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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 18 avril 2002 - Vol. 37 N° 32

Étude des crédits du ministère de la Culture et des Communications


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures quarante-deux minutes)

Le Président (M. Beaumier): Alors, la commission reprend ses travaux, et ça porte sur l'étude des crédits pour les programmes 1 et 2 du ministère de la Culture et des Communications.

Discussion générale (suite)

Je vous rappelle qu'il restait sept minutes au député d'Iberville. Ensuite, on continuera en alternance. M. le député.

Accès gratuit à certaines salles
d'exposition du Musée du Québec

M. Bergeron: Oui. Merci, M. le Président. J'avais commencé hier à parler de patrimoine et de musées et je voudrais continuer là-dessus. Je suis allé récemment au Musée du Québec, puis on disait: Entrée gratuite pour les expositions permanentes. Et il me semble que c'est dans la foulée du décès du peintre Jean-Paul Riopelle qu'on a instauré des gratuités pour les visites des collections permanentes, et je pense que c'est seulement au Musée du Québec.

J'aimerais savoir si c'est seulement au Musée du Québec et si, depuis l'instauration de cette politique, il y a eu une augmentation de l'achalandage. Est-ce que ça a eu un effet positif sur la fréquentation du Musée?

Le Président (M. Beaumier): Merci. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Dans les premières semaines de mon entrée en fonction comme ministre d'État à la Culture et aux Communications, évidemment, j'ai fait l'effort d'essayer de rencontrer le maximum d'intervenants dans le domaine de la culture, notamment les sociétés d'État qui sont sous ma responsabilité. Et j'ai un souvenir très net d'une rencontre que j'avais eu avec les sociétés d'État, que ce soient les musées, la Place des Arts, la Grande Bibliothèque, enfin, cette douzaine de sociétés sous ma responsabilité. Et je leur avais dit qu'une des choses qui me tenaient à coeur dans l'ensemble des objectifs que nous poursuivons était particulièrement la question de l'accessibilité de la culture et de la démocratisation et que j'espérais que nous développions toutes sortes d'initiatives faisant en sorte que la culture soit de plus en plus accessible aux Québécois.

Le Musée du Québec a entendu mon souhait. D'autres l'ont entendu autrement. Je pense, par exemple, au Musée d'art contemporain de Montréal, qui a fait une opération, il y a quelques mois, de disposer dans plusieurs endroits achalandés dans la ville de Montréal des oeuvres, que ce soit, donc, à la disposition du public. Pour moi, c'est un geste d'accessibilité de la culture. Et le Musée du Québec a donc saisi au vol cette préoccupation-là et a commencé à travailler, il y a quelques mois, donc, sur cette idée de rendre accessibles notamment les expositions permanentes, donc les pièces qui sont en possession du Musée du Québec, de rendre ces expositions permanentes accessibles et gratuites au public.

Le conseil d'administration a donc travaillé sur ce projet qui est un projet assez unique. Et, évidemment, au moment du décès de Jean-Paul Riopelle ? en fait, le Musée avait l'intention de l'annoncer au début du mois d'avril ? on a un petit peu devancé l'annonce de ça parce que là il y avait vraiment une conjoncture ? comment je dirais? ? humaine, là, qui s'y prêtait. Alors, ça veut donc dire que, pour le Musée du Québec, les visiteurs ont dorénavant accès gratuitement à sept des 12 salles du Musée du Québec, à savoir les galeries permanentes, qui mettent en valeur les plus importantes collections d'art du Québec des origines à nos jours. Ça veut donc dire que, par exemple, la salle Riopelle, la salle Lemieux sont disponibles, et d'autres galeries permanentes.

Le Musée du Québec est un des musées qui rejoint une grande population, et, effectivement, le taux d'achalandage, suite à cette mesure, le taux d'achalandage a augmenté. On estime, à ce moment-ci, selon les propos du directeur du Musée du Québec, M. Porter, que le taux d'achalandage aurait augmenté entre 20 et 25 %. Alors, c'est clair que c'est une mesure qui va changer les habitudes des gens. Parce que ce qui a été fait de la part du Musée du Québec, c'est donc de rendre gratuite la fréquentation des collections permanentes, mais que les expositions temporaires, donc, que ce soit une exposition internationale ou sur un certain nombre de sujets, il y ait toujours une tarification à ce sujet. Je crois comprendre que c'est une hausse qui est significative. Selon les experts, il semble qu'on serait probablement, là... l'effet positif sur l'achalandage serait probablement à la veille d'être à son maximum. On peut supposer, donc, le quart de plus d'achalandage. Ce serait étonnant qu'on se rende à la moitié, là, mais on est à peu près au quart de plus d'achalandage, ce qui est quand même extrêmement positif.

L'idée derrière ça, c'est d'essayer de changer les habitudes des gens, les inviter à fréquenter plus régulièrement le Musée et que le fait qu'une personne prenne la peine d'aller voir la salle Lemieux, Riopelle ou L'Abstraction: une manière de voir, qui est une autre exposition permanente, Toucher pour voir, une autre exposition permanente, Tradition et modernité au Québec... En fait, l'idée est que, une fois que les gens sont dans le Musée, qu'ils vont gratuitement voir ces expositions permanentes, qu'ils aient la curiosité d'aller voir les expositions temporaires. Je crois ? je l'ai dit hier ? un musée ou une bibliothèque, ce doit être plus que des lieux avec quatre murs et un toit qui conservent des pièces ou des livres. Ce doit être des lieux interactifs, conviviaux, ouverts. Et c'est un geste que j'ai salué de la part du conseil d'administration du Musée du Québec.

M. Bergeron: Ma dernière question, Mme la ministre, c'est concernant le patrimoine religieux. L'an dernier, vous avez annoncé des sommes importantes, et il me semble qu'il y avait peut-être une cinquantaine de lieux de culte qui en ont profité. J'aimerais, là, pour les minutes qui me restent, que vous me...

Une voix: ...

Le Président (M. Beaumier): Excusez...

M. Bergeron: C'est singulier, ça.

Le Président (M. Beaumier): Excusez, M. le député, je prends un peu cette erreur sur moi, là, j'étais attiré par autre chose. En tout...

