à bien servir le client.

Deuxièmement, elles doivent, les compagnies, établir et maintenir un système suffisamment performant pour s'assurer que chacun des intermédiaires, les nouveaux comme les anciens, se conforme aux dispositions de la loi ou des règlements. En d'autres mots, les compagnies ne peuvent pas dire, les yeux fermés: Je ne sais pas ce qui se passe, ça ne m'intéresse pas. Elles sont obligées d'être attentives puis de s'en occuper.

Troisièmement, elles doivent dénoncer à l'organisme d'autoréglementation tout intermédiaire si elles ont des motifs raisonnables de croire que ce dernier n'est pas apte à exercer son activité. Actuellement, qu'est-ce qui se produit? Un intermédiaire voit la fin de son contrat, souvent pour des causes qui peuvent mettre en question son honnêteté, mais cet intermédiaire-là quitte la compagnie, s'en va ailleurs, est recruté ailleurs. Alors, là, on s'est dit: C'est le devoir de la compagnie de dénoncer cet intermédiaire-là à l'organisme de réglementation pour empêcher qu'il aille se chercher un autre permis dans un autre domaine. Alors, ça, je pense qu'évidemment ça empêcherait les fraudeurs de se promener d'un secteur à un autre et d'une institution à une autre. C'est un problème que l'on déplore depuis de bien nombreuses années.

Finalement, les compagnies ne doivent pas inciter ou elles-mêmes adopter des pratiques qui vont à l'encontre du Code de déontologie des intermédiaires. Là, vous allez peut-être me dire: Bien oui, mais ces nouvelles exigences ne déresponsabilisent-elles pas l'intermédiaire? Non. Au contraire. L'intermédiaire demeure toujours entièrement responsable de ses actes en tant que professionnel. Puis nous croyons que le temps est venu au Québec d'établir la responsabilisation de tous les intervenants dans la chaîne de distribution des produits et services financiers.

Vous savez, la responsabilisation complète et partagée s'impose du sommet de la pyramide jusqu'à la base. C'est toute la beauté du système. Du président de la compagnie à son conseil d'administration jusqu'à l'intermédiaire chez son client, ça se tient. Tous ont une obligation très claire, celle de se préoccuper du client puis d'en prendre soin. Ainsi, parce que nous croyons essentiel de responsabiliser tous ceux qui participent à la distribution, nous proposons d'intégrer au Bureau de la distribution des produits et services financiers le concept de responsabilité complète et partagée.

La responsabilité complète et partagée implique également une modulation – c'est important de définir – de l'encadrement des individus qui distribuent des produits d'assurance, et cette modulation-là doit se faire au niveau du risque encouru par le consommateur. Ainsi, on propose un encadrement tantôt ultraléger quand ce n'est pas requis d'en mettre plus, tantôt grandement élaboré quand c'est important. À titre d'exemple, quand vous achetez une voiture et quand vous allez négocier un prêt hypothécaire, on vous offre automatiquement une assurance couvrant la totalité des paiements en cas de décès.

Le Conseil est conscient que l'offre de ces produits, d'abord, ce qui n'est pas le cas, ça doit être encadré. Il faut encadrer cette opération-là. Cependant, étant donné que l'offre ne devrait porter que sur un seul type de produit et que cette offre ne doit pas être accompagnée de conseils, parce que la personne n'est là que pour expliquer un seul produit, l'encadrement devrait être léger tout en étant efficace. C'est pourquoi le Conseil des assurances de personnes propose que les concessionnaires ou l'institution bancaire qui couvre ce genre de risque soient soumis à l'enregistrement au Bureau de la distribution des produits financiers, qu'ils soient recommandés par un cabinet ou un assureur qui assumera la responsabilité de former, d'encadrer tous ceux qui offrent le produit.

On met la responsabilité... La personne qui fait simplement donner une explication, on ne peut pas commencer à la former. On exige que quelqu'un s'occupe de lui donner un entraînement pour qu'elle reste à l'intérieur, évidemment, de la loi et que cette personne-là ne fasse que donner de l'information. Donc, l'organisme va rejoindre le cabinet qui encadre ou la compagnie qui encadre cette distribution-là. Ces personnes-là devront être inscrites, et ainsi le consommateur aura une protection, ce qu'on appelle l'encadrement ultraléger, si on veut.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Massé.

M. Massé (Guy): Oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si vous me permettez. Votre temps est... Ça fait déjà 27 minutes...

M. Massé (Guy): Ah! Excusez. J'ai presque fini...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ce n'est pas parce que ce n'est pas intéressant, mais c'est parce que je dois protéger aussi le droit de parole des parlementaires.

(14 h 40)

M. Massé (Guy): D'accord. Je vais accélérer. Merci. Pour en venir maintenant à la juridiction du Québec, ça a été une grande préoccupation pour le Conseil et, compte tenu de tous les impacts que l'on sait et que le gouvernement fédéral peut dans les années qui viennent lever l'interdiction d'offrir des produits dans les succursales bancaires, nous acceptons la proposition du mémoire quinquennal à l'effet d'avoir une structure d'encadrement, une structure d'accueil, soit un cabinet pour encadrer ces opérations-là. Bien sûr, nous ne sommes pas d'accord pour qu'il y ait la responsabilité ou le partage de responsabilités, le partage d'activités intermédiaires versus les activités bancaires. On ne veut pas qu'il y ait de mélange, c'est bien évident.

Alors, nous proposons au gouvernement, dans cet ordre-là, de légiférer par fonction. On considère que c'est très important. Si on légifère par fonction, on rejoint toutes les activités d'assurance et de distribution de produits financiers connexes à l'assurance de façon à ne pas perdre la réglementation provinciale.

Alors, je pense que ce que j'ai énuméré rencontre... Je ne voudrais pas réénumérer les points qui ont été proposés par M. le ministre à l'effet de renforcer, optimiser le décloisonnement, réduire les coûts, simplifier, uniformiser. Le Conseil, ayant à l'esprit la protection du consommateur, je vais vous le dire, rejette – puis ça, ça a été très difficile – toute tentation de protectionnisme. Je pense que c'est bien important puis je crois qu'on a répondu à l'invitation et aux objectifs qui nous ont été proposés dans le rapport quinquennal.

Alors, en terminant, je répète que nous croyons que notre industrie a la maturité et la capacité de se discipliner elle-même, cela, pour protéger le consommateur adéquatement. Puis on sait très bien que ce qui est bon pour le consommateur doit l'être pour l'industrie. Je pense que c'est très important.

Il n'est pas facile de prévoir tout ce qui s'en vient, on en est bien conscient, surtout en matière technologique. Je pense que dernièrement c'est Bill Gates qui disait ceci: On surestime Internet dans deux ans, mais dans 10 ans, mes amis, on le sous-estime grandement. Alors, je pense qu'il y a un tas de moyens technologiques, qu'il faut tout de suite commencer à y penser puis essayer de se positionner. Je pense que c'est urgent d'agir puis de la faire, cette réglementation-là. On pense qu'il est possible d'avoir un consensus dans l'industrie. On pense que c'est important. On pense que, dans le respect de chaque participant, on est capable d'arriver à créer un cadre qui va être satisfaisant pour tout le monde.

Alors, je vous remercie de l'opportunité que vous nous avez donnée de nous exprimer, puis je suis prêt, nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Massé, de votre présentation. J'accorde la parole au ministre des Finances pour son questionnement.

M. Landry (Verchères): Nous pouvons nous consoler du fait que vos remarques ont été écourtées par le fait que nous avons le texte et qu'il est aussi passionnant que ce que vous avez dit. On voit que vous considérez ce métier avec beaucoup d'enthousiasme et avec beaucoup de respect pour tous les participants, y compris les consommateurs, et c'est ce qui va expliquer ma seule question. En fait, pour l'essentiel de ce que vous avez dit, ça recoupe les grandes lignes du rapport lui-même, avec des ajustements à faire.

Ma seule question touche précisément la commodité du consommateur, pour prendre un mot simple. Ce n'est pas sa protection, ou quoi que ce soit, mais vous suggérez que, dans le cas des institutions de dépôts, les lieux physiques où se vendent des assurances soient différents du lieu physique où se pratique le commerce du dépôt. J'essaie de visualiser cela parce que, en fait, pour l'instant, on parle de Desjardins et encore de Desjardins... J'essaie de visualiser, pour la commodité du consommateur, ce que ça peut représenter, parce que, dans chaque village du Québec et souvent dans chaque quartier de ville, Desjardins représente un centre financier qui ne déplaît pas aux consommateurs. C'est le moins qu'on puisse dire, c'est la moitié du commerce bancaire du Québec qui se fait là. Pourquoi faudrait-il que le consommateur aille en deux lieux? En quoi serait-il mieux servi et en quoi est-ce que le commerce de l'assurance se ferait mieux?

M. Massé (Guy): Merci de votre question, M. le ministre. L'approche du Conseil est, disons, la suivante: c'est plus dans une approche de transparence, pour permettre au consommateur qu'il réalise qu'il ne s'en va pas là faire une transaction bancaire, mais que ce soit bien une transaction d'assurance ou d'autres produits connexes, que l'encadrement n'est pas le même. Nous voulons que la distribution de l'assurance se fasse toujours sous un chapeau qui soit, par exemple, par un local séparé, mais on n'a pas dit que le local devait être bien éloigné de la succursale, par exemple. Mais je pense que l'idée, c'est que, quand le consommateur franchit le seuil de la porte, ce soit marqué: assurances, services financiers, et ainsi de suite, que ce soit bien identifié, évidemment, pour le consommateur. C'est une question de transparence et de clarté.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Vous êtes responsable de la formation en général, de la validation de la formation.

M. Massé (Guy): C'est de la formation précertification.

M. Gautrin: Précertification.

M. Massé (Guy): C'est la formation de base, parce qu'il y a d'autres organismes qui s'occupent de la formation spécialisée. Nous, c'est la formation de base. Alors, précertification.

M. Gautrin: Et ça se termine comment? Autrement dit, vous faites passer des examens, vous...

M. Massé (Guy): D'abord, un premier examen après une étude sommaire d'un manuel. Après ça, l'intermédiaire devient stagiaire, l'individu devient stagiaire pour une période allant jusqu'à un an. Évidemment, il est pris en main à ce moment-là. La formation qu'il subit, souvent... sa compagnie le forme. Et, par la suite, arrive après son stage... Il est évidemment guidé par un maître de stage. Et, après, il subit un examen qui est conçu pour mesurer son aptitude et son habileté à pouvoir conseiller adéquatement le client, analyser ses besoins et lui faire des recommandations de produits dont il a besoin.

M. Gautrin: Ma question, et j'ai bien compris ça ce matin: Est-ce que, pour les personnes qui sont, par exemple, dans le Mouvement Desjardins qui fait sa propre formation, ce n'est pas vous qui vous occupez des examens?

M. Massé (Guy): Oui.

M. Gautrin: C'est vous qui faites passer les examens?

M. Massé (Guy): Maintenant, il y a une chose qui est importante. Je pense qu'il faut faire une nuance entre ceux qui sont certifiés et ceux qui ne le sont pas. Alors, ce qui se produit, c'est que ceux qui sont certifiés, ce sont les agents et les courtiers, qui sont certifiés, qui sont évidemment encadrés par le Conseil, mais les préposés, les personnes que l'on retrouve dans les caisses qui offrent de l'assurance ou dans les banques qui offrent de l'assurance-prêt hypothécaire, ces personnes-là sont encadrées par les organismes. Le monde de l'assurance ne les encadre pas.

M. Gautrin: Les personnes qui agissent dans une caisse peuvent être certifiées par votre organisme.

M. Massé (Guy): Il n'y en a pas.

M. Gautrin: Il n'y en a pas?

M. Massé (Guy): Il n'y en a pas. Il y en a en assurance de dommages, mais en assurance de personnes il n'y en a pas.

M. Gautrin: J'ai écouté, ce matin, par exemple, le président du Mouvement Desjardins... J'avais bien compris qu'ils avaient un mécanisme de formation interne. J'avais trouvé bizarre qu'il y avait un taux de succès de 98 % aux examens. Mais votre taux de succès aux examens, c'est combien, vous?

M. Massé (Guy): 70 %, 71 %.

M. Gautrin: Voyez-vous? Est-ce que vous avez regardé les examens internes qui se donnent à l'intérieur du Mouvement?

M. Massé (Guy): Je vais vous expliquer. Ce qui se produit... Je pense que ce à quoi on faisait allusion ce matin, c'était sur l'assurance de dommages...

M. Gautrin: Oui.

M. Massé (Guy): ...et ceux qui distribuent l'assurance de dommages doivent évidemment passer l'examen du Conseil des assurances de dommages. Ce que j'ai compris ce matin des pratiques de Desjardins, on disait qu'évidemment on est obligé de former les candidats pour passer les examens du Conseil des assurances de dommages, et l'intervenant disait qu'il ajoute à cette formation-là la formation Desjardins pour donner encore plus d'ampleur aux connaissances des personnes.

M. Gautrin: Donc, ils ont la formation de base que vous leur donnez. C'est ça?

M. Massé (Guy): Alors, ils donnent une formation... En assurance de dommages, chez Desjardins, on suit le même cheminement que tous les courtiers d'assurances et agents d'assurances. Mais eux ajoutent en plus. Mais, aussi, une allusion importante, quand on parle de la formation donnée par Desjardins, peut-être aussi qu'on se réfère à la formation aux préposés, à ceux qui offrent une couverture d'assurance-crédit. Là, ils sont formés par Desjardins. Desjardins, ça n'est pas du tout de notre ressort, et ces personnes-là ne sont pas licenciées, elles sont là pour offrir de l'assurance-crédit aux emprunteurs hypothécaires. Ça, c'est évidemment de la formation tout à fait privée, que ce soit la banque ou Desjardins.

(14 h 50)

M. Gautrin: Comment vous réagiriez ou, du moins, comment le Conseil réagirait à la création d'une corporation ou d'un ordre professionnel pour les courtiers? Et j'ai bien compris que, vous, vous êtes déjà en faveur de la suppression de la distinction entre agent et courtier, j'ai vu ça à l'intérieur de votre mémoire. Donc, la création d'un ordre professionnel pour courtiers et agents, puisque vous voulez qu'ils soient identifiés, par la loi du Code des professions.

M. Massé (Guy): Je veux juste comprendre votre question. Vous voulez savoir ce que je pense...

M. Gautrin: Vous comprenez que, implicitement, il y a actuellement des gens qui donnent des services professionnels. Il existe des mécanismes chargés à la fois de créer un code de déontologie et d'en voir l'application. Il y a des tables sectorielles un peu à cet effet-là. Mais c'est en dehors de quelque chose que l'on a au Québec qui est le Code des professions et les différentes professions qui existent, que ce soient les médecins, les avocats, les dentistes, etc. Comment réagiriez-vous à la création, à l'intérieur d'une nouvelle profession qu'on appellerait celle de courtiers ou d'agents...

M. Massé (Guy): Je comprends bien votre question maintenant. Si on prenait la direction de créer une corporation professionnelle pour les intermédiaires de marché, il resterait à réglementer toutes les autres formes d'assurances. Alors, on devrait, à ce moment-là, multiplier les organismes parce que l'assurance ne se vend pas que par des professionnels, il y a l'assurance qui est offerte sans conseil, et cette assurance-là, on le sait, va prendre beaucoup d'ampleur, elle a commencé à prendre son envol, elle va prendre beaucoup d'ampleur.

Nous, nous avons favorisé une approche où la réglementation de toute forme de distribution, parce que la distribution par courtier, agent, c'est une forme de distribution... Nous avons privilégié l'approche d'un seul organisme qui encadre tout, mais il n'empêche pas, à l'intérieur de cet organisme-là, d'avoir des dispositions particulières pour ceux qui offrent avec conseil. Mais on croit que ça doit être centralisé parce que, comme j'expliquais au début, la grande intégration dans la distribution des produits, la grande intégration, je pense que ça impose qu'on intègre aussi le cadre réglementaire.

M. Gautrin: J'ai une dernière question, M. le Président. Vous avez insisté sur à la fois la responsabilité de l'intermédiaire et la responsabilisation de la compagnie de qui il offre des produits. J'imagine que c'était ce que vous avez voulu dire dans l'annexe 1 de votre document. J'avoue que j'ai essayé de le comprendre et je n'ai pas bien compris. C'est à la page 57 de votre document. Il y a là un carré...

M. Massé (Guy): Oui, c'est très bien.

M. Gautrin: Si vous nous l'expliquiez, ça m'aiderait. Je comprends que ça va toucher ce que vous avez voulu dire dans lequel il y avait une responsabilisation conjointe, mais je n'ai pas compris quand j'ai lu le...

M. Massé (Guy): D'accord. Merci de me donner l'occasion de l'expliquer. Je pense que ce qu'on a voulu imager par ce tableau, c'est que ce que l'on veut faire, c'est proposer au consommateur un bloc de responsabilités. Et on dit: Cette responsabilité, ce bloc de responsabilités se partage en deux. On dit: Si l'individu est un certifié, donc n'est pas un professionnel de l'assurance, ou si le produit est vendu directement sans intervention, publipostage, courrier, à ce moment-là ça illustre que toute la responsabilité tombe sur le dos, évidemment, de l'institution qui offre le produit.

M. Gautrin: Autrement dit, la barre transversale, c'est...

M. Massé (Guy): La barre d'en bas. Alors, la responsabilité institutionnelle, elle est complète en bas du tableau.

M. Gautrin: O.K.

M. Massé (Guy): Plus vous avez des niveaux vers la barre transversale qui recoupe, vous avez le niveau d'intervention, parce que, en bas complètement, on a un niveau de... on pourrait avoir un niveau de ce qu'on qualifie, nous, d'information pure. Aussitôt que le conseil s'enclenche et que le conseil prend de l'ampleur, la responsabilité individuelle augmente, de façon à ce que, quand on arrive en haut, vous avez presque tout l'espace qui tombe sous la responsabilité individuelle de l'intermédiaire.

M. Gautrin: Et, allant de droite à gauche, il y a des moins et des plus. Il y a encore...

M. Massé (Guy): C'est ça, c'est l'institution. Alors, c'est ce principe-là, c'est pour expliquer une chose. C'est que le consommateur, il ne faut pas qu'il ait une protection moindre nulle part. Il faut que le consommateur soit pleinement protégé. S'il n'y a pas d'intervention d'un intermédiaire, l'institution doit prendre tout le poids, toute la responsabilité. C'est ce qu'on a voulu expliquer un peu.

M. Gautrin: Est-ce que vous avez peut-être... Moi, je commence à comprendre un peu mieux, mais pas complètement. Puis je pense que le temps passe. Mais peut-être que vous avez un texte pour expliquer votre graphique ou...

M. Massé (Guy): ...

M. Gautrin: Si vous l'aviez, moi, ça m'intéresse parce que j'essaie de le comprendre. Mais je ne veux pas continuer, parce que je pense qu'il y a d'autres personnes qui veulent poser des questions.

M. Massé (Guy): Je vais faire quelque chose, je vais vous en faire un, texte, pour vous expliquer ce tableau-là de façon plus élaborée.

M. Gautrin: Merci.

M. Massé (Guy): Je suis tout à fait d'accord. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Vous l'enverrez à mon attention, et je le distribuerai aux membres de la commission.

M. Massé (Guy): On peut le faire.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député d'Abitibi-Ouest, vous m'avez demandé la parole.

M. Gendron: Oui, M. le Président. Ce matin, on avait l'occasion d'entendre – je ne sais pas si vous étiez ici, mais, en tout cas, je sais que vous connaissez très bien ces dossiers-là et les sujets que nous allons discuter tout au cours de nos travaux – l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, et je leur demandais... Certains prétendent qu'il y aurait peut-être des pertes pour les consommateurs de 150 000 000 $ suite à des changements de polices pas toujours utiles, polices d'assurance, là. Et, comme il y a quelqu'un qui semble représenter les consommateurs, et vous aussi par l'association que vous représentez, le Conseil des assurances de personnes, je veux dire, la préoccupation de l'intérêt du consommateur est très présente...

Ma question. Ils m'ont dit que, sur le 150 000 000 $, ce n'était pas très crédible parce que c'était américain, ces données-là, puis il y avait toutes sortes de chiffres qui étaient là-dedans. Alors, j'aimerais ça avoir votre avis, vous...

M. Massé (Guy): Je suis content que...

M. Gendron: ...sur l'estimé du 150 000 000 $, puis c'est quoi, votre opinion, vous.

M. Massé (Guy): Je suis content que vous me posiez la question, honnêtement. Je vais vous dire pourquoi, d'où ça vient, ces chiffres-là.

Ici, le problème du remplacement de polices, ce n'est pas nouveau. Ça fait certainement 15, 10 ans... 10, 15 ans qu'il subsiste. Le problème survient lorsqu'un consommateur se voit offrir un produit d'assurance qu'il ne comprend pas et sur lequel il y a des valeurs futures qu'il n'est pas en mesure d'évaluer. Souvent, l'intermédiaire de marché, évidemment, lui propose de modifier ce produit-là pour un autre. Il achète un autre produit d'assurance et il n'est pas du tout conscient des problèmes et des pertes financières que ça lui cause.

Nous avons cherché, au Conseil...

M. Gendron: Que ça lui cause, le consommateur.

M. Massé (Guy): Oui.

M. Gendron: O.K.

M. Massé (Guy): Les problèmes que ça pose au consommateur. Nous avons cherché, au Conseil, à encadrer cette activité-là au mieux, mais c'est toujours difficile à encadrer.

Maintenant, d'où vient le 150 000 000 $. Aux États-Unis... Il n'y a pas beaucoup de monde qui a fait des enquêtes très poussées. Aux États-Unis, une enquête poussée a été faite par l'association des... la fédération des intermédiaires... pardon, la fédération des consommateurs américains, qui a fait une étude. J'ai vu le constat de cette étude-là qui mentionnait que, d'après leurs évaluations à eux, le consommateur perdait aux États-Unis 6 000 000 000 $. Bon.

Maintenant, comment on a transposé ça. Moi, j'ai dit: 6 000 000 000 $, on est le dixième de la population américaine, ça veut dire que ça fait ici 6 000 000 $. Nous sommes maintenant le quart de 6 000 000 $ au Québec, ça fait, évidemment, 150 000 000 $...

M. Gendron: Il vous en manque, là, 6 000 000 000 $.

Une voix: 600 000 000 $.

M. Massé (Guy): Pardon, 600 000 000 $, je m'excuse.

M. Gendron: Bon. Là, ça va aller mieux.

M. Massé (Guy): 600 000 000 $, ce qui veut dire que, si on divise par la population du Québec, ça fait 150 000 000 $.

Maintenant, je pense que le 150 000 000 $ est sous-estimé parce que les études qui ont été faites démontrent qu'au Québec le phénomène du remplacement est beaucoup plus important qu'ailleurs. Alors, au Québec, je vais vous dire quelles statistiques j'ai et je pense que c'est important que vous soyez...

M. Gendron: Oui.

(15 heures)

M. Massé (Guy): ...sensibilisés à ce problème-là parce que, nous autres, on considère que c'en est un grave.

C'est qu'au Québec il y a eu toutes sortes d'études qui ont circulé dans l'industrie à partir des données de compagnies, puis ainsi de suite, mais on le sait que ce n'est pas facile d'aller chercher ces données-là, les compagnies n'ont pas toujours les éléments pour les évaluer. Alors, dans l'industrie, on évaluait ces données-là à autour de 30 %, 35 % des nouvelles polices vendues qui étaient du remplacement. Mais un organisme de recherche très reconnu a fait une étude auprès des consommateurs eux-mêmes, au Québec, et leur a demandé, aux consommateurs: La dernière police que vous vous êtes achetée, c'était dans quel but? Savez-vous quelle a été la réponse? Plus de 50 % des réponses, les consommateurs disaient que c'était dans le but de remplacer une autre police existante.

M. Gendron: Donc, conclusion, rapidement là-dessus. Vous, vous dites que le chiffre est plutôt sous-estimé...

M. Massé (Guy): Oui.

M. Gendron: ...que surestimé et que parce que vous êtes pas mal sûr de l'importance des sommes qui sont en cause, il y aurait lieu de mieux encadrer la notion de substitution de polices et...

M. Massé (Guy): Définitivement.

M. Gendron: Merci.

M. Massé (Guy): Maintenant, et pour le faire – je veux ajouter ceci, et ça a été, je pense, reconnu et dit dans toute l'industrie – on s'est dit dans toute l'industrie: Tant et aussi longtemps qu'on ne trouvera pas une façon de discipliner les compagnies d'assurances, on ne réglera jamais le problème. C'est ça qui a été dit dans l'industrie.

M. Gendron: Merci. J'ai une autre question. L'autre question. Dans votre mémoire, quelque part – ce n'est pas nécessaire de s'y référer, vous allez vous rappeler de ça – vous dites: Le Conseil est d'avis, compte tenu de la complexité du produit – et vous parlez de l'assurance-voyage... et le besoin de conseil qui entoure son acquisition devrait obliger les agents de voyages à acquérir un permis restreint à la vente d'assurance-voyage. Là, je vous avoue que j'ai de la misère à... pas sur ce que vous dites... Je vois mal, moi, la complexité du produit, là. Ou bien je ne comprends pas... C'est quoi, le problème, dans une assurance-voyage? C'est quoi qui est compliqué là-dedans?

M. Massé (Guy): D'accord. Le problème de l'assurance-voyage, c'est surtout pour la partie hospitalisation. C'est que dans ce domaine-là les produits ont évolué de façon extraordinaire. Pourquoi? Évidemment, les besoins ont évolué. Les gens, maintenant, passent quatre, cinq, six mois en Floride, et les compagnies ont développé une gamme de produits différents pour couvrir des besoins différents. Alors, des personnes qui ont tel état de santé, tel genre de produit leur convient mieux, d'autres c'est selon la durée du séjour. On attaque les produits. Or, ce qu'on a comme problème, c'est qu'au départ on ne voulait pas l'encadrer de cette façon-là, mais on a commencé à évaluer le risque pour le consommateur d'acheter un produit d'assurance. S'il s'en va, par exemple, en Floride et puis, évidemment, il tombe malade, il peut se faire ruiner. Puis la personne... On ne veut pas restreindre l'activité. On dit: Il faut au moins former adéquatement puis encadrer de façon un peu plus avancée les gens qui vendent ce produit-là.

Un permis restreint, ça veut dire qu'on les forme à l'assurance-voyage spécialement sur le risque, pour qu'ils soient capables de bien conseiller le client, parce que c'est très important, c'est un domaine qui est assez complexe. Avec toutes les exclusions qu'on a maintenant, c'est assez complexe pour l'individu s'il n'a pas une formation. Je ne dis pas une formation de six mois, là, mais une formation assez... mais ça prend une formation plus poussée qu'un encadrement ultra léger, comme on le définit dans notre... Je pense que c'est important.

M. Gendron: Bien, en tout cas, là, je comprends mieux, mais admettez-vous que ça risque de toucher quand même une catégorie de consommateurs un peu moins démunis que beaucoup de monde? Quand même, les Floridiens à l'année ou six mois, ce n'est pas la majorité de la population.

M. Massé (Guy): Je dois dire qu'il y a beaucoup de gens qui partent dans leur petite roulotte – je vous dis qu'ils n'ont pas des gros budgets – puis qui s'en vont passer plusieurs mois en Floride. Ce ne sont pas les gens les plus privilégiés de la société.

M. Gendron: Bon. Je vais regarder, dans mon comté, un peu plus serré.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le député de Viger, il reste six minutes à votre formation politique.

M. Maciocia: Oui, M. le Président. Sur la question de l'organisme unique, je pense qu'on a posé cette question, je vous la repose à vous cet après-midi aussi: Est-ce que vous préférez que les membres de ce comité ou de cet organisme-là soient des membres élus ou des membres nommés par le ministre?

M. Massé (Guy): Nous avons favorisé un mode mixte avec membres élus et membres nommés, pour essayer de garder un équilibre et tenir compte des réalités actuelles des groupes qui en feraient partie. Alors, c'est l'approche que nous avons privilégiée. Je pense qu'elle a fait l'objet du consensus entre, évidemment, intermédiaires, représentants de compagnies, et nous en sommes venus à ce consensus-là pour que ce soit...

M. Maciocia: Ce serait un mixte d'élus et de nommés.

M. Massé (Guy): Avec un certain nombre de membres qui proviennent des tables sectorielles, parce qu'on s'est dit: Le grand organisme, il doit avoir des tables sectorielles pour étudier et régler des problèmes spécifiques à chaque secteur. Alors, à ce moment-là, les personnes qui iront au conseil d'administration seront élues des tables sectorielles et iront représenter, évidemment, les tables sectorielles et leur secteur. Et, de ces gens-là, il y aura des personnes élues.

M. Maciocia: Élues puis des nommées.

M. Massé (Guy): Et le ministre fera le reste des nominations pour qu'on retrouve à la fois des gens élus et des gens nommés, à la table.

M. Maciocia: Mais, quand on parle du reste nommé, on veut dire quoi exactement?

M. Massé (Guy): Les personnes nommées, évidemment, ce seront les personnes qui représentent le milieu, j'entends nommées à partir de recommandations d'associations de compagnies d'assurances et d'organismes, qui sont tous ceux qui composeront, évidemment, qui seront la représentation ou le miroir de l'industrie à la table, si on veut, du conseil d'administration. Alors, on n'a pas poussé la réflexion beaucoup plus loin parce qu'on a voulu d'abord établir un principe, puis on s'est dit: Là, il y aura une réflexion puis des discussions subséquentes pour savoir jusqu'où on va, de quelle façon... Qui devrait être assis à la table, on n'a pas été jusque-là dans nos discussions.

M. Maciocia: Ça serait toujours sur recommandation des compagnies ou d'autres associations?

M. Massé (Guy): Il y aurait représentation des compagnies puis, pour les gens qui sont membres d'associations, ça pourrait être des gens élus par leur association.

M. Maciocia: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de La Peltrie.

M. Côté: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, vous avez, à la page 27 de votre mémoire, la recommandation 10 qui dit que: «Le Conseil est d'avis que, relativement à la crainte de vente liée, la possibilité de résilier une adhésion dans un délai raisonnable permettrait de contrer quelque peu les effets d'une telle pratique puisque le consommateur aurait ainsi le temps d'évaluer les conséquences de sa décision.» Qu'est-ce que ça constitue, ça? Pour vous, là, c'est quoi, ça, un délai raisonnable, dans ces circonstances?

M. Massé (Guy): Le délai raisonnable, je pense que c'est... Si ma mémoire m'est fidèle, dans le rapport quinquennal, on parlait de, je pense, 30 jours, hein. C'est ça, c'est 30 jours.

Vous savez, d'abord, la vente liée est illégale. Ça, on est bien conscients de ça. Il n'est pas acceptable de faire une vente si on veut forcer la vente d'assurance, bien sûr que non. Mais on sait que parfois elle est très difficile à cerner, la vente liée, à ce moment-là, parce que l'individu qui la fait peut être plus persuasif et plus convaincant et puis, finalement, le consommateur se sent un peu coincé. On dit, à ce moment-là: Si on donne 30 jours, le consommateur a l'option de pouvoir se retirer après puis dire: Je laisse tomber, moi, la couverture de l'assurance. Alors, ça a été l'avenue que nous avons privilégiée, qui était celle qui était proposée dans le rapport quinquennal.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci, M. le Président. J'ai trois, quatre questions rapides. J'aimerais cependant... Ce midi, lorsqu'on est partis, il y a eu, sans qu'on en ait trop, trop connaissance parce qu'on se levait puis on partait, le dépôt des deux lettres dont a fait mention le ministre. Il y a une lettre qui a été lue, celle de M. Foucault, mais il y en a une autre, lettre, qui est celle de M. Labrecque – j'aimerais la lire et j'aimerais, après ça, faire ma première intervention – qui est adressée justement à M. Landry.

«Depuis deux ans, je siège de bonne foi au Conseil des assurances de personnes pour faire progresser la carrière et la protection du public.

«Aujourd'hui, compte tenu de l'utilisation publique que le président du Conseil des assurances de personnes fait des discussions auxquelles j'ai participé, induisant ainsi l'industrie de l'assurance de personnes en erreur face à la position des intermédiaires et de leur Association, je me vois dans l'obligation de vous remettre ma démission à titre de membre du Conseil des assurances de personnes, et ce, à compter de ce jour.»

Ma question est la suivante, elle a deux volets. Un, au président. J'aimerais ça que, pour l'information des membres, ici, on sache un petit peu plus la signification de ces deux lettres-là. Et j'aimerais demander à Mme...

Une voix: Barbier.

M. Bertrand (Charlevoix): ...Barbier si elle a l'intention de démissionner aussi, oui ou non, et le pourquoi...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): ...avant que je pose mes questions concernant d'autres choses.

Mme Barbier (Michèle): Si vous voulez, je peux vous répondre tout de suite en ce qui me concerne. Le rapport qui a été soumis par le conseil d'administration, c'est une continuité de ce que j'ai toujours prôné, c'est-à-dire soit un encadrement qui assure la protection du consommateur, d'une part, une formation continue pour les intermédiaires, assurant ainsi une garantie de professionnalisme, également une responsabilisation de tous les intervenants dans le domaine des produits financiers. Alors, c'est la raison pour laquelle j'ai abondé dans le sens du rapport, du mémoire qui a été soumis par le Conseil des assurances. Nous avons longuement travaillé sur ce mémoire, et je pense que le consensus a été autour de la table.

(15 h 10)

En ce qui concerne, peut-être, la démission de mes confrères, je pense que chacun est libre de prendre les décisions qu'il veut, mais le contenu des lettres qui ont été envoyées, d'après moi, ne concerne nullement le mémoire qui a été envoyé par nous-mêmes. Il ne se rapporte pas au mémoire, il se rapporte à d'autres choses qui ont pu être... M. le Président va vous répondre, je pense, à ce point-là, mais ça ne concerne pas le mémoire.

M. Massé (Guy): Je pense que vous avez là une bonne réponse. C'est vrai. Maintenant, je crois que c'est... Ça ne me surprend pas, dans un sens, parce que je vais vous dire, c'est très difficile, ce n'est pas facile pour des intermédiaires, comme des représentants de compagnies, de travailler. Vous savez, le Conseil, c'est un organisme de consensus, puis, quand on veut faire des consensus, il faut faire des concessions d'abord. Puis, quand vous mettez des gens à faire des concessions pour trouver un consensus, on n'est pas tout à fait assis sur la chaise de l'organisme avec lequel on est lié. Je comprends que des personnes se sentent assises un peu entre deux chaises. Ça, je comprends ça. C'est humain puis c'est normal que certains membres se soient sentis inconfortables, surtout au moment où on est en train d'ouvrir une loi puis qu'on discute d'un sujet aussi important que celui-là. Ça, c'est naturel, ça ne m'étonne pas.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci. Je dirais que ça me satisfait à peu près à 60 % au niveau de la réponse, mais, en tout cas, je vais m'en satisfaire parce que je ne veux pas aller plus loin dans ce domaine-là.

J'aimerais revenir sur l'organisme unique. Je pense que c'est assez évident que vous autres aussi vous recommandez un organisme unique. J'ai deux, trois petites questions alentour de ça. Tantôt, la question a été posée concernant la composition du Conseil. Je voulais la poser, mais je pense que la réponse a quand même été assez claire, il y a une partie qui serait élue et l'autre partie nommée par le ministre, dépendamment, exemple, pour les consommateurs ou autres. Ça m'apparaît assez clair.

Vous revenez, vous autres aussi, en disant qu'au niveau des institutions qui font d'autres services et qui vendent de l'assurance il devrait y avoir quelque chose de différent. J'ai parlé ce matin... Puis je ne veux pas parler, là, exemple, plus de Desjardins que d'autres. J'ai demandé la question au Groupe Desjardins: Est-ce que vous seriez en faveur, si on va vers un groupe unique, est-ce que vous seriez en faveur – puis ma question, je l'élargis – que tous les directs... Et là on inclut, exemple, le groupe Belair et d'autres, là, qui vendent de façon directe, et aussi le Groupe Desjardins. J'ai demandé, ce matin: Est-ce que vous seriez d'accord que les personnes qui ont affaire à vendre de l'assurance soient membres, paient une cotisation, soient responsables au même titre sur l'éthique, et la formation, la même pour tout le monde?

J'aimerais savoir si vous allez jusqu'à penser que, si le gouvernement ne choisit pas, exemple, de faire une différence, tel qu'il est demandé par plusieurs organismes, mais qu'au moins... Parce que, même si le gouvernement disait oui pour un groupe, d'avoir un local séparé, il reste qu'on ne règle pas le problème pour les directs, qui, eux, vendent de l'assurance et qui n'ont pas les mêmes normes: pas obligés d'être membres, pas obligés de payer une cotisation, pas obligés d'avoir un même examen et pas obligés d'avoir la même éthique. Moi, ma suggestion de ce matin était de dire: Toutes les personnes qui ont affaire devraient être dans le cadre. Est-ce que vous pensez que ça devrait aller jusque-là?

M. Massé (Guy): On y a longuement... Et je vais vous dire une chose, notre tentation, là, était d'aller dans cette direction-là. Mais le fait qu'on s'est donné des balises au point de départ, puis les balises, c'était: il ne faut pas être protectionnistes, il faut être, si on veut... il faut laisser la liberté au consommateur de choisir, il faut que l'encadrement soit proportionnel aux risques encourus par le consommateur, on ne peut pas exiger un encadrement comme ça pour une responsabilité très peu définie.

M. Bertrand (Charlevoix): Non, j'ai peut-être mal expliqué ma question ou vous ne la comprenez pas très bien, mais, moi, ça n'a rien à voir avec le choix. C'est simplement que les gens ont un permis, à l'heure actuelle, d'agent, si je comprends bien, pour vendre de l'assurance, mais ne sont pas soumis aux mêmes règles. Alors, moi, ma question est très simple, c'est: Est-ce que... Desjardins, c'est une chose, mais il y en d'autres, des vendeurs directs. On pense à Promutuel, on pense au Groupe Commerce, à Belair, et autres. Est-ce que ces gens-là aussi, si on ne veut pas faire deux poids, deux mesures, devraient accepter que les gens qui vendent de l'assurance dans ces groupes-là soient membres, paient une cotisation, soient responsables sur le plan éthique comme tout le monde et aient une formation équivalente à tout le monde?

M. Massé (Guy): Je pense qu'il faut que les règles soient les mêmes pour tous ceux qui donnent des conseils. Ça, c'est clair. Tous ceux qui donnent des conseils doivent avoir les mêmes règles du jeu, j'en conviens.

M. Bertrand (Charlevoix): O.K. Donc, vous êtes d'accord avec ça.

M. Massé (Guy): Mais, maintenant, ceux qui ne donnent pas de conseils puis qui font... c'est autre chose. C'est ce que je veux dire.

M. Bertrand (Charlevoix): Oui, mais on s'entend bien que les gens que je vous ai mentionnés donnent des conseils et vendent.

M. Massé (Guy): Pour tous ceux qui donnent des conseils, il doit y avoir des règles. Il doit y avoir les mêmes règles.

M. Bertrand (Charlevoix): Ils donnent des conseils et vendent. On s'entend bien là-dessus. Deux autres petites questions...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il faudrait qu'elles soient courtes.

M. Bertrand (Charlevoix): Peut-être que vous l'avez marqué quelque part, mais qu'est-ce qui arrive de l'Institut québécois de planification? Est-ce que vous le voyez à l'intérieur de cet organisme-là ou non?

