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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le lundi 22 juillet 1974 - Vol. 15 N° 142

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 22 — Loi sur la langue officielle


Journal des débats

 

Commission permanente de l'éducation,

des affaires culturelles et des communications

Etude du projet de loi 22

Loi sur la langue officielle

Séance du lundi 22 juillet 1974

(Quinze heures cinq minutes)

M. GRATTON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

La commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications reprend aujourd'hui l'étude du projet de loi 22. Avant de céder la parole sur la motion d'amendement, j'aimerais aviser la commission des députés qui ont droit de vote durant la séance d'aujourd'hui, soit MM. Bérard (Saint-Maurice), Charron (Saint-Jacques), Veilleux (Saint-Jean), Cloutier (L'Acadie), Hardy (Terrebonne), Lapointe (Laurentides-Labelle), Lachance (Milles-Iles), Morin (Sauvé), Desjardins (Louis-Hébert), Pha-neuf (Vaudreuil-Soulanges), Mercier (Bellechasse), Samson (Rouyn-Noranda) et Cornellier (Saint-Hyacinthe).

La motion principale en discussion...

M. CHARRON: Qui avez-vous nommé pour l'Opposition officielle, s'il vous plaît?

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Morin et M, Charron.

M. BURNS: Non, M. le Président; c'est M. Léger et M. Charron.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est à la demande du chef de l'Opposition.

M. BURNS: Ah bon!

M. MORIN: C'est parce que M. Léger n'était pas là.

M. LEGER: Pas de problème, d'accord.

M. CHARRON: C'est parce que l'amendement en discussion vient du député de Lafontaine.

M. LEGER: Je n'ai pas d'objection, d'accord.

M. BOURASSA: Vous vous êtes entendus.

M. BURNS: Pour qu'il n'y ait pas de problème...

M. CLOUTIER: C'est parce qu'ils doivent avoir une motion secrète.

M. BURNS: ... c'est le député de Lafontaine qui a proposé la motion qui est en discussion actuellement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Qui était membre samedi.

M. BURNS: Qui était membre. Vous n'avez pas de problème, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non.

M. BURNS: Parfait. C'est le chef de l'Opposition et le député de Saint-Jacques.

Motion d'amendement à l'article 133 de l'AANB (suite)

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, la motion principale est celle du ministre de l'Education, que l'article 1 soit adopté. La motion d'amendement proposée par le député de Lafontaine est que l'article 1 soit amendé en ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant : L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique (1867) cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec.

Est-ce que la commission est prête à se prononcer sur cet amendement?

M. CHARRON: Non, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Saint-Jacques, sur la motion d'amendement.

M. CHARRON: M. le Président, mes collègues qui sont intervenus samedi dernier sur cette motion ont présenté une argumentation serrée, je pense, et plus que valable pour soutenir cet amendement que nous proposons à l'article 1. J'essaierai donc, pour nous remettre dans le tempo des débats, de reprendre, au cours de cette intervention, les arguments que nous avons voulu soutenir aux fins d'adopter cet amendement. Resituons-nous, M. le Président, si vous le permettez. Nous sommes à discuter toujours l'article 1 du projet de loi 22 qui dit que le français est la langue officielle du Québec.

Il y a quelques jours, l'Opposition officielle a présenté un amendement, vous vous en souviendrez, M. le Président, qui visait à intercaler un nouveau mot dans cette phrase qui était plein de sens et qui, à notre avis, allait vérifier la portée réelle et la décision politique de principe que l'on doit retrouver à la base de cet article. Nous avons proposé que le français soit la seule langue officielle du Québec. Nous avons soutenu — aidé en cela de textes constitutionnels, et ce ne fut aucunement nié par le parti ministériel — que le français est déjà la langue officielle du Québec; tout le monde en conviendra. Le simple fait que nous discutions un texte de loi rédigé en français aujourd'hui en est une preuve. Mais le problème est qu'il n'est pas la seule langue officielle du Québec et qu'il se trouve, à

côté du texte français, un texte anglais qui a toute la même valeur officielle que l'autre.

Nous avons donc voulu tirer les lignes là où elles devaient être tirées et bien vérifié quelle était l'intention réelle du gouvernement. Nous lui avons dit: II ne s'agit pas de dire que le français est la langue officielle du Québec, c'est fait depuis 200 ans. Ce qu'il faut dire maintenant en 1974, c'est que le français est la seule langue officielle du Québec. M. le Président, la commission a tranché; par sa majorité, le gouvernement a battu cet amendement et le député de Lafontaine a utilisé son droit de présenter un autre amendement. Quel est donc cet amendement sur lequel j'interviens, M. le Président? Je ne dirai pas qu'il a une portée aussi dramatique et aussi percutante que l'amendement du chef de l'Opposition, qui visait à inclure à l'article 1 le mot "seule". Il était aussi clair et aussi précis que ça.

Mais je pense que le député de Lafontaine ne niera pas que son amendement vise le même but. C'est le but que recherche l'Opposition officielle depuis qu'elle est engagée dans ce marathon qui se poursuivra au cours des prochaines semaines, celui d'obliger le gouvernement à se prononcer sur une nouvelle réalité, la nouvelle réalité québécoise de 1974, qui est que nous sommes maintenant un peuple en situation d'affirmer qu'il est un peuple normal et que chez lui sa langue est la seule langue officielle.

Or, quand le député de Lafontaine vous propose cet amendement, M. le Président, que je relis et sur lequel j'interviens: "L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique 1867 cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec." C'est un peu être à la recherche du même objectif que nous étions lorsque nous avons proposé à cette commission de se prononcer pour que le français devienne la seule langue officielle du Québec.

Si c'était parfaitement l'équivalent de l'amendement déjà battu par la commission, vous auriez pu le déclarer irrecevable en quelque sorte, puisque la commission s'est déjà prononcée, a déjà tranché la question par un vote. Non, M. le Président, ce n'est pas tout à fait la même fin, ce n'est pas tout à fait le même sens. Nous concevons nous-mêmes que cet amendement a moins de portée que celui qu'avait le chef de l'Opposition, et c'est justement pourquoi nous le soumettons à la commission, pour voir si, sur un amendement à moindre portée, on peut au moins avoir l'acquiescement du parti ministériel.

Je sais que, pour bien des gens, alors, qu'on dit que l'on discute de l'article 1 et qu'on intervient constamment avec l'article 133, tout cela peut paraître un peu confus. Et surtout l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, qui est une loi votée par le Parlement de Londres, il y a matière à s'arracher les cheveux qui nous restent sur la tête. Pourtant, M. le Président, c'est la réalité dans laquelle nous vivons et c'est de cette réalité que nous devons parler; c'est également cette réalité que nous devons modifier.

Effectivement, la constitution du Canada, pays dont le Québec constitue une des dix provinces, cela s'appelle l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Cela a été voté par un Parlement anglais il y a 107 ans. Aussi invraisemblable que cela paraisse, quand nous voulons traiter de nos droits, parler de la réalité québécoise de 1974, c'est à travers ce chiffonnier du 19e siècle que nous devons essayer d'aller "débroussailler" la réalité québécoise d'aujourd'hui.

Que dit l'article 133 de cette fameuse constitution dans laquelle on vit toujours? L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 dit qu'ici, au Québec, l'anglais et le français, au niveau des tribunaux et au niveau de cette Assemblée nationale des Québécois, qui s'appelait à l'époque l'Assemblée législative, les deux langues ont le même statut et sont sur un pied d'égalité.

C'est exactement pourquoi le député de Lafontaine demande qu'en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec, l'article 133 cesse d'avoir effet ici, justement pour nous permettre d'établir que plus loin — parce que nul doute que si la commission devait adopter cet amendement, elle se trouverait à prendre une position dont elle devrait tenir compte dans les autres articles — les documents, les lois, les textes émanant de ce Parlement ne seraient plus soumis à l'obligation qu'ils ont, en vertu de l'article 133, d'être dans les deux langues. Ds pourraient être effectivement uniquement en français. Ce serait la seule langue officielle du Québec, comme nous avons tenté d'inciter le gouvernement à prendre cette décision.

Egalement, cela voudrait dire, M. le Président, que les tribunaux n'auraient qu'une langue, qui serait celle de la majorité du Québec, et que cette disposition de l'article 133, en ce qui concerne la Législature du Québec, n'aurait plus pour fins de s'appliquer, mais serait proclamée par ce Parlement comme ne s'appliquant plus sur le territoire du Québec.

Je sais bien que, pour qui aborde ce genre de question pour la première fois, tout cela parait fendre les cheveux en quatre et étirer le débat à des proportions invraisemblables. Je vous l'ai moi-même signalé. Il est vrai que pour traiter des droits et de la réalité québécoise de 1974, par le choix de ce gouvernement, nous sommes obligés d'aller déterrer une vieille loi anglaise de 1867. Que voulez-vous, c'est la réalité, nous y sommes et nous la touchons. Quelles sont ces dispositions qui s'appliquent en vertu de l'article 133, que ce Parlement, s'il décidait par une voix majoritaire qu'elles ne s'appliquent plus, ne s'appliqueraient plus? Quel est le but visé? Le but visé est de faire que le français soit la seule langue officielle du Québec et que les lois,

les documents officiels, les textes émanant de cette Assemblée soient en français. Le but visé est que les tribunaux et le système judiciaire du Québec soient en français.

Autant cette réalité paraît normale et palpable pour tous les Québécois, rejoint la majorité des Québécois, autant je suis convaincu que si demain matin on demandait aux Québécois: Que pensez-vous de cette idée qui voudrait qu'au Parlement du Québec les lois soient rédigées en français et uniquement en français, que les documents, les versions qui doivent accompagner ces textes soient en français? Que penseriez-vous de cette idée qui voudrait que les communications et la correspondance de cet Etat québécois obéissent à la même règle qu'en Ontario ou qu'en Colombie-Britannique où, là-bas, c'est la majorité qui a imposé sa langue et qu'ici, on ferait la même chose?

Que pensez-vous de cette idée qui voudrait que les cours, le système, les tribunaux québécois soient dans la langue de la majorité, sans esprit de racisme, simplement comme le font les autres provinces? C'est exactement cela, à travers tout ce fouillis d'articles 133 et d'amendements et de sous-amendements que nous présenterons, c'est cette réalité que nous demandons simplement au gouvernement d'en face de réaliser. Bien sûr, on peut dire quand on demande aux Québécois: Etes-vous pour le français, langue officielle? On peut se gargariser qu'un sondage à l'arrière ait signalé la confusion qu'ont les Québécois sur cette question. Bien sûr, mais si on disait simplement aux Québécois: Ecoutez, ce qu'on vous demande, ce n'est pas si vous êtes pour ou contre le français langue officielle, parce que les Québécois se demandent à ce moment si cela veut dire l'unilinguisme français, si cela voudrait dire qu'on leur interdirait maintenant d'apprendre l'anglais, qu'on n'enseignerait plus l'anglais dans les écoles, ou que même certains de nos concitoyens n'auraient plus le droit de s'exprimer en anglais, lorsque c'est leur langue, à l'Assemblée nationale. Dans cette confusion, bien des Québécois peuvent dire : Tant que je ne saurai pas clairement ce que c'est que le français langue officielle, ce que cela implique, je ne peux pas me prononcer. C'est pourquoi les sondages font état de la confusion.

Je suis convaincu que, si on expliquait la portée réelle de l'amendement présenté par le député de Lafontaine, et sur lequel j'interviens actuellement, qui serait de dire : Le français sera la langue de la loi, ce sera la langue des procès-verbaux, des documents de l'Assemblée nationale, des règlements émanant de l'Assemblée nationale, je suis convaincu que les Québécois comprendraient. Ils ne sont pas plus caves que les Ontariens, ils ne sont pas plus caves que les gens de la Nouvelle-Ecosse qui disent: C'est normal; puisque c'est la langue de la majorité, qu'ils le fassent. C'est cela que l'Opposition officielle vise en présentant l'amendement qui est là. Les dispositions de l'article 133 de la constitution du Canada nous obligent, nous ici, comme unique province, alors que cela n'oblige pas les autres, à être bilingues. Les autres sont unilingues anglais, â volonté, c'est absolument permis. Le Parlement du Québec peut décider que cela ne s'applique plus à un moment donné et que nous nous soumettons à la même règle. C'est ce que vise la formule tortueuse qu'est obligé de prendre le député de Lafontaine dans son amendement, c'est le but que nous visons.

M. le Président, je voudrais conclure avec l'intervention que j'ai eue l'occasion d'entendre samedi dernier de la part du député de Saint-Jean, qui intervient toujours comme un enfon-ceur de porte ouverte et qui a toujours l'impression d'être en train de découvrir le Pérou, alors que nous sommes tout à fait disposés à parler de la même réalité dont il veut parler. Parce que le député de Saint-Jean m'y a invité par sa proposition à clarifier exactement quelle est la place réelle que nous sommes prêts à accorder dans notre programme, dans notre projet à l'anglais qui est la langue d'une minorité de Québécois, quelque 13 p.c, ce sont les chiffres mêmes fournis par le ministre de l'Education, et qui est la langue d'adoption — il va sans dire — d'une autre partie de la population québécoise par le fait que nous l'avons laissée s'angliciser dans ces écoles, dans les écoles de la minorité anglaise, et que nous lui concédons encore ce privilège, dans la loi actuelle.

Nous ne pouvons pas nier qu'il existe une minorité d'anglophones. C'est bien entendu. Et nous ne voulons certainement pas réserver à cette minorité d'anglophones le même traitement qu'on a réservé aux francophones dans les autres provinces, traitement que nous avons jugé, dans toute notre histoire et que des citoyens beaucoup plus vieux que moi ont déjà évoqué et même combattu en le traitant d'inacceptable à l'égard d'une minorité.

Si le député de Saint-Jean m'y invite, M. le Président, j'ai donc l'honneur de déposer sur la table de cette commission un sous-amendement à l'amendement présenté par le député de Lafontaine. Mon Dieu, si le député de Saint-Jean, qui veut avoir ce débat, prétend être devenu le Sherlock Holmes qui découvre à peu près tous les artifices, mettons donc cela sur la table.

M. VEILLEUX: Je vais vous répondre tout à l'heure.

M. CHARRON: Mettons-donc cela sur la table! Le député de Saint-Jean, grâce à mon sous-amendement...

M. VEILLEUX: Je vais vous répondre tout à l'heure.

M. CHARRON: Le député de Saint-Jean, grâce à mon sous-amendement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

Motion de sous-amendement

M. CHARRON: ...aura une autre période de vingt minutes d'intervention, s'il le veut, M. le Président. Il pourra intervenir et participer à cette discussion que les députés du Parti québécois veulent avoir pour que tout le monde sache la portée réelle de cet article 1 que nous devrions adopter avant la fin de la semaine.

Je propose la motion suivante, M. le Président: Que la motion en discussion du député de Lafontaine soit amendée, en ajoutant, à la fin, la phrase suivante: "L'usage de l'anglais continuera à être permis." Plutôt, je dois prendre la formule affirmative, je crois, M. le Président: — "L'usage de l'anglais continue à être permis dans les débats à l'Assemblée nationale et dans les témoignages et plaidoiries orales devant les tribunaux."

Le député de Saint-Jean dit que nous faisons, dans notre projet, une place équivalente à l'anglais comme dans le projet de loi 22; invitons-le à sortir encore une fois son argumentation. Ce que dit le contre-projet, pour reprendre encore l'expression véhiculée par les ministériels, c'est cela. Là-dessus, M. le Président, j'en conviens, il y a des électeurs anglophones au Québec qui vont élire les députés anglophones et ces députés, je leur reconnais le droit, aussi bien à cette table de la commission, comme nous l'avons fait pour le député de Sainte-Anne ou pour le député de Mont-Royal qui sont des dissidents de leur parti sur cette question, d'intervenir dans leur langue. C'est cela.

Cela ne veut pas dire qu'une fois que tu as permis cela tu es obligé de dire que toutes les lois seront bilingues et que les règlements seront bilingues et que les documents seront bilingues. Non. Tu fais simplement preuve de bon sens et de modération et tu dis: C'est vrai qu'il y a des citoyens de langue anglaise qui ont le droit d'être représentés par des députés de langue anglaise. Il y a même des francophones qui votent pour des députés de langue anglaise. Les députés de langue anglaise auront le droit d'intervenir dans les débats, et qu'est-ce que cela veut dire au niveau des tribunaux?

Cela ne veut pas dire que les tribunaux rendront des jugements dans les deux langues et que tout le système judiciaire sera bilingue, comme essaie de l'interpréter, en jouant sur les mots, le Sherlock Holmes de Saint-Jean. C'est de dire que devant les tribunaux, les témoins, ceux qu'on convoque pour faire la preuve auront le droit de parler anglais. C'est normal. On peut faire preuve d'ouverture d'esprit sur ce point. Les plaidoiries orales que des avocats auront l'occasion de faire devant la cour pourront être faites en anglais. Pourquoi? Pour une seule et unique raison. Si je suis un citoyen unilingue anglais, et il y en a 699,000 au Québec, j'ai le droit, quand mon avocat est en train, soi-disant de me défendre, pour être certain qu'il n'est pas en train de me jouer dans les oreilles avec le juge, de comprendre ce qu'il est en train de dire, de comprendre comment il me défend. On demande simplement que les témoignages et les plaidoiries orales devant les tribunaux puissent être faits en anglais.

Que le député de Saint-Jean ou n'importe quel de ses compagnons "back-benchers" intervienne par la suite et vienne nous dire: C'est la même chose que le projet de loi 22, qui, puis-je vous le dire, continue le bilinguisme du système judiciaire en entier, mais fera même payer par le ministre de la Justice le fait que les jugements prononcés en anglais par les tribunaux devront être traduits. Ce n'est pas ce que demande le Parti québécois. Le Parti québécois dit que les jugements seront en français. Ils seront traduits en anglais par la suite, si le justiciable est unilingue anglais. C'est un principe de base de justice dont tous les citoyens québécois qui pourraient participer à nos débats aujourd'hui conviendront avec nous.

Ceux qui essaient de pourfendre et de sauver la face dans un bill de bilinguisme comme cela en disant: Le Parti québécois est aussi bilingue que nous autres, qu'ils en discutent! C'est pour cela que je dépose le sous-amendement. Ce que dit le Parti québécois, à ce chapitre, en ce qui concerne la place de l'anglais, c'est cela. Si le député de Saint-Jean veut engager une discussion, nous en aurons une. Le Parti québécois dit aussi qu'un document d'information, à l'occasion, pourra être en anglais.

Si ce Parlement décide demain matin d'augmenter les allocations familiales, par exemple, ou décide d'augmenter — je vois le ministre des Affaires sociales qui assiste à nos travaux.

S'il se rend à la demande des députés du Parti québécois, et augmente les traitements en vertu de la Loi de l'aide sociale, nous n'aurons aucune objection à ce que les citoyens de langue anglaise ou les Néo-Québécois vivant à Montréal — il y en a dans le comté que je représente ici — reçoivent cette information qui leur dit: Bonne nouvelle, à partir de demain, vous recevrez tant. Qu'un document d'information porte l'anglais, c'est normal, lorsqu'il s'agit d'informer les citoyens sur les droits qu'ils ont. Cela ne veut pas dire que tous les documents, tous les textes officiels, tous les règlements venant de l'Assemblée nationale seront bilingues, comme le dit l'article 2 que nous devrions étudier la semaine prochaine. Ce n'est pas cela du tout. C'est simplement le bon sens, que tous les Québécois reconnaissent.

Je veux que les concitoyens du Québec aient le droit de recevoir des documents d'information dans leur langue. Il y a 699,000 unilingues anglais au Québec. C'est une réalité sociologique à laquelle nous devons faire face, mais cela ne veut pas dire qu'on inscrit des droits dans tous les chapitres, qu'on leur donne quatorze droits nouveaux, et qu'on se refuse à faire du français la seule langue officielle, parce qu'on sait très bien que l'anglais le demeure en vertu de l'article 133 que nous invite à modifier le député de Lafontaine, dans son amendement.

M. le Président, pour que nous ayons ce débat, je propose le sous-amendement suivant: ajouter à la fin de la motion du député de Lafontaine, la phrase suivante: L'usage de l'anglais continue d'être permis dans les débats à l'Assemblée nationale et dans les témoignages et les plaidoiries orales devant les tribunaux. Cest là la place de l'anglais concédée sociologi-quement à une force qui existe, mais aucunement dans les droits et qui ne conduit aucunement à un bilinguisme officiel, comme le torchon qu'est le projet de loi 22.

M. VEILLEUX: Une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jean, sur une question de règlement.

M. VEILLEUX: M. le Président, en vertu du règlement, je voudrais quand même rétablir les faits, à la suite de l'intervention du "pee-wee" de Saint-Jacques. Je comprends, que le "pee-wee" de Saint-Jacques n'était pas ici samedi; je ne dirai pas pour quelle raison. J'aimerais quand même...

M. LEGER: M. le Président, je ne peux pas laisser le député de Saint-Jean exprimer immédiatement une fausseté, en disant que le député de Saint-Jacques n'était pas ici. Le député de Saint-Jacques était ici pour la majorité du temps samedi, et tout le monde le sait.

M. VEILLEUX: A la suite de la motion du député de Lafontaine, assis, lui aussi, sur un siège vert très confortable et pivotant, j'ai fait une intervention samedi. Je disais textuellement ceci...

M. BURNS: Jaloux!

M. VEILLEUX: ... Dire à la population du Québec: Nous, du Parti québécois, allons enlever l'article 133, mais, d'un même souffle, le réinscrire dans un projet de loi d'une politique linguistique, je dis — et je reprends les termes du député de Saguenay et de celui de Lafontaine — que c'est agir en hypocrites. La différence entre le gouvernement Bourassa et un hypocrite pseudo-gouvernement du Parti québécois, c'est exactement ceci. Le premier ministre du Québec l'a dit, le ministre de l'Education l'a répété hier: Nous, nous avons fait un choix politique. Nous voulons conserver l'article, 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. On n'a pas dit — et je reprends les termes que j'employais samedi; ce n'est pas de l'argumentation, je rétablis les faits — On va enlever l'article 133 et on va l'intercaler dans le projet de loi.

Nous avons dit: On laisse cet article. Qu'est-ce que cela enlève de plus ou qu'est-ce que cela donne de plus de l'enlever et de l'intercaler à nouveau dans une loi, comme veut le faire le Parti québécois? C'est exactement les termes que je mentionnais, M. le Président, et tout à l'heure j'aurai l'occasion de répondre à l'intervention ou au sous-amendement du "pee-wee" de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de l'Education, sur un point de règlement.

M. CLOUTIER: Sur un point de règlement, M. le Président, c'est un éclaircissement que je crois utile. Nous voici en présence d'un sous-amendement à l'amendement de la motion principale, qui demandait l'adoption de l'article 1. Est-ce à dire que nous devons maintenant discuter du sous-amendement avant de pouvoir revenir à l'amendement, ce qui signifierait que le débat sur l'amendement est suspendu pour l'instant?

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est exact. M. BURNS: Pour l'instant, oui.

M. CLOUTIER : Je voulais simplement que la précision soit très bien comprise par tout le monde.

M. BURNS: Si c'est l'avis du président, je m'y plie.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je suis tout à fait d'accord.

M.MORIN: Bien entendu, dans le débat, nous pouvons parler de la portée du sous-amendement par rapport à l'amendement.

M. CLOUTIER: II me parait impossible de dire quoi que ce soit, même d'inintelligent, là-dessus sans faire ce que vous dites, M. le chef de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Alors, disons que quant à la question de la recevabilité du sous-amendement, il est bien entendu que nous ne pouvons présumer, à ce moment-ci, quel sort la commission fera à l'amendement. Donc, je déclare tout à fait recevable la motion de sous-amendement du député de Saint-Jacques. Est-ce que la commission est prête à se prononcer sur ce sous-amendement?

M. BOURASSA: Mais est-ce qu'il peut y avoir un sous-amendement?

M. LEGER: Je vais intervenir là-dessus, oui.

M. BOURASSA: Est-ce qu'il peut y avoir un autre sous-amendement? Non?

M. BURNS: Ne vous inquiétez pas, M. le premier ministre, il ne peut pas y en avoir d'autres.

M. CLOUTIER: Ah bon! Cela signifie que vous avez épuisé vos armes.

M. BURNS: II peut y en avoir d'autres, cependant, une fois que celui-là aura été battu. Mais pour le moment il ne peut pas y en avoir d'autres. Si jamais vous ne trouvez pas qu'il est assez bon, à ce moment-là...

M. CLOUTIER: Ah! il y a d'autres amendements.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense qu'ils en ont.

M. CLOUTIER: Mais sur l'amendement, ceux qui ont déjà parlé n'ont pas à parler de nouveau.

M. BURNS: Non. Ceux qui...

M. CLOUTIER: Mais là, vous pouvez tous parler sur le sous-amendement.

M. BURNS: Exactement.

M. CLOUTIER: Alors, allez-y.

M. BURNS: Je tiens, M. le Président, parce que vous ne présidiez pas — vous étiez très bien représenté d'ailleurs, samedi, par le vice-président de l'Assemblée nationale — à souligner qu'il me restait cinq minutes concernant l'amendement lui-même. Il y a d'autres députés aussi, je pense, à qui il reste quelques minutes.

M. LEGER: II me reste trois minutes. UNE VOIX: II me reste quinze minutes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): On franchira ce...

M. CLOUTIER: Et moi, je ne suis pas intervenu.

M. LEGER: II vous reste 40 minutes.

M. BURNS: Prenez tout le temps que vous voulez, M. le ministre.

M. CLOUTIER: Non. C'est trop. Cinq, cela me suffit pour démolir vos arguments.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Disons que jusqu'à maintenant, chaque intervention a été faite en employant les 20 minutes. Je comprends que le règlement prévoit que lors de l'étude article par article... Mais je pense qu'on pourrait faire une argumentation à savoir que cela ne s'applique pas lorsqu'on parle sur une motion d'amendement. A tout événement, on ne prend pas de décision...

M. BURNS: M. le Président, j'aimerais dès maintenant et encore une fois — vu que vous ne présidiez pas samedi — mentionner, et on vérifiera peut-être au journal des Débats, qu'un certain nombre de députés, dont votre humble serviteur, dont le ministre des Affaires culturelles, d'ailleurs...

M. HARDY: Je n'avais pas parlé du tout, mais, M. le Président, je me souviens très bien de ce que dit le député de Maisonneuve et je m'engage à défendre sa cause auprès de vous.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A ce moment, je suis sûr de vous donner raison. L'honorable député de Lafontaine, sur la motion de sous-amendement.

M. LEGER: M. le Président, si je comprends bien, le sous-amendement présenté par le député de Saint-Jacques pour clarifier l'amendement que j'avais présenté est le suivant. L'amendement premier se lisait comme suit... Contrairement à certaines affirmations que j'ai vues en fin de semaine, ce n'était pas l'abrogation de l'article 133.

Mon amendement disait ceci: Que l'article 1 soit amendé en ajoutant, à la fin, l'alinéa suivant: "L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec". C'était l'amendement, ce n'est pas l'abrogation de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Pour clarifier davantage les intentions derrière mon amendement, le député de Saint-Jacques a amené le sous-amendement suivant: "Que la motion en discussion soit amendée en ajoutant à la fin la phrase suivante: "L'usage de l'anglais continuera d'être permis dans les débats à l'Assemblée nationale et dans les témoignages et plaidoiries orales devant les tribunaux". Comme on le sait fort bien, la langue officielle, d'une part, et les droits individuels des anglophones, d'autre part, sont des choses complètement différentes. Si nous voulons que le français soit la langue officielle, la seule langue officielle au Québec, ça ne brime en aucun point les droits individuels.

Il y a trop de gens qui se mêlent, depuis le début de l'étude du bill 22, sur le problème du bilinguisme d'Etat et du bilinguisme individuel, sur l'unilinguisme d'Etat et l'unilinguisme des individus. Je pense qu'il est temps qu'on éclaire les gens sur ce problème. Le problème des individus, c'est ce que clarifie l'amendement du député de Saint-Jacques. Ce qui mêle les gens actuellement, c'est la crainte de ne pas être capables, individuellement, de devenir des individus bilingues. Ce qui est absolument faux. Ce n'est pas le but recherché. Certains ministres et certains députés du parti ministériel, du parti des anglophones, essaient de faire croire cela. Le parti des anglophones essaie de faire croire aux citoyens québécois, particulièrement aux francophones, que nous voulons empêcher que les individus deviennent bilingues. C'est absolument faux et je ne sais pas combien de fois il faut que je le répète aujourd'hui pour que

ce soit bien clair dans l'esprit des citoyens: l'unilinguisme de l'Etat peut permettre facilement le bilinguisme des individus. C'est clair, ça? L'unilinguisme de l'Etat peut permettre le bilinguisme des individus.

C'est une chose qui doit être répétée le plus souvent possible et en plus gros caractères possibles auprès des citoyens québécois francophones pour qu'eux ne soient pas dupes du fait que les anglophones ont eu certaines angoisses à certains moments créés peut-être artificiellement, je me pose des questions, pour faire croire aux Québécois francophones que si quelques anglophones se sentent menacés, c'est peut-être parce que le projet de loi a quelque chose de bon, un petit avancement de quelques pas. C'était l'astuce du premier ministre, qui sourit actuellement, parce qu'il a vu que j'ai découvert son jeu. D'ailleurs, beaucoup de Québécois l'on découvert.

Mais non, M. le Président, on ne veut pas...

M. BOURASSA: Parlez-nous donc du timbre ! Je suis sérieux.

M. LEGER: ... que le Titanic libéral arrive à faire naufrage sur l'iceberg des six députés du Parti québécois qui représentent ce qui est en-dessous des neuf dixièmes, l'âme des Québécois, qui se défend devant un projet de loi comme ça. On ne veut pas que vous vous imaginiez que vous n'avez qu'un petit morceau de glace, les six députés péquistes et les deux députés créditistes, et qu'il n'y a que ça à traverser, M. le Président.

Le Parti libéral va être un gros Titanic qui va faire naufrage en arrivant directement sur l'iceberg parce que le reste des Québécois francophones est contre le fait qu'on leur joue un tour comme le premier ministre veut le faire actuellement.

Je lui dis que, si on veut essayer de remplacer une guillotine par un "bulldozer," il y a deux façons d'arrêter le "bulldozer." En se mettant devant, comme le Parti québécois le fait actuellement, ou en le retenant par l'intérieur, comme certains ministres auraient pu le faire.

M. BOURASSA: Est-ce que...

M. LEGER: Par l'intérieur, un bulldozer peut s'arrêter.

M. BOURASSA: Est-ce que vous voulez...

M. LEGER: ...en mettant différentes choses dans l'essence du "bulldozer" qui veut passer sur les doigts des Québécois. Vous voulez parler, M. le premier ministre?

M. BOURASSA: Est-ce que, en faisant de l'obstruction comme vous le faites, vous ne révélez pas votre jeu en voulant la guillotine? Est-ce que vous ne vous trouvez pas à demander indirectement la guillotine?

M. MORIN: Est-ce que cet amendement n'est pas sérieux?

M. BOURASSA: Est-ce que vous demandez...

M. MORIN: Voulez-vous que nous discutions sérieusement de cet amendement?

M. BOURASSA: En prenant une semaine par article, comme vous le faites, cela prendrait deux ans et demi pour adopter la loi. Vous nous demandez la guillotine.

M. BURNS: M. le Président, pour un article aussi important...

M. BOURASSA: Vous nous demandez la guillotine par votre attitude.

M. BURNS: Est-ce que vous en acceptez une question? Pour un article aussi important que l'article 1, c'est-à-dire celui qui décide une fois pour toutes que le français est la langue officielle, ne croyez-vous pas que c'est assez important pour y mettre quelques jours pour discuter du fond de ce problème qui va sous-tendre toute la discussion du reste du projet de loi? Vous ne croyez-pas cela, M. le premier ministre?

M. BOURASSA: M. le Président, le député de Saint-Jacques, au nom du Parti québécois, a dit samedi qu'il ferait un "filibuster" sur tous les articles, qu'il apporterait des amendements et des sous-amendements...

M. BURNS: Le député de Saint-Jacques n'a pas dit cela, M. le Président.

M. MORIN: Nous avons dit que nous engagerions une discussion sérieuse sur chaque article.

M. BOURASSA: Vous êtes le seul à l'avoir dit.

M. BURNS: Non, M. le Président, tout le monde a dit cela.

M. BOURASSA: Le député de Sauvé a été le seul à le dire.

M. BURNS: Sauf que, quand vous avez provoqué vendredi le député de Saint-Jacques en lui disant: Vous faites un "show", le député de Saint-Jacques a dit: Vous en voulez un "show"? on va vous en donner un pire que celui-là.

M. BOURASSA: Vous l'avez repris samedi. Vous avez dit que vous feriez un "filibuster" sur tous les articles.

M. BURNS: M. le Président, il n'a jamais été question de cela. Jusqu'à maintenant il a été question d'examiner fondamentalement,

d'abord, les questions de procédure — et vous nous en rendrez témoignage, M. le Président, vous avez été là pendant toute cette période. Nous avons demandé le dépôt de documents, lesquels documents nous ont été refusés sous forme de motions et nous ont été donnés par la suite, comme si le ministre de l'Education nous faisait un cadeau. Ce n'était pas un cadeau qu'on voulait, on voulait tout simplement examiner les documents avant d'examiner le projet de loi, article par article, dans ses détails.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOURASSA: Donnez vos amendements.

M. BURNS: Et nous continuons à tenir une discussion que nous voulons à son plus haut degré de rationalité. J'espère que le premier ministre va rester avec nous tout le temps. Quand je dis avec nous, ce n'est pas seulement physiquement, je parle intellectuellement. C'est ce que je veux dire.

M. BOURASSA: J'ai l'affaire Boutin.

M. BURNS: J'espère que vous allez rester avec nous parce qu'on a l'intention de garder la discussion à un niveau très élevé.

M. BOURASSA: J'ai d'autres problèmes. Il y a l'affaire Boutin, qui intéresse le député de Maisonneuve.

M. BURNS: D'accord? C'est ce que je vous demande.

M. MORIN: Ce n'est tout de même pas l'affaire Boutin qui va vous amener à passer la guillotine !

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Non, mais cela intéresse le député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Lafontaine, sur le sous-amendement.

M. BURNS: M. le Président, le premier ministre me provoque inutilement. Je lui dis d'avance qu'il ne réussira pas à me faire sauter dans d'autres sujets.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors on va laisser la parole au député de Lafontaine. L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, j'espère que vous n'enlèverez pas sur mon droit de parole les interventions du premier ministre, qui a provoqué des...

M. BURNS: Et du député de Maisonneuve.

M. LEGER: Et du député de Maisonneuve, qui a été obligé de répondre à des questions du premier ministre, M. le Président. J'espère que vous allez me conserver mon droit de parole. D'ailleurs vous l'avez toujours fait depuis le début, vous êtes le défenseur de l'Opposition et nous le savons fort bien.

M. BOURASSA: C'est un député libéral.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II ne faudrait pas que vous m'embarquiez trop.

M. LEGER: Je ne veux pas vous embarquer dans le Titanic, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y.

M. LEGER: M. le Président, j'étais en train de dire qu'il n'est pas suffisamment compris de la population pour bien des raisons, d'abord par la propagande libérale, deuxièmement par le maquignonnage du projet de loi, troisièmement par le fait que les Québécois sont en majorité en vacances.

Il y a trop de Québécois qui ne sont pas au courant. J'écoutais, en m'en venant tantôt, un "hot line", une ligne ouverte où des citoyens se demandaient des explications sur le bill 22. Ils ne l'avaient pas lu, ils avaient l'impression que... J'ai même entendu des gens dire: Les deux extrêmes, les anglophones et les francophones sont choqués, donc, il y a peut-être quelque chose de bon là-dedans. Imaginez-vous, M. le Président, vaguement, une population qui se dit: Parce que les anglophones s'opposent un peu au projet de loi, sans avoir vérifié pourquoi...

On voit les raisons qui ont motivé le gouvernement à agir de cette façon, à présenter, comme dans le cas de la loi 63 — d'ailleurs, elle n'est pas encore enlevée, la loi 63, on la retrouve dans le bill 22 — le départ de cette loi par une affirmation: "Le français est la langue officielle", alors qu'elle l'est depuis déjà plusieurs centaines d'années, et l'affirmer sans enlever l'officialité de l'autre langue, sans abroger l'article 133. Il faudrait qu'il se fasse poursuivre en vertu de la Loi des consommateurs; c'est une fausseté dans la publicité. C'est une fausseté de dire cela actuellement. Cela donne l'impression, publicitairement parlant, que l'anglais n'est plus la langue officielle du Québec.

Pour clarifier cela, nous avons proposé que ce soit bien clair, pour permettre que le français soit réellement officiel, que l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique cesse d'avoir effet, mais qu'on conserve les droits individuels de l'anglais devant l'Assemblée nationale et dans les plaidoiries orales devant les tribunaux.

On sait qu'actuellement quant aux langues officielles — je cherche mon autre papier qu'on m'a enlevé — l'article 133 rend obligatoires,

premièrement, l'impression et la publication des lois dans les deux langues; il y a deux langues officielles pour fins de lois. Deuxièmement, c'est la même chose pour les jugements devant les tribunaux. Ce que nous disons, c'est que si au départ les tribunaux et l'Assemblée nationale acceptent, par la motion et l'amendement que nous présentons, de ne pas garder l'effet de l'article 133 mais de protéger les droits individuels des anglophones, cela veut dire qu'il n'y aurait plus de traduction en langue anglaise ni dans les tribunaux, ni à l'Assemblée nationale, mais que les anglophones, eux, individuellement pourraient s'exprimer en anglais dans les deux cas.

Je pense, si c'était accepté, que cela donnerait, au départ, à l'article 1 une vision beaucoup plus dynamique de l'objectif que nous, nous voulons continuer à discuter à travers chacun des autres articles. Si c'est adopté à l'article 1, un amendement qui permet de donner au français cette possibilité d'être une langue officielle réelle, et non pas simplement une langue officielle officieusement présentée, publicitairement bien tournée — ce n'est pas cela qu'on veut, M. le Président — à ce moment, chacun des articles que nous étudierons par la suite devront être pensés, et là, on pourra facilement accepter de corriger un par un les articles dans l'esprit que nous aurons eu à l'article 1. Mais si ce n'est pas accepté, je ne vois pas comment on peut réellement, sérieusement corriger des articles qui iraient à l'encontre de ce que nous voulons que soit l'article 1 du bill 22.

Le premier ministre a des dons pour présenter les chiffres. Il a fait des élections le 29, le 29 octobre, le 29 avril. Il présente son bill 22 de façon qu'il paraisse le 22 mai dans les journaux, que la population l'apprenne le 22. Je ne sais pas s'il fait exprès pour que le chiffre 22 ressorte bien, comme le chiffre 29, mais je pense que si le bill 22 était adopté tel quel, cela pourrait être son Waterloo, en ce sens que le bill 22 pourrait coller à l'endroit que je n'ose pas dire ici...

M. BOURASSA: Cela ne peut pas être votre Waterloo à vous autres?

M. LEGER: ... pour le reste de son mandat, comme le bill 63 est resté collé à l'Union Nationale. Le projet de loi 22, parce qu'on sait que le gouvernement est toujours en fuite, on saura où est-ce qu'il va lui rester collé, le projet de loi, un 2 sur chacune. Pendant les trois prochaines années, c'est là qu'on verrait malheureusement les conséquences d'un parti qui a atteint les sommets dans les représentations. Comme nous pourrions dire facilement après que le projet de loi 22 sera adopté, nous pourrions le dire en anglais après cela: "The higher they go, the harder they fall".

M. BOURASSA: Mais, si c'est notre Water- loo, pourquoi vous opposez-vous tellement au projet de loi 22, si cela nous fait tellement tort?

UNE VOIX: Hypocrites.

M. LEGER: J'ai entendu la question, M. le Président, je vais vous les dire.

M. HARDY: Mais en trois ans...

M. LEGER: C'est parce qu'actuellement, au Québec, on a besoin d'une loi pour protéger le français, parce que c'est le français qui est en danger au Québec.

M. BOURASSA: Pierre Bourgault.

M. LEGER: Qu'est-ce qu'on voit actuellement? La réponse exacte à la question du premier ministre est la suivante: Premièrement, à l'article 1, on maquille la loi comme on l'a fait pour le bill 63 en disant que le français est la langue officielle, ce qui est déjà le cas, mais ce qui n'enlève pas le caractère officiel à la langue anglaise. Laissez-moi répondre, j'ai quatre réponses à votre question.

La deuxième, cela ne change rien à la réalité actuelle de dire que le français est la langue officielle. Comme disait si bien le chef de l'Opposition, dire que le français est la langue officielle, c'est la même chose que dire que le Québec est en Amérique. D'ailleurs, on sait que les Québécois, le Québec est un accident historique actuellement en Amérique.

M. BOURASSA: Cela ne change rien dans l'affichage.

M. LEGER: Troisièmement, on rend légal, cela est grave, ce qui était des privilèges accordés aux anglophones depuis 100 ans. C'est grave, cela.

M. BOURASSA: Vous faites la même chose.

M. LEGER: M. le Président, pour la bonne intention du ministre, je vais lui lire ce qu'il rend légal par le projet de loi 22 pour les anglophones. C'est pour cela que je voudrais rassurer les anglophones, qu'ils arrêtent de s'énerver. Même le député de Sainte-Anne, et même le député de Mont-Royal, que je vois là-bas et qui m'écoute avec attention. Ils n'ont aucune perte de droits, on leur en accorde quatorze de plus. Je dois dire peut-être douze, parce qu'il y a eu deux amendements faits par le ministre. Cela prend du temps avant que le ministre comprenne, il en a corrigé deux sur quatorze. Mais il y a quatorze droits que les anglophones n'avaient pas, législativement parlant, avant et qu'ils ont maintenant.

Premièrement, l'obligation légale de fournir des versions anglaises des documents officiels. Ils n'avaient ça auparavant dans aucune loi;

c'était un privilège qu'ils avaient. Là, on le met dans la loi. Donc, messieurs les anglophones, vous avez cela de plus. Cela a été voté, présenté par le parti des anglophones, le Parti libéral. Deuxièmement, l'obligation en loi, un autre privilège qui n'existait pas pour les anglophones, mais qu'ils ont aujourd'hui par la loi, obligation aux municipalités — qui le font déjà, avec une petite nuance de correction, mais c'est la même chose dans le sens — dont 10 p.c. des administrés sont de langue anglaise d'avoir des documents officiels en anglais. La version anglaise est alors aussi authentique que la française obligatoire. Cela veut dire que 311 municipalités du Québec, soit près de 3 millions de Québécois, vont vivre dans une situation d'assimilation anglicisante, parce que tous les documents municipaux peuvent se faire aussi bien en français qu'en anglais. Le moindrement que la majorité va être anglaise, cela va être uniquement en anglais.

M. HARDY: Personne ne lit les documents municipaux. Une lecture très...

M. LEGER: M. le Président, quand ses taxes sont menacées, je pense qu'il faut qu'on lise ces documents. Troisièmement, obligation pour l'administration publique d'accepter de toute personne, même morale, qu'elle s'adresse à elle en anglais. C'est encore un autre privilège qui est mis dans la loi à l'article 11. C'est le troisième. Voici le quatrième que les anglophones ont et qu'ils n'avaient pas avant. Tâchez de répéter cela dans les journaux anglophones. J'ai trouvé malheureux que pendant un mois ou un mois et demi on ait soulevé les passions du côté des anglophones en leur disant: Avec le projet de loi 22, vous allez perdre vos droits, les droits acquis, etc. Vos droits linguistiques vont être dissous, vous allez être dans une période discrétionnaire, etc. Tout à coup, avec les amendements du ministre Cloutier, alors que les passions sont éveillées, que les francophones se sont dits: Si les anglophones sont un petit peu choqués, cela doit être qu'on a gagné un pouce à quelque part, juste avant que le projet de loi arrive en Chambre, dans les journaux anglophones, un gros titre: English language rights are protected.

Maintenant, les anglophones vont se rassurer, vont s'en retourner chez eux, vont continuer à voter pour le parti des Anglais, le Parti libéral. Les francophones, qui ne lisent pas les journaux anglophones, ne sauront pas qu'on a apaisé les anglophones. Mais, pendant ce temps, ils ont toujours l'impression qu'avec le projet de loi 22 on vient de gagner un pouce. Ce pauvre peuple québécois qui, depuis 300 ans, a toujours été obligé de travailler pour gagner pouce par pouce. Le premier ministre nous arrive et nous dit: Pourquoi nous poignardez-vous dans le dos? Ce n'est pas cela, on vous retient dans le dos parce que vous êtes toujours en train de vous sauver devant vos responsabilités de premier ministre des francophones.

Cinquième privilège, M. le Président, qu'on reconnaît dans la loi pour les anglophones: possibilité reconnue juridiquement d'être uni-lingue anglais dans les postes administratifs du gouvernement — à l'article 14.

Un autre privilège que les anglophones vont avoir, maintenant, dans cette loi du bill 22: le droit de parler anglais en assemblée délibérante non plus seulement à l'Assemblée nationale, mais aussi partout dans l'administration publique.

Septième droit: droit de rédiger en anglais également les contrats conclus au Québec avec l'administration publique.

Huitième droit qu'on donne dans le bill des anglophones, le bill 22: obligation morale créée aux entreprises d'utilité publique ou de transport et corporations professionnelles de fournir une version anglaise des avis, communications, formulaires et imprimés destinés au public. Article 20.

Neuvième droit qu'on accorde aux anglophones qu'ils n'avaient pas avant, M. le Président: obligation morale aux employeurs de donner en anglais leurs avis, communications et directives lorsque leur personnel est en partie de langue anglaise. Cela va être maintenant dans la loi. Avant, cela devenait une habitude et, au lieu de redresser cela, on leur donne d'autres privilèges dans une loi.

Dixièmement, droit conféré à une majorité simple de salariés syndiqués. Maintenant, cela a été enlevé. Je dois m'excuser auprès du ministre. Vous avez raison. Vous avez apporté un amendement. Vous avez eu honte, rendu à l'article 9. Vous avez dit: II faut bien en enlever un petit peu.

Au dixième et au onzième, cela a été enlevé par les amendements du ministre qui a eu honte d'aller trop loin.

Douzièmement, le droit d'obtenir la rédaction, en anglais comme en français, des contrats d'adhésion, des contrats où figurent des clauses de style imprimé, ainsi que les bons de commandes, les factures et les reçus imprimés.

Treizièmement, droit de tout consommateur d'exiger un contrat d'achat en anglais. Cela, on l'a enlevé. Je dois admettre qu'on l'a enlevé.

Il en reste onze.

Quatorzièmement, droit pour les commissions scolaires de donner l'enseignement en langue anglaise, si elles ont déjà commencé à le faire. On l'a amendé différemment, mais l'esprit est encore là. On en parlera à l'article 48, si jamais on se rend jusque-là. Mais à l'article 48, M. le Président, l'amendement, qu'est-ce que cela donne comme conséquence?

M. BOURASSA: II y en a qui disent que c'est la même formule proposée par votre parti.

M. LEGER: M. le Président, je m'excuse. Le président me dit que je n'ai que deux minutes.

M. BOURASSA: Sauvé par la cloche.

M. LEGER: Non, M. le Président. Il reste la quatrième réponse à votre question à savoir: Qu'est-ce qu'il y a de pas bon dans le bill 22 pour les francophones? Le quatrième droit, c'est ceci: de permettre aux immigrants de langue anglaise d'aller à l'école anglophone, alors que nous ne contrôlons pas... Nous avons une fuite dans notre système qui amène cette hémorragie continuelle. C'est que l'immigration est contrôlée par le fédéral qui laisse pénétrer au Québec la quantité d'anglophones qu'il désire. Les chiffres sont là pour démontrer que c'est une majorité et une minorité de gens de langue française et de langues latines. Nous ne contrôlons pas notre immigration. Actuellement, on permettra aux immigrants d'aller à l'école anglaise s'ils sont d'origine anglophone et s'ils peuvent s'exprimer en anglais, si c'est leur langue maternelle. On sait qu'on est entouré de quelques 200 millions d'anglophones. Il y a les anglophones venant des Etats-Unis, d'Angleterre, d'Australie, d'Afrique, de la Jamaïque, de toutes les autres parties du monde où l'anglais est la langue maternelle. Ils vont aller du côté des anglophones, M. le Président.

