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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mardi 30 avril 2002 - Vol. 37 N° 38

Étude des crédits du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trente et une minutes)

Le Président (M. Beaumier): Alors, le mandat de la commission de la culture, ce matin, est de compléter l'étude des crédits budgétaires du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration pour l'année financière 2002-2003. Nous disposons de 90 minutes pour les crédits alloués au programme 2, c'est-à-dire Immigration, intégration et régionalisation, et de 30 minutes pour les crédits dévolus au Conseil des relations interculturelles, soit l'élément 3 du programme 3.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Doyer (Matapédia) remplace M. Deslières (Salaberry-Soulanges); M. Dion (Saint-Hyacinthe) remplace Mme Leduc (Mille-Îles); et M. Bordeleau (Acadie) remplace Mme Beauchamp (Sauvé).

Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, avant de passer à l'étape des remarques préliminaires...

M. Bordeleau: Pardon, M. le Président.

Le Président (M. Beaumier): Oui, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Juste une information au sujet de la façon de travailler. Ce que je proposerais, M. le Président, c'est que, on a un certain nombre de sujets à aborder, et qu'on le fasse de façon relativement libre, et qu'on garde tout simplement les dernières minutes pour l'adoption des budgets comme telle... des crédits, c'est-à-dire. Alors, je pense que...

Le Président (M. Beaumier): O.K. Je pense que c'est dans la même direction.

M. Bordeleau: Bon, parfait.

Le Président (M. Beaumier): C'est beau?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Beaumier): C'est agréé, presque agréable, quasiment. Bon.

Une voix: ...

Remarques préliminaires

Le Président (M. Beaumier): Ha, ha, ha! Alors, on passerait d'ailleurs aux remarques préliminaires. J'inviterais le ministre, en tout premier lieu, puis ensuite le porte-parole de l'opposition officielle, ainsi que les membres de la commission. Alors, M. le ministre.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Bien. M. le Président, M. le porte-parole et chers collègues de l'opposition, mes remarques préliminaires, elles seront très simples, elles seront très brèves. Je pense que, à la première étape de l'étude des crédits, autant mon collègue le ministre d'État et député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, M. Trudel, et moi avons fait un portrait assez sommaire des actions du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, sauf que je comprends bien qu'aujourd'hui est le volet purement immigration et le volet relations interculturelles, deux domaines où nous tentons d'agir de la façon la plus efficace possible.

Au niveau de l'immigration, je n'ai pas besoin de vous rappeler que nous avons donné l'état de la situation, où j'avais clairement indiqué, il y a quelques mois, que le Québec avait accueilli mais, par conséquent, s'était enrichi de 37 500 immigrants. Alors, des choses sont actuellement en révision à ce ministère de façon à ce que tout se passe le plus rapidement possible. Bien entendu, aussi, il y a des actions que nous devons prendre suite... M. le député de D'Arcy-McGee, heureux de vous saluer. Il y a des actions que nous devons prendre suite au 11 septembre, qui sont reliées à la sécurité. Et le Québec a toujours assumé, sauf que nous renforcerons certaines choses. Et nous offrons forcément notre collaboration au gouvernement central du Canada, qui a un volet important pour ce qui est de l'immigration.

Nous avons annoncé hier et nous en avons remis copie au président de la commission, souhaitant qu'elle vous soit distribuée, il s'agit de la pochette qui contient les éléments de la conférence de presse d'hier matin relatifs aux ordres professionnels versus les professionnels établis au Québec et issus de l'immigration, c'est-à-dire moins de cinq ans, où je pense qu'il y a eu des avancées drôlement importantes. Je ne vais pas vous faire croire que nous avons tout réglé, mais je pense qu'il y a là une piste de règlement drôlement intéressante qu'il nous faudra exploiter. Il y a un climat qui est tout à fait exceptionnel par rapport à ce que nous avons pu vivre durant de nombreuses années. Il y a une volonté manifeste des ordres professionnels, et notamment du Conseil interprofessionnel, d'ouvrir les portes et de faire en sorte que les besoins des Québécois soient satisfaits par le travail de ces professionnels.

Et, également, ce qui est important, c'est qu'aucun talent ne soit gâché au Québec. Lorsque j'ai fait valoir le nombre d'hommes et de femmes que nous avons accueillis l'an dernier, j'ai tenu à préciser sur l'extrême qualité de la formation de ces femmes et ces hommes. De mémoire, vous me permettrez peut-être de me tromper à des virgules ou des décimales près, mais c'est plus de 75 % des femmes et des hommes qui ont immigré au Québec qui étaient détenteurs d'une scolarité de 12 ans et plus. Et le très fort contingent ? corrigez-moi, Mme la sous-ministre ? le plus fort contingent était près de 55 ou 54 % ? je regarde désespérément Mme Gagné, sous-ministre, voilà ? qui était... Je les trouve ici, je les trouve ici, je vous les donne, c'est trop important. Profil, effectivement, profil de l'immigration, c'est important de le mentionner: 56 % ? alors là je ne me trompe pas sur le pourcentage ? possédaient une scolarité de niveau universitaire; 17 %, une scolarité de niveau collégial; alors, 73 %, 12 ans et plus. Je pense que nous allons tous nous en réjouir. Ils étaient aussi très jeunes, très jeunes: 54 % étaient âgés entre 25 et 44 ans et 35 % avaient moins de 25 ans. Je suis heureux de le dire. Je m'attriste, dans mon cas, je ne me serais pas qualifié, mais c'est quand même intéressant de voir une population aussi jeune arriver au Québec.

Pour ce qui est ? parce que je préfère que nous échangions ? des relations interculturelles, bien, vous n'êtes pas sans savoir qu'un nouveau conseil a été formé il y a quelques mois. Il est présidé par M. Pierre Anctil et il est formé de 14 autres membres et qui viennent de partout. Ils viennent de partout sur le territoire, et ça, je suis heureux de le souligner. Pour la première fois, une représentation on ne peut plus adéquate du territoire québécois est représentée. Il y a des gens de la Capitale-Nationale, de l'Estrie, de la région métropolitaine, il va de soi, de la Montérégie, de la Rive-Nord, de Chaudière-Appalaches. onc, nous voulions un peu, beaucoup, énormément, par ces choix...

Le choix était d'abord et avant tout la qualification, le désir de s'impliquer des membres qui ont été nommés, mais le fait qu'ils soient représentatifs de l'ensemble du territoire québécois m'apparaît drôlement important, puisque nous favorisons une immigration en région. Et on sait que la région de Sherbrooke est une région qui a beaucoup accueilli d'immigrants, donc que la sensibilité de Sherbrooke puisse être représentée, voilà, celle de la Capitale-Nationale, forcément celle de Montréal, puisque vous savez comme moi que 85 % des immigrants choisissent Montréal comme destination, en Montérégie, il y en a beaucoup d'ailleurs, en Chaudière-Appalaches, l'Estrie. Voilà.

Alors, ceci étant dit, je pense que c'est les grandes lignes. Je crois que vous préférez aller plutôt dans des détails et des questions auxquelles nous tenterons d'apporter les réponses les plus pointues.

n (10 h 40) n

Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Alors, je passe la parole à M. le député de l'Acadie, porte-parole de l'opposition officielle en matière de communautés culturelles et d'immigration. M. le député.

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue aux personnes qui vous accompagnent et qui pourront nous apporter des éclairages, là, concernant certaines questions que nous voulons soulever. Permettez-moi aussi d'abord de vous présenter la nouvelle députée de Viger, qui a fait son entrée la semaine dernière ? alors, c'est tout récent ? à l'Assemblée nationale et qui me secondera dans le dossier des communautés culturelles et de l'immigration, alors d'où sa présence intéressée aujourd'hui dans cette commission.

M. Boulerice: Et intéressante, nous n'en doutons pas.

M. Bordeleau: Exactement. Alors, écoutez, je ne veux pas faire des commentaires qui sont très, très longs. Je pense qu'on a un temps qui est relativement court, deux heures, alors je pense que, personnellement, je préférerais qu'on aborde un certain nombre de sujets que je voudrais toucher avec les ministres responsables. Et, comme on l'a suggéré tout à l'heure, bien, le président pourra nous faire signe à la fin, quelques minutes avant la fin, pour qu'on adopte les crédits comme tels.

Discussion générale (suite)

Représentativité des communautés
culturelles au sein de la fonction publique

Le premier point que je voudrais aborder avec le ministre délégué et le ministre responsable, c'est la question de la présence des communautés culturelles au sein de la fonction publique. Il y a eu un rapport qui a été déposé récemment, en novembre 2001, par le Conseil des relations interculturelles, qui avait pour titre Pour une fonction publique à l'image de la diversité québécoise. Alors, quand on prend connaissance de ce rapport-là, je dois vous dire qu'il y a des critiques qui sont assez fortes à l'endroit de la situation actuelle concernant la présence des communautés culturelles au sein de la fonction publique. Et je voudrais d'abord citer seulement quelques extraits du rapport, je pense qu'il va nous placer un peu, là, dans le contexte.

Dans le rapport, on mentionne, à la page 5: «L'existence préalable d'obstacles systémiques joue un rôle dissuasif important.» Et on poursuit en disant: «En témoignent les difficultés particulières rencontrées par les personnes issues des groupes minoritaires pour y être admises, retenues et promues. Elles se reflètent tout au long du processus de recrutement et pendant toute la durée de l'emploi pour celles qui réussissent à franchir la porte d'entrée. Cela affecte évidemment l'attrait qu'elles pourraient ressentir à vouloir y faire carrière.»

Un peu plus loin dans le rapport, le Conseil nous dit: «...le gouvernement adoptait la loi 143, qui s'inspire des recommandations du Conseil mais avec une portée beaucoup plus limitée, puisqu'elle ne vise pas le secteur privé et exclut la fonction publique du champ d'application de la loi.» Alors, on se rappelle que la loi n° 143 visait à favoriser l'accès des groupes minoritaires, notamment des communautés culturelles au sein de la fonction publique. Et le Conseil poursuit en disant: «Le Conseil déplore toujours cette exception et considère que l'État devrait lui-même jouer un rôle exemplaire dans le traitement des minorités. Légiférer pour imposer l'équité en emploi aux organismes publics alors que la fonction publique en est exemptée, demeure une incohérence inexplicable aux yeux du Conseil et annule une partie des effets recherchés.»

Et, un dernier extrait, on dit: Pour le Conseil du trésor toutefois, le peu de progrès dans la représentativité des groupes... des personnes minoritaires s'expliquerait avant tout par le faible taux d'embauche des dernières années. Cette argumentation-là, la dernière que je viens de donner, qui est celle du Conseil du trésor, est niée dans le document même parce que, quand on regarde ce qui s'est passé au cours, mettons, des huit dernières années, au niveau de la représentation des femmes, il y a eu une amélioration sensible, alors qu'on était dans la même situation de décroissance de la fonction publique, alors que, dans le cas des communautés culturelles, ça n'a pas été du tout la situation. Alors, il faut souligner, là, que le rapport ? on pourrait poursuivre, il y a beaucoup d'autres extraits ? est très critique vis-à-vis la situation actuelle.

Et je voudrais enchaîner, à ce niveau-là, avec les résultats concrets. En 1994, la fonction publique tota-lisait 57 061 personnes. En 2000, il y a eu une diminution, des années 1994 à 2000, et on s'est retrouvé, en 2000, avec 49 269 fonctionnaires. Au niveau de communautés culturelles, il y en a avait 2 311 en 1994 et il y en avait 1 011 en 2000. Alors que la fonction publique a diminué, dans son ensemble, de 13 % entre 1994, au moment de l'arrivée au pouvoir, à peu près, là, du gouvernement actuel, et 2000, diminution de la fonction publique de 13 %, et, quand on regarde la diminution des communautés culturelles, des membres des communautés culturelles, au sein de la fonction publique, la diminution est de 56 %.

Alors, vous avouerez que les données, là, sont... C'est des données, c'est factuel. Et je pense que ça explique peut-être un peu les remarques assez fortes que fait le Conseil des relations interculturelles. On a diminué la fonction publique de 13 % à cause, bon, des choix que le gouvernement a faits, de rationaliser et de diminuer la fonction publique, mais, la présence des communautés culturelles, elle, elle a été diminuée de 56 %, et ça, c'est le gouvernement actuel qui est responsable de cette situation-là, ça s'est fait durant son mandat.

Alors, j'ai eu l'occasion de questionner le ministre du temps, qui était M. Simard, qui est maintenant à l'Éducation, qui était, à ce moment-là, président du Conseil du trésor. Et je voudrais juste rectifier. À un moment donné, dans sa réponse, il nous disait: «M. le Président, à entendre de tels propos...» Je faisais référence aux données que je viens de citer. Le ministre me disait: «M. le Président, à entendre de tels propos, on croit rêver, venant d'un parti qui, pendant des années, n'a strictement rien fait pour aider les membres des communautés culturelles à accéder à la fonction publique.» Je tiens à vous faire remarquer qu'il y en avait deux fois plus, de membres des communautés culturelles, en 1994, qu'il y en avait en 2000. Alors, ce que le ministre disait là était totalement faux. Ça ne veut pas dire qu'on avait atteint les objectifs. Je pense qu'on parle, depuis plusieurs années, d'augmenter la présence à un niveau de 9, 12 % des communautés culturelles. Alors, on en était, à ce moment-là, à peu près à 4 %, en 1994, et là on en est autour de 2 %.