M. Massé (Guy): Ça doit nécessairement être à l'intérieur, je pense, parce que c'est un domaine qui est intimement lié à la distribution des produits financiers. C'est intimement lié. Alors, on ne peut pas le dissocier, c'est trop rapproché. C'est des mondes...

M. Bertrand (Charlevoix): Je pense qu'eux autres veulent dire dans leur mémoire...

M. Massé (Guy): C'est des mondes parents, si on veut. Oui.

M. Bertrand (Charlevoix): O.K.

M. Massé (Guy): Pourtant, c'est intimement lié.

M. Bertrand (Charlevoix): Une dernière question, juste pour être précis. Où se situe le Conseil dans un nouvel organisme qui regroupe tout le monde?

M. Massé (Guy): Nous, c'est que le Conseil soit fondu avec tous les autres organismes. Le Conseil disparaît. Puis, d'ailleurs, nous avons été le premier ou le seul organisme qui ait dit ici, je pense que c'est à l'occasion d'une commission parlementaire...

M. Bertrand (Charlevoix): Que vous étiez prêts à vous saborder.

M. Massé (Guy): On a dit: Nous, on considère une chose, on est le seul organisme qui ne défend pas sa survie et puis qui ne prêche pas pour sa paroisse, parce qu'on sait que, évidemment, c'est à la mode de ce temps-là. On s'est dit: Nous autres, il faut penser nouveau. C'est un nouveau monde, il faut penser différemment. Puis les organismes sont passés de mode, que voulez-vous. Il faut créer quelque chose de neuf, qui répond aux véritables besoins d'aujourd'hui puis qui est branché sur l'avenir. Alors, on a dit, à ce moment-là: Il ne faut pas protéger nos petites chapelles. Il faut s'orienter sur une vraie structure solide, qui répond aux besoins de l'avenir.

M. Bertrand (Charlevoix): Dans la dernière affirmation, le seul point où, quand même, il faut faire une distinction, mettre un bémol sur votre affirmation, c'est simplement que le Conseil est quand même composé différemment et a un rôle différent des associations qu'il protège. Exemple, que ce soit la carrière ou pour les consommateurs, le regroupement qui protège les intérêts des agents, des vendeurs, des courtiers ou les compagnies qui défendent leurs intérêts, le Conseil est quand même composé de personnes différentes, avec des intérêts différents.

M. Massé (Guy): C'est que le Conseil est composé de personnes de l'industrie, des compagnies qu'on retrouve...

M. Bertrand (Charlevoix): Ce n'est quand même pas les mêmes intérêts que les autres groupes mentionnés.

M. Massé (Guy): Mais c'est le seul intérêt qu'ils ont autour... Le seul objectif du Conseil, c'est la protection du consommateur, puis c'est la seule préoccupation que nous avons. C'est pour ça que nos positions sont différentes des autres.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Charlevoix, pour une bonne compréhension de nos travaux et un meilleur suivi pour ceux et celles qui vont s'y référer, vous avez mentionné tout à l'heure qu'il y avait deux lettres qui avaient été déposées ce matin. Vous nous avez fait part d'une en en faisant la lecture, mais ce n'était pas une des lettres qui ont été déposées ce matin, parce que les deux qui ont été déposées, c'était celle où le ministre confirmait M. Foucault dans ses fonctions comme membre du Conseil des assurances, et l'autre, c'était la démission de M. Foucault, à M. Landry. Donc, si vous voulez que...

M. Bertrand (Charlevoix): Vous allez me permettre de déposer l'autre, dans ce cas-là.


Document déposé

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon. Comme ça, tout sera convenu, et dans le meilleur fonctionnement de la commission.

M. Massé (Guy): Est-ce que je peux déposer un document, s'il vous plaît, qui décrit l'évolution de l'industrie et des produits financiers, qui nous amène un petit peu la base explicative de notre raisonnement?


Document déposé

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Certainement, M. Massé. On ira le chercher.

Il me restait un seul intervenant. Le temps est écoulé. Je ne sais pas si les membres... Il me restait le député de Crémazie qui avait une question à poser. Je ne sais pas si les membres acceptent. Oui. Allez-y, M. le député de Crémazie.

M. Campeau: M. le Président, elle va être très courte. Je voudrais revenir sur le 150 000 000 $. Ça me préoccupe. Je ne voudrais pas qu'on discute de ce 150 000 000 $ là comme d'un détail, ce n'est pas un détail. Qui en profite, du 150 000 000 $? Où est-ce que ça va? Vous arrivez... On dit les chiffres, c'est un sur trois, une vente sur trois se fait comme ça. Là, vous, vous arrivez à une vente sur deux. «My God!» Quelle sorte d'industrie c'est ça? Il est temps de monter aux barricades un peu. Je ne trouve pas qu'on doit le laisser aller puis dire, le traiter comme... Puis je ne vous accuse pas, M. Massé, là, mais je ne voudrais pas le traiter comme un fait banal. Moi, il me semble qu'il faut monter aux barricades, là.

M. Massé (Guy): Monsieur, c'est tellement pas banal qu'actuellement nous avons un comité sur ce sujet-là, un comité sur le remplacement de polices. Mme Barbier travaille sur des approches pour essayer de contrer et de mieux contrôler. Mais je vais vous dire que la seule et unique façon que nous avons trouvée pour contrer ce problème-là, c'est de responsabiliser les compagnies autant que les intermédiaires parce que ça profite aux deux.

M. Campeau: Oui, mais 75 000 000 $, 75 000 000 $...

M. Massé (Guy): Ah! là, par exemple, c'est très difficile à...

M. Campeau: C'est que ça va dans la poche d'individus vendeurs, courtiers.

M. Massé (Guy): C'est sûr que le vendeur en tire un profit, c'est bien évident.

M. Campeau: J'espère que le ministre des Finances en tire une partie aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Massé (Guy): C'est peut-être le seul ici qui en profite de façon importante. Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Il sait de quoi il parle, hein.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On vous remercie, messieurs et mesdames, de nous avoir fait part de vos recommandations et de vos suggestions.

Et, sur le fait même, j'invite les représentants de l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec à prendre place, et je suspends pour deux courtes minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 20)

(Reprise à 15 h 25)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): S'il vous plaît! À l'ordre! Si vous voulez reprendre vos places, la commission va reprendre ses travaux. Messieurs, mesdames, en arrière, s'il vous plaît! Nous vous avons écoutés religieusement; si vous voulez écouter les autres. À l'ordre, s'il vous plaît! Ne m'obligez pas à aller faire un tour en arrière. Ha, ha, ha! Ça va être pire, un peu.

C'est bien. Si les membres de la commission veulent reprendre place, j'inviterais les représentants de l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec à nous faire part de leur mémoire et j'invite M. Michaud à présenter la personne qui l'accompagne et à nous faire part de ses commentaires.


Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec (APEIQ)

M. Michaud (Yves): M. le Président, une fois n'étant pas coutume, je serai relativement bref. Vous avez devant vous un Québécois errant de commission en commission. Je déjeunais au Parlementaire il y a quelques instants et j'ai été mandé presque manu militari pour témoigner demain soir devant le comité du Sénat de la Chambre des communes du Canada au sujet de la loi de 1997 visant à réglementer les institutions financières du Canada. Je dis bien «un Québécois errant de commission en commission» depuis qu'il a eu la terrible, folle, téméraire et aventureuse idée de créer l'Association de protection des épargnants et investisseurs du Québec qui, soit dit en passant, est une première dans l'histoire du Québec, du Canada et, pour autant que je sache et sauf erreur, en navigant dans l'Internet, une première au monde d'une association consacrée à la protection des épargnants et des investisseurs.

Les buts de notre Association sont assez ambitieux: promouvoir une meilleure représentation des petits actionnaires aux conseils d'administration des sociétés par actions, une plus grande démocratie dans le gouvernement d'entreprises, une plus grande transparence dans les sociétés de gestion par actions, une meilleure diffusion d'informations à l'intention des épargnants et des actionnaires, une plus grande responsabilité des dirigeants des sociétés et des institutions financières; faire valoir le point de vue des membres dans les grands débats publics – et c'est ce que nous faisons actuellement – sur le fonctionnement des marchés financiers; constituer un forum pour permettre de discuter des problèmes collectifs de nos membres dans leurs relations avec les sociétés et les institutions financières, et tout cela, bien sûr, de façon bénévole, sans qu'il soit question de gains pécuniaires pour les membres de l'Association et ses dirigeants.

Celui qui m'accompagne, à ma droite, Dieu soit loué! est un docteur en administration, professeur en sciences comptables de l'Université du Québec à Montréal, et qui est d'une puissante et absolument indispensable assistance au lettré que je suis dans un domaine où je suis un béotien, un primaire et un non-instruit. J'ai donc absolument besoin de sa présence pour étayer la présentation de mon mémoire.

Donc, association relativement jeune, puisque mercredi dernier...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mais son nom? M. Bélisle? Belzile?

M. Michaud (Yves): M. Réjean Belzile.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci.

M. Michaud (Yves): Association relativement jeune, puisque mercredi dernier c'était la première assemblée générale de fondation – avant, j'en étais l'administrateur provisoire – et, un peu comme le baptême de Clovis en 496, j'ai été la semaine dernière oint de la souveraineté des élus de notre Association par le baptême et sacré président de l'Association. Donc, c'est à ce titre que je vous parle aujourd'hui, à titre de président formel et souverainement élu des membres de notre Association. Je ne vous parlerai pas du vase de Soissons, je ne vous parlerai pas du fier Sicambre, car ce serait rentrer dans un débat de politique intérieure française, ce que je n'ai pas l'intention de faire.

(15 h 30)

Je disais donc, M. le Président, qu'en trois mois, ou presque, des poussières, le soussigné reprend la route de Québec pour venir témoigner devant une commission parlementaire. Ce voyage a une triple dimension. La première, c'est que c'est un pèlerinage: je reprends le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle comme pèlerin – du temps de M. Duplessis, on appelait ça le «pèlerinage à Québec» – pour y faire entendre les prières de notre Association. Le second: je reprends le chemin de Canossa pour m'excuser humblement d'occuper le temps des élus de la souveraineté populaire. Et enfin, le chemin de Damas pour y voir la révélation tant attendue de l'intervention énergique de l'État, suprême gardien de l'intérêt public dans le secteur des institutions financières et des intermédiaires de marché dans lequel une déréglementation hybride et anarchique a laissé le consommateur des produits financiers souvent presque sans défense et sans voix. J'avais en exergue, et j'ai oublié de le mentionner, cette pensée d'un essayiste anglais du XVIIIe siècle qui prétendait que la perspective d'être pendu concentrait merveilleusement l'esprit du condamné.

Tout ça pour vous dire que laissés à eux-mêmes, sans lois ni maîtres, les hommes se dévorent. Regroupés en sociétés, la loi les civilise, contrôle leurs instincts, les rend parfois meilleurs, quelquefois par bonté d'âme, le plus souvent par la peur du gendarme. C'est le sens de la citation qui ouvre ce mémoire, choisie à contrecoeur et à mon corps défendant, étant un irréductible adversaire de la peine de mort et de la loi du talion.

Énoncé général. L'APEIQ – qui n'est pas l'AIPQ, là, parce qu'il peut y avoir des confusions dans les sigles – l'Association des épargnants et investisseurs du Québec constate avec une satisfaction évidente que le souci de la protection du consommateur financier constitue la toile de fond du rapport du ministère de l'Économie et des Finances relatif à la loi des intermédiaires de marché. Je souligne ici que notre témoignage est de façon presque marginale, incidente par rapport à la Commission des valeurs mobilières du Québec où nous pensons exercer un rôle encore plus important étant donné que nous avons beaucoup plus de surveillance à effectuer au niveau des courtiers qu'à celui des intermédiaires de marché, encore que, comme l'honnête homme du XVIIe siècle, rien de ce qui est humain ne peut nous être étranger et rien de ce qui est protection du consommateur ne doit nous être étranger.

Donc, le décloisonnement des institutions financières, en effet, doublé de la mise en oeuvre de stratégies globales de mise en marché pour les produits financiers, a dangereusement éloigné le consommateur de l'offreur de produits. Au secrétariat de notre Association, rares sont les semaines qui s'écoulent sans que nous entendions des histoires d'horreur à propos de citoyens à revenus modestes floués, détroussés, trompés et, dans certains cas, littéralement ruinés par des prédateurs sans scrupules au service d'institutions financières aveuglées par la seule loi du profit. La déréglementation et la mondialisation des marchés ont ainsi ouvert la voie à un néocapitalisme sauvage, débridé, âpre au gain, dans la plus parfaite indifférence des chantres du néolibéralisme triomphant et du pan-capitalisme à l'égard des consommateurs. Prosternés devant le veau d'or de la mondialisation et obsédés par l'infâme loi du marché, ces mêmes chantres du néocapitalisme cherchent des poux aux plus démunis de notre société, les rendant responsables des malheurs de notre temps.

Les nouveaux maîtres du monde sont désormais les derviches tourneurs – vous savez, ceux-là qui, en haut des mosquées, font les prières devant Allah – de la nouvelle religion du pancapitalisme qui affaiblit les nations, prépare le règne de l'Argent-Roi, destructeur des valeurs de solidarité humaine sur lesquelles ont été édifiés jusqu'à ce jour les fondements de nos démocraties modernes.

Un rééquilibrage s'impose donc d'urgence de sorte que le décloisonnement des institutions financières et le fonctionnement des marchés soient contrôlés par une réglementation rigoureuse des pratiques en matière de distribution des produits, de sorte que le consommateur ne soit plus laissé sans défense et sans voix devant la colossale puissance et la voracité d'institutions carnassières qui sont en passe d'agenouiller les gouvernements et de passer l'intérêt public au compte des profits et pertes.

Depuis toujours, le simple citoyen a été vulnérable face aux institutions financières et au monde de la finance. Cette vulnérabilité s'explique, d'une part, par le manque de formation du consommateur moyen sur le fonctionnement des marchés financiers, les produits qui y sont offerts et les règles du jeu qui y prévalent. Acheter une police d'assurance ou choisir un placement, c'est, pour la majorité d'entre nous, comme confier sa voiture au garage pour la faire réparer: cela demande une bonne dose de confiance qui n'est pas toujours justifiée, mais, comme on dit, on n'a pas le choix. D'autre part, la puissance des acteurs financiers – institutions financières, courtiers, fiducies, sociétés d'assurance et le reste – et la cavalerie lourde des cabinets d'avocats à leur service font en sorte que les éventuels recours d'un consommateur lésé sont, à toutes fins utiles, inexistants.

Avec le décloisonnement des institutions financières et le foisonnement de nouveaux produits qui l'ont accompagné, on a aggravé cette vulnérabilité du consommateur. Cela illustre bien l'insuffisance de son information. Et on a creusé de plus en plus le fossé entre ce dernier, le consommateur, et les mégagroupes financiers qui ont émergé du bouleversement des 10 dernières années. Le consommateur est de plus en plus inconfortable, voire inquiet devant les diverses institutions qui le sollicitent, certaines allant jusqu'au harcèlement financier – et on le voit souvent, ça, au mois de février, où l'on a à souscrire des régimes d'épargne-retraite – par le truchement financier de la publicité. Toutes ou à peu près ont le soi-disant produit miracle taillé sur mesure, entre guillemets, pour répondre aux besoins du consommateur. Quand les institutions financières deviennent des bazars en produits financiers, qu'elles reconvertissent leurs caissiers en vendeurs et que le mélange des genres – conseiller indépendant ou vendeur – menace le monde de la distribution au consommateur, il y a de quoi avoir des frissons dans le dos.

Devant cette foire de produits qui lui sont offerts, le consommateur doit acquérir une meilleure compréhension de la réalité économique et financière qui l'entoure. Rares sont ceux qui savent faire la différence – et nous le constatons, nous, tous les jours – entre une action, une obligation, une action privilégiée et a fortiori une «débenture», anglicisme probablement utilisé pour mieux dérouter les honnêtes gens. Des «débentures», ça n'existe pas en français; il y a des obligations.

Des milliers, que dirions-nous, des centaines de milliers de nos concitoyens croient que leurs avoirs sont protégés jusqu'à concurrence de 60 000 $, que leurs titres soient en actions ou en obligations, dans un régime d'épargne-retraite. Or, ça n'est pas vrai. Il n'y a de protégés que les montants en comptant dans le compte de banque ou les certificats de dépôt, point final, terminé. Des actions, des obligations dans un régime d'épargne-retraite ne sont pas protégées par la Régie de l'assurance-dépôts, mais tout le monde ou à peu près croit qu'elles sont protégées jusqu'à concurrence de 60 000 $. C'est dire la profondeur abyssale de notre ignorance en matière financière. Il importe de remédier à cela.

Le système scolaire devrait assurer à chaque jeune Québécois et Québécoise, probablement à la fin du secondaire, un enseignement de qualité sur les relations économiques et financières – un petit message, en passant, au ministère de l'Éducation. Des organismes de regroupement de consommateurs doivent également faire valoir les intérêts des petits investisseurs et épargnants dans les débats publics et contribuer à parfaire leur éducation en matière financière, ce à quoi nous allons, pour notre part, nous employer, au cours de l'année à venir, en allant dans toutes les régions du Québec et en tenant des séances d'information à l'égard du public, une pédagogie de la formation de base, mais vraiment de base, pour renseigner les citoyens sur les fonctionnements de base du marché. Ce sont là, à titre d'exemple que je viens de donner, deux objectifs majeurs poursuivis par notre Association.

(15 h 40)

Une condition nécessaire au rétablissement d'un meilleur équilibre entre le consommateur et les offreurs de produits financiers est de prévoir dans les lois et réglementations un renforcement de la protection du consommateur, et cela est manifestement visible dans le rapport ministériel qui a été déposé. Sous ce chapitre, je le répète, nous le répétons, nous prenons acte avec une évidente satisfaction que le gouvernement profite de la Loi sur les intermédiaires de marché pour proposer des mesures susceptibles de mieux protéger le consommateur.

La distribution des produits. «Malgré la subsistance de quelques interdictions – lit-on dans le rapport ministériel à la page 12 – les institutions financières deviennent des centres très polyvalents de distribution de produits et services financiers. Également, la fonction conseil aux clients est en train d'y prendre une place toute particulière en étant utilisée pour soutenir la vente de produits et de services financiers.» Fin de la citation.

Comme le souligne pertinemment le rapport, il devient de plus en plus difficile pour le consommateur de savoir s'il est à se faire aider par un conseiller compétent ou à se faire refiler un produit par un vendeur ou un ancien caissier recyclé en 15 jours en conseiller et en planificateur financier, que ce soit dans une banque ou que ce soit dans une caisse populaire. Comme le conclut le rapport, de façon un peu sibylline d'ailleurs, et je cite, «les informations fournies au consommateur peuvent être incomplètes et ne pas lui permettre de prendre une décision éclairée». Fin de la citation. En français, on appelle ça une litote ou un euphémisme. C'est en signifier moins pour en dire beaucoup plus. Nous dirions plus clairement que le consommateur risque d'être sous-informé ou mal informé et mal guidé par des personnes qui n'ont souvent pas la compétence et la formation requises pour vendre ces produits, encore moins pour conseiller le consommateur.

La nécessité d'encadrer ces activités est d'autant plus nécessaire que le consommateur n'est souvent pas en mesure de déterminer, même après coup, et à plus forte raison au moment crucial du choix, si un produit financier n'est pas adapté à ses besoins et objectifs: assurances inutiles, coûteuses, placement non adapté et le reste, et là on pourrait enfiler toute une kyrielle et un cahier de doléances qui n'en finiraient plus. À cet égard, notre Association endosse la troisième option de la section 4.1.2 du rapport, soit de rendre obligatoires l'utilisation d'un cabinet d'agents multidisciplinaire aux institutions financières qui désirent offrir une combinaison quelconque des produits d'assurance, les services d'un planificateur financier, des services de conseil en valeurs mobilières ou les services en valeurs mobilières par l'entremise d'un représentant d'un courtier d'exercice restreint.

Élargissement du champ d'application de la loi. Je termine dans quelques minutes. «La loi, dit le rapport, régira non seulement les intermédiaires de marché, mais aussi tous les distributeurs d'assurance et certains autres produits et services financiers non régis actuellement par la Loi sur les valeurs mobilières, et ce, quel que soit le mode de distribution utilisé.» Pages 22 et 23 du rapport. L'APEIQ souscrit à cet élargissement du champ d'application de la loi qui résultera à un assujettissement de tous les distributeurs de produits financiers à une réglementation uniforme. Cette mesure contribuera à relever le niveau de confiance des consommateurs et permettra de prévenir des abus.

Le document ministériel, le rapport, demeure cependant silencieux au sujet de mesures appropriées pour réglementer la distribution de produits financiers par moyen électronique. Cela a été mentionné tout à l'heure par ceux qui m'ont précédé à cette prestigieuse tribune. Tout se vend maintenant, ou à peu près, sur Internet, incluant des produits financiers, et le vendeur peut fonctionner à partir de n'importe où au monde pour transiger avec des clients également dispersés sur la surface du globe. Ce mode de distribution permet de contourner toutes les lois et réglementations nationales, car aucune infrastructure nationale n'est nécessaire sur Internet. Alors que la vente sans autorisation officielle de certains produits sera impossible ici, au Québec – tels ceux qui offrent des avantages fiscaux, à titre d'exemple – il est maintenant possible de distribuer illégalement des actions et de l'assurance-vie sur le réseau Internet, avec le résultat qu'une compagnie située à l'étranger pourra vendre sur le réseau Internet tout en s'affranchissant de la réglementation et des coûts auxquels sont assujettis les distributeurs nationaux. On peut facilement imaginer l'impact d'une prolifération de ce mode de distribution sur le secteur national de la distribution et de la protection du consommateur.

Nous demandons, nous prions et nous insistons pour que le législateur envisage les mesures à prendre pour éviter le risque d'un scénario où la distribution par moyen électronique devienne la voie royale qu'emprunteraient les requins et les prédateurs pour se soustraire aux lois et abuser les consommateurs.

Autoréglementation et discipline, et je termine là-dessus. Notre Association favorise l'option 1 pour l'encadrement des activités de distribution de produits et de services financiers. La création d'un seul organisme responsable à la fois de la réglementation et de la discipline aura l'insigne mérite d'économiser des coûts tout en assurant une cohérence et une uniformité de traitement pour l'ensemble de l'industrie. Cet organisme, devrais-je insister, appuyer lourdement, devra fonctionner en toute indépendance du marché, c'est-à-dire que les membres doivent être nommés et non élus par le marché, doivent être nommés par le gouvernement, par le ministre, qui est le seul gardien de l'intérêt national et de l'intérêt public au-delà de tous les intérêts corporatifs. Nous insistons là-dessus, pas de membres élus par les corporations professionnelles, mais que le ministre, qui, lui, aura assez d'intelligence, aura assez de ressources pour connaître les vraies personnes, désigne lui-même les personnes qui feront partie de ce bureau.

Enfin, notre Association souhaite que les consommateurs et les organismes les représentant constituent une proportion importante des membres du nouvel organisme à être créé. Ça rejoint d'ailleurs une recommandation du mémoire, du rapport ministériel à cet effet. De plus, comme elle l'a déjà exprimé dans le passé, l'APEIQ considère prioritaire la nomination d'un ombudsman, protecteur du citoyen, qui aurait le pouvoir et les moyens de réaliser des enquêtes suite aux plaintes des consommateurs insatisfaits du traitement de leurs plaintes contre un distributeur de produits financiers.

Je termine là-dessus, avec l'aimable permission des députés et de la commission parlementaire, en renversant un peu les rôles – ha, ha, ha! – si on peut me permettre cela, en posant deux questions qui nous semblent, nous, dans le vague. La première, c'est, dans le rapport du ministre, les relations qui existeront entre l'ombudsman en matière d'intermédiaires de marché et le bureau de protection et de distribution des services financiers. Car nous comprenons que l'ombudsman aura un pouvoir uniquement moral, bien qu'il pourra se reposer et il pourra prélever à la fois des ressources et des appuis sur le plan administratif au Bureau de la distribution des produits et services financiers. Alors, notre question est la suivante: Est-ce que ce Bureau, le BDPF, sera un tribunal administratif? Est-ce que les jugements seront exécutoires? Voilà, en tout cas, pour la loi des intermédiaires de marché.

Puis je ferais peut-être un petit aparté, en terminant, pour ce qui concerne la Commission des valeurs mobilières du Québec, mais ça, on me répondra un peu plus tard. On en a discuté au mois de juin. Il n'est pas prévu d'ombudsman et de protecteur du citoyen, alors que la loi sera amendée en 1997. On se demande quelles seront les mesures que prendra le gouvernement pour assurer la protection des épargnants et des investisseurs là où, plus encore que dans les intermédiaires de marché, ils sont susceptibles de se faire détrousser et avoir par des gens ou sans compétence ou sans scrupules.

(15 h 50)

Je vous ai dit, M. le Président, que je serais relativement bref. Je précise en terminant que tel est notre mémoire, le reste étant verbal. Nous n'avons pas la compétence pour répondre à des questions très spécifiques au domaine des assurances, qui nous est un peu étranger, notre mandat étant plus large, si vous voulez, de protéger les épargnants et les investisseurs, la question des assurances n'étant qu'une partie très faible de notre attention et des activités que nous déployons. Je vous remercie de votre bonne attention.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, M. Michaud, de votre présentation. Et, malgré que vous ayez dépassé de cinq minutes, ça ne nous a pas paru tellement long, juste à la façon dont vous faites votre présentation, façon toujours remarquée et remarquable. M. le ministre, à vous.

M. Landry (Verchères): Bon. D'abord, la proposition qu'on fait quant à cet ombudsman ne vise pas à affubler notre pyramide de contrôles d'un niveau supplémentaire qui serait lourd et coûteux. On veut procéder un peu par analogie avec le Protecteur du citoyen, mais avec des structures beaucoup plus légères, puisque ça ne survient qu'en fin de processus, quand une plainte est jugée, par celui qui la fait, inefficace ou n'ayant pas reçu l'attention qu'elle mérite des nombreuses autres instances. Alors, il ne faut pas s'attendre à une créature lourde et coûteuse. C'est surtout un pouvoir moral, un pouvoir de recommandation, un pouvoir de publicité plus qu'autre chose.

Quant au reste, je pense que vous avez raison d'insister – ce qui est surprenant, c'est que ça vienne d'ailleurs assez tardivement – sur les contrepoids nécessaires dans une société d'économie de marché. Les États-Unis nous ont peut-être donné les exemples les pires et les meilleurs, en ce sens que, eux, ils ont accepté depuis très longtemps l'économie de marché. C'est presque la base, la base constitutionnelle de leur pays. Toute la Constitution américaine pousse à la liberté, aux échanges, et ils ont été obligés plutôt de revenir en arrière par des lois contraignantes tellement la loi générale était libertaire. Mais ils sont habitués au contrepoids. Ils se méfient des gens d'affaires tout en étant la mecque du capitalisme.

On se souvient de la phrase de John Kennedy où il avait dit que... J'oserais à peine la répéter, mais il avait dit que les gens de l'industrie de l'acier étaient des «s.o.b.». C'est dur, le président des États-Unis qui parle à l'industrie nationale qui, dans ce temps-là, n'était pas encore en train de rouiller un peu partout. C'était une force épouvantable. Alors, l'industrie a crié au meurtre. Et puis le président, la semaine suivante, à sa conférence de presse, a dit: Ça, c'est Jos Kennedy, mon père, qui m'avait dit que l'industrie de l'acier était des «s.o.b.», puis je vous l'ai dit. Il a dit: J'y ai bien repensé, puis je pense que c'est ça qu'ils sont, indépendamment de ce que mon père disait. En d'autres termes, le dialogue entre le monde de la finance et des affaires et la population dans un pays qui pratique le capitalisme un peu comme une religion depuis longtemps est un dialogue viril, implacable et dur.

Dans la société québécoise, on est venu tardivement aux grandes affaires, aux grandes banques, aux grandes compagnies d'assurances. C'est des phénomènes qui datent presque de la Révolution tranquille, puis un certain nombre sont dans le secteur public ou semi-public ou dans le secteur associatif. Le Mouvement Desjardins, en 1950, n'était pas une grande puissance financière, c'était une institution paroissiale. Tout ça, aujourd'hui, est devenu très gros dans l'enthousiasme général. On a cultivé les gens d'affaires, on les a adulés, puis on a bien fait, d'ailleurs, parce qu'on en manquait, mais ça a déséquilibré un peu les choses – ha, ha, ha! – et on a fini par leur faire trop confiance. Alors, ça a l'air dur à dire, mais il faudrait redevenir un peu américain et appeler un brigand un brigand, si c'en est un. Il ne faut pas présumer que d'avance ils en sont.

C'est ça, je pense, qui est le mérite de votre Association. Vous avez un peu déchiré le voile du temple et dit: Oui, nous les aimons, les gens d'affaires du Québec, oui, la classe d'affaires a notre admiration, oui, ils sont montés très vite et très loin depuis la Révolution tranquille. Mais, s'ils ne font pas attention aux consommateurs, s'ils ne font pas attention aux gens qui épargnent ça à coups de 50 $ ou 60 $ par mois ou de 400 $, 500 $ par mois et qu'ils voient d'un point de vue de milliardaire la vie des pauvres gens qui perdent des épargnes, à leurs yeux, peu importantes, il faut qu'ils soient défiés et rappelés à l'ordre. Une bonne société d'économie de marché, c'est basé sur des contrepoids, et ce que vous proposez, c'est des contrepoids. Et ce qu'on propose aussi dans notre rapport, ce sont des contrepoids.

Est-ce que je vous lis bien? C'est vrai que ce n'est pas la première fois que je vous entends parler de ça, remarquez. Je voudrais m'en cacher que personne ne me croirait. Mais je pense que c'est ça qui est le sens de votre mémoire.

M. Michaud (Yves): Dans la philosophie générale, c'est cela. C'est bien sûr évident que... Vous parliez, M. le ministre, des Américains. On assiste à un renversement complet des valeurs, aujourd'hui. Les grands bâtisseurs de l'économie américaine, ceux qui étaient honorés comme des dieux... Henry Ford, 200 000 employés, payait bien ses travailleurs pour qu'ils puissent acheter des voitures qui sortaient des chaînes de montage. Aujourd'hui, c'est le monde à l'envers. Le président d'AT&T, American Telephone and Telegraph, 16 000 000 $ annuels de salaire pour avoir mis à pied 40 000 employés. Où est-ce qu'on va? Où est-ce qu'on va dans cette rationalisation? Où est-ce qu'on va dans ce monde des institutions financières qui est devenu sans loi, qui est devenu débridé? C'est un peu pour ça qu'on se bat.

Demain soir, j'irai dans une autre instance, celle-là fédérale, essayer de dire: Mais votre loi des banques, c'est une supercherie, c'est une tromperie. La loi des banques est essentiellement faite en vertu de la protection des banquiers et non des actionnaires qui sont les propriétaires des banques. C'est une juridiction. Pourtant, il y en a beaucoup, parce que les banques veulent vendre de l'assurance. C'est une juridiction extrêmement importante, et il y a des millions ou des centaines de milliers de Québécois qui sont sous cette juridiction-là à Ottawa, la Loi canadienne sur les sociétés par actions, qui est soustraite à l'emprise des lois québécoises, des chartes fédérales. Mais j'essaierai, demain. Pour la première fois dans l'histoire du Canada, quelqu'un ira devant un comité des finances du Sénat pour lui dire: Écoutez, ça n'a pas de sens, vos lois sont... Je ne dis pas qu'elles sont scélérates, je ne dis pas qu'elles sont iniques, je ne dis pas qu'elles sont félonnes, je dis que vos lois sont inopérantes, archaïques, régaliennes, féodales et moyenâgeuses. Il faut changer ça.

Puis il y a un nouveau discours qui de plus en plus se fait dans le Québec, des gens comme vous et moi. Quand je vous dis que nous recevons, nous, tous les jours, des histoires d'horreur, des plaintes de pauvres citoyens... Pour l'instant, bien, nous comptons sur une petite feuille d'écolier les misérables sous qui nous proviennent. Je remercie, en tout cas, j'en profite pour remercier le ministre de nous avoir envoyé quelque obole pour démarrer notre Association. On lui a passé la sébile, et il a volontiers déposé un louis d'or.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Alors, j'espère bien... Et il ajoute en plus dans sa lettre que ce qu'il donne ne sera pas récurrent.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Je dois vous dire, M. le ministre, que vous m'avez fait peine.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Si tant est qu'un jour nous ayons encore recours ou besoin de vos modestes contributions, peut-être pourriez-vous penser à «récurrer».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): C'est une prière. Mais enfin, c'est un grand débat de société qui s'ouvre, hein, et qu'on essaie d'ouvrir, justement. Nous ne sommes pas contre le capitalisme, loin de là. Les plus grands alliés du capitalisme en Europe – je pense à l'Allemagne – sont les syndicats qui négocient des partenariats avec les patrons, qui justement ont négocié avec le patronat allemand la baisse du temps de travail avec perte de salaire pour créer des emplois. J'ai vu dans les journaux que c'était une voie, ça, qui semble intéresser, en tout cas, les pouvoirs publics actuels. Mais c'est démentiel de penser que les syndicats sont contre les patrons. Mais non! Ce sont les associés du capitalisme. Mieux un travailleur est payé, mieux il peut acheter des biens de consommation et faire tourner la roue de l'économie, etc.

(16 heures)

Tout ça, ce sont des débats de société. Mais il y a un autre débat de société qui s'en vient – et là les cheveux vont vous dresser sur la tête, même ceux qui n'en ont pas – c'est la fuite de nos épargnes vers l'étranger. L'être le plus extraordinaire que j'ai rencontré de ma vie – un des – qui s'appelle Rosaire Morin, directeur de L'Action nationale , a recensé 918 fonds mutuels, 154 000 000 000 $. Vous savez combien il revient au Québec d'épargnes, de nos épargnes à nous? 4,53 %. C'est-à-dire que les épargnes des Québécois s'en vont ailleurs, à l'extérieur du Québec, dans d'autres provinces du Canada, à Toronto, à New York, à Séoul, à Singapour pour des placements de fonds mutuels. Parce qu'on arrive avec ça, avec Internet, là. Pour enrichir les autres, créer des capitaux, puis qui vont construire des usines, fabriquer des produits qu'ils viennent nous revendre par la suite. 4,53 %. Tous ceux qui ont un peu de notion du service public, à l'opposition et au pouvoir... Moi, j'ai été dans l'opposition surtout. Au pouvoir... Je pense qu'il y avait quelque chose d'irréductible en moi qui me faisait le craindre, alors je n'ai jamais été là, j'ai surtout été dans l'opposition.

M. Gautrin: Il y a un plaisir.

M. Michaud (Yves): Hein?

M. Gautrin: Il y a un plaisir à être dans l'opposition.

M. Michaud (Yves): Vous l'appréciez. Ah! moi, j'ai toujours adoré l'opposition, d'ailleurs; je trouve que c'est formidable. Non, le pouvoir ne m'a jamais grisé, mais j'ai peut-être été parfois une éminence qui se grise près du pouvoir, mais c'est peut-être par une consommation abusive de vin, dont j'ai été naguère un ancien distributeur. N'ayant plus d'intérêt financier dans ce domaine, ne craignez rien. Je ne suis qu'un bénévole à temps partiel, et d'autant plus dans le monde des affaires.

Bon. En fait, tout cela dit, M. le Président, vous savez que ça a duré... J'ai commencé à 15 h 22. Il est à peine 16 heures. Je vous ai économisé du temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Je ne sais pas si vous vous en rendez compte. Et pourtant, on a abordé des sujets plus sérieux, mais qui débordent le cadre des assurances, des intermédiaires de marché, etc., et des polices d'assurance et le reste. On a abordé un cadre plus fondamental, qui mérite, je pense, que l'on ait une réflexion profonde, parce que devant les puissances du monde...

Ce matin, à une émission de radio, je citais un proverbe coréen – bien justement là où nos épargnes s'en vont pour fabriquer des automobiles que nous rachetons par la suite ici – qui dit: Quand les requins se battent, les écrevisses ont le dos écrasé. C'est-à-dire que, quand les plus forts se battent entre eux, bien, les petits, forcément, ils sont écrasés. Un proverbe coréen. C'est intéressant. Alors, ceux qui se battent dans le monde entier, les puissances mondiales, les grands gestionnaires de l'argent.

Quand on pense qu'il y a 5 % des échanges économiques réels – tu m'achètes un crayon, je te vends une paire de souliers – alors que 95 % sont des échanges virtuels, alors que les gestionnaires de fonds de pension, qui sont les nouveaux maîtres du monde... Nous sommes passés du capitalisme industriel à la financiarisation du monde, alors que 95 % des gestionnaires de fonds de pension des employés, qui ne prennent pas de risques, peuvent débrancher les économies nationales en un tournemain. Et c'est d'autant plus grave qu'ils sont anonymes, puis ils ne se connaissent pas, puis ils ne concoctent pas ça ensemble.

Il suffit qu'un zigoto, à la Bourse de New York, à la Bourse de Tokyo, de Singapour ou à la Bourse de Paris, décide, à un moment donné, de retirer 500 000 000 $ de prêt à tel ou tel gouvernement, et là tout le monde suit, parce qu'ils sont moutonniers. Ils regardent ça sur Internet, ils suivent ça, puis, ha, ha, ha! résultat: le Mexique est par terre! Bien ça, il faut trouver des moyens, les États nations, hein, les nations doivent trouver des moyens pour se protéger contre ça. Sans ça, c'est une dérive, c'est un détournement de l'esprit civique, et nous nous préparons de bien tristes lendemains et non des lendemains qui chantent annoncés par Jaurès, déjà, au début du siècle. Si nous ne réagissons pas, si les pouvoirs publics ne réagissent pas devant ces nouveaux maîtres du monde, nous aurons cette voie dangereuse.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le ministre. Merci, M. Michaud. Maintenant, la parole sera au député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. M. Michaud, j'aurais deux petites questions à poser. À la page 3 de votre résumé du mémoire, vous dites: «Comme le souligne pertinemment le rapport, il devient de plus en plus difficile pour le consommateur de savoir s'il est à se faire aider par un conseiller compétent ou de se faire refiler un produit par un vendeur déguisé en conseiller. Comme le conclut le rapport de façon sibylline, dites-vous, "les informations fournies au consommateur peuvent être incomplètes et ne pas lui permettre de prendre une décision éclairée".»

Ça, c'est écrit dans le rapport qui a été déposé par le ministre. Est-ce que le fait qu'il y aurait un seul organisme, duquel tous les distributeurs ou les intervenants sont obligés de faire partie, est suffisant pour vous pour que ces craintes que vous avez puissent être dissipées?

M. Michaud (Yves): Je demanderai de compléter mes quelques remarques très brèves en réponse à votre question. Je dirais: Partiellement. Je répondrais: Que partiellement. Et reprenant la citation que j'ai faite au début: C'est par la peur du gendarme, souvent, hein, c'est par peur que les organismes fonctionnent, que les hommes fonctionnent et qu'ils suivent les lois. C'est comme ça qu'on les civilise. C'est-à-dire que, s'il y a une réglementation plus sévère, bien, il y aura moins de risques. Et, surtout s'il y a des sanctions, il y aura moins de risques qu'un vendeur, caissier, que les institutions responsables donnent ce pouvoir terrible à des incompétents pour pouvoir conseiller le consommateur. Mais je demanderais à M. Belzile, qui est mon vice-président, qui a des expériences mais personnelles de ce côté, de répondre et de compléter ma réponse.

