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(Onze heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. LeSage): Veuillez prendre vos places,
s'il vous plaît. Je déclare la séance de la commission de
la culture ouverte.
Je vous rappelle le mandat de la commission qui est de procéder
à des consultations particulières et de tenir des auditions
publiques dans le cadre de l'étude détaillée du projet de
loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Doyon
(Louis-Hébert) est remplacé M. Hamel (Sherbrooke); Mme Loiselle
(Saint-Henri), par M. Gauvin (Montmagny-L'Islet); M. Maltais (Saguenay), par M.
Philibert (Trois-Rivières).
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le secrétaire.
Je vous rappelle également l'ordre du jour que nous avons pour
aujourd'hui. Nous devions commencer à 11 heures avec des remarques
préliminaires. Nous avons également des représentants des
étudiants, des représentants de l'Union des artistes, de
l'Association des orchestres symphoniques, de la Guilde des musiciens du
Québec, du Syndicat des professeurs de l'État du Québec et
des représentants des directeurs de conservatoire.
Mme la ministre, vous avez des remarques préliminaires?
Remarques préliminaires Mme Liza Frulla
Mme Frulla: Oui, merci, M. le Président. Chers membres de
la commission de la culture, à vous tous chers élèves,
quelques remarques préliminaires pour situer un peu dans son contexte le
projet de loi qui est déposé à l'Assemblée
nationale.
Nous sommes réunis aujourd'hui pour entreprendre des
consultations particulières sur ce projet de loi, le projet de loi 135,
un projet de loi qui modifie la Loi sur le Conservatoire de musique et d'art
dramatique. Nous aurons en effet, comme vous le dites, M. le Président,
l'occasion d'entendre des représentants des élèves et du
personnel du Conservatoire, bien sûr, mais aussi trois groupes
représentatifs des milieux de la musique et de l'art dramatique, et
d'échanger aussi avec vous et avec eux sur l'avenir des
conservatoires.
Il s'agit en fait d'une étape que je qualifierais de
déterminante dans le cheminement de cette institution dont les origines
remontent à plus d'un demi-siècle. Le projet de loi 135 a
été déposé à l'Assemblée nationale le
11 novembre dernier et l'adoption de son principe a fait l'objet d'un vote
unanime en deuxième lecture jeudi dernier. C'est donc dire qu'il y a un
consensus qui existe au sein de la deputation pour reconnaître
l'importance du Conservatoire dans la vie culturelle du Québec et de ses
régions. Ce consensus porte aussi sur la nécessité
d'actualiser sa mission et de moderniser ses structures. Il ne fait aucun
doute, M. le Président, que les groupes que nous entendrons aujourd'hui
partagent avec nous ces objectifs.
Comme je le soulignais lors de mon intervention sur l'adoption du
principe du projet de loi, il s'agit d'un projet important, dans la mesure
où il vient concrétiser une démarche entreprise il y a
plusieurs années déjà. Les membres de cette commission se
souviendront sans doute que, au moment de la vaste consultation qui a
précédé l'élaboration de la politique culturelle en
1991, plusieurs intervenants en formation ont tenu à souligner l'apport
exceptionnel du Conservatoire pour favoriser l'excellence de la formation
artistique au Québec. Bon nombre de représentants
régionaux nous ont aussi fait part de l'importance du Conservatoire pour
favoriser le dynamisme culturel au sein de leurs milieux respectifs.
Faut-il rappeler également que la politique culturelle
adoptée en juin 1992 a été élaborée en
étroite collaboration avec 21 ministères et organismes du
gouvernement, dont, bien sûr, le ministère de l'Éducation
et celui de l'Enseignement supérieur et de la Science.
En matière de formation, une des orientations de la politique
culturelle confiées au ministère de la Culture et non au ministre
de l'Enseignement supérieur et de la Science: elle confie la
responsabilité de soutenir des écoles professionnelles
complémentaires dans certains secteurs de l'activité artistique.
Il ne s'agit donc pas d'intégrer les conservatoires au réseau
d'enseignement régulier, bien au contraire.
Après plus de 50 ans, le projet de loi 135 vient donc assurer la
pérennité du Conservatoire. Il actualise sa mission et bonifie
son mode d'organisation en tenant compte notamment d'un environnement qui s'est
considérablement modifié depuis 1942, car, par rapport à
la loi de 1942, c'est d'un changement majeur qu'il s'agit et, comme tout
changement majeur, on peut comprendre qu'il soulève certaines
interrogations. C'est pourquoi je mise sur la consultation que nous
entreprenons aujourd'hui pour cibler les problèmes auxquels il est
actuellement confronté et aussi pour échanger sur les solutions
que nous proposerons pour y remédier.
Je serai brève, M. le Président, car je veux laisser le
plus de temps possible aux personnes qui se sont déplacées
aujourd'hui pour se faire entendre.
Je voudrais néanmoins, pour le bénéfice des membres
de cette commission et des personnes présentes, rappeler
brièvement les grands objectifs qui nous ont guidés dans la
rédaction du projet de loi 135. (11 h 50)
Le premier objectif vise à assurer et à consolider la
mission pédagogique du Conservatoire. Depuis 50 ans, les conservatoires
de musique et d'art dramatique ont bien évolué. Ils ont
diversifié leurs programmes de formation pour s'ouvrir aux nouvelles
disciplines qui émergent. Au fil des années, les conservatoires
de musique, dans chacune des régions où ils sont
installés, sont devenus des partenaires indispensables au
développement culturel de leur milieu.
Autrement dit, le mandat qui a été confié à
l'origine au Conservatoire ne correspond plus à l'ensemble des
activités qui sont aujourd'hui les siennes. C'est le cas, notamment, des
activités actuelles des conservatoires en région, qui soutiennent
des organismes musicaux. C'est d'ailleurs ce qui explique pourquoi, en 1989, la
mission des conservatoires de musique a été révisée
et présentée dans un document intitulé «La mission
du Conservatoire de musique du Québec: à l'heure du
renouveau». Cette mission révisée comportait trois volets
reliés à la formation professionnelle, au soutien de la formation
musicale et initiale et au soutien d'organismes musicaux.
Le projet de loi 135 vient, enfin, reconnaître sur le plan
législatif cette mission renouvelée et enrichie des
conservatoires de musique. En art dramatique, il confirme le mandat des
conservatoires à titre d'établissements de formation
professionnelle supérieure. En musique, comme en art dramatique, il
ouvre la porte à des activités de perfectionnement qui viendront
répondre aux besoins exprimés par les professeurs et les
élèves et aussi par de nombreux professionnels de nos milieux
artistiques qui se sont eux-mêmes exprimés publiquement à
l'automne 1991, ici même, lors de la consultation sur la politique
culturelle.
Le deuxième objectif du projet de loi vise à
conférer au Conservatoire une plus grande souplesse et une autonomie
accrue pour réaliser son mandat. Les membres de cette commission
reconnaîtront sans doute que, depuis 50 ans, l'appareil gouvernemental
s'est considérablement modifié lorsque l'État a
décidé d'intervenir massivement dans plusieurs secteurs de
l'activité économique, culturelle et sociale. Cette
évolution s'est évidemment traduite, sur le plan administratif,
par une multiplication et une standardisation des mesures de contrôle,
lesquelles peuvent difficilement s'adapter aux besoins et aux pratiques d'une
institution d'enseignement. C'est le cas, particulièrement, des
conservatoires, dont l'une des principales caractéristiques est d'offrir
un enseignement personnalisé et modulé.
C'est pourquoi nous proposons de transformer le Conservatoire en une
corporation autonome. On ne peut plus, aujourd'hui, envisager l'avenir d'une
institution d'enseignement s?ns prévoir une participation active des
élèves et des professeurs à sa gestion et à la
définition de ses grandes orientations pédagogiques. Il faut
aussi favoriser une concertation accrue entre les intervenants, afin de
s'assurer que les activités du Conservatoire s'intègrent bien aux
besoins des milieux où il évolue.
Enfin, faut-il rappeler que les élèves, qui sont au coeur
de nos préoccupations dans cet exercice de réflexion, souhaitent
voir leurs études reconnues au même titre que ceux et celles qui
fréquentent nos collèges et nos universités, au titre de
l'enseignement, entre autres.
En terminant, M. le Président, je veux souhaiter la plus cordiale
bienvenue aux personnes qui sont déjà avec nous, de même
qu'à celles qui les suivront bientôt. Nul doute que leurs
commentaires contribueront à alimenter nos travaux lors de
l'étude du projet de loi, article par article. Pour ma part, je peux
vous assurer de mon ouverture à toute suggestion constructive en vue
d'atteindre un objectif qui nous est commun: donner au Conservatoire l'appui
dont il a besoin pour continuer de favoriser l'excellence de la formation
artistique au Québec dans les secteurs et de la musique et de l'art
dramatique, et ce, dans les grands centres et aussi dans les régions.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Doyon): Très bien, merci, Mme la
ministre. Donc, les remarques préliminaires se poursuivront maintenant
avec celles du député de Gouin, représentant de
l'Opposition officielle sur le sujet. M. le député.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Un mot d'abord pour
souhaiter la bienvenue à tous ceux et celles qui sont avec nous
aujourd'hui, et peut-être rappeler que c'est à la demande de
nombreux organismes, ainsi que sur les recommandations de l'Opposition
officielle, que la ministre, la semaine dernière, acceptait de tenir
cette consultation particulière sur le projet de loi 135. Il
apparaissait, aux yeux des membres de l'Opposition officielle, essentiel
d'enrichir le processus législatif par cette consultation. Pour nous, il
apparaissait important aussi que l'ensemble des membres de cette commission
commission de la culture, qui a ce mandat particulier d'étudier
chacun des articles du projet de loi puissent recevoir les
représentations des étudiants et des différents
organismes, des professeurs et des gens intéressés par la
question afin de, bien sûr, discuter avec eux, mais aussi dans une
perspective où nous aurons, au cours des travaux qui suivront cette
consultation, à bonifier, sans contredit, le projet de loi initialement
déposé par la ministre.
Même si j'aurais souhaité entendre tous ceux et celles qui
avaient manifesté un intérêt pour la question et même
si, à l'évidence, tous en conviendront, c'est de façon
précipitée que nous nous réunissons, je souhaite que les
discussions de ce jour puissent être l'occasion d'entreprendre un
véritable dialogue, ce qui, pour le profit de la ministre, est beaucoup
plus que la liberté de parole.
Alors, donc, au moment d'entreprendre cette séance, je pense que
ce que nous avons de mieux à faire, ce serait de mettre sur la table un
certain nombre de principes qui vont nous éclairer pendant
l'étude de ce projet de loi et pendant aussi les consultations que nous
tiendrons aujourd'hui, ce matin et cet après-midi.
Le premier qui anime l'Opposition et qui, je sais, anime aussi plusieurs
partenaires a trait à la pérennité de l'institution. Si
nous avons, comme la ministre le soulignait tout à l'heure, voté
en faveur du principe du projet de loi ce qui est une des nombreuses
étapes du processus législatif c'est parce que nous avons
la conviction que le maintien du statu quo, sous le prétexte
traditionnel de protéger le Conservatoire des intempéries,
aurait, à moyen terme, le même effet que son abolition. D'autres
avant nous ont affirmé que, dans un milieu voué à la
créativité et à l'émulation, les armures deviennent
vite des sarcophages.
Il faut donc relever le défi qui consiste à transformer
radicalement cette institution pour en faire le coeur de la formation
artistique professionnelle et donner toute l'ampleur aussi à la vision
qui animait ses fondateurs, et particulièrement Wilfrid Pelletier qui
résumait ainsi sa vision des conservatoires. Wilfrid Pelletier
écrivait: II nous faut engager les meilleurs professeurs de la province
et faire appel à des maîtres étrangers pour les postes
laissés vacants. Chacun des professeurs venant de l'extérieur
devra avoir un adjoint qui accompagnera l'élève aux cours afin de
pouvoir bénéficier lui-même des leçons d'un grand
maître et ainsi assurer une formation professionnelle aux
instrumentistes, chanteurs et compositeurs, ce qui comprend toutes les
disciplines, bien sûr, pertinentes à cette formation.
Les professeurs du conservatoire de Montréal ont raison de
vouloir redonner au secteur de création toute sa vigueur. Ainsi, il faut
souligner les préoccupations qui ont trait au régime
pédagogique. La pédagogie doit se baser sur le continuum des
études musicales et assurer le développement de
l'élève par un encadrement continu et individualisé.
Cependant, là où le bât blesse, c'est que le contenu du
projet de loi, à bien des égards, ne reprend pas dans son
libellé cette volonté. Il y a encore lieu d'être inquiet
lorsque la ministre nous dit, à l'occasion de l'adoption du principe du
projet de loi, et je la cite: Ce qu'on veut par ce projet de loi, c'est
justement clarifier le rôle des conservatoires pour que ces
réseaux disait-elle les universités et
écoles privées des conservatoires, soient complémentaires
et non pas superposés ou, enfin, enseignant les mêmes choses ou
fournissant les mêmes services. Pour le bien de l'élève, il
est sûrement préférable qu'il poursuive ses études
dans un grand centre.
Pour nous, au cours de ces travaux, il ne saurait être question de
confondre la mission des conservatoires avec celle des autres réseaux
qui participent à l'enseignement de la musique, si ce n'est à
cause du mode particulier que les conservatoires ont d'enseigner la musique, et
nous devons aujourd'hui plaider pour la spécificité et le
maintien de cette vocation, ce qui nous amène bien loin d'un discours
qui nous amènerait à parler de superposition ou de
dédoublement avec les autres institutions publiques, ce que laisse
entendre à l'heure actuelle la ministre sur cette question.
Un autre principe que nous devons clairement établir a trait
à la présence des conservatoires en région. Bien
sûr, nous comprenons avec la ministre qu'il ne saurait être
question d'offrir une formation terminale dans chacun des secteurs
d'activité, dans chacune des disciplines. Mais il y a une
différence entre affirmer ce principe, d'un côté, et, d'un
autre, inviter les étudiants à poursuivre leurs études
dans des grands centres. (12 heures)
La ministre, par son propos, insuffle et nous démontre clairement
sa volonté d'insuffler un mouvement des étudiants des
conservatoires en région vers les grands centres. Nous nous opposons
à cette façon de voir les choses parce que, pour nous, nous ne
voyons pas pourquoi un conservatoire, qu'il soit à
Trois-Rivières, qu'il soit à Chicoutimi, qu'il soit à
Val-d'Or, ne puisse pas, dans des secteurs qu'il aura choisis et compte tenu
des besoins de chacune des régions, offrir une formation terminale.
Compte tenu aussi des implications significatives et de la présence des
conservatoires et de l'impact qu'ils ont pour le développement et la vie
culturelle de ces régions, agir autrement serait une grave erreur.
Ainsi, nous attendons que la ministre ait le même courage que sa
prédécesseure, qui affirmait clairement, au lieu de parler de
superposition et de dédoublement, que les conservatoires
régionaux sont là pour rester. Nous attendons aujourd'hui de la
ministre qu'elle tienne cette même déclaration.
Il serait d'autant plus pertinent d'agir ainsi que plusieurs
élèves aussi s'inquiètent sur la reconnaissance de leur
diplôme. J'avais tout à l'heure l'occasion d'en glisser un mot
rapidement, mais il est clair que l'article 20 est nettement insuffisant dans
sa présentation. Ce serait utopique de croire que, parce que,
soudainement, dans un projet de loi, nous retenons la possibilité que
les diplômes soient reconnus par le ministère de l'Enseignement
supérieur, pour autant ils vont l'être. Et, si la ministre peut,
aujourd'hui, déjà nous déposer des ententes entre son
ministère et le ministère de l'Enseignement supérieur sur
cette question, qu'elle le fasse, parce que les étudiants ne paieront
certainement pas pour leur formation si elle n'est pas reconnue. Il s'agit
là d'un noeud important dans le débat et il faudra, bien
sûr, beaucoup plus que l'article 20, qui pourrait, à certains
égards, constituer une espèce de pensée magique. Et ce
serait se leurrer de croire que, parce que c'est écrit dans l'article,
où on dit: «...avec l'autorisation du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science, le Conservatoire»... On
dit que «le Conservatoire peut décerner le grade, diplôme,
certificat ou autre attestation d'études universitaires auquel conduit
un programme d'enseignement qu'il établit et met en oeuvre avec
l'autorisation du ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science». D'aucune façon nous n'avons des engagements clairs sur
cette question.
Ce débat prend d'autant plus de relief que, derrière cette
volonté de rajeunissement de l'institution, se cache aussi une
volonté claire de revoir l'implication de l'État dans ce secteur
et qu'il faut comprendre que ce projet de réforme est aussi mû par
une éthique du rendement. Il est très clair, dans l'esprit de la
ministre, que les étudiants et étudiantes de conservatoire auront
à débourser des frais de scolarité, dès sans doute
la prochaine session, sans pour autant avoir reçu des assurances, qui
sont celles que je souhaite pouvoir obtenir de la ministre aujourd'hui.
D'ailleurs, puisqu'il est toujours intéressant de suivre le fil de la
pensée gouvernementale, nous essayons toujours de comprendre pourquoi la
ministre ouvre ce débat que sa prédécesseure
elle-même avait clos en déclarant: La ministre Lise Bacon promet
de maintenir la gratuité des cours. Alors, aujourd'hui, nous demandons
aux membres de cette commission: Qu'est-ce que la vice-première ministre
avait que la ministre actuelle de la Culture n'a pas?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisclair: Et qu'attend-elle pour reprendre le même
discours que sa collègue?
Finalement, M. le Président, nous devons aussi souligner toute la
préoccupation qui a trait à la vie de l'institution, et je parle
spécifiquement du personnel enseignant et non enseignant qui oeuvre dans
ces institutions. Tout à l'heure, je parlais de cette possible
centralisation de la structure qui est celle qui semble se dessiner dans le
projet de loi et de ce courant que la ministre semblait insuffler des
régions vers les grands centres. Je pense qu'il est d'abord
démotivant, pour les gens qui oeuvrent au sein des conservatoires en
région, de présenter ce genre de vision.
C'est d'autant plus décevant dans un contexte où le
gouvernement, par son action, a suscité une très grande
insécurité dans la fonction publique, et il faut bien se dire
qu'à cet égard les conservatoires n'échappent pas à
cette règle: la loi 198* les négociations dans les secteurs
public et parapublic, un certain nombre de craintes qui font qu'à juste
titre, aujourd'hui, les enseignants se demandent quelle réalité
se cache derrière cette volonté de sortir les enseignants de la
fonction publique. Nous devons regarder cette réalité dans un
contexte, aussi, où les professeurs, publiquement, par le biais de leurs
représentants, ont fait un certain nombre d'ouvertures qui sont
significatives et dont nous devrons tenir compte au moment d'étudier le
projet de loi.
Alors, M. le Président, je tenais tout simplement à faire
ces quelques remarques préliminaires. Je pense qu'elles sont importantes
et je souhaite que ces trois préoccupations seront celles qui nous
animeront pendant ces travaux, et c'est sur ces questions que nous entendons
encourager et questionner ceux et celles qui viendront se présenter
devant nous aujourd'hui et cet après-midi.
Le Président (M. Doyon): Mme la ministre, il vous restait
quelques minutes.
Mme Frulla: Brièvement...
M. Boisclair: Ce n'est pas l'ordre de la Chambre, M. le
Président.
Le Président (M. Doyon): Pardon?
M. Boisclair: Ce n'est pas l'ordre de la Chambre.
Le Président (M. Doyon): Non, mais c'est la coutume. Si
vous le voulez...
M. Boisclair: Qu'on procède à la période
de... Il y a assez de gens qui sont ici.
Le Président (M. Doyon): Oui, oui, on va le faire, ne
craignez pas. Alors, Mme la ministre, pour quelques minutes.
Mme Liza Frulla
Mme Frulla: Bon. Brièvement. Si j'ai demandé la
parole, c'est parce qu'on véhicule des choses qui, à mon avis,
sont fort injustes et non justes. D'abord, quant à la volonté de
Mme Bacon, quant au renouveau, ce que je disais, de l'orientation des
conservatoires, c'est exactement ce qu'on fait, et que l'on prend, et qu'on
légalise dans le projet de loi, d'une part. Deuxièmement, il est
très facile de faire un communiqué de presse en prenant les deux
premières phrases et les trois dernières phrases d'un discours
qui a duré 20 minutes.
J'ai dit, et je le répète, que la seule façon
d'assurer la pérennité des conservatoires et d'assurer la
non-disparition des conservatoires, c'est de sortir les conservatoires, qui
sont une direction du ministère, et d'en faire une corporation autonome.
C'est la seule façon et nous allons en discuter tantôt.
Deuxièmement, quant à la diplomation, si Mme Bacon disait
qu'il fallait continuer la gratuité, c'est parce que, justement, tant
que les conservatoires sont une direction du ministère, vos
diplômes d'études ne peuvent pas être reconnus par le
ministère de l'Éducation, d'une part c'est impossible par
la loi et, deuxièmement, tant que les diplômes et
ça je l'ai dit la semaine dernière à Mme Tremblay
ne seront pas reconnus par le ministère de l'Éducation, il n'y
aura pas de frais de scolarité. Je veux que ce soit très clair.
Par contre, une fois que les diplômes seront reconnus... Et on en
parlera, justement, parce que Mme Robillard est à Strasbourg
c'est pour ça qu'elle n'est pas ici mais elle nous a
demandé, justement, de faire venir son collègue,
député adjoint au niveau de l'éducation.
Tant que les programmes ne seront pas reconnus par le ministère
de l'Enseignement supérieur, non, il n'y aura pas de frais de
scolarité. Par contre, pour les faire reconnaître, il y a du
travail qui est déjà amorcé. Donc, je nie ce qui a
été dit dans les journaux, qu'il n'y a rien de fait; au
contraire, le travail est déjà amorcé. Mais,
pour que ça se fasse, il faut que ça se fasse de
corporation, c'est-à-dire une corporation qui a une loi propre avec le
ministère de l'Enseignement supérieur. Tant que la corporation ne
deviendra pas une personne morale, les diplômes ne peuvent pas être
reconnus par le ministère de l'Enseignement supérieur.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Alors...
M. Boisclair: ...
Le Président (M. Doyon): Quoi?
M. Boisclair: Je peux utiliser un droit de...
Le Président (M. Doyon): Si vous me demandez la parole, M.
le député, oui. Je signale en passant que vous m'avez
signalé que l'ordre de la Chambre n'était pas à l'effet
que la ministre ou vous-même puissiez parler. Je vous indique que l'ordre
de la Chambre indique qu'il y aura des remarques préliminaires de 15
minutes de chacun des partis. Alors, à l'intérieur de ces 15
minutes, le président fait le partage du temps. Vous avez la parole.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, vous comprendrez
qu'à ce moment-ci on s'attendrait à certainement plus de la
ministre. Je conçois très bien que j'ai moi-même extrait
des propos de son discours, mais qui sont des propos qui existent, qui ne sont
pas là dans l'abstrait. Bien sûr qu'il faut pondérer en
fonction de tout un discours, mais, lorsqu'on nous dit: Pour le bien de
l'élève, il est sûrement préférable qu'il
poursuive ses études dans un grand centre, eh bien, je pense que c'est
le genre de déclaration qui sème la zizanie et qui sème la
confusion, et la ministre en est la seule responsable sur cette question. (12 h
10)
Autre chose, quant à la question de la reconnaissance des
diplômes, nous convenons très bien que le ministère de la
Culture ne peut pas décerner des diplômes qui sont ceux que le
ministère de l'Enseignement supérieur délivre à ses
élèves en fonction d'un certain nombre de règles. Nous le
savons très bien. Cependant, rien n'empêche la ministre de signer
une entente avec le ministère de l'Enseignement supérieur, et
cette nouvelle corporation qui sera créée se verra
transférer toutes les obligations qui seront contractées dans
cette entente. Voyons donc! Par exemple, rien n'empêche nos
conservatoires aujourd'hui de renouveler les baux qu'ils occupent, là,
pour les différents lieux physiques où ils offrent des services.
S'ils sont renouvelés, toutes ces obligations contractuelles seront
transférées à cette nouvelle corporation, de la même
façon qu'une entente avec le ministère de l'Enseignement
supérieur qui serait signée avec la ministre de la Culture, les
obligations contenues dans cette entente pourraient être
transférées à la nouvelle corporation.
La ministre peut très bien se prévaloir de cette
responsabilité. Alors, si c'est le cas pour d'autres secteurs, je ne
vois pas pourquoi on ne pourrait pas le faire dans le cas des conservatoires.
Qu'il y ait à tout le moins une lettre d'intention de la ministre de
l'Enseignement supérieur, qu'on nous donne un peu de chair.
Mme Liza Frulla Mme Frulla: Juste pour finir...
Le Président (M. Doyon): Rapidement, parce que le temps
est terminé, il vous reste à peine 30 secondes.
Mme Frulla: ...parce qu'il va falloir donner la parole. La lettre
d'intention, je l'ai, elle est datée du 7 octobre 1993, de la part de M.
Pierre Lucier, sous-ministre de l'Enseignement supérieur, à Mme
Michelle Courchesne, sous-ministre du ministère de la Culture.
M. Boisclair: Vous pouvez la déposer? Est-ce que la
ministre peut déposer le document?
Document déposé
Le Président (M. Doyon): Vous pouvez la déposer?
Alors, tout simplement, il n'y a pas de dépôt de document en
commission parlementaire, sauf qu'on en fera photocopie et elle sera
distribuée par le secrétariat.
Auditions
Alors, j'invite maintenant les représentants des étudiants
à bien vouloir prendre place en avant.
À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous
indique qu'il n'y a aucune manifestation d'approbation ou de
désapprobation qui sera tolérée dans cette salle. Nous ne
sommes pas au Colisée ici; nous sommes à l'Assemblée
nationale. Vous vous applaudirez entre vous autres quand vous aurez
quitté cette salle. Alors, je veux que ce soit très clair, comme
président, autrement je ferai évacuer immédiatement.
Mme Tremblay (Stéphanie): J'aimerais tout d'abord...
Le Président (M. Doyon): Un instant, s'il vous
plaît! Je vous indique que nos règles sont les suivantes. Vous
disposez de 20 minutes pour nous faire part de vos représentations.
Ensuite, 40 minutes seront consacrées aux députés: 20
minutes aux représentants du parti ministériel et 20 minutes aux
représentants des partis d'Opposition. Des questions vous seront
posées. Et je vous invite dès maintenant à vous
présenter pour les fins d'enregistrement de nos débats, de vous
identifier de façon à ce que nous puissions transcrire vos noms
dans
le Journal des débats, et je vous donne dès
maintenant la parole, dès que vous aurez fait ça. À
vous.
Représentants des étudiants
M. Boucher (Martin): Martin Boucher, représentant de
l'association des étudiants de Chicoutimi, étudiant en orgue.
Mme Tremblay (Stéphanie): Stéphanie Tremblay,
représentante de l'Association des étudiants du Conservatoire de
musique de Québec. Saxophone.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Annick-Patricia
Carrière, élève au Conservatoire de musique de
Montréal. J'étudie en écriture et en analyse.
Le Président (M. Doyon): Très bien. Alors,
bienvenue. Vous avez la parole.
Mme Tremblay (Stéphanie): J'aimerais tout d'abord
souligner qu'évidemment on est juste trois à avoir le droit de
parole. Mais, derrière nous, on a des gens des autres conservatoires,
des conservatoires de Chicoutimi, déjà ici, de
Trois-Rivières, de Rimouski et aussi une représentante en art
dramatique.
M. Boucher (Martin): «Aussi longtemps que les
conservatoires accomplissent leur fonction et qu'ils la redéfinissent
par rapport au présent, ils rendent à la société le
centuple de ce que la société leur donne.» C'est Jean
Vallerand qui disait ça, et c'est tiré du document sur la mission
des conservatoires en 1989.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Une citation d'Armand
Vaillancourt, sculpteur québécois: «Un artiste, c'est
quelqu'un qui est engagé dans son époque.»
Mme Tremblay (Stéphanie): Et, finalement, notre citation
modifiée: «Le conservatoire, un milieu de vie où l'art a
vraiment valeur d'idéal.»
Donc, on débute un peu la lecture du mémoire. Au
début, on vous a fait une espèce de petit résumé de
nos gros points. Donc, je commence.
Les points positifs du projet de loi. Les étudiants vont
être représentés au plus haut niveau, donc au C.A., puis
aussi on a une possibilité de reconnaissance des diplômes.
Ça, c'est nos points positifs. Par la suite, on y va avec les points
négatifs.
L'abolition très possible de la gratuité. On se pose une
sérieuse question. Est-ce que maintenant il va y avoir plus... Est-ce
qu'il y a une chance qu'il y ait une sélection plutôt à
partir de la capacité financière que du talent? C'est une
question qu'on se pose.
Ensuite, le projet de loi est une porte ouverte à la
centralisation vers les grands centres. Bon, je ne reciterai pas le
communiqué de presse du député Boisclair. Donc, on se pose
une autre question: Nos artistes deviendront-ils tous des Montréalais ou
des
Québécois? Évidemment, l'expression d'oeuvres
internationales, il n'y aura pas de problème avec ça. Mais nos
cultures régionales, les oeuvres régionales, est-ce que ça
va vraiment pouvoir s'exprimer encore si tous nos artistes sont obligés
d'aller à Montréal ou à Québec pour avoir leur
vraie formation? Et on se dit aussi: Après huit ou 10 ans de vie dans un
grand centre, durant une période de vie où tout nous influence
bon, on parle de la période de vie de 16 à 25, 30 ans
est-ce que les gens qui vont être obligés d'aller à
Montréal ou Québec pourront retourner dans leur région?
Est-ce qu'ils vont encore aussi pouvoir exprimer leurs racines? On ne le sait
pas. En demeurant dans leur région, aussi, ça leur permet de
s'implanter dans leur milieu et de pouvoir y travailler. Ça, c'est un
point positif de ce qu'on a présentement et c'est ce qu'on veut
garder.
Bon. Évidemment, on est étudiants, on veut surtout vous
parler de notre vécu. Qu'est-ce qui va bien présentement dans les
conservatoires? On a un enseignement personnalisé de très grande
qualité. On a des petits groupes. Ensuite, on a la possibilité de
rester en contact avec notre milieu. L'enseignement est gratuit, puis on a la
possibilité de créer une masse critique d'étudiants
d'où vont ressortir les meilleurs. Ce qui mérite des
améliorations: nos diplômes ne sont pas reconnus et on manque de
certaines ressources. je continue. je vous parle de notre vécu. c'est
peut-être, bon, ce qui peut vous sembler le plus éloigné:
qu'est-ce qui se passe pour nous, en tant qu'étudiants, notre vie
quotidienne de chaque jour? depuis plus de 50 ans, le conservatoire a pour
mandat de former des interprètes de haut niveau. les
élèves qui sont acceptés dans cet établissement
doivent donc répondre à des critères précis de
sélection et avoir du talent dès le départ. en cours de
route, les étudiants qui ne peuvent pas satisfaire aux exigences doivent
quitter l'institution pour poursuivre leurs études en privé ou
dans une autre école ou faire carrément autre chose. ce que
j'aimerais souligner là-dessus, c'est que, évidemment, partout
dans les universités, dans les cégeps, la note de passage est de
60 %. au conservatoire, ça ne fonctionne pas comme ça; c'est 75 %
pour passer. donc, les critères sont plus élevés, et
l'élève qui ne satisfait pas à ça, eh bien, il se
fait, disons, mettre à la porte de l'institution.
O.K. Ensuite, pour arriver à ce niveau d'excellence tant
recherché par le Conservatoire et donner à ses étudiants
les outils nécessaires à la formation d'interprète,
plusieurs facteurs entrent en ligne de compte: la qualité du corps
professoral, comme je l'avais mentionné; la possibilité de garder
le même maître tout au long de l'apprentissage; les structures
nécessaires mises en place pour bien encadrer l'élève; la
formation individuelle et la promotion par matière. Je vous ai
énuméré des choses; on va y revenir un petit peu plus loin
dans le texte.
Le réseau des conservatoires de musique donne à ses
étudiants plusieurs possibilités que les autres institutions
d'enseignement ne peuvent se permettre d'offrir. Un de ces grands avantages est
de pouvoir commencer à
former ses élèves le plus tôt possible, dès
le primaire, dès quatre ou cinq ans pour les violonistes, ou vers six,
sept ans pour les pianistes et les autres instrumentistes. Et, aussi, le
Conservatoire permet d'assurer aux étudiants un suivi adéquat
tout au long de leur apprentissage. De plus, le fait d'avoir le même
professeur tout au long de l'apprentissage joue pour beaucoup dans la formation
d'un étudiant, car, au fond, un étudiant en clarinette, peu
importe le professeur, va apprendre à jouer de la clarinette, sauf que
chaque professeur a un peu sa méthode. Les méthodes
enseignées sont différentes pour chaque professeur, il ne faut
pas se le cacher. Donc, si c'est comme ça, si on doit changer de
professeur quatre ou cinq fois durant l'apprentissage, ça peut perturber
beaucoup l'élève parce qu'il y a toujours des notions de base qui
sont à réapprendre, des façons, des techniques de base qui
sont à réapprendre.
De plus, puisque chaque étudiant peut progresser à son
rythme, en autant qu'il réponde à certains critères, il
est possible de terminer un cycle, qui aurait pris normalement trois ou quatre
ans, en deux ou même un an. Ça, ça se fait beaucoup,
beaucoup, au Conservatoire. Ainsi, le système permet à beaucoup
d'élèves de ne pas perdre de temps et d'arriver à d'aussi
bons résultats. Ce temps d'apprentissage est très important en
musique parce que, si on veut continuer nos études, il y a souvent, dans
les universités ou dans les institutions américaines et
européennes, des âges limites pour s'inscrire. Pour les
violonistes, c'est souvent 21, 22 ans ou même moins. Donc, il faut finir
jeune, il faut avoir le temps de pratiquer tant qu'on est jeune. Les
étudiants qui aspirent à des études à
l'extérieur doivent donc essayer de terminer le plus rapidement possible
leur conservatoire. (12 h 20)
Même dans les matières théoriques, on parvient
à dispenser... Je m'excuse, je reviens un peu à la
personnalisation des cours. Donc, même dans les matières
théoriques où on n'a pas des cours individuels, on réussit
quand même à avoir des petits groupes pour réussir à
bien encadrer l'élève, à cibler ceux qui ont plus de
difficultés, puis à bien les aider, puis, aussi, à aider
ceux qui n'en ont pas à avancer le plus vite possible.
En outre, puisque le Conservatoire permet la promotion par
matière, un étudiant peut, tout en étant au secondaire ou
même au primaire, suivre des cours de niveau collégial. Par
exemple, je vous donne un cours, la littérature musicale, qui est un
cours collégial, que plusieurs élèves peuvent faire tout
en étant au secondaire. Ça, c'est un autre grand avantage. Ou
aussi des cours universitaires. On a souvent des violonistes qui ont 10 ans
puis qui ont des premiers prix en solfège ou des troisièmes
cycles en solfège, dictée, qui sont habituellement des cours
universitaires. Ça donne l'opportunité aux élèves
d'avoir plus de temps de pratique personnelle à des niveaux plus
avancés ou de prendre quelques cours supplémentaires, de
l'histoire, de l'écriture, de l'analyse, peu importe, pour devenir
vraiment un musicien complet.
D'un autre côté, les étudiants dont les instru-
ments exigent qu'ils débutent plus tard, par exemple, les
contrebassistes, les chanteurs, les tubistes et bien d'autres, peuvent
être de niveau de troisième cycle, donc universitaire, tout en
étant peut-être dans des cycles un peu moins avancés dans
d'autres matières. De plus, les nombreux cours de formation
générale essentiels à la formation d'un interprète,
chanteur et créateur offerts par le Conservatoire respectent la
capacité des étudiants à se concentrer sur la pratique de
leur discipline principale.
Puis, le dernier point intéressant pour les conservatoires, c'est
qu'on est un réseau et qu'on réussit à dénicher des
talents partout dans la province, puis à les exploiter.
M. Boucher (Martin): En tant que représentant des
conservatoires de région, je vais vous faire part un petit peu de nos
inquiétudes face à certaines idées de centralisation. Les
conservatoires de musique du Québec représentent beaucoup
d'avantages pour les régions. On en parlera tout à l'heure. Ils
ont créé et créent encore aujourd'hui une légion de
grands musiciens qui constituent une importante richesse pour le Québec.
Cette institution a noué des liens solides dans chacun des milieux
où elle s'est enracinée et tous veulent la conserver.
Quels sont les avantages de pouvoir fréquenter un conservatoire
dans son milieu, dans sa région? Le Conservatoire permet à des
jeunes musiciens d'avoir un enseignement professionnel de qualité et
continu avec des professeurs expérimentés et de haut niveau. De
plus, il permet à l'élève d'éveiller ses sens au
monde musical et d'accroître ses compétences qui, plus tard, lui
permettront d'entrer dans le monde professionnel. Par sa recherche constante de
l'excellence et grâce aux infrastructures de qualité du
Conservatoire, comme le matériel pédagogique ou le prêt
d'instruments, les bibliothèques, etc., l'élève se fait
l'artisan de sa région. Il crée une tradition en suscitant chez
la population la curiosité, la sensibilité et le goût de la
musique. Étant donné que les régions sont plus
éloignées, il y a une recherche d'une espèce de tradition
musicale qui est moins présente. Donc, le Conservatoire contribue
essentiellement à développer cette pensée qu'ont les
grands centres, finalement.
Le conservatoire de région permet aussi à
l'étudiant de poursuivre des études avancées en musique
qui ne pourraient avoir lieu que dans les grands centres, comme Québec
et Montréal. Cette affirmation tient du fait que la majorité des
régions ne possèdent pas d'université
spécialisée en musique, donc impossibilité... Si les
conservatoires disparaissent en région, la majorité en tout cas
des régions, ça devient impossible pour nous autres de
poursuivre, à moins de s'exiler.
Ce que le Conservatoire engendre dans une région. Il est
évident de constater qu'un conservatoire de musique offrant des cours
avancés dans de multiples disciplines crée une activité
musicale intense dans le milieu où il évolue. Le Conservatoire
peut fournir des
instrumentistes compétents pour la formation ou le
complément d'un orchestre, d'une harmonie, d'un choeur ou de tout autre
ensemble musical. Par exemple, le Conservatoire de musique de Chicoutimi
contribue grandement, par l'entremise de ses étudiants les plus
avancés, les violonistes, les altistes, les violoncellistes et puis
d'autres, à rehausser le niveau de l'orchestre symphonique
régional sans que celui-ci ait besoin d'engager des musiciens de
Québec ou des musiciens d'ailleurs. Je pense que c'est un point assez
important. Par contre, avec le projet de loi 135, si les étudiants de
cycle supérieur se retrouvent dans les grands centres, les
différentes organisations régionales prennent un coup dur au
niveau musical.
L'article 18 du projet de loi 135 stipule que le Conservatoire a pour
objet d'administrer et d'exploiter dans diverses régions du
Québec des établissements d'enseignement à diverses fins:
dispenser la formation professionnelle, susciter une formation initiale de
qualité et favoriser la présence d'organismes essentiels à
la vie musicale. L'article termine en disant que le Conservatoire tiendra
compte des spécificités de chaque établissement
d'enseignement.
Éventuellement, un conservatoire régional verra ses
classes les moins peuplées fermées au profit d'un autre
conservatoire. Cette éventualité ne fera qu'accroître le
statut privilégié des conservatoires des grandes villes, en
particulier celui de Montréal, et, par conséquent, provoquera la
disparition, à moyen ou à long terme, des conservatoires de
région. Ainsi, l'existence des conservatoires régionaux est une
réalité importante, tant pour les étudiants que pour la
population. C'est miner leur avenir que de couper dans la formation
dispensée, les vouant au rang d'une école intermédiaire:
l'école est une espèce d'école préparatoire en vue
des autres.
La qualité de l'enseignement en région. Depuis sa
fondation en 1942, la formation dispensée au Conservatoire a toujours
été considérée de haut calibre, et ce, dans tout le
réseau. Partout, on dénombre des professeurs compétents,
attentifs aux besoins de leurs élèves et soucieux de les aider
à préparer un brillant avenir. Pour un étudiant, il est
primordial d'avoir une formation de qualité et un encadrement continu
dans le même établissement, avec le même professeur. Citons
ici un des points de la confirmation de la mission des conservatoires de
musique du Québec, datée de juin 1993: «Les conservatoires
de musique ont conservé des caractéristiques dont la conjugaison
justifie qu'on maintienne leur existence. Ils possèdent une
pédagogie qui privilégie le développement de l'individu et
qui permet un encadrement continu.»
Pourtant, le projet de loi va à rencontre de cette même
mission que s'était donnée la ministre, soit en favorisant, et
ce, pour le bien de l'élève, la poursuite des études dans
un grand centre. Au contraire, nous croyons qu'une telle déstabilisation
ne pourra que nuire au bon fonctionnement de l'élève, nuisant par
le fait même au dynamisme culturel des conservatoires de
région.
En conclusion, nous croyons que le projet de loi 135, tel que
proposé, est une atteinte directe à l'avenir des conservatoires
de région en tentant de séparer les élèves
avancés des débutants et des intermédiaires. Dans cet
ordre d'idées, on ne pourra que créer une forme de conservatoire
supérieur au détriment des conservatoires de région. Le
projet de loi devrait plutôt insister sur la consolidation de nos acquis,
tout en proposant de nouveaux programmes susceptibles de nous conduire à
une réussite totale de notre cheminement.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Alors, on a cru bon de
soulever la question du conseil d'administration, vu qu'on a à vivre
avec ce genre de fonctionnement. On a cru bon de vous proposer ici une
idée qu'on croit bonne, bien entendu. L'article 4 du projet de loi 135,
tel que proposé dans son intégrité, n'allège pas le
fonctionnement administratif du réseau des conservatoires. Notre
crainte, face à l'établissement d'un conseil d'administration tel
que suggéré, nous porte à croire que subsistera cette
lourdeur administrative, cette centralisation tant dénoncée
depuis plusieurs années. Chaque conservatoire ne pourra pas
véritablement se développer en son milieu. Il faut donc se
demander s'il est pertinent de se doter d'un seul conseil d'administration pour
l'ensemble des conservatoires, reproduisant ainsi, sous une nouvelle image
à saveur améliorée, la même problématique qui
fait que chaque conservatoire ne peut s'épanouir selon ses propres
caractéristiques régionales.
Pour pallier à cela, nous suggérons et recommandons, pour
le bien de la culture de chaque région du Québec, que chaque
conservatoire ait son propre conseil d'administration composé de gens
issus du milieu gouvernemental et musical propre à la région mise
en cause. Ce conseil administratif sera ainsi plus en mesure de répondre
aux besoins spécifiques de chaque conservatoire. Chaque conservatoire a
des réalités différentes à affronter et, par la
présence de ce conseil administratif sur les lieux, il sera plus en
mesure de répondre rapidement et efficacement aux besoins relatifs
à chaque établissement.
Le point crucial pour les élèves, c'est-à-dire la
reconnaissance des diplômes. Depuis la création des conservatoires
en 1942, le Québec s'est doté de créateurs et
d'interprètes de très haute distinction, reconnus à
l'échelle nationale et internationale. Cette élite musicale
provient du fait qu'ils sont initialement choisis pour leur talent. En
conséquence, nous sommes en mesure de dire que l'élément
clé de cette réalité s'observe par la souplesse des
programmes permettant à l'élève de se consacrer
entièrement à la pratique de son instrument. À cela
s'ajoute l'enseignement des matières théoriques
nécessaires à la formation complète d'un musicien. (12 h
30)
La venue des nouveaux programmes suscite de grandes craintes
auprès des élèves. Nous croyons qu'ils remettent en
question la vocation première des conservatoires, soit de former des
musiciens de grande distinction. Ces programmes créés ni plus ni
moins à l'image
des universités par leur lourdeur pédagogique
empêcheront les élèves de se donner entièrement
à leur évolution artistique. L'institution d'État qu'est
le Conservatoire perd ainsi sa véritable vocation première
citée plus haut. Donc, est-ce nécessaire d'alourdir le
cheminement pédagogique au détriment de la performance
instrumentale? Le Conservatoire n'est pas une faculté universitaire de
par son caractère.
À cela, nous, élèves des conservatoires de musique
du Québec, exigeons l'adoption d'une reconnaissance des diplômes
auprès du MESS et du MEQ, tels qu'ils sont actuellement, bien qu'on
sache vos points, Mme la ministre, mais, pour ce que j'ai dit plus haut, alors
c'est ce que nous demandons. À toutes fins pratiques, le Conservatoire
offre un enseignement d'excellente qualité, donné par des
professeurs de grande compétence, dans un cadre plus qu'exceptionnel, vu
l'enseignement individuel et personnalisé. Nos diplômes devraient
être reconnus dans leur intégralité, dans le but d'une
reconnaissance juste et équitable de nos acquis, afin que le
Conservatoire ne soit pas un pâle dédoublement des
universités.
Alors aussi, il faut revenir, par rapport à la connaissance des
études, au point que Stéphanie Tremblay a soulevé,
c'est-à-dire la question de la flexibilité et de l'âge.
Notre crainte est que, par l'imposition de ces programmes, on ne soit plus
capables, finalement, d'avoir cette souplesse de finir plus jeunes. Alors, il
faudra peut-être expliquer à nouveau, de façon plus claire,
comment vous croyez que ce sera possible de faire ça.
Maintenant, un des derniers points avant la conclusion,
c'est-à-dire les frais de scolarité. Lorsque Wilfrid Pelletier a
fondé les conservatoires, il avait pour but de créer un
établissement d'enseignement de qualité et, surtout, accessible
à toutes les couches de la société. La venue des frais de
scolarité soulève diverses questions chez les étudiants.
Les frais de scolarité viendront-ils modifier le mode de
sélection des étudiants dont Stéphanie a parlé
préalablement? Au lieu de les choisir pour leur qualité
artistique, ne finira-t-on pas par choisir les gens aux portefeuilles les mieux
garnis? Cela ne risque-t-il pas, à long terme, de baisser le niveau de
l'institution, puisqu'on ne choisira plus uniquement en fonction du talent?
Trois questions soulevées et autant d'hypothèses possibles.
Le Conservatoire s'engagera-t-il toujours à nous prêter des
instruments? Certains instruments sont si coûteux qu'ils en deviennent
tout simplement inaccessibles pour les jeunes étudiants.
Le Président (M. Doyon): Mme Carrière, je vous
signale qu'il vous reste 30 secondes.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Oui. Alors, on passe
à la conclusion.
Mme Tremblay (Stéphanie): Ce qu'on aimerait dire en
conclusion, c'est que, finalement, une loi sur les conservatoires, ça ne
peut pas être juste une loi administrative; ici, on parle de culture. Je
pense que, depuis 1942, le Québec a compris que c'était
important, la culture, puis, nous, les artistes, je pense qu'on est vraiment
des médiateurs de la culture. Donc, ce que j'aimerais juste soulever
là-dedans...
