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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le jeudi 12 janvier 1984 - Vol. 27 N° 230

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes sur le projet de loi 40 - Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public


Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux. Je vous rappelle que le mandat de cette commission est d'entendre toute personne ou tout groupe qui désire intervenir sur le projet de loi 40, Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public.

Les membres de cette commission sont: MM. Brouillet (Chauveau), Champagne (Mille-Îles), Cusano (Viau), Mmes Harel (Maisonneuve), Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre), Paré (Shefford), Payne (Vachon) et Ryan (Argenteuil).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Charbonneau (Verchères), Maltais (Saguenay), Doyon (Louis-Hébert), Gauthier (Roberval), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Rochefort (Gouin) et Sirros (Laurier).

Comme l'exige le règlement, je vais maintenant vous donner lecture de l'horaire d'aujourd'hui. Ce matin, nous entendrons la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. À 15 heures, nous entendrons la faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill et l'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal. À 20 heures l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires et, ensuite, l'Association des cadres scolaires du Québec.

M. le député d'Argenteuil.

Les organismes invités M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, avant que nous commencions les travaux de la journée, je voudrais porter à votre attention certains messages qui me sont parvenus au cours de la journée d'hier en provenance d'organismes qui insistent pour être entendus par la commission parlementaire à l'occasion de ses travaux sur le projet de loi 40.

Un premier message me parvient de la commission scolaire de Magog et se lit comme suit: "Nous comptons sur votre appui pour être entendus à la commission élue permanente sur l'éducation. Compte tenu de notre expérience en matière de décentralisation, nous considérons pouvoir apporter un éclairage positif sur les enjeux de la loi 40. Nous avons avisé le ministère de l'Éducation de notre intention d'ajouter une annexe à notre mémoire tel que présenté qui porterait sur le partage des pouvoirs entre l'État, le ministère de l'Éducation et la commission scolaire." C'est signé: La commission scolaire de Magog.

Il y a un autre message de la Québec Association of Catholic School Administrators, signé de son président, M. Leonard Tynan. Il se lit comme suit: "The Québec Association of Catholic School Administrators representing the in-school administrators of the English Catholic Schools of Québec protests in the strongest terms that it has not been invited to address the Parliamentary Commission on Bill 40, despite the written assurances that it would be heard. It is imperative that the position of the English Catholic School administrators be presented to the Commission. We urge the Minister to include our association among those who will be permitted to present their views."

Il y en a un autre en provenance de M. John Hayes, président de la commission scolaire régionale de l'Estrie. "M. le député, nous comptons sur votre appui pour être entendus à la commission élue permanente de l'éducation. Compte tenu de notre expérience en matière de décentralisation, nous considérons pouvoir apporter un éclairage positif sur les enjeux de la loi 40. Nous avons avisé le ministre de l'Éducation de notre intention d'ajouter une annexe à notre mémoire tel que présenté, qui porterait sur le partage des pouvoirs entre l'État, le ministère de l'Éducation et la commission scolaire." John Hayes, président de la commission scolaire régionale de l'Estrie.

Un autre message signé Dr Martin Murphy, président, Association of Directors of English Schools. "As you know, the Association of Directors of English Schools Inc. represents the English Catholic executive personnel of Catholic school boards in Québec. We cannot understand why, in all fairness, the leadership of English Catholic professional educators in this province has not been invited to appear before the parliamentary hearings on Bill 40. And no other group can speak on our behalf. Simple logic should dictate that our presence would be not only desirable but essential, particularly on this issue which will have such a significant impact on the future of English Catholic education in Québec. Surely to have failed to have invited us was not

deliberate. We trust that we will receive an affirmative response by Friday of this week."

Un télégramme du président de la commission scolaire Lac-Témiscamingue, M. Gabriel Bastien. "La commission scolaire Lac-Témiscamingue n'accepte pas de ne point être entendue. La commission exige de pouvoir présenter le point de vue de sa population, tel que promis dans la lettre de Jacques Girard, sous-ministre."

Un message ici de M. Yvon Raymond, directeur général de la commission scolaire de l'Asbesterie. "Les commissions scolaires de l'Asbesterie, Coaticook, Lac-Mégantic, Magog, La Sapinière, ainsi que la commission scolaire régionale de l'Estrie vous ont fait parvenir un mémoire sur le projet de loi 40. Les commissaires de la commission scolaire de l'Asbesterie vous demandent avec insistance de recevoir les représentants de la région de l'Estrie pour entendre leurs propos en commission parlementaire qui a cours présentement. Nous nous permettons de vous signaler que ces commissions scolaires couvrent un vaste territoire et représentent les niveaux préscolaire, primaire et secondaire. De plus, nous serions disposés à y annexer un certain nombre de réflexions sur le projet de réglementation et particulièrement sur le partage des responsabilités et les relations entre le ministère de l'Éducation et les commissions scolaires. Ce document complémentaire pourrait vous être transmis dès que nous aurons reçu une réponse positive à notre demande".

J'en ai encore une couple, M. le Président. Il y en a un autre ici qui vient du Dr John Simms, président de la Québec Association of Protestant School Boards. C'est un message. Peut-être que le ministre ou un de ses collaborateurs aurait quelque chose à nous dire là-dessus. Il demande un changement dans le programme qui a déjà été annoncé pour une raison donnée ici: "Copy of telegram sent to the Minister. Due to a previous commitment, the Québec Association of Protestant School Boards requests that the order of presentation of briefs be as follows..." Il y a une proposition. Je pense qu'il serait bon que nous soyons informés dès cette semaine, afin de nous préparer en conséquence. Ce sont des organismes qui doivent venir la semaine prochaine.

Un message du président de la commission scolaire La Sapinière, M. Marcel Lamoureux. "Lors d'une session du conseil des commissaires, les commissaires de la commission scolaire La Sapinière ont adopté la résolution suivante, portant le numéro 83-79. Le titre: Présentation en commission parlementaire du mémoire préparé par un groupe de commissions scolaires de l'Estrie. Le texte: Considérant l'invitation que le ministère de l'Éducation avait faite à tous les organismes intéressés de présenter un mémoire relatif au projet de loi 40 en vue de la commission parlementaire; considérant que cette invitation nous a été relancée par le caucus des députés de l'Estrie; considérant la sélection pour le moins très restrictive faite par le ministre de l'Éducation concernant les mémoires qui doivent être entendus en commission parlementaire; considérant que cette sélection prévoit qu'un grande nombre de citoyens et d'élèves de la région de l'Estrie ne seront pas représentés en commission parlementaire, il est proposé par M. Marcel Lamoureux, et résolu unanimement, que demande soit faite au ministre de l'Éducation, M. Camille Laurin, de revoir sa décision et d'inclure au nombre des mémoires à entendre celui présenté par un groupe de commissions scolaires du territoire de l'Estrie."

Un dernier message de Mme Jeanne G.-Bédard, présidente de la commission scolaire Lac-Mégantic: "Nous sollicitons votre aide afin que vous supportiez la demande que nous avons adressée au ministre de l'Éducation, M. Laurin, à savoir que nous insistons pour que le mémoire préparé par les six commissions scolaires suivantes: Estrie, Asbesterie, Coaticook, La Sapinière, Lac-Mégantic et Magog soit entendu à la commission élue permanente de l'éducation. Compte tenu de l'expérience en matière de décentralisation de ces six commissions scolaires, nous considérons que ceci pourrait apporter un éclairage positif sur les enjeux de la loi 40. Nous comptons sur votre collaboration habituelle. Nous vous prions d'accepter, monsieur, l'expression de nos salutations les plus distinguées."

M. le Président, en même temps que je vous fais part de ces messages, je voudrais vous assurer que, du côté de l'Opposition, nous appuyons entièrement la requête présentée de manière insistante par les organismes concernés afin qu'ils soient invités à se faire entendre devant la commission parlementaire.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député d'Argenteuil. Je crois comprendre qu'au cours des jours qui viennent vous aurez quelques autres lectures à nous livrer.

M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: M. le Président, j'ai ici un autre message qui nous a été adressé. Il se lit comme suit: "Part of the total consultative process on the proposed Bill 40 was an invitation to interested parties to submit briefs to a parliamentary committee. Explicit in this process was a commitment that interested parties would participate actively in the work of the parliamentary committee. The Association of Catholic Principals of Montréal followed the procedures and submitted a brief to the parliamentary committee on Bill 40. This

brief holds the views of the school administrators of the English factor of the CECM. The Association has followed assiduously the required procedures, but we now learned that we will not be heard by the commission. Indeed, we feel that our request for a hearing has been ignored with no reason given. The Association of Catholic Principals of Montréal deplores this cynical disregard of the views of a distinct section of the anglophone population. Moreover, the significance of this Association to the success of any education undertaking is being ignored. We demand in the strongest terms possible that the decision to exclude us from the hearings be immediately reversed." C'est signé, M. le Président, par M. Robert Harden, président de l'Association des principaux catholiques de Montréal.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Viau. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: Merci. I received yesterday a letter from Mr. H.D. Lighfoot, who is chairman of the Lakeshore School Board Parents Committee, sent to Dr Laurin and Jean-François Bertrand, leader of the Government.

The letter reads as follows: "Today our Parents Committee learned with some dismay that we are not included among those to be heard by the Parliamentary Commission on Bill 40. We think we have unique and useful message..." I am sorry, I am out of breath; I went back to my office to get the letter that I forgot. "We think we have unique and useful message that deserves to be heard. Our views are not represented by the federations of Parents Committees, such as the Fédération des comités de parents du Québec et la Fédération des comités de parents de l'île de Montréal. "One part of our uniqueness comes from the fact that we directly represent French and English schools, and we have their full support. Another part comes from the fact that our parents as a group have achieved a high level of participation in volunteer work in our schools, on the Home an School and on School Committees. Since the Ministry of Education says it is trying to encourage parents in other parts of Québec to move in this direction, our practical experience would be of interest to the Parliamentary Commission. Further, our parents and Parents Committee have good working relationships with the teachers, principals, administrators and commissioners of the Lakeshore School Board. This is a formal request that we be heard by the Parliamentary Commission on Bill 40."

Auditions

Le Président (M. Blouin): Merci, Mme la députée de Jacques-Cartier. Sur ce, j'invite maintenant les représentants de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec à s'identifier et à livrer à la commission le plus brièvement possible le contenu de leur mémoire. Ensuite, nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission parlementaire.

Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec

M. Chagnon (Jacques): M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, vous me permettrez de vous souhaiter une bonne année et de vous présenter la délégation de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. À ma gauche, M. Charles Perron, membre du bureau de direction de la fédération et président de la commission scolaire des Moissons; il s'agit d'une commission scolaire intégrée, située dans la région de Beauharnois. À ma droite, M. Fernand Paradis directeur général de la fédération; je tiens à souligner, en passant, que M. Paradis a oeuvré pendant plus de 30 ans à la Commission des écoles catholiques de Québec, dont les dernières années à titre de directeur général. M. Alain Doyer, conseiller en développement et en recherche à la fédération. Je me présente également, Jacques Chagnon, président général de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Je préside également la commission scolaire régionale de Chambly, sur la rive sud immédiate de Montréal.

M. le Président, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec regroupe depuis 35 ans les commissions scolaires catholiques du Québec. Elle compte dans ses rangs toutes les commissions scolaires pour catholiques, sauf une. Elle a pour mandat, en plus de défendre l'intérêt de ses membres, de faire avancer la cause du système public d'éducation au Québec. Avant d'aborder la partie principale de mon exposé, je voudrais, pour le bénéfice de la commission, situer le rôle de la commission scolaire dans une juste perspective.

Le livre blanc et le projet de loi 40 qui en a résulté constituent un désaveu injustifié et injustifiable pour tous ceux qui oeuvrent à un niveau ou à un autre au sein des commissions scolaires. Bien souvent, les nombreuses difficultés éprouvées par les administrateurs scolaires venaient des mille et une tracasseries bureaucratiques du ministère de l'Éducation.

Malgré les limites et les problèmes que leur impose l'extrême centralisation du système d'enseignement au plan des normes et des directives à respecter, les

commissions scolaires se sont définies dans une optique de services aux écoles, de respect de leurs différences et d'appui à leurs initiatives. Les commissions scolaires ont su organiser dans chacune des régions du Québec un système d'enseignement public répondant aux besoins des citoyens. Qu'il s'agisse des maternelles, de l'éducation des adultes, de l'aide personnelle aux étudiants: psychologues, conseillers en orientation, travailleurs sociaux, etc., ou de l'accessibilité des équipements scolaires à des fins communautaires, les commissions scolaires ont su développer des services répondant véritablement aux besoins de la population. Trop souvent, on a assisté à des tentatives de récupération de la part du ministère de l'Éducation ou à la publication de normes ou de directives de la part du même ministère qui avaient plus souvent qu'autrement pour effet de paralyser les commissions scolaires.

Les commissions scolaires n'ont pas attendu le gouvernement pour se préoccuper des décrocheurs, par exemple. Qu'il s'agisse des projets mis sur pied par la CECM à l'école Marie-Anne ou du projet Relance au Saguenay ou à la CECQ, les commissions scolaires se préoccupent des besoins des citoyens d'aujourd'hui et savent prendre les moyens pour y répondre. Les commissions scolaires se sont dotées de gestionnaires efficaces pour gérer les deniers publics. Leur administration peut se comparer avantageusement à toutes les autres administrations, y compris à celle du gouvernement québécois. Je tenais, M. le Président, à faire cette mise au point afin de rectifier certains propos qui, soit par ignorance ou intérêt, ne rendraient pas justice aux commissions scolaires.

Pour bien comprendre la position des commissions scolaires sur le projet de loi 40, il y a lieu de rappeler dans quelles circonstances a été rendu public le projet gouvernemental de restructuration scolaire à l'origine du projet de loi commenté ici. Lorsqu'en août 1981 les médias d'information ont dévoilé l'existence d'un projet de restructuration scolaire qui devait couvrir principalement deux sujets, soit l'intégration des niveaux d'enseignement primaire et secondaire et la confessionnalité des institutions, un tollé de protestations a accueilli cette nouvelle pour deux raisons: d'une part, le ministère de l'Éducation élaborait une réforme d'envergure en vase clos sans consulter les principaux intéressés qui s'interrogeaient, d'ailleurs, sur les objectifs réels de ce projet; d'autre part, il apportait la preuve qu'il n'avait pas l'intention de réaliser les belles promesses de décentralisation et de concertation faites par plusieurs représentants du gouvernement lors de la conférence Québec-commissions scolaires de 1979 et à la suite de la vaste consultation sur le livre vert sur l'enseignement primaire et secondaire au Québec en 1978.

En fait, il nous a fallu attendre six mois, soit jusqu'en janvier 1982, pour obtenir une première version du projet de livre blanc et connaître ainsi plus en détail les intentions gouvernementales. Elles avaient de quoi surprendre! Le ministère de l'Éducation proposait l'abolition du suffrage universel et l'élimination des commissions scolaires comme institutions démocratiques pour les limiter à un rôle de coopératives de services aux écoles. Et il suggérait de faire des écoles des corporations au sens du Code civil. Nous ne pouvions qu'être en désaccord avec un projet aussi peu conforme aux attentes de la population et aux besoins des milieux scolaires.

N'ayant pas réussi à convaincre le ministre de l'Éducation de nous associer à sa démarche, nous lui avons fait parvenir, ainsi qu'au premier ministre, un avis sur la réforme scolaire comportant un historique et des propositions. Sans succès. Quelque temps plus tard, le livre blanc, intitulé L'école québécoise, une école communautaire et responsable, était déposé à l'Assemblée nationale sans qu'un iota n'ait été changé à la première version, si ce n'est des modalités au plan de la confessionnalité. (10 h 30)

En janvier 1983, nous avons présenté une proposition complète, intitulée Pour un gouvernement local scolaire démocratique et responsable, que nous jugions susceptible de répondre aux besoins réels du système d'éducation. Chacune des commissions scolaires a été consultée sur cette proposition. Dans la plupart des milieux, les divers agents de l'éducation ont été impliqués: parents, enseignants, directeurs d'école et cadres. Les commissions scolaires ont également recherché la concertation avec d'autres organismes publics et obtenu majoritairement l'appui de leur population respective. Divers sondages d'opinion publique l'ont démontré, comme ce fut le cas dans les médias où des observateurs de la scène scolaire se sont prononcés dans le sens des orientations défendues par les commissions scolaires.

Si l'on en juge par le contenu du projet de loi 40 déposé en juin 1983, la volonté populaire et les commentaires des agents de l'éducation, pourtant les plus près de la réalité scolaire, n'ont pas réussi à infléchir le ministre de l'Éducation qui s'est contenté d'apporter des amendements à son projet sans rien modifier des orientations contestées. C'est ainsi que le projet de loi 40 ne retient pas le concept d'une école-corporation mis de l'avant dans le livre blanc, mais permet à l'école d'ester en justice! Il complique si bien les relations entre la commission scolaire et l'école en réaménageant les minces pouvoirs locaux

existants qu'on ne sait plus qui est responsable de quoi. Il conserve le principe du suffrage universel, mais en déforme tellement le mécanisme que la population est en droit de s'interroger sur la volonté réelle du gouvernement de maintenir la démocratie scolaire. Même si le ministre de l'Éducation avait annoncé en conférence de presse, le 25 mars, une série de mesures pour décentraliser son ministère, le projet de loi 40 n'en fait aucunement mention. Au contraire, certains articles visent précisément à augmenter les pouvoirs réglementaires et discrétionnaires du ministère de l'Éducation du Québec et du gouvernement. C'est en partie pour cette raison que les commissions scolaires ont demandé, en août dernier, le dépôt de la réglementation devant accompagner le projet de loi 40 au moins un mois avant la tenue de la commission parlementaire, afin d'être en mesure d'en évaluer toutes les implications. Mais d'ores et déjà il apparaît tout à fait clair que ce projet de loi légalise et même pousse jusqu'à la limite une situation dénoncée depuis longtemps par tous les agents de l'éducation, soit l'étatisation du système scolaire québécois. Plus que jamais se pose la question à savoir à qui profiterait la restructuration scolaire.

Voilà plusieurs années que les commissions scolaires travaillent à la recherche d'un nouvel équilibre d'ensemble du système d'éducation plus satisfaisant, basé à la fois sur une réduction significative du rôle du ministère de l'Éducation et sur une revalorisation des instances locales. Cette perspective rencontre l'approbation de la population et de la majorité des intervenants dans le réseau scolaire.

En résumé, la position des commissions scolaires se distingue par les éléments suivants: maintien, pour les niveaux primaire et secondaire, du système public d'enseignement, d'une structure politique locale véritablement démocratique, c'est-à-dire où les administrateurs détenant l'autorité ultime sont mandatés localement par l'ensemble des citoyens au moyen du suffrage universel. Cette structure doit disposer d'une autonomie fiscale satisfaisante. Transfert aux commissions scolaires de responsabilités et de pouvoirs actuellement détenus par le ministère de l'Éducation du Québec ou le gouvernement en vue d'une plus grande responsabilisation des agents de l'éducation au plan local. Délégation de pouvoirs de la commission scolaire vers les écoles. Accord à certains changements structurels comme l'intégration des niveaux d'enseignement primaire et secondaire et ouverture à la division des commissions scolaires selon le caractère linguistique.

Dans le but d'assurer le développement du réseau scolaire et, de là, une plus grande accessibilité aux services éducatifs, l'État s'est accaparé de la plupart des leviers décisionnels au cours des 20 dernières années. Cette centralisation s'est opérée dans tous les secteurs de l'administration scolaire: pédagogie, financement et ressources humaines. C'est ainsi que la population s'est vue privée peu à peu de son pouvoir d'influencer la gestion de l'éducation et, faute d'emprise sur les orientations et le fonctionnement du système scolaire, elle s'est désintéressée graduellement à toute forme de participation à la gestion de l'éducation.

Pour corriger cette situation qui nuit à l'exercice d'une démocratie véritable, il faudrait rapprocher des citoyens le lieu où s'exercent le leadership et la responsabilité en éducation. Cela revient à dire que le ministère de l'Éducation du Québec devrait responsabiliser les milieux en cessant d'intervenir pour régler des problèmes concrets et ponctuels qui gagneraient à être résolus au plan local ou régional. Il devrait mettre fin à la dépendance dans laquelle se retrouvent actuellement les instances locales qui se heurtent constamment à des rigidités administratives. Comment espérer la participation basée sur l'intérêt, l'initiative et la créativité si toutes les décisions sont balisées à l'avance par des directives, des règlements et des contrôles a priori par le ministère de l'Éducation? C'est dans cette perspective qu'a été examiné le projet de restructuration scolaire, le projet de loi 40.

C'est au plan des ressources matérielles et financières que le ministère de l'Éducation s'arroge le plus de pouvoirs réglementaires et discrétionnaires. Quant au financement, il demeure tel quel. Le projet de loi n'annonce aucune nouvelle source autonome de financement, ni même l'intention d'étudier cette question.

En ce qui a trait aux ressources humaines, alors que les commissions scolaires cherchent à réviser le processus de négociation nationale qui bouleverse de façon inquiétante la vie des institutions scolaires tous les deux ou trois ans, le projet de loi 40 augmenterait les pouvoirs réglementaires du ministère de l'Éducation dans ce domaine, une sorte de statu quo plus.

En matière pédagogique, le projet de loi 40 maintient la situation actuelle. Le ministère de l'Éducation du Québec continuerait à occuper la presque totalité du champ des responsabilités. Cependant, par un transfert aux écoles de certaines responsabilités exercées présentement par les commissions scolaires, il limiterait ces dernières à un rôle de surveillance et de contrôle sur l'action des écoles. C'est pourquoi il accorde à la commission scolaire un droit de tutelle sur une école qui n'assumerait pas correctement les fonctions qui lui reviennent. En fait, il y a là un risque que la nouvelle situation au plan

pédagogique favorise une intervention plus grande du ministère de l'Éducation dans ce secteur déjà largement centralisé.

Les commissions scolaires continuent donc à défendre l'option de décentralisation. C'est dans ce sens que s'inscrivent leurs propositions et leurs demandes de modifications au projet de loi 40 sur l'enseignement primaire et secondaire. Celles qui suivent portent sur le partage des responsabilités. Nous proposons que les gouvernements locaux scolaires soient revalorisés et responsabilisés par un transfert de pouvoirs du ministère de l'Éducation vers les commissions scolaires; que le rôle du ministère de l'Éducation soit redéfini; qu'il se limite à la détermination des grands objectifs généraux du système scolaire, des régimes pédagogiques et des programmes d'études, à la répartition selon des facteurs de péréquation de la masse monétaire dont l'État dispose pour la mission éducative; à l'évaluation et au contrôle a posteriori de la qualité des services éducatifs; à la détermination de la masse salariale et des avantages sociaux à incidences financières considérable, par exemple, régime de retraite; que le ministère de l'Éducation réoriente son action dans le sens d'une concertation avec ses partenaires, les commissions scolaires, pour mettre fin aux décisions unilatérales; d'une pratique réelle de décentralisation; d'un remplacement de ses comportements principalement axés sur les contrôles et les directives par des comportements soucieux d'aide et de soutien.

Conséquemment, il faudrait apporter au projet de loi 40 les modifications suivantes: relativement aux ressources financières, en rapport avec l'article 306, spécifier que le ministre ne peut retenir ou diminuer le montant d'une subvention destinée à une commission scolaire que dans le cas où les règles d'attribution ne sont pas respectées ou que le service n'est pas rendu. Dans les autres cas, il peut recourir à la tutelle ou aux tribunaux pour faire respecter une loi ou un règlement. Le projet de loi devrait laisser aux commissions scolaires le pouvoir de déterminer les normes de remboursement des dépenses des membres du conseil d'administration et du comité exécutif de la commission scolaire, des membres du conseil d'école et des divers comités. Le projet de loi devrait être modifié à l'article 242 pour indiquer clairement que la commission scolaire est responsable de son déficit ou de son surplus. À ce titre, elle ne serait pas obligée de l'intégrer à son budget comme dépense ou revenu de l'année suivante. Â l'article 245, on devrait spécifier que le ministre peut préciser le mandat du vérificateur, mais d'une façon générale seulement et après consultation avec les commissions scolaires.

Relativement aux ressources maté- rielles, la commission scolaire devrait conserver le droit de déterminer les normes, les conditions et les procédures à suivre pour l'acquisition de biens et de services ou pour la disposition de biens. La commission scolaire devrait également conserver le droit de déterminer les normes, les conditions et les procédures à suivre dans le cas de l'octroi des contrats de construction ou de modification majeure d'un immeuble de la commission et dans le cas des contrats de services professionnels reliés à ces contrats. Enfin, compte tenu de l'expérience acquise concernant l'octroi des contrats de transport, l'article 308, 5e alinéa, est inutile et devrait être biffé pour permettre à la commission scolaire de prendre ses responsabilités dans le transport des élèves.

Relativement aux ressources humaines, les commissions scolaires devraient déterminer les conditions de travail du personnel non membre d'une association accréditée. Par ailleurs, il serait important que les commissions scolaires et le gouvernement entreprennent conjointement une étude sérieuse afin de préciser ce qui pourrait être décentralisé dans le cas de l'établissement des conditions de travail de l'ensemble du personnel syndiqué et des mesures reliées à la gestion des ressources humaines touchant ce personnel: recyclage, perfectionnement etc.

Relativement à l'enseignement, spécifier dans la loi que le gouvernement doit consulter les commissions scolaires dans l'élaboration des régimes pédagogiques et des programmes d'études, lesquels seraient déterminés par le ministère de l'Éducation du Québec et constitueraient des minima que les commissions scolaires devraient respecter pour répondre aux besoins spécifiques des milieux. De la même façon, la loi devrait laisser aux commissions scolaires la responsabilité de déterminer les conditions et les modalités de consultation des parents pour l'établissement ou la révision du statut confessionnel d'une école.

La démocratie scolaire fut l'un des points les plus discutés dans tout ce débat. Le sujet a été abordé sous deux angles: l'autonomie de gestion nécessaire aux collectivités locales et les différents mécanismes d'expression de l'opinion publique, ces deux aspects étant, d'ailleurs, intimement liés. En effet, si les milieux détiennent nombre de pouvoirs et de responsabilités en matière scolaire, la population doit disposer d'un mécanisme de participation et d'expression au niveau local qui comporte en soi une garantie de pouvoir forcer l'administration à tenir compte des besoins des usagers. C'est là, d'ailleurs, une des failles importantes du projet de loi 40 qui, comme plusieurs autres lois, augmente l'emprise de la bureaucratie par le truchement de la réglementation au

détriment du pouvoir politique légitimement mandaté par les citoyens pour représenter leurs intérêts. Le rapport de la commission Vaugeois-French sur le contrôle parlementaire délégué, rendu public au mois d'août dernier, est assez clair à ce sujet. Cette seule raison justifierait nos réclamations en matière de décentralisation.

L'autonomie de gestion pour les collectivités locales, par le biais des commissions scolaires, nous la désirons plus grande qu'elle ne l'est actuellement. Une fois déterminés provincialement les grands objectifs pour l'ensemble du système d'éducation, de même que la répartition globale des ressources financières et des standards minimaux de qualité des services éducatifs, les commissions scolaires devraient avoir la liberté de déterminer elles-mêmes la voie à suivre pour atteindre leurs objectifs. Qu'elles aient à répondre ultérieurement de leur gestion devant la population de leur territoire et devant le gouvernement du Québec constitue une forme de contrôle suffisante.

De même, nous continuons à penser que l'élection au suffrage universel des commissaires à la commission scolaire est le mode de désignation des représentants de la population le plus démocratique qui soit parce qu'il permet aux citoyens d'exprimer leur satisfaction ou leur mécontentement par leur droit de vote et que l'élu obtient ainsi la légitimité qui lui permet de parler et d'agir au nom de tous. Le commissaire n'est pas confiné à représenter des groupes d'intérêts particuliers. Ses décisions peuvent donc se prendre en toute liberté en fonction de sa perception des intérêts ou du bien commun de sa communauté d'appartenance.

Compte tenu du projet initial du ministère de l'Éducation d'éliminer le suffrage universel au niveau de la commission scolaire, il ne faut pas s'étonner que la nouvelle formule qu'il propose ne soit pas aussi démocratique que celle que les Québécois connaissent acutellement. En effet, le projet de loi 40 reconnaît le principe du suffrage universel, mais le déplace au niveau de l'école et y joint une telle mécanique que cette nouvelle formule comporte des lacunes sérieuses, sortes d'entorses à la démocratie scolaire. (10 h 45)

Voici quelques-uns des inconvénients d'un suffrage universel indirect. Son principal défaut est de créer de la confusion sur l'orgine du mandat du commissaire, c'est-à-dire sur la source de sa légitimité et sur la nature des intérêts qu'il représente. Est-ce qu'il représente l'ensemble des citoyens de son milieu ou uniquement le conseil d'école dont il fait partie?

La formule proposée ferait deux catégories de commissaires: ceux représentant l'élémentaire et ceux repré- sentant le secondaire. Elle obligerait l'électeur à limiter ses intérêts à une seule école. Or, comme contribuable, celui-ci a des intérêts pour l'ensemble de l'administration scolaire locale, ses taxes servant à financer l'ensemble des écoles et des services scolaires locaux. De plus, ce même électeur a souvent des enfants dans plus d'une institution. Pourquoi les électeurs accepteraient-ils qu'on limite ainsi leur droit de regard à une seule école?

En permettant aux citoyens de choisir l'école où ils iraient voter, le projet de loi rend très difficile, sinon impossible, l'application du suffrage universel. Le coût pour se faire élire par des électeurs disséminés un peu partout sur le territoire de la commission scolaire serait excessif. C'est comme si on demandait aux électeurs, lors d'une élection provinciale, de choisir le comté où ils désirent voter. Ce système contient le germe d'une distorsion démocratique où certaines écoles pourraient représenter 5000 électeurs et d'autres 500. On ne respecte pas le principe d'un certain équilibre entre le poids relatif des unités représentées que cherchent à instaurer les systèmes électoraux modernes. Il pourrait y avoir un nombre élevé de commissaires dans une commission scolaire qui compte un grand nombre d'écoles, tandis que, dans une autre, il ne pourrait y avoir qu'un seul commissaire. Bref, c'est une formule qui crée de la confusion sur les intérêts que représente le commissaire qui comporte des accrocs à la démocratie et des difficultés d'application.

Le projet était tellement original, il contenait tellement de nouveautés sur le plan de l'exercice de la démocratie que nous avons demandé à un expert bien connu, le professeur Vincent Lemieux, de procéder à l'analyse de la proposition gouvernementale. La dernière phrase de son étude est révélatrice: "Avec le système électoral déficient qui est proposé dans le projet de loi 40, on accrédite la thèse qui veut que le ministère de l'Éducation cherche à faire la preuve que les commissions scolaires ne peuvent pas fonctionner pour se donner ensuite de bonnes raisons de les supprimer."

M. le Président, si les parlementaires veulent avoir une copie du texte intégral de M. Lemieux comme document d'appoint, cela me fera plaisir de vous le faire parvenir dès que vous voudrez ou immédiatement.

Le Président (M. Blouin): Vous pouvez le remettre et nous le ferons distribuer aux membres de la commission.

M. Chagnon: C'est fait immédiatement, M. le Président.

Les commissions scolaires proposent plutôt une structure où les unités représentées sont équilibrées en termes de nombre d'électeurs constituant le bassin

électoral et où les représentants élus reçoivent un mandat global et sont directement responsables auprès de leurs électeurs. L'objectif est de faire en sorte que les commissions scolaires apportent des réponses aux attentes de leurs commettants, parents et autres.

Nous proposons que la commission scolaire demeure une instance politique détenant son mandat de l'ensemble de la population locale. Cela implique que tous les commissaires soient élus au suffrage universel. Nous proposons une élection directe du commissaire à la commission scolaire; la division du territoire de la commission scolaire en quartiers électoraux identifiés géographiquement et composés d'un nombre relativement égal d'électeurs, comme c'est le cas pour les municipalités et les gouvernements provincial et fédéral; la reconnaissance de la commission scolaire comme mandataire de la collectivité pour exercer les fonctions d'orientation, de planification, de répartition des ressources de coordination, de contrôle, d'évaluation et de soutien pour l'ensemble des activités éducatives au plan local. Nous proposons aussi que l'exercice de la démocratie scolaire soit amélioré par le rapatriement de tous les pouvoirs inhérents au bon fonctionnement d'un gouvernement local scolaire et par des améliorations au processus électoral.

Le projet de loi apporte déjà des modifications demandées par les commissions scolaires, comme l'élection en bloc des commissaires à l'automne plutôt qu'en juin, un dimanche et non sur semaine, l'obligation pour un candidat d'avoir son lieu de résidence dans la municipalité scolaire pour être éligible, la clôture des mises en nomination deux semaines avant le jour des élections.

Cependant, il est essentiel de les compléter par les modifications suivantes: le citoyen ne vote que dans le quartier où il est domicilié et/ou là où il a une propriété foncière; l'obligation pour le candidat d'avoir l'appui de cinq citoyens et non de cinq parents du quartier où il se présente; le financement de la campagne des candidats selon des modalités similaires à celles qui existent pour les élections municipales; une élection complémentaire pour combler une vacance survenant à plus d'un an des élections générales.

Nous proposons que les commissions scolaires soient autonomes dans la gestion des activités éducatives et dans la gestion des ressources humaines, matérielles et financières. Cela signifie la réduction sensible de la réglementation et des mesures de normalisation et de standardisation; l'élimination des contrôles a priori et l'évaluation centrée sur les résultats plutôt que sur les moyens; l'autonomie de la commission scolaire dans la répartition des pouvoirs et des responsabilités entre les écoles et la commission; que cela se fasse dans le cadre d'une législation qui donne à la commission la souplesse de déléguer plus de pouvoirs et de responsabilités à l'école aux plans éducatif et de la gestion des ressources. Nous proposons que les commissions scolaires bénéficient d'un pouvoir de taxation locale significatif ou d'une source de revenu autonome afin que le pouvoir de taxation des commissions scolaires corresponde effectivement à leurs nouveaux pouvoirs et à leurs responsabilités accrues.

Tout en poursuivant des objectifs valables (créer un lien entre l'école et la commission scolaire, accroître la place des parents, rendre l'école plus autonome au plan de la pédagogie) le projet de loi 40 propose une série de moyens qui nous semblent créer des ambiguïtés entre le rôle de la commission et celui des écoles, être porteurs de germes de conflits entre ces deux instances et instaurer une dynamique de gestion nouvelle qui risque d'être non fonctionnelle.

À l'origine des modifications proposées se trouve la problématique du projet de restructuration scolaire selon laquelle la valorisation de l'école se heurterait à des obstacles tenant au partage des pouvoirs et aux règles du jeu du système actuel. Nous tenons à affirmer que, malgré les limites et les problèmes que leur impose l'extrême centralisation du réseau, les commissions scolaires travaillent dans une optique de service aux écoles. Cela suppose le respect de leurs différences, un appui à leurs initiatives et, dans certains cas, une délégation aux écoles de pouvoirs et de responsabilités aux plans éducatif et de la gestion des ressources.

Pour accroître la place des parents dans l'école, le projet de loi leur donne le pouvoir par une représentation majoritaire au sein du conseil d'école. Ils deviendraient ainsi les patrons dans l'école et il leur reviendrait d'arbitrer les conflits qui ne manqueront pas de survenir compte tenu de la nouvelle relation de subordination entre les agents locaux de l'éducation. Se fiant à leurs propres expériences, ainsi qu'aux sondages d'opinion publique et aux études réalisées par des organismes d'éducation, les commissions scolaires sont persuadées que la très grande majorité des parents n'espère pas se substituer aux décideurs actuels. Cependant, une participation accrue leur paraîtrait souhaitable. Les commissions scolaires croient sincèrement que leurs attentes peuvent être satisfaites à l'intérieur des structures et des mécanismes actuels.

C'est au niveau de l'école que doit d'abord se faire sentir la participation des parents, là où le projet éducatif doit se définir en concertation avec les divers agents concernés. Pour ce faire, la loi 71 qui a

modifié la Loi sur l'instruction publique en décembre 1979, avait prévu un conseil d'orientation dont certaines modalités devraient être repensées pour améliorer la formule que nous continuons à croire bonne. Aucun modèle idéal de participation et de concertation ne devrait être imposé et généralisé dans toutes les commissions scolaires, comme le fait à tort le projet de loi 40.

Illustrons certaines ambiguïtés de ce projet de loi. En dépit du fait que c'est la commission scolaire qui, par le biais de l'élection de ses représentants, reçoit de la collectivité le mandat de déterminer les orientations, les priorités éducatives et administratives au plan local, le projet de loi 40 confie à l'école des fonctions qu'elle sera appelée à assumer de façon presque totalement autonome par rapport à la commission scolaire. Ceci est particulièrement vrai au plan pédagogique où la commission est, à toutes fins utiles, privée de la possibilité du droit qui lui est reconnu par la population de planifier et de coordonner l'organisation des services pédagogiques.

L'existence d'un droit de tutelle sur l'école, conféré à la commission scolaire par le projet de loi 40, confirme que l'école devient quasiment une entité juridiquement distincte de la commission scolaire, un peu comme l'est cette dernière par rapport au ministère de l'Éducation du Québec. D'autres articles démontrent cet état de fait. L'article 119 permet à l'école de contracter au nom de la commission scolaire et, donc, d'engager cette dernière sans que la commission donne son autorisation. L'école peut, de plus, ester en justice. De par cet article, l'école se voit accorder certains attributs d'une personne morale sans que le législateur le mentionne expressément. Chose assez curieuse également, l'école pourrait bénéficier de ses surplus budgétaires provenant de la fourniture de biens et de services, comme elle assumerait un déficit de même source, contrairement à la commission scolaire qui, elle, doit l'intégrer à ses prévisions budgétaires. D'autre part, l'article 124 donne en propre à l'école le pouvoir de conclure des ententes pour l'utilisation des locaux et l'article 123 la rend seule responsable de l'utilisation des biens mis à sa disposition. Tente-t-on de leurrer la population en disant qu'on a éliminé la formule de l'école-corporation, alors qu'on en conserve la nature?

Des conflits sont à prévoir. Pour créer un lien concret entre l'école et la commission scolaire, les auteurs du projet de loi 40 proposent de faire élire le commissaire au niveau de l'école, créant ainsi la confusion sur l'origine du mandat du commissaire. Représente-t-il les intérêts de l'ensemble des citoyens ou ceux du conseil d'école? Est-il élu pour voir à l'administration de l'ensemble des services éducatifs de la commission ou pour ceux d'une école?

De même, le projet de loi brise le lien administratif existant entre le directeur d'école et le directeur général de la commission. Quelle sorte de coordination administrative le directeur général pourrait-il exercer sur des directeurs d'école sur lesquels il n'est pas en autorité? Qui trancherait quand il y aurait conflit ou divergence d'opinions? On se retrouverait devant une situation où le directeur d'école se verrait confier des ressources par la commission scolaire sans qu'il doive lui rendre compte de l'administration qu'il en fait. Il deviendrait ainsi très difficile de créer les consensus nécessaires à la définition des orientations d'ensemble, à la coordination des activités et à la répartition équitable des ressources. Ce serait la loi du plus fort. Le fonctionnement de la commission scolaire et des écoles en serait sûrement perturbé.

Nous proposons que la commission scolaire, dépositaire d'un mandat que lui confie la population pour définir les orientations et priorités éducatives et administratives au niveau local et qui doit répondre de la gestion des ressources qui lui sont confiées, ait pleine autorité sur les écoles et que celles-ci exercent toutes leurs fonctions dans le cadre défini par la commission; que la législation donne à la commission scolaire la souplesse de déléguer plus de pouvoirs et de responsabilités à l'école au plan éducatif et à celui de la gestion des ressources; que la commission scolaire, en concertation avec les écoles, développe des mécanismes pour impliquer les écoles dans le processus décisionnel de la commission pour toutes les politiques affectant la vie des écoles; que la gestion de l'école soit confiée au directeur d'école; que les modalités de sélection du directeur d'école fassent en sorte que c'est réellement la commission scolaire qui choisit ce dernier; qu'il continue de relever de la commission scolaire et qu'il réponde de sa gestion au directeur général de la commission scolaire; qu'on apporte des assouplissements à la loi 71 pour favoriser la création des conseils d'orientation. Il s'agirait, notamment, de faire disparaître l'obligation de la représentation obligatoire des trois types d'intervenants (directeurs, parents, enseignants) et de leur consentement unanime pour la création des conseils d'orientation. (11 heures)

Nous proposons qu'un tel conseil d'orientation soit mis en place dans chacune des écoles, selon le désir du milieu; que ses modalités de structuration, l'étendue de ses pouvoirs et ses mécanismes de fonctionnement soient décidés par les agents

de l'école et en concertation avec la commission scolaire (on doit éviter d'imposer un modèle uniforme); que l'on permette au commissaire de faire partie d'une telle structure de l'école.

Si le projet de loi 40 rencontre un profond désaccord des commissions scolaires quant aux rôles et aux pouvoirs qu'il propose pour les diverses composantes du système d'éducation, il provoque chez elles des réactions positives à l'égard de certaines propositions de changements qui auraient un impact sur les structures. C'est le cas, notamment, de l'intégration du primaire et du secondaire, des aménagements touchant la confessionnalité des écoles et des commissions scolaires et de la création éventuelle de commissions scolaires linguistiques.

La nécessité d'intégrer les niveaux d'enseignement primaire et secondaire suscite l'accord d'à peu près tout le monde. Tout en rapprochant le citoyen du lieu de la prise de décision, cela créera une plus grande continuité entre les deux niveaux d'enseignement, permettant ainsi aux parents de mieux suivre la progression de leurs enfants. Il devrait également en résulter un contexte administratif où il sera plus facile d'assurer la cohérence des décisions, ainsi qu'une meilleure coordination des ressources. C'est peut-être par cette seule opération touchant les structures qu'il faudrait commencer et remettre à plus tard d'autres changements qui, tout en étant pertinents, ne présentent pas un caractère aussi urgent.

Nous proposons que l'intégration des niveaux élémentaire et secondaire soit facilitée en assouplissant les règles prévues pour la faire. Il s'agirait de substituer une règle de majorité à celle de l'unanimité.

Les commissions scolaires ont toujours soutenu que les parents doivent se voir reconnaître dans les faits le droit pour leurs enfants de recevoir un enseignement conforme à leurs croyances religieuses. Par ailleurs, si à la suite d'une consultation une majorité de parents désire que l'école se voie décerner un statut confessionnel, il apparaît normal qu'elle puisse l'obtenir. Le projet de loi 40 prévoit des mesures en ce sens qui semblent acceptables dans l'ensemble. Cependant, il n'est pas nécessaire que cette consultation soit généralisée à toutes les écoles. Il serait beaucoup moins onéreux et tout aussi démocratique que la loi prévoie plutôt un mécanisme qui ferait en sorte que cette consultation s'enclencherait seulement sur demande d'un nombre significatif de parents d'une école.

Nous proposons que les mesures prévues au projet de loi touchant le choix entre l'enseignement religieux et l'enseignement moral et celles concernant l'animation pastorale soient implantées dans les écoles et que les ressources humaines et financières requises à leur application soient fournies aux commissions scolaires et aux écoles; que la consultation prévue pour déterminer le statut confessionnel ou non des écoles se fasse seulement dans les écoles où un nombre significatif de parents en font la demande.

Selon le projet de loi 40, les commissions scolaires ne seraient plus confessionnelles. Ces dernières acceptent en principe une telle vision des choses, sous réserve de garanties équivalentes à celles contenues dans la constitution canadienne eu égard à leur statut de gouvernement local. S'il n'est pas encore parfaitement établi au plan juridique que toutes les commissions scolaires bénéficient de garanties constitutionnelles, la chose ne fait aucun doute dans le cas de la Commission des écoles catholiques de Montréal, et de la Commission des écoles catholiques de Québec. Le projet de loi 40 reconnaît ce fait, mais il prétend que les garanties ne touchent que les territoires couverts en 1867 par ces commissions. La valeur de cette thèse gouvernementale sera tôt ou tard établie par les tribunaux compétents.

Nous proposons que les commissions scolaires s'ouvrent à des structures non confessionnelles, sous réserve de garanties équivalentes à celles contenues actuellement dans la constitution canadienne qui font en sorte de protéger la commission scolaire comme gouvernement local dont les membres seraient élus au suffrage universel, cette commission scolaire devant posséder un pouvoir de taxation et ses élèves ayant droit à l'école confessionnelle et à l'école non confessionnelle; que le gouvernement respecte l'intégrité territoriale de la Commission des écoles catholiques de Montréal et de la Commission des écoles catholiques de Québec, à moins que la population des milieux concernés ne fasse part, par le moyen d'un référendum, qu'elle veut des modifications au territoire de ces commissions scolaires.

Comme structure de services publics, le système scolaire doit refléter les aspirations de la société québécoise. Et, si les communautés qui la composent se définissent aujourd'hui selon leur appartenance linguistique et qu'elles désirent des institutions scolaires qui reflètent ces nouveaux liens d'identification, d'unification ou de référence, il est logique que les institutions scolaires soient réaménagées en conséquence. Nous proposons que des commissions scolaires linguistiques soient éventuellement créées sur l'ensemble du territoire de la province, là où le nombre le justifie.

Tous ces changements structurels dont nous venons de parler débouchent sur un nouveau découpage territorial des commissions scolaires. Or, si l'on veut que les nouvelles commissions scolaires soient

fonctionnelles et qu'elles reflètent les réalités des milieux, la détermination de leurs limites territoriales doit se faire non pas en vertu d'un plan conçu pour répondre à des besoins provinciaux, mais à partir d'une préoccupation de s'ajuster à des besoins locaux. Le grand principe qui devrait présider à ces changements structurels, c'est la volonté des milieux. Nous proposons que le découpage des nouveaux territoires scolaires découlant de ces divers changements structurels se fasse conformément à la volonté des milieux locaux et selon des critères définis localement comme une clientèle suffisamment nombreuse pour offrir l'ensemble des services éducatifs, la localisation actuelle des équipements, les barrières naturelles et le sentiment d'appartenance des populations.

En guise de conclusion, M. le Président, je vous dirai ceci. Dans sa forme actuelle, le projet de loi 40 est inacceptable pour les commissions scolaires. Il va à l'encontre de leurs réclamations et de celles de la population qui demande une décentralisation du ministère de l'Éducation du Québec, un allégement de la bureaucratie et un accroissement de l'emprise des citoyens sur le système d'éducation. Le projet de loi 40 aurait pour effet de démobiliser encore plus les agents de l'éducation au niveau local, compte tenu de leur impuissance à influencer les décisions de l'État et parfois même à régler les problèmes qui surviennent dans leur milieu respectif, vu les nombreuses ambiguïtés concernant les rôles des commissions scolaires et des écoles.

Deux années se sont écoulées depuis le dévoilement d'un projet de restructuration scolaire, deux années qui n'ont pas suffi au ministre de l'Éducation pour établir les consensus nécessaires. Ce sont des objections majeures, de fond, qu'apportent les organismes les plus représentatifs en éducation, qui ne voient pas, par exemple, la nécessité de chambarder aussi radicalement le système scolaire, surtout dans un contexte socio-économique où l'accent doit être mis sur l'amélioration des services éducatifs en regard de la formation professionnelle des jeunes, de l'éducation des adultes et de l'intégration des nouvelles technologies dans l'enseignement, par exemple.

Pour toutes les raisons qui ont été énumérées dans le présent mémoire, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec se voit dans l'obligation de conclure que, si le gouvernement ne modifie pas le projet de loi 40 dans le sens des revendications des milieux scolaires et de la population, elle se verra obligée de le rejeter et même d'en demander le retrait.

En terminant, la fédération tient à souligner qu'une équipe de juristes à qui elle avait confié le mandat d'étudier le projet de loi 40 a identifié une quantité considérable de vides juridiques qui auraient pour conséquence de rendre le projet de loi inapplicable sous certains aspect d'importance. Par ailleurs, le 12 octobre dernier, la Cour d'appel a cassé un jugement de la Cour supérieure, datant du 5 mai 1981, en déclarant ultra vires, nuls et sans effet plusieurs articles de la Loi sur la fiscalité municipale adoptée en 1979. Or, le projet de loi 40 sur l'enseignement primaire et secondaire reprend à son compte nombre de ces dispositions. La fédération souhaiterait que le gouvernement vérifie auprès des tribunaux la légalité de ses réformes d'envergure avant de les réaliser, comme d'autres provinces le font régulièrement et comme lui-même l'a déjà fait antérieurement. Je vous remercie, M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Chagnon, de cet effort de synthèse qui facilitera d'autant le déroulement de nos travaux. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Laurin: M. le Président, je remercie et je félicite la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec pour le mémoire de qualité qu'elle vient de nous présenter. En tant que plaidoyer pro domo, on ne saurait espérer mieux et plus habile. La position de la fédération est bien connue depuis deux ans, c'est celle d'une opposition totale, inconditionnelle, qu'elle a, d'ailleurs, appuyée depuis le début par une campagne de publicité qui s'est accélérée et intensifiée au cours des dernières semaines, au coût de centaines de milliers de dollars et même de millions de dollars, à grands coups de placards publicitaires dans les journaux qui couvrent toute une page, d'annonces à la radio, à la télévision et même dans les métros, pris à même les fonds publics et qu'il aurait été plus opportun, selon moi, de consacrer aux services éducatifs.

Aujourd'hui, elle nous présente un plaidoyer extrêmement bien fait, appuyé, d'ailleurs, par une synthèse qui sera probablement distribuée dans tout le Québec. C'est un plaidoyer remarquable à cet égard et je le reconnais. Cependant, même si j'admire la forme, mon admiration est moins grande quant au fond puisque j'ai quand même l'impression que la fédération, en l'occurrence, mène une bataille d'arrière-garde que je pourrais qualifier non seulement d'un maintien du statu quo, mais d'un recul par rapport au statu quo. En effet, à l'occasion de la discussion sur le projet de loi 40, la fédération des commissions scolaires demande à la société québécoise et à son gouvernement de revenir en arrière et de lui redonner, par exemple, un très grand nombre des responsabilités, pouvoirs, prérogatives qu'elle a conscience d'avoir

perdus au fil des ans, par exemple, un retour à une capacité de prélever un impôt foncier plus considérable que celui qu'elle prélève actuellement, des pouvoirs de taxation plus grands, une volonté de reconsidérer tous les pouvoirs que possède le gouvernement en matière d'éducation. Dans le mémoire, on parle même de la nécessité d'une révision en profondeur des grands encadrements nationaux, pédagogiques, financiers en matière de gestion des ressources humaines, en matière, en somme, de tout ce qui existe actuellement. C'est la raison pour laquelle je dis qu'à l'occasion du débat sur le projet de loi 40 la fédération des commissions scolaires non seulement défend le statu quo, mais veut profiter de ce débat pour revenir en arrière et récupérer des pouvoirs, des responsabilités qu'elle a perdus aux dépens de l'action gouvernementale entérinée par toutes les législations successives.

Évidemment, c'est parfaitement son droit de le faire et je ne le conteste pas, mais je ne suis pas sûr, cependant, que le consensus soit si grand actuellement dans la société pour permettre ce retour en arrière puisque ce sont les besoins collectifs en matière d'éducation qui ont déterminé l'évolution qu'a prise le système d'éducation au Québec, particulièrement depuis 1960. (11 h 15)

II y aurait lieu de commenter très longuement ce très long mémoire puisqu'il est évident que, ici au gouvernement en tout cas, nous ne sommes pas d'accord avec un très grand nombre des thèses ou positions qui y sont défendues. Je ne voudrais le faire que brièvement tout en assurant, cependant, la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec que je lirai et relirai encore bien des fois leur mémoire, car il est quand même riche et on peut en tirer des éléments qui pourront sûrement servir à enrichir, à améliorer le projet.

Mais je constate, encore une fois, que l'opposition à ce projet de la part de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec est totale et que, même si elle paraît en accepter des éléments, forcée par les convergences qui se sont manifestées au sein de l'opinion publique, comme l'intégration du primaire-secondaire, comme la division des commissions scolaires linguistiques selon la langue, comme les nouveaux aménagements de la confessionnalité, elle le fait d'une façon très timide et si nous l'écoutions cette évolution se ferait d'une façon extrêmement lente. J'en prends pour exemple ce qu'elle dit à propos de la division des commissions scolaires sur le plan linguistique. Elle voudrait simplement que les commissions scolaires s'ouvrent aux structures linguistiques, et éventuellement. Il me reste à déchiffrer le sens exact de ce terme et surtout comment cela se traduirait dans la pratique. Il serait difficile par exemple, d'accepter que les structures ne deviennent linguistiques que là où le nombre le justifie quand nous savons que les francophones forment maintenant près de 82% de la population du Québec et que les anglophones se retrouvent dans toutes les régions du Québec, et que le projet de loi leur assure partout dans toutes les régions du Québec des commissions scolaires qui répondent à leurs besoins linguistiques et culturels. Ce n'est là qu'un exemple pour montrer que, même là où la fédération semble accepter des éléments importants, essentiels du projet de loi, elle le fait d'une façon telle que dans la pratique on ne pourrait s'attendre qu'à des changements mineurs et qui se poursuivraient durant de longues années, et qui ne répondraient pas aux urgences, aux besoins qui se sont manifestés dans la société à ce sujet.

Cependant je voudrais en revenir à des éléments qui me paraissent plus importants. Dans le mémoire de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec on se retrouve souvent devant des équivoques. Sous l'apparence de critiquer le projet de loi 40, au fond on s'en prend beaucoup plus à la situation actuelle du système scolaire et on s'en prend en particulier à ce qu'on appelle une concentration indûe des pouvoirs au sein du ministère de l'Éducation. Ce qui me fait dire que ce que la fédération conteste, c'est beaucoup moins la loi 40 que la loi actuelle de l'instruction publique, avec tous les aménagements que nous y avons apportés au fil des ans, quelque gouvernement que ce soit d'ailleurs.

Ce que conteste la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, c'est ce que nous pourrions appeller et ce qu'elle pourrait peut-être appeler l'érosion graduelle des pouvoirs des commissions scolaires au cours des vingt dernières années, particulièrement depuis 1960. Évidemment, elle ne peut pas accepter le projet de loi 40 puisque la loi 40, même si je continue de prétendre qu'elle décentralise, ne décentralisera jamais assez pour satisfaire les ambitions ou les désirs de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Même si le projet de loi 40 décentralisait encore beaucoup plus qu'il ne le fait et ce n'est pas interdit de penser qu'on le fera jamais, à mon avis, nous n'arriverons pas à satisfaire l'appétit très grand de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec à l'endroit des responsabilités et des pouvoirs qu'elle peut assumer.

Ceci dit, évidemment, une fois qu'on a décidé de rejeter un projet de loi, il faut lui trouver tous les défauts possibles et imaginables, et c'est de bonne guerre. C'est ce que fait la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec dans son

mémoire. Encore une fois, bien des affirmations seraient contestables, par exemple, quand on dit que le projet complique si bien le réaménagement des pouvoirs qu'on ne sait plus qui est responsable de quoi ou, en termes populaires, une chatte n'y retrouverait plus ses petits. C'est l'opinion de la fédération, mais ce n'est pas l'opinion d'autres groupes, si on en croit les mémoires qu'ils nous ont présentés.

Ce n'est même pas l'opinion d'un grand spécialiste de la législation scolaire qui s'appelle Patrice Garant et qui, il y a quelques jours seulement, vient de déclarer que la répartition des pouvoirs entre le ministère, la commission scolaire et l'école lui apparaissait très claire, même si elle est encore susceptible d'être améliorée. Mais, au moins, les grands arrimages, les grandes répartitions sont bien faits et ils constitueront une feuille de route tout à fait convenable pour les diverses instances du système éducatif.