Actuellement, le projet de loi ne corrige pas cette situation, et comme nous ne contrôlons pas notre immigration, c'est encore une autre occasion d'avoir une hémorragie, et c'est là qu'on voit le danger pour les francophones avec le bill 22. Si le gouvernement des anglophones — le gouvernement libéral— ne corrige pas, à l'article 1, le principe directeur même de tout l'ensemble de tous les articles qui vont suivre, M. le Président, nous ne pouvons que lui dire que cela va lui coller à l'endroit que je ne peux pas mentionner parce que c'est peut-être antiparlementaire, de toute façon, c'est un chiffre 2 sur chacun, pour le reste de son mandat. Et les Québécois, quand ils reviendront de vacances, vont continuellement le pourchasser, comme pourchassaient nos anciens "cowboys", au fer rouge, pour le marquer de ce geste historique qu'il est en train de nous passer, aux Québécois. Il ne passera pas une deuxième élection, même s'il a 102 députés actuellement.

Rappelez-vous, M. le Président, l'Union nationale est disparue, et le Parti libéral n'a eu qu'un sursis de quelques années.

M. BOURASSA: Cest vous autres qui allez disparaître.

M. CLOUTIER: ... quatre fois.

M. LEGER: Vous êtes chanceux qu'on soit là encore comme paratonnerre de ce qui se passe au Québec.

M. CLOUTIER: Votre rôle historique se termine, malheureusement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission est prête à se prononcer sur la motion de sous-amendement?

M. CLOUTIER: Vote.

M. BURNS: Non. On veut entendre les réactions gouvernementales là-dessus.

M. CLOUTIER: Ah! Ecoutez...

M. BURNS: Ecoutez, M. le Président...

M. CLOUTIER: M. le Président, défendez votre motion. On parlera quand on sera prêt à parler.

M. TETLEY: Votre temps est expiré.

M. BURNS: Ah non! Il nous en reste beaucoup.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. CLOUTIER: Vous voudriez qu'on vous donne des arguments?

M. BURNS: Ce n'est pas cela.

M. CLOUTIER: Mais c'est à vous de fournir des arguments et on les démolira après. C'est votre sous-amendement.

M. TETLEY: Est-ce que le député me permettrait une question?

M. BURNS: M. le Président, sur une question de règlement, ici. Je parle sur une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur une question de règlement.

M. BURNS: Je veux tout simplement vous dire ceci. C'est beaucoup plus une question de raison qu'une question de règlement. Si vous voulez jouer à cache-cache avec nous, je n'ai pas d'objection. Jouez à cache-cache avec nous. Mais là, vous avez un nouvel amendement. On aimerais bien savoir ce que le gouvernement en pense. Est-ce que cette affaire est stupide ou se tient-elle, dans votre esprit, eu égard à...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: M. le Président, je pense...

LE PRESIDENT (M. Gratton): En fait, ce n'est pas une question de règlement, vous en conviendrez.

M. BURNS: C'est une question que je pose au gouvernement en général.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je vais le faire pour vous. Je vais demander s'il y a des députés ministériels qui veulent prendre la parole.

M. BURNS: C'est ce qu'on fait depuis le début.

M. CLOUTIER: Oui, sur le point de règlement.

M. BURNS: On demande... J'entends le ministre des Affaires culturelles...

M. CLOUTIER: Je veux parler là-dessus. J'ai demandé la parole.

M. BURNS: J'entends le ministre de l'Education qui a le courage d'y répondre. Tant mieux. Cela va me faire plaisir. J'aimerais savoir...

M. CLOUTIER: Vous l'avez posé.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... si cette affaire est acceptable ou si elle ne l'est pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le ministre de l'Education sur le sous-amendement.

M. CLOUTIER: II est bien évident que c'est recevable. Sinon, le président aurait tout de suite déclaré que ce ne l'était pas.

M. BURNS: Excusez. Recevable dans votre esprit. Je sais bien que c'est recevable au...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... point de vue de la procédure, le président l'a déjà déclaré recevable. Mais je veux dire: Est-ce que vous pensez que vous pouvez accepter un sous-amendement comme celui-là, eu égard à l'amendement que nous faisons à l'article 1? C'est seulement cela.

M. CLOUTIER: Je pense qu'il faut quand même être sérieux. Il est évident qu'on est en présence de manoeuvres dilatoires. Le gouvernement est tout à fait disposé à répondre, mais il trouve qu'il appartient à l'Opposition, qui a présenté un amendement et un sous-amendement, de le défendre.

L'Opposition n'a jamais caché qu'elle désirait faire parler tous ses membres et il est bien évident que c'est là une manoeuvre d'obstruction. Il n'y a pas d'autre solution pour nous que de prendre notre mal en patience, quel que soit le jugement qu'on puisse porter sur cette manoeuvre.

M. BURNS: Me permettez-vous, M. le ministre...

M. CLOUTIER: Je suis toujours sur mon point de règlement.

M. BURNS: Très bien.

M. CLOUTIER: II n'y a strictement aucune raison pour laquelle nous nous prêterions à cette manoeuvre. En effet, si nous répondons chaque fois que l'un de vous s'exprime, nous nous trouvons, à ce moment, à prolonger encore cette obstruction, ce qui n'est pas du tout le but que nous poursuivons. C'est la raison pour laquelle nous avons toujours été extrêmement sobres dans nos interventions. Je considère que l'un de vous s'est exprimé. Si vous décidez que personne d'autre ne parle, je suis tout prêt à parler au nom du gouvernement sur le sous-amendement et l'amendement.

En revanche, si vous attendez qu'un de nous parle pour alimenter encore vos manoeuvres d'obstruction, il n'en est pas question. Nous allons attendre que vous nous ayez présenté toutes les facettes de vos thèses.

M. BURNS: En vertu de l'article 96, je veux rétablir un fait. Je n'ai pas demande à tous les députés présents à la commission de répondre aux arguments de l'Opposition. J'ai tout simplement demandé s'il y avait quelqu'un qui aurait la possibilité ou qui serait en état de répondre aux arguments pour dire s'il est d'accord ou non sur cette motion.

M. CLOUTIER: Nous n'avons pas encore... M. BURNS: Laissez-moi terminer!

M. CLOUTIER: Je croyais que vous aviez terminé.

M. BURNS: Non. Faites comme j'ai fait à votre égard.

M. CLOUTIER: C'est qu'il y a eu un petit silence...

M. BURNS: Oui.

M. CLOUTIER: ... entre vos deux phrases. Alors, j'ai pensé que vous aviez terminé.

M. BURNS: Je dis que nous ne croyons pas que tous les députés ministériels répondront à cette motion, à moins que cela ne soit le désir de tous les députés ministériels et à moins que le caucus n'ait permis une certaine liberté chez les députés ministériels, mais on sait que cela n'est pas permis jusqu'à maintenant. On l'accepte. Qu'est-ce que vous voulez? Ce n'est pas tellement nous que cela brime; c'est vous autres.

M. HARDY: Occupez-vous donc de vos affaires.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: C'est vrai que vous faites partie du caucus, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que

vous pourriez m'éclairer? On est sur une question de règlement.

M. BURNS: ... cela vous vise, je m'excuse.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non. Soyez sans crainte. Je ne suis pas chatouilleux. J'ai l'impression que nous ne sommes ni sur une question de règlement, ni sur la motion d'amendement.

M. BURNS: On est sur une question de règlement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'aimerais bien qu'on revienne...

M. BURNS: ... et je vais vous dire laquelle. En vertu de l'article 96, on m'a dit que je venais de dire...

M. TETLEY: Vous vous exprimez mal.

M. BURNS: ... qu'il fallait que tous les députés ministériels...

M. TETLEY: Vous prenez six minutes...

M. BURNS: Voyons donc! M. le ministre, restez tranquille !

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: C'est votre journée aujourd'hui?

M. TETLEY: Vous vous exprimez si mal que vous prenez six minutes...

M. BURNS: Suivez l'exemple de votre premier ministre. Pour une fois, il est calme aujourd'hui. Il est tranquille.

M. TETLEY: Suivez son exemple vous-même.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Est-ce qu'il va falloir vous donner le même traitement qu'on a donné au premier ministre la semaine dernière?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. TETLEY: Je n'ai pas peur de vos menaces.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: Regardez s'il est tranquille. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. TETLEY: Je n'ai pas peur de vos menaces.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous voyez ce qui arrive. Est-ce que quelqu'un veut intervenir sur la motion de sous-amendement?

M. TETLEY: Déposez vos amendements. Vous avez peur de les déposer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous voyez ce qui arrive? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui veut intervenir sur la motion de sous-amendement? Il n'y a pas de question de règlement.

M. TETLEY: C'est comme votre budget de l'An l.

M. BURNS: M. le Président, je n'ai pas terminé.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, mais il n'y a pas de question de règlement.

M. BURNS: M. le Président, il y a l'article 96. Je m'excuse.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je m'excuse auprès du député de Maisonneuve. Il se réfère à l'article 96, en vertu d'une altercation qui a eu lieu au début...

M. BURNS: Non, M. le Président, pas du tout.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ...sur une question de règlement qui n'existe pas.

M. BURNS: Non, sur une remarque très gentille, mais un petit peu brûlante du ministre de l'Education. Ce n'était pas méchant, ce qu'il a dit.

M. CLOUTIER: Ce n'est jamais méchant, ce que je dis, mais c'est souvent efficace.

M. BURNS: Sa remarque est un petit peu au fer rouge. J'ai tout simplement mentionné tout à l'heure, un point. Vous m'avez permis, M. le Président, de dire: Comment se fait-il qu'il n'y ait pas de députés libéraux qui interviennent là-dessus? Et le ministre m'a répondu là-dessus. Je vous cite l'article 96: "Le député qui prend la parole pour donner des explications sur le discours qu'il a déjà prononcé ne peut le faire que lorsque le discours qui les provoque est terminé à moins que celui qui le prononce ne consente à être interrompu".

J'ai posé une question au ministre et il m'a dit: Attendez. D'accord, M. le Président, vous l'avez entendu comme moi. Après cela, on dit: "Les explications doivent être brèves et ne doivent apporter aucun élément nouveau dans la discussion et elles ne peuvent engendrer un débat".

M. le Président, ce n'est pas moi qui ai engendré un débat; c'est le député de NDG, le ministre des Institutions financières, qui m'a dit

que je tentais de mêler les problèmes. "Apportez vos amendements", comme il m'a dit.

M. TETLEY: J'ai dit que vous vous êtes mal exprimé.

M. BURNS: Pardon?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je dis tout simplement ceci: II ne serait que normal que l'Opposition, qui se force, M. le Président, pour vous apporter des arguments les plus raisonnables possible à l'appui de ses amendements, entende, après au moins deux interventions, ce que le gouvernement pense à ce sujet. Tout ce que j'ai entendu dire jusqu'à maintenant, de la part du ministre de l'Education, c'est: "On ne participe pas à ce "filibuster"." On ne vous demande pas de participer à quelque "filibuster" que ce soit. D'ailleurs, on ne vous a pas parlé de "filibuster" jusqu'à maintenant.

M. BOURASSA: C'est faux.

M. TETLEY: C'est dans le Jour de ce matin.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: Le député de Saint-Jacques en a parlé.

M. TETLEY: Lisez le Jour. Achetez-en une copie.

M. BURNS: On ne vous a pas parlé de "filibuster" jusqu'à maintenant. A la provocation du premier ministre, vendredi, à l'endroit du député de Saint-Jacques, quand il lui disait: Vous êtes en train de faire un grand "show". Le député de Saint-Jacques lui a dit: Si vous voulez avoir un "show", vous allez en voir un plus grand que cela.

Jusqu'à maintenant, et je défie, de façon très gentilhomme, le ministre de l'Education et tout autre ministre autour de la table... Je défie non pas au sens de l'article 99, parce que je vois que le ministre s'apprête à me dire que je n'ai pas le droit de défier.

M. HARDY: Ce n'est pas cela.

M. BURNS: C'est pour cela que j'ai dit: De façon bien gentilhomme.

M. HARDY: Je comprenais votre figure de style.

M. BURNS: Je défie qui que ce soit, autour de la table — c'est une figure de style — de trouver dans nos propos, jusqu'à maintenant, une volonté de bloquer de façon inintelligente, comme le disait le ministre...

M. CLOUTIER: Je peux le prouver tout de suite.

M. BURNS: ... le projet de loi. M. TETLEY: Cest vrai.

M. BOURASSA: On l'a accepté, votre "filibuster".

M. BURNS: Nos décisions, vous verrez qu'elles viennent au fur et à mesure, mais, jusqu'à maintenant, en tout cas, je pense que le débat s'est tenu — j'insiste encore là-dessus — à un niveau que très peu de débats ont connu jusqu'à maintenant, c'est-à-dire à un niveau intellectuel où on échange des idées, où on tente de vous convaincre. Mais, semble-t-il, vous êtes complètement enfermés sous une cloche de verre; c'est votre problème, ce n'est pas le nôtre. Mais, pour ce qui nous concerne, on aimerait bien, en attendant, savoir pourquoi le gouvernement voterait pour ou contre l'amendement qui vient d'être déposé par le député de Saint-Jacques. C'est seulement cela, ce n'est pas plus.

M. HARDY: M. le Président...

M. LEGER: Sur un point de règlement, M. le Président, d'après l'article 96. Je me suis fait dire par le ministre des Institutions financières...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: Je veux rétablir les faits.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous êtes censé le faire immédiatement après votre intervention.

M. LEGER: Oui, mais je ne pouvais pas l'interrompre pendant qu'il était sur une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): On est rendu à trois ou quatre sujets plus loin.

M. LEGER: Simplement un point, c'est qu'on m'a accusé — en réalité c'est à moi qu'on voulait dire cela — d'avoir dit qu'on voulait faire un "filibuster" actuellement.

M. BOURASSA: Tout le monde sait cela.

M. LEGER: Je n'ai même pas pris ces mots. J'ai dit qu'on ferait tout ce qu'il faut pour empêcher que le projet de loi ne soit adopté, mais je l'ai mis au conditionnel. Si l'on adopte l'article 1 sans un changement radical, là on va être obligé de se battre pour l'empêcher d'être adopté. Mais pas avant. Actuellement, nous avons des amendements...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ...qui permettent encore l'étude logique...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Est-ce qu'il parle au nom du parti?

M. BURNS: Je suis entièrement d'accord avec le député de Lafontaine; c'est exactement ce que je viens de dire.

M. BOURASSA: Cela veut dire que c'est un "filibuster" si on n'accepte pas vos amendements.

M. LEGER: Un amendement majeur à l'article 1. Le reste, M. le Président, cela ne sert à rien de laisser passer cela. C'est l'article 1 qui est la base même, le principe du projet de loi. D'ici ce temps, on espère vous empêcher de faire naufrage, comme je le disais tantôt, avec votre Titanic sur l'iceberg du Parti québécois. C'est à ce stade-ci que nous avons les amendements les plus sérieux, les plus profonds qui peuvent vous ramener sur votre chemin. Nous espérons que c'est un chemin de Damas, pour que vous puissiez voir clair.

M. BOURASSA: Vous nous demandez la guillotine.

M. LEGER: Après cela, on verra, mais je ne l'ai jamais dit. Comme le ministre, c'était conditionnel.

M. BOURASSA: En annonçant le "filibuster", vous nous demandez la guillotine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Non. Mais vous on voit que vous cherchez un prétexte pour amener la guillotine. On voit le commencement, la préparation du terrain pour amener une guillotine. Cela, c'est votre problème. Moi, je vous dis qu'actuellement c'est sérieux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. MORIN: Vous voulez partir en vacances.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le ministre des Affaires culturelles sur le sous-amendement.

M. HARDY: M. le Président, il est bien clair que je parle sur le sous-amendement. C'est en réponse à ce que vient de dire le député de Maisonneuve tantôt. Je vous préviens immédiatement que je n'utiliserai pas mes 20 minutes. Je ne veux qu'aborder une facette, celle soulevée par le député de Maisonneuve. Il l'a fait sous une forme de question de règlement qui n'en était pas une du tout.

Le député de Maisonneuve se dit: Pourquoi le parti ministériel ne parle-t-il pas sur nos sous-amendements? Je dis d'abord, M. le Président, qu'au Parlement comme ailleurs il y a une règle de bon sens qui veut que l'on parle lorsqu'on a quelque chose à dire, premièrement. Deuxièmement, je pense qu'il appartient aux députés ministériels de décider à quel moment ils considèrent qu'ils ont quelque chose à dire. L'évolution du débat peut déterminer le moment où l'on a quelque chose à dire. Il se peut fort bien qu'à un stade donné d'un débat on juge que l'on n'a rien à apporter, mais qu'à cause d'une certaine direction que le débat peut prendre à un moment donné on puisse avoir quelque chose à dire. Donc, il n'y a pas de loi absolue qui dit qu'une fois qu'un député de l'Opposition a parlé nécessairement un député ministériel doive lui répondre. Ce n'est pas aussi simple et aussi simpliste que cela.

Alors, M. le Président, je ne pense pas que l'on doive soulever un débat là-dessus, d'autant plus qu'il me semble que, dans l'ordre normal des choses, celui qui propose, celui qui avance une proposition se doit de l'exposer sous tous ses angles avant qu'on y réponde. Il se pourrait fort bien, à un moment donné, qu'après avoir entendu le discours du député de Maisonneuve sur un sous-amendement je décide d'intervenir et un autre collègue du député de Lafontaine, qui défend une autre facette de la proposition, pourrait peut-être me convaincre que certains des propos que j'ai tenus ne sont pas valables.

M. CLOUTIER: Ce n'est pas plausible. M. HARDY: Théoriquement, en tout cas.

M. BURNS: Vraiment, on vient d'entendre toute l'affaire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: Je n'ai pas pu résister, je m'excuse.

M. BURNS: Le ministre de l'Education interrompt; il est en train de contredire son collègue, La solidarité ministérielle, cela existe pour certains et cela n'existe pas pour d'autres? Qu'est-ce que c'est?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. HARDY: M. le Président, je propose...

M. BURNS: II y en a qui votent pour ce projet de loi, mais qui sont fondamentalement contre, que ce soit des anglophones ou des francophones.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, le député de Maisonneuve me parle de la solidarité...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Là; vous avez le parrain du bill qui contredit le ministre qui parle. Cela me fait de la peine pour le ministre qui parle.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, justement le député de Maisonneuve parle de solidarité. Je me propose, dès que les débats actuels seront terminés, quand on aura un peu plus de calme, de réfléchir longuement sur le problème de la solidarité et de faire part au député de Maisonneuve du résultat de mes réflexions.

M. BURNS: II va être trop tard, M. le ministre.

M. HARDY: M. le Président, la loi 22, c'est une loi importante...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Avez-vous terminé?

M. HARDY: Non. je m'excuse. Il y aura d'autres lois importantes.

Donc, M. le Président, je dis qu'il n'appartient pas au député de Maisonneuve de décider quand d'autres de ses collègues devront intervenir.

M. BURNS: C'est vrai, cela.

M. HARDY: Et vous me permettrez de terminer là-dessus, M. le Président. Le député de Maisonneuve semblait nous inviter à participer au débat immédiatement, dans le but de rendre plus facile, plus sérieux, plus objectif, plus efficace le débat.

M. BOURASSA: Pour maquiller leur "filibuster".

M. HARDY: Puis-je rappeler au député de Maisonneuve que s'il y a un parti autour de cette table qui a tout fait pour rendre plus efficace le débat, c'est bien ceux qui siègent à votre droite, M. le Président. Nous avons déposé tous les documents, les amendements, même si le règlement ne nous y oblige pas, les principes directeurs, les amendements, même si le règlement ne nous y oblige pas, les principes directeurs, alors que l'Opposition... Et cela pourrait aider aussi.

M. MORIN: Après trois jours de débat.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, pourriez-vous demander au député de Sauvé de se taire, de respecter le droit de parole des autres?

M. MORIN: Vous ne me ferez pas taire lorsque vous dites des faussetés.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, le député de Sauvé dit qu'il ne vous fera pas taire. Ce n'est pas à moi qu'il porte préjudice, mais il viole le règlement et surtout, il manque...

M. MORIN: Vous le violez constamment vous-même!

M. HARDY: ... sérieusement de déférence à votre endroit, M. le Président.

M. BOURASSA: Mépris des institutions parlementaires.

M. HARDY: M. le Président, je dis...

M. TETLEY: II est indigne.

M. BURNS: Je vais mourir tout de suite.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. CHARRON: Avez-vous entendu celle-là, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Le premier ministre a dit: "Mépris des institutions."

M. HARDY: M. le Président, vous voyez comment c'est.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: L'Opposition nous reproche de ne pas intervenir et aussitôt qu'on commence à parler, ils font tout pour nous empêcher de parler.

M. CHARRON: Mépris des institutions. Celle-là est bonne.

M. HARDY: M. le Président, je dis donc que si l'Opposition, les députés qui siègent à votre gauche, dans le sens parlementaire du mot, voulaient vraiment rendre plus efficaces nos travaux, s'ils étaient sérieux quand ils disent qu'ils veulent rendre plus efficaces nos travaux, ils feraient la même chose que nous avons fait, ils déposeraient leurs amendements afin qu'on les étudie et qu'on puisse voir ce qu'il y a dans leurs amendements qui pourrait peut-être bonifier la loi. Mais parce que ça ne fait pas partie de leur petit jeu, ça ne fait pas partie de leur stratégie, ça ne fait pas partie de leur scénario, les députés du Parti québécois refusent systématiquement de déposer les amendements qu'ils prétendent avoir à ce projet de loi.

M. CHARRON: Vous en avez deux sur la table et vous ne parlez même pas dessus.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Y a-t-il d'autres députés qui voudraient profiter de leur droit de parole pour nous dire pourquoi ils ne l'exerceront pas?

M. TETLEY: Brièvement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous avez l'intention d'intervenir sur le sous-amendement?

M. TETLEY: Non, non. J'aimerais parler tout simplement deux minutes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur le sous-amendement?

M. TETLEY: Oui, oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Institutions financières.

M. CHARRON: M. le Président, il y a quelqu'un au bout de la table qui vous a fait signe.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui. M. TETLEY: Vous permettez?

M. MERCIER: Certainement, mon cher collègue, allez.

M. TETLEY: Merci. Le député de Maisonneuve nous a posé la question? Pourquoi ne parlez-vous pas? Une raison claire, c'est parce qu'il y a un "filibuster"; c'est très difficile de parler. Lorsque des gens parlent vingt minutes chacun... laissez-moi terminer. Une autre raison, ce sont les interruptions.

M. BURNS: Je n'ai pas dit un mot. M. TETLEY: J'insiste, M. le Président.

M. BURNS: M. le Président, je n'ai pas dit un mot. J'ai bougé ma chaise et il dit: Laissez-moi terminer.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, à l'ordre!

M. TETLEY: Vous n'avez pas dit un mot? Vous venez de parler. Vous parlez encore.

M. BURNS: Je n'ai pas dit un mot.

M. TETLEY: II parle. C'est un "talking machine", M. le Président.

M. BURNS: J'ai le droit de m'approcher de la table.

M. TETLEY: Approchez-vous mais fermez la bouche. Si c'est possible. M. le Président, une raison, c'est qu'il y a un "filibuster". Une autre raison, ce sont les interruptions constantes du député de Maisonneuve. C'est une deuxième raison. Mais la plus grande raison... oui, vous! Pas, vous, M. le Président, je parle au député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Parlez-lui à travers le président.

M. TETLEY: Ah, pardon! Troisième raison et la plus importante, c'est que nous attendons, j'attends, si vous êtes sérieux, le dépôt de vos amendements. J'ai écouté avec tous mes amis, trois ou quatre jours d'insistance de votre part pour que le gouvernement dépose tous ses amendements. Pas deux ou trois, vous avez insisté pour que le gouvernement... Ah! un drapeau blanc. Vous quittez votre "filibuster". Attention, journalistes. C'est drôle parce que nous avons des nouvelles que vous avez vos billets pour le 4 août. Comment se fait-il que vous quittiez tout de suite? Vous avez vos billets pour l'Europe.

M. BURNS: Moi, vous me parlez à moi? Je n'ai pas de billets.

M. TETLEY: Pas vous, le député de Saint-Jacques.

M. BURNS: Moi, j'ai seulement des billets d'Inter-Loto dans le moment. Cela ne m'amène nulle part, ça.

M. CLOUTIER: Cela ne marche pas.

M. TETLEY: Lorsque j'ai parlé des interventions, M. le Président, du député de Maisonneuve, j'avais raison je crois, en voilà un autre exemple. En tout cas, M. le Président, pendant trois jours, ils ont insisté pour que le gouvernement dépose tous ses amendements. Je crois qu'ils n'ont pas d'amendement. Cela va être comme leur bill 22 qu'ils ont publié dans le journal Le Jour et dont même le journal Le Jour avait honte. Le journal La Presse avait écrit un article: Grand absent du débat sur le bill 22 : le Parti québécois. Si vous êtes sérieux, déposez vos amendements, si vous en avez. J'aimerais les voir. Et vous me privez, c'est une question de privilège personnel ainsi que pour tout le monde ici présent, de vous croire et d'étudier ces documents. Parce que j'aimerais les étudier cet été et même aujourd'hui. J'ai peur que vos amendements aient le même effet que votre budget de l'an 1 qui a été un grand désastre pour vous.

Le premier ministre a insisté, lors des élections, sur votre budget de l'an 1 et cela a été un désastre complet. Il attend vos amendements et moi aussi.

Donc, voici les trois raisons, M. le Président: Premièrement, le "filibuster". Deuxièmement les interventions du député de Maisonneuve, et

troisièmement, nous attendons vos amendements et je doute qu'ils existent.

M. LEGER: Est-ce que le ministre des Institutions financières me permettrait une question?

M. TETLEY: Oui.

M. LEGER: Comme d'habitude, il me permet. Je lui permets toujours d'ailleurs, quand c'est mon tour.

M. TETLEY: Une question, pas un discours.

M. LEGER: Est-ce que le ministre connaît la différence entre un projet de loi présenté — et je pense qu'il va me répondre oui — par le gouvernement où il faut déposer tous les amendements, parce que c'est là-dessus qu'on étudie un projet de loi article par article, et l'Opposition qui elle, peut proposer des amendements aux articles, au moment où il veut le faire, c'est-à-dire suivant ce qui est adopté, comme à l'article 1 on peut avoir des amendements différents de ceux des autres articles. N'est-ce pas le cas? A moins que vous vouliez qu'on fasse l'inverse. Qu'on prenne un projet de loi linguistique du Parti québécois et que le gouvernement essaie d'apporter des amendements à cela...

M. TETLEY: M. le Président, c'est un discours.

M. MORIN: Est-ce que vous me permettez une question?

M. TETLEY: Non.

M. LEGER: Ce n'est pas normal?

M. TETLEY: Non. Etes-vous capable de...

M. MORIN: Est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. TETLEY: Non, je vais répondre à sa question, à son discours. Je crois que vous avez le droit, l'obligation et la responsabilité de déposer vos amendements tout de suite, surtout parce que vous, le député de Lafontaine, avez dit que vous n'étiez pas capable de discuter l'article no 1 parce qu'il y avait d'autres articles plus importants et que le tout dépendait de l'article 1.

M. LEGER: Question de règlement, je n'ai pas dit cela.

M. HARDY: Article 96.

M. LEGER: Oui, mais le ministre comprend fort bien. Je lui ai posé une question.

M. TETLEY: C'était vendredi après-midi.

M. LEGER: J'ai dit que l'article 1... M. HARDY: ... avez dit article 96.

M. LEGER: J'ai dit que l'article 1 était la fenêtre...

M. HARDY: Tout le monde a voté 96.

M. LEGER: ... qui permet de voir la suite. Alors, selon ce qu'on va adopter à l'article 1, on peut apporter par la suite. C'est conditionnel à l'article 1.

M. MORIN: Maintenant, est-ce que je peux poser une question au ministre?

M. TETLEY: Non.

M. MORIN: Est-ce que ce ne serait pas la première fois que l'Opposition, dans l'histoire de ce Parlement, dépose ses amendements, comme cela, à l'avance...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. TETLEY: Pas du tout. Bill 45.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. TETLEY: Je peux citer quatre ou cinq exemples.

M. MORIN: Jamais nous n'avons été obligés de procéder de la sorte.

M. BOURASSA: Vous avez déposé votre contreprojet, vous avez montré...

M. TETLEY: Un instant, je vais répondre à cette question.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs !

M. BOURASSA: Correct.

M. TETLEY: Je peux vous donner quatre ou cinq exemples de mes bills, y compris le bill 45 et la Loi de la Commission des valeurs mobilières, la Loi des compagnies, etc.

M. LEGER: Je n'ai jamais proposé d'amendement au bill Tetley.

M. CHARRON: Est-ce que le ministre des Institutions financières me permet de lui apporter un éclaircissement sur cette question importante des amendements. Prenons comme exemple le sous-amendement que je viens d'apporter. Vous l'aviez. C'était déjà annoncé dans le contreprojet, votre collègue de Saint-Jean y puise toutes ses interventions depuis le début des séances de la commission. Vous le savez. C'est le texte de nos amendements que vous

voulez avoir; mais l'esprit, vous l'avez déjà. Celui-là, il était déjà annoncé, demandez au député de Saint-Jean, il l'a lui-même annoncé.

M. TETLEY: Déposez votre esprit...

M. CHARRON: II l'était déjà... Et on vous...

M. HARDY: Votre esprit, vous l'avez.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: Vous avez prêté votre esprit...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! S'il vous plait.

UNE VOIX: Vous faites un "filibuster".

LE PRESIDENT (M. Gratton): On va quand même revenir un jour ou l'autre au sous-amendement, pourquoi ne serait-ce pas tout de suite?

M. CHARRON: Vous avez bien raison. M. BURNS: 96, M. le Président. M. MERCIER: A qui la parole? M. BURNS: Question de règlement.

M. MERCIER: Je comprends mal que vous puissiez invoquer l'article 96 alors que vous n'avez pas encore parlé sur le sous-amendement.

M. BURNS: M. le Président, au contraire, je n'ai pas parlé...

M. MERCIER: Pour répondre au député de Maisonneuve qui invitait les députés "backbenchers" à prendre la parole...

M. BURNS: Le député peut-il attendre, je parle sur une question de règlement.

M. MERCIER: M. le Président a décidé, ce n'est pas à moi...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur une question de règlement.

M. BURNS: M. le Président, prenez tout l'après-midi, on va consentir à ce que vous dépassiez votre vingt minutes. Il 'n'y a pas de problème.

M. MERCIER: Vous êtes gentil, je vous remercie à l'avance.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve sur une question de règlement.

M. BURNS: M. le Président, vous me posez la question pourquoi je soulève l'article 96. J'ai posé une question au ministre, le ministre me l'a permise. Dans sa réponse, il a mal interprété des choses qui paraissaient dans ma question. Je veux tout simplement rétablir ceci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y rapidement.

M. BURNS: II nous dit, depuis le début, qu'est-ce que vous attendez pour déposer vos amendements? Pourquoi n'êtes-vous pas sérieux? On est sérieux depuis le début, M. le Président. Dites au ministre qu'on est sérieux. Je n'ai pas le droit de parler au ministre alors, je vous parle. M. le Président, voulez-vous dire au ministre qu'on est sérieux.

M. HARDY: Un sérieux très spécial.

M. BURNS: M. le Président, voulez-vous dire au ministre qu'on est sérieux depuis le déput. On a demandé d'abord les règlements qui sous-tendaient le projet de loi 22. On nous les a refusés et on a dit: Quand on arrivera à l'article 1...

M. HARDY: Question de règlement. M. BURNS: M. le Président...

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BURNS: On a dit également qu'on demandait...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles...

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... sur une question de règlement.

M. BURNS: Je suis sur une question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense que...

M. HARDY: Non, vous êtes sur l'article 96. L'article 96 n'est pas une question de règlement.

M. BURNS: Oui, c'est cela une question de règlement.

M. HARDY: Ce n'est pas une question de règlement, vous...

M. BURNS: L'article 96 est un article du règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Vous ne soulevez pas une question de règlement, vous vous prévalez d'un article du règlement, ce n'est pas la même chose. A chaque fois qu'on parle en Chambre ou en commission, on se prévaut du règlement, mais, moi, j'invoque le règlement, parce que...

M. BURNS: Quel article?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: ... à l'article 96, il est bien dit qu'on doit rétablir les faits sans apporter de faits nouveaux et surtout sans soulever de débat.

M. BURNS: Je n'apporte pas de faits nouveaux, M. le Président.

M. HARDY: Vous commencez un vieux débat.

M. BURNS: M. le Président, ce sont des faits vieux d'une semaine que je rapporte. Je n'apporte pas de faits nouveaux. Je ne soulève pas de débat.

M. HARDY: Ils sont nouveaux pour l'objet du débat actuel.

M. BURNS: M. le Président, je vous dis tout simplement que le ministre nous accuse actuellement.

M. HARDY: Faites-le!

M. BURNS: Non, je ne veux pas faire de discours, au contraire...

LE PRESIDENT (M Gratton): A l'ordre, messieurs ! A l'ordre!

M. BURNS: ... mon discours va être après.

M. HARDY: Une pièce de plus à votre dossier, c'est tout.

M. BURNS: Bien non, mon discours va venir après. Attendez. Qu'est-ce que vous voulez? Vous êtes bien pressé de l'entendre?

M. HARDY: Oui, quand vous parlez intelligemment, c'est intéressant, mais là vous ne le faites pas...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. BURNS: Bien oui! Je parle toujours intelligemment ici, depuis le début en tout cas. Il est arrivé des fois où je passais à côté du règlement, je m'en excuse, M. le Président, mais pas à cette commission-ci, cela ne m'est jamais arrivé.

M. CLOUTIER: De temps en temps.

M. BURNS: M. le Président, je dis tout simplement ceci: Le ministre nous demande: Pourquoi ne déposez-vous pas vos amendements? Pourquoi n'êtes-vous pas sérieux? On a déposé des demandes avant l'article 1. Ces demandes visaient à obtenir les amendements, ensuite la réglementation. On est même allé jusqu'à nous dire, du côté ministériel — et on a accepté cette argumentation — que les règlements n'étaient pas tout à fait prêts, qu'on pouvait nous donner peut-être les principes directeurs. On a dit : D'accord, donnez-nous les principes directeurs. On a fait des motions dans ce sens. Est-ce que c'est sérieux ou si ce n'est pas sérieux? C'est tellement sérieux que dès qu'on est arrivé à l'article 1, par entêtement ou par une espèce de je ne sais pas trop quoi du côté gouvernemental, on a dit : Là, on est rendu à l'article 1, là, on les accepte, vos motions, alors qu'on avait voté contre. Qui est sérieux et qui n'est pas sérieux, M. le Président? Je le demande au ministre des Institutions financières. Le résultat est là.

Cela fait cinq jours qu'on discute et on aurait pu être rendu à l'article 1, il y a deux jours, si on avait écouté certaines de nos suggestions au début.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le sous-amendement.

M. BEDARD (Chicoutimi) : M. le Président, j'aurais seulement une question à poser...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non, il n'y a plus de question. Est-ce que quelqu'un veut intervenir sur le sous-amendement?

Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: Justement pour vous dire, à l'instar de mon collègue de Terrebonne et du ministre des Institutions financières, que je n'utiliserai pas complètement mon droit de parole. La raison pour laquelle j'ai demandé quelques minutes, c'est justement pour répondre au député de Maisonneuve qui a fait appel aux commentaires des "back-benchers", ainsi que le député de Saint-Jacques. Je voudrais dire à ces marquis d'un parti bourgeois que, justement, la raison pour laquelle nous nous abstenons de prendre la parole sur ces amendements ou sous-amendements, c'est que je ne voudrais pas être complice de cette mascarade et bouffonnerie intellectuelle, de ce spectacle que nous offrent les membres de l'Oppostion depuis plusieurs jours. Je voudrais vous dire, au nom d'un peuple qui est également canadien-français, car on semble vouloir s'arroger les seuls droits de pouvoir parler au nom des Canadiens français, que dans la population de Bellechasse, qui est à 99.9 p.c. francophone, nous en avons assez de cette perte de temps que nous subissons depuis plusieurs jours...

M. CHARRON: II doit avoir du monde dans la salle!

M. BURNS: Vous avez étudié cela en fin de semaine?

M. MERCIER: Certainement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Depuis quand êtes-vous en vacances?

M. MERCIER: M. le Président, j'ai la parole.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : A l'ordre! A l'ordre!

M. SYLVAIN: Voulez-vous le laisser parler? M. BURNS: Justement, je veux savoir...

M. MERCIER: Je pense qu'on a permis aux membres de l'Opposition de s'exprimer depuis un bon bout de temps...

M. BURNS: Où étiez-vous, M. le député de Bellechasse?

M. MERCIER: ... en toute démocratie, mais on semble exploiter éhontément, effrontément, les règles parlementaires...

M. CHARRON: C'est parce qu'il y a des gens de Bellechasse dans la salle qu'on vous entend pour la première fois.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MERCIER: Vous me posez la question, je l'ignore. Ne vous tracassez pas, on ne fait pas comme vous autres, on ne "paquette" pas nos salles!

M. CHARRON: C'est la première fois que vous parlez depuis que vous êtes élu.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. HARDY: Raison de plus pour l'écouter!

M. MERCIER: Oui, c'est la première fois que je parle parce que c'est la première fois que je siège officiellement à cette commission.

M. CHARRON: C'est parce que c'est la première fois qu'il y a des gens de Bellechasse.

M. MERCIER: Ne vous tracassez pas. On a le droit de faire le même jeu que vous autres.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MERCIER: C'est la première fois que j'ai l'occasion...

M LEGER: M. le Président...

M. CHARRON: Là, vous vous fermez comme tous les autres.

M. MERCIER: ... d'être membre officiel de cette commission.

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président...

M. MERCIER: C'est la première fois, M. le Président...

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président...

M. MERCIER: II n'est pas question de règlement là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Lafontaine, sur une question de règlement.

M. MERCIER: M. le Président, j'ai la parole.

M. LEGER: M. le Président, je serai très heureux de remettre la parole immédiatement au député de Bellechasse, après, mais je ne peux laisser cela, parce que c'est absolument faux de dire qu'on est en train d'amener des gens dans la salle, alors qu'on sait fort bien que le député de Bourget en a amené régulièrement dans la salle, et qu'il les a lui-même amenés en autobus.

M. HARDY: II n'y a pas de question de règlement là-dedans.

M. LEGER : Qu'il n'essaie pas de dire que le Parti...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! J'aimerais avertir les gens dans les galeries que pour toute manifestation semblable, je me verrai forcé de les inviter à quitter les lieux.

M. MERCIER: Alors, est-ce que je peux poursuivre?

M. DESJARDINS: Je vais intervenir sur une question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Louis-Hébert, sur une question de règlement.

M. DESJARDINS: Je suis loin de vous et je vais tenter de m'en rapprocher un peu par mes propos. Je soulève une question de règlement sur le décorum à la commission parlementaire et sur le droit de parole des députés. J'ai assisté assez régulièrement, depuis le début, aux travaux de cette commission parlementaire, même si je n'en étais pas membre élu. J'ai constaté qu'il y avait interruption de part et d'autre, que des députés libéraux interrompaient des députés de l'Opposition officielle, mais j'ai surtout

remarqué que, chaque fois que les députés libéraux tentaient de prendre la parole, ils étaient continuellement interrompus surtout par le député de Saint-Jacques qui plaide pour la galerie, qui est là pour donner un spectacle, et surtout aussi par le député de Maisonneuve. Je vais vous dire de quelle façon le député de Maisonneuve nous interrompt avec succès en se servant du règlement. Lorsque l'on soulève une question de règlement, le député de Maisonneuve intervient, dit-il, sur une question de règlement lui aussi. A ce moment, selon nos règlements, le député de Maisonneuve devrait soulever une question de règlement sur la question de règlement déjà soulevée par le premier député. Mais ce n'est pas ce qu'il fait. Il prétend soulever une question de règlement sur la question de règlement déjà soulevée et il en profite pour argumenter sur ce qui a été déjà soulevé. Ceci, le député de Maisonneuve le pratique à profusion, en Chambre également. J'ai l'intention de faire valoir des représentations là-dessus auprès du président de la Chambre.

Je pense, M. le Président, que vous devrez, à compter de tout de suite, être très sévère sur les interruptions des députés les uns envers les autres. Les députés de l'Opposition nous incitent à prendre la parole et, dès que nous tentons de le faire, pour toutes sortes de raisons démagogiques et autres — enfin, je retire le mot "démagogique", parce qu'il pourrait ne pas être parlementaire et inviter le député de Maisonneuve à soulever une question de règlement sur ma question de règlement — on vient nous interrompre et je constate qu'on tente par tous les moyens de plaider pour une galerie. Moi, en tout cas, je ne suis pas ici pour donner un spectacle. J'ai l'intention d'intervenir sur le sous-amendement tout à l'heure et je veux le faire avec pondération, en employant des arguments bien fondés. Je voudrais que vous appliquiez le règlement de façon très sévère pour qu'on cesse de nous interrompre continuellement. Où je serais peut-être un peu plus large, c'est pour le premier ministre et le chef de l'Opposition. Après tout, vous avez deux hommes, de chaque côté de vous, qui représentent un peu plus la population du Québec tout entière que nous; vous avez le chef de l'Opposition officielle et vous avez le premier ministre qui s'échangent évidemment des propos à un moment donné. Je trouve cela beaucoup plus normal que ce soit eux qui le fassent que le député de Saint-Jacques et un autre député libéral quelconque.

Je termine donc en vous incitant à une très grande sévérité dans l'application du règlement pour toute discussion qui se continuera en commission parlementaire.

M. BURNS: M. le Président, une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur une question de règlement.

M. BURNS: Une question de règlement qui est soulevée par les remarques du député de Louis-Hébert. Je pense que c'est important, c'est sérieux; cela se base sur notre règlement. Je vous réfère à l'article 68. Je vous le lis: "Une motion de fond annoncée est nécessaire pour mettre en question la conduite du lieutenant-gouverneur — ce n'est pas moi, M. le Président — du président ou d'un vice-président de l'Assemblée — ce n'est pas moi, non plus — des présidents des commissions — ce n'est pas moi, non plus — ou d'un membre de l'Assemblée. Cette motion est privilégiée".

M. le Président, le député de Louis-Hébert, qui est avocat, devrait savoir que, s'il veut soulever une question relativement à ma conduite en Chambre ou ici, il y a l'article 68 qui existe. Qu'il fasse une motion, cela va me faire plaisir. Vous avez beau rire, mais qu'il le fasse, M. le Président. J'ai entendu le député de Louis-Hébert dire — c'est ce que je trouve le plus grave dans ce qu'il a dit — qu'il va en parler au président de la Chambre. Or, cela s'adonne que ce n'est pas au président de la Chambre qu'il va en parler. C'est par une motion en vertu de l'article 68.

M. HARDY: II a dit qu'il ferait des représentations au président de la Chambre...

M. BURNS: S'il veut en parler, il faut qu'il en parle en vertu de l'article 68. C'est le président de la Chambre lui-même qui a dit cela; il l'a dit, d'ailleurs, à deux ou trois reprises. Si vous voulez mettre en doute la conduite d'un député, allez-y, il y a une motion à cet effet. La motion se fait en vertu de l'article 68.

M. DESJARDINS: J'invoque l'article 96.

M. HARDY: Sur la question de règlement, très brièvement...

M. MORIN: Je pense que c'était de l'intimidation pure et simple.

M. HARDY: M. le Président, sur la question de règlement, en vertu de l'article 68.

M. DESJARDINS: J'invoque l'article 96 pour rétablir les faits, et je dois le faire immédiatement. Je m'excuse de participer à ce "filibuster" et à cette procédurite que je déteste, parce que je n'aime pas la procédurite, mais, M. le Président, je n'ai pas voulu faire allusion à une conduite indigne de la part du député de Maisonneuve. Absolument pas!

M. BURNS: II n'y a pas d'indignité dans l'article 68.

M. DESJARDINS: Je n'ai pas voulu faire allusion même à cela...

M. BURNS: II ne connaît même pas son règlement.

M. DESJARDINS: J'ai fait allusion au maniement habile de la procédure. Il agit avec une très grande habilité. C'est son droit et c'est son devoir de le faire, comme c'est mon droit et mon devoir de le dénoncer si je m'en rends compte. Je prétends...

M. BURNS: Si vous voulez me dénoncer, utilisez l'article 68. L'indignité, c'est un autre article.

M. DESJARDINS: M. le Président...

M. BURNS: Si vous voulez le savoir, je vais vous dire le numéro.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. DESJARDINS: Est-ce que le député de Maisonneuve avait la parole, M. le Président?

M. LACROIX: Vous n'avez pas vos femmes attachées. Vous êtes donc bien nerveux !

M. DESJARDINS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Prenez donc connaissance de l'affaire Boutin et vous allez savoir quel article.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. DESJARDINS: M. le Président, je ne suis pas une machine à retenir les numéros du règlement par coeur. Je laisse cela au député de Maisonneuve. Mais je dis que si je veux le faire en Chambre, au président de la Chambre, je le ferai publiquement et en Chambre, purement et simplement. Je voudrais éliminer l'idée que les gens pensent ici que je faisais allusion â une conduite indigne du député de Maisonneuve. Au contraire, comme procédurier...

M. BURNS: Indigne... Ce n'est pas le même article.

M. DESJARDINS: Comme procédurier... M. BOURASSA: Du calme! M. DESJARDINS: Comme procédurier... LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: II dit des stupidités, M. le Président. Je ne peux pas le laisser faire.

M. HARDY:... si on vous empêchait à chaque fois que vous dites des stupidités.

M. BOURASSA: Du calme!

M. DESJARDINS: Vous voyez, M. le Président...

M. HARDY: On serait toujours debout.

M. DESJARDINS:... que le député de Maisonneuve illustre bien ce que je viens de dire. Il nous interrompt continuellement...

M. MORIN: Vous tentez de l'intimider.

M. DESJARDINS: Vous voyez, M. le Président, comme l'honorable chef de l'Opposition officielle...

M. MORIN: Je proteste!

M. DESJARDINS: ...l'honorable chef de l'Opposition officielle...

M. HARDY: Oh! Oh! Il proteste!

M. MORIN: On tente d'intimider le député de Maisonneuve.

M. DESJARDINS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

UNE VOIX: Un peu de sérieux!

M. MORIN: Cest un procédé inqualifiable...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! Pour l'amour du bon Dieu, à l'ordre! Un instant !

M. DESJARDINS: Est-ce que j'ai la parole?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Un instant! Un instant! A l'ordre!. Bon! A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, je vais invoquer le règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Ecoutez! La question de règlement, cela fait déjà 45 minutes qu'on est dessus. J'aimerais vous suggérer que le député de Bellechasse finisse son intervention sur la motion de sous-amendement, pour qu'on y revienne.

M. MERCIER: Avec plaisir.

M. MORIN: Non, M. le Président, j'ai une question de règlement.

M. MERCIER: Avec grand plaisir, M. le Président.

M. MORIN: J'ai une question de règlement. M. MERCIER: Je voudrais poursuivre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LACROIX: Quelle sorte de professeur est-ce?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Si vous voulez rester sur la question de règlement, le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: Très brièvement, M. le Président. Je trouve cela plus ou moins valable, ce que le député de Maisonneuve a fait, en reprochant au député de Louis-Hébert de ne pas invoquer l'article 68, parce que...

M. BURNS: C'est la seule façon qu'il peut se plaindre de moi.

M. HARDY: Laissez-moi terminer!

M. BURNS: C'est tout!

M. LACROIX: Pouvez-vous vous taire un instant?

M. BURNS: Non, je ne peux pas me taire là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: S'il veut se plaindre de moi, qu'il utilise les bonnes procédures.

M. LACROIX: Sacrez donc votre camp, si vous n'êtes pas capable de vous taire.

M. BURNS: Bien, sacrez donc votre camp, vous aussi, si vous ne comprenez pas...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: ... ce qui se passe ici.

M. LACROIX: Je me suis retenu. Je vous écoutais d'en haut.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre!

M. LACROIX: Vos fanatiques illuminés d'en arrière ne me feront pas taire et ils ne me feront pas peur. Ils viennent directement de votre bureau.

