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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le jeudi 7 juillet 1977 - Vol. 19 N° 146

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition des mémoires sur le projet de loi no 1 - Charte de la langue française au Québec


Journal des débats

 

Audition des mémoires sur

le projet de loi no 1 :

Charte de la langue française

au Québec

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et messieurs!

Je constate qu'il y a quorum et nous commençons une nouvelle séance. Si chacun veut regagner son fauteuil et cesser les conversations particulières. Nous commençons une nouvelle séance de la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications pour l'étude, après première lecture, du projet de loi no 1, Charte de la langue française au Québec. J'appelle les membres de la commission et je les prie de m'indiquer les changements, s'il en est.

M. Alfred (Papineau), M. Bertrand (Vanier), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Belle-feuille (Deux-Montagnes), M. Dussault (Châteauguay), M. Godin (Mercier) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Charbonneau (Verchères); M. Laplante (Bourassa), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laurin (Bourget), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Paquette (Rosemont). Y a-t-il remplacement pour M. Paquette (Rosemont)?

Une Voix: II n'est pas encore remplacé.

Le Président (M. Cardinal): S'il y a remplacement, il faudrait me l'indiquer avant la fin de cette séance, s'il vous plaît.

M. Roy (Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee). Je reviens: M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Lacoste (Sainte-Anne); M. Samson (Rouyn-Noranda).

Je fais aussi, comme le règlement l'exige, l'appel de nos invités. Je leur demanderais d'indiquer leur présence. Ordre des ingénieurs, mémoire 230; Congrès juif canadien, mémoire 112; Grand conseil des Cris du Québec. Merci, mémoire 101.

Sur ce j'invite immédiatement l'Ordre des ingénieurs à se présenter devant nous.

Pendant ce temps, je donne le programme de la journée. La commission a une première séance aujourd'hui à compter du moment présent jusqu'à 13 h. A 13 h, en vertu de l'avis donné à la Chambre, je devrai ajourner sine die.

Il y a Assemblée nationale à compter de 15 h et après les affaires courantes et la période de questions, c'est-à-dire vers 16h, nous reprendrons nos travaux; ce sera une nouvelle séance. Cette séance sera suspendue à 18h pour reprendre vers 20 h ou 20 h 15, suivant l'avis qui sera donné à l'Assemblée nationale et ceci jusqu'à 23 h au moins. J'espère qu'avec la collaboration des membres de la commission, nous pourrons bien recevoir nos invités et les entendre tous.

Alors, messieurs, vous connaissez je pense la règle, cela fait déjà quelques jours que vous attendez; vous avez entendu cette commission. Vous avez 20 minutes pour exposer votre mémoire ou un résumé du mémoire. Si vous désirez que ce qui n'est pas dit soit déposé en annexe au journal des Débats, vous le demandez tout simplement à la présidence; vous devez cependant, auparavant, vous identifier, s'il vous plaît.

Ordre des ingénieurs du Québec

M. Perron (Gilles): M. le Président, mon nom est Gilles Perron, président de l'Ordre des ingénieurs. Immédiatement à ma droite, Jacques Soucy, directeur général, à mon extrême droite, Vincent Foster, représentant du public, membre du bureau et membre du comité administratif de l'Ordre des ingénieurs et à ma gauche, Robert Masse, secrétaire de l'ordre.

Le Président (M. Cardinal): J'ai trois documents concernant votre ordre. Je ne sais pas ce que vous avez l'intention de nous...

M. Perron: Je pourrais peut-être, M. le Président, vous exposer la façon dont on entend présenter, si vous voulez, nos vues. Nous avons déposé, le 3 juin, un mémoire et hier ou avant-hier, nous avons apporté deux autres documents, un document qui est en blanc, celui-ci, qui est une analyse du sondage et en troisième lieu un autre cahier vert qui s'intitule: Considérations supplémentaires au mémoire.

Je croyais d'abord vous donner un résumé, très général, du sondage et ensuite vous présenter nos suggestions quant aux modifications que nous proposons au projet de loi no 1.

Le Président (M. Cardinal): Désirez-vous que les autres documents que vous n'aurez pas lus soient portés...

M. Perron (Gilles): Je désirerais qu'ils soient tous déposés, s'il vous plaît.

Le Président (M. Cardinal): Non seulement déposés, mais publiés en annexe au journal des Débats?

M. Perron (Gilles): Publiés, c'est notre désir, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Cette demande est accordée, monsieur (Voir annexe 1). Vous pouvez commencer. Nous commençons à 10 h 17 minutes.

M. Perron (Gilles): Premièrement, je désirerais remercier la commission parlementaire de donner l'occasion à l'Ordre des ingénieurs de s'exprimer.

Comme vous le savez, notre profession est une des plus mobiles. Elle est composée de 20 000 membres en gros, c'est une profession que vise peut-être ou, enfin, qui est affectée peut-être un peu particulièrement par le projet de loi no 1.

La composition de l'Ordre des ingénieurs est, au total, de 58% de francophones et de 42% d'anglophones. Parmi les membres qui résident au Québec, ces pourcentages changent: 62% de francophones et 38% d'anglophones oeuvrent au Québec. Conséquemment, il nous est apparu difficile de présenter un mémoire strictement philosophique ou d'opinion, étant donné ce clivage un peu automatique qui pouvait se présenter entre les deux groupes sur des questions visant la langue et, donc, particulièrement plus émotives. A cette fin, pour en arriver à être plus factuels, nous avons décidé, même dans des délais très courts, de procéder à un sondage scientifique avec un échantillonnage de 2000 membres — au-delà de 10% conséquemment — 2000 membres parmi ceux qui résident au Québec et répartis selon les pourcentages de la communauté anglophone et de la communauté francophone. Nous avons émis un questionnaire comportant 28 questions; la réponse a été extraordinairement bonne, jusqu'à 65%, soit environ 1300 répondants sur 2000. Le sondage lui-même a été confié à une firme spécialisée, parce qu'on voulait garder une entière objectivité.

D'autre part, nous avons reçu beaucoup de requêtes de nos membres, tant verbales qu'écrites et à la suite du congrès annuel des 10 et 11 juin. Nos membres ont demandé que nous poussions l'analyse du sondage plus loin et que nous rendions public le contenu du mémoire et du sondage. Conséquemment, nous avons confié à une deuxième firme spécialisée l'analyse des données du sondage: c'est ce document blanc.

Je voudrais vous donner assez brièvement les résultats de ce sondage. Disons que la marge d'erreur, d'après les spécialistes qui ont fait l'analyse, est très faible. Elle est moins de 5%. Par ailleurs, les données brutes furent pondérées, parce qu'on a eu un peu plus de répondants anglophones que francophones. Nous avons dû faire une pondération pour représenter précisément les deux groupes. Le questionnaire du sondage comprenait 28 questions, dont une seule était ouverte. Le souci d'une méthodologie rigoureusement scientifique a présidé à la conception du questionnaire.

La compilation, comme je vous le disais, a été présentée dans le mémoire déposé à la commission parlementaire. La présentation du questionnaire était claire. Il n'y a pas lieu de croire que des erreurs significatives peuvent être associées à la codification des réponses. Les réponses au sondage ont été regroupées selon la région, le secteur de travail et l'âge des répondants pour chacun des groupes linguistiques.

Ainsi, 66% des ingénieurs, qui ont répondu au questionnaire, proviennent du Montréal métropolitain, alors que 34% demeurent dans d'autres régions du Québec. La moitié des répondants, 49%, travaillent dans le secteur industriel, 23% oeuvrent dans le génie-conseil, 19% dans la fonction publique et 9% dans l'enseignement ou autre.

La majorité des répondants, tant francophones qu'anglophones, soit 46%, ont entre 31 ans et 45 ans. Cependant, la proportion des répondants âgés de plus de 46 ans est plus élevée chez les anglophones, soit 40%, que chez les francophones, 20%.

Dans l'analyse de résultats, afin de bien cerner le point de vue des ingénieurs, les variables suivantes ont été retenues pour l'analyse: le groupe linguistique, la région de résidence, l'âge, et le regroupement des ingénieurs selon leur réponse aux questions suivantes:

Question 2: "Dans sa forme actuelle, pensez-vous que le projet constitue un pas en avant pour le Québec"?

Question 22: "Si ce projet de loi devenait loi, prévoyez-vous demeurer ou quitter le Québec"?

Question 24: "Avez-vous déjà lu intégralement le texte du projet de loi no 1?"

Ainsi, l'ensemble des résultats démontre que les opinions diffèrent grandement selon la langue maternelle. Il fallait s'y attendre. Ces résultats sont donc le reflet de véritables microcosmes de la communauté québécoise; d'un côté, les francophones et de l'autre, les anglophones.

Le profil des répondants: L'analyse des résultats du sondage a permis d'identifier le profil des répondants qui ont une attitude favorable à l'égard du projet de loi. Ce sont essentiellement les ingénieurs francophones, âgés de moins de 30 ans, qui oeuvrent dans le secteur public et qui résident en dehors de la région de Montréal.

De la même façon, nous avons pu tracer le profil des répondants qui prévoient quitter le Québec si toutefois le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle et, par conséquent, qui ont une attitude défavorable vis-à-vis du projet de loi. Ce profil est à peu près à l'inverse de l'autre.

Les points saillants. Connaissance de la langue seconde et utilité de l'anglais. La majorité des ingénieurs possède une connaissance jugée suffisante ou excellente de la langue seconde. On notera cependant que le terme "suffisante" peut donner lieu à diverses interprétations. Il est intéressant de noter que, quel que soit le groupe linguistique auquel il appartient, l'ingénieur évalue hautement la connaissance de l'anglais, tant dans sa formation que dans la pratique même du génie. Connaissance du projet de loi. La majorité des ingénieurs anglophones, 55%, a lu intégralement le texte de la loi no 1 alors que ce n'est le cas que pour 36% des ingénieurs francophones. Dans l'ensemble, ceux qui ont lu intégralement le projet valorisent plus que les autres la connaissance de l'anglais dans la pratique du génie et utilisent cette langue plus souvent dans leur milieu de travail.

Impact du projet de loi. La majorité des membres de l'ordre, 61%, qui est faite de 95% d'anglophones et de 39% de francophones, considère que, dans sa forme actuelle, le projet de loi ne constitue pas un pas en avant pour le Québec. Cette opinion varie, cependant, selon le secteur de

travail du répondant. Ainsi, ceux du secteur privé croient, pour la plupart, que le projet n'est pas un pas en avant pour le Québec, tandis que ceux du secteur public croient le contraire.

Modalités d'application. A la question suivante: "Selon vous, les modalités d'application vous apparaissent-elles équitables, généreuses, répressives, originales ou banales?" il se dégage qu'une majorité d'ingénieurs francophones est d'accord avec le projet de loi. Quelques-uns pensent même qu'il ne va pas assez loin. Les autres francophones et les anglophones en très grande partie se montrent défavorables et estiment que les modalités d'application sont répressives. Notons toutefois que plus l'ingénieur est jeune, plus il tend à être d'accord avec les modalités d'application et les mécanismes institutionnels prévus par le projet de loi.

Les modalités d'application touchant la profession. La presque totalité des membres, 92%, admet que tout ingénieur non francophone, qui travaille ou désire s'installer au Québec, devrait acquérir une connaissance suffisante du français. Par contre, quant au temps requis pour apprendre le français, les opinions sont partagées. Les résultats montrent que ce sont les anglophones, à 52%, principalement, qui estiment que trois ans est une période insuffisante pour l'apprentissage.

Par ailleurs, les ingénieurs divergent d'opinion quant à la possibilité pour leurs firmes de fonctionner uniquement en français au Québec. On vous réfère ici à l'analyse des résultats, page 17.

Pour ce qui concerne les communications de l'ordre avec ses membres, 51% des ingénieurs francophones et 96% des anglophones ne sont pas d'accord pour que l'ordre communique exclusivement en français avec ses membres et le public.

Par ailleurs, la majorité appuie la politique de l'ordre de fournir tous les documents officiels, les textes de loi et les règlements pertinents à la profession dans une version anglaise.

Inquiétudes soulevées par le projet de loi. La majorité des ingénieurs, qu'ils soient anglophones ou francophones éprouvent des inquiétudes vis-à-vis du projet de loi no 1. Dans l'ensemble, les ingénieurs anglophones sont beaucoup plus inquiets que leurs confrères francophones. Il ressort clairement que, tant pour les francophones que pour les anglophones, ce sont les conséquences possibles et, en particulier au plan de l'économie, qui suscitent le plus d'inquiétude.

A noter cependant que seulement 17% des ingénieurs francophones indiquent que le projet de loi ne les inquiète pas.

En résumé, les ingénieurs anglophones, pris comme groupe, sont ceux qui expriment le plus d'inquiétude face au projet de loi no 1. Les ingénieurs de la région de Montréal sont plus inquiets que leurs confrères des autres régions du Québec. Il est intéressant de constater que ce sont ceux qui ont lu intégralement le texte du projet qui sont plus inquiets que ceux qui ne l'ont pas lu intégralement.

Par ailleurs, on a pu remarquer que le niveau d'inquiétude croît avec l'âge.

Conséquences probables du projet de loi. Il ressort clairement que les ingénieurs francophones voient différemment de leurs confrères anglophones les conséquences probables. Par exemple, chez les ingénieurs francophones, à 42% on croit que le projet de loi entraînera une amélioration des perspectives d'emploi pour les francophones alors que seulement 22% des anglophones sont du même avis. Il faut noter que 35% des francophones et 80% des anglophones sont d'avis que ce projet entraînera une baisse du niveau de vie au Québec.

Ainsi, une légère majorité de francophones se révèle par ses réponses favorables au projet de loi, alors que la vaste majorité des anglophones est contre. Notons que la majorité des réponses des francophones et des anglophones peuvent être interprétées comme suit: Conséquences sur l'économie. A court terme, il se dégage un consensus à l'effet que la loi aura un impact négatif sur l'économie. A long terme cependant, 40% des francophones croient que l'impact sera positif alors que 33% croient qu'il sera négatif. Chez les anglophones, la très grande majorité est d'avis que l'impact sera négatif.

Exode des firmes d'ingénieurs. Sur cette question, on observe une très nette différence d'attitude entre les anglophones et les francophones. 75% des ingénieurs anglophones croient qu'il y aura un exode important de firmes d'ingénieurs du Québec. La proportion est inversée chez les francophones.

Perspectives d'emplois: La loi aura, selon les répondants, des répercussions sur leurs perspectives d'emplois. Ce sentiment est plus marqué chez les anglophones, soit 93% que chez les francophones, 61%. Dans l'ensemble, l'impact serait négatif. Notons, toutefois, qu'un nombre élevé de francophones, 65%, croit que l'application de la loi favorisera l'accès d'ingénieurs francophones à des postes supérieurs. Les anglophones, quant à eux, et dans la même proportion, croient le contraire.

Conséquence personnelle: Globalement, les membres domiciliés au Québec croient que le projet de loi aura un impact défavorable sur leur travail, c'est-à-dire que 23% croient que l'impact sera favorable, 44% croient qu'il n'y aura aucun impact, et 33% croient qu'il sera dévaforable. Alors, ceci est un sommaire de l'analyse des données provenant du sondage. Maintenant, je voudrais, je pense qu'il me reste suffisamment de temps, vous présenter les modifications que l'Ordre des ingénieurs suggère.

A la lumière des opinions exprimées par nos membres lors de ce sondage, l'ordre a jugé bon de suggérer quelques modifications aux articles qui le concerne directement dans son fonctionnement. En passant, c'est le dernier cahier vert déposé, qui s'intitule "Considérations supplémentaires au mémoire".

En page 2, à l'article 4, les travailleurs ont le droit fondamental d'exercer leurs activités en français, quelles que soient la nature, la forme et la taille de l'entreprise. Cet article proclame un droit fondamental et universel, quelle que soit la situation de l'entreprise. Ce droit est tempéré par

d'autres articles, tels que l'article 37 et l'article 113. L'ordre propose le libellé suivant: "Tout Québécois a le droit de travailler en français". La reconnaissance d'un droit fondamental n'a pas besoin d'être qualifiée ou précisée par un quelconque, etc. Ainsi amendée, la loi proclame le droit et impose à la société la nécessité de s'assurer que tout Québécois, qui veut l'exercer, pourra le faire. Le libellé de l'amendement rend l'article similaire aux articles 2, 3, 5 et 6 qui traitent aussi des droits.

L'article 10 dit qu'une "version anglaise des textes de loi est imprimée et publiée par les soins de l'administration". Nous suggérons le libellé suivant: "Une version anglaise des projets de loi, des textes de Ioi et des projets de règlements, des règlements afférents et des avis, est imprimée et publiée par les soins de l'administration". Nous croyons qu'il est aussi important que les projets de loi soient publiés en anglais que le texte des lois elles-mêmes.

L'opinion générale des membres de l'ordre soutient cette modification suggérée; réponse aux questions 18 f) et 18 g). A l'article 27, il est dit que "les ordres professionnels doivent communiquer en français avec leurs membres, ainsi qu'avec le public."

Nous ne suggérons aucune modification car le libellé n'exclut pas la possibilité de communiquer également en anglais. Les résultats de l'enquête, questions 18d et 18e indiquent que les membres de l'Ordre des ingénieurs sont d'accord pour qu'une version anglaise accompagne la version française.

L'article 32, et celui-ci est d'importance pour nous... "Les ordres porfessionnels peuvent délivrer des permis temporaires valables pour une période d'au plus un an, aux personnes autorisées à exercer leur profession en vertu des lois d'une autre province ou d'un autre pays et qui ne remplissent pas les conditions de l'article 30 quant à la connaissance de la langue officielle. Ces permis ne sont renouvelables que deux fois et sous réserve que l'intérêt public le justifie. Pour chaque renouvellement, les intéressés doivent se présenter à des examens tenus conformément aux règlements du gouvernement".

Le chapitre du projet de loi qui traite de la langue de certains organismes parapublics nous touche dans notre fonctionnement organique et technique, et plus particulièrement dans notre rôle précis de délivrance des permis de pratique. Nous croyons que les conditions d'obtention d'un permis de pratique autres que la langue sont du ressort du Code des professions et de la loi particulière de chaque ordre professionnel et ne devraient pas se trouver de quelque façon dans une autre loi. Nous référons ici aux mots "autorisées à exercer leur profession en vertu des lois d'une autre profession ou d'un autre pays" dans le premier alinéa de l'article 32. Ces mots n'ajoutent rien de valable à l'article. Au contraire, à cause du grand nombre de pays sans loi autorisant l'exercice du génie ou autre profession, tout immigrant de ces pays ne pourrait obtenir un permis temporaire. Par ailleurs, et tout en respectant la primauté de la langue française, le projet devrait tenir compte de la difficulté certaine d'apprendre la langue française, surtout pour les ingénieurs, à cause de la nature de leur travail qui les oblige à une grande mobilité. Nous suggérons donc que la période minimale de validité soit de deux ans plutôt qu'un. A ce moment, on pourrait limiter la possibilité de renouvellement du permis à une seule fois au lieu de deux.

Le chapitre 5 du projet de loi no 1 ne couvre d'aucune façon l'exercice temporaire de profession par des personnes non domiciliées au Québec, mais qui y viennent de temps à autre, soit à titre d'expert, soit à titre de consultant dans le contexte d'un travail ou d'un projet bien spécifique, ou même qui ne viennent pas au Québec, mais posent des actes professionnels nécessitant la sanction de l'ordre professionnel. Selon la Loi des ingénieurs, ne peuvent être admises à l'ordre que les personnes domiciliées au Québec ou encore domiciliées dans une province contiguë, mais travaillant continuellement au Québec. Lorsque des experts, spécialistes ou consultants domiciliés hors du Québec sont engagés pour des projets spécifiques situés au Québec, la Loi des ingénieurs nous autorise présentement à accorder une licence temporaire valide pour chaque projet spécifique et ce pour la durée du projet. Le Code des professions reconnaît ce besoin en autorisant l'émission d'autorisations spéciales valides pour trois mois, durée nettement insuffisante pour un projet d'irgénierie.

Si les, articles 30 et 32 du projet de loi entendent inclure tous les permis, les licences et autorisations spéciales, nous sommes alors d'avis qu'il y a nécessité d'ajouter un article 32a qui pourrait se lire comme suit: "Sous réserve des conditions imposées dans leur loi particulière, les ordres professionnels peuvent accorder des autorisations spéciales aux personnes possédant les qualifications professionnelles requises, mais qui ne sont pas domiciliées au Québec et n'y pratiquent pas leur profession de façon continue". Il est certain que nous devrons toujours avoir recours, occasionnellement, à des ingénieurs de l'extérieur du Québec et qu'ils seront généralement anglophones. Chez les ingénieurs canadiens, il existe des ententes qui permettent justement ces échanges entre provinces et qui ont été, jusqu'ici, favorables au Québec. Il y a en effet plus d'exportations de Québec, par exemple, avec l'Ontario, que nous n'avons d'importations.

Plusieurs questions du sondage ont une incidence sur l'article 32. Ainsi, 52% des ingénieurs anglophones sont d'avis que trois ans ne constituent pas une période suffisamment longue pour apprendre le français.

Par ailleurs, 95% des ingénieurs francophones et 86% des ingénieurs anglophones croient que tout ingénieur non francophone qui travaille ou désire s'installer au Québec, devrait acquérir une connaissance suffisante du français.

De plus, 12% des ingénieurs anglophones ont indiqué, spontanément, qu'une des conséquences probables du projet de loi no 1, s'il était adopté tel quel, serait la difficulté de recruter des ingénieurs qualifiés de l'extérieur du Québec.

Article 36: "II est interdit à tout employeur de congédier ou rétrograder un salarié pour la seule raison qu'il ne parle que le français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une langue donnée, autre que le français. Toute contravention au présent article, en plus de constituer une infraction à la présente loi, autorise le salarié à faire valoir ses droits auprès d'un commissaire-enquêteur nommé en vertu du Code du travail, au même titre que s'il s'agissait d'un congédiement pour activités syndicales, les articles 14 à 19 du Code du travail s'appliquent alors, mutatis mutandis".

Cet article pourrait créer de sérieux problèmes aux bureaux d'ingénieurs. Prenons le cas de deux ingénieurs francophones, dont l'un est uni-lingue et l'autre est bilingue. Le premier a plus d'ancienneté, ils travaillent tous deux à un projet de l'Etat. Le travail terminé, le seul projet où ils peuvent être affectés en est un pour un client américain. La connaissance de l'anglais est nécessaire pour y travailler. Selon l'article 36, il semblerait difficile de congédier l'ingénieur unilingue et de garder l'ingénieur bilingue. Nous craignons aussi que cet article puisse être utilisé comme moyen de pression par certaines personnes amenées à être congédiées lors de la terminaison du contrat.

Notons à cet égard que 63% des ingénieurs francophones sont d'avis que la connaissance de l'anglais est nécessaire dans la pratique du génie.

L'article 37: "II est interdit à tout employeur d'exiger, pour l'accès à un emploi ou à un poste, la connaissance d'une langue autre que le français, à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite la connaissance de cette autre langue, conformément aux règlements adoptés à cet effet par l'Office de la langue française. Il incombe à l'employeur de prouver que la connaissance de l'autre langue est nécessaire."

Il faudrait rappeler au législateur que, pour la très grande majorité des postes réservés aux ingénieurs, l'habileté à lire l'anglais est essentielle. Pour un nombre élevé de postes, comprendre l'anglais et le parler peut aussi s'avérer nécessaire. Compte tenu de l'étendue de ces exigences, il est important de connaître la réglementation de l'office. Nous avons des réserves sur la valeur de cet article. Si on ne peut mieux justifier son utilité, nous suggérons de l'abolir.

Les réponses données à la question 14 du sondage, notamment par les ingénieurs francophones, soulèvent de nombreuses interrogations quant à la pertinence de l'article 37. De plus, notons que 30% des ingénieurs francophones et 76% des ingénieurs anglophones ne croient pas que leurs firmes pourraient fonctionner uniquement en français au Québec. L'article 37 pourrait donc poser des problèmes importants pour les entreprises employant des ingénieurs.

Articles 52 et 58: Afin de faciliter la mobilité du personnel dans les entreprises ou établissements dont le rayonnement administratif dépasse les frontières du Québec, nous proposons les modifications suivantes aux articles 52 et 58. Article 52, je vais simplement au paragraphe a) où nous désirons ajouter "ou ailleurs au Canada" et qui se li- rait comme suit: "Les enfants dont le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs au Canada, l'enseignement primaire en anglais". Quant au reste, cela va.

Article 58: Le présent chapitre ne s'applique pas aux personnes qui, aux conditions fixées par règlement — et là, nous voulons ajouter: "afférant à cette loi"— sont de passage au Québec ou y séjournent pour une durée de deux ans. Cette exemption est renouvelable une seule fois. Ici, je pourrais me permettre un commentaire. En général, les projets de génie sont couverts par une période de deux ans et je pense qu'avec un renouvellement possible, nous couvrirons à peu près 99% des projets de génie.

L'enquête ne portait pas spécifiquement sur les questions soulevées par les articles relatifs à la langue d'enseignement.

Cependant, on doit noter que les articles 52 et 58 ont une incidence sur la facilité qu'auront les entreprises à recruter au Québec des ingénieurs provenant de l'extérieur. De nombreux organismes ont fait état de ce problème, en particulier, les directeurs des centres de recherche industrielle à Montréal.

Articles 67 à 74. A cause des pouvoirs discrétionnaires qui lui sont confiés, il y aurait tout avantage à faire de l'office un organisme de concertation en lui ajoutant un conseil d'administration formé principalement de personnes non employées de l'Etat. Le président et les deux vice-présidents pourraient être fonctionnaires de l'Etat, comme à l'actuelle régie. Les membres de l'ordre, dans une proportion de 61%, sont d'avis que les mécanismes institutionnels prévus sont trop lourds. De plus, les ingénieurs ont indiqué, dans une proportion de 38%, que les modalités d'application les inquiétaient. A noter également que 36% des ingénieurs ont indiqué qu'une des conséquences probables du projet de loi no 1 serait une plus grande bureaucratisation du système gouvernemental.

Article 86. "Sur la publication de la liste visée à l'article 85 dans la Gazette officielle du Québec, l'emploi des expressions et termes y figurant devient obligatoire dans les textes et documents émanant de l'administration, dans les contrats auxquels elle est partie ainsi que dans les ouvrages d'enseignement, de formation ou de recherche publiés en français au Québec et approuvés par le ministre de l'Education."

Les pouvoirs confiés à l'office par cet article sont trop vastes. Le manuel scolaire ne pourrait être approuvé par le ministre de l'Education s'il ne contient pas la bonne terminologie. En dernière analyse, c'est l'usage qui justifie l'acceptation d'un mot. Les ingénieurs sont parmi les principaux usagers de nouvelles terminologies et de terminologies techniques. A cet égard, il faudrait prévoir des mécanismes plus souples.

Articles 106 et 119. La loi no 1 oblige toutes les entreprises de plus de 50 employés à avoir un programme de francisation. Contrairement à la loi 22 qui était compensatoire, la loi 1 est d'application universelle, comme le sont la majorité des lois. Les articles 106 et 119 confèrent à l'office un

pouvoir de sanction, ce qui le rend à la fois juge et partie. Nous croyons qu'on devrait avoir le moyen de recourir au pouvoir judiciaire dans les cas d'infractions présumées. Ceci devrait être le mécanisme retenu par la loi no 1. Les réponses données à la question 3 sont en ce sens pertinentes, la majorité des membres de l'ordre, 57%, trouve que les modalités d'application sont répressives.

Articles 115 et 116. Tout programme de francisation doit refléter un engagement de l'entreprise. C'est donc la direction de l'entreprise qui doit en être responsable. Le rôle qu'accorde le projet de loi no 1 au comité de francisation peut créer des problèmes.

Nous croyons que ce comité devrait avoir un rôle uniquement consultatif.

Article 119. Bien que le texte de cet article n'exclue pas la possibilité d'appel des décisions de l'office, si ce droit existe, il nous semble préférable que les modalités soient précisées et fassent partie de l'article 119.

M. le Président, je vous remercie.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Perron. Il est 10 h 43. Depuis 10 h 37, j'ai présumé le consentement unanime de la commission pour vous laisser dépasser le temps prévu par la motion.

M. Perron (Gilles): Merci de votre gentillesse.

Le Président (M. Cardinal): Je vous en prie, c'est à la commission que vous le devez. Alors, M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: M. le Président, je m'adresserai d'abord à vous, si vous le permettez, et je vous prierais, en l'occurrence, d'excuser l'absence du ministre d'Etat au développement culturel, retenu ce matin par une réunion spéciale du cabinet.

Messieurs de l'Ordre des ingénieurs, nous vous remercions infiniment de vous être présentés devant nous ce matin, non pas comme témoins, mais beaucoup plus comme invités, pour nous faire connaître vos points de vue sur la Charte de la langue française au Québec. Ces remerciements sont d'autant plus sincères que le travail que vous avez proposé revêt une originalité assez remarquable.

Cela a été véritablement l'étude d'un microcosme en y donnant la dimension de la vie quotidienne.

Quelques opinions ont été exprimées, mais on les prend justement comme des opinions. Je voudrais également vous remercier de nous avoir présenté ce matin vos deux autres mémoires. Le premier, celui qui porte sur l'évaluation méthodologique, est très important, à mon avis. Si vous vous souvenez, au moment où vous avez fait connaître publiquement les résultats du sondage, ces derniers ont été immédiatement mis en cause, par certains, du point de vue méthodologique justement.

Je me souviens, de mémoire, qu'on parlait de certaines distorsions possibles à cause du fait que le pourcentage des répondants francophones et anglophones n'était pas similaire. Vous nous affirmez ce matin — je n'ai malheureusement pas eu le temps de prendre connaissance du dossier — vous nous affirmez ce matin qu'il y a eu, au moment du dépouillement et de l'interprétation, une pondération.

Ce sera donc, en conséquence, très utile pour la crédibilité même du travail que vous avez effectué.

Je vous remercie également de nous avoir fait parvenir ce matin, d'une façon plus détaillée et consécutivement au premier travail, des recommandations précises. On y reviendra tantôt; je n'ai malheureusement pas eu le temps d'en prendre connaissance complètement. C'est un peu dommage parce que j'aurais aimé réagir pour que vous partiez, j'allais dire, beaucoup plus satisfaits. Beaucoup de ces recommandations ont déjà été soumises, voire même la presque totalité, que je sache, après l'avoir parcouru en lecture rapide. Cela vient confirmer certaines demandes déjà faites par d'autres groupes.

A ce compte-là, on est très heureux de retrouver justement ce recoupement, ce qui nous permettra justement de faire des réajustements. On nous accuse de beaucoup de choses à propos de la charte. Mais quelle est la raison d'être d'une commission parlementaire. C'est justement pour demander aux Québécois en quoi ils sont d'accord ou non avec l'écriture même du projet de loi no 1.

Les ingénieurs acceptent, dites-vous, cette fois, non pas avec des opinions personnelles, mais bien après une véritable enquête sur le terrain, les objectifs poursuivis par le projet de loi. En même temps — ça, je crois que c'est tout à fait normal, c'est d'ailleurs pour ça que nous sommes ensemble ce matin — ils affichent certaines réticences sur le plan des modalités d'application de la charte. Nous sommes heureux justement de les entendre, nous sommes précisément ici pour ça.

L'Ordre des ingénieurs, ou plutôt les ingénieurs eux-mêmes, se divisent particulièrement en deux groupes au Québec: ceux qui travaillent dans le secteur public et ceux qui travaillent dans le secteur privé. J'aimerais, au préalable, vous demander, au moins approximativement, le pourcentage des quelque 20 000 ingénieurs qui travaillent dans le secteur public par rapport au secteur privé.

M. Perron (Gilles): J'ai ici des données très détaillées: à la fonction publique, groupe fédéral, provincial et municipal: 13,3%; en pratique privée, patrons et employés: 16,5%, dans l'industrie: 62,4%; dans l'enseignement: 5,2%; divers: 2,7%.

M. Fallu: De l'ensemble de ces groupes, quels sont ceux qui sont en relation d'employés par rapport à patrons ou encore artisans autonomes?

M. Perron (Gilles): Je dirais que... Vous permettez que je vous fasse répéter la question?

M. Fallu: Ceux qui sont en relation d'employés, j'allais dire au sens du Code du travail,

c'est-à-dire ceux qui sont salariés-cadres, non, n'utilisons pas le mot "cadre" pour le moment, salariés au sens du Code du travail.

M. Perron (Gilles): Au sens du Code du travail. A ce moment-ci, cela exclut un certain niveau de cadres. Je suis obligé de vous donner une estimation et j'espère que si mes confrères trouvent que ce n'est pas à point... On considère qu'il y a environ 95% ou entre 90% et 95% des membres de l'Ordre des ingénieurs qui sont des salariés, à divers niveaux.

Si on exclut les cadres supérieurs, je dirais que c'est probablement de l'ordre de 80%. Je ne sais pas si mes confrères sont d'accord avec cette opinion.

M. Fallu: Du moins, c'est un ordre de grandeur que vous nous donnez.

M. Perron (Gilles): C'est un ordre de grandeur, mais je ne l'affirmerais pas d'une façon catégorique.

M. Fallu: Cette question est importante, notamment à propos de certains articles qui sont relatifs à cette relation entre employeur et employés. C'est à cette fin que je demande une précision.

Les recommandations que vous faites ce matin à la commission sont nombreuses. J'aimerais, très rapidement et sans aller au fond, comme je vous l'ai dit tantôt, étant donné que le document vient de nous arriver, réagir un peu à vos suggestions.

A l'article 4, notamment, je trouve que la suggestion que vous nous faites est très positive, à savoir, distinguer dans l'article le principe général de certaines modalités qui s'y appliquent. Je ne dis pas carrément que nous sommes prêts à l'intégrer dans le projet de loi, mais c'est une suggestion que, pour ma part, je trouve extrêmement positive.

A propos de l'article 10, la question nous est souvent posée: Pourquoi fait-on seulement allusion, dans le texte, au texte de loi, et non pas au projet, et non pas au règlement? Je crois qu'il faut se référer à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Excusez une référence aussi lointaine et surtout aussi vieille. Précisément, puisque nous vivons toujours dans cette constitution, on ne mentionne, dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, que les projets de lois. C'est par voie de conséquence, puisque ce que la loi n'interdit pas, elle le permet, peut-être bien, par voie de conséquence, donc qu'un projet de loi ou peut-être un règlement... Ce qui est sûr, c'est déjà très certainement prévu par la Charte de la langue pour certains règlements qui ayant trait à la santé, à la sécurité, devront pour leur part, être publiés en anglais. Si je vous fais cette affirmation, c'est tout simplement pour vous rassurer sur le plan constitutionnel.

M. Perron (Gilles): Merci.

M. Fallu: A l'article 27, à propos des ordres professionnels qui doivent communiquer en français avec leurs membres, ainsi qu'avec le public, vous nous suggérez de ne faire aucune modification, car le libellé, dites-vous, n'exclut pas la possibilité de communiquer également en anglais. C'est un fait. Mais aussi en français?