Je ne saurais accepter non plus l'affirmation de la fédération des commissions scolaires lorsqu'elle dit que le gouvernement a tout centralisé sur le plan pédagogique. D'ailleurs, il faut faire remarquer que les régimes pédagogiques ont été préparés, en grande partie, en consultation avec la fédération des commissions scolaires, même si elle le dénonce actuellement. Même si elle dit, à la fin de son analyse, qu'elle ne conteste pas, que c'est un simple constat, toute sa démonstration tend quand même à prouver que le ministère s'est arrogé une trop grande importance sur le plan pédagogique, alors qu'en fait le président et la fédération savent très bien que, dans les régimes pédagogiques, il y a une large marge de manoeuvre pour les commissions scolaires et qu'il y en aura maintenant pour les écoles, dans la loi 40.

Je ne saurais non plus accepter l'affirmation que le rôle du ministère de l'Éducation, tel qu'il apparaît dans la loi 40, est véritablement excessif. J'ai rappelé dans ma présentation liminaire que le conseiller privilégié du ministère de l'Éducation, le Conseil supérieur de l'éducation, trouve, au contraire, que ce qu'a conservé le ministère de l'Éducation dans la loi 40 correspond véritablement à la mission éducative de l'État, à ce que l'État devrait pouvoir encadrer sur la plan pédagogique.

Par ailleurs, ce que demande la Fédération des commissions scolaires par rapport à l'école, qui est un nouveau partenaire, qui, depuis la loi 71, est devenue de plus en plus visible dans le système, c'est un lien hiérarchique clair. On peut traduire ceci en disant que c'est une dépendance absolue. Je rappelle, par exemple, que lorsqu'il s'est agi de faire adopter la loi 30, qui donnait un rôle aux parents au sein des commissions scolaires, rôle que tout le monde s'entend maintenant à considérer comme bénéfique, la fédération des commissions scolaires s'y est violemment opposée. Lorsqu'il s'est agi de faire adopter la loi 71, cette dernière n'a été acceptée par la fédération des commissions scolaires que lorsque le gouvernement a apporté un amendement consacrant la dépendance absolue de l'école par rapport à la commission scolaire.

Je rappelle que les conseils d'orientation, dont on fait grand état ce matin, ont certes été acceptés, mais ils n'ont guère fonctionné. S'is n'ont guère fonctionné, ce n'est pas seulement parce que la centrale de l'enseignement a donné le mot d'ordre à ses enseignants de ne pas y participer, mot d'ordre qui a été suivi, mais c'est aussi parce que la fédération des commissions scolaires n'a pas fait l'animation nécessaire pour que les conseils d'orientation fonctionnent et s'installent dans chacune des écoles. Si la fédération des commissions scolaires avait consacré à cette animation autant d'efforts qu'elle l'a fait pour d'autres sujets, il est sûr que les conseils d'orientation auraient probablement beaucoup plus fonctionné qu'ils ne l'ont fait.

Je ne saurais accepter non plus ce qu'on dit quand on signale que la valorisation de la participation des parents équivaudra à un rapport de force et qu'on veut imposer un modèle uniforme de participation. Ce qui est dans le projet de loi 40, ce ne sont pas des rapports de force, c'est l'institution d'une gestion participative au niveau de l'école, c'est l'exercice collégial de la responsabilité, c'est la création d'une équipe école où tous les intervenants, les agents de l'école, pourront ensemble fixer les besoins, les priorités de l'école et un plan d'action où chacun prendra sa place. Si la fédération des commissions scolaires appelle cela un modèle uniforme de participation, je veux bien, mais ce modèle uniforme de participation, si on veut l'appeler comme ceci, c'est simplement celui d'une équipe école constituée de ceux qui vivent l'école, qui font l'école et qui devraient être mieux en état, du fait qu'ils sont plus proches des élèves et plus proches du milieu, de donner à l'école la qualité de l'environnement éducatif et du projet éducatif qu'elle est en mesure de créer.

Je pourrais relever bien d'autres affirmations, mais je voudrais simplement dire qu'il ne s'agit pas de faire des parents les patrons de l'école, mais de leur donner une place qu'ils n'occupent pas actuellement et qu'ils réclament. On l'a entendu hier avec force de la part de la fédération des parents. La présence des parents, même s'ils sont majoritaires, n'en fera pas des patrons puisque eux-mêmes nous ont dit que ce qu'ils visent, et ce que nous visons également, c'est une concertation au sein de l'équipe

école, où chacun, dans le respect des compétences et des responsabilités des uns et des autres, apportera sa contribution maximale.

Enfin, la question que je voudrais poser à la fédération des commissions scolaires est celle-ci: Dans votre annexe, vous parlez des expériences de délégation de pouvoirs qui existent actuellement au niveau des écoles. Je remarque que ces expériences de délégation de pouvoirs se sont surtout multipliées depuis que le projet de loi 40 est dans le décor. Il y en avait moins auparavant. Certaines...

Des voix: Ha! ha!

Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît!

M. Laurin: ...commissions scolaires...

Le Président (M. Blouin): M. le ministre, M. le ministre, un instant, s'il vous plaît!

M. Laurin: Oui.

Le Président (M. Blouin): Afin que nos travaux se déroulent normalement, tout en souhaitant la bienvenue aux invités qui assistent à nos travaux dans l'enceinte du salon rouge, je rappelle à chacun et à chacune que nos règlements interdisent toute manifestation d'approbation ou de désapprobation à l'égard des opinions qui sont émises ou par les invités ou par les membres de la commission. M. le ministre.

Mme Lavoie-Roux: On peut rire, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît, Mme la députée de L'Acadie!

M. Laurin: Certaines commissions scolaires avaient, bien sûr, et on en a entendu quelques-unes, commencé, même en allant au-delà de la loi, persuadées quelles étaient du besoin de cette réforme, de décentraliser au niveau de l'école. Dans votre annexe, vous faites état de ces expériences, et je m'en réjouis, mais je voudrais vous poser une question à ce sujet. Cette délégation, qui demeure quand même élastique en ce sens qu'elle peut toujours être reprise par les commissions scolaires et qui, dans certains cas, va plus loin que ce que le projet de loi 40 préconise, par exemple, sur le plan de la décentralisation budgétaire, ne manifeste-t-elle pas, selon vous, que le projet de loi 40 serait tout à fait applicable et réaliste et qu'une telle façon d'assurer la revalorisation de l'école et sa responsabilisation est souhaitable, voire nécessaire? Alors, je vous pose cette question finale: Pourquoi la fédération refuse-t-elle que cette responsabilisation soit faite par voie législative, ce que nous ont demandé les parents, d'ailleurs, et certains autres groupes?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, d'abord, brièvement, vous me permettrez de récuser l'épithète de statu quo pour les positions que nous avons défendues ici. Sur aucun point nous ne défendons le statu quo.

Deuxièmement, sur la question précise, les commissions scolaires, bien avant le projet de loi 40, ont eu des relations harmonieuses avec leurs écoles. Le projet de loi 40 ne vient pas inventer la roue, on l'a entendu hier. Le projet de loi 40 cherche à créer uniformément un conseil d'école dont -M. le ministre vient de l'indiquer - la représentativité est déjà mesurée et indiquée. On parle d'une majorité de parents à un conseil d'école, qui contrôlent un conseil d'école. Comment parler dans ce cas-là de collégialité et de concertation quand un des partenaires est légalement dépositaire d'un pouvoir par sa majorité à un conseil d'école dans une école? (11 h 30)

Le conseil d'orientation dont parlait M. le ministre, je pense que c'était particulièrement dans l'article 52 qui parlait de sa composition, la composition du conseil d'école dans la loi 71, avait créé malheureusement une obligation de participation des parents, des enseignants et du directeur d'école; pour qu'il y ait conseil d'orientation, il y avait une espèce de droit de veto à chacun des groupes devant faire cette concertation. Nous demandons, nous suggérons d'amender cette loi 71, d'enlever le caractère obligatoire des participants afin de retirer une espèce de droit de veto qui devient... En fait, nous l'avons vu, cela a fait en sorte d'empêcher le conseil d'orientation de fonctionner. Souvenons-nous que la loi 71 a été adoptée en décembre 1979. Nous vivions alors des problèmes, comme je l'ai indiqué plus tôt, de relations du travail. Comme le ministre l'a indiqué, le ou les mots d'ordre des centrales ont été suivis. Comme le conseil d'orientation avait cette obligation d'y voir des enseignants, le mot d'ordre ayant été suivi, eh bien! il n'y a jamais eu de conseil d'orientation.

Mais le conseil d'orientation, l'esprit même qui préside à la création d'un conseil d'orientation n'est-il pas plus sain sur le plan de la concertation, sur la plan de l'égalité des partenaires et sur le plan de la collégialité que nous recherchons tous, justement afin de produire le projet éducatif, de s'assurer de son vécu et, troisièmement, de permettre à l'école de pouvoir l'évaluer?

Eh bien! C'est ce qui fait que le projet de loi 40, à cause de son uniformité à

travers 3000 écoles du Québec qui, dans les différents milieux du Québec, ont des besoins tout à fait différents, fait en sorte que nous ne sommes pas capables de l'accepter comme il est institué, d'autant plus qu'il part d'une conception antagoniste de l'école et de la commission scolaire. Or, une commission scolaire ne peut exister s'il n'y a pas d'école. Les écoles forment un tout qu'est la commission scolaire. C'est le rôle de la commission scolaire d'être un véritable régulateur de la qualité et de la quantité des services à offrir a l'élève.

C'est dans ce cadre que la commission scolaire se doit de travailler en étroite collaboration avec ses écoles. Mais la commission scolaire est un organisme démocratique. Ses représentants sont, comme vous, des élus. C'est un organisme dont la légitimité ne pose pas de problème. Les élus viennent de l'ensemble de la population et, comme cela a été indiqué hier et avant-hier, la majorité de ces élus sont des parents et c'est normal. C'est normal que des parents soient plus prêts à contribuer, généreusement il faut le dire, et à s'associer dans chacun de leurs milieux, à faire en sorte d'orienter le réseau de l'éducation.

Mais, il faut leur permettre et leur donner des moyens au niveau de la commission scolaire pour orienter le réseau. Pour y arriver, il va falloir décentraliser le ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Chagnon. M. le ministre.

M. Laurin: II ne me paraît pas que la conception qui préside au projet de loi soit antagoniste. Bien au contraire. Nous savons très bien qu'il y a trois éléments principaux dans le système scolaire, trois instances principales. Il y a l'école, la commission scolaire et le ministère de l'Éducation. Il est évident que, s'il y avait antagonisme institutionnalisé entre les trois instances, le système ne pourrait pas fonctionner. Il s'agit, au contraire, de répartir les responsabilités dans les lieux qui semblent les plus appropriés à la prise de ces responsabilités. C'est la raison pour laquelle, tout en renonçant au concept de corporation-école -et j'ai expliqué les raisons pour lesquelles nous le faisions - il ne nous paraît pas impensable, au contraire, il nous paraît très opportun de confier à cette instance décentralisée et maximale du système éducatif que constitue l'école, là où vont les enfants, là où enseignent les professeurs, là où les parents peuvent voir se continuer l'éducation reçue dans la famille, les pouvoirs et les responsabilités qui apparaissent les plus appropriés pour la mise en place d'un projet éducatif de qualité et un environnement éducatif de qualité.

Il ne nous paraît pas du tout impensable que le législateur confie certaines de ces responsabilités à cet élément important du système que constitue l'école tout en reconnaissant - et le projet de loi 40 le reconnaît - que l'école demeure quand même soumise à la commission scolaire. Il y a plusieurs articles du projet de loi qui font état de cette subordination de l'école à la commission scolaire, mais justement pour bien s'assurer que l'école pourra répondre à son objectif de qualité, il nous apparaît important de spécifier dans une loi les responsabilités qui lui sont attribuées tout en demandant à la commission scolaire, cependant, de contrôler, de vérifier, d'aider, de soutenir et de répartir les services éducatifs. Cette répartition des pouvoirs ne nous apparaît pas relever d'une conception antagoniste. Au contraire. Elle nous paraît relever de la saine attribution de responsabilités aux lieux appropriés de décisions dans une articulation, dans un arrimage, dans un mouvement et dans une dynamique qui sont propices à l'atteinte des objectifs du système éducatif sur le plan de la qualité aussi bien que sur le plan de l'accessibilité des services. D'ailleurs, je pense que sur ce point, la fédération des commissions scolaires aura beaucoup de difficulté à créer un consensus autour de ses vues que le ministère pourra en avoir.

Je voudrais poser une question à cet égard. Vous avez entendu, j'en suis sûr, puisque vous êtes situés non loin de nous au Hilton en permanence, les parents dire qu'ils n'étaient pas satisfaits jusqu'ici du rôle qui avait été accordé à l'école dans le passé et aussi de la contribution qu'ils pouvaient apporter à la vie de l'école et à l'amélioration de la qualité de l'école. Ils demandaient en particulier que l'école ait des pouvoirs et des responsabilités précises et que les parents aient non plus simplement le rôle consultatif qu'ils ont eu jusqu'ici, mais un rôle plus proprement décisionnel exercé, d'ailleurs, en collégialité avec les autres intervenants de l'école. Comment réagissez-vous à cette expression très vigoureuse d'opinion que nous avons entendue?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, d'abord, j'aimerais... Je ne peux pas être d'accord avec le ministre lorsqu'il dit qu'il y a présentement trois niveaux dans le secteur de l'éducation. Il y a deux niveaux dans le secteur de l'éducation: il y a le niveau de la commission scolaire et le niveau du ministère de l'Éducation. Le projet de loi 40 crée un troisième niveau qui est l'école. À la suite de l'adoption du projet de loi 40, il y aura un troisième niveau contrôlé par un groupe qui est le groupe parental. À propos de la délégation de pouvoirs, ce à quoi nous

travaillons et ce à quoi les commissions scolaires travaillent actuellement et depuis de nombreuses années, hier, vous avez entendu un son de cloche et avant-hier, vous en avez entendu un autre. Vous avez entendu des représentants de commissions scolaires qui sont venus ici - vous les avez cités tout à l'heure - dont plusieurs avec les membres de leurs comités de parents, des représentants de comités de parents et c'était un autre son de cloche. Ils sont venus vous dire: Dans notre commission scolaire, nous avons fait ceci, cela, ceci, cela qui pouvait ressembler à certaines volontés du projet de loi 40 - je ne mentionnerai que le projet éducatif - ou une volonté de détermination de certaines valeurs dans certaines écoles. La conclusion qu'on peut facilement en tirer, c'est qu'on n'a pas besoin du projet de loi 40 pour y arriver puisque cela se fait déjà.

Quant au rôle des parents, nous - je le disais précédemment - considérons qu'il est extrêmement important. Il est extrêmement souhaitable que les parents s'animent autour de l'école, fassent en sorte de dire et de bien articuler ce sur quoi, sur le plan pédagogique, ils veulent voir s'améliorer leur école. Par contre, je vous mentionnerai un sondage que nous avons rendu public l'an dernier, au mois de février, et qui avait été fait à cette époque, un sondage scientifique bâti par la maison SORECOM, peut-être l'une des maisons les plus sérieuses au Québec dans ce domaine, et qui concluait que, pour 90% des citoyens au Québec, on cherchait à avoir un système démocratique du type d'une commission scolaire. Ce qu'il y avait de particulier dans ce sondage, c'est qu'à chacune des questions, on s'apercevait que les réponses des gens qui s'identifiaient comme parents étaient légèrement plus élevées que les réponses données par les gens qui ne s'identifiaient pas comme parents. On voyait dans ce sondage que les gens voulaient avoir une commission scolaire qui soit plus forte. On considérait la commission scolaire comme déresponsabilisée. On voulait, effectivement, avoir un rôle plus grand au niveau de l'école. Par contre, le même sondage révélait qu'on ne cherchait pas à se substituer aux décideurs actuels.

Il y a, dans tout le Québec, des parents d'excellente volonté qui travaillent dans les écoles, et la Fédération des comités de parents nous le signalait hier avec raison. Et nous travaillons avec eux aussi. Nous travaillons dans chacune des écoles. Des parents siègent au conseil des commissaires. Des représentants des comités de parents siègent au sein du conseil des commissaires et du comité exécutif, parce que, je vous le souligne encore une fois, les parents qui siègent au conseil des commissaires ou au comité exécutif d'une commission scolaire et qui, eux, ont été élus au suffrage universel sont des parents d'enfants dans le système d'éducation. Alors, votre système, il est "bonnet blanc, blanc bonnet" sauf qu'il vient diviser, qu'il vient enlever des pouvoirs extrêmement importants, des pouvoirs pédagogiques de la commission scolaire pour les redistribuer au niveau des écoles d'un quartier, des écoles d'une commission. Et dans ce cadre-là, pour nous, c'est inacceptable.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Chagnon. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de saluer, au nom de notre groupe politique, les représentants de la Fédération des commissions scolaires catholiques qui sont à la table des témoins ce matin. Il me fait plaisir de saluer également la nombreuse délégation qui accompagne le président de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Nous retrouvons dans la salle ce matin des dirigeants de commissions scolaires de toutes les régions du Québec. Je pense que c'est une délégation qui est éminemment représentative et que nous devons saluer avec beaucoup de respect.

J'entendais tout à l'heure M. le ministre de l'Éducation tenter, dès le début de ses remarques, de déprécier le mémoire que nous venons d'entendre le définissant comme un plaidoyer pro domo. Je pense que le ministre s'est mépris sur la signification du mémoire. Quand des citoyens viennent nous rencontrer, M. le ministre, pour nous rappeler que l'école doit demeurer partie d'un système général, qu'elle ne saurait se développer, s'épanouir si elle est trop coupée d'un réseau à l'intérieur duquel elle va trouver sa force, dans l'ensemble duquel elle apportera également sa contribution, je ne pense pas qu'ils viennent faire un plaidoyer pro domo. Je pense qu'ils viennent plaider pour la qualité de l'éducation. Ils méritent d'être entendus. Peut-être, au chapitre des moyens par lesquels doit être promue la qualité de l'éducation, ont-ils des vues différentes de celles du gouvernement, mais cela ne veut pas dire qu'ils plaident pro domo quand ils défendent ces grandes valeurs, (11 h 45)

Quand ils viennent nous dire, comme on l'a entendu dire ce matin, que le système d'enseignement doit rester sous la responsabilité démocratique véritable des citoyens, de la collectivité, pas seulement d'un groupe particulier à l'intérieur de la collectivité mais de toute la collectivité, je ne pense pas qu'ils viennent faire un plaidoyer pro domo. Ils viennent faire un plaidoyer pour la démocratie bien comprise. Je pense que le gouvernement aurait intérêt

à l'écouter. Je ne voudrais pas qu'on conserve l'impression de cette présentation très rétrécie que l'on a entendue plus tôt de la portée du mémoire présenté ce matin. Moi, ce n'est pas comme cela que je l'ai compris et je suis convaincu que nos concitoyens auront la même perception. J'ai aussi déploré que, dans ses remarques, le ministre a montré, malheureusement une fois de plus, qu'il n'est pas bien informé sur ce qui se passe dans les commissions scolaires et dans les milieux scolaires.

M. le ministre, jeudi dernier, je suis allé dans ma région causer avec les membres d'une commission scolaire parce que je voulais prendre la température une dernière fois avant de venir discuter de votre projet de loi. Je pense que je peux les nommer. Ce sont les commissaires de la commission scolaire de Saint-Eustache. Eux aussi aimeraient beaucoup être sur votre liste choisie d'invités, entre parenthèses. Il y avait là autour de la table deux directeurs d'école, deux représentants des parents, quatre commissaires et deux cadres supérieurs de la commission. On a eu une discussion éminemment cordiale. Et là, ils m'ont montré comment, dans la pratique, se fait la coordination, l'unité et le développement du système. En écoutant ces choses-là, M. le ministre, on est obligé de reconnaître objectivement, que c'est de toute beauté! Quand on voit les raccourcis que contient le livre blanc, que contiennent certains propos qu'on entend sur les lèvres du ministre parfois, c'est regrettable parce que la situation véritable, ce n'est pas cela.

Je donne un exemple, la délégation de pouvoir. Deux commissions choisies par vous sont venues nous présenter un résumé de ce qu'elles ont fait, un résumé fort incomplet d'ailleurs qui demanderait d'être vérifié de près; je ne veux pas semer de doutes à ce sujet mais ce sont des choses qu'on doit évaluer de manière systématique quand on veut les généraliser à l'échelle de tout un territoire. Cela fait longtemps que cela se pratique la délégation de pouvoir dans les commissions scolaires. Cela a commencé avant, bien avant le livre blanc sur l'école communautaire et responsable. Ma collègue de L'Acadie aura sans doute l'occasion de parler plus tard de ce qui s'est fait à la commission des écoles catholiques de Montréal dès le temps où elle en était la présidente. Cela, c'est bien avant que vous soyez membre du gouvernement. Je pense qu'il y a des choses qui devraient être établies. Quand on vient s'ingérer ou insinuer, comme je l'ai entendu faire plus tôt, que les conseils d'orientation ne seraient pas développés parce que les commissions scolaires n'ont pas fait ce qui devait être fait de ce côté-là. C'est parfaitement ridicule! Nous savons tous pourquoi cette institution là n'a pas produit les fruits espérés.

Ce qu'on ne doit pas ignorer, c'est que dans un très grand nombre d'écoles, même si le conseil d'orientation n'existe pas tel quel, sous la forme qui est prévue à l'article - je ne sais pas si c'est 24 ou 25 de la Loi sur l'instruction publique, cela n'a pas d'importance - il existe des choses qui, dans la pratique, équivalent à cela, M. le ministre. Il y a bien des endroits où les enseignants collaborent avec le directeur de l'école, avec le comité d'école et où il se fait des choses remarquablement concertées, remarquablement constructives. Il s'en est fait même à travers tout le climat de conflits qu'on a vécu au cours des deux dernières années. Cela doit entrer en ligne de compte. Il me semble que ceux qui le permettent, qui le suscitent dans une très grande mesure, ne méritent pas de se faire adresser des reproches comme ceux qu'on a entendus plus tôt.

Le ministre disait également qu'on demandait un retour en arrière, M. le Président, pas seulement le statu quo de la fédération des commissions scolaires, il a dit que vous vouliez revenir en arrière. Il a cité deux exemples à propos des pouvoirs du ministère de l'Éducation. M. le ministre, j'ai lu le mémoire. Je trouve quatre choses en ce qui regarde les attributions que ces gens sont prêts à confier au ministère de l'Éducation. La détermination des objectifs d'ensemble du système scolaire, des régimes pédagogiques, des programmes d'études. Cela va assez loin. Deuxièmement, la répartition selon les facteurs de péréquation de la masse monétaire dont l'État dispose pour la mission éducative. Troisièmement, le contrôle et l'évaluation de la qualité des services éducatifs, les contrôles devant s'exercer a posteriori et recentrés sur les résultats plutôt que sur les moyens de fonctionnement. Et enfin, la détermination de la masse salariale et des avantages sociaux à incidence financière considérable.

Je relis ce que le livre blanc disait à propos du ministère et il n'y a pas tellement de différence entre les deux. Je pense qu'il y a au moins de la matière à négociation, il y a au moins de la matière à rapprochement; il me semble qu'il y en a beaucoup. À partir de ce cadre, il devrait être possible de s'entendre sur un rôle un petit peu plus allégé du ministère de l'Éducation par rapport à ce qu'il est actuellement et par rapport à ce qu'il serait si le projet de loi devait être adopté dans sa forme actuelle.

Ceci étant dit, j'ai mentionné d'autres points hier. Nous aurons l'occasion d'y revenir au cours de la journée, mais évidemment cela est un point sur lequel on n'a jamais eu de précision de la part du gouvernement parce qu'il n'est pas capable d'en donner. J'ai demandé à des gens: Comment pouvez-vous demander à- une

commission scolaire d'être l'employeur de son personnel et en même temps de ne pas avoir une certaine autorité sur son personnel? J'ai demandé si on connaissait des exemples de cela dans le secteur public. Vous vous rappelez, à la table des témoins, hier, les représentants de la Fédération des comités de parents ont été obligés de dire qu'ils n'en connaissaient pas. J'ai demandé si on connaissait d'autres pays du monde, avec un stade de développement correspondant à celui du Québec, où on aurait le genre de structure à contrôle parental que propose le gouvernement. On n'est pas capable de citer un cas. Le ministre a fait mention de l'Angleterre; on va lui en reparler plus tard aujourd'hui de l'Angleterre, on a des nouvelles pour lui là-dessus.

Une voix: ...

M. Ryan: Non, mais devant des choses d'une telle ampleur, je pense qu'on a le droit de se poser des questions et de venir soulever des difficultés ici. C'est ce qu'on fait et, par conséquent, c'est plus qu'un plaidoyer pro domo, c'est un plaidoyer pour la démocratie scolaire; et si c'est être conservateur, M. le ministre, que de défendre la démocratie scolaire, je vous prie de me ranger dans cette catégorie.

J'aurais quelques questions à vous adresser, M. le Président, ainsi à qu'à vos collègues qui font partie de la délégation. Des doutes ont été soulevés, depuis le début des séances de la commission, sur la valeur représentative du point de vue qui nous serait présenté par la fédération des commissions scolaires. On a commencé mardi par entendre des commissions scolaires individuelles - choisies par le ministre évidemment - qui se sont présentées ici avec sincérité, je pense, et voulaient nous dire leur expérience et nous donner leur opinion. Nous les avons écoutées avec beaucoup d'intérêt. Mais je voudrais que vous nous disiez: le mémoire que vous nous présentez ce matin a-t-il été dûment approuvé par l'ensemble de vos commissions scolaires? Est-ce qu'il y en a plusieurs qui vous ont fait part d'une dissidence? Est-ce que vous êtes en mesure d'affirmer que c'est l'opinion très générale des commissaires d'école?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, la valeur représentative de notre mémoire ne fait aucun doute. Nous avons 211 membres; notre mémoire est la poursuite de notre cheminement et de notre raisonnement sur toutes ces questions. Il a fait l'objet de deux assemblées générales de la fédération, l'une le 16 mars 1983, et la dernière, une assemblée générale spéciale, le 29 mai 1983. Nos positions sont celles des commissions scolaires: elles proviennent d'une consultation que nous avions faite préalablement.

Au cours de ces deux assemblées générales, les positions ont été adoptées, en gros, dans l'ordre de 85% à l'unanimité. Si, comme nous l'avions demandé lundi de cette semaine, les mémoires soumis par toutes les commissions scolaires étaient entendus, vous auriez la chance de pouvoir apprendre des choses qui probablement pour vous seraient nouvelles, à savoir que des activités au niveau de l'école se font, comme on posait la question tout à l'heure.

Deuxièmement, en ce qui concerne la représentativité, évidemment sur 211 membres il y a six ou sept commissions scolaires qui sont plus ou moins dissidentes. Vous en avez rencontré quatre mardi. Nous sommes fiers de nos commissions scolaires, qu'elles soient plus ou moins dissidentes ou autrement. Une chose est certaine c'est que la Fédération des commissions scolaires n'est pas une espèce de cage idéologique; ce n'est pas un goulag, la fédération des commissions scolaires, et le droit à la dissidence c'est un droit que nous acceptons. S'il y a six ou sept commissions scolaires qui se sont montrées dissidentes, il y en a 97% qui sont de l'avis de la fédération pour la simple et bonne raison que l'avis de la fédération est leur avis.

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Merci, M. Chagnon. J'aurais une autre question, je vais la poser un peu tranquillement parce que j'essaie d'aller au coeur du problème en prenant le moins de temps possible. Vous nous dites qu'un des effets de la loi 40, si elle était adoptée, serait de réduire les commissions scolaires à un statut insignifiant, à une situation où elles seraient dépourvues des pouvoirs, des moyens d'action dont elles ont besoin pour s'acquitter de leurs fonctions.

Dans le projet de loi 40, nous trouvons un certain nombre de dispositions qui semblent donner des attributions aux commissions scolaires et dont certains nous disent même qu'elles leur en donnent trop. Je voudrais vous citer les principaux articles du projet de loi qui traitent de ce sujet pour que vous nous disiez s'ils seraient satisfaisants, à votre point de vue, pour maintenir le rôle nécessaire des commissions scolaires. On dit à l'article 29 que l'école est établie par la commission scolaire, donc l'école ne peut pas exister si elle n'est pas établie par la commission scolaire. On dit que cela est un pouvoir très intéressant.

Ensuite à l'article 90, on dit: "Dans les domaines de compétence que le chapitre IV attribue aux commissions scolaires, l'école exerce ses fonctions dans le cadre défini par la commission scolaire dont elle relève." Par

conséquent, il y a un certain lien qui est prévu dans le projet de loi entre l'école et la commission scolaire. Il faudrait que vous notiez cela également pour me donner votre impression sur cela.

Ensuite il y a l'article 137. Ce sont des exemples et je ne prétends pas vous donner une liste exhaustive. À cet article il est écrit: "Chaque commission scolaire a compétence sur toutes les écoles de son territoire dont le statut linguistique est le même que le sien."

À l'article 199, on lit: "La commission scolaire s'assure que la population de son territoire reçoit les services éducatifs auxquels elle a droit dans les écoles situées sur son territoire."

À l'article 202, il est écrit: "La commission scolaire répartit les services éducatifs entre les écoles de son territoire."

J'en mentionne deux derniers, les articles 206 et 207. L'article 206: "La commission scolaire assure le soutien à l'organisation pédagogique des écoles." L'article 207: "La commission scolaire veille à ce que les écoles évaluent les apprentissages de l'élève et appliquent les épreuves uniques imposées par le ministre." Ailleurs il est écrit que l'école élabore son budget, lequel doit être approuvé avec ou sans modification par la commission scolaire.

Le projet de loi attribue également à la commission scolaire la responsabilité de l'affectation du personnel suivant les écoles.

Cela donne un peu de manière honnête, je pense bien - je n'ai rien déformé - la portée des responsabilités que le projet de loi veut conférer aux commissions scolaires. J'aimerais avoir vos commentaires sur cela. En quoi ces pouvoirs ou attributions ou responsabilités ne seraient-ils pas jugés satisfaisants par vous pour que vous puissiez vous acquitter convenablement de votre mission comme vous la concevez?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Le premier article que vous avez mentionné c'est quel numéro?

Le problème de fond qui se pose entre les relations école-commission scolaire c'est que les articles que vous avez cités sont d'abord relativement imprécis. L'article 90: "Dans les domaines de compétence que le chapitre IV attribue aux commissions scolaires, l'école exerce ses fonctions dans le cadre défini par la commission scolaire dont elle relève." La commission peut définir un cadre sauf qu'il y a dédoublement de fonctions entre d'autres fonctions que l'école se doit de faire. Je pense entre autres à l'établissement du calendrier scolaire, aux choses relatives au transport scolaire, au choix d'un directeur d'école. Il y a comme un conflit naturel qui existe entre l'école et la commission scolaire dans le partage des responsabilités prévu dans le projet de loi. C'est cela qui vient rendre les articles que vous venez de nous citer - 29, 90, 137, 199 et 202 - pas tout à fait clairs. Si on regarde l'article 29, l'école est établie par la commission scolaire, mais c'est le ministre qui en signe l'acte d'établissement. C'est le ministre qui autorise une commission scolaire à avoir un nombre X d'établissements sur son territoire. Il y a des restrictions comme cela qu'on retrouve un peu partout dans le projet de loi, particulièrement dans les chapitres que vous avez cités. (12 heures)

La compétence de la commission scolaire sur ses écoles est limitée ou elle se termine là où la compétence des écoles commence sur son territoire, on devrait présumer cela. M. le ministre citait tout à l'heure, M. Garant, spécialiste en droit, qui semblait dire qu'il n'y avait pas de problème dans l'espèce d'élaboration de la mécanique légale entre l'école et la commission scolaire. Or, ce matin, dans le journal Le Devoir, il y avait un article de M. Gilles Rémillard, un constitutionnaliste, qui semblait arriver à la conclusion que l'école du projet de loi 40 possédait moins de pouvoirs que l'école avant le projet de loi 40. On finit par tomber dans une espèce de schéma légaliste qui nous entraîne dans un tourbillon duquel on ne voit pas le bout du tunnel, on ne voit pas le commencement de la lumière. C'est l'articulation de cela qui finit par être assez difficile à saisir, tant pour les gens qui travailleraient sous l'empire du projet de loi 40, au niveau de l'école, que ceux qui travailleraient au niveau de la commission scolaire. D'abord, la mécanique est faussée au départ entre le rôle de l'un et de l'autre par le moyen et par le mode du suffrage universel. Si les gens sont élus au niveau d'une école et qu'ils représentent leur école devant la commission, comment les pouvoirs de la commission et les pouvoirs de l'école vont faire pour s'arrimer ensemble, c'est cela le problème.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Oui. À propos de ce que vient de mentionner M. Chagnon, je voudrais simplement signaler au ministre que M. Patrice Garant pour qui j'ai beaucoup de respect, n'est pas un expert en administration scolaire, c'est un professeur de droit administratif à l'Université Laval. Ce n'est pas un expert en administration scolaire, c'est tout autre chose. Pour l'aspect juridique, c'est très bien, mais il y a tout le problème du fonctionnement et de la gestion qui est un tout autre problème.

J'en viens à une autre question si...

Le Président (M. Blouin): Aviez-vous un

complément de réponse, monsieur Paradis?

M. Chagnon: Peut-être que M. Paradis pourrait ajouter à cette question...

Le Président (M. Blouin): Oui, d'accord. M. Paradis.

M. Paradis (Fernand): Si vous permettez, M. le Président, j'aimerais faire quelques commentaires sur la question posée. Il m'apparaît que l'examen de ces articles ne peut se faire isolément de l'ensemble du projet de loi. Qu'on regarde, par exemple, les chapitres 5 et 6 en ce qui concerne les pouvoirs du ministre. Lorsqu'on se met à les parcourir, le sentiment qui demeure, c'est qu'il y a une délégation d'administration vers la commission scolaire et, également, vers l'école, ce qui place un certain nombre de personnes dans des situations ambiguës. L'exemple le plus classique me semble être celui du directeur d'école qui relève du conseil de l'école. S'il ne fait pas l'affaire, c'est la commission scolaire qui le récupère et qui doit, ensuite, tenter de le placer. Il y a des ambiguïtés qui sont créées par l'ensemble, par l'économie générale de la loi. Chaque article, pris isolément, peut donner l'allure de bon sens. On peut être porté à accepter. Mais lorsqu'on regarde les articles et qu'on les met en concordance, c'est là que les ambiguïtés surviennent et c'est là que les conflits risquent d'apparaître. C'est ce que je souhaitais ajouter sur les propos de M. le président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Paradis. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'aurais deux autres questions. La première: vous donnez dans votre mémoire - je pense que c'est à la page 15 du texte complet de votre mémoire... Cette question a été posée à plusieurs reprises au cours de la journée d'hier, je voudrais profiter de votre passage pour que vous nous apportiez certains éclaircissements là-dessus. On se demandait s'il y avait des articles dans le projet de loi qui entraînaient un accroissement de la puissance d'intervention du ministre. Dans votre mémoire, il y a des passages qui sont consacrés à cela. Dans votre résumé, vous avez été obligé de passer très vite là-dessus. Je ne sais pas si vous pourriez nous donner un certain nombre d'exemples de dispositions du projet de loi 40 qui entraînent un élargissement de la compétence ou de la puissance du ministre.

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: La lecture des chapitres V et VI du projet de loi est très révélatrice sur les pouvoirs qu'accapare le ministère ou que garde le ministère ou qu'il ne décentralise pas. Je pourrais vous faire une lecture des chapitres V et VI. D'abord cela commence comme ceci: "Le ministre établit, à l'éducation préscolaire, le programme des activités de formation et d'éveil et, à l'enseignement primaire et secondaire, les programmes d'études dans les matières obligatoires et à option. Ces programmes comprennent des objectifs et des contenus notionnels obligatoires et des objectifs et des contenus notionnels indicatifs que l'école adapte à ses besoins selon les priorités de la communauté à laquelle elle dispense des services. Le ministre établit la liste des manuels scolaires qu'il autorise. Le ministre établit la liste des matières à option non mentionnées au régime pédagogique et la liste des matières pour lesquelles il impose des épreuves uniques. Le ministre publie, à la Gazette officielle du Québec, un avis sur l'adoption des programmes ou listes visés aux articles 292 à 294. Cet avis mentionne la date à laquelle ces programmes ou listes s'appliquent et leur objet. Un exemplaire des programmes et des listes établis par le ministre est distribué gratuitement aux commissions scolaires, aux écoles et au Conseil supérieur de l'éducation. Un exemplaire est aussi distribué, sur demande, à toute personne contre paiement des frais de reproduction et de transmission déterminés par le ministre. Le ministre peut établir les critères ou les conditions pour l'attribution d'une équivalence d'études... Le ministre peut réviser les résultats obtenus par un élève aux épreuves uniques afin d'éviter de pénaliser indûment l'élève".

M. Ryan: M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je ne veux pas interrompre M. Chagnon, mais, s'il veut nous donner la lecture de tous les articles qui traitent des pouvoirs du ministre, j'en ai compté au-delà de 80.

M. Chagnon: C'est cela.

M. Ryan: Vous m'avez demandé si je consentais, je dis non. Mais j'aimerais que vous me donniez quelques...

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Si vous voulez continuer, c'est votre affaire, remarquez bien. Mais, si vous voulez répondre à mon désir, je souhaitais que vous me donniez des exemples d'articles qui comportent un accroissement des pouvoirs du ministre.

M. Chagnon: Par les articles 200 à 230

qui accordent aux écoles l'usufruit des biens mis à leur disposition par les commissions scolaires, ces dernières perdent donc une partie de leur droit de propriété. Cela, ce n'est pas un pouvoir du ministre. L'article 308, quatrième alinéa, s'inscrit dans le même sens, puisqu'il fait du ministre de l'Éducation le juge des besoins des commissions scolaires en termes de biens, meubles et immeubles. C'est nouveau, cela. Le pouvoir ainsi accordé au ministre équivaudrait, à toutes fins utiles, à un pouvoir d'expropriation. De même, le ministre pourrait dorénavant décider des conditions et des modalités d'étalement des surplus ou des déficits des commissions scolaires, comme l'indique l'article 242 du projet de loi. À l'article 306, le ministre peut retenir ou diminuer le montant d'une subvention destinée à une commission scolaire dans le cas où une loi ou un règlement concernant l'éducation n'est pas appliqué, dans le cas où les règles d'attribution des ressources financières ne sont pas observées ou que le service pour lequel une subvention est versée n'est pas rendu. Actuellement, le ministre ne peut que retenir le montant d'une subvention.

C'est aussi le fait de l'article 308 qui révèle l'ampleur de la réglementation à venir. L'alinéa 3 de cet article donne au gouvernement le droit de déterminer les normes, les conditions et les procédures à suivre par les commissions scolaires pour l'acquisition de biens ou de services ou pour disposer des biens.

Sur le plan pédagogique, par exemple, M. le député, l'article 309, premier alinéa, accorde au ministre le pouvoir de déterminer les conditions et les modalités de consultation des parents pour la demande de la reconnaissance confessionnelle de l'école, ou de son retrait, alors que l'article 32 n'accorde pas à l'école le pouvoir d'en demander le retrait.

Au plan des ressources humaines, l'article 309, deuxième alinéa, reconnaît au ministre le droit de déterminer toutes les conditions de travail du personnel non membre d'une association accréditée, ce qui est actuellement du ressort des commissions scolaires.

L'article 245 légalise l'ingérence du ministre dans la vérification des commissions scolaires. L'article 309, septième alinéa, lui accordera le droit d'établir les normes de remboursement des dépenses des membres du conseil d'administration ou du comité exécutif. Enfin, il y en a une liste.

M. Ryan: Très bien, je pense que...

M. Chagnon: M. le Président, je me rendrai avec plaisir à la demande du député de ne pas lire les quelque 80 articles qui sont les articles relevant du pouvoir du ministère ou du ministre.

M. Ryan: M. le président, à la fin du résumé dont vous avez donné lecture, vous parlez des vides juridiques nombreux qu'auraient constaté vos conseillers juridiques à l'examen du projet de loi. Est-ce que vous vouliez laisser entendre par là que vous auriez une étude que vous seriez disposé à mettre à la disposition de la commission parlementaire?

M. Chagnon: Nous avons effectivement une étude sur le projet de loi 40 sur l'enseignement primaire et secondaire public à soumettre à la commission parlementaire. Enfin, cela pourrait être un document supplémentaire si les membres...

M. Ryan: Oui, cela nous intéresserait.

M. Chagnon: ...veulent l'avoir, si les parlementaires veulent l'avoir. Ce sera certainement intéressant dans le but d'améliorer une partie de la mécanique du projet de loi, si c'est le voeu de la commission.

Le Président (M. Blouin): II n'y a pas de problème, M. Chagnon. Vous n'avez qu'à le déposer au secrétariat et nous le distribuerons aux membres de la commission.

M. Chagnon: Cela me fera plaisir de vous la remettre.

M. Ryan: Des vides juridiques... Oui, c'est important.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Une voix: Un document nouveau.

M. Ryan: Très bien. Une dernière question, M. le Président. La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec défend dans son mémoire le principe de l'élection des commissaires d'école au suffrage universel à partir de territoires géographiques et de circonscriptions électorales géographiquement déterminées. C'est une position que nous-mêmes, de ce côté-ci de la table, défendons. Mais nous avons entendu à plusieurs reprises depuis le début des audiences de la commission parlementaire des organismes qui sont venus nous dire qu'ils favoriseraient, eux, une commission scolaire à composition mixte, à composition comportant soit une majorité de représentants en provenance d'organismes parentaux et une minorité de commissaires élus au suffrage universel ou soit un nombre égal de représentants des deux catégories. Est-ce que je pourrais vous demander quelle est votre position sur cette idée?

M. Chagnon: M. le Président, nous défendons la position d'un véritable gouver-

nement local scolaire démocratique et responsable. Je pense que le plus grand acte de démocratie qu'on puisse faire, c'est de permettre à l'ensemble des citoyens d'élire tous ces représentants pour l'orientation d'un service ou des services ou d'une gamme de services qu'on veut se donner. La légitimité même de ces élus au suffrage universel n'est pas remise en doute contrairement à des modèles comme ceux suggérés par le député d'Argenteuil, 50%-50% ou 25%-75%. Cela ressemble beaucoup plus à une compromission qu'à un compromis. Cela vient éluder le principe même d'un gouvernement local dont les membres sont élus au suffrage universel, qui possède un pouvoir de taxation et qui possède aussi le pouvoir d'orienter son réseau d'éducation dans un milieu.

On ne peut créer des distinctions au niveau des représentants dans un conseil. Par exemple, si on avait deux types de commissaires dans une commission scolaire, on se trouverait inévitablement à avoir des commissaires qui représenteraient des groupes d'intérêt différents. Premièrement, l'ensemble de la société et, deuxièmement, prenons l'exemple que vous formuliez, un groupe de parents. Qui, de ce groupe de parents, est membre de cette société? C'est antinomique. On ne verrait pas à l'Assemblée nationale des gens qui seraient représentants du secteur de la voirie et d'autres qui seraient représentants d'un autre secteur. Tous les députés qui sont ici en face de moi sont des gens qui ont été élus au suffrage universel et dont la légitimité ne peut pas être remise en question. C'est fondamental dans un régime démocratique. Pour nous, c'est aussi l'apanage d'un modèle comme le modèle municipal ou le modèle scolaire. Dans le monde municipal on ne crée pas et on ne pense pas même à créer de divisions dans un conseil municipal en privilégiant des groupes particuliers de la société pour faire en sorte qu'ils soient, eux aussi, des représentants du groupe d'où ils proviennent. (12 h 15)

Deuxièmement, j'ajouterais que les expériences que nous connaissons déjà de conseils d'administration multipartites - je pense entre autres aux centres hospitaliers, aux centres d'accueil, aux CLSC, aux cégeps... La Fédération des cégeps, M. le ministre doit le savoir, a des classeurs complets de protestations sur le mode de représentation des gens au conseil d'administration. Il y a trop d'intérêts qui se mélangent et trop de gens qui sont porteurs d'un intérêt particulier pour faire en sorte que les conseils d'administration puissent fonctionner dans le meilleur intérêt de l'ensemble de la communauté.

Dans les centres d'accueil, les CLSC et autres, on aura toujours un peu de misère à assurer la légitimité des représentants parce qu'ils ne sont pas représentants de l'ensemble de leur communauté. M. Perron pourrait ajouter sur le sujet si vous le désirez, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Rapidement, M. Perron, s'il vous plaît!

M. Perron (Charles): D'abord, on parle d'une école communautaire et responsable. On est bien d'accord mais, pour qu'elle soit communautaire, elle ne peut absolument pas être dominée par un des groupes de notre société qui soit des parents; sinon, elle n'est plus communautaire, elle est presque ségrégationniste. Le mot est peut-être un peu fort mais je suis bien à l'aise pour le mentionner parce que j'émane moi-même du réseau des comités d'école, des comités de parents; j'ai cheminé dans toute la structure. Je n'ai pas le sentiment qu'en faisant d'un groupe quelconque un groupe majoritaire au sein d'une institution décisionnelle, on pratique vraiment l'esprit communautaire. On fait en sorte d'isoler l'école de son propre milieu en faisant en sorte que seuls les parents soient considérés comme des interlocuteurs valables. C'est un point.

Maintenant, l'école responsable. On voit déjà le peu de pouvoir qui peut rester à la commission scolaire. On prétend qu'il lui en restera quand même mais qu'on en déléguera encore aux écoles. On sera responsable mais responsable de quoi, finalement? Je me pose une autre question encore beaucoup plus fondamentale que celle-là. On a connu au Québec, au cours des années passées, des petites écoles de rang qu'on a remplacées par des écoles centrales; puis, on a concentré encore la structure. On est venu à l'opération 55, les régionales. Maintenant, on renie ces structures; il y a donc eu une erreur de commise. On retourne vers cette atomisation de 3000 écoles pratiquement autonomes. Que les écoles aient plus de pouvoirs, c'est évident. D'ailleurs, il y a beaucoup de commissions scolaires qui donnent de plus en plus de pouvoirs. Je m'excuse, M. le ministre, mais avant que le projet de loi 40 ne soit mentionné, il y a des écoles qui reçoivent de leur commission scolaire de plus en plus de pouvoirs. Mais, moi, je me pose la question: Comment se peut-il qu'on ait une conception aussi "esprit de clocher"? Vous savez, je pense que, dans une structure scolaire, le pire à combattre, c'est l'esprit de clocher. Et, dans la pratique, c'est toujours à cela qu'on se heurte... Brièvement? C'est bien. Alors, quand on va se retrouver avec 3000 écoles relativement autonomes, on va faire jouer là à nouveau l'esprit de clocher qu'on est magnifiquement parvenu à abolir à peu près partout. Et cela, c'est la plus dure performance qu'on puisse réaliser, abolir cet esprit-là. On va y revenir en vertu d'un principe dont la logique m'échappe, je vous

l'avoue bien humblement.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Perron.

M. Perron (Charles): Vous m'avez demandé d'être bref. C'est à peu près cela.

Le Président (M. Blouin): Merci.

M. Chagnon: Alors, M. le Président, un conseil d'administration qui ne serait pas composé d'un ensemble de gens élus au suffrage universel deviendrait une espèce d'unité administrative d'un autre groupe par rapport à un gouvernement local.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Chagnon. Un dernier mot, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: Oui, juste une mise au point. M. Chagnon a parlé tantôt de la formule suggérée par le député d'Argenteuil. Je pense qu'il voulait dire: une formule qui a été suggérée par d'autres...

Le Président (M. Blouin): Bon.

M. Ryan: ...et évoquée par le député d'Argenteuil pour avoir des éclaircissements.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député d'Argenteuil. Cette mise au point étant faite, je cède maintenant la parole à M. le député de Vachon.

M. Payne: La commission des écoles catholiques de Québec m'a dit hier, en réponse à une question, qu'elle n'avait pas remarqué une tendance centralisatrice dans le projet de loi 40 et que le projet montrait même - je cite - "un esprit décentralisateur". Vous avez donné deux exemples tout à l'heure, aux articles 308 et 309, d'une tendance centralisatrice. Je ne suis pas d'accord avec vous, mais j'aimerais qu'on échange là-dessus durant quelques minutes.

Pour l'intérêt du public, il s'agit, à l'article 309, de la possibilité laissée aux commissions - je parle de votre proposition par rapport à ce qui est proposé dans le projet de loi... Vous proposez qu'on laisse aux commissions scolaires la responsabilité de déterminer les conditions et les modalités de consultation des parents pour l'établissement ou la révision du statut confessionnel. N'êtes-vous pas au courant que, si c'est inclus tel quel dans la loi, c'est pour apporter une certaine harmonisation? C'est une proposition - peut-être n'êtes-vous pas au courant - pas du gouvernement, pas des fonctionnaires, pas du ministre, mais une proposition du comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation.

En ce qui concerne l'article 308, c'est beaucoup plus intéressant, par ailleurs. On parle, parmi d'autres choses, de l'octroi des contrats. Accepteriez-vous une situation selon laquelle une commission scolaire puisse adopter ses propres règlements qui aillent à l'encontre d'une commission scolaire avoisinante en ce qui concerne l'octroi des contrats, ou dans un autre domaine, la disposition de ses biens et de ses immeubles? C'est sûr que dans le passé il y avait une certaine... on dirait même dans certains cas une certaine anarchie en ce qui concerne la réglementation régionale. Par contre, je considère que l'argument que vous apportez, à savoir que vous devriez avoir les mêmes pouvoirs que les municipalités, est très mal fondé, parce que les municipalités, depuis l'arrivée du Parti québécois, sont assujetties à des règles très rigoureuses en ce qui concerne l'octroi des contrats, notamment par Rosalie. Je considère que les pèlerinages qui existaient dans le passé avec le Parti libéral, à Québec, pour avoir l'octroi de contrats est passé. Ma question est: de quelle manière croyez-vous n'être pas en train de vous approprier certains pouvoirs arbitraires qui existaient dans le passé et que peut-être possédait le ministre dans le passé?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, la première partie de la question du député de Vachon concerne le mode de consultation sur le statut confessionnel d'une école. Bien, il est bon de savoir que depuis sept ou huit ans il y a des consultations qui sont faites sur le statut confessionnel des écoles qui sont nouvellement construites. Or, dans tous les cas, les commissions scolaires qui ont eu à faire ces consultations les ont faites, que je sache, de façon tout à fait acceptable puisque le comité catholique a entériné les décisions de ces commissions scolaires.

Deuxièmement, j'ajouterai ceci. Pourquoi pas un modèle unique comme vous le suggérez? Parce que la décentralisation, par elle-même, implique la reconnaissance d'une certaine diversité.

Quant à l'octroi des contrats, je n'ai pas compris votre problème.

M. Payne: Je voudrais retenir la discussion pendant deux secondes sur le statut confessionnel. Êtes-vous d'accord avec le principe opérationnel que vous proposez, selon lequel une commission scolaire peut édicter un statut confessionnel qui différerait de la définition du statut confessionnel d'une autre commission scolaire? Ne croyez-vous pas que le gouvernement, en association avec les partenaires et suivant la recommandation

du comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation, qui n'a rien à faire avec le ministre, lui, devrait être en mesure d'harmoniser, de normaliser les définitions des statuts confessionnels. C'est cela le point central du problème.

M. Chagnon: Si vous le regardez par ce bout du télescope, je vous dirai ceci: Les définitions d'un statut confessionnel ne varient pas d'une commission scolaire à l'autre, le français étant une langue universelle au Québec et la confession, on sait de quelle on parle. De plus, j'ajouterais que le comité catholique a rendu public, il y a trois ans, une espèce d'index où toutes ces définitions se retrouvent; alors, tout le monde sait de quoi on parle quand on parle de statut confessionnel dans les commissions scolaires. Or, la consultation comme telle ne peut pas mener à une définition différente d'un statut confessionnel d'une commission scolaire par rapport à une autre.

M. Payne: Et l'article 308? M. Chagnon: Les contrats? M. Payne: Oui.

M. Chagnon: Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

M. Payne: Oui. Vous semblez vouloir, au nom des commissions scolaires, vous approprier certains pouvoirs - on pourrait dire arbitraires dans le passé - que possédait le ministre ou le gouvernement pour la disposition des biens immeubles en disant que vous devriez avoir les mêmes pouvoirs que les municipalités. Je vous ai signalé que les municipalités comme le gouvernement, comme les ministères du gouvernement, comme le ministère des Travaux publics, maintenant sont rigoureusement assujetties aux règles uniformes pour l'octroi des contrats.

M. Chagnon: II y a déjà des règles qui existent dans les commissions scolaires pour l'octroi des contrats, particulièrement des règles qui concernent les processus d'octroi de contrats, peu importent les types de contrat, que ce soit l'enlèvement de la neige, enfin tout ce qu'on veut, ou la construction.

M. Payne: Oui, mais ma question était: Est-ce que vous ne pensez pas que c'est nécessaire d'avoir une harmonisation dans l'intérêt public et l'intérêt national?

M. Chagnon: II y en a, une harmonisation, M. le Président, puisque la règle, c'est l'octroi du contrat au plus bas soumissionnaire. Vous me dites que les municipalités sont maintenant régies par l'État pour l'octroi de leurs contrats. C'est une nouveauté, je n'avais jamais entendu parler de ça auparavant.

M. Payne: Ah non? Vous pouvez vous référer à la Commission municipale du Québec.

Le Président (M. Blouin): Je ne voudrais pas qu'on glisse sur les problèmes d'affaires municipales.

M. Chagnon: À ma connaissance, en tout cas, les municipalités ont leur pouvoir dans cette question. M. Perron.

Le Président (M. Blouin): M. Perron.

M. Perron (Charles): M. le Président, on a un exemple patent de ce dont on parle quand on parle d'octroi de contrats. Récemment, le ministère a délégué aux commissions scolaires le pouvoir de contracter dans le domaine du transport scolaire. C'est un fait. Avant, c'étaient des contrats qui étaient octroyés directement par le ministère. C'est un cas type d'autres possibilités qui pourraient être réalisées au sein des commissions scolaires. Rien que là, en accordant cela aux commissions scolaires qui gèrent en bon père de famille, disons, on a épargné je ne sais pas combien de millions de dollars dans toute la province. Cela est un exemple type parce qu'on se sent désormais responsables. Avant, on avait peut-être 55 autobus. On a réussi à le faire avec 52. On a négocié au plus fin avec les entrepreneurs et c'est un domaine vraiment typique où on a réussi à réaliser une économie substantielle des deniers publics.

Le Président (M. Blouin): Voilà, cela va.

M. Payne: Vous tombez sur un bon exemple. À l'Assemblée nationale, nous avons modifié la Loi sur les transports justement pour harmoniser et rationaliser le service, comme, par exemple, pour les personnes handicapées. Je peux vous donner des exemples dans mon comté là où on avait de la misère à transporter les handicapés. Il y avait un conflit entre les commissions scolaires et les commissions de transport. La Loi sur les transports est en mesure, justement dans mon comté, d'appuyer le principe d'une harmonisation nationale dans l'intérêt du handicapé en question.

Je termine brièvement avec une dernière question. Dans l'intérêt de l'objectivité de votre mémoire, pourquoi n'avez-vous pas jugé bon de faire allusion à certains articles du projet de loi qui montrent carrément la possibilité dp décentraliser le système, comme la référence à l'article 33 de former une école régionale

seulement après entente avec la commission scolaire?

(12 h 30)

Lorsque vous parlez, à 240, des surplus et des déficits, vous n'admettez pas dans votre mémoire que maintenant c'est légitimé par la loi même d'étaler les surplus. Auparavant, aucune commission scolaire n'avait la permission, de par la loi même, d'avoir un surplus ou un déficit. À mes yeux, il s'agit d'une mesure décentralisatrice. À l'article 293, maintenant c'est possible d'établir que l'école peut choisir le matériel didactique en ce qui concerne certaines utilités pour l'audiovisuel, etc. Finalement, à l'article 297, par exemple, l'équivalence maintenant est déterminée régionalement, même si les critères sont harmonisés sur le plan national. Je me demande pourquoi vous n'avez pas jugé bon de faire une certaine correspondance avec l'actuel projet de loi qui est devant nous et la loi telle qu'elle existe. Cela aurait pu éclairer le débat, et pour vous et pour vos membres.