M. BURNS: Ce n'est pas ma faute si vous ne comprenez pas ce qui se passe. Vous venez juste d'arriver.

M. LACROIX: Non. J'étais à mon bureau. Je vous écoutais.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Oui, bien, en tout cas... Qu'est-ce que vous voulez?

M. LACROIX: J'écoutais vos niaiseries. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: On suit cela depuis une semaine, nous autres.

M. LACROIX: Je suis, moi aussi. M. BURNS: A l'ordre!

M. BURNS: On en a deux qui suivent cela depuis deux mois.

M. LACROIX: Je suis cela de mon bureau aussi.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Si vous ne comprenez pas ce qui se passe, ayez au moins la décense de vous taire.

M. LACROIX: Vous, allez donc voir votre... ...vous faire expliquer comme il faut.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre !

Le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: M. le Président, je voulais tout simplement faire remarquer que le député de Maisonneuve usait de procédures plus ou moins valables, lorsqu'il reprochait au député de Louis-Hébert de ne pas avoir invoqué l'article 68.

Le député de Maisonneuve sait très bien la différence qu'il y a entre diverses interventions que l'on peut faire en Chambre, et il sait très bien qu'il y a une grande différence entre le fait de souligner au président qu'un député prend certaines libéralités avec le règlement et porter une accusation en vertu de l'article 68. Oh! je sais qu'à certains moments, pour servir un autre "filibuster", votre parti a porté une accusation en vertu de l'article 68 à l'endroit d'un vice-président, alors que le contenu de l'accusation que vous aviez apportée ne répondait pas du tout aux prescriptions de l'article 68. Vous aviez utilisé, d'une façon abusive, l'article 68 tout simplement pour retarder un autre débat. Mais, M. le Président, le député de Louis-Hébert, comme la plupart des membres de cette Chambre, connaît la gravité des différents articles du règlement. Le député de Louis-Hébert sait très bien qu'il y a une grande différence. Remarquer que le député de Maisonneuve utilise assez souvent le règlement pour priver de leur droit de parole d'autres collègues de la Chambre, il y a une différence entre faire cette remarque et se servir de l'article 68.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition officielle sur une question de règlement.

M. MORIN: Je regrette que chaque fois que l'Opposition, s'appuyant sur le règlement — comme c'est son droit le plus strict — pour faire respecter ses droits, chaque fois qu'elle l'invoque, le gouvernement interprète cela, automatiquement, comme de l'obstruction.

Tout ce que nous faisons depuis deux semaines est de tenter de faire proprement notre besogne d'Opposition. Le député de Maisonneuve a le droit — le député de Louis-Hébert a reconnu qu'il a même le devoir —

d'invoquer le règlement lorsque nous estimons que c'est nécessaire.

Il est bien mal venu par la suite d'agir comme il l'a fait il y a quelques instants et de tenter d'intimider le député de Maisonneuve.

M. LACROIX: Chanteur!

M. MORIN: Je sais que le député de Maisonneuve ne se laissera pas intimider...

M. LACROIX: Chanteur!

M. MORIN: ... mais je soutiens que de la part d'un gouvernement...

M. HARDY: ... doit être intimidé. M. MORIN: ... fort comme celui-là... M. LACROIX: Caméléon!

M. MORIN: ... d'avoir recours à des tactiques comme celles-là pour tenter d'enfoncer davantage la petite Opposition qui lui tient tête, je trouve cela pitoyable.

M. HARDY: Cela ne vaut même pas la peine de répondre.

M. LACROIX: Caméléon!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Bellechasse sur le sous-amendement.

M. MERCIER: Ce à quoi je faisais allusion tout à l'heure est justement ce qu'on vient d'entendre et de voir. C'est ce spectacle offert par les membres de cette Opposition depuis plusieurs jours, contre lequel je veux m'inscrire en faux pour ne pas être complice devant la population de cette perte de temps qu'occasionnent à l'Assemblée nationale les membres du Parti québécois sur le projet de loi 22.

Je voulais souligner également que nous avons d'autres domaines d'activité au Québec qui requièrent notre attention, que cela soit le domaine de la construction ou le domaine économique...

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. MERCIER: ... et je dois dire...

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Lafontaine sur une question de règlement.

M. LEGER: Je suis d'accord pour que le député de Bellechasse intervienne sur le sous-amendement et l'amendement, mais non pas sur toutes sortes d'autres articles ou d'autres projets...

M. MERCIER: J'ai appris cela du député de Lafontaine.

M. LEGER: ... de construction... Parlez donc de notre motion d'amendement et de sous-amendement. Si vous n'êtes pas d'accord, dites pourquoi, mais parlez là-dessus. Incidemment...

M. MERCIER: Justement...

M. LEGER: ... le règlement dit qu'un député prend la parole et qu'il doit s'en tenir à la pertinence du débat. Le débat est le sous-amendement du député de Saint-Jacques à la motion d'amendement du député de Lafontaine. Parlez là-dessus et nous ne vous interromprons pas du tout.

M. MERCIER: ... je passe par le comté de Lafontaine pour arriver au comté de Bellechasse, un peu à l'instar du député de Lafontaine.

La raison pour laquelle, moi, en tant que "back-bencher", membre de l'Assemblée nationale et membre du parti ministériel, et probablement plusieurs de mes collègues nous voulons nous abstenir de prendre la parole sur des amendements ou des sous-amendements, c'est justement pour ne pas être complices de cette perte de temps et de cette bouffonnerie, de ce spectacle auquel nous assistons depuis plusieurs jours. Pour répondre au député de Maisonneuve, si c'est la première fois que je prends la parole à cette commission parlementaire, c'est que j'ai été invité à remplacer officiellement le député de Jacques-Cartier qui siège comme membre élu de cette commission.

Si je me suis abstenu de prendre la parole antérieurement, je n'en ai pas moins pour autant participé en tant qu'auditeur aux délibérations la semaine dernière, il y a quinze jours, il y a trois semaines. J'ai suivi avec attention les propos des députés de l'Opposition. Je m'abstiens de dire avec intérêt parce qu'ils sont loin d'être intéressants.

Je voudrais dire que je souhaite ardemment que le gouvernement dépose le plus tôt possible la motion de clôture sur cette discussion...

M. LEGER : Vous voulez partir en vacances?

M. MERCIER: ... afin que l'on puisse le plus tôt possible consacrer nos actions et nos efforts à d'autres travaux aussi urgents, sinon davantage, qui touchent l'économie du Québec. Je ne voudrais pas que cette procédurite parlementaire se poursuive davantage afin d'éviter de faire perdre le cachet et l'esprit que nous devons avoir, non seulement à l'Assemblée nationale, mais dans les commissions parlementaires. J'ai été élu par la population de Bellechasse pour faire du travail sérieux et concret. C'est la raison pour laquelle je clos mes commentaires à

ce moment-ci. Je voudrais dire, en terminant, que loin de moi l'idée de vouloir remplir les galeries parce que cela serait chose facile, inutile de vous le dire. Je ne voudrais pas être complice de ce petit jeu auquel nous assistons depuis plusieurs jours, occasionné et organisé par les membres du Parti québécois.

Je clos là mes commentaires pour dire que je souhaite le plus tôt possible la fin de ces discussions futiles, faites par les membres de l'Opposition qui font une opposition systématique. Ils ont été contre, ils sont contre et ils seront contre.

Nous avons été élus avec un mandat clair, net et précis. La population jugera dans quatre ans de nos actions...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MERCIER: ... et je suis persuadé qu'à ce moment, nous ne retrouverons pas...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M.MERCIER: ...les six membres du Parti québécois dans cette salle.

M. BURNS: Est-ce que le député de Bellechasse me permet une question?

M. MERCIER: Certainement.

M. BURNS: Est-ce que, à la place de l'utilisation de la clôture, si c'est l'idée du député de Bellechasse de voir la fin des travaux le plus rapidement possible, il n'y aurait pas lieu tout simplement de suspendre les travaux et de recommencer dès le début de septembre? Si c'est un besoin de vacances chez les députés libéraux...

M. MERCIER: Absolument pas, M. le Président.

M. HARDY: Ne faites pas de projection.

M.MERCIER: Pour répondre au député de Maisonneuve, M. le Président...

M. BURNS: C'est notre suggestion depuis le début.

M. HARDY: N'attribuez pas vos désirs aux autres.

M. BURNS: Pas du tout.

M. HARDY: Si vous avez le goût d'aller en vacances, cela ne veut pas dire...

M. BURNS: Pas du tout. Nous, nous sommes ici jusqu'au mois de novembre. Il n'y a pas de problème.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Vous êtes les seuls à parler de vacances.

M. BURNS: M. le Président, on est ici jusqu'au mois de novembre. Ce sont les députés libéraux qui nous disent: Cela n'a pas de sens, vous êtes en train de discuter de cela cet été.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Depuis le début, vous êtes les seuls à parler de vacances. On n'a pas de vacances, nous.

M. BURNS: Pas du tout, on n'a pas parlé de cela.

M. MERCIER: M. le Président, pour répondre au député de Maisonneuve, loin de là mon intention...

M. BOURASSA: Le député se fait photographier au lac Simon. On voit des photos dans les journaux.

M. BURNS: Bien oui!

M. BOURASSA: II a hâte de retourner au lac Simon.

M. BURNS: Je me reposerai à un autre moment, c'est tout. Plus tard ou je ne me reposerai pas. C'est tout.

UNE VOIX: Alors!

M. BURNS: Moi, je n'ai pas d'hélicoptère pour me promener d'une place à l'autre, qu'est-ce que vous voulez.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Oui, c'est tout. J'y vais avec ma petite voiture.

M. BOURASSA: On va se promener à bicyclette...

M. BURNS: C'est moi qui la conduit.

M. BOURASSA: ... pour faire plaisir au député.

M.MERCIER: Je Arais répondre d'abord au député de Maisonneuve. Vous me permettez?

M. LACROIX: C'est effrayant!

M. MERCIER: II n'est pas question du tout, pour répondre au député de Maisonneuve, que le député de Bellechasse prenne des vacances. Loin de là! Nous avons du travail à faire. C'est dans cet esprit que j'ai exprimé ces commentaires. Au lieu de perdre notre temps inutilement et futilement, comme on nous le fait perdre

depuis un certain temps, je voudrais que ce temps, non seulement pour moi, mais aussi pour les membres de l'Assemblée nationale, soit consacré à d'autres activités importantes et urgentes au niveau de la province et particulièrement dans les comtés qu'on représente. C'est la raison pour laquelle j'ai exprimé ces commentaires. Je souhaite la fin de ces discussions le plus tôt possible, afin qu'on puisse adopter le plus tôt possible ce projet de loi qui répond, je pense, en majeure partie, aux aspirations des Québécois.

M. LEGER: M. le Président, je vous demande un éclaircissement. Une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine, sur une question de règlement.

M. LEGER: Etant donné que le député de Bellechasse devait parler à travers le président, je vais vous demander si vous avez vu, parce que, à travers vous il a dû vous expliquer qu'il parlait de l'amendement... Je n'ai pas compris s'il a amené quelques arguments disant qu'il était pour ou contre cet amendement puisqu'il n'en a pas parlé du tout. Est-ce que vous pensez qu'à travers vous nous pouvons savoir s'il a parlé de la motion, s'il est pour, s'il est contre? J'ai l'impression qu'il n'en a pas parlé du tout. Est-ce que le président peut nous dire si, à travers lui, il a vu une déclaration quelconque concernant notre sous-amendement?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Ce sont des questions que le député de Bellechasse ne comprend pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense bien que ce n'est pas une directive que vous me demandez. Le député de Saint-Jean sur le sous-amendement.

M. LEGER: Le président n'a rien vu là-dedans...

M. MERCIER: ... expliqué cela...

M. VEILLEUX: La motion d'amendement du député, du "pee-wee" de Saint-Jacques, cet après-midi, confirme exactement les propos que je tenais samedi passé sur la proposition d'amendement du député de Lafontaine. On me reproche, M. le Président, de connaître le projet de loi de la politique linguistique du Parti québécois. Je tiens à vous dire, dès le départ, pour que vous annonciez aux députés de l'Opposition, que tant et aussi longtemps que durera le débat sur le projet de loi no 22, je me ferai un plaisir de leur rappeler l'incohérence de leurs propos en commission parlementaire face à ce projet de politique linguistique du Parti québécois. .Je vais m'efforcer de leur faire avaler ou ravaler ce projet de loi, eux qui ont voulu agir comme un pseudo-gouvernement péquiste.

Tout à l'heure, le député de Lafontaine disait que, dans le projet de loi, on reconnaissait des droits aux anglophones. Je trouve aberrant que des propos comme ceux-là sortent de la bouche des députés de l'Opposition parce que, normalement, lorsqu'on met en face de la population un projet de loi de politique linguistique, j'ai la très nette impression qu'à l'instar du Parti libéral, on a dû en discuter à l'intérieur du caucus. Ou il n'était pas à l'intérieur du caucus ou encore ce projet de loi de politique linguistique a été sorti par le chef du Parti québécois sans demander à son aile parlementaire ses pensées sur ce projet de loi linguistique. C'est peut-être cela, M. le Président, qui fait que le chef du Parti québécois est absent des débats du projet de loi no 22, parce qu'il s'est rendu compte...

M. BURNS: Voulez-vous lui céder votre siège?

M. VEILLEUX: ... qu'avec ce projet de loi de portée linguistique il a commis la même erreur que Parizeau avait commise lors de la campagne électorale en sortant son fameux budget de l'an I. Je veux rappeler, M. le Président, ce que contient ce projet de loi no 22 et ce qu'en même temps ces mêmes personnes reprochent au projet de loi 22.

Dans le projet de loi du Parti québécois, M. le Président, il est bien dit que tous documents d'information émanant du gouvernement seront rédigés en français, mais pourront également être rédigés dans une autre langue. Je m'imagine que ce sera la langue anglaise et non le japonais, le chinois ou n'importe quelle autre langue. On le dit textuellement dans ce projet de loi et on reproche au projet de loi 22 d'avoir des articles concernant ces mêmes choses. On dit dans le projet de loi du Parti québécois: S'il s'agit de particuliers, les communications se font, dans toute la mesure du possible, dans la langue utilisée par le citoyen. Un peu plus bas, on dit: Pourra être utilisée la langue anglaise.

Le député de Lafontaine reprochait tout à l'heure que le projet de loi no 22 donne la permission aux personnes qui oeuvrent dans le milieu des municipalités, des commissions scolaires, de s'exprimer en langue anglaise et eux-mêmes, M. le Président, dans leur projet de loi — cela ils ne le disent pas à leur clientèle péquiste dans leurs assemblées — donneront cette permission. Une preuve que ce projet de loi du Parti québécois n'a pas été expliqué à la population, c'est que, vendredi soir, il y avait une femme, ici dans la salle — je pense qu'elle y est encore — qui s'est opposée à ce qu'un député du Parti libéral s'exprime en langue anglaise. Je me suis fait un plaisir de lui rappeler à cette dame du Parti québécois, du parti séparatiste, qu'eux-mêmes ici, pendant qu'on

discutait et qu'on recevait les gens, ont présenté exactement la même affaire dans leur projet de loi, en laissant aux anglophones le droit de s'exprimer en anglais et, d'un même souffle, des partisans du Parti québécois sont venus ici s'opposer à cette règle élémentaire de droit individuel qu'on peut laisser à des anglophones au Québec.

M. BEDARD (Chicoutimi): Une question de règlement, M. le Président, pour rétablir les faits.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. HARDY: Article 96.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant l'allusion â laquelle se référait tout à l'heure le député...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, mais il faudrait...

M.HARDY: A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): Une seconde.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A moins que le député de Saint-Jean ne vous le permette; il faudrait que vous le lui demandiez.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est une question de règlement. Il faut être juste aussi. Ce n'est pas lui qui a fait le rappel aux personnes en question dans la salle; c'est le chef de l'Opposition et le député de Saint-Jacques, Claude Charron.

M. HARDY: Article 96.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ce que je voudrais vous dire, c'est que l'article 96 prévoit que, si vous avez quelque chose à rectifier dans ce que dit le député de Saint-Jean, vous avez le choix de lui demander la permission de le faire immédiatement ou de le faire immédiatement après son intervention.

M. VEILLEUX: M. le Président, cela fait tellement mal au Parti québécois, les propos que je tiens depuis vendredi soir passé, qu'ils se sont sentis obligés, cet après-midi, d'apporter un amendement à leur amendement parce que j'ai démontré hors de tout doute l'incohérence des propos qu'ils tiennent à cette commission parlementaire depuis qu'on discute du projet de loi 22, après la deuxième lecture. J'ai dit : Les députés péquistes n'ont pas voulu expliquer à leurs membres leur projet de loi et moi, en me servant des règlements, j'ai dit à cette personne qui est assise là, qui se cache présentement:

Voilà ce que donne votre programme du Parti québécois. Le Parti québécois ne l'a pas expliqué à ses membres. On reproche au Parti libéral, au gouvernement Bourassa de ne pas s'être rendu dans la population discuter du problème de la langue. M. le Président, cela fait deux ans et demi à trois ans que je suis le premier ministre dans les congrès régionaux et au niveau de chacune des associations, avec le ministre de l'Education et mes collègues du Parti libéral. Cela montre le souci que nous avions de rencontrer la population pour discuter des problèmes, notamment celui de la langue. On vient dire, le député de Lafontaine l'a dit tout à l'heure: Nous, les avis vont être publiés en français. C'est faux, M. le Président, parce qu'eux, à la page 3 de leur projet linguistique, ils disent: Les avis dans les journaux devront continuer d'être publiés en anglais et en français. "Devront", M. le Président.

On reproche au projet de loi no 22 — le député de Lafontaine l'a rappelé tout à l'heure — d'avoir beaucoup de "néanmoins", de "pourquoi", de "cependant", de "dans la mesure du possible". On nous reproche d'en avoir quatorze dans le projet de loi no 22.

J'en ai trouvé dix-huit dans celui du Parti québécois. Dix-huit. Dix-huit.

M. BOURASSA: Dix-huit.

M. VEILLEUX: Dix-huit.

M. CLOUTIER: C'est plus que...

M. BOURASSA: Ouais, comment vous défendez-vous...

M. VEILLEUX: On dit: Nous, du Parti québécois, tout va se faire en français, ce sera l'unicité du français. C'est la proposition qu'ils ont faite, M. le Président, en l'amendement à la proposition du ministre de l'Education, seule langue officielle au Québec. Comme on ne l'a pas accepté, comme des enfants de maternelle, ils nous demandent d'abroger l'article 133 parce qu'on n'a pas accepté leur amendement, qui était "la seule". J'ai démontré vendredi soir passé qu'on ne pouvait pas, personnellement, accepter...

M. BURNS: J'invoque le règlement. Il n'est pas question... C'est la commission qui, à mon avis, est mise sur une fausse piste. Si le député de Saint-Jean prenait la peine de lire l'amendement que le député de Lafontaine a proposé, demandant que l'article 133 cesse d'avoir des effets, il verrait que cela fait une grosse différence au point de vue juridique avec abroger l'article 133. D'ailleurs le chef de l'Opposition l'a mentionné, je l'ai mentionné également. Nos deux autres collègues qui se sont exprimés là-dessus ont dit: On ne parle pas d'abrogation de l'article 133, pour une raison bien simple, c'est qu'on ne pense pas que le Parlement du

Québec ait la possibilité de le faire. Ne laissez pas, s'il vous plaît, M. le Président, le député de Saint-Jean se tromper comme ça.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ce n'est pas à moi de juger de la valeur des arguments.

M. BURNS: ... et tromper la commission. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: Non, ce sont ses collègues.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous pourrez rétablir les faits au moment où...

M. BURNS: II ne rapporte le discours de personne, M. le Président, je ne peux pas rétablir des faits.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non, mais au moment où vous exercerez votre droit de parole...

M. BURNS: II induit en erreur la commission. Je ne peux pas, au nom de la vérité...

M. HARDY: M. le Président, j'ai une directive à vous demander.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... le laisser faire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, j'ai une directive à vous demander.

M. BURNS: Dix-huit...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: J'ai une directive à demander. La latitude et les propos des députés du Parti québécois depuis un certain temps et surtout depuis cet après-midi m'incitent à vous demander cette directive. Est-ce qu'il faudrait, pour que les travaux de notre commission soient conformes aux règlements, pour qu'ils soient efficaces, que nous parlions quand le député de Maisonneuve décide que les députés ministériels parlent? Faudrait-il que les députés ministériels soumettent leur propos, leurs textes au député de Maisonneuve avant de les dire?

M. BURNS: Ce serait pas mal mieux s'ils faisaient ça avant.

M. HARDY: En d'autres termes, M. le Président, est-ce que, pour satisfaire les désirs, les volontés et je dirais même les caprices du député de Maisonneuve, il faudrait tout simplement l'avoir comme conseiller politique?

M. BURNS: Cela vous aiderait.

M. LACROIX: On n'aurait pas 102 députés.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saint-Jean.

M. BURNS: M. le Président, moi aussi, j'ai une directive à vous demander.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je vous ferai remarquer que je n'en ai pas donné de ce côté. Je n'ai pas l'impression que votre demande en suscitera une de votre côté non plus.

M. BURNS: Non, moi, ça ne sera pas aussi en dessous du tapis que ça. Cela va être pas mal plus direct. Vous nous avez dit qu'il n'y avait pas de question de privilège à la commission. Vous nous avez également dit que l'article 96 — là-dessus, je suis entièrement d'accord avec vous et je suis d'accord avec le ministre des Affaires culturelles, même si lui ne le respecte pas — permettait à un député d'intervenir après qu'il avait prononcé son discours. Mais là, je vous demande ceci: Comment un député peut-il empêcher que des faussetés se disent à l'Assemblée comme lorsque le député de Saint-Jean nous dit que l'amendement proposé par le député de Lafontaine mentionne qu'on abroge, j'ai bien entendu qu'on abroge, l'article 133? Je suis obligé de vous le rappeler à vous, pour que vous lui rappeliez les termes de l'amendement, parce qu'il ne discute plus de l'amendement. Je vous demande comment je peux faire ça autrement, sinon que d'intervenir quand le texte dit: L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec? Ce n'est pas abroger, ça! Ce n'est pas du tout...

M. HARDY: II est abrogé...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous avez rétabli les faits.

M. BURNS: M. le Président, il y a une petite distinction et, sur le...

M. LACROIX: Patinage de fantaisie.

M. BURNS: ... plan juridique, elle est énorme cette distinction. Le chef de l'Opposition a vraiment...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre ! Vous êtes en train d'argumenter.

M. BURNS: ... expliqué ce que voulait dire l'abrogation. Non, je n'argumente pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous êtes en train d'argumenter sur le texte de la motion.

M. BURNS: J'essaie de...

M. LACROIX: Avocasseries!

M. BURNS: Je vous dis qu'il y a une différence.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous me demandez une directive, je vous dis...

M. BURNS: Mais il ne cite pas les paroles, M. le Président, et il dit des faussetés.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, il peut quand même intervenir.

M. BURNS: II peut dire des faussetés?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ecoutez. La directive que vous me demandez c'est de savoir quand vous pouvez rétablir les faits. Vous pouvez sûrement le faire au moment où vous aurez droit de parole sur le sous-amendement.

M. HARDY: C'est cela.

M. BURNS: Non, je ne peux pas rétablir les faits, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous l'avez fait en tout cas.

M. BURNS: Non. Je vous demande à vous, M. le Président...

M. HARDY: Quand vous ferez votre discours...

M. BURNS: Non, ce n'est pas cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je demande, M. le Président, si vous, vous ne deviez pas, lorsqu'un député, sur la motion — sur l'interprétation de notre attitude, il a le droit de dire...

M. LACROIX: Faites-vous beau, on vous filme.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, c'est sérieux, la directive que je vous demande est la suivante: Si on cite mal mes paroles, c'est assuré que j'ai le droit de revenir. Si on cite mal les paroles de n'importe quel député de l'Opposition, c'est sûr qu'on a le droit de revenir. Mais, M. le Président, si on ne comprend pas, c'est ce que je vous demande, si on ne comprend pas le sens de la motion, est-ce que ce n'est pas vous qui devez ramener le député à l'ordre?

Par exemple, si on parle du commerce des pommes et que le député parle du commerce des oranges, est-ce qu'il ne faudrait pas dire au député : Vous parlez des oranges, alors que c'est des pommes qu'on parle?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je pense bien que, sans vous donner la directive que vous, demandez, vous ne me demandez pas non plus de trancher chacune des questions où un député s'éloigne de la pertinence du débat, où il interprète mal une motion d'amendement et où même j'ai eu l'occasion de constater que, du côté de l'Opposition, on a fait allusion à des motions qui avaient été défaites et qui, au dire de ceux-ci, n'avaient pas donné justice. Je veux bien tâcher de faire appliquer le règlement dans la mesure où c'est possible, mais dans le cadre du débat tel qu'il se situe, j'ai l'impression que vous me demandez de faire beaucoup plus que mes pauvres petites capacités me le permettent, c'est-à-dire de veiller à ce que l'interprétation de chacun des membres de la commission sur chacune des motions soit bien exacte. Alors, je préfère m'en remettre à la sagesse et à la perspicacité des membres...

M. BURNS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... de la commission pour rétablir les faits en temps et lieu.

M. BURNS: Permettez-moi, M. le Président, de dire que c'est, au contraire, grâce à votre souplesse depuis le début — et je le dis en toute honnêteté, j'en profite pour vous rendre hommage —

LE PRESIDENT (M. Gratton): Là, arrêtez!

M. BURNS: Cela vous fait plaisir. Mais justement grâce à cette souplesse, qui a effet autant sur les députés ministériels que sur les députés de l'Opposition, je vous le dis, je l'ai constaté en tout cas, je vous demande s'il n'y aurait pas lieu — je ne vous demande pas de me répondre tout de suite non plus — à un moment donné, quand au moins la motion en discussion est mal citée, que vous rappeliez le député à l'ordre. C'est juste cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je tâcherai de le faire.

M. BURNS: Ce n'est pas une question d'interprétation. C'est une question de mal citer la motion en discussion.

M. HARDY: M. le Président, juste un mot sur la question de règlement, très brièvement. Le député de Maisonneuve au fond — cela revient un peu au sens de la demande de directive, qui était sous le tapis, que je faisais tantôt — demande au président d'intervenir quand il jugera que les propos d'un député seront bons ou non.

M. BURNS: Ce n'est pas cela. M. HARDY: Prenons ce cas-là.

M. BURNS: Ce n'est pas cela que je dis. Je dis sur la motion elle-même.

M. HARDY: Bien oui !

M. BURNS: Pour le reste il a le droit à toutes ses interprétations.

M. HARDY: Je vais m'en servir de cette motion-là. Le député de Saint-Jean...

M. BURNS: II a droit de dire que je ne suis pas intelligent, que je ne suis pas fin, que je suis un idiot...

M. HARDY: Pouvez-vous nous laisser deux secondes?

M. BURNS: II a le droit de dire tout cela. M. HARDY: Qu'est-ce que ce serait si... M. BURNS: Ce n'est pas dans la motion.

M. HARDY: M. le Président, ce ne serait pas seulement des motions de clôture s'il fallait que ce parti prenne le pouvoir, mais il n'y aurait même plus de Parlement, ils ne nous laissent pas parler. Il n'y a pas moyen de dire un mot.

M. BOURASSA: On veut écouter le député de Saint-Jean...

M. HARDY: Le député de Saint-Jean dit... M. BURNS: Continuez sur le sujet.

M. HARDY: Le député de Saint-Jean prétend que la motion aura pour but d'abroger l'article 133. Le député de Maisonneuve part en grand et dit: Non, non, c'est faux de dire cela! Cela n'abroge pas. Je regrette, mais c'est tout simplement une interprétation. C'est une interprétation, et je partage cette interprétation du député de Saint-Jean. Je prétends que la motion en cause aurait pour conséquence d'abroger l'article 133 en ce qui concerne un certain champ. Pas l'abroger totalement. Elle continuerait d'exister pour la Chambre des communes, mais...

M. BURNS: Si vous me donnez le sujet de mon discours, je vais vous donner un cours si vous voulez.

M. HARDY: Mais elle sera abrogée. Dans le langage ordinaire des choses — l'expression du député de Saint-Jean n'est peut-être pas d'une splendeur juridique totale — abroger veut dire que cela cesse d'avoir effet, et la motion du chef de l'Opposition...

M. MORIN: Non, non.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Cest justement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Le député de Saint-Jean, qui n'est pas avocat, et c'est un bien pour lui, ne s'embarrasse pas de la technique, il parle du bon sens.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Est-ce qu'on peut revenir au député de Saint-Jean?

M. VEILLEUX: M. le Président, la question de règlement soulevée par le député de Maisonneuve...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur le sous-amendement, s'il vous plaît.

M. VEILLEUX: ... prouve exactement ce que j'avance depuis le début. Vous savez, lorsqu'on est du peuple, comme M. le député de Saint-Jean, toutes les subtilités juridiques, on n'en est pas au courant.

Je ne crois pas qu'il y a beaucoup de gens dans la salle, ici, qui puissent faire ressortir des différents discours toutes les subtilités juridiques, notamment du chef de l'Opposition. Ce que je voulais tout simplement dire, c'est qu'on a dit à un certain moment par un amendement: Enlevons l'application de l'article 133 pour ce qui est des actes de la Législature du Québec et des tribunaux du Québec, enlevons cela. Cela fait au moins depuis le début de la commission parlementaire que les péquistes, les séparatistes membres de cette commission nous rebattent les oreilles continuellement. Aujourd'hui, ils font un pas en arrière. Ils reprennent deux ou trois points qui sont contenus dans l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et nous disent: Vous avez, l'amendement qu'on a fait tout à l'heure ou qu'avait fait avant-hier le député de Lafontaine, ce n'est pas tout à fait cela qu'on voulait dire. On voudrait seulement enlever une ou deux petites choses.

Je tiens à vous dire qu'ils ont oublié, dans leur sous-amendement, d'inscrire que cela est contenu dans leur projet type et qu'ils devraient l'inscrire immédiatement pour éviter, lorsqu'on aura voté sur ce sous-amendement, d'en faire un autre. Je serais quasiment porté à demander au "pee-wee" de Saint-Jacques s'il accepterait d'intercaler dans son article ceci: Les documents d'information que sont les lois, les règlements et les documents officiels sont rédigés en français, mais peuvent également être rédigés dans une autre langue, la langue anglaise.

Si le député de Saint-Jacques voulait être conséquent avec lui-même, inscrire dans son sous-amendement ce qui est contenu dans le projet de loi de son parti, on reviendrait en sous-amendement avec tout ce que contient l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. C'est avec des propos comme

ceux-là qu'on nous rebat les oreilles. Je comprends fort bien le député de Bellechasse lorsqu'il me dit que la population de son comté, en très grande majorité francophone, comme celle d'ailleurs du comté de Saint-Jean, est fatiguée des facéties et "facéças" des membres de l'Opposition qui font perdre un temps énorme à treize, sinon plus, membres de l'Assemblée nationale. On demande à l'Opposition officielle de rentrer dans le coeur du sujet, de discuter des articles qui sont contenus dans le projet de loi. Personnellement, je voudrais retourner auprès des électeurs du comté de Saint-Jean, qui commencent à s'ennuyer de leur député. Cela fait au moins six semaines qu'il entend ces stupidités de l'Opposition et ils demandent au député de Saint-Jean d'aller travailler pour son comté. Ils demandent au député de Saint-Jean de dire aux membres de la commission qu'il est grandement temps qu'on règle les problèmes et, comme le soulignait le premier ministre la semaine passée, des problèmes de l'ordre du conflit de la construction et tous les autres qui tombent sur le bureau du premier ministre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pertinence!

M. VEILLEUX: Je pense que le premier ministre, non seulement se doit de discuter du projet de loi 22, mais il se doit, en même temps, de se pencher sur tous ces problèmes. Tous les députés...

M. LEGER: Est-ce que le député de Saint-Jean me permet une question?

M. VEILLEUX: Que le député de Lafontaine se la ferme, une fois pour toutes!

M. LEGER: Non, est-ce qu'il me permet une question?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. VEILLEUX: Qu'il se la ferme!

M. LEGER: II peut me dire oui ou non.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: C'est parce que je sais que tous les électeurs de Saint-Jean ne sont pas tous des veilleux, c'est pour cela qu'ils sont fatigués. Ce ne sont pas tous des veilleux, les gens du comté de Saint-Jean.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Le député des enlèvements, on connaît cela!

M. LACROIX: Les espaces verts. Vous êtes pas mal vert !

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saint-Jean, une minute.

M. LEGER: Vous prenez pas mal d'espace!

M. LACROIX: Je vais en prendre plus aux prochaines élections. Vous ne serez plus là!

M. VEILLEUX: Si vous pouviez demander au député de Lafontaine d'être poli, comme disait le ministre des Affaires culturelles, souvent, au chef de l'Opposition, et de se fermer quand un autre député parle. Pourriez-vous faire le même message au député de Lafontaine? En terminant, un sous-amendement de la nature de celui que nous a apporté le "pee-wee" de Saint-Jacques, appuyé par l'amendement du député de Lafontaine, que j'ai qualifié l'autre jour et que je ne requalifierai pas aujourd'hui, je suis â dire que ces amendement et sous-amendement sont apportés uniquement pour faire perdre le temps des membres de la commission parlementaire. Il est grandement temps qu'on se penche sérieusement — et excusez le pléonasme — sur le sérieux ou le peu de sérieux que peuvent apporter les membres de l'Opposition aux discussions que le gouvernement libéral et que le gouvernement Bourassa ont voulu apporter avec le projet de loi 22.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Est-ce que la commission est prête à se prononcer sur le sous-amendement?

DES VOIX: Vote.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, d'abord pour faire suite à l'intervention du député de Saint-Jean, on s'aperçoit d'une chose, c'est que, lorsqu'on donne un petit mérite aux membres du gouvernement au pouvoir, ils en abusent facilement. Je dois dire, le député de Saint-Jacques me le confirmera, j'en suis sûr, que c'était pour être gentil envers le député de Saint-Jean que le député de Saint-Jacques a indiqué, avant de présenter son amendement, qu'il le faisait suite à une intervention du député de Saint-Jean, samedi ou vendredi, je crois.

M. CLOUTIER : Je rends hommage au député de Saint-Jacques.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je dois lui dire, je pense qu'il est mieux de rétablir les faits...

M. VEILLEUX: II n'était pas ici...

M. BEDARD (Chicoutimi): ...c'est que cet amendement était prêt depuis mercredi. Le député de Saint-Jean n'a, d'aucune façon, contribué au "filibuster", en nous donnant l'idée

d'un amendement ou quoi que ce soit. D'ailleurs, il était prévisible. Le député de Saint-Jean semble se rassasier et se complaire dans l'étude du programme du Parti québécois, nous en sommes fort aise. Mais il aurait dû, à la lecture de ce même programme, en conclure que l'amendement que nous proposions aujourd'hui était tout à fait logique avec la position ou le projet de loi qui avait été présenté à la presse par le Parti québécois. C'est tout simplement une suite logique, cet amendement, non seulement à la motion principale faite par le chef de l'Opposition, mais également logique face au programme même du Parti québécois. Le député de Bellechasse nous a parlé de son désir de passer le plus vite possible à un travail sérieux, concret, pour employer ses paroles. Nous aussi, tous que nous en sommes au niveau de l'Opposition, je voudrais lui dire que nous avons la nette conviction de travailler depuis longtemps, depuis que cette commission siège, de travailler d'une façon très sérieuse et très concrète. Qu'à sa première et qu'à sa deuxième petite visite au niveau de la commission il puisse se permettre de qualifier de bouffonnerie l'attitude de l'Opposition face au projet de loi 22.

M. MERCIER: Question de règlement, M. le Président, je n'accepte pas les commentaires du député de Chicoutimi...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MERCIER: ... parce que j'ai bien spécifié tout à l'heure que j'ai assisté en auditeur...

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Je devrai vous faire remarquer de la même façon que je l'ai faite envers les députés de l'Opposition qu'il y a un moment...

M. MERCIER : Je veux tout simplement rétablir les faits, M. le Président...

M. LEGER: Article 96. Quand le député aura terminé son discours, vous pourrez rétablir les faits. Article 96 du règlement, d'accord?

M. MERCIER: Parfait.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense bien que le député de Bellechasse...

M. MERCIER: On va vous servir un...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... aurait mauvaise grâce à ne pas admettre qu'effectivement, dans sa courte intervention de tout à l'heure, il a exprimé son opinion de ne pas participer au spectacle de bouffonnerie tel que présenté par l'Opposition. J'ai noté ses paroles, c'est exactement ce qu'il a dit. Je comprends difficilement qu'il puisse qualifier ainsi ce spectacle depuis le début, parce qu'encore une fois c'est une de ses courtes visites à la commission. Deuxièmement, je crois que...

M. BERTHIAUME: M. le Président...

M. BEDARD (Chicoutimi): ...quelles que soient les discussions devant un projet aussi sérieux que celui d'élaborer une politique linguistique pour l'ensemble des Québécois, il est important... Et je vais y venir à la question de règlement...

M. VEILLEUX: Question de règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi) : C'est suite aux interventions qui sont faites.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jean, sur une question de règlement.

M. VEILLEUX: M. le Président, quand je suis intervenu tout à l'heure, le député de Maisonneuve a soulevé une question de règlement, parlant de la pertinence du débat. Je tiens à vous demander de rappeler au député de Chicoutimi la pertinence du débat, c'est-à-dire l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, et pas autre chose.

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement, je dois rappeler au député de Saint-Jean qu'il est tout à fait pertinent, à l'occasion de la discussion d'une motion sur la table, de répondre à une argumentation faite par un député soit du gouvernement ou de l'Opposition, selon le cas.

Le député de Chicoutimi est parfaitement dans l'ordre de répondre à l'argumentation que vous avez servie pendant votre discussion, et je pense que votre question de règlement était à l'encontre du règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, d'ailleurs, cela ne répond qu'au contenu des différentes interruptions qu 'on a eues de la part des députés ministérielles. Entre autres, par exemple, le premier ministre s'est inquiété à plusieurs reprises, au niveau de ses interruptions tout à l'heure, du temps que l'on met à la discussion de l'article 1.

Je considère, M. le Président, que c'est important quand on sait jusqu'à quel point le premier ministre et le gouvernement décident ou vont décider d'attacher une image politique et de la traîner dans le paysage durant tout le temps qu'ils le voudront bien, après l'adoption de l'article 1. Ce qui leur importe, c'est l'adoption de l'article 1, parce que le français langue officielle, quel que soit le contenu des quelque 100 articles qui suivent, on voit très bien, de

par les interventions du premier ministre, que c'est là que se situe l'image politique qu'il veut, une fois pour toutes, tramer dans le paysage du Québec, sans nécessairement dire...

M. BOURASSA: Vous n'êtes pas d'accord?

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, d'accord, à condition que ce ne soit pas une officialité massacrée, à condition que vous ne vous arrogiez pas des droits et un courage que, dans le fond, vous n'avez...

M. BOURASSA: Le député de Saint-Jacques parlait d'étudier...

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous n'avez rien inventé en parlant du français langue officielle. Elle est officielle et tous les experts sont d'accord là-dessus.

M. BOURASSA: Le député de Saint-Jacques parlait de 18 dans votre contre-projet.

M. BEDARD (Chicoutimi): Elle est officielle depuis 1774, M. le Président.

M. BOURASSA: Dans votre contre-projet, c'est 18.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas compliqué. Bon, même avant cela...

M. BOURASSA: Le député de Lafontaine disait que c'est 14, mais dans votre contre-projet, c'est 1 8.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ceux qui nous l'ont confié, que ce soit d'une manière ou d'une autre, nous l'ont laissé et on va vous le montrer tout à l'heure, au niveau de l'argumentation. Il est nécessaire d'intervenir là-dessus, parce que le premier ministre...

M. VEILLEUX: Trois dans trois lignes.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... essaie continuellement de laisser, à tous ceux qui viennent ici, l'image d'une Opposition qui essaie tout simplement de faire un "filibuster", qui essaie de s'opposer d'une façon négative au projet de loi 22, alors qu'il n'en est pas du tout question, M. le Président.

M. BERTHIAUME: Hypocrite!

M. BEDARD (Chicoutimi): Qu'il se promène avec l'image politique du français langue officielle, d'accord! Mais ce qui nous importe à nous, comme législateurs, c'est de savoir ce que cache cette image, du point de vue de la réalité, M. le Président.

Nous sommes ici en tant que législateurs. Il ne faudrait pas l'oublier, avant de retomber continuellement dans nos dispositions simple- ment électorales et nos dispositions de petits politiciens. En tant que législateurs, je suis convaincu que, si le gouvernement avait accepté qu'on discute beaucoup plus du préambule avant même de discuter de l'ensemble de la loi, à ce moment, peut-être que cela aurait été plus vite pour larticle 1. Lorsque nous avons demandé de discuter sur le préambule, quels étaient les motifs pour lesquels nous le faisions, sinon d'essayer de connaître, une fois pour toutes, l'esprit du législateur d'une façon globale? Il ne s'agit pas d'être un législateur qui adopte ce préambule selon ce qu'on vote, mais un législateur qui, au départ, dit carrément son intention ou l'esprit de sa législation, pour ensuite, ceci étant fait, permettre une législation qui soit conforme à l'esprit que le législateur veut bien y mettre, à la détermination qu'il semble vouloir mettre dans sa législation. On avait parlé, à ce moment — cela nous a été refusé, et après de longs débats — de cette discussion nécessaire au niveau du préambule pour suivre, durant toute l'étude de chacun des articles, le prolongement de l'esprit du législateur et y déceler sa détermination...

LE PRESIDENT (M. Gratton): La pertinence...

M. BERTHIAUME: Ce débat-là a été fait, M. le Président.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... de vouloir légiférer une fois pour toutes. L'amendement, M. le Président, c'est suite à des interventions et des interruptions du premier ministre, qu'il a faites à deux ou trois reprises même aujourd'hui. Je pense qu'on ne peut quand même pas, en toute justice, permettre aux gens du gouvernement de faire des accusations et, du même trait, ne pas permettre aux gens de l'Opposition d'y répondre. C'est le gouvernement qui a retardé le fait qu'on arrive à l'article 1.

M. BOURASSA: ... aime pas cela...

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour employer son expression même, le premier ministre a dit que tout notre travail avait été fait en fonction de maquiller — ce sont ses propres mots — un "filibuster", M. le Président, ce n'est pas le cas du tout! Cela aurait pu être très vite fait si le gouvernement n'avait pas été entêté. On se rappelle l'attitude du gouvernement, quand on lui a demandé — c'était une demande normale, légitime, à ce moment, pour un législateur sérieux — de...

M. BOURASSA: Est-ce que le député me permet une question?

M. BEDARD (Chicoutimi): ... déposer la réglementation.

M. BOURASSA: Est-ce que le député me

permet une question, seulement une petite question?

M. BEDARD (Chicoutimi): Allez-y.

M. BOURASSA: Pourquoi le leader parlementaire a-t-il refusé de changer de salle après l'incident de la semaine dernière? On aurait pu continuer sérieusement la discussion.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pardon, M. le Président. Je sais que ce n'est pas le cas.

M. BURNS: Pourquoi posez-vous la question du député de Chicoutimi plutôt qu'au leader parlementaire?

M. BOURASSA: Parce que le député de Maisonneuve a dit, à de multiples reprises, qu'il faisait un "filibuster". Alors...

M. BURNS: Je n'ai jamais dit cela. A quelle place avez-vous vu cela?

M. BOURASSA: Le député de Saint-Jacques l'a dit.

M. BURNS: A quelle place avez-vous vu cela?

M. BOURASSA: II n'y a pas seulement le chef de l'Opposition...

M. BURNS: Là, cela ne marche plus avec le député de Maisonneuve. Vous cherchez le député de Saint-Jacques.

M. BOURASSA: C'est évident pour tout le monde.

M. BURNS: Bien voyons donc!

M. BOURASSA: Même le Jour, votre journal, a dit que c'était un "filibuster".

M. MORIN: Je pense que le premier ministre ne sait pas ce qu'est un véritable "filibuster".

M. BURNS: On vous le dira quand on fera un "filibuster" On va vous le dire clairement à part cela. Ce sera une grande déclaration.

M. BOURASSA: Oh!

M. BURNS: M. le premier ministre, veuillez prendre note...

M. BOURASSA: Cela a été fait vendredi.

M. BURNS: ... qu'à compter de maintenant, nous faisons un "filibuster". On ne vous l'a pas dit.

M. BOURASSA: Oui, cela...

M. BURNS: Toutes les fois qu'on l'a fait on vous l'a dit.

M. BOURASSA: Oui, le député de Saint-Jacques a parlé au nom du parti, vendredi soir à 5 h 45.

M. BURNS: Le député de Saint-Jacques, en réponse au premier ministre, a dit ceci parce que le premier ministre lui disait: Vous faites votre "show". Vous continuez votre "show". Il a dit: Oui, attachez vos ceintures et vous allez avoir un bien plus gros "show".

M. BOURASSA: Non. Avant cela. Je lirai la déclaration tantôt où le député de Saint-Jacques avertissait le gouvernement...

M. BURNS: Là, cela n'allait pas bien avec le député de Chicoutimi. Vous posez la question pour le député de Maisonneuve. Je vous réponds. Maintenant, c'est le député de Saint-Jacques. Vous poserez la question au député de Saint-Jacques.

M. MERCIER: On ne peut rien vous cacher.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi, sur le sous-amendement.

M. BERTHIAUME: Le député de Chicoutimi est hors du sujet.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pas du tout. D'ailleurs, seulement pour donner un exemple au premier ministre, si on avait vraiment voulu faire un "filibuster", quand nous avons présenté notre motion à l'effet que le français soit la seule langue officielle au Québec, on aurait pu présenter la même motion deux fois...

M. BOURASSA: C'est un peu de maquillage.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... parce que si vous vous référez...

M. BOURASSA: C'est un peu de maquillage.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... au rapport de la commission d'enquête sur la situation de la langue française au Québec, on voit qu'à ce moment, seulement sur ce point, il y avait deux options sur le français, seule langue officielle, à savoir la première option: Le français, seule langue officielle, mais avec un champ d'application se limitant à ce qui est prévu dans l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, soit le corps législatif provincial et les tribunaux provinciaux. Il y avait une autre option, la deuxième: Le français, seule langue officielle mais avec un champ d'application illimité, C'est-à-dire embrassant toutes les activités du gouvernement provincial, y compris celles des collectivités subordonnées, municipa-

les et autres, ainsi que les activités bénéficiant du soutien provincial, établissements d'enseignement et autres établissements financés par la province. On aurait pu faire deux motions...

M. CLOUTIER: Non. Vous n'auriez pas pu parce que...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... seule langue officielle avec application limitée, le français, seule langue officielle avec application illimitée. On n'a pas voulu le faire.

M. CLOUTIER: Non. C'est parce que...

M. BEDARD (Chicoutimi): On a présenté notre motion. Quel était l'esprit du gouvernement...

M. CLOUTIER: ... je vous ai pris de vitesse.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... quelle était l'image qu'il voulait tramer dans tout le Québec ou si c'était vraiment le français, seule langue officielle... dans le Québec...

M. CLOUTIER: C'est parce que je vous ai pris...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... quitte à avoir des difficultés du point de vue juridique, quitte à affronter, une fois pour toutes, le gouvernement fédéral et à cesser d'avoir peur et à cesser de se soumettre au chantage du premier ministre du Canada, ce même premier ministre qui n'est même pas capable de reconnaître le principe de deux nations. Et on se fie là-dessus pour essayer...

M. CLOUTIER: C'était pour vous forcer à discuter...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... de sauvegarder la majorité française du Québec...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... de l'article 1. Je vous ai pris de vitesse en présentant une motion principale, et les amendements que nous discutons actuellement sont des amendements à la motion principale. Si je vous avais laissé faire, vous en seriez encore aux motions préliminaires dilatoires. Là, vous avez été obligés de raccourcir...

M. BEDARD (Chicoutimi): Je vais vous donner un...

M. BURNS: J'invoque le règlement.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... autre exemple.

M. BURNS: J'invoque le règlement.

M. BOURASSA: Comme l'a dit le député de Maisonneuve.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si on avait voulu faire durer ce débat par de la procédurite, on aurait pu présenter une motion pour le rapporteur. Cela aurait pu durer deux jours. On ne l'a pas fait...