M. Belzile (Réjean): Oui. Merci, M. Michaud. Non, nous faisions référence plutôt à des situations qu'on rencontre de plus en plus dans les institutions financières, incluant les caisses populaires, où, effectivement, les caissiers sont devenus des vendeurs – et souvent c'est par manque de formation; c'est beaucoup plus par manque de formation, pas nécessairement par malhonnêteté – où on conseille les clients sur des types de placements qui conviennent mieux à leur situation ou d'autres produits financiers.

Moi, j'ai eu des expériences personnnelles; chacun d'entre vous, vous en avez eues. Il suffit d'écouter, de se faire raconter ça, de faire semblant qu'on ne connaît rien et on arrive avec des aberrations. Et ça, c'est beaucoup plus au niveau de la formation du personnel des institutions financières et des intermédiaires de marché que ce problème-là peut disparaître, parce que ce n'est pas nécessairement de la malhonnêteté. Comme souvent il y a des gens qui sont promus de caissiers à conseillers et, la semaine d'après, ils changent de chapeau et se permettent de conseiller les clients. C'est beaucoup plus à ce genre de situation-là qu'on faisait référence.

L'organisme ne pourra pas... À moins d'intervenir au niveau des obligations en termes de formation, ce ne sera pas tout simplement l'unification de l'organisme qui pourra régler automatiquement ce type de situation.

M. Maciocia: O.K. Mon autre question, M. le Président, c'est toujours à la page 4 de votre résumé, vous dites: «Nous demandons au législateur d'envisager les mesures à prendre pour éviter le risque d'un scénario où la distribution par moyen électronique devienne la voie royale qu'emprunteraient les requins et les prédateurs pour se soustraire aux lois et abuser des consommateurs.»

Est-ce que vous avez envisagé quelles sortes de mesures le gouvernement devrait prendre pour régler ou, disons, d'une certaine manière pouvoir régler ce problème-là?

M. Michaud (Yves): Hélas! je dois vous répondre que non, que je plaide ignorance, comme la plupart de ceux qui réfléchissent à l'heure actuelle dans le monde entier à la globalisation des marchés, et à la mondialisation des marchés, et à la naissance de cet instrument qui s'appelle Internet et qui peut être un apprenti sorcier, à la fois être un facteur extrêmement puissant du développement économique et à la fois être un facteur extrêmement nocif, pervers et délétère des affaiblissements des nations, des gouvernements et des sociétés.

Mais je n'ai pas de réponse à cela, je n'ai pas de réponse précise. Comment réglementer, discipliner Internet? Beaucoup de gens, beaucoup de philosophes même s'interrogent là-dessus, pas uniquement des hommes politiques, hein, des philosophes. En France, il y a Edgar Morin qui a publié des papiers là-dessus; il y a les nouveaux philosophes allemands. Parce que le danger est là; le danger, et à la fois l'espoir et le danger. Alors, on oscille entre les deux. Des apprentis sorciers. Ça peut créer des choses merveilleuses, ça nous ouvre les portes de la connaissance. Nous pouvons entrer, par Internet, dans la Bibliothèque nationale de Paris, dans l'American Library of Congress. Nous pouvons visiter tous les musées du monde. Nos enfants, nos petits-enfants vont avoir accès à des connaissances, via ce réseau, dont on n'aurait pas imaginé, au siècle dernier et il y a même 20 ans, la formidable puissance de créativité et d'invention que ça va leur donner. Mais en même temps il y a tous ces dangers, dans le monde financier en tout cas.

Donc, il y a à boire et à manger et je n'ai pas de réponse à cela. Je ne sais pas quels moyens les gouvernements vont prendre. Mais peut-être que vous-mêmes, les députés... Vous participez à des missions parlementaires internationales, vous allez souvent... que ça soit les parlementaires du Commonwealth, l'Association internationale des parlementaires de langue française, c'est des sujets dont vous devriez discuter avec tous les parlementaires du monde, parce que c'est toutes les nations du monde qui sont interpellées par cette question. Mais, moi, je n'ai pas de réponse. Je serais le dernier des fats, des prétentieux et des pédants si je pensais avoir une réponse à une question qui est la question du sphinx, quoi. Je dois répondre humblement – ça ne m'arrive pas souvent – que je n'ai pas de réponse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maciocia: Ha, ha, ha! M. le Président...

M. Michaud (Yves): Je ne sais pas pourquoi les gens rient, hein. C'est...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Michaud (Yves): Qu'est-ce que j'ai pu dire?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est votre façon de le dire.

M. Maciocia: Ma dernière question. Vous souhaitez que les consommateurs aient une proportion importante de la représentativité à l'intérieur de l'organisme. Est-ce que vous avez envisagé quel pourcentage ça pourrait être, cette portion importante?

(16 h 10)

M. Michaud (Yves): Je laisserais ça à l'intelligence de l'opposition et des ministériels. Vous pouvez vous entendre ensemble là-dessus, sur la loi, non? Hein? Comment? M. le ministre, je n'ai pas compris, là, ce que vous avez dit.

Une voix: Vous n'avez rien perdu!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): On souhaite que le débat continue comme il est parti, donc on est mieux de ne pas répéter. Ha, ha, ha! Est-ce qu'il y a d'autres membres de la... M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Le problème que vous soulevez, c'est le problème de la globalisation des marchés, bien sûr, mais il y a un segment qui est déjà quand même régulé, si je puis dire, le segment le plus matériel des transactions: les biens, les services. Parce qu'il y a quand même une autorité internationale, qui s'appelle maintenant l'Organisation mondiale du commerce, qui a pris la succession du GATT, à Marrakech, il y a deux ans.

Mais où on a été pris au détour, c'est que ce qui a le mieux marché dans la globalisation, c'est le moins matériel, c'est l'argent. Savoir ce qu'il y a dans un conteneur qui se dirige du point a au point b, on peut toujours faire des contrôles physiques au port d'entrée, mais une impulsion électronique sur un fil – qui peut lui-même d'ailleurs ne pas en être un, parce que ça peut être aussi immatériel, ça peut être par les réseaux hertziens – ça, on est pris au dépourvu. Même l'autorité nationale ne peut pas réguler. Alors, imaginez-vous si cette activité est totalement globalisée, comme il n'y a pas d'autorité globale, là, l'espoir de quelque contrôle devient virtuel, c'est le cas de le dire. D'autant plus qu'on ne veut pas non plus alourdir toutes choses par des contrôles ou nationaux ou internationaux.

Alors, les États sont assez démunis devant ce phénomène qui a des implications fiscales aussi. Parce que l'argent voyage pour ses fins propres, pour les meilleurs rendements, mais l'argent peut voyager aussi pour échapper aux prélèvements que les États nations font pour des raisons fiscales. Et on a eu des cas récents, dans l'histoire du gouvernement du Canada en particulier mais on en a à tous les jours aussi dans toutes les juridictions, où l'argent se déplace sans qu'on puisse non pas bloquer le phénomène – la mondialisation, c'est une chose intéressante et positive – mais au moins empêcher les méfaits.

M. Belzile, vous êtes d'une université généralement très progressiste. Votre département des sciences comptables, il est reconnu pour être assez virulent dans les contrepoids nécessaires qu'il faut faire à certains égards. Est-ce que vous-même ou de vos collègues faites des recherches poussées sur la protection du consommateur, par exemple, en matière de consommation de produits financiers quand les transactions se font non seulement sans agent, mais sans frontières nationales?

M. Belzile (Réjean): Pour vous répondre franchement, je ne connais pas de recherches actuellement qui sont menées à notre université là-dessus. Le problème est très nouveau, et on le constate maintenant quand on navigue sur Internet, effectivement beaucoup de produits, de services financiers sont offerts et qui échappent à toute réglementation. Et il me fera plaisir, comme universitaire, de collaborer à ces études-là, je pense, qui doivent se faire, qui doivent se mener. Comme association qui date de trois mois, il est impossible que nous osions suggérer des mesures comme vous nous mentionnez. C'est extrêmement complexe et ça demande sans doute la collaboration internationale. Et, à ce que je sache, pour répondre directement à votre question, il n'y a pas de projet de recherche en cours, mais sûrement, étant donné que ça devient un sujet urgent et chaud, qu'il va y avoir des gens qui vont se pencher sur ce problème-là de la protection des consommateurs, particulièrement sur ce problème-là de vente par moyen électronique.

M. Michaud (Yves): Et j'ajouterais, M. le Président – M. le ministre, vous aviez raison de poser le problème – que, dans les instances internationales où, éventuellement, vous siégez, comme le successeur du GATT qui est l'Organisation mondiale du commerce, que ce soit à un titre ou à un autre dans un comité ou membre d'une partie d'une délégation fédérale, il y a eu une suggestion qui a été faite... je pense que c'est par M. Mitterrand le premier, et qui a été reprise par d'autres: une taxation sur les transactions boursières de 0,1 % à l'échelle du monde. 0,1 %.

Imaginez-vous que, quand vous commandez à votre courtier une action de la Banque Nationale, de la Banque de commerce, n'importe où, ça coûte 6 % sur le prix. Donc, 0,1 % rapporterait 72 000 000 000 $, qui pourraient aller à la Banque mondiale, faire accélérer le développement des pays en voie de développement, qui pourraient même servir – une partie en tout cas – à notre propre défense et justement à avoir les fonds suffisants. Je trouve que c'est une idée, en tout cas, intéressante. Comme l'idée de partage du temps de travail ou de la diminution du temps de travail, ça aussi, c'est intéressant pour la création d'emplois. Ce n'est pas la panacée. Ce n'est pas la panacée, sans doute, mais ce sont des idées intéressantes.

Une taxation sur les transactions boursières. Vous n'êtes pas capable de faire ça tout seul. Le Québec ne peut pas être le seul zinzin dans le monde à taxer les transactions boursières, mais il faut que ça se discute sur la scène internationale, via le gouvernement fédéral, via le gouvernement du Québec, etc., que l'on puisse en arriver à une taxation sur chaque transaction boursière. Ça rapporterait des sommes à peu près gigantesques. Et ça ne coûterait rien à personne, en plus, ou à peu près.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun, il resterait environ huit minutes à votre formation politique.

M. Gautrin: Je comprends. J'aurais pu continuer sur le débat que vous avez ouvert, qui est éminemment passionnant, mais je vais revenir sur la Loi sur les intermédiaires de marché pour vous poser deux questions. Vous êtes très sensible à la défense des intérêts des consommateurs, et on ne peut que vous féliciter pour cela. Est-ce que, dans votre esprit, la formation – qui est quelque chose sur laquelle vous insistez – devrait être telle que ne puissent transiger ou vendre des produits que des gens qui ont ladite formation? Autrement dit, qu'on ait une situation d'usage exclusif fait par les gens qui ont une certaine formation. Je ne veux pas rentrer après... Parce que j'ai posé la question sur le sens d'une corporation, mais, enfin, que la pratique de vente ne puisse être limitée qu'à ceux qui ont eu la formation, par voie législative.

M. Michaud (Yves): Je...

M. Gautrin: Alors, je répète...

M. Michaud (Yves): Vous vous exprimez dans un français tellement correct et impeccable que j'ai de la peine à vous suivre.

M. Gautrin: Alors, je m'en excuse. Je...

M. Michaud (Yves): Le sens précis de votre question quand vous parlez de corporation, là?

M. Gautrin: Alors, voici. Au sens qu'il existe, au Québec – vous êtes certainement au courant – la loi sur les ordres professionnels ou les corporations professionnelles, le cas échéant. Parmi ces corporations, vous en avez qui ont des titres réservés, c'est-à-dire ne peuvent porter le titre que ceux qui ont telle et telle fonction ou qui sont membres de telle corporation. D'autres ont ce qu'on appelle une pratique exclusive, c'est-à-dire ne peuvent pratiquer telle fonction que les gens qui sont membres de la corporation. L'exemple le plus classique, bien sûr, c'est les médecins. Ne peuvent faire des diagnostics que ceux qui sont membres de la corporation.

Alors, ma question, je reviens là-dessus: Pour protéger le public, pour protéger les citoyens, est-ce que vous avez envisagé la possibilité que ne puissent faire ce genre de transactions, c'est-à-dire vendre de l'assurance ou agir comme planificateur financier, que ceux qui ont ladite formation ou qui ont la certification, c'est-à-dire qu'ils soient soit courtiers soit agents et qu'on limite la pratique à un groupe de gens qui sont membres d'un certain groupe qu'on pourrait appeler corporation, qu'on pourrait appeler ordre, qu'on pourrait appeler ce qu'on voudra?

M. Michaud (Yves): Mon vice-président, qui est un grand maître des sciences comptables, vous répondra.

M. Belzile (Réjean): Bien, nous sommes d'avis que oui, jusqu'à une certaine limite. Le problème qui se pose, c'est comment définir les tâches? Je pense surtout...

M. Gautrin: Dans le champ de compétence.

M. Belzile (Réjean): Oui. Mais comment définir aussi les tâches. Disons, quelqu'un qui travaille dans une banque, qui donne à la fois des conseils et qui a plusieurs rôles, des rôles multiples, ça devient difficile de dire: Est-ce qu'il est essentiellement conseiller? Il ne faudrait pas aller jusqu'à exiger, par exemple, que tout le personnel des institutions financières soit membre d'une corporation professionnelle parce qu'ils doivent, à l'occasion, donner des conseils. Alors, ça pose certains problèmes.

Mais, sur une question de principe, les gens dont la responsabilité première est de conseiller le consommateur sur les affaires financières, que ce soit par l'appartenance à une corporation professionnelle ou une autre méthode, on devrait s'assurer que ces gens-là possèdent les qualifications et les compétences nécessaires pour répondre adéquatement à ces tâches-là.

M. Gautrin: Mais vous êtes conscients... Parce que le problème que j'essaie, moi, d'explorer...

M. Belzile (Réjean): Oui, oui.

M. Gautrin: ...avec les gens qu'on rencontre ici, en commission, c'est de savoir la limite, de circonscrire le champ de pratique et de circonscrire exactement dans quel...

M. Belzile (Réjean): Oui, c'est...

(16 h 20)

M. Gautrin: ...et la difficulté que j'ai actuellement, c'est de circonscrire ce champ de pratique.

M. Belzile (Réjean): Et c'est la difficulté que, nous aussi, de notre côté... On ne peut pas proposer que tous les gens qui travaillent dans des banques fassent partie d'une corporation professionnelle, mais, le principe, nous sommes d'avis que les gens, à cause de la responsabilité que ça entraîne face aux consommateurs, qui sont souvent, comme on l'a mentionné dans notre rapport, ignorants ou, enfin, peu au fait des choix financiers qu'ils ont à faire... que ce rôle de conseil, qu'il soit si important, soit fait par des gens qui ont une formation minimum. Est-ce que c'est par le biais d'une corporation professionnelle ou par d'autres moyens? Là-dessus, on n'a pas pris position, mais cette exigence-là devrait apparaître.

M. Gautrin: Comprenez bien aussi qu'une corporation professionnelle est là pour protéger le public et qu'elle a dans son sein des tribunaux ou des organismes régulateurs, si je puis dire, sans utiliser le terme «tribunaux», pour pouvoir surveiller la pratique des gens qui sont membres de la profession.

M. Belzile (Réjean): Et surtout, dans notre esprit, d'assurer une formation. Que les gens qui exercent ce métier-là, de conseil, aient la formation adéquate. Je crois que c'est un élément important de ce débat-là, oui.

M. Gautrin: De votre réflexion.

M. Belzile (Réjean): Oui, oui.

M. Gautrin: Donc, si jamais le gouvernement choisissait d'aller dans cette direction-là, ce ne serait pas en contradiction avec votre pensée.

M. Belzile (Réjean): Pas dans nos principes.

M. Gautrin: Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. Je vous remercie, M. Michaud, M. Belzile, pour votre présentation. Je suis certain que ça va enrichir les connaissances des membres de la commission et dans le meilleur intérêt des consommateurs.

M. Michaud (Yves): À moi de vous remercier, votre commission, tous les membres, d'avoir bien voulu m'accueillir deux fois en l'espace de trois mois. J'espère que je n'aurai pas à revenir bientôt, parce qu'il y a un aphorisme ou un dicton qui dit: Si vous commencez à ressembler à la photo de votre passeport, c'est que vous êtes trop malade pour voyager. Alors, je me suis regardé, puis la photo de mon passeport commence à me ressembler.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): De toute façon, vous êtes toujours le bienvenu.

M. Michaud (Yves): C'est toujours bien agréable de venir à Québec.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci beaucoup.

M. Chagnon: Soyez assuré que vous aurez toujours plus de plaisir à venir ici comme invité que comme convoqué.

M. Michaud (Yves): Ah! bien ça, convoqué, j'étais un convocateur avant, et là je suis maintenant un témoin, mais c'est un plaisir aussi agréable.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie, je vous remercie beaucoup, infiniment, et j'invite les représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. à prendre place. Je vais suspendre deux minutes, tout en invitant les membres de la commission à ne pas s'éloigner.

(Suspension de la séance à 16 h 23)

(Reprise à 16 h 29)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre, messieurs! Si vous voulez reprendre place. J'inviterais les représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. à nous faire part de leur mémoire. J'invite M. Millette, probablement, à nous présenter la personne qui l'accompagne pour nous faire part de son mémoire.


Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

M. Millette (Yves): M. le Président, je suis Yves Millette, vice-président principal aux affaires québécoises de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, et je suis accompagné aujourd'hui de M. Normand Pépin, qui est vice-président exécutif Filiales et vice-président Assurances individuelles et Rentes à l'Industrielle-Alliance, au Québec, qui a présidé le comité d'industrie pour l'étude du rapport quinquennal. M. Pépin est aussi président du Fonds d'indemnisation du Conseil des assurances de personnes, qui est l'organisme qui est chargé d'indemniser les consommateurs qui ont été victimes d'une fraude ou d'une malversation de la part d'un intermédiaire de marché.

(16 h 30)

Alors, la présentation que je vais faire... Je ne reprendrai pas notre mémoire comme tel, vous l'avez, vous avez eu l'occasion de le lire. Il y a 13 recommandations. C'est quand même assez court, mais je vais essayer de situer, dans le contexte, le contexte qui nous a amenés à proposer des recommandations que vous avez devant nous.

D'abord, environ 85 % des Québécois sont titulaires d'une police d'assurance, que ce soit une assurance-vie, une assurance-santé, une rente, un REER, donc c'est un marché relativement mature. D'ailleurs, le marché des institutions de dépôts couvre à peu près le même pourcentage de Québécois, c'est-à-dire ils ont comme clients à peu près 85 % des Québécois.

Ce que ça signifie dans un marché mature comme celui-là, c'est qu'on va avoir la tentation d'étendre son marché, d'aller dans le marché des institutions voisines, et ça a été le décloisonnement. Il faut savoir qu'il y a deux modèles de décloisonnement qui ont cours un peu partout dans le monde. Le premier modèle étant celui de la banque-assurances, dont on entend parler beaucoup et qui est, jusqu'à un certain point, l'intégration des activités à l'intérieur d'une même institution, la banque, mais théoriquement ça pourrait être aussi les autres institutions.

L'autre modèle, c'est ce que les Français appellent le modèle d'assure-finances. C'est un modèle qui est un peu à l'inverse et qui origine plus du monde des assurances, comme son nom l'indique, mais qui s'étend beaucoup plus par voie de filiales. C'est un décloisonnement qui se fait en respectant les différents métiers plutôt qu'en intégrant toutes les activités ensemble. Il faut savoir que, avant la lettre, avant le nom, le Québec a fait de l'assure-finances avec des modifications à la Loi sur les valeurs mobilières en 1983, la Loi sur les assurances du Québec en 1984, la loi sur les intermédiaires financiers en 1989. Toujours, à chaque fois, on préserve le métier ou on préserve l'activité, tout en permettant à des institutions financières voisines d'aller vendre les produits des concurrents, tout en respectant les compétences.

Le gouvernement fédéral a accepté le même principe, en 1992, et il l'a réitété, le ministre des Finances canadien l'a réitéré dans son budget du printemps dernier, en disant que les banques ne seraient pas autorisées à vendre de l'assurance dans leurs succursales, du moins à brève échéance.

Pourquoi ça se fait et pourquoi ce modèle-là, au Canada et au Québec, ne s'est pas développé à venir jusqu'à maintenant, je veux dire, le modèle de banque-assurances? C'est à cause de la grande concentration des institutions de dépôts au Canada, les banques, pour les nommer, mais aussi, au Québec, le Mouvement Desjardins, où le fait de permettre d'intégrer tous les produits au sein d'une même institution pourrait avoir pour effet d'éliminer les autres institutions financières canadiennes. On l'a vu abondamment au Canada, dans le reste du Canada, avec les compagnies de fiducie, avec les valeurs mobilières. Et finalement le pilier d'assurance est le seul des piliers qui demeure encore au Canada, à cause de circonstances particulières canadiennes où le système bancaire plus particulièrement est tellement omniprésent.

Le système actuel, est-ce qu'il a fonctionné? Si je prends l'exemple du Québec, où, comme je le disais tantôt, depuis 1983, de législation en législation, on a adopté le modèle de l'assure-finances, on peut dire que ça fonctionne, parce que l'Assurance vie Desjardins-Laurentienne, au Québec, perçoit 18 % du volume de primes au Québec et c'est deux fois plus que son plus proche concurrent. De la même façon, la Banque Nationale a pu, en toute satisfaction, conclure une entente avec La Métropolitaine pour distribuer tous les produits financiers de La Métropolitaine. On a vu la Banque Royale acquérir la Compagnie d'assurance Voyageur ou la compagnie d'assurances Westbury... la compagnie d'assurances Westbury qui, en passant, l'année dernière, au Québec, a augmenté son volume de primes de plus de 30 %. Donc, on ne peut pas dire que ça ne fonctionne pas. C'est des choses qui fonctionnent.

À venir jusqu'à maintenant, l'assure-finances ou le décloisonnement à la mode comme le Québec l'a fait a fonctionné et on pense qu'il y a des avantages à le conserver. C'est pourquoi on recommande que les institutions financières puissent vendre des produits d'assurance par l'intermédiaire de cabinets, en dehors des succursales, avec des personnes différentes employées par le cabinet et par la succursale de la caisse populaire. C'est un phénomène qui fonctionne à venir jusqu'à maintenant.

Maintenant, si on regarde plus particulièrement la distribution du marché des assurances: 85 % des Québécois qui détiennent un contrat d'assurance, comment on peut les départager à l'intérieur de tout ça? Dans un premier départage, si vous voulez, 53 % des primes qui sont perçues au Québec le sont sur base individuelle et 47 % le sont sur base collective. L'assurance collective, comme vous le savez, est très généralement souscrite par des employeurs qui vont choisir leur compagnie d'assurances par appel d'offres, vont souvent être conseillés par des actuaires, des consultants ou des conseillers en avantages sociaux qui sont des spécialistes de ce marché. Il n'y a pas tellement d'intermédiaires de marché, d'autres intermédiaires de marché qui sont impliqués dans ce domaine-là. Il y en a un certain nombre, mais ça reste un marché spécialisé, pour eux.

L'autre 53 % des primes, celles qui sont sur base individuelle, se divisent en deux grandes catégories. 30 % viennent de produits de rentes, c'est-à-dire très majoritairement des REER, REER qui est un produit qui est vendu pas nécessairement par des intermédiaires; on le voit dans les banques, on le voit dans les fonds mutuels. C'est un produit qui est vendu très communément au Québec et au Canada et ce n'est pas nécessairement vendu par des intermédiaires de marché. Il reste 23 % du marché qui constitue de l'assurance-vie traditionnelle parce que, en matière individuelle, l'assurance-santé est à peu près inexistante. Il y en a un petit peu, mais il n'y en a pas beaucoup.

Ce 23 % là se divise en deux grandes catégories: de l'assurance temporaire et de l'assurance permanente. L'assurance temporaire va chercher à peu près 15 % du marché et l'assurance permanente, 8 %. Dans le 15 % d'assurance temporaire, habituellement on va retrouver aussi les assurances dites de «mass marketing», de télémarketing, et les produits vendus par téléphone ou par publipostage. Ça représente à peu près 5 % à 6 % du marché. Donc, on voit que le marché est excessivement diversifié et qu'il n'y a pas un seul réseau de distribution dans notre domaine, qu'il y a une multitude de réseaux de distribution qui sont utilisés.

Les intermédiaires sont, comme on le disait, spécialement impliqués dans la vente d'assurance et de rentes individuelles. Ils sont largement répartis à la grandeur du Québec. Probablement qu'il y a des agents d'assurances dans un aussi grand nombre, pour ne pas dire un plus grand nombre de municipalités que de caisses populaires ou de succursales bancaires. Donc, ce sont des intermédiaires qui sont présents à la grandeur du territoire.

Maintenant, lorsqu'on parle de conseil, dans un monde aussi diversifié que celui qui est le monde de l'assurance, on voit qu'il y a une grande responsabilité pour le consommateur de s'informer, et je pense qu'on doit lui donner accès à cette information-là par des intermédiaires qualifiés, c'est bien évident, mais aussi, dans le cas de vente directe, par de la publicité ou des dépliants informatiques bien faits, mais aussi en donnant la possibilité au consommateur de s'informer notamment auprès d'un centre d'information comme celui qui est géré par l'industrie.

(16 h 40)

Donc, l'information du consommateur ne réside pas uniquement dans une source mais dans un nombre diversifié de sources qui peuvent permettre ou qui doivent être accessibles à l'ensemble des consommateurs. Et une des qualités du rapport quinquennal, c'est d'étendre ces sources-là à d'autres sources, ces sources d'information là à d'autres sources que la source traditionnelle de l'intermédiaire de marché, qui était, à venir jusqu'à maintenant, la source première d'information à cause de circonstances historiques. Donc, dans ce sens-là, on approuve l'approche qui est faite par le rapport quinquennal et on pense que le marché, comme le ministre le disait ce matin, doit respecter la volonté des consommateurs d'acheter leurs produits aux endroits qui leur conviennent le mieux, dans la mesure où on peut conserver une concurrence entre les institutions financières.

Je pense que ça fait un peu le tour de la mise en situation de notre rapport et il nous fera plaisir de répondre à vos questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci beaucoup, M. Millette. Maintenant, M. le ministre, si vous voulez questionner, passer vos commentaires.

M. Landry (Verchères): Oui, je vais surtout poser quelques questions. Puisque les députés collaborent beaucoup à cette commission, je vais me limiter à vous demander une chose.

Certains intervenants nous ont demandé d'octroyer aux assureurs la capacité de contrôler un cabinet multidisciplinaire d'agents. Avez-vous une opinion sur cette question?

M. Millette (Yves): Oui. L'opinion qu'on exprime dans notre document, c'est que le système de distribution d'assurance par agences, c'est le système de base de la distribution des produits financiers, le système traditionnel, si vous voulez. Et les assureurs ayant le droit de distribuer des produits financiers d'autres institutions financières en vertu de la Loi sur les assurances du Québec, nous ne voyons pas et nous ne croyons pas que les assureurs devraient être forcés de vendre leurs produits financiers à travers un cabinet multidisciplinaire. Ils pourraient continuer à le faire à travers leur système d'agences.

M. Landry (Verchères): Vous souhaitez le maintien de la disposition de la Loi sur les assurances qui permet à un assureur de distribuer les produits d'une autre institution. Par contre, vous soutenez que des institutions de dépôts ne devraient pas distribuer des produits d'assurance dans leurs locaux. Comment réconciliez-vous les deux positions?

M. Millette (Yves): Comme je vous l'ai dit, c'est essentiellement pour des raisons de concurrence, où on se situe en face d'un pilier, qui est le pilier des institutions de dépôts, qui est largement plus présent dans les marchés que le pilier d'assurance. Et on a vu avec les sociétés de fiducie, on a vu avec les firmes de valeurs mobilières que le fait de laisser ces grandes institutions financières prendre le contrôle des marchés finit, finalement, par la disparition de la concurrence. Donc, on pense qu'il est nécessaire d'adopter un modèle qui permet le décloisonnement, qui est le modèle québécois, mais qui permet aussi de garder une concurrence canadienne. Parce que, dans un monde de globalisation, c'est bien beau de détruire la concurrence qui existe sur notre territoire, mais ça va être pour ouvrir la concurrence aux marchés internationaux. Donc, je pense qu'on doit d'abord faire un effort pour conserver la concurrence qui existe chez nous et qui est saine.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Dans vos recommandations, vous avez la recommandation 5 – et je vais revenir sur votre document pour échanger un peu avec vous: «Nous souscrivons au modèle de distribution de produits financiers aux particuliers par le biais de cabinets unidisciplinaires ou multidisciplinaires», et vous demandez aussi à la condition expresse «que la vente d'assurance ne soit pas faite dans les succursales de l'institution de dépôts, qu'elle soit de juridiction fédérale ou provinciale», et vous visez spécifiquement le Mouvement Desjardins. Je comprends un peu...

M. Millette (Yves): Pas spécifiquement, M. le député.

M. Gautrin: Pardon?

M. Millette (Yves): Pas spécifiquement, M. le député. C'est l'ensemble des institutions financières, des institutions de dépôts.

M. Gautrin: Oui, j'ai bien compris, mais, vous comprenez, de ce qui est de juridiction provinciale, c'est-à-dire ce sur quoi ce Parlement a une juridiction, c'est quand même plus le Mouvement Desjardins que les banques comme telles. Alors, là, vous êtes en opposition, bien sûr. Vous avez, j'imagine, entendu ce matin le témoignage des représentants du Mouvement Desjardins, qui ne sont pas en accord avec vous. Et, si j'ai compris la raison profonde qui justifie votre recommandation, et je voudrais vous entendre là-dessus, c'est la protection des renseignements personnels, un peu la même chose que les personnes que nous avons rencontrées ce matin sur... j'ai oublié leur titre.

Une voix: Les intermédiaires de marché.

M. Gautrin: Les intermédiaires de marché qui disaient: Ça va être difficile pour la personne, même dans une institution financière, d'oublier que, malgré tout, elle a pu avoir des informations privilégiées sur les dossiers de crédit ou sur les avoirs de telle ou telle personne. Si j'ai bien compris, c'est la raison principale pourquoi vous voulez distinguer physiquement la vente d'assurance de l'endroit de l'institution de dépôts. Est-ce que c'est bien ce que...

M. Millette (Yves): Bien, c'est évident que, si la personne vient de faire souscrire un prêt et qu'elle dit: Maintenant, voulez-vous souscrire une assurance? elle possède des informations qu'un autre intermédiaire de marché ne possédera pas. C'est très évident, oui. Et ça donne un avantage concurrentiel énorme à l'institution de dépôts.

M. Gautrin: J'avais compris ça, mais je tenais à vous le faire... pour la fin du débat, parce que je trouve que c'est un point qui est assez important et qui n'a pas été partagé ce matin. Je ne sais pas si vous avez eu la chance d'écouter ce matin le témoignage du Mouvement Desjardins, qui ne partageait pas ces craintes qui avaient été exprimées, par contre, par d'autres personnes.

Quant à la qualification des gens qui donnent des services, vous intervenez peu. J'ai l'impression, en lisant en filigrane votre document, que vous êtes d'accord à l'unification du concept de courtier et d'agent. Est-ce que je me trompe ou pas? Vous ne le dites pas spécifiquement, mais j'ai cru... La logique que j'ai cru comprendre à travers votre document, c'est que, comme d'autres l'ont faite d'une manière plus explicite cet après-midi, la distinction entre un agent et un courtier est peut-être un peu arbitraire et que, dans ces conditions-là, on serait mieux, dans le cadre d'une réforme de la loi, d'avoir une seule dénomination.

M. Millette (Yves): Oui, on a parlé longtemps du phénomène d'agent et de courtier. Je pense que la réalité est beaucoup plus entre le professionnel et l'entrepreneur, le courtier étant quelqu'un qui va avoir son propre cabinet, habituellement, alors que l'agent va travailler pour une agence. Traditionnellement, l'agent travaillait pour le compte d'une agence qui appartenait à un assureur. Donc, la véritable différence entre les deux... Les deux ont le même travail, mais la véritable différence entre les deux, c'est qu'il y en a un qui possède son entreprise et l'autre qui travaille pour le compte d'une institution financière.

M. Gautrin: Je poursuis la même... C'est un cheminement que je fais à peu près avec toutes les personnes qui viennent témoigner devant nous. Comment vous vous situez sur la création d'une corporation professionnelle ou d'un champ exclusif de pratique réservé aux personnes qui vendent, disons, de l'assurance? Alors, je comprends que ma question est un peu biaisée parce qu'il y a aussi les planificateurs financiers dont on aura à débattre un peu plus tard. Mais comment vous vous situez sur la possibilité d'utiliser purement et simplement la loi sur les ordres professionnels? Vous en arrivez à créer un ordre professionnel d'intermédiaires de marché qui fait que les personnes qui seraient soit dans une institution soit en cabinet et qui auraient à conseiller, à vendre de l'assurance aux citoyens seraient soumises, bien sûr, à un code d'éthique, à des conditions de formation à établir, mais aussi auraient les recours qui sont inhérents au Code des professions.

M. Millette (Yves): Vous avez vu tantôt... Je vous décomposais, en quelque sorte, la provenance du revenu de primes des compagnies d'assurances et vous avez vu que cette provenance-là était très diversifiée. Donc, je vois mal comment on pourrait regrouper tous ces gens-là à l'intérieur d'une corporation professionnelle.

M. Gautrin: Donc, vous n'êtes pas en faveur. Par contre, vous êtes en faveur, si j'ai bien compris, d'un seul organisme qui les regrouperait, tel qu'il est énoncé dans le document, je ne sais pas si c'est le livre vert ou le document blanc du gouvernement, et qui aurait quand même un certain pouvoir de juridiction ou de protection du consommateur.

M. Millette (Yves): Je pense qu'il y a une très grande différence entre un encadrement professionnel et un encadrement de marché. Et je pense que le rapport quinquennal s'adresse d'abord et avant tout à un encadrement de marché où on doit s'assurer que les gens qui y sont sont suffisamment capitalisés, qu'ils ont des assurances-responsabilité, qu'ils ont la formation requise pour distribuer les produits qu'on leur demande de distribuer. Mais je ne pense pas qu'on est dans un cadre de corporation professionnelle.

(16 h 50)

M. Gautrin: J'ai bien compris le document, mais vous comprenez bien que mon questionnement, c'est en dehors du document pour voir si je ne pourrais pas explorer d'autres sources ou d'autres manières de protection du public. Et c'est dans ce cadre-là que j'interviens. Et je comprends bien que, vous, votre réponse, c'est que vous n'êtes pas favorables à ce type d'approche actuellement.

M. Millette (Yves): Mais on est très favorables à la protection des consommateurs.

M. Gautrin: Oui, oui. Non, non, écoutez, un instant. J'ai bien compris, là. Je ne veux pas mettre des mots que vous n'avez pas dits dans votre bouche. J'ai bien compris que vous êtes en faveur de la protection du consommateur, mais vous dites que ce n'est pas le moyen d'un ordre professionnel qui serait, à votre point de vue, le moyen optimal pour protéger le consommateur.

M. Millette (Yves): C'est exact.

M. Gautrin: Ça termine, pour l'instant, mes questions. S'il y a du temps, je pourrai revenir sur un autre point de vue. Mais je pense que mes collègues...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Très bien, M. le député de Verdun. On va laisser la parole au député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Excusez. Excusez-moi. Vous dites, à un moment donné, que vous souhaitez le CAP, le Conseil des assurances de personnes, et non l'AIAPQ, comme organisme d'autoréglementation reconnu par la Commission des valeurs mobilières. On a entendu... Bien, vous dites ça à quelque part dans le mémoire, si...

M. Millette (Yves): Bien... Oui, peut-être qu'on a dit ça, mais on veut dire l'organisme unique qui va être retenu.

M. Bertrand (Charlevoix): Ah! O.K. On s'entend que le nouvel organisme...

M. Millette (Yves): C'est le nouvel organisme qu'on voulait dire.

M. Bertrand (Charlevoix): ...si on s'en va vers le consensus.

M. Millette (Yves): Exact.

M. Bertrand (Charlevoix): D'accord. Là où j'ai un petit problème, c'est comment on peut expliquer que le BAC, le CAP puis le regroupement puis l'AIAPQ recommandent une loi professionnelle plutôt qu'une loi de la distribution? Puis, vous autres, vous avez l'air à aller plus vers une loi de la distribution. Puis, par contre, à quelque part, vous êtes en faveur de l'organisme unique. Y «a-tu» une contradiction? Ou j'interprète mal?

M. Millette (Yves): Comme je viens de l'expliquer, je pense que, nous, on pense que la solution est dans un organisme de régulation du marché et non pas dans un organisme professionnel. Et c'est pour ça qu'on est plus en accord avec la proposition du livre blanc d'un organisme de contrôle de la distribution, donc de contrôle du marché.

M. Bertrand (Charlevoix): Pour moi, c'est quand même phrasé différemment, mais je ne sais pas si on va avoir l'occasion d'y revenir parce que ça m'apparaît... En tout cas, j'espère que ce n'est pas contradictoire par rapport à ce que vous voulez, parce que vous allez quand même pas mal dans le même sens qu'actuellement la plupart des organismes.

M. Millette (Yves): Mais je ne pense pas que les deux soient contradictoires. Il est évident qu'un organisme de régulation du marché va devoir s'assurer de la compétence des gens qui distribuent des produits financiers. Je ne vois pas d'incohérence avec un organisme de réglementation du marché. J'en verrais un avec un organisme professionnel, mais je n'en vois pas avec un organisme de marché.

M. Bertrand (Charlevoix): Maintenant, on sait que vous représentez un certain groupe de compagnies, puis on sait qu'il y a un autre groupe qui va venir justement nous rencontrer un petit peu plus tard. Est-ce qu'on peut dire quand même qu'il y a un consensus à l'intérieur des groupes, des compagnies, des assureurs, ou s'il y a des différences fondamentales?

M. Millette (Yves): Évidemment, je vais laisser les gens de l'autre groupe présenter leur mémoire. Mais j'ai lu leur mémoire et je n'y vois pas de différence fondamentale.

M. Bertrand (Charlevoix): À l'intérieur d'un organisme, c'est quoi votre... Peut-être que vous l'avez dit, puis j'étais malheureusement à travailler, justement, sur ce sur quoi le député de Verdun revient souvent, la fameuse question d'ordre professionnel. On l'avait analysé, ça, en comité, puis c'est là-dessus que je suis en train d'essayer de ressortir les arguments qu'on avait pour ne pas aller dans ce sens-là. Si on va vers un organisme comme la répartition au niveau des gens qui vont composer et le système d'élection ou de nomination, pouvez-vous l'élaborer un peu plus ou davantage?

M. Millette (Yves): C'est notre dernière recommandation, où on prévoit que c'est le ministre qui devrait faire la nomination à partir d'une liste fournie par l'industrie, l'industrie n'étant pas nécessairement nous; l'industrie, c'est tous les participants. Et on n'a pas cru bon à ce moment-ci d'élaborer davantage, mais je pense que ça comprend tout le monde. D'ailleurs, le Conseil des assurances de personnes, à l'heure actuelle, est formé de gens qui représentent différents horizons, que ce soient les distributeurs, les filiales du Mouvement Desjardins, que ce soient les compagnies d'assurances traditionnelles avec des agences, des compagnies qui distribuent leurs produits par d'autres moyens, y compris la distribution directe. Donc, je pense que la répartition de l'industrie est faite et je pense que ça devrait continuer à se faire à partir d'une liste. Combien devraient être recommandés par un ou par l'autre? Disons qu'à ce moment-ci c'est flexible pour nous.

