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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mercredi 26 avril 1995 - Vol. 34 N° 8

Étude des crédits du ministère de l'Éducation


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures treize minutes)

Le Président (M. Facal): Alors, bonjour, mesdames et messieurs. Comme je constate que nous avons le quorum, je vous inviterais à prendre place afin que nous puissions commencer.

Nous sommes donc réunis afin d'étudier les crédits budgétaires du ministère de l'Éducation pour l'année financière 1995-1996. En vertu de l'entente que nous avons conclue, nous passerons la journée sur le programme 4; la journée, c'est-à-dire de 9 heures à midi et de 16 heures à 18 heures. Alors, qui veut...


Organisation des travaux

M. Williams: M. le Président...

Le Président (M. Facal): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, je voudrais...

Une voix: Est-ce qu'il y a des changements?

Le Président (M. Facal): Pardon?

Une voix: Il y a des changements aujourd'hui?

Le Président (M. Facal): Est-ce qu'il y a des remplacements?

Une voix: Des remplacements.

Le Président (M. Facal): Non. Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci, M. le Président. Avant de commencer le programme 4, je voudrais retourner pour quelques minutes dans le programme 5, et je demande la parole.

Le Président (M. Facal): M. le député, la commission est, évidemment, entièrement maître de sa procédure. Si tous les membres, ici, acceptent de vous laisser revenir quelques minutes sur le programme 5. Moi, personnellement, je ne m'y opposerai pas, mais j'aimerais quand même vous expliquer les arguments en raison desquels je serais, quant à moi, un peu réticent.

Depuis le début, nous travaillons sur un canevas de partage du temps qui a été proposé par votre propre formation et que nous avons globalement accepté. Deuxièmement, nous avons passé, hier, deux heures et demie sur le programme 5 au grand complet. J'ai beaucoup de difficultés à concevoir que nous n'ayez pas pu trouver, hier, cinq minutes pour venir poser votre question sur le programme 5.

C'est la deuxième fois que vous venez dans une commission, dont vous ne suivez pas avec assiduité les travaux, pour poser une question et, ensuite, repartir.

M. Williams: Eh! Je m'excuse, M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Facal): Voilà pourquoi... voilà pourquoi...

M. Williams: Je m'excuse, question de règlement.

Le Président (M. Facal): Je termine. Je termine. Voilà pourquoi... je vous dis pourquoi, a priori, je considère que le temps pour le programme 5, il avait lieu hier, et il est clôt.

Cela dit, si les membres ici, à l'unanimité, sont prêts, j'y consens, mais je vous donne ma position, que je soumets à la discussion.

M. Williams: M. le Président...

Le Président (M. Facal): M. le député de Matane.

M. Williams: M. le Président...

M. Rioux: M. le Président...

M. Williams: ...j'ai été dans plusieurs commissions, hier. J'ai essayé de demander une question, hier, pendant la période de questions, au «tautologue», comme supplémentaire, mais le temps n'était pas là. J'espère, à cause du travail de tous les députés, qu'il y a une certaine flexibilité. Et, quand nous allons, dans les autres commissions... Effectivement, on essaie de faire une certaine organisation du travail, mais, franchement, ça prend une certaine flexibilité pour donner une chance à tous les députés d'être dans plusieurs commissions.

C'est une question assez importante que je voudrais poser. Et selon les règles, pendant l'étude des crédits, j'ai le droit, nonobstant que je sois membre ou pas membre de cette commission, chaque député a le droit de questionner, de poser des questions pendant l'étude des crédits. La seule chose, je n'ai pas demandé d'être en remplacement aujourd'hui, je n'ai pas le droit de voter, mais j'ai le droit de questionner le ministre.

Le Président (M. Facal): Vous avez le droit...

M. Williams: Est-ce que le ministre a un problème avec ça?

M. Garon: Pardon?

M. Williams: Est-ce que vous avez un problème avec ça, M. le ministre?

M. Garon: Bien, moi, j'ai constaté, hier, que vous n'aviez pas beaucoup d'influence dans votre parti, vous êtes arrivé juste à la fin de la période des questions. Je pensais que vous pourriez être le premier, le deuxième, le troisième, vous êtes arrivé en neuvième ou dixième place.

Le Président (M. Facal): M. le député de Matane.

M. Rioux: Oui, M. le Président.

M. Williams: Aujourd'hui, avez-vous un problème à être questionné?

M. Garon: Nous autres, on a juste des solutions!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): M. le ministre et M. le député de Nelligan, si vous permettez. M. le député de Nelligan a fait une demande. J'ai dit, personnellement, ce que j'en pensais, c'est-à-dire que je suis très réticent, mais comme nous sommes, ici, traditionnellement souples, si tous les membres ici me disent qu'ils sont prêts à, nous entendrons le député de Nelligan. Mais, moi, j'ai plaidé un certain nombre d'arguments qui vont à l'encontre de la demande du député de Nelligan. M. le député de Matane.

M. Rioux: M. le Président, je pense qu'on a adopté un horaire qui est celui de l'opposition, et je n'ai pas le goût de payer, moi, pour les turpitudes du député de Nelligan. On a étudié le programme 5, il avait juste à se présenter et à les poser, ses questions. Nous, c'est ce qu'on fait. Alors, moi, je serais opposé à ce qu'on change les règles du jeu...

M. Williams: Question de règlement, s'il vous plaît.

M. Rioux: ...parce que le député...

M. Williams: Question de règlement, M. le Président.

M. Rioux: ...de Nelligan a jugé bon de venir se...

M. Williams: Question de règlement, s'il vous plaît.

M. Rioux: ...présenter ici ce matin. Probablement...

M. Williams: Question de règlement.

M. Rioux: ...qu'il s'est levé un peu plus tôt que d'habitude.

Le Président (M. Facal): M. le député de Nelligan, j'ai bien entendu votre question de règlement, et plus vous crierez, moins je vous entendrai.

M. Williams: Article 35.5°, s'il vous plaît.

Le Président (M. Facal): Je voudrais simplement que vous laissiez finir le député de Matane, et, après, il me fera plaisir de vous passer la parole.

M. Williams: Mais il n'a pas le droit d'attaquer ma conduite, là, comme il l'a fait, M. le Président, il n'a pas le droit de faire ça.

M. Rioux: M. le Président, quand il se lève tôt, ça ne lui fait pas, lui. Alors, on a...

M. Williams: Comment ça, là?

M. Rioux: ...commencé à travailler à 9 heures ce matin, et il arrive ici inopinément, il se pointe ici pour poser des questions. Alors, il arrive...

M. Williams: J'étais ici à 9 heures. Vous n'étiez pas ici.

M. Rioux: ...comme de la moutarde après le dîner.

Le Président (M. Facal): M. le député de Nelligan...

M. Rioux: C'est clair, ça!

Le Président (M. Facal): Bon. Comme dit le président de l'Assemblée nationale, j'en appelle à la collaboration de tous les parlementaires. Essayons, autant que possible, d'éviter des mots comme «il m'insulte» ou comme «turpitudes», essayons de discuter sur le fond de la question. Nous procédons, en effet, avec une certaine souplesse, mais il y a des limites à la souplesse. Nous avons travaillé avec un canevas qui est celui de l'opposition, en essayant d'être aussi accommodants que possible, mais j'ai, en effet, de la difficulté à croire que le député de Nelligan n'ait pas pu trouver cinq minutes pendant la journée d'hier. Je vais...

M. Rioux: Il manque de discipline.

Le Président (M. Facal): Ne portez pas ces jugements-là, M. le député de Matane, peut-être le député de Nelligan avait-il de bonnes raisons. Mais le fait est que nous avons un canevas et que, si nous commençons à multiplier les exceptions, nous ne réussirons peut-être pas à passer à travers toute l'étude des crédits, ce que je voudrais que nous fassions. Alors, je vais encore prendre quelques interventions là-dessus et, finalement, nous prendrons une décision.

Je vais reconnaître M. le député de D'Arcy-McGee et Mme la députée de Terrebonne.

M. Bergman: Je pense que c'est une question de bonne foi et de respect entre confrères. Je suis étonné de l'attitude du député de Matane. Si le député de Nelligan demande la permission pour demander une question, je pense, entre confrères, ici, que c'est une question de bonne foi, et je ne vois pas qu'on doive perdre 20 minutes avec le manque de bonne foi que je vois du côté ministériel, ce matin, envers notre confrère de Nelligan. Moi, je pense que le président doit permettre au membre de Nelligan de demander cette question, le ministre semble prêt à répondre à la question. Et, moi, je suis étonné du manque de bonne foi du membre de Matane, ce matin, envers le membre de Nelligan.

Le Président (M. Facal): Moi, je m'abstiendrais de porter des jugements sur la bonne ou la mauvaise foi de qui que ce soit, M. le député de D'Arcy-McGee. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Oh! je ne doute pas de la bonne foi de qui que ce soit. Je pense que nous avons accepté de bonne foi l'horaire qui nous a été présenté par l'opposition officielle. Si nous avions, nous-mêmes, décidé de l'horaire, je comprendrais. Mais, comme l'opposition officielle a elle-même présenté son horaire, elle avait d'abord à le respecter. Et, comme, M. le Président, je pense qu'il ne faut pas perdre plus de temps sur une question de règlement que sur le sujet lui-même, j'aimerais qu'on puisse passer à la décision.

(9 h 20)

Une voix: Monsieur...

Le Président (M. Facal): Alors...

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Facal): ...je constate qu'il n'y a pas de consentement, mais parce que vous êtes un homme sympathique, M. le député de Nelligan, je vous laisse une dernière intervention qui, visiblement, ne me semble pas destinée à changer l'avis des membres. Mais, puisque vous voulez vous exprimer, allez-y, un dernier court commentaire. Et ne posez pas votre question, les gens ne veulent pas.

M. Williams: C'est dommage. Avec ça, M. le ministre, nous allons trouver d'autres endroits pour, certainement, vous questionner sur la non-annonce du cégep francophone de l'ouest de l'île et le retard de l'ouverture sur ce sujet. Mais...

Le Président (M. Facal): Message passé, M. le député de Nelligan.

M. Williams: ...je voulais dire aussi: s'il n'y a pas de consentement, je ne demande pas de question. Je n'ai pas voulu faire perdre 10 minutes. J'étais ici à 9 heures pour demander des questions. En tout cas, la commission de l'éducation, le ministre de l'Éducation, le côté ministériel ne veut pas explorer ce sujet. En tout cas, je passe la parole à mes collègues sur les autres programmes.


Éducation préscolaire et enseignement primaire et secondaire (suite)

Le Président (M. Facal): Merci beaucoup, M. le député de Nelligan. Alors, nous reprenons, là où nous aurions dû reprendre à 9 heures, le programme 4. M. le député de Marquette.


Services aux élèves venant de milieux défavorisés

M. Ouimet: Merci, M. le Président. J'aimerais aborder, avec le ministre de l'Éducation, toute la question des milieux défavorisés. On sait qu'il existe un lien étroit entre l'arrêt prématuré des études et le milieu socioéconomique de la provenance des élèves. La «défavorisation» économique revêt plusieurs visages: chômage, problèmes de santé, foyer familial instable. Et, bien sûr, tous ces problèmes se répercutent et se traduisent à l'école, et ils prennent souvent la forme de fréquentation scolaire irrégulière, de retards académiques importants, d'une motivation scolaire, des fois, questionnable de la part des élèves et d'un taux d'abandon scolaire très élevé dans des milieux socioéconomiquement défavorisés.

J'aimerais poser la question suivante au ministre de l'Éducation: Peut-il nous indiquer, pour l'année 1994-1995, si les commissions scolaires du territoire de l'île de Montréal et la CECQ ont reçu des montants additionnels pour les aider à contrer les facteurs de la «défavorisation»?

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Peut-il nous indiquer combien ils ont reçu, additionnels?

M. Garon: Vous voulez dire additionnels? C'est les mêmes montants, en 1995-1996, qu'en 1994-1995.

M. Ouimet: Il a reporté les mêmes montants que l'année dernière. On parle de combien?

M. Garon: À peine... Pardon?

M. Ouimet: On parle de combien en 1994-1995? Combien en...

M. Garon: L'an dernier, c'étaient 75 110 000 $; cette année, ça va être 75 360 000 $ pour la réussite éducative, qui comprend différents montants, notamment: les milieux économiquement faibles de Montréal et de Québec, 9 830 000 $; le programme Lait-école, 588 000 $. J'espère que les enfants l'ont, le lait, pour ne pas qu'il soit affecté à d'autre chose, parce que j'ai remarqué qu'il y a des commissions scolaires qui affectent le lait à d'autre chose.

Le gouvernement a changé le programme, l'ancien gouvernement, il l'a réduit considérablement, d'abord. Les gens du Parti libéral ne montrent pas une grande préoccupation. Parce que, le Lait-école, c'est moi qui l'ai installé, et il est installé dans toutes les écoles du Québec. Les libéraux l'ont réduit graduellement, et, aujourd'hui, ils donnent le montant aux commissions scolaires qui ne sont pas nécessairement obligées de le verser en Lait-école. Alors, quand le député libéral me montre sa préoccupation pour les milieux défavorisés, je ne suis pas persuadé que son gouvernement avait cette même préoccupation là, puisque l'argent ne va pas nécessairement au lait. Je peux vous dire que les études nombreuses qui avaient été faites sur le Lait-école, au moment où ça avait été attribué – si ma mémoire est bonne, en 1978 – démontraient que la majorité des enfants n'avaient pas déjeuné le matin, et c'est pour cette raison qu'on disait que le Lait-école devait être distribué autour de 9 h 30 le matin, très tôt, lorsque les jeunes sont arrivés, pour qu'ils aient une meilleure attention à l'école – parce que les enfants qui n'ont pas déjeuné ont une moins bonne attention – et pas trop tard dans l'avant-midi, pour ne pas que ça gâte leur dîner.

Alors, je vais vous dire, le nombre d'études qu'il y avait quand je suis arrivé au ministère de l'Agriculture, en 1976, ça pouvait faire un rayon de bibliothèque, sauf qu'il n'y avait pas de lait dans les écoles. Mais on a mis le lait dans les écoles, et les libéraux, qui ne l'avaient pas mis, l'ont enlevé graduellement. Et, finalement, aujourd'hui, le montant est versé, mais n'est pas nécessairement affecté au Lait-école. Ils peuvent faire autre chose avec.


Mesures alimentaires

M. Ouimet: Sur les mesures alimentaires, maintenant. On sait que des mesures alimentaires sont destinées...

M. Garon: Dans les milieux aussi économiquement faibles, il y a une autre mesure de 20 280 000 $. Alors, c'est un montant qui date seulement de 1994-1995. Il y avait 20 220 000 $. Là, il y a 20 280 000 $, en 1995-1996. Donc, les montants n'ont pas été diminués; ils ont été augmentés à peine, mais ils ont été augmentés un peu. C'est pour des maternelles plein temps, de quatre ans à cinq ans, les classes Passe-Partout. Il y a un 20 280 000 $ cette année.

M. Ouimet: Oui, je reviendrai à ça. Je voulais parler toujours des mesures alimentaires. Est-ce que les mesures alimentaires destinées aux écoles en milieux défavorisés seront toujours reconduites sous la forme d'allocation de base aux commissions scolaires qui font partie du programme de réussite éducative? Est-ce que c'est une mesure qui est toujours décentralisée: c'est accordé aux commissions scolaires et les commissions scolaires gèrent cette enveloppe-là?

M. Garon: Sauf que l'île de Montréal, c'est donné au Conseil scolaire de l'île de Montréal.

M. Ouimet: Oui. Alors, ça, ça continue. Aucun changement à ce niveau-là.

M. Garon: Il n'y a pas de changement là-dessus, non.

M. Ouimet: Est-ce que le ministre serait en mesure de nous fournir...

M. Garon: Il n'y a pas de diminution, il y a plutôt une petite augmentation, légère, mais il y a une petite augmentation.

M. Ouimet: ...le relevé des activités des commissions scolaires qui bénéficient de cette mesure-là? Parce qu'on sait que les commissions scolaires sont libres de s'en servir comme elles le jugent.

M. Garon: Je vais vous donner un exemple. Sur le lait, le ministère donnait, en 1994-1995, 5 858 586 $, et les commissions scolaires ont donné du lait pour 4 902 491 $. Alors, on voit qu'il y a presque un million de moins que l'argent qui avait été donné pour le Lait-école. Il ne me semble pas qu'il y ait la même préoccupation au niveau des commissions scolaires au point de vue de l'alimentation des enfants. Je peux donner des exemples.

M. Ouimet: Pour les mesures alimentaires?

M. Garon: Il y a des mesures alimentaires aussi, des mesures alimentaires au primaire et au secondaire. Mais, si vous voulez, je peux vous produire la feuille, simplement.

M. Ouimet: Ce que j'aimerais savoir, c'est s'il pourrait nous donner le relevé des activités des commissions scolaires, l'année dernière, par exemple, par rapport à comment elles ont...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...disposé de cette enveloppe budgétaire, là, qu'est-ce qu'elles en ont fait, combien d'argent est allé directement pour l'achat de la nourriture, combien d'argent est allé pour...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...l'achat d'infrastructures ou d'équipement ou pour le transport, là, dans certains cas de...

M. Garon: Le transport...

M. Ouimet: ...ce qu'on appelle les boîtes à lunch.

M. Garon: ...je ne l'ai pas, parce que le transport ne relève pas, jusqu'à date en tout cas, du ministère de l'Éducation, il relève du ministère des Transports. Mais, pour les autres fins, je peux donner au secrétaire de la commission une...

M. Ouimet: Oui, mais c'est une information qui me semble incomplète. Ce que j'aimerais savoir, c'est par commission scolaire – il n'y en a pas tant que ça – comment les commissions scolaires ont disposé de l'enveloppe qui leur a été attribuée.

M. Garon: Bien, il n'y en a pas tant que ça...

M. Ouimet: Les commissions scolaires doivent faire rapport au ministère.

(Consultation)

M. Garon: On ne l'a pas à ce moment-ci. On me dit que le rapport de l'année financière 1994-1995 est produit au mois de juin et qu'on aura les données seulement à l'automne 1995; on n'a pas encore ces données-là par commission scolaire.

M. Ouimet: Mais, pour l'année qui vient de s'écouler, là...

M. Garon: C'est ça, l'année...

M. Ouimet: ...qui s'est écoulée au 30 juin 1994.

M. Garon: Ce n'est pas l'année qui vient de s'écouler, ça, c'est l'année dernière.

M. Ouimet: L'année dernière, si vous voulez. Vous avez sûrement ce rapport-là. Ce qui m'intéresse de savoir, M. le ministre, je veux savoir qu'est-ce que les commissions scolaires ont fait avec l'enveloppe, où est allé l'argent.

(Consultation)

(9 h 30)

M. Théorêt (Marcel): Alors, ce qu'on a, c'est des rapports financiers où les commissions scolaires nous indiquent les choix qui ont été faits, en termes de priorités d'investissements...

Le Président (M. Facal): Pourriez-vous vous identifier?

M. Théorêt (Marcel): Excusez. Marcel Théorêt, sous-ministre adjoint au réseau primaire et secondaire, services éducatifs.

Le Président (M. Facal): Merci.

M. Théorêt (Marcel): Alors, ce qu'on a aux états financiers, M. Ouimet, c'est des rapports nous indiquant les investissements des commissions scolaires par secteur d'activité, mais on n'exige plus des commissions scolaires des rapports nous disant de façon précise quelles sont les activités réalisées. À l'époque où on le faisait, particulièrement pour les mesures qui s'adressaient aux écoles primaires ou aux écoles secondaires, de mémoire, on avait recensé quelque chose comme 6 000 ou 8 000 activités. Alors, on a des recueils, pour les années où on le faisait, qui vous indiquent toute la nature des activités qui ont été réalisées, par activité, mais on a ça pour des années précédentes.

M. Ouimet: Donc, dans le cas des mesures alimentaires, le ministère ne peut pas savoir comment les commissions scolaires ont dépensé l'enveloppe qui leur était accordée. Par exemple, une commission scolaire aurait pu décider d'investir davantage au niveau des infrastructures, de l'achat d'équipement, de l'achat de cuisinières, de poêles ou de frigidaires, et tout ce qu'ils ont de besoin, et le ministère ne serait pas au courant de ça.

M. Garon: Non, non, on a l'affectation des fonds par tête de chapitre; on n'a pas la ventilation. S'il y a une mesure alimentaire... Vous avez ici: Mesures alimentaires au primaire et au secondaire. On ne peut pas vous dire si c'est des pommes, ou si c'est des oranges, ou si elles ont acheté des sandwichs, ça, on n'a pas la distinction, mais on dit qu'il y a un tel montant qui est affecté aux mesures alimentaires au primaire et au secondaire.

M. Ouimet: Oui, ça, je comprends.

M. Garon: On a telle mesure pour le Lait-école. Mais je ne comprends pas qu'est-ce que vous voulez, parce que vous l'avez dans la feuille.

M. Ouimet: Bien, c'est parce que vous avez démontré une préoccupation que l'argent ne soit pas destiné à l'administration.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: J'imagine que votre préoccupation en matière de mesures alimentaires, c'est de vous assurer que l'enveloppe qui est consacrée aux commissions scolaires, que la plus grande totalité de cette enveloppe-là va directement pour l'achat de denrées alimentaires.

La question que je vous pose, c'est: Comment faites-vous ce contrôle-là? Comment êtes-vous en mesure de déterminer, là, dans telle ou telle commission scolaire, si l'objectif qui a été fixé par l'ancien ministre de l'époque, si cet argent-là est bien investi et va bien à nourrir les enfants?

M. Garon: Oui, mais il y a une année financière qui vient de se terminer... qui se termine, 1994-1995. Je ne peux pas changer les règles en cours de route, moi, là.

M. Ouimet: Ce n'est pas ça que je vous dis. Je vous demande le rapport. Est-il possible d'avoir l'information?

M. Garon: Bien oui! Mais je ne comprends pas ce que vous me demandez. Je vais être franc avec vous, je ne comprends pas ce que vous me demandez. Les règles ont été fixées, 1994-1995... Vous étiez fier de dire hier que ça avait été affecté aux commissions scolaires au mois de mars, au début de mars. Voyez-vous, si elles l'ont eu au début de mars pour l'année 1994-1995, c'est évident que, moi, je n'ai pas pu changer les règles en cours de route. Maintenant, on fait l'année 1995-1996, qui va commencer en septembre prochain. Alors, l'année 1994-1995, il y a beaucoup de choses sur lesquelles, même s'il y a un changement de gouvernement, nous n'avons pas de contrôle, parce que l'argent a été affecté selon des paramètres, selon des conditions, et il n'est pas possible aussi... Il est bien difficile, vous savez, quand la pâte à dent est sortie du tube, de la remettre dans le tube. C'est bien compliqué; je n'ai jamais essayé, mais... Je laisse ça à d'autres. Mais, quand l'année est partie, je ne peux pas changer les règles du jeu.

M. Ouimet: Oui, mais ce n'est pas l'objet de ma question, là.

M. Garon: Bien, là, je ne comprends pas ce que vous demandez.

M. Ouimet: L'objet de ma question, c'est: Vous faites des contrôles lorsque vous, j'imagine, octroyez des enveloppes à des commissions scolaires pour des buts bien précis qui émanent du ministère ou de l'ancien ministre.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Et la question, c'était de savoir, compte tenu de votre préoccupation de voir le moins d'argent possible consacré à l'administration, comment faites-vous la vérification par rapport à la nourriture?

M. Garon: Bien, je ne l'ai pas faite pour l'an dernier parce qu'on ne l'a pas eu. Je ne l'ai pas, à date. Les états financiers ne sont pas là.

M. Ouimet: Mais la mesure...

M. Garon: Les règles du jeu ont été faites par l'ancien gouvernement au début de l'année...

M. Ouimet: La mesure alimentaire...

M. Garon: ...puis, pour 1993-1994, je viens d'avoir une note que, non, on ne l'a pas pour 1993-1994. Pour 1993-1994, j'ai une note ici du sous-ministre qui me dit qu'on ne l'a pas. Puis, en 1994-1995, on l'aura dans les états financiers lorsqu'ils seront produits. Parce qu'il y a une note qu'on a demandé aux états financiers de l'indiquer dans le rapport des états financiers de cette année. Mais ils vont être produits seulement à la fin de juin, puis ils vont être produits à... C'est-à-dire que l'année va se finir à la fin de juin. Parce que l'année scolaire, ce n'est pas l'année de calendrier du gouvernement. C'est du 1er juillet au 30 juin. Vous le savez, ça, d'ailleurs.

Alors, c'est évident que, l'année n'étant pas finie, les chiffres ne sont pas comptabilisés, puis on ne les aura pas avant l'automne.

M. Ouimet: Bon, très bien. Au niveau des maternelles et des prématernelles, maintenant, on sait qu'il existe des mesures spéciales...

M. Garon: Ce que j'aimerais, par exemple, dans les commissions scolaires, j'ai averti les commissions scolaires qu'elles doivent siéger publiquement. Elles ne doivent pas siéger à huis clos. La loi exige que ça doit se faire publiquement. Je dois vous dire que celles qui ne se conformeront pas à la loi, il y aura des mesures de prises.

M. Ouimet: Lesquelles?

M. Garon: Vous allez voir. Attendez. C'est-à-dire qu'il y a une loi, puis elle doit être respectée par tous. Quand la loi n'est pas bonne, on la change; tant qu'elle existe, elle doit être respectée.

M. Ouimet: Ça, c'est à la suite du reportage dans La Presse , il y a quelques semaines, du fonctionnement de la CEPGM, j'imagine? Vous faites référence à ce cas-là?

M. Garon: Entre autres. Mais la règle, c'est de fonctionner publiquement. Ce sont des fonds publics, et les organismes doivent siéger publiquement, autant les commissions scolaires que les conseils municipaux. Parce que c'est de l'argent public. Ce n'est pas une compagnie privée, une commission scolaire. C'est de l'argent public.

M. Ouimet: Et là vous constatez que cette règle-là n'est pas respectée.

M. Garon: Bien, quand j'entends parler qu'elle n'est pas respectée, moi, je pense que... En tout cas, on va commencer par donner un avertissement qu'elle doit être respectée. Ensuite, si j'entends parler qu'elle n'est pas respectée, on va prendre les mesures appropriées.

M. Ouimet: Vous en avez entendu parler récemment dans un reportage de La Presse , il y a deux semaines, trois semaines, je pense. Ça a été porté à votre attention?

M. Garon: Bien, un reportage, c'est une affaire; vérifier de quelle façon c'est fait, c'est une autre affaire. Mais j'ai fait en sorte d'indiquer qu'on doit siéger à huis clos. La loi exige que l'on siège... Pardon, pas à huis clos, ouvertement.

M. Ouimet: En séances publiques.

M. Garon: En séances publiques.

M. Ouimet: Mais, si vous intervenez, c'est parce que vous avez des inquiétudes.

M. Garon: Je vous le dis comme c'est, là.

M. Ouimet: Mais c'est ça la question que je vous pose. Si vous intervenez, si vous avez jugé bon d'écrire une lettre, c'est parce que vous aviez des inquiétudes, ça a été porté à votre connaissance.

M. Garon: Parce que la loi indique clairement qu'on doit siéger publiquement. Ce n'est pas à huis clos.

M. Ouimet: Oui. Ça, je comprends ça. La loi date de 1988, je pense. Les dispositions n'ont pas changé et vous sentez le besoin d'intervenir. Ma question, il n'y a pas de piège, M. le ministre, c'est juste de savoir quels cas ont été portés à votre attention. Pourquoi sentez-vous le besoin d'intervenir à ce moment-ci, comme vous m'indiquez que vous l'avez fait?

M. Garon: Oui. J'ai indiqué...

M. Ouimet: Et, si ce n'est pas respecté... Parce qu'il y a des traditions dans certaines commissions scolaires. Les commissions scolaires existent depuis 150 ans, elles ont leur fonctionnement.

M. Garon: Non, non. Il y a la loi...

M. Ouimet: Il y en a qui respectaient plus ou moins peut-être les dispositions. Moi, je vous pose la question.

M. Garon: La loi n'est pas...

M. Ouimet: Comment entendez-vous intervenir si vous voyez que ce n'est pas respecté, comme ça semble être le cas dans le cadre de la CEPGM?

M. Garon: Il y a plusieurs mesures, c'est-à-dire que, si un organisme n'est pas capable de respecter la loi, la tutelle peut être une réponse. Si des organismes sentent qu'ils sont au-dessus de la loi, à ce moment-là, bien, je pense qu'ils ne peuvent pas fonctionner en dehors de la loi, et c'est clair que, si des gens ne fonctionnent pas selon la loi, il va falloir prendre les mesures appropriées pour qu'ils fonctionnent selon la loi.

M. Ouimet: Avez-vous l'intention de désigner un observateur pour faire les vérifications?

M. Garon: Je ne vois pas de commentaires additionnels à ce moment-ci, sauf que j'ai...

M. Ouimet: C'est parce que vous évoquez la possibilité de la tutelle.

M. Garon: Non, non. Je n'ai pas évoqué, vous m'avez demandé...

M. Ouimet: Non, non, mais je vous pose la question.

M. Garon: ...qu'est-ce qui peut être fait.

M. Ouimet: Oui.

M. Garon: J'ai dit: Bon, je vais vous donner un exemple. Vous devez connaître ça, des tutelles, vous.

(9 h 40)

M. Ouimet: Oui. C'est pour ça que je vous pose la question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: C'est pour ça que je vous pose la question, M. le ministre. Je vais répéter ma question: Quels sont les cas précis qui ont été portés à votre attention? Et, concrètement, entendez-vous intervenir?

M. Garon: J'ai commencé par...

M. Ouimet: Et, avant d'intervenir, est-ce que vous allez décréter une tutelle comme ça à partir d'un article de journal?

M. Garon: Non. J'ai commencé par avertir que, selon la loi, on doit fonctionner ouvertement, c'est-à-dire en séances publiques...

M. Ouimet: Oui.

M. Garon: ...et que la loi doit être respectée.

M. Ouimet: Là, vous avez indiqué que des cas ont été portés à votre attention, que, si ce n'était pas le cas, vous aviez l'intention d'intervenir pour que la loi soit respectée, que vous n'acceptez pas...

M. Garon: Non, non, là, vous... Ne mélangeons pas le temps, là. J'ai dit que j'ai commencé par avertir les gens qu'il faut respecter la loi qui dit qu'on siège en séances publiques. Maintenant...

M. Ouimet: Oui, mais pourquoi avez-vous fait ce rappel-là?

M. Garon: Pardon?

M. Ouimet: Pourquoi avez-vous fait ce rappel-là? La loi existe depuis 1988.

M. Garon: Oh non! Elle existe depuis avant ça.

M. Ouimet: À ma connaissance, aucun ministre de l'Éducation n'a eu à le faire avant vous.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Vous sentez le besoin d'intervenir à ce moment-ci. Je ne sais pas quand vous l'avez fait, quand vous avez acheminé une lettre.

M. Garon: Je ne ferai pas de commentaires additionnels. J'ai dit qu'on doit respecter la loi qui dit de siéger publiquement...

M. Ouimet: Oui, mais pourquoi avez-vous fait ça?

M. Garon: ...et, comme je suis le ministre de tutelle...

M. Ouimet: Oui, mais...

M. Garon: ...chargé de voir à l'application de la loi, bon, bien, si la loi n'est pas respectée, il faudra prendre des mesures pour faire en sorte qu'elle soit respectée. Je n'en dis pas plus.

M. Ouimet: Oui, mais, je veux dire, la loi comporte je ne sais pas combien de centaines de dispositions. Vous avez jugé opportun d'intervenir sur cette disposition-là qui, à vos yeux, ne semble pas être respectée.

M. Garon: Parce que c'est fondamental dans un système démocratique, pour que les gens puissent surveiller, il faut qu'ils sachent ce qui se passe.

M. Ouimet: Oui.

M. Garon: Alors, dans un système démocratique, quand on administre des fonds publics, on les administre en plein jour. Ce n'est pas notre argent qu'on administre, c'est l'argent du public. Alors, étant donné que les fonds qui sont donnés aux commissions scolaires sont donnés dans une forte proportion par le gouvernement du Québec, bien, il doit s'assurer de faire en sorte que la loi soit respectée, et, une des bases, c'est que l'administration soit publique, c'est-à-dire que les débats soient faits publiquement, et c'est indiqué dans la loi, pas depuis 1988, depuis plus longtemps que ça, c'est la règle.

M. Ouimet: Ça, je comprends, mais vous avez jugé opportun d'intervenir, c'est vous-même qui l'avez dit tantôt, et la question...

M. Garon: Oui, mais je ne suis pas obligé de vous en dire plus.

M. Ouimet: ...que je vous pose, c'est: Quel cas a été porté à votre attention qui ne respectait...

M. Garon: Je ne veux pas...

M. Ouimet: Quel cas de commission scolaire ne respectait pas cette disposition?

M. Garon: Je n'ai pas besoin de...

M. Ouimet: Un ministre n'intervient pas comme ça, décider d'envoyer une lettre à toutes les commissions scolaires ou à certaines commissions scolaires, leur demandant: J'aimerais que vous respectiez telle disposition de la loi. Qu'est-ce qui a été porté à votre connaissance?

M. Garon: Je n'ai pas besoin de vous dire ça.

M. Ouimet: Bien, là, on est en crédits. Je pense qu'il est important...

M. Garon: Ah non! Il n'y a pas de crédits là-dessus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: L'administration de la loi, l'application de la loi, là, ça ne fait pas partie des crédits.

M. Ouimet: Oui, mais le... On est dans le programme 4, et le fonctionnement des commissions scolaires...

M. Garon: C'est parce que la surveillance des dépenses budgétaires est mieux faite quand les débats se font publiquement.

M. Ouimet: C'est l'objet de ma question, en crédits, aujourd'hui.

M. Garon: C'est pour ça que je dis que la loi doit être respectée, qui dit que les séances doivent se faire publiquement.

M. Ouimet: Alors, je vous repose la question. Quels cas ont été portés à votre connaissance du non-respect de cette disposition-là?

M. Garon: Bien, je n'ai pas besoin de vous répondre à cette question-là.

M. Ouimet: Vous avez décidé d'intervenir comme ça. Vous vous êtes levé un matin, vous avez...

M. Garon: Non. Là, vous tirez des conclusions.

M. Ouimet: ...dit: Je vais écrire une lettre à...

M. Garon: Vous tirez des conclusions.

M. Ouimet: Bien, je vous pose la question. Aidez-moi.

M. Garon: Non, je n'ai pas besoin de vous aider davantage, j'en ai dit assez.

M. Ouimet: Il y a eu un cas qui a été rapporté, celui de la CEPGM, par une journaliste, Michèle Ouimet, dans un article de La Presse , qui date de quelques semaines. Est-ce qu'on parle de ce cas-là? Est-ce qu'on parle de la CEPGM?