M. Chagnon: M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Je pense que vous faites référence à quelques-uns des amendements qui ont été apportés mardi dernier.

M. Payne: II y en a un qui touche... J'ai perdu la référence.

Le Président (M. Blouin): II y a certains amendements et d'autres qui sont des textes originaux. M. Chagnon.

M. Chagnon: C'est un peu le problème. On travaille, on...

M. Payne: L'article 33 pour l'école régionale, c'est toujours là; ce n'est pas amendé. Le surplus n'est pas amendé...

M. Chagnon: L'article 33...

M. Payne: Le matériel didactique n'est pas amendé. Vous avez cela depuis le début.

M. Chagnon: L'article 33, M. le Président, a été amendé. L'article 234 a été amendé; l'article 242 a été amendé; l'article 245 a été amendé. Et on a amendé aussi l'alinéa 6 de l'article 308, l'alinéa 5 de l'article 309. On a travaillé, M. le député, avec le projet de loi que nous avions. Il y a eu des amendements dont certains sont des améliorations intéressantes par rapport au projet de loi initial, nous n'en doutons pas. L'article 33, par exemple, est un pas dans le bon sens; l'article 234, l'article 242. Maintenant, dans l'article 242, pourquoi maintenir uniquement le budget?

M. Payne: L'article 297: Le ministre peut établir les critères ou les conditions pour l'attribution d'une équivalence d'études. La nuance est délicate, mais importante. Maintenant, il est possible, en vertu de cet article, que la commission scolaire puisse, elle, attribuer une équivalence en vertu de certains critères. Vous serez d'accord avec moi qu'il est nécessaire d'avoir une certaine uniformité nationale dans un domaine aussi délicat que l'équivalence concernant des gens qui viennent de l'étranger, qui changent de province, de ville, de commission scolaire. Et, par rapport au passé, tout cela était centralisé à Québec.

M. Chagnon: Le ministre, vous dites... Qui peut établir ces critères, sinon le ministre? D'ailleurs, actuellement, c'est le ministre qui établit les critères et les conditions pour l'attribution d'une équivalence d'études et c'est normal. C'est normal que les équivalences d'études soient... C'est comme cela dans tous les États, M. Payne; les équivalences d'études pour les étudiants étrangers ou les étrangers qui viennent s'établir ici...

M. Payne: On commence à se comprendre, alors. Le ministre établit les critères, et l'amélioration qu'on apporte, c'est que la commission scolaire les applique localement. Et peut-être cela fait-il partie des 80 références du député d'Argenteuil, là où il est question de pouvoirs accrus du ministre.

M. Chagnon: M. le Président, il n'est dit nulle part dans l'article 297 que les critères ou les conditions pour l'attribution d'une équivalence d'études à une personne seront décentralisés vers la commission scolaire. Ce n'est dit nulle part. Je ne sais pas où on voit cela.

Le Président (M. Blouin): Enfin, M. le député de Vachon, je vous rappelle d'abord que j'insisterai pour que chaque membre de la commission n'excède pas la période de 20 minutes qui est mise à sa disposition puisqu'il y a un grand nombre d'intervenants qui désirent prendre la parole. Il vous reste encore un certain nombre de minutes et je souhaiterais que nous n'abordions pas dès à présent l'étude article par article du projet de loi, mais que nous fassions ressortir davantage certaines idées et que nous échangions avec nos invités sur ces idées. M. le député de Vachon.

M. Payne: Oui, je vais terminer là-dessus. La différence est entre la loi en vigueur et ce qu'elle est actuellement selon laquelle... Dans l'article en question, le ministre se limite à l'établissement des critères laissant entendre qu'il n'y a

absolument rien qui empêche, comme dans le passé, les commissions scolaires de déterminer des équivalences. C'est une modification importante qui a été demandée par les commissions scolaires.

M. Chagnon: II n'y a rien qui indique non plus que ce sont les commissions scolaires qui auront le pouvoir d'élaborer des critères plus tard.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Vachon. En requérant votre collaboration comme toujours Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci M. le Président. Je sais que mes collègues veulent poser des questions. Je vais tenter d'être très brève.

Je remercie le député d'Argenteuil qui a repris déjà certaines remarques du ministre de l'Éducation, ce qui m'évitera d'y revenir.

Je voudrais simplement sur un point particulier relever ces remarques touchant la publicité que vous avez faite autour de ce projet de loi. Je pense que sur la publicité qui doit se faire, tous les organismes publics, à commencer par le gouvernement, doivent être très prudents quant à l'utilisation des fonds publics. Mais j'estime qu'on se trouve dans un situation où l'on voit la paille dans l'oeil de son prochain et on ne voit pas la poutre qui est dans le sien, parce que celui qui a été le grand maître ou le grand enseignant de la publicité, c'est certainement le gouvernement qui est devant nous.

Ceci étant dit, M. le Président, je veux remercier la fédération qui a fait un travail extrêmement sérieux. Je pense que ses dirigeants se sont astreints à toutes les consultations qui semblaient extrêmement importantes auprès de leurs membres sur un projet de loi qui les touchera autant dans l'avenir. Je voudrais aussi, c'est un peu à l'invitation de mon collègue d'Argenteuil, très brièvement parce que nous aurons l'occasion d'entendre d'autres commissions scolaires dont la commission des écoles catholiques de Montréal...

Apparemment vous avez de la difficulté à m'entendre. Bon!

M. Chagnon: Vous êtes en compétition avec un marteau piqueur, je pense.

Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas certaine de pouvoir compétitionner avec cela.

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon, afin que ceux et celles qui suivent nos travaux comprennent bien la situation, il y a effectivement des travaux importants qui sont actuellement en cours tout autour de la salle dans laquelle nous délibérons. Nous devons, malheureusement vivre avec ces contraintes. Probablement que la solution est de rapprocher le micro et de parler un peu plus fort Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je dois dire que le marteau est plus près de nous qu'hier.

M. Chagnon: Est-ce que vous nous signalez que les travaux importants ont lieu ailleurs?

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci. Je voulais revenir sur cette question de délégation de pouvoirs des commissions scolaires vers les écoles. C'est un fait que ceci est une réalité qui existe depuis plusieurs années qui, évidemment, est loin d'avoir porté tous les fruits qu'on souhaiterait et qui, je pense, n'existe peut-être pas non plus dans toutes les commissions scolaires. Mais entre cela et pour le gouvernement de se reconnaître le mérite d'avoir pensé à déléguer des pouvoirs des commissions scolaires vers les écoles, je pense qu'il faudrait que le ministre de l'Éducation refasse un peu d'histoire. C'est comme d'ailleurs en ce qui a trait au projet éducatif. Le projet éducatif semble être devenu le mot de passe créé par le gouvernement actuel. Je voudrais rappeler au ministre de l'Éducation que les projets éducatifs, Dieu merci, n'ont pas été inventés ni par les politiciens ni par les politiciennes et c'est fort heureux, mais ils ont été pensés depuis longtemps par un bon nombre d'écoles. Ils ont vu le jour particulièrement, je pense, par des initiatives dans les écoles des milieux économiquement faibles. Et déjà, le nombre s'est multiplié. Il existe dans les commissions scolaires de tout le Québec des écoles qui ont développé, précisément à partir d'un élargissement et d'une délégation de pouvoirs, des projets éducatifs qui sont vraiment les leurs et qui correspondent vraiment au désir des parents. J'en ai deux qui me viennent à l'esprit parce que je les connais, je pense à l'École Atelier à Montréal et je pense aussi à l'école mi-temps musique, mi-temps pédagogique à Montréal. Je suis certaine que vous avez une liste beaucoup plus longue. Je pense qu'en éducation, comme ailleurs, il n'y a personne qui a à s'attribuer tous les mérites. C'est heureux dans une société qu'un système d'éducation évolue. À tour de rôle, des gouvernements, qu'ils soient locaux, provinciaux ou autres, sont les outils, pour une période donnée, qui permettent de continuer l'évolution d'un système.

Ceci dit, j'ai des questions précises à vous poser. On sait que, dans un certain nombre d'écoles, que ce soit douze ou vingt, peu importe le nombre, des comités d'orientation... Là, je ne peux pas parler plus

fort.

M. Chagnon: Je comprends.

Le Président (M. Blouin): Nous allons suspendre les travaux pour une ou deux minutes. Messieurs, la commission élue permanente de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 14 h 45.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise de la séance à 14 h 56)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demande maintenant aux membres de la commission de regagner leur siège puisque la commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux.

Au moment où nous nous sommes quittés, nous avions donné la parole à Mme la députée de L'Acadie qui poursuivra son intervention. Mme la députée.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Même si ma voix a été couverte par les sons du marteau piqueur ou marteau-pilon, je ne reprendrai pas mes commentaires de ce matin et je vais passer immédiatement à des questions précises.

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de L'Acadie, vous pouvez même reculer votre micro maintenant.

Mme Lavoie-Roux: Même maintenant. Bon, d'accord. Là, c'est devenu trop fort.

Je vais passer immédiatement à des questions précises vu que plusieurs de mes collègues veulent en poser et qu'on a plusieurs groupes qui sont en attente pour être entendus d'ici la fin de la journée.

J'aimerais demander ceci à la fédération: Là où on a créé des conseils d'orientation dans certaines écoles - on a parlé de 12 à 20; je pense que ce n'est pas tellement le nombre qui m'importe, mais enfin, on sait que c'est un nombre infime -peut-on me dire quelle sorte ou quel type de relations ou comment les relations se sont articulées entre le conseil d'orientation et le comité de parents?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Nous avons eu, de la région de Drummondville, une communication sur le conseil d'orientation. Il n'y en a pas tellement. Il y en a peut-être une dizaine au Québec. Il semble que le conseil d'orientation joue pleinement son rôle de concertation dans le milieu et que le comité de parents est intégré au conseil d'orientation et a une voix qui, comme celle des autres partenaires, celle des enseignants, celle du directeur, fait en sorte de faire valoir ses points de vue sans difficultés, semble-t-il. Moi-même, je n'ai pas visité l'école. Nous avons eu une communication de la région de Drummond sur un conseil d'orientation.

Mme Lavoie-Roux: L'objet de ma question était, en fait, de voir s'il y avait des difficultés dans ces relations, vu que le projet actuel prévoit dans le fond deux structures, n'est-ce pas? Il prévoit le comité de parents et il prévoit le conseil d'école où les parents seraient majoritaires. Je me demandais si ceci était fait harmonieusement. En fait, vous n'êtes pas trop bien placés à ce moment-ci pour répondre à cette question, étant donné que cela n'a pas été une expérimentation très répandue.

M. Chagnon: Tout ce que j'en sais, c'est que le conseil d'orientation qui existe dans une des écoles de Drummondville semble bien fonctionner. Effectivement, il y a une concertation entre parents, enseignants, directeur d'école et le commissaire qui siège aussi au conseil.

Mme Lavoie-Roux: Vous dites, à la page 23 de votre synthèse: "Que la commission scolaire, en concertation avec les écoles, développe des mécanismes pour impliquer les écoles dans le processus décisionnel de la commission pour toutes les politiques affectant la vie des écoles." Vous avez tout à l'heure parlé de modifications possibles qui devraient être apportées au conseil d'orientation. Accepteriez-vous ou même considéreriez-vous comme quelque chose de positif que le projet de loi prévoie que des pouvoirs décisionnels précis, sans être exhaustifs, soient donnés par la loi aux comités d'orientation ou si vous vous en tenez toujours à votre recommandation de la page 23 qui, elle, m'apparaît beaucoup plus reliée à la bonne volonté de chacun? Auriez-vous des objections à ce que soient inclus dans le projet de loi des pouvoirs décisionnels précis qui pourraient être donnés au comité d'orientation, dans l'hypothèse que le comité d'orientation soit retenu?

M. Chagnon: Notre hypothèse repose sur le fait que nous pouvons déléguer des pouvoirs à l'école. Dans ce cadre, et c'est encore plus facile avec un conseil d'orientation, l'école a la capacité de prendre des décisions dans les matières qui lui ont été déléguées. Mais nous ne suggérons pas aux parlementaires d'encadrer sur le plan juridique une série de pouvoirs à l'école pour la bonne et simple raison que les matières devant être responsabilisées à l'école risquent de différer d'un milieu à l'autre, et même, dans une commission scolaire, d'une école à

l'autre.

Il n'y a pas la même volonté. Il y a une volonté de responsabilisation de part et d'autre, mais les objets sur lesquels il y a demande de responsabilisation ne seront pas nécessairement les mêmes d'une école à l'autre et particulièrement pas les mêmes d'un milieu à l'autre. Les besoins ne sont pas les mêmes. Les écoles ne sont pas conçues sur un modèle unique; alors les besoins ne peuvent pas, eux non plus, être uniformisés.

Mme Lavoie-Roux: Je ne parle pas d'une liste exhaustive - vous avez raison - je parle de certains pouvoirs de décision dans certaines matières. Par exemple - je ne sais jamais si c'est la loi 30 ou 71, parce qu'on les avait discutées toutes les deux ensemble - il y a eu d'inscrites dans la loi des matières obligatoires de consultation auprès des parents. Je me rappelle qu'il y avait la fermeture des écoles, enfin cinq ou six rubriques qui sont devenues des sujets obligatoires de consultation. Ils ont été inscrits dans la loi. Je ne crois pas qu'ils aient créé de problèmes parce que c'était quand même sur des objets de portée très précise. Est-ce que la même chose ne pourrait pas se faire au point de vue des pouvoirs de décision?

M. Chagnon: Nous estimons que la notion même de pouvoirs est une notion qui ne devrait pas s'encarcaner au niveau de l'école. En fait, l'école doit être un lieu de concertation, un lieu qui peut être responsabilisé et prendre des décisions, mais à partir d'une délégation de pouvoirs d'un niveau qui s'appelle la commission scolaire. Si on veut responsabiliser et revaloriser les milieux, pourquoi tenter d'imposer par la voie législative des pouvoirs à des unités? C'est cela qui est un peu difficile à comprendre. Par exemple, si l'école prend des responsabilités en matière de relations du travail, cela risque d'être fort dangereux pour le climat même de l'école. À un conseil d'orientation, on retrouve des employés, on retrouve des parents, un directeur d'école. L'exercice d'une responsabilisation, par exemple, en matière de relations du travail devient très périlleux. L'exercice peut être facilité par le biais d'une délégation de pouvoirs en matière d'enrichissement pédagogique. Le milieu peut donc avoir et prendre les moyens qu'il juge à propos, en concertation avec la commission, pour faire en sorte d'enrichir le programme pédagogique qu'il vit dans un milieu.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Dans votre synthèse, à la page 12, dans les propositions que vous faites, vous parlez de la détermination de la masse salariale, des avantages sociaux, des incidences financières considérables comme, par exemple, le régime de retraite. Est-ce qu'on doit comprendre par ceci que vous voudriez redonner au plan local des responsabilités en matière de négociation de convention collective?

M. Chagnon: C'est ce que nous souhaitons. Nous allons consulter nos membres à partir de la fin du mois de janvier sur un nouveau mode de négociation dans le secteur public et parapublic qui s'oriente assurément vers une responsabilisation accrue des commissions scolaires, comme agents négociateurs de ce qu'on appelle plus régulièrement, dans le jargon de la négociation, le normatif. C'est effectivement une orientation de responsabilisation que nous croyons justifiée, après l'empirique centralisation qu'on a connue dans le secteur des négociations dans les secteurs public et parapublic, de ramener le pendule, comme nous voulons ramener le pendule à d'autres niveaux pour la commission scolaire.

Mme Lavoie-Roux: Ceci irait, dans votre perspective, au-delà de ce qu'on entendait par les négociations locales...

M. Chagnon: Incontestablement. Mme Lavoie-Roux: Incontestablement.

M. Chagnon: II n'y a aucune espèce de corrélation entre les deux éléments, dans notre esprit.

Mme Lavoie-Roux: II me semble - vous me corrigerez, si je me trompe - que, du point de vue de la négociation au niveau local - remarquez bien que je suis très sympathique, personnellement, à cette hypothèse, parce que je pense qu'on ne s'en sortira jamais si on reste centralisé comme on l'est - il y avait chez certains de vos membres, compte tenu des ressources à leur disposition, des réticences à accepter au plan local même ce qu'on appelait "les objets de la négociation locale". Est-ce qu'à ce moment-ci vos membres seraient prêts à aller au-delà de ce cadre et même à envisager des négociations touchant le normatif?

M. Chagnon: Nous ne pouvons pas présumer des conclusions de la consultation que nous allons mener à partir de la fin de janvier jusqu'au mois de mars. Toutefois, si le cadre de négociation est fortement modifié par rapport à celui qu'on a connu avec les négociations locales et si la marge de manoeuvre est suffisante, je crois qu'il est fort possible que les commissions scolaires veuillent revenir à des négociations locales et négocier avec leurs propres syndiqués, les gens qu'ils connaissent dans leur milieu, sur le plan normatif, encore une

fois.

Lorsqu'on évalue des notions qui touchent aussi directement la tâche, le travail, il nous semble qu'il serait plus facile d'en arriver à des conclusions lorsque la négociation se fait près des lieux de travail.

Mme Lavoie-Roux: II reste que cette proposition a été entérinée par la très grande majorité, et même là où il y avait de la dissidence, elle ne portait pas nécessairement là-dessus. Généralement, les instances locales seraient, semble-t-il, prêtes à reprendre une partie de la négociation au plan local.

M. Chagnon: Les instances locales veulent être responsabilisées, on sent le besoin de responsabilisation chez les instances locales. Il se trouve que, dans les milieux scolaires, les gens se sentent de plus en plus comme des assistés sociaux du ministère. Ils se sentent de plus en plus colonisés par le ministère et, en fin de compte, je pense que ceci ne peut pas faire autrement que d'expliquer cette volonté de responsabilisation accrue, tant dans le domaine des relations du travail, qui n'est pas le domaine le plus facile, que dans d'autres domaines comme ceux que j'ai mentionnés plus tôt, c'est-à-dire les domaines d'un accroissement de l'assiette fiscale pour les commissions scolaires, comme le reste. En fait, il y a une récupération à faire pour les commissions scolaires, sinon, elles deviendront des instruments d'administration intermédiaires, c'est tout. Elles n'auront plus cette capacité politique d'orienter leur milieu. Peut-être que M. Paradis pourrait compléter.

Mme Lavoie-Roux: M. Paradis.

Le Président (M. Blouin): M. Paradis.

M. Paradis (Fernand): M. le Président, si vous le permettez, j'aimerais faire quelques commentaires sur la question qui vient d'être posée.

On ne peut nier que bon nombre de commissions scolaires se sont montrées réticentes à des "négociations locales". Ces négociations locales se situaient dans un contexte qui était à peu près celui que nous avions connu, où les marges de manoeuvre de négociation étaient à peu près inexistantes. Dans les commissions scolaires, on se sentait à peu près dans la situation suivante: II nous faut systématiquement dire non parce que nous n'avons pas de véritables matières à négociation. Au niveau local, cela devenait une deuxième ronde de négociations pour obtenir des choses qui avaient été refusées au plan national.

Alors, ce type de négociation ne pouvait absolument pas être accepté. Par ailleurs, ce qui est clairement ressorti également lors de ces sondages, c'est que, s'il y avait une négociation où véritablement on est responsabilisé sur des matières précises et où on peut dire oui à certaines choses, mais où, si on dit oui à telle matière, il faudra composer sur autre chose, dans ce contexte, à mon avis, on est sur un terrain beaucoup meilleur pour entamer de véritables discussions de négociation. Mais une négociation où on nous envoie sur la ligne de feu pour dire non, eh bien! c'est suicidaire et on ne veut pas de ce type de négociation. Par ailleurs, si on peut négocier avec les "oui, mais", "oui" sur telle chose, "mais" par ailleurs sur telle autre, alors on peut véritablement négocier et devenir responsable de notre gestion. Dans ce contexte, à mon avis, les commissions scolaires n'hésitent pas à s'embarquer.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais poser très brièvement les deux autres questions. Je vais les poser l'une à la suite de l'autre au cas où vous voudriez m'arrêter. La première: À un moment donné, vous avez fait une étude sur les coûts du projet de restructuration scolaire ou, enfin, du projet de loi - peut-être pas spécifiquement sur le projet de loi 40, je pense que vous l'avez faite davantage en fonction du livre blanc -et cela a été contesté. Est-ce que vous avez refait cette étude ou si vous tenez encore aux données que vous aviez communiquées publiquement à ce moment-là?

Ma deuxième question: Pourriez-vous me dire, à l'article 625: La présente loi entre en vigueur le 1er juillet 1985, à l'exception de tel et tel chapitre qui entrent en vigueur le 1er juillet 1984... Du point de vue du fonctionnement des écoles, des commissions scolaires, enfin, de l'ensemble du système, est-ce que cette date qui est prévue vous semble raisonnable ou si elle pourrait créer des problèmes et quelle en serait la nature?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, concernant les coûts, l'étude des coûts que nous avions faite l'an dernier et que nous avions rendue publique en décembre 1982 ne portait pas sur le projet de loi 40, évidemment, elle portait plutôt sur le livre blanc. C'était une étude extrêmement exhaustive que nous avions menée par l'intermédiaire, finalement, des principaux gestionnaires des fonds publics dans le secteur scolaire. Plusieurs dizaines de directeurs de services financiers de commissions scolaires avaient prêté leur concours à cette étude. Alors, nous retrouvions dans cette étude plusieurs types de commissions scolaires, des plus grosses aux plus petites, et des moyennes, et nous avions fait

l'évaluation des coûts en fonction des pouvoirs rattachés à l'école et du mode de fonctionnement de ces pouvoirs au niveau d'une école. Les conclusions que nous avions tirées, c'est que, sur une base de cinq ans, les coûts de cette restructuration scolaire s'établiraient à une augmentation, par rapport au système actuel, de l'ordre d'environ 250 000 000 $, soit 50 000 000 $ par année. C'est une étude extrêmement exhaustive, comme je l'ai souligné tout à l'heure, et il n'y a pas eu de réponse à cette étude. La majeure partie des coûts, si je me rappelle bien, était attribuable à des personnels supplémentaires qu'il fallait ajouter à l'école pour faire fonctionner l'école, toujours dans le cadre du projet de livre blanc. Maintenant, il n'y a pas eu d'étude sur le projet de loi 40. Nous n'en avons tout simplement pas eu le temps.

Le Président (M. Blouin): La deuxième question.

M. Chagnon: Peut-être que, sur la deuxième partie, l'année 1985, je demanderais à M. Paradis de répondre. (15 h 15)

M. Paradis (Fernand): M. le Président, c'est un aspect du projet qui me semble peu traité, mais qui comporte, à mon avis, un potentiel de difficultés non négligeables.

L'année 1985, il est facile de le prévoir puisque c'est déjà dans la programmation, en sera une où l'on devra implanter dans les commissions scolaires de nouveaux programmes. Déjà c'est une activité en cours qui n'est pas terminée et il y a des possibilités de débordement sur 1986. Peut-être même au-delà puisque les commissions scolaires ont beaucoup de difficultés à obtenir des manuels de base et le matériel pédagogique nécessaire à l'application de ces programmes. Donc, 1985 est une année où il y a la mise en vigueur de programmes scolaires.

Il y aura également l'obligation, pour les commissions scolaires qui ne se seront pas rendues là dans les années précédentes, soit en juin prochain par exemple, d'offrir l'option entre l'enseignement moral et l'enseignement religieux. On se rappellera également que ce sera la troisième année d'application de la convention collective qui, actuellement, prévoit une modification à la charge d'enseignement. Donc, de nouveaux ajustements, troisième ajustement, à l'intérieur du système.

Et ce n'est pas tout. Il y a également l'entrée de l'informatique à l'école. On est en train d'acheter 9000 ordinateurs et il y a une programmation qui prévoit en acheter un très grand nombre d'autres. Il faudra que les écoles absorbent ce nouveau changement avec tout ce que cela suppose. Il ne s'agit pas uniquement d'acheter des appareils puis de procéder au perfectionnement des enseignants. Avec tous les jeux de déplacement de personnel - il y a encore des baisses de population au niveau secondaire - il arrive que des enseignants du secondaire manifestent l'intention de travailler au primaire. Il faut les insérer, les perfectionner sur ce qu'est l'enseignement primaire, les habituer également à une charge de travail modifiée, ajouter les nouveaux programmes et aussi l'informatique. Et ce n'est pas tout. Il y a également l'enseignement professionnel qu'on s'apprête à modifier. Donc le système sera soumis à ces nouveaux changements.

Il y a l'éducation des adultes. On sait que la DGEA sera, à partir de juin prochain, démantelée. Mais comment va s'articuler l'éducation permanente ou l'éducation aux adultes dans ce nouveau système? Il faudra, puisque c'est en 1984 qu'on l'abolit, au cours de l'année 1984-1985 et les années suivantes, prévoir des mécanismes d'ajustement. Il y a aussi, pour 1985, des négociations parce que le contrat de travail sera terminé. Il faudra négocier. On s'apprête à modifier les mécanismes de négociation. Ce sont toujours les mêmes personnes qui devront digérer ces changements, qui devront absorber toutes ces modifications. Le projet de loi prévoit en plus une fusion primaire-secondaire, une diminution du nombre de commissions scolaires, un déplacement du pouvoir, un nouveau système d'élection des commissaires et des commissions scolaires linguistiques. Il ne m'appartient pas d'évaluer la possibilité qu'il y ait des élections générales, mais, si cela fait partie du tableau, j'ai l'impression que le plat est assez chargé.

Le Président (M. Blouin): Si j'ai bien compris...

M. Paradis (Fernand): Si vous me permettez, M. le Président, très rapidement, dix secondes.

Le Président (M. Blouin): Très rapidement, M. Paradis, s'il vous plaîtî

M. Paradis (Fernand): Ce qui me préoccupe, c'est que le projet ne reçoit pas actuellement l'assentiment des enseignants, des cadres, des directeurs généraux et de la fédération. C'est vouloir aller contre un courant qui me semble fort et imposer des changements alors qu'il y en a déjà beaucoup à digérer.

Mme Lavoie-Roux: Merci beaucoup.

Le Président (M. Blouin): Très bien, merci, M. Paradis. Merci, Mme la députée de L'Acadie.

M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. Je

vais tenter moi aussi d'être bref étant donné qu'il y a d'autres mémoires à présenter. Je voudrais d'abord vous féliciter pour votre mémoire. Il est très clair et très précis; même s'il n'est pas toujours dans l'orientation du livre blanc, il a au moins les qualités, je dois le dire et je le reconnais, d'être clair et de formuler des demandes qui sont précises. Vous le défendez aussi avec détermination et conviction.

Dans la sixième partie, il y a aussi des accords que je trouve très importants et intéressants, car ce sont des modifications sur des points qui sont très importants, que ce soit la confessionnalité, l'intégration du primaire, du secondaire ou bien la division linguistique. Sur ces sujets, il semble que cela va assez bien.

Le point où il y a divergence, c'est effectivement le point important, c'est la base même de la discussion du livre blanc et, par la suite, de la loi 40, c'est où on met de l'importance et de là découlent les pouvoirs. C'est sur cela qu'il est important qu'on discute et je suis content que vous soyez ici. C'est important, comme citoyens, comme individus, qu'on s'arrête un peu, c'est ce que nous faisons avec le livre blanc qui a été publié et les discussions qu'il y a eu un peu partout dans toutes les régions du Québec et aujourd'hui en commission parlementaire, et qu'on se demande si le système d'éducation que nous avons présentement, c'est l'idéal ou s'il peut être amélioré et comment il doit être amélioré. Notre système d'éducation, c'est quoi? C'est quoi, surtout, le système d'éducation qu'on veut pour les enfants? Une chose qu'on devrait peut-être oublier temporairement, durant quelques minutes, et ensuite ne pas oublier le reste, c'est qu'on devrait peut-être oublier que nous sommes ou parents, ou députés, ou commissaires, ou quoi que ce soit, mais penser, par exemple, et ne pas oublier l'école.

Pourquoi avons-nous un système d'éducation? Vous avez mentionné cela ce matin. Si nous avons des fédérations des commissions scolaires, si nous avons des comités de parents, si nous avons un ministère de l'Éducation, c'est parce que nous avons des écoles. Si nous enlevons les écoles, nous n'avons plus besoin d'être là, en tout cas, pour plusieurs de ceux qui sont ici dans cette salle aujourd'hui. Tout est basé sur l'école. Il ne faudra jamais oublier cela, parce qu'un système scolaire, c'est en fonction de l'éducation, de l'instruction qu'on donne à des enfants. Tout est basé sur cela et nous ne devons jamais l'oublier. Ce qui est important dans le système de l'éducation, c'est l'éducation que nous donnons à des enfants et cette éducation, nous la donnons au niveau de quel endroit? C'est l'école. Tout se passe dans l'école, cela se passe dans une bâtisse qui s'appelle l'école. C'est là que nous dispensons la pédagogie à nos enfants. Cela est important. Tout le reste, à mon avis, c'est la philosophie du livre blanc, doit être au service de cette école.

Il ne faudrait pas retourner le monde à l'envers non plus. Il ne faudrait pas que le ministère de l'Éducation soit si imposant. Oui, sur cela, j'embarque. On a besoin des commissions scolaires, c'est reconnu. Effectivement, il faut un pilier de service. Mais le ministère, comme les comités de parents et comme les commissions scolaires, doit être au service de l'école parce que c'est là que se passe l'éducation. Tout le système doit être orienté vers la place où se dispense la pédagogie, où on donne l'éducation, l'instruction et la formation à nos enfants; donc, c'est l'école. C'est cela qu'on essaie de faire valoir. Si cela se passe à l'école, si la préoccupation de tout le système d'éducation doit être sur l'enfant et qu'il se trouve à l'école, cela doit donc devenir le pivot du système d'éducation. Tout doit se passer là et le reste doit être complémentaire. On doit être au service de l'école. Par l'école, on entend, bien entendu, ceux qui dispensent l'éducation, spécialement les enseignants, le directeur d'école, les parents qui sont de plus en plus présents et qui ont le droit de définir un objet, un projet de l'école. On doit leur donner et leur fournir le maximum de pouvoirs dans ce sens.

Je me rappelle avoir fait le tour des commissions scolaires, pas longtemps après mon élection, et la chose qu'on me disait, c'était: II va falloir revaloriser au plus tôt le secteur public de l'éducation. Je suis tout à fait d'accord, c'est qu'il y a des problèmes si on se ramasse ici aujourd'hui. Il faut essayer de les régler au mieux. C'est la raison pour laquelle il y a un projet de loi, il y a une commission parlementaire. Des discussions aboutiront certainement à des solutions dans un sens ou dans l'autre et finiront par apporter quelque chose, je l'espère, en réponse aux besoins de l'éducation des enfants. Mais oui, il y avait des problèmes et il y en a encore.

Il faudrait que je conclue?

Le Président (M. Blouin): Est-ce que vous pourriez poser une question à nos invités...

M. Paré: Oui, j'y arrive.

Le Président (M. Blouin): ...pour que nous puissions procéder à ces échanges puisque c'est l'objet de la commission?

M. Paré: J'y arrive, M. le Président. J'ai écouté attentivement ce que les gens ont dit; donc, je tenais aussi à dire ce que j'en pense. Où je veux en venir, c'est que le livre blanc dit que l'école est le centre et le

pivot de tout le système scolaire. C'est cela qu'on tente, nous, dans la loi 40, d'amener les gens, d'amener les intervenants du monde de l'éducation... On retrouve dans votre mémoire, dans la liste des propositions: Que les gouvernements locaux soient revalorisés, que la commission scolaire demeure une instance politique déterminante, que le rapatriement des pouvoirs soit là, que la commission scolaire soit autonome dans ces choses. On le retrouve à différents endroits: que la commission scolaire ait pleine autorité sur les écoles.

Ce que j'aimerais vous poser comme question, c'est ceci: Vous avez entendu hier la fédération des comités de parents dire: On a l'impression que ce que demande la fédération des commissions scolaires, c'est une décentralisation au niveau des commissions scolaires. Face à ce que je viens de dire - on a droit de ne pas partager les mêmes opinions, c'est pour cela qu'on en discute - si on dit que c'est à l'école que cela se passe, que c'est là que doit être le pivot du système d'éducation, est-ce que vous n'avez pas l'impression - c'est ce que les parents nous disent - que, dans votre mémoire et selon ce que vous demandez, vous êtes en train de demander que le pivot du système d'éducation, ce soit la commission scolaire?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. Charles Perron donnera une partie de la réponse et M. Paradis, la seconde partie.

Le Président (M. Blouin): Vous comprendrez que l'intervention du député de Shefford peut amener de très longs développements...

M. Chagnon: Elle est fort intéressante...

Le Président (M. Blouin): ...que vous avez très probablement déjà approfondis. Je souhaiterais que vous apportiez des éléments nouveaux si possible et non pas, évidemment, que vous répétiez ce que vous nous avez livré ce matin lors de votre intervention initiale.

M. Chagnon: C'est pour cela que je me ferai violence pour ne pas répondre à la question et laisser répondre M. Perron et M. Paradis.

Le Président (M. Blouin): Alors, je comprends que ce sera une violence collective.

M. Chagnon: Voilà!

Le Président (M. Blouin): Très bien. M. Perron.

Une voix: On va en venir à la violence!

M. Perron (Charles): Ce que vous semblez dire, monsieur, c'est que, dans le fond, le pouvoir doit résider dans les écoles, d'après le projet de loi 40, comme s'il n'avait jamais résidé dans les écoles et comme si la commission scolaire avait toujours conservé ces pouvoirs pour elle. Or, je prétends que la commission scolaire n'existe qu'en fonction de ses propres écoles. Depuis des dizaines et des dizaines d'années, les commissions scolaires ont existé en fonction de leurs écoles et ont déjà, dans le passé, fait en sorte que ce soit à l'école que les choses se passent. Cela s'est toujours fait comme cela.

Là, on parle de transfert de pouvoirs additionnels. Je voudrais tout simplement faire référence à ce qui m'a frappé dans la déposition des représentants des comités de parents hier. Actuellement, ils forment une structure consultative. Ils le déplorent. Ils disent qu'ils n'ont pas les pouvoirs et qu'ils sont menottes par les commissions scolaires. Il y a du vrai dans cela, dans certains cas, mais, généralement, les comités d'école et les parents ont toujours eu droit de parole dans les commissions scolaires. Ce ne sont pas des mots tirés en l'air, c'est la stricte réalité des choses. On ne pourrait pas, de toute façon, dans les commissions scolaires, gérer des écoles sans le consentement des parents, parce qu'on aurait un tel bouleversement et des réunions où il y aurait tellement de protestataires... Obligatoirement, de par nos fonctions, on est obligé, et on le fait de bon coeur, de toujours fondamentalement tenir compte de la volonté des parents.

Ce que j'ai remarqué dans l'attitude des représentants de parents, c'est que, dès la minute où ils sont investis de pouvoirs décisionnels, on dirait que spontanément ils se coupent eux-mêmes de leurs anciennes fonctions de parents pour devenir "des commissaires", des "administrateurs". Ils éprouvent immédiatement le besoin d'avoir une structure parallèle consultative pour se rassurer et se consolider dans leur propre... Ils se coupent eux-mêmes, en accédant à des responsabilités décisionnelles au conseil, de ce qu'ils avaient antérieurement, de la dimension consultative. Ils éprouvent immédiatement le besoin d'avoir quand même cette structure consultative parallèle.

On en arrive à la quadrature du cercle. On arrive au fait que, dans très peu de temps, on va reconstituer exactement la situation qui existe actuellement. On va avoir des parents devenus commissaires, qui auront un rôle décisionnel, qui vont s'ajuster sur des parents "parents" qui vont être, eux, restés à l'école et on n'aura absolument rien réglé. On va transposer. On va nous éliminer, nous - cela ne me fait rien - mais on va

ramener une structure qui va être exactement identique.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Très bien.

M. Perron (Charles): Quel est l'intérêt de cela?

Le Président (M. Blouin): Très bien. Merci, M. Perron.

Une voix: M. Paradis pourrait-il compléter?

Le Président (M. Blouin): M. Paradis, vous avez des éléments supplémentaires?

M. Paradis (Fernand): Je le crois, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Très bien, allez-y.

M. Ryan: M. le Président...

M. Paradis (Fernand): Je trouve que la question est fondamentale parce qu'elle porte sur le coeur de la réforme la qualité de l'éducation. Pour bien comprendre la position de la fédération, il faut retourner au livre vert, à mon avis, où les conclusions qu'on a tirées succinctement disaient ceci: D'abord, arrêtons de toucher aux structures. Deuxièmement, c'est l'acte éducatif qui devrait faire l'essentiel, ou c'est sur l'acte éducatif que devraient porter nos efforts actuellement, l'acte éducatif.

Si on ne veut pas jouer dans les structures, et j'ai le sentiment que l'on joue dans les structures avec le projet de loi, et qu'on veut travailler sur l'acte éducatif, il faut d'abord regarder le régime pédagogique. C'est déjà enclenché dans ce sens-là. La mise en oeuvre de programmes nouveaux, cela aussi c'est commencé, mais ce n'est pas terminé, et c'est loin d'être terminé. Également, la parution de guides pédagogiques pour appuyer les programmes, c'est commencé, mais ce n'est pas terminé. Les livres, les manuels de base, le matériel didactique qui doit aussi être renouvelé, le perfectionnement des maîtres qui doit accompagner cela, tout cela est à faire. Si on joue à nouveau sur les structures de pouvoirs, on se distrait de cet acte essentiel.

C'est vrai que ce n'est pas spectaculaire que de travailler sur la pédagogie. C'est vrai que cela demande beaucoup de temps. C'est modeste comme travail, mais c'est essentiel. Cela demande du temps de travailler auprès des institutions. Est-ce qu'il faut changer le lien d'appartenance du directeur d'école pour en arriver à faire cela? On a déjà amélioré des programmes de français, de mathématiques et de sciences sans qu'il y ait un lien entre le directeur d'école et son conseil d'administration. La direction générale, enfin, les commissions scolaires ont acquis une expérience au cours des dernières années à travers des difficultés très grandes de diminution de clientèles et de difficultés économiques et on est arrivé à faire ce travail avec intelligence, je crois. Le conseil supérieur lui-même le disait. Il y a une expertise incroyable dans le réseau. Eh bien! Mettons-la à profit. Ce qui me semble épouvantable dans la situation actuelle, c'est de dévier de cette analyse de 1978, le livre vert, et de revenir sur les structures, de jouer à nouveau avec les structures alors que c'est l'acte éducatif, l'encadrement des élèves, la rigueur intellectuelle, c'est tout cela qui devra faire l'objet essentiel de nos réflexions et de notre travail. (15 h 30)

Le Président (M. Blouin): Merci. Est-ce que cela va, M. le député de Shefford?

M. Paré: Est-ce que je peux en venir à la conclusion que vous acceptez quand même que l'école doit être le centre et le pivot du système d'éducation?

M. Paradis (Fernand): II me semble que c'est l'élève qui est le pivot du système.

Une voix: Bon, très bien.

M. Paradis (Fernand): Je pense que...

M. Ryan: C'est très clair. Pas besoin d'explication.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député d'Argenteuil, s'il vous plaît! Merci, M. Paradis et merci, M. le député de Shefford. M. le député de Saint-Henri, vous avez la parole.

M. Hains: Oui, M. le Président. Moi aussi, je veux vous offrir mes plus sincères félicitations pour votre beau résumé de ce matin qui est vraiment attrayant et en même temps très révélateur.

Sans aucun autre préambule, parce que je ne veux pas être très long, voici quelques brèves questions et, pour aider le président, je vais vous demander d'être aussi brefs que possible dans vos réponses, malgré que cela puisse prêter un peu à de plus longues dissertations. Je vais faire porter mes questions principalement sur la réponse de M. le ministre ce matin au discours inaugural de votre président.

Ce matin, M. le ministre nous a dit que vous aviez fait un plaidoyer pro domo. Un de ses collègues qui est malheureusement absent aujourd'hui, le député péquiste de Roberval, M. Gauthier, se dit convaincu dans la Presse de ce matin - je ne sais pas si

vous l'avez lue - que votre position reflète mal la volonté de bon nombre de commissions scolaires et de la plupart des parents. J'aimerais que vous nous donniez quelques chiffres rapidement et peut-être un peu plus de détails...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Saint-Henri, une question a déjà été posée ce matin sur le fait que la fédération des commissions scolaires était oui ou non représentative de l'ensemble de ses membres. Je crois que nos invités ont très précisément répondu à cette question.

M. Hains: Oui. J'espère que j'ai quand même le droit de continuer.

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Hains: Je voudrais avoir un peu plus de détails sur les chiffres de votre sondage SORECOM. Est-ce que vous pourriez nous en donner quelques éléments, surtout au point de vue des commissions scolaires et au point de vue des parents?

Le Président (M. Blouin): S'il y avait des éléments nouveaux? Oui?

M. Chagnon: Brièvement, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Le sondage d'opinion publique qui a été produit en 1982 a révélé que les citoyens tiennent de façon majoritaire, dans l'ordre de 90%, à ce que les services éducatifs continuent à être gérés par les commissions scolaires et que c'est une bonne chose que les écoles relèvent des commissions scolaires. Pour les parents - là, c'étaient les parents qui répondaient - 90,5% sont davantage en accord avec cette idée que les non-parents, 80,2%, et les gens veulent voir augmenter l'influence locale et, par conséquent, diminuer celle du ministère de l'Éducation du Québec.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Chagnon. M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Là-dessus on peut donc compléter en disant que ce n'est peut-être pas un plaidoyer pro domo mais pro populo. N'est-ce pas? Parce que c'est vraiment le peuple qui est en arrière de vous.

Deuxième question. M. le ministre fait aussi un reproche d'un refus intégral - c'est sa propre expression - du projet de loi, qualifiant vos acceptations de "lentes" et de "timides". Ce sont ses propres mots, je les ai pris entre guillemets. Il rejoint encore son collègue de Roberval qui, dans la Presse de ce matin encore, parle de refus systématique de votre part. Je ne sais pas, mais, une petite parenthèse, pour moi, ils se sont vraiment parlé cette nuit, ces deux-là. En quelques mots, est-ce que cette assertion est justifiée? Est-ce que c'est vraiment justifiable de dire que c'est un refus intégral de votre part, que vous êtes très timides dans vos acceptations?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: À ma connaissance, depuis mardi, il n'y a pas eu ni d'acceptations ni de refus intégraux. Il y a des éléments dans le projet de loi 40 - et nous l'avons souligné -avec lesquels nous étions en accord. Mais le député de Shefford mentionnait que, dans l'organisation de la logique même du projet, ce qui est le coeur du projet, on ne fonctionne pas. On ne fonctionne pas pour une raison que je mentionnais ce matin: le projet de loi 40 qui se prétend être un projet de société en est un qui privilégie une classe de la société: les parents.

Le projet que nous vous soumettons est un projet "sociétal"; c'est un projet qui fait en sorte que la population en général garde le pouvoir et voie s'accroître son propre pouvoir d'orientation sur son réseau d'éducation, dans son milieu. Par le fait même lorsqu'on parlait de l'école, pivot du système... Le système d'éducation est un système qui n'a pas un pivot unique, ce n'est pas une toupie. M. Paradis disait que le pivot du système est l'étudiant; c'est un fait, on travaille pour des élèves, on travaille pour des étudiants. Les enseignants sont un pivot dans ce système-là; les parents sont aussi un pivot; tous les agents sont un pivot. La commission scolaire est un pivot, comme le ministère de l'Éducation est un pivot. Les pivots font en sorte qu'on a un réseau d'éducation et un système d'éducation.

Nous pensons que c'est une des différences entre le projet gouvernemental et notre position, que l'école, organisée comme on la prévoit dans le projet de loi, c'est-à-dire avec un conseil majoritairement composé de parents, deviendrait un lieu de pouvoir et risquerait alors, contrairement à ce que le parrain du projet de loi en pense, de ne pas être ce lieu de concertation que nous recherchons tous. À notre avis, la meilleure façon de s'organiser pour que l'école devienne un lieu de concertation, ce n'est pas d'en faire un lieu de pouvoirs directement organisé comme le projet de loi le prévoit. L'école doit être un lieu de concertation.

Il nous apparaît que la formule de 1979 qui - c'est un fait - n'a pas fonctionné - on ne peut donc pas la juger dans toute sa valeur - pour une simple raison de vice de forme dans l'écriture législative de l'époque, la loi 71, et plus particulièrement le conseil d'orientation, devraient être mis à l'épreuve

avant de procéder à d'autres modifications. Fondamentalement, ce sont là les différences entre ce que nous vous suggérons et ce qu'on retrouve dans le projet de loi 40, un projet qui favorise une partie de la population, les parents, une partie importante, très importante, mais qui discrimine la société en faveur d'un groupe, par rapport au nôtre.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Chagnon. M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Une autre petite dernière. M. le ministre, ce matin, a semblé vous reprocher une certaine froideur, sinon même une certaine hostilité envers les parents. Il s'est servi de certaines déclarations d'hier pour s'en faire un tremplin et, comme qui dirait, sauter dans ses accusations. Je vous pose ma dernière question: Est-ce que les équipes d'école que rêve de créer M. le ministre - avec raison aussi - sont possibles et viables avec le réseau actuel de commissions scolaires?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, en ce qui concerne la première partie de la question, nous n'avons aucune espèce d'agressivité ou d'animosité vis-à-vis des parents, nous en sommes tous. Deuxièmement - je l'ai mentionné ce matin - les trois quarts des membres des conseils et des commissaires de toute la province, dans tout le Québec, sont des parents d'enfants dans le réseau. On ne peut donc pas être contre les parents et, pour nous, l'espèce de dualité parents-commissaires n'est pas une marchandise qu'on achète. Effectivement, ce sont les parents qui ont déjà le réseau en main.

Le Président (M. Blouin): Ça va? Merci, M. Chagnon. Merci, M. le député de Saint-Henri. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Puisqu'on a parlé du député de Roberval, je voudrais souligner en son nom qu'il est en mission à l'extérieur du Québec, à titre d'adjoint parlementaire du ministre des Finances. Je pense qu'on l'excuse de son absence; il sera avec nous la semaine prochaine.

Je voudrais revenir, M. le Président, sur certaines réponses qu'on nous a fournies relativement à la place des parents au conseil d'école. Ma question sera directe, compte tenu des nombreux préambules qu'il y a eu sur le sujet. La question que je me pose - je pense que vous n'avez pas encore répondu à cette question - est celle-ci: Comment peut-on vraiment responsabiliser les agents d'éducation? Ce sont les parents, les enseignants, les professionnels, les élèves de deuxième cycle du secondaire, tel que prévu dans le projet de loi 40. Comment peut-on vraiment les responsabiliser? Vous utilisez le terme dans votre mémoire: On veut les responsabiliser? Puisque vous voulez les responsabiliser, comment peut-on les responsabiliser sans leur donner explicitement une autonomie de fonctionnement au niveau de l'école? C'est ma question; j'en aurai d'autres, M. le Président, à la suite des réponses.

Le Président (M. Blouin): Sur cette question précise, M. Chagnon.

M. Chagnon: Brièvement, les moyens comme tels varient d'une école à l'autre. Je connais plusieurs écoles qui administrent leur propre budget. Évidemment, la définition du projet éducatif, je mets cela un peu de côté parce que ça n'existe pas, une école qui n'a pas un projet éducatif. Il y a des projets éducatifs qui sont plus ou moins bien articulés dans une école par rapport à une autre, c'est un fait, mais il n'y a pas d'école qui puisse exister sans avoir un projet éducatif. Alors, les moyens, ce sont les moyens sur lesquels le milieu s'entend. Ils diffèrent d'une commission scolaire à l'autre et, finalement, ils permettent justement ce que vous appelez et ce que nous appelons la responsabilisation de l'école.

M. Leduc (Fabre): Si je comprends bien votre réponse, vous ne niez pas l'autonomie au niveau de l'école. C'est ce que je comprends; vous dites: Cela dépend des commissions scolaires, cela peut varier d'une commission scolaire à une autre, mais, si je comprends bien, vous ne refusez pas l'autonomie au niveau de l'école, vous n'êtes pas contre le fait que l'école occupe un certain champ autonome dans certains domaines. Vous venez de me parler du domaine du budget. C'est déjà prévu dans le projet de loi 40, le conseil d'école prépare son budget, le soumet à la commission scolaire. D'après des réponses que vous avez données antérieurement, si j'ai bien compris, dans le domaine pédagogique, vous n'êtes pas contre cela non plus. Vous n'êtes pas contre le fait qu'au niveau de l'école, les principaux agents de l'éducation occupent des responsabilités. Cela peut varier d'une commission scolaire à une autre, mais vous n'êtes pas contre le principe.

M. Chagnon: Nous le faisons déjà, M. le député.

M. Leduc (Fabre): D'accord. Donc, si je comprends bien, le seul point sur lequel on ne s'entend pas - c'est-à-dire nous, de ce côté-ci du moins, et ce que vous présentez -c'est sur le fait que ces pouvoirs soient regroupés au sein d'une loi et qu'ils soient donnés à un conseil d'école qui regrouperait

les agents de l'éducation, de façon à créer un troisième niveau décisionnel au niveau local. Je pense que c'est là-dessus qu'on ne s'entend pas et j'aimerais savoir pourquoi exactement vous refusez ce troisième niveau, puisque vous êtes d'accord pour que le ministère vous accorde plus de pouvoirs. Vous voulez la décentralisation au niveau de la commission scolaire, mais vous refusez une décentralisation au niveau de l'école, c'est-à-dire au niveau où l'éducation se fait. Pourquoi refusez-vous ce troisième niveau de pouvoir?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Je vous rappelle d'abord qu'il y a déjà deux niveaux; deuxièmement, je mentionnais tout à l'heure que l'école, lieu de pouvoir, organisée comme le projet de loi 40 l'organise, fait en sorte de donner une majorité à un conseil, à un groupe particulier, donc d'inférioriser d'autres groupes aussi importants. Je pense, entre autres, aux enseignants. À partir du moment où un groupe particulier choisi devient majoritaire dans ce processus, ça fait évidemment en sorte de minoriser les autres groupes. Or, comment peut-on bâtir une concertation qui se joue entre une certaine puissance locale qui est différente d'un groupe à l'autre? On ne peut pas privilégier cette option pour ces raisons. Nous préférerions une école qui soit véritablement un lieu de concertation. On parle beaucoup de concertation ces jours-ci. On en fait, on tente d'en faire au sommet. Le chef du gouvernement se réunit avec des chefs de l'industrie, du monde syndical, etc., mais la concertation, pour qu'elle puisse avoir des racines solides dans la société québécoise, doit partir de la base, une base avec laquelle la société québécoise est habituée de travailler ou s'habitue de travailler, et l'école serait ce lieu privilégié. (15 h 45)

Le Président (M. Blouin): Cela va?

M. Leduc (Fabre): Mais on est tout à fait d'accord là-dessus. Les agents de l'éducation doivent travailler en concertation. C'était l'esprit du conseil d'orientation. C'est l'esprit dans lequel est fait le projet de loi 40, dans lequel est conçu le conseil d'école. C'est un endroit de concertation, mais c'est un endroit décisionnel. Vous dites: On ne peut pas être pour parce que les parents vont être majoritaires. C'est vrai que, dans le projet de loi 40, on affirme que les parents sont majoritaires, mais ils peuvent être majoritaires d'un ou deux membres. Est-ce que c'est une majorité? Autrement dit, est-ce que les parents sont majoritaires au point d'empêcher les autres groupes de vraiment participer au sein du conseil d'école, de façon qu'il y ait une concertation, tel que vous le souhaitez?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: Dans ce cadre-là, que le conseil d'école, tel qu'on le retrouve dans le projet de loi 40, devienne l'aboutissement d'un cheminement commun au niveau de l'école.

M. Leduc (Fabre): S'il devenait l'aboutissement d'un cheminement commun au niveau de l'école, vous y seriez favorable?

M. Chagnon: Oui, parce que ce serait un choix local.

M. Leduc (Fabre): C'est très important - il me semble, en tout cas - ce que vous dites. Vous dites que vous êtes pour les pouvoirs au niveau du conseil d'école, à condition que ce soit un choix du milieu. C'est ce qu'on a entendu...

M. Chagnon: Ce qui...

M. Leduc (Fabre): ...hier de la part d'une commission scolaire également.

Le Président (M. Blouin): Un instant! M. Chagnon?

M. Chagnon: Le problème, le noeud gordien dans ce concept, c'est qu'il nous paraît à peu près impossible de créer une concertation, s'il y a un déséquilibre à la base des agents devant faire cette concertation. Je demanderais à M. Perron d'ajouter à la question.

M. Perron (Charles): II y a une espèce de momentum à établir là-dedans. Si, par le biais d'une loi, du jour au lendemain, on investit les parents de pouvoirs que, soi-disant, ils n'ont pas actuellement et qu'ils vont acquérir, est-ce qu'on a la certitude que tout le monde va être prêt à les assumer? Quelle forme cela va-t-il pouvoir prendre? Ce que la fédération recommande, c'est que, potentiellement - et on est d'accord avec cela - la responsabilisation de l'école se fasse, mais qu'elle ne soit pas imposée; qu'elle ne soit pas imposée, ni empêchée d'être imposée par la commission scolaire, ni imposée unilatéralement par le ministère. C'est là qu'est le noeud. Chacun marche à la vitesse qu'il peut et assimile les choses comme il l'entend. Si, d'un seul coup, 3000 écoles au Québec sont investies de pouvoirs, il va y avoir un flottement. Il va y avoir, à travers toutes les autres modifications qu'on connaît, les modifications au régime pédagogique, les nouveaux cours de français, les nouveaux cours... On va presque atteindre un point de rupture, si vous voulez.

Alors, on parlait ce matin de la commission scolaire en tant qu'agent régulateur. Je pense que cette dimension serait très bien articulée dans ce domaine, c'est-à-dire qu'au fur et à mesure qu'une école est prête, qu'il y a un certain déblayage qui est fait dans la prise de responsabilités, il n'y a pas de problème. C'est d'ailleurs comme cela que ça se passe actuellement. Dans les commissions scolaires, dans une grande majorité de commissions scolaires, au fur et à mesure que, par un aménagement plus fin, une connaissance plus grande des règlements et de tout cela, au fur et à mesure que les écoles se prennent en main elles-mêmes... Je pense que nulle part dans une commission scolaire, quand une école, honnêtement, consciencieusement, fait une demande pour s'organiser dans certains domaines précis qui relevaient de la compétence de la commission scolaire et non de celle du ministère, je doute qu'il n'y ait pas eu une délégation en rapport avec les pouvoirs que la commission scolaire avait.

M. Leduc (Fabre): Enfin, vous parlez toujours de délégation. Je veux vous rappeler l'article 216 du projet de loi où il est dit qu'à la demande d'une école, la commission scolaire peut exercer temporairement les pouvoirs de celle-ci en matière de gestion des ressources humaines, matérielles ou financières. Est-ce que cet article ne permet pas, enfin, la souplesse que vous souhaitez d'un milieu à un autre, d'un milieu qui n'est pas tout à fait prêt à entrer, si vous voulez, dans le cadre du projet de loi 40, à assumer les responsabilités prévues par le conseil d'école? Ne croyez-vous pas que cet article est suffisant ou est-ce qu'il y a moyen d'aménager cet article de façon à mieux répondre à vos désirs?

Le Président (M. Blouin): M. Perron, allez-y.

M. Perron (Charles): Je pense que cet article de loi illustre parfaitement les hésitations qu'on a et vous avez cru bon de le mettre dans la loi parce que vous vous rendez bien compte qu'il y aurait là possibilité d'accrochages sérieux. En mettant cet article de loi, vous faites exactement, vous permettez aux commissions scolaires de diluer dans le temps l'application du projet de loi 40. C'est exactement ce qu'on prétend.

