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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le mardi 26 octobre 1971 - Vol. 11 N° 94

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de loi no 28 - Loi concernant la restructuration des commissions scolaires sur l'île de Montréal


Journal des débats

 

Commission permanente de l'Education

Projet de loi no 28

Loi concernant la restructuration des

commissions scolaires sur l'île de Montréal

Séance du mardi 26 octobre 1971

(Seize heures cinquante-quatre minutes)

M. PILOTE (président de la commission permanente de l'Education): A l'ordre, messieurs !

La parole est à l'Association des cadres de la commission des écoles catholiques de Montréal dont le porte-parole est M. Laurent Portugais. M. Portugais.

Association des cadres de la commission des écoles catholiques de Montréal

M. PORTUGAIS: M. le Président, vous me permettrez de vous présenter les personnes qui m'accompagnent, ce sont des membres du comité de coordination qui ont présidé à l'étude du projet de loi: Mme Monique Brière, M. André Strouvens, M. Arthur Dubé, M. Aimé Nault et M. Bernard Landry.

M. le Président, MM. les ministres, MM. les membres de la commission, l'Association des cadres de la commission des écoles catholiques de Montréal se fait un devoir de venir aujourd'hui vous présenter l'opinion de ses membres sur le projet de loi. Je dis bien l'opinion de ses membres, puisque le document que nous avons déposé est le résultat de nombreuses consultations produites, consultations qui ont pris la forme de comités d'étude dont les conclusions se retrouvent dans les grandes lignes de nos recommandations, consultations qui ont également pris la forme d'une assemblée générale spéciale de nos membres qui ont approuvé l'action de base qui est contenue dans le mémoire.

Je disais que c'était un devoir, puisque nous croyons que, comme cadres et professionnels de la plus importante commission scolaire du pays, nous devons mettre à votre disposition un peu de notre compétence et de notre expérience, expérience acquise particulièrement dans le secteur montréalais de l'éducation, apporter cette expérience, dis-je, à l'élaboration et à la réalisation d'un système scolaire qui sera beaucoup plus complexe dans toute l'île que ne l'est la pourtant très importante CECM.

C'est un devoir également parce que la réforme proposée dans le projet de loi est une réforme des structures politiques mais surtout des structures administratives et que la majorité des administrateurs scolaires qui seront touchés par le projet de loi sont membres de notre association. Pour ces raisons et pour d'autres aussi, c'est un devoir qu'il nous fait plaisir d'accomplir aujourd'hui.

Le mémoire que nous vous présentons con- tient cinq parties mais M. Aimé Nault va faire un résumé. Nous aimerions que le document soit considéré comme lu et versé au journal des Débats. Dans le premier chapitre, nous endossons le principe de la commission scolaire unifiée. Nous le faisons parce que nous souscrivons aux objectifs qui sont inhérents au projet de loi, à savoir la démocratisation du système, la répartition plus efficace des ressources...

M. CARDINAL: Je m'excuse, M. le Président, monsieur vient de faire une proposition pour le journal des Débats. Il y aurait peut-être lieu que la commission l'accepte. Si je comprends bien, vous proposez de résumer votre texte pourvu qu'il soit reproduit intégralement au journal des Débats.

M. PORTUGAIS: C'est ça.

M. CARDINAL: Ceci doit être accepté par la commission, M. le Président. Nous sommes d'accord. Je m'excuse.

M. PORTUGAIS: Je vous en remercie.

M. LE PRESIDENT: La motion est acceptée. (Voir annexe)

M. PORTUGAIS: Je disais donc que, dans le premier chapitre, nous endossons le principe d'un système scolaire unifié pour l'île. Nous le faisons parce que nous souscrivons aux objectifs qui sont donnés dans les notes explicatives. Nous le faisons aussi pour une autre raison, c'est ce que contient ce premier chapitre.

Jusqu'à présent, le système scolaire québécois a remis aux collectives linguistiques et confessionnelles la responsabilité de transmettre aux jeunes à la fois les connaissances, les valeurs et la vision de la société dans laquelle ils évoluent. Cette organisation scolaire n'a certes pas contribué à un développement optimal d'une communauté culturelle et sociale. Plutôt, le système scolaire a servi d'organisation et de développement social pour d'autres groupes que la société québécoise comme telle dans son ensemble.

Nous considérons qu'une réforme en profondeur du système scolaire montréalais accompagnées simultanément d'autres mesures comme, par exemple, la politique de langue et la politique de l'immigration contribueront à mettre fin à l'existence de ces deux solitudes qui ne pourront continuer de s'ignorer longtemps sans entraîner des coûts sociaux majeurs pour l'une comme pour l'autre.

Il n'est plus permis de laisser la société québécoise évoluer et se transformer au gré des dynamismes particuliers. La démocratisation scolaire ne peut être recherchée en tenant compte uniquement des libertés individuelles qu'elle favoriserait mais en tenant un aussi bon compte des dimensions collectives, fondamentales à côté desquelles aucun individu à Québec

comme à Montréal ne peut passer dans le développement de sa personnalité. La question fondamentale demeure, à notre avis, l'orientation de la société québécoise. La réforme scolaire à Montréal devrait tendre vers l'instauration d'une société québécoise où les principaux partenaires se définiront d'abord les uns par rapport aux autres plutôt qu'à l'exclusion les uns des autres. La poursuite de cet objectif primordial nécessite, il va sans dire, un certain pragmatisme dans la recherche des moyens.

A cette fin, il nous apparaît que deux conditions essentielles doivent être absolument respectées pour atteindre la mise en commun de toutes les ressources du système scolaire de l'île: Un processus graduel, mais dynamique conduisant à une intégration progressive, et la mise en place d'un organisme central relativement fort, exerçant un rôle de leadership auprès des dynamisme s locaux actuellement existants.

En conclusion de ce premier chapitre, l'Association des cadres de la CECM, tout en endossant pleinement la mise en application le plus tôt possible du principe d'un système scolaire unifié, recommande par ailleurs aux législateurs d'user de réalisme et de souplesse et de permettre que, dans un délai plus adéquat, un processus graduel conduise à une intégration plus organique et beaucoup moins artificielle.

Notre chapitre 2 se divise en deux parties. Dans la première partie de ce deuxième chapitre...

M. SAINT-PIERRE: Les trois dernières lignes, qu'est-ce que ça veut dire concrètement, lorsque vous demandez au législateur d'utiliser de réalisme et de souplesse et de permettre que, dans un délai plus adéquat, un processus graduel conduise à une intégration plus organique et moins artificielle?

M. PORTUGAIS: Cela veut dire, par exemple, que ça ne suffirait pas de donner un délai plus long aux membres provisoires du conseil pour réaliser l'unification et que, en plus de donner du temps, il faudrait changer, à notre avis, le rôle qu'on veut donner au conseil provisoire de l'île.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous l'explicitez plus loin, dans votre mémoire?

M. PORTUGAIS: Donc, dans cette deuxième partie du chapitre 2, nous tenons à décrire les motifs qui nous amènent à croire à la nécessité d'une intégration graduelle.

En d'autre termes, pourquoi voulons-nous une intégration graduelle? Premièrement, parce que les écoles doivent continuer à fonctionner normalement. Une intégration qui serait trop brusque aurait pour effet de provoquer des bouleversements qui, inévitablement, vont rebondir au niveau de l'école.

Deuxièmement, parce que la réforme pédagogique est à peine amorcée et que, déjà, elle nécessite d'immenses efforts d'adaptation et de renouvellement. Il faut, à notre avis, éviter de reléguer la réforme pédagogique au troisième plan.

Troisièmement, parce que nous devons respecter les diversités réelles et les mentalités actuelles. A notre avis, ce respect se fera seulement par un cheminement qui favorisera des relations constantes entre les deux groupes et qui en plus incitera les organismes locaux à travailler ensemble.

Quatrièmement, parce que nous devons aussi éviter la formation de ghettos. En intégrant d'un seul coup des éléments aussi différents, on risque de déclencher des mécanismes de défense qui pourraient provoquer des effets contraires à ceux que l'on recherche.

Il faut éviter que des groupes minoritaires se sentent brimés dans leurs droits et cherchent à se regrouper et à constituer des blocs fermés sur eux-mêmes. A notre avis, il faut donner le temps au gouvernement d'établir une politique de la langue et de l'immigration.

Le projet de loi no 28 suscite de nombreuses discussions, parce qu'il ne s'appuie pas sur une politique linguistique gouvernementale appropriée. Une politique qui serait adéquate, une politique des langues devrait reconnaître la place prioritaire qu'il faut faire au français dans le Québec, alors qu'une politique de l'immigration devrait freiner l'anglicisation des néo-Québécois.

Sixièmement, parce qu'il faut intégrer graduellement le personnel impliqué. Ce changement de structures entraînerait inévitablement, dans bon nombre de cas, des réaménagements de fonctions et de nouvelles définitions de responsabilités.

On devrait, dans ce mécanisme, s'assurer une participation volontaire et une participation dynamique de toutes les personnes impliquées, parce qu'il faut aussi informer les parents et le public. Les parents sont directement impliqués dans des mécanismes nouveaux de participation et de consultation. Par ailleurs, l'élection des commissaires d'écoles constitue, pour la grande partie de l'île de Montréal, un processus démocratique nouveau. On peut donc penser que ces mécanismes nécessiteront préalablement une campagne d'information et de sensibilisation auprès de tout le public concerné.

On vous a dit que le chapitre 2 se divisait en deux parties. Dans la deuxième partie de ce chapitre 2, nous tenons à expliquer comment le conseil central peut être l'instrument premier du processus d'intégration. Nous croyons qu'en vue d'implanter graduellement un système scolaire unifié qui soit cohérent et efficace, le premier moteur de cette entreprise se situe au niveau du conseil scolaire.

Aussi, nous paraît-il plus approprié de donner, dès le départ, un caractère plus représentatif et des pouvoirs opérationnels à cet organisme clé qui aura pour tâche primordiale d'amener et de soutenir le mouvement vers l'intégra-

tion. Au lieu de préparer l'unification surtout par des plans et projets nécessairement à caractère plutôt théorique, nous croyons nécessaire que les éléments constituants s'engagent dans des expériences communes graduellement plus nombreuses et plus complexes et entreprennent, par étapes, des programmes communs tant à l'échelle de l'île qu'à l'échelle des territoires des futures commissions scolaires unifiées.

Dans cette optique, le conseil scolaire devrait être constitué, dès la sanction de la loi, de représentants désignés par les différentes commissions scolaires existantes. Ce conseil, une fois formé, pourrait se mettre à la tâche et entreprendre l'établissement et l'exploitation de certains services communs pour toutes les commissions scolaires de l'île. Simultanément à cette action à l'échelle de l'île, le conseil devrait inviter les commissions scolaires situées sur un même territoire à constituer des comités de travail, du genre des comités provisoires proposés dans le bill 27. Ces comités pourraient, d'une part, entreprendre un inventaire de leurs ressources et soumettre au Conseil leur plan d'intégration et, d'autre part, amorcer des programmes d'action commune dans leur territoire, programme qui cadrerait évidemment avec le plan général établi par le conseil. Nous croyons que, pour réaliser harmonieusement l'objectif de la commission scolaire unifiée, le conseil scolaire devrait être chargé de préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en conseil, au plus tard un an après sa création, un plan d'intégration prévoyant l'entrée en fonction des nouvelles commissions scolaires pour au plus tard le 1er juillet 1975. Nous croyons également que dans ce processus d'intégration graduelle il ne faut pas exclure la possibilité pour le conseil d'être amené à reconsidérer la carte scolaire, tel que prévu actuellement dans le projet de loi.

Au chapitre 3, nous traitons des droits et intérêts de nos membres en regard des profonds changements qu'amènerait la restructuration scolaire. Des changements aussi nombreux et aussi radicaux au cours d'une période de transition relativement brève ne seront pas sans faire naître chez tout le personnel impliqué de sérieuses tensions requérant de chacun un fort degré de tolérance à l'anxiété.

Pour éviter que ne se développent des mécanismes de défense et une résistance au changement qui risqueraient de compromettre le succès de cette vaste réorganisation des structures, voici quelques-unes des conditions qui, à notre avis, devraient être respectées. Certaines de ces conditions devraient être garanties par des dispositions du projet de loi lui-même, alors que les autres devraient faire partie de tout programme d'intégration du personnel qui vise à respecter les droits des personnes impliquées.

Ces conditions sont les suivantes: le projet de loi devrait garantir encore plus clairement la sécurité d'emploi de tous les cadres; deuxièmement, chacun devrait être assuré d'occuper soit des fonctions identiques ou similaires à celles occupées antérieurement, soit de se voir offrir de nouvelles fonctions qui tiennent compte de ses goûts et aptitudes, de sa capacité de réadaptation ou encore de son potentiel de développement.

Des cours de formation et de recyclage et des occasions d'apprentissage devraient faciliter l'adaptation de tous ceux affectés par des changements de fonctions. Des mécanismes de revision devraient permettre à tout cadre ou autre fonctionnaire de faire valoir son point de vue. Des mécanismes de consultation avec des représentants des cadres de chacun des groupes d'employés concernés devraient permettre de développer une procédure appropriée pour le transfert et la réaffectation des différentes catégories de personnel.

L'élaboration du plan d'intégration devrait se faire avec la participation active et dynamique des cadres impliqués. Enfin, les nouvelles tâches, responsabilités ou fonctions devraient être décrites aussi clairement que possible.

Chapitre 4. En cette section de notre mémoire, nous visons à développer quelques thèmes qui ont trait à d'autres préoccupations générales contenues dans le projet de loi. Le premier thème touché est la démocratisation. La démocratie ne se donne pas exclusivement à l'élection de ceux à qui on confie des responsabilités. Il faut en plus que ces personnes élues soient munies de véritables pouvoirs qu'elles doivent exercer sans les ingérences ou' des contrôles excessifs. A cet égard, nous croyons que le système scolaire montréalais ne pourrait être qualifié de démocratique que si l'on procède à une véritable délégation de pouvoirs permettant à chaque organisme d'exercer pleinement ses responsabilités.

En regard de la démocratisation, nous voudrions souligner un point particulier au sujet de la représentativité des membres provisoires du conseil. Nous croyons que ces treize membres devraient être désignés par et parmi les commissaires des commissions scolaires existantes et non par le gouvernement. Un tableau à la page 35 résume notre position sur ce sujet.

Deuxième thème: toucher dans ses préoccupations générales les contrôles gouvernementaux. Nous formulons de sérieuses réserves quant aux nombreux contrôles gouvernementaux prévus dans le texte de loi. Nous les formulons parce que certaines autres interventions touchent directement les opérations courantes du conseil et des commissions scolaires.

Un manque de latitude dans l'exercice des pouvoirs risque de paralyser le fonctionnement du système et d'inhiber les énergies mises en place.

Le troisième thème: la confessionnalité. Nous souscrivons entièrement à l'établissement de structures administratives non confessionnelles. Nous reconnaissons également le bien-fondé

d'offrir au milieu scolaire certaines garanties confessionnelles qui assureront le respect des diverses options religieuses. Cependant, nous sommes portés à croire que la population serait prête à accepter des écoles non étiquetées sur le plan confessionnel, mais qui toutefois respecteraient les options religieuses de chaque individu. A cet égard, nous recommandons aux législateurs de prévoir dans la loi, dans la mesure où ils se seraient assurés que la population le désire, une possibilité de regrouper les enfants selon la langue, dans des écoles multiconfessionnelles.

Un dernier thème touché: le rôle du conseil en matière pédagogique.

Nous croyons qu'un conseil scolaire qui constitue un palier intermédiaire entre le ministère et les commissions scolaires devrait exercer dans certains domaines pédagogiques un rôle de planification, de coordination et de service pour les commissions scolaires. Nous songeons entre autres à la recherche pédagogique appliquée, dont les expertises pourraient être faites en collaboration avec les commissions scolaires, à l'éducation de l'enfance inadaptée dont les besoins divers nécessitent une variété de services hautement qualifiés, enfin, à l'éducation permanente, afin de permettre une meilleure planification et utilisation des ressources pour une certaine clientèle adulte.

Dans le chapitre 5, nous regroupons nos recommandations et les amendements proposés. Ce chapitre pourrait être considéré comme un résumé technique des quarante premières pages de notre mémoire. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Bagot.

M. CARDINAL: M. Portugais, d'abord, je me permettrais de vous féliciter de la sérénité avec laquelle vous avez présenté ce mémoire, ça nous repose en commission et vous l'avez résumé, ce qui est aussi intéressant. Comme je le mentionnais aussi tantôt, à la page 41 et aux pages suivantes, nous pouvons voir dans la réalité l'esprit général de vos recommandations. Il y a cependant une question que je voudrais poser. Est-ce que nous devons comprendre que parce que vous semblez croire, — si je me trompe, vous me corrigerez — que le projet de loi 28, s'il était adopté dans son état actuel, établirait un état de fait et un état de droit en matière linguistique, il vaudrait mieux attendre que la Commission Gendron ait produit son rapport avant de réaliser la restructuration scolaire sur l'île de Montréal.

M. PORTUGAIS: Non, ce n'est pas là notre avis.

M. CARDINAL: Cela ne va pas aussi loin que ça.

M. PORTUGAIS: Nous disons qu'il faudrait prendre le temps d'installer à Montréal un système unifié et ce temps qu'on prendrait permettrait au gouvernement en même temps d'établir une politique de la langue. On considère que ça pourrait être fait en même temps.

M. CARDINAL: Merci, M. Portugais.

M. CHARRON: A votre avis, M. Portugais, l'actuel bill 28 rend bilingue la structure, si elle n'est pas accompagnée d'une politique de la langue propre, comme vous le suggérez dans votre mémoire. Si le bill 28 est appliqué tel quel, la structure serait bilingue.

M. PORTUGAIS: C'est une question à laquelle on ne peut pas répondre, à notre avis.

M. CHARRON: Est-ce que votre association a abordé la question dans le fait que l'unification veut dire que vous aurez vous, actuellement à l'emploi du secteur francophone de la CECM, désormais à répondre à des citoyens de langue anglaise à qui on reconnaît le droit de s'adresser en langue anglaise, donc forcément, si votre métier ne vous obligeait pas à être bilingues, peut-être devrez-vous l'être maintenant?

M. PORTUGAIS: Je n'ai pas compris le projet de loi dans ce sens-là. Nous avons évité de traiter de façon très directe le projet de la langue parce que nous ne voulions pas que le débat sur le projet de loi 28 se fasse sur la langue. Nous sommes prêts ici à annoncer que, s'il y avait une loi, une politique de la langue, notre association devrait à ce moment là intervenir et donner sa position sur cette politique. Or, nous ne voulions pas que le débat sur le projet de loi 28 devienne un débat linguistique.

M. SAINT-PIERRE: Pour continuer sur les territoires scolaires, je l'ai dit encore ce midi, il n'y a rien de parfait sur le nombre de commissions scolaires ni sur le territoire, est-ce qu'il vous semble à vous, compte tenu de facteurs à la fois pédagogiques et administratifs, que la grandeur moyenne de nos commissions scolaires, sans être un chiffre magique, c'est quand même d'un ordre de grandeur tel qu'elle permet une véritable vie sur le plan administratif et pédagogique?

En d'autres termes, est-ce qu'il vous semble qu'on doit absolument tendre à réduire le nombre des commissions scolaires et, au lieu d'en avoir onze, d'en avoir sept, ou si, au contraire, d'après vous, il faudrait augmenter ou si le problème se situe plus de tenter de corriger, de donner plus de latitude au conseil scolaire, de corriger les frontières des onze mais de rester avec le nombre onze, le nombre dix dans le projet de loi pour éviter après ça — puisqu'on le conçoit au niveau de la représentativité des différents groupes — que ça puisse être un débat interminable?

M. PORTUGAIS: Ce que nous disons, c'est qu'on ne devrait pas être relié à la carte actuelle. Nous sommes d'autant plus à l'aise de le dire parce que c'est du personnel de nos membres qui ont élaboré cette carte. Nous ne devrions pas être liés parce que, quand même, elle est faite depuis 1967, cette carte, et que si des regroupements, sans être des regroupements volontaires, s'avéraient fructueux, le conseil scolaire devrait présider à cette réorganisation-là, pour autant que ça respecte la logique de l'ensemble. C'est dans ce sens-là que nous disons que nous ne devrions pas être liés à la carte. Mais je pense que, s'il y avait une tendance à faire, ça devrait être dans la diminution des commissions scolaires, dans le nombre, afin de permettre aux minorités l'assurance d'un enseignement de qualité égale et c'est ce qui nous fait craindre autant d'un côté que de l'autre.

M. SAINT-PIERRE: Vous dites que, dans les comités d'écoles, il y aurait peut-être lieu d'accroître la proportion d'enseignants et de donner le vote à ces derniers. Est-ce qu'il ne vous semble pas que la voix des parents risque d'être mitigée, — et je m'explique — pas pour établir un conflit mais est-ce que les enseignants comme tels, soit par les syndicats ou soit par des comités de régie ou d'autres formes ou les principaux eux-mêmes, n'ont pas des voix pour exprimer leur point de vue? Est-ce qu'il n'y a pas lieu de laisser aux parents, bien qu'il y ait les mécanismes nécessaires d'information, toute la latitude pour eux d'exprimer leur point de vue, compte tenu qu'eux n'ont pas d'autre voix que le comité d'école pour exprimer ce qu'ils pensent?

M. PORTUGAIS: D'une part, sur le nombre des représentants des instituteurs, — d'abord à Montréal, nous avons des écoles avec quinze professeurs et d'autres avec 200 — on considère que le nombre devrait peut-être permettre plus de représentativité dans le comité d'école. Du côté du vote, je pense que ça pourrait permettre aux professeurs de se sentir vraiment participants au comité. Si on lui enlève le droit de vote, peut-être qu'on enlève là tout son intérêt à la participation.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'on ne risque pas qu'un des partenaires dans le domaine de l'éducation ait finalement deux mécanismes, c'est-à-dire qu'il a un syndicat qui peut formuler des griefs, demander des changements, qu'il peut participer au sein d'un comité de régie interne et qu'au même moment, le soir, il peut se rendre avec des parents et influencer une autre voix? On prend des risques, finalement, les parents ne se sentent pas manipulés mais se sentent devant des gens qui ont tellement plus d'informations qu'eux, un peu pris et peut-être pas capables d'exprimer leur point de vue, puisque le rôle de l'enseignant dans le comité d'école était plutôt d'amener de l'information et d'avoir quelqu'un qui peut répondre aux questions sans pour autant...