M. Bergeron: Vous êtes sur mon temps, en plus.

Le Président (M. Beaumier): En tout bien, tout honneur, je crois que je vais laisser la minute à Mme la députée.

Mme Beauchamp: Je suis sûre que vous pourrez poursuivre ultérieurement, il nous reste encore quelques heures d'étude de crédits, M. le député d'Iberville.

Le Président (M. Beaumier): Je m'en excuse. Merci.

Stratégie face à des moyens de pression
des enseignants entraînant un arrêt
des sorties culturelles

 

Mme Beauchamp: Rebonjour à tout le monde. Et, peut-être, à tout le monde, je leur souhaite une bonne Journée internationale du patrimoine, en espérant peut-être que, pour souligner cette Journée, en cette année 2002, que ce soit au cours de cette année qu'on voie enfin une vraie politique du patrimoine se réaliser au Québec.

M. le Président, je désire aujourd'hui, d'entrée de jeu, discuter, avoir la possibilité de discuter avec la ministre de la Culture de la situation que vivent plusieurs institutions culturelles dans plusieurs régions du Québec, qui sont, si je puis dire, victimes, on peut même dire otages du boycott des activités culturelles par les enseignants et enseignantes du Québec, qui, dans le cadre de leur conflit avec le gouvernement du Québec, utilisent des moyens de pression et, entre autres, mettent en branle des boycotts des sorties culturelles ou des activités culturelles pour nos enfants dans nos écoles.

n (11 h 50) n

M. le Président, je veux rappeler à la ministre que cette situation de boycott, nous l'avons à maintes occasions abordée avec elle. Deux exemples. Au mois d'octobre dernier, lorsque nous avons fait le suivi du rapport du CALQ et de la SODEC avec la ministre, j'ai abordé cette question pour la sensibiliser au fait que, déjà plusieurs mois auparavant, la présidente du Syndicat des enseignants du Québec avait déjà réaffirmé le fait qu'ils avaient l'intention de reprendre ces moyens de pression dans leur dossier de négociations avec le gouvernement du Québec.

À ce moment-là, au mois d'octobre, la ministre de la Culture a répondu ceci, je la cite: «C'est localisé, ce n'est pas généralisé. C'est déjà, donc, une situation moins grave. Mais, à partir du moment où le problème est localisé, on a plus de possibilités d'intervention.» Et elle poursuivait en disant: «Si on sentait qu'on glissait vers des mouvements comme ceux-là, là, de boycott des activités culturelles, on... ? il manque un mot, mais, j'imagine, c'est de dire "on viserait" ? à coordonner nos efforts, nos interventions.» Un peu plus loin, elle disait: «Le ministre de l'Éducation, je n'ai pas eu à me battre avec lui sur le fait que ce seraient des mesures extrêmement dommageables, il le sait. Donc, il fera ce qu'il faut pour les éviter.»

Un peu plus tard, au mois de février dernier, lors de l'étude des engagements financiers du ministère de la Culture, de mes collègues ont également abordé cette question du boycott des activités culturelles, et, à ce moment-là, la ministre réaffirmait que, pour elle, c'est localisé et elle disait qu'elle allait... Elle a parlé de quelques situations isolées et elle indiquait qu'elle avait l'intention de placer un appel auprès de la présidente de la CSQ.

Au mois d'octobre, un peu auparavant, je lui ai demandé si elle avait eu des contacts avec la CSQ et elle m'avait répondu qu'elle préférait garder ses stratégies secrètes, espérant qu'elles fonctionnent mieux. Mais, à ce qu'on peut voir, là, ça n'a pas donné les résultats qu'elle espérait, puisque ces activités de boycott, je pense qu'à ce moment-ci... Et j'espère, en fait, que la ministre reconnaîtra avec moi que nous ne pouvons pas parler de situations localisées et, en fait, diminuer ainsi l'impact de ces boycotts dans chacune des régions du Québec. Je vous interpelle, d'ailleurs, M. le Président, j'interpelle mes collègues de l'autre côté de la table, lorsqu'on dit «des situations localisées», en fait, ce que ça veut dire, essentiellement, c'est que, dans chacune des régions du Québec, il y a des institutions culturelles, des organismes culturels menacés.

Et je veux rappeler à la mémoire de la ministre, par exemple, différents secteurs qui sont particulièrement touchés par ce boycott. Je lui rappelle, par exemple, le communiqué du 31 janvier de la Société des musées du Québec ? et je les cite ? qui disait: «Les musées de la province disent être durement touchés par le boycott des activités parascolaires qu'orchestre la Fédération des syndicats de l'enseignement pour faire valoir ses revendications dans le dossier de l'équité salariale. La Société des musées du Québec, qui regroupe plus de 200 institutions, estime que le boycott lancé au début du mois de janvier a des effets néfastes et injustes sur ses membres.» Et ils soulignaient qu'ils avaient recensé ? et on était en janvier ? déjà 45 institutions qui sont touchées.

Je veux également rappeler à sa mémoire, par exemple, ce qui s'est passé encore tout récemment au Salon du livre de Trois-Rivières, où, l'année passée, on a accueilli 4 000 écoliers et où, cette année, l'achalandage, la prévision des organisateurs ? et ça a fait l'objet d'un article dans le journal Le Nouvelliste du 21 mars dernier ? était à l'effet que l'achalandage, on passerait de 4 000 à 50 enfants cette année. Et bien sûr le Salon du livre de Trois-Rivières était très préoccupé par la question, puisque lui avait fait ses prévisions sur la base de contrats signés, des engagements signés par les écoles.

Et je veux également ramener à l'attention de la ministre une enquête récente faite par le mouvement des Théâtres unis enfance jeunesse. Vous savez comme moi ? enfin, je l'espère, mais je n'en doute pas ? que ce regroupement a fait une étude où il a envoyé un sondage à ses membres, et il y a quelques résultats qui sont très préoccupants. Par exemple, dans certaines questions...