M. Leduc (Fabre): M. Perron vous ne répondez pas à ma question. Vous avez dit que chaque école doit fonctionner, chaque milieu doit avancer suivant son rythme. Bon! II me semble que c'est comme cela et je voulais avoir votre point de vue sur l'article 216. Je voudrais voir s'il y a lieu de l'aménager de façon à répondre à ce souhait, puisque vous dites, vous me l'avez dit encore, que vous êtes pour l'autonomie au niveau local, si je comprends bien.

Quant aux pouvoirs, il y a peut-être moyen de discuter, mais vous êtes pour une forme d'autonomie. Je vous dis que l'article 216, il me semble, répond à ce souhait de respect du milieu. Si ce n'est pas tout à fait le cas, j'aimerais vous entendre. Il me semble que vous partez sur une autre discussion.

M. Chagnon: La communauté, comme telle, a un milieu. Un milieu, cela représente toujours une communauté. On ne peut pas nier l'autorité ultime du centre qui est dépositaire de la volonté communautaire, ce centre qui est finalement légitimé par un mandat de la population et qui est celui qu'est la commission scolaire.

La relation de la commission scolaire avec ses écoles se doit d'être la plus raffermie possible. C'est pour cela que l'article 216 procède à l'envers. Il donne des pouvoirs à l'école, qu'elle peut prendre ou ne pas prendre. Si elle ne veut pas les prendre, elle les retourne à la commission scolaire. C'est le processus à l'envers, tandis que l'article 217 donne un droit de tutelle à la commission scolaire. La commission scolaire ne veut pas avoir de droit de tutelle sur ses écoles. Les écoles émanent - et je le répète encore une fois - l'ensemble des écoles d'un territoire forme la commission scolaire comme les doigts sont accrochés à une main. C'est aussi simple que cela.

M. Paradis pourrait peut-être rajouter sur la question.

M. Paradis (Femand): M. le Président, je souhaiterais faire quelques commentaires sur ces propos. Quand on regarde l'histoire de l'éducation au Québec au cours des quinze dernières années, on s'aperçoit que, de façon régulière, on a eu la tentation de généraliser des formules qui fonctionnent bien dans des milieux. Je voudrais évoquer des exemples très brièvement.

On a réalisé tout à coup qu'il y avait en France des méthodes dites actives qui produisaient de bons résultats. On a lancé, ici au Québec, l'opération SEMEA pour embrigader tout le monde dans des formes d'écoles actives qui seyaient bien à des gens, mal à d'autres, mais on a tenté de généraliser. Et vite, on a été obligé de conclure qu'il y avait des limites et qu'on ne pouvait pas généraliser.

On a fait la même chose avec des méthodes de lecture qui, tout à coup, ont donné d'excellents résultats. On a voulu les répandre, les généraliser, bien souvent sans même avoir le temps de préparer les maîtres. On a fait la même chose avec le plan de développement de l'enseignement des langues. Il fallait que chaque langue soit

dotée d'appareils audiovisuels et il fallait que partout on utilise l'audiovisuel pour faire de l'enseignement. C'était encore là une tentative de généralisation qui a vite fait ressortir qu'on ne pouvait pas généraliser des formules qui donnaient de bons résultats dans certaines circonstances.

Je me souviens également des tentatives en vue de l'établissement de la progression continue ou de l'école sans degré, des écoles sans mur. Je me souviens de prévisions qu'on faisait à l'époque et on disait: D'ici dix ans, toutes les écoles fonctionneront de cette façon. Au bout d'à peine cinq ans, on avait non seulement plafonné, mais on avait commencé une descente. Ce sont des tentatives de généralisation de formules qu'on croit heureuses et qui, en fait, le sont, mais, lorsqu'on en vient à généraliser, c'est ce pas qu'il faut éviter de franchir. Il faut, à mon avis, être plus respectueux des milieux, des façons de faire, de l'ingéniosité que les gens pourront développer et mettre tout cela à profit pour en arriver à des résultats de participation sans que ce soit très exactement la formule qui a fonctionné dans un milieu voisin.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Paradis.

M. Leduc (Fabre): Quelques commentaires, puisqu'il ne reste pas grand temps, sur ce que dit M. Paradis. Nous sommes tout à fait d'accord avec lui, c'est que nous souhaitons, et c'est ce que nous souhaitons justement par le projet de loi 40. S'il était adopté, on ne pourrait plus faire ce que vous avez dit, c'est-à-dire généraliser des formules, puisque l'école serait responsable de ces méthodes, de ces programmes, de l'application du régime pédagogique. C'est précisément cela que nous voulons éviter. Je comprends le sens de votre réponse, mais ce que vous apportez comme exemple me semble, plus ou moins convenir. C'est un commentaire que je fais.

M. Paradis (Fernand): On veut tout de même y imposer une structure. Alors, c'est cela.

M. Leduc (Fabre): M. le président, tout à l'heure, dans votre mémoire, vous défendiez le conseil d'orientation, c'est également une structure. J'ai la loi ici; si j'en avais le temps, je vous ferais lecture de l'article en question. C'est une forme de structure. On prévoit la participation de tel ou tel groupe, etc., et on prévoit aussi les prérogatives de cette structure. Nous ne pouvons pas éviter une forme de structure. Il s'agit qu'elle soit suffisamment souple et, sur cela, nous nous entendons aussi. Je vous ai cité l'article 216, mais nous pourrons toujours méditer plus tard...

Le Président (M. Blouin): En concluant, M. le député de Fabre, s'il vous plaît!

M. Leduc (Fabre): M. le Président, en concluant, je voudrais rappeler à la fédération ceci, parce qu'elle a cité le mémoire SORECOM. Je sais bien qu'il y a eu beaucoup de questions et que vous ne pouviez pas donner des réponses à toutes les questions qui ont été posées, mais je voudrais personnellement vous rappeler que plus de 73% des Québécois estiment que l'influence des parents dans les décisions qui touchent l'école devrait augmenter. Je conclus sur cela, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Fabre.

M. Chagnon: Cela confirme nos positions, qui veulent justement responsabiliser davantage l'école et ses agents. Mais j'aimerais préciser une chose, c'est qu'un conseil d'orientation devrait être mis en place dans chacune des écoles, selon le désir du milieu. C'est là notre position.

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Chagnon: Ce n'est pas une structure que nous voulions uniforme.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Chagnon; merci, M. le député de Fabre. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Votre mémoire révèle un travail assez remarquable et j'aimerais vous en féliciter. Contrairement au ministre, qui est spécialiste en matière de confrontation, j'apprécie grandement votre approche d'évaluation et de concertation, l'approche qui a inspiré votre mémoire. C'est une approche pleine de prudence et de bon sens, du sens de la réalité des choses sur le plan pratique.

J'en arrive à ma première question. Je crois que le critère ultime selon lequel il faut juger le projet de loi 40 est de se demander si le projet va améliorer la qualité de l'éducation. À cet égard, j'aimerais vous demander si vous croyez que le projet risque d'augmenter l'inégalité des écoles, donc l'inégalité des chances des élèves des différents milieux.

Le Président (M. Blouin): Oui, M. Paradis. (16 heures)

M. Paradis (Femand): M. le Président, si vous permettez, je disais tout à l'heure que l'entrée en vigueur du projet se ferait alors qu'il y a déjà un très grand nombre d'activités de planifiées et d'organisées en

vue d'améliorer l'acte éducatif. Ce qu'on a appelé le livre orange, et qui s'appelait, sauf erreur, le plan d'action du ministère, spécifie bien que ce n'étaient plus les structures qu'il fallait remettre en cause, mais qu'il fallait plutôt améliorer le régime pédagogique lui-même, améliorer les programmes, améliorer l'encadrement au plan scolaire, au plan intellectuel, au plan comportemental, c'étaient surtout ces choses-là. Or, la crainte que j'entretiens personnellement, c'est que l'entrée en vigueur de changements, particulièrement au niveau des structures, pourrait nous distraire de cet acte essentiel. Cela se fait sans que ce soit très spectaculaire. L'action de modification, de changement et d'amélioration est très modeste dans la pédagogie elle-même, mais c'est essentiel de le faire.

Depuis 20 ans, on a consacré énormément d'énergies à des réorganisations de toutes sortes, comme le réseau secondaire, la mise en place de l'enseignement professionnel. On a énormément travaillé à ces choses-là. Au terme de ces modifications, le jugement qu'on a porté, c'est qu'il faut regarder l'éducation, la pédagogie. Ce qui me semble dangereux, c'est qu'en ne respectant pas des rythmes d'implantation de changements qu'il faut apporter aussi dans d'autres secteurs, en imposant à tout le monde en même temps l'entrée en vigueur de certaines modifications, le monde de l'éducation, les agents de l'éducation seront distraits de cet acte essentiel: l'amélioration de la pédagogie.

Mme Dougherty: Je ne sais pas si vous avez vraiment compris le sens de ma question. Je parle surtout des milieux défavorisés. Je me demande si on va porter préjudice à certains milieux en donnant des pouvoirs...

M. Chagnon: M. le Président, je disais ce matin que, la commission scolaire étant par elle-même un régulateur de la qualité et de la quantité de services, cela implique, évidemment, qu'elle joue ce jeu de péréquation dans son territoire pour les écoles situées dans un milieu socio-économique plus riche par rapport à d'autres écoles dans un milieu moins favorisé. C'est un rôle fondamental qui doit se jouer à ce niveau. Est-ce que le projet de loi 40 va contribuer à modifier cet équilibre? Politiquement, il y a un risque que oui à cause, entre autres, de la formule prévue au niveau du mode de suffrage où le commissaire se sentira plus lié par les représentants des écoles que la vue de la collectivité lorsqu'il y aura un partage à faire. Cela est dangereux.

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci. J'ai une deuxième question. Dans votre mémoire principal à la page 46 et dans votre synthèse, à la page 26, vous avez parlé de garanties constitutionnelles équivalentes que vous demandez comme substituts pour quelques pouvoirs: un gouvernement local, l'élection des commissaires au suffrage universel, le pouvoir de taxation, le droit à l'école confessionnelle et à l'école non confessionnelle. Qu'envisagez-vous à cet égard? Est-ce que ces droits équivalents doivent être enchâssés dans la constitution canadienne ou dans une loi du Québec?

M. Chagnon: Ce qui a été adopté chez nous, c'est ceci: Lorsqu'on parle de garanties équivalentes, on parle de garanties équivalentes. Si, comme nous le pensons, l'article 93 de la constitution canadienne donne des droits particuliers aux commissions scolaires comme organismes locaux, comme gouvernement local, incluant un pouvoir de taxation, etc., ce sont des choses que nous voulons garder et que nous voulons même voir modifier et améliorer. Cela nous semble, en tout cas, assez évident que, dans la mise sur pied du projet de loi 40, il faudra regarder la dimension constitutionnelle, ne serait-ce que pour les modifications de statut, de confessionnel à linguistique, des commissions scolaires. Pour y arriver, nous estimons, comme nous avons des droits à l'article 93, qu'on doit conclure que la commission scolaire est un gouvernement local, dont les membres doivent être élus au suffrage universel, qui a un pouvoir de taxation et, finalement, qui dirige un réseau d'écoles confessionnelles ou non. Ce sont les droits que nous aimerions y voir. C'est tout.

Mme Dougherty: Alors, tout ce que vous cherchez à cet égard, c'est la protection des droits qui sont maintenant consacrés aux protestants et aux catholiques en vertu de la constitution, car ceux qui sont inscrits dans le projet de loi 40 ne constituent pas une garantie équivalente.

M. Chagnon: On veut avoir des garanties équivalentes dans le projet de loi 40. La raison pour laquelle on en demande, c'est que l'orientation qui se prend actuellement risque de modifier structu-rellement le gouvernement local qu'est la commission scolaire. Alors, on est un peu pris dans le coin du mur. Nous préférons avoir des garanties équivalentes à celles que nous avons sur les points que je vous mentionnais.

Mme Dougherty: En ce qui concerne le pouvoir de taxation, à la page 19 de votre synthèse, vous parlez d'un revenu autonome de taxation locale significatif. Considérez-vous que les 6% sont adéquats?

M. Chagnon: Bien, non! Fondamentalement, non, ce n'est pas adéquat.

Mme Dougherty: Ce n'est pas précisé dans votre synthèse.

M. Chagnon: Ce que nous ne précisons pas, c'est le modèle. Nous avons actuellement un modèle de taxation qui est basé sur l'évaluation foncière. Nous pensons que nous devrions, gouvernement et commissions scolaires, faire une recherche conjointe pour regarder d'autres mécanismes, s'il y en a, permettant une source de revenu autonome pour les commissions scolaires. C'est une étude. On doit la travailler.

Nous estimons que 6%, c'est nettement insuffisant; par exemple, en Ontario, les commissions scolaires sont financées dans l'ordre de 50%, 55% ou 60% par des crédits locaux. Les citoyens financent leur propre réseau. Cela augmente drôlement les responsabilités du réseau. Cela augmente aussi drôlement leur capacité de s'intéresser à leur réseau et de vouloir l'orienter. C'est fondamental.

Le Président (M. Blouin): Cela va?

Mme Dougherty: M. le Président, j'ai une dernière question.

Le Président (M. Blouin): Oui.

Mme Dougherty: À la page 47 de votre mémoire, vous parlez de la création de commissions scolaires linguistiques. Vous avez introduit l'idée, en parlant des commissions scolaires françaises, que, s'il y a quelques écoles anglophones qui veulent rester au sein des commissions scolaires linguistiques françaises, cela doit être permis, selon le voeu des parents. Je crois que c'est une idée très intéressante. J'aimerais savoir si vous accepteriez le corollaire, s'il y a quelques écoles françaises... Par exemple, hier soir, je crois que c'était dans le mémoire de la fédération des parents, on a parlé de Eastern Québec Regional School Board où il y a 35% de franco-protestants. Dans un cas comme comme celui-là, si ces parents voulaient rester au sein de la commission scolaire protestante, seriez-vous d'accord? C'est l'inverse.

M. Chagnon: Nous n'avons pas étudié la question, Mme la députée.

Mme Dougherty: En principe, seriez-vous ouverts à une suggestion comme celle-là?

M. Chagnon: En principe, probablement, si c'est la volonté des parents qui sont concernés dans le milieu. L'inverse devrait autant prévaloir que l'affirmation que nous faisons.

Mme Dougherty: C'est bien. Merci.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, Mme la députée de Jacques-Cartier. M. le député de Mille-Iles.

M. Champagne (Mille-Îles): Merci, M. le Président. J'ai lu avec beaucoup d'attention votre mémoire. J'y ai vu quelques contradictions. Vous dites: On demande le retrait du projet de loi 40, mais vous acceptez des principes fondamentaux qui font que la loi 40 apporte des changements majeurs auxquels vous adhérez. Je veux parler de la création des commissions scolaires linguistiques. Je pense que c'est un chambardement majeur et vous l'acceptez. Vous acceptez l'intégration du primaire et du secondaire et vous mentionnez, dans votre conclusion: Est-t-il nécessaire, par exemple, de chambarder aussi radicalement le système scolaire? Vous posez la question du chambardement, mais, d'autre part, vous acceptez la création de commissions scolaires linguistiques, vous acceptez l'intégration du primaire et du secondaire et, aussi, vous acceptez que la confessionnalité ne soit plus nécessairement rattachée à la commission scolaire, mais qu'elle vienne plutôt au niveau de l'école. Pourquoi? D'une façon, vous voulez le retrait de la loi 40 et vous êtes d'accord avec tous ses gros principes, quand même. C'est là, le chambardement. Vous l'acceptez, le chambardement. Je ne dis pas que c'est le fait de donner un peu de pouvoirs à l'école comme telle qui est le grand chambardement. C'est beaucoup plus la création de commissions scolaires linguistiques, l'intégration du primaire et le chambardement au point de vue confessionnel auxquels vous adhérez. Croyez-vous, M. le président, M. Chagnon, qu'il n'y a pas une contradiction dans la politique que vous avancez?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon.

M. Chagnon: M. le Président, je suis heureux de constater que le député aussi constate avec nous que nous sommes en faveur de changements.

Je dirai ceci: Depuis trois ans, nous avons eu à vivre un moratoire sur les principes de l'intégration de l'élémentaire et du secondaire. Il y a un nombre assez important de commissions scolaires qui ont déposé des mémoires pour faire en sorte de vivre une intégration dans leur milieu respectif. Elles sont prêtes à l'intégration. C'est mûr. Mais depuis trois ans tout est bloqué parce qu'au ministère on a dit: On s'en vient avec une restructuration scolaire, on bloque tout et on verra plus tard. Sans

cela, il y aurait eu plus de commissions intégrées qu'il n'y en a actuellement et cela se serait fait avec le moins de heurts possible. Nous favorisons cette intégration, c'est sûr mais il y a des critères d'intégration dont il faut tenir compte, particulièrement, entre autres, le fait que le milieu doit s'associer le plus possible par lui-même pour y arriver. C'est un peu ce à quoi le moratoire nuit actuellement.

Deuxièmement, les commissions scolaires linguistiques. On sait qu'il y a un dilemme juridique qu'il va falloir régler. Nous sommes bien ouverts mais il faut fonctionner un peu avec ce qu'on a aussi comme cadre juridique. Comme plusieurs des commissions scolaires au Québec sont déjà prêtes à l'intégration et que l'intégration -on n'y est pas obligé; elle peut s'étaler sur une période de deux ou trois ans, je présume - ce serait d'autant plus facile à avaler. Cela pourrait s'avaler en fonction des problèmes qu'auront à vivre chacune des commissions scolaires, chacune des écoles dans tous les milieux du Québec, avec ce qu'on a à absorber comme changements déjà, comme le signalait M. Paradis tout à l'heure.

Troisièmement, eh bien, l'idéal serait possiblement, M. le député, de scinder le projet de loi 40, d'en ressortir des éléments comme l'intégration, etc., et de pouvoir l'analyser bout après bout. Le problème est que tout est fondu ensemble dans le projet de loi. Ce qui est dommage, c'est qu'il est à prendre ou à laisser.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député de Mille-Îles. (16 h 15)

M. Champagne (Mille-Îles): Enfin, je suis content de savoir que vous êtes en faveur du projet de loi 40, je pense, dans son ensemble. Vous acceptez les grands changements comme l'intégration, les commissions scolaires linguistiques. Ce sont les éléments presque fondamentaux, de grands changements, je dis bien des changements de structures. Si on regarde votre mémoire, vous parlez souvent de structures et vous parlez un peu moins de la qualité de l'enseignement. Je sais bien que le directeur général, M. Paradis, a parlé beaucoup de la qualité de l'enseignement. Tout cela est la préoccupation des enseignants et c'est...

M. Chagnon: Bien non!

M. Champagne (Mille-Îles): Bien oui, justement, je lui en donne le crédit. C'est la préoccupation des enseignants et c'est aussi la préoccupation des parents. Si vous êtes pour le changement, comme vous le dites...

M. Chagnon: Ce n'est pas moi qui le dis, c'est vous.

M. Champagne (Mille-Îles): Vous avez dit que vous étiez pour le changement...

M. Chagnon: Et je l'ai répété.

M. Champagne (Mille-Îles): ...que vous étiez pour la création de commissions scolaires linguistiques; que, pour ce qui est de la confessionnalité, vous étiez dans une espèce d'évolution. Vous êtes pour l'intégration. Si on refait rapidement l'historique de l'évolution du système scolaire, on s'apercevra qu'il y a eu la création, dans les années soixante, d'un ministère de l'Éducation et la fédération était contre.

M. Chagnon: Pardon? Nous étions contre en 1960?

M. Champagne (Mille-Îles): Oui, la fédération des commissions scolaires était contre. On a vu tout un battage publicitaire autour de la création du ministère de l'Éducation. En 1973, il y a eu la loi 27 qui formait les comités de parents, et il y avait beaucoup de réticence. En 1979, il y a eu la loi 30 qui donnait un siège aux parents au niveau de la commission scolaire; ce fut un tollé. Je pense qu'aujourd'hui vous pouvez faire la preuve que les parents sont très utiles au niveau de la commission scolaire. Vous étiez contre la loi 30; vous étiez contre la loi 71 et, aujourd'hui, vous êtes contre la loi 40. Aujourd'hui, vous acceptez le ministère; vous avez accepté la loi 27; vous acceptez aujourd'hui la loi 30 et vous arrivez cet après-midi et vous demandez la loi 71. Vous étiez contre et, actuellement, vous l'acceptez.

Je me demande si, dans quelque temps, vous ne direz pas que vous êtes capables de vivre avec la loi 40. C'est une bonne loi. La fédération a un esprit conservateur. Je n'ai pas dit que vous étiez des conservateurs; j'ai dit que la fédération avait peut-être un esprit conservateur. Ne pensez-vous pas, M. le président, que, dans l'ordre normal des choses, dans l'évolution qui fait que les gens veulent une école pour la communauté, pour eux, dans leur milieu, on arrive à l'aboutissement normal avec les comités d'école que propose la loi 40? C'est ma question, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Mille-Îles, j'ai cru comprendre que votre intervention suscitait quelques réactions de la part de M. Chagnon.

M. Chagnon: Je suis un peu confus d'apprendre en même temps que nous sommes en faveur du projet de loi 40 et conservateurs. Doit-on penser que, pour être en faveur du projet de loi 40, il faut être conservateur?

M. le Président, je voudrais rementionner que la partie - c'est une partie importante - qui nous apparaît être l'objectif logique, l'organisation logique du projet de loi, c'est qu'il est un projet parental par rapport à un projet "sociétal". Vous nous avez parlé des années soixante. Dans les années soixante - je fais partie de la génération qui en a profité, je suis un finissant de l'école publique, un finissant de l'école polyvalente - la société s'est entendue pour qu'on démocratise l'éducation. La société s'est entendue pour qu'on la rende gratuite. La société a mis en place des structures pour accélérer le mouvement et la société a financé l'investissement depuis 1960 jusqu'à aujourd'hui.

Ce qui est rebutant dans le projet de loi, c'est qu'il donne un contrôle au niveau parental. Ce n'est pas un mauvais niveau, mais c'est une partie de la société par rapport à un projet "sociétal", qui est celui qu'on défend. Un projet "sociétal" ramène un pouvoir, que nous souhaitons de plus en plus grand, de la société au niveau même de la gestion de ses commissions scolaires, par l'augmentation de pouvoirs, par l'augmentation de responsabilités - on mentionnait tout à l'heure quelques sujets -par l'augmentation de son pouvoir de taxation, etc.

L'école, dans notre esprit, est intimement liée à la commission scolaire qui, elle, est contrôlée par l'ensemble des membres de la société. Dans notre esprit aussi, l'école n'est pas un lieu de pouvoir. C'est un lieu qui fonctionne en corrélation avec la commission scolaire, c'est un lieu de concertation, pour nous, et les différents agents dont on parle permettent de la rendre communautaire avec la commission scolaire qui, elle, constitue le bassin de la communauté.

Le projet donne un contrôle au niveau parental. C'est un concept, sauf que, dans la société scolaire, encore une fois, même s'ils sont une partie, une composante importante, les parents ne forment pas l'ensemble de la communauté. Et si l'école, qu'on veut rendre communautaire et responsable, part déjà sur de mauvaises prémisses quant à son rôle communautaire, quant à sa légitimité communautaire, elle subit une entorse profonde quant à sa légitimité par rapport à un projet "sociétal".

M. Champagne (Mille-Îles): M. le Président, il faut avoir vécu comme enseignant dans une école et aussi comme membre d'un comité d'école pour savoir jusqu'à quel point les enseignants et les parents membres du comité d'école sont limités dans leur action. Ces personnes, qui font partie du comité d'école, voudraient se donner des moyens éducatifs propres à leur milieu aussi simples que des activités parascolaires, peut-être l'occupation des locaux en fin de semaine ou une garderie. Je vous garantis que j'ai eu à négocier, simplement dans l'école de mon patelin, pour donner un service de garde parce que les parents le demandaient. C'était presque quelque chose d'impossible, malgré les efforts surhumains. C'est comme si on ne faisait pas partie de la communauté; on voulait se donner des services et on n'en avait pas les moyens.

C'est devant ces frustrations que parents, enseignants, directeurs d'école et étudiants ont demandé un certain pouvoir. Dans le projet de loi 40, ce ne sont pas des pouvoirs exorbitants qu'ils auront, les parents qui veulent s'impliquer dans le milieu et se donner des services éducatifs spéciaux. C'est pour ça qu'on en arrive, dans cette évolution, cette transformation de la société au niveau de l'éducation, à dire: Pour avoir une école à notre image, il faut avoir certains moyens. Il y a certaines commissions scolaires qui le font et je ne vois pas pourquoi vous n'embarquez pas là-dedans. Avant-hier, nous avons entendu la commission scolaire de Jacques-Cartier qui décentralise même le budget pour aller aux écoles. Je ne vois pas pourquoi vous ne feriez pas un effort dans ce sens pour le plus grand bien de l'école.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais tout simplement souligner ceci: Je disais tout à l'heure que j'étais président d'une commission scolaire et que nous faisions déjà tout ce que vous nous avez dit dans notre commission scolaire. Nous avons ouvert des garderies dans des centres de jour d'éducation des adultes. L'éducation des adultes, on n'en parle pas beaucoup, mais c'est un développement communautaire.

Vous avez parlé du rôle des enseignants, vous avez parlé d'un enseignant qui vit dans une école. M. Paradis a eu la chance d'avoir une vaste expérience: il a enseigné à l'élémentaire, au secondaire, il a été directeur d'école à l'élémentaire, au secondaire, il a été directeur des services pédagogiques à Québec avant d'être directeur général de la commission des écoles catholiques de Québec. On pourrait peut-être demander à M. Paradis de nous faire part succinctement de ce qu'il a vécu.

Le Président (M. Blouin): Succinctement, suivant les conseils de votre président, M. Paradis, s'il vous plaît!

M. Paradis (Fernand): M. le président, je commenterai brièvement vos propos. Au cours des dernières années, nous avons relevé des initiatives qui ont été prises par les commissions scolaires dans le cadre actuel, et cela s'est déroulé au cours d'années difficiles. Les dernières années ont été

marquées par de la dépopulation dans les commissions scolaires, par des difficultés économiques qu'on a rencontrées dans le système comme partout ailleurs. On a également eu des climats perturbés à cause de négociations laborieuses, très très difficiles. Malgré tout cela, les commissions scolaires ont réussi à donner les services que vous venez de mentionner. Il y a certainement eu des réticences dans certains milieux pour des raisons qu'il est difficile de juger comme cela, de loin, mais il faut reconnaître que, avec les moyens dont on disposait à l'époque, on a réussi à mettre en place exactement les services que vous avez évoqués.

Est-ce qu'il est nécessaire de tout chambouler, d'avoir des distributions de pouvoirs dans les écoles pour permettre des choses qui se font, qui se sont faites, qui sont inscrites dans des trajectoires déjà existantes? Pourquoi faut-il, encore une fois, légiférer? Pourquoi faut-il encore que le gouvernement intervienne auprès de petites unités? Est-ce vraiment une nécessité? Est-ce qu'on ne serait pas mieux - c'est la proposition de la fédération - de responsabiliser pleinement les commissions scolaires, de les rendre comptables au maximum de leur administration et d'établir des jeux de pression, de forcer les dialogues à l'intérieur des commissions scolaires plutôt que d'intervenir, encore une fois, par-dessus la tête des commissions scolaires?

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Paradis.

M. Champagne (Mille-Îles): Un dernier commentaire. On a entendu hier les comités d'école, les comités de parents. Eux aussi voulaient avoir certaines responsabilités, avoir les moyens de donner de bons services et une qualité d'enseignement à leur communauté. C'est pour cela qu'ils étaient favorables à la loi 40 et je suis content de voir que vous êtes aussi favorables à une très grande partie de la loi 40. Merci.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Mille-Îles. Sur ce, j'invite maintenant le dernier intervenant, le député de Saguenay, à s'adresser à nos invités. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer les gens de la fédération et mes nombreux ex-collègues qui sont ici aujourd'hui. J'aimerais saluer d'une façon spéciale les gens des commissions scolaires qui ne sont pas ici, mais qui auraient aimé être ici, particulièrement les gens de l'Abitibi, de la Gaspésie, de la Côte-Nord et du Lac-Saint-Jean. J'aimerais leur dire notre déception, quant à nous, du côté de l'Opposition, qu'il ne nous ait pas été permis de les recevoir ici.

M. le Président, j'aimerais féliciter la fédération pour son mémoire, un excellent mémoire. Je pense qu'il est beaucoup plus constructif que certains mémoires, beaucoup plus constructif, en tout cas, aux fins de la discussion à cette commission, que certains mémoires qu'on a entendus tard en soirée hier, M. le ministre.

J'aimerais aussi, avant de tomber dans les questions...

Le Président (M. Blouin): Tombez donc, M. le député de Saguenayl

M. Maltais: ...relever un petit fait que le député de Vachon a apporté ce matin. Je pense qu'il n'est pas tout à fait exact. Vous avez parlé de l'octroi de certains contrats aux commissions scolaires depuis que vous avez institué Rosalie. J'aimerais savoir ce que Rosalie pense du dernier contrat à Comterm-Matra.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Saguenay...

M. Maltais: Voici mes questions, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): ...Rosalie n'a pas été invitée à participer à nos travaux. Alors, je vous demande donc de poser des questions...

Mme Lavoie-Roux: Mais on a le ministre de l'Éducation qui peut répondre.

Le Président (M. Blouin): ...à nos invités pour que nous concluions avec l'étude de ce mémoire.

M. Maltais: C'était pour rétablir les faits, M. le Président. Alors, il y a bien d'autres Rosalie.

M. Payne: Tout à fait en conformité.

M. Maltais: La première question que j'adresse au président de la fédération: J'aimerais savoir de quelle façon, étant donné que les commissions scolaires au Québec sont reconnues depuis plus de 100 ans comme étant les principaux agents de l'éducation au Québec, elles ont été invitées par le ministre à collaborer, à travailler au projet de loi 40.

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon. (16 h 30)

M. Chagnon: Avant le dépôt d'un livre blanc sur la restructuration scolaire - c'était avant mon passage à la fédération - la fédération avait déjà demandé de travailler en collaboration, en "partnership" avec le ministère. La fédération a appris, comme

tout le monde, par le biais des médias, le dépôt à venir d'un livre blanc, le dépôt à venir d'un projet de loi et le dépôt à venir d'une carte scolaire, vers le mois de février 1982. Cela n'a pas été trop bien reçu dans le monde scolaire, vous vous l'imaginerez un peu. Le livre blanc est sorti au mois de mai 1982. J'ai eu d'assez nombreuses rencontres avec le ministre de l'Éducation sur le sujet. Je ne pense pas que ni l'un ni l'autre n'ait convaincu l'autre. Il y a eu depuis ce temps des échanges épistolaires aussi entre le ministère et la fédération.

M. Maltais: Est-ce que la fédération a offert de collaborer?

M. Chagnon: Oui.

M. Maltais: Quelle réponse avez-vous eue?

M. Chagnon: Je pense que les services du ministère de l'Éducation ont produit tout ce que l'on connaît sur le livre blanc.

M. Maltais: Merci. Contrairement à beaucoup d'autres intervenants qui sont venus ici - ils avaient une peur bleue, personne n'osait prononcer le mot enseignant, même le ministre était réticent quand on prononçait ce mot-là, je ne sais pas pourquoi - vous avez souligné de façon bien précise dans votre mémoire le rôle de l'enseignant à l'école. Moi, j'aimerais que vous spécifiiez davantage le rôle d'un enseignant de la façon dont vous le voyez présentement et de la façon dont le ministre veut le voir dans l'avenir.

M. Chagnon: Le rôle de l'enseignant à l'école, je le caricaturerais un peu. Vous excuserez l'expression caricaturer. Des personnes nettement plus âgées que moi parlent de leurs enfants qui ont mon âge et qui enseignent en disant de ces enfants qu'ils "font" l'école. C'est la conception d'une autre génération peut-être que de voir l'enseignant "faire" l'école. Mais, en 1984, au moment où on se doit d'humaniser le plus possible les services d'enseignement à l'élève et les relations entre l'élève et le professeur, je pense qu'il faut regarder cette conception du maître qui fait l'école davantage. C'est dans cette relation, c'est pour cette raison qu'on ne peut pas, d'abord comme employeurs, laisser agir nos employés enseignants à des niveaux finalement très secondaires, jeu qu'ils pourraient faire au niveau d'un conseil d'école dans une structure comme celle qui nous est proposée. Nous estimons que les enseignants doivent travailler en collaboration et de pair avec les parents et, au niveau secondaire, avec les élèves, les représentants des élèves pour, justement, créer dans l'école ce lieu de concertation. Cela nous apparaît fondamental. Sans cela, on va se casser la figure.

Les enseignants se doivent d'être intégrés dans ce réseau. De ce temps-ci, évidemment, c'est un peu difficile. Les enseignants ont mal à l'âme mais il faut être capables de récupérer nos enseignants. Ce qui intéresse les enseignants, c'est l'acte éducatif. C'est comment on enseigne, comment on transmet des connaissances, avec quelle habileté pédagogique on le fait. Voilà notre réflexion en ce qui concerne les enseignants.

Je pourrais peut-être souligner, pour revenir à votre première question, qu'après le dépôt du livre blanc le ministre de l'Éducation avait dit: Je suis prêt à changer des modalités dans mon livre blanc, mais pas les principes. Évidemment, cela rendait un peu plus difficile la lecture et la réflexion à faire sur les principes de fond du projet de loi. Une offre d'association - on en avait discuté ensemble au mois de décembre 1982 - risquait de nous amener pas très loin sur le plan du travail parce qu'on ne voulait pas être embrigadés dans un système où on n'aurait pas un certain contrôle des événements, nous aussi. Nous voulons partager ce contrôle, nous ne voulons pas nous faire manger tout ronds. Nous devons avouer que le "partnership" est un peu difficile quand on fonctionne et qu'on risque d'être mis de côté n'importe quand, dans n'importe quelle situation.

M. Maltais: Nos prédécesseurs, surtout les comités de parents, ont parlé beaucoup du projet éducatif, mais très peu ont parlé des programmes pédagogiques. Tout à l'heure, vous avez souligné une chose, M. Paradis, qui m'a chicoté, parce que les programmes pédagogiques sont prévus pour X temps d'avance. Advenant le fait que la loi 40 soit adoptée, est-ce que les programmes pédagogiques seront remis en cause, ceux qui sont échelonnés pour les années à venir, comme vous l'avez dit tout à l'heure?

Le Président (M. Blouin): M. Paradis.

M. Paradis (Fernand): M. le Président, si vous le permettez, je rappellerai, mais très brièvement, qu'il risque d'y avoir un embouteillage assez sérieux en 1985, étant donné la multiplicité des mesures qui devraient être remises en vigueur dans le réseau scolaire. Bien sûr, on peut se donner bonne conscience en disant: II est en application. Mais il faut vérifier la qualité de son application. À mon avis, de ce côté, il faut être très vigilant. C'est la quantité des mesures qu'on prévoit pour ces années qui me semble faire problème.

M. Maltais: II y a aussi une chose: les

parents nous ont dit, et d'une façon très claire, que les commissaires d'écoles, une fois qu'ils étaient élus, avaient à trancher avec la réalité du quotidien vécu à l'intérieur de l'école. À la page 15 de votre petit mémoire, vous nous dites que si les milieux détiennent nombre de pouvoirs et de responsabilités, leur mandat devrait d'autant plus leur venir réellement du milieu. C'est dans le chapitre sur une commission scolaire démocratique. Est-ce que l'affirmation que les comités de parents ont émise ici toute la journée d'hier a pour vous une signification importante ou si vous croyez sincèrement que votre méthode prime sur celle que les parents nous prêchent?

Le Président (M. Blouin): M. Chagnon. M. Chagnon: C'est à la page 15?

M. Maltais: Page 15. "En effet, si les milieux détiennent nombre de pouvoirs, etc." C'est complètement à l'opposé de ce que les parents nous ont dit hier. C'est dans le milieu du premier paragraphe: "En effet, si les milieux détiennent nombre de pouvoirs et de responsabilités en matière scolaire, la population, etc." Cela va?

M. Chagnon: Oui, nous pensons que, si les commissions scolaires sont responsabilisées, elles deviendront plus attrayantes et, en même temps, on fera se développer la participation, par exemple, au moment des élections scolaires.

M. Maltais: Peut-être qu'on pourra y revenir. J'en ai une autre petite qui se rapporte à cela. Cela relève de l'étude du professeur...

M. Chagnon: Je pourrais juste préciser qu'il ne s'agit pas du petit mémoire, mais de la synthèse du mémoire.

M. Maltais: De la synthèse, excusez-moi. C'est dans l'autre, on va bien se comprendre. C'est celui écrit par le politicologue Vincent Lemieux, à la page 15, au dernier paragraphe. "Autrement, avec le système électoral déficient qui est proposé dans le projet de loi 40, on accrédite la thèse qui veut que le ministre de l'Éducation cherche à faire la preuve que les commissions scolaires ne peuvent pas fonctionner, pour se donner ensuite de bonnes raisons de les supprimer." Que pensez-vous de cela, vous autres? Ce n'est pas moi qui le dis, je cite le politicologue renommé.

M. Chagnon: Ce n'est pas nous qui le disons, non plus.

M. Maltais: Je veux savoir ce que vous en pensez.

M. Chagnon: II y a une autre chose que dit aussi M. Lemieux qui, soit dit en passant, n'est pas un illustre inconnu pour les gens qui travaillent dans ce genre de débat. M. Lemieux disait aussi: "Même si cela répugne aux penseurs de pensées enfermés dans leurs bureaux et dans les systèmes clos de leurs constructions réformistes, il ne nous semble pas opportun de vouloir tout changer en même temps."

M. Maltais: Quand on vit ici, M. Chagnon, on s'aperçoit qu'il a raison. Continuez.

M. Chagnon: M. Lemieux estime qu'un système électoral, pour qu'il soit vraiment démocratique, doit s'appuyer sur quatre principes. Le premier principe - ce sont les commissaires, dans notre cas - c'est que les gens doivent être élus au suffrage universel. Le deuxième, c'est que l'élection doit être significative pour les électeurs. Le troisième, le poids relatif des électeurs doit être comparable d'un endroit à l'autre. Le quatrième, les élus doivent être en mesure de représenter tant des intérêts locaux que des intérêts collectifs, des intérêts individuels que des intérêts collectifs.

Quand on parle de suffrage universel, on ne demande pas tellement autre chose que ce que l'on retrouve dans la Loi sur les élections dans certaines municipalités, qui a été adoptée par le gouvernement en juillet 1982, par exemple, les articles 11, 12, 13 et suivants. L'article 11 dit ceci: "Chaque district électoral doit être délimité de façon à ce que le nombre d'électeurs dans ce district ne soit ni supérieur ni inférieur de plus de 15% au quotient obtenu en divisant le nombre total d'électeurs dans la municipalité par le nombre de districts." On cherchait, à ce moment, à moderniser un système électoral, contrairement à ce que l'on retrouve dans le projet de loi 40. C'est dommage.

M. Maltais: Merci. Ce matin, le ministre faisait état de la publicité faite dans les journaux par la fédération des commissions scolaires. J'ai ici une coupure du journal Le Devoir de ce matin. Je vois un témoignage de Mgr Grégoire qui, à mon avis, pour la population et l'ensemble des Québécois, est beaucoup plus positif que certaines publicités gouvernementales concernant la relance économique. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Saguenay. Avant que nous terminions cet entretien avec nos invités, M. le député d'Argenteuil aurait une brève intervention à faire.

M. Ryan: Je voudrais, tout d'abord,

remercier les dirigeants de la fédération des commissions scolaires catholiques de la discussion qu'ils ont eue avec nous. Cela a permis de préciser les positions de fond qui sont un élément essentiel dans le débat actuel.

En terminant, je voudrais simplement souligner la très grande pertinence de l'étude qu'on a fait remettre aux parlementaires ce matin sur le partage des pouvoirs en vertu du projet de loi 40. Bien des questions qui ont été soulevées ici depuis trois jours trouvent des réponses dans cette étude, qui est une étude objective. Ce n'est pas une étude partisane, ce n'est pas une étude qui est faite pour servir uniquement à l'une des thèses en présence; c'est une analyse du projet de loi, d'un point de vue juridique, qui est très éclairante. Je voulais le signaler avant que vous partiez. C'est une addition que vous faites à la recherche que nous poursuivons ensemble, qui aura une très grande utilité.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député d'Argenteuil. Un dernier mot, M. le ministre.

M. Ryan: La même chose s'applique à l'étude de M. Lemieux, à mon humble jugement. Je pense que M. Lemieux a fait une étude logique du projet de loi. Je pense que le gouvernement devrait examiner sérieusement la conclusion à laquelle il arrive à la fin parce qu'il y a quelque chose au point de vue logique qui ne résiste pas très bien à l'examen dans la façon dont le gouvernement conçoit la représentation.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député d'Argenteuil. Un dernier mot, M. le ministre?

M. Laurin: Oui, avant de vous remercier, à mon tour, non seulement pour ce mémoire, mais également pour toutes vos réponses que j'ai trouvées très intéressantes, je voudrais revenir sur une question importante que vous a posée le député d'Argenteuil ce matin et sur la réponse que vous lui avez donnée. Le député d'Argenteuil vous demandait de lui signaler des cas précis où il était évident que le ministère ou le gouvernement augmentait ses pouvoirs discrétionnaires et réglementaires. Vous avez répondu par huit exemples: les articles 205, 242, 245, 306, 308, alinéa 3 et 309, alinéas 1, 2 et 7. (16 h 45)

Pourtant, quand je regarde ces articles, sauf un cas, il n'est aucun exemple parmi ces huit articles qui dénote une augmentation des pouvoirs discrétionnaires ou réglementaires du ministre ou du gouvernement. Très brièvement, l'article 205 traite de la nécessité pour la commission scolaire d'informer annuellement la population de son territoire des services éducatifs, ce qui ne relèvent, évidemment, pas du ministre. L'article 242: "La commission scolaire intègre dans son budget, comme dépense ou revenu, son déficit ou surplus." C'est le cas actuellement et nous l'avons, d'ailleurs, amendé pour que la commission scolaire puisse étaler son surplus sur un certain nombre d'années. Le déficit, c'est une chose différente parce que la gestion des deniers publics pose le problème autrement. L'article 245 traite du vérificateur. Il ne fait que reproduire la situation actuelle. On demande simplement au ministère de préciser les champs de vérification et c'est la commission scolaire qui effectuera la vérification.

Quant à l'article 306, c'est une amélioration par rapport à la situation existante. Jusqu'ici le ministre pouvait retenir la totalité des subventions et, maintenant, on lui donne la possibilité de diminuer le montant d'une subvention en cas de refus ou de négligence d'observer la présente loi et ses règlements, ce qui est une mesure beaucoup plus ponctuelle et suffisante.

Quant à l'article 308, alinéa 3: "déterminer les normes et les conditions d'acquisition et de disposition des biens et d'acquisition de services", ceci est fait dans la loi, mais actuellement le ministre détermine cela cas par cas, alors que dorénavant il y aura des normes et qu'il reviendra aux commissions scolaires de les appliquer sans aucune intervention du ministère si la commission scolaire applique le règlement.

Quant à l'article 309, 1°, 2° et 7°, l'alinéa 1 - j'ai eu l'occasion de vous le dire et je l'ai aussi dit au député d'Argenteuil -c'est pour établir les conditions et les modalités de consultation des parents pour la demande de reconnaissance confessionnelle d'une école. Cela découle du projet de loi, évidemment. Il n'était pas de l'intention du gouvernement d'assumer cette responsabilité, mais, après beaucoup de recommandations de la part du comité catholique, nous avons accepté d'assumer cette responsabilité afin que les normes et les conditions soient objectives et uniformes pour toutes les écoles.

Quant au deuxième alinéa, très important, il permet au ministre de déterminer par règlement les conditions de travail du personnel non syndiqué: il s'agit des cadres, des gérants, des directeurs d'école. Comme vous le savez, actuellement, c'est le gouvernement qui assume cette responsabilité. Dans le cas des protestants, c'est la fédération des commissions scolaires. Vous nous demandez de faire la même chose, mais, comme vous le savez, l'Association des directeurs généraux, des cadres et des directeurs d'école maintient sa demande,

qu'elle nous fait depuis plusieurs années, de laisser le gouvernement déterminer ses conditions de travail. Je ne dis pas qu'il n'y a pas une évolution possible dans l'avenir à ce sujet, mais il faudra probablement d'autres rencontres avant d'y arriver; le deuxième alinéa ne fait que reconduire la situation actuelle.

Enfin, quant au septième alinéa de l'article 309: "déterminer les normes de remboursement des dépenses des membres d'un conseil d'école", il y a eu un amendement à cet égard. Cette responsabilité a été remise aux commissions scolaires. Donc, il en découle que votre réponse ne dénote pas l'addition ou l'augmentation de pouvoirs à ceux que le ministre ou le gouvernement possède déjà.

Ceci dit, je voudrais vous remercier à mon tour, et bien vivement, pour ce que vous nous avez apporté. Comme je vous l'ai dit au début, nous continuerons d'examiner de très près non seulement votre mémoire in extenso, mais aussi les deux études que vous nous avez fait remettre. Comme le député d'Argenteuil nous y engage, nous y accorderons la plus grande attention.

Vous avez eu également l'obligeance de faire état des rencontres et des consultations que nous avons eues, et de l'offre que je vous avais faite de continuer ces discussions. Même récemment, comme vous le savez, nous vous avons invités à une réunion. Nous voulions étudier avec les autres partenaires du système d'éducation le problème de la décentralisation. Vous avez cru bon de ne pas répondre à notre invitation. Je comprenais parfaitement vos raisons. Je sais que ce n'est pas facile d'engager une discussion parce que vous êtes liés par la position officiellement adoptée en congrès par votre fédération, de même que nous, évidemment, maintenant que le projet de loi est déposé, nous avons quand même, comme je le disais déjà, un engagement à respecter du moins les principes qui sous-tendent le projet de loi. J'aimerais, quand même, que des efforts soient faits de part et d'autre pour qu'on continue de rechercher, du moins sur le plan des modalités, sur le plan des articles très précis opérationnels, les moyens d'effectuer des rapprochements le plus marqués possible entre vos positions et la nôtre. J'espère que ce sera possible dans les semaines ou les mois qui viennent.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre. En plus du député d'Argenteuil et du ministre et au nom de tous les autres membres de la commission, je remercie nos invités de leur très importante participation aux travaux de cette commission.

Sur ce, j'invite maintenant les représentants de la faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill à venir prendre place à la table des invités.

Nous pourrions suspendre nos travaux pour une minute ou deux.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

(Reprise de la séance à 16 h 59)

Le Président (M. Blouin): À l'ordre!

Mesdames, messieurs, je demande donc aux membres de la commission et à nos invités de regagner leur siège. La commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux. Comme je l'ai dit avant que nous ne prenions quelques minutes de détente, nous allons maintenant entendre les représentants de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill. J'invite tout de suite les représentants de cet organisme à s'identifier et à nous livrer le contenu de leur mémoire.

M. le député d'Argenteuil, s'il vous plaît! Allez-y!

Faculté des sciences de

l'éducation de l'Université

McGill

M. Smith (David): M. le Président, MM. les membres de la commission, mon nom est David Smith. Je suis le doyen de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill. J'ai deux collègues avec moi, à ma droite, Mme Moira Carley, directrice du Département des sciences religieuses et de philosophie en éducation et, à ma gauche, M. Donald Burgess, professeur du Département d'administration et de politique en éducation. Avec votre permission, je donnerai une introduction courte et, après cela, M. Burgess et Mme Carley donneront les autres points importants de notre mémoire.

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Smith: Nous vous remercions de l'occasion qui nous est donnée d'assister aux délibérations de la commission pour présenter notre mémoire sur le projet de loi 40. Nous voulons participer au processus, pas parce que nous sommes affectés ou touchés par ce projet de loi mais, parce que nous devons offrir notre point de vue critique sur les questions sociales importantes. Nous nous sommes efforcés de rester aussi objectifs que possible et ce, dans l'intérêt de l'enseignement au Québec. Notre mémoire a été approuvé par 98% des professeurs de notre faculté.

M. le Président, nous sommes convaincus qu'il existe en éducation, au Québec, un besoin de changement. Un certain nombre de problèmes donnent lieu de croire qu'il est nécessaire de modifier les structures de l'enseignement à l'heure actuelle.

La baisse des inscriptions dans les

écoles primaires et secondaires publiques et les restrictions budgétaires posent des problèmes d'ordre administratif et structurel dans bien des secteurs du système éducatif. D'une part, certains services font double emploi en raison de la division des structures et, d'autre part, on manque de services d'administration et de soutien suffisants à cause de la taille réduite et des ressources limitées de certains établissements.

Le clivage historique des structures entre catholiques et protestants n'est plus pertinent. Quoi que l'on pense de la religion et de ses rapports avec l'enseignement public, nous devons admettre que la complexité et la diversité de la société québécoise...

Le Président (M. Blouin): Un certain nombre de membres de la commission ont de la difficulté à suivre. Résumez-vous votre mémoire ou est-ce que ce sont des notes? Si j'ai bien compris, ce sont des notes préliminaires et ensuite, vos adjoints procéderont à la lecture du mémoire. C'est bien cela?

M. Smith: Oui, M. le Président, je lis les notes préliminaires maintenant.

Le Président (M. Blouin): Très bien, d'accord, allez-y. Je m'excuse.

M. Smith: Merci. Troisièmement, il faut assurer plus de cohésion entre les différentes politiques éducatives. Par exemple, il convient d'équilibrer la tendance centralisatrice des régimes pédagogiques par des structures stimulant l'initiative locale. Tandis qu'ici, on encourage les écoles et les communautés individuelles à façonner leurs propres projets éducatifs, là, on leur prodigue très peu d'encouragement et on leur offre encore moins de possibilités. Par conséquent, de nombreux parents, professeurs et autres, se sentent impuissants a influer sur ce qui se passe dans les écoles.

Quatrièmement, au Québec comme ailleurs, on se soucie de plus en plus de la qualité de l'enseignement primaire et secondaire. Cela concerne de nombreux aspects, non seulement les habiletés fondamentales, mais la culture générale, l'aptitude aux mathématiques et aux matières scientifiques, le développement culturel et artistique et les valeurs. Ce souci se manifeste par des mécontentements et des critiques et par une augmentation des inscriptions dans les écoles privées. On espère toujours, même si l'on n'y croit pas vraiment, que des changements de structures entraîneront des améliorations au niveau de la substance. Ces facteurs nous donnent à penser que tout ne va pas pour le mieux dans l'enseignement public au Québec à l'heure actuelle et que, même si des initiatives ont déjà été prises pour améliorer et développer des services éducatifs, des changements d'ordre structurel s'imposent toujours. M. Burgess?

M. Burgess (Donald): M. le Président, je propose de résumer en français, de la page 2 à la page 6. D'accord?

Le Président (M. Blouin): Très bien.

M. Burgess: Après avoir étudié le projet de loi 40, nous avons identifié quelques propositions que nous croyons positives et qui méritent notre appui. En conséquence, nous sommes d'accord avec les propositions suivantes: 1° Un aperçu détaillé des services éducatifs. 2° Les droits des parents et des élèves. Nous sommes d'accord avec les déclarations concernant le droit de tous les enfants à l'éducation publique et gratuite, le droit à l'enseignement religieux ou moral, le droit de choisir l'école dans certaines limites pratiques, le droit de recours au Protecteur du citoyen et les droits spéciaux des handicapés. C'est aussi important, croyons-nous, de déclarer le droit de chaque enfant au Québec à un enseignement suffisant et compétent aussi bien en français qu'en anglais. 3° Les écoles publiques et communes. 4° La participation des parents au façonnement des politiques scolaires. 5° Un mandat de cinq ans pour les écoles. Un tel mandat de cinq ans pour une école permettrait de stabiliser le système dans une certaine mesure et d'en corriger la planification à long terme. 6° Une mission élargie de l'école. C'est là un pas important dans la reconnaissance juridique d'une mission élargie pour l'école. Outre ses fonctions traditionnelles, l'école peut désormais assurer l'éducation des adultes, offrir des services à la communauté, offrir des cours d'éducation permanente et des garderies. 7° Plus d'autonomie pour les écoles. 8° Le statut linguistique des commissions scolaires. On a de bonnes raisons de vouloir établir un système complet de commissions scolaires francophones et de commissions scolaires anglophones au Québec. Le projet d'une division linguistique des commissions revêt surtout de l'importance pour les communautés anglophones. Elle permet le regroupement des anglo-catholiques et des anglo-protestants. Elle respecte la tradition protestante de la réglementation locale et cela renforce la capacité des éducateurs anglophones de fournir des services culturels et éducatifs importants. 9° Le suffrage universel. Il est impératif de maintenir le principe du suffrage universel. Les commissions scolaires

sont, du moins en partie, des organismes et des unités politiques de gouvernement local et les membres doivent recevoir le mandat de la communauté dans son ensemble et non pas seulement d'un seul secteur de cette communauté. 10° Pouvoirs pépadogiques des commissions scolaires. Bien que le projet de loi ne soit pas très clair sur ce sujet, les dispositions à cet égard semblent signifier que les commissions scolaires continueront d'être chargées de fournir aux écoles des services et des ressources. 11° Des commissions scolaires confessionnelles et dissidentes comme options. Ce ne sont pas les raisons historiques et constitutionnelles qui manquent pour conserver la possibilité de certaines commissions confessionnelles à Montréal et à Québec et pour maintenir le droit à la dissidence religieuse telle qu'elle est comprise dans la tradition éducative du Québec. 12° Système de mise en oeuvre efficace. La structure fondamentale d'une commission de mise en oeuvre dotée de comités linguistiques et d'un réseau de comités de mise en oeuvre dans différents territoires semble une bonne stratégie pour la mise en oeuvre de la nouvelle structure des commissions scolaires. 13° Une loi sur l'éducation plus cohérente. Le présent projet de loi est plus cohérent que la loi sur l'instruction publique qui existe. 14° Améliorations du processus d'élection des commissions scolaires. Le report des élections des commissions scolaires au mois de novembre, la prolongation de la campagne pendant une semaine supplémentaire et l'emploi de certaines des dispositions de la loi sur les élections constituent des mesures qui devraient permettre d'améliorer le processus électoral et la participation du public votant. 15° Commissions scolaires intégrées et réduction de leur nombre. Nous appuyons l'idée d'intégrer les commissions scolaires du secteur primaire aux commissions scolaires du secteur secondaire. En plus de faciliter le passage des élèves de l'école primaire à l'école secondaire, cela devrait également entraîner une amélioration des services et une réduction des coûts.

Mr. President, the brief is divided into two parts. We have delt now with essentially the major points of the first part of our brief.

The second part of our brief, which we entitled "Sujet de préoccupation" ou, in English, "Some of Our Concerns" are five in number. And I would like now to call upon my colleague, professor Carley, to deal with the first of our concerns which is about confessionality.

Le Président (M. Blouin): Mme Carley.

Mme Carley (Moira): M. le Président, Bill 40 proposes a number of important changes in the traditional relationship between religion and education in Québec. There is clearly great significance in the change from the confessional division of Catholic and Protestant school boards to a linguistic division. Those who support this change, including ourselves, argue that a simple Catholic-Protestant division of boards no longer respects the cultural and religious diversity of contemporary Québec society and that religious structures are no longer necessary in order to ensure the survival and quality of religious education in schools, where parents wish such an education.

There are a number of questions that may be asked about the confessional implications of Bill 40. Among them are the following: 1. Will the confessional situation be different in English language schools from that in French language schools? We believe that it will be. 2. Can a school be recognized as both Catholic and Protestant at the same time? Example: in a community where we have fifty-fifty population and both populations come up with an educational project, will they be able to work together in one school situation?

(17 h 15) 3. Will there be a variety of traditional and "evangelical" Catholic and Protestant schools with different but specific religious educational projects? One of the values of pluralism is that everyone has his or her right, but in a situation where everyone has the right, it is possible that elements come in that do not represent the community? 4. Will there be Greek Orthodox and Jewish educational projects and schools? 5. Who will have the right to dissent from language boards? Both Catholics and Protestants? May we then imagine six boards in the same territory? 6. How can the religious and moral rights of minorities be reconciled with the religious rights of the majority, especially when the school is the only one in a given area? 7. What will be the mecanism to determine the confessional status of a school? Which body will be consulted and what per cent of this body must vote in favour of the proposal?