M. PORTUGAIS: Mais ces comités de parents demeurent quand même des comités consultatifs.

M. SAINT-PIERRE: Je reprends donc ma question. Est-ce que le concept des parents-maîtres vous semble préférable à un comité d'école formé exclusivement de parents?

M. PORTUGAIS: Le concept des parents-maîtres nous semble préférable afin d'avoir vraiment un interéchange entre les deux parties.

M. CARDINAL: M. le Président, à propos de cette question, la question du ministre de l'Education est intéressante mais je ne veux certainement pas lui imputer des idées qu'il n'a pas exprimées d'une façon explicite. Si je ne me trompe pas, à midi même, en parlant devant des gens, il a évoqué le fait qu'il espérait que la bonne foi de toutes les parties intéressées permettrait la réalisation concrète du projet de loi 28. Est-ce que sa question ne laisse pas entendre qu'il y a quand même des craintes, non pas du côté de la bonne foi, mais du côté du rôle d'une des parties importantes du système d'éducation que forment les enseignants?

M. SAINT-PIERRE: Je pense qu'on va sûrement tenter d'amoindrir des craintes qui auraient pu exister. Je sais que la communication, compte tenu de certains facteurs historiques des dernières années, est assez difficile mais c'est une des tâches où j'aimerais tenter d'englober de nouvelles avenues. Des associations de parents, à l'expérience particulièrement des ateliers pédagogiques, ont eu l'impression, dans quelques cas, non pas d'être manipulées, mais de ne pas avoir une association qui leur appartenait puisque d'autres partenaires, à savoir les enseignants, avaient beaucoup plus de renseignements, étaient beaucoup plus familiers avec les problèmes. Tout à coup, la réunion prenait la forme où un jargon nouveau était utilisé, les parents se sentaient alors perdus. Je conçois, par contre, que lorsque les parents sont très éclairés, il y a peut-être un avantage à y avoir une espèce d'équilibre, l'option parents-maîtres qui, particulièrement du côté anglophone, a joué beaucoup et qui permet peut-être...

M. CHARRON: Si vous le permettez, M. le ministre, la solution réside peut-être dans ce que le rapport Parent avait abordé lui-même, c'est-à-dire de laisser ouvert le comité d'école à qui que ce soit — on peut toujours le limiter — en laissant l'électorat aux parents, c'est-à-dire que ce sont les parents eux-mêmes qui pourraient décider d'intégrer tel ou tel enseignant à leur comité pour justement apporter la lumière sans leur donner une place, de fait, comme le

demande l'association mais parce que les parents eux-mêmes ont peut-être besoin d'impliquer le directeur des services pédagogiques de l'école à leur comité pour qu'ils puissent travailler ensemble, mais leur laisser le choix tel que le disait le rapport Parent.

M. CARDINAL: La question est intéressante et importante. Il va certainement se produire des comités où les enseignants sont en même temps parents et ils pourraient être membres du comité. Il ne faudrait pas que l'on parte d'un texte juridique — je reviens aussi sur quelque chose que le ministre a souligné aujourd'hui en parlant des articles de la loi — et que l'on croit qu'il y ait des exclusions, parce qu'on parle de parents. Des parents, cela peut être des cadres scolaires aussi, cela peut être des enseignants, cela peut être le principal...

M. CHARRON: Cela peut être des étudiants aussi.

M. CARDINAL: ... mais il est à craindre — je suis d'accord avec le député de Saint-Jacques — que parce qu'on parle de parents, on croit que de prime abord, il faille exclure tout parent qui aurait déjà un rôle dans le système d'éducation tandis que si, au contraire, le texte de loi est corrigé et indique clairement l'objectif de participation, alors cette crainte disparaîtrait.

M. CHARRON: M. le Président.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que c'était sur le même sujet?

M. CHARRON: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Portugais, tout à l'heure, vous avez indiqué que votre organisme n'avait pas l'intention de mélanger des questions et de faire porter l'accent de l'examen de ce projet sur la question de la langue. Il arrive toutefois que des organismes ont comparu devant nous et ont formulé des propositions précises sur cette question de la langue, notamment l'instauration de l'unilinguisme dans toute l'administration de cette grande structure scolaire unifiée. Unilinguisme également, et j'entends par là unilinguisme français, dans les écoles. Je ne veux évidemment pas vous entrafner sur un terrain que vous n'avez pas choisi et que vous avez temporairement écarté, mais il me paraîtrait utile d'avoir votre avis sur cette proposition, par exemple, de l'unilinguisme dans l'administration et, d'autre part, l'unilinguisme dans les écoles, comme cela nous a été demandé par au moins trois organismes qui ont comparu devant nous.

M. PORTUGAIS: A notre avis, le système scolaire ne devrait pas être une panacée quant au problème linguistique. Il y a d'autres mesures qui devraient accompagner une réorganisation, une restructuration scolaire. Cette restructuration scolaire sur l'île de Montréal devrait être accompagnée d'une politique de la langue. Dans une partie de notre mémoire, nous sommes portés à croire qu'on est prêt à regrouper les élèves dans des écoles selon la langue plutôt que selon la confessionnalité. Cela indique bien notre point de vue là-dessus.

Au niveau de l'administration, nous avons préféré ne pas toucher à cet aspect, quitte à y revenir dans un débat par une proposition d'une législation sur une politique de la langue.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si, M. Portugais, le gouvernement allait, par hypothèse, donner suite à certaines recommandations qui ont été faites, que ce soit dans un sens ou dans l'autre, vous regretteriez peut-être de ne pas avoir fait connaître votre opinion à ce stade-ci de l'étude du projet de loi.

M. PORTUGAIS: Le point de départ c'est, d'après nous, que la politique de la langue devrait mettre en évidence le français prioritaire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le français prioritaire, non pas l'unilinguisme.

M. PORTUGAIS: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, su sujet de la confession religieuse, est-ce que vous pourriez expliciter un peu plus votre attitude là-dessus? On a dit du projet de loi qu'il faisait disparaître l'école confessionnelle, d'autres prétendent le contraire, enfin nous avons entendu divers témoignages ici. Quelle est l'opinion de votre groupement à ce sujet? Vous avez parlé tout à l'heure d'écoles multiconfessionnelles, mais en pratique, de façon précise, qu'est-ce que cela veut dire?

M. PORTUGAIS: Dans la présentation que je vous ai faite au début, j'ai indiqué que l'étude du projet de loi s'était faite par comités d'étude. L'option de base du projet de loi s'est faite en assemblée générale. Il y avait un comité d'étude sur la confessionnalité. Le résultat de ce comité d'étude a été la tendance qui est indiquée dans notre mémoire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Merci, M. Portugais.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. Portugais...

M. PORTUGAIS: En passant peut-être, dans ce comité d'étude sur la confessionnalité plus

de la moitié des membres étaient des personnes de notre service de pastorale.

Donc, ce n'était pas pour nous un comité prévu à l'avance qui s'orientait dans cette option-là.

M. CHARRON: M. Portugais, vous me permettrez de revenir, non pas parce que pour moi, je ne sais et je ne veux parler que de ça, sur le problème de la langue. Parce que, tout en étant d'accord avec vous d'une première mesure qui devrait accompagner la loi 28, c'est le retrait de la loi 63, etc. Ce n'est pas dans les structures scolaires que l'on règle le problème de la langue.

C'est en tant qu'administrateur scolaire que vous êtes, que je reviens sur le problème. Vous allez avoir à vivre dans une structure unifiée. Je dois vous dire que je ne suis pas satisfait de la réponse que vous m'avez donnée tantôt.

Comment voyez-vous fonctionner cette structure-là sur le plan de la langue de travail, sur le plan du respect fondamental, à la fois des cadres anglophones qui sont déjà dans les structures scolaires anglophones et les vôtres? En fait, toute la réussite de ce que l'on craint est un fouillis administratif.

Les commissions scolaires unifiées vont reposer sur la façon dont vous les administrateurs scolaires, allez être capables de supporter le fardeau du défi que l'on vous demande.

Comme le disait le député de Chicoutimi, tout à l'heure, il y a des gens qui sont venus témoigner ici à la commission pour dire: Je cherche un autre mot que "bordel" mais, je n'ai que celui-là dans la tête. Ça va être le capharnaüm. Et, cela ne sera pas tenable comme maison.

M. SAINT-PIERRE: Le député de Saint-Jacques me permettra. Il y a des gens qui nous ont dit: C'est un problème qui n'en est pas un. La commission scolaire unifiée, lorsqu'on parle de la coexistence de deux groupes linguistiques, à l'intérieur d'une commission scolaire, ce n'est pas nouveau. Cela existe sur l'île de Montréal du côté catholique, de l'est à l'ouest de l'île. Dans des cas ce sont des francophones qui sont en majorité, dans d'autres cas ce sont les anglophones qui sont en majorité, et à ce que je sache, il n'y a pas de problème.

M. CHARRON: C'est d'accord.

M. SAINT-PIERRE: Et plus que ça il n'y a aucune garantie dans la loi. Alors, avec notre législation actuelle, les gens l'ont réglé peut-être d'une façon différente, mais ils ont réglé le problème.

M. CHARRON: C'est ça, vous venez de nous donner l'exemple de la CECM où M. Portugais est peut-être le mieux placé que nous tous.

M. SAINT-PIERRE: La CECM est différente...

M. CHARRON: Pour nous donner l'exemple qu'a donné monseigneur...

M. SAINT-PIERRE: Il s'est établi quand même des structures très différentes à la CECM et dans d'autres commissions scolaires elles n'existaient pas. Il ne faudrait pas penser que le projet de loi no 28 tend de recopier la CECM. Je l'ai déclaré à plusieurs reprises, autant qu'il y a des protections sur des postes clefs, pour m'assurer qu'il y a une présence au moins de la minorité linguistique. Il n'est pas question d'avoir des structures divisées au niveau des programmes ou du personnel. C'est une structure unifiée comme on a, par exemple, à la Commission scolaire de Saint-Laurent qui, elle, est une structure unifiée et qui, elle, je pense, a une majorité anglophone.

Lorsqu'on va à Baldwin-Cartier, je pense...

M. CHARRON: Eux étaient bilingues. M. SAINT-PIERRE: La régionale...

M. CHARRON: Ils nous ont dit que l'administration l'était. Ils ont dit que pour eux ce n'était pas un problème d'unifier les commissions scolaires, parce que de toute façon ils desservaient une clientèle 50 — 50. C'est déjà fait.

Moi, je veux savoir si, d'après Baldwin-Cartier, ici on va répéter à onze endroits leur expérience personnelle, comment les administrateurs scolaires francophones de Montréal envisagent l'expérience.

M. PORTUGAIS: A notre avis, on ne sait pas comment ça va se passer, si la loi est sanctionnée telle qu'elle est. Nous disons qu'elle ne devait pas être sanctionnée telle qu'elle est. On devrait prendre plus de temps, pour en même temps établir une politique de la langue qui nous permettrait de savoir comment ça va se passer.

La politique de la langue devrait être décrétée dans le système scolaire.

M. SAINT-PIERRE: S'il n'y avait pas de...

M. PORTUGAIS: Je ne peux pas répondre à votre question, parce que nous ne sommes pas d'accord sur le projet tel que présenté. On dit que c'est trop rapide. Il manque trop d'arguments et trop d'éléments pour constituer le casse-tête.

M. CHARRON: Je vais faire avec vous la même chose et je vais vous poser la même question que je pose toujours aux témoins qui viennent nous dire: Il y a ceci et cela. Moi, je vous dis que, si on refuse de donner plus de temps, jusqu'au 1er juillet 1975, au conseil provisoire pour préparer et si le gouvernement ne fait pas la politique linguistique...

M. PORTUGAIS: Moi, je vous réponds...

M. CHARRON: Cela fait cinq ans qu'on la demande...

M. PORTUGAIS: Je vous réponds très simplement: Cela va être le fouillis.

M. CHARRON: Cela va être le fouillis...

M. PORTUGAIS: A notre avis, ce sera le fouillis.

M. CHARRON: Votre mémoire touche plusieurs sujets mais il ne parle pas de l'article des adjoints ou alors je ne l'ai pas vu, peut-être que je me trompe...

M. PORTUGAIS: ...Non, nous n'en avons pas fait une étude spécifique.

M. CHARRON: Moi, je vous la demande. Des témoins sont venus dire à la commission, ici, — je dois vous dire que c'est ma croyance aussi — que le fait qu'on consacre une fonction publique parallèle pour la minorité, ça va être l'expérience de la CECM, que vous connaissez, c'est-à-dire, qui fonctionne indépendamment de votre secteur francophone, selon votre expérience, en tant qu'administrateur scolaire, est-ce que c'est ça qui va se passer, oui ou non?

M. PORTUGAIS: Je ne répondrai pas en donnant l'avis de l'association, si vous voulez une réponse personnelle, je pense que le danger pourrait être de former des réseaux parallèles.

M. CHARRON: Voulez-vous me dire, je ne veux pas entrer dans le secret des dieux...

M. PORTUGAIS: C'est une réponse personnelle.

M. CHARRON: ...pourquoi le mémoire de votre association, pas vous personnellement, est muet sur cette dimension administrative du projet de loi?

M. PORTUGAIS: Nous sommes peut-être mal placés pour le dire. Nous nous étions proposés de prendre beaucoup plus de temps. Notre mémoire date du 29 septembre. Nous avons été convoqués le 29 et le 30 septembre, puis le 20 et le 21 octobre et nous revenons aujourd'hui.

M. CHARRON: Vous "poireautez."

M. PORTUGAIS: Nous l'avons préparé à la vapeur, mais il y a bien des sujets que nous aurions aimé discuter davantage au sein des comités d'étude. C'est un des sujets que nous aurions aimé discuter. Nous n'en avons pas repris parce que vous savez que lorsqu'on donne...

M. CARDINAL: Est-ce que je peux vous interrompre, M. Portugais, est-ce que vous n'êtes pas justement l'association qui a envoyé un télégramme au ministre pour que les séances de la commission ne débutent qu'à la mi-octobre.

M. PORTUGAIS: C'est ça! C'est notre association. C'est le manque de temps qui nous a permis de toucher à des points, peut-être, que l'on considère moins importants mais quand même essentiels.

M. CHARRON: M. Portugais, une dernière question, si le Président le permet. Le témoin dont j'ignore le nom, je ne me le rappelle plus, qui est venu témoigner au nom de la commission régionale Baldwin-Cartier, commission scolaire bilingue, M. St-Pierre, nous a dit que c'était une condition de promotion à peu près, pas seulement à peu près mais effectivement à l'intérieur de la commission scolaire, le fait d'être bilingue, ne croyez-vous pas que l'expérience se répétera désormais à onze échelons sur l'île de Montréal...

M. PORTUGAIS: Si...

M. CHARRON: ...y compris le conseil scolaire aussi, douzième échelon?

M. PORTUGAIS: ... on sanctionne le projet de loi tel qu'il est actuellement, le danger que vous soulevez existe.

M. CHARRON: Merci.

M. PICARD: Monsieur, est-ce que votre mémoire, de même que les propos que vous avez tenus tantôt établissent, hors de tout doute, que vous admettez avec nous que le bill 28 est un bill qui touche les structures administratives surtout et presque exclusivement?

M. PORTUGAIS: Nous l'avons signalé dès la présentation.

M. PICARD: Alors, comment se fait-il que vous dites, comme vous l'avez fait tantôt, qu'il sera préférable d'attendre le rapport Gendron qui touchera plutôt, à mon avis, le côté pédagogique?

M. PORTUGAIS: Nous n'avons pas dit qu'il fallait attendre le rapport Gendron, on a dit que cela touche la réforme d'abord administrative. Nous sommes de cet avis-là.

M. PICARD: Exclusivement administrative, il n'y a rien, rien sur le plan pédagogique dans ce bill-là.

M. PORTUGAIS: Si on touche à l'administration, pourquoi l'administration est-elle là sinon comme soutien puis comme conseil des

écoles qui existent? Si on bouscule et si on bouleverse une administration scolaire, nécessairement et inévitablement, cela va rebondir au niveau de l'école. C'est dans ce sens-là. Autrement, on n'a pas de raison d'être comme cadre et professionnel d'une commission scolaire, si on n'est pas là comme personne de ressources et comme personne de soutien.

M. CHARRON: Le député d'Olier notera que la question que je posais quant à la langue portait sur l'administration de la structure scolaire.

Je suis bien d'accord avec lui pour dire que le projet de loi touche les structures administratives. Ce sont eux les fonctionnaires de la structure, et je me demande si on ne leur impose pas désormais une condition, soit le bilinguisme, pour la promotion qui n'existe pas actuellement. Parce que je ne crois pas qu'à l'intérieur du secteur francophone de la CECM, ce soit une condition d'avancement pour atteindre les cadres que ces messieurs et dames occupent que de parler anglais. Dans les structures scolaires unifiées, puisqu'on reconnaîtra à chacun le droit de s'adresser en anglais à tous les niveaux de la structure, à partir de l'école jusqu'au conseil scolaire, il est évident que les cadres supérieurs que ces messieurs représentent devront désormais être bilingues. Cela apporte, vous me direz, un impératif de plus pour les anglophones qui, probablement, dans la structure anglaise actuelle, ne parlent pas le français. Ils devront l'apprendre. Mais ça oblige aussi, contrairement à une politique si longtemps annoncée de la part du gouvernement, que la langue de travail dans ce secteur, qui était le français, deviendra désormais l'anglais et le français.

M. PICARD : Vos craintes sont basées surtout sur le plan théorique. En théorie, ce sera cela. Mais dans la pratique...

M. CHARRON: C'est une expérience pratique qu'il vient de me donner.

M. PICARD: ... de tous les jours, je ne vois pas comment...

M. CHARRON: Il y a une expérience pratique qui se fait à Montréal dans ce domaine, c'est l'expérience de Baldwin-Cartier et le témoin, président de la commission scolaire là-bas, est venu nous dire lui-même que c'était ça chez lui. Il a dit: Chez-nous, ce n'est pas un problème, le projet de loi no 28 y est déjà. Alors, nous demandons: Comment est-ce que ça va chez vous, maintenant que c'est unifié? Il dit: Tout le monde est bilingue dans la structure scolaire. Est-ce que c'est une structure d'avancement? Il nous dit oui et du même souffle, il nous dit que c'est même cela qui va être répété à onze niveaux dans la commission scolaire. On va toujours bien le savoir.

Avec le projet de loi, au point de vue de la langue de travail, on fait ceci: dans les domaines où l'anglais était la langue de travail, dans une structure où le français était la langue de travail, en les unifiant, on oblige à parler les deux langues dans la structure scolaire.

M. PICARD: Il n'est pas question dans le projet de loi no 28...

M. SAINT-PIERRE: Il ne faut pas exagérer. Si on prend le cas de la CECM — je m'excuse — il y a une composante. Parce que dans votre cas, vous tentez d'amplifier le rôle des protestants. On le sait, il y a moins d'étudiants protestants sur l'île de Montréal qu'il y a d'anglophones catholiques. Or, le secteur anglophone catholique à l'intérieur de la CECM, que fait-il dans le moment? Il n'y a absolument rien dans la loi. Il y a des anglophones qui vont à des commissions, il y a une situation de fait que le projet de loi no 28 ni n'aggrave ni ne résout. Et je répète ce que j'ai déjà dit: Il me semble illogique de tenter de nous faire prendre des décisions avant que nous ayons au moins terminé un travail de recherche, compte tenu que ce travail de recherche a été amorcé, que nous espérons avoir les résultats le plus rapidement possible et que, pour la première fois dans cent ans, dans ce secteur, nous avons voulu investir $3 millions pour savoir où nous devions aller.

M. PORTUGAIS: M. le Président, est-ce que vous permettez à M. Dubé de s'exprimer?

M. LE PRESIDENT: Allez.

M. DUBE: On a soulevé la question suivante: Dans la pratique, qu'est-ce qui arrive? Au niveau de la CECM, on peut dire que, dans la pratique, nous sommes obligés d'être bilingues mais que, dans la véritable pratique, nous n'avons pas besoin d'être bilingues parce qu'il n'y a pas de contact. Ce sont deux réseaux parallèles. Mais nous prévoyons, pour une grande part des cadres, que les adjoints recréeront la situation de la CECM contrairement à ce que Baldwin-Cartier a dit ici. Pour nous, c'est un fait, nous ne communiquons pas ou presque pas — et j'insiste davantage sur le "pas" — entre les deux réseaux parallèles de la CECM. Et ça, depuis des années et des années.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Dorchester.

M. GUAY: Dans votre recommandation numéro 11, je pense que vous l'avez formulée dans ce sens, le bilinguisme peut être à l'intérieur des cadres, tel que vous le prévoyez, quand vous dites: "Nous recommandons que des programmes d'information, de formation et de recyclage soient organisés pour permettre à tous les cadres, fonctionnaires et autres employés affec-

tés à de nouvelles tâches, de mieux s'adapter aux conditions nouvelles de leurs fonctions".

C'est sans doute là que vous prévoyez quand même un changement, un changement qui semble assez important, qui existe peut-être déjà mais qui devra, à l'intérieur des cadres mentionnés, faire l'objet d'un bilinguisme...

M. PORTUGAIS: Non, cette proposition n'est pas reliée à un bilinguisme possible des commissions scolaires. Cette proposition est reliée au fait que des cadres vont avoir dans leur restructuration à changer de fonctions, à changer de définition de tâches. Puis, on dit que, si on doit bousculer les personnes, on devrait leur offrir des cours de ce qu'on appelle "Service Training", des cours de conditionnement dans le nouvel emploi. Cela nous apparaît comme une condition et c'est important pour nous, parce que nous représentons nos membres qui sont les cadres. Il n'est pas exclu que la langue pourrait être une des dimensions. Nous ne songions pas nécessairement à cette optique.