Alors, le Conseil des communautés culturelles, aussi, dans son communiqué de presse, qu'ils ont émis en même temps que... c'est-à-dire qu'ils ont émis le 27 mars dernier, ils nous disent: «Il existe des obstacles systémiques qui forment une sorte de mur de glace et empêchent les personnes issues de groupes minoritaires d'être admises, maintenues en emploi et promues dans la fonction publique. Il incombe à l'État de prendre tous les moyens nécessaires pour faire fondre ce mur de glace afin qu'il puisse refléter le plus rapidement possible l'image de la population du Québec d'aujourd'hui.»

Alors, juste à des fins de comparaison, dans un article récent aussi, on mentionnait que le taux de représentativité des communautés culturelles, par exemple, en Ontario est de 9,4 % dans la fonction publique, de 7,4 en Colombie-Britannique et de 5,6 % dans l'ensemble du Canada. Alors, on est très loin de ça. On est très loin de ça, et c'est loin de s'améliorer, ça s'est détérioré depuis huit ans. Et, d'ailleurs, je pense, dans un article aussi récent, du 12 avril 2002, on citait M. Facal qui se disait personnellement interpellé par la question de la présence des communautés culturelles dans les ministères et organismes. Et je cite ses paroles qu'on nous rapporte dans l'article: «Le nombre d'embauches ne correspond pas à nos objectifs. Nous devrons donc amorcer une réflexion novatrice et rigoureuse sur la question.»

Alors, je dois vous dire que cette situation-là est inquiétante. Et on n'est pas les seuls à s'inquiéter. Le Conseil des communautés culturelles a été très explicite à ce niveau-là, très critique de ce qui s'est passé. Et les chiffres démontrent clairement que, loin d'avoir amélioré la situation depuis 1994, depuis huit ans que le gouvernement actuel est au pouvoir, on l'a détériorée. Et on ne peut pas dire, là, que c'est la baisse de la fonction publique qui fait qu'on a moins, aujourd'hui, de membres des communautés culturelles au sein de la fonction publique, puisque, comme je le mentionnais, on a diminué la fonction publique de 13 %, mais la présence des communautés culturelles, elle, elle a diminué de 56 %.

Alors, j'aimerais, dans l'esprit où M. Facal mentionnait que ça nécessitait une réflexion novatrice, rigoureuse sur la question, j'aimerais savoir, de la part des ministres responsables, quelle est la réaction à cette situation-là.

Le Président (M. Beaumier): Juste...

M. Trudel: ...c'est quoi, la méthode de calcul pour arriver à la baisse de 56 %?

M. Bordeleau: C'est des données qui viennent des chiffres officiels de...

M. Trudel: ...méthode de calcul...

M. Bordeleau: Bien, la méthode de calcul, j'ai pris l'ensemble des gens qui étaient dans la fonction publique en 1994, 57 061, c'est l'ensemble des effectifs de 1994, c'est dans les documents qui viennent de l'Office des ressources humaines, vice-présidence à l'information et la gestion, dans le rapport 1993-1994, et ensuite, dans le rapport 2000, des données semblables. Alors, on a le total, qui passe de 57 061 à 49 269, alors une baisse de 13 %. Et les fonctionnaires venant de communautés culturelles étaient de 2 311 en 1994 et ils étaient, en 2000, de 1 011, soit une diminution de 56 %.

n(10 h 50)n

Le Président (M. Beaumier): Je m'excuse, j'étais un petit peu distrait au début. M. le député de l'Acadie, est-ce que vous étiez en remarques préliminaires ou si vous étiez en question?

M. Bordeleau: ...enchaîné sur la première question.

Le Président (M. Beaumier): Tout de suite sur la première question? C'est très bien.

M. Boulerice: Alors, effectivement, la question que vous posiez lors de l'étude des crédits de mon collègue ministre président du Conseil du trésor... Et je crois, si j'ai bien lu la transcription, que la députée de La Pinière s'est attristée en ajoutant que, à l'époque où le parti à laquelle elle appartient était au gouvernement, les espoirs qui avaient été fondés, malheureusement, ne s'étaient pas réalisés. Je ne vais pas nier, si vous me permettez l'expression, que j'ai le nez en pleine face, là. Oui, malgré certains efforts, les choses ne sont pas allées autant que nous le souhaitions et autant que vous l'avez souhaité. Donc, nous sommes tous deux face à des difficultés que nous avons connues à nos périodes respectives. Je pense que ni vous ni moi n'avons l'intention d'en faire de la petite politique, mais nous cherchons plutôt des solutions.

La première chose est une invitation à être prudent, par contre, pour ce qui est des statistiques. Si je vous donne l'exemple du ministère des Relations avec les citoyens, 15 % du personnel refuse de répondre à une telle question, donc ça peut peut-être biaiser. Ça ne nous amène pas à 25 %, M. le député de l'Acadie, vous le savez comme moi, mais il y a quand même 15 % qui refusent de répondre à cette question. Je pourrais même vous donner un autre exemple. Il y a M. Pierre Girard, qui est membre du Conseil des relations interculturelles et qui est un Québécois d'origine haïtienne, et, à la question «Êtes vous membre d'une minorité visible?», il se refuse de répondre oui à cette question. Ça, c'est son droit, sauf que cela pourrait peut-être, à l'occasion, biaiser certaines statistiques. Mais le fait est que vous n'avez pas atteint l'objectif louable auquel nous avions souscrit à l'époque et que nous ne l'avons pas encore atteint. Bon.

Pour ce faire, qu'allons-nous faire? J'ai demandé immédiatement au nouveau Conseil des relations interculturelles de se pencher sur le problème. Mon collègue ? je vous les donne en vrac, sans ordre ? notre collègue le ministre président du Conseil du trésor a mis sur pied un petit groupe formé de spécialistes en la matière pour regarder s'il n'y avait pas de biais culturels dans les modes de sélection, les concours, etc. Nous sommes en train de lui demander de s'associer à lui de façon à pouvoir, entre guillemets, valider les choses comme telles. Nous savons aussi pertinemment que là où la difficulté se pose est que, durant très, très longtemps, la fonction publique était, dans un certain sens, pas réservée ni bloquée, mais les problèmes d'apprentissage de la langue pouvaient jouer, donc pouvaient ne pas attirer un segment important de la population québécoise. Mais je pense qu'en 2002 on peut dire que, véritablement, le français est la langue d'usage, la langue commune, la langue de communication. Donc, ce blocage-là ne devrait plus nécessairement exister. Bon.

Le gouvernement a tenté de faire des choses. Un de mes prédécesseurs, le député de Richelieu et ministre de l'Éducation nationale, avait décrété qu'il y aurait des concours réservés, ce qui lui apparaissait et nous apparaissait, à l'époque, une mesure intéressante. Mais, vous le savez comme moi, la Commission des droits de la personne a déclaré cette mesure non valide en fonction de la Charte.

Ceci étant arrivé, maintenant qu'est-ce qu'il nous reste à faire? Nous avons tenté d'intéresser les communautés culturelles au maximum en diffusant l'information. Nous regardons les processus ? je vous l'ai dit tantôt ? pour voir de quelle façon nous pourrions y arriver. De plus, nous avons ? et je m'en voudrais de ne pas le pas mentionner ce matin ? hier annoncé une certaine ouverture, une ouverture certaine avec les ordres professionnels. L'administration publique n'engage pas uniquement, je le dis, pour ne trouver que du personnel de secrétariat ou de soutien, mais engage également des professionnels. Donc, nous espérons que cette mesure-là pourra faciliter l'embauche de professionnels issus de l'immigration.

Nous allons, de plus, regarder de façon très attentive avec le secrétaire d'État chargé du renouvellement de la fonction publique pour voir dans quelle mesure cette grande fenêtre qui s'ouvre, où, de mémoire, corrigez-moi si je me trompe, mais il y aura 6 000 fonctionnaires engagés, de voir dans quelle mesure nous pouvons aller au maximum quant aux jeunes Québécoises et Québécois issus de l'immigration. À ce fait, d'ailleurs, je suis heureux de vous dire que, déjà, le député de Chicoutimi et secrétaire d'État a rencontré la Table de concertation pour réfugiés et immigrants pour leur faire part de ses attentes et définir quelle collaboration il pourrait exister.

Et, pour ce qui est de nous, bien, peut-être vous rappeler certaines mesures que nous avons prises. Depuis le 12 novembre, il y a des messages radiophoniques qui ont été diffusés à travers le Québec dans le but de sensibiliser la population à l'implantation de la nouvelle Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics et modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. Le Centre d'expertise en gestion des ressources humaines, au Secrétariat du Conseil du trésor, a mandaté une équipe de chercheurs indépendants ? ça, je tenais à vous le répéter ? dans le but d'évaluer et de prévenir la présence de biais culturels dans les examens de sélection utilisés dans la fonction publique. Et c'est la raison pour laquelle nous demandons ? et nous aurons une réponse affirmative d'ici peu du président du Conseil du trésor ? d'y être associés de façon à faire partie de la solution et non pas de la question. Donc, nous allons le faire.

Nous avons nous-mêmes créé un groupe de travail sur l'embauche des communautés culturelles dans la fonction publique. Nous allons aussi... Nous avons, dis-je, plutôt, mis en place un processus accéléré de traitement des demandes d'équivalence des diplômes qui sont nécessaires pour ces concours. Et le Conseil du trésor est en processus d'analyse et de révision du Programme d'accès à l'égalité dans la fonction publique. Il y a des tables de travail par groupes ciblés qui seront là éventuellement avec des groupes de travail avec tous les ministères et tous les organismes. Et il y a aussi un point qui pouvait peut-être blesser ? ou, comme on dit dans l'expression, là ou le bât blesse ? qui était aussi la reconnaissance des acquis, non pas uniquement des acquis académiques, mais des acquis de travail.

Donc, je peux vous dire que, d'ici très, très peu, le ministre d'État à l'Éducation, la ministre déléguée à l'Emploi seront en mesure d'annoncer des choses qui vont venir nous aider. C'est-à-dire, pour vous donner un exemple, un jeune Québécois issu de l'immigration mais qui a eu une expérience de travail x dans son pays d'origine, eh bien, cette expérience-là pourra être validée de façon à le rendre admissible aux concours.

n(11 heures)n

Et, de plus, aussi, une chose qui, à mon point de vue, pourrait être intéressante, je ne sais pas comment on va réussir à parvenir à l'atteindre, mais, durant très longtemps, on ne va pas se le cacher, vous êtes d'accord avec moi, M. le député de l'Acadie, la fonction publique a plus ou moins attiré parce que, bon, pour les jeunes, on était dans ? comment on dit, l'expression américaine? ? les «mushroom companies», surtout au niveau des hautes technologies, des salaires faramineux, etc. Sauf qu'on s'aperçoit, par contre, qu'il y a des emplois drôlement intéressants, où les niveaux salariaux sont maintenant équipés. Donc, nous regardons avec l'administration publique, le ministère, nous regardons de façon à ce que nous soyons présents dans toutes les foires d'emplois, toutes les foires d'emplois.

Exemple. Très souvent, vous avez, dans les universités... J'ai l'occasion de le voir à l'Université du Québec à Montréal, bon, elle n'est pas tellement loin de chez moi. Les étudiants des écoles des sciences de la gestion ont une foire d'emplois. La fonction publique n'était pas présente. Elle le sera, présente, maintenant, donc, de façon à donner la meilleure information possible sur la fonction publique et avoir un travail d'incitation, en disant: Mais venez, venez, venez tout au moins passer le concours. Alors, on espère être capable d'avoir des résultats tangibles à ce niveau-là.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de l'Acadie.

M. Boulerice: Nous ne renonçons pas aux objectifs qu'on s'est fixés, comme vous n'y avez pas renoncé, d'ailleurs.

M. Trudel: Si vous permettez, M. le Président, pour rajouter.

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre.

M. Trudel: Alors, juste quelques remarques pour dire que nous ne renonçons pas aux objectifs, et voyez l'ensemble des dispositions qu'on essaie de mettre en branle pour en arriver à atteindre l'objectif. Déjà, ces ajustements portent des fruits mais pas des fruits satisfaisants. On a, pour la dernière année, augmenté de 300 personnes ? de 300 personnes, on n'est pas dans la théorie des grands nombres ? et chacune compte, il s'est ajouté 300 personnes des communautés culturelles dans la fonction publique, dans les nouveaux concours. Je ne suis pas pour répéter tous les ajustements que le ministre vient d'indiquer pour atteindre l'objectif qu'on s'est fixé, mais déjà on voit que ces mesures-là, sous l'espace d'une année, jusqu'au début de 2002, ça donne déjà une augmentation de quelque chose comme 25 à 30 %. Du nombre de personnes qu'on avait en l'an 2000, on a augmenté de 30 % le nombre de personnes en provenance des communautés culturelles, avec aussi un phénomène ? ça, il faut le rappeler ? un phénomène qui est difficile à cerner parce qu'il fait partie du domaine des libertés, des droits et libertés: ce sont des données volontaires. Et le ministre délégué, il faisait allusion, à titre d'illustration, par exemple, tantôt, à un membre du Conseil des relations interculturelles.

