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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 5 novembre 1991 - Vol. 31 N° 53

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur la proposition de politique de la culture et des arts


Journal des débats

 

(Quinze heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Doyon): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de la culture continue les travaux qui ont été entrepris il y a maintenant quelques semaines et procède à la continuation du mandat qui lui a été accordé par l'Assemblée nationale. Il s'agit pour nous de procéder à une consultation générale et à des auditions publiques sur la proposition de politique de la culture, telle que présentée à l'Assemblée nationale au mois de juin l'an dernier. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: II n'y a pas de remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Tout simplement, nous allons suivre les mêmes règles que d'habitude. Avant d'expliquer ces règles, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous m'avez demandé la parole?

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Une question à la présidence et, par voie de conséquence, peut-être également au représentant du gouvernement, c'est-à-dire la ministre des Affaires culturelles. M. le Président, je reçois régulièrement à mon bureau de la correspondance de groupes et organismes qui se sont inscrits à cette commission et qui, n'ayant pas encore obtenu de date, s'interrogent à savoir s'ils seront entendus à la commission. Est-ce que vous avez l'intention d'entendre tous les groupes qui se sont dûment inscrits à cette commission?

Le Président (M. Doyon): La présidence a été saisie du même genre de demande aussi. Ce que nous avons fait jusqu'à maintenant, c'est que nous avons convoqué les groupes une semaine à l'avance, c'est-à-dire que les groupes pour la semaine prochaine sont déjà convoqués. Ces gens-là savent, par voie de conséquence, qu'ils vont être entendus. Maintenant, pour ce qui reste des groupes après la semaine prochaine, ça reste à voir, mais normalement ça devrait être décidé dans le courant de la semaine de façon à ce que nous puissions prendre une décision à savoir s'ils seront entendus maintenant ou peut-être plus tard, et de quelle façon. De toute façon, moi, ce que je proposerais, c'est que le représentant de l'Opposition avec Mme la ministre puissent s'en parler en dehors de la commission. La présidence se conformera aux ententes qui seront prises entre les deux partis, à ce moment-là.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Les règles qui nous gouvernent sont les suivantes: 10, 15 minutes de présentation; ensuite, le reste du temps pour discuter avec les gens qui nous visitent et qui nous font l'honneur d'être présents avec nous. C'est comme ça qu'on a procédé jusqu'à maintenant. Nous allons continuer de le faire. Le président, bien sûr, devant se réserver le droit d'intervenir pour faire respecter l'horaire, compte tenu du grand nombre d'intervenants que nous avons à recevoir. Bien sûr, il nous en reste encore plusieurs. Donc, il nous faut faire diligence et vous me verrez dans l'obligation de rappeler aux honorables membres de cette commission que le temps s'écoule parfois et qu'il nous faut abréger.

Je vois que les gens du groupe Juste pour Rire sont devant nous. Ils sont déjà installés. Je leur souhaite la plus cordiale des bienvenues. Je les invite, le plus sérieusement du monde, à nous faire part de leur présentation. Après ça, on va entamer la discussion avec eux. Tout d'abord, veuillez commencer par vous présenter, s'il vous plaît.

Festival Juste pour Rire

M. Rozon (Gilbert): Mon nom est Gilbert Rozon. Mes compagnons de route aujourd'hui sont...

M. lacobacci (Pascale): Pascale lacobacci, vice-président au marketing.

M. Cournoyer (Louis): Louis Cournoyer, directeur général du Festival Juste pour Rire.

Le Président (M. Doyon): Vous avez la parole.

M. Rozon: Je ne suis pas venu seul parce que c'est long de faire la 20 tout seul.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rozon: M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, merci de me permettre d'exprimer ici quelques opinions et convictions et de hasarder des suggestions; pas "bazarder".

Je fais dans le non-lucratif et le lucratif. J'ai à coeur ce qui intéresse cette commission de la culture. Je suis sous l'humour comme d'autres sont sous la musique ou le théâtre. L'humour a ses registres: la parodie, la satire, le grotesque, l'absurde. L'humour s'exprime dans différents genres: le cinéma, la télévision, le théâtre, la

littérature. L'humour a ses vedettes: Deschamps, Chaplin, Molière, Devos, Woody Allen, comme la musique a ses virtuoses. L'humour a besoin et se préoccupe de formation. C'est mon attachement à l'expression culturelle et à son avenir qui m'ont amené ici aujourd'hui.

La relève et la formation. Quand je parle de relève, je voudrais ici élaborer en vous racontant l'incursion de Juste pour Rire en formation. En 1982, avec la dernière crise économique, coïncidait curieusement l'émergence de nouveaux humoristes. En 1983, naissait le Festival Juste pour Rire qui profita du phénomène. En 1985, à notre troisième année, nous avons connu un essoufflement; nos jeunes débutants étaient devenus vedettes, il n'y avait plus de relève. Bref, notre affiche était la même depuis trois ans.

C'est alors que nous avons pris conscience de l'absence de structure de formation dans notre métier. L'illuminé qui se voyait un jour pratiquer le métier d'humoriste était laissé à lui-même. Il y avait la Place des Arts et, pour y accéder, rien. Nous avons, en conséquence, mis sur pied un système d'auditions nationales. Nous avons lancé ensuite le projet des Lundis Juste pour Rire à Québec et à Montréal pour que puissent pratiquer nos candidats. En 1986, nous mettions sur pied au Québec, la tournée Juste pour Rire encore une fois pour faire travailler nos quatre meilleurs candidats des Lundis et des auditions. Ces trois premiers volets mis en place, nous avons connu nos premiers résultats avec des Courtemanche, JiCi Lauzon, Lemire et bien d'autres.

Par la suite, nous avons fondé l'École nationale de l'humour, dirigée aujourd'hui par Louise Latraverse. L'École en est à sa quatrième année. Elle accueille - pas - Louise, l'École - 20 étudiants: 8 en écriture, 12 en jeu, ce qui correspond approximativement à ce que le marché actuel peut accueillir. Depuis sa création, l'École a contribué à la carrière de Jean-Marc Parent, François Massicotte, Patrick Huard, Claudine Mercier et combien d'autres qui vivent aujourd'hui de cette profession. À titre d'exemple, huit des animateurs du matin au réseau Radio-mutuel ont été repêchés de notre système de formation.

Enfin, il y a quatre ans, nous avons créé Jeunes pour Rire. Le but: sensibiliser les jeunes de niveau secondaire à la culture et aux métiers reliés aux communications. Ce volet enseigne le français, expression orale et écrite... avec humour, bien sûr. Nous toucherons cette année plus de 350 000 étudiants, dont plus de 6000 participeront activement. Ce programme fait l'unanimité autant auprès des professeurs, des pédagogues que des étudiants. Outre le fait qu'il aborde cette matière avec le sourire, il oblige l'étudiant à être discipliné et rigoureux. Les professeurs, quant à eux, apprécient que les étudiants soient autant motivés. Un des critères pour la participation est la qualité du français, en particulier, la syntaxe - en fait, je ne sais même pas si je serais eligible - et les choix de thèmes sont reliés à des préoccupations sociales, tels la santé et l'environnement.

Beaucoup d'aspects restent pour nous à améliorer. Entre autres, il nous faudrait établir un pont avec toutes les entreprises qui peuvent accueillir des finissants: les réseaux TV, les agences de publicité, les radiodtffuseurs, les producteurs de spectacles et de théâtre, etc. Malgré cela, le bilan de ces cinq volets est spectaculaire. Chaque année, depuis trois ans, 30 % de la programmation du Festival Juste pour Rire peut être qualifiée de relève et le milieu de l'humour a connu une stabilité sans précédent depuis une dizaine d'années. Il faut savoir qu'on occupe à peu près 40 % des productions de spectacles chaque soir au Québec. La relève est à la culture ce que la recherche et développement est à l'industrie manufacturière. Il faut donc savoir soutenir la première production d'un artiste comme il faut aussi maintenir et favoriser la création d'infrastructures souples pour la formation dans tous les domaines de la culture. Il faut en conséquence trouver des modes de financement stables. Par exemple, un pourcentage de la TVQ perçu sur les billets de spectacles pourrait être versé à Gilbert Rozon - pardon - à un fonds précisément destiné à la formation et à la relève. Ha, ha, ha! C'est une ligne qui n'a pas passé; peu importe. Il faudra réévaluer le système de formation actuel pour qu'existe une adéquation entre les besoins réalistes du marché et le nombre de finisants par discipline.

Finalement, derrière tout créateur qui réussit, il y a un bon gestionnaire. Et ce besoin est criant. Il faudra intégrer à nos structures de formation traditionnelle, des programmes de formation pour gestionnaires et entrepreneurs culturels.

Capitalisation des entreprises. En général, les entreprises culturelles, comme d'autres, sont mal capitalisées. Pour répondre à cette fragilité, il faut faire jouer un rôle de détenteur de capital-actions à la SOGIC. Elle pourrait être autorisée à des participations pouvant aller jusqu'à 50 %, rachetables avec une plus-value préfixée. Aussi, peut-être, un programme pourrait être mis en place pour favoriser l'achat d'obligations garanties par la caisse de dépôt, donnant droit à une déduction fiscale de 200 %.

Les masses critiques. La culture et la vitalité de son expression reposent sur des performances exceptionnelles, ce que les gens d'affaires appellent l'excellence. Ces prestations sont souvent le résultat d'un grand talent d'une personne ou d'individus. Mais tout individualiste qu'elle soit, la performance de qualité a besoin de support pour être répétée, partagée, disséminée, devenir inspirante et générer ainsi son propre succès. Ce soutien sous-entend des expertises multidtsciplinaires, des efforts et des ressources autant humaines que financières. Cela

implique, en conséquence, des regroupements et des concentrations. Bref, une masse critique. Ainsi, l'acte de création peut être suscité, réellement appuyé et promu. Cette réalité, ce besoin, exige d'être reconnu concrètement, sans culpabilisation. Il faut confirmer solidement ces concentrations qui occupent un créneau - un à la fois au Québec. Par exemple, en matière de festivals, il faudra savoir amener les promoteurs à ne pas diluer énergie, capital, auditoire, réseau, pour ce qui est d'envergure qui déborde nos frontières. En culture comme ailleurs, ce sont les grands ensembles des plus grosses entreprises qui peuvent être efficaces, résistants et capables. Il nous faut de très grosses entreprises culturelles québécoises, assez fortes pour soutenir, exporter nos talents et nos idées sur la scène internationale. Il faut savoir inciter au regroupement, favoriser la mise en commun ainsi que les concentrations intégrées pour nous permettre d'être compétitifs dans certaines niches au niveau mondial.

Montréal. Montréal, ces dernières années, a su se tailler une position enviable en aérospatiale, en télécommunications, transport, ingénierie, mode, pharmaceutique et, j'ose affirmer, en création. Nous sommes passés du produit culturel québécois qui plaisait parce qu'exotique, au produit culturel fait au Québec, mais avec des résonances internationales. Nos succès à l'étranger sont de plus en plus nombreux: Denys Arcand, les "Contes pour tous" de Rock Demers, le Cirque du Soleil, La La La Human Steps, l'OSM, le théâtre de Robert Lepage, Céline Dion, "Surprise sur prise", Michel Courtemanche, Roch Voisine, les expositions du Musée de la civilisation, André-Philippe Gagnon, "Juste pour Rire", et j'en passe, heureusement, sont autant d'exemples encourageants que notre culture s'exporte.

Dans d'autres domaines, les succès de Jean-Claude Poitras en mode, de Michel Dallaire en design industriel devraient nous rappeler que la création s'exprimant dans le design est sûrement un des facteurs les plus importants à la santé future des industries manufacturières. Montréal est pratiquement un passage obligé pour tout artiste québécois aspirant à une carrière nationale ou, encore plus, internationale. Marché le plus important au Québec, concentration de la plupart des entreprises culturelles et de communication, elle commande son statut de métropole culturelle. Mais il faut aller au-delà de cette expression et la traduire dans l'affirmation d'un axe prioritaire de développement économique et social pour Montréal par le gouvernement du Québec.

Le privé. Le secteur privé jouera en culture un rôle important pour plusieurs raisons. Entre autres, parce que la liberté d'expression et la créativité qu'elle entraîne s'accommodent mieux du capital non norme. Le courant de néo-libéralisme en Occident a défini pour la culture un nouveau paradigme: effort, marché, succès, profit, autofinancement, risque et entrepreneur ont une place sans précédent dans la pourtant jeune histoire de notre État interventionniste.

Ce nouveau carré de sable, c'est une présence incontournable des ressources privées pour financer une partie de plus en plus plus importante des activités culturelles. Pour réaliser cette transition, il faut cependant un appui et une compréhension de l'État. Concrètement, il faut trouver des mécanismes incitatifs à l'investissement privé dans la culture. Notamment, par des avantages associés au succès d'une production. Par exemple, aux États-Unis et en Angleterre, il existe un modèle original de financement pour les grandes productions, les "Broadway shows". Pour implanter ce mécanisme au Québec, il faudra apprivoiser l'investisseur par des incitatifs fiscaux dégressifs. Il faudra aussi penser à élargir l'application de bénéfices fiscaux reliés au mécénat aux organismes culturels à but non lucratif et non seulement aux organismes de charité.

Les organisations culturelles privées à succès. Il faut aussi reconnaître que, dans le cas des festivals et du cirque, le Québec a développé un modèle mariant le but non lucratif et le but lucratif, qui lui est particulier. Cette formule obtient du succès quant à la qualité, quant au public touché et quant aux retombées domestiques et internationales.

Or, pour maintenir ce succès, pour consolider ces positionnements du Québec et surtout de Montréal, il faut savoir maintenir des appuis. Il ne faut pas pénaliser les efforts en laissant effriter le support qui devient inversement proportionnel au succès. À revenir à la case départ chaque fois, des énergies mises à reconquérir des soutiens pourtant modestes mais essentiels ne peuvent être dépensées à croître, aller de l'avant et grandir.

Cette formule mixte, but non lucratif et but lucratif, est, en quelque sorte, un nouveau type de partenariat avec le gouvernement. Il permet à la partie lucrative d'utiliser tous les leviers dynamiques reliés à l'entreprise privée, participation aux profits, actionnariat, etc. Pour l'organisme à but non lucratif, quant à lui, les charges exigées par la partie commerciale sont égales ou moins élevées que les tarifs du marché.

L'État, pour sa part, n'a pas à les soutenir financièrement de manière aussi importante que pour des organismes à but non lucratif comparables au niveau de la taille et des mandats. Aussi faudra-il, en toute justice, établir des ratios de soutien qui permettront à ces organismes de se développer comme ils le doivent.

Soutien à la création et à la diffusion. La rapport Arpin propose avec justesse que la création et la diffusion soient soutenues prioritairement. Parmi les moyens d'action possibles, l'élimination de la TVQ pour toute oeuvre de création québécoise ou, du moins, l'attribution d'une partie des revenus qu'elle génère à un fonds de soutien à la création serait probable-

ment le geste le plus significatif pouvant être posé par le gouvernement. Quant à la diffusion, les récents règlements de la SOGIC excluent les émissions de variétés et les captations. Par conséquent, les producteurs de ces émissions n'ont pas droit au crédit d'impôt, ce qui est contraire au désir et au besoin de diffusion de spectacles québécois en région.

De même, les émissions de télévision produites par des Québécois et qui connaissent de grands succès à l'étranger, telles "Surprise sur prise" et "Juste pour Rire", ne peuvent obtenir la reconnaissance d'une émission québécoise du seul fait qu'elles ne sont pas diffusées au Québec. Pourtant, elles permettent à des centaines d'artisans de faire des revenus en provenance de l'étranger.

En somme, un certain nombre d'idées-forces semblent dominer l'élaboration d'une vision à long terme, dont les suivantes: que la relève et la formation dans toutes les disciplines soient fondamentales et essentielles, mais en autant qu'elles soient en adéquation avec les besoins du marché; que la culture soit incluse dans les axes prioritaires de développement économique et social pour Montréal; consolider et maintenir l'appui à ce qui a fait ses preuves et est performant; reconnaître que de grandes opérations, de grosses entreprises culturelles, des organisations complètes et sophistiquées sont essentielles pour susciter la créativité, la diffuser et la rendre performante; intégrer la participation privée, au niveau du financement comme de l'organisation, en sachant valoriser l'un et l'autre par des mécanismes fiscaux et parafiscaux souples, incitatifs et peu tracassiers; accepter que l'investissement culturel, s'il est pour les individus qui oeuvrent un investissement de temps, est pour les organisations un investissement financier. Il représente pour l'État, particulièrement au Québec, une présence budgétaire dont on doit reconnaître l'importance.

En conclusion, je voudrais remercier et féliciter Mme la ministre, le président et les membres de la commission de permettre au milieu de venir exprimer ses préoccupations; c'est une initiative heureuse. Je disais précédemment que nous avions beaucoup progressé. Ces succès sont la résultante d'un dynamisme du milieu, de la bonne foi et de la bonne volonté de nos politiciens, mais ce n'est certainement pas le fait d'une concertation. Il y a quelques années, quand l'économie allait bien, les gouvernements répondaient aux besoins et tentaient de satisfaire toutes les clientèles. Mais l'époque que nous traversons, les déficits gouvernementaux, le taux de chômage et l'incertitude constitutionnelle ne nous permettent pas de nous illusionner. L'argent ne tombera pas du ciel, du moins pas les sommes que tous les ministères réclament. Ça me fait penser au discours d'investiture de John F. Kennedy qui avait déclaré, le jour où il avait été mis en fonction: Ne demandez pas à l'État ce qu'il peut faire pour vous; demandez-vous ce que vous pouvez faire pour l'État.

Alors, nous sommes à l'heure des choix, à l'heure d'enfin savoir où l'on va, à l'heure de décider de quelques grandes priorités sociales. La morosité qui sévit n'est pas que la conséquence d'une économie en récession. Du moins, à mon avis, c'est plutôt une perte de foi, le sentiment qu'il n'y a plus d'idéologie, de leadership et, par conséquent, de vision. Le siècle qui se termine voit s'éteindre le communisme; le capitalisme pur est malade. Les deux ont en commun une chose: ils ont oublié l'homme. L'un, parce que trop idéaliste, négligeait les motivations fondamentales de l'humain; l'autre, au nom de la productivité, a éliminé graduellement la fierté du travail bien fait et, par conséquent, a conduit à l'individualisme.

Il nous faut, par conséquent, nous, les intervenants, nous accrocher à une mission ainsi qu'à quelques priorités fortes d'où découleront les objectifs dans tous nos secteurs d'intervention. Nous vivrons 10 à 15 années difficiles, mais nous nous devons de transmettre à nos enfants un héritage culturel dont nous serons fiers. Le ministère des Affaires culturelles doit ouvrir la voie avec un leadership clair, en nous dotant d'une vision et d'un plan d'action. Il faut revenir à l'homme et à son oeuvre. Il nous faut une vision de l'an 2000 pour la culture, au Québec, une vision qui s'exprimera en une phrase.

Je fais confiance aux membres de la commission et à Mme la ministre, et je sais que vous nous proposerez cette vision, cette mission et les priorités que nous attendons depuis si longtemps. Merci.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, M. Rozon. Mme la ministre, vous pouvez commencer, si vous voulez bien.

Mme Frulla-Hébert: Merci, M. Rozon. Je vous souhaite la bienvenue. On débute cette semaine de commission par vous. Vous avez, premièrement, proposé plusieurs avenues au niveau de la fiscalité, etc. Vous devriez être ministre des Finances, ça aiderait un peu la culture. Mais, ceci dit, je vais aller...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Frulla-Hébert: ...je pense, directement au coeur des choses. Vous savez que plusieurs groupes qui sont venus nous voir, que ce soient des créateurs, que ce soient des musiciens, enfin, plusieurs groupes du milieu culturel cette fois-ci, en commission, autant au niveau des crédits - je me souviens de l'Orchestre symphonique de Québec, par exemple - nous ont reproché - et je le dis très ouvertement - d'investir à ce point dans des manifestations, autant Juste pour Rire que le Festival de jazz, mais beaucoup dans Juste pour Rire, en disant que ces manifestations

étaient naturellement populaires - je ne parle pas de l'accessibilité versus la non-accessibilité de la culture, entendons-nous - que comme organisation, c'était beaucoup plus facile pour vous d'aller chercher des commandites, d'aller intéresser l'entreprise privée parce qu'il y avait une grande visibilité, d'aller chercher aussi des sommes d'argent directement des revenus générés par la vente des billets et tous les produits connexes et que, finalement, il fallait beaucoup plus se concentrer vers les créateurs, vers la création, vers des disciplines qui sont peut-être beaucoup moins connues, aussi faciles d'accès mais moins connues; donc, d'avoir une action beaucoup plus pédagogique et de laisser le marché faire le reste pour les entreprises qui sont plus accessibles, plus commercialement aussi rentables. Qu'est-ce que vous répondez à ça? Je pense qu'il n'y a pas une journée de cette commission où on ne s'est pas fait dire ce genre de choses. (16 heures)

M. Rozon: Ils ont raison en partie. C'est certain que le rire est populaire, l'humour est populaire, les gens en ont envie. Une des missions qu'on s'est données, nous, à Juste pour Rire, c'est d'ennoblir l'humour, c'est de s'en servir comme un outil pour augmenter la tolérance chez les gens. L'humour n'était pas aussi populaire il y a 10 ans au Québec. Il vivait même des problèmes assez critiques. Il n'y avait pas de lieu pour travailler; H n'y avait pas de festival; il n'y avait aucun moyen de diffusion. Je pense que Juste pour Rire s'est préoccupé depuis sa fondation de le structurer, ce marché de l'humour, ce milieu de l'humour, et on a créé, en quelque sorte, une épine dorsale. C'est ma première réponse. On est peut-être victimes, effectivement, du travail de fond qu'on a fait, mais je crois que d'accuser ou de mettre en question un au profit de l'autre, c'est déplacer un peu le débat, parce que, personnellement, je crois que c'est effectivement très important de soutenir la création, c'est le fondement de tout. Mais, maintenant, il faut aussi soutenir la diffusion, parce que de la création sans diffusion, elle demeure lettre morte. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

Mme Frulla-Hébert: Je vais revenir un peu là-dessus. Au niveau du financement, par exemple, le jour où une entreprise veut avoir un certain effort donc, a besoin du soutien gouvernemental, ne serait-ce que pour partir, ne serait-ce que pour structurer une discipline, ne serait-ce que la question formation et création, à ce moment-là, on voit très bien, d'une certaine façon, le rôle de l'État. Mais, une fois que l'entreprise est partie, qu'elle a pris son envol, qu'elle est connue et puis que, commercialement parlant, c'est une entreprise qui est très viable, dans un sens où les industries s'associent facilement, etc., est-ce que l'État devrait con- tinuer de la soutenir? Je vous le demande parce que, dans le cas du Festival de jazz et même dans votre cas, on soutient à combien? À 15 %, à 16 %, 20 %? Vous nous demandez d'aller jusqu'à 25 %, mais, moi, je vous dis: Est-ce que vous avez vraiment besoin de ça et est-ce qu'on peut beaucoup plus, une fois que c'est parti, prendre cet argent, nous, et le réinvestir dans d'autres entreprises qui ont plus de difficultés, d'une part, ou encore d'autres qui veulent partir, compte tenu qu'il y a toujours des choix à faire?

M. Rozon: Je vais vous répondre candidement, mais la réalité bête et méchante fait qu'un festival, un vrai festival qui se prétend être un festival qui accomplit ses mandats, ne peut pas virtuellement être rentable. Ce n'est pas prévu comme ça, ce n'est pas pensé comme ça puisque vous accomplissez des mandats... Par exemple, on accueille 500 acheteurs étrangers à chaque année. On accueille 200 journalistes. Faire venir un artiste ou aider des jeunes qui débutent, ça nous coûte aussi cher que de présenter des vedettes. Alors, si on s'en va dans un esprit uniquement commercial, on devient un producteur privé. On ne fait que présenter des grandes vedettes. On ne prend plus aucun risque. On ne fait plus aucun échange. On se préoccupe juste de la recette. Alors, là, on ne fait plus du tout un festival.

Je pense que l'État... Je l'expliquais dans mon mémoire en disant que le mixte entreprises à but non lucratif et lucratif a permis, par exemple, au Cirque du Soleil, aujourd'hui, d'être une entreprise florissante et le Cirque, qui était pourtant perçu comme quelque chose de commercial et un art mineur, est élevé ici, au Québec, grâce à un travail fantastique de cette équipe, à un art majeur au niveau international. On a, je pense, jusqu'à un certain point, la chance d'avoir à Montréal deux grands festivals, de jazz et d'humour, qui sont de renommée internationale parce qu'il y a un vrai travail, mais aussi parce qu'il y a des structures souples de financement autour. On n'est jamais venus demander de financement au gouvernement pour tout ce qu'il est possible d'autofinancer. On ne l'a jamais fait. On a maintenu les subventions à un niveau qui est franchement très bas. Si on organisait un festival comme tel, probablement que l'État s'impliquerait pour 30 % ou 40 %. On a tenu ça à, je pense, 13 % ou 14 % de subventions et je ne compte pas toute l'opération télévision qui s'autofinance parce qu'on utilise le maximum de la dynamique commerciale. Mais vient un moment où le 13 % ou 14 % qui a l'air abstrait, si on t'enlève, ce n'est plus un festival que tu fais. Tu fais des shows pour faire de l'argent. Et là, tu ne joues plus ton mandat. Les jeunes qu'on a développés depuis six ou sept ans, les jeunes artistes, ce qu'on fait comme travail de fond de rencontre entre la culture et le milieu scolaire au Québec... On est dans toutes les écoles avec

un programme d'enseignement du français avec humour. Je pense que c'est un contact avec la jeunesse qui est fondamental pour notre avenir. Si on n'avait pas fait ça, je ne sais pas si on mériterait de s'appeler "Festival". On serait peut-être autre chose. On serait producteur privé. Moi, comme producteur privé, je ne viens pas demander de subvention. J'essaie de m'autofinan-cer. J'essaie de calculer mon risque.

Mme Frulla-Hébert: En terminant, parce que je pense que vous m'avez fait signe, M. le Président, et aux intervenants, vous dites dans votre mémoire qu'il ne devrait y avoir qu'un festival majeur au Québec dans une discipline donnée.

M. Rozon: Oui.

Mme Frulla-Hébert: C'est ça. J'aimerais que vous élaboriez un peu là-dessus parce que plusieurs régions sont venues et vont continuer à venir et elles nous disent: Bien non, nous, on veut avoir l'accessibilité à tout. On veut être aussi capables de profiter de tout ce qui se passe. Ce n'est pas juste les Montréalais et ce n'est pas juste les gens de Québec qui y ont droit. Alors, un, j'aimerais que vous m'expliquiez votre pensée et, deuxièmement, pour vous aider, le Festival international du film qui a lieu présentement en Abitibi, à Rouyn, dans cette optique-là, est-ce qu'il devrait exister? C'est juste pour vous donner un exemple, quand on dit que ça prend un événement majeur, par exemple.

M. Rozon: J'ai envie de dire: Très bonne question. Répondez donc! Ha, ha, ha! C'est sûr que c'est un sujet délicat parce que de demander à l'État de... Je ne sais pas comment approcher le problème véritablement. On a parlé d'appellation contrôlée. On a trouvé toutes sortes de formules. Il est certain que, quand je vous parle de choix pour un État comme le Québec, avec 6 000 000 d'habitants, combien de festivals internationaux d'humour on peut avoir, combien de festivals internationaux de jazz on peut faire? Je pense qu'H faut tenter de composer avec les organisations en place pour qu'on essaie peut-être de faire du rayonnement en région. Nous, on a créé la tournée Juste pour Rire, les Lundis, etc., pour rayonner à travers la province. Je ne me sens pas menacé par la compétition, mais j'ai l'impression que tantôt on va avoir des choix de société fondamentaux. Alors, ou on revient à la théorie qu'on aide tout le monde et, bon, que le meilleur gagne! C'est vrai, c'est une théorie que, honnêtement, j'aurais pu soutenir il y a 10 ans, quand j'ai commencé, c'est logique. Mais il y a aussi, j'ai l'impression, des choix, il y a des priorités. Si je dirigeais une société, moi, je me dirais, en ce moment: Je ne peux pas tout faire. C'est curieux, par exemple, parce que je ne me sens pas menacé, moi, comme festival, pour ça.

J'en parle, mais en même temps je me dis: Qu'est-ce qui peut véritablement nous mettre en danger autant que ça, sinon qu'on va tous chercher le même dollar? On nous a dit: Le 350e, il n'y aura aucun problème, ça ne touchera pas les commandites. Il faut être sur le marché de la commandite actuellement pour savoir qu'il y a un vrai problème, parce qu'il y a un dollar et, si quelqu'un va le chercher, il y a quelqu'un d'autre qui ne l'a pas. Alors, à un moment donné, il y a des limites à ça.

Mme Frulla-Hébert: Donc, vous seriez d'accord, d'une certaine façon, si je reviens au rapport Arpin, quand on parle de consolidation - on parle de saupoudrage, mais on veut beaucoup plus dire consolidation - à un moment donné, on a beaucoup développé et peut-être que, pour une période donnée, une consolidation des organismes en place serait une solution qui serait la bienvenue.