M. Garon: Je ne ferai pas de commentaires, mais c'est un exemple.

M. Ouimet: M. le Président, c'est manifeste, le ministre ne veut pas répondre à la question.

M. Garon: J'ai répondu.

M. Ouimet: Bien, je vous pose la question: Est-ce que c'est le cas de la CEPGM?

M. Garon: Je n'ai pas besoin de vous dire de quel cas il s'agit, je vous dis que la loi s'applique à tous.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, simplement pour satisfaire votre curiosité, je vous signale les articles 79, 80, 81 et 82, qui disent que, bien entendu, vous pouvez poser toutes les questions que vous voulez et aussi souvent que vous le voulez, mais que, si la réponse du ministre ne vous satisfait pas, il n'y a pas grand-chose que vous puissiez faire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Il reste aussi libre de sa réponse que vous êtes libre de votre question.

M. Ouimet: Je comprends ce que vous me dites, M. le Président, mais je pense que c'est une question extrêmement importante. C'est tellement important que le ministre a jugé bon d'intervenir lui-même, et a jugé bon de faire un rappel à des commissions scolaires, et a même jugé bon de me dire qu'il y avait des dispositions auxquelles il pourrait recourir pour rappeler à l'ordre des commissions scolaires. Il a évoqué la possibilité d'une tutelle. Alors, je lui pose la question: Quelle commission scolaire?

M. Garon: J'ai répondu.

M. Ouimet: Alors, on peut présumer que c'est la CEPGM, parce que c'est de cette commission scolaire qu'il s'agissait dans un article de journal.

M. Garon: Je n'en dirai pas plus, à ce moment-ci.

M. Ouimet: C'est quand même important, là, ce sont des...

M. Garon: C'est parce que la loi s'applique à tous. Il n'y a pas de cas particuliers, la loi s'applique à tous et les commissions scolaires doivent siéger publiquement.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, la dernière ligne de l'article 82 se lit comme suit: «Le refus de répondre ne peut être discuté.» Alors, je vous inviterais à passer à votre ligne suivante d'argumentation.


Maternelles quatre ans et cinq ans

M. Ouimet: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir aux maternelles quatre ans et aux maternelles cinq ans. On sait que, pour les milieux défavorisés, il existe des dispositions spéciales qui permettent aux commission scolaires qui ont un indice de «défavorisation» d'avoir recours à des enveloppes budgétaires pour offrir des maternelles temps plein pour les enfants de cinq ans et des maternelles demi-temps pour les enfants de quatre ans. Est-ce que le ministre entend élargir cette mesure-là?

M. Garon: Je pense que ça va être le sujet d'un débat aux états généraux. Il y a déjà eu une manifestation dans ce sens-là par, je pense que c'est six organismes signataires, qui indiquaient qu'ils pensaient que ce serait une bonne chose, et j'ai le sentiment très net que c'est une question qui va être discutée aux états généraux.

D'autant plus que, quand j'ai manifesté, hier, qu'il y avait des locaux vides dans les commissions scolaires, dans les écoles, j'ai indiqué à plusieurs reprises aussi que ce n'est pas anormal, dans des locaux vides d'une école, de louer des espaces à des garderies, par exemple, que c'est peut-être un bon endroit pour les garderies. Ça m'apparaît peut-être un des meilleurs endroits même. Alors, c'est une des façons, à mon avis, possiblement, pour les commissions scolaires ou les écoles, de remplir leurs locaux, que de faire en sorte que les maternelles à plein temps ou à demi-temps soient dans les mêmes locaux que les écoles, surtout quand il y a des espaces vides. Maintenant, aux états généraux, moi, je suis persuadé que ça va être discuté. Évidemment, il y a des factures rattachées à ça, et, à ce moment-là, il sera temps de discuter de ces questions-là.

Dans la lettre que j'ai écrite aux commissions scolaires au début d'avril, je leur disais qu'il nous faudra aussi accentuer nos efforts dans les services à la petite enfance pour mieux répondre aux besoins des familles d'aujourd'hui. Dans une société où les mères réintègrent rapidement le marché du travail, il est maintenant courant que les jeunes enfants fréquentent les garderies. Au cours des dernières années, les garderies en milieu scolaire ont connu un grand essor. On en compte maintenant plus de 800 qui accueillent 40 000 jeunes d'âge scolaire. Il faut poursuivre dans cette voie et manifester une plus grande ouverture, particulièrement à l'égard des enfants de quatre et cinq ans, en vue de favoriser la réussite scolaire et l'égalité des chances.

C'est d'ailleurs avec un grand intérêt que j'ai pris connaissance de la prise de position récente de plusieurs de nos partenaires au sujet de l'engagement de l'école dans les services de garde. Alors, ça faisait partie de la lettre que j'ai envoyée aux commissions scolaires au début du mois d'avril.

M. Ouimet: Maintenant, actuellement, la mesure que je vous ai décrite un peu plus tôt s'applique uniquement aux écoles étant situées en milieux défavorisés.

M. Garon: Oui.

(9 h 50)

M. Ouimet: La question que je vous pose, c'est: Pour être conforme à la lettre que vous avez expédiée à l'ensemble des commissions scolaires, avez-vous l'intention d'élargir cette mesure-là pour que toutes les écoles du Québec puissent offrir la maternelle quatre ans à demi-temps et la maternelle cinq ans à plein temps pour l'ensemble des élèves? Est-ce que c'est une mesure qui serait accessible à tous ou est-ce que c'est une mesure qui demeure limitée aux élèves provenant de milieux socioéconomiquement faibles?

M. Garon: Bien, moi, quand j'ai parlé que ça soit un débat ouvert, tous les gens qui en ont parlé n'ont pas parlé que ça soit réservé. Je pense que ce n'est pas une question de richesse, qu'on puisse s'occuper ou non, qu'on s'occupe ou non de ses enfants. Il y a des enfants de familles très fortunées qui sont, à toutes fins pratiques, abandonnés, puis il y a des gens de familles très pauvres qui s'occupent beaucoup de leurs enfants. Ce n'est pas une question d'argent, moi, je pense, que les gens s'occupent ou non de leurs enfants. Puis que des jeunes soient doués, je pense que c'est pas une question de richesse également. C'est évident que la fortune ou le manque de fortune de la famille diminue ou augmente les chances. Excepté que je pense que le débat sur les garderies en milieu scolaire, c'est un débat qui concerne l'ensemble des citoyens. C'est comme ça que je l'ai abordé dans la lettre que j'ai adressée aux commissions scolaires, et j'ai l'impression que c'est comme ça que les gens vont en parler au moment des états généraux.

M. Ouimet: Je partage votre point de vue là-dessus, M. le ministre, mais la question que je vous pose, c'est: Quelles mesures peuvent accompagner la lettre ou l'orientation que vous avez donnée aux commissions scolaires? Parce qu'on sait que, pour avoir une maternelle demi-temps, il y a des coûts d'environ 25 000 $, puis ça, c'est à part des infrastructures. Il y a des coûts, là, rattachés à une telle mesure.

M. Garon: Oui, mais il y a des services...

M. Ouimet: Pour que vos voeux ne soient pas des voeux pieux...

M. Garon: Non, non, mais...

M. Ouimet: ...est-ce que vous avez l'intention d'accompagner cette mesure d'un financement additionnel pour pouvoir rendre cette mesure-là accessible à tous, et, comme vous le disiez, pas juste à des enfants provenant de milieux faibles...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...mais à l'ensemble des enfants de la province?

M. Garon: Bien, il y a des service de garde au Québec, et, quand il y a des locaux qui sont disponibles dans les écoles... Bon, je pense qu'il y a une politique, il y a des commissions scolaires qui ont des services de garderie, il y a les services de garde qui sont sous la responsabilité d'un autre ministère. Maintenant, que des gens déterminent que les locaux vont être utilisés davantage en milieu scolaire, d'autant plus qu'il y a des locaux vides, je pense que c'est une approche qui est sensée, mais je ne peux pas présumer de ce que les gens vont vouloir faire. Et c'est évident que, les garderies, il y en a en milieu scolaire mais il y en a un grand nombre qui ne relève pas du milieu scolaire. Alors, je ne peux pas présumer de ce que les gens vont décider, mais je pense que le débat est ouvert à l'occasion des états généraux.

M. Ouimet: À ce compte-là – vous faites un parallèle avec les services de garde qui relèvent d'un autre ministère – estimez-vous qu'il serait opportun que, dorénavant, ça ne relève que d'un seul ministère? Dépendamment des consensus qui seront dégagés dans le cadre des états généraux, avez-vous l'intention de favoriser un consensus qui proposerait que ça ne relève que d'un seul ministère, en l'occurrence le ministère de l'Éducation, parce que ça permettrait d'utiliser des locaux qui sont vacants? Et, si vous tenez à ne pas financer des locaux vacants, des écoles qui sont vacantes, et que vous souhaitez qu'elles soient mises à la disposition d'élèves dans le cadre d'une maternelle, ou d'une pré-maternelle, ou même d'un service de garde, ne croyez-vous pas qu'il serait opportun que ça relève d'un seul ministère?

M. Garon: Je n'ai pas parlé de ça parce que, là, on rentre dans des débats de structure; ce n'est pas de ça que j'ai parlé. Ce dont j'ai parlé, c'est que les gens vont faire le débat, ils vont décider des choses, parce que je sais qu'il y a différentes hypothèses et que les gens ne sont pas tous du même avis là-dessus. Il y a des gens qui pensent que les jeunes doivent être dans des garderies, et pas pour des fins d'école, il y en a d'autres qui pensent d'autre chose; il y a différentes théories là-dedans, différentes approches, différentes perspectives envisagées selon les tenants d'une thèse ou de l'autre.

Moi, je n'ai pas l'intention de faire de choix là-dedans, excepté que je dis que nous sommes dans la situation où il y a des locaux vides. Moi, j'ai indiqué que, cette année, on ne paierait pas pour les écoles vides, puis que, l'an prochain, qu'on ne paiera pas pour les locaux, les espaces qui ne sont pas occupés. Bien, si on ne paie pas pour les espaces qui ne sont pas occupés, moi, je pense que ça donne un an d'avance aux commissions scolaires pour prévoir ça. Et, une des façons, c'est d'utiliser les locaux pour que les services communautaires soient mieux organisés. Alors, l'ouverture est là. Maintenant, je ne veux pas forcer les gens, moi, ce n'est pas ma manière; je n'aime pas ça, forcer les gens. Je pense mieux les convaincre ou mettre le débat sur la table et que les gens fassent leur choix.

M. Ouimet: Mais avez-vous l'intention, à tout le moins, de les inciter avec des mesures? On sait qu'il y a des mesures, par exemple, pour inciter les commissions scolaires à fusionner dans certains cas. Vous accordez du financement additionnel. J'ai posé la question hier et le sous-ministre m'a répondu. Je vous pose la même question: Avez-vous l'intention de proposer des mesures incitatives...

M. Garon: Non.

M. Ouimet: ...pour que les commissions scolaires voient un avantage à louer leurs...

M. Garon: Non.

M. Ouimet: ...espaces excédentaires, et peut-être même à les offrir, là, pour des services de garde?

M. Garon: Non. Je n'ai jamais pensé, personnellement, que l'argent était toujours le meilleur incitatif; dans certains cas, mais pas tout le temps. Bien souvent, c'est une vision des choses; les gens ont une vision ou ils ne l'ont pas, et ils sont libres. Mais je n'ai jamais cru... Parce que, au Québec, on pense toujours, comprenez-vous, que le seul incitatif, c'est l'argent. Moi, je fais partie des gens qui croient que la motivation, c'est le meilleur incitatif, croire à quelque chose, être convaincu de quelque chose, et l'argent n'est pas...

Je lisais Le Devoir ce matin, par exemple, où on parle, encore là, que l'école pauvre cherche des partenaires. Celui qui a écrit ça, là, il ne lit pas dans ma pensée, je peux vous le dire, pas une minute, parce que je ne pense pas du tout comme ça. Je pense que c'est mieux pour les gens de regrouper certains services communautaires. C'est plus efficace, ça peut faire leur affaire. À Batiscan, quand on dit que j'ai forcé la bibliothèque... Pas du tout, je n'étais même pas au courant. C'est le maire qui, au moment des discussions, a dit: Nous autres, on a une bibliothèque, on pourrait la localiser dans l'école, et j'ai dit: Bon, vous avez un bon exemple de quelque chose qui peut être utile. Mais ça a été tout.

Moi, je n'ai pas l'habitude de forcer le monde, je n'ai jamais été partisan de cette théorie-là. Je suis partisan des consensus. Mais, qu'est-ce que vous voulez, je ne peux pas enlever aux gens qui écrivent des articles dans les journaux leur idée. Alors, ils aiment ça, penser que je suis un bulldozer. Mais je ne suis pas un bulldozer. Je suis un bulldozer une fois que le consensus est fait, pour l'appliquer, parce que je calcule que les gens sont assez écoeurés de la politique, où on a des comités d'étude qui arrivent à des conclusions et il n'arrive rien après. Là, quand les gens ont fait un consensus, je pense qu'il faut l'appliquer, le respecter. Mais, dans la recherche du consensus, je n'ai jamais l'habitude de forcer le monde.

D'ailleurs, je vois le député qui est ici, le député de Champlain, il pourra vous dire que personne n'a été... Ce qu'on a fait, par exemple, c'est respecter la volonté des citoyens qui souhaitaient quelque chose unanimement, parce qu'il y avait un consensus dans un milieu donné. Alors, moi, ce n'est pas ma façon de voir les choses.

M. Ouimet: Mais revenons à...

M. Garon: Moi, je vais vous dire, si j'avais vécu au moment des guerres de religions, il n'y en aurait pas eu, de guerres de religions, si j'avais été responsable de ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Je ne fais pas partie des gens qui croient aux guerres de religions, parce que je pense que les gens ont le droit de penser ce qu'ils veulent. Ils ont le droit de penser ce qu'ils veulent.

M. Ouimet: Mais revenons, M. le ministre, à l'utilisation...

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, peut-être une dernière question avant que je ne passe la parole à la députée de Terrebonne qui attend...

M. Ouimet: Non. Allez-y.

Le Président (M. Facal): Ah bon, très bien. Mme la députée de Terrebonne.


Gestion des commissions scolaires

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous avez abordé, avec le député, le côté des services de garde en milieu scolaire. J'en avais discuté au moment où la ministre responsable avait fait une tournée dans toutes les régions du Québec, on avait parlé longuement des services de garde en milieu scolaire, et les intervenants nous avaient rappelé un problème qui semblait exister, c'est qu'il n'y a pas obligation, pour la commission scolaire, de consacrer effectivement, pour les services de garde, l'enveloppe totale qui est donnée pour les services de garde. Donc, ça varie d'une région du Québec à l'autre et même d'une école à l'autre, parce que, à l'intérieur même de certaines commissions scolaires, certaines écoles décident qu'elles gardent une partie de l'enveloppe plus ou moins grande pour d'autres fins. Et je pense que, dans le débat qu'on va faire, il va falloir tenir compte aussi de cet argument-là.

(10 heures)

Dans le même sens, les compressions qui sont faites pour l'application de la loi 102, certaines directives sont envoyées aux commissions scolaires au niveau des compressions, mais il reste une liberté d'action au niveau des commissions scolaires. Et, dans ma région, les enseignants m'ont fait part que, finalement, on avait écopé de pertes de personnel enseignant, alors que la directive n'était pas dans ce sens-là, mais que le choix de la commission scolaire avait été de décider qu'on faisait plus de coupures du côté des enseignants, pour se retrouver quand même en fin d'année avec un surplus budgétaire.

Est-ce que vous pouvez m'éclairer un petit peu là-dessus? Est-ce que c'est vrai que, finalement, la commission scolaire a une très grande latitude, autant au niveau des services de garde en milieu scolaire que pour l'application de la loi 102, et que ça peut amener, finalement, sur le terrain, des disparités, puis que les enseignants ou les gens en service de garde n'ont pas de recours face à ça?

(Consultation)

M. Garon: La loi 102... Comme je n'étais pas là, au ministère...

Mme Caron: Non, non, c'est une loi qui est arrivée avec les libéraux.

M. Garon: Oui. J'aime autant que les fonctionnaires, qui ont vécu l'application, puissent en parler eux-mêmes, parce qu'ils vont être plus éloquents que je vais l'être, plus connaissants aussi. Ha, ha, ha!

M. Morel (Réjean): Réjean Morel, directeur général du financement et des équipements au primaire-secondaire. La loi 102, l'allocation qui est retirée aux commissions scolaires est globalement de 1 % sur l'ensemble des salaires, mais la commission scolaire, dans l'application, ne peut pas déroger à l'application de la loi 102 comme telle, donc elle ne pourra pas couper plus d'enseignants et exempter de la loi 102 les autres enseignants qui restent. Donc, elle doit appliquer la loi 102 comme elle est.

Mme Caron: Oui, mais le choix qu'elles ont à faire, est-ce qu'elles ont quand même un choix à savoir si elles vont couper plus au niveau de la masse salariale des enseignants, ou sur la masse des cadres, ou sur la masse du personnel de soutien?

M. Morel (Réjean): Il y a une différence assez fondamentale entre la gestion que fait la commission scolaire de ses allocations pour déterminer le nombre d'enseignants par rapport à ce qu'on lui finance et par rapport à ce qu'elle dépense et l'application de la loi 102, c'est très différent. Il n'y a pas de lien entre le nombre d'enseignants qu'elle va mettre en place, par rapport à ce qu'on lui finance, et la loi 102.

Mme Caron: Dans ses compressions, elle a un pourcentage à appliquer, mais elle est libre de l'appliquer comme elle veut.

M. Morel (Réjean): Pour les compressions. Excluant la loi 102, oui.

Mme Caron: Elle est libre de l'appliquer comme elle veut.

M. Morel (Réjean): Oui.

Mme Caron: Donc, ça peut amener des choix qui sont différents de ce que pouvait avoir le ministère comme objectif, disons, par rapport aux compressions.

M. Morel (Réjean): Dans les règles actuelles, effectivement, il y a une «transférabilité» entre les enveloppes d'allocation. Mais il faut dire que l'enveloppe globale des enseignants, quand même, elle est régentée par un ensemble de règles, de conventions collectives qui viennent réglementer au moins, je dirais, 85 %, 90 % de l'obligation de la commission scolaire de mettre en place des enseignants.

Mme Caron: Et, au niveau des services de garde, est-ce que c'est bien...

M. Garon: Attendez un peu, je ne voudrais pas que...

Mme Caron: Oui.

M. Garon: M. Lucier devrait peut-être compléter, parce que je pense qu'on est allé plus loin que la loi 102.

M. Lucier (Pierre): Je pense qu'on est au-delà de la loi 102. La loi 102 est très contraignante, c'est 1 % de la masse salariale qui a été pris, de manière générale, par deux journées et demie non payées, ou il pouvait y avoir, par ailleurs, d'autres façons de le récupérer. Ça a été le cas des cadres du public et du parapublic, où ça a été pris dans leur régime d'assurance, mais ça n'a pas de lien direct avec l'ensemble des autres compressions. Donc, il n'y a pas de compressions, au sens strict, qui viennent de la loi 102, il y a une réduction de la masse salariale qui doit être épongée d'une manière ou de l'autre par les employés de toutes catégories.

Mme Caron: O.K.

M. Lucier (Pierre): Tandis que, dans le cas des compressions, c'est tout à fait autre chose, et là il y a une «transférabilité», une gestion et des choix locaux dans la manière de les appliquer.

Mme Caron: Donc, certaines commissions scolaires ont pu utiliser les compressions en utilisant aussi un petit peu l'aspect de la loi 102, en se disant que ça pourrait passer de cette façon-là. Parce que ceux qui sont venus m'en parler l'ont vécu vraiment comme une application directe de la loi 102, mais c'était plutôt une application des compressions.


Services de garde en milieu scolaire

Et, au niveau des services de garde en milieu scolaire, est-ce vrai et d'où découlait cette décision-là du ministère, décision qui a été prise avant le ministre actuel, évidemment, de ne pas consacrer l'enveloppe comme telle qui devrait être attribuée aux services de garde, de laisser cette enveloppe-là libre, finalement, à chaque école? Même pas seulement à chaque commission scolaire, de l'utiliser pour des fins de services de garde ou pour d'autres fins?

M. Morel (Réjean): Les règles budgétaires sont assez précises là-dessus, ce sont des allocations supplémentaires. Les allocations supplémentaires, la dépense qu'on finance est indépendante de la dépense réelle, c'est-à-dire que, si, par rapport à une activité donnée qui est financée par allocation supplémentaire, l'activité coûte moins cher, la commission scolaire peut récupérer; si ça coûte plus cher, elle la finance, sauf que les règles budgétaires précisent que le service doit être rendu. Si le service n'est pas rendu et qu'il y a une contestation de cette nature-là, on peut couper la commission scolaire, récupérer les sommes, si elle n'a pas affecté les sommes aux services pour lesquels elles ont été données.

Par exemple, si un service de garde coûte 2 000 $, on en finance 1 900 $, la commission paie la différence. Si ça en coûte 1 800 $ pour donner le service, le 100 $, la commission le garde. Il n'y a pas de contrôle là-dessus. Mais le service doit être rendu.

Mme Caron: Oui, mais, dans les faits, sur le terrain, souvent, le service est rendu, mais on décide de calculer différents frais qui peuvent venir du service, par exemple l'utilisation du matériel. Tellement que, finalement, on se retrouve qu'une grosse partie de l'enveloppe reste à l'école pour d'autre chose et on doit, à ce moment-là, augmenter le coût pour les parents. Ça, dans la région, en tout cas, où j'ai assisté aux audiences, Laval–Laurentides–Lanaudière, ça a été dénoncé fortement. Je pense que ce serait important que, au moment des états généraux, on s'interroge aussi là-dessus.

M. Garon: La grosse question qu'on doit se demander, c'est si on doit mettre plus de contrôle ou moins de contrôle. Moi, je pense qu'on devrait mettre moins de contrôle. Contrôler – c'est pour ça, quand on parlait des frais administratifs – ça coûte de l'argent, tout ça. Alors, les frais administratifs, moi, je pense qu'il faut les réduire. Il faut viser le contrôle essentiel. À mon avis, ce qu'on doit faire, c'est contrôler qu'est-ce qu'on doit voir dans une année scolaire, qu'est-ce qui doit être vu dans chacune des années scolaires et s'assurer que ça a été vu. Le reste, moi, j'aurais plutôt tendance à dire: Laissons le maximum de latitude aux organismes locaux et respectons la loi.

Je me suis aperçu plusieurs fois, quand j'ai demandé des questions au ministère, que la loi n'est peut-être pas si mal faite que ça. Est-ce qu'elle est toujours appliquée? C'est une autre affaire. Tantôt, on parlait du huis clos, des séances publiques. La loi dit: séances publiques. Alors, séances publiques, c'est bien. Bon. Après ça, ça fait plus de contrôle, parce que, quand c'est public, tout le monde peut contrôler. Quand ce n'est pas public, les gens ne peuvent pas tous contrôler, ils ne le savent pas. Moi, j'ai toujours été partisan... C'est pour ça, des fois, je donne des exemples aux États-Unis. J'ai toujours été plus partisan, moi, de la divulgation des renseignements que de mettre des polices partout.

Aux États-Unis, par exemple, on dit: On rend publics les salaires des dirigeants. Tout le monde peut dire est-ce que c'est correct ou ce n'est pas correct, c'est trop. La pression publique vient jouer son rôle. Si on met un gardien pour surveiller, bon, est-ce qu'il va bien surveiller? Est-ce qu'il va se faire engager finalement par celui qu'il devait surveiller? On a déjà vu ça. Par exemple, quand je vois que l'Inspecteur général des institutions financières est engagé par celui qu'il devait surveiller, alors je n'aime pas ça. Je vais être franc avec vous.

J'ai toujours pensé, moi, que la meilleure façon, c'est d'obliger à donner des renseignements dans les volumes, d'obliger la divulgation de renseignements, et les gens se font leur opinion et ils réagissent. Une société démocratique, à mon avis, c'est de mettre les gens au courant, et les gens prennent leurs responsabilités. S'il faut mettre des gardiens partout, ça coûte cher. Deuxièmement, les gens se pensent moins responsables parce qu'il y a quelqu'un qui doit surveiller ça. Moi, je pense que l'orientation qu'on doit prendre, quand on parle de décentralisation, c'est de laisser les gens plus libres de prendre leurs décisions localement, mais, en même temps, de s'assurer des fins, des choses essentielles: Qu'est-ce qu'on doit voir chaque année? Est-ce que ça a été vu? Est-ce que les qualifications ont été acquises? Les gens doivent jouer leur rôle.

Quand je disais que la loi est bien faite, la loi dit bien qu'on doit faire le projet d'une école, on doit déterminer qu'est-ce que ça va être, une école. Je ne me rappelle pas les termes exacts. Le projet éducatif se fait au niveau de l'école. Mais, maintenant, quand, à un moment donné, le corps administratif prend trop de place, c'est là que le déséquilibre se fait.

(10 h 10)

Moi, je pense qu'il faut revenir à l'école, et les états généraux portent essentiellement sur l'école. Hier, le député de Matane en a dit un mot, par exemple. Bon, bien, moi, je pense que c'est une question de fond: Où est-ce qu'on fait le projet? On le fait au niveau de la commission scolaire ou au niveau de l'école? Nous autres, on a choisi, dans les états généraux, de dire: Définissons l'école.

J'ai remarqué, dans une émission qu'il y avait à la télévision, que quelqu'un avait enregistrée et après ça j'ai eu l'occasion de la voir, que les gens disaient: Si les états généraux portent sur l'école, ils vont avoir réalisé vraiment leurs fins, mais, si ça dévie sur d'autre chose ou si le mandat porte sur d'autre chose, ça va dévier. Alors, c'est pour ça que, moi, mon opinion, je veux dire mon opinion personnelle – je ne suis pas tout seul dans la société – à mon avis, on devrait définir l'école et puis, après ça, ajuster les structures pour réaliser le genre d'école qu'on veut avoir, avec tous les contrôles sociaux et toute la sécurité qu'une école dans un milieu donne aussi aux jeunes.

Mme Caron: Vous ne croyez pas, M. le ministre, qu'effectivement, au cours des dernières années, et puis ça remonte quand même assez loin, les parents se sont sentis de plus en plus éloignés des décisions de l'école, ont senti que la machine administrative contrôlait et que, même lorsqu'il y avait insatisfaction de leur part, il n'y avait pas de place pour l'exprimer? Ils pouvaient toujours l'exprimer, mais ça ne changeait pas le résultat. Et je pense que les états généraux vont aussi rappeler à tous les intervenants, à toute la communauté qu'ils ont un rôle à jouer au niveau de l'école et qu'ils doivent s'y intéresser aussi, puis qu'ils doivent participer.

Parce que, parfois aussi, il y a eu désintérêt de la part d'autres partenaires, et en ramenant, en recentrant les états généraux sur l'école, vous allez pouvoir aussi ramener l'intérêt autant des parents, des enseignants que de tous les intervenants de la communauté, des étudiants eux-mêmes, sur le rôle de l'école, et les faire participer pour que, justement, quand il y a des mesures qui sont plus ou moins acceptables, ils puissent réagir. Parce que là ils n'ont pas l'impression qu'ils peuvent le faire, ou ils se disent: On va le faire, mais ça ne donnera pas de résultat. Le rôle des états généraux, c'est de pouvoir les ramener à leur rôle essentiel à eux aussi, je pense.

M. Garon: Il faut dire que, traditionnellement, si on regarde l'histoire du Québec, on a confié nos enfants, au fond, au Québec, à des communautés religieuses. Contons-nous pas d'histoires, là. Alors, on confiait nos enfants aux soeurs, ou aux frères, ou à des prêtres, puis on avait confiance. Alors, les gens, le contrat était bien simple. Ils amenaient l'enfant au Séminaire, souvent il était pensionnaire. Tu l'amenais là au mois de septembre, tu allais le chercher à Noël, puis tu revenais au mois de janvier, puis tu le ressortais au mois de juin. Essentiellement, c'était à peu près ça. Puis, comme les gens avaient confiance, bien, ils ne posaient pas trop de questions si les résultats étaient bons, puis s'ils n'étaient pas bons, ils se faisaient mettre à la porte. Alors, en gros, là.

Aujourd'hui, des communautés religieuses, il n'y en a plus beaucoup, alors il faut que les gens s'en occupent eux-mêmes. Les traditions ont évolué. Les gens ont commencé à évoluer de telle façon. Quand les communautés religieuses ont commencé à partir tranquillement, ils ont remplacé ça par des laïcs qui ont pris la même culture, au fond, d'avoir la confiance des gens qui leur confiaient les enfants. Mais là, aujourd'hui, il faut se dire qu'on vit dans une société qui est différente, puis les parents doivent être responsables.

Puis aujourd'hui, bien, les gens, dans tous les domaines, ils ne sont pas dévoués à plein temps, dans le sens 24 heures par jour. Une soeur avait fait tous les voeux qu'on connaît, et s'occuper d'enfants, c'était sa tâche à plein temps, si vous voulez. Pas à plein temps, c'était de neuf à cinq. C'était du lever jusqu'au coucher, au fond. Alors, ça change la façon de concevoir les choses. Moi, je pense qu'il faut s'habituer à vivre dans une société qui est laïque, essentiellement. Moi, je pense qu'on n'a pas encore les comportements complets d'une société qui est laïque. Les gens, bien, commencent à vouloir s'en occuper.

On me disait, il y a 30 ans, au début du rapport Parent, que ce n'était pas tout le monde qui connaissait... L'éducation n'était pas généralisée comme aujourd'hui. Alors, il y a beaucoup de gens qui discutaient avec le professeur, la discussion n'était pas longue: le professeur connaissait ça, puis le parent ne connaissait pas ça. Aujourd'hui, c'est un peu comme pour un député. Autrefois, un député, c'était un grand seigneur qui pétait de la broue, puis tout le monde l'écoutait. Aujourd'hui, les électeurs sont souvent plus renseignés que le député. Ha, ha, ha! Alors, les gens, ce n'est plus le même comportement démocratique.

Alors, on dit que, dans les maternelles, les réunions de parents sont très fréquentées. Les parents... Aujourd'hui, il y a beaucoup moins de gens qui ont des enfants, mais, ceux qui en ont, ils sont plus intéressés. Ceux qui ont choisi d'en avoir – pour un certain nombre, il y en a qui ont choisi d'en avoir – il y en a beaucoup, il y en a un certain nombre, en tout cas, un plus grand nombre qui veulent s'impliquer davantage.

Par ailleurs, plus on monte dans la hiérarchie, moins les parents sont impliqués, mais il faut dire qu'on ne leur facilite pas la tâche. Je rencontre des associations de parents. J'en ai rencontré dimanche, j'ai parlé avec eux, une association de parents qui était en réunion à Québec. Ils m'ont dit: Dans les collèges, bien des collèges aiment bien mieux ne pas nous voir. Ils aiment bien mieux qu'il n'y en ait pas d'association de parents, parce que c'est tannant une association de parents. Moi, je leur ai dit qu'on essaierait de leur faire le maximum de place.

On me dit qu'à McGill, même à l'université, il y a une association de parents. Je n'ai pas vérifié, mais on m'a dit qu'il y avait une association de parents à McGill. Alors, je vous dis ça, ça m'a été dit; je n'ai pas vérifié, c'est du ouï-dire. Moi, je pense qu'il est souhaitable que les parents s'impliquent, d'autant plus que, si on laissait les parents s'impliquer davantage, peut-être que, quand on a des fondations et quand on demande aux gens de contribuer, ils en sentiraient plus le goût parce qu'ils seraient plus attachés. Si on prend tous les moyens possibles pour les détacher, demandons-nous pas pourquoi, après ça, ils ne sont pas impliqués. Alors, il faudrait les attacher davantage, puis attacher les anciens élèves à leur institution aussi. Moi, je trouve ça beau quand quelqu'un quitte une institution et qu'il est fier de son institution, puis qui aime son institution. Après ça, s'il fait un peu d'argent, il veut contribuer pour que d'autres aient les mêmes goûts, les mêmes services, le même plaisir que lui a eu dans son institution.

Alors, moi, je pense que cette culture-là doit se développer au Québec. Je pense que les gens sont plus prêts qu'antérieurement, parce que ceux qui pensaient, à un moment donné, qu'il y avait un retour des choses, que les communautés religieuses reviendraient, je pense que ce n'est pas dans un horizon prévisible. On ne peut jamais présumer de l'avenir, mais, dans un horizon prévisible, il y a moins de communautés religieuses aujourd'hui qu'il y a de sectes, hein.

Mme Caron: Oui, c'est bien vrai.

M. Garon: Et, quand on voit des mouvements qui demandent de l'argent au gouvernement pour essayer de les libérer des sectes, alors ce n'est pas ça... Alors, moi, je pense qu'il faut que les gens aient de la place pour s'en occuper, qu'ils soient les bienvenus, puis qu'on sente que c'est une oeuvre communautaire, s'occuper de l'éducation, mais qu'il y a des gens qui sont plus responsables que d'autres. Les enseignants sont responsables, c'est leur métier; puis les parents, c'est leurs enfants, ils ont un intérêt immédiat à ce que ça réussisse. Mais toute la société y a intérêt, parce qu'un enfant qui ne réussit pas c'est une charge pour la société pendant une bonne partie de sa vie. Alors, on a tous intérêt, au fond, plus ou moins immédiat, à ce que l'enfant réussisse à l'école.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé, qui attend avec une patience orientale...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): ...pour poser sa question.

M. Désilets: Orientale? En tout cas!

Le Président (M. Facal): C'est une grande qualité, la patience.

M. Désilets: Ah oui! Je sais.

M. Garon: Comme disait l'autre, mieux vaut endurer que de tuer.

Des voix: Ha, ha, ha!


Services aux élèves venant de milieux défavorisés (suite)


Accessibilité des services

M. Désilets: M. le ministre, ma question concerne le financement, surtout dans les milieux défavorisés. Comment on peut identifier un milieu comme étant défavorisé ou pas? Je pense que c'est au niveau, peut-être... J'ai entendu dire: au niveau de la richesse d'une municipalité. Ça, j'aimerais avoir un peu plus d'informations là-dessus, comment on peut le déterminer. Parce que, dans le milieu, dans ce qu'on vit au niveau des écoles, même si la ville est riche, il y a des secteurs qui sont plus défavorisés, au niveau des familles monoparentales, entre autres.

