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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le vendredi 26 novembre 1999 - Vol. 36 N° 22

Consultation générale sur la place de la religion à l'école


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Table des matières

Auditions


Intervenants
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. François Legault
M. Gilles Labbé
M. Claude Béchard
M. Jean-François Simard
Mme Solange Charest
M. Lawrence S. Bergman
*M. Arlindo Vieira, Conseil des relations interculturelles
*M. Jacques Desmarais, Ligue des droits et libertés
*M. André Paradis, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Onze heures sept minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): Je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Le mandat de la commission est de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur la place de la religion à l'école.

Est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Il n'y a pas de remplacements, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, l'ordre du jour: Aujourd'hui, ce matin, à 11 heures, nous recevons le Conseil des relations interculturelles; à 12 heures, la Ligne des droits et libertés; et nous ajournerons à 13 heures.


Auditions

Alors, bienvenue. Si vous voulez bien vous présenter. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation qui sera suivie d'échanges avec les deux groupes parlementaires.


Conseil des relations interculturelles

M. Vieira (Arlindo): Merci, Mme la Présidente. Mon nom est Arlindo Vieira. Je suis le président du Conseil des relations interculturelles, anciennement connu sous le nom de Conseil des communautés culturelles et de l'immigration. C'est un organisme autonome de consultation et de recherche créé par une loi de l'Assemblée nationale. Et la principale mission, c'est de faire en sorte que tous les citoyens soient reconnus de fait en égalité dans nos institutions, dans notre société et, évidemment, faire en sorte que l'intégration des nouveaux citoyens se fasse d'une façon harmonieuse et qu'on tienne compte, dans l'ensemble de nos institutions et de nos orientations, de la diversité ethnoculturelle et raciale qui compose notre société.

Notre propos, aujourd'hui, se résume à vous présenter l'école laïque comme la voie d'avenir pour le Québec. En effet, la place de la religion à l'école dépasse de beaucoup la seule place de la religion à l'école entendue dans un sens étroit. Le débat soulevé par la publication du rapport du Groupe de travail sur la place de la religion à l'école pose des questions d'une portée fondamentale pour l'avenir de la société québécoise.

Ainsi, certains des arguments invoqués dans le débat qu'il a soulevé en faveur du maintien pure et simple de la confessionnalité des écoles reposent sur une représentation, quant à nous, anachronique de l'identité québécoise, sur une interprétation tronquée de la règle de la majorité dans un régime démocratique et sur une interprétation restrictive des libertés fondamentales inscrites autant dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec que dans la Charte canadienne des droits et libertés.

Notre Conseil des relations interculturelles estime que le recours à de telles prémisses est dangereux et intenable dans un régime démocratique pluraliste, et c'est pourquoi il a jugé qu'il devait apporter sa contribution à cette délibération collective extrêmement importante pour l'avenir de notre société. Je dois dire aussi que ce n'est pas la première fois que nous le faisons parce que, en effet, au cours des dernières années, le Conseil des relations interculturelles s'est beaucoup attaché à cette question, non pas uniquement dans la perspective de l'intégration des immigrants et de la diversité ethnoculturelle et religieuse dont ceux-ci enrichissent notre société québécoise mais, plus largement et plus fondamentalement, dans l'intérêt de l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec.

(11 h 10)

L'école publique est, presque par définition, une institution extraordinairement sensible à la diversité sous toutes ses formes, en raison de la nature même de sa mission et de ses fonctions dans la société. C'est pourquoi nous pensons que c'est important pour nous de venir ici aujourd'hui et de vous rappeler un peu que la sécularisation des institutions de la société québécoise moderne fait partie d'une identité collective qui est toujours en voie de redéfinition. Une redéfinition qui a commencé à se faire sentir surtout à partir des années soixante, parce que, en effet, jusqu'à la Révolution tranquille, l'éducation québécoise était un peu à l'image de la société de l'époque, et le système scolaire était en effet constitué de deux entités institutionnelles établies sur des bases ethnoreligieuses qui recoupaient en forte proportion la division linguistique de notre société. L'héritage de ce passé a façonné beaucoup de nos institutions. Et, ainsi, l'éducation de base a conservé ses divisions ethnoreligieuses et linguistiques antérieures. Cette sécularisation des institutions est ainsi restée incomplète, surtout en ce qui concerne les écoles primaires et secondaires.

Aussi, on a mentionné l'impact de la Charte de la langue française qui a marqué aussi un changement d'envergure. La langue française, d'après l'esprit de cette loi, serait plus qu'un élément d'identité collective de la population d'ascendance française du Québec et est désormais définie officiellement comme un élément commun de l'appartenance civique de tous les citoyens du Québec au-delà des différences d'origine ethnoculturelle et des langues maternelles de ceux-ci.

Il y a aussi l'adoption de la Charte des droits et libertés de la personne qui constitue un autre moment historique charnière de cette redéfinition de l'identité collective de tous les Québécois. L'exercice des libertés fondamentales, dont évidemment la liberté de conscience et de religion, fut explicitement garanti à tous les citoyens en toute égalité, au-delà de la diversité de leurs caractéristiques ou de leurs appartenances. La Charte des droits et libertés de la personne est devenue ainsi un symbole des valeurs communes de la société québécoise et le garant de l'égalité des droits pour tous.

Le résultat de ces évolutions, c'est une incohérence et une tension croissante entre les aménagements confessionnels du système scolaire et les normes essentielles qui fondent la démocratie pluraliste au Québec, en particulier le droit à l'égalité et la liberté de conscience et de religion, garantis par les deux chartes de droits et libertés, dans une société dont la population se diversifie de plus en plus, notamment sur le plan des croyances religieuses et de la non-croyance.

C'est pourquoi maintenir indéfiniment les privilèges confessionnels par des clauses dérogatoires est, quant à nous, une solution inacceptable. Les privilèges consentis par notre système scolaire aux catholiques et aux protestants depuis 1867 contreviennent au droit à l'égalité en matière religieuse qui est reconnu aujourd'hui par les deux chartes des droits et libertés et obligent par conséquent le législateur à recourir à des clauses dérogatoires dont la légitimité même est de plus en plus contestable.

De l'avis de notre Conseil des relations interculturelles, il existe une contradiction évidente entre l'égalité affirmée comme principe fondamental et ces privilèges scolaires maintenus au prix d'une dérogation expresse à ce même principe, ce qui ne favorise guère l'acceptation par tous, tant les minoritaires que les majoritaires, du cadre civique commun qui est au fondement de notre citoyenneté. C'est pourquoi le Conseil rejette la reconduction indéfinie des privilèges confessionnels, car il considère le recours systématique à des clauses dérogatoires comme une solution inacceptable dans une démocratie pluraliste.

À l'instar de plusieurs autres organismes, le Conseil est d'avis que seuls des motifs exceptionnels peuvent justifier en droit de telles dérogations, et la protection des privilèges scolaires consentis aux catholiques et protestants n'entre pas dans la catégorie des motifs, quant à nous.

Un mot aussi sur l'offre multiconfessionnelle d'enseignement religieux qui n'est pas non plus pour nous davantage une solution acceptable ni viable. Certains voudraient garantir le droit à l'égalité en matière religieuse en élargissant la confessionnalité scolaire aux autres religions. Sur un plan formel et purement théorique, cette solution éliminerait, en principe du moins, le caractère discriminatoire des privilèges en faveur des catholiques et des protestants.

Mais la multiplication des statuts confessionnels pour les écoles ou encore une offre multiple d'enseignements religieux confessionnels répondant à la diversité religieuse de chaque milieu sont des solutions qui non seulement seraient extrêmement difficiles à gérer concrètement, mais créeraient un système de ségrégation religieuse dans les écoles publiques, en fonction du statut confessionnel ou de l'enseignement religieux offert. En outre, ces solutions assujettiraient l'exercice d'un droit fondamental au nombre de personnes susceptibles de les exercer, de sorte que, dans plusieurs milieux, le nombre insuffisant de membres de certaines confessions aboutirait à exclure systématiquement les personnes membres de minorités.

Une telle approche multiconfessionnelle irait diamétralement à l'encontre de la mission d'intégration, de cohésion sociale et d'éducation à la solidarité confiée à l'école publique commune. En effet, au lieu de rassembler tous les élèves autour des valeurs communes de notre société, l'école suivrait alors une logique ségrégationniste de cloisonnement et de fractionnement qui, au contraire, inclinerait chaque communauté de foi, de même que les non-croyants et les agnostiques, au repli sur soi et à la méfiance à l'égard des autres. Le Conseil appuie donc la solution proposée par le Groupe de travail, qui consiste à offrir un programme d'enseignement culturel des religions.

Dans notre mémoire, nous faisons aussi mention de la reformulation qui s'impose à l'article 41 de la Charte des droits et libertés de la personne. Je pense que c'est assez bien expliqué, les motifs, mais c'est néanmoins un aspect important. Il y a aussi, comme ce que nous proposons, une transformation des services d'animation pastorale et religieuse, parce que le Conseil reconnaît, à l'instar du rapport Proulx, que l'école publique doit prendre en compte le développement de la dimension spirituelle de la personne humaine. En ce sens, nous croyons que la proposition qui avait été faite par les états généraux sur l'éducation est restrictive.

Par ailleurs, dans la perspective laïque qui est la sienne, notre Conseil ne partage pas l'orientation du rapport Proulx visant à maintenir une animation religieuse ouverte à toutes les confessions et pouvant inclure l'organisation d'activités du culte à l'école publique. Le Conseil tient plutôt à insister sur les valeurs que doit viser cette animation et sur lesquelles se rejoignent en grande partie les deux rapports.

Parmi les valeurs démocratiques communes les plus classiques, il est fort concevable que certaines d'entre elles, sinon toutes, aient une portée qu'on pourrait qualifier de morale ou de spirituelle: ainsi, l'idée centrale de la valeur et la dignité fondamentales de la personne humaine, l'impératif moral de protéger les minorités contre les risques, entre guillemets, de la tyrannie de la majorité ou le devoir de solidarité entre citoyens ou entre prochains – ça se rejoint en quelque sorte – ont incontestablement une densité de sens suffisante pour rejoindre les motifs profonds de vie morale et spirituelle au-delà de leur portée stricte en philosophie politique.

Apprendre la démocratie, ce n'est pas éliminer la présence des valeurs religieuses et spirituelles, mais c'est au contraire permettre à des acteurs s'inspirant de tous les ordres de valeurs de vivre et de travailler ensemble dans un même espace civique et laïque commun dont les valeurs et les pratiques propres sont conçues justement pour permettre une cohabitation pacifique et des collaborations fructueuses à travers la diversité des allégeances particulières des personnes et des groupes. On ne saurait donc apprendre concrètement les exigences pluralistes de la démocratie sans apprendre à rencontrer directement cette diversité, ce qui exige qu'on ne cherche pas à en éliminer par avance de la sphère publique les différentes composantes dites religieuses, spirituelles ou philosophiques.

Les valeurs et les pratiques civiques communes inspirant une éthique démocratique doivent justement constituer le terrain commun nécessaire pour amorcer, dans un esprit authentique d'égalité, un travail d'animation de la vie spirituelle dans une école, en particulier au secondaire. Offrir un service de soutien à la vie civique n'est pas incompatible avec l'offre concomitante d'une animation de nature spirituelle. Le Conseil recommande donc de transformer les services actuels d'animation pastorale ou religieuse en services d'animation communautaire et à la spiritualité.