M. Perron (Gilles): Premièrement en français. C'est notre pratique, si vous voulez. Nous avons un journal mensuel qui est à peu près bilingue, mais qui a peut-être une petite prédominance francophone. Les textes importants, à tout événement, sont traduits, en général.

M. Fallu: Ou sont en français, traduits en anglais?

M. Perron (Gilles): Ils sont en français, d'abord, et traduits en anglais.

M. Fallu: A l'article 32, là on est en plein dans la matière, chez vous...

M. Perron (Gilles): Oui.

M. Fallu: Je voudrais simplement vous rappeler — et c'est pour réagir à la page 4 de vos propositions — ...Nous lisons: "Nous croyons que les conditions d'obtention d'un permis de pratique autres que la langue sont du ressort du Code des professions et de la loi particulière de chaque ordre professionnel et ne devraient pas se trouver, de quelque façon, dans une autre loi".

Je voudrais tout simplement vous faire remarquer la nature assez particulière du projet de loi no 1, puisque, au-delà d'un simple projet de loi, il s'agit d'un projet de charte. C'est dans cette dimension que nous trouvons l'ensemble des aspects de la vie du Québec, par rapport à la langue.

Vous êtes également inquiets... Enfin, vous êtes d'accord pour respecter la primauté du français dans l'ordre.

M. Perron (Gilles): Cela y est déjà.

M. Fallu: La preuve est là. Vous soulignez qu'on devrait tenir compte de la difficulté certaine d'apprendre la langue française, surtout pour les ingénieurs, à cause de la nature de leur travail qui les oblige à une grande mobilité. Je comprends que certains aient cette réticence, mais je voudrais également vous rappeler, et vous en féliciter d'ailleurs, que la tradition a voulu que les examens fussent préparés, dans le passé, de concert avec l'Ordre des ingénieurs et que, sans dévoiler ou sans faire surtout de comparaison odieuse, les ingénieurs ont toujours mis beaucoup de sérieux à se présenter à ces examens de français et le taux de succès est remarquablement élevé.

M. Perron (Gilles): Merci.

M. Fallu: A l'article 36, vous avez donné des exemples concrets pour illustrer ce qui pourrait arriver. Il s'agit encore une fois de l'expression "seule raison" pour une rétrogradation ou un

congédiement. Ici, de nombreuses expertises nous ont appris que, notamment pour ce qui a trait aux activités syndicales, il fallait exclure vraiment toutes les raisons à l'exception de...— c'est pour cela que le mot "seule" apparaît — et que l'expertise, notamment dans les griefs ou les arbitrages syndicaux, puisque c'est de cela qu'il s'agit— à toutes fins pratiques, ici, c'est la relation employés-employeur de nature syndicale, puisqu'ici, c'est "mutatis mutandis"— l'expérience nous révèle que, si on veut que la preuve, puisqu'ici, la preuve est à l'employeur, le fardeau de la preuve est relayé à l'employeur, si on veut vraiment qu'il n'y ait pas d'autres formes de discrimination, il faut vraiment serrer de très près la raison. Enfin, je ne voudrais quand même pas entrer dans l'histoire de tous les griefs et de tous les arbitrages qui ont créé de nombreux précédents judiciaires, mais je voulais tout simplement vous le signaler.

M. Perron (Gilles): Me permettez-vous un mot à ce moment-ci? C'est qu'on aimerait, en tout cas, en principe, avoir une certaine souplesse et l'exemple qu'on a donné veut illustrer certaines situations, étant donné la diversité des travaux qui existent dans les firmes de génie-conseils, en particulier. Il arrive, à certains moments, et peut-être qu'à ce stade-ci, dans notre économie, nos firmes d'ingénieurs-conseils oeuvrent beaucoup sur le marché international et la connaissance de l'anglais devient un atout nécessaire.

On voudrait que la Charte de la langue française nous permette justement assez de souplesse pour être capables d'agir.

M. Fallu: Justement, je vous renvoie, à ce compte-là, à votre demande relativement à l'article 37, qui est complémentaire. Je cite le texte du projet de loi, de charte: "...à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite la connaissance de cette autre langue..."

Or, la preuve était donnée tout simplement. Je pense qu'il n'y a pas de contradiction entre l'application de l'article 36 et de l'article 37. Au contraire, il y a complémentarité ici, de telle sorte que — c'est peut-être un peu cela que je voulais souligner — ce que vous nous proposez ou votre inquiétude au sujet des articles 36 et 37 n'est peut-être pas fondée, tout simplement.

A propos de la constitution de l'office, vous nous apportez une comparaison qui, au demeurant, est intéressante, c'est-à-dire votre propre fonctionnement chez vous. C'est intéressant parce que, justement, il y a dans... Comment rappelez-vous déjà? C'est le conseil de régie?

M. Perron (Gilles): Ce qu'on demande, c'est que le président et les deux vice-présidents soient fonctionnaires et qu'il y ait un conseil d'administration qui provienne de l'extérieur.

M. Fallu: Oui. Dans votre mémoire, vous nous faites part de l'expérience vécue chez vous.

M. Perron (Gilles): II faudrait que j'y retourne. Malheureusement, je ne me souviens pas.

M. Fallu: Bon, laissons. Je voudrais déjà vous rassurer. Nous avons déjà eu plusieurs représentations relativement, j'allais dire pour le moins, à la formulation, et peut-être même à la composition de l'office. Je peux vous assurer que nous allons, pour le moins, reformuler, d'une façon assez substantielle, tenant compte de l'ensemble des remarques que nous avons eues jusqu'à maintenant... Les vôtres arrivent en voie de conséquence. Nous sommes là pour écouter. Nous tâchons d'écouter le mieux possible. Nous avons quand même confiance dans la bureaucratie gouvernementale. La seule chose que nous voulons,c'est lui donner un mandat clair. Vous voudrez bien nous comprendre de ce point de vue.

Concernant les articles 115 et 116 à propos du programme de francisation, vous savez que les syndicats, pour leur part, exigent une présence d'au moins 50% des travailleurs ou des salariés au sens du Code du travail, à ce qui sera le conseil, le comité, bref, qu'importe la dénomination... Ce qui est sûr, c'est qu'il serait, à la limite, assez difficile que ces comités aient un rôle uniquement consultatif. Il faut que les gens soient présents et que cela devienne en fait, leur propre affaire, qu'ils se prennent en main au niveau local, au niveau de l'industrie, au niveau de la boîte, quoi!

M. Perron (Gilles): Me permettriez-vous de formuler, de reformuler notre crainte? Si on veut réellement progresser dans un programme de francisation, il faut que l'industrie ou la direction de l'entreprise y soit. On préférerait qu'un comité de francisation soit un peu comme un chien de garde, qu'il voit à ce qui se passe, et si cela ne fonctionne pas, qu'il ait un droit lui permettant d'avertir les autorités, ou enfin, de se défendre de quelque façon que ce soit. On ne voudrait pas que le comité dirige l'opération francisation. Il faut que l'industrie elle-même, ou la direction, en soit convaincue, si on veut que cela progresse véritablement.

M. Fallu: Vous voulez garder, en somme, le droit de gérance dans le domaine de la francisation?

M. Perron (Gilles): Le comité, si vous voulez, exercerait de la surveillance au nom des employés. Je pense que cela a tout à fait de l'allure. D'autre part, il faut que ce soient les directions d'entreprises elles-mêmes qui mettent en marche le programme. Si ce comité, formé d'employés et de membres de la direction, se rend compte que cela ne va pas ou que cela ne fonctionne pas suffisamment vite etc., qu'on puisse faire des représentations aux endroits voulus, de façon à pouvoir stimuler la bonne marche d'un programme de francisation, et non pas que le comité lui-même dirige cette opération à l'intérieur d'une entreprise.

M. Fallu: Oui, c'est une conception que je reçois avec intérêt. M. le Président, provisoirement.

Le Président (M. Blank): Le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je remercie l'Ordre des ingénieurs de s'être donné la peine, non seulement de présenter un mémoire, mais aussi d'avoir fait ce sondage qui, je crois, jette un éclairage assez intéressant sur la question linguistique, en 1977, au Québec.

Avant de commencer, je voudrais quand même en réponse aux propos du député de Terrebonne, excuser l'absence du ministre. Il a demandé à la commission de l'excuser. Cela ne me rassure pas, par exemple, parce que ses absences sont de plus en plus nombreuses, et ajoutées aux absences du député de Taschereau qui est suffisamment informé, et qui est maintenant à Paris — naturellement, on lui souhaite un bon voyage — cela m'inquiète un peu.

Cela m'inquiète d'autant plus que plusieurs avant vous, messieurs, ont reçu des assurances de la part du ministre à l'égard de certaines de leurs représentations, mais vous, on ne peut pas vous faire d'assurances, on ne peut pas vous en donner, parce qu'il n'y a pas de ministre ici. Je ne veux pas, naturellement, minimiser le rôle du député qui de toute évidence — non seulement du député de Terrebonne, mais du député en général à cette commission; naturellement c'est une réunion de députés — ...C'est seulement de la part du gouvernement, de la part du ministre, que vous auriez pu recevoir les assurances que le député de Terrebonne n'a pas pu vous donner.

Quant au sondage, il y a plusieurs aspects intéressants, mais cela ne demeure qu'un sondage. Mais il reste quand même à souligner, je crois, que l'appui, en ce qui concerne au moins votre clientèle, vos membres, que l'appui, dis-je, à l'égard du projet de loi no 1 est directement proportionnel à l'ignorance qu'on a du projet de loi et à l'éloignement dans lequel on est du problème linguistique, c'est-à-dire de Montréal et de son agglomération. Je ne sais pas si cela vous a frappé: vous avez dit tout à l'heure que la proportion de ceux qui ne l'ont pas lu augmente à mesure qu'augmente la proportion de ceux qui l'appuient et qu'elle augmente aussi à mesure qu'on s'éloigne de Montréal. Je me demande, non seulement si vous y avez songé, mais si vous avez pu porter des conclusions là-dessus. Sinon, je ne veux pas vous inviter à faire une considération politique. Simplement au point de vue de votre clientèle...

M. Perron (Gilles): Je voudrais premièrement, si vous voulez, relever "ce n'est qu'un sondage". Scientifiquement, il est très valable et c'est pour cela que nous avons eu recours à des firmes spécialisées. Pas pour porter nous-mêmes des jugements sur ce sondage, mais par des gens qui s'y connaissent; et le sondage comporte une marge d'erreur de moins de 5%. Donc, il est représentatif de la profession.

M. Lalonde: Excusez-moi de vous interrompre. Quand j'ai dit: "ce n'est qu'un sondage", ce n'était pas péjorativement ou pour enlever la valeur qu'il a comme sondage. Ce que je voulais dire, c'est que lorsqu'on discute d'un projet de loi et de virgules souvent, on ne peut pas s'en rappor- ter à un sondage pour savoir la sagesse de telle disposition ou non. Mais comme éclairage, j'ai aussi affirmé et je le répète, que c'est extrêmement intéressant.

M. Perron (Gilles): Maintenant, quant au profil que nous avons dégagé d'après le questionnaire il est à l'effet que — je vais essayer de m'en rappeler sans y référer — l'ingénieur favorable, comme profil, est un bonhomme qui était jeune, dans la fonction publique et en dehors de Montréal. Il y a l'inverse. Maintenant, c'est un fait que pour les gens qui n'en prennent pas connaissance, on lit le titre, on est pour ou on est contre de prime abord. C'est quand on approfondit que les opinions s'adoucissent. Ceux qui étaient contre deviennent un peu moins contre, parce qu'on réalise que ce n'est pas si mauvais que cela et là on s'attache à des modalités et la même chose pour les autres. On est moins pour, quand on voit qu'il y a certaines modalités qui ne vont pas.

M. Lalonde: D'ailleurs, M. Perron, je pense que les conclusions que vous venez de porter sont tout à fait pertinentes et c'est le tableau qu'on a pu dresser depuis cinq semaines à cette commission parlementaire. Alors qu'auparavant ceux qui étaient contre se faisaient traiter par le ministre de tous les noms, on s'est aperçu que la très grande majorité des gens, souvent — est-ce qu'on peut douter de la sincérité de quelques-uns? Ce n'est pas à moi de porter de jugement — la très grande majorité des gens sont en faveur des objectifs du projet de loi, c'est-à-dire que le français soit, dans les faits... C'est dans les modalités qu'on a des doutes sérieux et je comprends le gouvernement qui est un peu pris, pour avoir politiquement pris position à l'encontre de la loi 22. Il faut qu'il aille plus loin et là on s'aperçoit, depuis 60 mémoires, que, au niveau de combien de dispositions, il va falloir qu'il recule.

Enfin! La précision aussi au niveau des salariés est importante, je pense. Vous ne représentez pas, ici, un groupe privilégié, en ce sens, d'exploiteurs — j'emploie un peu le vocabulaire qu'on entend souvent de l'autre côté de la table — mais bien simplement des Québécois anglophones et francophones qui sont au fond un actif extrêmement sérieux de notre population et une population économique. Il y a aussi ce phénomène que, si j'avais le temps, j'aimerais vous entendre développer, à propos de l'exportation de la compétence du génie québécois depuis quelques années.

Combien de firmes québécoises... Là, je m'attache seulement à une minorité parce qu'au fond, vos 62% qui travaillent dans l'industrie... Je pense plutôt aux 16% qui sont des organisations professionnelles et qui exportent leurs connaissances à travers le monde, d'une façon souvent étonnante par rapport à une population assez limités. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?

M. Perron (Gilles): Je vais essayer de vous donner quelques chiffres de mémoire. Si je me rappelle bien, l'industrie, ce qu'on appelle la partie

industrie du génie-conseil qui s'exporte, rapporte dans le Québec quelque chose comme $200 millions d'honoraires par année, avec toutes les retombées que cela implique. Par exemple, l'ingénieur qui fait un projet, qui fait un "design", spécifie automatiquement le matériel qu'il connaît et celui qu'il connaît davantage, c'est le matériel local. Alors, cela a donc des retombées économiques extrêmement importantes.

C'est une des grandes préoccupations de l'Ordre des ingénieurs, à ce moment-ci, à cause de la mobilité. On est inquiet, dans certains milieux anglophones et francophones, parce que, si on applique trop rigidement les modalités de la charte, il va continuer de se produire ce qui s'est déjà produit: certains glissements de firmes ou de centres de recherche vers l'extérieur. Il y en a qui se font un peu sournoisement et il y en a d'autres qui se font de façon plus ouverte. Il y a des bureaux de génie-conseil... Par exemple, je pourrais vous nommer une organisation en particulier, qui n'a pas de projet dans le Québec, qui oeuvre strictement à l'extérieur, dans l'Oeust du pays, dans l'Est du pays et à l'échelle internationale. Or, tout ce paquet d'employés, on pourrait le prendre et le déménager à Vancouver, à Hamilton, à Toronto, cela ne changerait rien à la conception ou au travail que l'on fait. Alors, les ingénieurs francophones et anglophones qui sont heureux de vivre à Montréal ou dans le Québec, à ce moment, se sentent inquiets et craignent que ces groupements déménagent à l'extérieur. C'est ce qui se reflète dans le sondage que nous avons fait.

M. Lalonde: Pour ces gens-là, il y a une certaine analogie avec les sièges sociaux, c'est-à-dire une mobilité.

Vous avez parlé de la primauté du français dans l'Ordre des ingénieurs, vous avez dit que c'est déjà chose faite. Vous pourriez peut-être prendre quelques secondes pour faire l'histoire parce que, si je me souviens bien, il y a 20 ou 25 ans, commençait à peine l'effort cohérent du francophone vers le génie. Auparavant, c'était plutôt — peut-être pourriez-vous m'éclairer là-dessus — une profession où l'on retrouvait une majorité d'anglophones. Est-ce vrai?

M. Perron (Gilles): Quand on prenait le génie, même à mon époque, vers 1940, on se faisait regarder drôlement dans nos collèges classiques.

M. Lalonde: C'était presque anticlérical de le faire?

M. Perron (Gilles): Presque.

Je peux vous dire que, juste avant 1950, on avait 40% de francophones à l'Ordre des ingénieurs, alors qu'aujourd'hui, nous sommes rendus à 60% ou tout près, 58%. Jusqu'avant les années 1960, les délibérations du conseil d'administration, les procès-verbaux, à peu près tout se passait en anglais. Graduellement, il y a eu cette pratique où les gens s'exprimaient dans leur langue, sans qu'il y ait de traduction. C'était la règle, cela fonctionnait très bien, mais, graduellement, si vous vou- lez... C'est que le nombre d'administrateurs francophones est nettement supérieur à celui des autres et aujourd'hui, tout se déroule en français. Non pas que la liberté des anglophones soit brimée. Ils peuvent s'exprimer en anglais, il n'y a aucun problème. Les résolutions qu'ils présentent en anglais sont inscrites dans la langue dans laquelle on les présente, mais il reste que, dans les faits, c'est 99,9% en français.

M. Lalonde: Je ne veux pas prendre trop de temps, M. le Président. Je voudrais simplement assurer l'Ordre des ingénieurs qu'en ce qui concerne l'Opposition officielle, nous avons pris connaissance de votre mémoire avec beaucoup d'intérêt, plus particulièrement en ce qui concerne les dispositions de l'article 32, la connaissance du français de la part de vos membres pour l'émission d'un permis. Déjà, la loi 22 contient des dispositions dans ce sens — on n'a rien inventé ici — des dispositions qui créent souvent des problèmes, qu'il aurait fallu, de toute façon, je pense, assouplir ou enfin ajuster à la réalité. Nous apporterons beaucoup d'attention à ces articles, lorsque l'étude, article par article, de cette loi nous sera soumise.

Il en est ainsi des recommandations que vous faites pour le conseil d'administration de la régie. Plusieurs l'ont fait avant vous. On désire une direction collégiale. Sur les pouvoirs d'appel aussi, le ministre a déjà donné des assurances à ce propos.

Je termine. En ce qui concerne l'article 52, si je fais erreur vous me corrigerez, votre préoccupation, c'est strictement la mobilité, pour conclure à l'élargissement du critère de fréquentation de Québec à Canada. C'est strictement la question de mobilité. Parce que si la mobilité vous avait... Si, par hypothèse, la majorité, la très grande majorité des ingénieurs dont vous aviez besoin venait des Etats-Unis, est-ce que vous suggéreriez d'étendre cela aux Etats-Unis par exemple?

M. Perron (Gilles): II n'y a pas de problème. En fait, si vous voulez, dans l'émission de permis ou dans le fait d'accorder la permission de travailler au Québec, il y a les permis temporaires par projet, mais il y a d'autre part le genre de firmes dont je faisais mention tout à l'heure, qui importent de l'extérieur du Québec des gens pour faire un projet et qui sont ici pour une période de l'ordre de deux ans et qui, par après, s'en retournent à l'extérieur. Ceux-là, on ne voudrait pas les forcer à faire la scolarisation de leurs enfants en français, parce qu'ils ne sont pas ici en permanence. C'est pour cela qu'on suggère deux ans, avec un renouvellement, ce qui porte à quatre ans le maximum et, à ce moment-là, on couvre presque 100% des projets.

M. Lalonde: Je vous remercie, M. Perron.

Le Président (M. Blank): Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Merci, M. le Président. Je voudrais

d'abord, au nom de l'Union Nationale, vous remercier de votre participation et du mémoire vraiment judicieux que vous nous donnez ce matin. On fait la preuve, avec votre mémoire, qu'on en a encore pas mal à apprendre et on voit que, quand on donne le temps et qu'on fait une sélection des mémoires, il nous en reste certainement sur la tablette de très sérieux à étudier. J'espère bien qu'on aura devant nous tout le temps qu'il faut pour faire venir des groupes comme le vôtre encore pour nous permettre de donner vraiment tout l'éclairage dont on a besoin. Je ne vous cache pas qu'un mémoire comme celui de ce matin est juteux et sert, je pense bien, à toute la table. On n'a pas été gâtés ces derniers temps.

Mme Lavoie-Roux: ...

M. Grenier: Oui, je le souhaite. On n'a pas été gâtés. Pas besoin de vous dire qu'un mémoire comme celui-là est plus important que les kilomètres qu'on a reçus hier parce que, ramasser environ 20 000 lettres, à moi tout seul, dans mon comté, je peux le faire facilement. Il s'agit d'être un peu organisateur pour réussir cela, mais ce n'est pas cela qui fait avancer les discussions à la table et ce n'est pas cela non plus qui va faire qu'on va modifier les articles de la loi. Le ministre, qui s'apprête à présenter des amendements, a besoin de personnes comme vous aujourd'hui et on devrait voir à remplacer certaines personnes comme celles qui se sont présentées ici, surtout avec des mémoires individuels, pour rencontrer des représentants de groupes aussi importants que le vôtre.

On touche ce matin avec vous vraiment à l'âme du problème de la langue, je pense. Vous êtes dans le milieu pour nous démontrer jusqu'à quel point l'impact est important sur l'économie du Québec. Une première question que j'aimerais vous poser, ce serait pour savoir combien d'ingénieurs ont depuis environ six mois demandé à quitter ou ont quitté le Québec pour aller travailler ailleurs et, à l'inverse, combien ont demandé à venir travailler au Québec.

M. Perron (Gilles): Nous avons justement des statistiques. Si vous permettez, je vais demander au secrétaire de l'ordre, qui est aux prises avec le problème d'une façon quotidienne, de vous donner les chiffres qu'il peut avoir en main.

M. Massé (Robert): Les chiffres que nous avons sont ceux des ingénieurs qui quittent le Québec pour aller vers d'autres provinces généralement, et il y a des ententes entre les associations provinciales, qui font exactement la même chose que l'ordre au Québec. Ces gens-là procèdent par transfert. Dans les six derniers mois, c'est-à-dire depuis le début de l'année, il y a 175 ingénieurs qui ont quitté la province de Québec pour aller dans d'autres provinces. La plupart du temps, cela m'a l'air que c'est en Ontario et en Alberta. Cela semble être les marchés favoris.

M. Grenier: Je m'excuse. Est-ce que c'est plus que d'habitude?

M. Massé: C'est un peu plus que d'habitude. Il y a certainement une accentuation, mais cela peut être dû à la situation économique, sans le qualifier autrement. Pour répondre à votre deuxième question, ceux qui viennent au Québec par le même mécanisme, généralement, ce sont des multinationales, des ingénieurs qui sont transférés d'une province à l'autre. Depuis le début de l'année, il y a quinze personnes qui sont arrivées de l'extérieur pour venir au Québec.

M. Grenier: Est-ce que c'est plus ou moins que d'habitude?

M. Massé: C'est beaucoup moins que d'habitude. C'est de huit à dix fois moins que d'habitude.

M. Grenier: Je voudrais bien, M. le Président, qu'on comprenne... Article quoi?

Le Président (M. Cardinal): L'article 100, M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Est-ce qu'on pourrait nous préciser combien il y en avait à ce moment-là et combien il y en a aujourd'hui?

M. Grenier: Je ne sais pas si on a ces données. Est-ce que vous pouvez les fournir?

M. Laplante: C'est vague.

M. Grenier: On aimerait avoir en nombre les personnes qui ont pu quitter le Québec depuis environ six mois et les personnes qui y sont venues. C'est ça, je pense, le sens de la question du député de Bourassa? Du côté des ingénieurs.

M. Dussault: ... point de comparaison.

M. Massé: J'ai dit que c'était 175 pour les six derniers mois, ce qui est un peu plus fort que d'habitude. Normalement, on en a environ 300 par année. C'est une chose qui se fait d'année en année. C'est assez semblable. Cela varie sûrement de 250 à 300. Cela dépend beaucoup du climat économique et du jeu des multinationales qui changent les ingénieurs. Du côté des arrivées, le chiffre est généralement de 20 à 25 par mois. C'est une moyenne assez forte; elle démontre la mobilité des ingénieurs. Depuis les six derniers mois, je dirais même les dix derniers mois, cela a baissé très fortement et la moyenne est d'environ 2,5 par mois, ce qui ferait 30 par année, comparativement à 250 par exemple.

M. Grenier: M. le Président, je voudrais bien que le ministre tienne compte de ça. Je voudrais bien que le ministre lise le journal des Débats ce matin avant de prendre sa décision et de faire ses amendements, lundi prochain. Voilà une donnée,

ce matin, qui n'est pas une lettre écrite parmi celles des cinq kilomètres, une donnée très précise et qui nous montre l'impact de la loi 1. Il y a là une richesse qu'on doit signaler au ministre, qui est peut-être plus importante que d'autres qu'on a véhiculées au cours de ces derniers jours. C'est un point très important, je pense.

C'est-à-dire que je me base sur les chiffres qu'on m'a donnés.

M. Fallu: ... les chiffres, mais les causes.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! Vous savez qu'il n'y a pas de débat entre les députés.

Mme Lavoie-Roux: II y a des sourds qui ne veulent pas entendre et des aveugles qui ne veulent pas voir.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Madame, s'il vous plaît, à l'ordre! M. le député de Mégantic-Compton, vous avez la parole...

M. Grenier: Merci.

Le Président (M. Cardinal): Ne provoquez pas les autres à vous interrompre.

M. Grenier: C'est-à-dire qu'ils m'interrompent, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): C'est ça, je ne voudrais pas... à l'ordre, s'il vous plaît.

M. Grenier: Pardon?

M. Lalonde: Je m'excuse de vous avoir interrompu. C'était pour vous approuver.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Cela fait mal, quand on arrive avec des données comme ça. On aime mieux, de l'autre côté de la table, être poète, rêvasser, faire de belles déclarations, ronronner, mais on n'aime pas entendre parler de chiffres, ça fait mal. C'est pour ça qu'il faut continuer d'entendre des mémoires dans ce sens, pour que l'économie du Québec n'en souffre pas trop. A partir d'aujourd'hui et avec les données d'hier soir, je vais vous dire une chose: il va se faire, de ce côté-ci de la table au moins, des pressions fort considérables pour qu'on continue d'entendre des mémoires comme le vôtre.

Je pense que nous, de l'Union Nationale, nous demanderons au ministre, avec les données que nous avons, de sélectionner parmi les mémoires qui restent, des mémoires semblables au vôtre. On va peut-être proclamer la fin des philosophes, des poètes. Qu'on reçoive ici des personnes qui vont nous dire quel est l'impact de la loi 1 sur l'économie du Québec. C'est ça qui nous intéresse et c'est ça qui devrait intéresser les gens du gouvernement, c'est-à-dire les députés du gouvernement.

Le Président (M. Cardinal): Les députés ministériels.

M. Grenier: Ministériels. Merci, M. le Président.

Vous dites, à la page 5, que chez les ingénieurs canadiens, il existe des ententes qui permettent justement ces échanges entre provinces qui ont été jusqu'ici favorables au Québec. J'aimerais savoir dans quel ordre ces échanges peuvent être favorables au Québec.

M. Perron (Gilles): Toutes les provinces ont l'équivalent de l'Ordre des ingénieurs, mais il existe un organisme de coordination au-dessus de ça qui s'appelle le Conseil canadien des ingénieurs sur lequel nous siégeons en tant qu'ordre, comme toutes les provinces. C'est pour standardiser les normes d'accréditation des ingénieurs à travers le Canada et faciliter les transferts. On s'échange des données entre organisations professionnelles et le Québec requiert davantage de permis à l'extérieur qu'il ne s'en fait demander par d'autres, jusqu'à maintenant. Alors, ça joue en notre faveur.

M. Grenier: D'accord, merci. Je n'aurai pas le temps, bien sûr, pour plusieurs questions. Il y en a une qui m'intéresse d'une façon particulière. Un instant, je vais essayer de la retrouver. L'Opposition officielle a signalé tout à l'heure qu'il y avait eu pas mal de francisation depuis une décade. Est-ce que vous sentez que, depuis 1971, par exemple, le mouvement s'est accentué du côté de la francisation chez les ingénieurs?

M. Perron (Gilles): Forcément, parce que le nombre de diplômés qui sortent des universités du Québec augmente continuellement. Cela a un impact sur la venue d'autres. On se sent moins à l'aise si on travaille exclusivement en anglais, c'est évident.

M. Grenier: II y a une question qui n'est pas énoncée dans votre mémoire, bien sûr, mais qui est sortie parmi d'autres questions qui ont été posées et qui m'intrigue un peu. On nous dit que, alors que vous avez terminé votre collège ou votre séminaire du temps et que vous avez fait votre choix pour le groupe des ingénieurs, c'était une profession plutôt rare, qui était pas mal plus anglophone qu'elle ne l'est dans le moment.

Pouvez-vous nous dire jusqu'à quel point cela peut être francisé pour que cela ne fasse pas de tort et qu'on conserve suffisamment de gens bilingues ou de gens unilingues anglophones si cela est nécessaire, si cela devait être pour des gens qu'on amène ici? Jusqu'à quel point peut-on aller, en pourcentage, pour que le groupe d'ingénieurs puisse quand même continuer de respirer et de vivre à l'aise, d'aider le Québec à vivre à l'aise?

M. Perron (Gilles): Ce sera une appréciation un peu personnelle, vous allez comprendre. Mais il semble, d'après les réactions, les conversations qu'on a autour de nous — et dans Montréal, Dieu

sait si on en rencontre, des gens qui sont anglophones, qui sont inquiets — que la principale préoccupation, c'est la scolarisation des enfants, d'être forcés d'envoyer les enfants à l'école strictement française.

Les individus eux-mêmes, je pense qu'ils ne sont pas réticents à apprendre le français, en principe. Si nous avions une recommandation à faire, en tant que les ingénieurs sont visés, je dirais: Nous désirons, il est extrêmement désirable et peut-être nécessaire que tous les francophones aient une connaissance pratique de l'anglais; conséquemment, le système scolaire devrait être capable de nous la fournir. En second lieu, que les anglophones aient suffisamment de français dans leurs écoles pour apprendre la langue d'une façon pratique aussi.

M. Grenier: Je laisse le peu de temps qui peut me rester...

Le Président (M. Cardinal): Vous avez commencé à 11 h 15, M. le député de Mégantic-Compton; vous pouvez regarder l'horloge, autant que moi.

M. Grenier: Si vous le permettez, je garderai peut-être une couple de minutes pour le député de Gaspé.

Des Voix: Oui, oui.

Le Président (M. Cardinal): Tout le monde semble d'accord, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: D'accord. Merci.

Le Président (M. Cardinal): Pour le député de Gaspé; on lui laissera deux minutes, généreusement. Je pense que tout le monde est d'accord. Sur ce, Mme le député de L'Acadie; il reste huit minutes au parti de l'Opposition officielle.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. D'après les statistiques que vous avez données tout à l'heure qui, je comprends, sont des statistiques qu'à ce moment-ci, vous donnez de mémoire, il y aurait environ 175 ingénieurs qui auraient quitté la province, ce qui ne semble peut-être pas pour les premiers six mois, s'éloigner trop des statistiques habituelles. Mais quant à l'entrée des ingénieurs, si j'ai bien compris, alors que c'était de 20 à 25 par mois, nous en recevons maintenant de deux et demi à trois.

M. Perron (Gilles): II y en a dix fois moins. Mme Lavoie-Roux: Dix fois moins.

M. Grenier: C'est presque le double quand même qui a quitté, 175.

Le Président (M. Cardinal): Attention, M. le député de Mégantic-Compton.

Mme le député de L'Acadie, vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: Je vais continuer ce que le député de Mégantic-Compton disait. Il a interprété que c'était presque le double qui avait quitté. Est-ce qu'on peut déduire cela?

M. Massé (Robert): Pour les premiers six mois de 1977, c'est presque le double de ce que l'on aurait normalement dans cette période. Mais quand on regarde la moyenne mensuelle annuelle, c'est faiblement plus.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Maintenant, l'autre question. On voit, dans les journaux et je me demande si vous pourrez nous commenter ces informations que nous lisons de temps à autre... Concernant le chômage des ingénieurs dans le Québec présentement, est-ce que la situation est plus grave que d'habitude ou si...

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie, attention. Est-ce que vous parlez du projet de loi no 1?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Si vous spécifiez que ce sera à la suite du projet de loi no 1 qu'il y aurait plus de chômage, votre question est admissible.

M. Lalonde: C'est sous-entendu.

Mme Lavoie-Roux: Honnêtement, c'était dans cet esprit.

Le Président (M. Cardinal): D'accord.

M. Perron (Gilles): La situation du chômage, à l'Ordre des ingénieurs, comme nous la voyons — nous avons un bureau d'emploi au service de nos membres — n'est pas alarmante. Il peut y avoir des congédiements assez importants, mais il semble que les gens peuvent se trouver de l'emploi ailleurs. Cela ne veut pas dire que cela répond à leurs aspirations, mais ils peuvent se trouver au moins un gagne-pain. Tel que nous la voyons présentement du siège social de l'Ordre des ingénieurs, elle n'est pas alarmante outre mesure.

Mme Lavoie-Roux: Quand vous dites qu'ils peuvent se trouver un emploi ailleurs, est-ce que c'est dans le domaine du génie ou si ce sont d'autres types d'emplois se rapprochant du travail de technicien?

M. Perron (Gilles): En général, c'est dans le domaine du génie. Par exemple, vous pouvez être ingénieur de discipline électrique et être obligé d'aller vous accrocher à un autre domaine. Si vous êtes un chercheur et qu'il n'y a pas de recherche à faire, vous êtes obligé de prendre autre chose qui

convient moins à vos aspirations. C'est dans ce sens-là.

Mme Lavoie-Roux: Cela demeure dans le domaine du génie, d'une façon générale?

M. Perron (Gilles): Oui, c'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Les questions que je voulais vous poser sont d'un autre ordre. Il s'agit de la langue seconde. Je n'ai malheureusement pas pris connaissance de votre évaluation méthodologique au complet. J'avais quand même lu votre mémoire et j'ai cru discerner la nécessité pour des ingénieurs d'avoir une bonne connaissance de la langue anglaise, même s'ils fonctionnent, comme vous disiez tout à l'heure, à près de 90% ou 95% en français.

Est-ce que vous pourriez me dire — vous avez sans doute des enfants — si dans le moment, vous avez l'impression que l'enseignement de la langue seconde qu'on donne à vos enfants dans les écoles françaises est satisfaisant?

M. Perron (Gilles): Je pourrais peut-être aller plus loin. Quand je regarde la composition qu'on fait, je dis même que l'enseignement du français ne m'apparaît pas satisfaisant et, quant à l'enseignement de l'anglais, il me semble que les enfants qui se débrouillent, chez nous en tout cas, l'acquièrent plutôt à l'extérieur de l'école; d'après moi, je n'ai pas fait d'enquête personnelle, il me semble que ce soit insuffisant.

Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez que vos enfants acquièrent une connaissance d'usage pratique de l'anglais, vous devez recourir, si je me réfère à vos propos, à des moyens extérieurs à l'école, soit les envoyer dans des camps, soit dans des échanges entre étudiants des différentes provinces, est-ce que c'est cela la situation?