M. BROCHU: Si je comprends bien, à ce moment-là, c'est peut-être une des raisons principales qui vous font insister dans votre mémoire sur le fait de la mise en application graduelle de la restructuration de l'île de Montréal.

M. PORTGAIS: Absolument, c'est à cause de tout le problème que vous soulevez autour de cette table que nous disons, comme cadres de la CECM et comme cadres d'une importante commission scolaire, que nous ne sommes pas prêts actuellement à légiférer et à entrer, à nous orienter rapidement vers un système scolaire unifié. A cause de tout ça, c'est ce que l'on vous signale. C'est un élément important de notre mémoire.

M. BROCHU: J'ai une autre question, si vous permettez. A ce moment-là, les implications pédagogiques, dans votre conception, sont plus indirectes que directes. C'est-à-dire que les implications pédagogiques se retrouveraient au niveau du phénomène "d'habituation", si on peut parler ainsi, du personnel d'abord, et les conséquences, au niveau pédagogique, pourraient venir des difficultés qui pourraient exister à ce niveau, si la mise en application se fait tout d'un bloc, et non pas directement au point de vue pédagogique comme tel...

M. PORTUGAIS: Nous sommes dans un système scolaire, donc nous sommes dans un système pédagogique. A tous les niveaux: au niveau du ministère, au niveau du conseil de l'île, au niveau des commissions scolaires, nous avons un rôle à jouer. Nous aimerions que ce rôle, chacun le joue de la meilleure façon. Au ministère, si on se veut un véritable ministère moderne, qui exerce un rôle de leadership, on doit se limiter à des programmes-cadres. Au niveau du conseil scolaire, on devrait là planifier des choses, alors qu'au niveau des commissions scolaires, on devrait orienter et organiser l'enseignement. Si chacun joue bien son rôle, chacun peut être très fort aux trois paliers. Il n'y a pas de paradoxe dans cette position. C'est pourquoi on recommande un conseil relativement fort, que nous voyons comme une véritable autorité scolaire métropolitaine. A notre avis, il n'y a pas de paradoxe entre une véritable autorité scolaire métropolitaine au niveau du conseil et des commissions scolaires qui joueraient pleinement leur rôle et qui seraient fortes. Chacun joue le rôle qui lui revient. Et le ministère devrait lui aussi jouer son rôle.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. Portugais, quand vous avez parlé tantôt de français prioritaire, est-ce que, dans votre esprit, cela voudrait dire que vous iriez jusqu'à dire, par exemple, que le gouvernement devrait établir que les communications à l'intérieur du conseil soient faites en français, comme cela existe à l'intérieur de certains ministères ou de certains services du gouvernement: Est-ce que, dans votre esprit, c'est cela?

M. PORTUGAIS: Dans mon esprit, ça irait jusque là.

M. PEARSON: Cela irait jusque là.

M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester a demandé la parole.

M. GUAY: J'aurais une autre question. M. Portugais, vous semblez avoir une peur affreuse des contrôles gouvernementaux à l'intérieur du système scolaire.

Vous avez souligné un danger de produire une bousculade. Est-ce qu'un trop grand contrôle des gouvernements pourrait produire cette bousculade que vous craignez justement?

M. PORTUGAIS: Les dangers ne sont pas au niveau de la bousculade mais au niveau de l'action, s'il y a trop de contrôle, les gens qui sont dans des positions d'agir, ne pourront plus agir.

M. GUAY: Cela signifie que votre rôle sera grandement amoindri si l'état venait contrôler ce que vous mentionnez.

M. PORTUGAIS: Ce sont toutes les décisions importantes du conseil qui doivent être soumises à l'approbation, c'est excessif.

M. GUAY: Cela vous empêcherait d'agir à ce moment-là et de prendre les décisions.

M. PORTUGAIS: Vous avez raison.

M. SAINT-PIERRE: Pour soulager les craintes du député de Dorchester, ce ne semble pas qu'une législation socialisante contre l'école chrétienne.

M. PORTUGAIS: Absolument pas.

M. GUAY: Je remercie le ministre de la précision.

M. SAINT-PIERRE: Vu vos déclarations fracassantes de la fin de semaine, je suis heureux de la participation au débat.

M. CHARRON: M. Portugais, selon les recommandations que vous faites quant à la formation du conseil provisoire et à ses pouvoirs, mais lorsque la structure sera permanente, lorsque l'on atteindra le conseil scolaire, en 1975 selon votre mémoire, est-ce que vous accepteriez que le conseil scolaire soit l'unique employeur?

M. PORTUGAIS: Nous n'en avons pas fait d'étude complète, il y a des avantages et il y a des désavantages. Encore là, c'est un avis personnel, je pense que peut-être il serait préférable que les commissions scolaires soient les employeurs.

M. CHARRON: Les employeurs.

M. PORTUGAIS: C'est un avis personnel.

M. LE PRESIDENT: Je remercie, M. Portugais, ceux et celles qui l'accompagnent, de leur rapport. Soyez assurés que nous en prenons bonne note.

M. PORTUGAIS: Merci.

M. LE PRESIDENT: On passe à présent à la Quebec Association of School Administrators dont les porte-parole sont M. Stafford et Miss Marksfield.

Quebec Association of School Administrators

MLLE MARKSFIELD: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, j'ai le plaisir de vous présenter mes collègues, Miss Ann McClish, Vice-Principal, Riverdale High School; Mr. James Patrick, Principal, Verdun High School and president of MASA; Mr. James Haywood, Information Officer, Lakeshore School Board, Mr. William Stafford, Executive Director, QASA. I am Sylvia Marksfield, Principal of Cartierville School, école d'immersion.

L'association des administrateurs scolaires de Montréal et l'Association des administrateurs scolaires de Lakeshore comptent ensemble un total de membres desservant une population scolaire d'environ 70,000 élèves dans l'île de Montréal. Nos deux associations sont conjointement les auteurs du présent mémoire. Nous reconnaissons d'emblée la nécessité d'une réorganisation des systèmes scolaires de l'île de Montréal. Nous estimons qu'il est essentiel qu'un système moderne d'éducation puisse fournir à chacun la possibilité d'acquérir une éducation de même calibre et, pour ce faire, nous sommes en faveur de l'uniformisation de l'évaluation foncière et du taux de l'impôt. Par contre, nous ne pouvons être d'accord sur la structure des organismes de l'éducation tels qu'envisagés par le bill 28.

Si nous sommes en quelque sorte forcés à cette prise de position, c'est que nous ne pouvons faillir à notre principe directeur que tout système d'éducation doit en premier lieu être capable de percevoir et de réagir aux besoins de la population qu'il est censé servir; qu'il ne peut être imposé par une autorité supérieure ou cogité dans des bureaux du gouvernement, aussi éclairé et intelligent que puisse être cette autorité supérieure ou le gouvernement.

Le meilleur système doit être mis sur pied pour convenir à nos enfants et à nos écoles de sorte que la planification de l'éducation doit partir de ce niveau.

En tant qu'administrateurs scolaires, nous nous rendons bien compte que pendant trop longtemps nous avons essayé de forcer les gens à se plier à des normes, qui, administrativement, faisaient notre affaire. Ce dont il nous faut tous convenir maintenant, c'est de renverser la vapeur et d'apprendre à créer des structures qui répondent aux besoins de la population.

La conjoncture actuelle présente une occasion propice au gouvernement du Québec et aux citoyens de Montréal de se débarrasser des abus contraignants et des injustices flagrantes d'un système désuet tout en oeuvrant pour l'élaboration d'un nouveau.

Le présent exposé repose sur la profonde conviction que cette occasion est trop précieuse pour qu'elle coure le risque d'être gâchée ou tout au moins adultérée par une législation précipitée.

Un nouveau système doit tout d'abord être implanté selon les vrais besoins et les aspirations de la population. Ensuite, il doit pouvoir, dans une atmosphère bienveillante, disposer d'un temps suffisant pour s'étendre d'une manière logique, avec assez de souplesse et d'ampleur pour permettre la population de Montréal dans son ensemble de s'y épanouir. C'est seulement dans un tel système qu'il sera possible de développer "l'homme nouveau du Québec", celui qui, par sa formation éducative, pourra à la fois être profondément au courant et fier à juste titre des cultures française et anglaise dont il fait partie, tout en étant conscient de son rôle dans la communauté humaine.

La composition provisoire du conseil de l'île de Montréal tel que décrit dans le bill 28 section Il, article 9, est une structure imposée et ne peut ainsi refléter les vrais besoins des communautés de l'île de Montréal.

Nous désirons voir ce conseil désigné par le suffrage populaire de toute la population adulte de Montréal, car, pour nous, ce conseil fait face à la plus lourde des obligations et des responsabilités, celle de créer une nouvelle structure de l'éducation dans l'île de Montréal et celle de déterminer les tâches respectives du conseil permanent de l'île, des commissions et des comités scolaires.

Nous suggérons que des comités scolaires soient formés dans chaque école et que tous les contribuables en âge de voter puissent s'y porter candidats.

A partir de ces comités scolaires locaux, on pourrait élire les groupes de comités régionaux et, à leur tour, ces derniers pourraient élire le conseil provisoire de l'île de Montréal.

Nous proposons que le conseil provisoire de l'île soit mis sur pied de la manière suivante: a) que l'école secondaire et les écoles élémentaires qui l'alimentent soient reconnues comme unité éducative pour les élèves, les professeurs et les parents, environ 3,000 étudiants; b)que, pour cette unité éducative, des comités scolaires soient élus et que tout contribuable en âge de voter puisse y être candidat ; c) qu'il y ait treize régions, chacune composée de dix unités éducatives — 30,000 étudiants — chaque unité élirait alors un représentant à un conseil régional, — dix membres; d) que ces treize unités régionales élisent deux représentants pour former le conseil provisoire de l'île; e) que le président et le vice-président soient élus par les membres du conseil provisoire de l'île; f) que trois des membres de ce conseil soient nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil; g) que le comité exécutif soit élu par le conseil parmi ses propres membres.

Le conseil provisoire ainsi créé aurait pour tâche de formuler des recommandations au ministre sur tout ce qui a trait à la réorganisation des structures de l'éducation dans l'île de Montréal afin de pouvoir promulguer vers le 1er juillet 1974 toutes les lois s'y rattachant. Ceci permettrait au conseil provisoire d'avoir suffisamment de temps pour consulter les organismes de l'éducation déjà existants ainsi que tous les groupes, les individus et le gouvernement du Québec.

Le conseil pourrait alors faire connaître périodiquement les progrès de ses activités aux citoyens et aux gouvernants.

Nous croyons fermement qu'un tel conseil émanant du peuple et responsable devant lui peut fournir les meilleurs moyens possible à tous les groupes religieux et ethniques de travailler en commun à la création et au développement d'un système d'éducation convenant à tous.

En tant qu'administrateurs scolaires, nous nous attendons à être consultés par un tel conseil en tout ce qui touche aux fonctions et aux aspects pratiques de la vie des écoles. Ainsi nous pourrons nous joindre à tous les autres segments de notre communauté dans la tâche de construire un Québec nouveau.

Il y a un addendum. Nous désirons déclarer, M. le Président, qu'à une réunion de notre association tenue pour discuter ce mémoire, nos membres nous ont donné le mandat d'énoncer fermement que nous sommes en faveur de commissions scolaires basées sur la langue.

Merci.

M. SAINT-PIERRE: Merci, Mlle Marksfield. Est-ce que, dans votre processus sur le conseil provisoire, vous n'auriez pas une crainte? Parce que, si je comprends bien votre suggestion, on s'en remet pour les pouvoirs du conseil provisoire du type de recommandations formulées sur un processus qui n'est pas tellement dans nos moeurs au niveau des comités d'école alors qu'on n'est pas certain de la participation des parents à tous ces niveaux et que si ce sont ces treize personnes-là qui, somme toute, pourraient décider pratiquement de tout ce qui deviendra...

MLLE MARKSFIELD: Je m'excuse, M. le Ministre, mais personne vraiment n'a une formation. Vous, MM. les députés et M. le ministre, est-ce que vous avez eu une formation pour faire de la politique? Alors, ces gens qui vont vouloir se poser comme candidats, ils vont faire leur devoir comme vous le faites. Votre carrière n'était pas dans l'enseignement avant.

M. SAINT-PIERRE: Mais vous pensez qu'en laissant finalement à treize personnes tous les pouvoirs...

MLLE MAKRSFIELD: C'est un chiffre arbitraire, M. le ministre, on dit treize comme vous avez dit onze, alors on peut toujours arriver à une réponse.

M. SAINT-PIERRE: Merci.

M. CARDINAL: M. le Président, je voudrais poser une question. Votre association s'appelle The Quebec Association of School Administrators.

MLLE MARKSFIELD: C'est ça.

M. CARDINAL: Vous représentez les administrateurs, enfin je le devine, du secteur anglophone. Mais est-ce dans tout le Québec ou particulièrement à Montréal?

MLLE MARKSFIELD: Non, c'est simplement à Montréal et au Lakeshore, monsieur.

M. CARDINAL: D'accord, merci.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. TETLEY: Après vous, vous êtes le représentant d'un parti politique à la commission.

M. CHARRON: Merci, M. le ministre. Moi, c'est la dernière page qui nous a été passée qui m'intéresse beaucoup.

MLLE MARKSFIELD: Je le savais.

M. CHARRON: Votre groupe demande des commissions scolaires basées sur la langue. Moi, j'avais une série de questions à vous poser, comme administrateurs scolaires, sur l'unification des commissions scolaires. Comme je l'ai demandé aux messieurs de la CECM qui viennent de partir, comment entrevoyez-vous ça? Maintenant, si ce n'est pas dans votre mandat, est-ce que je dois croire que c'est comme administrateurs scolaires que vous demandez des commissions scolaires basées sur la langue? Est-ce que c'est parce que vous croyez qu'administrativement c'est impossible d'unifier les commissions scolaires que vous en êtes rendus à cette position?

MLLE MARKSFIELD: Oui, monsieur.

M. CHARRON: Maintenant, si le ministre, qui est parfois cruel, décidait de ne pas donner suite à votre recommandation et tenait ferme à son idée de faire l'unification des commissions scolaires, est-ce que vous considérez comme garantie suffisante l'article qui parle des adjoints représentant la minorité au niveau de chacune des commissions scolaires? Est-ce que c'est suffisant pour vous?

MLLE MARKSFIELD: M. Stafford, voudriez-vous répondre à cette question?

M. STAFFORD: Quand je suis venu ici, il y a deux ans, au mois de janvier, M. l'ancien ministre, un mémoire fut présenté par la Montreal Association of School Administrators. Ce mémoire d'aujourd'hui est présenté par deux de nos sections. La Quebec Association of School Administrators comprend les administrateurs et présidents de toute la province. Mais nos deux sections, la Montreal Association of Administrators et la Lakeshore Association, présentent ce mémoire. Quand j'étais ici représentant la Montreal Association of Administrators il y a deux ans, une des observations que j'ai faites était celle-ci: la seule nomination d'administrateurs de langue française et anglaise, catholiques romains, protestants et autres catholiques romains et protestants, n'assure pas en soi une protection adéquate au groupe des minorités placées sous la juridiction des commissions scolaires.

M. CHARRON: C'est votre réponse aussi à ce que stipule le projet de loi no 28 là-dessus, parce que vous savez sans doute qu'il y a des groupes francophones qui sont venus dire que c'était là une précaution excessive. Or, vous, vous la jugez comme non suffisante pour assurer les droits de la minorité. Mais là, est-ce que vous parlez en tant qu'anglophone ou en tant qu'administrateur scolaire?

M. STAFFORD: Je dois revenir à une chose. Notre mémoire d'aujourd'hui suggère qu'il y ait un comité, un conseil provisoire de l'île qui irait au peuple de Montréal et arriverait avec une décision à savoir quelle sorte d'entente nous voulons avoir, quelle sorte de plan pour l'île de Montréal.

Si ce comité venait nous voir et nous demander quel type d'organisation nous préférerions, pour le moment, nous dirions des commissions basées sur la langue pour des raisons semblables à celles que nous venons d'entendre de M. Portugais il y a quelques minutes.

Nous ne sommes pas contre l'idée du ministre que nous devons avoir un conseil de l'île unifié. Nous sommes entièrement d'accord. Cela a du bon sens. Il est temps que nous ayons cela. Mais, nous sommes convaincus que la culture, la langue sont transmises au niveau de l'école par les administrateurs et les professeurs et que, le deuxième niveau, la commission scolaire doit être aussi basé sur la langue. Au niveau du conseil de l'île, là c'est le moment où on doit avoir l'unification comme nous l'avons maintenant au ministère. Cela marche. Le problème est que ça marche...

UNE VOIX: Plus ou moins.

M. CHARRON: M. Stafford, si on adoptait le plan que vient de nous suggérer...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Il est six heures et nous continuerons la période des questions après le souper.

La commission ajourne ses travaux à huit heures quinze.

Reprise de la séance à 20 h 21

M. SAINT-GERMAIN (président de la commission permanente de l'Education): A l'ordre, messieurs!

Si vous voulez bien, nous allons commencer la séance. Je crois que M. le ministre d'Etat a quelque chose à nous dire.

M. GOLDBLOOM: M. le Président, je regrette d'informer les membres de la commission et surtout les témoins qui sont ici que le ministre de l'Education doit s'absenter ce soir de façon imprévue. Il s'excuse auprès de tout le monde. Il m'a prié de le remplacer et il a prié la commission de continuer ses travaux.

M. CHARRON: Si vous me permettez. Si on continue avec les témoins, je vais essayer de terminer mes questions.

M. LE PRESIDENT: Vous avez la parole.

M. CHARRON: En tenant compte de la suggestion faite par vos prédécesseurs, c'est-à-dire les administrateurs scolaires de la CECM, qui parlaient de prolonger le mandat du conseil provisoire de façon à faciliter l'intégration ou l'unification du secteur anglais et du secteur français, est-ce que l'opposition que vous faites, à la dernière page de votre mémoire, à l'unification des commissions scolaires pourrait s'éteindre ou disparraître? Je m'explique ; vous avez compris? C'est bien.

M. PATRICK: M. le Président, mon français n'est pas bon.

M. CHARRON: Le mien non plus.

M. PATRICK: Je peux parler un peu français mais je ne peux pas penser en français. Peut-être que c'est ça le mélange des cultures qui sera difficile ici.

M. CHARRON: C'est unifié...

M. PATRICK: Je peux parler un peu anglais pour vous?

M. CHARRON: Certainement.

M. PATRICK: Merci. Mr. President, about our brief of this evening, the question you are asking, M. Charron, is: Let us suppose that the brief of the CECM were adopted, the thoughts in that brief, how can we reconcile them with our last page?

The thinking of our membership is that, at this time, it would be better to have language boards, at that level. We see three levels on the Island of Montreal: the Council, the School Board, the School. We think that pedagogically speaking there, at that level, you need to have the language, better communication.

Alright at the council level to thave your unification. We are not thinking English or French, Catholic or Protestant, we are thinking pedagogically only, then, it would be a better communication direction.

Now, as to your question, our brief says: Take it to the people of Montreal. The job of the provisional council will be to make a recommendation to Government as to which kind of boards they recommend. If the provisional council says. Unified boards, we accept. Does that answer it?

M. CHARRON: Merci.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. TETLEY: Mlle Marksfield, combien d'administrateurs protestants y a-t-il sur l'île de Montréal? Combien êtes-vous?

MLLE MARKSFIELD: A peu près deux cents, au niveau des principaux, principaux adjoints, je parle seulement de cette catégorie. Je ne parle pas des gens qui sont surintendants ou surintendants adjoints.

M. TETLEY : Vous ne parlez pas des cadres qui se trouvent sur la rue Fielding, dans l'édifice A?

MLLE MARKSFIELD: Non, ils ne font pas partie de ces deux sections.

M. TETLEY: Très bien. Vous me permettez, Mlle Marksfield, de poser une question à M. Patrick. Mr. Patrick, after the session, this evening, at six o'clock, you had some personal views which were not in the brief. I do not say I necessarily agree with them or disagree with them, but I think you should present them or I would like you to, if you would do so briefly.

M. PATRICK: I would. I do not know if you would call a weakness of English speaking people, but they tend to perhaps belabour the fact that they would like to make sure, first of all. This is why they have pilot projects. Might I give an example? Around 1960, our school board examined subject promotion as an idea which we might bring in to our schools.

Before bringing it in, or even trying it, they visited school boards throughout North America where these were practiced. Then, they tried it in a few schools for about three or four years. These were pilot projects. It was only after that that they brought it in. Now maybe we take too long to do things, this is a thing we understand, and I have reservations, personal reservations about the establishing of unified boards. The reservations are only these that I would wonder what kind of study in depth has been made of unified boards throughout the rest of Canada, even North

America, because the feed-back we get, either in the press, or on the radio or on the television, is that they are in trouble, but I cannot go any further than that, because I personnally have not made a study in depth in that. I have reservations that way. I have a further reservation and that is about education in a metropolitan area.

Now, we do know that in United States, they have had more experience with metropolitan problems and they have much bigger metropolitan problems then we do. There has been a philosophy of the melting pot theory in United States; this seems to be again in trouble; it seems to be going by the boards in favor of another idea all together which seems to be based more on language areas and on small local boards, local areas. These are reservations I have. Now, have we done any study in metropolitan programs? Have we made a study in the unified boards throughout North America? These are the questions that I would ask. They are reservations I have.

M. TETLEY: I cannot of course reply for the Minister but I think your observations are useful. I know however there is one board, the Baldwin-Cartier Board, which is an excellent unified board in the west end of the Island, that had considerable success. Je vous remercie, M. Patrick, de vos idées personnelles.