Ainsi, il serait possible de souligner, par exemple, des fêtes des différentes religions auxquelles appartiennent les élèves de l'école, d'en décrire le symbolisme et d'en expliquer la signification dans un esprit de compréhension et d'encouragement de la tolérance, sans pour autant faire de la pastorale ou de l'animation religieuse au sens strict une activité confessionnelle.

En ce qui concerne l'enseignement religieux confessionnel et les services d'animation pastorale ou d'animation religieuse au sens propre, le Conseil appuie la recommandation du Groupe de travail de permettre la prestation, dans les locaux de l'école, de services pastoraux ou religieux aux élèves de différentes allégeances religieuses, mais en dehors des heures d'enseignement et aux frais des groupes religieux, et ce, dans le cadre de la mission communautaire de l'école. Cette solution complémentaire respecte, quant à nous, la neutralité de l'État, le droit à l'égalité et la liberté de conscience et de religion, tout en offrant un lieu communautaire accessible à l'ensemble des groupes confessionnels présents sur le territoire de chaque école.

(11 h 20)

Nous faisons aussi mention dans notre mémoire d'un certain nombre d'obstacles au consensus et nous parlons surtout de trois types de clivage. J'aimerais surtout attirer votre attention sur le troisième clivage où il y a une différence entre les groupes des régions, mais la principale différence entre les groupes des régions, c'est que la population habitant Montréal et Québec a davantage l'expérience de la diversité, ce qui est moins clairement le cas dans l'ensemble des autres régions, en dépit du rôle important qui est joué par les médias de masse et les communications.

Dans ces conditions, la tentation pourrait être grande pour certains groupes de la majorité catholique de proposer des aménagements différents pour la région de Montréal et peut-être même celle de Québec et de simplement maintenir les aménagements actuels dans les autres régions en présumant une absence de discrimination dans ces dernières. Le Conseil tient à exprimer son opposition totale à toute solution de cette nature qui instaurerait deux régimes distincts dans différentes régions du territoire.

Comment, dès lors, arriver à tenir compte de la diversité québécoise? Le Conseil croit que cette situation appelle des efforts vigoureux d'information et de clarification auprès des populations majoritaires de parents catholiques dans les régions où l'école confessionnelle est encore tenue pour un acquis évident, jamais encore mis en question. Les inconvénients vécus par les membres des minorités doivent être rendus directement visibles aux yeux de ceux qui ont trop longtemps eu tendance, inconsciemment, à ne pas les voir. Il faut rendre visible le fait que les personnes minoritaires concernées habitent partout au Québec; ce ne sont pas uniquement des immigrés ou des gens de Montréal, comme on le croit souvent, mais d'abord des gens natifs de la même région.

Le pluralisme démocratique signifie qu'une majorité n'a pas seulement des droits et des libertés pour elle-même; elle a aussi des devoirs et des responsabilités en matière de respect des droits des minorités afin d'assurer leur pleine intégration en toute égalité au sein de la société. La diversité protégée par notre régime démocratique pluraliste n'est donc pas le seul fait de l'immigration ni le propre de la métropole montréalaise. La diversité est d'ores et déjà un trait marquant de la société québécoise prise dans son ensemble, et le seul cadre qui puisse l'intégrer toute est l'école commune laïque.

En conclusion, pour importants et essentiels qu'ils soient, les changements impliqués par la réforme que propose le Groupe de travail sur la place de la religion à l'école ne représentent tout de même pas une révolution radicale dans les structures et les pratiques scolaires au Québec. On peut déjà constater que d'importantes adaptations, bien que celles-ci soient encore insuffisantes, ont permis à l'école de s'ouvrir à la diversité. Le pas à franchir demeure néanmoins important, puisqu'il implique la reconnaissance de fait de l'égalité de tous en matière de convictions religieuses, et ce, autant dans la région de Montréal que dans les autres régions du Québec.

L'école québécoise se doit d'être, quant à nous, de manière conséquente, une école commune où tous les élèves apprendront à vivre et à travailler ensemble, solidaires dans leurs valeurs communes et dans le respect de la diversité religieuse et philosophique qui les caractérise dans leur ensemble et à travers laquelle ils se reconnaîtront, toutes et tous, égaux. Une école qui saura nourrir chez tous le sens d'une réelle appartenance commune avec des libertés personnelles et les responsabilités partagées que celle-ci implique, voilà le plus bel héritage que promet une laïcité ouverte pour le Québec de demain. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Vieira. M. le ministre.

M. Legault: Oui, M. Vieira, merci d'être ici aujourd'hui. On devait se voir il y a un certain temps, mais j'ai compris que vous avez eu la douleur de perdre votre père. J'en profite pour vous offrir toute notre sympathie.

Le Conseil des relations interculturelles, comme vous disiez tantôt, a été créé par une loi de l'Assemblée nationale en 1984 et, donc, vous avez comme mandat de conseiller notre ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Donc, vous pourrez sûrement nous aider à essayer, comme je le répète souvent, de trouver un consensus et à essayer de dépasser certains clivages qu'on aperçoit dans notre société, et aussi nous donner des pistes pour savoir comment on peut informer la population des scénarios à envisager pour pouvoir passer à une période de transition, puis d'ailleurs vous en parlez un peu dans votre mémoire, de cette période de transition.

Ma première question: Vous nous dites que vous vous objectez à une offre multiconfessionnelle d'enseignement religieux. Vous dites que vous vous objectez au nom de l'intégration des élèves. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a des personnes, entre autres un grand pourcentage des parents de la communauté catholique et protestante au Québec, qui, eux, voient des avantages pour le développement de l'identité de leurs enfants de conserver un enseignement religieux catholique et protestant à l'école. Selon votre expertise, selon les expériences que vous avez vécues sur le terrain, d'abord, si jamais on pensait à aller vers une offre de services multiconfessionnels, est-ce que vous pensez qu'il y a plusieurs communautés religieuses autres que les communautés catholique et protestante qui feraient la demande d'avoir des cours d'enseignement religieux dans nos écoles?

M. Vieira (Arlindo): Oui, évidemment, et cette demande-là, même à travers des représentations qu'ils nous font – j'ai eu l'occasion de rencontrer plusieurs représentants dans différentes communautés – elle existe dans la mesure où elle est perçue comme des privilèges qu'ont les catholiques et les protestants.

Alors, dans ce sens-là, plusieurs se demandent pourquoi, dans le contexte où nous vivons aujourd'hui, dans un Québec qui est très diversifié, donc où l'histoire n'a plus le même... On n'a pas toujours à se référer à la situation qui existait il y a un siècle ou deux. Dans un Québec moderne d'aujourd'hui, pourquoi, si on doit maintenir ce type de privilèges pour deux groupes confessionnels, on ne le maintiendrait pas pour les autres?

Il y a, concrètement, des demandes très spécifiques, notamment des représentants de la communauté musulmane. La communauté juive aussi qui... malgré que la situation, pour eux, est un peu différente parce qu'ils ont déjà une forme de reconnaissance publique à travers un système un peu parallèle qui est aussi financé par l'État. Du fait que eux, s'appuyant sur le même principe, y ont eu droit, pourquoi toutes les autres confessions qui sont présentes sur le territoire aujourd'hui, et surtout celles plus importantes, dont les musulmans sont certainement le groupe religieux qui suit... Ils font des demandes et des pressions constantes, si on est pour maintenir cette logique.

Par ailleurs, ils nous disent qu'ils sont prêts à accepter – en tout cas, plusieurs que j'ai rencontrés seraient prêts à accepter – un contexte où l'État, vraiment, ne favorise pas un groupe au détriment d'un autre. Là, ce qu'on nous dit, c'est que l'État laïque, c'est celui qui respecte, qui prend au sérieux la liberté de l'acte de foi et le respecte intégralement. Dans ce sens-là, ils seraient prêts à vivre... Et ils comprennent aussi les difficultés d'ordre pratique et le cloisonnement que ça amènerait nécessairement d'offrir des écoles pour répondre à ce type de besoins. Et l'école publique commune reste – parce que la plupart de ces groupes-là, ils souhaitent une intégration dans notre société – le moyen par excellence d'intégration et, en même temps, la réponse qu'on connaît d'une société qui est vraiment inclusive et qui respecte tout le monde.

M. Legault: Mais je voudrais revenir davantage à votre expérience sur le terrain.

M. Vieira (Arlindo): Oui.

M. Legault: D'abord, vous savez déjà que, dans la Loi sur l'instruction publique, à l'article 228, il y a une ouverture à, éventuellement, avoir un enseignement religieux autre que catholique et protestant dans les écoles; il y a aussi l'article 41 de la Charte qui montre une ouverture aussi de ce côté-là.

Ce qu'on nous rapporte sur le terrain – en tout cas, certains groupes nous ont dit ça – c'est que, premièrement, il n'y a pas de demande, vraiment, des autres communautés religieuses et que, deuxièmement, la discrimination potentielle qui est invoquée, elle est un peu théorique parce que, sur le terrain, on nous dit – en tout cas, certains groupes nous disent – qu'il ne semble pas y avoir de problèmes de discrimination puis que, finalement, dans le système actuel, les communautés religieuses minoritaires – si je peux les appeler ainsi – fonctionnent très bien, avec beaucoup de tolérance de la part des communautés religieuses catholiques et protestantes. Qu'est-ce que vous avez vécu, qu'est-ce que vous voyez sur le terrain de ce côté-là?

(11 h 30)

M. Vieira (Arlindo): Bon. Il faut distinguer, d'abord, dans le système anglais et dans le système français. Dans le système anglais – enfin, dans l'ancien réseau protestant – il y a effectivement une tradition de cohabitation qui a été expérimentée et dont semblent s'accommoder relativement bien toutes les confessions, mais dans la mesure où ce n'est pas perçu comme étant un lieu, je dirais, d'évangélisation ou de pratique qui, dans les faits, ne se retrouve pas...

Donc, pour plusieurs, ils viennent en quelque sorte de découvrir un peu – parce qu'ils ont été beaucoup en contact plus avec le réseau anglais – tout ce débat-là et le type de privilèges qui existaient dans nos lois par rapport à l'expression de la confessionnalité. Parce que, dans les faits, ça fonctionnait comme étant... Je pense qu'il faut se le dire, il faut l'admettre, le réseau anglais surtout fonctionnait comme étant un réseau de laïcs, où aucune religion n'avait probablement des droits plus affirmés par rapport à d'autres, et donc, dans ce sens-là, ils semblaient s'accommoder assez bien.

Mais, dans la mesure où on s'aperçoit maintenant que ce n'est pas tout à fait cela et que, dans les adaptations, le réseau français maintenant et anciennement catholique est maintenant plus appelé à vivre et à s'ouvrir à cette nouvelle réalité, là il a commencé à y avoir des résistances, et ça semble être aussi très, très réel, là, il y a de l'inquiétude. Là, dans ce sens-là, les gens disent: Dans ce cas-là, il faut clarifier les règles du jeu. Ou bien tout le monde est sur le même pied ou bien nous ne le sommes pas.

Bon. Il y a effectivement deux courants. Il y a un courant qui propose une offre multiconfessionnelle. Ça, c'est une réalité que certains groupes, je dirais, plus militants souhaiteraient même peut-être. Alors, ils ouvriraient l'école à la possibilité de profiter de l'organisation de l'éducation religieuse dans les écoles, ça ouvrirait la porte pour faire une part de formation religieuse pour leurs élèves. Donc, dans ce sens-là, il y a sur le terrain, effectivement, des demandes qui vont dans le sens de l'offre multiconfessionnelle.