M. Perron (Gilles): II faut sûrement ajouter à ce qui existe dans le domaine scolaire, tel que constitué.

Mme Lavoie-Roux: Une autre question que je voudrais vous poser, c'est au sujet de l'utilisation des manuels dans les universités, dans les facultés de génie. Je pense qu'il y a une assez grande proportion des manuels qui sont de langue anglaise. Dans quelle mesure croyez-vous que ceci puisse être diminué et dans quelle proportion, si cette utilisation des manuels anglais peut être diminuée, à votre point de vue, restera-t-eIle toujours nécessaire, pour la formation de l'ingénieur et pour son travail ultérieur dans la pratique?

M. Perron (Gilles): II y a 25 ans, il n'existait absolument pas de documentation en français dans le domaine technologique, dans le domaine du génie. Il en existe une faible proportion aujourd'hui et c'est difficile de prévoir quand il y en aura suffisamment dans l'avenir pour pouvoir se contenter de la langue française, mais, en 1977, je dirais que la très forte proportion de la documen- tation technique ou technologique est de langue anglaise.

Mme Lavoie-Roux: Les communications scientifiques et votre mise à jour des développements technologiques, dans le domaine des différents génies, est-ce qu'elle vous arrive, comme professionnels, majoritairement en anglais? Quelle est la proportion en français et en anglais, pour les revues scientifiques, etc.?

M. Perron (Gilles): En très grande proportion en langue anglaise. Les colloques ou séminaires qui sont organisés sont généralement patronnés par des associations à caractère scientifique qui sont anglophones, à la base.

Mme Lavoie-Roux: Je comprends cela, si on reste sur le continent nord-américain, mais dans les congrès à l'extérieur de l'Amérique du Nord, est-ce que l'anglais semble également y prédominer, non seulement comme moyen de communication, mais de diffusion de la recherche scientifique?

M. Perron (Gilles): Je pense qu'à peu près le seul pays où on a des conférences qui sont organisées d'abord en français, c'est en France et, là encore, on permet ou va donner la traduction simultanée, l'interprétation simultanée, et on peut présenter ses documents, sa documentation scientifique en langue anglaise.

Mme Lavoie-Roux: C'est la langue de communication générale?

M. Perron (Gilles): D'une façon générale, l'anglais est la langue de communication dans le domaine scientifique.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie et je regrette de ne pas avoir plus de temps. Je trouve ce mémoire extrêmement intéressant. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Merci beaucoup, Mme le député de L'Acadie. Il vous restait même encore une minute.

Mme Lavoie-Roux: Je l'ai gardée pour mon collègue qui désire poser des questions.

Le Président (M. Cardinal): Ah bon! Dans ce cas-là, je lui en accorderai deux. M. le député de Gaspé, avec deux minutes gracieusement offertes par la commission.

M. Le Moignan: M. le Président, je n'ai pas de question spéciale, mais c'est peut-être pour compléter une des questions de Mme le député de L'Acadie. Quand vous parlez de cette pauvreté, de cette rareté des manuels en langue française, j'imagine qu'en France, dans les universités, on doit former là-bas des ingénieurs et tout ce que vous voulez. Quels sont les manuels en usage en France et en Belgique?

M. Perron (Gilles): Malheureusement, je ne suis pas en position de faire des commentaires. Je présume qu'on a des manuels français, mais je suis sûr qu'on a aussi des textes anglais. Mais je ne peux pas vous faire une proportion. Malheureusement, je ne suis pas au fait.

M. Le Moignan: Maintenant, une dernière question. Je vois, à l'article 52, que vous avez ajouté: "Les enfants dont le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs au Canada, l'enseignement primaire en anglais". A ce moment, vous seriez ouvert, favorable à ce que tous ceux qui demeurent au Canada et qui viennent travailler au Québec puissent aller à l'école anglaise.

M. Perron (Gilles): Au moins ceux qui y viennent en résidence non permanente. Si ces gens viennent ici au Québec en résidence permanente, je pense qu'il est normal et logique qu'ils viennent s'intégrer et qu'ils apprennent le français.

M. Le Moignan: Alors, pour ces gens qui viennent de façon permanente, même si leur milieu de vie, leur culture, leur langue première est l'anglais, vous suggéreriez qu'ils soient intégrés à l'école française?

M. Perron (Gilles): Qu'ils soient intégrés, mais il y a peut-être un mode d'intégration un petit peu plus en douceur que celui d'aller brutalement à l'école française, sans anglais. Je pense que l'école française devrait contenir un enseignement en anglais, tout comme les écoles anglaises devraient contenir une programmation française, qui permette d'acquérir pratiquement ce qui est pour eux, quand ils arrivent, la langue seconde, et qui, graduellement, devrait devenir la langue première.

M. Le Moignan: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de D'Arcy McGee, avec aussi deux minutes.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. J'ai deux question à poser. Je les poserai ensemble, parce que la deuxième est en quelque sorte un corollaire de la première.

Vous déposez des documents qui comprennent notamment un sondage. Nous avons reçu, plusieurs collègues l'ont souligné, des expressions d'opinion de la part de beaucoup de personnes, notamment de certains groupes qui ont donné un avis sans avoir appuyé cet avis sur des données précises. Voici que vous déposez un document étoffé avec une analyse des réponses récoltées parmi les membres de votre corporation professionnelle.

Vous avez été avare d'interprétations, mais, puisque le document est là, des interprétations seront faites. J'aimerais avoir les vôtres, notamment à un égard particulier. Je remarque que vous avez fait une distinction entre les répondants selon leur âge. Il y a clairement des différences entre les jeunes et les moins jeunes. Qu'est-ce que vous voyez comme avenir de votre profession, en vertu des résultats que vous déposez, dans les deux hypothèses, l'adoption du projet de loi tel quel ou l'adoption du projet de loi avec les modifications que vous recommandez.

Voici la question corollaire. Le député de Terrebonne, que je félicite, entre parenthèses, pour une intervention très pondérée, vous a rassuré quant à certains articles. Il l'a fait en fonction de sa sincérité évidente, mais le fait, pour un membre d'un gouvernement, de déclarer que vous devez vous rassurer, qu'il n'y aura pas d'inquiétude ne suffit pas quand il y a un texte qui sera interprété par d'autres. Alors, j'aimerais vous demander, en indiquant la perspective d'avenir de votre profession, votre réaction devant cet effort sincère de vous rassurer quand il y a quand même un texte qui est devant nos yeux.

M. Perron (Gilles): Premièrement, l'avenir de notre profession. Il est sûr que, s'il fallait avoir des modalités extrêmement rigoureuses dans l'application du projet de loi no 1, qu'on accepte dans ses objectifs, il n'y a aucun doute, il me semble qu'on se priverait d'expertises extrêmement valables qui peuvent venir de l'étranger. J'espère que les représentations que l'on fait — et c'est un peu le deuxième point... A titre de citoyens professionnels de l'Ordre des ingénieurs, c'était notre devoir de démontrer les problèmes qui peuvent surgir de modalités trop rigoureuses.

A ce moment-là, le député de Terrebonne nous a rassurés. Quant à moi, je dis que nous avons fait notre devoir. Nous avons donné nos considérations et je pense qu'on doit avoir confiance qu'on en tiendra compte. Je l'espère. C'est tout ce que je puis dire.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Vanier. Je souligne qu'il reste dix minutes au parti ministériel.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. M. Perron, je voudrais vous remercier beaucoup. J'ai une admiration sans borne pour les ingénieurs et pour le génie québécois tel qu'il s'illustre à travers des réalisations aussi prestigieuses que la Manicoua-gan. Quand je pense au génie québécois, je pense à la Manic et surtout au fait français de la Manic, à la capacité qu'a eue le génie québécois, à cette époque, de traduire et de concrétiser son génie, à tous les niveaux de travail, en français. Je pense que votre organisme est sans doute pour beaucoup dans les efforts qui ont été faits pendant les dernières années pour faire en sorte que vous soyez le reflet du Québec dans sa complexité, bien sûr, mais en même temps dans sa volonté d'être de plus en plus français.

J'aurais plusieurs questions à vous poser. Je suis effectivement, comme le député de Mégantic-Compton, extrêmement heureux que vous soyez ici ce matin, parce que votre mémoire est tout simplement intéressant dans tous les sens du terme. Le sondage que vous avez réalisé et que vous vous êtes donné la peine de faire — et je dois le souligner, parce que cela manifeste le sérieux que vous mettez à venir devant la commission

parlementaire et le sérieux que vous mettez à l'analyse du projet de loi no 1... Il y a plusieurs questions que je voudrais vous poser, donc je vais y aller. Je vais tenter que les miennes demandent des réponses brèves pour que je puisse vous en poser le maximum.

Il y a des variations dans le pourcentage des ingénieurs francophones au Québec depuis plusieurs dizaines d'années. Je note, dans un tableau que vous nous avez soumis, qu'il y a une chute du pourcentage francophone de 1945 à 1960 environ, et une remontée de 1960 à 1977. Y a-t-il un ou deux facteurs particuliers qui expliqueraient à la fois la chute pendant une quinzaine d'années et la remontée depuis une quinzaine d'années?

M. Perron (Gilles): C'est une chute dans la proportion... Il y a évidemment la période de guerre et d'après-guerre pendant laquelle il y a eu une recrudescence d'ingénieurs ou de candidats anglophones. C'est ce qui fait que la proportion a diminué. M. le secrétaire pourrait peut-être donner des précisions...

M. Massé: Comme vous le savez, c'est après la guerre qu'a commencé le développement technologique, si on veut accélérer ... D'ailleurs nos effectifs ont commencé à monter dès ce moment-là. Il y avait un besoin d'ingénieurs, mais malheureusement, à ce moment-là, nous n'avions pas d'ingénieurs francophones en nombre suffisant. Ceux qui sont venus étaient anglophones en très grosse majorité.

M. Bertrand: Qu'est-ce qui, à partir de 1960 — j'imagine que la réponse nous viendrait vite de l'Opposition officielle, et pourquoi pas? — qu'est-ce qui aurait expliqué cette remontée, principalement, au cours des quinze dernières années?

M. Perron (Gilles): Je pense qu'il y a eu des changements d'idéologies parmi la population. Il s'est fait une évolution dans la pensée de nos gens. On s'est ouvert davantage aux carrières scientifiques. C'est devenu, pour nous, quelque chose d'accessible, qui n'était plus si loin. Les parents ont pensé que leurs enfants pouvaient y aller. Il y a eu des incitations. C'est un phénomène qu'il est peut-être difficile de préciser, mais cela a été une évolution générale dans la pensée de notre groupe.

M. Bertrand: C'est donc intimement lié à la révolution tranquille des années 60 et à la métamorphose de notre société et des mentalités?

M. Perron (Gilles): Je crois.

M. Bertrand: Vous savez, d'une certaine façon, c'est un peu ce que je suis en train de faire, mais...

M. Lalonde: C'était gentiment dit.

M. Bertrand: A trop sentir le parfum on peut s'étouffer, alors prenez-le modestement!

M. Perron (Gilles): Le secrétaire me dit que cela a peut-être coïncidé avec le déménagement de l'école polytechnique sur la montagne où notre génie est devenu plus en évidence. Je ne sais pas.

M. Bertrand: En tout cas, j'en suis fort heureux, parce que nous sommes plusieurs autour de cette table à avoir fréquenté les collèges classiques. Je n'ai rien contre mon éducation dans un collège classique et je ne regrette absolument rien.

Je pense même, quelquefois, à l'instar du titulaire du Haut-Commissariat, qui, à une certaine époque, avait dit qu'il y avait certaines valeurs dans ce système qu'on aimerait peut-être retrouver aujourd'hui dans le système public. Il n'en demeure pas moins que le moins qu'on puisse dire, c'est que la fonction d'ingénieur n'était pas particulièrement courue et qu'elle commence à l'être davantage, et Dieu sait que c'est sans doute à l'avantage des Québécois.

Sur les chiffres nouveaux que vous nous avez apportés sur les départs, les arrivées, vous êtes devenus presque une gare, au sens littéral du terme, j'aimerais savoir si vous avez des statistiques qui remonteraient à cinq ans ou à dix ans sur les départs et les arrivées. Avez-vous des courbes de départs et d'arrivées? En d'autres mots, est-ce un phénomène qui a commencé le 16 novembre au matin, ou est-ce un phénomène qui, quand même, a commencé au début des années 1960, il y a eu des départs à cette époque, il y a eu des arrivées, comment cela s'est-il orienté au cours des dernières années?

M. Perron (Gilles): M. le secrétaire peut vous donner quelques chiffres.

M. Massé: Je ne peux pas vous fournir de courbe là-dessus, mais je puis dire que, depuis les dix ou quinze dernières années, les arrivées et les départs, du moins ceux que l'on peut contrôler, se compensaient assez raisonnablement. Dernièrement, les départs se sont un peu accentués, par contre, les arrivées ont faibli énormément. Cela ressort, je dirais, depuis septembre 1976, si cela peut vous rassurer.

M. Bertrand: Non, très honnêtement, monsieur, je comprendrais que certaines inquiétudes, qui peuvent se manifester dans certains milieux, fassent qu'on assiste à des phénomènes comme ceux-là. J'espère qu'ils sont temporaires. Mais, ce que je veux surtout savoir, y aurait-il un certain nombre de facteurs qui, de façon générale, jouent toujours, depuis une quinzaine d'années, et qui font qu'il y a, de toute façon, des départs et en grand nombre et qu'il y a, de toute façon, des arrivées, et en grand nombre, comme vous le dites, à peu près l'équivalent. Quel est le phénomène majeur qui explique la mobilité qui peut exister dans votre profession, départs et arrivées inclus?

M. Perron (Gilles): On peut les prendre secteur par secteur. Il y a le secteur industriel; il y a des entreprises nationales qui peuvent avoir des succursales à travers les diverses provinces et qui, pour fins de formation et d'entraînement du personnel, effectuent des transferts. Ceci contribue à la mobilité.

D'autre part, en termes de génie-conseil, il y a peut-être, pour plusieurs d'entre elles, 25% du chiffre d'affaires qui est effectué à l'étranger. Or, on a énormément d'ingénieurs qui sont appelés à aller travailler en pays étranger, soit dans le Moyen-Orient, dans les pays d'Afrique, en Amérique latine. C'est difficile de dire combien nous avons d'ingénieurs membres de l'ordre qui sont là, mais il y en a quelques centaines, cela est sûr.

Ce sont les deux principaux facteurs, si vous voulez, mobilité à travers les nationales et projets à l'extérieur du pays.

M. Bertrand: M. le secrétaire a insisté et, pensant en cela, sans doute, ne pas vouloir me contrarier, je lui en sais gré, a parlé du mois de septembre. Pourquoi le mois de septembre? S'est-il passé quelque chose de particulier? J'aurais compris que novembre ait pu expliquer des choses, mais septembre?

M. Massé: Non, justement, comme vous le savez, le 1er juillet 1976, une clause est entrée en vigueur dans la loi 22 qui disait qu'il fallait que tous les Canadiens et non seulement les étrangers sachent le français. Il y a eu un assez fort nombre d'arrivées, à l'Ordre des ingénieurs, de personnes, avant le 1er juillet et, à cause des lenteurs administratives normales, date de réunions, etc., un ralentissement très fort s'est fait sentir au début de septembre. C'est à partir de ce moment que la moyenne, qui était d'environ 20 arrivées par mois, est tombée à 2, 2 1/2, 3, si vous voulez.

M. Bertrand: M. le secrétaire, je ne voudrais pas vous imputer d'intentions, de motifs, ou vous prêter des paroles que vous n'auriez pas dites, mais — je vous pose la question et vous m'interpréterez convenablement — est-ce que vous voulez dire qu'il y avait déjà, à l'intérieur de la loi 22, des clauses, des règlements qui faisaient en sorte que, de toute façon, il y avait déjà d'inscrit, à l'intérieur de la loi 22, ce genre d'effet sur les départs et les arrivées?

M. Massé: Oui, c'était la condition de la connaissance de la langue française. Depuis le début de l'automne, si vous voulez, ou après le 1er juillet en tout cas, et dernièrement la même chose, les compagnies nationales qui, d'habitude, transféraient les ingénieurs d'une province à l'autre le font beaucoup moins vers le Québec, et, lorsqu'elles le font, les ingénieurs refusent d'accepter le transfert. C'est pour cela que cela a tombé.

M. Bertrand: Je trouve cela intéressant. On se rend compte qu'à poser des questions, des fois on obtient des réponses que en tout cas, je vous l'avoue franchement, je ne pensais pas trouver. Je vous avoue que dans un certain sens, cela me fait plaisir.

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'il faudrait continuer d'en poser.

M. Bertrand: C'est exact.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie à l'ordre, s'il vous plaît.

M. Lalonde: Je crois que le député de Vanier n'était pas suffisamment informé, M. le Président. On en tiendra compte.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Cela allait trop bien depuis ce matin. A l'ordre, M. le député de Vanier aussi.

M. Bertrand: Oui.

Le Président (M. Cardinal): Je pense que la question du député de Vanier n'avait rien pour provoquer l'ire ou la réaction, d'aucune personne.

M. Lalonde: Voyez notre intérêt, M. le Président.

Mme Lavoie-Roux: C'est de la sympathie que l'on voulait lui exprimer, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Manifestez-la silencieusement, s'il vous plaît. M. le député de Vanier, il vous reste à peine deux minutes.

M. Bertrand: Merci beaucoup. J'aimerais savoir, dans ce pourcentage de personnes qui, au cours des sept, huit ou dix derniers mois, ont quitté le Québec, quel est le pourcentage de ces personnes qui sont des anglophones et quel est le pourcentage qui sont des francophones?

M. Massé: Je ne peux pas vous donner de pourcentage exact là-dessus, mais je peux vous dire que la plupart sont des anglophones.

M. Bertrand: Parce qu'il y a quand même un tableau que je trouve extrêmement intéressant dans votre sondage, c'est celui qui, en réponse à la question "Si le projet de loi devenait une loi, prévoyez-vous demeurer au Québec, demeurer certainement, demeurer probablement, ne pas être affecté, quitter probablement le Québec, quitter certainement le Québec?... Quitter probablement le Québec et quitter certainement le Québec", il y a 6% des francophones qui répondent que ce serait leur cas et chez les anglophones, quitter probablement le Québec et quitter certainement le Québec, il y en a 49%.

Le Président (M. Cardinal): Vous avez raison de parler rapidement, M. le député de Vanier, parce que le temps s'écoule.

M. Bertrand: Ce sera très bref, M. le Président. Vous avez été large pour tout le monde.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'on pourrait invoquer votre indulgence à l'égard du député de Vanier, pour être d'une générosité...

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Je voudrais m'informer suffisamment. M. Perron, j'aimerais savoir si à l'heure actuelle il manque d'ingénieurs au Québec.

M. Perron (Gilles): Cela, c'est selon les gens que vous interrogez. Vous avez des réponses qui varient. Pour certains il y en a trop, pour d'autres il n'y en a pas assez. Il en manque énormément.

M. Bertrand: Est-ce qu'on en forme suffisamment au Québec?

M. Perron (Gilles): Là, encore, il faut rattacher cela à la première question. Je peux vous donner une opinion personnelle. D'après moi on n'en a pas trop, certainement pas en 1977 et si on en forme suffisamment? Je pense que la formation ici même au Québec est de 1500 par année, à peu près; 1000 par année sortent diplômés de nos universités. L'apport total est de l'ordre de 2000. On pourrait peut-être en former davantage chez nous.

M. Bertrand: Où vont-ils ces diplômés, M. Perron?

M. Perron (Gilles): Je pense qu'à ce moment-là on doit se rapporter aux proportions d'emplois que j'ai données plus tôt à savoir que 60% vont dans l'industrie, tout près de 15% dans le génie-conseil, 5% dans l'enseignement. En somme on renouvelle, si vous voulez, les secteurs où nos gens sont déjà.

M. Bertrand: Indépendamment de cette notion de départ et d'arrivée dont on a parlé tantôt — et je note avec vous qu'effectivement il y a plus de départs que d'arrivées depuis une dizaine de mois — ce que je voudrais savoir c'est si vous avez espoir, vous, que la formation d'ingénieurs au Québec, francophones ou anglophones, va compenser pour ces départs et va constituer tranquillement un Ordre des ingénieurs du Québec qui s'alimentera à même le réservoir québécois.

M. Perron (Gilles): Compenser? Si des industries, des sièges sociaux ou des firmes de génie-conseil glissent à l'extérieur, à ce moment-là on n'a pas besoin de compenser. Cela va diminuer le besoin, si une telle chose doit se produire.

M. Bertrand: D'accord. Je voudrais vous remercier et remercier surtout l'Opposition de m'avoir permis d'ajouter quelques minutes.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Alors, M. le Président, Gilles Perron, M. Jacques Soucy, M. Vincent Foster, M. Robert Massé, qui représentez l'Ordre des ingénieurs au nom de la commission, c'est-à-dire de tous les partis qui la compo- sent, je vous remercie de votre exposé très intéressant avec statistiques à l'appui, ce qui suppose un travail pour la présentation de ce mémoire. Je vous remercie aussi de votre patience. Pour une fois, cependant, vous avez pu être entendu sans grandes interruptions. Alors, je souhaite que la journée se continue ainsi. Oui, M. Perron.

M. Perron (Gilles): Est-ce que je peux ajouter un mot de remerciement, au nom de l'Ordre des ingénieurs et de mes collègues qui m'accompagnent.

Nous nous excusons en même temps pour la production peut-être un peu tardive de documents mais on était toujours limités par des contraintes de temps. Si on avait eu dix jours de plus, on aurait sans doute produit d'autres courbes, dont celle que requérait le député tout à l'heure sur l'exode. A tout événement, nous sommes très heureux d'avoir pu exprimer notre point de vue, c'est un devoir de citoyen, et nous avons confiance qu'on tiendra compte de nos inquiétudes. Merci.

Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie d'autant plus, M. Perron. Evidemment, vos dernières paroles m'incitent à dire qu'on ne saura jamais quand la commission sera suffisamment informée. Merci, et j'appelle immédiatement le prochain organisme, le Congrès juif canadien, mémoire no 112.

M. Grenier: Est-ce que vous pourriez, pendant que le nouveau groupe s'installe à la table, répondre à la question du député de Gaspé que vous avez prise en délibéré?

Le Président (M. Cardinal): Malheureusement, je n'ai pas eu le temps, je vais même donner l'emploi de mon temps. Vous savez que nous avons terminé la séance d'hier vers 23 h 20; ensuite, j'avais une réunion qui n'était pas de la nature d'un caucus, absolument pas, et, ce matin, nous avons repris nos travaux vers 10 h 12. J'ai repensé à la question, mais, à cause des conséquences de ce choix parmi d'autres mémoires déjà déposés, je ne suis pas encore prêt, malheureusement, à rendre ma décision.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, vous nous voyez tout à fait intéressés à votre décision, parce que ça peut affecter naturellement les travaux...

Le Président (M. Cardinal): Exactement.

M. Lalonde: ... de la commission. Maintenant, je m'inquiète, je vois circuler le leader adjoint du gouvernement avec les règlements dans les mains. Cela sent le bâillon, M. le Président.

M. Grenier: Cela a l'air de rien, mais il y a anguille sous roche.

M. Charbonneau: ... le député de Laval circulait parmi nous hier soir.

M. Lalonde: C'est le député de Saint-Jacques qui se promène avec le règlement.

M. Grenier: II y a anguille sous roche.

M. Charbonneau: II y avait le député de Laval qui frayait parmi vous hier.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Allez-y, M. le député...

M. Grenier: II se brasse des choses, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Lalonde: Que le gouvernement veuille nous mettre le baîllon, ça ne nous surprendrait pas beaucoup, ça va nous fâcher. On va faire tout ce qu'il faut pour ne pas se laisser bâillonne'' mais que le gouvernement vous bâillonne et vous empêche de rendre votre jugement, je n'aimerais pas cela. C'est pour ça que je veux vous demander quand vous avez l'intention de rendre votre décision sur...

M. Grenier: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, je vais tenter de répondre à la question, je vais donner une réponse...

M. Grenier: M. le Président, avant la réponse...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: ... est-ce que vous me permettriez de vous suggérer de le faire à l'heure du dîner? Cela va vous donner une couple d'heures. Vous avez besoin d'un bout de temps pour manger vous aussi, mais c'est un bon temps de réflexion... Est-ce que vous pourriez nous informer, dès la reprise, à 16 h 30, de votre décision sur la motion du député de Gaspé?

Le Président (M. Cardinal): Je vous ferai remarquer qu'à l'heure du lunch, je vais manger comme tout le monde, mais j'ai aussi d'autres préoccupations. En plus, cet après-midi, comme vous pouvez le deviner, j'aurai la période des affaires du jour à présider. Je peux tenter de vous satisfaire, mais je ne puis pas le promettre à ce moment-ci, parce que, vraiment, il faudrait que je fasse certaines recherches. Ce n'est pas simplement le fait de réfléchir...

M. Grenier:... M. le Président, c'est bien là vo- tre conviction, il n'y a pas de force extérieure qui vous demande de remettre votre décision...

Le Président (M. Cardinal): Ah non, je puis, du fond du coeur et de l'âme, en mon âme et conscience, dire qu'il n'y a aucune force extérieure. Parfois, des gens d'un parti ou d'un autre peuvent venir plaider devant moi, ça se fait de tous les partis, et j'accepte ça comme une plaidoirie "ex parte", comme ça se fait "in camera" devant les juges, ça ne va jamais plus loin que ça.

M. Grenier: M. le Président, vous êtes un excellent président, on va vous conserver, s'il n'en dépend que de l'opposition.

Le Président (M. Cardinal): Je vais faire tout ce qui est possible pour me conserver moi-même jusqu'à la fin. Madame le député de L'Acadie.

M. Dussault: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant!

M. Dussault: Relativement à la même question de règlement, si le député de Saint-Jacques avait le règlement en main, c'est qu'il avait le mien et je lui demandais des conseils judicieux, puisqu'il a beaucoup d'expérience dans ce domaine.

Le Président (M. Cardinal): Et vous allez me remplacer dans quelques minutes.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît, Mme le député de L'Acadie a demandé la parole, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Burns: Moi, je me promenais avec la liste des membres...

Le Président (M. Cardinal): M. le leader parlementaire, ne venez pas troubler la paix de cette commission.

M. Burns: Je m'en vais, M. le Président.

M. Lalonde: C'est l'organigramme des vacances des députés.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il faut comprendre la nature des questions des collègues qui sont assis de ce côté de la table.

Hier soir, en quittant la salle, j'ai rencontré, dans l'ascenseur, un aimable député qui siégeait avec moi entre huit heures et onze heures, un député du côté ministériel qui, sans doute par compassion — et je voudrais le rassurer, je n'en ai pas besoin — m'a dit que j'aurais fort probablement quelques soirées libres d'ici peu.

Cela m'a vraiment mis la puce à l'oreille et, au lieu de diminuer mon anxiété, cela l'a augmentée, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie, je ne peux en rien — je l'ai déjà mentionné — préjuger des motions, des avis, qui seront donnés à l'Assemblée nationale. Cependant, je dois dire que moi, j'ai abandonné le projet de vacances et que j'espère être avec vous la semaine prochaine.

M. le député de Vanier et M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bertrand: M. le Président, j'ai cru voir naître une angoisse chez le député de L'Acadie et je me propose personnellement pour lui faire visiter quelques bons coins de Québec si jamais cela l'intéressait.

M. Lalonde: Oh! M. le Président. On n'admet pas que le parti ministériel vienne dans notre talle.

M. Bertrand: Nous avons déjà embrassé l'Opposition, M. le député, en votre absence.

Le Président (M. Cardinal): C'est le président qui l'a fait et je souligne que le député de Vanier est célibataire.

M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je m'inquiète qu'on empêche le député de L'Acadie de passer des nuits calmes et qu'on l'empêche de dormir avec ces tracasseries d'ascenseur. J'aimerais bien qu'on précise, cet après-midi, à votre retour, si c'était possible, la journée de demain. D'abord, cela donnerait une bonne nuit au député de L'Acadie et à nous aussi. Probablement aussi qu'on pourrait partir pour une meilleure fin de semaine.

Le Président (M. Cardinal): Je regrette, je vais être très honnête. Je ne donne la journée de demain qu'à la fin de toute la séance. Je ne le fais jamais au milieu, parce que je ne sais jamais ce qui va se produire. On l'a vu encore hier soir. Je ne sais pas si, ce soir, je devrai m'astreindre à un cours de procédure parlementaire.

M. Grenier: II n'y a pas de fumée sans feu, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Ne dites pas cela au président. Il faut dire cela au parti ministériel, si cela vous tente. C'est votre droit.

Si vous le permettez, est-ce que nous pouvons procéder?

Des Voix: Oui, oui.

Le Président (M. Cardinal): Alors, nous avons devant nous le Congrès juif canadien, mémoire 112. C'est M. Lévy qui a communiqué avec la commission, je pense. Est-ce que je pourrais vous demander, comme d'habitude, de présenter tous ceux qui vous accompagnent ainsi q ue vous-même? Ensuite, vous aurez 20 minutes pour présenter votre mémoire. M. Lévy.

Congrès juif canadien, région du Québec

M. Schwartzben (Melvin): M. le Président, Madame, MM. les députés. Je m'appelle le Dr Melvin Schwartzben. Je suis président du Congrès juif canadien, région de Québec. A ma droite se trouvent M. Félix Meloul, ancien vice-président du congrès; M. Mayer Lévy, directeur des relations communautaires; à ma droite, M. Ted Baker, directeur exécutif du congrès; à ma gauche, M. Alan Rose, vice-président exécutif du congrès, et Me Frank Schlesinger, membre principal du comité de rédaction.

May I, as the Chairman...

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, vous-même?

M. Schwartzben: Moi-même, j'ai dit que je suis le Dr Melvin Schwartzben.

Le Président (M. Cardinal): Oui, au début. Je m'excuse, je me rappelle.

M. Schwartzben: C'est un nom très long et peut-être que c'est difficile.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas facile.

M. Schwartzben: C'est Schwartzben.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. Schwartzben. Vous commencez votre mémoire?

M. Schwartzben: Je commence le mémoire. Le Président (M. Cardinal): Alors, 12 h 02.

M. Meloul (Félix): C'est l'introduction, M. le Président.

M. Schwartzben: C'est juste l'introduction.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais c'est compris dans l'exposé. M. Schwartzben, vous avez la parole.

M. Schwartzben: May I, as the Chairman of the Canadian Jewish Congress, the official representative organization of our Jewish Community in Québec, express our appreciation for this hearing today? We believe this action exemplifies your esteem for a community which has been deeply rooted in Québec for over 200 years.

Le mémoire que vous avez devant vous fut préparé par le comité conjoint des relations communautaires du Congrès juif canadien et de la B'nai B'rith. Nous avons fait de grands efforts pour obtenir la plus importante participation de notre communauté dans la rédaction de ce mémoire. Je ne veux pas expliciter cette question car mes collègues le feront bientôt.

Je voudrais tout simplement vous dire que vous ne devriez pas être déconcertés par ce qui semble être une contradiction, de par notre position.

Ainsi que vous le remarquerez dans le mémoire, nous sommes en faveur du principe du projet de loi no 1, lequel vise à faire de la langue française la langue principale, primordiale et d'usage du Québec.

En même temps, nous nous opposons à bien des dispositions du projet de loi no 1 et ceci, madame et messieurs, n'est pas une contradiction. C'est précisément parce que nous voulons que la langue française s'épanouisse et soit la langue de la vie quotidienne que nous nous opposons à la coercition qu'on retrouve dans le projet de loi no 1 tel que rédigé à l'heure actuelle. Il ne contribuera pas à accomplir le but visé, tout au contraire, il pourrait faire en sorte que l'accomplissement de ce but soit rendu difficile, sinon impossible.

Notre mémoire ne discute pas de statistiques, de pourcentages, de chiffres, non plus de controverses constitutionnelles. Nous nous sommes surtout attardés aux transgressions que le projet no 1 pourrait faire à la Charte des droits et libertés de la personne.

Nous faisons appel au gouvernement et à l'Assemblée nationale, non pas pour repenser les objectifs du projet de loi no 1, mais pour repenser les moyens et les manières de les accomplir.

Dans notre esprit, il n'existe pas de meilleure façon ni de meilleure manière, que le chemin déjà reconnu de la compassion, de la compréhension et de l'éducation, lesquels font tendre le peuple vers un but. Si je peux me permettre de reprendre une expression prophétique en la paraphrasant: ni par la peur, ni par la puissance, mais par l'esprit de bonne volonté et de tolérance. C'est ce que nous recherchons.

Je demanderai maintenant à M. Félix Meloul de lire la première partie du mémoire.

M. Meloul (Félix): Je vais commencer par la préface, mais j'aimerais quand même dire un tout petit mot de votre patience. Ceux qui sont physionomistes ont dû voir qu'on était dans la salle depuis au moins trois jours. Donc, nous avons eu de la patience. Merci, de part et d'autre.

Si vous avez l'impression que c'est du déjà vu, nous sommes pratiquement les derniers... Non? J'espère que non. Nous représentons un segment de l'opinion publique et, forcément, nous venons avec les mêmes inquiétudes et les mêmes espoirs que les autres segments de l'opinion publique québécoise.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que la remarque que vient de faire monsieur est tout à fait pertinente. Quand on a commencé à annoncer au public qu'on était suffisamment informé, on a mis les gens dans la situation où se trouve ce monsieur qui se dit: Est-ce que je viens ici pour rien ou pour quelque chose? C'est tout ce que je voulais dire.

Le Président (M. Dussault): Si vous permettez, monsieur...

Mme Lavoie-Roux: Non, mais c'est vrai.

Le Président (M. Dussault): ... présentez votre mémoire de la même façon que les autres et la commission, je pense...

Mme Lavoie-Roux: Nous sommes intéressés, monsieur.

Le Président (M. Dussault): ... sera fort intéressée d'entendre vos propos.

M. Meloul: Le Congrès juif canadien, région du Québec, est le porte-parole reconnu de la communauté juive de la province de Québec, laquelle comprend quelque 115 000 âmes. Le Congrès juif canadien est un corps élu démocratiquement qui représente virtuellement tous les courants d'idées au sein du judaïsme au Québec. La B'nai B'rith est la plus importante des organisations de services juifs. Ces deux organismes vous soumettent conjointement et respectueusement ce qui suit.

C'est le fruit d'un travail d'un comité ad hoc et de quarante mémoires reçus de la communauté, ainsi que de plusieurs réunions dont certaines rassemblaient plus de 1000 personnes.

La communauté juive, bien qu'unie, n'est pas monolithique. En raison de l'importance du projet de loi no 1, nous avons sollicité, par le biais d'une série de réunions publiques ouvertes à tous les membres de la communauté juive, la plus grande expression possible de points de vue à l'égard dudit projet. Un comité spécial a été établi par le comité conjoint des relations communautaires du Congrès juif canadien et de B'nai B'rith, afin d'étudier le projet de loi. Ce comité commença à se réunir alors que le livre blanc était publié. Il a étudié sérieusement les répercussions du projet de loi, son impact sur la vie du Québec et ses conséquences pour la communauté juive et toutes les minorités au sein de la province.