M. Landry (Verchères): C'est un débat que vous semblez avoir réglé. C'est que ces gens-là ne sont pas là pour représenter les intérêts du groupe dont ils proviennent, mais ils sont là pour, en leur âme et conscience, participer à la régulation de l'industrie.

M. Millette (Yves): Exactement. Je pense que c'est...

M. Landry (Verchères): Ça, pour vous, c'est un débat tranché.

M. Millette (Yves): C'est essentiel pour nous qu'il en soit ainsi. On a vu toutes les difficultés que ça a posées, l'incompréhension qu'il pouvait y avoir autour de ça. Donc, j'espère que c'est un débat qui est terminé.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce qu'il reste du temps, M. le Président?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Oui, M. le député de Charlevoix, c'est encore à vous la parole.

M. Bertrand (Charlevoix): Dans les éléments qu'on avait regardés pour un ordre professionnel ou autres, on accrochait sur la question de multidisciplinarité et la partie des commissions – je sais que vous avez une opinion là-dessus – la question des personnes morales – je réponds en même temps à M. le député – il y avait la question aussi que les cabinets de courtage sont des entrepreneurs payés à commission, contrairement à des professionnels, puis il y avait aussi que les assureurs sont responsables de leurs agents et non l'inverse, les agents ne sont pas responsables des assureurs. Alors, j'aimerais ça entendre vos commentaires sur ça parce que, depuis le matin, quand même, ça revient souvent, cette question-là.

M. Millette (Yves): Bien, je pense que ça fait partie des éléments très importants qui font qu'on ne peut pas pencher dans le sens d'une organisation professionnelle, que ce soit un ordre en vertu du Code des professions ou en vertu d'une autre loi. Je pense qu'on est vraiment dans un organisme de réglementation du marché, et, si on veut résoudre les contradictions qui naîtraient d'un ordre professionnel, je pense qu'il faut rester dans un organisme de régulation du marché.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que c'est plus clair un peu, M. le député?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça complète votre interrogation. M. le député de Verdun, c'est à votre tour.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que ce n'est pas la place, actuellement, de débattre ça, à l'heure actuelle. Donc, je me permettrai de le faire au moment opportun. Je voudrais revenir, si vous me permettez, M. le Président, sur un point de votre mémoire, à la recommandation 12.

D'une part, vous signalez l'existence du centre d'information de votre groupe, qui fonctionne un peu, d'après vous, comme l'ombudsman qui était prévu dans la loi. J'aurais aimé, parce que je ne le sais pas, que vous nous expliquiez comment fonctionne votre centre d'information, que vous nous donniez un peu plus – excusez, ça fait une tautologie – d'informations sur votre centre d'information. Je ne veux pas faire de jeu de mots.

Ensuite, je m'étonne beaucoup de la suite de votre recommandation, qui dit: Si jamais vous allez vers un ombudsman, que ce soit l'Inspecteur des institutions financières. Alors, là, il va falloir que vous m'expliquiez pourquoi parce que j'ai l'impression... Je ne comprends pas.

Alors, ma première question, donc, c'est une question à trois volets: Qu'est-ce que fait votre centre d'information? Pourquoi il a des fonctions analogues à celles de l'ombudsman? Et pourquoi, si on voulait avoir un ombudsman tel qu'il a été suggéré dans le document gouvernemental, vous souhaiteriez que ce soit l'Inspecteur des institutions financières?

M. Millette (Yves): Avec plaisir. Le centre d'information de notre Association existe depuis 25 ans. Il remonte à la première génération de protection du consommateur et il avait été mis en place... À ce moment-là, on ne parlait pas d'ombudsman, mais il avait été mis en place pour permettre aux consommateurs de faire le lien avec leur compagnie d'assurances. Le centre d'information est opéré par des retraités qui ont été des spécialistes des réclamations ou de la distribution et qui connaissent les rouages des compagnies, qui sont capables de diriger les consommateurs au bon endroit. Donc, le centre d'information répond à environ 30 000 appels par année et à 1 000 plaintes ou documents écrits.

M. Gautrin: Comment il fonctionne?

M. Millette (Yves): Pardon?

M. Gautrin: Comment fonctionne-t-il? Il est ouvert? On peut l'aborder? Faire une plainte et il fait enquête?

(17 heures)

M. Millette (Yves): Il communique avec... Voici la façon dont ça fonctionne. Lors d'un premier contact, on dirige la personne au bon endroit à l'intérieur de la bonne compagnie ou au bon service à l'intérieur de la compagnie. Si la personne ne réussit pas à régler son problème, on échange de la correspondance avec la compagnie d'assurances pour connaître les motifs et voir s'il n'y a pas une incompréhension entre le client et la compagnie sur la nature de la réclamation, etc. Et finalement on obtient une réponse qui est la position définitive de la compagnie. À ce moment-là, si le consommateur n'est pas satisfait, il doit aller devant les tribunaux.

Donc, notre Association ne joue pas un rôle de médiateur, mais elle s'organise pour mettre en contact les gens. La plupart du temps, dans 40 % des cas et plus, on réussit à régler le problème à la satisfaction du consommateur. Mais, dans les cas où on ne peut pas le faire, à ce moment-là le consommateur sait au moins comment, dans quel état est son dossier et il peut faire une présentation à son conseiller juridique d'une façon adéquate. Il n'y a pas de pouvoirs de médiation qui sont accordés, mais je n'ai pas compris qu'il y en aurait non plus qui seraient accordés à l'ombudsman.

M. Gautrin: Pour l'ombudsman, vous avez raison. Mais alors, le deuxième volet de ma question. Vous dites: Si jamais il y avait un ombudsman... Vous dites que le centre d'information ferait un peu cette fonction-là. Je comprends mieux maintenant pourquoi. S'il y avait un ombudsman, vous souhaiteriez que ce soit l'Inspecteur des institutions financières...

M. Millette (Yves): Oui, pour une raison...

M. Gautrin: ...si je comprends bien votre texte. Je vais remettre mes lunettes pour le lire, parce...

M. Millette (Yves): Oui, oui, oui. C'est pour des raisons, un peu, qu'on a évoquées ce matin. L'organisme de réglementation du marché va être là pour régler les problèmes de compétence, les problèmes de conseil, alors qu'il y a aussi, et au-delà de ces problèmes-là, des problèmes qui sont liés aux produits, qui sont liés aux communications avec la compagnie d'assurances. Et donc l'ombudsman qui dépendrait de l'organisme de réglementation n'aurait pas, quant à nous, la perspective suffisante pour équilibrer les deux niveaux de plaintes. Et particulièrement il y a toujours danger qu'il y ait confusion à l'intérieur de l'organisme entre le comité de discipline et l'ombudsman. Et donc on pense qu'en le mettant à un autre palier il serait plus en mesure de jouer son rôle de dernier recours, si vous voulez, autant pour l'industrie...

M. Gautrin: Mais est-ce que je me trompe? Mais l'ombudsman arrive en dernier recours. Est-ce que je me trompe bien? C'est-à-dire, il n'y a pas confusion des... Dans votre livre vert, il arrive en dernier recours. C'est bien...

Une voix: Quand le reste a échoué.

M. Gautrin: Quand tout a échoué, c'est bien ce que je comprends.

M. Millette (Yves): Nous sommes d'accord avec cette présentation-là, sauf que le fait de l'avoir dans le même organisme risque d'apporter une certaine confusion.

M. Gautrin: Une confusion des fonctions. C'est pour ça, à ce moment-là, que vous voulez qu'il soit distinct, et vous dites: Bon, quitte à le mettre ailleurs, je le mettrais à l'Inspecteur des institutions financières.

M. Millette (Yves): Si on peut prendre l'exemple du Protecteur du citoyen, on le fait relever de l'Assemblée nationale...

M. Gautrin: Oui.

M. Millette (Yves): ...et non pas de chacun des ministères. C'est un peu le même principe.

M. Gautrin: C'est exact. Oui, je comprends un peu plus pourquoi il... Merci, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Monsieur...

M. Gautrin: Je ne suis pas d'accord, mais je comprends un peu plus.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Beaulne: Je vous remercie de votre présentation. Je pense qu'une des préoccupations... Si je peux résumer un peu les préoccupations des parlementaires par rapport à l'exercice que nous faisons: d'abord, nous voulons préserver un sain climat de concurrence dans ce secteur d'activité; deuxièmement, nous souhaitons que les services soient dispensés de la meilleure façon possible par les gens les plus compétents possible; et, troisième préoccupation, c'est le maintien et la création d'emplois dans votre secteur d'activité, comme d'ailleurs dans n'importe quel autre secteur d'activité du Québec.

Sans entrer dans les recommandations ou les commentaires que vous faites sur des aspects spécifiques et un peu techniques de la réforme, j'aimerais que vous nous disiez s'il y a des éléments proposés dans cette réforme-là qui, selon vous, dans votre secteur d'activité, se traduiraient par des pertes d'emplois.

M. Millette (Yves): Résultant du rapport quinquennal? Non, je ne pense pas. Je ne vois pas. Oui, peut-être au niveau des organismes de réglementation, s'il y avait fusion d'organismes de réglementation, mais je ne pense pas qu'au nombre d'emplois qui sont créés dans l'industrie des assurances de personnes – il y en a plusieurs dizaines de milliers au Québec – ce soit significatif, non.

M. Beaulne: Bon. Je vous remercie. Puis la deuxième question, c'est concernant la pratique de la façon dont se font à l'heure actuelle certains contrats d'assurance, où vous avez – et c'est la préoccupation que j'ai à ce sujet-là, au niveau du maintien d'une saine concurrence – à l'heure actuelle des personnes qui se présentent dans une institution financière, qui, bien souvent, surtout si elles viennent d'accéder au marché du travail, répondent de justesse aux critères d'octroi de prêts et qui, par conséquent, se sentent un peu intimidées dans le contexte où on leur fait signer ça.

Alors, parallèlement, on leur proposerait ou on leur propose des contrats d'assurance, et elles se sentent, dans le contexte où elles sont situées, un peu, disons, obligées de confier à la même institution leurs autres services d'assurance. Alors, je sais qu'il y a des propositions ici qui visent à prendre en considération ces éléments-là, mais, malgré les aspects de surveillance, la qualification, ainsi de suite, comment pensez-vous qu'on peut éviter ou qu'on peut déroger à ce contexte? Appelons ça, entre guillemets, des pressions conjoncturelles qui font en sorte que des individus, soit pour des raisons de critères de crédit financier ou soit parce qu'ils veulent se débarrasser de toutes les autres formalités, signent tout ça en même temps. Alors, comment pensez-vous qu'au-delà de toutes les réglementations on puisse éviter cette situation-là?

M. Millette (Yves): Écoutez, il y a déjà un certain nombre de choses qui existent, par exemple le droit de regard de 10 jours, le droit de regard gratuit de 10 jours qui existe depuis fort longtemps et qui est très largement répandu dans l'industrie. Il y a toutes les stipulations contractuelles d'ordre public contenues au Code civil qui sont là pour protéger le consommateur. Il y a la loi de protection du consommateur quand on est plus dans le domaine du marketing direct, mais il y a aussi toutes les directives que l'Association établit à l'intention de ses membres pour éviter autant que possible ce genre de situation là.

Donc, il existe déjà un bon nombre d'éléments qui permettent la protection du consommateur. On se rend compte qu'on a peut-être besoin d'aller aujourd'hui un petit peu plus loin. On développe beaucoup des choses comme la notion du meilleur conseil – je l'ai abordée un peu tantôt – mais ce sont des concepts nouveaux et auxquels on réfère dans le rapport quinquennal. Et ce sont des choses sur lesquelles on travaille. Pas plus tard que la semaine dernière, notre organisation faisait un colloque sur la commercialisation des produits financiers et l'impact sur la protection des consommateurs. On a eu des conférenciers qui venaient d'un peu partout à travers le monde pour nous dire ce qui se fait chez eux. C'est des choses qu'on regarde. On essaie de voir comment on pourrait introduire ces nouvelles notions là chez nous et éventuellement les retrouver dans la législation.

M. Beaulne: Oui, mais c'est simplement que je me dis que la nature humaine étant ce qu'elle est, on a beau prévoir que les gens soient situés dans des locaux physiquement distincts d'une succursale et interdire l'échange d'informations, il reste qu'il semble qu'il y a quand même des avantages qui vont découler de toute façon du fait qu'une institution financière ou une banque puisse entrer dans ce secteur-là. Même si on met toutes les barrières possibles ici, il reste qu'on ne peut pas empêcher les gens de se parler entre eux sans qu'il y ait toujours une police autour. Et, même s'il y a une petite porte qui sépare les cabinets des conseillers en assurance de l'endroit où les gens font leurs dépôts ou leurs transactions bancaires traditionnelles, il reste qu'on peut avoir quand même certains doutes sur l'échange d'informations qui va quand même se passer.

M. Millette (Yves): Je pense qu'il y a un élément très important dans toute transaction financière, vous le mentionniez tantôt, c'est le momentum. S'il s'écoule un certain temps entre une transaction et une autre, vous avez le temps de réfléchir, de voir. Vous ne voyez pas la même personne. Alors, c'est beaucoup plus probable que, comme consommateur, vous allez réfléchir à la situation que si vous avez: Voici ce que j'ai à vous offrir, signez ici. On donne un temps de réflexion au consommateur, beaucoup plus important, je pense.

M. Beaulne: Oui, mais entre «Voici, voici, vous signez ici» et gentiment vous escorter à la porte d'à côté, pensez-vous qu'il y a une longue période de réflexion?

(17 h 10)

M. Millette (Yves): Il y en a une parce que vous changez de personne, vous changez de lieu, donc la situation qui se crée au moment où vous voulez avoir votre prêt automobile, par exemple, n'existe plus. On vous l'a donné, vous l'avez. Maintenant, vous allez faire la transaction qui concerne la protection de ce prêt automobile là. Je pense que c'est important.

M. Pépin (Normand): Pour le consommateur, aussi, ça peut être perçu moins comme une condition pour l'obtention de son prêt. Par exemple, si c'est la même personne qui donne le prêt et qui offre l'assurance, bien, ça devient quasiment conditionnel, les deux deviennent quasiment des conditions. Alors que, si, même, il traverse seulement une porte, bien il pourrait avoir l'impression au moins que là il a obtenu son prêt et maintenant on parle d'une question peut-être d'assurance. Et c'est avec une autre personne qu'on parle, et ce n'est pas conditionnel à ce que je prenne l'assurance ici et que j'obtienne mon prêt. Parce que le consommateur, quand il veut avoir un prêt vis-à-vis d'une institution financière, il est très, très dépendant, hein. Est-ce qu'il va dire oui ou il va dire non?

M. Beaulne: Bon, bien, ça va.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ça complète. M. Millette et M. Pépin, je vous remercie de votre présentation.

Avant de suspendre, j'invite les membres de la commission à ne pas s'éloigner parce que cette fois-ci... Je ne suspendrai justement pas parce que, si on veut finir... Vous pouvez aller saluer les gens, vous reviendrez tout de suite, parce que, la commission, si on veut finir à 18 heures avec le prochain organisme, il ne faut pas perdre de temps.

Donc, j'invite tout de suite les représentants du Conseil interprofessionnel du Québec à prendre place.

À l'ordre, mesdames et messieurs! Je souhaite la bienvenue aux représentants du Conseil interprofessionnel du Québec et je les invite immédiatement à nous présenter leur mémoire et M. Delisle à nous présenter toutes les personnes qui l'accompagnent, d'abord.


Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Delisle (Pierre): Merci, M. le Président. M. le vice-premier ministre, messieurs de la commission, permettez-moi tout d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent et qui démontrent par leur présence la très grande importance que les ordres professionnels directement concernés attachent aux considérations et recommandations exposées dans le mémoire du Conseil interprofessionnel: tout d'abord, à mon extrême gauche, François Renauld, qui est président-directeur général de l'Ordre des comptables en management accrédités; M. Marcel Godbout Lavoie, directeur général de l'Ordre des comptables généraux licenciés; à ma gauche immédiate, Richard Gagnon, directeur général de la Chambre des notaires du Québec; à mon extrême droite, M. Marc Sauvé du Barreau du Québec; M. Réal Sureau, président sortant de l'Ordre des comptables agréés; et finalement M. Robert Frances, du Secteur planification financière de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec.

Le Conseil interprofessionnel du Québec, institution du Code des professions, regroupe 43 ordres professionnels régis par le Code, lesquels comptent actuellement plus de 265 000 membres. Avec l'Office des professions et le Tribunal des professions, le Conseil et les Ordres constituent le système professionnel du Québec, qui a pour mission d'assurer la protection du public en matière de prestation de services professionnels.

De la même manière que dans son mémoire du 2 février 1996, qui est annexé à notre mémoire actuel, adressé au vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances concernant la Loi sur les intermédiaires de marché, le Conseil interprofessionnel parle ici au nom de l'ensemble des ordres, qui voient dans les propositions soumises à la discussion publique par le ministre une affaire qui intéresse et affecte le système professionnel du Québec établi par le Code des professions.

Nous regrettons d'ailleurs de devoir exprimer ici notre insatisfaction de ne pas avoir été invités à participer à la consultation initiale et de constater que les recommandations que nous avons insisté pour faire entendre ne semblent pas avoir été considérées, alors que les six ordres professionnels directement concernés regroupent 47 % des planificateurs financiers du Québec.

Le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché nous paraît largement inspiré par une logique économique justifiable et une prise en compte de la nécessaire protection du consommateur et de l'investisseur, particulièrement en ce qui a trait à la vente de produits financiers. Cette double préoccupation est explicitement présente parmi les cinq objectifs poursuivis par le rapport. Le Conseil, animé par une perspective professionnelle de la prestation des services en planification financière, souscrit à ces objectifs.

On constate toutefois que le rapport ne retient pas l'approche que privilégiait le Conseil dans son mémoire du 2 février 1996, à savoir: amender la Loi sur les intermédiaires de marché de façon à mettre fin à l'existence d'un système parallèle pour réglementer la fonction de planification financière ainsi que l'octroi et l'usage du titre de planificateur financier.

(17 h 20)

Aux yeux du Conseil, rien de ce qui est survenu depuis l'adoption de la Loi sur les intermédiaires de marché ne permet de croire qu'il y a eu avantage à établir un système parallèle à celui que constitue le système professionnel du Code des professions. En effet, la Loi sur les intermédiaires de marché a instauré tout un système d'octroi du titre de planificateur financier, de sa réglementation et de sa surveillance, alors que le système professionnel possédait déjà les structures et mécanismes nécessaires à l'octroi et à l'encadrement de titres professionnels par le biais du Code des professions adopté par le gouvernement dans un souci de protection des utilisateurs de services professionnels.

Les professionnels régis par le Code qui détiennent aussi le titre de planificateur financier assument depuis l'adoption en décembre 1995 de la loi sur le financement de l'Office des professions la totalité des coûts des deux systèmes et voient qu'il est de leur intérêt, comme de celui du public, payeur ultime, d'en diminuer les coûts. L'économie la plus substantielle proviendrait de l'intégration des deux systèmes existants en un seul en retenant celui du Code des professions, qui s'applique déjà à 43 ordres professionnels.

Ceci dit, le Conseil prend acte de l'orientation retenue dans le rapport et de l'existence d'un système parallèle que les trois options considérées maintiendront. Dans ces conditions, le Conseil estime qu'il vaut mieux constituer deux filières distinctes et pleinement autonomes pour l'encadrement des planificateurs financiers, soit, d'une part, la filière proposée dans le rapport selon l'une ou l'autre des trois options proposées et, d'autre part, la filière du système professionnel à laquelle appartiennent les six ordres actuellement habilités par la Loi sur les intermédiaires de marché à attribuer le titre de planificateur financier.

En vue d'assurer l'encadrement uniforme des planificateurs financiers membres des ordres professionnels, les six ordres proposent de mettre sur pied une table de concertation par laquelle ils détermineront les critères d'octroi du titre de planificateur financier et les exigences de formation y afférentes, les règles de déontologie et normes de pratique de la planification financière applicables à tous les planificateurs financiers des six ordres par le biais d'une réglementation harmonisée. En outre, comme ils le font actuellement, les ordres utiliseront les mécanismes de protection du public, à savoir discipline, inspection professionnelle, syndic, révision des plaintes et représentation du public, déjà institués par le Code des professions à l'égard de leurs membres porteurs du titre de planificateur financier. La constitution d'une telle filière aura pour effet d'assurer l'atteinte des objectifs du rapport à peu de frais tout en évitant les conflits de chevauchement que les propositions avancées n'éliminent pas.

En effet, pour les planificateurs financiers membres des ordres professionnels, deux objectifs parmi les cinq mis de l'avant dans le rapport ne seront pas atteints par les options mises de l'avant, soit celui de réduire les coûts inhérents à l'encadrement et à la réglementation et celui de simplifier et uniformiser l'encadrement. Les trois options présentées par le rapport obligent le professionnel qui souhaite porter le titre de planificateur financier à s'adresser à un nouvel organisme d'autoréglementation et à en défrayer les coûts inhérents pour obtenir le droit de s'afficher planificateur financier. La contribution financière à cet organisme, qui est actuellement imposée annuellement, servira également à soutenir la formulation de normes de pratique professionnelle édictées par cet organisme sans aucune consultation des ordres professionnels qui encadrent pourtant déjà près de la moitié des planificateurs financiers du Québec. Or, le Code des professions oblige déjà les ordres professionnels à encadrer la pratique de leurs membres par le biais de normes de pratique professionnelle établies, en vigueur et inspectées.

Enfin, selon les options avancées, deux professionnels relevant du même ordre seront réglementés par deux instances différentes, l'un, porteur du titre de planificateur financier, étant assujetti à une double réglementation. Par conséquent, le consommateur qui souhaite porter plainte devra s'adresser à deux endroits différents, dépendant soit du professionnel avec qui il fait affaire soit de la nature de l'acte posé par celui-ci.

La proposition avancée par le Conseil a l'avantage de combler ces lacunes tout en offrant toutes les garanties de protection du consommateur recherchées par la loi. Le membre d'un ordre professionnel qui souhaite obtenir le titre de planificateur financier ne devra s'adresser qu'à un seul endroit, son ordre avec lequel il a déjà des liens bien établis. Les exigences de formation et les critères d'admission des six ordres professionnels concernés assurent déjà un standard de qualité dans la prestation des services professionnels en planification financière. Il s'agira alors d'établir, d'un commun accord, les règles additionnelles particulières au porteur du titre de planificateur financier et de les mettre en oeuvre par une réglementation harmonisée.

Les ordres professionnels possèdent l'expertise, l'expérience et les mécanismes réglementaires nécessaires à l'octroi des titres professionnels, à leur encadrement et à leur surveillance. Pour accomplir ces tâches, les structures des ordres professionnels sont déjà en place et fonctionnelles. La gestion pleine et entière du titre de planificateur financier n'occasionnera pas de coûts marginaux tant pour le système professionnel que pour le professionnel lui-même. De même, par l'entremise de la table de concertation, structure souple et peu coûteuse, l'harmonisation des réglementations en matière de normes professionnelles est assurée, et une réglementation harmonisée assure que la pratique de la planification financière par les professionnels est uniforme. D'ailleurs, à cet égard, le système professionnel a déjà à sa disposition des normes de pratique professionnelle applicables spécifiquement en matière de planification financière et reconnues comme étant les plus rigoureuses au Canada. Enfin, les chevauchements de juridiction sont éliminés et le consommateur n'a qu'un seul endroit où il doit s'adresser. En adoptant cette solution, le gouvernement atteint également l'objectif de diminution des intervenants dans le domaine de la planification financière, puisque les six ordres agiront d'une seule voix par le biais de la table de concertation.

Les ordres professionnels ont en diverses circonstances fait la démonstration de leur capacité d'établir des mécanismes de concertation. Ce fut le cas en matière de médiation familiale, alors que le Barreau, la Chambre des notaires, l'ordre des conseillers et conseillères d'orientation, l'Ordre des psychologues et l'ordre des travailleurs sociaux signaient, en avril 1994, un protocole d'entente dont l'Association des centres jeunesse du Québec et l'Association de médiation familiale du Québec étaient également signataires. Cette concertation a mené à la création d'un comité des organismes accréditeurs en médiation familiale ayant pour objet d'établir une collaboration en ce qui a trait à la formation des médiateurs, la promotion de la médiation, l'établissement de règles déontologiques communes et le développement général de la médiation au Québec.

Une concertation pourra également s'établir avec le Bureau de la distribution des produits et services financiers ainsi qu'avec l'Institut québécois de la planification financière, le cas échéant, comme les ordres qui ont des organismes analogues à l'échelle canadienne savent le faire quand il s'agit d'harmoniser leurs normes de pratique et d'éthique respectives. Si la concertation peut effectivement s'avérer souhaitable, il est inacceptable qu'un organisme externe aux ordres et sur lequel ils n'exerceraient aucun contrôle réglemente la pratique de leurs membres.

La concertation déjà mentionnée aura amené les ordres à s'entendre sur les diplômes, et la formation équivalente s'il y a lieu, donnant ouverture au port du titre de planificateur financier. En ce qui regarde le Conseil et les ordres professionnels, tant les universités que l'IQPF, si ce dernier est maintenu, constituent des institutions aptes à décerner le diplôme en planification financière que les ordres reconnaîtront.

Prenant note de l'approche retenue par le rapport quinquennal et retenant parmi les recommandations du mémoire du Conseil de février 1996 celles qui demeurent pertinentes, le Conseil apporte les solutions suivantes à la mise à jour de la Loi sur les intermédiaires de marché.

Comme première recommandation, intégrer à la Loi sur les intermédiaires de marché une définition claire de la planification financière.

À cet effet, le Conseil proposait, dans son mémoire de février, une définition inspirée d'autres déjà reconnues, notamment à l'échelle nord-américaine, et qui essentiellement se résume ainsi: La planification financière est un processus de conseil et d'assistance structuré qui vise l'atteinte des objectifs financiers et personnels d'un individu. Ce processus tient compte des ressources, de la situation financière et de la personnalité du client et permet l'élaboration d'un plan intégré ou partiel qui lui recommande les stratégies et les actions visant à organiser et prévoir la gestion de ses finances personnelles dans l'optique de protéger et d'accroître son patrimoine. Ce processus exclut les recommandations relatives à l'achat ou à la vente de produits financiers spécifiques.

En fonction de la définition proposée, la planification financière peut s'exercer dans six domaines: la planification de l'encaisse et de la dette, la planification fiscale, la planification des investissements, la planification de retraite et d'indépendance financière, la planification des risques et assurances, la planification successorale. Le planificateur financier qui, à la demande de son client, concentre son mandat sur l'un ou l'autre de ces domaines ou une combinaison de quelques-uns de ces domaines seulement réalise une planification financière partielle. Le planificateur financier qui, à la demande de son client, intègre ces six domaines réalise ce qu'il convient d'appeler une planification financière intégrée.

(17 h 30)

Tel que nous l'avions soutenu dans notre position précédente, le Conseil est d'avis qu'une définition claire de la planification financière est le premier pas nécessaire pour assurer la compréhension par le public de ce que constitue un service de planification financière. En outre, cette définition permettra aux organismes de réglementation de s'appuyer sur une base commune dans la conduite de leurs activités d'octroi du titre et d'encadrement de la pratique de planification financière.

Deuxième recommandation, intégrer à la loi l'obligation pour le membre d'un des six ordres professionnels concernés qui souhaite obtenir le titre de planificateur financier de s'adresser à son ordre professionnel, même s'il est inscrit à titre d'intermédiaire de marché en assurance ou d'intermédiaire oeuvrant en valeurs mobilières.

L'objectif de cette recommandation est de s'assurer que tous les planificateurs financiers d'un même ordre professionnel soient encadrés selon les mêmes critères et par le même organisme, soit leur ordre professionnel. Cette proposition élimine les conflits de juridiction entre les ordres et l'organisme d'autoréglementation. Elle évite que le professionnel soit soumis à deux ensembles de règles de pratique professionnelle différentes, voire conflictuelles.

À l'opposé, les trois options proposées dans le rapport n'attribuent aux ordres qu'un rôle de surveillance et de discipline envers certains professionnels. D'une part, les ordres n'encadreraient donc pas intégralement les membres des ordres professionnels porteurs du titre et, d'autre part, l'intervention d'un autre organisme d'autoréglementation dans une partie de la pratique des membres des ordres professionnels entretiendrait la situation de confusion qui existe actuellement aux yeux du consommateur. Enfin, la mise en oeuvre de cette proposition du Conseil est réalisable à très court terme au sein même des structures actuelles des ordres professionnels et est atteinte à faible coût.

Troisième recommandation. Préciser dans la loi que le mandat de la table de concertation des six ordres professionnels consiste à déterminer les règles applicables aux membres des six ordres professionnels quant aux critères d'octroi du titre de planificateur financier et aux normes de pratique professionnelle en planification financière.

Le Code des professions dispose à cet égard des mécanismes réglementaires nécessaires à la conduite adéquate de ces mandats. En effet, il dicte que les ordres professionnels établissent les critères d'admission et les processus d'accréditation menant à l'octroi des titres professionnels. De plus, il prévoit le processus de détermination des diplômes qui donne ouverture à un permis ou à un certificat de spécialiste et permet aux ordres de valider les connaissances de ces spécialistes au moyen d'examens. En matière de normes professionnelles, les ordres formulent les standards de pratique que doivent respecter les porteurs des titres professionnels et inspectent les professionnels sur la base de ces normes. Il est à noter que les règlements fixant ces diverses modalités sont adoptés par le gouvernement, après avis de l'Office des professions, et qu'en matière de planification financière ces règlements seront harmonisés pour les fins des six ordres professionnels concernés.

La table de concertation des ordres professionnels dispose donc déjà des moyens nécessaires à l'accomplissement de son rôle. En pleine connaissance des normes que doivent déjà respecter leurs professionnels, ce sont les ordres qui sont le mieux en mesure d'apporter les ajustements nécessaires et d'effectuer harmonieusement l'encadrement intégré de la pratique de leurs membres en planification financière. Enfin, cette proposition concrétise la volonté de diminuer la diversité des encadrements en matière de planification financière. La table de concertation devient l'interlocuteur privilégié pour toutes les questions relatives à ce domaine, qui affectent 47 % des planificateurs financiers du Québec membres d'ordres professionnels.

Comme le proposait le mémoire de février 1996, les six ordres, soucieux de démontrer le niveau élevé de protection du public qu'ils entendent assurer aux consommateurs, s'engagent à mettre en oeuvre, par le biais de la table de concertation, les recommandations proposées au ministre dans le cadre du dernier mémoire, à savoir: intégrer dans un manuel de pratique commun les normes à respecter dans l'exercice de la planification financière.

À cet égard, les ordres considèrent que la planification financière, parce qu'elle est un processus de conseil et d'assistance structuré, s'exerce en fonction d'étapes bien définies auxquelles les ordres doivent souscrire, à savoir: qualifier le client pour la planification financière personnelle; établir les objectifs du client et la portée du mandat; recueillir les renseignements pertinents sur le client; préparer l'analyse préliminaire sur la situation financière du client; examiner les résultats de l'analyse préliminaire et évaluer les besoins du client; effectuer une analyse détaillée et préparer les recommandations préliminaires; discuter les recommandations préliminaires avec le client et les autres conseillers et élaborer les recommandations finales; préparer et présenter un rapport écrit de planification financière; présenter le plan de mise en oeuvre des recommandations; et, enfin, effectuer le suivi et la mise à jour du plan.

On entend aussi intégrer la norme suivante qui avait été proposée en février dernier: l'obligation pour celui qui détient le titre de planificateur financier de réaliser auprès de chacun de ses clients une planification financière intégrée ou partielle en respectant le processus de planification financière en 10 étapes, à moins d'être dégagé par son client de cette obligation, et ce, par écrit.

Quatrième et dernière recommandation, confirmer dans la Loi sur les intermédiaires de marché que l'obligation d'encadrer la pratique de leurs membres détenteurs du titre de planificateur financier relève exclusivement des six ordres professionnels, peu importent les autres inscriptions de ces membres. Cette responsabilité s'accomplit notamment par la mise en place des mécanismes nécessaires pour assurer la mise à jour des connaissances, l'adoption de mesures inhérentes à l'inspection professionnelle ainsi que le traitement des plaintes formulées par le public en conformité avec les mécanismes prévus par le Code des professions.

En effet, ce que les ordres sont habilités à faire, en vertu du Code des professions, pour la protection du public, ils continueront à le faire pour les planificateurs financiers membres de leur ordre. Sur cet aspect, la proposition du Conseil rejoint entièrement l'approche retenue par le rapport quinquennal et constate par cette convergence d'opinions que les structures et les mécanismes qui font l'originalité du système professionnel québécois remplissent également les objectifs du ministère des Finances. Notons à cet égard que les bureaux de direction des ordres professionnels comptent déjà des représentants du public nommés par l'Office des professions.

Pour ce qui est du traitement des plaintes du public, le recours au syndic des ordres et le nouveau comité de révision des plaintes, qui comprend lui-même des représentants du public, constituent un système de protection amélioré. L'inspection professionnelle des membres ainsi que les exigences de formation continue des membres sont déjà en place.

Enfin, le système professionnel possède également les mécanismes nécessaires au fonctionnement des comités de discipline et prévoit l'indemnisation des clients lésés, par le biais du fonds d'indemnisation. Dans le cadre de la proposition du Conseil, tous ces mécanismes continueront de jouer le rôle de surveillance et de discipline des membres des ordres professionnels sans requérir d'ajustements majeurs ou coûteux.

Le Conseil interprofessionnel du Québec apprécie vivement avoir été entendu dans le cadre de la discussion publique devant votre commission. Les recommandations que le Conseil propose visent à signaler et éviter les écueils qui découleraient de l'adoption d'une nouvelle loi inspirée du rapport tel que déposé. Cette intervention du Conseil offre une démonstration concrète que le système professionnel est en mesure de proposer des solutions simples et pratiques et de promouvoir la concertation entre les groupes professionnels au Québec. Le Conseil est confiant que sa recommandation concernant l'établissement d'une filière distincte pour les planificateurs financiers membres des ordres professionnels sera retenue. Je vous remercie.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Delisle. Maintenant, je cède la parole à un membre du côté ministériel. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Bien, M. le Président, ce que nous venons d'entendre et ce que vous venez de nous dire est intéressant mais introduit un coefficient de difficulté dans nos travaux qui n'y était pas auparavant. Vous avez utilisé à plusieurs reprises le mot «simplicité», mais je dois vous dire en toute modestie que je me considère à convaincre de cette simplicité parce que vous y établissez carrément un deuxième niveau, et un deuxième niveau qui traditionnellement et historiquement n'est pas lui-même coordonné entre ses diverses composantes.

J'ai fait partie d'au moins un des ordres que vous représentez et je me souviens que, à cette époque en tout cas, il n'était pas toujours en harmonie parfaite avec un autre ordre voisin dans la sphère juridique. Et c'est un dossier que je n'ai plus suivi, mais cette concertation que vous décrivez comme facile et simple ne me paraît historiquement ni facile ni simple, et en plus vous bouleversez l'équilibre et l'économie générale de la loi. En tout cas, vous nous invitez à le faire. Parce que l'économie générale de la loi, jusqu'à ce jour, c'est de régir l'agent, le planificateur. Là, vous nous conduisez à régir l'acte, ou je vous comprends mal. Mais il me semble qu'en introduisant, comme vous le faites, un deuxième ordre d'intervention aux agents il n'y aura plus de commun que l'acte. Pourriez-vous nous éclairer un peu sur ces questions?

M. Delisle (Pierre): Bon. Tout d'abord, comme je le mentionnais, il y a déjà 47 % des planificateurs financiers qui sont membres d'ordres professionnels. Ce que nous proposons, c'est de continuer, en tant qu'ordre professionnel, à encadrer ces gens-là et de devenir le seul organisme qui va les encadrer à titre de planificateurs financiers, que ce soit un notaire qui fait de la planification financière, un avocat, un comptable agréé, etc. Donc, dans notre compréhension, on n'ajoute rien de nouveau, mais on s'assure qu'il n'y aura pas deux endroits où le public, comme consommateur, aura à se plaindre si jamais il y a des problèmes avec les services d'un planificateur financier. C'est dans ce sens-là que notre proposition s'articule.

(17 h 40)

M. Landry (Verchères): Non, mais, s'il est membre du Barreau, le consommateur, il va aller au Barreau, il va aller à la table de concertation puis il va aller à l'organisme unifié.

M. Delisle (Pierre): Bien, son point de chute, c'est le syndic du Barreau, à ce moment-là, qui a la responsabilité de surveiller la pratique de son membre, l'avocat, quel que soit le type de pratique qu'il exerce.

M. Landry (Verchères): Oui, mais le syndic du Barreau, il n'est pas rompu, lui, aux subtilités et aux arcanes de la planification financière. Le syndic du Barreau, il va avoir toutes les causes qu'il a actuellement plus celles concernant la planification financière.

M. Delisle (Pierre): Comme actuellement, dans les différentes professions, il y a évidemment des comités de discipline – le syndic doit porter devant les comités de discipline les plaintes qu'il a devant lui – à ce moment-là il y a déjà, dans les différentes professions, des spécialités. Et les gens qui vont témoigner devant le comité de discipline, le cas échéant, seront les gens spécialisés dans cette discipline-là, comme ça se passe dans les disciplines de la médecine ou dans les disciplines d'autres secteurs d'intervention des syndics des ordres professionnels.

Une voix: Mais qui va coordonner?

M. Landry (Verchères): Remarquez que les questions que je vous pose, ce sont des questions, ce ne sont pas des objections. Mais je veux bien vous présenter la situation de façon réaliste: vous êtes en péril de ne pas être compris.

M. Gagnon (Richard): Si je peux me permettre de compléter, M. le ministre, en fait, déjà, actuellement, six ordres professionnels ont le mandat d'autoriser leurs membres à porter le titre de planificateur financier. Déjà, le public peut se plaindre à ces ordres professionnels de l'activité incorrecte d'un membre en planification financière, et déjà les syndics des ordres professionnels concernés sont saisis occasionnellement de plaintes liées à la planification financière.

Alors, si on reconnaît clairement que les six ordres professionnels concernés ont l'autorité de décerner le titre de planificateur financier comme c'est le cas actuellement, ils doivent se donner les instruments appropriés pour encadrer la pratique de leurs membres en planification financière, et c'est ce qui a déjà été fait dans le système professionnel. La loi a déjà amené les ordres professionnels à développer des normes de pratique en planification financière.

Je pense notamment à l'Ordre des administrateurs agréés, qui a regroupé tous ses planificateurs financiers au sein d'un même secteur qui s'appelle le Secteur planification financière, qui a développé pour ces personnes des normes de pratique professionnelle en planification financière extrêmement rigoureuses et qui oblige ses membres, par voie réglementaire ou déontologique, à respecter les normes de pratique professionnelle déjà établies. S'il y a plainte, bien entendu, le syndic de l'Ordre évalue si le membre s'est conformé ou non aux normes de pratique en planification financière imposées aux membres et agit en conséquence.

Alors, ce qu'on dit, c'est que ce système qu'on est à développer depuis l'avènement de la loi, depuis cinq, six ans, est en train de prendre une belle forme dans le système professionnel. Et je ne vous cacherai pas qu'on n'est pas du tout gênés, M. le ministre, de tout ce qui a été développé comme normes de planification financière avec d'autres partenaires au sein du système professionnel.