Le Président (M. Doyon): Votre temps est terminé,
vous aurez l'occasion de revenir sur d'autres...
M. Boisclair: Sur le temps de l'Opposition, M. le
Président.
Mme Tremblay (Stéphanie): On a raté notre
punch!
M. Boisclair: M. le Président...
Le Président (M. Doyon): Oui, oui, alors, en terminant,
rapidement.
M. Boisclair: ...sur le temps de l'Opposition.
Le Président (M. Doyon): On a un ordre de la Chambre qu'il
nous faut respecter, d'ailleurs le député de Gouin l'invoquait
tout à l'heure avec raison. On a un ordre de la Chambre, alors...
Mme Tremblay (Stéphanie): Vingt mots.
Le Président (M. Doyon): .. je veux m'y conformer.
M. Boisclair: M. le Président...
Le Président (M. Doyon): Alors, Mme Tremblay, en
terminant.
M. Boisclair: ...sur le temps de l'Opposition.
Mme Tremblay (Stéphanie): On se demande: Est-ce que le
projet de loi 135, dans sa forme actuelle, n'est pas un peu utopique en regard
des moyens que vous voulez nous donner pour le réaliser? C'est ce qu'on
se demande vraiment.
Le Président (M. Doyon): Merci. Alors, je remercie Mme
Tremblay, M. Boucher et Mme Carrière. Mme la ministre, vous avez la
parole.
Mme Frulla: Premièrement, je vous remercie d'être
ici. Je suis heureuse de vous entendre à nouveau pour le bienfait de
tous ceux qui sont avec vous. Vous avez rencontré M. Thibault pendant
à peu près trois heures, vous nous avez rencontrés pendant
à peu près trois heures. Je vous ai expliqué aussi ce
qu'est une loi versus des règlements, versus des règlements
internes, le conseil d'administration. Ça, c'est très,
très important qu'on s'entende entre nous, entre une loi
déposée à
l'Assemblée nationale... Je vous ai dit: Une loi, c'est un
squelette; les muscles et la peau, ça, ce sont le conseil
d'administration et aussi les intervenants qui y travaillent. C'est très
important de vraiment comprendre le mécanisme même de
l'Assemblée nationale.
Vous avez raison quand vous dites: Une loi ne peut pas tout faire. Non,
une loi établit certains paramètres et, après ça,
par règlement, par entente, par synergie aussi entre professeurs,
élèves, le reste, évidemment, s'impose.
Maintenant, moi, j'ai des questions à vous poser. J'en ai
plusieurs, donc le temps nous presse. Par rapport à ce qui existe
présentement, sachant que les conservatoires sont une direction du
ministère, sachant que, par la Loi sur l'administration
financière, nous, on ne peut pas déléguer de pouvoirs, si
on veut, dans les régions ou dans d'autres conservatoires c'est
une loi du ministère, et je signe vos diplômes alors, par
rapport à ce qui existe maintenant et par rapport à ce qu'on veut
faire dans la loi 135, c'est-à-dire d'en faire des corporations
autonomes, avec, oui, un conseil d'administration où vous allez
être partie prenante, des commissions d'études où il y aura
des programmes, autant en art dramatique qu'en musique, qui pourront être
finalement imposés, si on veut, au niveau des différents
conservatoires, respectant la notion de réseau réseau,
c'est-à-dire Montréal, Québec, les régions,
où vous pouvez, comme vases communicants, aller de l'un à l'autre
sans que la qualité de l'enseignement soit différente
où vous allez participer et, ensuite, évidemment, des commissions
d'orientation où encore les gens, dans les différents
réseaux, les différents intervenants, vont être partie
prenante et inciter la vie musicale en région, est-ce que et je
reviens à ma question initiale entre la situation actuelle des
conservatoires et celle qu'on vous propose, vous préférez le
statu quo ou vous préférez vraiment qu'on aille de l'avant?
Mme Carrière (Annick-Patricia): Je pense qu'à
ça je vais vous répondre qu'on a eu une entente préalable
vous me le direz si ce n'est pas ça. C'est sûr qu'on veut
aller de l'avant. Ça, c'est sûr. Donc, je pense qu'à ce
niveau-là le projet de loi, peut-être avec certaines
bonifications, pourrait nous apparaître un avantage. Sauf que, je
m'excuse, vous avez soulevé deux points: vous avez parlé de
programmes, vous avez parlé de C.A. Les programmes que vous nous
proposez ne sont pas... C'est utopique de vouloir offrir un cours, par exemple,
de littérature d'orgue, on va toujours citer l'exemple clé:
Val-d'Or. Imaginez s'il y a un élève en troisième cycle
qui a besoin de ce cours-là pour pouvoir avoir son D.E.S., ce qui sera
l'équivalent probablement d'un diplôme reconnu du bac. Alors, je
ne vois pas dans quelle mesure vous voulez implanter tous ces programmes au
niveau du réseau, ça on ne le comprend vraiment pas. Alors, c'est
à ce niveau-là, il y a ce point de vue là aussi.
Mme Tremblay (Stéphanie): Moi, j'ai comme l'impression
qu'avec l'apparition de ces nouveaux programmes là... Est-ce qu'on ne
perd pas un peu la souplesse qui caractérise maintenant les
conservatoires, puis ce qui va faire que tous les étudiants des
régions ne pourront plus en aucun cas finir leurs études
terminales en région?
Mme Frulla: Je veux juste, parce que là on vous a dit
beaucoup de choses, puis je comprends votre inquiétude, hein, je
comprends votre inquiétude, mais, croyez-moi, si les conservatoires
demeurent au ministère de la Culture... Et ça, c'est
statué dans la politique culturelle déposée à
l'Assemblée nationale, acceptée à l'unanimité par
l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les deux partis. Donc, la
politique culturelle, c'est finalement le document qui régit le
développement culturel du Québec pour maintenant et pour les
années futures.
Si c'est statué que le Conservatoire reste au ministère de
la Culture, c'est justement pour vous donner cette
flexibilité-là. Si notre volonté avait été,
mettons, de transférer les conservatoires à l'Éducation,
vous n'auriez pu avoir cette flexibilité. On en est très
conscients autant au niveau de l'Éducation qu'au ministère de la
Culture, de telle sorte qu'il y a une entente formelle entre les deux
ministères pour qu'on garde les conservatoires au ministère de la
Culture, pour vous donner cette flexibilité-là. Ça, c'est
une chose.
Deuxièmement, et je reviens à l'article 93, c'est
qu'évidemment, le ministère de la Culture, on est chargés
de l'application de la présente loi. Donc, il ne faut pas vous
inquiéter, cette flexibilité-là, vous l'avez et vous allez
la conserver. (12 h 40)
Maintenant, au niveau de la reconnaissance de la diplomation
parce que je sais que pour vous c'est capital et je vous comprends, vous me
l'avez bien fait comprendre par des exemples très précis
j'ai parlé à Lucienne Robillard. Je vous ai dit que Lucienne
n'est pas ici avec nous aujourd'hui parce qu'elle est à Strasbourg. J'ai
une lettre d'entente entre les deux sous-ministres qui date du 7 octobre. Il y
a des programmes qui ont été travaillés depuis plusieurs
années, même entre les conservatoires et le ministère de
l'Enseignement supérieur, de telle sorte qu'on puisse justement en
arriver à cette reconnaissance au niveau de la diplomation, tout en
observant la flexibilité dont vous avez besoin. Mais, là-dessus,
comme Lucienne a mandaté son adjoint parlementaire, M. Hamel, je vais
lui laisser la parole.
Le Président (M. Doyon): M. le député de
Sherbrooke.
M. Hamel: Merci, M. le Président. Merci, Mme la ministre.
Écoutez, effectivement, ce qu'il faut comprendre, c'est que les deux
ministres, et de la Culture et de l'Éducation et de la Science,
travaillent en très étroite collaboration avec un seul objectif:
l'éducation et l'excellence. Comme vous l'avez souligné
tantôt, ça,
c'est primordial. Alors, du côté artistique, la Culture; du
côté pédagogique, la ministre de l'Éducation.
L'article 20 que vous avez dans ce projet de loi vient confirmer une
entente administrative qui existe pratiquement déjà entre les
deux, à l'effet, par exemple, de reconnaître certains programmes
de niveau collégial, d'une part.
Cette reconnaissance du diplôme vous préoccupe au plus haut
point. Encore une fois, on veut vous rassurer, soyez tout à fait
rassurés le terme est approprié, c'est le terme qu'il faut
choisir à ce moment-ci définitivement, les deux ministres
et les deux ministères travaillent très, très, très
étroitement pour vous assurer cette reconnaissance.
Maintenant, il faut d'abord procéder par le statut juridique de
la corporation qui va faire que, dorénavant, il y aura un organisme
mandaté et par lequel le nouveau Conservatoire de musique et d'art
dramatique du Québec pourra, avec entente du ministère de la
Culture et de la ministre de l'Enseignement supérieur, à ce
moment-là, reconnaître certains diplômes de niveau
universitaire.
Maintenant, avec cette reconnaissance universitaire ou cette
reconnaissance des diplômes que vous aurez... Ça, c'est acquis.
Vous n'avez pas à vous inquiéter là-dessus. Mme la
ministre de la Culture vous le répète constamment, c'est un fait
acquis, mais il faut d'abord passer par le statut juridique de la naissance de
cette corporation. Les frais de scolarité que vous avez
mentionnés tantôt vous préoccupent, c'est normal. Mais,
à ce moment-là, dès que vous aurez cette reconnaissance de
vos diplômes, vous deviendrez éligibles aux programmes d'aide
financière actuellement disponibles aux universités.
Mme Carrière (Annick-Patricia): On est déjà
éligibles aux prêts et bourses.
Mme Tremblay (Stéphanie): Moi, j'aimerais éclaircir
quelque chose. Vous nous dites que vous travaillez déjà en
étroite collaboration avec le ministère de la Culture, sauf qu'en
même temps vous nous dites que vous ne pouvez rien faire tant qu'il n'y a
pas... tant que la corporation... Est-ce que ça veut dire que vous ne
vous êtes pas encore rencontrés et qu'il n'y a rien qui s'est
fait?
M. Hamel: Non, non, au contraire.
Mme Tremblay (Stéphanie): J'aimerais savoir ce qui s'est
fait à date pour ça.
M. Hamel: À date, Mme la ministre de la Culture peut vous
le confirmer, il y a de nombreux échanges de correspondance, des
comités de travail qui, effectivement, poursuivent leur travail afin de
régler et d'arriver à une entente finale là-dessus. Mais
il faut d'abord établir le dossier, le statut juridique de la
corporation. Alors, déjà il y a du travail qui se fait.
Mme Tremblay (Stéphanie): Donc, j'imagine que vous n'avez
pas encore exploré les programmes, voir s'il pouvait vraiment y avoir
compatibilité?
M. Hamel: Oui, oui, oui. C'est déjà en marche, et
je puis vous assurer qu'au plus tard le 1er juillet prochain ça devrait
être terminé.
Mme Tremblay (Stéphanie): Vous nous l'assurez?
M. Hamel: Oui.
Mme Frulla: C'est-à-dire que...
Mme Tremblay (Stéphanie): Et puis, donc, au 1er septembre,
nos diplômes vont être reconnus.
Mme Frulla: Ce qui se passe présentement, c'est qu'au
niveau collégial la collaboration est déjà en marche et
les diplômes ont été travaillés conjointement. Au
niveau universitaire, il reste, avec le ministère de l'Enseignement
supérieur, du travail à faire. Si on vous a donné la copie
de l'entente... «C'est-u» ça qu'on vous a passé, la
copie de l'entente des deux sous-ministres?
Mme Tremblay (Stéphanie): Ça ressemble à
ça.
Mme Frulla: C'est-à-dire, une entente des deux
sous-ministres, oui, c'est une entente qui fait en sorte qu'au niveau de la
diplomation, finalement, au niveau universitaire il reste du travail à
faire, mais ce travail va être fait en courant d'année. Par
contre, il n'y aura pas de frais de scolarité tant que les
diplômes ne seront pas reconnus. Je vous l'ai dit la semaine
dernière, et je vous l'assure, et c'est présentement dans le
projet de loi. On le verra demain, il n'y en aura pas, de frais de
scolarité.
Mais, dans la mesure où les diplômes sont reconnus, il y
aura des frais de scolarité, mais graduels. C'est-à-dire que, sur
une base de trois ans, vos systèmes de prêts et bourses vont
être réajustés en fonction de ces frais de
scolarité. Mais vous savez comme moi qu'il y a aussi un principe
d'équité à observer, c'est-à-dire que, dans le
temps de Wilfrid Pelletier, il y a 50 ans, il n'y avait pas non plus un
réseau d'éducation qui dispensait à trois fois plus
d'élèves, par exemple, en interprétation que le
Conservatoire ne le fait.
Donc, par un certain principe d'équité, c'est très
difficile de soutenir, pour un gouvernement, la position de dire que, oui, il y
a des élèves qui paient des frais de scolarité et qui ont
une certaine formation, qui est différente de la vôtre, je
l'avoue, et que, de l'autre côté, il y a des élèves
qui n'ont aucuns frais de scolarité. Par contre, les frais de
scolarité vont tenir compte des programmes qui sont reconnus par le
gouvernement, ce qui veut dire que vous n'aurez probablement pas les
mêmes frais de scolarité qu'un étudiant, par exemple, au
premier cycle universitaire à McGill. C'est dépendant des
programmes qui vont être acceptés par le ministère de
l'Enseignement supérieur. Et ça, ils seront
modulés, et nous avons une entente avec le ministère de
l'Enseignement supérieur à cet effet, mais il faut continuer le
travail.
Mais il faut comprendre que, malgré ce que le
député dit c'est moi qui est ministre, là
une direction du ministère ne peut pas travailler avec le
ministère de l'Enseignement supérieur de façon tangible
à signer des ententes, là, et tout ça. C'est impossible,
par loi; il faut que ce soit de corporation à corporation. Sachez aussi
que, sur le conseil d'administration, vous allez y être, ainsi que des
ex-élèves du Conservatoire, ce qui fait qu'on assure aussi, au
niveau du conseil d'administration et des commissions d'études, l'input
des élèves et des ex-élèves du Conservatoire, ce
que vous n'avez pas présentement. Demain matin, je décide de
fermer...
Mme Tremblay (Stéphanie): On l'a d'ailleurs
mentionné comme un point positif.
Mme Frulla: ...le conservatoire à Val-d'Or, il n'y a
personne qui peut m'en empêcher.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Excusez-moi, mais il y a
peut-être aussi un aspect qu'il faut voir, que les musiciens ont vraiment
dans leur vie, c'est-à-dire... Par exemple, si on parle de l'achat d'un
instrument de musique, ça, c'est quelque chose, vraiment... Vous le
savez parce que, vous, vous administrez des budgets pour des prêts
d'instruments. Vous savez la valeur d'une contrebasse, d'un basson, d'un piano
et tout ce que ça comporte être musicien. Ça, c'est des
frais que quelqu'un... Quelqu'un qui étudie en pédagogie a des
frais aussi, mais qui sont quand même moins élevés. Un
musicien qui, après ses études, a déjà des
prêts et bourses à rembourser, si, pendant ses études, il
n'a pu qu'emprunter un instrument à l'institution et qu'en plus il y a
des frais de scolarité, je vois un petit peu difficilement... C'est
différent. Il faut traiter le problème un petit peu... Je
comprends votre position, mais il faut voir la nôtre aussi,
peut-être, plus. Je sais que vous la voyez, mais encore plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Tremblay (Stéphanie): J'aimerais aussi soulever un
autre point. Vous nous dites que les universités produisent trois fois
plus d'étudiants que les conservatoires. C'est vrai. Eux, je pense
qu'ils vivent le problème qu'on a peur qui arrive aux conservatoires.
C'est qu'ils en acceptent beaucoup, beaucoup, et, de ce nombre-là, il y
en a quelques-uns qui ressortent, qui sont vraiment bons, mais nous autres on
les choisit. Et j'aimerais ça vous parler un petit peu de quelques
statistiques. Juste pour Québec, à l'OSQ, 50 musiciens sur 76
sont issus des conservatoires. Les Violons du Roy, c'est la même chose;
10 sur 15.
Je pense qu'il faut aussi parler de productivité. Les
conservatoires, ça fonctionne. Même si l'université a 300
étudiants en interprétation et que le conservatoire en a 20, eh
bien, j'ai comme l'impression qu'il y a plus de chances que ces 20
étudiants-là trouvent des emplois. Je pense qu'il faut vraiment
protéger ça. Et, au fond, les frais de scolarité à
ce moment-là, on est tellement peu nombreux... C'est vrai, vous me
parlez d'équité. Dans ce sens-là, ça peut
être acceptable, sauf que, dans le budget total, c'est
complètement symbolique. Ça va peut-être couvrir les frais
de voyage d'un conseil d'administration qui va se diriger...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Tremblay (Stéphanie): ...qui va aller siéger
pendant une réunion. Ça risque peut-être juste de couvrir
ça. Ça ne devient pas un peu ridicule? À ce
moment-là, est-ce qu'il n'y aura pas une espèce d'appât du
gain avec ces frais de scolarité? Vous allez dire: Oups! On n'a pas
assez d'étudiants, il n'y en a pas beaucoup, ça nous en prendrait
plus. Ça fait que là vous allez accepter tous les gens qui vont
vouloir se présenter aux auditions, pour avoir plus d'argent.
Mme Frulla: À la différence de vous et des
universités, n'oubliez pas, votre enseignement demeure modulé,
d'une part. Deuxièmement, quand on parle de frais de scolarité
par rapport aux programmes qui seront acceptés, comme je vous dis, c'est
modulé, ça ne sera pas de la même façon, par
exemple, où on dit: Bon, eh bien, année un à McGill, par
exemple, c'est 1500 $ ou 2000 $. Alors, il va falloir absolument qu'il y ait
une façon de moduler tout ça de telle sorte qu'il y en a certains
qui vont avoir quelques cours universitaires, d'autres qui vont avoir d'autres
cours qui vont être de niveau collégial, et tout ça dans
une même année. Alors, c'est pour ça que je vous dis que,
tant que tout ça ne sera pas fait et que tout ça ne sera pas
modulé, alors, à ce moment-là, il n'y en aura pas de frais
de scolarité. (12 h 50)
Deuxièmement, c'est le conseil d'administration. Il ne faut pas
oublier que je remets aussi dans la main du conseil d'administration,
formé d'élèves, de professeurs, de trois personnes de
l'Enseignement supérieur et représentants aussi du
ministère de la Culture, dont des ex-étudiants aussi au
Conservatoire, la décision administrative. Alors, les ententes qui vont
être faites par rapport aux frais de scolarité, etc., vont
être prises aussi... la décision va être prise par le
conseil d'administration. Ça ne sera plus pris par moi, là,
ça va être pris par le conseil d'administration, qui est beaucoup
plus représentatif en termes de donner une pulsion, si on veut, à
un réseau d'institutions que seule la ministre de la Culture, veux veux
pas. Alors, donc, ça, il ne faut pas minimiser ça non plus, ainsi
que les deux commissions d'études. Vous allez être partie prenante
des décisions, et ça, c'est important, parce que, au moment
où on se parle, comme je vous le dis, vous n'êtes nulle part. Vous
recevez, c'est vrai, mais, pour le reste, vous n'êtes nulle part. Et je
vous disais tantôt: Demain matin, je décide de fermer un
conservatoire, c'est ma décision et ma décision unique. Et elle
pourrait être prise, si on pousse au plus
loin, elle pourrait même être prise par une décision
totalement administrative provenant, si on veut, de règles du Conseil du
trésor, ce qui ne peut pas arriver si vous êtes une corporation
avec un conseil d'administration. Et, encore là, votre conseil
d'administration, c'est lui qui décide des modes administratifs du
Conservatoire ainsi que de tout le reste, et vous êtes partie
prenante.
Mme Tremblay (Stéphanie): Mais j'ai comme l'impression que
la loi actuelle... C'est vrai, la loi vous permet de faire ça, mais
est-ce que l'opinion publique vous le permet? Imaginez-vous le scandale si vous
décidiez demain matin de fermer le conservatoire de Québec, alors
que l'Université Laval se meurt. Il ne resterait plus rien. Est-ce que,
par la loi, ça ne pourrait pas déjà être... C'est
vrai, pour l'opinion publique, de le fermer tout d'un coup, c'est scandaleux,
mais de le laisser mourir à petit feu, ça l'est moins. Est-ce
que...
Mme Frulla: Bien, c'est justement parce que...
Mme Tremblay (Stéphanie): Mais, dans la loi, je vois que,
c'est vrai, il y a quand même une volonté de faire avancer des
choses, mais j'ai comme l'impression qu'il n'y a pas les moyens qui vont avec.
Vous nous parlez, même M. Bruneau nous parlait de développer les
régions. Aïe! ça serait extraordinaire si ça pouvait
se faire, mais on parle de sous: Oups! il n'y en a pas.
Mme Frulla: Bien, faites attention, revenez donc sur «il
n'y a pas les moyens».
Mme Tremblay (Stéphanie): Bien, les moyens
évidemment...
M. Boucher (Martin): Bien, dans ce sens-là, moi, je pense
que tantôt on parlait...
Mme Frulla: Parce que les conservatoires, c'est 16 000 000 $ au
moment où on se parle, tout consolidé, là.
Mme Tremblay (Stéphanie): C'est peu.
M. Boucher (Martin): Mais parlons des régions. On parlait
de souplesse tout à l'heure, mais est-ce qu'on s'engage à
certains... Parce que je regardais la liste des cours je l'ai ici, bon
il y a plein de cours là-dedans qui ne sont pas donnés en
région en ce moment. Est-ce que comme on le disait tout à
l'heure, d'offrir l'enseignement spécialisé en région pour
une plus grande équité, etc. on s'engage ici à
donner tel cours? Si un étudiant désire, mettons à
Val-d'Or, le prendre, le cours de littérature d'orgue, est-ce qu'on va
lui dire: Non, ce n'est pas possible, on ne te le donne pas?
Mme Frulla: Qu'est-ce qui se passe actuellement?
M. Boucher (Martin): Bien, actuellement, souvent on n'en donne
pas. Mais, de toute façon, on le donne parce que le cours est existant.
Mais, étant donné qu'on veut couper à plusieurs niveaux et
qu'il n'existe pas, est-ce qu'on va investir à mettre un professeur de
plus, à commencer une nouvelle classe en région pour que
l'étudiant puisse continuer, premièrement?
Mme Frulla: Mais pourquoi on parle de... C'est parce que j'essaie
de comprendre, là. Quand on... Et la volonté évidemment
est là d'assurer une pérennité des conservatoires. Parce
qu'il faut comprendre que, si ça continue comme c'est là, les
conservatoires vont tout simplement s'atrophier, veux veux pas, parce que les
conservatoires sont soumis à des règles administratives qui sont
beaucoup plus rigides, parce qu'elles proviennent du Conseil du trésor,
que des corporations qui sont autonomes, d'une part.
Deuxièmement, j'essaie de comprendre quand vous dites que, bon,
on veut couper, et tout ça. Je ne comprends pas ce que ça a
à voir avec la loi, d'une part. Et, deuxièmement, est-ce que vous
êtes j'essaie de voir d'accord aussi à dire que,
s'il y a un cours très, très spécialisé que vous
voulez aller chercher et qui n'existe pas, par exemple, dans une région
ou une autre, mais un cours...
M. Boucher (Martin): Qui va être obligatoire. Mme
Frulla: ...très pointu, là...
M. Boucher (Martin): Très, très
spécialisé. Mais, moi, je me fie au programme qui est là,
et qui va s'ajouter, et qui va être obligatoire pour l'obtention du
diplôme d'études supérieures.
Mme Frulla: Si, pour l'obtention, il y a des cours qui sont
obligatoires, les cours vont se donner.
Le Président (M. Doyon): Merci, Mme la ministre.
Mme Frulla: C'est clair.
Le Président (M. Doyon): Malheureusement, ça
termine le temps, et je me dois d'appliquer les règles qui sont les
nôtres. M. le député de Gouin, vous avez la parole.
M. Boisclair: Bien, un premier commentaire. Je vais vous dire,
ça fait du bien de voir autant de jeunes dans le parlement, Ça
tranche certainement...
Mme Frulla: Regardez-moi pas. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisclair: Ça tranche certainement avec notre
quotidien, et je voudrais vous remercier pour votre présentation, en
reprenant tout d'abord le premier commentaire de la ministre, qui nous disait
tout à l'heure: II y a une loi, et la loi c'est le squelette, il faut
mettre la chair alentour, et ce sera le conseil d'administration qui verra
à mettre la chair alentour du squelette. Moi, je pense que c'est bien
fait comme explication, sauf que la loi c'est aussi le verrou, c'est la
garantie, c'est ce qui fait que le conseil d'administration ne pourra pas faire
n'importe quoi. C'est le cadre dans lequel le conseil d'administration aura
à travailler. Et nous, ce que nous avons à faire ici, alentour de
cette table, c'est à définir ce cadre-là.
Ce que je comprends de votre propos, c'est que le cadre n'est pas assez
clairement défini. Particulièrement lorsque vous nous parlez de
la question des régions, on dit à l'article 18: «Le
Conservatoire a pour objet d'administrer et d'exploiter dans diverses
régions...» Pourquoi on ne les nomme pas, les régions? On
le pourrait très bien, dans la loi, et il n'y a rien qui nous
empêche de procéder. Ça nous donne une garantie et, si
jamais le conseil d'administration décidait de procéder à
la fermeture, par exemple, d'un conservatoire, il devrait obtenir un amendement
à la loi, ce qui peut être beaucoup plus compliqué, et
ça suscite un débat public qui permet aux gens de s'exprimer.
Autre chose qu'il faut remettre en perspective, la ministre dit:
Ça sera au conseil d'administration de décider. Un instant,
là, ne soyons pas naïfs! La majorité des gens au conseil
d'administration sont nommés soit par la ministre de la Culture, soit
par la ministre de l'Enseignement supérieur. Alors, regardons les choses
comme elles sont.
Mme Tremblay (Stéphanie): ...C.A. aussi.
M. Boisclair: La majorité des membres au conseil
d'administration sont nommés après consultation, soit par vous...
cinq nommés par la ministre de la Culture, deux nommés par le
MESS ça fait sept et ça, c'est sur un conseil de
13, si je ne m'abuse, les six autres...
Mme Tremblay (Stéphanie): Quinze.
M. Boisclair: Hein?
Mme Tremblay (Stéphanie): Quinze.
M. Boisclair: Quinze. Une de l'Éducation, je m'excuse,
c'est l'autre personne. Alors, cinq par la ministre de la Culture, deux
nommés par le MESS et une nommée par l'Éducation.
Connaissant la façon dont les choses fonctionnent, je comprends
très bien qu'il y aura place pour la discussion, et ainsi de suite, mais
il ne faut pas être naïfs non plus, et on sait très bien
comment les choses vont fonctionner.
Ces commtntaires-là étant faits, moi, je pense que c'est
justement sur le cadre que nous devons travailler et c'est ce avec quoi les
conservatoires vont pouvoir se développer, et la réflexion qui
doit se faire, c'est à ce niveau-là. Et, moi, je pense qu'il faut
aller encore plus loin que ce qu'il y a dans le projet de loi.
Je voudrais peut-être résumer quelques-unes de vos
recommandations pour être sûr que je vous ai bien compris et,
après ça, je vous laisserai tout le temps pour soit me corriger
ou me rappeler d'autres choses que vous avez dites.
D'une part, vous parlez de la question des régions. Je pense
qu'il est important de préciser les régions. Deuxièmement,
à l'article 18, on souligne la formation initiale, d'où la
crainte du glissement et que les conservatoires en région ne soient que
des écoles préparatoires qui servent à envoyer des gens
dans les grandes centres. Vous souhaitez une modification à cet
élément-là. Vous nous faites aussi une proposition pour un
conseil d'administration pour chacun des conservatoires. Je me demande si une
opération comme celle-là peut être
opérationnelle j'aimerais peut-être vous entendre tout
à l'heure préciser là-dessus parce que ma
principale préoccupation, moi, elle est surtout à l'article 44 du
projet de loi, lorsqu'à l'article 44 on dit: «Le conseil
d'orientation dans chacune des institutions, et qui, à mon avis,
en passant, est beaucoup trop fermé, devrait être beaucoup plus
ouvert sur les représentants régionaux, et on aura des
amendements à proposer dans ce sens-là pour bonifier le projet de
loi donne son avis sur toute question que lui soumet le
Conservatoire».
Mais, moi, je pense que le conseil d'orientation devrait avoir une
poignée plus grande sur le conseil d'administration et soumettre des
avis sur les sujets qu'il lui semble bon de recommander. Et c'est pour
ça que, pour assurer la mobilité, toutefois, des étudiants
dans le réseau, je ne sais pas si votre proposition d'un conseil
d'administration pour chacun des conservatoires est une proposition qui est
réaliste. Je vous soumets cette question-là humblement, en
attendant votre question.
Mme Tremblay (Stéphanie): Cette...
M. Boisclair: Dernier petit commentaire, si vous me permettez.
L'entente. Écoutez, on vous a remis le document. Si une correspondance
entre deux sous-ministres, c'est ce qu'on appelle une entente, je ne suis pas
député, pas plus que je ne suis ministre aussi.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: ...
M. Boisclair: Non plus, oui. Mais il faut bien comprendre que
cette lettre-là, c'est une réponse à une lettre qui a
été envoyée par la sous-ministre à la Culture, Mme
Michelle Courchesnes, pour susciter des commentaires. Je relis la lettre, le
premier paragraphe: «J'ai bien reçu pour commentaires le projet de
loi sur le
Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec.» Je
dois vous dire que c'est une bien mince garantie et, connaissant nos appareils
d'État et connaissant les lourdeurs administratives, je ne suis pas
convaincu que ce genre de texte pourra se traduire rapidement par une
entente.
La ministre me dit: Bien sûr, on l'a dans la loi. Je suis tout
à fait d'accord avec vous, mais ce n'est pas pour autant parce que c'est
dans la loi que les gens arriveront à une entente, compte tenu des
problèmes spécifiques que vous n'arrêtez pas de nous
énoncer depuis tout à l'heure et qui sont une
réalité. Par exemple, on va regarder tout à l'heure le
régime collégial... (13 heures)
Le Président (M. Doyon): Un instant! Je constate, M. le
député, qu'il est 13 heures. L'ordre de la Chambre nous indique
que nous devions terminer nos travaux à 13 heures. Alors, je suspends
ces travaux jusqu'à 15...
M. Boisclair: M. le Président, s'il y a consentement,
est-ce qu'on peut finir nos 20 minutes et reprendre à...
Le Président (M. Doyon): Bien, est-ce qu'il y a
consentement dans cette commission?
M. Boisclair: Qu'on finisse pour les étudiants. Le
Président (M. Doyon): Alors, très bien.
M. Boisclair: Alors, il faudra voir sur le régime
d'études collégiales. Ce sont mes commentaires
généraux. Première question que je vais vous poser: sur
l'organigramme du Conservatoire. Vous nous avez proposé un conseil
d'administration pour chacune des institutions. Est-ce que vous auriez aussi
une bonification à nous proposer quant à la composition des
conseils d'orientation, si jamais c'était une formule que vous reteniez?
Est-ce qu'il ne serait pas aussi préférable, au lieu d'avoir un
conseil d'administration pour chacune des institutions, de modifier le
rôle des conseils d'orientation et leur composition?
Mme Tremblay (Stéphanie): Ça pourrait être
une solution aussi. Nous autres, pour proposer un conseil d'administration par
établissement, on s'est surtout basés sur ce qui se fait
déjà dans les hôpitaux. Mais on pense que les conseils
d'orientation, n'ayant pas de vrais pouvoirs réels, ils peuvent toujours
émettre des suggestions, faire des commentaires, évidemment, si
le conseil d'orientation est fort, pesant, ça peut avoir une influence
sur le conseil d'administration, sauf que, évidemment, le conseil
d'administration ne peut pas être obligé d'accepter les
recommandations des conseils d'orientation sans renoncer à ses vrais
pouvoirs.
Donc, on se dit: Vraiment, est-ce que c'est suffisant? Les
conservatoires sont établis partout à travers le Québec.
Est-ce qu'un conseil d'orientation, regroupant en majorité des gens
nommés ne venant pas nécessairement de chaque région, peut
être vraiment apte à répondre aux besoins
spécifiques de chaque région? C'est pour ça qu'on propose
ça. On se dit: Bon, les conseils d'orientation, on ne peut pas leur
donner un vrai pouvoir de décision. Ils peuvent juste faire des
recommandations. Donc, on se dit à ce moment-là: Un C.A. par
établissement, ça se fait déjà, avec
peut-être un petit conseil de coordination au-dessus, comme on
connaît déjà. C'est une formule qui a été
éprouvée, je pense.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Je pense que les C.A.,
aussi, au même titre que l'exemple des hôpitaux ça a
l'air qu'on est dans le même ordre d'idées c'est que les
hôpitaux n'ont pas seulement un C.A. pour tous les hôpitaux, puis
je pense que le C.A. qui est par hôpital va pouvoir vraiment savoir les
besoins internes par hôpital. En tout cas, enfin, je ne peux pas croire
qu'un C.A. unique va pouvoir répondre aux besoins des gens de Rimouski,
tandis que les gens qui seront sur place pourront répondre efficacement
et rapidement à tout ce qui se passera. Alors, je pense qu'à ce
niveau-là les problèmes qu'on avait déjà... C'est
déjà mieux, il y a un avancement, mais, tant qu'à faire,
vous êtes aussi bien de changer pour vraiment mieux, à ce
moment-là, que les gens soient... De toute façon, le directeur
général assure déjà une coordination entre les
conservatoires, alors je ne vois pas pourquoi notre recommandation ne pourrait
pas être retenue.
Le Président (M. Doyon): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Peut-être laisser terminer...
Le Président (M. Doyon): Ah! très bien. Alors, M.
le député de Gouin.
M. Boisclair: La préoccupation, c'est de maintenir une
flexibilité entre les conservatoires... non pas une flexibilité,
mais de permettre que des étudiants puissent se promener, aussi, d'un
conservatoire à l'autre...
Mme Carrière (Annick-Patricia): J'imagine que ça
doit pouvoir être possible.
M. Boisclair: ...et de maintenir la notion de réseau.
Votre formule, à mon avis, mérite d'être
étudiée, mais elle soulève un certain nombre de
questions.
Deux autres petites choses. Est-ce que vous avez été
consultés sur les orientations ministérielles qui ont
été déposées?
Mme Tremblay (Stéphanie): Consultés? M.
Boisclair: Oui.
Mme Tremblay (Stéphanie): Est-ce que... On nous les a
présentées...
Mme Carrière (Annick-Patricia): En juin...
Mme Tremblay (Stéphanie): ...disons, on nous les a
présentées...
Mme Carrière (Annick-Patricia): ...15 minutes avant la
réunion. En juin, ça?
M. Boisclair: Oui.
Mme Tremblay (Stéphanie): Les orientations? Oui, oui,
c'est ça.
Mme Carrière (Annick-Patricia): C'est 15 minutes avant la
réunion qu'on a eu le dossier pour le lire.
M. Boisclair: Et c'est là-dessus...
Mme Tremblay (Stéphanie): On nous a vraiment juste
présenté... La personne qui est venue nous les présenter
nous a dit qu'elle récoltait un peu nos états d'âme face
à ça. Puis ces orientations ministérielles là, il
ne faut pas se le cacher, ont suscité vraiment de vives
inquiétudes chez nous, surtout lorsqu'on parle de la mission, qui est
à confirmer, puis, c'est très clair, on encourage, on veut
vraiment encourager les étudiants à terminer leurs études
à Montréal.
Là aussi je voudrais peut-être relever une
espèce de contradiction la ministre disait, juste avant la fin de
nos 20 minutes, que, si les cours dans les programmes sont obligatoires, elle
va les dispenser dans chaque conservatoire. Mais est-ce que ce n'est pas un peu
utopique? Puis est-ce que ça ne va pas un peu à rencontre de ce
qui est déjà indiqué dans les orientations
ministérielles? Puis, aussi, est-ce que, pour pouvoir donner tous les
cours des programmes, les conservatoires de région ne se feront pas
fermer des classes, pour pouvoir donner, genre, un programme complet à
Chicoutimi en orgue, un programme complet en saxophone à Val d'Or? Je ne
sais pas, ça peut peut-être être possible. C'est la question
que je me pose.
M. Boisclair: Oui. Autre élément: Est-ce que vous
avez regardé le régime pédagogique, quant aux conditions
d'admissibilité? Parce que votre crainte, tout à l'heure, quant
à la sélection des étudiants qui pourrait se faire sur
d'autres motifs que le talent... Je veux juste souligner, entre autres, vous
connaissez très bien comment ça fonctionne dans les
régimes d'études collégiales, par crédits, qui
viendraient peut-être même établir une séquence qui
pourrait être beaucoup plus stricte que celle que vous connaissez,
à l'heure actuelle, qui vous permet un cheminement très flexible,
individualisé et...
Mme Carrière (Annick-Patricia): On ne nous l'a pas
présenté, ce dossier-là.
Mme Tremblay (Stéphanie): On a quand mê- me... Moi,
j'ai quand même eu accès, en consultation, au programme de
saxophone, puisque c'est l'instrument dont je joue, et je regardais juste au
niveau du programme qu'on peut appeler bac ou D.E.S., peu importe, il y a
vraiment des... C'est réparti sur trois ans au lieu de deux ans. On me
rajoute une année. Donc, on standardise avec le trois ans standard du
bac, et je dois vous dire que, pour ce qui est de la progression
accélérée, ça devient pratiquement impossible. Il y
a tellement de cours que, finalement, ça devient, en faisant un
accéléré... Bon, ça veut dire «loader»
une année pleine de cours, avoir moins de temps pour pratiquer, moins
avancer. Ça devient très difficile. Je pense qu'on en vient un
peu à standardiser ces programmes-là avec les universités.
Moi, je trouve que ça ressemble à un programme
d'université et je me demande: Avec l'apparition de ces
programmes-là, c'est certain qu'il peut y avoir des cours
intéressants, sauf que est-ce qu'on ne va pas être pareil comme
une université? Et ça peut peut-être faire baisser un peu
le niveau d'excellence du Conservatoire, si on peut appeler ça comme
ça.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Surtout quand on sait que,
au niveau international, ils préfèrent quand on est jeune.
Ça a l'air que, quand on arrive... De toute façon, les concours,
en général, pour les instrumentistes, c'est 30 ans; pour les
chanteurs, c'est 35 ans. Donc, finir les études déjà plus
tard, ça nous amène certaines difficultés, quand on sait
qu'après le conservatoire il y a toujours un perfectionnement, si, bien
entendu, on a envie d'aller plus loin, à établir. C'est par
rapport à ça que nos inquiétudes se greffent vraiment, et
ça, ce n'est pas clair.
Et peut-être que, dans le projet de loi, oui, ils en parlent,
mais, comme le rappelait M. Boisclair, ce n'est pas clair, et ça, on a
vraiment des craintes à ce niveau-là, vu que ça sera
peut-être moins choisi, l'imposition de frais de scolarité... Tout
ça fait en sorte que, dans notre tête... Et les programmes en
région, vous nous dites: Oui. On peut vous croire, c'est sûr, de
bonne foi, mais, quand on sait ce qui se passe et qu'ils ferment de plus en
plus de classes, on a un petit peu de la difficulté à se
l'imaginer, ce que vous nous dites. C'est un peu dur, je vous avoue,
là.
Mme Tremblay (Stéphanie): Est-ce qu'on n'essaie pas un peu
de faire en ce moment ce qu'on a fait à l'École des
beaux-arts?
Mme Frulla: Je m'excuse, mais est-ce que je peux répondre
à ça? Parce que l'École des beaux-arts, tout simplement...
Écoutez, la différence, justement, entre l'École des
beaux-arts et ce qui se passe au niveau des conservatoires, c'est que
l'École des beaux-arts a tout simplement été remise au
ministère de l'Éducation, et, effectivement, l'École des
beaux-arts, maintenant, n'existe plus. C'est dans les différents
cégeps que les cours en arts visuels, etc., se donnent.
À la différence de ce qui se passe présentement
au niveau du Conservatoire, c'est que c'est la ministre de la Culture,
je l'ai expliqué tantôt, qui a la responsabilité de
l'application de la loi, donc qui garde, en son ministère, les
conservatoires. Je vous l'ai expliqué tantôt, et c'est dans la
politique culturelle aussi. Si on remettait les conservatoires aux
ministères de l'Enseignement supérieur, par exemple, et de
l'Éducation, alors on remet les conservatoires avec les budgets s'y
afférents et on leur dit: Bon, bien, allez-y et occupez-vous-en. C'est
justement pour ne pas avoir cette standardisation que l'on garde, au
ministère de la Culture, la responsabilité de ces
conservatoires.
Deuxièmement, je vous l'ai dit aussi je le sais, je vais
trop vite vous n'aurez pas de frais de scolarité tant que tout
ça ne sera pas aplani. Et, comme il faut le faire très
modulé et il faut le faire un peu sur mesure pour vous autres, j'aime
autant que ça se fasse bien que de dire: Bon, eh bien, parfait! On
s'organise et, l'année prochaine, vous avez tout ça acquis.
Autre chose, j'ai de la misère à vous comprendre. Comment
pouvez-vous nous demander d'avoir une diplomation reconnue et, d'un autre
côté... Je peux comprendre, il y a cette crainte du
ministère, de la standardisation, et je la comprends. Je la comprends,
et on va s'organiser pour ne pas que ça se passe. Mais c'est parce que
vous ne pouvez pas avoir tout un, mais que le ministère de
l'Éducation ne soit nulle part à l'autre. Autrement dit, vous ne
pouvez pas avoir des diplômes reconnus par le ministère de
l'Éducation, mais il ne faut pas que le ministère de
l'Éducation «interface» dans rien. J'ai de la misère
à vous suivre là-dessus un petit peu. (13 h 10)
Mme Carrière (Annick-Patricia): Mais, à ce
moment-là, pourquoi ne pas reconnaître nos études que l'on
fait en ce moment? Je veux dire, moi, je termine bientôt. Et ça,
on en a parlé avec vous: Qu'est-ce qui se passe avec la
rétroactivité de ça? Je vais être aussi intelligente
que quelqu'un qui va avoir suivi tous les cours. Je veux dire, à ce
moment-là, quelle est la marge entre ce qu'on fait actuellement,
peut-être avec une sensibilisation en ce qui a trait à des
matières théoriques, et entre ce qui se fera? Je veux dire, ce
sera où? Et, compte tenu des cours qui s'ajouteront, est-ce que ces
cours qui s'ajoutent... On se fie aux professeurs, parce qu'on sait que les
professeurs ont travaillé fort à ça, on se fie à la
pertinence, mais c'est parce que ça change le point de vue du
Conservatoire, le caractère, comme on vous a parlé. Le
véritable caractère était de former des musiciens,
finalement, exceptionnels.
M. Boisclair: Un dernier commentaire. Vos propos viennent nous
éclairer aussi sur le genre de consultation qui a été
faite. Je crois comprendre qu'on vous a remis un document et que, 15 minutes
plus tard, on vous demandait de vous prononcer sur ce document.
Mme Frulla: II y a eu une demi-journée dans chacun des
conservatoires et six heures de consultation.
Mme Carrière (Annick-Patricia): Pas à
Montréal, pas à Montréal.
M. Boisclair: Bon! Alors...
Mme Carrière (Annick-Patricia): II y a eu un
problème avec les photocopies, je ne me rappelle plus.
M. Boisclair: Ça, c'est une belle façon de
consulter. Alors, je voudrais passer à ma collègue.
Le Président (M. Doyon): Mme la députée de
Chicoutimi...
Mme Blackburn: Oui.
Le Président (M. Doyon): ...je vous signale qu'il reste
trois minutes.
Mme Blackburn: Bien! Je voudrais vous féliciter, vous avez
bien fait vos points, je pense que c'est clair. Il restera à
l'Opposition d'essayer de faire modifier la loi en conséquence.
Une question: Est-ce qu'on vous a donné des explications sur
l'article 18, lorsqu'on confie au Conservatoire la responsabilité de
«susciter et favoriser une formation initiale»? Qu'est-ce que
ça veut signifier par rapport à la situation actuelle? Et
qu'est-ce que ça voudra signifier par rapport aux régions?
Mme Tremblay (Stéphanie): Ce que la ministre nous a dit
lorsqu'on l'a rencontrée, c'est que, évidemment, ces trois
points-là devaient être dispensés dans tous les
établissements du Québec. Mais un petit point sur lequel elle n'a
pas mis l'accent, c'est surtout la dernière phrase qui parle:
«Dans la poursuite de ses objets, le Conservatoire tient compte de la
spécificité de chaque établissement d'enseignement.»
On se demande: Est-ce que, ça, ça ne serait pas la porte ouverte?
Bon, l'établissement de Val-d'Or n'est pas spécifique au
saxophone, pas de saxophone; l'établissement de Chicoutimi n'est pas
spécifique à la flûte, n'a pas le bassin pour avoir des
flûtistes. Est-ce que ça ne peut pas amener la fermeture de
classes? Ou, sans ça, dans la spécificité, ça veut
dire que, peut-être, à Val-d'Or c'est notre exemple parfait
ils ne peuvent pas nous donner d'enseignement vraiment professionnel et
avancé là, je parle du troisième cycle et du
quatrième cycle. Est-ce que ce n'est pas la porte ouverte à ce
que, justement, dans ces régions-là, c'est spécifique, on
ne peut pas donner d'enseignement professionnel, donc on envoie ça
à Montréal? Au fond, c'est vrai, les trois points doivent
être dispensés partout, mais il y a quand même encore la
porte ouverte à ce qu'ils soient séparés, je pense.
Le Président (M. Doyon): Merci. Ça termine le temps
dont nous disposions.
Donc, il me reste à remercier Mme Tremblay,
Mme Carrière ainsi que M. Boucher, et tous ceux qui les ont
accompagnés, et à indiquer à cette commission que nous
allons reprendre nos travaux avec l'audition de l'Union des artistes, qui sera
avec nous à partir de 15 heures.
Donc, suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 13)
(Reprise à 15 h 11)
Le Président (M. LeSage): La commission de la culture
reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de la commission qui est de
procéder à des consultations particulières et tenir des
auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du
projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
Et le prochain groupe que la commission entendra est celui de l'Union
des artistes, représentée par M. Serge Turgeon. Je vous
demanderais, M. Turgeon, de présenter les personnes qui vous
accompagnent et je vous informe que vous avez une période de 20 minutes
pour présenter votre mémoire.
