Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission permanente de l'Education
Projet de loi no 28
Loi concernant la restructuration des
commissions scolaires sur l'île de
Montréal
Séance du mercredi 17 novembre 1971
(Dix heures quinze minutes)
M. PILOTE (président de la commission permanente de l'Education):
A l'ordre, messieurs!
J'inviterais le Front commun pour la défense de la langue
française, représenté par MM. Raymond Lemieux et Reginald
Chartrand, à venir présenter son mémoire.
Y a-t-il possibilité, pour les représentants du Front
commun, de ne pas lire le mémoire, de donner des explications? A la
suite, les membres auront le loisir de vous poser dés questions.
Front commun pour la défense de la langue
française
M. LEMIEUX: M. le Président, j'aimerais présenter les
trois porte-parole du Front commun. A ma gauche, M. Réginald Chartrand
et, à ma droite, M. Alain Beiner, et moi-même, Raymond
Lemieux.
Nous voulons remercier la commission d'avoir voulu enfin nous entendre
et, en guise d'introduction, je voudrais vous expliquer un peu ce qu'est le
Front commun pour la défense de la langue française. C'est un
organisme qui a été fondé le 16 août dernier pour
poursuivre, en quelque sorte, la campagne qui avait été
lancée, il y a deux ans, par le FQF lors de l'affaire du projet de loi
63, dont l'objectif ultime est que le français devienne langue
officielle au Québec dans tous les dommaines.
Comme objectif immédiat, évidemment, nous avions
défini l'intégration scolaire, le retrait du projet de loi 63 et
le français comme seule langue d'enseignement et de travail au
Québec. Dès la fondation du Front commun, un grand nombre
d'organismes et d'individus y ont adhéré et ont participé
ensemble à la première activité du Front commun,
c'est-à-dire la manifestation du 16 octobre dernier.
Cependant, sur le projet de loi 28, de façon précise,
plusieurs de ces organismes dont, entre autres, les centrales syndicales
avaient déjà rédigé leur mémoire, avaient
déjà des prises de position avant même la formation du
Front commun. Le mémoire que nous vous soumettons aujourd'hui
représente quand même l'esprit du Front commun rejoint en tous
points celui des autres groupes syndicaux et nationalistes francophones de
Montréal.
Nous dénonçons les mêmes vices du bill 28 qu'eux ont
déjà dénoncés. La différence, c'est que nous
arrivons à une conclusion différente à partir des
mêmes problèmes, c'est-à-dire que, pour remédier
à ces vices, les autres groupes demandent des amendements substantiels,
des amendements majeurs au bill 28, alors que nous, dans le contexte actuel,
nous demandons son retrait pur et simple.
Si vous me le permettez, j'aimerais que M. Beiner lise le texte du
mémoire qui est très court, M. le Président. Est-ce que ce
serait possible?
M. PICARD: M. le Président, serait-il possible que le
mémoire soit transcrit dans le journal des Débats? Il ne serait
pas nécessaire d'en faire la lecture.
M. SAINT-PIERRE: Il est transcrit directement dans le journal des
Débats, même si vous ne le lisez pas. (Voir annexe A)
M. LEMIEUX: Si les membres en ont pris connaissance, cela nous
satisfait.
M. CARDINAL: Nous l'avons déjà en notre possession.
M. SAINT-PIERRE: Il y a plusieurs questions que l'on pourrait poser, M.
Lemieux. Je vais commencer par quelques-unes pour identifier, peut-être,
votre association. Qu'est-ce qu'il y a dans le Front commun? Est-ce que ce sont
des individus ou des organismes, dans le moment?
M. LEMIEUX: Il y a les deux, M. Saint-Pierre. Il y a, notamment, la
Ligue pour l'intégration scolaire, les Chevaliers de
l'indépendance, la Ligue socialiste ouvrière.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que nous pouvons nous arrêter à ces
trois premiers organismes? La Ligue d'intégration scolaire: à
votre assemblée annuelle, vous étiez 28 ou 27 membres, c'est bien
cela?
M. LEMIEUX: M. Saint-Pierre, si vous voulez jouer sur le nombre des
membres.
M. SAINT-PIERRE: Non, je vous le demande.
M. LEMIEUX: Je peux vous demander le nombre de membres du Parti
libéral, vous savez.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais je vous le demande, c'est parce que...
M. MARCHAND: M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, à l'ordre!
M. SAINT-PIERRE: Je pense que c'est relativement important lorsque l'on
parle...
M. LEMIEUX: Si vous me permettez de répondre, je pense que l'on a
déjà démontré dans le passé et l'on
peut encore le démontrer
dans l'avenir qu'il y a un grand nombre de Montréalais qui
suivent les positions que nous prenons. Si vous voulez, nous voulons être
les porte-parole de ceux qui n'ont pas de voix, justement, dans le
Montréal métropolitain et ça, par des moyens que n'ont pas
ces gens pour faire entendre leur voix. Enfin, je ne sais pas si ça
répond à votre question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quel organisme, M. le ministre, avons-nous
entendu, représentant la population de Montréal?
M. LEMIEUX: Je n'ai pas dit la population de Montréal. J'ai dit
ceux qui n'ont pas de voix au Parlement de Québec à
Montréal. Cela représente une large tranche de la population.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Combien y a-t-il de députés de
l'île de Montréal au Parlement?
M. MARCHAND: M. le Président, je pense que, sur le bill 28
actuellement, toute la population de Montréal a eu le loisir de se faire
entendre par des organismes importants qui sont représentatifs. Il n'y a
personne qui peut dire, je pense, ici à la commission, qu'il n'a pas pu
se faire entendre. Je crois que monsieur est complètement dans
l'erreur.
M. LE PRESIDENT: J'inviterais et les membres de la commission et les
représentants à ne pas faire de politique avec le bill 28.
M. LEMIEUX: Non, non, mais...
M. LE PRESIDENT: Deuxièmement, M. Lemieux, si vous me le
permettez, le ministre vous a posé une question concernant le nombre de
gens qui étaient à votre assemblée et je crois que ce
n'est pas une question politique, à ce moment-là.
M. LEMIEUX: Non. Sans faire de politique, nous, de la LIS, nous avons
établi, il y a quelques années, que nous ne donnerions pas
publiquement le nombre de membres que nous avons.
Si vous voulez que je vous explique pourquoi, je peux vous l'expliquer.
Je sors d'un procès que le gouvernement a traîné en
longueur pendant deux ans, uniquement un procès politique, pour essayer
de désorganiser notre mouvement. Je tiens à dire qu'il n'a pas
réussi, que le mouvement est bien vivant...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, M. Lemieux! C'est en dehors du sujet.
M. MARCHAND: Le gouvernement vous a tenu, parce que vous avez
cassé des vitres, vous avez cassé tout ce que...
M. LEMIEUX: Je regrette, vous lirez la conclusion du jugement du
procès hier.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Je voudrais qu'on s'en tienne au
bill 28 uniquement.
M. LEMIEUX: Moi aussi, j'aimerais me consacrer au bill 28.
M. SAINT-PIERRE: Ma question était dénuée de toute
agressivité. C'est parce qu'il y a ici des groupes, qui nous ont dit: On
a étudié le bill 28, voici ce qu'on suggère, ce qu'on
recommande. Or, dans chacun de ces groupes, les gens nous ont expliqué
qui parlait exactement, parce qu'il y a beaucoup de confusion, beaucoup de
fronts communs et on aime bien savoir qui parle derrière un groupe. Or,
des gens je prends l'archevêque de Montréal ont
nié cela. Ils ont dit: Très bien, on a eu des assemblées
dans chacune des paroisses, il y avait peut-être 3,000 personnes pour
étudier le projet de loi, il a été adopté. Hier, on
a eu les mêmes questions avec des organismes syndicaux, c'est
dénué d'agressivité. Tout ce que je veux savoir, c'est si
ceux qui ont accepté la participation de la LIS dans ceci sont les 28
personnes qui assistaient à votre assemblée
générale.
M. LEMIEUX: Ce que je peux vous dire, c'est que les organismes que j'ai
nommés tantôt faisaient partie du Front commun. Le texte que vous
avez devant vous a été approuvé par les plus hautes
instances, les exécutifs, les conseils de ces organismes. Est-ce que
cela répond à votre question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous pourriez, M. Lemieux,
répéter le nom de ces organismes, s'il vous plaît, pour
l'information de la Chambre?
M. LEMIEUX: Enfin, oui, j'ai été interrompu, j'en avais
d'autres à nommer, j'ai parlé de la LIS, des Chevaliers de
l'indépendance, la LSO, la Société nationale populaire, le
Comité des patriotes 37-38, le Comité de vigilance nationale,
l'Avant-garde française d'Amérique. Est-ce qu'il y en a
d'autres?
M. CHARTRAND (Réginald): Et même un bon nombre des membres
du PQ.
M. PICARD: Est-ce que ce sont les mêmes personnes qui se
réunissent à différentes occasions sous différents
titres?
M. LEMIEUX: Evidemment, par définition, c'est un front commun qui
s'est formé dans un contexte particulier. Ce n'est pas un front
commun...
M. PICARD: Avec les mêmes personnes. A l'occasion d'un
événement particulier, on se donne un nouveau titre, une nouvelle
marque de commerce et ce sont les mêmes personnes qui se
déménagent de nouveau.
M. CHARTRAND: Non, non. Si vous voulez absolument un nom...
M. PICARD: Ce sont toujours les mêmes 28. L'autobus de la
Commission de transport de Montréal...
M. LEMIEUX: Ecoutez. Le 16 octobre dernier, devant l'édifice de
l'Hydro-Québec, on était 12,012 pour défendre la langue
française. Ce n'est pas 28.
M. CHARTRAND: Ce sont quand même des milliers de personnes.
M. BEINER (Alain): Il faut dire à part les organismes, il y a un
nombre important d'individus, par exemple, les étudiants du secondaire
qui, d'habitude, n'ont rien à dire sur ce qui se passe dans la ville de
Montréal.
Nous avons au moins 2,500 membres chez les élèves du
secondaire qui ont participé aux actions du 16 octobre et malgré
les menaces de la police et de l'administration scolaire, des amendes contre
les parents et des choses comme cela; puis bien qu'il y ait des mouvements qui
ont plus d'argent ou plus de prestige nous parlons pour ces personnes qui
à notre avis sont importantes.
M. LE PRESIDENT: Monsieur je ne permets pas ceci. On est en train
d'étudier le bill 28, il n'est pas question de police, il n'est pas
question de quoi que ce soit. Si vous avez des représentations et des
recommandations à faire concernant le bill 28 je vous prierais de les
faire, sans essayer de faire de politique, que ce soit contre la police, la
ville de Montréal ou qui que ce soit; alors si vous voulez vous en tenir
au bill 28 et aux articles du bill 28, je vous prierais de le faire.
M. CHARTRAND: Je suis prêt à parler du bill 28
présentement: vous voulez me laisser la parole?
Moi, j'estime que c'est le français qui est en train de
disparaître en Amérique du Nord, ce n'est pas l'anglais; or, nous
n'avons pas à passer des lois pour protéger l'anglais mais des
lois pour protéger la langue française. Je refuse toute
législation sur le bill 28, toute loi qui sera passée avant le
retrait du bill 63. Le bill 28 ou le bill 63 est un bill de colonisé
puis, si vous le passez vous allez passer vous autres pour des vendus. Nous ce
que nous voulons dans la province de Québec, c'est le français
comme langue de travail comme dans tous les pays normaux du monde. Je veux que
le Québec soit aussi français que l'Ontario est anglais, ce n'est
pas plus compliqué que cela; d'ailleurs, ce que je viens de dire, c'est
l'ancien premier ministre du Québec qui avait dit exactement les
mêmes paroles, M. Daniel Johnson. On veut vivre dans un pays normal. Par
exemple, en Italie la langue de travail est l'italien, en Allemagne c'est
l'allemand, en Angleterre c'est l'anglais, en Ontario c'est l'anglais. Dans la
province de Québec on veut travailler en français, il me semble
que cela n'est pas compliqué. La meilleure manière pour le Canada
anglais de garder le peuple québécois à genoux c'est de
nous forcer de travailler dans cette langue. La meilleure façon
d'opprimer le peuple québécois, c'est d'abord par la langue. La
seule province bilingue du Canada, c'est la province de Québec, les neuf
autres provinces sont unilingues anglaises, on travaille dans les autres
provinces seulement en anglais. Dans la province de Québec c'est
bilingue, puis les seuls personnes qui sont bilingues sont des Canadiens
français; très peu de Canadiens anglais savent parler le
français, ceux qui savent le parler ne veulent pas, parce que, pour eux
parler français et travailler en français c'est s'abaisser, alors
que pour nous, les Canadiens français, c'est relever notre prestige que
de parler leur langue dans notre pays, c'est cela être
colonisé.
Au Québec et à Montréal en particulier, le Canada
anglais, c'est une minorité qui est traitée comme une
majorité, puis nous, nous sommes une majorité traitée
comme une minorité et tout cela au niveau linguistique. D'abord c'est
là que la bataille commence parce que le français, notre langue,
c'est l'âme et la culture de notre peuple.
Alors, si nos politiciens n'ont pas le courage d'adopter des lois pour
protéger notre langue, ils ne protègent absolument rien. Ces lois
que vous devez adopter, ce sont des lois pour protéger le
français et pour que le français devienne la langue du travail.
Le Canada anglais a eu 104 ans de confédération pour apprendre
à parler le français et il ne le sait pas aujourd'hui et il ne le
saura jamais, parce que c'est psychologiquement vrai que le vainqueur
n'apprendra jamais à parler la langue du vaincu. Et c'est à vous
d'adopter des lois pour nous protéger et c'est pour cela que vous,
gouvernement québécois, vous devez prendre l'intérêt
du peuple qui vous a élu, la majorité française dans la
province de Québec, mais vous faites souvent le contraire, vous prenez
le côté de la minorité anglaise. M. Bourassa par exemple!
On a vu M. Bourassa aller demander à des compagnies anglaises si elles
voulaient faire du français la langue du travail, alors elles ont toutes
dit oui. Qu'est-ce que vous attendez pour adopter des lois qui disent que le
français devient la langue du travail? Ils ont dit oui ces gars
là, ils étaient de bonne foi, mais on sait qu'ils ne le feront
pas. Ce n'est pas une chose qui se demande, c'est une chose qui s'exige dans
son pays de parler sa langue.
J'ai lu un peu le texte du bill 28, toutes les décisions finales
y reviennent au lieutenant-gouverneur en conseil; je regrette, mais le
lieutenant-gouverneur, qui est le "descendant" direct de la reine, ne peut pas
prendre l'intérêt du peuple québécois, il est
payé pour prendre l'intérêt des autres. Moi je ne marche
pas dans
cette affaire-là. Moi, je dis qu'ici il faut dire qu'on est dans
un pays colonisé et, s'il y a quelques députés parmi vous
qui sont révolutionnaires, ils vont commencer à adopter des lois
qui protègeront la majorité du peuple
québécois.
M. CHARRON: Je voudrais vous faire remarquer que quand une loi dit "le
lieutenant-gouverneur en conseil", c'est une formule; je veux bien croire que
les formules des textes de loi sont archaïques, mais
"lieutenant-gouverneur en conseil", cela veut dire le conseil des ministres. Le
lieutenant-gouverneur, il est dans sa petite boîte, on le sort pour
l'ouverture et la fin de la session et déposer des couronnes le 11
novembre...
M. CHARTRAND: D'abord cela indique, M. Charron, un état d'esprit,
il n'y a pas ici même une Assemblée nationale. Une
assemblée nationale, cela appartient à une république et
vous autres, vous avez une assemblée nationale, c'est
complètement fausser l'affaire. Vous avez une assemblée nationale
dans une colonie; voyons, votre affaire ne tient pas debout, même si vous
essayiez de me remplacer mon affaire, est-ce que oui ou non il n'y a pas un
lieutenant-gouverneur qui dépend directement du gouverneur
général à Ottawa et qui contrôle complètement
le pays?
M. CHARRON: Oui, mais... non, non quand c'est lui qui...
M. TREMBLAY (Chicoutimi); M. le Président, je voudrais faire
remarquer ici...
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... que constitutionnellement le
lieutenant-gouverneur du Québec ne dépend pas du gouverneur
général d'Ottawa, cela n'a absolument rien à voir.
M. CHARTRAND: Bien, supposons que vous voulez adopter une loi favorable
au peuple québécois...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Chartrand, vous demandez que l'on respecte
la langue française, vous dites que la langue française est dans
un mauvais état. En vous entendant, j'en suis convaincu.
M. CHARTRAND: Je suis bien "smart" pour vous, c'est très gentil
de votre part. C'est justement parce que vous autres, vous n'avez pas eu le
courage, vous avez été trop lâches pour passer des lois
pour protéger notre langue dans notre pays que nous parlons le
"jouai".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Chartrand, permettez-moi de vous faire
observer monsieur, que nous avons probablement à peu près le
même âge, je ne comprends pas que vous ne parliez pas le
français comme je le parle.
M. CHARTRAND: Puis après, ça prouve quoi? Moi, je suis
né près de l'Ontario...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela prouve qu'il y a un dynanisme interne
chez certaines gens et qu'il y en a d'autres qui n'en ont pas.
M. CHARTRAND: Moi, je suis un Québécois et je ne fais pas
de snobisme et d'étroitesse d'esprit comme vous, M. Tremblay.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. CHARTRAND: Je parle ma langue dans mon pays. C'est un
québécois assez clair qu'il se comprend dans tout l'univers. Ce
n'est pas vrai que je parle si mal que ça, parce qu'on me comprend
partout, toutes les nations francophones de la terre comprennent très
bien le langage que je parle. Je ne fais pas de snobisme et d'étroitesse
d'esprit comme vous en faites là-dessus.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. CHARTRAND: Tout ce que vous faites, c'est de bien parler.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais qu'on évite de faire des
personnalités ici.
M. BEINER: On sait que durant la grève à la General
Motors, le gouvernement a fait semblant de vouloir défendre la langue
française en exigeant poliment, si je peux continuer...
M. PICARD: Parlez-nous donc en anglais, monsieur.
M. CHARTRAND: On va vous laisser ça à vous de parler en
anglais.
M. BEINER: ... de faire du français la langue de travail. Comment
peut-on exiger d'une compagnie, comment peut-on demander poliment à une
compagnie qu'elle fasse du français la langue du travail, quand le bill
63 réduit la langue à un bien familial. Donc, les parents peuvent
décider de la langue des enfants. La langue est un bien national qui
doit être protégé par l'Etat, on ne doit pas laisser aux
parents de décider. Mais comment peut-on faire une chose semblable que
de demander à General Motors de faire du français la langue du
travail quand on l'a réduite à un bien familial?
Il faudrait d'abord forcer au moins les parents à instruire leurs
enfants dans la langue nationale avant de demander poliment aux compagnies de
faire du français la langue du travail. Le gouvernement libéral a
exprimé des doutes quant au bill 63 et à ses effets
négatifs
sur la langue française. Je pense que le gouvernement
libéral a refusé de l'inclure dans la Constitution si je
ne me trompe lors de la conférence de Victoria. Ce n'est pas
parce que le gouvernement veut protéger la langue, mais qu'on a peur de
provoquer une réaction massive comme lors de l'adoption du bill 63. Mais
même si le gouvernement libéral a des droits quant aux effets du
bill 63, je ne vois pas comment il pourrait être question de passer un
autre bill comme le bill 28, qui renforce le bill 63. C'est une application
administrative dans l'île de Montréal du bill 63 et de son
bilinguisme faux. On fait de l'île de Montréal un territoire
bilingue. On connaît déjà la situation linguistique de
Montréal. L'anglicisation est de plus en plus forte.
La ville de Montréal est divisée dans une proportion de 60
p.c. et 40 p.c. en faveur des francophones, mais, selon les experts, elle est
rapidement en train de se transformer en ville anglaise.
Je suis certain que tout le monde ici est au courant de ça. Selon
les experts, dans quinze ou vingt ans, Montréal sera une ville à
domination anglaise. Cela est sans le bill 28 qui établit le bilinguisme
légal et constitutionnel. Ceci ne peut qu'accélérer
l'anglicisation à Montréal, c'est certain. Il est certain que,
tant que l'anglais demeure la langue de l'économie et de la haute
finance, les enfants des immigrants, même les francophones, vont
s'intégrer à la communauté anglophone.
Tant qu'on laissera les privilèges des anglophones en place, ce
sera toujours le cas, le français va disparaître très
rapidement. Je demande au ministre quelle langue est en danger. On dirait que,
d'après les lois qui sont adoptées, c'est l'anglais qui est en
danger. Mais je crois qu'il est clair que c'est le français. Où
sont les lois pour protéger la langue française? Il n'en existe
pas.
M. SAINT-PIERRE: Si l'on voit les vingt-cinq fautes de français
dans votre mémoire, il va falloir donner à d'autres groupes que
le vôtre...
M. BEINER: Cela, c'est grâce à vous. M. SAINT-PIERRE: Non,
grâce à vous.
M. BEINER: Je suis né à Montréal, je n'ai jamais
vécu ailleurs. Comment ça? Je ne parle pas un français
convenable?
M. LEMIEUX: Ce n'est pas ce que nous disions.
M. BEINER: On n'a pas tous la chance de parler comme...
M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre de l'Education et je
demanderais aux représentants de parler un par un.
M. BEINER: D'accord, mais pas d'insultes personnelles.
M. CHARTRAND: Nous ne sommes peut-être pas aussi intelligents que
vous, mais nous ne sommes pas aussi lâches que vous l'êtes.
M. LEMIEUX: On demanderait aux membres de la commission de cesser...
M. LE PRESIDENT: Il n'est pas question de lâcheté,
monsieur.
M. CHARTRAND: C'est justement ça, une question de courage et de
lâcheté. Vous n'avez pas le courage de vos convictions et vous
n'adoptez pas de lois. Je vais aller plus loin que ça: je vais vous dire
que vous êtes des prostitués politiques qui vendent
l'intérêt de la nation pour des gains personnels.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Si cela continue, je serai obligé
d'annuler...
M. CHARTRAND: Il faut leur dire la vérité une fois de
temps en temps, on les a devant nous aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, c'est digne d'autres lieux.
Nous étions venus ici pour entendre quelque chose, nous ne sommes pas
venus entendre un monologue...
M. CHARTRAND: M. Tremblay fait de l'esprit, il essaie de m'asseoir dans
ma chaise, je peux répondre. Je parle peut-être le "jouai", mais
je me tiens debout. Je ne penche du côté de personne.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous pouvons vous taquiner, M. Chartrand. Nous
croyions que vous aviez le sens...
M. CHARTRAND: Moi aussi, je vous taquine.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...de l'humour. Quant à moi, j'estime
que votre mémoire est complet par lui-même, je ne sens pas le
besoin... Pardon?
M. LEMIEUX: C'est facile de bien parler français au salon rouge,
mais allez vivre dans les rues de Montréal ou dans votre comté,
M. Tremblay...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans mon comté, monsieur, je parle le
français que je vous parle actuellement.
M. LEMIEUX: Vous êtes enfermé dans une tour d'ivoire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et personne ne me fait jamais de concessions
sur le plan du langage...
M. BEINER: Est-ce que c'est la première fois que vous entendez la
langue des travailleurs?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEINER: C'est ça, la langue française au
Québec.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, monsieur.
M. BEINER: On ne peut même pas le parler, parce que, dans les
écoles, 85 p.c. des textes sont en anglais.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vais être obligé de vous
faire évacuer de la salle, monsieur, si vous ne vous soumettez pas aux
ordres du président. A l'ordre!
M. BEINER: Pas d'insultes personnelles.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais aux trois messieurs qui sont
en face de moi d'y aller avec un peu moins d'agressivité, de parler du
bill 28. Nous ne sommes pas des animaux ici pour nous lancer des mottes. Nous
allons vous écouter comme nous avons écouté tous les
autres représentants. Je vous demanderais d'être un peu moins
agressifs. Depuis une demi-heure, vous montrez beaucoup trop
d'agressivité. Nous avons écouté des gens avec attention.
C'est la première fois depuis que je siège à cette
commission qu'il y a tant d'agressivité. Parlons du bill 28. Evitons de
parler des péchés du passé. Parlons pour 1971. Parlons de
la loi que nous étudions actuellement. C'est ce que je vous demande.
M. CHARTRAND: Il faut parler des péchés du passé si
nous voulons nous ramener à l'avenir.
M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre de l'Education.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai rien
à ajouter. Le mémoire me semble complet.
M. BEINER: Je voudrais poser une question au ministre.
M. SAINT-PIERRE: Je regrette. Je ne suis pas au tribunal pour
répondre à des questions. Je n'ai rien à ajouter à
votre mémoire. Vous avez dit ce que vous aviez à dire. Si vous
avez autre chose, je veux bien vous écouter encore, bien que...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai regardé le mémoire qui nous
a été soumis. Je crois qu'il est complet. Il y a des propositions
que nous étudierons au mérite. Je crois qu'il serait oiseux de
vouloir reprendre chacun des points de vue. D'ailleurs, les propositions qui se
trouvent là, outre les injures que nous retrouvons dans ce
mémoire, sont exactement celles qui nous ont déjà
été soumises par d'autres organismes responsables et qui ne sont
pas des organismes clandestins.
M. BEINER: J'ai un point à ajouter, si vous me le permettez.
D'abord, j'aimerais souligner le différence entre ce mémoire et
les autres mémoires. Je pense que la plupart des mémoires des
organismes qui veulent défendre la langue française poussaient
pas mal, insistaient sur l'intégration des immigrants à la
communauté francophone. Nous ne sommes pas d'accord uniquement pour
intégrer les immigrants. Nous ne blâmons pas les immigrants. C'est
tout à fait naturel qu'un immigrant qui entre au Québec
s'intègre à la communauté anglophone, parce que c'est
là qu'on peut s'affirmer économiquement. C'est clair. Une loi qui
vise uniquement les immigrants serait raciste. Il faudrait viser tous les
Québécois. Il faudrait enlever les privilèges des
anglophones parce que la discrimination contre la langue française est
le produit des privilèges qu'ont les Canadiens anglais. Il n'est pas
question de mettre fin à cette discrimination envers le français
tant que les anglophones, qui forment 15 p.c. de la population, jouissent de
privilèges au détriment des Canadiens français. Il n'est
pas question de blâmer les immigrants. Il n'est même pas question
de blâmer les anglophones. Il s'agit de blâmer le gouvernement qui
protège la minorité aux dépens de la majorité. Il
faut enlever le bill 63. C'est là la première tâche. C'est
ça qui garantit un bilinguisme à sens unique qui est en train de
se transformer rapidement en unilinguisme anglais. Nous pouvons constater la
dégénérescence de la langue française ici
même, chez ceux qui vivent dans le monde, qui sont en contact avec la
population et qui parlent un français qui n'est pas très bon.