M. Rozon: Absolument. Je crois qu'on est rendus mûrs pour ça. Quand je parle de grosses entreprises québécoises, vous savez, le Festival de jazz, moi, je les ai connus H y a 10 ans, ils étaient trois personnes dans un sous-sol. Ils sont rendus peut-être 200 dans cette équipe-là et je crois qu'ils font un travatt important pour la culture québécoise à toutes sortes d'égards, au niveau du disque, au niveau de la scène. Ils sont présents à plusieurs endroits. Le Cirque du Soleil, avec ses 160 employés, son rayonnement international, fait vivre des gens qui, récemment, ne vivaient pas de ce métier-là ou en vivaient difficilement. Nous, je pense, en humour, on a humblement structure un peu. Et il y en a d'autres qui s'en viennent. On arrive au point, là, où on est comme à la puberté, si je pouvais prendre une espèce d'analogie. On est en train de vivre notre puberté comme organisation et on peut effectivement répartir l'ensemble du dollar sur toutes les organisations ou on peut aider à consolider quelques leaders et les amener plus loin. C'est un choix et, moi, je pense qu'on est rendus là.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. Rozon. Le député de LaFontaine m'a demandé la parole.

M. Gobé: Oui.

Le Président (M. Doyon): Malheureusement, le temps est écoulé. Alors, je me vois dans l'obligation de passer la parole au représentant de l'Opposition officielle, avec regret.

M. Boulerice: On tentera bien de lui laisser peut-être une petite minute, M. le Président pour le consoler de son dimanche désastreux dans l'impromptu d'Outremont no 2. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): II préfère peut-

être ne pas avoir de temps dans ce cas-là. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: M. Rozon, M. Cournoyer, M. lacobacci....

M. Gobé: Le député pourra aller au festival de l'humour quand sa carrière sera terminée. Je le remercie de son attention. J'ai bien compris que vous m'avez donné la parole, M. le député, c'est ça? Vous m'avez laissé la parole?

Le Président (M. Doyon): Je pense que, même s'il voulait le faire, c'est une prérogative du président qu'il a l'intention de garder. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Vous ayant salué, messieurs, M. Rozon, quant à vous, vous avez forcément ouvert la porte tantôt - donc, vous allez me voir venir - quand vous avez dit: Nous sommes à l'aube de choix fondamentaux. Donc, la question que je vais vous poser... Forcément, si j'ai bien lu votre mémoire, vous faites allusions à l'ONF, à Radio-Canada, etc. La question que je vous pose, c'est: Pourquoi vous ne souhaitez pas que le Québec rapatrie l'ensemble des responsabilités fédérales en matière de culture, même s'il demeure à l'intérieur du régime fédéral? Si on vous garantit le principe du "at arm's length", qui semble recevoir l'acquiescement de tous, qu'il y ait un transport latéral intégral de l'argent du fédéral au Québec...

M. Rozon: Ça fait beaucoup de "si". Ha, ha, ha! Non, mais c'est...

M. Boulerice: Ah, je vous l'accorde, il faut une volonté politique; nous l'avons exprimée, nous: "transport latéral intégral".

M. Rozon: Non, non, je comprends. Quand on nous pose cette question, c'est évident qu'on a un choix, comme Québécois, à faire bientôt; on va avoir un choix à faire: si on veut être souverains ou si on veut continuer dans la Confédération. Quand on aura fait ce choix-là, je pense que va s'imposer la deuxième partie de la question. Mais, en supposant qu'en restant dans le régime fédéral on puisse, comme vous dites, rapatrier tous les fonds et recréer des organismes semblables, je pense que c'est une hypothèse intéressante, mais, pour moi, d'abord, je pose la condition de voir où est-ce qu'on s'en va. Ça fait 15 ans que je fais ce métier, ça fait une trentaine d'années, je crois, qu'il y a un ministère des Affaires culturelles et il est à peu près temps qu'on ait un plan d'action, qu'on ait une vision à savoir où on s'en va, qu'on se fixe des objectifs. J'ai un petit peu de difficulté à répondre à des questions, puis à donner des mandats en blanc, tant que je ne sais pas précisément où est-ce que s'en va notre ministère de la culture et quelles sont ses priorités. Une fois que cette question fondamentale va être posée, va être répondue et qu'on va avoir des objectifs, je serai peut-être prêt à passer à l'étape suivante.

M. Boulerice: Sans vouloir prolonger indéfiniment dans cette question bien précise, parce qu'il y en a d'autres que je veux aborder avec vous, vous êtes dans un domaine où la très grande majorité de ceux qui oeuvrent sont inscrits, reçoivent la très grande majorité de leurs cachets, dans tout ce grand domaine de l'audiovisuel. Par cela, j'entends que ça peut être le film également, ça peut être la télévision, etc. Si on n'a pas un contrôle là-dessus, ça nous est difficile d'établir les objectifs bien précis d'une politique culturelle, sachant que des pans d'intervention aussi essentiels pour vous nous échappent au départ, dans la première prémisse.

M. Rozon: J'ai une ministre et j'attends d'elle un plan. Quand j'aurai ce plan-là, à moins qu'il soit complètement impensable, invivable, mais je ne le crois pas, on va ensuite s'y accrocher, puis travailler. Moi, j'ai besoin de contribuer à quelque chose comme citoyen, de sentir que je contribue à l'épanouissement d'une société, à son évolution. Quand vous faites un peu référence au fédéral, à l'audiovisuel, etc., il est sûr que, depuis 30 ans, le fédéral nous a quand même relativement bien servis, les gens de la culture, puisque Téléfilm, l'ONF, Radio-Canada, nous ont laissés libres de travailler et nous ont permis de vivre, de gagner notre vie. Pendant ce temps-là, on se tâtait; c'était peut-être normal. Mais si, maintenant, on décide exactement - je répète ce que je dis - si on décide véritablement, si on fait nos choix de société, je serai le premier à mettre l'épaule à la roue, à travailler dans ce sens-là. Je serai le premier à travailler, quels que soient les choix que les Québécois feront.

M. Boulerice: M. Rozon...

M. Rozon: J'ai hâte qu'on le fasse, soit dit en passant.

M. Boulerice: Ha, ha, ha! Nous le partageons. Est-ce que vous pourriez peut-être me donner un petit peu, enfin, pas un peu, beaucoup, plutôt, de détails sur la formule d'incitatif aux commandites culturelles par le biais de l'appariement?

M. Rozon: La formule de l'appariement qui avait été initiée - je pense qu'elle était à l'essai une année, à ma connaissance; moi, j'ai connu ça, une année - avait tellement eu de succès qu'ils ont été obligés de la réduire un peu. C'est donc dire qu'il y avait quand même eu un effet

clair sur la recherche de fonds privés. (16 h 15)

II est certain, pratico-pratique, que, quand vous allez chercher une commandite, la première fois, avec un projet, c'est le moment le plus difficile. Parce que les commanditaires vous demandent, en général, trois ans d'existence pour vous financer. Alors, de pouvoir dire: Si vous nous donnez tant, le gouvernement suit pour tel montant, ça permet souvent d'initier de nouveaux projets. Par exemple, nous, l'an prochain, en principe on va célébrer notre 10e anniversaire et on a l'intention de faire certains événements spéciaux qu'on veut commanditer. Et c'est très difficile, malgré qu'on ait 10 ans de succès, d'arriver avec une nouvelle idée forte, parce qu'on demande à la voir avant de la commanditer. Ça, c'est le principe des entrepreneurs privés. Alors, cette formule avait un avantage.

Maintenant, je dois dire, encore là naïvement ou candidement, que c'est certain que, dans les choix qui seront faits, c'est possible que ça saute, cette possibilité. J'en offre une, comme j'en ai offert une vingtaine d'hypothèses. Moi, je crois beaucoup aux incitatifs fiscaux qu'on retire à un moment donné. Je donne l'exemple de New York où, lorsqu'on finance, à Broadway, une production de 5 000 000 $, on la divise en 500 actions à 10 000 $. Il y a 500 actionnaires qui mettent 10 000 $ et le premier 5 000 000 $ leur est retourné automatiquement. Et, ensuite, ils partagent 50-50 avec le producteur. Ça permet de financer tous les shows du Strand à Londres et de New York sur Broadway. N'essayez pas de faire ça au Québec demain matin. Les gens ne suivront pas.

Alors, il faut les inciter pendant cinq ans, mais diminuer, les habituer; après ça, on va avoir fait nos preuves et on va exister, point. Ce qui me fait toujours peur, c'est des structures fiscales qui, dans le fond, enrichissent les courtiers, les comptables, tout le monde, mais nous éloignent du but fondamental qui est d'habituer les gens ou de financer mieux notre culture.

M. Boulerice: Une dernière question, avant que ma collègue, la députée de Chicoutimi, n'intervienne. Je l'ai écrite, tellement elle est longue. Vous recommandez la fin du saupoudrage. Est-ce que vous êtes conscients que cette pratique joue un rôle essentiel dans le maintien d'activités de nombreux organismes culturels en région, qui ne peuvent tout simplement pas se passer de subventions, si modestes soient elles, que la fin du saupoudrage ne peut que conduire à une certaine institutionnalisation de la culture, au détriment de la relève ou des courants marginaux? Alors, ne reconnaissez-vous pas que la fin du saupoudrage est une prémisse qui fausse le débat sur le financement de la culture, parce qu'il implique une rationalisation et non pas une augmentation des efforts budgétaires en matière de culture?

M. Rozon: C'est pour ça que j'ai fait un peu à la blague l'idée du fonds de saupoudrage. C'est que, jusqu'à un certain point, c'est certain qu'il faut se garder ce qu'on appelle du "launch money", de l'argent pour aider ceux qui débutent, pour peut-être faire des expériences, mais un fonds particulier réservé à ça. Ce qui est embêtant des fois, on ne le vit pas tellement... Mon Dieu! Versailles.

M. Boulerice: Vous y êtes habitués.

M. Rozon: On est à la télévision? Je prends l'exemple du ministère des Communications à Ottawa; il y avait vraiment un problème avec le fonds PIC et ça n'a rien à voir avec le ministère de la culture, mais, quand même, c'est un problème fondamental. On était peut-être 7 ou 8 organismes pour lesquels ce fonds avait été créé, 7 ou 8 événements majeurs; en dernier, on était 200. Il y en avait 180 petits et 8 gros. Là, je dis n'importe quoi, mais tout le monde venait pomper l'argent dans ce fonds-là pour le distribuer, pour en faire le fameux fonds de saupoudrage. Est-ce que je réponds à votre question? Parce que l'éclairage nous a un peu détournés de...

M. Boulerice: Perturbés.

M. Rozon: C'est vous qui avez allumé ça? Mon Dieu! Vous êtes équipés!

Le Président (M. Doyon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.

M. Rozon: Bonjour, madame.

Mme Blackburn: En fait, mon collègue, le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, a un peu abordé la question du saupoudrage. Moi, je suis d'une région, le Saguenay-Lac-Saint-Jean qui - je pense que c'est démontré - a contribué à fournir plusieurs artistes, commentateurs, journalistes - prenez tous les arts, la culture et les communications - qui se produisent et qui travaillent à Montréal actuellement. On peut dire que la région a été particulièrement généreuse en ce qui concerne la relève. Quand on parle de saupoudrage, quand on parie de concentrer l'action, de consolider - pour utiliser les termes de Mme la ministre, tout à l'heure - la consolidation des organismes en place, comme on n'ajoute pas d'argent dans la caisse, ça veut généralement dire la mort totale de toute subvention à des petites troupes, à des petits orchestres, à des petits ensembles, à tous ces petits organismes qui se créent, je dirais, quasiment quotidiennement dans notre région,

très souvent dans notre région, qui, finalement, prennent, comme un peu partout ailleurs, deux ans, trois ans à se faire un minimum de petit marché. Après ça, ils vivent exclusivement sur la petite subvention, minime, 7000 $, 8000 $, 9000 $ ou 10 000 $. On ne parle pas de pactole, là.

Là, on est en train de dire qu'on va consolider ce qu'il y a et qu'on ne les financera que sur des projets. Ça veut dire que les petits sous qui leur permettaient d'essayer de se trouver des contacts, d'aller chercher des fonds et de commencer à se faire faire des affiches - vous savez comment ça fonctionne - bien, là, on leur dit: Vous ne les aurez plus. Le temps qu'ils préparent le projet, ça prend des sous pour préparer des projets, pour essayer d'imaginer comment on pourrait monter un spectacle, aller vendre l'idée à deux ou trois producteurs, à des entreprises privées, bien, là, on leur dit: Vous ne les aurez plus, ces sous-là.

Ça, ça constitue, à mon avis, une partie de la relève du Grand Montréal, parce qu'elle se fait aussi chez vous. Comment est-ce qu'on réagit à ça? Je vous ai écouté attentivement et vous avez un bon bout sur la relève. Vous avez aussi un bon bout sur le financement et le soutien par rapport aux avantages fiscaux, que je trouve intéressant, d'ailleurs. Mais comment est-ce qu'on réagit? Semble-t-il qu'on a une caisse et qu'ils n'envisagent pas d'en mettre et la façon d'en mettre, ce serait de fermer certains des musées, et vous n'êtes sûrement pas d'accord avec ça, les conservatoires... Alors, comme on ne peut pas, je pense, aller en deçà de ce qu'on a et que ce gouvernement a décidé qu'il voulait en donner un peu plus pour la consolidation des organismes en place, qu'est-ce qu'on fait avec la relève en région?

M. Rozon: Je suis d'accord avec vous sur le fond, madame. Il faut aider, mais je pense qu'il faut faire des choix. Quand je dis "faire des choix", on ne va pas entrer dans le gras et définir les budgets.

Mme Blackburn: II n'y a pas de gras.

M. Rozon: Non, je ne le sais, mais je veux dire que, quand on fait un budget au ministère des Affaires culturelles - ce n'est pas à moi à le faire, ce budget-là - je crois qu'il va falloir peut-être se réserver des sommes pour, justement, supporter des organismes en région qui en ont besoin. Pas juste en région, même à Montréal; ça peut être une idée d'une petite troupe de théâtre qui démarre à Montréal. Ça peut être partout. Je n'ai pas de problème avec ça. Je m'en réserve des budgets, moi, pour prendre des risques à chaque année. De moins en moins, mais on s'en réserve quand même, parce qu'on ne peut pas faire que des trucs sûrs. Mais il faut quand même garder l'essentiel. Il n'y a personne ici, je ne crois pas, qui soit venu témoigner à la commission, qui roule sur l'or. On travaille tous très dur pour arriver et, à un moment donné, quand je dis de faire des choix de société, s'il y a un deuxième festival qui m'affaiblit, bien, là, je ne pense pas qu'on s'aide, personne. Parce qu'on est sur le point... On a la tête comme ça, là. On essaie de sortir, d'amener ça plus loin pour que ça rayonne plus et d'aider plus de monde, parce que n'oubliez pas qu'on a un effet multiplicateur. On en aide, du monde. On en fait travailler, des gens et, si, nous, on a de la difficulté à survivre, qu'on est toujours en train de regarder juste l'essentiel, peut-être qu'on remplit mal notre mandat. On est peut-être mieux d'avoir 7 enfants en santé que 14 maigrichons. Tu sais, il va peut-être falloir, à un moment donné, dire: Bien, il y a ça.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. Rozon. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Rozon: Vous n'avez pas aimé cette expression-là.

Le Président (M. Doyon): Malheureusement, le temps est écoulé.

M. Boulerice: M. Rozon, merci. M. Rozon: Oui.

M. Boulerice: Je pense que vos commentaires, fort sérieux malgré le ton quelquefois badin, mais réconfortant pour nous parce qu'une commission, c'est long, sont de nature à nous éclairer dans l'oeuvre qui nous attend. Je me permettrai, en guise de remerciement, de dire: Oui, le milieu de la culture demande beaucoup de mécénat très souvent. Il demande beaucoup à l'État, mais je sais que le milieu de la culture épouse toujours de grandes causes. Je sais pertinemment, de bouche à oreille, que vous vous apprêtez à vous engager dans les restos du coeur. Je trouve cette initiative extrêmement louable. Je vous incite à vous lancer plus à fond et peut-être à donner l'exemple à l'Assemblée nationale à ce niveau-là. Vous verrez bientôt pourquoi je fais cette dernière petite allusion. Espérons être partenaires.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Oui. À mon tour, je me joins à mon collègue pour vous remercier, d'une part, d'abord pour nous avoir éclairés, parce que, effectivement, on parle souvent d'humour et, des fois, on grince un peu à ça, versus l'aide gouvernementale toujours et non pas versus sa place. J'aurais pensé, d'ailleurs, que mon collègue, qui m'a taquinée plus d'une fois sur le musée, aurait posé une question. Ceci dit, au niveau de la...

M. Boulerice: II paraît qu'il faut une invitation pour y aller.

Mme Frulla-Hébert: En tout cas, au niveau de la formation, c'est sûr que vous êtes très présents dans toutes les écoles et, si vous aidez, justement, à ce que les enfants apprécient leur langue et travaillent mieux à maîtriser leur langue, alors, ça aura valu la peine. Merci.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre. Alors, il me reste, au nom des membres de la commission, à vous remercier d'avoir bien voulu nous consacrer ce bout de temps. Tout en vous permettant de vous retirer, je vais maintenant indiquer à cette commission que le moment est venu d'entendre... Suspension.

(Suspension de la séance à 16 h 26)

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Doyon): Donc, le moment est venu d'entendre l'Orchestre Métropolitain de Montréal. Je signale aux membres de cette commission que la présidence a l'intention de débiter à l'intervenant qui suit le temps consacré aux effusions, aux embrassades, aux bons souhaits, etc. C'est un choix que vous ferez. Les effusions, il n'y a pas de problème avec ça; les embrassades aussi, les souhaits de bonne année et de joyeux Noël, de joyeuses Pâques, etc., mais ça sera débité sur le temps de l'intervenant suivant. Alors, c'est un choix que les membres de la commission font.

Nous entendrons, sans plus de délai, les représentants de l'Orchestre Métropolitain de Montréal. Je leur souhaite la plus cordiale des bienvenues et Mme Dupont Rémillard qui est avec nous, bonjour.

Mme Dupont Rémillard (Marie): M. le Président...

Le Président (M. Doyon): Vous connaissez les règles. Vous savez que vous avez 10 à 15 minutes pour faire la présentation. Vous vous présentez pour les fins du Journal des débats et, après ça, la conversation s'engage pour le temps qui reste...

Mme Dupont Rémillard: D'accord.

Le Président (M. Doyon): ...avec les membres de la commission. Vous avez la parole.

Orchestre Métropolitain de Montréal

Mme Dupont Rémillard: M. le Président, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, nous sommes honorés de nous présenter devant la commission parlementaire de la culture. Mon nom est Marie Dupont Rémillard. Je suis directeur général de l'Orchestre Métropolitain et je suis accompagnée de M. Charles-Albert Poissant, qui est président de Donohue et membre de l'exécutif de notre conseil d'administration, notre trésorier.

Le Président (M. Doyon): Bienvenue.

Mme Dupont Rémillard: Nous avons longuement hésité avant de nous présenter devant la commission parlementaire sur la politique culturelle du Québec parce que l'Orchestre Métropolitain a une histoire et une philosophie bien particulière et nous n'étions pas convaincus de la nécessité de nous faire entendre à ce moment-ci de notre histoire et de celle de la commission parlementaire, puisque nous sommes en plein développement et que nous innovons beaucoup encore au sein du monde de la musique.

L'Orchestre Métropolitain a été fondé en 1981 par les meilleurs musiciens diplômés des conservatoires et des facultés de musique du Québec. Ses 60 musiciens réguliers ont une moyenne d'âge de 34 ans. Sa triple mission, soit de contribuer à la vie culturelle de Montréal et de sa banlieue; de promouvoir le talent des musiciens, compositeurs et chanteurs québécois, incluant, lors de certains concerts, le choeur de l'Orchestre Métropolitain, fondé par Agnès Grossmann; et aussi, l'autre volet de sa mission, c'est de présenter des concerts avec la collaboration des intervenants du monde de l'éducation afin de former un nouveau public. L'Orchestre Métropolitain - je pense que je peux le dire - fait désormais partie intégrante de la vie artistique de Montréal.

L'Orchestre Métropolitain est différent des autres pour trois raisons. La première, c'est le deuxième orchestre symphonique à Montréal. Comme on vous l'a sans doute dit, il est déjà difficile pour une ville de faire vivre un seul orchestre symphonique. Alors, que dire d'un deuxième orchestre qui vit un peu en marge du grand milieu culturel québécois et qui, pourtant, arrive à survivre, à se développer et à cumuler des surplus chaque année depuis cinq ans. En fait, nous avons dû trouver ailleurs un espace culturel propre et nous l'occupons peu à peu.

La deuxième différence de l'Orchestre Métropolitain, c'est qu'il n'aurait pas dû être. Seulement, voilà, il est né de la volonté de nos musiciens de se trouver un travail. Il est issu du désir et de la détermination de ces finissants du conservatoire et des écoles de musique qui voulaient oeuvrer dans le secteur dans lequel ils avaient étudié pendant de nombreuses années. Ce qui fait notre différence, c'est que la culture corporative a donné naissance à un rapport particulier de confiance entre l'administration et les permanents syndiqués. Nous avons une convention collective souple, légère, qui permet à l'administration et au syndicat d'entretenir des rapports de productivité que l'on ne retrouve

nulle part ailleurs au Canada. Cela aussi nous rend différents et nous permet de matérialiser des projets rapidement et efficacement.

Le troisième élément qui nous "diffère", c'est le lien étroit qui nous unit à l'entreprise privée, comme Quebecor, et ça constitue aussi une particularité de l'Orchestre Métropolitain. La formule vaut la peine d'être retenue, parce qu'il est fort intéressant que la personne chargée de gérer les destinées d'organismes culturels ait une marge de manoeuvre et la sécurité financière nécessaire pour garantir des décisions visant le long terme plutôt que la rentabilité à court terme. L'administration s'en trouve renforcée dans son intégrité et son objectivité.

Ce sont ces trois éléments: le marché particulier, la structure syndicale souple et le lien étroit avec l'entreprise privée qui font que l'Orchestre Métropolitain a pu continuer de grandir et de prendre une place importante dans le milieu montréalais et qui lui permettent d'innover.

L'excellence et la qualité, c'est la philosophie de base de l'Orchestre Métropolitain à l'égard de son développement. Nous sommes d'accord avec le rapport Arpin à l'effet que seules l'excellence et la qualité sont garantes de la survie d'un organisme. Ce sont les objectifs que nous poursuivons à notre niveau, soit celui du développement du talent québécois, et canadien. C'est notre mandat.

L'accessibilité et l'appartenance au milieu sont également deux points qui constituent les paramètres de toute notre démarche et cela se reflète dans toutes nos actions quant au choix des projets que nous décidons d'amorcer. C'est dans cet esprit que nous avons choisi que l'Orchestre Métropolitain ne performe pas seulement à la Place des Arts.

Nous nous rendons en banlieue depuis trois ans, et cela, dans cinq villes de la Communauté urbaine de Montréal, soit ville Saint-Laurent, Verdun, Montréal-Nord, Hochelaga-Maisonneuve et Pierrefonds, où nous présentons des concerts de façon régulière trois fois l'an. Nous y avons développé une clientèle d'environ 600 personnes par concert, un système de billetterie autonome et un réseau de bénévoles pour chacune des villes, et les commanditaires sont régionaux. Nos salles ne sont plus assez grandes; nous en avons choisi de nouvelles cette année. Les gens paient 6 $ pour assister à un concert auquel ils n'assisteraient pas à la Place des Arts. Nous nous rendons chez les gens, ils ne viennent pas chez nous. De plus, ils s'associent et s'identifient à nous.

La série "Premières". Il en va de même pour la série "Premières" qui s'adresse aux enfants de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Nous avons mis sur pied une série de concerts gratuits pour enfants seulement. Cette série de concerts est destinée aux 10 à 12 ans et présente, entre autres, des solistes de 10 à 12 ans auxquels les enfants peuvent s'identifier. L'originalité de notre démarche est la suivante: nous offrons tout gratuitement: transport, collation et concert aux enfants de milieux défavorisés afin de leur faire aimer la musique. Cette série a été conçue avec la collaboration de la CECM et intègre dans le cadre d'une démarche pédagogique les matières suivantes: musique, français et arts plastiques. La musique ainsi présentée devient accessible et développe chez ces enfants un sens d'appartenance à l'Orchestre. Ce sont nos futurs clients. Cette année, 6000 enfants assisteront à nos présentations à la Place des Arts.

Accessibilité dans la mise en marché. Nous n'utilisons que les médias qui sont près des gens. Notre mandat étant de trouver un nouveau public, il nous fallait nous lier avec des médias auxquels le public s'identifiait le plus. Ainsi, nous avons favorisé une approche rock de la musique classique. Nous avons aussi utilisé les hebdos et des journaux comme Le Journal de Montréal ou encore un poste de radio comme CJMS. Les porte-parole de l'Orchestre Métropolitain que nous avons retenus sont également ceux auxquels le grand public voue une admiration sans bornes. Je pense à Marjo, Andrée Boucher, Lucien Francoeur, Michel Tremblay, Mario Tremblay, Mitsou ou encore, dernièrement, Céline Dion, et j'en passe.

Nous avons également installé un système de points pour la mise en marché, le système multi points, donnant accès, pour nos abonnés, à d'autres disciplines que la musique. Nos abonnés peuvent ainsi recevoir en prime pour leur abonnement des billets pour l'Opéra de Montréal, les Grands Ballets ou encore au théâtre Jean-Duceppe.

En termes de financement aussi, on a favorisé l'accessibilité. L'Orchestre Métropolitain étant le reflet d'un nouveau type de public et devant tenir compte du fait que les grandes corporations soutiennent avant tout l'OSM, il nous fallait nous tourner vers d'autres sources. La campagne de financement corporative habituelle fut maintenue, mais elle doit être complétée. Cette année, compte tenu de notre notoriété grandissante, nous descendons dans le métro où nous présentons des concerts sympho-niques trois jours de suite. Enfin, je passe les détails, mais c'est une façon pour nous encore d'être plus accessibles et que le public s'identifie davantage à nous. Cela développera alors l'appartenance du milieu populaire à l'Orchestre et confirmera notre caractère accessible. En fait, toutes les démarches de l'Orchestre Métropolitain se font en conformité avec l'image qu'il veut donner: jeune, dynamique, excellent et accessible.

Commentaires et recommandations à l'égard du rapport Arpin. Nous sommes d'accord avec les grands principes véhiculés par le rapport, tels l'excellence, la création, la stabilité des organismes culturels, l'ouverture au monde et à l'action

internationale, de même que le développement et le maintien au Québec de la compétence professionnelle dans le domaine culturel. Nous souscrivons aux grands principes évoqués, en particulier celui de la saine gestion et de la participation du secteur privé au développement des arts. Nous sommes tous pour la vertu.

Les recommandations que nous faisons sont les suivantes. Nous recommandons fortement que le ministère exige des équilibres financiers au niveau du fonctionnement des organismes culturels, tout comme on l'a exigé pour les municipalités. Je crois fermement que nous devons tous tendre vers cet objectif.

Système de bonification. Le ministère pourrait même instaurer un système de bonification à l'endroit des organismes ayant atteint cet objectif. La pratique de camoufler certains surplus pourrait ainsi disparaître. Il n'est pas rare que l'on ne dévoile pas les surplus de peur que l'on sabre dans les subventions sous prétexte d'aider ceux qui sont en difficulté.

La délimitation des champs d'action est aussi une recommandation que nous faisons à l'effet que nous aimerions que le ministère délimite les champs d'action des organismes culturels oeuvrant dans le même secteur afin d'éviter le recoupement, les dédoublements néfastes à l'égard du public. Si le mandat d'un organisme est national et international, qu'il le demeure et ne tente pas de se créer une niche régionale et vice versa.

Intégration. Nous aimerions qu'il y ait intégration de certains organismes désirant travailler ensemble. Cela pourrait nous permettre de réduire les frais de gestion importants, tout en assurant des emplois mieux rémunérés à nos employés. Cette notion n'exclut pas l'autonomie des organismes partenaires ou encore des conseils d'administration.

Rigueur dans l'octroi des subventions. Nous souhaiterions une plus grande rigueur dans l'octroi des subventions afin d'éviter le saupoudrage inutile. Nous demandons aussi une plus grande objectivité dans l'octroi de ces subventions. Nous désirerions que l'on évite les conflits d'intérêts et que des citoyens fassent partie des comités d'évaluation de différents organismes qui demandent des subventions.

Nous aimerions aussi que le ministère des Affaires culturelles suscite des rencontres annuelles par secteur, par région, pour favoriser l'échange et la coordination entre les organismes. Nous aimerions également que l'on instaure des cours de formation et de perfectionnement, sous la gouverne des HEC, afin de renseigner les gestionnaires sur les différentes formes de gestion et de professionnaliser la gestion d'organismes culturels.

Nous serions aussi favorables à la nationalisation complète de certains organismes. Je pense, entre autres, à l'OSM qui le réclame ou encore à des grands organismes comme l'opéra ou encore l'Orchestre symphonique de Québec. Je suis d'accord pour la nationalisation, mais à la condition qu'ils le soient totalement et qu'ils ne bénéficient pas des subventions du secteur privé.