M. CLOUTIER: ... de la futilité.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... parce qu'on considérait que c'était une futilité.

M. CLOUTIER: Vous avez...

M. BEDARD (Chicoutimi): C'était une futilité, mais demander les principes directeurs...

M. BOURASSA: C'est un peu de maquillage.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... ce n'est pas une futilité. Demander le dépôt de tous les règlements, ce n'est pas une futilité, et vous nous l'avez refusé. C'est juste votre entêtement qui a fait durer le débat.

M. BOURASSA: Cela fait une semaine.

M. BEDARD (Chicoutimi): Et demander que des experts soient entendus, ce n'est pas de la futilité et vous l'avez refusé...

M. BOURASSA: Douze.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... malgré qu'on ait essayé par tous les moyens de vous convaincre. C'est vous autres qui avez refusé le débat. C'est vous autres qui l'avez retardé, parce que vous avez simplement retardé l'échéance où vous seriez démasqués. A l'article 1, vous avez été démasqués en refusant une fois pour toutes d'accepter le français, seule langue officielle et où, à l'avance —on peut le présumer, d'après votre attitude négative — vous allez refuser, encore une fois, la motion présentée par le chef de l'Opposition et l'amendement que nous présentons présentement. Nous savons pourquoi cette motion et cet amendement.

Nous savons que le français seule langue officielle aurait amené, en définitive, des conséquences du point de vue constitutionnel. Nous sommes convaincus, à ce moment — le gouvernement nous en a d'ailleurs convaincus par son attitude — que le gouvernement n'aurait pas le courage d'affronter le gouvernement libéral d'Ottawa.

Il n'aurait pas le courage de clarifier, une fois pour toutes, la situation juridique et les possibilités du Québec de légiférer en matière linguistique, de légiférer non pas comme une minorité canadienne, mais de légiférer comme une vraie majorité québécoise, on l'a dit à plusieurs occasions. Le chef de l'Opposition devant cette attitude négative, ce manque de courage d'affronter le fédéral, est arrivé avec une motion demandant non pas l'abrogation de l'article 133 d'une façon pure et simple, et là-dessus, je diffère d'opinion avec le ministre des Affaires

culturelles — mais demandant tout simplement que l'article... Il s'agit de lire la motion, M. le Président... Prenons la peine de la lire.

M. BOURASSA: Un peu de cosmétique.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, on ne se mêle pas, c'est vous autres qui êtes mêlés, dans vos manques de courage. C'est aussi simple que cela.

Dans la motion, qu'est-ce qu'on demande, M. le Président? "Que l'article 1 soit amendé en ajoutant, à la fin de l'alinéa suivant: Que l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 cesse d'avoir effet en ce qui concerne — c'est ce qui est important, pas "cesse d'avoir effet", point — les matières relevant de la Législature du Québec".

Nous, nous savons que, du point de vue des experts en droit constitutionnel, du moins, il semble qu'il se fait une certaine unanimité là-dessus, il n'y aurait pas de difficultés juridiques à l'horizon si le gouvernement acceptait cela. S'il devait y en avoir, à la suite même de la motion mitigée que nous faisons, face aux droits, d'une façon globale, qui peuvent être inclus à l'intérieur de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, même notre motion, à ce moment-là, ne permettrait pas, à notre avis, de grands débats juridiques, de grands conflits de juridiction qui s'éterniseraient et qui ne permettraient pas l'application de la loi. C'est pour cela qu'on a diminué notre première motion à l'effet d'abroger purement et simplement l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. On essaie tout simplement de sécuriser le gouvernement du point de vue constitutionnel. Là-dessus, il n'y a pas de danger. La plupart des experts se sont prononcés dans le sens qu'il n'y avait pas de danger de contestation. Vous ne direz pas que l'Opposition est irréaliste.

Ensuite, on apporte un amendement qui est tout simplement normal, conforme à notre programme du Parti québécois, un amendement auquel il fallait s'attendre, qui est tout à fait normal. Quand les députés de l'Opposition ont l'air de s'inquiéter devant cet amendement, ont l'air de penser que c'est un changement au programme du Parti québécois ou du projet de loi qui a été présenté lors d'une conférence de presse avant que ne débute ce débat linguistique, ils ne semblent pas lire le programme du Parti québécois et les implications qu'il recèle, M. le Président.

M. VEILLEUX: Une question de règlement. UNE VOIX: Budget de l'AN I.

M. BEDARD (Chicoutimi): On pourrait vous en parler, mais on va être en dehors du débat.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jean sur une question de règlement.

M. VEILLEUX: A l'instar du député de

Maisonneuve, vis-à-vis de moi, tout à l'heure, je tiens à dire au député de Chicoutimi qu'il vient de dire une fausseté. Ce n'est pas avant le début, que le projet de loi du Parti québécois a été déposé, c'est pendant la commission parlementaire qui entendait les mémoires. C'était donc bien après que le projet de loi eut été déposé et commencé à être discuté en commission parlementaire. C'est une autre fausseté que le député de Chicoutimi vient de dire.

M. BEDARD (Chicoutimi): D'abord, M. le Président, il y , une fausseté que j'ai dite et que je vais corriger tout de suite. Tout à l'heure, en parlant des députés de l'Opposition qui avaient l'air de s'inquiéter et qui avaient l'air de ne pas être capables d'interpréter correctement le projet de loi du Parti québécois, comme je sais que c'est consigné aux Débats, je voudrais bien qu'on indique que ce sont les députés ministériels, M. le Président. D'ailleurs, c'est simplement pour les fins du journal des Débats parce que, pour ceux qui écoutent les discussions, c'est facile de voir que ce sont les députés ministériels qui ne comprennent rien ou qui interprètent mal le projet de loi du Parti québécois.

M. HARDY:Vous êtes comme ces gars: Nous avons la vérité, la vie...

M. BEDARD (Chicoutimi): On n'a pas la vérité, on essaie d'être sérieux.

M. BERTHIAUME: C'est vrai.

M. BEDARD (Chicoutimi): A un moment donné vous avez formulé...

M. BERTHIAUME: Ce doit être fatigant d'avoir toujours raison.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... des réticences du point de vue de l'interprétation ou une différence d'interprétation concernant...

M. HARDY: Me permettez-vous une question?

M. BEDARD (Chicoutimi): ... la motion présentée par mon confrère.

M. HARDY: Cela ne vous donne-t-il pas des maux de tête d'avoir toujours raison comme cela?

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, on n'a pas toujours raison. Ne vous inquiétez pas, on n'a pas toujours raison.

M. MORIN: Nous n'avons pas cette prétention!

M. BOURASSA: Le timbre: Moi j'annule, vous n'avez pas eu raison avec cela? Le timbre pour l'élection fédérale?

M. MORIN: M. le Président...

M. BEDARD (Chicoutimi): A la longue, à force d'en parler, on va commencer à penser que cela vous fait mal.

M. MORIN: Le premier ministre fait du "filibuster".

M. HARDY: C'est accessoire.

M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, M. le Président, tant au niveau de la motion qu'au niveau de l'amendement, on propose toute la démarche du parti jusqu'à maintenant, ou de l'Opposition. Cela a été dans le sens d'apporter des amendements qui permettent au Québec de se tenir debout devant le gouvernement fédéral, pour qu'il résiste à l'omniprésence du gouvernement fédéral, surtout dans un secteur aussi vital que celui de l'élaboration d'une politique linguistique. Nos interventions ont été dans le sens — et on lui en a fourni la possibilité — de clarifier cette situation juridique. On ne peut quand même pas continuer indéfiniment à fonctionner avec une situation juridique qui soit confuse, qui permette indéfiniment le chantage ou qui permette les pressions du gouvernement fédéral ou de qui que ce soit ou de quelque citoyen que ce soit qui, face à l'illégalité de la loi que pourrait adopter le gouvernement, pourrait soulever la constitu-tionnalité de cette politique linguistique du gouvernement. On a offert — et c'est le sens des interventions que nous avons faites — de fournir au gouvernement l'occasion une fois pour toutes de légiférer comme une vraie majorité québécoise, après avoir décidé ce qui est nécessaire pour l'ensemble de la majorité québécoise, la majorité française, tout en respectant les droits des minorités. Ayant posé ce premier jalon, ensuite, au nom de cette majorité, au nom de cette minorité, il n'hésiterait pas, une fois pour toutes à affronter le gouvernement fédéral. Je vous remercie.

M. MERCIER: Article 96...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Bellechasse.

M. CLOUTIER: Je ne voudrais pas que vous perdiez de temps.

M. MERCIER: Simplement pour rappeler au député de Chicoutimi que je remplace aujourd'hui le député de Jacques-Cartier comme membre élu de cette commission. Pour son information personnelle, j'ai assisté en tant qu'auditeur, comme lui d'ailleurs il y a quelques jours, aux délibérations et aux auditions qui ont eu lieu dans cette salle à la commission parlementaire de l'Education. L'exemple qu'il voulait illustrer tout à l'heure, je pense qu'il en est lui-même le témoin...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... l'idée.

M. MERCIER: ... de l'idée qu'il voulait mentionner tout à l'heure, de ce "filibuster" soi-disant fait par les députés ministériels, se retourne contre lui puisque lui-même n'était pas membre de la commission élue et que depuis quelques jours...

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela ne m'a pas empêché d'y venir toutes les fois que cela était nécessaire...

M. MERCIER: Comme j'ai fait d'ailleurs.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... même si nous n'étions que six.

M. MERCIER: Comme j'ai fait d'ailleurs. Aujourd'hui c'était la première fois que j'avais l'occasion, en tant que remplaçant du député de Jacques-Cartier, membre élu de cette commission, de pouvoir prendre la parole. Alors, je pourrais prolonger davantage le commentaire...

M. MORIN: C'est si rare que nous sommes heureux de vous entendre.

M. MERCIER: Je suis très heureux d'entendre ce commentaire du chef de l'Opposition. Enfin, il a compris. Je voudrais lui dire également que les commentaires que j'ai exprimés tout à l'heure, je les répète, si vous voulez, de façon à pouvoir confirmer l'idée de plusieurs citoyens du Québec qui jugent que cela a suffisamment duré, cette discussion qui ne mène à rien et qui est animée par les autres députés du Parti québécois qui n'étaient pas membres élus de cette commission. Nous, dans un geste de superdémocratie, nous leur avons permis de prendre la parole à tour de rôle comme membres de la commission. Je pourrais prolonger davantage, M. le Président, mais pour permettre de revenir, si c'est possible...

M. MORIN: Merci.

M. MERCIER: ... à des discussions plus constructives relativement à ce projet de loi, je clos là mes commentaires avec cette réserve que, si c'est nécessaire, j'y reviendrai.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission est prête à voter sur le sous-amendement?

UNE VOIX: II n'y a rien à ajouter... M. CLOUTIER: Un vote.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on demande le vote sur le sous-amendement? Je pense que le député de Maisonneuve a une quinte de toux qui l'empêche de me demander la parole.

M. CLOUTIER: C'est une quinte de toux qui cherche à faire parler quelqu'un du côté ministériel, ou bien...?

M. BOURASSA: Non, M. le Président, c'est un signal.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur le sous-amendement.

M. BOURASSA: Nous sommes prêts à attendre.

M. BURNS: J'avais l'intention, M. le Président, d'intervenir.

M. BERTHIAUME: Si c'est un signal pour les applaudissements, il n'y en a pas aujourd'hui.

M. BURNS: J'avais l'intention d'intervenir, M. le Président, et...

M. CLOUTIER: Savamment.

M. BURNS: Savamment, comme toujours. Je serais tenté, au départ, de vous dire ce qu'un de mes vieux professeurs a déjà dit au groupe... Non. Cela aurait été mon jeune professeur. Il était tellement jeune, le député de Sauvé, qu'il n'a pas eu le temps d'être mon professeur.

Ce qu'un de mes vieux professeurs m'avait dit et avait dit à mes confrères de classe, c'est que, lorsqu'on écrivait un examen, il fallait toujours faire en sorte de laisser croire au professeur qu'il était un parfait ignorant. Parce que, disait-il, vous êtes censés expliquer ça à quelqu'un qui est en mesure de comprendre. A la suite de l'intervention du député de Saint-Jean, je suis tenté d'appliquer à la commission cette suggestion de mon vieux professeur et de remonter à l'origine de cette motion, de repartir simplement où on en était lorsque le député de Lafontaine a fait, à l'origine, la proposition d'amender l'article 1 pour qu'il se Use avec l'ajouté suivant: "L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec." Comme le disait le ministre de l'Education au tout début de l'après-midi, c'est sûr qu'il est impossible de discuter du sous-amendement proposé par le député de Saint-Jacques sans se référer constamment à l'amendement qui a été soumis par le député de Lafontaine. J'ajoute un autre élément: II est impossible de discuter intelligemment du sous-amendement ou de l'amendement sans se référer au texte même de l'article 133.

Cela m'étonne que, depuis le début, tous les députés ministériels qui se sont exprimés sur la question ne se soient pas posé la question: Qu'est-ce que c'est que l'article 133? Vous allez me dire qu'il y en a quelques-uns qui l'ont examiné dans leur bureau, qu'il y en a quelques- uns qui se sont penchés là-dessus. Soit, c'est fort possible. Mais, pour les fins de l'intelligence du débat, M. le Président, j'aimerais, au moins, contribuer à la lecture de l'article 133 pour qu'on sache exactement dans quel cadre on se situe à cette commission-ci, avec l'amendement et avec le sous-amendement à l'article 1.

Je cite l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique: "Dans les Chambres du Parlement du Canada et de la Législature du Québec, chacun pourra, dans les débats, faire usage de la langue anglaise ou de la langue française; mais les registres et les procès-verbaux des Chambres susdites devront être tenus dans ces deux langues. Dans tout procès porté devant un tribunal du Canada établi en vertu de la présente loi ou devant un tribunal du Québec, chacun pourra faire usage de l'une ou de l'autre de ces langues dans les procédures et les plaidoyers qui y seront faits ou dans les actes de procédures qui en émaneront." Deuxième alinéa: "Les lois du Parlement du Canada et de la Législature du Québec devront être imprimées et publiées dans l'une et l'autre de ces langues."

C'est ça qui est le coeur de l'amendement qui a été soumis par le député de Lafontaine. J'insiste sur le fait que le député de Lafontaine, contrairement à ce que disait le député de Saint-Jean, ne propose pas d'abroger cet article 133 que je viens de lire. Il propose, tout simplement, que cet article 133 cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières qui relèvent de la Législature du Québec. C'est ça, le cadre de la discussion. C'est ça, le cadre du sous-amendement que nous discutons actuellement. Ce n'est pas plus, mais ce n'est pas moins, non plus. On a un corridor qui a été imposé. Alors, qu'est-ce que ça veut dire l'article 133, actuellement? Sans être un grand constitution-naliste, je suis en mesure de vous dire que ça s'attaque — n'importe qui qui a pris la peine de le lire peut le dire aussi, comme moi — à trois domaines : le domaine des Chambres, comme on le dit à l'article 133, du Parlement du Canada et de la Législature. A cette époque, il y avait deux Chambres au Québec; donc, on pouvait parler des deux Chambres du Québec. Cela s'applique également à tout procès porté devant un tribunal, soit du Canada, soit du Québec. Finalement, ça s'attaque aux lois du Parlement du Canada ou de la Législature du Québec.

Ce qu'on vient faire actuellement avec le sous-amendement qui a été proposé par le député de Saint-Jacques, c'est calmer les inquiétudes du député de Saint-Jean, d'une part, et lui répondre, à toutes fins pratiques, lui qui citait le projet du Parti québécois, qui n'est pas, soit dit en passant, un projet de loi, mais plutôt une espèce de résumé d'un éventuel projet de loi.

M. VEILLEUX: Ce n'est pas cela que me disait le député de Saguenay, vendredi passé.

M. BURNS: Pas du tout. J'étais là et le député de Saguenay vous a dit que c'est une

espèce de condensé, parce que, si le projet de loi du Parti québécois avait été libellé, on l'aurait libellé de façon beaucoup plus explicite, beaucoup plus large. On aurait introduit, en forme de texte complet, les principes qui paraissent au projet que vous citez si allègrement depuis deux ou trois jours. Cela semble vous faire plaisir. Nous aussi, cela nous fait plaisir, sauf qu'on se demande sérieusement si vous comprenez de quoi on parle â cette commission; c'est notre seul problème.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. VEILLEUX: Est-ce que le député de Maisonneuve me permettrait de lui dire ce que le député de Saguenay m'a dit?

M. BURNS: Vous pourrez toujours rétablir les faits après.

M. VEILLEUX: II a peur.

M. BURNS: Si vous voulez me poser une question â moi...

M. VEILLEUX: Vous avez peur.

M. BURNS: ... comment voulez-vous que je réponde au nom du député de Saguenay?

M. VEILLEUX: Non, c'est à vous que j'ai posé la question.

M. BURNS: Posez-la au député de Saguenay.

M. VEILLEUX: Vous avez peur que je vous dise ce que le député de Saguenay m'a dit.

M. BURNS: Non, je vous dis tout simplement que moi, j'ai bien entendu le député de Saguenay et je n'ai pas compris que ce dernier commettait des hérésies en vous répondant.

M. VEILLEUX: II m'a parlé en aparté et il m'a dit quelque chose

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS; A ce moment-là, ayez au moins la décence d'attendre que le député de Saguenay soit ici, s'il vous a parlé en aparté, en privé ou derrière le trône, ou dans les corridors...

M. VEILLEUX: Vous auriez honte d'entendre ce qu'il m'a dit.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: ... ou où que ce soit. M. VEILLEUX: Vous auriez honte.

M. BURNS: Vous direz cela en présence du député de Saguenay. Tout ce que je sais, pour l'avoir entendu, c'est ce que le député de Saguenay vous a dit ici. J'espère que le député de Saguenay sera en mesure de vous répondre, parce que je pense que vous avez ouvert une porte au député de Saguenay, par ce que vous venez de dire. En tout cas, je ne me lance pas plus loin que cela.

J'étais donc à dire, M. le Président, qu'à la lecture même de l'article 133 il y a trois domaines particuliers où s'exerce cette espèce de bilinguisme consacré par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. J'ai entendu également le député de Louis-Hébert, samedi, nous élaborer une thèse des plus farfelues. En effet, dans toute son argumentation, je j'avais pas l'impression d'avoir affaire à quelqu'un qui avait l'habitude d'examiner des textes juridiques. Dans toute son argumentation, on retrouve cette ambiguité constante qui est relative aux droits collectifs et aux droits individuels.

Si je remets dans un même paquet les arguments lancés sur la table et par le député de Saint-Jean et par le député de Louis-Hébert, je me retrouve dans cette espèce de confusion totale entre les droits collectifs et les droits individuels. D'une part, le député de Saint-Jean, mieux connu sous le nom de l'apocalypse de saint Jean depuis quelque temps, nous dit...

M. VEILLEUX: Question de règlement.

M. BURNS: Oui, parce que c'est noir, c'est noir ce que vous nous annoncez. C'est fini; après, il n'y a plus rien.

M. VEILLEUX: Je me réjouis de voir que le député de Maisonneuve lit encore la Bible.

M. BURNS: Oui, c'est d'ailleurs un livre que nous ne devrions jamais cesser de lire jusqu'à notre mort. M. le Président, je ne pourrai pas vous en citer de longs passages, cependant. C'est ma mémoire qui est défaillante.

Je disais donc, que, d'après le député de Saint-Jean, c'est véritablement brimer toute une collectivité. J'insiste sur le mot parce que c'est cela qui ressort de l'argumenation du député de Saint-Jean et de celle du député de Louis-Hébert. C'est la collectivité anglophone qu'on brime par notre amendement.

Je veux véritablement vous prouver que vous êtes dans l'erreur la plus totale et simplement vous prouver que l'argumentation du député de Saint-Jean elle aussi est totalement dans l'erreur. Il nous dit: Comment se fait-il que dans le projet du Parti québécois — ce qu'il qualifie le projet de loi du Parti québécois — on accorde la possibilité à des gens de parler en anglais devant les tribunaux? Bien oui, c'est ça et tout est situé au niveau de la différence entre les droits individuels et les droits collectifs. Les individus ont la possibilité, par l'entremise des personnes qui sont anglophones, d'utiliser —je dis bien utiliser, l'amendement parle d'usage de l'anglais — devant les tribunaux et en Chambre de

la langue anglaise, ce qui est bien différent que ce que l'on constate de façon consacrée dans l'article 133. Si nous disons, d'une part, à notre amendement, que l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières qui sont de la juridiction du Québec et que du même souffle, par sous-amendement, nous disons que l'usage de l'anglais continue d'être permis dans les débats de l'Assemblée nationale et dans les témoignages et les plaidoiries orales devant les tribunaux, c'est justement en conformité de cette espèce de conception de droits individuels qui, eux, doivent continuer à être soutenus même par un projet de loi du style du projet de loi 22, même par un projet de loi qui ferait de la langue française la seule et unique langue officielle au Québec.

Ce débat, je dirais, remonte à peu près d'un an, à compter du moment où la commission Gendron a fait connaître ou a laissé faire connaître son rapport par l'entremise de certains journalistes. Par la suite, le gouvernement l'a déposé en Chambre, de gré ou de force, parce que certains journalistes avaient eu vent de certaines conclusions de la commission Gendron. Depuis que tout ce débat est commencé, il y a une chose qui est bien claire de la part du Parti québécois, c'est que jamais, à aucun moment, nous n'avons refusé de reconnaître certains droits individuels des anglophones, jamais. C'est cela qu'on vient, de façon concrète, reconnaître par notre sous-amendement.

Je dis tout de suite, à l'intention du député de Saint-Jean — j'imagine quelle sera sa réponse, il va me dire: Hein! hein! je vous ai taquiné et vous êtes venu avec votre sous-amendement. Ah! je suis fin, moi, le député de Saint-Jean, d'avoir provoqué ce sous-amendement du député de Saint-Jacques — que cela aurait pu paraître ailleurs à l'intérieur du projet de loi. Ce n'aurait pas été pour nous difficile de reconnaître des droits ailleurs. Si on en fait une question de principe à l'article 1, nous croyons qu'il est nécessaire de préciser notre pensée par le sous-amendement du député de Saint-Jacques, à ce stade-ci, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté. Tout au long de ce débat-ci nous avons fonctionné au nom de l'absence d'ambi-guité.

Quand j'entends le premier ministre ou tout autre ministre ou tout autre député, autour de la table, nous dire que nous faisons un "filibuster", que nous avons déclaré... On cherche, on gratte, on "gratouille", comme dirait Sol, dans nos déclarations, on "gratouille" pour ne pas nous "énervouiller"...

M. VEILLEUX: II écoute la télévision aussi.

M. BURNS: ... pour trouver certaines indications d'un "filibuster".

M. VEILLEUX: La télévision.

M. BURNS: On cherche dans tout ce qu'on a dit depuis le début. On remonte, on relit le journal des Débats, comme je voyais le premier ministre le faire tout à l'heure; on relit la transcription de la session de vendredi pour essayer de trouver le moindre indice qu'on ferait actuellement un "filibuster". On tente de nous dire: Vous êtes des gros, gros méchants. Vous êtes des méchants parce que vous voulez faire un "filibuster", parce que le député de Saint-Jacques a dit: Vous voulez en voir, un "show", vous n'avez rien vu encore. Vous n'avez rien vu si jamais on se rend compte que ce gouvernement est en train de trahir le peuple du Québec.

Jusqu'à l'article 1, parce que la bonne foi se présume, on est en mesure de dire: C'est fort possible que ce gouvernement veuille encore améliorer son projet de loi. Si tel est le cas, nous vous suggérons deux façons claires de l'améliorer. La première, c'est de dire qu'en matière "d'officialité", je ne sais pas si le mot existe, je ne sais pas si c'est un néologisme que je fais, en matière de langue officielle — c'est pour cela que je parle d'"officialité" d'une langue — il n'y ait qu'une seule langue, qui est la langue française tel qu'on l'édicté à l'article 1. Ceci nonobstant les dispositions de l'article 133, mais tout en reconnaissant les droits individuels des anglophones au Québec. Nous sommes prêts à apporter un amendement qui consacre l'usage de l'anglais tant devant les tribunaux qu'à l'Assemblée nationale. Ceci, évidemment, veut dire que les procès-verbaux, que les projets de loi seraient, si notre amendement était accepté, unilingues français. On ne se le cache pas. On ne tente pas de maquiller quoi que ce soit. On ne tente pas de cacher notre intention. On n'essaie pas de vous dire qu'on aimerait que la langue française soit la langue officielle, mais que peut-être, de temps à autre, et tout le temps, et peut-être aussi souvent qu'ils voudront, les Anglais auront des textes anglais, etc. Cela, on l'étudiera dans les autres articles, si vous nous permettez éventuellement d'y arriver. Ce qu'il est important de savoir dès l'article 1, pas à l'article 130 quand on parlera de la sanction de ce projet de loi, mais dès l'énonciation du principe à l'article 1, c'est où ce gouvernement veut aller, avec le moins d'ambiguïté possible.

Si c'est cela que le gouvernement veut faire, on vous dit, nous, qu'on va vous aider à y arriver. On veut tellement vous aider qu'on propose l'amendement du député de Lafontaine, doublé, à ce stade-ci — et comme je vous dis, peut-être de façon prématurée — en ce qui concerne le projet qu'on aurait pu faire, qu'on aurait pu insérer, éventuellement, dans d'autres articles, mais pour enlever des inquiétudes, on vous dit: On propose ce sous-amendement dès maintenant pour que les gens sachent bien qu'on n'est pas ici pour brimer les droits des Anglais. Mais quand on parle des droits des Anglais, attention, encore une fois! On parle de droits individuels, et on ne parle pas de droits collectifs.

Si vous parlez de langue officielle du Québec, je ne vois pas comment, d'une part — sans revenir à cette motion, M. le Président — on aurait été gêné qu'au niveau des droits collectifs on ne puisse pas dire: "la seule" langue officielle au Québec, c'est le français. Moi, j'avais l'impression, autour de la table, d'assister à une gêne, collective celle-là, de la part des ministériels. C'étaient des gens gênés de dire ce qu'ils pensent vraiment, ou bien des gens qui veulent maquiller, comme le disait le député de Saint-Jacques — le mot n'est pas trop fort — un projet de loi qui, éventuellement, fera de deux langues au Québec, l'anglais et le français, et dans cet ordre — parce que cela va continuer à "bilin-guiser" les francophones — faire de l'anglais et le français, deux langues officielles.

Le problème actuel, M. le Président, on ne semble pas s'en rendre compte. J'aurai l'occasion d'y revenir au cours du débat. Je résume et je termine là-dessus. Par les attitudes ministérielles jusqu'à maintenant, on semble rejeter, du revers de la main, nos arguments en disant: II n'y en a pas de problème. A partir du moment où l'article 1 est édicté, à partir du moment où on a dit que le français est officiel, il n'y en a plus, de problème. M. le Président, je dis à ces messieurs du côté ministériel, qu'ils rêvent dangereusement. Ils le font, comme le disait le chef de l'Opposition, que constater un fait qui existe, ils ne font que maintenir une ambiguïté historique que personne n'est capable d'élucider, sinon par des textes précis, des textes serrés, qu'une volonté du Parlement de véritablement légiférer en matière de langue.

C'est cela, M. le Président, la raison pour laquelle j'appuierai et le sous-amendement du député de Saint-Jacques, et l'amendement du député de Lafontaine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'il y a d'autres députés? Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, bien qu'il ne me reste que sept ou huit minutes avant l'heure de la suspension de la séance, je voudrais commencer mon exposé, me réservant de le continuer à la reprise de la séance ce soir.

Le sous-amendement du député de Saint-Jacques a le très grand mérite de nous permettre d'établir une distinction entre droits collectifs et droits individuels. C'est une distinction qui est importante. Depuis que ce débat linguistique existe au Canada et au Québec, on a toujours joué sur la confusion entre droits collectifs et droits individuels, soit pour éteindre les droits collectifs des francophones dans les provinces anglophones, soit pour favoriser l'épanouissement des droits collectifs des anglophones au Québec.

C'était une époque où les francophones du Québec négligeaient le droit constitutionnel ; ils étaient mal armés pour lutter contre les juristes anglo-canadiens et anglo-québécois dans un domaine où le poids des mots est si important.

Mais, aujourd'hui, nous sommes en mesure de peser le sens des droits individuels et la portée des droits collectifs. Dans plusieurs écrits, des auteurs québécois se sont penchés sur ces problèmes et ils ont élucidé chacune de ces notions.

On sait que les droits individuels n'ont pas la même origine que les droits collectifs. Les droits inviduels ont pris leur essor — il faut le reconnaître — en Grande-Bretagne, il y a de cela déjà plus de sept siècles. Vers 1215, de fait, on voit, pour la première fois, les rois, le pouvoir, être obligés de reconnaître les droits des individus notamment devant les tribunaux. Le roi d'Angleterre s'incline devant les droits de ses sujets qu'il avait, jusque-là, brimés.

Il y a toute une tradition qui nous vient de la Grande Charte britannique, toute une tradition qui a connu des développements aux Etats-Unis et dans tous les pays d'Occident à l'effet qu'on doit respecter les droits individuels. Nous de l'Opposition, nous du Parti québécois, n'avons absolument pas l'intention de brimer les droits individuels de qui que ce soit au Québec. Ce n'est pas parce que nous voulons que la langue française devienne la langue de la vie au Québec, qu'elle devienne la langue de l'Etat et de tous ses organismes, que nous voulons, pour autant, que les anglophones soient obligés, du jour au lendemain, de se mettre à parler français. Cela serait inhumain, cela serait impossible.

Nous voulons non seulement reconnaître les droits individuels des minorités au Québec et, en particulier, de la minorité qui vit avec nous depuis déjà deux siècles; nous voulons nous incliner devant la situation réelle, devant le bon sens. C'est le but du sous-amendement du député de Saint-Jacques.

Les droits collectifs eux, ont connu un développement beaucoup plus récent. Ils étaient, à vrai dire, la conséquence des droits individuels parce que, lorsqu'on met ensemble les droits individuels d'une grande multitude de personnes, on aboutit nécessairement à reconnaître les droits de la collectivité.

Mais cela a pris des siècles avant qu'on se rende compte que les collectivités aussi avaient des droits. Il a fallu attendre le XVIIIe siècle, cinq siècles plus tard, avant que ces droits ne prennent leur essor à leur tour. Il a fallu attendre le "Bill of Rights" de l'Angleterre, mais surtout la révolution américaine et la révolution française, pour que soient affirmés les droits de la nation. Ce qui est en cause, quand nous parlons de la langue officielle au Québec, ce sont les droits de la nation, de la majorité nationale qui habite ce pays depuis toujours.

Le gouvernement voudrait nous faire croire qu'avec l'article 1, tel qu'il est rédigé actuellement, il innove, il reconnaît aux francophones du Québec quelque droit nouveau. Ce n'est pas le cas. C'est un article qui dit l'évidence même. J'ai déjà dit à ce propos que c'est un peu comme si le premier ministre disait que le Québec est situé en Amérique du Nord; nous

nous en doutons. Nous savons que le français est la langue du Québec; personne n'en doute. Cela n'a jamais cessé d'être le cas, non seulement depuis l'Acte de Québec, qui d'ailleurs ne le confirme qu'implicitement, mais depuis qu'il y a des francophones, depuis que nous sommes arrivés dans ce pays et que nous avons commencé à le construire.

En refusant l'autre jour notre amendement, je crois que le gouvernement a montré le fond de ses intentions. Il aurait été simple de dire : Le français sera la "seule" langue officielle du Québec. Il s'agissait d'ajouter un mot, mais combien lourd de conséquences! Combien significatif! Cela aurait été une innovation, parce que c'est la lutte que nous menons depuis deux siècles pour donner à la langue française le statut qu'elle n'aurait jamais dû perdre dans ce pays. Le gouvernement l'a refusé, montrant par là que toutes ses grandes déclarations antérieures, selon lesquelles le français allait être la "seule" langue officielle du Québec, ce n'était que du vent, que de la publicité commerciale, de la camelote! J'ai hâte d'entendre les prochains discours du premier ministre, sur le projet de loi 22, pour voir s'il va encore nous parler du français "seule" langue officielle. Du moins, nous aurons empêché ce subterfuge d'être utilisé à nouveau. Mais revenons aux droits de l'homme.

J'entends l'horloge du parlement qui sonne les six heures, M. le Président. Puis-je proposer la suspension de la séance?

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

Reprise de la séance à 20 h 2

M. GRATTON (président de la commission permanente de l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre, messieurs!

Au moment de la suspension, le chef de l'Opposition officielle avait la parole sur la motion de sous-amendement du député de Saint-Jacques. Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, j'étais en train de rappeler l'évolution des droits collectifs par rapport aux droits individuels et je tentais d'expliquer qu'à notre époque les droits collectifs ont pris une place qu'ils ne possédaient pas avant le XVIIIe siècle, alors que l'accent avait été mis systématiquement sur les droits de l'individu. Depuis que les droits collectifs — le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, par exemple — ont pris de l'ampleur et se sont affirmés chez les divers peuples, tout le problème, c'est de trouver un juste équilibre entre droits collectifs et droits individuels.

Le Parti québécois, l'Opposition officielle a proposé, l'autre jour, que nous adoptions le français comme "seule" langue officielle, ce contre quoi le gouvernement a voté. Mais, nous n'avons jamais, pour autant, prétendu abroger ou restreindre de quelque façon que ce soit les droits individuels. C'est pourquoi le député de Saint-Jacques a présenté ce sous-amendement qui a pour but de rappeler que, selon nos traditions parlementaires et selon les droits que nous reconnaissons aux personnes, même si le français était désormais la langue de l'Etat et de tous ses organismes. En vertu de l'accent que nous mettons sur les droits collectifs, il n'en reste pas moins que les individus pourraient très bien parler l'anglais, par exemple, à l'Assemblée nationale ou devant les tribunaux en plaidoirie orale, s'ils ne connaissent pas le français. Mais il faut distinguer cela, comme je le dirai dans un instant, des jugements, qui sont des actes de l'Etat et devraient donc être rédigés dans la langue officielle, dans la seule langue officielle. De même, les lois, qui sont l'expression la plus accomplie de la volonté de l'Etat, doivent être également rédigées uniquement dans la langue officielle, le français.

Donc, le sous-amendement du député de Saint-Jacques a pour but de restaurer l'équilibre entre ces droits collectifs que l'Opposition voudrait voir reconnaître pleinement en faveur de la majorité francophone du Québec et les droits individuels que nous n'entendons pas négliger pour autant.

Le député de Saint-Jacques avait certainement à l'esprit, lorsqu'il a présenté cette motion, les grands documents internationaux contemporains qui reconnaissent les droits de l'individu, notamment devant les tribunaux. Je me permets de vous rappeler que certains articles de la Déclaration universelle des droits

de l'homme peuvent nous servir d'indication quant à la protection de ces droits individuels, notamment dans le domaine dont nous parlons ce soir. L'article 7 de la déclaration universelle nous rappelle que tous sont égaux devant la loi et ont droit, sans distinction, à une égale protection de la loi. Cela signifie sûrement que devant les tribunaux une personne a le droit de se faire entendre dans sa langue, qu'elle a le droit d'être entendue, même si sa langue n'est ni l'anglais, ni le français.

Il se peut qu'il y ait des gens, arrivés au Québec de fraîche date, qui ne comprennent pas encore le français, qui ne connaissent pas l'anglais et qui, de la sorte, pourraient se trouver tout à fait sans défense devant les tribunaux. A l'article 10 de la Déclaration universelle, on nous dit que "toute cause doit être entendue équitablement". C'est bien sûr que cela signifie, à tout le moins, qu'une personne doit pouvoir se faire entendre et comprendre ce que dit le tribunal. A l'article 11, on nous dit que "toute personne doit avoir à sa disposition toutes les garanties nécessaires à sa défense". Tout cela converge, M. le Président, pour appuyer le sous-amendement proposé par le député de Saint-Jacques.

D'ailleurs, je vous avoue que je ne vois pas très bien pourquoi le gouvernement serait contre un sous-amendement comme celui-là. Je ne serais même pas étonné tout à l'heure de voir le ministre et ses collègues ministériels voter en faveur de l'amendement.

M. BOURASSA: Qui reprend l'article 133.

M. MORIN: En effet, qui reprend une partie de l'article 133, mais pas tout l'article 133 du British North America Act...

M. BOURASSA: Presque totalement.

M. MORIN: .. puisque nous sommes limités aux tribunaux et à l'Assemblée nationale. Justement, puisque vous...

M. BOURASSA: Il n'y a pas beaucoup de différence.

M. MORIN: ... m'amenez, M. le premier ministre, sur le sujet de l'article 133, il s'agit de s'assurer que cet article 133 vise notamment l'obligation de publier les lois dans les deux langues, ne s'applique pas au Québec. C'est l'objet de l'amendement. Et le sous-amendement vient réchapper, en quelque sorte ce qui, dans l'article 133, est valable, c'est-à-dire ce qui touche les droits individuels. Nous ne voulons écarter de l'article 133 que ce qui va à l'encontre des droits collectifs.

C'est pourquoi le député de Saint-Jacques, en vue de respecter les droits individuels des anglophones à l'Assemblée nationale et devant les tribunaux, a fait ce sous-amendement.

Nous disons dans l'amendement — je parle de l'amendement du député de Lafontaine — que l'article 133 cesse de s'appliquer au Québec. Il est donc utile et pertinent de préciser dans la loi québécoise — c'est là la différence avec l'intervention du premier ministre il y a un instant — certains droits individuels garantis aux députés anglophones et aux citoyens anglophones devant les tribunaux du Québec.

Puisque l'article 133 cesserait de s'appliquer au Québec, il faudrait trouver dans la loi proclamant le français comme seule langue officielle, certaines dispositions importantes de l'article 133. Mais, cette fois, elle ne nous serait pas imposée par une loi impériale menacée de désuétude, ni par une loi dont la seule version — et c'est bien caractéristique — est rédigée en langue anglaise, le British North America Act. Les garanties accordées à la minorité québécoise seraient insérées dans la loi québécoise elle-même, alors qu'à l'heure actuelle elles ne s'y trouvent pas.

M. BOURASSA: Est-ce que le chef de l'Opposition n'a aucun doute sur le pouvoir du gouvernement du Québec d'amender l'article 133 ou de l'abolir?

M. MORIN: Nous avons, à plusieurs reprises, défini notre position là-dessus. Je suis heureux de permettre cette question au premier ministre. Cela va m'aider à préciser notre pensée une fois de plus. Cependant, comme cela fait cinq fois que je le dis, je m'étonne que vous n'ayez pas encore tout à fait compris.

M. BOURASSA: Non, c'est parce que cela va permettre de remplir votre temps.

M. CLOUTIER: J'ai l'impression que cela change d'un jour à l'autre.

M. BOURASSA: Cela change...

M. MORIN: M. le Président, je veux bien répondre au premier ministre à la condition de ne pas perdre une minute du temps qui m'est alloué; il me reste seulement quelques minutes.

M. BOURASSA: Non, c'est parce que je voulais vous donner un coup de main pour remplir vos douze minutes, étant donné que vous faites un "filibuster".

M. MORIN: J'ai encore beaucoup de choses à dire, fort importantes, sur la question et je n'ai pas besoin de votre aide, si c'est cela que vous voulez faire...

M. BOURASSA: Je fais toujours exception pour le chef de l'Opposition.

M. MORIN: Est-ce que je peux vous dire que vous vous trompez royalement? Vous essayez en ce moment, c'est clair, de créer l'impression que nous faisons perdre le temps de la commis-

sion, alors que, cet après-midi, c'est vous qui nous l'avez fait perdre.

M. BOURASSA: Non, j'ai toujours fait exception pour le chef de l'Opposition.

M. MORIN: N'essayez pas de faire des exceptions, nous sommes solidaires les uns des autres, dans l'Opposition. N'essayez pas de semer la zizanie, vous perdez votre temps.

M. BOURASSA: Non, non.

M. MORIN: Nous savons qu'il y en a au sein de votre parti, mais vous n'en sèmerez pas ici.

M. BOURASSA: Non. Sur la consigne d'annulation, vous en avez un peu dans votre parti.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais dire que j'ai été étonné, pour ne pas dire scandalisé, des propos du premier ministre depuis quelques jours au sujet de la guillotine, au sujet de la clôture.

M. BOURASSA: Vous la voulez!

M. MORIN: Non, justement, nous voulons faire notre travail sérieusement. Nous voulons prendre tout le temps qu'il convient de prendre pour un bill de cette importance. M. le premier ministre, tous les journaux vous le disent.

M. BOURASSA: Ils disent que vous faites un "filibuster". Tous les journaux disent que vous faites un débat marathon. C'est cela qu'ils disent, y compris le journal péquiste.

M. MORIN: Parce que vous passez votre temps à dire des choses comme cela, mais vous savez très bien que nous avons été sérieux sans désemparer depuis le début.

M. BOURASSA: Vous êtes le seul.

M. MORIN: Vous êtes vraiment sidérant. Tous mes collègues ont fait des interventions sérieuses et circonstanciées — vous ne pouvez pas dire le contraire — sur chaque point qui a été soulevé et tous les amendements ou sous-amendements que nous avons présentés étaient empreints de sérieux.

M. BOURASSA: On a parlé des films de Fernandel et de toutes sortes de choses...

M. MORIN: C'est vous qui avez déclenché cela.

M. LEGER: Qui est-ce qui n'était pas sérieux?

M. MORIN: Qui est-ce qui a donné le signal de ces pertes de temps? Systématiquement, les gens comme le député de Pointe-Claire sont intervenus pour parler du théâtre que faisait je ne sais plus trop lequel de nos députés. Allons donc!

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez parlé d'un nommé Simard.

M. MORIN: M. le Président, je ne voudrais pas me laisser interrompre, si cela devait empiéter sur mon temps.

M. SEGUIN: Je ne voudrais pas l'interrompre, mais, d'un autre côté, je voudrais bien que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. SEGUIN: M. le Président, est-ce moi que vous rappelez à l'ordre?

M. MORIN: Je reprends. Désirez-vous m'interrompre? Moi, je le veux bien mais dites-le.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je n'ai rien dit.

M. SEGUIN: Non, n'empêche que ce n'est pas le député de Sauvé qui va m'attribuer toutes sortes de choses, d'avoir fait perdre du temps à cette commission-ci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre !

Le chef de l'Opposition officielle.

M. SEGUIN: Je n'ai pas interrompu le député de Maisonneuve.

M. MORIN: M, le Président, pour en revenir à ce que disait le premier ministre, que j'estime personnellement très grave, je dois dire que cela fait à peine une semaine que nous débattons, depuis la seconde lecture, ce projet qui compte 130 articles. A peine une semaine et déjà on nous parle de clôture. Ma foi, si vous voulez partir en vacances, établissez un roulement entre vos députés.

M. BOURASSA: Non, c'est vous.

M. MORIN: C'est facile: Changez-les tous les jours ou toutes les semaines. Nous, nous sommes prêts à rester.

M. DESJARDINS: Ce n'est pas sûr. M. BOURASSA: Nous aussi. M. DESJARDINS: Moi aussi.

M. MORIN: Je le sais très bien. Le député de Louis-Hébert habite Québec et il peut, lui, se délasser tous les soirs sur sa véranda, mais si les autres veulent rentrer...

M. DESJARDINS: Ah oui! A minuit!

M.MORIN: ... dans leur patelin qu'ils le fassent et qu'on cesse de nous parler de clôture. Vous n'avez aucun...

M. DESJARDINS: Je suis disponible.

M. MORIN: ... motif valable à l'heure actuelle d'imposer la clôture alors que nous sommes au milieu d'un débat sérieux.

M. DESJARDINS: M. le Président, je me fais bronzer au clair de lune.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: II y a actuellement un sous-amendement à la motion d'amendement qui est présentement débattue. Je ne vois strictement pas ce que cela a à voir avec la motion de clôture ou une éventuelle motion de clôture. J'aimerais bien...

M. MORIN: Le premier ministre m'a interrompu. Vous n'aimez pas que je vous dise vos quatre vérités, mais je vais vous les dire tout de même. Ne m'interrompez pas!

M. CLOUTIER: Alors, la pertinence.

M. HARDY: M. le Président, parlant toujours sur ma question de règlement et interrompu d'une façon irrégulière et impolie comme d'habitude par le député de Sauvé, je vous demanderais de lui rappeler qu'il a le droit de dire tout ce qu'il veut dire, que sa liberté de parole est illimitée dans la mesure où il s'en tient aux règlements et en l'occurrence à la pertinence du débat. Il n'y a pas de motion de clôture actuellement, ni devant cette commission, ni ailleurs. Donc, il n'a pas à en parler.

M. MORIN: Cet après-midi même, vous avez mentionné la clôture.

M. BURNS: Cela fait à peu près trois fois qu'on se le fait dire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: ... sur le sous-amendement — M. le Président, si j'ai bien le droit de parole — pendant dix minutes, le député de Bellechasse n'a fait qu'une chose, nous dire qu'il souhaitait la clôture. J'ai l'intention de commenter cela quelque peu.

M. HARDY: M. le Président...

M. MORIN: Vous-même, vous l'avez dit à plusieurs reprises cet après-midi.

M. BOURASSA: Mais je vous rappelle simplement, si vous me le permettez, les paroles du député de Saint-Jacques, vendredi soir, vers 5 h 45, où il a dit que tous les moyens seraient pris pour bloquer l'adoption du projet de loi. On le voit aujourd'hui avec les amendements et les sous-amendements. Cela fait une semaine et on n'a même pas un article d'adopté. Il ne sera pas adopté pour les Jeux olympiques, si on continuait comme cela.

M. LEGER: C'est pour cela que vous appelez cela le marathon.

M. MORIN: Avec le bill que vous proposez vous pourriez vous présenter au concours d'é-quilibrisme aux Jeux olympiques.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: M. le Président, un point de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Un instant, j'aimerais faire le rappel...

M. MORIN: Le ministre m'a interrompu,...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... journalier en demandant aux gens dans les galeries de ne pas, s'il vous plaît, applaudir. Je vous invite à rire, mais à ne pas applaudir.

M. CLOUTIER: M. le Président, je voudrais simplement préciser que cette discipline n'existe pas aux Jeux olympiques, étant donné que le Haut-Commissariat relève de mon ministère.

M. LEGER: M. le Président, sur le point de règlement.

M. MORIN: C'est dommage!

M. LEGER: Sur le point de règlement, M. le Président, soulevé par le député de Terrebonne. Le député de Terrebonne a dit justement que le député de Sauvé ne respectait pas la pertinence du débat parce qu'il parlait de clôture. Je dois actuellement rappeler que c'est le député de Mercier, le premier ministre, qui a, à deux occasions, provoqué le député de Sauvé, en lui disant: Vous voulez avoir la guillotine! C'est normal pour le député de Sauvé de répondre et c'est pertinent au débat, puisque la question lui a été posée, pour une des rares fois, dans l'ordre, puisque le premier ministre a demandé la permission au député de Sauvé de poser sa question. Alors, pour une des rares fois, le premier ministre se conformait au règlement. Il a posé sa question et il a eu sa réponse. Le député de Terrebonne était à l'encontre du règlement en invoquant sa question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je fais remarquer au chef de l'Opposition officielle que,

Quel est, d'après vous, le temps requis pour un bill de cette importance? Vous avez semblé nous dire une semaine. Est-ce une semaine, deux semaines, trois semaines, un mois? Pourquoi ne le dites-vous pas à la population: Un bill de cette importance, cela prend tel ou tel délai? Vous vous gardez bien de le faire, parce que vous savez qu'un bill comme celui-là, comportant 130 articles et engageant l'avenir, pourrait normalement requérir plusieurs semaines, voire des mois de débat.

M. HARDY: Une semaine à l'article.

M. MORIN: Je vous donne un exemple. Le code des professions est resté 18 mois devant l'Assemblée. Je répète, M. le Président, parce qu'on m'interrompt sans cesse...

M. BOURASSA: Une vingtaine de lois.

M. MORIN: ... le code des professions est resté pendant plus d'un an devant cette commission après le moment où il a été déposé devant la Chambre.

M HARDY; c'est faux.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre!