Union des artistes (UDA)
M. Turgeon (Serge): Je vous remercie, M. le Président.
M'accompagnent, donc, à cette comparution, entre guillemets, le
directeur général de l'Union des artistes, M. Serge Demers, ainsi
que la directrice des communications de l'UDA, Mme Lucie Beauchemin. Et,
après la période de questions, l'un ou l'autre, nous nous ferons
un plaisir de répondre, évidemment, à vos questions.
Je sais bien, M. le Président, Mme la ministre, qu'il y a une
tradition qui veut que la période précédant la fin des
travaux parlementaires soit particulièrement mouvementée, pour ne
pas dire fébrile, et, de toute évidence, cette deuxième
session de cette 34e Législature ne fait pas exception à cette
règle; j'en veux donc pour exemple, simplement, le fait que ce projet de
loi nous réunit aujourd'hui pour une seule journée
d'appréciation et de commentaires de la part de certains des principaux
intéressés par la formation d'interprètes musicaux et
dramatiques de qualité. Non pas que cette mise à jour de la Loi
sur le Conservatoire soit une découverte de dernière minute, bien
au contraire, puisque la révision de cette loi, qui a été
adoptée en 1942, est quelque chose dont on parle depuis très
longtemps, y compris dans le milieu; c'a fait l'objet d'études, de
rapports, de discussions de tout ordre depuis de nombreuses années.
Mais voilà que, tout à coup, pour des raisons que nous
ignorons, il semble qu'il devient soudainement urgent de passer aux actes avant
l'ajournement de la Législature pour 1° congé de Noël.
Ça semble urgent à ce point que notre demande d'être
entendus ici, en com- mission parlementaire, n'a pas mis plus de cinq jours
ouvrables avant de se concrétiser en audiences publiques. Et ça
semble tellement urgent que des ententes, essentielles au bon fonctionnement de
certaines dispositions particulièrement importantes de cette loi, n'ont
pas encore été conclues avec les ministères
concernés. Et c'est si urgent que même certaines des orientations
privilégiées par Mme la ministre de la Culture, dans son document
de juin dernier, n'ont semble-t-il, en tout cas, à la lecture du
texte que nous avons devant nous pas trouvé le temps de se
concrétiser dans ce projet de loi lui-même.
Bref, il est urgent, semble-t-il, à tel point que la
précipitation dont semble empreint le projet de loi 135 risque, pour des
considérations qui n'ont peut-être pas de rapport, finalement,
avec les objectifs que poursuit le Conservatoire, d'attaquer cela même
qu'on prétend consolider, c'est-à-dire l'excellence reconnue de
la formation professionnelle avancée que dispensent les neuf maisons
d'enseignement spécialisé que sont, donc, les deux conservatoires
d'art dramatique et les sept conservatoires de musique du Québec.
C'est une fébrilité soudaine qui est d'autant plus
incompréhensible, à ce moment-ci, que personne, personne ne
conteste l'utilité d'une mise à jour des orientations et des
moyens de les atteindre qui tienne compte des contraintes imposées,
évidemment, par la situation économique que tout le monde
connaît et reconnaît. Il est donc d'autant plus regrettable,
à notre sens, que l'esprit de certaines de ces dispositions et l'urgence
soudaine, je le rappelle, avec laquelle elles sont amendées, elles sont
amenées font donc que ce projet de loi 135 ne servira, sans doute, ni
l'un ni l'autre de ces objectifs et, surtout, risque de porter un
sérieux préjudice à l'excellence d'une formation dont la
preuve vous serez d'accord avec moi n'est quand même plus
à faire.
En sachant la très grande sensibilité dont Mme la ministre
a toujours fait preuve envers le milieu des arts, nous sommes convaincus que
c'est peut-être là le contraire de ses intentions. Et c'est pour
cette raison que nous souhaitons, Mme la ministre, vous faire part de certaines
réserves, assez sérieuses à certains points, que suscite
ce projet de loi chez nous, à l'Union des artistes.
Quant à la formation professionnelle avancée, c'est une
priorité dans tout le Québec, j'imagine bien. À l'heure
où tous nos gouvernements reconnaissent que la formation professionnelle
est l'outil privilégié de notre développement, il est
curieux de rencontrer ici un projet de loi comme celui-là, où on
érige en principe une confusion fondamentale entre les objectifs et les
critères spécifiques que doivent poursuivre une formation
générale et une formation professionnelle avancée.
Prenons l'article 18. On énonce trois objectifs pour le
Conservatoire: d'abord, de dispenser de la formation professionnelle et du
perfectionnement dans les domaines de la musique et de l'art dramatique;
ensuite, de susciter et de favoriser une formation initiale de qualité
dans le domaine de la musique et, en troisième
lieu, de susciter et de favoriser dans le milieu la présence
d'organismes essentiels à la vie musicale. On précise que le
Conservatoire tient compte de la spécificité de chaque
établissement d'enseignement dans la poursuite de ses objectifs.
Il nous paraît difficilement concevable que ces différents
objectifs soient introduits sans hiérarchisation autre qu'une vague
spécificité de l'établissement, alors qu'il est essentiel,
à notre sens, que le Conservatoire constitue, d'abord et avant tout, et
quelle que soit la région dans laquelle il est implanté, un lieu
de formation professionnelle, musicale ou dramatique. Non seulement est-il
nécessaire de bien dégager cette priorité pour en
favoriser la réalisation, mais cette distinction s'impose si l'on entend
vraiment favoriser la réalisation de deux des objectifs subsidiaires qui
sont justement énoncés à cet article 18.
Il n'y a, en fait, que dans l'esprit et sur papier que toutes choses
peuvent se réaliser concurremment et sans distinction. Dans la
réalité, seul un objectif clair crée dans son sillage les
effets souhaités. Or, sans la présence de noyaux de formation
avancée dans toutes les régions desservies par le Conservatoire,
je vous le demande, comment peut-on prétendre y susciter une
véritable vie musicale, autrement qu'à titre de voeu pieux?
Dire cela, ce n'est pas nier le rôle spécifique
dévolu à des centres de formation situés à
Québec ou à Montréal, mais c'est simplement affirmer une
évidence que, dans certaines régions, seul le Conservatoire peut
assurer certains types ou certains niveaux de formation et créer ainsi
les conditions d'implantation et de développement d'une vie musicale
dynamique.
Quant à l'idée d'en faire une corporation vraiment
autonome, comme en fait foi le libellé du projet de loi, le
Conservatoire, donc, deviendrait une corporation, c'est-à-dire une
entité juridique distincte, une personne morale, bien, ce nouveau statut
ne semble pas poser problème pour les principaux
intéressés, mais à la condition je le dis bien
à la condition, toutefois, que la personne morale ainsi
constituée jouisse réellement de l'autonomie nécessaire
à la poursuite de son but premier. Or, la composition du conseil
d'administration, telle que détaillée à l'article 4, nous
paraît peu propice à l'exercice d'une telle autonomie.
La question se pose: Pour quel motif, au juste, le législateur
croit-il nécessaire d'assurer, sur ce conseil, une présence aussi
marquée de personnes nommées par le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science, ou de l'Éducation, après
consultation d'organismes qu'il juge représentatifs des milieux de
l'enseignement collégial ou universitaire? Et, pourquoi veut-il une
représentation des milieux de l'enseignement primaire ou secondaire? On
sera peut-être tenté de nous répondre qu'il s'agit
là d'une façon d'assurer une bonne coordination entre les
institutions et les paliers d'enseignement. Bien. Mais, d'après cette
logique, les universités et les collèges étant
habilités à décerner des diplômes, est-ce que vous
ne pensez pas que la loi devrait aussi prévoir le même type
d'obligation dans leur cas? Ou encore, poli- tesse oblige, les instances
décisionnelles de nos maisons d'enseignement primaire, secondaire,
collégial et universitaire ne devraient-elles pas aussi accueillir des
personnes représentant le Conservatoire de musique et d'art dramatique?
C'est la même logique. (15 h 20)
Cette présence affirmée ne se limite pas au conseil
d'administration non plus; elle s'étend aussi jusqu'au conseil
d'orientation de chaque établissement d'enseignement, et c'est là
pousser un petit peu loin une sollicitude qui ressemble bien davantage à
une volonté d'influencer indûment les destinées de la
corporation dans son projet pédagogique même. Pareille
volonté, en tout cas si c'est le cas nous paraît
inacceptable.
Par ailleurs, concernant les ententes à développer avec
d'autres institutions d'enseignement, là, il nous paraît
plutôt inconcevable que le projet de loi 135 en précède la
conclusion au lieu de les confirmer. Si vous regardez les articles 20 et 21,
vous verrez qu'on prévoit la dispensation par le Conservatoire, avec
l'autorisation du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science, de grades, diplômes ou attestations de niveau collégial
ou universitaire, selon le cas. Or, les ententes qui sont nécessaires
à la réalisation de ce projet n'ont pas encore été
finalisées entre les principaux intéressés. Et, sauf votre
respect, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'en assurer la conclusion, à
la satisfaction des parties, avant d'en inscrire la finalité dans un
projet de loi?
Qu'est-ce qu'il adviendrait dans le cas où le ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science ou le ministère de
l'Éducation et le Conservatoire ne s'entendraient pas sur les conditions
à respecter pour l'obtention de semblables attestations? Il semble, en
tout cas, qu'à leur manière les rédacteurs du projet de
loi aient prévu cette éventualité et en aient
disposé de la façon la plus prévisible qui soit,
c'est-à-dire en érigeant la structure qui doit mener au
résultat souhaité. C'est peut-être une façon de
faire qui a ses adeptes, mais je vous dirai que ces adeptes-là ne se
trouvent pas chez nous.
Il y a un proverbe tibétain qui dit ceci: La fenêtre est
carrée, mais le paysage, lui, ne l'est pas. Cette simple évidence
semble trop souvent échapper, hélas, à ceux pour qui le
cadre ou la structure occupe une importance démesurée par rapport
à la réalité. Et, si cette vérité s'applique
à tous les domaines de formation, je vous dirai qu'elle est
particulièrement sensible dans le domaine des arts
d'interprétation musicale et dramatique. Et c'est bien de cette
formation-là qu'il s'agit ici, n'est-ce pas? Il nous paraît donc
fondamental de finaliser des ententes acceptables avant et non pas
après l'adoption d'un projet de loi comme celui-ci.
Nous n'avons aucune intention, croyez-moi, de nous immiscer dans les
détails des relations patronales-syndicales qui existent entre le
gouvernement et le Syndicat des professeurs de l'État du Québec,
le SPEQ. Mais il nous paraît, cependant, essentiel de rappeler que la
responsabilité première de l'État et des professeurs est
d'assurer une formation professionnelle de la meilleure
qualité possible aux élèves du Conservatoire. Une
formation professionnelle aussi spécialisée que celle de
l'interprétation musicale ou dramatique exige le respect de certains
critères de formation chez les maîtres eux-mêmes, et nous
osons croire que ces questions seront débattues et réglées
autrement que par l'adoption d'une loi massue.
Le Conservatoire a fait ses preuves. Il n'est que de consulter la liste
de ses diplômés j'en ai des pages et des pages en art
dramatique, en musique, en chant. Il faut noter la progression constante des
artistes québécois sur nos scènes et sur celles du monde
entier, à cause, notamment, de leurs études au Conservatoire,
pour savoir que, non seulement la créativité est bien vivante au
Québec, mais qu'elle trouve, dans le Conservatoire, un lieu de choix
pour transmuer le talent à l'état brut en talent accompli et
maîtrisé.
Bien sûr, les bénéfices qu'en retirent les individus
et la société ont une valeur incalculable, et nous savons bien,
aussi, que les valeurs incalculables constituent un casse-tête pour les
administrateurs du trésor public. Il appartient alors à vous, Mme
la ministre, avec l'appui des milieux concernés, ces milieux qui vous
ont toujours donné leur appui, de leur en rappeler l'importance et d'en
défendre les conditions d'épanouissement. Voilà pourquoi
nous pensons que ces conditions d'épanouissement ne sont pas
réunies, actuellement, dans le projet de loi 135, enfin, tel qu'il nous
a été soumis. La sagesse voudrait donc, à notre sens, que
le gouvernement accepte de surseoir à son adoption
précipitée. Quelques mois supplémentaires de
réflexion ne seront sans doute pas de trop pour assurer que le
Conservatoire de l'avenir sera à la hauteur, au moins, des
réalisations du Conservatoire actuel.
En résumé, Mme la ministre, nous sommes d'accord avec la
révision de la loi des conservatoires. Après 50 ans, je pense
qu'il faut brasser les choses, qu'il faut trouver une façon moderne de
faire les choses et qu'il faut y aller de mécanismes de souplesse, comme
ça se fait, d'ailleurs, ailleurs dans le monde. Si certains points de ce
plan sont bons, il nous semble que d'autres, à l'heure actuelle, sont
trop nébuleux, prêtent trop facilement à
interprétation, créent, alors, de la confusion. Et c'est
pourquoi, à ce moment-là, une partie du milieu s'interroge alors
sur les motifs véritables de cette refonte. Je vous remercie.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Turgeon. Je
cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Frulla: Merci, M. le Président. D'abord, je veux vous
souhaiter la bienvenue à tous.
M. Turgeon, dans le rapport Arpin, où vous étiez partie
prenante, vous vous êtes posé des questions sur la formation, en
général, la formation des arts. J'ai relu, hier, une partie,
justement, du rapport Arpin, où les gens qui y ont travaillé
disaient ou suggéraient de s'asseoir avec le milieu de
l'éducation, d'une part, et de voir maintenant comment, ensemble, on
serait capables d'élaborer une façon de faire, de telle sorte
qu'on puisse, oui, d'un côté, assurer la pérennité
des conservatoires et, de l'autre côté, les faire évoluer,
mais tout en étant en synergie avec ce qui se passait au niveau du
milieu de l'éducation.
Suite à cette recommandation du rapport Arpin, on s'est assis
avec les gens du milieu de l'enseignement et on a regardé aussi des
façons, pour conclure, et du côté du ministère de
l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de notre
côté, que la seule façon d'assurer la
pérennité des conservatoires, c'est: un, que ceux-ci restent la
responsabilité du ministère de la Culture et que, deux, on trouve
une façon, soit par loi ou autre, de pouvoir les faire, justement,
grandir, de les rendre autonomes et aussi de pouvoir assurer aux
élèves des programmes qui peuvent être reconnus.
Dans la politique culturelle du Québec, il est aussi
statué, d'abord, la valeur et l'importance des conservatoires et que
ceux-ci restent au ministère de la Culture, mais dans une forme
modifiée, encore une fois, pour assurer, oui, leur
pérennité, mais aussi leur donner les outils nécessaires
pour, justement, qu'ils évoluent en termes de pôles culturels, et
dans chacun de leurs milieux, et aussi en termes d'institutions de formation
visant l'excellence.
Alors, quand on parle d'un projet de loi précipité... Moi,
ça fait quatre ans que je suis au ministère et ça fait
quatre ans qu'on regarde les conservatoires, qu'on les étudie, qu'on
s'assoit avec le ministère de l'Éducation et qu'on trouve une
façon, justement, non seulement de promouvoir les conservatoires, mais
d'assurer leur pérennité, ce qu'ils n'ont pas,
présentement, en étant une direction du ministère.
Alors, après avoir conclu tout ça, on a
procédé à une vaste consultation durant tout
l'été, avec, justement, un document qui était les
orientations du ministre, document qui, un peu comme le rapport Arpin,
était là pour, justement, susciter la discussion. Et c'est
à partir de cette discussion-là que nous avons formulé ce
projet de loi.
Là, j'ai des questions. Quand on dit: Si urgent que certaines
orientations du document n'ont, semble-t-il, pas trouvé le temps,
finalement, de se retrouver dans le projet de loi lui-même, j'aimerais
ça qu'on élabore un peu. C'est-à-dire que, s'il y a une
bonification à apporter, je leur ai dit, il n'y a pas de
problème. D'ailleurs, je vais en avoir des bonifications, demain, par
rapport à ce qui s'est dit et par rapport aux autres discussions que mes
collaborateurs ont eues, autant avec les professeurs que les directeurs, etc.
Donc, il y aura bonification.
Mais, là, j'aimerais voir ce qu'on veut dire quand on dit que
certaines orientations... Parce que, par rapport à ce qu'il y a
présentement, je vous assure que non seulement il y a un monde de
différence, mais c'est une police d'assurance que l'on donne aux
conservatoires, cette loi-là. (15 h 30)
M. Turgeon (Serge): Très bien, Mme la ministre...
Le Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): Oui. Alors, oui, vous citez le rapport Arpin.
Nous nous sommes penchés un peu sur la question. Je dirais: Un peu. Vous
remarquerez que ce n'est pas un des chapitres les plus importants de la
politique culturelle que nous avions soumis. Nous pensions qu'il fallait
laisser ça, vraiment, à une autre table. Ce qui fait que nous
sommes tout à fait d'accord avec vous pour qu'il y ait ce
mécanisme important de consultations avec les différents
ministères. Il faut s'entendre, aussi, sur le sens de la
précipitation, quand nous parlons de ça. Moi, je vous ai dit
tantôt que nous sommes d'accord avec une révision de la loi. La
précipitation, ça serait de le faire accepter tel quel, ce projet
de loi, sans modifications.
Cela dit, vous avez donc rendu publiques des orientations au mois de
juin dernier, conséquemment à ce qui avait été dit
dans le rapport Arpin, conséquemment aux études que vous avez
vous-même menées. La question que je peux me poser, c'est: Comment
se fait-il que les ententes, par exemple, avec les différents
ministères, à ce moment-ci, ne soient pas encore prêtes?
Vous le dites vous-même: Ça fait des années et des
années qu'on se penche sur la question.
Quelle différence y a-t-il entre votre rapport d'orientation de
juin dernier et le texte de loi que nous avons aujourd'hui? Il y en a
plusieurs. Je peux vous énumérer quelques points, uniquement pour
vous donner une idée de notre incompréhension par rapport au
texte que nous avons aujourd'hui et ce que vous annonciez au mois de juin
dernier.
Vous parliez, par exemple, à un moment donné, d'une
représentation large, que les enseignants soient largement
représentés sur le conseil. Si je lis bien le projet de loi, on
parle de deux représentations sur 14; ce n'est pas, à mon sens
à moi, quelque chose de très, très large.
Vous parliez, dans les orientations de juin dernier, de convention de
subventions triennales. C'est important, ça, pour voir venir les choses;
surtout en matière culturelle, il faut voir venir les choses. Or,
ça, malheureusement, à la lecture, ça ne se retrouve pas
dans le texte d'aujourd'hui. Vous parlez, bien sûr, de mécanismes
de consultation avec le ministère de l'Enseignement supérieur,
avec le ministère de l'Éducation, et je vous le
répète nous sommes d'accord avec ça, et c'est
fondamental. Mais il y a une différence entre établir des
mécanismes de consultation et affirmer, comme le fait le projet de loi,
une telle présence. La présence est vraiment affirmée,
dé ces ministères-là.
Vous parliez aussi, en juin dernier, d'un encadrement continu quant
à la qualité pédagogique. Moi, quand je lis ça, je
comprends que vous voulez parler d'une certaine stabilité à ce
niveau-là. Cette stabilité, je ne la retrouve pas dans le projet
de loi d'aujourd'hui. Quant au conseil d'orientation, on en a parlé un
petit peu tantôt, il y a des visées qui peuvent être
différentes, selon qu'on vienne de l'Enseignement supérieur, de
L'Éducation ou des conservatoires. Il nous semble, en tout cas, que le
Conservatoire doit avoir ses coudées franches.
Alors, moi, la question que je me pose, voyant ça ce sont
quelques points seulement c'est: Qu'est-ce qui s'est donc passé,
Mme la ministre, entre le mois de juin dernier et aujourd'hui?
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre.
Mme Frulla: Merci. D'abord, la présence du
ministère de l'Enseignement supérieur sur le conseil
d'administration, entre autres, a été proposée par le SPEQ
en août dernier. Donc, ça n'a pas été une surprise
pour personne. Il y a trois représentants sur un conseil qui est, pour
l'instant, à 15, et, en amendement, je songe à augmenter un peu
les membres du conseil pour m'assurer de la présence
d'ex-élèves du Conservatoire, autant en art dramatique qu'en
musique. On verra ça à l'étude article par article. Donc,
cette proposition-là, tout à coup, bon, on nous dit: Pourquoi des
membres de l'Enseignement supérieur sur notre conseil d'administration?
C'est parce que ça nous a été proposé en août
dernier.
Deuxièmement, au niveau de la reconnaissance, j'ai dit aux
élèves, cet avant-midi, qu'il n'y aura pas de frais de
scolarité tant que les programmes ne seront pas dûment reconnus
par l'Enseignement supérieur, c'est-à-dire pour, justement,
combler cette iniquité qui existe entre les élèves du
Conservatoire, par rapport à l'enseignement, par exemple, versus ceux
qui sont dans le réseau scolaire actuel.
Par contre, la loi de 1942, chez nous, le Conservatoire n'est même
pas mandaté pour dispenser une formation professionnelle, d'une part
pour vous dire comment la loi est désuète et,
deuxièmement, c'est dans les articles 20 et 21, qui nous permettent de
reconnaître, justement, les études universitaires, en ce sens
où les conservatoires étant une direction du ministère,
moi, je peux m'asseoir avec l'Enseignement supérieur et
l'Éducation. Il y a des choses qui ont été faites pour,
justement, adapter, si on veut, les différents programmes,
spécialement au niveau du collégial, avec le ministère de
l'Éducation.
Nous avons, avec l'Enseignement supérieur, non seulement une
entente, mais aussi une promesse. Mme Robillard, avant de quitter, doit se
pencher avec moi là-dessus de façon incessante. Par contre, il
n'y a pas d'entente possible si le Conservatoire n'est pas, en bonne et due
forme, une corporation. Tant que le Conservatoire reste une direction du
ministère, c'est impossible pour nous de faire, enfin, une entente quant
à l'accréditation des programmes. Donc, de là l'urgence,
justement, de procéder à ce que les conservatoires deviennent une
personne morale.
Mais une autre question, c'est qu'on parle du conseil d'administration.
Sur le conseil d'administration,
sur 15, il y a sept représentants des élèves et
professeurs, ce qui est toujours mieux que ce qu'il y a maintenant, parce que,
maintenant, les élèves et professeurs ne sont pas parties
prenantes, à part des commissions pédagogiques. Mais, est-ce que,
dans l'ensemble si on parle de concertation, on parle de participation
de profs et élèves il y a une façon pour vous
d'entrevoir le C.A.?
Si je compare, par exemple, au Conseil des arts et des lettres, nous
nommons chacun des membres du C.A. après recommandation des organismes.
Encore une fois, dans la Loi sur le Conservatoire, les gens que nous nommons au
gouvernement vont être nommés après recommandation au
niveau des organismes. Mais, est-ce qu'il y a une façon de bonifier au
niveau du C.A.? Parce qu'il me semble que c'est relativement
généreux, sept représentants des professeurs sur 15, d'une
part. Et les autres que nous nommons, nous consultons les organismes, ce qui
est encore beaucoup plus généreux que ce qui se fait partout
ailleurs.
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Demers, vous voulez
répondre à cette question?
M. Deniers (Serge): S'il vous plaît.
Le Président (M. LeSage): La parole est à vous.
M. Deniers (Serge): Merci, M. le Président. Mme la
ministre, je pense qu'il y a moyen de bonifier cet aspect-là. Nous
partons, nous, dans notre réflexion à l'Union des artistes, de la
prémisse suivante: C'est vrai que la loi de 1942 a besoin d'être
dépoussiérée, mais il demeure un fait indéniable,
c'est que les conservatoires, tels qu'ils existent actuellement, donnent des
résultats excellents. Il y a des choses à améliorer, il y
a des choses à modifier, à changer, mais, quand on regarde les
résultats, les résultats sont qu'il y a là quelque chose
qui fonctionne avec une loi désuète, mais qui fonctionne
relativement bien. Par conséquent, avant de jouer là-dedans et de
risquer d'en modifier la dynamique profonde, on dit: Soyons prudents et prenons
le temps de réfléchir. Je pense que c'est ia base de notre
mémoire.
Quand on regarde aussi et je pense que vous allez nous comprendre
un peu, vous allez comprendre nos appréhensions on sait qu'il y a
beaucoup de débats dans notre société, actuellement, sur
l'efficacité de l'école. Il y a des débats dans
l'enseignement primaire et secondaire, il y a des débats dans
l'enseignement collégial, et on sait, d'ailleurs, que votre gouvernement
travaille à certaines réformes. Donc, on peut dire que, dans la
cour du voisin, ça ne va pas tellement bien. Alors, quand on voit qu'on
nous propose une association avec le voisin qui a des gros problèmes
à régler chez lui, alors que, nous, ça va relativement
bien, puis qu'il y a lieu, peut-être, de modifier certaines choses pour
s'adapter à une réalité nouvelle, vous comprendrez qu'on
soit un peu anxieux des résultats. Parce qu'on ne voudrait pas que les
autres viennent faire dans notre cour, peut-être, certains gâchis
qui existent déjà dans leur propre cour. (15 h 40)
Alors, dans ce sens-là, je pense qu'il serait intéressant
que les conseils d'administration soient le moins possible, je dirais,
entachés de la présence de représentants que ce soit du
ministère de l'enseignement professionnel ou du ministère de
l'Éducation, que les conseils d'administration représentent
essentiellement le milieu et qu'il y ait donc, à partir de cette
personnalité morale, une discussion véritable qui s'engage entre
ces nouveaux conservatoires et les ministères concernés, et non
pas qu'on se retrouve dans une dynamique où les ministères
concernés vont débattre un peu avec eux-mêmes, dans la
mesure où ils auront de fidèles représentants qui seront
toujours prêts à avaliser, n'est-ce pas, les
considérations, entre guillemets, bureaucratiques qu'on peut retrouver
dans ces ministères-là.
Et je pense qu'on ait cette garantie-là qu'il y ait une
représentation, je pense que ce n'est pas mauvais en soi, mais elle doit
être, d'après moi, la plus discrète possible et la
représentation doit d'abord être fondée sur le milieu et
ses exigences. Alors, je pense que, si on avait un conseil ou une
recommandation à formuler, ce serait de faire en sorte, justement, que
ce soit vraiment le milieu et que la représentation, que ce soit du
ministère de l'Éducation ou de l'enseignement professionnel, soit
réduite à son strict minimum. Et je dirais la même chose
pour les conseils pédagogiques.
Mme Frulla: M. Demers, c'est parce que, au niveau du C.A.,
présentement parce qu'on peut toujours augmenter ou diminuer
on parle de 20 % de représentation du MESS, par exemple, sur le
conseil global. Et il va probablement y avoir même une diminution de ce
20 %, si j'ajoute deux ou trois autres membres d'ex-étudiants du
Conservatoire, donc la représentation va être encore plus
petite.
L'idée, c'était vraiment d'essayer, en tout cas, de faire
une espèce sans copier sur ce qu'ils font, là, vous avez
raison de jonction entre les deux, de telle sorte que les deux
systèmes ne soient pas tout simplement parallèles, mais qu'il y
ait une espèce de synergie, si on veut, entre les deux, sans, justement,
que leur poids fasse en sorte que ça impose leur façon de faire
sur la nôtre. Alors, c'était un peu ça l'idée des
représentants au niveau du ministère de l'Éducation.
Il y a un autre point parce qu'on est toujours limité par
le temps c'est la question du perfectionnement. Vous nous avez
demandé aussi, je me souviens, en commission parlementaire, à
l'époque, que les conservatoires puissent aussi donner du
perfectionnement aux professionnels, c'est-à-dire un peu continuer
à donner leur enseignement, mais beaucoup plus en fonction d'un
perfectionnement à des gens qui sont déjà professionnels,
qui pratiquent le métier versus, tout simplement, un enseignement
à des élèves. Maintenant, le projet de loi prévoit
ça. Alors, je ne sais pas si vous
pouvez élaborer un petit peu là-dessus, là, s'il y
a des façons de...
Le Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): Bien, oui, écoutez, on l'a bien dit,
tout n'est pas mauvais, là, dans ce que vous annoncez dans le projet de
loi et on se pointe ici, Mme la ministre, avec un esprit positif, dans le but
de faire avancer les choses dans le bon sens.
Tout le monde ne passe pas par le Conservatoire. Vous savez, ce n'est
pas parce que, non plus, on aura quelques années de faites au
Conservatoire qu'on pourra en sortir, comme, par exemple, sortent les
élèves de l'école de médecine, avec un papier
tamponné: «Tu es artiste» ou «Tu es
créateur». Ça ne se fera jamais comme ça. Cependant,
il y a des gens qui font le métier, et qui ont réussi une partie
de leur carrière, déjà, dans le métier sans
être allés encore au Conservatoire, et qui, tout à coup, en
cours de carrière, réalisent que le manque de formation, bien,
ça leur nuit, finalement, et ils voudraient aller plus loin. Alors,
c'est peut-être ce qu'on suggérait à l'époque, une
branche à développer, qu'on puisse aussi, donc, permettre
à ces professionnels qui ont déjà commencé à
oeuvrer dans le métier de pouvoir parfaire, si vous voulez, leur
formation.
Mais le point sur lequel nous insistons particulièrement,
aujourd'hui, c'est de dire que l'enseignement au Conservatoire, c'est
ça, la formation professionnelle de pointe. Et, moi, la semaine
dernière, j'étais devant des étudiants du secondaire V.
Ils demandaient à plusieurs individus de la société de
venir leur parler de leur métier parce qu'ils commencent à
scruter leur avenir. Je vous avoue que je les ai beaucoup déçus,
je pense, malheureusement, parce qu'ils auraient voulu que je leur dise,
d'abord, que les artistes, tous, ça fait des millions et des millions de
dollars et que, surtout, pour réussir, il faut vite qu'ils abandonnent
leurs études pour tout de suite commencer à travailler et
commencer à faire ces millions-là. Alors, l'essentiel, moi, de
mon intervention, c'a été de leur dire: Vous devez, pour faire ce
métier, en avoir une, formation, et avoir une formation professionnelle
de pointe.
Quand on voit des gens comme Lepage, comme plusieurs autres, qui, sur la
scène internationale, font ce qu'ils font pour le Québec, pour
leur pays, finalement, qu'ils réussissent parce qu'ils ont eu cette
formation de pointe, professionnelle, bien c'est ça que va être la
concurrence de demain et c'est ça le signal qu'il faut lancer à
ceux qui veulent faire ce métier-là, que ce soit en art
dramatique, que ce soit en musique, ou autrement: II va donc falloir que vous
alliez le plus loin possible dans ce que vous êtes et dans votre
formation. Et la crainte, c'est que les conservatoires, dans la refonte,
actuellement, ne puissent plus vraiment offrir ça comme ils l'offraient.
La crainte, c'est que davantage on fasse un clivage entre le monde de
Montréal, des grands centres, et le monde des régions. La
crainte, c'est que, encore une fois, par ce biais-là, on sorte les
créateurs obligatoirement de leur région pour s'en aller dans le
grand centre et alimenter, par la suite, le grand centre.
Quand une région je l'ai déjà dit à
maintes reprises, moi, devant ces commissions parlementaires commence
à perdre ses créateurs, elle commence à s'assécher.
Aujourd'hui, c'est la culture qui va sortir; demain, ce sera les autres
entreprises, et il n'y aura plus rien. Alors, c'est quoi, finalement, la
société que nous voulons?
Et il nous semble que, dans le texte, dans le projet de loi que nous
avons actuellement, vous posez ce problème de société. Et,
nous, nous disons, et, moi, je le dis... Et je me souviens de mon passage
à la commission Bélanger-Campeau, je me souviens du cri des
régions, et je pense qu'il faut être ouverts à ce
cri-là.
Mme FruIIa: Dans la...
Le Président (M. LeSage): Brièvement, Mme la
ministre, il ne vous reste que 15 secondes.
Mme Frulla: Oui, c'est que je veux juste... L'article 18, par
exemple, identifie tout simplement la mission de 1989. Il y a eu une mission
renouvelée, finalement, annoncée par Mme Bacon après la
consultation. Alors, ce que l'article 18 fait, c'est qu'il met en mots
légaux ce qui existe déjà; pas plus, pas moins. Quand on
parle de susciter, c'est tout simplement pour que les conservatoires en
région soient de vrais pôles culturels, et c'est de là les
commissions d'orientation. Et ce n'est pas pour que les conservatoires, un
jour, deviennent de grandes écoles de musique. Parce que, à ce
moment-là, pourquoi, finalement, les conserver comme tels? Et pourquoi,
justement, avoir une loi qui assure leur pérennité?
En termes de clivage, aussi, il y aura un seul régime
pédagogique avec les mêmes standards partout. Ce sont des
standards d'excellence, avec deux commissions d'études: une commission
d'études en musique et une commission d'études en art dramatique,
où les professeurs et les élèves seront parties prenantes.
Donc, il n'est pas question non plus de diminuer, si on veut, le
professionnalisme de ces conservatoires-là en région, bien au
contraire, et la volonté n'est pas ça. Et, finalement, ce que le
projet de loi fait, c'est tout simplement qu'il institue et donne un pouvoir au
conseil d'administration, formé de différents membres du
milieu.
Maintenant, est-ce qu'on peut spécifier, à la formation du
conseil d'administration, qu'il faudrait y avoir une
représentativité en région? Ça, on est en train de
le regarder pour être encore plus spécifique et pour rassurer
encore plus. Mais c'est le conseil d'administration, aussi, qui pourra prendre
des décisions non seulement administratives, au contraire, mais
administratives par rapport au lieu d'enseignement versus un ministère
qui a des décisions administratives qui lui sont souvent imposées
par le Conseil du trésor et qui sont...
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre, si
vous le permettez, je vous avais déjà avisée, avant
que vous ne preniez le dernier mot, que vous aviez 15 secondes; vous avez pris
1 min 15 s.
Mme Frulla: Excusez-moi, M. le Président, je suis
indisciplinée.
M. Turgeon (Serge): Puis-je prendre cinq secondes, M. le
Président?
Le Président (M. LeSage): Cinq secondes. Allez-y, M.
Turgeon.
M. Turgeon (Serge): Pour vous dire, Mme la ministre, que, si ce
que vous dites est vrai et je le crois; je vous crois il faudra
alors que ce soit très clair dans le texte. Et, pour nous,
malheureusement, ça ne l'est pas à l'heure actuelle.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Turgeon. Je
cède maintenant la parole au député de l'Opposition,
critique de l'Opposition officielle, M. le député de Gouin.
M. Boisclair: M. Turgeon, monsieur et madame, au nom de
l'Opposition, je tiens à vous remercier pour votre présentation.
Si vous avez assisté à nos délibérations cet
avant-midi ou si vous avez pris connaissance de nos propos à l'occasion
de l'adoption de principe du projet de loi, vous comprendrez rapidement que
nous nous retrouverons dans une communauté d'esprit sur les
préoccupations que vous soulevez, parce que nombreuses elles sont que
nous avons déjà fait valoir à la ministre à
l'occasion de ce débat. Pour ça, bien, je tiens à vous en
remercier et à vous dire qu'à bien des égards nous sommes
d'accord avec votre point de vue.
Je vous poserais une première question toute simple. La ministre,
souvent, nous a parlé de cette vaste consultation qui a eu lieu sur
l'énoncé de politique du mois de juin 1993. Est-ce que vous avez
été consultés directement sur le contenu de cet
énoncé?
M. Turgeon (Serge): Directement, je crois que non, mais nous
avons été consultés indirectement de bien des
façons. Et je pense qu'il faut dire que, depuis ces dernières
années, il n'y a pas beaucoup de choses, au niveau de la politique
culturelle, qui se sont faites sans qu'il y ait consultation du milieu. Et je
pense que c'est ça qu'il y a de nouveau, aussi, depuis les
dernières années, c'est que le milieu lui-même a reconnu
l'importance de ce qu'il était et, donc, a pris les moyens aussi pour se
faire entendre.
Alors, de façon très indirecte, je dois dire que, oui,
nous avons été consultés, ne serait-ce que lors de la
réflexion qu'on a faite avec le rapport Arpin, etc. Mais, de
façon pointue et spécifique sur ce sujet-là, moi, à
ma connaissance, je pense qu'au cours des derniers mois, nous, à l'Union
des artistes, nous ne l'avons pas été. (15 h 50)
M. Boisclair: Alors, je comprends que, sur les orientations, soit
le document, vous n'avez pas eu l'occasion de faire connaître votre point
de vue, en comprenant tout à fait, cependant, qu'à l'occasion des
différents travaux d'ébauche de la politique culturelle, sur la
politique culturelle, nous savons tous que vous avez été des
partenaires incontournables. Mais la question était sur les
orientations. Je voulais tout simplement, par cette question, tenter de donner
un certain relief à votre propos sur ce que vous appelez la
précipitation, qui m'appa-raît, effectivement, être le terme
approprié.
Je voudrais renforcer votre perception par deux idées. La
première. La ministre, encore il y a quelques instants, nous disait:
Nous sommes en train de voir ça. Donc, il apparaît très
clair par son propos qu'à bien des égards il y a des
décisions qui demeurent à prendre. Et, pour renforcer davantage,
aussi, cette précipitation, la ministre n'a toujours pas fait
connaître le contenu de ses amendements. Et je tiens à rappeler,
d'ailleurs, que, si ce n'était de l'insistance de plusieurs membres de
cette commission, nous ne serions pas ici, aujourd'hui, pour discuter de son
contenu. Je pense que c'est grâce aux membres de la commission que nous
nous retrouvons ici, aujourd'hui.
Ma question, après ce commentaire, aura trait à la
composition du conseil d'administration. Vous avez fait des remarques qui
m'apparaissent pertinentes sur la composition du conseil. Je voudrais attirer
votre attention sur un autre article du projet de loi qui, à l'heure
actuelle, est passé inaperçu, mais qui mérite aussi
commentaire, qui est l'article 75, qui fait partie des dispositions
transitoires, au chapitre VII du projet de loi, et, tout simplement, recevoir,
s'il était possible, vos commentaires sur, justement, cette composition
du conseil d'administration, ce conseil provisoire, qui sera formé, et
je tiens à le rappeler, uniquement des gens nommés par le
ministère de la Culture, par les ministères de l'Enseignement
supérieur et de l'Éducation.
En vous rappelant que c'est à ce premier conseil d'administration
que reviendra la responsabilité, entre autres, et je cite au texte le
projet de loi, d'élaborer «un projet de règlement relatif
aux droits d'admission ou d'inscription au nouveau Conservatoire et aux droits
de scolarité», d'établir le plan d'effectifs et le plan
d'affectation des employés, est-ce que cette disposition du projet de
loi est conforme à vos attentes ou si vous ne croyez pas qu'il serait
important de procéder? Comment vous voyez cette transition?
Le Président (M. LeSage): M. Demers.
M. Deniers (Serge): Merci, M. le Président. Je pense qu'on
voit ce conseil d'administration transitoire ou temporaire nommons-le
comme on voudra de la même façon qu'on voit le projet de
loi dans les circonstances actuelles, c'est-à-dire: Quelle est la raison
et ça, j'aimerais bien qu'on nous l'explique, si c'est possible
fondamentale de ce que, moi, j'appelle la hâte de
procéder?
Qu'est-ce qui fait qu'on ne peut pas nommer le véritable conseil
d'administration pour prendre des décisions aussi fondamentales que
celles qui apparaissent à l'article 75, qui vont tracer, je dirais, le
sillage du futur Conservatoire pour les cinq, 10, 15 ou 20 prochaines
années? Qu'est-ce qui fait qu'on doive procéder par cette
étape intermédiaire, où et, là, sans vouloir
faire de procès d'intention on va inévitablement se
retrouver avec des gens qui sont là d'une façon temporaire pour
remplir un mandat, pour livrer une marchandise qui ne sera pas
nécessairement ni dans l'esprit ni dans le besoin réel du milieu
et des objectifs que la loi prétend viser, un conseil qui,
évidemment, ne pourra pas se chicaner avec lui-même, étant
donné que tout le monde ayant été nommé, tout le
monde va très bien s'entendre et tout le monde n'aura qu'à livrer
la marchandise? Je pense qu'une telle disposition ne peut qu'accroître la
méfiance du milieu vis-à-vis des intentions cachées, entre
guillemets, et des intentions qui sont visées par ce projet de loi. Et,
dans ce sens-là, moi, je pense que de telles dispositions devraient
être rayées du projet de loi et que, lorsqu'on aura fait les
corrections qui s'imposent à ce projet-là, pour lui donner sa
véritable dimension et répondre vraiment aux besoins, on devrait
procéder d'une façon normale, avec le conseil qui devra exister
et qui devra faire les débats pertinents quant aux choix majeurs
qu'actuellement on semble vouloir référer à un conseil
transitoire.
M. Turgeon (Serge): Si vous me permettez... Le
Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): ...je voudrais simplement, M. le
Président, faire ressortir que ces mesures transitoires, finalement,
contreviennent à l'esprit qui se dégage un peu plus haut, et,
notamment, avec les bonnes intentions qu'on retrouve au point no 4, qui est la
nomination d'un directeur ou d'un responsable, tant en musique qu'en art
dramatique, deux enseignants du Conservatoire, membres du conseil du
Conservatoire, deux élèves à temps plein du Conservatoire.
Alors, c'est la raison pour laquelle, effectivement, il y a lieu de
s'interroger sur ces mesures transitoires.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Vous avez
attiré l'attention des membres de la commission sur le libellé de
l'article 18, qui vient définir les missions du Conservatoire. Je me
permets, à mon tour... Au-delà de cet article, il y a le premier
alinéa de l'article 18 qui est significatif, à mon avis,
où on dit: «Le Conservatoire a pour objets d'administrer et
d'exploiter dans diverses régions du Québec des
établissements d'enseignement». Ne croyez-vous pas qu'il serait
opportun de préciser davantage cette mission en nommant, par exemple,
à tout le moins les régions où se trouvent
déjà des conser- vatoires et peut-être même de
prévoir un mécanisme de reconnaissance dans la mesure ou dans
l'hypothèse où il serait loisible de croire que d'autres
conservatoires pourraient voir le jour?
Le Président (M. LeSage): M. Deniers.
M. Deniers (Serge): Oui. Il s'agit là, je pense, d'une
considération fondamentale. Et il est important qu'on respecte certaines
réalités, entre autres les réalités existantes.
Cependant, au-delà de ça, il nous semble important qu'il y ait,
dans les objectifs, une hiérarchie et que celui qui est de dispenser la
formation professionnelle et du perfectionnement dans le domaine de la musique
et de l'art dramatique soit clairement établi comme étant un
objectif prioritaire et fondamental pour l'ensemble des établissements,
de façon à éviter que l'on en arrive à des
spécialisations, au détriment des intérêts des
régions, pour concentrer dans les grands centres, vraiment, la formation
supérieure. Et ça, c'est pour nous une préoccupation
majeure.
Donc, il y a la direction, je dirais, des instances régionales et
la gestion de ces instances-là, et, aussi, le fait qu'on
détermine clairement quel est l'objectif fondamental, applicable
à l'ensemble des maisons, et, par la suite, qu'on voit évidemment
à l'articuler avec le reste.
M. Turgeon (Serge): Mme la ministre, si vous me permettez...
Le Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): Mme la ministre, tantôt, vous avez dit
qu'il n'y a pas de crainte à avoir, comme telle, dans les régions
et je veux bien vous croirece à quoi on répondait:
Mais ce n'est pas clair dans le texte. Et, ce qui n'est pas clair, justement
et je vais vous le montrer par rapport à l'article 18
c'est qu'on puisse craindre que, tout à coup, on décide que telle
région, elle, c'est le point no 2 de l'article 18 qui la vise et que,
donc, à ce moment-là, on ne va susciter dans cette région
et favoriser qu'une formation initiale de qualité dans le domaine de la
musique. Et, voyez-vous, il n'y a pas cette garantie, dont parle M. Demers,
quant à la formation professionnelle et quant au perfectionnement dans
l'ensemble. C'est ça les craintes que nous avons et c'est ça
qu'il y a à revisser, certainement, ou à dévisser, en tout
ca.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Sur cette même lancée, justement, ne
craignez-vous pas que ce deuxième alinéa: «susciter et
favoriser une formation initiale», est plutôt limitatif, craignant,
justement, que les conservatoires en région deviennent uniquement des
centres de formation préparatoire et qu'on concentre dans les grands
centres la formation spécialisée, c'est-à-dire la
formation terminale?
Et, prenons un exemple bien particulier: la formation en art dramatique.
Et j'aimerais peut-être que vous puissiez nous instruire sur cette
question. N'est-il pas vrai, par exemple, que la formation offerte au
Conservatoire d'art dramatique de Montréal diffère, à bien
des égards, de celle qui peut être offerte au Conservatoire d'art
dramatique de Québec et qu'il y aurait lieu de craindre qu'on fonde ces
missions dans une seule, qui pourrait se faire au détriment de l'une ou
l'autre des institutions? (16 heures)
M. Turgeon (Serge): C'est un fait et c'est exactement le sens,
donc, de notre intervention précédente. Oui, il y a des approches
qui sont différentes, présentement, dans l'enseignement de l'art
dramatique à Montréal et à Québec, et c'est ce qui
fait, finalement, la beauté de la chose, très souvent. Alors,
c'est tout à fait dans ce sens-là, c'est dans le sens des
craintes que nous pensons légitimes et justifiées à ce
moment-ci.
M. Boisclair: Une dernière question...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: ...quant à l'organisation du Conservatoire:
Est-ce que les pouvoirs qui sont accordés aux conseils d'orientation,
quant aux relations que les conseils d'orientation entretiendront avec le
Conservatoire, est-ce que le mandat des conseils d'orientation et les pouvoirs
vous apparaissent suffisants pour reprendre, justement, cette volonté
que vous exprimez de véritablement enraciner le Conservatoire dans la
région? Et, sinon, qu'est-ce que vous nous proposez?
Le Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): On a souligné tantôt notre
inquiétude à ce sujet-là. On veut bien et on est d'accord
pour qu'il y ait mécanisme de concertation entre les conservatoires et
les ministères de l'Enseignement supérieur et de
l'Éducation. Mais nous craignons, tel que présenté, que le
Conservatoire n'ait plus les coudées franches et qu'à ce
moment-là on se fonde, si vous voulez, dans un système plus
général, qui, en ce moment, en tout cas, ne semble pas avoir
vraiment trouvé sa voie.
M. Boisclair: Est-ce que vous avez, compte tenu de votre
expérience, une proposition, peut-être, ou un exemple dans un
autre domaine dont vous pourriez nous faire part qui pourrait nous
éclairer quant aux amendements qu'on pourrait possiblement apporter au
projet de loi?
M. Turgeon (Serge): Moi, je pense qu'il faut poursuivre la
réflexion; il faut poursuivre la réflexion là-dessus. Il
faut effectivement que le ministère des affaires culturelles ait, lui
aussi, les coudées franches là-dessus et il faut que la
représentation soit, à tout prix, fondamentalement la
représentation véritable des conservatoires et de la culture.