Il y a ? et là c'est une tendance qu'il nous faut analyser, décortiquer ? de plus en plus de personnes vivant sur le territoire national qui sont, vu de notre oeil, en provenance des communautés culturelles et qui refusent de s'identifier avec cette étiquette. Ça, c'est un progrès de la société, de la société québécoise, ils s'identifient comme des Québécois et des Québécoises sur le territoire national, de plein droit, avec ce que cela signifie, et nous avons l'impression ? mais c'est une impression ? que cela biaise sensiblement les statistiques. Alors, on va travailler là-dessus, à décortiquer aussi, parce que 15 % du fort contingent, c'est important, malgré et en sus peut-être de l'augmentation de 30 % qu'on a eue du contingent en provenance des communautés culturelles, tel qu'ils/elles s'identifient au cours de la dernière année, une augmentation de 30 %, et on va aller au-delà parce qu'on ne renonce pas à l'objectif terminal.

Oui, il faut se poser aussi la question de l'étiquette, la question de l'étiquetage, de dire: On étiquette une personne différemment de Québécois et Québécoise dans le contexte actuel. Il faut qu'on soit en mesure... Et c'est ce qu'entre autres choses obtiendra comme avis, éclairage le ministre lorsqu'il indique qu'il a déjà chargé le Conseil des relations interculturelles d'analyser ce phénomène-là pour nous aider à progresser. Et aussi noter ? le ministre délégué en a fait hier un énoncé public ? à l'égard des efforts avec les corporations professionnelles facilitant ce travail-là, il va aussi y avoir des impacts sur la fonction publique parce que, de nouveaux contingents pouvant s'intégrer à partir des corporations professionnelles, ça va comme qualifier aussi ces professionnels pour être dans la fonction publique davantage avec ce qui est avancé par le ministre, les efforts que nous poursuivons. Donc, on ne renonce pas à ça, au contraire, mais on va aussi travailler avec ces personnes pour élever davantage le chiffre et surtout faciliter les outils nécessaires pour une plus grande participation.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de l'Acadie, il y a un quatre minutes à ce bloc.

M. Bordeleau: Oui, mais j'avais compris qu'on procédait sur une série de thèmes et puis on ne se limitait pas, là, à...

Le Président (M. Beaumier): On a des blocs de 20 minutes.

M. Bordeleau: Ah oui! Excusez, je pensais que vous parliez des sujets.

Le Président (M. Beaumier): Non, je parle de l'alternance, pas plus.

M. Bordeleau: O.K. Alors, ce que je voulais mentionner, suite un peu à ce qui a été mentionné par les deux ministres responsables, c'est... En tout cas, peut-être pour réfuter certains des arguments, d'abord, la question de s'identifier comme des communautés culturelles ou non, moi, je suis député depuis 1989, j'ai dans mon comté 45 % de gens qui viennent d'origines culturelles différentes et je suis bien conscient de ce problème-là. Mais le problème existait en 1989, existait en 1994 et il existe encore en 2000. Donc, qu'on dise que ça peut peut-être expliquer, là... Ça peut peut-être faire en sorte qu'on est un peu en deçà de ce que ce serait si toutes les personnes s'identifiaient, mais ça serait vrai pour 1994 comme c'est vrai pour 2000. Donc, ça ne change pas, je pense, les tendances générales que j'ai mentionnées tout à l'heure.

L'autre point, c'est que le ministre mentionnait tout à l'heure qu'on n'avait pas réussi. Je lui ai concédé tout à l'heure qu'en 1994 évidemment on souhaitait avoir une proportion beaucoup plus grande, mais on en n'était pas au même point quand même. En 1994, il y avait 4 % des communautés culturelles et il y avait une croissance qui se produisait. Si on regarde les chiffres de 1989, en 1989, les gens qui venaient des communautés culturelles, il y en avait 1 970; en 1990, il y en avait 1 974; en 1991, il y en avait 1 958; en 1992, il y en avait 2 339; en 1993, il y en avait 2 405. Alors, de 1989 aller à 1994, du temps ou on était au pouvoir, il y avait une croissance, pas suffisante, mais on était en croissance. Et, en 1994, 2 311. Mais là ce que je soulignais tout à l'heure, c'est qu'en 1994 il y en avait 2 311, et, à cause, en fait, des différentes décisions qui ont été prises sur la diminution de la fonction publique, on s'est retrouvé avec 1 011. Et je dois vous dire que, entre 1994 et 2000, le gouvernement n'a pas été très, très proactif pour régler ces problèmes-là, à part que de faire des discours ou de présenter le plan que le ministre Perreault avait présenté en 1999, en disant: Bon, on a encore un objectif de x. Mais, entre 1994 et récemment, parce qu'il semble y avoir une prise de conscience que je trouve relativement récente, là, de la part du gouvernement par rapport à cette réalité-là, on a été témoin de cette diminution-là, et il n'y a pas personne qui s'en est offusqué et qui a réagi à ça, à part que tout récemment. Et ça rentre en ligne de compte avec tout ce qui s'est passé, au fond, dans les décisions que le gouvernement a prises de diminuer le personnel, bon, dans la fonction publique, dans le réseau de la santé et dans le réseau de l'éducation. On a diminué partout sans trop évaluer les conséquences que ça avait puis, après ça, on a observé les conséquences. Alors, on a vu les effets que ça a eu dans l'éducation, on a vu les effets que ça a eu dans la santé et on voit aussi les effets que ça a eu dans la représentation des communautés culturelles. Alors, au moment où on parle d'améliorer la situation, qu'on a des discours pour améliorer la présence des communautés culturelles, bien, on a diminué de 50 % les communautés. C'est ça, la réalité qui s'est passée.

n(11 h 10)n

Le Président (M. Beaumier): J'aimerais, M. le ministre, pour qu'on s'entende bien, là... Le temps est terminé sur ce bloc-là. Peut-être une réponse, ce qui fait que le temps que vous prendrez s'ajoutera. Je l'ajouterai aussi à la députation ministérielle. C'est bien? Alors, allez-y, une courte réponse, puis, après ça...

M. Boulerice: Non, j'invite M. le député de l'Acadie à une certaine prudence. Oui, il y a peut-être eu des augmentations de x de 1989 à 1994, mais, en 1994, vous allez convenir avec moi qu'il a fallu éliminer un déficit qui nous avait été laissé, donc il y a eu des mises à la retraite anticipées. Mais là est-ce qu'il est en train de nous suggérer que nous aurions dit: Bon, il y a des mises à la retraite anticipées, n'y sont admissibles que les Québécois de souche, mais ne pourront pas être admissibles les Québécois issus de l'immigration, les minorités visibles, invisibles, etc.? Je veux dire, à ce moment-là, ça ne peut pas tenir, là. Tout le monde avait le droit de prendre cette offre que lui faisait l'État. Donc, ça a inévitablement un impact au niveau des statistiques que vous donnez.

Le Président (M. Beaumier): ...complément? Complément, oui.

M. Trudel: ...parce que ça va s'ajouter. Je veux juste ajouter que, moi... Par ailleurs, il faut se satisfaire et se réjouir de ce que l'opposition vient de dire. C'est-à-dire, c'est moins une question de savoir: Mon père est-u plus fort que ton père, entre 1989 et... L'objectif, c'est que les deux parties concourent à une augmentation et de prendre les moyens pour y arriver au niveau de la représentation. Et, à cet égard-là, je suis bien heureux qu'on reconnaisse que, oui, c'est ça. Vous avez la photo de mars 2000, je prends la photo de mars 2002, et déjà on a une remontée de 30 % par rapport à ce que nous avions comme contingent, mais ce n'est pas l'objectif terminal, vous avez raison. Alors, je suis bien heureux qu'on reprenne cette direction-là, de la volonté d'y arriver et moins de chercher si on s'attend à 4 heures, après la classe, pour régler nos affaires.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaumier): Oui, M. le député de l'Acadie?

M. Bordeleau: Je ne vais pas avoir le temps que vous avez accordé au ministre, supplémentaire?

Le Président (M. Beaumier): C'est à dire qu'on avait déjà dépassé quand vous avez posé...

M. Bordeleau: Mais ils viennent de répondre, ils viennent de prendre plus de temps. Vous avez dit que vous nous concéderiez le même temps.

Le Président (M. Beaumier): Non, non, aux députés ministériels. Laissez-moi gérer ça, vous allez voir. Laissez-moi gérer ça, ça va être bien équitable. M. le député de Saint-Hyacinthe.

Reconnaissance des compétences
professionnelles des personnes immigrantes

M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, MM. les ministres, c'est un sujet extrêmement intéressant que celui de l'immigration, et on peut se réjouir d'avoir accueilli près de 40 000 immigrants dans l'année qui vient d'être écoulée, je pense que c'est un enrichissement pour la société québécoise, ça, c'est indéniable. Mais je pense aussi qu'on est très sensible à l'intégration des immigrants dans la société québécoise, une intégration qui, dans la mesure du possible, se fasse au niveau de leur capacité de rendre service à la société. Et on sait qu'on a la chance d'accueillir, comme vous l'avez très bien mentionné, bon nombre d'immigrants qui arrivent ici après non seulement une formation supérieure, avoir acquis une formation supérieure, mais aussi avoir acquis parfois de longues années d'expérience dans des domaines extrêmement importants pour la société. Alors, ce sont des gens qui arrivent ici donc avec une formation considérable et qui nous en font cadeau, d'une certaine façon. Par contre, on a un problème évidemment de les accueillir au niveau où ils sont capables de rendre service dans la société.

Je vois, dans le communiqué de presse que vous nous avez donné, dans la pochette ici, qu'on peut lire une déclaration très intéressante: «En collaboration avec les ordres professionnels, le ministère met en oeuvre plusieurs actions afin de mieux informer les personnes immigrantes, de mieux reconnaître la formation et l'expérience pertinentes des personnes immigrantes et de mieux assurer dans les établissements d'enseignements collégiaux et universitaires l'accès à la reconnaissance de la formation et des expériences.» Alors, je pense que l'intention, elle me semble évidente.

Par contre, je vois, dans l'autre document, Professions régies par un ordre professionnel, je vois qu'on a 44 ordres professionnels au Québec qui disposent d'une réelle autonomie pour accomplir leur mandat de protection du public. Et les principaux règlements adoptés pour chaque ordre ? et les règlements sont adoptés par les ordres ? évidemment, ils doivent être acceptés par les gouvernements, mais, une fois qu'ils sont acceptés, ils ont force de loi. Donc, ils ont force de loi, ils ont force de loi tant qu'ils ne sont pas changés, et ils sont changés par les ordres eux-mêmes et non pas par le gouvernement. Donc, le gouvernement ne peut qu'approuver les règlements tels que présentés par les ordres.

Or, vous savez comme moi ? et je suis certain que vous êtes très sensibles à cette question ? qu'il y a des gens qui arrivent ici avec des compétences très avancées. Par exemple, je parle de la médecine, parce que j'ai l'impression que c'est là où la situation est la plus criante. Je me souviens de la consultation qu'on a eue il y a deux ans, je crois, ou un an et demi, dans la même commission, à l'occasion de l'adoption du plan triennal, où on a étudié cette question-là. Et je vous avoue que le sentiment que j'ai eu à ce moment-là, c'est que la situation était un peu bouchée, était un peu bloquée et qu'on ne voyait pas trop comment on pourrait s'en sortir. Alors, si mes souvenirs sont bons, le minimum d'années de présence au Québec avant de pouvoir avoir une reconnaissance de sa capacité de pratiquer la médecine, c'était de six ans, à l'époque, si mes souvenirs sont bons. Alors, vous comprendrez qu'on retrouve donc des médecins qui sont gardiens de sécurité ou chauffeurs de taxi, toutes des professions très nobles, mais c'est des gens qui pourraient rendre des services beaucoup plus considérables à la société dans un contexte où on a besoin de médecins.

Alors, la question que je me pose est la suivante, et tout en admettant que la médecine est une profession très particulière, c'est à la fois une science, c'est un art aussi, parce qu'on sait que, dans la médecine, il y a toutes sortes de choses qui entrent, et c'est... Ensuite de ça, dans la médecine, la dimension culturelle est importante aussi, et on voit difficilement quelqu'un passer de la pratique de la médecine dans une certaine culture à la médecine dans une autre culture sans aucune transition. Et je suis prêt à faire aussi la distinction entre différentes pratiques de médecine. La médecine générale, c'est une chose; la chirurgie très spécialisée, c'est autre chose, ça ne présente pas la même problématique.