Mais, nous, en tout cas, bien d'autres... Et je pense que là-dessus la plupart de ceux qu'on a pu consulter et contacter et qui viennent nous voir, par exemple, ils vont dans le sens qu'il serait mieux, finalement, d'avoir une école où l'État serait neutre et respecterait effectivement la liberté de tous et chacun. Parce que, de toute façon, il serait pratiquement impossible d'organiser des services qui répondent à tous les besoins ou, alors, ça aurait des effets à long terme aussi, en tout cas qui pourraient être inquiétants, qui seraient dans le sens à contribuer à ce qu'il y ait une forme de concentration de certains groupes pour avoir le droit à cette offre multiconfessionnelle. Ils seraient comme obligés ou incités à rester dans certains quartiers et ça amènerait d'autres difficultés après d'intégration.

Alors, il y en a beaucoup qui s'inquiètent de ça, parce que le fait d'avoir des écoles ou d'avoir un nombre suffisant pour avoir une offre multiconfessionnelle les inciterait à rester cantonnés dans leur sorte de ghetto – si on veut, sans abuser du terme, parce que je pense qu'on en abuse parfois – et ça resterait un élément qui retarderait de beaucoup leur intégration. Ça les inquiète parce qu'ils veulent s'intégrer le plus rapidement possible. Et, dans ce sens-là, en dépit du fait que plusieurs seraient privés, dans les faits, de la possibilité d'avoir accès à cet enseignement, pour des questions d'organisation pratique, je pense que tout le monde comprend et qu'eux-mêmes comprennent que ça ne serait pas justifié pour un petit nombre. Donc, ils ont autant de droits fondamentaux qu'ils seraient prêts plutôt à eux-mêmes assumer, quitte à le faire dans le sens proposé du rapport Proulx, donc en dehors des heures de classe et eux-mêmes à l'assumer.

M. Legault: Supposons, pour les fins de la discussion, qu'on retiendrait votre proposition. Bon. Vous nous parlez d'une période de transition. Comment vous pensez qu'on pourrait inciter des milieux qui sont relativement homogènes au plan religieux à accepter de faire cette transition? Comment en pratique vous nous suggéreriez d'agir? Quelles seraient les étapes que vous verriez? Quelles sont les périodes, les délais, que vous nous suggéreriez, si on acceptait votre proposition, pour convaincre, entre autres, les communautés catholiques et protestantes?

M. Vieira (Arlindo): Bon. Je pense que la voie est un peu celle que nous indiquons, dans le sens où les services d'animation pastorale seraient transformés et – là-dessus, bon, je pense qu'on l'explique assez bien dans notre mémoire – garderaient la dimension spirituelle importante. Donc, ça ne serait pas une dimension strictement civique, mais la dimension spirituelle serait importante. Et ça, je pense que ça pourrait faire en sorte que beaucoup pourraient y adhérer facilement, à ce type de solution.

Autour de valeurs que, finalement, toutes religions partagent, on pourrait découvrir les valeurs des autres et, en même temps, se servir de ces occasions. Je ne sais pas, à la période du ramadan, par exemple, on pourrait, autant les catholiques que toutes les autres religions ou ceux qui n'en ont aucune, découvrir et partager en quelque sorte le symbole, la signification que ça peut avoir et faire le rapprochement avec les valeurs de la religion catholique, par exemple, et ça, dans une dimension qui serait au-delà des simples connaissances abstraites de ces notions-là, dans un vécu réel, à travers une animation, des activités concrètes de partage et d'animation, même là où il n'y en a pas, de musulmans.

Je pense que ça pourrait être la sorte de compromis qui pourrait nous mener vers un consensus, on croit, en tout cas. Je pense que ça serait important de faire vivre concrètement des expériences de spiritualité à nos jeunes autour de ce type d'animation. Avec ça, je pense que c'est le compromis qui serait acceptable, qui nous mènerait vers la meilleure solution.

M. Legault: Et donc, selon votre expérience, vous pensez que ça pourrait faire un consensus et éviter une certaine révolte de la part des parents catholiques et protestants. Donc, vous pensez que votre suggestion, sérieusement, pourrait faire consensus et éviter...

M. Vieira (Arlindo): Oui, dans la mesure où évidemment...

M. Legault: ...une réaction trop forte.

M. Vieira (Arlindo): Excusez. Dans la mesure où la majorité serait quand même dans cette animation-là – elle aurait quand même la plus grande part – mais où il y aurait concrètement, quand même, des expériences d'autres croyances et d'autres façons de vivre la spiritualité. En faisant bien comprendre que la tradition catholique, elle, demeure et reste importante et capitale dans notre société, on pourrait peut-être convaincre...

Je conviens qu'il y a tout un travail aussi de formation et de sensibilisation à faire, mais qu'en même temps il y a des principes sur lesquels je pense qu'une société avancée, une société démocratique comme la nôtre, ne doit pas abdiquer. La majorité a aussi des devoirs et des responsabilités. Et le respect des minorités, c'est comme ça qu'on évalue toujours en grande partie le degré d'une société, de la démocratie. Je pense que ça aussi, ça s'éduque. La population pourrait être avantageusement convaincue. Tout en respectant ses traditions, on pourrait de cette façon-là, par l'animation qui serait faite dans les écoles, arriver à une sorte de connivence qui est nécessaire et qui est importante.

M. Legault: Merci beaucoup.

M. Vieira (Arlindo): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Masson.

M. Labbé: Merci, Mme la Présidente. M. Vieira, je vous remercie de votre présentation et surtout d'être venu ce matin. On apprécie énormément. Je vais continuer dans la même veine que M. le ministre, si vous le permettez. Justement, quand vous parlez d'un service d'animation communautaire et à la spiritualité, c'est un petit peu ce sur quoi on parlait. Vous dites aussi, dans votre document, que ça serait peut-être une belle occasion de parler justement des habitudes, des accommodements religieux au niveau des habitudes alimentaires et même vestimentaires. Est-ce que vous verriez qu'on pourrait en parler à l'intérieur de cette partie, de cette pédagogie-là, par rapport justement au service d'animation communautaire? C'est-u un endroit où vous verriez ça, à ce moment-ci, dans un premier temps? Et qui pourrait donner cette formation-là?

M. Vieira (Arlindo): Oui, certainement, ça serait le lieu où ça pourrait se faire, parce que, plus que d'apprentissage théorique, c'est une expérience de vécu autour d'événements qui pourraient rassembler toute la population ou tous les élèves de l'école, et même les enseignants et les autres, autour de certains types d'événements qui feront autant partager... Je ne sais pas, Noël, il peut aussi bien être enseigné et vécu, par des expériences concrètes, par ceux qui ne partagent pas la croyance chrétienne, comme d'autres expériences et d'autres vécus, d'autres formes de vivre la spiritualité et la croyance.

(11 h 40)

Ceux qui pourraient le faire, ça serait probablement, même, des animateurs actuels. Dans la façon dont ça serait encadré, ils auraient bien compris l'esprit et le sens de ce nouveau type d'animation. Je pense que ça n'impliquerait pas nécessairement un changement de personnel, dans la mesure où eux-mêmes sont formés, éduqués et le sont, je pense, en grande partie par, même, la nature de la fonction.

Mais ils le feraient moins dans le cadre d'une forme de prosélytisme, en quelque sorte, même si, dans les faits, parfois il n'existe pas mais quelque part ouvre la possibilité de le faire. Et, dans ce sens-là, donc, on enlèverait cette dimension-là pour introduire cet autre type d'expérience qui enrichirait de beaucoup, je pense, l'école, et ça permettrait à tous de partager les mêmes choses. Donc, il n'y aurait pas d'exclusion ni pour les uns ni pour les autres.

M. Labbé: D'accord. Suite à ce que vous venez de dire, M. Vieira, je soulignais justement qu'hier on avait l'occasion de rencontrer des groupes musulmans. On connaît la réticence qu'ils ont par rapport à justement des gens qui pourraient parler de leurs traditions, de tout ce qui s'appelle le patrimoine des fêtes, ainsi de suite, et je pense que vous êtes sûrement sensible au fait qu'eux autres considèrent que la personne la mieux habilitée à parler de leurs traditions religieuses, c'est une personne qui est vraiment choisie par la communauté comme telle. De votre côté, comment vous verriez ça à ce moment-là? Est-ce que vous sentiriez des réticences de par ces ethnies qui sont peut-être plus réticentes justement à ce qu'on enseigne des choses qui leur appartiennent?

M. Vieira (Arlindo): Non. C'est sûr que, dans le cadre de cette animation-là, il devrait y avoir une forme de collaboration, mais ça se fait déjà régulièrement. On fait appel à des ressources extérieures. Et je vois très bien, dans le cadre de ce type d'animation, le responsable des valeurs humaines qui pourrait faire appel régulièrement à des personnes, à d'autres ressources qui proviendraient de ces groupes-là et de ces communautés. Je pense qu'effectivement la personne elle-même, si elle est responsable et consciente, ne se sentirait pas à l'aise pour affirmer, par exemple, ou exprimer certaines formes ou certaines façons de comprendre ou de vivre certaines croyances.

Je pense que ça devrait être fait, et ça se ferait sans trop de difficultés, sans que les personnes aient à avoir une fonction spécifique ou un cadre précis à l'intérieur de l'école. Ça se ferait dans le cadre de ce type d'animation. Les gens viendraient régulièrement, autant musulmans que bouddhistes, et ça serait la personne de cette croyance-là qui viendrait aider en quelque sorte l'animation ou la concrétiser, dans les faits, pour quelle soit bien comprise et que ce qu'on prétend transmettre soit effectivement exact.

M. Labbé: D'accord. Merci, monsieur.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Merci, Mme la Présidente. M. Vieira, merci, bienvenue pour votre mémoire et merci de nous faire partager vos connaissances en ce qui a trait à la vie en commun et aux relations entre, je dirais, les Québécois qu'on pourrait qualifier de souche et les nouveaux Québécois, mais qui ensemble forment sans aucun doute un Québec, une société absolument moderne. Et c'est d'ailleurs un des points que vous abordez dès le début de votre mémoire.

Moi, un des premiers éléments que je voulais vous demander, c'est... Il y a des gens qui sont venus ici et qui nous ont dit: Oui, ces changements-là pourraient être opportuns, mais est-ce que la société québécoise est vraiment prête? Est-ce qu'on est vraiment à la croisée des chemins où on doit procéder à ces changements-là? Et vous avez une certaine ouverture d'un autre côté quand vous dites, entre autres, que vous rejetez la reconduction indéfinie des privilèges confessionnels. Est-ce que vous laissez une porte à une certaine période? Et est-ce que vous croyez que le moment est vraiment venu de procéder à ces changements-là?

Parce qu'il y a, entre autres, les commissions scolaires qui nous ont dit que peut-être on devrait reconduire et attendre pour vraiment mettre les programmes en place et qu'il n'y a pas nécessairement urgence pour le faire tout de suite, on peut procéder sur quelques années. Pour vous, est-ce que la question de la place de la religion à l'école est maintenant à une croisée des chemins où il faut procéder immédiatement à des changements et prendre des décisions immédiatement sur ces questions-là?

M. Vieira (Arlindo): Sincèrement, je crois que oui. J'ai peut-être la perception d'un Montréalais, mais je crois que notre société... Nous avons fait, il y a deux ans, une vaste consultation à travers tout le Québec et nous avons rencontré des milliers de citoyens qui sont venus l'exprimer, et ça s'est confirmé un peu partout. Donc, la perception n'est pas spécifiquement montréalaise. Peut-être qu'en quelque sorte ils ont expérimenté un peu plus cette diversité, entre autres, à cause des médias de masse, etc. On en parle un petit peu, mais la différence n'est pas si grande que ça, le clivage n'est pas si important entre les différentes régions.