M. Boisclair: Je vous remercie.
Le Président (M. LeSage): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. Turgeon,
mesdames, messieurs. Vous exprimez, de façon fort éloquente, les
inquiétudes qui sont celles des régionaux par rapport à ce
projet de loi. Et la ministre comprendra si je lui dis qu'un chat
échaudé craint l'eau froide. La composition du Conseil des arts
et des lettres et je le redis ici elle avait pris l'engagement de
nommer des personnes qui seraient issues des régions entendons
les régions éloignées et, là, on a dû
se contenter c'est supposé représenter toutes les
régions du Québec de deux personnes de Québec, une
de Sherbrooke et 10 de Montréal.
En ce qui a trait à ce projet de loi, si j'ajoute, à la
fois, les articles que vous avez soulignés, particulièrement le
18, où on parle d'«une formation initiale» et on parle: Dans
la poursuite des objectifs, il tient compte de la spécificité de
chaque établissement, et, en plus, de ces déclarations à
l'effet que, pour le bien de l'élève, la poursuite des
études devrait se faire dans un grand centre, je suis
profondément inquiète.
Alors, comme vous aviez souligné plusieurs points, j'aimerais
juste savoir une chose de vous. Les conservatoires ont été
performants; ils ont formé des élèves qui ont
performé un peu partout au Québec et à l'étranger.
Il y avait quelques problèmes, dont le principal, me dit-on,
c'était la diplomation. Il n'y avait pas d'attestation d'études
où on retrouvait des équivalences et, bon, pour des raisons x, y,
z, là, l'université ou le cégep ne reconnaissait pas
d'équivalence. C'était un des problèmes, me dit-on. Mais,
qu'est-ce qu'il aurait fallu changer pour corriger les problèmes sans
compromettre les acquis?
Parce que, les acquis, on nous dit: II a été possible
d'atteindre une certaine performance en raison de la souplesse, de la
qualité de la formation, de la capacité de poursuivre ou
d'atteindre un certain niveau de performance dans des périodes plus
courtes, ce qu'on appelle une formation continue, mais sans être
obligé de s'inscrire en I, II, III, IV, parce que, finalement,
ils pouvaient faire, des fois, en deux ans, ce qui aurait pris quatre ans dans
le système régulier. Qu'est-ce qu'il aurait fallu changer pour
corriger les difficultés qu'on éprouve actuellement sans remettre
en cause les acquis?
M. Deniers (Serge): Si vous permettez... Le Président
(M. LeSage): M. Demers. M. Deniers (Serge): Merci. Il y a
plusieurs
façons d'envisager de la concertation, de la consultation et, je
dirais, à l'occasion, une certaine harmonisation. On peut le faire d'une
façon, je dirais, structurelle, c'est-à-dire en faisant en sorte
d'intégrer les structures, pour permettre aux différents
intervenants de rationaliser, de prendre des décisions conjointes, etc.
C'est une voie qui, selon ndtis, est peut-être une voie quelque peu
dangereuse, dans la mesure où on sait que les gros appareils
gouvernementaux ont souvent tendance, de par leur logique, à finir par
avaler les petits. Et, un jour ou l'autre, les conservatoires risquent de plus
en plus de ressembler à l'ensemble de l'appareil qu'on retrouve, que ce
soit du ministère de l'Enseignement supérieur ou encore le
ministère de l'Éducation.
Il existe d'autres façons de se concerter, et, d'ailleurs, on le
voit, parce que nos établissements d'enseignement, les différents
ministères ont des façons, par exemple, de reconnaître des
équivalences pour des étudiants qui, parfois, viennent de pays
étrangers, d'autres provinces du Canada, etc. Donc, j'imagine qu'il y a
là une volonté, sans que ce soit structurel,
nécessairement, de développer une approche visant à
reconnaître et à accréditer un certain nombre
d'équivalences. Et je pense qu'il pourrait y avoir, peut-être au
niveau gouvernemental, des endroits de concertation qui n'entachent aucunement
le développement propre des conservatoires, qui n'entachent aucunement
l'avenir des conservatoires en rapport avec ces différents
ministères, mais qui permettent des débats, des discussions, de
façon à dégager des normes, des critères qui vont
permettre, éventuellement, de reconnaître des
équivalences.
Alors, ce qu'on craint, peut-être, c'est l'approche plus
structurelle, qui peut devenir facilement une approche envahissante, pour ne
pas dire trop intégrante...
Mme Blackburn: Sclérosante.
M. Deniers (Serge): ...et qui pourrait éventuellement
nuire, quand même, à une institution qui, actuellement, fonctionne
très bien.
M. Turgeon (Serge): Si vous me le permettez, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): M. Turgeon.
M. Turgeon (Serge): Donc, la différence fondamentale qu'il
y a entre la concertation je le rappelle essentielle à
tous les niveaux, cette différence entre cette concertation et la
garantie d'implantation formelle qu'on leur donne, à eux, de s'implanter
dans la structure, c'est là, finalement, que le bât blesse.
Le Président (M. LeSage): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Est-ce qu'il n'y a pas de quoi s'étonner et
s'inquiéter, également, de cette espèce de volonté
de soumettre les conservatoires aux mêmes règles qui
prévalent actuellement dans les écoles, quand on connaît
les résultats plutôt mitigés, actuellement, dans nos
écoles? Moi, je ne vous cache pas puis, je connais un peu le
réseau pour l'avoir un peu fréquenté... Est-ce qu'on a un
avantage à se moudre au même modèle, alors que, finalement,
les résultats ne sont peut-être pas aussi probants?
M. Turgeon (Serge): Moi, écoutez...
Le Président (M. LeSage): Brièvement, M. Turgeon,
il vous reste environ une minute.
M. Turgeon (Serge): ...brièvement, ce que je vous dirais,
c'est que je pense qu'on n'a pas intérêt à se moudre
là-dedans. Mais je ne crois pas que ce soit l'intention de la ministre.
Je connais assez la ministre pour m'imaginer que ce n'est pas son intention.
Mais, puisque je pense que ce n'est pas son intention, voilà la raison
pour laquelle je pose: Pourquoi est-ce que ce n'est pas clair comme ça
dans le projet de loi?
M. Boisclair: Est-ce que je peux vous demander c'est l'intention
de qui, alors?
Mme Blackburn: Permettez, juste une...
M. Turgeon (Serge): Écoutez, vous êtes politicien,
alors vous devriez y répondre.
Le Président (M. LeSage): Brièvement, M.
Demers.
M. Demers (Serge): Brièvement, M. le Président, et
peut-être pour conclure, c'est pourquoi nous demandons à la
ministre et nous ne croyons pas qu'il y ait urgence et, si jamais, avant
Noël, on ne procédait pas, je ne pense pas que ni les
conservatoires, ni le ministère de la Culture, ni le ministère de
l'Enseignement supérieur, ni le ministère de l'Éducation
ne seraient gravement entachés quant à ce qui s'en vient
qu'on prenne le temps de réfléchir, de se parler et de trouver
vraiment les solutions à des problèmes qui sont sûrement
réels mais qui ne doivent pas nécessairement, et qui ne doivent
surtout pas se régler parce qu'on est dans un milieu de
créateurs, où la liberté d'expression est quelque chose de
très valorisée d'ici 15 jours par la guillotine.
Le Président (M. LeSage): Alors, merci, messieurs, madame,
les représentants de l'Union des artistes. Le temps qui vous
était imparti est écoulé. Je vous remercie pour votre
participation à nos travaux.
Je suspends les travaux pour quelques instants, alors que nous
entendrons les représentants de l'association des orchestres
symphoniques. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 9)
(Reprise à 16 h 16)
Le Président (M. LeSage): La commission reprend ses
travaux. Le prochain mémoire qui nous sera présenté nous
parvient du Comité Québec de l'Association des orchestres
canadiens, et son porte-parole est M. Jacques Brochu. M. Brochu, je vous
rappelle que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire.
Je vous demande, également, de nous présenter les personnes qui
vous accompagnent.
M. Brochu (Jacques): Merci... M. Philibert: M. le
Président...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Trois-Rivières.
M. Philibert: ...une question d'information. On a reçu une
communication, tantôt, qu'on devait être rappelé en Chambre
à 16 heures, suite à une décision que le président
doit rendre, et on nous dit que les travaux des commissions vont être
suspendus. Est-ce que vous avez des informations qui vous permettent de penser
que ces gens-là pourront livrer leur mémoire d'un trait? S'ils
doivent commencer, faire trois ou quatre minutes, il me semble que ce serait
frustrant de déconcentrer le peuple pour revenir au dossier. Est-ce que
vous avez pris des informations, à savoir quand la décision du
président viendrait?
Le Président (M. LeSage): Je n'ai aucune indication sur
l'heure exacte à laquelle cette décision sera rendue et, pour
permettre aux gens de débuter, je crois que nous devrions débuter
maintenant, mais je vous avise qu'il est possible que les cloches se mettent
à sonner. Lorsque ces cloches sonneront, je devrai suspendre les travaux
pour quelques instants, mais nous reviendrons à votre mémoire.
Alors, M. Brochu, si vous voulez bien nous présenter les personnes qui
vous accompagnent.
Comité Québec de l'Association des
orchestres canadiens (AOC)
M. Brochu (Jacques): Merci, M. le Président. En tout
premier lieu, je vais présenter Mme Louise Laplante, à mon
extrême gauche, directrice générale de l'Orchestre
symphonique de Québec; à ma gauche, Mme Françoise Asselin,
directrice générale de l'Orchestre symphonique de Laval, et,
à ma droite, M. Daniel Gélinas, directeur général
de l'Orchestre symphonique de Trois-Rivières.
À la suite de la consultation sur le document d'orientation du
Conservatoire et après étude et analyse du projet de loi 135, le
Comité Québec de l'Association des orchestres canadiens
désire vous souligner son appui envers cette démnrche de
rajeunissement du Conservatoire.
Dans la foulée de la nouvelle politique culturelle
québécoise, nous considérons que cette nouvelle Loi sur le
Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec viendrait
concrétiser des attentes depuis longtemps formulées. Les
structures plus modernes du nouveau Conservatoire, davantage orientées
vers les besoins des milieux musical et régional, contribueront sans
doute à l'amélioration de la formation des interprètes et
des créateurs et, incidemment, favoriseront l'essor de la musique au
Québec.
Ce bel enthousiasme serait toutefois tempéré si ce projet
de loi allait à rencontre de la pérennité d'une telle
institution, c'est-à-dire de la garantie formelle du maintien et de la
consolidation des sept établissements existants, de même que du
maintien de l'enseignement d'une variété intéressante
d'instruments dans chaque établissement. Il serait difficilement
acceptable que, dans un avenir plus ou moins rapproché, des
établissements du Conservatoire disparaissent sous le couvert de la
rationalisation budgétaire ou encore sous celui d'un possible
dédoublement avec d'autres institutions de niveau collégial ou
universitaire.
Pour le Comité Québec de l'AOC, le Conservatoire est et
demeure une institution unique de haut calibre dont on retrouve
l'équivalent dans plusieurs pays où la culture musicale foisonne
et qui jouit d'une réputation de très bonne école,
même au niveau international. Pour tous les orchestres du Québec,
les finissants du Conservatoire représentent un bassin important de
musiciens d'orchestre et une relève de qualité, relève que
la mission des autres institutions de formation musicale au Québec rend
moins apte à nous fournir.
À propos de concertation et de collaboration, le Comité
Québec aimerait vous signaler, Mme la ministre, que nous estimons fort
souhaitable, pour la vie de la musique en région et le
développement d'habiletés chez nos jeunes instrumentistes en
particulier, que tous les organismes intervenant dans le domaine musical, dont
la Guilde des musiciens, souscrivent à un nouvel esprit de partenariat,
facilitent la participation des étudiants du Conservatoire à des
activités d'orchestre local ou régional et leur permettent ainsi
de performer. (16 h 20)
Quatre points plus spécifiques font l'objet de nos
préoccupations. Il s'agit, entre autres, de la mission du Conservatoire,
que nous souhaiterions plus explicite, de la composition des conseils
d'orientation, de celle des commissions des études et, enfin, d'une
disposition financière.
Nous espérons, Mme la ministre, que vous prendrez en
considération ces recommandations, lesquelles, croyons-nous,
assureraient un fonctionnement encore plus harmonieux du Conservatoire, sa
meilleure intégration aux forces du milieu culturel, ainsi qu'un plus
grand rayonnement, souhaitable à bien des égards.
Nous vous félicitons, Mme la ministre, de tous vos efforts et de
votre détermination à nous doter d'une véritable politique
culturelle. La nouvelle loi du Conservatoire éclaircira les horizons et
perspectives de cet
organisme indispensable à la survie du monde musical et, enfin,
elle s'inscrit fort bien dans le cadre de la politique culturelle du
Québec. Mme Laplante.
Le Président (M. LeSage): Mme Laplante, vous voulez
intervenir?
Mme Laplante (Louise): Merci. Je vais traiter de la mission du
Conservatoire. Nous considérons que la mission du Conservatoire aurait
avantage à être mieux définie, c'est-à-dire que sa
personnalité propre soit bien caractérisée et que l'on
mette aussi en valeur sa vocation de formation continue de qualité au
regard des personnes qu'il dessert. Ainsi, nous voudrions que soient
désignées les clientèles spécifiques auxquelles il
s'adresse, nommément les interprètes et les créateurs.
D'autres institutions, tels les écoles privées de musique,
les cégeps et les universités, assurent également de la
formation musicale, et elles ont toujours leur place. Aussi,
désirons-nous le maintien d'une variété d'institutions
dans les grands centres et en région. Par ailleurs, nous souhaiterions
que, par sa personnalité, sa vocation et ses critères
d'excellence, le Conservatoire continue, entre autres, d'être
considéré comme une voie privilégiée d'accès
à la profession de musicien d'orchestre.
Nous croyons également que non seulement le Conservatoire
pourrait, et je cite, et devrait «susciter et favoriser dans le milieu la
présence d'organismes essentiels à la vie musicale», mais
aussi leur développement. Le Conservatoire devrait être, sinon
devenir, un lieu d'expertise et un pôle d'attraction dans le milieu, un
moteur du développement musical en région qui accorderait
soutien, collaboration et appui aux autres écoles, par exemple par le
prêt de professeurs ou d'autres échanges de services.
M. Brochu (Jacques): Pour les conseils d'orientation du
Conservatoire, M. Gélinas prendra la parole.
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Gélinas.
M. Gélinas (Daniel): Oui.
Le Président (M. LeSage): Allez-y.
M. Gélinas (Daniel): Alors, pour les conseils
d'orientation du Conservatoire, la position de l'Association est la suivante.
S'il est des aspects auxquels nous sommes favorables, la création de
conseils d'orientation est un de ceux-là. Nous percevons ce
mécanisme au sein des établissements comme un outil concret de
démocratisation et d'autonomie qui devrait refléter la
spécificité de chacune des régions concernées et
assurer un meilleur rayonnement et un enracinement au profit du
développement du milieu musical régional.
Toutefois, ces conseils consultatifs n'auront d'existence réelle
que s'ils sont effectivement consultés par le Conservatoire. Aussi,
serait-il opportun de préciser que le Conservatoire aura la
responsabilité de consul- ter, à tout le moins deux fois l'an,
les conseils d'orientation. Le dernier paragraphe de l'article 45 devrait
être reformulé en conséquence.
Nous proposons, par ailleurs, en harmonie avec l'esprit de ce projet de
loi, d'élargir la représentativité des membres des
conseils d'orientation afin de mieux prendre en compte les différentes
problématiques régionales, sachant fort bien que chacune des
régions présente ses propres et grandes
spécificités. Ainsi, nous proposons qu'un ou deux
représentants d'orchestres locaux, selon le cas, fassent partie de ces
conseils. Ils pourraient être nommés à la suite d'une
demande expresse, auprès des orchestres concernés, d'y
désigner un représentant ou encore, si, pour quelque raison que
ce soit, il est impossible de procéder ainsi, le Comité
Québec de l'Association des orchestres canadiens pourrait se prononcer
et déléguer un représentant à titre de membre d'un
conseil d'orientation du Conservatoire.
Une de nos préoccupations concerne aussi l'équilibre de la
représentativité des membres d'un tel conseil. À cet
effet, nous voulons qu'outre les membres déjà
désignés à l'article 38 du projet de loi 135, par 1°,
2°, 3°, 4°, 5° et 7°, fassent partie de ces conseils
d'orientation un autre membre représentatif des organismes musicaux de
la région concernée et, enfin, un représentant du monde
des affaires intéressé par le développement culturel de sa
région. De fait, nous désirons une représentation
égale des intervenants du Conservatoire, c'est-à-dire l'interne,
et des organismes du milieu musical et régional, c'est-à-dire
l'externe, ce qui nous semble plus équitable et davantage collé
à l'esprit de ce projet de loi.
Le Président (M. LeSage): Mme Asselin, vous voulez
poursuivre?
Mme Asselin (Françoise): S'il vous plaît, sur les
commissions des études. Nous remarquons que le rôle
conféré aux commissions des études serait quelque peu
restrictif et que, dans le libellé actuel de l'article 35, on fait
abstraction de tout lien avec le marché du travail. Ceci nous semble une
lacune et en non-concordance avec l'esprit du projet de loi et aussi la mission
du Conservatoire. Aussi, désirons-nous y voir inscrire des
éléments sur le cheminement pédagogique qui feraient appel
à une étroite collaboration avec les organismes du milieu musical
et qui concerneraient l'intégration au marché du travail et,
entre autres moyens, l'organisation de stages. À cet effet, nous
souhaitons qu'une des fonctions de la Commission des études musicales
soit de veiller au cheminement pédagogique des étudiants en ayant
à l'esprit leur intégration au marché du travail et, pour
ce faire, qu'elle ait aussi pour fonction de créer de nouveaux
partenariats avec les organismes du milieu musical. De plus, pour des raisons
apparentées à celles déjà évoquées
dans le cas des conseils d'orientation, nous aimerions améliorer la
représentativité à la Commission des études
musicales, donc qu'on y ajoute, entre autres, des membres.
Nos suggestions sont les suivantes: à l'article 31.4°, que,
pour les deux élèves en musique, l'on spécifie que l'un
provienne d'un établissement en région et l'autre, de
l'établissement de Montréal si, tel que prévu,
l'établissement de Montréal doit assumer un rôle
particulier; à l'article 31.6°, que l'on ajoute également
deux personnes représentatives du milieu de la musique, dont une
proviendrait d'une région et une autre de Montréal.
Au niveau des dispositions financières, l'article 48 devrait
être reformulé, pensons-nous. Ainsi, il nous semblerait plus
normal et plus cohérent, surtout dans la conjoncture actuelle, que, si
le Conservatoire «doit intégrer dans son budget, comme
dépense, son déficit», il doive également
intégrer dans son budget ses surplus, et ce, dans le sens suivant: qu'il
y ait déficit ou surplus, les octrois annuels du gouvernement
demeureraient les mêmes. Ainsi, si le Conservatoire recevait un don
important, il pourrait le conserver et soit l'appliquer à combler un
déficit ou le réserver pour un usage ultérieur.
Le Président (M. LeSage): Oui, M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): Au regard des diverses considérations
que nous venons de vous exposer, le Comité Québec de
l'Association des orchestres canadiens recommande que le projet de loi 135, Loi
sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec, soit
amendé et que la formulation proposée des articles suivants soit
retenue, ou toute autre formulation de nature similaire qui conserverait le
sens des recommandations qui précèdent.
Comme exemple, à l'article 18: «Le Conservatoire a pour
objets d'administrer et d'exploiter dans diverses régions du
Québec des établissements d'enseignement aux fins de»:
1° dispenser de façon continue de la formation professionnelle
répondant à de hauts standards de qualité et du
perfectionnement, aux interprètes et créateurs, dans les domaines
de la musique et de l'art dramatique; 3 e susciter et favoriser dans
le milieu la présence et le développement d'organismes essentiels
à la vie musicale.
À l'article 31: «La Commission des études musicales
est composée des membres suivants»: 4° deux
élèves en musique à temps complet du Conservatoire, l'un
provenant d'un établissement en région et l'autre de celui de
Montréal, «nommés conformément...»; 6°
deux personnes représentatives des organismes de musique, nommées
par les membres en fonction de la Commission des études, la
première de la région de Montréal et la seconde d'une
autre région où se situe un établissement du
Conservatoire. (16 h 30)
À l'article 35: «Les commissions des études ont pour
fonction, dans leur domaine respectif, de conseiller le Conservatoire sui toute
question concernant le régime pédagogique, les programmes
d'études dispensés par le Conservatoire et l'évaluation
des apprentissages, y compris les procédures de sanction des
études», et de favoriser, dans le milieu musical, de nouveaux
partenariats nécessaires à une démarche pédagogique
continue et visant à faciliter l'intégration des finissants du
Conservatoire au marché du travail.
À l'article 38: «Le conseil d'orientation d'un
établissement d'enseignement de la musique est composé des
membres suivants». Les paragraphes 1°, 2°, 3° et 4° de
cet article demeureraient tels quels.
L'actuel 38.5° deviendrait 38.6°, pour être
remplacé, à 5°, par: 5° un ou deux représentants
des orchestres locaux, selon le cas, nommés après consultation
desdits orchestres, en premier lieu, et, si nécessaire, en second lieu,
après consultation du Comité Québec de l'Association des
orchestres canadiens, sinon de tout autre organisme représentatif des
orchestres du Québec.
Le 7° resterait le même, tel quel. 8° une ou deux
personnes, nommées par les autres membres du conseil d'orientation en
fonction, représentatives d'autres organismes musicaux de la
région concernée.
Et, enfin: 9° une personne, nommée par les autres membres du
conseil d'orientation en fonction, du monde des affaires
intéressée au développement culturel de sa
région.
L'article 45: Le conseil d'orientation doit être consulté
au moins deux fois l'an par le Conservatoire sur les différentes
dispositions.
Et, enfin, à l'article 48: «Le budget maintient
l'équilibre entre, d'une part, les dépenses et, d'autre part, les
subventions octroyées par le ministre au Conservatoire et ses autres
revenus.»
Le Conservatoire, donc, doit intégrer dans son budget, comme
revenu, ses surplus, s'il en est.
M. le Président, Mme la ministre, les membres de la commission,
nous vous transmettons respectueusement ce mémoire.
Le Président (M. LeSage): Alors, merci, messieurs,
mesdames. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Frulla: Merci, M. Brochu. D'abord, je remercie tous les
représentants du Comité Québec de l'Association des
orchestres canadiens. Maintenant, ce que je retiens de votre
présentation, c'est que, dans l'ensemble, le projet de réforme
répond aux besoins du milieu musical et, aussi, régional.
Maintenant, c'est d'autant plus important pour nous quand on considère
le rôle majeur des orchestres symphoniques auprès des jeunes de la
relève.
Et je voudrais revenir un peu à ce que vous avez dit quand vous
avez parlé de partenariat. Il y a des exemples assez concluants, soit au
concert annuel de l'Orchestre symphonique de Trois-Rivières, par
exemple, avec les élèves avancés du conservatoire de
Trois-Rivières qui participent à la tenue de ce
concert-là, ou,
encore, la participation active des professeurs et des
élèves du conservatoire de Chicoutimi qui participent aux
activités de l'Orchestre symphonique du SaguenayLac-Saint-Jean.
Alors, quand on parle de partenariat entre toutes les diverses instances du
milieu, autant au niveau de la Guilde, autant au niveau des professeurs et
élèves du Conservatoire, par exemple, pour vous, là,
j'aimerais ça que vous élaboriez un peu là-dessus.
D'abord, est-ce que c'est important, d'après vous, pour la
formation des élèves, que cette participation occasionnelle des
élèves, par exemple, dans un orchestre qui est,
évidemment, formé de professionnels, d'une part? Est-ce que cette
pratique devrait se continuer? Et, enfin, est-ce que, finalement, elle devrait
aussi se développer, si on veut, et ce, un peu dans toutes les
régions du Québec?
Le Président (M. LeSage): M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): Sans prendre la place... Excusez-moi, M. le
Président.
Le Président (M. LeSage): Allez-y, M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): Sans prendre la place des musiciens qui sont
déjà en place, c'est certain, il faudrait donner la chance
à nos musiciens en région, à nos gens qui sont en instance
de devenir des musiciens professionnels, la chance et l'occasion de se
manifester au niveau des orchestres symphoniques, ou des orchestres de chambre,
ou de différents orchestres au niveau du Québec. Vous savez qu'il
y a un chiffre d'affaires d'environ 30 000 000 $ au Québec, en ce qui
concerne les orchestres symphoniques, les orchestres de musique de chambre et
autres orchestres, ce qui représente, à peu près, 400
à 425 représentations au niveau du Québec, ce qui est,
à notre sens, assez important.
Alors, pour nos jeunes qui ont besoin de performer, ont besoin de se
mesurer, ont besoin, dans leur stage pédagogique, dans leur
évolution pédagogique, de se manifester, on se doit, en tant que
société, nous croyons, de donner la chance à ces personnes
de se manifester au niveau des orchestres symphoniques.
Mais, M. Gélinas, peut-être, peut en parler un petit peu
plus longuement sur les expériences qu'il a vécues, à ce
niveau-là, avec le Conservatoire; ce fut enrichissant, autant pour les
musiciens, autant pour nos mélomanes. Avec ces gens, nous pouvons
produire des concerts que nous ne pourrions peut-être pas produire si
nous n'avions pas la collaboration précieuse des conservatoires. On ne
pourrait pas faire la Huitième de Mahler, on ne pourrait pas
interpréter des oeuvres volumineuses, si nous n'avions pas la
participation de certaines personnes du Conservatoire; d'une façon
sporadique, j'entends.
Alors, M. Gélinas, je ne sais pas si...
Mme Frulla: Est-ce que vous rencontrez des obstacles à
ça? Parce que la pratique, finalement, ce devrait d'être, comme je
vous dis, sans remplacer, si on veut, les musiciens professionnels, parce que
ce n'est pas le cas et ce n'est pas la volonté non plus, mais, au moins,
de donner l'occasion aux jeunes de, justement, jouer et de performer, si on
veut, avec des musiciens professionnels, puisque c'est une façon pour
eux, évidemment, de plonger, finalement, dans la pratique.
Alors, est-ce qu'il y a des obstacles à ça? Parce que
j'aimerais voir, finalement, cette expérience-là peut-être
de façon un peu plus fréquente ou encore étendue, si on
veut, à travers le Québec.
Le Président (M. LeSage): M. Gélinas.
M. Gélinas (Daniel): II faut bien comprendre que
l'important... C'est évident que la participation des conservatoires au
niveau des orchestres peut prendre diverses formes, parce que chaque
région, chaque conservatoire vit dans des milieux qui sont
différents. Il y en a qui ont des orchestres, il y en a qui n'en ont
pas; des orchestres professionnels et d'autres non. Je pense que ce sera
à chacun des conseils d'orientation de déterminer quelle forme
pourra prendre la participation du Conservatoire au niveau de son milieu
musical.
En ce qui concerne... Et je voudrais attirer votre attention sur cet
aspect-là: vous avez parlé de la participation de certains
étudiants avancés à l'intérieur des concerts de
l'orchestre. Il faut bien faire attention, et ça, je pense que ça
pourrait être relevé, sur le fait que les musiciens qui doivent
participer à ces concerts-là, il faut que ça corresponde
très bien à leur cheminement pédagogique, alors faire
attention au type de programme qui sera présenté pour que ce
programme-là convienne bien au cheminement pédagogique de chacun
des étudiants.
D'autre part, aussi ce qui est un aspect important il va
falloir que les orchestres et la Guilde des musiciens du Québec puissent
s'entendre sur une formule qui pourra permettre cette implication-là des
étudiants du Conservatoire dans les orchestres ce qui n'est pas
nécessairement fait actuellement et voir de quelle manière
tout ça peut se faire; et ça, ça devra se faire. Nous, on
peut le faire déjà, depuis quelques années, mais c'est des
choses qu'il faut négocier. Les autres orchestres, aussi, probablement
qu'il va falloir qu'ils déterminent de quelle manière ils vont
procéder dans ce genre d'implication là.
Mais on considère essentiel et très important que les
musiciens du Conservatoire puissent être intégrés de
diverses façons ne serait-ce que par des stages dans les
concerts, etc. dans les orchestres, parce que c'est le foyer même
d'une expérimentation qui est extrêmement enrichissante pour eux
autres. Et, d'autre part, c'est leur futur milieu de travail, vraiment, le
milieu dans lequel ils vont probablement évoluer plus tard.
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre. Mme Frulla:
On a beaucoup parlé, évidemment,
du rayonnement des conservatoires en région et du rôle des
conservatoires en région. Et, encore une fois, s'il faut apporter des
amendements à l'article 18 pour vraiment refléter notre
volonté que les conservatoires demeurent des lieux d'excellence, tels
que dans l'orientation ou, enfin, la vocation modifiée de 1989, nous
allons le faire. Mais notre volonté, c'est vraiment que les
conservatoires en région restent des endroits où l'on dispense
une formation supérieure basée sur l'excellence.
Maintenant, on sait que la participation de ces
élèves-là est indispensable à une formation
avancée en région; la participation, s'entend, à vos
orchestres. Maintenant, vous parlez d'une négociation, par exemple, avec
la Guilde. Est-ce qu'il y a des problèmes à ce niveau-là?
Et je dois vous le dire, là, d'emblée nous allons entendre
la Guilde tantôt qu'on entend, là, qu'il peut y avoir aussi
certaines obstructions, sachant que, si on veut que les conservatoires soient
des pôles essentiels en région et on parle et on continue
à dire que les régions, c'est important il faut dispenser
de cette formation professionnelle. Il faut que l'étudiant puisse
travailler ou, enfin, apprendre en région, aussi, et ne pas être
défavorisé et être obligé, finalement, de s'en aller
dans les grands centres. Il me semble que leur expérience aussi est
nécessaire.
M. Gélinas (Daniel): Effectivement.
Mme Frulla: Parce que vous parlez de négociation: Est-ce
que ça se fait, est-ce que ça se fait de façon
positive?
Le Président (M. LeSage): M. Gélinas.
M. Gélinas (Daniel): Je pourrais vous dire que,
actuellement, je pense que, dans le cas de Trois-Rivières, ça
devrait être réglé dans les... On en a même
d'ailleurs discuté juste vendredi dernier. Alors, je pense qu'on devrait
en arriver à une entente qui pourra permettre aux étudiants du
Conservatoire, dans le cas de Trois-Rivières, dans le cas de
participation à des concerts, qui est une des formes, je crois, de
participation du Conservatoire, parce qu'il peut y en avoir plusieurs autres,
mais cette forme-là devrait être réglée d'ici une
semaine ou deux. Ce n'est pas entièrement réglé, mais je
pense qu'il y a une ouverture de ce côté-là.
Mais, je pense que, si on n'a pas d'entente à ce
niveau-là, il y aura une incohérence entre ce que la loi veut, et
ce que les conservatoires voudront, et ce qu'on pourra faire en région
en tant qu'orchestres. Alors, éventuellement, il va falloir que les
gens, les représentants des musiciens professionnels se positionnent sur
cette question-là, absolument.
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre. (16 h 40)
Mme Fru'ia: À la fin, vous proposez, finalement,
d'élargir la composition des conseils d'orientation.
Maintenant, en ce qui concerne le principe même de
l'établissement de ces conseils, est-ce que vous croyez qu'ils
favorisent une plus grande synergie entre les conservatoires, aussi, et les
organismes musicaux? Vous allez jusqu'à dire que les conseils
d'orientation devraient être consultés deux fois l'an. J'aimerais
que vous élaboriez là-dessus un peu.
M. Brochu (Jacques): On dit souvent, Mme la ministre, à
tort, que, être cultivé je...
Le Président (M. LeSage): M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): ...m'excuse toujours, M. le Président
qu'une personne cultivée est une personne qui, de temps en temps,
va à un concert, va à un musée, écoute un peu de la
musique classique, va à différents endroits pour se
récréer. Mais, en réalité, la culture, chez un
individu, ou une société, ou un peuple, ce n'est pas seulement
ça; ce n'est définitivement pas ça. C'est une façon
de vivre, c'est une façon de se récréer, une façon
de boire, de manger, de faire de la politique, c'est une façon de
dialoguer avec les gens. C'est une question d'améliorer ses
connaissances, d'améliorer son état personnel.
Dans le système d'éducation actuel, nous n'avons pas de
système intégré au niveau culturel. Et je vois l'article
4, deuxième alinéa, je crois qu'il y a une ouverture, avec les
deux personnes du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science, à cet effet-là. Le fait d'avoir des organismes de
consultation, d'orientation dans notre milieu, où les gens du milieu
seront capables de s'exprimer et d'échanger, de se connaître, de
dialoguer et de voir réellement les besoins du milieu, il va se
développer, définitivement et c'est prouvé dans
différents autres domaines, que ce soit dans le sport ou dans
l'économique une synergie profitable au niveau du domaine
musical, et nous y sommes favorables.
M. Gélinas (Daniel): Peut-être sur la question de la
consultation, Mme la ministre...
Le Président (M. LeSage): M. Gélinas.
M. Gélinas (Daniel): ...juste pour compléter.
Le Président (M. LeSage): Allez-y.
M. Gélinas (Daniel): Pourquoi on a insisté sur le
fait que ce conseil d'orientation là devrait être consulté
deux fois l'an? C'est pour une question tout à fait pratique. Je pense
que, n'ayant aucun pouvoir en tant que tel, ces conseils d'orientation
là, si le Conservatoire n'envoie jamais de «in» ou n'envoie
jamais d'avis de consultation sur rien, je crains que ces comités
d'orientation là ne se réuniront jamais, ou pratiquement jamais,
à moins d'avoir vraiment quelque chose d'intéressant à
discuter. C'est la raison pour laquelle on veut que le Conservatoire consulte
au moins deux fois l'an.
Le Président (M. LeSage): Merci. Mme la ministre. Alors,
M. le député de Gouin.
M. Boisclair: Mesdames, messieurs, merci pour votre
présentation. Je tiens à souligner la qualité du
mémoire, qui a sans doute été rédigé dans
des délais assez réduits, compte tenu des délais qui
étaient ceux que les membres qui se présentent devant nous ont
eus pour préparer leur présentation. Je reconnais aussi l'oeuvre
de gens qui sont soucieux de faire progresser le débat, compte tenu du
ton nuancé que vous proposez, que vous utilisez dans votre
mémoire.
Je vous poserais une question très directe: Vous signifiez votre
appui au projet de loi 135. Cependant, vous émettez un certain nombre de
réserves. Nous aurons la responsabilité, comme membres de cette
commission, d'appuyer ou non ce projet de loi. Et, dans la mesure où vos
commentaires et vos suggestions n'étaient pas retenus, est-ce que vous
nous inviteriez à voter et à appuyer le projet de loi, ou si
plutôt vous seriez de ceux qui nous conseilleraient de surseoir à
l'adoption du projet de loi?
Le Président (M. LeSage): M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): II demeure que, dans l'ensemble, ce projet
de loi est très positif, et il s'inscrit dans une politique culturelle
déjà amorcée depuis longtemps, et nous sommes favorables.
C'est sûr que les aménagements, s'ils n'étaient pas
adoptés, ou s'il n'était pas tout simplement modifié, on
serait déçus, mais on appuierait quand même ce projet de
loi, parce qu'il y a beaucoup là-dedans et nous en sommes arrivés
là. Je pense qu'il faut arriver à quelque chose de positif.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Est-ce que vous estimez qu'il est important de
procéder rapidement? Les intervenants précédents nous ont
fait valoir qu'il y avait lieu de procéder à davantage de
discussions sur cette question. Est-ce que je peux vous demander, d'une part,
si vous avez été consultés sur les orientations
ministérielles qui ont été rendues publiques au mois de
juin 1993? Et, deuxièmement, est-ce que vous estimez, pour vous, qu'il
est impérieux d'agir en cette matière?
M. Brochu (Jacques): Je vais répondre... Le
Président (M. LeSage): M. Brochu.
M. Brochu (Jacques): ...au deuxième volet de votre
question, si vous le permettez, et laisser Mme Laplante répondre au
premier volet.
Nous n'avons pas été consultés d'une façon
directe. Nous avons eu des échanges indirects avec certaines personnes,
mais pas plus que ça. Donc, on n'a pas été
consultés à cet effet.
Le Président (M. LeSage): Mme Laplante, vous voulez
poursuivre?
Mme Laplante (Louise): II est vrai que cette consultation est
venue peut-être tardivement, mais il s'est trouvé que nous nous
sommes tous précipités à cette consultation tant elle
était attendue. Donc, dans un délai très court, nous
sommes venus vous rencontrer. Nous avons pris le temps d'examiner très
sérieusement la proposition.
Je me suis amusée, au cours des jours qui ont suivi, à
relire le rapport de la commission Parent. C'est là que je vais vous
répondre: Oui, c'est urgent; ça fait 23 ans, 24 ans qu'on attend
un changement et une ouverture sur le milieu. Et c'est là que nous
sommes favorables. Évidemment, il y a peut-être des
problèmes internes que nous n'avons pas eu le temps d'examiner et qui,
peut-être, ne sont pas de notre ressort. Mais, tout ce qui concerne
l'externe, l'ouverture sur le milieu, la participation en région, les
conséquences sur le milieu du travail, ça, ça nous
intéresse au plus haut point, et, oui, il y a une urgence. Nous sommes
les employeurs éventuels de ces étudiants, et il doit y avoir une
concertation entre la formation et le marché du travail.
M. Boisclair: M. le Président...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: ...je souscris tout à fait à ces
propos. Je pense qu'il n'y a personne ici, alentour de cette table, qui ne
serait pas assez généreux pour dire autrement. Cependant, cette
dure réalité qui nous confronte, c'est celle d'un contenu d'un
projet de loi rédigé de façon souvent très
technique, article par article. Et notre objectif, à ce moment-ci, c'est
d'essayer, justement, de réconcilier cette volonté d'ouverture
sur le milieu, qui nous anime tous, avec le contenu du projet de loi.
Et comment, justement, arrivez-vous à réconcilier cette
ouverture souhaitée avec je donne trois exemples qui
m'apparaissent importants d'une part, l'article 75, qui fait l'objet de
dispositions quant à la transition, où, à mon humble avis,
en faisant place uniquement aux gens qui seront nommés par les
différents ministères, pour des tâches qui seront
significatives et qui donneront le ton aux travaux du nouveau conseil
d'administration, ce seront essentiellement des gens que je pourrais appeler,
là, nommés par la ministre, où l'affiliation sera quand
même assez facile à deviner...
Et aussi, ne croyez-vous pas qu'il serait opportun de, justement,
préciser, dans ce projet de loi, l'importance de maintenir ces
conservatoires en région, en spécifiant peut-être, entre
autres à l'article 18, de nommer les conservatoires qui dispensent,
à l'heure actuelle, une formation?
Le Président (M. LeSage): M. Gélinas, ou...
Mme Laplante (Louise): Bon, je peux répondre. En ce qui
concerne l'article 75, c'est justement parce qu'elle est transitoire qu'il n'y
a point d'inquiétude. Si elle est transitoire, elle n'est que
transitoire, et le conseil d'administration a tout le loisir d'en
étudier les différentes implications. En ce qui concerne l'autre
question de nommer les régions, ça, je serais assez favorable,
dans un premier temps, à les nommer, de manière à
préserver les acquis.
M. Boisclair: Vous me permettez un commentaire. Je ne partage pas
votre point de vue quant à l'article 75, en comprenant que c'est ce
conseil qui aura la responsabilité d'édicter les
règlements qui sont visés aux différents articles du
projet de loi. Et non seulement aura-t-il la responsabilité de les
édicter, mais aussi, dans ce règlement, il aura la
responsabilité de prévoir de quelle façon on pourra
modifier ces règlements. Et il y a toutes sortes de façons qui
peuvent nous faire craindre... Je ne dis pas que ces gens ne seront pas de
bonne volonté, mais, dans le corps de ce projet de loi, où nous
devons, nous, comme législateurs, décider du niveau de
délégation, nous croyons qu'il serait plus sage de
procéder autrement.
Toujours sur cet article 18, je voudrais maintenant avoir votre
compréhension, vous qui représentez... il y a des gens de
Trois-Rivières, des gens de Laval. Vous avez une riche expérience
du travail, du produit si je peux utiliser cette expression en
tout cas, de la formation qui est dispensée par les conservatoires. Un
des alinéas de cet article, qui suscite beaucoup de commentaires, est le
second alinéa, où on nous dit: «...susciter et favoriser
une formation initiale». (16 h 50)
Vous nous proposez, dans votre mémoire, un certain nombre
d'amendements, sans cependant décider ou proposer une hiérarchie,
ou sans proposer de façon claire, par votre amendement, de modification
au second alinéa. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, pour les
législateurs, de s'assurer d'une espèce de verrou, d'un plancher
minimal pour s'assurer que, dans chacune des régions où les
conservatoires sont présents, une formation terminale, supérieure
puisse continuer à s'offrir? Je vois mal, par exemple, ce qu'il
adviendrait de l'Orchestre symphonique de Chicoutimi, ou peut-être de
Trois-Rivières, si justement cette formation terminale ne s'offrait plus
en région.
Le Président (M. LeSage): Alors, Mme Asselin, allez-y.
Mme Asselin (Françoise): Merci, M. le Président. II
nous est apparu important de le préciser, et c'est dans le paragraphe 1
° que nous avons précisé cette
préoccupation-là, en précisant que la vocation ou la
mission serait de dispenser de façon continue, c'est-à-dire du
début jusqu'à la fin du processus, de la formation
professionnelle répondar* à de hauts standards de qualité
et du perfectionnement aux interprètes et aux créateurs.
Donc, en ce sens-là, au lieu de l'indiquer au paragraphe 2°,
c'est au paragraphe 1°, où cette mission, elle est là autant
pour la formation professionnelle en musique qu'en art dramatique, tandis que,
dans le paragraphe 2°, ça se liait seulement à la musique.
Donc, on a voulu s'assurer que ce processus-là était continu et
de qualité, donc qu'on pouvait le permettre.
Et, dans l'introduction, nous avons bien dit que nous serions moins
enthousiastes de l'adoption du projet de loi s'il ne visait pas à la
consolidation des sept établissements et au maintien de l'enseignement
d'une variété intéressante d'instruments dans chaque
établissement. Ça fait que je pense que notre
préoccupation a été exprimée là.
M. Boisclair: Donc, vous proposez indirectement la suppression du
second alinéa si...
Mme Asselin (Françoise): Pas nécessairement, parce
qu'on ne le voyait pas de la même façon à ce
niveau-là.
M. Boisclair: Vous estimez que c'est compatible.
Le Président (M. LeSage): Alors, si vous le permettez, je
veux tout simplement souligner, avant de suspendre les travaux, qu'il reste 11
minutes au parti ministériel et neuf minutes à l'Opposition.
Comme je l'ai mentionné tantôt, le président de
l'Assemblée nationale doit rendre une décision très
importante, et je pense qu'il est important que les parlementaires y assistent.
Alors, je suspends les travaux pour quelques instants.
M. Boisclair: M. le Président, pour éviter de
retenir ces gens inutilement, on pourrait...
Le Président (M. LeSage): On m'indique qu'il y a entente
pour faire des conclusions rapides. Alors, M. le député de Gouin,
vous avez une minute.
M. Boisclair: Tout simplement vous remercier de votre
présentation. J'aurais aimé revenir sur vos amendements à
l'article 31 qui me semblent, dans les circonstances, pertinents. Nous devons
élargir la composition des conseils d'orientation. Mais je m'en voudrais
donc de ne pas vous rappeler, cependant, les dispositions de l'article 44 qui
me font craindre, justement, sur le mandat qui sera celui des conseils
d'orientation. Il m'appa-raît qu'ils seront, à la limite,
consultatifs et que cette volonté que nous partageons se traduira
difficilement, compte tenu de 44 et 45, même si on élargit.
Et votre proposition, d'ailleurs, d'élargir à des gens du
milieu et peut-être à des gens d'affaires, m'apparaît
pertinente, mais il faut aussi travailler sur 44 et 45 pour s'assurer que ces
gens-là fassent vraiment oeuvre utile.
Le Président (M. LeSage): Merci.
M. Boisclair: Je vous remercie beaucoup de vous être
déplacés.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le
député de Gouin. Mme la ministre.
Mme Frulla: Rapidement, encore. Moi aussi, je vous remercie.
D'une part, soyez sûrs que vos recommandations seront regardées
très sérieusement.
Maintenant, je veux seulement revenir à ce qui est
véhiculé au niveau de l'article 75, par exemple. À vous
tous, là, c'est très difficile d'avoir un conseil
d'administration nommé et entier, puisque l'article 75, comme vous
l'avez si bien dit, Mme Laplante, c'est qu'il y a une partie du conseil
d'administration qui va être là pour des dispositions totalement
administratives, mais on ne peut pas avoir les gens qui sont élus dans
une corporation qui n'existe pas. Alors, de là le besoin de créer
cette corporation.
Finalement, je tiens à vous rappeler que c'est impossible, aussi,
que les étudiants aient une diploma-tion reconnue si on observe, pour
l'instant, le statu quo et que les corporations ne deviennent pas des personnes
morales. De là, évidemment, quand on parle d'urgence, oui, il y a
urgence, parce que plus on attend et plus ces élèves-là
sont pénalisés. Alors, voilà pourquoi l'urgence.
Merci.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la ministre. Alors,
MM., Mmes les représentants de l'association des orchestres
symphoniques, je vous remercie de votre participation à nos travaux. Et,
lorsque nous reprendrons les travaux, tantôt, nous entendrons la Guilde
des musiciens du Québec.
Je suspends les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 55)
(Reprise à 20 h 7)
Le Président (M. LeSage): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission reprend ses travaux.
Je vous rappelle le mandat de la commission de la culture qui est de
procéder à des consultations particulières et de tenir des
auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du
projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
Je demanderais aux représentants de la Guilde des musiciens du
Québec de bien vouloir s'avancer pour présenter leur
mémoire.
Est-ce que Mme Gisèle Frechette est présente?
Alors, en l'absence des représentants de la Guilde des musiciens
du Québec, nous procéderons avec le Syndicat des professeurs de
l'État du Québec.
M. Boisclair: En comprenant, M. le Président, qu'on pourra
entendre la Guilde après, s'ils sont présents.
Le Président (M. LeSage): Effectivement, après le
Syndicat des professeurs de l'État du Québec, si Mme Frechette,
qui représente la Guilde des musiciens du Québec, est
présente, nous procéderons par la suite avec Mme Frechette.
Alors, les représentants du Syndicat des professeurs de l'État du
Québec, si vous voulez bien vous avancer.
Alors, je comprends que M. Luc Perron est le porte-parole du Syndicat
des professeurs de l'État du Québec. M. Perron, je vous rappelle
que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et je vous
demande également de présenter les personnes qui vous
accompagnent.
(Consultation)
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Perron.