Quoi qu'il en soit, il y a un problème de reconnaissance de compétences ? je prends ce cas-là parce que c'est peut-être le cas le plus criant ? et l'intention du ministère, du gouvernement est claire, de faciliter cette reconnaissance-là. Alors, la question que j'aimerais vous poser, M. le ministre, c'est: Quel moyen vous allez prendre pour faire en sorte que cette intention-là se traduise de façon efficace et le plus rapidement possible dans les faits?

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre.

M. Boulerice: Je vous remercie de votre question, elle est fort d'actualité. Le ministère est très conscient de ces difficultés-là, mais il y a des avancées quand même qui ont été faites. J'en ai cité une. Il y a diverses actions qui ont été mises de l'avant particulièrement depuis un an en vue justement de favoriser l'accès rapide aux professions qui sont régies par les ordres professionnels, et ça, on l'a fait en étroite collaboration avec l'Office des professions, le Conseil interprofessionnel, qui regroupent tous les ordres professionnels et les ordres concernés, et notre ministère entend tabler énormément là-dessus, et leur collaboration, elle nous est acquise.

La clé, vous l'avez dit, c'est la reconnaissance des acquis professionnels. Donc, il faut développer des outils d'évaluation de ces acquis, faciliter l'accès à des formations ? ça, je vous ai dit qu'il y aurait des annonces bientôt là-dessus ? pour mettre à niveau les compétences ou encore pour faciliter l'intégration en emploi. Et, parmi certaines interventions en cours, il n'est peut-être pas mauvais de vous citer ce que nous avons fait. Il y a des brochures d'information générale sur les professions qui sont régies par les ordres, et 21 fiches sur les professions spécifiques sont disponibles sur Internet, il y en a 24 autres qui sont en élaboration et qui seront également là-dessus. Il y a une table de concertation sur l'immigration et l'admission aux ordres professionnels qui s'est faite avec le Conseil interprofessionnel et le CAMO pour personnes immigrantes. Le CAMO, je pense que tout le monde va lui donner son crédit, il travaille, il travaille énormément, il travaille très fort. Je vois que Mme la députée de Viger les connaît bien et apprécie le travail qu'ils font. Et il y a un projet-pilote actuellement pour faciliter l'accès à des professions régies, notamment ? on l'a illustré hier ? les infirmières, les orthophonistes. Et je reviens à tantôt parce que la prochaine politique d'éducation des adultes, elle va être dans une perspective de formation continue, de même que la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, elles vont tenter d'apporter des solutions à ce que nous avons dit.

n(11 h 20)n

Mais, pour le cas très spécifique des médecins, ils sont informés que c'est une profession réservée au départ. Le Québec est très honnête, lorsqu'une personne, en qualité de médecin, désire immigrer au Québec, nous lui disons: C'est une profession réservée. Maintenant, il y a une certaine ouverture avec des permis restrictifs, et ça se fait aussi via la résidence. Les fonctions antérieures de mon collègue aussi permettent probablement d'ajouter quelque chose à cela. Mais il y a une chose qui est certaine, c'est qu'hier il y a eu un grand déblocage drôlement porteur. N'étaient pas présents que les audiologistes, orthophonistes, etc., l'Ordre des ingénieurs était là, l'Ordre des chimistes, pour ne nommer que ceux-là. Et il est dans notre intention aussi de rencontrer les médecins pour voir de quelle façon nous pourrions faire débloquer certaines choses, puisqu'un sujet qui tient particulièrement à coeur à mon collègue, c'était la responsabilité également des régions. Et, ancien ministre de la Santé et des Services sociaux, il est conscient que, au niveau de la reconnaissance des acquis en médecine, il peut y avoir là un certain élément de solution à des difficultés que nous rencontrons.

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre d'État, oui.

M. Trudel: En indiquant l'effort spectaculaire et l'avancée réalisés hier par le ministre délégué à l'égard de ce qu'on pourrait appeler la barrière des professions. C'est assez exceptionnel, ce qu'il vient d'énumérer, ces ententes de collaboration visant à faciliter l'accès aux professions. Nous nous retrouvons cependant dans le cas d'une corporation professionnelle et, à plus juste titre, dans le cas des médecins, avec une situation particulière qu'il ne faut jamais oublier, c'est que, au Québec, compte tenu que nous avons un régime public, l'accès à la profession donne un double privilège, et c'est à toutes fins utiles la seule profession dans laquelle, quand tu obtiens ton titre professionnel pour lequel l'Ordre, le Collège des médecins a des responsabilités, tu obtiens aussi le droit, guillemets ? en anglais ? d'obtenir un «billing number». C'est-à-dire que l'obtention du statut de médecin, omni ou spécialiste, au Québec, en vertu des critères gérés par l'Ordre, par le Collège des médecins, donne accès à deux privilèges: être médecin, pratiquer la médecine sur le territoire national, mais aussi d'avoir accès au régime public.

Par ailleurs, ce qu'il faut toujours constater, c'est que les enveloppes de rémunération des médecins, quelque chose comme 2 milliards de dollars, médecins omnipraticiens, médecins spécialistes, sont des enveloppes fermées, c'est-à-dire qu'il y a une convention collective qui est établie avec les médecins omnipraticiens et une autre convention collective avec les médecins spécialistes qui disent: Nous allons oeuvrer, compte tenu des besoins et des capacités de l'État, à l'intérieur de l'enveloppe x et de l'enveloppe y, si bien que ceux et celles qui auront accès à cette enveloppe sont les personnes professionnelles qui s'appellent médecins qui seront accréditées par le Collège des médecins.

C'est pour ça qu'il faut dire donc qu'accéder à la profession donne un double privilège: d'être reconnu professionnellement et d'avoir accès, pour cette seule profession, à un système public d'assurance. Et c'est pourquoi il faut toujours ajouter, d'abord sur le plan de la gestion, que ces personnes de l'extérieur sont prévenues, comme disait le ministre délégué, les personnes sont prévenues de cette disposition particulière. Parce que, on le comprendra facilement ? et là ce n'est pas ici que doit se faire le débat ? c'est le Québec qui compte le plus de médecins par 100 habitants, c'est le Québec qui compte le plus de médecins parmi toutes les provinces canadiennes, quand on le calcule donc par tranches de 100 ou de 1 000 habitants sur le territoire. Par ailleurs, comment se fait-il que nous nous retrouvons, dans certains coins particuliers, une dizaine particulièrement, avec des problèmes d'effectifs? Là, c'est un problème de répartition. Mais le Québec a un plus grand nombre de médecins par 100 habitants que n'importe quelle autre province canadienne et la plupart des États américains.

Alors, l'avancée et l'étape spectaculaire qui a été réalisée hier avec les professions placent aussi, il faut le dire, le Collège des médecins dans une situation particulière, vu le double rôle qu'ils assument en termes d'accord de privilèges, et c'est pour ça que les échanges vont prendre aussi le ton et s'intéresser à cette question, puisqu'il s'agit également de répartition à l'égard du contrat collectif que nous avons avec les médecins.

M. Boulerice: D'ailleurs, si vous me permettez, il y a de prévu à brève échéance une rencontre avec eux.

Le Président (M. Beaumier): Il y a encore du temps ici, M. le député d'Iberville. Oui?

Présence d'immigrants en région

M. Bergeron: Oui. Alors, MM. les ministres et tous les gens qui vous accompagnent, bienvenue. J'aimerais parler de régionalisation de l'immigration. Dans vos remarques préliminaires, M. le ministre délégué, vous avez dit qu'il y a eu, l'an dernier, 37 500 immigrants, et Montréal a pris 85 % de ce nombre-là. Lors de précédentes auditions en commission parlementaire, on a reçu la visite du maire L'Allier de Québec qui disait vouloir colorer la région, voulait avoir plus d'immigrants. Le maire Bourque, dans le temps ? donc, c'était avant la dernière campagne électorale ? était venu dire sensiblement la même chose. Mais c'est que le Québec n'est pas Montréal, n'est pas seulement Québec, il y a aussi toutes les régions. Qu'en est-il de la présence des immigrants? Est-ce qu'on peut dégager un bilan? Et, dans un premier temps, de me dire: Est-ce qu'il y a eu augmentation ou diminution?

M. Boulerice: Il y a effectivement une augmentation d'immigrants vers d'autres régions que celle du Montréal métropolitain. Il y a une augmentation au niveau de la capitale nationale, une augmentation, oui, de 28 % vers la capitale nationale, il y a également vers l'Estrie, la Mauricie, le Centre-du-Québec, ça touche même aussi une région qui est très chère à mon collègue, qui est l'Abitibi-Témiscamingue, et l'Outaouais, qui est un peu voisin comme tel. Mais il y a effectivement une augmentation.

Et il se dessine quelque chose de drôlement intéressant. C'est que, quand ça fait 17 ans qu'on est dans un Parlement et qu'on rencontre des gens, on voit les différences de mentalité qui peuvent exister. Il y a quelques années, vous alliez en région puis on disait: Il faut notre CLSC. Mais vous êtes maintenant en région et vous entendez dire de la part des régions: On veut nos immigrants, on veut nos immigrants. Et c'est drôlement plus important aussi que, à l'occasion, certains projets d'ordre économique peuvent être bloqués parce qu'il manque de personnel spécialisé, et ce personnel spécialisé peut nous venir de l'immigration.

Mais la fonction régionalisation, nous y apportons énormément d'intérêt. Et cette fonction-là, je ne l'exerce pas de façon exclusive, nous la partageons en équipe solidaire et conjointe, mon collègue et moi, parce que, comme il est ministre d'État aux Régions, je trouve que ça donnait beaucoup de crédibilité que le ministre d'État aux Régions parle de régionalisation et d'immigration aussi.

M. Trudel: Alors donc, comme, à l'égard de cette question de la régionalisation, c'est une préoccupation qui est aussi constante que celle que nous avons abordée tantôt, par exemple, de la participation des communautés culturelles dans la fonction publique québécoise. On s'est fixé des objectifs ambitieux. On a 37 500, cette année, nouveaux Québécois et Québécoises qui arrivent de l'extérieur. On souhaite que 25 % puissent s'établir en région. On en est, en gros, à peu près à 15 %, si bien que, comme ministres responsables, nous sommes en train, je suis en train de préparer une révision des mécanismes visant à augmenter significativement la part de l'immigration dans les régions du Québec.

n(11 h 30)n

Mais qu'est-ce que cela signifie sur les grandes intentions? Ça signifie, par exemple, qu'on pourra développer des mécanismes particuliers pour répondre aux besoins de certaines régions. Exemple à l'appui: ce qui s'est fait il y a 15 jours avec la Cité de l'optique, à Québec. Cité de l'optique, à Québec, en gros, nous identifie un besoin de spécialistes, de ressources humaines hautement spécialisées dans le domaine de l'optique et de la photonique pour un minimum, nous disent-ils, la première année, de 30 personnes. Et ces gens, qui sont dans les réseaux internationaux, sont capables d'identifier ces ressources humaines dont ils souhaitent la migration vers le Québec pour participer... On a donc signé une entente particulière qui fait en sorte que, dans ce cas, avec la pleine participation d'Immigration Canada, on est capable, dans une très, très courte période de temps, de faire en sorte qu'une personne identifiée vient se joindre à nous ou a l'autorisation de venir se joindre à nous dans des délais aussi courts qu'une semaine. Une semaine, toutes les formalités administratives peuvent être complétées, pour se joindre à nous.

C'est la même chose à l'égard de certaines régions. Je vais en prendre une au hasard, évidemment l'Abitibi-Témiscamingue, qui a eu l'autorisation de développer un département de génie industriel et de génie minier dans son université et qui a fait appel à des ressources formées en particulier en Europe de l'Est. Nous pouvons faire en sorte de travailler avec des unités, des lieux industriels ou institutionnels pour favoriser du recrutement ciblé. Parce que, par ailleurs, il faut toujours se soucier dans tous les cas qu'au Québec nous ne pouvons pas faire comme en Ontario et ne parler que d'immigration. Au Québec, il faut parler d'immigration et d'intégration. C'est un couple indissociable, compte tenu du caractère particulier de la société québécoise et de la volonté d'assurer la pérennité de cette nation à caractère français en Amérique du Nord, et ça fait partie toujours, en termes d'intégration, du souci que nous devons avoir. Nous devons aussi bien sûr avoir le souci d'intégration économique. Sommes-nous capables de s'offrir suffisamment d'ouverture partout sur le territoire national pour avoir la capacité que ces gens exercent leur compétence sur le territoire et l'augmentent, ce degré de compétence?

Alors, nous allons réviser substantiellement, au cours des prochaines semaines, nos approches et mécanismes pour davantage de régionalisation. Et j'ai déjà eu l'occasion d'en discuter avec des collègues de l'opposition aussi dans le cadre du mandat du ministre d'État à la Population et à l'égard de l'évolution démographique du Québec dans son ensemble.