Pourquoi? Parce que le gouvernement protège intégralement
si je peux reprendre les citations de M. Saint-Pierre les droits acquis
de la minorité anglophone. Il ne s'agit pas de droits acquis, Ce sont
des droits conquis, des droits volés, des privilèges qu'ils ont
aux dépens de la majorité. La langue française va
disparaître dans quelques années si le gouvernement ne
défend pas la majorité qui l'a élu au lieu de
défendre les pouvoirs financiers étrangers qui contrôlent
le Québec.
M. CHARTRAND: Nous n'acceptons plus notre état de
colonisés. Nous voulons que le français devienne la langue de
travail. Quand vous aurez assez de courage pour adopter ce bill, il n'y aura
plus de discussion sur la langue.
C'est vous qui avez manqué et c'est pour ça qu'on est venu
ici aujourd'hui vous le dire. Ce n'est pas vous insulter que de vous le dire.
Si
une certaine ingorance. Pourriez-vous nous expliquer, monsieur, ce
qu'est la Société d'éducation du Québec, qui
groupe-t-elle?
M.GIRARD: Notre groupe est un groupe qui s'occupe surtout de choses
éducatives. Nous avons édité un livre qui s'appelle
"L'affaire Saint-Léonard"; nous avons déjà produit
d'autres mémoires. Notre groupe s'occupe surtout de faire des
études au niveau des commissions scolaires, au niveau des recensements,
au niveau des statistiques. C'est pourquoi nous arrivons avec certaines
recommandations.
M. SAINT-PIERRE : Il y a combien de membres dans cette
société?
M. GIRARD: Nous sommes environ une centaine de membres.
M. SAINT-PIERRE: De la région de Montréal?
M. GIRARD: Oui.
M. SAINT-PIERRE: Et ce n'est pas un groupe professionnel particulier; ce
ne sont pas des enseignants, ce ne sont pas des parents...
M. GIRARD : Il y a des enseignants, il y a un permanent à
l'Alliance des professeurs, je peux le donner, il est dans
l'exécutif il y a un ingénieur à la ville de
Montréal qui est membre de l'exécutif, il y a M. Couture qui est
avec moi qui est plombier.
M. SAINT-PIERRE: Et quels sont de nouveau les buts de votre
association?
M. GIRARD: Dans notre association, il est entendu que nous sommes en
faveur de la langue française. Par contre, nous sommes aussi en faveur
d'une situation logique et nous calculons qu'actuellement, avec la
restructuration scolaire qui va s'amorcer, il y a certainement de bonnes choses
à faire.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, pour préciser. Est-ce que vous
étiez dans le Front commun du groupe que nous venons d'entendre?
M. GIRARD: Non. Donc, j'ai expliqué que la CECM ou même le
Protestant School Board, sur un même territoire que les autres
commissions scolaires, imposaient $1.60 au lieu de $1.80. Je pense qu'avec le
projet de loi 28 et nous l'avons prouvé dans ce cas-ci en
égalisant le taux de la taxe ce serait une injustice qui sera
certainement corrigée. Je pense que tout le monde est d'accord avec moi
que ce n'est pas juste que quelqu'un, parce qu'il est protestant et un autre
qui est catholique, ne paie pas le même taux de taxe. vous avez
manqué à votre devoir en tant que politiciens, que vous ne vous
êtes pas tenus debout et qu'aujourd'hui on ne vit pas dans une situation
normale, c'est votre faute à vous; ce n'est pas notre faute à
nous, parce que c'est vous qui avez été élus par le
peuple.
M. PICARD: M. le Président, je propose qu'on passe à la
lecture du mémoire de la Société d'éducation du
Québec s'il n'y a pas d'autres questions.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Je remercie MM.
Lemieux, Chartrand et compagnie pour le mémoire et soyez
assurés...
M. BEINER: Beiner.
M. LE PRESIDENT: ... que nous allons en prendre bonne note. J'inviterais
à présent la Société d'éducation du
Québec, représentée par M. Jean Girard, à bien
vouloir présenter son mémoire.
M. CHARTRAND: Vive le Québec libre! Vive le Québec
français!
M. SAINT-PIERRE: Etes-vous d'accord toujours?
M. TREMBLAY: Ils sont divisés...
M. LE PRESIDENT: La parole est à M. Jean Girard. Monsieur on vous
a laissé la parole, alors voulez-vous laisser la parole à M. Jean
Girard.
Société d'éducation du
Québec
M. GIRARD: Messieurs, je tiens au nom de la société
d'éducation du Québec à vous remercier de la faveur que
vous nous avez donnée de nous faire entendre. Nous allons essayer
d'apporter quelques notes constructives au projet de loi 28. Nous allons
expliquer un peu ce que nous attendons du projet de loi 28 et pourquoi nous
avons approuvé certaines clauses.
A la première page: Que les populations ont droit aux mêmes
services, reçoivent les mêmes services, ont droit à une
éducation de qualité pour un même coût. Je pense, par
exemple, à Montréal qui imposait $1.60 les $100
d'évaluation tandis que d'autres commissions scolaires imposaient $1.80.
Je pense à certains territoires où le Protestant School Board
percevait $1.60 sur un territoire et d'autres, sur le même territoire,
les commissions scolaires catholiques, percevaient $1.80. Je crois que le
projet de loi 28 en uniformisant...
M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre de l'Education.
M. SAINT-PIERRE: Je pose la même question aux autres groupes
puisqu'il y a peut-être
M. CARDINAL: Si vous me permettez, M. Girard, est-ce que actuellement,
le ministre me corrigera, le taux et des protestants et des catholiques n'est
pas le même?
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. CARDINAL: Le problème n'est pas là. Le problème
c'est distribution de la taxe des neutres.
M. GIRARD: Il est le même. Je prends, par exemple, un cas lorsque
j'étais commissaire à Saint-Léonard. Les protestants
payaient $1.60 et il n'y avait aucune école protestante. Les
catholiques, eux, payaient $1.80 en 1970. Et les compagnies se
déclaraient protestantes pour payer meilleur marché que la taxe
des neutres.
M. CARDINAL: C'est-à-dire que c'était la loi qui les
déclarait neutres et qu'il y avait les deux tiers qui allaient aux
protestants et un tiers aux catholiques.
M. GIRARD: Quand même, une compagnie pouvait se
déclarer...
M. CARDINAL: Je suis d'accord sur le principe que vous énoncez.
Il est exact qu'à Montréal, deux jeux se faisaient: des individus
s'incorporaient de façon à payer la taxe des neutres pour faire
bénéficier les protestants et que, d'autre part, pour des fins de
cotisation d'église, des corporations mettaient leurs immeubles au nom
d'une personne, d'un individu, pour éviter la taxe d'église.
D'ailleurs, il y a justement des dispositions dans le projet de loi 28, qui est
le cran d'arrêt des $100,000, pour éviter ce jeu qui se
faisait.
M. GIRARD: C'est cela. Dans les petites commissions scolaires, le
patronage est florissant, pour ne pas dire érigé en
système. Le commissaire et même les fonctionnaires subissent
énormément de pression. J'en sais quelque chose, puisque je suis
un ex-commissaire et je pourrais vous citer je pourrais peut-être
éviter de le faire des cas de patronage que j'ai vus. Maintenant,
si la Chambre peut m'éviter cela je n'aime pas tellement citer
ces cas je m'en abstiendrais, mais si vous y tenez, je vais les
citer.
M. CHARRON: Cela pourrait être long M. Girard, j'aimerais vous
poser une question en ce qui concerne l'article 589. C'en est un sur lequel la
plupart des mémoires se sont accrochés à un moment ou
l'autre, celui que nous appelons, entre nous, l'article des adjoints, celui qui
permet à la minorité de chacune des commissions scolaires
d'avoir, sur le plan administratif, une série d'adjoints qui sont de sa
langue.
Vous dites craindre que cet article provoque un dédoublement
administratif qui va augmen- ter les coûts, ce qui est vrai, mais
peut-être pas autant qu'on le dit. Mais si moi aussi je suis
opposé à l'article 589, c'est que non seulement cela peut
augmenter les coûts dans une certaine proportion, mais c'est aussi parce
que, comme vous le dites à la première page de votre
mémoire, cela va augmenter ce que vous appelez les conflits
d'intérêts. Tôt ou tard, selon votre analyse pour avoir
demandé l'abolition de l'article 589 et de le remplacer par ce qu'il
proposait dans ce chapitre-là, le bill 62 de l'ancienne Union Nationale,
est-ce qu'à ce moment-là, vous ne craignez que l'on aboutisse,
à la longue, à vingt-deux commissions scolaires?
C'est-à-dire que dans chacune, le dédoublement sera si
profondément marqué...
M. GIRARD: Il est entendu que si l'on met deux administrations
différentes... Dans un mémoire, un peu plus loin, vous pourrez
constater qu'à Saint-Léonard nous avons, par exemple, des classes
anglaises et des classes françaises, dans les mêmes écoles;
nous n'avons pas de dédoublement administratif anglophone ou
francophone, catholique ou protestant. Il n'y a pas d'écoles
protestantes, il y a seulement des taxes qu'ils viennent chercher.
Nous avions, quand j'étais là, seulement une
administration qui administrait, et qui administre actuellement
quatre-vingt-deux classes anglaises et plus d'une centaine de classes
françaises. Donc, cela peut se faire avec la même administration.
Je pense que les administrateurs doivent être choisis pour leur
compétence.
M. SAINT-PIERRE: Dans le bill 28, monsieur, il n'y a pas deux
administrations. Il n'y a pas une administration anglaise et une administration
française: même au niveau des services qui sont prévus, les
postes d'adjoints je l'ai répété bien des fois
il y a simplement, même au niveau du personnel, au niveau des
programmes, un seul service. Tout ce que l'on dit, c'est que l'adjoint
et cela s'applique à la fois pour les cas des commissions scolaires
à majorité anglophone doit être de la langue de la
minorité, quelle qu'elle soit. Il y a une différence. En d'autres
termes, ce n'est pas la réplique de la CECM qui, dans le moment, a deux
services différents, un pour les anglophones et un pour les
francophones. Dans la commission scolaire unifiée, il n'y a qu'un seul
service.
M. GIRARD: Dans l'expérience que nous avons vécue dans le
passé à Saint-Léonard... On a quand même,
actuellement, deux sortes de classes, deux sortes d'écoles. Les
employés ont été choisis uniquement en raison de leur
critère de compétence. Ils n'ont pas été choisis
parce qu'ils étaient de la langue de la majorité ou de la langue
de la minorité.
M. SAINT-PIERRE: Ce que nous disons, c'est que si nous prenons le cas de
la commission scolaire no 10 qui est dans l'ouest de la
ville de Montréal, où il y a 16p.c. de francophones, c'est
que ces 16 p.c. de francophones, par le bill 28, sont obligés d'avoir,
au niveau du personnel de l'enseignement et du service aux étudiants, un
représentant de la langue et que, si on choisissait strictement sur la
base de la majorité, évidemment, il pourrait bien arriver que les
16 p.c. de francophones n'aient pas un représentant. On calcule que pour
ces trois services, le personnel, les étudiants et les programmes, une
personne ce n'est pas beaucoup lorsqu'on tient compte qu'on groupe à la
fois le service protestant et le service catholique, anglophone et francophone.
Il n'est pas question de dédoubler le service, mais simplement de
prévoir des postes.
M. CARDINAL: M. le Président, à ce sujet-là
si vous permettez, M. Girard on reprend ici ce matin une
discussion qui a eu lieu à la toute dernière séance de la
commission parlementaire de l'Education et je voudrais rappeler la position que
j'ai indiquée à ce moment-là.
Une des grandes différences entre le défunt projet de loi
62 et le projet de loi 28, qui n'est pas encore né au sens parlementaire
du terme c'est un document de travail c'est qu'on a ajouté
dans le projet 28 des garanties juridiques additionnelles le ministre me
corrigera si j'erre à un moment donné et sur le plan de la
langue et sur le plan de la confessionnalité.
Ce que j'ai alors souligné au ministre et soumis pour
réflexion, parce que ceci ne nous satisfaisait pas, nous de l'Opposition
officielle, c'est que l'on venait créer une situation juridique qui va
consacrer de rares situations de fait la réponse du ministre,
évidemment, est toujours la même: il nous cite le cas de cette
commission scolaire où il y a 16 p.c. de francophones qui
n'existent qu'à la CSCM en fait, je m'excuse du pléonasme. J'ai
précisé que même si le projet de loi 28, comme n'importe
quel projet de loi à l'avenir, pourrait être amendé, les
gens soutiendront qu'ils ont des droits acquis que le gouvernement ne pourra
plus leur enlever.
On retombe toujours dans la même situation et là, quand
même, à la décharge du ministre et ce n'est pas une
attaque partisane que je fais, absolument pas, c'est une conviction profonde
je dirai que les gens, en général, ne réalisent pas
qu'aucun des projets de loi, qu'il s'agisse de 63, de 62, de 28 ou de 27, n'est
en soi une loi en ce sens qu'ils ne font pas partie de la constitution
on l'a encore dit hier. Ils ne réalisent pas que n'importe quel
gouvernement qui viendrait, enfin, le même ou un autre qui viendrait
après, pourrait les modifier. Mais quand même, malgré ceci,
je suis inquiet et je partage vos inquiétudes, non pas sur le fait qu'il
y ait deux administrations et que ça puisse coûter plus cher. De
toute façon, la population étudiante des deux langues et des
trois confessionnalités, si on peut s'exprimer ainsi à partir du
projet de loi 28, est déjà là. Mais je crains que l'on
donne, sur le plan de la langue, tellement de garanties que l'on ne puisse
jamais, même après le rapport Gendron, revenir à des
solutions plus globales. Cela me paraît être le fond du
problème et non pas une question d'administration.
M. GIRARD: Si vous le permettez, je vais continuer. Je suis bien heureux
que vous me posiez des questions. J'essaie quand même de trouver des
solutions avec vous.
Présentement, à la page 3, on parle des commentaires, des
recommandations qui sont inspirées par le souci de rendre plus
économiques, plus rentables et plus justes les structures scolaires.
Dans un autre paragraphe, je vais parler quand même de
l'enseignement religieux dans les commissions scolaires catholiques au niveau
du cours élémentaire, il n'est pas subventionné par le
gouvernement. Alors, quand on parle de commissions scolaires catholiques, c'est
quand même assez drôle, puisque vous ne pouvez pas engager de
coordonnateurs de catéchèse ou d'animateurs ou de professeurs de
pastorale. C'est impossible, vous n'avez pas le droit de le faire, ce n'est pas
subventionné par l'Etat. Alors, quand on parle de commissions scolaires
catholiques, moi, je cherche ça. Il y a bien la pastorale au secondaire,
mais c'est pour des aumôniers. Donc, des commissions scolaires
catholiques sont administrées par des commissaires qui ont, comme
catholiques, une seule obligation en réalité pour se
présenter... être inscrits au rôle d'évaluation comme
catholiques. Obligatoirement, les commissaires ne sont pas tenus d'être
pratiquants et j'ajouterais que les commissaires s'occupent rarement, pour ne
pas dire jamais, de questions religieuses.
On dit qu'on ne veut pas que les commissions scolaires ne soient ni
catholiques, ni protestantes. Notre système scolaire, qui est
basé sur la religion, catholique ou protestante, a accumulé au
cours des années des injustices criantes. Je pense par exemple aux juifs
francophones à qui, pendant des années, on a refusé des
écoles françaises, et je vous assure qu'il faut rester
près pour avoir une école française pour les juifs
francophones.
Pour ce qui est du cas des Grecs orthodoxes, j'ai ici un
témoignage de la commission scolaire de la ville de Mont-Royal qui a
demandé par exemple de recevoir un enfant ou des enfants Grecs
orthodoxes chez elle. Naturellement, la ville de Mont-Royal a une commission
scolaire protestante et une catholique, si je ne me trompe. La commission
scolaire protestante n'a pas d'école française, et la commission
scolaire catholique a des écoles françaises. Naturellement, le
père voulait envoyer son enfant à l'école
française. Ce qui est arrivé, c'est qu'on lui a répondu
qu'il payait ses taxes aux protestants et que, par le fait même, s'il
voulait envoyer ses enfants à l'école catholique
française, étant donné qu'il n'y avait pas d'école
protestante
française à Mont-Royal, il devait payer un surplus.
C'est la même chose, j'ai un autre cas pour Pointe-aux-Trembles
où il n'y a aucune école française qui ne soit pas
catholique.
Il y a trois écoles protestantes françaises
élémentaires à l'île Jésus, à
l'île de Montréal et sur toute la rive sud. On ne peut pas tout
couvrir. Un enfant de six ans ne peut pas aller à l'école
française catholique et être obligé de payer. Je pense que
dans le projet de loi on a aboli cette clause d'argent à payer et je
suis en faveur de cette clause que l'on a abolie.
M. SAINT-PIERRE: Votre dernière recommandation, M. Girard, porte
sur les immeubles excédant $100,000. Vous êtes favorables à
ce que nous retrouvons dans le projet de loi 28.
M. GIRARD: Oui, je suis pour que ces immeubles soient taxés comme
taxe des neutres, c'est très logique.
M. SAINT-PIERRE: Les onze membres du conseil scolaire, la formation d'un
comité exécutif, vous êtes contre cela. Pour quelle
raison?
M. GIRARD: Lorsque j'ai été commissaire. J'ai eu une
expérience personnelle. Nous étions douze
délégués à la régionale; or, les douze
délégués à la régionale élisaient
cinq commissaires, c'est tout ce que nous avions à faire; après
cela nous n'avions rien à dire.
M. SAINT-PIERRE: Oui, mais dans le projet de loi, il serait faux de dire
que tout ce que font les quinze commissaires c'est d'élire un
exécutif. C'est la commission scolaire qui a tous les pouvoirs, elle
peut déléguer une partie de ses pouvoirs à un
exécutif qu'elle choisit elle-même, mais il y en a qui en
ont fait le reproche mais moi, je trouve que c'est une mesure de
flexibilité la commission scolaire ne peut donner aucun pouvoir
à l'exécutif; de la même façon, elle peut
également lui donner beaucoup de pouvoirs suivant enfin les...
M. GIRARD: Mais pourquoi ne pas réduire le nombre à sept
puis au moins que ces sept-là puissent travailler?
M. SAINT-PIERRE: Quand vous prenez une population étudiante de
35,000 ou 50,000, comme nous avons dans certaines régions, il me semble
que 15 personnes ce n'est pas beaucoup. Cela veut dire que la moitié de
l'administration scolaire du Québec sera dirigée par 165
personnes. Prenons les chiffres que nous avons en province. Même avec le
projet de loi 27, dans certains milieux, il y a des villages qui trouvent
qu'ils n'ont pas assez de représentation scolaire. Nous y avons
diminué le nombre de commissaires d'une façon très
substantielle. Il reste que Montréal, pour le nombre d'étudiants
a un nombre de commissaires beaucoup plus faible.
Le reste de la province a 2,000 commissaires pour à peu
près le même nombre d'élèves que l'on retrouve sur
l'île de Montréal alors qu'à Montréal nous en
retrouverons 165.
M. GIRARD: Vous avez quand même à Québec 108 ou 110
députés pour 6,000,000. Pourquoi n'y aurait-il pas sept
commissaires? Si les sept commissaires font partie de l'exécutif,
ça peut fonctionner beaucoup mieux; autrement ce sont seulement des
têtes d'affiche et ils ne servent à rien, il n'y a plus
d'utilité pour eux. Quand j'étais délégué
à la régionale LeRoyer, nous ne servions absolument à
rien, on élisait puis point final on adoptait le budget une fois par
année.
M. SAINT-PIERRE: Vous comprenez que c'est un contexte différent
là. Le commissaire, ce n'est pas la même chose que le
délégué à la régionale; la loi
prévoit pour lui des pouvoirs beaucoup plus substantiels, qu'elle ne
prévoyait pas pour les délégués qui
n'étaient qu'un mécanisme, un collège électoral,
élisant des responsables à la régionale. De toute
façon, je vous remercie du point de vue, je ne sais pas s'il y avait
d'autre question, il me semble que votre mémoire est assez complet.
M. GIRARD: J'ai d'autres notes que je ne vous ai pas données.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. Girard, nous sommes un peu
bousculés par le temps.
M. GIRARD: Je vais essayer d'être plus bref.
M. SAINT-PIERRE: Oui, mais regardez, M. Girard, il faudrait
peut-être s'en tenir au mémoire que vous nous avez
déposé, qui est consigné au journal des Débats.
(Voir annexe B) Si d'autres membres de la commission avaient des questions,
d'accord. Autrement, vous savez que l'on peut presque retarder l'adoption d'un
projet de loi...
M. GIRARD: Je voudrais ici parler surtout des classes d'accueil, je
pense que cela devrait quand même être regardé dans
les...
M. LE PRESIDENT (Assad): M. Girard, je m'excuse, les membres de la
commission ont épuisé leurs questions, nous devons passer...
M. COUTURE: Est-ce que je pourrais vous demander quelque chose,
messieurs? Nous sommes partis de Montréal pour venir expliquer quelque
chose à un groupe de gens qui sont les représentants du peuple.
M. Girard a quelque chose de très important à dire, je vous
demanderais tout simplement un peu de patience.
M. LE PRESIDENT: L'autre jour, nous avons statué que les
mémoires soient versés au journal des Débats et qu'il y
aurait simplement
des questions qui seraient posées sur les mémoires.
M. GIRARD: Mais ce n'est pas le mémoire que je vous donne, ce
sont mes notes.
M. LE PRESIDENT: Justement, on a demandé que ce soit
présenté à la commission avant.
M. GIRARD: J'ai envoyé mon mémoire, mais j'ai des notes
attachées au mémoire pour les explications. C'est ça que
je voudrais donner...
M. LE PRESIDENT: Mais il n'y a personne de la commission qui a ces
notes-là? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui a des notes? Est-ce qu'elles
ont été publiées?
M. GIRARD: Non, les notes n'ont pas été
publiées.
M. LE PRESIDENT: Je trouve qu'il n'est pas possible de continuer votre
exposé. En tout cas, M. Girard, nous voulons vous remercier de votre
mémoire. Et maintenant, nous allons passer, si vous le voulez, à
la Commission scolaire catholique Saint-Pierre-aux-Liens. Le porte-parole, je
crois que c'est M. Gilles Tétreault? Pardon, voulez-vous approcher,
monsieur, s'il vous plaît?
UNE VOIX: Non, il n'est pas venu. C'est M. Dispaltro.
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous vous identifier, s'il vous plaft, pour le
journal des Débats avant de commencer?
Commission scolaire catholique
Saint-Pierre-aux-Liens.
M. MATHIEU DISPALTRO: J'aimerais que vous me permettiez de vous
présenter les gens qui m'accompagnent ce matin. A ma droite, M.
René Vincent, commissaire d'écoles; à mon extrême
gauche, M. Roger Rivet, commissaire d'écoles; Frère Louis
Beaudoin, directeur au secondaire. Mon nom est Mathieu Dispaltro de la
Commission scolaire de Saint-Pierre-aux-Liens dont nous faisons tous
partie.
Laissez-nous vous exprimer toute notre gratitude pour votre
bienveillance à nous recevoir aujourd'hui. La Commission scolaire de
Saint-Pierre-aux-Iiens accepte le principe de regroupement des commissions
scolaires de l'île de Montréal. Cependant, elle formule des
desirata quant à la répartition de son propre territoire. Les
raisons qui inspirent notre démarche nous apparaissent logiques et
valables. Voici les trois points que nous aimerions souligner et porter
à votre attention. Premièrement...
M. PICARD: M. le Président, est-ce que je pourrais demander qu'on
localise cette commission scolaire-là? Sur l'île de
Montréal, où est-elle située exactement?
M. DISPALTRO: Entre Lachine et la ville de Montréal-Ouest.
M. PICARD: Entre Lachine et Montréal-Ouest, dans Lakeshore.
M. DISPALTRO: Oui, au sud, LaSalle.
M. PICARD: Elle comprend la ville de Saint-Pierre?
M. DISPALTRO: C'est la ville de Saint-Pierre. La Commission scolaire de
Saint-Pierre-aux-Iiens est dans la ville de Saint-Pierre.
M. SAINT-PIERRE: Avant votre mémoire, déjà le 23
septembre je ne sais pas si cela peut aider c'était
l'intention du gouvernement d'apporter un amendement, plusieurs amendements,
mais au moins un à la carte scolaire et de rattacher effectivement
Saint-Pierre-aux-Liens à la région no 4. Alors,
c'est-à-dire changer la limite de la région: la frontière
ouest de la région no 4 serait alors la limite entre votre région
et Montréal-Ouest. Et tout le triangle de Saint-Pierre-aux-Iiens
passerait à la région no 8. Je l'avais déjà
annoncé publiquement, antérieurement, dans un discours, mais je
ne sais pas si...
M. DISPALTRO: Oui, j'avais pris en note vos propos. C'était le
but de notre visite. Nous vous remercions infiniment de votre décision,
ainsi que de nous avoir permis d'être ici présents
aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Dispaltro, ainsi que ses compagnons. On
prendra bonne note de votre représentation.
M. DISPALTRO: Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Pilote): La parole est maintenant à la
Provincial Association of Catholic Teachers.
M. CHARRON: Je m'excuse, M. le Président. Est-ce que je peux
demander au ministre, à propos de la décision qu'il vient
d'annoncer , si cela change la proportion francophone, anglophone à la
commission scolaire no 8?
M. SAINT-PIERRE: Cela va augmenter le nombre de francophones...
M. CHARRON: ... à l'intérieur de 8.
M. LE PRESIDENT: Le Provincial Association of Catholic Teachers,
représenté par M. Patrick McKeefrey, est-il ici? Excusez la
prononciation. Est-ce qu'ils sont présents? Est-ce
que l'Association des éducateurs de l'ouest de Montréal
est ici? M. Gilbert Plante, si vous voulez vous identifier.
Association des éducateurs de l'ouest de
Montreal
M. DUHAIME (Marcel): M. le Président, une première
correction, si vous me permettez. Le représentant de l'Association des
éducateurs de l'ouest de Montréal, Marcel Duhaime est mon nom. M.
Gilbert Plante étant le directeur administratif de l'association, c'est
lui qui a fait les démarches pour les réservations et c'est
pourquoi il y a eu de la confusion.