M. CARDINAL: There was an experience in the Montreal Island, I should say in Greater Montreal, it is the Baldwin-Cartier School Board and that is an experience, that is a fact, that is not a theory, it is not in the United States or elsewhere. That is in the Montreal Island and I was very happy to hear what they said about this unified school board where they are about, not exactly half and half, but 60 p.c. and 40 p.c.

But that is something and I thing that this brief from the Baldwin-Cartier School Board was something very positive presented to this committee.

M. TETLEY: J'ai aussi la même opinion du mémoire de la commission scolaire Baldwin-Cartier de l'ouest de Montréal.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. Patrick, c'est la première fois que j'entends un témoignage comme celui que vous venez de nous donner et j'aurais été intéressé, en somme... C'est vous qui nous dites que vous avez entendu les "come back from the press, from the radio, was there anything written at all about those experiences, any opinion expressed by the press, or something because it is the first time I hear something like that? I would be interested myself.

M. PATRICK: I have heard, for instance, about the people in Sturgeon Falls, Ontario, and I saw the actual television myself where the French people themselves in Sturgeon Falls were asking, in one case, for language boards. I heard them use that expression but I do not know. If they are asking for them, M. Charron, it probably means that they are not happy with what they have got. This is the point, be the English or French. I do not want to try and say to you the French people or someone else are asking this because we have purposely try to keep away from anything dealing with this. We are trying to be as pedagogical as we can and I know that M. Cardinal appreciates this because this is his original field.

M. CHARRON: Vous me permettrez de vous faire remarquer, M. Patrick, que j'admets que le fait que les gens de Sturgeon Falls, par exemple, aient demandé des commissions scolaires françaises est une preuve qu'ils ne sont pas satisfaits de ce qu'ils ont, mais il y a toute la différence au monde aussi entre ce qu'ils ont actuellement, ce qui s'appelle les écoles séparées ou les autres écoles, et ce que va offrir à la minorité anglaise le projet de loi no 28.

Je comprends qu'ils demandent plus dans le cas où ils sont parce que, toutes proportions gardées, ils sont beaucoup moins bien traités que ne le Sera encore la minorité anglophone dans le projet de loi no 28. Cela ne veut pas dire que je suis contre le traitement de la minorité anglophone dans le projet de loi no 28, je suppose qu'ils devraient avoir le même là-bas.

M. STAFFORD: Si je peux revenir à ce que M. Cardinal a dit à propos de Baldwin-Cartier, si je me rappelle bien, les gens à Baldwin-Cartier ont dit qu'ils ont deux réseaux parallèles.Des cadres de Montréal ont dit, ce matin, qu'à la CECM c'est encore la même chose avec deux réseaux parallèles. Ce qui nous inquiète franchement c'est le fait que, dans certaines de ces commissions, il y ait un très petit groupe, une minorité très minuscule et je me demande ce qu'on peut faire avec toute la bonne volonté du monde. Qu'est-ce qu'on peut faire pour ce groupe-là? Parce que je reviens à ce que j'ai dit auparavant, notre mémoire dit qu'on va accepter ce que la commission temporaire ou provisoire de l'île suggérera au gouvernement, nous ferons notre possible pour faire fonctionner ce qu'il recommandera mais nous croyons — si vous voulez notre opinion personnelle — que si on veut avoir un système qui va fonctionner, il faut avoir une bonne communication entre la commission et ceux qui sont dans l'école. Il faut travailler de plus près avec nos collègues de la section française. Il faut qu'on collabore de plus près. Mais pour des raisons de communication, nous croyons qu'on pourrait avoir un système qui serait plus efficace pour les deux groupes linguistiques si

nous avons la commission régionale linguistique et l'école aussi.

M. CARDINAL: M. le Président, maybe I do not possess a perfect command of the English language, but as you speak French, I may answer you in French.

C'est justement là qu'est le véritable problème. On a donné l'exemple de Baldwin-Cartier, on pourrait prendre l'exemple de Missisquoi, on pourrait prendre l'exemple de Saint-Laurent; le député de Saint-Laurent, M. Pearson, pourrait en parler. Actuellement, à la CECM on a dit qu'il y avait deux réseaux parallèles, d'accord, au Protestant School Board of Greater Montreal il n'y a pas deux réseaux parallèles même s'il y a quelques écoles françaises.

Mais il serait important, dans une ville comme Montréal, que l'on puisse justement s'unifier. Tantôt, on m'a dit que j'ai été dans l'enseignement pendant dix-sept ans, ce qui est vrai; j'ai été aussi dans le milieu des affaires pendant sept ans. Et, dans le milieu des affaires, justement, il n'y a pas cette distinction. Rue Saint-Jacques ou rue Notre-Dame, autrefois, rue Dorchester, aujourd'hui, vous avez, dans des sociétés financières, industrielles, commerciales, des conseils d'administration composés de francophones et d'anglophones et qui, par conséquent, sont unifiés. Je pourrais prendre toutes les sociétés l'une après l'autre, que ce soit The Royal Bank of Canada, The Montreal Trust, The Montreal Bank so on and so forth, et ça fonctionne.

Je comprends qu'il y a le point de vue pédagogique, mais pourquoi n'est-on pas capable d'accepter? Quelle est la raison fondamentale? Est-ce que parce que des gens de deux cultures différentes, élus au suffrage universel ou presque — donc, c'est la majorité qui agirait — avec, surtout, les garanties qu'il y a dans le projet de loi — là, c'est drôle, je défends le ministre et je ne suis pas entièrement d'accord avec lui, on le sait — pourquoi, avec les garanties qu'on a ajoutées, ne serait-on pas satisfait? Il va quand même y avoir les directeurs pédagogiques de l'autre langue. Si l'élection n'élit qu'une majorité d'une langue, le ministre pourra en nommer deux de l'autre. Je vous dis que je ne suis pas entièrement d'accord sur ça, mais quand même, je prends le projet comme il est. Je me demande quelle est la raison fondamentale pour laquelle il faut absolument que nous continuions à être divisés?

MLLE MARKSFIELD: Est-ce que vous voulez une réponse franche, monsieur?

M. CARDINAL: Ah oui!

MLLE MARKSFIELD: Eh bien! je vais tâcher de vous la donner. C'est très simple. Nos collègues, nos membres, nos écoles, tous les enseignants de la communauté s'effraient cha- que fois qu'il y a une déclaration. Et l'on sait, par un membre de la CEQ ou de l'Alliance, je ne veux même pas le répéter, vous savez très bien ce qu'ils disent, alors, il faut au moins donner des sauvegardes bien éclairées à l'égard de l'enseignement en anglais. Voilà! Est-ce que je simplifie trop?

M. CARDINAL: C'est une bonne réponse. Mais, est-ce que vous pensez vraiment qu'au Québec, après 125 ans d'histoire dans le domaine de l'éducation à Montréal, qui a toujours été à majorité francophone — je ne compare pas au Manitoba, je ne compare pas à l'Ontario, je ne compare pas à la Colombie-Britannique, etc., on pourrait faire une longue histoire — est-ce que vous croyez vraiment qu'il y a danger pour la culture anglaise à Montréal?

MLLE MARKSFIELD: Je ne parle pas de la culture, je parle simplement de l'instruction en anglais.

M. CARDINAL: Je réponds aussi franchement que vous, je ne vois pas la différence.

MLLE MARKSFIELD: On peut chercher de midi à quatorze heures à distinguer culture et enseignement.

M. CARDINAL: Il y a l'instruction en anglais, il y a l'instruction de l'anglais, si vous voulez.

MLLE MARKSFIELD: Vous avez demandé la raison pour laquelle on insiste, et la voilà, monsieur.

M. CARDINAL: Oui, mais je pense que c'est une crainte. C'est une crainte que je reconnais.

MLLE MARKSFIELD: Oui.

M. CARDINAL: Je le reconnais, écoutez. J'ai été 32 mois ministre de l'Education, et je l'ai très bien sentie, cette crainte.

Cela fait deux ans que l'on discute cette question. On l'a souligné cet après-midi, lorsque la commission parlementaire s'est réunie les 20 et 21, on a célébré le deuxième anniversaire de cette commission parlementaire sur le projet de loi.

Monsieur nous a même rappelé le mémoire qu'il avait présenté à ce moment-là.

MLLE MARKSFIELD: Moi aussi.

M. CARDINAL: Il y a d'autres personnes dans cette salle, justement vous étiez là; d'ailleurs, entre parenthèses, je vous félicite de l'excellent français que vous parlez. C'est à souligner.

MLLE MARKSFIELD: Merci.

M. CARDINAL: Non, c'est à souligner. C'est à souligner parce que c'est un argument. Si... Il n'y a pas de questions?

MLLE MARKSFIELD: Continuez. Je suis honorée.

M. CARDINAL: Si vous réussissez à parler un excellent français, si je réussis à me débrouiller en anglais, à cause des expériences passées, est-ce que vous ne pensez pas que ça pourrait être quelque chose de positif, de constructif, d'avantageux que l'on fasse cette expérience pour les deux groupes culturels du Greater Montreal, quelque chose de différent du reste du Québec?

MLLE MARKSFIELD: On ne peut pas nier l'idée, la conception de l'unité ou l'unification des écoles. C'est l'idéal, n'est-ce pas?

M. CARDINAL: Ah bon!

MLLE MARKSFIELD: Et on a dit dans notre mémoire, au niveau du conseil, ça va. Peut-être en cinq ans, en dix ans, ça peut marcher. Mais, je crois que c'est trop précipité.

M. CARDINAL: Est-ce que je peux poser une dernière question?

MLLE MARKSFIELD: Oui.

M. CARDINAL: Votre mémoire, encore là je vais être très franc, contrairement à certains mémoires présentés par des groupes, ou francophones ou anglophones, que l'on a appelés, à cette table, à certains moments, extrémistes est très serein, très calme, donne une position très précise.

Mais, vous ajoutez à la fin une douzième page, si ce n'est pas une onzième, un addendum. Vous êtes très catégorique. Vous n'êtes pas obligée de répondre, mais est-ce que votre association n'est pas prise dans la situation présente, où, je ne sais pas moi, un exécutif est ouvert à une discussion, à des développements, mais où ses membres viennent dire: Votre mandat, c'est de dire devant la commission: On veut des commissions scolaires non unifiées.

MLLE MARKSFIELD: M. Stafford répondra à cette question.

M. CARDINAL: D'accord.

M. STAFFORD: Je voudrais répondre à cela. Notre mandat est bien clair. Si le gouvernement permet la nomination d'un conseil de l'île provisoire qui fera des recherches parmi tous les gens de la ville de Montréal et si ce conseil provisoire de l'île vous recommande que ce soient des commissions unies, notre mémoire indique que nos membres sont prêts à respecter cela et à faire leur possible pour assurer qu'un tel système fonctionne.

Deuxièmement, on dit: Si cette commission vient nous demander quelle est notre opinion pour le moment, il faudra dire: Nous croyons que nous pouvons faire de meilleurs progrès avec des commissions linguistiques. Cela, c'est notre opinion actuellement.

Je pourrais ajouter, moi-même, que si on continue de faire des progrès dans nos écoles dans l'enseignement du français, le jour arrivera, et peut-être assez tôt, où on pourra fonctionner dans des commissions unies avec plus de possibilités de succès que nous n'en avons maintenant. On travaille de plus près avec nos collègues de la section française. J'ai dit auparavant qu'il faut le faire le plus tôt possible et autant que possible, mais je suis convaincu que, si on ne pousse pas ça trop vite — je ne veux pas dire d'attendre toujours — si on se connaît mieux, et si on ne saute pas dans quelque chose où il faut résoudre toutes sortes de problèmes — vous-même, M. le ministre, vous avez dit que vous l'espériez — on aura quelque chose qui durera assez longtemps et qu'on ne devra pas changer trop vite.

Alors, c'est pour cela que j'ai dit — si vous me le permettez, j'aimerais bien le répéter — qu'il ne faut pas oublier que c'est l'avenir de nos enfants qui nous tient à coeur et que nous voulons à tout prix assurer. Alors, n'agissons pas trop vite. Pour eux, les changements brusques sont difficiles à accepter et je reviens à ce que monsieur a dit avant le souper: Ce qui arrive au niveau de la commission touchera les élèves dans les écoles. C'est pour cela que nous préférons qu'on fasse le premier pas maintenant, mais, je le répète, selon notre mémoire, nous sommes prêts à accepter la décision du gouvernement après avoir reçu un mandat ou des suggestions d'un tel conseil qui serait nommé d'une façon entièrement démocratique.

M. CARDINAL: I thank you very much. There are many more shades and nuances in your answer than in your brief.

M. STAFFORD: Je peux peut-être simplement souligner ce que monsieur a dit avant aussi, c'est que j'ai téléphoné à M. Pouliot lui-même, lui demandant s'il ne serait pas possible d'avoir un peu plus de temps pour préparer cela. Il a répondu le 24 septembre pour nous dire que nous étions convoqués pour le 30. Nous avons fait notre possible et nous sommes ici pour essayer de répondre de notre mieux à vos questions.

M. CARDINAL : Nous vous remercions. D'ailleurs, écoutez, ce n'est pas moi qui vais répondre à ce que vous venez de dire; c'est de l'autre côté de la table.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: Le député de Bagot a fait allusion tantôt au cas de Saint-Laurent. A

Saint-Laurent, l'unification est faite au niveau confessionnel, c'est-à-dire qu'il y a une commission scolaire catholique qui groupe les francophones et les anglophones.

Et ça existe depuis des années; à ce niveau, il n'y a aucune difficulté. Au niveau des commissaires d'écoles, il y a quatre commissaires francophones et un anglophone et il n'y a pas de difficulté, même dans les communications.

Maintenant, il y a une réponse qui a été donnée par Mlle Marksfield tantôt qui m'a surpris un peu. Elle a mentionné, en réponse au député de Bagot: Qu'est-ce que vous voulez, à cause des mémoires de la CEQ ou d'autres mémoires, on est obligé de réagir un peu de cette façon! Est-ce que votre mémoire, en somme, est un peu une réaction vis-à-vis de certaines demandes d'autres mémoires qui auraient pu être présentés auparavant, par exemple?

MLLE MARKSFIELD: Non, pas du tout. Ce sont simplement les déclarations qu'on lit dans la presse — par la presse, j'entends la presse anglaise et la presse française — qui disent : Les chefs de ces deux groupes, voilà! Et cela effraie l'élément anglophone dans la ville de Montréal.

M. PEARSON: D'accord. Mais assez pour pouvoir influencer la teneur des mémoires que vous pouvez présenter?

MLLE MARKSFIELD: Je le crois. M. PEARSON: Oui?

MLLE MARKSFIELD: Bien sûr, cela nous influence. Est-ce que je peux ajouter...

M. PEARSON: Do you mean that in the brief you present you ask for a little more just to receive a little less?

MLLE MARKSFIELD: Non, jamais. Il n'y a pas de... Ce que j'ai pensé que vous avez voulu dire, monsieur, c'était le fait qu'on a dû ajouter une phrase à la fin de notre mémoire, purement à cause de ces déclarations et pour sauvegarder l'instruction en anglais.

M. PEARSON: D'accord.

MLLE MARKSFIELD: Est-ce que je peux simplement dire quelque chose à l'égard de l'enseignement du français dans les écoles anglaises?

M. PEARSON: Certainement.

MLLE MARKSFIELD: Vous savez, on fait des progrès extraordinaires. Les petits anglophones qui apprennent à parler français au niveau primaire, au niveau de la 7 e année et partout dans les écoles, bien sûr, mais ceux qui sont immergés dans les programmes français...

Je voudrais bien que vous veniez un jour passer une semaine chez nous dans mon école, s'il vous plaît, 6520 ouest, boulevard Gouin. Nous serons toujours prêts à vous accueillir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On a l'adresse.

M. LACROIX: Je tiens à dire au député de Chicoutimi que ça fait longtemps que j'ai l'adresse, puisque je parlais avec madame...

MLLE MARKSFIELD: Vous serez étonnés et, je crois, ravis, de voir les progrès que font ces petits anglophones en faisant des leçons, quatre heures et demie par jour, en français, entièrement en français. Ils font les mathématiques, l'histoire, la géographie, l'initiation à la musique, l'initiation à la peinture; ils font la gymnastique, les sports en français et ils parlent français dans la cafétéria. Et c'est très anormal de voir deux petits anglophones se parler en français, vous allez m'accorder cela. Mais ils le font, et volontiers. Ils ont fait ce choix et ils l'acceptent avec enthousiasme. C'est notre nouveau Québec qui se crée. Alors, il faut vraiment venir le voir et je vous invite tous, soit à mon école ou aux autres écoles d'immersion.

M. LACROIX: A quelle heure, les cours?

MLLE MARKSFIELD: De 9 heures à 3 heures, monsieur.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Mlle Marksfield, votre réponse très franche au député de Bagot tout à l'heure m'oblige à vous donner un commentaire très franc aussi sur ce que vous venez de dire. Vous avez dit que chaque fois que des groupes comme la CEQ et l'Alliance des professeurs de Montréal, par exemple, s'expriment sur la situation linguistique de Montréal, vous auriez pu mentionner d'autres groupes et j'imagine que c'est avec délicatesse que vous avez ignoré de nommer mon parti,...

MLLE MARKSFIELD: Pas du tout, je l'ai oublié, voilà.

M. CHARRON: la communauté anglophone de Montréal frissonne et se voit immédiatement attaquée dans ses droits. Je vous rappellerai quand même que ces deux groupes que vous avez nommés, pour ne pas prendre ceux que vous avez sous-entendus, sont eux-mêmes venus témoigner, ils vous ont précédée à la table que vous occupez actuellement, et aucun des deux groupes — peut-être un, celui de l'Alliance des professeurs, avait un style particulier qui, je crois bien, ne l'a pas beaucoup servi, mais enfin, peu importe, c'est son choix — n'a demandé la disparition des écoles anglophones. Pas plus

d'ailleurs que le Parti québécois n'a demandé la disparition des écoles anglophones.

MLLE MARKSFIELD: ...mais c'est malheureux alors que la presse...

M. CHARRON: C'est ce que j'allais vous dire, madame, je ne vous cache pas qu'il existe dans le groupe francophone des extrémistes qui demandent, et vraisemblablement nous aurons l'occasion de les entendre aussi, la disparition de ce que nous considérons comme l'un de vos droits des écoles.

Mais vous admettrez que vous avez une presse du côté anglophone bien particulière et qui sait mettre en évidence ces secteurs de la population, qui ne reflètent peut-être rien à l'intérieur de la population francophone, qui sont utilisés en première page ou avec beaucoup d'éclat, surtout quand les personnages qui véhiculent cette idéologie sont aussi éclatants, cette crainte chez les anglophones. Je n'ai jamais été un gros lecteur des journaux anglophones, malheureusement, mais je le suis devenu depuis le dépôt de la loi 28, parce que je suis concerné.

J'ai été étonné de voir comment, par exemple, des témoignages que j'avais entendus ici, ainsi que tous mes collègues autour de la table, se trouvaient agencés. Je ne parle pas du travail des journalistes eux-mêmes qui prenaient le contenu, mais comment il était présenté, l'importance qu'on lui accordait dans le journal pour toujours faire ressortir le côté le plus francophile, le plus désireux de retrouver la dignité francophone que nous n'avons pas encore tout à fait atteinte, etc.; comment on manoeuvrait les nouvelles, ou alors les attaques parfois normales que j'ai pu faire moi-même ainsi que d'autres sur ce qui a été, pour un certain moment, des privilèges des anglophones, comment on les a placées, le fait que nous disions simplement notre opinion là-dessus, comment on les a traitées comme étant une attaque viscérale et visqueuse et que nous voulions vous arracher tous vos droits, etc. Je trouve que, si la minorité anglophone de Montréal frissonne à chaque fois qu'un francophone dit que la situation de Montréal est anormale, il y a une part de responsabilité dans ceux qui dirigent cette minorité anglophone à Montréal et qui sont intéressés justement, et bien souvent, à apeurer la minorité anglaise de l'endroit.

Je ne nie pas, encore une fois, l'existence des extrémistes, mais on lui accorde une importance beaucoup plus forte par rapport à la majorité. Vous avez ici quatre partis politiques. Aucun, depuis le début des travaux de la commission, n'a voulu demander la disparition des écoles anglaises à Montréal. Chacun a eu l'occasion de répéter à son tour que c'était un droit et chacun est venu assurer les anglophones qui sont venus ici que ces droits-là étaient préservés dans la loi 28. Ce que nous et ce que le gouvernement aussi croient, puisque c'est lui le proposeur du projet de loi no 28, c'est qu'une commission scolaire propre à la minorité anglophone, ça c'est un privilège. Lui, il parle de les unifier, nous aussi voulons les unifier d'une façon plus complète que ne le fait le projet de loi no 28. Mais dans l'ensemble, il y a une entente autour de la table qui représente les quatre partis politiques de la province de Québec là-dessus et je vous assure que si votre remarque était franche — je l'admets bien quant à vos craintes — le commentaire que je vous fais, il l'est aussi beaucoup. J'ai eu l'occasion de recevoir plusieurs mémoires des anglophones, il y en a eu quelques-uns, comme celui du Protestant School Board de Montréal la semaine dernière, qui était vraiment, à mon avis, malhonnête. Mais pour l'ensemble, je comprends la crainte que vous ayez. Vous venez d'un groupe bien particulier.

Si vous nous dites que vous êtes une minorité, pour nous, ici, vous êtes la pointe d'une majorité continentale. On ne peut pas vous considérer que comme minorité. Vous êtes, c'est vrai, minoritaires, chez nous, mais on ne peut pas ignorer que vous êtes en même temps la pointe d'une majorité continentale forte, solide, puissamment organisée, contrairement à notre situation à nous, et c'est ça qui domine toute nos positions.

MLLE MARKSFIELD: Vos remarques me soulagent énormément, monsieur, et je vous en remercie. Simplement quelques petits commentaires.