La poussée du projet de loi no 1 est d'une importance cruciale à l'endroit des citoyens du Québec. La communauté juive croit que toute forme d'encouragement doit être donnée à l'épanouissement de la culture et de la langue française, car cela reflète les aspirations légitimes de la majorité de nos concitoyens de la province. Dans notre présentation à la commission de l'éducation, des affaires culturelles et des communications de l'Assemblée nationale sur la Loi de la langue officielle, loi 22, nous avons déclaré que: "La communauté juive est unanime dans sa conviction que le langage prééminent du travail et des communications en cette province, doit être le français. Nous sommes toujours attentifs et éprouvons une profonde sympathie envers les aspirations linguistiques et culturelles des Québécois de langue française. La communauté juive du Québec a, durant les dernières années, en commun avec d'autres communautés dont la langue de base est l'anglais, vécu une transformation considérable dans l'usage et la priorité de l'anglais et du français, grâce à l'adoption plus large du français en tant que langue d'expression et de tra-

vail. Il est à relever que les toutes dernières statistiques publiées indiquent que le groupe le plus bilingue non francophone dans la province de Québec est la communauté juive."

Conformément à cette politique, dans notre présentation à la commission Gendron faite à une date antérieure, la politique substantielle de la communauté juive entre autres: a) Exprima sa compréhension des aspirations du peuple francophone de la province de Québec tendant à maintenir son intégrité linguistique et culturelle, et, en conséquence, suggéra que les mesures en vue d'aboutir à cet objectif soient fondées sur des motifs constructifs, et l'automotivation dirigée; b) Proposa que rien ne devrait déroger ou diminuer en aucune manière aucun droit ou privilège acquis ou exercé en ce qui concerne la langue — et, en particulier, le français et l'anglais — par n'importe quel habitant de la province de Québec; c) Insista sur le fait que toute division des résidants du Québec entre groupes majoritaire et minoritaire soit éliminée et que tous les Québécois soient considérés comme possédant un statut éga-litaire; d) Proposa qu'il n'y ait point de distinction entre les résidants nés au Québec, ceux qui s'y sont établis ou y vinrent avant ou après une certaine date; e) Recommanda que toutes les écoles établissent un système éducatif qui fournisse à leurs étudiants une connaissance de travail des langues française et anglaise en tant que moyens de communication; f) Insista en vue de l'adoption d'un code des droits de l'homme incorporé dans la constitution, qui inclurait des garanties pour la liberté de choix des langues française et anglaise en faveur de tous les Québécois.

Ainsi, la communauté juive reconnaît que l'avancement pour la langue et la culture françaises est un développement positif dans cette province.

Ainsi qu'on pourra le remarquer dans le mémoire qui suit, notre souci majeur réside dans le fait qu'il ne devrait pas y avoir de violation des droits de l'homme pour n'importe quelle personne, et que l'équité, en termes de loi, habitude et usage, soit maintenue pour tous les individus, sans distinction. Nous partageons un souci profond avec de nombreux segments de l'opinion publique dans la province à savoir que la Charte des droits et libertés de la personne ne devrait être supplantée de quelque façon que ce soit par le projet de loi no 1, et que l'attitude adoptée par le Parti québécois, pendant qu'il était dans l'Opposition, à savoir que toute nouvelle loi ne l'emportera pas sur la Charte des droits et libertés de la personne, soit honorée. Nous croyons que l'épanouissement du français, comme dans l'étude établie dans le livre blanc et dans la loi proposée, ne doit pas diminuer les droits et libertés fondamentaux de l'homme, de tous les citoyens du Québec.

Quelles qu'aient été les injustices du passé dont la communauté juive fut aussi la victime, comme cela est arrivé si souvent malheureusement dans notre histoire, celles-ci ne peuvent être corrigées par des mesures discriminatoires ou coercitives. Les problèmes culturels et linguistiques du Québec doivent plutôt être résolus par la coopération et la compréhension la plus étroite de la part de tous les citoyens, sans distinction d'origine.

Introduction.

La communauté juive appuie une politique linguistique qui rend le français langue primordiale et langue d'usage au Québec. Notre communauté a commencé à prendre les mesures nécessaires, il y a de cela un certain nombre d'années, pour permettre aux institutions communautaires dont la langue d'expression était presque exclusivement l'anglais de s'exprimer aussi efficacement en langue française.

La communauté juive au Québec est composée de personnes parlant français, anglais et bilingues. Toutefois, les deux derniers groupes constituent la majeure partie de la communauté. Il est à noter que bien des personnes bilingues trouveraient difficile, sinon impossible, de communiquer en langue française avec les institutions communautaires ou gouvernementales sur des problèmes compliqués. Il existe des degrés de bilinguisme, de telle sorte que bien des personnes bilingues peuvent facilement s'exprimer jusqu'à un certain point dans leur langue seconde. Quoi qu'il en soit, la majorité des personnes dans notre communauté ont toujours bénéficié et s'attendent à recevoir des services communautaires offerts en langue anglaise. Telle est la réalité linguistique de notre communauté.

Nous appuyons le projet de loi no 1, pour autant qu'il a pour objet de faire du français la langue principale, primordiale et d'usage au Québec. Nos objections vis-à-vis du projet de loi no 1 sont fondées sur ce qui nous semble être un traitement injuste des minorités ou des individus ou une violation de leurs droits et de leurs libertés. Nous sommes d'accord avec la déclaration faite par l'actuel vice-premier ministre et ministre de l'Education à l'Assemblée nationale le 21 juin 1976, lorsqu'il dit: "On juge une démocratie par le traitement qu'elle offre à ses minorités". Ceci devrait s'avérer vrai également en ce qui concerne le traitement des individus.

Nous comptons que l'Assemblée nationale et le gouvernement continueront d'appuyer les principes et dispositions de la législation en vigueur applicable au Québec, offrant la protection des droits et libertés pour les minorités et les individus. Il est donc impératif que l'article 172 du projet de loi no 1 soit supprimé de façon que, dans les termes de l'article 52 de la Charte des droits et libertés de la personne, "les articles 9 à 38 de cette charte prévalent sur toute disposition" de la Charte sur la langue française au Québec.

En premier lieu, nous traiterons des droits fondamentaux, tant des individus que des minorités, et, en deuxième lieu, de la substance et de l'administration du projet de loi no 1.

Les droits fondamentaux. D'abord les droits et

libertés de la minorité de langue anglaise. L'Acte de l'Amérique du Nord britannique protège certains droits collectifs de la minorité. Par exemple, l'article 93 garantit certains droits à l'enseignement à la fois des protestants et des catholiques romains tant en Ontario qu'au Québec, et l'article 133 garantit certains droits linguistiques au niveau fédéral et au Québec.

L'article 43 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec stipule que "Les personnes appartenant à des minorités ethniques ont le droit de maintenir et de faire progresser leur propre vie culturelle avec les autres membres de leur groupe". Le troisième paragraphe du préambule du projet de loi no 1 mentionne que l'Assemblée nationale entend "poursuivre cet objectif dans un climat de justice et d'ouverture à l'égard des minorités qui participent au développement du Québec." A notre point de vue, cette intention n'est pas appliquée de façon logique dans le projet de loi no 1 ainsi que l'indiquent les exemples suivants:

Premièrement, il semblerait que le mot "Québécois" figurant dans le préambule aussi bien que dans les articles 2,6, et 112b du projet de loi no 1 se prête à des interprétations diverses. Il peut signifier chaque Québécois, quelle que soit son ethnicité ou sa langue; Québécois de langue française ou seulement Canadien français. L'emploi de ce terme tendrait à créer différentes classes de Québécois. Contrairement à ce que certains auteurs du projet de loi no 1 ont déclaré, y compris le premier ministre et le ministre d'Etat au développement culturel, le premier paragraphe du préambule exclut les personnes ne parlant pas français au sein du Québec de la définition du "Québécois". Ainsi, un touriste belge ou un Onta-rien de langue française aurait le droit de demander que certaines personnes communiquent avec lui en français aux termes de l'article 2 du projet de loi no 1 où i! est stipulé que "tout Québécois" jouit d'un tel droit. Assurément, un tel touriste n'est pas inclus dans la définition du terme "Québécois". Nous croyons que toutes les personnes devraient avoir des droits linguistiques égaux au Québec. Nous prions donc le gouvernement de remplacer le terme "Québécois" par les mots "Toute personne".

Un second exemple de violation des droits de la minorité figure au chapitre III du projet de loi no 1 qui traite de la langue et de la législature et des tribunaux. L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique stipule, tel qu'indiqué ci-dessus, une certaine protection de la langue pour la minorité parlant anglais au Québec. La question n'est pas de savoir ici si l'Assemblée nationale peut, oui ou non, constitutionnellement, diminuer ces droits. Il est clair que l'Assemblée nationale peut éliminer ou diminuer bien des droits des minorités, par exemple ceux figurant à l'article 43 de la Charte des droits et libertés de la personne. L'élimination des droits linguistiques de la minorité, proposée au chapitre III du projet de loi no 1, est inéquitable et injuste. Il faut garder présent à l'esprit le fait que ces droits linguistiques ont été le privilège de la communauté de langue anglaise du

Québec depuis bien avant la confédération. Enfin, nous ne pouvons accepter le fait que l'élimination de certains droits de la minorité de langue anglaise dans les tribunaux et la législation tendra à préserver ou à contribuer au développement de la langue et de la culture françaises.

Troisièmement, certaines collectivités locales de langue anglaise se sont exprimées dans cette langue au Québec depuis le XVIIIe siècle. Le but du chapitre IV du projet de loi no 1 vise à forcer ces collectivités locales — par exemple des commissions scolaires et des municipalités — à travailler dans la langue française. Ceci est inéquitable et injuste. Le fait de changer la langue de travail des institutions parlant essentiellement anglais ne contribuera sûrement pas à l'épanouissement de la langue française au Québec. En dernier lieu, il est à noter que des institutions similaires d'expression française se trouvant dans la province voisine du Nouveau-Brunswick seront capables de s'administrer exclusivement en langue française. Le traitement d'une minorité par une législature se rapporte évidemment à un traitement législatif. A notre point de vue, le traitement législatif proposé dans le projet de loi no 1, en regard de la minorité de langue anglaise au Québec, affectera de façon déplorable les valeurs et les croyances démocratiques de notre société.

Droits et libertés de la personne. Les droits de l'homme ont été transgressés dans un certain nombre d'articles du projet de loi no 1. Afin d'illustrer ces transgressions, nous donnons les exemples suivants:

L'article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne prévoit la protection d'un nombre de libertés fondamentales, y compris la liberté de parole. L'article 10, en outre, prévoit que "Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée et en particulier sur la langue." Il semblerait que l'article 46 du projet de loi no 1, qui interdit l'emploi d'une langue autre que le français dans l'affichage, entre clairement en contradiction avec les droits et libertés ci-dessus. Nous croyons que protéger la liberté de parole revient également à protéger le libre cours de l'information commerciale. Une telle liberté d'expression est et devrait rester partie intégrante de la loi du Québec.

Une autre violation des droits et libertés de la personne figure au chapitre VIII, qui traite de la langue d'enseignement. L'élimination des enfants parlant anglais et venant d'écoles anglaises de l'extérieur du Québec n'est pas une classification rationnelle. Pourquoi classer différemment des enfants? Supposons, par exemple, que deux familles parlant anglais viennent d'Ontario au Québec et que l'un des pères ait reçu un enseignement élémentaire au Québec. Pourquoi les enfants de ce dernier devraient-ils être classés comme étant admissibles aux écoles anglaises alors que les enfants des autres parents ne le seraient pas? La Charte des droits et libertés de la personne déclare dans le préambule que tous les êtres humains "ont droit à une égale protection de la loi." Selon nous, la classification législative au chapitre

VIII du projet de loi no 1 fournit une protection inégale et est injuste, inéquitable et arbitraire. Ce type de classification discriminatoire n'existe pas pour ce qui est de l'admission des enfants aux écoles existantes anglaises et françaises ailleurs au Canada.

Des violations possibles des droits de l'homme figurent également dans les articles du projet de loi no 1 ; qui traitent de l'application de la loi. Deux bureaucraties puissantes sont établies, l'Office de la langue française et la Commission de surveillance et les enquêtes. Ces organismes gérés, tel que stipulé, par une personne et dotés de pouvoirs énormes devraient être assujettis à des contrôles spécifiques et efficaces incluant clairement des droits d'appel interjetés à propos de décisions administratives.

Enfin, la protection de la langue et de la culture française n'est point hostile en soi aux droits et libertés de groupes, de minorités ou d'individus. Il est important, cependant, que le projet de loi no 1 soit dans tous ses aspects logique avec de tels droits et de telles libertés. Il est bon de rappeler que les paragraphes 2 et 3 du préambule de la Charte des droits et libertés de la personne déclarent que "Le respect de la dignité de l'être humain et la reconnaissance des droits et libertés dont il est titulaire constituent le fondement de la justice et de la paix" et que "Les droits et libertés de la personne humaine sont inséparables des droits et libertés d'autrui et du bien-être général."

Nous avons ensuite une vingtaine de pages que nous n'allons pas lire, mais que nous aimerions, M. le Président, verser en annexe au journal des Débats. C'est une suite d'articles et de changements suggérés avec les raisonnements et les justifications pour ces changements.

Je tiens à dire tout de suite qu'ils ne sont pas tous négatifs. Il y a certains aspects qui sont très positifs et où nous sommes très ouverts.

Il y a évidemment l'article 172, que j'ai presque envie de lire, en tout cas le raisonnement que nous donnons. En conclusion, à la page 28, nous lisons ceci: "La communauté juive du Québec appuie la tentative d'essai du gouvernement de promouvoir et de préserver la langue française. Toutefois, nous croyons que les modifications que nous avons proposées n'amoindrissent nullement un quelconque des objectifs formulés par le gouvernement, eu égard au projet de loi no 1. A notre avis, en adoptant ces changements, une acceptation plus enthousiaste des principes généraux de cette législation émanerait du grand public. Nous maintenons l'idée que le but du projet de loi no 1 doit être consistant avec la protection des droits de l'homme et la dignité de tous les citoyens. Nous croyons que la langue française peut s'épanouir sans coercition et pénalité. Finalement, nous attendons que ce gouvernement, qui a si bien énoncé par le passé l'importance des libertés individuelles, fera les changements nécessaires afin d'assurer que le projet de loi no 1 devienne la Charte de la langue française pour toutes les personnes au Québec".

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie.

Vous avez demandé que ce qui n'a pas été lu puisse paraître au journal des Débats. Effectivement, cela sera mis en annexe au journal des Débats, comme cela est un droit reconnu à tous les organismes qui sont venus nous voir ici.

Maintenant, je cède la parole à M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: M. le Président, je voudrais, avant même de remercier nos invités, excuser pour son absence le ministre d'Etat au développement culturel, retenu encore à cette heure au Conseil exécutif. Dans un message qu'il me faisait tantôt parvenir, il me prie instamment et personnellement de l'excuser de cette absence bien involontaire, car il croyait être de retour à la commission vers midi; de même, M. Lévesque, le premier ministre, aurait aimé assister à nos travaux ce matin, il est, lui aussi, retenu. Il s'était lui aussi promis de venir vous entendre.

D'ailleurs, vous savez que tant M. Laurin que M. Lévesque, et notamment M. Lévesque récemment, à la Canadian Jewish Association, où il a eu l'occasion d'être invité, ont depuis les derniers mois rencontré assez fréquemment des organismes de la communauté juive du Québec, d'une façon beaucoup plus précise, peut-être, que d'autres communautés du Québec, pour s'enquérir personnellement des réactions et éventuellement des remarques faites à la limite des craintes de la communauté juive, communauté qui a une importance notoire au Québec, pour justement mieux traduire peut-être, même avant l'audition de votre mémoire, ici, dans une volonté législative les besoins exprimés par chacun des Québécois, entre autres vous-mêmes.

Je voudrais en premier lieu vous remercier de votre patience. C'est un fait, nous sommes très physionomistes, quelques moments sont longs quelquefois; alors, nous nous plaisons à reconnaître des visages, quelquefois avec un peu d'angoisse, parce qu'on sent la fatigue chez eux peut-être davantage que chez nous, puisque nous participons aux débats, alors que vous n'êtes que spectateurs. Je vous remercie également de nous avoir présenté un mémoire qui est remarquable à plusieurs égards. Il est remarquable parce qu'il est le résultat d'une très vaste consultation. Ce n'est pas un mémoire qui nous vient d'un exécutif quelconque, d'une élite quelconque, qui a été cogité par quelques membres d'un bureau d'administration ou quelques scripteurs bénévoles. Il a une qualité absolument remarquable, celle d'être un résultat et, de ce point de vue, je pense qu'il pèse lourd ici comme témoignage ce matin.

Ce mémoire reflète également de multiples aspects de la communauté juive du Québec. Je veux souligner par là notamment la dernière partie, les recommandations qui touchent à peu près tous les chapitres de la charte de la langue, ce qui est, j'allais dire, un peu inusité dans les mémoires que nous recevons, puisque habituellement, chacun spécialise ses remarques dans son domaine, alors que vous avez fait un effort absolument considérable pour couvrir l'ensemble de la Charte de la langue. La communauté juive du Québec est

effectivement, après la communauté francophone et la communauté d'origine britannique ou écossaise, comme le disait quelqu'un récemment, la plus vieille communauté à faire partie de l'ensemble de ces minorités, peut-être, qui sont des Québécois. C'est la communauté, vous l'avez souligné, qui est de fait la plus bilingue au Québec. Je crois, sans vouloir faire de comparaison de quelque nature que ce soit, que cela est probablement une qualité maîtresse de tout votre peuple à travers le monde, d'avoir su, dans cette survivance, à travers non seulement l'histoire, mais aussi sur les divers continents, vous adapter au pays ou à la majorité que vous côtoyez.

Je suis toujours ému à la pensée de ces amis personnels venus plus ou moins récemment — quelques-uns sont ici depuis quatre ou cinq générations, c'est-à-dire aussi longtemps que mes propres ancêtres, en l'occurence — qui sont à la limite, parce qu'ils nous le disent, sans quoi on ne le saurait pas, Juifs comme on dit, car ils sont tellement intégrés à la communauté québécoise que c'est à s'y méprendre, j'allais dire.

Je ne suis pas toujours sûr que la communauté juive devrait être perçue comme une minorité ici au Québec, car elle a en son sein une sorte de démultiplication de facteurs qui fait qu'une partie de la communauté juive est justement francophone, et j'allais dire tellement bilingue ou autrement qu'elle est, j'allais dire, non seulement intégrée mais presque assimilée. Cette variété de la communauté juive du Québec donne de ce fait un dynamisme assez extraordinaire qui, pour nous — je ne voudrais pas exclure dans ma pensée l'aspect religieux du fait linguistique, de sorte que je ne voudrais pas voir dans la communauté juive l'expression d'une minorité linguistique comme on en a souvent parlé ici à cette table, au contraire — fait qu'un ensemble d'individus à caractère religieux ou à prédominance religieuse, du moins, mais avec des particularités de langue, qu'une partie devrait être étiquetée, dans notre tradition de vocabulaire, pour le moins de Canadien français, que d'autres seraient de langue prédominante yiddish, et d'autres seraient de langue prédominante anglaise.

Du moins, c'est la vision, à vivre avec la communauté juive, à vivre avec des amis, que je retiens de la communauté juive.

Il serait pour moi très long de reprendre l'ensemble de l'expertise que vous avez faite de la charte de la langue. Je vous en ai déjà remercié, mais, devant l'ensemble des recommandations, s'il fallait les prendre les unes après les autres, il faudrait sans doute y passer quelques jours, j'allais dire. Je me bornerai, si vous permettez, puisque l'ensemble des recommandations ont été versées au procès-verbal, au feuilleton de la commission, à souligner et très rapidement et en faisant un choix qui, je le sais d'avance, ne sera peut-être pas tout à fait judicieux, quelques-unes de vos recommandations.

D'abord, la recommandation globale, comme on pourrait l'appeler, est que la communauté juive appuie une politique linguistique qui tend à faire du français la langue — et vous avez utilisé dans votre présentation divers adjectifs — qui soit primordiale, qui soit d'usage.

C'est peut-être là le mot le plus important, au Québec, pour autant, dites-vous — et je l'admets au point de départ, on nous l'a souligné et c'est une volonté du législateur — que celle-ci ne viole pas les droits de l'homme.

Il y a eu — je passe du préambule à l'article 172, pour ainsi dire — très certainement beaucoup de fausses impressions relativement — et je veux exprimer le fond de ma pensée — à l'aspect de l'écriture ou de la technicité d'écriture de l'article 172. nous en sommes très conscients et j'allais dire très bien informés.

M. Bertrand: C'est le troisième... Mme Lavoie-Roux: Pardon?

M. Bertrand: C'est le troisième qui dit cela, bien informé.

Mme Lavoie-Roux: Sur cet article. C'est ce que j'ai cru comprendre.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Fallu: Je sais fort bien que...

Mme Lavoie-Roux: C'est devenu une technicité, c'est intéressant.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît, Mme le député!

M. Fallu: Très brièvement, maintenant, à propos des diverses recommandations. Il y en a une qui me tient particulièrement à coeur, étant député du comté de Terrebonne, et vous comprendrez pourquoi à l'instant. C'est relativement à l'article 54. Vous avez certaines hésitations. Je voudrais vous rassurer, notamment pour ce qui a trait — pardon, c'est l'article 58 — aux écoles religieuses qui sont régies par la Loi sur l'enseignement privé. Vous comprenez pourquoi, comme député de Terrebonne, je tiens à la communauté de la Côte cachée.

M. Schwartzben: La situation est que notre communauté a besoin de trouver des rabbins, des personnes chargées de la religion venant d'autres endroits du monde. Nous ne sommes pas assez avancés chez nous pour avoir cela. C'est très difficile, si l'on doit trouver quelqu'un des Etats-Unis, d'Australie ou d'un autre pays du monde, de venir ici, si toute la famille, les enfants, sont éduqués ou viennent d'une culture anglaise.

Pour venir ici, cela sera un changement, mais pour autant que nous aurions les institutions, les rabbinats et des personnes comme cela, des professeurs, cela arrivera avec le temps nous ne serons pas obligés de les chercher en dehors du Québec. Pour le moment, c'est de nous donner une chance d'avoir cela, de ne pas créer une situation où nous n'aurions pas un rabbin, une per-

sonne religieuse, une institutrice, quelqu'un comme cela. C'est la raison de cela.

M. Fallu: D'ailleurs, à mon avis, c'est un engagement formel, je crois que l'école rabbinique est, à plusieurs points de vue, assez mal traitée du point de vue strictement des droits de l'homme. Le temps passera.

Bref, je me refuse finalement à faire l'analyse article par article, parce que ce serait, d'une part, beaucoup trop long et peut-être un peu fastidieux, ici, en commission. Je peux — j'allais utiliser le mot vous rassurer, mais je pense que je n'en ai pas besoin — vous dire que chacune des recommandations a déjà été, par le groupe ministériel, longuement soupesée, décortiquée.

On les a comparées, les unes après les autres, aux autres recommandations qui étaient faites par d'autres groupes, d'autres mémoires, qui n'ont même pas été présentés, quelques-uns, du moins, et on a, dans l'esprit de la charte et aussi dans l'esprit de la reconnaissance complète des droits de l'homme, tenu compte des recommandations. Je ne veux pas dire par là qu'on a tenu compte de toutes vos recommandations, parce qu'on s'est rendu compte... Je me souviens, entre autres, de l'analyse de votre mémoire sur trois recommandations. Il nous est apparu, entre autres, que les recommandations étaient faites, suite à ce qui nous est apparu pour le moins une certaine incompréhension de la portée même de l'article. Enfin, je ne veux pas vous chicaner sur la chose.

Une Voix: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Terrebonne, je vous remercie. Est-ce que vous voulez réagir aux propos du député?

M. Schlesinger: Oui, si possible, j'aimerais peut-être faire un petit commentaire sur une des choses qui ont été dites par M. le député. On reconnaît et on est heureux de savoir que le député reconnaît les efforts qui ont été faits par la communauté juive pour devenir bilingue et pour être "fluent", parler de façon assez courante la langue française, mais, de là, il ne faut pas quand même faire le saut et croire que toute la communauté juive est complètement bilingue. Il reste qu'il y a des personnes, dans notre communauté, qui sont unilingues ou peut-être bilingues en anglais et en yiddish. Ces gens-là auront quand même des problèmes si des changements ne sont pas apportés au projet de loi.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie. M. le député de D'Arcy McGee a émis le souhait de prendre la parole, brièvement, quelques secondes, quelques minutes, et ensuite, je passerai la parole au député de L'Acadie. Je vais leur donner ce privilège, si on peut dire.

M. Grenier: Je comprends, la situation est tout à fait particulière.

Le Président (M. Dussault): D'accord, je vous remercie.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Il ne conviendrait pas, je crois, que je sois celui qui, au nom de l'Opposition officielle, pose des questions aux porte-parole du Congrès juif canadien. Après tout, étant issu de cette communauté, comme mon collègue de Saint-Louis, ayant été actif, étant actif dans de nombreux organismes, selon la compatibilité de ces activités avec mes responsabilités publiques, je me permets de croire que je suis presque suffisamment renseigné sur la communauté juive. Tel n'est peut-être pas le cas de tous mes collègues à cette table.

Le mémoire qui est devant nous reflète les faits historiques qui ont sensibilisé la communauté juive à toute considération qui touche les droits et libertés de la personne. Il est conséquent avec la série de mémoires présentés par le Congrès juif canadien au cours des récentes années et des récentes décennies sur les grandes questions de l'heure. Je voudrais tout simplement remercier les porte-parole du Congrès juif canadien, les féliciter pour un mémoire qui est présenté, de toute évidence, dans un esprit constructif et avec une très grande dignité. Ce disant, M. le Président, avec votre permission, j'aimerais passer la parole à ma collègue de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je me joins à mon collèque de D'Arcy McGee pour vous souhaiter la bienvenue. J'ai l'impression que c'est déjà une chose faite, puisque, depuis plusieurs jours, vous errez dans les couloirs du Parlement, sinon à l'intérieur du salon rouge.

Je voudrais profiter de l'occasion pour souligner la contribution de la communauté juive dans de nombreuses sphères d'activités au Québec, activités culturelles, activités commerciales, activités professionnelles, activités scientifiques. Je tiens à le souligner d'une façon toute spéciale aujourd'hui. Comme le disaient mon collègue de D'Arcy McGee, et, d'ailleurs, le député de Terrebonne, je pense que vous avez eu le souci d'examiner le projet de loi sous tous ses aspects et de faire des recommandations qui sont fort appropriées.

Ce qui m'a le plus frappée, ce sont les appréhensions que vous apportez ici de la part d'une communauté qui souvent a été l'occasion ou plutôt l'objet de discrimination. Je comprends que vous soyez particulièrement sensibles à des articles, par exemple, comme l'article 37, non pas parce qu'ils prévoient qu'on puisse exercer de la discrimination, mais à cause du silence qu'ils contiennent, comme d'ailleurs d'autres articles. Vous appréhendiez que, possiblement, ceci puisse devenir l'objet d'abus et l'exemple que vous apportez, c'est celui, maintenant devenu presque célèbre, du député de Saguenay, qui, je pense, est une toute petite illustration de ce qui pourrait survenir là-dessus. Je dois vous dire qu'il y a eu des assurances de la part du gouvernement

qu'on s'assurerait que de semblables choses ne puissent arriver. On a également eu ici d'autres groupes minoritaires. Comme il est très souvent difficile de discerner, dans le cas de congédiement ou le cas d'incompétence parmi un ensemble de facteurs, et souvent celui de la langue pourrait être utilisé, je pense qu'on ne saurait prendre trop de précautions pour prévenir des abus dans toute la mesure du possible. Ceci ne doit pas empêcher un gouvernement de légiférer sur la question linguistique, mais il doit prendre toutes les précautions nécessaires pour ne jamais laisser de porte ouverte à ce type de discrimination.

Il y a une autre chose que, de la part de l'Opposition officielle, je voudrais vous dire, comme je l'ai dit à d'autres groupes minoritaires qui sont venus ici, particulièrement à la Fédération des groupes ethniques. Là-dessus, je pense que je ne partage peut-être pas l'approche du député de Terrebonne, à moins que je ne l'aie mal interprétée.

Il s'est tout à coup senti très proche de personnes de votre communauté parlant français à un point tel qu'ils se seraient même assimilés, voulant sans doute vous payer ou vous donner un tribut de son estime et de son admiration. Je souhaite que votre communauté, comme toutes les autres, puisse se sentir à l'aise dans la langue française, dans une communauté, dans une province dont la langue de communication est le français. Je souhaite également qu'on soit capable de vous laisser vos caractéristiques propres et tous vos attributs, de même qu'aux autres communautés qui se sont présentées devant nous.

C'est dans la mesure où nous saurons le faire que le Québec sera un pays riche qui s'affirmera dans un esprit de respect, ce qui indiquera la qualité de sa vie démocratique.

Il y a deux questions que je veux vous poser. La première — le député de Terrebonne y a touché — c'est la remarque que vous avez faite quant aux délais qui devraient être donnés aux écoles religieuses pour obéir — c'est peut-être un mauvais terme, mais je n'en trouve pas de meilleur — à l'article 58, en ce qui concerne l'acquisition du français comme langue seconde. Quelles sont les difficultés particulières qui empêchent les écoles religieuses de répondre à cette exigence? J'ai l'impression qu'il s'enseigne déjà du français dans ces écoles. J'aimerais avoir un peu d'explications sur ce point.

M. Levy: Mme le député, nous ne voudrions pas nous attarder trop longtemps sur cette question, car l'association des écoles... juives est en rapport avec le ministère de l'Education en ce moment pour des arrangements finaux. Nous avons déjà commencé le processus de la langue française comme langue d'instruction aux degrés 1, 2 et 3. Le gouvernement demande qu'on augmente ces heures de français. On est en train de faire des tractations pour essayer de revenir à un processus beaucoup plus lent, au lieu de le faire en 2 ou 3 ans.

Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien, traditionnellement, sauf les écoles juives sefaraddes, les écoles juives privées ont toujours fonctionné dans la langue anglaise, avec, évidemment, le français comme langue seconde. M'indiquez-vous qu'elles vont se transformer pour, éventuellement, dans un délai qu'on jugera convenable, devenir des écoles françaises qui auront l'anglais comme langue seconde, plus, récemment, l'hébreu — et cela, je le sais — ...?

M. Levy: Cela tend vers cette direction, Mme le député. Nous avons demandé une période d'années un peu plus longue. C'est tout. Mais, le but est de franciser ces écoles le plus vite possible.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Meloul: J'aimerais ajouter quelque chose ici. C'est vrai que cela se fait progressivement. Et depuis trois ans cela se fait même avec une certaine intensité. Mais, c'est justement ce que nous avons voulu souligner, qu'il y a deux aspects. Il y a cet aspect que vous avez souligné et que nous soulignons à notre tour. L'autre aspect, c'est l'admission dans ces écoles. Si, par exemple, un parent religieux orthodoxe veut envoyer son enfant à cette école et qu'il n'est pas de langue anglaise, il ne peut pas l'envoyer. Il sera obligé de l'envoyer à l'école française, même sefaraddi qui n'est pas nécessairement religieuse et orthodoxe.

C'est là que nous demandons un délai, juste ce point là. Mais tout l'aspect général de ce que nous demandons est une espèce de ralentissement en ce qui concerne cela. Je suis éducateur et je suis évidemment tenté d'aller plus loin, mais j'aimerais, avec la permission du Président, faire une petite analogie avec ce que nous savons tous puisque nous sommes tous de descendance judéo-chrétienne, c'est que Moïse a pris 40 ans, dans le désert, pour que les générations puissent s'éteindre et que la future génération puisse vraiment être prête à faire face au futur, à la loi et à la Thora, etc. Voyez-vous, vous ne pouvez pas le faire. Il est dommage que M. Laurin ne soit pas là, j'aimerais lui dire qu'il y a une patience à prendre ici. La dame qui a 60 ans, le monsieur qui a 60 ans actuellement et qui vont à un hôpital juif, par exemple, ne pourront pas s'exprimer en français. Ils vont peut-être agoniser, mais ils ne pourront pas le faire. Avec toutes les lois du monde, il y a une patience. Par contre, il faut mettre l'accent sur l'enfant parce que, lui, il va naître, progresser et grandir dans cette société québécoise qui est majoritairement francophone et, comme nous avons déjà dit, nous en prenons le pli, il n'y a pas de doute là-dessus.

Mme Lavoie-Roux: Je trouve extrêmement intéressante votre ouverture vis-à-vis de ces écoles, qui, justement, depuis des années, probablement des générations, fonctionnent en anglais et que vous êtes prêts à convertir, selon des modalités que vous jugez justes et équitables, pour qu'elles deviennent des écoles françaises.

Une dernière question d'information. Le

Congrès juif canadien, région de Québec, compte-t-il dans ses membres également des personnes de la communauté juive française de Montréal, qui, je le sais, est moindre que la communauté anglaise mais s'est quand même accrue considérablement dans les dernières années?

M. Meloul: Vous en avez en face de vous. Votre humble serviteur est ex-vice-président du congrès et je suis évidemment issu de la communauté juive de langue française, cela s'entend je crois. Je suis ex-vice-président auss de l'Association sefaradde francophone. Actuellement, le président de l'Association sefaradde du Québec est le secrétaire du Congrès juif canadien, section québécoise.

Mme Lavoie-Roux: Je suis extrêmement heureuse de vous entendre dire cela, pour qu'ensuite certains ne mettent pas en doute votre représentativité. Une chose que je voudrais faire remarquer en terminant, c'est que je connais des personnes de la communauté sefaradde. Même si le problème de langue ne se pose pas pour elles de la même façon que pour les membres de la communauté juive anglophone, elles ont, à l'égard de ce projet, de loi no 1, les mêmes appréhensions, à cause des expériences antérieures qu'elles ont vécues et la plupart dans un passé beaucoup plus récent que les membres de la communauté anglaise. Je réalise fort bien que toute cette question de perception devient extrêmement importante pour votre communauté. Je vous remercie beaucoup et surtout de votre patience depuis trois jours.

Le Président (M. Cardinal): Merci, Mme le député de L'Acadie. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, on est toujours coincé sur une fin d'heure. Je ne sais pas comment le hasard fait cela.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, qu'est-ce que vous voulez? C'est le destin qui vous accompagne.

M. Grenier: II n'y a pas de groupe qui peut mieux me comprendre que ceux qui sont là.

Le Président (M. Cardinal): Justement, me permettez-vous un mot pour éviter que vous ne soyez coupé dans vos élans oratoires? Est-ce que vous êtes disposés, messieurs, à revenir avec nous cet après-midi vers 16 heures ou à peu près? Nous n'avons pas fini de poser des questions. L'Union Nationale a encore tout son temps, soit dix minutes, il reste encore quelques minutes que j'ai à calculer au parti ministériel, il reste encore treize minutes... Pardon, au parti de l'Opposition officielle, 13 minutes au parti ministériel, ce qui veut dire que nous en avons encore pour au moins une bonne demi-heure. Si vous voulez être assez gentils pour venir après les travaux de l'Assemblée nationale, je pense que là, avec la permission du député de Mégantic-Compton, je pourrais dès ce moment ajourner le débat.