Dans ces milieux-là, l'encadrement, pour les enfants, le matin, le midi, avec les heures de récréation... Par exemple, l'heure du midi, une heure et demie sur l'heure du midi; le matin, parce que les autobus arrivent tôt le matin. En tout cas, moi, je pense surtout, de préférence, dans les milieux défavorisés, où le taux de décrochage et de suicide est excessivement élevé, partout en province, je raccroche ça avec nos commissions scolaires qui font des surplus, puis l'argent, je ne sais pas où il est placé. J'en ai une bonne idée, remarque, mais le système est fait...

(10 h 20)

Pour se faire bonne bouche, souvent, les commissions scolaires vont encadrer ou vont engager... Parce que ça privatise de plus en plus. Autant sur l'heure du midi ou après l'école, ils vont offrir des services ou des activités parascolaires aux étudiants, mais l'étudiant est obligé de payer tout le temps, de plus en plus. Et c'est dans ce sens-là, je veux dire, que la famille qui est défavorisée, bien, l'est encore plus, parce que le jeune veut bien participer, il aimerait ça jouer au football, il aimerait ça jouer à 56 jeux, 56 affaires différentes, ou même la musique ou de la danse aérobique, mais il faut que tu paies tout le temps. Le jeune ne peut pas embarquer, la famille n'a pas les moyens, puis la commission scolaire fait des surplus au bout de la ligne. Il y a un non-sens.

Puis on pose la question aux commissions scolaires. Elles disent: Si le cas nous est présenté, on va lui payer. Mais c'est tout le temps du quémandage ou... En tout cas, il y a un glissement vers la privatisation, de plus en plus, et je ne sais pas comment on doit se positionner là-dessus. On est pris face à un déficit pour l'ensemble de la province. Les commissions essaient de faire leur bout de chemin là-dessus en disant: Il faut privatiser, il faut offrir les services. Et puis on a le dilemme. Et puis, en même temps que le dilemme est là, on se repositionne comment? Je vous laisse la parole là-dessus. Ce n'est pas évident.

M. Garon: Vous avez raison à 100 %. Je vais vous dire, moi, je suis d'accord avec vous. J'ai eu mes enfants à l'école, puis, quand je regardais les comptes qu'on nous demandait pour faire telle excursion, telle excursion, je me disais: Bien, les gens qui n'ont pas l'argent, qu'est-ce qu'ils font?

Moi, je pense que, trop souvent, dans notre société, on est comme «Les deux orphelines», de Jean Narrache: on pleure aux vues, mais, quand on les voit, on dit: Tassez-vous, mes «p'tites» gueuses. Alors, je pense qu'on vit dans une société qui est assez hypocrite sur ce plan-là. Moi, je trouve que vous avez parfaitement raison, on devrait avoir la préoccupation... C'est pour ça l'idée de rapprocher aussi les écoles des municipalités. Ça a l'air de rien, ça, il y a aussi que la municipalité a un rôle de rendre les services plus accessibles. C'est aussi de donner un esprit communautaire à l'école, dans son milieu, pour ne pas justement toujours faire payer les gens. Il y a peut-être une façon de faire une péréquation qui est différente pour que les services soient accessibles à l'ensemble des enfants, indépendamment de leur fortune. Ça, c'est un sujet, je pense, sur lequel la commission parlementaire pourrait jouer un rôle important, la commission parlementaire de l'éducation.

Deuxièmement, des fois, les gens, on leur apprend qu'ils sont pauvres. Je me rappellerai toujours, moi, quand j'ai travaillé avec l'abbé Pierre dans les années soixante. Il me disait que, quand il était en contact avec Nehru, aux Indes, les gens ne savaient pas qu'ils étaient pauvres, jusqu'à temps qu'on leur apprenne qu'ils l'étaient. Ils sont devenus malheureux quand ils l'ont appris, mais, avant ça, ils n'avaient pas l'impression d'être aussi mal qu'on le disait.

Souvent, nous, on fait des catégories. Les gens disent: On n'est pas riches, mais on est bien. Mais, par ailleurs, quand on vous classe puis qu'on vous dit: Tu es pauvre, je ne suis pas certain que la personne a le même sentiment par après. Sauf qu'il faut, je pense, dans une société démocratique, faire un plus grand partage des choses. Et c'est évident qu'un petit enfant, par exemple, qui a envie... On fait une excursion, puis on dit: C'est 20 $ chacun. Moi, j'en vois des familles, comme député, comme j'ai été député un certain nombre d'années. Moi, ce qui me fait le plus de peine, quand je vais à mon bureau, c'est quand je vois des mères de famille, le mari a sacré le camp, ne s'occupe pas de ses obligations, puis la femme, une jeune femme, est prise avec trois enfants en bas âge et puis tire le diable par la queue, au fond, parce qu'elle n'a pas de revenus. Je me dis: Quand ses enfants sont à l'école puis qu'on lui demande 20 $, elle n'est pas capable; elle ne l'a pas, le 20 $.

C'est pour ça, moi, je pense que, dans notre approche, on se débarrasse un peu des problèmes. On devrait faire notre approche au niveau de l'école pour dire comment on rend les choses accessibles, comment on s'organise pour faire en sorte qu'il y ait une péréquation, pour ne pas qu'on ait toujours, comme vous dites, un 20 $ ou un 30 $... Quand je vois des excursions, par exemple, l'excursion, elle peut être pas loin, l'excursion. Elle peut être pas loin.

Moi, je me rappelle, quand j'étais pensionnaire, j'étais petit gars, j'étais chez les soeurs, à Saint-Louis-de-Gonzague, c'était même avantageux un peu. Mais, quand elles nous envoyaient en excursion, on n'allait pas loin, on allait en pèlerinage à pied aux chapelles dans la ville, tu sais. Ce n'était pas loin, les excursions, et on allait pique-niquer à Maizerets. Ce n'était pas bien loin, Maizerets, tu sais.

Mais, quand je vois, par exemple, une école où on dit: Bon, bien, on va aller à une place, on va aller faire une excursion, et on vous amène à Montréal, ou bien, à Montréal, je ne sais pas, ça doit être la même chose, on doit les amener à Québec, ou quelque chose de même, et ceux qui n'ont pas d'argent? Il me semble qu'on peut faire des pique-niques, on peut faire des choses, des excursions, sans que ça coûte autant d'argent. Qu'on pense qu'il y a des gens qui sont cassés, qui n'en ont pas, d'argent. Ils ne sont pas nécessairement malheureux, mais ils n'en ont pas, d'argent, pour des activités.

Alors, c'est pour ça que, dans les projets d'école, il me semble qu'il devrait y avoir davantage cette préoccupation-là, et puis on devrait trouver le moyen de faire une péréquation pour que les enfants dont les parents n'ont pas d'argent ou qui sont dans une situation difficile... Ça existe, des situations difficiles. Moi, je vais vous dire une chose, les gens, ce n'est pas de dire qu'ils sont paresseux. Je regarde le chantier de Lévis, moi. Là, il est à 200. Je l'ai déjà connu à 200; il est remonté à 3 000, il a baissé à 200. Mais, dans la période où il était à 200, il y a quelques milliers de familles, comprenez-vous, dont le revenu, c'est l'assurance-chômage et, au bout d'un an, c'est le bien-être social, tu sais. Alors, ce n'est pas des gens qui ne veulent pas travailler, mais... Et, après ça, souvent, ils se sont mis des obligations de gens qui gagnaient le revenu qu'ils gagnaient quand ils travaillaient. À un moment donné, quand ils tombent en chômage parce qu'il manque de contrats, bien, ils ont des obligations, souvent, de gens qui avaient un bien plus gros revenu et ils n'ont plus les revenus.

Alors, c'est pour ça, je pense, qu'il devrait y avoir une préoccupation beaucoup plus grande, dans les commissions scolaires, dans les écoles, de faire en sorte qu'on soit plus prudents là-dessus, beaucoup plus prudents. Et ce n'est pas nécessaire d'organiser des choses où on est toujours obligé de faire payer les gens, hein. Des fois, moi, je me rappelle, au collège, où on jouait, il y avait un poteau de fer avec un ballon et on donnait des coups de poing pour faire tourner le ballon jusqu'à temps que la corde tourne autour du poteau, et on l'empêchait. Ça ne coûtait pas cher, ça, hein. On jouait au drapeau. Ça ne coûtait pas cher, jouer au drapeau, hein. C'était un bâton et un drapeau, un morceau de linge. Et on avait bien du plaisir à jouer à ça.

Si on est obligé de toujours trouver des façons d'amuser les jeunes qui coûtent cher ou qui font dépenser de l'argent, et qu'on n'a pas de sensibilité au fait qu'il y a des gens qui n'en ont pas beaucoup, d'argent, bien, c'est évident que... Un jeune, il ne demande pas nécessairement des loisirs qui coûtent une fortune. Ce sont souvent les adultes qui pensent: C'est de ça qu'il a besoin. Alors, je pense qu'il faudrait avoir une préoccupation beaucoup plus grande là-dessus. C'est une façon aussi de concevoir l'école de façon plus démocratique. Quand les gens, autrefois, ont mis des uniformes, c'était très démocratique, l'uniforme, hein.

Le Président (M. Facal): M. le député de...

M. Garon: On a pensé, à un moment donné, que c'était la discipline et des gens de droite, etc., sauf qu'il n'y avait pas de classes sociales. Même Mao a pensé à essayer ça, lui, dans le pays au complet. Mais, souvent, un uniforme, ça permettait d'avoir les gens qui étaient sur un pied d'égalité et ça coûtait moins cher que d'essayer de rivaliser sur le plan de la mode dans les écoles, tu sais. Mais, si vous reparlez de ça aujourd'hui – ça prend des débats de société – les gens vont penser toutes sortes de choses, mais, dans le fond, ça avait une qualité extraordinaire: tout le monde était sur un pied d'égalité. Ils étaient tous pareils.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.


Confessionnalité dans le système scolaire

M. Ouimet: Merci, M. le Président. J'aimerais maintenant aborder avec le ministre une question qui va sûrement intéresser l'ensemble des membres de la commission, particulièrement, je suis convaincu, le député de Matane, j'aimerais parler de la confessionnalité scolaire. On sait que la structure confessionnelle, que ça soit au niveau des commissions scolaires, au niveau des écoles, est très contestée depuis plusieurs années; certains diront depuis au moins 30 ans, depuis le rapport Parent.

(10 h 30)

Le ministre souhaite redéfinir le système scolaire, souhaite redéfinir l'école de demain, il y a beaucoup réfléchi, et on sait que le système scolaire actuel a été coulé dans un moule confessionnel. Le vice-président du Mouvement laïque québécois écrivait son opinion dans La Presse , en date du 6 avril dernier, et disait ceci. Il disait: «Ce système scolaire a été conçu de A à Z en fonction de la confessionnalité; il a été coulé dans un moule confessionnel, si bien qu'il est devenu impossible d'en réformer quelque élément que ce soit sans toucher à la question confessionnelle. Pour repenser l'école, il faut la sortir de ce moule qui est devenu un carcan» ou, pour reprendre les propos du député de Matane, un archaïsme.

La présence confessionnelle, que ce soit au niveau de l'école ou au niveau du propre ministère de l'Éducation, est omniprésente. On n'a qu'à penser aux animateurs de pastorale, aux conseillers pédagogiques, au service de l'enseignement catholique, à la Direction de l'enseignement catholique, au Comité catholique du Conseil supérieur de l'éducation et, bien sûr, à tout le pendant protestant. Et, au niveau de l'enseignement religieux à l'école, on sait que c'est le seul cours dont le poste de conseiller pédagogique est protégé par la loi.

Au niveau du programme du Parti québécois, le programme du Parti québécois est assez clair sur ce sujet. Le programme du parti prévoit l'instauration d'un système scolaire linguistique et d'écoles laïques et, également, le retrait de la clause «nonobstant». Ça, je pense, c'est l'engagement 7.4 de votre programme.

Au niveau de l'école dans une société pluraliste, les principes de l'égalité des religions et de la liberté de conscience dans les écoles publiques se heurtent directement au moule de notre système qui est basé en fonction d'une école catholique ou d'une école protestante. J'aimerais entendre le point de vue du ministre sur tout ce dossier important parce que, lorsqu'on parle de réformer à la fois l'école de demain et l'ensemble du système scolaire, on ne peut pas passer à côté de la confessionnalité. Tantôt, je l'entendais parler de faire référence au passé, comment on confiait nos enfants aux religieux et que, dorénavant, il faudra absolument s'habituer à vivre dans une société laïque. Alors, j'aimerais pouvoir prendre quelque temps pour entendre le ministre sur sa conception de la confessionnalité et la place qu'elle aura dans l'école de demain, dans le système scolaire de demain.

M. Garon: Bien, disons que, d'abord, ce n'est pas mon école. Quand vous parlez de mon école, mes états généraux, non, moi, je ne raisonne pas comme ça. Je pense que ce sont les états généraux de la population et qu'ils vont définir l'école que la population souhaite avoir, qui peut varier d'un milieu à l'autre; ce n'est pas nécessairement uniforme. Moi, je suis plutôt partisan de la liberté des gens, par tempérament personnel, les gens font ce qu'ils veulent. Ça ne me dérange pas, moi, que mon voisin soit de telle ou telle allégeance. C'est son affaire, puis il a le droit. Puis il a le droit même de m'en parler, puis j'ai le droit de l'écouter. Je ne suis pas obligé d'y adhérer, mais il peut me convaincre, puis j'ai le droit de faire la même chose. J'ai le droit aussi de ne pas le convaincre si je ne veux pas. On n'est pas militant de tout, tout le temps, dans la vie.

Alors, l'école, moi, je pense, va être définie par les états généraux. Les gens vont parler de ces questions-là. Il y a un consensus, au Québec, sur les commissions scolaires linguistiques. Je pense qu'il y a un consensus là-dessus. C'est clair, les gens souhaiteraient avoir des commissions scolaires linguistiques. Encore là, ce qui nous crée des problèmes, c'est la Constitution canadienne, parce qu'elle a été définie à une époque où les gens se définissaient plutôt en d'autres termes, c'est-à-dire catholiques ou protestants, et c'est ça que la Constitution a prévu dans le temps. Maintenant, qu'est-ce qu'ils vont décider? Moi, je pense que les états généraux sont une bonne occasion d'en parler puis de dire comment ils voient les choses. Mais, moi personnellement, c'est mon opinion personnelle, les gens sont libres.

M. Ouimet: Mais votre opinion personnelle, votre conception de l'école? Il y a des problèmes qui se manifestent. Par exemple, à Montréal, il y a eu l'incident du port du hidjab qui a fait les manchettes...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...parce qu'on voit, là...

M. Garon: Le hidjab, ce n'est pas un problème d'école...

M. Ouimet: ...notre société pluraliste et l'école publique qui est définie en fonction d'une religion catholique ou protestante.

M. Garon: Oui. Ces questions-là, à mon avis, doivent être réglées par les tribunaux parce que les droits religieux ou la Charte des droits, ce sont les tribunaux qui établissent comment ça fonctionne. Évidemment, moi, je pense que, quand une école dit telle règle, elle a le droit de le faire. À ce moment-là, ceux qui ne sont pas d'accord et qui pensent qu'ils ont d'autres droits peuvent aller devant les tribunaux, et c'est les tribunaux qui tranchent ces questions-là. Je comprends qu'il y a des gens qui ont écrit d'autre chose, mais, qu'est-ce que vous voulez, au bout de la course, là, qui est-ce qui décide? Il y a une loi qui peut être interprétée de différentes façons. C'est souvent le cas des lois parce qu'elles ne peuvent pas prévoir, surtout les lois de principe, toutes les hypothèses. À ce moment-là, il y a des gens qui prennent des décisions et il y a des gens qui contestent ces décisions-là, et les tribunaux établissent, dans les cas... Si on pense, comme Assemblée nationale, que ce n'est pas ça qu'on veut, que ce soit la loi ou l'application de la loi, on change la loi. Habituellement, c'est comme ça qu'une société démocratique fonctionne.

M. Ouimet: Oui, mais, dans le cadre actuel, on a une Charte des droits et libertés au Québec qui protège l'article 10, liberté de religion, liberté de conscience.

M. Garon: Oui, mais...

M. Ouimet: Sauf qu'il y a une clause «nonobstant», qui a été invoquée par votre prédécesseur, qui fait obstacle à la Charte et qui permet de maintenir le système confessionnel actuel. Ça a des répercussions au niveau des écoles. On voyait que la CECM était aux prises avec ce problème-là, et, à la fois, les écoles demandent une certaine orientation qui doit venir du ministère de l'Éducation. Je ne pense pas qu'on puisse avoir autant d'écoles publiques à travers la province qu'il y a de conseils d'orientation, de directions d'écoles ou de commissions scolaires.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Là-dessus, il doit y avoir des orientations qui soient données. J'aimerais entendre...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...votre position, votre orientation à vous.

M. Garon: Oui, mais...

M. Ouimet: Vous avez sûrement des idées. Si vous n'en avez pas, elles sont inscrites dans le programme de votre parti.

M. Garon: Oui. Mais je peux vous dire une chose, dans la Constitution du Canada – parce que, jusqu'à nouvel ordre, on est encore dans le Canada – nous autres, on est prêts à faire des changements. Mais on est dans le Canada. Il y a une loi qui reconnaît la confessionnalité et qui en fait un article de base des écoles confessionnelles, qui est interprétée par les tribunaux. Alors...

M. Ouimet: Oui, mais, pour qu'elle s'applique, on doit invoquer la clause «nonobstant». Et ça, c'est laissé à la liberté du gouvernement de l'invoquer ou de ne pas l'invoquer. Votre prédécesseur, pour maintenir ces protections confessionnelles là, a invoqué la clause «nonobstant».

La question que je vous pose: Quant à vous, vous avez le pouvoir décisionnel en cette matière...

M. Garon: Puis? Vous voudriez que je fasse comme vous lorsque vous étiez président...

M. Ouimet: Non, non, non. Ce n'est pas ça que je vous demande.

M. Garon: La CECM, un matin, les gens se sont retrouvés avec une déclaration publique...

M. Ouimet: Bon!

M. Garon: ...alors que le parti n'en avait pas entendu parler. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: M. le ministre, on peut se tourner vers le passé, mais je pense qu'on est en train de regarder l'école de demain.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Et je vous pose des questions, je pense, qui sont sacrément importantes pour le système scolaire...

M. Garon: Oui, c'est vrai. C'est vrai.

M. Ouimet: ...vous en conviendrez avec moi. Notre système...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...est basé sur la confessionnalité.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Je demande vos orientations, votre point de vue, et je vous rappelle que votre parti a quand même des orientations assez précises et définies depuis bon nombre d'années.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Je suis convaincu qu'il y a plusieurs députés autour de cette table qui ont des idées bien arrêtées là-dessus.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Le député de Matane les a déjà exprimées.

M. Garon: Oui.

Le Président (M. Facal): Le député de Matane est le prochain sur la liste.

M. Ouimet: Oui. Alors, c'est ça.

Le Président (M. Facal): Je suis sûr qu'il va s'exprimer.

M. Ouimet: J'ai hâte de l'entendre. Il va falloir faire ce débat-là. Je sais que ça va se faire dans le cadre des états généraux, mais...

M. Garon: Oui, mais, quand on a déclenché les états généraux, j'ai dit: La pâte à dents est sortie du tube. Les états généraux vont avoir lieu. Il n'y a plus un presto sur le Québec maintenant. Il n'y a pas de presto parce que, je vais vous dire une chose, le couvercle va sauter vite en démon! Les gens vont parler de ce qu'ils veulent.

M. Ouimet: Oui, mais vous, là, ce qu'on veut savoir, c'est l'orientation du ministre. Il y a des problèmes actuellement dans les écoles. Le système actuel se heurte à la réalité de la société, entre autres la société montréalaise qui est une société pluraliste. Ça pose des problèmes.

Vous avez certains leviers, au niveau de votre gouvernement, que vous pourriez activer pour régler une partie de ces problèmes.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Je faisais référence à la clause «nonobstant».

M. Garon: Un des leviers importants, ça a été de déclencher les états généraux.

M. Ouimet: Oui, mais les états généraux, ce n'est pas avant... La fin du processus, tel que vous nous l'avez indiqué, c'est autour de l'été 1996. Donc, avant que vous preniez des mesures, ça ne sera pas avant l'automne 1996.

M. Garon: Je comprends, mais...

M. Ouimet: Mais tout ça, je comprends, là. Je comprends qu'il y a des gens qui vont réfléchir. Je sais qu'il y a plusieurs personnes qui ont des idées bien arrêtées là-dessus.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Mais ce qui m'intéresse de savoir aujourd'hui, c'est la position du ministre de l'Éducation.

M. Garon: C'est un...

M. Ouimet: Il ne peut pas toujours, sur des grands dossiers d'orientation fondamentale, se référer aux états généraux. S'il a été placé là, c'est parce qu'il a des idées...

M. Garon: Non...

M. Ouimet: ...et il est important qu'on connaisse ses idées...

M. Garon: Oui.

(10 h 40)

M. Ouimet: ...qu'on sache, lui, quelle est son orientation, qu'est-ce qu'il privilégie.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Je comprends qu'il veut être guidé par les états généraux, mais il y a quand même un programme politique de son parti qui doit le guider aussi.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Les militants de son parti appuient le Parti québécois à cause de certains engagements qui y sont pris.

M. Garon: Oui. Et aussi pour le climat de liberté qui y règne. Moi, je n'ai pas été nommé ministre de l'Éducation pour canaliser le Québec. J'aime beaucoup les ruisseaux; auprès des ruisseaux du printemps, les torrents qui jaillissent, les rivières où il y a des eaux stagnantes, mais aussi des rapides et des courants, même des tourbillons, voyez-vous, à certains endroits. Moi, j'aime la vie qui vit.

Alors, les états généraux, ce n'est pas au ministre de dire que ça doit être ci ou que ça va être ça.

M. Ouimet: Non. Mais vous avez dit...

M. Garon: Je vais finir, M. le Président.

M. Ouimet: ...qu'il y a un consensus sur les commissions scolaires linguistiques.

M. Garon: Non, non.

M. Ouimet: Vous l'avez dit vous-même tantôt.

M. Garon: Oui, oui. Oui. Mais ça va être beaucoup plus facile de faire des commissions scolaires linguistiques avec une charte, une constitution différente. Je vais vous dire une chose, si les gens votent oui au moment du référendum, ça va être beaucoup plus facile de faire des commissions scolaires linguistiques. Ne nous contons pas d'histoires. Ça va être bien plus simple.

M. Ouimet: Si les gens votent non, M. le ministre...

M. Garon: Ils ont le droit.

M. Ouimet: ...est-ce que vous êtes en train de nous dire...

M. Garon: Oui, mais il faut faire...

M. Ouimet: ...qu'on va conserver notre système confessionnel?

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Oui?

M. Garon: Mais, moi, j'attends... Non, ce n'est pas ça que j'ai dit. J'attends d'être rendu aux rivières pour traverser les ponts. Autrement, il faut faire comme les anciens partis ont fait, faire des ponts où il n'y a pas de rivière. Alors, ce n'est pas nécessaire. En attendant, je suppose que la rivière, ils y arrivent. Mais ce n'est pas mon idée.

Deuxièmement, je pense que, dans un débat de cette nature, qui est un débat très important, fondamental, ce n'est pas à moi... Au contraire, je vais avoir une attitude de respect très importante par rapport aux gens, pour que les gens sentent que c'est un débat de société fondamental, mais que c'est un débat de société. S'il y en a un qui est un débat de société, c'est bien notre conception de la société par rapport à ces questions-là qui sont des questions...

M. Ouimet: Et vous n'avez pas d'idée là-dessus.

M. Garon: Hein?

M. Ouimet: Vous n'avez pas d'idée là-dessus, vous.

M. Garon: J'en ai des idées là-dessus.

M. Ouimet: Si je vous demande vos idées.

M. Garon: Sauf que les gens... Je vais vous dire une chose, moi, j'ai appris une chose dans la vie, c'est qu'il y a mes idées, puis il y a ma liberté, puis il y a la liberté des autres. J'ai toujours pensé que ma liberté finissait là où elle entravait la liberté des autres. Et j'ai toujours pensé que, dans une société que vous parlez comme une société pluraliste, les gens ont des conceptions, ont des croyances et des convictions. Il y en a qui sont discutables. Par exemple, moi, je pourrais décider... Comme j'aimerais bien qu'au Québec on arrête de nous prendre pour des enfants, puis qu'on ait le droit de tourner sur les lumières rouges, à droite. Dans le reste de l'Amérique du Nord, on a le droit de tourner sur une lumière rouge. Sauf que le ministre des Transports, traditionnellement, a toujours considéré que les Québécois étaient des enfants, puis il dit: Non, ils font faire des accidents s'ils tournent sur les lumières rouges, où, dans le reste de l'Amérique, ils peuvent tourner.

Alors ça, je pense qu'on peut faire un débat de conception là-dessus. Mais, quand on entre dans des convictions profondes des gens, des convictions fondamentales des gens, je pense qu'il faut avoir une attitude de respect qui est très importante...

M. Ouimet: Oui. Mais, M. le ministre, vous avez parlé de...

M. Garon: ...dans une société démocratique. Alors, les états généraux sont là pour que les gens en parlent et, moi, je n'ai pas l'intention de jeter de l'huile sur le feu.

M. Ouimet: Ce n'est pas...

M. Garon: J'ai l'intention, au contraire, de souhaiter que les débats se fassent sereinement, qu'on voie à la fin s'il y a un consensus ou s'il n'y en a pas et, si le consensus est aménageable, de quelle façon, pour que tout le monde soit plus heureux.

M. Ouimet: Mais vous avez donné à plusieurs reprises, depuis sept mois, votre conception de l'école. Vous avez parlé de l'école milieu de vie, de l'école communautaire, de l'école où... Hier, vous parliez de l'école du bonheur...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...où il fait bon vivre, où il fait bon...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...apprendre et...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...il faut avoir un environnement qui favorise la transmission des connaissances et...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Derrière tout ça, il y a la toile de fond de la confessionnalité.

M. Garon: Oui, mais c'est une...

M. Ouimet: Vous ne pouvez pas faire abstraction des deux. Vous ne pouvez pas avoir votre conception de l'école sans tenir compte de la dimension confessionnelle. Vous lisez les journaux comme moi. Vous voyez que plusieurs écoles sont aux prises avec des problèmes.

M. Garon: Ça aussi, ce sont des notions qui ont évolué. Ce qu'il est important de savoir, c'est le degré d'évolution. Je rencontrais, moi... Il n'y a pas longtemps, je parlais avec le curé de Lauzon, chez nous, puis je lui disais: Quand on était petit gars, un protestant, c'était épouvantable, puis il n'y avait pas grand-chose de pire qu'un protestant. Aujourd'hui, on dit: Nous sommes tous des chrétiens. Protestants, catholiques, etc., nous sommes des chrétiens. Il a dit: Oh! vous savez, il y a de grandes distinctions. Moi, j'ai dit: Lesquelles? Il a dit: La présence réelle, la présence symbolique dans l'eucharistie. J'ai dit: M. le curé, on ne fera pas un gros débat en 1995 là-dessus comme on a fait; les gens se sont entretués, les armées se sont entretuées sur des questions comme celle-là il y a quelques centaines d'années. Aujourd'hui, je pense que les gens ne s'entretuent pas sur des questions comme celle-là.

Autrefois, on disait que l'école devait être confessionnelle complètement. On a parlé, à un moment donné, de la place de la religion dans l'école. On en a parlé pourquoi? On en a parlé pour dire, à un moment donné: Est-ce qu'il y a des cours de religion et il y a des cours de morale? Alors, les concepts, là-dessus, ont beaucoup évolué. Maintenant, à la faveur d'un débat comme les états généraux, moi, je pense qu'il y a des gens qui veulent en parler, qui vont en parler, mais il est souhaitable que le débat soit le plus serein possible pour dire comment on voit l'école de demain, pour qu'on puisse vivre tous ensemble dans une société où les gens ont des consensus plus ou moins grands, une société qui est plus ou moins pluraliste, dépendamment des territoires au Québec. Alors, je pense que c'est ça qui va s'exprimer. Ça va pouvoir s'exprimer, d'autant plus qu'il va y avoir des états généraux régionaux, il va y avoir des états généraux nationaux, et on verra comment les gens vont discuter...

M. Ouimet: O.K.

M. Garon: ...sur ces plans-là.

M. Ouimet: Deux points. Tantôt, vous avez dit que...

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, peut-être une dernière question...

M. Ouimet: Oui.

Le Président (M. Facal): ...sur la confessionnalité?

M. Ouimet: Oui. Par la suite, je serais très intéressé d'entendre les propos du député de Matane. Tantôt, vous avez dit qu'au Québec on n'a pas encore les comportements d'une société qui est laïque. M. le ministre...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...tantôt, vous avez dit qu'au Québec on n'a pas encore les comportements d'une société qui est laïque. Est-ce que ça veut dire qu'il...

M. Garon: Je n'ai pas dit ça.

M. Ouimet: Bien oui!

M. Garon: Non, non. Ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. Ouimet: On va relire les galées. Vous avez dit...

M. Garon: Non, non, mais je l'ai dit dans un sens très précis, qu'on avait une école, autrefois, qui était confiée entièrement à des religieux, à peu près, à des religieuses, des frères ou des prêtres, ou encore des hommes de congrégation, des jésuites et des dominicains ou les oblats, etc. J'ai dit qu'aujourd'hui ce n'était plus le cas, que, maintenant, l'école est administrée par des laïcs. C'est ça que j'ai dit. Je voulais dire par rapport à des religieux. C'est ça que j'ai dit.

M. Ouimet: O.K. Allons-y sur des chiffres, dans ce cas-là. Le vice-président du Mouvement laïque québécois faisait état qu'il y a environ entre 460 000 000 $ et 500 000 000 $ par année qui sont attribués à la confessionnalité scolaire. Mais, dans une période de compressions budgétaires de l'ordre de 200 200 000 $ au niveau de l'éducation, pourriez-vous m'indiquer combien d'argent va à payer les animateurs de pastorale, tout ce qui découle de la confessionnalité? Est-il possible d'avoir des chiffres à cet égard? Or, là, si on était dans un système laïque, on n'aurait pas ces dépenses-là. Compte tenu qu'on est dans un système confessionnel, il en découle qu'on doit nécessairement financer certaines mesures confessionnelles, entre guillemets. Pourriez-vous m'indiquer ces chiffres-là et me les détailler?

M. Garon: Bon. Moi, je ne pense pas que les gens parlent beaucoup en ces termes-là. Ils parlent... Au fond, si les gens enseignent... Il y a des gens qui enseignent la religion et il y en a qui enseignent la morale.

M. Ouimet: Le service...

M. Garon: Et il y en a qui parlent d'enseigner l'histoire des religions ou...

M. Ouimet: Le service de l'enseignement catholique coûte combien?

M. Garon: Je n'ai pas de chiffres.

M. Ouimet: Toute l'infrastructure, le service de l'enseignement catholique, par exemple?

M. Garon: Oui. Allez-y donc, M. Lucier, parce que vous êtes plus familier que moi avec... comment se...

M. Lucier (Pierre): Nous ne pouvons pas ventiler le chiffre avancé de 500 000 000 $, là. Ça nous est impossible de voir qu'est-ce qu'il y a derrière ça. La plus grosse, je dirais, la plus grosse... le plus gros coût, c'est forcément le temps d'enseignement de l'enseignement religieux confessionnel. Alors, évidemment, si on compte les unités d'enseignement religieux confessionnel qui sont données, ça, c'est du temps d'enseignement. Évidemment, c'est une approche un peu théorique parce que, s'ils n'enseignaient pas ça, ils enseigneraient autre chose. Donc, ce n'est pas en soi une économie. C'est difficile à chiffrer, ça, parce qu'il y a aussi ceux qui ne... Tout n'est pas en enseignement religieux confessionnel; il y a aussi l'enseignement moral. Mais...

M. Ouimet: Non, mais il y a des gens qui ont des tâches spécifiques...

M. Lucier (Pierre): Oui. Ça, c'est les plus...

M. Ouimet: ...les conseillers...

M. Lucier (Pierre): Ça, c'est plus simple.

M. Ouimet: ...pédagogiques en... les conseillers en éducation chrétienne, par exemple...

M. Lucier (Pierre): Ça, c'est plus simple.

M. Ouimet: ...les animateurs de pastorale...

M. Lucier (Pierre): Oui.

M. Ouimet: ...tous les services qui... le service de l'enseignement catholique, la Direction de l'enseignement catholique, le Comité catholique au Conseil supérieur de l'éducation, son pendant protestant. Je veux dire, à quelque part, j'imagine qu'on doit être en mesure de chiffrer combien coûte, au Québec, la dimension confessionnelle.

(10 h 50)

M. Lucier (Pierre): Sur la dimension proprement confessionnelle de ces services, les plus simples à chiffrer, on arrive à autour d'une trentaine de millions. Si vous comptez, par exemple, les comités confessionnels, les coûts au ministère des deux directions qui sont vouées à la confessionnalité, les allocations aux commissions scolaires pour services aux catholiques, services aux protestants, les conseillers en éducation chrétienne, les animateurs de pastorale, quand on fait l'addition de ces coûts-là, qui sont des coûts directs et plus faciles à chiffrer, on arrive à 32 000 000 $ en 1993-1994.

M. Ouimet: Le ministre pourrait-il déposer le document? Pourrait-on avoir la ventilation de ces coûts-là, savoir exactement comment les calculs sont faits?

M. Garon: On poura produire un document pour faire la ventilation des coûts.

M. Ouimet: Oui, la...

M. Garon: Bien, on pourra produire un document; on peut produire un document pour assumer les coûts de la confessionnalité.

M. Ouimet: J'imagine que, dans le cadre des états généraux, ça va être une donnée intéressante si on est pour débattre du système confessionnel.

M. Garon: Pardon?

M. Ouimet: Dans le cadre des états généraux, dans le cadre d'un contexte économique difficile, c'est une donnée qui va être fort importante.

M. Garon: Moi, je ne pense pas qu'il faut parler des choses en ces termes-là. Je pense que, les gens, ils croient que c'est nécessaire ou que ce n'est pas nécessaire. S'ils pensent que c'est nécessaire, il faut l'assumer. Comme l'éducation physique, si on pense que c'est nécessaire, on en met, ou on n'en met pas. Moi, je pense que ce n'est pas une question de coûts, c'est une question de est-ce qu'on pense que c'est bon ou que ce n'est pas bon. À ce moment-là, la partie qu'on peut mettre est plus ou moins importante, selon... Mais ce n'est pas uniquement une question... Si vous parlez de la question confessionnelle uniquement sur des questions de piastres, je pense bien que le débat n'ira pas loin...