M. CHARRON: Allez-y.

MLLE MARKSFIELD: Tout d'abord, vous dites que nous sommes dans un vaste continent anglophone. C'est vrai, mais nous habitons ici, c'est notre foyer. Il me semble que je l'ai dit il y a deux ans, nous ne voulons pas être des Québécois errants. Montréal, le Québec, c'est notre "home" et nous voulons demeurer ici. Nous avons fait des carrières ici; nous voulons continuer à aider à faire épanouir cette province et je crois que nous avons déjà apporté des contributions assez grandes et assez importantes. Autre chose. Si vous savez que la presse indique quelque chose qui n'est pas comme il faut, il me semble — si j'ose le dire, et je m'excuse de le dire — que comme député vous avez le droit d'écrire des lettres et des articles pour éclaircir les choses pour la communauté.

M. CHARRON: C'est ce que le ministre de l'Education lui-même a fait et regardez le traitement qu'il reçoit à l'intérieur de ces journaux-là.

M. LACROIX: Si j'osais dire la moitié de ce que le député de Saint-Jacques a dit vous verriez la belle publicité qu'on me ferait.

MLLE MARKSFIELD: Chapeau.

M. LAURIN: On vous en fait de la bonne.

M. STAFFORD: Si je peux ajouter une seule remarque, Mlle Marksfield a dit que peut-être une raison pour le retard, ce sont quelques craintes. Je souligne une chose, c'est que je vois ici des gens comme moi qui sont assez mûrs, pas aussi jeunes qu'auparavant et j'ai suggéré, quand nous sommes venus ici la dernière fois, que nous représentions peut-être cent cinquante ans dans l'enseignement. Je ne suis pas loin de la vérité peut-être, mais j'ajoute que notre raison, la vraie raison pour laquelle on a dit ceci, c'est que si ce conseil provisoire venait nous demander, comme pédagogues, comme des gens qui veulent faire fonctionner quelque chose, un programme qui aiderait les élèves — les gens à qui nous nous intéressons le plus — des deux sections, autant que possible, pour le moment, je crois que comme pédagogues c'est ce qu'il faudrait qu'on dise. Je répète que c'est comme pédagogues que nous sommes venus ici.

M. LE PRESIDENT (Pilote): La parole est au député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: Mademoiselle, comme mot final personnel, disons qu'on a le droit d'envoyer des fleurs. Vous êtes sûrement, dans toutes les séances que nous avons eues jusqu'à présent, une des meilleures ambassadrices de l'élément anglophone.

MLLE MARKSFIELD: Merci.

M. PEARSON: Et si tous les anglophones qui viennent nous présenter des mémoires avaient autant d'ouverture d'esprit, je pense que cela nous éviterait beaucoup d'affrontements.

M. LE PRESIDENT: Je remercie les membres de la Québec Association of School Administrators et Mlle Marksfield. J'ai noté que le député de Chicoutimi avait pris votre adresse.

UNE VOIX: J'espère que vous aimez les maigres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je dois dire, mademoiselle, que si ce n'est pas confortable pour vous, ce le sera pour moi.

MLLE MARKSFIELD: Qui vivra verra!

De la part de mes collègues, puis-je vous remercier pour l'accueil très chaleureux que vous nous avez témoigné. Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci bien. Nous allons passer maintenant au mémoire de la Montreal Teachers Association représentée par M. D.R. Peacock, président.

Montreal Teachers Association

M. PEACOCK: Je m'appelle Donald Peacock P-e-a-c-o-c-k, ça veut dire paon. Je suis prési- dent, depuis cinq ans, du Montreal Teachers Association, syndicat qui regroupe les 2,800 enseignants à l'emploi du Bureau protestant du Grand Montréal. J'espère que vous avez reçu, en même temps que notre mémoire, le mémoire qu'on a présenté sur le bill 62 puisqu'il contient toujours des points valables.

Comme tout bon enseignant, je me rends compte que la classe est un peu fatiguée, surtout la première journée d'école. Je ne veux donc pas vous ennuyer trop longtemps; je n'ai aucunement l'intention de lire tout mon mémoire, surtout que vous l'avez sous les yeux.

M. VEILLEUX: M. le Président, peut-être, avant de commencer, pourriez-vous nous montrer le lien ou la différence qui peut exister entre le Montreal Teachers Association et le PAPT.

M. PEACOCK: Nous sommes une section de la PAPT, par hasard. Je vais vous expliquer ça plus tard. La PAPT est une corporation. Je vais essayer de faire un résumé de notre mémoire ce qui m'est assez difficile parce que je ne suis pas francophone. De temps en temps, vous allez voir que je vais le lire. J'espère bien que je ne vais pas ajouter trop de choses pour fâcher le député de Chicoutimi et nuancer ce que j'ai déjà écrit.

Nous sommes en faveur de la rationalisation des structures, de la démocratisation et de la participation des parents. Nous sommes également en faveur de l'égalisation des "opportunités" pour tous les enfants de l'île. Le rôle coordonnateur du conseil de l'île pourrait justement assurer cette égalisation. Nous sommes toujours contre les commissions unifiées.

Nous sommes contre pour les mêmes raisons qui ont poussé la commission Pagé à proposer les commissions divisées selon la langue. Il y a deux raisons principales. D'abord, on craignait que demander à une communauté de se préoccuper des intérêts de l'autre à l'heure actuelle, c'était un peu trop demander, la bonne volonté étant à la baisse au Québec ces jours-ci. C'était la première raison.

Ensuite, une raison technique. Si vous voulez à tout prix unifier les commissions pour aider quelques commissaires anglophones à devenir bilingues, nous allons nous trouver en face de gros problèmes quand il s'agira de fournir trois sortes d'instruction en deux langues aux enfants dans au moins quatre des onze commissions proposées.

Alors, si vous voulez à tout prix faire cela, il y a trois solutions au problème. D'abord, centraliser l'opération au complet en faisant du conseil de l'île une supercommission. L'expérience vécue par New York et par Londres a démontré que cette solution était finalement non démocratique et inefficace.

Deuxième solution: réduire le nombre des commissions scolaires. A cause de la répartition inégale d'enfants anglophones et francophones, ceci causerait des difficultés. Par exemple, le

West Island Board (numéro 10)est déjà géographiquement vaste et devrait prendre une proportion énorme afin d'inclure une population francophone d'au moins 20,000 personnes.

Troisième solution, c'est celle qu'on propose: réduire le nombre de types d'écoles. La grande majorité de nos professeurs est en faveur d'écoles neutres, mais, comme ceci causerait de nouvelles divisions, nous vous recommandons la fin des écoles à dénominations différentes et la création d'écoles multiconfessionnelles où toutes les religions seraient respectées, où les cours d'éducation religieuse seraient offerts sur une base optionnelle et où, enfin, des enfants de toutes croyances et d'aucune croyance pourraient se rencontrer, travailler et jouer ensemble.

Pour nous, ça, c'est l'unification réelle au niveau où existe le monde. En passant, je dois dire que cette association n'a jamais favorisé l'argument constitutionnel envers le projet de loi no 28, en partie parce que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique n'a pas garanti les droits linguistiques du français en d'autres parties du Canada et en partie parce que nous ne voyons pas comme inaliénable le droit de séparer nos enfants.

Nous osons suggérer à nos amis catholiques et protestants à qui répugne l'idée des écoles multiconfessionnelles que c'est essentiellement faire preuve d'un manque à son devoir de chrétien de refuser de se mêler à ceux qui ont d'autres croyances, que le foyer et l'Eglise sont les endroits appropriés pour la dissémination des valeurs religieuses et qu'un vrai chrétien est quelqu'un qui peut vivre dans un monde dénudé de christianisme et garder sa foi.

On le fait parce que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique nous donne un cadre inapproprié à nos besoins modernes. Néanmoins, il ne faut pas faire comme on dit en anglais "throw the baby out with the bath water." On a besoin d'une constitution et nous sommes déçus que le gouvernement du Québec n'ait pas proposé des amendements à cet Acte de l'Amérique du Nord britannique qui correspondraient mieux aux réalités d'aujourd'hui et qui, tout en protégeant les droits de la majorité, assureraient une fois pour toutes les droits des parents à choisir la langue d'instruction de leurs élèves.

Comme la langue n'est pas seulement un outil de l'enseignement mais bien une méthode de transmission d'une culture, nous acceptons à regret la séparation de nos écoles sur une base linguistique, mais nous espérons que le ministre verra à ce que l'instruction dans la langue seconde soit grandement améliorée afin de contrebalancer cette séparation physique.

Nous avons déjà soumis à son ministère des propositions destinées à favoriser cette fin, dont le sommaire apparaît à l'annexe A que je vais lire.

Nous suggérons une dépense admissible spéciale, à être incluse dans le rapport maître-élèves, afin de permettre une classe maximum pour l'enseignement de la langue seconde de quinze élèves pour les trois premières années, de vingt pour les trois années suivantes et de vingt-cinq par la suite.

Deuxièmement, la présente entente fédérale-provinciale pour promouvoir le bilinguisme doit être amendée afin d'inclure les subsides fédéraux suffisants pour couvrir les coûts additionnels entraînés par la recommandation numéro 1.

Nous avons trouvé à notre grande surprise que les $25 millions sont en partie pour payer les frais de l'instruction en anglais à la minorité anglophone. Cela ne marche pas au Québec, on trouve que le Québec n'est pas une province comme les autres et on trouve illogique ce système de paiement. Nous désirons porter aussi votre attention sur le fait que la présente formule, qui reconnaît le facteur de coût pour l'enseignement de l'anglais aux enfants anglophones, est convenable pour toutes les autres provinces mais hautement inappropriée pour le Québec.

Troisièmement, la création d'instituts linguistiques dans des centres convenables à travers le Québec — possiblement sous l'égide de l'Université du Québec — financés par les gouvernements fédéral et provincial et où des cours de linguistique, de méthodes pédagogiques modernes, de phonétique, là, seraient accessibles aux professeurs de la langue seconde et dans la langue seconde, c'est-à-dire des professeurs donnant des cours d'histoire en français aux étudiants anglophones.

Quatrièmement, pourvoir, en priorité, des bourses de perfectionnement professionnel aux enseignants de la langue seconde qui désirent se prévaloir des cours décrits ci-haut.

Cinquièmement, un encouragement actif par le gouvernement provincial à un échange d'enseignants et d'élèves entre les deux groupes linguistiques, incluant des clauses selon lesquelles les enseignants gardent tous les droits d'emploi avec leur commission scolaire originale alors qu'ils enseignent dans une autre commission scolaire.

Sixièmement, la préparation de cours au niveau secondaire destinés à rendre les étudiants conscients des caractéristiques sociales et culturelles de l'autre communauté linguistique. Ces cours devraient être préparés par le ministère de l'Education en collaboration étroite avec les enseignants et des experts-conseils des commissions scolaires; ils devraient être des cours-cadres afin de permettre des variations locales et encourager l'initiative des enseignants, ils devraient faire appel à des artistes connus, chanteurs, acteurs, écrivains, etc. et des personnalités, aussi bien qu'à des films, disques, concerts vivants, etc., et ils devraient être des cours d'intérêt plutôt que des cours formels permettant l'obtention de crédits.

Autrement dit, on veut, au lieu de passer de petits règlements pour des raisons politiques, que le gouvernement mette un peu d'argent dans l'affaire une fois pour toutes. Nous ne

considérons pas tout ceci comme étant une digression du débat sur la réorganisation des écoles puisque aucun changement de structures n'a de valeur réelle à moins de créer un esprit nouveau d'entente mutuelle et de respect entre les citoyens de demain.

Nous ne pouvons pas trop insister sur le fait qu'une condition préalable pour que toute réorganisation scolaire puisse réussir, c'est la formulation d'une politique linguistique par le gouvernement.

Nous avons déjà constaté que la plupart des gens qui discutent théoriquement du bill 28 ne parle pas du bill 28, ils parlent du bill 63. Peut-être ne le savent-ils pas mais ils parlent du bill 63. Leurs craintes viennent justement du fait que le bill 63 est toujours mis en cause.

Si M. Saint-Pierre veut attendre le rapport de la commission Gendron — tout le monde attend le rapport de la commission Gendron — soit, mais qu'il retire son bill, entre-temps. Nous ne sommes pas contre la composition d'un conseil de l'île temporaire et permanent.

Sûrement nous avons terminé l'ère des représentants nommés par le gouvernement et catapultés dans les divers corps de l'éducation. Ou nous faisons confiance au peuple ou non. Nous ne pouvons simplement pas avoir une démocratie partielle dans les années soixante-dix.

Nous recommandons que l'article 600 et que la disposition transitoire 9 soient amendés comme suit: Article 600: "Le conseil sera composé de onze membres — le nombre de membres selon le nombre de commissions — désignés à la première assemblée suivant l'élection des commissaires d'écoles, parmi et par les commissaires de chaque commission scolaire" et que la disposition transitoire soit amendée afin qu'elle se lise: "Jusqu'au moment de la désignation faite en vertu de l'article 600, mais au plus tard le 1er août 1972, le conseil sera composé de treize membres, élus parmi et par les commissaires des commissions scolaires, selon la formule suivante:..."

Nous désirons maintenant toucher à un sujet qui concerne tout particulièrement notre association. En 1966, nous avons organisé ce syndicat et, malgré la contestation de notre bureau, de notre commission, nous avons obtenu accréditation, pour négocier. En 1967, nos premières négociations furent "gelées" par le projet de loi 25, et une corporation professionnelle, The Provincial Association of Protestant Teachers, fut nommée en tant que notre représentant pour fins de négociations.

Nos professeurs s'adaptèrent à cette situation en réorganisant la PAPT de façon à séparer les administrateurs des enseignants en ce qui avait trait au syndicat. Le projet de loi no 46, encore une fois, nous force à utiliser la PAPT en tant que représentant et les termes de ce projet de loi ne spécifient pas si de vraies négociations — dans le sens du code du travail — seront permises à notre niveau. Un gouvernement qui accorde des droits de négociation aux syndicats, d'une part, et les empêchent d'exercer ces dits droits, d'autre part, est un gouvernement dont l'attachement à la démocratie pose un doute sérieux.

L'article 17 des dispositions transitoires et finales du projet de loi no 28 ajoute encore à la confusion en laissant entièrement la question de notre employeur légal au plan d'intégration du conseil transitoire.

Nous trouvons continuellement que, pour certaines fins, notre employeur est le ministre de la Fonction publique et, pour d'autres, le ministre de l'Education alors que, légalement, c'est le "Protestant School Board of Greater Montreal". Dans le plan stratégique d'ensemble de la Fonction publique, nous devons insister sur l'exercice de nos droits de base à pouvoir négocier avec notre employeur ou, du moins, de pouvoir choisir notre propre mandataire.

Nous avons déjà fait mention que, sous les chartes démodées des trois corporations (CEQ, PACT et PAPT) être membre n'est pas une question de choix individuel. En effet, selon le présent projet de loi, les enseignants dans les écoles non protestantes et non catholiques — qu'elles soient multiconfessionnelles ou autres — se retrouvent automatiquement membres de la CEQ.

Cette situation absurde signifie en effet que le fait que je sois membre d'une corporation est déterminé par le comité protestant du conseil supérieur puisque ce corps peut décider de reconnaître ou non une école comme étant protestante. Cela signifie aussi qu'à cause du projet de loi 46, je dois demeurer dans cette corporation si je désire pouvoir exercer une influence sur les négociations concernant mon salaire et mes conditions de travail.

Nous recommandons donc que les ministres du Travail, de l'Education et de la Fonction publique travaillent ensemble une fois pour toutes dans le but de mettre fin au statut privilégié spécial des corporations professionnelles, et de faire un amendement au projet de loi no 46 afin de permettre à tous les syndicats de choisir librement leur mandataire pour toute négociation provinciale.

Nous recommandons de plus que le présent projet de loi no 28 soit amendé afin de stipuler clairement que, quoique l'employeur légal des enseignants demeure la commission scolaire, les négociations (ou "arrangements" pour citer le projet de loi no 46) doivent se faire au niveau du conseil de l'île. Nous n'avons pas inclus dans ce mémoire le problème syndical parce que nous croyions à ce moment que c'était réglé par une décision de la East End Teachers Association. Mais on se trouve encore dans la confusion à cause d'un autre jugement à Sainte-Foy. Je vous explique l'affaire.

Normalement, on ne divise pas une unité de négociation, mais un commissaire-enquêteur peut le faire, s'il trouve des raisons valables. Un commissaire-enquêteur, Me Geoffroy, a trouvé qu'à la régionale Le Royer, il y avait lieu, pour

des raisons qui étaient un peu poussées, je crois, de diviser selon la langue, de permettre, autrement dit, aux anglo-catholiques de la régionale Le Royer de former leur propre syndicat. C'est ce qu'ils ont fait.

Mais, à Sainte-Foy, un autre qui était autrefois employé de l'Alliance des professeurs de Montréal, M. Normand Cinq-Mars, a trouvé que la langue n'était pas une raison suffisante pour diviser une unité de négociation. Il l'a refusé.

Alors, puisque le ministre ne veut pas nous dire qui sera notre employeur, nous nous trouvons face à plusieurs possibilités. Si c'est le conseil de l'île qui est notre employeur et si c'est Sainte-Foy qui l'emporte, nous nous trouverons dans un syndicat de 21,000 enseignants.

Je vous ai dit la dernière fois, dans notre mémoire sur le projet de loi 62, que, si nos arguments d'ordre démocratique ne vous touchent pas, peut-être que vous allez calculer que 21,000 enseignants dans un syndicat, c'est un gros bébé au Québec. Vous ne voulez pas créer un tel géant.

Par contre, si l'employeur est la commission scolaire, nous pouvons nous trouver dans neuf syndicats majoritairement francophones et deux syndicats majoritairement anglophones. C'est absurde, cette histoire.

L'Alliance des professeurs et nous-mêmes avons déjà proposé à M. Cournoyer une autre solution basée sur un principe qui va pour le projet de loi no 28 aussi: s'unifier autant que possible et se séparer où ça s'avère nécessaire, c'est-à-dire des certifications conjointes, mais l'organisation séparée. C'est cela que l'on propose.

Vous trouvez peut-être que je parle en dehors du projet de loi no 28, mais le projet de loi no 28 influence beaucoup d'autres choses. C'est une question de démocratie.

Alors, notre problème syndical, pour nous, c'est celui qui nous préoccupe le plus. Mais, si vous voulez vos commissions unifiées, nous relèverons ce défi de travailler au sein de structures nouvelles, en contact plus étroit avec nos collègues catholiques francophones et anglophones et nous vaincrons... pourvu que le gouvernement alloue à chaque commission scolaire — vous avez compris — autant d'initiative pédagogique que le demande une égalité de service; pourvu que le conseil de l'île serve en capacité de corps coordonnateur plutôt qu'en celle d'un maître tout-puissant de la bureaucratie et pourvu que nos droits à un enseignement de haute qualité dans la langue de notre choix soient clairement respectés par nos collègues francophones, alors que certains parmi eux semblent croire que notre droit de respirer est un privilège intolérable.

Ce projet de loi, amendé convenablement, peut devenir la base d'une nouvelle société plus éclairée au sein de laquelle les deux races fondatrices peuvent perdre leurs craintes mutuelles, leur belligérance, et où nos enfants peuvent être enrichis par une influence réciproque de deux cultures vitales et dynamiques, libres de la mentalité de ghetto qui caractérise encore aujourd'hui un grand nombre de nos débats publics au Québec.

Ce projet de loi peut aussi marquer la fin d'un système d'éducation cohérent à Montréal et amener la scission finale dans les relations communautaires.

Qu'il le fasse ou non dépend ultimement non pas d'un document juridique, mais de la motivation des divers éléments impliqués dans l'enseignement à Montréal.

Cette association, dont je suis fier d'être le président, voue son attachement aux idéaux de base du projet de loi no 28. Nous sommes prêts à sacrifier notre existence collective afin de voir la réalisation de ces idéaux.

Nous avons fait le premier pas. Il appartient maintenant à d'autres de la majorité ou de la minorité culturelle du Québec de sacrifier leurs préjudices afin que nos enfants puissent grandir et apprendre ensemble.

Je vous remercie.

M. CARDINAL: Peut-être pour une fois, ce soir nous sommes d'accord. La dernière fois que vous êtes venu, pour le projet de loi 62, cela avait été assez difficile.

Le premier jour des séances de cette commission parlementaire, à la première minute, en réponse au ministre, je lui ai souligné le problème des relations syndicales sur lesquelles vous avez fortement insisté.

Sur ce point-là, je suis entièrement d'accord avec vous, le projet de loi no 28 n'est pas clair et on ne sait pas qui est l'employeur des enseignants au Québec. C'était clair dans le projet de loi no 62, vous n'étiez pas d'accord, mais au moins c'était clair. Bon. Non, c'était clair. Mais, enfin, on ne recommencera pas les discussions d'il y a deux ans.

Il y a quelque chose quand même qui me frappe: la question de certification syndicale. L'Alliance des professeurs au sein de la CEQ, comme votre groupement au sein de la PAPT, vous êtes dans la même position, si je ne me trompe pas après avoir entendu les deux. Mais il y a autre chose, il y a ce problème de savoir qui est l'employeur...

M. PEACOCK: Excusez-moi, vous dites que l'Alliance dans la CEQ est dans la même position que nous dans la PAPT, ce n'est pas vrai.

M. CARDINAL: D'accord.

M. PEACOCK: La CEQ est une corporation, mais en même temps c'est une centrale, et quand l'Alliance perçoit sa cotisation syndicale, dont une part va à la CEQ, la CEQ ne se sert plus de sa charte des corporations, sauf aux fins d'obtenir des membres dans les écoles qui ne sont pas catholiques ou protestantes. Elle n'a pas encore abandonné la charte. Mais la PAPT,

c'est une vieille affaire, ça date de 1860, avant la confédération et cela n'a jamais été créé pour les fins syndicales. La PAPT n'est pas un syndicat, ce n'est pas une centrale. Chaque unité, chaque syndicat est séparé parce que nous sommes membres individuellement de la PAPT, et la PAPT obtient ses $60 séparément par sa charte. Autrement dit, la PAPT c'est un peu une anomalie. Je sais pourquoi M. Johnson a nommé la PAPT dans le bill 25, c'est parce qu'il n'y avait pas autre chose, mais je m'élève contre l'idée des corporations dans ce siècle. L'idée des corporations est vraiment antidémocratique.