Je vous signale certaines questions. On demande aux membres: «Pourriez-vous compléter une programmation avec les seules représentations grand public?», ce qui signifie, donc, de devoir se passer de la fréquentation scolaire. La réponse, c'est un oui, mais 10 non. À l'autre question: «Devriez-vous renoncer à un projet de tournée s'il n'y avait que des représentations grand public?», la réponse: huit oui, huit institutions devraient renoncer à des tournées, et un non. Autres questions: «Pour vous, le contexte actuel a-t-il une incidence sur vos relations contractuelles avec vos acheteurs, les diffuseurs, les écoles? Vos garanties annoncées cette année sont-elles différentes de celles de l'année dernière à la même époque?» Et là c'est des questions...

Ça a plus été répondu sous la forme écrite. Et j'aimerais rappeler à la ministre certaines réponses qu'a eues à ce moment-là ce regroupement de théâtres enfance jeunesse. Je cite donc certains de leurs membres, qui disent ceci: «Les diffuseurs sont prudents, nous sommes désemparés. C'est toujours la même chose, le diffuseur veut signer le contrat seulement quand il saura combien de représentations pourront avoir lieu avec l'engagement du milieu scolaire. En fait, nous nageons une fois de plus dans l'incertitude, et c'est très menaçant pour la compagnie, les artistes, les créateurs. Les diffuseurs offrent moins de garanties et plus d'options en expliquant clairement que cette situation est due à la menace du boycott. Le nombre de représentations discuté antérieurement est partout revu à la baisse, plusieurs d'entre elles devenant optionnelles.»

On dit aussi: C'est une «situation très difficile. Une évidente réticence des diffuseurs à s'engager.» Un peu plus loin, on dit ? c'est un autre membre qui répond: «Pendant la bourse Rideau, certains diffuseurs nous ont manifesté leur intérêt avec des dates précises, en nous mentionnant qu'ils ne signeraient les contrats qu'à l'automne, lorsqu'ils sauront ce qui se passe avec le boycott. Par ailleurs, notre structure administrative réduite ne nous permet pas de mettre en branle tout de suite l'opération contrats pour l'automne.»

Un peu plus loin: «Une saison de boycott menace l'existence même de notre compagnie. Bien que nous tentions de garder notre optimisme, cette inquiétude nous travaille constamment, d'autant plus que nous sommes impuissants face à cette situation.» Un autre membre répond: «Nous sommes de plus en plus convaincus que la nécessité de la fréquentation des arts par l'enfant doit faire l'objet d'une volonté politique claire et ferme.»

Le résumé qu'en fait cette association de regroupements de théâtres enfance jeunesse, ils disent ceci: «Les réponses à l'enquête décrite plus haut illustrent très bien notre inquiétude justifiée et notre propos: si le boycott devait durer, l'accessibilité aux arts de la scène, pour l'ensemble des enfants du Québec, redevient presque nulle à moins de l'expression d'une volonté politique suffisamment ferme pour prendre les moyens concrets qui garantiront aux jeunes de tous les milieux un environnement artistique et culturel riche et varié. La situation est très claire ? je les cite toujours: on ne parle pas ici d'une détérioration graduelle de l'accessibilité, ce qui serait déjà inacceptable, si le boycott dure, on parle de l'effondrement de l'offre de spectacles professionnels», de l'effondrement des réseaux. On dit: «On observe une diminution rapide du nombre global d'heures consacré à l'enseignement des arts à travers le Québec.» Et, enfin, ils demandent qu'on prenne les moyens utiles pour confirmer... Enfin, ils parlent maintenant du gouvernement, bien sûr. Ils s'attendent à ce qu'il prenne les moyens utiles pour confirmer sa volonté politique d'assurer aux arts une présence quotidienne dans la vie du citoyen, sachant que c'est à l'école que s'amorce la relation avec l'art pour la plupart des enfants.

Je veux également rappeler à la mémoire de la ministre que le député de Frontenac, si je ne m'abuse, la semaine dernière, si je ne me trompe pas, ou il y a quelques jours, a déposé à l'Assemblée nationale une pétition de représentants, de gens, de citoyens et citoyennes de son comté qui illustrait également très clairement l'inquiétude qui sévit en ce moment dans plusieurs régions du Québec.

Donc, je répète qu'on ne peut plus considérer ça comme une situation localisée, avec des effets mineurs. Nous savons que nous sommes devant une situation où, en tout cas, l'inquiétude se généralise. La prudence excessive des diffuseurs fait en sorte que des institutions culturelles n'ont pas les engagements qu'elles ont l'habitude d'avoir à pareille date, ne peuvent pas signer de contrats avec les artistes, avec différents intervenants du milieu de la culture.

Et faisant suite, donc, à la pétition déposée par le député de Frontenac et aux différents éléments que je lui amène aujourd'hui, je lui demande quelles sont les interventions qu'elle effectue pour s'assurer, un, comme elle le disait il y a quelques mois, un, peut-être s'assurer que le ministre de l'Éducation ? elle l'a dit ? fera ce qu'il faut pour éviter cette situation. On voit que, jusqu'à maintenant, ça n'a pas fonctionné. Mais quelles sont les discussions qu'elle a avec son collègue de l'Éducation? Mais de façon encore plus ciblée, puisqu'elle est la gardienne de la pérennité de nos institutions culturelles dans chacune des régions du Québec, comment elle entend procéder pour assurer la survie ? parce qu'on en est rendu là, d'après les signaux d'alarme qui nous sont lancés ? pour assurer la survie d'institutions culturelles vivantes qui collaborent à la culture dans plusieurs régions du Québec?

Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la députée de Sauvé. Mme la ministre.

n(12 heures)n

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Écoutez, M. le Président je suis parfaitement non seulement au courant, mais en accord avec les inquiétudes exprimées par la députée de Sauvé. Et, lorsque j'ai dit, à l'automne dernier, que, à ce moment, c'était plutôt isolé, c'était vrai, c'était vrai à ce moment-là. L'enjeu actuellement est que le boycott ne porte pas nécessairement sur les activités engagées, mais sur les nouveaux engagements pour la prochaine session d'automne. L'enjeu, il est là. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas, des effets d'activités engagées, mais, essentiellement, la préoccupation la plus grande est vraiment sur l'effet pour la prochaine saison, la prochaine session également, à l'automne prochain. Et, comme, à cette période-ci de l'année, c'est souvent le moment où il y a des engagements de la part des milieux scolaires et des milieux culturels à une programmation pour la session d'automne, c'est sûr qu'on est à un moment très critique.