M. Ouimet: Mais...

M. Garon: ...puis je n'ai pas l'impression que les gens vont vouloir l'aborder de cette façon-là.

M. Ouimet: Je mets ça en perspective, M. le ministre.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Est-ce que d'autres personnes appartenant à une autre religion pourraient revendiquer les mêmes droits qui sont accordés aux catholiques et aux protestants, par exemple, et avec les mesures qui s'ensuivent? Deuxièmement, est-ce que l'enseignement, l'école catholique, devrait, d'après vous, relever de l'enseignement privé, comme c'est le cas en France où les écoles publiques sont laïques? Celles qui tiennent à avoir un enseignement catholique ou un enseignement religieux dans le cadre d'une école doivent en défrayer les coûts. C'est de ça qu'il s'agit. C'est pour ça que c'est important d'avoir les chiffres. C'est un débat sérieux, c'est un débat profond.

M. Garon: Non, non. Ces chiffres vont être fournis, je n'ai pas d'objection à ça. Les chiffres, on va les fournir. On va fournir une ventilation à la commission, on va la faire parvenir. Comme, la question, vous l'avez posée, on va fournir les chiffres de ventilation pour les catholiques et les protestants.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, vous demandez des chiffres que le ministre semble prêt à nous donner. Alors, sur ce, j'inviterais le député de Matane...

M. Garon: Moi, je pense que c'est plus complexe que tout ça. Moi, dans mon esprit, ma conception très profonde, on vit dans une société démocratique qui n'est pas la société du XIXe siècle, qui est issue, à mon avis – je vous ai dit tout ça quand je parlais de l'enseignement de la philosophie – d'une pensée philosophique qui a élaboré sur la démocratie et qui est aussi issue d'une pensée chrétienne. Il y a les catholiques et les protestants, mais, essentiellement – il y a eu des distinctions, là; moi, je ne m'embarquerai pas sur les distinctions – la pensée fondamentale de la pensée chrétienne, c'était de valoriser la personne humaine. Si on met les deux ensemble, les philosophes qui ont valorisé la démocratie, qui ont mené au fait qu'on a un système démocratique... Il y a beaucoup de pays qui n'ont jamais voté. On vit dans une société qui vote parce qu'il y a eu des philosophes et il y a eu des gens qui avaient une pensée dominante – dans le monde occidental, ça a été la pensée chrétienne – qui a fait qu'on vit dans une société qui est démocratique et qui valorise la personne humaine. Et nous sommes, aujourd'hui en 1995, le produit de tout ça à travers les âges. Quand bien même on voudrait faire abstraction de ça, ça nous pénètre bien plus qu'on ne le pense. Alors, aujourd'hui, comment on conçoit ces choses-là? Moi, je pense que, dans un débat démocratique, les gens vont en parler, mais je ne pense pas qu'on va renouveler des débats qui ont été des débats du XVIIe, du XVIe ou du XVIIIe siècle.

Les débats qu'il y a eu sur le divorce, rappelez-vous, ça ne fait pas bien, bien longtemps. Moi, je me rappelle, j'étais petit gars, j'ai entendu ces débats-là. J'étais en Irlande, en 1986, au moment du référendum sur le divorce et je me rappelle avoir entendu une conversation à un bar, que j'ai trouvé extraordinaire, où les gens disaient: Vas-tu voter pour ou contre? Il y a quelqu'un qui disait: Toute l'Europe est pour; nous autres, on s'en fout, nous sommes des Irlandais, on vote comme on veut dans notre société, on établit la société irlandaise comme on veut. Je trouvais ça extraordinaire d'entendre un débat comme ça. Ce n'était pas un débat de suiveux. Ils disaient: Nous autres, on fait la société qu'on veut en Irlande; eux autres, ailleurs, ils la feront comme ils voudront. Bon, bien, moi, les états généraux, ce n'est pas pour faire une société de suiveux, c'est pour décider, au Québec, comment on conçoit notre système scolaire, nos institutions.

M. Ouimet: Mais, s'il n'y a pas de consensus là-dessus, et...

M. Garon: On verra.

M. Ouimet: ...vous savez comme moi qu'il y a des tenants de...

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.

M. Garon: On verra. Vous êtes toujours en train de supposer un monde... Vous êtes toujours en train de vous faire... Je ne comprends pas ça, moi. Vous êtes toujours en train de dire... M. le Président, je trouve que le député de Marquette est vieux dans sa tête parce qu'il pose toujours un certain nombre d'affaires en disant: Si c'est ça, il y a ça, il y a ça, partant de là. Moi, je ne pars jamais comme ça. Je me dis: Les gens sont comme ils sont, puis j'aime ça les respecter comme ils sont. Je n'ai pas le goût, moi, d'haïr mon voisin parce qu'il ne pense pas comme moi sur tout, puis je n'ai pas le goût de le compartimenter.

M. Ouimet: Que dit M. le ministre.

M. Garon: J'ai le goût de le laisser vivre comme il veut. Puis, à cette heure, on va s'arranger pour vivre ensemble, dans une société, comme vous dites, qui n'est pas homogène comme avant, mais qui en même temps est une société occidentale d'Amérique du Nord. Ça, n'oublions jamais ça. Moi, si je veux vivre comme vivent les gens aux Indes, je vais aller aux Indes. Mais je ne reste pas aux Indes, je reste ici. Alors, il ne faut jamais oublier ça non plus, qu'on est dans une société occidentale d'Amérique du Nord. Ça, c'est fondamental. Puis quand on est à Montréal, on est à Montréal, on n'est pas à New York, on n'est pas à Rio, puis on n'est pas à Bagdad non plus. C'est important, ça aussi.

Le Président (M. Facal): Bon. Maintenant, nous allons voir où le député de Matane veut nous amener.

M. Rioux: M. le Président, je vais être en désaccord un peu avec le ministre de l'Éducation. Le député de Marquette, même si je l'ai déjà perçu comme vieux dans sa tête, je trouve qu'il a fait quand même un bout de chemin depuis un certain nombre de mois, et c'est tout à son honneur. Le député de Marquette, alors qu'il était président de la CECM, a dépensé une fortune en frais d'avocats pour combattre la loi 107 sur les structures, mais, à un moment donné, il a pris son courage à deux mains et il s'est dissocié de la chapelle à l'intérieur de laquelle il militait depuis un certain nombre d'années. Donc, félicitations. Je trouve qu'il y a une belle ouverture. Et, aujourd'hui, les questions qu'il pose pour analyser les coûts de la confessionnalité, l'hirondelle ne fait pas le printemps, mais, quand même, je dois l'en féliciter.

Le ministre a dit hier une chose fort importante. Il disait que l'école était confrontée à la réussite et à la qualité. Ça a fait partie de son intervention à des questions que posait le député de Marquette ou celui de Bourassa – je ne me souviens pas – et, ensuite, il a épilogué longtemps sur les états généraux. Moi, ça me fait plaisir qu'on ait des états généraux parce que ça va nous permettre de poser la question de la mission de l'école dans une société démocratique. On va se poser la question si on forme un citoyen et quelle sorte de citoyen on veut former, parce qu'un citoyen, il faut le savoir, comme préalable, il faut qu'il ait de solides connaissances des choses de base et aussi il faut lui inculquer des valeurs, des valeurs culturelles, c'est sûr, mais aussi des valeurs d'ouverture, de tolérance puis de liberté.

Les états généraux vont nous permettre de débattre tout ça, et on pourra parler des profils de sortie, on pourra parler de réorganisation de l'enseignement en fonction des profils de sortie, de vérifier les connaissances à chaque étape. Moi, je ne serais pas fermé, par exemple, à l'idée que le cours élémentaire soit divisé en deux parties: les trois premières années, on fait le bilan de l'acquisition des connaissances des jeunes, les trois autres années aussi, et le continuum, dont on parlait hier, les trois années du premier cycle des études secondaires, ce qu'on appelle la formation générale de base. J'aimerais ça qu'on débatte de ça aux états généraux. Parce que l'école, ça véhicule aussi le savoir. Ça véhicule des valeurs, mais ça véhicule le savoir. Ce sera quoi, notre priorité? La langue maternelle? L'histoire? La langue seconde? Les mathématiques? Les sciences? Il faudra mettre de l'ordre là-dedans. On a demandé à l'école d'enseigner à peu près tout, depuis un certain nombre d'années, et il va peut-être falloir établir des priorités d'enseignement.

(11 heures)

Ça m'amène au débat sur la confessionnalité. Moi, il y a une question que je me pose: Est-ce qu'une école peut être démocratique et confessionnelle? Est-ce qu'une école peut être ouverte à tous et à toutes, nonobstant leur langue, leur culture, leur religion, leur race, et être, à la fois, confessionnelle? Je vois mal une école publique avec, sur son fronteau, «confessionnelle». J'ai un problème avec ça. Cependant, je vais surprendre le député de Marquette, est-ce que... Parce que c'est vrai que l'État est neutre, l'organisation de l'État est neutre, et qu'on ait une structure confessionnelle, c'est un peu aberrant. Mais est-ce qu'on peut intégrer la religion dans une structure neutre, mais l'intégrer comme phénomène culturel?

Moi, je ne voudrais pas qu'on connaisse ou que se prolifère ce qu'on vit présentement dans certaines régions du Québec où on tente de créer des écoles ghettos. Des ghettos scolaires, je n'en veux pas. La création d'écoles ethniques, privées, des écoles primaires privées. Je me suis laissé dire qu'il y a 30 % des élèves du Québec dans les régions de Montréal, de Sherbrooke, de Trois-Rivières et de Québec qui vivent dans des écoles secondaires sélectives, privées ou publiques. Le pourcentage serait à peu près de 25 %-5 %. Les ghettos, dans le domaine de l'éducation, lorsque c'est financé par les deniers publics, à mon avis, il y a une contradiction là-dedans.

Mais je voudrais qu'aux états généraux on puisse essayer de définir et de préciser qui seraient les responsables du projet éducatif. À mon avis, une commission scolaire n'a pas à être confessionnelle, mais les parents, au niveau local, peuvent décider que l'enseignement, qu'il y aurait des types d'enseignement confessionnel, protestant, catholique ou autres. Mais ça serait une décision de parents.

Quand le ministre veut responsabiliser les parents vis-à-vis du travail de leurs enfants à l'école et de la vie de leurs enfants à l'école, moi, je me dis: Là, il y a un défi qui est redoutable. Le système scolaire, tel que nous l'avons vécu jusqu'à maintenant, a ouvert la porte aux parents, mais la porte n'était pas très grande, tant et si bien qu'on a eu l'illusion de la participation des parents au système scolaire. On a vécu ça à Montréal, souvenez-vous-en. On a formé un énorme comité de parents, avec des ramifications dans les régions administratives de la CECM, et, finalement, les parents en sortaient beaucoup plus frustrés qu'autre chose. Je pense qu'on en arrive à une évolution de notre société où il faut se poser les vraies questions et les états généraux vont nous en donner la chance.

Je crois qu'à vouloir monopoliser entre les mains de l'État l'enseignement religieux, on a réussi à déresponsabiliser l'Église. Je pense que l'Église a un rôle à jouer dans l'éducation de la foi et la culture religieuse des citoyens. Moi, je suis favorable à ce que les gens soient éduqués dans leur religion, mais je commence à trouver difficilement acceptable que l'État... C'est un pacte qu'il y a eu entre les évêques du Québec et l'État québécois, de confier l'enseignement religieux aux écoles. C'était une entente, à l'époque.

Est-ce que ce pacte-là, on doit le réexaminer, à l'occasion des états généraux? Je pense que oui. Il y a des évêques, au Québec, qui ont une ouverture assez remarquable et qui seraient prêts à examiner ça très sérieusement. Mais je pense, honnêtement, qu'il est possible d'intégrer, dans un système scolaire linguistique et neutre, l'enseignement de la religion comme phénomène culturel. Je le crois profondément.

La commission scolaire doit être neutre et linguistique, mais l'école, elle, peut opter pour un statut confessionnel, mais ça, c'est une affaire de parents. Ce n'est pas une affaire d'État, ce n'est pas une affaire d'Église, mais une responsabilité de parents. Confier à des parents, au Québec, la responsabilité de décider quel sera le projet éducatif pour leurs enfants et le caractère confessionnel ou pas de l'école, vous venez de leur donner une responsabilité immense que, moi, je crois, ils sont capables d'assumer. On dirait que les parents, on les utilise dans le système scolaire, mais on ne les rend pas responsables. C'est beau de parler des parents, de faire de la vocalise sur les droits des parents, la responsabilité des parents, mais leur donner des responsabilités concrètes, un pouvoir décisionnel quant à l'éducation de la foi, moi, je pense qu'on aurait fait un bout de chemin.

Et le débat sur la confessionnalité, c'est un débat que j'ai eu l'occasion de vivre depuis de nombreuses années, mais j'estime qu'il y a peut-être de la place pour de la souplesse. Comme le député de Marquette a connu un peu son chemin de Damas, je me dis qu'il y a bien d'autres citoyens au Québec qui sont capables de connaître une évolution semblable, sauf les intégristes, sauf ceux qui sont en marche vers le XIXe siècle, ceux qui oeuvrent dans des chapelles, ceux qui refusent le débat démocratique. Dans une société industrielle avancée comme la nôtre, où l'école va redevenir au coeur de notre projet de société, voilà un débat fondamental très sérieux. Et, moi, je convie la Madeleine de Verchères qui dirige la Fédération des commissions scolaires à venir s'asseoir avec nous autres et à débattre ces questions-là. Plutôt que de japper à l'extérieur, qu'elle vienne à l'intérieur et on va se parler. C'est ça, vivre en démocratie.

Le Président (M. Facal): Merci, M. le député de Matane. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci...

M. Ouimet: Juste... Le ministre ne répond rien à ça. Je veux dire, je suis très heureux d'entendre le point de vue du député de Matane, mais c'est le député de Lévis que j'aurais aimé entendre.

M. Garon: Mais j'ai trouvé très intéressant ce qu'a dit le député de Matane.

Le Président (M. Facal): Voilà!

M. Ouimet: Oui, mais le partagez-vous entièrement, en partie?

M. Garon: En grande partie.

M. Ouimet: En grande partie.

M. Garon: Je me demande même si, la grande partie, ce n'est pas ce que les Québécois pensent.

Le Président (M. Facal): Le député de Matane n'a pas terminé son intervention par une question.

M. Rioux: J'y arrive.

Le Président (M. Facal): Ah!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): Alors, donc, si j'ai bien compris, tout ceci n'était qu'un préambule.

M. Rioux: C'est mon sens musical; j'ai voulu permettre au député de Marquette de prendre son souffle.

Le Président (M. Facal): L'importance des silences en musique. Alors, la question, brièvement.

M. Rioux: La question est la suivante: Est-ce qu'il est conciliable, nonobstant la Constitution canadienne, de vivre à l'intérieur de ce que je viens d'énoncer: des commissions scolaires qui seraient neutres, où on pourrait intégrer l'enseignement religieux ou le développement de la culture religieuse justement comme valeur culturelle?

M. Garon: Je vais demander au...

M. Rioux: Au plan juridique.

M. Garon: ...représentant du contentieux du ministère s'il veut...

M. Rioux: Souveraineté ou pas, M. le député de Marquette.

M. Garon: Pouvez-vous reprendre la question pour M. Fortin?

M. Rioux: Oui. J'aimerais savoir, si on décide que l'école publique québécoise, une école démocratique... Puis là je vais faire plaisir au député de Marquette, je formule l'hypothèse qu'on maintient les commissions scolaires. Est-ce qu'il est envisageable d'avoir des commissions scolaires neutres et linguistiques, mais où l'école pourrait être intégrée comme phénomène culturel? Donc, certaines écoles au Québec pourraient opter pour un statut confessionnel mais décidé par les parents.

Le Président (M. Facal): Fort bien.

M. Rioux: Est-ce qu'il y a un problème constitutionnel rattaché à ça, juridique?

M. Fortin (Michel): Bien, le problème constitutionnel, c'est...

Le Président (M. Facal): Est-ce que vous pourriez vous identifier?

M. Fortin (Michel): Oui, d'accord. Michel Fortin de la Direction des affaires juridiques du ministère de l'Éducation.

Le Président (M. Facal): Merci.

(11 h 10)

M. Fortin (Michel): La Constitution canadienne prévoit, à l'article 93, le droit pour les minorités catholiques et protestantes de pouvoir exercer le droit à la dissidence dans le cas où ces minorités ne sont pas d'accord avec la majorité, soit catholique, soit protestante, qui mène la commission scolaire, qui dirige la commission scolaire sur leur territoire. Ça, c'est les droits que la Cour suprême a reconnus dans un jugement récent et qui sont protégés constitutionnellement comme tels. Donc, ils peuvent être exercés sur tout le territoire du Québec.

Par rapport à ça, cependant, à l'intérieur des commissions scolaires, la Loi sur l'instruction publique reconnaît pour les parents le droit de demander soit au Comité catholique ou au Comité protestant que leur école soit reconnue comme catholique ou protestante par les comités catholique ou protestant en question. C'est ce que la loi prévoit en ce moment. Je ne sais pas si ça répond.

M. Rioux: Une petite question.

Le Président (M. Facal): Une dernière additionnelle avant que le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui est en train de gagner son ciel lui aussi, ne prenne la parole.

M. Rioux: Donc, on peut garantir un enseignement confessionnel au Québec sans qu'une commission scolaire soit confessionnelle.

M. Fortin (Michel): Oui, oui. Bien sûr. Bien sûr.

M. Rioux: Parfait.

M. Fortin (Michel): Oui, oui, Il n'y a pas de problème.

M. Rioux: Parfait.

M. Fortin (Michel): Ce que je veux dire, c'est que, s'il y a des commissions scolaires appelons-les linguistiques, les minorités soit catholique ou protestante au Québec – je ne parle pas de Québec, Montréal, c'est un cas problème, c'est un autre cas, mais ailleurs sur le territoire – elles pourront exercer le droit à la dissidence. C'est ça que la Constitution prévoit. Mais il peut y avoir des commissions scolaires linguistiques.

Mais ces droits de ces minorités-là sont protégés par la Constitution. Donc, elles pourront exercer leur droit à la dissidence. Et c'est protégé, d'ailleurs. Ce droit-là est protégé dans la Loi sur l'instruction publique en ce moment.

M. Rioux: O.K.

Le Président (M. Facal): Très bien.

M. Rioux: Merci.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Un petit commentaire sur les commissions scolaires linguistiques, puis, par la suite, j'aimerais poser trois questions qui portent sur les services éducatifs aux enfants handicapés, trois questions dont la réponse ne dépendra pas des états généraux de l'éducation. Je ne sais pas si ça va faire plaisir ou pas au ministre, mais on va voir.

Tantôt, le ministre a dit qu'il y avait un consensus... Même avant ça, le ministre a dit que, quand il y a un consensus dans la société, il fonce, il bouge. Puis, tantôt, il a dit qu'il y a un consensus autour des commissions scolaires linguistiques.

Mr. Chairman, the Minister cannot have his pie and eat it too. S'il a dit que, quand il y a un consensus, il fonce, puis s'il admet qu'il y a un consensus sur les commissions scolaires linguistiques, bien, logiquement, il devrait foncer là-dessus. Ça, c'est mon commentaire. Qu'est-ce qu'il attend? Il attend autre chose? Il attend ses états généraux? Il attend bien des états généraux, lui.


Services aux élèves handicapés

Sur les trois questions précises sur les services aux étudiants handicapés, en 1994-1995, selon la Commission des affaires sociales, lors de l'étude des crédits de l'OPHQ, l'année dernière, le ministère de l'Éducation a créé, dans le courant de l'année 1994-1995, ou peut-être 1993-1994, en tout cas, 21 postes dans les régions pour apporter un support aux commissions scolaires pour favoriser l'intégration scolaire.

Est-ce que ces 21 postes, qui dépendent du ministère de l'Éducation, existent toujours? Est-ce qu'il sont maintenus? Et quel est le mandat de ces 21 personnes en région?

M. Garon: M. Théorêt, allez-y donc.

M. Théorêt (Marcel): Oui, c'est un programme qui se poursuit cette année.

M. Copeman: Quel est le mandat de ces personnes-là?

M. Théorêt (Marcel): De façon précise, M. Roberge pourrait vous décrire un peu plus le mandat de ces groupes-là.

M. Roberge (Jean-Yves): Ce sont des gens qui sont libérés de leur commission scolaire initialement, dont le mandat est défini régionalement par des tables de concertation, soit des tables de gens en adaptation scolaire, soit de directions des services éducatifs, qui tourne en général sur une question de soutien au milieu scolaire pour organiser des services adaptés aux jeunes qui ont des déficiences intellectuelles. Dans certains cas, ça prend des formules du genre perfectionnement régional; dans d'autres cas, c'est un soutien local comme tel qui est donné aux gens qui intègrent, entre autres, des jeunes qui ont des déficiences intellectuelles.

M. Copeman: Merci. Si on peut parler du programme des services éducatifs, qui, si ma mémoire est bonne, a été transféré de l'OPHQ au ministère de l'Éducation, le but de ce programme-là était de donner des services de soutien aux commissions scolaires pour, encore une fois, favoriser l'intégration scolaire des élèves pour s'assurer qu'il y ait la possibilité que les élèves handicapés soient intégrés dans des classes d'école régulières.

Quel est le budget pour 1995-1996 de ce programme de services éducatifs pour les élèves handicapés? Voyez-vous, M. le Président... Mme la Présidente, pardon, quand les question sont détaillées et pointues, les réponses sont brèves. C'est magnifique, ça.

M. Garon: Avez-vous remarqué qu'elles viennent assez vite?

M. Copeman: Oui, oui.

M. Garon: J'ai remarqué, quand j'étais porte-parole de l'opposition, quand je posais une question aux Transports, ça prenait entre 15 et 20 minutes à avoir la réponse. Je peux vous dire qu'à chaque fois les réponses arrivent dans la minute. Je vais vous dire une chose, moi...

M. Copeman: On va partir le chronomètre, M. le ministre, on va voir.

M. Garon: ...ça fait 20 ans, 19 ans que je fais des crédits au Parlement et c'est la première fois, à part de l'Agriculture, quand j'étais à l'Agriculture, que je vois un ministère aussi efficace. Parce que j'en ai posé des questions dans l'opposition; c'était long, les réponses, c'était long. Les Transports, je ne vous mens pas, là, l'an dernier, avec M. Cherry, ça prenait entre 15 et 20 minutes. Au bout de 20 minutes, je lui disais: Ça fait 20 minutes que je vous ai posé la question. J'ai vu des fois prendre quasiment une demi-heure à avoir une réponse.

M. Copeman: Je me réjouis de l'efficacité de votre équipe, M. le ministre.

M. Garon: En tout cas, je vais vous dire une chose, ils sont au courant de ce qui se passe, parce que c'est la première... Je vais vous dire une chose, quand j'ai abordé les crédits, je me posais la question: Comment ça prendrait de temps? Je vais vous dire quelque chose, je suis impressionné que les projets de réponses, les chiffres ou les données arrivent rapidement comme ça.

M. Théorêt (Marcel): Alors, pour 1995-1996, c'est le dossier 30372, Services locaux en milieu ordinaire et projets innovateurs. Il y en a pour 8 327 731 $.

M. Copeman: Est-ce qu'il y a une compression, une coupure par rapport à 1994-1995? Parce que le chiffre qui a été avancé lors de la séance de la commission des affaires sociales de février 1994, pour l'année qui est terminée... Je ne sais pas si on compare les pommes et les pommes, mais le chiffre qui a été avancé par les autorités de l'OPHQ était de 11 877 000 $.

M. Théorêt (Marcel): Oui, il y a également, là, un autre dossier, c'est: Services régionaux et suprarégionaux de scolarisation et de soutien, où on trouve un deuxième montant de 3 041 804 $. Alors, vous retrouvez donc 11 368 000 $.

M. Copeman: Il sont semblables à l'année passée?

M. Théorêt (Marcel): C'est du même ordre.

M. Copeman: Excellent. Merci. Puis là une dernière question, M. le Président, sur un sujet connexe un tout petit peu aux questions que j'ai posées au ministre en Chambre, il y a deux semaines, auxquelles il a très bien répondu le lendemain, et je le félicite pour la rapidité et l'efficacité avec lesquelles il a réglé ce problème. Je le fais publiquement, parce que le but de ma question était de résoudre un problème qui existait et, en dedans de 24 heures, le problème était réglé. Ça n'aurait jamais dû arriver, mais, quand même, je félicite le ministre pour l'efficacité, le soin qu'il a pris pour régler le problème.

(11 h 20)

Mais il y en a un autre qui est connexe, M. le Président, et il s'agit des interprètes oraux dans les écoles. Il y a à peu près une centaine d'élèves à travers le Québec, grosso modo, qui ont besoin des services d'interprètes oraux dans les écoles, et il y a un problème de disponibilité de ces services-là, ça, tout le monde le reconnaît. Le problème qui se développe, c'est que les parents sont comme des petits pions, parce que, quand ils font des revendications au niveau de la commission scolaire, beaucoup de commissions scolaires répondent: On n'a pas les budgets nécessaires, les marges de manoeuvre nécessaires, les masses nécessaires pour assurer la plénitude des services pour répondre à la demande. Et, quand ces mêmes parents s'adressent au ministère de l'Éducation, la très grande majorité du temps, le ministère de l'Éducation répond: On donne le budget nécessaire aux commissions scolaires pour répondre à la demande.

Moi, je ne veux pas partir une chicane de juridiction, Mme la Présidente. C'est la dernière chose que je veux, mais j'aimerais savoir de la part du ministre de l'Éducation... Les faits réels, c'est que les parents et les élèves n'ont pas assez de services et que, quand un fait une demande à un niveau, ils se disent: Bien, ce n'est pas notre responsabilité, on n'a pas les sous; ils vont voir l'autre niveau, puis ils se font dire: Mais ce n'est pas notre faute, on donne des sommes d'argent assez importantes pour répondre aux services. Mais, dans les faits, M. le ministre, il n'y a pas assez de services et les parents sont pris en otage; même, certaines commissions scolaires disent: S'il faut qu'on réponde à la demande de votre élève, il va falloir qu'on l'enlève à un autre, ce qui me semble complètement ridicule, aberrant et illogique. J'aimerais savoir comment le ministre entend solutionner ce problème-là.

M. Garon: Je vais demander au sous-ministre de vous répondre sur la situation actuelle. Après ça, parce que vous n'étiez pas ici hier, je vous dirai une approche de solution que j'ai mentionnée hier pour pas seulement ça, pour l'ensemble des choses.

M. Théorêt (Marcel): Bien, à votre question à savoir comment on entend solutionner ça, je vous dirai qu'on travaille en étroite collaboration avec les représentants des parents. On a un groupe de travail en adaptation scolaire où sont représentés l'Office des personnes handicapées et différents autres organismes, avec des partenaires du réseau scolaire. On a, au cours de l'année, mis sur la table l'ensemble des données financières et autres, on cherche avec eux les meilleures façons de solutionner des problèmes et on analyse, de façon systématique, tous nos modèles de financement et nos modèles d'allocations budgétaires. Alors, dans la mesure où on pourrait établir, avec des groupes, que la partie des budgets qui est dans les budgets des commissions scolaires ou la partie des budgets qui est gérée par le ministère de l'Éducation aurait avantage à être gérée autrement... On est à regarder ça avec les organismes directement concernés et les porte-parole des enfants handicapés.

M. Copeman: M. le Président...

Le Président (M. Facal): I am back.

M. Copeman: Marvelous. C'est à peu près la même réponse, malheureusement, qu'on donne aux parents, mais, dans la pratique, dans le pratico-pratique, malheureusement, M. le ministre, il y a des situations complètement aberrantes où les commissions scolaires, semble-t-il, font un peu comme Ponce Pilate, lavent leurs mains des problèmes en disant: On n'a pas assez d'argent. Est-ce que, selon le ministère de l'Éducation, il y a assez d'argent fourni aux commissions scolaires pour répondre aux besoins des élèves qui ont besoin des services d'interprètes oraux?

(Consultation)

M. Théorêt (Marcel): Alors, j'ai quelques chiffres ici concernant des demandes précises pour des clientèles, pour des jeunes directement desservis. Alors, en 1994-1995, c'est 1 674 jeunes qui ont fait l'objet d'une allocation particulière pour répondre à un besoin précis, alors que, l'année précédente, c'était 1 465 et, en 1992-1993, c'était 1 214. Alors, il y a une croissance quand même significative d'aide spécifique à des jeunes en difficulté.

M. Copeman: Mais ces types de chiffres là, M. le Président, cachent souvent la réalité. C'est vrai, peut-être, qu'il y a une croissance, mais les informations que j'ai, avec des cas très précis, c'est que oui, quand une famille se présente en disant: J'ai besoin de x nombre d'heures d'interprète oral pour mon enfant, il est souvent accordé peut-être deux heures de temps, une heure de temps, il est enlevé une heure de temps à un autre élève. Moi, je conçois mal comment une commission scolaire peut dire à une famille, à un élève qui a besoin d'un interprète oral pour apprendre: Oui, on va vous donner ça, deux heures par semaine, trois heures par semaine, cinq heures par semaine, mais l'élève qui est là dans sa classe pendant x nombre d'heures, qui n'a pas le service d'un interprète oral, sauf pendant peut-être une heure par jour, il n'apprend pas grand-chose. Ça fait que je me méfie beaucoup des chiffres qui me disent: Oui, ils sont en croissance. Ce n'est pas ça la question.

Les commissions scolaires, souvent, disent: Nous n'avons pas assez d'argent du ministère de l'Éducation pour répondre à la demande. Le ministère de l'Éducation, la position, à ma connaissance, est que le ministère dit: On en donne assez aux commissions scolaires pour répondre à la demande. Où est la vérité dans tout ça, M. le ministre, là, puis quelle est la situation des parents des élèves qui sont tellement frustrés par le fait qu'ils ne peuvent pas avoir des services? C'est ça qu'il faut, il me semble, solutionner. Il y a une réalité qui s'impose: il y a des élèves qui ont besoin d'interprètes oraux dans les écoles puis qui ne reçoivent pas de services. Comment est-ce qu'on va le régler?

M. Théorêt (Marcel): Alors, dans les discussions qu'on a avec les représentants des groupes, moi, je dirais qu'actuellement les gens mettent beaucoup plus l'accent, dans leurs interventions, sur le développement de plans d'intervention personnalisés, c'est-à-dire une démarche qui est faite au niveau de l'école entre les parents, les différents professionnels, pour établir, en fonction des besoins des jeunes, l'ensemble des interventions les plus pertinentes. On a une rencontre qui est d'ailleurs prévue, je pense, au tout début du mois de mai, avec les représentants particulièrement de l'Office des personnes handicapées, et la façon d'aborder la question, c'est sur la démarche de plans d'intervention personnalisés. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas de besoins financiers dont on fait état, mais, actuellement, la priorité des interventions des représentants des groupes porte beaucoup plus sur la façon de permettre aux parents de participer à la définition de ces plans d'intervention personnalisés pour leurs enfants.

Maintenant, la question des ressources est, bien certain, une problématique importante, mais, actuellement, on est plus à voir comment on utilise pleinement les sommes qui sont disponibles. Et on a, lors des dernières rencontres, mis sur la table l'importance des investissements qui ont été faits. Et les budgets investis pour l'ensemble des élèves avec des besoins particuliers, cela représente probablement un montant de l'ordre de 24 % à 25 % des budgets globaux dont on dispose, qui sont affectés à une clientèle qui représente à peu près 12 % des effectifs. Alors, à peu près deux fois plus d'investissements que les clientèles directement concernées.

Est-ce que l'effort devrait être plus important? Chacun des milieux doit considérer sa situation propre, et les analyses des plans d'intervention personnalisés amènent souvent les commissions scolaires à aller plus loin dans le développement de leur offre de services.

M. Copeman: En tout cas, M. le Président, je ne sais pas si le ministre a des commentaires là-dessus. On va suivre le dossier de très près. J'imagine qu'on aura encore l'occasion de s'en parler, et, au besoin, je vais revenir l'année prochaine pour poser à peu près les mêmes questions, pour voir s'il y a du progrès qui a été fait pendant l'année courante, amener, si vous voulez, des cas très précis. Il y en a une tonne, de cas très précis, des parents qui se présentent à une commission scolaire, qui essaient de faire faire un plan de service personnalisé, dont le résultat ultime est, mettons, une heure d'interprète oral par jour pour l'enfant, ce qui, selon moi, est aberrant. Parce que, pour le restant de la journée, l'enfant qui... Si on accepte que l'enfant a besoin d'avoir un interprète oral pour apprendre et qu'on lui fournit pendant une heure de temps dans une journée, ça veut dire qu'il manque quoi, 80 %, 75 % des classes? Moi, je trouve que c'est complètement aberrant. Il faut trouver une solution à ça.

Je comprends, le ministre dit souvent: Bien, l'argent n'est pas la solution à tout. Je suis bien d'accord. Mais il y a malheureusement des cas très précis où des personnes, des élèves handicapés ont besoin d'un soutien accru qui implique des dépenses d'argent, et, moi, je trouve qu'on devrait en dépenser, de cet argent-là, pour aider les élèves handicapés dans les écoles. Économisez ailleurs, M. le ministre, coupez vos tartes comme vous voulez, mais trouvez-en une pointe pour les élèves handicapés qui en ont besoin dans vos écoles, dans nos écoles, pardon. Pas vos écoles, c'est nos écoles. Merci, M. le Président.

(11 h 30)

Le Président (M. Facal): Merci, monsieur...

M. Garon: Je dois dire que le budget, actuellement, là, en 1995-1996, pour les élèves en difficulté ou handicapés, c'est 1 083 000 000 $ sur des crédits totaux, du primaire et du secondaire, de 5 714 698 000 $. C'est quand même beaucoup d'argent, Maintenant, est-ce qu'il est bien affecté tout le temps, là? C'est évident que...

Moi, j'ai participé, dans mon comté, à des batailles d'écoles, et, souvent, ça m'a pris du temps à trouver les raisons. Des fois, je ne comprenais pas. Je vais vous dire, moi, ça a été des batailles... À un moment donné, quelqu'un m'a dit: M. Garon, regardez, quand une école a plus de 500 élèves, le directeur de l'école a droit à un adjoint. Parce que là j'ai compris, j'ai commencé à comprendre certaines batailles que j'ai dû mener, que je ne comprenais pas, parce qu'elles étaient absurdes, même pour fermer des écoles pleines.

J'ai demandé au ministère: Comment ça se fait qu'après 500 élèves un directeur d'école a droit à un adjoint? S'il en a un à plus de 500 élèves, ça incite à faire plus de 500. Ils ont dit: Ce n'est pas comme ça que la règle a commencé. Vous voyez, au début, quand la règle a été mise en place, c'était pour empêcher qu'un directeur d'une école ait plus d'un adjoint s'il y avait 500 élèves. Ha, ha, ha! Alors, on a dit: Il n'a pas droit à plus d'un adjoint. Et c'est devenu, avec les années, qu'il avait droit à un adjoint. Comprenez-vous? Alors, parfois, une mesure correctrice a un effet différent avec les années. Moi, j'en ai vu, des batailles. Ça, ça m'a créé une source de problèmes incroyables. J'ai vu aussi, moi, quand j'ai été élu député chez nous, il y avait une grève à chaque année, jusqu'à temps que le directeur général se trouve un emploi au Conseil du trésor, puis là il n'y a plus eu de grève une seule fois.