Donc, je pense que, oui, il est temps. Je pense que, sur des questions fondamentales, on ne doit pas reculer. Et je pense que le moment est attendu, notamment, de la part de beaucoup de minorités, et les Québécois ont démontré qu'ils sont suffisamment ouverts et sont préoccupés par l'intégration de ces minorités-là et ils comprennent qu'ils n'ont peut-être plus le choix de faire ce pas-là.

Dans les faits, il est déjà, en grande partie, fait ici. Il y a comme un décalage entre cette réalité de droit et les faits, parce que, dans les écoles, ça se vit quand même relativement bien, cette forme de cohabitation. Mais il reste ce petit pas à faire, et je pense que le moment est opportun pour le faire.

C'est sûr qu'il y a un effet pédagogique aussi important, le fait que l'État lui-même va de l'avant, le propose et enseigne à tous les citoyens ce devoir de responsabilité envers ses minorités, à les traiter toutes d'une façon égale, et donc envoie le signal vraiment que nous sommes une société inclusive et que nous souhaitons que ceux qui sont venus vivre et partager cette société avec nous, qui sont nés...

Parce que souvent on parle de ces réalités-là comme si c'était quelque chose juste des 10 ou des 20 dernières années, et il faut penser qu'il y a beaucoup de ce qu'on appelle des communautés culturelles qui sont nées ici, et souvent même depuis des siècles, et que, bon, notre société n'a pas encore été capable de faire ce pas-là. Je pense que, à l'aube du prochain siècle, les gens croient que le moment est venu de faire cette transformation-là dans nos lois, qui, bien souvent, est déjà faite dans la réalité des faits de tous les jours.

M. Béchard: Vous proposez une modification à l'article 41 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et vous présentez – d'ailleurs, je crois que c'est à la page 5 et, ensuite, aux pages 7 et 8 de votre mémoire – cette Charte québécoise comme étant un trait caractéristique de la société québécoise et qui a une force quasi constitutionnelle.

Il y a des gens qui sont venus ici et qui ont dit... entre autres Me Patrice Garant, qui a dit que de modifier l'article 41, c'était presque de modifier un des éléments qui font du Québec une société distincte, spécifique, et qui caractérisent la société québécoise, en disant que c'est un article qu'on ne retrouve pas ailleurs et qu'il faudrait faire attention parce que, si on veut vraiment se conformer aux autres chartes, à la Charte canadienne, entre autres, et à d'autres exemples au niveau international, le Québec risque de perdre de sa couleur au niveau, entre autres, du choix des parents en ce qui a trait à la religion. Qu'est-ce que vous répondez à ces arguments-là?

M. Vieira (Arlindo): Bon. Je pense que c'est attribuer à l'article 41 plus de poids et de valeur qu'il n'en a. En effet, je ne suis pas sûr qu'il veuille bien dire ce qu'on prétend qu'il dit souvent. Mais il reste, quant à nous, qu'il est un obstacle à la possibilité d'un système d'écoles publiques communes laïques. Et, dans ce sens-là, si on propose une reformulation, ce n'est pas un changement radical du principe – peut-être que certains prétendent que c'est ça qu'il aurait dû dire ou qu'il voulait dire de toute façon – c'est de garantir le droit des parents, tout simplement, d'assurer l'éducation de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques sans imposer à l'État le devoir de le faire.

Alors, c'est dans ce sens-là. Je ne pense pas que ce soit une caractéristique fondamentale de toute façon et que ça changerait le sens, que ça ferait en sorte que le Québec se distingue. S'il doit se distinguer, je pense que ça ne serait pas pour la bonne raison et qu'il devrait plutôt le reformuler dans le sens de garantir effectivement aux parents, mais pas nécessairement à l'État de le fournir, ce service-là.

M. Béchard: O.K. Quand vous parlez de la proposition, vous appuyez le programme d'enseignement culturel des religions. Il y a un constat qui se fait, c'est que, dans le fond, de mettre en place ce cours-là, c'est presque aussi compliqué, au niveau des matières à retenir, de la façon de l'enseigner, quelles religions seront incluses ou pas, que de finalement ouvrir à la multiconfessionnalité. C'est sur la formulation comme telle du cours, d'une part.

(11 h 50)

Et, d'autre part, est-ce que vous croyez – et vous l'avez abordé un petit peu tantôt – que ce cours-là devrait accorder une prédominance particulière aux traditions historiques religieuses du Québec, c'est-à-dire qu'il y ait une plus grande place à l'intérieur de ce cours-là pour les religions catholique et protestante et qu'on le centre davantage sur cette approche-là, quitte, oui, à ouvrir à d'autres religions et à enseigner ou faire prendre connaissance aux jeunes des autres phénomènes religieux?

Mais est-ce que vous croyez qu'une approche comme ça, plus historique, de la situation québécoise, en ce qui a trait aux religions, permettrait de rallier certaines personnes et serait acceptable et serait applicable aussi dans les faits?

M. Vieira (Arlindo): Je pense que oui, parce que c'est un peu la carte d'interprétation de notre société. On ne pourrait pas comprendre bien là où nous en sommes aujourd'hui, l'évolution et la façon de fonctionner de nos institutions, si on ne passe pas par ça. Et forcément je crois que la tradition chrétienne et catholique doit avoir une forme de place, une prépondérance, si on veut, dans le programme de ce cours-là. Je crois que c'est essentiel.

Mais il reste que l'enseignement culturel des religions, par l'exploration des symboles de plusieurs confessions religieuses à laquelle ça donnerait lieu, conduira en quelque sorte les élèves à devoir examiner le sens de leur propre appartenance confessionnelle, mais dans un contexte pluraliste, c'est-à-dire en apprenant à reconnaître et à respecter le fait que d'autres personnes adhèrent à d'autres systèmes de croyance ou de courant de pensée et se rattachent à d'autres communautés d'appartenance ou de référence.

Je pense que ce type d'enseignement culturel des religions offre des procédés d'apprentissage plus conviviaux, une sorte de congruence avec le «vivre ensemble» de citoyens libres et responsables dans un même espace social et civique, et ça n'est pas contradictoire avec une forme de rôle prépondérant et prédominant que pourrait avoir la tradition chrétienne et catholique.

M. Béchard: Mais, M. Vieira, que répondez-vous aux gens qui diraient que la mise en place de ce cours-là et de ses contenus ferait en sorte qu'on devrait procéder à de tels arbitrages que, finalement, en bout de ligne, c'est peut-être encore plus compliqué d'assurer un contenu adéquat de ce cours-là que d'ouvrir à l'enseignement d'autres religions, là où le nombre le justifie, avec des accommodements raisonnables?

Sur la composition du cours comme tel, comment le gouvernement pourrait s'y prendre pour qu'il y ait un contenu le plus neutre possible, qui représente en même temps l'évolution historique du Québec au niveau religieux? Et quelle serait la place des différents groupes religieux que l'on pourrait faire participer à l'élaboration d'un tel cours?

Est-ce que vous pensez que ça serait possible ou ça serait peut-être une solution de faire participer les différents groupes religieux à l'élaboration de ce cours-là pour s'assurer, je dirais, d'aplanir le plus possible les irritants et aussi, en même temps, de répondre à un souhait que plusieurs font? C'est-à-dire qu'ils veulent être impliqués et participer à l'élaboration d'un cours culturel des religions ou de tout cours d'enseignement religieux qui pourrait être élaboré.

M. Vieira (Arlindo): Bon. C'est sûr qu'il y a une certaine forme de complexité, mais c'est le cas aussi pour bien d'autres programmes et d'autres matières dans l'enseignement. Je ne crois pas que c'est un obstacle insurmontable, d'autant plus que ça a déjà été expérimenté. Il y a plein d'autres sociétés, en Occident, notamment, qui ont déjà pris de l'avance, je dirais, sur ça. En Europe, notamment, il y a beaucoup d'expériences qui ont exploré et qui ont établi des programmes qui tiennent compte de la diversité de leurs populations.

Donc, on ne partirait pas à zéro. Mais ça n'exclut pas non plus que des groupes d'autres confessions soient invités à participer à l'élaboration de ces programmes. Ça, je pense que ça va de soi et que ça pourrait se faire. Je ne dis pas que c'est simple, mais c'est incontournable, c'est indispensable.

M. Béchard: À la page 10 de votre mémoire, vous appuyez la recommandation du Groupe de travail en ce qui a trait à la prestation, dans les locaux de l'école, des services pastoraux religieux aux élèves des différentes allégeances religieuses, mais en dehors des heures d'enseignement et aux frais des groupes religieux. Est-ce que, pour vous, il doit y avoir une ouverture à ce niveau-là vraiment à tous les groupes religieux, sectes et tout ça, au même niveau, ou est-ce qu'on doit procéder à certains arbitrages? Parce que, en bout de ligne, même si c'est en dehors des heures de classe, c'est quand même dans l'école, dans un lieu public. Comment on pourrait regarder cette question-là? Est-ce qu'on ouvre à tout ou s'il faut qu'il y ait une demande faite au conseil d'établissement qu'une secte ou qu'un groupe veut organiser soit de l'enseignement religieux ou d'autres activités religieuses? On est obligé de dire oui ou est-ce qu'on devrait procéder à certains arbitrages?

M. Vieira (Arlindo): Je crois que, nécessairement, ils vont être nécessaires. Même si cette question-là de la difficulté de reconnaissance de certains groupes ou certaines sectes, même sans la poser, même pour des groupes qui sont reconnus, qui sont bien établis, qui ont des traditions, qui sont respectés, il pourrait y avoir cette forme d'arbitrage, parce qu'ils restent quand même limités, le nombre d'heures, l'aménagement des lieux, etc. Donc, de toute façon, il doit y avoir des formes d'arbitrage. Mais, pour ça, bon, je pense qu'il faut laisser une place aussi à une certaine dose de bon sens, aussi aux organisations locales, aux comités d'école.

Et il y a des formes de reconnaissance de l'État, aussi, qui existent pour ce type de situation. Alors, on pourrait peut-être s'inspirer de ce type d'arbitrage que l'État est obligé de toute façon de faire, parce que toutes les sectes ou toutes les religions ne sont pas connues ou reconnues, je voudrais dire, et n'ont pas accès aux mêmes types de facilités que d'autres. Alors, ça se pose à d'autres niveaux aussi. Donc, c'est une question qu'il faudrait laisser beaucoup de place et de marge. Il y a l'ensemble des groupes confessionnels qui sont présents sur le territoire de chaque école. Et à chaque école même d'arbitrer ça, parce qu'il y a des arbitrages qui sont inévitables de toute façon.

M. Béchard: Mais justement, dans ces cas-là, à partir du moment où on dit: On laisse le soin à l'école de faire ces arbitrages-là, ça ne risque pas de placer, je dirais, le conseil d'établissement ou l'école dans une situation bien particulière où ils doivent juger de la pertinence de la présence de certains groupes dans les écoles, même en dehors des heures de classe?

On a toutes sortes d'exemples qui nous viennent en tête, là, entre autres au niveau des nouvelles religions. Est-ce que vous seriez prêts à laisser complètement aller, au niveau des conseils d'établissement, au niveau local, ces décisions-là? Est-ce qu'il faudrait leur fournir certains paramètres? Est-ce qu'il faudrait un peu les guider là-dedans au niveau de ce qui est acceptable et de ce qui ne l'est pas?

M. Vieira (Arlindo): Oui. En tout cas, si on doit aller dans le sens de cette orientation-là, je pense que oui. Si on dit qu'on permet aux différentes allégeances religieuses une présence ou la possibilité de faire une forme autant d'animation que de formation de leurs fidèles, c'est la difficulté que ça présente, mais je ne pense pas que ça soit insurmontable.