Bref, pour terminer, je suggérerais aussi la création d'actions accréditives culturelles, un peu comme on l'a fait dans le secteur minier pour la levée de fonds. Ça permettrait de constituer un fonds de roulement pour certains organismes culturels et de les former en corporations avec actionnaires ayant droit de regard sur la gestion de l'organisme en question. Cela pourrait renflouer les coffres de certains d'entre eux et assurer une meilleure utilisation du capital. Je vous remercie de nous avoir permis de nous exprimer ici, devant la commission parlementaire.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme Rémillard. M. la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Merci. Mme Rémillard et M. Poissant, bienvenue. Premièrement, je tiens à vous féliciter sincèrement du dynamisme dont fait part l'Orchestre Métropolitain, d'une part, et aussi de sa façon très innovatrice d'aborder certains publics, d'aborder les choses, et même aussi, finalement, de se mettre lui-même en valeur et sur le marché. Vous êtes très orientés vers l'accessibilité. D'une part, comme vous dites, on se sert des journaux qui sont aussi très populaires... Vous avez aussi la chance d'avoir un mécène qui y croit beaucoup. Mais, quand même, action pédagogique versus les enfants, entrer dans l'école... Donc, vous vous êtes donné un mandat qui n'appartient qu'à vous seuls, ce qui me fait poser cette question: Vous demandez, un peu comme l'Orchestre symphonique de Montréal l'a fait et aussi comme l'Orchestre symphonique de Québec, comme vous le dites, de catégoriser, d'une certaine façon, les grands organismes en musique, c'est-à-dire des orchestres dits nationaux versus d'autres qui sont plus régionaux. Pourriez-vous élaborer un peu votre pensée là-dessus?

Mme Dupont Rémillard: Ça veut dire que... Si on se situe au point de vue québécois, dans l'ensemble, je pense qu'une ville doit avoir un orchestre symphonique. Il n'y a pas de problème, on s'entend au niveau des principes. Une ville comme Québec doit avoir un orchestre symphonique, une ville comme Montréal doit avoir un orchestre symphonique.

Pour ce qui est de notre particularité, nous sommes le deuxième orchestre symphonique à Montréal. Il deviendrait important, à ce moment-ci, de définir les champs d'action de chaque orchestre. Notre vocation étant régionale, nous acceptons qu'elle le soit et nous sommes ravis du fait qu'elle soit régionale, c'est-à-dire que notre mandat soit de développer des nouveaux publics. Mais il serait très important, à ce moment-ci, que le gouvernement soutienne suffisamment

I'OSM pour que l'Orchestre symphonique n'ait pas à se préoccuper du régional et qu'il voie à une vocation et à un rayonnement national et international. C'est en ce sens que je favoriserais peut-être un soutien additionnel à l'OSM, mais que son mandat soit très précis en ce sens qu'il se situe en termes de solistes, par exemple, qu'il engage des solistes nationaux et internationaux et qu'il nous laisse, nous, promouvoir les talents québécois qui émergent de nos conservatoires.

Parfois, il peut arriver qu'il y ait conflit entre les deux orchestres parce que, justement, nous sommes deux dans la même ville. Donc, si l'OSM est suffisamment soutenu financièrement par le gouvernement, je pense qu'à ce moment-là nous pourrons oeuvrer à notre niveau de façon encore plus intense et nous pourrons développer de nouvelles séries, mais à la condition que les mandats soient très précis de part et d'autre. Notre particularité, nous, c'est que nous sommes deux à Montréal, voyez-vous? J'en reviens toujours à ça.

Mme Frulla-Hébert: Ce qui m'amène, d'ailleurs, à deux questions. D'abord, vous parlez de rayonnement, de votre action au niveau du rayonnement. Dans le fond, on subventionne 11 orchestres de façon différente, mais c'est ça, quand même. On soutient à peu près 11 orchestres. Donc, il y a eu une suggestion de l'Orchestre symphonique de Québec, dans son mémoire, qui disait: Bien, faites-nous voyager. Nous, on va faire la même chose, c'est-à-dire qu'on aura, nous, un rayonnement qui est régional, donc qui va desservir Québec et ses environs. Par contre, nous avons des orchestres au Lac-Saint-Jean - par exemple, à Chicoutimi, on a un orchestre extrêmement populaire, extrêmement dynamique - et aussi ailleurs dans les régions. Alors, comment voyez-vous ça? Est-ce que c'est possible, tel que vous le faites, de répéter cette expérience-là, si on veut, dans la région de Québec ou ailleurs?

Mme Dupont Rémillard: Je serais d'accord, moi, pour le maintien d'orchestres symphoniques régionaux. Ce qui est inquiétant, c'est plutôt la prolifération des orchestres symphoniques, je dirais, municipaux. Il y en a partout maintenant. Ça, je suis d'accord pour ça. Ce qu'il faudrait peut-être, c'est plafonner le niveau des subventions de votre ministère pour ce type... J'entendrais peut-être plafonner à 15 % du budget global la contribution du ministère des Affaires culturelles pour tout le monde et, après, aller selon vos priorités de développement. (16 h 45)

C'est-à-dire que, si vous désirez favoriser, par exemple, le développement ou le rayonnement international de l'OSM, vous pourriez additionner un 10 % de plus pour l'OSM et peut-être d'autres types... C'est-à-dire y aller par projet et par ampleur de ce que voulez donner à l'organisme. En fait, après avoir fait un plan de développement global - parce que je pense qu'à ce moment-ci il faut un plan de développement global - je pense qu'il devrait y avoir un minimum de 15 % du budget global qui est fourni par votre ministère pour le fonctionnement de ces orchestres-là.

Pour le budget total, on pourrait avoir une norme générale et, selon le type de développement que vous entrevoyez, après avoir consulté le milieu, je ferais peut-être des exceptions, si vous voulez. On pourrait peut-être donner plus à l'OSM s'il doit aller à l'international. Ça coûte une fortune d'aller à l'international et c'est quand même le Québec qui est représenté à l'international. On a un orchestre merveilleux au niveau mondial. Pour nous, c'est superbe d'avoir cet orchestre-là parce que ça nous permet de nous mesurer à des gens qui sont très bons et, donc, le niveau augmente. Je serais peut-être pour une uniformisation des subventions. Je ne sais pas si financièrement c'est possible.

Mme Frulla-Hébert: Ça m'amène à ma deuxième question. C'est que plusieurs de vos recommandations vont dans le sens d'une plus grande intervention de l'État dans la gestion de la culture. Par contre, il y a plusieurs groupes qui sont venus et, justement, ont perçu du rapport Arpin cette volonté d'une plus grande ingérence de l'État, ce qui, en fait, n'est pas le cas, mais il y a cette perception. Les gens nous ont dit: Non, au contraire, il faut que l'État puisse donner les grandes orientations et, finalement, sortir du secteur le plus rapidement possible. Donc, il y a le principe de ce qu'on appelle, d'un côté, le "arm's length" et l'autre principe que vous semblez prôner. À moins que j'aie mal lu, vous semblez demander une plus grande intervention de l'État. Est-ce que c'est le cas?

Mme Dupont Rémillard: C'est-à-dire que ce serait important que l'État définisse ses priorités en termes de perspectives de développement. Il est évident que, dans le domaine de la musique, il y a énormément de corporations qui poussent un peu partout. Il faudrait peut-être un plan directeur, a savoir les grandes lignes où nous désirons nous en aller en termes de groupes pour représenter la musique et, après, je standardiserais les organismes qui veulent avoir accès à une subvention. J'uniformiserais les critères et je développerais les critères d'excellence où on veut aller. J'identifierais clairement où on veut aller.

Si un orchestre a une vocation régionale, à ce moment-là, le financement serait... Tout dépend de la bonification que vous voudriez accorder à l'orchestre. S'il y avait un système de pointage et d'évaluation de l'organisme qui demande des subventions, ce serait un bon moyen de contrôler. Mais il faut quand même

définir les organismes et les créneaux dans lesquels ils doivent oeuvrer. Je pense que c'est fondamental; on ne peut pas y aller tous azimuts.

M. Poissant (Charles-Albert): Mme la ministre, si vous me permettez une observation additionnelle. Pour revenir à votre question antérieure sur la régionalisation, si je peux me permettre, je pense que vous pourriez facilement dire... Vous avez parle de l'orchestre de Chicou-timi, je pense, et peut-être d'ailleurs. Il faudrait faire en sorte que ces régions-là soient délimitées, en fait, pour qu'ils n'aillent pas dans une région où il y a déjà un orchestre existant ou vice versa. Ce n'est pas impensable que vous puissiez arriver à dire: Voici votre région en ce qui nous concerne, nous de l'Orchestre Métropolitain de Montréal, et voici la région géographique pour un autre?

En ce qui concerne la présence du gouvernement, ce n'est pas tout à fait ce.... On vous suggère d'établir des normes, des guides, pour avoir une espèce d'uniformisation qui vous permettrait peut-être d'arriver et de dire: Si vous rencontrez certaines de nos exigences administratives, financières, de participation, etc., vous pourriez bénéficier de telle ou telle subvention. Ça, c'est à peu près ce qu'on vous demande. Je ne pense pas qu'on voudrait que le gouvernement vienne s'immiscer, parce qu'on se considère meilleurs administrateurs que vous, avec votre permission, madame.

Mme Frulla-Hébert: On se lest fait dire, d'ailleurs, par un autre, par M. Landry.

Le Président (M. Doyon): Dernière question, Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Alors, justement à vous, M. Poissant. Au niveau des commandites privées, vous avez la chance d'avoir - je le disais tantôt - un mécène, M. Péladeau, qui croit beaucoup en l'orchestre. Au niveau des commandites privées, deux choses. D'abord, est-ce que c'est difficile, ou est-ce que c'est plus difficile, ou est-ce que les compagnies se joignent maintenant plus à des entreprises dites culturelles? Entendons-nous, elles veulent avoir des retombées et c'est bien normal. Deuxièmement, aussi, il y a certains organismes qui nous disaient: C'est du surplus, d'une part, et aussi non aux commandites parce qu'il peut y avoir aussi une certaine ingérence au niveau de la création, de la programmation, etc. Alors, il vaut mieux que l'État s'occupe de tout, ce qui est assez difficile. Alors, dites-nous un peu comment vous fonctionnez au niveau de vos commandites privées.

M. Poissant: Évidemment, je pourrais y répondre, mais celle qui serait la plus apte à y répondre, c'est quand même Marie Rémillard. Je pense qu'en principe c'est le parrainage des deux qui est le plus intéressant: d'une pan", avoir ces commandites privées là... Et je suis d'accord avec vous, je n'aimerais peut-être pas qu'elles soient à un niveau tel, qu'elles puissent commander la gestion, en somme, qu'elles contrôlent, si vous voulez. Mais, règle générale, ce n'est pas ce qui se fait. C'est que les commanditaires versent le montant qui leur est demandé - certains organismes que nous avons - pour financer l'orchestre et il n'y pas cette ingérence-là. Je pense bien qu'on ne la voudrait pas. Par ailleurs, il y a le public qui finance une partie aussi par les droits d'entrée et, troisièmement, il y a les subventions gouvernementales.

Mais, si vous me posez la question à savoir: Est-ce qu'on voudrait avoir... D'abord, le premier exposé de votre question disait: Quelle est votre expérience, je pense, sur le... Bien, aujourd'hui, à l'heure actuelle, c'est plus difficile, mais il y a quand même dans l'industrie - et je peux prendre la mienne en exemple - de plus en plus une conscience de la culture, je pense, et on le voit. Il y a une contribution. Est-ce qu'elle est plus grande? Je ne pourrais pas vous le dire, mais il y a quand même une acceptation du fait qu'on doit prendre notre rôle dans cela, et on le fait; peut-être pas suffisamment, mais on le fait, quand même. On pense qu'on n'est pas simplement des faiseurs d'argent, mais qu'on doit avoir également notre contribution sociale dans le milieu où nous sommes. Dans ce sens-là, je pense que, oui, je ne dirais pas il y a une effervescence, mais il y a une amélioration sensible sur la participation de l'industrie.

Le Président (M. Ooyon): Merci, M Poissant. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Mme Rémillard, M. Poissant, bienvenue à cette commission. Deux brefs commentaires avant de débuter le questionnement. J'ai apprécié, M. Poissant, que vous fassiez état de cette sensibilité de plus en plus grande que les industriels ont envers la culture. Il est effectivement prouvé que, dans le recrutement des employés, quel que soit le niveau, techniciens, cadres, cadres supérieurs, une des premières questions qu'on va vous poser au-delà du salaire que vous aller leur offrir est: Y a-t-il un environnement culturel à l'usine où vous allez m'envoyer ou à l'édifice administratif où je serai affecté? Bien des intervenants de la même occupation que vous nous disent qu'effectivement cela devient un grand incitatif dans le recrutement de leurs employés. Donc, je pense qu'il était intéressant que vous le fassiez.

Mme Dupont Rémillard, vous avez fait un commentaire tantôt au sujet des orchestres et des orchestres régionaux. Je pense que vous avez soulevé une question à laquelle il va falloir réfléchir. Est-ce qu'il y a un orchestre à Saint-Jérôme? Est-ce qu'il y a un orchestre à Joliette ou bien avons-nous un orchestre régional Lau-

rentides-Lanaudière? Je pense que c'est une question qu'il va falloir se poser à ce niveau-là. Je pense que, oui, il faut les multiplier, mais il faut quand même être prudents dans la multiplication.

Mme Dupont Rémillard: C'est très bien qu'il y ait beaucoup d'orchestres.

M. Boulerice: Oui, mais...

Mme Dupont Rémillard: Le problème, c'est de savoir lesquels on doit soutenir. Je pense qu'il faut avoir certains critères d'objectivité pour choisir le type de financement qu'on leur accorde, parce qu'il y en a vraiment partout et la qualité n'est pas la même partout. Mais on ne peut pas empêcher les gens de créer des orchestres. Ils peuvent en faire, mais de là à les subventionner tous, il y a quand même une différence et une limite aussi.

Pour en revenir juste une minute au financement, ce que M. Poissant disait tantôt, ce qui est extraordinaire, nous on remarque que, puisque, à Montréal, il y a deux orchestres, on est toujours obligés d'innover. Alors, ce qui est superbe chez nous, c'est que le public va devenir la base de notre financement, parce que les grandes corporations ont tendance à aller vers l'autre. Maintenant, dans nos campagnes de financement, ce sont les gens qui vont nous soutenir en majorité. On a nos grands commanditaires, évidemment, on a un grand mécène comme Quebecor. Mais, au fil des ans, les structures qu'on est en train de mettre en place vont faire que ce sont nos abonnés et tous les gens chez qui on s'en va en ce moment qui vont nous soutenir, ce qui va faire que je ne pense pas qu'il y ait de compétition pour l'obtention de commandites entre les deux orchestres à Montréal. Alors, on poursuit dans le régional...

M. Boulerice: J'ai une autre question; vous vous doutez bien de laquelle, Mme Rémillard. Vous parlez de votre association avec Quebecor et vous la dites comme une particularité de l'Orchestre. Qu'est-ce que ça a amené comme particularité d'avoir une association avec quand même un puissant groupe? Quebecor, c'est 300 000 000 $, je crois, au minimum, au Québec.

Mme Dupont Rémillard: C'est un peu plus.

M. Boulerice: C'est plus même? J'avoue que mes chiffres ne sont peut-être pas nécessairement à date.

Mme Dupont Rémillard: Je pense que M. Poissant pourrait bien nous répondre. Pour ce qui est de nous, l'association avec Quebecor, ça a été la porte de salut, en fait, mais le principe pourrait s'appliquer à d'autres organismes. Je pense que le prêt de cadres à des organismes culturels par les grandes entreprises, c'est une initiative qui peut porter fruit, qui pourrait être répandue de façon plus grande au niveau des orchestres. L'implication d'une compagnie, ça pourrait être le prêt de cadres aussi, ce qui garantit une saine gestion. Le problème, c'est la gestion dans les organismes culturels; c'est toujours la gestion. Il y a le développement artistique, évidemment, mais ça, il y a beaucoup de talent au Québec. Mais, si le prêt de cadres est systématisé, le rapport peut être fabuleux pour l'entreprise culturelle qui n'a pas à assumer, à ce moment-là, le coût du prêt du cadre.

M. Boulerice: Je suis persuadé que M. Poissant va vouloir rajouter... Vous me dites qu'une des grandes particularités est, justement, le prêt de cadres venant de ce groupe; donc, ça a un énorme avantage.

Mme Dupont Rémillard: C'est-à-dire que ça sauve...

M. Boulerice: Les artistes n'ont comme préoccupation que de créer...

Mme Dupont Rémillard: C'est ça. M. Boulerice:... et non pas de gérer... Mme Dupont Rémillard: Absolument.

M. Boulerice:... pas parce qu'ils gèrent mal - c'est faux - mais on les distrait de leur oeuvre de création, à ce moment-là.

Mme Dupont Rémillard: Absolument. Vous avez tout à fait raison. Je pense que M. Poissant est d'accord que ça pourrait être peut-être quelque chose qui est instauré de façon plus systématique. Ce serait bien et une entreprise y gagnerait aussi, parce qu'à ce moment-là aussi elle serait sensibilisée au monde des arts et se rendrait compte de la fragilité de la gestion dans le milieu des arts.

M. Boulerice: Vous avez parlé du camouflage des surplus de certains organismes. Oui, cela peut toujours arriver, ça va de soi. Mais quand vous parlez des équilibres financiers...

Mme Dupont Rémillard: Bien, je pense qu'on doit tendre vers les équilibres financiers dans le milieu des arts comme dans le milieu des affaires. Je pense que c'est un principe de base. Et je pense que les subventions de fonctionnement devraient être en fonction, justement, des équilibres financiers. Enfin, c'est ce que je pense profondément, là; je ne sais pas si M. Poissant est d'accord. Les municipalités ont été obligées de le faire à un moment donné, et je pense que le milieu des arts devrait le faire aussi...

M. Boulerice: Oui, mais...

Mme Dupont Rémillard: ...sauf peut-être dans les projets spécifiques de développement. Mais, là, je pense que j'ai une vision très particulière de ce milieu-là.

M. Boulerice: Mais, pour faire une image bête, Mme Rémillard, bien oui, la municipalité offre un produit, forcément, qui est universel: tout le monde veut une caserne de sapeurs-pompiers, etc. Mais, dans le domaine de l'art, dans le domaine de la culture, il y a toujours une part de risque. Vous allez peut-être, pour une saison, établir une programmation qui est très belle et qui est très sérieuse, mais il va arriver qu'elle ne rejoint peut-être pas nécessairement un grand public, parce que les gens disent: Ah bien, il n'y a pas de Bach cette année, je n'y vais pas. On n'a pas de Bach...

Mme Dupont Rémillard: Ah...

M. Boulerice: ...ou du Ravel, etc., enfin, les grands classiques dans la musique. Et c'est un peu la même chose au niveau du théâtre. Une pièce peut-être un petit peu plus difficile d'accès va amener des rentrées moins fortes. Donc, il y a toujours une grande partie de risque, là.

Mme Dupont Rémillard: Mais, à ce moment-là...

M. Boulerice: L'équilibre ne peut pas être absolu.

Mme Dupont Rémillard: ...il pourrait y avoir des subventions au niveau du budget de fonctionnement des saisons normales ou des choses comme ça. Mais, au niveau du développement artistique pur, il pourrait peut-être y avoir un volet spécifique pour ces choses-là, un volet spécifique pour le développement et la création de pointe. Je pense qu'on pourrait peut-être demander des sommes additionnelles pour ce genre d'entreprise périlleuse.

M. Boulerice: La question que je voulais vous poser... Et je me rattache au slogan merveilleux qu'avait utilisé l'Orchestre Métropolitain, qui était: "Vous n'allez pas manger toujours au même restaurant; alors, pourquoi aller toujours au même orchestre?" qui avait été une publicité avec un sens de l'humour, mais qui faisait effectivement réfléchir les gens. Je pense que cette publicité-là a contribué, ça a aidé énormément. Ça a provoqué un certain attachement de la part des gens. On parie de levée de fonds. Il y a eu, à un certain moment, au niveau de la levée de fonds, un instrument assez intéressant qu'on a appelé l'appariement ou, comme on dit en anglais, le "matching grant". Est-ce qu'un organisme comme le vôtre souhaite voir réintro- duite une telle mesure au niveau du financement? Il ne faisait pas uniquement appel au financement corporatif, il y avait une petite incitation auprès du public aussi...

Mme Dupont Rémillard: Non, je vous avoue qu'on...

M. Boulerice: ...en disant: Si tu me donnes 10 $, hein, tu sais que tu m'en donnes 20 $ en définitive.

Mme Dupont Rémillard: On a beaucoup apprécié les subventions d'appariement, vraiment, c'a été extraordinaire pour nous. On en a profité comme tout le monde. Ça nous a justement permis de sauver l'orchestre parce que c'est arrivé au moment... en 1987, je crois, cette subvention d'appariement. On en a profité comme tous.

Mais, à ce moment-ci de notre existence, on n'a pas vraiment besoin d'une subvention d'appariement. On est capables d'aller chercher des sous ailleurs. Ce qui arrive, c'est qu'on vend des concerts aussi. Notre situation est particulière, elle ne ressemble pas à celle des autres. On vend des concerts, beaucoup de concerts privés, et on peut dire qu'on va chercher 40 % de notre argent dans la vente de concerts, ce qui est complètement différent. Les troupes de théâtre ne vendent pas de pièces à des compagnies. Nous, on vend des concerts. On a beaucoup de sorties et on est engagés souvent; donc, on ne peut pas vraiment se comparer. Le marché que l'on a développé est différent des autres. Alors, les règles ne s'appliquent pas de la même façon. C'est sûr qu'on aimerait ça avoir plus d'argent pour développer. On va y arriver à notre rythme, mais de toute façon, on va y arriver. L'argent entre; alors, on ne peut vraiment pas se plaindre. M. Poissant?

Le Président (M. Doyon): Est-ce que vous vouliez rajouter, M. Poissant?

M. Poissant: Non, je pense que c'est bien clair.

Mme Dupont Rémillard: Merci.

Le Président (M. Doyon): Vos conclusions, si vous voulez bien.

M. Boulerice: Je vais vous remercier. Effectivement, les approches que vous avez eues pour trouver de nouveaux marchés et surtout de nouvelles clientèles, j'ai été en mesure de les voir, notamment ces concerts à l'église Saint-Jean-Baptiste, dans un quartier populaire qui n'était pas habitué à voir un orchestre de musique classique s'y produire. Quand on parte de démocratisation de la culture, je dois dire que l'Orchestre Métropolitain de Montréal en a

probablement donné une des plus belles illustrations. Je vous encourage à poursuivre. Merci, Mme Rémillard. Merci, M. Poissant.

Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Je me joins aussi à mon collègue. La seule chose qu'on a à vous dire, c'est: Bravo pour votre programme. Vous avez réussi, dans un même marché, à trouver votre niche, à la développer et à ne pas être en compétition avec l'autre, mais à travailler ensemble, à être complémentaire d'une certaine façon. On essaie d'habituer d'autres organismes à en faire autant. Merci encore de votre présence, merci d'avoir été ici.

Mme Dupont Rémillard: Merci de nous avoir entendus. Merci beaucoup.

Le Président (M. Doyon): Merci à vous, Mme Rémillard. Merci, M. Poissant. Je suspends les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(ReprisE 17 h 21)

Le Président (M. Doyon): Donc, après une suspension qui ne dépendait pas de la commission, qui était due au retard de nos invités, retard qui ne dépendait pas d'eux, semble-t-il, ils ont pris Via Rail... Alors, vous pouvez prendre Via Rail, mais à condition de le prendre la veille. Ha, ha, ha!

M. Boulerice: Toujours le fédéral. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Alors, je souhaite la bienvenue au Groupe de travail sur le développement de la culture scientifique et technique. Il nous reste malheureusement peu de temps, parce qu'il y a un autre groupe que nous devons entendre avant la fin de nos travaux, à 18 h 30. Là, c'est l'Outaouais? Oui? On a affaire à l'Outaouais. Oui, c'est ça.

Une voix: Leur train était à l'heure.

Le Président (M. Doyon): Eux autres, leur train était à l'heure. Les gens de l'Outaouais sont à l'heure.

Une voix: Toujours.

Le Président (M. Doyon): M. le député, on verra si vous êtes membre de la commission dans quelques instants.

Des voix: Ha,ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Alors, je souhaite la bienvenue aux Créateurs de l'Outaouais. Je les invite à faire leur présentation. Le problème qu'on a, c'est que, l'autre groupe n'étant pas arrivé, on ne sait pas s'il va arriver. En tout cas, on va essayer d'improviser un peu, mais en vous consacrant le plus de temps possible et en vous remerciant vraiment d'être parmi nous. Vous disposez de 10, 15 minutes pour faire votre présentation. Après ça, on va entamer la discussion avec vous pour le restant du temps, par voie de discussion, de questions et réponses, si vous voulez bien participer. Pour commencer, je vous inviterais à bien vouloir vous présenter. Vous comprenez le français, oui? Assez?

Une voix: If you would explain it, yes.

Le Président (M. Doyon): Well, you have 10 or 15 minutes to present your mémoire and then we will start the discussion with you for the rest of the time. If you would start, please, by introducing yourself and the people who are in front of me, so that we will know to whom we are speaking and then we will take 10 or 15 minutes to listen to your presentation. You can go ahead.

Outaouais Creators

Mme Peeler (Deirdre): We are still catching our breath. We have travelled seven hours.

Le Président (M. Doyon): You can even have a glass of water, if you want to.

Mme Peeler: Thank you. I am Deirdre Peeler, and I am a professional artist and business person in Wakefield, Québec. I am president of the Outaouais Creators, which is the association here now.

Mme Woods (Anna): I am Anna Woods. I am a painter, working full time, living in Québec and a member of Outaouais Creators in Shaw-ville, Québec.

Le Président (M. Doyon): And who is next?

Mme McLaughlin (Deborah): My name is

Deborah McLaughlin. I am a retired dancer and I worked in theater and music. I am a member of Outaouais Creators and I live in Wakefield.

M. Neelin (Michael): My name is Michael Neelin. I am a landscape and architectural artist. I am treasurer of Outaouais Creators and live in Shawville, Québec.

Le Président (M. Doyon): Welcome to all of you. You can go ahead.

Mme Peeler: I would like to say thank you

for inviting us. We thought we would have a few minutes to catch our breath. I want to explain a little bit about who we are, the Outaouais Creators, and then it will go down the line to our questions.

The Outaouais Creators is a network of regional professional artists, writers, performers and craftspeople from urban and rural West Québec. This includes active members from Buckingham to Mantwaki to Fort-Coulonge.

The Creators' network was formed in 1990, following a series of information meetings with local artists, sponsored by Outaouais Alliance and the Ministry of Cultural Affairs with Ludmila Pergat. A dedicated committee of artists was formed out of which the Outaouais Creators organization was founded. The prime objective at that point was to publish information from the Ministry of Cultural Affairs on grant deadlines etc., as well as the artists themselves sharing their ideas in English for the English-speaking creators in the region. We number about 120.

The Outaouais Creators is operated by a volunteer board of directors and its mandate is to provide information, encourage and promote professionalism in the arts in the Outaouais, promote public awareness of the arts, improve the economic situation of professional artists and improve links with all levels of government and educational centres in West Québec.

The sole source of revenue to date is membership fees and our membership is 25 $ per member, per year. These fees barely cover the publication of our newsletter, which is published bimonthly. I have a copy of our newsletter with me. The newsletter is sent to 150 individuals and organizations which provides information in English on regional, provincial and national issues with particular information regarding Ministry of Culture deadlines and opportunities. The newsletter also provides the artists who are often geographically and professionally isolated with an important network, which lends some encouragement in their own endeavours.

The members of Outaouais Creators promote and are part of the two major studio tours in the region, which draw thousands of people from the Hull-Ottawa region. The Pontiac studio tour and the Artists And Their Environment tour not only provide a venue for local artists but are promotors and assets for tourism in the Outaouais region. We also sponsor professional seminars for our membership as well as the public. Thank you.

Le Président (M. Doyon): Thank you.

M. Neelin: I wanted to take this opportunity to speak briefly about one aspect that I saw arising in the Arpin Report, specifically that of cultural education. As a young artist, I feel that it is very much in my interest to address the issue of educating, first, our society with regard to culture, and secondly, the need to educate our professional artists and developing artists.

I was encouraged by the steps noted in the Report, the recommendations relating to education and to the recognition in the Report that culture is an asset, culture is something to be invested in. Investment to me means long term commitment and I feel that one way of undertaking a long term commitment to culture is through building awareness in our society of our cultural milieu and of our artistic endeavours. This is an area where the regional diversity of Québec is essential to the future growth of our culture. One area that is addressed particularly in the Report that I would like to applaud is the area of cultural education in our schools. I felt that if we are going to begin to develop this asset, we need to do it at a very early age, but we also need to continue it throughout our primary and secondary educational systems.

I feel also that it is very important to recognize - here we are, we are speaking as the Outaouais Creators, as a regional arts group -the regional diversity and uniqueness of our artists and of our creators. In order to recognize this in our educational curriculum, I think what we need to do, perhaps, is to begin bringing local artists into our schools, as well as providing an expanded cultural curriculum from the Ministry of Education provincewide. Another key aspect of education - obviously, education does not stop when school ends - is to begin to educate the community in culture and to involve the community in our artistic endeavours. This could be done through seminars, through studio tours such as we are already doing in the Outaouais. And I feel there is a need for expanded support from the government in this area.

The second aspect of the whole question of cultural education is the need to develop excellence in our artists, doing this through ongoing professional development both of inspiring young artists and also mature artists who need to continue to grow and to mature throughout their artistic life. This begins with school, but then we need to continue by facilitating the training of our artists. I think this is particularly a concern for us in the regions.