These are questions that we would like to see addressed in the consultation on the law.

M. Burgess: M. le Président, I am going now to continue with the second, third, fourth, and fifth areas of concerns.

Now, on page 7 of the English version,

I do not think it is the same page in the French version. C'est à la page 8 pour la version française, c'est au sujet de nos préoccupations; la composition des membres de la commission scolaire. Si vous me le permettez, je propose de présenter ceci en anglais.

Le Président (M. Blouin): Très certainement.

M. Burgess: Our second area of concern is the issue of the school board membership in the election of school board commissioners. We have studied the proposal and we believe that there are a number of problems with the proposal to have one school commissioner for each constituent school territory and we would like to outline briefly at least five of those problems.

First. The definition of what is a school. In some schools, multi-confessional demands, and these may be far more important and common in the English community than perhaps they are in the French community, could well lead to two or more legally defined schools being established in the same building. As an example, we quote the present-day Dorval High School, which is protestant, and the John XXIII High School, which is catholic, operating on the two quite different boards, one Catholic and one Protestant, but operating together in the same school building. When it comes to the election of a commissioner for that school, have we got two schools here or have we got one? If we have only one school, then, is the commissioner going to represent the Catholic side of that school or the Protestant side of that school?

A second problem is the choice of school. In any given geographical territory or community, that will nearly always be more than one school for which an eligible voter may choose to vote; it is obvious that, in an any given community, there are both elementary and secondary schools, where does a voter decide that he is going to cast his right to vote. These parents have the choice where they wish to send their children, to which school they wish to send their children, in a family where several children are going to different schools, where do the electors cast their vote?

Third. Variations in school size. A commissioner elected by 200 voters for small elementary school will have the same legal powers as a commissioner elected by 12 000 voters for a large secondary school for example. Another point here is that there are always more elementary schools than there are secondary schools, approximately five or six elementary schools per high school, so that school commissioners representing elementary schools will always be able to outvote those representing secondary schools. We wonder whether that will be fair to the secondary schools.

A fourth area of concern is one of conflicting responsibilities for the "commissaires". Under the "projet de loi 40", a commissioner will be placed in the unenviable position of having conflicting responsibilities and divided loyalties, we submit.

In our full brief, we identify four such conflicting responsibilities. We suggest that the membership of the school boards be such that the mandate of the commissioners is clear and unambiguous.

A fifth problem with the proposal, as we now understand it, is that there will be considerable variations in the size of school board membership. The majority of the proposed new school boards will have more than 20 schools and thus will have more than 20 commissioners.

But, in some urban areas, school boards will have more than 50 schools and thus more than 50 commissioners.

Now, we suggest in our brief that a membership of a school commission composed to 50 or more elected representatives is perhaps far too many for effective operation of that school board in a democratic manner, because we suspect that the powers will be delegated to a small executive who will exercise the real powers and the commissioners elected from those schools who have to be on the executive will have far more influence than other members of the commission. We would like to suggest that school commissions be composed of a workable number of commissioners and we suggest that ten to fifteen members would be an ideal number and that any increase beyond this number would tend to turn the board into a debating society rather than a decision-making body. We note that the level of the individual school, "le conseil d'école" suggested that it not be more than 14 members. We suggest for the same reasons that is a for more workable number than what might be 50, 60 or 70 commissioners.

So, we recommend that the law be amended so that each school commission be made up of 14 members: one half - 50% -to be elected by universal suffrage by the population at large in order to represent the interests of the community at large and that one half of the commissioners - 50% - to be elected by members of school councils, "les conseils d'école", to represent the interests of the schools and their users.

Also we suggest that at least three of the school councils seats should be reserved to representatives of secondary schools; otherwise, as I have explained earlier, the number of elementary school commissioners will always outnumber the secondary school commissioners.

À la page suivante, la préoccupation no

3: Power of the Government and Ministry to regulate. We find no evidence of any new willingness to consult, of any... I must explain that this brief was written last summer. There may now be some evidence of more willingness to consult. But, in our brief, when we wrote it last summer, we found no evidence of any new willingness to consult, of any reduction in Ministry structures, of any decrease in Ministry manpower or of any formal or systematic mechanisms to ensure continuing cooperation and consultation among the partners in the educational enterprise.

The problem of over - centralization and of over - regulation continues to be of concern to us as we know it is of concern to many others. In other words, the exhortations given in the White Paper concerning a fundamental change in the modus operandi of the Ministry of Education appear to us to have been ignored.

We have a number of recommendations, M. le Président. Firstly, that clause 476 dealing with draft regulations on the Superior Council of Education be withdrawn. I would like to explain to members of the committee that, as we understand it, at the present time, new regulations are first submitted to the Superior Council of Education before being approved by the Government. As we understand the effect of article 476, it would have the result of the Superior Council of Education examining these proposed new regulations after - not before -they have been approved by the Government.

Secondly, we recommend that consultation among the partners - and by partners, we mean not only the ministry, the school boards and the schools, we would now add, I think, at least the fourth one which would be teachers - the consultation among the partners in the planning and decision-making processes be established and systematized.

Thirdly, we recommend that formal mechanisms for consultation and participation be established in the law.

Fourthly, we recommend that the Ministry of Education reduces the size of its bureaucracy and, then, in our brief, we have made a comparison between Ontario and Québec. We recommend that the Ministry reduces the size of his bureaucracy and, then, delegates some fields of activity to other levels, to other partners in order to permit - and I quote from the White Paper -all its partners in Education to fully carry out their responsibilities.

M. le Président, a fifth one that I would like to add is one area that directly affects the McGill Faculty of Education, concerning teachers' training. We ask that the law permits the universities and the teachers' associations to also be involved with the standards required for the certification of teachers.

Areas of concern number 4: division of powers and responsibilities. Firstly, we believe that there is some ambiguities in defining powers and responsibilities in the law. In our full brief, we indicated at least four examples of these ambiguities. Secondly, there appears to be no clear limits placed on the power of one of the partners. Thirdly, the powers granted to school boards appear to us to be both ill-defined and insufficient to enable them to play their roles as meaningful partners.

M. le Président, we believe that the powers granted to schools and to school boards, on the one hand, should approximately balance the powers held by the Ministry of Education on the other. We therefore recommend that all the partners in the educational enterprises be granted clearly defined authority and responsibilities in the law. We recommend that clear limits be placed in the law on the power of the Ministry of Education. Thirdly, we recommend that school boards be granted a number of meaningful responsibilities that are defined in the law. In our full brief, we indicate a list of what we would consider to be appropriated meaningful responsibilities for school boards.

M. le Président, finally, in this section, Bill 40, "le projet de loi 40" makes no reference to the fact that a linguistic school system, a linguistic school structure, a linguistic school division also requires, we believe, appropriate linguistic structures in the ministry of Education itself. (17 h 30)

We do not propose parallel linguistic structures throughout the ministry. This is not our intention to recommend the return to the times before the Parent's commission or before the "Révolution tranquille". What we do propose: That in certain fields, such as those concerned with curriculum and pedagogy, that there should be formal structures to deal with specific anglophone concerns.

We also recommend, Mr. President, that a member of the English-speaking community be appointed at the rank of associate deputy-minister to represent the interests of all English language educational institutions at a policy-making level. I think I speak in this regard on behalf of all of the English-language community, not just McGill.

Finally, areas of concern no. 5: The role of teachers and professionals. In our opinion, if there is one glaring omission in both the White Paper and in Bill 40, it concerns the role of teachers and of other professional educators. The proposed law appears to us to treat teachers and teacher associations as only marginal elements in the educational enterprise. This, we submit, is folly. Teachers are an essential element of

any formal school system. To downplay their contribution or to ignore them is to invite confrontation.

It is important, we believe, the principals and teachers retain the right to make decisions on all professional matters. We therefore recommend that the law make a clear distinction between politic, policy decisions of school councils and school boards on the one hand and professional decisions of principals and teachers on the other.

Finally, we recommend that a Curriculum Council be established, composed equally of teachers, other representatives of the educational milieu, including the ministry and of the general public. We suggest that the establishment of an independent Curriculum Council such as this with membership named by the institutions involved rather than by the Minister, would help to dissipate some of the concern and distrust that currently exist within the system. We believe that it would also help to restore the confidence and good will that is essential if our educational system is to move forward to meet the further challenges that await it.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci mesdames et messieurs. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, la Faculté des sciences de l'éducation de McGill jouit d'une excellente réputation. Je crois que le mémoire qu'elle nous a présenté aujourd'hui est à la hauteur de cette réputation. C'est un mémoire clair, nuancé, objectif et qui ouvre des perspectives aussi ouvertes que larges, en même temps qui se veut et qui réussit à être objectif en même temps qu'une analyse approfondie du projet de loi.

Évidemment, le résumé qu'on vient d'entendre ne donne pas justice au mémoire entier que j'ai lu avec le plus grand intérêt. Je veux donc féliciter les auteurs.

Je retiens que plusieurs raisons militent en faveur d'un changement des structures scolaires. Je pense que vous en avez saisi les principales raisons. Je me réjouis évidemment que l'accord de la faculté sur plusieurs éléments importants du projet de loi soit acquis. Il y en a quinze et je les ai bien notés. Je voudrais surtout m'arrêter aux "concerns", aux inquiétudes, par exemple, aux inquiétudes confessionnelles. On a posé sept questions au ministère; je n'aurai pas le temps aujourd'hui de répondre à ces sept questions, but I want to affirm to you that they are well taken and that we will try to make it a duty for us to answer them as adequately as possible.

Je voudrais me contenter de dire pour le moment qu'il y a actuellement - j'en suis bien conscient - des écoles qui reçoivent des élèves anglo-catholiques et des élèves anglo- protestants. Ces écoles existent par entente entre commissions scolaires catholiques et commissions scolaires protestantes. La loi 40 leur permettra de continuer d'exister puisqu'elle permet des ententes, le même type d'ententes que la loi actuelle. Je sais que cela ne répond pas entièrement au problème, mais il reste que c'est un élément qu'il faut considérer.

Si on veut regarder dans la boule de cristal, je ne veux pas présumer de l'avenir, mais il est très possible que ces écoles deviennent, non pas pluriconfessionnelles ou multiconfessionnelles mais plutôt non confessionnelles. Je voudrais vous faire remarquer à nouveau que la loi permet et permettra que l'enseignement religieux, catholique ou protestant, soit dispensé aux élèves catholiques comme aux élèves protestants et que la loi permettra aussi que des services ou d'animation pastorale ou d'animation religieuse puissent être dispensés, tout cela en vertu de la loi.

Il y a aussi un autre article qui permet à un conseil d'école d'intégrer les valeurs religieuses d'un groupe ou des groupes qui font partie de l'école. On peut donc penser encore une fois, si on fait un peu de projection, que cet article 31 permettrait à une communauté importante appartenant à une même confession religieuse, qu'elle soit juive, orthodoxe ou mahométane, de faire en sorte que leur école intègre les valeurs religieuses d'une confession particulière. Ceci pourra même permettre que le projet éducatif reflète les valeurs religieuses d'autres groupes dont les valeurs sont similaires ou rapprochées.

Je voulais aussi attirer l'attention sur une phrase du livre blanc qui n'est pas marquée dans la loi mais la loi ne l'empêcherait pas. Elle permettrait, là ou l'enseignement moral et l'enseignement religieux d'une religion est dispensé, que la marge de manoeuvre puisse être utilisée, si le conseil d'école en décide ainsi, pour l'instauration de cours additionnels se référant à une confession particulière donnée. Je sais que mes réponses n'épuisent pas les sept questions qui ont été soulevées mais je peux vous affirmer à nouveau que nous les étudierons avec attention et que nous essaierons de leur apporter la réponse la plus adéquate.

Quant aux autres inquiétudes, là non plus je ne pourrai certes pas, dans le temps qui nous est imparti, les couvrir entièrement. Je voudrais me limiter à un certain nombre de points. Vous avez été obligés de passer rapidement sur les raisons qui vous font opter en faveur de la division linguistique. Je voudrais vous demander quand même d'élaborer davantage votre pensée sur cette question et de nous dire les avantages que vous voyez, en tant que représentants de votre communauté, à l'établissement de

commissions scolaires linguistiques.

Deuxièmement, je voudrais vous poser une question sur les enseignants. J'ai vu une certaine impatience à cet égard dans votre mémoire. Je voulais vous proposer la formulation suivante. Actuellement, dans le système que nous connaissons, les enseignants ne sont nulle part; ils ne sont pas à la commission scolaire, ils ne sont pas à l'école en vertu de textes de loi et c'est précisément dans le projet de loi 40 qu'on améliore la situation. D'ailleurs, nous en avions parlé dans le chapitre III du livre blanc et d'une façon, je pense, assez éloquente. Nous en parlons dans le projet de loi 40 puisque nous disons que le conseil d'école pourrait être composé, si les enseignants le désirent, d'un certain nombre d'enseignants, un étant le minimum, mais ça pourrait parfaitement être davantage si les enseignants de l'école demandent que ce chiffre soit supérieur. Donc, ils pourraient, s'ils le voulaient, être dans ce conseil d'école. Nous disons "s'ils le désirent", parce que l'expérience des conseils d'orientation nous a montré que les syndicats d'enseignants pouvaient ne pas désirer et nous n'avons pas voulu les forcer à faire partie du conseil d'école, mais l'intention du législateur est qu'ils occupent cette place. Donc, ils seraient là au conseil d'école à siéger en collégialité avec les autres membres, le nombre étant ouvert à des décisions locales.

Deuxièmement, ils seraient présents aussi, pour la première fois, à une commission pédagogique formellement instituée. Là non plus on ne veut pas les forcer, mais c'est notre désir, notre souhait que les enseignants créent cette commission pédagogique et que celle-ci se prononce sur les treize ou quatorze points sur lesquels le projet de loi mentionne que les enseignants pourraient ou devraient être consultés. En plus, il y a certains points dans le projet de loi où on dit que la décision des enseignants est finale en ce qui concerne, par exemple, leurs méthodes d'enseignement, en ce qui concerne leur latitude ou initiative en classe.

Donc, je pense que, contrairement à la situation actuelle, les enseignants sont juridiquement, formellement présents à l'école. Est-ce qu'il faut aller plus loin? Est-ce qu'il faut, par exemple, dire que les enseignants devraient être égalitaires ou paritaires au conseil d'école? C'est une hypothèse que je n'ai jamais rejetée, mais, à la lumière du passé où les mots d'ordre qui avaient été donnés par la centrale avaient été suivis avec le fait que le conseil d'orientation ne pouvait pas fonctionner à cause de cette absence, il faut que le législateur s'assure que ce conseil d'école puisse fonctionner en toute éventualité, même si les enseignants décident de ne pas y participer. Mais évidemment, si nous avions les assurances, les garanties que les enseignants participeront à ce conseil d'école, je ne pense pas que le fait d'inscrire cette participation obligatoire dans une loi soit une garantie, puisque nous l'avons déjà fait et que cela s'est révélé ne pas être une garantie. Mais si nous l'avions, cette garantie, cette assurance, il serait possible alors de revoir à nouveau la composition du conseil d'école et de voir à un aménagement qui pourrait peut-être être plus précis en ce sens. Enfin, les enseignants sont présents dans cette possibilité d'organiser un organisme qui serait chargé de la préparation des programmes, de la production du matériel pédagogique, une initiative d'ailleurs qui ressemble un peu à celle que vous nous proposez. En fait, je voudrais vous demander ce que vous pensez de cette initiative possible que prévoit le projet de loi. Ce serait ma deuxième question. (17 h 45)

Ma troisième question porterait sur un sujet que vous n'avez pas mentionné, sinon indirectement, dans votre mémoire, c'est celui, précisément, du nombre des commissions scolaires anglophones au Québec. Nous voulons que tous les anglophones au Québec puissent non seulement étudier dans des écoles anglophones, mais dans des écoles anglophones qui relèvent de commissions scolaires anglophones. Nous n'avons pas voulu prendre de notre propre chef une décision à cet égard. Nous avons entendu des suggestions de la part de la communauté anglophpne et nous en avons reçu. Il a existé à un moment donné et je pense qu'il existe encore ce qu'on a appelé un groupe des sept, un "Group of Seven", dont vous faisiez partie, et qui était constitué de représentants importants de la communauté anglophone. Ce "Group of Seven" nous a proposé d'établir neuf commissions scolaires anglophones sur le territoire québécois. Nous ne pouvons pas inscrire cela dans le projet de loi. Mais, vous le savez, nous vous l'avons dit, nous avons accepté la suggestion du "Group of Seven" et, dans la carte électorale, la carte territoriale actuellement au stade d'élaboration, il y a neuf commissions scolaires linguistiques anglophones. J'aimerais savoir de votre part si, à ce chapitre, vous êtes satisfaits du découpage qui apparaît dans la carte territoriale que vous avez pu consulter.

Enfin, ma quatrième question porterait sur le suffrage universel. Vous êtes partisans du suffrage universel, mais, en même temps, vous nous proposez, à la lumière des critiques, d'ailleurs, que vous faites du système électoral qui apparaît dans le projet de loi, une modulation du suffrage universel selon laquelle 50% des commissaires seraient élus par les conseils d'école. C'est une suggestion qui nous a également été faite par le Conseil supérieur de l'éducation, par certaines commissions scolaires et par

d'autres groupes. Cependant, ce matin, la fédération des commissions scolaires s'est vivement élevée contre cette suggestion en disant que le suffrage universel est indivisible, qu'il se fonde et doit se fonder exclusivement, uniquement, sur le principe de la démocratie de représentation et ne tenir aucun compte de ce que d'autres appellent la démocratie de participation, c'est-à-dire participation de lieu identifié comme lieu de prise de responsabilité où participent les intervenants de l'école. En conséquence, la fédération des commissions scolaires maintient l'idée d'un suffrage universel tel qu'il existe^ actuellement.

Étant donné la réputation d'excellence de la faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill, je suis sûr que vous avez dû étudier les fondements juridiques ou démocratiques du vote, du suffrage, et j'imagine que vous y avez pensé, que vous aviez ces éléments présents à l'esprit quand vous avez fait cette suggestion.

J'aimerais bien que vous nous expliquiez davantage comment un mode de scrutin comme celui-là pourrait répondre aux objections qui sont habituellement faites et surtout comment, sur le plan démocratique, nous pourrions justifier un tel type modulé de suffrage.

Le Président (M. Blouin): M. Smith.

M. Smith: M. le Président, je veux référer cette question à M. Burgess.

Le Président (M. Blouin): M. Burgess.

M. Burgess: Merci, M. le Président. The first question concerns the advantage of linguistic school boards as we see it. It is extremely unfortunate, from our point of view, that the present structures of school boards divides the anglophone community. We are a fairly small community. We are a minority in this Province and yet our membership is divided between those who go the Catholic schools under the jurisdiction of Catholic school commissions and those who attend Protestant schools under Protestant school commissions, and we are very much in favour and this is not a new suggestion, Mr. President, because the principal of McGill University and other reprsentatives of McGill supported the idea of linguistic school boards as long ago as 1968 when it submitted a brief to the Premier of the Province, Mr. Jean-Jacques Bertrand, requesting linguistic school structures in the Province of Québec. So, this is not anything new, as far as McGill is concerned, and we have been working, McGill has been working quite closely with the so-called the "Groupe des sept" and we are all in favour of a linguistic school board structure. I might, if I can, explain that the "Groupe des sept" is composed of the major elements of the anglophone educational community. It includes the Provincial association of Protestant teachers, the Provincial association of Catholic teachers, the Québec association of protestant school administrators, the Québec association of English catholic (these are all anglophones), school administrators, the director general of the Protestant association of the Association of directors of English schools and his equivalence in the Catholic milieu, so, together with McGill University, the seven composed the "Groupe des sept". We have all endorsed the notion of linguistic school boards, and we have done this partly because our community is declining community in a numbers and partly because we feel that there are considerable advantages in bringing out our two communities together. At McGill, we can speak with some knowledge about this because, in 1970, the Teacher Training College for English Catholics was merged with the Teacher Training College for English Protestants. McDonald College St. Joseph came together into the form of the new McGill Faculty of Education. We have both worked very successfully together and I think that we have enriched each other, so that there are many reasons why we recommend the linguistic school board structure.

The second question concerns the role of teachers. Our real concern here, was on the proposed "conseil d'école", that teachers will be permitted at least one representative, if they wish, which was exactly the same formula, it seems to us, as the non-teaching staff of the schools, one, if they wish, the same number as the high school students, one, if they wish, and this was putting teachers into what is - we use the term marginal - "marginaliser" the teachers.

M. le ministre has indicated that there is a "commission pédagogique" possible in each school. But the real policy-making body of the school is not "la commission pédagogique". The policy-making body of the school is the "conseil d'école", on which the teachers may not even be represented at all. Speaking only in this case for the anglophone community, I think that there is a change of attitude since the teachers did not participate in the orientation committees of 1975. I suggest that you ask the PAPT and the PACT directly when they come to this committee if they have changed their minds, because I believe they have. I think it is the wish of teachers to participate fully on the "conseil d'école", even mandatory, not just voluntarily, and we would suggest that their number be increased at least to three or four representatives.

M. le ministre made reference to a nonprofit organization for the preparation of teaching materials in text books and so on.

We would support that but we would suggest that its mandate be enlarged to develop curriculum, not just produce the didactic material of the text books or whatever films, strips or audiovisualaid or whatever... but to design curriculum, to develop curriculum to take that curriculum to the Minister for his approval, but not that fonctionnaires in complex G or the ones who are designing curriculums. Let the professionals in the educational sector, the teachers and professors of universities and other people be involved in the development of curriculum. In that sense, we suggest that educators need to play full a role in the educational mission.

On other point. It is not clear to us at all whether that the curriculum responsables and the curriculum consultants that presently are available to schools from the school boards whether those new school boards will continue to provide that sort of service. We believe that when we come to talk about the quality of education, it is not only the teachers in the school, but it is also the support services and the support personnel, such is curriculum "responsable" and others. These now are provided by the school boards and we can not see in the law whether or not school commissions will continue to be able to provide that sort of services which we think is essential if you are going to improve the quality of education in the schools.

Your third question concern the "Groupe des sept". I have made reference to the composition of that group, but the question was specific in terms of the territories of the proposed new school commissions. I can not speak about the territoires francophones, mais simplement les territoires anglophones. Le Groupe des sept a proposé neuf commissions scolaires anglophones: trois sur l'île de Montréal et six en dehors de l'île de Montréal. La proposition du gouvernement, comme je la comprends, est de créer treize commissions scolaires anglophones: trois sur l'île de Montréal, comme l'a suggéré le Groupe des sept et dix en dehors de Montréal.

Our concern here is whatever the number, that they be viable, that they are able to provide the level and quality of service to those populations, anglophone populations. We realize that there is a problem with small numbers in Gaspé or in Saguenay-Lac-Saint-Jean wherever. We suggest that six school commissions out of the Island of Montreal would be a viable number. I think that the position of the "Groupe des sept" would remain the same that we would still propose: three on island and six off island. But I think that it should be consultations with local communities and if there are good reasons for local communities to have their own shcool board, even though it would be small, if someone, and I do not know who, would guarantee that the level of services that those children receive would be the equivalent of those in the largest school boards, then, I do not think we need to argue too much about the actual number, whether it be six or ten.

Le Président (M. Blouin): D'accordl Le quatrième point?

M. Burgess: Le quatrième point is about the proposal that a school commission be composed of seven members elected by universal suffrage and seven members elected by school council. The Minister asked how we would justify that and what was the philosophy behind that. Very briefly, I am aware of the time as you are, M. le Président, we believe that schools primarily serve two groups: society at large and the children who attend those schools. That would be our position. The schools primarily have two major functions: to serve children and their uses of the school, on one hand, and to serve the interest of the community at large, of the society at large.

That is why we would suggest that school commissioners represent these two different interests, one interest being the society at large, because they are paying taxes, eitheir school taxes directly or income taxes, and have a right to be consulted and a right to have some say in how schools are administered. Thus we would suggest the universal suffrage and the formula of seven members appointed by universal suffrage at large. But there is a problem. The number of people who turn out for school board elections, as we all know, is unfortunately not great. Those are the fact, we must accept that. We must also accept that the people who are most directly implicated are the parents and the other youths of the school. That is why we would recommend that the other seven members be elected by the users of the school through... There are various formulas for doing this and I am aware that the groups are going to make similar suggestions. But this "moitié-moitié" 50%-50%, we feel, would meet the present needs or meet some of the problems of the present situation.

Le Président (M. Blouin): Cela va? Alors, M. Burgess...

M. Smith: May I just add a comment?

Le Président (M. Blouin): Très rapidement, parce que nous devons suspendre nos travaux. M. Smith, aviez-vous autre chose? Mais nous pourrions terminer cette séquence qui donne suite aux questions du ministre. Si vous voulez prendre la parole quelques brèves minutes pour compléter la

question.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, si vous leur disiez qu'ils reviennent, peut-être qu'ils...

M. Smith: If I may just be permitted to add some information to question 2 concerning the composition of school councils that the minister ask about. I think I would like to emphasize that we agree with a greater participation of parents, but that the increase of membership of teachers on such a council would bring important expertise to that council in the formulation of policy and also would help to improve communications between the council and the teachers in the school and, perhaps, improve the implementation of the policy in the school. Thank you.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Merci. Sur ce, la commission... Oui, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: Oui. Vous alliez ajourner?

Le Président (M. Blouin): J'allais suspendre.

M. Ryan: Je vous ai saisi au vol. Le Président (M. Blouin): Oui.

M. Ryan: Je voudrais vous faire une suggestion à la suite d'une proposition que m'avait faite tantôt le député de Fabre. M. le député de Fabre avait proposé que tout en suspendant à 18 heures nous essayions de reprendre les travaux à 19 h 30 étant donné qu'en plus de compléter la rencontre avec le groupe de McGill il y a deux autres groupes qui doivent venir. Nous serions intéressés à procéder de cette manière.

Le Président (M. Blouin): S'il y a consentement... Je comprends qu'il y a consentement. Nous suspendons donc nos travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

(Reprise de la séance à 19 h 40)

Le Président (M. Blouin): La commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux. Sans plus tarder, j'invite le député de Chauveau à adresser la parole à nos invités.

M. Brouillet: Excusez-moi, ce ne sera pas très long. Je vais sortir tous mes papiers.

Alors, messieurs, madame, c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai lu votre mémoire et que j'ai écouté l'exposé que vous en avez fait. Moi aussi, je partage l'opinion des autres membres de cette commission. Votre mémoire est vraiment un apport considérable pour la réflexion de notre commission. Il est dégagé de toute position trop monolithique. On voit que vous faites une réflexion très objective de l'ensemble de la situation et que vous avez traité chacun des aspects de la question à son mérite. Vous apportez, sur ces points, un éclairage et des considérations qui sont vraiment précieux pour nous.

Je vais m'en tenir simplement à quelques points. Je vais aborder le problème de la répartition des pouvoirs. Vous nous affirmez qu'il est important que les pouvoirs soient bien définis et bien délimités entre les différentes instances. Je vois que vous confirmez, dans votre mémoire, le bien-fondé de reconnaître à l'instance de l'école un certain nombre de pouvoirs de décision. Vous êtes d'accord avec cela. Vous reconnaissez, je. crois, au début, dans vos principes, qu'il convient que la commission scolaire ait aussi des pouvoirs et que le ministère ait des pouvoirs. Vous êtes pour une décentralisation des pouvoirs du ministère vers les commissions scolaires mais vous êtes aussi pour une certaine décentralisation des pouvoirs qui, actuellement, sont dévolus à la commission scolaire. Vous êtes pour une certaine décentralisation de ces pouvoirs, vers l'école.

Vous traitez aussi du principe du suffrage universel, que vous voulez maintenir. Je voudrais vous poser une question sur ce point-là. Il y a des groupes qui sont venus devant nous, ils se sont appuyés sur le principe du suffrage universel pour refuser à toute personne qui ne serait pas élue par le suffrage universel quelque pouvoir de décision que ce soit quant au système scolaire. De façon très concrète, au nom du suffrage universel, on ne veut pas que des parents qui auraient été élus par d'autres voies que le suffrage universel puissent exercer un pouvoir de décision au niveau de l'école. Pensez-vous que l'on peut vraiment, à partir du principe du suffrage universel, en déduire que toute personne qui ne serait pas désignée par ce moyen ne pourrait pas exercer un pouvoir de décision?

Le Président (M. Blouin): M. Smith.

M. Smith: I think, as professor Burgess has pointed out in his preliminary remarks, that the community consists of two classes of persons: one would be the population at large and the other would be the special interest group that is served by the school. The idea of universal suffrage would certainly represent everyone in the community at large, but experience in the Québec school elections has shown that very few people in fact do turn out, and that the

proposal that we have here is more of a compromise position. It is a compromise between the real interests of the parents and the students and the very broad interests of the community at large. I do not know if Professor Burgess ou Professor Carley would like to add anything to that answer.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Cela va? C'est bien. M. le député de Chauveau, ça va?

M. Brouillet: Si je comprends bien, pour vous, même si on reconnaît le principe du suffrage universel, cela n'entraîne pas nécessairement l'exclusion d'autres modes de désignation de certaines personnes quant à un pouvoir de décision?

M. Burgess: M. le Président, right now, the school commissioners are elected by universal suffrage but, on each school commission, the parents also have the right for, I think, two representatives; one representing the elementary sector, one representing the secondary sector, in integrated boards, so that, in a sense, that principle of having two groups represented at the level of the "commission scolaire" is already accepted.

What we are doing, in effect, is expanding on that notion, but putting it in such a way that we retain the principle of universal suffrage, which I think is important to retain in a democracy. But also, when I think the intent of the White Paper was and that the criticism that was directed at the school commissions, in some respects, was the fact that they did not seem to be close enough to the communities that they served, well, I am not sure that I would necessarily agree with that statement, but, by having half of the members of the school commission directly elected by the users of the school, you would be requiring the school commission to be closer to the schools that they serve.

Now, I realize that this is a debatable point, because there are some who claim that it is universal suffrage or nothing, that universal suffrage has to be maintained. I think you should see our suggestion as a suggestion, as a form of compromise, that perhaps, we hope, would satisfy both the needs of those who support universal suffrage, on the one hand, and the needs to permit users of the school, particularly the parents, to be more directly represented on the school board. That exists presently with parent representatives, although they do not have the right to vote. This would give them the right to vote, and I think it would also make clear to the population at large that schools are not there only to serve parents. They also have a larger mandate, which is to serve the community at large, the society as a whole, and that is why we are in favour of our suggestion.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Burgess.

M. Brouillet: Très bien, je vois. Là, vous avez surtout centré votre exposé au niveau de la commission scolaire. Vous reconnaissez le bien-fondé de la présence de commissaires élus au suffrage universel pour représenter les intérêts de l'ensemble de la population et vous reconnaissez le bien-fondé de la présence, aussi, de parents qui seraient désignés par les conseils d'école, pour représenter les intérêts des usagers plus immédiats, si vous voulez, des services éducatifs.

Maintenant, il reste le niveau du conseil de l'école. Je pense que, sur ce point, vous dites que cela existe déjà en partie, sans que les membres aient le droit de vote; en tout cas, il y a des parents qui vont aux conseils des commissaires. Mais là, le problème se pose au niveau du conseil d'école. Reconnaissez-vous légitime qu'un conseil d'école où il n'existe que des gens non élus par le suffrage universel puisse quand même y exercer un pouvoir de décision quant à certains aspects de la chose scolaire, entre autres la dimension ou les matières plus strictement éducatives?

Le Président (M. Blouin): M. Burgess.

M. Burgess: Nous sommes d'accord avec la proposition d'avoir les parents au niveau des conseils d'école. I admit that they are not elected by universal suffrage, but they are elected by the parents, who are the most directly implicated in the educational process. But I would like to emphasize that, in the philosophy behind the bill, it would seem to us that schools are not there only to serve the children between age of five, six or whatever, but that the enlarged mandate of the school includes other activities in the community the possibility of "garderies", adult education, community activities of one sort or an other, so that another suggestion that I have heard is that the parents, the representatives of school councils who might serve on school commissions could, in fact, also be elected by universal suffrage. That is another suggestion that has been made. À criticism of our proposal is that this proposal gives certain people two votes: that, as citizens, they would have the right to vote for the commissioners elected by universal suffrage, and they would also have another vote to represent the interests of the schools directly. I believe that if there is sufficient consultation on this problem - and I believe that the Minister is open to these consultations - that perhaps a consensus can

emerge in which the interests of the various groups, the community at large, the interests of the schools themselves can be more effectively represented at the level of school commissions, I hope.

Le Président (M. Blouin): Merci, cela va.

M. Brouillet: Très bien, alors, je vous remercie.

M. Burgess: Merci.

Le Président (M. Blouin): Merci M. le député de Chauveau. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Alors, M. le Président, je remercie la faculté de l'éducation de l'Université McGill de l'excellente contribution qu'elle apporte à notre recherche commune. Je le félicite de cette recherche à deux points de vue: tout d'abord, parce que la faculté de l'éducation de McGill est l'un des rares organismes de niveau universitaire qui semble s'être intéressé concrètement à tout ce défi que représente le projet de réforme du système d'enseignement aux niveaux primaire et secondaire. Nous avons fait l'expérience dans une commission parlementaire, au mois de décembre, d'un travail autour d'un projet très important du ministère de l'Éducation; c'était le nouveau règlement des études collégiales, et je me souviens que, de ce côté-ci de la table, nous avons demandé à plusieurs organismes universitaires s'ils étaient intéressés à ce problème de tout le contenu des études au niveau collégial, mais aucun organisme universitaire, aucune grande université, aucun conseil réunissant les administrateurs ou les professeurs, n'a jugé que c'était assez important pour venir soumettre leurs opinions.

Dans ce cas-ci, je pense que vous êtes le seul organisme universitaire à le faire, à ma connaissance. Je vous en félicite avec d'autant plus de chaleur que vous ne vous êtes pas contentés de préparer un mémoire pour la commission, mais vous avez suivi le développement de cette question depuis le début. J'ai pu être témoin de réunions, j'ai eu l'occasion de vous rencontrer, lors des rencontres d'information dès le tout début de ce débat et j'ai pu constater que vous faisiez une contribution éminemment positive à la recherche qui se faisait. Je veux le souligner d'une manière spéciale. L'apport que vous avez fourni, en particulier au développement de l'idée de commissions scolaires à base linguistique et même à la confection d'un projet de carte scolaire tenant compte de cette proposition de base, était extrêmement constructif et je pense que - le ministre l'a dit lui-même tantôt - on n'a pas fini de ce côté-là. Nous voudrions qu'éventuellement ce soit inscrit dans la loi elle-même, mais, quand même, une bonne partie de chemin a été faite. Vous avez joué un rôle significatif à cet égard.

Le mémoire que vous avez présenté est très intéressant. Je regrette que nous n'ayons pas tout le temps voulu pour en débattre d'une manière très, très détaillée. Il faut aller à des questions essentielles et je peux vous assurer que j'ai lu, avec beaucoup d'intérêt, à deux reprises, le texte complet du mémoire. Je vous félicite surtout d'avoir réussi à préparer ce document, sans qu'on y trouve une trace de cette psychose d'angoisse qu'on trouve trop souvent dans des représentations qui viennent de milieux anglophones. Je pense que vous l'avez fait à la fois en votre qualité d'experts dans les questions d'éducation, de membres de la communauté québécoise et, franchement, on a l'impression qu'il n'y a absolument pas de trace là de ce sentiment d'"estrangement", d'aliénation ou d'angoisse qu'on trouve trop souvent en certains milieux. J'espère - je ne dis pas qu'ils ne sont pas justifiés parfois -que nous irons de plus en plus vers ce genre d'approche qui peut faire énormément pour rapprocher les uns des autres les Québécois, qu'ils oeuvrent dans le secteur francophone ou dans le secteur anglophone de notre société.

I think that I will put some questions to you in your language, not because you did not grasp very well the meaning of the questions which were put to you in French by my friends from the other side of this table, but because I think it is good that you should have a mark of the warm hospitality which is reserved for all people of Québec when they come here to testify before the House. And one mark of this hospitality is that we should take the liberty of addressing you in your language if we feel like doing it and if we feel it is going to put you perhaps a little more at ease to express your views on the subject under consideration.

I would have three questions which I would put to you in as a concise form as possible. I will not discuss the whole question of the powers of the Department of Education, because this matter was discussed rather elaborately this morning and we had a study tabled before this Commission by the Federation of Catholic school boards which is excellent and goes beyond all that we have seen until now from outside sources. So, I do not think it it will be an insult to you to suggest that there are other elements on which you may have perhaps some more immediate contribution to make, though I noted with great interest your general observations that, in this draft of legislation, there is little that announces any kind of substantial reduction of the actual authority of the Minister of the field of education. I

hope this remark will have been noted by the Minister and that he will come up, at some later stage, with an improved version of the present Bill.

My first question will be about the powers and the responsibilities, as you put it, which you would entrust to school boards. On pages 27 and 28 of your brief, you have a list of such responsibilities. You mention, among the meaningful responsibilities which should be entrusted to school boards, maintenance of local school taxation; distribution of funds and resources; management of pedagogical, administrative and support services; management of personnel; definition of curriculum; establishment of criteria and development of precedures for pupil evaluation; coordination and management of adult education, pupil personnel and special education services; standards for educational material; professional development programs, pedagogical research and curriculum development.

My question, in connection with this list of responsibilities, would be this: according to your reading of Bill 40, does this list conflict with what you saw in Bill 40 and what changes will be needed in Bill 40 in order to make it compatible with the suggestions which you offer in this part of your brief?

M. Burgess: Mr. President, I do not believe that Bill 40 does meet these particular requirements that we have indicated here. I should perhaps preface my remarks by saying that I appreciate your asking the question in English. Thank you.

Our major concern is number three on our list and particularly the management of pedagogical services, because it is not clear to us where these pedagogical services are going to come from. If this bill, in fact, is going to lead to greater autonomy for schools, then it is even more important than it is now, the schools will need support, pedagogical expertise and we cannot see in the bill any reference whatsoever to the type of pedagogical support that I referred to earlier, which is the curriculum responsables, the curriculum consultants. Where are the consultants, the social studies for history, for French as second language? Where is this expertise going to come from? We do not find it in Bill 40, and we would maintain that the quality of education is not only a function of the teachers in the schools, it is the function also of the support services that those teachers receive. If the school is going to be innovative in its "projet éducatif", it may very well need advice from competent trained professionals, and we do not know where they are coming from.

At the present time, school boards, the largest school boards provide those services to their schools. Bill 40 makes absolutely no reference, as far as we can see, to this professional expertise. What we would deplore would be that the only source of pedagogical expertise would be that supplied by the regional bureaux of the Ministry of Education. We state in our brief that there should be no single source of pedagogical expertise. We have in Québec the expertise available in the universities, present school boards, in the Ministry, I am not trying to exclude the Ministry. It is just that there is expertise available in our community - I mean our community at large, the community of Québec - and it should be utilized; and I do not see where it is in the bill. That is one area of concern. (20 heures)

In terms of the 5th item, definition of curriculum, within general objectives established by the Ministry of Education, I have no objection at all to a government, most governments in Western democracies establish the general objectives. Under our "régime pédagogique" that we are operating now, not only do we have the global objectives defined by the government, but we have the intermediate objectives, we have the specific objectives. I would maintain, Mr. President, that it is the role of the Ministry of Education to define the global objectives, but that it is far more effective, if the local communities, and, by this, I mean the school boards, define the intermediate or more specific objectives.

With reference to the next item concerning the establishment of criteria and development of procedures for pupil evaluation, I believe that these criteria are essentially established already with in the "régime pédagogique" and are not the responsibility of the school board. So, in those respects, I would suggest that those powers that we feel school boards can legitimately exercise, if they are to be real partners in the educational enterprise, are not guaranteed to school boards in Bill 40, according to our understanding of Bill 40.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: There is a lot more that I would like to discuss on this particular issue, but I wonder if it would be too much to ask of you to suggest that you might perhaps examine this part, of your brief more thoroughly and perhaps suggest some weaknesses that you see in actual provisions of Bill 40 and potential improvements. I think that it would be enlightening for this committee if you would be disposed to push this work a little farther in order to provide more light on this matter which appears to me to be central to our discussion.

There is a second question I have in

mind. It regards first the relationship of the school to the school board and through the internal life of the school. The government says that the cornerstone of the new edifice which they want to build would be responsible self-governing school. The key organ which they see for that purpose is the so-called school council. How do you see the role of that council, its composition, its functions as compared to those of the school principal for instance, to those of the school teachers? You say a basic distinction ought to be made between policy decisions and professional decisions. I would like you to provide some explanations on these aspects of your presentation.

M. Smith: Perhaps, Mr. Chairman, I just may make opening remarks and I may be followed up by professor Burgess.

I think we see that the main function, among the many functions of the school council, would be the development of overall policies for the school, the determination and reflexion of what the community values are - that the school is serving - and the formulation of a policy statement that will include the principal objectives for that school. The role of the principal and the role of the teacher on the other hand would be the interpretation or the translation of that policy statement into the pedagogical practices of the school and those would be, in our view, professional decisions that teachers would be able to make in the light of the overall policies. Mr. Burgess.

M. Burgess: Mr. President, I just might add that we already mentioned in terms of the composition of the school council that we feel that the teachers should be represented, not just on a voluntary basis, but they should be on that school council because we believe that anybody that is mandated to develop an educational project for the school, to determine the confessional status of the school and has other powers, will benefit from the advice and knowledge of the professional teachers involved. Now, I agree there is nothing to prevent the parents going and asking the teachers what they think. Here, by increasing the involvement of teachers on the school council, you are involving the teachers in the evolution of policy. So, we would very much support the notion of teachers being better represented on the school council.

With reference to the role of the principal, I think the role of the principal is going to have to change very drastically. Principals have tended to operate in many schools in a somewhat autocratic manner: this is their school; I think they are going to have to either undertake some form of retraining or some change of attitude in many cases to make themselves more responsive to the needs as expressed by the parents. I think the principals are going to be put in a very key position here and a very difficult position. I was once a school principal myself and I am not so sure that I would want again to be put into the position of serving so many different masters. I am not quite sure in the law whether I am to take my instructions from the school council or from the school board. That is an area of ambiguity, I think, in the law, because, on the one time, they are servants of the school council, on the other hand, they may receive other instructions from the school board. The school board is the employer, it is legally the employer, but, in fact, the school council, by two thirds majority, can decide to refuse the services of the school principal. The principal is put in a key position and a very difficult position. I think, however, you should perhaps ask the "Association des directeurs d'école" what they think of this proposal. I think the answer would be different from the francophone community than it is from the anglophone community, but that is what we think.

M. Ryan: I have a twofold question to some of my concerns. One of the key features of the bill is this concept of parental control, especially at the level of the school council. I would like to have your views on this concept as a working concept. Would it be a working concept? Could it function easily? Would it be acceptable according to your views of educational organization? Secondly, based upon your knowledge of conditions and trends in countries which are more familiar to us and closer to our traditions here, especially the United States, the other provinces of Canada and the United Kingdom - to return to the discussion we had yesterday - do you know of any such trend towards parental control in those countries?

M. Burgess: Not in those countries that you have stated, M. le député d'Argenteuil. I have however visited Australia and I know that in Australia there are some examples, particularly in the State of Victoria, where parents do have a similar sort of role to play but, to my knowledge, there is no similar arrangement in a public school system, because I would suggest that in a number of countries, and perhaps even here in Québec, the private school system could be, and sometimes is very much like this, that the parents who are the payers of the fees are the ones who select the school principal and, in effect, act as managers of the school. So, there are examples in the private sector and I am not aware of any similar arrangements in Britain or in United States, or in the other provinces of Canada,

where parents would have this sort of control. I think if the bill is passed and parents do end up like this, we should be setting a very interesting trend. No, other than in that State of Australia, I am not aware of any other example.

M. Ryan: You made a reference in your remarks to a scheme which is rather dear to our good friend the Minister of Education. He often says that private institutions provide a model from which he would like to borrow some of his inspiration in terms of search for quality and excellence in education. I would just like to add one light remark to what you said on this subject. Insofar as private institutions are concerned on the French side in Québec, I have had kids in those institutions and - I do not know, I still do, not at the moment - and I would like to insure you that parents have very little to say in the conduct of those institutions. You know, they are... I think they like to conduct their schools by themselves. They have enough faith in the excellence of the services that they provide not to bother themselves overly with the notion that parents should dictate what must happen in the school or should have a majority voice in the decision-making process there. But these are just remarks on the larger side. I do not want to open a controversy on this at this particular stage of our discussion, but I am glad you said that it may exist in private institutions in happier lands.

M. Burgess: M. le Président, if I could add...

M. Ryan: Send the Minister down to Australia.

M. Burgess: I would be happy to go with him, Sir.

M. Ryan: Yes. Well, we would need a witness.

M. Burgess: I wonder, Mr. President, if I could...

Mme Lavoie-Roux: You would go as a witness?

M. Burgess: ...if I could offer a supplementary...

M. Ryan: Mr. Payne must have provided the source of this...

M. Burgess: I wonder if I could offer a supplementary comment because your question really was - the serious part of it, Sir - concerned with the role of parents in the decision-making process. I think it is our view that no one group should be the sole determinants of school policy, whether it be parents or teachers, or school principals or whatever, because studies that we have made would suggest that when you put policy control into the hands of a single group, be it parents, be it teachers, whatever, their own agendas tend to be the important ones. We would suggest, and I think you will read this if you read our whole brief...

The general philosophy here is that there should be a sharing of responsibility, an involvement of the various partners and that control in the hands of any one group, ministry, teachers, parents can often be detrimental to the interest of the children themselves. I realize that this may not go down very well with certain parent groups, as some parents have very narrow views on what education of their children should be, but we think that it is the interest of those individual children that should be at the forefront, not necessarily just the views of the parents, or the teachers or the ministry or of any other single group.

Le Président (M. Blouin): D'accord, merci. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. I would like to thank the representatives of McGill Faculty of Education very much for their brief.

I am sorry that you did not have a chance to present your entire brief, because I think it is a very special view of Bill 40; it is a very balanced and dispassionate analysis that perhaps we will not hear from any other group. For that reason, it has a special credibility and I certainly hope that the Ministry heeds the points that you have made, the principles that you have raised, both positive and negative, and some of the concerns that you have raised that are very serious concerns and that, in some respect, are being swept under the rug, I think, by the Ministry of Education.

I would just like to follow this business of the parent role a little bit, as my first question. From what I have heard, particularly from what I heard yesterday from the "fédération des parents", I think that there is a very serious ambivalence coming out in the views of the parents, on the one hand, that they want to be involved more in what they call pedagogy. I think it is a legitimate demand. I think there is a bit of a semantic problem as to exactly what pedagogy is in the parents' view, but there is definitely a frustration on the part of parents that they are not involved sufficiently in the real action in relation to their children and that has to be responded to. (20 h 15)

On the other hand, I think that the

parents - particularly, the representatives that we heard last night and most parents, I believe, as individuals and as groups that I have heard - certainly do not want to be managers in the sense of being involved in all the administrative nitty-gritty of education.

Now, what I would like to hear is this: In view of the very legitimate distinction that you have made with regard to the professional role of educators, teachers primarily, what do you see as the appropriate role of parents, the role which you think, which you sense is being demanded by parents - legitimately demanded - and how can the parents be involved in what they identify as pedagogy without sabotaging the professional role of teachers? I am not talking so much about structures, I am talking about the role.

M. Burgess: That is an extremely difficult question to respond to adequately in the time we have available. I do not believe, personally, and we do not believe that the parents should have final, determinant control over pedagogical aspects of education at all. The only reason why we are willing to support the notion of school councils with parents in the majority is because parents will also have the right to choose which school they wish their child to go to.

There are very grave dangers of parents - some groups of parents, I am not saying all or even the majority, but some groups of parents - establishing their own philosophies, whether it be concerned with the religious aspect of the school or the pedagogical aspect of the school, the discipline of the school, for example, the homework in the school, the whole ambiance of the school, and provided the Bill enables parents to choose to which school they are prepared to send their children, so that they do have a choice, that is the only condition under which we are prepared to endorse the notion of having parents in this policy-making role. That will enable those parents who feel that a school's "projet éducatif" is not appropriate for their child, is too narrow or whatever, to send their child to a different sort of school.

If that were not the case, if parents did not have the right to choose to which school they wanted to send their children, I would be adamantly opposed to parents being the ones to determine the basic philosophy and to get involved in the pedagogical aspects of schooling because I believe that that is a professional responsibility. I would ask: If anybody can do it without any training, why are we bothering to send students to cegeps, to universities, to faculties of education to receive training in pedagogy if that expertise is of no use whatsoever? We would maintain very strongly and naturally, from where we come from, that such training is important and necessary. Therefore, the role of parents in pedagogy is not an easy one and it is only because parents have the right to choose the school to which they wish to send their children that we are prepared to endorse this proposal at all. I hope that answers the question from the députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: I think that you have made a very important statement in your answer. Can I go just a little further and say this...

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de Jacques-Cartier, M. Smith voudrait ajouter un petit élément supplémentaire.

M. Smith: I just have a supplementary comment, Mr. Chairman, that might be helpful in adding to what professor Burgess has said. Beyond the role of the parents in helping to determine the philosophical orientation of the school, which I think is a very important connection to it, we do need to realize that today, many parents are extremely well-educated people and many of them have a very special expertise in certain areas such as business and science. While they may make some very useful suggestions to the school in terms of pedagogy and facilitate the work of the school - for example, I know that in some areas parents have made very helpful connections to business and industry involving short-term apprenticeships and visits to industrial areas on the other hand, there is a very considerable range of subjects in the school with specialized pedagogy, such as the sciences, first and second language acquisition, mathematics, the teaching of art and so on. These are indeed, in some cases, special areas for teachers and the parents would not have the range of expertise, even though they may have some expertise in some limited area. So I think that the position we would take is that they could make a very helpful contribution in some limited areas, but the scope is rather broad and sophisticated.

Mme Dougherty: Thank you, Dr. Smith. To push this question a little further, in view of your response about the parents' role, do you think that the real desires or the legitimate desires of parents could be accommodated by reinforcing the existing laws - Bills 71, 27 and so on - which institutionalize parent involvement in the schools, rather than introducing another whole concept of parent participation which, in effect, was suggested by the federation? I think that the question was put by the

Minister himself to the parents last night.

M. Burgess: No. I think the parents have been led to believe... They have certain expectations that arose out of their own demands, out of the white paper, and I am not so sure that to try and reinvent the orientation commitees is the right way to go. They were not successful and that was not the parents' fault. The parents do want to be more involved in what goes on in schools. They do want a say in establishing policy for that school.

Speaking for the anglophone community now, I am not so sure that any of the parents that I have heard - I have met a number of parent groups - have indicated any desire to trespass on the professional interest of teachers or school principals. They do want to be involved and they want to have a say, particularly in establishing the educational project of the school, but I have not heard anglophone parents saying they want to be involved in pedagogy or in the administration of the school.

However, we have to bear in mind, M. le Président, the history of the anglophone community and the relationship between parents and school organizations. It is a somewhat different one than it has been in the French community. The Protestant schools in particular have had a very long history of parent-teacher associations, Québec Federation of Home and School Organizations, which I think does make a difference in the response from anglophone parents and from francophone parents. I am not qualified to speak definitively on the needs, legitimate or otherwise, of the francophone parents. My understanding is that in many cases, they have been excluded from schools and participating in schools and that they are now rightfully asking for a more direct involvement in schools.

Mme Dougherty: Yes, I am very aware of the different situation, the different historical situation that has led to a legitimate need and expressed aspirations on the part of the French community that have already, apparently, been satisfied on the English side.

My next question, Mr. Chairman, relates to some of the questions that you have raised around the confessional choice. I think that you have raised a great many questions that are very important in that they demonstrate that this confessional choice that is being given to parents by the "projet de loi" is not a simple matter. Many problems could result which are not being addressed at all by the law; the law is guilty by omission in not anticipating the problems that could arise, particularly in the urban areas where you get a very great mix of religious and cultural values.

Added to that, you have raised the issue of dissent, the right to dissent, which is still there and which in itself could result, I think, in fractionating the system. What I would like to hear from you is this: In giving parents this choice, which I think is legitimate, what do you see as the result when it is added to the right to dissent which could mean whole school boards could dissent on the basis of religious values? In the way in which this is being proposed in the law, do you see a danger that the system be seriously fractionated or splintered by virtue of parents exercising all kinds of options or rights which are being given to them by the law? I speak of fractionating not only in terms of different schools developing, but even within individual schools.

What I am concerned about is that the aim of pluralistic accommodations, the accommodation of greater diversity which is the growing reality of our society, may in fact backfire and result in greater division and conflict than ever before. What is your view on this? What do you see happening and how can it be prevented?

M. Smith: Mr. Chairman...

Le Président (M. Blouin): Oui, allez-y.

M. Smith: May I refer this question to professor Carley in the first instance?

Le Président (M. Blouin): Bien sûr.

Mme Carley: I am very glad that you raised that issue because that is one of my concerns too. I think it is a great idea to give people options and to encourage freedom of choice, but when we put it into a practical situation... One of the courses that I teach at McGill currently is called Guiding the Religious Response of the Elementary School Child. I am imagining some of my students going out into the schools and a third grade teacher, for instance, having a class of 25 children. The parents would exercise their right to, first of all, opt out totally of any kind of religious education to choose instead a kind of moral formation according to a specific curriculum. In the make-up of the class, in urban Montreal, I might have two Jewish children, two Orthodox children, two Muslim children, two Catholic children, two Protestant children and I am the teacher, trying to follow a curriculum and to abide by the wishes of the parents who have a right to and have asked for religious education for their children. According to the "projet éducatif", I am supposed to do 120 minutes a week. So, I see the present law not in what it says, but in what it does not say as being an occasion for division in the school,

frustration in the life of the teacher because she either has to excuse three quarters of her class or she has to make accommodation for all the rights of the varied groups. (20 h 30)

To be realistic, there has to be some clearer principles stated in the school project, decided at the beginning of the year and adhered to by the teachers, the principal and the parents. But I feel that it is unreal to say: Oh great, we have rights, we have the recognition of pluralism. That is in terms of my experience, of what I am preparing my students for at this moment.

Le Président (M. Blouin): Merci, Mme Carley. Nous allons bientôt avoir un petit problème parce que nous devons maintenant passer la parole à M. le député de Vachon, puisque le temps de Mme la députée de Jacques-Cartier...

Mme Dougherty: M. le Président, ils n'ont pas complété leur réponse.

Le Président (M. Blouin): II pourrait y avoir un bref complément, Mme la députée de Jacques-Cartier, mais vous comprendrez que, compte tenu du nombre d'intervenants, compte tenu aussi des autres organismes que nous avons à entendre ce soir, nous devons maintenant procéder avec plus de rigueur. D'accord? Vous voulez compléter votre réponse, s'il vous plaît?

M. Burgess: Merci, M. le Président. I think this is an extremely important issue. I would like to preface my remarks by saying that we have indicated earlier that we are in agreement with the establishment of linguistic school boards rather than confessional school boards. We are also in support of the notion of confessionality being determined at the level of each school.

Having said that, I believe that, in this instance, the experience of the anglophone community can perhaps be of benefit to the whole of society because the anglophone community, historically, has been the receiver of the vast and varied immigrant groups that have entered the province of Québec and have found a home, for the most part, in the Protestant school system whatever their religious beliefs, whether they be Moslem, Buddhist, Greek Orthodox, Jewish or what have you. Indeed many Catholics are also educated in the Protestant system.

The problem is, - that is why we ask these questions in our brief - that with so many different religious beliefs being present in society, on the one hand, this is enriching, it adds to our knowledge of the world and of various peoples, beliefs, but, on the other hand, there are serious practical difficulties in trying to respect the rights of all religious beliefs in this new "projet de loi".