Je dirais également... Moi, je veux bien entendre la question: Qu'est-ce que la ministre compte faire? C'est un conflit de travail. Ce sont des moyens de pression qui sont exercés. Et peut-être que ça va sembler paradoxal, ce que je dis, mais nous sommes dans une société démocratique, les gens ont le droit d'exercer des moyens de pression. C'est bien évident ? et c'est là qu'il y a un paradoxe ? que, moi, je ne suis pas confortable avec le choix de ces moyens de pression, mais on ne fera quand même pas une loi spéciale contre l'utilisation de moyens de pression. Radio-Canada, actuellement, est en grève. On n'a pas le Téléjournal auquel on est habitué, c'est très frustrant, mais on ne fera pas une loi spéciale. De toute façon, je le donne à titre d'exemple, ce n'est pas de ma juridiction.

Alors, on est dans un paradoxe incroyablement difficile à résoudre. Les gens ont le droit d'exprimer leur désaccord. Ils le font d'une manière qui, moi, ne me rend pas confortable, c'est clair, parce que les effets de ces moyens de pression touchent particulièrement des organisations, et je ne veux pas infantiliser les organisations culturelles, mais des organisations culturelles qui n'ont pas toujours les reins aussi solides qu'on le voudrait, qui sont un petit peu plus vulnérables à ce type de moyens-là. Alors, vous savez, les solutions, là, elles ne sont pas juste dans mes mains.

Par ailleurs, la solution, c'est le règlement du conflit. C'est bien évident que la vraie solution pour inviter et pour rassurer tous les intervenants à faire en sorte que les engagements entre la culture et le milieu de l'éducation se passent sans contraintes, c'est le règlement du conflit. Or, c'est un conflit qui porte sur plusieurs dimensions. Écoutez, je ne cacherai pas que je suis aussi vice-présidente du Conseil du trésor. Alors, je le vois aussi évoluer, ce conflit-là, d'un autre point de vue. Tout le monde souhaite une solution rapide au conflit qui ferait en sorte, donc, qu'on respecterait les activités culturelles en milieu scolaire.

Les négociations se déroulent de manière intensive, notamment depuis le début du mois d'avril. Les négociateurs, d'ailleurs, d'un côté comme de l'autre, vont faire le point avec leurs instances, que ce soit du côté de la... On me dit que c'est aujourd'hui, là, du côté de la CSQ, et ça se fera également du point de vue gouvernemental. Le ministre Simard met les bouchées doubles là-dessus. Il s'est dit confiant d'aboutir à une solution à court terme. Alors, c'est clair que la solution, à moins qu'on décide de se comporter comme un pays dictateur et qu'on passe 53 lois puis qu'on emprisonne les gens, la solution passe par une négociation et une entente autour d'un certain nombre d'éléments entre la partie patronale et syndicale.

Ceci étant dit, ma responsabilité, c'est de gérer et d'amoindrir les effets négatifs de ces moyens de pression. Même s'ils n'appartiennent pas au milieu culturel... La responsabilité n'en appartient pas au milieu culturel, elle appartient au choix qui a été fait par les leaders syndicaux. Je n'ai jamais laissé les organismes culturels... je ne les ai jamais laissé tomber, je ne les laisserai pas tomber. Rappelons-nous, en 1999, il y a eu un mouvement similaire qui a été important. À ce moment-là, le ministère avait mis un programme d'aide spécial à la disposition du milieu culturel à hauteur de 1,5 million. Dans les faits, on a compensé pour quelque chose comme 800 et quelques mille dollars, que ce soit au ministère... et au CALQ également, qui a compensé pour 600 000 $. Donc, il y a eu une opération de compensation.

Alors, c'est sûr qu'il va falloir mesurer l'effet sur la prochaine programmation. On va le mesurer. On va prendre les mesures qu'il faut. Même à ce moment-ci, là, je ne peux pas identifier ? et je ne voudrais pas le faire à ce moment-ci non plus ? de manière concrète ces mécanismes-là, mais, si on a besoin d'y recourir, on va le faire. Je vous dirais également que j'ai rencontré la présidente de la CSQ, mon directeur a rencontré les responsables de l'Alliance des professeurs de Montréal, j'ai rencontré RIDEAU, j'ai rencontré l'UDA, les gens me parlent de ça, je suis consciente de cette réalité-là.

Et il y a eu récemment, d'ailleurs, une rencontre la plus structurante possible entre les représentants de Théâtres unis enfance jeunesse, dont la députée de Sauvé vient de faire largement état d'une enquête qu'ils ont faite. Il y avait des gens de mon cabinet, des fonctionnaires du ministère de la Culture, des gens du cabinet du ministère de l'Éducation, des fonctionnaires de l'Éducation, des représentants de l'UDA, des représentants de l'Association des enseignants spécialisés, parce que ça touche aussi les enseignants spécialisés dans le domaine de la culture dans le réseau scolaire. Alors, on a fait le point. On essaie de contenir le plus possible les effets négatifs de ce boycott-là. Alors, c'est ce que je peux dire à ce moment-ci.

Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Mme la députée.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaumier): Il reste deux minutes, madame.

Mme Beauchamp: D'accord. Ma question, elle sera, à ce moment-là, très pointue. Vous parlez de votre ouverture à parler une fois de plus de compensation, je comprends... C'est là où je vous interpellais quand je disais que vous étiez gardienne de la pérennité d'institutions culturelles dans nos régions. Maintenant, j'aimerais connaître, savoir, en fait, à quel moment vous allez mettre en branle et de quelle façon vous allez mettre en branle un processus de décision autour de ça. Parce que, vous-même, vous avez reconnu que c'est en ce moment que les institutions culturelles sont en train... Habituellement, dans leur façon de fonctionner, c'est à ce moment-ci de l'année qu'ils sont habituellement en train de signer leurs contrats d'engagement pour la prochaine année. Or, le fait que ces contrats-là ne se signent pas au même rythme qu'ils en avaient l'habitude, c'est dès maintenant qu'il y a une très grande inquiétude sur même non seulement la survie des emplois à l'interne, les emplois habituellement permanents dans ces institutions culturelles, mais bien sûr aussi l'embauche, la prise de risques pour la prochaine année.