Les personnes qui m'entourent, M. le Président, sont
également Mlle Micheline Sicotte, présidente de l'Association des
enseignants de Le Royer, qui a préparé conjointement avec nous,
le mémoire que nous vous soumettons et M. Raymond Desilets,
président de la Fédération des enseignants de l'île
de Montréal.
L'Association des enseignants de l'ouest de Montréal
représente tous les enseignants francophones des commissions scolaires
de Saint-Laurent, de Saint-Pierre, de Lachine, de Saint-Sacrement-de-Lachine.
Dorval, Baldwin-Cartier, Sainte-Anne-de-Bellevue et l'île Bizard.
L'Association des enseignants de Le Royer représente les enseignants
francophones des commissions scolaires régionales Le Royer,
Montréal-Est, Anjou, Saint-Léonard, Pointe-aux-Trembles.
Nous apprécions l'attention que le gouvernement porte à
notre voix. Nous nous faisons un devoir de présenter, sur le projet de
loi numéro 28, le présent mémoire. Notre
intérêt immédiat à la réalité scolaire
démontre l'importance historique de ce projet de loi et les nombreuses
interventions qu'il suscite...
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y aurait possibilité de passer
à vos recommandations?
M. DUHAIME: Sauf que, si vous me permettez, M. le Président, pour
qu'on puisse...
M. LE PRESIDENT: Faire un court résumé de votre affaire et
passer aux recommandations après.
M. DUHAIME: D'accord. Les grands objectifs du projet de loi 28, nous les
partageons. Quand on dit du projet de loi 28 qu'il se propose d'unifier les
commissions scolaires, nous sommes d'accord là-dessus. Quand on voit que
le projet 28 se propose de distribuer le pouvoir scolaire à trois
paliers, L'Etat du Québec, un conseil régional scolaire et la
commission scolaire, là-dessus également, nous sommes
d'accord.
Nous sommes d'avis qu'il est temps pour l'île de Montréal
en tout cas pour ce qui est des politiques scolaires au Québec
de s'inscrire de plain-pied dans la collectivité nationale.
Nous nous réjouissons également de voir que les
commissaires d'écoles seront tous élus, quoique nous aurons
quelques commentaires à faire sur les commissaires d'écoles
additionnels, au moment où certaines minorités n'ont pas l'air
d'être représentées de façon satisfaisante.
De toute façon, dans l'ensemble, pour le cadre administratif du
projet de loi, nous tenons à dire qu'il nous plaît et que nous
sommes d'accord sur cela.
Dans une perspective globale d'éducation au Québec, les
mesures adoptées en cette matière se doivent d'être
coordonnées, de suivre l'évolution générale de la
société et de favoriser la meilleure utilisation possible des
fonds publics. L'évolution du système d'éducation doit
donc se réaliser conformément à un plan d'ensemble qui
l'établit d'une façon rationnelle et méthodique. Seul un
organisme ayant une vision globale de la province peut assurer la
conformité du système aux objectifs premiers et ultimes de
l'éducation. C'est à l'Etat et au ministère de l'Education
qu'est dévolu ce rôle.
Egalement, nous trouvons tout à fait justifié que le
ministre puisse et doive assurer un certain contrôle sur tout le
système d'éducation y compris le conseil scolaire. Nous trouvons
qu'il est normal que le ministre de l'Education puisse, jusqu'à un
certain point, mesurer et contrôler l'activité du conseil
régional dans le territoire de l'île de Montréal.
Toutefois, dans l'ordre de l'administration, au niveau du conseil
régional et des commissions scolaires, les pouvoirs du niveau provincial
prévus dans le projet de loi 28 doivent être entendus et compris
dans le sens d'un contrôle normatif du gouvernement provincial. Si le
pouvoir du gouvernement provincial, à notre avis, sur le conseil
scolaire doit être plus que normatif, il nous apparaît que
ça ne respecterait pas la philosophie générale de la Loi
de l'instruction publique.
Il s'agit donc dans les faits d'assurer une véritable
décentralisation des pouvoirs, une participation réelle de la
collectivité à la vie scolaire. Dans cette perspective de la
participation, où une conscience commune devient nécessaire,
où une solidarité entre les personnes et les groupes
impliqués est indispensable, il nous apparaît et nous
tenons à souligner que c'est un point central de notre point de vue sur
le bill 28 nous tenons à souligner que le niveau vital, dynamique
de l'organisation scolaire doit être la commission scolaire.
Le projet de loi 28, dans l'ordre des structures nous apparaît
donc comme un compromis valable entre une centralisation excessive des pouvoirs
et une décentralisation à outrance qui ne serait ni efficace, ni
rentable. Dans cet esprit, nous souhaitons que la version finale du projet de
loi soit plus claire quant à l'étendue des pouvoirs de chacun des
trois paliers: l'Etat, le conseil, la commission.
Dans l'état actuel du texte, nous voyons que
le gouvernement, par les constants renvois au ministre et au conseil des
ministres qu'on exige du conseil scolaire, place celui-ci, à notre avis,
en tutelle permanente. De plus, la définition en même temps trop
large et trop imprécise des pouvoirs du conseil scolaire laisse planer
un doute assez sérieux sur la latitude qu'auront les commissions
scolaires dans leur champ d'activité.
En bref, les trois paliers doivent, à notre avis, l'un par
rapport à l'autre, se situer de telle façon que le conseil ne
soit ni la marionnette du ministère, ni un petit desposte
régional ou une espèce d'Etat dans l'Etat. C'est pourquoi nous
disons qu'il est temps pour l'île de Montréal de s'inscrire dans
la collectivité nationale et on ne voit pas pourquoi le conseil
régional aurait des pouvoirs tels que ce serait un Etat dans l'Etat.
Quant au financement, il est bien sûr que pour les objectifs
d'équité sociale qui sont poursuivis, il est tout à fait
évident que nous sommes d'accord. Quant à l'aspect social, je me
souviens de ce que M. le ministre vient de souligner à une autre
personne à propos de la situation sociale des francophones dans le West
Island et nous avons également à soumettre quelques idées
qui pourraient se cristalliser autour des mots suivants:
Nous croyons que le Québec a mis la charrue devant les boeufs en
procédant à la loi 63, premièrement. Il serait
inadmissible, à notre avis, que la loi 28 n'en soit pas le contrepoids.
Nous savons pertinemment, et dans l'est et dans l'ouest de l'île de
Montréal, les deux extrémités de l'île non
pas les deux extrémistes que pour vivre dans l'ouest donc avec
une suffocante majorité anglophone, le ministre l'a dit, 16 p.c. de
francophones et une coulissière minorité anglophone dans l'est,
nous savons pour notre part que ces petites dispositions qu'on appelait
tantôt l'article des adjoints, à notre avis, ça va saboter
le projet de loi du gouvernement.
M. SAINT-PIERRE: Si vous permettez, dans un débat, c'est un point
intéressant. Si je comprends bien, vous êtes favorable à la
commission scolaire unifiée et vous êtes également
favorable à ce qui me semble la plus grande différence entre le
projet de loi 28 et le projet de loi 62 de l'ancien gouvernement, à
savoir que c'est la commission scolaire unifiée qui a réellement
les pouvoirs et non le conseil scolaire qui, dans le projet de loi 62,
était à la fois l'employeur, le propriétaire des
bâtisses, alors qu'il y a eu un net glissement dans le projet de loi 28
pour donner plus de pouvoirs à la commission scolaire
unifiée.
Mais étant favorable à ceci et je pense qu'on se
rejoint puisqu'étant l'auteur du projet de loi et ayant participé
à la rédaction du projet de loi c'est une des orientations
que nous avons prises dès le départ. Ceci dit, est-ce que nous
n'avons pas le problème que dans l'ouest de l'île de
Montréal je vous l'ai mentionné avec 16 p.c. de
francophones, si on donne tous les pouvoirs au niveau de la commission scolaire
unifiée, il devient alors important de s'assurer que les
minorités, en particulier la minorité francophone dans l'ouest de
la ville, aient des mécanismes pour s'assurer que leurs droits ne seront
pas brimés?
Et si on accepte cette nécessité de mécanismes
car, sans cela, on risque d'avoir commissions scolaires francophones
brimant les droits des minorités, et on peut discuter de ce que sont les
droits, enlevons les privilèges on pourrait avoir quatre
commissions scolaires unifiées qui, elles, pourraient brimer les droits
des francophones en pleine province de Québec.
Tenant compte de ça, est-ce que le législateur n'a pas la
responsabilité de tenter d'avoir dans un projet de loi non pas des
bâtons dans les roues qui empêcheraient la loi d'atteindre ses
objectifs mais des mécanismes permettant aux deux minorités de
l'est et de l'ouest en sens inverse de s'assurer que leurs droits ne sont pas
brimés? Ces droits linguistiques qui s'appliquent à la fois pour
les francophones ou dans anglophones, si on est dans l'est ou dans l'ouest,
impliquent d'une part je tiens à le souligner publiquement
le fait que au lieu que les commissaires soient désignés par le
gouvernement, on puisse prendre une autre formule, puisque nous ne voulions pas
changer le vote démocratique. Ce que nous voulions donner, c'est une
voix au chapitre à la minorité, lui donner une oreille pour
savoir ce qui se passe à la commission scolaire. C'était
l'intention du gouvernement de changer le projet de loi pour qu'au lieu d'avoir
des commissaires, des observateurs soient nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil lorsque la minorité linguistique n'a
aucun représentant, et les observateurs qui ont tous les droits et les
pouvoirs des commissaires sauf le droit de vote. Si cela peut respecter plus la
démocratie, cela a atteint quand même notre objectif. Quant
à l'autre type de garantie qui nous semblait nécessaire, je pense
encore aux 16 p.c. de francophones dans l'ouest de la ville de Montréal,
dans la commission scolaire no 10. Est-ce qu'ils n'ont pas besoin d'avoir dans
les postes clés non pas un dédoublement des structures mais un
service au personnel, un service aux étudiants, un service des
programmes, avoir au moins l'assurance de l'adjoint de langue
française?
M. DUHAIME: Ce que nous avons à dire à ce sujet, c'est que
dans une collectivité normalement organisée, les droits des
minorités, à notre avis, relèvent d'un pouvoir politique
et d'un pouvoir politique global comme le gouvernement d'un Etat. A notre avis,
il n'est pas normal de confier ça à des fonctionnaires comme des
adjoints ou des sous-chefs de ci et de ça. A notre avis, c'est
créer un pouvoir parallèle, c'est créer par la loi des
"jobs" qui vont servir...
M. SAINT-PIERRE: Je ne pense pas. Lorsque nous parlons de ces trois
postes clés, pour les minorités, avec onze commissions
scolaires, cela fait 33 postes. Ayez à l'esprit qu'uniquement
à la CECM il y a 1,100 employés. Ce n'est pas exagérer,
lorsque vous avez 50,000 élèves, de dire qu'il y a un adjoint qui
sera de la langue de la minorité le moins que la minorité
puisse avoir, c'est 5,000 ou 7,000 élèves et de dire qu'il
y aura un type de minorité. Je ne trouve pas qu'on se crée des
structures parallèles. Ce que la loi fait, c'est que le pouvoir
politique représenté par les législateurs impose un carcan
aux pouvoirs établis localement, compte tenu qu'il y a des
minorités qui méritent d'être protégées ou
qui ne méritent pas d'être protégées, si on n'avait
pas raison.
M. DUHAIME: A notre avis, ce n'est pas une question de nombre, c'est
bien clair que 33 personnes sur une couple de cents ce n'est pas tellement
important comme nombre. Ce n'est donc pas une question de nombre, c'est une
question d'impact et c'est également une question de l'importance de la
fonction qui est consacrée par une loi.
M. SAINT-PIERRE: Vous êtes vous-même dans l'est de
Montréal.
M. DUHAIME: Je suis dans l'ouest, à Pointe-Claire.
M. SAINT-PIERRE: Dans l'ouest, vous avez combien d'élèves
francophones à la commission scolaire no 10?
M. DUHAIME: Je ne m'en souviens plus.
M. SAINT-PIERRE: J'ai les chiffres ici. Il y a 7,000
élèves. Ne trouvez-vous pas que c'est assurer que ça va
donner de bonnes chances de bien aller si on empêche c'est ce que
nous faisons dans le projet de loi les commissaires de ne nommer aucun
francophone dans les trois postes que je vous ai mentionnés? On les
force à avoir au moins un adjoint qui va être francophone. Je ne
dis pas qu'ils ne le feraient pas normalement. La loi est pour donner des
garde-fous.
M. DUHAIME: Ce que je peux faire là-dessus, c'est à partir
de la réalité et vous décrire une situation. Prenons une
commission scolaire de Laval, c'est la commission scolaire qui sera la
commission scolaire no 10; la commission scolaire Baldwin-Cartier
présentement, à toutes fins pratiques, c'est la région no
10. Il y a là des commissaires d'écoles francophones. Il y en a
pas mal. Il y a là une répartition d'à peu près
50-50 quoique de plus en plus cela devient 60-40 chez les catholiques, anglais
et français.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, il faut ajouter à la région
10 le Lakeshore Regional Board.
M. DUHAIME: C'est bien clair que cela deviendra les 16 p.c. dont vous
parlez. Dans la situation actuelle où nous ne sommes pas 16 p.c. mais 40
p.c. à 50 p.c, chaque fois dans la mesure où j'ai pu le
vérifier dans les cinq ou six dernières années
qu'il y a des conflits d'intérêts qui se soulèvent, chaque
fois qu'il se bâtit des écoles nouvelles, chaque fois qu'il y a
des problèmes de bibliothèque ou de transport scolaire, cela se
règle rarement à l'avantage des intérêts des
francophones. Prenons un exemple. L'horaire des autobus. Il est ainsi fait que
depuis trois ou quatre ans ce sont toujours les francophones qui finissent plus
tard. Vous me direz que nous fendons les cheveux en quatre mais à mon
avis, c'est ça le contexte culturel, le contexte social dans lequel nous
nous inscrivons dans le West Island.
Je dis, quant à moi, que les francophones du West Island, comme
n'importe quelle autre minorité dans le Québec, sont partie d'une
majorité nationale et c'est là qu'ils devraient trouver leur
force, pas dans trois ou quatre fonctionnaires d'une petite structure
régionale.
Je dis que si nous avions au Québec une structure scolaire
française, nationale qui, par sa structure globale, garantit les droits
des minorités et on n'est pas plus sauvage que d'autres de
la même façon que la minorité anglophone du Québec
est partie d'une majorité nationale et ne s'en porte pas très mal
je n'ai pas besoin de rappeler la loi 63 la minorité
francophone du West Island est partie d'une majorité
québécoise. C'est dans cette majorité
québécoise qu'elle doit puiser son statut national de
collectivité, pas dans de petites dispositions d'une loi qui fait que
dans cette région les gens pourront toujours défouler leur
frustration à travers trois ou quatre fonctionnaires.
M. SAINT-PIERRE: C'est donc votre position que pour assurer des
garanties au groupe francophone, pour prendre ce cas d'espèce que vous
avez soulevé dans l'ouest, finalement ce groupe va retrouver ses appuis
ou ses garanties au niveau du conseil scolaire ou au niveau du ministère
de l'Education et que là, il va faire partie d'une majorité.
M. DUHAIME: Du gouvernement, pas du conseil scolaire.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, ça me frappe parce que c'est un
point assez important. Est-ce que les parents et la population francophone ne
se sentent pas frustrés, lésés et cela s'appliquerait de
même aux anglophones? Est-ce que, somme toute, ce ne sont pas souvent de
très petites décisions qui sont presque prises au jour le jour?
Au mois de septembre, quand on dit à la mère de famille: Votre
enfant ne va pas à l'école de l'autre côté de la rue
mais il va à l'école à un demi-mille, est-ce que ce ne
sont pas ces petites décisions qui, souvent, causent le plus de
frustrations? Dieu sait qu'on va demander aux parents de faire une
réunion de parents sur le projet de loi 28, que vous y aurez
peut-être 200 personnes, alors qu'au mois de septembre, pour un
problème de transport scolaire, vous aurez une pétition de 950
parents et ils vont descendre je ne sais où.
Je me demande finalement s'il n'y a pas nécessité pour ces
petites décisions d'avoir certains mécanismes qui nous assurent
qu'il y ait certains garde-fous? C'est évident que le conseil scolaire
ou le ministère de l'Education, le ministre de l'Education
à moins qu'on veuille changer les règles du jeu ne peut
pas intervenir dans les décisions de toutes les petites commissions
scolaires. Même entre anglophones, il y a des disputes. J'étais
hier avec le groupe du West Island Regional Board et là, entre
Deux-Montagnes et l'île Jésus, on ne s'accorde pas et pourtant on
est entre anglophones et entre protestants. On ne s'accorde pas pour de petites
décisions, l'implantation d'écoles.
M. DUHAIME : Référant à cette histoire de petites
décisions, il nous arrive souvent entre nous de faire un
parallèle entre le West Island et le Manitoba, comme situation
culturelle. La culture française ne circule pas dans le West Island.
Allez au Fairview pour vous acheter un livre en français, une revue,
maintenant, c'est inaccessible. Nous sommes dans une situation telle qu'il
existe même un Cercle des amis de la culture française avec son
siège social au Stewart Hall. C'est quelque chose. Ce sont toutes des
choses anodines, ce sont des bagatelles...
M. SEGUIN: Je voudrais faire un commentaire.
M. DUHAIME: ... mais tout ça c'est en filigrane et ça
traduit la situation d'un groupe de personnes qui vivent en anglais, qui
travaillent pour des Anglais et qui ont peur à leur "job" s'il y vont un
peu trop raide. Vous m'excuserez ce langage un peu cavalier à ce
moment-ci, mais je crains qu'on arrive à un moment où on me dise:
Monsieur, le temps est écoulé. Je voudrais être bien
sûr qu'on a vidé notre question. Je n'ai pas l'intention non plus
de vous faire découvrir l'univers. Je sais que, comme hommes politiques,
vous êtes tous conscients de ça.
Mais comme responsables d'un groupe d'enseignants de ce territoire, je
crois qu'il est de notre devoir de venir le souligner à la commission
parlementaire du projet de loi 28. Autrement dit, cette histoire de langue et
de Stewart Hall, ce sont toutes des bagatelles. Mais ça s'inscrit depuis
quatre, cinq, dix et douze ans, et c'est continuellement croissant, de telle
sorte que nous ne vivons pas dans un Québec francophone dans le West
Island, nous vivons au Manitoba.
Ceci est dit tout simplement pour comprendre en termes de comparaison et
avec tout le respect qui est dû aux personnes. Nous n'avons aucun
intérêt à nous en prendre à des personnes, ce sont
des idées, des situations que nous essayons d'expliquer...
M. SAINT-PIERRE: J'ai un dernier point à soulever; après,
peut-être le député de Baldwin-Cartier aura-t-il quelque
chose à soulever. Les syndicats d'enseignants et je pense en
particulier à l'Alliance et aussi à la CEQ étaient
en désaccord sur votre point de vue. Ils auraient
préféré que le conseil scolaire ait plus de pouvoirs et en
particulier que le conseil scolaire soit l'employeur de tous les
enseignants.
M. DUHAIME: Je ne pense pas que la CEQ ait dit cela, l'Alliance, la
CSN.
M. SAINT-PIERRE: Pas la CEQ, je m'excuse. Si je comprends bien, dans
votre mémoire, vous seriez favorables à avoir onze employeurs et
présumément en tout cas à onze niveaux, nous pourrions
retrouver des syndicats. Sans aller dans les détails, est-ce que cela
doit être francophone, anglophone, catholique ou protestant?
M. DUHAIME: Cela, M. le ministre, c'est l'autre panneau ou l'autre volet
de notre présentation et nous le trouvons plus important, parce que ce
que nous venons de dire là, tout le monde l'a déjà dit
finalement; vous n'aviez pas besoin de nous pour vous dire cela.
Au sujet de cette histoire d'employeurs, fondamentalement, il nous
apparaît que le siège de la démocratie scolaire au
Québec, c'est la commission scolaire. Il nous apparaît que le
conseil scolaire est un palier intermédiaire entre l'Etat responsable
à la fois des lois des minorités et du reste, et la commission
scolaire où la participation du citoyen, du contribuable et du
travailleur, l'enseignant, où la participation de ces gens à
l'enseignement doit s'exercer. Nous disons que, pour que l'enseignant puisse
participer démocratiquement de façon valable, pour qu'il puisse
rencontrer rapidement un interlocuteur valable et accessible, pour que le
citoyen et le contribuable puissent également rencontrer des
interlocuteurs valables et rapidement accessibles, il faut onze commissions
scolaires employeurs. Employeurs, parce que nous trouvons que nous avons besoin
de cela pour avoir un interlocuteur valable, rapidement accessible.
A notre avis, c'est une question de démocratie de participation.
Si l'on se met à créer des monstres, cela va donner comme
résultat que les citoyens vont devenir des consommateurs
d'éducation, mais l'interlocuteur va être trop loin. Il ne sera
pas possible pour eux de participer, de développer un sentiment
d'appartenance, de développer un sentiment de responsabilité et
de développer des contacts humains qui aient du sens. A notre avis,
c'est cela le fond de l'argument qui finit par aboutir à cette
conclusion que la commission scolaire soit l'employeur.
M. SAINT-PIERRE: Plusieurs groupes nous l'ont demandé.
Sûrement, j'espère qu'il y aura amplement de consultation,
d'ailleurs, je pense qu'il y a un groupe de travail qui tente d'examiner cet
aspect de relation de travail entre les ministères du Travail et
nous-mêmes, dans le projet de loi 28. Ce sont des amendements qui
pourraient sembler techniques, mais qui vont peut-être nous aider tous
à vivre la période de transition. Comment voyez-vous, avez les
onze employeurs définis, le problème d'avoir des enseignants qui,
dans le moment, appartiennent à des syndicats qui sont
différenciés par la langue dans certains cas, et par la religion,
dans d'autres? Comment voyez-vous cela dans les faits? Quelles recommandations
avez-vous? Est-ce que vous voyez onze syndicats unifiés si je
peux employer l'expression avec les problèmes qui pourraient se
poser au plan provincial ou compte tenu des minorités dans chacune des
commissions scolaires unifiées? Une libre appartenance de chaque
syndiqué, une appartenance obligatoire à l'une des deux ou trois
fédérations provinciales ou à des syndicats à
l'échelle de l'île? Certains problèmes étant
réglés par un syndicat local au niveau de la commission scolaire
unifiée, mais d'autres retrouvant une participation au niveau de
l'île, comment voyez-vous cela ou est-ce que vous voyez plutôt les
syndicats séparés?
M. DUHAIME: Je vais laisser M. Désilets répondre à
cela.
M. DESILETS: La question s'est posée pour nous du
côté syndical, mais M. le Président de l'ouest de
Montréal a parlé, évidemment, en fonction du bill 28 et de
la structure scolaire comme telle. Notre philosophie de donner passablement de
pouvoir aux commissions scolaires, cela c'est en rapport avec l'organisation
scolaire comme telle, pédagogique, de l'administration. Evidemment, il y
a un volet, il y a le revers de cela et ce sont les structures syndicales.
La décision n'est pas prise finalement à savoir comment
les syndicats d'enseignants ou les associations d'enseignants vont se
regrouper. Cependant, nous aimerions bien qu'il y ait justement cet accord
entre les deux ministères de l'Education et du Travail, de telle sorte
que l'on puisse sauver les droits collectifs et les droits individuels des
enseignants, entre autres. A ce moment-là, essayer de s'organiser pour
que l'on rationalise tout le système d'accréditation.
Est-ce que les enseignants vont vouloir se regrouper dans un immense
syndicat? Je ne peux pas présumer de leur décision. Ce que nous
demandons, cependant, nous, c'est que l'employeur soit au niveau local,
c'est-à-dire que ce soit la commission scolaire et, à ce
moment-là, si les syndiqués, les enseignants ou d'autres types de
travailleurs veulent se regrouper, soit à l'intérieur de
fédérations provinciales, régionales, ce sera à
discuter par la suite. Ce que l'on veut, cependant, c'est qu'il y ait des
enseignants qui ont une convention collective et qui ont des droits collectifs
et individuels; et de ceux-là, il ne faudrait peut-être pas trop
en perdre. C'est pour cela que cela va prendre une coordination et une
planification.
M. SAINT-PIERRE: Mais, quels sont les principes que, d'après
vous, le législateur devrait retenir? Est-ce qu'un des principes serait
la libre appartenance de chaque enseignant à un syndicat qui pourrait
être divisé, à la fois sur la langue et la religion?
M. DESILETS: Je pense bien que pour le code du travail, on a entendu
parler d'ailleurs d'amendements possibles au code du travail, la philosophie du
travail, actuellement dans la province, c'est le code du travail. Des
représentations seront faites, j'en suis convaincu, de la part de la
CEQ, aux gens qui sont responsables de ces amendements-là, de telle
sorte qu'on puisse être honnête envers tout le monde et causer le
moins de préjudices possible.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député d'Olier.
M. PICARD: Je regrette, M. le Président, mais on a répondu
à ma question.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Robert
Baldwin.
M. SEGUIN: Je ferai tout simplement une mise au point. Tout d'abord, M.
le Président, on a fait un commentaire tout à l'heure autour de
l'utilisation de l'établissement culturel dans la ville de
Pointe-Claire, communément reconnu comme Stewart Hall. Je voudrais
aussi, en faisant cette mise au point, parce que cela m'a piqué joliment
que de faire dire ou de faire insinuer, par exemple, qu'il y avait une
tolérance ou qu'il semblait y avoir une tolérance qu'un certain
groupe d'une expression ou d'une autre, il fallait qu'ils occupent un endroit
qui s'appelait Stewart Hall; quelle insulte que d'être obligés de
se réunir dans un endroit semblable! Il reste tout de même, et je
voudrais le dire ici, pour la commission, que dans ce fameux centre Stewart
Hall, qui est un des centres culturels, je le dis en toute humilité et
sans complexe, un des centres culturels, le plus pur peut-être, qui
existe dans la province et celui qui est strictement culturel dans le vrai sens
du mot, d'après les expositions et d'après ce qui se passe dans
ce centre.
Je voudrais aussi dire que Stewart Hall porte ce nom, pour la simple
raison que la personne, Mme Béatrice Stewart, a bien voulu donner
gratuitement à la ville un immeuble d'une valeur d'au-dessus d'un
million de dollars et le parc annexé. Je pense qu'il est très
juste de reconnaître, en nommant ce centre, en le nommant Stewart Hall en
mémoire de la
personne qui a bien voulu donner et qui maintient un fonds de soutien en
même temps, de quelques centaines de milliers de dollars.