Syndicat des professeurs de l'État du
Québec (SPEQ)
M. Perron (Luc): Oui. Luc Perron. À ma droite, Yvon
Thiboutôt, professeur au Conservatoire d'art dramatique de
Montréal depuis quelques années, c'est-à-dire depuis 1967,
et, à ma gauche, Jean-Guy Proulx, organiste et professeur au
Conservatoire de musique de Rimouski depuis de nombreuses années.
Nous venons de remettre à Mme Frulla 422 signatures qui lui
demandent de remettre, si vous voulez, le travail à l'oeuvre,
c'est-à-dire de surseoir à ce projet de loi 135. Nous venons
aussi de lui remettre deux lettres qui appuient notre démarche: M.
Joseph Rouleau, professeur à l'UQAM, chanteur, et Mme Françoise
Bertrand, présidente de l'Académie de musique du Québec,
qui demandent aussi à la ministre, si elle le veut bien, si elle le
désire, bien sûr, au nom de la formation professionnelle
d'interprètes et de créateurs, de surseoir à ce projet de
loi. (20 h 10)
Nous remercions la ministre, Mme Frulla, nous remercions M. Boisclair,
porte-parole de l'Opposition, et les autres membres députés de
cette commission de la culture de nous avoir invités. Nous formulons le
souhait que l'acte démocratique, par la représentation que nous
assumons, se transpose dans le contexte des relations entre des
compétences culturelles et la technocratie à l'intérieur
de l'administration publique. Nous pensons que la politique est malheureusement
déphasée par le poids technocratique des administrateurs.
Nous vous demandons, Mme la ministre, dans un premier temps, de surseoir
à ce projet de loi et nous vous disons pourquoi. Et, par la suite, nous
sommes prêts, si vous voulez vous compromettre en toute liberté,
à identifier ensemble les moyens les plus appropriés pour assurer
la pérennité, que vous utilisez à bon escient, du
réseau des neuf conservatoires.
Tout d'abord, nous vous présenterons, entre autres, trois
prémisses fondamentales dont l'oubli permanent a toujours
entraîné une lecture strictement
comptable de la formation professionnelle obnubilée par trois
concepts: efficience, efficacité et rendement. À cette occasion,
nous ferons écho des conséquences du nouvel Hydro-Québec
de 1963.
Nous aborderons ensuite le thème de la technocratie sans la
culture, soit la valorisation d'une administration nullement
préoccupée par son objet, à savoir la formation
professionnelle d'interprètes et de créateurs. Nous poursuivrons
en relisant ensemble très succinctement l'empreinte des
compétences culturelles qui auraient dû sensibiliser l'appareil
administratif dans l'écriture de ce projet de loi 135.
Puis, notre mémoire portera sur une analyse comparative entre un
modèle législatif développé en vase clos par
l'administration et un autre développé par les intervenants en
prise directe avec la culture du milieu et sa clientèle.
Enfin, nous formulerons à cette commission notre demande,
à savoir que la politique tienne compte des impératifs de la
formation professionnelle formulés par les professeurs artistes, et
notre souhait de collaborer à la rédaction d'un autre projet de
loi, pour conclure sur un partage de responsabilités culturelles
et je précise et je vous lis très bien ce que j'ai devant moi
donnant accès à la renégociation de toutes les
conditions de travail.
Le Conservatoire: son efficience, son efficacité, son rendement,
abus de concepts en termes de lecture administrative d'une appréciation
culturelle de la formation professionnelle. Rappelons-nous trois
prémisses fondamentales. Une a été mentionnée ce
matin, nous ne reviendrons pas dessus: la nécessité de la masse
critique. Une deuxième prémisse fondamentale, c'est que la
formation, elle est personnalisée, au Conservatoire, et sa progression
se fait souvent à un rythme différent du cheminement
pédagogique traditionnel. La troisième prémisse, qu'on
oublie souvent, c'est qu'il existe au Québec un espace culturel propice
au développement de la formation professionnelle.
On vous cite dans le rapport qu'on constate, dans le rapport Arpin, que
60 % des Québécois ne vont jamais à une
représentation théâtrale en saison, à un concert ou
à un spectacle de danse classique ou moderne. Donc, il y a un espace
culturel certain.
Que serions-nous devenus aujourd'hui si la constitution, en 1963, du
nouvel Hydro-Québec n'avait pas été
réalisée? Hydro-Québec a ouvert aux
Québécois des emplois de cadres administratifs,
d'ingénieurs et de techniciens. Les neufs conservatoires peuvent
constituer cette force culturelle dans chacune des régions pour rendre
accessible dans chaque foyer la raison d'être des conservatoires. La
culture peut déterminer l'emplacement d'une entreprise. Avis aux sept
régions dans lesquelles se trouvent les conservatoires.
Nous vous avions déposé un mémoire, le 20 novembre
1991, qui répondait à la pertinence d'investir dans cette
formation professionnelle d'interprètes instrumentistes,
chanteurs, chefs d'orchestre et comédiens et de créateurs
compositeurs, metteurs en scène et scénographes
lequel mémoire précisait par 24 recommandations comment
améliorer ce réseau. À ce moment-là, le 20 novembre
1991, une affiche de 230 diplômés du Conservatoire de musique et
d'art dramatique, de grande renommée, vous fut remise. Ce
dépôt du 20 novembre 1991 fut suivi d'un silence
administratif.
Les activités artistiques nombreuses dans chacun des
conservatoires occupent un espace culturel considérable dans chacune des
régions. Pamphlets, brochures et autre documentation disponible tracent
l'imposante foison de jeunes talents prometteurs. La stricte approche comptable
ne peut pas décemment être l'unique questionnement
envisagé. Si tel est le cas, comme nous le pensons, cela confine
à l'écriture des différents articles de ce projet de
loi.
Nous affirmons que ce questionnement une approche comptable
réductrice néglige des éléments importants
pour décider de l'avenir de ces maisons d'enseignement. Ce projet de loi
135 traduit l'incapacité de l'administration d'apprécier les
grands talents québécois formés dans les
conservatoires.
Le Vérificateur a déjà analysé le travail
fait dans les conservatoires. Cela nous avait permis, à ce moment,
d'écrire que l'administration n'avait pas sensibilisé le
Vérificateur sur la spécificité de la formation
professionnelle musicale et théâtrale et sur les
caractéristiques du travail des professeurs artistes.
La technocratie, elle est sans culture. Le 29 septembre 1977, M. Uriel
Luft exprimait ses vues d'une réforme administrative affectant les
structures de l'enseignement dans ce réseau. Elles correspondaient
à ceci: l'amputation des troisième et quatrième cycles
dans les conservatoires autres que Montréal et Québec et la
transformation du quatrième cycle en une école de
perfectionnement avec des classes de maîtres. Les motivations
administratives d'alors prédominaient l'élan de ce
changement.
À ces propos, les étudiants, ce matin, ont très
bien répondu devant vous. La culture de terrain dans ce mémoire
imprime sa trace dans la vision qu'avait M. Wilfrid Pelletier, eminent musicien
et premier directeur du Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec en 1942. D'ailleurs, un document intitulé «Les
origines du Conservatoire de musique du Québec» dévoile
cette «institution prestigieuse et unique qui fait l'envie de plusieurs
pays», propos tenus par la Direction des communications de votre
ministère.
Pourquoi la bureaucratie administrative ne pense-t-elle pas comme ce
grand maître qui disait ceci: «J'ai passé 19 ans à
cette direction et toutes ont été de belles années
remplies des joies que l'on peut connaître en voyant s'éveiller de
vrais artistes»?
Loin de véhiculer une mémoire de l'histoire culturelle des
conservatoires, l'administratif, depuis 1978, à intervalles
réguliers, a analysé différentes manières de sortir
les conservatoires, institution nationale, écoles gratuites et
publiques, du ministère, par des
velléités de lui revêtir des habits
juridico-administratifs variés: en 1978, celui d'une régie; en
1980, celui d'une constituante de l'Université du Québec; en
1984, celui d'un cégep nous avions été
informés alors par Le Soleil, le 6 avril 1984 et, en 1989,
celui d'une société d'État nous avions
été informés aussi parce que nous avons lu Le Soleil,
le 22 janvier 1989.
Relever cette attitude administrative facilite l'inclinaison d'agir au
nom d'une intention noble de la pérennité du Conservatoire, par
exemple, sans tenir compte malheureusement de la culture du terrain, de la
réalité. Le développement d'une telle attitude
administrative leur permet même d'écrire ceci dans un document
interne, dans votre ministère de la Culture: «Bien identifier ce
à quoi on tient. En dehors de cela: ne pas craindre de gratifier le
personnel de toutes les façons possibles: pour le reste, s'aligner sur
les pratiques usuelles du monde de l'éducation.» Alors, Machiavel
n'aurait pas écrit mieux que cela.
À cela s'ajoute un projet de réforme
précipité, des orientations ministérielles écrites
déposées le matin même d'une réunion avec
l'organisation représentative des professeurs artistes, le 1er juin
1993, une obligation d'y répondre durant la période de vacances
des professeurs et le dépôt de ce projet de loi, le 11 novembre
1993, le dernier jour permis pour une possible adoption avant les fêtes.
Comme cadeau, on trouverait mieux!
L'insertion des valeurs culturelles dans l'administratif, nous pensons
que c'est possible, en autant que vous écoutiez vos 220 professeurs.
D'ailleurs, je vous rappelle qu'elles sont dûment classifiées par
des équivalences de scolarité. Alors, ça existe ce
sont tous des gens qui ont 18, 19 ou 20 ans de scolarité le
système d'équivalence existe. Ce matin, j'ai été
abasourdi de comprendre ou sidéré, si vous voulez, de constater
qu'il semble qu'il n'y a pas de possibilité à cet
effet-là, alors que cela est. Mille étudiants aussi. Si on les
écoute, ça nous permet d'insérer des valeurs culturelles
dans l'administratif.
La spécificité du terrain, ça a été
largement diffusé aujourd'hui. Il y a six critères particuliers,
selon nous, qui la caractérisent. Nous n'y reviendrons pas. J'attire
votre attention... Lorsqu'on accepte que la valeur culturelle lie, si vous
voulez, l'administratif, ou détermine, ou influence l'administration, je
vous rappelle qu'à Rimouski on n'a pas attendu qu'il y ait une salle de
concert. Malgré qu'il n'y en ait pas, de salle de concert, les amateurs
de musique de l'Est de la province viennent de former l'Orchestre symphonique
de l'Estuaire du Saint-Laurent, et nous les en félicitons. N'est-ce pas
là, madame, la manifestation, d'abord, d'une approche culturelle? Il
faut féliciter aussi l'orchestre réseau Bell Canada, qui investit
500 000 $ par année depuis 1986. Il n'a pas fait une lecture
économique, si vous voulez, de la culture, et lui-même, comme
organisation avec but lucratif, avec profit, alors il investit dans la culture.
(20 h 20)
Alors, les membres de la commission, cette ré- forme
administrative, elle est sans culture. Je vous rappelle l'article 3 de la loi
actuelle qui a été reproduit comme tel dans le rapport annuel
1992-1993 du ministère de la Culture. On dit que la loi présente,
la loi qui existe, la loi qu'on dit qui est désuète, elle confie
le mandat d'assurer la coordination de l'enseignement de la musique et de l'art
dramatique, au Québec, au Conservatoire, sans toutefois porter atteinte
au développement et à l'autonomie des institutions existantes, et
d'aider à la formation professionnelle de compositeurs, de chanteurs,
d'instrumentistes et d'acteurs. Alors, c'est tout à fait légal
qu'il y ait de la formation professionnelle de dispensée, bien
sûr, dans ce réseau des neuf conservatoires.
Cette loi instituait également une commission de l'enseignement
de la musique et de l'art dramatique. Cette loi, toujours en vigueur,
instituait un comité d'études musicales, un comité
d'études dramatiques, des programmes d'études et d'autres
dispositions. Pourquoi le pouvoir administratif de cette loi n'a-t-il jamais
mis sur pied cette commission de l'enseignement de la musique et de l'art
dramatique depuis 1942? Pourquoi l'administration n'a-t-elle jamais mis sur
pied ce comité d'études dramatiques et n'a-t-elle jamais fait
adopter des programmes d'études au sens de cette loi? Il a existé
un comité d'études musicales à intervalles et, depuis
1984, de façon régulière, répondant ainsi aux
obligations de cette loi. Malgré l'absence totale d'un comité
d'études dramatiques, des programmes d'enseignement hautement
adaptés existent, formulés conjointement par les profs et les
directions des deux établissements respectifs, et ont permis et
permettent toujours aux jeunes comédiens et comédiennes, devenus
professionnels, de se tailler une place enviable dans le monde du
théâtre, du cinéma et de la télévision.
De plus, j'attire, à cette commission, votre attention sur
l'article 17 de cette loi qui existe toujours, qui permet aux conservatoires
dans les différentes régions du Québec de se multiplier,
comme cela aurait dû être le cas à Sherbrooke, ou d'affilier
au Conservatoire toute école supérieure de musique ou d'art
dramatique. Pourquoi l'administration s'est-elle si manifestement
désintéressée d'appliquer cette loi?
Aussi, j'attire votre attention qu'au Conservatoire d'art dramatique de
Montréal ils ont développé, depuis 10 ans, un secteur de
formation continue qui s'adresse aux professionnels, contrairement à ce
que nous avons entendu aujourd'hui ici.
Nous pouvons affirmer que, si les conservatoires existent toujours, ce
n'est pas par l'intégration de l'administration aux impératifs de
l'enseignement. Les professeurs artistes par eux-mêmes ont réussi
à maintenir le cap. Des générations continuent, à
l'étonnement de l'administration centrale, à fréquenter
cette institution nationale.
Antérieurement à ce dépôt de projet de loi,
l'administration avait été d'une certaine sensibilité
auprès de la représentation des professeurs artistes, ce qui
avait permis l'endossement d'une réforme administrative
soucieuse de la culture du terrain, détachant l'actuelle
direction générale du Conservatoire de la Loi sur
l'administration financière mais conservant l'appartenance des
professeurs artistes à la Loi sur la fonction publique.
Or, quel est le barrage administratif qui empêchait
l'avènement de ce genre de réforme? Il nous est permis de croire
que la logique de l'administration publique ne pouvait pas laisser un pouvoir
externe à l'administration publique, notre organisation syndicale en
l'occurrence, avec sa convention collective, devenir un partenaire
compromettant pour le pouvoir autoreproductif de l'administration par
elle-même.
Le projet de loi 135 revêt les caractéristiques de la
prépondérance de cette approche administrative
déterminée par une gestion comptable. Nous vous présentons
un tableau synoptique aux fins de faire ressortir la réforme
administrative voulue par la technocratie qui est comparée avec le
projet de réforme souhaitée par les professeurs. Alors, vous
avez, d'une part, une société administrative qui gère des
services selon le projet de loi et vous avez, d'autre part, une corporation au
service de la formation professionnelle d'interprètes et de
créateurs, selon le projet des professeurs du 13 août 1993.
Dans la société administrative, quatre
établissements seulement sont nommés; dans la corporation, nous
nommions, notamment, neuf établissements. Dans la société
administrative, on parle d'une gestion avec des coûts administratifs
très onéreux, réduisant d'autant des montants pour la
formation professionnelle au sein d'un budget. Puis vous disiez, il n'y a pas
longtemps, que vous vouliez grossir le C.A., donc grossir les dépenses,
grossir les dépenses administratives, ce qui fait en sorte que,
étant considéré une même enveloppe, ça
réduit d'autant, si vous voulez, l'argent pour la formation
professionnelle.
On parle dans cette loi d'une augmentation du personnel, à
l'article 34: un responsable pédagogique par établissement. C'est
évident que, dans notre projet, nous ne voulions pas cela, valorisant
les responsabilités pédagogiques entre les mains des
professeurs.
Dans ce projet de loi, il y a des incantations magiques par
l'écriture d'une loi sur les vertus intrinsèques d'un maillage
entre le Conservatoire et l'ensemble des autres intervenants dans le domaine de
la musique et de l'art dramatique. Or, nous savons depuis quelques
années que les liens consolidés entre les conservatoires et
certaines écoles ont tendance à s'effriter, compte tenu, si vous
voulez, du manque d'encouragement de l'administration à cet effet. Nous,
nous parlons d'encouragement à créer des conditions
réelles de maillage avec les autres intervenants dans le monde
général de l'éducation.
Fascination pour l'administration de contrôler le capital humain
et de le remplacer au gré de sa discrétion. Donc, c'est un retour
en arrière. L'administration voudrait tout simplement avoir droit de vie
et de mort, si vous voulez, sur l'ensemble du personnel. Nous, par ailleurs,
nous valorisons davantage la liberté de l'individu par la continuation
d'une reconnaissance d'un droit à la stabilité d'emploi et de
critères d'évaluation objectifs.
Dans Le Soleil, le 3 décembre, on a pu constater que vous
partagiez une discrimination, que nous appelons éhontée, pour
inviter les professeurs dans la nouvelle corporation. C'est une lecture de
l'article 83. Quant à nous, nous sommes pour une absence de
discrimination. La Loi sur la fonction publique, qui continue à
s'appliquer, considère le professeur du Conservatoire comme un artiste
avant d'être un enseignant.
Dans votre projet de loi, l'article 89, ça revient à dire
que, le 1er juillet 1995, à travers les nouveaux courants
néo-libéraux, l'arbitraire paternaliste à outrance va
revenir en force, en fonction de critères qui sont arbitraires. Nous, ce
que nous valorisons, c'est des conditions d'embauché et une valorisation
de la responsabilité professionnelle du professeur artiste.
Aussi, il y a l'absence de pondération entre les trois volets de
la mission, à l'article 18, tel que ça a été
mentionné. Nous, nous parlons d'une prépondérance de la
formation professionnelle d'interprètes, tels que les instrumentistes,
les chanteurs, les chefs d'orchestre et les comédiens, et de
créateurs, tels que les compositeurs, les metteurs en scène et
les scénographes, au regard des deux autres volets de la mission. Soit
dit en passant, la mission de mai 1989 diffère de l'écriture de
celle qui apparaît dans l'article 10 de cette loi.
La société administrative s'en remet au bon vouloir du
prince, pour ne pas le féminiser, tandis que, de notre
côté, nous valorisons, si vous voulez, le partenariat. La
société administrative crée un climat d'incertitude
perpétuel et un exode possible d'étudiants de niveau
avancé vers d'autres institutions, pas nécessairement des
conservatoires. Nous, nous favorisons une stabilité proactive.
Notre analyse nous permet d'affirmer que le projet de loi, loin de
répondre à la formation professionnelle et à la culture du
milieu, constitue uniquement une réponse technocratique insensible aux
besoins du développement des personnalités des neuf
conservatoires. Notre interprétation nous amène à
entrevoir, à travers ce projet, s'il devient loi, un effritement
progressif de cette institution nationale. Advenant que le pouvoir politique
décide de passer outre aux nouveautés culturelles
caractérisant le monde du travail à venir, nous tenons à
l'aviser que, suite à un scrutin secret auprès des professeurs
permanents, plus de 90 d'entre eux demeureront dans la fonction publique.
Ça revient à dire que 5 000 000 $ de salaires seront
sous-utilisés advenant la poursuite des étapes de ce projet de
loi.
La réforme que nous proposons, rédigée en
s'ins-pirant de la Loi sur la Bibliothèque nationale et de la Loi sur
l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, tout en tenant
compte des racines du milieu et du vécu quotidien sur le terrain, nous
permet d'affirmer qu'elle offre les meilleures garanties d'assurer, au
Québec, la pérennité d'un système indispensable de
formation professionnelle et de répondre aux besoins pressants de la
relève dans le domaine des arts d'interprétation et de
créativité.
L'État a le devoir de soutenir et de développer la
dimension culturelle de la société. N'est-il pas pensable que
cette société administrative éloigne volontairement cette
gestion du contrôle des parlementaires pour introduire un filtre
partisan, donc huit sur 15 dans le conseil d'administration qui assument des
mandats, et pas nécessairement préoccupé par l'objet de la
loi, c'est-à-dire la formation professionnelle en tant que telle? Il
nous apparaît important que des objectifs clairs doivent servir de guide
aux gestionnaires publics et leur dicter des lignes de conduite. Nous pouvons
conséquemment dire que ce transfert du Conservatoire à un autre
palier de responsabilité consiste à se débarrasser tout
simplement des coûts qui y sont liés.
Les responsabilités culturelles de l'administratif. Le retour de
la gestion ou de l'administratif dans la culture au niveau local, dans les
conservatoires, ne favoriserait-il pas la pérennité
véritable de ces institutions? Alors, plus que jamais il faut que
l'imagination créatrice habite les administrateurs de la culture.
Pouvons-nous priver le Québec d'un développement des arts
d'interprétation? Pouvons-nous laisser les jeunes talents sans
formation, ou les inviter à contribuer au développement de
l'identité culturelle du Québec?
Nous pensons que nous devons orienter nos énergies pour le
maintien de ce réseau de formation professionnelle, à la
manière que les professeurs se sont impliqués ces
dernières années pour définir des programmes
d'enseignement dans le domaine de la formation professionnelle musicale,
entreprise avortée sans la participation des professeurs durant
plusieurs années et réussie avec la participation de ceux-ci.
Pourquoi ne pas tenir compte de ce que nous appelions, au tout début,
des prémisses fondamentales? Les professeurs artistes veulent le
maintien du réseau des conservatoires, en tenant compte d'une
distinction entre conservatoires nationaux, Québec et Montréal,
et conservatoires nationaux de régions, pour les autres, et de deux
conservatoires d'art dramatique spécifiques. La mise en commun de
données, d'analyses devrait nous permettre d'envisager, par la
création d'un autre projet de loi, une adhésion culturelle et
constructive à une réforme, laquelle tiendrait compte des besoins
des jeunes talents.
En guise de conclusion, tout au cours de ce mémoire, nous
espérons vous avoir convaincus de surseoir à ce projet de loi
135. Laissez-vous guider par les jeunes qui, depuis 50 ans, ont
fréquenté cette institution nationale unique, institution
d'État publique et gratuite, et qui, grâce à leur talent et
à une formation professionnelle personnalisée, ont atteint les
joies de la réussite.
Le palmarès n'est pas dû à une approche comptable
sous le poids d'une vigilance technocratique, mais le palmarès
dépend essentiellement d'une relation professionnelle humaniste,
construite sur les fondements d'une culture à maintenir et à
développer. Notre seule ambition consiste à vous aider à
prendre de bonnes décisions et à vous permettre d'assumer en
toute dignité leurs conséquences, orientées,
espérons-le, pour le mieux-être culturel de la
société québécoise.
Alors, dans cette perspective, soyez assurés de notre
entière collaboration.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Perron. Je cède
maintenant la parole à Mme la ministre. (20 h 30)
Mme Frulla: Je vous remercie, M. Perron. D'abord, vous ramenez
toujours et très souvent le mot «technocrate», le mot
«comptable». Je ne suis pas une technocrate, M. Perron, et ce
projet de loi qui a été élaboré n'est pas un projet
de loi qui a été élaboré rapidement.
Il y a eu énormément de consultations ces dernières
années. Il y a eu le projet, pas le projet, mais le renouveau de la
mission déposé par Mme Bacon en 1989 qui a fait, lui, finalement,
appel à plusieurs consultations du milieu et d'autres intervenants. Il y
a eu la commission parlementaire sur la politique culturelle où
vous y étiez, et je me souviens le 20 novembre 1991, vous nous
avez demandé de démentir une nouvelle parue dans la presse
écrite et qui laissait croire que les conservatoires étaient sur
le point de disparaître. Et vous avez alors déclaré,
à cet égard, vous disiez: Les effets sont tragiques. Je pense que
cette incertitude ne mérite pas d'être maintenue. Vous avez alors
répondu sans ambiguïté que les conservatoires étaient
des maisons d'excellence, qu'elles devaient vivre et qu'elles étaient
là pour exister.
Deux ans plus tard, après d'autres consultations, autant avec le
ministère de l'Enseignement supérieur que des consultations aussi
dans le milieu en général, on dépose à
l'Assemblée nationale un projet de loi qui vient assurer, selon nous, la
pérennité de l'institution donc, on vous rejoint
qui enrichit sa mission et qui permet une implication directe des professeurs
et des élèves. Vous parliez du conseil d'administration. Le
ministère de la Culture nomme cinq membres, l'Enseignement
supérieur en nomme trois et les sept autres membres sont élus
parmi le corps professoral et les élèves. En plus, dans les cinq
membres que je nomme, ces membres sont suggérés par des
organismes. Alors, en termes de vouloir l'implication, je pense que c'est
là.
Mais, moi, j'ai des questions à vous demander, parce que vous
avez parlé d'un projet rédigé à la hâte et
sans consultation du milieu. Vous savez pertinemment que c'est faux. Il y a eu
des consultations à partir du mois de mai, juin. Il y a eu des
consultations. À peu près 400 personnes ont été
consultées à l'intérieur même des conservatoires.
Vous ne pouvez pas dire que vous n'avez pas été consultés,
professeurs et élèves.
Quand, le projet de loi, nous l'avons déposé, parce qu'on
ne peut pas dévoiler un projet de loi avant qu'il soit
déposé à l'Assemblée nationale, d'autres groupes
ont été rencontrés. Donc, il y a eu consultation. L'avenir
du Conservatoire a été discuté à plusieurs
reprises, d'une part. Je disais que le personnel et les élèves de
chaque établissement ont été consultés. Nous avons
rencontré aussi des étudiants, après le dépôt
du projet de loi, séparément. Nous vous avons rencontré
aussi, M. Perron, le 11 novembre, lors du dépôt du
projet de loi. À un moment donné, la consultation a ses
fins, et il faut agir.
Alors, dans le document que vous m'aviez transmis, le 19 août
dernier, en réaction au document d'orientations ministérielles,
vous avez dit que vous êtes favorable à la transformation du
Conservatoire en corporation indépendante, avec un conseil
d'administration, encore une fois, formé de gens du milieu. Quels sont,
selon vous, les avantages ou les désavantages parce que là
tout est noir, aujourd'hui alors les désavantages que vous voyez
à la création d'une corporation, par rapport, M. Perron, à
la situation actuelle, quand vous savez très bien que, les
conservatoires étant une direction du ministère, ces
conservatoires-là ne peuvent que s'atrophier?
Le Président (M. LeSage): M. Perron.
M. Perron (Luc): Oui. Il y a beaucoup de questions.
Dans un premier temps, Mme Frulla, j'aimerais dissiper un malentendu,
là. C'est qu'il n'y a pas eu de consultation au sens, si vous voulez,
généreux du terme. Ce que je veux vous mentionner, dans le
mémoire qu'on vous dépose, c'est qu'on vous définit c'est
quoi, la technocratie. Vous l'avez à la page 9. On vous dit que c'est un
système, c'est une gestion d'un système d'information par un
contrôle monopoliste de la fourniture et du traitement des informations
qui se manifeste clairement. Donc, je vais vous traduire ça en termes
plus simples.
Le document des orientations ministérielles nous a
été déposé le 1er juin et la rencontre avait lieu
le 1er juin. Par la suite de la tournée qu'ont faite vos technocrates,
si vous voulez, dans les conservatoires, il était entendu qu'ils
donneraient, par exemple, les enregistrements qu'ils faisaient. D'ailleurs,
j'en parle dans le mémoire. Et, compte tenu que l'information qu'ils
recevaient, soit au Conservatoire d'art dramatique par les professeurs, soit au
Conservatoire de musique de Québec par les professeurs, ne
coïncidait pas tout à fait avec les attentes, si vous voulez, de ce
que j'appelle une technocratie, alors, ne coïncidant pas avec les
attentes, ce qu'on a fait, c'est qu'on n'a pas voulu nous faire prendre
connaissance, si vous voulez, de ces informations-là. Ce qui fait en
sorte que, quand je vous dis «technocratie», je parle d'une
médiation qui existe entre la culture du terrain où nous sommes
par profession, une médiation entre nous autres, donc, et vous, comme
tel, et ils ont intérêt, compte tenu qu'on parle de vivre selon
ses moyens, compte tenu que ce qui existe actuellement, c'est des coupures de
services, c'est des baisses, si vous voulez, d'investissements, alors ils ont
intérêt, pour vous conforter, à vous donner une information
qui vous permette de penser que les gens veulent faire le grand bond et le
grand saut et se retrouver dans une situation qui est colorée par une
gestion, depuis ces 10 dernières années, qui va en effritant le
réseau.
Il y a eu an climat d'incertitude qui est créé depuis de
nombreuses années. Il y a eu des encouragements d'exode, si vous voulez,
d'étudiants de niveau avancé par exemple, je pense
à Trois-Rivières pour qu'ils s'en aillent vers
Montréal ou qu'ils s'en aillent vers Québec. Ils ne vont pas
nécessairement aux endroits où on veut. Alors, tout ça, si
vous voulez, ça traduit un petit peu l'esprit de cette loi-là. Et
la loi actuelle, on ne peut pas se mettre la tête dans le sable, on sait
très bien qu'on est dans une ère de coupures.
Donc, ce qu'on se dit actuellement, ce qu'on perçoit, c'est un
transfert, si vous voulez, de votre pouvoir, à vous, de conserver ces
conservatoires-là, via des mandataires, avec un budget qui est moindre,
puis en misant, entre autres, si vous voulez sur la
générosité d'un mécène ou d'un
mécénat, et tout ça, qui n'existe absolument pas au
Québec.
Alors, c'était juste pour répondre que la consultation,
c'est une consultation que j'appellerais technocratique. En ce sens-là,
elle est très habile. Elle ne va pas chercher l'intelligence des
partenaires. Elle ne va que donner de l'information, puis je dirais presque par
condescendance. Et d'ailleurs, dans le mémoire, je vous le mentionne:
vos technocrates, les premiers mots qu'ils nous ont dit lorsqu'on les a
rencontrés je pense à Mme Courchesne, je pense à M.
Bruneau, pour les nommer ce qu'ils ont mentionné, c'est:
Écoutez, on fait des rencontres, on est prêts à vous donner
une certaine information, mais il ne faut absolument pas penser que c'est une
forme indirecte ou subtile d'une sorte de cogestion.
On ne veut pas, si vous voulez, prendre des décisions à
votre place, mais on aimerait que vous nous entendiez, que vous nous
écoutiez, que vous descendiez au niveau du terrain. Je pense qu'il est
important, quand on parle de technocratie, qu'on assiste à des concerts
puis qu'on entende, qu'on se laisse imprégner par la beauté des
sons, mais il faut aller au-delà de ça. Il faut descendre dans
les studios, il faut descendre au niveau des difficultés, il faut
descendre vraiment au niveau du terrain, ce que j'appelle la culture du
terrain, et lire le développement de la formation à travers cette
culture-là.
Et c'est ça que je traduis, si vous voulez, par rapport à
une approche comptable où on se dit tout simplement: Un orchestre
symphonique, compte tenu qu'on n'a pas l'argent pour avoir l'ensemble des
instruments qui caractérisent un orchestre symphonique, on peut faire en
sorte que les bois n'y soient plus et puis ça va jouer pareil, etc.,
puis ça va certainement être agréable. Et c'est ça
qu'on dit quand on lit la formation professionnelle au niveau des
interprètes et créateurs à travers une approche comptable,
et c'est ça qu'on sent actuellement. Et on sent que votre motivation, si
vous voulez, de précipitation, ce n'est pas une motivation pour rendre
un réseau plus performant, mais c'est pour leur donner des moyens et
puis leur permettre de faire plus avec moins, alors que déjà ils
sont avec un budget qui a toujours été en diminuant ces
dernières années par rapport à la formation.
Je vais vous donner des exemples bien pratiques
que vous ne connaissez peut-être pas. Il y a 220 professeurs dont
je vous parle dans le mémoire. Il y a 98 permanents seulement. Pourquoi
on encourage le fractionnement, qu'on laisse des professeurs occasionnels
là depuis 15 ans? C'est tout simplement parce qu'ils coûtent moins
cher. Or, la lecture qu'on veut faire, on veut faire une lecture, à
travers l'ensemble de ces gens-là, pour faire en sorte que le professeur
artiste, si vous voulez, devienne, à cause du prestige d'enseigner au
Conservatoire, quelqu'un qui ne mérite pas des émoluments, comme
ça se fait pour les enseignants au niveau de la maternelle, du primaire
ou du secondaire au Québec. Et c'est ça qui est malheureux.
Donc, ces élans-là, si vous voulez, viennent donner un
esprit à la loi, et l'écriture de la loi vous parlez de la
mission, la mission de Mme Bacon ce n'est même pas
l'écriture de la mission telle quelle, il y a des mots qui ont
été changés, et, en ce sens-là vraiment, c'est
qu'on passe de façon subtile à une diminution de l'investissement
que vous voulez ou qu'on peut accorder et qu'on doit accorder à ce
réseau. (20 h 40)
Mme Frulla: M. Perron, quand vous dites que, bon, les moyens vont
être diminués, etc., je pense que vous assumez quand même
beaucoup. Et c'est peut-être ça qui m'a un peu horripilée,
je dois vous dire, surtout ces dernières semaines, cette dernière
semaine surtout. C'est qu'en brandissant, justement, le spectre je pense que,
d'une certaine façon, on cache la vraie volonté de vouloir faire
des conservatoires, justement, des organismes ou un organisme, enfin un
réseau autonome, dispensant évidemment une meilleure
qualité possible d'enseignement et ayant une structure qui a une
souplesse par rapport non seulement à ce qu'il doit faire, mais aussi
une souplesse pour agir en pôle culturel dans les régions.
Vous parlez, en référence aux structures prévues
dans le projet de loi 135, de lourdeur administrative. Ça, vous l'avez
véhiculé beaucoup. Par contre, en août dernier, vous
proposiez la structure suivante et on le retrouve dans le
mémoire: un C.A. de 20 membres, un comité exécutif, un
secrétariat général, deux commissions d'études, un
conseil régional dans chaque établissement, chapeauté par
un conseil national régional, et vous proposiez même
d'élargir la notion du réseau des conservatoires de musique par
la mise sur pied de conservatoires municipaux. Alors, je veux bien, là,
mais j'essaie de comprendre, là. Lourdeur pour lourdeur, il me semble
que ça s'équivaut pas mal, hein.
Deuxièmement, vous dites, aussi, au niveau des professeurs, que
les professeurs, bon, vont être discriminés, puis tout ça.
Tous les professeurs, sans exception, sont invités à joindre la
corporation, tous, sans perdre aucun droit acquis. Alors, là encore,
ça, j'aimerais ça vraiment dissiper ça, là, parce
que c'est l'intention et c'est écrit dans le projet de loi.
Et vous dites aussi que, dans le projet de loi, le projet de loi ne
décrit pas la mission renouvelée. Le projet de loi décrit,
dans des termes légaux, la mission renouvelée de 1989. Alors,
là-dessus, on n'a absolument rien perdu. Puis, quand vous dites qu'on
n'a pas consulté, etc., il y a 400 personnes qui ont eu quand même
l'occasion de s'exprimer. Et ce que vous nous dites, c'est qu'on les a
brimées. En quelque part, là, j'essaie de faire un peu la
jonction. Mais, si on revient, finalement, à cette lourdeur
administrative, je trouve que ce que vous proposez est plus lourd, même,
que ce qu'on propose nous-mêmes.
Le Président (M. LeSage): M. Perron.
M. Perron (Luc): C'est assez simple de répondre, Mme
Frulla. C'est que, à force, si vous voulez, de se faire dire par
l'administration que c'est impossible d'acheter un ordinateur, par exemple, je
pense à un Macintosh, au Conservatoire d'art dramatique de
Québec, ça semblait tellement insurmontable dans le contexte de
l'assujettissement de la direction générale par rapport à
ses liens dans la fonction publique qu'on s'est dit: On va les aider, parce
qu'ils ne s'épanouissent pas comme administrateurs là-dedans. On
va faire en sorte qu'ils se dégagent de la Loi sur l'administration
financière, ce qui vous donne la possibilité d'avoir votre 14 000
000 $ vous avez dit 16 000 000 $, aujourd'hui, c'est intéressant,
une augmentation de 2 000 000 $ d'avoir un montant...
Mme Frulla: Avec les loyers.
M. Perron (Luc): Ah bon! Excusez. Moi...
Mme Frulla: Ça fait partie de l'ensemble, ça.
M. Perron (Luc): Ça doit être les 2 000 000 $ pour
l'insonorisation qu'on avait oubliée à Hull.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Frulla: II faut vous loger.
M. Perron (Luc): Oui, mais c'est parce qu'on
déménage. Qu'est-ce que vous voulez! On ne consulte pas les gens,
on ne consulte pas les étudiants, et ça fait en sorte que le
déménagement est fini et la seule chose qu'on a oubliée,
c'est l'insonorisation. Ça, c'est en 1987, là. Vous allez me dire
que c'est quelqu'un avant vous, là.
Mme Frulla: C'est le conseil d'administration qui va y voir.
Continuez.
M. Perron (Luc): Non, mais ça, c'est malheureux.
Alors, on a voulu, tout simplement, si vous voulez, entrer un petit peu
dans les schemes administratifs, en se disant qu'on va les intégrer par
rapport à la formation, par rapport aux impératifs de la
formation professionnelle et, en ce sens-là, on va leur donner une
forme corporative, mais une forme corporative, aussi, avec un
sérieux, c'est-à-dire qu'on va demeurer du personnel assujetti
à la Loi sur la fonction publique pour être certain qu'il y a un
incompressible, si vous voulez, question d'appréciation au niveau des
conditions globales pour les enseignants. Je pense que ça diminue les
risques par rapport à une tendance. Parce que j'écoutais le
discours de Mme Robillard, lorsqu'elle est passée, là,
rapidement, comme ministre des Affaires culturelles, et, elle, elle se disait
estomaquée, si vous voulez, que les professeurs, dans les
conservatoires, soient syndiqués; elle se disait estomaquée que
des artistes, par définition, soient syndiqués, puis elle se
disait estomaquée, en plus, que des artistes aient une permanence. Elle
a dit: C'est contraire à tout.
Nous, on estime que les professeurs artistes ont le droit à une
stabilité d'emploi. Us donnent carrière, puis on vous l'a
très bien dit, les étudiants, ce matin. C'est qu'à un
moment donné on parle de continuité pédagogique, c'est
avec le même professeur, donc on y croit à ça, donc il y a
un minimum. On était prêts à aller à l'aventure,
mais une aventure qu'on appelle moins risquée. Alors, les lourdeurs que
nous vous avons amenées sont minimes, si vous voulez, par rapport aux
objectifs qui sont recherchés.
Quand vous parlez des conservatoires municipaux, c'est que
l'administration, loin de faire un travail vraiment offensif, un travail
proactif, pour vraiment intensifier ses relations avec le monde
général de l'enseignement, elle a toujours regardé comment
sortir du monde du Conservatoire. Et, nous, quand on parle de conservatoires
régionaux, c'est tout simplement, si vous voulez, vraiment pour faire en
sorte qu'à la périphérie des conservatoires on se donne
des moyens d'aller chercher des réseaux qui alimentent les
conservatoires.
De façon précise, pour donner un exemple, la direction
générale, depuis plusieurs années, se dit qu'un
conservatoire, c'est une école supérieure. Alors ça, c'est
ce que j'appelle une compréhension technique. Étant une
école supérieure, la formation initiale devient exclue. La
formation initiale devient exclue, c'est les autres qui doivent la faire.
Alors, ça, c'est technique aussi, dans le sens que les autres qui
doivent la faire ne la font pas.
Alors, nous, on a dit: On n'est pas contre des. formules de
remplacement, mais, à défaut que les autres le fassent, il faut
que le Conservatoire assume la formation initiale. Et, en ce sens-là, on
a déposé des rapports. On parle, si vous voulez, de Cholette, on
parle de Blume, on parle de Trowsdale, qui font la preuve a + b que la
formation initiale est très importante dans l'ensemble du continuum pour
se rendre en formation terminale. Et ça, c'est compris de tout le monde.
Mais, en coupant, si vous voulez, ce qu'on se dit: On se coupe les pieds.
Alors, il n'y a personne. On n'a pas créé des liens. On n'a pas
créé, vraiment, de réseaux pour améliorer
ça. Pire que cela, où il existait certains liens avec des
écoles mi-temps, par exemple, pour une question de contrainte des
corservatoires, la direction générale a fait des pieds et des
mains pour se couper l'herbe sous le pied par rapport à ces
liens-là, en se disant que la loi, par magie, elle va régler, si
vous voulez, ce partenariat avec l'environnement comme tel.
Donc, la lourdeur que nous faisons, c'est une lourdeur qui
n'était pas risquée. C'est une lourdeur qui vient tout simplement
aider l'administration, mais parce qu'on croit qu'on peut l'intégrer aux
préoccupations de sa raison d'être, c'est-à-dire au service
de la formation professionnelle et non l'inverse. Actuellement, ce qu'on
constate, c'est que l'administration a tendance à enfler et puis, le
budget n'augmentant pas, ça vient faire en sorte que ça vient
gruger dans l'enseignement.
Dans l'article 34, vous dites: Bon, on va mettre des responsables
pédagogiques dans chaque établissement. Ce n'est pas moi qui
l'écrit, c'est vous autres. Alors, c'est-à-dire qu'on grossit au
lieu de responsabiliser davantage les profs par rapport à leur
pédagogie, on vient grossir cela. Vous créez des commissions des
études. La commission des études, ça vient faire en sorte
de s'approprier de la pédagogie, alors qu'il existe des commissions
pédagogiques. Puis, nous, ce qu'on veut quand vous parlez de
secrétariat général, c'est vraiment donner
l'opportunité à ce que chacun des conservatoires assume
directement ses responsabilités.
Vous, vous les dégagez. Vous faites un conseil d'orientation?
Vous leur donnez des responsabilités pédagogiques. Nous, le
conseil régional qu'on faisait, c'est un conseil régional qui
était proactif par rapport à la formation initiale, de susciter
de la formation initiale pour essayer de développer des organismes
musicaux, c'était là-dedans qu'ils allaient être proactifs
dans leur région.
Vous, ce que vous faites avec l'article 44, vous dites: Le conseil
d'orientation, en fonction du conseil d'administration, il va être en
mesure d'apprécier si le marché est capable d'intégrer, si
vous voulez, un hautboïste dans sa région. S'il n'est pas capable
de l'intégrer, il n'y a pas de hautbois. Alors, c'est pour ça
que, dans bien des conservatoires, il y a beaucoup d'instruments qui sont
absents, malgré qu'il y aurait des jeunes qui voudraient suivre, qui
voudraient s'astreindre à une formation de qualité dans ce
domaine-là. Ça, c'est la réalité.
Mme Frulla: Mais juste...
M. Perron (Luc): Et puis on se dit qu'avec une loi pareille on va
augmenter ces tendances-là, et ça va faire en sorte, si vous
voulez, la médiation qui va se faire par des gens qui sont
nommés, par des gens qui sont étrangers un peu, par des gens qui
sont lointains, bien ça va faire en sorte qu'on va permettre un
effritement progressif de cela.
On vous parle, nous autres aussi, dans notre rapport, du milieu
d'affaires, mais le milieu d'affaires au niveau du conseil régional, qui
correspond un peu à votre conseil d'orientation, seulement sur les
volets 2° et 3° de l'article 18 et non sur le volet 1° sur la
formation professionnelle. On laisse ça aux principaux responsables, les
professeurs.
Alors, il y a des différences qui sont marquées. Ce qu'on
se dit, c'est mettez ce projet de loi de côté, regardons ensemble,
venez au niveau du terrain. Pas juste pour des grandes occasions, tout
ça. Je pensais au Tour de l'île, mais c'est parce que vous avez
oublié le 50e anniversaire, ça nous avait fait un petit peu de la
peine.
Mais venez à de grands événements comme
ceux-là, comme vous avez fait à la remise des prix. Je pense que
c'est fantastique. Venez en bas. Venez voir les contraintes qui se passent,
puis essayons d'harmoniser, si vous voulez, de joindre... Laissez un petit peu
de côté votre administration, entre vous et nous, puis essayez de
joindre cela. Puis je suis certain qu'on peut se donner des moyens
véritables d'assurer un développement du réseau.
Actuellement, ce n'est pas ça qui arrive. Vous faites
l'appariement avec le système général de
l'éducation. C'est certain que, si on le fait, le géant va manger
le petit. Écoutez, ça, c'est des vérités
historiques ça.
Mme Frulla: Bon. Là, laissez-moi parler là-dessus,
là. Il faut que je parle. D'abord...
M. Perron (Luc): Oui, mais je...
Mme Frulla: Non, mais laissez-moi juste...
M. Perron (Luc): Mais j'aimerais, juste pour finir
là-dessus... Vous-même, à la commission des crédits
en avril cette année, vous admettiez qu'il n'y avait rien qui
s'était fait avec le ministère de l'Enseignement supérieur
et de la Science, malgré qu'il y a des comités ad hoc qui ont
été faits au niveau des sous-ministres, suite à la
promotion, je dirais, de la mission de mai 1989.
Alors, ça, c'est une réalité, qu'entre 1989 et 1993
il ne s'est rien fait au niveau des sous-ministres. Deuxièmement, c'est
vous-même qui le dites, parce que je vous lis à l'occasion, tout
ça, j'y prends plaisir. Et c'est ça qu'on peut lire, c'est ce que
vous avez dit comme tel. Et puis, là, ça n'existe pas non
plus.
Mme Frulla: Mais il y une chose, c'est que, quand je vous ai dit
et quand j'ai dit, et je le dis encore, que... Le lien entre les deux,
finalement, pour voir l'appariement, n'a pas rien donné. Au contraire,
ce que ça a donné, c'est la conclusion des deux
ministères et du gouvernement que les conservatoires restaient la
responsabilité du ministère de la Culture, et de là
l'article 90.
Alors, de dire que le gros va avaler le petit, vous savez comme moi que,
dans une loi, quand on dit que la responsabilité et l'application de la
loi s'appliquent au ministère de la Culture, c'est par loi. Et, pour
changer ce fait, il faut changer la loi. Donc, je pense que, encore là,
c'est de brandir une petite menace.
Deuxièmement, vous nous avez dit... Bon, vous nous dites: Bon,
soyez présente. Et je pense que, s'il y en a une qui est
présente, je suis assez présente un peu partout. Mais je veux
revenir au conseil d'administration. Vous reparlez encore d'un conseil
d'administration. Aujourd'hui, on nous a dit: Ne mettez pas des
représentants de l'enseignement sur le conseil d'administration. Par
contre, vous-mêmes vous disiez que le conseil d'administration, selon
vous, devrait être composé d'un président nommé par
un ministre, d'une représentativité des milieux de
l'enseignement...
M. Perron (Luc): Une représentation. Mme Frulla:
...MEQ et MESS... Hein? M. Perron (Luc): Une représentation.
Mme Frulla: Bon. Donc du MEQ et du MESS. Le Président (M.
LeSage): Alors...