Alors, régionalisation. On a déjà des augmentations assez spectaculaires. 2001 sur 2000, en termes d'augmentation, par exemple, l'Estrie, on a augmenté de 122 %; la Capitale-Nationale, 72 %; le Centre-du-Québec, 56 %. Nous devons aussi affiner nos définitions de ce que signifie «région», de ce que signifie «région». On comprend qu'ici, en termes d'immigration, c'est hors l'île de Montréal. Il faut faire attention aux définitions aussi en termes de ce que c'est que la régionalisation de l'immigration. Est-ce que, sitôt qu'on a franchi le pourtour bleu de l'île, on est en région? C'est une définition qui appartient au sens commun mais qui mériterait qu'on s'y attarde davantage. Quand on s'établit à ville de Laval ou dans la nouvelle ville de Longueuil, est-ce qu'on régionalise l'immigration? Nous sommes en train aussi de revoir cela, l'important étant que nous souhaitons que davantage de nouveaux Québécois et Québécoises vivent partout sur le territoire national et que nous ayons les instruments pour soutenir leur participation, leur intégration partout dans toutes les régions du Québec.

Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. Trente secondes.

M. Boulerice: ...en 30 secondes.

Le Président (M. Beaumier): Trente secondes, oui.

M. Boulerice: Il y a des attitudes très proactives de la part de certains. Le ministère fait la promotion des régions, il va de soi, mais un bel exemple à vous donner est la région, ici, de la Capitale-Nationale où on fait, entre guillemets, du maraudage, c'est-à-dire que les gens de la Capitale-Nationale viennent visiter ceux qui sont dans les carrefours d'intégration sur l'île de Montréal pour leur parler de cette région et des possibilités d'établissement et d'emploi. Donc, il y a des mesures très proactives spontanées de la part des régions qui se produisent. C'est la même chose pour l'Estrie aussi.

Le Président (M. Beaumier): Bien. M. le député de l'Acadie.

Représentativité des communautés
culturelles au sein de la fonction publique (suite)

M. Bordeleau: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais aborder un autre sujet qui me préoccupe beaucoup ? on y a fait référence un petit peu ? concernant toujours la question de la présence des communautés culturelles dans la fonction publique, c'est la question des concours. On a eu, je pense que c'était en septembre ou... en tout cas en 2001, je crois que c'est en septembre 2001, un concours pour qualifier des candidats pour différents postes. Et on se souvient qu'il y a eu 18 000 candidats qui se sont présentés pour se qualifier pour une série de postes qui étaient des postes de secrétariat, d'agent, en fait, pour des postes de technicien, agent ou agente vérificateur, d'aide socioéconomique, évaluation foncière, etc., en droit, recouvrement fiscal, etc. Alors, il y a eu 18 000 candidats qui se sont présentés.

Et il faut bien situer qu'au niveau de l'immigration on sélectionne avec des critères de plus en plus sévères au niveau de la qualification académique ou de l'expérience. On veut avoir des gens qui sont des gens qualifiés, on les amène ici et, après ça... Ces gens-là viennent ici d'abord et avant tout avec l'idée de pouvoir travailler et gagner leur vie de façon digne. Alors, c'est une attente qui est très forte. Ces gens-là viennent s'établir ici. On sélectionne, encore là, une grande qualité au niveau de l'immigration et, quand on arrive ici, on répond, à mon avis, de façon décevante aux attentes que ces gens-là peuvent avoir.

On a parlé de la présence dans la fonction publique, mais la clé pour entrer dans la fonction publique, c'est les concours. Et on a eu un concours où on a eu 18 000 candidats qui se sont présentés, et il y en a eu là-dedans 3 724 qui provenaient de différentes communautés culturelles. Alors, ça veut dire à toutes fins pratiques à peu près un sixième, et un sixième, ça, c'est tout à fait contraire à ce que le ministre président du Conseil du trésor me disait à une question en Chambre, où il me dit: Lors des derniers concours publics qui ont été rendus... qui ont été effectués au printemps dernier, le tiers des candidats de ces concours publics sur l'île de Montréal appartenait à des groupes des communautés culturelles. C'est faux. Ce n'est pas le tiers des candidats qui s'est présenté qui venait des communautés culturelles, c'est 3 700 sur 18 000, c'est un sixième. Donc, on nous donne des chiffres, on essaie de démontrer qu'il y a une ouverture effective ? je ne parle pas au niveau de la volonté et du désir, là, mais je parle des faits ? et on nous dit: Il y en a un tiers qui viennent des communautés culturelles, ce qui est faux, c'est plus près de un sixième.

Mais ce qui est plus inquiétant là-dedans, et on a eu des réactions qui sont... D'abord, il faut signaler... il faut donner les résultats. Les résultats de ce concours-là...

M. Boulerice: M. le Président, je ne veux pas empêcher M. le député de l'Acadie parce que je sais qu'il le fait d'intérêt, mais je pense que cette question-là a été posée au ministre président du Conseil du trésor. Ce n'est pas le ministère des Relations avec les citoyens qui gère les concours de la fonction publique. Nous tentons de vouloir apporter des solutions aux problèmes qu'il a soulevés, on se fend l'âme presque pour le faire, mais, moi, je ne vais pas répondre à la place du ministre président du Conseil du trésor.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Cette question-là, je suis bien conscient que c'est une question qui relève du ministère du président du Conseil du trésor, excepté que, comme responsable des communautés culturelles, vous devez avoir un intérêt à surveiller ce qui se passe là-dedans, et c'est dans cet esprit-là que je pose des questions pour savoir comment vous réagissez à cette situation-là. Je ne vous demande pas de répondre à la place du président du Conseil du trésor, mais je pense que vous devez répondre parce que vous avez d'abord la responsabilité de vous assurer que les communautés culturelles sont traitées de façon équitable au Québec.

Une voix: ...

M. Bordeleau: Alors, je poursuis, M. le Président.

Le Président (M. Beaumier): Un instant. C'est au député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. Alors, suite aux résultats, je mentionnais que, dans les faits, il y a un candidat sur deux qui s'est qualifié sur les 18 000 candidats, quand on prend l'ensemble des candidats, un sur deux, mais, dans le cas des communautés culturelles, c'est un sur quatre qui s'est qualifié, alors deux fois moins. Toutes proportions gardées, deux fois moins de candidats venant des communautés culturelles se sont qualifiés à ces concours qui étaient des examens, là, écrits, etc.

n(11 h 40)n

Et il y a eu des réactions à ça qui sont inquiétantes et qui me préoccupent beaucoup. Il y a des gens qui nous ont dit, par exemple ? et je cite juste deux extraits: «"Ce sont des examens mal adaptés. J'ai réussi tous les examens, je réussirai encore, mais je sais que ceux qui n'ont pas fait leurs études ici n'ont pas les références pour comprendre", a affirmé une jeune femme d'origine haïtienne désireuse de conserver l'anonymat et qui, depuis ce temps, va de contrat temporaire en contrat temporaire au sein de divers ministères.» Une autre personne nous dit: «On sert de figurants. À compétences égales, donnez-nous des chances égales. Il n'y a pas de discrimination positive ou négative, il y a de la discrimination, point.»

Et on peut se poser la question, quand on est devant cette réalité-là qu'il y a deux fois plus de gens qui échouent qui viennent des communautés culturelles que de l'ensemble des autres candidats, écoutez, on peut se poser la question: Est-ce qu'il n'y a pas des biais culturels à l'intérieur de ces questionnaires-là? Et je dois vous dire que je suis dans le domaine, j'ai travaillé dans le domaine de la psychologie industrielle, j'ai été témoin dans des causes de discrimination systémique sur des procédures d'emploi dans des compagnies québécoises et dans des grandes compagnies canadiennes. Et j'ai demandé, à ce moment-là, au Conseil du trésor de me faire parvenir tous les renseignements concernant la validation de ces questionnaires.

Alors, M. le Président, on a reçu quelques informations qui démontrent... Je vais simplifier parce que c'est assez technique. Quand on construit des tests pour mesurer, par exemple, telle habileté, je pense qu'on le fait correctement, c'est-à-dire que le test mesure bien telle habileté, d'après l'ensemble des documents de statistiques qu'on m'a fait parvenir, alors je ne remets pas ça en cause. Quand on mesure une habileté x, je pense qu'effectivement on a pris toutes les techniques nécessaires pour s'assurer qu'on mesure bien cette habileté-là. Maintenant, ce qu'on n'a pas fait, c'est qu'on n'a pas déterminé, on n'a pas expliqué pourquoi les gens venant de communautés culturelles échouent plus à un test qu'à un autre. Et l'explication que nous donne le président du Conseil du trésor est inacceptable. Il confirme exactement ce que je pensais, c'est qu'on se retrouve vis-à-vis des questionnaires qui sont biaisés au plan des... un biais culturel.

Et je veux juste citer sa réponse qu'il m'avait donnée en Chambre: «Les pourcentages de réussite aux examens de la fonction publique pour les gens issus des communautés culturelles, pour des raisons justement d'origine culturelle et de difficultés d'adaptation, font en sorte que les taux de succès sont moins élevés.» Il nous dit que c'est à cause de l'origine culturelle. C'est préoccupant, ça, parce que ça, ça veut dire qu'il y a un biais culturel. Si on avait voulu avoir des examens bien faits, on se serait rassuré de retenir des items ou des questions qui se répondent de façon semblable, c'est-à-dire autant qui échouent, autant qui ont des résultats moyens, autant qui ont des résultats forts, que ce soit dans les communautés culturelles ou dans les candidats d'origine québécoise, et là on aurait des tests qu'on peut appliquer à tout le monde, et il n'y a pas de biais. Mais ce qu'on nous dit, dans ce cas-là, c'est qu'on... On pense qu'il y a des biais. Alors, je pense que ça, on n'a pas fait la démonstration à date que les questionnaires ne sont pas biaisés.

Et je veux attirer l'attention du ministre là-dessus parce que, au niveau du CN par exemple, au début des années quatre-vingt, il y a eu une cause de discrimination systémique à l'égard des femmes, qui a été une cause qui a été portée en cour par Action travail femmes, qui était l'organisme à ce moment-là, et ça a duré longtemps, et, en bout de ligne, ça a été reconnu qu'il y avait une discrimination systémique à l'égard des femmes. Je pense que, dans les tests qui ont été présentés, il est loin d'être exclu qu'il n'y a pas de discrimination systémique à cause d'un biais culturel qui est en défaveur des candidats des communautés culturelles, et ça, ça doit préoccuper les ministres responsables de ce dossier de la présence des communautés culturelles et de l'équité à l'égard des communautés culturelles aussi.

Et, dans ce sens-là, M. le Président, je veux juste citer des exemples... des extraits qui viennent du document préparé par le Conseil des relations interculturelles. On mentionne ? et je vais juste lire deux, trois extraits: «L'embauche demeure inférieure à la disponibilité potentielle en raison d'un trop fort taux de rejet des candidatures à l'étape de l'admissibilité aux concours.» C'est évident qu'à partir du moment où on exclut dans un concours des candidats, bien, les candidats ne se retrouveront pas dans la banque. Il y en a dans la banque probablement deux fois moins qu'il aurait dû y en avoir si les questionnaires avaient été faits correctement et si on n'avait pas agi de façon discriminatoire à l'égard des communautés culturelles.

Dans le document, encore, du Conseil des relations interculturelles, je cite: «On devait aussi analyser les étapes du processus de sélection et les moyens utilisés pour déterminer les causes d'élimination à chacune des étapes du processus de dotation afin de pouvoir corriger les biais susceptibles d'être la cause de discrimination systémique ? c'est très important. Nous verrons plus loin qu'une partie de l'échec du programme actuel est certainement attribuable au fait que cette analyse, qui est cruciale, n'a jamais été faite.»

Un peu plus loin, ici, on parle de biais systémique dans la procédure d'embauche: «Le Conseil du trésor n'a toujours pas exécuté d'analyse sur les facteurs qui se cachent derrière ce phénomène. Aux yeux du Conseil des relations interculturelles, un tel examen pourrait détecter la nature exacte des biais culturels et des autres obstacles dans le processus d'embauche.» Enfin, le dernier extrait que je veux vous mentionner: «Le problème principal repose moins sur les inscriptions que sur la déperdition en cours de route. Comme rien n'a été fait jusqu'ici pour tenter de corriger les biais systémiques dans la sélection, il faut s'attendre à ce que ces proportions fondent au fur et à mesure que les individus avanceront dans le processus.»

Alors, je ne veux pas être un oiseau de mauvais augure, mais je vous garantis que, si, actuellement, il y avait des gens qui se levaient puis qui prendraient des procédures en vertu de la Charte canadienne des droits à l'égard des tests qui ont été utilisés, le gouvernement aurait à faire la démonstration qu'il n'y a aucun biais culturel dans ces tests-là, et c'est loin d'être le cas. Le ministre lui-même, de façon un peu naïve, nous dit que, s'il y a des taux de réussite moindres, ça dépend de l'origine culturelle. Bien, moi, je pense que ça préoccupe. C'est la porte d'entrée, à ces gens-là, pour avoir accès à un travail qu'ils veulent faire. On les sélectionne, comme je le mentionnais tout à l'heure, avec des qualifications élevées, puis, quand on arrive ici, on leur ferme la porte, ce que ça a été par la fermeture, l'attitude de fermeture qui existait assez fortement dans le passé au niveau du Conseil interprofessionnel ou des ordres professionnels, mais, au niveau de la fonction publique, on leur rend ça difficile d'entrer là-dedans. Alors, il ne faut pas se surprendre qu'on en ait moins et qu'on se réveille avec les chiffres qu'on a tout à l'heure.