Je voudrais aussi indiquer pour ceux qui ont voulu peut-être lire
dans les commentaires qu'il y avait une espèce de persécution
pour un groupe ou pour un autre, que le seul groupe social, le seul
événement social d'importance, qui se tient à Stewart Hall
au cours de l'année, est justement les fêtes de la Saint-Jean, et
c'est le seul groupe qui est autorisé par la municipalité
à occuper, pour un événement du genre, le Stewart Hall. Ce
ne sont ni les Anglais, ni les autres qui y ont droit.
Je voudrais aussi dire que celui qui parlait tout à l'heure
semblait donner des impressions que, dans l'ouest de l'île, nous vivions
en pays étranger, soit du Manitoba ou de l'Ouest. Tel n'est pas le cas,
pour y avoir vécu la grande partie de ma vie et m'être
mêlé à la population. Il n'y a pas de frustration
populaire; s'il y a frustration, c'est peut-être parmi le groupe
d'enseignants, un certain groupe d'enseignants, dans une certaine école.
Il ne faudrait pas attribuer des commentaires qui se sont faits, comme
étant d'ordre général et s'appliquant à toute la
population, à toutes les institutions d'enseignement, ou à tout
ce qui peut se faire dans ce secteur. Il faut quand même
reconnaître qu'il y a 85 p.c. de la population qui est d'expression
anglaise; il faut aussi reconnaître que cette population est
divisée quasi moitié-moitié: catholique et protestante, et
dans la partie catholique, il faut la subdiviser encore entre catholiques
d'expression française et catholiques d'expression anglaise. La
tâche n'est pas facile.
Il faut aussi reconnaître que cette population est une population
qui est arrivée dans ce secteur, en grande partie de certaines autres
provinces du Canada et de quelques autres pays dans le monde. Ce n'est pas une
population, en majorité, qui serait déménagée de la
ville de Montréal, à un moment donné, dans le secteur
ouest. C'est plutôt l'accroissement économique du milieu
montréalais qui a permis à certains groupes de s'établir
là, venant d'autres provinces plutôt qu'ailleurs. C'est un autre
phénomène qu'il faut considérer et qu'il faut
reconnaître. Ces gens-là ne sont pas prêts
immédiatement à adopter des attitudes tout à fait
différentes, soit au sujet de l'enseignement, soit au sujet de
comportement social ou autre chose.
Justement, un des points que je voulais apporter, c'était sur une
des recommandations, c'était sur l'abolition du poste des adjoints.
Je crois que ce serait une erreur, je le dis, à titre personnel,
parce que si la population francophone de cette région n'est que de 15
p.c, 16 p.c. ou 18 p.c, une fois qu'il y aura unité dans les deux
commissions, il est bon de garantir cette protection au cas où on
faillirait à nommer ou à établir par la voie normale de
l'électorat des gens qui pourraient surveiller cette
minorité.
Je crois aussi que, présentement, à la commission
Baldwin-Cartier, qui est une commission catholique, la majorité des
conseillers ou des commissaires sont d'expression française, y compris
le président. S'il y a un problème de transport, il ne faudrait
pas accuser une majorité ou accuser la majorité de l'île
d'être responsable directement ou indirecrement d'une lacune, je pense
que c'est plutôt un problème administratif. Je serais curieux de
savoir si les cours finissent en même temps, s'il y a
préférence pour l'autobus à ce moment-là ou si
c'est parce que peut-être les cours d'un côté se terminent
un peu plus tard que de l'autre côté.
Economiquement, on utilise les autobus pour le transport de ceux qui
sont prêts. De toute façon, puisque cette commission est
présentement en majorité d'expression française la
commission Baldwin-Cartier je ne vois pas pourquoi, à
l'intérieur de cette commission qui a la même autorité que
n'importe quelle autre commission scolaire existante, on ne pourrait pas
résoudre des problèmes d'ordre plutôt interne ou des
problèmes d'administration. C'est peut-être un peu à cause
de ces difficultés qui ont existé dans plusieurs commissions
scolaires et qui continuent à exister que je suis en faveur de
l'unification des commissions scolaires. C'est afin que, si dans certains
milieux il y a une bonne administration, on puisse peut-être, grâce
à cette bonne administration, influencer les secteurs qui ont une moins
bonne administration. De cette façon, le contribuable sera plus
récompensé pour les efforts de ses contributions.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, je voulais juste ajouter un point,
parce que je me sens en devoir de le faire, à la suite des propos du
député de Baldwin, qui voulaient en tout cas contredire un peu la
teneur des propos de M. Duhaime. Je suis natif de cette région du West
Island, j'y ai vécu 19 de mes 25 années. C'est la première
fois que j'entendais l'expression, mais j'ai vraiment eu l'impression pendant
que j'étais là-bas, en particulier lorsque je suis devenu un
citoyen un peu plus conscient, à 17, 18, 19 ans, d'appartenir à
une véritable minorité. Le sentiment n'a peut-être pas
encore atteint les quartiers-généraux du député de
Robert-Baldwin, mais ce sentiment-là est grandissant chez les
francophones de cette partie de Montréal. C'est un fait que, pour nous,
il fallait faire un saut jusque dans le centre-ville, encore une fois avec
toutes les réserves que cela implique, mais en tout cas, au coeur de
Montréal, pour retrouver une atmosphère française qui
n'existe pas là-bas.
J'aurais une question, M. Duhaime, si vous me le permettez,
peut-être allez-vous la trouver curieuse, mais elle est importante, elle
porte sur la confessionnalité. Vous avez demandé que la loi
précise les limites de surveillance que peu-
vent exercer les comités confessionnels quant aux
règlements pertinents du Conseil supérieur. Je vais vous demander
à vous, dans l'hypothèse où on a demain trois types
d'école confessionnelle: catholique, protestante, neutre, ce que cela
signifie pour les enseignants que de travailler. Est-ce que cette
délimitation va avoir un effet sur la liberté des enseignants,
sur le choix de s'inscrire dans un type d'école plutôt que dans
une autre? Est-ce que vous voyez des différences fondamentales sur le
plan pédagogique, sur le plan de votre travail professionnel au fait
d'enseigner dans une école qui professe une confessionnalité
plutôt qu'une autre?
M. DUHAIME: Micheline pourra vous en dire un peu plus, mais je peux vous
dire déjà là-dessus que l'histoire de connaître les
limites de la surveillance, pour nous, c'est surtout sur la dimension sociale
de ce que pourrait amener cette surveillance. Ce que nous craignons ou ce que
nous craindrions véritablement, c'est que la création de ces
comités confessionnels ressuscite ou suscite certains réflexes un
peu inquisiteurs au niveau de la confessionnalité.
Si, par exemple, ce comité-là a sa surveillance à
exercer dans la nomination d'un principal d'une école catholique,
qu'est-ce que c'est que cette surveillance-là? Elle va jusqu'où?
Dans le mémoire, on dit: Il est prévu au bill 28 que ce
comité existera, il est prévu que le fonctionnement de ces
comités sera déterminé par arrêtés en
conseil". On dit ces arrêtés-là, il faudrait
peut-être prévoir aussi que les gens intéressées
puissent y dire leur mot, avant qu'il ne soit réalisé. Mais ce
n'est pas tellement parce qu'on craint qu'on vienne nous embêter dans
notre travail. Au contraire, à la démocratie, on y croit autant
que tout le monde, c'est qu'on ne voudrait pas que cela prenne une allure
inquisitrice, ces surveillances confessionnelles. Va-t-il à la messe,
n'y va-t-il pas, est-il marié, est-il divorcé? Là, je fais
des caricatures qui ne sont pas si loin que ça de la
réalité.
Parlant de réalité à décrire,
également, un mot sur ce que je n'ai pas eu le temps de terminer
tantôt. Dans nos écoles du West Island il faut que
ça se sache, la commission Gendron est venue nous voir nous avons
jusqu'à 30 p.c. de nos élèves francophones dans les
écoles francophones qui ne parlent qu'en anglais et personne dans la
situation actuelle n'est bienvenu de le leur reprocher. D'abord, si on
"charrie" les élèves parce qu'ils font cela, on se place dans une
situation où nous sommes soumis à un certain type de terrorisme
intellectuel; d'autre part, on ne peut pas reprocher à ces
élèves de fonctionner comme cela dans le milieu dans lequel ils
vivent. Moi, je n'essaie pas de monter en épingle les cas marginaux ou
des "bébelles", je vous donne des exemples qui vous disent comment cela
s'inscrit en filigrane de la vie culturelle du groupe francophone. Il y en a
des tas d'autres, comme par exemple, la transformation des noms des gens: des
Louis-Philippe, cela devient des "Phil", des Arthur, cela devient des "Art",
etc. Cela, ce sont des choses qui s'inscrivent et qui traduisent un
contexte.
UNE VOIX: Il n'y a pas de plus bel exemple.
M. DUHAIME: Maintenant, j'aimerais que Micheline ajoute des commentaires
à la réponse que j'ai faite à M. Charron.
MME SICOTTE: Ce que je voudrais ajouter là-dessus, pour aller
dans le même sens que ce que mentionnait M. Duhaime tout à
l'heure, c'est que, au sein du bill 28, les articles concernant les
comités confessionnels sont très minces, en ce sens que
effectivement, on ne définit pas ce qu'est une école
confessionnelle, une école catholique, protestante ou neutre. Est-ce que
c'est une école au sens d'une école de pensée, ou si c'est
une école au sens d'une bâtisse physique?
M. SAINT-PIERRE: Actuellement, il n'appartient ni au ministre, ni aux
commissaires d'écoles de définir l'école catholique. Cela
revient au comité catholique du Conseil supérieur de
l'éducation qui, par une réglementation, peut justement, non pas
définir uniquement les critères, mais même accorder une
reconnaissance de droit à une école en particulier pour la
reconnaître catholique.
MME SICOTTE: Là, vous parlez d'une école au sens d'une
entité physique.
M. SAINT-PIERRE: Non là, je parle de l'école telle que
définie dans le bill 27, qui est une collectivité
d'élèves, de professeurs et d'un principal et qui, lorsque nous
aurons des règlements du comité catholique, pour satisfaire aux
exigences du comité catholique, devra être conforme à
certains critères. Dans notre législation, la définition
de l'école catholique revient au comité catholique.
MME SICOTTE: Alors, ceci étant dit, voyant justement tout cet
aspect de vague, d'imprécision, devant lequel on se retrouve face
à ces quatre articles-là, je pense qu'il y a raison d'être
assez prudent sur l'instauration, qui semble claire, d'un comité de
surveillance, parce qu'en fait c'est la partie qui est articulée au sein
du bill 28. Alors, articuler un rôle de surveillance à un
comité formé de trois parents, alors que rien d'autre autour
n'est précisé, ni agencé... On se pose quand même de
sérieuses questions, à ce moment-là, et justement les
mêmes questions que posait M. Charron, à savoir ce qui arriverait
des enseignants. Est-ce que cela prendra une certaine sélection pour
enseigner dans l'une ou l'autre des trois écoles qui pourront exister,
selon qu'on enseigne les mathématiques ou que l'on enseigne la
géographie ou quoi? Est-ce que cela demandera une espèce de
sélection? En fait, il y a ici une part d'interrogation qui est
très large et qui effecti-
vement, nous place dans un contexte qui ne correspond vraiment pas,
peut-être, à ce qu'on est quand même prêt à
accepter, à savoir que les parents peuvent choisir pour leurs enfants la
confessionnalité qu'ils désirent.
Cela, je pense, est clair et c'est acquis.
M. SAINT-PIERRE : Les parents le réclament également. Dans
la loi actuelle, vous reconnaissez qu'il n'appartient pas au ministre on
ne parlera pas de problème de classification mais au
comité catholique d'établir les qualifications additionnelles
présumément ou complémentaires que devraient avoir les
enseignants pour enseigner dans une école catholique. Jusqu'ici, le
comité catholique, pour diverses raisons, n'a pas exercé ce droit
de réglementation, mais depuis 1964 il possède ce droit et il
peut à tout instant décider de l'exercer.
MME SICOTTE: A ce moment-là, M. Saint-Pierre, si on parle surtout
de collectivité, on pourrait dire qu'à l'intérieur d'une
collectivité il pourrait y avoir des enfants dont les parents
désirent qu'ils aient une formation dans une école catholique,
d'autres dans une école protestante et d'autres dans une école
neutre, et ils pourraient se retrouver au bout de la course dans une même
entité géographique, dans une même structure
géographique.
M. SAINT-PIERRE: Ce qui veut dire "structure" dans le sens
"d'école"?
MME SICOTTE: Structure, une école physique.
M. SAINT-PIERRE: Physique. Mais l'école est chaque fois
définie non pas comme une école physique mais comme la
collectivité qui, sur le plan pédagogique, a un lien
hiérarchique entre des instituteurs et un principal d'une école
dite catholique. En d'autres termes, je serais déçu si la
définition de l'école catholique était une
définition physique, de brique ou de pierre. C'est une
définition, j'imagine, sur des critères de ce qu'est la vie
à l'intérieur de l'école catholique.
MME SICOTTE: Ce que je tente de vous dire, c'est qu'à
l'intérieur d'une collectivité donnée, compte tenu qu'on
veut correspondre à ce que désirent les parents pour donner
l'éducation à leurs enfants, on pourrait se ramasser dans une
situation où il y aurait un pluralisme effectivement et pour
répondre justement à des besoins d'enseignement, au sens
académique du mot, qu'il faille regrouper des enfants de
différentes confessionnalités. C'est là une situation avec
laquelle il faudra éventuellement composer aussi.
M. SAINT-PIERRE: A l'intérieur de la classe pour un
enseignement...
MME SICOTTE: Est-ce que ce sera la classe, est-ce que ce sera un groupe
de classes? C'est peut-être possible qu'on parle plutôt d'un groupe
de classes. En tout cas, ce sont toutes des modalités, qui ne sont pas
du tout précisées actuellement. Vous dites que ça
relève d'un autre comité, soit, mais il reste qu'à ce
moment-là, c'est très vague et l'existence d'un comité de
surveillance, tel que c'est prescrit, cela nous apparaît n'être
peut-être pas suffisamment cohérent actuellement.
M. SAINT-PIERRE: Le droit de consultation, l'obligation de consulter le
comité catholique, comité local confessionnel, pour la nomination
d'un principal, est-ce que ça vous semble une disposition, compte tenu
que nous avons des commissions scolaires unifiées, que dans un milieu
donné, les commissaires à très grande majorité
pourraient être soit des juifs, soit des protestants? Ce pouvoir non pas
de décision mais de consultation du comité confessionnel, est-ce
que ça vous semble correspondre au bien commun?
MME SICOTTE: Je pense que M. Duhaime a répondu en ce sens tout
à l'heure. La consultation qui pourrait être faite auprès
d'un tel comité,. ça vient faire quoi finalement, la consultation
des parents sur un principal donné? Surtout si on tient toujours pour
acquis, parce que ce n'est pas clair du tout pour moi, que le principal n'aura
dans son école physique, dans sa collectivité, que des enfants
dont la formation se fera d'une façon catholique ou d'une façon
protestante.
M. SAINT-PIERRE: Pour moi, c'est clair par exemple.
MME SICOTTE: C'est tout ce que nous avons à ajouter.
M. SAINT-PIERRE: Une fois qu'on donne le droit aux parents à
l'école catholique, à l'école protestante et à
l'école neutre, et qu'on définit l'école comme une
entité avec un lien hiérarchique pédagogique entre les
instituteurs et un principal, il me semble impossible qu'un principal
d'école catholique ait sous ses ordres non pas des enseignants de foi
protestante mais des élèves qui ont choisi une école
protestante. Il doit avoir sous ses ordres uniquement des élèves
dont les parents ont choisi un enseignement catholique.
M. CHARRON: Alors, ça veut dire que, lorsqu'il y a cohabitation
du groupe catholique et du groupe protestant dans le même édifice,
il y aura deux principaux.
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. CHARRON: Un qui s'occupera des catholiques et un des protestants.
M. SAINT-PIERRE: C'est ça.
M. CHARRON: Mais ça remet en question toute la théorie des
défenseurs de l'école confessionnelle qui nous l'ont
définie comme une école à atmosphère
spéciale.
M. SAINT-PIERRE: ...je ne vois pas le problème. Je pense qu'il
est possible d'avoir dans le même lieu physique on en a des cas
une école à atmosphère catholique et une autre
entité regroupant d'autres personnes avec d'autres enseignants dans une
atmosphère différente, une atmosphère protestante. Ce
seront quand même des cas extrêmes.
M. CHARRON: D'une atmosphère oecuménique.
M. CARDINAL: M. le Président, si vous me permettez, je me demande
si la difficulté d'une entente entre les parties ne vient pas du fait
que ce n'est pas le projet de loi 28 on le répète une
autre fois qui règle cela mais le projet de loi 27.
Les deux projets de loi ne sont pas des lois in se, ce sont des
amendements à une vétuste loi qui s'appelle la Loi de
l'instruction publique.
M. DUHAIME: A propos de la définition du mot "école", au
fond, pour revenir sur cette histoire de confessionnalité, les
comités consultatifs, fort bien, mais on veut savoir si ces
comités-là ne seront que consultatifs. Autrement dit, il est dans
la dynamique des choses que les comités consultatifs ne demeurent
consultatifs que dans la mesure où ils se contentent d'être
consultés, parce qu'ils peuvent faire jouer des influences, c'est connu;
on en a des comités consultatifs, nous les enseignants, on connaît
leurs limites et leurs possibilités.
Sur la définition du mot "école", on a voulu y revenir
même si elle était dans le bill 27, et surtout parce qu'elle est
dans le bill 27, parce qu'à notre avis il y a une chose qu'il faut
éviter, et ça existe déjà, c'est surtout dans
l'ouest, toujours à cause du contexte socio-culturel que je vous
décrivais tantôt. Il faut éviter que vous ayez un
groupuscule ou petit groupe d'élèves assemblés dans une
école où vous avez une grosse masse d'anglophones, parce qu'alors
l'école deviendra un instrument d'assimilation galopante à une
minorité ou majorité localisée.
On a déjà, à Dorval, cinq classes francophones dans
une école où il y en a 17 anglophones. La cour de
récréation est anglaise, les enseignants doivent aller dans une
autre école pour des réunions de personnel, c'est quelque chose
d'incroyable. Cela aurait pu être l'inverse mais il aurait fallu
déplacer les Anglais d'école et ils n'ont jamais voulu. Autre
exemple: les écoles neuves qui se bâtissent dans ce
territoire-là sont aux anglophones. Il y a une école neuve qu'on
a eue et c'est Bourgault qui l'a fait bâtir. Vous vous souvenez du
"chiard" de l'école de Pierrefonds.
Il n'est pas possible de faire une preuve logique, rationnelle, froide
et inattaquable dans une situation comme celle-là. Ce sont des choses
qui se traduisent dans le quotidien et qui se voient dans le filigrane de
l'existence socioculturelle d'une collectivité. On pourra prendre
n'importe lequel de ces faits inscrits en filigrane et prouver le contraire
à partir de ça. C'est dans l'ensemble que la situation se traduit
et à notre avis, trois fonctionnaires ou douze ou dix-sept ça ne
réglera rien, ça ne fera que consacrer une situation qui n'est
pas encore consacrée par la loi.
Nous disons, c'est la responsabilité politique, la protection des
droits des minorités, ce n'est pas la responsabilité des
fonctionnaires ou des officiers de commissions scolaires.
M. LE PRESIDENT: Je remercie l'Association des éducateurs de
l'ouest de Montréal, M. Duhaime, M. Desilets et Mme Sicotte de leur
mémoire et soyez assurés que nous allons prendre bonne note de
vos recommandations.
M. DUHAIME: Merci.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que M. Chipping, représentant de The
Humanist Fellowship of Montreal est ici? Vu que le groupe doit revenir à
quatre heures cet après-midi à la suite de l'ajournement d'hier
et qu'il n'y a pas d'autres personnes présentes, on pourrait
peut-être ajourner après la période des questions.
M. SAINT-PIERRE: Cela me va.
M. TETLEY: M. le Président, je crois que le PACT ne vient pas.
The Provincial Association of Catholic Teachers qui n'est pas venue ce matin ne
viendra pas cet après-midi, suivant des renseignements de M. le
député de Papineau. Je regrette que The Humanist Fellowship of
Montreal soit absente mais je suggère qu'on ajourne comme vous l'avez
suggéré.
M. LE PRESIDENT: Nous ajournons après la période des
questions et nous entendrons la Fédération des travailleurs du
Québec, la suite de leur mémoire.
(Suspension de la séance à 11 h 55)
Reprise de la séance à 16 h 20
M. PILOTE (président de la commission permanente de l'Education):
A l'ordre, messieurs!
M. CHARRON: Est-ce que le ministre a actuellement une rencontre avec son
parallèle au niveau fédéral, M. Gérard
Pelletier?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Son 45e parallèle.
M. CHARRON: Si on a quorum, on pourra procéder quand même,
parce qu'il est déjà arrivé, lors des séances de la
commission, que le ministre n'y était pas et qu'on a
procédé quand même. D'autre part, les 71 dynamiques
députés libéraux peuvent certainement remplacer le
ministre.
M. SEGUIN: Je n'accepte pas qu'on établisse un parallèle
entre M. Pelletier et le ministre de l'Education. Certainement pas. Si on veut
procéder, oui. Mais le ministre arrivera lorsqu'il sera
libéré de ses engagements, et sans considération à
ce qu'il y ait un parallèle établi entre M. Pelletier et M.
Saint-Pierre.
M. CHARRON: Pourquoi pensez-vous qu'il le rencontre d'abord?
M. SEGUIN: Je n'ai pas questionné le ministre sur son absence et
je trouve malvenu qu'un autre s'interroge sur son absence.
M. CHARRON: Je vais vous dire pourquoi il le rencontre, c'est parce
qu'ils sont en train de discuter du programme Perspectives-Jeunesse...
M. SEGUIN: Si vous êtes si bien renseigné, je demande tout
simplement qu'on procède et sans faire allusion à l'absence du
ministre.
M. CHARRON: Très bien.
M. LE PRESIDENT: La parole est à M. Daoust, de la
Fédération des travailleurs du Québec.
Fédération des travailleurs du
Québec (suite)
M. DAOUST: Merci, M. le Président. Je vais donc maintenant
commenter...
M. CARDINAL: Est-ce que vous pourriez, pour des raisons techniques,
approcher le microphone devant vous, parce que nous ne vous entendons
point?
M. DAOUST: Parfait.
M. LE PRESIDENT: Il avait été entendu hier, M. Daoust, que
l'on vous consacrerait une demi-heure et qu'on passerait à d'autres
mémoires.
M. DAOUST: Parfait. Je vais donc lire les recommandations, quitte
à écourter les remarques à l'égard de chacune
d'entre elles. Je suis toujours à la page 23 de notre mémoire.
Recommandation 2.1: Des garanties antidémocratiques et inutiles: A) Que
les dispositions du projet de loi 28, article 583, permettant au gouvernement
d'ajouter deux commissaires aux commissaires démocratiquement
élus par la population soient supprimées.
M. SAINT-PIERRE: J'ai indiqué à plusieurs reprises
publiquement je le répète, si cela pouvait satisfaire le
groupe que le gouvernement avait l'intention de supprimer cela. Le
désir du gouvernement était de donner une voix à la
minorité qui pouvait se retrouver à l'intérieur d'une
commission scolaire unifiée sans aucun commissaire; c'était
plutôt la possibilité pour la minorité linguistique de
savoir ce qui se passe à la commission scolaire. Devant les
représentations comme celle de votre groupe, nous avons
décidé d'amener plutôt deux observateurs. Ce serait le sens
des amendements.
Je voudrais savoir ce que vous en pensez de nommer deux observateurs,
lorsque la minorité n'a aucun représentant, qui auraient tous les
droits et pouvoirs des commissaires sauf le droit de vote.
M. CARDINAL: Un instant, M. le Président. Avant que M. Daoust ne
réponde, est-ce que le ministre pourrait répondre à une
question sur ce point? Hier matin, si mes souvenirs sont bons, le ministre m'a
dit que les amendements dont il avait déjà parlé en
présence d'un journaliste n'étaient pas les amendements du
gouvernement mais des intentions plus ou moins précises du ministre.
Aujourd'hui, il vient nous dire très clairement que sur ce point il
apporte un amendement. Est-ce que c'est un amendement du gouvernement ou du
ministre?
M. SAINT-PIERRE: Non, je pense que c'est un amendement qui a l'accord du
cabinet. Je pense que celui-là est plus précis que d'autres que
nous analysons mais celui-là d'une façon assez claire puisque le
but du gouvernement n'était pas de fausser la démocratie mais
donner à la minorité une voix au chapitre. Parce qu'il nous
semblait qu'il né pouvait rien y avoir de plus frustrant pour une
minorité linguistique que de n'avoir aucun représentant au sein
de la commission scolaire et d'avoir l'impression qu'il se passe des choses
dans son dos, qu'elle n'est pas au courant. Et je reconnais la justesse de vos
propos.
Je demandais simplement si le gouvernement retenait comme amendement
à la loi le fait, au lieu de nommer deux commissaires
supplémentaires, de nommer deux observateurs choisis parmi les
comités de parents et qui auraient tous les droits et pouvoirs des
commissaires sauf le droit de vote. Est-ce que d'après vous ça
pourrait, d'une part, peut-être satisfaire les droits légitimes
d'une minorité de savoir ce qui
se passe à la commission scolaire et, d'autre part, de respecter
la démocratie, c'est-à-dire que le vote se prendrait uniquement
par ceux qui ont été élus par les gens de la commission
scolaire?
M. DAOUST: Comme point de départ, pour nous, disons que sans
aucun doute c'est une amélioration à la loi que de retrancher
cette disposition dans le projet de loi. Par ailleurs, nous pensons à la
FTQ qu'il faut faire confiance au milieu. Et je ne crois pas c'est ma
première réaction qu'il soit essentiel que des
observateurs soient là et jouent le rôle plus ou moins de la
conscience de ceux qui seront absents. Je pense qu'il faut se fier au processus
démocratique. Il faut éviter de débalancer un groupe
ils seront une quinzaine par la présence de deux autres
personnes même si elles n'étaient là qu'à titre
d'observateurs. Vous avez mentionné qu'ils auraient droit de voix au
chapitre dans une certaine mesure, droit de parole tout au moins, enfin une
voix délibérante sans que sur le plan des décisions ils
soient appelés à se prononcer.