Bon, je me suis dit: Il n'est peut-être pas responsable. Il n'est peut-être pas responsable de quoi que ce soit, il y avait peut-être des conflits de personnalités. Quand on voit des époux qui s'aiment, qui se séparent un jour, il n'y a pas nécessairement de coupables non plus là-dedans. Il arrive, des fois, qu'il y a des gens, quand ils se parlent, ils ne s'entendent pas; pour des raisons autres, ils ne règlent pas les problèmes parce qu'ils ne sont pas capables de se parler. Alors, il arrive toutes sortes de choses là-dedans. Moi, j'ai eu assez d'expérience là-dedans, dans la gestion publique, pour voir qu'il n'y a pas nécessairement des coupables, mais il y a des effets de politiques qui ne sont pas nécessairement les effets recherchés.

C'est pour ça que, moi – je l'ai dit hier – je songe à ce qu'on fasse un amendement aux lois pour qu'on permette aux parents d'envoyer l'enfant dans l'école qu'ils veulent au secteur public, dans les mêmes catégories, là: les francophones chez les francophones, les anglophones chez les anglophones, mais au-delà d'une commission scolaire, si la commission scolaire accepte sans que la sienne, où il reste, le veuille. Si les parents ont plus de marge, peut-être que ça va inciter les écoles à traiter plus les gens comme des clients. Ça ne veut pas dire que le client a toujours raison dans le domaine de l'éducation, mais ça veut dire, au fond, qu'il y a des besoins qui sont différents. À ce moment-là, il y a des gens qui peuvent dire: Moi je vais m'occuper de satisfaire tel besoin, qui est un besoin réel.

Pour les handicapés, vous avez parfaitement raison. Moi, je pense qu'on doit toujours traiter les handicapés comme on voudrait être traités si on était nous-mêmes handicapés. Je pense que c'est parce qu'on ne l'est pas. On n'a pas de mérite à ne pas l'être. Des fois, on pense qu'on ne l'est pas, puis on l'est peut-être. Mais, en tout cas, il y a des gens qui peuvent le penser. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Facal): M. le ministre, je vous inviterais à conclure.

M. Garon: Mais je veux dire essentiellement...

Le Président (M. Facal): Je vous inviterais à conclure.

M. Garon: ...que ce n'est pas simple. J'ai été député pendant plusieurs années, ce n'est pas simple. C'est quoi un handicapé? Moi, je connais des gens qui n'ont plus de membres, mais qui ne sont pas handicapés intellectuellement. Puis vous avez des gens qui sont forts comme des lions, comprenez-vous, mais, sur le plan intellectuel, ils sont handicapés. Ce n'est pas simple, ces questions-là. Et, à part de ça, il n'y a pas de catégories précises là-dedans. Ce n'est pas simple, c'est complexe.

Maintenant, vous parlez de quelqu'un qui a un handicap physique clair, là, quelqu'un qui est sourd ou quelque chose comme ça. Je pense que ça, c'est mécanique; ça, il faut pallier à un défaut ou à une lacune. Ça, c'est autre chose. Mais ce n'est pas si simple que ça, les questions des handicapés, et je pense, moi, qu'il faut traiter ces questions-là avec beaucoup d'ouverture, mais être prudents également.

Moi, je me rappelle, quand les parents étaient venus me voir. J'ai pris fait et cause pour eux; d'ailleurs, ils ont gardé leur école un bout de temps. Mais je me rappelle une des madames, elle disait: Mon enfant est handicapé. J'ai dit: Madame, je vais être franc avec vous, si vous ne me l'aviez pas dit, je ne m'en serais pas aperçu.

M. Ouimet: ...ministre à terminer son intervention, ça n'a aucune pertinence.

Le Président (M. Facal): Oui. M. le ministre, il reste 25 minutes.

M. Garon: Pardon? Non, je comprends que le député de Marquette juge les affaires rapidement, mais il change d'idée souvent aussi. Moi, j'aime autant les approfondir, prendre le temps qu'il faut pour les approfondir.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee.


États généraux de l'éducation


Consultation du milieu scolaire anglophone

M. Bergman: M. le Président, avec le gouvernement en place nous sommes à l'ère des consultations. Je n'ai rien contre les consultations comme telles, lorsqu'elles sont faites d'une façon démocratique et qu'elles respectent le droit de chacun de s'exprimer, et ce, quelles que soient ses opinions. Mais est-ce que les prochains états généraux de l'éducation seront une copie des dernières commissions sur l'avenir où seuls y seront bien reçus ceux qui partagent le point de vue du côté ministériel? J'espère bien que non, M. le Président, mais j'en ai peur et je vous dis pourquoi.

Comment se fait-il que, lors de l'annonce, en grande pompe, des états généraux de l'éducation, ni le premier ministre ni le ministre de l'Éducation n'ont cru bon de parler du système scolaire anglophone? Le secteur anglophone représente à lui seul 10 % du système d'éducation du Québec aux niveaux élémentaire et secondaire. Il est un segment important de notre réseau scolaire, qui ne doit pas être négligé.

Ma question au ministre de l'Éducation est donc la suivante: Est-ce qu'il a prévu de faire une place au milieu scolaire anglophone dans la prochaine tenue des états généraux de l'éducation?

M. Garon: Bien, les états généraux de l'éducation concernent tous les Québécois. Je n'ai pas fait de distinction entre francophones et anglophones, catholiques ou protestants; on n'en parle nulle part. Les gens vont venir dire ce qu'ils veulent dire. Puis ce n'est pas si simple que ça aussi, qui est un anglophone puis un francophone, tu sais.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Moi, ma mère est irlandaise; personne ne le sait. Alors, je suis à moitié irlandais, à moitié... Je vais vous dire: Mon ancêtre vient d'Amérique du Sud, en passant à travers différents pays. Il semble qu'il soit parti dans le temps des guerres de religions. Il devait être protestant, parce qu'il venait d'une région où c'étaient tous des protestants. Le cardinal de Richelieu est venu attaquer le coin.

M. Bergman: M. le Président, je pense que le ministre peut faire ridicules les questions de qui est un anglophone et qui est...

M. Garon: Non, non, mais je veux dire, ce n'est pas si simple que ça.

M. Bergman: Mais je pense que, si vous voulez faire du ridicule, ça ne vaut pas le sens de faire une réponse du tout.

M. Garon: Non, ce n'est pas ça que je veux dire. Je dis que, essentiellement, quand on parle de ces questions-là au Québec, ce n'est pas si simple que ça. Je veux dire, à ce moment-là...

M. Bergman: C'est simple, mais vous...

M. Garon: Les gens vont pouvoir venir dire, aux états généraux, leurs préoccupations. Ils vont pouvoir dire... Moi, je ne suis pas maître de ce que les gens vont dire, ils vont pouvoir dire ce qu'ils veulent.

Je vais vous dire une chose, par exemple, pour l'enseignement de l'anglais au Québec, ça, par exemple, j'ai l'intention de faire des changements. Ou on veut que les gens l'apprennent ou on veut que les gens ne l'apprennent pas. Le français, pour ceux qui ne sont pas francophones, on veut qu'ils l'apprennent ou on veut qu'ils ne l'apprennent pas.

On fait beaucoup d'heures d'anglais au Québec, chez les francophones, puis, finalement, il y a un grand nombre qui ne le parlent jamais. Est-ce qu'on peut se poser des questions si c'est enseigné correctement? Est-ce qu'on veut qu'ils l'apprennent ou on ne veut pas? Moi, je pense qu'en Amérique du Nord, de ne pas être capables de comprendre l'anglais ou de s'exprimer en anglais, ça peut être une forme de handicap. Éventuellement, je pense que de ne pas parler l'espagnol, ça va être un genre de handicap également quand, de plus en plus, on s'en va vers un marché de l'Amérique.

Alors, je ne suis pas, moi, antianglophone. Ce que je veux dire – c'est ça que je disais – essentiellement, c'est que je ne suis pas antianglophone, d'aucune façon. Mon épouse est anglophone; quand elle est arrivée ici, elle ne parlait pas un mot français. Ça fait que je sais c'est quoi arriver ici sans parler un mot français.

Sauf que les états généraux n'ont pas été, au point de départ, un forum pour des francophones, des anglophones, des allophones; c'est un forum pour l'ensemble des Québécois, puis ils diront ce qu'ils voudront.

M. Bergman: Mais il me semble que, dans les structures des états généraux, il doit y avoir une place pour tous.

M. Garon: Oui.


Nomination de M. Gary Caldwell à titre de commissaire

M. Bergman: Et, s'il n'y a pas une place pour tous, alors il n'y aura pas les réponses qu'on doit avoir, et je vous demande... Gary Caldwell, le seul membre anglophone de la Commission des états généraux, a déclaré qu'il souhaite l'abolition du réseau primaire anglophone. Alors, est-ce que c'est une réflexion de la pensée du ministre?

M. Garon: Ha, ha, ha! Non, pas du tout. Je ne savais pas qu'il avait dit ça, en passant. Ha, ha, ha! À plus forte raison, s'il a dit ça, ça va provoquer les gens qui vont venir dire davantage ce qu'ils pensent. Bien, moi, je ne savais pas qu'il avait dit ça, puis je ne sais pas s'il l'a dit non plus; vous dites qu'il a dit ça. Il est né en Ontario, il habite dans les Cantons-de-l'Est, puis il a enseigné à Bishop, alors il doit avoir un peu de préoccupations anglophones, tu sais; j'imagine.

M. Bergman: Je peux vous demander quelle est votre vision du futur système scolaire anglophone, en général? Comment vous le voyez, votre vision du système anglophone?

M. Garon: Moi, ce qui m'importe, ce n'est pas ma vision, c'est leur vision.

M. Bergman: Mais quelle est votre vision, M. le ministre?

M. Garon: Ça va ressembler aux consensus que les gens vont faire. Je n'ai pas des visions sur tout dans la vie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Je n'ai pas une pensée sur tout, mais, moi, je pense que... Moi, mon approche, c'est la suivante.

M. Bergman: Mais certainement que, comme ministre, vous avez une vision sur une question très importante, autrement ça ne vaut pas que vous êtes...

M. Garon: Oui. Je souhaite que l'ensemble des Québécois soient heureux au Québec, un. J'ai déjà dit publiquement que l'indice de mesure d'une société devrait être plus, beaucoup plus le BNB que le PNB, c'est-à-dire, bien plus le «bonheur national brut» que le «produit national brut».

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Et même le Parti libéral a voulu, quelques années plus tard, prendre cette idée-là, et Gilles Lesage, du Devoir , avait dit: Ils veulent prendre l'idée de Garon. Alors, ils ont arrêté tout de suite.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Ils ont arrêté tout de suite d'en parler.

Le Président (M. Facal): Ah! je suis sûr que le Parti libéral est pour le bonheur lui aussi.

M. Bergman: Mais, certainement, quand vous parlez du bonheur de la société, on croit tous dans le bonheur de la société. Alors, vous devez avoir des pensées sur qu'est-ce qui fait le bonheur d'une société.

M. Garon: Hier, ce que j'ai dit... Je vais vous dire pourquoi, quand vous demandez pour M. Caldwell.

M. Bergman: Mais, si vous...

M. Garon: La raison, je l'ai dit, j'ai dit: Moi, je pense que la société anglophone de Montréal est plus forte. Je ne pouvais pas nommer un nombre indéfini de commissaires. J'ai pensé à quelqu'un qui était dans une région où il y avait beaucoup d'anglophones. Il y en a moins qu'il y en a déjà eu, mais il y en a beaucoup. Ils ont une petite université, Bishop, et je me disais: Les gens de Montréal, je suis certain que ce qu'ils ont à dire, ils vont le dire, les anglophones de Montréal.

(11 h 40)

Mais j'aimerais que, sur la Commission, il y ait quelqu'un qui ait la préoccupation... Parce que je ne pouvais pas en nommer... Si on pense aux allophones, aux différents groupes, là, j'ai dit: Comment on peut en nommer, de personnes? Alors, j'ai dit: Je voudrais en nommer un qui vient d'une communauté anglophone régionale, parce que, quand ils vont parler de ces questions-là en Estrie, en Gaspésie, dans le Saguenay–Lac-Saint-Jean, dans la Mauricie, dans la région de Québec, dans les différentes régions du Québec, il va y avoir quelqu'un qui sait ce que ça veut dire vivre comme un anglophone dans une région. Puis, moi, je suis certain que la pensée de Montréal, elle va s'exprimer. Je suis sûr que les gens de McGill vont dire ce qu'ils pensent, parce qu'ils ont une communauté qui n'est pas menacée. En Amérique du Nord, les anglophones ne sont pas menacés, à court terme; nous sommes tous menacés, à plus long terme, par la langue espagnole.

Vous savez, il y a 2 000 ans, les Romains ne se sentaient pas menacés. Si on vous avait dit, il y a 2 000 ans, que la langue latine, un jour, ne serait plus parlée, sauf par quelques personnes au Vatican, Claude Ryan possiblement au Québec...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: ...vous auriez passé pour un lunatique. Pourtant, c'est la réalité. La langue latine, c'était la langue des Américains il y a 2 000 ans. Les Romains, c'étaient les Américains du temps. Ça va être quoi, la langue de l'Amérique du Nord, de l'Amérique dans 200, ou 300...

M. Bergman: M. le Président, je regrette...

M. Garon: ...ou 400 ans? Moi, je ne le sais pas.

M. Bergman: Je regrette que...

M. Garon: Mais il est possible qu'il y ait une grosse place pour les Espagnols, parce qu'ils sont plus prolifiques que les francophones et les anglophones.

M. Bergman: M. le Président...

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Je trouve regrettable, sur des questions très sérieuses...

M. Garon: Bien, c'est sérieux!

M. Bergman: ...que le ministre fasse des farces. Ce n'est pas une soirée ou une matinée d'«entertainment», pour faire rire les gens. Moi, je trouve regrettable l'attitude du ministre sur une question très sérieuse, à une table très sérieuse, avec grand respect pour vous, M. le Président. Et, pour moi, je trouve l'attitude du ministre très regrettable.

M. Garon: Mais je ne comprends pas l'allusion du...

M. Bergman: Et je pense que, s'il est ici pour donner du plaisir à son audience, peut-être...

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, vous me permettrez de vous rappeler l'article 81 qui dit exactement ceci: «Aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante.» Alors...

M. Bergman: Je vous donne mon opinion.

Le Président (M. Facal): Votre opinion.

M. Bergman: Et je pense que vous avez un devoir de...

Le Président (M. Facal): Mais, considérant qu'il...

M. Bergman: ...conduire ces sessions...

Le Président (M. Facal): Oui.

M. Bergman: ...d'une manière... ou tel que demandé par la loi. Et, si le ministre n'a pas l'intention d'avoir ce comportement, c'est regrettable.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: C'est regrettable pour la population du Québec.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, s'il y a quelqu'un ici qui va faire la discipline, ce sera moi et pas vous.

M. Bergman: Mais, si vous le faites...

Le Président (M. Facal): Alors, venez-en à votre question.

M. Bergman: Mais, si vous ne faites pas de discipline, je vais vous dire qu'est-ce que vous devez faire.

Le Président (M. Facal): Depuis trois jours, nous travaillons ici...

M. Bergman: Je pense que vous avez une obligation.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, ne me coupez pas la parole, j'ai horreur de ça.

Deuxièmement, considérant qu'il reste 15 minutes, je crois qu'il serait beaucoup plus profitable que vous posiez des questions sur le fond, plutôt que de faire des montées de lait.

M. Bergman: Mais je ne peux pas poser des questions sur le fond si le ministre ne répond pas aux questions et ne prend pas au sérieux les questions. Et, pour moi, ça ne vaut pas la peine de poser des questions à quelqu'un qui veut faire des farces. Moi, je n'ai pas l'entraînement pour jaser dans un «nightclub act». Ça, c'est «a nightclub act». You could have at someone else. This is the National Assembly, and I think that it merits a serious attention. And the gentleman who is called upon to service the Ministry and the Government should be prepared to answer questions seriously. If he cannot, he does not want to, let him tell us and then we will just close off the mike.

Le Président (M. Facal): Mais, si vous trouvez que votre présence ici ne vous apporte pas les informations que vous souhaiteriez, libre à vous de partir. Ce sera à moi à juger de la...

M. Bergman: Ce n'est pas la question d'avoir les réponses, c'est d'avoir l'attitude...

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee...

M. Bergman: Si vous voulez suspendre et les lire les galées de ce qui s'est passé maintenant, vous aurez honte de ce qui vient de se passer.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, chacun, ici, est libre d'aller lire les galées et d'en penser ce qu'il veut. Je vous ai lu l'article 81. Je peux également, pour vous éclairer davantage, vous lire l'article 82...

M. Bergman: Excusez, M. le Président, vous pouvez...

Le Président (M. Facal): ...qui dit: «Le refus de répondre ne peut être discuté.» Et, sur ce, je vous ai déjà assez entendu parce que...

M. Bergman: Vous pouvez me lire les articles, mais vous avez une obligation de conduire...

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, ça fait quatre fois de suite que vous dites la même chose, je vous ai compris.

M. le député de Groulx, est-ce que c'est pour une question de règlement?

M. Kieffer: C'est une question de règlement, M. le Président. Il doit sûrement y avoir quelque part un règlement, dans ce livre-là, qui dit que finalement les députés ont bien ce qu'ils méritent. Lorsque, au début d'une intervention, le député remet en question les fondements mêmes des états généraux, en disant au ministre: On s'attend à ce que ce soit l'équivalent des commissions régionales, écoutez, là...

Une voix: Quel est l'article du règlement invoqué par le député?

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx...

M. Kieffer: Non, mais, je m'excuse...

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx...

M. Kieffer: ...en d'autres mots, quand on attaque, on s'assure...

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx...

M. Kieffer: ...que nos arrières sont protégés.

Le Président (M. Facal): M. le député de Groulx, je vous arrête tout de suite, parce que, ce que vous êtes en train de dire pourrait faire l'objet de ma part exactement des mêmes commentaires que j'ai servis au député de D'Arcy-McGee. Et, par toute équité, vous êtes à peu près aussi hors d'ordre que lui.

M. Kieffer: Parfait, M. le Président. Vous avez raison...

Le Président (M. Facal): Merci.

M. Kieffer: ...mais je voulais lui souligner qu'il était hors d'ordre.

Le Président (M. Facal): Alors, je pense que le député de Champlain, lui, veut, depuis le début...

M. Bergman: Excusez...

Le Président (M. Facal): ...poser une question de fond.

M. Bergman: Excusez...

M. Garon: Mais, M. le Président...

M. Bergman: Excusez...

M. Garon: ...j'aimerais dire un mot, s'il vous plaît, parce que...

M. Bergman: Excusez, mes questions ne sont pas finies.

Le Président (M. Facal): Comment?

M. Bergman: J'aurais des questions additionnelles.

Le Président (M. Facal): Des questions sur le fond ou des...

M. Bergman: Oui, sur le fond.

Le Président (M. Facal): Très bien. Alors, posez-en encore une, deux, de manière à ce que nous puissions finir la liste des interventions avec le député de Champlain, à l'heure convenue. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Je viens de dire au ministre que Gary Caldwell est le seul membre anglophone de la Commission des états généraux et qu'il a déjà déclaré qu'il souhaite l'abolition du réseau primaire anglophone. Je veux demander au ministre... Le ministre a dit qu'il n'a pas eu connaissance de ces déclarations, et je peux comprendre, ce n'est pas possible d'avoir connaissance de tout. Mais, si cette déclaration est vraie, est-ce que le ministre est prêt à demander la démission de M. Caldwell comme membre de la Commission des états généraux?

M. Garon: M. le Président...

M. Bergman: Oui ou non?

M. Garon: Oui ou non? Non. C'est simple, parce que...

Le Président (M. Facal): M. le ministre, je soulignerais au député de D'Arcy-McGee qu'il est à l'extrême limite d'outrepasser l'alinéa 5 de l'article 77 qui dit: «Les questions ne peuvent être formulées de manière à susciter un débat.» Vous mettez en cause carrément un individu qui n'a même pas encore commencé à siéger à titre de commissaire aux états généraux. Alors, veuillez faire bien attention dans la formulation de vos questions. Cela dit, la question est posée, alors, M. le ministre, si vous voulez répondre.

(11 h 50)

M. Garon: Essentiellement, j'ai dit que la raison pour laquelle on a nommé M. Caldwell, c'est parce que c'est un anglophone qui vient d'une région, qui a enseigné à une université anglophone, qui est Bishop, qui était dans une communauté anglophone, qui était dans une région, où, je pense, les anglophones peuvent se sentir plus menacés. C'est pour ça que j'ai dit que j'ai nommé quelqu'un qui venait d'une région comme celle-là, disant que la communauté anglophone de Montréal est vigoureuse.

Maintenant, moi, les gens savent ce que je pense là-dessus. J'ai rencontré déjà les gens de McGill; dans l'opposition, j'allais les rencontrer. Et, quand McGill me disait qu'elle voulait occuper un secteur important sur le plan des institutions et qu'elle souhaitait que Montréal soit une ville universitaire, moi, j'ai dit: Bravo! J'étais dans l'opposition, je n'ai pas changé d'opinion là-dessus.

Ça fait longtemps que je rencontre les gens des communautés anglophones. Si vous essayez de faire croire aux gens... Si vous essayez ça, ça ne poignera pas. Moi, je n'ai jamais eu de préjugés par rapport aux anglophones. Je n'en ai pas de préjugés par rapport aux anglophones. Je ne fais pas partie de ceux qui n'aiment pas les anglophones. Alors, je vous dis: Essentiellement, les états généraux sont là pour l'ensemble des Québécois. Et Mme Hodder, qui est responsable des questions concernant les anglophones au ministère, comme sous-ministre adjointe à la question anglophone, va pouvoir vous dire quelles sont les approches qui ont été faites depuis que les états généraux ont été mis sur pied, pour faire en sorte que la communauté anglophone participe aux états généraux.

Mme M. Hodder (Janyne): Janyne Hodder, sous-ministre adjointe, Service à la communauté anglophone. Deux commentaires. Deux informations. Une première information: la Commission de l'éducation en langue anglaise, qui est une structure qui donne conseil au ministre de l'Éducation, s'est déjà mise en contact avec le secrétariat général de la Commission des états généraux sur l'éducation pour offrir sa collaboration et tenter d'explorer des mécanismes par lesquels on pourrait assurer la participation et la collaboration des gens du milieu anglophone.

Seconde information: depuis l'annonce des états généraux, j'ai moi-même rencontré des associations, je prévois des rencontres avec des associations du milieu de l'éducation et, encore une fois, les inviter à rejoindre le secrétariat général de la Commission et à faire valoir leur offre de collaboration et de présentation d'information, de mémoire ou de participation. Donc, on tente, à l'intérieur du ministère, d'assurer la participation active des anglophones aux activités qui auront lieu tant dans les régions qu'à l'échelle nationale.

M. Bergman: Merci.

M. Garon: Deuxièmement, ce qui est important de dire aussi, c'est que le commissaire n'a pas été nommé là – et je voudrais que le député de D'Arcy-McGee s'en rappelle – pour exprimer ce qu'il pense, mais c'est pour faire en sorte que les gens qui pensent quelque chose viennent le dire. Les états généraux sont là pour exprimer les besoins, les attentes de la population, comment la population voit les choses, et les commissaires vont faire un état de la situation, de ce que pensent les gens, de ce que demandent les gens. Ensuite, il y aura des états généraux régionaux et nationaux pour faire des consensus à partir de l'état de situation qui aura été rédigé par la Commission, après avoir entendu les citoyens. C'est ça, les états généraux.

Alors, que tel citoyen pense telle ou telle chose... Et, moi, je leur ai dit: Vous pouvez dire ce que vous voulez. Je ne bloquerai pas les gens de dire ce qu'ils pensent. L'époque du nihil obstat et de l'imprimatur, dans mon esprit, est révolue.

M. Bergman: Avec grand respect pour vous, dans tout système judiciaire dans le monde, quand un juge a des préjudices dans une cause qu'il entend, il se retire de la cause. Un juge, dans une cause, n'est pas là pour donner son opinion; il est là pour écouter les parties devant lui. Il se retire ou le juge en chef le retire d'une cause. Alors, oui, toute personne a droit à son opinion privée, mais, si on siège comme commissaire, on doit être neutre dans la situation.

Alors, je vous demande encore, si les allégations que vous avez entendues ce matin sont vraies, que ce monsieur souhaite l'abolition du réseau primaire anglophone, est-ce que vous allez demander qu'il se retire comme commissaire sur les états généraux? Je pense que c'est une question fondamentale dans tout système démocratique dans le monde qu'un juge ne peut avoir des préjugés dans une cause. Et c'est bien normal, ce n'est pas un manque de respect pour ce monsieur, ça veut dire que, dans cette situation, il n'est pas qualifié pour siéger.

M. Garon: D'abord, ce ne sont pas des juges. Et, deuxièmement, je n'ai pas essayé de choisir des gens qui ne pensaient à rien.

M. Bergman: J'essaie juste de faire une analogie. Ils ne sont pas des juges...

M. Garon: Ils ne sont pas des juges.

M. Bergman: ...mais les mêmes principes de justice s'appliquent.

M. Garon: Ils ne sont pas là pour dire si ce que les gens disent est bon ou mauvais.

M. Bergman: Mais il a des préjugés...

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, vous avez posé une question; elle est claire, finie, complète en elle-même. Pourrions-nous maintenant entendre la réponse sans que vous interrompiez la personne que vous souhaitez vous-même interroger? M. le ministre.

M. Garon: Moi, je dis qu'ils ne sont pas dans la situation de juges, les commissaires. Deuxièmement, si j'essayais de satisfaire aux exigences du député de D'Arcy-McGee, j'aurais essayé de trouver des gens qui ne pensaient à rien. J'imagine que l'ensemble des gens ont donné des opinions. Je suis persuadé que les gens qui vont venir les rencontrer vont contredire ce qu'ils ont dit, certains d'entre eux, dans le passé. Mais ce n'est pas ça, ils ne sont pas là pour dire ce qu'eux pensent et écrire ce qu'eux pensent; ils sont là pour entendre les gens et, possiblement, pour leur poser des questions pour aller plus loin, pour qu'on ne reste pas dans le domaine des voeux pieux, pour qu'on aille un peu plus loin dans l'expression des besoins que les gens ressentent. Alors, ils sont là pour ça. Leur mémoire, là, ou leur rapport, ou leur état de situation, qui va aller aux états généraux, ça va être ce qu'ils vont avoir entendu.

Le Président (M. Facal): M. le député de D'Arcy-McGee, si vous me permettez, il reste cinq minutes, et, par cordialité, je vous ai permis de prendre la parole avant le député de Champlain qui l'avait pourtant demandée avant vous. Alors, je passerais maintenant la parole au député de Champlain, dont je pense que ce sera...

M. Bergman: Excusez. Mais j'avais une autre question sur le sujet, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Comment?

M. Garon: J'aimerais dire également...

Le Président (M. Facal): Bon. Alors, le député de Champlain...

M. Beaumier: Je vais être bon prince, M. le Président.

Le Président (M. Facal): ...bon prince, gracieusement, vous cède les quelques minutes restantes.

M. Bergman: M. le ministre, comment pouvez-vous accepter qu'une personne qui a un si grave préjudice contre un groupe puisse siéger sur cette Commission comme commissaire? Comment c'est possible, avec tout respect pour vous, selon toutes règles fondamentales du droit, comment vous pouvez accepter une situation si grave?

M. Garon: Disons qu'aux états généraux les représentants des commissions scolaires protestantes ont été invités au lancement, de même que les représentants des enseignants anglophones et des parents anglophones. Le monde anglophone a été invité.

Deuxièmement, je ne sais pas toutes les déclarations qu'a pu faire chacun des commissaires au cours de sa vie. Je ne le sais pas et je n'ai pas essayé de le trouver non plus parce que, essentiellement, dans mon esprit, on ne nommait pas des juges, mais des commissaires qui représentent différents volets de notre société.

Moi, je vais vous dire, la déclaration qui m'a le plus impressionné, que j'ai rencontrée, que j'ai vue de M. Caldwell, c'est quand il disait que les parents doivent s'impliquer davantage dans l'école et qu'ils devraient avoir leur mot à dire davantage dans l'école.

Mais, essentiellement, dans mon esprit, c'est un représentant d'une communauté anglophone de l'Estrie, qui enseignait à Bishop, et donc qui a des sensibilités concernant ces questions-là, et il sait quelles sont les difficultés d'être un anglophone dans une région comme celle-là. Et j'imagine que le même problème va se rencontrer, comme je l'ai dit, dans la région de Québec, dans le Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, dans le Lac-Saint-Jean et que vivre comme anglophone dans une région en dehors de Montréal et à Montréal, c'est différent.

Je vais vous dire que je suis d'autant plus à l'aise pour le dire que, moi, mon épouse est anglophone. Elle a souhaité que nos enfants participent aux deux cultures, de sorte que les enfants parlent aussi bien le français que l'anglais. J'ai appris que, Mme Hodder, elle, c'était sa mère qui était francophone et que son père était anglophone. Bon.

Moi, je dis que, dans le monde du Québec, il y a beaucoup de gens comme ça. Moi, je pense que, dans ces débats-là, les gens peuvent entendre les gens, les écouter et voir quelles sont leurs préoccupations, et les comprendre, et en discuter. Or, c'est ça, essentiellement, les états généraux. Les états généraux, là, ça va être pour entendre les gens qui vont venir dire... D'ailleurs, vous allez voir, quand ils vont commencer à les entendre, au mois de mai, là, les journaux qui vont rapporter, ils vont rapporter quoi? Ce que les gens vont dire aux états généraux, ce qu'ils vont dire à la Commission. C'est ça qui va être rapporté. Eux, quand ils vont faire leur rapport, ils vont rapporter qu'est-ce que les gens ont dit. C'est ça qui va être rapporté. Et c'est là-dessus que les débats vont se faire.

Alors, est-ce qu'on a intérêt, au Québec, à ce que les anglophones soient les plus malheureux? Je ne le pense pas, moi. Je pense qu'on a intérêt à ce que les anglophones soient les plus heureux. Je pense que, dans le monde dans lequel on va vivre demain – c'est pour ça que je vous dis que c'est très important – au Québec, la langue de l'ensemble des Québécois va être le français, mais je suis persuadé que le plus grand nombre possible de Québécois vont apprendre l'anglais, vont souhaiter parler l'anglais, et je pense qu'on devrait l'enseigner de façon beaucoup plus efficace qu'on ne l'a enseigné jusqu'à maintenant. Pourquoi? Parce qu'on vit en Amérique du Nord. C'est une belle culture, la culture anglaise.

Troisièmement, je dis qu'on vit aussi dans l'ensemble de l'Amérique. S'il y a une troisième langue, ça devrait être l'espagnol, pour participer aussi et pour pouvoir être plus mobile en Amérique.

(12 heures)

Alors, concernant les questions anglophones, moi, j'ai l'intention de remettre un certain nombre de choses en cause. Personnellement, je vais vous dire, la principale chose, c'est: Comment on va faire en sorte que plus de Québécois puissent parler l'anglais? Parce que je pense que, dans le monde dans lequel on va vivre dans l'avenir, ça va être un handicap de parler seulement une langue. Ça va être un atout de parler plusieurs langues, et ça va être un plus grand atout aussi de connaître la culture anglophone, qui n'est pas seulement d'ici, qui est des États-Unis...

M. Bergman: Excusez...

M. Garon: ...ou d'autres pays dans le monde.

M. Bergman: Excusez, M. le Président...

Le Président (M. Facal): Nous venons de franchir midi. Alors, nous allons maintenant suspendre nos travaux, que nous reprendrons à 16 heures, cet après-midi. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 16 h 12)

Le Président (M. Facal): J'inviterais tout le monde à prendre place, s'il vous plaît. Comme je constate que nous avons le quorum, nous allons reprendre l'étude des crédits budgétaires du ministère de l'Éducation pour l'année 1995-1996. Je vous rappelle qu'en vertu de l'entente dont nous avons convenu des deux côtés nous étudions présentement, et jusqu'à 18 heures, le programme 4. Alors, je crois que M. le député de Marquette voulait intervenir en premier.

M. Ouimet: Oui. Merci, M. le Président. Juste une courte question pour terminer sur M. Caldwell: Est-ce que le ministre a pris connaissance de la déclaration de M. Caldwell?

M. Garon: Non.

M. Ouimet: J'ai mon attaché qui devrait nous apporter la copie de sa déclaration, je vais vous la transmettre, et je vous poserai, un peu plus tard la question à savoir si vous avez l'intention de demander sa démission...

M. Garon: Non.

M. Ouimet: ...ou si vous avez l'intention de le laisser là, après avoir pris connaissance de ses propos.

M. Garon: Vous savez, moi, j'ai assez d'expérience pour savoir que des propos, là, qu'on attribue à des gens sans connaître le contexte, sans savoir comment ça s'est posé, il faut faire attention à ça. Alors, je ne sais pas quels sont les propos, quelles sont les circonstances, etc. Deuxièmement, j'ai dit ce matin que les commissaires sont là pour entendre la population. Alors, je ne ferai pas de procès d'intention aux commissaires par rapport à ce qu'ils ont dit dans leur vie.


Lutte contre le décrochage scolaire

M. Ouimet: Parfait. J'aimerais aborder maintenant, avec le ministre de l'Éducation, l'importante question du décrochage scolaire.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: On n'a peu eu l'occasion, jusqu'à maintenant, d'aborder ce volet important. J'aimerais lui rappeler une déclaration qu'il faisait le 26 octobre dernier, 1994, au Devoir . Il venait d'être nommé ministre de l'Éducation il y avait un peu moins de quatre semaines. Il disait qu'il rejetait la logique qui avait présidé au plan Pagé de la lutte au décrochage, plan qui consistait à venir en aide à une multitude de projets. Il disait ceci: Ça n'a rien donné, les jeunes décrochent encore.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: En commission parlementaire, j'ai eu l'occasion de lui poser la question s'il avait un plan concret pour contrer le décrochage scolaire.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: La réponse n'était pas claire à ce moment-là. Nous sommes maintenant à l'étude des crédits, et je lui repose la question, tout en lui soulignant que je vais lui poser la question sur quelles mesures concrètes propose-t-il pour contrer le décrochage scolaire, d'une part, que la réponse qu'il va me donner, j'ai bien l'intention de distribuer ça à la fois aux commissions scolaires et aux médias pour que les gens comprennent bien quelle est l'orientation que privilégie le ministre de l'Éducation pour contrer cet important problème qui est le décrochage scolaire.