M. MORIN: Ah bon?

M. HARDY: Pas article par article.

M. BURNS: Voyons donc! Les deux ensemble.

M. BOURASSA: Dites-le donc que vous voulez la clôture !

M. MORIN: Je termine en demandant au gouvernement d'avoir un bon mouvement et de voter pour ce sous-amendement, qui va même dans le sens de ses préoccupations, à moins qu'il ne soit vraiment contre les droits individuels.

Merci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre de l'Education, sur le sous-amendement.

M. CLOUTIER: L'amendement, comme d'ailleurs le sous-amendement, proposés l'un, si je ne me trompe, par le député de Lafontaine et l'autre, par le député de Saint-Jacques, me paraissent assez habiles.

Evidemment, il s'agit d'un enfant malingre. C'est sans doute à cause des deux parents. Ils me paraissent assez habiles parce qu'on n'exige pas l'abolition de l'article 133. On se contente d'essayer d'en annuler les effets sur le territoire du Québec. D'autre part, on essaie de protéger les droits individuels en reprenant, sur ce plan, la possibilité de continuer à parler anglais dans les débats et devant les cours de justice. compte tenu des interruptions qu'il a subies, il lui reste deux minutes pour terminer son intervention.

M. MORIN: Vous êtes bien aimable, M. le Président. Je vais tenter d'utiliser ces deux minutes sans être interrompu.

On a répété à plusieurs reprises aujourd'hui, pour mieux préparer psychologiquement le peuple du Québec à la clôture, que nous faisions de l'obstruction. M. le Président, nous ne sommes que six. S'il y avait à l'Assemblée nationale, comme il devrait y avoir, 30 ou 31 députés du Parti québécois, qu'est-ce que ce serait? Il pourrait en être ainsi si la Loi électorale était juste!

M. DESJARDINS: Pertinence.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Je veux tout simplement rappeler que, lorsque vous dites que nous faisons de l'obstruction, vous ne tenez pas compte du fait qu'à six nous représentons 45 p.c. de la population.

M. CLOUTIER: II y a les créditistes, il y a l'Union Nationale.

M. MORIN: Justement! Il y a même, à ce que nous croyons savoir, beaucoup de libéraux qui sont contre le bill 22, dont un certain nombre d'anglophones et de députés. Je ne serais pas surpris que nous parlions pour 75 p.c. de la population sur ce point.

M. DESJARDINS: 90 p.c, quant à y être.

M MORIN: Peut-être, M. le député de Louis-Hébert.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre.

M. MORIN: Et, si tel est le cas, vous voudrez bien accorder quelque crédit à ce que nous disons, à ce que nous avons à faire savoir à cette commission.

M. DESJARDINS: Je vous écoute. Je vous écoute.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Une minute.

M. MORIN: Et vous voudrez bien nous accorder tout le temps dont nous avons besoin pour donner notre point de vue sur ces articles, qui engagent tellement l'avenir du Québec.

Si vous estimez que, pour un tel projet, deux semaines suffisent ou, comme vous avez semblé l'indiquer aujourd'hui, qu'une semaine à peine suffit, vous allez à l'encontre des traditions parlementaires les mieux établies, M. le premier ministre.

II est évident que ceci témoigne d'une démarche qui est tout à fait différente de celle du gouvernement. En fait — je crois que le député de Maisonneuve sera peut-être de mon avis — si le Parti québécois avait vraiment voulu jouer le jeu à fond et discuter article par article, d'une façon normale, il me semble que cet amendement, comme ce sous-amendement, auraient dû venir à un autre moment. Au lieu d'être rattachés artificiellement à l'article 1, il me semble qu'ils auraient pu être rattachés d'une façon beaucoup plus naturelle à l'article 5, qui porte sur le statut de la langue officielle et qui se lit de la façon suivante: "Le présent titre règle les effets juridiques de l'article 1".

En fait, l'article 133 touche à la langue de l'administration publique et c'est tout le titre III qui est impliqué par l'article 133. Si le Parti québécois — j'entends le député de Saint-Jacques me donner raison — n'a pas procédé de cette façon, qui aurait été, à mon sens, beaucoup plus dans l'esprit de nos règlements, c'est sans doute parce qu'il a décidé de ne pas aller au-delà de l'article 1, après avoir été pratiquement obligé de l'aborder parce qu'il ne faut quand même pas oublier que c'est une motion du gouvernement — c'est ma motion, en fait — qui a permis l'ouverture de l'article 1 et que jusque-là, pendant des jours et des jours, les motions ont été multipliées pour tout simplement faire perdre — je crois qu'il faut le dire d'une façon assez brutale — le temps de cette commission.

On a réclamé tout un ensemble de documents — dont, curieusement, on ne parle absolument plus maintenant, comme si on n'en avait vraiment pas l'usage — que j'étais prêt à déposer aussitôt que l'article aurait été appelé, comme lors de toutes les discussions en commission élue.

En fait, je n'ai pas voulu faire une querelle de recevabilité. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas fait état de ces arguments auparavant. Je ne voulais pas me prêter à une obstruction qui ne pouvait que prolonger encore le débat. C'est la raison pour laquelle j'ai attendu pour faire ces remarques au moment de prendre la parole, soit sur l'amendement, soit sur le sous-amendement.

En fait, on est en plein débat byzantin, on est en plein débat de juristes. Il n'y a vraiment... Non, je ne permets aucune question. J'ai l'intention d'aller au bout de mon raisonnement.

M. LEGER: Même si elle est simple et courte?

M. CLOUTIER : Surtout si elle est simple et courte, parce que je connais les questions du député de Lafontaine et je ne vois certainement pas l'intérêt d'y répondre en ce moment.

M. LEGER: Bon.

M. CLOUTIER: Je disais donc que nous sommes en plein débat byzantin, nous sommes en plein débat de juristes. Je ne doute pas de la bonne foi du chef de l'Opposition, je doute davantage de son jugement car je me demande s'il n'est pas en train d'être plus ou moins manipulé par ses troupes — parce que je crois que le député de Lafontaine, par ses interventions, et même le député de Maisonneuve à l'occasion, en tout cas certainement le député de Saguenay, — manifestent de façon évidente, par leur humour ou leur rire, qu'il s'agit d'obstruction et ils ne s'en cachent guère. Il n'y a, au fond, que le député...

M. LESSARD: Question de privilège, M. le Président. Question de règlement.

M. LEGER : On est normal.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: ... de Sauvé qui prenne la discussion sérieusement et le député de Maisonneuve, qui manie avec art...

M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Saguenay sur une question de règlement.

M. LESSARD: M. le Président, on m'accuse d'avoir ri. Je viens juste d'arriver ici à cette commission parlementaire. J'aimerais bien savoir, M. le Président, quand le ministre de l'Education m'a vu rire. J'ai ri, par exemple, de ses interventions inopportunes et de ses arguments...

M. CLOUTIER: J'aime mieux vous entendre rire que de vous entendre parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable ministre de l'Education.

M. CLOUTIER: M. le Président...

M. LEGER: Est-ce que vous avez entendu le rire intelligent du député de Mille-Iles?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LACHANCE: C'est un rire intelligent.

M. CLOUTIER: Revenons à notre argumentation.

M. LACHANCE: C'est justement quand vous parlez qu'on...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. CLOUTIER: Nous sommes tellement en

plein débat de juristes que je voudrais citer ici le professeur Chevrette qu'a déjà cité, à quelques reprises, le chef de l'Opposition et qui, d'une façon extrêmement claire, illustre l'espèce d'illogisme à vouloir, d'un souffle, annuler les effets de l'article 133, sinon les abroger et, d'un autre souffle, vouloir critiquer la loi 22. Dans cette émission dont j'ai déjà eu l'occasion de faire état et le texte en a été déposé devant cette commission, Présent québécois, du 18 juillet, le professeur Chevrette dit ceci: "Je comprends mal la position des gens qui invitent Québec à abolir expressément l'article 133, parce que le bill 22 ne serait pas conforme à l'article 133. La raison est très simple. C'est une position qui me paraît illogique parce que, dans la mesure où Québec peut abolir l'article 133 et qu'on estime, n'est-ce pas, qu'il peut le faire, à ce moment-là, il va le faire implicitement en adoptant le bill 22, si tant est que l'on estime que le bill 22 va contre l'article 133. Je ne sais pas si vous comprenez mon point de vue"? Et l'interviewer dit: "D'après vous, c'est un faux problème"? Et M. Chevrette reprend: "Ecoutez, tel qu'on en discute, ici, entre nous deux, je pense que c'est un faux problème". "Je pense que, si l'on estime — ce qui n'est pas mon cas — que le Québec peut abroger l'article 133 et si l'on estime aussi que le bill 22 va contre l'article 133, il n'y a pas de problème. A ce moment-là, dans cette logique, le bill 22 se trouvera à modifier l'article 133. Forcément, le Québec ne peut pas changer l'article 133, d'une part, et, d'autre part, le bill 22, dans son ensemble, je dis bien sous réserve de quelques détails, ne va pas contre l'article 133. J'ai simplement voulu citer ce témoignage pour montrer qu'au fond cela n'a qu'une importance relative. Pourquoi? Pour ma part, je suis tout prêt à admettre qu'en vertu de l'article 92 le Québec pourrait abroger l'article 133. Ou, encore, le Québec pourrait très bien accepter un amendement, même tortueux, même malvenu, même rattaché au mauvais article, analogue à celui que propose le député de Lafontaine, modifié par le sous-amendement du député de Saint-Jacques. Le problème me semble être ailleurs. Le problème me semble être dans le type de démarche qu'a choisi le gouvernement, à savoir apporter une solution pratique à une question linguistique qui existe dans un milieu donné. C'est précisément ce que le gouvernement a tenté de faire, affirmer le fait français, mais ne pas brimer les droits individuels.

Le gouvernement prétend qu'il est parfaitement possible d'affirmer le fait français. Il est parfaitement possible d'aller très loin dans ce domaine, mais il n'est pas nécessaire pour le faire de restreindre les droits des citoyens. C'est la démarche qu'il a voulu tenter. Par conséquent, pourquoi aurait-il envisagé de modifier l'article 133? Mes collègues ont clairement dit que l'article 133 protège des droits individuels devant le Parlement et devant les tribunaux. L'article 133 prévoit également que certains textes devront être publiés en français et en anglais. Qu'est-ce qu'il y a de profondément choquant là-dedans? Nous sommes dans une société où il y a 20 p.c. d'anglophones. C'est un fait historique, qu'on le veuille ou non. N'est-il pas normal que ces anglophones puissent connaître, puissent comprendre le texte des lois qui les régissent? Soit dit en passant, les deux régimes particuliers qui sont créés de par le projet de loi 22, chez les corporations municipales et les corporations scolaires, sont des régimes exactement du même ordre. Ces régimes n'instituent en rien le bilinguisme, à moins d'être de mauvaise foi, mais ils permettent simplement à l'individu, au citoyen québécois, de comprendre dans sa langue les textes qui déterminent sa situation dans la société, c'est-à-dire les textes juridiques qui le régissent, soit au niveau du gouvernement, soit au niveau des municipalités, c'est-à-dire des gouvernements locaux. L'article 133 ne va pas plus loin et les régimes particuliers que nous instituons par le projet de loi 22 ne vont pas plus loin. Quel intérêt alors y aurait-il eu à supprimer l'article 133 ou même à en annuler les effets, suivant l'amendement et le sous-amendement? Strictement aucun, sinon qu'on aurait fait disparaître des garanties qui auraient amené une confusion considérable dans l'ensemble de la population. Nous aurions été obligés immédiatement de réintroduire les mêmes droits que nous aurions supprimés par l'article 133, de les réintroduire dans le projet de loi pour les francophones, puisqu'il s'agit de droits auxquels ils tiennent, et également pour les anglophones. La meilleure preuve c'est que c'est la démarche que suit au fond l'amendement et le sous-amendement. Cette démarche consiste à supprimer les effets de l'article 133 et, je le répète, comme je l'ai dit, d'une façon astucieuse, même si elle est malvenue et si ce n'est pas tout à fait la faute du PQ. C'est qu'il a vraiment choisi d'accrocher ses amendements à l'article 1 et non de discuter suivant l'ordre logique le projet de loi. Mais c'est à peu près le même raisonnement qui est fait, parce qu'on est obligé de réintroduire presque aussitôt la plus grande partie de ces droits.

Je pense donc que c'est sur le plan le plus pratique qu'il faut se situer et, à cause de tout ce raisonnement, le gouvernenement n'acceptera pas le sous-amendement et ensuite l'amendement qui est proposé par le PQ.

Je voudrais, M. le Président, profiter de l'occasion pour dire qu'à mon avis les comparaisons constantes dont use et abuse le Parti québécois, comparaisons avec d'autres provinces, comparaisons avec d'autres pays ne me paraissent qu'avoir une validité très limitée. En effet, les expériences et les situations ne sont pas comparables. La vie internationale depuis vingt ans est pleine d'exemples d'échecs; je pense, en particulier, à la compagne d'alphabétisation de l'UNESCO, prodigue d'échecs parce qu'on a tenté d'importer ou d'exporter des

institutions ou des systèmes tels quels. Il y a une situation au Québec qui doit recevoir une solution et, même si l'on peut tirer un certain nombre de leçons de l'exemple des autres provinces canadiennes ou encore de l'exemple belge ou de l'exemple suisse, il reste que c'est uniquement à partir de la société telle qu'elle est, que l'on peut trouver des solutions qui collent à notre réalité à nous. C'est la raison pour laquelle il faut être extrêmement prudent lorsqu'on utilise ce genre de comparaison.

M. le Président, ce n'est pas avec des discours incendiaires, des discours qui font appel beaucoup plus à la passion qu'au raisonnement, ce n'est pas avec des discours de cet ordre qu'on va régler le problème linguistique. Un gouvernement responsable doit trouver des solutions valables et je crois que c'est ce que propose le projet de loi 22. J'aurais bien voulu, à un certain moment — lorsque le député de Maisonneuve nous invitait, nous du parti ministériel, à prendre la parole, pour démolir, disait-il les arguments de l'Opposition — qu'il soit possible de le faire. Mais les arguments de l'Opposition sont drôlement rares, permettez-moi de vous le dire. Ce que l'on entend le plus souvent de la part de l'Opposition, — si j'excepte le député de Sauvé qui apporte des arguments, mais des arguments qui, étant basés sur l'histoire — et j'ai beaucoup de respect pour l'histoire — ne tiennent pas toujours compte de la réalité, ne se prêtent pas facilement à des réfutations parce qu'il ne semble pas toujours être exactement sur la même longueur d'onde que nous — ce ne sont pas des arguments depuis trois ou quatre jours, ce sont des ramassis — je crois qu'il faut dire les choses comme elles sont — de vieux thèmes où l'on parle — oh! je ne ferai pas état de petites incursions dans les rivières à saumon, il ne s'agit pas de ça actuellement — comme...

M. LESSARD: Est-ce que cela vous a fatigué?

M. CLOUTIER: Non, cela ne m'a pas fatigué du tout, mais je trouve cela très significatif.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas mieux que...

M. CLOUTIER: C'est pour ça que je ne rate pas une occasion de remettre ça à la surface, si j'ose dire. Ce sont exactement les mêmes thèmes.

M. LESSARD: Vous êtes mieux à la surface qu'entre deux eaux.

M. CLOUTIER: Au fond, nous n'avons pas entendu cinquante discours depuis que nous avons commencé à onze heures, mardi. Nous avons entendu le même discours prononcé par les six députés péquistes avec des variantes qui se déploient avec une marge extrêmement faible. Ce sont toujours les mêmes thèmes, le thème de l'indépendance. Je ne peux pas blâmer le PQ, c'est sa raison d'être. Il est bien évident que le PQ se place dans une optique tout à fait différente...

M. MORIN: Quelle lucidité, M. le ministre!

M. CLOUTIER: J'ai hâte de voir ce qui va se passer au congrès d'automne. Je crains bien que le chef de l'Opposition, qui cherche à avoir de l'humour en ce moment, se trouve drôlement mis en minorité, ne serait-ce qu'à cause de la stratégie à courte vue qu'il a adoptée ici même.

M. LEGER: Vous "paragouinez" actuellement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: Certainement, certainement. Je fais de la politique.

M. LEGER: Je n'ai pas dit baragouiner, j'ai dif'paragouiner".

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: C'est exact. J'ai fait mon argumentation et maintenant, je ne vois pas pourquoi je ne mettrais pas en évidence que tout ce que nous avons entendu depuis quelques jours, ce sont des discours n'apportant rien de positif à ce projet de loi et qui portent uniquement sur les vieux thèmes politiques du PQ, c'est-à-dire l'indépendance et ensuite on reprend tous les préjugés pour essayer de mélanger ça. On parle de cette loi qui institue le bilinguisme, alors que n'importe quel esprit raisonnable se rend parfaitement compte que cette loi n'institutionnalise pas le bilinguisme, mais institutionnalise la primauté du français en déterminant des règles d'usage, règles d'usage d'ailleurs — le député de Saint-Jean l'a admirablement démontré — qui se retrouvent, mot pour mot, à certains moments, dans le contre-projet ou, devrais-je dire, la contrepèterie du

PQ-

M. LEGER: Vous pouvez dire cela sans rire.

M. BOURASSA: C'est clair, les textes parlent par eux-mêmes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission est maintenant prête à se prononcer sur... Le député de Louis-Hébert, sur le sous-amendement.

M. DESJARDINS: En effet, il s'agit d'un débat plutôt aride parce qu'il s'agit d'un débat strictement juridique. Je voudrais me pencher un peu sur cet amendement et sur ce sous-amendement parce qu'on se souvient que, samedi dernier, le Parti québécois a présenté un amendement auquel il rattache aujourd'hui un

sous-amendement. Cet amendement se lisait comme suit, parce qu'on doit discuter de l'un en compagnie de l'autre: "L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec"

Aujourd'hui on ajoute: "Et que l'usage de l'anglais continue d'être permis dans les débats de l'Assemblée nationale et dans les témoignages et plaidoiries orales devant les tribunaux." Samedi dernier, j'ai indiqué — et j'ai eu un échange de vue là-dessus avec le député de Maisonneuve — que l'amendement était inacceptable et j'ai révélé quelques inquiétudes, en particulier des inquiétudes au chapitre de la liberté de l'individu par rapport à sa liberté de s'exprimer devant les tribunaux.

J'avais une deuxième inquiétude que je n'ai pas eu le temps de développer à ce moment et qui était une inquiétude constitutionnelle. Mais avant de répéter ou de présenter certains arguments là-dessus, je pense qu'il vaut la peine, pour le journal des Débats et pour ceux qui nous écoutent en ce moment, de comparer la bonne foi et le désir de protéger l'intérêt des québécois avec cet amendement et ce sous-amendement présenté aujourd'hui.

Il était évident, samedi dernier, que l'amendement était inacceptable tant sur le plan juridique que sur le plan constitutionnel. Mais il a été présenté quand même et, dès ce moment, le Parti québécois savait déjà qu'il présenterait un sous-amendement aujourd'hui. D'ailleurs, samedi dernier, le député de Maisonneuve a tenté de m'inciter à présenter moi-même ce sous-amendement. Si je l'avais fait, je m'aperçois que j'aurais volé le spectacle ou la motion du député de Saint-Jacques.

Mais quoi qu'il en soit, samedi dernier, déjà le Parti québécois présentait un amendement, le sachant inacceptable, et aujourd'hui, lundi, il vient nous présenter un sous-amendement. Il savait déjà samedi qu'il le présenterait aujourd'hui, et j'en prends à témoin le député de Chicoutimi qui, dans son intervention cet après-midi, en réponse au député de Saint-Jean, a mentionné que le sous-amendement était déjà prêt depuis mercredi dernier. Parce qu'il a voulu éviter que l'on dise que le sous-amendement était amené à cause du discours du député de Saint-Jean samedi dernier et afin d'éviter que le public conclue que le Parti libéral, que le parti ministériel a forcé le Parti québécois à amener un amendement, on vient nous dire qu'il était déjà prêt depuis mercredi dernier.

Franchement je m'inquiète sur la bonne foi — je ne veux pas prêter d'intentions, d'abord c'est contraire aux règlements — et j'essaie, très objectivement de chercher le sérieux du Parti québécois en procédant de cette façon. Face aux inquiétudes du député de Saint-Jean, face à mes inquiétudes, samedi dernier, pourquoi le Parti québécois n'a-t-il pas sur-le-champs présenté le sous-amendement qu'il avait déjà dans sa poche, dans la poche de derrière à ce moment- là? J'ai mentionné — et je prends le député de Maisonneuve à témoin — que les inquiétudes que je soulevais au point de vue de la liberté des individus sur l'amendement de samedi dernier disparaîtraient presque complètement si, par sous-amendement, on nous offrait de réécrire ou d'ajouter ce qui parait à l'article 133 de la constitution canadienne.

Donc, là, le Parti québécois avait une excellente occasion d'ajouter à son amendement ce qu'il vient ajouter aujourd'hui. Et je pense que maintenant — alors que j'hésitais auparavant — j'ai le droit, comme parlementaire et comme Québécois, de me poser des questions et de semer de sérieux doutes dans la population sur la bonne foi du Parti québécois lorsqu'il discute du projet de loi et lorsqu'il prétend qu'il prend l'intérêt des Québécois.

M. MORIN: Nous nous en posons depuis deux mois, des questions!

M. DESJARDINS: M. le Président, je pense que j'ai le droit de parole. Je comprends que, quand le chef de l'Opposition est professeur à l'université, il peut interrompre n'importe qui, mais ici le règlement s'applique, et ce n'est pas le titulaire de la chaire... Par conséquent, je continue et je ne veux pas être interrompu, M. le Président. Je ne permettrai aucune question cette fois-ci, parce que je n'aurai pas assez de mes 20 minutes pour dire au Parti québécois ce que je pense de lui là-dessus, sur l'attitude de samedi dernier. Moi, le "filibuster", je l'accepte. J'ai dit que je l'acceptais, mais je ne l'accepte pas sur la forme, sur la procédurite. Je l'accepte sur le fond. Qu'on vienne m'apporter des amendements sérieux, je veux en discuter.

On a discuté d'amendements sérieux, il y a deux semaines, quand on a parlé du bill 21, la loi des alcools. Le député de Chicoutimi a présenté un amendement sérieux et on l'a accepté, après l'avoir discuté.

Au mois de décembre 1973, quand on a parlé des amendements au code civil et à la loi des loyers, l'Opposition a apporté des amendements sérieux, particulièrement sur le stationnement des véhicules automobiles. C'est encore le député de Chicoutimi qui était à l'origine de ces amendements. On les a acceptés.

Si cela avait été un "filibuster" sur le fond, je l'accepterais; je serait prêt à discuter des idées de façon illimitée. Cependant, quand on m'arri-ve, aujourd'hui, avec un sous-amendement qu'on aurait pu discuter samedi dernier, alors qu'on l'avait dans sa poche de derrière, je vous dis bien franchement que vous me décevez. M. le Président, l'Opposition officielle me déçoit, comme stratège d'abord et parce qu'elle manque de bonne foi, parce qu'ici je prétends que nous devons chercher le meilleur intérêt des Québécois. Ce n'est sûrement pas dans le meilleur intérêt des Québécois de diviser à volonté des motions d'amendement et de sous-amendement pour le seul plaisir d'en discuter et

de faire tramer le débat en longueur. Mais cela étant dit, nonobstant ce "filibuster" sur la "procédurite", nonobstant ce que, je pense, je devrais appeler la mauvaise volonté de l'Opposition officielle face à un problème qui est fondamental et dont on a commencé, nous, à discuter en 1966, alors que le Parti québécois n'existait même pas... On n'a tout de même pas attendu qu'il arrive en Chambre pour se pencher sur les problèmes linguistiques, puisque des résolutions ont été adoptées en ce sens en 1966, 1968, 1970, 1972 et cela a donné le bill 22 d'aujourd'hui.

Il y en a qui sont élus députés aujourd'hui qui étaient encore à l'école alors qu'on discutait des problèmes linguistiques au Québec. Cela étant dit, malgré que c'est un "filibuster", je vais quand même discuter sur le fond de ce sous-amendement.

M. MORIN: Bon.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. DESJARDINS: Enervez-vous pas! Enervez-vous pas, parce que je peux vous démontrer...

M. MORIN: Je me demandais si cela viendrait.

M. DESJARDINS: ... que vous avez tort sur la forme, mais je peux vous démontrer que vous avez tort sur le fond aussi. Gardez votre fond bien tranquille; ne bougez pas trop, j'arrive.

M. HARDY: Pas de forme, pas de fond. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. DESJARDINS: M. le Président, on arrive aujourd'hui avec un sous-amendement qui ressemble à l'article 133. En fait, ce qu'on veut nous dire, de façon générale, c'est ceci: L'article 133 de la constitution, on va l'enlever de là et on va le replacer dans le bill 22. En d'autres mots, changeons donc quatre "trente-sous" pour une piastre. Mais quel est le but de cela? Je pense que le but qui est recherché... Encore là, je ne veux pas prêter d'intentions et je reprends ma phrase: Je pense que cela pourrait donner lieu à des chicanes constitutionnelles. Cela pourrait donner ouverture à la contestation du bill 22, en partie. Je pense que certaines gens — et je ne fais pas allusion aux députés plus qu'à d'autres— dans le fond, aimeraient bien qu'on inclue l'article 133 dans le bill 22, justement pour susciter des débats constitutionnels et des débats historiques devant la cour Suprême du Canada, puisque l'Opposition pé-quiste a un expert dans ce domaine.

Ne serait-ce que le moindre risque d'aller susciter des débats constitutionnels devant la cour Suprême, je me dis que nous n'avons pas le droit de gaspiller le temps et l'argent des

Québécois pour aller en cour Suprême là-dessus et que notre devoir, comme gouvernement, c'est de maintenir l'article 133 où il est. D'ailleurs, je pense que l'article 133 est plus fondamental qu'un texte juridique recherché par le Parti québécois. Dans une constitution, c'est la base de la liberté, c'est la liberté fondamentale qui est exprimée. En plus d'un droit juridique qui est conféré à l'individu, vous avez un droit moral également dans une constitution et vous avez un droit traditionnel qui peut être invoqué, tandis que, dans un texte strictement juridique, comme le bill 22 qui devient du droit statutaire interprété à la lettre, vous avez devant vous un droit strictement juridique qui oublie l'aspec moral, qui oublie l'aspect traditionnel.

Je connais bien des gens qui préfèrent invoquer une constitution plutôt que d'invoquer la lettre du bill 22 qui deviendrait strictement un statut, à ce moment. Mais je vais plus loin. Je pense que le Parti québécois veut nous jouer un tour. Je retire ce que je viens de dire. J'ai toujours peur de prêter des intentions au Parti québécois, même s'il en a, et je veux éviter l'intervention du député de Maisonneuve sur une question de règlement. Il trouvera bien le moyen quand même vous savez.

M. le Président, dans le sous-amendement, on dit ceci, et remarquez comme c'est habile; c'est tellement habile et je vais vous mettre en contradiction. J'ai mis le Parti québécois en contradiction sur la forme, j'arrive sur le fond. On dit ceci et je cite, M. le Président. Je viens d'entendre le député de Saguenay; s'il ne veut pas que je lui répète ce que je lui ai dit en Chambre, je pense qu'il serait mieux de se taire.

M. LESSARD: Allez-y!

M. DESJARDINS: Je cite: "Et que l'usage de l'anglais...

M. LESSARD: Question de règlement, M. le Président.

M. DESJARDINS: Ça y est, je le savais.

M. LESSARD; Question de règlement, en vertu de l'article 98; le député de Louis-Hébert vient de dire: S'il ne veut pas que je lui cite ce que je lui ai dit à l'Assemblée nationale. Est-ce que ce ne sont pas des menaces, M. le Président? S'il m'a dit des choses aussi importantes que cela qui mettraient peut-être en doute ma réputation, je mets au défi le député de Louis-Hébert de répéter ce qu'il m'a dit à l'Assemblée nationale.

M. DESJARDINS: Certainement, M. le Président. Je n'ai pas voulu blesser mon ami, le député de Saguenay, qui vient de se choquer un peu. Je sais qu'il...

M. LESSARD; Je voudrais bien savoir, à un moment donné...

M. DESJARDINS: Un instant, laissez-moi donc finir! Voyons donc, vous êtes bien pressé! Je suis ici pour tout l'été, si vous voulez. Oui!

M. MORIN: Vous êtes aussi sérieux que le premier ministre. Bravo!

M. DESJARDINS: M. le Président, lors de mon discours sur le projet de loi 22 en deuxième lecture, le 13 juillet 1974, j'ai dit au député de Saguenay qu'il n'avait pas entendu les mémoires déposés devant la commission parlementaire...

M. LESSARD:Je les ai lus.

M. DESJARDINS: ... parce qu'un des sens du verbe "entendre" veut dire saisir avec intelligence.

M. BEDARD (Chicoutimi): Arrêtez donc cela.

M. DESJARDINS: Mais j'avais ajouté...

M. BEDARD (Chicoutimi): Lâche ton petit Robert!

M. DESJARDINS:... parce que le député de Saguenay, je le respecte. J'avais ajouté que je disais cela strictement pour taquiner le député de Saguenay. C'est textuel au journal des Débats.

M. BURNS: Le député de Louis-Hébert n'est pas sérieux.

M. DESJARDINS: Je peux vous en donner lecture.

M. BURNS: Gros taquin, va! C'est-y grave!

M. DESJARDINS: M. le Président, nous pourrions invoquer...

M. BURNS: II est taquin ce moses-là!

M. DESJARDINS: ... le sérieux du député de Saguenay, qui, à ce moment, est venu s'asseoir à côté de...

M. BURNS: Gros taquin!

M. DESJARDINS: Le député de Maisonneuve est venu le chercher. Je termine maintenant...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Deux minutes,

M. BURNS: II est tannant.

M. DESJARDINS: Lorsqu'on mentionne...

M. BURNS: C'est effrayant!

M. DESJARDINS: M. le Président, je vous prie de rappeler le député de Maisonneuve à l'ordre, je ne veux pas être interrompu. S'il veut continuer à se trouver sur mon chemin, comme il le disait samedi... Maintenant, le sous-amendement dit, et ceci est très habile...

M. BURNS: C'est parce que...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. DESJARDINS; "Et que l'usage de l'anglais...

M, BURNS: II n'est pas assez large, le chemin. On va être obligé de débattre à deux.

M. DESJARDINS: M. le Président, je vous rappelle mon intervention d'avant souper. J'ai dit que, dès qu'on tente d'intervenir sur le fond d'une question, on est continuellement interrompu par le Parti québécois. Vous en avez encore un exemple frappant dans le moment. Ils savent que je m'en viens et que je les attaque dans le fond, dans l'âme. Ils le savent. Ils ont peur. Ils tentent de m'interrompre et de m'éloigner les idées du débat.

M. MORIN: Nous sommes transis.

M. BURNS: On a peur de la gendarmerie royale. On a peur que la gendarmerie royale s'en vienne.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Louis-Hébert.

M. DESJARDINS: II me reste encore "un gros" dix minutes. J'ai été interrompu tout le temps.

M. LEGER: Consentement unanime, M. le Président.

M. DESJARDINS: "Et que l'usage de l'anglais continue d'être permis dans les débats à l'Assemblée nationale et dans les témoignages et plaidoiries orales devant les tribunaux." On a donc éliminé de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique les points suivants: La rédaction des archives, des procès-verbaux et des journaux de la Chambre, les actes du Parlement de la Législature du Québec et les pièces de procédure devant les tribunaux. Je considère ces omissions, et je pense que j'ai le droit de considérer qu'elles sont volontaires. Je tente de les concilier avec les prétentions du chef de l'Opposition, qui dit ceci, je cite: "Nous n'avons pas l'intention de brimer les droits individuels de qui que ce soit au Québec." Je cite un autre passage: "Nous n'avons jamais prétendu abroger, ni modifier, ni restreindre les droits individuels."

M. le Président, j'ai plaidé samedi, en fait, c'était vraiment une plaidoirie juridique, j'ai employé les termes de la défense pleine et

entière devant les tribunaux. C'est un principe sacré en droit criminel, et mes confrères de Maisonneuve et de Chicoutimi le savent bien, puisqu'ils sont avocats, que devant les tribunaux, ce principe de défense pleine et entière va très loin. Il est invoqué en tout temps et nous n'avons pas le droit de risquer qu'un mauvais jugement soit rendu parce qu'une personne n'a pas pu réaliser sa défense pleine et entière.

Par conséquent, quand on arrive, dans une procédure écrite, devant une cour de justice, soit un appel devant la cour d'Appel, soit une plaidoirie écrite parce que souvent des juges nous demandent des plaidoiries écrites, nous ne pourrons pas présenter ces pièces de procédure en langue anglaise, alors que l'article 133 de la constitution le permet, tel que rédigé.

M. MORIN: Est-il vrai que vous soyez l'avocat de la "Police montée"?

M. DESJARDINS: Quand on vient nous dire... M. le Président, est-ce que j'ai le droit de parole?

M. MORIN: Nous comprenons. C'est l'avocat de la "Police montée" qui parle.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. DESJARDINS: Lorsqu'on arrive...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Trente secondes.

M. DESJARDINS: Monsieur, vous apprendrez que j'ai toujours agi en conscience. M. le Président, je n'ai pas besoin des remarques du député de Sauvé pour agir en toute honnêteté, avec les clients que j'ai, quels que soient ces clients.

Je continue. Vous avez ici...

M. BURNS: Vous me permettez une question, le député de Louis-Hébert?

M. DESJARDINS: ... le chef de l'Opposition officielle, M. le Président...

M. BURNS: Le député de Louis-Hébert.

M. DESJARDINS: ... cela vous fait mal. Cela vous fait donc mal que j'aie retrouvé des oublis de l'article 133...

M. BURNS: Non, mais le député de Louis-Hébert...

M. DESJARDINS: ... que vous voulez insérer à l'article... Vous ne voulez pas insérer ces droits-là...

M. BURNS: Non, ce n'est pas cela.

M. DESJARDINS: ... au bill 22. Vous ne voulez pas les insérer...

M. BURNS: Le député de Louis-Hébert... M. DESJARDINS: ... ils s'imaginent... M. BURNS: Le député de Louis-Hébert...

M. DESJARDINS: ... à moins que cela fasse l'objet d'une prochaine motion d'amendement. Dans les circonstances...

M. BURNS: Le député de Louis-Hébert...

M. DESJARDINS: M. le Président...

M. BURNS: Le député de Louis-Hébert...

M. DESJARDINS: ...j'entends des voix, mais je sais que je ne suis pas au ciel. D'ailleurs, ceux qui me parlent à ma droite...

M. BURNS: Je veux lui demander s'il veut accepter une question.

M. DESJARDINS: ... ceux qui me parlent à ma droite...

M. LESSARD: Jeanne d'Arc au bûcher.

M. DESJARDINS: M. le Président, je n'ai pas terminé.

UNE VOIX: Le temps est écoulé.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II faudrait faire vite. Est-ce que...

M. MORIN: C'était passionnant!

M. DESJARDINS: Je termine. Je termine.

M. BURNS: Est-ce que le député de Louis-Hébert me permet une question?

UNE VOIX: Vingt minutes encore.

M. DESJARDINS: M. le Président, est-ce que quelqu'un veut poser des questions?

M. CLOUTIER: Vous cherchez à allonger les débats.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve vous demande la permission de poser une question.

M. CLOUTIER: Vous venez de dire 20 minutes encore. Vous ne ratez jamais une occasion.

M. DESJARDINS: M. le Président, je permets au député de Maisonneuve de me poser une question, mais je le préviens que je n'y répondrai que si je la juge intelligente.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: On est bien parti! On est bien parti !

M. DESJARDINS: Posez-la!

M. CLOUTIER: II n'ose plus maintenant.

M, BURNS: Je veux simplement demander au député de Louis-Hébert ceci: Est-ce qu'il ne croit pas que toute cette plaidoirie qu'il fait, depuis samedi, aujourd'hui, en faveur des droits individuels, trouve satisfaction dans le sous-amendement qui est proposé par le député de Saint-Jacques aujourd'hui? Est-ce qu'il ne trouve pas cela? Sinon, est-ce qu'il peut nous dire en quoi ces droits individuels ne sont pas satisfaits par le sous-amendement du député de Saint-Jacques?

M.MORIN: Va-t-il voter contre l'amendement?

M. DESJARDINS: Alors, je continue mon intervention, M. le Président.

M. BURNS: Ah bon!

M. DESJARDINS: Parce que j'avais mis la réserve que vous connaissez.

M. BURNS: La réponse, c'est quoi?

M. DESJARDINS: Je continue mon intervention.

M. BURNS: La réponse à ma question, c'est quoi?

M. DESJARDINS : Je vous ai dit que je n'y répondrais peut-être pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! UNE VOIX: Vous avez peur...

M. BURNS: C'est parce que la question n'est pas intelligente?

M. DESJARDINS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Est-ce que je dois comprendre que la commission... A l'ordre!

M. DESJARDINS: Je termine, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vous terminez brièvement.

UNE VOIX: Nous consentons.

M. DESJARDINS: Je termine brièvement. Ma deuxième inquiétude, c'était la constitution-nalité, et même si je respecte bien l'opinion du chef de l'Opposition qui dit que le Québec peut amender l'article 133, opinion qui est d'ailleurs partagée par d'autres éminents juristes, il faut admettre quand même qu'il y a d'autres aussi éminents juristes qui prétendent que ce n'est peut-être pas si vrai que cela que l'article 133 puisse être amendé.

M. MORIN: Attention! C'est du terrain glissant !

M. DESJARDINS: De toute façon, cela semble contesté jusqu'à un certain point...

M. CLOUTIER: ... Chevrette, pour commencer...

M. MORIN: Oui, mais vous ne pouvez pas adopter l'article 1, dans ce cas.

M. DESJARDINS: Oui, mais je ne peux jamais parler.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CLOUTIER: Si, si on vous a expliqué tout cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! Le député de Louis-Hébert.

M. BURNS: Laissez-le parler!

M. DESJARDINS: De toute façon...

M. BURNS: Tout le monde l'interrompt, y compris le ministre de l'Education. Cela n'a pas de sens. Il faut écouter cette pièce.

M. CLOUTIER: Je remercie le député de Maisonneuve de me rappeler à l'ordre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Véritablement, cela mérite le nom de pièce, ce qu'on entend actuellement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BURNS: II faut écouter cette pièce.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Louis-Hébert, brièvement.

M. DESJARDINS: L'habileté du député de Maisonneuve est quelque chose à voir. Mais quand même. Je termine, M. le Président.

M. BURNS: Je veux protéger vos droits individuels. Oui, parce qu'il est tout seul à penser cela.

M. DESJARDINS: Est-ce que je peux continuer, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je vous en prie.

M. DESJARDINS: Je termine en disant que, ne serait-ce que le moindre risque de contestation de la constitutionnalité du bill 22, si on tente d'y inclure l'article 133, je pense qu'il faut l'éviter à tout prix.

L'article 133 existe depuis 1867 et la constitution, dans son ensemble, il y a une jurisprudence qui s'y rattache. Les gens y ont rattaché des droits moraux, une valeur morale, une valeur traditionnelle et je ne veux pas... Je pense que cela serait inutile de risquer toute contestation à ce chapitre.

Je comprends qu'il y a certaines personnes qui aimeraient bien qu'on l'inclue pour ensuite contester parce qu'il y a des personnes qui aiment jouer avec les mots et se perdre justement dans les mots, les virgules, les points, les points-virgules.

Je vous remercie et je termine en disant que je voterai contre le sous-amendement qui représente en même temps une position parfaitement contradictoire du Parti québécois entre la motion présentée samedi dernier, le sous-amendement d'aujourd'hui, son contre-projet et tous les discours prononcés devant cette commission parlementaire.

Merci bien.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que les membres de la commission sont prêts à se prononcer sur la motion d'amendement?

M. CLOUTIER: Oui. Vote.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le sous-amendement...

M. LESSARD: M. le Président...

M. CLOUTIER: II me semblait aussi qu'on ne l'avait pas entendu, celui-là.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: II est vrai que je n'ai pas la prétention pompeuse du ministre de l'Education pour m'exprimer dans un langage châtié, mais...

M. CLOUTIER: Cela le fatigne terriblement. Je ne sais pas pourquoi.

M. LESSARD: ... je vais m'exprimer en bon Québécois, en bon citoyen québécois, de telle façon que tout le monde puisse me comprendre alors que, malheureusement, le ministre de l'Education n'est pas souvent compris.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement. Entendre parler le député de Saguenay.

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. J'aimerais bien, à toutes les fois que le ministre des Affaires culturelles, comme dirait le député de Saint-Jacques, le "foreman" des Affaires culturelles intervient...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... qu'il nous dise en vertu de quoi il intervient, qu'il nous le dise au départ et qu'il n'intervienne pas tout simplement à gauche, à hue et à dia... comme cela.

M. HARDY: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BURNS: En vertu de quoi? M. HARDY: Laissez-moi finir!

M. BURNS: Dites au président en vertu de quoi vous intervenez.

M. HARDY: Si vous vous taisez, je vais le dire.

M. BURNS: Je veux entendre cela.

M. HARDY: M. le Président, le député de Saguenay insulte la collectivité québécoise en croyant...

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. J'aimerais bien que le ministre nous dise...

M. LESSARD: C'est Jean-Noël Tremblay qui commence à faire ses interventions.

M. BURNS:... en vertu de quoi il intervient.

M. HARDY: J'ai fini. J'ai dit ce que j'avais à dire.

M. BURNS: C'est sa façon, tout simplement, d'intervenir dans un discours.

M. HARDY: Je finis par apprendre, à vous regarder. Je suis en train d'apprendre, à vous regarder.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'ai remarqué qu'il y a deux ou trois membres de la commission qui ont cette tactique.

M. LESSARD: M. le Président, ce n'est pas le député...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay sur la motion de sous-amendement.

M. LESSARD: ... de Saguenay qui insulte la

collectivité québécoise, mais c'est bien le ministre de l'Education et le ministre des Affaires sociales lorsqu'ils tentent de ridiculiser le langage des membres de l'Assemblée nationale, prétentieusement d'ailleurs...

M. HARDY: Pas du tout.

M. LESSARD: L'on sait que le ministre des Affaires culturelles est devenu le petit Jean-Noël Tremblay...

M. HARDY: Pas du tout.

M. LESSARD: ... de ce gouvernement. C'est vrai qu'être ministre des Affaires culturelles, cela monte à la tête.

M. BURNS: Ils s'en cherchaient un, ils l'ont trouvé, et, en plus de cela, ils l'ont nommé dans son ministère.

M. LESSARD: Malgré que je n'aie pas la prétention pompeuse du ministre de l'Education.

M. HARDY: Vous avez de la misère à partir.

M. LESSARD: ... de m'exprimer dans un français international, vous me permettrez de le faire comme...

M. HARDY: II a de la misère à se réchauffer.

M. LESSARD: ... Québécois moyen, de telle façon que j'espère pouvoir être compris, ce qui n'est pas souvent le cas du ministre...

M. CLOUTIER: Vous ne pourriez-pas l'envoyer se coucher?

M. LESSARD: M. le Président, vous me permettrez, en commençant cette intervention...

M. HARDY: II a pris un coup de soleil aujourd'hui.

M. LESSARD: ... de citer justement M. Chevrette qui a été interviewé par M. Barnabé: "M. Chevrette, il y a des analystes qui, en scrutant le bill 22, ont constaté que finalement c'était une sorte de mélange entre des formes de bilinguisme et des formes d'unilinguisme ou en tout cas de priorité au français. Est-ce qu'on ne peut pas croire que la tactique de M. Bourassa était, au fond, de laisser l'article 133 pour que chacun..." le ministre de l'Education ne l'a pas lu"... puise dans la constitution ce qu'il veut bien pour que, d'une part, on puisse voir un peu de bilinguisme et, d'autre part, un peu d'unilinguisme? Est-ce que ce n'est pas une confusion constitutionnelle qui, au fond, fait l'affaire de M. Bourassa? " Réponse de M. Chevrette. "C'est possible. C'est une question de politique. J'estime, là-dedans, que la politique est très importante, tout le monde en fait, mais..."

M. BOURASSA: Y compris le Parti québécois.

M. LESSARD: "... dans le contexte, il y a peu de gens qui utilisent le droit constitutionnel pour faire de la politique. J'estime que l'article 133 est de caractère fondamental et ce qu'il prescrit est assez limité. C'est un article qui parle de bilinguisme dans les tribunaux du Québec et fédéraux et aux Parlements du Québec et d'Ottawa. Un point, c'est tout. En somme, le bill 22 ne va pas contre cela", c'est-à-dire le bilinguisme.

M. BOURASSA: Continuez.

M. LESSARD: "Je pense qu'Ottawa, dans ce cadre de l'article 133...

M. BOURASSA: Continuez.

M. LESSARD: ... qui vaut aussi pour le fédéral, le gouvernement fédéral a choisi une politique de bilinguisme, le gouvernement du Québec s'oriente vers une politique qui est plus unilingue", ce sur quoi je ne suis pas d'accord avec M. Chevrette. "Pour moi, l'article 133 n'empêche ni l'une ni l'autre de ces deux positions".

M. BOURASSA: Pourquoi le citez-vous si vous n'êtes pas d'accord?

M. LESSARD: Voici, M. le Président...

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour vous montrer le mélange.

M. LESSARD: ... l'expert constitutionnel qu'a tenté, tout à l'heure, de citer le ministre de l'Education affirme lui-même que l'article 133 concrétise le bilinguisme au Québec.

M. BOURASSA: Vous n'avez pas compris M. Chevrette. Il dit que c'est l'unilinguisme.

M. LESSARD: Oui, M. le Président, "c'est un article qui parle de bilinguisme dans les tribunaux du Québec et fédéraux et aux Parlements du Québec et d'Ottawa".

M. BOURASSA: M. Chevrette dit que le bill 22 mène à l'unilinguisme.

M. LESSARD: Les 129 autres articles, à part l'article 1, consacrent le bilinguisme.

M. BOURASSA: Personne ne vous croit.

M. LESSARD: M. le Président, je pense que les députés libéraux ne veulent absolument pas comprendre ce que nous tentons de leur démontrer depuis au moins vendredi dernier. Il y a une différence entre un article qui consacre officiellement le bilinguisme et des droits individuels qui sont reconnus en vertu de la motion

qui est présentée par le député de Saint-Jacques. C'est ce que nous tentons de leur démontrer depuis vendredi dernier. En effet, qu'est-ce que fait l'article 133? L'article 133 reconnaît le bilinguisme au niveau du gouvernement fédéral, d'accord, au niveau du Parlement fédéral, d'accord, mais il reconnaît par un texte officiel le bilinguisme au niveau du Parlement québécois, comme au niveau des tribunaux québécois. M. le Président, c'est là où nous nous différencions, où nous nous séparons du Parti libéral.

Nous n'avons rien contre les droits individuels. Au contraire, ici, en commission parlementaire, comme à l'Assemblée nationale, nous avons affirmé à maintes reprises que les droits individuels devaient être reconnus à la minorité anglophone. Je pense que c'est tout à fait normal. Je pense qu'en ce sens on va beaucoup plus loin que n'importe quelle province canadienne. On va beaucoup plus loin, M. le Président, que le Nouveau-Brunswick qui a étudié la possibilité de faire reconnaître l'enseignement de la langue française dans sa province, mais qui n'a jamais sanctionné ce projet de loi, alors que 40 p.c. de la population du Nouveau-Brunswick est francophone.

M. le Président, je pense que nous allons beaucoup plus loin que la province de l'Ontario. Nous allons beaucoup plus loin que la province du Manitoba qui a fait disparaître d'un revers de la main les droits individuels des francophones, en 1890, et qui ne les a jamais reconnus par la suite.

M. le Président, l'Opposition ne s'est jamais opposée à la reconnaissance des droits individuels, mais ce que nous discutons, c'est le fait de reconnaître à une minorité ce qui étaient des privilèges et d'en faire actuellement des droits. Cela, M. le Président, ce n'est pas le député de Saguenay ou le député de Saint-Jacques ou les députés du Parti québécois qui l'ont affirmé. C'est le ministre des Affaires municipales lui-même, M. Goldbloom, qui a affirmé à l'Assemblée nationale que, pour la première fois, les droits collectifs des citoyens anglophones seront reconnus en vertu du projet de loi 22.