M. Grenier: Oui. D'accord, cela irait. J'aimerais peut-être avoir une précision, avant, M. le Président. Je crois que ce sont les Cris que nous devons entendre après ceux-là cet après-midi. Je me demande si ce ne serait pas bon de s'informer auprès de ces gens s'ils pourraient revenir au début de la soirée afin qu'on vide notre question après avoir entendu, cet après-midi, la communauté juive, avant six heures, à savoir si on continue et avec qui, qu'on sache une fois pour toutes, qu'on se donne le temps, qu'on ne soit pas toujours pris avec des gens qui sont là, en ayant l'air de gens qui ont envie de faire perdre le temps du monde important.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le député de Mégantic-Compton. Il y aura toujours des invités qui seront là, parce que j'ai déjà indiqué de façon précise que le mandat de la commission, c'est de recevoir des invités et des témoins. Alors, je ne sais pas — évidemment, les représentants des Cris sont à l'arrière là-bas — si je puis me permettre de leur donner congé jusqu'à 20 heures. Encore une fois, qu'est-ce que vous voulez? Je suis pris dans une situation où je ne sais pas ce qui va se produire.

M. Grenier: Je vous inviterais à le faire à l'heure du midi, parce que j'ai bien l'intention qu'on vide la question avec tout ce qu'on a depuis deux jours. Je veux qu'on vide la question, alors invitez-les à nous revenir à 20 heures ce soir, parce que je prendrai certainement le temps, avec notre parti, de vider la question.

Mme Lavoie-Roux: Et nous attirer des reproches des députés ministériels continuellement.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Bourassa sur une question de règlement.

M. Laplante: Est-ce que le député peut vous donner un ordre semblable?

Le Président (M. Cardinal): Non, je ne le prends pas...

M. Grenier: M. le Président, une question de règlement.

M. Laplante: C'est un manque de...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît. Je ne le prends pas comme un ordre. Je le prends comme une demande. Bon, c'est réglé?

M. Grenier: D'accord, c'est cela.

Le Président (M. Cardinal): Cependant, cette demande je ne la refuse pas, mais j'ai de la difficulté à demander qu'un groupe ne se présente qu'à 20 heures. A ce moment-là, la commission sera, en quelque sorte, vide, ce sera un débat entre les députés et là vous me demandez une directive, dans le fond. Si telle est la question, j'ai ap-

pris que parfois il ne faut pas poser de question si on ne veut pas connaître la réponse. Parce que ma réponse va être que je ne pourrai pas agir ainsi.

M. Grenier: M. le Président, une proposition, une suggestion, si vous voulez...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, c'est toujours bienvenu.

M. Grenier: Ce n'est pas un ordre, c'est une suggestion. Si c'est un règlement que d'asseoir des gens là, on demandera aux Cris de venir nous entendre nous parler à hauts cris d'ici 17 heures ou 18 heures, parce que j'ai l'impression qu'on va vider la question une fois pour toutes.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas un règlement, c'est une question de mandat de la commission. A ce moment-là, ce que je peux faire, suite à votre demande, c'est de suggérer qu'il n'y ait qu'un seul représentant de ce groupe qui vienne, pro forma, si vous permettez, ce qui permettrait à la commission de continuer. Parce que, je le dis, dès le moment présent, quoi qu'il arrive aujourd'hui, s'il advient que nous n'avons plus d'invités devant nous, je suspendrai ou j'ajournerai les travaux sine die. D'accord?

Et sur ce, la commission ajourne ses travaux sine die. Vous revenez avec nous quand même cet après-midi, s'il vous plaît.

(Fin de la séance à 12 h 59)

Reprise de la séance à 17 h 1

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et messieurs!

Nous avons devant nous le Congrès juif canadien, mémoire 112. L'audition a débuté à 12 h 2, ce matin, et a été suspendue vers 13 heures. La parole est au député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, on arrive déphasé pour le moins.

Le Président (M. Cardinal): Ne m'en parlez pas, s'il vous plaît!

Mme Lavoie-Roux: Qui est déphasé, le président ou le député de Mégantic-Compton?

M. Grenier: J'aurais dû dire que nous sommes déphasés.

Je veux d'abord...

Le Président (M. Cardinal): ...M. le député de Mégantic-Compton.

Je voudrais quand même, parce que c'est une nouvelle séance, établir clairement quels sont les membres de la commission. Je ne voudrais pas l'oublier. Vous n'avez pas commencé votre exposé.

Les membres de la commission pour cette séance qui débute immédiatement et qui durera au moins jusqu'à 23 heures sont M. Alfred (Papineau), M. Bertrand (Vanier), M. Charbonneau (Verchères), membre de la commission cette fois-ci, M. Charron (Saint-Jacques), M. le ministre, M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Dussault (Châteauguay), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Fallu (Terrebonne), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Paquette (Rosemont) remplacé par M. Brassard (Lac-Saint-Jean) — bienvenue, M. le député de Lac-Saint-Jean — M. Roy (Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) et M. Samson (Rouyn-Noranda). Oui.

Mme Lavoie-Roux: C'est que le député de D'Arcy McGee remplace...

Le Président (M. Cardinal): M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) est remplacé par M. Goldbloom (D'Arcy McGee).

Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

Le Président (M. Cardinal): Merci beaucoup. La commission est établie.

Je n'ai pas d'ordre du jour à donner, il a été fourni ce matin. Nous avons devant nous...

M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, oui; allez-y, M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: Un très court point de règlement. C'est que je crois que cette commission avait choisi le député de Rosemont comme rapporteur, il y a quelques semaines...

Le Président (M. Cardinal): C'est exact.

M. Charron: ... au début de ses travaux. Le député de Rosenont n'est plus au Québec pour quelque temps, 'aisant partie d'une délégation parlementaire à I'étranger. Je me demande, dans le cas où cette commission terminerait ses travaux pendant l'absence du député de Rosemont, s'il ne faudrait pas choisir immédiatement un nouveau rapporteur.

M. Chevrette: M. le Président, je crois que c'est moi qui suis rapporteur de la commission, proposé, je ne me souviens pas par qui, mais à la première séance de la commission...

Le Président (M. Cardinal): Un instant! Si vous permettez, non, je pense que c'est M. Pa-quette (Rosemont). Je ne suspends pas, je vais vérifier et ensuite, je reviendrai sur cette question, parce qu'elle est importante.

M. Charron: D'accord.

Le Président (M. Cardinal): M. le secrétaire peut-il... C'est vraiment M. Paquette (Rosemont) qui a été nommé. Oui, M. le député de Mont-Royal, sur une question de règlement.

M. Ciaccia: Si je comprends bien, le député de Rosemont est parti seulement pour une période de quinze jours...

Mme Lavoie-Roux: Dix jours.

M. Ciaccia:... dix jours, alors, ce n'est pas une longue période. On pourrait le garder comme rapporteur.

M. Charron: Je suis parfaitement d'accord à l'effet que si le député de Rosemont revient avant que la commission n'ajourne ses travaux, on puisse par une nouvelle motion, lui remettre ses droits; il avait été le choix de la commission. Au cas où cette commission se juge suffisamment informée de quelque autre manière d'ici ce temps, il faudrait peut-être nommer un rapporteur intérimaire. Est-ce que je peux proposer que le député de Verchères soit le rapporteur de cette commission durant l'absence du député de Rosemont?

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Je sais ce qu'est l'intérim. Je ne préjuge en rien de la fin des travaux de cette commission; même ce matin, j'ai indiqué que j'étais très heureux de passer tout le mois de juillet et août avec vous. Par conséquent, je ne voudrais pas que l'on croie que cette suggestion du député de Jacques-Cartier et ministre... le député de Saint-Jacques — pardon, je m'excuse pour le député absent de Jacques-Cartier — soit interprétée comme étant le début de la fin des travaux. Je demande simplement à la commission si elle est d'accord; il me faut un consentement unanime, sans quoi — encore une fois, j'indique ce qu'il faut faire et je ne voudrais pas qu'on s'enferre dans la procédure — je devrai demander une motion qui sera débattable. Alors, est-ce que la commission est d'accord unanimement pour nommer par intérim un remplaçant au député de Rosemont?

Des Voix: D'accord.

M. Bertrand: Oui, on est d'accord; par intérim.

Le Président (M. Cardinal): Par intérim, d'accord. Alors, voulez-vous, s'il vous plaît, M. le député de...

M. Lalonde: On court un risque, mais... M. Bertrand: Par intérim.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques et M. le ministre, voulez-vous répéter votre suggestion dans ce cas?

M. Charron: Je propose, si la commission devait achever ses travaux durant l'absence du député de Rosemont que, par courtoisie, nous respections, tout autant que les députés de l'Opposition qui l'accompagnent actuellement dans un voyage en France... Je propose, si cette commission devait faire rapport à l'Assemblée, que le député de Verchères soit mandaté par cette commission pour le faire.

Le Président (M. Cardinal): Bon! Ecoutez! Vous m'avez donné un consentement et vous voulez recommencer.

M. Ciaccia: Je voudrais seulement poser une question.

Le Président (M. Cardinal): On va recommencer. Un instant! M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: C'est simplement pour demander s'il n'y aurait pas lieu de présenter ce changement pour mardi ou mercredi de la semaine prochaine? Il n'y a rien d'urgent aujourd'hui. C'est certain qu'avec le nombre de mémoires qu'on a devant nous, ça ne peut pas presser. Si on pouvait présenter la motion mardi, par exemple, à la reprise des travaux...

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le député de Mégantic-Compton, je regrette. Vous savez que ces jours-ci, j'en accepte pas mal. J'avais un consentement de la commission. Est-ce que ce consentement m'est retiré?

M. Grenier: II était accordé par tout le monde? Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Grenier: S'il l'a été, je vous l'accorde, vu que c'est intérimaire.

Le Président (M. Cardinal): Bon! Merci beaucoup! Vous êtes fort gentil, je l'apprécie.

M. Charbonneau: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Mme le député de L'Acadie avait quelque chose à dire aussi.

Mme Lavoie-Roux: C'est une directive, M. le Président. Je voudrais savoir si celui qui est nommé rapporteur de la commission a le droit de parole, s'il peut participer au débat ou, si, au contraire, pour préserver son impartialité dans le rapport qu'il présentera, il est soumis au silence.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie, un rapporteur d'une commission est premièrement, nécessairement, membre de la commission; deuxièmement, tout comme le président, il a tous les pouvoirs d'un membre d'une commission, à savoir faire des motions, parler, voter et même rapporter, puisque c'est son rôle.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce qu'il y a une autre intervention? Bon! Dans ce cas, je vais reprendre non pas le débat, parce que je ne voudrais pas du tout que c'en soit un... La parole est au député de Mégantic-Compton, sur la question principale, avec dix minutes pour le parti de l'Union Nationale.

M. Grenier: Merci, M. le Président.

Je voudrais, comme l'ont fait les autres, bien sûr, remercier la communauté juive d'être devant nous avec son mémoire, qui est subdivisé en trois, et qui nous donne vraiment un éclairage différent de ce qui nous a été donné.

Vous avez dit bien sûr ce qu'on a senti dans tous les mémoires, à savoir que tout le monde est bien d'accord, en pratique, à une refrancisation du Québec. Dans la théorie, il n'y a pas de mémoire ici, je pense, qui n'ait pas dit ça, mais c'est toujours dans la pratique que cela accroche. C'est dans les faits qu'on retrouve des choses qui vont moins bien.

Comme on l'a signalé antérieurement, c'est toujours facile d'être pour la vertu et contre le vice, mais, pour le vôtre, on se rend compte qu'il y a des faits qui ne sont pas ce qu'on a relevé dans d'autres mémoires.

Ce qui m'a vraiment réjoui — pas surpris, je le savais, mais je suis content de le voir écrit — c'est ici, à la page 2, "il est à relever que les toutes dernières statistiques publiées indiquent que le groupe le plus bilingue non francophone, dans la province de Québec, c'est la communauté juive". Cela me fait plaisir de le lire et que vous soyez ici aujourd'hui pour qu'on puisse vous signaler ce fait. J'aimerais savoir comment ce groupe a senti le besoin de se franciser plus qu'un autre groupe qui n'est pas un groupe anglophone, mais une communauté allophone au Québec. A quoi attribuez-vous ce facteur d'être plus bilingues que d'autres?

M. Schlesinger: Pour commencer, je ne crois pas qu'il y ait lieu de nous comparer à d'autres groupes. Si la communauté juive trouve entre ses membres beaucoup de personnes qui ont cru bon d'apprendre la langue française, c'est parce que les personnes se rendent compte qu'elles vivent dans une province où la majorité est francophone et elles ont probablement pris chacune sa propre décision; chacun a décidé que c'était normal d'apprendre cette langue pour pouvoir communiquer avec ses confrères d'autres langues, à part égale. Je ne crois pas que cela ait été une politique comme telle, énoncée par la communauté, mais des personnes individuelles ont décidé que c'était normal et, naturellement, ces personnes ont décidé de faire les démarches nécessaires pour apprendre le français.

M. Grenier: Je ne suis pas pleinement satisfait. Votre communauté, je me trompe peut-être, j'espère ne pas errer, mais, il me semble, c'est une communauté allophone, si on veut la qualifier; je n'aime pas l'expression, mais je pense qu'il faut ainsi la qualifier pour se comprendre, et c'est peut-être la première qui est répartie un peu partout dans le secteur du Québec. On voit d'autres communautés qui sont très majoritairement limitées à la ville de Montréal, alors que votre communauté est assez répandue à la grandeur du Québec. C'est peut-être un facteur qui explique le fait que ces personnes sont plus bilingues que d'autres. Mais quand je vois une communauté de 115 000 âmes, qui se dit — et je pense que c'est vrai — une des communautés les plus bilingues, je me dis que c'est peut-être plus que ce que vous nous dites, c'est peut-être plus qu'une conviction personnelle. Il y a peut-être, à l'intérieur, une espèce de mouvement d'accueil qui fait que, chez vous, c'est plus facile d'apprendre la langue française que pour d'autres communautés. Est-ce que je me trompe ou est-ce que cela peut être vérifié?

M. Schlesinger: Je crois que quand des personnes d'origine juive sont venues s'installer au Canada et surtout à Québec, la plupart d'entre elles ne parlaient ni l'anglais ni le français. Alors, c'est certain que ceux qui se sont installés dans les régions où il n'y avait presque pas d'anglais ont appris le français plus facilement que les autres. D'autre part, les personnes qui doivent offrir des services à la population francophone aussi ont décidé que c'est nécessaire d'apprendre le français et les personnes se sentent à l'aise dans le Québec et veulent participer à la société québécoise et un des moyens les plus faciles de participer à une société, c'est d'essayer d'apprendre la langue de la majorité. C'est évident que quand il faut apprendre une autre langue, on prend des démarches pour le faire. Historiquement, ceux qui ont été accueillis par la communauté anglophone

ont acquis la connaissance de la langue anglaise. C'était plus facile pour la plus grande partie des immigrants ici d'apprendre l'anglais, vu la situation qui existait pour l'accueil des immigrants.

M. Grenier: Merci. Vous avez un autre facteur et je dois vous signaler qu'il y a eu des groupes qui sont venus ici, des groupes exagérés des deux côtés. On a vu cela. Vous vous prononcez, peut-être de façon indirecte, pour le libre choix. C'est ce que j'ai cru détecter, le libre choix de l'enseignement de la langue, de façon indirecte peut-être; il semble qu'on le détecte à l'ensemble de cela. Je dois vous dire qu'il y a des groupes qui sont venus ici et à la lumière de plusieurs mémoires que nous avons, on se demande pourquoi tant d'insistance pour le libre choix chez certains groupes anglophones principalement, tant d'insistance pour vouloir donner le libre choix alors que dans l'ensemble je pense que la loi — je ne parle pas des programmes de partis politiques, je parle de la loi que nous avons devant vous — protège en très grande partie, au moins, l'élément anglophone déjà installé au Québec. Alors, c'est à se demander, à un moment donné, si des groupes anglophones ne voulaient pas tout simplement angliciser en étant tenaces au point de vouloir qu'on laisse le libre choix, si ce n'était pas simplement pour "bilinguiser", mais pour angliciser les 4% ou 5% d'étudiants qui fréquentent les écoles anglaises. Je ne sais pas si on doit détecter chez vous cette volonté indirecte d'un libre choix. Je ne peux pas dire qu'il y ait un article de votre mémoire qui le dit, mais dans l'ensemble, est-ce que c'est votre volonté d'avoir un libre choix ou si vous acceptez que les nouveaux arrivants juifs s'incorporent d'abord à la communauté canadienne-française?

M. Meloul: Je suis très heureux de répondre à cette question. Je suis très heureux qu'on nous pose cette question, parce que ça va faire plaisir aux deux côtés de la table. C'est pas facile. Il y a eu une progression depuis la loi 22 et même depuis ce qu'on a proposé à la commission Gen-dron; honnêtement, au moment de la loi 22, on était pour le choix pur et simple, le libre choix. Il y a eu une nette progression. Ce que nous proposons aujourd'hui, c'est le libre choix pour les anglophones seulement, pour les vraies personnes de langue anglaise, et ce libre choix serait donc d'envoyer l'enfant à l'école anglaise ou à l'école française.

C'est clair, j'espère. Le deuxième point là-dessus, nous avons mis une nuance quant à l'école religieuse. J'ai répondu, ce matin, l'école orthodoxe. Bien que nous soyons tous Juifs, il y a des orthodoxes parmi nous; il y a des moins orthodoxes parmi nous. Il y a des gens pour qui l'éducation est intimement liée à la religion, elle doit se donner, non pas par un instituteur, mais par,un rabbin. Cela s'est vu dans d'autres religions évidemment. Vous connaissez la question. Ceux-là pourrait venir d'une origine non anglophone et, toutefois, avoir besoin d'aller à l'école juive religieuse orthodoxe.

Malheureusement, dans l'état actuel des cho- ses au Québec, une telle école n'est qu'anglophone. Donc, il y a une nuance dans le cas de ces enfants qui pourraient ne pas être d'origine anglophone. Quant à la majorité de la communauté, il n'y a aucun doute, nous avons progressé là-dessus, notre position est bien différente de celle de la loi 22, du moment où on a proposé quelque chose pour la loi 22. C'est le libre choix des anglophones, c'est-à-dire d'aller à l'école anglaise ou à l'école française.

M. Grenier: Je vous remercie. Je dois vous dire que vous donnez aujourd'hui un son de cloche tout à fait différent de celui de bien d'autres mémoires qu'on a eus. Cela me fait plaisir de l'entendre parce que je sais que vous répondez peut-être à des aspirations des deux côtés de la table. Ce que j'ai dit tout à l'heure, je ne le donne pas comme affirmation, mais à voir venir des groupes ici qui disent: il faut un libre choix à des gens qui sont installés ici, c'est à se demander, quand on y tient tellement, si c'est pour angliciser ces 4% ou 5%. Je m'interroge, je ne dis pas que c'est une certitude. Tandis que lorsqu'on dit que ce serait pour les rendre bilingues, cela expliquerait des choses, mais on a des témoignages qui font qu'à cause du système francophone qui était vraiment mal organisé jusqu'à ces dernières années, ça commence à monter, on se rend compte qu'on ne faisait pas avec ces jeunes, qui s'incorporaient aux écoles anglaises, des gens bilingues, mais des Anglais, au moins de mentalité.

Vous venez nous témoigner que vous vous êtes rendu compte de ça, vous avez progressé depuis quelque temps et vous êtes une minorité qui donne un point très clair dans le programme.

Personnellement, je crois que c'est un éclairage important pour notre parti. Je veux que vous en soyez bien conscients. On prend bonne note de ce passage qui n'est pas celui de beaucoup de monde de la commission.

Je ne veux pas utiliser tout mon temps. Je m'arrête là. Je vois que le député de Gaspé a des questions à poser.

Le Président (M. Dussault): Merci, M. le député de Mégantic-Compton. Je cède maintenant la parole au député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je veux tout d'abord remercier nos invités pour leur mémoire. Je veux les remercier, premièrement, pour l'aspect très positif de leur mémoire et aussi parce qu'ils sont très soucieux et très préoccupés de la question des droits minoritaires. Ils veulent que notre société ne soit pas divisée entre majoritaires et minoritaires, mais que tout le monde soit traité sur une base égalitaire.

Avant de poser quelques brèves questions, je voudrais seulement me référer à des propos que le député de Terrebonne a tenus ce matin. Je sais bien que ce n'était pas de mauvaise foi, il voulait certainement accueillir les invités. Mais quand il a dit que ces gens étaient assimilés, étant moi-même membre d'un groupe minoritaire, je me suis senti un peu... cela m'a touché; je ne voudrais pas

aller trop loin en disant insulté, parce que je ne veux pas vous attribuer de mauvais motifs. S'il y a une chose, c'est qu'on veut garder notre identité. Les minorités veulent garder leur identité. Je crois qu'il faut faire une distinction entre l'assimilation et l'intégration. Nous sommes prêts, comme minorités, à nous intégrer au Québec, à la société québécoise. Mais de là à être assimilés... Nous non plus, nous ne voulons pas perdre ce que nous sentons de façon viscérale.

J'espère que ce n'est pas une des intentions du projet de loi no 1 que d'assimiler les gens. Si c'est le cas, c'est une raison de plus...

M. Fallu: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal! Oui, M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: Vous êtes en train, M. le député, d'interpréter mes paroles, ce n'est pas un souhait que j'ai fait, c'est une constatation pour quelques individus. D'ailleurs, c'était vraiment minoritaire la remarque que j'ai faite, c'était pour quelques individus qui se sont assimilés; donc, ce n'est nullement un souhait.

Le Président (M. Dussault): Merci, M. le député de Terrebonne.

M. Ciaccia: Je répète, je crois qu'il y a vraiment un manque de communication. Ces individus que vous disiez soi-disant assimilés, si vous le leur demandiez, je suis certain qu'ils vous diraient la même chose que je vous dis: Nous ne sommes pas assimilés, nous sommes intégrés. C'est malheureux que ce côté-là de la table, des fois, ne semble pas comprendre cette différence.

En tout cas, je ne veux pas susciter un débat, c'est une remarque que je veux faire. Je voudrais procéder à certaines brèves questions.

Le Président (M. Dussault): S'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal, parce qu'il y a un débat qui va s'amorcer si cela continue en ce sens-là. S'il vous plaît!

M. Ciaccia: Le meilleur moyen d'éviter le débat, ce serait d'arrêter de parler de ce côté-là et de me laisser faire mes commentaires. A ce moment-là, il n'y aurait pas de débat. Je donnerais mes commentaires...

Le Président (M. Dussault): Je vous prierais, s'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal de continuer votre intervention dans le sens prévu, s'il vous plaît.

M. Ciaccia: Très bien, merci. Il y a plusieurs jeunes gens de... Je vous inviterai à faire des commentaires. Voulez-vous faire des commentaires sur ce que...

M. Schlesinger: Oui, j'aimerais faire un bref commentaire.

M. Ciaccia: Très bien.

M. Schlesinger: C'est qu'on est d'accord avec le fait que la communauté juive, comme d'autres minorités, ne veut pas s'assimiler. En effet, la communauté juive, comme d'autres minorités, veut garder son intégrité comme communauté et ses capacités et ses caractéristiques distinctives qui composent le groupe ethnique ou le groupe minoritaire que compose la communauté juive.

D'autre part, comme M. le député de Terrebonne a parlé d'assimilation, j'ai cru qu'il voulait dire intégration, parce que je crois que le ministre Laurin a déjà déclaré que l'intention du gouvernement était de sauvegarder le statut des minorités et leur intégrité et c'est dans cette optique que nous avons interprété les dires de M. le député.

M. Ciaccia: Très bien, parce que c'est seulement de cette façon qu'on peut maintenir et apporter une contribution au développement culturel de cette société.

Le Président (M. Dussault): Un instant, s'il vous plaît, M. le député! Excusez-moi, M. le député de Mont-Royal, il y a une question de règlement de la part du député de Papineau. Oui, M. le député.

M. Alfred: C'est pour expliquer quelque chose, une question d'explication. Le député de Terrebonne parlait en pédagogue...

Le Président (M. Dussault): Est-ce une question de règlement, M. le député de Papineau?

M. Alfred: Oui, ... et lorsqu'il a dit presque assimilé, il a fait la distinction entre deux termes que Piaget a employés dans son livre: "Accommodation et Assimilation".

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, M. le député de Papineau, je ne peux pas vous laisser continuer, ce n'est pas une question de règlement.

M. Alfred: Donc, le terme assimilation était pédagogique.

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, M. le député de Papineau, ce n'est pas une question de règlement. M. le député de Mont-Royal, continuez, je vous laisse une minute de plus, c'est normalement déjà écoulé.

M. Ciaccia: C'est plus qu'une minute, mais j'accepte le temps additionnel. Merci.

Il y a plusieurs membres de votre communauté et de la communauté anglophone, spécialement parmi les jeunes, qui sont inquiets des effets possibles du projet de loi 1.

Je me réfère à un mémoire qui a été présenté spécifiquement sur l'article 112 où on réfère à des Québécois et les suggestions, les recommandations qui avaient été faites à ce moment étaient clairement d'amender cet article afin que, quand on parle d'augmentation du nombre de Québécois à tous les niveaux de l'entreprise, on comprenne

vraiment les gens qui parlent le français. Est-ce qu'il y a des inquiétudes, à votre connaissance, parmi les jeunes, dans votre communauté? Face au projet de loi, face à des situations, s'il n'y a pas d'amendement, est-ce qu'ils disent que peut-être ils n'auraient pas autant de chances ici, est-ce qu'ils parlent de quitter la province?

Le Président (M. Dussault): S'il vous plaît, très brièvement.

M. Schlesinger: D'accord. On peut se référer à notre commentaire sur l'article 112b, à la page 25 de notre mémoire. On dit que le mot "Québécois, doit être remplacé par "de manière à assurer l'utilisation du français à tous les niveaux de l'entreprise, y compris, au sein du conseil d'administration et au niveau des cadres". En effet, l'inquiétude est causée par le mot "Québécois". On a déjà parlé ce matin de la question des Québécois quand on lit le préambule au projet de loi. Si on interprète "Québécois" comme étant seulement un Canadien français, naturellement, il y a de l'inquiétude, mais si on parle seulement d'une connaissance de la langue française, je crois que, probablement, l'inquiétude sera beaucoup diminuée. L'inquiétude est partagée par toute la communauté de la province de Québec, et non seulement la communauté juive. C'est une question de droit humain, plutôt que d'une minorité quelconque.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie, M. le témoin. Je passe maintenant la parole, le temps du Parti libéral est malheureusement écoulé. J'ai été quand même généreux, malgré les questions de règlement qui ont pu intervenir. Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, il y a peut-être un petit malentendu, parce qu'avant l'ajournement de ce midi, je pense, mais je ne peux pas l'affirmer, parce qu'on a tellement de travaux, différents détails, il m'a semblé qu'il nous restait au moins huit ou neuf minutes...

Mme Lavoie-Roux: C'est ce que le président nous avait dit.

Une Voix: C'est ce que le président nous avait dit.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il restait six minutes. S'il était vrai que c'était huit minutes, vous auriez encore largement profité du temps que vous aviez. C'est pour cela que je me permets maintenant de donner le temps qui reste à M. le député de...

M. Lalonde: Alors, nous avons eu plus que huit minutes.

Le Président (M. Dussault): Oui, vous avez eu le temps qu'il fallait. Alors, je me sens tout à fait à l'aise.

M. Ciaccia: Vous ne l'avez pas fait d'une façon très élégante, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): D'accord. Je voudrais maintenant laisser la parole à M. le député de Gaspé pour deux minutes.

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Excusez, je vais revenir en français.

M. Alfred: C'est gentil!

M. Le Moignan: Non, cela priverait les membres de la commission des réponses qu'ils vont nous donner en français.

Une Voix: On n'a rien contre le bilinguisme!

M. Le Moignan: Non, cela aurait l'air trop prétentieux de ma part. Je voudrais simplement revenir sur certaines...

M. Bertrand: Ne commencez pas à dire la messe !

M. Le Moignan: ...questions de mon voisin, le député de Mégantic-Compton. Cela m'intéresse beaucoup, parce que si votre groupe compte 115 000 Juifs, j'aimerais savoir quelle proportion de Juifs de langue française vous avez. Simplement, en vitesse?

M. Schlesinger: C'est à peu près un cinquième à un sixième. Cela veut dire, à peu près 20 000 à 25 000.

M. Le Moignan: Ils sont tous cantonnés, en somme... Vous êtes situés dans la région presque immédiate de Montréal?

M. Schlesinger: A peu près, mais il en existe naturellement en dehors de Montréal également.

M. Le Moignan: Mais, en dehors de Montréal, la proportion n'est pas tellement forte. A travers la province, on peut dire que c'est un chiffre minime.

M. Schlesinger: Je n'ai pas les statistiques, je regrette.

M. Le Moignan: Mais, à Montréal, vous avez vos propres écoles?

M. Schlesinger: A Montréal, il y a deux écoles francophones juives.

M. Le Moignan: Maintenant, ceci veut dire que beaucoup de Juifs envoient leurs enfants dans les écoles anglaises. Ils ne vont pas tous dans vos propres écoles. Est-ce que vos écoles sont suffisantes pour vos enfants?

M. Schlesinger: II y a des écoles juives proprement dites et il y a les écoles publiques protestantes, qui accueillent la plus grande partie des étudiants juifs.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Gaspé, votre temps est aussi écoulé. Vous n'aviez que deux minutes.

Mme Lavoie-Roux: II est raide, n'est-ce pas!

Le Président (M. Dussault): Maintenant, je cède la parole à M. le ministre d'Etat au développement culturel, pour treize minutes.

M. Laurin: Messieurs du Congrès juif canadien, je suis très heureux d'être venu à la commission parlementaire — dont je m'excuse de m'être absenté ce matin — avant que votre témoignage ne soit terminé. Je suis content de renouveler les bons contacts que j'ai eus avec divers membres de votre communauté, à quelques occasions, avant que ne débute cette commission parlementaire.

Je prends évidemment à mon compte tout ce que vous a dit le député de Terrebonne ce matin. Pour nous, du gouvernement, vous représentez une communauté très importante non seulement par le nombre, mais en raison du fait que vous êtes établis depuis longtemps au Québec, que vous êtes intégrés à la vie du Québec et que votre apport à la vie du Québec a toujours été et demeurera précieux. Et c'est bien en ce sens que nous voulons continuer de présenter toute législation qui a trait aux divers groupes qui participent avec nous au développement du Québec.

J'ai vu, à la lecture attentive de votre mémoire, que vous accordez une très grande attention à la protection des droits et libertés de la personne. Croyez que nous comprenons parfaitement cette préoccupation. Elle est la nôtre également, et même si quelques formulations temporaires ont pu vous amener à penser que notre préoccupation était moindre que la vôtre, je pense bien que la nouvelle version du projet de loi dissipera à ce sujet toute crainte, toute inquiétude, toute préoccupation que vous pourriez avoir et qu'en ce sens, l'un ou l'autre des membres de votre groupe n'aura pas à faire des procès par anticipation de l'action du gouvernement.

Vous voudriez aussi —cela se comprend — que la présente législation accorde davantage de place à l'anglais au Québec. Malgré que nous comprenons, jusqu'à un certain point, votre préoccupation dans ce domaine, nous ne pouvons pas vous suivre totalement puisque le but premier de la législation est quand même de faire du Québec un pays français, beaucoup plus français en tout cas qu'il ne l'a été, mais cependant dans le respect de toutes les particularités culturelles et avec tout le respect qui se doit à tous les groupes, encore une fois, qui participent avec nous au développement du pays.

Je vois que vous avez lu avec attention le projet de loi, puisque vous nous faites une cinquantaine de recommandations. Je n'ai vraiment pas le temps de les étudier toutes avec vous, mais je pense que je peux vous dire qu'une bonne partie de vos préoccupations proviennent d'un malentendu au sujet du projet de loi.

Beaucoup des choses que vous nous demandez sont en fait accordées, dans le projet de loi, mais d'une façon et selon une formulation qui a pu vous induire en erreur. Par exemple, dans la recommandation que vous nous faites à l'article 3, il est bien évident qu'en assemblée délibérante, vous aurez le droit d'intervenir et de vous exprimer en français.

A l'article 6, nous remplacerons le mot "Québécois", dans le sens de vos voeux.

A l'article 15, rien ne vous empêche d'avoir les textes et documents en anglais, en même temps qu'ils seront en français. Ceci vaut pour plusieurs articles, pour l'article 16, pour l'article 25, pour l'article 26, pour l'article 27, pour l'article 41 et pour beaucoup d'autres articles. Plusieurs groupes l'ont fait avant le vôtre, ils ont exprimé cette préoccupation avant que vous ne l'exprimiez. La nouvelle version du projet de loi sera beaucoup plus claire à cet égard et il sera spécifié que l'usage d'une autre langue continuera d'être permis, là où il n'est pas interdit de façon spécifique, ou là où une prescription de la loi ne demande pas l'interdiction d'une autre langue que le français.

Je pense que ceci tient compte d'une dizaine ou d'une douzaine de vos demandes et je pense que, de ce point de vue, vos craintes seront dissipées.

Ceci vaut pour toutes les traductions, les versions, les catalogues, les formulaires d'emploi dont il est question à un endroit ou à un autre du projet de loi.

Vous nous faites aussi une recommandation à l'article 30. Vous nous demandez que cet article ne s'applique pas — cet article touche les ordres professionnels, comme vous le savez — à toute personne membre d'un ordre professionnel, au moment où cette loi entrera en vigueur. Ceci nous semble une recommandation valable et nous essaierons d'y satisfaire dans toute la mesure du possible, car nous avons appris, en effet, que, malgré la loi 22, il y a encore, au Québec, un certain nombre de professionnels qui ont de la difficulté à se conformer aux règlements actuels et ne possèdent pas encore une connaissance de la langue française qui les habiliterait à passer les examens appropriés. La nouvelle version de la loi prévoira un délai, assez long, qui permettra aux professionnels, qui ne se seraient pas encore conformés à la loi existante, d'acquérir une connaissance suffisante de la langue française pour pouvoir se présenter aux examens et les réussir.

Vous ne voudriez pas non plus qu'en vertu de l'article 37, des gens perdent leur emploi. Je pense que ce n'est pas le sens de l'article 37 et nous veillerons, bien sûr, à ce qu'aucune personne, juive ou anglophone, ne souffre de cet article, ne soit l'objet de discrimination en raison de cet article. Si nous avons voulu faire cesser la discrimination à l'endroit des francophones, pour des raisons linguistiques, ce n'est sûrement pas pour l'établir à l'endroit des anglophones.

Je comprends aussi votre préoccupation particulière en ce qui concerne les produits alimentaires importés, que votre communauté consomme de façon spécifique. Nous essaierons aussi de faire droit à cette demande dans les règlements,

de même qu'à votre autre demande en ce qui concerne les messages commerciaux placés à l'intérieur des commerces de détail.

Nous avons étudié cette recommandation et nous essaierons d'y donner suite dans toute la mesure du possible, sans que cela nous entraîne, cependant, à sacrifier un article que nous croyons essentiel et qui a trait à la francisation des raisons sociales.