M. Garon: Bien, je n'ai pas trop, trop peur de la menace que vous me faites de le distribuer aux médias. Vous savez, quand on parle dans le micro, ici, ce n'est pas très confidentiel. Habituellement, je ne tiens pas de propos que je regrette par la suite. Alors, je n'ai pas l'habitude de changer d'idée. Habituellement, je réfléchis à ce que je dis avant, de sorte que je ne suis pas obligé de changer d'idée 15 jours plus tard. M. le Président, l'ex président de la CECM sait sûrement de quoi je veux parler.

Je voudrais dire que, dans la lettre que j'ai adressée aux commissions scolaires le 3 avril dernier, je mentionnais ceci: «En arrivant au ministère, j'ai pris connaissance de données qui m'amènent à poser le problème de façon différente de celle de mes prédécesseurs. Près de 35 % des jeunes n'obtiennent pas le diplôme d'études secondaires après sept ans d'études, alors que le durée normale pour l'obtention de ce diplôme est de cinq ans. Mais il faut aussi être conscient qu'une bonne partie de ces élèves ne délaissent pas l'école pour autant. Près de 95 % des élèves de 16 ans et 90 % des élèves de 17 ans sont toujours aux études. Alors qu'à 19 ans 18 % des jeunes ont abandonné l'école secondaire sans avoir obtenu de diplôme, 17 % y demeurent dans l'espoir de l'obtenir. Premièrement, il nous faut poursuivre nos efforts pour garder à l'école les éventuels décrocheurs, y ramener ceux et celles qui l'ont quittée, dans le but de faire acquérir au plus grand nombre le diplôme de qualification qui leur convient. Nous ne pouvons nous permettre que le tiers de nos jeunes consacrent de nombreuses années à leurs études sans obtenir de diplôme. Il est essentiel pour l'avenir du Québec que le taux de diplomation actuel de 65 % soit considérablement haussé et que le diplôme signifie ce qu'il doit signifier.» Parce qu'il y a des diplômes, mais, aussi, il faut que les diplômes veuillent dire quelque chose.

Alors, par exemple, quand on passe d'un cycle à l'autre et qu'on fait recommencer des études en français – même à l'université, les gens recommencent à étudier le français, comme s'ils ne l'avaient pas appris avant – ce n'est pas de cette façon-là qu'il faut bâtir l'avenir. Il faut bâtir l'avenir sur des fondations plus solides. Alors, ce que nous avons annoncé récemment, au début d'avril, sur la politique en formation professionnelle, avec les cinq volets, dont quatre peuvent s'appliquer à partir de septembre prochain, un en septembre 1996, vise, justement, à intéresser, à susciter aussi plus de détermination chez les décrocheurs. On peut essayer par différents moyens, mais, si on ne tient pas compte des besoins des jeunes...

Je l'ai dit antérieurement plusieurs fois, autrefois, on donnait des coups de règle sur les doigts de celui qui était gaucher. Souvent, il passait son cours à recevoir des coups de règle, puis il continuait à être gaucher. D'ailleurs, à la commission sur les états généraux, j'inciterais, par exemple, à parler à M. Normand Maurice, qui est quelqu'un, justement, qui a travaillé beaucoup avec des décrocheurs, pour faire en sorte, par une formation plus pratique, de leur faire acquérir des qualifications, à des gens qui étaient des décrocheurs. Là-dedans, moi, je pense qu'il faut offrir aux jeunes des avenues différentes qui vont convenir plus à leurs aptitudes, à leurs goûts et à leurs ambitions. Vous remarquerez, dans les volets sur la formation professionnelle que nous avons annoncés, on pense que ça va intéresser beaucoup de gens qui vont procéder de cette façon-là.

(16 h 20)

Deuxièmement, les stages en entreprises, la formation école-entreprise, ça a un effet important, aussi. Combien de jeunes se disent: Aller aux études, ça donne quoi, ça, au juste? Est-ce que ça va me permettre de trouver un emploi? Il y en a plusieurs qui n'y croient pas. Alors que la formation ou la collaboration, le partenariat école-entreprise va faire que les gens vont apprendre dans des entreprises réelles, en faisant des stages ou par l'alternance école-entreprise, puis vont se préparer davantage au marché du travail, et sachant aussi que les entreprises dans lesquelles ils font leurs stages ou font l'alternance travail-études elles-mêmes engagent des finissants, engagent des gens qui obtiennent leur qualification. Ça aussi, on pense que ça va avoir un effet considérable.

Vous savez, au Québec, on a fait des changements concernant des formules d'apprentissage, mais je me rappelle, à une époque, le premier emploi que j'ai fait quand j'ai fini mes études en économique, ça a été au bureau de planification du ministère de la Jeunesse, où le Québec, à ce moment-là, était le numéro un au Canada dans la formation professionnelle, numéro un, à tel point que le fédéral donnait des sommes d'argent considérables à l'Ontario, en 1962, 212 000 000 $ à l'Ontario, 12 000 000 $ au Québec, pour permettre à l'Ontario de rattraper le Québec. Il a été une époque où le Québec était bon en formation professionnelle. On a eu des changements importants avec le rapport Parent, on a mis tout le monde ensemble, on a aboli les écoles d'art et métiers et, finalement, on en est arrivé à ne pas très valoriser les gens qui étaient en formation professionnelle. Résultat, bien, il y a beaucoup de gens qui ont quitté.

On veut changer cette façon de voir les choses, mais, en même temps, ne pas revenir non plus vers des créneaux qui faisaient que les gens entraient dans des culs-de-sac, c'est-à-dire en permettant à des gens de cheminer en formation professionnelle et de continuer, s'ils le souhaitent, par cette voie plus pratique, si on veut, d'apprentissage ou d'apprendre. Il n'y a pas de...

M. Ouimet: ...la formation professionnelle...

M. Garon: Attendez un peu, laissez-moi finir. Je veux...

M. Ouimet: C'est long, et vous ne répondez jamais à la question. C'est ça...

M. Garon: Bien oui, je réponds. Écoutez, vous me faites penser à un avocat, en cour, qui questionne un témoin et qui voudrait qu'il lui dise ce pour quoi il le questionne. Moi, ce que vous voulez, vous voudriez avoir une réponse. Bien, vous n'avez pas, peut-être, la réponse que vous vouliez avoir...

M. Ouimet: Non. Je veux avoir une réponse, point.

M. Garon: Bon. Alors, je vous en donne une réponse sur la formation professionnelle.

Deuxièmement, je veux parler des nouvelles technologies. Moi, quand je suis arrivé au ministère, je ne l'ai pas pris sous bénéfice d'inventaire. On était les derniers au Canada dans les nouvelles technologies de l'information et de la communication, puisqu'on avait un ordinateur, dans nos écoles, pour 21 élèves, et, en plus, on dit que le parc est désuet, et ça, ce n'est pas moi qui le dis, c'est dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation.

Actuellement, j'ai dit qu'il y aurait une conférence socioéconomique, non pas pour placoter, pour dire de quelle façon on va rattraper notre retard et, au contraire, devenir les premiers au Canada, se comparer aux meilleurs en Amérique du Nord, si vous voulez. Et je vous l'ai dit, au cours de cette commission parlementaire là, qu'il y aurait une conférence socioéconomique là-dessus. On va préparer un document de base avec les différents partenaires, pour leur dire: Bon, voici l'état de la situation, voici les objectifs que nous pensons nécessaires. Comment chacun, là-dedans, peut s'impliquer et jouer un rôle là-dedans pour que ça marche de la façon la mieux possible pour qu'on fasse des consensus pour que, tous ensemble, on s'en aille dans cette direction-là? Ça en est une deuxième.

Et, au cas où vous ne seriez pas au courant, les technologies de l'information, d'après les renseignements que j'ai, on me dit que ces nouvelles technologies là ont pour effet, aussi, de contrer le décrochage pour plusieurs qui s'intéressent à ces questions et qui souhaitent utiliser cette forme de moyens de communication pour apprendre et s'exprimer. Ça en fascine plusieurs. D'ailleurs, vous voyez souvent qu'il y a des gens dans l'école traditionnelle qui sont meilleurs au Nintendo qu'ils ne le sont dans leur façon d'apprendre et qui aiment mieux d'autres façons.

Alors, moi aussi, je pense qu'il faut faire en sorte de créer une école qui convienne à différents types de personnes, différents types de jeunes, avec des goûts différents, des aptitudes différentes, des ambitions différentes, sans essayer de les envoyer dans un canal en disant: Vous allez tous passer par là. Moi, je ne suis pas un partisan de la méthode Mao, le même habit pour tout le monde. Alors, comme le premier ministre a dit: On va arrêter de faire du mur-à-mur et on va faire du sur mesure. Ça adonne bien, moi, je suis 100 % pour le sur mesure, et je pense qu'on doit aller dans cette direction-là.

M. Ouimet: Alors, ce sont les trois réponses, là: formation professionnelle, nouvelles technologies et le troisième volet, une école taillée sur pièce pour chacun des élèves.

M. Garon: Je n'ai pas dit une école...

M. Ouimet: C'est comme ça qu'on va contrer le décrochage au Québec, M. le ministre?

M. Garon: Non, non. J'ai dit: Des avenues plus diversifiées qui correspondent à des jeunes qui ont des aptitudes, et des goûts, et des ambitions différentes.

M. Ouimet: Et c'est comme ça qu'on va contrer le décrochage scolaire au Québec?

M. Garon: Je pense que oui, en partie, pas seulement, mais c'est... Pour les premiers six mois, c'est déjà un départ. Et je vais vous dire plus que ça.

M. Ouimet: J'espère.

M. Garon: Oui, j'oubliais la dernière.

M. Ouimet: J'espère, et c'est inquiétant.

M. Garon: La dernière, au lieu de faire en sorte que toutes les initiatives viennent d'en haut, parce que les gens parlent souvent de la décentralisation puis des commissions scolaires, vous remarquez qu'on a dit aux commissions scolaires, j'ai dit aussi: «C'est dans cet esprit que, pour ma part, j'accueillerai avec ouverture les demandes provenant de commissions scolaires qui voudraient adapter leur offre de services aux besoins particuliers de leur clientèle.» Alors, dans le volet de la formation professionnelle, l'initiative doit venir des commissions scolaires, des écoles qui doivent faire des partenariats avec les entreprises de leur milieu.

M. Ouimet: Ça, c'est le plan Pagé, ça.

M. Garon: Non. Le plan Pagé, je ne l'ai pas... Je vais vous dire bien franchement...

M. Ouimet: C'était ça, là. Essentiellement, le plan sur la réussite éducative, c'était ça.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Là, est-ce que vous l'avez reconduit, cette année?

M. Garon: On l'a laissé là.

M. Ouimet: Vous l'avez reconduit?

M. Garon: On l'a laissé...

M. Ouimet: Vous l'avez décrié, le 26 octobre, mais vous avez jugé bon, au 1er avril, de le reconduire?

M. Garon: C'est la dernière année, je pense, du plan. C'était un plan de tant d'années. C'est la quatrième, l'avant-dernière année?

Une voix: C'est la quatrième.

M. Garon: Sur combien d'années?

M. Ouimet: Il n'y avait pas d'années fixées. Il n'y avait pas d'années fixées, M. le ministre.

M. Garon: Mais on va l'évaluer.

M. Ouimet: Bien, il n'était pas bon le 26 octobre. Vous avez dit...

M. Garon: Ce n'est pas ça, j'ai dit qu'il n'avait pas donné de résultats.

M. Ouimet: Non, non, non. Vous avez dit: Il n'a pas... Bien, justement, il n'a pas donné des résultats.

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Vous êtes là maintenant pour faire en sorte que les plans que vous allez mettre de l'avant vont donner des résultats.

Je vous pose la question aujourd'hui: Quels plans d'action avez-vous à mettre de l'avant?

M. Garon: Je vous l'ai dit...

M. Ouimet: Et vous me dites: Je vais reconduire le plan...

M. Garon: Non, non, ce n'est pas la... Non, non.

M. Ouimet: ...qui n'a pas donné de résultats, puis qui vient de l'ancien gouvernement.

M. Garon: Je vais vous dire, là, ce n'est pas avec le Lait-école, que les commissions scolaires peuvent faire ce qu'elles veulent avec, comprenez-vous, qu'on va faire le raccrochage, tu sais.

M. Ouimet: On ne parle pas du Lait-école, là, on parle d'un plan pour lutter contre...

M. Garon: Non, mais ça en faisait partie, tu sais. On donne de l'argent pour le Lait-école, puis, si on ne veut pas le donner pour le Lait-école, ça fait pareil, tu sais. Alors, ça faisait partie du plan Pagé, n'oublions pas ça, là. On avait pris un plan... Si le Lait-école était bon, pourquoi l'avoir diminué, le programme qu'on avait mis en place? Il était rendu, à la fin, à 5 000 000 $, alors qu'on avait couvert tout le Québec. Puis le décrochage n'est pas réservé à quelques régions, il y a du décrochage à la grandeur du Québec. Alors, si le Lait-école était bon, pourquoi l'avoir diminué?

M. Ouimet: Oui, mais vous, là...

M. Garon: Bien, moi, je ne suis pas contre le Lait-école, c'est moi qui l'ai mis en place, partout au Québec.

M. Ouimet: ...vous avez décrié le plan de l'ancien ministre Pagé. Parfait! Vous proposez quoi, aujourd'hui?

M. Garon: Je viens de vous le dire, là.

M. Ouimet: Ce n'est pas ce que vous venez de me dire là, ce n'est pas ça.

M. Garon: Je vais vous dire les...

M. Ouimet: Si c'est ça, ça n'a pas de sacré bon sens. C'est inquiétant.

M. Garon: O.K. Vous avez...

M. Ouimet: Vous n'avez pas de discours sur le décrochage scolaire.

M. Garon: Vous avez le droit de penser ça.

M. Ouimet: Mais je vous pose la question: Qu'est-ce que vous allez faire concrètement pour contrer le décrochage scolaire au Québec? C'est le défi le plus important qui confronte votre ministère.

M. Garon: Oui. Puis? Votre bilan, vous, après votre départ, à la CECM, a paru le 20 octobre 1994. Le rapport de la CECM évalue le décrochage à 46 % au secondaire.

M. Ouimet: M. le ministre, vous êtes ministre de l'Éducation. C'est vous qui êtes là.

M. Garon: M. le Président, j'ai... Oui, oui, oui.

M. Ouimet: On vous pose des questions: Vous, qu'est-ce que vous allez faire?

M. Garon: M. le Président, sa question, je vais vous le dire, là, d'où je pars. Je pars d'où vous avez quitté. Vous avez quitté, vous avez réussi à rendre ça à 46 % de décrochage au secondaire. Si votre ambition, c'était 100 %, vous avez réussi à moitié.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Parfait! Mais on parle de vous, là...

M. Garon: Bien là, on part de là. C'était 46 %.

M. Ouimet: C'est vous qui êtes là, M. le ministre. Vous êtes responsable pas d'une commission scolaire, vous êtes responsable...

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: ...de toutes les commissions scolaires, de toutes les écoles de la province de Québec. Qu'est-ce que vous allez faire?

M. Garon: Je vais faire comme j'ai fait dans le secteur agroalimentaire. Je visais l'autosuffisance, et, quand j'étais là, ça a passé de 46 % à 75 % dans quelques années. Je vais faire la même chose, vous allez voir que ça va marcher.

M. Ouimet: Oui, mais comment? On vous pose des questions: Comment?

M. Garon: En faisant en sorte que tout le monde travaille, puis soit intéressé, puis que ça ne soit pas sur les «brakes» partout.

M. Ouimet: C'est de même que vous allez réussir à contrer le décrochage scolaire au Québec?

M. Garon: Oui, oui, avec l'enthousiasme, avec le dynamisme.

M. Ouimet: Ah, mon Dieu!

M. Garon: Oui.

M. Ouimet: Avec de la bonne volonté?

M. Garon: Ça compte pour beaucoup.

M. Ouimet: Avec une école du bonheur?

M. Garon: Oui. Avec l'école du bonheur, oui.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, veuillez poser des questions. Et, tant et aussi longtemps que vous poserez des questions, je vous laisserai aller. Mais posez des questions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Alors, j'étais en train, M. le Président...

M. Benoit: M. le Président, est-ce qu'on pourrait avoir des réponses? J'entends des discours ici, et je n'ai pas de réponses à des questions précises que le député a posées, M. le Président.

Le Président (M. Facal): M. Orford...

Des voix: Ha, ha, ha!

(16 h 30)

Le Président (M. Facal): M. le député d'Orford, premièrement, je ne vous ai pas donné le droit de parole. Deuxièmement, vous savez très bien que vous n'avez pratiquement aucun recours si la réponse du ministre ne vous satisfait pas. Vous posez votre question, il répond ce qu'il veut.

M. Benoit: On va insister sur les questions, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Fort bien, fort bien, mais, quand la même question aura été posée six fois de suite, je passerai la parole au député de Maskinongé qui, lui, attend patiemment. Tant et aussi longtemps que nous serons sur le décrochage et que je sentirai que le député de Marquette veut faire avancer la discussion, il poursuivra. Sitôt que je sentirai qu'il commence à radoter et à poser six fois la même question, nous passerons au prochain intervenant. C'est clair?

M. Benoit: Le but des crédits, M. le Président, c'est d'obtenir des questions... c'est d'obtenir des réponses. Mon confrère a posé des questions précises et il s'attend à avoir des réponses précises, M. le Président.

Le Président (M. Facal): La parole est au député de Marquette, pas au député d'Orford. Si vous voulez parler, je vous mets sur la liste et votre tour viendra en temps et lieu.

M. Benoit: Très bien, M. le Président.

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, j'ai posé un ensemble de questions au ministre. Je pense que tout le monde dans cette salle convient de l'importance du sujet et je pense qu'on est en droit de s'attendre à un peu plus du ministre de l'Éducation qui est là depuis sept mois, qui a décrié un programme. Parfait! Il veut le mettre au rancart, il veut le mettre de côté, ça n'a pas donné les résultats escomptés, d'après lui. Parfait! Qu'est-ce qu'il a à dire? Qu'est-ce qu'il a à proposer? Quelles mesures concrètes met-il de l'avant pour tenter de régler ce problème-là?

M. Garon: Ce que j'ai dit...

M. Ouimet: Quels pas fait-il?

M. Garon: Est-ce que c'est à moi la parole, M. le Président?

Le Président (M. Facal): M. le ministre, oui.

M. Garon: Bon. Je n'ai pas dit que les mesures de M. Pagé n'étaient pas bonnes pour quoi que ce soit. J'ai dit qu'elles n'avaient pas d'effet sur le décrochage scolaire. C'est ça que j'ai dit, et vous reprenez mes paroles... Parce que, là, moi, je comprends... Je me rappelle mon premier cours de statistiques, mon professeur m'avait dit: «Figures cannot lie but liars can figure.» Alors, ça, je comprends qu'on peut faire dire ce qu'on veut aux données.

M. Benoit: Ce n'est pas une réponse, ça. C'est un discours.

M. Garon: Moi, ce que j'ai dit, c'est que M. Pagé, dans son plan, il a des bonnes... Le Lait-école, je le dis, je ne suis pas contre, c'est moi qui l'ai mis en place, mais, lui, il l'a réduit.

M. Benoit: M. le Président, on ne parle pas du Lait-école, on parle du décrochage, une question précise d'un député, M. le Président.

Le Président (M. Facal): M. le député d'Orford, M. le député d'Orford, malheureusement, je constate qu'en raison de votre absence depuis trois jours vous avez de la difficulté à vous insérer dans le climat de bonne entente et de cordialité qui est le nôtre depuis une quinzaine d'heures. Pour vous aider à vous y insérer, je vais vous faire la lecture, premièrement, de l'article 36 que vous connaissez, étant bien plus ancien que moi, mais, les vertus de la répétition, je vous le relis: «Aucun député ne peut interrompre celui qui a la parole, sauf pour faire un rappel au règlement, signaler le défaut de quorum ou attirer l'attention sur une violation de droit ou de privilège.» Comme votre intervention ne tombait dans aucune des ces trois catégories-là, vous étiez parfaitement hors d'ordre.

M. Benoit: Je n'avais pas terminé, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Mais, en plus, ce n'est pas assez, j'ai aussi envie de vous lire l'article 81, intitulé «Réponse insatisfaisante», et qui dit: «Aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante.» Je vous relirai ces deux articles tant et aussi longtemps qu'il sera nécessaire et plus je prendrai de temps à vous les lire, plus vous enlèverez du temps à votre collègue de Marquette. M. le député de Marquette.

M. Garon: M. le Président, j'étais en train de répondre quand le député m'a interrompu.

M. Benoit: Je n'avais pas terminé, M. le Président. Je n'avais pas terminé.

Le Président (M. Facal): Premièrement, ce n'est pas votre tour de parole et, en plus, vous n'avez même pas fait un appel au règlement pour justifier votre droit de parole. Alors, premièrement, vous allez vous taire; deuxièmement, le ministre va reprendre la parole et, ensuite, le député de Marquette, lui, reviendra. Si vous voulez intervenir, il me fera plaisir de vous inscrire sur la liste au tour qui sera le vôtre.

M. Benoit: M. le Président, vous avez interpellé un député, lui demandant de poser des questions précises. Je vous interpelle...je vous interpelle...

Le Président (M. Facal): Est-ce que...

M. Benoit: Laissez-moi finir. Je vous interpelle de la même façon, M. le Président, en vous demandant d'inviter le ministre...

Le Président (M. Facal): Est-ce que c'est une question de règlement?

M. Benoit: ...en vous invitant à demander au ministre de répondre à des questions de façon précise. Il est après nous parler du lait...

Le Président (M. Facal): Est-ce que c'est une question de règlement?

M. Benoit: ...M. le Président, alors que nous parlons de décrochage. Alors que nous parlons de décrochage, il nous parle du lait, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Premièrement, M. le secrétaire, pourriez-vous, s'il vous plaît, me trouver le numéro de l'article qui réfère au rappel à l'ordre. Je pense que je vais bientôt devoir l'utiliser à l'encontre du député d'Orford. Deuxièmement, M. le député d'Orford... C'est étonnant comme certaines personnes nous rendent moins patients que d'autres. Deuxièmement, M. le député d'Orford, c'est moi, et moi seul, qui vais juger de la pertinence des réponses du ministre et qui vais lui demander de revenir dans le droit chemin, s'il le faut. Si, vous, vous voulez lui poser des questions, vous attendrez votre tour. En ce moment...

M. Benoit: En attendant que vous le fassiez, M. le Président, il y a des questions précises qui ont été posées par mon confrère.

Le Président (M. Facal): En ce moment, j'ai le député de Marquette, à qui nous donnons toute la glace pour faire ses huit, ses boucles et ses pirouettes. Ensuite, nous passerons au député de Maskinongé et, ensuite, quiconque voudra prendre la parole s'inscrira à son tour. M. le ministre, je crois que vous étiez en train d'essayer de répondre à la question du député de Marquette qui porte sur le décrochage. J'aimerais ça qu'on revienne aux choses essentielles.

M. Garon: J'aimerais rappeler au député d'Orford quelque chose de très important, parce que je l'ai cité ce matin, sans le nommer, et, maintenant qu'il est là, j'aimerais ça lui parler directement. C'est lui qui était président de la fédération libérale du Québec qui a voulu adopter le «bonheur national brut». Et, là, c'est Gilles Lesage, du Devoir , qui a écrit: «Le député d'Orford préconise comme programme pour le Parti libéral le programme du député de Lévis.» Alors, quand je dis aujourd'hui que c'est important que, dans une école, les enfants soient heureux...

M. Benoit: M. le Président, je n'ai jamais été président de la fédération libérale. J'ai parlé du «bonheur brut» en environnement. Alors, le ministre est tout mélangé, M. le Président.

Le Président (M. Facal): Merci, M. le député d'Orford. Maintenant, M. le ministre, pourrions-nous revenir au décrochage scolaire? Ha, ha, ha!

M. Garon: Le décrochage scolaire, bien, j'étais dedans. J'étais dedans. Une école où les enfants sont heureux ne favorise pas le décrochage. Une école dans laquelle les enfants ne se sentent pas heureux, ils ont le goût de s'en aller, de ne pas rester là. Une école qu'ils sentent inutile, à tort ou à raison, ils ont tendance à s'en aller.

Moi, ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est qu'il y a différentes façons d'apprendre. Les gens n'apprennent pas tous sur un même modèle. Il y a différentes façons d'apprendre. Vous savez que l'école, ça existe depuis un certain nombre d'années. Il n'y en a pas toujours eu, des écoles. Il y a eu un temps où les gens apprenaient en accompagnant quelqu'un qui savait. Même les avocats – je pense que ça pourrait être utile même pour les avocats – ils apprenaient en suivant un avocat pendant 15 ans, 20 ans, en lui apportant le café au début, sans doute, comme clerc, mais, à un moment donné, à force de suivre l'avocat, ils devenaient eux-mêmes avocats. Après ça, on en est venu à faire des écoles. Ça a été vrai pour les menuisiers, ça a été vrai dans tous les domaines, au fond. Mais, aujourd'hui, on en est venu avec les années à faire une école très théorique où il y a des gens qui se sentent à l'aise, mais où il y en a d'autres qui se sentent mal à l'aise.

J'ai dit ce matin que, à l'Université Laval – c'est quand même des gens qui ont passé à travers le préscolaire, le primaire, le secondaire et le collégial – à l'Université Laval, 74 %, selon une enquête récente – je n'ai rien à y faire, je n'ai pas commandité cette étude-là – 74 % des étudiants souhaitent des études plus pratiques, souhaitent une meilleure connexion avec le marché du travail où ils vont aller. Alors, j'ai dit: Bon, je pense qu'il y a des gens qui font différents cheminements, qui sont heureux dans différents types d'écoles. Il y a différentes façons de faire des apprentissages. J'ai dit: Bon, on va en développer qui correspondent...

Et je vous dis que plusieurs personnes disent la même chose. Je n'ai pas dit que le plan Pagé était mauvais en soi. J'ai dit qu'il ne donnait pas de résultats sur le plan du décrochage. Je n'ai pas dit... Je vais finir...

M. Ouimet: Qu'allez-vous faire, vous, pour donner des résultats? C'est ça qui est la question.

M. Garon: M. le Président... M. le Président, on n'est pas, dans une commission parlementaire, en cour, devant un témoin que le procureur a le droit d'interroger de façon agressive. Je ne suis coupable de rien, moi, ici.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Je viens simplement donner des explications. Peut-être que la pratique du député de Marquette fait en sorte qu'il est habitué d'interroger de façon agressive, mais ce n'est pas le rôle d'un parlementaire. Ici, moi, je dis simplement qu'on a dit: Bon, on va trouver d'autres façons.

(16 h 40)

Un engagement important du Parti québécois au cours de la campagne électorale, c'était la formation professionnelle. On a fait en sorte de mettre des choses en place, et il va y en avoir d'autres, mais, dans quelques mois... On a dit: Bon, pour septembre 1995... Il va y avoir d'autres années scolaires, mais, pour septembre 1995, on a dit: Il y a un programme qui va se mettre en application, auquel on croit beaucoup, et qui repose essentiellement sur l'initiative des commissions scolaires. C'est les commissions scolaires qui vont faire des propositions, en accord avec des entreprises du milieu, avec les enseignants et avec leurs écoles. Alors, on dit aux gens: Vous voulez pouvoir jouer un rôle dans votre développement régional? Allez-y. Proposez-nous des choses, et on va regarder par rapport aux standards si c'est possible, puis on va vous aider à le rendre possible. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on a mis à l'ouvrage tout le monde, mais dans une formation plus concrète, plus pratique, qui peut satisfaire des jeunes qui cherchent à se former de façon plus réaliste, plus pratique, immédiatement. Et ça va être fait dans des endroits...

J'aime bien, par exemple, l'exemple que donne souvent M. Lanoux, quand il parle de celui qui veut changer – comment il appelle ça – des pièces d'automobile, là, des silencieux... Non, pas les silencieux. C'est quoi, son exemple qu'il donne tout le temps? Non, ce n'est pas des silencieux, ce n'est pas des «mufflers» non plus...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: ...mais c'est... en tout cas, une pièce d'automobile... les poseurs de freins chez Midas, c'est ça. Les poseurs de freins. Alors, quelqu'un qui dit: Moi, j'aimerais faire un travail, il peut être formé chez Midas, il peut être formé avec des gens en collaboration avec l'école, puis il va devenir qualifié là-dedans. Évidemment, plus tard, s'il veut se qualifier dans les silencieux en plus, bien, ça ne sera pas bloqué, il va pouvoir continuer et se former, puis, à un moment donné, il pourra peut-être être formé dans toute l'automobile au complet, s'il le veut, mais ça va être possible. Parce que ces emplois-là existent. Quand vous changez des freins, ce n'est pas nécessaire de connaître la pression dans les valves du moteur. Ce n'est pas nécessaire. Alors, je dis: Il y a des emplois pour les gens, puis il y a des gens qui veulent se former puis qui ne veulent pas nécessairement aller aux études de façon prolongée pour pouvoir remplir un travail qui est faisable sans avoir fait un cours trop long, dans leur esprit. Alors, on dit: Bon, on peut raccrocher des gens à l'école par la formation professionnelle tout en maintenant des créneaux de formation générale pour permettre les options à venir ouvertes. C'est ça, l'idée. Alors, moi, je pense, je suis convaincu que ça correspond à des besoins.

Il y a également... on dit le magasinage, si on veut, des jeunes qui veulent aller dans une formation plus pratique de formation professionnelle, mais qui ne savent pas exactement ce qu'ils veulent faire. Maintenant, on va permettre un certain magasinage. C'est ça qu'on dit. Pourquoi? Moi, je me rappelle, quand j'ai fait mon cours classique, on finissait à 20 ans, dans le temps, puis il y en a un paquet qui hésitaient; ils ne savaient pas au juste quel ruban prendre, dans le temps, puis ils avaient 20 ans. Aujourd'hui, qu'un jeune, après le secondaire III, sache qu'il n'aime pas les études théoriques, mais qu'il ne sache pas en même temps exactement ce qu'il voudrait faire sur le plan pratique, bien, on dit: On va rendre ça possible. Puis ça correspond à des besoins réels de gens. Je pense qu'il faut avoir été assez en contact avec la population pour le savoir.

Moi, je vais vous dire une chose, je suis un de ceux qui, dans mon comté, ont aidé des gens à passer par VIA, qui est un organisme pour les handicapés. Il y a des gens qui y sont passés puis, après ça, qui ont été un bout de temps chez VIA, ils ont pu aller ailleurs puis ils ont continué. Pourquoi? Parce qu'ils avaient un handicap, puis ça a fait leur affaire, puis... J'en connais plusieurs. Dans le nombre d'années que j'ai été député, j'en ai rencontré plusieurs. Ils ont appris concrètement. Je peux vous nommer aussi un atelier où on enseigne à des jeunes qui font des travaux répétitifs, mais ils sont bons là-dedans. Ils sont contents de faire ça. Autrement, ils ne feraient rien puis ils seraient sur le bien-être social, s'ils n'apprenaient pas là.

Alors, il y a différentes choses possibles avec des gens qui ont des goûts différents, qui ont des aptitudes différentes puis qui ont des potentiels différents. Respectons donc ça. Respectons donc ça. Je suis un de ceux, à part ça, moi, qui étaient au ministère de l'Agriculture, qui ont fait engager des prisonniers à l'Île-d'Orléans – c'était plus difficile à se sauver, remarquez – qui les ont fait travailler. Ça faisait l'affaire des cultivateurs puis ça faisait l'affaire des prisonniers également. Quand aujourd'hui on fait venir des gens du Mexique, par exemple, pour ramasser des fraises parce qu'on dit qu'on ne trouve pas de gens pour ramasser des fraises, c'est drôle, moi, quand je m'en suis occupé, il y en avait des gens qui ramassaient des fraises. Mais il faut vouloir travailler avec la main-d'oeuvre d'ici et faire en sorte qu'elle puisse travailler. Il faut avoir une volonté dans ce sens-là.

D'abord, je vais vous dire une chose, je l'ai, la volonté. Le premier ministre l'a, la volonté, puis les députés du Parti québécois l'ont. Puis je vais vous dire, le nombre de personnes qui me disent bravo, quand je prends l'ascenseur pour monter ou descendre, au ministère, à l'édifice G, je pense qu'il y en a un paquet dans le ministère qui sont d'accord aussi. Alors, je pense que c'est une voie importante.

Dans les nouvelles technologies de l'information, je suis persuadé qu'il y a un potentiel considérable là-dedans, considérable là-dedans, parce qu'il y a des gens qui aiment ça, ce genre d'appareils là, qui aiment ça, qui sont à l'aise là-dedans, puis il y a des gens, quand ils voient un livre, ils deviennent malades, comprenez-vous. Alors, pourquoi ne pas faire apprendre aux gens de différentes façons?

Quand vous avez, par exemple... Je vais vous donner un exemple: un programme sur l'alphabétisation. Parce qu'il y a plusieurs centaines de milliers de personnes au Québec qui ne savent pas lire ni écrire. On pourrait peut-être bien s'intéresser à ces gens-là aussi. Je comprends qu'on en rencontre moins sur le bord du lac Memphrémagog, mais il y a des gens qui ne savent pas lire ni écrire, puis, pour différentes raisons, plusieurs raisons très variées, j'ai dit: On va s'en occuper. Parce que je considère que c'est un handicap, en 1995, de ne pas savoir lire ou écrire de façon fonctionnelle. On a dit: Le réseau régulier s'en occupe; on va permettre aussi à des groupes populaires, qui ont une approche différente, de s'en occuper également. Alors, ça aussi, ça va contribuer à éduquer, à former des gens qui ont un handicap important parce qu'ils sont rendus des adultes et ils ne savent pas lire ni écrire.

Alors, le problème, au Québec, est aussi en grande partie... Ce n'est pas seulement un problème de décrochage, mais un problème de non-diplomation. Il y en a qui n'en ont pas, de diplôme. C'est très important, ça aussi. Puis, ça aussi, j'en ai dit un mot dans la lettre que nous avons écrite, quand je dis: «Près de 95 % des élèves de 16 ans et 90 % des élèves de 17 ans sont toujours aux études. Alors qu'à 19 ans 18 % des jeunes ont abandonné l'école secondaire sans avoir obtenu de diplôme, 17 % y demeurent dans l'espoir de l'obtenir.»