Nous avons démontré, par notre vécu démocratique, être capables de régler ce genre de situation. Et, si vraiment une situation de discrimination se présente, il y a des mécanismes qui sont prévus pour faire obstacle. Si vraiment on peut démontrer qu'il y a eu discrimination, que ça puisse être réglé par des mécanismes qui existent, par ailleurs, dans bien d'autres situations. Et ça ne serait pas différent à l'école que ça l'est ailleurs dans la société.

M. Béchard: Dernière question. À la page 12 de votre mémoire, vous êtes absolument contre l'idée qu'il pourrait y avoir, dans certains cas, par exemple, différents aménagements pour la région de Montréal par rapport aux autres régions au Québec. Est-ce que, pour vous, cette situation-là est vraiment irrecevable? Et je dirais: Quelles en sont les principales raisons? Parce que ça pourrait être, effectivement, comme vous le mentionnez, tentant, d'un côté, de dire: Écoutez, il y a 90 % du territoire, comme tel, québécois, où on pourrait à peu près garder le système actuel et apporter vraiment une situation spécifique à la région de Montréal, à la grande région de Montréal. Quelles seraient les principales embûches à avoir une espèce de système comme celui-là?

(12 heures)

M. Vieira (Arlindo): Bon. Je ne crois pas que j'aie le temps d'élaborer là-dessus, mais c'est effectivement une tentation, ça, dans la tradition bien chrétienne, qu'il faut absolument éviter, je crois. Parce qu'il faut éviter qu'on se retrouve... Il existe déjà, par ailleurs, le fait que la concentration soit déjà, je pourrais dire, disproportionnée dans la région de Montréal, la concentration de la diversité ethnoculturelle et raciale soit très concentrée dans la région de Montréal. Il faut à tout prix éviter qu'on la consacre et qu'on renonce pour toujours à changer les choses et que le reste du Québec ne puisse pas partager cette même diversité et qu'on crée justement, en créant des aménagements de ce type-là, des incitatifs à perpétuer ou à consacrer cette situation-là. Je pense que c'est une tentation très dangereuse. On se trouverait effectivement, probablement, dans quelques générations, avec deux sociétés et deux Québec qui ne partagent pas du tout le même territoire, le même espace commun, le même espace civique.

Et ça aussi... parce que la diversité n'est pas exclusivement due à l'immigration. Il y a aussi, même dans la population majoritaire, toutes formes d'autres croyances, des personnes qui sont non croyantes, et tout ça, qui ont aussi les mêmes droits, et on doit faire en sorte que, dans tout le territoire, ils soient respectés. Et c'est une forme d'éducation elle-même, l'éducation civique, aussi, qu'on ne devrait pas être tenté de s'embarquer dans ce type de solutions parce que, en termes de cohésion sociale, elles pourraient être potentiellement très dangereuses pour l'avenir de notre société. Si on est lucide un peu, on devrait l'éviter.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Vieira, pour votre présentation. Nous allons suspendre 30 secondes.

M. Vieira (Arlindo): Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 12 h 2)

La Présidente (Mme Bélanger): Nous recevons maintenant la Ligue des droits et libertés, représentée par Me Jacques Desmarais et M. André Paradis.

Alors, nous vous souhaitons la bienvenue. Comme le monsieur qui vient de passer avant vous, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi par un échange, avec les groupes parlementaires, de 40 minutes.


Ligue des droits et libertés

M. Desmarais (Jacques): Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je me présente, Jacques Desmarais. Je suis secrétaire du conseil d'administration de la Ligue des droits et libertés; je suis accompagné de M. André Paradis, qui est membre du conseil d'administration à titre de directeur.

La Ligue des droits et libertés, comme notre mémoire l'expose, au début, c'est une organisation non gouvernementale sous le seul contrôle de ses membres, de type communautaire et généraliste, intéressée à faire la promotion et la défense des droits humains, de leur universalité et de leur indivisibilité et des organisations québécoises diverses engagées dans cette même cause.

Notre préoccupation légendaire est vraiment fondée sur le respect des droits, particulièrement des droits et des libertés fondamentales. Vous n'avez donc sûrement pas été étonnés que notre mémoire accorde à cette préoccupation la quasi-totalité de ses énergies. C'est l'énoncé des droits et libertés, en particulier la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée il y a maintenant 51 ans, qui a guidé l'esprit et la lettre du mémoire que nous vous soumettons.

Ma déformation de professeur serait appelée, d'une certaine façon, à qualifier notre mémoire d'exercice rigoureux, presque implacable, de l'application des droits, en particulier des droits et libertés fondamentales, à la question de la place de la religion dans l'école.

Nous ne sommes pas les premiers à affirmer ces choses. Nous ne sommes pas les premiers à tenter de démontrer que le Québec, comme État et comme gouvernement, a accepté de se lier non seulement dans une Charte québécoise des droits et libertés, mais à d'autres instruments internationaux fondamentaux que sont la Déclaration universelle et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Et c'est à partir de ces engagements que nous avons trouvé les arguments qui cherchent à faire en sorte que le débat auquel nous sommes conviés aboutisse à résoudre, à avancer dans la solution de cette question.

Il y a, parfois, des événements, dans l'actualité, qui renforcent notre orientation puis notre préoccupation. Vous avez probablement déjà pris connaissance d'une décision toute récente, du 5 novembre 1999, du Comité sur les droits humains de l'ONU qui est chargé de recevoir les plaintes de citoyens, d'individus relativement à l'application, en particulier, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Or, l'Ontario a été justement épinglée, le 5 novembre, par un rapport de ce Comité relativement à sa politique de financement exclusif des écoles catholiques. Et, 90 jours après le 5 novembre, l'Ontario est appelée à expliquer pourquoi sa politique discriminatoire, en violation de l'engagement international contenu dans ce Pacte, peut justifier sa politique.

Je ne reprendrai pas toutes les dispositions de notre mémoire. Comme je vous ai dit, c'est un exercice d'examen rigoureux, implacable, de l'application de certaines règles de droit fondamental à la question qui nous est soumise. Nous, on pense qu'il faudrait résoudre cette question de façon politique et ne pas attendre que les tribunaux soient saisis, ici et là, à tous les mois, à tous les six mois, à tous les ans, de contestations, de plaintes relativement à l'application privilégiée à certains groupes des fonds de l'État, des structures de l'État, des institutions de l'État. C'est pour ça qu'on met de l'avant, oui, la déconfessionnalisation, l'introduction d'une école plutôt laïque.

Le recours à la clause dérogatoire, qu'est-ce que c'est? Bien, c'est l'admission qu'on fait de la discrimination. Et, sur le plan juridique – ça a été soulevé par d'autres avant nous – quand on regarde le Pacte en question auquel l'Assemblée nationale a adhéré, bien, le Pacte ne permet pas la dérogation, sauf lorsque, dit l'article 4, «un danger exceptionnel menace l'existence de la nation». Je ne pense pas qu'on pourrait invoquer que le maintien de privilèges à certains groupes religieux constitue une solution qui fasse en sorte que, si ça disparaît, ça constitue un danger exceptionnel qui menace l'existence de la nation.

(12 h 10)

Alors, notre préoccupation, c'est: S'il vous plaît, réglez ce problème politiquement. La plainte contre l'Ontario, ça va donner des idées à beaucoup de monde. Puis c'est gênant, comme gouvernement, d'être obligé d'aller parader devant un comité d'experts qui vous font la leçon sur le respect des engagements pris par un gouvernement. C'est fatigant.

J'ai vu ça récemment. Nous, remarquez, on est une ligue des droits et libertés puis on a besoin de se fonder sur quelque chose, puis, à l'heure actuelle, ça constitue le socle commun, le substrat incontournable sur lequel on pense que la citoyenneté civique peut se construire. Et on a bien appris notre leçon parce que, l'an dernier, à l'occasion du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits, la Ligue des droits s'est engagée à fond, avec l'aide généreuse du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, dans des activités d'information et de promotion des valeurs contenues dans un document comme la Déclaration universelle des droits de l'homme. On pense qu'il n'y a pas suffisamment d'accent mis, que ce n'est pas fait de façon suffisamment systématique, ce travail de création d'un sentiment de citoyenneté civique. On pense – et c'est une des conclusions – que c'est l'occasion rêvée de vraiment mettre l'accent sur une dimension incontournable de l'avenir de la société québécoise.

Je ne pourrais pas faire autrement, après avoir entendu tantôt M. Vieira, que d'aller à plein dans le sens de son mémoire, de ses interventions et des réponses qu'il vous a fournies. Je ne les répéterai pas. Ça constitue, dans son orientation générale et dans ses réponses, tout à fait des préoccupations que nous appuyons et qui vont dans le sens des nôtres. Et, lui, il a l'avantage d'être plus directement lié aux personnes qui sont, en grande partie, pour un grand nombre d'entre elles, non partie de cette culture majoritaire catholique ou protestante. Il a l'avantage, lui, de la connaissance du terrain pas mal mieux que nous, et on trouve que, en tout cas, ce qu'il explique, ça correspond tout à fait aux dimensions de cette question que nous abordons de façon strictement juridique, oui, mais qui est une dimension à laquelle vous n'êtes pas étranger.

On pourrait nous reprocher, avec raison, que nous aurions pu faire des efforts pour définir avec un peu plus de précision ce que nous appelons le «service de soutien à la vie civique». On était tellement préoccupé par l'autre question, la dimension strictement des droits, qu'on pensait qu'il fallait faire un effort pour que ce message-là passe. Ça va être un problème juridique. Manifestement. Et je ne pense pas que même une clause dérogatoire, pour gagner du temps, va réussir devant les instances internationales, c'est sûr. Alors, on peut attendre. On peut laisser la tempête passer. Mais je pense que c'est une occasion qui devrait être saisie.

Dans notre conclusion – et il ne faudrait pas se méprendre sur nos intentions – on n'est pas des anticléricaux. On ne refait pas la bataille de la Révolution française. On ne veut pas faire disparaître les soutanes. Ce qu'on veut vraiment mettre de l'avant, c'est ce qu'on appelle une laïcité compréhensive et ouverte. C'est ça qui nous anime.

C'est la prise de conscience, la confrontation, à ce moment privilégié de la vie des citoyens que constitue le passage à l'école, pour, le plus tôt possible, commencer à être confronté à des idées de tolérance, à des idées de rapports harmonieux, problématiques qui ne sont pas seulement contemporaines, qui font partie de l'histoire de l'humanité. Alors, je pense qu'on ne peut pas rater cette occasion-là. Et c'est un peu pour ça qu'on va dans le sens de ce qu'on propose.

Ça peut paraître implacable, ça peut paraître un peu trop rigoureux, certains diraient rigide, théorique, mais je pense que c'est politiquement quelque chose de bien senti chez nous. Et on a fait cette expérience. On a vu l'appétit... Si on avait les moyens, ce qu'on a commencé à faire l'an dernier à l'occasion de tout ce qu'on a mis en place pendant ces activités sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, on ferait ça toutes les semaines, partout. Il y a une avidité extraordinaire justement pour comprendre comment les choses peuvent fonctionner autrement.

Finalement, les remarques qui débordent notre mémoire. Il y a un appel à la recherche du consensus qui, d'après moi, fait preuve un peu d'un manque de courage. J'ai été, dans ma vie passée, directeur de cabinet de Mme Payette, en 1977, 1978, 1979. Si on avait attendu le consensus pour faire la réforme de l'assurance automobile, si on avait navigué à partir des sondages et puis des paroles du Barreau, des assureurs, des courtiers, des gens qui avaient peur du changement, on ne l'aurait pas fait. Et puis l'hésitation, la crainte qui pouvait être majoritaire au moment où ça a été adopté, en dedans de 12 mois, c'est devenu majoritaire, largement, puis, en dedans de 24 mois, c'est devenu quelque chose qui, comme on le sait, encore jusqu'à maintenant, a résisté.