Il serait un peu embarrassant que le planificateur financier comptable agréé ou le planificateur financier administrateur agréé ou notaire soit régi par son ordre professionnel et, en même temps, par un organisme de réglementation hors du système professionnel, parce que là qui a la responsabilité d'encadrer l'individu et à qui le citoyen se plaint s'il a des problèmes avec le professionnel concerné? Et, si un administrateur agréé est enregistré comme planificateur financier auprès d'une autre instance, le public se plaint à quel endroit? Et le public demande que l'individu soit encadré par quelle instance, exactement? Alors, nous, on pense qu'on doit concentrer au sein de la même organisation le mandat d'octroyer le titre et de le contrôler.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le ministre, si vous me permettez deux secondes, comme je n'ai pas eu le temps de tout noter vos noms, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Gagnon (Richard): Richard Gagnon.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Votre fonction?

M. Gagnon (Richard): Je suis le directeur général de la Chambre des notaires du Québec.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je vous remercie beaucoup. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Oui. Me Gagnon, je crois que vous avez par inadvertance employé une imprécision dans les termes. Vous avez bien dit que les corporations professionnelles décernaient le titre de planificateur financier. En tout respect, cher confrère, l'article 32 de la loi dit: «Les membres d'une corporation professionnelle doivent, pour porter le titre de planificateur financier ou s'afficher comme tel, se conformer aux articles 29 et 31 et être autorisés par la corporation professionnelle qui régit les activités qu'ils exercent.» Donner l'autorisation et donner le titre, selon moi, c'est deux opérations d'une nature mais radicalement différente.

Et que dit l'article 29? L'article 29 dit: «Une personne ne peut prendre le titre de planificateur financier sans être titulaire d'un diplôme décerné par une institution québécoise de planification financière agréée par le ministre. Cette institution peut reconnaître par règlement une formation jugée équivalente.»

Alors, ou j'ai mal compris ou il y a vraiment une différence de nature entre le geste que pose le Barreau du Québec, qui est d'autoriser...

M. Gagnon (Richard): ...

M. Landry (Verchères): ...et celui que l'on retrouve à l'article 29.

M. Gagnon (Richard): Au fond, M. le ministre, ce que vous venez de lire fait l'illustration que, pour porter le titre de planificateur financier au Québec, on doit répondre à deux conditions: la première, être titulaire du diplôme de planification financière émis par l'IQPF; la deuxième, être autorisé par un organisme mandaté par la loi qui va vous autoriser à porter le titre.

Mais prenons l'exemple d'un ordre professionnel qui a autorisé un de ses membres à porter le titre de planificateur financier. Que fait cet ordre professionnel? La demande du professionnel est adressée au secrétaire général de l'ordre qui, première condition, vérifie si l'individu a le diplôme de l'Institut québécois de la planification financière. Alors, oui, M. X, vous répondez à cette première condition. Maintenant, nous, à l'interne, on a des conditions supplémentaires: vous devez nous démontrer que vous avez un certain nombre d'heures en planification financière, tant d'années d'expérience, etc., et, à la lumière de ces vérifications, nous allons vous autoriser formellement à porter le titre de planificateur financier et, en conséquence, allons encadrer votre pratique de la planification financière.

Alors, l'individu doit répondre à deux conditions. Mais, s'il n'a que le diplôme de l'Institut québécois et qu'il n'est autorisé par personne à porter le titre, il ne le portera pas. Alors, c'est dans ce sens-là que je vous dis que l'ordre professionnel va décerner ultimement le titre à l'individu et, ensuite, à la lumière des critères d'admissibilité, accepter d'encadrer sa pratique professionnelle.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vais continuer toujours sur la même question. Si je comprends bien, il y a 47 % des planificateurs financiers qui sont membres d'un des six ordres professionnels. Les autres 53 % sont planificateurs financiers comment?

M. Delisle (Pierre): Bon. Les autres sont regroupés sous diverses associations, les assureurs de personnes, les gens...

M. Gautrin: C'est ça. Alors, si je comprends bien, et je reviens donc à l'intervention... J'ai oublié votre nom...

M. Delisle (Pierre): M. Gagnon.

M. Gautrin: ...qui représentez le directeur du Barreau, je m'en excuse.

M. Gagnon (Richard): Gagnon.

M. Gautrin: Supposons que vous ne donnez pas l'autorisation...

M. Delisle (Pierre): Oui.

M. Gautrin: ...est-ce que la personne pourrait dire: Je ne fais plus partie de mon ordre et je redeviens un planificateur financier par l'autre voie, puisque j'ai la diplomation suffisante de l'institut québécois des planificateurs financiers?

M. Gagnon (Richard): Dans la mesure où l'individu répond aux critères...

M. Gautrin: De diplomation.

M. Gagnon (Richard): ...d'un autre organisme...

M. Gautrin: De diplomation, hein.

M. Gagnon (Richard): ...ou d'un autre ordre professionnel.

M. Gautrin: O.K. Là, j'ai une première question à vous poser. Vous avez très bien dit dans votre mémoire, et j'étais heureux que vous le fassiez... Vous avez bien expliqué tous les avantages des ordres professionnels, comment ça fonctionne, et c'était bon que la commission, ici, soit un peu au courant. Vous avez des restrictions, j'imagine et je le comprends bien, à ce qu'on crée un ordre professionnel des planificateurs financiers qui seraient membres, après, de plein droit, de votre Conseil.

(17 h 50)

M. Delisle (Pierre): Bon. La question est de savoir: Est-ce qu'on est d'accord ou pas pour qu'il y ait... Premièrement...

M. Gautrin: J'ai cru comprendre que c'était non, que vous n'étiez pas d'accord.

M. Delisle (Pierre): C'est-à-dire que vous savez quel est le processus pour qu'un groupe soit reconnu comme ordre professionnel...

M. Gautrin: Oui.

M. Delisle (Pierre): ...et les cinq critères prévus à l'article 25 du Code des professions. Dans le processus d'analyse d'une demande, le Conseil est interpellé, et à ce moment-là on regarde l'impact qu'il peut y avoir et l'avantage qu'il y aurait pour le public, en bout de piste, à créer un ordre professionnel, un nouvel ordre professionnel.

Parmi ce qui est considéré, entre autres, et ici on parle des planificateurs financiers, c'est que c'est quand même une pratique qui peut être commune à des membres de plusieurs ordres différents. Donc, à ce moment-là, on a une segmentation horizontale d'une pratique, et ça devient peut-être plus difficile à encadrer dans le cadre d'un ordre professionnel. Je ne dis pas que c'est une chose impossible, mais il faudrait voir, en vertu des critères, si vraiment c'est une solution au problème.

M. Gautrin: Je comprends. Alors donc, vous réservez votre consultation, si jamais le gouvernement va vous consulter dans l'intention de créer éventuellement un ordre professionnel des planificateurs financiers.

Dans votre proposition, je comprends bien que chaque membre de son ordre professionnel va être soumis – et comprenez bien, je comprends exactement le sens du mot «soumis» – au syndic de son ordre. Est-ce que vous ne craignez pas que, dans le cas de faute professionnelle commise par un planificateur financier, suivant l'ordre auquel il appartient – et je pense évidemment aux 47 % – les syndics peuvent avoir des jugements qui seront différents? Et le consommateur qui fait appel à un planificateur financier, ne sachant peut-être pas qu'il fait appel à un notaire ou à un comptable agréé ou à un CGA, et puis il y a... La même faute pourrait être considérée comme une faute par un ordre et être considérée comme n'étant pas une faute par un autre ordre, pour être plus précis, par un syndic d'un ordre et par le syndic de l'autre. C'est ça qui me gêne dans votre approche, vous comprenez bien.

À l'heure actuelle, vous avez une même profession, enfin, un même champ de pratique qui est commun à chacun de vos ordres. Si je comprends bien la situation, c'est un champ de pratique plus nouveau qui est en train de se créer, et on est pris dans la loi 142 à voir comment on légifère dans un champ de pratique qui devient un champ de pratique nouveau. Je comprends parfaitement l'argumentation, mais est-ce que vous n'avez pas cette crainte, avec votre proposition, qu'il pourrait y avoir des décisions qui soient différentes pour la même faute, entre guillemets?

M. Delisle (Pierre): Pour éviter justement un tel problème, nous avons prévu notre troisième recommandation, qui est la mise sur pied d'une table de concertation où on va s'entendre au niveau des normes de pratique minimales qui devront être respectées par les planificateurs financiers membres d'un des six ordres. Donc, on va assurer cette standardisation puis éviter le problème que vous anticipez par la table de concertation à laquelle les ordres se sont engagés à travailler. Et on propose que ce soit même inscrit dans la loi.

M. Gautrin: Donc, on pourrait aller même jusqu'à inscrire ça dans la loi, avoir obligation ou donner un délai pour établir une certaine forme de jurisprudence. C'est dans votre approche...

M. Delisle (Pierre): C'est la troisième recommandation.

M. Gautrin: Votre troisième recommandation. C'est intéressant à poursuivre, comme ligne. C'est compliqué, mais ça a un certain intérêt.

Moi, j'aurais une autre question qui ne touche pas les planificateurs financiers. Je vais profiter du fait que vous êtes là pour poser ma question sur les courtiers d'assurances, mais je comprends que mon collègue voulait continuer sur les planificateurs financiers. Est-ce que je pourrais revenir plus tard, M. le Président?

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Certainement. M. le député de Charlevoix, c'est à vous la parole.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci, M. le Président. Si je comprends bien, celles et ceux qui sont membres de l'Institut québécois de la planification financière sont des banquiers, des notaires, des comptables, des assureurs-vie, des vendeurs de fonds mutuels, etc. qui, je pense, suivent un cours – puis vont venir devant nous, ils vont nous l'expliquer à un moment donné – puis ils obtiennent le titre. Et la plupart, si je comprends bien aussi, vendent à commission, même s'ils ne s'en vantent pas ouvertement. On va leur poser la question quand ça va être le temps, mais je pense que c'est non seulement une rémunération à honoraires, mais il y a beaucoup de commissions, ce qui n'est peut-être pas le cas du banquier, mais l'agent d'assurance-vie qui est là ou même d'autres professionnels, j'ai l'impression qu'il y a un élément de commission.

Ceci dit, quand vous donnez, vous autres, le titre de planificateur financier, est-ce que les personnes – parce que vous autres, vous travaillez tous à honoraires, à ce que je sache, il n'y a personne de vous autres à commission – est-ce que vos gens à ce moment-là sont exclusivement à honoraires? Je ne parle pas du 47 %, je vais y revenir. Je parle uniquement de ceux qui sont membres de votre groupe, le vôtre.

M. Delisle (Pierre): Ce qui relève de l'encadrement professionnel – évidemment, il y a une distinction, là, qui n'est peut-être pas toujours simple – c'est tout le processus de planification comme tel: la partie consultant en termes de planificateur financier avant ce qui en découle, qui est probablement ou peut-être la vente ou l'achat de certains produits financiers.

M. Bertrand (Charlevoix): On peut parler de placement d'argent, on peut parler de recommandations testamentaires, de planification fiscale, on s'entend là-dessus. D'accord.

M. Delisle (Pierre): On propose, entre autres, dans notre mémoire que les étapes soient suivies, à moins que le client, par écrit, ne consente à ce qu'il y ait seulement certaines de ces étapes-là qui soient suivies. D'autre part, on insiste aussi pour qu'il y ait déclaration d'intérêts de la part du professionnel lorsqu'il peut, par la suite, être impliqué dans la vente d'un produit financier qui découle de la planification qu'il aura faite et qui aura été acceptée par le client pour lequel il travaille. À ce moment-là, c'est une déclaration qui doit se faire dès le début de la prise du mandat, et on pense que c'est une façon de s'assurer qu'il n'y a pas conflit d'intérêts au niveau des différentes étapes subséquentes à la planification financière comme telle.

Peut-être que M. Frances aurait des...

M. Frances (Robert): Oui, certainement. Robert Frances, président du Secteur planification financière de l'Ordre des administrateurs agréés.

Premièrement, pour ce qui en est de l'IQPF, l'IQPF décerne le diplôme. L'individu qui a le diplôme, en soi, peut aller voir n'importe quel autre organisme. S'il va voir un ordre professionnel, il y a certaines dispositions pour ce qu'il en est de la divulgation de son mode de rémunération. Cependant, il y a une remarque à faire qui est quand même importante, c'est qu'en planification financière – comme vous voyez, on présente, on propose une définition qu'on utilise, nous, auprès des ordres – il n'existe pas de planification financière à commission. C'est impossible. On ne peut pas acheter une planification financière à commission, n'importe où au monde. Et c'est une nuance extrêmement importante parce que, dans un mandat, le mandat va spécifier le mode de règlement du coût, le mode de règlement de la facture de la planification financière. L'individu qui préfère payer des honoraires les paiera. L'individu qui approche un planificateur, qui dit: Je n'ai pas les moyens de me permettre la planification, mais j'aimerais, par contre, qu'à la fin de la planification vous me permettiez d'acheter un produit pour financer ma planification, c'est à l'individu de choisir cette option-là.

Dans notre opinion, du moins du côté des administrateurs agréés, nous croyons que le conflit d'intérêts ne réside pas dans la pratique de la planification financière ni dans la multidisciplinarité ni dans le port du titre. Il existe simplement dans les choix économiques que le consommateur aimerait faire. Et je crois que ça reste dans l'esprit des objectifs du rapport.

M. Bertrand (Charlevoix): Ça, c'est l'idéal, parce que dans la pratique on sait très bien que ce n'est pas ça qui arrive. Dans la pratique, quelqu'un se présente chez un client, M. Jos Bleau offre ses services de planificateur. Un coup que la personne est dans le processus et qu'à la fin elle a les recommandations, ça devient relativement facile de vendre des produits à part des honoraires ou de combiner les deux.

M. Frances (Robert): Est-ce qu'il est membre de l'ordre?

M. Bertrand (Charlevoix): Qu'il le soit ou non, mais je pense... On parle, là, de la réalité quotidienne de tous les jours.

M. Frances (Robert): Mais c'est là la beauté de l'affaire. S'il est membre d'un ordre professionnel, à ce moment-là vous pouvez justement... Si vous sentez avoir été lésé, vous avez l'impression d'avoir été lésé, vous avez un endroit pour vous plaindre. Vous n'en avez pas deux, vous savez que ce professionnel-là est encadré, est surveillé par son ordre et puis qu'il y a des normes de...

M. Bertrand (Charlevoix): Et vous dites que les 47 % des membres qui sont de vos ordres...

M. Frances (Robert): Oui, c'est ceux-là qu'on...

M. Bertrand (Charlevoix): ...n'ont pas cette protection-là. Moi, ce qui me...

M. Delisle (Pierre): C'est pour ça que, dans notre mémoire... Excusez, je croyais que vous aviez terminé.

M. Landry (Verchères): Et, aux yeux du public, là, il y a donc deux sortes de planificateurs financiers. Et c'est le mode de rémunération qui est un des discriminants, c'est-à-dire que les uns reçoivent des commissions et les autres reçoivent des honoraires.

M. Frances (Robert): J'aimerais...

M. Landry (Verchères): Et certains reçoivent les deux parce qu'ils n'ont pas un ordre pour les réglementer.

M. Frances (Robert): Je dirai que, oui, c'est juste qu'il y ait une limite des planificateurs aux yeux du consommateur, ceux qui sont membres des ordres professionnels et ceux qui ne le sont pas, la raison étant que les membres des ordres professionnels, c'est très clair dans leur mandat de planification, la façon dont ils seront rémunérés, et c'est au choix du consommateur. Ça, c'est très important comme nuance.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que les actuaires... Les actuaires ne font pas partie de votre groupe?

M. Delisle (Pierre): Non. Ce n'est pas un ordre professionnel, non.

M. Bertrand (Charlevoix): C'est parce que ce n'est pas un ordre professionnel.

M. Landry (Verchères): Non, mais, si c'est au choix, ça veut dire que...

M. Gautrin: C'est une association, mais ce n'est pas un ordre professionnel.

M. Landry (Verchères): Un membre en règle du Barreau pourrait se trouver payé à commission.

M. Frances (Robert): Pas pour une planification financière. Il n'existe pas de planification financière à commission. Il devra aller voir, par exemple, la CVMQ pour vendre un produit et il devra demander... Je pourrais laisser répondre...

(18 heures)

M. Landry (Verchères): Non, mais, dans l'hypothèse que vous avez vous-même évoquée, de celui qui dit: Je ne peux pas me payer la planification financière; cependant, je choisis d'acheter des produits qui vont vous rémunérer, ça veut dire qu'un avocat et un notaire vont être rémunérés à commission sur les ventes de produits?

M. Bertrand (Charlevoix): Bien, il n'a pas tort.

M. Frances (Robert): Bien, il y a deux éléments à la réponse.

M. Bertrand (Charlevoix): Vous autres, vous allez dire non pour vous autres, excepté que votre 47 % de membres qu'on retrouve dans l'Institut et qui sont membres du Barreau et ils vendent... Ils font exactement ce que le ministre vient de dire.

M. Frances (Robert): Peut-être que Marc Sauvé pourrait...

M. Bertrand (Charlevoix): C'est ça que vous dites, d'ailleurs.

M. Frances (Robert): Avant que M. Sauvé réponde, juste une clarification. Les 47 % des membres ne sont pas les membres des ordres professionnels. 47 % de tous les planificateurs financiers au Québec sont des membres des ordres professionnels. 53 % de tous les planificateurs financiers ne sont pas...

M. Bertrand (Charlevoix): Combien sont membres de vos ordres et sont dans l'Institut et, selon vous autres en tout cas...

Une voix: Ils sont tous dans l'Institut.

M. Bertrand (Charlevoix): ...je ne dirai pas enfreignent les règlements ou les lois, mais vous insistez quand même pour dire qu'ils devraient être uniquement sous votre tutelle... Combien il y en a qui sont membres, exemple, du Barreau et qui, en même temps, sont membres de l'Institut et qui vendent à commission?

M. Frances (Robert): Ils sont tous membres.

M. Delisle (Pierre): Actuellement, ils sont tous membres de l'Institut.

M. Frances (Robert): Ils sont tous membres de l'Institut. Pardon, ils sont tous...

M. Bertrand (Charlevoix): Mais combien sur... Je ne sais pas combien ils sont de membres. Je les vois puis je n'ose pas le leur demander parce que, quand ils vont venir, on va leur en parler. Mais ce que je veux savoir, moi, c'est: Est-ce qu'il y a... Vous semblez dire qu'il y a des gens qui sont notaires puis qui font de la pratique sous l'Institut et qui ne sont pas sous vos règles. C'est ça que vous semblez dire. Non, ce n'est pas ça?

M. Frances (Robert): Un membre d'un ordre professionnel qui pratique la planification financière doit être titulaire d'un diplôme de l'IQPF. Il ne peut pas oeuvrer en planification financière sans avoir le diplôme. Le diplôme est décerné par l'IQPF. S'il est membre ou non de l'IQPF... On aura des questions à se poser s'il y a un membership qu'on devrait aller chercher auprès de l'IQPF. Mais ça, c'est une autre question.

M. Bertrand (Charlevoix): En avez-vous donné, des diplômes? En avez-vous donné, des autorisations?

M. Frances (Robert): M. Gagnon.

M. Gagnon (Richard): En fait, pour bien préciser, effectivement, tous les membres des ordres professionnels qui ont le titre de planificateur financier sont inévitablement titulaires du diplôme de l'IQPF parce que c'est une condition de pratique essentielle. Parmi ces professionnels, certains peuvent, parce qu'ils sont régis par d'autres groupes liés à la vente, aussi vendre des produits. Ce n'est pas le cas des notaires, puis c'est interdit. Tu ne peux pas être notaire et rémunéré à commission. Je pense que c'est la même chose au Barreau.

Sauf que, pour certains ordres professionnels... Je pense que chez les administrateurs agréés ça pourrait être le cas, que quelqu'un qui est planificateur financier, qui est régi par l'Ordre des administrateurs agréés en planification financière, fasse son activité conseil en planification financière mais pourrait, dans une deuxième phase, vendre un produit financier, ça pourrait arriver. Et là il serait régi par un autre groupe. Ça pourrait être la Commission des valeurs mobilières qui régit la vente ou d'autres groupes, d'autres associations qui régissent la vente de produits financiers, pas l'ordre professionnel.

Par contre, vous remarquerez que ce qu'on propose – et c'est, honnêtement, assez contraignant pour le professionnel – dans les normes professionnelles qu'on vous recommande même d'inscrire dans la loi: on contraint le planificateur financier à s'astreindre à une démarche en 10 étapes dont il ne peut se dégager, à moins que ce soit par écrit de la part de son client.

Donc, la planification financière escamotée, qui en réalité est une vente de produits financiers mais cachée derrière un semblant de planification financière, n'est pas possible. Elle n'est pas possible, parce que celui qui est régi par le système professionnel doit nécessairement faire une réelle planification financière en fonction des normes de pratique qu'on lui impose. Et, si ça ne fait pas son affaire, bien là il ira voir une autre association, qui lui émettra le titre de planificateur financier selon des normes moins rigoureuses.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Mme et MM. les membres de la commission, ça me prend votre consentement pour dépasser 18 heures.

M. Gautrin: Consentement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Allez, M. le député de Charlevoix, mais je vous avise que le temps pour les ministériels est écoulé, là.

M. Bertrand (Charlevoix): Consentement?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: M. le Président, sans vouloir abuser, c'est parce que je pense que, quand même, on pourrait bien laisser un peu de consentement pour finir les questions du député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce que vous avez consulté...

M. Gautrin: Mais pas deux heures, hein. Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): ...les gens qui sont soit du Barreau ou autres, encore une fois, mais qui emploient le titre de planificateur dans l'Institut québécois? Est-ce qu'ils ont été consultés par vous autres pour savoir, je ne sais pas, moi, ce qu'ils pensent de votre position puis pourquoi ça se passe comme ça? Parce que, quand vous venez ici, j'imagine que vous avez à quelque part des revendications. D'abord, je suis surpris que la loi existe depuis 1989 et que – moi, à ma connaissance – ce soit la première fois qu'on entende parler de cette dimension-là; peut-être qu'au niveau fonctionnaires ils en ont entendu parler. Puis je lis en même temps ce que vous recommandez, soit, dans l'éventualité où demeurent des éléments d'un système parallèle, intégrer la loi, et là vous faites une définition de ce que ça devrait être.

J'aimerais ça savoir, moi... Je vais aimer ça savoir ce que, quand ils vont venir devant nous autres, ils pensent de ça. Et est-ce que ça ne met pas, si je lis ça, puis je ne veux pas la relire, à cause du temps, mais est-ce que ça ne vous positionne pas dans une mauvaise position par rapport, exemple, je ne sais pas, moi, à un notaire qui fait un contrat pour une vente de maison et qu'on sait très bien que ce n'est pas uniquement à honoraires? Si ma mémoire est bonne, il y a une espèce de... Il n'y a pas un pourcentage ou quelque chose? En tout cas.

M. Landry (Verchères): C'est à honoraires, mais il y a un tarif.

M. Bertrand (Charlevoix): Je vous pose la question: Est-ce qu'il n'y a pas un petit peu une contradiction là-dedans, dans la définition que vous voudriez nous voir adopter?

M. Frances (Robert): Je vais répondre à la question sur l'origine de la définition de planification financière. Elle provient, c'est-à-dire elle est acceptée dans les cercles de planification financière depuis longtemps. Elle est utilisée par l'association internationale des planificateurs financiers, qui regroupe les différentes associations de planification financière de différents pays à travers le monde. Elle est utilisée par l'Association canadienne. Et, avant l'établissement des différentes associations puis des regroupements au Québec, avant 1989, c'était l'association québécoise de la planification financière qui existait jusqu'en 1989, et c'était la définition qui était utilisée.

M. Bertrand (Charlevoix): Une courte et dernière intervention, M. le Président, en disant simplement que je pense que ça va mériter qu'on se penche là-dessus, qu'on creuse ça un petit peu plus. Moi, je vous donne mon opinion très personnelle: l'Institut, quant à moi, devra être dans l'organisme, s'il y a un organisme qui est créé, et non à part, parce que ça, c'est très clair, que tu ne peux pas à la fois avoir tous les mérites de quelque chose puis pas les désavantages. Ça, pour moi, c'est très clair.

M. Gautrin: On peut créer un ordre, à ce moment-là. On peut créer un ordre de planificateurs financiers.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Bon. J'avais M. le député de l'Acadie qui avait demandé aussi la parole. Je ne veux pas trancher entre le député de l'Acadie et le député de Verdun, mais il vous reste à vous deux, en tout cas, 13 minutes.

M. Bordeleau: O.K. En fait, je voudrais poursuivre un peu sur le même sujet. Au niveau de l'institut québécois des planificateurs financiers, est-ce que les ordres présents, vous êtes impliqués d'une façon ou d'une autre soit au niveau du Conseil ou... Est-ce que vous avez une représentation dans l'Institut?

M. Frances (Robert): Très bonne question. On n'a pas de représentant mandaté par les ordres pour nous représenter. Lors des élections de l'IQPF, l'IQPF est libre de... par l'entremise de l'élection de ses membres, doit s'assurer qu'il y a certains membres du conseil d'administration qui portent le titre ou qui portent l'accréditation d'un certain ordre professionnel, et ça, c'est écrit dans la loi. Mais il n'y a aucune obligation que ces individus-là soient mandatés ou reconnus par les ordres pour représenter les ordres dans les discussions de l'IQPF.

M. Bordeleau: Alors, il n'y a pas de représentation formelle des ordres. Il y a des individus qui sont là, qui viennent des différents ordres professionnels et qui siègent au Conseil. C'est ce que vous me dites.

M. Frances (Robert): Ce sont des individus élus, des praticiens du domaine, mais qui ne sont pas reliés formellement ou souvent même informellement avec leur ordre.

M. Gagnon (Richard): D'ailleurs, à cet égard, dans le mémoire que nous avons transmis le 2 février 1996, on faisait valoir que, dans la mesure où le ministre reconduisait le mandat de l'IQPF, il serait intéressant que les ordres professionnels puissent être en mesure de désigner des représentants à l'Institut québécois pour harmoniser les pratiques et les façons de faire.

M. Bordeleau: O.K. J'aimerais reprendre un peu... Tout à l'heure, on parlait de la question du diplôme qui est décerné par l'Institut. Ce qui semble être admis actuellement, si je comprends bien, c'est un diplôme qui est nécessaire et qui semble répondre, disons, aux exigences du travail des planificateurs financiers.

À partir du moment où ce diplôme-là est décerné par l'Institut et non pas par chacun des ordres professionnels où il y a des individus qui travaillent comme planificateurs financiers, à partir du moment où c'est un institut qui donne le diplôme, qui fait la formation, qui prépare les gens, disons, à un niveau de compétence acceptable, la question que je me pose, c'est: Pourquoi les normes déontologiques ne seraient pas associées au même organisme plutôt qu'aux ordres professionnels, ce qui aurait l'avantage de recouvrir 100 % des planificateurs financiers et non pas seulement 47 %, comme c'est le cas actuellement, qui sont couverts par vos codes déontologiques? Et il y en a 53 %, si je comprends bien, qui ne sont pas nécessairement couverts par des normes déontologiques parce qu'ils ne sont pas membres d'ordres professionnels.

(18 h 10)

M. Gagnon (Richard): En fait, pour recréer une situation un peu compliquée pour le consommateur, à savoir que le même individu, qui est d'abord et avant tout un administrateur agréé et qui, par surcroît, est planificateur financier, serait régi par deux codes de déontologie différents et donc par deux organismes différents... Le consommateur qui n'est pas satisfait de monsieur, il s'adresse où? À son ordre professionnel qui va lui dire non? Pour ce bout de sa pratique, ce n'est pas l'ordre professionnel qui l'encadre ou qui le régit, c'est un autre organisme auquel je vous réfère. Ça pourrait devenir drôlement compliqué.

M. Frances (Robert): Peut-être, Réal, tu avais de quoi pour compléter, là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si vous voulez vous identifier, s'il vous plaît.

M. Sureau (Réal): Oui. Réal Sureau, président sortant de l'Ordre des comptables agréés du Québec.

Je voudrais répondre à M. Gautrin. Cet après-midi, j'ai assisté aux trois ou quatre présentations – je crois que nous sommes la quatrième – et vous êtes revenu souvent en demandant: Est-ce qu'on est d'accord... Vous demandiez aux intervenants, aux témoins, si nous étions d'accord à ce que les planificateurs financiers deviennent un ordre professionnel.

M. Gautrin: Plus généralement, ça touchait en partie les planificateurs financiers...

M. Sureau (Réal): Et il y en a qui étaient pour et il y en a qui étaient contre.

M. Gautrin: ...et aussi les courtiers d'assurances, pour une deuxième dimension.

M. Sureau (Réal): Je voudrais juste, à titre d'information, pour compléter votre information... J'ai avec moi un mémoire qui a été présenté à M. Campeau, le 7 août 1995, alors qu'il était ministre des Finances, préparé par l'Institut québécois de planification financière. Et, à la page 28, dans les recommandations de l'Institut même, leur premier énoncé, je vous le lis: «L'Institut québécois de planification financière ne doit pas devenir un ordre professionnel.» Alors, vous pourrez peut-être leur poser la question lorsqu'ils comparaîtront. Mais, selon eux, à leur propre désir, ils ne désirent pas, ne se voient pas comme devenant un ordre professionnel, si ça peut répondre à votre...

M. Gautrin: Pour l'institut des planificateurs en particulier.

M. Bordeleau: Je voudrais juste ajouter une question. Actuellement, est-ce qu'un planificateur financier – je pense que la question a été posée tout à l'heure, mais je n'ai pas saisi la réponse – si, par exemple, il est un notaire, s'il est un administrateur agréé, s'il fait partie d'un autre ordre professionnel, est-ce que c'est exactement le même code, les mêmes normes d'un ordre à l'autre qui vont permettre de juger si la personne qui agit en tant que planificateur financier a un comportement qui est acceptable ou non? Est-ce que c'est exactement les mêmes normes d'un ordre à l'autre?

M. Gagnon (Richard): Non. Actuellement, ce ne sont pas exactement les mêmes normes. Ce qu'on propose dans notre mémoire, c'est de se doter exactement des mêmes normes. On a déjà des normes, elles sont très proches, pour être honnête, il n'y a pas de différences majeures, mais, dans la mesure où on raffermit l'encadrement de la planification financière au sein du système professionnel, on se doterait d'une table, les six ordres professionnels concernés, qui définirait les mêmes normes pour les six ordres professionnels concernés.

M. Bordeleau: Au niveau des planificateurs, pas au niveau de l'ensemble des...

M. Gagnon (Richard): Au niveau des planificateurs financiers, effectivement.

M. Bordeleau: À ce moment-là, si c'est possible de le faire d'une façon horizontale entre les différents ordres, ce n'est pas possible de prendre ce code-là, qui est commun, et de l'appliquer au niveau, par exemple, de l'Institut, et à ce moment-là de couvrir le 100 % des planificateurs financiers?

M. Gagnon (Richard): Tout à fait, et il n'y a rien qui empêcherait qu'effectivement on se concerte pour avoir les mêmes normes en planification financière. C'est d'ailleurs exactement ce qu'on proposait dans notre mémoire du 2 février, où on proposait que tous ceux qui détiennent le titre de planificateur financier au Québec soient assujettis exactement aux mêmes normes professionnelles, parce qu'actuellement c'est la cacophonie. Actuellement, il n'y a pas deux groupes au Québec qui sont mandatés pour décerner le titre de planificateur financier qui le font sur la même base. Il n'y a pas deux groupes au Québec qui le font sur la même définition de la planification financière. Il n'y a pas deux groupes au Québec qui le font sur les mêmes normes de pratique professionnelle ou les mêmes conditions liées au titre de planification financière.

Alors, au fond, ce qu'on proposait dans notre mémoire de février, c'est de dire: Uniformisons donc, pour clarifier la situation auprès du public, les normes de pratique en planification financière et les règles liées à l'octroi du titre de planificateur financier, pour que tout planificateur financier au Québec soit assujetti aux mêmes règles d'émission du titre, aux mêmes normes professionnelles. Alors, c'est ce qu'on proposait. Il y a une variante dans ce qui est proposé actuellement, et, à la lumière de ce qui est proposé, nous, on se dit: Bon, bien, au moins laissez les six ordres professionnels uniformiser l'ensemble des normes liées à l'octroi et à l'encadrement du titre de planificateur financier.

On parlait tout à l'heure de la définition de planification financière. Vous admettrez qu'il est assez curieux que six ou, même plus, huit groupes différents actuellement octroient le titre de planificateur financier, alors que nous n'avons aucune définition de la planification financière. Alors, quand on décerne le titre de planificateur financier en fonction d'une définition et qu'un autre groupe le fait en fonction d'une autre définition, bien, qu'on le veuille ou non, au bout du compte, on ne décerne pas le même titre de planificateur financier.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il vous resterait trois minutes, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci. Je ne voudrais pas abuser du temps comme ça, mais là, quand même, j'ai de la difficulté. Autant je vais être d'accord avec vous qu'il est sain qu'on ait une définition de planificateur financier, autant je vais être d'accord avec vous qu'on ait les mêmes normes d'attribution du titre, autant je suis heureux que vous puissiez vous concerter, autant il reste un problème qui est les 53 % de planificateurs financiers qui sont non-membres d'un ordre actuellement et que, vu du côté du public...

Et, comprenons bien, un public, quand il va voir un planificateur financier, il ne sait pas, au départ, si c'est un membre d'un ordre, ou si c'est un membre qui n'est pas membre d'un ordre, ou si c'est un membre des comptables agréés, ou un notaire. Et cette personne qui s'adresse à ce 53 % de non-membres d'un ordre n'aura pas toute la protection et les recours qu'il y a actuellement dans le Code des professions et que vous connaissez aussi bien que moi, à l'heure actuelle.

Et je me demande à quoi sert de mettre des normes communes si, pour vérifier l'application de ces normes, il y a 47 % de la pratique de la profession où il y aura des mécanismes d'application et de surveillance des normes – et je comprends que vous puissiez vous concerter sur la surveillance des normes – et 53 % où ça sera simplement un voeu pieux. Il y aura les normes. Il n'y aura pas moyen, pour le public, d'aller se plaindre ou quoi que ce soit. C'est ça qui m'inquiète dans la situation à l'heure actuelle.

Je vais poursuivre mon débat avec l'Institut, demain, sur ça, mais vous comprenez mon point de vue, à ce moment-là. Autant je peux comprendre que vous vous concertiez puis je trouverais sain que vous vous concertiez, autant je me dis: À partir du moment où il y a la moitié du marché où le public n'est pas protégé, ça me pose un problème. Alors, je ne sais pas ce que...

M. Delisle (Pierre): Votre remarque va tout à fait dans le sens de la proposition que nous avions faite en février. Évidemment, ça n'avait pas été retenu. Donc, nous avons dû arriver avec une proposition qui tenait compte de ce qu'il y avait dans le rapport. Je présume que les trois options qui sont soumises, soulevées dans le rapport vont solutionner cette partie du problème. Il n'y a rien qui empêcherait que le gouvernement édicte les normes minimales, qu'il les fasse appliquer par le biais du BDPF ou d'un autre organisme, puis, à ce moment-là, ça sera à lui de le voir. Mais on présume que cette partie-là nous concernait moins, compte tenu que notre première option de février n'avait pas été retenue. En ce qui concerne les ordres professionnels, bien, je pense que notre position est assez claire, par contre.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. Je remercie les représentants du Conseil interprofessionnel du Québec de nous avoir fait part de leurs réflexions qui, sans doute, enrichiront nos travaux. Je suspends ces mêmes travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 18)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! À l'ordre, MM. les membres de la commission! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux afin de procéder à des consultations particulières sur le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché, «La distribution de produits financiers aux particuliers: relever résolument le défi du changement».

J'invite les représentants du Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec à prendre place et à nous présenter leur mémoire. J'inviterais M. Desbiens, probablement...

M. Gautrin: M. le Président, on salue l'ancien et le futur ministre des Finances.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Ah ça! M. le député de Verdun, j'allais dire: Dieu seul le sait. On sait où est le bon Dieu. Excusez, M. Desbiens, je vous laisse...

M. Gautrin: ...on ne peut pas toujours bien choisir, tu sais.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...présenter les gens qui vous accompagnent et ensuite nous présenter votre mémoire.


Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec (RACQ)

M. LaCouture (Jean): M. le Président, je vous remercie. Mon nom est Jean LaCouture. Je suis président et directeur général du RACQ. Et vous allez me permettre, au tout début, de prendre 15 secondes pour vous présenter le RACQ parce que c'est une association qui a un an d'existence seulement, donc à sa première année. Je pense qu'il est important de vous dire que c'est une organisation qui a été fondée, en août 1995, dans le but de promouvoir l'intérêt des compagnies d'assurance-vie à charte québécoise.

Aujourd'hui, après un an d'existence, nous avons 12 des 17 membres, 17 entreprises à charte québécoise, donc nous représentons quelque 75 % des primes qui sont émises par des assureurs à charte québécoise. Ces entreprises sont la Croix Bleue, l'Assurance vie Desjardins-Laurentienne, AXA, La Survivance, MFQ Vie, La Personnelle-Vie, Promotuel, SSQ Vie, Saint-Laurent, L'Union-vie, l'assurance-vie de la Banque Nationale et L'Excellence. Vous allez comprendre, M. le Président, également que deux de nos membres ont souhaité présenter leurs mémoires respectifs, soit deux des institutions financières qui sont également des institutions de dépôts. Donc, Desjardins a eu son propre mémoire ainsi que la Banque Nationale.

Je voudrais vous présenter les membres qui sont avec moi, qui feront la présentation. Et vous remarquerez que ce sont tous des assureurs qui ont participé à articuler leur position face à cette nouvelle loi touchant les intermédiaires de marché. C'est la façon dont le RACQ fonctionne, d'avoir à la tête des comités importants un président d'une compagnie d'assurances et également un membre du conseil d'administration.

Alors, les gens qui m'accompagnent ce soir sont: à mon extrême gauche, M. Marcel Marcouiller, qui est vice-président Développement et Affaires corporatives de L'Union-vie; par la suite, M. André Gaudreault, qui est vice-président exécutif Assurance de personnes de AXA; à l'autre extrême, M. Gilbert Maltais, qui est vice-président Développement de la Croix Bleue du Québec; et, à mes côtés, M. Jacques Desbiens, qui est celui qui vous fera la présentation des points saillants du mémoire. Il est président de L'Union-vie, il est également vice-président du conseil du RACQ, et c'est lui qui a été président du comité sur les commentaires que nous allons vous livrer sur la loi des intermédiaires de marché du Québec.

Alors, M. le Président, c'est M. Jacques Desbiens qui va diriger la présentation.

M. Desbiens (Jacques): Merci, M. LaCouture. M. le Président, membres de cette commission, nous sommes heureux de vous présenter nos commentaires, observations et recommandations suite à la publication en juin dernier du rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la Loi sur les intermédiaires de marché, et nous vous remercions de nous en avoir donné l'opportunité.

D'entrée de jeu, sans toutefois être catégoriques à cet effet, nous croyons que la loi 134 actuelle, ou encore la Loi sur les intermédiaires de marché, une fois modifiée pour corriger les problèmes les plus importants, pourrait continuer à protéger adéquatement le consommateur. Comme le dossier a pris une autre tangente et que nous comprenons que le train est déjà parti, vu sous cet angle nous sommes prêts à collaborer avec le ministre pour relever résolument les défis du changement dans la distribution des produits financiers aux particuliers en prenant pour acquis que cette démarche est imprégnée de prudence. Dans le même souffle, nous désirons vous assurer que c'est d'abord et avant tout l'entière satisfaction du consommateur et, par ricochet, la protection adéquate de ce dernier qui nous ont guidés tout au long de nos réflexions, et nous espérons avoir bien traduit ces préoccupations dans nos commentaires, observations et recommandations.