Alors, je pense qu'il y a un problème qui est réel là et qui démontre, en tout cas, jusqu'à preuve du contraire... c'est une hypothèse, ce n'est pas une affirmation, mais une hypothèse sérieuse qui peut sous-entendre que les questionnaires qui ont été utilisés dans ces concours-là ont discriminé de façon discriminatoire, si on veut, les gens des communautés culturelles. Alors, je voulais vous souligner cette question-là et vous demander: Quelle est votre attitude comme ministre responsable des Communautés culturelles? Je comprends que ce n'est pas vous qui êtes responsable des processus de sélection, mais j'ai l'impression que vous avez des représentations à faire sérieuses auprès du Conseil du trésor pour vous assurer qu'on ne se retrouve pas avec une situation comme ça, qui, en vertu de la Charte, de la Charte canadienne des droits, on discrimine des gens sur la base de l'origine culturelle, parce que c'est inhérent aux questionnaires qu'on utilise.

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre d'État.

M. Trudel: Il faudrait avoir une précision, parce que c'est quand même très gros, ce que dit le député, mais quoique c'est modulé par la fin de son intervention qui annule le restant, là, en disant que, quant à lui, c'est une hypothèse. Est-ce que, de votre côté, c'est une hypothèse ou si c'est une thèse que vous appuyez? Et, si c'est une thèse, il faudrait avoir davantage d'information. Est-ce que vous avez des exemples concrets? Parce que vous avez commencé par une prémisse qui dit que les instruments pour mesurer les habiletés sont corrects puis ils sont bons. Alors, si les instruments sont bons... Et là vous dites, vous inférez qu'il y aurait du biais discriminatoire, mais vous modulez votre intervention, après avoir fait des affirmations, en disant: C'est une hypothèse. Je vais juste compléter en disant que j'aimerais ça avoir davantage de précisions. Mais là, pour vous, là, pour vous, là, c'est vous qui êtes le porte-parole, là, est-ce qu'il y a une seule illustration qu'il y a un biais négatif de discrimination dans ce que vous avez vu comme instruments, là, si vous avez une opinion là-dessus? Parce que le Conseil des relations interculturelles, lui, ce qu'il nous dit, c'est... il nous invite à creuser ça parce qu'il n'est pas, lui non plus, en mesure d'affirmer. Vous, vous l'avez affirmé dans le milieu de votre... Est-ce que vous avez des exemples concrets?

M. Boulerice: À la demande de l'ancien ministre et président du Conseil du trésor, c'est à sa demande que le Conseil des relations interculturelles a posé cette chose-là.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de l'Acadie, oui.

M. Bordeleau: Oui. Écoutez, on a fait une demande au Conseil du trésor, le 28 février, pour avoir tous les questionnaires qui ont été utilisés avec les études de validation, les études, ce qu'on appelle d'homogénéité interne des questionnaires, et on nous a envoyé quelques données, mais beaucoup de données... Entre autres, des questionnaires, on ne nous en a envoyé aucun. On nous a envoyé quelques tableaux statistiques ? j'en ai ici ? qui démontrent... À partir de ça, ça démontre tout simplement que, quand on mesure... Je reprends l'exemple, pour bien se faire comprendre. Quand on mesure une habileté x, l'ensemble des items qui sont à l'intérieur du questionnaire, de façon homogène, mesurent bien l'habileté x. C'est juste ça que je vous mentionne. Ça ne veut pas dire que l'ensemble de ces items-là s'appliquent de façon égale ou uniforme d'une culture à l'autre. Et les résultats du nombre de rejets nous portent à croire ? je ne peux pas l'affirmer, je ne les ai pas, les tests ? nous portent à croire qu'il y a un biais culturel. Et le Conseil des relations interculturelles a les mêmes réserves. Quand il parle de discrimination, quand il parle de biais systémique, quand il parle de biais culturel, c'est les mots qu'eux utilisent...

n(11 h 50)n

Une voix: ...

M. Bordeleau: Bien, non, laissez-moi terminer. On m'a posé une question. Alors, à ce moment-là, c'est la raison pour laquelle je vous dis qu'il y a une démarche à faire qui est importante à ce niveau-là parce que les données qu'on a... actuellement, on n'a pas toutes les données, mais ça nous laisse à penser qu'il pourrait y avoir un biais culturel. Je pense la même chose, comme le Conseil des relations interculturelles l'a fait.

Le Président (M. Beaumier): Bien. M. le ministre délégué.

M. Boulerice: Ce que le député avance est une hypothèse qu'il ne peut confirmer. Bon. Le ministre président du Conseil du trésor, qui a occupé cette fonction, qui a toujours cette sensibilité et qui l'a probablement plus que n'importe qui à cette Assemblée puisqu'il est d'origine immigrante, et il est fier de le dire, a dit: Mais c'est peut-être une hypothèse, allons fouiller cette hypothèse. Et ils sont en train de la fouiller, l'hypothèse. Et, durant qu'ils le font, nous, au ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, on a mis une équipe pour ce qui est de l'interprétation de ça, les relations interculturelles sont là, les ressources humaines, on prête main-forte au Conseil du trésor pour valider l'hypothétique hypothèse que M. le député de l'Acadie n'a pas validée mais qu'on n'exclut pas dans le champ. Et, si c'est ça, cela sera corrigé. Mais là il n'y a aucune preuve de cela, et il n'y a surtout aucune preuve de discrimination en fonction de race, religion, etc. La première chose qu'apprennent les gens au Québec, c'est qu'il y a une charte des droits et libertés québécoise, qui est meilleure que la fédérale, entre parenthèses, c'est reconnu à travers le monde, et ça, quiconque y transgressera se fera rappeler à l'ordre. Mais il n'y a pas de discrimination systémique. Il peut y avoir peut-être, et nous sommes en train de le valider, et, si ça s'avère vrai, ce sera corrigé le plus rapidement possible.

M. Trudel: Pour compléter, c'est que le Centre d'expertise en gestion des ressources humaines du Conseil du trésor a initié le travail de vérification scientifique systématique pour avoir cette démonstration. Parce que, pour reprendre l'expression qui vient d'être employée, c'est une hypothèse hypothétique actuellement, et il y a peut-être d'autres facteurs. Et c'est aussi à titre d'hypothèse... Je vais essayer d'en donner une illustration.

Au propre ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, en termes d'emplois occupés, pour les emplois réguliers, 17 % des nominations jusqu'au 23 janvier 2002, tout récemment, 17 % pour les emplois réguliers sont pour des personnes d'origine des communautés culturelles. Ça, c'est pour les emplois réguliers. Pour les emplois occasionnels, 16 %. Mais, statistique étonnante, pour le placement étudiant, où on n'a pas toute la batterie requise en vertu des ententes contractuelles, etc., 90 %, 90 % des étudiants embauchés dans le ministère parce que on est en droit de supposer, on va l'examiner, fait en sorte qu'on a davantage de souplesse et de flexibilité, en apparence en tout cas, on a davantage de souplesse. Ça aussi, il faudrait le creuser, cet aspect-là: Comment se fait-il que nous obtenions des scores aussi formidables quant aux objectifs poursuivis quand il s'agit, par exemple, de la catégorie du placement étudiant et qu'on ne l'atteigne pas à une hauteur davantage élevée en ce qui concerne les emplois à caractère régulier et les occasionnels? Alors, tous les travaux du Centre d'expertise vont nous amener à faire en sorte que l'hypothétique hypothèse soit devienne une thèse parce qu'elle sera appuyée ou...

Une voix: ...

M. Trudel: ...et qu'elle sera démontrée, mais, en attendant, il faut être capable de se donner l'éclairage nécessaire pour en arriver à conclure sur un phénomène et les correctifs nécessaires.

Le Président (M. Beaumier): Alors, il est midi moins cinq. On va se garder un cinq minutes à la fin pour passer nos crédits. On avait avancé ? pas convenu, mais avancé ? qu'aussi il y aurait des crédits dévolus au Conseil des relations interculturelles. Alors, de quelle façon vous voulez gérer ça? Pardon?

Une voix: ...

Le Président (M. Beaumier): Non, non, mais il y avait des discussions qui devaient être faites sur les crédits...

M. Bordeleau: ...qu'on est entré dedans. On parle des relations interculturelles, je ne vois pas comment on pourrait dissocier les deux de façon précise. Je pense qu'on va continuer à faire la discussion qu'on fait actuellement jusqu'au moment où on adoptera les crédits.

Le Président (M. Beaumier): M. le député de Frontenac.

Une voix: ...

Le Président (M. Beaumier): Alors, M. le député de Frontenac.

Situation de la femme immigrante

M. Boulianne: Je vous remercie, M. le Président. Alors, bienvenue à la commission avec votre équipe, M. le ministre. On a beaucoup parlé, depuis le début, des communautés culturelles, je pense que c'est important aussi, on a parlé de leur sélection, de leurs fonctions, de l'intégration à l'intérieur de la fonction publique. Et on a vu aussi que le comité des relations interculturelles avait un rôle à jouer ? je pense que le député de l'Acadie l'a souligné ? à ce chapitre-là. Puis je pense aussi qu'il faut que ces communautés soient traitées équitablement.

Il y a une catégorie cependant qu'on n'a pas parlé puis qu'on devrait aborder, la femme immigrante. Je pense que vous avez, à ce chapitre-là... On l'a vu, il y a des difficultés, les femmes rencontrent beaucoup de difficultés spécifiques au fait qu'elles soient femmes. Et le député de l'Acadie tout à l'heure a lu aussi une indication à ce sujet-là. Alors, est-ce que vous pouvez nous faire un résumé de la situation actuellement? Puis est-ce que le Conseil des relations interculturelles est appelé à jouer un rôle dans la situation de la femme immigrante pour aplanir les difficultés maintenant?

M. Boulerice: Je vous remercie de votre question, M. le député. Dès mon arrivée, au départ comme secrétaire d'État, effectuant la visite de plusieurs carrefours d'intégration ou... appelons-les carrefours mais gérés, ceux-ci, par des organismes non gouvernementaux, où, ceux-là, il y avait une très forte population femmes qui était là, je ne sais pas, c'est au niveau du sentiment, j'ai senti que la femme immigrante semblait beaucoup plus fragile... la fragilisait. Ses acquis académiques, à l'occasion, sont moins forts que le conjoint, d'où un marché du travail rétréci, etc. Les enfants vont à l'école, donc l'apprentissage de la langue, pour elle, devient quelque chose de très primordial. Il l'est pour tout le monde, mais, pour elle, il semble que ça l'est encore un petit peu plus, si on peut utiliser l'expression, puisque, les enfants étant à l'école, et les enfants vont à l'école française, si elle n'a pas la facilité d'entrer en contact avec l'enseignant ou l'enseignante qui s'occupe de sa petite fille ou de son fils, à ce moment-là, elle est privée de.

Donc, à partir d'une impression intérieure, je vous le dis très candidement, que j'ai eue, j'ai demandé au Conseil des relations interculturelles de se pencher sur la situation de la femme immigrante, étant conscient aussi que la femme immigrante, sa situation, sa condition, ses espoirs, ses ambitions ou même, à l'occasion, peut-être, ses frustrations, ça varie énormément en fonction des communautés d'origine, il va de soi. Et, vendredi dernier, je rencontrais le Conseil des relations interculturelles, puisque c'était leur première réunion, je tenais à les saluer et amorcer un peu un débat avec eux, et je leur ai posé de nouveau cette préoccupation que j'avais. La condition de la femme est un sujet, et nous en... tous, on ne peut plus sérieux au Québec. La femme, de dure lutte, a conquis des droits ici, au Québec. Donc, j'ai, veux veux pas, cette sensibilité-là.

n(12 heures)n

Et puis nous avons participé, dans un certain sens, à la Marche mondiale des femmes parce qu'on a répondu, nous, favorablement ? je dis «nous», mais... oui ? aux revendications. Et, en 2001-2002, donc, il y a 22 projets qui ont été réalisés par les groupes de femmes des communautés culturelles et des minorités visibles, et ça, c'est grâce à un programme d'aide du ministère, pour une somme de près de 700 000 $. Et on participe aussi activement à des projets qui sont mobilisateurs, conduits dans le cadre du Programme d'action 2000-2003 ? nous fonctionnons toujours de façon triennale ? L'égalité pour toutes les Québécoises, tout en étant... L'égalité pour toutes les Québécoises, effectivement. Il y a un budget de 2,2 millions de dollars qui est consacré à financer un programme d'allocation pour les frais de garde et de transport des stagiaires, dont des femmes qui vont dans les programmes de francisation, qui sont inscrits à temps partiel.