Moi, j'ai eu une leçon, à ce moment-là. Quand on est au gouvernement, il y a des moments où on se dit: Oh boy! Ça va être dur, ça. Il y a des gens qui ne sont pas d'accord puis ça rue dans les brancards. Des fois, il faut y aller parce qu'on pense que c'est la voie qui va faire les choses pour plus longtemps que moins longtemps, qui va permettre de modifier les choses de façon plus profonde. Je pense qu'on est à ce moment-là.

Puis, quand on regarde les sondages qui ont été faits puis l'opinion des gens, oui, il y a bien 88 % des parents qui envoient leur enfant à l'école qui choisissent l'enseignement religieux. Mais c'est quoi, leur choix? Quand on utilise cette statistique, le choix, c'est la morale, la pastorale ou bien ça. Il faut prendre ce chiffre pour ce qu'il vaut dans le contexte où la question est posée. Ils n'ont pas un choix autre que celui-là peut-être parce que l'autre partie du choix n'est pas vraiment attirante, n'est pas vraiment valorisée, n'est pas satisfaisante. On sait que ça obtient souvent des... l'objet de critiques: Ce n'est pas substantiel, ces cours-là.

(12 h 20)

Mais, quand on regarde les autres chiffres, il y a des nombres imposants. Quand on découvre que 88 % des parents catholiques veulent que l'enseignement religieux fasse connaître les différentes religions présentes dans la société, comment interpréter ça? Si on cherche un consensus, il est en train de se constituer à partir d'une idée comme celle-là. Quand 83 % veulent qu'ils fassent connaître l'histoire des différentes religions, c'est en train de constituer un consensus assez fort, ça. Quand 93 % souhaitent qu'on envoie un message de tolérance envers les religions différentes, ça m'apparaît être un consensus imposant, ça. Je pense que c'est à partir de cela qu'il faut commencer à construire quelque chose.

Puis je conclurais comme ça. En feuilletant tout ce qui s'est publié depuis – et heureusement que ce débat-là a lieu maintenant – on découvre, par exemple – puis c'est mentionné dans le rapport qui fait l'objet de la consultation – qu'en 1977 on a mis de l'avant... il y en a eu un programme qui est disparu. L'expérience, elle a été tentée puis elle n'est pas disparue parce que ça causait des problèmes énormes; c'est comme si les gens s'étaient lassés ou il n'y avait pas eu quelqu'un qui avait dit clairement: C'est vers ça qu'on s'en va. Ça n'a pas obtenu l'appui politique suffisant pour annoncer que c'est ça, la direction recommandée. On en vient à ce que je disais plus tôt, je pense que ça exige un engagement politique clair: Ne laissez pas les tribunaux apporter une solution à cette question. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Me Desmarais. M. le ministre.

M. Legault: Oui. Me Desmarais, M. Paradis, merci d'être ici ce matin. Vous nous présentez un mémoire qui est clair, qui est bien détaillé, qui est bien documenté. Bon. On pourrait effectivement s'embarquer dans une grande guerre de sondages. Je ne vous en citerai qu'un qui se retrouve d'ailleurs à l'intérieur du rapport de M. Proulx, où on nous dit que, chez les catholiques, 21,4 % souhaitent maintenir des droits et privilèges aux catholiques et protestants seulement mais que 50,8 % souhaitent accorder aux autres religions les mêmes droits. Donc, il y en a seulement 24 % qui ne souhaitent accorder ni droit ni privilège à aucune religion.

Donc, oui, il y a une ouverture. Oui, il y a un désir, dans certains cas, de tolérance et d'acceptation des autres religions. Mais je ne lis pas les sondages de la même façon que vous et puis, après près de 50 heures qu'on passe ici à recevoir des groupes de la société québécoise, moi, j'arrive un peu à la conclusion que la grande majorité des Québécois et des Québécoises ne souhaitent pas de coupures radicales avec certaines traditions religieuses. Et d'ailleurs on avait hier la Fédération des commissions scolaires, qui ajoutait que ça semble ne pas poser de problème important non plus sur le terrain auprès des autres groupes religieux.

Vous nous parlez d'une période de transition. J'aimerais bien qu'on puisse discuter un petit peu des étapes que vous voyez qui pourraient nous amener à un plus grand respect des droits et libertés fondamentales. Mais, avant de parler de la période de transition, je veux peut-être revenir sur une partie de votre mémoire. À la page 18, vous nous rappelez, dans votre avis, que, selon la convention relative aux droits de l'enfant, l'éducation doit préparer l'enfant à assurer la responsabilité de la vie dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance – on dit un petit peu loin – d'amitié entre tous les groupes, incluant les groupes religieux. Est-ce que vous pensez sérieusement que c'est possible de respecter cette obligation en ne dispensant aucun enseignement sur la religion?

M. Paradis (André): Bien, on appuie, en tout cas, l'enseignement culturel des religions. C'est de l'enseignement sur les religions. Ce n'est pas l'enseignement religieux, mais c'est l'enseignement sur les religions.

Nous, par ailleurs, on voudrait que ça soit intégré dans un cadre finalement qui ferait la part plus grande à l'éducation à la démocratie, au droit et à la citoyenneté pour que l'éclairage qui est apporté par un enseignement culturel des religions puisse aussi déboucher sur les grandes valeurs qui sont les fondements de nos sociétés et qui sont en grande partie issues justement des grandes traditions religieuses et culturelles. Mais la reconnaissance, par exemple, de l'égale dignité de tous les êtres humains, qui est au fondement de la déclaration universelle et finalement de tout l'édifice des droits, autant au plan international que national, c'est une valeur qui se retrouve, d'une façon ou d'une autre, dans toutes les grandes religions, dans toutes les grandes traditions culturelles.

Alors, pour nous, l'enseignement culturel des religions, l'éducation à la démocratie, au droit et à la citoyenneté, ça va ensemble, ça débouche finalement dans une même perspective de reconnaissance des valeurs fondamentales qui, si on peut dire, fondent l'humanité ou l'humanisme. Alors, on est pour l'enseignement de la religion, mais l'enseignement culturel de la religion, parce qu'il nous semble que c'est dans cette voie-là qu'on va faire des pas vers une société où la tolérance, le respect mutuel puis, comme vous disiez dans la citation, la coexistence pacifique de tous les membres de la société vont être assurés.

M. Legault: Mais on a eu aussi des experts juridiques qui sont venus nous dire que cet enseignement culturel des religions, que vous proposez d'inclure dans un cours de soutien à la vie civique...

M. Paradis (André): ...d'éducation civique, oui.

M. Legault: ...l'éducation civique, ça posait la question du choix des religions qui seraient enseignées et qu'il y avait des risques importants que ce choix soit discriminatoire en regard des religions qui ne seraient pas choisies, qui ne seraient pas retenues, donc ça ne réglait pas notre problème de discrimination. Qu'est-ce que vous pensez de cet avis?

M. Paradis (André): C'est-à-dire qu'actuellement on est devant une situation de fait de discrimination, à l'intérieur du système scolaire québécois.

M. Legault: Oui.

M. Paradis (André): C'est une situation de fait. Là, vous parlez d'une situation de discrimination appréhendée. Les situations de discrimination appréhendée, on a habituellement les moyens d'essayer de les éviter, c'est-à-dire...

M. Legault: Comment?

M. Paradis (André): Bien, d'une part, parce que, sur toutes ces questions-là, il y a des précédents historiques. Il y a une jurisprudence au plan international et dans d'autres pays, d'une part, qui permettent d'éclairer, de baliser certaines choses. Il est possible, ici aussi, de faire des consultations, d'arriver à élaborer, sinon un consensus, au moins des convergences. Par ailleurs, d'autre part, si jamais, malgré toutes ces précautions prises, on arrivait à une situation de discrimination, il y a des recours qui sont prévus dans notre système, ici, basés sur la Charte québécoise, entre autres.

M. Legault: Je ne suis pas bien certain que je vous suis. Donc, vous dites: Même si, avec un nouvel enseignement culturel des religions, on arrivait à conclure que c'est discriminatoire, il y a des moyens de contourner la loi. Je ne comprends pas ce que vous nous dites.

M. Paradis (André): Non, non, c'est ce que je dis. C'est qu'il y a des moyens, il y a toute une série de mesures possibles à prendre pour éviter que, effectivement, dans l'établissement de ce programme d'enseignement culturel des religions, on arrive à la discrimination. Il est possible de prendre toute une série de précautions, de mesures, en se basant entre autres sur des précédents, en se basant sur la jurisprudence, en se basant sur les avis des juristes et d'autres spécialistes dans le domaine des sciences sociales et humaines, en consultant aussi ceux qui sont reconnus comme les porte-parole des grandes religions et des autres religions, en faisant appel à des experts, et tout ça. Il est possible de prendre ces précautions-là et, si jamais, malgré les précautions prises, on arrivait effectivement, dans certains cas, à une situation de discrimination, il y aurait la possibilité d'un recours.

Autrement dit, on ne peut pas se bloquer la voie de l'avenir parce qu'il y aurait la possibilité de discrimination. À peu près dans tous les gestes que finalement l'État québécois peut poser dans quelque domaine, il y a toujours un potentiel, la possibilité de poser un geste discriminatoire. Il s'agit de prendre les précautions pour éviter de poser des gestes discriminatoires. Si jamais, malgré tout, ça arrivait, il y a des voies de redressement.

M. Legault: Donc, vous nous dites: La situation actuelle est discriminatoire; c'est un problème. Le cours proposé pourrait être discriminatoire...

(12 h 30)

M. Paradis (André): Ce que je dis, c'est que vous parlez d'une situation appréhendée. Moi, je dis: Il est possible d'éviter que ça se réalise parce que... Je n'ai pas lu finalement les témoignages de vos experts juridiques, ceux qui ont témoigné sur cette question-là, mais je pense qu'il est possible de prendre une série de mesures, de consultations, d'études, de réflexions qui permettraient d'éviter que l'élaboration d'un programme d'enseignement culturel des religions débouche sur des effets discriminatoires. Et, si jamais, par hasard, il y avait quand même quelque chose qui passait à travers le filet de précautions, il y a quand même des mécanismes par la voie administrative mais aussi au plan juridique. Mais je pense que ce serait considérablement atténué, ce risque-là, si le processus d'élaboration prenait les précautions nécessaires.

M. Legault: Bon. Peut-être une dernière question sur la période de transition dont vous nous parlez. Disons qu'on ne fera pas des discussions pour savoir quel pourcentage, mais disons qu'il y a un pourcentage important des parents qui souhaitent garder un enseignement religieux, entre autres, catholiques, dans nos écoles. Comment vous nous suggérez d'agir, en pratique, dans les prochains mois, les prochaines années? Quelles sont les étapes, la façon dont vous les suggérez pour arriver à votre proposition?

M. Desmarais (Jacques): Je vous ai dit...

M. Legault: Sans faire de révolte au Québec, bien sûr.

M. Desmarais (Jacques): Non. Là, ça va être Jacques Desmarais qui parle, parce que ce n'est pas la Ligue qui a réfléchi avec précision à la question que vous posez. Mais j'ai trouvé – puis vous l'avez probablement vu, on vous l'a signalé – un texte de Julien Harvey, de septembre 1992, qui fait, à mes yeux, ce qui m'apparaît être une proposition tout à fait judicieuse, ce qu'il appelle le «développement d'une culture religieuse commune».