Mme Frulla: Donc, il y en avait une au conseil
d'administration.
Le Président (M. Lesage): Si vous voulez bien conclure
rapidement, Mme la ministre. (20 h 50)
Mme Frulla: Représentation du milieu musical et
théâtral, directeurs d'établissement, des professeurs et
des élèves. Il me semble que ce n'est pas très
différent du conseil d'administration de la corporation.
M. Perron (Luc): Mme la ministre, je...
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Perron, si vous le
permettez, le temps alloué au parti ministériel étant
écoulé, la parole que vous prendrez sera imputée au parti
de l'Opposition. Allez-y, M. Perron,
M. Perron (Luc): La dimension que vous oubliez, qui est
très importante, de la corporation que vous faites dans votre
société administrative et de la corporation dont nous faisons la
promotion, c'est que le personnel demeure assujetti ou l'appartenance à
la Loi sur la fonction publique demeure. C'est une très grosse
différence.
Alors, la question qui est facile à vous poser: Vous, pourquoi
vous délaissez ce lien qui fait en sorte vraiment d'assurer, si vous
voulez, un incompressible au niveau de l'ensemble de l'investissement dans le
système des conservatoires? Pourquoi vous ne vous contentez pas de
ça?
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre.
Mme Frulla: C'est que, quand nous avons été, entre
autres... Parce que, ne l'oubliez pas, là, je le dis, ce qui a
été véhiculé est faux. Tous les professeurs sont
invités à joindre la corporation et gardent leurs droits
acquis.
M. Perron (Luc): Ce n'est pas ce qui est écrit à
l'article 83.
Mme Frulla: Je m'excuse, mais c'est ça.
M. Perron (Luc): Mais, à l'article 83, ce n'est pas ce qui
est écrit.
Mme Frulla: Tous les professeurs sont invités à
joindre la corporation avec des droits acquis, M. Perron. Et je vous l'avais
dit, d'ailleurs, quand je vous ai rencontré au mois de novembre.
M. Perron (Luc): Non, non. Ce n'est pas ce qui a paru dans Le
Soleil non plus la semaine passée, là.
Mme Frulla: Je vous l'ai dit, ça. Deuxièmement, je
suis allée en France, en Belgique et en Angleterre, et le
système, en France, donne une certaine flexibilité
ça aussi, je vous l'ai dit pour avoir des professeurs artistes,
ce qui fait en sorte qu'on peut aussi avoir une flexibilité au niveau
des professeurs et de l'enseignement. Et ça, ça n'a absolument
rien à voir avec une diminution des budgets ou quoi que ce soit.
Ça a tout à voir avec une flexibilité au niveau de
l'enseignement qui fait en sorte que les conservatoires peuvent donner aussi un
enseignement de pointe à des élèves qui le méritent
bien.
M. Boisclair: Flexibilité qui existe d'ailleurs
déjà dans les...
Le Président (M. LeSage): Alors, M. le
député de Gouin, vous avez la parole et vous pouvez vous adresser
à la présidence en posant votre question également
à M. Perron et aux représentants du Syndicat des professeurs de
l'État du Québec. M. Gouin, la parole est à vous... M. le
député de Gouin.
M. Boisclair: Boisclair, oui. O.K. Alors, je continue sur la
lancée de la ministre. Cette flexibilité existe
déjà d'ailleurs dans plusieurs conservatoires,
particulièrement dans les conservatoires d'art dramatique, qui, à
l'occasion du quatrième cycle, si je ne me trompe pas, offrent justement
ce genre de formation à leurs enseignants.
Ceci étant dit, je voudrais remercier les représentants du
Syndicat des professeurs de l'État du Québec pour cette
réflexion originale dans sa présentation qui certainement, quant
aux propos et quant au niveau de réflexion qui est proposée,
diffère des préoccupations qui, depuis la matinée, nous
ont été soumises.
Vous soulevez, à juste titre, toute la question de la gestion des
ressources humaines dans un établissement public et, dans ce cas
particulier, dans les conservatoires. Votre crainte que vous manifestez
m'apparaît d'autant plus justifiée... Et je voudrais tout
simplement peut-être rappeler deux passages des propos du
Vérificateur général, qui, connue vous le savez, depuis
maintenant trois ans étudie cette question de la gestion des ressources
humaines dans la fonction publique. Je me permets juste d'en lire deux extraits
pour la compréhension des membres de cette commission: «L'analyse
des plus importantes fonctions de la gestion des ressources humaines a fait
ressortir plusieurs faiblesses: planification stratégique
généralement absente, grincement de la machine en dotation, peu
de questionnement et de mesure relativement au développement et à
la formation, escalade indue de la valeur des emplois, gestion du rendement
pour sauver les apparences et lenteur du mécanisme de règlement
des litiges avec les employés. Bref, il y a encore
énormément à faire pour restaurer la fonction publique,
améliorer son efficacité et redorer son blason!»
Le Vérificateur général continuait et allait
même à dire... Et je voudrais aussi le citer. En conclusion
générale, il disait: «II est utopique de penser corriger
efficacement les principaux problèmes rencontrés dans la gestion
des ressources humaines dans la fonction publique si le gouvernement ne change
pas la trame de l'administration publique, plus particulièrement sur les
éléments de base: la responsabilisation des gestionnaires
associée à une reddition de comptes significative.»
Et, à cet égard, l'Opposition ne peut que souscrire
entièrement aux propos qui sont les vôtres lorsque vous nous
mentionnez avec quelle pertinence il est important de donner les moyens aux
professeurs artistes de justement se responsabiliser dans cette démarche
de formation plutôt que de privatiser, si je peux m'exprimer ainsi, leurs
responsabilités en confiant cette tâche d'harmonisation et de
mesure de l'excellence à des directions pédagogiques, comme le
projet de loi nous le propose. Et je pense que cette réflexion doit se
faire. C'est la première fois qu'on nous la soumet devant cette
commission et c'est une réflexion de fond qui est, à mon avis,
importante.
Comme deuxième commentaire, je ne peux que... Je me demandais,
tout à l'heure, si on se retrouvait à la commission de
l'économie et du travail, parce que le ton des discussions ressemblait
pratiquement à celui qu'on a pu retrouver récemment, qu'on a
entendu, dans cette enceinte, lorsqu'il était le temps de discuter de
l'industrie de la construction. Je trouve déplorable de voir ce discours
de sourds qui se tient et je suis inquiet, si jamais cette réforme
devait être adoptée, de voir que les principaux partenaires sur
qui reposera la réussite de cette réforme-là, qui sont les
professeurs artistes, ne se sentiront pas dans le coup. Si ce n'est que pour la
motivation de ces partenaires, si ce n'est, aussi, que pour ses
conséquences sur la qualité de l'enseignement, je pense que c'est
un risque très grave à courir que de ne pas, dès le
départ, s'être associé à ces partenaires et avoir
pris les gestes et les mesures appropriés pour atteindre ces objectifs.
Je fais particulièrement référence à la
réflexion significative qui a été initiée par les
membres de votre syndicat, par les membres, aussi, de votre syndicat local, au
Conservatoire de musique de Montréal, qui ont produit à cet
égard des réflexions plus
que significatives qui, aujourd'hui, sont restées, convenons-le,
plutôt lettre morte. Mais cette réflexion m'apparaît
importante à souligner, et je dois vous dire mon inquiétude
devant cette possibilité.
Une question, M. Perron: Dans votre mémoire, au début,
à la page 4, vous nous dites, et je vous cite: «Enfin bon
nous formulerons...» Vous concluez en disant: «...donnant
accès à la renégociation de toutes les conditions de
travail.» Est-ce que vous pourriez indiquer aux membres de la commission
ce que vous signifiez, ce que vous mettez sur la table concrètement? Et
est-ce que cette proposition a déjà été
discutée avec les autorités du ministère, ou qu'en est-il
exactement quant à cette proposition?
Le Président (M. LeSage): M. Perron.
M. Perron (Luc): M. le Président, c'est que l'ensemble des
motivations administratives, si vous voulez, il ne faut pas se le cacher,
proviennent du Conseil du trésor, il va sans dire, dans le sens que
l'ensemble du budget du réseau des conservatoires doit diminuer le plus
rapidement possible. Et, en ce sens-là, ceux qui le réussiront
auront une promotion, je dirais, inversement proportionnelle.
Des voix: ...
M. Perron (Luc): Mais c'est une réalité, là,
je veux dire, c'est ce qui nous...
Mme Frulla: C'est parce que le Trésor ne dit pas,
là, où il y a des compressions; c'est nous qui faisons les choix,
M. Perron.
M. Perron (Luc): ...c'est ce qui nous préoccupe. Non, mais
écoutez, c'est ce qui nous préoccupe, là.
Mme Frulla: Tu sais! Ce n'est pas surprenant que vous ayez fait
peur à tout le monde.
M. Perron (Luc): C'est pour ça qu'on parle... Le
Président (M. LeSage): S'il vous plaît. M. Perron (Luc):
C'est pour ça qu'on parle...
Le Président (M. LeSage): M. Perron, vous avez la
parole.
M. Perron (Luc): C'est pour ça qu'on parle que le
ministère privilégie une approche comptable. Nous, on dit...
Écoutez, je vais donner des exemples, là, des exemples du terrain
qui ne sont peut-être pas toujours agréables mais qu'il faut
dire.
Vous avez un professeur de clarinette à Hull. Une
étudiante s'en va à Toronto au début de l'année.
Avant que le professeur n'en soit avisé, la direction locale en est
saisie. La secrétaire, par bienveillance, pitonne, si vous voulez, cette
information. Ça se ramasse sur la table centrale ici, à
Québec, et, à ce moment-là, le professeur occasionnel,
supposons qu'il avait une perspective de gagner 25 000 $, avec un
élève en moins calcul comptable très rapide
ça tombe, une baisse de 10 000 $, et, tout de suite, on appelle
ça un bénéfice net. Et, soit dit en passant, comme
anecdote, ce fameux programme s'appelle Musard. Quand vous regardez dans le
dictionnaire, «musard», c'est: Gérer des bagatelles. Mais
enfin, c'est triste, là, mais c'est un peu comme ça.
Mais ça, c'est une réalité du terrain. Mais
ça, on ne peut pas, si vous voulez, se le cacher. Alors, ça veut
dire quoi? Ça veut dire que vous avez des occasionnels qui existent
à 60 % dans ce réseau-là depuis de nombreuses
années. On ne veut tout simplement que lire le travail qui va se faire,
seulement en émiettant davantage, pour que ça coûte le
moins possible, et on ne se préoccupe pas des conséquences et des
effets sur la formation professionnelle.
Nous, ce qu'on dit à cela on est en avance avec la FTQ et
la CEQ, et ce n'est pas nous autres qui avons fait la loi 102, là, c'est
le gouvernement, qui nous dit: Bien, écoutez, malgré vous autres,
on vous prolonge les conditions de travail de deux ans nous, on dit: Si
notre convention collective coûte trop cher, que l'administration
je pense que le politique va être plus sensible à ça
que le politique sensibilise son administration et qu'il dise: Va donc voir
auprès de ce monde-là c'est quoi qui coûte trop cher. La
convention, c'est quoi? Y a-t-il des paramètres qu'on peut changer? Y
a-t-il des paramètres qu'on peut aménager? Et je pense qu'on est
disponibles à cela. (21 heures)
Mettons ce projet de loi là de côté, regardons
vraiment ce qu'il en est. On peut faire des aménagements qui Sont
différents. Je pense que c'est une très grande ouverture, bien
sûr, que l'on fait, mais regardons vraiment ce qui est nécessaire
pour assumer, si vous voulez, cette formation professionnelle, et non de le
regarder à l'inverse, de se dire: II y a des professeurs qui sont vieux
dans ce réseau-là. Ça a été dit, ça a
été dit aux étudiants, ça nous a été
rapporté, ça a été rapporté dans Le
Soleil aussi. À un moment donné, les journaux rapportent
aussi ce qui est dit. On a une moyenne d'âge, dans notre groupe, si vous
voulez... au-delà de 56 ans, vous avez 40 % des professeurs.
Malheureusement, il y a certaines gens je ne dis pas que c'est
politique, ça; c'est plutôt, tu sais, médiatisé
il y a des gens d'un certain âge qu'on dit qu'il faudrait les
faire remplacer. Alors, en ce sens-là, je pense que c'est ça
qu'on vise par une loi, d'essayer vraiment d'amoindrir les coûts de
l'enseignement au niveau de l'ensemble du réseau. Et ça, je
trouve que c'est une discrimination que j'appellerais vraiment
éhontée, vraiment inadmissible, vraiment incorrecte.
Et c'est dans ce sens-là, si notre convention coûte
trop cher, on l'a quand même signée à deux ce
n'est pas tout seul bien, je veux dire, que, de l'autre
côté, ils retroussent leurs manches. On va faire la même
chose et on va regarder ce qu'il en est pour que le réseau vive et que
les professeurs, si vous voulez, aient plaisir à continuer de travailler
et pour qu'on enlève ce climat d'incertitude au niveau des
étudiants, tant de niveau avancé que de niveau, si vous voulez,
de formation initiale, pour ne pas qu'ils quittent ces maisons-là.
Je pense que c'est important, c'est une grande ouverture, et j'ai
compris, ce matin, que Mme la ministre avait manifesté, en ouvrant cette
séance, une grande ouverture. J'espère que les deux ouvertures
vont se rencontrer. C'est ce que je souhaite.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Dans un contexte où il y a un certain nombre
de règles, aussi, qui sont les nôtres, qui, à l'heure
actuelle, nous amènent à poser des gestes quand même assez
rapides, je ne peux que le souhaiter, mais je pense que c'est à des gens
qui sont de l'autre côté de la table de poser ce genre de
gestes.
Je voudrais en venir à l'article 83. Il semble y avoir une
profonde incompréhension quant à la portée de cet article.
Est-ce que vous pourriez nous expliquer vos prétentions?
M. Perron (Luc): Juste avant, c'est que je ne pense pas qu'il
faudrait, si vous voulez, se laisser devancer par un échéancier
pour mettre en péril des fondations qui ont pris 50 ans à faire
ce qui existe présentement. Je pense que le sérieux exige
davantage.
L'article 83, après l'analyse que nous avons faite de ce texte
via notre contentieux, c'est que ça permet tout simplement,
l'originalité de cela une originalité, bien sûr,
cynique de cela à la corporation, une fois qu'elle sera
instituée si elle est instituée d'inviter, si vous
voulez, les gens qu'elle veut bien faire passer. Ça veut dire que, parmi
nos permanents, on va discriminer. On ne connaît pas la grille, on ne
connaît rien, mais c'est ce qui est écrit dans l'article 83.
Là, on nous dit qu'on va inviter tout le monde. Mais, en tout
cas, l'article 83, ce n'est pas ce qu'il dit. L'article 83, ce qu'il laisse
entendre, c'est qu'on va inviter du monde, si vous voulez, sur une certaine
base, une certaine grille nous, on pense que l'âge en est une,
entre autres comme telle, pour les faire traverser dans cette nouvelle
corporation. Je calcule que c'est tout à fait inhumain, c'est tout
à fait inacceptable, je veux dire, sur le plan humain, sur le plan d'une
approche humaniste, si vous voulez, dans les relations de travail.
M. Boisclair: Si tel était le cas, je le conçois
très bien, mais j'essaie juste... Votre fondement se retrouve lorsqu'on
lit à l'article 83, «sous réserve des dispositions d'une
convention collective qui leur sont applicables». J'essaie juste de voir
le fondement de votre analyse, parce que cette clause nous nous sommes
déjà rencontrés, et j'ai fait un certain nombre de
vérifications avec d'autres projets de loi où il y a eu transfert
de fonctionnaires effectivement, comme on l'avait porté à
mon attention, apparaît plutôt, je ne dirais pas standard, mais
conforme à ce qui s'est fait dans d'autres institutions. Je voudrais
peut-être même si vous aviez un avis juridique, si
c'était possible de nous le faire parvenir ou de le déposer aux
membres de cette commission mais j'aimerais peut-être entrer dans
le détail.
M. Perron (Luc): II s'agit...
Le Président (M. LeSage): M. Perron.
M. Perron (Luc): Oui, M. le Président. Il s'agit de lire
l'article. On dit: «...les employés du nouveau Conservatoire dans
la mesure où un décret prévoyant leur transfert est
pris» avant telle date. Alors, dans le décret, si vous voulez, les
gens vont être invités, donc les gens vont être
identifiés. C'est le décret qui va déterminer ceux qui
peuvent passer, en autant qu'ils aient signifié leur désir de
passer, bien sûr. Alors, c'est la compréhension que nous en
avons.
Qu'ailleurs, si vous voulez, on ait permis à l'ensemble des gens
de passer, c'est possible, mais le texte de la loi, ce qu'il donne,
actuellement, c'est cette opportunité-là, et on trouve que c'est
une opportunité tout à fait dégradante. Et, d'ailleurs, il
y a des gens du ministère, qui, au Conservatoire de musique de
Québec, là, ont dit récemment que ça ne serait pas
tout le monde qui serait invité à traverser. Donc, c'est
déjà, si vous voulez, des propos qui sont dits par des
gestionnaires, qui sont mandatés pour traduire ou pour donner des
explications de leur compréhension de l'article 83.
M. Boisclair: Si ma compréhension est juste, sur environ
235 enseignants dans le réseau, il y en aurait environ 90 qui auraient
le statut de permanents. Est-ce que c'est une tendance qui est récente,
cet appel à l'embauche d'occasionnels, ou c'est une tendance qui s'est
manifestée, qui s'est accrue au fil des ans? Et comment vous
réagissez par rapport à ce ratio pour le moins...
M. Perron (Luc): Non, l'embauche des occasionnels, c'est une
tendance, si vous voulez, administrative d'une dépréciation,
vraiment, des conditions de travail de quelqu'un qui donne sa carrière
à l'enseignement dans les conservatoires, depuis déjà la
fin des années soixante-dix au début des années
quatre-vingt. Ce n'est pas dur à comprendre. Je veux dire, quelqu'un qui
est comptable le moindrement, il voit l'économie qu'il peut en faire et
se dit tout simplement: Bon, écoutez, ces gens-là enseignent
pareil et, parce qu'ils enseignent, on va y aller dans cette
proportion-là. Donc, c'est vraiment une décision patronale,
à mon sens, d'une incompréhension, d'une non-valorisation, d'une
non-reconnaissance, si vous voulez, des services qu'un professeur va offrir
à cette maison d'enseignement.
vous dites: ii y a 220 profs actuellement; il y en a 98, donc, qui sont
permanents. on fait des sollicitations de façon très pressante,
en identifiant les gens qui ont un âge de pleine maturité, en leur
indiquant la porte; pas en leur indiquant les services faits, mais la porte. et
ce que je vous dis, c'est que vous avez 40 % des gens qui ont plus de 56 ans.
alors, je ne sais pas le calcul qui peut être fait là-dedans. sans
être trop habile là-dedans, on se dit: bon, il ne leur reste pas
beaucoup de temps; on peut les aider, les encourager, les stimuler, mais c'est
certain qu'on ne veut pas nécessairement les inviter à
traverser.
Puis, l'article est plus sévère que ça vu
que vous m'ouvrez la porte là-dedans. C'est que ça permettrait
aussi aux professeurs occasionnels, qui sont d'un certain âge, si vous
voulez, aussi, de ne pas être invités, malgré qu'eux n'ont
pas, bien sûr, comme vous le savez, la sécurité d'emploi.
Et ça, je calcule que, s'il faut faire une loi pour reprendre des
termes, des fois, qui sont dits dans le public pour dégraisser un
corps d'emploi, c'est absolument scandaleux! C'est absolument inacceptable! Et
nous nous situons, bien sûr, complètement en défaveur avec
cela.
C'est tout à fait éloigné, actuellement, des
relations qu'on tente de créer, de manière harmonieuse, entre les
gens, et qui existent, heureusement, même au Québec, dans certains
contextes privés, comme vous l'avez si bien dit tantôt, si bien
cité, où, vraiment, on veut que les gens s'impliquent, on veut
que les gens participent. Et on sait que les retombées significatives de
cela aident l'ensemble de l'organisation. Nous, dans la fonction publique, dans
le ministère de la Culture, malheureusement puis, c'est assez
ironique, puis assez paradoxal, parce que c'est un ministère de la
culture on est plusieurs années en arrière
là-dedans.
M. Boisclair: II me reste trois, quatre minutes.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Des petites questions courtes, mais que
j'espère précises. Vous nous avez parlé de
l'expérience des commissions pédagogiques. Ce sont des
commissions qui existent en vertu des conventions collectives, si je ne me
trompe pas.
M. Perron (Luc): Oui, mais la loi qui est là...
M. Boisclair: Est-ce que vous pourriez nous faire part de cette
expérience, rapidement?
M. Perron (Luc): Mais, très rapidement, c'est que ce
projet de loi a été copié quasiment qu'on dit, nous
autres rapidement, sur un coin de bureau, possiblement. C'est qu'on a
parcouru la loi des cégeps de façon attentive, puis la nouvelle
appellation, c'est qu'on parle du directeur des études au lieu de
directeur des services pédagogiques. Et c'est ce que vous retrouvez
là- dedans: directeur des études au niveau central, et vous avez
une commission des études, donc, qui pourrait remplacer les commissions
pédagogiques.
Donc, ça veut dire que vous avez une commission des études
presque itinérante, qui survole l'ensemble des conservatoires, pour
décider pour les établissements eux-mêmes, si vous voulez,
ce qui peut se passer. Même plus que ça, les commissions
pédagogiques, qui ont vraiment un rôle moteur au niveau de
l'enseignement dans leur établissement comme tel, c'est dilué
aussi par certaines fonctions qu'on a accordées, dans ce projet de loi
là, aux conseils d'orientation.
La commission pédagogique, localement, a permis par
exemple, à Montréal directeur et professeurs, de se dire
c'est quoi la différence on vous le met dans le mémoire
aussi; vous allez avoir le temps de le lire par exemple, entre le
système au niveau du Conservatoire et au niveau de l'université.
Parce qu'il y a une coordination qui est imposée par la loi, qui existe
depuis 1942 alors, c'est un visionnaire qui l'a faite, là; je
veux dire, ce n'est pas un visionnaire qui a fait celle-là, en tout cas
où on disait vraiment qu'il fallait, si vous voulez, coordonner
avec l'ensemble, déjà, des institutions existantes: on parle de
l'Université Laval, à l'époque, on parle de
l'Université de Montréal, l'Académie de musique.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Juste terminer en faisant un commentaire qui est
celui que j'ai fait à plusieurs reprises. La ministre nous parle de ses
nombreuses consultations, mais ce n'est pas... Tous ceux à qui j'ai
posé la question m'ont dit qu'ils n'ont pas été
consultés. Depuis le début, là, tous ceux à qui
j'ai posé la question, depuis le début de l'après-midi,
m'ont dit qu'ils n'ont pas été consultés directement sur
le contenu de l'énoncé de politique de juin 1993. On m'a dit que
certains de vos membres ont été consultés de façon
tout à fait précipitée, en leur remettant un document
à la dernière minute, et même certains ont refusé de
se livrer à cet exercice. Et l'argument de la ministre, à cet
égard, sur l'imposante consultation, ne tient pas, de la même
façon que ce n'est pas vrai que, parce qu'on est capable de nommer
toutes les notes de piano, pour autant on est capable de jouer du piano, et
que...
M. Perron (Luc): C'est que c'est une consultation, bien
sûr... c'est un concept qui est vide de sens. Moi, je pourrais dire que
certains technocrates ont consulté beaucoup, par exemple, parce qu'ils
ont assisté à l'orchestre réseau Bell Canada, puis, vu
qu'il y avait des foules impressionnantes, ils peuvent dire qu'ils ont
rencontré bien du monde, mais c'est évident que c'est une
consultation, si vous voulez, qui n'est pas réelle. On ne mise pas sur
l'intelligence des gens, on ne mise pas sur des espaces de dialogue qui, pour
moi, sont fondamentaux, surtout dans l'avenir des orientations à
construire pour le réseau de la formation. De se dire que c'est
une consultation de dire à l'autre: Je lui ai donné la main, je
l'ai salué... Écoutez, ça mérite vraiment, il y a
vraiment de la formation qui doit être dispensée pour approfondir,
là, ce concept de consultation.
M. Boisclair: Conclusion: c'est quoi l'avenir des conservatoires
si ce projet de loi là est adopté?
M. Perron (Luc): Si ce projet de loi là passe, nous, sans
être des futurologues, compte tenu de ce qui caractérise,
actuellement, je dirais, l'ampleur de l'administration, les élans de
l'administration des fermetures de classes, des fermetures de
disciplines sachant absolument que Val-d'Or comme ça a
été dit ce matin ne peut pas donner l'ensemble des
programmes, ça va de soi, c'est partiel, si on s'en va dans cette
ligne-là puis on sait très bien, actuellement, qu'on est
dans un contexte de coupures budgétaires, de coupures de financement, on
sait très bien qu'au niveau du ministère on veut réduire
l'enveloppe globale, parce qu'on se dit que le privé va subventionner
alors ça s'en va vers une mort plus ou moins lente de ce
réseau-là, et, au Québec, on ne peut pas se permettre
cela.
Quand on dit, par exemple, qu'on veut imposer des frais de
scolarité... C'est un réseau performant, c'est sur la base du
talent. Nous, ce qu'on espère: Pourquoi j'étais pour dire:
Maudite affaire! mais je ne sais pas si c'est permis ici qu'on ne
pourrait pas lire, si vous voulez, la formation ailleurs, à travers
celle qui se donne dans les conservatoires, miser vraiment, si vous voulez, sur
le talent dans toutes les disciplines, puis la rendre gratuite, rendre
ça gratuit, l'enseignement? Ça va être performant.
Ça nous a été dit; les jeunes l'ont dit, il y en a 20 dans
les conservatoires qui sont dans les orchestres.
M. Boisclair: M. Perron, rapidement, parce qu'il reste 30
secondes.
Le Président (M. LeSage): M. Perron, je m'excuse
d'intervenir, le temps qui nous était alloué pour cette...
M. Boisclair: Est-ce que la ministre peut consentir, comme je
l'ai fait à plusieurs reprises? Est-ce que vous êtes prêt,
vous, à...
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin...
Mme Frulla: Bien là, c'est parce que...
M. Boisclair: Une question simple, simple; courte, courte.
Mme Frulla: O.K. Trois secondes. Je prends une minute, hein? (21
h 10)
M. Boisclair: Je voulais juste vous demander: Est-ce qu'il
est...
Le Président (M. LeSage): Alors, il y a consentement pour
une minute de chaque côté.
M. Boisclair: Est-ce qu'il est de votre...
M. Perron (Luc): C'est une négociation rapide. Oui.
M. Boisclair: Est-ce qu'il est... On réussit parfois.
M. Perron (Luc): Ah oui! Je vous félicite.
M. Boisclair: Est-ce qu'il est de votre intention de soumettre
des amendements concrets au projet de loi aux membres de cette commission?
M. Perron (Luc): Nous, nous demandons avec sérieux que,
compte tenu de l'ensemble de la compréhension qu'on a de ce dossier, le
gouvernement sursoit à ce projet de loi là, qu'on s'assoit, de
façon précipitée s'ils le veulent, de façon
intensive s'ils le veulent, mais qu'on installe un espace de dialogue
productif, et puis il renaîtra un autre projet de loi en 1994. Mais
celui-là, tel qu'il est là, il ne mène nulle part, et
c'est excessivement dangereux de vous laisser, comme politique,
légiférer là-dessus. Il faudrait l'amender, si vous
voulez, en tout et partout. On vous a donné à peine quatre pages
dans notre mémoire qui vous démontrent, hors de tout doute, les
tendances qui sont inscrites là-dedans et puis celles, nous autres, que
nous privilégions comme étant du terrain.
M. Boisclair: Je vous remercie.
Le Président (M. LeSage): Je vous remercie, M. Perron, M.
le député de Gouin. Mme la ministre.
Mme Frulla: Moi, M. Perron, ce que je regrette de votre
prestation, c'est votre vision, qui est destructrice, qui est remplie de
faussetés. Vous savez comme moi que l'article 83, par exemple, selon
votre expérience... Parce que vous n'êtes pas, quand même,
un permanent du Conservatoire. Vous vous occupez de COFI, vous vous occupez de
l'Institut agricole, vous vous occupez d'autres choses. Quand vous dites: Soyez
présente, je peux vous dire la même chose.
Vous savez très bien que l'article 83, c'est un article qui est
standard. On le fait présentement et on procède
présentement au transfert de personnels qui vont d'eux-mêmes
à la CALCQ et qui sont liés selon les conventions collectives
actuelles. Vous avez, je vous l'ai dit, brandi le spectre de la destruction et,
honnêtement, M. Perron, j'en suis scandalisée, parce que, au lieu
de penser à la pérennité des conservatoires, vous pensez
à votre membership. C'est ce que j'ai à dire.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la ministre. Ceci met
fin à la période de temps qui nous était
alloué...
M. Perron (Luc): Est-ce que je peux...
Le Président (M. LeSage): Je m'excuse, M. Perron, mais il
y a d'autres groupes qui attendent, là. Je vous remercie, d'abord,
d'avoir présenté votre mémoire, d'avoir participé
à nos travaux, de même que M. Thiboutôt et M. Proulx. Et,
avant de suspendre les travaux, j'indique que, lorsque nous reprendrons, nous
entendrons la Guilde des musiciens du Québec, représentée
par Mme Gisèle Frechette.
Alors, je suspends les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 13)
(Reprise à 21 h 19)
Le Président (M. LeSage): La commission de la culture
reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de la commission qui est de
procéder à des consultations particulières et de tenir des
auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du
projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
Et nous entendrons la Guilde des musiciens du Québec,
représentée par Mme Gisèle Frechette. Mme Frechette, je
vous rappelle que vous aurez 20 minutes pour présenter votre
mémoire et je vous demande de présenter les personnes qui vous
accompagnent.
Guilde des musiciens du Québec
Mme Frechette (Gisèle): Bonsoir. Je vous présente
d'abord M. Gilles Tremblay, qui est membre de la Guilde des musiciens du
Québec, musicien professionnel formé au conservatoire de
Montréal et professeur à la même institution; à ma
gauche, M. François Lanthier, avocat et conseiller de scène
à la Guilde des musiciens du Québec, musicien formé
à l'Université de Montréal. Je suis présidente de
la Guilde des musiciens du Québec. Je suis musicienne professionnelle,
formée aux conservatoires de Trois-Rivières et de
Montréal. (21 h 20)
Notre présence ici n'est donc pas le fruit du hasard. D'ailleurs,
plusieurs de nos membres sont diplômés des conservatoires de
musique du Québec et plusieurs autres y ont fait un stage à un
moment ou à un autre. Malheureusement, le court laps de temps qui nous a
été alloué pour préparer ce mémoire explique
qu'une large consultation auprès de nos membres n'a pu être
menée, ni même, d'ailleurs, une véritable discussion au
sein de notre conseil d'administration. Mais cela ne nous empêche pas de
relever plusieurs points obscurs et d'être en mesure de poser de
nombreuses questions.
Nous connaissons la valeur de l'institution et la réussite
remarquable de ses programmes pédagogiques. Nul besoin de vous
réciter des statistiques qui démontrent parfaitement l'apport
considérable et inestimable qu'a exercé cette institution envers
la culture québécoise. Sans contredit, depuis sa fondation en
1942, le Conservatoire a permis l'éclosion et l'évolution de la
vie culturelle québécoise. Nous avons donc la prétention,
ce soir, de vouloir défendre les intérêts de nos futurs
membres en tentant de protéger la noble institution qu'est le
Conservatoire.
Le projet de loi 135 suscite de nombreuses craintes quant à
l'avenir qui est promis au Conservatoire. Il semble trahir l'intention qui
sous-tend l'action ministérielle, au risque de mettre en péril la
survie de l'institution que l'on tente de sauver.
Dans la mission du Conservatoire de musique du Québec, en 1989,
Mme Bacon déclarait que l'on reconnaissait unanimement les forces de
cette institution. Elle disait: L'institution «offre une
flexibilité pédagogique qui lui est propre et que beaucoup lui
envient».
Une des caractéristiques fondamentales du Conservatoire consiste,
justement, à fournir à l'élève un encadrement
individuel continu qui permet le décloisonnement des matières
à tous les niveaux. Conjuguées avec la gratuité, ces
caractéristiques assurent la plus grande accessibilité à
la culture qui soit jamais donnée aux talents québécois.
De même, la possibilité pour un élève de faire
reconnaître sa compétence, de pouvoir se présenter à
un examen pour, finalement, se faire créditer un cours, de pouvoir
profiter d'une exemption grâce à une équivalence constitue
un procédé juste et équitable qui favorise un
apprentissage plus approfondi et plus étendu, de même qu'une
meilleure utilisation du temps, des énergies et des ressources humaines.
Nous encourageons fortement le ministère à conserver ces
caractéristiques du Conservatoire.
Prenons pour acquis que nous cherchons tous à assurer la survie
et le développement futur des conservatoires et examinons maintenant le
projet de loi 135.
Dans le chapitre I, à l'article 4, il est question de la
composition d'un conseil d'administration de 15 personnes. La composition de ce
conseil nous apparaît déséquilibrée d'abord par la
préséance des personnes nommées politiquement qui
détiennent, de par leur nombre, un pouvoir absolu elles sont huit
sur 15 d'autant plus que l'inscription au conseil d'administration des
membres nommés par le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science, ainsi que par celui de l'Éducation,
risque d'accorder des pouvoirs décisionnels à des
représentants d'institutions qui bénéficieraient
directement de la disparition d'une institution concurrente, qui réduit
déjà le bassin potentiel de leur clientèle.
Pourquoi faudrait-il assujettir les conservatoires à un conseil
d'administration majoritairement extérieur à ses murs pour
décider de son orientation future et de son développement?
Dans les orientations ministérielles proposées en
juin dernier, le ministère de la Culture indique se baser sur
l'exemple des corporations qui existent dans le monde de l'enseignement
les commissions scolaires, les cégeps, l'Université du
Québec pour créer une corporation dénommée
le Conservatoire du Québec. Les cégeps, de par la Loi sur les
collèges d'enseignement général et professionnel, sont
effectivement dirigés par un conseil d'administration composé de
personnes entièrement nommées par le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science. De même, dans la Loi sur
l'Université du Québec, les 17 personnes sont nommées par
le gouvernement.
Cependant, ces modèles se réfèrent à un
organigramme où le conseil d'administration ou l'assemblée des
gouverneurs, pour l'Université du Québec, doit gérer
plusieurs constituantes, qui, à leur tour, dirigent plusieurs
facultés ou options, où s'enseignent des disciplines aussi
différentes les unes des autres que la musique et les techniques
infirmières, l'informatique et la littérature, pour ne nommer que
celles-là. Or, les neuf conservatoires n'offriront jamais, dans le
meilleur des cas, que deux disciplines: musique et art dramatique. C'est
pourquoi nous considérons l'organigramme proposé dans le projet
de loi bien trop lourd et complexe pour permettre la souplesse et la
flexibilité nécessaires à la bonne marche d'une
école de musique.
De plus, la représentation des directeurs, professeurs et
élèves de musique s'avère pour le moins déficiente,
puisque, pour un réseau de sept institutions, un seul directeur, un seul
professeur et un seul élève feront partie de ce conseil
décisionnel trois sur 15.
D'autre part, le projet de loi 135 accorde au secteur de l'art
dramatique un droit de représentation identique à celui de la
musique, sans tenir compte de la disproportion entre ces deux secteurs: l'on
dénombre actuellement deux institutions qui dispensent la formation en
art dramatique, alors qu'il y a sept institutions qui dispensent la formation
musicale. Le même constat peut être effectué en comparant le
nombre d'élèves dans chacun des secteurs. Ce relevé ne
fait qu'accentuer l'insuffisance de la représentation accordée au
secteur musique au sein du conseil d'administration.
La représentativité proportionnelle devrait
s'étendre de la même façon aux établissements
d'enseignement, en tenant compte du nombre d'élèves et de profs,
pour permettre aux conservatoires de Montréal et de Québec de
participer activement à la gestion administrative et à
l'orientation de leurs établissements. C'est sûr que, quand on
considère le conservatoire de Montréal, qui a déjà
plus de la moitié des élèves de tout le réseau, il
est normal qu'il soit impliqué.
Malgré la requête des professeurs du Conservatoire de
musique de Montréal, dans un document remis aux instances du
ministère en juillet dernier, nous remarquons et déplorons
l'absence au conseil d'administration de gens issus spécifiquement du
milieu des affaires. L'orchestre réseau Bell Canada illustre pourtant
bien la bonification fourrie par la participation du milieu des affaires
à la vie culturelle.
Aux paragraphes 4° et 7° de ce même article 4, il est
question de l'élection des autres membres du conseil d'administration,
et, si on lit bien cet article 4, les membres du conseil d'administration en
fonction sont alors les membres nommés politiquement. Ce sont donc eux
qui détermineront lequel parmi eux tiendra et présidera
l'élection des directeur, enseignant, élève à plein
temps en musique et, s'il y a lieu, du membre du personnel non enseignant.
Pourquoi les pairs, qui doivent élire leurs représentants, ne
pourraient-ils par déterminer eux-mêmes les critères et la
procédure du vote selon les coutumes de leurs associations respectives?
En exagérant un peu, le conseil d'administration pourrait aller
jusqu'à indiquer aux élèves qu'ils doivent élire un
représentant de tel âge, de tel niveau et, allons-y, de telle
classe!
À l'article 12, on parle du comité exécutif, qui
doit être élu à l'intérieur de ces mêmes
membres nommés politiquement. Est-ce à dire que les membres du
comité exécutif seront des personnes nommées
politiquement, étrangères à l'institution, et non pas des
personnes actives, oeuvrant dans les établissements d'enseignement et
seules parfaitement au courant des vrais problèmes?
À l'article 13, on parle du directeur général et du
directeur des études. Nous endossons la proposition des professeurs, qui
requièrent la nomination d'un secrétaire général,
plutôt que celle d'un directeur général, pour permettre un
alignement sur la politique culturelle du Québec, qui veut
décentraliser et rendre possible des décisions locales
adaptées aux spécificités du milieu. Nous devons concevoir
une structure plus responsabilisante, où chaque conservatoire aurait son
propre conseil d'administration, qui serait à la fois appui et reflet du
milieu, avec une participation d'intervenants du monde des affaires de la
région. Le conseil d'administration local remplacerait le conseil
d'orientation proposé dans le projet de loi et détiendrait des
pouvoirs décisionnels. Une plus grande autonomie locale réduirait
certainement la lourdeur administrative qui transpire à la lecture du
projet de loi, en plus de permettre une souplesse de gestion cohérente,
efficace et stimulante.
Nous questionnons la pertinence de nommer un directeur des études
si hautement placé dans l'organigramme, alors que l'efficacité
d'un directeur des études repose sur son contact quotidien avec les
éléments de la base et que la situation que lui réserve,
justement, le projet de loi 135, aura comme première conséquence
de le couper de cette base. De toute façon, ce rôle, à la
base, est déjà joué par les commissions
pédagogiques dans chacun des conservatoires. Laissons-les le jouer,
accordons-leur un pouvoir décisionnel qui en ajoutera de
l'efficacité. La nomination d'un directeur des études est, quant
à nous, tout à fait inutile et coûteuse.
Toutefois, pour établir les orientations pédagogiques
essentielles à la mobilité des élèves d'un
établissement à l'autre, pour voir à la normalisation de
la valeur des diplômes, à la gestion des équivalences, une
commission des études musicales devrait être maintenue.
Composée de représentants des différents
établissements d'enseignement, cette commission devrait, pour
répondre aux exigences de l'efficacité, être
décisionnelle. Elle serait chargée de gérer les questions
pédagogiques qui s'appliquent à tous les établissements
application de la philosophie de base de formation musicale et gestion
des programmes communs et laisserait au conseil d'administration de
chaque école la latitude nécessaire pour régler les
problèmes particuliers. (21 h 30)
Nous sommes d'avis que les décisions prises sur un plan local par
ceux-là mêmes qui les appliquent sont plus rapides, plus
efficaces, plus adaptées et, finalement, moins coûteuses. Il nous
semble, au contraire, que le projet de loi obéisse à une logique
qui veuille placer l'enseignement et la formation musicale au service de la
bureaucratie, plutôt que de prévoir une équipe de soutien
pour guider et servir la formation de nos artistes.
Au chapitre II, aux objets et pouvoirs, on donne comme premier objet:
«dispenser de la formation professionnelle et du perfectionnement dans
les domaines de la musique et de l'art dramatique». Les «de»
et «du» indiquent une certaine restriction, comme pour permettre de
dispenser une partie de la formation et une partie du perfectionnement. Cet
objectif est trop imprécis et il crée inutilement une
ambiguïté. Nous suggérons plutôt de garder la
fonrulaîion de l'ancienne loi, qui stipule, à l'article 3, que
l'objectif du Conservatoire est de donner une «formation professionnelle
de compositeurs, de chanteurs, d'instrumentistes et d'acteurs». Cela
signifie la formation de compositeurs, de chanteurs, d'instrumentistes, de
chefs d'orchestre, de la musique ancienne à la musique contemporaine, et
cela inclut toutes les disciplines pertinentes à cette formation. Ainsi,
l'institution favorise le maintien de la mémoire et encourage, en
même temps, l'innovation: deux conditions d'une tradition vivante
orientée vers l'avenir.
Dans le deuxième objet, on se demande qu'est-ce que c'est
vraiment la signification de l'expression: «susciter et favoriser une
formation initiale de qualité». Quand on se reporte au document de
Mme Bacon, en 1989, il est expliqué que le Conservatoire doit chercher
à ne plus dispenser lui-même de l'enseignement initial. Quand on
lit directement: «susciter et favoriser une formation initiale de
qualité», on pourrait tout à fait comprendre l'inverse.
D'ailleurs, aujourd'hui, il y a des groupes qui ont, justement,
interprété carrément l'inverse. Je voudrais juste vous
faire remarquer que la compétence du premier professeur pour un
élève débutant revêt une valeur inestimable, qui
peut expliquer la différence entre un bon musicien et un grand virtuose.
Alors, quand on dit qu'on ne doit pas dispenser du tout d'enseignement initial,
ça peut avoir des conséquences à moyen terme et à
long terme.
Quand on parle, à l'objet no 3, de «susciter et favoriser
[...] la présence d'organismes essentiels à la vie
musicale», on s'est posé la question: Qui aura la
compétence reconnue pour évaluer le rôle essentiel des
différents organismes?
L'article 18 se termine par: «Dans la poursuite de ses objets, le
Conservatoire tient compte de la spécifi- cité de chaque
établissement d'enseignement.» Ainsi, à l'instar des
conservatoires français, le réseau doit tendre vers une
unité de philosophie de base de formation musicale, plutôt que de
se résigner à ne produire que des copies conformes à tous
les niveaux. Il doit comporter deux paliers d'institutions nous sommes
d'accord pour concevoir deux paliers: les conservatoires nationaux de
région et les conservatoires nationaux supérieurs, qui seraient
Montréal et Québec.
Nous privilégions la souplesse et l'acceptation des
différences causées par le positionnement régional des
conservatoires à une centralisation systématique, qui correspond
à un nivellement par le bas: ce qu'un conservatoire ne pourrait pas
offrir serait refusé aux autres. Cette attitude non concurrentielle,
ainsi que le moulage forcé, sont démotivants, abrutissants et
sclérosants. Permettre le droit à la différence n'exige
pas l'élimination du respect fondamental du contenu pédagogique.
Les cours des différents cégeps ne sont pas tous identiques et,
pourtant, leurs diplômes sont tous reconnus.
À l'article 20, quand on parle du régime des études
collégiales, on dit: «Les diplômes ou autres attestations
relatifs à des programmes d'études collégiales sont
décernés en application du régime des études
collégiales.» Est-ce que ce petit paragraphe condamne le
Conservatoire à abandonner son système pédagogique de
promotion par matière? Ainsi, l'élève qui a l'oreille
absolue devra assister en classe à tous les cours de solfège
prescrits par le programme collégial pour obtenir le bon nombre de
crédits et avoir droit à son diplôme! Parce que le
programme aura prescrit un cours de solfège et non pas un cours
d'arrangement ou de composition, l'élève devra physiquement
assister à un cours de solfège, même s'il n'en a pas
besoin.
Il y a d'autres éléments aussi à considérer.
Un violoniste de niveau cégep au Conservatoire a déjà huit
à 10 ans de formation, alors qu'un chanteur du même âge
n'est strictement qu'un débutant, sans même de bagage musical, la
plupart du temps. Est-ce que ces deux élèves-là devront
suivre les mêmes cours pour répondre aux normes du régime
collégial? Si c'est cela que ça veut dire, ce changement n'est
pas une amélioration! Au contraire, ce système freine
l'apprentissage et ne tient aucun compte du potentiel individuel de
l'élève, en plus de restreindre sa culture. Le système de
promotion par matière du Conservatoire a fait ses preuves. Il a, de
plus, la qualité de développer au maximum le talent, au lieu
d'imposer aux élèves avancés ou plus talentueux le rythme
des plus faibles ou des moins avancés de la classe, ce qu'on
déplore, malheureusement, très souvent dans le système de
l'éducation publique actuel.
À l'article 21, où on parle de certificats ou
d'attestations d'études universitaires, on s'est posé la
question: Est-ce qu'il ne faudrait pas, pour permettre aux conservatoires de
décerner des certificats ou des attestations d'études
universitaires, amender la Loi sur les établissements d'enseignement de
niveau universitaire et, nommément, désigner le Conservatoire
comme établissement d'enseignement de niveau universitaire?
À l'article 22: «Le Conservatoire peut, par
règlement: «1° prescrire le paiement de droits d'admission ou
d'inscription aux services d'enseignement offerts par le Conservatoire et de
droits de scolarité afférents à ces services».
Cet article met brutalement fin à 50 ans d'accessibilité
à la culture musicale au Québec. Il faut le dire, bon nombre de
nos artistes n'auraient jamais eu accès à la formation musicale
sans la gratuité offerte par les conservatoires. Est-ce que la politique
culturelle du gouvernement ne doit pas démocratiser la culture? Ne
doit-elle pas faciliter l'accès aux arts et à la culture?
La disposition de la perte de la gratuité entraînera un
changement radical de la clientèle. Ça établira un
élitisme où l'aisance des bien-nantis prévaudra sur le
talent artistique, d'autant plus que l'article 22 ne donne aucun critère
comparatif des montants exigés en guise de frais d'admission ou de
scolarité. À la rigueur, il pourra en coûter deux fois plus
cher d'étudier au Conservatoire qu'à l'université.
L'article 21 laisse pressentir une reconnaissance des diplômes du
Conservatoire, sans toutefois la garantir. Le projet de loi, à l'article
22, prévoit établir des frais d'admission et de scolarité.
Alors, l'élève, qui devra payer de toute façon, aura le
choix entre une institution qui lui garantit des diplômes reconnus et le
Conservatoire.