J'ai entendu, ce matin, le député de Matane. Je l'ai entendu très bien quand il a parlé, ce matin, des genres de qualifications qu'on pourrait obtenir. Au lieu d'avoir des examens chaque année, il pourrait y avoir une façon de faire un contrôle d'une façon différente. Ça aussi, je pense que ça doit être analysé, puis ça peut être des sujets d'états généraux. Essentiellement, c'est qu'il ne faut pas décourager les gens des études. Il faut, au contraire, les encourager, mais faire en sorte qu'ils puissent mieux exploiter leur potentiel. Les gens sont différents. Il n'y a pas un seul canal.

Je pense que la réforme Parent a eu un défaut. Personnellement, je pense qu'elle a eu un défaut. On était les premiers au Canada en formation professionnelle; aujourd'hui, il n'y a plus grand monde là-dedans. Mais, savez-vous, quand vous regardez... Regardez ce qui se passe en Allemagne puis au Japon. Ça se passe avec des gens, avec des techniciens, des gens de formation professionnelle avec une base solide, avec une main-d'oeuvre solide, comprenez-vous. On en a besoin. Alors, c'est évident que, si on encourage tout le monde à devenir ingénieur en laissant croire à quelqu'un qu'il est un raté s'il ne va pas à l'université, on ne s'en va nulle part avec ça. Il y a des gens qui vont aller à l'université... Bien, moi, j'ai un menuisier qui demeure pas loin de chez moi. Je vais vous dire une chose, il gagne mieux sa vie que peut-être 75 % des gens qui sont passés par l'université parce que c'est un excellent menuisier.

Il va falloir valoriser les gens, dans une société, qui font un travail qui est important. Il va falloir aussi valoriser ces formations-là plutôt que d'essayer de les dévaloriser. Et, moi, je pense que la motivation, c'est très important. Quand quelqu'un abandonne, pourquoi il abandonne? Parce qu'il n'a plus de motivation, essentiellement. Essentiellement, quand quelqu'un abandonne, c'est parce qu'il n'en a plus, de motivation. Puis, quand quelqu'un est motivé, c'est toute la différence du monde. On le voit, actuellement. On le voit en Chambre, par exemple, que les députés du Parti québécois sont plus motivés.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: On le voit. Puis je regarde les députés libéraux, ils n'ont pas l'air motivés, ils ont l'air plutôt écoeurés.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Bien, qu'est-ce que vous voulez? Bien, là, je suis persuadé qu'avec des députés motivés on fait plus de choses qu'avec des députés qui ne sont pas motivés. Et qu'est-ce qui est la cause de la motivation? Je suis persuadé que c'est d'être bien ou d'être pas bien dans sa peau. Et on est bien ou pas bien dans sa peau selon que ce qu'on fait nous rend heureux ou ne nous rend pas heureux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Et, moi, je pense actuellement que, dans les écoles, c'est la même chose. C'est pour ça que je dis: Dans les écoles, il faut rendre les gens heureux, qu'ils se sentent le plus heureux, parce qu'ils sentent que c'est utile, ce qu'ils font là, puis qu'ils apprennent des choses qui vont leur servir. C'est pour ça, je pense, qu'il faut avoir plusieurs avenues qui correspondent à plusieurs types de personnes différentes.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.

M. Ouimet: Juste un instant, M. le Président. Je n'avais pas terminé.

Le Président (M. Facal): Sur le décrochage?

M. Ouimet: Oui, sur le décrochage.

Le Président (M. Facal): Une dernière, peut-être, parce que votre...

M. Ouimet: Un dernier commentaire...

Le Président (M. Facal): Un dernier commentaire. Fort bien.

M. Ouimet: ...qui m'apparaît important, et, par la suite, je vais céder la parole au député de Maskinongé.

Le Président (M. Facal): Très bien.

(16 h 50)

M. Ouimet: Le ministre de l'Éducation, depuis le début des crédits, nous a démontré son habilité parlementaire à meubler du temps et à occuper du temps. Aussitôt qu'on approche des dossiers, des questions d'importance pour son ministère, on n'arrive pas à avoir l'ombre d'une seule orientation. Je suis personnellement scandalisé de voir que, sur le dossier du décrochage scolaire, qui est le dossier le plus important qui confronte son ministère, il n'ait pas réussi à nous dire une seule chose intelligente cet après-midi sur ce dossier.

Une voix: Oh! Oh!

M. Ouimet: Je pense que c'est toute la jeunesse qui va payer pour ça et je vous dis: C'est honteux, M. le ministre. Vous avez réussi à meubler du temps, mais vous n'avez dit rien de concret. Je ne sais même pas si vous connaissez, si vous comprenez la dynamique et la problématique du décrochage scolaire, avec les réponses que vous nous avez données aujourd'hui. Je suis prêt à céder la parole.

Le Président (M. Facal): M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, je suis obligé de reconnaître que le député de Marquette connaît ça beaucoup parce que c'est lui qui l'a sans doute le plus augmenté au Québec, quand il était président de la CECM. Et je vais vous dire que, nous, nos solutions ne passeront pas par l'apprentissage du flamenco.

Le Président (M. Facal): M. le député de Maskinongé.

M. Désilets: Bon. Avant de passer...

Le Président (M. Facal): Oui, oui, c'est à vous.

M. Désilets: Oui, c'est à moi? Merci.

Le Président (M. Facal): Ça vous étonne? Ha, ha, ha!

M. Désilets: Merci, M. le Président. Oui, ça m'étonne que ce soit...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Désilets: Mais je peux vous dire quand même, concernant le décrochage, je veux dire, que, le député de Marquette, quand même, il connaît ça parce qu'il a fait un voyage en Europe, à coups de 22, justement sur le décrochage. Ça a coûté autour d'une quarantaine de mille, 40 000 $, 45 000 $ là-dessus. En tout cas, c'est un dossier qu'il connaît.

Changement de sujet, M. le... M. le...

Une voix: Président.


Chargés de cours et droits de retraite

M. Désilets: ...Président, pour aller au ministre: le personnel. Il semblerait qu'à peu près, approximativement le tiers du personnel de l'enseignement a un titre d'occasionnel ou un statut précaire. Sachant qu'on bâtit un pays ou qu'on ne bâtit, là, rien de solide avec du temporaire – pour ma part, c'est important de mettre des assises qui sont sérieuses – vous, comme ministre, comment voyez-vous l'amélioration du sort du personnel de l'enseignement? Comme première question.

Comme deuxième, j'attaque plus la retraite en fonction encore du personnel, ceux qui sont permanents maintenant. Il y en a une gang qui sont temporaires, mais qui vont devenir permanents un jour, mais avec une retraite aussi. C'est que les gens arrivent, ils ont une augmentation de tâche, ils ont un taux de désappropriation du système scolaire qui fait qu'il y a un désintéressement de la profession. Les profs se ramassent avec un «burn-out». Ils ont une fin de carrière pas agréable. Il y a un écoeurement aigu dans le système. Il n'y a pas grand-chose de mobilisant pour les préretraites dans l'enseignement et la retraite, pour plusieurs années, ceux qui reçoivent une retraite, la retraite, le montant qu'on met dans le RREGOP, c'est gelé depuis un bon bout de temps. Donc, les gens vont arriver à leur retraite avec un salaire encore plus bas, et puis, dans tout ce phénomène-là, on sait encore que les femmes vivent plus vieilles que les hommes, et puis les statistiques disent que c'est, encore une fois, les enseignantes qui vont faire les frais du gel des pensions, du montant qu'on donne au RREGOP. Le montant est gelé. Donc, avec les années, les augmentations des retraites ne sont pas là. Ça fait que tout ça fait...

Dans une question, finalement, si on résume un peu, les statuts précaires, qu'est-ce qu'on peut faire? Y a-t-il une mesure qui vient, face aux préretraites et à la retraite, qui peut arriver avec ça?

M. Garon: Disons que les statuts précaires... Et, comme j'allais dire tantôt, quand je donne mes explications, quand je pense au député de Marquette, je pense toujours à la phrase que me disait mon professeur au collège: Qui potest capere capiat – que celui qui peut comprendre comprenne. Le statut précaire, ça ne dépend pas vraiment du ministère, c'est-à-dire que, dans les universités, dans les collèges, l'engagement est fait par les instances. L'engagement est décentralisé, ce n'est pas le ministère qui engage les gens. Moi, je suis un de ceux, aussi, qui déplorent qu'on engage des gens... On devrait engager, à mon avis, plus de professeurs permanents. J'ai vu, par exemple, devant une commission sur l'avenir du Québec, le professeur, l'ex-professeur Moreau, qui a été 35 ans professeur à l'Université Laval, qui expliquait qu'est-ce qui se passait comme dynamique. Il disait: Au fond, qu'est-ce qui arrive, c'est que, là, le ministère de l'Éducation paie pour des professeurs à temps plein, paie pour des professeurs qui sont là. Le professeur est là, l'université l'incite à faire de la recherche, à prendre des contrats de recherche. S'il réussit à en prendre, il est trop occupé pour donner son enseignement et, finalement, on engage un chargé de cours pour le remplacer. Il disait, dans le fond: Qui paie pour ça? Ce sont les étudiants.

On se rend compte actuellement qu'au cours des années il y a de plus en plus de professeurs à statut précaire. Et est-ce que ça a été l'objet de la décentralisation? Moi, je ne pense pas que la décentralisation est nécessairement une religion parce que ça peut être bon, ça peut être mauvais. La décision est prise localement. Et, là-dedans, on ne peut pas intervenir facilement, et je ne pense pas que le ministère soit coupable du fait que les gens engagent des...

Il y a peut-être que le financement pourrait être fait sur d'autres bases. Est-ce qu'on doit aller jusque-là, de faire en sorte que maintenant la rémunération tienne compte du fait que les professeurs qui enseignent sont des professeurs réguliers, ou des professeurs à la leçon? Parce qu'on veut avoir des chargés de cours. C'est évident que ça ne coûte pas le même prix à l'université, mais il n'y a pas le même service non plus. Pas parce que le chargé de cours n'est pas bon, mais parce que lui est payé pour donner une heure de cours, il n'est pas payé pour rester là. Tandis qu'un professeur à l'université, je pense, de façon régulière, donne quatre cours par année. Je pense que c'est ça, le barème, d'après les conventions, quatre cours: deux cours à l'automne, deux cours à l'hiver, normalement. Ça peut varier. Alors, c'est évident qu'après ça, bien, il y a de la disponibilité aux étudiants normalement, pour rencontrer les étudiants. Celui qui est payé pour donner une leçon, une fois que sa leçon est donnée, il s'en va. Il n'est pas payé pour rester là. Et, s'il a juste son salaire de chargé de cours et qu'il reste là, il va vivre pauvrement, dans le fond.

Alors, je pense que ça dépend de la conception. Maintenant, comment doit-on s'ajuster par rapport à ça? Moi, je pense, dans le cadre des états généraux, que les étudiants vont venir dire qu'est-ce qu'ils en pensent. Ils vont venir dire comment ils voient les choses, ils vont venir dire qu'est-ce qu'ils souhaiteraient voir organisé de façon différente. Maintenant, les institutions vont y répondre ou n'y répondront pas. Est-ce qu'à ce moment-là le ministère doit jouer un rôle, avoir des conditions ou avoir des méthodes de financement différentes? C'est un peu pour ça, moi, que je disais qu'un peu de concurrence, ça peut faciliter les choses. Pourquoi? Parce que, je le disais pour les écoles primaires et secondaires, si on donne plus de choix, pas parce que les gens vont changer d'école, parce que, s'ils ont plus de choix, ils vont avoir le choix de changer d'école et, parce qu'ils ont le choix, souvent ça fait en sorte que, quand votre client n'est pas captif, ça vous oblige à essayer de le retenir un peu plus.

Alors, moi, je pense que, s'il y a une approche, par exemple, dans les écoles qui sont privées au Québec, qui sont publiques, pardon, plus en se préoccupant des besoins des gens, pour correspondre plus à leurs besoins, il va y avoir un incitatif parce que la clientèle ne sera pas captive. Et ça, c'est une question d'organisation. Je pense, par exemple, au député de Matane, quand il me parle de son problème de Matane où la commission scolaire veut prendre l'école pour faire le siège social et tasser les enfants qui sont très heureux dans leur école. Je vois le député de Groulx qui dit: La commission scolaire veut tasser une école de quartier pour envoyer les enfants ailleurs, les disséminant dans des écoles, parce qu'elle voudrait former une école de musique dans une école de quartier où les parents sont très contents d'avoir leur école de quartier parce qu'elle est en plein milieu de leur quartier. Autrement, ils vont être obligés de se promener, d'aller beaucoup plus loin. Bien, c'est évident que ça pose des problèmes.

Mais, si les gens ont la possibilité de choisir davantage ou d'aller ailleurs, si on ne s'en occupe pas suffisamment, je pense que ça donne une marge de manoeuvre, et qui oblige à s'en occuper davantage. Alors, ce n'est pas la seule méthode. Je pense que les étudiants parlent beaucoup de cette question-là et les gens aussi, les syndicats parlent de ça aussi, qu'on a développé beaucoup les chargés de cours au cours des années. Je ne pense pas que c'est... Il doit y avoir des chargés de cours parce que je pense que ce n'est pas possible de prévoir exactement tout ce qui va se passer, des chargés de cours qui viennent compléter ou encore qui sont engagés de façon particulière pour tel cours. Mais, dans l'enseignement régulier, normalement l'enseignement est donné par des professeurs réguliers.

(17 heures)

Quand vous avez parlé des retraites, c'est une grosse affaire, une question importante. Maintenant, il y a des questions de coûts là-dedans, importants également. Parce que vous savez qu'une préretraite alors que l'argent n'est pas accumulé dans la caisse, c'est dans les dernières années qu'un fonds de pension rapporte. Au début, les quelques dollars qu'il y a là-dedans rapportent un peu d'intérêt, mais c'est au bout de 20 ou 25 ans que l'argent accumulé, les intérêts accumulés commencent vraiment à augmenter. C'est pour ça qu'on vous conseille... Souvent ceux qui vendent des fonds de retraite vous disent: Commencez jeunes, parce que les années que vous aurez perdues au départ, vous allez les payer chèrement à la fin. Alors, quand le député dit, à ce moment-là, sur le plan des fonds de pension... Je pense que ça peut être envisagé, mais il faut être conscient, aussi, qu'il peut y avoir des coûts considérables.

Alors, non seulement ça peut être envisagé, je sais qu'on m'a demandé d'en parler. Moi, j'ai dit: Oui, je n'ai pas d'objection à ce qu'on en parle, qu'on regarde ça et, si c'est possible... Mais, tout ça, c'est toujours une question de moyens. Est-ce que c'est possible ou c'est pas possible? Est-ce que c'est possible, à ce moment-là, de regarder des préretraites avec des professeurs qui sont rendus plus âgés, alors qu'ils vont être remplacés par des plus jeunes? Est-ce qu'il y a compensation entre les deux? Je pense que non seulement c'est regardable, mais on va le regarder. Mais, essentiellement, c'est une question de coûts.

Le Président (M. Facal): Merci. Mme la députée de La Pinière.


Politique interculturelle

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. M. le Président, le Québec est une société pluraliste. Près de 90 % des nouveaux arrivants se concentrent dans la grande région de Montréal. Un nombre significatif d'élèves dans les écoles sont issus des mariages biculturels. De plus en plus, on voit des écoles à très forte majorité multiethnique avec très peu d'interaction directe avec les Québécois francophones. Or, on sait que l'école est le lieu d'intégration par excellence, parce que tout le monde passe par l'école.

Plusieurs intervenants du milieu de l'éducation, notamment la CEQ, réclament une politique interculturelle avec des paramètres clairs. Je voudrais savoir, M. le Président, si cette préoccupation fait partie des priorités du ministre, surtout à l'aube des états généraux de l'éducation, puisque nous sommes actuellement en réflexion. Est-ce que cela fait partie des priorités du ministre? Et, si oui, quels sont les moyens qu'il entend mettre en oeuvre pour opérationaliser cette politique interculturelle?

M. Garon: Ça fait partie des préoccupations, oui. Et la meilleure preuve, c'est que, sur la Commission des états généraux, il y a un certain nombre de personnes qui sont d'origines diverses. Tous les Québécois sont d'origine extérieure au Québec. Même les autochtones, ils sont arrivés plusieurs milliers d'années avant chacun d'entre nous, mais nous venons tous d'ailleurs par nos ancêtres qui sont plus ou moins lointains. Et, habituellement, les gens qui changent de pays veulent améliorer leur sort. Seulement, ils veulent améliorer leur sort, ça veut dire qu'ils veulent adopter un nouveau pays qui représente des valeurs différentes, parce qu'ils ont fui un pays, souvent, qui ne correspondait plus à ce qu'ils recherchaient. Alors, nous sommes tous dans les mêmes circonstances, quelles que soient les raisons, quelles que soient les époques et, je pense, nous essayons de former un peuple ensemble. Je pense qu'il ne réussit pas si mal, au bout du compte.

Ça ne veut pas dire que, parce que quelqu'un a un nom, vous seriez surprise... Et je vous incite à lire un volume qui va paraître bientôt sur l'histoire de Lévis–Lotbinière, qui n'est pas encore publié, mais qui va être publié. J'ai demandé, je ne sais pas s'ils vont l'avoir fait, de mettre en annexe les noms des gens qui ont changé au cours des temps. Parce que j'avais appris... Par exemple, quand vous voyez quelqu'un, sur la Rive-Sud, qui s'appelle Daigle, vous pensez qu'il vient de la France, sauf que les Daigle, au Québec, sont d'origine allemande; ils s'appelaient Dagler. Mais, comme, à l'époque où ils sont arrivés, les gens ne savaient pas lire puis écrire, Dagler dans Lotbinière, c'est devenu, avec la prononciation, Daigle. Des Caux, les gens peuvent penser que les Caux, ça vient de la France; les Caux sont aussi d'origine allemande, c'étaient des Cox. Je ne sais pas comment ça s'écrivait, par exemple, mais ça s'appelait Cox, apparemment, et, avec la déformation, c'est devenu des Caux. J'avais mon grand-père, moi, qui venait de la Gaspésie, je ne sais pas où il avait pris ce mot-là mais, quand il parlait de la térébenthine, il appelait ça de la «tourmentine», parce qu'il y avait, en Gaspésie – le député de Matane le sait – au fond, des francophones, des anglophones, puis il y avait certains mots qui avaient certaines variantes.

Alors, dans mon esprit, nous sommes tous des immigrants et nos ancêtres ont... Les Irlandais sont partis parce qu'ils crevaient de faim en Irlande, puis ils sont venus en grand nombre au moment des grandes famines d'Irlande en 1840. Ils avaient beaucoup de courage, ils sont venus à travers des bateaux, dans des cales de bateaux, parce qu'ils n'étaient pas très riches – quand on part puis qu'on est en famine, on part parce qu'on n'est pas riche. Souvent, ceux qui arrivaient étaient déjà malades, puis on les mettait en quarantaine pour ne pas contaminer les autres. Aujourd'hui, juste en face de Montmagny, il y a des îles qui ont été les îles de la quarantaine. Donc, les immigrants qui ont immigré autrefois, qui sont des ancêtres de certains, n'ont pas eu des conditions faciles. Je pense que ça a été le cas à travers les âges. Et, aujourd'hui, moi, je pense que les gens d'ici ont été à travers des immigrations qui ont varié. Ça a été l'immigration européenne. Aujourd'hui, elle est moins européenne, elle est plus de continents différents, mais ce sont des gens qui, dans mon esprit, viennent améliorer leur sort, comme ça a été le cas de tous les autres. Ah! je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu quelques-uns au travers pour dominer les autres, c'est arrivé, mais, essentiellement, les gens venaient pour trouver un nouveau pays, pour différentes raisons qui leur étaient personnelles.

Alors, aujourd'hui, moi, je pense que c'est très important de faire un peuple ensemble, mais qu'il est très important autant que possible de ne pas transporter les querelles qu'on avait avant d'arriver. Ça peut arriver ça aussi. C'est pour ça qu'en Amérique du Nord on a développé un sentiment de tolérance. La plupart des gens qui ont quitté ont quitté parce qu'ils ne voulaient pas vivre dans la société qu'ils quittaient. Prenez aux États-Unis, s'il y a autant de tolérance par rapport, par exemple, à des choses, à des religions, c'est parce que la plupart ont quitté parce qu'ils étaient protestants, de différentes dénominations, puis ils quittaient la persécution religieuse. Et, quand ils sont arrivés ici, on voit qu'il y a eu de la concurrence mais dans la tolérance, avec différentes dénominations religieuses où les gens ont voulu vivre dans un monde différent.

(17 h 10)

Moi, je pense que c'est le même esprit qui anime les gens de notre société qui veulent bâtir ensemble une société différente, et, s'il n'y avait pas de volonté d'accueil, les gens interdiraient l'immigration. Les gens ne l'interdisent pas parce qu'ils souhaitent un certain nombre d'immigrants, qui peut varier selon les époques ou selon aussi la capacité de l'économie, et j'en parle aussi, mais, en général, je pense que les taux ont été assez généreux. Maintenant, il s'agit d'aider les gens. Puis, vous avez raison quand vous dites que l'école est peut-être le meilleur secteur d'intégration.

J'ai rencontré beaucoup de gens au cours de l'automne et ils m'ont dit, la plupart du temps... Qu'est-ce qu'ils m'ont dit? Ils m'ont dit: L'école peut jouer un rôle important. Et, quand je leur demandais: Pensez-vous qu'une école de 2 000 enfants ou 2 000 jeunes peut jouer le même rôle? Là, ils se rendaient compte rapidement, quand on discutait, que plus l'école est grosse, moins elle peut jouer ce rôle-là, et c'est plus facile de le faire jouer à une école qui est plus petite. Et c'est pour ça que, dans le cadre des états généraux, nous pensons que c'est une question qui va être débattue. Et c'est en pensant beaucoup à ça, pas seulement à ça, mais beaucoup à ça, que nous avons dit: Il faudrait des états généraux régionaux.

On avait promis des états généraux. On a dit: On voudrait en faire des états généraux régionaux pour que les gens, dans les différentes régions, déterminent quel genre d'école ils veulent avoir en fonction de leurs besoins. Et j'ai même dit aux commissaires, quand je leur ai parlé, après ça, une fois nommés, ils feront ce qu'ils voudront, mais je leur ai dit: Si vous sentez le besoin et si vous sentez que les gens sentent le besoin d'avoir des états généraux à Montréal, plus qu'un, si vous pensez que c'est nécessaire d'en avoir deux, par exemple, états régionaux, un dans l'est et un dans l'ouest, si vous pensez que c'est nécessaire d'en avoir de façon différente pour mieux comprendre ou mieux permettre aux gens de s'exprimer, gênez-vous pas, sachant qu'à la fin il y aura les états généraux nationaux où les gens viendront faire les consensus sur une base nationale, alors qu'ils en auront fait d'autres sur une base régionale. Et on verra, à ce moment-là, ceux qui sont possibles sur une base régionale et nationale, alors qu'on verra ceux qui l'auront été sur une base régionale mais qui ne le seront pas sur une base nationale.

Mais, essentiellement, vous pouvez être certaine que c'est une préoccupation importante d'un grand nombre qui le vivent personnellement, aussi. Il y a plusieurs députés au Parlement, dans le Parti québécois, qui ont soit des épouses allophones ou des époux allophones – même dans leur génération, pas besoin de remonter dans les ancêtres – qui sont nés à l'extérieur et qui veulent contribuer à s'intégrer davantage à une nouvelle patrie qu'ils ont choisie.

On pense aussi faire une politique, et là je dois dire que je suis embêté un peu parce qu'il y a des travaux qui se font sur une politique interculturelle. Est-ce qu'on doit les produire avant les états généraux ou est-ce qu'on doit les produire pour les mettre dans le cadre des états généraux pour être consultatifs, pour servir à la consultation? Je ne le sais pas, mais vous pouvez être certaine que, dans le plan d'une vision interculturelle des choses, nous n'avons pas l'intention de ne rien faire.

Mme Houda-Pepin: Bon. M. le Président, sur le plan du constat, je ne peux qu'être d'accord avec vous sur la diversité historique du Québec. Je me réjouis de voir que vous êtes assez conscient de ça, et vous avez cité des noms. Moi, je peux vous dire qu'il y a deux ans il y a un généalogiste qui m'a contactée pour me demander si je n'étais pas l'ancêtre de mon mari, puisque les Houde étaient à l'origine des Houda. Alors, j'ai dit que ce n'était pas dans...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: Alors, comme ce n'est pas dans mon domaine, j'ai avoué mon ignorance. Mais toujours est-il que c'est un fait que la diversité n'est pas quelque chose de nouveau, c'est une caractéristique fondamentale de la société québécoise et canadienne.

Ceci étant dit, moi, je me réjouis d'entendre que c'est dans vos préoccupations. Je me réjouis d'entendre qu'il y a des documents qui se préparent. Je voudrais, là-dessus, vous offrir mon entière collaboration, parce que c'est un sujet qui est très préoccupant pour moi, et je pense que je ne suis pas la seule. Même d'autres de mes collègues partagent cette préoccupation-là. J'insiste sur le fait que la diversité de notre société est une tendance irréversible, et, même s'il y a une concentration de cette diversité dans la grande région de Montréal, il faut savoir que ça ne concerne pas seulement les gens qui vivent cette réalité, c'est aussi une préoccupation pour l'ensemble de la société québécoise, et c'est comme ça qu'il faut voir l'intégration. On s'intègre, c'est un mouvement dans les deux sens, et ça prend une préparation de la personne à intégrer, mais ça prend aussi une préparation des personnes qui vont intégrer, donc la société d'accueil et les personnes qui sont venues enrichir notre patrimoine au Québec. Donc, je m'attends, de ce côté-là, à vous lire, à lire vos documents très attentivement et, éventuellement, à y réagir.


Confessionnalité dans le système scolaire (suite)

Une des dimensions particulières de l'interculturalisme est incontestablement la diversité religieuse. Or, si, par le passé et jusqu'à maintenant, nous avons assez vécu avec la diversité ethnique, avec la diversité multiculturelle et même avec la diversité raciale, bien qu'il y ait énormément de préjugés encore dominants, la diversité religieuse est une problématique qui se pose avec beaucoup d'acuité et, d'une certaine façon, elle heurte davantage les sensibilités dans la mesure où elle touche aux valeurs profondes, à nos valeurs profondes, quelle que soit notre appartenance religieuse.

Pendant longtemps le pacte, je dirais, social au Québec et même au Canada était entre deux grandes communautés religieuses, catholique et protestante. Or, le paysage religieux a profondément changé, au Québec en particulier, puisque les religions non chrétiennes sont dans une progression constante et extrêmement significative. Cela amène bien entendu des conflits, des tensions, des incompréhensions. Je soulignerai en passant tout ce qui a été écrit sur l'affaire du hidjab, le «voile dit islamique». Je conteste le «voile islamique». Je dis que c'est le «voile dit islamique», puisque le voile existait bien avant l'islam. C'est une autre question. Donc, cette diversité se retrouve à l'école.

Et, finalement, moi, j'ai eu le privilège, entre autres dans mon travail antérieur, d'enseigner et de former des gens, parmi lesquels des enseignants et des enseignantes qui me disaient: Moi, je ne reconnais plus mes classes, je ne reconnais plus mon école. Ça me dépasse. Les autorités politiques ne font rien. Il faut réagir, etc. Et les autorités politiques, d'après ce qu'on voit, elles disent à l'école: Débrouillez-vous! Bien, moi, je trouve qu'il y a un contexte favorable dans le cadre de ces états généraux entre autres, puisque le débat est ouvert, et ça nous concerne tous encore une fois, pour voir un petit peu comment, dans notre société pluraliste, on peut gérer la diversité religieuse. Alors, il y a plusieurs pistes de réflexion, plusieurs pistes de solution. Je ne prétends pas avoir la solution, mais, en tout cas, je réfléchis avec le monde.

M. le Président, j'aimerais entendre le ministre sur sa compréhension personnelle de cette situation-là, et je voudrais peut-être l'entendre réagir sur les différentes pistes de solution qui sont dans le débat, dans les médias, etc. La confessionnalité scolaire: Est-ce qu'il faudrait que l'école soit neutre? Est-ce qu'il faut accommoder, dans l'école publique, l'enseignement de différentes religions? Est-ce qu'il faut plutôt avoir un enseignement d'éducation civique à tous les élèves, abstraction faite de leur religion? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Garon: Moi, je vous dirai que je ne me considère pas comme très vieux, mais j'ai quand même passé un certain nombre d'années et je pense que j'en ai peut-être plus de fait que j'en ai à faire. Je vous dirai que j'ai vu un changement considérable dans la société au cours des années. On en a parlé longuement ce matin. Quand j'étais petit gars ou jeune homme, je le disais, un protestant puis un catholique, je vais vous dire une chose, c'était loin l'un de l'autre. Je ne sais pas si les communistes ou les protestants étaient pires l'un que l'autre. On n'en parlait pas beaucoup parce que... J'étais petit gars, moi, là, on avait été alliés des communistes contre l'Allemagne. Mais un protestant, c'était quelque chose. Le député de Matane, il doit se rappeler de cette époque-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Aujourd'hui, je vais être franc avec vous, là, je parlais avec le curé de Lauzon récemment, puis je disais: Vous savez, aujourd'hui, un protestant puis un catholique, on ne voit pas beaucoup de différence. Il me disait qu'il y avait la distinction importante de la présence réelle ou symbolique dans l'eucharistie. Oui, mais j'ai l'impression que les gens ne font pas les guerres aujourd'hui qu'ils ont faites autrefois là-dessus. Puis je ne suis pas méprisant quand je dis ça, là. C'est parce que les conceptions ont évolué.

Rappelons-nous, par exemple, le divorce. C'était quelque chose, le divorce, autrefois. Les premiers cinéastes ont développé leur talent à ce moment-là, en essayant de prendre les ébats amoureux de la personne dont il voulait se séparer.

Des voix: Ha, ha, ha!

(17 h 20)

M. Garon: Mais, aujourd'hui, la conception de la société a changé. À tort ou à raison, ça, c'est une autre affaire. Justement, quelqu'un me rappelait ce matin, on me disait: On ne le dit pas assez souvent, puis j'en profite, j'avais dit que je le dirais. Vous savez que, autrefois, il y avait beaucoup d'anglophones, au Québec, qui ne parlaient pas le français. Il y en a même qui pensaient que c'était un point d'orgueil de ne pas parler le français. Et, d'un coup sec, au Québec, très rapidement, on s'est demandé si... Parce qu'on se pensait meilleurs, les francophones, d'apprendre l'anglais. On disait: Un Anglais, ce n'est pas capable d'apprendre une autre langue. Je vais vous dire que les concepts ont changé beaucoup. Aujourd'hui, il y a beaucoup d'anglophones qui parlent le français. Je pense que la plupart le parlent, et le parlent très bien. Même, dans certains coins, on a pensé que c'était quasiment de la génération spontanée, des gens qui ne l'avaient jamais parlé, le lendemain, le parlaient. On a dit: Ils l'ont bien caché.

Mais, aujourd'hui, je pense que c'est une grande satisfaction pour les gens, au Québec, de voir à quel point les anglophones ont appris le français. Je vais vous dire, en 1986, je suis allé en Irlande. J'avais hâte, parce que mon père m'avait dit: Si tu vas en Irlande, tu vas passer pour un gars de là. Tu ressembles beaucoup aux Irlandais. J'ai tellement passé pour un gars de là, j'ai passé même comme venant de la place dont venait mon ancêtre maternel. On m'a dit: Vous ressemblez aux gens de Cork. Sacrifice! C'est fort!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Le premier qui est venu ici venait de là, c'était l'arrière-grand-père de ma mère. Ce qui m'a frappé surtout, c'est que j'étais en Irlande et que je me sentais chez nous, par la musique, par les paysages, par une foule de choses. Je n'avais jamais compris pourquoi il y avait tellement d'Irlandais qui étaient allés en Gaspésie. Là, je le comprends. Ils ne devaient pas se sentir dépaysés, tellement les paysages se ressemblent.

Alors, moi, ce qui m'a frappé au cours des 30 dernières années, c'est à quel point la conception des gens a évolué, à quel point les gens ne se sont pas éloignés; ils se sont rapprochés. Moi, je pense qu'entre les francophones et les anglophones, au Québec, il y a eu un rapprochement considérable, et je dirais dans l'estime réciproque, l'estime culturelle et le goût de mieux connaître la culture de l'autre. Même si ça ne paraît pas à 100 %, on le sent, quand on parle avec les gens.

Avec les nouveaux arrivants, comme vous dites, qui sont moins de culture européenne, dans certains cas, il y a des choses, par ailleurs, je pense, sur lesquelles notre société ne changera pas. C'est une société laïque, civile. Les choix ont été faits. Je pense qu'on est mené ici par des lois civiles, et les gens ne veulent pas changer ça, parce qu'ils pensent, essentiellement, que l'État, c'est dirigé par des lois civiles. Exemple, c'est l'État qui a décidé des règles du mariage. Ce n'est pas la religion, c'est l'État qui a décidé comment ça fonctionnerait, sur le plan du mariage, de la célébration qui, en passant, est provinciale; le divorce, c'est fédéral.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: C'est une drôle de législation, mais c'est comme ça. Donc, le Québec unit, le fédéral sépare.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Mais dans les lois. Essentiellement, ce que je veux dire quand je dis ça...

Mme Houda-Pepin: Vous conviendrez, M. le ministre, qu'il y a très peu de gens qui veulent se séparer.

M. Garon: Pardon?

Mme Houda-Pepin: Dans les mariages, par rapport aux gens qui sont mariés.

M. Garon: Souvent, les gens se séparent malgré eux, ne voudraient pas, souhaiteraient que ça marche. La plupart des gens que j'ai connus, moi, qui se sont séparés, ils ne voulaient pas se séparer. Ils auraient souhaité que ça marche. Je pense, au Québec, qu'il y a beaucoup de gens qui pensent à la séparation, mais en souhaitant que ça marche. Ils auraient aimé mieux que ça marche. C'est un peu comme ça, je pense. Je ne pense pas que des gens qui sont unis, qui ont vécu ensemble veulent nécessairement se séparer. Mais souvent ça ne marche pas, pour un ensemble de raisons. Il faut dire qu'autrefois le mariage ne durait pas longtemps, quand les gens avaient une expectative de vie de 35 ou 40 ans – le député l'a rappelé tantôt. Aujourd'hui, la femme vit jusqu'à 78 ans en moyenne et l'homme, 75 ans. Ça fait que ce n'est pas la même chose de se marier et de dire: On va vivre 50 ans ou 60 ans ensemble, alors qu'autrefois ça voulait dire à peu près vivre une vingtaine d'années. Peu importe, mais ce n'était pas ça.