Donc, ma question, c'est... Il ne faudrait pas attendre que la situation soit trop tard et que, par exemple, certaines institutions culturelles en viennent à perdre une expertise parce que des gens vivant une situation d'inquiétude auraient choisi d'aller travailler ailleurs ou, en fait, que ce que j'appelle leur pérennité soit menacée. Donc, j'aimerais entendre la ministre: Lorsqu'elle parle de son ouverture à être la gardienne de la pérennité de ces institutions-là, quand va-t-elle agir? Et, dans le fond, je lui lance l'appel pour qu'elle n'agisse pas à la toute dernière minute, au moment où des effets très dommageables auraient déjà eu lieu dans plusieurs institutions culturelles dans plusieurs régions du Québec.

Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Peut-être aussi juste qu'elle nous dise qu'est-ce que répond la présidente de la CSQ à ses interpellations. On sait, donc, qu'elle a eu des rencontres. Qu'est-ce qu'on lui répond lors de ces rencontres?

Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Sur cette dernière question, je crois que ce serait inapproprié que je parle au nom de quelqu'un d'autre. Vous pourrez demander à la présidente du syndicat. On a, à ces rencontres-là, un peu plus de convivialité. Mais je pense que ce serait tout à fait inadéquat que je parle au nom de quelqu'un d'autre. Maintenant, pour ce qui est de...

Mme Beauchamp: ...reformuler ma question, à ce moment-là, en lui demandant: Quelle conclusion vous en tirez? Quelle impression et quelle conclusion, vous, vous en tirez?

Mme Lemieux: Ah! bien, deuxième raison pour ne pas répondre. Je crois que je n'ai pas à témoigner de mes états d'âme sur des conversations que j'ai avec des responsables publics, des présidents ou des présidentes de syndicats. Je crois que je dois conserver ces impressions pour moi-même et je ne crois pas que ça ajoute quelque chose à la discussion actuelle. Il est important, habituellement...

Le Président (M. Beaumier): Alors, je crois que...

Mme Lemieux: Bien, je veux juste répondre... Bien, enfin, peut-être que vous ne voulez pas. Peut-être que mes collègues accepteraient que je complète...

Le Président (M. Beaumier): Tout le monde est présent ici...

Mme Lemieux: Ça implique tout le monde, là, écoutez. Moi, la première. Dans mon propre comté, j'ai une maison de la culture, j'ai des écoles, etc. Écoutez, tout le monde est interpellé par ça.

Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, je me dois...

Mme Lemieux: Est-ce que je peux... Ah non! O.K.

Le Président (M. Beaumier): Je me dois... Je crois que tout le monde vous a comprise. Alors, ils vont peut-être ajuster...

M. Bergeron: Moi, je serais d'accord si Mme la ministre veut articuler sa réponse quelques minutes...

Mme Lemieux: Je le prendrai dans le temps...

M. Boulianne: On peut prendre du temps de notre côté.

Le Président (M. Beaumier): Bien, oui, mais posez-la.

M. Boulianne: Je vais la poser.

Le Président (M. Beaumier): Mme la députée de Mille-Îles, il y a un bloc de 20 minutes, là, pour les députés ministériels. Mme la députée de Mille-Îles.

Politique de la lecture et du livre

Mme Leduc: Oui. Alors, je vais vous poser mes questions, Mme la ministre, et vous pourrez peut-être utiliser une certaine partie du début pour d'autres réponses. Alors, moi, je voulais revenir sur un sujet qu'on a abordé hier. J'aurais deux sujets que je voudrais vous voir aborder.

n(12 h 10)n

C'est concernant la politique de la lecture et du livre. Alors, c'est sûr que vous l'avez abordé, vous avez rappelé qu'il y avait eu des investissements de 21 millions pour la lecture et le livre dans le cadre du plan Agir pour la culture et les communications. Vous avez tenu une séance de travail en compagnie de représentants du milieu le 7 mars dernier, une séance à laquelle j'ai participé et dont je peux dire que le contenu était fort éclairant et enrichissant sur les constats que faisaient les gens du milieu. J'aimerais que vous nous parliez de ces constats à l'égard de la politique du livre et peut-être, si possible, que vous nous éclairiez sur quelques axes d'intervention que vous privilégiez pour l'avenir.

Investissements du gouvernement fédéral
en matière de culture et de communications

Et, deuxièmement, si le temps le permet, j'aimerais que vous nous parliez... Le gouvernement fédéral a fait des annonces d'investissements de 500 millions dans le secteur de la culture et des communications. Je voudrais savoir, Mme la ministre, où c'est rendu, ces investissements, et comment le gouvernement fédéral s'est harmonisé avec le gouvernement du Québec. Alors, vous avez un choix de...

Mme Lemieux: J'ai un choix immense.

Mme Leduc: ...immense. Ha, ha, ha!

Stratégie face à des moyens de pression
des enseignants entraînant un arrêt
des sorties culturelles (suite)

Mme Lemieux: Bien, vous m'avez ouvert la porte. Je vais juste terminer rapidement mon intervention sur le boycott des activités éducatives. D'abord, le fait d'avoir eu une intervention bien organisée en 1999 nous donne une base de travail qui peut nous aider à résoudre plus rapidement les problèmes que ça causerait dans les organismes culturels. Entre autres, on sait qui ça touche plus particulièrement.

Deuxièmement, nous sommes actuellement dans le processus de décision par rapport à ça. C'est sûr que je... Écoutez, l'objectif, là, ce n'est pas de développer un programme de compensation. L'objectif, c'est que les activités culturelles aient lieu, et, s'il le faut, nous compenserons. Mais on se comprend, là, que nos énergies doivent être consacrées à ce que ces activités-là soient dispensées. Puis, si, dans certains cas, il faut compenser, on verra, mais on se comprend sur l'objectif.