Je pense que ce serait un élément de lourdeur dans une
certaine mesure sur le plan des procédures et du fonctionnement des
commissaires en assemblée, en session publique ou bien en session, ce
que l'on appelle à la CECM et peut-être dans d'autres milieux, en
session de comité plénier. Mais, comme point de départ,
c'est sans aucun doute une amélioration.
L'on aurait peut-être souhaité que l'on fasse
carrément et complètement confiance au milieu et que l'on ne se
mette pas à sous-peser la représentativité ethnique ou
linguistique de quinze personnes. Vous savez, l'on peut être
représenté de temps à autre par des anglophones, je ne dis
pas cela d'une façon sarcastique, ces derniers pouvant comprendre
très bien le point de vue des francophones. Par ailleurs, on peut penser
à être représenté par des francophones qui peuvent
carrément oublier les points de vue de leur groupe linguistique ou de
leur milieu à eux.
Alors, nous, notre thèse de fond, c'est que nous voulions faire
confiance au milieu. Il y a quinze personnes qui seront élues et il y
aura toutes sortes de tendances inévitablement. C'est un milieu
pluraliste que Montréal, sur tous les plans. Je pense bien que l'on
retrouvera là une espèce d'éventail du milieu
montréalais. Mais, encore une fois, comment peut-on évaluer
quinze personnes si, surtout dans certains quartiers; une telle est plus
anglophone ou plus francophone? Qu'est-ce que nous allons faire des
Néo-Québécois qui seront élus et qui peuvent parler
français mais qui envoient leurs enfants dans des écoles
anglaises? Cela sera passablement compliqué, je pense, pour le
législateur.
C'est pour cela que l'on optait carrément pour la non
présence, ou du moins la non-élection ou la
non-désignation plutôt de commissaires par le gouvernement.
M. CARDINAL: C'est très bref. Je rejoins, sur ce point, M.
Daoust. C'est qu'il m'apparaît assez surprenant et le
président et le ministre me connaissent assez pour savoir que je dis
cela en toute objectivité qu'un gouvernement qui vient d'abolir
les comtés protégés ils étaient un accroc
à la démocratie dans le fond, on ne leur a pas fait confiance
viennent, par une autre loi établir cette fois-ci des commissions
scolaires protégées, "dans un sens", que les gens soient
observateurs ou qu'ils soient commissaires.
M. DAOUST: Chez nous, c'est peut-être un peu plus profond. L'on
voit là une reconnaissance d'une forme de bilinguisme institutionnel.
C'était beaucoup plus précis dans ce projet de loi mais la seule
présence d'observateurs, cela nous semble à nous et je
pense que la thèse de fond de la FTQ est encore soutenable que
l'on voudra maintenir cette forme de bilinguisme institutionnel contre lequel
nous nous élevons, nous autres tout au moins, à la FTQ.
M. SEGUIN: M. le Président...
M. SAINT-PIERRE: Même si votre papier à lettre est
bilingue.
M. DAOUST: C'est très bon, j'ai souligné ça ce
matin et je pense bien que ce sera corrigé assez rapidement.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Robert-Baldwin.
M. SEGUIN: Il s'agirait tout simplement de ne pas m'accorder avec M.
Daoust... comme étant une correction valable, mais plutôt je
sollicite et je souhaite qu'on continue le bilinguisme sur son papier à
lettre.
Je voudrais demander à M. Daoust s'il a un commentaire à
faire, par exemple, pour quelqu'un comme moi représentant un secteur de
la province, l'ouest de l'île de Montréal, où la population
est probablement à 85 p.c. de langue anglaise. Donc si je protège
une minorité ou si je parle pour une minorité à
l'intérieur de la province même, je dois quand même
représenter aussi la minorité à l'intérieur de mon
comté. Vous voyez, ce qui est bon pour l'un est bon pour l'autre, je
pense, en toute justice. Alors, je vois mal qu'à l'intérieur d'un
comté ou d'une région qui représente la troisième
et la quatrième plus grosse commission scolaire dans l'île de
Montréal: la commission scolaire West Island Regional et la commission
scolaire. Baldwin-Cartier... Alors, elles viennent, au point de vue de nombre
et de valeur, de grosseur ou de grandeur, les troisième et
quatrième à peu près, venant tout de suite après le
Greater Montreal School Board et la Commission catholique de Montréal.
Alors, votre opposition selon vos énoncés, quelle serait-elle si
vous étiez à mon endroit, représentant une minorité
à l'inté-
rieur de la province mais d'un autre côté voulant
défendre les intérêts d'une minorité à
l'intérieur d'une région? Est-ce que vous seriez satisfait, vous,
M. Daoust, d'accepter qu'il y ait des observateurs ou que réellement le
gouvernement assume ses responsabilités afin de voir à ce que
cette minorité soit réellement représentée dans les
décisions qui devront être prises au niveau de la commission
locale? Ce qui est bon pour l'un est bon pour l'autre. What is good for the
goose is good for the gander, comme on dit en anglais.
M. DAOUST: Oui, mais comme député d'un comté
québécois, vous représentez...
M. SEGUIN: Je représente d'abord mon comté.
M. DAOUST: Je pense qu'il en sera de même dans une large mesure
pour les commissaires. Il y en aura quinze par commission scolaire et
l'ensemble de ces derniers représentera la population de cette
commission scolaire.
Ils seront élus démocratiquement; et je pense que,
nous,nous avons surtout voulu éviter qu'il y ait deux types de
commissaires: les vrais, les authentiques, ceux qui émanent de la
population et qui en sont le reflet dans une large mesure, et d'autres qui
seraient là artificiellement, par une décision gouvernementale,
et qui représenteraient la minorité ou les minorités
ethniques ou linguistiques. Je pense que ces gens-là, d'abord, seraient
défavorisés et puis c'est une façon de donner un vote de
non-confiance à l'égard de ceux qui ont été
élus démocratiquement. Si la population de l'ouest de
Montréal, cette région no 10 dans les nouvelles commissions
scolaires décidait globalement de désigner ou de
déléguer quinze commissaires anglophones, c'est leur droit le
plus strict. Cela nous prouvera à nous que le découpage de la
carte en onze commissions scolaires a peut-être été quelque
peu faussé. D'ailleurs, on ne connaît pas tellement les
critères on l'a mentionné hier qui ont pu
présider au découpage de cette carte en onze régions et,
dans certains cas, comme on l'a mentionné, je pense que nous l'avons
mentionné hier abondamment, cela veut dire que dans quelques
années il y aura quatre commissions scolaires sur onze qui seront
à peu près inévitablement contrôlées, ou du
moins, dont la majorité des commissaires seront anglophones. Et cela
nous inquiète.
M. SEGUIN: Voulez-vous me dire qu'il y a des Québécois qui
n'ont pas voix au chapitre? D'après quoi, une langue ou une
nationalité?
M. CHARRON : Non, non.
M. SEGUIN: C'est une déduction juste, après ce que j'ai
vu.
M. DAOUST: C'est-à-dire que, encore une fois et je risque
de reprendre un peu ce que nous avons soutenu hier si les
Néo-Québécois n'avaient pas été, par toutes
sortes d'incitations, poussés à opter carrément pour le
secteur anglophone, ce ne sont pas quatre commissions scolaires anglophones
qu'on risquerait de trouver dans quelques années, c'est peut-être
une, peut-être deux; en fait, il y a toute cette population qui n'est ni
anglophone, dans le vrai sens du mot, ni tellement francophone, malheureusement
pour nous.
M. SEGUIN: Une population canadienne mais d'expression française
ou anglaise.
M. DAOUST: Et québécoise. Oui.
M. SEGUIN: Maintenant, voici ce qui arrive, on ne répond pas
carrément à ma question, c'est que les 16 p.c. ou les 15 p.c. de
la minorité dans ce secteur-là, qui tout à fait
naturellement, d'après des élections qui sont très
démocratiques, risqueraient de ne pas être
représentés, est-ce qu'à ceux-là on dit, comme aux
gens du Manitoba ou du Nouveau-Brunswick ou d'ailleurs au Canada: C'est bien
regrettable mais vous demeurez dans un secteur. Malheureusement les gens n'ont
pas voté pour vous. Est-ce que vous considérez que cette
approche-là est juste.
M. DAOUST: Avec un découpage d'une commission scolaire en quinze
grands morceaux, morceaux moyens, inévitablement les chances sont qu'on
va retrouver encore une fois cet éventail de la population mais, si on
ne retrouve pas de francophones ou d'anglophones, ce n'est pas fausser le jeu
de la démocratie. S'il n'y a pas de francophones ou s'il n'y a pas
d'anglophones, c'est la réalité.
M. SEGUIN: M. le Président, je trouve tout simplement et je
m'excuse, M. le ministre, que le débat est chargé de
problèmes linguistiques et qu'on n'est pas tellement
intéressé à l'éducation des enfants. C'est la
conclusion que je fais de ce débat.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, peut-être pourrait-on
terminer sur cela? Le point est que si on pense justement à la
commission scolaire de l'ouest, une fois que le législateur et les
groupes comme vous et le Parti québécois, comme l'Union
Nationale, acceptent le principe de la commission scolaire unifiée. Il
faut aussi regarder que, dans un deuxième temps et prenons strictement
la commission scolaire de l'ouest, no 10, que là avec 15 p.c. de
francophones et tenant compte que cette population francophone n'est pas
concentrée mais qu'elle est un peu disséminée sur le
territoire, eh bien les chances sont qu'il n'y ait aucun francophone qui soit
élu commissaire. C'est possible, probable même qu'aucun
francophone soit élu commissaire à la commission scolaire
unifiée que nous voulons tous. Là on se dit que pour les
15 p.c de la population francophone, qui a quinze commissaires
anglophones dans un système que la majorité francophone s'est
donnée et c'est le même cas qui pourrait jouer dans l'est
de l'île de Montréal en sens inverse on dit: Est-ce qu'il
n'est pas normal, est-ce que le système en vue des jeunes, en vue de
ceux qui sont dans les systèmes scolaires, est-ce que cela ne pourrait
pas fonctionner mieux si la minorité francophone dans l'ouest avait au
moins, comme je l'ai dit, deux observateurs qui au moins sont au courant de ce
qui se fait à la commission scolaire, savent qu'il y a une
procédure, qu'on va embaucher des enseignants, quels sont les
critères qu'on retient? Cela est un cas réel; une fois qu'on
accepte la commission scolaire unifiée, une fois qu'on l'accepte comme
l'ont mentionné plusieurs groupes, il semble se dégager un
certain consensus, que les pouvoirs devraient être près de la
population pour refléter ses aspirations.
Donc, enlever les pouvoirs au conseil scolaire et les donner à la
commission scolaire unifiée. Mais là, il faut aussi
reconnaître dans un deuxième temps qu'on expose, dans la province
de Québec, 15 p.c. de la population francophone de l'ouest de
l'île de Montréal à n'avoir aucun représentant
à sa commission scolaire.
M. CHARRON: M. le Président, si M. Daoust me le permet, en
prenant les mêmes termes que le ministre vient de développer, une
fois que les quatre partis autour de la table ont accepté le principe
d'une commission scolaire unifiée, on ne devrait pas s'appliquer
à en fausser la réalisation et à en fausser l'objectif
à l'aide d'une série de garanties que le mémoire de la FTQ
appelle antidémocratiques et inutiles.
M. SAINT-PIERRE: Bien, je ne vois pas...
M. CHARRON: On ne vise pas à faire de chacune des onze
commissions scolaires de Montréal un sénat où les deux
groupes importants, sur le plan linguistique, à Montréal seraient
obligatoirement représentés. Ce n'est pas ça l'objectif
d'une commission scolaire, être une espèce de balance entre les
groupes linguistiques puis là où la balance est vraiment trop
défavorable, il y a des mesures particulières pour venir les
aider. Ce n'est pas ça l'ambition d'un système de commission
scolaire.
Pour répondre au député de Robert-Baldwin, qui est
en train de fumer son joint dans le coin, c'est justement à cause de
l'éducation des enfants et non pas à cause du problème
linguistique. Si on ne parlait que du problème linguistique, on
demanderait à chacune des onze commissions scolaires d'être le
représentant sept-sept de chacun des groupes par exemple ou
parallèles, mais c'est parce que la première fonction, la toute
première fonction est d'assurer une éducation de qualité,
comme le dit l'article 587 de la loi actuelle. On n'a pas d'affaire à
ajouter des garanties pour un groupe ou l'autre.
Depuis tantôt, le ministre, depuis le début du
dépôt du projet de loi, utilise constamment comme exemple les 15
p.c. de francophones de la commission scolaire no 10, mais il y a huit
commissions scolaires où ce sont les Anglais qui sont en
minorité, là aussi, dans ces cas-là...
M. SAINT-PIERRE: Si nous enlevons le no 10 dans les autres, je ne vois
pas de problème, parce qu'il y a suffisamment peut-être
dans l'est avec l'inverse mais dans le centre-ville, cet
article-là ne joue pas. Parce que la population est à
25/75,40/60...
M. CHARRON: Dans combien de commissions scolaires?
M. SAINT-PIERRE: Les concentrations sont suffisamment fortes. Si nous
prenons la commission scolaire no 2, c'est évident que dans Outremont
qui va être un, deux ou trois quartiers, ça va être des
commissaires francophones. C'est également évident que dans
Snowdon ou dans Côte-des-Neiges ou dans Côte-Saint-Luc ça va
être des commissaires anglophones, et nous sommes certains que l'article
ne joue pas; l'article a des chances de jouer dans la commission scolaire no 10
pour les francophones et dans la commission scolaire no 9, pour les
anglophones.
Ce sont les deux seuls endroits.
M. CHARRON: Est-ce qu'il y a un vote en Chambre?
M. LE PRESIDENT: Veuillez vous informer s'il y a un vote en Chambre s'il
vous plaît, parce qu'on n'entend plus sonner la cloche. M. Daoust.
M. SAINT-PIERRE: Vous me permettez peut-être une question.
Pourquoi dites-vous en page 6 de votre mémoire, ça ne se
réflète pas à la fin, après avoir fait cet aveu de
confiance à la démocratie que vous venez de faire, que "le
travail de délimitation des quartiers ne devrait pas être
confié à des personnes élues comme le mentionne le projet
de loi 28, mais plutôt à un comité de
spécialistes"...
Est-ce que, ce sont des spécialistes qui vont imposer des
quartiers à des gens élus si on fait confiance à la
démocratie ou si ce sont des hommes élus qui confient à
des spécialistes la première tâche à partir de
certains critères, afin d'en arriver à des suggestions?
M. DAOUST: Oui.
M. LE PRESIDENT: Je demanderais à M. Daoust de prendre note de la
question du ministre, nous sommes obligés de nous retirer, on a un vote
et on revient dans... Ah bon! Il n'y a pas de vote, d'accord, nous pouvons
continuer.
M. CHARRON: Fausse alarme.
M. LE PRESIDENT: C'est une fausse alarme.
M. DAOUST: Ecoutez, le premier découpage des quartiers est fait
par le conseil scolaire. Par la suite, chacune des commissions scolaires
pourra, si elle le juge à propos, procéder à des
chambardements dans le découpage de ces quartiers et ça, on ne le
souhaite pas trop. Vraiment, on voulait que soit dégagé des
commissions scolaires ce droit de pouvoir procéder à un
découpage à l'intérieur d'une commission scolaire.
Quand on parle d'un comité de spécialistes,
inévitablement, on le voyait rattaché au conseil scolaire qui
lui, tout de même, est un organisme qui émane des commissions
scolaires et des gens qui sont élus. Lui pourrait, par la suite, donner
son approbation à l'égard de tel ou tel type de
découpage.
M. SAINT-PIERRE: Et c'est le conseil scolaire qui prendrait la
décision?
M. DAOUST: Oui.
M. SAINT-PIERRE: Et non des spécialistes qui...
M. DAOUST: Non, sûrement pas. En dernière analyse, ce
serait vraiment rattaché au conseil mais la décision finale
appartiendrait au conseil. C'est peut-être un peu équivoque dans
notre texte mais on n'a pas voulu laisser le soin à un seul
comité de spécialistes.
M. PICARD: J'aurais une remarque à ce sujet-là, je pense
que la recommandation de M. Daoust est très valable si l'on
considère qu'actuellement il y a la commission de la réforme
électorale, alors que les députés voulaient se charger du
découpage de la carte, quant à nous, nous avons
décidé nous-mêmes que nous ne pouvions pas nous faire
confiance et nous l'avons donné à une commission
indépendante.
Je pense que, dans le cas de la division des quartiers à
l'intérieur d'une commission scolaire, on ne doit pas laisser ça
entre les mains des personnes en place, car elles pourraient découper
les quartiers à l'intérieur de la commission scolaire de
façon à se faire réélire. On donne ça
à une autorité supérieure qui serait, en l'occurrence, le
conseil scolaire.
M. DAOUST: On ne voudrait pas qu'on puisse perpétuer un mauvais
découpage, que des gens élus à la suite de ce
découpage soient à ce point intéressés qu'ils ne
souhaitent aucun changement. Cela m'amène à la recommandation
2.2: "Langue de travail au niveau des commissions scolaires et du conseil
scolaire".
A) que la langue de travail soit le français dans les commissions
scolaires et au conseil scolaire de l'île de Montréal.
Là-dessus, deux mots. Nous croyons que le gouvernement a
là l'occasion de préciser sa politique linguistique à la
suite de cette restructuration et de décider que la langue de travail,
à l'intérieur de chacune des commissions scolaires, la langue de
communication, sera le français. Je pense qu'il ne faut pas rater cette
occasion-là. Elle est merveilleuse. Elle vous est donnée à
ce moment-ci et elle aurait des effets d'entraînement extrêmement
importants sur un tas d'entreprises qui sont au Québec ou qui viennent
s'y établir. Cette décision est évidemment conforme aux
politiques de la FTQ. Nous croyons, encore une fois, que c'est peut-être
la première grande occasion, à la suite d'un projet de loi qui
chambarde, dans une certaine mesure ou dans une très grande mesure les
structures scolaires. C'est la première fois que vous avez l'occasion de
plonger et de faire en sorte que le français soit la langue de
travail.
Il y aura des milliers et des milliers de salariés
d'impliqués: personnel administratif, concierges, enseignants. On peut
faire la distinction qu'il ne s'agit pas que les enseignants anglophones soient
tenus d'enseigner en français. Ce n'est pas ça que nous voulons
dire. Je ne voudrais pas que quelqu'un me souligne que nous sommes
contradictoires. Ce n'est vraiment pas ça. Il s'agit du personnel
administratif et de tout ce personnel. Il y aurait lieu que le gouvernement,
dans l'élaboration d'une telle politique, fixe un
échéancier pour faire en sorte que les anglophones unilingues,
que l'on retrouve à peu près inévitablement au PSBGM et
dans certaines commissions scolaires dans l'ouest de Montréal, puissent
assez rapidement apprendre la langue de la majorité et être en
mesure de communiquer avec tous les employés, avec le conseil scolaire,
dans la langue de la majorité, ici, au Québec.
Pour nous, c'est donc un aspect qui nous semble fondamental à la
veille de cette restructuration scolaire.
M. SAINT-PIERRE: M. Daoust, au bas de la page 9 de votre mémoire
cela me surprend parce que vous allez, dans l'autre sens, un peu plus
loin que le gouvernement vous dites: "Dans le système scolaire
montréalais, ce qui n'exclut naturellement pas que la connaissance de la
langue anglaise soit requise pour plusieurs postes de travail". Or, dans notre
législation, dans le moment, il n'y a rien qui exige la connaissance de
la langue anglaise pour occuper un poste dans l'administration. Est-ce que
c'est le sens de votre mémoire que, compte tenu, comme vous dites
après, de l'importante minorité anglophone, qu'il soit requis
qu'une connaissance de la langue anglaise soit demandée dans le sens
d'une qualification pour plusieurs postes de travail?
M. DAOUST: Dans la législation, vous parlez du bill 28.
M. SAINT-PIERRE: Ou de toute autre légis-
lation. Nous ne sommes pas obligés dans la législation
scolaire au Québec, ou même dans le code du travail. J'admets avec
vous que le problème n'existait pas. Hier, on a discuté des
travaux de la commission Gendron et il m'apparaissait nécessaire, pour
moi, d'avoir une approche globale du problème mais on risquait d'avoir
une approche partielle si, avant même de terminer cette étape de
recherche, on commençait à prendre des mesures. Je reconnais
l'urgence du problème. Actuellement, dans notre législation, la
connaissance de l'anglais n'est pas requise, n'est pas un facteur de
qualification pour occuper un poste quelconque. Dans l'esprit du projet de loi
28, on ne demande à personne d'être obligé de
posséder l'anglais pour occuper un poste.
M. CARDINAL: Sauf, M. le ministre, dans certaines lois
particulières, comme la Loi du Barreau et la Loi de la Chambre des
notaires.
M. SAINT-PIERRE: Je parle de la législation scolaire.
M. DAOUST: L'employeur sera ou bien les commissions scolaires ou bien le
conseil scolaire. Ce dernier pourra comme on le fait à mon sens,
je n'ai pas vérifié le PSBGM exiger la connaissance de
l'anglais. Je ne dis pas que cela se fait au PSBGM mais, dans les faits, j'ai
la conviction profonde que l'immense majorité du personnel administratif
du PSBGM, les secrétaires, les commis, sont surtout anglophones et
sûrement même unilingues. Comme l'employeur sera, dans certains
cas, la commission scolaire et, dans l'autre cas, le conseil scolaire,
même si le gouvernement n'exige pas la connaissance de l'anglais, ces
commissions scolaires pourront peut-être l'exiger.
M. SAINT-PIERRE: J'essaie de comprendre. Le sens de votre
mémoire, c'est qu'une importante minorité anglophone...
M. DAOUST: Le sens de notre mémoire, c'est pour être
conforme avec notre politique linguistique à la FTQ. Il est entendu
qu'inévitablement, même si on dit: Ecoutez, la langue de travail
c'est le français, que, pour certains postes de travail, il sera
essentiel que les personnes qui occuperont ces fonctions connaissent aussi
l'anglais, celles qui seront appelées à communiquer avec un
public anglophone, ici à Montréal, une clientèle si vous
voulez.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce dire que vous reconnaissez que, dans la position
de la FTQ, la connaissance de l'anglais est nécessaire pour des cas de
promotion? Est-ce que vous reconnaissez que c'est une situation de fait?
M. DAOUST: Non. La FTQ a toujours reconnu que, pour certains postes, le
français d'abord doit être exigé mais que,
inévitablement, la connaissance de l'anglais est essentielle.
On ne veut pas être aveugle là-dessus, on sait que, dans
certaines fonctions de l'entreprise, un type, par exemple, qui est
préposé aux ventes à l'extérieur du pays et qui
doit transiger avec des Américains ou des Allemands ou des Japonais, qui
vend des produits et qui ne les achète pas, devra inévitablement
connaître l'anglais. Et ce serait se leurrer que de penser que telle
n'est pas la situation.
Mais nous nous sommes toujours élevés contre le fait que
les francophones devaient d'abord connaître l'anglais et contre le fait
surtout que les anglophones unilingues qui ne parlaient même pas le
français détenaient des postes de commande et détiennent
des postes de commande dans une série d'entreprises.
Somme toute, dans ce mémoire, nous voudrions qu'il soit bien
établi que la langue de travail que ce soit bien dit, dans une
déclaration ministérielle ou dans le projet de loi, ce serait
sûrement beaucoup mieux à tous les niveaux, à tous
les paliers de ces différentes structures, soit le français.
Encore une fois, pour nous, il y a un effet d'entraînement
extrêmement important.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): En vous écoutant, je me réjouis
parce que ce que vous proposez en ce qui concerne l'usage du français
dans les mécanismes de cette nouvelle grande commission scolaire de
Montréal enfin, ce que sera l'organisation scolaire de
l'île de Montréal c'est qu'on y fasse du français la
langue de travail. C'est un objectif que nous poursuivons et que nous voudrions
atteindre dans les délais les plus brefs possible.
Mais je note avec satisfaction et c'est là que nous nous
retrouvons et que je me rends compte que vous avez les mêmes
préoccupations que nous que vous vous inquiétez de
l'importante minorité anglophone. C'est là notre problème.
C'est là le dilemme dont je vous parlais hier soir, de concilier les
objectifs de ce français prioritaire, langue de travail, etc., en
même temps que ce respect d'une réalité qui est celle de la
présence d'une minorité anglophone quand même
importante.
Mais là où la difficulté se présente de
façon plus précise et plus aiguë, c'est lorsque les
législateurs qui ne peuvent pas simplement parler en termes de principe
doivent statuer par voie législative, sur des cas concrets comme
ceux-là. Je le disais il y a quelques semaines, lors d'une séance
de cette commission, que, personnellement, le cheminement intellectuel que je
poursuis toujours ne me faisait pas considérer comme quelque chose
d'aberrant la demande qui a été faite par plusieurs organismes,
dont le vôtre, que le français soit la langue normale de
communication à l'intérieur de ces nouvelles structures de
l'organisation scolaire de l'île de Montréal.
Alors, c'est ce que vous proposez. Je me dis
que ce n'est pas aberrant, que c'est un objectif qu'il nous faut
atteindre. Mais nous avons et c'est vous qui nous suggérez d'en
tenir compte à tenir compte de ce que vous appelez l'importante
minorité anglophone. Et en vous écoutant, M. Daoust ce
n'est pas un reproche que je vous fais à vous personnellement, je vous
connais, je connais votre sincérité et le travail que vous
accomplissez et en écoutant les membres de certaines centrales
syndicales qui prêchent pour le français, l'unilinguisme, etc. et
qui, d'autre part, font des réserves sur les importantes
minorités anglophones, je me dis que vous parlez un peu quelquefois
comme des hommes politiques qui sont obligés de flatter deux
clientèles à la fois. On reproche aux hommes politiques de
flatter les Anglais pour avoir des votes et parfois je me demande si les
centrales ne flattent pas les Anglais aussi pour avoir des cotisations.
Je me dis qu'au fond, nous nous retrouvons sur ce plan de l'objectif
à atteindre, mais que nous nous posons sincèrement les
mêmes questions: Comment y parvenir? En conciliant cette exigence du
français prioritaire et, d'autre part, le respect d'une minorité
dont vous dites qu'elle est importante.
Moi, je suis moins familier que vous avec le monde scolaire de
l'île de Montréal. Je n'aurais pas d'objection, pas du tout,
à ce que le français soit la langue de communication. J'y verrais
comme vous une force d'entraînement. Sur le plan pratique, n'étant
pas dans le milieu et du milieu, je m'interroge sur les difficultés que
cela pourrait présenter.