Est-ce que cela vous dérange, M. le ministre?

M. CLOUTIER: Cela m'ennuie.

M. LESSARD: Cela vous ennuie? Je comprends parce que cela commence à vous fatiguer, le bill 22.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: M. le Président, ce ne sont pas les députés du Parti québécois qui l'ont reconnu; c'est le ministre anglophone des Affaires municipales qui a reconnu que le projet de loi 22 consacrait enfin des droits aux anglophones du Québec. C'est là justement toute la différence que nous avons entre les ministériels et l'Opposition. Il y a une différence et cela a été reconnu en commission parlementaire. Il y a une différence entre des droits collectifs, les droits d'une collectivité, que l'on reconnaît, et les droits d'une minorité, qui sont des privilèges que nous voulons simplement lui reconnaître. Comment lui donner ces privilèges sans brimer le droit de l'ensemble de la collectivité québécoise?

D'abord, il faut reconnaître que la langue française sera la seule langue officielle. Il y a une démarche logique entre les différents amendements qu'a proposés le Parti québécois, assez qu'on peut se demander encore ce soir si ce n'est pas le Parti libéral qui fait de l'obstruction systématique. Quand nous avons présenté notre premier amendement concernant le fait que la langue française soit la seule langue officielle, le premier ministre a commencé à nous dire ceci: C'est de la redondance, cela n'ajoute rien à l'article 1. Mais tout à coup, le premier ministre s'est laissé aller, il s'est échappé, il s'est démasqué, M. le Président. Parce que le premier ministre a dit: Allez donc dire cela aux anglophones que le français est la seule langue officielle au Québec!

M. BOURASSA: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. LESSARD: Vous l'invoquerez à partir de l'article 96, après mon intervention.

M. BOURASSA: Cela fait plusieurs fois qu'on mentionne cette fausseté...

M. BURNS: Après, M. le Président. Vous ferez cela après.

M. BOURASSA: M. le Président, si l'on me permet seulement de rectifier.

M. BURNS: Vous en avez le droit, mais après. M. le Président, je vous demande de faire respecter...

M. LESSARD: Vous n'avez rien à rectifier, parce que c'est cela que vous avez déclaré officiellement à cette commission parlementaire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: ... M. le Président, que pour les anglophones...

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. Le premier ministre pourra faire toutes les rectifications qu'il voudra après...

M. BOURASSA: C'est de la démagogie.

M. LESSARD: Vous lirez le journal des Débats.

M. BOURASSA: C'est malhonnête.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. BOURASSA: J'ai dit que pour les anglophones, le français était la seule langue officielle dans le projet de loi 22, et le député de Sainte-Anne l'a prouvé en faisant un amendement. C'est de la démagogie.

M. LESSARD: Vous lirez le journal des Débats, c'est exactement ce que vous avez déclaré. Vous, vous savez...

M. BURNS: Après. Lisez donc l'article 96. J'invoque le règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: Pouvez-vous, M. le Président, faire respecter le règlement quant au premier ministre, s'il vous plaît?

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est ce que j'essaie de faire.

M. BURNS: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: Je ne permets rien, M. le Président, parce que...

M. BOURASSA: Vous avez peur.

M. LESSARD: Non. Il pourra le faire en vertu de l'article 96.

M. HARDY: Vous avez peur. M. BOURASSA: Vous avez peur.

M. LESSARD: M. le Président, je l'ai affirmé ici samedi à deux reprises et j'ai mis au défi les députés libéraux de me contredire sur ce point... Après.

M. HARDY: Vous avez peur.

M. BOURASSA: Vous avez peur de le permettre tout de suite.

M. LESSARD: Et il n'y a aucun député libéral qui me contredit. Le député de Saint-Jacques, d'ailleurs, M. le Président...

M. BURNS: Après.

M. BOURASSA : On va l'enlever sur son temps.

M. LESSARD: D'ailleurs, M. le Président, le premier ministre lui-même, lors de son discours de deuxième lecture, juste avant l'ajournement de six heures, a parlé de déclarer le français comme la seule langue officielle du Québec.

M. BOURASSA: C'est le texte.

M. LESSARD; II aime cela, à un moment donné, essayer de tromper les Québécois. Il aime cela jouer à l'hypocrisie avec les Québécois.

UNE VOIX: Menteur!

M. LEGER: Nous dire cela en pleine face, comme cela. Ce sont de purs mensonges.

M. HARDY: ... impoli, ce n'est pas de notre faute.

M. LEGER: On a un amendement pour demander que le mot "seule" soit inclus et vous n'avez pas le courage de le mettre...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Vous essayez de faire croire aux Québécois que c'est cela...

M. HARDY: ... aux lois qu'au...

M. LEGER: Ce sont des mensonges en pleine face. Ce n'est pas acceptable...

LE PRESIDENT (M. Gratton) : A l'ordre! A l'ordre !

UNE VOIX: Qui a donné la parole au premier ministre?

M. LEGER: ... ni du premier ministre, ni du ministre des Affaires culturelles.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: Dites-le donc fortement.

M. HARDY: ... mal rédiger nos lois parce que les péquistes ne savent pas lire.

M. LESSARD: M. le Président...

M. LACROIX: ... caméléons que vous êtes. Vous êtes un groupe de caméléons, hypocrites, menteurs, peureux!

M. LESSARD: Est-ce que le député des Iles-de-la-Madeleine...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LEGER: Pensez à Patton, Patton, Patton. M. LACROIX: Continuez.

M. LESSARD: Enlevez donc le bill 22, on va régler le problème.

M. LACROIX: Continuez, vous allez bien. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LESSARD: M. le Président...

M. LACROIX: Continuez, crachez votre bave!

M. LESSARD: M. le Président, lorsque nous avons présenté la motion concernant le fait que la langue française soit la seule langue officielle, le premier ministre a commencé à dire que c'était de la redondance et...

M. DESJARDINS: Pertinence. M. BOURASSA: Pertinence.

M. LESSARD: ... vous allez voir quelle relation il y a entre cet amendement et la motion qui est présentée actuellement. Le premier ministre s'est repris par la suite et il a dit au chef parlementaire de l'Opposition: Allez donc dire ça aux anglophones !

M. BOURASSA: Expliquer... M. LESSARD: Non, vous expliquerez après. M. BOURASSA: Vous avez donc peur. M. BURNS: Après.

M. LESSARD: Allez donc dire ça aux anglophones !

M. BURNS: Vous ferez ça après.

M. BOURASSA: Vous avez donc peur!

M. BURNS: Vous prendrez tout le temps que vous voudrez après.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LESSARD: Ce qui démontrait...

M. BOURASSA: Vous avez donc peur, hypocrites que vous êtes!

M. LESSARD: Non, après, vous aurez tout le temps pour le faire mais pas maintenant; après, d'accord?

M. LEGER: Prenez vos vingt minutes après.

M. LESSARD: On veut vous empêcher de faire une nouvelle menterie, c'est tout.

M. BOURASSA: Vous avez peur de la vérité...

M. LESSARD: M. le Président, ce qui démontrait tout simplement que ce gouvernement n'a jamais pris parti pour les francophones, que ce gouvernement n'a jamais pris parti pour la majorité francophone au Québec, que ce gouvernement est tout simplement sous le joug de la minorité anglophone au Québec, et c'est en ce sens que nous présentons la motion.

M. HARDY: Bla, bla, bla, bla!

M. LESSARD: En effet, suite au refus du gouvernement d'accepter la motion qui avait été présentée concernant le fait de faire de la langue française la seule langue officielle, nous avons présenté un amendement. Nous avons présenté un amendement pour faire en sorte que l'article 133 ne s'applique pas aux tribunaux sous la juridiction du Québec et ne s'applique pas à l'Assemblée nationale. En effet, il serait douteux de modifier l'article 133 lorsqu'il s'agit de la juridiction fédérale. En ce qui concerne la motion qui a été présentée par le député de Lafontaine, c'était de notre juridiction et en vertu de l'article 92, premier paragraphe, il est possible de modifier notre constitution, excepté en ce qui concerne le lieutenant-gouverneur.

Lorsque cette motion a été présentée, le député de Saint-Jean a tenté de faire une démonstration qui était complètement en contradiction, à la fois avec les propos tenus par le premier ministre, lorsqu'il disait que c'était de la redondance de faire de la langue française la seule langue officielle, et avec ceux du ministre de l'Education. Le député de Saint-Jean a en effet affirmé ceci: S'il s'agit de déclarer la langue française comme seule langue officielle, le contre-projet du Parti québécois devrait faire disparaître ce qu'il propose concernant les débats parlementaires. En effet, le député de Saint-Jean a dit qu'il était vrai que, si la langue française était la seule langue officielle, il fallait faire disparaître la possibilité pour les anglophones de s'exprimer en langue anglaise à l'Assemblée nationale. Il fallait faire disparaître la possibilité pour les anglophones de s'exprimer en langue anglaise devant les tribunaux. Il fallait faire disparaître, si le français devenait la seule langue officielle, la possibilité pour les anglophones de pouvoir s'exprimer en français au niveau des municipalités et des commissions scolaires. Le député de Saint-Jean a lu complètement le contre-projet du Parti québécois.

Le député de Saint-Jean tentait tout simplement de mettre en contradiction le projet du Parti québécois avec la motion qui avait été présentée par le député de Lafontaine en disant que, si on abolissait l'article 133, c'était absolument contradictioire de reconnaître dans un contre-projet qui avait été présenté par le Parti québécois, la possibilité, pour les anglophones, de pouvoir s'exprimer dans leur langue au niveau de l'Assemblée nationale et au niveau des tribunaux. Ce que nous avons tenté, à ce

moment-là, d'expliquer au député de Saint-Jean, c'est qu'il y a une différence importante entre des droits collectifs qui sont consacrés en vertu d'un article de la constitution canadienne et des privilèges que nous leur reconnaissons mais comme étant des droits individuels en vertu d'un projet de loi qui était celui du Parti québécois.

En effet, la motion que nous présentons ce soir ne fait que respecter ce que nous avons affirmé depuis le début de cette commission parlementaire, ce que nous avons affirmé lors de la discussion de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, ce que le député de Saint-Jacques et le chef parlementaire de l'Opposition ont affirmé à maintes et maintes reprises lorsque nous avons eu la commission parlementaire au cours de laquelle des organismes ont pu se faire entendre.

En effet, M. le Président, nous n'avons pas l'intention, malgré le fait que nous voulons que la langue française soit la seule langue officielle, d'enlever à une minorité importante au Québec — ce en quoi on se distingue des autres provinces — certains privilèges. Il s'agit de privilèges individuels. Or, le droit de s'exprimer en anglais à l'Assemblée nationale, c'est un privilège individuel et je ne peux pas comprendre le député de Louis-Hébert, qui a argumenté samedi matin, pendant 20 minutes, en tentant de nous démontrer le danger d'adopter la motion du député de Lafontaine.

En effet, nous disait-il, vous nous affirmez qu'on fait disparaître l'article 133. Cela veut donc dire que les anglophones ne pourront s'exprimer dans leur langue devant les tribunaux. Or, justement, le député de Louis-Hébert, tout en nous convainquant que, pour faire une véritable politique linguistique, il fallait faire l'indépendance du Québec, est en train de nous dire: Qu'est-ce qui arriverait devant les tribunaux fédéraux, étant donné qu'en vertu de l'article 133 les anglophones ont le droit de s'exprimer devant les tribunaux fédéraux? Or, la motion présentée par le député de Saint-Jacques vient répondre à l'argumentation...

M. DESJARDINS: Ce n'est pas vrai.

M. LESSARD: ... que nous a présentée le député de Louis-Hébert, samedi dernier.

M. DESJARDINS: Non.

M. LESSARD: Elle vient, tout simplement, lui dire que les citoyens anglophones auront le droit de pouvoir plaider devant les tribunaux, auront le droit de pouvoir s'exprimer en anglais devant les tribunaux. Nous venons, tout simplement, répondre à l'argumentation qui a été présentée par le député de Louis-Hébert.

M. DESJARDINS: Vous l'aviez dans vos poches samedi.

M. LESSARD: Et le député de Louis-Hébert nous dit: Mais pourquoi ne pas l'avoir présentée samedi?

M. BOURASSA: Cela fait vingt minutes. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOURASSA: Cela fait 20 minutes. M. LESSARD: Je termine, M. le Président. M. CLOUTIER: Cela suffit.

M. BURNS: II a commencé il passait neuf heures, j'ai vérifié.

M. BOURASSA: Non, non.

M. BURNS: Je m'excuse, question de règlement. Le député de Saguenay a commencé à parler après neuf heures, M. le Président. Il a été interrompu avec des questions de règlement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je m'excuse, il n'y en a pas eu de questions de règlement à part votre intervention.

M. LESSARD: Le premier ministre Bourassa, le premier ministre du Québec.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre.

M. BURNS: Oui, lui-même.

M. LESSARD: Le pion de M. Trudeau.

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'applique les mêmes règles, vous le savez fort bien...

M. BURNS: M. le Président, il y a eu des interruptions de façon fantastique.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... à tous les membres de la commission.

M. LESSARD: Le premier ministre des anglophones m'a interrompu continuellement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Terminez très brièvement, parce que le temps est écoulé.

M. LESSARD: Alors, je dis, M. le Président, que, s'il était logique avec lui-même, le député de Louis-Hébert devrait, tout simplement, accepter la motion qui est présentée par le député de Saint-Jacques, parce que cela répond exactement à l'argumentation qu'il a tenté de nous faire samedi dernier. Merci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission...

M. BOURASSA: Non, juste pour...

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable premier ministre, sur une question de règlement.

M. LESSARD: Allez-y, vous pouvez.

M. BOURASSA: Le député de Saguenay n'a pas voulu me permettre tantôt de faire une mise au point. Si j'avais été à sa place, je l'aurais permis, mais il n'a pas voulu me le permettre. C'est facile de sortir une phrase du contexte et de l'interpréter de plusieurs façons.

M. LESSARD: C'est ce que vous avez affirmé.

M. BOURASSA: Je pourrais en sortir quelques-unes que le député de Maisonneuve a prononcées et qui pourraient l'embêter drôlement.

M. BURNS: Faites-le donc!

M. BOURASSA: M. le Président...

M. LESSARD: De la menace, M. le Président?

M. BURNS: Faites-le donc; je vais vous en sortir quelques-unes, à vous aussi.

M. BOURASSA: Ce que je dis au député de Saguenay, c'était évident pour tout le monde. La preuve, c'est que le député de Sainte-Anne, dans la soirée, a proposé un amendement pour qu'il y ait deux langues officielles au Québec. Ce que j'ai voulu dire au chef de l'Opposition — et ceux qui ne sont pas partisans l'ont compris comme cela — c'est que, pour les Québécois, pour les anglophones en particulier qui protestent contre le projet de loi, il est évident que le français est la seule langue officielle, qu'on n'a pas besoin d'ajouter le mot "seule". On n'a qu'à voir leurs protestations dans certains milieux.

M. LESSARD: Pourquoi, à ce moment-là, ne pas l'accepter?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BOURASSA: Parce que c'est un texte juridique; ce n'est quand même pas une déclaration complète...

M. LESSARD: Le Manitoba.

M. BOURASSA: C'est un texte juridique et nous avons quand même... Je peux vous citer une déclaration de votre chef...

M. LESSARD: Au Manitoba, c'est un texte juridique.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. BOURASSA: ... M. René Lévesque, au lendemain de l'élection, qui parlait du français comme langue officielle, qui ne parlait pas de seule langue officielle.

M. LESSARD: C'était compris.

M. BOURASSA: C'est évident, quand on parle de la langue officielle, cela veut dire la seule langue officielle.

M. LESSARD: Les 129 autres articles consacrent justement la langue anglaise comme langue officielle au Québec.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Pour terminer, je vais citer de nouveau celui que le député de Saguenay a cité, celui que le chef de l'Opposition a cité, M. Chevrette, qui l'a dit. Je pense que le chef de l'Opposition va être d'accord pour dire que M. Chevrette est un observateur objectif.

M. MORIN: Oui, mais il contredit d'excellents juristes sur plus d'un point. Il contredit M. McWhinney.

M. BOURASSA: Est-ce que c'est un observateur objectif?

M. MORIN: Oui, je crois.

M. BOURASSA: II dit que la loi 22...

M. MORIN: C'est également un bon juriste, cela ne veut pas dire qu'il ait raison sur tous les points.

M. BOURASSA: D'accord, mais, d'après lui, la loi 22 s'oriente vers l'unilinguisme bien plus que le bilinguisme, comme vous le prétendez.

M. MORIN: Voyons donc!

M. BOURASSA: C'est vous-même qui l'avez cité tantôt.

M. MORIN: Là-dessus, M. le Président, je pense qu'il faut le prendre "cum grano salis".

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: D'ailleurs, le député de Maisonneuve a dit lui-même que la loi est un effort sérieux pour améliorer le rôle des francophones. Il l'a admis lui-même.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Est-ce que la commission est prête à se prononcer sur le sous-amendement?

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. Si le premier ministre veut faire des farces ce soir, il peut toujours les faire.

M. BOURASSA: Vous l'avez dit vous-même vendredi dernier, que le ministre de l'Education et le premier ministre étaient sérieux quand ils voulaient améliorer le rôle des francophones.

M. BURNS: C'est l'habituelle façon du premier ministre de faire des distorsions de ce que nous disons.

M. BOURASSA: Je vais vous citer le texte.

M. BURNS: Citez-le-moi! Justement, j'aimerais que vous me le citiez. Voulez-vous sortir le texte?

M. LEGER: Argumentez, il en restera toujours quelque chose.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! A l'ordre !

M. LACROIX: Soyez donc poli, pour un professeur vous êtes donc bien... Vous n'êtes pas un exemple à donner.

M. BURNS: Si le premier ministre ment, on va lui dire qu'il ment.

M. LACROIX: Quand j'enlèverai quelqu'un, je n'enlèverai pas un innocent comme vous.

M. BOURASSA: J'invoque le règlement.

M. BURNS: Vous mentez, vous mentez! Sortez donc le texte où j'ai dit cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BOURASSA: Cela vous fait donc mal le bill 22.

M. BURNS: Sortez donc le texte où j'ai dit cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: M. le Président, sur l'article 96, je crois que je peux dire ceci. Ce que j'ai mentionné vendredi, c'est que je présumais, je constatais que, de par leur attitude, le premier ministre et le ministre de l'Education croyaient, n'est-ce pas — c'est cela que j'ai dit — que le projet de loi qu'ils soumettaient était sérieux. J'ai même dit... Sortez le texte, M. le premier ministre. Vous allez arrêter de dire des men-teries publiquement comme cela.

M. BOURASSA: Oh! je vous en prie. M. BURNS: Cest d'accord. Sortez-le!

M. BOURASSA: On va le trouver et on va voir. Vous l'avez dit à plusieurs reprises.

M. BURNS: J'ai dit que je n'étais pas d'accord avec cette opinion, mais il restait quand même que je croyais que vous pensiez que c'était sérieux ce que vous faisiez. C'était dans ce sens qu'on disait: A ce moment, si vous pensez que c'est sérieux, faites donc ce que nous faisons, c'est-à-dire prendre toutes les précautions pour ne pas qu'il y ait ambiguïté dans votre projet de loi.

M. BOURASSA: Pas de...

M. BURNS: Maintenant, sortez-moi le texte. C'est d'accord.

M. BOURASSA: On va le...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Oui, c'est cela, on va...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Vote!

M. CHARRON: Je peux continuer sur la motion et le sous-amendement avant que vous ne la mettiez aux voix.

M. LESSARD: II ne rougit pas plus que cela, il continue d'affirmer toutes sortes de choses.

M. BOURASSA: M. Chevrette, que vous avez cité...

M. BURNS: Droit de réplique.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II n'a pas utilisé...

M. LESSARD: M. Chevrette parle d'un élan de bilinguisme.

M. BOURASSA: Non, non!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Un instant, je ne veux pas créer de précédent. Il n'a pas le droit de réplique.

M. BURNS: Bien, depuis le début qu'il a un droit de réplique.

LE PRESIDENT (M. Gratton): II n'y a pas de droit de réplique pour un amendement, encore moins pour un sous-amendement.

M. BURNS: Bien voyons donc! Bien, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): J'accorde volontiers la parole au député de Saint-Jacques à cause du fait qu'il n'a pas...

M. BURNS: Cest ça!

LE PRESIDENT (M. Gratton): ...utilisé tout le temps à sa disposition sur la motion, mais sûrement pas en vertu d'un droit de réplique. L'honorable député de Saint-Jacques. Il lui reste six minutes.

M. CHARRON: M. le Président, la motion, que j'ai présentée au début de l'après-midi et que vous soumettrez au vote dans quelques minutes, a été parfaitement bien décrite par chacun de mes collègues de l'Opposition qui est intervenu. Nous visons à remplir l'engagement que nous nous sommes donné lorsque nous abordions cette question et ce que nous avons demandé au gouvernement de prendre également comme façon d'aborder la question et le problème linguistique au Québec. D'abord, un parti pris net, clair, en faveur de la majorité francophone. Il n'y a pas ailleurs espoir d'avoir un gouvernement qui puisse gouverner dans l'intérêt des francophones, que celui-ci. Par la suite, une fois que les droits collectifs sont clairement affirmés, comme dans toutes les autres sociétés du monde, en faveur de la majorité qui constitue cette société, nous appliquer, dans des dispositions précises, à identifier les droits individuels et ceux qui ne partagent pas cette culture.

Le ministre de l'Education, en intervenant tout à l'heure sur ma motion de sous-amendement, M. le Président, a mentionné qu'effectivement — et je lui ai partiellement donné raison — le sous-amendement que j'ai présenté et l'amendement du député de Lafontaine sur lequel nous nous prononcerons également tout à l'heure, auraient pu arriver dans le débat, ailleurs.

Nous l'avions nous-mêmes, je dois dire, calculé un peu de cette façon. Mais nous l'avons fait parce que ce gouvernement et cette commission se sont prononcés de façon défavorable à l'amendement qui visait à faire du français la seule langue officielle du Québec. Nous intervenons donc immédiatement avec cette motion pour vérifier à nouveau, maintenant que vous avez refusé de faire du français la seule langue officielle du Québec, quelle est la portée réelle de ce texte que vous voulez faire ratifier par la commission et qui dit que le français est la langue officielle du Québec.

A cette occasion, M. le Président, nous avons soumis un amendement qui vise à ce que cette Assemblée, non pas déclare l'abrogation de l'article 133 de la constitution, contrairement à l'interprétation fantaisiste de députés qui n'y ont rien compris, mais rende non applicables sur le territoire du Québec, par une volonté du gouvernement du Québec, les dispositions qui "bilinguisent" l'Assemblée nationale et tous les textes qui en émanent, à commencer par les lois, les règlements, les documents officiels, et qui "bilinguisent" le système de la justice...

M. BOURASSA: Pas les règlements.

M. CHARRON: ... en permettant à tous les tribunaux de fonctionner à leur choix dans une langue ou dans l'autre. Pour écarter ces dispositions de bilinguisme dans lesquelles nous vivons et qui sont à nouveau consacrées dans le projet de loi, nous voulons faire du français la seule langue officielle et nous précisons bien que l'emploi de l'anglais par le sous-amendement que j'ai présenté n'est — comme l'a dit le député de Saguenay — qu'un privilège individuel reconnu à un député élu par une population qui, à l'occasion, peut être majoritairement anglophone, à s'exprimer dans sa langue, aussi bien à l'Assemblée nationale qu'à cette commission et à un citoyen, qui est de langue anglaise et qui est convoqué devant les tribunaux, à plaider sa propre cause dans sa langue, s'il est anglophone, ou à voir son avocat plaider sa défense dans sa langue, pour qu'il soit bien sûr de comprendre comment son avocat le défend, pour qu'il ne trafique pas et qu'il lui joue dans les oreilles avec le juge pendant que lui ne comprendra rien.

M. BOURASSA: Les écrits.

M. CHARRON: II y a une réalité sociologique au Québec qui veut qu'il y ait de plus en plus d'unilingues anglais au Québec et qui ne se trouve aucunement contrecarrée par le projet de loi 22. Sur les 790,000 anglophones qu'il y a au Québec, il y en a 649,000 qui se déclarent unilingues anglais. Il y en a plus en 1971 qu'il n'y en avait en 1961. Il est de plus en plus possible de vivre au Québec sans parler français.

M. BOURASSA: J'ai vu des chiffres un peu différents.

M. CHARRON: C'est cette réalité sociologique indéniable, mais qui n'est certainement pas encouragée, à laquelle nous devons faire face.

M. BOURASSA: Quelle est la source des chiffres?

M. CHARRON: En prenant parti très clairement et très nettement pour que le français soit la seule langue officielle du Québec, la seule langue officielle de l'Assemblée nationale, de ses lois, de ses textes, de ses documents, de ses règlements, en prenant parti très nettement pour que le français soit la seule langue des tribunaux, des juges, de ses jugements, avec, bien sûr, l'exception que nous prenons, nous pouvons ensuite — dans un sous-amendement que nous voulons à ce moment-ci greffer à l'officialité de la langue française — bien préciser que l'anglais n'a pas d'autre statut. C'est pour cela que nous le faisons à ce moment. C'est pour bien préciser que, dans le domaine de l'Assemblée nationale ou des tribunaux, l'anglais n'a d'autre statut que celui de privilège individuel, comme l'a signalé le député de Saguenay, soit dans le cas des citoyens qui plaident ou soit dans le cas de citoyens qui sont

élus, qui ont le droit d'intervenir dans cette langue. Sinon, si le sous-amendement est à nouveau battu, et si l'amendement, éventuellement, du député de Lafontaine l'est également, de la même façon, par la commission, qu'ils ont battu la seule langue officielle soit le français, nous revenons à la situation de bilinguisme au niveau de l'Assemblée nationale, de ses textes, de ses lois, et de ses documents, et de bilinguisme des tribunaux, c'est-à-dire que c'est à la discrétion des juges et des tribunaux et qu'ils peuvent fonctionner légalement dans une langue ou dans l'autre.

Nous soumettons cette Assemblée et cette commission au même vote et au même but —puis-je vous le rappeler en toute dernière conclusion — avec le même ultimatum au gouvernement. Si cet ultimatum n'est pas respecté et si on refuse à nouveau de faire du français —qu'on proclame langue officielle après qu'il l'eut été depuis 200 ans— l'unique langue de l'Assemblée nationale et l'unique langue des tribunaux sans disconvenir aux droits individuels qu'ont les citoyens dans ce réseau.

Alors nous saurons vraiment la portée réelle de ce gouvernement quand il dit qu'il fait du français la langue officielle du Québec, après que cela nous a été concédé il y a maintenant déjà deux cents ans.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le sous-amendement... A l'ordre! A l'ordre!

M. LACROIX: II y a beaucoup de petits mignons ici.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le sous-amendement proposé par le député de Saint-Jacques se lit comme suit: "Que la motion en discussion soit amendée en ajoutant à la fin la phrase suivante: L'usage de l'anglais continue d'être permis dans les débats à l'Assemblée nationale et dans les témoignages et plaidoiries orales devant les tribunaux."

Le vote sur ce sous-amendement. M. Bé-rard? M. Charron?

M. CHARRON: En faveur, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Veilleux?

M. VEILLEUX: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : M. Cloutier?

M. CLOUTIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Hardy?

M. HARDY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Lapoin-te?

M. Lachance?

M. LACHANCE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Morin? M.MORIN: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Desjardins?

M. DESJARDINS: Contre, M. le Président. LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Phaneuf? M. PHANEUF: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : M. Mercier? M.MERCIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Samson? M. Cornellier?

M. CORNELLIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pour, 2; contre 9. Le sous-amendement est rejeté.

M. DESJARDINS: Est-ce qu'on passe automatiquement à l'amendement maintenant, M. le Président?

M.MORIN: Non, il reste des droits de parole.

M. CLOUTIER : Non, vous n'avez pas encore parlé.

M. LEGER: ... des droits...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, il y a encore le député...

M. CLOUTIER: Ah bon! Il ne faut pas surtout pas les perdre, pour être logique avec votre "filibuster".

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: J'invoque le règlement. Le ministre nous parle de la logique de notre "filibuster". Il n'est pas question de cela. C'est simplement... J'ai encore droit à pas grand temps... Trois minutes seulement, et le député de Maisonneuve à cinq minutes. Nous, nous les avons réservés dans le but de répondre à des affirmations peut-être gratuites de certains députés ministériels, et c'est pour cela qu'on n'a pas épuisé tout notre temps de parole, au cas où des anomalies auraient pu survenir pendant les discours...

M. CLOUTIER: J'eus eu la même prudence...

M. LEGER: ... très peu nombreux des députés ministériels.

M. CLOUTIER: J'ai eu la même prudence. Il me reste quelques minutes également.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LA CHANCE: J'invoque le règlement. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LACHANCE: Le député de Lafontaine n'a pas le droit de parole. Il l'a perdu samedi. On lui a même donné quatre minutes de plus.

M. LEGER: M. le Président, je demanderais au député des Mille-Iles de se fier au chronométreur qui est le président. Lui-même devrait, plutôt que de calculer les minutes...

M. LACHANCE: J'ai le journal des Débats, ici. Tu as perdu ton droit de parole...

M. LEGER: ... parce qu'il se trompe, écoutez ce qui s'est dit... Pardon?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LACHANCE: J'ai le journal des Débats ici, tu as eu quatre minutes de plus.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LACHANCE: On t'a donné quatre minutes de plus.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que c'est normal pour un député...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... de tutoyer un autre député comme cela?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Qu'est-ce que ces façons, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Quel manque de décorum de la part du député des Mille-Iles!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. BOURASSA: On est entre camarades. LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. LACHANCE: Quand on parle à des...

M. BURNS: Sûrement pas avec le député des Mille-Iles. On n'est pas entre camarades. On n'a pas gardé les cochons ensemble.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

UNE VOIX: Absolument pas! UNE VOIX: ... parti communiste...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Ayant moi-même manqué les travaux de samedi dernier, vous me trouvez un peu au dépourvu pour juger qui a...

M. HARDY: M. le Président, je serais bien d'accord pour consentir quatre minutes au député de Lafontaine.

M.BOURASSA: II va nous parler des icebergs.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on pourrait s'entendre tout de suite? Si je comprends bien, il y a le député de Maisonneuve qui disposerait encore de cinq minutes.

M. BURNS: C'est exact.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Lafontaine, de trois ou quatre minutes?

UNE VOIX: Quatre minutes.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Quatre minutes? Bon! Alors, allons-y! Lequel des deux voudrait...

M. CLOUTIER: Non, ils ne peuvent pas faire d'autres sous-amendements.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine.

M. VEILLEUX: Un autre sous-amendement.

M. CLOUTIER: Ils ne peuvent pas faire de sous-amendements.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Maisonneuve?

Le député de Lafontaine?

M. LEGER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Lafontaine, pour quatre minutes.

UNE VOIX: Pardon?

M. BURNS : C'est vous qui choisissez?

LE PRESIDENT (M. Gratton): Non, non. Loin de moi ce...

UNE VOIX: Alors, le député de Lafontaine. M. LEGER: M. le Président...

M. HARDY: C'est bien exact qu'on consent, mais vous aviez terminé.

M. LACHANCE: Vous aviez terminé. Vous avez eu quatre minutes de plus.

M. HARDY: On consent.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: Le consentement que vous...

M. BURNS: C'est parce qu'on n'était pas sur la même chose, M. le Président.

LE PRESIDENT (M.Gratton): A l'ordre! M. LACHANCE: Oui, c'est la même chose...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Lafontaine a la parole.

UNE VOIX: On écoute.

M. LEGER: M. le Président, quand j'ai proposé cette motion...

M. HARDY: Allez-y...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

UNE VOIX: La galerie...

M. LEGER: ... d'amendement, c'était clairement dans le but, justement, d'enlever au Québec la possibilité d'être soumis â sa part de responsabilité juridique de l'article 133.

Ce qui me frappe davantage dans les quelques arguments que j'ai pu avoir, venant des députés ministériels, c'est une des affirmations du député de Louis-Hébert qui, de sa voix suave, nous exprimait qu'il nous avait pratiquement proposé ce sous-amendement à l'amendement que j'avais proposé pour le rendre le plus acceptable possible et respecter des droits individuels. Ce qui me surprend — c'est pour cela que je vais prendre les trois ou quatre dernières minutes qu'il me reste pour demander où est la logique du député de Louis-Hébert — c'est qu'il envoie de l'encens, mais il l'envoie par en-dedans.

Il disait tantôt que c'était lui qui avait eu la brillante idée de nous dire samedi comment nous aurions dû présenter notre motion d'amendement et qu'il avait trouvé que c'était bon et normal. Et c'est ce que nous avons fait par un sous-amendement, présenté par le député de Saint-Jacques.

Comment se fait-il que le député de Louis-Hébert n'ait pas poussé la logique jusqu'à voter pour, puisqu'il disait que c'était son idée qu'on avait volée? Alors s'il a parrainé cette idée et qu'il vote contre, on se demande où est la bonne foi du député de Louis-Hébert, qui nous affirme...

M. HARDY: ... complexe.

M. LEGER: ... que c'était lui-même, en premier, qui nous l'a proposé et par la suite, parce que c'est nous qui le proposons, il vote contre. Je ne vois pas la logique là-dedans. Un autre point. Tantôt le ministre de l'Education a dit qu'il s'agissait pour lui, dans ce projet de loi, de trouver une solution linguistique pratique adaptée à un milieu donné. Je pense que ce sont les mots textuels. Je pense que vous les repensez depuis tantôt tellement c'était bien dit.

M. CLOUTIER: Pour une fois, ce n'est pas trop déformé.

M. LEGER: C'est pas mal bien. Dans votre projet de loi, tel que présenté, nous trouvons à l'article 1 un principe de base. Nous comprenons que, pour le Parti libéral, trouver une solution linguistique pratique — et je dis bien le mot pratique — adaptée à un milieu donné. Pour lui, c'était essayer de faire croire aux Québécois, d'une façon pratique, qu'il trouvait une solution par un projet de loi pour la langue française comme langue officielle et, d'un autre côté, d'une façon détournée, dans ce milieu donné, pour ne pas trop déplaire...

M. CLOUTIER: C'est là que la déformation...

M. LEGER: ... aux appréhensions de la grande partie de son électorat, qui est le côté anglophone.

M. CLOUTIER: ... se situe. M. LEGER: Non.

M. CLOUTIER: Je vous l'avais dit que cela viendrait.

M. LEGER: C'est de trouver une solution linguistique pratique — c'est-à-dire faire semblant de légiférer — et adaptée à un milieu donné et le milieu donné est le milieu anglophone, qui contribue à l'élection du parti ministériel.

M. BOURASSA: A l'ordre, M. le Président! Votre temps est écoulé.

M. LEGER: Comme mon temps est presque terminé, je pourrai continuer tantôt à l'occasion...

M. BOURASSA: ... d'un autre amendement?

M. LEGER: Non. Mais de l'article 1. La motion du ministre. Est-ce que quelqu'un a parlé d'une motion?

M. BOURASSA: Je n'ai pas d'objection aux propos du député de Lafontaine. C'est le plus comique des six.

M. LEGER: Ah! Au moins on va s'amuser.

Vous savez que les gens sévères ne sont pas nécessairement sérieux, mais les gens peuvent rire en disant des choses sérieuses.

M. BOURASSA: Cela fait partie du spectacle.

M. LEGER: Je me réserve, à l'occasion de la suite de ce débat, soit sur la motion principale du ministre de l'Education ou en d'autres circonstances, de continuer sur cette préoccupation de trouver une solution linguistique pratique adaptée à un milieu donné, essayer de voir le contexte et les solutions pratiques de quelque côté de la table qu'on se place.

Je termine. Je ne veux pas priver les députés ministériels de la brillante intervention du député de Maisonneuve qui donnera une suite définitive à cet amendement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. HARDY: Est-ce qu'on peut lui demander de donner suite à vos propos?

M. DESJARDINS: Article 96. Je veux rétablir des faits soulevés par le député de Lafontaine, qui a mal rapporté les propos que j'ai tenus samedi dernier...

M. LEGER: Aujourd'hui.

M. DESJARDINS: Samedi dernier. Mais je pardonne facilement au député de Lafontaine, je lui dis à l'avance que ce n'est pas sa faute. Je ne voudrais pas que vous croyiez que ce sous-amendement est mon idée, selon les propos tenus par le député de Lafontaine. Au contraire! J'ai dit que, samedi dernier, c'est le député de Maisonneuve qui est venu se placer en face de moi, juste ici, et qui m'a incité à présenter un sous-amendement et j'ai refusé à ce moment. J'ai ajouté aujourd'hui qu'à ce moment le Parti québécois, dans sa poche de derrière, dissimulait déjà le sous-amendement qu'il nous présente aujourd'hui. C'est ce que j'ai dit, pas autre chose. Une chance que nous avons cet article 96.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve, sur la motion d'amendement du député de Lafontaine.

M. BURNS: M. le Président, je suis très heureux qu'il me reste cinq minutes.

M. CLOUTIER: Non, il avait deux minutes tout à l'heure.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Cinq minutes.

M. CLOUTIER: C'est de la génération spontanée.

M. BURNS: Cinq minutes, n'est-ce pas, M. le Président...

M. LESSARD: C'est le ministre de l'Education qu'est "time-keeper".

M. BURNS: ... pour simplement mentionner au gouvernement quelle était l'intention de l'Opposition derrière l'amendement à l'article 1. Encore une fois, il s'agit, de notre part, d'une suite logique qui a commencé, à mon avis, lors de la discussion du préambule ou, si vous voulez, de la motion pour différer l'étude du préambule après l'étude de l'article 1.

Je vois, M. le Président, que je vais avoir un gros succès avec mon intervention. Ni le premier ministre, ni le ministre de l'Education ne m'écoutent.

DES VOIX: Ni le chef de l'Opposition.

M. BURNS: Le chef de l'Opposition, il n'y a pas de problème; il est déjà convaincu.

M. DESJARDINS: Nous vous écoutons, ce bout-ci.

M. BOURASSA: Je me demandais si vous aviez un autre amendement après celui-là et on m'a dit que oui. Alors, c'est le "filibuster" qui continue. Vous voulez la guillotine, on le sait.

M. BURNS: Non, ce n'est pas cela. M. BEDARD (Chicoutimi): Non.

M. BURNS: II n'y a pas de problème, mais, si je dois parler ici pour tenter de convaincre deux ou trois ministres, je pense que ce sont le premier ministre, le ministre de l'Education et...

M. CHARRON: Le "foreman".

M. BURNS: ... comme le dirait le député de Saint-Jacques, le "foreman" des Affaires culturelles.

M. HARDY: Le dépit ne mène à rien.

M. BURNS: M. le Président, il n'y a pas de dépit. Le ministre le sait, je l'ai dit avec un sourire.

M. HARDY: Je ne parle pas de vous; je parle de votre jeune collègue.

M. BURNS: Même mon jeune collègue n'a aucun dépit lorsqu'il dit cela.

M. BOURASSA: Vous donnez un bon "show" pour les touristes.

M. BURNS: II y croit, cependant, lorsqu'il dit cela.

M. LESSARD: Cela vous monte à la tête d'être ministre des Affaires culturelles.

M. BURNS: M. le Président, je disais que nous avons tenté...

M. HARDY: Vous n'avez jamais ce problème, vous.

M. BURNS: ... à plusieurs reprises...

M. LESSARD: Non, j'aime autant, si c'est pour faire comme Jean-Noël Tremblay.

M. DESJARDINS: M. le Président, le député de Saguenay interrompt le député de Maisonneuve.

M. LESSARD: Ce n'est pas le député de Saguenay qui a commencé à intervenir, M. le Président ; c'est le ministre des Affaires culturelles qui intervient à la Jean-Noël Tremblay continuellement.

M. DESJARDINS: Question de règlement, M. le Président. Le député de Saguenay interrompait le député de Maisonneuve. Je vous demanderais de dire au député de Saguenay de continuer à lire son journal et de laisser le député de Maisonneuve parler.

M. LESSARD: Que le ministre des Affaires culturelles, qui ne s'occupe pas de ses problèmes, laisse le député de Maisonneuve parler.

M. MORIN: C'est très brillant comme intervention !

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Maisonneuve.

M. LESSARD: Occupez-vous donc du Hilton! Allez donc vous occuper du Hilton! Encore là, vous avez trompé les Québécois.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Donnez nos ressources naturelles aux Américains. Donnez toutes nos affaires aux Américains. C'est ce que vous faites; continuez comme cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: C'est ce que vous allez avoir réussi plus que Jean-Noël Tremblay, par exemple. C'est ce que vous aviez dit au programme "appelez-moi Lise"?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable député de Maisonneuve, sur la motion d'amendement du député de Lafontaine.

M. LESSARD: II a la danse de Saint-Guy.

UNE VOIX: Votre collègue lit le journal à côté.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pourrais-je faire remarquer au député de Maisonneuve qu'il a demandé cinq minutes de temps? Cela fait six minutes de cela. Je n'ai pas l'impression qu'il a commencé.

M. BURNS: M. le Président, j'ai parlé à peu près 30 secondes jusqu'à maintenant.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y.

M. BURNS: Je pense que c'est une règle parlementaire bien reconnue que, lorsque les interruptions ne sont pas provoquées par l'opinant, cela ne doit pas lui être enlevé de son temps.

M. HARDY: Même si c'est provoqué par son collègue.

M. BURNS: Je pourrais provoquer. Je pourrais dire au ministre qu'il est "ci" ou "ça", mais je ne le ferai pas.

M. HARDY: C'est votre collègue qui vous interrompt.

M. BURNS: Non, c'est le premier ministre qui a interrompu, tout simplement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, je disais que nous avons, à plusieurs reprises, tenté de convaincre le gouvernement d'y aller vraiment avec beaucoup de précautions quant à l'adoption de l'article 1. Nous avons tenté, dans un premier temps, de différer l'étude du premier article après l'étude du préambule. Ceci nous a été refusé. Je pense que nous avons quand même donné un grand nombre d'arguments en faveur d'une telle attitude. Je n'y reviendrai pas, M. le Président.

Nous avons, dans un deuxième temps, mentionné que l'article 1 devrait être amendé en ajoutant le mot "seule" après le mot "la" pour que cela donne "la seule langue officielle". On sait ce qui est arrivé à cet amendement. Encore une fois, il a été défait.

Finalement, M. le Président, dans un troisième temps, toujours pour signaler l'importance du geste qu'on s'apprête à poser en votant pour ou contre l'article 1, nous avons pensé, au moins, à donner le signal d'alerte, à allumer le feu rouge quant à l'application, je dirais même quant à l'applicabilité du projet de loi.

Dieu sait qu'on en a parlé de l'applicabilité dans les motions préliminaires, sans aucune référence à quelque intention que le premier ministre veut nous imputer depuis deux ou trois jours. Chaque fois qu'il nous les impute, il nous

menace de la guillotine, du bâillon et de tout ce que vous voulez.

M. BOURASSA: Je sais que vous voulez retourner au lac Simon. Je le sais, c'est évident pour tout le monde.

M. BURNS: Si vous pensez que c'est cela, que est-ce que vous voulez, je ne peux pas vous l'enlever de la tête. Je vous dis que je suis ici pour l'été; je suis ici pour l'automne, s'il le faut. Il n'y a pas de problème. Il n'y a aucun problème. On n'est pas pressé. La meilleure preuve, c'est que les députés qui ont été présents samedi, totalement, au point de vue groupe, ce furent les députés de l'Opposition. Il y avait six députés de l'Opposition officielle, alors qu'il y avait 91 députés gouvernementaux qui étaient en vacances. Nous, nous n'étions pas en vacances samedi.

M. BOURASSA: Vous avez assez hâte qu'on l'impose.

M. BURNS: On était ici, tous les six.

M. BOURASSA: Vous avez assez hâte qu'on l'impose. On a le goût de la retarder pour vous punir.

M. BURNS: Où étaient-ils vos 91 députés? Où étaient-ils? Vous avez voté...

M. BOURASSA: Vous avez assez hâte qu'on l'impose qu'on a le goût de la retarder pour vous punir.

M. BURNS: Continuez. Vous avez peur.

M. LESSARD: Vous avez peur pour la retenir.

M. BURNS: Vous avez peur. Je dis tout simplement, M. le Président, que devant un certain nombre d'arguments — je l'ai mentionné dans mon autre intervention — il est possible qu'on en soit venu à cet amendement qui fut proposé par le député de Saint-Jacques un peu plus loin. Mais, seulement pour vous montrer notre bonne foi dans ce débat, on a proposé l'amendement du député de Saint-Jacques concernant l'usage de l'anglais qui pourra continuer — selon l'amendement qu'on vient juste de défaire — à avoir cours dans les débats à l'Assemblée nationale, dans les témoignages et les plaidoiries devant les tribunaux. Encore une fois, toujours dans ce désir de vous faire comprendre que nous sommes à l'article central du projet de loi no 22, que nous sommes à l'article où véritablement il y a une situation de non-retour. Si vous l'adoptez dans cette forme, comme vous avez refusé nos amendements et avec les arguments que vous avez utilisés, il est évident que le gouvernement ne veut pas véritablement adopter une loi...

M. BOURASSA: Le temps est écoulé, à l'ordre!

M. BURNS: Laissez-moi terminer, ce ne sera pas long. Cela vous fatigue?

M. BOURASSA: Pas du tout!

M. BURNS: Si cela ne vous fatigue pas, laissez-moi continuer.

M. BOURASSA: Quand même, on veut faire la preuve de ce que vous voulez faire.

M. BURNS: Vous n'écoutez même pas ce que je suis en train de dire et c'est peut-être parmi les choses les plus sérieuses que j'aie dites dans le présent débat.

M. BOURASSA: Cela fait 10 fois que vous le dites.

M. BURNS: C'est la première fois que je le dis. Il y a peut-être de mes collègues qui l'ont dit, mais moi je le dis.

M. BOURASSA: Le perroquet!

M. BURNS: Non, pas le perroquet. Sûrement pas! Vous, vous êtes en train de devenir "radoteux". C'est une autre affaire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît, dans les galeries!

M. BURNS: Je veux simplement terminer avec ceci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Rapidement, il reste 30 secondes. Le temps est écoulé.

M. BURNS: M. le Président, écoutez...

M. LESSARD: II reste 30 secondes et cela fait une minute que le premier ministre tente de l'arrêter.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Maisonneuve.

M. LESSARD: Comment à l'ordre? Je soulève une question de règlement, M. le Président. Vous venez de le confirmer...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Il n'y a pas de question de règlement; je l'ai tranchée. Le temps est écoulé.

M. LESSARD: Je soulève une question de règlement en vertu de l'article 39 et des suivants.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. LESSARD: Je soulève une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Il n'y en a pas de question de règlement.

M. LESSARD: Vous ne le savez pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Qu'est-ce que c'est, votre question de règlement? Qu'il a été interrompu par le premier ministre et ainsi de suite?

M. LESSARD: Vous ne le savez pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Oui, je le sais. Le député de Maisonneuve a commencé à parler à 9 h 41.

M. LESSARD: C'est de la présomption. Je soulève une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. LESSARD: II n'y a pas de "à l'ordre"; je soulève une question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Laquelle? M. LESSARD: Attendez, je vais la soulever.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Allez-y. Je vous attends.

M. LESSARD: Bon. M. le Président, vous avez confirmé...

M. BOURASSA: Quel spectacle!

M. LESSARD: ... la question de règlement sur le droit de parole du député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT (M. Gratton): En vertu de l'article 43, je suis suffisamment éclairé...

M. LESSARD: C'est faux, l'article 43.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... sur la question de règlement et je prononce tout de suite que ma décision est rendue.

M. LESSARD: Non. L'article 43, attendez un peu.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LESSARD: Prenez votre temps. Je soulève une question de règlement, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Laquelle?

M. LESSARD: ... en vertu de l'article 39 et vous allez me laisser le droit de m'exprimer sur ma question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Qu'est-ce que c'est, la question de règlement?

M. LESSARD: Je vais la soulever, ma question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Qu'est-ce que c'est la question de règlement?