On est en train de regarder toutes sortes d'alternatives. Parce que, comme on est à un moment critique, on regarde des alternatives: Est-ce que, nous-mêmes ou par certains de nos opérateurs, on ne pourrait pas acheter des spectacles, maintenant, en disant: Le conflit va se régler puis, au moins, ça sera disponible? On regarde toutes sortes d'éléments comme ceux-là pour faire en sorte qu'il y ait le plus d'activités qui soient dispensées.

Par ailleurs, j'ai réservé une enveloppe au cas où, au cas où nous devrions compenser certains organismes. Cette enveloppe, elle est réservée. Disons que je mets de côté 1 million de dollars. On verra selon les besoins, mais je le mets de côté. Mais, je vous le dis, mon objectif, ce n'est pas de compenser le plus de monde. Mon objectif, c'est qu'il y ait le plus d'activités culturelles qui se déroulent, de toute manière. Et, s'il faut être imaginatif puis s'il faut que j'achète des shows personnellement, bien, on le fera. Bon.

Politique de la lecture et du livre (suite)

Sur la politique de la lecture et du livre, bon, effectivement, on le sait, la politique de la lecture et du livre a été adoptée il y a un certain nombre d'années. Je crois que tout le monde reconnaît qu'il y a eu des investissements majeurs dans différents domaines. On parle de plusieurs centaines de millions. Je ne veux pas reprendre ça en revue. Mais ce que j'ai... Ça chuchote beaucoup autour de moi, hein? Mes chéris, là... Bon. J'espère que ça ne sera pas noté. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lemieux: C'est fait. Alors, «mes chéris» est une expression affectueuse pour les personnes que j'aime le plus au monde et qui sont des collaborateurs extraordinaires.

Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Donc, cette politique, elle a quatre ans. Et, comme je l'expliquais hier, j'ai réservé... D'abord, j'ai convaincu la ministre des Finances que l'achat de livres, c'était aussi un geste structurant, qu'on pouvait capitaliser et, donc, qu'on pouvait utiliser le service de la dette. Ça a surpris tout le monde, mais tant mieux. Et, avant de faire les choix finaux quant à ces investissements-là, parce que 20 ou 21 millions de dollars, c'est beaucoup de sous ? je n'ai pas ça dans mon compte de banque, hein, c'est beaucoup de sous ? je trouvais qu'il était pertinent de reprendre notre souffle un peu puis de déterminer les acquis, les éléments forts de la politique de la lecture et du livre, là où on avait bien performé, là où les maillons étaient plus faibles, avant de prendre les décisions finales. Parce que quatre ans, c'est à la fois peu, considérant qu'une politique de la lecture et du livre, ça porte des objectifs d'envergure, à long terme, de longue haleine, c'est une course de fond. Et on a couvert... À ce moment-là, la politique couvrait tous les fronts, la petite enfance, les garderies, les écoles, les bibliothèques publiques, scolaires, la création, la diffusion, tout y était. Donc, quatre ans, c'est peu.

Mais, tout de même, on a pu faire un certain nombre de constats. D'ailleurs, on a produit un document qui est disponible, là, qui a été à l'appui de cette rencontre de travail que j'ai tenue le 7 mars dernier, pour essayer de bien alimenter les intervenants les plus concernés. Et, bon, un certain nombre de constats. On doit noter... Dans les constats moins sympathiques, moins positifs, on constate une baisse de la lecture, par exemple, des quotidiens. En fait, ce qu'il faut comprendre, c'est que la lecture, elle a de la concurrence, Internet, tout ce qui est multimédia, etc., il y a de la concurrence à la lecture. Et on a un grand défi parce que la lecture, c'est un prérequis pour la vie, ce n'est pas juste une activité. Ouvrir un livre, lire un roman, c'est agréable, etc., bien sûr que c'est une activité culturelle qui est fort agréable et très riche, mais, en même temps, c'est un prérequis pour la vie. Tous ceux et celles qui ne maîtrisent pas la lecture ont plus de difficultés à exercer l'ensemble des activités et à poser l'ensemble des gestes auxquels on s'attend des citoyens. Donc, il y a de la concurrence, il y a une certaine baisse de la lecture de livres, notamment chez les hommes. D'ailleurs, il y a de l'analyse à pousser de ce côté-là. Par contre, on a des atouts. Les anglophones, les allophones lisent plus en français; ça, il y a des progrès extraordinaires.

Et ce qu'on a réalisé, en fait, c'est que, dès que les jeunes sortent du milieu scolaire, la fin des études entraîne donc une baisse importante de la lecture. Alors, c'est sûr qu'en milieu scolaire les jeunes sont captifs, si je puis m'exprimer ainsi. La lecture est un geste obligatoire pour accumuler des savoirs et faire des apprentissages, mais, quand ce milieu captif n'est plus dans la vie des jeunes, il y a une baisse importante. Alors, il faut mieux travailler les périodes de transition dans la vie des gens.

Par contre, on sait également que les activités qui ont été ciblées ces dernières années auprès des tout-petits... Dans les services de garde, on a évalué les programmes de formation. Je pense notamment à cet organisme qui s'appelle Communication-Jeunesse, qui a développé des outils extrêmement... pédagogiques intéressants pour la clientèle des tout-petits. Cette formation-là, elle a été évaluée, elle est pertinente. Et on sait que les gens qui sont formés à la lecture sont des gens qui vont donc acheter plus de livres, par exemple, dans les centres à la petite enfance, vont développer plus de matériel interactif avec les tout-petits sur la question de la lecture et du livre. Alors, ça, c'est des choses que l'on sait.

On sait également que nous avons amélioré notre réseau de bibliothèques. On couvre actuellement 90 % de la population québécoise dans notre réseau de bibliothèques publiques. Les bibliothèques, c'est paradoxal, elles ont aussi de la concurrence. Les bibliothèques ont perdu certaines clientèles mais en ont gagné d'autres. Par exemple, il y a toute une clientèle de jeunes, devant l'attrait des bibliothèques publiques, qui sont plus présents dans les bibliothèques publiques que dans les bibliothèques scolaires. La clientèle plus âgée, qui est une clientèle souvent mise à la retraite, fortement impliquée, éduquée, scolarisée ? pardon ? etc., fréquente plus les bibliothèques que nos grands-parents, ça se comprend bien. Donc, il y a des atouts à ce niveau-là.