M. CARDINAL: Bon, d'accord, j'accepte ce que vous venez de dire comme étant "a matter of fact". Ce que je voulais dire, c'est que votre position, non pas votre situation juridique, mais votre position devant la commission est analogue — toute comparaison a toujours des défauts — analogue à celle de l'Alliance.

Mais il y a deux aspects au problème: cet aspect, si vous voulez, de la corporation qui est en même temps syndicat — qui va peut-être devenir simplement syndicat sans être association, la PAPT qui date de dix-huit cent j'ignore quoi, etc — et le fait que, même si Montréal est très, très important au sein du Québec, les gouvernements, les uns après les autres, ont voulu qu'il y ait à travers tout le territoire du Québec une égalité pour les enseignants. Et c'est pourquoi, quand, dans votre mémoire, vous accusez un gouvernement, sans le nommer, on devine lequel, de n'être pas démocratique, et que vous accusez celui qui est là aujourd'hui de ne pas l'être pour les mêmes raisons, là je ne vous suis plus parce qu'il y a deux plans, il me semble qu'il y a deux choses différentes.

Je suis d'accord avec vous que ça n'a pas de bon sens que les négociations avec les enseignants fassent que le ministre de l'Education, quel qu'il soit, soit sans cesse mis, vous me permettrez d'employer cette expression, "on the spot", pendant que le ministre de la Fonction publique prend ses décisions et que le ministre du Travail est dans son ministère. Sur ce point, je l'ai dit même pendant que j'étais ministre, et ce n'était pas une attaque contre mon collègue, le ministre de la Fonction publique. Cela, il va falloir qu'au niveau du gouvernement ce soit réglé, vous ne pouvez pas faire affaires avec trois ministères. On en a vu un exemple cet après-midi, le ministre de l'Education a fait une déclaration ministérielle sur le problème des universités, mais c'est M. Cournoyer qui devient celui qui s'en occupe. Qu'est-ce qui va arriver tout à l'heure, je ne le sais pas, je souhaite bonne chance au gouvernement et aux relations entre les ministres, surtout à l'UQAM et à l'Université de Montréal. Mais là, ça n'a pas de sens.

Je fais quand même cette distinction, si vous me comprenez bien, entre l'égalité des traitements — le mot "traitements" est employé au sens large non pas de salaire mais de façon de traiter avec quelqu'un — l'égalité des services envers les étudiants, et ces questions techniques de reconnaissance d'unité que j'appellerai unité syndicale.

Et c'est pourquoi, tout en exceptant cela —je vous dis que je suis d'accord avec vous — il y a quand même cette distinction, je pense, qu'il faudrait apporter. C'est sûr que le projet de loi no 28, et je l'ai soumis au ministre déjà, il y a plusieurs semaines, devrait clarifier la question de l'engagement des enseignants sur l'île de Montréal. Dans mon esprit, ce n'est pas clair qui est responsable de cette question.

Quand, dans le projet de loi no 28, ou dans le projet de loi de la communauté urbaine, on fait référence aux articles 36 ou 37 de la Loi du ministère du Travail, je ne suis pas d'accord. Toute législation par références, que ce soit référence à une autre loi du Québec ou à une loi fédérale, est une mauvaise législation. Lorsque l'on modifie la législation principale, on se trouve à modifier l'autre législation. Deuxièmement, le projet de loi no 28 ne crée pas des fusions de syndicats, ne crée pas des fusions de commissions scolaires; il défait tout le système radicalement et le refait. Par conséquent, je ne comprends pas comment l'on va pouvoir résoudre ce problème des relations syndicales alors que le projet de loi no 28 pourrait être adopté pendant que vous êtes en négociations.

Cela me parait encore une situation pire. Et quand je dis ceci, ce n'est pas une attaque, M. le ministre, contre le gouvernement. C'est simplement une invitation au gouvernement à réfléchir à cette situation qui pourrait placer l'Etat —je ne dis même pas le gouvernement — l'Assemblée nationale, tout le Québec, tout le système de l'éducation dans une situation impossible parce qu'on n'aurait pas clarifié cette question des relations syndicales à l'occasion de l'application concrète dans les faits, sur une certaine période, du projet de loi no 28.

Et l'intervention que je fais n'est absolument pas partisane; c'est simplement une invitation au gouvernement, après l'expérience que j'ai moi-même vécue, de songer très sérieusement à inclure dans le projet de loi no 28 des articles qui viendront clarifier cette situation et cela de concert avec le ministère de la Fonction publique et le ministère du Travail.

M. PEACOCK: Est-ce que je peux ajouter quelque chose? Vous avez parlé beaucoup mieux que moi, beaucoup plus longuement que moi sur ce que j'ai dit, je crois. Ce n'est pas seulement cela, M. Cardinal. C'est aussi la question du code du travail qui influence encore la politique linguistique. Le commissaire-enquêteur à la régionale Le Royer n'a pas divisé l'unité sur la base de la langue; il n'a pas osé; il n'a pas le droit. Il a prétendu que la formation des maîtres était différente, que l'objet visé était différent, ainsi de suite.

Mais je vous demande: Est-ce que le gouver-

nement va changer le code du travail afin de nous reconnaître le droit de nous organiser dans notre langue? C'est encore une chose. Il faut le faire. Même si c'est la commission qui est notre employeur, on se trouve encore dans la même maudite bataille avec un commissaire qui fait une chose. On ne saura plus où on se trouve. Il faut une fois pour toutes décider si c'est un droit ou un privilège. Nous sommes prêts à marcher avec une accréditation conjointe, c'est ce que nous avons proposé, avec l'Alliance, malgré le East End Teachers Association qui leur a donné le droit d'avoir un certificat séparé.

On le veut parce que c'est logique, selon le principe que j'ai énoncé. Unifier où c'est possible; diviser où c'est nécessaire. Mais on ne peut pas, à l'heure actuelle, avoir cela. La CECM est un exemple différent parce qu'elle a un certificat conjoint donné par Duplessis pour des raisons que je ne veux pas expliquer maintenant parce que c'est tout à fait spécial. Cela n'existe plus, ça ne peut pas exister. Mais on veut savoir. Est-ce que le gouvernement va nous accorder le droit de nous ! organiser nos propres syndicats de langue anglaise, oui ou non? Ensuite, c'est la question des chartes des corporations, de l'éducation non confessionnelle ou non catholique ou non protestante. Le projet de loi no 28 n'est pas clair là-dessus; il ne parle pas des écoles, il parle seulement de possibilités; il n'y a pas de comité pour cela, il n'y a rien; il y a un comité protestant, un comité catholique au conseil supérieur mais il n'y a pas d'autres choses. Alors on n'est pas sûr de ce qu'il veut dire par ces autres choses. Est-ce qu'on aura des écoles ou non? Mais s'il y a des écoles qui ne sont ni catholiques ni protestantes — et on les veut — on veut des écoles multiconfessionnelles.

Si vous nous mettez dans ces écoles, nous allons nous trouver dans une corporation dite la corporation des enseignants du Québec, pas dans un syndicat mais dans la corporation. Parce que la corporation a une charte qui dit que tout enseignant dans les écoles publiques du Québec se trouve dans la CEQ à part ceux qui se trouvent dans la partie des écoles anglo-catholiques et ceux qui se trouvent dans la partie des écoles protestantes. C'est absurde!

Alors, il y a manque de cohérence dans la politique du gouvernement, un manque de clarté.

M. CARDINAL: Vous ne croyez pas, justement, M. Peacock, qu'à l'occasion du projet de loi no 28, ce n'est pas le code du travail qui devrait être amendé, mais que c'est le projet de loi no 28 qui devrait être clair sur la question. Cela ne concerne que l'Ile de Montréal.

M. PEACOCK: Le projet de loi ne peut faire que définir l'employeur et l'on fait cela.

M. CARDINAL: Qu'on aille plus loin. Qu'on dise dans le projet de loi no 28 non seulement qui sera l'employeur, mais comment se régleront, à l'occasion de l'abolition des commissions existantes et la création de nouvelles commissions, d'un conseil métropolitain, les conflits, enfin ce que j'appelle des conflits syndicaux, c'est un terme générique, qu'on le dise, qu'on ne réfère pas au code du travail.

M. PEACOCK: Vous ne pouvez pas faire un amendement au bill 28 pour régler cette affaire si c'est en contradiction avec le code du travail, parce que ça fait partie de la loi de la province.

M. CARDINAL: Ah oui! Vous le pouvez.

M. GOLDBLOOM: Je m'excuse, si le député de Bagot me permet. Mais ce n'est pas à M. Peacock de nous dire ce que le gouvernement peut faire et ne peut pas faire. Le gouvernement, si l'Assemblée nationale est consentante, peut justement faire avec le projet de loi no 28 ce qu'il croit nécessaire de faire. Et je me permets de dire aussi que je crois que même si mon collègue, le ministre de l'Education, était ici ce soir, et en outre, mes collègues de la Fonction publique et du Travail et de la Main-d'Oeuvre; il ne serait pas possible de fournir ce soir, séance tenante, une réponse à ce que M. Peacock nous demande, parce que justement c'est le conseil des ministres qui devra se prononcer et qui devra fournir la réponse.

Tout ce que M. Peacock et le député de Bagot ont dit a été enregistré et tout cela sera étudié par le ministre. Je m'en porte garant.

M. CARDINAL: M. le Président, si vous me permettez, je suis entièrement d'accord sur tout ce qu'a dit, au début, M. le ministre. Il a parfaitement raison, M. Peacock, du point de vue de l'Assemblée nationale, vous pouvez toujours par une loi, que ce soit le projet de loi no 28, amender d'autres lois, même si c'est dans d'autres domaines.

Je ne prends qu'un exemple, qui peut soulever des débats, le projet de loi no 63, qui parlait autant de la Loi du ministère de l'Immigration que de la Loi du ministère de l'Education.

L'Assemblée nationale dans ce domaine, je ne dis pas le gouvernement, je dis l'Assemblée nationale est toute puissante et peut, par n'importe quelle loi, à sa majorité, amender toute autre loi.

M. PEACOCK: J'ai mal compris. Je sais très bien que l'Assemblée nationale est toute-puissante, mais elle peut être aussi illogique qu'elle veut.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voilà une observation pour le moins insolente. Tenez donc pour acquis, M. Peacock, que l'Assemblée nationale est toute-puissante, sans commentai-

res. Les suggestions que vous nous faites, nous en tiendrons compte dans la mesure où il nous sera possible de le faire et admettez une fois pour toutes qu'il y a des législateurs et que vous n'êtes pas ici pour nous donner des leçons.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: Le ministre a répondu tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, il y a dans la première partie du mémoire du Montreal Teachers Association, une longue partie qui porte sur la confessionnalité des écoles et même si je trouve valables, fort valables les idées que vous soulevez à propos de la multiconfessionnalité des écoles qui serait, sinon un objectif à court terme, très certainement à moyen terme pour les Québécois, vous avez eu cette phrase, vous avez dit à un moment donné: "La majorité des membres de notre association sont neutres". Ceci m'a posé une question, que je vous transmets à l'instant. Les commissions scolaires, par la loi 28, seront obligées d'offrir des écoles confessionnelles, c'est-à-dire catholiques ou protestantes et autres. Maintenant, elles seront aussi responsables de l'affectation des professeurs à l'intérieur de ces écoles.

Qu'est-ce qui va se produire chez les professeurs comme ceux que vous représentez, quand, par exemple, un professeur préférera être envoyé dans une école neutre mais que la commission scolaire lui demandera d'aller enseigner dans une école catholique ou dans une école protestante? Est-ce que vous seriez prêt à reconnaître le droit de l'enseignant à refuser d'aller dispenser sa science et son savoir dans une école dont il n'approuverait pas, ou la non-confessionnalité ou la confessionnalité, parce que ça peut être à l'inverse aussi? Les professeurs catholiques pourraient également refuser d'être affectés à une école neutre, demandant plutôt d'aller dans une école confessionnelle.

C'est la première fois que le problème me vient à l'esprit parce que, contrairement peut-être à ceux de l'Alliance ou de la CEQ, vous mentionnez qu'il existait chez vous une majorité neutre. Or, je ne crois pas que... enfin, dans certaines commissions scolaires, la majorité des écoles ne sera pas neutre. Il va se trouver des coins de l'île de Montréal où 60 à 65 pour cent des écoles seront catholiques, 15 à 20 pour cent protestantes et il en restera 15 à 20 pour cent neutres. Vous aurez des professeurs neutres qui enseigneront dans des écoles catholiques et des professeurs catholiques qui enseigneront dans des écoles neutres. Si je soulève ce problème c'est parce que les tenants de l'école confessionnelle que la commission a entendus depuis le début nous ont toujours défini l'école confessionnelle comme une école où existe une ambiance particulière. Et en définissant ambiance, on faisait évidemment allusion au corps professoral de l'endroit. On nous dit: Oui, actuellement, il y a des écoles confessionnelles, mais tout le monde sait que les professeurs y compris — il y en a un qui est venu nous dire ça — même les professeurs de cathéchèse ne croient pas en Dieu. C'est un reproche que les parents, tenants de l'école confessionnelle, faisaient. Qu'est-ce qui va arriver dans le système actuel, où la majorité des professeurs neutres seront affectés à différentes confessionnalités?

M. PEACOCK: Il y a deux problèmes, là; je crois qu'on doit faire une distinction, on doit être franc, on doit faire une distinction entre l'école catholique et l'école dite protestante, parce que ça fait bien longtemps que l'école protestante n'est qu'une école non catholique. Comme ça, on pourrait facilement les transformer en écoles multiconfessionnelles. Je rappelle que, je ne crois pas moi-même. Mais parce que notre mémoire suggère des écoles multiconfessionnelles pour tout le monde, et si les catholiques veulent une école purement catholique, ce serait illogique, j'ose le dire encore, de mettre les professeurs qui ne sont pas catholiques dans cette école, parce que ce n'est pas seulement le fait qu'il y a une croix sur le mur, mais que le professeur est catholique et quand je dis catholique, je veux dire bon catholique, catholique croyant et pratiquant. Ce serait logique dans un système confessionnel. J'espère qu'on fera faire cette distinction, pour qu'on ne puisse pas, qu'une commission ne puisse pas envoyer des professeurs qui ne sont pas catholiques dans des écoles catholiques. Mais la question en est encore de pratique, parce qu'il y a quand même trop de professeurs pour pas assez d'emplois. Si les professeurs catholiques sont assurés des postes dans des écoles catholiques, ils peuvent aussi venir dans nos écoles. Nous aurons alors des problèmes et des mécontentements, parce qu'il se peut fort bien que le surplus d'enseignants catholiques vont se trouver dans nos écoles, car il n'y a rien qui les en empêche. C'est encore un problème qui n'a pas été vraiment étudié assez longtemps, je crois.

M. CHARRON: Je ne veux quand même pas exagérer le problème. Je ne veux pas dire qu'il va y avoir conflit, que ça va être le cas majoritaire ou disons presque unanime de conflit entre la confessionnalité de l'école et la confessionnalité propre de l'enseignant. Mais j'ai l'impression que ce conflit-là va exister. Si, à certains endroits, les commissions scolaires, d'ailleurs en réponse aux demandes du comité confessionnel que la loi crée et en réponse aux demandes des comités d'écoles, se mettent à dire, en réponse par exemple, à des parents qui disent: Moi, j'ai choisi d'envoyer mon enfant à l'école catholique, il se trouve que la majorité

de ces enseignants, après l'expérience de quelques mois, sont de parfaits athées. Dites-le-moi, est-ce que j'ai une école confessionnelle, oui ou non? Et pour ce faire, on procédera peut être, c'est ma crainte, à un transfert de professeurs, mettant tous les neutres dans les écoles neutres et tous les catholiques... Mais, à ce moment là, est-ce qu'on n'affecte pas la qualité de l'enseignement? Il me semble que la raison fondamentale pour mettre un professeur dans une école plutôt que dans une autre, c'est sa qualité professionnelle et le fait qu'il doit desservir un plus grand nombre d'étudiants.

Mais parce que ce professeur aurait une confessionnalité particulière, on le placerait dans une petite école de 30 élèves par exemple, qui seraient de sa confession, pendant que l'énorme polyvalente neutre ne recevrait que des professeurs neutres, peut-être moins qualifiés, et que 180 élèves recevraient un cours moins valable qu'une trentaine à côté, à cause de la confessionnalité des enseignants.

Je ne dis pas que ce sera un problème général, mais pour la première fois, — on est ici à la commission pour ça, pour fouiller le bill — je m'aperçois que cette disposition-là va peut-être créer des conflits. Je ne les souhaite pas mais ils sont latents au projet de loi.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: M. Peacock, lorsque vous mentionnez que, dans une école catholique, il ne devrait y avoir que de fervents chrétiens, est-ce que, dans votre esprit, vous voulez dire que ça irait jusqu'au fait qu'un professeur de mathématiques, de physique, de chimie ou de sciences devrait être un fervent catholique?

M. PEACOCK: Vous devez poser la question à d'autres personnes, je ne suis pas catholique, je ne suis même pas chrétien. Nous proposons des écoles multiconfessionnelles pour les raisons qu'on vous donne, mais je suppose que je comprends l'idée d'une école catholique, je dis catholique, pas protestante.

L'idée d'une école catholique, ça ne veut pas seulement dire qu'on lui donne le nom d'un saint, on dit que c'est catholique et qu'il y a des crucifix sur les murs. On croit qu'on crée une ambiance catholique dans cette école, — et le député de Chicoutimi a bien expliqué cette affaire la dernière fois — et que le professeur de mathématiques catholique inspire ses élèves par ses relations personnelles. Il ne peut pas enseigner les mathématiques catholiques dans ce sens pur qu'il donne l'instruction mais sa personnalité influence l'enfant.

Alors, un catholique qui veut une école catholique veut que ses enfants soient exposés aux bons catholiques, dont la formation, l'idée de la vie quoi, le caractère est catholique. C'est quelque chose que je ne comprends pas. Mais, M. Pearson, vous posez la question au mauvais endroit parce que je n'y crois pas. Je comprends, mais je ne propose pas ça.

M. PEARSON: Non, c'était tout simplement pour saisir à peu près la définition que vous pouviez donner. Autrement dit, ça veut dire que dans ses rapports extraprofessionnels, par exemple, un professeur de mathématiques, dans ses relations en dehors de son cours de mathématiques, dans votre esprit, ça devrait être quelqu'un qui serait un bon catholique pour enseigner dans une école catholique. Cela irait jusque là.

M. PEACOCK: Je vais plus loin, je dirais que, si ce n'est pas ça, ce n'est pas la peine d'avoir des écoles catholiques.

M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Peacock, représentant de la Montreal Teachers Association, de ses représentations et j'en prends bonne note. M. le ministre.

M. CARDINAL: Ajournement au 16 novembre à 10 heures.

M. CHARRON: Le 16 novembre.

M. LE PRESIDENT: La séance ajourne ses délibérations au 16 novembre à 10 heures.

M. GOLDBLOOM: Les séances sont prévues pour les 16, 17 et 18.

M. LE PRESIDENT: Les 16, 17 et 18. (Fin de la séance: 10 h 20)

ANNEXE

MEMOIRE PRESENTE PAR L'ASSOCIATION DES CADRES DE LA CECM

A LA COMMISSION PARLEMENTAIRE DE L'EDUCATION

DE L'ASSEMBLEE NATIONALE DU QUEBEC

PREAMBULE

L'Association des cadres de la C.E.C.M. se fait un devoir de venir présenter à la commission parlementaire de l'Education son mémoire sur le projet de loi no 28.

Consciente des profondes répercussions que l'adoption de ce projet de loi aura, à court et à long termes, tant sur le système lui-même dans son ensemble que sur tous les cadres et professionnels de la C.E.C.M., l'association a voulu présenter un mémoire qui soit vraiment l'expression de la pensée de ses membres à l'égard de la restructuration scolaire sur l'île de Montréal. A cette fin, de nombreuses consultations ont été faites, divers sous-comités d'études ont été formés et plusieurs recherches ont été entreprises permettant de recueillir l'opinion éclairée et mûrie de l'ensemble des cadres et professionnels de la CE.C.M. En outre, les options de base du présent mémoire ont été approuvées au cours d'une longue assemblée générale de nos membres. La présentation d'un tel mémoire devrait retenir l'attention de la commission parlementaire non seulement parce que les recommandations qu'il contient ont été étudiées et formulées par des pédagogues et des administrateurs oeuvrant quotidiennement dans le secteur montréalais de l'éducation et qui ont voulu ainsi apporter un peu de leur compétence et de leur expérience à la solution tant attendue du problème de la restructuration scolaire de l'île de Montréal.

La préparation de ce mémoire a cependant été marquée par une contrainte lourde à supporter: celle du temps. Nous aurions aimé pouvoir consacrer plus de temps à l'étude de cette question. Certes, les cadres de la C.E.C.M. désirent qu'une décision soit enfin prise en regard de la restructuration scolaire de l'île de Montréal dont on parle dans le milieu montréalais depuis plusieurs années. Mais, c'est peut-être au moment de la prise d'une décision si importante et si lourde de conséquence pour l'avenir de l'éducation à Montréal qu'il faut éviter une précipitation hâtive dont tout le monde regretterait les effets. Notre association avait demandé un délai pour comparaître devant la Commission parlementaire de l'éducation sur ce projet de loi. Nous désirions par ce geste faire part de notre vive inquiétude de ne pouvoir faire participer démocratiquement dans une période si courte nos six cents membres à l'étude approfondie d'un projet de loi si important pour eux au point de vue professionnel. Même si la question à l'étude n'est pas nouvelle, il reste que l'heure de la décision est grave et retarder de quelque temps l'adoption du projet de loi no 28 nous paraissait normal en regard des années au cours desquelles ce sujet a été à l'étude. L'impossibilité de retarder les séances de la commission parlementaire nous a contraints de présenter un document que nous aurions voulu plus complet et illustrant mieux par plus de données factuelles le bien fondé de nos recommandations. Quoi qu'il en soit, c'est en vue de contribuer professionnellement à l'élaboration d'un système scolaire efficace et répondant aux besoins de l'éducation montréalaise que l'Association des Cadres de la C.E.CM. soumet à l'attention des membres de la commission parlementaire de l'Education l'opinion de ses membres en regard de la restructuration scolaire de l'île de Montréal. Nous restons, par ailleurs, à votre entière disposition pour fournir divers renseignements ou données supplémentaires jugés nécessaires pour appuyer nos recommandations contenues dans ce mémoire.