Au chapitre III, dans les organes consultatifs du Conservatoire, nous
avons un peu modifié ces organes-là; pour nous, ça devient
des organes décisionnels. Alors, à la section I, à la
commission des études, dont on a déjà parlé
tantôt, ce qu'on doit retenir, principalement, c'est que cette Commission
des études musicales doit avoir un pouvoir décisionnel pour
établir et gérer les grandes orientations pédagogiques qui
s'appliquent à tous les établissements application de la
philosophie de base de la formation musicale et gestion des programmes communs
doit avoir un pouvoir décisionnel pour régler les
procédures d'évaluation de l'apprentissage et de la sanction des
études.
Relèvent aussi de son champ de compétence, les projets de
règlement relatifs au régime pédagogique, les projets de
programmes d'études du Conservatoire, de même que les projets
concernant les prix et les concours du Conservatoire. Elle est composée
de représentants des différents établissements
d'enseignement.
Le conseil d'orientation serait remplacé par un conseil
d'administration local détenant un pouvoir décisionnel. Ce
conseil tiendrait compte des besoins spécifiques régionaux,
déciderait des critères de sélection du directeur, des
priorités locales, ainsi que de l'orientation générale de
l'institution. Il y aurait aussi des gens d'affaires de la région.
Et nous ajouterions, en section III, la commission pédagogique
qui était prévue dans les conventions collectives
qui réglerait les modalités de l'organisation scolaire, les
modalités de l'application du ré- gime pédagogique,
traiterait des projets de règlement concernant la conduite et la
discipline des élèves.
Il a été question des dispositions transitoires et
finales. On trouve que ce comité transitoire a vraiment beaucoup de
pouvoirs. À la limite, le conseil d'administration pourrait, par
exemple, durant son exercice de transition, limiter considérablement le
nombre d'élèves d'un établissement d'enseignement, ou
fixer des frais d'admission ou de scolarité très
élevés, ou encore modifier les affectations budgétaires
sans que quiconque n'ait eu son mot à dire.
Le projet 135, dans sa conception actuelle, provoque une profonde
inquiétude, une grande insécurité. Il semble vouloir
effacer toutes les spécificités du Conservatoire qui ont fait sa
force au fil des ans et qui lui permettent, aujourd'hui, de brandir un imposant
palmarès: la gratuité et la promotion par matière,
l'encadrement individuel continu, l'excellence de ses programmes
pédagogiques. Le projet de loi semble vouloir le transformer en un
nouveau cégep ou une université supplémentaire. Il lui
applique une structure administrative beaucoup trop complexe, ce qui fait
redouter une lourdeur paralysante. Au contraire, il faudrait
décentraliser la gestion administrative et pédagogique pour
respecter les différences régionales et permettre une gestion
efficace. Les objets et la mission du Conservatoire ne sont pas clairement
définis et sont potentiellement compromis. Tel que formulé, le
projet de loi ne garantit pas la survie de l'institution. Le Conservatoire
risque d'être immobilisé davantage et, finalement, de sombrer dans
les complexités, les méandres des planifications de la structure
organisationnel le.
Nous convenons qu'il est impératif que la Loi sur le
Conservatoire soit modifiée. Tout le monde l'admet. Cependant, elle doit
préserver ce dernier de l'obligation de se transformer en une
réplique du système collégial ou universitaire. Cherchons
plutôt les moyens d'alléger sa structure au lieu de la compliquer
davantage. (21 h 40)
En conclusion, nous croyons que certains devoirs doivent être
refaits et que le texte du projet de loi doit être retravaillé et
réécrit de façon à préserver les valeurs
sûres du Conservatoire et à éviter le sacrifice du
principal responsable de la formation de nos artistes musiciens.
Je vous remercie de l'intérêt que vous manifestez pour
sauver cette institution québécoise indispensable et
irremplaçable. Et je termine par une citation extraite du rapport annuel
1991-1992 du Conseil supérieur de l'éducation:
«Au-delà du seul transfert de pouvoirs, c'est la simplification
des transactions, voire des structures et des encadrements, qui est
souhaitée, de même qu'une participation plus active des acteurs
sur le terrain; mais c'est aussi l'ouverture aux diverses formes de partenariat
et la possibilité de disposer, de façon plus autonome, des
argents en fonction des besoins éducatifs locaux.»
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme Frechette. Je
cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Frulla: Merci, Mme Frechette. Comme je le disais, il va y
avoir certains amendements apportés déjà au projet de loi
pour répondre à certaines de vos craintes. Par contre, vous avez
apporté une notion que je n'ai pas vue ailleurs, quand vous parlez de
deux paliers d'institutions: les conservatoires nationaux des régions et
les conservatoires nationaux supérieurs, Montréal et
Québec. On a beaucoup parlé, évidemment, de ne pas faire
de différence entre l'enseignement en région et celui de
Montréal, malgré qu'il y a un certain bassin à
Montréal qui fait en sorte qu'il y a certains cours qui se donnent, ou
à Québec, aussi. Mais c'est la première fois, finalement,
que je vois cette proposition, et j'aimerais que vous m'en parliez un petit peu
plus, à savoir c'est quoi, là.
Mme Frechette (Gisèle): II y a quand même un petit
côté de réalisme à concevoir. Je pense qu'avant que
le conservatoire de Val-d'Or, par exemple, puisse justifier l'ouverture d'une
classe d'opéra, ça peut prendre quelque 10 ans. Même si on
dit que les conservatoires doivent offrir les mêmes services à
tout le monde, je pense que la philosophie de base doit effectivement
être là pour tout le monde, il y a quand même des programmes
pédagogiques qui doivent s'appliquer à tout le réseau,
mais il y a quand même des différences qu'on doit apporter. Et je
pense qu'il est normal, là où le bassin est le plus fort,
à Québec et à Montréal, que la plus grande
diversité des cours soit dispensée dans ces deux
institutions-là, qui deviendraient, par la même occasion, les
conservatoires régionaux avec un plus. C'est pour ça qu'ils
seraient comme à un niveau supérieur.
Mme Frulla: On parle aussi d'activités de
perfectionnement. Il y a des cours, évidemment, qui se donnent, de
perfectionnement, présentement au Conservatoire, mais ce n'est pas dans
la mission du Conservatoire. Et, contrairement à ce qui était dit
tantôt, la loi donne au Conservatoire cette mission de perfectionnement
à des artistes déjà professionnels. Vous qui,
évidemment, travaillez avec plusieurs membres, etc., est-ce que... On
nous l'a beaucoup demandé, l'UDA nous l'a demandé, d'ailleurs, en
1991. Mais quelle est l'ampleur de ces besoins-là et quel type
d'activités, vous pensez, répondrait mieux à ces
besoins?
Mme Frechette (Gisèle): Je pense que ça touche un
peu le cadre pédagogique. Il faudrait un peu entrer dans les
détails des commissions pédagogiques. Mais c'est sûr que,
quand on veut... Voyons! je m'excuse, j'ai un blanc. Est-ce que vous pourriez
me répéter un peu? J'ai...
Mme Frulla: Quand on parle de perfectionnement. ..
Mme Frechette (Gisèle): Ah oui! D'accord.
Mme Frulla: ...pour vos membres, par exemple.
Mme Frechette (Gisèle): Quand les élèves
sortent du Conservatoire, il y a vraiment un vide au niveau professionnel,
parce que l'intégration ne se fait pas du jour au lendemain. Ce n'est
pas comme le médecin qui peut professer le lendemain de... On leur fait
toujours une blague pour dire qu'un compositeur, quand il a son prix, il va
s'acheter une petite plaque, puis il accroche ça après sa porte,
puis, après ça, il attend que le téléphone
sonne.
Cette transition-là, il faut qu'on l'aide, puis je pense qu'une
des façons de l'aider qui est la plus sécurisante pour le
finissant et la plus prometteuse pour lui permettre de rentrer dans le
marché du travail, c'est de lui permettre de prendre des cours de
perfectionnement, autres que ceux qu'il a suivis strictement pour ses cours. Il
a besoin de cours d'intégration, un peu de marketing, il a besoin de
savoir comment ça fonctionne le milieu, il a besoin de... Et ça,
ce n'est absolument pas donné nulle part dans les cours au
Conservatoire. Et, quand un quatuor, par exemple, se forme au Conservatoire, si
on lui donnait la possibilité, après l'obtention des prix, de
travailler avec un maître, mais d'aller plus loin que la formation
musicale qu'on lui a donnée pendant son cours, et de voir un peu de mise
en scène, et de voir un peu comment étayer sa carrière et
aller voir, pourquoi...
Dans ces cours de perfectionnement, il y a plein de choses qui peuvent
entrer en ligne de compte, qui peuvent être considérées, et
à peu de frais, finalement, parce que les ressources humaines sont
là, au Conservatoire, pour le faire. Excepté que les
élèves, bon, quand ils sont partis, ils sont partis.
Mme Frulla: II y a une chose, une précision que je voulais
apporter, aussi, quand vous dites: «Ne faudrait-il pas, pour permettre au
Conservatoire de décerner des certificats ou attestations
d'études universitaires, amender la Loi sur les établissements
d'enseignement de niveau universitaire»? Dans notre consultation avec le
ministère de l'Enseignement supérieur, le sous-ministre, M.
Pierre Lucier, et Mme Robillard, à moi, m'ont dit que, dans le nouvel
article 21 de cette loi, le fait de fonder une corporation permet à
cette corporation d'attribuer des diplômes universitaires, ce qui fait
que, dans la nouvelle loi sur l'enseignement, vous retrouvez, finalement, cette
même volonté. Donc, ça, c'est pour vous rassurer.
J'ai une question à vous poser, spécifique à
l'inclusion, si on veut, au sein d'orchestres symphoniques,
d'élèves du Conservatoire pour bénéficier d'une
expérience pratique. On en a discuté tantôt avec des
dirigeants d'orchestres symphoniques et on sait aussi que c'est important pour
les jeunes, par exemple, ou, enfin, les élèves d'avoir une
expérience pratique et aussi de côtoyer des professionnels, ce qui
fait en sorte que, évidemment, spécifiquement en région,
entre autres... je dis en région, mais même à
Montréal, Québec, etc., ce
qui est important, c'est qu'ils aient une expérience pratique de
terrain. Et je voudrais savoir comment vous voyez ça.
Et on parlait beaucoup... Et je me réfère au genre
d'actions qui sont menées, présentement, pour professionnaliser
l'orchestre du SaguenayLac-Saint-Jean, par exemple. Et je pense que c'est
dommage, d'une certaine façon, puisque, encore là, c'est de
priver les élèves de cette présence, et j'en suis, pas
continuelle, mais au moins sporadique dans l'orchestre, pour justement leur
donner cette expérience qu'ils ne pourraient peut-être, en tout
cas, jamais acquérir ailleurs. Alors, j'aimerais ça que vous
élaboriez un peu là-dessus, là.
Mme Frechette (Gisèle): Bien, d'abord, j'ai presque envie
de vous poser des questions, parce que je ne sais pas vraiment de quoi il
s'agit avec l'orchestre du Saguenay. On n'est comme pas au courant de...
Mme Frulla: Bien, Saguenay ou Trois-Rivières. Est-ce
que... Bon! Alors, je vais poser cette question-là, parce que, bon,
c'est... Est-ce que vous, la Guilde, par exemple, voyez de façon
très positive la présence d'élèves au sein
d'orchestres symphoniques on en a sept, présentement, là;
plus que ça, on en a neuf pour justement leur donner cette
expérience nécessaire, là, expérience
professionnelle, si vous voulez, nécessaire?
Mme Frechette (Gisèle): Oui. Je vais juste faire un petit
commentaire et je vais laisser François répondre. Je veux juste
dire que les élèves qui sont disponibles pour aller jouer dans
ces orchestres-là, ça se multiplie, ça, au fil des ans, il
y en a toujours des nouveaux, et les élèves qui sont sortis et
qui seraient prêts à aller travailler dans ces
orchestres-là si on va au fil du raisonnement, au bout du
raisonnement ils n'auront pas de place pour aller jouer, parce qu'il va
y avoir d'autres élèves qui vont aller jouer.
Mme Frulla: D'accord. Mais, si, par exemple, dans je ne
sais pas, moi certaines occasions on peut finalement les nombrer
ces occasions-là mais sans que ça soit vraiment,
là, pratique habituelle, c'est-à-dire de dire: Bon, on fait un
orchestre... pas un orchestre d'étudiants, là, finalement, avec
les orchestres symphoniques dans les régions, mais de dire, par exemple,
que, dans certaines occasions, on enrichit, si on veut, l'orchestre
d'étudiants de conservatoires, mais le faire systématiquement,
par exemple, pour leur donner cette expérience-là, qui est une
expérience pratique unique, là. (21 h 50)
Mme Frechette (Gisèle): Oui, c'est une bonne
expérience pour ces élèves-là. Cependant, ça
ne remplit quand même pas le rôle complet d'un orchestre de
formation, parce que, dans un orchestre de formation, comme l'orchestre Bell ou
l'orchestre du Conservatoire, le répertoire n'est pas le même que
celui qui est pratiqué à Trois-Rivières toi moment
où ils ont un surplus d'effectifs parce qu'ils utilisent les
élèves du Conservatoire. Ça n'a pas la même
portée pédagogique. Mais je vais laisser répondre
François.
Le Président (M. LeSage): M. Lanthier, vous voulez
rajouter?
M. Lanthier (François): Merci, M. le Président. Je
pense que la Guilde l'a souvent exprimé, lors des négociations
que nous avons entreprises avec la plupart des orchestres régionaux, des
orchestres de banlieue, que cette collaboration-là avec les orchestres
musicaux en région, c'est important; c'est important pour nous.
Cependant, la Guilde n'accepte pas que les orchestres se servent des services
gratuits des étudiants pour occuper des postes de musiciens
professionnels. Et c'est seulement dans cette perspective-là qu'on a des
objections à formuler.
Vous avez entendu, nous avons tous entendu, tout à l'heure, M.
Brochu, qui est le président de l'orchestre de Trois-Rivières,
nous parler de la participation des étudiants à des concerts de
l'OSTR, qui permet la production d'oeuvres que les orchestres, autrement,
n'auraient pas les moyens de faire. Mais où est le souci du travail
pédagogique derrière ça? C'est la seule question qu'on
pose.
Dans la mesure où l'objectif est clair, c'est de permettre
à l'étudiant d'avoir une expérience pédagogique
utile et intéressante, d'accord. Et la Guilde a toujours dit: Oui,
faisons-le! Mais, si, l'objectif, c'est de remplacer des postes de musiciens
professionnels par des étudiants qui ne coûtent rien et,
comme des étudiants, il y en a, ça roule, il y en a tout le
temps, à toutes les années bien ça, on a de grosses
réserves par rapport à ça.
Mme Frulla: Mais, non, c'est parce que, là, je reviens au
projet de loi. Je m'excuse, là, mais c'est parce qu'on a parlé de
partenariat.
M. Lanthier (François): Alors, ceci dit, pour l'orchestre
de Trois-Rivières, M. Gélinas l'a exprimé, nous avons,
nous sommes presque sur le point de régler cette
négociation-là, puis je pense que, dans le cas du projet
d'entente collective, on a prévu la possibilité d'une
collaboration entre l'orchestre et le Conservatoire. Alors, évidemment,
c'est ça, c'est limité. Il y a deux productions... En tout cas,
je ne veux pas commencer à mettre ça ici, là, à
exposer ici des négociations collectives, les questions de
négociations collectives, mais, s'il n'y a pas d'entente, la raison
essentielle, ce sera parce que la Guilde refuse l'apologie du «cheap
labor». Mais, à part de ça, c'est possible de
s'entendre.
Mme Frulla: D'accord. Mais, je vous pose la question par rapport
au projet de loi, parce que, que ce soit au niveau des intervenants qu'on a
entendus cet après-midi, etc., on parle beaucoup de partenariat. On
parle beaucoup, aussi... on parlait d'un conseil d'orientation pour essayer,
justement, d'unir toutes les
forces, spécialement en région. On a parlé,
même, d'ouvrir un peu son conseil d'administration pour, justement,
inclure vous avez parlé de gens d'affaires bon, un plus
grand nombre possible de gens impliqués dans le milieu musical en
région.
On a même parlé d'avoir des conseils d'orientation
obligatoires, c'est-à-dire rencontres obligatoires deux fois par
année, pour, justement, créer cette synergie. Et, pour moi,
ça me paraît important que tous les intervenants participent,
justement, à ce rayonnement, sans pour autant faire du «cheap
labor» je pense que ce n'est pas l'intérêt de qui que
ce soit mais comme ajout, par exemple. Ne pas couper des musiciens, mais
ajouter à un ensemble qui existe déjà, quelques fois par
année, pour donner des expériences qui sont concrètes et,
je pense, aussi très bénéfiques, et qui seraient
complémentaires, si on veut, à l'enseignement qu'on dispense au
niveau des conservatoires en région, je pense que c'est ça, le
but.
Le Président (M. LeSage): Mme Frechette.
Mme Frechette (Gisèle): Si vous permettez, en y mettant un
petit bémol, pour que les conservatoires ne deviennent pas des
institutions de services. Si...
Mme Frulla: Mais, ce n'est pas le but, là. Mme
Frechette (Gisèle): Pardon?
Mme Frulla: Parce que, dans un sens, j'essaie de comprendre,
là, Mme Frechette.
Mme Frechette (Gisèle): Bien, je veux dire, parce
qu'à un moment donné ça devient...
Mme Frulla: Parce que, comme les conservatoires, il y a des
étudiants qui en sortent, donc qui ont besoin d'emploi ça,
c'est une chose, il faut trouver des débouchés et que,
d'un autre côté, il y a ceux qui sont à l'intérieur
et qui ont besoin ne serait-ce que de côtoyer des professionnels pour,
justement, finalement, avoir, je pense, en tout cas, un enseignement qui est
beaucoup plus complet... Mais ce n'est pas... un n'est pas là pour
remplacer, en permanence, les autres. C'est juste pour améliorer, si on
veut, le curriculum et améliorer leur formation.
Mme Frechette (Gisèle): Oui. Cependant, la façon
dont ça se fait, physiquement, cet apport-là, je ne suis pas
convaincue de la valeur pédagogique de l'élève du
Conservatoire qui a travaillé pendant deux ou trois mois sa partition au
Conservatoire et qui arrive à deux répétitions, avec un
professionnel assis à côté de lui, puis un concert, sinon
le fait que c'est sûrement très stimulant.
M. Tremblay (Gilles): Vous permettez, M. le Président, que
j'ajoute...
Le Président (M. LeSage): M. Tremblay, allez-y.
M. Tremblay (Gilles): ...un petit éclaircissement
là-dessus. Par exemple, à Montréal, il y a un orchestre du
Conservatoire. Le rôle de cet orchestre, son devoir, c'est de faire
expérimenter aux jeunes étudiants toutes sortes de styles: du
style classique, du style romantique, du style contemporain, différents
styles, donc. Tandis que les orchestres auxquels vous faites allusion, qui
étaient représentés tout à l'heure, en
général, ces orchestres ont un répertoire très
restreint. Ils font rarement de la musique contemporaine, par exemple. Ils ne
se spécialisent pas, alors qu'il faut, pédagogiquement, que les
élèves connaissent tout ça. Et ils ont cette
expérience à travers un orchestre, qui est l'orchestre du
Conservatoire, qui existe actuellement, en tant qu'élèves. Alors,
je pense qu'il y a deux choses qu'il ne faut pas mélanger.
Quant à l'idée, qui pourrait être excellente, de
stages dans un orchestre, ça pourrait être fait si, par exemple,
l'OSM ou l'OSQ offraient des stages limités. Ça, c'est une chose,
un stage, c'est une chose tout à fait différente. Et, si vous
voulez, c'est un peu ce qui se passe lorsque nos élèves vont dans
un orchestre international, les Jeunesses musicales ou autres. Ils travaillent
avec un grand maître, avec des musiciens d'un peu partout. Ça, ce
sont de vrais stages. Mais, autrement, je pense qu'il y aurait un grand danger
de confusion et même d'affaiblissement de l'enseignement
pédagogique donné dans les orchestres de conservatoires.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Tremblay. Ça
va, Mme la ministre?
Mme Frulla: Oui, ça va.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: M. le Président, très
intéressant toute cette discussion, mais un peu loin du contenu du
mémoire de nos amis de la Guilde des musiciens. Je ne commenterai pas
cette stratégie, mais j'aimerais revenir sur le contenu de votre
mémoire fort intéressant, qui m'a moi-même allumé
sur un certain nombre de réalités, qui, à ce jour,
étaient passées inaperçues, et je tiens à vous
remercier de l'avoir fait, particulièrement en ce qui a trait à
la composition du comité exécutif. J'aurais aimé que la
ministre puisse réagir à la question que vous lui posez, question
pertinente, lorsque vous soulignez: «Est-ce à dire que les membres
du comité exécutif seront les personnes nommées
politiquement, étrangères à l'institut, et non pas les
personnes actives oeuvrant dans les établissements d'enseignement et
seules parfaitement au courant des vrais problèmes?»
Je pense qu'une lecture attentive du projet de loi nous amène
à répondre de façon affirmative à cette
inquiétude. Et je pense que nous devrons modifier, sans contredit, cette
réalité si nous souhaitons donner suite aux discours
généreux auxquels nous avons pu assister
depuis le début de nos travaux.
En plus, aussi, de souligner, là, à l'article 4, lorsque
vous dites: «Pourquoi les pairs qui doivent élire leurs
représentants ne pourraient-ils pas déterminer eux-mêmes
les critères et la procédure du vote, selon les coutumes de leurs
associations respectives?»... Vous avez entièrement raison. On a
vu, dans d'autres organismes et associations, que le Parlement a
habilité par une loi ce genre de procédure. Je pense, par
exemple, au Conseil permanent de la jeunesse, qui, par le biais, non pas d'une
assemblée générale, mais par le biais d'un forum,
là...
Une voix: Un collège électoral.
M. Boisclair: ...collège électoral, voilà,
par le biais d'un collège électoral, lui-même
réussit par une procédure, qui est quand même assez simple,
en bout de course, à élire ses représentants. C'est un
genre de formule qui pourrait être retenue, et simple, et efficace dans
son utilisation.
Ma question, ceci étant dit... Et je vous remercie pour ce
mémoire, rédigé, je présume, aussi, rapidement mais
rempli d'un contenu qui nous sera certainement fort utile pour la discussion
article par article.
J'aimerais vous entendre parler sur cette proposition des professeurs,
qui requièrent la nomination d'un secrétaire
général plutôt que d'un directeur général.
Au-delà de l'appellation significative, j'en conviens
est-ce qu'il n'y aurait pas lieu aussi de regarder quant à la
délégation des pouvoirs, quant au mandat de cet individu? Et,
là-dessus, j'aimerais peut-être connaître votre point de
vue.
Le Président (M. LeSage): Mme Frechette. M. Tremblay
(Gilles): Bon, écoutez...
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Tremblay, allez-y.
M. Tremblay (Gilles): Bon, d'accord, mais, enfin, vous pourrez
ajouter, aussi, des choses. Si nous avons pensé à un
secrétaire général plutôt qu'à un directeur
général, c'est que nous avons pensé à quelqu'un,
non pas qui donne des ordres, mais qui reçoit ses ordres de chacune des
institutions. Ça a surpris certains qu'on emploie l'expression
«secrétaire général», en disant: En
général, on n'emploie pas cette expression. Mais je vous
réfère, par exemple, à l'ONU toutes proportions
gardées, les conservatoires sont moins importants en nombre; il s'agit
de la planète, au fond mais l'ONU a à sa tête un
secrétaire général, qui est mandaté par les
États. Donc, c'est un mouvement qui va vers le haut. Il est
mandaté par les États, il est au service des États. Et
c'est un peu ce que nous voudrions au Conservatoire: un secrétaire
général au service de chacune des institutions. (22 heures)
Voici la raison pour laquelle nous avons insisté
là-dessus. C'est qu'on a constaté, durant ces dernières
années et c'est une chose qui s'est
détériorée de plus en plus que la direction
générale travaillait de plus en plus fermée sur
elle-même, dans une sorte de bunker, venant nous consulter, entre
guillemets, de temps en temps mais ce ne sont pas de vraies
consultations et prenant des décisions qui sont loin de la base,
loin de ceux qui oeuvrent. Et il me semble que, dans toute
société qui se veut saine, on doit rapprocher les centres de
décision de ceux qui oeuvrent. Alors, c'est pour ça, si vous
voulez, c'est dans cette perspective de décentralisation, tant
administrative que pédagogique, que nous avons pensé à un
secrétaire général. Bien sûr, les directeurs locaux,
eux, auraient toute responsabilité. Il faut qu'il y ait des directeurs
locaux qui soient beaucoup plus responsabilisés qu'actuellement et
près des professeurs, également.
Donc, ce que nous proposons, c'est une sorte de renversement de pyramide
et c'est une chose qui peut être très bénéfique pour
le Conservatoire. Parce que la structure qui est proposée actuellement,
Mme la ministre, on la trouve extrêmement, extrêmement lourde. Tout
à l'heure, on a encore parlé de lourdeur, mais je crois qu'il
faut viser à avoir des structures les plus légères et
rapides possible; et, à ce moment-là, ça va
économiser des sous à l'État et des sous à tout le
monde, et beaucoup d'énergie. C'est tout simplement le sens qu'on donne
au voeu d'avoir un secrétaire général. Si, pour des
raisons de mots, on doit l'appeler directeur, appelons-le directeur de
coordination, par exemple, en définissant son rôle de façon
claire qui serait surtout de coordonner les différentes instances.
Est-ce que j'ai répondu à votre question?
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Oui, tout à fait. Ce qui m'amène
à vous poser la question, justement, sur le rôle du directeur des
études. Vous estimez qu'il n'est pas nécessaire de nommer un
directeur des études, vous y voyez même un alourdissement, vous
préférez qu'on renforce et responsabilise les commissions
pédagogiques qui existent déjà. Est-ce que je peux tout
simplement... Vous pourrez largement commenter.
Mme Frechette (Gisèle): Oui.
M. Boisclair: Vous qui, aussi, avez une expérience
étrangère, quant à l'organisation des conservatoires,
est-ce que, à votre connaissance, cette structure et ce poste de
directeur des études existent dans d'autres conservatoires?
M. Tremblay (Gilles): II y a plusieurs volets à votre
question. Je vais commencer par le dernier. Par connaissance
étrangère, vous faites peut-être allusion à ce qui
se passe, par exemple, en France. On dit toujours
que les conditions sont différentes ici, mais il y a deux
conservatoires nationaux supérieurs et, pour les programmes, il n'y a
pas de programme commun, il n'y a pas de direction des études commune
pour ces deux conservatoires. Chaque conservatoire donne un programme
d'excellence comme il l'entend, et on ne voudrait surtout pas qu'il y ait un
programme commun. Chacun le fait le mieux possible; ça fait une
émulation, et on fait confiance aux gens. À ce moment-là,
un directeur des études au-dessus, c'est un étage de plus qui
alourdit le système, cette fois-ci non pas au point de vue
administratif, mais au point de vue pédagogique. Alors, ça, c'est
le dernier volet. Est-ce que j'ai répondu...
M. Boisclair: Si on peut juste poursuivre sur cette
question-là, la notion de réseau, comment concilier votre point
de vue, où vous dites: II est même important de susciter
l'émulation entre les institutions... Je comprends votre point de vue,
et on le voit très bien, par exemple, si on utilise l'exemple des
conservatoires d'art dramatique, qui, effectivement, à Québec et
à Montréal, offrent une formation qui, à bien des
égards, les distingue l'un de l'autre. Est-ce que cette notion de
réseau, qui est chère à la ministre, et lorsqu'on parle de
la mobilité des étudiants au sein du réseau, c'est un
principe qu'on doit retenir dans l'étude de ce projet de loi?
Mme Frechette (Gisèle): Je pense que ce qu'il faut
comprendre...
Le Président (M. LeSage): Mme Frechette.
Mme Frechette (Gisèle): Je pense que ce qu'il faut
comprendre, c'est que le conservatoire national supérieur est d'abord un
conservatoire national régional, plus le supplément qui fait de
lui le conservatoire national supérieur, et que la notion de
réseau de Mme la ministre est tout à fait conservée dans
le premier niveau...
M. Tremblay (Gilles): Intégralement. M. Boisclair:
C'est une... C'est une...
Mme Frechette (Gisèle): ...ce qui permet la
mobilité des élèves et l'équivalence des
diplômes.
M. Boisclair: Ce que je vous... Ce que je vous...
M. Tremblay (Gilles): Et on garderait une commission des
études, justement. Pour...
Le Président (M. LeSage): M. Tremblay.
M. Tremblay (Gilles): ...cette question que vous posiez tout
à l'heure: Qu'est-ce qui coordonnerait tout ça? bien, c'est
justement la commission des études qui est là.
M. Boisclair: Mais, quant à la composition de la
commission des études, est-ce qu'elle vous apparaît correcte?
M. Tremblay (Gilles): II faut la réviser, encore une fois,
en la rapprochant le plus possible des gens du milieu, de ceux qui
oeuvrent.
M. Boisclair: Justement, sur cette question de composition, on a
beaucoup parlé, tout au long de la journée, de la composition du
conseil d'administration. Les gens seront mandatés au conseil,
dépendant des individus, pour des mandats de trois ans, deux ans et
même un an. Il se peut donc que, pendant plusieurs années, un
conservatoire ne soit représenté d'aucune façon au conseil
d'administration. Est-ce que cette réalité vous inquiète
et vous amènerait à nous proposer une façon originale de
s'assurer d'une rotation ou d'une représentation des différents
conservatoires?
Mme Frechette (Gisèle): En fait, ce qu'on présente
dans notre mémoire, c'est un conseil d'administration à chaque
conservatoire, une commission pédagogique à chaque conservatoire,
une commission des études pour tous les conservatoires et un
secrétaire général qui coordonne le tout. Je pense que les
orientations ministérielles ou gouvernementales peuvent très bien
être acheminées à travers la commission des études
plutôt que...
M. Boisclair: II serait intéressant d'entendre la
ministre. Je comprends très bien que c'est... Est-ce que la ministre
pourrait nous dire ce qu'elle pense de cette suggestion-là?
Mme Frulla: C'est parce que j'ai de la difficulté à
comprendre. Vous parlez de lourdeur. Bon. Alors, vous parlez d'un conseil...
D'abord, vous parlez de deux paliers. Ça, je ne sais pas, là.
Dans toutes les discussions que nous avons eues, évidemment, là,
régions versus Montréal, versus Québec... Mais, dans le
fond, vous dites que vous statuez la réalité. Bon. Mais, alors,
j'essaie juste de vous comprendre. Bon, deux paliers.
Vous gardez la commission d'études, pour l'instant. Dans la
commission d'études, ce que nous proposons, c'est que professeurs et
élèves sont quand même très présents, sinon
majoritaires. Donc, vous gardez une commission d'études, des commissions
pédagogiques et des conseils d'administration à chaque
institution. Bon. Maintenant, nous, ce qui nous importait aussi beaucoup,
évidemment comme le député de Gouin
c'était cette notion de réseau, cette notion de programmes
pédagogiques qui se donnent d'égale, je dirais, qualité
autant dans une institution que dans une autre. Je pense que, pour nous, c'est
assez capital, surtout qu'il y a des enfants qui sont très jeunes. Si
les parents décident, par exemple, ou sont obligés de
déménager pour une raison ou pour une autre, l'enfant continue
tout simplement sa formation dans une autre institution, puis il n'y a pas
de
différence. Donc, j'ai de la misère à comprendre en
quoi, nous, là, ce qu'on propose, c'est plus lourd que ce que vous
proposez.
Mme Frechette (Gisèle): Bien, parce que, nous, c'est
près de la base. Le conseil d'administration d'un conservatoire local va
réagir beaucoup plus rapidement, va prendre des prises de position et va
régler les problèmes beaucoup plus rapidement que s'il faut que
ça monte en haut puis que ça redescende avant d'être
appliqué.
Mme Frulla: D'accord. Alors, à ce moment-là, si le
conseil d'administration de la corporation a une représentativité
régionale, si on spécifie une représentativité
régionale, le conseil d'administration, habituellement, va prendre des
décisions globales au niveau administratif. Mais, au niveau des
régions, il y a d'abord secrétaire, ou directeur, ou, enfin,
quelqu'un qui est responsabilisé, avec responsabilités et,
là, j'en suis accrues. Et il y a aussi le conseil d'orientation
qui fait en sorte que non seulement on s'assure, finalement, de la synergie
entre le conseil, les conservatoires et les milieux, mais aussi de cette
communication si nécessaire entre les écoles de musique, les
orchestres, bon, au niveau du milieu et... (22 h 10)
Mme Frechette (Gisèle): Le conseil d'orientation, nous
autres, on l'a éliminé. Notre conseil d'administration comprend
des gens d'affaires du milieu et est en majorité formé de gens du
Conservatoire. Et je pense que l'implication dans le milieu, par la
présence de gens extérieurs au Conservatoire sur le conseil
d'administration local, va répondre à ces exigences-là
d'adaptation.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme Frechette. Alors, M.
le député de Gouin, vous voulez poursuivre?
M. Boisclair: Je veux juste être sûr que je vous
comprends. Il se fait tard, on est tous un peu fatigués.
Vous nous proposez de remplacer le conseil d'orientation de chacune des
institutions par un conseil d'administration, de maintenir la commission des
études sauf de modifier sa composition pour être sûr
d'inclure davantage de gens du milieu et de remplacer la direction
générale par un secrétaire général, qui est
au service des responsables de chacune des institutions. Mais il n'y a donc
plus de conseil d'administration en haut de l'organigramme. Je vous comprends
bien?
Bon, maintenant, le problème c'est justement là
où je voulais en venir au niveau de Fimputabilité,
j'essaie juste de voir comment on peut... Parce qu'il y a quelqu'un, à
un moment donné, qui doit rendre compte, qui doit... J'imagine, par
exemple... Je ne vois pas une université sans conseil de gouverneurs, et
uniquement laisser la responsabilité au directeur de chacune des
facultés. Mon exemple n'est peut-être pas pertinent, mais
j'aimerais juste approfondir avec vous ce dialogue.
Le Président (M. LeSage): Mme Frechette.
M. Tremblay (Gilles): Je pourrais, si vous me le permettez, M. le
Président...
Le Président (M. LeSage): M. Tremblay, allez-y.
M. Tremblay (Gilles): ...répondre par un autre exemple qui
n'est peut-être pas tout à fait pertinent, mais qui fait
comprendre aussi. Essayez, un moment, d'imaginer qu'un jour, au Québec,
on décide de se doter d'un conseil d'administration unique pour tous les
orchestres. Imaginez la zizanie, la pagaille, la guerre et
l'impraticabilité de la chose. Ce n'est pas tout à fait la
même chose, mais il y a une certaine analogie.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: On a parlé de l'exemple des Hautes
Études commerciales.
M. Tremblay (Gilles): C'est un étage inutile, en quelque
sorte. Nous, on le voit comme ça.
M. Boisclair: Oui. Mais, inutile, peut-être pour des gens
qui oeuvrent dans le réseau, mais certainement fort utile pour des gens
qui souhaitent identifier des gens qui, en bout de course, ont à rendre
des comptes quant à l'utilisation des deniers publics. Ce que vous nous
proposez, finalement, c'est de créer neuf corporations plutôt
qu'une seule.
Mme Frechette (Gisèle): Ça pourrait très
bien...
M. Boisclair: Est-ce que je comprends bien votre propos? Neuf
corporations indépendantes les unes des autres, mais quand même
régies par une commission des études conjointe pour l'ensemble
des conservatoires.
Mme Frechette (Gisèle): II faut que ce soit
coordonné, tout ça. Il faut quand même garder le plan
pédagogique, qui s'applique partout. La notion de réseau doit
quand même continuer à être sauvegardée.
M. Boisclair: Et cette responsabilité, elle serait
confiée à la commission des études.
Mme Frechette (Gisèle): À la commission des
études, oui.
M. Boisclair: C'est intéressant, mais je pense que, sur le
plan de l'administration publique, ça pose un certain nombre de
questions. Peut-être que M. Bruneau ou la ministre pourrait nous
éclaircir, nous apporter leur point de vue sur ces questions.
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre, sur le temps de
l'Opposition.
Mme Frulla: Évidemment, dans l'application, si on veut...
enfin, quand on se sert des deniers publics, c'est vrai qu'il doit y avoir une
certaine transparence. Donc, il faut que ce soit des gens qui soient
imputables, d'une part. Et, si on a une commission des études qui est
là, qui est un peu flottante... Parce que, oui, elle chapeaute, mais
c'est une commission des études et c'est vraiment neuf corporations
distinctes. On ne peut pas avoir neuf corporations liées par... En
quelque part, il y a une espèce de difficulté d'application, je
pense, ce qu'on trouve, là, au système, là-dessus, que
vous nous proposez, comparativement à une corporation avec des
établissements, des membres des établissements qui siègent
au conseil d'administration, les commissions d'études, pour s'assurer
une uniformité au niveau du programme pédagogique, mais toujours,
par exemple, par rapport à l'institution que sont les conservatoires et
leur spécificité, il ne faut pas oublier. Parce que, sur le
conseil d'administration, oui, il va y avoir des professeurs, il va y avoir des
élèves, il va y avoir des exélèves, aussi, et, pour
répondre à votre inquiétude, les gens qui sont
nommés par le gouvernement seront des gens qui auront été
proposés par les divers organismes. Ce n'est pas des gens qu'on prend en
l'air. Un peu comme ça s'est passé, par exemple, au niveau du
Conseil des arts, ce sont des gens qui ont été proposés
par les organismes, à travers desquels il y a une liste, à
travers de laquelle on choisit. Donc, il y a aussi une assurance, au niveau du
conseil d'administration, que ce ne soit pas, justement, des gens qui viennent
de nulle part et qui ne sont pas reliés, si on veut, au monde de la
musique ou de l'art dramatique. Alors, il y a une espèce d'unité,
aussi, d'action, et les conseils d'orientation, ce sont justement des conseils
d'orientation qui assurent, pour chaque organisme, aussi, le rayonnement de
l'organisme au sein de son milieu propre. C'est de là la logique.
Mme Frechette (Gisèle): Mais le danger du conseil
d'orientation... Pour nous autres, en tout cas, on ne saisit pas la nuance que
vous voulez y apporter. On conçoit que le conseil d'administration local
peut très bien remplir ce rôle-là.
Mme Frulla: C'est-à-dire que le conseil d'administration
local... un conseil d'administration prend des décisions qui sont
administratives sur la gestion de chacune. Parce que, vous autres, ce que vous
dites, ce sont neuf conseils, donc toutes des corporations
indépendantes, et qui prennent des décisions sur la gestion de
chacune des corporations, comparativement au conseil d'administration de la
corporation qui prend des décisions, finalement, administratives
importantes, mais, ensuite, que l'application se fasse par un directeur
général ça, j'en suis avec
responsabilités, donc forte- ment responsabilisé. Et les conseils
d'orientation, c'est pour s'assurer que l'application de ces mesures et, aussi,
le rayonnement de l'institution se fassent, et non pas que tout ça se
fasse en vase clos. Alors, c'est un peu cette orientation-là qu'on veut
leur donner.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la ministre. Alors,
M. le député de Gouin, je regrette, mais la période de
temps allouée à l'Opposition est complétée. Par
contre, il reste 3 min 45 s au parti ministériel.
M. Boisclair: Vous pouvez m'en donner un peu.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisclair: Non, mais elle vient d'en prendre.
Mme Frulla: Tout simplement, pour un, vous remercier.
Deuxièmement, il va y avoir, suite à vos propositions je
regardais certaines propositions des amendements au niveau du projet de
loi qui vont clarifier, aussi, certaines de vos préoccupations, d'une
part. Et, deuxièmement, nous allons essayer, justement, de
peut-être clarifier le rôle du conseil d'administration, mais nous
proposons quand même une corporation avec des personnes qui se doivent
d'être, finalement, transparentes ou encore de répondre aux
responsabilités financières que l'État leur a
dévolues. Parce que ces millions-là sont quand même des
millions qui viennent des contribuables, donc il faut y avoir une gestion
totalement transparente. Alors, c'est un peu là-dessus qu'on
s'enli-gne.
Le Président (M. LeSage): M. Tremblay.
M. Tremblay (Gilles): Très rapidement. Si, pour des
raisons de technicalité administrative, il fallait un seul conseil
d'administration, alors, à ce moment-là, je pense qu'il faut
totalement changer l'esprit des conseils d'orientation, qui seraient
plutôt transformés en conseils régionaux, qui
rééquilibreraient, en quelque sorte, l'autorité du conseil
central et, à ce moment-là, apporteraient plus
d'équilibre, plus de ballant, une balance entre les deux.
Et, aussi je veux juste terminer ça il faudrait
aussi laisser, je pense, à chaque établissement ça,
c'est très important le soin d'en choisir les membres en fonction
des besoins et des connaissances du milieu; le milieu de Chicoutimi, le milieu
de Rimouski n'est pas le même que le milieu de Montréal. Ça
devrait être fait par les gens du milieu.
Et, deuxièmement, il faudrait alors enlever à ce conseil
d'orientation deux rôles qui s'annulent l'un et l'autre. Par exemple, son
mandat, actuellement, c'est une sorte d'amalgame où on lui demande de se
prononcer sur des questions d'orientation, proprement dites, et aussi sur des
questions de cuisine interne, dans un
certain sens, et, à ce moment-là, qui devraient être
débattues purement à l'interne. Alors, je pense qu'il faudrait,
à ce moment-là, le purger de cet aspect-là. Ce serait
beaucoup plus acceptable et, surtout, ça contrebalancerait: si on ne
peut pas avoir neuf corporations, on pourrait avoir une
confédération à neuf jambes. Voilà!
M. Boisclair: Et nous proposerons le droit à
l'autodétermination pour chacun des conservatoires.
M. Tremblay (Gilles): C'est ça!
Des voix: Ha, ha, ha!
(22 h 20)
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Tremblay, Mme
Frechette, Me Lanthier, je vous remercie de votre présence, je vous
remercie de votre participation à nos débats.
Vous entendez les cloches comme je les entends. Alors, nous devrons
suspendre dans quelques instants nos travaux, mais je me propose de contacter
à nouveau tous les membres de la commission pour faire en sorte que l'on
revienne avant 23 heures et que nous puissions entendre les
représentants des directeurs de conservatoire. Alors, merci de votre
participation, et je suspends les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 22 h 21)
(Reprise à 22 h 38)
Le Président (M. LeSage): S'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. J'invite les représentants des
directeurs de conservatoire à se présenter à la table des
invités.
Alors, si je comprends bien, le porte-parole est M. Albert Grenier,
directeur du Conservatoire de musique de Montréal.
Représentants des directeurs de
conservatoire
M. Cloutier (Raymond): Non. Ça va être Raymond
Cloutier, directeur du Conservatoire d'art dramatique de Montréal.
Le Président (M. LeSage): Alors, M. Cloutier, je vous
indique que vous aurez 20 minutes pour présenter votre mémoire et
je vous demande de nous présenter les personnes qui vous
accompagnent.
M. Cloutier (Raymond): Avec plaisir. Si on m'a demandé de
lire le mémoire, c'est parce qu'il n'est pas chanté, sinon
ça n'aurait pas été moi, mais c'est seulement pour
prêter ma voix et ma capacité de lecture à la commission,
\lors, je vous présente Albert Grenier, qui est directeur du
Conservatoire de musique de
Montréal, et Jacques Clément, directeur du Conservatoire
de musique de Chicoutimi.
En deuxième préambule, avant de lire, j'aimerais vous dire
que j'ai été content d'apprendre, ce soir, que j'étais
rendu un technocrate, en plus du reste. Alors, ça me fait bien plaisir
d'avoir un diplôme supplémentaire. Mais, je dois avouer que je
suis ici non seulement en tant que directeur du Conservatoire d'art dramatique
de Montréal, mais aussi en tant qu'acteur, homme de
théâtre, artiste vivant et très vivant dans
son milieu. Et les autres directeurs des autres établissements sont
aussi, pour la plupart, comme moi, des anciens de l'institution. Nous sommes,
moi, membre de l'Union des artistes, eux, probablement de la Guilde, enfin il y
a un méli-mélo des tables qui se succèdent ici, où
tout le monde est un peu partie prenante de tous les discours. (22 h 40)
Et, finalement, la consultation qui a eu lieu a été un
travail très important fait par la direction générale, qui
nous a beaucoup consultés, les directeurs, depuis de nombreuses
années que nous travaillons sur ce projet-là. Et nous vivons dans
des petites unités d'enseignement, des écoles qui sont
pratiquement, souvent, des familles, où nous vivons avec les oreilles
ouvertes. Nous sommes sur le terrain, nous sommes tous des artistes, et je me
refuse à voir dans tout ça une grande division de luttes de
classes, ici. Tous, ce que nous voulons, c'est l'amélioration,
probablement, de la condition et de la grandeur de l'art, de la musique et de
l'art dramatique.
Alors, je vais donc vous lire notre mémoire de façon la
plus succincte possible et ça me fera plaisir, par la suite, de
répondre... tous les trois, nous répondrons à vos
questions.
Donc, en 1942, M. Wilfrid Pelletier se réjouissait de voir
créée, par voie législative, et placée sous le
protectorat du secrétaire de la province l'institution qu'il
réclamait depuis un certain temps. Le Conservatoire s'appuyait sur une
philosophie d'école d'art, basée sur la souplesse et la recherche
de l'excellence dans un contexte qui favorisait des mécanismes flexibles
et peu normalisés. Les années qui ont suivi ont assuré le
développement du Conservatoire à l'intérieur d'une
structure gouvernementale beaucoup moins complexe qu'aujourd'hui. Il jouissait
alors d'une reconnaissance importante.
La création du ministère des Affaires culturelles, au
début des années soixante, intégrait le Conservatoire dans
l'administration du ministère et, par la suite, il allait être
encadré par une direction générale. Une trentaine
d'années plus tard, le Conservatoire se trouve marginalisé par
rapport au développement considérable de l'administration
publique, d'une part, et de l'enseignement supérieur, d'autre part. Tenu
de respecter les procédures d'une administration publique moderne, il se
trouve ainsi encarcané dans un appareil de gestion qui est souvent
contraignant pour sa mission de former des interprètes et des
créateurs dans les domaines de la musique et de l'art dramatique, ce qui
l'isole de plus en plus de ses partenaires.
Cette situation devient préoccupante et, depuis 20 ans, nos
prédécesseurs et nous avons participé à la
recherche d'avenues pour la transformation du Conservatoire, transformation qui
devait s'appuyer sur les principes de souplesse et d'excellence mis de l'avant
par Wilfrid Pelletier. Par ailleurs, compte tenu de l'évolution de notre
institution et des structures juridiques des autres écoles de formation
dans diverses disciplines artistiques, nous ne pensons pas que la gestion d'une
institution comme le Conservatoire relève du mandat d'un
ministère.