La rencontre du 7 mars. Bon, d'abord, on a réuni tous les intervenants concernés par la lecture et le livre. Il y avait des représentants des municipalités, des associations professionnelles, ceux qui sont dans les opérations, que ce soient les centres à la petite enfance, que ce soient les centres régionaux de services aux bibliothèques publiques, il y avait des représentants du ministère de la Famille, ministère de l'Éducation, évidemment du ministère de la Culture, bref, tout ce qui bouge en matière de lecture et de livre était présent. Et le milieu a confirmé les constats que nous avions faits. Le milieu nous a signifié qu'une des clés importantes, si nous voulions faire des progrès significatifs, était une concertation beaucoup plus forte, beaucoup plus soutenue.

Par exemple ? je l'illustre de manière très concrète ? les centres à la petite enfance expriment des besoins à l'effet d'avoir un nombre de livres destinés aux enfants significatif dans leurs locaux. Or, à la blague, je disais aux centres à la petite enfance: Il me semble qu'il doit y avoir une autre manière que vous envoyer des caisses de livres. Il y a moyen de connecter tout ça avec la bibliothèque publique de votre quartier, avec la bibliothèque scolaire, à la limite, avec le centre régional de services aux bibliothèques publiques. Bref, l'offre, on doit organiser l'offre de livres. Et ça, depuis, on a mis en place des mécanismes costaux. On a même pris à témoin la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui a un niveau de concertation plus élevé. On les a fait travailler là-dessus pour nous inspirer dans d'autres régions. Bref, il va y avoir des progrès très importants par rapport à tout cela.

n(12 h 20)n

Donc, d'ores et déjà, je peux vous dire que nous mettons sur pied une table de concertation sur les bibliothèques. Nous allons actualiser, évidemment, le programme d'acquisition de livres; ça, je ferai des annonces au cours des prochaines semaines. Nous sommes à revoir l'interaction entre le ministère de la Culture et les villes, les municipalités qui achètent des livres. Jusqu'à maintenant, on était beaucoup sur le modèle de répondre aux besoins, répondre aux factures. Les villes disaient: On achète 10 000 livres, voilà, ça coûte tant, et là, nous, on faisait de l'appariement. Je pense qu'il faut intervenir d'une manière un petit peu plus fine, un peu plus raffinée, considérant les progrès que nous avons faits. Nous allons donc... Bien, bref, probablement au cours du... au début du mois de mai, je vais, dans le fond, annoncer la suite de nos investissements dans le domaine de la politique du livre et de la lecture, ces suites-là étant appuyées sur un diagnostic partagé avec les intervenants et sur un certain nombre de pistes intéressantes que les intervenants m'ont signalées.

Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre.

Investissements du gouvernement fédéral
en matière de culture et de communications (suite)

Mme Lemieux: Ah! sur le fédéral, écoutez, je ne veux pas en parler trop longtemps, mais je vais vous le dire assez honnêtement, les interventions du fédéral dans le domaine de la culture... Et j'ai eu une longue rencontre avec Mme Copps il y a quelques semaines. Vous savez, il y a quelque... bien, ça fait presque deux ans que le fédéral avait annoncé 500 millions dans le domaine culturel. Ce sont nos impôts, je n'ai pas d'objection à ce que le fédéral intervienne. Le problème, c'est que le fédéral intervient en ignorant complètement les priorités et le... Parce qu'on doit reconnaître qu'au Québec nous avons une organisation de support à la culture qui est très avancée, très sophistiquée, pas dans le sens péjoratif du terme, là, mais on a un réseau de soutien qui est fort, tout le monde le reconnaît. On met deux fois plus d'argent en culture, au Québec, que n'importe quelle autre province au Canada. Par exemple, au Québec, on met 60 $ per capita en culture, alors que la moyenne canadienne est de 27 $. Alors, on a un degré d'adhésion aussi aux grands objectifs de la politique culturelle, de tous les intervenants, pas juste gouvernementaux mais des gens de terrain, sur la démocratisation, l'accessibilité, etc.

Le fédéral arrive, il dit: On veut investir de l'argent. Pas de problème, merveilleux! Mais le problème, c'est qu'ils ne parlent pas à personne puis qu'ils font n'importe quoi, puis du saupoudrage. Et là on est en train de vivre des effets de distorsion dans notre manière de soutenir la culture. Et, honnêtement, j'ai eu une rencontre avec Mme Copps, j'ai mis beaucoup d'espoir dans cette rencontre-là, mais je vais vous dire que la collaboration, quand elle est passée, Mme Copps n'y était pas, ça, c'est clair, et j'en suis franchement désolée. Ça fait qu'on essaie de rattraper ce qu'on peut.

Par exemple, le programme Espaces culturels canadiens. Il y a plus ou moins 5 millions, là, que Mme Copps avait dédiés ? pour le Québec? ? ...

Une voix: ...

Mme Lemieux: ...pour le Québec à Espaces culturels canadiens. En fait, c'est des projets autour d'infrastructures d'équipements culturels. On a réussi à obtenir de peine et de misère ? puis je ne suis même pas sûre que ça va fonctionner ? que, si le fédéral compte faire des investissements dans des infrastructures, peut-être qu'il pourrait nous parler un petit peu avant parce que, nous, là, c'est nous qui avons une idée de l'ensemble des infrastructures au Québec, qui savons où sont les besoins prioritaires. Il y a des secteurs, il y a des disciplines, des fois, où il y aurait besoin d'infrastructures supplémentaires. Il y en a d'autres, ce sont plus du point de vue des régions. Alors, on en est un peu là.

Et, je vais vous dire, les investissements concrets du fédéral, il faut les chercher et, quand on les cherche, des fois, on trouve des éléments de distorsion. Alors, bref, je pourrais en parler pendant des heures, ça prend un temps fou, c'est de l'énergie négative, mais, bon, je suis obligée de vivre dans ce contexte-là.

Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre.

Mme Leduc: ...pour le reste du temps qui me reste à mon collègue.

Le Président (M. Beaumier): Dans le bloc des 20 minutes?

Mme Leduc: Oui, dans le bloc des 20 minutes.