Dans le présent mémoire, nous exposons dans les deux premiers chapitres notre thèse principale suivant laquelle l'établissement d'un système scolaire unifié pour l'île de Montréal doit s'effectuer par le processus d'une intégration graduelle, laquelle pourrait être mise en action dans le plus bref délai avec la création d'un conseil central relativement fort qui constituerait l'instrument clé pour la mise en place d'un réseau de commissions scolaires unifiées pour au plus tard le 1er juillet 1975.

Dans un troisième chapitre, nous traitons des droits et intérêts de nos membres en regard des profonds changements qu'amènera la restructuration scolaire. Un quatrième chapitre apporte d'autres considérations sur des aspects particuliers du projet de loi no 28 qui devraient aussi retenir l'attention du législateur. Enfin, vous trouverez dans le dernier chapitre l'ensemble des recommandations et amendements proposés par notre association.

POUR UN SYSTEME SCOLAIRE UNIFIE

L'Association des cadres de la C.E.C.M. endosse pleinement le principe d'un système scolaire unifié pour l'île de Montréal. C'est en fonction d'une conception de la démocratie tenant compte, non pas uniquement des seuls droits de l'individu mais également des principales dimensions collectives ou des groupes d'appartenance qui conditionnent l'évolution de l'individu et le caractérisent dans toute sa personnalité, que nous en sommes venus à reconnaître cette fonction majeure que le bill 28 fait assumer au système scolaire montréalais.

En effet, jusqu'à présent, le système scolaire québécois a remis aux collectivités linguistiques (francophones et anglophones) et confessionnelles (catholiques et protestants) la responsabilité de transmettre aux jeunes à la fois les connaissances, les valeurs et la vision de la société dans laquelle ils évoluent. Cette organisation scolaire n'a certes pas contribué à un développement optimal d'une communauté culturelle et sociale. Objectivement, on se retrouve aujourd'hui, à Montréal plus particulièrement, avec deux cultures, deux visions du monde, deux solitudes qui cohabitent sans réellement se rejoindre. Parce que la société québécoise n'a pu assumer directement — dans sa totalité et sa diversité — la responsabilité de l'école, celle-ci a été utilisée par d'autres groupes (les collectivités canadienne-française et canadienne-anglaise) à leurs fins spécifiques. Le système scolaire a servi d'instrument d'organisation et de développement social pour d'autres groupes que la société québécoise comme telle, dans son ensemble.

Certes, nous ne pouvons attribuer à l'école la responsabilité exclusive de cette situation, dont les diverses conséquences (distribution inégale des ressources scolaires, assimilation massive des immigrants, minorisation accélérée de la majorité francophone, rupture entre l'école de la majorité et le milieu de travail, etc.) ont été décrites et analysées en long et en large. Mais, par ailleurs, nous considérons qu'une réforme en profondeur du système scolaire montréalais accompagnée simultanément d'autres mesures, comme par exemple une politique des langues et de l'immigration, contribuera à mettre fin à l'existence de ces deux "solitudes" qui ne pourront continuer de s'ignorer longtemps sans entraîner des coûts sociaux majeurs pour l'une comme pour l'autre. Il n'est plus permis de laisser la société québécoise évoluer et se transformer spontanément au gré des dynamismes particuliers. La collectivité québécoise se doit, dans quelque contexte constitutionnel que ce soit, de renforcer ses caractéristiques fondamentales à l'aide du seul instrument collectif légitime qu'est l'Etat. La démocratisation scolaire, à notre avis, ne peut être recherchée en tenant compte uniquement des libertés individuelles qu'elle favoriserait, mais en tenant un aussi bon compte des dimensions collectives fondamentales à côté desquelles aucun individu, à Montréal comme dans tout le Québec, ne peut passer dans le développement de sa personnalité.

Cette question fondamentale — à savoir l'orientation de la société québécoise — la démocratie ne peut pas la trancher comme telle, par dessus la volonté des citoyens. La démocratie ne privilégie pas un type de la société à l'exclusion des autres, pas plus pour le Québec que pour d'autres sociétés. Elle ne vise qu'à permettre aux citoyens, à travers leurs élus et à l'aide de leur propre participation, de choisir leurs vraies options fondamentales.

Selon nous, la question fondamentale se pose ainsi: Voulons-nous une réforme scolaire à Montréal qui consolidera la situation actuelle ou voulons-nous une réforme scolaire à Montréal qui tendra vers l'instauration d'une société québécoise, où les principaux partenaires se définiront d'abord les uns par rapport aux autres plutôt qu'à l'exclusion les uns des autres, ou encore, par rapport à d'autres réalités extérieures à celles du Québec? En regard de cette question, nous affirmons qu'un système scolaire unifié pour l'Ile de Montréal, tel que proposé dans le bill 28, permettra aux francophones, anglophones et individus de toutes autres ethnies, qu'ils soient catholiques, protestants ou autres de s'engager dans un processus de construction d'une société québécoise originale.

La poursuite de cet objectif primordial nécessite, il va sans dire, un certain pragmatisme dans la recherche des moyens. L'unification constitue un défi à relever pour la société scolaire montréalaise; ce défi, elle ne pourra le relever qu'en tenant compte des réalités et des dynamismes actuellement existants.

Si nous reconnaissons que le principe d'un système scolaire unifié doit être mis en application le plus tôt possible pour l'île de Montréal, nous ne pouvons accepter par ailleurs qu'une contrainte législative nuise à la poursuite d'un tel objectif. Or, il nous apparaît que le projet de loi no 28, tel que rédigé, risque à cause d'une interprétation trop rigide de fausser le véritable esprit qui doit animer le processus graduel vers l'unification. Comme cadres de la plus importante commission scolaire du Canada, nous vivons quotidiennement les problèmes toujours de plus en

plus complexes de l'administration et de la bureaucratie scolaires. Nous avons connu et nous connaissons encore les difficultés pour adapter un système administratif qui réponde vraiment aux exigences de l'éducation d'aujourd'hui. Certes, une réforme des structures scolaires pour l'Ile de Montréal s'avère nécessaire et urgente, mais nous restons convaincus qu'une telle réforme sera véritablement effective dans la mesure où la loi qui l'inspire présente suffisamment de souplesse pour permettre aux individus et aux organismes en cause d'évoluer sans coercition comme sans délai excessif vers l'objectif poursuivi.

A cette fin, il nous apparaît que deux conditions essentielles doivent être absolument respectées pour atteindre la mise en commun de toutes les ressources du système scolaire de l'île un processus graduel mais dynamique conduisant à une intégration progressive et la mise en place d'un organisme central relativement fort exerçant un rôle de leadership auprès des dynamismes locaux actuellement présents dans le milieu scolaire. Cet organisme que nous identifions au conseil scolaire de l'île devrait être muni de pouvoirs lui permettant, tout en favorisant l'épanouissement des diverses cultures, d'orienter vers un objectif commun les forces actuellement agissantes en vue de constituer progressivement un milieu scolaire montréalais qui soit essentiellement le reflet d'une culture typiquement' québécoise. C'est dans un conseil scolaire unifié que se situe selon nous le point de départ d'un regroupement de toutes les ressources et de toutes les énergies du milieu scolaire de l'Ile de Montréal. C'est à partir d'un tel organisme, que les commissions scolaires actuellement existantes trouveront l'élan et l'appui indispensables pour entreprendre dans un climat de compréhension et de collaboration l'unification de leurs ressources culturelles et pédagogiques tout en favorisant l'épanouissement du génie propre de chacune des deux cultures.

En conclusion, l'Association des Cadres de la C.E.C.M., tout en endossant pleinement la mise en application le plus tôt possible du principe d'un système scolaire unifié, recommande par ailleurs au législateur d'user de réalisme et de souplesse et de permettre que dans un délai plus adéquat un processus graduel conduise à une intégration plus organique et moins artificielle.

POUR UNE INTEGRATION GRADUELLE (

SOUS LA RESPONSABILITE D'UN CONSEIL RELATIVEMENT FORT)

Tout en reconnaissant le principe d'un système scolaire unifié tel qu'exposé dans le chapitre précédent, l'Association des cadres de la C.E.C.M. est convaincue que cet objectif ne pourra être atteint que par une intégration graduelle.

Nous tenons dans ce chapitre, d'une part, à décrire les motifs qui nous amènent à croire à la nécessité d'une intégration progressive et, d'autre part, à expliciter comment, selon nous, un conseil central relativement fort peut être l'instrument premier dans la mise en marche du processus d'intégration.

RAISONS QUI JUSTIFIENT UNE INTEGRATION GRADUELLE

La mise en place d'un processus d'intégration graduelle nous parait justifiée pour les raisons suivantes: a) Le bon fonctionnement des écoles

Pour bien fonctionner, les écoles doivent s'appuyer sur de solides structures pédagogiques et administratives qui répondent à leurs besoins. Elles doivent trouver continuellement au sein du système dont elles font partie le ressourcement nécessaire à leur bon fonctionnement et à leur progrès. Une intégration trop brusque et trop hâtive aurait pour effet de provoquer des bouleversements qui, inévitablement, rebondiraient au niveau de l'école. b) Les exigences de la réforme pédagogique

La réforme pédagogique est à peine amorcée et elle seule nécessite déjà d'immenses efforts d'adaptation et de renouvellement. Le règlement no 7, que le ministère de l'Education vient d'édicter, crée les conditions et les cadres nécessaires pour mettre en marche une réforme pédagogique en profondeur. Une telle réforme requiert un changement dans les mentalités, les programmes, les méthodes, les horaires, etc... Ces changements doivent avoir pour effet de transformer complètement l'enseignement et l'école.

Il faut éviter de reléguer au troisième plan ou de noyer dans des préoccupations administratives ou structurales les efforts qui doivent être entrepris sans retard pour adapter la pédagogie aux exigences de l'éducation nouvelle. La réforme des structures ne peut primer sur la réforme pédagogique. Bien au contraire, ces deux réformes doivent se faire simultanément. Pour les personnes en place dans chaque classe, dans chaque école et dans chaque échelon administratif, il s'agit donc d'effectuer, non pas une simple évolution, mais une véritable mutation si l'on veut que les deux réformes, celle de la pédagogie comme celle des structures, aient une chance de réussir. c) Le respect des diversités réelles et des mentalités actuelles

Le défi de l'unification ne pourra être relevé que dans la mesure où l'on respectera les cheminements nécessaires qui permettront de mieux tenir compte des diversités réelles et des mentalités actuelles. Pour nous, un nouvel esprit doit s'instaurer où le travail se fera en commun dans le plus grand respect des uns et des autres. Des relations et une collaboration entre francophones et anglophones, entre catholiques, protestants et autres devront être constantes. Il faut éviter le danger de coercition et de conflits que des délais trop courts ou une précipitation hâtive risqueraient d'entrafner.

Le conseil scolaire de l'île devrait avoir cette constante préoccupation, tout en présidant à la mise en place du nouveau système, d'inciter les organismes locaux à travailler ensemble, dans le respect des diversités linguistiques et culturelles, à l'élaboration graduelle d'un système scolaire unifié. d) Le danger de ghettos

La solution globale proposée dans le projet de loi 28 (intégration d'un seul coup d'éléments si différents) risque de déclencher des mécanismes de défense considérables qui pourraient produire des effets contraires à ceux recherchés. Il faut éviter, entre autres, un risque très sérieux de balkanisation où des groupes minoritaires se sentant brimés dans leurs droits chercheraient à se regrouper et à constituer des blocs fermés sur eux-mêmes. Devant ce danger, nous croyons qu'une intégration graduelle soutenue par une autorité centrale respectant les droits de chacun sera la garantie d'une véritable unification de toutes les forces en présence. e) La nécessité d'une politique des langues et d'une politique de l'immigration

Le bill 28 suscite et suscitera de nombreuses incompréhensions, prises de position ou discussions parce qu'il ne s'appuie pas sur une politique linguistique gouvernementale appropriée.

Le processus de l'intégration graduelle vers un système scolaire unifié devrait permettre au gouvernement provinciel d'user du temps voulu pour élaborer, et même établir par législation au besoin, une politique des langues et une politique de l'immigration en vue de favoriser l'intégration harmonieuse des minorités au groupe majoritaire français et freiner l'anglicisation des Néo-Québécois.

Une politique adéquate des langues devrait reconnaître la place prioritaire qu'il faut faire au français dans le Québec et préciser, entre autres, les droits linguistiques au point de vue scolaire.

Des mesures n'affectant qu'une réforme des structures scolaires sont bien insuffisantes pour favoriser la priorité concrète du français. Il faudrait aussi généraliser un usage meilleur et plus large du français dans le monde du travail, la vie économique, la conduite des affaires publiques, la publicité, les loisirs, etc. L'élaboration de ces politiques devrait se faire simultanément avec la mise en place d'un système scolaire unifié. f) Besoin d'intégrer graduellement le personnel impliqué

La restructuration scolaire de l'île de Montréal touche directement dans leurs attributions et leurs fonctions un nombre impressionnant de fonctionnaires et d'employés qui oeuvrent actuellement dans les diverses commissions scolaires. Ce changement des structures entraînera inévitablement dans bon nombre de cas un réaménagement des fonctions et de nouvelles définitions de responsabilités. Nous

croyons qu'une tâche importante du conseil sera de fournir à tout le personnel impliqué les moyens requis et le temps nécessaire pour leur permettre de s'adapter dans des conditions normales aux changements qui seront amorcés. Les actions à entreprendre pour l'unification, tant au niveau du conseil qu'au niveau des commissions scolaires, devront être proposées au personnel impliqué avec beaucoup de souplesse et de flexibilité afin de s'assurer une participation volontaire et dynamique de tous dans l'élaboration et la mise en place du nouveau système. Cela suppose que seront prévus à l'intention de tout le personnel des programmes d'information, de formation et de recyclage pour permettre à chacun de s'intégrer harmonieusement dans le nouveau système et de remplir efficacement des fonctions nouvelles qu'il pourrait être amené à exercer. g) Le besoin d'informer les parents et le public

L'établissement d'un système scolaire unifié qui se veut démocratique et respectueux des particularités culturelles et religieuses de la communauté montréalaise ne pourra réussir qu'avec la participation active de tous les citoyens. Les parents, particulièrement, seront directement impliqués dans les mécanismes de participation et de consultation et auront un rôle important à jouer pour l'amélioration du système scolaire. Déjà, sur le territoire métropolitain, des efforts sont entrepris pour rapprocher les parents de la vie de l'école et en faire d'authentiques partenaires. Nous savons que les progrès sont lents et que la grande majorité des parents montréalais sont encore absents dans le domaine de l'éducation scolaire. Par ailleurs, l'élection des commissaires d'écoles constituent pour la grande partie de l'île de Montréal un processus démocratique nouveau. Quand nous savons déjà que dans le reste de la province existe un faible pourcentage d'électeurs aux élections des commissaires d'écoles, on peut penser que la première élection des commissaires d'écoles au suffrage universel sur l'île de Montréal nécessitera préalablement une campagne d'information et de sensibilisation auprès de tout le public concerné. L'implantation des comités d'écoles et des comités de parents devrait être une première étape dans un processus d'intégration graduelle pour permettre aux parents et au public de participer progressivement à l'établissement du système scolaire unifié.

Toutes ces raisons ainsi décrites justifient à elle seules que l'établissement d'un système scolaire unifié doive se faire de façon progressive, sans contrainte excessive ou coercition mais en tenant compte des réalités existantes et avec l'appui d'un organisme central qui pourra jouer tout au cours de cette opération un rôle de leadership, de soutien et, au besoin, d'arbitre.

Il— LE CONSEIL SCOLAIRE: UNE VERITABLE AUTORITE SCOLAIRE METROPOLITAINE_______________________

Nous croyons qu'en vue d'implanter graduellement un système scolaire unifié qui soit cohérent et efficace, le premier moteur de cette entreprise se situe au niveau du conseil scolaire. Aussi nous paraît-il plus approprié de donner dès le départ un caractère plus représentatif et des pouvoirs opérationnels à cet organisme clé qui aura pour tâche primordiale d'animer et de soutenir le mouvement vers l'intégration. Au lieu de préparer l'unification surtout par des plans et projets nécessairement à caractère plutôt théorique, nous croyons nécessaire que les éléments constituants s'engagent dans des expéreinces communes, graduellement plus nombreuses et plus complexes, et entreprennent par étapes des programmes communs tant à l'échelle de l'île qu'à l'échelle des territoires des futures commissions scolaires unifiées.

Dans cette optique, le conseil scolaire devrait être constitué, dès la sanction de la loi, de représentants désignés par les différentes commissions scolaires existantes, à l'instar de la formation du conseil exécutif de la Communauté urbaine de Montréal.

Le conseil, une fois formé, pourrait se mettre à la tâche et entreprendre l'établissement et l'exploitation de certains services communs pour toutes les commissions scolaires de l'île.

Nous croyons qu'à ce niveau une des premières tâches du conseil serait de s'attaquer au problème de la taxation et à celui du financement des commissions scolaires, et d'amorcer des solutions quant au rattrapage à effectuer dans les milieux défavorisés de l'île.

Egalement, le conseil pourrait mettre sur pied, selon les possibilités et les besoins prioritaires, des services communs pour toutes les commissions scolaires de l'île, comme par exemple: le contentieux, le transport, la planification, la construction, l'informatique, la recherche pédagogique appliquée, etc.

Simultanément à l'action à l'échelle de l'île, le conseil devrait inviter les commissions scolaires situées sur un même territoire à constituer des comités de travail (genre conseil provisoire tel que prévu dans le bill 27 pour le regroupement des commissions scolaires) qui pourraient, d'une part, entreprendre un inventaire de leurs ressources et soumettre au conseil leur plan d'intégration et, d'autre part, amorcer des programmes d'actions communes dans leur territoire, programmes qui cadreraient avec le plan général établi par le conseil.

Le conseil scolaire, vu ainsi comme l'instrument principal d'une intégration graduelle de toutes les forces en présence, sera une meilleure garantie que l'établissement d'un système scolaire unifié pourra se faire dans un climat de sérénité et de confiance avec la participation de tous les intéressés.

Dans cette optique, nous recommandons que le chapitre du bill 28 concernant les dispositions transitoires soit amendé dans son esprit et dans sa forme de telle façon que soit mis en place, dès la promulgation de la loi, un conseil permanent qui, tout en jouissant d'un délai plus raisonnable, soit muni de pouvoirs lui permettant, en plus d'élaborer des projets et des plans pour l'unification, de déclencher certaines opérations qui mettront en branle le processus d'une unification graduelle des diverses commissions scolaires.

Nous croyons que pour réaliser harmonieusement l'objectif de la commission scolaire unifiée, le conseil scolaire devrait être chargé de préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en conseil, au plus tard un an après sa création, un plan d'intégration graduelle comportant la mise en place et l'exploitation par étapes de services communs tant à l'échelle de l'île qu'à l'échelle de chacun des territoires des nouvelles commissions scolaires et prévoyant l'entrée en opération des nouvelles commissions scolaires pour au plus tard le 1er juillet 1975.

Par ailleurs, tout en reportant la date limite pour la formation des commissions scolaires au 1er juillet 1975, nous n'excluons pas la possibilité que les commissions scolaires unifiées puissent commencer à fonctionner à des dates différentes, ce qui permettrait ainsi une évolution progressive vers l'unification en respectant les particularités des divers groupes impliqués. Nous croyons également que dans ce processus d'intégration graduelle il ne faut pas exclure la possibilité pour le conseil d'être amené à reconsidérer la carte scolaire telle que prévue actuellement dans le projet de loi no 28.

Ces diverses considérations nous amènent à insister pour que le législateur laisse au conseil beaucoup de souplesse dans son fonctionnement et lui permette de s'ajuster constamment aux réalités auxquelles il aura à faire face. Il faudrait aussi prévoir dans la loi, comme cela existe d'ailleurs pour la communauté urbaine de Montréal, que tout délai accordé par la présente loi au conseil scolaire de l'île pour adopter une mesure ou poser un geste autre que la mise en place pour le 1er juillet 1975 des nouvelles commissions scolaires, puisse être prorogé pour une période d'au plus un an par le lieutenant-gouverneur en conseil à la demande du conseil scolaire.

En conclusion, l'intégration graduelle, processus indispensable pour en arriver à établir avec succès un système scolaire unifié pour l'île de Montréal, nécessite une modification du bill 28 de telle façon que les dispositions de la loi assurent la mise en place de l'organisme clé et le munissent de moyens souples et d'instruments solides pour exercer, dans un délai suffisant, la tâche difficile qui lui revient.

LES DROITS ET INTERETS DE NOS MEMBRES

La restructuration du système scolaire de l'île de Montréal touchera directement ou indirectement un grand nombre de personnes. En particulier, le changement des structures entraînera inévitablement, pour la plupart des cadres et professionnels qui oeuvrent dans les diverses commissions scolaires, un réaménagement des fonctions et une nouvelle définition de responsabilités, quand ce ne sera pas un changement de lieu de travail ou une insertion dans une nouvelle équipe de gestion. Des changements aussi nombreux et aussi radicaux au cours d'une période de transition relativement brève ne seront pas sans faire naître chez tout le personnel impliqué de sérieuses tensions requérant de chacun un fort degré de tolérance à l'anxiété.