(20 h 10)

Ceci étant dit, à cette étape-ci des consultations, comme en fait foi notre mémoire, nous avons préféré limiter nos interventions sur ce que nous considérons être les quatre enjeux majeurs de la réforme proposée, à savoir la portée de la loi, l'organisme d'autoréglementation et d'autodiscipline, la certification, la distribution des produits et services financiers dans les institutions de dépôts. Avant de terminer cette présentation, si le temps nous le permet, nous ferons quelques brèves observations sur divers autres sujets traités dans le rapport quinquennal.

Ainsi, en ce qui concerne le champ d'application de la loi, compte tenu de l'évolution rapide dans le domaine de la distribution des produits et services financiers, compte tenu que la Loi sur les intermédiaires de marché ne touche que le segment de la distribution qui est faite par les intermédiaires de marché et compte tenu qu'il faut, en autant que faire se peut, avoir une loi qui couvre toutes les situations, le RACQ est donc d'accord avec l'orientation du gouvernement d'élargir la portée de la loi actuelle pour passer d'une loi d'intermédiation à une loi sur la distribution des produits et services financiers, de telle sorte que la loi régisse non seulement les intermédiaires de marché, mais aussi tous les distributeurs d'assurance et de certains autres produits et services financiers non régis actuellement, et ce, quel que soit le mode de distribution utilisé.

Toutefois, pour les compagnies membres du RACQ, cet élargissement ne doit pas pour autant, comme c'est le cas actuellement, comprendre une réglementation des fonctions rattachées à la création des produits, tels la conception et la tarification du produit, la rémunération du distributeur, l'établissement des normes de souscription et de réclamation du produit. Nous pensons que la libre concurrence du marché assure une grande diversité des produits et des modes d'accès aux produits pour le consommateur et des prix compétitifs.

Pour être conséquent avec ce que l'on vient d'avancer au sujet de la portée de la loi, le RACQ appuie tout à fait la création d'un seul organisme chargé à la fois de réglementer et de maintenir la discipline, qui sera éventuellement mieux connu sous l'appellation BDPF, soit le Bureau de la distribution des produits et services financiers. L'expérience des cinq dernières années est très révélatrice à ce chapitre, et nous sommes convaincus que cette voie assurera une plus grande uniformité de pratique, tant au niveau de la réglementation que de la discipline, éliminera les dédoublements de responsabilités et les chevauchements, simplifiera considérablement l'encadrement de la distribution de tous les produits et services financiers et réduira par le fait même les frais de fonctionnement.

Quant à la composition du conseil de ce Bureau, nous notons que le rapport quinquennal n'est pas très explicite à ce sujet, se limitant à indiquer qu'il serait représentatif des divers groupes d'intervenants, tout en précisant que les consommateurs y constitueraient une bonne proportion. Eu égard à la portée étendue de la loi, il nous apparaît logique que tous les intervenants du marché financier y soient représentés: compagnies d'assurances, institutions de dépôts, distributeurs, intermédiaires de marché, planificateurs financiers et consommateurs. Tel que recommandé au rapport, la loi devra prévoir une voix importante aux consommateurs.

Le Regroupement est aussi d'avis que les membres du conseil d'administration du Bureau de la distribution des produits et services financiers nommés par le ministre le soient à titre personnel plutôt qu'à titre de représentants d'organismes dont ils sont issus. Cependant, les membres devraient être nommés à partir des noms suggérés par des organismes reconnus. Les personnes ainsi désignées pourraient avoir été proposées suite à un procédé électif.

Le troisième enjeu concerne la certification, et c'est probablement l'enjeu le plus important pour nous. De façon générale, nous espérons voir apparaître à ce chapitre le principe, et vous me pardonnerez l'expression, du «level playing field», et ce, dans le meilleur intérêt du consommateur. Nous comprenons cependant que le problème n'est pas simple, puisque actuellement le consommateur peut se faire offrir pratiquement les mêmes produits et services financiers soit par l'entremise de personnes physiques – on parle ici des agents, courtiers d'assurances, des employés des institutions de dépôts, des concessionnaires d'automobiles, etc. – ou directement – on parle ici de télémarketing, publipostage, annonces télévisées, et même par le réseau Internet.

Il ne fait aucun doute dans notre esprit que la variété des produits et des services financiers offerts au consommateur de même que la complexité et le degré de sophistication de certains produits et marchés appellent la spécialisation des personnes étant en contact avec le consommateur. Pour ce dernier, la garantie de compétence réside d'abord dans un processus de certification. Nous favorisons donc l'obligation de détenir un certificat modulaire reflétant l'acquisition de connaissances de différentes spécialités lorsque les produits et services financiers sont distribués par l'intermédiaire des personnes énumérées ci-haut. Le permis de conduire offre un exemple concret de certificat modulaire. Les différents programmes d'études nécessaires à l'obtention d'une spécialité, les examens et l'émission des certificats devraient être sous la responsabilité d'un organisme d'autoréglementation et d'autodiscipline.

D'un autre côté, lorsque les produits sont distribués directement au consommateur, le Regroupement recommande que les employés du distributeur possèdent un certificat émis par l'organisme d'autoréglementation et d'autodiscipline, et ce, dans le but d'assurer le consommateur que les personnes avec lesquelles il peut être mis en contact suite à ces offres directes possèdent toutes les qualifications requises pour le servir adéquatement.

Afin de s'assurer aussi que le consommateur est suffisamment protégé lorsqu'il transige sans l'intervention d'un intermédiaire, le Regroupement recommande que toute personne morale, société et entreprise individuelle qui n'est pas une institution financière sous la juridiction de l'Inspecteur général des institutions financières ait l'obligation de s'enregistrer auprès de l'organisme d'autoréglementation qui sera désigné par la loi.

Cependant, nous sommes d'avis qu'en plus de l'enregistrement la loi devrait comporter l'obligation pour le distributeur d'assumer l'entière responsabilité à l'égard des actes de ses employés et de maintenir un cautionnement suffisant pour garantir la protection des consommateurs. De plus, la loi devrait prévoir un mécanisme de divulgation publique des contrevenants.

Le dernier enjeu pour nous, mais non le moindre, concerne la distribution de produits et de services financiers dans les institutions de dépôts. La section 2.4 du rapport quinquennal, qui décrit les problèmes rencontrés dans l'offre de produits et services financiers, dresse un portrait complet de la situation. Cet exposé met en lumière les écueils pouvant être rencontrés par les consommateurs dans la situation actuelle.

Ainsi, parce que les institutions financières et les cabinets d'intermédiaires de marché deviennent des centres de distribution de produits et de services financiers diversifiés, le consommateur est actuellement amené, et serait de plus en plus amené, à y rencontrer des personnes qui agissent sous différents titres, certaines devant posséder un certificat et étant déjà soumises à des règles de pratique définies et d'autres pouvant lui offrir des conseils ou des produits sans être soumises à une réglementation quelconque. De plus, tel que décrit dans cette partie du rapport, les institutions financières qui emploient ces personnes n'ont pas toujours une responsabilité légale évidente à l'égard des conseils qui sont donnés aux consommateurs ou à l'égard de la pertinence du produit acheté en regard des besoins. Il y a aussi le fait que des produits presque identiques offerts par une même personne sont souvent soumis à des exigences réglementaires différentes.

Afin d'apporter une solution à cette situation, le rapport propose trois avenues de solution. Le Regroupement favorise la troisième voie proposée, puisque cette solution s'adresse expressément aux inconsistances et lacunes de la situation actuelle qui crée de la confusion pour le consommateur et que cette solution permet de s'assurer que la responsabilité légale est couverte adéquatement, tout en donnant au consommateur la possibilité de choisir où et comment il désire se procurer des services financiers, tout en affirmant la compétence du Québec en matière de distribution de produits financiers.

L'utilisation obligatoire pour les institutions de dépôts d'un cabinet d'agents multidisciplinaire, regroupant des personnes possédant un certificat attestant qu'elles sont dûment qualifiées, soit des intermédiaires de marché, planificateurs financiers et représentants d'un courtier d'exercice restreint, permet en effet de contrer les effets néfastes de la situation actuelle et de répondre aux objectifs visés par les modifications à la Loi sur les intermédiaires de marché.

(20 h 20)

Afin d'éviter la concentration des activités d'assurance, le Regroupement recommande les dispositions suivantes: les activités du cabinet d'agents multidisciplinaire doivent être réalisées à l'extérieur des succursales des institutions de dépôts. Le Regroupement considère aussi essentielle l'introduction de dispositions prohibant l'utilisation de renseignements détenus par les institutions de dépôts pour les fins de sollicitation de la clientèle par le cabinet d'agents multidisciplinaire. Quant au double emploi, le Regroupement considère qu'à cet égard un pas important dans la bonne direction a été accompli depuis l'introduction de la Loi sur les intermédiaires de marché. En conséquence, nous recommandons qu'aucun allégement ne soit consenti par les modifications à la loi, puisqu'un tel allégement constitue un pas en arrière.

Tel que mentionné au début, nous aimerions, dans les minutes qui restent, faire des commentaires sur certains points particuliers, soit les règles de transition, l'ombudsman, la publicité et les normes de pratique, les privilèges de résiliation, la rémunération nivelée et le compte en fidéicommis. Alors, pour fins de transition, certaines exceptions pourraient être décrétées. Cependant, elles devraient l'être par règlement et pour une période limitée.

En ce qui concerne l'ombudsman, jusqu'à récemment les plaintes étaient adressées à l'IGIF, et l'expérience a démontré qu'il s'agissait d'une excellente voie. Le RACQ recommande donc de remettre cette fonction à l'IGIF.

En ce qui concerne la publicité et les normes de pratique, nous croyons que la réglementation en vigueur est suffisante; en ajouter ne ferait qu'accroître la confusion et les coûts.

Quant aux privilèges de résiliation, pour éviter la confusion chez le consommateur, nous estimons que le délai de résiliation sans frais doit être identique pour tous les produits et modes de distribution; le délai actuel de 10 jours nous semble approprié.

Pour la rémunération nivelée, le Regroupement est d'avis qu'une action directe, rapide de l'organisme d'autoréglementation, comportant les pénalités appropriées dans le cas de remplacement injustifié, est préférable à une politique indirecte, telle la rémunération nivelée, pouvant créer des effets non souhaités dans certaines situations.

En dernier lieu, pour le compte en fidéicommis, le Regroupement est d'avis que le compte en fidéicommis pour les sommes d'argent transmises à un intermédiaire de marché dans le cadre de ses opérations professionnelles constitue une protection plus adéquate pour le consommateur que le compte séparé, tel que proposé dans le rapport.

Merci de votre attention, et mes collègues et moi sommes disponibles pour répondre à toutes vos questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. Desbiens et M. LaCouture, de votre présentation, et je laisse la parole au député de Crémazie pour ses questions.

M. Campeau: Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, je voulais vous remercier, au nom du ministre des Finances, Bernard Landry, pour cet excellent mémoire. Je pense qu'il y a là-dedans beaucoup de travail. Et le fait que vous soyez venus ici ce soir pour le présenter, bien, merci aussi et merci à tous ceux qui vous accompagnent.

En lisant votre rapport, je remarque deux points, entre autres, et je laisserai les autres pour mes collègues et les collègues de l'opposition aussi. C'est que vous indiquez qu'il faut laisser au consommateur le libre choix du lieu, du moment puis de la façon dont il veut ou il peut se procurer les produits puis les services financiers. Personnellement, je trouve ça excellent. Mais, tout de suite après, vous avez quand même une réserve et vous dites que les activités du cabinet d'agents doivent être réalisées à l'extérieur d'une institution de dépôts. Est-ce que ça ne va pas en contradiction, le fait que vous voulez lui laisser le libre choix du lieu, du temps, de l'heure, mais vous ne voulez pas que ce soit dans une institution de dépôts?

Et, lié à ça, un deuxième commentaire. Ma perception, c'est que vous êtes contre la distribution des produits dans les institutions de dépôts, mais, vous autres, vous voulez offrir les produits d'une institution financière. Vous voulez offrir les produits, par exemple les dépôts, et vous autres, vous seriez prêts à servir d'agents là-dessus. Est-ce que je comprends bien vos commentaires dans votre rapport?

M. Desbiens (Jacques): M. Maltais va donner suite à vos questions.

M. Maltais (Gilbert): Effectivement, il semble y avoir, M. Campeau, carrément une opposition dans la logique de l'argumentation qui est amenée. Ce qu'il faut quand même comprendre, c'est que l'institution de dépôts constitue quand même un endroit privilégié en termes d'information, d'une part, et de momentum de services qui sont requis à ce moment-là. Si quelqu'un se présente dans une institution de dépôts pour solliciter un prêt, à ce moment-là il devient, je crois, tout à fait à la merci, un peu, de la personne qui va lui répondre. Et, si cette personne-là est à la fois capable de lui offrir des produits d'assurance quels qu'ils soient, à ce moment-là je pense qu'il y a une situation de dépendance qu'on veut carrément éviter.

Donc, oui, que le consommateur décide de lui-même de l'endroit pour acheter son produit, sauf qu'il faut quand même, la nature humaine étant ce qu'elle est, je crois, favoriser que cette situation-là se fasse dans un climat et dans un endroit qui affiche un peu plus de neutralité, tout simplement.

M. Campeau: Alors, M. le Président, je comprends votre explication, mais est-ce que ça veut dire qu'à l'intérieur d'une même bâtisse deux bureaux l'un à côté de l'autre pourraient faire l'affaire, ou il faudrait sortir dehors puis à une autre adresse?

M. Maltais (Gilbert): C'est un peu comme dans les pharmacies, où on a fait une division carrément synthétique entre ce qui est l'officine du pharmacien et ce que sont les activités de commerce courantes où le pharmacien, d'une part, peut vendre des cigarettes, etc. Alors, s'il faut faire une division synthétique juste pour en faire une, je serais un peu en désaccord avec ça. Je dirais qu'il faudrait peut-être être plus franc et honnête que ça et dire: O.K. Il faudrait que ce soit carrément à l'extérieur de l'institution de dépôts et non pas à la porte d'à côté. En tout cas, c'est ma perception individuelle de cela.

M. Campeau: Je comprends la portée de votre mémoire avec ce commentaire-là.

M. Maltais (Gilbert): Merci.

M. Campeau: Je vais passer la parole à mes collègues ou à l'opposition, bien sûr, M. le Président.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Crémazie. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Pour poursuivre sur le même point, et j'aurais une autre question que je voulais rentrer. Mais, si je comprends bien, vous êtes assez d'accord avec le Conseil des assurances de personnes en ce qui touche les institutions de dépôts. Vous dites: Ça créerait une sorte de concurrence injuste, ça permettrait qu'il y ait des gens qui auraient dans leurs tractations une information que d'autres n'auraient pas, et strictement pour protéger le client, c'est-à-dire pour permettre de donner un véritable choix à la population, vous préférez que les services financiers ne soient pas offerts dans les institutions de dépôts. C'est à peu près ce...

M. Desbiens (Jacques): C'est bien ça.

M. Gautrin: C'est ce qu'avaient dit vos collègues, et j'imagine que vous partagez à ce moment-là le point de vue du Conseil des assurances de personnes qui était là cet après-midi.

M. Desbiens (Jacques): Tout à fait.

M. Gautrin: Si vous me permettez, M. le Président, je vais rentrer sur quelque chose de nouveau qu'on n'a pas encore entendu aujourd'hui, c'est la certification modulaire. Là, moi, j'essaie de voir comment je pourrais bien cerner, borner la fonction de ces intermédiaires de marché, de ces courtiers d'assurances, de ces planificateurs financiers. Et une partie des interventions des gens qui étaient venus avant vous... Ils disaient: Faites attention, les gens font un peu de tout, et, à vouloir trop séparer, à trop vouloir définir et préciser, vous risquez à ce moment-là de ne pas couvrir réellement la réalité de la profession. Alors, vous, vous me dites par contre que je pourrais faire ça. C'est-à-dire, la certification modulaire... Je pourrais avoir des gens qui font de l'assurance-vie, des gens qui font de l'assurance...

M. Desbiens (Jacques): De dommages.

M. Gautrin: ...de dommages – je m'excuse – des gens qui font de la planification financière, que les types de certification soient différents, que les uns... Vous me dites que le permis de conduire, il pourrait faire... Vous pouvez conduire une moto puis une auto, vous pouvez bien conduire une moto, une auto et un camion, etc. C'est...

M. Desbiens (Jacques): Exactement. C'est ce qu'on préconise.

M. Gautrin: Et vous dites que c'est faisable de cette manière-là. Pouvez-vous m'expliquer un peu plus parce que je n'ai pas eu l'impression que les gens qui sont intervenus avant vous – ou à moins que je les aie mal compris – semblaient partager votre point de vue?

M. Desbiens (Jacques): Nous, on présente...

M. Gautrin: Parce que l'idée est originale et elle est intéressante, hein.

M. Desbiens (Jacques): C'est ce qu'on croit.

M. Gautrin: Non, non, mais ce que je voudrais, c'est que vous l'expliquiez mieux pour qu'on la comprenne mieux, là.

M. Desbiens (Jacques): On s'attendait à cette question, et c'est M. Marcouiller qui a été désigné pour donner suite à cette question.

(20 h 30)

M. Marcouiller (Marcel): M. le Président, M. Gautrin, en fait, la question de la certification est un domaine excessivement complexe, et on peut le voir par les différentes conversations qu'on peut entendre et les positions de plusieurs personnes. Le point est que, dans l'esprit d'un système de distribution ou d'une loi sur la distribution très complexe, on touche, comme il est mentionné dans le rapport, dans la partie 2, particulièrement dans la section 2.4 où on décrit de façon très détaillée et très imagée ce qui se passe dans le vrai monde à propos de quelqu'un, un client qui est confronté à quelqu'un qui va lui offrir des produits très semblables, un fonds distinct dans une compagnie d'assurances, un fonds d'investissement... de fonds mutuels, des produits d'assurance-maladie, de l'assurance collective, de l'assurance IARD. Alors, c'est très complexe. Dans notre milieu, on finit par se débrouiller un peu et ceux qui sont familiers avec les institutions financières vont se retrouver un petit peu, mais la plupart des clients ou des consommateurs vont avoir beaucoup de misère à se distinguer.

Alors, nous autres, on a pensé qu'il faudrait une forme de certification qui permet de savoir c'est quoi, les qualités de la personne avec qui le consommateur fait affaire, puis que ce soit contrôlé. Nous, on a pensé, en discutant, qu'au niveau du permis de conduire avec déjà... Il y a huit, neuf classes là-dedans, avec des sous-classes, qui vont du tracteur de ferme à un train routier ou à des autobus scolaires avec toute la responsabilité, puis le gouvernement a réussi à ce que ça fonctionne, ça. En tout cas, moi, j'ai mon permis de conduire depuis de très, très nombreuses années puis je n'ai jamais entendu parler qu'il y avait des problèmes à propos de l'émission de ces permis-là, puis de contrôle.

Alors, on a dit: Si une organisation aussi massive que le permis de conduire, qui est modulaire, allant d'un petit produit comme un tracteur, qui reste sur une ferme, à un train routier, qui se promène sur les autoroutes puis qui circule avec tous les autres gens puis les motos... Il devrait y avoir moyen, au niveau des produits ou des genres de produits ou des groupes de produits, dans les produits financiers, de créer une structure – vers laquelle on ne s'est pas penché, là, parce qu'on a dit: On va laisser aller l'idée avant – pour qu'il y ait la certification. À ce moment-là, l'organisme d'autoréglementation définirait les cours nécessaires pour ça, produirait les examens puis pourrait avoir les certificats qui pourraient être contrôlés.

M. Gautrin: Mais, si on continue à prendre l'exemple dont vous parliez, on est capable prima facie de distinguer un tracteur d'une semi-remorque à...

M. Marcouiller (Marcel): Un six-roues.

M. Gautrin: ...six roues ou 12 roues. Le problème qu'il y a, tel que je l'avais compris – et peut-être que je me trompe, c'est pour ça que je vous pose la question spécifiquement – c'est que, dans le domaine des distributeurs, des intermédiaires de marché, de ceux qui distribuaient vos services, c'était beaucoup plus difficile de distinguer clairement un six-roues d'un tracteur. Autrement dit, il y avait un paquet d'affaires qui avaient cinq roues, quatre roues puis trois roues et demie, et c'était loin d'être aussi facile. Alors, des gens qui sont venus avant vous nous disaient: Faites attention, mais la distinction, les champs d'application ne sont pas aussi clairement définis que vous semblez le dire. Vous, vous me dites qu'on pourrait le faire.

M. Marcouiller (Marcel): Nous sommes d'avis qu'il y a moyen de s'entendre sur des lignes sans avoir une vingtaine de classes différentes. Nous croyons ça.

M. Gautrin: Dans ces conditions-là, votre organisme, regardez, il va regrouper tout le monde, l'organisme de certification, il aura avec lui un élément de surveillance. Ce n'est pas loin d'une corporation professionnelle ou d'un ordre professionnel, cette affaire-là. L'organisme qui certifie, il prend tout le monde, il couvre tout le monde en ayant un modulaire à l'intérieur – ça, je comprends bien – il a une fonction de certification, il a une fonction de protection du public, ça se rapproche assez d'un ordre professionnel.

M. Gaudreault (André): En fait, pour...

M. Gautrin: Alors, je vous demande si vous...

M. Gaudreault (André): André Gaudreault...

M. Gautrin: Je ne veux pas vous...

M. Gaudreault (André): Non, non, ça...

M. Gautrin: Si vous m'avez écouté avant, je suis assez cohérent avec ce que je dis, là.

M. Gaudreault (André): Non, en fait, vous soulevez exactement un point qui nous a tracassés longtemps. Effectivement, lorsque la distribution, et la loi qui la gère, n'est que la distribution par, disons, intermédiaires de marché, effectivement l'ordre a beaucoup d'avantages et permet de gérer la compétence, la formation, la discipline, l'éthique et un encadrement général des fonctions des distributeurs...

M. Gautrin: ...

M. Gaudreault (André): Exactement. Alors, on pourrait effectivement dire que l'ordre professionnel serait le générateur de ça. Cependant, la nature du livre vert nous laisse croire qu'on veut élargir la portée de la loi et encadrer toute la distribution de produits financiers. Alors, devant une réalité semblable, on ne peut pas, à ce moment, se replier sur un organisme qui se limite aux distributeurs qui sont des intermédiaires de marché, il faut aller chercher tous les autres genres de distribution. Alors, c'est pour ça qu'on dit qu'effectivement dans l'organisme il y aura une partie pour les distributeurs, mais il y aura également d'autres modules pour gérer tout ce qui se fera par les autres moyens de distribution.

M. Gautrin: Mais vous comprenez que, de la part de l'opposition, nous ne nous sentons pas nécessairement liés avec... D'ailleurs, c'est un livre vert que vous avez déposé, c'est bien ça? Alors, vous m'avez bien expliqué, la dernière fois qu'on a eu un débat ensemble, qu'un livre vert était simplement non pas un livre blanc, c'était seulement quelques idées et que ça pouvait être changé et remis sur une voie différente. Je m'adressais implicitement au ministre à ce moment-là.

M. le Président, j'aurais d'autres questions, mais je vais laisser peut-être la chance à mes collègues de l'opposition d'intervenir.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Verdun. La parole serait au député de Charlevoix.

M. Bertrand (Charlevoix): Merci, M. le Président. Je voudrais commencer d'abord mon intervention en déplorant un fait qui se passe actuellement et que je trouve totalement inopportun, inadéquat, inacceptable. Quelqu'un, à quelque part – on n'est pas capables d'identifier qui – nous fait, à nous les députés, en tout cas à plusieurs députés alentour de la table, parvenir un questionnaire. Dans ce cas-ci, c'est un questionnaire concernant les gens qui sont devant nous, des questions qu'ils nous recommandent de poser. Mais on ne peut pas identifier d'où ça vient, de qui ça vient, etc.

M. Gautrin: Moi, je ne l'ai pas reçu.

M. Bertrand (Charlevoix): Je trouve ça totalement inacceptable et, en le disant, je sais que ça va être enregistré. Alors, j'espère que dans les prochains jours, jusqu'au 10, on n'aura pas à subir ce genre de chose.

M. Gautrin: M. le député de Charlevoix, c'est parce que vous êtes favorisé par les gens, parce que, moi, je n'ai pas reçu de questionnaire.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le député, il y en a d'autres ici qui l'ont eu, et je suis certain que vous êtes d'accord avec moi pour déplorer ce genre de chose.

M. Gautrin: Je suis tout à fait d'accord avec vous, c'est inacceptable comme procédure. Mais, moi, ils n'ont même pas essayé de m'en envoyer.

M. Bertrand (Charlevoix): Alors, je déplore tellement ça, M. le Président, que je ne m'en servirai même pas pour poser les questions qu'il y a là-dessus.

Je reviens, M. le Président. Deux éléments. Premièrement, vous semblez être d'accord, vous autres aussi, sur l'option n° 1 qui parle d'un organisme. Il y a certaines petites différences que j'ai remarquées, mais j'aimerais vous entendre sur le mode électif, le choix du bureau de direction, la représentation, etc. Je sais, entre autres, qu'il y a déjà des gens qui ont passé ici aujourd'hui nous disant qu'ils préféraient un mode électif à peu près... en tout cas, en partie électif puis en partie nommé. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

J'aimerais vous entendre aussi à savoir si on doit regrouper tout ce qui s'appelle intermédiaires de marché à tous les niveaux que ce soit. Et, quand on aura épluché là-dessus, bien, j'aimerais discuter avec vous parce que je sais que vous avez à l'intérieur de votre groupe des gens qui sont spécialisés sur l'assurance-voyage et autres. Alors, j'aimerais toucher cet élément-là.

Mais, avant d'en arriver là, j'aimerais qu'on épluche la partie d'un organisme. Et, moi aussi, je souligne que, depuis ce matin, il y en a plusieurs qui ont collaboré avec nous depuis deux ans, on ne l'a pas dit à chaque fois, mais... les intermédiaires de marché en assurance de personnes, le Conseil des assurances de personnes, etc., et les représentants de compagnies aussi, et l'ACCAP aussi, puis il y en a d'autres qui vont venir d'ailleurs qui travaillent avec nous depuis deux ans là-dessus, et je pense que ça mérite d'être souligné. Alors, j'aimerais ça vous entendre élaborer un peu plus sur la structure unique qu'on verrait.

M. Gaudreault (André): M. Bertrand, je vous avoue que notre réflexion, et vous l'avez dans le rapport, n'est pas allée aussi loin que de monter des organigrammes et des structures d'administration. L'idée de l'organisme unique vient du fait que la mondialisation ou, si vous voulez, la globalisation fait en sorte que les produits vont être accessibles par toutes sortes de moyens. Alors, on pense que c'est une voie qu'on ne peut pas éviter, c'est-à-dire qu'il faut réglementer la distribution et non pas les distributeurs, qui sont des personnes physiques. Alors, lorsqu'on recommande un organisme...

M. Bertrand (Charlevoix): Je m'excuse, là. Donc, vous allez vers un...

M. Gaudreault (André): Un organisme unique.

Une voix: Un.

(20 h 40)

M. Bertrand (Charlevoix): Un organisme unique, mais sur la réglementation plus large que ce qu'on avait...

M. Gaudreault (André): Oui. En fait, on est favorable à...

M. Bertrand (Charlevoix): Autrement dit, on dépasse les intermédiaires de marché...

M. Gaudreault (André): Voilà!

M. Bertrand (Charlevoix): ...pour en arriver à plus large.

M. Gaudreault (André): Oui. En fait, c'est toujours dans un but de protection du consommateur. On ne dit pas nécessairement que c'est pour demain matin, on réalise la tâche à faire, et il y a peut-être, comme il est mentionné dans le rapport, des petits bobos du moment qui pourraient être, disons, guéris de façon ponctuelle, et nous laisser le temps de mûrir la grosse boîte. Cependant, c'est notre avis qu'un organisme qui regroupe la distribution de tous les produits, qui supervise la distribution de tous les produits, est le meilleur instrument.

Maintenant, en ce qui a trait au conseil, qui serait le conseil d'administration de l'organisme, la réalité du marché nous amène à suggérer un mode de représentation qui essaie d'être proportionnel aux pouvoirs, et tout ça, qui inclurait les institutions de dépôts, les assureurs et les regroupements d'intermédiaires. La manière de les nommer, on recommande la nomination par un ministre, ce qui n'exclut pas la possibilité que le ministre choisisse à partir d'une liste fournie par des organismes reconnus, et, lorsqu'on parle de liste fournie, il est possible que cette liste ait été montée à partir d'un processus électif. C'est un peu ça qui est la position.

M. Bertrand (Charlevoix): Moi, je vous avoue très franchement que je ne favorise pas nécessairement cette formule-là au total. Je suis prêt à aller à un compromis, là. Mais j'aimerais ça que vous m'expliquiez pourquoi ça serait au complet, cette formule-là.

M. Gaudreault (André): Pardon? Ce serait...

M. Bertrand (Charlevoix): J'aimerais ça que vous m'expliquiez pourquoi tous les membres du conseil devraient être choisis par le ministre. Au lieu qu'il y ait, exemple, une partie... Bon, exemple, les consommateurs choisis par le ministre, au niveau des intermédiaires, ils pourraient choisir leurs représentants, etc. J'aimerais ça que vous me disiez pourquoi vous voulez absolument que tout le monde soit choisi par le ministre, au lieu de laisser une certaine liberté aux gens qui ont à exercer la profession et autres.

M. Marcouiller (Marcel): Il pourrait arriver à ce moment-là que la personne ait à répondre à son organisation de façon trop serrée, tandis que, même si c'est électif, les personnes qui vont en élection, elles ne sont pas là par force, elles ont accepté d'être mises en candidature et d'être élues. Le procédé électif amène une liste à partir de laquelle le ministre va choisir des personnes qui vont l'être par après de façon personnelle.

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce qu'on peut s'entendre pour dire que les chances sont à 99,99 % que les personnes qui vont être recommandées par à peu près tout le monde vont être des personnes avec des titres d'organismes? Donc, ça change quoi dans le fond, là, comparé à permettre à certains organismes d'en nommer?

M. Gaudreault (André): Je suis d'accord avec vous, mais ce que ça donne, je crois, au ministre, c'est un pouvoir discrétionnaire qui pourrait, disons, permettre de débloquer... Je ne sais pas, écoutez, on n'a pas quand même exploré ça pendant plusieurs jours.

M. Bertrand (Charlevoix): Mais vous n'êtes pas campés ferme là-dessus, si je comprends bien.

M. Marcouiller (Marcel): Non.

M. Gaudreault (André): Non, non, non, non, non, écoutez...

M. Bertrand (Charlevoix): Moi, en autant que vous me dites que vous n'êtes pas campés ferme là-dessus, je suis satisfait de la réponse.

M. LaCouture (Jean): Le grand objectif, M. le Président, c'est que les gens qui soient représentés soient là pour eux-mêmes et non pas pour représenter une association puis être obligés d'aller vérifier avec leur association avant de donner leur opinion. Un peu comme sur un conseil d'administration d'une entreprise, ceux qui y sont représentent l'intérêt de l'organisation sur laquelle ils sont et non pas l'intérêt d'un groupe qu'ils représentent. Alors, l'objectif de base, c'est celui-là. Maintenant, il y a des modalités et il y a de la flexibilité au niveau du RACQ.

M. Bertrand (Charlevoix): Alors, si je prends un exemple précis, si le ministre a à nommer un, deux ou trois représentants des compagnies d'assurances, il doit nommer quelqu'un qui ne représente pas la compagnie... l'association, c'est-à-dire le regroupement des compagnies, et comment ne pas trouver quelqu'un qui a une sensibilité au regroupement des compagnies? Si le ministre a à nommer un assureur-vie ou un courtier d'assurances, comment peut-il trouver quelqu'un qui possède toutes les qualifications requises pour siéger à ce style de conseil là et ne pas avoir une affinité? C'est là où, moi, j'ai de sérieuses questions.

M. LaCouture (Jean): Il y a une différence entre l'affinité puis des comptes à rendre à une organisation qui vous délègue.

M. Bertrand (Charlevoix): On peut jouer sur les mots, mais, sur les objectifs à atteindre, je pense que c'est très proche. Je vous donne un exemple. Puis je fais attention à mes mots parce que je ne veux évidemment insulter personne. Si on y va dans le sens que vous parlez, on pourrait se retrouver sur un conseil d'administration où il n'y aurait pas beaucoup de monde qui connaît le fonctionnement de tout ça, qui a la compétence nécessaire. Appelons les mots tel qu'il se doit, là. C'est tout un défi qu'on se donne, là. Vous êtes d'accord avec moi pour dire que ça ne s'est jamais vu, ça, dans l'industrie, ce qui est en train de se produire là. Pour la première fois dans toute l'industrie, il y a une espèce de consensus qui est en train de s'établir. On ne peut pas se permettre, j'imagine, tout le monde, que ce soit nous comme législateurs, vous comme intéressés, de prendre des chances. Alors, moi, je ne vois pas, j'ai de la misère à voir où on peut accepter le style de proposition. Si vous me dites que vous l'exprimez mais que vous n'êtes pas carrément campés, je suis satisfait de la réponse.

Alors, je passe à un autre...

M. LaCouture (Jean): Nous exprimons... Juste pour compléter, M. le Président. Nous exprimons l'indépendance des gens qui seraient sur ce conseil-là. Ça, c'est le point principal.

M. Bertrand (Charlevoix): Mais mon point de vue est aussi valable que le vôtre...

Une voix: Absolument.

M. Bertrand (Charlevoix): ...sur la difficulté d'établir l'indépendance.

M. Gaudreault (André): Tout à fait d'accord.

M. LaCouture (Jean): On se fie à votre jugement, là. C'est le ministre qui demandait ça, là.

M. Bertrand (Charlevoix): Oui, mais il faut être réaliste aussi.

M. LaCouture (Jean): On se fie au jugement du gouvernement.

M. Bertrand (Charlevoix): Il faut être réaliste aussi.

Une voix: Si c'est le ministre, c'est bien beau.

M. Bertrand (Charlevoix): Ha, ha, ha! Oui.

M. Desbiens (Jacques): En disant les choses... O.K. En disant les choses peut-être autrement, bien, on exprime ici une première réaction à ce qui est avancé dans le livre vert, et ce n'est certainement pas une position bien arrêtée dont le RACQ ferait un cheval de bataille.

M. Bertrand (Charlevoix): D'accord. Comme vous acceptez aussi quelque chose qu'on n'a pas encore discuté depuis ce matin mais qui m'apparaît assez évident, c'est que, si on s'en va vers un organisme unique, évidemment vous acceptez aussi qu'il va y avoir différents secteurs à l'intérieur de l'organisme pour discuter d'assurances de personnes, de dommages et autres. Je pense qu'on s'entend là-dessus.

Une voix: Absolument.

M. Maltais (Gilbert): Il faut que cet organisme-là soit effectivement très représentatif de l'industrie en général, sinon ça ne donne rien. Si on met une concentration trop forte dans le secteur d'activité, ça va carrément débalancer tout l'exercice, et le résultat va être catastrophique.

M. Bertrand (Charlevoix): D'accord. Il est de plus en plus une priorité pour les parlementaires de s'assurer qu'à peu près toutes les formules et tous les plans d'assurance vont être couverts par la nouvelle réglementation ou la nouvelle loi ou la loi amendée, peu importe, qu'on parle d'assurance-voyage, qu'on parle d'assurance vendue par Internet, etc. Ce matin, quelqu'un nous a dit: L'assurance-voyage, ce n'est pas compliqué, ça ne coûte pas cher, c'est simple et, selon nous, ça ne demande pas quelque chose de très spécifique.

Moi, j'aimerais vous entendre, parce que je sais que, parmi vous autres, il y en a qui sont des spécialistes en assurance-voyage. Parce que vous vendez de plus en plus de protections, il faut être quand même réaliste. Les protections sont en plus élevées, et il y a aussi une possibilité de duplication. Alors, j'aimerais savoir si, selon vous autres, la partie assurance-voyage – je m'adresse peut-être plus à M. Maltais parce que je sais qu'il est spécialiste dans le domaine – devrait être couverte d'une façon quelconque à l'intérieur de ce qu'on s'apprête à faire.

M. Maltais (Gilbert): Il est vrai que mon entreprise est quand même un leader au Québec. On doit, sur une base annuelle, à peu près vendre 300 000 contrats d'assurance-voyage par année, dont 100 000 sont vendus directement par téléphone, en prise d'appels. Donc, les clients appellent directement l'entreprise, notre centre d'appels, pour souscrire un contrat. Je suis responsable de cette ligne d'affaires depuis 1987, soit plus de neuf ans, et je n'ai jamais vécu de problèmes au niveau des ventes téléphoniques directes là-dessus.

Ce qu'il faut comprendre, c'est que les produits d'assurance-voyage, d'abord, pour régler l'aspect de duplication, il y a toujours eu en assurance collective un volet d'assurance-santé hors Québec ou hors Canada avec des coassurances à 80 % ou à 90 %. Dans le temps où ça ne coûtait pas cher, les réclamations de ce type-là, quand le gouvernement payait à peu près à 100 %, les primes étaient insignifiantes du côté collectif, les réclamations sans conséquence, et je pense que ça allait de soi, et il y avait très peu de duplication. Aujourd'hui, on réalise que, d'abord, la plupart des contrats collectifs se sont dotés d'un remboursement à 100 %. Certains l'ont carrément sorti du régime parce qu'ils y voient un potentiel de réclamations excessivement élevé.

(20 h 50)

Les primes d'assurance-voyage dans un contrat collectif représentent pour un individu approximativement une dépense de 0,65 $ par mois, donc on parle d'une dépense annuelle d'à peu près 7,50 $, sauf que ça ne couvre que le volet santé. Quand quelqu'un voyage, généralement la personne qui lui vend le voyage va lui offrir de souscrire aussi une assurance de type annulation, parce que la personne, généralement, entre la date d'achat et le départ, il peut y avoir trois mois, même cinq mois dans bien des cas. Donc, il peut se passer bien des événements d'ici là, et la personne assure son voyage, qu'elle a payé 3 000 $ ou 4 000 $, et la prime de ça est à peu près à 4 $ du 100 $. Ce qui veut dire que le volet collectif n'offre jamais ou pratiquement jamais le volet annulation.

Donc, ce que les assureurs ont fait, c'est qu'ils ont «packagé» des programmes où on retrouve l'assurance-santé, l'assurance-annulation, l'assurance-bagages, l'assurance-décès et mutilations accidentelles; d'autres y ont ajouté l'accident... le vol aérien, et la prime combinée de tout ça est à peu près à, je dirais, 15 %, 20 % plus cher que la prime d'un bénéfice tout seul. Donc, en fait, c'est un programme qui est vendu comme un menu, si on veut, comme le repas du jour versus à la carte, et le prix en conséquence. Donc, l'effet de la duplication est vraiment très faible, et les contrats collectifs, de toute façon, sont tarifés sur une base d'expérience. Donc, ce n'est pas catastrophique.

Il y a plusieurs types de marchés aussi. Ce qui veut dire que, si on parle du marché de la vacance, qui passe à peu près exclusivement à travers les agences de voyages, là on réalise que l'élément ponctuel, l'élément timing, si on veut, est très important. La personne vient d'acheter sa vacance, donc c'est normal qu'elle l'assure à ce moment-là. Et des phénomènes d'antisélection font en sorte d'ailleurs que l'assurance-annulation doit être souscrite dans les 48 heures de l'achat du voyage.