Donc, il y a une préoccupation que j'avais, qu'il était peut-être difficile d'exprimer en termes, mais j'ai demandé au Conseil de s'y pencher. Il y a des différences culturelles, il y a des différences de perception du rôle de la femme, et ça, je crois que c'est une chose qui doit être respectée. Mais, dans l'intégration, il faut que ces choses-là le soient, mais que ce soit harmonieux pour l'ensemble de la société québécoise. Je ne sais pas si, M. le Président...

Le Président (M. Beaumier): ...M. le député de Frontenac, bien sûr.

M. Boulianne: Donc, vous avez donné un mandat, en plus des activités que vous avez faites au comité des relations interculturelles, ce mandat-là, d'examiner la situation. Est-ce qu'il y a un échéancier? Est-ce qu'il y a un rapport à produire? Est-ce qu'il y aura un travail qui va suivre ce mandat-là?

M. Boulerice: Je vais être très franc, je leur en ai tellement donné que je me sentais un peu coupable à la fin. Il y a plusieurs fers au feu déjà qui sont là. Il y a peut-être de nouveaux membres qui se sont ajoutés au Conseil des relations interculturelles, mais le Conseil est toujours dans une situation de continuité, là, il n'y a pas de brisure entre le premier et le deuxième. Et je le trouvais d'autant plus important au sujet de la situation de la femme parce que, si j'ai longtemps parlé de la représentation de l'ensemble du territoire québécois au sein du Conseil des relations interculturelles, j'avais la joie de dire que, des 14 membres, il y a sept femmes, sept hommes, parité. S'il y a un endroit où il fallait donner l'exemple, c'était là. Il n'y a pas d'échéancier précisé, mais, d'expérience, je sais que, avec les moyens qu'ils ont, le Conseil des relations interculturelles fait toujours grande diligence pour remettre rapports, avis de pertinence, etc.

M. Boulianne: Merci, M. le ministre. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Beaumier): Bien. M. le député d'Iberville.

Bilan du Programme des investisseurs immigrants

M. Bergeron: M. le ministre, il y a quelques années, on avait mis sur pied un programme novateur, celui des immigrants investisseurs. En Montérégie notamment on disait que, dans la région de Brossard, il vivait au-delà de 2 000 familles qui venaient notamment de la région de Hong-Kong. J'aimerais savoir où c'en est, ça, ce Programme des immigrants investisseurs. Est-ce qu'on peut tracer un bilan positif?

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre délégué.

M. Boulerice: Hors de tout doute, on peut tracer un programme extrêmement positif face à ce programme. Il est tellement positif, d'ailleurs, qu'à un certain moment donné, vous vous rappelez, le Québec l'avait, ses standards étaient très élevés, d'autres provinces du Canada souhaitaient en avoir, mais, pour l'avoir, on demandait au Québec de réduire, lui, ses standards de façon à l'uniformiser parce que, le programme québécois étant tellement particulier, il est celui qui attire et continue d'attirer le plus d'immigrants investisseurs.

Le programme, il a été réformé le 8 juin 2000 pour justement faire bénéficier davantage des petites et moyennes entreprises des sommes transférées par les immigrants investisseurs. L'aide que l'on permet d'accorder aux PME pourrait aller jusqu'à 15 % de la valeur de leurs projets d'investissement. Et vous avez parlé de Hong-Kong. C'est un fait que beaucoup d'immigrants investisseurs proviennent de cette région. Et il y a actuellement des demandes qui sont là, des demandes qui sont là, des demandes qui sont en train d'être étudiées.

Et, dans l'ensemble des immigrants investisseurs ? je reviens ? 90 % des candidats choisissent le programme du Québec, hein, dès qu'il s'agit d'immigrants investisseurs, celui du Québec, qui a le plus fort taux et la plus forte cote. Les délais jouent en moyenne de 12 à 20 mois, ce qui nous apparaît extrêmement raisonnable. Et, en terme global, je ne sais pas si je vais vous donner le bon chiffre, mais je crois qu'immigrants investisseurs, ça a été prêt de... Combien? Les apports totaux du programme...

Une voix: 600 millions.

M. Boulerice: 600 millions, voilà. Donc, 600 millions de dollars investis dans l'économie québécoise, ce n'est pas nécessairement négligeable. Et le taux de rétention de ces immigrants va grandissant.

Des voix: ...

M. Boulerice: En plus de cela.

M. Trudel: Entre 1986 et 2001, l'apport d'investissements par le biais du Programme d'immigrants investisseurs, ce sera 2 652 000 000, 2,6 milliards. Il faut rappeler les dispositions du programme. Toute personne qui veut bénéficier du volet IVM, Immigrant investisseur au Québec, s'engage donc à confier au Québec, via Investissement Québec, une somme de 400 000 $ pour cinq ans. Et là il y a une transition qui se fait, évidemment, la sixième année, il y a des dispositions autres qui s'appellent, c'est les règles du secteur privé.

Quand on est à, donc, 400 000 $ par personne placés à Investissement Québec et confiés pour cinq ans à cet organisme-là, cet argent-là, évidemment, on ne l'envoie pas dans la poche d'avoine de Séraphin, là, il est placé, et les fruits du placement sont répartis en deux catégories, d'abord, tous les frais relatifs à l'administration et au placement pour l'administration de ce programme-là, et 50 % est fait, est attribué en subventions à des petites et moyennes entreprises qui soumettent des projets à Investissement Québec. Et Investissement Québec travaille ces attributions-là avec les institutions financières, qui, elles, travaillent et en amont et en aval, puisqu'elles sont en amont pour la présentation de dossiers à Immigration Québec et en aval parce que ça correspond aussi à des projets qu'elles soutiennent en région comme institutions. Et elles peuvent aider à soumettre les dossiers. Alors donc, on est en termes de... c'est du...

Une voix: ...

M. Trudel: Oui. Ils sont en termes de placements par Investissement Québec. Évidemment, il y a donc 2,6 milliards qui ont été transités dans ces fonds-là depuis 1986. On a indiqué tantôt, pour l'ensemble de la catégorie immigrants investisseurs au Canada, 90 % viennent au Québec, compte tenu du soutien que nous apportons et en amont et en aval, avec les institutions, à ces personnes.

Mais nous allons tenter au cours de prochains mois de faire encore davantage. Nous sommes à travailler sur davantage de liaison entre l'immigrant, la volonté d'un immigrant investisseur et un projet spécifique dans une région donnée, n'importe laquelle au Québec, de façon à ce qu'il y ait non seulement la relation entre la mise de fonds de la personne au Québec, mais que ce soit davantage rattaché à un projet, et que cette personne puisse aussi être en mesure de suivre l'évolution du placement qui aura été fait, qui aurait pu être fait dans un projet donné, et qu'on puisse y adjoindre aussi une capacité de développement des ressources humaines qui pourraient provenir d'ailleurs pour en arriver à ce que le projet aille plus à l'avant et connaisse davantage de développement.

n(12 h 10)n

Alors, succès remarquable du Programme d'immigrants investisseurs au Québec, mais on va en faire davantage, encore davantage pour les projets, en particulier les projets régionaux, en termes de relations entre l'immigrant investisseur et le projet donné parce qu'il y a là d'immenses potentiels et pour le secteur de l'immigration, et pour le secteur du développement économique du Québec, et le développement de certaines régions ou de certains projets dans certaines régions, pour en faire davantage.

Le Président (M. Beaumier): M. le député d'Iberville.

Intégration des immigrants

M. Bergeron: Oui. Une dernière question. J'ai entendu récemment l'affirmation suivante: Suite aux dernières données du recensement fédéral, la population du Québec stagne. Deux choses, on ne fait plus d'enfants et on ne parvient pas à garder nos immigrants. Tantôt, je pense que c'est le ministre délégué qui a parlé du couple immigration-intégration. On a esquissé ça, mais le succès d'une politique d'immigration, ça passe par la capacité d'intégration de la société d'accueil à garder ses nouveaux arrivants, à les maintenir. On a des immigrants qui sont scolarisés, vous l'avez dit, 56 % d'universitaires, 17 % de niveau collégial, presque les trois-quarts sont des gens qui sont très scolarisés, et de plus en plus ont une connaissance de la langue commune, une connaissance du français.

Donc, l'affirmation que je vous disais: On ne fait pas d'enfants puis on ne garde pas nos immigrants, est-ce que c'est un cliché ou bien on est en train, je ne sais pas, moi, de renverser une tendance? C'est peut-être très large, mais j'aimerais, là, qu'on puisse brosser, pour les quelques minutes qui restent... Je pense qu'il ne nous en reste plus beaucoup.

Le Président (M. Beaumier): Il reste deux minutes. M. le ministre.

M. Trudel: ...tantôt cette illustration. Au Québec, il faut toujours être en termes de conception couple immigration-intégration, et c'est pour ça d'ailleurs qu'on a conclu les ententes. Et puis, ça, il faut rendre hommage aussi à nos prédécesseurs parce que les prédécesseurs qui ont convenu les ententes, il n'y a pas juste Cullen-Couture, il y a Mme la députée de Saint-François aussi, qui a eu une contribution magistrale à la responsabilisation du Québec en termes d'immigration.

Nous avons des succès remarquables en termes immigration et intégration. Par exemple, sur la langue commune, tout près de 50 % maintenant de nos personnes immigrantes ont une connaissance de la langue en arrivant ici; 47 %, cette année. Mais, pour tout cela, on ne peut pas conclure, on ne peut pas conclure que le Québec ne retient pas ces personnes immigrantes. Vous avez raison, à mon avis, vous avez raison de le verbaliser comme cela, ça fait partie du mythe, ça fait partie du mythe à détruire qu'on ne.... Nous sommes dans un ensemble nord-américain, avec la liberté de circulation des biens, des services et des personnes. Et, oui, il existe une capacité d'attraction, une capacité d'attraction des différentes composantes nord-américaines pour toute personne sur le territoire. Et le Québec, à cet égard-là, a des taux d'intégration qui sont assez remarquables.

On pourrait peut-être inverser, juste pour les niveaux de perception, on pourrait peut-être inverser l'exemple toujours utilisé en prenant celui que nous venons de décrire, les immigrants investisseurs. Comment se fait-il que le Québec, de toute la catégorie immigrants investisseurs au Canada, il y en a 90 % qui viennent se joindre à nous, au Québec, hein? Ça, c'est un élément qui est propre à propulser la carapace du mythe à l'extérieur et défaire ce mythe-là. Est-ce que cela...

Le Président (M. Beaumier): M. le ministre, en conclusion.

M. Trudel: En conclusion, c'est: Est-ce qu'on est satisfait des résultats? Non, il faut en faire encore plus. Il faut encore développer davantage, encore développer davantage. Et on retient notre... En termes de taux ? c'est la conclusion ? c'est 80 % qui demeurent sur le territoire national. À 80 %, là, c'est comme dans tous les mouvements migratoires dans les sociétés où il y a des... dans le Nord Amérique en termes de liberté de circulation des biens, des personnes et des services. Alors, on retient à 80 %.

Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre. M. le député de l'Acadie.

Représentativité des communautés
culturelles au sein de la fonction publique (suite)

M. Bordeleau: Alors, écoutez, comme le temps va se terminer bientôt, je voudrais peut-être juste faire quelques commentaires puis, après ça, aborder un dernier sujet. Tout à l'heure, on a parlé de la question des tests, là, qui ont été passés, et je pense que le ministre délégué avait fait référence à un groupe qui a été mis en place pour aborder cette question-là. J'aimerais éventuellement, si c'était possible, que le ministre nous dépose les membres de ce groupe-là, qui est membre de ce groupe et qui forme ce groupe qui va se pencher sur la question des biais culturels. Alors, je pense que l'existence de ce groupe-là justifie aussi le fait qu'on ait des interrogations.

Et le problème, là-dedans, c'est que, quand on utilise un test, le test doit être validé avant et non pas après qu'on l'ait utilisé, parce que, là, dans le cas qui nous préoccupe, les 18 000, là, les gens qui ont été éliminés, des communautés culturelles, possiblement à cause d'un biais culturel, bien, ils ne sont plus là, ils ont été exclus, ils ne sont plus dans la banque. Ce n'est pas après qu'on doit faire ces études-là pour vérifier, pour s'assurer... puis qu'on corrige par la suite. Ça, tant mieux, mais le problème, c'est qu'on doit faire ces évaluations-là de validité des questionnaires avant de les utiliser, de façon à s'assurer qu'on a des questionnaires homogènes, qu'on a des questionnaires valides, qu'on a des questionnaires qui prédisent effectivement le succès au travail, et, dans ces conditions-là, là, après ça, on peut utiliser les questionnaires. Parce qu'il ne faut pas oublier, là, qu'on a dit qu'il y avait eu un candidat sur quatre venant des communautés culturelles qui avait réussi au lieu de deux sur quatre, comme ça a été le cas dans la balance, bien, celui qui n'est pas là, il n'est plus dans la banque, il a eu un échec. Alors, je pense que c'est important de souligner ce point-là.