Pour éviter que ne se développent des mécanismes de défense considérables et une résistance au changement qui risqueraient de compromettre le succès de cette vaste réorganisation des structures, nous croyons qu'une des tâches importantes du conseil (comme des autorités de chacune des commissions scolaires existantes ou en voie de formation) sera de fournir à tout le personnel impliqué les moyens requis et le temps nécessaire pour lui permettre de s'adapter aux nouvelles fonctions et aux nouvelles conditions.

Pour permettre une harmonieuse intégration de tous les fonctionnaires et employés dans les nouvelles structures (et en particulier des cadres et professionnels que notre association représente), voici quelques-unes des conditions qui devront être respectées. Certaines de ces conditions devraient être garanties par des dispositions du projet de loi lui-même, alors que les autres devraient faire partie de tout programme d'intégration du personnel qui vise à respecter les droits des personnes impliquées. — Le projet de loi devrait garantir encore plus clairement la sécurité d'emploi de tous les cadres, professionnels, enseignants et autres employés des commissions scolaires existantes. Une telle garantie paraît d'autant plus nécessaire dans le cas des cadres scolaires que ceux-ci n'ont pas la protection minimum accordée aux salariés par le code du travail ou par la présence d'un syndicat pour faire valoir leurs droits. — Chacun devrait être assuré d'occuper soit des fonctions identiques ou similaires à celles occupées antérieurement à la restructuration, soit de se voir offrir de nouvelles fonctions qui tiennent compte de ses goûts et aptitudes et de sa capacité de réadaptation ou de son potentiel de développement. — Des cours de formation et de recyclage (in-service training) et des occasions d'apprentissage devraient faciliter l'adaptation à leurs nouvelles tâches de tous ceux affectés par des changements de fonctions. Là où la chose sera possible, le transfert à de nouvelles fonctions devrait se faire graduellement ou par étapes. — Des mécanismes de revision devraient permettre à tout cadre ou autre fonctionnaire qui se sent lésé par la réaffectation qu'on lui impose de faire valoir son point de vue et assurer ainsi une meilleure équité dans le plan d'intégration du personnel. — Des mécanismes de consultation avec des représentants des cadres et de chacun des groupes d'employés concernés devraient permettre de développer une procédure appropriée pour le transfert et la réaffectation des différentes catégories de personnel et, notamment, déterminer certains critères pour la rétention ou le transfert de cadres ou autres fonctionnaires, d'une fonction à une autre, ou d'une commission scolaire à une autre. — L'élaboration du plan d'intégration ou la répartition des nouvelles fonctions devrait se faire avec la participation active et dynamique des cadres ou fonctionnaires impliqués, à un point tel que par cette participation les personnes se sentent vraiment engagées dans le processus de changement et développent ainsi une attitude positive face aux nombreuses transformations que la restructuration impose. — Les nouvelles tâches, responsabilités ou fonctions de chacun devraient être décrites aussi clairement que possible pour réduire les risques de confusion et les descriptions de tâches devraient être revisées fréquemment pour s'assurer qu'elles reflètent bien la situation du moment et qu'elles répondent bien aux besoins changeants d'un système en évolution. Egalement un processus adéquat d'évaluation des tâches devrait déceler rapidement la nécessité de reviser (en moins ou en plus) le contenu des tâches ou de réévaluer les traitements y attachés.

C'est consciente des nombreuses implications des réformes structurales proposées dans le projet de loi 28 pour le statut et le développement professionnel de ses membres, que l'Association des cadres de la C.E.C.M. se déclare prête à collaborer pleinement avec les autorités concernant l'élaboration et la mise en place des nouvelles structures de gestion scolaire.

AUTRES PREOCCUPATIONS GENERALES

La présente section de notre mémoire vise à développer quelques thèmes ayant trait à d'autres préoccupations générales touchant le projet de loi no 28: la démocratisation, les contrôles gouvernementaux, la confessionnalité et le rôle du conseil en matière pédagogique.

La démocratisation

Il va s'en dire que l'Association des cadres de la CECM, tout en souscrivant au principe d'un système scolaire unifié, tient à préserver le caractère démocratique que devront revêtir les nouvelles structures administratives scolaires. Nous reconnaissons que le projet de loi no 28, dans son esprit, manifeste un souci certain de démocratisation du système scolaire montréalais. Ainsi, il est heureux de pouvoir constater que tous les citoyens de l'île de Montréal pourront enfin élire leurs commissaires d'écoles. Il est heureux également que la loi reconnaisse que les parents puissent devenir des partenaires dans un système public d'éducation et que des mécanismes de consultation aient été prévus pour leur permettre de mieux jouer le rôle qui leur revient en éducation scolaire. Toutefois, la démocratie ne se borne pas exclusivement à l'élection de ceux à qui on confie des responsabilités. Il faut en plus que ces personnes élues soient munies de véritables pouvoirs qu'elles doivent exercer sans des ingérances ou des contrôles excessifs ou inutiles. A cet égard, nous croyons que le gouvernement fausse le processus démocratique par ses approbations et ses contrôles fréquents dans toutes les prises de décisions importantes de même que par la nomination de personnes de son choix à des postes clés, tel que les dispositions présentes du projet de loi no 28 l'y autorisent.

Tout en reconnaissant que l'Etat constitue l'autorité première en matière d'éducation publique nous croyons que le système scolaire montréalais ne pourra être qualifié de démocratique que si l'on procède à une véritable délégation de pouvoirs permettant à chaque organisme d'exercer pleinement ses responsabilités. C'est dans cet esprit que nous formulons plus loin (chapitre V) divers amendements à la loi concernant les comités d'écoles, les commissions scolaires et le conseil. Ces amendements proposés amélioreront le processus démocratique du système scolaire montréalais et permettront l'établissement d'une véritable décentralisation devenue indispensable pour permettre aux organismes locaux de répondre aux besoins et exigences de leur clientèle respective.

En regard de la démocratisation, nous voudrions souligner un point particulier au sujet de la représentativité des membres provisoires du conseil. L'article 9 des dispositions transitoires prévoit la nomination de treize membres au conseil. Nous croyons que ces treize membres devraient être désignés par et parmi les commissaires des commissions scolaires existantes et non par le gouvernement. Nous suggérons en plus pour des motifs explicités plus loin que la représentation des membres du conseil soit déterminée de la façon suivante : a) six (6) personnes choisies par et parmi les membres de la Commission des écoles catholiques de Montréal; b) deux (2) personnes choisies par et parmi les membres du Bureau métropolitain des écoles protestantes de Montréal; c) quatre (4) personnes choisies par et parmi les membres des autres commissions scolaires catholiques existantes; d) une (1) personne choisie par et parmi les membres des commissions scolaires protestantes existantes autres que celles qui sont soumises à l'autorité du Bureau métropolitain des écoles de Montréal.

Ce mode de répartition pour la désignation des membres du conseil permettrait une représentation proportionnelle plus équitable par rapport aux populations scolaires francophones et anglophones, catholiques et protestantes. De plus, il amènerait une représentation plus juste des commissions scolaires catholiques autres que la Commission des écoles catholiques de Montréal, lesquelles présentent des particularismes variés dus à leur clientèle plus hétérogène (catholique française ou anglaise), leur milieu socio-économique, leurs structures administratives différentes, leur situation géographique etc.

Le tableau comparatif suivant (page 35) démontre de façon plus explicite le bien fondé de notre recommandation.

B — Les contrôles gouvernementaux

Dans un même ordre d'idées, nous formulons de sérieuses réserves quant aux nombreux contrôles gouvernementaux prévus dans le texte de loi. Certaines de ses interventions (déplacement du siège social du conseil, décret pour un recensement) sont occasionnelles et ne constituent pas une entrave. D'autres (établissement des honoraires des membres du conseil, approbation des budgets) sont vraiment imperatives et leur utilité n'est pas discutée. Par ailleurs, certaines autres

interventions touchent directement les opérations courantes du conseil et des commissions scolaires. Il s'agit particulièrement de nombreuses décisions administratives relatives aux emprunts, aux transactions immobilières, aux constructions, aux dépenses d'entretien, d'amélioration et de rénovation et aux diverses ententes et conventions relatives à l'implantation et à la mise en oeuvre de projets communautaires. L'administration d'un système scolaire unifié à l'échelle de l'île de Montréal se doit, pour être efficace, d'user de pouvoirs assez étendus pour être en mesure de répondre adéquatement aux besoins des divers organismes socio-économiques du milieu montréalais.

De plus, la complexité du système administratif, la lourdeur et la lenteur du fonctionnarisme et de la bureaucratie inhérentes aux grands organismes rendent encore plus nécessaire un réel partage des décisions.

Un manque de latitude dans l'exercice des pouvoirs risque de paralyser le fonctionnement du système et d'inhiber les énergies mises en place. Nous recommandons dans la section suivante de notre mémoire divers amendements qui éliminent ou restreignent certains contrôles gouvernementaux que nous avons jugés excessifs.

C — La confessionnalité

En regard de la confessionnalité, nous souscrivons entièrement à l'établissement de structures administratives non confessionnelles telles que prévues dans le projet de loi no 28. Nous reconnaissons également le bien fondé d'offrir au milieu scolaire certaines garanties confessionnelles qui assureront le respect des diverses options religieuses. Nous souhaiterions cependant que pour garantir l'option religieuse des non catholiques et des non protestants, le législateur introduise les mêmes mécanismes qui ont été prévus pour les catholiques et les protestants.

Par ailleurs, selon un principe suivant lequel une école publique doit aujourd'hui, dans un contexte oecuménique, accepter tous les enfants quelle que soit leur option religieuse, nous sommes portés à croire que la population serait prête à accepter des écoles non étiquetées sur le plan confessionnel mais qui, toutefois, respecteraient les options religieuses de chaque individu. A cet égard, nous recommandons au législateur de prévoir dans la loi, dans la mesure où il se serait assuré que la population le désire, une possibilité de regrouper les enfants selon la langue dans des écoles multi-confessionnelles.

D — Rôle du conseil en matière pédagogique

En matière pédagogique, le Ministère de l'éducation a comme rôle principal à l'échelle de la province d'élaborer les grandes politiques, d'établir la planification à long terme, de concevoir les programmes et de coordonner les initiatives existantes.

Au niveau local, la commission scolaire a principalement un rôle d'exécution et d'organisation. C'est à elle que revient la responsabilité d'appliquer les politiques pédagogiques en les adaptant aux besoins et possibilités du milieu.

Avec l'établissement sur l'île de Montréal d'un système scolaire unifié, nous croyons qu'un conseil scolaire, qui constitue un palier intermédiaire entre le ministère et les commissions scolaires, devrait exercer dans certains domaines pédagogiques un rôle de planification, de coordination et de service pour les commissions scolaires.

Cette fonction particulière que nous attribuons au conseil devrait en être une d'expertise plutôt que d'autorité de type hiérarchique.

A cette fin, nous recommandons, pour des facteurs d'efficacité et de rentabilité, que le conseil scolaire puisse mettre sur pied certains services pédagogiques.

Nous songeons, entre autres, à la recherche pédagogique appliquée dont les expertises pourraient être faites en collaboration avec les commissions scolaires, à l'éducation de l'enfance inadaptée dont les besoins divers nécessitent une variété de services hautement spécialisés, et également à l'éducation permanente afin de permettre une meilleure planification et utilisation des ressources pour certaines clientèles adultes.

Cette mise en commun des initiatives et ressources pédagogiques au niveau de l'île aurait pour effet de mieux servir l'enseignement et d'accélérer les progrès dans la réforme d'éducation.

NOS RECOMMANDATIONS ET LES AMENDEMENTS PROPOSES

Nous regroupons dans cette section nos recommandations et les amendements proposés en suivant les thèmes développés dans les chapitres précédents.

I- PRINCIPALES POSITIONS ET RECOMMANDATIONS 1 — Nous endossons pleinement le principe d'un système scolaire unifié pour l'île de Montréal. 2 — Nous croyons cependant que seul un processus dynamique d'intégration graduelle respectant davantage la capacité d'évolution du milieu permettra d'établir avec succès un système scolaire unifié sur l'île de Montréal. 3 — Nous recommandons que l'on donne dès le départ au Conseil scolaire un caractère plus représentatif et des pouvoirs opérationnels pour lui permettre d'animer et soutenir l'implantation graduelle des nouvelles commissions scolaires unifiées. 4 — Nous recommandons que pour réaliser harmonieusement l'objectif de la commission scolaire unifiée, le conseil scolaire soit chargé de préparer et de soumettre au lieutenant-gouverneur en conseil, au plus tard un an après sa création, un plan d'intégration graduelle comportant la mise en place et l'exploitation par étapes de services communs tant de l'échelle de l'île qu'à l'échelle de chacun des territoires des nouvelles commissions scolaires, et prévoyant l'entrée en opération des nouvelles commissions scolaires pour au plus tard le 1er juillet 1975. 5 — Nous recommandons que les commissions scolaires existantes situées sur chacun des territoires prévus dans le plan d'intégration constituent des comités de travail genre "conseil provisoire" tel que défini dans la loi 27 pour le regroupement des commissions scolaires à l'extérieur de l'île de Montréal. 6 — Nous croyons que le conseil scolaire, dans l'élaboration de son plan d'intégration, ne devrait pas être lié par la carte scolaire telle que prévue actuellement dans le projet de loi 28. 7 — Nous recommandons que sans plus de délai le gouvernement élabore et établisse, par législation au besoin, une politique des langues reconnaissant la place prioritaire qu'il faut faire au français dans le Québec et précisant, entre autres, les droits linguistiques au plan scolaire. 8 — Nous recommandons que maints contrôles gouvernementaux sur les opérations courantes tant du conseil que des commissions scolaires soient éliminés ou du moins grandement restreints. 9 — Nous croyons qu'un des rôles principaux du conseil scolaire sera la mise en commun des ressources et leur redistribution équitable non simplement sur une base "per capita" mais aussi en fonction des besoins réels des divers milieux. 10 — Nous recommandons que le projet de loi no 28 garantisse plus clairement la sécurité d'emploi de tous les cadres, professionnels, enseignants et autres employés des commissions scolaires existantes. 11 — Nous recommandons que des programmes d'information, de formation et de recyclage ("in-service training") soient organisés pour permettre à tous les cadres, fonctionnaires et autres employés affectés à de nouvelles tâches de mieux s'adapter aux conditions nouvelles de leurs fonctions.

Il— AMENDEMENTS PROPOSES A — En regard de la démocratisation a) Le comité d'école

En vue d'enrichir les échanges entre les parents et l'école, nous recommandons au sujet de la composition du comité d'école, que l'article 69 du bill 27 soit modifié afin de permettre une meilleure représentation des enseignants dans les écoles où le nombre de professeurs est élevé.

En vue de stimuler la participation des professeurs, nous recommandons que l'article 66 du bill 27 soit modifié pour accorder le droit de vote aux professeurs.

b) le comité de parents

En vue d'éviter un trop grand nombre de membres au comité de parents et en vue d'assurer une représentation équitable des comités d'écoles, nous recommandons que le projet de loi no 28 prévoie: — que les comités de parents soient composés de quinze membres, chaque membre étant désigné par les présidents des comités d'écoles d'un quartier.

En vue de rendre le rôle du comité de parents encore plus significatif, nous recommandons d'ajouter la fonction suivante à celles déjà énumérées à l'article 68 de la Loi de l'instruction publique: — avant l'adoption du budget de la commission, être consulté par celle-ci sur les grandes orientations et les priorités du budget. c) les commissions scolaires

En vue d'éviter la possibilité de manipulation dans le découpage des quartiers par les élus et d'éviter de politiser les commissions scolaires sur des enjeux non éducatifs, nous recommandons de modifier l'article 584 de la façon suivante: — que toute modification au découpage des quartiers établi par la commission scolaire soit soumis à l'approbation du Conseil scolaire.

En vue d'éviter que la rotation par tiers ne favorise que l'apparition de débats locaux, en vue d'éviter que la population soit en constante période électorale et en vue d'assurer une plus grande stabilité dans l'équipe des commissaires, nous recommandons de modifier l'article 585 de la façon suivante : — que les commissaires soient élus simultanément pour un terme de trois ans.

Conséquemment à l'amendement proposé ci-haut, nous recommandons d'amender l'article 583 de la façon suivante: — que les commissaires nommés pour représenter les minorités aient un mandat de trois ans.

En vue de garantir un vote universel et de réduire certaines inégalités dues à la propriété foncière, nous recommandons: — que tous les électeurs, locataires ou propriétaires, n'aient qu'un seul droit de vote par municipalité scolaire. d) le conseil scolaire

Au sujet de la formation du conseil scolaire et en vue de permettre une représentation démocratique, nous recommandons de modifier l'article 9 des dispositions transitoires de la façon suivante : — que le conseil scolaire soit composé de treize membres désignés par et parmi les commissaires des commissions scolaires existantes et cela de la façon suivante: — six (6) personnes choisies par et parmi les membres de la Commission des écoles catholiques de Montréal — deux (2) personnes choisies par et parmi les membres du Bureau métropolitain des écoles protestantes de Montréal. — quatre (4) personnes choisies par et parmi les membres des autres commissions scolaires catholiques existantes — une (1) personne choisie par et parmi les membres des commissions scolaires protestantes existantes autres que celles qui sont soumises à l'autorité du Bureau métropolitain des écoles protestantes de Montréal.

En vue d'établir une concordance entre le mandat des membres du conseil élus par leur commission scolaire et celui de ceux nommés par le Gouvernement, advenant que le gouvernement persiste dans son intention d'en désigner, nous recommandons de modifier l'article 603 de la façon suivante: — que les membres du conseil devant être nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil aient un mandat de trois ans.

Afin d'assurer que les membres du Conseil représentant la C.E.C.M. auront une connaissance suffisante de son fonctionnement, nous recommandons: — qu'au plus deux (2) des quatre (4) nouveaux commissaires de la C.E.C.M., prévus à l'article 10 des dispositions transitoires, puissent être nommés au conseil.

Considérant que diverses mesures assurent déjà au ministère un contrôle suffisant sur la structure proposée comme celles relatives aux nombreuses décisions importantes devant être soumises à l'approbation du conseil des ministres ou celles concernant les nombreuses normes ministérielles actuellement existantes, nous recommandons d'amender l'article 618 de la façon suivante: — que le président et le vice-président soient choisis parmi et par les membres du conseil. B- AMENDEMENTS EN REGARD DES CONTROLES GOUVERNEMENTAUX ARTICLE 588 — En regard du paragraphe (c), que l'approbation du ministre ne soit requise que si la durée du bail excède 5 ans ou si le loyer annuel excède $250,000.00. — En regard de la transformation des immeubles (réaménagement et/ou rénovation), que l'approbation du Ministre ne soit requise que si le coût excède $250,000.00. — En regard de l'aliénation de biens-meubles et immeubles, que l'approbation du ministre ne soit requise que dans les cas ou la valeur excède $50,000.00. — En regard de la démolition d'immeubles, que l'approbation du ministre ne soit requise que si le coût excède $100,000.00.

ARTICLES 592 et 616 — En regard des conventions et ententes relevant des commissions scolaires en vertu de l'article 226, que l'intervention du ministre ne soit requise, en supplément de celle du conseil, que si le coût excède $250,000.00. — En regard des conventions et ententes entre des commissions scolaires en vertu de l'article 496, que l'approbation du ministre, en supplément de celle du conseil, ne soit requise que dans les cas concernant les institutions d'enseignement privées si le coût excède $250,000.00. — En regard des ententes et conventions entre les Commissions scolaires et le conseil concernant le fonctionnement normal des commissions scolaires, que l'intervention du ministre ne soit requise que pour l'arbitrage de conflits découlant de l'application desdites ententes ou conventions. ARTICLES 606 et 624 — En regard des règlements du conseil applicables aux commissions scolaires, que le conseil ait pleine autorité pour adopter tous les règlements; mais en cas de conflits de juridiction entre le Conseil et les commissions scolaires, que le ministre intervienne pour régler le litige. — En regard du règlement créant différents services et établissant leur mandat, que l'intervention du lieutenant-gouverneur en conseil ne soit requise que dans l'arbitrage des conflits de juridiction.

ARTICLE 607 — Que l'autorisation du ministre ne soit pas requise concernant le paragraphe (g) relatif au pouvoir d'édicter des règlements pour sa régie interne. — En regard des coûts relatifs aux transformations d'immeubles et aux baux de location, que l'approbation du ministre ne soit requise que dans les cas où la valeur excède $250,000.00. — En regard de la durée d'un bail de location, que l'approbation du ministre ne soit requise que si cette durée excède 5 ans.

ARTICLE 617 — Que les règlements du conseil concernant les pouvoirs et devoirs du comité exécutif ne relèvent que du conseil.

ARTICLE 590 — En regard des devoirs des commissaires et des syndics relativement aux propriétés scolaires et aux emprunts, si le conseil n'est pas propriétaire des biens-meubles et immeubles, que l'autorité suffisante lui soit reconnue d'affecter l'utilisation des édifices scolaires selon les besoins des diverses clientèles lorsqu'il est nécessaire de procéder à un échange de services entre commissions scolaires.

EN REGARD DE LA CONFESSIONNALITE

En vue d'assurer des garanties confessionnelles aux non catholiques et aux non protestants, nous recommandons d'amender les articles 593 et le dernier paragraphe de l'article 589 de la façon suivante :

(art. 593) — il est constitué pour chacune des commissions scolaires, un comité catholique, un comité protestant et un comité pour les autres options religieuses.

(art. 589) — à la demande des comités visés à l'article 593, les commissaires d'écoles doivent nommer trois personnes responsables des questions religieuses: une pour les catholiques, une pour les protestants et une autre pour les autres options.

D - EN REGARD DE LA PROTECTION DES INTERETS DE NOS MEMBRES — que le paragraphe (b) de l'article 11 soit modifié en ajoutant les mots: "avec les organismes représentatifs d'employés". — que l'article 18 soit amendé en ajoutant une référence aux articles 1lb et 17. L'article se lirait comme suit: "Sous réserve des articles 7, 11b, 14, 15 et 17, tous les règlements....."

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