M. LESSARD: En vertu de l'article 40, M. le Président.

M. HARDY: Bon, les articles 39, 40, 41, 42, allez-y donc pour 45.

M. LESSARD: En vertu de l'article 40, M. le Président. "Un député peut, en tout temps, signaler une violation du règlement. Mais il doit le faire sans retard en se limitant rigoureusement dans son exposé au point soulevé". L'article 39 aussi: "II est du devoir du président d'attirer immédiatement l'attention sur toute violation du règlement, sans attendre qu'elle lui soit signalée, mais sa juridiction ne s'étend pas sur des paroles prononcées hors de la Chambre". Or, vous avez confirmé que le député de Maisonneuve avait encore 30 secondes alors que le premier ministre, qui n'est pas "timekeeper", à ce que je sache, a enlevé...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M.LESSARD: ... le droit de parole au député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, à l'ordre!

M.LESSARD: C'est ça ma question de règlement et vous me laisserez, à l'avenir, soulever mes questions de règlement tel que je l'entendrai.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur votre question de règlement, je vais vous expliquer ce qui est arrivé.

M. BOURASSA: "Time-keeper".

LE PRESIDENT (M. Gratton) : C'est que le temps du député de Maisonneuve...

M.LESSARD: Le "time-keeper" n'est pas là.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... est terminé depuis longtemps...

M. BOURASSA: Ce n'est pas français.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... mais je lui accorde 30 secondes dans mon désir de laisser tout le monde...

M. LESSARD: Ce n'est pas ça que vous avez dit.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si vous aviez écouté, peut-être auriez-vous compris.

M. LESSARD: J'ai écouté, ce n'est pas ça que vous avez dit. Vous avez dit: II vous reste 30 secondes.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Maisonneuve, 30 secondes pour terminer. A l'ordre.

M.BOURASSA: "Time-keeper" n'est pas français.

M. HARDY: Lisez donc votre journal!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. HARDY: Le soleil vous a importuné cet après-midi.

M. BURNS: M. le Président, je ne veux pas commencer la chicane à cette commission, ce qui arrive...

M. BOURASSA: Tartufe, tartufe.

M. BURNS: Je ne veux pas être l'objet d'une chicane, alors je vais terminer, M. le Président...

M. HARDY: ... consentement.

M. BURNS: ... avec une seule phrase et, véritablement, je termine avec ceci: Je pense...

M. BOURASSA: Cela va applaudir.

M. BURNS: ... non, ça n'applaudira pas.

M. BOURASSA: Donnez le signal.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS; Non, non, je pense, écoutez, si vous donnez le signal, ça va peut-être partir parce que ça va partir autrement. Si vous voulez continuer à chercher les plats pour mettre vos pieds dedans, c'est votre problème à vous. C'est à vous, le problème. Et si on veut, nous, de l'Opposition, vous éviter peut-être la plus grande erreur de votre carrière politique, c'est notre problème à nous.

M. BOURASSA: Quelle générosité!

M. BURNS: On vous dit que vous êtes en train de faire un "flop" monumental avec votre projet de loi.

M. BOURASSA: Comme la consigne d'annulation.

M. BURNS: On est en train de vous dire que vous faites la plus grave erreur politique que le

Québec n'aura jamais vue en tentant de bousculer, de "bulldozer", de "railroader", si vous le voulez, dans la langue du bill 22, votre bill 22. C'est ça qu'on est en train de vous dire. Pensez-y avant de l'adopter comme ça et pensez-y avant de refuser les amendements que l'Opposition vous propose. Ce n'est pas dans l'intention que l'Opposition ait raison, M. le premier ministre, parce qu'on ne fonctionne pas comme ça; vous, peut-être que vous fonctionnez selon les termes: II faut que le gouvernement ait raison. J'ai été élu, il faut que je passe mon bill et il faut surtout que je le passe pendant qu'il y a le moins de monde possible qui regarde. Nous, on vous dit que ce n'est pas ça. On vous dit que vous êtes en train de juger de l'avenir, avec votre majorité — votre majorité obtenue on sait comment — vous êtes en train de décider de l'avenir des Québécois.

M. HARDY: ... radier personne.

M. BURNS: Vous jouez avec quelque chose de drôlement important et le bill 22, si vous adoptez l'article 1 dans cette forme, va vous coller vous savez où, M. le Président, il va vous coller...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, à l'ordre!

M. BURNS: ... où le bill 63 a collé à d'autres.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le vote sur la motion d'amendement du député de Lafontaine. M. Bérard? M. Charron?

M. CHARRON: En faveur, M. le Président. LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Veilleux? M. VEILLEUX: Contre. LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Cloutier? M. CLOUTIER: Contre. LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Hardy? M. HARDY: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Lapointe?

M. LAPOINTE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Lachance?

M. LACHANCE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Morin?

M. MORIN: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Desjardins?

M. DESJARDINS: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : M. Phaneuf?

M. PHANEUF: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Mercier?

M. MERCIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): M. Samson? M. Cornellier?

M. CORNELLIER: Contre.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pour: 2 Contre 9. La motion est rejetée.

M. DESJARDINS: On revient à la motion principale.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que la commission est maintenant prête à se prononcer sur la motion du ministre de l'Education?

M. MORIN: M. le Président, il me restait un temps de parole considérable sur la motion elle-même et j'entends en profiter pleinement.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition, sur la motion du ministre de l'Education.

M. MORIN: Merci, M. le Président. Nous avons voulu proposer au parti gouvernemental de clarifier l'article premier dans le sens des déclarations du premier ministre, qui, à plusieurs reprises depuis quelques semaines, a dit aux Québécois que ce projet de loi aura pour effet de faire de la langue française la seule langue officielle. Nous avons tenté de le prendre au mot parce que nous le croyons de bonne foi. Et, jusqu'à nouvel ordre, nous tentons de croire en sa bonne foi. Aussi avons-nous présenté ce premier amendement qui ajoutait le mot "seule", après l'article "la", dans l'article premier.

Le premier ministre et, il fallait s'y attendre, tout le groupe des libéraux qui font partie de cette commission ont refusé notre amendement alors que c'était la chose la plus logique du monde. Comme si "la", c'était la même chose que "la seule". Le bon sens nous dit que ce n'est pas la même chose et le droit constitutionnel nous le démontre amplement.

C'est d'ailleurs pour cela, parce que le premier ministre trompe les Québécois quand il leur dit que ce bill va faire de la langue française la seule langue officielle, c'est pour cela que vous avez battu cet amendement.

J'ai l'impression, comme je le disais l'autre jour au ministre des Affaires culturelles, que sa définition de l'article "la" sort tout droit du petit Robert. Comme vous avez voté contre vos présumées convictions, nous avons donné une seconde chance de concilier vos propos avec le droit...

M. HARDY: Une telle générosité.

M. MORIN: ... en proposant que cesse de s'appliquer l'article 133. Je prie le premier ministre de bien écouter ce que j'ai à dire, car c'est important.

M. BOURASSA: Vous êtes tellement généreux, vous voulez toujours nous aider.

M. MORIN: Oui, précisément, aider les Québécois; vous aider, c'est douteux que nous le puissions.

M. BOURASSA: Oui.

M. MORIN: Je pense que nos objectifs ne sont pas tout à fait les mêmes pour l'avenir du Québec.

M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve, durant dix minutes tantôt, a dit qu'il voulait nous aider, nous renforcer...

M. MORIN: Oui, vous aider à réaliser les aspirations des Québécois.

M. BOURASSA: Comme si 102 députés ce n'était pas assez.

M. MORIN: C'est ce que nous tentons de faire, vous aider à agir en faveur des Québécois.

M. BOURASSA: Ah oui !

M. MORIN: Mais vous êtes si peu prédisposé à le faire que nous avons vraiment l'impression de nous cogner à un mur de béton.

M. BOURASSA: II n'y a jamais un gouvernement qui est allé plus loin que nous.

M. MORIN: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Nous avons voulu proposer une seconde chance en faisant une motion disant que cesse de s'appliquer l'article 133 au Québec, et vous l'avez repoussée également.

J'entends maintenant proposer un amendement, entièrement conforme cette fois-là à vos idées. Un amendement que vous ne pouvez pas logiquement refuser...

M. BOURASSA: Une copie, M. le Président.

M. MORIN: ... enfin, que vous ne pourrez pas refuser si vous êtes conséquent avec vous-même.

M. BOURASSA: Merci.

Motion d'amendement à l'article 1

M. MORIN: Je propose donc que l'article premier soit amendé en ajoutant à la fin, la phrase suivante — et je pense que le premier ministre, qui est juriste, qui s'est frotté au droit en tout cas, pourra peser chacun des mots: "Nonobstant l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, nulle autre langue n'a de statut officiel".

M. BOURASSA: Vous continuez à jouer avec les mots.

M. MORIN: C'est vous qui jouez avec les mots.

M. LEGER: C'est significatif.

M. HARDY: Des exercices de réthorique.

M. MORIN: M. le Président, la différence entre cette motion et la première n'aura pas échappé aux juristes que sont le premier ministre et le ministre des Affaires culturelles. La première motion écartait les effets juridiques de l'article 133 sur le territoire québécois. Elle disait que cessait d'avoir effet l'article 133. Notre nouvelle tentative de répondre au voeu apparent du premier ministre est plus subtile et je pense qu'elle sera sûrement acceptable aux gouvernementaux, plus acceptable en tout cas que la première. Elle utilise la formule de la loi manitobaine de 1890, à peu de chose près.

M. DESJARDINS: Question de règlement.

M. MORIN: Est-ce que vous voulez me poser une question?

M. DESJARDINS: Non. Nonobstant votre discours, pourriez-vous répéter, s'il vous plaît, l'amendement?

M. MORIN:"Nonobstant l'article 133...

M. LEGER: M. le Président, j'espère que cela ne comptera pas sur le temps du député de Sauvé, qui a besoin de tout son temps. Il faut le répéter parce qu'un député n'écoutait pas.

M. DESJARDINS: S'il a besoin de son temps, laissez-le parler. Voulez-vous le répéter, s'il vous plait?

M. MORIN: Cela ne compte pas sur mon temps de parole, M. le Président. "Nonobstant l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867...

M. DESJARDINS: Ah! Ah!

M. MORIN: nulle autre langue...

M. DESJARDINS: Dans votre cas, c'est point de suspension.

M. MORIN: n'a de statut officiel". Fermez les guillemets.

M. DESJARDINS: Vous vous appelez guillemets?

M. MORIN: M. le Président...

M. CHARRON: Le voulez-vous en anglais aussi?

M. DESJARDINS: Oh! Oh!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: Je n'ai pas cru bon d'en faire une traduction anglaise, mais j'imagine que le premier ministre doit être capable de le faire, si le député le désire.

Cette motion, M. le Président, utilise cette fois le langage, les termes de la loi intitulée: "An Act to provide the English language shall be the official of the province of Manitoba, 1890", la loi qui a aboli l'usage de la langue française au Manitoba.

Vous avez dit que vous ne vouliez pas abroger l'article 133, que vous vouliez même qu'il continue de s'appliquer au Québec. Cette formule permet à l'article 133 de continuer de s'appliquer au Québec mais elle permet d'en restreindre le sens en ajoutant que nulle autre langue que le français n'aura de statut officiel.

Vous pouvez, de la sorte, réconcilier votre désir de conserver l'article 133 et celui de faire du français la seule langue officielle. Je tiens pour acquis que le premier ministre veut toujours faire du français la "seule" langue officielle, même s'il a refusé le premier amendement du Parti québécois. La nouvelle solution est plus précise; elle est plus subtile que la première et elle a pour avantage d'ajouter que nulle autre langue n'a de statut officiel, ce que ne disait point la première proposition. Même si l'article 133...

M. BOURASSA: Elle est plus habile, celle-là.

M. MORIN: Elle est plus précise. Elle est plus fine, sûrement.

M. BOURASSA: Plus sournoise.

M. MORIN: Non, je ne vois pas pourquoi vous le prenez comme cela. Nous tentons de répondre à vos désirs, M. le premier ministre, ceux dont vous avez fait part à tout le monde. Même si l'article 133 continue de s'appliquer au Québec, il ne confère point, pour autant, d'après cette motion, de statut officiel à la langue anglaise. Si le ministre veut bien se référer à la Loi du Manitoba, au chapitre XIV des lois de 1890, il verra que c'est la formule subtile que cette province a utilisée pour

empêcher que la langue française puisse demeurer officielle au Manitoba.

Le ministre nous a dit que la langue anglaise n'a pas de statut officiel au Québec. Je l'ai entendu dire cela. Eh bien! voilà l'occasion de le dire clairement. Merci, M. le premier ministre.

M. BOURASSA: Cela crève les yeux dans le texte de loi.

M.HARDY: Vote!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, c'est encore une fois un effort que l'Opposition fait pour tenter de réduire de plus en plus le corridor de l'attitude gouvernementale. Soyez certain que ce n'est pas inutile que nous le fassions. Dans mes brèves remarques sur l'amendement qui a été défait il y a quelques secondes, je vous mentionnais les étapes que nous avons suivies. Je vous mentionnais jusqu'à quel point nous avons, d'une part, commencé du général pour nous rendre au particulier. Dans le fond, c'est cela que je vous disais tout à l'heure. On se rend compte de plus en plus que nous nous rendons au particulier.

Permettez-moi, sur le sens de l'article 133, de vous citer justement ce M. McWhinney que, par voie de proposition, nous aurions voulu inviter si le gouvernement avait accepté. Vous me pardonnerez de le citer en anglais. Je n'ai pas de traduction française. Cela ne choque pas le premier ministre que je le cite en anglais?

M. BOURASSA: Votre accent est très agréable à entendre.

M. BURNS: Je vois, M. le Président, dans son document qui s'intitule "Opinion on bill 22", à la page 2, au tout début... Vous avez le droit de le citer à vos fins, comme moi, j'ai le droit de le citer à mes fins, n'est-ce pas, M. le ministre?

M. BOURASSA: D'accord.

M. CLOUTIER: ... aux mêmes fins, allez-y.

M. BURNS: Oui, et je cite le professeur McWhinney lorsqu'il dit: "Examined on this basis, as a simple exercice in statutory (constitutional) interpretation, without any ideological preconceptions one way or other, it is remarkable how clear and concise section 133 of the BNA Act is. It is not a definition of "official language" as such; and that would, in any case, have been alien to the approach of British legislators in 1867, who were not, after all, engaged in the drafting of abstract dictionary definitions but in articulating rules or guide-lines for solving concrete problems or shaping and controlling legislative action for the future."

M. le Président, il me semble que toute notre réaction depuis le début, relativement à l'article 1, se trouve résumée dans cette opinion d'un constitutionnaliste de réputation. Je pense que personne ne conteste — même si on conteste les conclusions auxquelles il peut arriver — la valeur de M. McWhinney comme constitutionnaliste. D'ailleurs, nous étions tellement d'accord que, dans l'une de nos propositions, M. Edward McWhinney figurait en tête de liste parmi les experts que nous voulions inviter à la commission pour nous éclairer en matière constitutionnelle. Ce qui nous incite à dire qu'il est nécessaire dès l'article 1 — c'est peut-être la deuxième reprise, mais dans une formule différente, encore une fois, dans cet objectif que je vous mentionnais tout à l'heure, de partir du général pour nous rendre au particulier le plus possible. C'est la deuxième reprise où nous vous invitons à clarifier, je dis bien, l'impact de l'article 133 concernant les dispositions de l'article 1.

Il est évident que tôt ou tard, si vous ne voulez pas tenir cette discussion à cette commission, cette discussion va avoir lieu. Il y a des gens qui vont se dire: Est-ce que l'article 133, selon l'expression anglaise, "supersedes the provisions of bill 22"? C'est une des questions qu'ils vont se poser. Je pense que le chef de l'Opposition a été très clair là-dessus. A plusieurs reprises, il vous a mis en garde. Nous vous remettons en garde d'une façon différente. J'aime bien à ce moment vous signaler la différence qu'il y a entre les deux textes. Au début, nous disions: L'article 133 cesse d'avoir effet en ce qui concerne les pouvoirs de la Législature du Québec. Comme vous avez refusé cet amendement, on a pensé aller moins loin, en diminuant la portée de notre amendement, en vous disant que, malgré les dispositions de l'article 133, aucune autre langue n'a de statut officiel.

Vous devinez tout de suite, M. le ministre, qu'à moins qu'on nous y provoque une seconde fois, soit au moment de l'étude des articles particuliers, on devra, parce qu'on a exprimé notre opinion par le sous-amendement tout à l'heure, préciser en plus de cela certains droits individuels, que nous ne nions pas. Que ce soit bien clair dans l'esprit de tout le monde, nous ne nions pas au député de Sainte-Anne, par exemple, le droit de parler anglais à l'Assemblée nationale quand bon lui chante. Nous ne nions pas à John Doe le droit de s'exprimer en anglais devant quelque tribunal que ce soit, si M. John Doe pense que c'est dans cette langue qu'il va se faire entendre. Il est important, cependant, de clarifier ce problème relativement à l'article 133, qui peut paraître aux yeux de beaucoup de gens comme une pure et simple technicité. Or, ce n'en est point une. C'est justement une des pierres d'achoppement comme le cas des fameux comtés protégés qui étaient prévus dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Pendant des années, un débat a eu lieu sur les fameux comtés protégés; pour n'en citer que quelque-uns: Missisquoi, Brome et tous les autres, qui à l'origine existaient en vertu d'une disposition de l'Acte de l'Amérique britannique du Nord, jusqu'au moment où un gouvernement, et c'est le vôtre, M. le ministre, a eu le courage de légiférer dans une matière qui apparaît à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, c'est-à-dire par le projet de loi, je pense que c'était 80 à ce moment. De toute façon, c'était le projet de loi qui a précédé la réforme électorale.

Tout le monde sait que la réforme électorale n'était pas possible, aucune réforme électorale sérieuse n'était possible, à moins de l'abolition de ces fameux comtés protégés qui, à l'origine, étaient des comtés anglophones et qui, au fur et à mesure des années, sont devenus des comtés comme les autres où des francophones se sont adjoints. Je pense au comté de Sherbrooke, par exemple. Même si ce sont des zones, comme le professeur Castonguay les qualifie, anglicisantes, je pense au comté de Hull, je pense même au comté de Gatineau, je pense au comté, M. le Président, de Shefford, qui sont maintenant des comtés à majorité anglophone où il y a une grande proportion d'anglophones, je l'avoue. Mais pourquoi, M. le Président, avons-nous — et j'en prends à témoin le ministre des Affaires culturelles qui a participé à toutes ces discussions — réussi la réforme? Quand je dis "avons-nous"' c'est parce que nous avons appuyé le gouvernement clairement en ce domaine. Le gouvernement a pris une position qui était normale, qui était celle d'un gouvernement qui prend ses responsabilités.

On vous demande de les prendre au niveau de l'article 133. On vous demande de déclarer, dès l'article 1 de ce projet de loi, que vous avez l'intention d'exercer, dans tous les domaines possibles... Quand je dis possibles, je veux dire dans tous les domaines où vous ne voulez pas brimer des droits individuels. Je reviens à notre argument de tout à l'heure. Dans tous ces domaines, il faut que vous affirmiez, comme gouvernement, que vous êtes le gouvernement des Québécois et non pas un gouvernement téléguidé par Ottawa non pas un gouvernement qui se retrouve dans une situation de se faire menacer, à tout bout de champ, soit d'en référé à la cour Suprême, soit d'un désaveu, soit encore, M. le Président, d'une non-applicabilité de sa loi.

C'est cela qu'il est important, dès l'article 1, de poser comme problème et de le poser clairement. Il ne faut pas s'imaginer, avec tout ce bagage historique, toutes ces frustrations historiques que nous tramons derrière nous, que c'est facile de légiférer en matière de langue. D'accord, l'Opposition admet cela ouvertement que ce n'est pas facile de légiférer en matière de langue. Jamais, M. le Président, nous n'avons dit que c'était une sinécure de le faire. Tout ce que nous avons dit, c'est qu'il fallait user de virilité, au sens législatif du mot, lors de l'adoption d'une telle loi. Il s'agit d'être clair. Il s'agit de laisser entendre, à qui veut l'entendre, où on veut aller.

M. le Président, encore une fois, je me référerai au professeur Castonguay, simplement pour vous dire qu'il est temps qu'une fois pour toutes on dise ce qu'on veut faire avec ce projet de loi. Au fur et à mesure que nos amendements arrivent, ils sont de plus en plus dilués pour des raisons bien simples, M. le Président, c'est que nous vous les apportons d'une façon telle que nous partons, comme je le disais tout à l'heure, du général au particulier. De plus en plus, on est obligé, pratiquement, de plaider auprès du gouvernement de ne pas se placer dans une situation où sa propre loi va devenir inefficace. Au début, on pouvait vous dire: Si vous ne faites pas cela, vous n'avez pas de loi, et on en est toujours convaincu, M. le Président.

Mais, plus cela va, au fur et à mesure qu'on réduit la portée de nos amendements, on est en train de vous dire: Vous n'avez presque plus de loi. Ce qui est bien différent. Encore, M. le Président, si on était convaincu, tous ensemble, qu'il ne se posait pas de problème; encore, M. le Président, si on ne pensait pas que, tous ensemble, on a un but commun. Du moins, j'espère que c'est le but du gouvernement. Si ce n'est pas le but du gouvernement, j'aimerais qu'on nous le dise. Mais, depuis le début qu'on entend le gouvernement dire: II est temps et passons aux actes. Allons au fond des choses.

On vous dit, nous aussi: Allons au fond des choses. Je vous mentionnais que, s'il n'y avait pas de problèmes sur le plan linguistique au Québec, on ferait comme n'importe quel autre pays souverain, c'est-à-dire qu'on ne se casserait pas la tête pour légiférer en matière linguistique. Je citais...

M. HARDY: Cela n'a rien à voir avec la souveraineté.

M. BURNS: ... le cas de la France, je citais le cas de l'Angleterre, je citais le cas des Etats-Unis qui, pourtant, n'ont aucune espèce de problème, n'ont aucun problème en matière linguistique. Pourtant...

M. HARDY: Le député me permet-il une question?

M. BURNS: Oui, je vous permets une question.

M. HARDY: Le député de Maisonneuve reconnaîtra avec moi que cela n'a rien à voir avec la souveraineté. C'est une question sociologique de composition d'une collectivité. Il y a des pays aussi souverains et qui ont besoin de légiférer.

M. BURNS: Qui sont souverains et qui ont des problèmes linguistiques. Je suis d'accord.

M. HARDY: Ce n'est pas lié à la souveraineté.

M. BURNS: Je dis qu'il n'y a aucun pays souverain qui, actuellement, sent le besoin de légiférer en cette matière...

M. HARDY: Mais oui.

M. BURNS: ... si, à un certain moment, il n'a pas de problème.

M. HARDY: Ah!

M. BURNS: J'ai toujours dit cela. Je viens de le dire. Je viens tout à fait de le dire et si j'ai utilisé le mot "souverain", c'est que surtout le ministre des Affaires culturelles se fait le chantre de la souveraineté culturelle. Le premier ministre a trouvé celle nouvelle formule tellement ambiguë qu'il n'y a plus personne qui comprend quoi que ce soit. Il n'y a plus personne qui sait ce que vous voulez faire par votre souveraineté culturelle. Avec votre souveraineté culturelle, vous êtes en train de décourager votre actuel ministre des Communications, alors que vous le laissez tomber à toutes les fois qu'il essaie d'aller négocier la récupération de certains pouvoir à Ottawa. Jean-Paul L'Allier, nommons-le par son nom. C'est de lui que je parle. Ce n'est pas un intime à moi. Je ne le connais pas. Je le connais comme ministre et c'est tout, mais seulement à le voir, déprimé, votre ministre des Communications, je me rends compte jusqu'à quel point vous n'y croyez pas à votre souveraineté culturelle. Vous n'y croyez pas du tout et, malgré les haussements de sourcils de l'attaché de presse du ministre de l'Education, qu'est-ce que vous voulez, je suis obligé de continuer à affirmer ce que je dis là. Je vois votre ministre des Communications dépérir. Je vous vois le tasser dans le coin, de jour en jour. Je vous vois le laisser se débrouiller avec des problèmes vis-à-vis d'Ottawa et quand il a tenté de les négocier...

M. HARDY: La motion.

M. BURNS: ... je vous vois le laisser tomber.

M. HARDY: La motion.

M. BURNS: Je vous vois, tous les jours...

M. HARDY: La motion.

M. BURNS: ... faire cela. Alors, parlez-moi de souveraineté culturelle après cela et je vais être impressionné. Revenons à la motion.

M. HARDY: Oui.

M. BURNS: Quand je vois dans des textes — cela ne fait pas plaisir à certaines gens, mais je vais le citer à nouveau — aussi récents que celui de juillet 1974, préparés par le professeur Charles Castonguay ou le docteur Charles Cas-tonguay du département de mathématiques de l'Université d'Ottawa, quand je le vois examiner le problème de la "bilinguisation" des Québécois francophones, quand je vois à quelles conclusions il arrive et quand je vois qu'en même temps, on se retrouve avec une loi de la langue officielle, je me dis — comme je le mentionnais il y a deux jours — que cette loi doit arriver à un effet précis, c'est-à-dire celui de rendre le français indispensable au Québec. A qui veut vivre au Québec, cela doit apparaître comme la langue indispensable. C'est plus que de dire dans un texte : Le français est la langue officielle.

Si cela doit être la langue indispensable, il y a une atmosphère qu'on bâtit autour de cette langue. Il y a quelque chose qui fait que n'importe qui, arrivant au Québec, se dit: C'est la langue qu'on parle dans ce pays, même si vous n'aimez pas l'expression "pays". Je ne peux dire autre chose parce que je sens que le Québec est mon pays. C'est une autre affaire. On pourrait avoir de longues et de belles discussions là-dessus, mais laissez-moi dire : Mon pays, le Québec.

Quand je vois dans le texte du Dr Castonguay la phrase suivante, je ne peux faire autrement que de m'émouvoir, et je cite M. Castonguay: "Bien que formant une minorité numérique, plus de 70 p.c. des anglophones d'origine britannique, de la région de Montréal, sont unilingues anglais. Un même taux d'unilin-guisme prévaut, en général, chez les concentrations anglophones d'origine britannique ailleurs en province". Je saute quelques lignes pour vous rapporter l'autre citation du Dr Castonguay qui nous dit: "Si bien que 50 p.c. de la population francophone active de Montréal est bilingue".

Est-ce que vous avez pensé, M. le Président, à accoler ces deux affirmations qui sont basées sur des études auxquelles le professeur Castonguay a eu accès grâce à une subvention de l'Université d'Ottawa? Est-ce qu'on a pensé deux secondes à mettre simplement côte-à-côte ces deux affirmations?

M. le Président, il y a plus de 70 p.c. des anglophones d'origine britannique de la région de Montréal qui demeurent unilingues anglais et, en même temps, il y a 50 p.c. des francophones de la population active de Montréal qui sont bilingues. Je vais plus loin que cela. Il y a des chiffres assez extraordinaires qui sont cités justement à la page suivante. Tout simplement pour vous dire que ce n'est pas un problème.

Je termine, M. le Président, j'achève; je vous remercie de m'indiquer qu'il ne me reste que quelques minutes.

Dans un tableau qui s'intitule "Rayonnement de l'anglais et du français dans la région de Montréal" on lit ceci: Population d'origine britannique: 440,000 personnes; personnes capables de converser en anglais — regardez bien le chiffre, M. le Président— 1,670,000. C'est pas mal différent de la population d'origine britannique. Il y a quelque 1,200,000 personnes

qui sont capables de converser en anglais et qui ne sont pas d'origine britannique, c'est-à-dire Irlandais, Gallois, Ecossais ou Anglais. Autres statistiques assez intéressantes et qu'il ne faut jamais oublier: population d'origine française, 1,765,000 personnes, toujours dans la région de Montréal; personnes capables de converser en français, 2,180,000. Ce qui prouve l'affirmation du professeur Castonguay, c'est que de plus en plus le milieu francophone — passez-moi l'expression — se "bilinguise" et que de plus en plus le milieu anglophone s'unilinguise. Ce qui permet au professeur Castonguay d'arriver à cette conclusion: Pendant que le nombre de personnes capables de parler français dépasse de peu la population d'origine française, il y a près de quatre fois plus de personnes capables de parler anglais qu'il n'y a de population d'origine britannique. Pourtant, la population montréalaise d'origine française est numériquement quatre fois plus importante que celle d'origine britannique.

M. le Président, ce qu'il faut, par un projet de loi comme celui-ci, c'est quelque chose d'aussi simple que de rendre l'unilinguisme anglais le plus exceptionnel possible, de rendre le français la chose la plus indispensable à manier au Québec, de rendre l'unilinguisme anglais aussi exceptionnel au Québec que l'est l'unilinguisme français en Ontario. Ce n'est pas plus que cela, M. le Président. C'est sur cette base que nous vous proposons de clarifier au moins votre article 1.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine sur la motion d'amendement du chef de l'Opposition officielle.

M. LEGER: M. le Président, à 17 h 55 le premier ministre récidivait et annonçait à la radio que l'article 1, auquel nous proposons un amendement, signifiait que le français était la seule langue officielle. Il récidivait, même s'il avait refusé un amendement bien précis à l'article 1. Le français est la langue officielle du Québec, pour lui, cela voulait dire la seule langue officielle. Nous lui avons proposé de mettre le mot "seule" et il a refusé. Malgré son refus d'accepter notre amendement à l'article 1, ce soir, à 17 h 55, le premier ministre Bourassa réaffirmait à la radio, devant un auditoire assez nombreux, que cela voulait dire quand même que le français était la seule langue officielle.

M. le Président, on ne peut pas laisser le premier ministre être pris en flagrant délit de mensonge officiel. Il faut l'aider à sortir de ce pétrin.

M. HARDY: J'invoque le règlement. Je m'excuse...

M. LEGER: En vertu de quel article, M. le Président?

M. HARDY: En vertu de l'article 63.

M. LEGER: 63 est un chiffre fatidique.

M. HARDY: Je m'excuse auprès du député de Lafontaine. Il y a déjà un bon moment que je m'interroge et j'attendais votre retour pour vous le signaler puisque vous avez présidé les débats pendant toute la journée.

M. le Président, j'invoque l'article 63 et je prétends que la motion telle que présentée, la motion que nous sommes en train d'étudier présentement est irrecevable étant identiquement ou substantiellement la même que cette motion où on proposait d'ajouter le mot "seule" à l'article 1, quand on dit: "Nonobstant l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, nulle autre langue n'a de statut officiel". Dans un cas on disait la seule; là c'est nulle autre. C'est substantiellement la même chose. On reprend, sauf en y mettant un peu plus de détails, en faisant une référence à l'article 133, mais je soutiens que cette référence à l'article 133 ne constitue pas l'essence de cette motion d'amendement. L'essence de cette motion d'amendement c'est toujours de prétendre que l'article 1 n'est pas suffisant en parlant de la langue officielle. On prétend qu'il faut ajouter qu'il n'y en a pas d'autre, que c'est la seule, etc. Donc, substantiellement, M. le Président, cette motion d'amendement est exactement la même qu'une autre motion sur laquelle la commission s'est déjà prononcée.

M. LEGER: Est-ce que le président n'avait pas accepté la recevabilité...

M. HARDY: A tout moment au cours de l'étude d'une motion, le président lui-même ou tout membre de la commission peut invoquer la recevabilité d'une motion.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Pour l'information du député de Lafontaine, je dois avouer que, dès l'annonce ou la motion du chef de l'Opposition officielle, j'ai entretenu des doutes quant à sa recevabilité, compte tenu de deux motions précédentes d'amendement qui avaient été faites par le chef de l'Opposition, soit celle à l'effet de faire du français la seule langue officielle et également celle dont la commission a disposé il y a quelques instants. J'ai l'impression que...

M. BURNS: M. le Président, au contraire, si vous me permettez d'argumenter là-dessus, je reconnais la présence de l'article 63 dans notre règlement; je reconnais également qu'en tout temps au cours du débat, si un moment donné vous vous trouvez devant une motion qui est non recevable, vous pouvez la juger non recevable. Je ne vous cherche pas querelle, M. le Président, là-dessus. D'ailleurs je ne vous cherche jamais querelle. Il est important, cependant, de se placer dans le cadre de l'évolution. J'ai bien parlé d'ailleurs dans mon intervention de l'évolution des motions, et vraiment à dessein.

La première motion, M. le Président, je vous la rappelle, c'était d'ajouter le mot "seule", la seule langue officielle. La seconde, M. le Président, c'était d'ajouter un alinéa à l'article 1 en disant: Aucune autre langue n'aura le statut officiel. La troisième, c'était que l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867 — j'insiste sur les mots — cesse d'avoir effet en ce qui concerne les matières relevant de la Législature du Québec. Et finalement cette quatrième nous dit: Nonobstant l'article 133, nulle autre langue n'a de statut officiel.

M. le Président, il y a véritablement d'une motion à l'autre un changement et vous ne pouvez pas vous baser sur l'article 63 de notre règlement pour nous dire qu'au fond chaque motion est identique. Loin de là, et j'entends vous le prouver. Si la première motion avait été adoptée, je vous le soumets respectueusement et j'en appelle aux connaissances juridiques du chef de l'Opposition pour compléter mon opinion là-dessus, il aurait été nécessaire de clarifier la position de cette loi relativement à l'article 133. Il aurait été nécessaire de le faire soit à l'article 1 ou encore à l'article X, 9, 10, 18, 48, peu importe. Il aurait été nécessaire de le faire et je m'attendais, M. le Président, à ce que vous me disiez, à un moment ou à un autre, que lorsque nous tripotions, si on peut dire, l'article 133... Non. Je le dis sans aucune allusion péjorative, parce qu'évidemment nous touchons et nous retouchons, donc nous tripotons l'article 133.

M. DESJARDINS: Je prends bonne note.

M. BURNS: Je m'attendais que vous disiez, M. le Président, que nous jouions dans un domaine constitutionnel qui vous empêchait d'accepter comme recevable notre motion. Je m'étais apprêté à vous citer cette brillante décision de votre collègue, vice-président de l'Assemblée nationale, le député de Saint-Louis, M. Harry Blank, décision qu'il a rendue — ça fait presque un an jour pour jour, il y a quelques jours de différence — le 5 juillet 1973. Vous retrouverez cette décision à la page 2176. D'ailleurs, le député de Saint-Louis, qui présidait une commission plénière, comme vous présidez, M. le Président, avec les mêmes pouvoirs, une commission élue, nous disait, en citant notre bon vieux règlement — on aurait dû le garder, de plus en plus je suis convaincu de ça — l'opinion que d'autres orateurs — comme on les appelait dans le temps — avaient rendu — à la page 2176, vous retrouvez cette citation que le député de Saint-Louis prend sur lui — "II n'appartient pas au président de décider si une proposition est inconstitutionnelle ou incompatible avec les dispositions déjà adoptées." Je pense, M. le Président, que toute la substance est là. Oui, si vous voulez vérifier. Page 2176 du journal des Débats. Si vous voulez argumenter, vous argumenterez. D'ailleurs, vous allez trouver cette opinion à la page 65, je crois, sauf erreur, si ma mémoire est bonne. Je vais m'en assurer, attendez un peu.

Oui, ça nous aiderait si on travaillait avec les anciens règlements. Ce serait plus clair, on saurait où on s'en va.

M. CLOUTIER: Vous auriez plus de possibilités de motions.

M. BURNS: Oui, il y en aurait plusieurs; oui, il y en aurait plus. M. le Président, je ne suis pas certain que ce soit à la page 65, parce que je m'y réfère et je ne le trouve pas d'emblée. De toute façon, la décision à laquelle je vous ai référé fait mention de cette décision tirée de l'ancien règlement. Tout ceci pour vous dire qu'il est important de voir la progression de chacune de ces quatre motions qui, à première vue, peuvent vous paraître tout simplement identiques. Il y en a une qui dit: "La seule langue officielle; il y en a une autre qui dit "aucune autre langue ne sera officielle". Vous avez accepté cette deuxième et je pense que vous aviez parfaitement raison de l'accepter. Dès ce moment-là, vous auriez pu vous poser la même question que le ministre des Affaires culturelles vous a posée, parce qu'il y avait quand même une relation. C'est sûr qu'il y a une interrelation entre toutes ces motions. Mais nous poursuivons le même objectif, tout en le disant différemment, j'irais même jusqu'à dire en le diluant au fur et à mesure. Puisque vous nous avez dit que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, à l'article 133 — quand je dis vous, c'est la commission — ne devait pas cesser d'avoir des effets quand aux actes de la Législature, nous avons pensé que nous pourrions diluer un peu plus cette motion en vous présentant cette dernière qui ne dit pas que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, article 133, n'a plus d'effet ou cesse d'avoir des effets. On dit tout simplement que, malgré l'existence de cet article 133, nulle autre langue n'a de statut officiel. Ceci est parfaitement en accord avec une loi qui a été adoptée au Manitoba —on vous l'a citée — en 1890 et qui répète, à peu près textuellement ce nonobstant. Je pense qu'on dit "provisions of article 133 notwithstanding", etc., la seule langue officielle du Manitoba est l'anglais. C'est dans cet esprit que je vois mal comment vous pourriez trouver que cette motion n'est pas recevable. J'admets que les distinctions sont ténues de l'une à l'autre de ces motions. J'admets également que toutes visent un même but, ce but étant de préciser la position constitutionnelle du Québec lors de l'adoption du projet de loi 22.

Mais là où je vous dis qu'il y a des différences fondamentales de l'une à l'autre de ces motions, c'est que si la première ou la deuxième motion que nous avons présentée avait été adoptée — et c'est là-dessus que je fais appel au chef de l'Opposition qui s'y connaît davantage que moi en matière constitutionnelle — nous aurions été obligés de préciser notre position relativement à l'article 133.

Or, quant à l'article 133, vous avez deux motions. Une qui dit, d'une part, que cet article cesse d'avoir effet et une autre qui dit tout simplement que, malgré l'existence de l'article 133, il n'y a pas d'autre langue officielle.

Encore une fois, je vous dis qu'il n'est pas certain — et je suis plutôt porté à croire le contraire — qu'on ne devra pas plus tard, soit à cet article-ci ou au cours des articles que nous étudierons, préciser ce qu'on veut dire par "nulle autre langue n'a de statut officiel malgré l'article 133" parce qu'on vous répète à nouveau qu'il n'est pas question de brimer les droits individuels des anglophones. Il n'est pas question d'empêcher, dans notre esprit, un député anglophone de parler en anglais à l'Assemblée nationale. Il n'est pas question d'empêcher un individu qui se présente devant les tribunaux, qui est un justiciable, de parler en anglais devant ces tribunaux, de s'exprimer dans la langue qu'il maîtrise le mieux.

Tout cela pour vous dire, M. le Président, que je ne vois pas comment on pourrait juger non recevable la motion qui est faite actuellement et qui est sur la table, eu égard à cette progression qui a été faite. Et ce ne sont pas — j'insiste là-dessus — des motions identiques au fond. Ce sont des motions qui démontrent une certaine progression, qui touchent au même sujet, mais, que voulez-vous, on est à l'article 1, M. le Président. On parle de la langue officielle du Québec.

M. CLOUTIER: C'est exact.

M. BURNS: On parle de la langue française comme langue officielle. C'est sûr qu'on va toujours toucher au même sujet, tant qu'on ne quittera pas cet article 1.

M. CLOUTIER: Ah bon!

M. BURNS: Oui, mais le ministre de l'Education ne devrait pas être si pressé de quitter, de façon si abrupte, l'article 1, parce qu'on ne cesse de lui répéter que c'est le coeur de son projet de loi. Son projet de loi sera jugé sérieux ou jugé tout simplement comme un panneau-réclame, selon qu'on va préciser les dispositions de l'article 1. Cela, c'est le gros danger.

M. CLOUTIER: II n'y a pas de contradiction dans ce que vous dites.

M. BURNS: Non.

M. CLOUTIER: Parce que vous avez présenté, si ma mémoire est bonne, une motion pour différer l'étude de l'article 1.

M. CHARRON: Ce qui était normal.

M. CLOUTIER: Vous sembliez, à ce moment-là, considérer que l'article 1 ne présentait pas l'importance...

M. HARDY: ... avec coeur.

M. BURNS: Non, c'est tout le contraire. Au contraire, on a dit que l'article 1 était...

M. HARDY: Vous étudiez l'accessoire.

M. BURNS: Ecoutez, révisez, M. le Président. J'invite le ministre de l'Education et le ministre des Affaires culturelles à réviser toutes et chacune de nos interventions lorsque nous avons fait motion pour que soit différée l'étude de l'article 1 après l'étude du préambule.

Ce que nous avons dit à ce moment — et je pense qu'il n'y a aucun des députés qui n'a pas été clair là-dessus, aucun des députés de l'Opposition — l'article 1 est très important, au contraire, c'est la loi, on y consacre un titre. En termes législatifs, un titre, c'est plus qu'un article, c'est plus qu'un chapitre. Quand on dit un titre, c'est une partie de la loi, c'est une partie substantielle de la loi. Dans ce titre-là, le titre I, on retrouve un article et, dans cet article, on retrouve une phrase. C'est à ce point-là qu'on le trouve important, sauf que nous disions — lorsque nous demandions que l'étude de cet article soit différée à plus tard — que le préambule contenait un certain nombre d'énoncés de principes que nous jugions devoir étudier avant d'étudier ce titre, cet article, ce chapitre, cette moitié de loi. C'est uniquement à ce niveau que nous avons fait cette remarque. Et nous pourrions aussi vous dire que l'article, à notre point de vue, est à ce point important qu'il faudra savoir exactement ce qui l'entoure. C'est fort possible, à un moment donné, que la commission décide de préciser ce qui entoure cet article pour qu'on sache ce qu'on adopte à l'article 1.

Mais, quant à la recevabilité, M. le Président, je pense que vous êtes obligé de reconnaître que, dans la forme et dans l'esprit où l'amendement vient d'être déposé ou qui a été déposé depuis quelque temps — puisqu'il y a déjà deux opinants qui ont parlé au sujet de cet article — les mots "nonobstant l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, nulle autre langue n'a de statut officiel", vous êtes obligé de reconnaître que jamais au cours du débat nous n'avons présenté une semblable motion qui avait le poids et les conséquences de cette motion.

On en a présenté certaines qui avaient plus de conséquences que cela, qui, alliées à d'autres amendements, auraient pu avoir de plus grandes conséquences encore. Mais comme telle, dans cette forme-ci et avec les conséquences qu'elle a, cette motion n'a jamais été soumise devant vous et nous ne sommes aucunement répétitifs, loin de nous l'intention d'être répétitif dans ce débat-là. Le ministre de l'Education a beau sourciller lorsque je dis cela, il nous rendra...

M. CLOUTIER: Je pensais au proverbe, "l'enfer...

M. BURNS: ... au moins cette justice, lui qui habituellement est juste, au moins, dans ces cas, quand il ne perd pas les pédales. Ce soir, il est très calme, il écoute nos arguments...

M. CLOUTIER: Toujours.

M. BURNS: Non, pas toujours, la semaine dernière ce n'était pas tout à fait la même atmosphère.

M. CLOUTIER: Vous m'étonnez.

M. BURNS: Ce soit il est très calme et, dans ces moments, il a tendance...

M. CLOUTIER: Non, je pensais au proverbe "l'enfer est pavé de bonnes intentions."

M. BURNS: ... à reconnaître les intentions des autres comme étant justes. Il va au moins reconnaître que, depuis le début de ce débat-ci, il n'y a eu aucune — même si cela a exaspéré à certaines occasions le ministre lui-même et d'autres ministres — motion qui, en soi, pouvait être considérée comme futile, non sérieuse, simplement pour perdre du temps. Toutes les motions qui ont été soumises jusqu'à maintenant l'ont été pour discuter des vrais problèmes, pour gratter le fond du problème, pour examiner ce qui nous était soumis à chaque fois. D'ailleurs, le ministre a reconnu nos motions par la suite. C'était seulement le moment qu'il n'aimait pas en ce qui concerne les amendements qu'on voulait voir déposer ou en ce qui concerne les principes fondamentaux de la réglementation. C'est seulement le moment où on les a présentées qui a déplu au ministre...

M. CLOUTIER: Soyons sérieux, vous savez très bien que vous avez tout fait pour ne pas commencer la discussion de l'article 1...

M. BURNS: ... parce qu'il s'est rendu à nos demandes.

M. CLOUTIER: ... qu'on vous y a forcés par une motion principale qui est encore sur la table et qu'aussitôt que vous vous êtes sentis obligés d'ouvrir l'article 1, à ce moment, vous avez multiplié les amendements et les sous-amendements.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques, sur la recevabilité.

M. CHARRON: Sur la recevabilité, M. le Président, je n'ai pas l'habitude d'intervenir beaucoup sur des questions de procédure pour tenter d'éclairer votre jugement à l'aide de l'interprétation de notre règlement. Mais je vous soumets simplement ceci d'après mon expérience parlementaire et avec le souci que j'ai toujours, vous le savez, à chaque fois que je suis intervenu. Pour que le vote que nous allons prendre éventuellement sur cette motion soit clair dans l'esprit des députés qui participent à la discussion, je vous souligne que, si nos amendements successifs présentés vont dans le même sens, c'est qu'il va sans dire que nous sommes dans le corridor étroit d'un article quelconque d'une loi.

Ils ont constitué — je vous l'affirme au nom de l'Opposition — à chaque occasion, une dilution de notre objectif premier. Je ne vous mens pas, et vous aurez sans doute constaté la vigueur que nous avons mise à le défendre, notre objectif principal était de faire prendre comme décision par ce gouvernement que le français était la seule langue officielle. Soit, nous avons été battus, mais je soutiens que chaque amendement est une décision différente et a été une décision différente de la commission. La dernière motion, celle présentée par le député de Lafontaine, visait à faire prendre une décision à cette commission, à savoir si l'article 133 de la constitution canadienne s'applique encore ou ne s'applique pas. Soit, elle a été tranchée par la commission et la commission a décidé qu'elle s'applique encore. Nous l'avions invitée à se prononcer pour qu'elle ne s'applique pas.

Celle-ci n'est pas du tout du même ressort. Celle-ci dit que, faisant fi de la question à savoir si elle s'applique ou ne s'applique pas, ce que nous voulons atteindre, cette fois-ci, comme décision de la commission, c'est qu'au moins il n'y ait aucune autre langue qui aurait de statut officiel au Québec. C'est une décision différente de la précédente. Nous ne demandons plus d'affirmer ou de ne plus affirmer qu'un article de la constitution canadienne s'applique ou ne s'applique pas au Québec, cela a été tranché.

M. HARDY: ... forme affirmative.

M. CHARRON: Ce que nous voulons avoir comme affirmation — un député peut préférer la formule négative à la formule positive — c'est simplement cette garantie minimale qui n'est pas du tout l'affirmation que nous aurions voulu atteindre par un premier amendement. Je ne veux pas la défendre, ni entrer sur le fond, mais je veux simplement vous signaler que c'est une décision. Il faut toujours considérer un amendement comme une décision à prendre éventuellement. Quand quelqu'un propose un amendement, c'est qu'il veut que la commission prenne une décision. Lorsque nous prendrons — la jugeriez-vous recevable, M. le Président — une décision sur cet amendement, lorsque la commission se prononcera, ce n'est pas la même décision que tout à l'heure. Nous avons décidé que l'article 133 continue à s'appliquer. Ce que nous voulons maintenant, c'est au moins prendre la garantie que cette commission affirme qu'il n'y aura pas d'autre langue officielle que le français, dans l'esprit de l'article 1. Nous sommes encore dans le cadre de l'article 133 que cette commission a voulu soutenir, mais nous voulons au moins cet engagement ferme.