The problem is particularly severe in the anglophone community because in many areas, there is only one school, particularly off-island; our numbers are such that there is only one school. With so many different religious groups and interests being required to attend that school, because there is no choice of school in many rural areas, the problem of the definition of a confessional status for the school is an extremely difficult one. I think that perhaps we should dialogue at some later date on this issue.

On the question of dissidence, which was a specific question from the Deputy from Jacques-Cartier, the law permits...

Le Président (M. Blouin): M. Burgess, vous comprenez que c'était une question spécifique et vous devez comprendre aussi que je me dois maintenant de demander votre collaboration.

M. Burgess: Et je demeure, M. le président de la commission...

Le Président (M. Blouin): Non, comprenez moi bien, M. Burgess, je vais vous laisser répondre, mais je vous demande de le faire le plus succinctement possible pour que les autres membres puissent également vous adresser la parole...

M. Burgess: Je comprends bien...

Le Président (M. Blouin): ...afin que l'échange soit le plus complet possible. Alors, succinctement s'il vous plaît, je demande votre collaboration.

M. Burgess: D'accord.

Le Président (M. Blouin): Merci. Allez-y, M. Burgess, succinctement.

M. Burgess: Très vite. The right of dissidence, which is written into the "projet de loi 40", permits both Protestants and Catholics to dissent from language boards. If you take any given area, for instance, the West Island of Montreal, there will be a French language board and there will be an English language board, two boards. Both Catholics and Protestants have the right, under Section 93 of the BNA Act - and it is written in the "projet de loi 40" - to dissent from the French board and both Catholics and Protestants can dissent from the English board and establish their own boards. The possibility exists, Mr. President, d'avoir six commissions scolaires pour chaque territoire de la province de Québec. This will make the situation even crazier than it is now.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Merci, M. Burgess. Je crois que vous avez très bien exprimé votre opinion. M. le député

de Vachon, vous avez la parole.

M. Payne: You are discussing something which is very interesting and, in a spirit of collaboration with the Deputy for Jacques-Cartier, I will continue my own thoughts in the same direction. But just a very short preamble. You say - and I would just like to resume what you said in your brief - that Bill 40 is simpler and more coherent than the existing Education Act and provides a sound base for Education Legislation in Québec today - right? - and you support the need for change. You consider the present Catholic-Protestant structural arrangements as no longer appropriate. You support an increased role for schools and you support the principle of integration of elementary and secondary boards. That is quite a change but you recognize the importance of that and the necessity in terms of falling through in 20 years of rethinking.

I would like to put the question very bluntly. There are some members of the English community who consider, at the expense of millions of school tax dollars, that they prefer the status quo with respect to linguistic reorganization. They are even prepared to sacrifice linguistic boards which I should not say - somebody was involved in the issue - was one, at least for the moment, before the Minister of Education. It is on the table. It is not adopted in law. They are prepared to sacrifice linguistic boards in favour of what I consider to be a very fragile confessional guarantee in Section 93. Just in a couple of words, in your opinion, which option best represents the future interests of the English community of Québec?

M. Burgess: There is very little doubt that the linguistic option represents the best future for the anglophone community in Québec, but I understand those groups who are retaining the status quo in the sense that they feel that their confessional rights, as Protestants or Catholics, are guaranteed by the Canadian Constitution whereas the linguistic boards that we support are not guaranteed by the BNA Act, Section 93. Whereas - I referred to this earlier - fifteen years ago, the English community pretty much as a whole was willing to support the notion of linguistic boards, there has now developed unfortunately, in some parts of the anglophone community a considerable distrust of the intent of the present Government. That is why they are now clinging to what they consider to be constitutional guarantees.

It is not the McGill position, as you know, and it is not the position of the "Groupe des Sept". It is not the position of a number of other anglophone groups. I would interpret the situation as being a distrust of the present Government. I think it is very unfortunate that this distrust exists, but they feel that language boards are not guaranteed by the Canadian Constitution and therefore, they do not want into that. Most of those groups would say that if linguistic school boards could be guaranteed under the Canadian Constitution, they would accept them tomorrow, today.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Vachon.

M. Payne: You lead on to a very interesting political discussion and I would be happy - not this evening - to continue it with you regarding the possibilities of engaging in discussions with other minorities in other provinces with respect to possible constitutional arrangements for linguistic commissions in other provinces. I am sure that the Minister of Education of Québec would not be the last person on the train to show that kind of leadership in Québec and throughout the other provinces.

Two brief questions. First, can you give me one example where the Minister or the Government has, by virtue of Bill 40, increased powers?

M. Smith: Yes.

Le Président (M. Blouin): Mr. Smith.

M. Smith: I would like to reply to that. One particular example that we find in the proposed law would be contained in articles 316 through 319, where the complaints by any member of the public regarding a teacher would be forwarded directly to the Minister of Education. That does not seem to be the case under the status quo, although I stand to be corrected. We prefer to see the complaints against a particular teacher settled first of all within the school, if that is possible; if not possible within the school, within the school board itself and addressed to the Minister of Education only as a last resort. We think that the local structures are being circumvented in that particular instance.

M. Payne: I can give you the reasons for that. I do not want to go into details for obvious reasons, but there have been examples whereby it was necessary for the Minister to undertake measures to appoint an independent investigation committee. If you look at article 319, that provision is there whereby an independent investigation committee can be set up whereas previously it was not possible.

With respect to the whole notion of decentralization, I would like to show you -and I think you know my own colors, that I am a decentralist to coin a word... My experience shows that in certain... If the

deputy can just follow the concession. There are a certain number of articles where we talk about decentralization, where the principle of decentralization in my reading is carried out. I will give you a couple of examples. I realize that your brief was made up during the summer and that there has been a lot of thinking and input from different groups. In terms of budget, for example, previously, it was illegal, it was not possible by law to have a surplus or a deficit. In fact, under the present Bill, it is possible for the surplus to be accumulated by a school commission and to be carried over a number of years which allows forward planning on the part of a school commission, which was not possible before. That is article 242.

With respect to teaching materials, as opposed to teaching manuals, that is now given to the school. It is not the school commission which wins because of that, but the school itself. That is quite a considerable change. And I will give you one reason why the Ministry could not easily decentralize the entire control over teaching reading material. There has been an increased kind of conciousness, for example, of racism in books. I remember a few books which talked about "les sauvages", the Indians, how they were naughty and evil and so on. It needs a certain degree of national provincial control and a watchdog control to eliminate certain elements in terms of discrimination - racial, sexual, human discrimination. À provincial committee has been set up which, in fact, involves teachers already and it needs a certain kind of control from the ministerial level. (20 h 45)

Have you also noticed, in terms of equivalences - I am not talking of teacher equivalences, but student equivalences - that although there are national criteria, certain norms established for kids coming from other provinces, from Ontario or from other countries, the application of it is now done by the school commission. And that is in the Bill, article 297. I do not know whether you have noticed that.

In terms of the modalities - I come to the question of the députée de Jacques-Cartier, when she was talking about confessional status a few minutes ago - that is a very real problem for the English community. I foresee, in a couple of years, the possibility of establishing pluralist schools, but the cultural and historical traditions, as she was saying, would cause particular problems. The comité catholique of the Superior Council of Education demanded that the Government in fact have the modalities for attributing confessional status in terms of the present constitutional guarantees. That is important, because if one school commission decides what is Catholic whether it is Evangelical Catholic or Papal traditional Roman Catholic or whatever, I think that the Superior Council of Education has to be given a certain amount of credibility in wishing to establish certain norms.

Have you picked up on some of these important additions which have been made over the last couple of months in Bill 40 and which I maintain are, in fact, considerable improvements for decentralization?

Now, I have one very small last question.

M. Smith: We have tended to address ourselves to what was actually contained in the "projet de loi 40" and there have been some changes and announcements certainly since the "projet de loi" was announced. Professor Burgess, would you like to reply to that?

M. Burgess: I accept what the "député de Vachon" has said about the changes in the law that have now been made or indicated. These are to be welcomed. I hope there will be more of them.

With reference to the problem of confessionality at the level of the school, I would just add that because of Bill 101, it seems to me that the problems that are not in the anglophone community will very shortly be in the francophone community too. These questions have to be answered not just for the anglophone community alone, but for the whole of Québec society because it is becoming far more pluralistic and diverse. The Moslem immigrant or the Hindu immigrant is no longer entering the English schools, the Protestant schools but, because of Bill 101 he is going into the French language system. This system is going to be faced with these problems too and I think that further study needs to be made of this confessional issue before these proposals are implanted in the law.

M. Payne: I would like to say, just in passing, for the record, that I agree with the summary of your proposals as you made them. I would have some discussion at some other time with respect to the exact content of those proposals because, sometimes, I think it leads to misunderstanding.

You have a vocation and a mission, in terms of teacher training. It seems reasonable to me that you should ask and present a case to the Government in terms of teacher certification. Whereas I would still be a defender of the idea that there should be certain national norms, whether it is with respect to citizenship or whatever, certain things should be equitable and equal across school commission lines. I do believe that, for example, in the option of linguistic school commissions as proposed by Bill .40,

you could set up with the Government perhaps a teacher certification process in a similar way to the other 39 professional corporations that we have in Québec. The teachers and their teaching bodies would be in a position to establish with the Ministry exactly what kind of evaluation procedures could be implemented. I do know that you have a Department of Administration and Policy Studies in the Faculty of Education and that particularly in the very thorny area of confessionalism and pluralistic schools...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Vachon, je vous signale qu'il vous reste cinq minutes d'intervention. Si vous voulez entendre nos invités, je vous suggère de leur poser probablement une dernière question puisque, après, nous devrons passer à un autre intervenant.

M. Payne: You have a department of religious philosophy in education. Would it be possible for you to engage in a process of research with respect to evaluating that kind of possibility, making a proposal to the Minister of Education in terms of teacher certification which has posed a lot of problems in the past?

Secondly, very briefly, would you envisage a watchdog role and a surveillance role in the implementation period which will ensue on the adoption of the Bill?

Le Président (M. Blouin): Oui, M. Smith.

M. Smith: On the first question, Mr. Chairman, I think that we would welcome the opportunity to participate in a discussion on the decentralization of the certification process, particularly in terms of sharing that process with teachers who would also very much be involved, if we use the model of the other professions in Québec.

In the case of the second question, with regard to the watchdog role or the monitoring of the implementation of Bill 40, we would be very happy to cooperate and to be a resource for the Ministry of Education in that process.

M. Burgess: Two things, very quickly. Le Président (M. Blouin): Mr. Burgess.

M. Burgess: The suggestion that the teaching profession could become a professional corporation is an extremely interesting one to any professional educator. However, if it is to be added to the 39 corporations or professions that already exist, I would like to ask if it would be necessary to have a knowledge of the French language in order to practice in the English language school system.

Secondly, with...

M. Payne: In your brief, you mentioned that we should change Bill 101. Bill 57 does allow that.

M. Burgess: That has been changed already. With reference to the suggestion of participating in the implementation of linguistic school boards, I personally would reject the notion of the term "watchdog"; I do not think that it would be appropriate at all, but I think that the McGill Faculty of Education would be extremely willing to participate, with others, in seeing that there is a smooth implementation of linguistic boards if Bill 40 is indeed passed.

M. Payne: Thank you very much indeed. I congratulate you for such a positive contribution to the discussions of the commission.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Merci beaucoup, M. le député de Vachon. M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Merci, M. le Président. Je vais faire des efforts pour être un peu moins long que le député de Vachon qui a pris ses 20 minutes, comme vous le savez.

Le Président (M. Blouin): Son intervention a réclamé 18 minutes de notre temps, M. le député.

M. Doyon: Merci. Alors, cela nous a paru plus long que cela ne l'a été.

Je voudrais attirer l'attention et discuter brièvement avec les membres de la faculté de l'éducation de McGill de tout ce qui concerne la composition de la commission scolaire. Ils font une analyse de la situation. Si je suis leur critique, la conclusion que j'en tire, c'est que le système proposé dans le projet de loi 40 est pratiquement "inopérable". Cela ne peut pas fonctionner tel que c'est là. Les gens vont voter à plusieurs endroits, ils devront choisir. On va se retrouver avec des territoires qui vont empiéter les uns sur les autres; les gens vont avoir le droit de vote dans un territoire ou dans l'autre. On ne saura pas trop à quoi s'en tenir. On va se retrouver avec des gens qui seront possiblement des antagonistes autour de la table et, qui plus est, on va se retrouver avec beaucoup d'antagonistes potentiels, jusqu'à 50 ou 60. Je vous suis jusque-là et je n'ai aucune difficulté à être convaincu par votre critique que le système que propose M. le ministre ne peut pas fonctionner. La preuve en sera faite rapidement; je n'ai aucune inquiétude là-dessus.

Là où je vous suis moins, c'est dans la solution que vous proposez. Nous sommes

tous au courant qu'il y a dans les faits un désintéressement de la population vis-à-vis des élections scolaires. Le pourcentage du vote est bas. On y trouve toutes sortes de raisons: le vote au mauvais moment, une campagne électorale pas suffisamment longue, l'absence de dépenses électorales. En tout cas, on peut trouver toutes sortes de raisons. Or, la solution que vous proposez, c'est d'avoir un conseil scolaire composé, en partie de gens qui représentent la communauté et en partie de gens qui représentent les utilisateurs, c'est-à-dire les parents des enfants qui fréquentent les écoles.

Il y a une chose que vous déplorez avec raison, d'après moi, et c'est là une critique fondamentale parce que, si on croit à la démocratie, je pense que la base fondamentale de la démocratie, c'est un homme, un vote. Si on sort de cela, ce n'est plus la démocratie, c'est autre chose. Quand on institutionnalise cela, cela cesse totalement d'être de la démocratie. Quand vous dites qu'il y aura des territoires possiblement de 200 électeurs et d'autres de 12 000 électeurs et qu'à la table tout le monde aura le même droit de vote, cela, c'est la négation de toute démocratie.

Il me semble y avoir une lacune dans ce que vous proposez; cela va empirer la situation dans ce sens qu'on va retrouver au conseil scolaire, par hypothèse, quatorze personnes, dont sept seront élues par une population de 50 000 personnes, par exemple. Ces sept personnes sont élus à ce qui s'apparenterait, si elles étaient les seules autour de la table, au suffrage universel. D'un autre côté, leur poids autour de la table va être contrebalancé par sept autres personnes élues, elles, par une minorité. Il est facile de concevoir que le nombre de personnes qui agiront au niveau des conseils d'école sera beaucoup moindre que les 50 000 personnes qui ont le droit de vote général. On va se retrouver avec des gens ayant le même poids autour de la table, mais qui vont être élus par moins de gens. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. Est-ce que vous ne pensez pas que le fait d'institutionnaliser cette façon de faire, c'est-à-dire d'avoir deux classes de commissaires, va avoir comme effet de désintéresser encore plus les gens de la chose scolaire?

Si je prends mon cas personnel, n'ayant pas d'enfants à l'école, si je sais que pour équivaloir au vote d'un parent ayant des enfants à l'école, cela prend cinq ou six votes comme le mien, ce n'est pas de nature à me rapprocher ou à m'intéresser encore plus à la chose scolaire, parce que je suis en minorité d'une façon institutionnelle et structurelle dans le projet. Je me demande si vous avez envisagé cette question. Si on se retrouve avec des commissions scolaires où les gens participent encore moins à l'élection générale, on va à la longue donner raison à ce qui semble être le souci de plusieurs, c'est-à-dire le désir éventuel d'arriver à la disparition des commissions scolaires. Je me demande si cette façon de structurer, selon votre proposition, la commission scolaire n'aura pas pour effet d'en arriver aux fins contraires à celles que vous avez indiquées dans votre mémoire où vous dites, par exemple: Nous appuyons donc fermement le maintien des commissions scolaires dans la structure éducative de la province. Si on en venait à la solution que vous proposez, parce que très peu de gens vont être motivés à s'y intéresser à titre de membres de la communauté "at large", ces gens ne s'y intéressant pas, je conçois très bien le discours gouvernemental éventuel disant: On avait 10%, 11% ou 18% des gens qui votaient, maintenant on se retrouve avec 5% ou 6%. Donc, désintéressement total avec pour conséquence l'abandon du suffrage universel et ce que cela entraîne, la disparition des commissions scolaires.

Le Président (M. Blouin): M. Burgess.

M. Burgess: We do not see it that way, Mr. President. It is obvious that the present system of universal suffrage does not appear to be a sufficient participation on the part of the public at large. I do not know what the figures are, but even with the great campaign that was held last June to improve the number of people voting in school board elections, the percentage of voters was in fact still extremely small. (21 heures)

Now, how will you go about resolving this? I am not saying that our solution is the only one. I realize that we might be creating two classes of commissioners: those voted in by universal suffrage and those voted in by the parents of the conseil d'école. But we have that now, M. le Président; there are two classes of commissioners now. There are commissioners elected by universal suffrage and there are commissioners nominated by parents. All we are suggesting is the expansion of those two parent representatives to an equal part.

M. Doyon: Ils n'ont pas le droit de vote.

Mme Lavoie-Roux: Ils n'ont pas le droit de vote.

M. Doyon: They do not have the right to vote, have they?

M. Burgess: No, they do not have the right to vote, but they asked not to be given the right to vote, because they did not want to be put into the minority position of

having a decision made by the majority of the board and the two parent representatives implicated in that. It was the parents themselves who asked that they not be given the right to vote. It was not the school commission or the Government who said: You cannot have the right to vote.

So, there are two classes of citizens serving on the school commissions now: those elected by universal suffrage, which tend to be a minority of the population eligible to vote, and two appointed by the parent committee. What we are suggesting is an expansion of that latter category, in order to provide an equilibrium between those elected by universal suffrage and those elected by the conseil d'école.

Le Président (M. Blouin): Très bien. M. le député de Louis-Hébert, rapidement, s'il vous plaît.

M. Doyon: À mon avis, le problème demeure quand même. Cela m'apparaît comme si on tentait de résoudre la quadrature du cercle. Une porte ne peut être ouverte et fermée en même temps. Si le suffrage universel ne donne pas satisfaction, dans une situation comme celle-là, ce que vous proposez et ce que propose le ministre n'est pas mieux du tout. Vous en faites la preuve très convaincante, je l'ai dit au début. La solution que vous proposez m'apparaît une tentative de. compromis qui -c'est là l'inquiétude que j'exprime; je me rends compte que vous ne la partagez peut-être pas - à très brève échéance, aura pour conséquence de désintéresser encore plus la population, la communauté, les gens. Si cela prend sept votes des gens ordinaires qui n'ont pas d'enfant dans les écoles pour équivaloir à un vote d'une personne qui, par la voie du comité d'école, envoie un commissaire, vous pouvez être sûrs que, très rapidement, les gens vont faire le calcul. Ils vont dire: Si mon vote vaut sept fois moins que le vote d'un parent, je n'ai pas à jouer ce jeu. C'est le danger que je signale. Ce n'est pas un danger que vous voyez aussi immédiat que je le vois et je respecte votre opinion.

Le Président (M. Blouin): Un dernier commentaire, M. Burgess, à ce sujet.

M. Burgess: I accept the suggestion that it is possible that by creating two classes of commissioners, you might even be decreasing the interest and the number of people who might vote on the universal panel. But we have a problem here. What do you suggest? That the whole school commission therefore be composed of parents, as the original white paper proposal? I mean, what we are suggesting is a compromise. I realize that for certain people, the idea is universal suffrage or nothing, but there appear to be problems in the application of universal suffrage. I realize that it may create a lack of interest in the population at large and they will have nobody else to blame but themselves.

Une voix: C'est clair.

M. Burgess: Nevertheless, it is a fundamental right of any democratic society, particularly when those bodies are spending taxpayers, money, which they are, even if it is only 6% directly and 94% indirectly, if they wish to exercise it, to vote. I suggest that if they vote by defeat, by not going to the polling stations, then they must accept the consequences.

Somehow or other, Québec society has to reach some sort of consensus as to how to deal with this problem. The present situation is clearly not satisfactory. I think most people agree that it is not satisfactory. We are trying to help the process by suggesting a compromise. Our compromise may not be a perfect one. It may not be indeed a good one but, at least, it is a suggestion that people can think about and debate about.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Burgess.

M. Doyon: Je terminerai là-dessus. Je ne dis pas que la suggestion ne mérite pas d'être discutée, mon propos est loin de là. Pour répondre à votre interrogation, si je peux me permettre une suggestion, le défaut fondamental qui est à la source de ce désintéressement qu'on constate élection après élection, c'est, finalement, l'absence de pouvoirs réels à la commission scolaire. Je pense que tout le reste constitue du court-circuitage et du cataplasme pour camoufler le fait que, si les gens se désintéressent de la commission scolaire, ils le manifestent en n'allant pas voter. Ce que je vous dis, c'est que la commission scolaire n'a pas de pouvoirs véritables, réels, fondamentaux et que, si on confiait à la commission scolaire des pouvoirs fondamentaux, réels et un pouvoir décisionnel, sans avoir, pour employer un terme qui est à la mode maintenant, les yeux et le bras du "Big Brother" continuellement, je pense que l'intérêt reviendrait très rapidement. C'est là la source du problème. Le reste, c'est du cosmétique.

Le Président (M. Blouin): Ça va. Merci, M. le député de Louis-Hébert. Sur ce, au nom de tous les membres de la commission, je remercie beaucoup les représentants de la faculté des sciences de l'éducation de l'Université McGill pour leur témoignage très substantiel. J'invite maintenant les

représentants de l'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal à prendre place à la table de nos invités.

Je dois également informer les membres qu'il y a eu une entente selon laquelle le dernier groupe que nous devions entendre ce soir - compte tenu de l'heure, vous comprendrez que tout cela est très logique - c'est-à-dire l'Association des cadres scolaires du Québec, sera entendu demain matin, non pas à 10 heures, mais bien à 9 heures. Nous reprendrons nos travaux demain, non pas à 10 heures, mais bien à 9 heures.

Maintenant que nos invités ont pris place à la table qui leur est désignée, j'invite les représentants de l'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal à s'identifier et à nous livrer, en une vingtaine de minutes - je crois que vous comprenez bien maintenant notre fonctionnement - le contenu de leur mémoire.

Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal

M. Saint-Jacques (Marcel): M. le Président, MM. les membres de cette commission, je me présente. Je suis Marcel Saint-Jacques, président de l'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal. À ma droite, M. Katif Gazze, qui est le vice-président de notre association, et M. André Langevin, qui est conseiller au sein de notre conseil exécutif.

Je tiens à vous remercier pour l'opportunité qui nous est offerte de vous présenter de vive voix l'essentiel de notre mémoire. Nous espérons que l'abrégé présenté ce soir, qui consiste à vous présenter de larges parties de notre texte original, a su conserver toutes les nuances et les explications qu'on trouve dans ce premier texte.

M. Leduc (Fabre): M. le Président...

Le Président (M. Blouin): Je crois que je comprends le sens de votre intervention.

M. Leduc (Fabre): Je voudrais juste savoir quels postes occupent les cadres. Je ne sais pas... Est-ce qu'ils se sont identifiés?

Le Président (M. Blouin): Oui, ils se sont identifiés.

M. Leduc (Fabre): Est-ce qu'on pourrait connaître les postes qu'ils occupent en tant que cadres?

Le Président (M. Blouin): Quels sont vos postes?

M. Saint-Jacques: M. Katif Gazze est directeur du service de l'équipement à la CECM; M. André Langevin est directeur du service des études et moi-même, je suis directeur adjoint du bureau de ressources en développement pédagogique et en consultation personnelle.

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques, puisque vous commencez à nous présenter votre mémoire, il serait très utile pour les membres de la commission que vous puissiez nous situer l'endroit où vous êtes pour que nous puissions suivre l'évolution de votre présentation.

M. Saint-Jacques: C'est cela, je vais donner les titres et les numéros des chapitres. Mais nous avons pris des parties du texte. Nous n'avons pas tout le texte.

Le Président (M. Blouin): Ça va, M.

Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: Introduction. L'association endosse plusieurs positions du ministre de l'Éducation à l'intérieur du projet de loi 40. Il y en a, cependant, d'autres qu'elle trouve inquiétantes. Enfin, l'une d'entre elles lui apparaît excessive et inacceptable. Nous tenons à souligner qu'il peut être dangereux d'engager une réforme sur la seule base d'une froide rationalité. Des structures ne se font et ne se défont pas sans tenir compte dans une large mesure des facteurs humains. Il est presque superflu de rappeler ici le peu d'impact de certains règlements du ministère de l'Éducation, notamment le règlement no 7 qui proposait, entre autres, l'individualisation de l'enseignement. On sait que celle-ci demeure toujours au stade des souhaits dans la majorité des écoles. Cet exemple illustre bien le fait que l'on ne règle pas les questions pédagogiques par l'effet de la seule réglementation.

Dans le chapitre I, nous verrons les principes qui nous ont guidés, les objectifs et les moyens pour l'instauration d'une école responsable et communautaire. Les membres de l'association partagent la volonté du ministre de l'Éducation de doter la province d'écoles communautaires et responsables.

Premièrement, les principes. C'est en définissant l'école communautaire et responsable que l'on identifiera les principes qui lui servent de fondement. Une école communautaire, c'est une école qui éduque et instruit en harmonie avec son milieu. Ceci signifie qu'elle respecte et véhicule les valeurs de son milieu en les intégrant à son projet éducatif. Elle utilise les ressources de sa communauté pour en faire bénéficier sa population, tout en offrant certains services à la première. Une école responsable, c'est une école qui, ayant identifié les besoins de

développement de ses élèves, peut prendre les moyens qu'elle juge les plus aptes à les satisfaire. Une telle école agit donc en symbiose avec son environnement. Elle s'établit en complémentarité avec les autres ressources éducatives.

Cependant, cette école communautaire et responsable ne sera pas créée par la seule volonté politique d'un gouvernement. Il est difficilement concevable de mettre sur pied de telles écoles en dehors d'un contexte social de participation. En d'autres termes, l'appareil bureaucratique du ministère de l'Éducation ne peut guère engendrer des institutions fondées sur la participation sans mettre en cause de façon préalable ses structures, ainsi que son fonctionnement.

Enfin, soulignons cette lapalissade qui semble trop souvent oubliée tant par les administrateurs, que par les législateurs: l'école devrait exister en premier lieu et avant toute chose comme milieu éducatif privilégié et tous ses employés devraient, avant tout, être guidés par les besoins des enfants qu'elle sert, par l'organisation d'une pédagogie qui réponde de façon optimale à ses besoins. Toute mesure administrative et législative devrait n'avoir que ce seul objectif. Pour le réaliser, il faut que les milieux de l'éducation cessent d'être des lieux d'affrontement pour la recherche d'un pouvoir. Tant qu'il en sera ainsi et que les objectifs de l'éducation ne constitueront pas les véritables préoccupations, la réussite scolaire continuera d'être une conséquence inégalement partagée par les élèves.

Deuxièmement, les objectifs. Nous n'en retiendrons que trois qui peuvent contenir tous les autres. 2.1. Le développement optimal. L'école devrait permettre que chaque enfant puisse développer de façon optimale tout son potentiel humain, qu'il soit physique, cognitif, émotif, social et spirituel. 2.2. L'éducation à l'autonomie. L'école devrait graduellement amener les enfants à se passer des adultes. Il faut de plus en plus centrer les efforts sur les apprentissages qui permettent aux élèves d'apprendre eux-mêmes et de devenir plus autonomes en regard de leur propre cheminement scolaire et, par voie de conséquence, de leur propre vie. 2.3. Le développement d'un être socialisé. Si l'école est vraiment le lieu privilégié de la formation totale de l'enfant, et pas simplement celui de l'acquisition de techniques scolaires, on doit envisager également la poursuite d'objectifs plus larges tels que l'apprentissage de la sociabilité et de la capacité à vivre en harmonie avec un milieu social donné; éventuellement, le développement de la capacité de vivre avec son handicap et non pas de vivre de son handicap ou par son handicap, en fait, permettre à l'enfant de devenir dans la communauté un adulte agissant et responsa- ble.

Troisièmement, les moyens. Même si les changements importants, en particulier depuis les années soixante, ont voulu modifier de plus en plus le système scolaire et l'école pour l'atteinte de tels objectifs, on peut admettre, même sans une étude exhaustive, le besoin de procéder à d'autres changements afin qu'un jour nous ayons réellement une école totalement au service de l'élève. On ne peut que souhaiter l'apparition d'une école responsable et communautaire, d'une commission scolaire responsable et communautaire, d'un ministère de l'Éducation responsable et au service de la communauté. (21 h 15)

II faut donc que l'école devienne de plus en plus responsable de l'organisation des stratégies éducatives de première ligne et en ait les moyens. Il faut qu'elle s'inscrive nettement comme partenaire et en étroite collaboration avec toutes les autres instances de sa communauté immédiate et puisse même graduellement étendre cette relation aux communautés plus larges et plus englobantes. Il faut donc rendre possible à tous les agents de l'éducation une participation à la définition de l'acte pédagogique, à l'identification des moyens et à l'action concrète dans l'école. Il faut présenter une structure permettant une collaboration et la mise en place d'une véritable complémentarité des rôles.

En plus de fournir de tels moyens par voie de législation et de réglementation administrative, il faudra prévoir les étapes d'implantation de cette nouvelle formule de collaboration, en particulier, en établissant comme primordiaux les mouvements de sensibilisation, d'information et de formation. Pour qu'une telle école s'inscrive réellement dans sa communauté, elle devrait répondre de tous les enfants de son territoire géographique. Toute situation d'échec, tout handicap décelé chez l'un ou chez l'autre de ses élèves est pris en charge par l'école qui doit essayer, avant toute chose, d'organiser à l'interne les réponses adéquates à leurs besoins. L'école peut conclure que les mesures nécessaires ne sont pas immédiatement disponibles et qu'elle doive recourir à des services externes. À ce moment, elle devra continuer d'être responsable de tel élève, elle suivra ses progrès puisqu'il restera toujours sous sa responsabilité et décidera toujours du meilleur service pour lui ou pour elle. Entre-temps, elle verra à réorganiser son milieu pour une intégration dans le plus court laps de temps. Ainsi, les écoles régionales de services spéciaux et les écoles dites nationales auront à passer des contrats de services avec les écoles régulières primaires et secondaires et devront répondre de leur action à ces écoles. De même, pour les enfants immigrants, elle devra reconnaître son devoir de bien les intégrer

et de bien les servir.

Pour les milieux socio-économiquement désavantagés, cette nouvelle école devra obligatoirement prendre racine dans son milieu et, plus que toute autre, se mandater pour une action réellement communautaire. De telles écoles exigent les meilleures ressources humaines possible et un apport pécuniaire important. Il est urgent pour l'école de définir clairement son projet éducatif qui deviendra la formule permettant de respecter les données globales auxquelles elle doit répondre et les particularités du milieu auxquelles elle doit se soumettre. Face à ces écoles, la commission scolaire aura des rôles de support et de contrôle. Elle devra voir à l'efficience de ses écoles, au partage équitable, selon les particularités de ses milieux, des ressources humaines, financières, à l'organisation des services communs, au support pédagogique à fournir pour aider ses écoles à atteindre leurs objectifs et au développement de services pour l'éducation des adultes. 3.1. Le contrôle de l'efficacité de l'école. La décentralisation au maximum de la pédagogie et de son administration n'assure pas en soi la qualité des services. Nous sommes ici dans l'ordre des moyens et des mentalités. Nous avons besoin d'un organisme à qui l'on confie certaines tâches de contrôle. Au premier chef, la commission scolaire devra donc s'outiller afin de s'assurer, pour le mieux-être de chaque enfant, que tous les élèves profitent au maximum de l'école. 3.2. Le partage des ressources. Encore ici, c'est à un organisme impartial, qui peut se permettre une vue d'ensemble et plus globale, que l'on confie le soin de voir à une juste répartition, selon la situation économique vécue, des ressources humaines et financières disponibles. La prévention peut facilement devenir une grande inconnue pour certaines écoles libres de toute réponse à une instance supérieure. La commission scolaire aura donc l'obligation, non seulement de voir au partage des ressources, mais d'en vérifier l'utilisation à bon escient. 3.3. Les services communs. La commission devra aussi voir, d'une part, en concertation avec les écoles, à l'installation de services communs que les écoles, individuellement, ne pourraient s'offrir et, d'autre part, voir avec d'autres commissions scolaires à négocier certains services communs dont les coûts deviendraient prohibitifs pour son seul portefeuille ou pour des populations minoritaires qui seraient mal servies si de tels services n'existaient pas. Nous pouvons penser à certains services centralisés, tels l'informatique, le développement et l'animation pédagogique, ou à des écoles spéciales ou spécialisées, régionales ou nationales. 3.4. Le support pédagogique. Ce sujet nous semble fondamental et primordial. La décentralisation n'est pas une panacée transformant du jour au lendemain l'école ordinaire en école omnisciente possédant une manière de connaissance universelle de la science pédagogique et possédant l'habileté optimale de l'art d'enseigner et d'éduquer. D'un autre côté, croire que le ministère de l'Éducation deviendrait, lui aussi, seul habile à l'interprétation des besoins, éloigné qu'il est du milieu, paralysé par une bureaucratie inévitable, relèverait plus du domaine de l'utopie que d'une saine interprétation réaliste. La commission scolaire devrait donc se préoccuper au premier chef d'être au service de ses écoles pour ce qui est du développement pédagogique, du support à l'application du meilleur acte pédagogique possible et pour la formulation d'une instrumentation et d'un outillage adéquats. 3.5. L'éducation des adultes. Il est de la responsabilité de la commission scolaire d'organiser un réseau de services souple et articulé et d'étudier sérieusement le rôle que ses écoles primaires et secondaires pourraient y jouer.

Chapitre II, l'école. Réactions au chapitre III du projet de loi 40. La participation des enseignants. Avec le conseil d'école, le ministre de l'Éducation propose une structure de participation au sein de laquelle les divers groupes directement concernés sont ou peuvent être représentés. Avec une telle représentation, on se rapproche déjà de l'école communautaire, mais on ne l'atteint pas encore, car, d'une part, la communauté locale n'est pas conviée à participer à la gestion de l'école; d'autre part, les principaux intéressés, les enseignants, sont nettement sous-représentés. En vertu du principe selon lequel la participation est influencée par l'implication, on pourrait s'attendre que les écoles développent un projet éducatif sans les enseignants. Si l'on veut faire de l'école une réelle entreprise communautaire, il nous apparaît indispensable d'impliquer davantage les enseignants afin qu'ils ne se perçoivent pas comme des employés au service des parents employeurs, mais plutôt comme des collaborateurs.

Les enseignants étant quasiment exclus du conseil d'école ne seront guère motivés à se retrouver massivement dans le comité pédagogique. Le conseil d'école risque alors d'être privé d'une consultation sur le plan pédagogique et de devoir fonctionner comme un simple comité de parents à qui la direction de l'école seule suggérera les décisions à prendre. Par ailleurs, il est fort probable que les enseignants interprètent cette décision comme une mise à l'écart et une dépossession par rapport à la science et à l'acte pédagogique. Cette exclusion constitue, du point de vue de l'association, un obstacle majeur à la réalisation du projet

éducatif. D'autre part, nous croyons que les associations d'enseignants devront se prononcer clairement et publiquement sur leur volonté de participer activement au sein d'un conseil d'école et d'un comité pédagogique. Il est évident qu'une telle participation devra s'inscrire dans la loi ou à l'intérieur de sa réglementation, mais exigera un engagement professionnel de ceux-ci à collaborer sincèrement avec les autres agents de l'éducation.

Enfin, nous sommes opposés au mode de nomination du directeur tel que défini par l'article 77, ainsi qu'à tout contrôle que pourrait exercer sur lui le conseil d'école, aux articles 83 et 84.

La confessionnalité. L'association se montre favorable aux aménagements concernant la confessionnalité. Il faut admettre que l'évolution socioreligieuse de la société québécoise qui s'est manifestée avec vigueur au cours des dernières décennies doit trouver sa contrepartie au niveau de l'institution scolaire. L'école, de par sa vocation, doit respecter le pluralisme des opinions exprimées au sein de la population. Nous acceptons donc que soit assurée l'option enseignement religieux et enseignement moral dans toutes les écoles publiques, que soit laissé à la décision des populations locales le statut confessionnel ou non de leur école et, enfin, que toutes les commissions scolaires soient non confessionnelles.

Par contre, nos attirons l'attention du ministre sur le besoin d'établir clairement et de façon prioritaire le rôle de supervision des commissions scolaires qui auront à vérifier que tout se déroulera dans l'ordre, que les choix individuels seront respectés sans entraves, sans pressions indues, sans faux-fuyants et que les choix collectifs seront réellement assumés démocratiquement et ne pourront être l'effet de stratégies démagogiques de groupes minoritaires, efficaces parce que bien organisés et surtout politiquement soutenus. 2. Un modèle de gestion et d'organisation. 2.1. Principe de décentralisation administrative. Le succès de l'école qui veut atteindre les objectifs de ce pourquoi elle existe dépend de sa capacité à répondre adéquatement et rapidement à tout besoin pédagogique identifié. Pour qu'elle puisse apporter des réponses adaptées à mesure que les nécessités se manifestent, il lui faut disposer d'une très large autonomie au plan administratif. Il faut donc relocaliser dans l'école le pouvoir de décision pour tout ce qui a trait à la pédagogie courante. L'exercice de la pratique pédagogique entraîne des tâches de gestion administrative. Ces tâches doivent être effectuées dans une optique de service à la pédagogie et s'y subordonner réellement. En aucun cas, les contraintes de la gestion administrative ne doivent conditionner celles de la pédagogie, car l'administration n'est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen afin d'atteindre les objectifs pédagogiques préalablement déterminés. 2.2. La structure de l'école...

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques, je m'excuse de vous interrompre. Je constate que vous faites des efforts de lecture louables. Cependant, si je regarde un peu le contenu de votre mémoire, je m'aperçois que vous n'arriverez certainement pas à le présenter dans les limites de temps convenues. Je veux bien comprendre qu'on puisse excéder un peu ces limites, mais, si je fais une légère projection, je réalise que votre présentation prendrait environ cinquante à soixante minutes. Est-ce que je dois comprendre que vous avez l'intention de lire entièrement votre mémoire ou s'il y certaines parties qui seront résumées?

M. Saint-Jacques; C'est cela. On en a enlevé de larges parties, mais, naturellement, il y en a qu'il nous semblait essentiel de communiquer aux membres de la commission.

Le Président (M. Blouin): Je dois comprendre que certaines parties seront résumées, si possible.

M. Saint-Jacques: De larges parties ont été enlevées dans l'abrégé qu'on est en train de lire.

Le Président (M. Blouin): Enfin, procédez, mais je vous signale que cela fait déjà environ quinze minutes et dans environ quinze minutes au maximum, je vous demanderai de conclure. D'accord?

M. Saint-Jacques: Oui. Donc, la structure de l'école. Déjà, la loi 71 précisait et renforçait les responsabilités du directeur d'école. Il faut maintenant franchir un pas de plus et inviter le directeur d'école à partager son autorité.

Si vous voulez, on passerait immédiatement au point 2.2.1.1. la composition du conseil d'école. Donc, nous proposons qu'il y ait un conseil d'école et un comité d'école. Partant du principe selon lequel la participation doit se faire à tous les niveaux, il faut y retrouver des représentants des parents, de la pédagogie et de la communauté locale. De façon générale, tous les intervenants impliqués à divers titres doivent être représentés au conseil d'école. On devrait donc y retrouver les personnes suivantes: le directeur, des parents, des membres du personnel pédagogique de l'école et des représentants du milieu. Quelle que soit l'évolution dans la constitution du conseil d'école, celui-ci devra être composé d'une majorité de parents. Le nombre total des membres ne dépassera pas quinze.

Je saute par-dessus le rôle et la responsabilité qu'on confiait à ce conseil qui détient quand même son autorité de la commission scolaire.

On proposait à 2.2.2. le comité pédagogique. Le projet de loi 40 prévoit l'existence de trois comités consultatifs dans l'école. Toutefois, les parents, le personnel pédagogique, les élèves demeurent libres de former ou pas de tels comités. Dans notre modèle, le comité pédagogique est une structure indispensable au bon fonctionnement de l'école. Grâce à une délégation de pouvoirs du conseil d'école, ce comité gère les affaires pédagogiques courantes.

La composition de ce comité. La nature des tâches effectuées par le comité pédagoqique réclame qu'une majorité de ses membres soient recrutés parmi le personnel pédagogique de l'école. Ce comité regroupera les personnes suivantes: le directeur de l'école qui agira comme président, les représentants du personnel enseignant de l'école et des représentants des parents. Encore là, nous présentions dans notre mémoire une série de responsabilités qu'on pouvait confier au comité pédagogique dont la délégation était faite par le conseil d'école. 2.2.2.5. Le bénévolat. L'école communautaire accorde une place importante à l'action bénévole. Celle-ci constitue autant un apport de ressources pour les élèves qu'un moyen de valorisation des personnes qui s'impliquent dans des tâches à caractère éducatif. Le personnel bénévole dans l'école relèvera d'une personne désignée par le comité pédagogique. Celle-ci coordonnera les demandes d'aide du personnel et s'assurera du bon fonctionnement de cette ressource.

Le chapitre III porte sur la commission scolaire. Réactions au chapitre IV du projet de loi 40. Le regroupement des commissions scolaires sur une base linguistique. L'association endosse entièrement l'article 133 qui envisage le regroupement des commissions scolaires sur une base linguistique. Je saute les explications.

L'intégration des niveaux primaire et secondaire à l'intérieur des commissions scolaires. L'association souhaite que cette restructuration réalise l'intégration effective des niveaux primaire et secondaire à l'intérieur de chaque nouvelle commission scolaire tel qu'il était proposé dans le livre blanc.

Les pouvoirs et responsabilités de la commission scolaire. L'examen attentif des différents articles du chapitre IV fait ressortir la nature des pouvoirs et responsabilités des commissions scolaires. On est alors forcé de constater que celles-ci ont surtout des responsabilités et que leur exercice s'effectue dans le champ de l'administration. Il est à craindre dans ces conditions qu'on trouve peu de volontaires pour étoffer les divers comités que le projet de loi 40 souhaite voir se mettre sur pied. (21 h 30)

Le dépouillement des pouvoirs pédagogiques des commissions scolaires amorcé avec les régimes pédagogiques se poursuit avec le projet de loi 40. Il ne reste, à toutes fins utiles, aux commissions scolaires qu'un rôle administratif. Celui-ci pourrait, par la suite, être facilement assumé par les écoles et les directions régionales du ministère de l'Éducation. Alors, les commissions scolaires disparaîtraient n'ayant plus d'utilité. L'absence de structures intermédiaires aurait certainement un effet défavorable sur l'innovation pédagogique, ainsi que sur les réponses à apporter à des besoins particuliers.

Un modèle de gestion. La structure qu'on propose. La commission scolaire est une instance administrative qui regroupe un certain nombre d'écoles primaires, secondaires, spéciales et spécialisées, selon le cas. Cet ensemble sera ainsi dénommé le bassin scolaire de services de la commission scolaire. Pour administrer ce bassin, la commission scolaire aura un conseil d'administration et un comité exécutif.

La composition du conseil d'administration, à 2.1.1.1. Partant du principe selon lequel la participation doit se faire à tous les niveaux et bien y représenter les écoles, nous retrouvons donc une composition pluridimensionnelle. Cet équilibre visé devrait permettre de retrouver le directeur général nommé d'office, mais sans droit de vote, des commissaires élus au suffrage universel et des parents élus à partir des conseils d'école.

Dans un premier temps, une majorité de commissaires seront élus au suffrage universel. De leur côté, les conseils d'école réunis en sous-bassins éliront leur représentant.

Le conseil d'administration ainsi composé du directeur général, des commissaires élus au suffrage universel et des représentants des parents pourra par la suite augmenter le nombre de ses membres en invitant différents syndicats et associations de personnel de la commission scolaire à y déléguer un ou des représentants. Il pourra également y inviter un ou des représentants des groupes socio-économiques du milieu.

Nonobstant ce qui précède, les commissaires élus au suffrage universel devront être majoritaires au conseil d'administration qui ne dépassera pas 25 membres.

Le conseil d'administration peut mettre sur pied le nombre de comités dont il a besoin, mais le comité exécutif doit être constitué d'un président, d'un vice-président, de cinq commissaires dont deux obligatoirement doivent être élus par les

parents nommés à partir des conseil d'école.

Le ministère de l'Éducation, chapitre IV. La création du ministère de l'Éducation en 1964 s'est faite au nom de la démocratisation et de l'accessibilité à l'école pour tous. À quelques nuances près, nous devons reconnaître un net progrès dans l'atteinte de ces objectifs. L'École québécoise et le nouveau projet de loi 40 exigent qu'on se préoccupe maintenant de l'amélioration de l'acte éducatif et qu'on rende l'école plus intégrée dans sa communauté. Comme nous l'avons dit précédemment, ce nouveau vouloir ne peut se concrétiser que dans le respect de l'autonomie de l'école et de la commission scolaire. Cette façon de voir nous oblige à prévoir aussi des réajustements du pouvoir central.

Fondamentalement, au plan pédagogique, le ministère de l'Éducation devrait continuer de définir les programmes. En ce qui concerne les autres aspects pédagogiques, tels les régimes pédagogiques, les manuels scolaires, le matériel didactique, l'enseignement aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, l'enseignement aux élèves en milieu économiquement désavantagé et pour le secteur professionnel, le ministère de l'Éducation devrait se limiter à donner les grandes orientations. Nous invitons le ministère de l'Éducation à faire confiance à sa restructuration et à pourvoir les commissions scolaires du personnel et des ressources pour qu'elles puissent assumer les rôles d'animation directe, d'animation pédagogique, de soutien aux écoles et d'encadrement pédagogique.

Nous passons à quelques aspects particuliers reliés au projet de réforme du ministre de l'Éducation, au chapitre V. La commission de mise en oeuvre. On est étonné par l'étendue des pouvoirs que le ministre accorde à la commission de mise en oeuvre, ainsi qu'aux comités de mise en oeuvre. Cette commission est nantie de pouvoirs quasi discrétionnaires et l'entrée en jeu des comités équivaut, à toutes fins utiles, à une sorte de mise en tutelle des commissions scolaires et des écoles, tout au moins au début de leur nouvelle existence. Par ailleurs, les décisions ainsi prises pourront avoir des effets à long terme, obligeant les instances à assumer des décisions qu'elles n'ont pas prises. Un exemple parmi d'autres est l'engagement du directeur général de la nouvelle commission scolaire. On imagine que le ministre de l'Éducation a cru bon de créer des instances temporaires pour assurer la mise en opération de la nouvelle structure scolaire avec un maximum de célérité. D'un autre côté, on voit mal que les personnes à qui on reconnaît la compétence ne puissent pas elles-mêmes directement prendre des décisions que, de toute façon, elles sont appelées à assumer par la suite. L'association aurait préféré que la commission de mise en oeuvre agisse à titre conseil et fournisse l'aide demandée pour établir et faire fonctionner les nouvelles structures.

Le point 3, la taille des commissions scolaires. L'argumentation développée dans le livre blanc concernant la réduction du nombre des commissions scolaires est endossée par l'association. Cependant, le fractionnement de certaines grosses commissions scolaires au nom du principe de la participation mérite un examen plus attentif. Pour les centres urbains, il y a lieu de considérer d'autres principes que ceux qui découlent des économies d'échelle. Nous reprenons ici la comparaison avec la réforme municipale. On n'a pas assisté, au plan municipal, à un découpage des centres urbains, bien au contraire. Ainsi, sur l'île de Montréal, le gouvernement a créé la Communauté urbaine de Montréal et a également accepté la décision encore récente prise par la ville de Montréal d'annexer la ville de Pointe-aux-Trembles. Sans doute les exigences de planification et d'intégration des services justifient de tels regroupements.

Au niveau scolaire, on retrouve des arguments semblables. Les régions urbaines présentent des caractéristiques de population que l'on ne retrouve pas avec la même intensité dans les régions rurales ou semi-rurales et, notamment, la mobilité de la population, la concentration d'immigrés, la formation de zones de pauvreté. Au plan scolaire, on assiste à la manifestation de certains phénomènes, tels l'usage des drogues, la violence, l'abandon scolaire. Les caractéristiques et l'expression de ces phénomènes doivent être étudiées de façon globale afin d'y apporter des solutions satisfaisantes. Ainsi, il faut que continue d'exister une organisation scolaire à la mesure des besoins d'une métropole.

Par ailleurs, il n'existe plus au Québec de commissions scolaires atteintes d'un gigantisme manifeste. L'époque où la Commission des écoles catholiques de Montréal avait 235 000 élèves ne reviendra probablement plus. L'application de la loi 40 ramènerait la population étudiante de la Commission des écoles catholiques de Montréal à environ 80 000 élèves francophones. Les divisions régionales et sous-régionales qu'elle s'est données satisfont à la fois les besoins de participation locale, tout en ménageant des services centralisés qui ne pourraient être offerts autrement et qui garantissent que toute la population est servie avec équité.

Au plan humain, l'éclatement des grosses structures entraînerait la libération d'une charge émotive considérable à un moment critique de la mise en place des changements prévus par la loi. Il va sans

dire qu'un tel déplacement de l'investissement pourrait retarder ou même compromettre le succès de la réforme. Il est superflu d'évoquer ici la condition de saturation déjà atteinte dans les écoles par l'implantation des nouveaux programmes, l'application des nouveaux régimes pédagogiques, la mise sur pied du projet éducatif.

Après avoir étudié sérieusement le projet de loi 40 et avoir essayé de saisir les principes qui le sous-tendent, nous ne saisissons pas les raisons d'ordre pédagogique qui pourraient motiver un démantèlement de ces commissions scolaires et, en particulier, car nous y vivons et travaillons, de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Nous demandons donc de façon pressante au ministre de l'Éducation de maintenir le territoire de la Commission des écoles catholiques de Montréal tel que nous la connaissons actuellement.

Respect des conditions de travail actuelles des cadres. L'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal tient à affirmer, avec le livre blanc du ministère de l'Éducation, L'école communautaire et responsable, "qu'il faut d'abord s'assurer que la restructuration ne soit pas la cause, pour ainsi dire aveugle, de la perte des droits des divers personnels". Aussi, le ministre de l'Éducation, lors d'une rencontre avec les membres de notre association, le 25 octobre 1982, déclarait ce qui suit: "La restructuration ne saurait être une raison pour une atteinte à la sécurité d'emploi que connaissent actuellement les cadres." Le ministre d'affirmer aussi: "Dans nos premiers échanges avec les syndicats, nous avons dit que ce ne serait pas nouveau (les changements de territoires et d'unités d'accréditation), nous avons déjà procédé en 1971 à un tel réaménagement. Les principes qui nous avaient guidés alors seront de nouveau appliqués. Même d'une façon plus généreuse puisque nous prévoyons une comparaison des diverses conventions collectives et nous entendons retenir celles qui favorisent davantage les syndiqués. En ce qui concerne les cadres, il est entendu que toutes les discussions auront lieu au comité qui est prévu à cette fin."

Forts de ces déclarations, nous réclamons du ministère de l'Éducation le respect intégral et de façon permanente des conditions de travail de nos membres. Le ministre comprendra la volonté ferme et la détermination des membres de l'association à faire toutes les représentations pour obtenir le respect de leurs droits acquis. Je vous remercie.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. Saint-Jacques, de votre collaboration. Je peux vous assurer, de toute façon, que les membres ont pu prendre connaissance de l'ensemble de votre mémoire. D'ailleurs, vous pourrez le constater par la teneur des questions qu'ils vont vous poser. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, les cadres scolaires de Montréal, de par les fonctions qu'ils occupent et de par leur nombre, constituent des partenaires importants du système éducatif québécois. Je sais qu'ils ont consacré à la préparation et à la rédaction de ce long mémoire de 68 pages beaucoup de temps et d'attention. Je les en remercie et je les félicite d'autant plus que non seulement ce mémoire est très long, mais qu'ils fourmille de remarques toutes plus intéressantes les unes que les autres et très originales que nous ne retrouvons pas dans d'autres mémoires. Je peux donc assurer l'association des cadres qu'au-delà des questions que nous lui poserons ce soir nous avons déjà accordé et accorderons une extrême importance à chacune des propositions qu'elle nous fait.

L'association des cadres prend résolument parti dès le début pour la création d'une école responsable et communautaire, ce dont je me réjouis, évidemment. Mais, comme l'a fait déjà la Fédération des comités de parents, elle prend la peine d'analyser longuement la signification de cette école responsable et communautaire. Elle parle des éléments de la conception de cette école, elle parle des objectifs, elle parle des moyens. Je pense que c'est là une analyse extrêmement pertinente et inspirante. Par exemple, dans les éléments de sa conception, elle cite la symbiose avec le milieu, avec l'environnement, la complémentarité avec les autres ressources éducatives, le contexte social de participation, la primauté des préoccupations éducatives, etc.

Parmi les objectifs, il y en a un qui me plaît beaucoup, c'est celui du développement optimal de l'enfant, de l'éducation à l'autonomie de l'enfant et du développement de l'enfant qui doit devenir un être social, qui prend toutes ses responsabilités de citoyen. Je me suis intéressé aussi particulièrement à ce que vous décrivez comme moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs. Vous expliquez longuement vos solutions, tout en disant au départ qu'il est besoin de procéder à des changements malgré tous ceux que nous avons déjà connus. Vous voulez que l'école ait vraiment tous les moyens de devenir de plus en plus responsable de l'organisation de stratégies éducatives de première ligne. C'est une belle expression que je voulais noter au passage.

Vous voulez également rendre possible pour tous les agents de l'éducation une participation à la définition même de l'acte pédagogique et à l'action concrète dans

l'école au sein d'un projet éducatif que l'école doit définir. Vous parlez aussi - je comprends qu'à Montréal c'est un problème urgent et aigu - beaucoup de l'enracinement de l'école dans le milieu, mais particulièrement dans les milieux défavorisés, désavantagés, afin que nous puissions rendre justice davantage à ces élèves.

En ce qui concerne la commission scolaire, vous lui assignez comme fonctions principales - je pense que c'est facile d'être d'accord avec vous - le contrôle de l'efficacité de l'école, le partage des ressources, la mise en place de services communs, le support pédagogique et l'éducation spécialisée. Je pense que c'est là un bon résumé de votre position que j'ai trouvée originale pour ma part et que je me promets de relire.

Ensuite, vous parlez de l'école. Évidemment, comme vous l'avez dit, vous voudriez que le projet implique davantage les enseignants - ce avec quoi je suis d'accord -et surtout qu'il voie les enseignants non pas comme des employés, mais comme de véritables collaborateurs ou encore, en d'autres termes, comme de véritables professionnels. En passant, vous dites que vous êtes favorables aux nouveaux aménagements de la confessionnalité que contient le projet de loi. (21 h 45)

Par la suite, vous vous attardez au modèle de gestion et d'organisation de l'école, tout en répétant à ce propos que vous voulez accorder une très large autonomie à l'école sur le plan administratif. Vous avez cette belle phrase, qu'il faut relocaliser dans l'école le pouvoir de décision pour tout ce qui a trait à la pédagogie courante. Quant aux modes d'organisation, plutôt aux mécanismes et aux contenants, vous reprenez à votre compte les contenants que nous suggérons dans le projet de loi, c'est-à-dire le conseil d'école et, ensuite, le comité pédagogique. Vous allez même jusqu'à préciser les responsabilités de chacun, les dix responsabilités du conseil d'école et les huit responsabilités du comité pédagogique. Je pense que c'est là très bien situer les champs d'action respectifs du conseil d'école et du comité pédagogique. Il y a, cependant, une façon de les articuler différente de celle du projet de loi 40; j'y reviendrai un peu plus tard.

Par la suite, au sujet de la commission scolaire, en plus de ce que je viens de dire, vous endossez aussi le regroupement linguistique des commissions scolaires, ainsi que l'intégration des deux ordres d'enseignement, primaire et secondaire, de même que vous préconisez une composition mixte du conseil d'administration de la commission scolaire, c'est-à-dire des commissaires en partie élus au suffrage universel et en partie nommés par les conseils d'école, mais aussi en partie par les syndicats ou autres agents communautaires. C'est là une formule originale, nouvelle, qui mérite notre attention.