In the big cities of Montréal and Québec City, it is perhaps easier to be exposed to culture and to the artistic life of Québec, whereas in the more outlying regions, it becomes very important that the government plays a role in facilitating and in bringing to the public the possibilities for education of artists.

This education and professional development of artists then needs to continue through perhaps regional exchanges between our region and the cities, or our region and other regions, other than West Québec, and through a variety of initiatives that could be shared between the government, between the Ministry of Cultural

Affairs, and the regional artistic associations.

In many cases, the artists' associations are already taking considerable initiatives to promote the arts and to educate the public in their areas and to involve them in cultural life. We are encouraged by the Department of Cultural Affairs' initiative to become more involved in the life of professional artists at the regional level. We would encourage them to support the existing regional artistic associations and to enhance the communication going on, the dialogue going on between the artists and the Ministère. Thank you.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup.

Mme McLaughlin: First of all, I would like to thank this commission for inviting us. I would like to say that two years ago, when Ludmila Pergat, who was the representative for non-francophone cultural communities, called artists in the Outaouais and then Outaouais Alliance got in touch with the multidisciplinary group of artists, at that point, there were only half a dozen people who even realized that there was a Ministry of Cultural Affairs, because we are very far from Québec City, and because our general area is Hull-Ottawa.

Somehow, the artists had a very welcoming introduction through Ludmila's encouraging meetings. She went to meetings in Shawville, Wakefield and Hull to try and let people know what kinds of programs were being offered by the Ministry. Since that time, she has been of great assistance to us in dealing with a couple of difficult things, enhancing the communication and understanding the great diversity of programs that are offered by the Ministry. We think that this is a wonderful opportunity for us to begin a dialogue to let you know a little bit about the artists in our area.

One of the things that is so important is the communication and this has begun with the Ministry of Cultural Affairs in Hull and with Ludmila, but it is also important that the communication be accessible in English. For example, the Arpin Report had to be paid for to be translated so that we could understand the issues involved and be able to respond to them, and the translation was not available in time for the deadline. So we want you to understand that we really appreciate when this effort is made to communicate with artists in English, because these are very difficult and sometimes subtle ideas, and we appreciate being addressed in our mother tongue. One of the suggestions we have is that there be a 1-800 number available with a person in charge of non-francophone affairs and with the "direction régionale", so that artists in outlying areas can communicate with the "ministre des Affaires culturelles" to clear up misunderstandings or understand when some proposition is put forward, because people do live several hours from Hull.

Now, I would like to review the excerpts from a letter, which we will submit today, along with several other books and information from Katharine Fletcher, who is a writer living in Quyon, Québec. "As a member of Outaouais Creators who is unable to attend this hearing session, I submit this letter for your attention, outlining my concerns vis-à-vis the Arpin Report. I am a freelance writer, author and publisher residing near Quyon, Québec, whose language of business and communication is English. I have major concerns about and a significant interest in Quebec's cultural dossier and propose changes to it. "Specifically, I am extremely concerned about the emphasis given to Montréal and Québec City. I therefore most heartily applaud recommendations such as No. 51, which encourages the support of outlying regions such as the one in which I live. I also fully support items 61, 62, 63 and 64, which emphasize the importance of literature, reading and culture in the schools. "I would like you to know that as a writer in the English language who resides in Québec, I have been personally unable to receive provincial assitance for my own writing. My first book: "Historical Walks: The Gatineau Park Story", was entirely self-published - I took a personal financial risk to write, publish, promote and distribute it - and is now a Canadian best-seller. I have sold over 6350 copies and 5000 is a Canadian best-seller. I have been unable to receive any assistance for three printings. I have been unable to receive any funding for future projects. I have been unable to procure any assistance for its translation into French. Ironically, the only assistance I have been able to receive for my personal writing is through the Province of Ontario, through the Ontario Arts Council. I am currently writing a book for McClelland & Stewart and the OAC gave me a grant under the Works in progress for out-of-town province writers. "As a minority language writer residing in Québec, I suffer from lack of information available in English, and as an indication of my personal commitment to fostering appreciation of the culture of Québec, I am enclosing some relative materials which describe projects I have personally helped to promote. And we will... "

These are excerpts from this letter that we will submit to you since she wanted to put forward the concerns of writers. Thank you.

Le Président (M. Doyon): Thank you.

Mme Woods: O. K. It is an honour and a privilege to be here. It is my understanding that this committee is formed to sollicit response to the Arpin Report and we sent you our response.

We are making the assumption that you have it, that everyone here has the report and has read it. So we are not covering items that are in the report and expect that you will be asking questions about those later.

I wanted to start out by saying that as an organization we value a community in which all members have equal political and economic privilege and responsability, and our submission to you is partly based on that. The items that I wish to cover are based on that too.

One of the things that I wanted to deal with was the economic situation of artists in Québec and in Canada. Five years ago, when studies were done, artists were the lowest income group in Canada, lower than people on welfare, because many artists do not apply for welfare.

In the Arpin Report, there is an emphasis on creation and on creativity and culture. But when you look at the reality of artists living in Québec, the reality does not reflect the stated purpose in the Arpin Report. So, as an artist, I would like to say to you, who are in the positions of power: I would like to see you do things or make decisions that create policy in that program that works to help improve the status of the artists.

So, some suggestions around that would be in the area of education. Some of the points have been touched on already and I am going to review recommendations that we have under different areas from the viewpoint of looking at increasing the income of artists, which, I think, is of extreme importance.

So, under the heading of education, one thing would be to involve artists in educational programs by paying them professional fees. If you are going to be looking at promoting culture in Québec and developing curriculum within schools, hire artists as consultants for the curriculum, pay them professionally, create programs within communities, numerous programs for artists and residents. Have them go into the schools. Have them provide services within the community and pay them for their services. Have artists teaching educators. One way to really promote culture is to teach educators about art, so that they are able to incorporate it daily into their curriculum, whether their curriculum is history or in other areas. It does not have to just be painting or drawing or music. The educators need to know more, and there should be workshops using artists in those workshops.

Something that would be helpful for artists, for the development of artists would be to encourage programs to pay artists to teach other artists or to work as a mentor with developing artists, to encourage that kind of programming for the development of arts within Québec.

There is a tremendous ressource. When our group first met and we sat around the table with staff from your regional office, none of us were known to the regional office at that time and we were not known to one another, and there were people in our group, myself included, who exhibited or performed internationally and nationally, but have had no exhibits or performances within Québec. There is a tremendous ressource in West-Quebec of artists. Because we are so far out, we are unknown within the centers of Québec or Montréal.

Another thing that would be helpful to artists working within their profession would be to somehow begin a program of accreditation for teaching and training that might be outside of the university or other recognized institutions.

The next category would be economic, looking at ways to bring up or improve the situation of the artists economically. For visual artists, one would be looking at a program to guarantee exhibition fees to Québec artists, just tossed out as an idea.

Another is pensions. Most Québec artists do not qualify for pensions. Another would be looking at income tax. What can be done to help the artists, to the low income artist regarding income tax? Another is tax incentives to purchasers of art. To eliminate tax on cultural products might be a suggestion. Also, to provide tax incentives to corporations.

Another recommendation in the area of communications would be to provide toll-free numbers for artists, which Deborah already mentioned, from outlying regions, so we can get information, we can know of programs that are going on.

Another would be to publicize notice of competitions and programs in local newspapers and then announce and publicize the results of the competitions in English communities in English and in French. And also send notice of competitions directly to the artists and the artists' associations in their language. We have a terrible time getting any information about arts programming, and it is not because we do not try and we are not interested. We are very interested. (17 h 45)

Another suggestion that we would like to make at this time of change for Québec - and perhaps this has been done, we do not know - is to look at other models that exist and just some that we are aware of is in Ireland. They honor their writers and their writers do not pay income tax. In Brandon, Manitoba, in the late 70's, there was a three-year pilot project done on guaranteed income. That was quite successful. It might be worthwhile to get the results of that program and take a look at guaranteeing a minimum standard of living to artists in Québec. In Norway, the Government of Norway provides residences and studios free of charge to artists and then provides some with a guaranteed minimum incoma In Japan, artists and artworks are considered national treasures. Thank you.

Le Président (M. Doyon): So, you are ready for the questions. Mme la ministre.

Mme McLaughlin: There is one more thing that we wanted to add and that was the concern that Québec do everything possible to increase the funding to 1 % and that takes the will of everyone here because whose lives are at stake? It is the life of artists and we would like to make sure that some of the benefits trickle down to the daily life of artists, so that they can continue to be artists.

The second thing is that, at this point, a lot of people in our area feel that, as we are still getting to know what the Ministry of Cultural Affairs offers, we still require a federal presence which can enhance certains activities. Well, Québec Cultural Affairs does so wonderful things in training and is looking at education, which is a provincial jurisdiction.

There are still some things that the Federal Government provides that we find very beneficial such as the opportunity to travel to Victoria, Prince Edward Island and have liaison with other professionals. And so, there is a question about the control and funding of culture residing in Québec and also, the question of the arm's length policy.

For example, recently, there was an exibit in Ottawa, at the National Gallery, that consisted of some wooden shacks outside the National Gallery. Now, this was quite controversial and this was only one of the number of artists, but, because he was exibiting what is the reality of living and circumstances in many countries in the world where people live in little shacks like this outside of the wonderful, beautiful Gallery, he became very controversial.

If this is too closely linked to the political people who actually give the dollars, then it seems like the owners come back on you for deciding what should or should not be a public domaine. So, there has to be an arm's length almost like a crown corporation at some point if culture is in Québec only. Otherwise, we have, you know, different status, as it now stands, but the same with the municipalities.

Some municipalities and municipal politicians are very leery of doing perhaps more experimental work that is not sort of the reassuring type of work that people are used to, but is more contemporary because they feel they have to account for every tax dollar in exactly how it is spent. So, the freedom of the artists is a very particular balance and yet we absolutely need the government support because, nationally, culture is a very important aspect of life, and we do hardly endorse parts of the Arpin Report which talk about its integral part of life and contributing to the good of all. Thank you.

Le Président (M. Doyon): Thank you very much. Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Thank you. I welcome you here. And when you are saying that West Québec is very prolific, as far as artists and creative part, you are right. There is a lot of, you know, sort of creative ideas and also influences that come from Western Québec. The thing is - and this is the question I have to ask you - being so much near, as a neighborhood, let us say, to Ottawa, which is the national capital... It is not even a region like another region. It is the national capital. You know, all our national museums, a lot of them are located there and, of course, the Parliament. So, you have access directly to it and it is not far. So, how do you feel? You are talking a lot about being and evolving in Québec, but as an artist do you feel more, I would say, part of sort of the Canadian frame or, you know, being more within the Québec artists' community?

Mme McLaughlin: I would like to answer that. I think that many of the artists look upon Hull-Ottawa, and that includes Gatineau and Aylmer, which is the third largest area in this province, but they look upon this area as sort of their urban area. However, many artists do live in the country. They live a couple of hours out of town because they can afford to have studios. They enjoy the atmosphere that is conducive to the visual arts, in particular, although our group is multidisciplinary. But in terms of participation, there is a lot of participation with the urban area and vice versa, through the studio, tourist people come from Eastern Ontario up to Gatineau or up to Pontiac. I mean, they bring to us dollars to...

Une voix:... trip. Ha, ha, ha!

Mme McLaughlin: Yeah. So, there is definitely a participation and there is also a very strong Canadian feeling, but there is also Québec feeling and so we may wear many hats. There is an Outaouais feeling and there is a very strong nourishment that comes from living in such a beautiful country area that allows us the freedom to work and provides at the same time access to national and sometimes international stimulations that Montréal provides, and so does Québec City, and so does Toronto. So I hope that answers your question and then maybe someone else who wants...

Mme Woods: I would like to speak about that too. Living in West Québec, I feel quite isolated from the rest of Québec. As I said before, it is extremely difficult to get any information and I am living in Québec by choice. I want to live in Québec. I think Québec has a lot to offer me and there is a rich and a vibrant culture here, but I find it very difficult to know what is going on, to feel like I am part of the culture, part of Montréal or Québec City. It is

difficult to get information, whereas in Ottawa, the Ottawa City program for arts and public buildings is very well publicized, and an effort is made on that part of the city to contact artists and let them know step by step what is happening. So, there is an effort there to include me, even though I live 80 miles away, in that community of artists. An effort that I do not feel coming from the province that I live in.

Le Président (M. Doyon): Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le député de Gatineau puisse intervenir?

M. Boulerice: De Gatineau ou Papineau?

Le Président (M. Doyon): De Papineau, pardon. Consentement? M. le député.

M. MacMillan: Vous connaissez mon comté, mon cher collègue. Vous le mentionnez souvent à l'Assemblée nationale. Alors, merci, M. le Président, de me donner la permission.

I would like to welcome you, on my part and my colleagues from the Ottawa region. I was surely glad when I found out today that you were going to come here and present something on the policies of cultural affairs in the province of Québec. I read your report, a short notice, this afternoon, but the question I would like to ask... I would like you to tell Mme la ministre the real problems in the Outaouais region. You have mentioned some of them, but you have talked globally about your problems. But I want you just take a couple of minutes to tell us and the people here what really are the problems. And, second question, what is the improvement that you would want in our region to help you, people, to continue to improve the culture where you are apt or where you work in? I do not think that that was mentioned enough, as far as I am concerned.

I know you have talked about problems of all the province of Québec, but I would like you to talk about our beautiful Outaouais region. I do not think we are far away from Québec or Montréal, so it is time to really talk about the problems that we have in our region and maybe, after that, we can help your people to get closer to the new policies that will follow in the next year or so.

Mme McLaughlin: From Katharine's letter, for example, she says: "Here, in our local communities of Shawville, Quyon, Aylmer - and that would include Buckingham and some of those other areas - teachers in the artistic literary committee are frustrated at the lack of funding for an arts in the schools program. "

In other words, there are people living in Buckingham or Shawville, wonderful, talented artists, craftspeople and writers who could participate in the schools program. And unfor- tunately it comes down to budget and who covers what. A lot of schools, at the secondary level, do have some kind of program in music and visual arts, but at the elementary school level, it is not so prevalent, and I think that it is up to the Ministry of Cultural Affairs to increase the budget, so that artists can become residents in the schools and that they can be paid a living wage for doing what they are doing.

M. MacMillan: So other regions the province of Québec are getting money to do that and we are not getting it in our region?

Mme McLaughlin: In that case, no. I understand that, at one time, there was an arts in the schools program and it is now recommended that it come back into existence in the Arpin Report. In our region, I think, one of the things that I would like to see is support and recognition in terms of the kinds of studio tours that we would like to see developed. It brings a lot of... It enhances the tourism, when people drive up the Gatineau or drive up the Pontiac, they stop and they look at the different galleries and the different exhibits, and they come specifically...

Mme Peeler: Well, the arts spin off businesses. The restaurants do well, as well as the artists, as well as any other business on the route. And we have expanded, last year, from one week-end now to two week-ends. And we are full from 10 o'clock in the morning till 6 o'clock at night, people streaming for two solid week-ends for studio tours. I am sorry, I interrupted you, but...

Mme McLaughlin: Yes. Also, there is a request to have... She talks about it in here, as well. "We must have access to a fluently bilingual ministre des Affaires culturelles' representative here, in the outlying region, because there is such a strong professional network of English-speaking artists. " She feels that it is necessary to have that as well as congratulations to the Ministry of Cultural Affairs for putting someone to have a permanent position to deal with issues of non-francophone affairs.

I understand that may be happening. Certainly, in the past, we have really appreciated having an ongoing position and I hope this becomes something that will help. Because if we knew problems, through this 1-800 number that you are going to install in Montréal, we can call this person and say: "Jay, we are having a few problems. Could you, please, check it out?" And that relieves some of the pressure on the "direction régionale", because they are very responsive, but it will help also if they have that kind of input.

And another level... For example, the

Outaouais Creators has been publishing their newsletter in English. They would really like to publish it bilingually. They would really like to have funds available to translate some of their works, such as Katharine Fletcher's work, into French and also, vice versa, that some of Québec's works and artists in French be translated into English because there is a large interested Canadian, American and international market for works. And so translations are very sensitive things and it requires funds to do it correctly, to insure that kind of communication.

Une voix: I would like to say...

Le Président (M. Doyon): The last few words, because I have to give the occasion to the members for the Opposition. You can go ahead for a few seconds.

Une voix: A few seconds. O. K. With our organization also, we find we have professionals who would like to teach and no classroom space available. It is just as interest courses to the adults in the communities. We need some community centers, something like this where we can go and teach, where we ourselves can put our filing cabinet. These are very basic needs.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Merci. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. (18 heures)

M. Boulerice: Oui. Mesdames et messieurs, vous êtes le premier groupe d'artistes de la région de l'Outaouais qui se présente avec forcément un contenu qui, à bien des égards, est intéressant. I do not know what is the English word for it. Maybe my two colleagues could help me. Comment on dit ça, "saupoudrage"? You have probably heard about that word, "saupoudrage", in the Arpin Report, the multiplying of small allowances. The Arpin Commission has a recommandation that we should stop it.

Mme McLaughlin: I do not know.

M. Boulerice: It is because I do not know what is the English word for "saupoudrage", madame.

Mme McLaughlin: Could you give me another word, please, and speak a little louder?

M. Boulerice: The word "saupoudrage" means those small grants that are multiplied and that are given to small groups or creators.

Mme McLaughlin: Oh, small grants!

M. Boulerice: Small grants, yes. The Arpin Commission recommends that we should put an end to it. Do you believe that, in a region... If we stop it, what can happen is that we will institutionalize certain groups, but there are little cultural organizations in regions that will suffer for this.

Mme McLaughlin: Well, certainly, the institutions that have worked so hard must be supported and continue to be maintained. And it is laudable, in the Arpin Report, that they are looking at a three-year support program, so that you can start to plan. However, it is also very important that groups that have previously not, maybe, been in the center of things be considered and that more attention be paid to the regions.

For example, if our group is a new group, in reality, people have been living and working as artists for quite a long time. So I think that support should be given to groups like ours. It can come in resources. It does not have to come just in dollars and cents. It can come in ways in which the Ministry itself starts to enhance its communication with the regions.

Mme Woods: I think that if moneys were put just into a few selected programs, it would be very stifling to the development of culture in Québec. I am not saying to not support programs, but I think it is very important to also support emerging groups, emerging art, to allow for creativity within Québec culture, it is extremely important.

M. Boulerice: When I read your memo, I could feel that you had certain fears regarding the role and the actions of the proposed Québec Ministry of Cultural Affairs. If I was granting you the arm's length principle, making sure that the same distance should prevail when we elaborate programs and then one comes to give grants, we would create what we have at the federal level, which is the Art Council, would your fear disappear?

Mme McLaughlin: I think the apprehensions come because what the Ministry of Cultural Affairs can do and how serious Québec is about supporting its cultural creators, that we do not have enough experience to really know yet the seriousness of the commitment. For example, the funding has not reached 1 % for the last number of governments. It is a problem inherent that when culture and so forth... There is, maybe temporary, five seconds of fame and glory, but the reality is quite different for working artists. So I think we would like to have a chance to be better acquainted with how the system does work, so that we can feel more confident.

But, as well, there is something about having several different avenues and sources, if one... For example, the federal programs do things that the provincial programs cannot do. Education is a provincial jurisdiction and it is

very important that this be developed and followed. But there are things that can happen between artists going from Prince Edward Island to Québec City, to Toronto, to Kelowna B.C. meeting and meeting with their peers and exchanging information, plus the chance for Québec artists to be seen outside of this province.

Let me take an example. As a dancer, there are things that Montréal is well known for: les Grands Ballets canadiens, the jazz, les Ballets Jazz, absolutely superb, and some modern dance. However, there are other places where different kinds of dances is happening, such as in Toronto. And there are different people that an artist may choose to apprentice with or groups of people that they would want to work with.

So a dancer, actually, has a very small field in Canada itself and sometimes has to go to the United States or Europe to enhance his training or to have the artistic expression that is very important to them. So, the more open the attitude and the more freely that artists can pursue their career with vigour, the more and more passion and vitality that they feel in the work, their more that comes back into our society because people may go to Europe for a couple of years, but they come back.

M. Boulerice: But if I do understand you, it is not exactly a question of fear, as I used the word, but it is a question of credibility. There have been so many promises with no result that you question the credibility of this Department to achieve a global policy.

Mme McLaughlin: I would not even say it is credibility. I think it is still that... For example, the Ministry has been very good in the last couple of years because people have known about the Ministry of Cultural Affairs. They have been able to apply for grants and some have succeeded on merit, the merit of their project. But the first thing is getting in the door. The second thing is that the "ministre des Affaires culturelles" contributed towards one of the studio art tours this year, which made that possible and that was graciously accepted and lauded because it is quite expensive to advertise and make sure that a studio tour is done in a professional .way. However, there are few things, for example, the fact that the translation has been so slow in the Arpin Report, it was very disturbing and... I have lost my train of thought. Ha, ha, ha!

M. Boulerice: As a writer, how do you suffer from not having a real copyright law? As a matter of fact, for my colleague, it is federal and the last law dates from 1924.

Mme McLaughlin: I would suggest that what you could do is contact Katharine Fletcher, who is the writer, who would love to talk to you about what she and the author writers have been concerned about. You are regarding copyright and books?

M. Boulerice: Yes. And even the other notion which is european, "les droits voisins".

Mme McLaughlin: The what?

M. Boulerice: "Les droits voisins". Copyright is reproduction...

Mme McLaughlin: Yes.

M. Boulerice: ...but "droits voisins" is the intellectual property of your oeuvre.

Mme McLaughlin: Yes. Well, right now, I believe the Canadian Conference of the Arts has put forward proposals on copyright and on copyright of intellectual ideas, and I am not anymore conversant in that at this point.

Mme Woods: Actually, tomorrow night, in Ottawa, we are having a seminar on copyright for arts, for both writers and visual artists, to inform ourselves more of copyright law that exists and potential changes.

M. Boulerice: My last question, because there is another group who was on the train and the train did arrive. What should be the place of the Outaouais in a cultural policy for Québec?

Le Président (M. Doyon): You have one minute to answer that.

M. Boulerice: Because the Outaouais region is very peculiar.

Mme McLaughlin: Yes. Well, the policy, I would suggest, is to support through a greater budget the "ministre des Affaires..., direction régionale", so that the professional artists who have just come into the system can start to partake and not affect other people who happen to know about it, not affect their opportunities. So the pie must be made larger for that area. Also, yes, there has to be communication in English and we suggest to have 1-800 numbers with the non-francophone liaison and with the "Direction régionale", so that people from outlying areas can call and clarify the process.

We would also very much like to have this publicized. We do not often get The Gazette. We may not, in fact, know of things that are happening and if there are new initiative programs, they have to be broadcasted. So we would like to work in improving the communication between the "Direction régionale" and the artists who live all through the area, whether this is done through newspapers, English and French, and regional newspapers, or the Ottawa Citizen,

which is like The Gazette to you in Montréal, or whether this, is done through contacts with Outaouais Creators which would then have the additional onus of us paying for our own mailing to let people know what is going on, or whether this is done through you, from the "Direction régionale" actually mailing out correspondence to everyone on a mailing list, and we would be delighted...

Le Président (M. Doyon): Je suis obligé de vous interrompre, madame. M. le député, si vous voulez bien remercier nos invités parce qu'il nous reste à peine quelques minutes pour entendre les personnes qui sont en retard. M. le député.

M. Boulerice: I think that you have given us the real picture of your situation. So thank you for coming.

Le Président (M. Doyon): Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: I just want to thank you and to do what I think more personally, I will ask my colleague.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Hull, avec le consentement de la commission.

M. LeSage: Yes, I would like to thank you for coming at this commission to speak out your griefs. So I hope the conclusions of your request will be granted to you and that, in the future, the culture of the English-speaking people in the Outaouais region will be more lively. Thank you.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. I wish to thank you and I want to apologize for having pushed you a little bit because, I know, you had just come inside the room and we had to ask you to start right away. I apologize for that and I thank you for coming.

Une voix:...

Le Président (M. Doyon): O.K. Leave it on the desk. We will look after that. Thank you.

Alors, j'invite maintenant le Groupe de travail sur le développement de la culture scientifique et technique à bien vouloir s'avancer et à prendre la place des gens qui quittent actuellement la table.

Je suggère que les conversations puissent se continuer à l'extérieur, s'il vous plaît, pour que nous puissions terminer nos travaux. Merci beaucoup, M. le député.

M. Boulerice: M. le Président, il est impoli envers le chef de l'Opposition, impoli envers le président de la commission.

Le Président (M. Doyon): C'est regrettable.

Donc, je souhaite la bienvenue à... Je pense que nous avons devant nous Mme Claude Benoit. Je lui indique que, dû au retard qui n'est pas de sa faute, je comprends bien, cette commission n'a pu, évidemment, l'entendre à 17 heures, comme c'était prévu. Il nous reste à peine 15 minutes à vous consacrer et, dès maintenant, je vous laisse la parole.

Groupe de travail sur le développement de la culture scientifique et technique

Mme Benoit (Claude): Merci. J'espère que l'apéritif sera agréable et pas trop long. Je m'excuse encore. On ne contrôle pas nos transports en commun tellement. J'ai été prise dans le train. Le groupe de travail est un groupe ad hoc qui s'est réuni pour faire une réflexion et déposer des propos articulés au sujet de la proposition de culture et des arts qui a été déposée en septembre.

Je voudrais rappeler les recommandations: faire état d'une réflexion sur la culture et la culture scientifique et technique, proposer une problématique et suggérer peut-être des éléments d'orientation pour le développement de ce point dans la future politique de la culture et des arts.

Je rappelle brièvement les recommandations de notre groupe de travail. D'abord, nous avons souhaité que soit reconnue la culture scientifique et technique comme une composante à part entière de la culture. Nous souhaitons que, dans la future politique des arts et de la culture, soient précisés la place et le rôle de la culture scientifique et technique. Nous souhaitons que soit désigné clairement un ministère, préférable-ment le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science, comme ministère responsable de la culture scientifique et technique et, dans le cadre de l'élaboration d'une politique spécifique sous sa responsabilité, nous souhaitons que soient précisées les orientations et les voies de développement privilégées. (18 h 15)

Nous avons recommandé de prendre les mesures nécessaires pour bien évaluer les impacts du rapatriement au Québec des fonds fédéraux destinés à la culture, en tenant compte du contexte spécifique des programmes de développement et de promotion de la culture scientifique et technique et, ce faisant, de statuer clairement sur les modes de concertation, de transition et d'opérationalisation de ce rapatriement.

Je voudrais prendre quelques minutes, maintenant, pour vous faire état un peu de ce qu'est la culture scientifique et technique, puisqu'elle a été omise au rapport. Il nous apparaissait important peut-être d'outiller les membres du comité de différents points à ce titre. Pour nous, la culture en général représente l'ensemble des façons d'être, d'agir, de communiquer et de se représenter le monde, pour un

groupe ou une société donnés. Il apparaît de plus en plus difficile de concevoir la culture selon un secteur ou une discipline précise. La civilisation de communications dans laquelle nous vivons commande une vision globale intégrée. Le développement des réseaux d'information, de production et de diffusion oblige à des réflexes analogiques, à la compréhension des processus, à la rétroaction, à la conceptualisation. L'une des composantes de la culture, la culture scientifique et technique, peut se définir comme les rapports que les individus et les groupes entretiennent vis-à-vis des sciences et des techniques.

Nous voulons apporter ici des éléments d'information relativement aux dimensions que prend la culture scientifique et technique et qui pourraient inspirer la réflexion au niveau des catégories en développement culturel. La culture scientifique et technique a une dimension de création qui signifie l'élaboration de contenus scientifiques et techniques; une dimension de production qui renvoie, par exemple, à l'édition, à la réalisation d'expositions ou d'équipements spécialisés, de films, d'activités diverses; la distribution qui concerne la diffusion de ces produits, leur vente, leur itinérance; la sensibilisation des marchés, qui désigne l'éducation culturelle, traditionnellement présente au coeur du projet de la culture scientifique et technique qui a toujours fait des marchés jeunesse et scolaires ses clientèles privilégiées.

La culture scientifique et technique se manifeste sous différentes formes: l'édition, la littérature spécialisée, les magazines, les journaux grand public, le cinéma, la télévision, les arts d'interprétation, les musées et autres lieux d'exposition. La culture scientifique et technique a pris une couleur très particulière au Québec, qui la distingue. La culture scientifique au Québec se manifeste aussi par des activités de loisir, des clubs sciences, des ateliers d'amateurs répandus à travers la province, des produits éducatifs qui se développent de plus en plus, des trousses, des mini-expositions.

Alors, la culture scientifique et technique réussit, selon les moyens de diffusion utilisés, à transmettre des usages (compétences et savoir-faire) et à transmettre des représentations (formation des opinions, renforcement des attitudes) qui en font un élément actif du développement social et économique de notre collectivité. Elle permet également de combler peu à peu le fossé qui s'est creusé entre les individus, la science et la technique. Elle crée dans le public le sentiment que celles-ci ne sont pas réservées à une élite. Elle assure la socialisation des connaissances en science et en techniques en rendant publics des faits qui émanent de l'univers de la science et en en imprégnant la conscience collective.