Ce que je veux dire essentiellement, c'est que le système de valeurs dans lequel on vit, c'est un système laïque, que les gens ne voudront pas vivre dans un système religieux. Ça, je pense qu'il y a un système de valeurs qui est plus définitif. Je pense que les gens ont voulu que la vie en société soit régie par des lois civiles et, par ailleurs, avoir une grande tolérance sur le plan des valeurs religieuses.

C'est pour ça que je disais ce matin que, vivre en Amérique du Nord, ça veut dire quelque chose. Vivre à Montréal, ça veut dire quelque chose. Et quelqu'un qui a choisi de venir vivre en Amérique du Nord, de venir à Montréal ou de venir même à Matane, ça veut dire quelque chose. Et, si j'ai choisi de vivre à Montréal, il faut que je pense vivre à Montréal ou vivre selon un ensemble de règles, qui ne sont pas immuables, mais qui évoluent lentement. Les gens évoluent graduellement, lentement, de façon souvent imperceptible au cours des années. Et, par ailleurs, je pense que la façon de vivre est différente selon qu'on est à Montréal, selon qu'on est à Mexico, selon qu'on est à Bagdad ou selon qu'on est à Rome, parce que les valeurs qui sont reflétées sont différentes.

Alors, je pense qu'il y a une société d'accueil, il y a une société qui doit être tolérante, et je pense qu'elle l'est sur le plan religieux, mais, par ailleurs, il s'agit d'une société laïque, c'est-à-dire civile, dans laquelle les gens ont convenu que la religion était libre pour chacun, mais que, par ailleurs, dans la société, il y avait un certain nombre de règles qui étaient des règles civiles, qui n'étaient pas des règles religieuses.

Essentiellement, moi, c'est comme ça que je vois ça. Vous me demandez comment je vois ça? C'est à peu près comme ça. Mais je vais vous dire, l'influence d'une société, c'est imperceptible. Par exemple, aujourd'hui, on a l'impression qu'au Québec, quand on regarde les menus, on est plus des Italiens que des... On voit du spaghetti italien, de la pizza partout, et tout ça. On a l'impression qu'on est un peu italien. Quand on voit, par exemple, les ragoûts, et toutes sortes d'affaires, on pense que le ragoût, c'est québécois; ce n'est pas québécois, c'est irlandais, le ragoût. C'est les Irlandais qui mettaient du boeuf et des légumes, et tout ça, et on disait «Irish stew». Alors, aujourd'hui, il y a beaucoup de gens qui aiment les «mezzés», qui sont moins importants, moins considérables qu'autour de la Méditerranée, mais ça n'existait pas il y a quelques années.

Je pense que la nourriture, c'est une façon importante de vivre, la musique. Beaucoup de relations culturelles sont différentes parce qu'il y a des gens qui sont là qui n'y étaient pas avant, qui ont donné le goût d'en connaître davantage sur leur façon de faire les choses, et de participer, et d'influencer notre société. Aujourd'hui, vous avez raison quand vous dites que c'est une société qui est beaucoup plus diversifiée sur beaucoup de plans, et je pense que c'est une bonne chose. Mais, être québécois aujourd'hui, c'est quoi? Les gens vont vous dire: Quels sont les mets nationaux du Québec? J'ai l'impression que le spaghetti italien va en faire partie. Je vous donne un exemple, là, je ne dis pas ça pour faire une blague, là. C'est que la culture, l'interculturalisme nous pénètre de telle façon qu'à un moment donné on en vit les attributs sans même s'en rendre compte.

Le Président (M. Facal): Mme la députée de La Pinière, peut-être une dernière question sur ce volet-là?

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci, M. le Président. Je suis heureuse de vous entendre dire que notre système de valeurs est un système laïque, quoique je doute que la société québécoise dans son ensemble y adhère, mais je crois que majoritairement, oui. En France, où la laïcité est une valeur fondamentale, le ministre de l'Éducation a interdit les symboles religieux à l'école. Vous êtes le ministre de l'Éducation du Québec. Qu'est-ce que vous recommandez aux écoles québécoises en ce qui concerne le port du hidjab, par exemple?

M. Garon: Disons que, quand vous parlez de la France... Je n'ai pas dit un système de valeurs laïque. Je n'ai pas dit ça. J'ai dit que nous sommes régis en société par des lois civiles.

Mme Houda-Pepin: Je l'ai noté. Ce n'est pas grave.

(17 h 30)

M. Garon: C'est ça que j'ai dit. Deuxièmement, quand je regarde la France, il y a des débats qui ont eu lieu en France, qui ont été faits il y a plusieurs années, quand on a décidé de faire la laïcité sous certaines formes, qui n'ont pas été faits ici encore. L'école, par exemple, en France, elle est laïque. C'est un débat qui s'est fait il y a longtemps. Ici, la Constitution dit que l'école est confessionnelle ou... Non. Elle ne dit pas qu'elle est confessionnelle, on garantit des droits confessionnels dans l'école.

Alors, moi, je pense qu'il y a des débats qui sont des débats de société. Comme ceux-là, c'est, je pense, un débat de société. Je pense que les gens vont en parler tous ensemble. Moi, je pense que les gens vont en parler pour dire de quelle façon... On en a parlé longuement ce matin. Il y a eu un discours très éloquent du député de Matane sur le sujet, pour dire comment il voyait les choses, comment les gens voient les choses sur le plan de l'évolution de l'école, de la commission scolaire, des institutions, et tout ça est enregistré dans les galées, ce dont on a parlé ce matin.

Mais, essentiellement, il y a des débats qui sont à faire, puis ce sont des débats de société, ce ne sont pas des débats d'autorité. Moi, je pense que ce sont des débats de société. On peut le faire aussi, comme dans certains pays ils l'ont fait, mais je ne pense pas que les gens vont le faire de façon agressive. Je pense qu'ici ils vont vouloir le faire de façon civilisée, dans un véritable débat de société, public, dans lequel ils vont décider comment ça va fonctionner.

Et je pense que le cadre des états généraux va sans doute être un cadre où les gens vont choisir d'en discuter. Je ne sais pas dans quelle proportion, mais je pense que le débat se pose de façon différente selon qu'on est à tel endroit ou à tel endroit. Puis les gens le sentent ou ne le sentent pas. Moi, je vais vous dire une chose. Je me rappelle, au début du mouvement indépendantiste, pour vous donner rien qu'un exemple, dans les années soixante, quand les gens, à Montréal, voulaient qu'on parle du Québec français, nous autres, on disait: Oui, on pourrait en parler un bout de temps à Québec, mais on ne pourra pas en parler longtemps, parce que, si on cherche quelqu'un pour parler d'autre chose que le français, il n'y a pas tant de monde, tout le monde parle quasiment français à Québec. On ne peut pas dire: Un Québec français! On peut l'affirmer, mais le besoin était moindre à Québec.

Alors, quand vous arrivez, par exemple, dans des débats sur, vous dites, les questions religieuses, bon, les gens ne sentent pas les choses de la même façon selon que c'est à tel endroit ou à tel endroit. Et je pense que, là-dessus, le député de Matane a été très éloquent ce matin, d'autant plus qu'il est originaire de Matane, qu'il a vécu pendant plusieurs dizaines d'années à Montréal et que, maintenant, il est retourné représenter le milieu dont il est originaire. Si vous regardez les galées de ce matin, moi, je pense que vous allez trouver exprimé de façon très éloquente ce que beaucoup de Québécois pensent, des idées, moi, je pense, vers lesquelles penchent beaucoup de Québécois, puis qui y vont, qui évoluent, moi, je pense, de façon graduelle, sans soubresauts, sans haine et dans le respect des uns et des autres.

Où il y a un problème, c'est lorsque le militantisme s'installe. C'est pour ça que je disais, moi, ce matin: Je me considère comme un homme libre et je considère que ma liberté est limitée par la liberté des autres. D'ailleurs, le problème se pose dans d'autres pays également. On voit, au fond, que c'est le militantisme religieux qui veut prendre beaucoup de place, au fond, qui, parfois, essaie d'écarter les autres. Je ne pense pas que les gens pensent comme ça à l'heure actuelle. Je pense qu'ils ne pensent pas de cette façon-là, puis qu'ils ne souhaitent pas que le débat se fasse de façon intolérante ou... Je pense qu'ils veulent le faire de façon très tolérante, dans le respect des valeurs de chacun.

Mme Houda-Pepin: Ma question était beaucoup plus précise que ça. Je n'ai pas assisté, ce matin, au débat du député de Matane, mais j'ai une petite idée de ce que le député de Matane pense, ayant eu le plaisir de lire et de savoir un petit peu où il se situe dans le débat sur l'éducation.

Mais je m'adresse à vous en tant que ministre de l'Éducation. Je voudrais savoir ce que vous, en tant que ministre de l'Éducation, vous recommanderez à l'école, au-delà du débat de société que nous sommes tous amenés à faire. Vous avez une position privilégiée de leadership, entre autres. Est-ce que vous avez une idée sur ça? Et, si oui, laquelle?

M. Garon: Non. Je ne pense pas que... Je ne suis pas d'accord là-dessus, M. le Président, parce que je pense que je ne suis pas en charge des droits et libertés de la personne au Québec. Et, quand la Commission des droits de la personne a dit qu'est-ce qu'elle pensait, bien, je pense qu'elle a dit ce qu'elle pensait. Le Conseil du statut de la femme est allé dans la même direction.

Je pense que le ministre de l'Éducation n'est pas responsable des droits et libertés de la personne. Il y a une charte des droits et libertés de la personne qui comporte des droits religieux, différents types de droits, et, à ce moment-là, les gens l'interprètent dans l'application et, éventuellement, bien, les tribunaux vont élaborer plus précisément comment elle doit être interprétée. Souvent, les problèmes ne se posent pas tant que la Charte n'est pas appliquée.

Maintenant, il n'y a pas un modèle, hein. C'est pour ça que je vous disais tantôt: Il y a des modèles différents; selon qu'on est dans tel ou tel endroit, les problèmes se posent différemment. À ce moment-là, moi, je pense que les problèmes se posent différemment à Montréal et qu'ils se posent différemment selon que les gens les ressentent de telle ou telle façon. À ce moment-là, il y a des gens qui vont poser des actes qui vont être évalués par les tribunaux, en fonction de nos lois et de nos constitutions. Et, si, à un moment donné, on calcule ou si les gens pensent que ce que les tribunaux décident ne correspond pas à ce qu'ils veulent, les lois vont être changées. C'est un peu comme ça. Moi, je ne pense pas que le ministre de l'Éducation est responsable des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Facal): M. le député de Champlain.


Maintien de la dernière école de village ou de quartier (suite)

M. Beaumier: Oui, merci, M. le Président. Pour bien montrer que le Québec est bien uni mais bien varié aussi, j'aimerais soulever la question de la politique des petites écoles ou des dernières écoles de village. Ça a été soulevé ce matin, mais assez rapidement. Moi, je voudrais demander au ministre s'il a l'intention... De quelle façon ça pourrait s'élaborer? Est-ce qu'il faut attendre les états généraux? Est-ce que ça fera partie des états généraux, avant ou bien après, je ne le sais pas, en ce qui concerne l'élaboration d'une politique, avec les problèmes réels que l'on vit actuellement, une politique de maintien des dernières écoles de village?

Je conçois que le problème a été soulevé et, j'allais dire, réglé à partir du symbole, à partir de l'école de Batiscan. J'aimerais signaler au ministre – il le sait déjà, mais ça évolue tellement vite – que le modèle retenu par la municipalité, la commission scolaire Samuel-de-Champlain, les parents et, j'allais dire, la communauté et le ministère des Affaires culturelles, ce modèle-là est en train, un petit peu, de faire boule de neige. Déjà, chez moi... En tout cas, j'observe ce qui se passe dans mon comté. Sur neuf municipalités, déjà trois autres municipalités se sont mises à l'oeuvre et sont en train de finaliser, à peu près avec le même modèle, des ententes impliquant les mêmes intervenants.

Deux sur trois, c'est l'intégration de la bibliothèque municipale à l'intérieur des murs de l'école, faisant de l'école un lieu non seulement éducatif, mais un lieu culturel, également. Une autre municipalité, qui est Sainte-Geneviève-de-Batiscan, où, là, c'est la municipalité qui s'entend, qui offre un de ses centres pour aménager un gymnase qui servira à l'école primaire qui, autrement, n'aurait pas accès à cet équipement.

Alors, ce que je suis en train de dire, M. le ministre, c'est que les solutions sont en train de s'installer. Tout ne sera pas fait au moment où les états généraux seront terminés, mais il y a là des modèles, effectivement, concrets de réussite et d'entente à l'avantage de tout le monde et avec l'apport de tout le monde.

Ma question est la suivante: Il avait été soulevé la question de l'élaboration d'une approche ou d'une politique des dernières écoles de village, j'aimerais savoir où en est le ministre. Je conçois que la démographie, je parle particulièrement chez nous, une partie dans un milieu rural, le développement de l'agriculture n'a pas nécessairement, en termes démographiques, réglé le développement du milieu rural. Donc, il faudrait intégrer ou ajouter à une politique de développement agricole une politique plus large de développement rural.

(17 h 40)

Mais, au-delà de tout ça, même si ça aurait des effets bénéfiques – et on y travaille – sur la démographie, il restera toujours, sur notre territoire, dans notre société, des endroits où le nombre exigerait, à mon point de vue, une politique de maintien des petites écoles. Alors, je voudrais savoir de quelle façon le ministre entend, j'allais dire, finaliser ce qui a été commencé et bien commencé à partir de Batiscan et des autres exemples que je vous ai donnés.

M. Garon: Je dirais que le député de Champlain, M. le Président, a parfaitement raison, Batiscan va marquer un temps dans l'évolution du Québec par rapport à la conception des écoles. Je pense qu'on peut dire qu'à partir de Batiscan, Saint-Jean-Eudes, Lefebvre, il y aura d'autres cas, mais, essentiellement, les gens ont pris conscience de plus en plus qu'il était possible de maintenir leur école locale.

J'étais très content, l'autre jour, quand j'ai lu aussi, dans le journal Le Devoir , l'entrevue de M. Gérard Filion, qui a regardé ça, puis qui a été dans la commission Parent. Dans le fond, il disait dans ses mots – et ça fait partie de ce que j'entends beaucoup – qu'une école de base ça devrait aller jusqu'au secondaire III à peu près, c'est-à-dire les neuf premières années. Il disait ça, puis j'entends ça beaucoup, de différentes façons. On voit de plus en plus que les gens parlent d'une école de base jusqu'au secondaire III, les neuf premières années d'éducation; ça devrait être à peu près standard, puis ça devrait être le plus local possible. Après ça, les gens feront leur cheminement. Dans les états généraux, ça va être discuté beaucoup.

Maintenant, j'avais pensé former un groupe de travail, j'y pense encore. Je vais vous dire une chose, ce qui a changé, c'est qu'il y avait Mme Demers que j'avais pensé mettre sur ce groupe de travail. Je vous le dis candidement. Mais, quand est arrivée la formation des états généraux, j'ai pensé, à un moment donné, que, si Mme Demers était coprésidente, cette conception d'une école de base plus locale serait une préoccupation et qu'il y aurait quelqu'un comme commissaire qui refléterait ça. Ça a l'air de rien, mais les gens vont sentir, au fond... Je veux qu'ils sentent que, ce débat-là, il est possible, puis qu'il y a des gens sur la commission qui en ont assumé la responsabilité.

Maintenant, ça a retardé un peu la formation d'un comité sur l'école, puis comment ça devrait fonctionner, et j'ai l'intention, rapidement, parce qu'il y a un travail qui a été fait, de former un comité de travail avec des députés, des parents, possiblement des commissaires, possiblement des maires, des gens de municipalités, pour voir qu'elle devrait être l'école de base. Pas en parlant seulement en termes d'argent; ce n'est pas seulement de l'argent, c'est de voir les choses d'une façon différente. Je pense à un comité qui pourrait faire un travail qui pourrait être versé dans le cadre des états généraux, faire partie du débat et de l'état de situation, éventuellement, qui pourrait être débattu dans le cadre des états généraux régionaux et nationaux.

Quand je parle d'école de base, ça veut dire, au fond, que ça peut être au niveau d'un village, ça peut être au niveau d'un quartier, dans une ville, également. J'écoute les gens, puis je remarque. Quand j'ai vu Paul Gérin-Lajoie qui a dit, par exemple: L'école qui ferme à 15 h 30, c'est absurde, étant donné les besoins des familles d'aujourd'hui, moi, je pense ça, moi aussi, je l'ai dit souvent. Sauf que Laurent Laplante disait que je parlais trop, puis il y en a d'autres qui disent... Je vois le député de Marquette qui dit que je ne parle pas assez. Alors, je suis mal pris entre les gens qui disent que je parle trop ou que je ne parle pas assez. Alors, j'ai décidé de régler le problème, j'ai décidé de dire que je penserais comme un autre citoyen, sachant que les états généraux vont faire en sorte que les gens vont venir dire ce qu'ils pensent, que l'ensemble des gens peuvent dire ce qu'ils pensent et, ensuite, que le rapport des commissaires fera partie du débat avec un état de situation puis des besoins tels qu'ils auront été exprimés par l'ensemble des citoyens. Puis, d'ici ce temps-là, il faut débattre le plus possible.

Alors, moi, j'ai l'intention de mettre sur pied un comité, de demander, en particulier, aux députés qui ont été mêlés à ces questions-là de faire partie du comité, et puis à d'autres personnes également, pour, éventuellement, leur demander de faire un rapport: Comment ils voient l'école de village, ou l'école municipale, ou l'école de quartier, et qu'est-ce qu'il faudrait faire pour la rendre plus possible?

Moi, je pense que Batiscan, ça a été un modèle. Contrairement à ce qui a été dit dans Le Devoir de ce matin, je n'ai pas imposé, je n'ai même rien dit par rapport à la bibliothèque. Quand j'y suis allé, le maire a dit: On a un projet de bibliothèque; si la commission scolaire acceptait qu'on la mette dans l'école, il n'y aurait plus de locaux vides. Moi, j'ai dit: C'est une belle idée. Pourquoi pas? Mais c'est tout. Je n'ai rien imposé. Je n'ai rien dit, et c'est resté comme ça. Alors, moi, je pense qu'il n'y a rien de plus normal qu'avoir une bibliothèque dans une école.

Mais il y a eu des théories. À un moment donné, les gens, aux Affaires culturelles, pensaient les mettre dans les centres d'achats parce qu'il passe plus de monde dans les centres d'achats. Bon. C'est une autre conception, l'une n'écartant pas nécessairement l'autre. Moi, je suis partisan, personnellement, de dire: On devrait remplir les écoles par la base, plutôt que de commencer par le haut. Remplir les écoles d'abord, voir au niveau local, dans le milieu de vie des citoyens, avant d'envoyer les enfants ailleurs.

C'est évident que, quand on a un cours et qu'on dit: Jusqu'à la neuvième année... Pourquoi le secondaire III? Parce que les cours sont tous obligatoires, il n'y a pas de laboratoires avant le secondaire III, donc c'est plus possible d'avoir une école plus locale. À partir, de secondaire III, bien là, les cheminements peuvent être différents. Il peut y avoir de la formation générale, il peut y avoir de la formation professionnelle, il peut y avoir toutes sortes de cheminements qui, là, supposent des équipements différents.

Alors, je peux vous dire qu'il y a deux ou trois comités que je vais mettre sur pied très prochainement, dans le cadre des états généraux. J'en ai un, par exemple, sur la petite école de village, l'école de quartier. Deuxièmement, sur l'enseignement de l'histoire au Québec, l'enseignement de l'histoire et de la géographie. Je pense que c'est important pour des citoyens de se situer dans le temps et dans l'espace. Dans le temps, qui nous sommes aujourd'hui, c'est parce que nous provenons de quelque part, hein. Et, dans l'espace aussi, c'est bon de connaître un peu sa géographie. Je trouve qu'il y a beaucoup de lacunes de ce côté-là.

Je voudrais mettre un groupe de travail sur pied là-dessus et aussi préparer des états généraux sur les nouvelles technologies de l'information et des communications, une conférence socioéconomique. Là, ce n'est pas dans le but de le mettre dans les états généraux, mais dans le but de faire en sorte que ces équipements-là vont être utilisés de façon plus importante dans l'avenir pour qu'on considère qu'il y a trois langages: le français – je dis le français, entendons-nous, le français comme langue commune au Québec; ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'apprentissage de l'anglais – les mathématiques et les nouvelles technologies de l'information.

Le Président (M. Facal): M. le député d'Orford.


Construction et agrandissement d'écoles

M. Benoit: Oui, M. le ministre. Dans les dernières minutes qu'il nous reste, j'aimerais qu'on... Vous avez parlé de dollars il y a quelques minutes. Moi, depuis la fin de l'année 1978 que je me promène à travers le Québec avec notre formation politique, où j'ai l'occasion de... Comme on sait, toutes ces réunions-là se tiennent dans les écoles, dans les polyvalentes, dans les cégeps, et, souvent j'ai eu l'occasion d'y passer des fins de semaine complètes. Un peu comme disait Claude Castonguay à la Commission d'enquête sur la santé, il y a quelques années, il disait que le parc des installations physiques des hôpitaux vieillissait et il suggérait à cette Commission, à l'époque, qu'on s'assure que le problème n'aille pas plus loin qu'il n'était déjà. Et Dieu sait, quand on va dans les hôpitaux, qu'on s'aperçoit que le parc, la construction de nos hôpitaux vieillit, les fenêtres sont désuètes, etc.

J'avais l'occasion, dimanche midi, d'être à la polyvalente de Coaticook, dans mon comté, et le directeur, par concours de circonstances, s'est assis à ma table et on a jasé ensemble. Il m'a fait visiter sa polyvalente. C'est un nouveau directeur qu'il y a là. Il était, d'une façon particulière, préoccupé par l'état. Et, là, la commission scolaire l'informe qu'il n'y a pas d'argent pour faire les améliorations: les toits, les plafonds qui coulent un peu, etc.

M. Garon: Qui coulent un peu. Ha, ha, ha!

M. Benoit: Alors, ça m'amène à vous demander...

M. Garon: Il dit: Qui coulent un peu. Ha, ha, ha!

M. Benoit: On sait que, l'an passé, le gouvernement libéral a mis 40 000 000 $ dans la construction et l'agrandissement d'écoles pour le secteur primaire et secondaire. Pourriez-vous nous dire ce que vous avez l'intention d'engager cette année? L'entretien, ça, c'est une autre affaire, c'était peut-être un aparté que j'ai fait. Mais parlons plus carrément de la construction et de l'agrandissement d'écoles pour l'année à venir. Avez-vous un ordre de grandeur que vous pouvez nous donner? L'an passé, ça a été de l'ordre de 40 000 000 $.

M. Garon: Combien, l'an passé?

M. Benoit: 40 363 000 $.

(17 h 50)

M. Garon: De?

M. Benoit: Bien, là...

M. Garon: De construction?

M. Benoit: Pour la construction et l'agrandissement d'écoles pour les secteurs primaire et secondaire, formation générale.

(Consultation)

M. Garon: Actuellement, le volume des immobilisations n'est pas encore indiqué. Parce que vous savez que ce n'est pas dans l'année où on les fait qu'elles coûtent quelque chose, c'est par la suite. Mais il faut avoir les autorisations, par ailleurs. Nous n'avons pas encore le chiffre pour l'enveloppe de cette année, pour les immobilisations des secteurs primaire et secondaire. C'est ce que je vais faire au cours du mois de mai, normalement. C'est dans le délai normal, puisque, habituellement, ces investissements sont annoncés dans le cours du mois de juin.

M. Benoit: Est-ce que, à ce point-ci, le ministre a déjà autorisé des projets de construction ou d'agrandissement qui semblaient être prioritaires? Je vois qu'il lève les sourcils, là. Est-ce qu'il a déjà approuvé un certain nombre de projets, même s'il n'est pas supposé les avoir approuvés?

M. Garon: Pas vraiment.

M. Benoit: Et pour quels montants? Est-ce qu'on peut savoir quels projets ont été approuvés, au moment où on se parle?

M. Garon: Il n'y a pas eu de projets d'approuvés, on me dit, pour 1995-1996. L'an dernier, il y en a eu pour 39 400 000 $. Je peux vous dire que, cette année, actuellement – c'est des demandes, ça ne veut pas dire qu'elles sont correctes – en tout cas, des demandes qui vont être analysées, il y en a pour 260 000 000 $.

M. Benoit: Ça m'amène à ma troisième question. Effectivement, vous avez pour 260 000 000 $ de demandes là...

M. Garon: Au total.

M. Benoit: Oui, au total. On sait que...

M. Garon: Ça ne veut pas dire que c'est recevable, que chaque demande est recevable.

M. Benoit: Non, non, absolument, je comprends ça. On sait que souvent les parents, M. le ministre – vous en avez parlé un peu tantôt avec notre confrère d'en face, là – veulent une école dans chaque quartier...

M. Garon: Oui.

M. Benoit: ...même si l'école est située à 4 km ou 5 km. J'ai ça chez nous, les gens de Fish Bay veulent garder leur école, et puis, bon, c'est correct ça, on va vivre avec ça, alors qu'il y a, à Magog, à quelques kilomètres de là, des écoles qui sont à moitié vides. Devant le gel des budgets de l'Éducation que vous vivez, là, le ministre peut-il nous dire selon quels critères vous allez être capable d'évaluer les projets qui vous sont soumis venant des commissions scolaires? Quels sont les critères que vous allez prendre quand vous allez avoir à trancher entre la ville-centre et puis à 4 km de ça ou, dans une même ville, deux... Qu'est-ce qui va vous guider pour prendre ces décisions?

Vous avez 260 000 000 $; nous, on en a mis 40 000 000 $ l'an passé, vous me dites. J'ai entendu 39 000 000 $, enfin 39 000 000 $, 40 000 000 $. J'imagine que ça va être quelque part semblable à ça dans l'année qui vient. Bon. Il y aurait un manque à gagner de 220 000 000 $, si je prends 40 000 000 $, là. Ça va être quoi, les critères, quand vous décidez de laisser des écoles ouvertes?

Parce que, finalement, la rationalisation de toutes ces écoles-là, quand ça a été fermé, les commissions scolaires l'ont fait comme bons gestionnaires ou bons pères de famille. Il y avait des dimensions pédagogiques, mais il y avait aussi des dimensions économiques qui ont fait que les dirigeants des commissions scolaires l'on fait comme bons pères, bons gestionnaires des deniers publics, disant: Bon, on va fermer l'une, puis, bon, on va laisser l'autre ouverte, etc. Comment vous allez gérer ça? Et, moi, je me pose la question, parce qu'on la vit chacun chez nous, cette situation-là.

M. Garon: Bien, d'abord, disons que la loi n'est pas changée: on doit fournir des places aux enfants pour aller à l'école. Maintenant, ça peut se faire de différentes façons. Ça peut se faire de différentes façons, et c'est évident qu'il y a des choses qu'il faut ajuster, au gouvernement, pour rendre ça possible. Moi, un critère, c'est d'abord l'implication du milieu; ça, c'est fondamental. Qu'est-ce que le milieu veut et qu'est-ce qui est possible? Quand je dis: Qu'est-ce qu'il veut? ça veut dire l'implication du milieu, des gens localement, j'entends, là, pas seulement...

J'écoute les débats qu'il y a aussi dans les milieux. Quand les consensus ne sont pas faits, vous pouvez être certain que ça va m'influencer beaucoup. Quand les consensus ne sont pas faits, je vais vous dire que la construction d'une école va susciter plus de problèmes qu'elle ne va en régler, va susciter plus de chicanes. Je vais vous dire une chose, ça va compter.

Deuxièmement, je n'ai pas l'intention de donner beaucoup d'argent pour des sièges sociaux. Les sièges sociaux, je pense qu'on peut attendre un peu. Là, on est dans une période où il y a 6 000 000 000 $ de déficit. Quand on m'a dit, tantôt, que notre équipement – comment vous appelez ça? – notre parc immobilier est désuet...

J'ai été député de l'opposition et j'en ai profité pour faire partie des relations avec les États-Unis. J'ai été plusieurs fois en Nouvelle-Angleterre et j'ai eu l'occasion de visiter des hôpitaux, les meilleurs hôpitaux de Boston. Et puis, d'ailleurs, j'ai toujours aimé aller à Boston comme milieu culturel. Je ne sais pas, dans une autre vie, où j'étais, mais, quand j'arrive à Boston, je me sens heureux. Je trouve qu'il y a un beau milieu de liberté, etc. Mais ce qui m'a frappé, dans un milieu qui, sur le plan universitaire, je dirais, est un des premiers, des deux ou trois premiers aux États-Unis dans le domaine médical, qui est sûrement à l'avant-garde, ça m'a frappé que les bâtisses ne s'étaient pas nécessairement construites dans la même année. Au contraire, j'ai trouvé qu'il y avait des bâtisses qui étaient considérées comme des hôpitaux numéro un dans le monde, mais c'était évalué selon la qualité des médecins qui étaient dedans.

Comme, de la même façon, moi, j'ai toujours considéré... Comme une école, ce qui compte, ce n'est pas l'épaisseur des murs, la beauté de la brique, mais plutôt la qualité des personnes qui sont dedans. Moi, j'ai étudié, je peux vous donner un exemple... Si vous allez voir où était l'école des sciences sociales quand j'ai étudié en économique, vous vous rendrez compte que, selon nos critères d'aujourd'hui, ça devait être considéré quasiment comme un taudis. Mais j'étais, à mon avis, dans la meilleure école qu'il y avait au Canada. Pour ceux qui étaient là, eux, ce n'était pas un taudis dans leur tête. Il y avait des gens qui étaient des bons professeurs, puis ils connaissaient ça. Alors, je pense que, ça aussi, ça fait partie de l'évaluation, de penser que ce n'est pas seulement de la construction, une école. Mais c'est évident que, dans notre climat, le monde ne peut pas étudier assis dehors.

Deuxième critère: la grosseur. Moi, je ne fais pas partie des gens qui considèrent que plus l'école est grosse, plus elle est belle. Je pense, par exemple, au contraire, que, si l'école est plus à l'échelle humaine, moins les gens sont obligés de se battre pour développer leur personnalité et ils peuvent s'épanouir plus facilement. Je pense que, dans une école-centre d'achats, le fort va passer au travers, mais, le fragile, lui, il va longer les murs. Alors, je pense que, dans une école, les caractères humains de l'école sont très importants.

Troisièmement: le transport scolaire. Si le but, c'est d'habituer les enfants à faire de l'autobus, on réussit très bien. On veut les habituer au transport en commun pour qu'ils l'haïssent correct? On est parfait, on l'a, l'affaire. Le budget du transport scolaire est de quelque 430 000 000 $, voyez-vous. Alors, moi, je pense que le transport scolaire doit être aussi un facteur qu'il faut considérer dans la construction des écoles pour faire en sorte qu'on se pose des questions.

Tout le monde pensait... tout le monde... beaucoup de gens pensaient que ça coûtait moins cher de construire des grosses écoles. Je n'ai jamais été de cette théorie-là, j'ai toujours mis ça en doute, pas seulement sur le plan de la prévention, mais sur le plan des coûts réels. Alors, quand il est arrivé des cas concrets, je me rappelle, une commission scolaire disait: On a besoin d'une école de 600 places, j'ai dit: 600 places, c'est gros. Parce que tous les gens à qui je l'ai demandé me disaient: La meilleure école, c'est 300, 350 places pour le primaire. Tous, sans exception, me disaient: De 300 à 350 places. Comme tout le monde me dit que la meilleure école, c'est 300, 350 places, 600, moi, je trouve ça gros.

Et je me rappelle que la présidente de la commission scolaire me disait: Oui, mais il nous en faudrait deux, en me regardant interrogativement, en me disant: Vous ne voudrez jamais qu'on en fasse deux. Bien, si on voulait. Là, les yeux se sont illuminés, elle a dit: Eh que le monde serait content! Bien, j'ai dit: Pouvez-vous regarder qu'est-ce que ça ferait en termes de transport scolaire, si on faisait deux écoles bien situées? Elle a dit: On n'aurait plus besoin de transport scolaire sans doute. Bien, on a pris ce modèle-là – je ne voudrais pas le nommer – et on l'a regardé.

(18 heures)

Le premier scénario, on l'a fait avec seulement la construction. Et là on s'est rendu compte que ça coûtait moins cher deux de 300 qu'une de 600. J'ai dit: Regardez aussi... Moi, je veux essayer d'aller plus loin là-dedans. Les gens vont me demander: Oui, mais le coût de fonctionnement? Il y a un directeur d'école... Même, je ne pense pas qu'à chaque école ça prend un directeur, ça peut être un professeur principal. On voit, dans les vieux films français, que c'est marqué: le principal. Dans la municipalité, il y avait le maire et le principal de l'école.

Alors, on a pris le modèle qui existait, actuel: deux écoles, 300 places. Puis, la réalité, si elles étaient localisées de telle façon, dans ces cas-là, concrets, en termes de transport scolaire, croyez-le ou non, sur une période de 12 ans, les deux écoles de 300 places coûtaient meilleur marché que l'école de 600. Ça change les paramètres, ça.

Le Président (M. Facal): M. le ministre...

M. Garon: Alors, c'est dans ce sens-là que je me dis qu'il faut regarder également ça en regardant l'avenir, puis en mettant toutes les variables dans la discussion.

Le Président (M. Facal): Merci, M. le ministre. Il est un petit peu passé 18 heures. Avant d'ajourner, je voudrais permettre au député de Marquette, sans commentaire, sans préambule, de déposer un document qu'il a dit plus tôt qu'il déposerait.


Document déposé

M. Ouimet: Voilà. Alors, j'aimerais déposer, pour le ministre de l'Éducation, la déclaration de M. Caldwell, du 7 avril 1992, pour qu'il puisse en prendre connaissance, et j'aurais une petite question, mais vraiment sans...

Le Président (M. Facal): Non, non, non, non.

M. Ouimet: ...sans débat.

Le Président (M. Facal): Non, non, non. Vraiment, M. le député de Marquette, l'entente que nous avions...

M. Ouimet: Et ce n'est pas là-dessus.

Le Président (M. Facal): L'entente... Ah! Bien...

M. Ouimet: Juste pour savoir s'il a lu...

Le Président (M. Facal): M. le député de Marquette, même si elle n'est pas là-dessus, nous avons dépassé 18 heures. Alors, nous ajournons et nous nous retrouverons...

M. Garon: M. le Président...

Le Président (M. Facal): M. le ministre.


Document déposé

M. Garon: J'aimerais déposer un document, parce qu'on en a parlé souvent, le «Programme expérimental de diversification des voies offertes aux jeunes en formation professionnelle».

Le Président (M. Facal): Merci beaucoup.

M. Garon: Si les membres sont intéressés à avoir le programme...

Le Président (M. Facal): Ce document est également déposé.

Nous ajournons nos travaux jusqu'à demain matin, 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 2)


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