Le projet de loi, maintenant. Nous sommes convaincus que l'adoption de
ce projet de loi assure la pérennité de notre institution. Ayant
été consultés et ayant suscités la réflexion
et la discussion dans nos différents établissements
d'enseignement, nous croyons que ce projet de loi accorde une plus grande
souplesse et favorise davantage l'atteinte des objectifs d'excellence
souhaités par tous. Ce projet de loi constitue un changement majeur qui
ne peut faire autrement que se traduire par une dynamisation de notre
école. Dans cet esprit, nous ne croyons pas que le Conservatoire sera
plus vulnérable, car, si une volonté de procéder à
la fermeture de certains établissements de notre réseau avait
existé, il aurait été plus facile de la réaliser en
maintenant le statu quo. Le Conservatoire se voit confirmer son statut
d'institution nationale de formation en musique et en art dramatique du fait de
sa création par voie législative.
Nous ne croyons pas qu'une forme quelconque de menace existe dans ce
projet de loi pour certaines personnes ou groupes. Nous pouvons même
affirmer que notre institution se voit consolidée par ce projet de loi
et qu'elle acquiert un souffle nouveau. Elle acquiert également une
assise juridique moderne, car, à notre connaissance, nulle part ailleurs
n'existe une école d'art qui est partie intégrante d'un
ministère.
Maintenant, nous voudrions insister sur certains aspects du projet de
loi qui nous semblent être des indicateurs de développement de
notre institution au cours des prochaines années.
Premièrement, la mission. Le projet de loi reconnaît d'une
façon explicite la mission actuelle de notre institution. Il
reconnaît également la formation verticale continue qui s'est
construite au cours des années. Et cette mission se voit
complétée par le perfectionnement disponible aux artistes
professionnels. Elle intègre aussi la spécificité de
chaque établissement. Autrefois, nous étions des sections; nous
devenons des établissements, des écoles. Mais nous voulons
particulièrement mentionner un droit nouveau, inscrit à l'article
21 du projet de loi, concernant tout grade, diplôme, certificat ou
attestation d'études que notre institution pourra dorénavant
décerner. C'est là un acquis de taille qui ne peut être que
bénéfique à nos élèves et à la
réputation de nos institutions.
Le réseau. Le Conservatoire, spécifiquement et uniquement
dans le domaine de la musique, s'est façon- né, au cours des
années, en un véritable réseau de sept
établissements d'enseignement. La reconnaissance de ce réseau
confirme un régime pédagogique commun et maintient la libre
circulation des élèves à l'intérieur du
réseau.
Nous nous réjouissons de voir inscrit, enfin, la participation
fondamentale des professeurs dans la structure de notre institution. Depuis une
vingtaine d'années, elle est simplement convenue par voie de
négociations et elle se traduit par cette participation à la
commission pédagogique, sur laquelle j'aimerais revenir plus tard si
vous avez des questions là-dessus. Mais cette participation a
dorénavant une assise législative, garante du rôle de nos
professeurs. Nous apprécions également la mention du personnel et
des élèves dans les diverses instances qui constituent la
structure du Conservatoire. Tantôt sous forme décisionnelle
le conseil d'administration ce qui est aussi un droit nouveau,
tantôt sous des modes consultatifs la commission des études
et les conseils d'orientation toutes les personnes qui oeuvrent à
la réalisation des objets du Conservatoire pourront intervenir. Cet
élément nous semble très important, d'autant plus que,
dans le cadre rigide actuel de l'administration publique, cela est une chose
pratiquement impossible et cela ne reflète pas notre
particularité.
Les normes et procédures qui sont justifiées dans
l'administration publique cadrent mal avec une philosophie de gestion d'une
école d'art qui repose sur l'ouverture, l'adaptation, la
flexibilité et, j'ajouterais, la rapidité d'exécution. Il
suffit de mentionner l'incompatibilité entre l'année scolaire de
notre institution et l'année financière du gouvernement pour
illustrer notre propos. De même, l'application d'une mesure
financière décrétée par le gouvernement, à
un moment précis de notre année scolaire, ignore toujours le
service que nous nous étions engagés à offrir à nos
élèves.
Enfin, l'autonomie. Ayant déjà mentionné que le
Conservatoire sera dorénavant moins soumis aux contraintes
administratives publiques, nous devons ajouter que, dans notre
compréhension du projet de loi, chaque établissement
d'enseignement bénéficiera d'une marge de manoeuvre plus
importante. Il faut aussi signaler que les mécanismes de
délégation, normalement accessibles à une entité
juridique distincte de l'appareil gouvernemental, favoriseront cette
décentralisation en faveur des établissements d'enseignement. De
même, l'existence des conseils d'orientation constituera pour les
directeurs un appui non négligeable dans l'exercice de leurs
fonctions.
Nous croyons donc que ce projet de loi, s'il est l'objet d'amendements
suite aux travaux de cette commission parlementaire, ne peut être que
bonifié. Pour nous, après tant d'années d'attente et
d'espoir, nous souhaitons que dorénavant existe le Conservatoire de
musique et d'art dramatique du Québec. Merci.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Cloutier. Mme la
ministre.
Mme Frulla: Merci, M. Cloutier. On vous remercie, d'ailleurs,
d'être ici, vous tous, et spécialement vous, après une
grande journée de tournage. (22 h 50)
C'est intéressant de voir, finalement, cet enthousiasme face au
projet de loi. Oui, effectivement, on a parlé, on a consulté, et
tout ça; il y a eu beaucoup de choses qui se sont dites aujourd'hui. Et
vous avez dit, vous l'avez répété qu'une institution
d'enseignement cadre mal à l'intérieur d'une structure
ministérielle. Est-ce que vous avez des exemples concrets, là
et je vous le demande à vous, M. Cloutier, et aussi aux autres
de difficultés administratives auxquelles vous êtes
confrontés dans la structure actuelle?
M. Grenier (Albert): Mme la ministre, je pense que...
Le Président (M. LeSage): M. Clément.
M. Grenier (Albert): Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. LeSage): Allez-y.
M. Grenier (Albert): Albert Grenier. On en a parlé un
petit peu dans notre texte de présentation, il y a plusieurs facteurs de
contrainte ou de rigidité qui font en sorte que ça devient,
à certains moments, pratiquement ingérable d'essayer de mettre en
forme une école d'art à l'intérieur d'un système de
fonction publique. Et je ne fais pas que me citer; je cite à peu
près tous les directeurs que j'ai connus, directeurs
généraux et même sous-ministres, depuis à peu
près 20 ans. Parce que je dois vous dire que ça fait une
vingtaine d'années que ce dossier chemine.
Et on parlait, dans notre présentation, de l'inadéquation,
par exemple, de l'année budgétaire du gouvernement par rapport
à une année scolaire qui nous cause énormément de
problèmes. Il faut, par exemple, que nous ayons pratiquement deux
systèmes de budget pour une même année scolaire, au lieu
d'un seul. Nous devons également toujours craindre, dans le
fonctionnement de notre année scolaire, qu'il y ait par exemple,
avec les décrets du Conseil du trésor à un moment
donné, un gel des crédits. Et, à ce moment-là, on
se demande exactement comment est-ce qu'on va faire pour continuer à
donner le service pour le reste de l'année scolaire. Ou même, il
peut très bien arriver que le Conseil du trésor
décrète un gel ou même une coupure dans l'embauche ou
l'engagement du personnel occasionnel. Et nous savons tous que, dans les
conservatoires, il y a beaucoup de professeurs occasionnels. Alors, à ce
moment-là, si on coupe là-dedans, qu'est-ce qu'on fait avec nos
élèves? Et ça, ce sont des exemples que je donnerais.
Il y en a d'autres qui sont peut-être plus amusants. Si, par
exemple, on veut acquérir un ordinateur pour des fins
pédagogiques je pense à la composition par ordinateur
eh bien, actuellement, on ne peut à peu près pas le faire
à cause des directives qui existent et qui font en sorte qu'il y a gel
sur l'acquisition de ces appareils. Et je pourrais vous raconter beaucoup
d'autres histoires d'horreur. Et c'est dans ce sens que nous croyons qu'il faut
revenir à une forme de gestion décentralisée qui permette,
justement, une imputabilité, mais aussi comment dirais-je?
une décentralisation du pouvoir de gérer vers la base. Et nous
croyons que, par le biais d'un projet de loi comme celui-là, c'est la
clé pour y parvenir.
Mme Frulla: On nous a dit aussi que le projet de loi... M.
Cloutier, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose?
M. Cloutier (Raymond): Oui. Il y a des objets lourds aussi. Par
exemple, on a toujours dit, depuis le début, qu'il faut rapprocher la
tête du corps; la tête est trop loin. Il est évident, quand
on parle des projets de développement, on essaie de faire quelque
chose... on change un sous-ministre! Il y a eu beaucoup de ministres de la
culture qui sont passés depuis six ans. Et il faut convaincre les gens
à la verticale, tout le temps, de ce qu'on veut faire. Et, dès
que les gens changent, il faut leur laisser le temps de s'acclimater, de
comprendre la situation. C'est un épuisement total à ne pas faire
la tâche pour laquelle on est fait, c'est-à-dire, agir sur le
terrain, diriger une école d'art, animer ces élèves, les
professeurs, rendre le service qu'on doit rendre à la communauté.
On ne peut pas négocier nos conventions collectives; on ne peut pas
négocier nos baux, et ce sont des sommes énormes. Et nous
connaissons nos besoins, nous connaissons la spécificité de nos
réalités. Et on n'a pas la «pole» sur la
véritable gestion de nos affaires.
Mme Frulla: On a parlé du projet de loi. À un
moment donné, il a été dit que le projet de loi a
été fait de façon hâtive. Il me fait plaisir de vous
entendre dire que ça fait des années qu'on y travaille, d'une
part. Deuxièmement, il a été dit qu'on devrait surseoir au
projet de loi pour, enfin, faire un projet de loi qui est peut-être plus
adapté à certains besoins.
Selon moi, la conséquence de surseoir au projet de loi,
finalement, retarde encore l'échéance au niveau d'une gestion qui
est plus adaptée, plus décentralisée au niveau, aussi, des
besoins des élèves, dans un sens. Bon, il y a toute la question
de la diplomation, la reconnaissance des diplômes, mais ça a
été mis sur la table. Et, comme vous le vivez à tous les
jours et que vous apportez quand même des exemples concrets, si, demain
matin, on décidait de surseoir au projet de loi... Et je ne parle pas de
bonifier, parce que bonifier, ça, on va le faire; apporter des
amendements, il y a eu des propositions qui ont été mises sur la
table, très concrètes, avec lesquelles on est aussi très
confortable et qui enrichissent le projet de loi et ça, j'en
suis. Mais, qu'est-ce qui arrivera si, demain matin, on sursoit au projet de
loi et on recommence l'exercice?
Le Président (M. LeSage): M. Cloutier.
M. Cloutier (Raymond): Bien là, vous allez vous trouver un
autre joueur, en tout cas, parce que ça ne se peut plus, là!
À un moment donné, on a mis nos meilleures idées, on a
cherché à conclure, après des années d'analyse de
la situation, à la forme la plus souple, la plus simple, la plus claire,
à mon avis. Moi, la problématique de lourdeur qu'il y a
là-dedans, je ne la vois pas, je ne la comprends pas. Je ne comprends
pas comment c'est lourd de réunir un conseil d'administration trois fois
par année; comment c'est lourd de réunir une commission des
études une fois par mois ou par deux mois. Je ne vois pas la lourdeur de
ça. Pour le reste, nous laisser gérer nos écoles en toute
spécificité et personnalité et, enfin, pouvoir commencer
à exister réellement.
Tout ce dont on s'occupe en ce moment, c'est d'essayer, malgré
toutes les contraintes, de le faire marcher. Et ça fonctionne, on est
pas mal bon là-dedans. On est en train de donner la preuve à
beaucoup de monde que toutes ces contraintes-là, tous ces
corsets-là, toutes ces conventions collectives... Écoutez, j'en
ai six conventions collectives au Conservatoire d'art dramatique; il y a 12
employés et 15 professeurs, et j'ai six conventions à
administrer. Ça n'a pas d'allure! On ne peut pas dire: Ah! on va encore
remettre ça, on va discuter avec toute sorte de monde. Et, la prochaine
fois qu'on va discuter, c'est à notre niveau, parce que c'est nous qui
vivons le problème. Nous l'avons, à notre avis,
réglé, école par école, sur le terrain et nous
sommes très confortables.
Je vous ai dit à la fin que le projet de loi pouvait être
bonifié. Moi aussi, j'ai des suggestions que j'aurais aimé vous
apporter...
Mme FruIIa: Oui, s'il vous plaît, allez-y donc avec des
suggestions.
M. Cloutier (Raymond): Oui? Alors, j'y vais. À l'article
4, j'enlèverais toute notion de responsable d'un établissement.
Ça nous semblait faire des catégories de directeur et d'autres de
sous-directeur, de petites écoles et de grandes écoles. Et,
à notre avis, une école d'art... et j'en ai une toute petite
à Montréal qui est très grande dans mon coeur, mais qui
n'est pas grande en termes d'effectifs. Mais ça peut être
très, très fort dans une région si un directeur est un
directeur, c'est-à-dire un véritable animateur profond. Alors, la
première fois qu'on le mentionne, c'est 4, au quatrième
alinéa. Mais il va revenir dans le document comme responsable d'un
établissement, donc de l'enlever dans tout le document.
Deuxième chose et je suis très content de le dire
nous serions d'accord pour accorder au monde de la musique deux autres
membres supplémentaires au conseil d'administration, soit un directeur
et un enseignant supplémentaires, pour refléter,
évidemment, cette grande majorité d'effectifs qui est
réelle dans le réseau. Seulement, il faut faire attention. Moi,
quand je suis entré au Conservatoire, nous étions
installés entre la classe de trompettes et de flûtes, et
c'était dans un petit, petit local. Nous avons parce qu'on est,
excusez-moi l'expression, une confrérie assez baveuse, là
pris de l'espace, de la place, et on a... Ha, ha, ha!
Mais il ne faudrait pas reculer. Et je sais que la participation au
conseil d'administration, ce n'est pas une question de votes c'est
très rare que les conseils d'administration votent c'est une
question de bien préparer ses dossiers, d'être fort en gueule et
en chiffres et d'être convaincu; et puis, d'habitude, les gens sont
raisonnables. Mais, en termes de reconnaissance d'un plus grand nombre, nous
serions d'accord pour faire ça, sachant que, dans votre sagesse, vous
saurez peut-être, dans les nominations que vous ferez, contrebalancer
quelque chose qui...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cloutier (Raymond): Ha, ha, ha! Alors, à l'article 11,
troisième paragraphe, nous croyions, quand on a lu ça, que tout
le monde sortait du conseil pour discuter des conditions de travail des gens;
il ne restait que l'élève ha, ha, ha! qui signait
les contrats de salaire avec tous les employés. C'était pas mal.
Alors, on voudrait que le troisième paragraphe, les directeurs puissent
demeurer au conseil d'administration pour être présents dans les
discussions et décisions concernant les conditions de travail du
personnel du Conservatoire. Évidemment, ils sortiront pour leurs propres
conditions à eux, là. Ça, je comprends ça. Vous me
suivez? Ça va?
Mme FruIIa: Ça va.
M. Cloutier (Raymond): L'article 19. Comme M. Boisclair le
reconnaissait tout à l'heure je suis content qu'on sache
ça les conservatoires d'art dramatique, il ne faut pas oublier
qu'ils sont deux institutions d'enseignement postcollégial, hein? Donc,
tous nos élèves sont de niveau universitaire. Et ce sont deux
établissements, comme vous l'avez dit, d'enseignement très
distincts. On ne peut pas «translater» ou transférer d'un
établissement à l'autre sans que ce soit très
compliqué. (23 heures)
Alors, l'article 19 dit: «Le Conservatoire établit par
règlement un régime pédagogique.» Ça nous
semblait dangereux qu'un conseil d'administration soit pris avec ça.
Alors, si c'est possible d'y inscrire: ...établit par règlement
un régime pédagogique en musique et des régimes
pédagogiques en art dramatique. Alors, là, les gens feront ce
qu'ils voudront.
Le Président (M. LeSage): Mme la ministre.
Mme Frulla: Juste une précision pour bien comprendre, M.
Cloutier. Quand vous dites «des régimes
pédagogiques», c'est vrai qu'à Québec c'est un peu,
enfin, ce qu'on y enseigne, puis la philosophie est
différente de Montréal. Par contre, il y avait aussi la
notion, bon, que tu peux partir de Québec, aller à
Montréal, puis tout ça. J'assume que, dans le cas de l'art
dramatique, ce n'est pas comme dans le cas de la musique, finalement,
même que ce serait bon de passer d'une philosophie à une autre ou,
enfin, dépendant de ce qu'on veut aller rechercher.
M. Cloutier (Raymond): Oui, mais pas sous forme de réseau.
C'est-à-dire qu'on sait que, si on arrive dans l'autre école, on
recommence...
Mme Frulla: Universitaire d'ailleurs.
M. Cloutier (Raymond): ...parce qu'on ne comprend pas tout
à fait ce qui s'est passé puis on n'a pas tout à fait le
même genre d'entraînement.
Et, pour l'art dramatique évidemment, c'est un enseignement qui
est très intuitif, qui est basé sur seulement la transmission de
l'expérience, l'entraînement, et les écoles ressembleront
toujours au noyau qui les anime. Il n'y a pas de cahiers de charges, de
programmes. Quelqu'un qui va nous faire accroire un jour que c'est comme
ça qu'on forme un acteur, déjà ça va être un
peu difficile à appliquer. C'est toujours par intuition et par
équipe aussi. C'est très collégial et c'est sur le terrain
que ça se fait. Tandis que, à ma compréhension, en musique
il y a quand même des lois objectives à apprendre.
À l'article 21, nous voulons comprendre que l'autorisation du
ministère de l'Enseignement supérieur et de la Science ne
signifie pas de se conformer aux méthodes et programmes universitaires,
quels qu'ils soient. D'accord. Si c'est ça, c'est...
L'article 45 maintenant... Ah non! 25, pardon. Très important
pour nous. On dit ici que «le Conservatoire peut en outre conclure une
entente d'association ou d'affiliation, avec ou sans contrepartie, avec un
organisme dispensant de la formation dans le domaine des arts de la
scène», et nous voudrions y ajouter «et de
l'audiovisuel» parce que nous avons hâte de pouvoir aller envahir
le monde du cinéma, de la télévision, enfin, pour les
acteurs, c'est très important. Nous donnons déjà un peu de
perfectionnement en mise en scène. Nous pourrions le faire pour ces
disciplines-là. Enfin, il y a un tas de choses qui en
découlent.
L'article 45, je crois, pour terminer. Oui. À propos du conseil
d'orientation, nous sommes un petit peu inconfortables, en art dramatique, avec
ça, parce que, étant de niveau universitaire... c'est un organe
qui est un peu calqué sur le niveau collégial, à ce que
j'en ai su. Et, bon, qu'on consulte des gens dans la région pour savoir
les projets de règlement concernant la conduite et la discipline
d'élèves universitaires, on se sent un peu mal en point avec
ça, là. Alors, ce qu'on suggérerait, ce serait de changer
le verbe «doit», «le conseil d'orientation doit», par
le verbe «peut». Alors, ça nous laissera le loisir de le...
Voilà.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Cloutier.
Mme la ministre, est-ce que vous avez une autre intervention?
Mme Frulla: Une intervention au niveau de... On a prétendu
aussi que le projet de loi 135 signifiait la disparition des conservatoires en
région.
Alors, moi, je m'adresse particulièrement au responsable du
Conservatoire de musique de Chicoutimi, M. Clément. M. Clément,
est-ce que vous croyez que la mise sur pied des conseils d'orientation
parce que, effectivement, qu'on dise «peut» par «doit»,
etc., ou enfin «doit» par «peut» que les
conseils d'orientation vont faciliter la collaboration entre les conservatoires
et les organismes musicaux, d'une part?
Et, deuxièmement, on a aussi effleuré le fait qu'il
fallait que les conservatoires en région soient aussi dans le processus
décisionnel, soient proches du milieu et prennent des décisions
par rapport à ce qui se passe dans chacun des milieux, chacun des
milieux étant différent.
Est-ce que vous croyez que le projet de loi, tel qu'il est
présentement, vous êtes capables de fonctionner avec ça, de
telle sorte que parce que c'est notre volonté les
décisions, la collaboration, la coopération, enfin, se fassent
pour le milieu, dans le milieu et qu'il y ait aussi un rayonnement?
M. Clément (Jacques): Oui, je pense que c'est très
possible. D'ailleurs, tout ce qui est émis dans ce conseil d'orientation
là, ce sont des choses qui se font déjà, mais de
façon informelle, c'est-à-dire qu'on va consulter les gens du
milieu de l'éducation, on a des rapports avec les orchestres, etc., mais
c'est toujours informel. Ce n'est jamais autour d'une table. Et je pense que le
fait que ce soit enchâssé dans la loi va faire que ces gens vont
se sentir plus concernés et qu'ils vont avoir une obligation,
finalement, de s'occuper un peu de ce qui se fait dans le Conservatoire.
On avait une tendance à rester un petit peu refermés sur
nous, même si on essayait toujours d'avoir des contacts avec
l'extérieur, et je pense que le fait que ce soit
institutionnalisé, c'est une bonne chose en soi. Je ne pense pas non
plus que ça puisse créer de problème. Où j'aurais
peut-être une certaine réserve, c'est quand ces
conseils-là, justement, se mêlent de la gestion interne. Il me
semble qu'ils doivent être concernés particulièrement par
les grandes orientations, mais la cuisine de ce qu'on fait dans le
Conservatoire probablement concerne moins ces gens-là.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Grenier. M.
Clément (Jacques): Non. C'est M. Clément.
Le Président (M. LeSage): Clément. Je m'excuse. M.
le député de Gouin.
M. Boisclair: Un commentaire d'introduction. On ne va quand
même pas se réjouir ce soir parce que les directeurs de
conservatoire ont été consultés. Je
pense que ça fait partie de la nature des choses, et je pense que
les intervenants, qui, encore ce soir, nous proposaient des amendements, sont
certainement heureux d'avoir l'occasion de nous proposer des amendements et
peut-être même, dans un avenir rapproché, à
l'occasion des travaux de cette commission, pourront, par différentes
voies, nous faire connaître d'autres amendements. Je suis d'ailleurs
heureux de voir que vous avez pris l'initiative de nous en soumettre
quelques-uns. Je pense qu'il y aura toujours de la place dans nos
interprétations et dans nos propositions pour un peu de nuances et que,
de la même façon que ce n'est pas vrai que tout est noir et que
tout est blanc, et que la vérité n'est jamais acquise, et qu'il
faut plutôt toujours continuer à y tendre et à la
rechercher, il aurait été un peu étrange de voir les gens
nous dire: C'est parfait, tout est beau, on aime ça, et tout ce qu'on a
entendu, aujourd'hui, là, il n'y a rien de bon là-dedans. La
vérité doit un peu, à mon avis, se situer entre les deux,
et j'apprécie votre sens critique, et j'apprécie le fait que vous
ayez pris sur vous de proposer un certain nombre d'amendements, et je voudrais
vous questionner tout à l'heure sur un certain nombre d'autres
amendements qui m'apparaissent importants d'apporter au projet de loi.
Deuxième chose, je n'ai entendu personne ici, aujourd'hui,
remettre en cause le fait qu'il était absolument nécessaire de
soustraire les conservatoires à la Loi sur l'administration
financière. Vous avez parlé de l'achat d'équipement
informatique. On a eu d'autres exemples aujourd'hui. Tout le monde fait
consensus, en tout cas, à moins que mon interprétation de ce que
j'ai entendu aujourd'hui soit faussée, tout le monde, aujourd'hui,
semble d'accord avec cette question-là. Donc, quant à moi, cette
question-là ne fait plus l'objet d'aucun débat. Elle est
tranchée, elle est claire, et il n'y a personne qui souhaite revenir sur
cette question-là.
Je voudrais cependant revenir sur cette question de l'ancrage de chacun
des conservatoires dans sa région. Vous semblez être favorables au
contenu, à la façon, à l'organisation qui est
proposée pour les conservatoires. Je relisais les propos que le
directeur du Conservatoire de musique de Chicoutimi, M. Clément, tenait
à la commission de la culture à l'occasion de la consultation
générale sur la proposition de politique sur la culture et les
arts et je veux les rappeler, parce que ces propos m'apparaissent
intéressants.
M. Clément nous disait: Le sentiment d'appartenance qu'ont
les gens de notre région envers leurs organismes culturels est
très fort et directement relié à la réussite de
leurs activités. Le haut taux d'insertion que nous avons réussi
à atteindre est la conséquence de la mise sur pied d'un
réseau de mise en marché de nos productions nous permettant
d'offrir, sur l'ensemble du territoire, des séries de concerts de grande
qualité. Il serait hasardeux de croire que les orchestres de grands
centres puissent desservir les régions avec succès si une
structure semblable ne s'y trouve pas déjà. Le travail de
sensibilisation que nous avons amorcé, il y a plusieurs années,
est considérable et a permis de développer un public de base
partout en région. D'une façon très brève, nous
espérons sensibiliser la commission de la culture aux besoins qu'a une
région comme la nôtre d'avoir ses propres organisations
culturelles génératrices d'emploi et bien enracinées
bien enracinées, disait-il afin d'offrir quotidiennement
une énergie vitale à la région, garante de l'avancement de
la culture et de l'épanouissement de nos artistes.
Je me demande, aujourd'hui, comment on peut réconcilier ces
propos avec une organisation où, dans le conseil d'orientation, à
l'article 44, on nous dit que le conseil d'orientation donnera son avis sur
toute question que lui soumettra le Conservatoire. Et vous venez même,
aujourd'hui, nous dire que sur certaines questions le conseil d'orientation ne
devrait pas être consulté, que vous souhaitez qu'on remplace le
«doit» par un «peut». (23 h 10)
Je pense qu'il y a une difficulté à réconcilier ces
deux visions. Il y a une difficulté d'autant plus grande que tous, ici,
aujourd'hui, sont venus nous dire que la composition des conseils d'orientation
devait être revue. Même la ministre. Même la ministre, qui a
présenté ce projet de loi, est d'accord avec cette
proposition.
Est-ce que vous partagez ce point de vue quant à la
révision des conseil d'orientation, quant, aussi, au mandat de ces
conseils?
M. Cloutier (Raymond): Je peux répondre.
Le Président (M. LeSage): M. Cloutier. Allez-y,
allez-y.
M. Cloutier (Raymond): Le «doit» par un
«peut» ne concerne que les quatre critères: la
sélection du directeur, l'application du régime
pédagogique, le règlement de la conduite et de la discipline des
élèves... Ce n'est pas la vie musicale à Chicoutimi,
ça, là. C'est juste... Mais il peut le faire. Mais, s'il doit
systématiquement le faire... Pour le reste, le conseil est là de
façon enchâssée.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Alors, vous n'avez aucun commentaire à faire
sur la composition du conseil d'orientation?
Une voix: On est confortable...
M. Grenier (Albert): Vous voulez... Vous vous adressez à
n'importe qui?
Le Président (M. LeSage): M. Grenier, allez-y.
M. Boisclair: Moi, je ne le sais pas. La ministre entend proposer
des amendements que l'Opposition entend appuyer, sans doute, s'ils vont dans le
sens de ce qui a été annoncé. Je voudrais au moins
être sûr que vous partagez ce point de vue.
Mme Frulla: Excusez-moi. Il faudrait préciser,
peut-être, les amendements au niveau de l'élargissement du conseil
d'orientation pour être encore plus représentatif, ce qui suit un
peu ce qu'on disait tantôt, avec, entre autres, la Guilde et l'UDA, je
pense, et, donc, les amendements sont beaucoup plus au niveau de la
représentativité du conseil d'orientation, une
représentativité peut-être un peu plus large, donc
d'ajouter deux membres, que sur la fonction même.
Le Président (M. LeSage): Oui, M. le député
de Gouin, vous avez la parole.
M. Boisclair: Est-ce que vous estimez qu'il faut, dans le projet
de loi, à l'article 18, nommer chacun des conservatoires et même
peut-être penser à la création d'autres conservatoires?
Lorsqu'on dit: Le Conservatoire a pour objet d'administrer, d'exploiter dans
diverses régions, est-ce qu'il vous apparaît important de
préciser l'existence de chacun de ces conservatoires dans cet
article?
Le Président (M. LeSage): M. Cloutier.
M. Cloutier (Raymond): Écoutez, il y a un conservatoire
qui est créé, qui est le Conservatoire de musique et d'art
dramatique du Québec. Est-ce que la loi crée d'autres
entités juridiques?
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Non, non. Mais je vous pose la question.
M. Cloutier (Raymond): Moi, je sais que, bon, il est
nommément, des fois, mentionné qu'il y a un directeur de
Montréal de ci, un directeur de Québec de ça, mais je vois
mal, au mois de juillet prochain, changer quoi que ce soit à la
réalité actuelle. Je ne vois pas comment on peut faire ça
et qui va faire ça.
M. Boisclair: Moi, je pense qu'en tout cas un commentaire,
là il est impérieux de préciser, à cet
article, que le Conservatoire a pour objet d'administrer et d'exploiter... de
nommer chacune des régions des établissements d'enseignement. Et
c'est, pour nous, un minimum, c'est un plancher. On a vu ce qui s'est
passé dans d'autres régions. Je pourrais vous donner l'exemple de
Radio-Québec, je pourrais citer des exemples à l'infini,
là. Vous, vous ne voyez pas la pertinence d'identifier chacun des
conservatoires, dans cet article?
M. Cloutier (Raymond): ...
M. Boisclair: Bon, d'accord, votre réponse est claire.
Deuxièmement...
M. Cloutier (Raymond): Écoutez, je ne suis pas seul,
ici.
Le Président (M. LeSage): Est-ce que quelqu'un veut
répondre? M. Clément.
M. Clément (Jacques): Est-ce que le danger ne serait pas,
justement, d'empêcher la création d'autres conservatoires?
M. Boisclair: On peut très bien le prévoir,
ça aussi, là.
M. Clément (Jacques): Ça peut être ça,
aussi.
M. Boisclair: Non, non. J'ai bien dit qu'il faut tous les nommer
et prévoir la possibilité d'autres conservatoires. Je comprends
votre malaise et je passe au deuxième alinéa: «susciter et
favoriser une formation initiale».
Plusieurs personnes sont venues nous dire, aujourd'hui: On craint que
les conservatoires, en région, ne soient que des institutions qui vont
offrir une formation de base et qu'on insufflera, par cet article, un mouvement
vers les grands centres. À peu près tous sont venus nous dire
qu'il fallait revoir le libellé. Même la ministre, à un
moment donné, acquiesçait. Je l'ai entendue dire tout à
l'heure: On va préciser ça.
Est-ce que vous souhaitez, vous avez une proposition à nous faire
pour modifier le deuxième alinéa de l'article 18?
Le Président (M. LeSage): M. Clément, allez-y.
M. Clément (Jacques): Je voudrais... Peut-être que
l'article n'est pas très clair parce que, moi, effectivement, j'ai
rencontré des étudiants qui ont eu la même
inquiétude. Mais, dans la mission de 1989 de Mme Bacon, ça a
toujours été, cet article-là, le fait que les
conservatoires, partout sur le territoire, encouragent... Parce qu'on sait
très bien que le conservatoire de Chicoutimi ne peut pas desservir
Normandin, etc., c'est très, très étendu le territoire.
Donc, ce qu'on fait, et on fait ça actuellement, c'est qu'on encourage
et on aide les gens à faire une formation initiale pour que les
élèves puissent arriver préparés au Conservatoire.
Donc, c'est ça le but de l'article, mais ça ne concerne pas, en
tout cas à mon sens, du tout l'enseignement dans le Conservatoire.
Et je pense qu'il faudrait peut-être ajouter: et susciter une
formation initiale dans le milieu. En tout cas, il y a peut-être quelque
chose qui manque, mais c'est ça le sens de la... En tout cas, moi, je
l'ai toujours compris comme ça.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Est-ce que vous êtes d'accord pour
élargir la composition des conseils d'orientation pour y inclure
des gens d'affaires qui, dans le quotidien, comme vous-mêmes l'exprimiez
dans votre mémoire à la commission de la culture... Est-ce que
vous souhaitez qu'on ouvre sur la composition du conseil d'orientation? Et, si
oui, dans quel sens?
Le Président (M. LeSage): M. Grenier.
M. Grenier (Albert): Je pense qu'il y a eu, dans les
mémoires que nous avons entendus, des inquiétudes, il y a eu des
questionnements faits sur les comités d'orientation, et je pense que, si
j'avais une recommandation à faire, ce serait plutôt dans le sens
de ne pas se priver, au niveau des régions, de ressources. Je pense
à des hommes d'affaires, je pense à toutes sortes de situations
qu'on ne peut pas prévoir facilement, des gens qui pourraient nous aider
ça peut être des représentants d'orchestre
symphonique, je pense à Montréal ou des choses comme ça
et, dans ce sens-là, je n'ai pas de restriction sur ce qui est
mentionné là, mais je ne voudrais pas qu'on se prive de
ressources qui pourraient nous aider. Dans ce sens-là, je serais
favorable à ce qu'on élargisse, en tout cas, sans trop, trop,
trop préciser, pour qu'on puisse, au moins, s'adjoindre ces
gens-là.
M. Boisclair: Votre message est reçu.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Est-ce que vous êtes d'accord avec
l'imposition de frais de scolarité pour les étudiants qui
fréquentent les conservatoires, comme ça semble être
l'intention précisée par la ministre? Et, si oui, à
quelles conditions et qu'est-ce que vous voyez comme frais de
scolarité?
M. Cloutier (Raymond): Je voudrais répondre à cette
question-là.
Le Président (M. LeSage): M. Cloutier.
M. Cloutier (Raymond): Est-ce que je peux vous préciser,
pour la question précédente, qu'en art dramatique ça nous
ferait plaisir d'avoir des gens d'affaires et plusieurs?
M. Boisclair: C'est juste que ce n'est pas prévu. C'est
parce qu'il va falloir changer l'article.
M. Cloutier (Raymond): Mais est-ce que c'est défendu,
hein?
Mme Frulla: Ce n'est pas exclu. Voyons donc! Ce n'est pas
exclu.
M. Cloutier (Raymond): Est-ce que c'est défen- du? Et
c'est ça qui est toute l'affaire. Est-ce qu'on va mettre des bretelles,
des boutons, des zippeurs et qu'on va dire aux gens: Voici comment
opérer? On a le droit de le faire.
M. Boisclair: Bien oui, c'est exclu. Un parent
d'élève. Bien, je dois vous dire, c'est exclu, là.
Regardez bien: trois professeurs, un responsable pédagogique, un
employé, un élève, un parent d'élève, un
établissement privé, un organisme musical, un ou deux
représentants d'institution d'enseignement, un directeur sans vote.
À moins que le parent soit un homme d'affaires, il est, en ce moment,
exclu.
Mais, là, sur la question des frais de scolarité, est-ce
que vous êtes d'accord avec l'imposition de frais de scolarité
pour vos étudiants qui fréquentent les conservatoires et, si oui,
à quelles conditions?
M. Cloutier (Raymond): Entièrement d'accord. Je trouve que
nous avons, à Montréal, une preuve par neuf que le discours sur
le fait que les gens vont arrêter d'être des artistes parce qu'il y
a des frais de scolarité... Il est absolument démontré,
par le fait que notre principal compétiteur, à Montréal,
est l'École nationale de théâtre du Canada où, pour
y entrer, ça coûte 1800 $ par année... Nous recevons tous
les ans en audition les mêmes candidats qu'eux, environ 300, et le
partage entre les deux établissements est égal. On accepte
à peu près 10 à 12 candidats chacun des deux, et pas pour
des raisons économiques, croyez-moi.
Deuxièmement, il me semble que ça donnerait une certaine
noblesse à l'étudiant qui arrêterait d'être
quémandeur et serait peut-être demandeur et aurait des exigences
un peu plus élevées. Et, troisièmement, il est
assuré que tous les frais de scolarité de gens qui sont
déjà sur le régime de prêts et bourses seront
payés par ce même régime.
Maintenant, je voudrais, si c'est possible, que ces frais de
scolarité n'entrent en fonction que le jour, ou l'heure, ou la semaine
où le diplôme sera acquis, donc qu'il y ait une corrélation
entre le fait de payer pour ses études et d'en recevoir un
diplôme.
Et, un dernier bémol, si les musiciens me permettent, si on
pouvait introduire ces frais de scolarité par étapes pour ne pas
arriver d'un coup de masse, parce qu'on a des élèves actuellement
en formation, donc, je ne sais pas, diviser ça en trois parties et, en
trois ans, arriver à un niveau qui a du bon sens.
M. Boisclair: L'article 4 du projet de loi prévoit que ce
sont les membres du conseil d'administration en fonction, donc les personnes
nommées, qui détermineront lequel présidera
l'élection des directeur, enseignants, élèves à
temps plein en musique et, s'il y a lieu, membres du personnel non
enseignant.
Comment vous conciliez cette réalité avec votre discours
sur l'ouverture et l'enracinement dans les régions, alors que ceux qui
auront la responsabilité d'édic-ter la majorité des
règlements significatifs seront ceux
qui sont nommés soit par le MESS, soit par le ministère de
la Culture ou le ministère de l'Éducation? (23 h 20)
M. Cloutier (Raymond): De quel article parlez-vous, pardon?
M. Boisclair: L'article 4, particulièrement.
M. Grenier (Albert): Vous êtes à quel alinéa,
là?
M. Boisclair: Aux paragraphes 4° à 7°. M.
Grenier (Albert): Ah! d'accord. Le Président (M. LeSage): M.
Cloutier.
M. Cloutier (Raymond): Moi, je n'ai pas compris le sens de votre
question du tout.
M. Grenier (Albert): Je n'ai pas compris le sens de votre
question non plus. L'inquiétude que vous manifestez...
Le Président (M. LeSage): Vous voulez
répéter la question, M. le député de Gouin?
M. Boisclair: Alors, regardez bien. L'article 4 du projet de loi:
les membres du conseil d'administration en fonction, donc ceux qui sont
nommés par le ministère de la Culture, par le ministère de
l'Enseignement supérieur et par le ministère de
l'Éducation, les huit ou sept personnes, là, nommées,
seront celles qui détermineront de quelle façon on
présidera à l'élection des directeur, enseignants,
élèves à temps plein en musique et, s'il y a lieu, membres
du personnel non enseignant. Et ce sont eux aussi qui, par les dispositions
transitoires prévues à l'article 75, présideront à
l'élaboration des règlements et qui pourvoiront à la
régie interne de l'institution.
Comment vous conciliez cette réalité avec votre discours
d'ouverture et d'enracinement dans les régions que vous nous avez tenu
tout à l'heure?
Le Président (M. LeSage): M. Clément. M. Grenier
(Albert): Ma lecture...
Le Président (M. LeSage): Je m'excuse. M. Grenier.
M. Cloutier (Raymond): Vous êtes bien à 4? Deux
élèves à temps plein. On n'a pas le même projet de
loi, peut-être.
M. Grenier (Albert): Vous faites une référence avec
l'article 75 par rapport à ce que vous lisez à l'article 4, je
crois. Je pense qu'un des problèmes qui se posent... ma lectrre, en tout
cas, du projet de loi, c'est que la nouvelle corporation va entrer en vigueur,
finale- ment, le 1er juillet. Il y a des réalités. Il faut quand
même... Il y a un processus d'enclenché.
Il y a un premier point. C'est qu'il y a un plan d'effectifs qui doit
être fait pour que la corporation l'approuve, d'une part. Puis il y a
aussi un autre phénomène, c'est qu'il peut y avoir des
professeurs, comme il peut y avoir aussi des membres du personnel
administratif, lorsqu'on leur demandera s'ils acceptent d'être
transférés dans la nouvelle corporation, qui pourraient refuser
de le faire. Alors, à ce moment-là, ce n'est qu'une fois que
cette opération sera terminée qu'on saura quelles sont vraiment
les personnes qui ont accepté d'être transférées, de
telle sorte qu'on ne peut pas procéder à la votation par les
pairs des représentants sur le conseil d'administration sans que cette
réalité-là soit faite. Et c'est comme ça que je
comprends l'article 75. Et c'est ce qui explique, probablement, l'article
4.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. Grenier. M.
Boisclair: Autre question.
Le Président (M. LeSage): M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Autre question. Les gens de la Guilde des musiciens
nous ont rappelé un certain nombre de préoccupations quant au
régime pédagogique. Et, sur la base de leur compréhension
de l'article 20, ils disaient: «Est-ce que ce petit paragraphe condamne
le Conservatoire à abandonner son système pédagogique de
promotion par matière?»
Ils disaient, par exemple: «Un violoniste de niveau cégep
au Conservatoire a déjà huit à 10 ans de formation, alors
qu'un chanteur du même âge n'est strictement qu'un débutant,
la plupart du temps sans bagage musical. Ils devront suivre les mêmes
cours pour répondre aux normes du régime collégial?»
se demandent-ils. «Si c'est cela que ça veut dire, ce changement
n'est pas une amélioration! Au contraire, ce système freine
l'apprentissage et ne tient aucun compte du potentiel individuel de
l'élève, en plus de restreindre sa culture. Le système de
promotion par matière du Conservatoire a fait ses preuves. Il a de plus
la qualité de développer au maximum le talent au lieu d'imposer
aux élèves avancés ou plus talentueux le rythme des plus
faibles ou des moins avancés de la classe.»
Est-ce que vous partagez cette analyse?
M. Grenier (Albert): Si je peux me permettre, je pense qu'il est
bon qu'ils aient posé cette question. Ça nous permet
peut-être de les rassurer. C'est ce qui existe, finalement, dans la
réalité actuelle. C'est que le Conservatoire je parle de
la section musique, là est en mesure de dispenser et de donner le
diplôme d'études collégiales en musique, mais il ne le
donne, ce diplôme, qu'à ses étudiants. Et ça ne
change absolument en rien la promotion par matière. C'est-à-dire
que l'élève, par
exemple, qui est inscrit formellement au niveau du collégial au
Conservatoire, actuellement, peut très bien prendre des cours par
anticipation au niveau universitaire et, lorsqu'il aura terminé son
collégial, par la suite pourra être inscrit formellement au niveau
du premier cycle universitaire, mais en ayant en banque les crédits
qu'il aura accumulés par anticipation. De telle sorte que l'article 20
est exactement la situation actuelle. Il n'y a aucune crainte de ce
côté-là.
Le Président (M. LeSage): Alors, brièvement, M. le
député de Gouin.
M. Boisctair: Bon bien, je vous remercie d'apporter cette
réflexion qui enrichit notre compréhension de l'article. On verra
sans doute à en rediscuter.
Bien, écoutez, on a fait le tour. Je voulais être bien
sûr d'avoir le temps de vous poser toutes ces questions. Je voudrais
peut-être tout simplement vous remercier et vous dire que plusieurs des
recommandations qui nous ont été soumises aujourd'hui et que vous
nous avez présentées aussi seront sans doute retenues je
le souhaite, en tout cas par les membres de la commission.
Si je peux seulement me permettre, j'aurais souhaité un peu plus
de nuances, en tout cas, dans l'analyse, et, moi, je pense que, sur cette
question, il y a de la place, je pense, pour un peu de dialogue et de bonne
foi. Et les remarques d'introduction, tout à l'heure,
m'inquiètent pour l'avenir, tout comme celles que j'ai entendues de la
part des représentants des enseignants et de la ministre, qui a tenu des
propos assez durs tout à l'heure. Je souhaite donc, ma foi du bon Dieu,
pour l'intérêt des gens qui fréquentent cette
institution... j'aurais le goût de vous dire: Retournez faire vos travaux
et parlez-vous un peu.
Le Président (M. LeSage): Merci, M. le
député de Gouin. Mme la ministre, je vous informe que votre
formation a encore trois minutes.
Mme Frulla: Je pense que c'est à mon tour de vous
remercier, d'abord vous, cher directeur, et tous ceux qui... étudiants,
enfin, professeurs, membres de la Guilde, membres des orchestres. Je pense
qu'on peut conclure cette journée sur au moins un consensus, je pense,
un consensus qui est important, c'est que presque tous, je dirais, ont reconnu
que la situation actuelle doit être modifiée. Vous avez
apporté, vous, des précisions, puisque vous la vivez, je dirais,
tous les jours. Alors, il y a des choses, finalement, qui n'ont pas
été soulevées, quant à l'année
financière, etc., administrative, d'une part.
J'ai rassuré les élèves qu'il n'y aura aucuns frais
de scolarité avant que les ententes soient faites au niveau de la
diplomation et soient faites avec le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Science. Alors, ça prendra le temps que
ça prendra, on va le faire bien, mais il n'y aura pas de frais de
scolarité, d'une part, avant que ce soit fait.
Maintenant, je pense sincèrement que le projet de loi qui est
devant nous représente un gain fondamental pour, justement, la
pérennité de nos conservatoires. Il va y avoir bonification, il
va y avoir des amendements qui vont préciser certaines choses telles que
ce que je disais aux élèves au niveau des frais de
scolarité, au niveau de la régionalisation, être sûrs
que la part régionale y soit bien décrite, qu'il n'y ait plus,
non plus, de craintes, malgré que vous l'ayez bien lu, M.
Clément, au niveau de l'article 18, par exemple, qu'il n'est pas
question que les conservatoires donnent de formation initiale. Au contraire,
mais on a tenu compte, aussi, de la part des conservatoires au niveau des
régions.
Et, d'autre part, je veux rassurer aussi les professeurs un peu quant
aux craintes qu'on leur a formulées, aux menaces qu'on leur a
formulées, c'est-à-dire que tous les professeurs sont
invités à joindre, sans exception, la nouvelle corporation,
conservant les droits acquis, et il n'y a aucune perte et aucune crainte. Par
contre, on va essayer de donner aux corporations la flexibilité
nécessaire pour que votre gestion, tel que vous le disiez, M. Cloutier,
soit peut-être un peu plus facile et adaptée à la
réalité des conservatoires.
Chose certaine, c'est que notre volonté profonde, c'est d'assurer
la pérennité des conservatoires, leur action dans toutes les
régions du Québec, d'une part, et de leur donner une
flexibilité pour, non seulement continuer leur bon travail, mais, je
dirais, aller encore plus loin. Et non, on ne surseoira pas au projet de loi,
on va le bonifier, mais le projet de loi va passer. Merci.
Le Président (M. LeSage): Merci, Mme la ministre. Alors,
je tiens à remercier également M. Cloutier, M. Clément, M.
Grenier pour leur participation aux travaux. Et, compte tenu de l'heure,
j'ajourne les travaux de la commission sine die.
(Fin de la séance à 23 h 30)