La culture nous renvoie à l'ensemble des connaissances, des savoir-faire qui permettent aux citoyens et aux citoyennes de mieux con- naître, apprécier et participer à la réalité présente de leur cadre de vie, autant dans sa richesse historique, artistique et scientifique que dans la complexité de son évolution. Par ailleurs, à l'instar d'autres champs culturels, la culture scientifique et technique génère, par ses activités et son développement, d'importantes retombées au niveau économique et social. En contribuant directement à la formation de nouveaux scientifiques et technologues, ainsi qu'à l'émergence d'une main-d'oeuvre mieux adaptée aux changements technologiques, en sensibilisant la population aux enjeux réels du développement scientifique et technique, elle sert les entreprises des secteurs les plus prometteurs, comme les télécommunications, l'industrie pharmaceutique et les biotechnologies.

Le développement de la culture scientifique et technique présente une problématique particulière, tant par ses contenus que par les structures qui la soutiennent, l'animent et la développent. Mais le projet d'émancipation de l'individu et la définition de celui-ci en tant que citoyen du monde moderne en font un élément important, voire une composante essentielle à la culture dite générale.

La proposition pour une politique des arts et de la culture déposée en septembre dernier, à la différence des politiques culturelles québécoises qui se sont succédé à ce jour, n'accorde pas à la culture scientifique et technique la reconnaissance qu'elle mérite. Nous comprenons mal cette omission, d'autant plus que le Québec peut se réclamer d'une tradition aussi vivante qu'originale en vulgarisation scientifique et en loisir associatif à caractère scientifique.

La culture scientifique et technique doit donc absolument, selon nous, être considérée - de manière tout à la fois spécifique et intégrée - comme une composante essentielle de la culture au sens large, culture trop souvent réduite aux seuls champs des arts et des lettres. Il s'agit là d'un point qui, selon nous, devra être absolument corrigé dans l'élaboration de la politique des arts et de la culture.

Je voudrais maintenant vous livrer une réflexion que nous avons faite sur différents éléments d'une problématique du développement de la culture scientifique et technique. Quatre problèmes se posent au développement de ce secteur.

Il s'agit, d'abord, d'un secteur à structurer. Au plan des contenus culturels, on devrait renforcer les secteurs dans lesquels le Québec affirme déjà une forte présence et développer progressivement les autres disciplines ou secteurs en fonction de thématiques prioritaires, de clientèles cibles à toucher, afin d'assurer le rayonnement des activités d'excellence des institutions impliquées et de confirmer notre position culturelle internationale.

Deuxième problème: les acteurs à réunir. Les Québécois et Québécoises doivent occuper

une place centrale dans l'élaboration du projet de diffusion de la culture scientifique et technique. Ils sont, bien entendu, les premières clientèles cibles, mais ils représentent également les porte-parole auprès des touristes et des communautés culturelles, tout comme ils sont des ambassadeurs du Québec à l'étranger.

Les intervenants du milieu à concerter. La culture scientifique et technique est l'oeuvre conjuguée d'un ensemble d'intervenants qu'il est important de rassembler et de supporter. Les producteurs de savoir disposent d'expériences et de savoirs susceptibles d'alimenter le processus de création et de diffusion. Les diffuseurs du savoir, les muséologues, éducateurs, travailleurs, designers, concepteurs, communicateurs articulent les messages et les moyens dans le but d'informer la démarche culturelle des individus et des groupes. Les partenaires interviennent au plan du soutien à la création, à la production et à la diffusion.

Une situation à améliorer. Au plan des équipements culturels particulièrement, les musées, les centres d'exposition, les expositions temporaires itinérantes, des améliorations, fondées sur l'engagement des différents paliers de gouvernement, de l'entreprise privée et du public, devront être amorcées pour combler les lacunes importantes, entre autres, l'absence d'équipements majeurs dans le domaine des sciences et des techniques, la nécessité de consolider ou de développer des équipements dans certains champs disciplinaires en fonction de contenus prioritaires à promouvoir ou de clientèles cibles à servir; la nécessité de confirmer les orientations stratégiques de la consolidation et du développement des équipements majeurs; la nécessité de la mise en valeur de collections privées, institutionnelles et publiques; l'insuffisance de ressources professionnelles qualifiées pour la conception, la production, la gestion et un besoin de programmes de formation intégrés et adéquats; le manque de concertation entre les différents intervenants culturels; l'absence de programmes adéquats pour certains segments de clientèle et, enfin, une faiblesse généralisée au plan de la promotion des équipements et de leurs activités.

Des actions à prendre. Si on voulait, dans le cadre d'une politique culturelle, prendre des actions pour le développement de la culture scientifique et technique, on devrait viser l'objectif général de consolider et d'accroître chez les individus les connaissances, les outils et les pratiques nécessaires à une meilleure maîtrise des éléments de la vie quotidienne. Nos actions devront contribuer à une compréhension des phénomènes et des multiples changements scientifiques et technologiques qui marquent notre société et notre environnement.

Des objectifs spécifiques. Quelques suggestions: renforcer les axes forts et structurants du Québec au niveau des dimensions de la culture scientifique et technique et de ses formes; valoriser et "prioriser" les projets qui comblent les besoins précis du milieu culturel en privilégiant ceux qui font déjà l'objet d'un consensus; consolider et mettre en valeur les réalisations existantes; privilégier les projets dont la gestion relève d'une direction culturelle administrative forte, pertinente et cohérente; privilégier les projets dont la taille et le contenu respectent les modèles et les échelles de développement adaptés aux ressources québécoises; privilégier les projets dont le développement au niveau du contenu et des approches permet de franchir les différentes étapes de développement, amenant les productions québécoises à se situer à la fine pointe des réalisations internationales; privilégier des projets dont la viabilité financière est prise en compte et assurée à long terme; privilégier des projets pour accroître la position concurrentielle du Québec au plan national et international, en tenant compte à la fois des critères d'excellence, d'originalité et de diversité.

Trois stratégies pour ce faire, avant de conclure. Une première étape, celle du rattrapage. Il faut répondre à des besoins déjà identifiés faisant l'objet de consensus, mais non comblés actuellement. Par exemple, la mise sur pied d'un équipement majeur dans le domaine des sciences et des techniques à Montréal est attendue et désirée depuis plus de 15 ans.

Une deuxième étape, la consolidation. Il s'agit de bonifier les activités existantes ou de renforcer le fonctionnement et le rayonnement d'organismes et d'industries déjà implantés. Par exemple, élargir la distribution de productions audiovisuelles au marché de l'éducation ou de la vente au détail.

Enfin, le développement, dernière étape. Il s'agit de développer de façon complémentaire, à partir d'une planification stratégique adéquate, les réseaux de distribution actuels et prévus, et d'ouvrir de nouveaux secteurs, d'occuper d'autres marchés, d'élargir les clientèles touchées; par exemple, la mise sur pied d'un réseau de distribution de produits éducatifs et culturels, tels des valises, des jeux, des logiciels.

Les quelques propos que nous venons de tenir ne sont que l'ébauche d'une discussion plus large qui devra animer le milieu de la culture scientifique et technique. Je n'ai pas pu décrire avec autant de force qu'elle le mériterait l'effervescence qui anime le milieu de la culture scientifique et technique au Québec. Je n'ai pas abordé, non plus, spécifiquement les champs de la communication et de la vulgarisation scientifiques, ni l'évolution étonnante de la muséologie scientifique ces dernières années.

La future politique constituera, croyons-nous, un lieu privilégié pour souligner l'existence, voire le rayonnement, des forces québécoises en culture scientifique et technique, pour lever l'ambiguïté qui entoure encore l'identification d'un ministère responsable et pour reconnaître clairement l'importance de la culture dans

notre société. Merci.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup, madame.

Mme la ministre, il vous reste à peu près le temps de réagir brièvement à la présentation de notre invitée.

Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie. Le temps nous presse. La seule chose, je pense, sur laquelle je dois vous rassurer... On a eu une représentation ici d'autres groupes au niveau de la culture scientifique et technique. Vous dites aussi que la politique des arts et de la culture confirme clairement le leadership du ministère de l'Enseignement supérieur, ce sur quoi on est d'accord, dans le sens où c'est impossible pour nous... On peut travailler en parallèle, comme on le fait avec le musée de la science et de la technologie, mais on n'a pas... C'est dans le cadre même et la fonction même du ministère de l'Enseignement supérieur de prendre le leadership là-dessus et de travailler avec nous à l'implantation. Alors, c'est une remarque. Comme le temps nous presse, je veux vous rassurer là-dessus.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, même genre de...

M. Boulerice: Oui, mais en faisant quand même remarquer que Mme Benoit a réintroduit, elle aussi, ce projet qui, malheureusement, est stoppé et qui est essentiel, si on veut parler de culture scientifique et de culture technique, qui est une vraie maison des sciences et des techniques à Montréal, il va de soi, puisque le bassin important est là et qu'on peut y amener les gens. Mais, si on n'a pas cette illustration, ce moyen très tactile, en définitive, d'apprivoiser la culture scientifique et technique, je pense qu'on aura beau avoir les meilleurs programmes qui soient, dans les meilleures écoles qui soient, on n'aura probablement pas atteint notre but. Quand je vous entends parler, j'ai toujours image du parc de la Villette et de l'importance qu'il a eu dans le développement de la culture scientifique et technologique en France. Merci, Mme Benoit.

Le Président (M. Doyon): Alors, Mme la ministre, peut-être simplement dire au revoir et merci et nous devrons suspendre.

Mme Frulla-Hébert: Effectivement, il y a le fameux projet du musée de la science et de la technologie travaillé de pair, effort provincial et fédéral. C'est dans les cartons, d'ailleurs, du ministère de l'Enseignement supérieur. Mais, là-dessus, je suis d'accord avec mon collègue que, comparativement ne serait-ce qu'à l'expérience ontarienne, ça nous prend aussi une maison de la science et technologie. Là-dessus, on peut vous donner, finalement, une aide en poussant sur le projet, encore une fois, en laissant le ministère de l'Enseignement supérieur comme maître d'oeuvre de ce projet.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.

Alors, Mme Benoit, il me reste à vous remercier, en vous faisant part que ce sont des contraintes dont nous ne sommes pas maîtres qui nous imposent de suspendre nos travaux pour le moment jusqu'à 20 heures. Je suspends donc les travaux.

(Suspension de la séance à 18 h 29)

(Reprise à 20 h 8)

Le Président (M. Gobé): La commission de la culture reprend ses travaux. Nous allons sans plus tarder demander aux représentants de l'Association de la vidéo indépendante du Québec de bien vouloir venir prendre place en avant.

M. Boulerice: Prenez les rouges.

Le Président (M. Gobé): C'est la couleur de l'avenir.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: L'avenir est bloqué.

Le Président (M. Gobé): Fiez-vous à nous pour le débloquer, mon cher ami. Alors, bonsoir, mesdames et messieurs. Il me fait plaisir de vous accueillir. Si vous voulez maintenant vous présenter après ça, nous allons avec plaisir vous écouter dans la présentation de votre mémoire.

Association de la vidéo indépendante du Québec

M. Brunelle (Charles-Mathieu): Charles-Mathieu Brunelle. Je suis président de l'Association de la vidéo indépendante du Québec.

Le Président (M. Gobé): Bonsoir, monsieur.

M. Brunelle: Immédiatement à ma gauche, Françoise Dugray, secrétaire.

Le Président (M. Gobé): Bonjour, madame.

M. Brunelle: À l'extrême gauche, Agnès Maltais, administratrice.

Le Président (M. Gobé): Bonsoir.

M. Brunelle: À ma droite, Robert Faguy, trésorier.

Le Président (M. Gobé): Bonsoir, M. Faguy. Alors, vous pouvez commencer la présentation de

votre mémoire.

M. Brunelle: Mme la ministre, Mmes et MM. les commissaires, j'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir accordé une audience aujourd'hui, dans le cadre de la politique de la culture et des arts. Nous ne pouvons, dans un premier temps, qu'être d'accord avec la conclusion de la proposition. Nous aurions souhaité, cependant, que cette conclusion fasse partie également de l'introduction. En effet, la notion de priorité, voire d'urgence d'accorder aux arts et à la culture une place de choix dans la société est, à notre avis, le point central, le point à régler une fois pour toutes. Je me permets de citer cette conclusion: "Pour le Québec, accorder à la culture une place à la table des grandes idées, des grands projets, des vastes choix et lui donner une voix équivalente à celle qu'on accorde aux autres grandes missions de l'État, c'est procéder à une révision radicale; c'est accepter l'idée que les richesses de l'imagination, du coeur, de la création sont elles aussi des leviers qui font grandir la société," etc. C'est, à notre avis, la base de la revendication globale du milieu face à l'appareil politique depuis belle lurette. À partir du moment où le milieu ressentira cette volonté, à partir du moment où un véritable changement s'annoncera, alors le véritable travail pourra commencer.

Effectivement, et nous vous en félicitons, il y a lieu de consulter le milieu avant d'effectuer tout changement. On vit dans une société dans laquelle il s'avère de plus en plus nécessaire d'impliquer les regroupements, les associations afin d'établir, ceci à la base même de la population, non seulement la prise de conscience nécessaire pour ces changements, mais également afin de sonder l'expertise que ces associations et regroupements possèdent dans leur domaine respectif.

Il est évident que, pour nous, la proposition de politique de la culture et des arts propose des mécanismes qui nous inquiètent, compte tenu de l'absence totale de la création vidéographique des programmes du ministère des Affaires culturelles. Nous n'avons donc, pour ainsi dire, en dehors de certains organismes financés à l'intérieur du secteur des arts visuels, aucun interlocuteur au niveau provincial. Il est essentiel d'établir un dialogue constant avec le milieu et, à ce titre, nous sommes plus qu'heureux de collaborer avec le ministère des Affaires culturelles afin de bien présenter l'ensemble des besoins de notre communauté.

L'AVIQ est née d'un besoin urgent de regrouper les intervenants de la création vidéo-graphique québécoise. A ce titre, nous sommes un organisme national qui effectue les représentations nécessaires afin que la vidéo soit reconnue comme forme de création à part entière au même titre que les arts visuels ou les arts d'interprétation, pour ne nommer que ceux-ci. L'AVIQ regroupe donc 11 organismes: des collectifs de création, des centres d'accès et des distributeurs représentant 500 créateurs.

Mme Dugray (Françoise): Je dois vous expliquer ce qu'est la vidéo, mais je vais d'abord dire de quel groupe nous sommes pour vous donner un aperçu des groupes que vous connaissez peut-être. Agnès fait partie de Vidéo Femmes; Charles-Mathieu, de Prime-Vidéo; Robert, de Obscure; et je fais partie du VidéoGraphe.

La vidéo est un médium technologique qui ne peut exister sans instrumentation. Sa spécificité se caractérise par un travail basé sur la démarche personnelle d'un artiste. La recherche, l'expérimentation et la création se font dans plusieurs genres, que ce soit fiction, documentaire, vidéo d'art, installations, vidéo-danse, vidéo-théâtre ou expérimentations de toutes sortes. L'aspect non conventionnel de sa pratique dans tous ces genres en fait une discipline à part entière, reconnue sur le plan international, avec ses auteurs et ses tendances. Elle entretient, certes, des liens étroits avec d'autres disciplines, étant un outil ou le complément idéal à d'autres formes artistiques. La vidéo possède aussi un intérêt archivistique aisément reconnu parce que utilitaire, et ce, depuis sa création. Elle est également un outil de formation parce qu'elle sert d'expérimentation dans le domaine audiovisuel.

Il existe quatre pôles de travail à la création vidéographique. L'artiste est à la base de toute création, travaillant à toutes les étapes, mais prioritairement à la préproduction, donc à la scénarisation de tout concept. Cet artiste peut être lié à un centre de production ou groupe vidéo. Ce sont des collectifs qui ont une relation idéologique, que ce soit le féminisme ou alors la recherche et l'expérimentation visuelle ou sonore, ou autre. En troisième lieu, il existe des centres d'accès qui fournissent l'encadrement technique et technologique nécessaire à toute création vidéographique. En quatrième lieu, il existe des distributeurs qui développent des marchés spécifiques à la vidéo, que ce soit festival, galerie, réseau social ou autre.

Mme Maltais (Agnès): Les membres de l'AVIQ se définissent tous comme faisant de la vidéo indépendante. Que signifie cette particularité? Qu'est-ce qui nous unit et nous singularise?

En gros, c'est que tous les membres de l'AVIQ laissent à l'artiste le contrôle artistique et le droit editorial sur sa création en tout temps, sans aucune ingérence, sans aucune censure. Nous ne sommes pas des industries culturelles. Quand se met en branle le processus de création d'une oeuvre vidéographique, le besoin n'est pas de répondre à une finalité commerciale, mais bien de répondre à une finalité artistique. C'est-à-dire que c'est à l'artiste d'abord que revient le désir de créer

une oeuvre, ensuite le processus se met en branle.

De plus, cette notion d'indépendance se retrouve dans tous les secteurs de la production de l'oeuvre. Chaque secteur est autonome et l'artiste peut choisir indifféremment de produire lui-même, de faire sa propre distribution, de travailler avec l'équipement qu'il possède ou de fonctionner avec le centre d'accès qu'il désire. Les notions d'indépendance et de liberté sont les fondements de notre existence.

M. Faguy (Robert): Alors, juste pour vous présenter un petit peu la situation présente pour le soutien de la vidéo indépendante, je peux vous dire qu'étant donné que nous ne nous considérons pas comme des industries culturelles, à ce moment-là, les programmes de la SOGIC ne nous sont pas ouverts d'une façon évidente. Alors, il reste le ministère des Affaires culturelles et, grâce à la loi sur le statut de l'artiste, qui a aidé beaucoup d'affaires, en passant, il y a deux ans, la vidéo d'art a fait partie des arts visuels. Présentement, il y a 2 organismes sur les 11 qu'on représente qui sont subventionnés par le ministère des Affaires culturelles. Or, tous ces organismes obtiennent un appui et une reconnaissance d'autres paliers - pour ne pas les nommer - du Conseil des arts du Canada. C'est pour vous dire que le Conseil des arts du Canada a senti le besoin, il y a 20 ans, de créer une section des arts médiatiques autonome pour reconnaître les besoins évidents des créateurs en vidéo.

En ce qui a trait maintenant aux artistes pour qui la vidéo peut être un outil de création dans les formes qu'a énumérées tantôt Françoise, je peux vous dire que, présentement, au ministère des Affaires culturelles, les artistes ne peuvent obtenir que du financement sur la base de scénarisation, donc ce qu'on appelle, dans le jargon, de la préproduction en vidéo, et ne peuvent en aucun temps soumettre des projets de production autonome pour réaliser une bande, ce qui cause, bien sûr, un problème, vous vous en doutez bien.

Pour le Conseil des arts, il existe, bien sûr, toutes les bourses de recherche et des bourses de production qui s'élèvent à des montants quelque peu plus élevés que ce que le ministère peut offrir dans ces conditions-là.

M. Brunelle: Si l'on accepte le fait que cette politique proposée est une proposition, il est encore temps de discuter et d'y participer. Il est donc essentiel pour nous d'apporter ici les souhaits de notre communauté.

Le médium vidéo fait partie intégrante de la recherche et du développement d'une manière générale car elle est non seulement liée au développement technologique, mais elle est profondément imbriquée dans le développement des autres formes d'art.

La société évoluant de plus en plus dans un univers technologique, il est fondamental que les artistes aient accès aux nouvelles technologies, qu'ils aient l'occasion de domestiquer ces appareils. À toutes fins pratiques, il est important de réaliser que la création vidéographique et, d'une manière plus générale, les arts médiatiques seront définitivement des formes de création du XXIe siècle. On n'a qu'à penser aux recherches de pointe, l'infographie, l'image assistée par ordinateur, l'électroacoustique, etc., la deuxième vie du théâtre, de la danse, de la diffusion, etc. C'est aussi l'outil de diffusion de l'avenir de par son potentiel d'infiltration dans nos salons.

Il faut tenir compte de l'ensemble du processus de création et soutenir les quatre pôles: l'artiste, les collectifs de production, les centres d'accès et les distributeurs. Il est essentiel de développer une accessibilité au médium vidéo dans toutes les régions du Québec, ainsi que d'élaborer des programmes de formation spécifiques à ce médium. Nous souhaitons donc que, de toute urgence, une section des arts médiatiques soit créée au sein du ministère des Affaires culturelles en collaboration avec le milieu.

La proposition de politique de la culture et des arts soulève certains questionnements. Vous constaterez qu'il est difficile d'envisager un rapatriement quand tout un secteur d'activité artistique est absent des programmes existants. On disparaît ou on se retrouve dans un vacuum insupportable. De toute façon, avant d'acheter un condominium, le minimum que l'on veut voir, ce sont les plans. Ce n'est pas beaucoup demander quand, en plus, on est prêt à faire des suggestions de dessin.

Le Président (M. Doyon): Avez-vous terminé votre présentation?

Une voix: Non.

Une voix: Deux petites minutes?

Le Président (M. Doyon): Oui, bien sûr, allez!

M. Faguy: Alors, deuxième questionnement par rapport au rapport de la commission Arpin. J'ai l'impression qu'il faut bien distinguer les deux pôles. C'est-à-dire que le rapport Arpin commence très bien en parlant de la création, mais, à un moment donné, il y a une sorte de détournement au profit des industries culturelles. J'ai l'impression qu'on mélange à souhait ces deux formes-là. La création et les industries culturelles correspondent à deux formes de logique; c'est tes mots mêmes qui l'expliquent: la création, l'industrie. Ce n'est pas nécessairement évident que l'industrie doit être créative, bien sûr, mais ça répond à deux formes de logique. À notre avis, le rapport ne prend pas en considéra-

tion cette dichotomie-là qui existe entre les deux, n'appuie pas assez, d'une façon évidente, tous les processus de création. Du moins, c'est ce que ça nous laisse présager, surtout en ce qui concerne, bien sûr, toute la référence à la SOGIC qui est le seul répondant, finalement, du cinéma et on ose espérer que la vidéo est incluse là-dedans. Alors, vous comprendrez très bien qu'il y a un problème à ce niveau-là. On veut carrément que la vidéo soit reconnue comme un processus de création avant tout.

Mme Maltais: On ne comprend pas, non plus, l'argumentation qui accompagne la recommandation du rapport d'en finir avec le saupoudrage de subventions. On est tous contre le saupoudrage, bien sûr, mais pas dans le sens de couper le nombre de groupes subventionnés, mais plutôt d'en finir avec les subventions qui tombent à la graine et qui arrivent à la graine. Il existe au Québec un manque désespérant de soutien à la création et à l'innovation. Le peu de saupoudrage, si jamais il s'en fait, c'est le seul facteur de risque qui puisse peut-être mener à de nouvelles finalités artistiques ou qui puisse servir à encourager les plus osés, les plus novateurs. En plus, on est en droit de se demander quels seront les critères qui aideront le MAC à juger de la haute qualité d'un projet, critère qui est en jeu pour décider si on saupoudre ou non, pour décider qui cessera de recevoir ce que j'appelle la poudre de perlimpinpin des maigres subventions qui vont aux artistes. Je parle de poudre de perlimpinpin ici, mesdames et messieurs, parce qu'il faut être magicien pour faire de l'art au Québec, particulièrement de la vidéo, avec le peu de sous qu'on reçoit.

Ensuite, dans le rapport, on trouve déjà une ébauche de ce qu'on veut faire comme type de sélection. C'est écrit: "C'est de vision que le ministère des Affaires culturelles a besoin - ce n'est pas nous qui le disons - et il en aura de plus en plus besoin au cours des prochaines années, une large vision qui le pousse à prendre des initiatives, à favoriser des organismes et des projets hautement professionnels, à faire des choix courageux, car les ressources sont rares." Il s'agit là d'un sérieux avertissement pour nous: Ne soyez pas seulement professionnels, soyez hautement professionnels si vous voulez survivre. Et on dit ici que le courage politique sera de choisir qui mourra. On n'est pas tout à fait d'accord.

Mme Dugray: Par rapport aux régions maintenant, nous ne sommes absolument pas d'accord avec votre argumentation sur les régions. Pour nous, il est inconcevable de ne penser aux régions qu'en tant que récepteurs des fabrications de la métropole. Nous savons pertinemment que des groupes de production en vidéo se forment actuellement à Chicoutimi, à Rimouski et à Hull, entre autres; ces jeunes doivent avoir droit à l'équipement nécessaire à toute expérimentation. Les fermetures, entre autres, des télévisions que l'on sait ont amené des bouleversements et des exodes désolants pour la vitalité de l'ensemble de la création québécoise.

Mme Maltais: Autre chose à propos du transfert aux municipalités. On est présentement en pleine période de retrait du gouvernement provincial de la fiscalité municipale. N'est-il pas normal de craindre que la culture soit laissée dans les mains des municipalités sans qu'on ne leur laisse l'argent pour la soutenir et, en plus, quand on sait que les municipalités ne sont absolument pas sensibilisées au fait culturel? Alors, le délestage reste trop dangereux à ce stade-ci des relations provinciales-municipales.

Autre chose: il s'agit du paragraphe sur la diversification des sources de financement que vous trouverez en page 31, où l'État devrait mettre l'accent sur les grands équipements à caractère national, le soutien à la création, les budgets de base des organismes culturels. Les municipalités pourraient privilégier les équipements régionaux et la production locale et régionale de niveau professionnel.

Alors, nous nous demandons, nous, tout à coup, ce que signifie ce cloisonnement très précis entre les sources de financement, mais qui ne s'accompagne d'aucune justification dans la politique. Nous craignons que très rapidement les organismes, entre autres - moi, je suis de Québec, avec Vidéo Femmes - les organismes des régions et de la région de Québec, deviennent des organismes régionaux et soient renvoyés aux municipalités pour trouver du financement. Le MAC s'en laverait alors joyeusement les mains. Nous pouvons appuyer nos craintes sur les disparités existant déjà entre les subventions accordées aux organismes de Québec et de Montréal, disparités maintes fois dénoncées, et qui se trouveraient justifiées ici.

M. Brunelle: Avant de conclure, au niveau des structures administratives proposées, nous trouvons inquiétant de créer un observatoire qui, finalement, vérifierait l'application de la politique culturelle, quand on sait pertinemment bien que, si le ministère des Affaires culturelles est mandaté, il est plus que compétent pour s'assurer de l'application de ses politiques.

Au niveau aussi des structures administratives supplémentaires (le comité consultatif), je dois vous dire que ça nous fait plaisir de venir discuter ici et qu'on est prêt, l'ensemble du milieu, à discuter avec le ministère des Affaires culturelles. Donc, le comité consultatif pourrait peut-être comprendre l'ensemble des associations et des regroupements.

Bref, nous endossons le principe d'une politique culturelle. Nous souhaitons ardemment que le dialogue se poursuive et considérons que

cette proposition est un document de travail qui, suite aux recommandations et aux correctifs ainsi apportés, devra être endossé par l'ensemble des regroupements et associations qui représentent le milieu des arts et de la culture au Québec. On est prêts à travailler et à collaborer. Après tout, on n'est pas pressés, ça fait 30 ans qu'on attend.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Justement parce que ça fait 30 ans qu'on l'attend, on est pressés vraiment de la faire et de la déposer, croyez-moi. Ha, ha, ha!

J'ai plusieurs questions à vous poser. Premièrement, au niveau du retard que nous avons, que le ministère a et affiche dans le domaine de la création, mais autre que - et pardonnez-moi l'expression - ce qui est habituel à voir ou à entendre, là-dessus, il y a quand même du chemin à faire. J'aimerais revenir à certaines sources de financement et, aussi, à la responsabilité gouvernementale. Je vais revenir, par ce fait même, à la SOGIC versus Téléfilm versus le ministère versus le Conseil des arts.

Le ministère versus le Conseil des arts. Vous faites affaire avec le Conseil des arts depuis, vous nous dites, 10 ans, je pense. C'est ça?

Des voix: Vingt.

Mme Frulla-Hébert: Vingt? C'est pire. Vingt ans. On a beaucoup parlé du Conseil des arts, ici, à cette commission, versus le ministère des Affaires culturelles, dans un sens où le Conseil des arts semble avoir une certaine façon - malgré que ce n'est pas toujours des compliments non plus - d'agir et de distribuer, c'est-à-dire d'avoir une distance par rapport, justement, à l'organisme gouvernemental et d'être l'espèce de trait d'union entre le milieu, C'arm's length". Comment faites-vous affaire avec le Conseil des arts à ce niveau-là? Est-ce qu'il y a un programme? D'une part, est-ce que c'est des jurys? Est-ce que...

M. Brunelle: En fait, le principe, c'est qu'on fait affaire, d'abord, avec la section des arts médiatiques, qui regroupe l'ensemble des arts avec support technologique. Cette section a des jurys annuels, biannuels, quatre fols par année pour les individus et pour les organismes. Ces jurys sont formés par des pairs qui sont choisis à travers le Canada et l'évaluation de chaque organisme est faite. Il y a un budget complètement séparé pour cette section-là.

Mme Frulla-Hébert: Maintenant, quand vous parlez des arts médiatiques au niveau du Conseil des arts, ça regroupe?

M. Brunelle: Les arts médiatiques regroupent l'électroacoustique, enfin, ce qu'on appelle la composition audio.

Mme Frulla-Hébert: Oui.

M. Brunelle: L'holographie, le cinéma, la vidéo et l'image assistée par ordinateur.

Mme Frulla-Hébert: Donc, ça fait partie du même programme.