Vous savez, je suis très près de vous à ce point de
vue-là, mais, pratiquement, je me pose des questions. Comment cela
peut-il fonctionner?
M. DAOUST: Ecoutez, je ne partage sûrement pas votre point de vue
en ce qui a trait à ce parallèle que vous avez établi
entre les hommes politiques...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne m'y attendais pas.
M. DAOUST: ...et les dirigeants syndicalistes à l'égard de
la minorité anglaise, ici, au Québec. Je ne pense pas qu'à
la FTQ nous ayons flatté notre minorité anglophone. Je
mentionnais, hier, qu'elle est constituée de 20 p.c. de nos membres,
dont 9 p.c. sont probablement de véritables anglophones. Loin de
là. Je répète, mais fort rapidement, que la FTQ, depuis
déjà une dizaine d'années, a abordé ce
problème avec énormément de fermeté et n'a jamais
eu peur de dire carrément aux anglophones québécois que,
selon nous, la langue de travail, mais vraiment à tous les paliers de
l'activité économique et cela englobe vraiment absolument
tout doit être le français. On a suggéré que
le gouvernement cesse d'avoir recours à des méthodes polies et
incitatrices et décide vous me permettrez le mot d'avoir
le courage, à un moment donné, d'avoir recours à une
législation ou des lois coercitives. Je pense que, lorsque l'on a
parlé de cette façon-là, c'est que l'on mesurait tout le
drame que connaît le Québec à ce moment-ci et la jeunesse
québécoise qui, elle, tout au moins, a décidé de ne
plus être complaisante à l'égard du problème
linguistique. Nous avons toujours mis en gardé les hommes politiques,
nos membres et, enfin, ceux à qui l'on s'adresse, contre toute
tergiversation sur le plan linguistique.
Je pense que ce n'est pas tout à fait de la flatterie. Cela nous
a valu des lettres, des éditoriaux et cela nous en vaut encore
quotidiennement, des attaques de toute nature, à l'égard de nos
prises de position là-dessus, tout au moins.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Daoust, vous êtes à cet
égard victime, comme je l'ai été moi-même, lorsque
l'on me présentait comme un séparatiste.
M. CHARRON: L'on avait sérieusement tort.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je recevais beaucoup de lettres et même
des menaces de mort d'anglophones, imaginez. Ils allaient jusque là.
M. CHARRON: M. le Président, je ferai d'abord une remarque
à la suite du paragraphe que relevait le ministre de l'Education dans le
mémoire. Nous sommes aussi de ceux qui ont préconisé,
depuis le début de la commission, à l'instar de nombreux autres
groupes, la suppression de l'article des adjoints.
Nous disions, cependant, dans la défense de notre opinion, que
cela n'impliquait pas le devoir pour chacun, pour le directeur des services
pédagogiques, pour le directeur des services aux étudiants,
d'assurer un enseignement de qualité à tous les étudiants
de son territoire, sans qu'il y ait d'adjoints reconnus par la loi. Si l'on
extrapole un peu, cela voulait dire, comme le soulignait le mémoire de
la FTQ, vu l'importance de la minorité anglophone, qu'à mon avis
le directeur général de la commission scolaire no 10,
fût-il par hasard un francophone cela me surprendrait à
cause de la proportion ce serait presque une aberration mentale, quant
à moi, s'il ne parlait pas anglais pour occuper ce poste, desservant une
population de 85 p.c. c'est cela qu'elle sera dans la commission
scolaire no 10 anglophone. Ce serait une aberration mentale. Encore
plus, à mon avis, le directeur des services aux étudiants qui,
lui, aura à travailler concrètement avec la clientèle
d'expression anglaise. Encore une fois, à ce niveau-là de postes,
à cause je ne sais pas comment s'exprime la FTQ sur cette
question des postes particuliers, de plusieurs postes de travail. Je
pense que ceux-là vont
nécessiter une connaissance de l'anglais, parce qu'il n'y a pas
une commission scolaire qui n'en aura pas.
Mais, ce que je crains, c'est que la loi, en ne statuant pas d'abord sur
la langue de communication à l'intérieur, comme on l'a dit depuis
le début, crée, d'une certaine façon, ou officialise le
bilinguisme.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, mais la loi semble reconnaître ce
que M. Daoust dit. Ce sont les faits, puisqu'à un certain niveau, vous
dites que la connaissance au Québec, la connaissance du français,
vous la souhaitez pour tous, incluant les anglophones, et je suis avec vous.
Vous dites à partir d'un certain niveau, dans le secteur privé
et, on pourrait faire le même parallèle dans le secteur public, si
on pense aux congrès pancanadiens, aux congrès internationaux qui
peuvent se dérouler dans le monde de l'éducation. A partir d'un
certain niveau, la connaissance de l'anglais est nécessaire. Cela ne
correspond-il pas à dire, que dans votre pensée, dans les faits,
même avec des changements, à partir d'un certain niveau, il y ait
une espèce de bilinguisme? Comme quelqu'un disait hier: En Europe,
ça prend trois langues pour se débrouiller. Si on n'a pas trois
langues...
M. CHARRON: Non, mais, M. le ministre, cela n'est pas tellement...
M. SAINT-PIERRE: Et moi, je m'excuse, je voudrais seulement
compléter. On dit que, dans les faits, il y a une connaissance de deux
langues. Mais dans un secteur aussi vital que celui de l'éducation,
qu'est-ce qu'on fait? On prend deux entités qui ont été
complètement séparées: le monde anglophone protestant et
le monde catholique, surtout avec la CECM, où il y a
énormément d'unilingues dans les deux camps. On tente de faire
travailler ensemble ces ressources humaines disponibles. On dit que, dans un
premier temps, compte tenu que les lois peuvent changer, dans les endroits
névralgiques, programmes, services aux étudiants, services du
personnel, non pas un dédoublement de structures, on doit s'assurer
qu'un des deux postes, le supérieur ou son adjoint, que l'un des
deux...
M. CHARRON: Je ne reviens pas à l'article des adjoints. J'ai
évoqué cela pour nommer les postes importants où, à
mon avis, à cause de l'importance de la minorité anglophone et de
l'importance du poste, la connaissance des deux langues pouvait être
éminemment souhaitable. Mais, je disais que le fait que la loi ne statue
pas véritablement sur la langue de travail à l'intérieur
de la structure scolaire impose le bilinguisme à un nombre autrement
considérable de postes qu'à ceux où on serait
justifié de les attendre.
Le fait que les citoyens pourront communiquer dans la langue de leur
choix, avec la structure scolaire à tous les niveaux, que ce soit
à partir du concierge de l'école, à aller jusqu'au
président du Conseil scolaire de l'île de Montréal, que le
bilinguisme soit reconnu comme tel, va imposer à un nombre
considérable d'endroits où on ne serait pas en mesure de
l'attendre, où l'on n'est pas obligé de l'attendre au
Québec, ce bilinguisme: chez tout le personnel de bureau, tous les
secrétaires, tous ceux qui auront à répondre à la
population, même ceux qui n'ont pas à défendre de
politique. Le directeur général d'une commission scolaire qui va
rencontrer un groupe de parents anglophones, il est souhaitable qu'il parle
anglais, il occupe un poste mais sa secrétaire, à son bureau, on
n'a pas d'affaire à le lui imposer à elle. Le concierge de
l'école, le personnel administratif, le personnel de la marchandise, le
personnel du service des achats, on n'a pas d'affaire à leur imposer
à eux.
M. SAINT-PIERRE: Et pourquoi leur imposerait-on?
M. CHARRON: Parce que la loi ne le statue pas actuellement.
M. SAINT-PIERRE: Je ne suis pas d'accord.
M. CHARRON: M. le ministre, quand vous disiez tantôt, en
première objection au rapport de la FTQ, que la FTQ allait moins loin
que le gouvernement va actuellement, puisqu'il n'impose la connaissance de
l'anglais nulle part, est-ce que vous seriez prêt à vous opposer
à une réglementation qui, dans une des onze commissions
scolaires, obligerait le personnel de tout acabit à être bilignue,
comme cela se produit à la commission Baldwin-Cartier actuellement?
M. SAINT-PIERRE: Je serais contre cela, moi.
M. CHARRON: Vous seriez contre! Vous seriez prêt à
dénoncer cette obligation-là qu'on ferait à n'importe quel
poste. J'admets qu'à des postes plus importants, c'est éminemment
souhaitable comme je vous l'ai dit tantôt nous ne sommes
pas naifs à ce point. Mais, toute obligation à être
bilingue pour occuper un poste dans la structure scolaire de Montréal
vous la dénonceriez?
M. SAINT-PIERRE: Je la dénoncerais, et d'autant plus que si le
législateur l'avait voulu, il l'aurait mise dans la loi. Alors, s'il ne
l'a pas mise dans la loi, c'est qu'on revient à l'argument de
tantôt, on fait confiance qu'il y aura des solutions différentes
d'un endroit à l'autre et qu'on fait confiance aux solutions.
M. CHARRON: Le ministre sait trop bien qu'à tous les groupes
anglophones qui sont venus témoigner, j'ai posé la question
à chaque fois.
M. SAINT-PIERRE: Mais, là, vous ne parlez pas des groupes
anglophones.
M. CHARRON: Ils s'attendent très bien à ce que la
structure soit parfaitement bilingue, d'un bout à l'autre.
M. SAINT-PIERRE: Ah non! Je m'excuse.
M. CHARRON: Et quand ils occuperont les postes de responsabilité,
à l'intérieur des commissions scolaires, une des premières
choses qu'ils exigeront du personnel de ces commissions scolaires, ce sera
d'être bilingue. Si vraiment vous défendez cette
position-là, pourquoi ne seriez-vous pas prêt à l'inclure
avec un amendement dans la loi?
M. SAINT-PIERRE : Pour les mêmes raisons que, abordant
partiellement ce problème de langue, je ne voudrais pas après
cela que des gens disent: C'est ça la politique linguistique du
gouvernement? Je vous ai dit hier qu'il me semble plus logique...
M. CHARRON: Mais votre collègue des Affaires culturelles n'a pas
attendu le rapport Gendron pour dire qu'il annoncerait en Chambre cet
après-midi des mesures...
M. SAINT-PIERRE: Mais là, c'est différent, sur le
multiculturalisme, là, on est rendu à...
M. CHARRON: Non, non, c'est l'Office de la langue française avec
le français langue de travail dans les industries; il a pris des mesures
qu'il a annoncées en Chambre cet après-midi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il a complété celles que j'avais
mises en place.
M. CHARRON: Vous pouvez en prendre ici dans cette mesure-là. Il
suffit de dire qu'on ne peut pas exiger le bilinguisme.
M. LE PRESIDENT: Un à la fois, s'il vous plaît!
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. le député de
Saint-Jacques, mais lui, il n'a pas pris ça dans un projet de loi. Je
trouve que dans un projet de loi on risque que ce soit tellement fragmentaire,
que ça puisse être mal interprété. Mais il y a des
mesures qui sont prises et qui, il me semble, indiquent très clairement
dans quel sens on s'en va. Exemple: toute la correspondance officielle et non
officielle qui se fait, la correspondance de toute sorte qui se fait dans le
moment même avec le PSGBM à partir du ministère de
l'Education se fait en français.
UNE VOIX: Même la FTQ.
M. SAINT-PIERRE: Je veux dire que ce n'est pas inscrit dans les textes
de loi qu'on est obligé de répondre; on ne fait pas du
bilinguisme, nous on écrit des lettres en français aux
commissions scolaires, même anglaises.
M. CHARRON: Quand un citoyen va écrire pour demander une
information à la commission scolaire...
M. SAINT-PIERRE: Ah! un citoyen, c'est différent.
M. CHARRON: ... et que l'individu qui occupe le poste en titre doit
répondre, est-ce qu'il va répondre en anglais ou en
français à la personne qui lui a écrit?
M. SAINT-PIERRE: Moi, je vois une différence au Québec
à savoir quelle doit être la langue utilisée, entre les
institutions publiques, que ce soient les commissions soclaires, les villes et
le gouvernement, et un citoyen. Lorsqu'on parle d'un citoyen devant sa
commission scolaire, qui, lui paie des taxes et qui veut avoir une information,
il me semble que là, à moins que l'on change les règles du
jeu, le citoyen a le droit de s'exprimer dans sa langue et d'avoir une
réponse dans sa langue. Mais pour l'institution qui est anglaise, c'est
différent.
M. CHARRON: Est-ce que c'est pour les communications?
M. SAINT-PIERRE: Dans le moment, je m'excuse, la politique que nous
suivons est celle-ci: Si une commission scolaire anglophone nous écrit,
nous répondons en français; mais si un anglophone nous
écrit pour dire: Qu'est-ce que je fais pour que ma fille obtienne une
bourse? On lui répond en anglais.
M. CHARRON: Mais n'a-t-il pas été décidé par
votre propre gouvernement que les communications du gouvernement avec ses
citoyens seraient en français?
M. SAINT-PIERRE: Non, pas avec les citoyens. Il a été
décidé par notre propre gouvernement c'est en sept points,
je ne voudrais pas les citer par le conseil des ministres que les
communications avec les citoyens qui sont des résidants du Québec
se retournent dans la langue du résidant, français ou anglais,
mais que les communications avec les institutions se font dans la langue
française.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Jacques-Cartier.
M. MARCHAND: M. le Président, est-ce que vous pourriez demander
au député de Saint-Jacques s'il est bilingue?
M. SEGUIN: Il a appris son anglais dans Baldwin et son français
ailleurs.
M. MARCHAND: Est-ce que le député de Saint-Jacques
pourrait répondre s'il est bilingue? Est-ce que je pourrais demander au
député de Saint-Jacques s'il est bilingue?
M. CHARRON: Oui, j'ai vécu trois ans au Canada.
M. SEGUIN: 19 ans dans Baldwin.
M. MARCHAND: Je sais que le député de Saint-Jacques est
bilingue et je me demande pourquoi il ne veut pas par exemple que les jeunes
apprennent l'anglais pour être bilingues. Quand même et il
ne s'agit pas seulement de l'anglais être biculturel c'est une
formation additionnelle.
M. CHARRON: C'est un abâtardissement des deux cultures.
M. MARCHAND: Alors pourquoi dites-vous cela? Si vous, vous l'avez appris
pourquoi voulez-vous empêcher les autres de l'apprendre?
M. LE PRESIDENT (Pilote): La parole est au...
M. CHARRON: Regardez, le député de Robert-Baldwin, il
n'est ni anglais ni français.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. MARCHAND: Je ne permets pas. Il n'est pas question de cela, je pense
que votre réponse n'est pas juste, moi je suis bilingue et je suis
Canadien français autant que vous. Je ne suis pas contre le fait que le
Canadien français soit bilingue, parce que je pense que cela lui donne
des occasions d'avoir des responsabilités plus grandes dans les grandes
compagnies qui existent au Canada, au Québec et un peu partout dans le
monde. Sans cela, jamais nos Canadiens... Lorsque l'on demande à nos
jeunes d'être unilingues, on leur demande de rester au Québec,
puis d'être dans des petits blocs fermés, étroits comme
cela. Je pense que s'ils veulent être bilingues, on leur demande souvent
d'être trilingues. Si tu veux entrer dans une compagnie comme Air Canada,
tu dois être bilingue, trilingue et tu avances plus vite. Je pense que
c'est là que l'on va former nos Canadiens français et non pas en
les limitant à une langue. Je suis pour le français d'abord, mais
je pense que se battre contre le bilinguisme, c'est se battre contre nous.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: M. Daoust, si vous me le permettez, je pense bien que
je puis vous poser cette question, vu enfin que les syndicats sont des
corporations publiques. Vous travail- lez, je suppose, au niveau de la
direction de la FTQ, en français?
M. DAOUST: Oui. Evidemment.
M. SAINT-GERMAIN: Mais est-ce que, dans votre constitution ou dans vos
règlements, il y a une obligation de délibérer en
français?
M. DAOUST: Vous parlez des congrès et des assemblées de la
FTQ?
M. SAINT-GERMAIN: Je parle des assemblées de l'exécutif,
des réunions que vous avez au point de vue administratif.
M. DAOUST: Dans les statuts de la FTQ, il est mentionné que la
langue officielle de la FTQ est le français.
Maintenant quant aux délibérations de la FTQ, si un
délégué anglophone adresse la parole, évidemment il
peut le faire en anglais.
M. SAINT-GERMAIN: Vous avez des représentants qui, je le suppose
bien, représentent les minorités anglophones au niveau de votre
exécutif?
M. DAOUST: Les assemblées du conseil général de la
FTQ, du bureau de la FTQ, les discours en congrès et les principales
interventions, sauf celles qui sont faites par les
délégués anglophones, sont faites en français.
L'ensemble de nos délibérations se fait en français.
M. MARCHAND: Acceptez-vous les cotisations d'un anglophone?
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous avez quelque chose dans vos...
M. DAOUST: On accepte les cotisations de tous nos membres.
M. SAINT-GERMAIN: Mais, est-ce que vous avez dans vos règlements
ou dans votre constitution quelque chose qui dit que vos
délibérations ou la langue de travail est le français?
M. DAOUST: Non.
M. SAINT-GERMAIN: Bon, mais elles se font effectivement en
français?
M. DAOUST: Oui.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, pourquoi croyez-vous qu'au niveau des
commissions scolaires, du conseil de l'île et ainsi de suite, on n'en
arrivera pas à avoir le français comme langue prioritaire sans
nécessairement le mettre dans la législation ou dans les
règlements puisque la FTQ est arrivée au même
résultat sans législation et sans règlement.
M. DAOUST: La FTQ n'est pas un employeur comparable à la Sun
Life, à la Union Carbide ou à la GM. C'est un employeur
microscopique comparé à ceux que je viens de mentionner et
microscopique comparé à ce que seront divers employeurs et
diverses commissions scolaires de l'île. La réalité on la
connaît, on va retrouver dans un personnel administratif du PSBGM, ou du
West Island, ou de je ne sais trop où, des centaines et des centaines de
sténodactylos, de dactylos, de secrétaires, ou de commis qui
depuis toujours inévitablement ont travaillé en anglais, qui sont
unilingues dans l'immense majorité des cas. Et là, à la
suite d'un tel regroupement, on va retrouver des chefs de services et des
surintendants, des contremaîtres qui sont unilingues anglais, un peu
comme dans l'entreprise... La langue de travail de ces gens-là sera la
langue de travail de ceux qui sont au pouvoir, comme on le mentionnait hier, de
ceux qui détiennent les postes de commande. C'est cela la terrible
réalité. Le travailleur, le concierge, si son surintendant est
anglophone, quand il va s'adresser à lui et, si ce dernier est unilingue
surtout, il va parler en anglais. Alors on dit que là vous avez, nous
avons la collectivité, l'occasion merveilleuse de prendre une
décision qui aura des effets d'entraînement et de donner un
avertissement à GM, à toutes ces grandes entreprises qu'on
retrouve au Québec, en leur disant : Ecoutez, on va établir un
modèle qui va montrer comment cela peut fonctionner, on va se fixer des
échéanciers, on va faire en sorte que la langue de travail soit
le français. Cela n'empêche pas qu'à un certain moment,
inévitablement, il y aura des gens bilingues, ce n'est pas
l'unilinguisme, vous nous faites dire et vous nous imputez des pensées
qu'on n'a pas. Ce n'est pas l'inilinguisme...
M. SAINT-GERMAIN: Non, non je ne veux pas... excusez-moi...
M. MARCHAND: On voulait vous faire dire votre vraie pensée.
M. SAINT-GERMAIN: Non, excusez moi, M. Marchand, ce que je voudrais...
excusez-moi...
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Je comprends très bien qu'on ne peut
certainement pas comparer la Royal Trust, ou la Northern Electric, ou les gros
employeurs à la Fédération des travailleurs du
Québec, mais l'importance que vous avez ne vient pas du fait que vous
êtes employeur, c'est comme syndicat que vous avez une importance dans le
Québec et que vous jouez un grand rôle. C'est la même chose
pour les commissions scolaires; la commission scolaire ou les commissions
scolaires ne seront pas importantes dans l'île de Montréal, comme
employeurs elles seront importantes comme vous par les services qu'elles
rendront au public comme votre organisation d'ailleurs. Puisque dans votre
propre organisation, où il y a une grosse minorité de langue
anglaise, comment êtes-vous arrivés sans soulever de passions et
d'une façon logique, sans règlement, sans législation
à avoir comme langue de travail le français? Pourquoi croire ou
désespérer qu'au niveau des commissions scolaires on n'arrivera
pas au même but et probablement pour les mêmes raisons que
vous?
Il ne faut pas oublier tout de même une chose. Prenez mon cas, je
représente un comté qui est aussi bien de langue anglaise que de
langue française et je suis directement responsable à la
population. Je sais pertinemment qu'un projet de loi comme le bill 28, quelle
qu'en soit la qualité, si les gens ne veulent pas travailler ensemble,
ne fonctionnera pas. Je sais pertinemment que, même si le projet de loi
28 n'était pas parfait, si les gens veulent coopérer et veulent
travailler ensemble, il y aura des résultats positifs. Mais pourquoi
exiger de moi que je soulève des doutes sur les buts que nous voulons
atteindre avec ce projet de loi en mettant immédiatement dans la loi ou
dans les règlements une limite à leur liberté culturelle
de façon à créer des doutes, des antipathies et des
craintes?
Je suis directement responsable devant la population, ce que votre
président ou les membres de votre exécutif ne peuvent pas dire.
Parce que vos 200,000 membres qui ne sont pas ... 20 p.c. de votre
minorité ou 20 p.c. de langue anglaise chez vous, ça ne peut pas
voter directement pour ou contre son président. Il y a peut-être
des coussinets là qui protègent vos élus.
M. DOAUST: Je ne veux pas reprendre ce débat-là, je ne
veux pas vous rappeler que vous avez peut-être été
élu par 45 p.c. de l'électorat, je ne veux pas vous rappeler le
nombre de personnes qui ont pu voter dans votre comté. Remarquez que je
peux me tromper dans votre cas, c'est peut-être plus bas que ça
encore.
M. SAINT-GERMAIN: Non, non, c'est sans importance.
M. DAOUST: Sans cela, on va s'éloigner du sujet.
M. SAINT-GERMAIN: Ce que je veux faire ressortir, M. Daoust, si vous me
le permettez, pourquoi exiger du gouvernement une façon de
procéder autre que la vôtre?
M. DAOUST: Chez nous, nous nous sommes donné une politique
linguistique, j'aurais dû vous le mentionner, qui a été
adoptée en congrès. Fondamentalement, notre position est que nous
ne croyons plus, nous, à la FTQ, aux incitations polies, nous sommes
pour des méthodes coercitives sur le plan linguistique et cela
ne s'est pas décidé du jour au lendemain, ça fait
dix ans qu'on fouille le problème, qu'on le vit dans les usines. Ce sont
des travailleurs québécois qui l'ont affirmé, qui l'ont
crié, qui ont fait des grèves et qui, à l'occasion d'un
prochain congrès, vont probablement le réaffirmer avec encore
plus de fermeté. Ces gens-là ne croient pas que ceux qui
détiennent le pouvoir économique au Québec vont
d'eux-mêmes, poliment et gentiment, faire en sorte que la langue de la
majorité soit la langue de travail et, que la langue des promotions soit
le français et non plus l'anglais, et que la langue des beaux postes
soit le français et non l'anglais. On retrouve les anglophones au
Québec et vous le savez dans les plus belles fonctions,
les plus beaux postes et c'est pareil partout. Allez où vous voudrez, on
ne les retrouve pas dans les usines et sur les chantiers de construction.
M. SAINT-GERMAIN: Cela ne répond pas à ma question, M.
Daoust, je ne parle pas...
M. DAOUST: C'est ça pour nous le problème.
M. SAINT-GERMAIN: ... en général, je parle
spécifiquement pour ce qui concerne le bill 28 et les commissions
scolaires. Comme employeur, c'est une tout autre question. De toute
façon, vous dites, comme le ministre l'a fait remarquer, que
nécessairement les gens qui devront communiquer avec des gens de langue
anglaise devront bien parler l'anglais...
M. DAOUST: Nous le croyons nous aussi.
M. SAINT-GERMAIN: Ne croyez-vous pas qu'à l'inverse ceux qui
représenteront ou qui dirigeront les commissions scolaires à la
majorité anglaise n'auront pas la même réaction et qu'il ne
deviendra pas évident pour eux que ceux qui veulent, qui auront la
responsabilité de communiquer avec le ministère de l'Education,
de communiquer avec les autres commissions scolaires de la ville de
Montréal, que ceux qui auront à délibérer au niveau
du comité de l'île, ne croyez-vous pas, dis-je, que ces gens de
langue anglaise ne seront pas assez pratiques, assez intelligents pour savoir
qu'un homme qui ne comprendra pas en français jouera un rôle
absolument inutile dans toutes ces délibérations?
Personnellement, je tiens pour acquis que le commissaire d'école ou le
membre, le haut employé, le représentant des commissions
scolaires de langue française au niveau du conseil de l'île
parleront français. Il me semble que c'est logique. Dans ces conditions,
en effet, que croyez-vous qu'il va ressortir comme langue de
délibérations et comme langue de travail, la même chose que
chez vous à la FTQ?
Ne croyez-vous pas que les mêmes résultats vont être
atteints? Absolument les mêmes résultats?
M. DAOUST: Mais chez nous, c'est simple, tout le monde est francophone.
On n'a pas à le dire et à l'écrire que la langue de
travail est le français.
M. SAINT-GERMAIN: Mais vous dites que vous avez 20 p.c. de vos membres
qui sont anglophones.
M. DAOUST: Non, je parle des salariés à l'emploi de la
FTQ, les membres...
M. SAINT-GERMAIN: Non, je ne parle pas comme salariés.
M. DAOUST: Vous parlez des membres.
M. SAINT-GERMAIN: Je ne considère pas que votre mouvement est
important comme employeur. Je parle comme syndicat.
M. DAOUST: Oui, mais là, écoutez...
M. SAINT-GERMAIN: Parce que ce ne sont pas des employeurs, ces
gens-là. Ce n'est pas là le but des commissions scolaires. Ces
gens-là seront là pour rendre service à la population, non
pas comme employeurs.
M. DAOUST: Mais la commission scolaire est une administration qui a des
centaines de personnes à son emploi, selon sa taille évidemment.
Ce sont ceux qui sont à l'emploi de la commission scolaire pour lesquels
on voudrait que le français soit la langue de travail.
M. SAINT-GERMAIN: Dans votre mémoire, toute cette question de
langue relativement au bill 28 concerne les commissions scolaires comme
employeurs.