Donc, c'est normal que cette clientèle-là achète à travers les agences de voyages, et elle est difficilement déplaçable. Si on veut la déplacer, ce qui veut dire qu'on va enlever l'élément momentum, ça va avoir comme impact que les gens vont moins s'assurer, ce qui veut dire que les gens vont être plus souvent mal pris à l'étranger et qu'à ce moment-là l'État va se ramasser avec des problèmes pratiques sur le dos. On en a vécu, des gens qui ont été mal pris à l'étranger sans assurance et qui faisaient appel à l'État pour venir les dépanner. Alors, ça peut se produire.

Ce qui est la problématique, c'est l'assurance qui couvre les personnes âgées qui vont passer des périodes de trois à six mois, généralement en Floride. Alors, ces contrats-là sont une dépense excessivement importante, puisqu'ils représentent des primes qui peuvent aller, dans le cas de 81 ans et plus, à quelque chose comme 12 $ par jour. Donc, 12 $ par jour pour 180 jours, ça fait une dépense supérieure à 2 000 $. Si vous avez monsieur et madame, c'est devenu une dépense de 4 000 $. Et ces contrats-là sont toujours assortis de clauses ou d'évaluations de santé très importantes, parce qu'il y a une évaluation médicale qui doit être faite. Et, comme il n'y a pas une évaluation comme on fait en assurance-vie avec des tests sanguins ou quoi que ce soit, il faut que le vendeur demande à cette personne-là quel est son état de santé. Et généralement les gens de 75 ans, 70 ans, 80 ans sont portés à arrondir les coins, à dire: Bien, je suis en bonne santé, mon médecin m'a dit que je pouvais voyager.

Effectivement, ça peut être un problème, mais, à mon sens, ce n'est pas nécessairement un permis comme on connaît actuellement, qui est un permis que j'appellerais – excusez-moi l'expression – fourre-tout, qui va faire en sorte que les gens qui vendent ça sont qualifiés pour le faire. Donc, c'est à l'assureur de garantir, de s'assurer que les gens à qui il permet de vendre ces produits-là soient qualifiés, posent des questions et que les contrats soient d'une transparence qui fasse en sorte que la personne parte sous l'impression qu'elle est assurée alors qu'en réalité elle ne l'est pas.

Et je dois avouer, pour terminer, que depuis cinq ans, si on regarde les refus de réclamation ou les problèmes de réclamation qu'on vit, c'est de moins en moins fréquent que quelqu'un se voie refuser une réclamation sous prétexte qu'il a une condition qui existait avant. Les gens maintenant s'informent. Il y a toujours le placotage dans le Sud de: Qui m'a assuré et à quelle prime? Donc, maintenant, les histoires d'horreur sont de moins en moins vraies, sauf que ce n'est pas un produit qui est facile.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, une courte intervention, juste pour terminer sur le sujet, parce que la dernière partie de l'intervention est extrêmement importante quand on parle de l'assurabilité et des conséquences. Et, si on ajoute à ça la question des médicaments, qui évidemment devient de plus en plus complexe, vous ne m'avez dit en aucun temps dans votre intervention que, si ce nouvel organisme là songeait à inclure à quelque part une formule pour que les gens qui ont à vendre de l'assurance-voyage aient certaines règles à suivre, etc., vous ne m'avez pas dit que vous seriez mal à l'aise avec ça ou que le domaine... Ou je vous poserais peut-être carrément la question: Est-ce que vous verriez, à l'intérieur de ce nouvel organisme là, une protection, comme tous les autres domaines d'assurance?

M. Maltais (Gilbert): Je crois que la solution qui a été amenée dans le cadre d'offrir l'alternative de permis modulaire, je préfère 100 fois faire affaire avec un distributeur qui possède un permis modulaire assurance-voyage, qui ne peut être que ça, que d'avoir quelqu'un qui a un permis qui lui permet de vendre une assurance collective ou qui lui permet de vendre de l'assurance-vie de type universel et qui ne connaît rien en assurance-voyage, mais qui, sous prétexte qu'il a un permis très large, peut légalement le faire. Donc, la réponse à votre question, c'est oui. Mais, de grâce, ne tuez pas le phénomène avec un permis trop complexe.

M. Bertrand (Charlevoix): Ça me satisfait.

M. Maltais (Gilbert): Il doit être très particulier.

M. Bertrand (Charlevoix): Ça me satisfait. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je veux donc revenir, dans le temps qui me reste, M. le Président, sur le fameux Bureau. Le député de Charlevoix a abordé la question des nominations sur le Bureau. Je dois vous dire que, dans votre texte, il me semble y avoir, avec tout le respect que je vous dois, une incongruité.

Je lis, à la page 4, le deuxième paragraphe, et je vais lire au texte: «Eu égard à la portée étendue de la loi – je suis au deuxième paragraphe – il nous apparaît logique que tous les intervenants du marché financier y soient représentés – on parle du conseil d'administration du Bureau: compagnies d'assurances...» Donc, à ce moment-là, on ne parle pas des individus, là; on parle bien de tous les intervenants, dans votre point de vue, du marché: compagnies d'assurances, institutions de dépôts, distributeurs, intermédiaires de marché, planificaec

teurs financiers et consommateurs. Ensuite, vous dites, c'est le paragraphe suivant: «Le Regroupement est d'avis que les membres du conseil d'administration [...] nommés par le ministre le soient à titre personnel.» À ce moment-là, les membres du conseil d'administration sont des individus et ne sont plus des personnes morales. Or, on aurait pu comprendre, à la lecture du deuxième paragraphe, que c'étaient des personnes morales que vous vouliez voir au niveau du Bureau, point de vue que je ne partage pas du tout.

Moi, j'ai un point de vue beaucoup plus restrictif. J'aurais souhaité réellement qu'on ait, pour réglementer la profession... qu'on réglemente les gens qui agissent dans la profession et non pas les personnes morales, bien sûr les personnes morales employant des gens qui ont, à ce moment-là, les qualifications pour agir dans la profession. Bon, on a échangé tout à l'heure sur le point de vue, on a compris que vous n'excluiez pas ce point de vue là, mais vous étiez plutôt rentrés dans le cadre du livre vert.

Mais comment vous regroupez les deux points de vue? Est-ce que, pour vous, c'est des personnes morales qui font partie du Bureau, tel que je pourrais le lire à la lecture du deuxième paragraphe, ou à ce moment-là c'est des individus? Je n'arrive pas à faire le lien entre les deux. Vous comprenez la lecture que je fais entre le deuxième paragraphe et le troisième paragraphe?

M. Desbiens (Jacques): Bien, quand on parle de compagnies d'assurances, on parle des représentants des compagnies d'assurances, on parle des personnes physiques qui seraient déléguées par des...

Une voix: Qu'on appelle des agents.

M. Gautrin: Autrement dit... non. Donc, vous dites un agent. Essentiellement, vous dites un agent.

Une voix: Non, non, non, ce n'est pas ça.

M. Gautrin: Non? C'est un président de compagnie d'assurances?

M. Desbiens (Jacques): En fait...

Une voix: Monsieur le...

M. Gautrin: Excusez-moi de vous couper la parole.

M. Marcouiller (Marcel): S'il vous plaît.

M. Gautrin: Oui, oui.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Marcouiller.

M. Marcouiller (Marcel): Moi, j'aimerais bien reprendre, dans cette même page 4 là, M. le Président, le dernier paragraphe qui, je pense, tente de répondre au genre de question que vous posez. Dans le sens qu'on dit que de plus le Regroupement recommande l'ajout d'une disposition à l'effet que les membres du conseil, des personnes physiques, y compris ceux représentant les consommateurs, soient, par leur expérience dans quoi ils travaillent ou ils ont travaillé, représentatifs des différents types d'assurance et modes de distribution.

M. Gautrin: Oui, ça, c'est cohérent avec le paragraphe qui est en avant. Donc, pour vous, dans le Bureau, c'est essentiellement des personnes, c'est-à-dire des hommes ou des femmes, comme vous ou moi, qui agissent dans le domaine de l'assurance ou dans le domaine financier, mais qui peuvent agir, bien sûr, dans une compagnie d'assurances, dans une institution de dépôts éventuellement, qui peuvent agir comme courtiers, qui peuvent agir comme agents, qui peuvent agir dans un cabinet de planificateurs financiers. C'est ça que vous voyez dans le Bureau, c'est des individus.

Une voix: Oui, oui.

M. Gautrin: Voyez-vous... et, moi, très lentement, j'ai l'impression que dans votre pensée – et je l'approuve, votre pensée – à ce moment-là, ce que vous voyez dans ce Bureau, c'est essentiellement des représentants, des hommes et des femmes, qui agissent dans le secteur qui est concerné. Et, comme je vous le dis, je vous le répète, vous n'êtes pas loin dans votre conception, quand je gratte un peu, de la conception d'un ordre professionnmel ou d'une corporation. Je m'excuse, je suis têtu et j'arrive souvent à mes fins...

(21 heures)

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Desbiens (Jacques): À ce niveau-là, le meilleur exemple qu'on pourrait prendre, c'est la composition du Conseil des assurances de personnes, que vous avez reçu cet après-midi, qui, d'un côté, a dit: Il y a les représentants des compagnies d'assurances, les représentants de l'AIAPQ, du consommateur, donc les représentants des compagnies d'assurances. Nous, on a appelé ça, on a abrégé ça par les compagnies d'assurances, mais ce sont les représentants qui viennent des milieux des compagnies d'assurances.

M. Gautrin: Mais, si vous me permettez, monsieur, ce n'est pas des représentants des compagnies d'assurances, dans ce que vous avez là. Vous, ce que vous voyez, c'est des gens, des hommes ou des femmes, donc des êtres en chair et en os, qui agissent, qui travaillent...

M. Desbiens (Jacques): C'est bien ça.

M. Gautrin: ...dans le secteur de l'assurance.

M. Desbiens (Jacques): C'est bien ça.

M. Gautrin: Mais ce ne sont pas des représentants des compagnies d'assurances.

M. Desbiens (Jacques): O.K.

M. Gautrin: Il y a une nuance, à mon sens, qui est importante: ce n'est pas un représentant de la personne morale, mais c'est une personne qui, dans son expérience, etc., travaille dans ce secteur.

M. Desbiens (Jacques): Absolument.

M. Gautrin: C'est ça, si je comprends bien, votre position.

M. LaCouture (Jean): Ce sont des personnes autonomes...

M. Gautrin: Autonomes.

M. LaCouture (Jean): ...qui ne sont pas en situation...

M. Gautrin: Et qui ont une expérience de travail...

M. LaCouture (Jean): ...mais qui ont une expérience et un bagage...

M. Gautrin: ...dans le secteur, etc.

M. LaCouture (Jean): ...particulier pour représenter le groupe.

M. Gautrin: Merci. Ça complète mon point de vue, M. le Président. Ça répond à ma question.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Je permettrais une courte question au député d'Abitibi-Ouest, et, après ça, bien, le temps...

M. Gautrin: Par consentement, M. le Président, on peut laisser un peu...

M. Gendron: Merci de votre générosité, M. le Président. Si mon collègue avait pris un peu moins de temps, j'en aurais plus. Mais ça, c'est nos règles.

Dans votre présentation, vous avez dit tantôt que la détention de renseignements personnels au niveau des institutions de dépôts semblait vous préoccuper ou préoccuper votre association. Et, dans votre mémoire, vous souhaitez l'introduction de dispositions qui défendraient l'utilisation de renseignements détenus par les institutions, mais spécifiquement aux fins de sollicitation de clientèle.

Alors, question très claire: Est-ce que vous croyez que ça devrait être la même chose pour tous les types d'intermédiaires de marché, agents ou courtiers? Première question.

Puis, deuxièmement, liée à ça, j'en aurais une autre très courte. Est-ce qu'on doit appliquer ça à tous les types d'intermédiaires de marché, agents ou courtiers? Parce que vous étiez très spécifiques sur les institutions de dépôts, qui semblaient avoir un avantage par rapport aux autres, mais est-ce qu'on en fait une règle générale ou si c'est uniquement au niveau des institutions de dépôts, votre point de vue?

M. Desbiens (Jacques): Non, non, on pourrait en faire une règle générale, et ça pourrait être applicable à tous les agents et courtiers.

M. Gendron: Non, mais vous voyez le principe qu'il y a là-dedans, là? Alors, il n'y a pas d'objection de principe à ce que ce soit une application générale, de ne jamais avoir la capacité d'utiliser des renseignements personnels pour aller offrir une gamme de produits à partir de cette information privilégiée.

M. Desbiens (Jacques): C'est ça. Je ne sais pas si mes collègues auraient autre chose à rajouter là-dessus.

M. Gaudreault (André): J'aimerais peut-être que vous précisiez votre question encore parce que...

M. Gendron: Bien, regardez, elle est très claire.

M. Gaudreault (André): ...ce que vous dites...

M. Gendron: Vous dites les...

M. Gaudreault (André): ...ce que vous dites exactement...

M. Gendron: Vous dites: les...

M. Gaudreault (André): Laissez-moi le...

M. Gendron: Regardez, vous dites: Les institutions de dépôts, là, il y a un avantage. Puis, dans le mémoire, vous dites: On devrait prohiber l'utilisation de renseignements détenus par les institutions de dépôts aux fins de sollicitation de la clientèle.

M. Gaudreault (André): Et votre...

M. Gendron: Question: Croyez-vous qu'on doit faire la même chose pour tous les types d'intermédiaires financiers...

M. Gaudreault (André): En fait, ce que vous supposez...

M. Gendron: ...agents...

M. Gaudreault (André): Oui. Ce que vous supposez dans votre question, c'est que l'intermédiaire qui a vendu, par exemple, une police d'assurance automobile ne pourrait pas solliciter la personne pour...

M. Gendron: Du REER, pour un fonds mutuel, et ainsi de suite.

M. Gaudreault (André): Et parce qu'il a eu des renseignements en automobile. Mais je pense que c'est un petit peu... Ce n'est pas la même situation. La personne qui va dans une institution de dépôts va demander, par exemple, un prêt, et à la demande d'un... Alors, il y a une position de force de l'institution de dépôts de dire oui ou non à accorder le prêt, et il pourrait... Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il peut y avoir une influence sur la vente d'autres produits de façon à obtenir un prêt.

M. Gendron: Ça me va. Ça me va. Regardez, par contre. Moi, je suis vendeur d'assurance générale. Vous venez à mon bureau puis je vous vends une assurance-vie universelle. O.K.?

M. Gaudreault (André): Oui.

M. Gendron: Mais, quand je vous vends une assurance-vie universelle, vous me donnez une série de renseignements intéressants qui me permettent, à la fin, de dire: Ça te «tenterait-u» d'acheter un REER? Ça te «tenterait-u» d'acheter tel fonds mutuel? Ainsi de suite. Alors, si je suis courtier, bien, pourquoi je n'ai pas le droit? Je peux le faire.

M. Gaudreault (André): Mais la situation... En tant que consommateur, vous n'êtes pas en situation de désavantage versus le courtier. Vous avez déjà consommé peut-être de l'assurance universelle, mais vous pouvez dire non à quoi que ce soit d'autre. Ça ne vous empêchera pas de pouvoir acheter la vie universelle. Ou, si vous n'êtes pas content de l'intervention du courtier, bien, vous pourrez toujours dire: Bien, écoute, si tu n'es pas content que j'achète la vie universelle, je vais l'acheter avec un autre courtier ou auprès d'une institution qui... Alors que l'institution de dépôts qui donne un prêt est souvent en position de force, dans les villages, entre autres, et peut se servir de... Alors, c'est comme ça qu'on le voit. J'espère que...

M. Gendron: Oui. C'est très clair. C'est ce que je veux. Merci.

M. Marcouiller (Marcel): Il ne le fera probablement pas, remarquez bien, puis...

Une voix: Non, non.

M. Marcouiller (Marcel): C'est une question de perception. Je demeure dans le même petit village que votre ministre, et puis, dans un petit village comme ça, la caisse populaire qu'il y a là ou l'institution... Ça peut être la Banque Nationale parce que c'est les deux qu'il y a là seulement. La personne qui va oeuvrer dans le village, la personne qui se présente là peut avoir l'impression que, si elle dit non, elle pourrait... Puis c'est probablement faux, mais ça, ce n'est pas... Cette perception-là, elle n'est pas facile à enlever. La personne qui le veut, son prêt, elle ne voudra pas prendre de chance parce que c'est la seule institution de dépôts qu'il y a là. Alors, c'est dans ce contexte-là dans lequel on est convaincu... En tout cas, on a eu des pourparlers avec d'autres gens, là, dans lesquels... Il serait surprenant que...

M. Gendron: Oui, mais c'est très clair.

M. Marcouiller (Marcel): ...les institutions de dépôts fassent des quotas ou des choses comme ça.

M. Gendron: Non, mais, très clairement, ce que vous prohibez, c'est que, dans les institutions de dépôts, on ne doit pas... il doit y avoir des dispositions qui empêchent de se servir des renseignements personnels obtenus à d'autres fins que pour le prêt.

M. Marcouiller (Marcel): C'est ça.

M. Gendron: C'est ça que vous dites clairement comme position. Merci.

M. Desbiens (Jacques): C'est-à-dire qu'on ne peut pas empêcher la même personne d'utiliser...

M. Gendron: Ah non! Puis ça, c'est évident.

M. Desbiens (Jacques): ...les renseignements qu'elle connaît sur un client donné pour lui offrir, d'un côté, de l'assurance de dommages, de l'assurance-vie... Ce qu'on préconise ici, c'est que, supposons, la caisse populaire, à partir d'un certain nombre de prêts qui ont été faits dans la dernière période, prenne ces renseignements-là et les donne à un agent d'assurances pour aller solliciter, pour des fins d'assurance, cette fois-ci, les mêmes clients.

M. Gendron: Merci.

M. Desbiens (Jacques): Donc, c'est le transfert. Mais la personne qui a...

M. Gendron: Oh! C'est évident.

M. Desbiens (Jacques): ...au départ les renseignements, on ne peut pas l'empêcher de les utiliser à bonnes fins.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien, M. le député d'Abitibi-Ouest, je vous remercie. Et, pour essayer d'équilibrer un peu le temps, je vais laisser la parole au député de l'Acadie pour les quatre minutes qu'il reste à sa formation politique, tout en vous invitant ou en vous rappelant... c'est-à-dire que quelquefois les membres de la commission signalent au président qu'il n'est pas assez sévère sur le temps. Mais je fais juste vous rappeler ça en passant. M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. En fait, j'ai une question seulement à vous poser. Ce matin, je pense que le premier mémoire qu'on a eu, c'était celui de l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec, qui sont venus et qui ont soulevé un point, à savoir que ce qu'on appelle les manufacturiers ne devraient pas siéger sur l'organisme de contrôle pour le bien, au fond, des intérêts des consommateurs.

Alors, évidemment, j'aimerais savoir quels sont les arguments que vous avanceriez pour supporter le contraire de cette position-là, étant donné que vous êtes directement impliqués?

M. Desbiens (Jacques): O.K. M. Gaudreault.

M. Gaudreault (André): Écoutez, je l'ai effleurée tout à l'heure, la réponse. Si ce n'est, disons, que la gestion ou la supervision de la distribution des produits d'assurance par des intermédiaires, l'ordre professionnel peut très bien gérer et superviser, s'occuper de la discipline, etc. Cependant, dans un cadre ou dans un environnement où on regarde ce qui se passe et où on veut élargir les pouvoirs législatifs en allant chercher la distribution par tous les moyens, donc les intermédiaires, les moyens électroniques – j'ai une liste ici, là – Internet, publipostage, si on veut s'assurer que le consommateur est protégé, peu importe le mode de distribution, l'organisme unique devra s'occuper également des autres modes.

Donc, il faudra que les intermédiaires soient supervisés également par cet organisme-là, et, pour avoir une unité ou, si on veut, une consistance dans tout ça, je pense que c'est ça qu'on recommande. Cependant, si la loi ne s'intéresse qu'à la distribution par intermédiaires, pour nous c'est clair que l'encadrement actuel peut faire l'affaire. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Bordeleau: Votre position, c'est plus au niveau de l'élargissement des moyens, et à ce moment-là vous verriez un rôle au niveau de l'organisme de contrôle.

(21 h 10)

M. Gaudreault (André): C'est ça, on verrait un rôle... En fait, on verrait une responsabilité plus large. Donc, il faudrait, en plus des intermédiaires, que les assureurs soient là, parce qu'il y en a qui n'ont aucun intermédiaire lorsqu'ils agissent. Donc, d'une façon ou d'une autre, il faut s'assurer qu'on les supervise. Donc, il faut leur donner aussi une voix au chapitre en ce qui a trait aux règlements qui seront appliqués.

M. Bordeleau: O.K., ça va. Merci.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, messieurs les représentants du Regroupement des assureurs de personnes à charte du Québec, pour votre présentation et pour avoir eu l'amabilité de répondre à notre invitation.

Et j'invite, par le fait même, le Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins à se présenter à la table. Je suspends pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 11)

(Reprise à 21 h 14)

Le Président (M. Baril, Arthabaska): À l'ordre! À l'ordre, mesdames, messieurs! Si vous voulez prendre place, la commission va reprendre ses travaux afin d'entendre le Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins. J'inviterais les représentants à prendre place et à s'identifier d'abord.


Regroupement des victimes des caisses populaires Desjardins

M. Desrosiers (Jean-Yves): Mon nom est Jean-Yves Desrosiers; à ma droite, Robert Proteau; à ma gauche, M. Conrad Julien. Il y a deux personnes qui devaient y être, mais leurs occupations les ont obligées à nous laisser pour ce soir.

Je ne relirai pas le mémoire que nous vous avons déposé, je vais extraire les éléments essentiels et amener certains points complémentaires à ce que nous soulevons dans ce mémoire.

Bien sûr, l'approche qui nous préoccupe, on est sous l'angle des consommateurs. On pourrait nous dire, bien entendu, pourquoi on ne touche pas l'ensemble des institutions financières même dans le contexte de la loi que vous étudiez. Bien entendu, les cas qui nous amènent – on est des victimes, nous autres aussi, mais on en représente beaucoup d'autres – nous amènent à nous concentrer sur Desjardins parce que c'est l'objet pour lequel on est créé. À ma connaissance, il n'y a pas d'autres groupes qui ont été formés parce qu'il y a des cas de victimes ou de problèmes qui se sont posés par certaines pratiques dans des banques ou ailleurs. On va laisser ces gens-là, s'il y en a, se révéler.

La préoccupation qui nous a amenés à soumettre un mémoire, c'est que bien entendu on se présente comme des victimes, mais fondamentalement c'est que des gens se retrouvent devant des problèmes dans des cours de justice ou devant des cas comme la caisse Saint-Henri, avec des fraudes majeures. Finalement, c'est une résultante, les victimes des caisses. Ça veut dire qu'il y a d'autres types de problèmes. Pourquoi et tout?

Bien entendu, l'analyse qui est faite est par mon biais de professionnel, d'économiste. Ce qui nous apparaît derrière le problème ou les problèmes qu'on constate en analysant les dossiers qui nous sont soumis – tout à l'heure on parlera d'un cas concret de problème d'assurance-prêt hypothécaire – c'est fondamentalement que, lorsqu'on enlève un contexte de concurrence, où normalement les lois du marché doivent jouer, où normalement aussi on doit fonctionner avec l'information la plus parfaite possible, si on n'accepte pas que les règles de la concurrence fonctionnent, on crée des situations de monopole ou de quasi-monopole qui ont pour effet inévitablement de conduire, d'un côté, en termes de production, à une structure où les consommateurs n'en ont pas nécessairement pour leur argent, où ils paient très cher parce que c'est un monopole, où ils n'ont pas le type de produit équivalent à ce qu'ils paient.

Notre préoccupation, bien entendu, c'est de dire: Si on a créé cette situation de monopole depuis des années... Bon, le Mouvement Desjardins, durant des décennies, les principes qui ont été à la base de sa création, de son développement, c'étaient des principes très importants et qui ont été véhiculés par des gens, bon, qui sont plus jeunes que moi, en général... ou plus vieux que moi, en général, et ces gens-là disparaissent en cours de route, et aujourd'hui on se trouve avec une génération de gens qui savent de moins en moins ce qu'ont été les origines de ce mouvement-là.

Ce qu'on découvre dans une situation de monopole et avec des privilèges extrêmement importants qu'on a donnés à une institution comme Desjardins, c'est qu'il y a des déviations en cours de route parce que, à la base, on découvre que, d'un côté, les sociétaires consommateurs ont de moins en moins d'emprise sur leur propre organisation et y participent de moins en moins, ce qui conduit inévitablement – les travaux sur les organisations l'ont démontré – à des comportements abusifs où à des pratiques déloyales. On y reviendra.

La situation qu'on présente, bien entendu... On est le fruit finalement de quelques années de problèmes. Ce n'est pas nouveau qu'il y ait des problèmes de gens qui se sont retrouvés victimes du Mouvement Desjardins, mais finalement il y a un concours de circonstances qui fait que des gens se battent depuis des années. On a des cas où ça fait 15 ans qu'ils se battent; d'autres, ça fait six ans. Mais du jour au lendemain ils se disaient: Il n'y a personne, il n'y a aucun organisme, aucune entité à qui on peut parler. Fondamentalement, l'analyse nous amène à découvrir des privilèges associés au monopole de Desjardins. Ces privilèges ont eu pour effet d'éloigner les gens, les dirigeants de la base.

Qu'on parle seulement... Un aspect important dans la loi, qui a échappé à beaucoup de monde, c'est que, dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, par exemple l'article 97, on a exclu le Mouvement Desjardins de la loi d'accès. Donc, ils sont protégés. Il y a beaucoup de renseignements auxquels un journaliste ou un simple citoyen n'aura pas accès. C'est dans le chapitre P-39.1 de septembre 1994. C'est un type de privilège qu'on a donné à Desjardins. Quand on protège un monopole comme ça, protéger ces informations dites privilégiées auxquelles les consommateurs ne peuvent pas avoir accès, il y a un problème parce que c'est enlever une règle fondamentale de la concurrence.

(21 h 20)

Vous me direz: Il y a des banques au Québec. Oui, mais, dans l'évolution de l'idéologie de Desjardins et de tout le développement de l'organisation des institutions financières au Québec, il reste qu'on a privilégié énormément le Mouvement Desjardins dans cette évolution historique là. Je ne dis pas qu'au départ il n'y avait pas des raisons. Il faut se rappeler qu'au début du siècle c'est sûr que les capitaux des francophones étaient dispersés dans beaucoup de bas de laine, ils n'avaient pas de masse critique pour organiser les affaires et donner des services de base. Ça, c'est vrai.

Mais, en cours de route, en grossissant, en devenant beaucoup plus complexe, on se retrouve aujourd'hui avec une institution dont l'idéologie est un petit peu ambivalente, où on n'a plus de coopératif à peu près que les caisses, et elles-mêmes jouent beaucoup dans les platebandes très capitalistes en achetant le groupe La Laurentienne, Culinar, ou en investissant des parts majoritaires dans Culinar, en achetant Location Lafleur ou des groupes comme ça.

Et elles veulent aussi entrer dans le marché bancaire: on a acheté la Banque Laurentienne, si je ne me trompe pas, dans le but d'entrer dans la voie, dans le champ de la loi des banques fédérales pour avoir accès à certains types de marchés internationaux ou à des meilleurs mécanismes de compensation. Mais là c'est le volet capitaliste qui a pris le dessus, et ce qu'on trouve dans les cas qui nous entrent pratiquement tous les jours maintenant, c'est des situations où des gens se retrouvent devant des comportements ou des pratiques du Mouvement Desjardins qui vont à l'encontre des règles normales, soit des lois du marché ou des règles de fair-play vis-à-vis des clients.

C'est qu'une organisation qui devient un monopole devient insensible. On pourrait parler de l'exemple d'Hydro-Québec actuellement, que vous connaissez bien, où un monopole très puissant devient une entité qui fait ses propres lois un bon matin, et on découvre, à travers les dossiers qui nous sont soumis, qu'à la longue – on ne dit pas que c'est tout le monde dans le Mouvement Desjardins – il y a un certain nombre de dirigeants qui ont oublié les principes de base du Mouvement Desjardins et qui en sont à pratiquer des abus importants.

On pourrait soulever des cas. D'ailleurs, pour illustrer concrètement ce qu'on dit, on va laisser tout à l'heure à chacun de vous un dossier de cas et de problèmes bien pratiques.

Dans la situation des privilèges d'un monopole de ce genre-là, qui vont contre l'intérêt des consommateurs, un type de privilège très important qu'on a enlevé – je viendrai aux cas d'assurance tout à l'heure – c'est, par exemple, qu'il n'y a pas de vérification comptable externe indépendante. Et déjà en 1988, quand l'Ordre des comptables agréés s'est présenté ici, il avait soulevé ce type de problème, qui est très important, le problème de l'absence de rapport indépendant sur la situation financière, sur les transactions à l'intérieur du Mouvement Desjardins. C'est un type de situation que l'on doit rappeler.

Et déjà aussi en 1988 un cadre de la Fédération des caisses de Montréal, M. André Cardin, avait déposé un mémoire qui soulevait déjà un certain nombre de problèmes qu'on amène aujourd'hui. Ce monsieur-là, pour lui avoir parlé deux fois dans les derniers jours, a payé très cher le fait d'avoir parlé de ces problèmes-là pour essayer de les faire résoudre.

Ce qui nous amène ici, c'est que, pour nous, comme consommateurs qui vivons chacun des situations problèmes qui nous amènent à dépenser des frais d'avocat, ou à se battre pour des choses qui nous apparaissent élémentaires, ou à défendre finalement des gens qui sont devenus des victimes de Desjardins parce qu'ils n'ont pas la formation voulue, qui ont signé des documents parfois ou qui se sont carrément fait frauder...

Je pourrais juste mentionner, bon, le cas de Saint-Henri. C'est un magnifique cas qui illustre de nombreux autres cas dans la province. On a présenté Saint-Henri comme étant «le» cas. Mais, pour nous, ce qui se passe dans le cas de Saint-Henri, c'est un cas parmi de nombreux autres. Mais le cas de Saint-Henri nous illustre des pratiques – là, on parle des caisses – où il y a eu abus des dirigeants. Il y avait des administrateurs, avocats, notaires, sur ces conseils d'administration, qui ont utilisé leur situation à leur avantage. Et c'est les consommateurs qui paient.

Si on arrive aux questions de cas d'assurance, qui intéressent plus spécifiquement votre commission, bien entendu il y a des dimensions du livre blanc et de vos préoccupations qui ne sont pas du tout de notre compétence, et on n'entend pas répondre aux questions là-dessus.

Ce qu'on veut plus illustrer, c'est qu'il y a des situations concrètes de cas problèmes qui vont demander que le Mouvement Desjardins, d'abord, reconnaisse qu'il y a des problèmes. C'est le premier écueil qu'il y a actuellement. Et, d'après ce qu'on m'a dit, en fin d'après-midi, aux nouvelles, M. Béland a commencé à déplacer le problème vers vous, vers l'Inspecteur général, en disant: S'il y a des problèmes, c'est à eux de les régler.

Mais, quand on étudie la Loi sur la protection du consommateur, qu'on étudie la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, qu'on étudie aussi le mandat de l'Inspecteur général des institutions financières, ces gens-là nous ont dit déjà ou on a constaté, par les documents et les analyses qu'on a fait faire par des spécialistes, que les consommateurs victimes de situations graves n'ont aucun mécanisme soit pour faire évaluer leur dossier indépendamment, se faire indemniser ou amener le Mouvement Desjardins à bouger.

Parce que ce n'est pas plus ce qu'on appelle son commissaire aux plaintes qui va régler quoi que ce soit, parce qu'il dépend directement du président et n'a aucun pouvoir. Et, par tous les cas qui nous entrent et les discussions qu'on a, il a plus tendance à envoyer promener les gens et à rire d'eux, souvent, plus qu'autre chose. Je pourrais vous mettre en contact avec des personnes qui l'ont vécu.

Mais, si la loi de protection du consommateur n'a pas de mécanismes pour protéger, encore moins la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, encore moins l'Inspecteur général qui, par son directeur général des institutions de dépôts, M. Gauthier, nous a déclaré, à M. Proteau et à moi, et à une autre personne de Montréal: On n'est pas là pour défendre les consommateurs, on est là pour protéger l'institution...

L'Inspecteur général est dans une drôle de situation parce que, si on lui donnait ou si on lui avait donné des pouvoirs, peut-être qu'il pourrait intervenir, mais on nous dit... Il nous a dit lui-même: On n'a même pas le droit d'entrer dans une caisse pour vérifier des choses et vérifier des cas. M. Julien exposera le problème qu'il a vécu pour l'assurance hypothécaire.

Les gens, on leur dit: Bon, allez en cour, dépensez de l'argent, et peut-être que vous gagnerez à un moment donné. Mais des victimes qui rarement ont les moyens de Desjardins pour se battre se retrouvent en cour et dépensent beaucoup d'argent. Je pourrais nommer ou présenter des personnes, qui sont derrière moi ce soir, qui vivent ces situations-là en se disant: Est-ce qu'on va en sortir? Pourquoi est-ce que ça nous arrive?

À ce moment-là, pour nous, l'aspect important qu'on veut soulever devant votre commission, c'est que, bien entendu, s'il y avait des situations qui touchaient les banques, des problèmes de consommateurs, normalement il devrait y avoir des gens qui viennent les soulever. Mais, nous, ce dont on s'aperçoit, depuis au moins cinq ans que je relève les médias, c'est qu'il y a peut-être eu 500 articles, minimum, qui ont touché le Mouvement Desjardins, c'est que quelque part, dans cette institution-là, on n'a pas créé de mécanismes soit de médiation ou de règlement rapide des causes, que constamment dans les médias on voit sortir des questionnements sur des pratiques.

On pourrait vous amener un cas qui est sorti hier, dans La Tribune de Sherbrooke, mais là, aujourd'hui, qui fait beaucoup jaser. Dans les jours à venir, quand vous allez découvrir que le président de la fédération des caisses de l'Estrie est lui-même compromis dans un vaste conflit d'intérêts qui fait perdre de l'argent à des gens de la région de Sherbrooke... On va vous laisser de la correspondance tout à l'heure.

Mais là il y a un problème. C'est que le Mouvement Desjardins, dans son arrogance et dans sa taille, n'a pas lui-même prévu les mécanismes pour éviter que ces gens-là se retrouvent dans les problèmes, alors que M. Béland dit constamment: C'est une grande famille, on est des coopérants, on aide le monde. C'était ça il y a 20, il y a 25 ans, c'est vrai. Mais vous pourriez aller demander à beaucoup de gens, même M. Cardin qui a été dans le Mouvement ou des personnes qui y ont travaillé, qui nous révèlent des choses, qui disent: Ça fonctionnait normalement à un moment donné, puis il n'y en avait pas, de problème. Mais pourquoi aujourd'hui se retrouve-t-on que régulièrement il sort des choses?

Saint-Henri n'est qu'un exemple. On va vous laisser un document sur un autre cas: un notaire, qui n'est pas de Saint-Jérôme mais il est de Sainte-Agathe ou de Sainte-Adèle, qui a fait faillite dans les derniers mois, une faillite de 3 000 000 $ et quelques, avec à peu près 400 000 $ d'actif. Mais, quand on va voir dans les créances non garanties et qu'on se retrouve avec un prêt non garanti fait par la caisse de Saint-Jérôme de 1 200 000 $ et que la caisse ne se présente même pas à une assemblée de créanciers, il y a un problème. C'est qui qui paie? C'est les sociétaires.

Dans l'affaire de Saint-Henri, c'est à peu près 20 000 000 $. On dit: On va payer ça dans les réserves du Mouvement. Mais ça échappe au bon sens. Maintenant que le problème s'est fait et que ça a duré des années, pourquoi n'a-t-on pas agi auparavant? Mais il y a une série de cas du genre qu'on pourrait amener.

(21 h 30)

Mais, nous, notre objectif ce soir, ce n'est pas de centrer sur les victimes en particulier, c'est de dire que derrière ça il y a un problème de fond. Qu'on dise: Le Mouvement Desjardins est une institution très importante au Québec, mais qu'on la protège comme monopole, qu'on lui donne toutes sortes de privilèges qu'on a mentionnés dans notre document et qu'en plus on la protège de la loi d'accès, ce qui fait que...

Je prends un exemple d'une personne de Gaspé dont on traite le dossier ces jours-ci où, depuis les 13 dernières années, il a fallu qu'elle se batte par des avocats pour avoir ses relevés de comptes et où, sur un prêt hypothécaire de 7 500 $ réajusté d'un autre 3 000 $, elle a payé à peu près 30 000 $ d'intérêt et de frais depuis ce temps-là. Il y a un an et demi à peu près le commissaire aux plaintes lui a envoyé le relevé des comptes, mais, depuis un an et demi, sa caisse ne le lui envoie plus, refuse de le lui fournir, puis hier elle devait encore 2 500 $ sur un prêt, mettons, de 10 000 $ parce qu'elle a réajusté. Il y a des comportements anormaux, et c'est ça qu'on veut soulever, ou des pratiques qui sont reliées à du parjure, à de la fabrication de faux ou au fait d'amener des victimes à être considérées comme des bandits.

J'aimerais peut-être compléter le point en amenant des cas d'assurance. On a parlé beaucoup cet été de l'assurance prêts-hypothécaires, l'AIAPQ a sorti des choses. Le hasard a voulu que, à peu près au même moment que sortait ce document-là, un cas nous a été amené, et je demanderais à M. Julien d'exposer un peu l'expérience du prêt hypothécaire. On me dit qu'au Mouvement Desjardins c'est à peu près 600 000 prêts hypothécaires. Bien entendu, la situation de l'assurance, où beaucoup de gens paient leur solde ou ont réglé avant leur décès leur solde de prêt hypothécaire... Mais, quand ils se retrouvent, à la mort de quelqu'un, avec un solde puis qu'ils considèrent que ça allait être réglé par une prime d'assurance et que, du jour au lendemain – même, ça ne tarde pas, dans la semaine suivant un décès – la famille reçoit un avis comme quoi la personne n'était pas assurée et pas assurable et qu'elle n'a jamais eu un contrat garanti et même, dans les cas qu'on connaît, qu'on accuse la personne décédée de faire de fausses déclarations... Je pense que M. Julien, qui est ici, de Limoilou, va pouvoir expliquer son cas concret pour illustrer le type de situation, mais relié à l'assurance, dans votre cas.

M. Julien (Conrad): C'est ça. Nous avions une assurance-hypothèque sur une demeure que nous avions à Limoilou, ma mère, moi et ma soeur. Les trois étaient assurés sur la vie et sur l'invalidité. On a acheté le 12 décembre 1990, et ma mère est décédée le 4 août 1993, c'est-à-dire deux ans et huit mois après avoir été assurée par Desjardins, sans toutefois avoir reçu copie de l'assurance. C'est ça. Ils ont refusé le remboursement de l'assurance sur l'hypothèque.

Ensuite, ils nous ont remboursé les primes que nous avions payées durant les deux ans et huit mois sur la tête de ma mère, qu'ils ont déposées d'ailleurs directement dans le compte, nous avisant par la suite par une lettre. Ensuite de ça, ça va faire trois ans en novembre 1996 que nous avons pris un avocat pour nous défendre dans cette cause. Il n'y a toujours rien de réglé, on n'a pas de nouvelles. L'avocat, il est là, mais ça ne bouge pas, puis il n'y a rien qui se passe. Ça fait que, grosso modo, la situation, c'est à peu près ça.