A l'article 52, vous nous demandez de faire une modification qui existe déjà dans le projet de loi, car les anglophones qui fréquentent une école anglaise, du fait qu'ils fréquentent une école anglaise, ne perdent pas leur droit à l'admissibilité à l'école anglaise. Peut-être l'article n'est-il pas assez clair, mais je pense que si vous le relisez bien, vous verrez que cette demande est déjà satisfaite dans le projet de loi. Vous nous demandez aussi qu'un parent accompagne l'enfant lorsqu'il s'agit de vérifier l'admissibilité de l'enfant à l'enseignement en anglais. Cela va de soi. Il n'y a absolument rien dans le libellé de la loi qui empêche un parent d'accompagner son enfant, d'autant plus que la preuve d'admissibilité devra être fournie par le parent, évidemment pas par l'enfant.

Vous nous faites beaucoup d'autres recommandations en ce qui concerne l'office. Là aussi, je crois qu'il sera possible de satisfaire la plupart de vos demandes, soit qu'elles sont déjà inscrites en filigrane dans le projet de loi, soit que nous apporterons des amendements qui iront dans le sens de vos souhaits, lorsque vous souhaitez par exemple, que l'office soit moins bureaucratique, qu'un lieu soit trouvé où une entreprise puisse contester d'une certaine façon le refus, la suspension ou l'annulation d'un certificat de francisation, ou encore lorsque vous vous opposez à l'utilisation du terme québécois dans l'énonciation des objectifs que doivent poursuivre les programmes de francisation.

Je pense que vous verrez dans la version finale du projet de loi que — ce que je disais au début — les craintes que vous entreteniez au sujet de la concordance possible entre les deux chartes, celle du français et celle des droits de la personne, telle qu'elle a été tentée dans l'article 172... Le projet de loi sera amendé de façon telle que vos inquiétudes n'auront plus lieu d'être exprimées, d'être senties. Je suis donc heureux de vous dire que vos efforts n'auront pas été vains, que votre mémoire a contribué pour beaucoup à notre réflexion, qu'il nous sera possible de satisfaire vos demandes. En retour de quoi, nous vous demandons, à vous aussi, peut-être de faire un effort additionnel pour comprendre davantage la portée, le sens, l'esprit de ce projet de loi et surtout le mouvement collectif, le mouvement social dont il témoigne et qui amène une majorité à mieux définir son identité et à se doter des moyens dont elle a besoin, non seulement pour se maintenir dans l'existence, mais pour se développer et pour donner son caractère distinctif à cette communauté, à ce peuple qui a ses lettres de noblesse au Québec, qui a droit à l'existence, mais aussi et surtout qui a droit à son développement, qui a droit d'apporter sa contribution à l'oeuvre, à l'édifice de la civilisation universelle.

D'ailleurs, je pense bien que la communauté juive nous entendra, d'autant plus qu'elle compte déjà dans son sein un nombre croissant de Juifs francophones, de Juifs sefaraddes qui n'ont déjà aucune difficulté à reconnaître nos préoccupations, à les partager et aller également dans le sens du mouvement collectif que nous entendons instituer par cette loi.

Encore une fois, merci pour votre contribution et soyez sûrs que tous les autres problèmes qu'on ne peut pas régler par cette loi et que vous avez soulevés à l'occasion de votre mémoire, comme celui de l'enseignement religieux pour la communauté juive seront réglés aussi à d'autres niveaux par d'autres politiques.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Je pense que ceci termine l'audition...

Mme Lavoie-Roux: Ils veulent peut-être répondre.

M. Levy: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, je parle des députés. Oui, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Est-ce qu'il restait quelques minutes au parti ministériel?

Le Président (M. Cardinal): Oui, il reste quelques minutes.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je regrette, à ce moment-là, vous allez en accorder ici, parce que...

M. Chevrette: M. le Président, on va s'abstenir si on veut partir un débat.

Le Président (M. Cardinal): Ecoutez, s'il vous plaît. Il reste quelques minutes, j'espérerais qu'on ne les emploie pas; mais je ne voudrais pas, si on les emploie, que l'on commence un débat à cette heure-ci, alors que nous allons suspendre à 18 heures. Mais chacun des députés est libre et en aucun cas, je ne vais brimer la liberté de qui que ce soit.

Un instant, M. le député de Verchères et ensuite, M. le député de Mont-Royal.

M. Charbonneau: Est-ce que vous pourriez m'indiquer, M. le Président, combien de temps il pourrait rester au parti ministériel?

Le Président (M. Cardinal): Environ une minute.

M. Charbonneau: Ce sera très bref.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le député de Mont-Royal a demandé la parole.

M. Charbonneau: M. le Président, on n'a pas demandé à l'Opposition, si c'est dans les limites

du temps qui nous est accordé, la permission d'utiliser cette minute.

Le Président (M. Cardinal): Non, d'accord, mais M. le député de Mont-Royal, je pense, demande une question de règlement.

M. Ciaccia: Exactement, M. le Président. Je voulais seulement faire remarquer, c'est une question de règlement et du temps alloué aux députés de l'Opposition officielle, que le président qui était à votre siège avant vous nous a coupé la parole d'une façon très inélégante. Il n'a pas eu la même élégance que vous de donner une autre minute ou deux; alors, on n'avait même pas terminé nos interventions, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît, M. le député de Mont-Royal. Je m'excuse, je ne puis permettre cela. Ce n'est pas moi qui suis ici, c'est la présidence et je ne fais pas de personnalité, ni de distinction de personnes et je veux remercier autant le député de Saint-Louis que le député de Châteauguay, que le député de Jonquière que d'autres qui, à l'occasion, m'ont remplacé. Je n'accepterai pas de comparaisons qui seraient peut-être flatteuses, mais qui sont dans l'objectivité non recevables.

M. Ciaccia: C'est une plainte, ce n'est pas une comparaison, je me plains de la façon dont le règlement a été mis en vigueur pendant que j'avais le droit de parole.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais vous savez fort bien, M. le député de Mont-Royal, avec votre expérience, qu'une fois qu'un président a rendu une décision, elle est rendue. Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais simplement vous demander si le président qui vous a précédé croit que le temps du parti ministériel était complété quand vous êtes arrivé. Il avait dit qu'il y avait 13 minutes au parti ministériel et je suis convaincue qu'il a utilisé 13 minutes. Je n'ai pas d'objection à ce que vous donniez une minute au député de Charbonneau...au député de...

M. Charbonneau: II y avait un monseigneur qui était célèbre et je n'ai aucune honte à porter ce nom.

Mme Lavoie-Roux: ...au député de Verchères, mais je pense que réciproquement, vous pourriez peut-être accorder une minute au député de Mont-Royal.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie, je vais répondre directement à votre question. M. le député de Châteauguay, avant de quitter ce fauteuil, m'a indiqué qu'il restait une minute au parti ministériel.

Mme Lavoie-Roux: Parfait.

Le Président (M. Cardinal): Deuxièmement, qui veut parler du côté du parti de l'Opposition officielle? M. le député de Mont-Royal, je vous accorde une minute. Ensuite, il y aura une minute pour le député de Verchères.

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Vous parlez, dans votre mémoire, de droits individuels. Le Parti québécois parle très souvent de droits collectifs. Est-ce que nous faisons face à un problème culturel d'interprétation ou croyez-vous que la question des droits individuels est un concept fondamental qui devrait exister chez tous les peuples et toutes les nations?

M. Schlesinger: En effet, si les droits fondamentaux doivent être respectés pour chaque individu, normalement, il n'y a pas d'atteinte aux droits de la collectivité. Dans une société démocratique, la communauté juive a toujours pris cette position: les droits individuels et humains doivent être respectés en tout temps.

M. Chevrette: Appel au règlement, s'il vous plaît. M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je ne voudrais pas interrompre votre conversation avec les membres de l'Opposition officielle, mais je considère que cela devient quasiment indécent pour nos témoins.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Par respect pour la présidence, je ne veux pas continuer mon intervention, mais je voudrais, par exemple, que l'invité puisse terminer sa réponse, s'il vous plaît.

Le Président (M. Cardinal): D'accord.

M. Schlesinger: M. le ministre a dit qu'on avait une fausse impression de la loi. Peut-être que c'est l'article 172 qui nous a fait craindre un peu plus que nécessaire. Quand on voit, dans un projet de loi, un article qui supprime une charte des droits de l'homme, on commence naturellement à avoir des pensées qui mènent à des craintes, surtout quand on voit dans le préambule que la définition du groupe privilégié sera limitée à des personnes qui sont de langue française seulement.

M. le ministre vient de nous dire, heureusement, que cela sera amendé. Peut-être que cela va soulager un peu les craintes. Il faut toujours garder à l'esprit de chaque Juif ce qui est arrivé dans le passé. C'est pour cette raison que chaque fois qu'il y a la moindre atteinte, ou tentative d'atteinte, ou possibilité d'atteinte aux droits et libertés individuels, il faut devancer les autres pour souligner notre appui à tout droit humain et liberté individuelle dans une société démocratique. Par contre,

je ne crois pas que, si on respecte tous les droits humains et démocratiques, cela doive porter atteinte aux droits de la collectivité. Dans une démocratie, ce sont les minorités qui doivent être protégées.

M. Ciaccia: Je suis d'accord avec vous. Merci.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Verchères, une minute vous aussi. Je vous demande la même collaboration que m'a accordée le député de Mont-Royal.

M. Charbonneau: De toute façon, M. le Président, c'est juste pour illustrer le type de malentendu que le ministre d'Etat au développement culturel a mentionné tantôt.

Vous avez, à la page 2 de votre mémoire, fait référence à une présentation que vous avez faite devant la commission Gendron, paragraphe A, l'utilisation du terme "peuple francophone de la province du Québec". Si on regarde l'utilisation que le gouvernement a fait du même terme "peuple", en l'utilisant comme "le peuple québécois", je comprends très bien les malentendus qui naissent de l'interprétation du terme "québécois". La seule remarque que je voudrais vous faire, c'est que, dans notre esprit, l'utilisation du terme "peuple" était différente de la façon dont vous l'avez fait.

Pour nous, à l'encontre de la façon dont vous l'avez fait, on aurait préféré utiliser le terme "nation"; pour nous, le terme "peuple", c'est dans le sens d'une société qui habite un même territoire et qui veille sur l'autorité des mêmes droits. Je pense que, dans des débats fondamentaux — on s'en rend compte aujourd'hui — il est important de bien situer les concepts de base et d'utiliser les bons termes pour exprimer les bonnes réalités. Je pense que vous avez raison, compte tenu de votre perception du terme "peuple", d'être inquiets de la façon dont nous l'avons utilisé, mais je vous signale que notre utilisation n'était pas dans le même sens que la vôtre.

Ce que je trouve extraordinairement intéressant, d'autre part, c'est que vous êtes probablement un des seuls groupes ici, autre que québécois francophones ou que canadiens-français, qui a admis très clairement qu'il y avait une nation francophone au Québec. Que cette nation ait le droit ou non à l'autodétermination, qu'elle l'exerce ou non, c'est une autre question, mais elle existe et je pense que je vous rends grâce de l'avoir compris déjà à l'époque de la commission Gendron. Merci.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Puis-je vous permettre justement de terminer cette audition?

M. Levy: Je voudrais seulement dire deux mots à M. le ministre. Quand il s'est attardé à l'article 52, c'est que, dans le livre blanc, il était clairement mentionné que dans le cas des enfants qui allaient à l'école primaire française et qui étaient de parents anglophones, leur progéniture avait le droit d'aller à l'école anglaise par la suite.

J'ai étudié le cas avec le député de Rosemont, M. Paquette, qui, malheureusement, n'est pas là. Il m'avait dit que c'était un lapsus, qu'il avait été omis du projet de loi et qu'il verrait à ce que ce soit réinséré là-dedans. C'est une promesse qu'il m'avait faite au début des auditions.

M. Laurin: II est bien inclus à l'article 57, mais je fais une dernière vérification.

M. Schlesinger: Puis-je demander l'indulgence de la commission pour faire deux commentaires sur les paroles de M. le ministre?

Le Président (M. Cardinal): Oui, certainement, je vous demanderai de le faire brièvement, parce que je devrai suspendre bientôt.

M. Schlesinger: M. le ministre a fait allusion aux articles 48 et 49, brièvement, comme quoi il n'avait pas l'intention de changer les dispositions de la charte de la langue en ce qui concerne les raisons sociales.

Dans notre mémoire, nous avons dit que cela équivaut, en effet, à une expropriation sans indemnité, parce qu'il y a quand même des petits commerçants qui ont établi leur commerce depuis longtemps, même il y en a qui existent depuis plus de cent ans, qui ont établi un certain achalandage pour leur commerce. Alors, il y en a qui ne sont pas traduisibles, en les forçant à tout simplement abandonner leur nom, en effet, cela crée une situation qui est injuste pour ces personnes, parce que cela les force à perdre tout l'achalandage attaché à leur commerce. Et, pour une grande partie de ces commerces, c'est le plus grand bien de leur commerce. Alors, pour cette raison, je crois que quand il n'y a pas moyen de changer les raisons sociales sans perte pour les personnes en question, il devrait avoir un amendement à la loi ou au projet de loi, permettant à ces personnes de ne pas être obligées de changer leur raison sociale.

Le Président (M. Cardinal): Vous avez terminé?

M. Schlesinger: Deuxièmement, c'était la question de l'article 172. On a entendu beaucoup qu'on avait l'intention de le changer, mais jusqu'à ce moment, on n'a pas eu la substance de ce changement. Nous ne pouvons pas être trop forts en exprimant notre désir que l'article soit supprimé complètement.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, question de règlement. Tantôt, le député de Montcalm a référé à l'indécence de la présidence quand la présidence parlait au député de L'Acadie. Pourquoi le député de Montcalm ne réfère-t-il pas à l'indécence du ministre maintenant qu'il n'écoute même pas les questions et les commentaires de nos invités? Le ministre a une obligation d'écouter les commentaires. Le président préside seulement la commis-

sion. Alors, je voudrais que vous souleviez la question d'indécence maintenant.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je vous ferai remarquer que tout témoin s'adresse à la présidence, dans toute procédure parlementaire. Vous le savez. Cela fait assez longtemps que vous êtes ici pour le savoir. Si vous ne le savez pas, il est grandement temps que vous l'appreniez.

M. Lalonde: II y a de la procédure et il y a de la décence.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Montcalm, maintenant que votre question est posée et que je l'ai entendue, et que je la suis, je donne la parole...

M. Schlesinger: Seulement pour deux instants. La communauté juive était probablement la communauté la plus heureuse quand la Charte des droits de l'homme a été adoptée et peut-être plus heureuse que tout autre citoyen québécois. Alors, c'est pour cette raison que nous tenons plus à cette Charte des droits de l'homme que toute autre personne. Toute atteinte à cette charte doit être rejetée.

Le Président (M. Cardinal): Merci, monsieur. Si vous permettez, au nom de toute la commission, c'est-à-dire de tous les partis qui la composent, je vous remercie d'avoir accepté de venir devant nous volontairement, d'avoir préparé votre mémoire, de l'avoir présenté et d'avoir répondu aux questions.

Maintenant, c'est terminé. Merci beaucoup. Comme nous allons suspendre nos travaux dans quelques minutes, je vais me permettre quelques remarques. Après ces remerciements...

Est-ce que vous voulez ajouter un mot?

M. Schwartzben: Nous voulons seulement vous remercier, d'accord?

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci beaucoup. Alors, je n'appellerai pas immédiatement...

M. Schwartzben: Une minute!

Mme Lavoie-Roux: II n'avait pas terminé.

M. Lalonde: II ne les a pas donnés.

Le Président (M. Cardinal): Ah bon! J'avais compris... Je m'excuse!

M. Schwartzben: ... Pas si vite que cela. Après deux jours, je dois prendre quelques minutes.

Le Président (M. Cardinal): D'accord! Non, c'est parce que je regarde l'horloge devant moi. Je vous en prie. Je m'excuse vraiment.

M. Schwartzben: Nous devons attendre l'autre vol jusqu'à 10 heures. Comme ça, nous avons assez de temps.

M. le Président, messieurs les ministres, madame et messieurs les députés, merci de nous avoir écoutés et de nous avoir rassurés. Nous espérons que la commission et les rédacteurs de la loi tiendront compte de notre effort.

Merci bien!

Le Président (M. Cardinal): Merci! Je ne vous dira pas "bienvenue", parce que je ne souhaite pas qu'il y ait un autre débat semblable un jour. Mais enfin, espérons que tout se réglera, sans aller au fond du problème, je n'ai pas le droit...

Une Voix: Vous êtes toujours les bienvenus...

Le Président (M. Cardinal): Merci à tous! Vous êtes toujours les bienvenus dans cette Assemblée nationale qui appartient à tous les contribuables.

M. Schwartzben: Merci!

Le Président (M. Cardinal): Si vous me permettez avant la suspension quelques remarques. Je fais une invitation au groupe suivant, le Grand conseil des Cris du Québec, mémoire 101, à se présenter à 20 heures. C'est à 20 heures que nous recommencerons ce soir.

Je souligne une chose: J'ai reçu cet après-midi une lettre datée du 7 juillet qui vient de l'AI-can Aluminium Limitée, 1, Place Ville-Marie, Montréal, adressée à mon nom et dont j'ai fait faire 20 photocopies pour chacun des membres de la commission et que, comme d'habitude, j'ai fait distribuer à chacun des membres de la commission. Je ne le fais pas pour qu'une nouvelle motion me soit présentée, mais simplement parce que je veux que, comme président, chaque fois qu'on s'adresse à moi, je pense qu'on s'adresse, à ce moment-là, à la commission... Chacun d'entre vous a devant lui ou, enfin, tout près, cette lettre de l'Alcan.

M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui? Un instant! Oui, Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, vous nous faites part de cette lettre de l'Alcan. Pour ma part, j'ai reçu un télégramme des distributeurs d'équipement et j'ai cru comprendre, d'après la copie qu'on m'a envoyée, que semblable copie avait été adressée à chacun des membres de cette commission.

Le Président (M. Cardinal): Sauf au président, on ne sait pas que le président est membre de la commission.

Mme Lavoie-Roux: Alors, je le déplore et j'espère au'on vous a envoyé depuis une copie, M. le Président. Je voulais savoir quelle réponse, dans

ces cas, vous adressez aux intéressés parce qu'il semble vraiment que ce soit pour des raisons qu'eux jugent importantes qu'ils auraient souhaité comparaître devant cette commission.

Le Président (M. Cardinal): Mme le député de L'Acadie, ceia dépend des cas. Dans le cas de l'Alcan, si je n'ai pas encore répondu, c'est que j'ai reçu cette lettre pendant que j'étais à la commission parlementaire. Alors, la réponse viendra plus tard.

Dans le cas que vous soulignez, je n'ai pas reçu le télégramme, je ne peux pas présumer de la réponse que je rendrai.

Pour terminer, M. le député de Mégantic-Compton, M. le député de Saint-Jacques.

M. Grenier: Je ne voudrais rien soulever, parce qu'on est à 15 secondes de la fin.

Le Président (M. Cardinal): De toute façon, je vais me lever et cela va finir là.

M. Grenier: Si vous me dites que c'est terminé, c'est terminé; sinon je voudrais bien qu'on ajourne et on reprendra à 20 heures.

Le Président (M. Cardinal): Nous n'ajournons pas, nous suspendons. M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, est-ce que je dois considérer que nos prochains invités sont d'ores et déjà à la table pour la reprise des travaux à 20 heures.

Le Président (M. Cardinal): Non, j'ai justement indiqué que nos invités étaient le Grand conseil des Cris du Québec, mémoire 101, et qu'ils sont déjà invités à être là à 20 heures.

M. Charron: Bien, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Et sur cela, ce n'est pas un ajournement, c'est la même séance. Tout simplement, le Président se lève et les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

Reprise de la séance à 20 h 9

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et messieurs!

Est-ce que je peux demander à messieurs les députés et à madame le député de regagner leurs fauteuils, s'il vous plaît?

A l'ordre, M. le député de Gaspé, M. le député de Mégantic-Compton, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, M. le député de Mont-Royal. Le temps des caucus est terminé. Messieurs les députés de l'Opposition, à l'ordre, s'il vous plaît.

Mme Lavoie-Roux: Ils n'écoutent plus du tout.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Est-ce qu'il faut que je suspende la séance? La séance est suspendue pour deux minutes à cause des députés.

(Suspension de la séance à 20 h 10)

Reprise de la séance à 20 h 11

Le Président (M. Cardinal): Je regrette infiniment cet incident, je me permets de le dire, je le regrette infiniment. M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je regrette infiniment cet incident, c'est-à-dire que, pendant qu'il y a des invités ici, on se permette des mini-caucus et qu'on ne réponde pas à la demande de la présidence.

De toute façon, nous commençons quand même et nous avons devant nous le Grand Conseil des Cris du Québec, mémoire no 101; messieurs, madame, je vous donne la parole.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais et notre parti aurait quelques motions...

Le Président (M. Cardinal): Permettez-vous auparavant que ceux qui sont témoins devant nous s'identifient?

M. Lalonde: Oui, M. le Président.

M. Moses (Ted): My name is Ted Moses, I am representing the Grand Council of the Crees. I am also the director general of the Cree School Board. I would like, at this time, to introduce the delegation from the Grand Council of the Crees. On my right, I have the legal advisor of the Grand Council of the Crees who is also our anglophone legal advisor, Mr James O'Reilly, and on my left... ready? On my left is also the legal advisor of the Grand Council of the Crees, Miss Monique Caron, my francophone advisor.

M. Lalonde: M. le Président, nous n'avons pas entendu, à cause du défaut technique. We did not hear, before the technical defect, the name of your legal advisor to your right; could you introduce him, please?

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous m'avez devancé. J'allais poser la question, parce que ce n'était pas entendu, ni enregistré.

M. Moses: On my right is the legal advisor of the Grand Council of the Crees who is also my anglophone advisor, Mr James O'Reilly.

Le Président (M. Cardinal): Anglophone très bilingue, n'est-ce pas? Est-ce que vous êtes prêt à commencer ou...

M. Ciaccia: Tous les anglophones sont bilingues, M. le Président. Une bonne proportion des anglophones sont bilingues, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Je ne participe pas au débat, je vous en prie. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, est-ce que vous avez demandé la parole?

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je n'aime pas le dire devant la commission, mais je trouve fort étrange qu'on ait enlevé de ce côté-ci le fauteuil qui appartenait à l'Union Nationale et qu'on l'ait transféré du côté du gouvernement. On aurait pu avoir la décence de laisser au moins ce fauteuil qui appartenait à notre parti.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton. Oui, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Je veux juste indiquer que lorsqu'on est arrivé, la disposition des fauteuils était comme cela. Si vous voulez l'avoir, je vais vous le donner.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Nous pouvons discuter de la forme de la table, de la grandeur de la table, de la forme des fauteuils. Je rappellerai, cependant, au député de Mégantic-Compton que c'est moi — et je dis moi — qui ai obtenu un fauteuil additionnel, parce que M. Biron venait ici.

M. Grenier: A ma demande, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Je vais vous l'accorder. Je ne sais pas qui a changé les fauteuils ce soir. Je le regrette d'ailleurs. J'espère que ceci pourra se faire sans procédure.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Est-ce que le journal des Débats pourrait démontrer que le député de Verchères vient de prendre son fauteuil pour le donner au député de Mégantic-Compton?

Le Président (M. Cardinal): Vous venez de le faire, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'allais vous indiquer, avant la guerre des fauteuils, que nous avions quelques motions à présenter à cette assemblée ce soir. Toutefois, étant donné la présence de nos invités, j'aimerais vous demander la directive suivante: Dans l'hypothèse où je suspendrais la présentation de la ou des motions qu'a actuellement l'Opposition officielle, est-ce que vous me reconnaîtriez immédiatement après la fin de la présentation et de la période des questions et réponses de nos invités pourque je puisse faire la présentation des motions que je vous ai annoncées?

M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques et ministre délégué au Haut-Commissariat, à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, sur la question de règlement.

M. Charron: Sur la question soulevée par le député de Marguerite-Bourgeoys, je pense que le député n'a pas à nous faire languir. S'il a des intentions qu'il estime urgentes et importantes de présenter à la commission, je pense qu'il devrait le faire tout de suite.

Il n'a pas le droit, ni dans les règlements, ni même dans la pratique, de réclamer d'avance un traitement qui devrait lui être réservé à la fin du témoignage de nos invités qui, par ailleurs je le signale, viennent de fort loin pour nous donner leur témoignage.

Nous faisons une chose ou nous faisons l'autre. Si nous entendons immédiatement nos invités, soit et, par la suite, M. le Président, ce sera à votre guise de reconnaître, selon la tradition habituelle de cette commission comme de cette Assemblée nationale, les opinions émanant de votre droite, comme cela peut être aussi de votre guise de souhaiter que le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il nous affirme déjà qu'il est possesseur de motions devant soulever l'intérêt de cette commission, les soumettre tout de suite, à notre avis, mais je ne vois pas pourquoi, dans le genre d'un film comique, il nous ferait des "previews" avant même que nous ayons entendu nos invités.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de...

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mont-Royal a demandé la parole.

M. Ciaccia: M. le Président, ce n'est pas que le député de Marguerite-Bourgeoys ou que l'Opposition officielle demande des faveurs sur la question de règlement, c'est seulement par courtoisie pour nos invités. Ils viennent de loin et nous préférerions qu'ils soient entendus. Mais, vous le savez, M. le Président, nous avons le droit de présenter certaines motions. Le député de Marguerite-Bourgeoys et l'Opposition officielle ont pleinement le droit de les présenter, mais, par courtoisie, nous serions prêts à laisser entendre les témoins des Cris, pourvu que nous ne perdions pas le droit de présenter nos motions. C'est pour cela que nous demandions au parti ministériel, au gouvernement, s'il était d'accord pour laisser procéder les invités et nous sauvegarder nos droits de présenter nos motions.

Naturellement, M. le Président, si le gouvernement n'est pas prêt à se prononcer, nous n'aurions aucun choix que de présenter nos motions maintenant. Ce n'est pas par manque de respect pour nos invités, mais nous avons des motions assez importantes et nous voulons préserver nos droits à cette commission.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, cela va peut-être rappeler ce qui s'était dit hier soir, alors que nous avions décidé d'entendre vers 22 heures le mémoire de la CSN.

Vous aviez signalé, à ce moment, que pour siéger — vous me donnerez probablement les termes plus techniques d'une commission — on ne pouvait pas se permettre de siéger sans avoir des invités, que certains appellent des témoins. Alors, si cela devait être le cas, on ne pourra pas laisser continuer, à moins que vous ne m'avisiez par le ministre qui nous accompagne ce soir, que vous nous disiez qu'après ces invités, il y aura d'autres témoins qui seront ici. S'il devait y avoir d'autres témoins, j'aimerais le savoir tout de suite; sinon, j'aimerais qu'on revienne à une motion que nous étions en train de discuter hier et qu'on a laissé tomber pour recevoir les représentants de la CSN. Est-ce que vous pourriez m'en informer immédiatement?

Le Président (M. Cardinal): Je pose quand même la question. Si je la comprends bien, vous demandez que, s'il n'y a pas d'autres invités que le grand Conseil des Cris du Québec, immédiatement, nous revenions à la motion que vous avez proposée hier soir.

M. Grenier: Oui. Plus précisément, cela devait être cela, puisque vous aviez bien spécifié hier que cela nous prenait des invités pour pouvoir continuer à siéger. Cela devait être cela. Si on entend les Cris ce soir... D'ailleurs, je les ai rencontrés hier soir, je leur ai dit qu'il y aurait un débat devant eux; ils s'attendent à cela. Si cela devait être comme cela, je suis bien prêt. Si vous me confirmiez qu'après, on pourra reprendre la motion, je suis bien d'accord, mais si vous me dites: On ne peut pas, immédiatement, je voudrais bien revenir à notre motion d'hier soir...

M. Charron: M. le Président... Le Président (M. Cardinal): Oui...

M. Grenier: ... qui sera, d'ailleurs, très courte, j'aime mieux vous le dire; j'ai autre chose. C'est seulement pour en parler; ce sera peut-être différent. J'aurai quelque chose à vous préciser tout de suite après.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, il n'est pas question de bousculer les motions qui sont déjà prises en délibéré par cette commission. Il me semble que la mission fondamentale de cette commission, à ce moment, est d'entendre les témoins. Les témoins sont on ne peut plus près de nous, ils sont à la table et prêts à nous livrer leur témoignage actuellement. Cela devrait être la première tâche de la commission. Par la suite, puisqu'il n'y a pas d'autres témoins d'invités ce soir, si le temps de nos travaux le permet, j'estime normal que les motions que vous avez en délibéré, M. le Président, et que cette commission a déjà soumises dans ses précédents travaux, reçoivent la priorité de traitement par la suite, et ce, dans le respect de tous ceux qui les ont proposées. De là à admettre que n'importe quel député de cette commission peut se prévaloir du droit de présenter une nouvelle motion à la suite des motions précédemment prises en délibéré par rapport à l'ordre traditionnel des interventions de cette assemblée, cela me paraît exagéré.

La position que le gouvernement soutient sur cette question est celle du respect des travaux de la commission. D'abord, sa mission fondamentale est d'entendre nos invités et je pense qu'on ne devrait pas retarder plus longtemps.

Deuxièmement, il y a des motions en délibéré qui devraient être considérées, comme celle du député de Mégantic-Compton. Je crois savoir que le député de Marguerite-Bourgeoys en a une également. J'admets, fondamentalement, qu'on y accorde notre attention, mais par la suite, lorsque ces motions seront libérées, la rotation normale des motions reprendra son cours.

M. le Président, je ne vois pas pourquoi, ce soir, nous changerions la marche de nos travaux que l'on suit depuis cinq semaines. Que l'initiative de toute nouvelle motion, à la suite de la disposition des motions déjà sur place, soit faite en accordant la rotation régulière.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, pouvez-vous me confirmer—je n'ai aucune espèce d'objection d'entendre, non seulement je n'ai pas d'objection, mais je suis désireux d'entendre les témoins, les invités qui sont ici—pouvez-vous me confirmer qu'après avoir entendu les témoins, on pourra reprendre, selon l'ordre qui vous plaira, les motions? Si oui, je suis d'accord. Si ce n'est pas possible, alors, je vais reprendre ma motion d'hier soir immédiatement.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. C'est une demande de directive. Je ne suspendrai pas les travaux, je ne prendrai pas en délibéré, je vais rendre la directive immédiatement.

M. Lalonde: M. le Président, vous ne me donnez même pas le droit de réplique.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député. Il n'y a pas de droit de réplique sur une question de règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Non, mais laissez-moi répliquer au député de Saint-Jacques qui conteste la demande que je vous ai faite...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est par grande générosité que je vous accorde que le droit de répliquer. Il n'en existe absolument pas, d'après les règlements. Vous m'avez interrompu. Je regrette, je ne suis pas Jean-Guy Cardinal, je suis le Président, mais quand même je l'accepte et je vous accorde la parole.

M. Lalonde: M. le Président, je ne vous ai pas appelé par votre nom, j'ai dit M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Vous m'avez interrompu quand même, monsieur.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai essayé d'avoir le droit de parole. Il faut quand même interrompre quelqu'un, tout le monde parle en même temps, ici, alors...

Le Président (M. Cardinal): Je regrette, je n'accepte pas cette affirmation. Je regrette, je ne veux pas que ce soir on commence ce genre de scène.

M. Lalonde: J'essaie d'avoir le droit de parole...

Le Président (M. Cardinal): Quand vous voulez avoir le droit de parole, vous le demandez au Président, vous ne l'interrompez pas. Je vous l'ai accordé. Je vous prie de l'utiliser d'une façon qui ne soit pas une provocation à la commission.

M. Lalonde: Alors, M. le Président, le député-ministre de Saint-Jacques conteste la demande que je vous ai faite de me reconnaître après l'audition de ces témoins. Peut-être qu'en vertu des règles de cette commission, il n'y a pas de précédent à cet effet.

Je souligne quand même que la présidence a une certaine indépendance à l'égard des travaux, et que la présidence peut établir des règles de conduite des travaux qui reconnaîtraient justement ou qui pourraient vous faire accepter la suggestion que je vous ai faite.

Si la suggestion que je vous ai faite n'est pas acceptable, à ce moment, je m'en remettrais à la deuxième position prise par le député-ministre de Saint-Jacques pour que les motions qui seraient déjà devant cette commission, au moment où l'audition de ces témoins serait terminée, soient vidées avant de procéder à d'autres travaux.

A ce moment, si vous rendez votre décision et que celle-ci est que vous ne pouvez pas me reconnaître en priorité après l'audition des témoins, à ce moment, immédiatement après votre décision, si telle est votre décision, je vous demanderai de me permettre de présenter des motions dont la discussion pourrait être suspendue jusqu'après l'audition des témoins, à moins que le gouvernement n'y consente pas. Ce sont des motions dont une d'ailleurs a déjà été acceptée par la présidence — vous vous en souvenez, vous étiez là, M. le Président — et il y en a une autre d'ailleurs que le député de L'Acadie veut présenter. Ce sont des motions extrêmement utiles, extrêmement pertinentes aux travaux de cette commission.

Alors, dans votre directive, j'aimerais que vous me disiez si je peux, en même temps, présenter immédiatement des motions dont le débat pourrait être suspendu jusqu'après l'audition des témoins.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, devant cette commission présentemment, il y a premièrement des invités qui sont devant nous. Deuxièmement, il y a une motion qui se lit comme suit: "Que l'ACELF soit invitée à se présenter devant cette commission pour expliquer l'impact de la loi 1 sur l'ensemble des minorités françaises vivant hors Québec, le vendredi 15 juillet." Cette motion a été prise en délibéré.

Il y a une deuxième motion devant cette commission: "Que cette commission invite..." — et c'est une motion non pas amendée par la procédure habituelle, mais de consentement — "... l'Union des conseils de comté du Québec à venir expliquer les implications de la loi 1 sur l'administration des municipalités rurales." C'est une motion du député de Mégantic-Compton. Elle a été jugée recevable et le débat est commencé.

On me parle de courtoisie. On invoque que, à ma guise, je pourrais faire ceci ou cela.

On invoque le droit de présenter une motion, M. le député de Mont-Royal, on parle de motion en délibéré. Je ne vois pas pourquoi — et là, je dis cela au-dessus de toutes les lignes de partis — j'accorderais à un parti, celui de l'Opposition officielle ou non officielle, ou ministériel, une préférence pour une motion alors que, devant nous, nous avons déjà des témoins. Si nous voulons

vraiment revenir à des motions, nous pilons revenir aux motions qui sont devant cette commission et les autres viendront dans l'ordre où la présidence en jugera l'à-propos, selon les règles habituelles contenues dans le code qui est devant moi et qui est bien connu du député de Laval. Ma directive est rendue.

M. Lalonde: M. le Président, une information, un renseignement. Est-ce que l'effet de votre directive m'empêcherait de faire une motion, actuellement, dont le débat pourrait avoir lieu après l'audition des témoins?

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Donc, si je veux faire une motion qui soit entendue actuellement, à moins d'avoir le consentement unanime, j'imagine...