Puis là il y a comme trois éléments majeurs dans cette proposition, trois blocs: une réflexion fondamentale sur le sens de la vie, incluant les raisons de croire ou de ne pas croire, sur les points communs de la foi des grandes religions, sur la Charte des droits et libertés comme expression du sens de la vie en commun dans un pays; deuxièmement, une connaissance du patrimoine religieux indispensable pour comprendre la culture dans laquelle nous vivons; et, troisièmement, une connaissance générale mais structurée des grandes traditions religieuses.

Si l'effort était fait, dans la prochaine année, de construire ce programme et de le proposer, si on concentrait nos efforts à faire une proposition de programmation, peut-être que le pourcentage de catholiques qui veulent avoir l'enseignement en question réfléchiraient autrement. Pour l'instant, on ne parle pas avec des propositions concrètes. Si on lançait cela et qu'on se mettait à discuter, peut-être que les craintes de certains seraient résorbées.

M. Legault: Mais vous faites référence à la proposition du Centre justice et foi.

M. Desmarais (Jacques): Oui.

M. Legault: Si je me rappelle bien, ce Centre nous proposait de conserver un enseignement religieux mais non confessionnel. Est-ce que je dois comprendre que vous seriez d'accord avec ce genre de proposition?

M. Desmarais (Jacques): Bien, je ne veux pas jouer sur les mots, là. Qu'est-ce qu'un enseignement religieux non confessionnel? Oui. De prime abord, ça m'apparaît... Je ne connais pas la proposition spécifique, mais ça me paraît mieux que... Si on veut garder le mot «religieux» parce que ça constitue, pour certains – comment dirais-je – non seulement une référence, mais une assurance que c'est de ça qu'on parle, bien, moi, personnellement, ça ne me pose pas problème.

M. Legault: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Montmorency.

M. Simard (Montmorency): Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Me Desmarais, M. Paradis, bienvenue parmi nous. Merci pour la qualité du mémoire que vous nous avez présenté.

On sent très bien que les grands points cardinaux de la philosophie des lumières guident l'orientation de ce mémoire. Et, d'entrée de jeu, vous nous avez parlé – et nous en sommes tous – de l'indivisibilité des droits humains, et mon intervention porterait surtout sur l'indivisibilité de la personne humaine. Parce que vous n'êtes pas sans savoir qu'un individu n'est pas seulement un citoyen, un individu n'est pas seulement un consommateur. Un individu, c'est aussi une personne humaine dans toutes les dimensions de son être. Ce n'est pas seulement un être physique, ce n'est pas seulement un être intellectuel, ce n'est pas seulement un être culturel ou émotionnel, c'est aussi un être spirituel. Et, moi, j'aimerais savoir quelle place vous faites à la spiritualité dans le projet éducatif québécois?

M. Paradis (André): Quand on parle d'éducation civique, pour nous, ça inclut la dimension de l'enseignement culturel des religions, et je pense que le rapport Proulx et bien d'autres présentations que vous avez eues ont démontré de long en large comment cet enseignement-là permet de garder cette dimension spirituelle et qui est essentielle.

Hier encore, dans Le Devoir, vous avez pu lire comme moi, sans doute, l'article de Fernand Ouellet qui est un de ceux qui ont travaillé à l'élaboration du projet de l'enseignement culturel des religions, et je pense qu'il a clairement démontré, à travers cet article-là, que cette dimension-là serait tout à fait présente dans l'enseignement culturel des religions, la dimension de la spiritualité, que le recours aux sciences sociales et sciences humaines, ça ne signifie pas que les questions de spiritualité, du sens de la vie, etc., tout ça – qu'est-ce qu'on fait, ici, sur la terre? – ne seraient pas posées. Au contraire, elles continueraient d'être posées.

De la même façon, quand on parle d'éducation au droit à la démocratie, quand on parle de l'éducation au droit à la citoyenneté, en dernière analyse, ces questionnements-là, ça renvoie aussi à la spiritualité. Quand, par exemple, on établit que le fondement ultime de la notion même des droits, c'est la dignité fondamentale de tous les êtres humains, je pense qu'on débouche nécessairement, après ça, sur toutes les questions qui sont liées à l'existence humaine: l'origine de la vie, le sens de la vie, s'il y en a un, etc., et tout ça.

M. Simard (Montmorency): Oui. Je sais que ma collègue de Rimouski a une question à vous adresser, mais une sous-question: Une des critiques adressées à l'enseignement culturel des religions, c'est que c'est un fourre-tout et puis, dans la langue de bois des universitaires, dans une perspective phénoménologique, on dit que l'enseignement culturel des religions oublie que la spiritualité, c'est aussi quelque chose qui est intérieur, vécu donc intérieurement, de soi vers l'infini, si vous voulez, et ce n'est pas simplement quelque chose qu'on reçoit objectivement de l'extérieur vers soi. Et on n'aurait pas tendance, à votre avis, à oublier ce dialogue qu'on peut avoir avec quelque chose qui est supérieur à nous?

M. Paradis (André): D'une part, il y a plusieurs réponses possibles, sans doute, à ça. La première, c'est que l'école n'est pas le seul puis ne devrait peut-être même pas être le principal véhicule d'éducation à la religion ou même d'intéressement des jeunes aux questions relatives au sens de la vie ou à la vie spirituelle. C'est la responsabilité première des parents, et l'école ne peut pas assumer complètement, d'une part, cette responsabilité-là. Les parents ont... Puis, dans notre société où il y a beaucoup d'autres influences qui s'exercent directement sur les jeunes, je pense, entre autres, aux médias, c'est un lieu aussi où les jeunes trouvent substance à se nourrir sur la réflexion.

L'autre élément de réponse que je dirais par rapport à ça, c'est que les jeunes – c'est une chose que Fernand Ouellet expliquait très bien dans son article d'hier – sont déjà soumis aux interpellations de sens, que ce soit par les autres grandes traditions religieuses, par les autres phénomènes. Les jeunes d'aujourd'hui, ils sont bombardés de ces interrogations, de ces questions-là par les médias, et tout ça. Alors, il expliquait bien que le processus de développement de l'identité – et ça peut inclure l'identité religieuse – ce n'est plus le processus linéaire que c'était autrefois. C'est un processus, maintenant, qui est beaucoup plus multidimensionnel, qui est beaucoup plus éclaté et que, dans ce contexte-là, l'enseignement culturel des religions n'est sûrement pas quelque chose qui est défavorable à la définition de cette identité religieuse ou autre qu'un jeune veut se donner.

M. Simard (Montmorency): Merci.

(12 h 40)

La Présidente (Mme Bélanger): Courte question avec courte réponse, Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest: Merci, Mme la Présidente. Messieurs, merci d'être venus nous faire connaître et échanger avec nous sur votre mémoire. Dans un premier temps, j'ai un commentaire et, dans un deuxième temps, une question. Le commentaire, c'est suite aux propos de Me Dagenais...

Une voix: Desmarais.

Mme Charest: Me... oui, c'est ça, Me Dagenais.

Des voix: Desmarais.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Charest: Ah! pardon. Je m'excuse. Oui, c'est bien Desmarais. Je m'excuse, monsieur. C'est à l'effet que, oui, l'assurance automobile, vous avez eu le courage qu'il fallait pour le passer, mais je vous dirais et j'aimerais faire remarquer que, aujourd'hui, ce dont il s'agit, c'est beaucoup plus d'une question de valeurs que d'enjeux économiques. Et j'attribuerais la position du gouvernement actuel, si position il y a, pour l'instant, à beaucoup plus de prudence parce qu'on veut quand même être sensible à ce que les citoyens et les citoyennes viennent nous dire par rapport à la place de la religion à l'école. Et je pense qu'on ne parle pas de la même chose et des mêmes enjeux quand on parle du courage par rapport à l'assurance automobile, par rapport au courage que l'on doit avoir, ou qu'on devrait avoir, ou qu'on n'a pas, ou qu'on a sur la place de la religion à l'école. Je pense que c'est autre chose.

Mais je veux venir rapidement à ma question: Quels seraient, selon vous, les objectifs que vous poursuivez en proposant un service de soutien à la vie civique? Vous dites que les écoles devraient être dotées d'un service, d'un programme de soutien à la vie civique. J'aimerais savoir aussi quelles distinctions vous faites – parce que, présentement, il existe des services de pastorale, des services de vie étudiante ou de morale, enfin il y a des services de ce type-là qui existent – et les objectifs que vous poursuivez?

M. Paradis (André): Bien, ce n'est pas tellement différent de ce qui existe en réalité, à l'heure actuelle, dans une grande partie du système scolaire. Les animateurs de pastorale, très souvent, ils sont aussi les organisateurs, par exemple, d'activités de solidarité internationale ou de compréhension internationale, des activités de rapprochement interculturel, parfois des activités d'éducation au racisme, des activités d'implication dans le milieu environnement, des projets qui sont faits en lien avec des organismes qui sont dans les quartiers où les écoles sont situées, et tout ça.

Dans la réalité des faits, les animateurs assument déjà une partie de ce rôle-là. Alors, nous, on est tout à fait d'accord pour que des animateurs ou un service de soutien à la vie civique continuent d'avoir aussi une dimension de stimuler la vie spirituelle des jeunes. Il y a bien des façons dont ça, ça peut être réalisé, ce type de choses là.

La Présidente (Mme Bélanger): Malheureusement, c'est terminé.

Mme Charest: Merci, M. Paradis et Me Desmarais. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Me Desmarais et M. Paradis, pour votre présentation. Alors, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Merci, Mme la Présidente. Me Desmarais et M. Paradis, bienvenue. Merci pour votre mémoire. Vous savez, il y a toujours, moi, quelque chose qui me frappe en politique. C'est qu'on peut effectivement... on vit dans un État de droit, mais on vit aussi dans un État politique.

Un des éléments, moi, qui me frappent dans les questions qu'on traite actuellement sur la place de la religion à l'école, c'est qu'on a deux choix. On a le choix, c'est-à-dire, de se conformer au droit en tentant de tenir compte un peu de la situation politique ou on a le choix de tenir compte de la situation politique et de l'évolution de la société québécoise et d'y ajuster le droit selon ce qu'on peut faire. C'est sûr qu'après ça il y a toujours la concordance avec les grands pactes internationaux.

Mais, moi, un des éléments que j'aimerais vous poser au point de départ, c'est: Est-ce que vous avez jugé que cette possibilité-là, c'est-à-dire de trouver des solutions québécoises qui, sans attaquer de front, je dirais, les grand principes de droits internationaux, permettraient, par exemple, d'ouvrir à d'autres religions... Quand vous dites: Il faut lancer des appels pour respecter la diversité, est-ce qu'il n'y a pas moyen... Quelles sont les principales critiques que vous avez face à ceux qui prônent davantage l'ouverture à l'enseignement d'autres confessions et qui... Parce qu'il y a quand même d'autres grands légistes qui sont venus et qui nous ont dit que, si on fait la même lecture peut-être des mêmes éléments, mais une lecture différente au niveau du droit international, on arrive à de tout autres conclusions, et c'est un peu ça qui est frappant.

Il y a Me Patrice Garant qui est venu ici et qui nous a dit à peu près exactement le contraire, c'est-à-dire que, quand on regarde tout ce qui se passe, on peut ajuster le droit, c'est certain. Mais, pour tenir compte de ce qui se passe au Québec, il faudrait peut-être davantage trouver des accommodements pour ouvrir à l'enseignement religieux d'autres confessions.