M. Brunelle: Oui.

Mme Frulla-Hébert: Maintenant, au niveau de Téléfilm, Téléfilm a lancé un nouveau programme, il y a à peu près trois semaines, un mois, en tout cas, c'est ce qu'on a vu d'annoncé, un programme qui s'adresse à la production indépendante. Est-ce que vous avez accès à ce programme?

M. Faguy: Certains de nos organismes y ont accès. C'est un programme qui existait, si je suis correct, dans un ancien ministère, Approvisionnements et Services, sur des fonds destinés à la production indépendante. Alors, à un moment donné, le fonds a comme perdu et ils ont récupéré, semble-t-il, aux informations que j'ai... Ils ont vu qu'il y avait un problème de financement du cinéma et de la vidéo indépendante. Ils appellent ça de la vidéo destinée à des marchés secondaires. Alors, dans les faits, c'est quand même une méthode industrielle de faire, ça répond encore aux critères de Téléfilm ou de la SOGIC, c'est-à-dire de prendre en compte vraiment le marché auquel on s'adresse. Ce qui n'est pas nécessairement notre façon de faire, il faut bien le comprendre.

Mme Frulla-Hébert: Comme tout est à faire ici, à part l'aide, évidemment, le statut de l'artiste, etc., quelle serait, selon vous, avec les expériences que vous vivez présentement au niveau du fédéral et, finalement, la connaissance de vos besoins, la meilleure façon, en termes de financement, au niveau de l'État? Est-ce que ce serait à l'intérieur même d'un programme du ministère? Est-ce que ce serait au niveau d'un programme spécial au niveau de la SOGIC? (20 h 30)

M. Brunelle: II est évident que, dans un premier temps, nous - il y a certains organismes qui sont reconnus à l'intérieur des arts visuels -on est heureux à l'intérieur des arts visuels, mais ça ne suffit pas pour les besoins de l'ensemble de la communauté.

Mme Frulla-Hébert: Ah! Parce que ça ne couvre pas tout l'ensemble.

M. Brunelle: Donc, d'abord, ce qu'on aimerait, c'est, effectivement, qu'il y ait une

section qui soit créée à l'intérieur du ministère des Affaires culturelles pour les arts médiatiques. Il est évident aussi que, quand on parle de création et quand on parle de diffusion de cette création, de recherche et d'innovation, et c'est séculaire la relation que nous avons avec la SOGIC, c'est, pour ainsi dire, totalement incompatible quand on parle d'industries culturelles. Alors, nous, c'est clair qu'on veut quand même demeurer à l'intérieur du ministère des arts et de la culture, si jamais ça allait jusque-là.

Mme Dugray: II faut dire aussi que c'est vraiment un département à part que nous voulons parce que, reconnue à travers les arts visuels, la vidéo est un médium vraiment technologique qui a des besoins autres. Alors, il faut vraiment qu'il y ait de l'équipement et tout. Même à l'intérieur, par exemple, des arts médiatiques au Conseil des arts, il y a une section vidéo qui correspond réellement aux besoins, parce que le médium existe réellement comme tel. Alors, c'est ou bien au ministère des Affaires culturelles ou dans un département autre ailleurs, mais vraiment spécifique à la vidéo.

M. Faguy: II faut bien comprendre aussi qu'on ne veut pas non plus nécessairement un cloisonnement, c'est-à-dire une section des arts médiatiques qui règle seulement ses affaires ensemble, parce que la vidéo, on l'a noté tantôt, c'est quand même un outil qui sert aussi à d'autres formes d'art, c'est-à-dire que c'est un outil de création autonome, bien sûr, mais il faudrait prendre en compte un peu une ouverture des programmes, faire en sorte que... Souvent, il y a des arts multidisciplinaires. Je fais partie d'un collectif multidisciplinaire.

Mme Frulla-Hébert: Oui.

M. Faguy: On fait autant de la vidéo que des arts visuels et du théâtre et, lorsqu'on arrive avec des demandes de subvention, c'est un joyeux casse-tête, merci. Alors, il faut quand même qu'il y ait une sorte de souplesse entre les programmes. Que ces programmes-là puissent, d'une certaine façon, s'imbriquer, trouver des mécanismes qui font en sorte qu'une demande peut être recevable, oui. On parle souvent de guichet unique, à une place, qui soit le ministère, mais qu'ensuite les agents qui sont là, qui devraient être beaucoup plus des agents provenant du milieu, en ce qui nous concerne... On aimerait beaucoup que les personnes qui gèrent ces programmes-là aient une très bonne connaissance du milieu. C'est souvent le cas problématique avec le ministère, lorsqu'on parlait de structure, tout à l'heure. Probablement que la grande différence aussi avec le Conseil des arts, c'est que les personnes qui gèrent ces programmes-là proviennent souvent du milieu. Elles ne sont pas soumises à toute une hiérarchie politi- que et bureaucratique qui fait en sorte qu'à un moment donné, lorsqu'il y a un changement d'agent qui ne connaît pas du tout le domaine, ça arrive très souvent, il faut tout recommencer à zéro. C'est absolument incroyable. À ce moment-là, nos dossiers n'évoluent pas du tout. Ça, c'est probablement la grande différence là-dedans. Alors, cette souplesse-là de programme, mais qu'au moins on puisse en discuter à l'intérieur d'un programme bien précis qui est celui des arts médiatiques ou des arts technologiques, appelons-le comme on le voudra, mais c'est le trou noir présentement, auquel le ministère ne répond pas.

Le Président (M. Doyon): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Messier: Oui. Une question brève parce que le temps avance. Dans votre mémoire, à la page 13, vous défendez le rôle des régions. Le rôle des régions devrait être mis en évidence au niveau du développement culturel et des arts. Et vous dites, du même souffle - je pense que c'est madame - qu'il faut faire attention au niveau des municipalités. Mais, s'il y avait décentralisation ou si on jouait un rôle important dans les régions au niveau du développement des arts et de la culture, qui est votre intervenant si ce n'est pas les municipalités?

Mme Maltais: II n'y a aucun intervenant, en ce moment, dans les régions. Je ne crois pas que de donner aux municipalités la responsabilité de la vidéo, entre autres, des arts médiatiques, soit une bonne chose à faire parce que les municipalités, particulièrement en région, ne sont pas sensibilisées à investir dans la culture. Ça commence à peine à Montréal. À Québec, on vient d'avoir un bureau des arts et de la culture. On n'a pas encore de conseil de la culture à la CTCUQ. Alors, c'est nous obliger à repartir à zéro. Il y a des structures, il y a des artistes qui travaillent en région, qui essaient de produire. Il faut les soutenir, il faut que les directions régionales créent des sections des arts médiatiques. Il faut qu'il y ait des pôles de production dans chaque région. Et ça ne doit pas être les municipalités qui doivent avoir la responsabilité de gérer la culture en région, ce serait une erreur. Elles ne sont pas sensibles à ça du tout.

Le Président (M. Doyon): M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Mesdames et messieurs, bienvenue. Quant à votre dernière remarque, je ne suis pas loin de partager un peu votre point de vue. Plusieurs municipalités sont venues, plusieurs maires sont venus, plusieurs ont montré leur sensibilité particulière. Disons qu'il y a peut-être une nouvelle génération d'édiles municipaux qui arrive, mais je partage votre

point de vue que ce n'est pas vrai que tous les secteurs de création au niveau de l'art doivent nécessairement passer vers les municipalités. On y arrivera peut-être un jour, mais je ne pense pas qu'il faille faire à ce niveau-là le délestage au niveau des municipalités, comme un autre ministère a fait un délestage dans la cour des municipalités, ce qui réduit leur marge financière. Ceci étant dit, vous avez prononcé le nom de la SOGIC; lorsqu'on le prononce en cette commission, on a tendance a sortir les gousses d'ail et les croix pour que le vampire se retire. Vous êtes, vous aussi, critiques à l'égard de la SOGIC. Des intervenants avaient la nostalgie de la Société générale des industries du cinéma - je ne sais pas si vous partagez cette nostalgie-là - où, paraît-il, le contact était mieux, les discussions étaient plus profitables. Dans votre cas à vous, qu'est-ce que vous lui reprochez de façon très spécifique?

M. Brunelle: Essentiellement, il y a une chose qui est une aberration inimaginable, la voici: tout financement de projet de création vidéo est lié à la vente. Ça, pour moi, c'est le bout! S'il y avait un peintre qui voulait avoir une subvention pour peindre, il faudrait que son tableau soit garanti d'être vendu. Ça, pour nous, c'est... J'arrête là.

Mme Maltais: Si je peux ajouter, il y a une histoire par rapport à la SOGIC et ses relations avec les petits organismes culturels qui ne s'appellent pas industries culturelles. Mettons qu'ils n'ont pas le don de nouer des relations harmonieuses avec nous particulièrement.

M. Boulerice: Nous vous avons compris. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Faguy: II n'y a pas de nostalgie par rapport à d'autres formes anciennes. Comme vous l'avez mentionné, l'intitulé est toujours: des industries du cinéma et nous sommes quand même assez dégagés de cette notion-là. Il faut bien le comprendre.

M. Boulerice: Je ne suis pas là pour défendre ce qu'il y avait nécessairement avant, sauf que les gens du cinéma s'estimaient mieux servis à l'époque de l'ancienne que de l'actuelle où, si on ne porte pas jabot et dentelle, à ce moment-là, le dialogue est difficile. Votre inquiétude à l'égard du rapatriement des responsabilités fédérales s'explique, si je vous comprends bien, par le peu de considération du ministère des Affaires culturelles à votre endroit, par rapport à celle que vous avez, notamment, de la part du Conseil des arts, mais aussi par l'absence de garantie que les sommes rapatriées seraient réinjectées latéralement et intégralement - j'insiste sur ces deux qualificatifs - dans les secteurs correspondants de la part du gouvernement qui l'aurait fait. Vous reprochez aussi, comme d'autres organismes, et ça n'ajoute pas à la crédibilité forcément, de ne pas avoir respecté l'objectif du 1 %. Vous avez mentionné le statut de l'artiste, soit, mais ce n'est qu'un statut, puisque cela n'a pas été accompagné du statut fiscal des artistes. Donc, c'était bien, mais ce n'était pas suffisant.

Alors, est-ce qu'en principe le rapatriement des responsabilités serait acceptable aux conditions suivantes: l'assurance que les budgets rapatriés soient réinjectés latéralement et intégralement dans les secteurs correspondants par diverses mesures de soutien forcément aux arts, et la mise sur pied d'un organisme subvention-naire autonome - certains donnent l'exemple d'un Téléfilm québécois - chargé de gérer les budgets de programmes de soutien pour les secteurs de l'audiovisuel, dont inévitablement celui de la vidéo indépendante, et cet organisme respectant le principe du "arm's length"?

M. Brunelle: Là, il y a comme une légère dichotomie, si je peux m'exprimer ainsi. Si on parle du "arm's length" et qu'on parle d'un... Moi, je m'attendais à ce que vous disiez, par exemple, un Conseil des arts du Québec. Téléfilm Canada n'a pas de préoccupation d"'arm's length" et n'a pas d'histoire, non plus, reliée à la création. C'est pour ça que, pour nous, on est vraiment dans un vacuum assez important.

M. Boulerice: J'ai mentionné Téléfilm, parce qu'il faut retransposer quand même les organismes pour lesquels, actuellement, les gens n'expriment pas des propos négatifs. Téléfilm est bien perçu. Entre parenthèses, vous savez, il y avait un Conseil des arts au Québec.

M. Brunelle: Oui, en 1966. Mme Dugray: II a été aboli.

M. Boulerice: II a été aboli, il y a deux ans. J'avais dit: Ne faites pas ça, tout d'un coup qu'on en aurait besoin.

Mme Maltais: Si je peux m'exprimer ainsi, je vous dirai qu'on est d'accord avec le rapatriement, si vous rapatriez d'abord le respect, la structure et la philosophie. Je pense que vous comprenez ce qu'on veut dire.

M. Faguy: En ce qui concerne l'argent, je peux très bien vous dire qu'au Conseil des arts la section des arts médiatiques, c'est une des plus jeunes et elle a encore du chemin à faire pour en arriver vraiment à une reconnaissance aussi. C'est-à-dire que la reconnaissance est là, mais, en termes financiers, ça ne monte pas non plus. Le Conseil des arts est pris aussi dans l'appareil politique. Et ça, j'aime quand même le

préciser, parce qu'on peut très bien dire que la structure est très bien, mais il y a un manque évident de volonté politique à la voir monter en flèche, à la voir soutenir la création à ce niveau-là. La section des arts médiatiques, à l'intérieur de ça, manque de financement à cet égard-là aussi. Je veux quand même le remettre sur table.

M. Boulerice: Quand on parle des régions - et vous en avez fait mention - et qu'on lit le rapport Arpin, on est un peu tenté par la phrase de Cyrano: "C'est un peu court" au niveau des régions. Ça fait effectivement fausse route, à mon point de vue. Les régions ne sont qu'un réceptacle. C'est mon opinion. Moi, je dis qu'on parle de culture en région, mais il y a également une culture des régions. Des régions ont réussi à développer - vous m'excuserez le terme - des produits - parlons aussi peut-être de production, parlons peut-être de création -des choses qui leur sont typiques et qui sont originales.

M. Brunelle: Je pense qu'on est très d'accord avec ça. C'est évident que, pour nous autres, le discours des régions est très important. On peut dire que la vidéo est vraiment un moyen privilégié de faire battre le coeur d'une région, d'une certaine façon, ou, du moins, d'en prendre le pouls. La vidéo, si on se souvient bien, ça a quand même commencé lorsque les équipements de captation ont commencé à être légers. On a commencé à se promener un petit peu à travers tout. On filmait tout, il y avait une espèce de grande période de démocratisation. On filmait absolument tout, etc. Ça s'est stabilisé. Maintenant, on est capable de mieux filmer, de bien filmer. À cet égard, j'ai l'impression que le discours régional, du moins en ce qui concerne la vidéo, est très important, parce que l'outil même, la vidéo, le médium même qui n'est pas nécessairement conçu en fonction de la télévision - je pense qu'il faut se le rappeler - la diffusion de la vidéo est, à maints égards, très large, autant en circuit fermé, autant pour ce qui est des galeries en arts visuels, autant aussi pour ce qui serait une sorte de diffusion "at large" en télévision, mais une télévision qui soit ouverte à ce genre de produit, ce qui n'est pas le cas présentement. Il faut très bien dire que les télévisions sont les censeurs absolument incroyables de l'appareil gouvernemental, d'un côté, et aussi les censeurs d'une société bien pensante, etc. Les télévisions communautaires, comme elles existent présentement, ne permettent pas non plus l'expression entière de la création. Ce qu'on voudrait, c'est vraiment faire en sorte qu'une politique culturelle puisse aussi se préoccuper de ces problèmes-là, autant de la diffusion que de la production.

Le Président (M. Doyon): Je vous demande- rais, M. le député, une dernière question et les remerciements.

M. Boulerice: Très brièvement, êtes-vous en train de me dire... J'ai presque le goût de dire: Dites-moi que, oui, c'est ça que vous voulez dire. Vous avez mentionné l'abandon de la régionalisation au niveau de la télévision, à Radio-Québec, à partir de 1986, à Radio-Canada récemment, donc un vacuum terrible. Êtes-vous en train de me dire que, dans une hypothèse où on restructure les émetteurs régionaux sur l'ensemble du territoire, un des principaux points d'appui que l'on pourrait avoir au niveau d'une programmation qui nous viendrait des régions et qui serait diffusée réseau pourrait s'appuyer, justement, sur l'expertise - j'essaie de trouver le mot, je ne le trouve pas; je vais employer un mot latin, je m'excuse - et le "brainstorming" d'un groupe comme le vôtre, l'Association de la vidéo indépendante, un peu comme de grands réseaux achètent des téléfilms? Donc, les antennes régionales pourraient se servir d'un organisme comme le vôtre pour constituer des productions. (20 h 45)

M. Faguy: Mais dans une structure complètement différente de ce qui existe présentement. Ça existe, d'ailleurs, dans d'autres pays où les régions peuvent avoir accès à leurs créations, à leurs propres stars, d'une certaine façon, embarquer dans le "star system". On est loin de ça. Mais, d'une certaine façon aussi, ils reconnaissent le travail des artistes qui travaillent en région et en métropole. Et ça, je pense que c'est important de faire circuler ces idées-là.

Mme Maltais: Je ne sais pas, M. le député, ce que vous voulez nous faire dire, mais ce que nous voulons vous faire entendre, c'est qu'on a besoin de pôles de production. Partout au Québec, les régions se meurent. Les artistes s'en vont et ça ne produit plus. Si on laisse les artistes des régions sans moyen de production, sans accès à des centres de production de vidéo, ils se retrouvent à l'époque médiévale en arts. On est au XXIe siècle. Il faut parler. On travaille maintenant avec la vidéo en danse, en théâtre. Alors, il faut que nos artistes qui sont en train de grandir aient accès à la vidéo. Et là, on pourrait tomber dans la formation aussi.

Le Président (M. Doyon): Un dernier mot, madame.

Mme Dugray: J'étais à Radio-Québec à Rimouski. J'ai travaillé là pendant... Quand ça a fermé, il a fallu partir. Radio-Canada a fait la même chose. C'est terrible à Matane maintenant. Même les galeries qui étaient liées à... Il y avait une vie culturelle qui se passait là. Maintenant,

ces travailleurs-là sont obligés de partir. Alors, tout ce cercle-là, tout ce que ça... Il y avait des festivals vidéo. Il y avait des choses qui se passaient pendant qu'on était là parce qu'on était une vingtaine. Dans toutes les régions, c'était la même chose. Alors, maintenant, c'est ce vacuum-là qui est énorme et on veut qu'il reprenne parce qu'il y a encore des forces vives, mais qui sont en exode et...

M. Boulerice: II y a urgence d'agir.

Mme Ougray: II y a urgence?

M. Boulerice: D'agir.

Mme Dugray: Absolument, absolument.

Le Président (M. Doyon): Un dernier mot, M. le député.

M. Boulerice: Merci de votre participation. J'y...

Le Président (M. Doyon): Vous voulez faire de même, Mme la ministre.

M. Boulerice: ...trouve matière.

Mme Frulla-Hébert: Rapidement, merci de votre présentation. Effectivement, il y a un manque. On est ici pour apporter des changements. Donc, c'est un point à noter.

On aurait pu discuter aussi au niveau de toutes les nouvelles technologies. Il y a plusieurs intervenants qui sont venus en commission parlementaire, tel M. Chagnon. On parle de télévision à la carte maintenant; dans 10 ans, tout le paysage télévisuel va être totalement différent de ce qu'on connaît présentement. Alors, c'est sûr que le talent doit être développé pour faire face à cette production. On prédit d'ailleurs des heures de production énormes, ne serait-ce que pour compétitionner avec l'invasion américaine. Alors, on va regarder ça de très près. Merci.

Le Président (M. Doyon): Au nom de la commission, je tiens à vous remercier. Prenez le temps de vous retirer pour que nous puissions continuer le travail que nous avons à faire. Merci beaucoup encore.

C'est maintenant le tour du Groupement des arts visuels de Victoriaville de se faire entendre. Je les invite à prendre place en avant, à la place qui leur est réservée.

Comme vous étiez ici quand nous avons repris nos travaux tout à l'heure, à 20 heures, je m'abstiendrai de vous rappeler comment on fonctionne. Je vous donne dès maintenant la parole, en vous demandant de bien vouloir vous identifier pour les fins de la transcription de nos débats. Vous avez la parole.

GRAVE

M. Luneau (Laurent): Nous sommes deux représentants du GRAVE. Je vous présente Mme Thérèse Domingue, coordonnatrice au GRAVE, et je suis Laurent Luneau, des relations publiques du GRAVE.

Le Président (M. Doyon): Bienvenue. Allez, vous avez la parole.

M. Luneau: C'est avec plaisir que nous répondons à l'invitation qui nous a été faite de présenter devant cette commission le mémoire que nous lui avons déjà soumis.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais vous parler un petit peu de notre groupement que vous ne connaissez pas, sauf Mme la ministre que nous avons déjà rencontrée. Alors, je voudrais vous dire que le Groupement des arts visuels de Victoriaville a été fondé en 1985 par des artistes professionnels de la région des Bois-Francs. C'était, à l'origine, un regroupement d'artistes qui s'était donné comme mission de sensibiliser la population locale à l'art actuel, tout en offrant certains services à ses membres. Depuis, le GRAVE est devenu un centre d'artistes dont l'objectif principal est toujours de rendre les arts visuels contemporains plus présents et plus accessibles par la programmation régulière d'expositions, la production d'événements ponctuels et la participation des membres au débat culturel. Ça explique aussi pourquoi nous avons présenté un mémoire et nous sommes ici ce soir.

Le groupe compte maintenant 17 membres actifs qui sont, pour la plupart, des artistes fraîchement émoulus de l'université et au-delà de 70 membres associés.

Le GRAVE a déjà reçu dans ses murs des grands noms dont Armand Vaillancourt, Serge Lemoyne, Graham Cantieni, etc., beaucoup d'artistes locaux et des artistes des autres régions.

Cette mise au point étant faite, j'arrive dans le vif du sujet. Notre intention n'est pas de refaire la lecture du mémoire que nous avons présenté, mais plutôt d'en expliciter les grandes lignes à la lumière de notre vécu de centre d'artistes oeuvrant en région. Bien que nous ayons accueilli favorablement la proposition du rapport Arpin dans son ensemble, comme nous le disions, d'ailleurs, dans le mémoire, nous voulons vous faire part des inquiétudes que nous inspirent certaines recommandations et des objections que soulèvent d'autres propositions. Ces craintes et ces objections se manifestent vis-à-vis de trois sujets particuliers: la définition des régions et pôles, le partage des responsabilités avec les municipalités et l'amélioration de l'efficacité administrative.

D'abord, au premier niveau, la définition des pôles. Le rapport Arpin divise la province en

trois grands pôles: Montréal, Québec et le reste. Pour nous, c'est un fait acquis depuis longtemps. Cette polarisation du Québec dans le secteur culturel nous fait justement problème. On a l'impression que le gouvernement, et le rapport Arpin le confirme, considère les pôles comme des vases communicants et que ce qu'on va injecter comme subventions dans les grands centres va se répercuter automatiquement dans les régions. Nous ne sommes pas sûrs que ça fonctionne suivant ce principe des vases communicants. Pour nous, le développement de la culture au Québec devrait se faire de façon harmonieuse en suivant sensiblement le même rythme de croissance dans toutes les régions du Québec, à partir, évidemment, d'une infrastructure de base. Nous croyons en effet que, si on arrivait à susciter dans toutes les populations régionales un intérêt pour l'art actuel, si on arrivait à créer des habitudes culturelles dans la population de toutes les régions du Québec, l'industrie culturelle dans les grands pôles ne s'en porterait que mieux. Les grandes expositions du Musée des beaux-arts ne seraient-elles pas plus fréquentées si toute la population du Québec était préparée à les visiter? D'autre part, comment éduquer cette population si elle doit toujours se rendre à Montréal ou à Québec pour être témoin d'événements culturels importants? Il s'agit donc d'un cercle vicieux. Nous pensons qu'on ne pourra le briser qu'en accordant un soutien plus grand aux organismes qui oeuvrent en région car c'est à eux, je pense, de faire l'éducation de la population région par région. Les organismes qui oeuvrent en région ont justement la mission de sensibiliser les populations aux formes d'art actuelles.

Je ne sais pas si vous connaissez la région des Bols-Francs. On parle souvent de Victoria-ville comme la ville de la poutine et des centres d'achat. En fait, c'est vrai. Nous faisons pitié. Vous connaissez sûrement le FIMAV, ce Festival international de musique actuelle. Avant de présenter les spectacles, ils ont à travailler pendant au moins une semaine à préparer et à transformer une salle de loisir en salle de spectacle. C'est la même chose pour les troupes de théâtre qui oeuvrent dans notre région. Il y a la troupe À mitaine à mi-temps, il y a la troupe à Wilfrid. Chaque fois qu'une pièce est présentée, c'est d'abord un travail d'une semaine pour transformer une salle de regroupement, une salle d'étudiants en une salle de théâtre. Je ne dis pas que la faute revient nécessairement au ministère; je vous dis ce qui est chez nous.

Donc, nous faisons vraiment pitié au niveau de l'infrastructure et, en même temps, il y a une activité culturelle débordante. Nous suscitons l'admiration parce que nous faisons des miracles et, dans ce sens, nous pouvons dire que nous sommes des créateurs. C'est vrai autant pour les services offerts à la population que pour les artistes eux-mêmes. Il faut presque toujours se déplacer à Montréal pour les séminaires de toutes sortes: sur la fiscalité, sur le statut de l'artiste, sur les produits toxiques, etc. Pour les grandes conférences, il faut se déplacer à Montréal. Donc, pour les services, on est bienvenus à Montréal, mais pour se faire voir, il faut repasser le lendemain.

Il nous semble que les recommandations du rapport Arpin à ce sujet ne vont pas régler tous nos problèmes. Bien sûr, on recommande de fournir aux régions les équipements de base. Effectivement, c'est la base, bien qu'une infrastructure ne garantisse pas nécessairement un ensemble de services aux artistes et à la population. On confie aux musées d'État la tâche d'élaborer des programmes d'activités à l'intention des régions. Si ça veut dire de faire connaître les artistes des régions, soit; sinon, qu'est-ce que ça veut dire? Pour nous, cette recommandation prend, à nos yeux, un caractère un peu paternaliste qui témoigne d'une méconnaissance de la problématique des régions et du potentiel des organismes en place.

À notre avis, le rapport arrive un petit peu trop tard, dans le sens que les organismes régionaux se sont déjà pris en main, ils ont déjà bien cerné la problématique et ils ont déjà envisagé des solutions depuis un certain temps. Ce qui manque, évidemment, c'est l'argent. En tout cas, c'est le cas pour nous, au GRAVE. Je veux juste énumérer un petit peu des choses qu'on a faites ou qu'on voudrait faire, mais qu'on ne peut pas faire sans argent. Nous avons organisé, par exemple, en mai dernier, une exposition-échange avec des artistes d'une autre région. Nous avons organisé pour cet automne un atelier en région sur la fiscalité, pour les artistes. Nous avons déjà fait de la diffusion au niveau scolaire et, actuellement, on a un projet qui est en attente de subvention. Depuis un an, nous demandons de l'argent pour faire un répertoire de toutes les galeries, groupements, centres de diffusion dans les régions du Québec, dans le but de créer un réseau provincial d'échange pour les artistes. Pour nous, ce serait une façon de régler, en partie, le problème de l'éloignement. Nous n'avons pas d'argent pour le réaliser.

Nous avons un projet d'échange avec un groupe de jeunes artistes du Mexique. Les premières démarches ont été faites en 1987 et le projet est tout fin prêt. Ce qui manque encore, c'est l'argent pour le réaliser. Ce qui veut dire que, dans notre région, au niveau des arts visuels, nous avons des éléments de solution à nos problèmes, mais il nous manque le financement. Bien sûr qu'on a besoin des musées d'État, bien sûr qu'on a besoin des grands organismes de diffusion, bien sûr qu'on aimerait que le ministère de la culture prenne les dispositions pour nous permettre de nous faire voir ailleurs que dans notre région, mais il nous semble qu'il faut avant tout qu'on reconnaisse et qu'on respon-

sabilise les organismes comme le nôtre en continuant de les subventionner et peut-être davantage. Voilà ce que nous vivons comme problématique au niveau de la polarisation.

Le deuxième volet qui nous inquiète particulièrement, et je pense que vous en avez sûrement entendu parler assez souvent, c'est celui du partage des responsabilités avec les municipalités. Là-dessus, nos craintes sont assez vives. Disons d'abord que, théoriquement, on est d'accord qu'il s'établisse un partenariat avec les municipalités. C'est dans la pratique que les problèmes se posent. Le rapport propose de faire du nouveau ministère de la culture le maître d'oeuvre en matière culturelle, mais, en même temps, il propose un partage des responsabilités avec les municipalités sous la forme d'un partenariat.

D'abord, les municipalités dans les régions ont-elles la volonté et, nous, nous osons dire: Ont-elles la compétence pour assumer ces nouvelles responsabilités? Permettez-nous de citer, encore une fois, notre région en exemple. Le dossier d'une maison de la culture piétine chez nous depuis 1981. Le conseil municipal n'a cessé de répéter le geste du pas en avant suivi de deux pas en arrière, depuis 1981, de sorte que, 10 ans après, bien que le ministère des Affaires culturelles ait donné son aval et débloqué les fonds en 1988, Victoriaville n'a toujours pas son centre culturel. Et, s'il arrive un jour - et là, on dit que c'est une priorité - il sera amputé de sa salle de spectacle. Alors, les problèmes du FIMAV, les problèmes des troupes de théâtre ne sont toujours pas réglés. (21 heures)

Un autre exemple. En septembre, la ville nous a offert un local pour aménager une nouvelle galerie, un local qu'elle nous loue, et ce local, nous avons dû l'aménager nous-mêmes au coût de 700 heures de bénévolat fournies par les membres actifs. C'est vous dire l'intérêt que la municipalité, chez nous, porte à la culture. On ne leur en veut pas nécessairement, mais ce que nous disons, c'est que ces gens-là ne sont pas vendus à l'idée de la culture qu'ils associent d'ailleurs souvent aux loisirs. D'ailleurs, chez nous, le service à la municipalité s'appelle le Service des loisirs et de la culture, et l'appendice date de l'an passé.