Le Président (M. Beaumier): Un peu comme l'entente qui avait été faite hier avec les députées de Sauvé et de Mercier? Alors, M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, j'ai quelques minutes pour passer d'abord une annonce. Vous savez que, pour reprendre les paroles de mon collègue d'Iberville, nous avons le Musée minier... minéralogique de Thetford Mines. C'est extrêmement important. Alors, je vous invite durant l'été. Il y a une collection de plus de 10 000 objets minéraux. Alors, je vous invite donc au pays des mines et des lacs à visiter le Musée.

La deuxième remarque, la députée de Sauvé a raison, j'ai présenté une pétition. Je pense que c'est une préoccupation des jeunes. C'était présenté par les trois polyvalentes, et c'était important. Et je suis très heureux de constater la préoccupation de la ministre à ce chapitre-là ainsi que la préoccupation des ministres concernés à régler le problème pour protéger nos biens culturels.

Bilan du soutien à la restauration
du patrimoine religieux

Mme la ministre, ma question touche le patrimoine religieux. Alors, on n'a pas beaucoup de temps, mais vous avez mentionné souvent, vous avez comparé nos églises aux châteaux européens assez souvent. Vous avez déjà débloqué des crédits pour restaurer des églises. Il y en a d'autres encore, des monuments religieux, qui sont promis. Alors, est-ce que vous pouvez nous faire le bilan? Vous avez même parlé d'entente avec Montréal, d'entente avec Québec. Est-ce que vous pouvez nous faire un bilan rapide de ces investissements-là dans le patrimoine religieux?

Le Président (M. Beaumier): Mme la ministre.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je suis très heureuse de parler de ce dossier du patrimoine religieux. D'ailleurs, je peux vous dire que, lorsque j'ai rencontré Mme Copps, elle était... honnêtement, là, je crois, honnêtement, elle était époustouflée de la qualité de ce programme, de la qualité des interventions et de la hauteur aussi des investissements qu'on a faits dans ce domaine-là. Hier, la députée de Sauvé s'est bien gardée de parler de cette réalisation-là. Je crois qu'hier la députée de Sauvé a voulu... en fait, sa thèse était que la ministre de la Culture avait été inactive et ne faisait rien. Alors, je suis très contente qu'on puisse en parler aujourd'hui parce que ça fait partie des réalisations concrètes.

Je voudrais aussi dire... Parce que ça m'a beaucoup trotté dans la tête, cette hypothèse de la députée de Sauvé hier, son plaidoyer à l'effet que je ne faisais rien. Évidemment, quand on est en politique, il faut être capable de vivre avec un peu d'injustice. Je vis très bien avec cette accusation-là, d'autant plus que je n'ai aucun problème de conscience, alors ça se prend pas si mal. Mais je veux quand même dire, profiter de l'occasion pour dire que ça m'a un peu troublée parce que, quand on dit que la ministre ne fait rien, on dit en même temps que tous les gens qui sont ici et derrière moi ne font rien. Et c'est là-dessus que la thèse de la députée m'a troublée et m'a attristée.

Si nous avons eu des résultats ? et le patrimoine religieux en est un bon exemple ? c'est qu'on a eu cette capacité de mettre ensemble toutes les compétences. Et il y en a, des compétences dans le domaine de la culture. Le ministère de la Culture est habité par des gens qui sont passionnés de la culture. Alors, quand on porte le jugement... elle peut bien porter un jugement sur ma personne, là, je vais vivre avec cela, mais on porte également un jugement sur des hommes et des femmes pour qui c'est le gagne-pain, qui travaillent souvent depuis des années ? le ministère de la Culture est un ministère très fidélisé, son personnel y est depuis longtemps ? qui travaillent depuis des années, qui m'accompagnent... c'est à moi à avoir la vision, à faire les choix, mais qui m'accompagnent au meilleur de leurs compétences et leur collaboration... Alors, il faut que la députée de Sauvé réalise qu'en portant un jugement sur moi elle a fait plus que cela, elle a aussi porté un jugement sur l'ensemble du ministère de la Culture, et j'en suis vraiment désolée.

Sur le patrimoine religieux, donc, depuis 1995, nous avons tous constaté que nous avions un défi incroyablement gigantesque de préserver ces édifices patrimoniaux. Et souvent les églises, les lieux de culte sont des lieux non seulement beaux, mais forcément patrimoniaux. Souvent, ces églises sont classées. Alors, jusqu'à maintenant, nous sommes intervenus sur 760 biens et édifices patrimoniaux qui ont donc bénéficié d'une aide financière. Nous avons consacré, depuis 1995, 120 millions de dollars à cette opération de préservation et de mise en valeur des églises, des presbytères, des couvents, des salles paroissiales. Nous avons, l'an passé... en fait, pas l'an passé mais à l'occasion du budget de Mme Marois, on a réinvesti un autre 20 millions de dollars qu'on est en train... D'ailleurs, l'opération de priorisation est presque complétée, complétée pour chacune des régions.

Je tiens à le mentionner, parce qu'on oublie ça, ces investissements au patrimoine religieux, non seulement on a restauré des lieux, mais ça a aussi généré des emplois. Entre 1995 et 2001, on parle de 2 000 emplois personnes-année. C'est sympathique et c'est souvent des emplois spécialisés. On a redéveloppé, donc, ces métiers très spécialisés d'artisans et de restaurateurs de patrimoine. Et la loi n° 181 nous a facilité cela.

Peut-être deux autres remarques. Je sais, vous m'avez fait signe, une minute. Mais on a aussi fait une entente avec les autorités religieuses de Québec et, plus récemment, de Montréal pour se dire comment, de manière pratique, on va gérer ce parc immobilier. Bref, on a mis ensemble les experts, on a réussi à faire de la conservation, on a réussi à faire de la consolidation. On a encore du boulot à faire devant nous, mais ce sont des interventions significatives pour les citoyens. Voilà. Bref, on a gagné notre ciel!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Beaumier): Merci, Mme la ministre. Merci bien. Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures, alors que nous étudierons, au salon bleu, les crédits dévolus à l'Office de la protection du consommateur et au Curateur public.

(Fin de la séance à 12 h 30)


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