Ensuite, vous avez certains mots sur la situation de la Commission des écoles catholiques de Montréal qui pose un problème particulier. Je suis d'accord avec vous qu'on doive peut-être avoir des barèmes un peu différents pour les commissions scolaires rurales et pour les commissions scolaires urbaines. Il faut faire la part des choses et reconnaître, en vertu de ce que vous avez dit, que les commissions scolaires en région fortement urbanisée et connaissant des conditions particulières comme Montréal doivent peut-être avoir des bassins de clientèle plus nombreux qu'ailleurs, sans peut-être aller jusqu'à une disparité trop grande entre les clientèles des diverses commissions scolaires qui sont sur l'île. On pourra peut-être s'étendre davantage là-dessus.

Vous finissez - je m'y attendais - sur la nécessité qu'il y a de respecter les conditions de travail des cadres de la CECM. À cet égard, je suis très heureux de répéter les engagements que je prenais lorsque je vous ai rencontrés. Il est certain que cette restructuration ne se fera pas aux dépens du personnel actuellement en fonction dans les commissions scolaires. Comme vous le savez peut-être, le ministère a déjà rencontré jusqu'ici plusieurs associations de cadres et de hors-cadres pour leur faire part des projets, des orientations relatives aux normes et aux modalités de transfert et d'intégration. Je sais d'ailleurs que nous devons vous rencontrer très bientôt à ce sujet.

Les principes qui guident ces orientations sont peut-être plus explicites que ceux dont on vous faisait mention le 25 octobre, mais ils vont dans le même sens, c'est-à-dire que nous avons l'intention d'instaurer un moratoire sur les effectifs pour l'année 1985-1986 et un moratoire qui s'exercerait par groupes, c'est-à-dire les hors-cadres, les directeurs d'école, les cadres et les gérants. Nous avons bien l'intention aussi de maintenir les conditions de travail déjà prévues dans la réglementation et nous entendons consulter les associations sur les règles de transfert et d'intégration. Je suis assuré que les rencontres à venir nous permettront de trouver des solutions adéquates aux problèmes particuliers de vos membres.

Je me contenterai de vous poser une seule question. D'un côté, vous êtes d'accord pour une école responsable et communautaire; vous êtes d'accord pour que l'école soit autonome, définisse son projet éducatif, mais vous voudriez que ce soit sous l'autorité de la commission scolaire. Je me demande alors ceci: Si cela doit être fait

par autorité ou délégation de la part de la commission scolaire, est-ce que quelqu'un devra donner des directives aux commissions scolaires pour que ces dix responsabilités que vous avez définies pour le conseil d'école ou ces huit responsabilités que vous avez définies pour la commission pédagogique existent vraiment, soient connues, puissent être communiquées et surtout puissent être mises en oeuvre dans chacune des écoles du Québec? Selon la réponse que vous me donnerez à cette question, peut-être que vous pourrez en prendre une autre, additionnelle. Est-ce que vous suggéreriez alors que le projet de loi contienne des articles qui obligent les commissions scolaires à inclure les responsabilités et pouvoirs propres au conseil d'école et au comité pédagogique?

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: Si je comprends bien votre question, vous me demandez comment il se fait, si on veut une école qui puisse être autonome et responsable, qu'on demande aussi que ces pouvoirs de l'école et ces responsabilités lui soient délégués par la commission scolaire; c'était la première partie de votre question. Alors, oui, nous croyons qu'il faut une décentralisation vers l'école et permettre à l'école de jouer réellement de plus en plus ce rôle face à sa communauté locale. Mais nous croyons aussi, lorsque nous confions des mandats et des responsabilités à un organisme quelconque, qu'il doit y avoir possibilité de rendre compte à une autorité supérieure des façons dont nous avons respecté les mandats qui nous étaient confiés, ce que nous n'avons pas saisi à l'intérieur du projet de loi 40. Je pense qu'on vous rejoignait sur L'école communautaire et responsable, mais on ne saisit pas à qui l'école peut rendre compte de son administration de la chose scolaire. Donc, nous croyons qu'il est nécessaire que la commission scolaire puisse avoir autorité sur ses écoles et qu'elle puisse exiger que les écoles rendent compte de leur administration pédagogique.

Je crois que la deuxième partie de votre question, c'était: Si, dans le projet de loi, il y avait déjà certaines responsabilités, serions-nous opposés à ce que la commission scolaire donne à ses écoles un certain nombre de responsabilités énumérées? Est-ce que c'est bien ça?

M. Laurin: Une garantie que la commission scolaire confiera aux écoles, au conseil d'école et au comité pédagogique les responsabilités que vous souhaitez voir assumer par l'école, par le conseil d'école et par le comité pédagogique.

M. Saint-Jacques: Si vous le remarquez, dans notre mémoire, nous avons fait appel déjà à la loi 71 et à plusieurs responsabilités qui y étaient déjà formulées. Je pense, sans qu'on ait discuté de cette question en assemblée générale, que je peux répondre que nous serions favorables à ce qu'il puisse y avoir, comme on l'a fait pour la loi 71, une certaine énumération de responsabilités fondamentales qui puissent être confiées à l'école.

M. Laurin: Cela reviendrait, en somme, à ce que le projet de loi contienne des dispositions qui assurent à l'école, ainsi qu'à ses diverses instances les responsabilités et pouvoirs nécessaires pour qu'elle assume sa signification pleine et entière d'école responsable et communautaire.

M. Saint-Jacques: C'est ça, mais cela n'enlève rien aux commissions scolaires comme responsabilités sur le plan pédagogique plus larges vis-à-vis de la communauté, car, comme vous l'avez souligné vous-même, dans notre mémoire, nous parlons aussi de cette pédagogie quotidienne de première ligne. Il reste qu'il peut y avoir des orientations, qu'il peut y avoir des adaptations.

M. Laurin: Donc, si je comprends bien, ce ne serait pas une délégation de la part de la commission scolaire qui constituerait une sorte de blanc-seing, une délégation que la commission scolaire ferait au moment opportun, comme on nous le disait ce matin, en temps et lieu et dans des termes qui ne seraient pas formulés dans le projet de loi, mais qui seraient déterminés de temps à autre par la commission scolaire. Ce serait une énumération de responsabilités, de pouvoirs très définis, très précis que la commission scolaire s'engage à déléguer à l'école aux fins, comme vous le disiez, de contrôle, d'imputabilité ou de reddition de comptes.

M. Saint-Jacques: Oui, mais, M. le Président, si vous le permettez, il y a un point qui revient dans notre mémoire. Nous pensons quand même qu'il y a toute une question de temps aussi. Il faut fonctionner avec l'évolution d'un milieu. Naturellement, je comprends que, dans le projet de loi, on donne un an, je pense, pour l'application des différents articles, mais il y a aussi un article qui permet au ministre d'étendre, à ce moment-là, le temps. Je ne peux pas vous dire actuellement le temps exact que cela peut prendre pour transformer ainsi l'école pour qu'elle devienne encore plus responsable et plus axée sur son milieu, mais je pense qu'il faut permettre au milieu de prendre le temps de vivre cette réforme.

Le Président (M. Blouin): Cela va? Merci, M. le ministre.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, je me contenterai, pour l'instant, de saluer l'Association des cadres de la Commission des écoles catholiques de Montréal et de la remercier de la présentation qu'elle nous a faite. Je vais demander à ma collègue de L'Acadie, Mme Lavoie-Roux, qui est l'ancienne présidente de la Commission des écoles catholiques de Montréal, de commencer la période d'échange avec vous. Peut-être que j'aurai tantôt une couple de remarques à vous adresser.

Je voudrais simplement me contenter, cependant, d'une observation générale. J'écoutais la réaction du ministre et je voudrais lui dire que, s'il est prêt à prendre une partie de vos propositions, il faudrait qu'il pense à l'autre partie également, parce que c'est un tout qui se tient. Il ne serait pas justifié de prendre seulement votre acquiescement à l'insertion de pouvoirs pour le conseil d'école, par exemple, dans la loi s'il n'accepte pas également les clauses qui visent à assurer le rattachement organique de l'école à la commission scolaire. Je pense, M. le ministre, que ce sont des choses qui se tiennent ensemble si vous voulez avoir un projet qui soit sérieux. Ce que ces gens sont venus nous dire, c'est un volet, mais il y a l'autre volet, les deux ensemble faisant un tout organique.

Le Président (M. Blouin): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer d'une façon toute particulière M. Saint-Jacques, M. Langevin et M. Gazze. Cela nous ramène à plusieurs années en arrière où, dans une salle un peu plus petite, on échangeait sur un grand nombre de problèmes qui, soit dit en passant - je pense que vous serez peut-être d'accord - n'étaient pas strictement d'ordre administratif, mais souvent d'ordre pédagogique et peut-être, le plus souvent, d'ordre pédagogique. Ceci étant dit, je veux vous remercier pour votre mémoire qui, je pense, continue de démontrer les préoccupations profondément éducatives que les cadres de la CECM ont toujours eues, même ceux qui étaient rattachés à l'équipement. Je pense à M. Gazze; quand il planifiait ses écoles, tout l'aspect pédagogique à l'intérieur du cadre physique des écoles était important et il était bien sensibilisé aux dimensions de la formation de l'enfant.

Je voudrais vous faire préciser si ce que j'ai cru déceler dans le modèle que vous proposiez à deux paliers - ce n'est peut-être pas "deux paliers", le terme que vous utilisez; oui, je pense que c'est cela, deux paliers, un qui soit le conseil d'école et un qui soit le comité pédagogique - au fond, n'est pas un modèle qui se rapproche beaucoup - et c'est peut-être dans ce sens qu'était la question du ministre - du conseil d'orientation, finalement. Il s'appelle le conseil d'école à ce moment-là plutôt que de s'appeler le conseil d'orientation et même la nomination ou l'élection se fait selon les modalités déjà prévues pour le conseil d'orientation. Est-ce que je me trompe ou si c'est ce que vous aviez à l'esprit, sauf que vous lui donnez peut-être plus de responsabilités pédagogiques? Dans ce sens, le rôle des parents du conseil d'école se rapprocherait dans une large mesure de celui que les commissaires d'écoles actuels jouent à l'égard des questions pédagogiques quand, par exemple, les responsables de la pédagogie à l'intérieur de la commission font des recommandations d'ordre pédagogique de telle ou telle nature et que les commissaires les endossent ou demandent des modifications. Est-ce un peu ce modèle que vous transférez au niveau de l'école, mais en partant comme organisation de ce qui est prévu pour le conseil d'orientation?

M. Saint-Jacques: M. le Président, oui, je pense, comme on le disait tout à l'heure, que nous nous sommes beaucoup inspirés du conseil d'orientation comme formule, sauf que - je pense qu'il est connu que les conseils d'orientation ont fonctionné plus ou moins bien à l'intérieur des écoles - nous croyons qu'il faut donner des responsabilités et des pouvoirs réels de décision au conseil d'école. (22 heures)

Maintenant, ce qui nous rend un peu difficile la lecture du projet de loi, c'est qu'on n'y voit pas, de façon claire... On dit naturellement que des enseignants pourraient être présents au conseil d'école. On dit un ou plusieurs, mais il n'y a pas d'obligation que les enseignants soient là. C'est s'ils le veulent bien. Et on comprend à ce moment-là que les parents peuvent être très majoritaires à ce conseil. D'un autre côté, on parle d'une école responsable et communautaire et il n'y a pas d'autre agent de la communauté présent au conseil d'école. Nous, on propose un conseil d'école où il y aura des parents en majorité, mais naturellement, lorsqu'on parle de quinze personnes au maximum à un conseil d'école, on ne suppose pas quatorze parents et un enseignant. On suppose que les parents peuvent être majoritaires, mais qu'il y ait un nombre assez important d'enseignants. Une fois que ce premier noyau sera en place, à ce moment-là, il pourra offrir à la communauté, par les groupes socio-économiques du milieu, d'être présente aussi dans l'école au sein du conseil d'école et de

voir à ce qu'il ait réellement des possibilités de prendre des décisions face à la pédagogie de l'école...

Mme Lavoie-Roux: Dans les pouvoirs... Oui, continuez, M. Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: ...mais ce sera nécessairement associé à un comité pédagogique où nous croyons que les enseignants et le personnel de l'école seront majoritaires avec des parents et qui - on a défini une série de responsabilités de ce comité pédagogique - pourra proposer au conseil d'école des orientations, des façons de faire, apporter une expertise professionnelle à l'école pour aider le conseil d'école à prendre les bonnes décisions face à la communauté.

Mme Lavoie-Roux: En passant - c'est une petite parenthèse - vous suggérez que ces membres de la communauté qui seraient appelés à siéger au conseil d'école seraient choisis par la commission scolaire sur recommandation de l'école. Je me suis demandé pourquoi vous faites intervenir la commission scolaire. Ce n'est pas exact?

M. Saint-Jacques: On a eu un premier projet, je crois...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Saint-Jacques: Je ne voudrais pas me tromper, mais on a eu un premier projet qui n'était pas le projet officiel de notre association. Nous sommes allés en assemblée générale. Il y a eu des corrections apportées à ce premier projet et il y a maintenant une nouvelle version qui est la version officielle. Je ne crois plus qu'on ait à l'intérieur de cette version ce que vous venez de dire,

Mme Lavoie-Roux: Non? M. Saint-Jacques: Non.

Mme Lavoie-Roux: Enfin, il me semblait bien que... À moins qu'on n'ait une vieille version, nous. Oui, M. Langevin?

M. Langevin (André): M. le Président, non, effectivement, les membres, que ce soit à l'échelon de l'école ou à l'échelon de la commission scolaire... Le modèle que vous avez devant vous, c'est un modèle, au fond -ce n'est pas explicite - à géométrie variable, c'est-à-dire qu'au fur et à mesure que les gens sont capables d'inclure des gens de la communauté ils les choisissent et ce sont eux les gens qu'on définit comme membres du comité d'école, ou comme conseil des commissaires nouveaux qui choisissent d'inclure des gens au fur et à mesure qu'ils le désirent, que ce soit des représentants de grandes compagnies, que ce soit des représentants des caisses populaires...

Mme Lavoie-Roux: Oui, en tout cas, je l'ai lu dans votre mémoire, ou j'ai lu... Pardon?

M. Gazze (Katif): Oui, oui. À la page 25, vous avez raison, madame.

Mme Lavoie-Roux: Bon. Je ne l'avais pas inventé.

M. Gazze: Les représentants de la communauté sont nommés par la commission scolaire à la suite d'une recommandation du conseil d'école.

M. Saint-Jacques: À la suite d'une recommandation du conseil d'école.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais ils sont nommés par la commission scolaire. Je ne vois pas la nécessité que ce soit d'une certaine façon sanctionné par la commission scolaire. Mais c'est un détail. Il ne faut peut-être pas...

M. Gazze: C'est un sujet discutable, mais nous avons pensé que, le conseil d'école recommandant la nomination d'une personnalité, la commission scolaire, normalement, devrait accepter, à moins d'avoir une objection grave. C'est quand même la commission scolaire qui est responsable de ses écoles.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Gazze: Et ce n'est pas une élection; c'est une nomination.

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord. Maintenant, au comité pédagogique, vous prévoyez aussi que des parents puissent siéger?

M. Saint-Jacques: Oui, oui.

Mme Lavoie-Roux: Ce qui est nouveau, je pense, par rapport au comité pédagogique d'enseignants qui est prévu par le projet du ministre. Quel est votre objectif? Est-ce la communication, ou dans quelle proportion les parents devraient-ils y être, parce que ce n'est pas précisé dans votre projet?

M. Saint-Jacques: Là encore, comme je le disais tout à l'heure, nous croyons qu'il devrait y avoir une majorité d'enseignants avec un certain nombre de parents. Maintenant, on n'est pas allé jusqu'au point de définir très exactement le nombre de personnnes. Est-ce que cela devrait être décidé à l'intérieur de la loi comme telle? On a laissé aux gens, si l'idée peut être

acceptée par le ministre de l'Éducation, le soin de définir un peu ces nombres-là. Nous croyons que la participation des parents à l'intérieur d'un conseil d'administration était déjà une chose, mais à l'intérieur des activités régulières quotidiennes de l'école, nous pensons aussi que les parents ont leur place et peuvent, à ce moment, s'établir, comme on disait dans notre mémoire, en collaboration avec les professionnels que sont les enseignants.

Naturellement pourra se poser la question de l'éthique professionnelle, et on nous a interrogés sur cela. Nous croyons qu'il y a possibilité de définir un certain code d'éthique parce que c'est entendu, à ce moment-là, qu'il y a des études, par exemple, d'enfants qui peuvent être en difficulté d'apprentissage, ce qui demande un certain respect des renseignements confidentiels qu'on reçoit. Mais je pense que ce n'est pas une raison pour éviter la participation des parents à un tel comité.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aimerais demander à M. Langevin s'il peut nous dire ceci: Est-ce que les pouvoirs que vous prévoyez dans votre modèle, lesquels seraient dans la loi, iraient beaucoup plus loin que ceux qui, au plan de l'organisation et de la pédagogie de l'école, même de la gestion de l'école, sont présentement accordés à une école telle que - et je sais qu'elle vous est très familière - l'école-atelier, par exemple, sauf qu'ils sont inscrits dans la loi et qu'ils n'y étaient pas à ce moment?

M. Langevin: M. le Président, pour répondre à la question de Mme la députée, je dois dire que, même dans le cadre de la loi actuelle, l'école-atelier vit mal. Je ne sais pas comment elle pourrait bien vivre dans le cadre de la loi 40, car ce qu'on en perçoit, c'est une loi énormément normalisante, même si l'on dit qu'on accorde beaucoup de pouvoirs locaux. Les pouvoirs locaux que nous avons décrits dans notre rapport sont les pouvoirs que possèdent dans la loi actuelle les commissions scolaires. Je pourrais parler longuement du très mince pouvoir que possèdent actuellement les commissions scolaires sur le plan pédagogique, actuellement et non pas avec la loi 40. On ne fait que repousser cela à l'école. On le fait, nous, consciemment, dans notre mémoire. Ce qui est résiduel actuellement aux commissions scolaires, on le pousse à l'école, mais les pouvoirs du ministère sont énormes. Dans notre mémoire, on a un long chapitre sur les pouvoirs du ministère. Pour répondre très spécifiquement à votre question: Est-ce qu'ils en auraient plus qu'ils en ont actuellement? je ne le crois pas. Présentement, par exemple, puisque vous parlez spécifiquement de cette école-là...

Mme Lavoie-Roux: Parce que c'est un projet d'école...

M. Langevin: Très particulier, oui, c'est une école "alternative" dans le système. Les gens choisissent leurs livres, ils choisissent le type de discipline qu'ils veulent à l'école, ils choisissent leur horaire, ils choisissent leur "bossing". Ils choisissent tout cela présentement, dans le cadre de la loi actuelle.

Mme Lavoie-Roux: On permettrait de l'étendre à toutes les écoles. Est-ce souhaitable que toutes les écoles fonctionnent selon cette formule-là?

M. Langevin: M. le Président, tantôt c'est l'expression que j'ai utilisée de la géométrie variable.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Langevin: Ce milieu très particulier de l'école-atelier, ce sont les parents qui ont choisi la participation et l'individualisation de l'enseignement, la pédagogie ouverte. Ils l'ont choisi pour cela. C'est un choix. Mais on ne peut pas, je pense, imposer à tous les parents demain matin de participer. La participation, cela ne s'impose pas. Il y a d'ailleurs une disposition dans le projet de loi 40 qui permet de faire en sorte que les gens pourraient même dire - c'est ce que nous avons énuméré dans les pouvoirs qu'on veut transmettre aux parents - Pour un certain temps, on refuse de les exercer, on les laisse à la commission scolaire. Ce n'est pas spécifique dans notre rapport, mais, dans notre esprit, quand on en a discuté, cela allait jusque-là.

Mme Lavoie-Roux: Ce que vous dites, dans le fond - c'est vrai qu'il y a une disposition à l'article 216 - dans votre esprit, est-ce que le temporaire qui est dans la rédaction de cet article, à savoir que pour une période temporaire, la commission scolaire pourrait continuer d'exercer... Selon votre expérience - vous étiez dans la région 5, au moment où vous étiez en charge de la pédagogie dans cette région qui était peut-être la plus grosse de la CECM - pensez-vous que ce temporaire, pour un certain nombre d'écoles, pourrait être assez long? Si on veut être réaliste... Peut-être que le temporaire sera défini par règlement, je n'en ai aucune idée; pour le moment, c'est temporaire. Dans la pratique, dans la réalité, est-ce que, pour certaines écoles dans la région 5 ou ailleurs, cela pourrait être un temporaire qui se prolonge assez longtemps?

M. Langevin: M. le Président, à cette

question, je répondrai que cela peut être aussi temporaire que la démocratie. La démocratie est toujours à faire et à refaire. C'est certain qu'il faudrait un certain temps pour impliquer les gens de façon profonde, mais on ne doit pas refuser pour cela. Même pour nous, vous avez peut-être senti qu'on peut y aller avec une certaine insistance dans notre mémoire; c'est-à-dire qu'il y a le jeu de ce que les Américains appellent le "push and pull". Il faut pousser et il faut tirer de temps en temps. Donc, on est prêt à y aller un peu.

Mme Lavoie-Roux: II va falloir que je me dépêche, il paraît qu'il me reste seulement cinq minutes. Mon truc, c'est de poser quatre questions en même temps et c'est vous qui êtes responsable du dépassement.

Le Président (M. Blouin): Ce n'est pas une marque de courtoisie à l'égard de nos invités. Ce sont eux qui devront en subir les préjudices, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas sûre qu'ils vont juger que ce sont des préjudices, M. le Président.

Au chapitre sur la centralisation - le chapitre IV - que vous n'avez pas eu le temps d'aborder, à la page 42: La tendance à la centralisation du ministère de l'Éducation, vous dites: "Dans le livre blanc, le ministre fait le procès de son ministère à qui il reproche la tendance à tout contrôler et réglementer. L'association croyait pouvoir s'attendre à des assouplissements. La lecture du projet de loi 40 ne nous permet pas de découvrir un article - je suis sûre, mais il n'est pas ici, que le député de Vachon vous en trouverait au moins un; il essaie de convaincre tout le monde qu'il y en a au moins un - proposant une réduction des pouvoirs du ministère de l'Éducation." Je sais que vous êtes probablement parmi ceux qui reçoivent en premier lieu les directives et les règles du ministère, presque hebdomadairement, sinon deux fois la semaine; peut-être que j'exagère. D'après vous, est-ce que le projet de loi 40 ne propose vraiment pas d'assouplissement? Peut-être que vous n'avez pas été mis au courant de quelques amendements que le ministre a déposés mardi matin. Selon vous, au projet de loi 40, il n'y a pas de décentralisation de proposée?

Le Président (M. Blouin): Oui, M. Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: M. le Président, je demanderais à M. Langevin de répondre à...

Le Président (M. Blouin): M. Langevin, rapidement s'il vous plaît.

M. Langevin: M. le Président, je reviens à ce que je vous disais tantôt, c'est-à-dire qu'actuellement, de par les nouveaux régimes pédagogiques, les gens parlent beaucoup des pouvoirs à décentraliser vers les parents. Or, il n'y a pas eu de commission parlementaire au moment où on a eu le livre oranger et L'école québécoise et que les nouveaux régimes pédagogiques sont apparus. Les programmes-cadres sont disparus. On a eu des programmes très précis, restrictifs, avec des objectifs terminaux, avec le manuel de base et déjà se jouait à ce moment-là, il y a deux ans et demi, une partie de la chose dont on discute aujourd'hui. Déjà, à ce moment-là, était entamé le pouvoir des commissions scolaires sur le plan pédagogique. C'était déjà fait. (22 h 15)

Maintenant, qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui? Nous, comme je vous le disais tantôt, on le fait tout à fait consciemment, ce qu'il nous reste on le porte à l'école. La marge est très mince. C'est assez centralisé. Par exemple, la liste des manuels, le ministère avait une liste omnibus. Il fallait que cela réponde sur le plan de la confessionnalité, sur le plan de la foi. Il fallait que cela réponde sur le plan de la langue. Une immense liste. Maintenant, avec les nouveaux programmes, dans certains cas, nous n'avons plus qu'un seul livre, parce que les éditeurs ne sont pas capables de les produire. Alors, le pouvoir que vous transmettez à l'école comme celui qui est à la commission scolaire, c'est de choisir le livre qui est là ou de choisir entre deux livres. Il faut discuter de ce qui est devant nous. Il faut parler de ce qui est dans l'assiette, non pas de ce qui est à côté.

Le Président (M. Blouin): Cela va?

Mme Lavoie-Roux: Selon vous, le projet de loi 40 n'est pas un projet qui décentralise.

M. Langevin: II décentralise comme nous on le fait. On porte les pouvoirs résiduaires qu'il nous reste à l'école.

Mme Lavoie-Roux: Mais vers les commissions scolaires, est-ce qu'il y a une décentralisation?

M. Langevin: Pas actuellement. Mme Lavoie-Roux: II n'yen a pas.

Le Président (M. Blouin): Très bien. Merci.

Mme Lavoie-Roux: Une minute.

Le Président (M. Blouin): Non, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Avec le consentement. Je voulais poser une question sur le territoire de la CECM.

Le Président (M. Blouin): II y a consentement, mais très rapidement, s'il vous plaît. Vous comprenez le problème auquel nous devons faire face, Mme la députée de L'Acadie. Je demande donc votre collaboration et permettez-moi d'insister.

Mme Lavoie-Roux: II y a une seule question que je voudrais poser et je vais la faire la plus brève possible. Je pense que vous y touchez, mais j'aimerais peut-être que vous en parliez davantage. Au plan des réalités sociales du territoire de la CECM, qui regroupe quand même le coeur de la ville de Montréal, un centre urbain avec tout ce que cela comporte au plan du tissu social parfois très complexe, est-ce que le fait d'être une commission scolaire de plus grande taille permet de mieux répondre aux besoins des différents groupes? Vous dites: Si nous restons avec une commission scolaire linguistique, nous serons environ 80 000 comparativement à 230 000 à une autre époque. Est-ce que, selon vous, ceci permet d'abord d'offrir de meilleurs services? Est-ce que cela permet une meilleure péréquation des ressources pour répondre aux besoins les plus criants, compte tenu des ressources générales qui sont mises à la disposition du système d'éducation?

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques.

Mme Lavoie-Roux: Parce que je pense que c'est cela qui est le facteur important à savoir si on coupe ce territoire ou si on tente de le garder intact au moins au niveau de la ville de Montréal.

Le Président (M. Blouin): M. Langevin.

M. Langevin: M. le Président, on pense qu'actuellement, on a développé une expertise parce qu'on vit depuis longtemps dans ce milieu. On pense qu'à une métropole doivent correspondre des services qui sont comparables à ceux qu'on doit offrir à une métropole. Je comprends les désirs, dans un certain sens, du ministre de vouloir réduire des tailles comme celle qu'on avait antérieurement. Mais 80 000, c'est l'équivalent de la commission scolaire de Scarborough. Nous, on pense que c'est une taille pour la métropole qui nous permettrait d'avoir des services différenciés parce que, dans une petite commission scolaire, c'est vrai que "small is beautiful", mais c'est vrai aussi que vous ne pouvez pas vous offrir une multiplicité de services. La taille nous permet de nous offrir, par exemple, des spécialistes particuliers par rapport à des besoins particuliers rattachés à une métropole.

Le Président (M. Blouin): D'accord, merci, M. Langevin. Merci, Mme la députée de L'Acadie. M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais vous féliciter pour votre mémoire parce que, dès le début, on sent une préoccupation qui est tournée vers les besoins de l'enfant et on la retrouve en avançant dans votre document. Je trouve cela très important qu'on y revienne. De plus, je trouve que c'est un document qui est très ouvert sur le changement, qui propose des choses concrètes avec une orientation qui est à la fois communautaire, participative et sociale et on y retrouve même le bénévolat. Je trouve cela important parce que, dans la société québécoise, c'est quand même quelque chose, c'est un facteur qu'on retrouve dans tous les milieux, mais on ne spécifie pas assez souvent la présence de ces gens.

Mme la députée de L'Acadie m'a volé un peu ma question, mais je vais la ramener dans un autre sens, pour revenir exactement sur la tâche de la commission scolaire. Dans un chapitre, vous en parlez en disant, et avec raison, qu'il faut regarder de plus près la région métropolitaine de Montréal, parce que c'est spécial. Vous dites que les régions urbaines présentent des caractéristiques de population que l'on ne retrouve pas avec la même intensité dans les régions urbaines et semi-urbaines. Vous en spécifiez quelques-unes: la mobilité, l'immigration, les zones de pauvreté, la drogue, la violence, l'abandon scolaire. Plusieurs facteurs sont énumérés ici et c'est vrai que, dans une métropole comme Montréal, il y plus de risques que des problèmes semblables soient concentrés dans la métropole.

Ce que je vous demande, c'est si vous n'avez pas l'impression que, si c'était divisé en commissions scolaires plus petites, cela pourrait amener une dynamique différente, une certaine émulation, le fait de créer des expériences nouvelles de quartier. En ayant des commissions scolaires qui soient plus près finalement des milieux et des écoles, n'avez-vous pas justement l'impression qu'il va se tenter des expériences différentes d'une commission scolaire à l'autre qui pourraient faire en sorte d'amener finalement une dynamique de comparaison entre les commissions scolaires qui seraient existantes à ce moment sur l'Ile de Montréal?

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: M. le Président, naturellement, comme nous avons déjà pris position à l'intérieur de notre mémoire, nous

ne croyons pas que ce soit... D'abord, nous ne prévoyons pas que les divisions en commissions scolaires comme telles, cela va bonifier la situation. À la commission scolaire de Montréal, nous avons déjà des regroupements qui existent et je pense qu'à l'intérieur de ces regroupements, on pourra retrouver l'argumentation où vous parlez d'une certaine dynamique.

Mais il reste à ce moment, à cause des nombreux problèmes et difficultés que présente une métropole, que nous croyons que l'organisme devrait encore couvrir le même territoire et pouvoir bénéficier des expertises d'un regroupement qui peut se retrouver, par exemple, en milieu aisé, et qui peut apporter des expertises pour permettre d'aider des milieux défavorisés où certaines formules d'inadaptation peuvent en profiter. C'est cette possibilité d'avoir une commission scolaire, face à l'ensemble de cette population de la métropole, qui puisse répartir plus facilement ses ressources, qui puisse appeler les expertises d'un regroupement vers l'autre. Réellement, nous croyons, jusqu'à aujourd'hui, qu'il faut respecter le territoire actuel de la commission scolaire, qui fait quand même appel à une bonne tradition de services rendus à cette population.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député de Shefford.

M. Paré: Je vous remercie. J'aurais une autre question, s'il vous plaît. Vous parlez aussi d'une autre chose très importante dans la présentation de votre mémoire. Il s'agit des enseignants. Effectivement, c'est une préoccupation dont on ne cesse de parler. À chaque groupe, on en a parlé et c'est essentiel, de toute façon, ce sont des gens qui dispensent les cours à l'école.

Dans votre mémoire, vous mentionnez qu'il devrait y avoir une représentation significative. Vous allez plus loin en disant que les associations d'enseignants devraient se prononcer clairement et publiquement sur la volonté qu'elles ont de collaborer. J'aimerais que vous alliez un peu plus loin là-dedans. Quel est le sens que vous voulez donner à cette partie de votre texte?

M. Saint-Jacques: Je crois, pour avoir écouté le ministre de l'Éducation, qui est peut-être intervenu à propos d'un autre mémoire, qu'à ce moment, le projet de loi 40 prévoit de laisser le libre choix aux enseignants de participer à ce genre de conseil d'école en disant: Je ne voudrais pas les obliger à ce moment et qu'on puisse ensuite nous le reprocher, que cela devienne peut-être un lieu de confrontation et qu'on discute de problèmes autres que de problèmes pédagogiques.

Nous croyons quand même - nous avons confiance dans les enseignants, pris individuellement et globalement - qu'il y a un niveau professionnel qu'ils savent respecter. Nous croyons qu'un conseil d'école, si nous voulons réellement qu'il soit responsable, qu'il soit tourné vers sa communauté, appelle à ce moment réellement une participation à l'acte pédagogique, à la définition de l'acte pédagogique, à toute la définition d'aide aux élèves, appelle de la part des enseignants qu'ils jouent nécessairement un rôle au plan professionnel à l'intérieur du conseil d'école, que cela ne soit pas un lieu pour discuter d'autres dimensions que des affaires pédagogiques de l'école.

C'est pour cela qu'on croit, et peut-être un peu pour rassurer le ministre, qu'il serait bienvenu que des associations d'enseignants puissent publiquement s'engager à jouer un rôle professionnel à l'intérieur des conseils d'école.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. le député de Shefford. Je signale aux membres de la commission qu'il est presque 22 h 30, que certains membres ont encore demandé la parole et que nous devons par la suite entendre une autre présentation et une série d'échanges avec un autre groupe. En principe, nous devons terminer nos travaux à minuit et demain nous devons reprendre les travaux à 9 heures. C'est dans cet esprit et par déférence pour le dernier groupe que nous avons à entendre que je me fais plus pressant pour demander la collaboration des membres de la commission afin qu'ils restreignent au maximum leurs interventions et qu'ils les fassent le plus succinctement possible. M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci, M. le Président.

Toujours dans un esprit de collaboration, je peux vous assurer que je tenterai d'être très bref.

Le Président (M. Blouin): Je suis sûr que vous en êtes capable, M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci beaucoup. J'en ai l'habitude, oui. Plusieurs intervenants dans le domaine scolaire, depuis de nombreuses années, ont déclaré, et avec raison, que le pouvoir décisionnel pédagogique, s'il n'est pas accompagné d'un pouvoir budgétaire, d'un contrôle des budgets, n'est pas vraiment un pouvoir pédagogique. On a entendu hier de la part de la commission scolaire de Sherbrooke que, selon les expériences qu'elle a tentées, elle a décentralisé le budget au niveau de l'école, un certain montant au niveau de l'école. J'aimerais savoir de vous, M. Gazze, si, de la part de la CECM, dans le secteur francophone - je sais que cela est fait au secteur anglophone - il y a eu une

décentralisation des fonds au niveau de l'école.

M. Gazze: Sur le plan administratif et sur celui de l'équipement, en 1977, nous avons fait une décentralisation des effectifs, ce qui correspond déjà dans le budget aux régions administratives. Si on ne l'a pas fait à l'école, c'est que nous n'avions pas la possibilité de le faire parce que chaque région administrative se compose de 70 écoles et que nous avions à peine une équipe à consacrer à une région pour desservir les écoles. Si on n'a pu aller plus loin, c'est parce que nous n'avions pas la possibilité budgétaire de le faire. On est allé jusque-là. C'est ce qui prime actuellement, c'est ce qui est appliqué.

M. Cusano: Si je comprends bien et si je me souviens bien de certaines de mes expériences vécues en tant que directeur d'une école anglophone de la CECM, c'est qu'à un certain moment, on nous a informés qu'au-delà des montants alloués pour les dépenses au jour le jour... On est arrivé avec un budget décentralisé qui, pour mon école, desservait environ 600 élèves. J'avais été informé du fait que mon budget était décentralisé et que je recevais une somme de 156 000 $. Après analyse, je me suis aperçu qu'il fallait que je soustraie les salaires des concierges, des secrétaires, des surveillantes du dîner, etc. Que me restait-il à la fin? Il ne restait pas grand-chose. (22 h 30)

Lorsque j'ai posé la question à la Commission scolaire de Sherbrooke, on m'a laissé l'impression que cette décentralisation... Eux, ils parlaient de 100 000 $ pour une école de 300 élèves et cela irait jusqu'à 215 000 $ pour une école de 700 élèves. Ma question plus précise, c'est que, même s'il y a ce transfert de montants et que l'école n'a pas de contrôle sur les salaires des concierges, des aides-concierges, des secrétaires qui sont liés par une entente collective, la seule chose qu'on fait, on transfère des chiffres, mais le pouvoir réel est très minime.

M. Gazze: Je ne sais pas si vous me permettez de répondre. C'est pour cela que je n'ai pas parlé d'une décentralisation, parce que, au fond, c'est une imputation budgétaire qu'on fait à l'école, ce sont les salaires des enseignants, les salaires des concierges, les salaires de tous ceux qui travaillent qui sont déjà fixés; que ce budget soit à la commission scolaire ou à l'école, ça ne change rien. Ceci n'est pas une décentralisation. Si l'école avait la possibilité d'imputer une certaine partie de ce budget à une autre activité, là il y aurait lieu de considérer cela comme une sorte de décentralisation, mais je pense que les conventions collectives ne vous permettaient pas de faire ça.

M. Cusano: La raison pour laquelle je vous ai posé cette question, c'est que plusieurs intervenants, depuis la publication du livre blanc, ont laissé planer l'idée de gros montants qui s'en allaient vers l'école, sans donner les détails que vous venez justement de donner et je l'apprécie.

Une autre question supplémentaire.

Le Président (M. Blouin): D'accord.

M. Cusano: De ce côté, en prenant le projet de loi 40, avec toute cette décentralisation qui est proposée, avez-vous fait une analyse, vraiment, des montants réels qui seraient contrôlés par le comité d'école, le directeur, etc.?

M. Gazze: Je ne penserais pas qu'il y ait un changement comparativement à l'état actuel comme décentralisation au point de vue budgétaire, à moins que l'école ne puisse avoir une certaine liberté de choix dans certains domaines, par exemple, qu'elle ne puisse attribuer moins de professeurs pour attribuer plus de concierges, si c'est son choix, ou vice versa. Mais, tant qu'il n'y a pas ces choix à la disposition de l'école, je ne pense pas qu'il y ait une décentralisation.

M. Cusano: Merci, monsieur. Cela a été assez bref, M. le Président?

Le Président (M. Blouin): Je vous remercie, M. le député de Viau, vous avez bien entendu l'appel de collaboration et je suis persuadé, par anticipation, que les deux derniers intervenants ont également compris ce message. M. le député de Mille-Îles.

M. Champagne (Mille-Îles): Dans un esprit de collaboration avec les invités et les membres de la commission, je vais céder mon droit de parole au député de Fabre...

Le Président (M. Blouin): C'est au-delà de toute espérance, M. le député de Mille-Îles'.

M. Champagne (Mille-Îles): ...qui m'a promis d'ailleurs d'être très bref.

Le Président (M. Blouin): Très bien. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président, merci, M. le député de Mille-Îles. Je serai très bref. J'aurais beaucoup de questions à vous poser, mais je vais me limiter à une seule. Cela a trait aux directeurs d'école. Je voudrais que vous dissipiez ce que je perçois comme de la confusion. D'une part, vous faites relever le directeur d'école de la commission scolaire

qui a certains pouvoirs sur l'école. D'autre part, vous maintenez, au niveau du conseil d'école, des pouvoirs décisionnels. Dans le projet de loi 40 - je pense qu'il en est ainsi à l'intérieur de l'école actuellement, le directeur d'école est un exécutant - en quelque sorte, il devient l'exécutif du conseil d'école. Comment concilier ce qui me semble être une contradiction du fait que, dans votre proposition, le directeur d'école va relever non pas de l'instance décisionnelle au niveau de l'école, mais de la commission scolaire? Est-ce que cela ne risque pas d'engendrer de très graves conflits et est-ce que cela ne risque pas de placer le directeur d'école dans une situation difficile?

Le Président (M. Blouin): M. Saint-Jacques.

M. Saint-Jacques: M. le Président, c'est un peu presque l'inverse que nous avions comme impression. C'est-à-dire qu'un directeur d'école qui serait soumis aux pressions exclusives des parents, si on interprète bien le projet de loi 40, on supposait, à ce moment-là, que cela deviendrait extrêmement difficile pour un directeur d'école de vivre à l'intérieur de cette école. Cette proposition que nous faisons, il me semble qu'elle est cohérente avec l'ensemble de toutes les propositions que nous faisons, c'est-à-dire que l'école détient quand même ses pouvoirs et ses responsabilités de la commission scolaire. À ce moment-là, le directeur d'école qui est le gestionnaire à l'intérieur de l'école détient, lui aussi, ces mêmes pouvoirs et il est nommé par la commission scolaire. Cela nous semblait conforme, comme je vous l'ai dit, à l'ensemble du projet ou à l'ensemble des propositions que nous faisions à l'intérieur de ce projet.

Le Président (M. Blouin): Cela va?

M. Saint-Jacques: Puis-je demander à M. Gazze si...

Le Président (M. Blouin): Oui, pas de complément? Cela va? Très bien. Rapidement, M. le député de Saint-Henri, s'il vous plaît.

M. Hains: Je vous remercie. Dans votre préface, à la page 2, vous dites ceci: "l'association endosse plusieurs positions du ministre de l'Éducation à l'intérieur du projet de loi 40." Je ne vous demanderai pas d'en faire une révision, parce que M. le ministre l'a fait, tout à l'heure, avec beaucoup de satisfaction et de complaisance. Vous continuez et vous dites ceci: "II y en a cependant d'autres que nous trouvons inquiétantes." Pourrait-on brièvement nous dire un peu ce qui vous inquiète le plus dans ce projet de loi?

M. Saint-Jacques: Lorsque nous avons parlé de la formation du conseil d'école comme il est proposé et selon ce qu'on a compris du projet de loi 40, c'est-à-dire des comités qui peuvent être mis sur pied à l'intérieur de l'école, il n'y a aucune obligation d'avoir un comité pédagogique qui devient un comité d'expertise et de surveillance de l'administration quotidienne de la pédagogie; il y a aussi les propositions qui sont faites sur la formation du conseil des commissaires avec la représentation par un commissaire qui fait partie du conseil d'école et qui est nommé. Naturellement, comme je l'ai dit, on a essayé d'être concordant à l'intérieur de notre mémoire. Si on prend une commission scolaire comme la nôtre et lorsqu'on demande le respect de notre territoire, cela peut supposer quelque chose comme quelque 170 commissaires, possiblement. Pour nous, naturellement, cela devient une chose absolument impossible. C'est ce genre de propositions qu'on trouve inquiétantes.

M. Hains: Jusque-là, je vous donne neuf sur dix.

Le Président (M. Blouin): Cela va? Non?

M. Hains: Non. Je veux essayer de lui donner dix sur dix. Vous concluez en disant ceci: "Il y a une autre position qui nous paraît vraiment excessive." Quelle est cette surprise pour finir?

M. Saint-Jacques: C'est-à-dire que je pourrais peut-être aussi dire qu'il y en a deux, dans le fond.

M. Hains: Ah bon!

M. Saint-Jacques: La première, c'est la question du territoire qu'on retrouve peut-être plus au niveau de la réglementation, la commission de mise en oeuvre et les comités de mise en oeuvre.

M. Hains: Dix sur dix.

Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le député de Saint-Henri.

M. Saint-Jacques: Merci.

Le Président (M. Blouin): M. Gazze, M. Saint-Jacques et M. Langevin, au nom de tous les membres de cette commission, je vous remercie de votre importante collaboration aux travaux de cette commission.

Sur ce, j'invite maintenant le dernier groupe que nous entendrons ce soir,

l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, à venir prendre place à la table des invités. Je crois que vous connaissez bien nos règles maintenant. Je vous demande donc de vous identifier et ensuite de nous livrer le contenu de votre mémoire.

Association des directeurs généraux des commissions scolaires

M. Paquet (Michel): Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais vous présenter, à ma droite, le vice-président de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, Gérard Tousignant, qui est aussi directeur général dans la région de l'Estrie pour l'enseignement secondaire; à ma gauche, M. Guy Benoît, responsable du dossier que nous avons conduit sur le projet de loi 40, qui est directeur général dans la région d'Aylmer au niveau de l'enseignement primaire. Moi-même, Michel Paquet, président de l'association, et j'exerce ma fonction de directeur général à Charlesbourg, en banlieue de Québec, une commission de niveau primaire aussi.

M. le Président, tout en voyant le temps qui nous est imparti et en comprenant les contraintes auxquelles cela nous oblige, j'aurais le goût de vous proposer un exercice auquel nous sommes habitués, parce que, à l'occasion, nous siégeons avec des conseils de commissaires qui doivent travailler assez tard en soirée. Et on va s'appliquer à faire l'exercice de notre pratique professionnelle en ayant un mémoire-synthèse rapide et en laissant le plus de temps possible pour les questions...

Le Président (M. Blouin): Vous savez, M. Paquet...

M. Paquet (Michel): ...sur le mémoire, de façon à pouvoir...

Le Président (M. Blouin): Ce que je veux simplement vous dire, c'est qu'en constatant le nombre de pages que contient votre mémoire et à sa face même, son contenu peut se lire en une vingtaine de minutes. Alors, c'est la règle, si vous voulez lire votre mémoire...

M. Paquet (Michel): Nous l'avons préparé en ce sens, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): D'accord. Si vous voulez le lire intégralement, il n'y a pas de problème.

M. Paquet (Michel): Cela va.

Le Président (M. Blouin): D'accord.

M. Paquet (Michel): L'association des directeurs généraux est un organisme qui regroupe les directeurs généraux et les directeurs généraux adjoints à temps plein des commissions scolaires du Québec. Outre la mission de promouvoir le statut et les intérêts de ses membres, notre association a principalement pour objectif de participer activement aux débats, travaux d'élaboration et de mise en oeuvre des lois, des règlements et des politiques applicables dans les commissions scolaires.

C'est pourquoi le projet de loi 40, Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public retient l'attention des directeurs généraux, parce qu'ils sont de ceux et celles qui, par leurs fonctions, ont contribué à la mise en place des commissions scolaires régionales et au regroupement de 1971, veillent à l'heure actuelle à l'implantation du régime pédagogique et des nouveaux programmes d'études, assurent la gestion des ressources humaines et matérielles dans le respect des présentes contraintes budgétaires. Aussi, soucieux de rendre disponible à la communauté québécoise le fruit de leur expérience, ils soumettent à cette commission leurs avis et propositions à l'égard de ce projet de loi.

Il convient de signaler que cette contribution s'inscrit dans une perspective d'amélioration des services dispensés par les écoles du Québec dans le souci de maintenir le système scolaire québécois en état d'équilibre et de santé.

Au cours des vingt dernières années, le Québec a imposé un rythme énergique et rapide à l'évolution de son système d'éducation. Dans une recherche incessante de la meilleure qualité possible des services à offrir, tout ou presque a été revu, ajusté, modifié: opération 55 et formation des commissions régionales, regroupement des commissions en 1971, loi 57 sur la fiscalité scolaire, loi 71 au sujet de la participation des parents, implantation des nouveaux programmes pédagogiques, mise en application de la politique relative aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, négociations et conventions collectives, livres vert, orange et blanc. Voilà un liste impossible à compléter et qui s'allonge, de toute façon, au fil des ans. Le terrain paraissant fertile, on a largement semé le changement, l'épuisement du sol paraissant alors si peu probable.

Les directeurs généraux reconnaissent qu'il était et qu'il demeure important de répondre aux besoins exprimés par les usagers et les dispensateurs de services. Plusieurs résultats positifs témoignent aujourd'hui des efforts entrepris. À titre d'exemple, soulignons une meilleure accessibilité de l'école et de ses services, une augmentation de la scolarisation, un retour des parents à l'école, la rationalisation de l'utilisation des ressources,

le développement des projets éducatifs, une gestion en général plus ouverte et plus accessible.

Mais, dorénavant, il faut donner un rythme de croisière moins accéléré à la démarche d'évolution du système scolaire. Au lieu de modifier ou de remodifier sans arrêt ce qui vient de l'être déjà, il faut permettre une intégration des changements déjà effectués. Pour cette raison, nous faisons nôtre l'opinion formulée par M. Paul Tremblay dans la revue Relations du mois d'octobre 1982. Et je cite: "Une institution peut mourir par immobilisme et par refus de changement. Elle peut également mourir par suite de tension et de changement continus."

Convaincus de la nécessité de concentrer les énergies des professionnels et des usagers sur l'amélioration concrète de l'acte éducatif, nos avis et nos recommandations se situeront dans une perspective d'appui aux seuls changements vraiment utiles à l'amélioration de la qualité pédagogique. L'ADIGECS défendra donc la compétence actuelle du réseau scolaire ainsi que la libre et véritable prise en charge de l'évolution des milieux par les communautés de base. L'ADIGECS s'opposera cependant à tout processus visant une uniformisation encore plus grande du système scolaire. Le temps des perpétuels combats pour réaliser des changements doit être révolu. Il faut investir dans ceux qui offrent des garanties suffisantes de succès de manière à permettre une nécessaire quiétude dans la réalisation de l'activité éducative. (22 h 45)

Notre exposé comprendra alors trois parties. Nous situerons d'abord le projet de loi 40 dans son contexte. Dans un deuxième temps, nous identifierons les redressements inscrits dans le présent projet de loi qui reçoivent l'appui des autres directeurs généraux et, troisièmement, nous signalerons les orientations et les modalités proposées qui doivent être rejetées. Par la suite, nous présenterons quelques recommandations à la commission pour enfin conclure sur ce qui nous apparaît être l'essentiel dans le débat actuel.

Le projet de loi 40 et son contexte. Le projet de loi 40 constitue la traduction législative du livre blanc L'école, une école communautaire et responsable, après que le ministre y eut apporté quelques modifications en réponse aux réactions des membres du réseau des écoles primaires et secondaires, de la presse, de la population en général. Ce livre blanc soulevait de nombreuses problématiques proposant une analyse de leurs causes et des moyens pour corriger les situations relevées. Les directeurs généraux reconnaissent évidemment eux aussi l'existence de certaines difficultés. Ainsi, il est fondé d'affirmer que les structures confessionnelles ne répondent plus aux besoins d'une société pluraliste. Il est fondé de parler de la réduction du nombre de commissions scolaires et de l'intégration des commissions scolaires à la suite de la diminution des effectifs et compte tenu des nécessaires coordinations entre le primaire et le secondaire. Il est fondé de parler de la centralisation excessive et du développement tentaculaire du ministère de l'Éducation. Enfin, il est fondé de réclamer, pour l'école, une marge de manoeuvre plus grande afin de lui permettre une réponse plus immédiate aux réclamations de ses usagers.

Toutefois, l'association dénonce la trop grande sévérité des jugements du document gouvernemental précité. À titre d'exemple, nous relevons toute l'argumentation faite au sujet de la fragilité de l'école, de l'incertitude quant à sa survie, de sa fermeture trop facile. Or, si certaines fermetures d'école ont effectivement laissé des séquelles, il faut aussi souligner par ailleurs qu'à la suite d'une diminution dramatique du nombre d'élèves, certaines étaient inévitables. La qualité pédagogique étant en danger, les budgets nécessaires n'étant plus disponibles, les commissions scolaires ont alors agi de façon responsable en assumant les réflexions et les décisions conséquentes à ces problèmes. Les directeurs généraux auraient donc apprécié que les nuances soient plus significatives dans les diverses analyses ayant servi à la préparation des solutions. Ceci aurait sans nul doute changé le ton des débats, mais aussi et surtout le choix des correctifs à proposer.

Aujourd'hui, après cette longue période de réflexions et de débats, les directeurs généraux affirment qu'il est inutile, en matière de gestion de l'enseignement, de procéder à une révolution de palais, même si le chantier demeure ouvert et qu'il faut toujours y oeuvrer avec diligence. À leur avis, le réseau des écoles primaires et secondaires se porte assez bien pour qu'on fasse confiance à sa capacité d'évolution autonome.

En effet, signe de santé: c'est le réseau qui a développé des approches éprouvées en matière de concertation parents, élèves, commissaires, cadres et personnel. Signe de maturité: c'est le réseau qui a élaboré et produit le concept des projets éducatifs. Signe de vitalité: c'est le réseau qui a commencé des expériences de gestion participative et décentralisée. Signe de responsabilité: c'est le réseau qui a pris l'initiative du développement de la micro-informatique dans les écoles. Signe de réceptivité: c'est le réseau qui a permis le développement d'écoles optionnelles répondant à des besoins clairement identifiés par le milieu.

Rappelons-nous toutefois que partout où ce dynamisme s'est exercé, cela s'est fait dans la collaboration - et j'insiste sur la

collaboration - plutôt que dans la tension. Pour cette raison, les directeurs généraux croient fortement qu'un projet de loi qui réglementera plus intensément les rapports entre les groupes impliqués et uniformisera encore davantage les manières de faire la gestion, ce projet de loi, disons-nous, doit être légitimé par le consensus du milieu scolaire; il ne doit pas être imposé.

Dans les redressements à effectuer, les directeurs généraux considèrent que le projet de loi 40 propose un certain nombre de redressements qui, en plus d'être souhaitables, reçoivent un appui important soit de la population, soit des partenaires scolaires eux-mêmes. Ainsi, la réduction du nombre de commissions scolaires et la modification de leur territoire apparaissent comme une mesure acceptable, pour autant que le découpage de ces territoires tienne principalement compte de la nécessité d'offrir des services de qualité et respecte les milieux naturels.

L'intégration des niveaux primaire et secondaire apparaît comme une initiative valable. Plusieurs arguments militent en faveur de l'intégration des niveaux primaire et secondaire au sein d'une même commission: meilleure utilisation des ressources, meilleure coordination entre les niveaux, cohérence des décisions, etc. De plus, les expériences vécues dans le milieu s'avèrent positives dans la plupart des cas.

La création des commissions scolaires linguistiques reçoit l'appui de l'ADIGECS. La création de commissions scolaires linguistiques répond à la réalité québécoise qui comprend une minorité anglophone fortement implantée sur son territoire, laquelle désire continuer à y vivre en harmonie avec la majorité francophone. En ce sens, il convient, dans la tradition québécoise de compréhension à l'égard des minorités, de favoriser ce moyen pour préserver aux anglophones leur langue et leur culture.

Enfin, la question de la décon-fessionnalité. Le débat juridique sur la question de la légalité de déconfessionnaliser les commissions scolaires au Québec fait l'objet de recherches par des juristes éminents et a été soumis aux autorités du pays. L'ADIGECS ne prétend pas jouer un rôle d'expert en cette matière et n'entend pas se substituer aux autorités judiciaires du pays. Dans ce domaine, nous nous contentons d'énoncer les principes suivants:

Premièrement, l'école québécoise doit être publique. En effet, les écoles relevant des commissions scolaires doivent être accessibles à tous les enfants saris discrimination d'origine, d'opinion ou de croyance. L'enseignement donné dans celles-ci doit respecter la liberté de conscience. C'est un droit strict inclus dans la charte québécoise des droits de la personne.

Deuxièmement, l'école doit pouvoir demander une reconnaissance comme école catholique ou protestante. Le principe qui reconnaît le droit à l'existence des écoles confessionnelles catholiques ou protestantes est profondément ancré dans la tradition scolaire du Québec. Le violer irait à l'encontre du droit des parents de choisir une éducation et une école conformes à leurs convictions. Ce principe est inscrit dans le préambule de nos lois scolaires ainsi qu'à l'article 26 de la Déclaration universelle des droits de l'homme: "Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants." Le respect de ce droit exige que les parents puissent s'exprimer sur le statut confessionel de leur école. Aussi, il est important que le système scolaire du Québec prévoie pouvoir laisser place à des écoles officiellement reconnues confessionnelles quand la majorité des parents d'un tel milieu réclame de telles écoles.

L'autonomie des commissions scolaires et des écoles. Le développement de l'école et, par ce biais, le développement de l'ensemble du réseau passent par la mise en place dans les écoles et les commissions scolaires d'initiatives et de mécanismes issus des milieux où ils sont insérés. La participation des parents doit être encouragée et soutenue de manière à permettre à ceux-ci de nourrir de leur expérience le projet éducatif des écoles d'un territoire donné. Les élèves et les personnels doivent, par des mécanismes appropriés, s'exprimer sur les orientations de leur école. La marge de manoeuvre des écoles doit être étendue de façon à leur permettre de donner une saveur locale au projet éducatif national. Ces initiatives doivent être encouragées. Toutefois, et pour tout ce volet important du projet de loi 40, les directeurs généraux affirment que les créations collectives issues des communautés locales ont plus de chance de rendre authentiques les projets éducatifs des écoles qu'une législation uniformisante et universelle. Donc, si le projet de loi 40 ne contenait, après modifications, que les éléments de changements mentionnés aux articles précédents, il recevrait notre appui.