Le Président (M. Cardinal): Exactement.

M. Lalonde: ...du gouvernement, il faudrait que je la fasse...

Le Président (M. Cardinal): Pas du gouvernement, de la commission.

M. Lalonde: De la commission, oui. A ce moment-là, il faudrait que je la fasse maintenant et qu'elle soit discutée maintenant. Et seulement le consentement unanime de la commission pourrait permettre l'audition des témoins avant la discussion de ma motion.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, il me semble que c'est clair. Nous fonctionnons normalement. La première mission de cette commission, c'est d'entendre des témoins, c'est l'ordre même de la Chambre...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques, je m'excuse, ce n'est pas la première mission, c'est le mandat de la commission.

M. Charron: Le mandat premier de la commission est d'entendre les témoins, ce que, de ce côté-ci de la table, nous sommes tout à fait disposés à faire immédiatement. Deuxièmement, c'est ensuite dans l'ordre régulier des choses d'étudier les motions qui sont en suspens, qui sont en délibéré; vous l'avez vous-même signalé. Troisièmement, si le député de Marguerite-Bourgeoys ou n'importe quel autre membre de la commission a une motion à présenter, elle viendra après; mais on ne peut pas prendre les trois missions en même temps. Respectons-les dans l'ordre, mais je suis désireux, M. le Président, d'entendre le témoignage de ces invités que je respecte.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Vous avez donné une directive — je ne sais pas quel terme utiliser — pour M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Cardinal): J'ai donné une directive et je suis prêt à en donner une autre.

M. Grenier: J'aimerais connaître maintenant quelle est votre décision relativement à la question que je vous ai posée, à savoir si je dois faire ma motion devant les témoins ou si je pourrai continuer la motion après l'audition de ces invités.

Le Président (M. Cardinal): Je vais aussi rendre cette directive. J'ai donné ce matin, au début de la journée, l'ordre du jour. J'ai appelé les invités qui étaient devant nous. Tous ont répondu à l'appel. Il n'y en avait que trois. Lorsque ces invités auront terminé l'exposé de leur mémoire, auront répondu aux questions des membres de la commission, je suis disposé... Parce qu'il n'y a plus d'autre invité de prévu pour aujourd'hui. Pour aujourd'hui, il y en a d'autres prévus pour plus tard. Il y a ici des motions adoptées qui invitent d'autres invités. Je suis disposé, jusqu'à 23 heures, sans ordre de préférence, si ce ne sont les traditions de l'Assemblée et des commissions, à entendre toutes motions, à les faire débattre, et sans préférence pour aucun parti, je veux que ceci soit clair. Je pense que ma réponse est claire?

M. denier: Merci. Oui. Il me manque une autre partie maintenant, je m'excuse, est-ce que la tradition ou la coutume établie dans cette Chambre fait que la motion qui viendra après est celle qui était en discussion hier soir quand on l'a abandonnée? Est-ce qu'elle aura priorité sur d'autres? Remarquez bien que c'est seulement pour le savoir, je n'y tiens pas plus qu'il faut, c'est pour savoir ce que vous avez à dire.

Le Président (M. Cardinal): Normalement, M. le député de Mégantic-Compton, ce serait votre motion, dont le débat est commencé, qui reviendrait devant cette commission.

M. Grenier: D'accord.

Le Président {M. Cardinal): Oui, M. le député de Laval.

M. Lavoie: Un dernier éclaircissement. Ecoutez, je voudrais que les règles du jeu soient bien établies pour qu'il n'y ait pas de procédure inutile ou supplémentaire. Je voudrais bien que les règles soient établies. Si j'ai bien compris, les motions qui sont en délibéré...

Le Président (M. Cardinal): II y a une motion en délibéré et il y a une motion dont le débat a été suspendu à la demande même du député de Mégantic-Compton.

M. Lavoie: II y a ces deux genres de motions, une dont le débat a été suspendu et une autre en délibéré. On suspendrait ça, on entendrait les té-

moins qui sont invités et, après, on arriverait à ces motions, et libre aux députés ministériels ou autres, une fois que ces témoins seront libérés, soit ce soir ou demain, même s'il n'y a pas d'autres témoins devant la commission, de présenter, soit du côté ministériel ou du côté des oppositions, d'autres motions qui pourront être discutées.

Le Président (M. Cardinal): Je m'avance beaucoup, M. le député de Laval, mais je vous dis très simplement oui.

M. Lavoie: Bon!

M. Charron: Nous sommes à l'écoute de nos invités, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Cela étant fait, le grand conseil des Cris du Québec, je vous prierais, s'il vous plaît... à l'ordre, s'il vous plaît! Je vous prierais d'identifier les trois personnes qui sont devant nous, c'est le mémoire no 101. C'est fait, mais est-ce qu'on recommence ou si on l'accepte?

Mme Lavoie-Roux: On peut bien recommencer.

Le Président (M. Cardinal): J'aimerais mieux qu'on recommence et qu'on fasse le tout d'une seule pièce. Je sais fort bien qui vous êtes, chacun d'entre vous, mais j'aimerais mieux, pour le journal des Débats, que l'on recommence, ce serait plus simple.

Vous êtes d'accord, M. O'Reilly? Ce serait plus simple.

Allez, cela ne prendra que quelques minutes.

Grand conseil des Cris du Québec

M. Moses: Mr President, my name is Ted Moses. I represent the Grand Council of the Crees. I am also the director general of the Cree School Board. I would like to present the delegation for the Grand Council of the Crees. On my right, is Mr James O'Reilly the legal advisor for the Grand Council of the Crees and he is also my anglophone advisor. On my left, she is also the legal advisor for the Grand Council of the Crees, as well as my francophone advisor, Miss Monique Caron.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Si j'ai dit ceci, c'est pour une raison que je veux bien indiquer. C'est évident que c'est au journal des Débats, ce que vous avez déjà dit. Mais, avec la procédure, on peut l'avoir oublié. Nous recommençons vous avez vingt minutes pour exposer votre mémoire. A vous.

M. Moses (Ted): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, le Grand Conseil des Cris du Québec représentant le peuple cri du Québec apprécie cette occasion de vous communiquer la position des Cris sur le projet de loi no 1.

I have been delegated by Grand Chief Billy

Diamond and the Grand Council of the Crees of Quebec were previouslv met in Rupert House to explain the Grand Council of the Crees' brief and the development since the date of the brief.

Chief Diamond and the other Cree Chiefs greatly regret not being here but have had the chance to convey their views to Premier Lévesque and Minister Yves Bérubé. Before going any further, however, I wish to speak to you briefly in cree, if you may permit me, Mr Chairman.

Le Président (M. Cardinal): It is all right.

M. Moses: (S'exprime dans sa langue).

This has been a historic week for the Crees of Québec. We had the privilege of welcoming the Premier of Québec in James Bay, on Tuesday, July the 5th. The Crees were very pleased that he came and were very delighted and very pleased for these messages.

He confirmed, in the name of his government, that the James Bay and Northern Quebec Agreement would be fully respected and that our rights would be guaranteed.

In regard to Bill 1, the Premier promised that Cree, English and French would be teaching languages in Cree schools, which will soon be under the jurisdiction of the Cree School Board. He indicated that the Crees would basically be exempt from Bill 1. He also stated that the Grand Council of the Crees and corporations, entities and organisms provided for in the agreement would be exempt from Bill 1, as well as future corporations where the Crees are the majority.

Finally, he mentioned that the preamble to Bill 1 would recognize the rights of the Indians of Québec to maintain and develop their own culture.

Because of the guarantees received and the continuing meetings which had been held, I really do not need to go into the brief which, no doubt, some of you probably have seen. The brief essentially sought certain items which I will highlight, the first one being the protection of rights under the agreement.

Bill 1, as drafted, breaches or conflits with certain provisions of the agreement. The second one being that the recognition of the rights with respect to education be guaranteed. The third one, that the right to continue to conduct our affairs as in the past being Cree and in English. Fourthly, the clear objective of the Cree people to acquire functional knowledge of French.

Since the letter from Dr. Laurin, committing the Government to certain amendments, there have been two meetings respecting the nature and extent of the amendments. These meetings have been very positive. There has been an agreement on most amendments. The commitments from Premier René Lévesque that our language and culture would be maintained and developed, that we would continue to use English, that we would do this at our own pace.

We wish to have an acknowledgement from this commission that the amendments will be introduced to Bill 1, so that the teaching

languages will be Cree, English and Frencoh and the school board could determine the rate of introduction of the teaching languages.

Secondly, that the Crees in the corporations and entities constituted by the James Bay and Northern Quebec Agreement and other entities controlled by them will be exempted from the provisions of Bill 1.

Thirdly, that there will be the recognition of the maintenance and the protection of the Cree language and culture.

Before terminating, I wish to say a few things about the Crees. There are eight Cree communities in Northern Québec, on James Bay and Hudson Bay as well as in the interior, in the Abitibi region. The Crees occupy some 150 000 square miles in which they are active hunters, fishermen and trappers. The Crees fought in Court the James Bay project. There were two years of intensive negotiations and, then, the agreement which is known as the James Bay and Northern Quebec Agreement.

Now, there is the legislation process. We have developed a new working relationship with Québec and we wish to maintain that relationship. The Crees are happy with the agreement. The agreement is looked upon by the Crees as the Crees' Charter. Thank you, Mr Chairman.

Le Président (M. Dussault): Merci beaucoup, monsieur. Je passe la parole à M. le ministre d'Etat au développement culturel.

M. Laurin: I wish to thank the Grand Council of the Crees of Québec and Mr Moses for the brief they have presented. I would like you to convey my best greetings to your chief, Mr Billy Diamond, that I have met already and whom I would have had the pleasure to meet again at this commission, but I understand that he has been unable to come.

I hope to see him soon, maybe after the amendments are presented and to have his acknowledgement that what we have discussed together is now written to his own satisfaction and to the satisfaction of his people.

I could gather that the brief you have presented today is shorter than the one you anticipated, and it is the direct result of all the meetings we had together. As you have just stated in your brief, we had the occasion to meet a few times to clear what possible misunderstandings might exist between us, to understand each other better, to go at the root of all the problems that were confronting your people in the relationship with the present Legislation or with the Government, and I think those meetings have been very productive and very fruitful.

I had many occasions to discuss the result of those meetings with the Prime Minister of Québec. I had occasions to tell him that your demands were legitimate and that I favoured their acceptance by the Government. When he finally left for this historic visit at Fort Rupert, which is the first one by the chief of a Québec Government, we were perfectly in agreement with the message he wanted to convey to you and even to the letter with the next of the amendments he wanted to propose to you. At the same time, here, at this Commission, we had the pleasure of receiving another community you know well, the Naskapi people, and coincidentally, at the same time, as he was speaking to you, I was speaking to the Naskapi people in exactly the same terms.

So, there is a common commitment of this whole Government regarding the amendments we want to put in our revised version of Bill 1. And those amendments, we have reason to believe, will correspond exactly to your wishes. For example, we will guarantee your rights as a founding people of Québec; we will recognize the right you have of maintening and developing your original culture, and as far as specifics are concerned, we will guarantee to you the right to receive instruction either in the Cree language or in the French language or in the English language, at the rate of introduction you will see fit to accept. Also, we will put in those amendments what we have accepted together, in the future, the Cree people will acquire gradually at its own pace a functional knowledge of French, so as to benefit the following generations who want to take part in the collective mainstream.

Also, we have accepted, and it will be written in the revision of the Bill, that your organisms, those which are foreseen in the agreement and those which you control, because you will constitute the majority, will be exempted from the provisions of Bill 1, which means that you will have the right to communicate between your organisms or with the Québec Government in the language of your choice.

I think this is the essential of what we have discussed together. For the rest, because there are other problems which we have discussed together, a solution will be found, not in the Charter itself, but in the measures we will be called to take in the future. Those problems pertain to the cultural development of your people, and, as you well remember, we have come to an agreement whereby we will be ready to form a committee where those problems will be discussed and we will try to find together the best solutions or the best instruments or the best tools or measures to identify those problems, first, and, second, to put at your disposal what you need to develop your culture. By this, for example, we mean action taken by one or the other ministry of the government or the setting up of joint organisms whereby we can work together to the eventual strengthening of your institutions and particularly your cultural institutions.

I think all this means the respect we have for your people, the great case we make, not only of their culture, but also of their contribution to the Québec of tomorrow. By this, we would like to develop a continued and increasing sense of partnership and friendship for the years to come.

I think it is with this message of goodwill and this message of cooperation for thousands of

moons to come that I would like to wish you the best of luck in everything you do or will be called to do in the future, hoping that we will be in this common search or venture the ideal partners which we want us to become. Thank you very much.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie M. le ministre, le témoin veut-il réagir aux propos de M. le ministre?

M. Moses (Ted): Mr Minister, all of which you have said has been discussed and has been accepted. I have been instructed and I am mandated to tell this Commission what I have just said, and I will certainly convey your best wishes to Chief Diamond and the other members of the Grand Council of the Crees.

However, we have one small problem, that is, will the Crees, as individuals themselves be exempted from the provisions of Bill 1?

M. Laurin: All those who are eligible to the advantages set up in the convention will be eligible, in the sense that they will be exempted in the same way as organisms will be.

M. Moses: Mr Minister, I think we have an agreement provided that you bind yourself to what you have just said.

M. Laurin: I understand it this way too.

M. Moses: Mr Chairman, we would have liked to have said more about the results of the progress that have been made in the past with respect to the amendments. We are really happy with it, so long as, in the future, we can discuss the issues in the province which are related to the culture of the Cree people.

M. Laurin: We will do it in the same spirit we have gone through those negotiations.

M. Moses: Thank you. I just would like to assure you that the Cree people are prepared to discuss and negotiate in good faith as they have always done. The Crees have not broken their word and, provided the other parties are in good faith, we intend to operate in that direction.

M. Laurin: That is a good omen for the future.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie et je cède la parole au député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Before we get too carried away with all of the good wishes between all parties, I certainly hope that they all continue. First of all, I want to thank and welcome the representatives of the Crees and their legal advisors, both anglophone and francophone, and hope that the relationships that were started between the Cree people and the Government of Québec, relationships of participation, of goodwill and of generosity on both parts, not only on the part of government but on the part of the Crees, because you did inhabit these territories from time immemorial and it was with heavy heart that you gave all of your rights to these areas in consideration for certain protection in the agreement.

I would just like to remind the Minister, however, and remind the members of this Commission that the goodwill that the Minister shows now and of which I am very appreciative —and I hope that it will continue — was not quite apparent at the beginning of the introduction of the White Paper and of Bill 1. It was through the questions that had to be asked of the Minister and I believe, unnecessarily, but it had to be done, that the Minister who, at first, I think, ignored the demands of the Crees, ignored the James Bay agreement, which is apparent by the terms of the Bill 1. It was only through the intervention of the Official Opposition and bringing the Government to task in the sphere of the historic agreement that the Minister did finally meet with you and has given you the insurances which you originally sought.

I would also like to point out to members of this Commission the words of introduction that Mr Moses gave to the members after he had introduced his legal advisors and, if you note, they were said in French. The reason that I note that is that I discussed and negotiated with the Cree people for many years and it was through historic facts not of their own volition that they just did not understand and could not even pronounce one word of French.

And I think that the fact... should be noted and accepted by all the parties here that Mr Moses began his presentation in the French language. It is a sign of the good faith of the Cree people. It is a sign of their faith in wishing to implement the objective that has been set forth in the James Bay Agreement to introduce the French language in their schools. It is very difficult for them. All the negotiations as a matter of fact, in many instances, had to be done through the means of interpreters. Those who do speak a second language in the Cree community, it has always been English. I would like to, personally, congratulate the Cree people and Ted Moses for this show of good faith towards their implementation of the agreement. I think that it is a lesson for us and a lesson for the government to also show good faith on its part. Would you like to make a comment? Voulez-vous faire un commentaire, monsieur?

M. O'Reilly: Oui, s'il vous plaît, M. le Président. Il y a un petit point.

Mr Ciaccia, I know that you are an excellent negotiator and that you did take the interest of the province at heart, but I do not think the Crees gave up all their rights, they get a few in return. Do you not agree on that?

M. Ciaccia: Yes, you did. And I hope I did not

mislead the Commission, the members of this committee, in saying that you gave up all your rights. I think I said in exchange for certain rights which are included in the James Bay Agreement. If I did not, I stand corrected.

M. O'Reilly: I hope you would not want to leave Mr Laurin the legacy of the Crees having no rights. We like to be reasonable, but not that reasonable.

M. Laurin: I corrected by myself.

M. Ciaccia: Mr Chairman and Mr O'Reilly, all I wanted to emphasize was how much the Cree people had given up by the signature of the agreement. They have given up something that emotionally was probably much more difficult to give up than the benefits which were conferred by the Government.

M. O'Reilly: Mr Chairman, if I just may respond one thing. I know that Mr Moses and the others are very conscious. I just wanted to single out that perhaps that agreement would not have been possible without the comprehension of persons like Mr Ciaccia, the tough negotiator on the other side, but he was fair. I think that what Mr Moses was alluding to is that that degree of fairness has been continued by the present Government. Obviously, people cannot be too idealistic, time may change things, but up until now it has been very good.

M. Ciaccia: The other point that I wanted to make before... I want to ask a few questions of the Cree representative about the statements made on both sides and by the Minister about the desire of the Government to protect the Crees' own culture. The intimation here being that you can protect the Crees' culture on its own and refer only to its language and its customs. However, I think that the Cree people, as did the Inuit people, have made a very valid point; and that is that. The culture of these people was threatened with extinction, with dangers, precisely because the communities had been isolated and had lost their participation with the larger community around them.

I think, Mr Chairman, and Mr Minister, what the Cree people are saying and the main reason why they are asking for exemption from Bill 1 is not because of the desire to continue always protecting the English language or speaking English. That is not the reason. They have realized that the only way, the only method that they can preserve their own culture is if they can participate in the larger community around them, if they can communicate with the people around them. Right now, the only way they have of doing that is through the medium of the English language. Mr Chairman, if I may be so bold as to suggest to the members of this Commission that we have a lesson to take from the native people.

Perhaps the people who have drawn up Bill 1 and the spirit of Bill 1 should also realize that the only way to protect the culture, to protect the language is not an isolation, not in ghettoising, but in being able to communicate with the language of communication, with the main language of the people around us, whether it is French, English or otherwise. I think that it is a lesson that has been lost through the... that has not been properly appreciated by the Government in assessing the briefs that have been submitted by the Naskapi, by the Inuit and by the Crees.

Just to elucidate the members of this Commission, as to why you want exemptions from Bill 1, because it is possible that, in spite of the good will of the Minister, that there may be some around this table and in the public, and in the French-speaking community who may misinterpret your desire or your reasons why you want exemptions from Bill 1. Could you give us briefly the reasons why you do not want this particular legislation to apply to the Cree communities at this time?

M. Moses: Mr Chairman, I would like to thank Mr. Ciaccia for the comments he had made and I fully support those comments, because, you know, the culture of the Cree people is in the land which they have occupied from time immemorial, I mean hunting, fishing and trapping.

In answer to Mr Ciaccia's question, the reason why we could like to have exemption from Bill 1 is because, for historical reasons, the Crees have received their education in English for those Crees who have received certain education, due to the fact that they have attended federal schools, the other reason being that their first language is Cree and virtually all of the Cree people in the James Bay area speak Cree. A predominant number of the Cree people in James Bay speak English, as I have just mentioned; they have received a certain education in the English language.

The other thing that I would like to point out to the members of this Commission is that we have made efforts towards introducing French as a third language. I will give you an example: there is a school in Fort George where some Crees are presently attending and the instruction is in Cree and in French, as well as in English. There is also another school in Eastmain which is the community which I come from; there is also a French school and the school children receive their education in Cree, French and, to a certain extent, in English as well. There is also another school in Rupert House or Fort Rupert, as it is commonly known to other people, where there is a French school and the Crees receive their education in Cree, French and some English.

So, up to now, I think I am not far out in saying that there are approximately 300 to 400 Crees who have received their education in Cree and French as well as in English, and these Crees are trilingual, they speak fluent Cree, they are fluent in French as well as fluent maybe it is

not fluent but they are having a knowledge of the English language.

The other reason why the Cree people wish to be exempt from Bill 1 is because of their self-determination. They would like to be exempt from Bill 1, so that they are not trying to remove themselves from the mainstream with the collective life of Québec.

We would like to introduce the second or third languages of instruction at the rate, we feel, they should be introduced and we are very much interested in being trilingual.

The other point that I would like to make is, as I said, a predominant number of the Crees speak English. It is because of the corporations, the entities which would be established under the James Bay and Northern Quebec Agreement, as well as other corporations which are exclusively administrated by the Cree people.

If the language of communication is not English, then, there is no way in which we can operate these corporations, for the reasons which I have previously given.

M. Ciaccia: What you are saying is that the agreement, in addition to providing benefits in the hunting and fishing inland, also provides for your participation in Government corporations, in local government, in regional government, in development corporations, in school boards, and that the only way right now, that you can effectively participate in these various structures is through communications in English?

M. Moses: Yes, Mr Ciaccia, you are very correct in that.

M. Ciaccia: There is another provision in the agreement which provides an obligation, on the part of the Government, to provide work, contracts, to stimulate the economic development of the Cree people. The reason for that particular provision was, as part of the agreement, to alleviate the very high unemployment in many of the Cree communities and to permit the Cree people and those who wish to do so to participate in the economic life of Québec.

Recently, in the National Assembly, there has come to what is commonly known now as the Lessard Principle. That means that the Minister of Transport and Public Works at the time insisted that if anyone was to receive employment from the Province, no matter how menial or what kind of task was asked to be implemented, that person had to speak English.

Mme Lavoie-Roux: French.

M. Ciaccia: French, I am sorry. That would mean that if Bill 1 is implemented, what effect obviously that would have on you, that would be it would be impossible for any of your people to receive employment from the Province. Is that correct?

M. Moses: Mr Chairman, in answer to Mr.

Ciaccia's question, it is yes. But, with respect to section relating to SOTRAC, which is the remedial works mecanism which was set up under James Bay and Northern Quebec Agreement, it stipulates there that the works can go on and increase.

M. Ciaccia: But that is providing that the agreement expressed it so in Bill 1?

M. Moses: Yes, that is correct.

M. Ciaccia: Are there any other conflicts between Bill 1 and the James Bay Agreement?

M. Moses: Mr Chairman, I would like our legal advisor, Mr O'Reilly, to make a comment with respect to the last question and, if you permit me, I will let him speak.

M. Ciaccia: O.K., but because he makes his comment, just in case there is a repetition of the incident which occurred here the other night when the Inuits came, where, suddenly the members of the Government pulled out a telegram from some so-called dissidents, in addition to answering a question, could you also comment on the representativity of the Grand Council of the Crees and their ratification of this agreement by the Crees? I just would not want any surprises from the other side of the table.

M. Moses: Mr Chairman, the Grand Council of the Crees is composed of one chief from each band, as I have just mentioned; there are eight communities or there are eight bands in the James Bay area as well as in Hudson Bay and the interior of the Abitibi region; so, therefore, there is one chief from each band on the Grand Council of the Crees as well as one person delegated by each band who is the official representative of that band. So, therefore, you have two members from each band making a total of sixteen people on the Grand Council of the Crees.

The Grand Council of the Crees is very close to the people. They have a very good relationship with them. The Cree people have a lot of respect for the Grand Council of the Crees and they have a lot of confidence in the Grand Council of the Crees.

With respect to the confirmation which Mr Ciaccia just asked me, prior to the signing of the James Bay and Northern Quebec Agreement, the Crees were unanimous in their vote to the terms and conditions of the agreement, but, during the confirmation process, there was only one vote that was against out of a total of something like 1600 Cree people voting for and in favour of the ratification of the James Bay and Northern Quebec Agreement.

One correction, before the ratification process, it was 1600 that were in favour for the James Bay Agreement, but, during the ratification process, it was 922 in favour of the James Bay Agreement to I who was against it.

M. Ciaccia: Were you going to make a comment on the previous question?

Une Voix: Yes.

M. Ciaccia: Go ahead.

M. O'Reilly (James): Mr Chairman, if I may, yes. S'il y a encore des Cris qui sont contre l'entente, il y a quelque chose qui serait extrêmement étrange, parce que, jusqu'à maintenant, on ne les a pas vus à part d'une voix que M. Moses a mentionnée.

Quant à la convention et au conflit possible entre la convention de la baie James et le projet de loi no 1, évidemment, les Cris ont fait abstraction des dispositions générales en tant que loi générale d'application générale à tous les citoyens. Ils se sont concentrés uniquement sur le projet de loi no 1 quant aux effets possibles du projet de loi no 1 sur eux en tant que Cris, c'est-à-dire en tant qu'autochtones. Ils ne se prononcent pas sur le reste évidemment, surtout s'il y a une exemption.

Par le biais d'une formule que nous avons discutée ensemble avec le ministre Laurin et avec ses représentants par après, les représentants des Cris et d'autres groupes autochtones, le Dr Laurin et ensuite ses conseillers, nous espérons arriver au résultat qu'il n'y aura pas de conflit entre les dispositions du bill 1 et celles de la convention de la baie James, de sorte que si on prévoit que des bénéficiaires de la convention — c'est pourquoi on a posé la question tantôt — sont exemptés des dispositions du projet de loi no 1, si les corporations aussi sont exemptées, nous pensons qu'on peut éviter ou contourner tout conflit qui aurait possiblement existé.

Evidemment, si le projet de loi no 1 était demeuré dans sa forme actuelle, nous avons pensé — c'est seulement notre opinion, comme conseiller juridique — qu'il y avait plusieurs conflits entre les dispositions du projet de loi no 1 et la convention de la baie James. C'est pourquoi nous avons communiqué avec le ministre qui, après certaines discussions et d'autres représentations — je sais que M. le député Ciaccia en a fait aussi — a étudié la question et a accepté de trouver une formule pour résoudre ces conflits.

M. Ciaccia: En terminant, je veux seulement remercier le conseiller juridique anglophone des Cris. Je souhaite bonne chance à M. Moses et aux Cris. J'espère que le gouvernement pourra s'inspirer des principes qui sont contenus dans l'entente avec les Cris et les Inuit. Merci.

Le Président (M. Dussault): Merci, M. le député. Je cède la parole à M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: Merci, M. le Président. I think we have been privileged this week to have this opportunity of meeting with the Cree people, which was for us the first time that we had this opportunity, the Naskapi, the Inuit and the Cree people.

I have no particular comment tonight, but I just want to tell you that we admire the fact that you have a great devotion for your culture, for your history, for your traditions and, just as the French have the same ambition of keeping their culture, their language. I see, there is no doubt, that you want to remain just as you are. In the past, the English language was for you a means to deal with other peoples. Now, I see that you are introducing slowly, probably it will require a great sacrifice from your people, but just the fact that you have this agreement signed with the Government, and with the words of the Minister I do not know exactly all the terms of this but I think it is an encouragement for your people. When all the details reach their end, I think you will keep on, giving a real good example of faithfulness to your past. In this case, I think that the Québec people here, the Quebecers, will certainly admire the way and the lesson that you are giving us tonight. Since you came here, it is because you wanted to have your desires heard. I am sure that you also want to leave Québec with the assurance that you will give your own people who are waiting for you, the best of news. It is the reason why, as Mr Ciaccia just said, I wish you good luck, and I hope maybe another time, not on the same Commission, we will have a chance maybe to meet you up in James Bay or somewhere around the place. Thank you.

M. Moses: Mr President, I certainly will convey your comments, your remarks and your wishes to the Cree people, but other than that, if the Government wants to give us more rights, we will certainly take them.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Gaspé, vous avez terminé? Je cède la parole à M. Shaw, excusez, je n'ai pas le droit de vous nommer ainsi, M. le député de Pointe-Claire.

M. Shaw: Merci, M. le Président. First of all, I would like to say how proud I am of the native people and of what they are doing and have done and that you and Mr Diamond and the Grand Council of the Crees have made it quite clear that you wanted no part of Bill 1 and the Government knew that you meant it. I hope that this will be a lesson to the anglophone community, who are equally concerned about the Bill and their language and their institutions and their cultures, and I mean cultures, and perhaps that they can learn from you that firmness works.

I have two questions though. I have understood that some complaints have been made by the Grand Council of the Crees concerning communications with the Government. Have you found that, since your recent negotiations with the Government, the negotiations that you are having with the "fonctionnaires" of the Government now are being conducted with you in English?

M. Moses: Well, to a great extent, the communication between the various Government departments and the Cree people is now in English, but prior to that, there were certain problems, but that has been resolved.

M. Shaw: That has since been resolved. Obviously, it is quite important for you, as Canadians and as North-Americans, to demonstrate your national pride as well. I noticed that the original agreement that ceded the Ungava district, in 1898-1912, the cession was made on the basis that services would be provided to the native people and the land claims would be settled.

Are the schools presently being provided by the Department of Education of the Province of Québec?

M. Moses: Yes. The three schools, as I have mentioned, are under the Department of Education. As a matter of fact, they are presently under the jurisdiction of the Commission Scolaire du Nouveau-Québec, which we will take over. Those schools will come under the jurisdiction of the Cree School Board.

M. Shaw: The Cree School Board.

M. Moses: The other thing I would like to point out is that the budget of the Cree School Board, part of it will be funded by the Québec Department of Education and the other part by the Federal Government.

M. Shaw: So the Federal Government is still picking up a piece of the tab of your education bill in the Nouveau-Québec?

M. Moses: Yes, in part.

M. Shaw: A third question. I noticed that, under Bill 1, we have a question of names, the changing of the names of towns. The previous Government began a policy of changing the names of the various towns in Nouveau-Québec.

Under your concept of Bill 1, do you have a say in the change of the names in New-Québec? In the Ungava district?

M. Moses: Yes, we hope that it will be part of the discussions which will go on with Dr Laurin, in respect to the Cree culture.

M. Shaw: I want to thank you again, and being married to a girl who is part Cree, it makes me very proud of the work that you have done in your negotiations with the Government.

M. Moses: Is she eligible under the agreement?

M. Shaw: No, unfortunately no.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce terminé, M. le député de Pointe-Claire?

M. Shaw: Oui.

Le Président (M. Cardinal): II reste une minute au parti de l'Union Nationale.

Une Voix: On la donne.

Le Président (M. Cardinal): Vous la donnez, d'accord.

M. Grenier: Si vous me permettez, pendant cette minute, je voudrais d'abord remercier le député de Verchères de m'avoir laissé le fauteuil qui était occupé, avant le début de la séance, par le parti ministériel, mais en dehors de cette question, qui est peut-être moins importante, je voudrais, au nom de l'Union Nationale, remercier les Cris qui sont venus devant nous ce soir présenter ce mémoire.

Merci.

M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Mont-Royal, sur une question de règlement.

M. Ciaccia: Le député de Deux-Montagnes a imputé des motifs pas mal indignes quand il a dit que c'était un cadeau d'Indien. Je crois que nos invités se sentent un peu insultés de ces paroles et je lui demanderais de s'excuser.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le député de Mont-Royal. Je ne vois pas ce qu'il y a d'indigne à employer ces termes. Au contraire.

M. Ciaccia: Je les ai entendus, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Moi aussi, j'ai entendu. Je ne sais pas si c'est au journal des Débats, mais c'est l'interprétation qui peut être digne ou indigne. Alors, je laisse porter et nous terminerons l'audition avec M. le député de Duplessis.

Mme Lavoie-Roux: Cela est grave.

M. Perron: Merci, M. le Président. Comme j'ai fait l'autre soir avec les Inuit de mon comté, je m'adresserai, si le président le permet, en anglais aux gens qui sont présents et qui représentent la nation...

Le Président (M. Cardinal): C'est permis présentement, tout à l'heure, avant...

Mme Lavoie-Roux: Et on nous affirme que cela sera encore permis par la loi 1.

M. Perron: Merci.

M. Ciaccia: ... si vous êtes une personne morale, seulement si vous êtes une personne morale.

M. Lalonde: Si vous êtes immoral, cela ne marche pas.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Perron: Thank you, Mr. President. It is with a real pleasure that I address myself to the representatives of the Cree nation and I am welcoming them in front of this Commission.

I will not have any question, except one, to ask you, but I would like to inform this Commission that in the county of Duplessis, there is one band of the Cree nation who is part of my county; it is over at Whale Head.

The question I would like to ask is this one: What is the percentage of the Cree nation who actually speak English? What is the percentage of the old Cree nation?

M. Moses: If you are looking for a percentage, I can say, if you are talking of the older generation, that there is a very small percentage of it. I think there are hardly any that speak the English language. Their first language is Cree and they know a few words in English. The middle-aged people understand and can speak a bit of English. Well, the middle-aged people can speak English as well as people within my generation who are fluent in English as well as in Cree which is their first language.

M. Perron: Thank you, Mr. President, and once again, welcome to this Commission. I hope that you will have a good trip back home and tell all your people that I am sure that the Government the Quebecers, will work right now hand in hand with the Crees, with the Cree nation.

Thank you, Mr President.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce terminé? D'accord. Dans ce cas, je remercie le Grand conseil des Cris du Québec de s'être présenté devant nous. Je remercie particulièrement...

I thank particularly Mr Ted Moses, Mr James O'Reilly et madame Monique Caron. Merci.

Vous êtes les derniers témoins ce soir. Si vous voulez ajouter quelque chose, je vous le permets certainement. Vous pouvez parler en cri d'ailleurs.

M. Moses: I wish to express my appreciation to the Chairman, the Minister and the members of this commission. In Cree, when we say: Thank you very much, we say: (s'exprime dans sa langue) and in French, it is: Merci beaucoup.

Le Président (M. Cardinal): C'est cela. Alors...

M. Moses: It is so strange to see that, after five years of argument, there is not even a sign of a fight when I come here before the commission.

Le Président (M. Cardinal): Merci, et je souligne un point, M. Moses. J'avais bien indiqué qu'en commission parlementaire, il ne devait jamais y avoir de démonstration favorable ou défavorable. C'est la première fois que les députés se permettent, depuis quatre semaines, d'applaudir. C'est quelque chose de particulier et je veux le souligner. Je leur demande de ne pas recommencer.

Mme Lavoie-Roux: On a été exemplaire...

Le Président (M. Cardinal): Merci. M. le député de Marguerite-Bourgeoys et ensuite M. le député de Saint-Jacques.

M. Lalonde: M. le Président, étant donné que...

Le Président (M. Cardinal): Merci. Vous êtes libérés.

M. O'Reilly: On est libéré, merci. On va se sauver avant que la bataille ne commence.

M. Lalonde: Vous devriez rester, ce sera peut-être un beau spectacle.

Le Président (M. Cardinal): Alors, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je constate qu'il est 21 h 37. Nous avons été...

Le Président (M. Cardinal): J'ai 37 et demie, moi.