Comment peut-on confier la responsabilité d'éduquer une population en arts visuels et dans tout le domaine des arts si les personnes en place n'ont ni l'intérêt, ni la volonté, ni la compétence de le faire? Comment le ministère peut-il prétendre pouvoir arriver à changer ces mentalités des dirigeants des municipalités? Je parle des petites municipalités, parce qu'il y a quand même de plus grandes municipalités où ça fonctionne. Alors, pour nous, c'est un peu utopique parce que nous vivons la situation depuis longtemps et il nous semble que c'est peine perdue. D'ailleurs, le témoignage des municipalités qui sont intervenues dans ce débat à cette commission même, depuis le début, est assez éloquent et vient confirmer nos appréhensions.

D'autre part, il y a d'autres questions qui se posent. À supposer que les municipalités soient encore en mesure d'assumer ces nouvelles responsabilités, qui nous garantit que le transfert de moyens de la part du gouvernement sera proportionnel au transfert des pouvoirs? Qui garantit aux municipalités qu'elles n'auront pas à créer une taxe déguisée sur la culture? Elles ont encore en mémoire le transfert de responsabilités dans le domaine de la voirie, du transport en commun et de la police. Alors, pour elles, ce rapport serait-il un prétexte pour que le gouvernement se désengage financièrement d'un autre dossier? Et, alors, c'est les organismes comme le nôtre et les artistes qui en sont membres qui vont devenir les premières victimes d'un partage de pouvoirs qui n'offrirait pas certaines garanties et qui ne tiendrait pas compte des besoins particuliers de chaque région.

Quant au troisième volet, celui de l'efficacité administrative, il va un peu plus dans le sens des recommandations du rapport Arpin. D'abord, disons d'emblée que nous appuyons fortement la recommandation de rapatrier au Québec tous les pouvoirs en matière de culture pour les raisons que le rapport lui-même donne et, dans le même ordre d'idées, nous croyons qu'il ne faut pas multiplier les paliers d'intervention, mais plutôt essayer de les restreindre pour des raisons d'efficacité et de coût.

Le rapport parle en particulier de discuter de la pertinence des CRC. Nous, nous allons plus loin et nous la mettons en doute, cette pertinence, car - en tout cas, c'est le cas dans notre région - le conseil régional de la culture ne sert pas les besoins réels de ses membres. Son rôle de consultation et de concertation n'a pas d'issue. Comment, en effet, concevoir une concertation entre des groupes qui ont des besoins immédiats différents bien que parents d'une certaine façon?

Encore en exemple notre région. Chez nous, le CRC n'a pas réussi, cette année, à tenir une seule réunion faute de quorum. Alors, pour nous, c'est l'Indice d'un malaise profond. Je pense que c'est un palier inutile, que les directions régionales n'ont pas besoin d'intermédiaire entre elles et les organismes en place et je pense que le contact direct est plus efficace. Par exemple, nous obtenons beaucoup plus de services du Regroupement des centres autogérés du Québec.

Voilà, livrées d'une autre façon, nos objections et nos craintes formulées à partir d'une expérience que les contraintes rendent souvent pénible, mais toujours stimulante à cause des défis qu'elles nous lancent et que nous relevons à grands coups de bénévolat.

Nous voulons travailler avec vous à conférer à la mission culturelle le statut et la place

qui lui reviennent, nous voulons être des partenaires avant et pendant l'application d'une politique sur la culture, nous voulons surtout continuer d'être après son application.

Nous vous remercions de votre attention, Mme la ministre et MM. et Mmes les membres de la commission.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Je vous remercie et je vous souhaite la bienvenue en cette soirée. D'ailleurs, quand on s'était rencontrés en août dernier, on a pu constater, de toute façon, sur place la diversité et aussi toute l'effervescence de la région de la Mauricie-Bois-Francs. Alors, quand on parle des régions et de l'importance des régions - et on s'en était parlé d'ailleurs -là-dessus non seulement je vous l'accorde, mais c'est capital. Alors, ça, c'est un principe qui fait consensus d'ailleurs, évidemment, à la commission et je pense que c'est à ne pas discuter.

Vous parlez de la municipalité et il faut en parler. On se rappelle, quand on s'est vus, le maire était là, puis il y avait eu ce fameux article dans Le Devoir qui notait, justement, le vide, dans la municipalité précisément de Vic-toriaville, quant aux équipements culturels. Vous parlez de votre centre culturel qui, depuis 1981, est censé se bâtir. Vous nous dites que maintenant ça devient une priorité. Il semblait, par exemple, qu'à la municipalité, poussée probablement aussi par les autres, parce que, évidemment, le réveil des autres fait en sorte que tu as l'air fou un peu quand tu restes endormi, il y avait une certaine sensibilisation. C'est Important, la relation avec la municipalité, sans parler, évidemment, de délestage, mais que les municipalités, par exemple, considèrent le domaine culturel aussi important que le domaine des loisirs ou le domaine du sport, ce domaine-là qui a pris tant de place. On se rappelle, on bâtissait beaucoup plus d'arénas. En fait, ça prenait moins de temps pour bâtir des arenas qu'une bibliothèque. Alors, est-ce que vous sentez quand même un certain changement? Vous en avez parlé tantôt, mais je veux quand même être plus spécifique là-dessus, parce que, veux veux pas, le ministère a beau vouloir, à quelque part la municipalité, elle aussi, doit, à son niveau à elle, suivre, sinon c'est peine perdue.

M. Luneau: C'est pour ça, d'ailleurs, qu'on se pose des questions sur les recommandations du rapport Arpin. Comment penser qu'un partenariat entre le ministère de la culture et les municipalités puisse s'établir quand les municipalités ont des réactions semblables? S'il y a un espoir de changement chez nous, c'est uniquement à cause de la politique, disons. C'est peut-être une concurrence avec une municipalité voisine qui va faire en sorte que ça va changer. Ou bien si la population disait: On veut une maison de la culture, c'est sûr qu'il y en aurait une. Le problème, il est, dans les municipalités, politique. Il n'y a personne dans les conseils qui a un intérêt pour la culture et qui veut développer le culturel. On va le faire quand on sera forcés de le faire. Je pense que c'est la problématique chez nous et j'ai l'impression que c'est un peu comme ça dans plusieurs régions.

Mme Frulla-Hébert: Parce qu'on a vu, quand même, des témoignages de plusieurs municipalités. Oui, là, vous avez raison. On se rappelle un peu le témoignage de Magog, de North Hatley, où les maires eux-mêmes avaient soit des galeries, soit des collections, ou étaient écrivains eux-mêmes, peintres. C'est ça. Mais, évidemment, là, c'était effervescent en termes culturels. Donc, d'après vous, la seule solution, c'est vraiment d'avoir sur le conseil ou, finalement, à la mairie quelqu'un qui a cette sensibilité-là, sinon il n'y a pas de...

M. Luneau: Bien, il nous semble, en tout cas.

Mme Frulla-Hébert: Je veux aussi parler de la diffusion des arts en région. Est-ce qu'il y a des mesures qui devraient être mises en place, par exemple, pour favoriser la création et la diffusion des arts, notamment auprès des jeunes créateurs, en région? Tout le volet recherche et développement.

M. Luneau: II y a déjà des mesures qui sont en place. Il y a déjà des programmes du ministère qui favorisent, par exemple, des projets pour la relève. Ce que le rapport propose, c'est des interventions magistrales, disons, au niveau des musées d'État, des organismes de diffusion. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faudrait que le travail qui est fait dans les régions par les organismes soit reconnu parce que c'est un travail de qualité qui se fait. Je pense qu'on en est un peu une preuve dans notre région. On reçoit des grands noms. Malgré une absence d'infrastructures, on réussit à faire des choses, quand même, assez importantes. Je ne sais pas quelle autre mesure le ministère pourrait mettre de l'avant pour faire développer l'art en région, sinon d'encourager des organismes comme le nôtre. J'ai parlé de projets tantôt. Ce projet d'échange avec le Mexique, c'est un projet qui nous tenait beaucoup à coeur et les artistes qu'on a sélectionnés au Mexique, ce sont des artistes de qualité, ce n'est pas des faiseurs d'images. Alors, pour nous, c'était un projet important et ça nous aurait permis aussi d'aller au Mexique. Alors, ce genre de projet là, puisque les grands centres sont difficilement accessibles pour nous, au moins afin de se faire voir dans d'autres régions, de se faire voir ailleurs dans d'autres pays, c'est, pour nous, une voie possible,

une voie à explorer.

Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je passe la parole à ma collègue de Châteauguay.

Le Président (M. Doyon): Elle ne me l'a pas demandée.

Mme Cardinal: Je peux parler, M. le Président?

Le Président (M. Ooyon): Si vous me la demandez, Mme la députée. Mme la députée de Châteauguay.

Mme Cardinal: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Doyon): Je ne peux pas deviner, moi.

Mme Cardinal: Vous soulignez, dans votre mémoire, l'importance d'accroître notre action sur un plan international. Dans votre secteur, quels types d'intervention gouvernementale pourrait-on privilégier, par exemple, pour faciliter cet accroissement au niveau international?

M. Luneau: Bien, nous, ce qu'on souhaitait, c'est que, d'accord, on envoie des personnes à l'étranger, mais on pourrait aussi, je ne sais pas, par l'intermédiaire des universités, faire venir des gens de l'extérieur, pas seulement à Montréal, mais les amener en région aussi. Nous, c'est une chose à laquelle on pense. Plutôt que de toujours envoyer des gens à l'extérieur pour se perfectionner, on pourrait aussi faire venir parfois des gens de l'extérieur chez nous et pas juste à Montréal. Je ne sais pas par l'intermédiaire de quel organisme; moi, je pense aux universités, mais il y a sûrement quelque chose aussi à exploiter de ce côté-là.

Mme Cardinal: Est-ce qu'à ce moment-là les régions... Ce serait, évidemment, avantageux d'avoir ce genre d'échanges, mais vous avez mentionné ce manque d'équipement dans bien des cas qui ne favorise pas toujours, malheureusement, ces échanges. Est-ce que ce serait aussi dans ce sens que vous aimeriez peut-être qu'on y arrive, en centralisant mieux davantage, par exemple, une région pour un point donné quant à une activité au niveau international, comme échange international?

M. Luneau: Oui, bien sûr, on pourrait créer des événements régionaux. D'ailleurs, il y a des régions qui se spécialisent. Chez nous, au niveau des arts de la musique, par exemple, il y a ce Festival international de musique actuelle qui met Victoriaville sur la carte de la musique actuelle. Il y a, à Trois-Rivières, ce Festival de la poésie qui est un événement qui est subventionné par le ministère. Ce genre d'événement là, oui, on pense que c'est efficace.

Mme Cardinal: II y aurait intérêt à se regrouper, à s'orienter vers une sensibilisation.

M. Luneau: Oui.

Mme Cardinal: Peut-être qu'à ce moment-là - on a beaucoup parlé des municipalités - on pourrait aussi développer ce secteur culturel plutôt que, comme vous le mentionnez si bien, le secteur loisirs, assez souvent on ne lui reconnaît pas la même Importance. Merci.

Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la députée. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui. Madame, monsieur, ma première question, et le terme est brusque. Vous ne pensez pas que vous êtes en train de vous étrangler vous-mêmes quand vous dites qu'il faut mettre fin au saupoudrage? Ça risque de conduire à l'institutionnalisation de certains groupes au détriment de plusieurs autres, particulièrement les organismes de la relève, les organismes culturels des régions, des organismes qui sont marginaux en raison de leur caractère peut-être non conformiste, novateur, original dans leur production.

Mme Domingue (Thérèse): Non, non, tout dépend de quelle façon vous interprétez le saupoudrage. Nous, quand on a parlé, en tout cas, qu'on aurait peut-être voulu limiter le saupoudrage, c'était, justement, pour un peu renforcir un projet qu'on avait peut-être, avec un répertoire, de former comme un réseau. Il y a beaucoup de projets où il y a des dédoublements, finalement, en région. Avec l'éloignement, souvent on fait les mêmes projets ou presque les mêmes. Il y a un dédoublement de coûts qu'on doit assumer pour chacun des côtés. Avec un outil, où il pourrait y avoir une collaboration, à ce moment-là, sur beaucoup de projets individuels, il y aurait des sommes d'argent qui pourraient être récupérées.

M. Boulerice: Bon, si je vous comprends bien, vous dites: Non, on n'est pas contre le saupoudrage, sauf que vous dites qu'il y a dédoublement et l'économie d'échelle qui pourrait être faite en évitant le dédoublement permettrait de consolider. Mais vous acceptez qu'un petit organisme se retrouve en situation de demande et, même si la portion de subvention n'est pas extrêmement forte, ça peut être le déclencheur de quelque chose, à un moment donné. C'est dans ce sens-là que vous l'avez dit.

Mme Domingue: Oui, le saupoudrage n'était pas fait dans le sens qu'un organisme... Je pense qu'on ne peut pas dire un petit organisme. Il a

quand même sa valeur, peu importe. Ce n'était pas dans ce sens-là. C'était vraiment dans le but de toucher au dédoublement qui se fait présentement de toute façon.

M. Luneau: Si vous permettez. Il y a de l'argent aussi qui n'est pas versé directement, mais il y a souvent de l'argent qui est versé indirectement, je ne sais pas, par l'intermédiaire d'un député, par exemple, et ça, on considérait ça comme du saupoudrage parce que ce n'est pas fait suivant les voies officielles. Pour nous, le saupoudrage, c'était ça, c'était de l'argent qui était dispersé un peu partout, mais non pas par la voie officielle.

M. Boulerice: D'accord. M. Luneau, pourquoi souhaitez-vous que la cartographie qui est dans le rapport Arpin ne se limite qu'aux équipements, mais ne s'étende pas aussi aux centres de création? Enfin...

M. Luneau: On pense plutôt le contraire. Nous, ce qu'on voudrait...

M. Boulerice: Non, non, c'est ça que j'ai dit.

M. Luneau: Oui.

M. Boulerice: La fatigue aidant, M. Luneau, vous devez être indulgent à mon égard. La question que je vous posais est: Pourquoi souhaitez-vous que ça s'étende aussi aux centres de création?

M. Luneau: Oui, parce que c'était un de nos projets pour lesquels on a demandé une subvention. Pour nous, c'était important de répertorier dans toutes les régions du Québec tout ce qui se faisait, toutes les galeries, tous les centres d'artistes, dans le but d'arriver à créer un réseau entre les artistes des régions. Alors, c'est une façon pour nous de créer un chemin parallèle pour sortir les artistes des régions et leur permettre d'aller ailleurs. Alors, c'est pour ça qu'on était d'accord avec la recommandation du rapport Arpin et on voulait qu'elle aille plus loin, que ce répertoire se fasse pour tous les types de galeries, de centres d'artistes et tout ça.

M. Boulerice: On est sur la même longueur d'onde parce que je lisais votre mémoire et j'écoutais votre intervention tantôt. Oui, il y a une culture en région, dans le sens qu'on y amène des choses, et vous n'êtes pas fermés. Vous dites: Bon, on est ouverts, cela va de soi. Mais vous parlez également de la culture des régions, puisque les régions ont développé, si vous permettez ce mot familier, mais qui vient du langage militaire, des créneaux particuliers, etc. Donc, il y a un potentiel de création, donc il faut nécessairement le soutien à la création et aux organismes aussi qui, à un moment donné, sous-tendent ceci. Un des moyens suggérés de soutien est venu de plusieurs intervenants qui disaient que les régions devaient être dotées d'enveloppes autonomes et qu'elles étaient en mesure de gérer elles-mêmes ces enveloppes. Est-ce qu'une région comme la vôtre souscrit à ce principe et répond: Oui, présent, nous, on est capables, à partir d'une enveloppe, de gérer?

M. Luneau: Quand vous parlez des régions, est-ce que vous parlez des municipalités ou si vous parlez...

M. Boulerice: Non, je parle des régions. Vous, c'est la Mauricie-Bois-Francs, comme il y a le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il y aura nos amis de Lanaudière tantôt.

M. Luneau: Mais je comprends mal, parce que, là, je me demande: L'enveloppe, comment elle est distribuée? Elle est distribuée pour un partage, mais vous voulez dire que c'est les organismes qui vont se partager l'enveloppe?

M. Boulerice: On déterminerait: bon, il y a un budget pour la culture, mais on donnerait aux régions leur enveloppe, une enveloppe monétaire. Écoutez, votre région, bassin de population... Enfin, il pourrait y avoir une foule d'éléments à considérer. Voilà, la région a tant et c'est vous, en région, en concertation, qui gérez cette enveloppe.

M. Luneau: Moi, je pense que la concertation est toujours assez difficile quand il y a beaucoup d'organismes à caractère différent. Je pense qu'une fois le partage fait les organismes sont en mesure de gérer les budgets. La problématique est peut-être au niveau du partage. Mais je pense que, oui, théoriquement, les régions sont en mesure d'administrer l'enveloppe parce que, en tout cas dans notre région, les organismes qui sont là sont des organismes sérieux, ils sont là depuis un certain temps, ils ont fait leurs preuves. Je pense qu'ils sont en mesure de le faire, théoriquement pariant.

M. Boulerice: D'accord. Je vous remercie.

Le Président (M. Ooyon): Merci beaucoup, M. Luneau. Mme la ministre, un mot de remerciement, si vous voulez bien.

Mme Frulla-Hébert: Moi aussi, je me joins à mon collègue pour vous remercier. Évidemment, encore une fois, on va travailler très fort sur votre municipalité - ce n'est pas un honneur d'être un désert - d'une part, et, deuxièmement, évidemment, parce qu'on est quand même un ministère très décentralisé, aussi au niveau des programmes et des ententes triennales. Alors, ça

aussi, au niveau de la gestion, ça devrait aider. Alors, merci d'être ici.

M. Luneau: Nous vous remercions beaucoup.

Le Président (M. Doyon): Alors, merci à vous, M. Luneau, à Mme Domingue, d'être venus nous rencontrer. La commission suspend ses travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 22)

(Reprise à 21 h 24)

Le Président (M. Doyon): Maintenant que le Conseil régional de la culture de Lanaudière a pris place à la table de nos invités, je lui souhaite la bienvenue. Ils sont ici avec nous depuis maintenant quelque temps. Ils savent comment nous procédons. Je leur demande tout simplement de bien vouloir s'identifier pour les fins de la transcription de nos débats. Ensuite, vous disposerez de 10, 15 minutes pour nous entretenir de votre sujet et, après ça, la conversation s'engagera avec les membres de la commission jusqu'à ce que je suspende ou ajourne les travaux. Vous avez la parole.

Conseil régional de la culture de Lanaudière

Une voix: Est-ce qu'on commence par la gauche?

Mme Ross (Céline): Céline Ross.

M. Gaudet (Stéphane): Stéphane Gaudet, du CRC.

Mme Martin (Françoise): Françoise Martin, administratrice au CRC.

M. Morissonneau (Christian): Christian Morissonneau, président.

Mme Beauchemin (Lise): Lise Beauchemin, directrice du CRC.

Mme Barrette (Danielle): Danielle Barrette, je suis une employée du CRC.

Le Président (M. Doyon): Soyez les bienvenus, tous et chacun et chacune.

Mme Martin: Merci. J'ai le plaisir de vous faire la lecture. J'imagine que ça devient lourd et pénible pour tout le monde ici présent. Après une heure et demie d'écoute, on vous lève notre chapeau, parce que, vraiment, c'est incroyable, toute cette distance et ces longs textes. Mais quand même, il nous fait plaisir d'être ici ce soir et on remercie Mme la ministre Frulla-Hébert de nous accorder l'opportunité de présenter à la commission sur la culture le point de vue de régionalistes, l'intérêt des créateurs et de récepteurs, d'organisateurs, de consommateurs, de partenaires et de penseurs du champ culturel lanaudois. Ça serait beaucoup plus drôle de chanter, de danser ou de vous faire un petit numéro de théâtre, mais, quand même, on va essayer de vous situer un peu.

Certainement que la majorité des gens ici nous connaissent déjà comme région. À proximité de la région de Montréal, Lanaudière est la région où, depuis plus d'une dizaine d'années, nous enregistrons le plus haut taux d'augmentation de la population au Québec. La moyenne enregistrée est environ de 10 % par cinq ans, nous plaçant loin devant les Laurentides, Laval ou encore la Montérégie. L'accroissement de la population est majoritairement imputable à l'arrivée de nouveaux résidents, particulièrement dans les secteurs du sud, soit Repentigny, Le Gardeur, Terrebonne et Mascouche. Il importe de mentionner que plus de 51 % de la population lanaudoise réside dans six municipalités de Lanaudière. Ces municipalités, comme je disais tantôt, sont dans le sud et sont en pleine croissance. Si on se transporte dans le temps, en l'an 2046 on prévoit une augmentation de l'ordre de 45 %. Présentement, au-delà de 320 000 personnes vivent réparties en six MRC et dans une réserve attikamek, soit la Manouane.

Chez nous, la grande entreprise est peu présente. L'entreprise d'environ 50 employés, en quantité plus abondante, se retrouve dispersée sur tout le territoire. Les services municipaux, gouvernementaux, de santé, de services sociaux et scolaires demeurent les géants de l'emploi professionnel. En plus de la motoneige et de la villégiature, Lanaudière est devenue un attrait touristique majeur avec l'amphithéâtre du Festival international de Lanaudière, le Musée d'art de Joliette, le festival Fleuve et musique de Repentigny et I'île-des-Moulins que vous connaissez sans doute.

Lanaudière n'est pas uniquement un lieu de résidence secondaire pour artistes à carrière nationale, mais aussi un milieu géniteur d'artistes créateurs et producteurs. On pense à Angèle Dubeau, Robert Marien, Réjean Ducharme, Luc Beauséjour, Pascale Giguère. Après avoir obtenu une formation de base au collégial, l'artiste lanaudois doit compléter ses études universitaires hors région. Certains y reviennent pour exercer leur profession et toutes les contingences rattachées; ça veut dire qu'ils peuvent passer de la conciergerie au marketing jusqu'à l'enseignement.

Enfin, chez nous, le consommateur lanaudois apprécie et encourage plusieurs formes d'art, c'est important de le souligner, parce qu'on s'intéresse tout autant au traditionnel qu'à l'art actuel, on s'intéresse au "country" ou à la musique classique, et c'est chez nous et dans les régions avoisinantes qu'on peut apprécier ces

arts. Mais l'accroissement récent de la population nous oblige à constater des besoins d'équipements culturels, des besoins de bibliothèques et de salles de spectacle. Vous connaissez aussi la réforme Ryan comme nous et, chez nous, au Conseil régional de la culture, on retrouve cinq maires dont les municipalités de 1500 à 5000 habitants ne prétendent aucunement posséder l'expertise des besoins de leur population, voire même des préoccupations culturelles. Il y a peut-être des secteurs où il se sentent plus à l'aise, mais en termes culturels, c'est très fragile. Pour Mme Lise Perreault, par exemple, maire de Saint-Côme, les municipalités lanaudoises ne sont encore qu'aux balbutiements en ce qui a trait à leur présence et à leurs activités sur le plan culturel.

Les intervenants de notre milieu viennent au Conseil régional de la culture pour chercher de l'information, autant au niveau des lois, des ressources à accorder aux artistes, aux responsabilités envers l'électeur, les consommateurs et les protecteurs des biens culturels. Le Conseil régional de la culture de Lanaudière, ainsi que certains groupes des milieux culturels lanaudois s'inquiètent de certains propos du rapport Arpin recommandant la disparition du saupoudrage. Vous en entendez parler très régulièrement, mais, pour nous, ce financement mineur symbolise le droit à la vie culturelle pour l'artiste. En 1990-1991, chez nous, une troupe de théâtre a reçu 15 000 $ de subvention du ministère des Affaires culturelles. Cette mise de fonds leur a permis d'aller chercher d'autres subventions à Emploi et Immigration Canada. Cette reconnaissance de leurs pairs leur a insufflé énergie et combativité. Sept comédiens marionnettistes et gérants ont pu travailler un an avec ce financement de base. Ils ont monté des tournées à travers les régions du Québec, rendant accessible la vie culturelle à l'ensemble des citoyens et des citoyennes. La vie artistique des régions a autant besoin d'argent que les organismes, événements ou productions de Montréal et Québec.

Nous sommes conscients que plusieurs défis restent à relever pour le créateur: une administration transparente, un partenariat financier avec les municipalités et les entreprises privées, un déblocage avec les médias. Du côté du consommateur, des crédits d'impôt faciliteraient des acquisitions. La proximité d'équipements augmenterait la fréquentation. Une place prépondérante aux arts et à la culture dans les médias accorderait davantage de crédibilité aux produits offerts.

Pour nous, l'accroissement de la population fait, nul doute, que l'on choisit Lanaudière pour sa qualité de vie. On y habite de plus en plus car on y trouve une excellence dans le quotidien. Un ministère des Affaires culturelles ou de la culture doit considérer les besoins des régions, ainsi que l'identité de Lanaudière. Le Conseil régional de la culture de Lanaudière désire souligner son expertise du fait régional lanaudois et vous répète ses services d'information, de collaboration, de concertation, de rassemblement auprès de la population lanaudoise et du ministère des Affaires culturelles.

Ici se termine la partie intellectuelle et théorique. J'aimerais profiter d'une petite minute pour ajouter peut-être des éléments qui viennent du coeur, parce que je pense que, personne ne peut le nier, les gens qui sont ici et d'autres dans Lanaudière travaillent fort et désirent que, par des petits gestes; la reconnaissance du milieu puisse se poursuivre et puisse être vécue chez nous.

Contrairement à d'autres - puis on sait qu'il n'y a pas de règle magique, qu'il n'y a pas de solution miracle - on pense que c'est important de maintenir une complémentarité entre les municipalités, le ministère des Affaires culturelles, le Conseil régional de la culture dans chacune des régions, les organismes et les artistes. Il y a des tiraillements, il y a des incompréhensions, mais je pense que c'est la base du développement et de l'avancement des artistes et des organismes qui les représentent.

On désire vraiment conserver chez nous la pratique et la diffusion, dans nos milieux, parce que ce qui se vit à Repentigny, à Joliette, à L'Assomption, à Mascouche ou à Terrebonne, c'est précieux pour les gens qui y vivent et qui vont y trouver un intérêt. C'est bien agréable quand on est près de Montréal, comme nous à Terrebonne, de pouvoir s'y rendre et d'avoir une autre vie culturelle, différente, parce qu'elle est vraiment différente. Mais, chez nous, c'est important de maintenir le développement du potentiel de créateurs parce qu'il a un impact social, économique et culturel très fort. Si on pense à l'île-des-Moulins, au Festival de peinture de Mascouche, à des organismes comme les Petits pas jacadiens, au symbole de notre région, la ceinture fléchée, il existe des choses et c'est important qu'on ait les moyens de poursuivre ce développement.

Une dernière petite parenthèse. En tant que bibliothécaire responsable des arts et de la culture à la ville de Terrebonne, j'aimerais attirer votre attention sur l'absence des bibliothèques dans le rapport Arpin; vous le savez déjà, on vous l'a dit à plusieurs reprises. Il est certain que le rapport Sauvageau existe et qu'il met en application tout doucement certaines des recommandations qui avaient été faites. En tout cas, pour le vivre chez nous, puis le Conseil est de cet avis, l'intégration de la culture et des bibliothèques est quand même un élément et un point forts. Ça ne règle pas tous les problèmes, mais c'est important, quand on parle de culture, qu'on parle de bibliothèques en même temps, et les gens ne sont pas toujours rassurés sur cet état de fait.

Je vous remercie de croire à la passion culturelle qui passe par Saint-Côme, à L'Assomp-

tion, à Joliette et à Terrebonne. Merci de croire encore au Conseil régional de la culture de Lanaudière et d'avoir bien voulu nous accueillir ce soir.

Le Président (M. Doyon): Merci beaucoup. Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: En fait, c'est un plaisir pour nous, d'ailleurs, de vous accueillir, d'une part. Deuxièmement, et notre député m'en faisait mention, effectivement quand on parle de Lanaudière, on a souvent en tête, évidemment, le Festival. Et, comme on le mentionnait, le Festival, bon, ce n'est pas tout, et on le sait, parce qu'il y a tout ce qui se passe à Terrebonne, ce qui se passe aussi, comme vous l'avez mentionné, partout ailleurs. Mais c'est sûr qu'il y a le Festival de Lanaudière, à Joliette, et on a été très actifs dans ce dossier-là, évidemment. Mais ceci dit, c'est une région qui, malgré sa périphérie versus Montréal, est très active elle-même, en soi.

Ceci dit, je m'en voudrais de ne pas laisser quand même, M. le Président, mon temps à notre député, si la commission et vous, vous le voulez bien.

Le Président (M. Doyon): Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Berthier puisse intervenir?

Une voix: Est-ce qu'on peut voir les questions avant?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Doyon): Pas plus que les réponses.

M. Houde: Je pense qu'elles vont aller dans le même sens, jusqu'à un certain point, du fait qu'il connaît la région. Merci, M. le Président. Avec votre permission, j'aimerais saluer les gens de la belle grande région de Lanaudière qui part de Repentigny, Le Gardeur et qui va jusqu'à Saint-Michel-des-Saints inclus. J'aimerais en même temps féliciter votre président du CRC de sa nomination comme conseiller à la paroisse de Saint-Zénon, qui est dans mon comté, nouvellement arrivé, élu presque immédiatement. Il faut croire qu'il a des qualités pour être capable de remplir cette charge-là. Félicitations, M. Moris-sonneau.