Les directeurs généraux ont cependant des oppositions fondamentales. Le projet de loi 40 propose un modèle organisationnel qui fait du ministère le pivot du système en lui accordant des pouvoirs généraux importants et un pouvoir de réglementation presque illimité. Ce projet de loi limite dans les faits le rôle de la commission scolaire à des responsabilités administratives. Il multiplie les centres de décision. Il propose une formule de fonctionnement uniforme au sein des commissions et des écoles.

Dans le projet de loi 40, le ministre établit les programmes d'études; il établit le régime pédagogique; il établit comment les

services éducatifs seront généralement organisés; il détermine les conditions de travail des personnels.

Les chapitres V et VI du projet de loi 40 sur les pouvoirs du ministre confirment et encouragent la tendance à édicter et à normaliser du ministère de l'Éducation. En ce sens, le diagnostic qu'a posé le livre blanc sur le ministère est toujours d'actualité. Nous citons: "Trop souvent, au lieu d'informer, d'animer, de faire partager des objectifs, voire d'associer ses partenaires à la formulation même de ces objectifs, le ministère se fait pointilleux sur les moyens et mène des opérations de publicité et de mise en marché, comme si l'apologie pouvait tenir lieu de démonstration et comme si la précision des prescriptions concernant les moyens pouvait se substituer à la clarté de l'énoncé des finalités et des objectifs. Et comme si, doit-on ajouter, les interlocuteurs ne percevaient pas sa volonté à peine voilée d'imposer ses vues."

En matière de décentralisation, la promesse faite ne semble pas en voie d'actualisation si l'on considère qu'au départ l'exercice laisse peu de place à une large redistribution des pouvoirs ministériels, et j'insiste, à une large redistribution des pouvoirs ministériels vers les instances locales. Ce constat de centralisation témoigne au contraire de la toute-puissance de l'État et du ministère et, pourrait-on dire, d'une sorte d'infaillibilité. Comme s'il suffisait que l'État ou le ministère définisse des objectifs, formule des politiques et une réglementation ou déclenche des actions pour que s'ensuivent les résultats escomptés.

Le projet de loi 40 ne prévoit aucune véritable décentralisation de pouvoirs vers les autorités locales. Il procède plutôt à l'émiettement et à la dilution des pouvoirs locaux au point de les rendre inconsistants face à l'omniprésence de l'État. Cette multiplication des centres de décision risque fort d'augmenter les conflits de juridiction, de complexifier le processus décisionnel, dans une structure déjà hyperbureaucratisée et hyperréglementée. Par exemple, dans une commission scolaire de quinze écoles, il faudra quinze réunions, quinze études, quinze résolutions de conseils d'école pour adopter un calendrier scolaire déjà largement déterminé par les règles ministérielles et encadré en plus par la commission pour tenir compte du transport scolaire. Le même processus devrait être effectué pour le choix des manuels, l'établissement des plans d'effectifs, la fabrication de l'horaire des écoles, etc.

La balkanisation du réseau place celui-ci en potentiel d'échecs plutôt que de succès, en position de pertes plutôt que de gains. Bon nombre des nouvelles responsabilités qu'on veut faire assumer par les écoles ne sont pas essentielles à leur mission éducative qui est d'éduquer des élèves, leur permettre d'acquérir des connaissances et d'avoir les performances nécessaires à leur certification.

Dans le système actuel, la supervision des écoles est assumée par la direction générale, qui a autorité sur chacun des directeurs d'école, le tout sous la juridiction de la commission scolaire. Le projet de loi veut faire assurer la supervision pédagogique par une instance politique. En effet, le directeur général n'aura pas de juridiction sur les directions d'école. Ce mode de fonctionnement aura pour effets d'atrophier le fonctionnement quotidien des commissions et de rendre les comités responsables des résultats obtenus. Pour nous, la notion de responsabilité personnelle est diluée. L'autorité simple, directe, personnalisée disparaît. Des comités sont constitués en parallèle comme en doublure aux personnes compétentes, formées à l'exercice de fonctions qui exigent des connaissances professionnelles, comme l'évaluation des performances d'une école, la supervision pédagogique des enseignants, l'évaluation du personnel.

La mécanique du suffrage universel proposée s'inscrit dans la logique du modèle organisationnel présenté dans ce projet. La commission scolaire étant un simple agent administratif, le suffrage universel a peu d'importance. Pour les directeurs généraux, la commission scolaire constituant une instance politique autonome et habilitée à développer des initiatives spécifiques à son milieu, le suffrage universel, selon le mode habituellement reconnu, apparaît alors tout à fait légitime et doit même être renforcé. Ceci en vertu du principe que les citoyens ont le droit de se prononcer sur la qualité des services éducatifs sur leur territoire et en vertu du fait de la reconnaissance de l'école comme étant commune et publique, appartenant ainsi, non pas aux seuls parents, mais à l'ensemble de la collectivité. (23 heures)

Quelques recommandations. Compte tenu des opinions formulées dans le présent mémoire, les directeurs généraux sont d'avis qu'il serait pertinent que l'Assemblée nationale procède à des modifications législatives qui permettraient, premièrement, de créer des commissions scolaires linguistiques; deuxièmement, de reconnaître l'école québécoise comme publique et commune, avec la garantie de reconnaissance d'un statut confessionnel; troisièmement, de confier, selon les critères que nous avons énoncés, à une seule commission scolaire la responsabilité des écoles primaires et secondaires de même statut linguistique sur un territoire donné.

Cependant, et en considération des faits suivants: d'abord, les dispositions des lois existantes en matière de partage de

responsabilités et de mécanismes de participation; deuxièmement, l'expérience démontrant que la diversité des écoles exige, entre autres, des modèles diversifiés; troisièmement, la mise en place, dans plusieurs milieux déjà, de modèles originaux et répondant à leurs besoins, l'ADIGECS rejette l'ensemble des modalités proposées dans le projet de loi 40 en matière de gérance du réseau des écoles primaires et secondaires.

Malgré ce dernier commentaire, la position des directeurs généraux sur la gérance du réseau ne se traduit pas par une volonté de statu quo. Au contraire, ils sont d'avis que le gouvernement doit enclencher un véritable processus de décentralisation afin de procéder à un nouveau partage des responsabilités entre l'État, le ministère de l'Éducation et la commission scolaire, dans le but de mieux répondre à la réalité québécoise d'aujourd'hui.

Au cours de cet exercice, on pourrait alors mieux associer, d'une part, la nécessité de la mission gouvernementale en matière d'orientation générale d'un système d'éducation et, d'autre part, la capacité de chaque milieu de prendre en charge les responsabilités qui le concernent. À cette fin, les directeurs généraux des commissions font deux recommandations: Premièrement, que le gouvernement crée un lien obligatoire et officiel entre le ministère de l'Éducation et les commissions scolaires, afin que ces organismes travaillent au développement et au règlement du dossier de la décentralisation; deuxièmement, que les commissions scolaires, en collaboration avec tous les intervenants impliqués dans leur milieu respectif, adoptent - et je dis "adoptent" -le modèle de décentralisation qui convient à leurs besoins.

En guise de conclusion, M. le Président, madame et MM. les membres de cette commission, nous vous rappelons que les directeurs généraux demeurent convaincus de la nécessité d'un processus d'évolution normal du système scolaire québécois. L'expérience des directeurs généraux quant au fonctionnement du système scolaire, leur réflexion collective sur le système d'éducation, leurs responsabilités de premiers fonctionnaires du gouvernement scolaire local, leur proximité des problèmes, leur rôle au sein d'une organisation où se vivent succès et échecs, coopération et opposition, les ont donc invités à exposer leur analyse de la situation, à remettre en question et à contester certaines propositions de changements inscrites au projet de loi 40 et à recommander des orientations de rechange.

Cependant, notre association reconnaît qu'il revient finalement au gouvernement de prendre les dernières décisions à ce chapitre. Nous pouvons aussi affirmer que nos membres, même dans le contexte d'un désaccord avec le projet final, s'appliqueraient à gérer honnêtement sa mise en oeuvre. Toutefois, nous espérons que le dossier sera réglé en ne recherchant qu'une seule visée: l'amélioration véritable des services éducatifs à dispenser. Or, ceci ne nous paraît pas assuré par le projet de loi 40.

Nous nous devons de rappeler qu'il y a devant nous le danger évident d'autres décisions qui, non appuyées suffisamment par les intervenants du réseau, seront mal intégrées. En conséquence, nous pensons qu'il n'y aurait pas avantage à imposer des modalités qui brusqueront valeurs et comportements, l'expérience nous démontrant qu'en de tels cas, après une certaine période d'essai, il faut le plus souvent reprendre l'exercice afin de corriger de nouvelles tares.

M. le Président, les directeurs généraux souhaitent que l'on cesse les bousculades, les changements à répétition, les chambardements inutiles. La santé du système scolaire exige que tous puissent, au cours des prochaines années, axer vraiment leur acte professionnel sur l'essentiel: la qualité des services éducatifs à offrir aux élèves du Québec.

M. le Président, en terminant, sans vouloir imposer davantage de temps aux membres de cette commission, pendant la période qui a précédé le dépôt de notre mémoire à cette commission et de façon à assurer aux membres de cette commission que notre témoignage sur la compétence du réseau, quand nous parlions tout à l'heure de clarté, de créativité et d'initiative... Nous avons fait un relevé bref, rapide, que nous avons fait de façon synthétique, en termes de lecture rapide, pour bien illustrer, à l'aide de quelques exemples, cette compétence du réseau dont nous témoignons. Nous avons relevé, dans 80 commissions scolaires qui ont eu le temps de nous répondre, à peu près 250 projets montés de toutes pièces dans les milieux depuis 1972 jusqu'à maintenant et qui touchent des thèmes comme la concertation et les structures de participation, les projets éducatifs, les expériences de gestion décentralisée, le développement de la microinformatique, la concertation avec les gouvernements locaux et les projets milieux à caractère pédagogique et novateur. Ce document, que j'ai en main, est disponible pour les membres de la commission et si vous acceptiez qu'il soit remis aux membres de la commission, je le remettrai au secrétariat de façon que vous en preniez connaissance pour votre information.

Le Président (M. Blouin): Certainement, M. Paquet. Merci de cet apport supplémentaire et sur ce, vous n'avez qu'à le remettre au Secrétariat des commissions et les membres pourront en avoir une copie.

M. le ministre, vous avez la parole.

M. Laurin: M. le Président, je remercie vivement l'association des directeurs généraux pour son intéressant mémoire que j'ai lu avec la plus grande attention. Je constate qu'il épouse, en grande partie, d'une façon marquée les thèses de la Fédération des commissions scolaires catholiques, ce qui, au fond, n'a rien d'étonnant puisque les directeurs généraux constituent leurs fondés de pouvoir. Je remarque aussi, cependant, que leurs positions sont plus claires et vont plus loin sur certains points, par exemple, quand l'association des directeurs généraux se dit d'accord avec l'instauration de commissions scolaires linguistiques, lorsqu'elle se dit d'accord, franchement et résolument, avec l'intégration des deux niveaux d'enseignement, primaire et secondaire, ce qui diminuera d'une façon notable le nombre de commissions scolaires, et lorsqu'elle se dit d'accord également avec les nouveaux aménagements de la confessionnalité que nous prévoyons, et aussi lorsqu'elle se dit d'accord sur certains principes comme celui de la participation des parents qu'on veut encourager et soutenir et sur l'agrandissement de la marge de manoeuvre laissée à l'école.

Mais, sur d'autres points, évidemment, elle reprend la thèse que nous avons entendue ce matin, c'est-à-dire que la commission scolaire doit garder tous les pouvoirs qu'elle a et même qu'elle doit en acquérir de nouveaux de la part du ministère de l'Éducation et qu'il convient de garder l'autorité simple, directe de la part de la commission scolaire sur les écoles à tous égards.

Cependant, en introduction, l'association reconnaît qu'il est et qu'il demeure important de répondre aux besoins exprimés par les usagers. Or, précisément, les usagers si on peut employer ce terme que je n'aime pas - c'est-à-dire les parents des enfants qui sont à l'école, réclament et ont réclamé ici avec beaucoup de vigueur un changement de leur situation au sein de l'école en disant qu'ils ne veulent plus, qu'ils ne peuvent plus se contenter d'un rôle purement consultatif, mais qu'ils veulent maintenant un rôle décisionnel, particulièrement en ce qui concerne la vie de l'école, l'environnement éducatif de l'école, le plan d'action de l'école.

Devant cette demande que les directeurs généraux connaissent sûrement, l'association désire, pour sa part, s'en tenir aux seuls changements vraiment utiles à l'amélioration de la qualité pédagogique. Ce serait là, en fait, justement, ma première question. Ne croyez-vous pas, messieurs, que, précisément, la remise à l'école de responsabilités nouvelles, importantes, en matière de pédagogie, en vertu de laquelle l'école, par son conseil de gestion et ses comités, serait capable d'élaborer un projet éducatif à partir des besoins qu'elle identifie, des besoins de ses clientèles, à partir des caractéristiques de ses clientèles, à partir de la connaissance directe que les intervenants, parents, enseignants, professionnels non enseignants ont des enfants, à partir de la connaissance qu'ils ont d'un milieu donné, ne pourrait pas précisément leur permettre d'améliorer considérablement la qualité de l'éducation entendue dans le sens du développement optimal de la personne de l'enfant dans toutes ses dimensions, par l'utilisation de certains moyens que constituent, par exemple, l'adaptation et l'enrichissement du régime pédagogique, l'adaptation et l'enrichissement des programmes, l'addition de programmes spécialement axés sur les lacunes ou les besoins identifiés dans leur clientèle, axés également sur l'utilisation de chaque ressource, de chaque moment, de chaque activité de l'école pour les fins, justement, de ce développement?

Ne croyez-vous pas que ce changement qui, en apparence, est un changement de structure, en réalité, est un changement de contenu extrêmement important et que, d'une part, il satisferait aux besoins exprimés par les usagers et que, d'autre part, il aurait pour effet immédiat d'améliorer la qualité de l'enseignement? C'est tellement vrai que vous venez justement de dire que, malgré que la législation actuelle ne les facilite pas, il y a eu 280 projets éducatifs qui se sont développés dans les écoles. C'est là ma première question.

M. Paquet (Michel): M. le Président, en réponse à la question de M. le ministre, j'aimerais, avec tout le respect que cela exige, parce que, dans mon propos, il n'y a aucune velléité... C'est simplement une précision que je voudrais faire. Quand M. le ministre dit, au tout début, qu'il trouve un peu normal que les directeurs généraux aient une grande association d'idées avec la fédération, parce qu'ils sont, dans l'exercice de leurs fonctions, les fondés de pouvoir de leur commission scolaire, j'aimerais, en tout respect du propos que vous avez tenu, faire la précision suivante: l'association des directeurs généraux est une association autonome, reconnue comme telle, et, malgré le fait que, dans nos fonctions de jour, nous ayons des comptes à rendre à des hommes et femmes politiques que sont les commissaires d'écoles qui ont un regroupement qui s'appelle la fédération des commissions scolaires, nous avons, comme association, une liberté de parole que nous exerçons largement depuis les douze ans que notre association existe, à telle enseigne que, souventefois, nos histoires de divergences d'opinions avec la fédération sont fort bien connues.

Je voudrais juste insister en disant que

notre proximité de point de vue apparente entre le mémoire de l'association des directeurs généraux et la fédération ne tient en rien au fait que nous ayons des fonctions de fondés de pouvoir des commissions scolaires. J'insiste là-dessus parce que je pense que c'est important et je voudrais, par ce témoignage, exprimer ceci: Cela fait deux ans et demi environ que nous travaillons dans le dossier. Vous avez été vous-même témoin de l'ardeur que nous y avons mise; nous avons donné des contributions importantes à des comités que vous avez convoqués, à des entrevues auxquelles nous avons participé avec vous et, dans tout ce débat et ce cheminement, les directeurs généraux, à compter de septembre 1981 et par la suite, ont eu maintes assemblées au cours desquelles nous avons eu des résolutions régulièrement prospectives dans lesquelles nous faisions des progressions et des propositions qui étaient très dérangeantes et très changeantes par rapport à la structure.

Nous avons donc, dans notre participation, fait preuve et témoigné régulièrement de propositions qui étaient, je dirais, avant-gardistes par rapport au fait que la fédération a pu démontrer antérieurement des positions qu'on a pu décrire comme traditionnelles. (23 h 15)

Ce qui a amené des changements de position de la part de l'association des directeurs généraux, je voudrais le préciser. Il y a un point fondamental dans le mémoire que nous déposons: c'est le point selon lequel en rien nous n'attaquons la nécessité d'une autonomie plus grande au niveau de l'école et d'une responsabilisation des gens qui y oeuvrent; en rien nous n'attaquons un principe pour lequel nous avons travaillé depuis deux ans. Ce que nous attaquons maintenant, c'est ceci: De nos communications avec les partenaires du réseau - les partenaires du réseau, ce sont tous ceux qui oeuvrent, qui vont venir ici et que nous avons pu reconnaître comme étant des commissaires, des parents, des cadres scolaires, des cadres de services, même les enseignants avec lesquels nous avons eu quelques échanges - nous avons constaté que, quand nous entrons dans le domaine des comment faire - je donne comme exemple essayer de rassembler des enseignants dans leur école, sur leur manière de faire dans leur classe - la partie du projet de loi 40 qui précise les comment faire la gestion, nous entrons dans le domaine de la "quasi-infaisabilité" de s'entendre entre nous sur le menu détail des mécanismes de gestion de chaque milieu, non pas parce que nous ne le voudrions pas, mais parce que nous travaillons et nous oeuvrons dans des territoires, dans des communautés qui sont différentes les unes des autres.

À l'inverse, ce que nous constatons - c'est le témoignage que nous voulons faire en déposant ce document - c'est que nous pouvons témoigner que plusieurs commissions scolaires - vous en avez même reçu ici à la commission - ont fait des créations locales fort intéressantes. Je le dis en caricature. Je suis sûr que mon modèle de gestion est plus important et intéressant que celui de Gérard - il est sûr de l'inverse - simplement parce que nous l'avons créé dans notre milieu, avec nos gens et on est sûr qu'il n'est pas exportable. Ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est donc ceci: Notre proximité maintenant apparente avec la fédération n'a aucun rapport avec le fait que nous soyons des fondés de pouvoir le jour. C'est qu'à l'exercice de ce travail, depuis deux ans, nous avons constaté qu'il nous faut arriver à un respect des milieux si nous voulons permettre la créativité locale, et c'est dans ce sens que nous proposons plus de manoeuvre au niveau du comment.

Quant à la question que vous posez maintenant, oui, nous croyons qu'il est nécessaire de remettre à l'école des responsabilités, de façon qu'en pédagogie et en gestion, on puisse avoir une mainmise locale plus grande. Nous insistons simplement dans notre proposition en disant que cela doit être fait par des créations locales où les marges de manoeuvre sont plus grandes, plus étendues et différentes, d'un territoire à l'autre. C'est la seule différence selon nous. Ce n'est pas sur le principe, ce n'est pas sur l'orientation recherchée, c'est sur le comment.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Paquet. M. le ministre.

M. Laurin: Ailleurs dans votre mémoire, vous dites que vous voulez faire confiance à la capacité d'évolution du réseau. Moi aussi, je veux faire confiance à la capacité d'évolution du réseau. Vous avez, à cet égard, des formules jolies, même lapidaires. Je les cite: L'élaboration du concept des projets éducatifs est un signe de maturité. C'est parce qu'il est un signe de maturité que le projet de loi 40 veut les généraliser. Entreprendre des expériences de gestion participative et décentralisée est un signe de vitalité. Oui, c'est la raison pour laquelle nous voulons les généraliser aussi par le projet de loi 40. Le développement d'écoles optionnelles est un signe de réceptivité. Oui, malgré que, dans certains cas, cela ait pris beaucoup de temps et de difficulté avant de les développer. Mais nous sommes d'accord que c'est un signe de réceptivité et c'est pour cela que nous voulons que chaque école devienne une école optionnelle, c'est-à-dire ayant, non pas sa saveur locale ou sa couleur locale, mais son projet éducatif unique individualisé, ce qui correspond d'ailleurs au désir des usagers. Le développement de la

micro-informatique est un signe de responsabilité. C'est la raison pour laquelle nous voulons multiplier d'ailleurs intensément le développement de la micro-informatique, d'une part, et la qualité des équipements dans toutes les écoles. Mais je vous cite toujours cette conclusion. Vous ne voulez donner qu'une saveur locale au projet éducatif national, alors que ce que nous demandent les usagers et justement les tenants des écoles optionnelles, c'est précisément un projet éducatif local qui vient s'intégrer dans le projet éducatif national. Ce n'est pas qu'une différence de formulation, c'est une différence de contenu qui m'apparaît fondamentale.

Vous dites ailleurs que le MEQ, par le projet de loi, devient le pivot du système scolaire. Le projet de loi, je le répète encore une fois, n'ajoute rien aux pouvoirs actuels détenus par le ministère de l'Éducation, mais, au contraire, il donne à ce nouveau palier, à ce troisième palier que nous individualisons et qui s'appelle l'école et à qui nous confions des responsabilités, toute sa capacité d'existence et les moyens qui lui permettront d'assumer la mission qui est proprement la sienne.

Vous craignez aussi que le projet multiplie les centres de décision. C'est une objection que nous avons souvent entendue sous plusieurs formes. C'est la menace d'atomisation de l'école. C'est évidemment le côté administratif de la chose. Je ne rejette pas cet argument, mais je préfère l'envisager sur le plan positif. C'est vrai que l'école va devenir un centre de décision et c'est vrai qu'elle va être caractérisée, chacune à son endroit, par ses caractéristiques de clientèles, par la teneur des interventions et du projet éducatif que chaque école se donnera. Mais c'est précisément, je pense, ce qu'il faut rechercher, puisque là, nous sommes en matière éducative, pédagogique proprement dite et c'est précisément un des objectifs, je crois, que nous devons rechercher, c'est-à-dire que chaque école produise son projet éducatif qui correspond aux besoins de sa clientèle, aux besoins, à la couleur, aux attentes de son milieu. Donc, loin d'y voir une objection ou un argument à l'encontre du projet de loi, j'y vois plutôt un argument qui favoriserait l'adoption du projet de loi.

Ne croyez-vous pas, pour votre part, que le fait pour chaque école de posséder son projet éducatif n'aboutit pas à la balkanisation, comme vous le craignez, mais plutôt, au contraire, à l'assomption véritable de la mission propre de l'école qui est d'améliorer la qualité de l'environnement éducatif, du vécu éducatif, du développement de la personne, pour chacun des élèves qui lui sont confiés?

Le Président (M. Blouin): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): M. le Président, M. Tousignant répondra à cette question.

Le Président (M. Blouin): Très bien. M. Tousignant.

M. Tousignant (Gérard): Lorsqu'on discute de ces questions, on constate rapidement qu'une modalité devient une orientation, un principe et des choses comme ça. Lorsqu'on parle du réseau scolaire, il serait important, peut-être, de clarifier un certain nombre de choses. Nous avons toujours compris qu'il y a, bien sûr, une première instance qui s'appelle le ministère de l'Éducation à qui on reconnaît que, légitimement, il puisse définir des orientations. Nous avions cru comprendre, à ce jour, que le gouvernement reconnaissait aussi dans la réalité québécoise un deuxième palier qui s'appelait la région. On le reconnaît au plan municipal. Plusieurs politiques tendent, bien sûr, à responsabiliser la région.

En matière scolaire, nous pensons que le gouvernement, en toute cohérence, à partir du palier gouvernemental, devrait, au niveau de la région, constituer l'assise de ce que pourrait être un réseau qui s'appelle le réseau scolaire en région et nous ne trouvons pas illégitime de croire que le gouvernement, par le ministère de l'Éducation donnant les orientations du réseau scolaire, puisse fort bien mandater un organisme au niveau de la région pour assurer le bon fonctionnement du réseau.

Nous avons toujours dit que l'école doit avoir des responsabilités. Mais, là où le débat se fait, c'est que l'on ne s'entend pas sur les responsabilités dont l'école a besoin. La qualité de l'éducation se passe à un endroit; on peut en discuter fort bien ici ou ailleurs, ça se passe dans une classe, dans une relation entre un professeur et des élèves. D'ailleurs, une étude américaine qui, semble-t-il, a coûté très cher est arrivée à la conclusion que les enfants apprenaient à partir de personnes qu'ils aimaient, qu'ils appréciaient. La qualité de l'éducation se passe dans une classe.

Qu'on pense que, dans le réseau au Québec, il y a 1725 écoles qui ont moins de 225 élèves. On sait qu'il y a 300 écoles qui ont plus de 1000 élèves. Ce que nous disons, c'est que ces écoles ne requièrent pas les mêmes responsabilités pour répondre à leurs besoins. Nous ne pensons pas, par exemple, que l'enfant de maternelle dans une classe ait besoin, pour un bon service, d'un conseil d'école, entre autres, qui doit gérer les dispositions du suffrage universel, fort complexes d'ailleurs. Nous ne voyons pas non plus, pour la qualité du service à un enfant, qu'il soit nécessaire de gérer une politique de location de locaux.

Au dernier volet, la position est la

suivante: Quand le gouvernement voit une chose qui est bonne dans un réseau d'écoles, est-il nécessaire qu'il prenne cette disposition et la mette dans la loi pour la généraliser? Nous disons: Que le gouvernement donne les orientations, donne aussi le devoir aux commissions scolaires d'atteindre les objectifs généraux de l'éducation. Comme le souligne notre recommandation, nous ne sommes même pas opposés au fait que les commissions scolaires doivent répartir les pouvoirs, mais que ceux-ci soient répartis selon les besoins. Une école de 200 élèves ou de 150 élèves n'a pas les mêmes besoins qu'une école de 3000 élèves; ou bien cela fait quinze ans qu'on a le réseau et on n'a encore rien compris. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Tousignant. M. Benoît avait un complément de réponse.

M. Benoît (Guy): M. le Président, j'aimerais redire ici que nous sommes de ceux qui croient en la nécessité de responsabiliser l'école, de la rendre plus autonome, de laisser les agents de l'école prendre en charge leur projet éducatif. Notre opposition est sur la modalité proposée par le projet de loi 40, qui fera en sorte que toutes les écoles du Québec auront un modèle uniforme. Notre expérience et notre analyse de la situation sont que les écoles à l'intérieur d'une même commission scolaire -et, évidemment, encore plus dans tout le Québec - sont extrêmement diverses les unes par rapport aux autres et qu'on doit, en ce sens-là, pour en exploiter toute la richesse, les laisser se donner un modèle décentralisé de gestion, mais un modèle qui leur est propre. D'ailleurs, le sens de notre recommandation, qui apparaît à la page 19 de notre mémoire, aurait pour effet d'obliger les commissions scolaires à se donner, en collaboration avec les écoles de leur territoire, un modèle de décentralisation qui convienne à la fois aux besoins des écoles et du territoire donné. Je pourrais parler plus tard de ce que pourrait avoir l'air un modèle de gestion décentralisée de ce genre, si les membres de la commission le désirent.

Deuxièmement, toujours sur la question de l'école, la modalité proposée dans le projet de loi 40 est axée sur un partage des pouvoirs. À notre expérience, la tendance naturelle dans les organisations, c'est pour les gens de se centrer justement sur les pouvoirs, de tenter d'en accaparer le plus possible. À notre sens, ce genre de partage des pouvoirs aura pour effet d'isoler l'école plutôt que de la centrer sur des objectifs à atteindre, du genre projet éducatif, du genre responsabilisation, du genre ouverture à la communauté.

Enfin, il y a déjà - d'ailleurs, dans son introduction, M. le ministre l'a mentionné - un certain nombre de mesures qui sont proposées dans la loi 40 du genre intégration des commissions scolaires, confes- sionnalisation, création de commissions scolaires linguistiques. Déjà là, il y a énormément de boulot et il y a énormément de changements dans ces éléments qui vont être imposés au réseau. Si on ajoute à cela des changements de structures et des changements de partage de pouvoirs entre la commission scolaire et les écoles, qui touchent directement la vie de l'école, sa façon de fonctionner, à ce moment, nous avons des inquiétudes à savoir que, encore une fois, ces mesures qui sont faites avec un objectif d'augmenter la qualité de l'enseignement dans l'école vont avoir pour effet de drainer des énergies plutôt sur l'administratif, sur des pouvoirs que sur le pédagogique. (23 h 30)

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Benoît.

M. le ministre, une dernière question?

M. Laurin: Oui, une dernière question. Dans un avis que vous rendiez public sur le livre blanc en octobre 1982, vous faisiez les recommandations suivantes: "que la loi accorde à l'école des pouvoirs déterminants en matière éducative et pédagogique; que la loi accorde à l'école des pouvoirs en matière de gestion des ressources humaines, matérielles et financières; que le statut de l'école soit celui d'une entité institutionnelle qui exerce des pouvoirs reconnus par la loi sous la responsabilité générale de la commission scolaire. L'ADIGECS se déclare d'accord avec l'idée d'un conseil de direction de l'école qui exercerait les pouvoirs dévolus à un tel conseil. L'ADIGECS recommande que le conseil des commissaires soit formé par des commissaires élus, pour une partie, au suffrage universel et, pour une autre partie, par des parents élus par les conseils d'école."

Je constate que vous faites table rase aujourd'hui de toutes ces recommandations. Est-ce que vous pourriez expliquer à la commission comment vous en êtes arrivés à changer d'opinion sur ces importantes questions?

Le Président (M. Blouin): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Je trouve la question terriblement pertinente, particulièrement dans le contexte de la première intervention d'introduction de M. le ministre qui invoquait notre position de similitude avec la fédération et à laquelle je répondais par notre historique de collaboration à ce dossier. Cela me fait plaisir de pouvoir traiter de ce sujet.

Je vais revenir un peu en arrière alors que nous répondions, après une assemblée générale, d'ailleurs, où les collègues avaient

participé massivement, à une autre démarche où, à l'automne 1982, nous avions tenu un colloque avant même le dépôt du livre blanc, colloque au cours duquel nous avions amorcé une réflexion qui visait à déposer, à l'intention du ministre et des partenaires du réseau, une série de recommandations de changements.

Nous étions donc déjà, à ce moment, dans une perspective de propositions d'adaptation ou de corrections ou de redressement à la situation du réseau. C'était un cheminement premier, gratuit et qui n'avait pas encore été critiqué ni nettoyé par les partenaires. Le livre blanc arrive, "brusque" un peu, entre guillemets, notre démarche parce que cela nous obligeait à accélérer et nous arrivons à cette nécessaire réaction au livre blanc.

Effectivement, à cette époque, nous avons, par des résolutions, formellement pris des positions dont vous parliez dans votre intervention, M. Laurin. Cependant, nous avons, à cette époque, fait les nuances suivantes et il y en avait deux principales. Dans la démarche possible de législation pour fixer à l'école des pouvoirs déterminants, par exemple, en matière pédagogique et, après, dans les discussions avec les partenaires et dans les discussions avec les représentants du ministère tant au niveau politique qu'administratif, nous avons toujours signalé la nécessaire relation de contrôle de la commission. En tout temps, nous avons relevé la nécessaire coordination d'ensemble de la commission de façon que la dimension réseau territorial ne soit jamais, comme nous le disons maintenant dans notre mémoire, balkanisée. Donc, il est vrai que nous avons affirmé ces options, mais nous les avons affirmées dans un contexte conditionnel. Et quand nous avons travaillé ensuite à des comités de façon à faire avancer cette idée, nous avons toujours réclamé ce chapeau d'encadrement général de la part de la commission.

Une deuxième condition à laquelle nous avons largement travaillé était la suivante: mais tout ce beau projet, important, essentiel, sûrement prospectif n'aura pas de vrai suite s'il n'est pas le fruit d'un consensus significatif des gens du réseau. Entre autres, je signale - je sais bien que les gens l'ont relevé depuis le début de la commission et il est important qu'on le relève régulièrement - la participation plus présente à nos tables de partenaires des enseignants parce qu'ils vont être impliqués directement dans les écoles.

Nous avons toujours dit: Ce projet devra avoir le support du consensus important des partenaires. Or, c'est le résultat auquel nous en sommes arrivés maintenant et c'est l'obligation à laquelle nous sommes astreints, nous ne rejetons pas plus l'objectif qu'au début, nous le maintenons, mais nous constatons qu'il y a deux conditions qui ne se réalisent pas. La première, c'est que le chapeautage de la commission n'est pas total et global et la deuxième, c'est que le consensus auquel nous devions arriver n'est pas présent. Cela nous oblige donc à dire: C'est peut-être là un constat que nous ne sommes pas mûrs pour un projet global et uniformisant; tout au plus sommes-nous assez mûrs, parce qu'on en a parlé largement, pour que, dans chaque commission, il y ait plus de pressions pour que les projets locaux se réalisent.

Le Président (M. Blouin): Merci, M. Paquet. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, je constate que les interventions et les questions du ministre ont occupé le temps pendant une demi-heure. Je ne veux pas lui en faire reproche, mais je voudrais que vous conveniez que le reste de la période jusqu'à minuit devrait être accordé à l'Opposition et que vous me permettiez, à même cette période, de prévoir quelques minutes à la fin pour mon collègue de Viau afin qu'il puisse compléter l'intervention que j'aurai faite. Je pense que c'est l'élémentaire justice.

Le Président (M. Blouin): M. le député d'Argenteuil, vous savez très bien, si ça ne vous vient pas à l'esprit pour le moment, qu'en commission parlementaire le ministre a droit à toute la latitude qu'il désire prendre en termes de temps, alors que, pour les autres membres de la commission, cela se limite à vingt minutes par intervenant. Jusqu'à maintenant, nous avons été, enfin pour utiliser une expression qui vous fera plaisir, plus libéraux à l'égard du représentant de l'Opposition, mais je crois que nous devrons continuer en fonction de ces règlements et, si nous voulons vraiment jouer le livre, je ne pense pas que nous y gagnerons. Jusqu'à maintenant, les choses se sont bien déroulées. Alors, je vous cède la parole, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je vous soulignerai que, chaque fois que nous avons siégé en commission, nous avons eu des ententes pratiques, qui allaient au-delà de la lettre du règlement, qui ont été respectées de part et d'autre. De toute manière, le problème ne se pose plus, puisqu'il est minuit moins vingt.

Le Président (M. Blouin): Nous pourrions toujours excéder de quelques minutes, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: On l'appréciera, si c'est requis. Si vous voulez nous accorder quelques minutes de plus, cela nous aidera à compléter. Ce n'est pas parce que je veux abuser de notre temps collectif. Je pense

que nous aimerions tous mieux rentrer chez nous, même à cette heure-ci, mais nous avons eu, en fin de journée, une intervention très importante, c'est la quatrième aujourd'hui, qui va dans le même sens général.

Je me rappelais, en écoutant le début de l'intervention des directeurs généraux, l'intervention qu'ils avaient faite devant la commission parlementaire qui avait examiné le conflit des enseignants en mars dernier. À ce moment-là, les directeurs généraux étaient venus nous rencontrer et nous avaient soumis un mémoire qui était plutôt favorable aux décrets imposés à l'époque par le gouvernement. Le ministre les avait reçus avec les paroles suivantes: "L'association des directeurs généraux joue, au sein des commissions scolaires, un rôle majeur, analogue, à un niveau plus élevé, à celui des directeurs d'école. Leur rôle est également un rôle majeur, essentiel, puisqu'ils sont les gestionnaires principaux quotidiens des commissions scolaires. Il est donc important d'accorder une grande attention à ce qu'ils nous disent ce soir". Je pense que ce qui valait il y a à peu près dix mois est aussi bon aujourd'hui et que la matière que nous discutons ce soir est encore plus importante, en tout cas, dans ses répercussions à long terme, que celle qui était l'enjeu de nos discussions au début de mars dernier.

Il y une chose qui me frappait, en vous écoutant, c'est la contradiction majeure entre le discours et les actes du gouvernement. Je relisais des passages du livre blanc où l'on disait qu'il était temps de reconsidérer le rôle du ministère, de l'axer davantage sur sa vocation essentielle, qui est celle de servir de soutien, d'animateur pour l'ensemble du réseau scolaire. Lorsque nous faisons le bilan des actes posés au cours des dernières années, la liste comprend surtout des actes centralisateurs.

Vous dites une chose, je pense que c'est à la page 13 de votre mémoire. C'est important que l'on se comprenne très bien sur le sens de la centralisation. Depuis quelques jours, il y a eu des exercices de comptabilité. On a dit: On vous donne six pouvoirs, on vous en donone quatre, on vous en donne trente-quatre. Il y en a d'autres qui disent: Vous en retenez 83, etc. Je pense que, finalement, cette comptabilité peut être bonne pour les jeux d'effet sur l'opinion, mais cela ne rend pas compte du fond des choses. Je pense que, lorsqu'on parle de tendance centralisatrice, c'est, comme vous le dites dans une formule qui résume tout, à mon point de vue, cette tendance à édicter et à normaliser du ministère de l'Éducation.

Je me faisais une liste rapide d'exemples qui remontent à ces dernières années. Cela commence avec la loi 57, évidemment, sur la fiscalité scolaire qui accroît la dépendance financière des commissions scolaires à l'endroit du gouvernement. Le régime pédagogique, c'est une autre mesure qui renforce l'autorité centrale du ministère; les décrets, cela va dans le même sens; les coupures budgétaires. Voici des mesures centralisatrices qui ont toutes émané du centre. On a imposé des normes jusque dans le détail quant aux coupures qui devaient être effectuées ici ou là; l'affaire des 40 000 000 $, l'an dernier, des surplus des commissions scolaires qu'on est allé chercher par une méthode de calcul récurrent.

L'an dernier, on a adopté, après les décrets... À la fin de chaque session, on nous présente un projet de loi omnibus qui ramasse toutes les affaires dont on ne voulait pas faire des projets de loi en bonne et due forme; on les met là-dedans et c'est le produit Heinz avec les 57 variétés, c'est le produit de la fin de session. Il y avait dans ce projet-là un article qui venait confirmer le pouvoir du ministère d'édicter les conditions de travail des salariés non syndiqués des commissions scolaires. Je me rappelle que j'avais été tout étonné de cela. J'avais dit: Vous avez déjà ce pouvoir-là, j'imagine, en vertu du fameux article 16 de la Loi sur l'instruction publique, qui vous donne le pouvoir de faire des règlements pour l'organisation, l'administration, la discipline des écoles. Il y avait déjà un règlement semblable qui existait. On nous a dit: Cela n'est pas assez. On veut être bien sûrs que cela nous appartient et on a adopté un article de loi. Je ne sais pas s'il a échappé à votre attention, cela m'a bien frappé à l'époque parce que j'avais essayé de le faire retenir, mais j'avais été soutenu seulement par mon collègue de l'Opposition qui était avec moi à ce moment-là.

Là, on continue, on le met en toutes lettres dans le projet. Il me semble qu'on pourrait peut-être se dire: On a été obligés de faire cela pendant quelques années, mais ce n'est pas dans cette direction-là qu'on veut aller. Mais, là, on le met dans le projet de loi et on dit: C'est cela qu'on voudrait faire. Cela n'a pas de bon sens, à la longue, que des conditions de travail soient déterminées, jusque dans le détail, pour les salariés non syndiqués des commissions scolaires par un règlement ministériel. Cela n'a pas de bon sens. Que les conditions salariales soient déterminées comme cela l'est dans le secteur syndiqué, je le comprendrais et j'espérerais qu'on puisse aller au-delà de cela un jour, mais dans l'avenir prévisible c'est très difficile d'envisager une telle chose. Mais que cela aille dans le détail comme c'est actuellement, il me semble qu'on devrait viser au moins à sortir de ce genre d'encarcanement, mais on ne voit pas de signe qui l'indique.

On a eu des événements récents, le

projet de règlement des études collégiales. Pourtant, s'il y a une affaire qui mûrit depuis longtemps, c'est cela. Mais il a fallu tenir une commission parlementaire pour que le gouvernement se fasse dire: II y a bien des aspects là-dedans dont on ne veut pas. L'affaire des micro-ordinateurs, cela me fait rire! Pardon?

Une voix: Vous et vos amis.

M. Ryan: Non, c'est parce qu'il y a quelque chose là-dedans. Je suis allé visiter une école polyvalente durant le temps des fêtes, qui est une des plus avancées en matière de micro-ordinateurs à Montréal. Là, j'ai appris qu'on s'était organisé. On n'a pas attendu les directives du ministère et tout cela. Les 40 ordinateurs dont ils ont besoin, ils les ont. Ils les ont acquis à bien meilleur compte qu'aucune des propositions qui ont été faites au gouvernement ne vous aurait permis de le faire. Ils se sont arrangés sur le marché libre. Ils sont allés chercher de très bon ordinateurs. Ce ne sont pas des Matra, ce ne sont pas des Olivetti, ce ne sont pas des IBM; c'est une autre marque, très bonne aussi, que les enfants apprécient énormément. Ils ont pris l'initiative, ils ne voulaient vraiment pas que cela passe par toutes les tracasseries de la bureaucratie. Les enseignants se sont formés en petite coopérative. Ils les ont achetés eux-mêmes, ils ont dit: On va les louer à l'école et elle prendra cela à même son budget d'entretien. Elle paiera un petit loyer là-dessus et cela va marcher. Le ministre sera au courant de cela dans deux ans. Sa directive va venir, mais cela fait longtemps qu'elle est dépassée par les événements. C'est cela qu'on voudrait qui soit compris clairement: dans la vie réelle, il y a un tout autre cheminement que celui de toute cette pléthore de comités qui se réunissent et qui même, des fois, ne sont pas capables d'aboutir à des résultats collectifs. Dans ce cas-ci, on avait engagé un processus, on est passé à côté vers la fin. (23 h 45)

Je dis que le projet de loi est un exemple extrêmement éloquent de cela. On dit: On va susciter la participation, la décentralisation, la responsabilisation de l'école et on commence par un projet éminemment déresponsabilisateur. Cette manière de procéder, imposer un cadre uniforme dans tout le Québec, primaire, secondaire, anglais, français, catholique, protestant, je trouve que cela ne tient aucun compte de la variété du développement que nous avons connue dans ce milieu depuis un bon nombre d'années et je pense que c'est une manière de procéder qui est absolument fausse. C'est le message qu'on est venu nous dire ce soir, M. le ministre. Vous avez dit que vous alliez l'étudier. C'est bien plus important que les petits passages qui soulèvent des difficultés.

Il y avait deux recommandations à la fin du mémoire que vous n'avez commentées ni l'une ni l'autre; ça m'a bien surpris. On vous dit: On voudrait former un comité conjoint ministère-commissions scolaires pour étudier de manière véritable le problème de la décentralisation. Cela voudrait dire, évidemment, qu'il faudrait que, concernant votre projet de loi, sauf dans les étapes qui peuvent être mises en route immédiatement, vous disiez: On va attendre un peu. Si on attend un an ou deux pour ça, personne ne va mourir; peut-être votre gouvernement, mais, à part ça, il n'y a pas de danger. Je pense que c'est le sens d'une des deux suggestions qui vous sont faites; j'espère que vous allez l'écouter et la commenter en d'autres lieux, vu que le temps ne s'y prête pas trop ce soir.

On disait deuxièmement: Que chaque commission scolaire soit invitée à se donner un modèle de décentralisation, de responsabilisation des écoles convenant à leurs besoins. C'est ce sur quoi je vais vous interroger tout de suite. Il me semble que ce sont des propositions véritables, étayées, d'ailleurs, par des dossiers de réalisation de choses qui sont déjà en marche; ce ne sont pas des choses qui viennent de nulle part, ça vient d'une expérience considérable. La première partie, un comité conjoint qui aurait un mandat véritable de travail, si vous vouliez l'expliquer un peu, je ne détesterais pas ça pour qu'on soit sûr de bien comprendre la portée de votre proposition. Deuxièmement, vous dites: Chaque commission scolaire se donnerait un programme de partage des responsabilités. Qu'est-ce que ça veut dire exactement? Comment ça se réaliserait? Le ministre a émis une inquiétude à laquelle je suis sensible. Il a dit: Oui, c'est bien beau de dire: On va se donner un objectif, mais comment va-t-on s'assurer ensemble qu'on va progresser dans cette direction? Est-ce qu'il y a des conditions que vous pourriez énoncer qui vont faciliter la réalisation d'un objectif comme celui-là, des moyens de vérification, des garanties de progression dans cette direction? J'aimerais que vous nous donniez des explications sur ces deux points.

En terminant, je voudrais vous remercier de nous avoir amenés, dans un langage simple et très sobre en même temps, mais très clair, au coeur même du problème. À ce moment, on se dit: La dentelle, à savoir s'il y aura trois ou quatre membres au comité, c'est secondaire. Ce qui nous importe, c'est le coeur même du problème. Vous formulez deux propositions. Je vous félicite de nous avoir amenés à la question et je voudrais que vous nous précisiez les deux recommandations que vous faites.

Le Président (M. Blouin): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): M. le Président, j'irai sur la première partie, parce qu'on touche la première recommandation. Je ferai cela brièvement et M. Tousignant traitera de la deuxième avec des commentaires possibles, si nécessaire, de M. Benoît.

Sur la première question, à savoir que le gouvernement crée un lien obligatoire et officiel, on n'a pas travaillé dans notre proposition - c'est pour ça que nous ne l'avons pas mis dans notre document - des modalités très précises sur les comment. Ce qu'on voulait surtout, c'est que cette commission constate qu'il y a un contentieux qui dure, qui recommence, qui s'éteint, qui recommence, qui touche la notion de décentralisation, qui est important et qui est de niveau politique. Depuis de nombreuses années, entre le niveau politique, qui nous engage, que sont les commissions scolaires et le niveau politique gouvernemental représenté par le ministère, il y a un contentieux qui engorge et qui oblige régulièrement à la reprise de décisions ou à la révision de mécanismes parce que, sur le fond du terrain, on ne s'entend pas. Ce sur quoi on insiste, c'est qu'il serait nécessaire que la recommunication se fasse et essentiellement, si on pouvait créer des comités ou des genres de commissions d'enquête centrés sur la décentralisation qui rapprocheraient les deux niveaux politiques auxquels on fait référence, les commissions et le gouvernement, et qui pourraient travailler sur cette notion de décentralisation, je pense que ça pourrait avoir pour avantage, si on pouvait atteindre cette cible, de nettoyer un ciel gris qui dure et qui fait que, sur la réalisation, régulièrement, on a cela comme engorgement. Il n'est pas question de poser des jugements ou de chercher des fautifs. À notre niveau, comme administrateurs - tout le réseau en parle - on constate que, dans la relation, en termes de débat, en termes de position sur la décentralisation, ces zones grises ne sont pas clarifiées, qu'elles créent des impacts sur toutes sortes de décisions après et des contestations pour ceux qui les subissent.

On dit donc qu'il y aurait peut-être nécessité d'avoir une commission quelconque liant les deux organisations, avec des partenaires pour aider à la recherche, pour clarifier cette zone. Si cet objectif pouvait se réaliser, nous pourrions, à ce moment-là, plus facilement travailler le deuxième, mais il peut se réaliser dans des milieux qui, eux, sont plus en avance. Là-dessus, M. Tousignant va vous parler de nos façons pratiques d'articuler le deuxième, comment les commissions scolaires, en collaboration avec les intervenants, pourraient adopter un modèle de décentralisation qui convienne à leurs besoins.

Le Président (M. Blouin): M. Tousignant.

M. Tousignant: M. le Président, je vais commencer par un exemple en vous décrivant comment s'est fait un certain partage de pouvoirs et responsabilités entre la commission scolaire et l'école. Le plus récent que j'ai en mémoire, c'est une responsabilité confiée à l'école en matière de gestion de la cafétéria. Cette procédure ou ce cheminement se fait de la façon suivante: la commission scolaire, avec les écoles et les directeurs d'école, entre autres, réfléchit à la problématique posée par la gestion des cafétérias. Il se fait une démarche à laquelle sont associés les parents. En fin de compte, les parties conviennent - direction d'école, parents, etc - de ce qui va être de la responsabilité de l'école et de ce qui va demeurer à la commission. Entre autres, comme résultat, la commission a la responsabilité d'énoncer une politique alimentaire et l'école assume ce qu'on appelle la gestion de la cafétéria, avec un comité formé à la fois de directeurs d'école, de commissaires, de parents et de membres intéressés pour gérer toute la question alimentaire dans l'école. Voilà la façon dont on procède actuellement.

Ce que nous suggérons, nous pensons que c'est une façon de s'inscrire de manière plus cohérente dans la décentralisation, en voulant vraiment poursuivre le discours de décentralisation, tout en permettant l'émergence de modèles diversifiés. Quand on avance une hypothèse comme celle-là, bien sûr, il y a automatiquement des interrogations à savoir qu'est-ce qu'on fait avec les milieux qui ne s'entendraient pas, qu'est-ce qu'on fait avec des milieux qui n'accepteraient pas de cheminer? Quand on dit cela, nous n'avons aucune forme d'objection à ce que soit prévue dans la loi une obligation afin que les commissions scolaires, avec les écoles, procèdent à un partage des pouvoirs et nous ne nous opposons même pas, non plus, à prévoir des mécanismes de recours si les parties ne s'entendent pas. Ceci est généralement reconnu dans presque toutes les situations.

Notre hypothèse est que ce modèle pourrait faire que la prise de responsabilités dans les écoles tiendrait compte de leurs besoins réels et se ferait au rythme des milieux. C'est notre prétention de dire que, si on veut vraiment parler de décentralisation, on parle de prise en charge. Prendre en charge signifie respecter le rythme, respecter aussi la diversité.

Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Tousignant. M. le député de Viau, très rapidement s'il vous plaît:

M. Cusano: Merci, M. le Président.

M. Champagne (Mille-Îles): M. le Président.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Mille-Îles.

M. Champagne (Mille-Îles): Depuis le début de nos interventions, on a toujours eu l'alternance.

M. Laurin: On avait convenu...

Le Président (M. Blouin): M. le député de Mille-Îles, il y a eu une entente entre les deux partis. M. le député de Fabre a accepté que M. le député de Viau intervienne très rapidement pour que nous puissions terminer à minuit. C'est ce dont on m'a fait part.

Mme Lavoie-Roux: Ce sera pour demain.

M. Champagne (Mille-Îles): Ce seront d'autres invités et j'avais quand même des questions à poser à ceux-ci.

Mme Lavoie-Roux: On en a tous et on se retient.

M. Champagne (Mille-Îles): D'accord. J'ai donné mon droit de parole, tout à l'heure, pour le bien de la commission. Alors, on essaiera de trouver un autre moment.

Le Président (M. Blouin): Merci. M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, je tenterai encore d'être très bref, comme d'habitude. Depuis les fuites et, ensuite, la publication du livre blanc, le ministre n'a fait que parler d'harmonie, de concertation, de respect qu'il a et qu'il aura envers les commissions scolaires, les écoles, les comités d'école, etc. Mais la contradiction entre les discours et les actes de ce gouvernement, du ministre et du ministère de l'Éducation soulève des craintes dans le milieu scolaire et avec raison. Plusieurs ont exprimé la crainte, une fois que le projet de loi serait adopté, de l'intervention du MEQ et du ministre dans le fonctionnement quotidien de l'école. Je vais sauter, à cause du temps, tous les exemples qu'on pourrait citer, mais je me souviens d'un en particulier, c'était la distribution d'un document qui s'intitulait Minute Ottawa! dans le débat constitutionnel, qui avait été envoyé directement dans les écoles et on avait demandé aux directeurs d'école d'en faire la distribution. Je me rappelle que le ministre nous avait dit en Chambre qu'il allait prendre toutes les mesures pour s'assurer - il n'était pas le responsable, il nous disait que c'était un autre ministère qui avait envoyé ce document dans les écoles -que cela ne se reproduise pas. On dit, M. le Président, que le passé est le garant de l'avenir.

Ma question sera très brève afin de donner à nos invités la chance de répondre. J'aimerais leur demander si, depuis ce fameux débat constitutionnel et depuis cette promesse formelle du ministre de ne pas demander aux écoles ou aux directeurs d'école de remplir des tâches particulières sans passer par lui, à votre connaissance, il y a des directives qui sont parvenues du ministre de l'Éducation directement aux directeurs d'école.

Le Président (M. Blouin): M. Paquet, s'il vous plaît! Vous n'êtes pas au courant?

M. Paquet (Michel): Non, ce n'est pas cela; j'essaie quand même de prendre la question dans son sens le plus large. La seule chose que je peux répondre, c'est ceci: Comment évaluer à des moments des circulaires ou directives qui peuvent être acheminées? Je le signale sans exemple précis. Il peut arriver que des circulaires puissent avoir été envoyées et que nous ayons eu des discussions d'ajustements, alors qu'il s'agissait strictement d'erreurs en termes de stratégie d'information. Mais c'est difficile de pouvoir identifier dans cela des intentions. En ce qui me concerne, comme président de l'association, nous n'avons pas eu de débat, ni de discussion, ni de relation avec le ministère pour contester des erreurs présumées. Des erreurs de type administratif ont pu se présenter; je pense que c'est chose normale en général à cause de l'importante quantité de communications qui nous arrivent.

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau, il est presque minuit, je vous le signale.

M. Cusano: II reste 30 secondes et je vais essayer de terminer en 30 secondes.

Le Président (M. Blouin): En 30 secondes, allez-y.

M. Cusano: Est-ce que vous êtes au courant d'une lettre qui a été envoyée, signée par M. Camille Laurin, datée du 22 décembre 1983, où il demande aux directeurs d'école de faire la distribution de chèques à certains élèves?

Le Président (M. Blouin): M. le député de Viau, j'essaie de vous suivre, j'essaie de comprendre la pertinence de vos questions et, selon le mandat que nous avons reçu de l'Assemblée nationale, je vous assure que j'ai beaucoup de difficulté à vous suivre. Est-ce que vous pourriez...

M. Cusano: M. le Président, c'est à cause des limites de temps.

Le Président (M. Blouin): ...faire un lien

quelconque avec le mandat de la commission?

M. Cusano: Excusez-moi. C'est sur la question de la décentralisation et sur la question des craintes qui ont été exprimées que le ministre, une fois son projet de loi adopté tel quel, aura certains pouvoirs et qu'il pourra passer au-delà des commissions scolaires et aller directement dans les écoles. C'est pour cela que je demande si nos invités sont au courant qu'il y a eu une lettre et quelle est leur réaction concernant cette lettre.

Le Président (M. Blouin): Enfin, très rapidement, s'il vous plaît!

M. Cusano: Très rapidement! Je ne peux pas aller plus vite que cela, M. le Président.

M. Paquet (Michel): M. le Président, au début de la présentation, j'expliquais la différence des rôles que nous exerçons. M. Tousignant est au niveau secondaire, moi au niveau primaire. Dans la pratique, je n'ai pas eu cette lettre touchant les niveaux d'enseignement secondaire et ceux intégrés. Ce qu'on m'a dit comme président d'association, c'est que cette lettre a été reçue. Cependant, je ne suis pas capable de vous exprimer s'il y a une réaction ou un commentaire que nous devrions faire, puisque, au point de vue de la gestion, je n'ai pas été impliqué comme tel. Mais, comme association, je ne peux pas, non plus, affirmer qu'il y a là un fait non normal dans le comportement administratif parce que je ne connais pas la teneur de la lettre. Donc, il est difficile pour moi...

Le Président (M. Blouin): Merci. Merci, M. le député de Viau. Sur ce, je remercie nos invités, les responsables de l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires, de leur participation à nos travaux. J'invite tous ceux qui suivent nos débats, ainsi que les membres de la commission à être présents demain à 9 heures puisque c'est à neuf heures que nous reprendrons nos travaux. Les travaux de la commission sont donc ajournés à demain, 9 heures.

(Fin de la séance à 0 h 1)

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