M. Desrosiers (Jean-Yves): On a des cas d'assurance-invalidité... Peut-être que, M. Proteau, vous pourriez expliquer la nature de ce qu'on découvre.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si vous permettez, je voudrais... C'est parce que tout le temps que vous prenez... Il y a plusieurs membres de la commission qui veulent vous questionner.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Bon. On peut peut-être recevoir les questions.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Il y a plusieurs membres de la commission qui veulent vous questionner et...

M. Desrosiers (Jean-Yves): D'accord. On va laisser les questions et peut-être qu'on...

Le Président (M. Baril, Arthabaska): ...je ne veux pas vous brimer dans votre temps, mais je veux juste vous informer que votre 20 minutes est écoulé. Si vous voulez prendre quelques minutes...

M. Desrosiers (Jean-Yves): Mais, à travers les questions, on aura sans doute l'occasion de ramener ces situations particulières là.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): C'est bien. Je vous remercie. Pour le groupe ministériel, c'est le député d'Abitibi-Ouest qui poserait les premières questions.

M. Gendron: Bien, écoutez, moi, ça va être plus deux commentaires puis une illustration. C'est évident, quand une commission se donne un mandat de recevoir des intervenants pour nous éclairer sur le projet de loi... Parce que là le mandat, puis vous l'avez dit au début, donc je ne peux pas vous critiquer là-dessus... Mais je peux vous dire que j'ai lu votre mémoire et que je ne suis pas plus avancé par rapport à ma fonction de parlementaire, si ce n'est que j'ai compris qu'il y avait une charge à fond de train contre le Mouvement Desjardins. Moi, pour être membre du Mouvement Desjardins, je suis capable d'en prendre, mais il me semble qu'il y a pas mal de choses qui ne sont pas dites à la bonne place et qui illustrent une absence totale de connaissance du Mouvement Desjardins par ceux qui le dénoncent puis le décrient, et je voudrais l'illustrer, et c'est plus sur ça que j'aimerais vous entendre.

Je lis, par exemple: «absence d'obligations, par législation gouvernementale, de déclarer les salaires et autres avantages des dirigeants et leurs divers intérêts». Ça n'a rien à voir par rapport à ce qu'on discute, parce que c'est vrai, mais c'est vrai pour tous les intermédiaires financiers, d'une part. D'autre part, si vous vouliez savoir ça puis si ça vous intéresse puis si vous êtes membre d'une caisse populaire en quelque part, bien, ça m'étonne que vous ne sachiez pas quoi faire. Quand on est sociétaire d'une caisse populaire, on a le droit de participer obligatoirement à l'assemblée générale annuelle. Et, à l'assemblée générale annuelle, il me semble que, lorsque les sociétaires ont raison d'illustrer qu'à certains endroits il y a des comportements, entre guillemets, débridés, c'est vraiment la place, eu égard aux mécanismes gouvernementaux, parce que le gouvernement a encadré un certain nombre de règles qui permettent à des sociétaires d'avoir l'heure juste sur un certain nombre de situations.

Je donne d'autres exemples: «nomination de personnes dans les postes de haute direction sans que les membres n'aient leur mot à dire ou sans que n'existent des mécanismes transparents de nomination». Si c'est encore le cas dans les caisses concernées, il me semble que vous avez, que ce soit à la Commission de crédit, au Conseil de surveillance, par l'assemblée annuelle, la possibilité de mettre énormément de visibilité publique là-dessus, puis ça, j'aime bien mieux une attitude comme ça que de parler très généralement du Mouvement Desjardins. Parce que, dans le fond, par rapport à ce qu'on a à regarder, moi, j'aurais aimé ça que vous me fassiez une liste des privilèges accordés à Desjardins eu égard à la Loi sur les intermédiaires de marché, c'est-à-dire le rapport quinquennal suite à la loi 134, parce que c'est de ça qu'il est question.

Et là, si, moi, comme législateur, j'apprenais ce soir que, oui, le Mouvement Desjardins a cinq, six, sept, huit privilèges – parce que vous semblez être capable d'en lister jusqu'à demain matin très tard – là je me poserais des questions, comme parlementaire. Je dirais: Il y a de quoi qui ne marche pas dans nos affaires. Comment se fait-il qu'ils ne sont pas assujettis au même cadre que les autres? Mais ce n'est pas dans votre mémoire que je vois ça. Tous les privilèges que je lis et même les situations que vous venez d'exposer, c'est des situations qui peuvent se présenter chez n'importe quel autre intermédiaire financier par rapport à ce qu'on discute. Alors, je ne suis pas capable de saisir exactement de quels privilèges il s'agit, mais toujours eu égard au rapport quinquennal sur la loi 134.

Si j'avais été éclairé là-dessus, là je serais plus sensible, comme parlementaire, en disant: Bien, écoutez, on a un mandat de rajeunir, modifier tout l'encadrement de cette législation-là, puis là j'aurais le sentiment que vous contribuez à me permettre que je fasse ma job. Et ce n'est pas en illustrant certains cas... Parce que je suis convaincu que vous avez raison sur certains cas. Mais qui n'a pas eu de problème avec des intermédiaires financiers dans sa vie? Puis ce n'est pas spécifique au Mouvement Desjardins. Alors, il me semble que...

Puis là c'est parce que je ne veux pas rentrer dans des détails. Il y a quand même des choses qui m'apparaissent erronées à plusieurs endroits – je pourrais citer une série de pages – par rapport à la connaissance que j'en ai. Mais ça, ça ne nous mènera pas bien, bien loin, «mon père est plus fort que le tien», tu sais. Moi, c'est plus: Est-ce que vous le saviez que c'est ça que vous vouliez faire, puis vous vouliez profiter effectivement de cette tribune pour dire aux parlementaires: Bien, nous, on veut quand même vous dire qu'il se passe une série de choses irrégulières, et profitez donc des modifications que vous voulez faire à la loi concernant l'encadrement des intermédiaires financiers, au sens large, pour regarder si effectivement vous n'avez pas favorisé davantage le Mouvement Desjardins par un certain nombre de privilèges autres que les autres qui font les mêmes services, qui offrent la même kyrielle de services?

Et là c'est pour ça que ma seule question, ce serait: Bien, donnez-m'en, des privilèges que Desjardins aurait, mais par rapport à la Loi sur les intermédiaires de marché et non pas sur absence d'obligations par législation. Ça, c'est le cas de tout le monde. Nomination de personnes dans les postes de haute direction, il y a plusieurs banques, institutions de crédit, compagnies d'assurances... Moi, ma compagnie d'assurances, je ne le sais pas, quel salaire elle paie aux dirigeants de ma compagnie d'assurances, parce qu'il n'y a pas de législation disant que, dans le secteur privé... Puis ça ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas lieu de faire ça, là. Mais pour l'instant il n'y en a pas. Mon assureur... Moi, je ne suis pas capable de savoir exactement quel salaire les cadres de ma compagnie d'assurances se paient.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. Desrosiers.

(21 h 40)

M. Desrosiers (Jean-Yves): Bon, il y a beaucoup d'éléments dans ce que vous dites, je vais essayer d'en prendre quelques-uns. La structure du mémoire amène plusieurs éléments, mais fondamentalement ce qu'on dit à travers les cas d'assurance qu'on avait puis les discussions qu'on a eues avec les gens qui ont travaillé sur ce mémoire-là, c'est que, dans la question des assurances... C'est sûr qu'autour on avait l'occasion de dire: Il y a un problème. Il y a un problème qui est relié aux consommateurs, et on touche aux produits financiers. C'est sûr que l'épargne et le crédit, c'est le produit principal de Desjardins, de ce type d'institution financière là.

Et il y avait les produits d'assurance. C'est sûr que, si on n'avait pas eu de cas d'assurance qui nous étaient entrés, on n'aurait pas pu venir ici. Mais ce qu'on découvre à travers soit les cas d'assurance-invalidité soit les cas d'assurance-prêts hypothécaires ou les problèmes que les gens nous expliquent, comment ils vivent leur situation, c'est que les gens ont le sentiment qu'ils ne sont pas traités sur le même pied. Il n'y a pas les mêmes règles. Quand ils vont dans les caisses, si on prend les cas de l'argumentation qui est amenée dans les cas d'assurance par des employés de caisse ou des cadres de caisse, c'est que, concernant les règles de qualification des gens qui remplissent les formules dans les caisses, on n'exige pas les mêmes règles de qualification que pour un courtier d'assurances qui travaille dans le privé, par exemple, et ça, c'est des volets qu'on a amenés dans le mémoire et qui nous amènent à faire certaines recommandations qui touchent des cas.

Dire qu'on a abordé plus que seulement les questions d'assurance, on les a abordées, mais on les a abordées aussi dans le contexte en se disant: Est-ce que les lois du marché, actuellement, on les laisse jouer? Est-ce qu'on n'a pas intégré la dimension monopole qu'on a donnée et les privilèges qui sont associés à ça? La question des salaires, c'en est un, mais aussi les règles qui touchent le fait que les employés du Mouvement qui vendent de l'assurance dans les caisses ne sont pas assujettis aux mêmes règles de certification et tout que les autres. Ça, c'est un problème de fond qu'on aborde derrière l'ensemble des problèmes, parce qu'il relève en même temps d'une conception de l'approche générale de l'organisation du Mouvement Desjardins, ce qu'on a mis dans la loi des caisses d'épargne et de crédit. Je ne réponds peut-être pas complètement.

L'autre point, vous dites: Bon, il y a des choses – c'est vrai – qui vont devoir être rediscutées, parce que vous allez devoir tenir une commission parlementaire sur la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. Mais, si on l'étudie, la loi, et si on étudie les situations de ce qui se passe dans les caisses, on s'aperçoit très bien que le taux de participation est devenu extrêmement faible dans le Mouvement, sauf exception. Les renseignements, ils nous viennent de tous les coins de la province. Il y a des phénomènes qui sont compréhensibles, à savoir que les gens ne participent pas et qu'ils ne sont pas renseignés ou qu'ils se font dire dans une caisse: Tu n'as pas d'affaire à connaître même les règlements internes. On a un cas à Montréal – et il va probablement se retrouver dans les journaux cette semaine – où la dame s'est battue durant quatre ans pour avoir le règlement interne, puis elle a été obligée d'aller en cour parce qu'on voulait cacher une situation. Le cas, on va le laisser sortir...

M. Gendron: Mais... Excusez. Rapidement, je n'ai pas d'objection avec ça, mais admettez-vous – puis je termine – que c'est la même chose dans une commission scolaire? Puis ce n'est pas le gouvernement qui peut légiférer là-dessus. S'il y a une commission scolaire qui décide à un moment donné que le règlement de régie interne... Il y a toutes sortes de dispositions d'institutions que l'État n'est pas en mesure de chapeauter.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Je ne dis pas que c'est l'État qui doit chapeauter, mais l'interprétation qui a été faite par la loi des caisses d'épargne et de crédit... Ou même, quand un président de fédération ou un directeur de caisse nous dit: Bon, ce n'est pas mon problème, ça a été fait comme ça, mais qu'on appelle quelqu'un d'autre qui dit: Ah! nous, on l'interprète de telle autre façon, c'est que, le consommateur sociétaire, il a quand même... À moins qu'on dise du jour au lendemain: Bon, ce n'est plus un mouvement coopératif, ce n'est plus une coopérative, le Mouvement Desjardins, là les membres deviennent des actionnaires, si on veut, ou ça va être comme dans une banque, ils n'ont plus accès à plein d'informations. C'est une chose. Mais il faut dire clairement: Si c'est un mouvement coopératif, les membres ont le droit d'avoir accès à de l'information. Puis, si c'est eux qui financent tous ces cadres-là jusqu'au président du Mouvement, ils ont peut-être le droit de savoir combien ces dirigeants-là sont payés. Pourquoi est-ce qu'il n'y aurait pas des comptes publics, comme il y en a au gouvernement, dans une organisation qui est créée par une loi du Québec? C'est dans ce contexte-là qu'on mentionne le point.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Moi, contrairement au député d'Abitibi-Ouest, je trouve que c'est pertinent que vous veniez ici, et je vais vous dire ce que je retiens de votre mémoire. Je comprends que tout ce qui touche le Mouvement Desjardins, la manière dont il fonctionne, bon, c'est de l'information que vous nous donnez, et on aura probablement d'autres commissions parlementaires pour en débattre.

Néanmoins, le Mouvement Desjardins est une institution qui donne des services financiers. Et, à partir de la page 14 de votre mémoire, vous abordez la situation d'une institution qui donne des services d'assurance et vous nous dites, tel que, moi, je comprends ce que vous dites: Les gens qui donnent des services d'assurance dans les institutions de dépôts n'ont pas toujours la qualification nécessaire pour donner le service qu'ils devraient donner, dont la loi, actuellement, qu'on est en train d'étudier pour s'assurer qu'il y a une qualification minimale pour tout le monde... Alors, je vous pose la question: Est-ce que la loi va répondre actuellement à ce problème-là ou non?

Deuxième élément de votre mémoire, vous nous dites: Les gens qui se sentent lésés n'ont pas de mécanisme de tribunal comme il y a dans le Code des professions: le tribunal d'appel, etc. Il y en a un de prévu dans la loi, qui est le Bureau – comment il s'appelle – de la distribution des produits et services financiers, BDPF. Depuis le temps qu'on prend les initiales, on a oublié le titre même. Ha, ha, ha! Est-ce que ça, ça va régler en partie le type de problème que vous voyez à l'intérieur?

Donc, je dois me limiter spécifiquement dans la portée de la réflexion qu'on fait aujourd'hui sur les intermédiaires de marché et, dans ce cadre-là, je vous demande: Les problèmes que vous avez perçus, comment faut-il que dans la loi nous les changions pour qu'une institution de dépôts... Moi, je perçois votre intervention aujourd'hui nous disant: Faites attention, vous avez accordé à des institutions de dépôts qui ont en général le privilège d'émettre de l'assurance... Est-ce que ceci a créé des problèmes ou pas?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Bon. Il faut rappeler que maintenant la seule institution de dépôts, sauf erreur, qui demeure sous la juridiction du Québec, c'est le Mouvement Desjardins...

M. Gautrin: C'est ça.

M. Desrosiers (Jean-Yves): À ce moment-là, ce qui nous apparaît important, c'est que d'un côté il y ait un mécanisme qui permet d'entendre des gens qui sont victimes. Bon, dans ce cas-ci, c'est plus spécifique, relié aux assurances. Et là, que ce soient des cas qui touchent les caisses ou des banques, je pense qu'il est important qu'il existe un mécanisme qui est neutre et sans frais pour les personnes qui s'y présenteraient.

M. Gautrin: Donc, alors – vous permettez, M. le Président? – si je reviens... le BDPF, le bureau de distribution des produits financiers, va avoir un mécanisme à l'intérieur qui permettra une possibilité aux gens de se faire entendre. Moi, personnellement, je choisirais et je préférerais qu'on arrive à une forme proche d'une structure du Code des professions où les gens qui distribuent, même à l'intérieur des institutions, des services seraient soumis à une forme, à un code. Mais il y a déjà actuellement dans le livre vert des choses qui sont prévues. Est-ce que ça, ça répond en partie à vos préoccupations?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Je pense que ça répond en partie. Ce dont il faut s'assurer, parce qu'on touche quand même des clientèles qui n'ont pas toujours les moyens ou qui se retrouvent devant des problèmes financiers...

M. Gautrin: Absolument. Non, non. Je suis très sensible à ça.

M. Desrosiers (Jean-Yves): ...c'est que ce soit un mécanisme où ils peuvent se défendre sans frais, qu'ils puissent avoir des avocats et qu'un mécanisme où on assure la neutralité des personnes qui représentent, qui font partie du bureau de direction... Et l'autre dimension, c'est la célérité. C'est que, si les cas prennent un an, deux ans, trois ans, souvent les gens, ça fait 10 ans en arrière qu'ils se battent. Ça, je pense que c'est une question de...

M. Gautrin: O.K. Vous insistez sur «célérité» et «indépendance du mécanisme d'appel».

M. Desrosiers (Jean-Yves): C'est ça. Et la gratuité de l'accès à ces services-là.

M. Gautrin: Et la gratuité, ça, je pense qu'on était d'accord là-dessus.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Une autre dimension, il faudrait que, je pense, cet organisme-là ait un genre de fonds d'indemnisation, à moins que les...

M. Gautrin: C'est prévu, à l'heure actuelle, d'avoir un fonds d'indemnisation.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Dans ce cas-là, c'est un mécanisme important. C'est un aspect qu'on a moins étudié, mais là ce que vous me dites, ce que je comprends, c'est...

M. Gautrin: O.K. Mais je voudrais que... C'est important pour nous, vous comprenez...

M. Desrosiers (Jean-Yves): C'est très important...

M. Gautrin: ...d'avoir votre réaction actuellement sur ce qu'on étudie devant nous. Si vous me permettez, M. le Président, pour continuer dans la même voie, il y a, à l'intérieur de la réflexion qu'on a, la création d'un poste d'ombudsman qui arrive à la fin d'un processus. Il y a des gens qui sont venus nous voir en disant: Bon, ça serait quelque chose de trop, ça ne servirait à rien. Est-ce que, pour vous, un tel poste créé dans le BDPF serait utile, répondrait à une partie de vos préoccupations?

(21 h 50)

M. Desrosiers (Jean-Yves): Moi, personnellement, je pense que oui, parce qu'un ombudsman peut traiter un ensemble de questions qui peuvent ne pas nécessairement avoir des aspects financiers, qui peuvent toucher des aspects juridiques...

M. Gautrin: Ou des aspects plus humains.

M. Desrosiers (Jean-Yves): ...ou des aspects de relations humaines qui peuvent déborder. Il y a des aspects très techniques de ces dossiers-là et des dossiers qui peuvent amener quelqu'un à dire: Je dois jouer un peu un rôle de médiation dans certaines situations. Et un ombudsman qui serait aussi très indépendant et qualifié et autant que possible qui ne devrait pas venir des institutions, que ce soient le Mouvement Desjardins ou d'autres institutions, qui serait vraiment une personne indépendante et qui a une grande crédibilité, ça, je pense que c'est un élément essentiel du dossier.

M. Gautrin: Donc, vous êtes en faveur de cette dimension-là.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Oui.

M. Gautrin: Dernier point, M. le Président, si vous me permettez, je reviens maintenant sur la qualification des gens qui distribuent les services à l'intérieur du Mouvement Desjardins. Nous avons écouté ce matin M. Béland, qui est le président du Mouvement Desjardins, qui est venu nous dire: Les personnes habilitées à distribuer des services en assurance sont des gens qui ont la qualification minimale d'un D.E.C. et une formation interne suivie d'un examen qui est semblable à celui qui est fait par l'Association des intermédiaires en assurance de personnes pour les courtiers d'assurances.

Est-ce que votre expérience... Parce que vous semblez avoir bien connu le Mouvement, et je pense à votre voisin de gauche qui a eu une expérience malheureuse. Est-ce que c'est le cas? Ou, si ce n'est pas le cas, est-ce que vous avez des exemples à nous déposer à la commission où les personnes qui ont traité, donc, de l'assurance n'avaient pas cette formation minimale analogue à celle d'un courtier d'assurances?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Dans les situations qui nous sont entrées, les discussions qu'on a, parce que là on a des points contacts dans la province, c'est qu'on s'aperçoit que généralement il y a beaucoup de problèmes dans cette qualification-là, et on fait faire des tests même par des gens, on fait rentrer des gens dans des caisses pour faire remplir des formulaires et tout et on s'aperçoit qu'il y a des renseignements qui sont interprétés différemment. On l'a mentionné quelque part dans le texte, même la façon d'interpréter le formulaire d'assurance Desjardins, on en a parlé même avec des avocats qui défendent des causes et qui nous disent: Personne n'interprète de la même façon les choses. M. Julien, quand sa mère a rempli la formule, qui avait une instruction limitée, quand on disait que...

Je vais vous laisser expliquer ce type de problème là, comment elle pouvait interpréter et eux interprétaient les problèmes médicaux. C'est qu'il y a une façon de vendre actuellement dans le Mouvement Desjardins qui semble... Les éléments qu'on nous apporte, c'est qu'il y a un problème, de ce côté-là, important. Et finalement je ne suis pas dans l'assurance, mais, avec mon biais d'économiste qui observe les professions depuis longtemps et tout, je me dis: Il n'est pas logique que les gens qui vendent ces produits-là à travers le Québec, quel que soit le secteur où ils oeuvrent, ne soient pas régis selon les mêmes règles et les mêmes exigences. Pour moi, c'est une règle élémentaire. Mais je laisserais...

M. Gautrin: Vous comprenez que c'est un point de vue que nous partageons et que je crois que les ministériels partagent aussi, si j'ai compris les interventions des ministériels à ce niveau-là.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Parce que, même moi, quand je regarde un contrat d'assurance, c'est un domaine où je suis toujours un peu perdu même si j'ai une formation universitaire. C'est pour ça que...

M. Gautrin: Oui, mais c'est pour ça que vous faites appel à un professionnel qui est un courtier, en qui vous avez...

M. Desrosiers (Jean-Yves): Mais il faut qu'on ait confiance en lui.

M. Gautrin: ...confiance et qui est en mesure de vous expliquer le contrat que vous signez.

M. Desrosiers (Jean-Yves): C'est ça.

M. Gautrin: Et en principe l'équivalent du professionnel devrait être l'agent, dans le Mouvement. Et, s'il n'a pas la qualification nécessaire, cela pose un problème. C'est ce qui est arrivé pour vous, M. Julien?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Avant de faire parler M. Julien, juste un point là-dessus. Un avocat avec qui je travaille sur ces questions-là me disait: Avec le nouveau Code civil, il y a... Je ne l'ai pas lu, mais il dit: Maintenant, il y a des règles qu'on a mises dans le nouveau Code civil qui imposent à celui qui vend des produits financiers ou d'autres services d'informer pleinement le consommateur. Il y a des nouvelles exigences. On pourrait fournir les articles du Code civil qui réfèrent à ça mais qui rendent beaucoup plus responsables les gens, quels que soient les types de produits qu'ils vendent. Et les produits financiers, en général, M. Tout-le-Monde s'y perd facilement.

M. Julien pourra peut-être dire – c'est un formulaire dans le cas... – comment il pouvait être interprété par Mme Julien et les types de questionnements que ça peut poser.

M. Julien (Conrad): Bien, la question était: Faites-vous de l'hypertension? Puis, elle, quand elle allait voir son médecin, il lui parlait de pression, il ne parlait pas d'hypertension. Il y avait un peu l'ignorance de la personne, aussi, qui n'était pas connaissante côté médical, etc. Son médecin la connaissant selon son éducation lui parlait selon son éducation, il lui parlait de pression, tandis que, à la caisse populaire, l'agent de crédit qu'on a rencontré pour le formulaire d'assurance lui parlait d'hypertension. Mais là hypertension, pression, tu sais, c'est quoi, le problème? «C'est-u» la même chose, «c'est-u» pas la même chose? Bien, tu réponds oui, tu réponds non, tu ne le sais pas. Elle, elle a pensé que c'était ça. Je veux dire...

Ensuite, il y a ma soeur qui, elle, a été opérée pour le coeur à 30 ans. À 42 ans, elle s'en va s'assurer chez Desjardins pour l'hypothèque. Elle l'a souligné à l'agent de crédit, et l'agent de crédit n'a même pas pris note qu'elle prenait encore des médicaments pour son coeur, etc. Ça fait que, en ne prenant pas note, «c'est-u» dire que, si c'était elle qui était décédée plutôt que ma mère, ils n'auraient pas voulu payer plus sous prétexte qu'elle avait été opérée pour le coeur puis qu'elle prenait des médicaments pour son coeur puis qu'elle avait demandé une assurance-vie sur une hypothèque?

M. Gautrin: Mais la personne – est-ce que vous me permettez, M. le Président? – qui semble – et je dis bien «qui semble» parce que je n'ai pas... – ne pas avoir fait son travail de courtier ou d'agent, est-ce que vous l'avez référée? Est-ce qu'elle avait une qualification particulière? Dans ces conditions-là, c'est parce que, tel que vous me le décrivez actuellement, c'est ce qu'on pourrait qualifier – et je ne veux pas porter de jugement, parce que j'ai seulement votre point de vue actuellement – ce qu'on appellerait, dans le cadre du Code des professions, une «faute professionnelle».

M. Julien (Conrad): Oui.

M. Gautrin: Est-ce que vous l'avez référée? Est-ce qu'elle avait les qualifications pour... Et là...

M. Julien (Conrad): Bien, elle avait des qualifications comme agent de crédit mais pas comme courtier d'assurances. Je veux dire...

M. Gautrin: Donc, ce n'était pas quelqu'un qui avait eu la formation...

M. Julien (Conrad): Non, non, non, non, non.

M. Gautrin: Elle n'avait pas eu la formation telle qu'elle a été décrite ce matin par M. Béland...

M. Julien (Conrad): Non, non.

M. Gautrin: ...pour les gens qui sont censés vendre de l'assurance.

M. Julien (Conrad): C'est un agent de crédit junior, point.

M. Desrosiers (Jean-Yves): L'autre dimension qu'on pourrait soulever par rapport à ça, c'est que le marché des assurances, comme je suis la situation économique par mon biais professionnel... Là, c'est le marché international qui est en train... Des grosses compagnies internationales s'en viennent au Québec, des nouveaux produits entrent constamment dans des produits spécialisés, et le consommateur peut facilement s'y perdre. Je ne nommerai pas de compagnies qui nous ont appelés pour dire qu'elles avaient des problèmes avec Desjardins et qui étaient dans l'assurance, mais on nous dit: Bon, c'est des compagnies qui arrivent au Québec, qui viennent des États-Unis. Mais, si on se met sous l'angle du consommateur, il est très facile, dans ce type de produit là, de vendre de la camelote ou de vendre des avantages que le consommateur ne maîtrisera pas. Et là on ne fait pas un cas particulier de Desjardins là-dessus, on dit: C'est un produit spécialisé, qu'on prenne les moyens de bien protéger les Québécois et aussi de s'assurer que les gens aient les meilleurs prix possible.

J'aimerais juste souligner un point: il y a une caractéristique du Québec, si vous voyagez à l'extérieur, c'est qu'une majorité des choses qu'on vend au Québec coûte plus cher qu'ailleurs. Il y a un problème.

M. Gautrin: Ça, c'est votre biais d'économiste.

M. Desrosiers (Jean-Yves): M. Proteau aimerait ajouter un point.

M. Gautrin: Oui.

M. Proteau (Robert): J'aimerais ajouter aussi: il y a 50 % des assurances-hypothèque qui sont vendues via le Mouvement Desjardins. Ça amène un énorme problème parce que la qualification, justement, des représentants de Desjardins n'est pas la même que celle d'un courtier. Donc, ça amène des problèmes comme M. Julien parce que les questions ne sont souvent pas posées, ou très rapidement. Et, quand arrive une réclamation, c'est là que les gens deviennent en sorte victimes d'une situation où les gens ont peut-être mal rempli les formulaires, ce qui est contraire à un autre assureur qui, lui, a posé des questions, a demandé un examen médical et a établi un contrat en bonne et due forme, et les règles sont qu'après deux ans le contrat devient contestable. Donc, dans le cas de M. Julien, il y a décès, et, une fois que le décès a eu lieu, on lui dit que la personne assurée n'était pas assurée ni assurable et qu'il n'y a pas de réclamation. Il est là, le problème.

(22 heures)

M. Gautrin: Je comprends ça. Mais ça réglerait votre problème si la personne dans le Mouvement Desjardins apte à signer un contrat d'assurance était quelqu'un qui avait été certifié par un organisme extérieur qui aurait une qualification.

M. Proteau (Robert): Exactement.

M. Gautrin: Moi, je voudrais terminer en vous demandant des commentaires sur le projet de loi. Je comprends que vous nous avez fait état d'un certain nombre de problèmes que vous avez connus à l'intérieur du Mouvement. Il y a, dans la réflexion qui se passe, des efforts même de la part du gouvernement, même si je n'en fais pas partie, pour essayer de régler ces questions-là. Si vous aviez une analyse à faire sur ce qui se passe dans le livre vert et ce qui est proposé – ombudsman, certification, BDPF – on aimerait peut-être savoir ça. Si vous avez des commentaires supplémentaires à nous donner, pouvez-vous les envoyer par courrier, peut-être, à M. le président?

M. Desrosiers (Jean-Yves): On les a parcourus, et c'est sûr qu'il y a plusieurs dimensions de la démarche actuelle qui ne nous touchent pas directement. D'abord, on n'est pas compétents là-dedans. Mais, nous, c'est sûr qu'on fait appel à des gens. On travaille. Derrière nous, on ne les identifie pas, mais il y a des spécialistes d'assurance, des actuaires, des avocats, actuellement, des comptables, qui viennent travailler avec nous volontairement parce qu'ils voient des problèmes.

C'est sûr que de créer un bureau pour s'occuper d'étudier les cas, de protéger le consommateur le plus possible, de créer un ombudsman, c'est des éléments importants. Sous l'angle du consommateur, l'aspect qualification est très important, et de s'assurer que les mécanismes peut-être au-dessus de tout ça, les mécanismes de concurrence, soient en place, qu'on ne crée pas des déséquilibres dans ce système-là. Parce qu'il ne faut pas oublier que là Desjardins a une situation privilégiée là-dedans, et il faut laisser le marché s'ouvrir, et ça va amener de meilleurs prix. Et, si Desjardins, comme n'importe quelle autre institution, ne peut pas suivre les lois du marché et de la concurrence là-dedans, qu'ils sortent du marché des assurances, tout simplement, mais c'est les lois de la concurrence normale.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Merci, M. le député de Verdun. Il reste 10 minutes exactement au groupe ministériel, mais avant ça va prendre le consentement de la commission, puisqu'on va dépasser 22 heures.

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Consentement. Donc, M. le député de Marguerite-D'Youville, et il va me rester le député de Charlevoix. Si vous voulez vous partager le temps pour satisfaire tout le monde.

M. Bertrand (Charlevoix): Je vais attendre que mon collègue ait fini.

M. Beaulne: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Même si certaines de vos recommandations s'éloignent un peu du but de la commission, je pense que, quand même, votre témoignage est important parce que, au fond, ce que nous essayons de faire, c'est de voir jusqu'à quel point et de quelle manière des privilèges qui sont présentement consentis à des institutions de dépôts pourraient être élargis à d'autres institutions de dépôts, au fond, de quelle façon et de quelle manière on pourrait le faire pour préserver à la fois le marché de la concurrence, préserver la qualité des services aux assurés et prévoir des mécanismes qui évitent qu'on tombe dans certaines des lacunes que vous avez indiquées. Alors, votre témoignage ici est tout à fait pertinent, puisque vous vous adressez à la seule institution de dépôts qui, pour le moment, s'est vu octroyer ce genre de privilège.

Dans un premier temps, j'aimerais savoir... Vous avez parlé... Vous dites que vous représentez des victimes. Bon. Il y en a combien? Il y a combien de gens que vous représentez, en fait, dans votre mouvement? Vous regroupez combien de personnes?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Bon. C'est une bonne question. C'est qu'actuellement le groupe de gens qui est actif autour de nous, c'est à peu près 1 000 personnes, mais...

Une voix: Combien?

M. Desrosiers (Jean-Yves): C'est à peu près 1 000 personnes. Des cas comme Saint-Pascal, c'est environ 500 personnes qui sont victimes de la fraude de 25 000 000 $. À Sherbrooke actuellement, c'est une centaine de personnes dans un cas très grave. Mais ce n'est pas juste ce point-là, c'est que le Regroupement, en termes... Le nom qu'on lui a donné au départ, c'est qu'on touchait un ensemble de cas qui étaient connus à ce moment-là et, depuis quelque temps, il en entre régulièrement. Mais c'est que là on s'aperçoit par tout le réseau à travers la province que, si on prend juste les sociétaires de la caisse Saint-Henri qui se retrouvent dans la situation d'avoir perdu 20 000 000 $ puis de s'être fait organiser le portrait, ces gens-là deviennent des victimes.

C'est-à-dire que le Regroupement est un organisme qui a quand même un caractère informel. On s'en vient avec un organisme permanent qui va, à répétition, sortir des choses, et là il va y avoir du membership. C'est que là, finalement, le hasard a fait que des gens se rencontrent dans la province, qui se battaient chacun de leur côté. Et souvent c'est des journalistes qui nous ont mis en contact. C'est des journalistes qui recevaient des cas, puis, bon, moi, je parlais à des journalistes, puis des personnes parlaient à des journalistes, et à un moment donné on est tombés sur les mêmes journalistes, et ces gens-là se sont rencontrés. Et c'est autour de ça.

Et on sait actuellement que ça touche énormément de gens, mais on ne prétend pas qu'on représente des millions de personnes. Ce n'est pas ça. C'est que là, chaque jour, chaque fois que des gens découvrent qu'on existe, les appels entrent. Les gens nous disent: On vit telle ou telle situation. On analyse des cas. Parce que ce n'est pas parce que les gens viennent nous voir qu'on va... Il y a un travail très systématique de fait sur les dossiers. Il y a des choses qu'on ne sortira jamais parce qu'il y a des ambiguïtés ou il manque de preuves dans des documents qui nous sont soumis ou des cas présentés.

C'est que l'objectif, ce n'est pas de... Peut-être, en créant l'organisme permanent dans les prochains mois, qu'on va se retrouver, là, avec 10 000, 15 000, 20 000 membres. Si le Mouvement Desjardins veut qu'on crée un organisme permanent qui va être constamment à l'affût... Parce que là on s'aperçoit que les ACEF nous envoient des informations, les centrales syndicales, que même des employés du Mouvement commencent à nous révéler des choses. Ça devient intéressant, et on peut arriver à des choses assez étonnantes dans les prochains mois. C'est que, au départ, nous, c'étaient des cas qui touchaient les caisses populaires. Mais, dès la première interview qu'on a faite, c'est des employés du Mouvement qui nous ont appelés, qui étaient rendus à la Commission des normes du travail – congédiement arbitraire, des choses comme ça – des cas qui touchaient les assurances, des cas qui touchaient le plan Paillé, des gens qui étaient passés par les caisses...

M. Beaulne: Je comprends, mais, étant donné que le but de l'exercice, ici, c'est particulièrement d'évaluer la pertinence et la manière d'étendre à d'autres institutions de dépôts les services d'assurance, pour faire avancer les travaux de la commission je pense que ce serait plus pertinent qu'on se limite à cet aspect-là en particulier. Et je pense qu'également ça serait utile que vous nous fassiez parvenir à la commission la liste des cas qui impliquent des contestations d'assurance en matière d'assurance-vie ou d'assurance-invalidité, comme ceux que vous...

M. Desrosiers (Jean-Yves): O.K.

M. Beaulne: Et également la liste de ce que vous considérez comme étant les privilèges...

M. Desrosiers (Jean-Yves): O.K.

M. Beaulne: ...qu'a le Mouvement Desjardins, pour nous permettre d'ajouter ça à nos documents et également d'en faire l'analyse et l'évaluation pour la suite de nos travaux.

Maintenant, pour revenir à la question plus précise des assureurs, il y a plusieurs représentants des assureurs et des regroupements d'assurances qui sont venus ce matin et qui vont venir demain ici également et jeudi. Il y a deux aspects, entre autres, qui ont été soulevés au niveau du service d'assurance. On nous dit d'abord... et je pense que, d'après les questions qu'a posées mon collègue, vous semblez d'accord pour que les gens qui dispensent ces services d'assurance là soient des gens qui soient qualifiés, qui soient compétents et qui soient encadrés d'une manière adéquate. Je pense que ça découle de la réponse que vous avez donnée, d'une part.

M. Desrosiers (Jean-Yves): D'accord, c'est exact.

M. Beaulne: Et, d'autre part, en ce qui concerne le lieu physique, il y a beaucoup de recommandations qui ont été faites à l'effet que ce serait préférable que ces services d'assurance là soient offerts aux clients dans des lieux physiquement séparés des institutions de dépôts des succursales, si vous voulez, elles-mêmes, de façon à permettre une plus grande concurrence dans le marché et à éviter une espèce d'échange incestueux d'informations sur les clients. Alors, que pensez-vous de ces suggestions qui nous ont été apportées?

M. Desrosiers (Jean-Yves): Disons que les commentaires là-dessus vont être mes commentaires parce que c'est un type de question qui n'a pas été posé actuellement dans notre groupe. J'aimerais, avant de parler, vous parler des institutions de dépôts, pour les assurances, de leur permettre l'accès. Je comprends que vous voulez donner un accès aux banques, et tout, mais...

M. Beaulne: C'est-à-dire que ça fait partie des propositions...

M. Desrosiers (Jean-Yves): ...ça peut être tout type de marché...

M. Beaulne: ...ce n'est pas encore décidé, là, ce n'est pas encore définitif.

(22 h 10)

M. Desrosiers (Jean-Yves): O.K. Parce que c'est tout le réseau de distribution de l'assurance qui vous intéresse. En ce qui concerne la qualification, c'est exact, c'est extrêmement important, d'autant plus que, comme je le mentionnais tout à l'heure, le Code civil a mis des exigences importantes sur ceux qui vendent des produits. La dimension du lieu physique, c'est une opinion personnelle que je vous donnerais parce qu'on n'a pas consulté les gens, et ce n'est pas dans les préoccupations du regroupement, ce n'est pas là-dessus que les gens se... Les victimes veulent régler leur cas, elles veulent qu'on les traite de façon équitable. Et, si, physiquement, c'est dans un local qui est inclus dans une banque ou dans une institution qui offre de multiples services financiers, bon, là... parce que de vouloir faire des cloisonnements comme dans les pharmacies, c'est un peu artificiel, c'est-à-dire qu'il peut y avoir plusieurs façons d'aménager, et là c'est une opinion personnelle, je pense bien qu'on n'ira pas plus loin là-dessus.

M. Beaulne: Bon, écoutez, je pense que le temps, de toute façon, file, mais est-ce qu'on pourrait s'attendre à ce que vous nous envoyiez la liste des cas...

M. Desrosiers (Jean-Yves): On va vous en laisser tout de suite.

M. Beaulne: ...de victimes? Bon, si vous l'avez, ça serait encore mieux. Et des privilèges également. Je pense que ça répondrait aux demandes des membres de la commission pour, disons, ajouter à nos travaux.

M. Desrosiers (Jean-Yves): Si vous me permettez, on vous laisse une série de documents qui, justement, abordent ces questions-là et qui relatent aussi le contexte dans lequel on travaille actuellement. Les gens qui sont avec nous autres, c'est qu'il y a des professionnels, il y a des gens... il y a toute sorte de monde, il y a des petits cas et des gros cas, et le travail est fait de façon très systématique.

Le Président (M. Baril, Arthabaska): Si j'interprète bien aussi, M. Desrosiers, la volonté des membres de cette commission, c'est que, si, plus tard, vous étiez capable de nous faire parvenir les privilèges que vous pourriez nous définir, là, que vous pensez que les caisses, le Mouvement Desjardins a, je pense que c'est un voeu des membres de la commission. Vous ferez parvenir ça soit à moi-même ou au secrétaire de la commission, et on le distribuera aux membres. Pour ce qui est des documents que vous avez à déposer, là on va en prendre connaissance. Vous pouvez aller les chercher tout de suite.

Puis, sur ça, je vous remercie énormément d'avoir pris le temps de préparer ce mémoire. Aussi, probablement avec les moyens financiers précaires dont votre regroupement dispose, c'est un travail, je pense, important qui va sans doute éclairer les membres de la commission, et je vous remercie beaucoup là-dessus.

Sur ce, la commission du budget et de l'administration suspend ses travaux jusqu'à demain, 26 septembre, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 13)


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