M. DAOUST: C'est ça.
M. SAINT-GERMAIN: Non pas comme dispensateurs de services à la
communauté ouvrière.
M. DAOUST: Non ça, écoutez...
M. SAINT-GERMAIN: Cela a énormément d'importance parce que
ce n'est certainement pas par les commissions scolaires comme employeurs qu'on
va résoudre le problème des employeurs.
M. DAOUST: Non, c'est l'effet d'entraînement que ça peut
avoir. De toute façon, vous voyez notre prise de position
là-dessus. Je ne vous demande pas si vous êtes convaincus,
mais...
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Laurent.
M. PEARSON: Brièvement, M. Daoust, sur le même sujet. C'est
justement là, à mes yeux, qu'existe le danger, à
l'intérieur d'une loi
comme le bill 28 où se greffe, à un moment donné,
ce qu'on peut considérer comme une consécration d'un principe,
que quelques-uns pourraient qualifier de bilinguisme. Mais mon impression,
à moins que je ne me trompe, c'est que le bill 28 ne statue tout
simplement pas là-dessus. Il ne fait simplement qu'accepter, en somme,
le statu quo en attendant que le gouvernement finisse par présenter en
Chambre un projet de loi qui statuera sur le problème global de la
langue.
Il a déjà commencé à faire des efforts: par
exemple, avec l'Office de la langue française, avec le
dépôt du rapport de la commission Gendron. Et, à ce
moment-là, le gouvernement lui-même, comme parti en tout cas,
s'est engagé à statuer et à présenter les projets
de loi avant la prochaine élection. J'ai bien l'impression que si le
Parti libéral, avant la prochaine élection, n'est pas
arrivé à des solutions précises au sujet de la question de
la langue, on va un peu se faire traiter de menteurs.
A ce moment-là, c'est un peu une échéance.
C'est-à-dire que ça touchera à peu près l'ensemble
de la législation et non pas simplement le secteur scolaire, mais
également l'industrie, le commerce et l'immigration. Ce que je pense,
c'est que vous n'êtes pas le seul à avoir exprimé cette
inquiétude à l'intérieur du bill 28. Mais mon impression
personnelle, c'est que, justement je ne dirai pas que c'est un faux
problème ce n'est pas là le problème du bill
28.
Nous sommes indirectement portés à parler du
problème du bill 63, ni plus ni moins, autrement dit, de toute la
question globale de la langue. Je suis d'accord avec vous là-dessus, et
je suis convaincu personnellement, comme membre du parti, qu'il faut arriver
à trouver quelque chose. Mais vous savez qu'aussitôt qu'on touche
à ça, on fait appel à l'instinct de conservation et
immédiatement à toute l'émotivité qui entoure cette
question-là.
M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, il faudrait
accélérer, je vous ai accordé presque une heure, M.
Daoust.
M. DAOUST: Bien oui, mon Dieu!
M. LE PRESIDENT: Il y en a d'autres qui veulent présenter leur
mémoire.
M. DAOUST: Je vais essayer de faire ça très rapidement.
Les recommandations, toujours à la page 24. 3. des fonctionnaires en
charge des questions religieuses. 3.1: Que le projet de loi 28 soit
amendé de façon à assurer, dans les commissions scolaires,
la présence d'un fonctionnaire en charge de l'enseignement des sciences
morales pour les neutres. 3.2: Que les comités confessionnels tels que
définis aux articles 593 à 596 inclusivement soient abolis. 3.3:
Que le système scolaire montréalais soit réorganisé
de façon à instituer deux types d'écoles: les
écoles multiconfessionnelles francophones et les écoles
multiconfessionnelles anglophones.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous me permettez une question? M. Daoust,
je ne peux pas m'empêcher de... Si je comprends bien, j'ai lu
votre texte avec attention à la page 11... Il y a des gens ici
qui nous ont défini l'école catholique, et Dieu sait qu'il y en a
qui ont parlé pour bien des personnes, pour nous dire ce qu'est une
école catholique. Je mentionne l'Archevêché et d'autres
groupes.
Carrément dans votre mémoire je ne voudrais pas
vous dire des mots que vous ne prenez pas vous êtes contre
l'existence de l'école catholique dans notre système scolaire
montréalais, école catholique entendue comme une école qui
ne dispense pas juste une heure ou deux par semaine d'un cours de
catéchèse mais une école telle qu'on nous l'a
définie, c'est-à-dire qu'il y a une ambiance avec des
maîtres catholiques qui correspond à... Je n'irai pas dans les
détails. La FTQ se prononce carrément contre l'existence de
l'école catholique.
M. DAOUST: Nous souhaitons que l'école reflète le
pluralisme de la société montréalaise et tienne compte de
l'évolution sur le plan religieux qu'on connaît dans notre milieu
depuis déjà fort longtemps.
M. SAINT-PIERRE: Sur le plan de la langue, on vous a posé des
questions. Je ne peux pas m'empêcher de poser la même question.
Vous avez une phrase dans votre texte qui est celle-ci: "Le concept même
d'école confessionnelle est périmé." Est-ce que c'est
partagé par l'ensemble des membres de la PTQ qui pourraient penser que
l'école confessionnelle est périmée? Je ne dis pas la
reconnaissance du droit à la dissidence, le droit à
l'école neutre. Je suis certain que les membres de la FTQ sont
favorables à ça mais est-ce que leur pensée va aussi loin
et dire que l'école confessionnelle est périmée et que
dans un deuxième temps on dit: La FTQ, les membres de la FTQ se
prononcent contre l'école catholique, contre l'existence de
l'école catholique parce que le pluralisme d'une société,
on a tenté de le réfléter dans le projet de loi en
créant un réseau d'écoles neutres pour exprimer le droit
à la dissidence sur le plan confessionnel? Vous allez plus loin que
ça. Somme toute, vous créez un seul type d'école que vous
appelez multiconfessionnelle où le mardi matin à onze heures, les
catholiques vont dans une chambre, les protestants dans une autre et ceux qui
ne sont ni catholiques ni protestants vont dans une troisième salle.
M. DAOUST: Nous sommes convaincus à la FTQ que cela
reflète selon nous je vais être assez précis dans
cette déclaration le senti-
ment de l'immense majorité de la population. Il y a des
traditions à la FTQ. La FTQ depuis toujours n'a jamais été
confessionnelle dans le sens où on l'a entendu à la CTCC et
à la CSN autrefois. Ce n'est pas une position anticléricale, ce
n'est pas de l'anticléricalisme. Cela aussi est dépassé,
je pense.
M. SAINT-PIERRE: Ici, nous ne sommes pas dans des structures syndicales,
nous sommes dans des structures scolaires.
M. DAOUST: Oui. J'essaie de vous dire pourquoi la FTQ peut opter pour
ça. Cela se rattache à ses traditions, à son histoire et
à sa connaissance du milieu des travailleurs montréalais.
L'immense majorité des membres de la FTQ se retrouve à
Montréal. Le problème de l'école confessionnelle, de
l'école catholique, de l'enseignement de la religion à
l'école a été abordé à de multiples reprises
depuis 20, 30 ou 40 ans lors d'assemblées, de congrès et de
réunions. C'est le reflet de tout ça qu'on a voulu traduire dans
cette prise de position: encore une fois, pluralisme, évolution et
difficulté de mise en application de cette confessionnalité dans
les écoles. Les enseignants eux-mêmes étant de moins en
moins "confessionnels". Je ne veux pas dire religieux. Loin de moi
l'idée d'accuser les enseignants d'être des paiëns. Mais, ils
sont de moins en moins portés vers l'enseignement de la religion.
D'ailleurs c'est révélateur, je pense qu'il ne serait
peut-être pas mauvais qu'il se fasse il a dû s'en faire
des enquêtes poussées sur la fréquentation
religieuse de nos jeunes au secondaire et de ce qu'eux-mêmes
souhaiteraient recevoir comme enseignement religieux. Tous ces
phénomènes-là... Enfin, on opte pour la tolérance.
On ne veut pas que l'école serve de milieu d'endoctrinement pour une
secte religieuse ou une autre. On pense que ce concept de la
confessionnalité et de l'école catholique est largement
dépassé même si certains vont brandir le crucifix, etc. Je
pense que tout au moins dans le milieu urbain, dans le milieu
montréalais, dans ce milieu pluraliste à part de faire les
manchettes de quelques revues et de susciter des déclarations de
quelques personnes, je pense que ça n'émeut pas beaucoup la
population montréalaise.
M. SAINT-PIERRE: Pour retourner le titre d'un journal, je dirais que le
jour est plein d'imprévus ajourd'hui. Peut-être que le
député du Ralliement créditiste a des questions à
vous poser sur ça.
M. DAOUST: Ah bon!
M. CARDINAL: ... la revue Maintenant va assumer la thèse de la
FTQ.
M. DAOUST: Récemment?
M. CARDINAL: Oui, le dernier numéro. Je pense que ce n'est pas en
dehors du sujet, M. le Président, la première page ce
n'est pas une annonce que je fais de la revue Maintenant a cette
attitude quant à la confessionnalité dans les écoles. Le
numéro est sorti hier.
M. DAOUST: Sur la valeur morale des gens qu'on forme dans nos
écoles, on peut prendre exemple d'un tas de pays où les
écoles sont non ou multiconfessionnelles. Et je ne sache pas que les
citoyens de ces pays soient moralement moins bons que les citoyens
québécois, catholiques, francophones ou anglophones.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais le législateur doit se
préoccuper des aspirations d'une population. Il y a plusieurs groupes
ici qui prétendent parler au nom de... Et, je ne parle pas uniquement de
M. Bouchard. Je pense à d'autres groupes qui nous parlent de ce besoin.
Tout autant qu'ils reconnaissent le besoin d'écoles neutres, ils
prétendent que la très grande majorité, en particulier des
francophones au niveau montréalais, désirent l'école
catholique, entendue non pas comme une heure par semaine, mais comme une
école avec son ambiance.
M. DAOUST: Nous n'y croyons vraiment pas.
M. CARDINAL: Si vous me permettez, M. le Président, j'apporterais
la nuance suivante à l'égard du ministre. J'ai entendu, comme
lui, tous ceux qui sont venus devant nous. Je pense, je ne veux pas
interpréter les idées des parents catholiques et je ne veux pas
développer une thèse, que les parents catholiques qui sont venus
devant nous je parle de l'Assocaition des parents catholiques comme
telle, parce qu'il y a d'autres groupes qui sont venus, qui étaient
catholiques, et qui n'ont pas tenu le même langage ont une notion
assez vague de l'école catholique, en ce sens que, pour eux, il s'agit
de structures confessionnelles. Et quand on leur a demandé quelles sont
les valeurs qu'il y aurait au sein de ces structures, ils n'ont jamais pu nous
répondre. Ceci n'approuve ni n'infirme la thèse de la FTQ, mais
c'est un fait qui s'est produit à cette commission parlementaire.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Saint-Laurent.
M. PEARSON: M. Daoust, excusez-moi. Je n'étais pas ici ce matin.
Je n'ai pas pu parcourir tout votre mémoire. A la page 24, 3.3: "Pour
une école multiconfessionnelle: Que le système scolaire
montréalais soit réorganisé de façon à
instituer deux types d'écoles, l'école multiconfessionnelle
francophone et l'école multiconfessionnelle anglophone." Est-ce que je
saisis bien ou mal? Est-ce que vous prônez, en somme, la division
scolaire, à Montréal, selon la langue?
M. DAOUST: Non, sûrement pas.
M. PEARSON: Si je lis ça textuellement, c'est mon impression.
Deux systèmes, deux types d'écoles: multiconfessionnelle
francophone et multiconfessionnelle anglophone...
M. DAOUST: Nous sommes pour... M. PEARSON: Je ne saisissais pas...
M. DAOUST: C'est le principe des commissions scolaires unifiées
et nous en sommes. Mais, à l'intérieur de celles-ci, nous
reconnaissons la nécessité d'avoir des écoles anglophones
et des écoles francophones. Mais nous les souhaitons
multiconfessionnelles plutôt que d'avoir catholiques, protestants ou
autres; de part et d'autre, six choix; qu'il n'y en ait que deux...
M. PEARSON: Cela veut dire que, dans votre mémoire, H y a un
mécanisme, je suppose, qui explique ce que vous mentionnez là? De
quelle façon cela pourrait-il fonctionner?
M. DAOUST: Disons que c'est un aspect un peu plus complexe. On voulait
surtout s'attacher au principe, sachant que c'est assez nouveau aussi comme
prise de position. Nous voulions plutôt décrire ça d'une
façon globale, au lieu de donner tous les mécanismes, tous les
amendements qu'on pourrait retrouver dans le projet de loi.
M. LE PRESIDENT: M. Daoust, il est 5 h 35, je vous accorde encore deux
minutes.
M. DAOUST: Deux minutes, d'accord.
M. MARCHAND: Deux minutes pour vous, deux minutes pour nous autres.
M. DAOUST: Je vais passer la page 25. Nous souhaitons en deux
mots que le conseil scolaire ait les plus grands pouvoirs possible, que
la propriété des édifices reste au conseil scolaire, pour
qu'il puisse jouer son rôle de planificateur. Je ne veux pas
répéter. D'autres ont dû abondamment vous parler de tous
ces sujets. A la page 26...
M. PICARD: Seulement une question, M. Daoust; sur la question des
pouvoirs du conseil scolaire à comparer avec les pouvoirs des
délégués aux commissions scolaires. Il y a, dans le projet
de loi, un article, dont je ne me souviens pas du numéro, qui parle des
pouvoirs résiduaires. Est-ce que vous avez étudié cette
possibilité de transférer les pouvoirs résiduaires au
conseil scolaire plutôt que de les garder aux commissions scolaires?
M. DAOUST: Je vous avouerai qu'on n'a pas étudié les
moindres détails du projet de loi. Ce que nous souhaitons, c'est que le
conseil scolaire, dans sa lutte à la pauvreté, puisse avoir tous
les instruments voulus à sa disposition.
En fait, c'est le problème du rattrapage, le problème de
la coordination et que, conséquemment, l'on ne cède pas aux
commissions scolaires trop de pouvoirs.
M. PICARD: Ce qui me frappe, c'est que vous venez de dire que vous
n'avez pas étudié les détails. Si vous considérez
que ces pouvoirs résiduaires sont des détails, bien, franchement,
je ne sais pas, vous n'avez pas regardé ce chapitre, parce qu'à
mon avis c'est à peu près ce qu'il y a de plus important dans le
projet de loi, cette question du partage des pouvoirs.
A un moment donné, on donne certains pouvoirs aux commissions
scolaires, certains autres pouvoirs définis dans le texte de loi, au
conseil scolaire et on dit, tout ce dont nous n'avons pas parlé, ce sont
les commissions scolaires qui l'ont. C'est grave cela, j'aimerais avoir votre
opinion là-dessus.
M. DAOUST: Il y a un ou deux aspects de ce problème que l'on a
abordé à la toute fin du mémoire. Je pense, d'ailleurs,
que le bill 27 reconnaît aux commissions scolaires maintenant le pouvoir
d'organiser des cours pour l'éducation des adultes. Nous, dans notre
mémoire, souhaiterions que le conseil scolaire puisse, s'il le juge
à propos, avoir ce pouvoir-là, quitte par la suite à le
céder ou du moins à donner aux commissions scolaires certains
pouvoirs. Cela est abordé à la toute fin de notre mémoire
et si c'est le genre de pouvoirs dont vous voulez faire état, oui, on a
étudié ces aspects-là.
Je m'excuse, je suis toujours coupé par les deux minutes.
Coupé; du moins, l'on me rappelle... Il m'en reste une et demie! Page
26: Election des commissaires, élection du conseil scolaire. Je pense
que d'autres organismes ont abordé ce problème et vous êtes
familiers avec les prises de position de la FTQ.
M. SAINT-PIERRE: Sur un point, M. Daoust, je ne sais pas si vous me
permettrez une question. C'est à la page 18 et peut-être que cela
vaudrait la peine puisque votre expérience dans ces milieux-là...
C'est que nous avons voulu, dans le projet de loi, donner une participation aux
parents par le mécanisme des comités de parents. Mais il nous
semble et il semble également que la très forte majorité
des associations de parents soient favorables que les comités de parents
soient faits pour les parents, c'est-à-dire ceux qui tint un
intérêt direct de ce qui se passe dans la chose scolaire.
A la page 18, vous parlez d'une participation et là je mentionne
d'autres types d'amendements. J'ai, moi-même, à plusieurs
reprises, évoqué le rôle communautaire de l'école et
nous envisageons d'autres types d'amendements pour assurer ce rôle
communautaire au niveau des commissions scolaires. C'est le genre de
comités mixtes avec la ville et avec d'autres organismes
socio-économiques pour assurer un rôle communautaire à
l'école, l'utilisation maximum des équipements collectifs
disponibles.
En page 18, vous dites: "La participation des citoyens au fonctionnement
de leur école trouverait donc une première expression dans ces
comités consultatifs, comités dont les membres seraient
élus par l'assemblée générale des citoyens du
quartier en âge de voter." C'est drôle, l'assemblée
générale des citoyens, pour moi, c'est la commission scolaire.
Ces mécanismes d'élection, ce n'est pas une assemblée
générale ou un comité de citoyens, c'est une
élection où les gens se présentent et là je
peux retenir vos suggestions de faire cela à tous les quatre ans pour
tout le monde en bloc, il y a différents types d'amendements que l'on
peut envisager mais je ne vois pas là... Est-ce qu'il n'y a pas
une structure parallèle de convoquer tous les gens à élire
des commissaires qui s'occupent de la chose scolaire et en même temps
avoir une assemblée générale de citoyens qui
établit un comité consultatif de citoyens, cela fait quoi? Est-ce
que cela n'a pas tué dans l'oeuf la participation des parents? Cela vise
à quoi? Quel est objectif dans le cas d'une structure scolaire?
M. DAOUST: Je dois vous dire que là-dessus la prise de position
de la FTQ est passablement originale, je ne pense pas qu'on l'ait soutenue
souvent depuis le début des sessions de cette commission parlementaire.
Oui?
M. CHARRON: Dans le mémoire de la CSN.
M. DAOUST: Bon. Alors ce serait d'élargir la participation du
milieu, de ne pas la restreindre aux seuls parents. Nous pensons qu'il y a un
grand nombre de gens dans une société qui ont beaucoup à
dire sur l'éducation des enfants et qui pourraient siéger au sein
des comités d'écoles et qui ne sont pas nécessairement ou
ne sont plus des parents dans le vrai sens du mot ou qu'ils ne l'ont jamais
été. C'est cette notion, en fait, que nous voulions soutenir et
surtout faire accepter éventuellement, élargir le cadre de la
participation du milieu et sortir un peu de cette espèce de
cloisonnement, de comités de parents et puis les parents à
l'école, ces derniers étant quasiment les seuls à avoir la
compétence parce qu'ils sont parents.
M. SAINT-PIERRE: Mais, au niveau des pouvoirs de décision, ce qui
est à la commission scolaire, il n'y a pas cette restriction,
c'est-à-dire que tous les citoyens qui s'intéressent à
l'éducation peuvent se présenter comme commissaires, se faire
élire et même participer à la gestion de la chose
scolaire.
M. DAOUST: Nous sommes fort heureux d'ailleurs de cela et nous l'avons
mentionné.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose de
parallèle du fait qu'on dit aux citoyens: Intéressez-vous
à la chose scolaire, présentez-vous comme commissaires. Il y a
des gens qui nous disent que, pour quinze commissaires, on aura de la
diffuculté à recruter les gens compétents. Moi, je n'y
crois pas. Je pense qu'à Montréal on est capable, dans chaque
quartier, de trouver quinze personnes qui vont être habiles à
apporter une contribution à la gestion scolaire. Est-ce qu'il n'y a pas
un parallélisme, après leur avoir dit ça, de dire:
Ohé! ohé! citoyens, il y a une assemblée
générale, on va élire un comité de citoyens pour
s'occuper de la chose scolaire. Est-ce qu'on ne risque pas de noyer la
participation des parents qui, devant et là, j'ai des exemples
assez récents le rôle accru des animateurs sociaux et
d'autres groupes, vont se sentir déphasés. Ils vont abandonner
l'école et, finalement, un des objectifs qu'on avait ne sera pas
réalisé.
M. DAOUST: Oui, il y a par ailleurs l'autre danger aussi. C'est qu'on va
convier les citoyens du quartier d'une commission scolaire à voter une
fois par quatre ans et à ne plus particper vraiment à la chose
scolaire, sauf par l'entremise de ceux qu'ils auront
délégués au sein de la commission scolaire. Au niveau des
écoles, on ne retrouve plus le milieu, on retrouvera les parents. Cela
nous inquiète un peu et on voulait en tout cas attirer votre attention
là-dessus. Il faudrait peut-être trouver des mécanismes;
celui-là en est un qui permettrait véritablement au milieu et pas
seulement aux parents parce qu'on estime, pour un tas de raisons sociologiques,
que de plus en plus cette cellule, la famille enfin, je ne veux pas
faire un discours là-dessus a peut-être perdu l'importance
qu'elle avait dans le passé et que, de plus en plus ça
aurait toujours dû être cela le milieu doit s'occuper de
l'éducation des enfants. Alors, c'est un peu cette thèse qu'on a
voulu soutenir.
M. TETLEY: Avez-vous des parents ou d'autres personnes à votre
conseil?
M. DAOUST: Oui, il y a de tout.
M. TETLEY: Ce sont tous des travailleurs, tous membres de la FTQ.
M. DAOUST: Oui, oui.
M. TETLEY: Pas des gens qui ne sont pas de la FTQ.
M. DAOUST: Non, non. Mais, écoutez, en fait, il est normal qu'on
retrouve les parents majoritairement au sein... Enfin, ici, dans le projet de
loi, c'est exclusivement au sein des comités d'école. Il serait
normal qu'on les retrouve majoritairement. Mais nous souhaiterions que d'autres
talents, d'autres personnes puissent donner leur contribution.
M. TETLEY: Mais, au conseil de la FTQ, vous ne souhaitez pas
d'étrangers ou de personnes qui ne sont pas membres...
M. DAOUST: Oui, je vois. Vous essayez peut-être d'établir
un parallèle entre...
M. TETLEY: Oui, parce que vous parlez de consultation, etc.
M. DAOUST: Mais l'école, les parents et les citoyens en
général, mais l'école est un instrument de civilisation.
Cela véhicule des valeurs et je pense que cela appartient à la
collectivité.
M. TETLEY: La FTQ se lance dans la société, c'est un
instrument, suivant votre chef la semaine dernière, pour tout changer
dans la société. Il ne parlait pas tout simplement des syndicats,
des entreprises touchées par le syndicat. Mais je trouve que c'est
illogique de votre part de parler d'une institution comme une commission
scolaire ou un conseil d'école où vous voulez la participation et
la consultation et vous-mêmes, vous n'avez pas chez vous cette même
participation, cette même consultation.
A mon avis, c'est illogique.
M. DAOUST: Je m'excuse, je vois très mal l'analogie, je m'en
excuse.
M. TETLEY: Je vais le répéter. Vous dites que
l'école est une partie de la société, mais votre chef, M.
Laberge, la semaine dernière, a parlé du rôle de la FTQ,
changer complètement la société, etc. Si c'est
peut-être votre rôle, je me le demande, mais si la FTQ a ce
rôle, elle doit m'inviter peut-être ou d'autres à faire
partie de votre conseil et de voter parce que vous voulez que les parents qui
s'occupent de l'éducation vous invitent et invitent tout le monde
à participer. Je trouve ça très illogique de votre
part.
M. LE PRESIDENT: Je suis obligé d'arrêter ici les
débats. J'ai promis à M. Chipping qu'il se présenterait ce
soir et je l'inviterais à venir présenter son rapport.
On remercie M. Daoust.
M. DAOUST: Moi aussi, je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: La parole est à M. Chipping.
Humanist Fellowship of Montreal
M. MARGENTALER: Non, il y a une erreur, je suis le Dr Margentaler, Mme
Chipping c'est la secrétaire de notre organisme. Je représente
l'Association humaniste de Montréal, Humanist Fellowship of Montreal. Je
pense que nous sommes les seuls porte-parole ici d'un groupe de gens du
Québec qui n'ont pas d'autre porte-parole parce que nous
représentons une philosophie que nous appelons philosophie humaniste ou
scientifique, si vous voulez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Au sens du XVIe siècle?
M. MARGENTALER: Non. Non, ça porte à confusion un peu, le
terme tel qu'il est.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est ce que ça veut dire le mot
"humaniste" ici? Humanitaire ou humaniste?
M. MARGENTALER: Non, humaniste séculaire, non confessionnel ou
scientifique. Enfin, il y a plusieurs termes pour décrire ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la définition du XVIe
siècle.
M. SAINT-PIERRE: Il y a combien de membres dans votre organisation,
monsieur?
M. MARGENTALER: Nous avons 200 membres inscrits, mais il y a plusieurs
humanistes, des gens qui se considèrent humanistes, qui ne sont pas dans
notre organisme.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous autres...
M. MARGENTALER: Nous ne faisons pas de prosélytisme et nous avons
plusieurs membres et nous représentons des gens qui se
considèrent comme athées, agnostiques, libres penseurs,
rationalistes, et des gens qui ne veulent pas ou ne veulent plus se dire qu'ils
appartiennent à une Eglise: catholique, protestante, juive ou
autres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous regroupez aussi, monsieur, les
positivistes?
M. MARGENTALER: Oui, enfin nous incluons un peu les positivistes et nous
sommes électiques dans la philosophie en disant que nous acceptons de
n'importe quelle religion des philosophies, des valeurs que nous
considérons appropriées ou bonne pour l'humanité. Nous
rejetons celles qui sont basées sur des notions fausses ou
périmées.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que c'est de l'électisme ou du
syncrétisme?
M. MARGENTALER: Non, c'est plutôt de l'électisme, je
dirais, c'est-à-dire par la méthode scientifique, nous essayons
de dégager les valeurs et les notions qui nous paraissent bonnes ou
scientifiques et nous rejetons...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous voulez faire une symbiose de toutes les
valeurs?
M. MARGENTALER: Oui, au fond, oui, si vous voulez, oui. Nous sommes
dévoués à la démocratie, c'est-à-dire
à la dignité de la personne humaine et nous essayons de
participer à la société dans laquelle nous vivons en
tenant compte justement des diversités ethniques et religieuses et
autres.
Nous voulons que la société reflète ces valeurs de
société ouverte à tout le monde,
c'est-à-dire à des devoirs égaux envers tout le
monde, sans égard à la croyance, à la couleur, au sexe et
à l'appartenance ethnique.