Ma première question. Le passé d'un organisme le porte toujours garant du présent et de l'avenir. Quelles sont les actions du Conseil régional de la culture de Lanaudière qui ont servi le développement culturel et économique régional?

M. Morlssonneau: II faudrait que je vous fasse un petit historique. Vous savez que nous, à l'inverse de certains projets, on est passés de la souveraineté-association à la souveraineté. On était mariés, de gré ou de force, à notre voisin qui s'appelle les Laurentides et on n'arrivait pas à faire un mariage d'amour. Alors, on a décidé que peut-être on pouvait exister "autonomique-ment". Et, avant que la région soit reconnue, puis, bon, mon Dieu! on a payé ça cher, le budget a été un peu renié, on le paie encore d'ailleurs, on n'a jamais pu ajuster notre budget après ce divorce-là. Il en est des organismes comme des couples: c'est très coûteux de se séparer. Mais, tout de suite, dès le sommet économique de 1983, le Conseil a été le maître d'oeuvre du symbole régional. Je me rappelle, à Joliette, on l'avait... Les gens nous ont pris très, très vite comme le porte-parole de la culture, même presque l'image. On a participé à tous les schémas d'aménagement. Toutes les MRC nous envoyaient leurs brouillons qu'elles étaient en train de faire avec des firmes ou entre elles, et on leur disait: Regardez, vous avez oublié telle ou telle chose. La plupart en ont tenu compte, ils ont intégré nos recommandations.

Par exemple, on a fait un guide aussi, qu'on appelle le Guide de Lanaudière, qui est encore unique dans les régions du Québec, il n'y a pas l'équivalent encore. Eh oui! on avait été un peu impérialiste, on avait embarqué ia MRC des Moulins que les gouvernants hésitaient à laisser dans un bloc, qui devait s'appeler Laval bloc nord, ou dans les Laurentides ou chez nous. On a été assez visionnaires pour penser que Terrebonne faisait partie de Lanaudière. Les gens de Terrebonne sont bien contents d'en faire partie. On a fait une exposition, Histoire de la région verte. On a monté des dossiers. Regardez le plus gros dossier; si vous alliez dans les filières du Conseil, vous verriez "vieux palais de justice de L'Assomption", qui est une réussite au sommet économique. Tout le monde n'a fait que des éloges de la dame qui est la cheville ouvrière, ou la "ma tante" comme je l'appelle, du développement culturel de L'Assomption, à travers son vieux palais de justice. Les projets sont pratiquement tous passés par le Conseil. Le dernier sommet économique a été une grande réussite culturelle et je pense que le Conseil a contribué à ça.

Tous les créateurs, tous les artistes, tous les gens qui ont eu besoin d'assistance à travers les programmes du temps où on avait encore des jurys autonomes, qu'on a perdus depuis pour toutes sortes de raisons... Entre autres, en patrimoine, c'était nous qui décidions où devait aller l'argent; maintenant, on le partage, c'est interrégional. Le sommet économique. On a été au CRD et je me rappelle m'être battu personnellement pour qu'on ait la ceinture fléchée comme symbole, donc un produit culturel et non quelque produit inventé comme on en voit souvent. On a été les membres fondateurs du sommet économique permanent, ce qui fait qu'on

a un siège d'office, membres fondateurs de l'office du tourisme et ainsi de suite. On nous voit dans beaucoup d'organisations qui naissent et qui vivent encore de la belle façon.

Je pense qu'on est un outil de concertation, donc politique. Je pense aussi qu'on a beaucoup contribué à la construction de la reconnaissance régionale. Alors, nous savons trop, au Conseil, ce qu'est Lanaudière pour que, d'un seul coup, le rapport Arpin l'oublierait et ferait que, après tout, Lanaudière ayant la chance - ou malchance, comme vous voudrez - d'être à la périphérie soit considérée comme la grande banlieue, le terrain de Jeux dans le Grand Montréal. Non. Au moment où Terrebonne s'identifie aussi à la MRC des Moulins, Repentigny à la MRC de L'Assomption, il est en train de se créer un sens de l'identité, puis voilà que ça nous échapperait. Non. On ne le prend pas comme Conseil, puis on ne le prend pas comme intervenant régional.

Aussi, la plupart d'entre nous, on a passé tellement de temps, bénévoles dans des réunions, des concertations, des déplacements qui, je pense, ont évité du travail a des fonctionnaires. Puis, vous savez très bien que les fonctionnaires sont quand même payés plus cher que les bénévoles chez nous. Donc, tout ce temps depuis des années qu'on consacre à ce que la région ait du sens, que les artistes aient du sens d'y vivre, je pense que ça vaut la peine - on vous le rappelle ici et on vous remercie de nous avoir entendus - qu'il y ait quelque chose comme Lanaudière région reconnue et un Conseil pour s'en occuper à travers nos programmes. Nous sommes, les administrateurs et les gens qui y sont membres, des gens sincèrement convaincus que le développement culturel peut passer par un organisme.

Regardez, Françoise l'a dit tantôt, il y a cinq maires parmi nous et on est en train de créer un nouveau poste qui permettra un autre siège de maire. Ce qui fait que la vision, au moment où les gouvernants pensent qu'on peut décentraliser vis-à-vis des municipalités, on l'applique, nous, on a un représentant de chaque MRC chez nous, pas juste disciplinaire. Pour toutes sortes de raisons, je pense que Lanaudière doit être gardée comme région autonome et pas oubliée dans le rapport, avec son Conseil où les gens sont sincèrement intéressés au développement. Je vous remercie.

M. Houde: Merci, M. le président. Tantôt, vous avez noté qu'il y a des choses qui vous échappent encore. Vous savez que la région est bien jeune.

M. Morissonneau: Oui, j'aurais pu le dire.

M. Houde: Elle est bien jeune pour être reconnue officielle. Ma deuxième question. Une partie du mémoire du CRCL touchait le financement des arts et de la culture. En région, est-il plus difficile de trouver le financement?

M. Morissonneau: Je vais passer à Stéphane...

M. Gaudet: Je vais prendre la position d'un organisme dans une région comme Lanaudière, un petit organisme. La ministre l'a souligné, Lanaudière est connue par son Festival, c'est évident, par son musée, par de grandes activités comme le Festival de Mascouche, le festival Fleuve et musique. Mais, parmi tout ça, il y a des gens qui oeuvrent à la base, qui oeuvrent dans de petits groupes, qui ont des centres d'intérêt qui leur sont typiques. Ces gens-là, face à des décisions parfois... On a parlé, et vous en avez certainement entendu parler, de la question du saupoudrage. Pour ces gens-là, c'est la survie. Qu'est-ce que vous voulez? (21 h 45)

Quand on annonce une subvention de 2 000 000 $, 3 000 000 $, de plusieurs millions à un gros organisme, eux, ils traversent trois phases. Premièrement, la colère: Les maudits, c'est rien qu'eux autres qui ont l'argent, puis nous autres, on n'a jamais rien. Deuxième phase, la crise de larmes: On n'est bons à rien et on est tristes et, mon Dieu! qu'on fait pitié. Pour finalement aboutir à dire: Bof! ça a marché l'année passée; on va recommencer encore cette année, ça a l'air. Bon, bien, si ça a marché depuis tout ce temps-là, c'est parce qu'il y a des bénévoles en arrière de ça qui travaillent très fort et ces gens-là finissent par... On devient fatigués de dire: Bof! Bof! on va s'arranger. Bof! on va s'arranger. Mais vient un temps où, à force de dire des "bof!", on ne va pas plus loin. On n'a pas la capacité de se développer, on n'a pas la capacité de planifier à long terme.

Là où la difficulté est encore plus grande, c'est que ces organismes-là, les gros organismes les court-circuitent un petit peu parce que ces gens-là, quand vient le temps d'aller chercher du financement au niveau du secteur privé, c'est très difficile. Ils vont cogner à la porte d'une compagnie comme Scott Paper, les Papiers Scott, et on leur dit: Désolé! nous, on a tout donné au Festival. Bien, c'est une réalité dans les régions et, dans la région de Lanaudière, c'est très vrai. Pour l'avoir vécu moi-même, je vous dis que ça fonctionne comme ça.

Donc, à ce niveau-là, c'est difficile de dire: Bon, sur qui allons-nous nous rabattre? Au niveau du gouvernement? Difficile. On est petit, on est plein de bonne volonté et on veut bien, mais ce n'est peut-être pas assez. Bon, on va aller voir quelqu'un qui nous connaît peut-être mieux, on va aller voir les municipalités. Les municipalités, par les temps qui courent, ne sont pas très, si on peut dire, ouvertes à de nouveaux investissements, surtout pas au niveau culturel. Dans un avenir prochain où, peut-être, les finances finiront par s'améliorer et où la chose

culturelle sera plus développée au niveau des municipalités, je crois que ça va être une possibilité à envisager. Mais, pour ce qui est de maintenant, à moyen et court terme, il n'y a pas d'argent à aller chercher à ce niveau-là. Déjà, les quelques municipalités qui font leur effort ont fait leur effort maximal. Au niveau d'une petite municipalité, on peut difficilement dire: Bon, pourriez-vous nous débloquer 30 000 $, 40 000 $ ou 50 000 $? Ce n'est pas évident du tout, du tout, du tout. Et surtout, ce n'est pas évident de faire accepter ça par... Les élus municipaux sont peut-être prêts à le donner, mais faire accepter ça par la population, ce n'est pas toujours évident, même si la cause est bien belle, est bien bonne.

En région, pour se financer, c'est très difficile. Il faut faire preuve d'imagination. Souvent, on leur reproche leur manque de saine gestion. C'est un petit peu difficile d'être bon gestionnaire quand on n'a pas les fonds. C'est difficile de dire: On va avoir nos choses, on va planifier nos projets en fonction de ce qu'on a. Quand on n'a rien, on ne peut pas faire grand-chose. On fait ce qu'on peut. Donc, on ne peut pas leur reprocher leur manque de gestion. Quand tu n'as rien à "gestionnei*, tu ne peux pas "gestionner" beaucoup. Ce n'est pas leur faute.

Deuxièmement, c'est le niveau bénévole, ce sont des gens qui, justement, donnent leur temps, qui donnent souvent leur argent, ils s'investissent beaucoup. Ce n'est pas des citrons, ces gens-là, il faut arrêter de les presser. Quand c'est toujours les mêmes, le "bof!" devient pesant. En région, c'est très difficile pour les petits organismes et pour les petits organismes qui, éventuellement, pourraient percer et devenir de grands organismes. Qu'on pense au Festival, ça ne s'est pas lancé du jour au lendemain. En région, on doit faire des efforts, mais ces efforts-là doivent être reconnus et je pense qu'il serait temps qu'au niveau politique on reconnaisse les efforts qui sont faits et qu'on donne plus qu'une tape dans le dos et de dire: Félicitations. Je pense que ce serait Important de dire: Allons-y donc et procédons.

Le Président (M. Doyon): Merci. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Houde: Je n'ai pas terminé, M. le Président.

Une voix:...

M. Houde: O.K. Allez-y, allez-y, allez-y. Excusez-moi.

Une voix: Le temps est écoulé pour nous.

M. Boulerice: Je suis prêt à consentir, M. le Président, si vous voulez être tolérant...

M. Houde: Allez-y. Je reviendrai par la suite.

M. Boulerice: ...une question de plus de la part de mon collègue, le député de Berthier.

Le Président (M. Doyon): Alors, allez, M. le député de Berthier, et réponse rapide, s'il vous plaît.

M. Houde: Merci. Dans votre mémoire, vous affirmez qu'il faut d'abord assurer la collaboration, la sensibilisation et la concertation entre les municipalités. Ma question a deux volets. Que fait le Conseil régional de la culture de Lanau-dière à cet égard? Avez-vous des suggestions sur les moyens qui seraient les plus efficaces pour atteindre un tel objectif? Allez-y, M. Morisson-neau.

M. Morissonneau: Je l'ai dit tantôt, je l'a! évoqué, on a un représentant par MRC et on a la chance que cinq maires siègent avec nous, cinq maires qui y croient. Alors que vous savez que la plupart sont occupés à toutes sortes de réunions municipales, des congrès de l'Union des MRC, de l'Union des municipalités, ils viennent chez nous en croyant que les municipalités ont leur part à faire. Comment vont-ils le faire? Ça reste la grande affaire au moment où les budgets risquent d'être alourdis pour toute autre chose que la culture, entre nous, là. Mais ils y croient et je pense que c'est une de nos réussites au Conseil que d'avoir réussi à sensibiliser au moins quelques municipalités et d'avoir réussi à sensibiliser toutes les MRC. Alors, non seulement on a déjà cet acquis-là, mais on veut le grossir avec un poste nouveau qui sera clairement identifié comme municipalité. Les moyens après, je veux dire, les gens retournent chez eux, en parlent au conseil municipal. Mais il est évident que les MRC croient en nous en déléguant leurs représentants élus. Je pense qu'on a réussi cet objectif-là, la sensibilisation, ou on est en bonne voie de le faire, en tout cas.

Le Président (M. Doyon): Merci. M le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, Mme la ministre, chers collègues, surtout chers amis, quand vous entendez la fougue et la conviction de M. Morissonneau, ne vous inquiétez plus. Si vous retrouvez la même fougue et, j'ose espérer, la même conviction quand le député de Joliette et celui de Sainte-Marie-Saint-Jacques interviennent en Chambre, c'est un trait caractéristique. J'en profite, d'ailleurs; M. Chevrette m'a demandé de vous présenter ses excuses. Il est vraiment désolé, mais un inconvénient de toute dernière minute l'empêche, malheureusement, d'être à la commission et soyez certains qu'il le regrette profondément.

Mme la ministre, j'aurais le goût - ce serait insulter nos invités - de me lancer et de vous parler de ma région natale, parce que c'est une région qui est aux marches de Montréal. C'est une région - et je pense que nos amis l'ont bien dit - qui n'a jamais voulu se laisser satelliser par la métropole. Elle a toujours voulu, cette région, développer sa personnalité, en jouant sur ses forces et en se disant quelquefois que ses faiblesses pouvaient, à quelques occasions, se retourner et devenir des forces.

Je vous ai écouté tantôt parler de l'absence d'un discours plus articulé au niveau des bibliothèque, dans le rapport Arpin. Mais le centre de la vie culturelle dans ma ville natale - et vous allez voir, au fur et à mesure que je vais parler avec vous, que je vais reprendre les "J" de Joliette et de Saint-Jacques, l'accent va me revenir tranquillement - c'était la librairie René Martin, sur la Place Bourget, qui était un salon littéraire presque. Et ça se poursuivait à la bibliothèque qui était extraordinaire et qui était également une galerie d'art avec des Krleghoff extraordinaires, puisque les Clercs de Saint-Viateur étaient extrêmement présents. Et ça l'était également à L'Assomption avec les prêtres séculiers qui avaient un collège où il y avait une énorme activité - elle est encore là - culturelle. Et je pourrais encore rattacher toutes les ficelles qui lient les villes et les municipalités de ce territoire et, effectivement, mentionner Terre-bonne qui est peut-être un peu plus jeune que Joliette ou L'Assomption, mais qui n'en a quand même pas perdu en qualité. C'est une région, oui, qui a produit peut-être beaucoup de politiciens, de Barrette à Chevrette, de Masse à Boulerice, si vous me permettez de me citer, en bifurquant par Marcoux, Roch LaSalle et Georges-Emile Lapalme.

Puis, c'est une région, effectivement, aussi qui a donné au Québec beaucoup de grands noms. Je ne veux pas vous faire le reproche, parce que c'est toujours odieux, une enumeration, on oublie toujours quelqu'un. Mais il y en a une en particulier pour laquelle j'ai toujours une énorme affection, Mme Lasnier qui est sans doute une des plus grandes poétesses québécoises. J'allais saccager son jardin quand j'étais jeune. Que voulez-vous? Mais j'ai été initié à la poésie en guise de réprimande et je me sens beaucoup mieux maintenant. J'aimerais ça que des jeunes puissent avoir une telle réprimande. Saccagez un petit peu le jardin de la voisine et vous allez connaître la poésie; c'est merveilleux.

Ceci étant dit, puisque la nostalgie n'a qu'un temps et qu'il faut quand même penser à l'avenir, vous connaissez ma position quant aux conseils régionaux de la culture. Elle est très claire. Je n'ai jamais dévié de discours depuis six ans. Sauf que je ne vous le cacherai pas, certains intervenants disent: Nous, le conseil régional de la culture, on ne sait pas à quoi ça sert, on n'est pas intéressés, etc. Qu'est-ce qui a fait que ce conseil de la culture - qui a été bicéphale un certain temps et maintenant vous avez pleine et entière souveraineté, tout en continuant de dialoguer et d'échanger avec vos voisins et amis des Laurentides - a réussi à prendre une place aussi importante dans notre région?

M. Morissonneau: Regardez. Ce n'est pas tant le nombre de gens qui y croyaient que... Bien, j'ai un mot qui est peut-être démodé, mais je pense qu'on avait la foi. Il y a plusieurs années - je n'ai pas toujours été président, mais il y a longtemps, j'allais dire, que je milite, mais je n'aime pas ce mot-là - que je m'implique, puis d'autres... Il y a un carré de fidèles qui, je veux dire, ont fait... Regardez. On faisait des tournées de MRC. On allait expliquer aux gens qu'est-ce que c'était que le Conseil. Et je pense que, pour toutes les actions variées, pas juste appliquer les programmes, on n'a jamais doublé les fonctionnaires. On les a même complémentés. Ce n'est même peut-être pas assez. On allait plus loin que ce que pourra jamais faire un ministère dans une région, c'est-à-dire prendre des initiatives pour faire connaître la région, des conférences, par exemple, se laisser inviter par l'UPA. Il y a eu les états généraux du monde rural. Bien, ils ont invité le président du Conseil régional de la culture à aller parler: C'est quoi? Qu'est-ce que la culture aurait à dire sur le monde rural, la culture historique? Décider de faire un guide, ce n'était pas écrit dans notre charte ou dans nos objectifs, ni dans les moyens de les réussir. On a fait un guide. Ça s'est diffusé. Je veux dire, tout le monde ou toutes les municipalités ont ce guide-là. Il se vend encore à la librairie Martin qui a déménagé, parce que les choses changent dans ce bas monde; elle est rendue sur une rue banale maintenant, mais on y vend le guide. Tu sais, des tas d'actions de ce genre-là. Une foire culturelle à Rawdon; mon Dieu! ça remonte déjà à 1983. Toutes sortes d'initiatives.

Comme je l'ai dit tantôt, on était souvent dans les entreprises pionnières, l'office du tourisme. Quand ça se fondait: Ah! il faut que les gens de la culture soient là. Il faut que les gens de la culture soient là. Et très, très vite on a été identifié à quelqu'un qui croit au développement culturel et qui est au-dessus des partis. Je ne pense pas qu'on nous identifiait à quelque parti que ce soit. M. Houde est là. M. Boulerice est de l'autre bord. On était aussi pour toutes les disciplines. Mais, vraiment, il y a toujours eu une représentation équitable de toutes les disciplines et aussi des territoires. Je pense que c'était une bonne idée, ça, que chaque MRC envoie un représentant.

Puis, aussi, bien, mon Dieu! la personnalité de quelques-uns qui ont été de toutes les batailles, le sommet économique de 1983, le dernier, puis, comme je l'ai dit tantôt, le CRD, l'office du tourisme et d'autres organismes. On

est allés chercher les gens du sud. Les gens se plaignaient en disant: C'est Joliette. Bon, allez. On est allés faire des conférences à Repentigny, à Terrebonne. Le maire Forget nous avait reçus en disant: Oui, je viens de Lanaudière, maintenant j'embarque. Allez. Aussitôt, des gens sont venus représenter; Françoise est là qui en témoigne, et ainsi de suite. Ce n'est pas du miracle. C'est du travail sincère et passionné, parce que sans passion on n'y serait pas arrivés. Parce qu'on n'avait pas d'argent. On a un budget qui est parmi les plus faibles de tous les conseils. Je vous l'ai dit tantôt, on a vraiment payé notre séparation. Vraiment, on l'a payée. Je veux dire, une rapide enquête dans la région vous montrerait qu'on a été sur tous les fronts ou à peu près. (22 heures)

M. Boulerice: Bon. Naturellement, je me dois à une certaine sympathie face à ma région, sauf que ma justice doit être distributive. Vous dites: "II est possible d'envisager que la taxe d'amusement collectée par certaines municipalités (qui, dans certains cas, s'ajoutera à la TPS et à la TVQ) soit remise dans le réseau culturel sous la forme d'une participation au fonds régional." Alors, deux volets. Le fonds régional comme tel. Mais vous ne semblez pas préconiser l'abolition pure et simple de toute taxe sur oeuvre ou manifestation culturelle et, venant de vous, ça m'inquiète un peu.

M. Gaudet: Écoutez, dans le rapport Arpin, on préconisait une diminution à 3 % de la taxe de vente. Ce qu'on peut dire, c'est que, si on décide d'abolir ou de diminuer la taxe, il y aura toujours quelqu'un pour dire: Bon, regardez, encore la culture qui a tout; pourquoi eux sont-ils exemptés et, nous autres, on ne l'est pas? La seule façon qui est une façon très bonne d'y arriver justement, c'est en fonction de la taxe de vente: que la taxe de vente soit saisie, mais que cette taxe de vente soit réinvestie au niveau de la culture. Donc, ce qui est préconisé dans le mémoire, c'est que, justement, par cette compensation-là, on réussirait à arriver au 1 % qui, jusqu'à aujourd'hui, est encore la politique du gouvernement en place d'investissement dans la culture. C'est une façon très juste, je crois, quand même. On n'affecterait pas, on n'agirait pas de façon discriminatoire, mais de façon positive au niveau de la culture. On ne peut pas dire: Pourquoi exempter la culture? Là, ça va être un autre secteur qui va dire: Bien, nous autres aussi, on veut être exemptés. Je crois que les bénéfices qui en résulteraient, c'est que, si les gens sont prêts à payer pour... La culture est un service, mais, justement, le milieu culturel ne veut pas se désister de la TPS. Possiblement que certains pourraient dire: Oui, on aimerait mieux pas de TPS ou de TVQ, mais une façon de rendre ça équitable - de toute façon, on peut vivre avec - c'est qu'elle soit collectée, mais qu'elle soit remise par la suite, qu'elle soit réinjectée au niveau de la culture et qu'elle ne serve pas à payer, je ne sais pas, de l'asphalte, on pourrait dire en Abitibi, sur deux kilomètres. Mais on peut dire que l'argent serait réinvesti et serait utile. Ce serait une façon de conscientiser quand même. Ça a un coût, la culture; bien, que les gens soient prêts à le payer en consommant.

M. Boulerice: Une autre question. Dans une région comme Lanaudière, vous avez fait état de quelques compagnies de grande importance, vous avez parlé des Papiers Scott à Crabtree, Crabtree Mills, comme on disait, quand j'étais jeune. D'ailleurs, M. le maire de Crabtree vous salue, il est ici, et vous le savez. Compte tenu de la non-abondance, si vous voulez... À L'Assomption, mon Dieu! il y a Hupp Canada qui est le plus gros; je ne pense pas que les arsenaux militaires soient des mécènes, j'en douterais. À Joliette, il y a toujours la Scott dont on parlait, Firestone et, peut-être, je pense qu'il y a Cascades, Domtar ou Cascades, je ne me souviens plus.

Une voix: II y a Cascades.

M. Boulerice: C'est Cascades, oui, maintenant. D'accord. Donc, le bassin finit par être limité. Dans quelle mesure un programme comme le fonds d'appariement ne pourrait-il pas être utile dans un milieu dit régional? Est-ce que, au départ, il y a des organismes chez vous qui en ont bénéficié à l'époque où il existait? Il y a eu deux phases. Il y a eu la première phase qui était 1 $ pour 1 $ et, après, ça a été modifié, c'était 0,50 $ pour 1 $. J'avais protesté contre la diminution, mais il y avait quand même le principe du fonds d'appariement qui subsistait et qui m'apparaissait intéressant.

M. Gaudet: Comme vous le disiez, au niveau des corporations qui existent dans les régions, justement, l'argent est limité. Premièrement, les compagnies ne sont pas, justement, des mécènes sauf quelques exceptions comme, par exemple, M. Lamarre pour Lavalin. Donc, ces gens-là ont des budgets, si on peut dire, de dons. On peut appeler ça des dons de charité, soyons clairs; on met la culture au même niveau que les dons de charité. Ensuite, vient un budget de publicité. Donc, il y a une partie de ces budgets-là qui va aller dans des événements, mais des événements qui vont avoir des répercussions assez importantes au niveau de la population. Cet argent-là, au niveau de petits organismes, n'est pas disponible.

Pour en revenir à la question du saupoudrage, une façon de rendre plus efficace, si on peut dire, la distribution des fonds qu'on préconise au niveau d'un fonds régional, on préconise aussi la mise sur pied d'un comité qui serait, si on peut dire, branché sur la population, sur ces organismes-là qui seraient près du milieu. Donc, on pourrait, de façon plus aisée, répartir des

montants qui ne seraient quand même pas énormes. Au niveau de la taxation au Québec; on pourrait aller chercher au niveau des produits culturels 143 000 000 $, O.K., en taxant le secteur culturel. Donc, 143 000 000 $ répartis par tête d'habitant, selon une répartition justifiable, on aboutirait à un fonds de 700 000 $ pour la région de Lanaudière. Avec 700 000 $, je vais vous dire, distribués à des petits organismes et à des artistes, vous en verriez de l'ébullition au niveau artistique et au niveau culturel dans la région de Lanaudière parce que c'est un milieu où on fait beaucoup avec peu et le CRC est un de ces exemples-là avec les budgets limités avec lesquels il vit. Je crois qu'au niveau des organismes c'est la même chose. Les gens diraient: Ah! si j'avais 50 000 $, je ferais des miracles. Bon, 50 000 $, ce n'est vraiment pas beaucoup, c'est une goutte d'eau. Avec 50 000 $, c'est vrai qu'on ne fait plus grand-chose aujourd'hui. Mais des gens comme ça, dans leur milieu, dans leur zone d'influence qui est parfois restreinte, finiraient par pouvoir rayonner.

Le Président (M. Doyon): Une dernière question, M. le député.

M. Boulerice: Oui, une dernière question. Il y a forcément une concertation qui est importante qui est faite avec les municipalités, les municipalités régionales de comté, une participation, etc. Ma dernière question, c'est: Est-ce qu'on peut songer sérieusement à une implication accrue des municipalités dans le secteur suite à la réforme Ryan? Si vous me répondez non, combien de temps cela va-t-il nous prendre avant de rattraper ce temps qu'on s'est enlevé volontairement?

Le Président (M. Doyon): Oui, madame.

Mme Beauchemin: Les municipalités, il n'y en a aucune d'entre elles qui a actuellement une politique de la culture. Dans nos municipalités, on a évalué à 35 % celles qui n'ont aucun service, ni mandataire, ni boîte postale pour toute question qui touche au sujet culturel. On se rend compte avec les maires avec lesquels on travaille, qui sont très près de nous, qu'ils ont un besoin d'information tout d'abord. C'est le premier intérêt. C'est pour ça qu'ils sont chez nous. Ils voient aussi. Ils sont très bien informés. Certains sont membres délégués à l'UMRCQ. Ils savent très bien que ça s'en vient, que ce sera un des prochains dossiers qu'ils auront à gérer. Ils sont quand même inquiets parce qu'ils n'ont pas la structure chez nous. Alors, combien de temps ça prendra? Je n'en ai aucune idée. Nous n'en avons aucune idée. Il y a des intérêts, il y a des soucis, il y a des inquiétudes. Comment peut se faire ce transfert aussi? Ce sont des points d'interrogation. Nous, actuellement, on est prêts à leur accorder avec le peu de person- nel que l'on a, si on peut dire, tout le soutien et la collaboration que l'on pourra leur accorder.

Mais combien de temps, quels moyens? On ne le sait pas. On ne peut pas vous en suggérer.

M. Boulerice: Si j'en ajoutais, j'ai peur qu'on considérerait cela comme de la flatterie compte tenu de nos origines. Alors, j'emploierai ce vieux dicton bruxellois qui dit que, lorsque le coeur parle, les mots viennent courts. Donc, merci.

Le Président (M. Doyon): Merci. Mme la ministre... M. le député de Berthier, vous voulez dire le dernier mot? Allez.

M. Houde: Merci bien sincèrement de vous être déplacés et d'avoir présenté un mémoire qui parle par lui-même. Je veux souligner, encore une fois, que je suis entièrement d'accord avec vous autres; le bénévolat que vous avez mis là-dedans depuis nombre d'années, on le reconnaît, je pense, aujourd'hui. Je pense bien que Mme la ministre est bien consciente de ça, du bénévolat qui se fait là-dedans. Sans bénévolat, il n'y aurait rien qui se ferait dans bien des organismes, et surtout dans celui-là. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Doyon): Merci, M. le député. Au nom des membres de la commission, au nom de Mme la ministre, il me reste à vous remercier d'avoir bien voulu venir nous rencontrer, d'avoir attendu aussi longtemps que vous l'avez fait et d'avoir voulu rester avec nous aussi tard. Il me reste maintenant à ajourner les travaux jusqu'à demain matin, 9 h 30.

(Fin de la séance à 22 h 11)

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