Reconnaissance des compétences
professionnelles des personnes immigrantes (suite)

Je voudrais juste souligner aussi, on a abordé rapidement tout à l'heure la question des ordres professionnels, je veux juste souligner... Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de voir un mémoire qui a été présenté par la Jeune Chambre de commerce de Montréal, qui est intéressant à ce titre-là parce que c'est des jeunes professionnels qui font partie de la Chambre de commerce de Montréal qui se préoccupent de la question de l'accès des nouveaux arrivants aux ordres professionnels. Et juste signaler qu'il y a deux parties, je pense, qui méritent d'être regardées, c'est-à-dire qu'il y a un diagnostic où on identifie les problèmes majeurs qui existent, les barrières qui existent pour les jeunes immigrants, les nouveaux arrivants, et aussi les pistes de solution que la Jeune Chambre de commerce propose au ministère des Relations avec les citoyens, Communautés culturelles et Immigration, de même qu'aux ordres professionnels. Et je trouve ça salutaire, là, que des jeunes qui sont sur le marché du travail se préoccupent de l'accès des nouveaux arrivants au marché du travail, aussi. Alors, il y a une ouverture, là, je pense, qui méritait d'être soulignée, et je pense, qu'il y a des suggestions très concrètes là-dedans qui méritent d'être regardées et dont on peut faire la promotion éventuellement.

Présidence du Conseil
des relations interculturelles

Le dernier point que je veux aborder, je veux l'aborder d'une façon délicate quand même, c'est la question de la présidence du Conseil des communautés culturelles. Et je veux bien d'abord dire très clairement que ça n'a rien à voir avec M. Anctil, pour qui j'ai le plus grand respect. Les problèmes que je veux soulever, ça ne vise pas M. Anctil, d'aucune façon. Je veux soulever deux problèmes. Le Conseil des communautés culturelles a toujours été dirigé par une personne...

M. Trudel: Des relations.

M. Bordeleau: ... ? des relations, excusez, anciennement des communautés culturelles et immigration, aujourd'hui des relations interculturelles ? a toujours été présidé par une personne qui venait des communautés culturelles. Je pense qu'il faut souligner Dominique de Pasquale, Juanita Westmoreland-Traoré, Raymonde Folco, Arlindo Vieira. Alors, ça a toujours été... C'est un poste qui est symbolique, c'est un poste qui est important, c'est un poste qui est consultatif au gouvernement, on a toujours voulu que ce soit un organisme autonome, indépendant du gouvernement, qui peut faire des recommandations au gouvernement, critiquer le gouvernement au besoin, et pousser, au fond, dans le dos du gouvernement, quel qu'il soit, pour s'assurer de la promotion des communautés culturelles.

Alors, c'est un poste qui est important, qui était valorisé par les gens des communautés culturelles. Et on me dira que, dans le Conseil des communautés culturelles, il y a des gens... oui, il y en a des deux côtés, il y a des Québécois d'origine, il y a des gens qui viennent des communautés culturelles, et c'est très bien comme ça. Excepté que la présidence, ça avait quand même une signification de promotion, de visibilité pour les communautés culturelles.

n(12 h 20)n

Le gouvernement a décidé ? c'est sa décision à lui ? de nommer, cette fois-ci, un Québécois d'origine. Et je pense qu'il y a eu des commentaires qui ont été faits. Je pense qu'il y a eu des commentaires, des inquiétudes légitimes qui ont été exprimées par les gens des communautés culturelles. Je pense que, dans l'ensemble, c'est une perte, en tout cas, on doit le considérer comme ça, et les gens du milieu le considèrent comme ça aussi, c'est une perte pour les communautés culturelles, le fait que le Conseil ne soit pas présidé par un... comme ça a été depuis le début, présidé par une personne qui vient des communautés culturelles, qui avait aussi... Parce que, dans les communautés culturelles, il y a des experts, il y a des gens qui ont un potentiel intéressant, qui peuvent apporter beaucoup à ce niveau-là. Alors, je voulais souligner ce point-là.

Et le deuxième point que je veux souligner par rapport à la nomination du président, et, encore là, ça n'a rien à voir avec la personne de M. Anctil, je soulève un autre point qui me semble important. Le Conseil des relations interculturelles, c'est un organisme indépendant, autonome, qui doit, au besoin, pousser dans le dos du gouvernement, comme je l'ai mentionné, le critiquer, faire des commentaires sévères, quand c'est le temps de le faire, comme ça a été le cas dans les derniers avis qu'on a eus concernant la fonction publique, auxquels j'ai fait référence à plusieurs reprises.

Il me semble que ce n'est pas approprié, dans un organisme qui a ce mandat-là, de nommer, quelle que soit la personne, une personne qui a été un fonctionnaire dans le même ministère. On nomme une personne qui est fonctionnaire depuis un certain nombre d'années, qui a été associée aux décisions que le gouvernement a prises dans le passé, qui travaillait, qui faisait son travail de façon tout à fait correcte, mais elle était associée aux décisions que le gouvernement a prises dans le passé. Alors, quelle marge de manoeuvre cette personne-là peut avoir pour arriver maintenant à faire des critiques par rapport aux actions du gouvernement ou à certains manques d'action du gouvernement qui ont pu se produire? La personne était intégrée à l'intérieur, elle était partie des décisions, partie depuis quand même un certain nombre d'années. Et c'est une personne aussi qui va retourner éventuellement, parce que c'est une personne qui est en congé sans solde, va retourner dans la fonction publique à la suite du mandat comme président du Conseil des relations interculturelles. Encore là, comment une personne ? encore là quelle que soit la personne ? une personne qui occupe cette fonction-là puis qui va retourner travailler avec des gens de la fonction publique, comment cette personne-là peut se sentir à l'aise pour critiquer des gens avec qui elle aura à travailler possiblement demain?

Personnellement, je trouve que c'est une situation qui n'est pas souhaitable. Et, dans le passé, on a toujours, à ma connaissance, nommé des gens qui venaient de l'extérieur. Et ces gens-là qui venaient de l'extérieur, bon, avaient une attitude, une autonomie, une indépendance, n'étaient pas liés, disons, aux décisions qui ont été prises. Et, dans le cas où la personne retourne dans la fonction publique par la suite, bien, on sait qu'il y a peut-être avantage, à un certain moment donné, à ne pas dire à quelqu'un avec qui on va se retrouver l'année prochaine, ou dans deux ans, ou dans trois ans certaines vérités qu'on devrait dire.

Alors, j'ai l'impression qu'à ce niveau-là il y a une perte, il y a une perte d'influence des communautés culturelles qui a été perçue comme telle. La situation ou le choix qui a été fait, encore là, ne touche en rien à la compétence de M. Anctil, mais la décision de choisir un fonctionnaire qui retourne éventuellement dans la fonction publique ne me semble pas appropriée compte tenu de l'objectif et du mandat du Conseil des relations interculturelles. Alors, vous aurez l'occasion de réagir à ça, mais je veux conclure quand même, parce que je pense que c'est la dernière intervention que j'aurai...

Le Président (M. Beaumier): Il restait trois, quatre minutes...

M. Bordeleau: Alors, je veux juste conclure que, globalement, j'ai fait ressortir trois dossiers qui me semblent importants. La présence des communautés culturelles au sein de la fonction publique, ça a diminué de 56 %, alors que la fonction publique a diminué de 13 %, c'est loin d'être un succès. Deuxième élément, c'est qu'on a utilisé un processus de sélection qui, actuellement, est à tout le moins fort discutable, mais qui a eu pour effet ? parce que ça, c'est passé puis c'est arrivé ? d'éliminer deux fois plus de candidats venant des communautés culturelles que de candidats hors communautés culturelles. C'est une deuxième réalité, ça. Les faits sont là, les données sont là, ce n'est pas des interprétations, c'est les chiffres des candidats qui ont réussi. Et le troisième élément, c'est qu'on avait un Conseil des communautés culturelles où les communautés culturelles avaient une certaine visibilité, avaient une certaine influence parce qu'elles occupaient le poste de la présidence, et, encore là, on a décidé que ce ne serait plus comme ça que ça fonctionnait.

Alors, je dois vous dire, en conclusion, que, quand on regarde ces trois éléments-là, depuis 1994, le bilan du Parti québécois au gouvernement, par rapport aux communautés culturelles, a été loin d'être un succès. Puis ce qu'on peut conclure, c'est qu'il y a eu une diminution de l'influence des communautés culturelles effective au sein de la fonction publique, une exclusion plus grande des candidats qui voulaient venir se joindre à la fonction publique à partir de questionnaires qui sont à tout le moins fort discutables et aussi le fait qu'on ait décidé de ne plus confier la présidence du Conseil des communautés culturelles à une personne remarquable qui pourrait venir de ces différentes communautés culturelles.

Alors, en conclusion, je pense que le gouvernement n'a pas à être très, très fier de ce qui s'est passé. Et je souhaite que ça ne soit pas garant de l'avenir et que les ministres qui sont là actuellement en place vont apporter les correctifs nécessaires parce qu'on est dans une situation où il y a beaucoup d'insatisfaction. Et je pense que les députés qui ont des membres des communautés culturelles sont à même de les mesurer, ces insatisfactions-là quand les gens vont les rencontrer dans leur bureau.

Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le député. Alors, il resterait deux minutes pour...

M. Boulerice: M. le Président, je ne m'attendais pas à voir un député de cette Assemblée nationale insulter aussi vertement et aussi lourdement le président et l'ensemble des membres du Conseil des relations interculturelles. J'aurais espéré un ton plus haut, mais à l'impossible nul n'est tenu, semble-t-il, de l'autre côté de cette table.

Le Conseil des relations interculturelles... Et, lorsque le premier ministre m'avait confié la responsabilité du secrétariat d'État à l'accueil et l'intégration des immigrants, j'avais dit que cette fonction serait réussie dans la mesure où il y aurait 7 499 999 sous-secrétaires d'État pour m'aider. Je suis allé au bout de ma pensée. Oui, j'ai nommé, comme un esprit chagrin a dit, un canadien français de race blanche de la province de Québec. Est-ce qu'on va faire de la discrimination à rebours maintenant, alors qu'on parle d'empêcher toutes les autres formes de discrimination? Non, M. le Président.

Représentativité des communautés
culturelles au sein de la fonction publique (suite)

La deuxième chose aussi que j'aimerais vous dire, dans le cas de l'inclusion des Québécois et Québécoises issus de l'immigration, nous ferons mieux que le gouvernement précédent. Et, si c'était leur responsabilité, si c'étaient leurs grandes inquiétudes, comment se fait-il que nous attendons depuis non pas des mois mais des ans, patiemment, à chacune des périodes des questions, d'avoir une question là-dessus? Mais il n'y en a jamais, M. le Président. On s'est inquiété du sort des animaux domestiques. Propriétaire de deux gentils petits chats siamois, cela m'a touché, mais je m'attendais à une question sur la présence des Québécois dans la fonction publique issus des communautés culturelles ou sur l'immigration, et ils n'en ont pas. Alors, M. le Président, les remarques dernières étaient vraiment de trop.

Le Président (M. Beaumier): Merci, M. le ministre délégué.

M. Trudel: Trente secondes...

Le Président (M. Beaumier): Oui, les 30 secondes qui restent, parce que, sans ça, je suis dans une difficulté.

M. Trudel: J'ai-tu 30 secondes?

Le Président (M. Beaumier): Bien sûr.

Présidence du Conseil
des relations interculturelles (suite)

M. Trudel: En particulier sur le Conseil des relations culturelles, oui, le gouvernement a fait le choix d'assumer la responsabilité des relations interculturelles et a fait son choix en toute conscience et pleinement éclairé des capacités du président actuel, à qui nous renouvelons totalement notre confiance, avec les nouveaux membres aussi du Conseil des relations interculturelles. Et, si on veut que ça soit des relations, il faut que toutes les parties soient là, et M. Anctil est particulièrement compétent pour illustrer cette présence de la relation interculturelle.

Adoption des crédits

Le Président (M. Beaumier): Merci. Alors, merci, M. le ministre. Merci. Nous allons procéder à l'adoption des crédits.

Est-ce que le programme 1, Relations civiques, relations avec les citoyens et gestion de l'identité, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bordeleau: Sur division.

Le Président (M. Beaumier): Sur division. Est-ce que le programme 2, Immigration, intégration et régionalisation, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bordeleau: Sur division.

Le Président (M. Beaumier): Est-ce que le programme 3, Conseil et organismes de protection relevant du ministre, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bordeleau: Sur division.

Le Président (M. Beaumier): Est-ce que le programme 4, Curateur public, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bordeleau: Sur division.

Le Président (M. Beaumier): Est-ce que l'ensemble des crédits du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, pour l'année financière 2002-2003, sont adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Bordeleau: Sur division.

Le Président (M. Beaumier): Sur division. Alors, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci, M. Anctil.

(Fin de la séance à 12 h 29)


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