M. SAINT-PIERRE: Votre mémoire, monsieur, reflète les vues
de vos 200 membres sur le type d'écoles que nous devrions avoir, le type
de structures. Je pense qu'en établissant au Québec
l'école neutre on tente de satisfaire une partie de vos membres, qui
pourraient y retrouver l'école neutre, c'est-à-dire
l'école non confessionnelle. Est-ce que votre société
reconnaît que d'autres personnes, qui peut-être sont plus que 200,
puissent désirer avoir un système scolaire qui soit
confessionnel?
M. MARGENTALER: Nous reconnaissons qu'il y a plusieurs associations qui
veulent d'autres sortes d'écoles, mais nous croyons justement que
l'école neutre, ou multiconfessionnelle si vous voulez, est la seule
école démocratique dans un Etat pluraliste où il y a
plusieurs groupes religieux. Nous ne voyons pas pourquoi un groupe religieux ou
un autre aurait des privilèges qui ne sont pas accordés à
d'autres groupes religieux. Si vous prenez l'exemple du système scolaire
qu'il y a ici au Québec, il y a des privilèges accordés
par la Constitution aux groupements catholiques et aux groupements protestants.
Il y a maintenant plusieurs groupes religieux au Québec, tant dans le
milieu anglophone que francophone, et nous ne voyons pas pourquoi une injustice
serait faite à ceux qui ne sont pas catholiques ou protestants.
D'ailleurs, nous ne voyons pas pourquoi les protestants ou les catholiques
insistent pour séparer leurs élèves des autres. Nous
croyons que les concepts comme M. Daoust l'a dit de divisions
confessionnelles sont complètement périmés. Ils ne sont
pas justes, ils ne sont pas démocratiques et ils ne sont pas
pragmatiques. De sorte que même les catholiques, les bons catholiques,
les bons protestants se trouveraient très bien dans une école
multiconfessionnelle où tous les enfants, sans égard à
leur religion, ou à la religion de leur foyer, pourraient apprendre
à se connaître comme individus, comme personnes humaines. C'est ce
que nous voyons dans le projet de loi. Evidemment, nous reflétons, comme
j'ai dit, la philosophie de nos membres, la philosophie humaniste en
général. Nous voulons appliquer les principes
démocratiques au système scolaire. Donc, nous sommes contre la
rétention, qui est implicite dans le projet de loi 28, qui non seulement
va créer des écoles catholiques et protestantes, mais va
créer six types d'écoles, des écoles françaises
catholiques, protestantes ou neutres, et des écoles anglaises
catholiques, protestantes ou neutres. Nous trouvons que c'est...
M. SAINT-PIERRE: Vous auriez je m'excuse du parallèle,
c'est pas dans mon esprit, mais un peu comme la FTQ le mentionnait deux
types d'écoles: multiconfessionnelles françaises et
anglaises?
M. MARGENTALER: Oui, nous croyons que...
M. SAINT-PIERRE: Dans votre résolution 2, vous dites: "There is
no reason why Catholics as a group, Protestants as a group should be given
rights or privileges denied to other religious groups". La raison en est que
ces gens-là commencent à avoir les épaules assez larges,
c'est la Constitution de 1867 qui accordait à ces groupes-là des
droits qu'elle n'a pas accordés à d'autres groupes.
M. MARGENTALER: Oui, c'est pour cela que nous trouvons enfin je
ne suis pas expert constitutionnel mais nous trouvons qu'il serait bien
mieux de procéder par un amendement à la Constitution, par une
Constitution nouvelle, mais là c'est un peu difficile parce que ce qui
est reconnu, ce sont quand même des droits qui sont reconnus dans la
Constitution actuelle. Je pense que le groupe protestant anglophone s'oppose
surtout à l'unification des structures scolaires non pas à cause
de la religion, parce que les protestants en général, aux
Etats-Unis, un peu partout, sont pour le système d'écoles
neutres, multiconfessionnelles dans l'école publique. Ils s'attachent
à cela, ils pensent que c'est la seule façon de conserver le
droit à l'école anglaise.
M. CHARRON: Mais si on veut rester réaliste, croyez-vous qu'est
possible l'amendement à la Constitution que vous jugez
nécessaire?
M. MARGENTALER: Je pense que oui. Avec de la bonne volonté de
tous les côtés, je pense qu'il serait...
M. CHARRON: De quel côté?
M. MARGENTALER: De tous les côtés.
M. CHARRON: Identifiez-vous les forces actuellement?
M. MARGENTALER: J'identifie beaucoup de forces. Nous vivons dans une
société où il y a plusieurs organismes. Il y a des
organismes de militants et révolutionnaires ou extrémistes et je
pense qu'il n'est pas possible de satisfaire les organismes bien militants de
gauche et de droite, mais je pense que la majorité de la population a
une bonne volonté de vivre ensemble et en coopération. Nous avons
ici une société qui est peut-être avancée à
plusieurs points de vue sur beaucoup de populations dans le monde parce que ce
n'est pas une population homogène. Il faut que nous apprenions à
bien vivre ensemble. La seule façon de le faire est de respecter les
droits fondamentaux de chaque groupe. Maintenant, les droits religieux ne
sont
pas fondamentaux. C'est-à-dire le droit à l'école
religieuse n'est pas un droit fondamental parce que, s'il était
accordé, il faudrait accorder les mêmes droits à tous les
groupes religieux.
M. CHARRON: Je trouve que l'optimisme que vous manifestez quant aux
possibilités d'amender la Constitution de 1867, vous devriez en passer
un peu au ministre des Affaires sociales qui se promène bredouille
depuis à peu près huit mois puis il cherche seulement juste
à faire amender un tout petit article. Le jour où vous obtiendrez
l'amendement à l'article 93...
M. MARGENTALER: Il y a des gens qui sont optimistes ou pessimistes, je
ne sais pas, il y a beaucoup de choses...
M. CHARRON: Il y a des gens qui sont réalistes et d'autres ne le
sont pas.
M. MARGENTALER: On est presque arrivé à un accord à
Victoria, il se peut quand même qu'on arrive à des accords s'il y
a de la volonté des deux côtés d'y arriver.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela pourrait se produire, monsieur, lorsque
et mon collègue de Saint-Jacques va être d'accord
cet accord pourra survenir lorsque tous les gens auront cette conception
humaniste que vous exprimez si bien.
M. MARGENTALER: J'espère bien, mais je pense qu'il faudrait
vouloir arriver à des compromis plutôt qu'à des solutions
qui entravent ou briment une minorité. Le champ de bataille, au fond,
s'est transféré à partir des droits religieux. Tout le
monde comprend maintenant, je pense, que ce que la majorité des gens
veulent maintenant, c'est une école française ou une école
anglaise.
On le comprend très bien et nous lisons dans le mémoire
que les gens qui veulent une éducation religieuse pour leurs enfants
dans le cadre d'une école publique peuvent l'avoir. On peut demander
à des enfants catholiques, protestants ou juifs, d'une façon
facultative, si les parents veulent qu'ils aient une instruction religieuse,
mais, comme M. Saint-Pierre l'a dit, que ce soit à onze heures, midi ou
après l'école, et qu'ils aillent dans des locaux
différents et qu'ils y aient cette instruction, à condition que
ce ne soit pas une chose imposée mais une chose voulue par les
parents.
Ce n'est pas là le problème. Le problème principal
ici au Québec, c'est le fait que la minorité anglophone est
angoissée à la pensée que le droit à l'école
anglaise puisse lui être enlevé complètement. Et j'arrive
ici à un point qui est très important, sur lequel plusieurs
organismes anglophones ont fait des représentations. J'aborde ça
du point de vue pratique et pragmatique.
Si nous considérons qu'il y a un droit fondamental à
préserver l'identité, de la langue et de la culture, il faut donc
qu'il y ait des écoles anglaises et des écoles françaises,
je vois mal pourquoi il n'y aurait pas en même temps des commissions
anglaises et françaises. Je ne vois pas pourquoi on s'obstine à
ce qu'il y ait des commissions unifiées qui, en même temps,
décident de l'enseignement en français et en anglais. Il me
semble beaucoup plus pratique et beaucoup plus pragmatique d'instituer des
commissions qui s'occuperaient des écoles françaises en
français et des écoles anglaises en anglais.
Comme on a un ministère de l'Education, je pense que la
correspondance et la coordination pourraient se faire au niveau du
ministère de l'Education. On pourrait donc éliminer tous les
différends qui existeraient sans doute au sein de chaque commission
scolaire, pour savoir quelle sera la langue de travail, s'il y aura des gens
qui ne comprendront pas ce que l'on dit, etc.
C'est un point très pratique et je pense que je vais me limiter
à ça. Je serais très heureux de répondre à
vos questions.
M. SAINT-PIERRE: Nous vous remercions. Je ne sais pas si, dans la
société humaniste, dans les règles des sophism es, vous
avez toujours sept règles comme l'abbé Grenier avait ou si vous
en avez plus. Nous prenons vos recommandations en bonne note.
M. PICARD: M. le Président, j'aimerais avoir une information.
Dans le préambule de votre mémoire, vous parlez de vos membres.
Vous avez deux cents membres?
M. MARGENTALER: Nous avons deux cents membres à
Montréal.
M. PICARD: Il est écrit dans votre mémoire que: "Since
many of our members are religious non-conformists, atheists, agnostics,
freethinkers and rationalists."
M. CHARRON: Môman.
M. PICARD: J'espère que vous n'avez pas d'anarchistes et de
séparatistes dans votre groupe.
M. MARGENTALER: Cela n'a rien à faire avec ça.
M. PICARD: C'est simplement à titre d'information.
M. MARGENTALER: Vous pouvez avoir un séparatiste qui est
catholique ou qui est athée. On peut avoir des anarchistes qui sont
catholiques. Il y a bien des choses à considérer.
M. LE PRESIDENT: Il est six heures. Je remercie M. Margentaler de sa
présentation. Nous allons en prendre bonne note. La séance est
levée et la commission ajourne ses travaux à dix heures demain
matin.
(Fin de la séance à 18 heures)
ANNEXE A
MEMOIRE PRESENTE PAR LE FRONT COMMUN POUR LA DEFENSE
DE LA LANGUE FRANÇAISE
Le bill 28, pendant du bill 62, constitue une application administrative
de la loi 63 (anciennement le bill 63). Dans ce sens, le bill 28 constitue
également une extension et un renforcement du bill 63.
Le bill 63 fut présenté et adopté à
l'Assemblée nationale en 1969, afin de renverser les résultats
démocratiques des élections aux commissions scolaires de
St-Léonard, où les parents francophones, majoritaires, avaient
décidé en faveur de l'unilinguisme français comme seul
moyen d'assurer la survie de la langue nationale du Québec. Bien que ce
n'était pas la première fois qu'était adopté,
à l'Assemblée nationale, des lois antidémocratiques
flagrantes contre les québécois, ce fut la première fois,
au Québec, qu'un gouvernement osait légiférer la
destruction de la langue française, et par conséquent, la
condamnation à terme de la nation québécoise.
Avant l'adoption du bill 63, bien que la langue française
était, au Québec, à un degré avancé de
disparation, le gouvernement Bertrand s'est vu obligé
d'accélérer le processus d'anglicisation, déjà bien
avancé par la politique linguistique des monopoles étrangers, qui
dominent le Québec depuis des années, cela avec la
complicité des gouvernements à Ottawa et à
Québec.
Aussitôt que des Québécois décidèrent
de mettre fin à cette assimilation forcée, en adoptant des moyens
démocratiques, le gouvernement Bertrand, avec la complicité
totale du Parti libéral, est intervenu pour légaliser
l'anglicisation et la rendre plus rapide.
Le bill 63 fut la première élaboration d'une politique
linguistique par le gouvernement québécois. Il fut bien
sûr, un bill de colonisés, comme la presque totalité des
bills adoptés à l'Assemblée nationale. Le bill 63
garantissait aux parents le droit de choisir (un droit qui n'existe en aucun
autre pays au monde) la langue d'enseignement à laquelle leurs enfants
seraient soumis, au sein du système scolaire public.
Nous savons trop bien que le bill 63 fut une réussite
complète pour ceux qui visaient l'assimilation des francophones. Les
chiffres rendus publics il y a trois semaines de la Commission des
écoles catholiques de Montréal, organisation que nous croyons
libre de tout agitateur étranger, viennent confirmer cette
réussite.
Il y a d'autres députés à l'Assemblée
nationale, notamment ceux du Parti Québécois, qui se trompent
gravement en proposant une simple modification du bill 63, en vue d'obliger les
immigrants à s'intégrer à la communauté
francophone. Un tel amendement serait raciste et discriminatoire en s'attaquant
à un secteur particulier de la population québécoise. Il
faut des lois pour obliger tous les Québécois, quelle que soit
leur origine nationale, à s'intégrer à la
communauté francophone s'ils veulent participer au secteur public de
l'éducation.
Tant que les Québécois d'origine anglophone pourront
s'instruire et se former en anglais aux écoles subventionnées par
l'Etat, le processus d'anglicisation ira en s'accélérant. Tant
qu'un secteur de la population québécoise aura droit à
l'instruction publique dans la langue favorisée, c'est-à-dire,
l'anglais, la langue de la haute finance, les francophones qui tiennent
à leur langue seront, chez eux, des citoyens de deuxième
classe.
Il n'est pas question de "défendre les droits acquis de la
minorité". Il s'agit plutôt de droits conquis, de droits
volés. La minorité anglophone au Québec jouit
d'énormes privilèges au détriment de la majorité
francophone. Il nous suffit d'étudier les cartes préparées
au laboratoire de sociologie électorale du Département de science
politique à l'Université de Montréal, publiées dans
la revue Maintenant (No. 110/novembre, 1971), pour voir que les quartiers les
plus francophones à Montréal sont ceux où l'on a un revenu
au-dessous du revenu moyen. Il n'est pas possible de mettre fin à cette
discrimination linguistique que subit la nation québécoise
opprimée (indépendamment de ce que nous faisons avec les
immigrants), si nous n'enlevons pas les privilèges de la nation
opprimante, c'est-à-dire la nation canadienne-anglaise.
Bien que le Front commun pour la défense de la langue
française (FCDLF) soit parmi les plus fervents partisans d'une
intégration scolaire réelle, nous sommes carrément contre
toute extension et application du bill 63 et de sa politique linguistique
"bilingue". Le bilinguisme légalisé par le bill 63 est un
bilinguisme à sens unique, se transformant rapidement en unilinguisme
anglais. Tant que le bill 63 ne sera pas aboli, nous nous opposerons à
toute restructuration scolaire, y compris, bien sûr, le bill 28.
Tant que la politique linguistique du gouvernement demeure celle
légiférée par le bill 63, nous nous opposons à
toute législation qui touche la langue française, directement ou
indirectement. Le bill 28 est un autre bill de colonisés qui aide
à garder le peuple québécois soumis et à genoux, en
faisant de l'île de Montréal un territoire "bilingue". Selon les
experts, la ville de Montréal, métropole de la nation, devient de
plus en plus anglaise. D'ici 15 à 20 ans, elle sera une ville à
majorité anglophone, et sans l'aide du bill 28!
Le FCDLF est en faveur d'une intégration scolaire qui sert
à la défense de la langue française et non à sa
destruction. D'abord il faut abroger la loi 63, adoptée à la
hâte en 1969 malgré une massive opposition dans la rue.
Une fois le bill 63 annulé, le FCDLF est en faveur d'une loi
concernant la restructuration des commissions scolaires sur l'île de
Montréal qui réclame: a) unification complète de chaque
commission scolaire sur l'île, sans les structures et postes
parallèles anglophones et francophones préconisés dans le
bill 28. b)que le conseil scolaire et les commissions scolaires soient
unilingues françaises. c) que le français soit la seule langue
officielle des communications écrites et parlées dans
l'administration scolaire sur l'île de Montréal. d)que le
français soit la seule langue d'enseignement dans les écoles de
Montréal subventionnées par l'Etat. Toute école anglaise
devrait être financée privément par ceux qui la
fréquentent. Toute école anglaise, qui désire demeurer
dans le système public intégré', participera au programme
de transformation qui durera 5 ans. Durant cette période, les
écoles anglaises deviendront progressivement françaises avec une
instruction linguistique adéquate, qui assurera aux élèves
une pleine participation à la vie québécoise. Cinq ans
après l'adoption de cette loi sur la restructuration scolaire, toute
école subventionnée par l'Etat sera française. L'anglais
pourra être enseigné comme langue seconde, tout comme le
français aux écoles du Canada anglais. e) que tous les
commissaires soient élus démocratiquement - - aucune nomination
"d'en haut". f) que toute référence et tout renvoi au
lieutenant-gouverneur en conseil soient biffés. Le lieutenant-gouverneur
représente la Reine d'Angleterre qui fera encore moins que le
gouvernement québécois pour défendre la langue
française. La défense de la langue française est l'affaire
des Québécois, et non de la Reine d'Angleterre et de ses
représentants!
Bien que le Front commun pour la Défense de la langue
française ait peu d'argent et aucun porte-parole à
l'Assemblée nationale, nous avons l'appui de milliers d'étudiants
et d'ouvriers québécois qui sont prêts à descendre
dans la rue pour défendre leur langue. Nous allons convoquer une
conférence nationale au mois de janvier pour lancer une campagne de
masse pour l'abolition du bill 63 et pour le gel de toute autre
législation qui touche la langue jusqu'à ce qu'il soit
annulé. Cette conférence lancera une action de masse qui aura
lieu au mois de mars 1972. Notre manifestation du 16 octobre ne fut que le
début de la lutte du FCDLF pour un Québec français!
Au lieu de passer son temps et dépenser notre argent pour
s'assurer que "les droits de la minorité anglophone seront
intégralement respectés", le gouvernement ferait mieux de
traduire quelques manuels scolaires pour les élèves francophones.
Nous avons l'intention d'obliger le gouvernement à Québec
à défendre notre langue, en mobilisant de plus en plus de
Québécois dans la rue.
ANNEXE B
MEMOIRE PRESENTE PAR LA SOCIETE
D'EDUCATION DU QUEBEC
Un bill vient enfin tenter de réorganiser l'administration
scolaire sur l'île de Montréal: la nécessité de
cette restructuration tant attendue, et dont on parle depuis si longtemps
qu'on se souvienne, par exemple, du rapport Parent, du rapport
Pagé, du bill 62 la nécessité de cette
restructuration est si évidente que nous n'insisterons pas sur
l'anarchie qui semble définir le monde scolaire montréalais. Il
n'est pas utile de s'étendre sur la disproportion énorme qui rend
sans commune mesure des géants comme la CECM et le PSBGM, et les autres
commissions scolaires de l'île. Comment oser prétendre, dans de
telles conditions, que les populations ont droit aux mêmes services,
reçoivent les mêmes services, ont le même droit à une
éducation de qualité pour un même coût ! Entre
l'administration automatisée et les services de recherche de la CECM, et
la poignée de cadres d'une petite commission scolaire à la
gestion de type artisanal, il y a toute la différence qui sépare
une firme moderne et une échoppe du XIX siècle. Nous ne
prétendons pas que les petites commissions scolaires font
nécessairement du mauvais travail: au contraire, elles ont toute notre
sympathie, mais nous devons reconnaître qu'elles ne sont qu'une
survivance légèrement aberrante.
Une restructuration administrative répond donc à nos
voeux. En partie, du moins. En attendant cette restructuration plus
fondamentale des individus qui oeuvrent dans ces structures. Nous avons trop vu
de ces administrateurs ou de ces fonctionnaires de petites commissions
scolaires se rendre coupables inconsciemment, sans doute de ce
qu'en d'autres pays on nomme forfaiture, et de ce qu'ici on cache sous le nom
bénin de "conflit d'intérêts". Nous n'insisterons pas sur
ces abus que, dans certains cas, des maladresses placent entre les mains
de la justice et, plutôt que de les déplorer, nous
préférons croire que la prise en mains des structures scolaires
par l'Etat devrait les éliminer.
Aussi, les commentaires et les recommandations que nous vous soumettons
sont-ils inspirés par le souci de rendre plus économiques, plus
rentables et plus justes les structures scolaires : elles doivent donner
à chacun la même chance de recevoir une instruction qui,
idéalement, ne sera limitée que par ses propres aptitudes et non
plus par des contraintes sociales ou économiques; qu'il soit né
riche ou pauvre, anglophone ou francophone, canadien ou immigrant, chaque
enfant doit pouvoir recevoir une instruction qui répond à ses
possibilités, et à ses désirs; ce développement
libre des possibilités de chaque individu sera bénéfique
pour la société québécoise.
Nos commentaires et recommandations sont aussi inspirés par le
souci de répondre à nos besoins de Québécois. Nous
sommes francophones dans un monde anglophone: ces adjectifs, trop souvent
répétés, et à toutes les sauces, ont un sens
profond; ils représentent quelque chose de fondamental, qui fait que
nous ne sommes plus des Français, mais encore moins des
Américains: c'est une langue, une culture, une manière de vivre,
le goût d'une certaine gratuité, une façon d'être
heureux qui, hélas, disparaissent peu à peu. Notre peuple
s'affaiblit, sinon en qualité, du moins en quantité. Nous ne
voulons pas citer des statistiques cruelles que chacun connaît: au
Québec, la natalité décroît et les immigrants
s'anglicisent, nous ne pouvons faire autrement que le constater. Nous ne
condamnons pas les immigrants: ils viennent au Québec, pour la plupart
attirés par une vie qu'on leur a présentée comme meilleure
(c'est-à-dire plus confortable, en réalité), et l'attrait
économique de l'anglais est plus fort que l'attrait sentimental du
français. Mais pour nous, Québécois francophones, si du
moins nous croyons en notre culture notre façon de vivre et de
penser il est de notre devoir le plus absolu de renverser par tous les
moyens ce mouvement qui nous affaiblit. En d'autres termes, s'il est louable de
respecter les minorités et de leur assurer les moyens de survivre, il
est impératif de sauvegarder notre majorité.
Nous croyons que le bill 28 est un bon moyen de répondre à
nos aspirations: nous l'appuyons, nous l'approuvons, avec, cependant, quelques
réserves et quelques modifications que nous vous suggérons
maintenant.
Article 583
Nous croyons que cet article devrait se limiter à ce qui suit:
"Chaque commission scolaire est composée de sept commissaires
élus conformément aux articles 95 à 183".
En effet, la nomination par le lieutenant gouverneur en conseil de deux
commissaires supplémentaires nous semble un accroc à la
démocratie et à notre façon de voter. Une telle mesure, si
elle est appliquée, est la preuve que notre système
électoral est faussé puisqu'il ne permet pas de choisir des
représentants assez... représentatifs. Si tel est le cas, c'est
tout notre système d'élection qu'il faudrait reviser.
En outre, quinze commissaires nous semblent constituer un groupe lourd
et encombrant. Un plus petit nombre devrait nous garantir moins de bavardages
et plus d'efficacité. Les sept commissaires seraient membres de
l'exécutif, ce qui éviterait de voir recommencer
l'expérience des régionales où douze
délégués n'ont aucun pouvoir réel et où cinq
commissaires prennent toutes les décisions.
Article 585
Nous ne sommes pas d'accord avec le mode de remplacement des
commissaires présenté ici. Nous croyons que, comme le
gouvernement, les commissaires devraient tous voir leur mandat expirer en
même temps. A notre avis, les commissaires devraient être
élus pour une durée de quatre ans. Les élections devraient
avoir lieu en mai, afin de permettre une meilleure administration de la
rentrée de l'année suivante. (Ajoutons ici qu'une preuve
d'identité devrait être exigée lors de ces scrutins).
Article 588 -c - Nous approuvons le gouvernement qui veut obliger
la commission scolaire à ne pas signer de bail sans l'autorisation du
conseil et du ministre. Nous pensons au cas de l'école
Aimé-Renaud, de la régionale Le Royer, qui fut louée pour
cinq ans moyennant une somme de 857,835.60 dollars, alors que
l'évaluation de l'immeuble était de 763,000 dollars! -e - Les
dons faits aux commissions scolaires par des compagnies ou des particuliers
devront être pris en considération par le conseil de l'île
lors de l'établissement du budget.
Article 589
Nous craignons que cet article provoque un dédoublement
administratif qui va augmenter les coûts. En ce sens, nous
préférions la formule proposée par le Bill 62.
Par exemple, la commission scolaire de Saint-Léonard administre,
en 1970, 79 classes anglaises et 112 classes françaises, sans avoir de
double administration. L'administration ne doit pas être catholique,
protestante, anglaise ou française: de telles distinctions nous semblent
inutiles et coûteuses.
Le directeur général et son adjoint ne doivent être
choisis que pour leur compétence d'administrateurs.
Article 593 "Il est constitué pour chacune des commissions
scolaires un comité catholique, un comité protestant et un
comité autre que catholique et protestant si besoin est".
Article 600
Le conseil ne devrait être composé que des onze membres
désignés parmi et par les commissaires élus, et ceci pour
les mêmes raisons que celles qui ont été formulées
à propos de l'article 583. Le gouvernement, en nommant le
président et le vice-président, s'assure le contrôle de
l'exécutif du conseil.
Article 602 "Aucun fonctionnaire ou employé d'une
commission scolaire ne peut être désigné ou nommé
membre du conseil. Il en est de même de toute personne qui a une
entreprise ou un contrat pour le conseil ou pour une commission scolaire, ou
pour tout sous-traitant de telle entreprise,..?'
Article 612
Le conseil, s'il prend une assurance, devra s'assurer obligatoirement
auprès d'une compagnie ayant son siège social au Québec,
sauf si les taux d'une telle compagnie excèdent de 10 p.c. les taux
offerts par une compagnie ayant son siège social hors du
Québec.
La même règle devrait s'appliquer aux institutions
bancaires avec lesquelles le conseil ou les commissions scolaires feront
affaires.
En outre, aucun employé supérieur ou commissaire membre du
conseil ne pourra être membre du conseil d'administration de ladite
compagnie d'assurance.
Article 618
Les onze membres du conseil de l'île devraient être
également membres de l'exécutif, afin de préserver la
représentation des commissions scolaires.
Article 650
Sur tout immeuble excédant 100,000 dollars, le conseil devrait
imposer une surtaxe égale aux taxes payées par les corporations.
Cette surtaxe éviterait que des compagnies soient vendues à des
particuliers pendant les trente jours où s'établit la taxe
scolaire, comme c'est parfois le cas.
La Société d'Education du Québec 7230 - 19è
avenue, St-Michel Montréal 453, Québec.
Jean Girard, Président Henry Egretaud, Vice-président
Fraser Couture, Vice-président Gabriel Jacob, Vice-président