M. Paradis (André): Je vais laisser mon ami Desmarais répondre sur l'aspect juridique de la question. Mais, moi, je voulais dire que la façon de réconcilier ce que vous dites, c'est-à-dire les principes de l'État de droit puis la réalité de la société québécoise, ça nous semble être justement le compromis que représente, d'une certaine façon, la proposition mise de l'avant par le rapport Proulx, c'est-à-dire l'enseignement culturel des religions. Ça nous apparaît une bonne façon de réconcilier ces choses-là dans la cohérence avec les valeurs que, par ailleurs, l'État et la société québécoise ont décidé de mettre de l'avant, valeurs qui sont proclamées dans la Charte québécoise des droits et libertés. C'est un choix de société qui a été fait quand on a adopté la Charte. Ce n'était pas juste adopter une loi parmi tant d'autres. C'était un choix de société qui a été fait, de mettre ces valeurs-là aux fondements de la société québécoise.

On a réitéré, au cours des années, à travers toutes sortes de déclarations – ça a été fait autant par un gouvernement libéral qu'un gouvernement québécois – d'énoncés de politique sur l'intégration, sur l'immigration, sur le caractère pluraliste de la société québécoise. Je pense que la solution de rechange que représente la proposition d'une école laïque avec un enseignement culturel des religions, c'est une solution qui est cohérente avec les choix qui ont été faits par la société québécoise en adoptant la Charte mais aussi en posant toute une série d'autres gestes, tout au cours des 25 dernières années. Alors, c'est une question de cohérence, à cet égard-là, qu'il nous semble qu'il faut poursuivre.

Il me semble qu'il faut reconnaître que la société québécoise a beaucoup évolué. Elle a beaucoup évolué, elle s'est diversifiée considérablement. Elle s'est déconfessionnalisée déjà, en grande partie. C'est-à-dire, si on regarde les institutions publiques, les institutions de la société civile – comme les syndicats qui, autrefois, étaient confessionnels et tout ça, les hôpitaux et tout ça – ça s'est déconfessionnalisé. Le dernier bastion véritable où la confessionnalisation reste retranchée, c'est le système d'éducation. Alors, ce n'est pas une révolution qu'on demande de faire. C'est de continuer une évolution qui est en cours depuis longtemps et de continuer d'aller dans une direction qui a été choisie par la société, l'État québécois, sous les différents gouvernements, depuis 25 ans.

M. Desmarais (Jacques): Pour répondre avec un aspect étroitement juridique, dès l'instant où l'État décide de consacrer des sommes d'argent à quelque fin que ce soit, qu'il met en place des institutions à quelque fin que ce soit, qu'il adopte des lois à quelque fin que ce soit, il y a ce corpus de droits et libertés fondamentales que la société de cette fin du XXe siècle commence à considérer comme importants, plus qu'auparavant, et de plus en plus. Il y a de plus en plus de manifestations du recours à cela, pour que les décisions soient prises dans le sens du respect de ce corpus.

Même les tribunaux canadiens commencent – commencent – avec prudence, à se référer aux engagements internationaux, aux instruments internationaux, pour justifier leurs décisions. Ça commence, même si, depuis 50 ans, on considérait qu'on n'était pas lié, il n'y avait que le Parlement, par le biais de ses lois, qui pouvait vraiment lier l'État. C'est en train de changer, ça.

(12 h 50)

Alors, la réponse que je fais à votre question, c'est: Il y a là comme quelque chose qu'on pourrait peut-être chercher à amender en allant dans les forums internationaux. Mais là vous imaginez, hein? le travail que ça exige. Mais je pense qu'il est là, ce corpus, et il s'agit de décider si on s'y sent lié ou pas.

Les aménagements, comme mon collègue Paradis le suggérait, sont proposés et, d'après nous, ils répondent à cette recherche du compromis. Il y a une chose certaine, c'est que la situation actuelle, même avec continuation de dérogation, d'après nous, elle ne supporte pas la confrontation au corpus des instruments internationaux dont je vous ai parlé. Et tantôt vous allez vous retrouver avec du monde qui vont vous dire que ce n'est pas légal. Et puis là ces décisions-là n'auront pas pour conséquence de vous dire: Vous faites bien ça. Ils vont vous dire: Ce que vous faites est illégal, vous ne pouvez plus verser de l'argent pour la formation à telle religion. Mais là vous allez être pris avec le même problème plus tard.

M. Béchard: Sur le fait d'avoir un cours culturel de religion, que vous présentez comme pouvant être relié à des programmes obligatoires d'éducation physique... d'éducation civique, c'est-à-dire – toute une différence, ha, ha, ha! – lapsus. Pour les besoin des galées, c'est un lapsus. Ha, ha, ha!

Est-ce que vous voyez ce cours-là... Parce qu'on se retrouve dans... Je ne sais pas si vous avez vu, il y a toutes sortes de chiffres, toutes sortes de sondages, mais, moi, un des éléments qui m'ont frappé, justement, en cette fin de XXe siècle où on serait porté à penser que les gens veulent de moins en moins de religion, je pense que c'est dans le sondage Léger et Léger qu'on a vu où on se rend compte que les... Quand on dit: Pour l'avenir, est-ce que vous voulez plus ou moins de religion? Les gens disent: On veut plus de religion. Et c'est assez particulier. Moi, en tout cas, ça m'a frappé. On croirait plutôt qu'on est sur l'autre tendance.

Est-ce que vous voyez votre proposition d'intégrer des valeurs religieuses dans un programme d'éducation civique comme un point, justement, pour voir est-ce qu'on peut avoir ça présentement et penser en augmenter le contenu religieux par la suite ou plutôt une évolution vers une laïcisation complète et totale et au fait qu'on n'en viendra plus à parler d'enseignement religieux, même sous une forme culturelle, mais beaucoup plus d'un cours, une matière comme les autres?

M. Paradis (André): Non, je ne pense pas. Je pense qu'on accepte pleinement le fait que, dans l'éducation civique, l'enseignement culturel et religieux est là, est appelé à rester de façon permanente. Ça, on accepte tout à fait ça. Quand je disais que c'était un compromis, ce n'était pas le compromis transitoire, là. C'était la façon de réconcilier deux ordres d'exigences: d'une part, les principes qui sont proclamés dans la Charte québécoise et, d'autre part, le besoin qu'expriment les parents québécois qu'on puisse, à l'école, éclairer les enfants sur la religion. Je pense que c'est dans ce sens-là qu'on en parlait.

Quand vous parlez du besoin de plus de religion, je pense que c'est vrai, d'une certaine façon, qu'on pourrait constater que – je serais d'accord avec vous – dans nos sociétés, actuellement, il y a comme un retour au spirituel. Moi, j'élargirais ça peut-être plus au spirituel.

M. Béchard: Oui, d'accord.

M. Paradis (André): Il y a un retour au spirituel. Mais cet univers spirituel là – et je lisais hier la réaction du Comité catholique de l'éducation au rapport Proulx – c'est un univers spirituel de plus en plus éclaté où les gens, même à l'intérieur des confessions – confession catholique ou confession protestante – il y a comme des sous-groupes de pensées de plus en plus nombreux, et les gens retiennent – c'est l'expression qui était utilisée dans le rapport du Comité catholique – les concepts ou les idées qui leur apparaissent valables ou utiles, entre guillemets.

Alors, on s'en va vers cet extrême pluralisme dans le domaine religieux comme dans le domaine spirituel. Alors, il nous semble que la façon d'accommoder ce pluralisme-là, religieux et culturel, de plus en plus grand, c'est la laïcité ouverte du système, c'est ça, et c'est non pas la création d'un système multiconfessionnel, parce qu'on ne pourra pas, à terme, répondre à la demande qui est, à l'heure actuelle, presque exponentielle, hein?

Tantôt, vous avez posé des questions à M. Vieira par rapport aux religions reconnues et aux sectes, et tout ça. Mais ça, c'est un univers qui est en plein développement, et, si on veut accommoder cette réalité-là dans les cadres structurels de l'école québécoise, je pense qu'on se pose des problèmes impossibles.

D'une part, on ne sera pas capable de gérer ça et, d'autre part, ça va aller complètement à l'encontre de l'objectif de développer un mouvement d'adhésion à des valeurs communes, ce qui est un objectif proclamé dans la société québécoise depuis très longtemps et, compte tenu de la nature de cette société-là, qui a véritablement une importance encore plus grande.

M. Béchard: Peut-être juste une petite question rapide – avant de passer la parole à mon collègue – sur la notion d'école privée. Ce que vous proposez, c'est... Vous considérez que les écoles privées actuellement ne sont pas des écoles privées. Dans votre approche, une école privée, c'est vraiment un financement étatique zéro, point, et totalement privée. Dans ces cas-là, est-ce qu'on pourrait laisser – étant donné que ça devient complètement privé – la place à de l'enseignement religieux confessionnel?

M. Desmarais (Jacques): Tout à fait.

M. Béchard: Mais à zéro de financement.

M. Desmarais (Jacques): Ah oui! mais ça...

M. Béchard: Je veux dire, ce n'est pas uniquement de baisser le financement à 20, à 15, à 10, c'est à zéro?

M. Desmarais (Jacques): Ça, c'est la logique de notre système. On est obligé, en bout de piste – quand la cascade des arguments est déployée – d'arriver à cette conclusion-là. Parce que c'est quoi l'autre solution? C'est de toutes les financer, alors, là, avec les problèmes que vous imaginez.

M. Béchard: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, Mme la Présidente. Me Desmarais, M. Paradis, merci pour votre présentation. La question: Qui a le droit de choisir pour l'enfant mineur? Est-ce que c'est l'État ou est-ce que c'est les parents? Et on trouve la réponse directement dans le Code civil: C'est les parents. Il semble que vous êtes d'accord aussi, si je vous comprends bien, dans la section 9 de la page 12 de votre mémoire, vous donnez le droit de choisir aux parents et, subitement, vous le retirez en ce qui concerne la religion, à cause d'une crainte de la ghettoïsation des enfants selon la religion ou les convictions. Mais nous sommes tous des ghettoïsés, selon quelque choix que nos parents ont fait dans notre vie. Alors, pourquoi est-ce que vous niez le droit des parents de choisir dans le cas d'une religion ou des convictions?

M. Paradis (André): C'est-à-dire que le droit de choisir, tel qu'il a été reconnu historiquement, c'est le droit de choisir l'éducation religieuse que les parents veulent donner aux enfants. Ce n'est pas le droit de choisir l'école puis la façon dont l'école va jouer un rôle dans l'enseignement des religions, ça n'a jamais été ça. En tout cas, on ne pourra pas trouver, dans toute la jurisprudence qui entoure, ici ou ailleurs, la question de la liberté de religion, on ne pourra jamais trouver cette interprétation-là. L'interprétation, c'est le parent qui a le droit de choisir l'éducation religieuse qu'il veut donner à son enfant, l'orientation religieuse de son enfant.

Mais la question du système scolaire puis des buts de ce système scolaire là, c'est une question qu'il faut distinguer de celle du choix des parents. Et, dans le partenariat dont on parle, quand il s'agit de l'école publique québécoise, partenariat entre les parents, la société et puis l'État, et tout ça, ça ne veut pas dire que les parents peuvent faire fi d'un cadre d'ensemble que la société se donne pour fonctionner et puis s'aligner sur des valeurs communes.

On ne peut pas penser que le droit des parents l'emporterait sur les valeurs fondamentales qu'une société s'est données puis qu'elle a, entre autres, formalisées dans une charte des droits.

M. Bergman: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? Alors, Me Desmarais et M. Paradis, nous vous remercions de votre présentation.

Alors, l'ordre du jour étant épuisé, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 13 heures)


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