Encore une fois, je considère, comme l'a soutenu le député de Maisonneuve, qu'il s'agit d'une décision différente d'une précédente décision; elle n'a pas du tout été éliminée par la décision précédente ou impliquée dans la décision précédente. En ce sens, vous devez reconnaître que l'amendement proposé par le chef de l'Opposition est parfaitement recevable et donc soumis aux débats de cette commission.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, sur le point de règlement, avec la faible expérience que je peux avoir au niveau des règles parlementaires, je voudrais quand même souligner ceci. La motion que nous présentons est assurément différente de celle que nous avons déjà présentée à l'effet de faire du français la seule langue officielle. Ce n'est pas seulement sous l'aspect que, d'une part, lorsque nous avons présenté la première motion voulant que le français soit la seule langue officielle, on employait une formule affirmative, alors que, dans cette résolution, on emploie plutôt une formule négative. Ce n'est pas seulement là-dessus. Cest que, dans la première proposition que nous avons faite à l'effet de faire du français la seule langue officielle, il n'y avait aucune référence à ce moment à l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Il n'en a été question qu'au niveau de certaines remarques qui ont été faites de la part des ministériels, mais d'aucune façon il n'était fait référence, dans le texte même de la motion que nous avons faite, à l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique disant qu'il s'appliquait ou qu'il ne s'appliquait pas. Tandis que dans cette nouvelle motion que nous présentons, non seulement il y a la question de la formule négative — ce n'est pas le plus important — mais il y a référence. Autrement dit, on exprime une attitude, nous, envers l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en employant la formule: Nonobstant cet article, attitude que nous n'avions exprimée d'aucune façon dans la première motion que le chef de l'Opposition avait déposée à l'effet de faire déclarer le français la seule langue officielle.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le ministre des Affaires culturelles.

M. HARDY: M. le Président, le député de Maisonneuve vous a invité tantôt à considérer, je pense, à bon droit, l'ancien règlement qui explicite merveilleusement bien l'article 63 de l'actuel règlement. Si on retourne à l'ancien règlement, on voit l'article 151 qui dit: Nulle motion ne doit soulever une question qui soit, au fond, identique à une question dont la Chambre a décidé pendant la session en cours". C'est toujours le fond. Quand on dit que, dans l'autre motion, il n'y avait pas de référence à l'article 133, ce n'est pas cela qui est le fond.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, mais c'est du fond, l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Arrêtez donc! Vous vous cachez derrière continuellement.

M. HARDY: Dans la motion telle quelle, ce n'est pas cela qui est le fond.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est votre opinion.

M. HARDY: Je vous ai écouté sans rien dire tantôt. Pourquoi ne faites-vous pas la même chose?

M. BEDARD (Chicoutimi): Parce que vous vous adressez à moi; vous me regardez.

M. HARDY: Alors, je ne peux pas vous regarder?

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous pouvez me regarder. Cela ne me fait ni chaud, ni froid, je vous en prie. Vous pouvez continuer.

M. HARDY: M. le Président, la référence à l'article 133, ce n'est pas cela qui est le fond de la motion, l'objet de la motion, ce que l'on poursuit avec la motion. C'est une conséquence "nonobstant l'article 133".

Le fond, c'est qu'on veut affirmer une nouvelle fois, comme on l'a fait dans deux ou trois motions différentes... On veut absolument qu'il y ait une précision, que ce soit "la seule" ou que "nulle autre"... Le fond, on en a discuté; on a donné des arguments à ce sujet, mais quant à la question de la recevabilité, c'est exactement la même chose sous des formes différentes.

Le député de Maisonneuve l'a dit aussi. Il dit : II y a une progression. C'est cela, il y a une progression. Oui, mais une variation sur le même fond. La chose que vous recherchez toujours, contrairement à ce que dit le député de Saint-Jacques, ce n'est pas l'article 1, ce n'est pas la substance de l'article 1. C'est bien sûr que toutes les motions d'amendement que l'on peut faire à la motion principale concernant l'article 1 se rapporteront toujours à la langue officielle. C'est évident.

M. CHARRON: Moi, je me souviens d'une décision que vous, vous avez rendue...

M. HARDY: Bon! Encore!

M. CHARRON: ... comme vice-président de la Chambre. Me permettez-vous de vous la signaler?

M. HARDY: Comment cela se fait-il, M. le Président? C'étaient toujours de mauvaises

décisions. J'étais partial et on ne finit plus de rappeler mes décisions pour se justifier.

M. BURNS: Vous étiez un mauvais président et vous rendiez des bonnes décisions.

M.HARDY: Entendez-vous! ... Un mauvais président qui rendait des bonnes décisions. Voilà!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Un autre paradoxe comme seuls peuvent en faire les gens du Parti québécois.

M. BURNS: C'est vous-même qui avez dit cela, et je suis totalement d'accord avec vous.

M. HARDY: Un bon président...

M. BURNS: Vous étiez un mauvais président, parce que vous "antagonisiez" les députés, mais vous rendiez de bonnes décisions, parfois.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! M. CHARRON: C'est vrai.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! A l'ordre!

M. HARDY: M. le Président, vous reconnaf-trez que cela me flatte toujours jusqu'à un certain point de voir mes décisions...

M. CHARRON: Mais, est-ce que le ministre...

M. HARDY: Oui, oui.

M. CHARRON: ... me permet de la lui signaler? Lorsque nous avons débattu la loi 28, en commission plénière en Chambre, vous vous rappelez? On fonctionnait à cette époque avec le vieux règlement. C'était en décembre 1971. Je pense que c'est mon collègue de Sainte-Marie, à l'époque, qui avait présenté un amendement qui touchait au pourcentage, qui disait que dans le cas où il y aurait tel pourcentage, telle disposition s'appliquerait. Vous nous avez reconnu le droit de modifier presque ad vitam aeternam, parce que le "filibuster" sur la loi 28, puisque c'en était un...

M. BOURASSA: C'est vrai... Un autre...

M. CHARRON: ... d'ailleurs, au moment où le député de Maisonneuve intervenait...

M. CLOUTIER: Vous le regrettez celui-là, aussi, hein?

M. CHARRON: II avait comme objectif... Vous nous aviez permis d'intervenir à un moment où, après avoir dit 15 p.c, un député pouvait dire 10 p.c, l'autre député, après que l'amendement avait été battu, 8 p.c. C'est là-dessus qu'intervenait, au moment où cela a été suspendu...

M. BURNS; La théorie du chiffrage...

M. CHARRON: ...la théorie du chiffrage, justement, qui nous avait fait bien rire, à l'époque, mais c'était une dilution, pour employer ce que......tout le temps dans le même canal. C'est bien entendu que la "seule langue officielle", si vous me permettez encore, c'étaient les 100 p.c. que nous voulions atteindre. Nous en sommes réduits maintenant à demander d'obtenir au moins la garantie que nonobstant... Mais c'est vous-même qui avez reconnu qu'une Opposition peut viser le maximum dans ses amendements et, si elle ne l'atteint pas, se résoudre à aller au moins chercher un consensus minimal sur un sujet. Si elle ne l'atteint pas encore, vous nous l'avez permis avec des chiffres...

M. HARDY: Très bien! Bon! M. le Président...

M. CHARRON: Vous pouvez certainement, aujourd'hui, soutenir que nous pouvons le faire avec le fond.

M. HARDY: M. le Président, je ne m'en souviens vraiment pas, et là, je suis très sincère. Je ne me souviens vraiment pas de cet incident.

M. CHARRON: Moi, je suis très sincère quand je vous dis que vous l'avez fait.

M. HARDY: Et comme je ne prétends pas à l'infaillibilité, il est possible que j'aie erré, à ce moment.

M. CHARRON: Je m'en souviens très bien, très bien.

M. HARDY: M. le Président, je continue à prétendre que la seule différence entre la motion que nous avons présentement devant nous et les différentes motions que nous avons eues à étudier — je me réfère toujours à celle qui voulait ajouter le mot "seule" — est la rédaction. Substantiellement, quant au fond, elles veulent uniquement dire qu'il... Elles veulent venir préciser la proposition de l'article 1 qui dit: "Le français est la langue officielle". Toutes les propositions, toutes les motions d'amendement que le Parti québécois a présentées jusqu'ici veulent venir ajouter une certaine précision que, quand on discute du fond, nous prétendons inutile, redondante. Ce serait de la mauvaise rédaction législative. Mais ce n'est pas cela qui est l'objet de mon propos actuellement. L'objet de mon propos, c'est qu'en vertu de l'actuel article 63, en vertu de l'article 151, en vertu de l'article 153 de l'ancien règlement, et

surtout en vertu de l'article 176, vous ne pouvez pas déclarer recevable cet amendement, et je vous cite l'article 176: "Un nouvel amendement ne doit pas remettre en question un principe sur lequel la Chambre s'est déjà prononcée à l'occasion d'un premier amendement".

Le principe sur lequel nous nous sommes déjà prononcés, lorsque nous avons rejeté la motion voulant incorporer le mot "seule", est que nous avons déclaré le principe que nous avons admis à ce moment, c'est que toutes ces additions, que cela soit "seule" comme dans l'autre motion ou "que nulle autre", "seule" ou "nulle autre", si on parle la même langue, cela veut dire passablement la même chose.

Si je vous dis: Vous êtes le seul député de Chicoutimi ou si je vous dis qu'il n'y a nul autre député de Chicoutimi que vous, cela veut dire la même chose. Vous êtes le député de Chicoutimi. C'est cela. On a tout dit...

M. BOURASSA: La langue officielle.

M. HARDY: ... quand on a dit cela. Le député de Maisonneuve.

M. BOURASSA: Pas besoin de dire le seul député de Maisonneuve.

M. HARDY: Le député de Maisonneuve a tout rempli l'espace.

M. BURNS: Vous ne savez pas qu'il y a deux députés de Maisonneuve dans le système fédéral actuel?

M. BOURASSA: Si c'est tout ce que vous avez...

M. CLOUTIER: Encore l'indépendance.

M. HARDY: Franchement, ceux qui viennent d'applaudir ne sont pas très exigeants.

M. BOURASSA: ... comme argument...

M. BURNS: Je vais être obligé, à un certain moment, de vous demander...

M. BOURASSA: Vous démontrez la futilité de vos amendements.

M. BURNS: ... le député provincial ou le député fédéral? C'est ça que je vais être obligé de vous demander.

M. BOURASSA: Vous venez de démontrer la futilité de vos amendements.

M. BURNS: Pas du tout!

M. HARDY: Je n'avais pas terminé. Je termine. Je conclus.

M. MORIN: En réponse au premier ministre qui affectionne le système parlementaire français, je voudrais attirer son attention sur le fait qu'il y a des circonscriptions électorales en France, comme la Nièvre, la Loire, qui comptent plusieurs députés. Et quand on dit: Le député de la Nièvre...

M. HARDY: Mon Dieu, M. le Président...

M. MORIN: ... on ne sait pas encore duquel on parle.

M. HARDY: Le député de Sauvé n'a pas besoin d'aller courir jusqu'en France pour ça.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. MORIN: C'est pour montrer que votre exemple est farfelu.

M. BOURASSA: Si vous permettez, le député de Sauvé vient d'apporter un exemple qui, comme l'a fait le député de Maisonneuve, démontre la futilité des amendements péquis-tes. Il est évident que, lorsqu'on dit le député de Maisonneuve, on pense au député en question ici. Pas besoin de dire le seul député de Maisonneuve.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'en tant que seul président de la commission, je pourrais rendre ma décision?

UNE VOIX: Oui.

M. BURNS: M. le Président, si vous me permettez une dernière remarque.

M. MORIN: Sur la recevabilité, j'ai un mot à dire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on pourrait fixer une limite de temps? Je vous avoue que je commence à être passablement éclairé.

M. HARDY: M. le Président, si vous êtes éclairé, vous n'avez pas à...

M. BURNS: M. le Président, en vertu de l'article 160, je pense que vous allez nous donner...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... cette nouvelle motion.

M. HARDY: Si vous vous déclarez éclairé...

M. BURNS: ... je pense que vous allez nous donner suffisamment de latitude parce qu'elle est assez importante.

M. MORIN: J'ai bien l'intention de vous répondre.

M. HARDY: J'avais encore des choses à dire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on pourrait demander au député de Maisonneuve et au chef de l'Opposition officielle de s'entendre à savoir lequel des deux va parler.

M. BURNS: J'ai invité moi-même le chef de l'Opposition à préciser certaines choses que je me sens moins compétent que lui à préciser, mais je voudrais simplement vous souligner une chose.

M. HARDY: Pendant tout ce temps-là, je n'avais pas terminé, et mon droit de parole s'est envolé.

M. BURNS: Ah bien! On va vous écouter. Excusez. On pensait que vous aviez terminé.

M. BOURASSA: Ils sont généreux. Cela fait partie du "filibuster".

M. HARDY: Je voulais simplement dire que j'avais encore quelques remarques à faire, mais vous avez manifesté votre intention de rendre votre décision, tel que le règlement vous le permet.

M. LEGER: Vous l'avez suggéré au président. Ce n'est pas pareil. C'est vous qui l'avez suggéré.

M. HARDY: Quand le président déclare qu'il est suffisamment informé, si des députés continuent à parler, c'est une autre preuve évidente et claire que tout ce que ces députés veulent est de faire perdre du temps à la commission. Comme cela n'est pas mon intention, je mets de côté les arguments que j'avais encore à faire valoir puisque vous considérez...

M. BURNS: J'invoque le règlement.

M. HARDY: ... que vous êtes prêt à prendre votre décision.

M. BURNS: Voyons donc! Vous me déprimez ce soir, M. le ministre. Le ministre me déprime. Vraiment. Quand il lui restera seulement cela comme argument...

M. BOURASSA: Je ne sais pas si cela vous en prendrait beaucoup ce soir.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Comme je l'ai dit tantôt, je me sens prêt à rendre ma décision...

M. HARDY: II est prêt.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... mais, par contre, vous avez mentionné qu'il y avait des faits nouveaux auxquels vous aimeriez faire allusion...

M. BURNS: Oui.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... j'aimerais que vous vous entendiez avec le chef de l'Opposition pour que cela ne dure pas jusqu'à minuit.

M. BURNS: Cela sera très bref. Cela sera une ou deux phrases au maximum et le chef de l'Opposition traitera, je pense bien, de l'aspect plutôt constitutionnel.

LE PRESIDENT (M. Gratton): L'aspect constitutionnel n'entre pas en jeu. C'est une question d'interprétation du règlement.

M. BURNS: Je pense qu'il est important — et c'est ce que je pense que le chef de l'Opposition va vous donner comme éclairage assez spécifique — d'examiner le premier et le troisième amendement. J'ai parlé de quatre amendements, je me suis trompé, j'en mettais un de plus. Le premier amendement parlait tout simplement de "seule" et le troisième amendement parle de langue officielle, "que nulle autre langue n'a de statut officiel...", mais eu égard au corridor restreint de l'article 133. C'est seulement cela que je veux dire et c'est ce qui est la différence fondamentale.

Le député de Terrebonne et ministre des Affaires culturelles vous a cité l'article 151. Je pense qu'il est bon de lire la note 2, sous l'article 151, aussi de l'ancien règlement qui donne l'éclairage justement, dans quel contexte on doit interpréter.

Ce sont des hommes aussi impressionnants que Beauchesne, Campion et les autres qui disent: La question dont la Chambre a été saisie par motion ne peut être renouvelée par voie d'amendements et vice versa. Or, je vous dis que ce n'est pas un renouvellement de motion. Il y a un aspect très différent à la motion no 3, si on peut l'appeler ainsi, par rapport à la motion no 1. C'est cet éclairage en vertu de l'article 133. L'article 133, qui était présenté dans la deuxième motion, était présenté différemment, en ce sens que l'amendement disait que l'article 133 cessait d'avoir une application, alors qu'ici on dit: Malgré l'article 133, nulle autre langue n'a de statut officiel. Je vous le demande, M. le Président, c'est pour cela que j'arrête tout de suite mes remarques, le chef de l'Opposition a sans doute des choses à dire sur l'aspect de l'éclairage constitutionnel.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Je cède volontiers la parole au chef de l'Opposition officielle, sauf que j'aimerais lui demander de ne pas argumenter sur la constitutionnalité ou l'acceptabilité constitutionnelle de trois amendements car je n'ai pas à trancher de la valeur constitutionnelle, mais strictement de l'application du règlement et de la recevabilité de la motion en vertu de nos règlements.

M. MORIN: M. le Président, si vous tranchez, dans un sens ou dans l'autre, que la motion n'est pas recevable, vous vous prononcez implicitement sur le fond.

M. CLOUTIER: Non.

M. HARDY: Voyons donc!

UNE VOIX: Allez-y.

M. MORIN: Sûrement, parce que nous soutenons que les deux propositions sont entièrement distinctes et nous pouvons prouver qu'elles le sont. Si le président se prononce sur la non-recevabilité, c'est qu'il estime qu'elles sont semblables, qu'elles ne sont pas seulement différentes par la forme, mais nécessairement aussi par le fond. Je vais tenter de le démontrer.

Les deux propositions sont à ce point différentes qu'on pourrait avoir voté contre la première proposition, comme l'ont fait les membres du gouvernement, et néanmoins voter en faveur de la seconde. Je l'ai dit au premier ministre, tout à l'heure, je ne vois pas comment il peut voter contre ce nouvel amendement alors que je puis concevoir qu'il ait voté contre le premier.

Pour tout dire, nous avons fait ce nouvel amendement sur mesure pour le premier ministre et pour le ministre de l'Education. Tout à l'heure, l'amendement disait clairement que l'article 133 cessait de s'appliquer au Québec. Je vous avouerai que c'était une solution draconienne; nous voulions une solution juridique à l'emporte-pièce. Cette fois, c'est tout à fait différent. Nous ne disons pas que l'article 133 cesse de s'appliquer au Québec. Nous avons adopté une solution beaucoup plus subtile qui est celle, en fait, du Manitoba; c'est celle que le Manitoba a utilisée pour mettre fin à l'usage de la langue française dans cette province.

Si vous le voulez bien, nous allons nous mettre à la place des juristes du Manitoba pour bien comprendre la différence entre les deux propositions. Lorsque le gouvernement manitobain, à la suite des événements qui ont entouré la rébellion de Louis Riel, avant 1885, et la privation des fonds publics imposée aux écoles françaises du Manitoba, les juristes de cette province ont été consultés pour savoir comment il fallait présenter les choses pour que l'article 133 cesse de protéger l'usage de la langue française. Il y avait quatre ou cinq solutions, et je me permets de vous les énumérer. Je pense que vous allez saisir la différence. Premièrement, ils auraient pu prétendre abroger l'article 133. Evidemment, les juristes manitobains ont vu que cela était impossible puisque l'article 133 fait partie d'une loi impériale, imposée d'ailleurs au Québec à l'époque, qui s'appelle le "British North America Act". Les juristes ont donc dit au ministre qui voulait abolir la langue française: Vous ne pouvez abroger l'article 133.

Peut-être, comme une seconde solution — nous sommes dans la gradation des idées à laquelle je faisais allusion tout à l'heure — pourrait-on dire que l'article 23 du Manitoba Act, qui reprenait l'article 133 du British North America Act, pourrait être, lui, abrogé?

C'était la loi qui constituait la province du Manitoba et elle avait, sous l'influence de Georges-Etienne Cartier, repris la formulation exacte de l'article 133 dans l'article 23. Puis, le Parlement impérial était intervenu par le British North America Act de 1870 pour entériner le Manitoba Act et donner sa garantie en particulier à cet article 23.

Les juristes ont dit: Nous ne pouvons pas abroger l'article 133; nous ne pouvons abroger l'article 23 du Manitoba Act. Qu'est-ce qu'on peut faire pour se débarrasser du français? C'était cela, le problème: Comment chasser la langue française? On pouvait dire que l'article 133 cessait de s'appliquer au Manitoba. Ils y ont pensé. C'était la proposition qu'on vous a faite tout à l'heure; elle ne sort pas de n'importe où. Cela vient de l'expérience constitutionnelle du passé. Mais les juristes ont eu des doutes. Ils se sont dit : Est-il possible de déclarer que l'article 133 cesse de s'appliquer au Manitoba? Peut-être que, si nous présentons les choses comme cela, y aura-t-il difficulté constitutionnelle, peut-être qu'il y aura un "désaveu" fédéral, peut-être serons-nous traînés devant les tribunaux, jusqu'au comité du Conseil privé de Londres et peut-être notre loi sera-t-elle déclarée inconstitutionnelle? Il valait peut-être mieux éviter la formule que vous avez repoussée tout à l'heure. Finalement, ils se sont rabattus sur une quatrième solution, qui est celle que nous vous proposons maintenant. Qu'on ne vienne pas prétendre qu'elle n'est pas différente de la première! Elle est essentiellement différente. Dans leur perplexité donc, les juristes manitobains ont décidé d'adopter une formule d'une subtilité exemplaire. Elle n'est pas de nous, cette solution; elle est d'eux. C'est pour cela que nous vous la proposons, parce qu'il semble que cela ait bien fonctionné au Manitoba, que cela n'ait présenté aucune prise à ceux qui auraient voulu en contester la constitution-nalité. Ce sont des grands mots difficiles à prononcer.

M. le Président, je voudrais vous rappeler le langage utilisé par l'article 1 du chapitre 14 des lois du Manitoba de 1890. Je vais le lire en anglais puisqu'il n'y a pas de version française. J'espère que vous verrez la similitude avec ce que nous venons de vous soumettre et que vous comprendrez ce qui distingue cette solution de l'ancienne proposition. "Any statute or law to the contrary notwithstanding — c'est le "nonobstant" de notre proposition — the English language only — c'est le "seule" que nous avions présenté au tout début de nos débats — shall be used in the records and journals of the House of assembly for the Province of Manitoba, and in any pleadings or process in or issuing from any court in the Province of Manitoba. The Acts of the Legislature of the Province of Manitoba need only be printed and published in the English language".

A dessein, nous avons repris une formule qui

était destinée à causer le moins d'inconvénients constitutionnels possible. Je vous rappelle qu'à la suite de l'adoption de cette loi le gouvernement fédéral a été invité à désavouer — pour utiliser la mauvaise traduction de l'expression anglaise "disallow" — cette loi qui allait à l'encontre des droits fondamentaux des parlant français du Manitoba. Mais le gouvernement fédéral a refusé d'intervenir et c'est ce précédent qui est invoqué aujourd'hui par beaucoup de juristes. Pourtant, comme le professeur Beaudoin de l'Université d'Ottawa l'a fait observer — je me réfère à la page 224 de son travail — même si l'article 23 n'est plus une disposition impériale, la garantie était de même nature, puisque le British North America Act de 1871, article 5, donnait la sanction impériale au Manitoba Act.

C'est donc un précédent déterminant. Si le Manitoba a pu écarter l'usage — je n'ai pas dit abroger — de la langue française en utilisant cette formule, nous soutenons que le Québec peut faire la même chose sans risquer le désaveu fédéral.

Ce que le premier ministre semblait craindre l'autre jour, à la suite de l'intervention de M. Trudeau et sans, non plus, très probablement, encourir les foudres de la cour Suprême, puisque cette cour se trouvera devant le précédent manitobain et sera obligé de reconnaître que ce qui était bon pour les francophones du Manitoba — l'abolition de leur langue comme étant d'usage public — est tout aussi bon pour les anglophones du Québec.

C'est donc pour vous faciliter les choses que nous avons présenté cet amendement qui, je le soutiens — vous ne pourrez en venir à d'autres conclusions, M. le Président — est totalement différent de l'autre. Juridiquement, ils ne se comparent pas, même si tous deux y mentionnent l'article 133. Sur le fond, le premier disait que "cesse de s'appliquer l'article 133 au Québec". Le second ne dit pas cela. En vertu du second, l'article 133 s'applique encore au Québec; néanmoins, on en restreint la portée pour ce qui est de l'usage de la langue anglaise. C'est tout à fait différent.

M. le Président, je vous le répète, ce qui m'inquiète dans la décision que vous vous apprêtez à prendre, c'est que vous allez nécessairement vous prononcer sur le fond si vous écartez la recevabilité de cette motion.

En conclusion, je voudrais vous dire que tous les traités de procédure parlementaire ou autre, de procédure des assemblées délibérantes prévoient que les amendements ont pour but de rendre la proposition acceptable au plus grand nombre possible de participants. Transposons cela dans nos débats. Le but de nos amendement est de rejoindre un commun dénominateur entre la majorité gouvernementale et la minorité de l'Opposition. Nous pensons qu'avec cette proposition, nous l'avons trouvé, ce commun dénominateur. En tout cas, je tiens compte de tout ce qui nous a été dit par le premier ministre et le ministre de l'Education en réplique à nos amendement antérieurs pour vous dire que cette nouvelle proposition répond à leur attente.

Le ministre de l'Education nous a rappelé tout à l'heure que le professeur McWhinney est d'avis que l'article 133 ne fait que consacrer des droits précis et non une langue officielle. Là-dessus, il resterait à consulter le rapport de Me Sheppard, écrit pour la commission Gen-dron, qui dit le contraire. Mais peu importe; c'est ce que nous a dit le ministre. Comme nous voulons que le ministre vote avec nous cette fois, nous avons fait cette motion en tenant compte de ses arguments. Pour ma part, si le ministre ne pouvait être d'accord, tout à l'heure, avec la dernière proposition, je comprends qu'il ait voté contre, étant donné le langage qu'il nous a tenu à ce moment. Mais je ne comprendrais pas, cette fois, qu'il votât contre ce nouvel amendement. Je ne comprendrais pas, M. le Président — je vous le souligne en toute déférence — que vous déclariez que cette proposition est irrecevable parce que cela signifierait que vous vous prononcez sur le fond. Vous prendriez sur vous d'affirmer que ces deux propositions sont semblables sur le fond alors qu'elles sont totalement différentes. Merci.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, je pense que, suite à ces nombreux éclairages de part et d'autre, il y a un fait d'acquis: c'est que personne ne conteste les dispositions de l'ancien règlement et de la tradition parlementaire, à savoir qu'une motion ne peut soulever une question de fond identique à une décision qui a déjà été prise par l'Assemblée ou, en l'occurrence, par cette commission. Je n'aurai donc pas à citer les nombreux auteurs et l'ancien règlement, à savoir si une commission peut prendre une décision de fond identique à une autre déjà prise. Il s'agit donc, pour moi, simplement de décider et il ne s'agit sûrement pas, contrairement à ce que prétend le chef de l'Opposition, de décider de la valeur constitutionnelle des différents amendements. Je pense qu'il s'agit plutôt de décider si le fond de cette dernière motion est identique ou non à des motions précédentes faites par le chef de l'Opposition officielle...

M. MORIN: Cest parfait.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... au cours de l'étude de l'article 1.

M. MORIN: Cest bien, c'est cela.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Si je relis — n'étant pas juriste, je ne la relis peut-être pas de la même façon — la première motion, soit celle du chef de l'Opposition officielle, à savoir "que le français soit la seule langue officielle", je ne vois réellement pas en quoi cela diffère de

la phrase "nulle autre langue n'a de statut officiel".

Je ne porte pas de jugement de valeur; je voudrais simplement donner ma décision...

M. MORIN: D faudrait au moins consulter le président de l'Assemblée.

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... mon interprétation.

M. BURNS: Lisez tout l'article, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Laissez-moi finir.

M. BURNS: Vous ne lisez pas le début de l'article.

Décision du président

LE PRESIDENT (M. Gratton): Justement, j'y arrive. Si je me reporte à la motion du député de Lafontaine, je crois, voulant que l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867, cesse d'avoir effet, je ne vois pas en quoi cela diffère, dans le fond, des mots "nonobstant l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867".

Je pense qu'en vertu du fait que toutes ces motions, les trois motions sont faites au moment de l'article 1 du projet de loi 22, je me dois de la déclarer irrecevable, ce qui n'empêche pas...

M. MORIN: Ne pourriez-vous pas consulter le président de l'Assemblée?

M. BURNS: Avant que vous rendiez votre décision.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Ce qui n'empêche pas l'Opposition de refaire des motions identiques ou des motions semblables au cours des articles subséquents, qui peuvent s'appliquer...

M. BURNS: M. le Président, je vous demande, en grâce...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: C'est assez important ce que vous êtes en train de décider.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je vous demande de consulter le président de l'Assemblée nationale.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est déjà fait, c'est ce que j'ai fait.

M. BURNS: Vous l'avez fait avant même qu'on fasse une motion?

LE PRESIDENT (M. Gratton): La motion était faite. C'est, d'ailleurs, pourquoi je me suis absenté pendant dix minutes pour aller consulter le président de l'Assemblée nationale.

M. BURNS: Et vous l'avez consulté?

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est exact.

M. MORIN: Et qu'a déclaré le président?

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Ma décision est rendue. Vous savez fort bien...

M. BURNS: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): ... qu'il n'est pas question d'en appeler. Je déclare donc la motion du chef de l'Opposition irrecevable.

M. MORIN: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: II y a une chose qui est claire, c'est que le gouvernement refuse de se donner les moyens légaux...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER: ... de rendre le français langue officielle.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. HARDY: Taisez-vous donc et écoutez donc!

M. LEGER: II a refusé de rendre légal...

M. BURNS: C'est exactement la façon d'éviter les vrais débats.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Si on veut éviter les vrais débats, M. le Président, on est parti pour le faire.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! L'honorable député de Maisonneuve sait fort bien qu'une...

M. BURNS: M. le Président, on est parti pour éviter les vrais débats, si c'est cela qu'on veut...

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: ... et avec votre complicité, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre! Je m'excuse...

M. BURNS: Vous êtes complice de cette façon d'éviter les vrais débats.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: II n'y a pas d'à l'ordre, M. le Président!

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je considère que vous êtes en train actuellement de brimer les droits de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La décision est rendue. A l'ordre!

M. BURNS: C'est cela que vous faites. Vous ne respectez pas un des droits de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La motion du ministre de l'Education...

M. BURNS: Une des choses, M. le Président, que vous devriez respecter c'est qu'au moins dans le cas de doute...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que vous voulez que je suspende les travaux?

M. BURNS: Non, je ne veux pas. Je veux que vous m'écoutiez vous dire...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Respectez ma décision, s'il vous plaît.

M. BURNS: Non, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je ne peux pas la respecter; elle n'est pas respectable.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. BURNS: Je vous dis M. le Président, que vous brimez, à leur base même, les droits de l'Opposition.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, la commission suspend ses travaux pour dix minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 18)

Reprise de la séance à 23 h 36

LE PRESIDENT (M. Gratton): Sur la motion du ministre de l'Education.

M. BURNS: M. le Président, sur une question de règlement...

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: ... je vous dis tout de suite que je suis obligé d'accepter votre décision même si je ne suis pas d'accord sur elle. Ainsi je vous demande une directive, simplement ceci: Comment l'Opposition peut-elle formuler une motion à l'article 2 de façon à enlever toute ambiguïté, qui pourrait fort probablement faire l'unanimité autour de la table, si je comprends les remarques qui ont été faites par le premier ministre et le ministre de l'Education à l'effet que "la seule", cela n'était pas nécessaire, que la langue officielle, cela veut dire la seule, tout en sauvegardant les principes et en s'abritant à l'endroit des principes qui sont mentionnés dans l'article 133?

M. le Président, vous êtes notre guide en commission parlementaire. Est-ce que vous êtes en mesure de me suggérer une rédaction, une formulation d'une motion qui pourrait dire en même temps qu'il n'y a qu'une seule langue officielle au Québec et que, malgré cela, les dispositions de l'article 133 sont ou bien mises de côté ou bien protégées?

LE PRESIDENT (M. Gratton): En réponse à votre demande de directives, non, je ne suis pas en mesure de vous faire une suggestion à cet égard. Je ne suis même pas en mesure de vous dire si cela est possible. Ce que je pourrais faire, par exemple, c'est de vous suggérer que, demain ou après la séance de ce soir, nous rencontrions ensemble le président de l'Assemblée nationale et que nous étudiions ensemble la possibilité d'en arriver à une telle formulation.

M. BURNS: Vous êtes d'accord avec moi, M. le Président, que non seulement votre devoir est de juger recevables les motions, ou irrecevables si vous considérez qu'elles le sont, mais votre devoir est aussi, je pense —j'espère que vous partagez mon opinion là-dessus — de considérer que vous êtes une assistance tant pour le gouvernement que pour l'Opposition dans la rédaction des motions de façon qu'elle soient recevables.

LE PRESIDENT (M. Gratton): C'est dans ce sens que je fais la suggestion de rencontres.

M. BURNS: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: M. le Président, me préva-

lant de l'article 157 de notre règlement, qui dit "qu'en commission élue un député peut proposer que la commission ajourne ses travaux".

UNE VOIX: Adopté. M. CLOUTIER: Ah non!

M. CHARRON: Est-ce le président de l'Assemblée nationale qui vient de dire "adopté", M. le Président?

M. CLOUTIER: Vous n'étiez pas membre de la commission, M. le Président.

M. CHARRON: Peut-être devrais-je attendre immédiatement un signe approbatif ou négatif de l'autre côté? S'il est négatif, je vous expliquerai pourquoi je propose l'ajournement, s'il est affirmatif, alors nous en disposerons immédiatement.

M. CLOUTIER: M. le Président, je crains bien que le signe devra être négatif.

M. CHARRON: Bien.

M. CLOUTIER: Nous devons travailler jusqu'à une heure déterminée. Je ne vois aucune raison pour laquelle, chaque soir, l'Opposition arrive avec une motion de cet ordre, ou plutôt, si, j'en vois une; c'est toujours la même, celle de faire perdre du temps à la commission.

M. CHARRON: M. le Président... M. HARDY: Pour éviter le fond.

M. BURNS: On parle du fond depuis le début et je n'ai pas entendu un ministériel nous parler véritablement du fond; pas plus le député de Louis-Hébert que les autres, je n'ai entendu personne discuter du fond. Tout ce que j'ai entendu, c'est que, quand on a parlé de la seule langue officielle du Québec, on nous a dit: C'est une redondance, c'est la même chose, cela veut dire la même chose. L'article 133, il ne faut pas se mêler de cela, c'est trop compliqué. Voyons donc. S'il vous plaît, ne nous parlez pas de gens qui ne parlent pas du fond, vous!

M. HARDY: On ne peut pas parler de fond sur vos motions, elles n'en ont pas.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Saint-Jacques, sur la motion d'ajournement.

M. LEGER : Vous avez même refusé de vous donner des moyens légaux de rendre le français la seule langue officielle.

M. HARDY: On verra.

M. LEGER: On essaie de trouver ce moyen et vous vous servez de la procédure pour nous empêcher de vous donner des moyens légaux de rendre le français la seule langue officielle.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. LEGER : Vous le savez, vous réalisez cela par la procédure, non pas en discutant le fond.

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Saint-Jacques, sur la motion d'ajournement des travaux.

M. CHARRON: Je crois que mes collègues viennent d'exprimer un peu la situation dans laquelle nous nous trouvons. Invités à grand renfort d'interruptions par chacun des députés, tout au cours de la semaine dernière, pour que nous engagions un débat de fond, nous avons proposé systématiquement des amendements depuis le début, en acceptant les votes négatifs de cette commission comme un signe que nous devions diminuer nos exigences. Nous avons tenté systématiquement d'obtenir sur l'article 1 ce débat de fond auquel ils nous ont convié et on les voit maintenant se rabattre et retraiter uniquement derrière la formulation qu'ils ont encore refusé d'expliquer et qui ne constitue aucunement...

M. HARDY: Pourquoi devrait-on ajourner?

M. CHARRON: Je pense qu'on devrait ajourner pour que ces ministériels aient l'occasion de se refaire une beauté démocratique et qu'ils aient l'occasion de s'apercevoir...

M. HARDY: On n'est pas fort dans le maquillage.

M. CHARRON: ... qu'ils sont en train de ridiculiser ce qu'ils ont eux-mêmes avancé au cours de la semaine dernière.

M. le Président, nous avons soumis, et vous le savez, des motions qui, je le soutiens, étaient recevables et devaient être même incluses au projet de loi. Nous avons voulu obtenir une précision. Il semble qu'à cette heure tardive, à la fin de la journée, on n'est plus capable de nous fournir les indications dont on avait besoin. Nous avons essayé d'obtenir la portée réelle de l'article 1. Au cours du débat que nous aurions eu sur chacun des amendements, si les ministériels avaient osé y participer, sur le fond sérieux auquel nous les invitions à participer, peut-être aurions-nous eu une réponse à ce moment. Mais je crois, M. le Président, qu'il est inutile de continuer à fonctionner, en tout cas pour aujourd'hui, avec un autre amendement que j'aurais l'intention de proposer à l'article 1, si c'est pour aboutir au même résultat.

Peut-être que deamin, ils se rendront compte que, non seulement ils manquent à leur propre parole et au défi qu'ils nous lançaient, la semaine dernière, d'avoir un débat de fond sur l'article 1, alors qu'ils prétendent proclamer le

français langue officielle, alors qu'ils ne font que reconnaître un état de fait, M. le Président, non seulement s'apercevront-ils qu'ils se défilent après nous avoir conviés à avoir ce débat de fond, mais peut-être aussi découvriront-ils au cours de la nuit de repos que je leur propose, qu'ils sont en train de manquer absolument du minimum de politesse à l'égard des Québécois à cette question. On n'intervient pas avec une loi pour la soumettre aux critiques de l'Opposition en se rebiffant et en refusant de fournir à l'Opposition, qui représente la population là-dessus, comme à ceux qui assistent à nos travaux, les explications et les intentions du législateur. Tôt ou tard, un tribunal aura à interpréter cette loi, et un tribunal devra, lui aussi, aller chercher l'intention du législateur, selon la formule consacrée dans les tribunaux. Nous n'avons pas réussi, depuis que nous avons entamé l'étude de l'article 1, à connaître véritablement quelle est l'intention du législateur, derrière cette formule. Nous l'avons soumis à vérifier la portée et la contradiction qu'il peut y avoir entre l'article 133 et cette formulation. Que voulez-vous dire? Qu'est-ce que vous voulez atteindre par cela? Etes-vous d'accord avec nous pour exiger que la portée réelle de cet article soit plus grande, qu'elle dépasse même, à certaines occasions, la portée de la constitution canadienne? Rien! Nous n'avons rien obtenu, excepté quelques fanfaronnades de députés qui profitent de l'occasion pour sortir de l'ombre, M. le Président.

M. DESJARDINS: Question de règlement!

M. CHARRON: Mais c'est absolument inutile, je crois...

M. DESJARDINS: Question de règlement!

LE PRESIDENT (M. Gratton): Le député de Louis-Hébert sur une question de règlement.

M. DESJARDINS: Avec le respect que je dois à l'orateur qui parle, j'aimerais vous souligner, M. le Président, qu'il n'est pas pertinent au débat dans le moment et j'aimerais que vous l'ayez à l'oeil pour qu'il y ait une pertinence au débat en tout temps.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Louis-Hébert, sur une question de règlement.

M. DESJARDINS: Je m'excuse d'interrompre le député de Saint-Jacques, mais je voulais seulement le ramener à la pertinence du débat. C'est tout.

LE PRESIDENT (M. Gratton) : Le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: Je crois que ce genre d'intervention irrégulière et inutile comme celle que vient de faire le député de Louis-Hébert prouve que nous devrions ajourner nos travaux immédiatement. Je pense que le député de Louis-Hébert, qui voudrait se faire — je ne sais dans quelle intention —

M. DESJARDINS: J'ai passé une bonne nuit.

M. CHARRON: ... une place au niveau de la procédure.

M. DESJARDINS: J'ai passé une bonne fin de semaine.

LE PRESIDENT (M. Gratton): A l'ordre!

M. CHARRON: ... passe absolument à côté de la question.

M. DESJARDINS: Je me couche à 12 h 30.

M. CHARRON: Je crois, et j'ai l'intention de vous le rappeler, que tout le débat que nous avons eu depuis le début sur l'article 1 n'a fourni aucune précision de la part des ministériels. En ce sens, il est inutile de continuer à travailler ce soir dans des circonstances aussi déplorables, non seulement pour l'Opposition, mais pour les Québécois qui aimeraient bien savoir quelles sont les intentions de leur gouvernement lorsqu'il prétend proclamer le français langue officielle à l'article 1. Plus, si nous devions, ce soir, entamer l'étude d'un nouvel amendement, je me demande même si nous pourrions compter sur une présence spirituelle suffisamment active pour que la commission se prononce en tout état de cause et en tout état de santé sur les amendements que nous avons à proposer.

Je le signale immédiatement. Si l'intention du gouvernement est de nous forcer à continuer nos travaux pour que nous parvenions à un vote sur l'article 1 avant minuit, j'aime autant le prévenir immédiatement que nous ne quitterons pas le terrain de l'article 1 tant que nous ne saurons pas ce que vous avez dans le ventre.

Est-ce que c'est uniquement l'hypocrisie que des Québécois sont venus proclamer à cette table? Vous prétendez obtenir pour les Québécois un gain nouveau dans leurs droits alors que vous ne faites que réaffirmer ce qu'ils ont déjà gagné? Où est-t-elle donc la portée réelle et quel est le statut que vous voulez réserver aux autres langues dans cette question?

Tout cela, j'ai l'impression, mérite d'être considéré seulement à la lumière du jour, demain.

M. CLOUTIER : Maintenant que nous venons d'assister au disque quotidien du député de Saint-Jacques, je demande le vote.

M. BURNS: M. le Président, avant le vote, au nom de l'Opposition, je pense que j'ai le droit de parole.

M. CLOUTIER: Non.

M.BURNS: Ah oui! Je vous réfère —je m'excuse — au deuxième paragraphe de l'article...

M. CLOUTIER: C'est exact. Pardon. M. BURNS: ... 157.

M. CLOUTIER: Allez-y! Je ne suis pas pour vous en priver.

M. BURNS: Merci. Alors, en tant que représentant de l'Opposition, je vais appuyer la motion du député de Saint-Jacques. Je pense que vous-même, M. le Président, en plus des raisons que le député de Saint-Jacques vient de nous donner, vous avez donné une raison additionnelle d'être favorable à la proposition du député de Saint-Jacques. Je vous ai demandé, M. le Président, tout à l'heure, une directive à savoir comment l'Opposition pourrait formuler une proposition qui aurait pour double but d'enlever l'ambiguïté relativement au fait qu'il n'y a qu'une seule langue officielle. Ou, si vous voulez, regardez-le de l'autre point de vue, qu'il n'y a pas d'autre langue officielle au Québec et, d'autre part, c'est le deuxième volet de la demande de directive que je vous faisais, qu'il n'y ait pas d'accroc, si vous voulez, dans le cadre de notre compétence, en ce qui concerne le cadre de la compétence législative du Québec, à l'article 133. Je vous ai demandé quelle pouvait être la formulation d'une telle motion qui n'empiéterait pas sur les motions qui ont déjà été proposées. M. le Président, c'est sans aucune espèce de doute une de nos volontés premières et indéfectibles, dirais-je, de voir à ce que ce point soit précisé au moment de la discussion de cet article fondamental qui est l'article 1.

On a vu toutes sortes d'attitudes; même à l'intérieur du groupe ministériel, on a entendu au moins deux sons de cloche. On aurait pu entendre probablement plus de deux sons de cloche s'il y avait eu plus de députés qui s'étaient exprimés sur le sujet. Mais jusqu'à maintenant j'ai entendu des personnages aussi importants au sein du caucus que le premier ministre, le ministre de l'Education et le ministre des Affaires culturelles affirmer d'une part que dire que "la seule langue officielle au Québec, c'est le français", cela veut dire la même chose que "la langue officielle au Québec, c'est le français". J'ai entendu ce groupe de gens dire cela.

J'ai également entendu, M. le Président, le ministre des Affaires municipales nous dire autre chose, exprimer un certain nombre de réticences à l'égard de cette affirmation. J'ai entendu le député de Saint-Jean dire cela.

J'ai entendu, c'est peut-être cela le troisième son de cloche, le député de Sainte-Anne, qui a voté contre le projet de loi en deuxième lecture — il faut se le rappeler — nous parler même de possibilité d'amender l'article 1 pour y inclure l'anglais comme langue officielle. Et j'ai vu, M. le Président, durant toutes nos interventions, le député de Sainte-Anne — j'espère que je ne le trahis pas, c'était public à ce moment-là, il était sur la banquette rouge derrière les sièges ministériels — opiner du bonnet en faveur de ce que les membres de l'Opposition disaient lorsqu'on demandait de clarifier, de préciser le plus possible le projet de loi et, en particulier, l'article 1. Ce n'était peut-être pas dans le sens que nous voulons le clarifier que le député de Sainte-Anne veut le clarifier, mais peu importe, M. le Président. Il y a une chose qui est sûre autour de cette table: l'article 1, on ne peut pas, comme tel, l'adopter dans sa forme actuelle et cela nous prend, à mon avis, M. le Président, votre opinion pour rédiger une motion qui sera, elle, jugée, recevable. Comme je vous le mentionnais tout à l'heure, c'est un de vos rôles, je pense, et vous m'avez approuvé là-dessus, de diriger les membres de la commission, qu'ils soient les membres de l'Opposition ou qu'ils soient les membres du côté ministériel, en vue de faire passer le véritable message que tous les parlementaires veulent faire passer au sein de cet article 1 qui, encore une fois, je le répète et on ne le dira jamais trop souvent, est l'article fondamental de ce projet de loi.

Cet article voudra dire quelque chose si on le précise. Cet article aura des conséquences énormes. Si on ne précise pas ces conséquences, on est en droit de dire dès maintenant, M. le Président, qu'on peut douter dans quel sens elles vont affecter la vie collective des Québécois. Si on le précise, d'autre part, tous les Québécois sauront exactement où se situer par rapport au projet de loi no 22.

On n'a pas, M. le Président, à vous convaincre et je pense que l'attachement et l'intérêt que le député de Saint-Jacques et le député de Sauvé, le chef de l'Opposition, ont mis à l'audition publique des mémoires, d'une part, et, d'autre part, l'intérêt que les membres de l'Opposition ont mis à la discussion du projet de loi jusqu'à maintenant, je pense que vous connaissez dès maintenant notre intérêt relativement à ce projet de loi. H est important pour nous de savoir exactement où nous allons.

Il est important que les ministériels nous disent autre chose que ce qu'ils nous ont dit jusqu'à maintenant. S'il faut le faire par l'entremise de motions, on va prendre le temps nécessaire poor que les ministériels, en particulier, le premier ministre, fassent autre chose que nous présenter ce panneau-réclame que constitue l'article 1. Jusqu'à maintenant, le panneau-réclame nous dit ce qu'est le produit, mais personne n'est sûr du produit. Personne n'a testé le produit. Je le dis dans le sens légal du mot. C'est pour ça que je voterai en faveur et que l'Opposition sera favorable à la motion du député de Saint-Jacques en vue d'ajourner nos travaux jusqu'à demain. J'ajoute...

M. HARDY: Je retire.

M. BURNS: Pardon? Excusez, vous dites?

M. HARDY: Je pensais que vous aviez terminé.

M. BURNS: Non. Je dis, M. le Président, qu'en plus de ça, même s'il y a eu un ajournement de fin de semaine, même si les membres de la commission ont pu, brièvement, je dis brièvement, se reposer, prendre quelques heures de repos, je pense que, quand on est rendu à des points aussi fondamentaux, aussi centraux, aussi majeurs que celui qu'on discute actuellement, il n'est que normal qu'aux environ de 11 h 30 ou 11 h 45, on ajourne. C'est pour ça que le député de Saint-Jacques a fait sa motion vers 11 h 40 ou 23 h 40. Cela nous permettra, de part et d'autre, de réexaminer la situation eu égard aux décisions que vous avez prises ce soir, que vous avez rendues. De votre côté, possiblement, M. le Président, je ne dirais pas que vous pourrez réviser votre décision, parce que, comme vous le savez, je ne peux pas vous demander de réviser votre décision, je ne peux pas en appeler. Je vous ai dit tout à l'heure, dès que je vous ai demandé une directive, que je n'avais nullement l'intention de le faire, même si j'en avais eu le droit. Je me soumets à votre décision, bien que ce ne soit pas tellement de bon gré. Cela vous permettra, à vous aussi, de réexaminer la situation à la lueur de l'objectif au moins de l'Opposition, cet objectif étant de mettre véritablement devant la population le véritable sens, le fond de l'article 1. Si vous me dites que l'article 1 a plus ou moins d'importance, si un ministre, du côté du gouvernement, que ce soit le ministre de l'Education ou le premier ministre ou le ministre des Affaires culturelles ou même, à la rigueur, le sympathique ministre d'Etat aux sports et aux loisirs, nous disait que ce n'est pas important, que c'est un article secondaire, M. le Président, on sera tout près à ce moment-là d'examiner d'autres articles.

Mais selon nous, et jusqu'à preuve du contraire, on considère que l'article 1 est suffisamment fondamental, M. le Président. "Il est minuit, Dr Schweitzer".

M. HARDY: Vous allez aller vous reposer...

M. BURNS: Alors on va aller se reposer, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Gratton): La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain après la période des questions.

(Fin de la séance à 23 h 58)

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