M. Lalonde: ... suivant un ordre de la Chambre, convoqués jusqu'à 23 heures. Je constate qu'aucun invité n'attend, n'a été convoqué. Je me demande s'il y a eu quelque défectuosité dans les communications entre le ministre et les invités qui nous restent. Il y en a à peu près 200. Je voudrais savoir de vous, M. le Président, quels seront, demain matin, puisqu'il ne semble pas y en avoir ce soir, les invités devant cette commission puisque l'ordre de la Chambre nous oblige à revenir demain matin à 10 heures. Je m'excuse, c'est jusqu'à 23 heures seulement; étant donné que c'est vendredi demain, ce sera certainement un autre ordre. Enfin, jusqu'à 23 heures; est-ce qu'il y a d'autres invités et pourquoi n'en avons-nous pas?

Le Président (M. Cardinal): Un instant. M. le député de Saint-Jacques a la parole et ensuite Mme le député de L'Acadie. Je peux vous dire que j'ai donné la liste ce matin, qu'il n'y en a pas d'autres. Vous vous rappelez qu'à la suite d'une demande de directive, j'ai indiqué plus tôt que je consentais que, même sans témoin, l'on poursuive les travaux de cette commission et que l'on présente, en particulier, la motion de M. le député de Mégantic-Compton. Cependant, je reviendrai sur ce point tantôt. Je donne la parole à M. le député de Saint-Jacques et ensuite à Mme le député de L'Acadie.

M. Charron: M. le Président, au nom du gouvernement, je me réjouis, comme le député de Marguerite-Bourgeoys, que cette commission ait enfin réussi à suivre son ordre du jour pour une de ses séances. C'est probablement une des premières fois que nous ne nous trouvons pas obligés de demander à certains de nos invités de patienter à l'extérieur parce que les débats ont été plus longs que prévu. C'est d'ailleurs avec beaucoup de satisfaction que je constate que les derniers témoins de ce soir ont été parmi les fondateurs du pays que nous occupons.

Maintenant, cette assemblée est effectivement convoquée, par la motion adoptée cet après-midi, si bon lui semble, à poursuivre ses travaux jusqu'à

23 heures. Je sais que cette commission est déjà saisie d'une motion, depuis hier, du député de Mégantic-Compton, motion que nous aurions avantage à étudier et à voter. Par la suite, une autre motion, que vous avez vous-même, je crois, M. le Président, prise en délibéré, émanant du député de Marguerite-Bourgeoys, selon votre décision quant à la recevabilité...

Mme Lavoie-Roux: De Gaspé.

M. Charron: De Gaspé, pardon... selon votre jugement sur la recevabilité de cette motion, méritera notre attention.

Par la suite, M. le Président, nous reviendrons à la tradition normale d'une commission qui se trouve sans motion pendante devant elle, c'est-à-dire que vous reconnaîtrez à tour de rôle les députés, dans l'ordre habituel, qui ont des motions à présenter devant cette assemblée. J'en ai une au nom du gouvernement, le député de Marguerite-Bourgeoys en a signalé d'autres.

Quand on aura disposé de la mienne, ce sera au tour de l'Opposition officielle de présenter la sienne, mais je pense que, d'ores et déjà, nous pouvons aller à celle du député de Mégantic-Compton.

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: M. le Président, le député-ministre de Saint-Jacques vient d'affirmer que l'ordre de présentation des motions serait de la façon qu'il a indiquée, à savoir que la motion qu'il a annoncée serait présentée avant la mienne. Je n'ai pas perçu dans votre directive, M. le Président, ce genre de chronologie. J'aimerais que vous me rassuriez, à savoir qui va avoir préséance à ce moment-là. Je vous ai demandé une directive, vous avez refusé de me reconnaître immédiatement. A ce moment-là, je respecte votre directive, mais je n'ai pas perçu dans votre directive une indication selon laquelle ce serait la motion du député-ministre de Saint-Jacques qui serait reconnue avant la mienne.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ne préjugez de rien, sauf des usages prévus à l'article 4 du règlement. Nous en sommes à la motion du député de Mégantic-Compton. Je rappelle qu'il a encore, quant à lui, au moins deux minutes, M. le député de D'Arcy McGee a parlé, mais il est avec nous ce soir. Il n'a parlé que pendant cinq minutes et Mme le député de L'Acadie a déjà parlé pendant dix minutes, ce qui fait qu'il lui reste dix minutes; tout cela en vertu de l'article 160 du règlement. Nous retombons avec cet article général qui permet à chacun des députés de toute l'Assemblée nationale de s'exprimer pendant vingt minutes. Le temps est déjà compté pour le passé, mais je me dois, pour le moment, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, d'accorder la parole au député de Mégantic-Compton, en lui rappelant qu'il lui reste deux minutes.

M. Lalonde: M. le Président, vous me permettrez...

Le Président (M. Cardinal): Je vous permets tout, pourvu que...

M. Lalonde: ... et je déteste interrompre le député de Mégantic-Compton, mais je vous ai demandé si la suggestion du député-ministre de Saint-Jacques était bonne. Vous ne m'avez pas répondu, peut-être que c'est par distraction, étant donné que vous...

Le Président (M. Cardinal): Pardon, ce n'est pas du tout par distraction. J'ai dit que nous verrions en temps et lieu, quand la motion du député de Mégantic-Compton aura été débattue, ce qu'il adviendra des travaux de cette commission.

M. Lavoie: Battue?

Le Président (M. Cardinal): Je n'ai pas dit battue, M. le député de Laval, j'ai dit débattue.

M. Lavoie: D'accord.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... vous me permettrez encore, sur une question de règlement... Parce que je me demande en vertu de quel principe ou de quelle pratique il vous est impossible, actuellement, de rassurer l'Opposition officielle quant aux suggestions du député-ministre de Saint-Jacques. Est-ce qu'il y a un règlement qui l'autorise à supposer que sa motion serait présentée avant la mienne?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, pour les travaux de la Chambre comme pour les travaux des commissions, et ceci en vertu de l'article 163 et ensuite de l'article 4, dans les cas non prévus par les règles de procédure, nous n'avons plus de règle de pratique, mais, dans un cas de divergence d'opinions sur l'interprétation d'une règle de procédure, le président décide en tenant compte des usages de l'Assemblée, depuis son origine; c'est l'article 4. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde:... est-ce que je peux, étant donné que vous m'avez beaucoup éclairé quant au contenu du règlement, vous demander quand

même comment vous interprétez les usages de l'Assemblée en ce qui concerne la suggestion du député-ministre de Saint-Jacques?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je regrette. Je n'ai pas du tout interprété la suggestion du député de Saint-Jacques et je n'ai pas du tout l'intention d'interpréter la vôtre. Je viens de dire et je répète que, quand nous aurons disposé, quand nous aurons débattu la motion du député de Mégantic-Compton, le président, selon l'article que je viens de lire et qui est très clair, en décidera. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Lalonde: Je comprends, M. le Président, que vous prenez en délibéré ma demande de directive?

Le Président (M. Cardinal): Absolument pas, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je viens, au contraire, de rendre une directive en disant que l'article 4 s'applique et que le président en décidera en temps et lieu.

M. Lalonde: Mais de quelle façon la décision va-t-elle être faite, M. le Président? Il y a des usages, vous les connaissez, mais...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vous en prie. Vous avez suffisamment d'expérience en cette Assemblée nationale, en commission parlementaire, pour ne pas exiger davantage de la présidence. Ma directive est rendue et je donne la parole au député de Mégantic-Compton.

Reprise du débat sur la motion pour entendre l'Union des conseils de comté

M. Grenier: M. le Président, j'ai une proposition qui pourrait faire l'unanimité autour de cette table. Cela évitera peut-être des priorités ministérielles...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, je vous arrête avant que vous n'alliez plus loin. Est-ce que vous parlez sur la motion qui se lit comme suit et que je vais relire?

M. Grenier: Oui.

Le Président (M. Cardinal): "Que cette commission invite — motion corrigée, et non pas amendée — l'Union des conseils de comté du Québec à venir expliquer les implications de la loi 1 sur l'administration des municipalités rurales", motion déclarée recevable par la présidence, comme vous le savez.

M. Grenier: Si vous le permettez, je le ferai sous forme de directive.

Suite à la discussion que nous avons eue hier soir sur cette motion, aujourd'hui, les débats se sont déroulés d'une façon peut-être un peu diffé- rente pour permettre de voir autre chose, d'avoir un éclairage différent.

J'aimerais vous faire savoir que l'intention de l'Union Nationale, ce n'est pas de faire des motions dilatoires pour faire perdre le temps à cette commission. L'Union Nationale est convaincue, dans le moment, qu'il manque peu de chose pour l'éclairage des députés. Suite à cela, on aimerait vous faire savoir qu'on aurait aimé transformer notre résolution d'hier soir et l'englober dans une autre motion un peu plus large qui permettrait, après avoir étudié l'ensemble des mémoires qui restent à étudier, soit environ 200, de les diviser en neuf groupes différents. Vous jugerez, à ce moment-là, si c'est recevable ou pas...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, vous faites votre intervention sous forme de demande de directive. Vous vous dirigez vers une nouvelle motion, alors que je vous ai donné la parole sur une motion qui était déjà devant cette commission.

M. Grenier: Ecoutez, M. le Président, si vous me dites que ce n'est pas recevable...

Le Président (M. Cardinal): Je vous dis que c'est une nouvelle motion, qu'elle n'est pas prioritaire. Vous devez, à ce moment-là, retirer votre motion. Nous prendrons une autre motion, selon ce qui adviendra devant cette commission.

M. Grenier: Si j'avais le consentement unanime, je pourrais demander qu'on l'amende, sinon...

Le Président (M. Cardinal): Je pourrais demander le consentement unanime. D'accord, M. le député.

M. Grenier: Ce serait peut-être intéressant de faire connaître notre proposition. Je veux vous faire savoir que ce n'est pas notre intention de retarder les débats. Je dois vous laisser entendre immédiatement que, quant à nous, nous avons presque suffisamment entendu de mémoires pour mettre fin à ces débats.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît. Si vous le permettez, M. le député de Saint-Jacques. Je pense que j'ai compris l'intervention du député de Mégantic-Compton et j'y reviendrai tantôt. S'il désire un consentement unanime, je lui permettrai de lire la nouvelle motion et je demanderai ce consentement.

Auparavant, comme le député de Saint-Jacques a demandé la parole, je vais la lui accorder et je reviendrai à vous, M. le député de Mégantic-Compton. M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, il n'y a pas consentement unanime pour qu'à ce moment-ci, le député de Mégantic-Compton modifie la motion qu'il nous avait présentée hier.

M. Grenier: Est-ce que vous avez donné le consentement? Je m'excuse, j'ai été dérangé.

M. Charron: II n'y a pas consentement à ce moment-ci.

M. Grenier: Est-ce que vous permettez que je lise le texte que j'ai devant moi, quitte à demander le consentement par la suite? Cela prendrait une minute.

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Madame et MM. les membres de la commission, je vous autorise certainement à lire cette motion, mais rien de plus.

M. Grenier: D'accord. Si vous le permettiez, j'aurais peut-être une très brève explication, qui va être pas mal moins longue que la lecture de la motion elle-même, pour démontrer ce qu'on entend par cette motion. C'est une motion de trente secondes.

M. Charron: Je suggère au député de Mégantic-Compton de prendre la plus courte des deux.

M. Grenier: D'accord.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, comme je ne veux pas que l'on s'enferre dans des questions de procédure, etc.... A l'ordre, sil vous plaît! Soyons calmes, paisibles, sereins. Il fait beau, c'est l'été, nous sommes ensemble depuis déjà quelques semaines...

M. le député de Mégantic-Compton, avec beaucoup de générosité, je vous laisse la parole, quitte à vous interrompre si vous franchissez des bornes...

Mme Lavoie-Roux: Infranchissables.

Le Président (M. Cardinal): Non pas infranchissables, ce serait un pléonasme, qui ne seraient pas acceptables. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Vous permettez, M. le Président, que le point...

Le Président (M. Cardinal): L'on vous permet, M. le député de Mégantic-Compton, mais, s'il vous plaît, à votre préambule, il n'y a pas de motion.

M. Grenier: Je ne provoquerai pas de débat, M. le Président, je vais donner une courte explication, lecture de ma motion et, s'il n'y a pas unanimité, nous serons en mesure de prendre une décision après, mais je dois vous dire une chose, la décision de l'Union Nationale, c'est celle qui est depuis le début de cette commission, depuis le début de nos travaux, de seconder le gouvernement dans des efforts loyaux qui sont faits, et on considère que les efforts qui ont été faits en vertu du projet de loi no 1 sont des efforts loyaux, et, à partir de là, notre motion sera courte et les travaux pourraient être courts à partir de ce soir également.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas à moi à vous remercier a ce moment-là, c'est au gouvernement. Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: La motion se lit comme suit: "Cette commission ne se déclare pas suffisamment informée tant et aussi longtemps que n'auront pas été convoqués et entendus en cette commission, parmi ceux qui ont fait connaître en temps voulu leur intention d'être entendus ici par les membres de cette commission ou, à défaut, parmi ceux dont on aurait intérêt à connaître le point de vue, des organismes ou individus représentant le milieu rural— il y en a neuf — le monde municipal, les minorités francophones hors Québec, les industries de type sectoriel, le domaine spécialisé du transport et des communications, le monde du sport, le milieu agricole ou encore ceux qui ont bâti ce pays, les gens de l'âge d'or, et enfin le monde hospitalier."

M. le Président, si ce devait être cela, je pense que, si vous me permettez, seulement pour compléter, ce sont les trente secondes dont j'ai besoin, pour notre part, nous nous contenterions d'un mémoire par secteur, ce qui veut dire qu'au rythme où nous allions dans les bonnes journées de cinq mémoires par jour, si la commission était appelée à siéger à compter de lundi, nous pourrions avoir terminé mardi soir, s'il y a unanimité autour d'un mémoire qui pourrait être choisi dans chacun des secteurs par cette commission, par les délégués des partis à cette commission.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, je n'ai pas l'intention de rendre immédiatement une décision sur la recevabilité de cette motion.

Vous vous rappellerez que, le 7 juin, cela fait déjà un mois, j'avais indiqué que chaque fois qu'une motion serait présentée devant cette commission, avant de rendre une décision, pour des fins très démocratiques, j'inviterais les membres de la commission — j'ai bien dit les membres de la commission, je m'en tiens à ceux-là — à m'informer eux-mêmes de ce qu'ils pensent de cette recevabilité.

Nous pouvons donc procéder de deux façons. Je puis — écoutez, je vous donne une chance — tout simplement tout de suite demander s'il y a unanimité sur la motion ou je puis demander si on veut en discuter pendant quelques instants, non pas pendant une heure, parce que le président peut être suffisamment informé à un moment donné — ce n'est pas qu'à nos commissions, ce n'est pas aussi lourd — si l'on désire que ce soit accepté. Il y a un risque à ce que je demande s'il y a accord. Il y a peu de risque à ce que je demande ce que l'on pense de la recevabilité de la motion.

Quant à moi, je me prononcerai après vous avoir entendus.

M. Grenier: Vous allez me permettre une intervention très brève.

M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Dans l'ordre, M. le député de Mégantic-Compton, M. le député de Vanier, M. le député de Saint-Jacques. M. le député de Mégantic-Compton, uniquement sur la recevabilité de la motion et très brièvement. Ce n'est pas l'article 160 qui s'applique, c'est purement une générosité du président.

M. Grenier: M. le Président, avec votre permission, ce que nous avons proposé ici, ce n'est pas, bien sûr, pour dire que nous prenons les devants pour faire un débat à caractère purement politique. Ce que nous voulons, c'est mettre fin, d'une façon correcte et d'une façon éclairée, à cette commission pour qu'on ne se dise pas mardi que c'est l'un ou l'autre parti qui portera "l'onéreux" de fermer cette commission. Je pense que si, ensemble, nous décidions d'un accord commun d'accepter cette proposition, il y aurait peu de débats oiseux autour de cette table et cela ne retarderait pas indéfiniment ces débats. Nous serions passablement plus éclairés, puisque c'est un secteur qui a été très peu représenté à cette table et je pense qu'il serait facile d'avoir un comité tel qu'il avait été proposé à la commission, alors que nous siégions avec le leader du gouvernement et que nous parlions d'un comité pour juger de la priorité des mémoires alors que ces débats devaient être télévisés.

Il y aurait lieu de faire très brièvement un comité de trois ou quatre personnes représentant les partis politiques et de décider dans chacun des secteurs quel mémoire pourrait être présenté. Si c'était le cas, je pense qu'à neuf mémoires, on pourrait clôturer cette session qui pourrait commencer lundi matin pour donner la chance à nos témoins de venir, et se terminer mardi soir.

Je pense que là, il n'y a personne qui pourrait dire, comme lors de ces débats que nous lisions, qui sont ceux de l'Opposition du temps sur la loi 22, qui disait que cela faisait à peine cinq semaines, deux mois qu'on entendait des mémoires, à peine cinq motions, neuf amendements et tout cela, et tenter de jeter l'onéreux sur un autre parti.

Ce n'est pas notre intention. Notre intention, c'est qu'on a été éclairé, on a eu d'excellents mémoires, qui ont été jugés par le ministre ou son cabinet, on nous a apporté ici des mémoires très représentatifs. En dehors des discussions peut-être plus partisanes qui sont faites à cette table, on pourrait en sélectionner ici neuf autres. Là, on mettrait fin à ces débats avec un éclairage suffisant et ce serait là vraiment une collaboration qui pourrait être apportée, je pense, par l'Opposition officielle autant que l'opposition de l'Union Nationale, et que le gouvernement aurait grand avantage à retenir pour la fin des débats, qui pourrait être amorcée pour mardi soir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton, je ne vous interromps pas?

M. Grenier: ... M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Dans le court exposé que vous venez de faire, qui est très objectif, d'ailleurs, j'ai cru comprendre qu'il y a peut-être le désir d'une autre motion, celle de créer un comité?

M. Grenier: Non, je n'en fais pas une motion. C'est simplement un voeu qui pourrait être fait. Maintenant, si quelqu'un pouvait nous assurer, bien sûr, qu'il y aurait un mémoire de chacun de ces secteurs, on n'a peut-être pas besoin de comité. C'est un voeu que j'exprime, ce n'est pas une autre motion.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Alors, M. le député de Vanier.

M. Bertrand: M. le Président, c'est à vous directement que je m'adresse.

Le Président (M. Cardinal): II faut toujours s'adresser au président, d'ailleurs.

M. Bertrand: C'est plus que cela. Ce n'est pas simplement pour la forme, c'est parce que c'est de vous que j'attends une réponse. Je ne comprends pas très bien la démarche dont vous venez de nous faire part lorsqu'après la lecture de ce que pourrait être une nouvelle motion du député de Mégantic-Compton, vous dites: Nous allons, comme ce fut le cas pour d'autres motions qui avaient été présentées dans le passé, d'abord, démocratiquement, permettre qu'il puisse y avoir des opinions exprimées sur la recevabilité de cette motion.

Je ne comprends pas votre démarche, parce que vous avez dit avant que vous alliez suivre ce qui était déjà déposé sur la table. Il y avait sur la table une première motion du député de Mégantic-Compton, dont le débat a commencé hier soir, et qui avait été suspendue. Il y avait, deuxièmement, une motion que vous aviez décidé de prendre en délibéré et qui avait été présentée par le député de Gaspé.

Vous avez donc, comme vous deviez le faire, donné la parole au député de Mégantic-Compton qui, au moment de prendre la parole, nous a fait part de sa volonté, si les membres de la commission y consentaient unanimement, et c'est vous qui l'avez invité à obtenir le consentement unanime, de présenter une nouvelle motion et, à ce moment, si le consentement unanime était donné, nous allions débattre sa recevabilité, et ensuite, si elle était reçue, débattre sur le fond de cette motion.

Or, avant même que le député de Mégantic-Compton ait lu sa nouvelle motion qu'il entendait présenter, peut-être en remplacement de l'autre, M. le ministre et député de Saint-Jacques vous a fait part qu'il ne donnait pas son consentement à

la réception de cette motion, et vous aviez dit qu'il fallait consentement unanime pour la réception de la motion.

Donc, je ne comprends pas que, maintenant que le texte de la motion nous a été lu, vous donniez place à un débat sur la recevabilité, alors que vous avez vous-même dit, et je pense que je n'interprète pas vos paroles, c'est ce que vous avez fait, vous avez dit que cette motion pourrait être acceptée sur la table, à condition qu'il y ait, sans même aucun débat, consentement unanime pour que le député de Mégantic-Compton présente cette motion au lieu de celle qui avait été présentée hier soir et dont le débat avait été suspendu.

Alors, ce que je vous demande, c'est de demeurer fidèle, comme vous l'avez toujours été depuis le début de la commission, à l'attitude que vous avez eue dans les minutes qui ont précédé, et de faire en sorte que vous posiez la question: Y a-t-il ou pas consentement unanime pour que le député de Mégantic-Compton puisse convertir sa motion?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Vanier, vous avez en partie raison. J'ai été d'une générosité qui... Je ne sais pas comment la qualifier, ce n'est pas moi. Les gens jugeront...

Une Voix: Exagérée peut-être?

Le Président (M. Cardinal): ... mais, si je comprends bien votre intervention, et si on me permet de mettre quelque chose entre de petits tirets— j'ai dit, il y a deux possibilités: ou bien je demande le consentement ou bien je me fais aviser et je décide. Je n'ai pas demandé le consentement immédiatement; si je l'avais demandé, je considérerais que votre intervention est un non-consentement, si je vous interprète bien. Il faudrait que je vous interprète. Non pas que ce que vous avez dit n'était pas clair; au contraire, c'est tellement clair pour moi que je vais jusque-là. Je ferme les tirets —.

J'ai voulu le faire simplement pour que l'on entende la motion, que l'on puisse y réagir mais, ne craignez pas, il ne se passera pas beaucoup de minutes avant qu'une décision soit rendue.

Je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys et ensuite je me permettrai de décider de cette question, à moins que vous n'ayez quelque chose à ajouter. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'avais l'intention d'intervenir sur l'intervention du député de Vanier parce que, de toute évidence, il y a une question de règlement. Vous en avez décidé, je pense, d'une façon tout à fait éclairée. Autrement dit, il y a consentement unanime et, s'il n'y a pas de consentement unanime, vous devez décider de la recevabilité. Je dois tout d'abord dire que, en ce qui concerne le consentement unanime, nous sommes prêts, nous, de l'Opposition officielle, à donner notre consentement. Maintenant, si ce consentement n'est pas accueilli, s'il n'y a pas de concurrence de la part des députés ministériels, à ce moment, sur la recevabilité, M. le Président, je pense que la motion d'amendement, en fait, du député de Mégantic-Compton est tout à fait recevable. Elle élargit, naturellement, le concept de cette motion.

M. Charron: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je m'excuse. M. le député de Saint-Jacques sur une question de règlement.

M. Charron: Je m'excuse également auprès de mon excellent ami, le député de Marguerite-Bourgeoys, mais il vient lui-même de mettre noir sur blanc la situation. Bien sûr, il y a débat sur la recevabilité si, d'abord, il y a consentement unanime. Je vous ai signalé, dès le début, comme l'a rappelé le député de Vanier, qu'il n'y a pas consentement de notre part puisqu'une autre motion, celle du député de Gaspé, est en délibéré actuellement et nous allons procéder selon l'ordre habituel. Le député de Mégantic-Compton pourra revenir plus tard avec celle-là; donc, il est inutile d'engager le débat sur la recevabilité actuellement puisqu'elle ne peut même pas être entendue par le président de cette commission.

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, je pense que je suis suffisamment informé. Certains membres de cette commission sont ici, avec nous, depuis le début; certains sont venus, sont partis, sont revenus. J'avais indiqué un certain nombre de voies possibles au tout début des travaux de cette commission; non pas que nous en sommes à la fin. Je ne préjuge jamais de rien.

J'ai voulu faire encore un petit exercice de démocratie, cela me revient encore; enfin, cela me revient. Je ne regrette rien...

Une Voix: Ne le regrettez pas, M. le Président. M. Ciaccia: Ne chantez pas surtout.

Le Président (M. Cardinal): Non, je ne chanterai pas, surtout que j'ai vu des témoins dans cette salle qui pourraient chanter mieux que moi. Alors, je ne regrette rien et je dirai ceci tout de suite. Cette motion, quant au fond, est de la même nature que la motion du député de Gaspé, en ce sens qu'elle donne une préférence à un certain nombre de groupes. Hier soir, il n'y avait qu'un organisme de mentionné; ce soir, M. le député de Mégantic-Compton a raison. Il a divisé, et c'est très sage, les organismes ou individus en un certain nombre de catégories.

De toute façon, sa motion n'indique pas quels sont ces organismes, quel est le numéro de leur mémoire. Quant à cela, je l'excuse. Il n'a pas cette clé sur le numéro des mémoires, bien qu'il ait reçu comme membre de la commission...

M. Grenier: Avais-je le droit de mettre dans une motion les numéros...? Je pense qu'on n'a pas le droit.

Le Président (M. Cardinal): C'est une parenthèse. Ce n'est pas la question que vous n'aviez pas le droit, mais vous n'avez pas indiqué... Vous n'avez indiqué que des groupes, mais, quand même, je sens très bien, je pense, vers quoi vous vous dirigez. Il y a un certain nombre de groupes qui, avant la fin des travaux de cette commission, seraient préférés ou privilégiés. Comme hier soir, face à la motion du député de Gaspé, j'ai réservé mon jugement parce que j'ai donsidéré, en toute sagesse, que cela engageait l'avenir. De même ce soir, devant cette motion, je prendrai la même position et je la prendrai en délibéré. La décision est rendue et on ne peut plus en discuter.

M. Charron: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: Puisque votre décision est rendue quant à la politesse que nous avions rendue au député de Mégantic-Compton de nous laisser lire son projet de motion, eût-il été recevable, et puisque vous venez de rendre votre décision sur la motion présentée par le député de Gaspé hier, à qui je réserve tout mon respect, qui tentait d'orienter les travaux de cette commission, je voudrais, au nom du gouvernement, vous faire connaître notre position à ce moment-ci des travaux de cette commission.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, par délicatesse, politesse, éthique, etc., je vais vous laisser la parole, mais j'aurais un commentaire à faire.

Allez-y, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je comprends que votre décision est que la proposition d'amendement du député de Mégantic-Compton n'est pas acceptée...

Le Président (M. Cardinal): Pardon. Un instant.

Mme Lavoie-Roux: Elle est prise en délibéré. M. Lalonde: Elle est prise en délibéré? Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Lalonde: A ce moment, peut-on discuter du fond ou, enfin, de la motion principale?

Le Président (M. Cardinal): Non, parce que je n'ai pas décidé si elle était recevable ou non. J'ai simplement dit que, comme celle du député de Gaspé, elle était prise en délibéré.

M. Lalonde: On va se faire fourrer bien raide!

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Je ne voudrais pas ce soir... Un instant, s'il vous plaît. Je ne voudrais pas ce soir que l'on considère que la présidence fait le jeu de quelque parti que ce soit. J'ai référé tantôt à l'article 4. J'ai permis, et c'était une permission vraiment généreuse, au député de Mégantic-Compton de lire son préambule et sa motion. J'ai même demandé, comme l'a dit le député de Vanier, bien que j'eusse pu rendre la décision immédiatement comme je l'avais indiqué le 7 juin, j'ai même demandé à la commission, qui s'est exprimée, son opinion; je n'ai interrompu personne. Je considère qu'il est parfaitement normal que devant des motions prises en délibéré on ne discute point du fond. Je considère, deuxièmement, qu'il est parfaitement normal, conforme aux usages immémoriaux de cette Assemblée, dans cet édifice qui a 100 ans cette année, que le parti ministériel ait une certaine initiative. Je pense que personne ne peut le leur reprocher, même pas les partis de l'Opposition.

M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président...

M. Grenier: Si vous rendez une décision sur la motion que j'ai présentée ici, je dois vous dire que je retire... si vous me donnez l'autorisation et je reviens à ma motion principale.

Le Président (M. Cardinal): Non, je regrette. Attention. Il faut être honnête envers tous. M. le député de Mégantic-Compton, si vous retirez cette motion, j'ai déjà rendu une directive depuis le début des travaux de cette commission selon laquelle, à cette commission, avec le mandat qu'elle possède, qui lui a été donné par l'Assemblée nationale, un membre de la commission — et vous en êtes membre — est maître de la motion qu'il présente et peut la retirer.

Vous venez donc de retirer votre motion et...

Une Voix: D'amendement.

Le Président (M. Cardinal): Non, pas d'amendement, c'est une nouvelle motion.

M. Grenier: Je retire ma nouvelle motion.

Le Président (M. Cardinal): C'est une nouvelle motion. S'il vous plaît. C'était une motion, si on peut dire, comme je viens de l'entendre, de remplacement. Dans ce cas, en justice pour tous, je dois vous redonner la parole sur la motion que vous aviez d'abord présentée. Est-ce qu'il est nécessaire que je la relise? En vous rappelant qu'il vous reste deux minutes sur le fond de cette motion.

M. Charron: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Le député de Saint-Jacques, sur une question de règlement.

M. Charron: Je ne veux pas vous être désagréable, d'autant plus que nous aurions pu arrêter tout ce scénario du député de Mégantic-Compton dès le début si nous avions refusé la courtoisie de lui laisser lire ce qu'il avait l'intention d'émettre, si nous avions émis notre consentement à ce qu'il émette une autre proposition à la place de celle qu'il avait, hier, présentée. Tout cela n'existerait pas si au départ nous n'avions refusé cela au député de Mégantic-Compton. Nous avons dit que nous refusions de remplacer une motion par une autre, comme c'était son souhait. C'est lui-même qui nous a offert de retirer sa motion pour en présenter une autre. L'autre a été prise en délibéré. Qu'il ne revienne pas avec la précédente qu'il a choisie de présenter à sa place.

M. Grenier: Non.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Charron: Oui, il a retiré la première.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Dois-je rappeler l'article 100, M. le député de Saint-Jacques?

M. Grenier: C'est une directive, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Non, monsieur.

M. Grenier: Non, pas maintenant, je m'excuse. J'avais demandé tout à l'heure une directive.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Alors, je laisse la parole encore à M. le député de Saint-Jacques.

M. Charron: M. le Président, la question est simple. Comme plusieurs témoins à cette table, on a entendu le député de Mégantic-Compton dire qu'il n'avait pas l'intention de faire de motion dilatoire, c'est à son honneur par rapport à d'autres membres de l'Opposition. Il a voulu faire une proposition qui remplaçait celle qu'il avait faite hier étant donné qu'il disait lui-même qu'il lui manque peu de chose pour son éclairage et pour se déclarer suffisamment informé. Nous avons dit à ce moment-là qu'il ne pouvait pas remplacer sa proposition. Par courtoisie, nous lui avons permis de la lire et par courtoisie, M. le Président, vous avez accepté de la prendre en délibéré. Maintenant que vous l'avez prise en délibéré, il dit qu'il ne veut plus la présenter, mais qu'il préfère revenir à sa proposition initiale. C'est prendre cette commission pour...

M. Grenier: M. le Président.

M. Lalonde: La décision est rendue.

M. Charron: Autrement, M. le Président, toute courtoisie et tout esprit poli que les membres de cette commission pourraient avoir les uns envers les autres demeure inutile maintenant puisque par pure politesse — et pourquoi ne pas le dire — par pure politesse politique nous avons permis à l'Union Nationale d'affirmer à l'intention des media ce qu'elle aurait présenté si nous lui avions permis de présenter autre chose que ce qu'elle avait présenté hier. Parce que l'Union Nationale se permet de changer d'avis de jour en jour, aujourd'hui, elle avait une autre opinion que celle d'hier.

M. Grenier: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, oui.

M. Grenier: Je ne permettrai pas au député de Saint-Jacques de dire qu'on change d'opinion chaque jour. Jusqu'à hier...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Mégantic-Compton, ce n'est pas une question de règlement, c'est une question de privilège et il n'y en a pas en commission. Vous pourrez demain donner un avis au président une heure avant l'Assemblée, en vertu de l'article 49, alinéas 1 et 2. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: M. le Président, c'est justement pour faire suite à l'intervention du député-ministre de Saint-Jacques. Je pense que votre décision a été rendue et que le député de Mégantic-Compton est tout à fait autorisé à commencer à exercer son droit de parole que vous lui avez accordé avant l'intervention du député de Saint-Jacques. Je ne pense pas que le député de Saint-Jacques, qui vient d'apparaître ici depuis quelques minutes, après cinq semaines de délibérations où la courtoisie a été la règle — M. le Président, vous pouvez en témoigner — de tous les côtés, avec quelques écarts, naturellement... Quand même, cela a pu cimenter une volonté de tous les membres de cette commission de faire un travail positif. Je pense qu'on en a fait un. Je pense que le député de Mégantic-Compton devrait recevoir, de la commission, comme il a reçu de vous, M. le Président, le droit de s'exprimer sur sa motion principale.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je ne voudrais pas justement, comme vous l'avez dit vous-même, après quatre semaines d'à peu près 13 heures par jour de courtoisie, sauf quelques incidents passagers, rendre une décision qui fasse que, non pas tout se termine mal, parce que nous n'en sommes pas à la fin, mais que tout se continue mal.

Pour ces raisons, et je m'en excuse auprès des membres de la commission et de ceux qui sont devant nous, je vais suspendre la séance pendant exactement quatre minutes pour y réfléchir et je reviendrai rendre ma décision. Exactement... pardon?

Mme Lavoie-Roux: Elle a été rendue, votre décision?

Le Président (M. Cardinal): Un instant, ce qu'a dit le député de Saint-Jacques, je pense, ne se rapporte pas à ma décision. Ce que j'avais rendu comme décision, c'est que j'acceptais que le député de Mégantic-Compton retire sa motion; je lui ai ensuite donné la parole sur sa motion principale. Cependant, j'avoue que je me trouve dans une situation où je ne voudrais pas du tout que l'on considère que je joue le jeu d'un parti ou d'un autre, que ce soit l'Union Nationale, le Parti québécois ou d'autres partis. J'ai entendu plusieurs intervenants et, sans revenir sur... non pas sur une décision, j'avais simplement donné la parole, je regrette, au député de Mégantic-Compton. J'aimerais quand même y penser pendant quelques minutes. J'ai dit que je prenais quatre minutes seulement.

Cela sera un repos pour la commission...

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Avant que vous preniez quelques minutes de réflexion, permettez-moi de vous dire qu'il y a quelques jours à peine, vous m'avez permis de retirer une motion, malgré le manque de consentement du reste des membres ou de quelques membres de cette commission. Vous avez décidé, à ce moment-là — je pense que c'est un précédent qui est valable — qu'un membre de cette commission pouvait unilatéralement retirer une motion, même si le consentement n'était pas accordé par les autres membres, ce qui, je pense, est tout à fait pertinent à ce débat et ce qui donne automatiquement, je crois, le droit au député de Mégantic-Compton de s'exprimer sur sa motion principale qui est aussi valide et vivante qu'avant.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm sur la question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, ce que le député de Marguerite-Bourgeoys soulève avec raison, c'est le droit de retirer sa proposition, mais pas pour revenir à une autre proposition; c'est nettement différent comme approche.

Dans le cas présent, le député de Mégantic-Compton avait une proposition débattue sur la table, proposition qu'il a amendée et sur laquelle il n'y a pas eu consentement...

M. Grenier: M. le Président, j'ai demandé une directive sur ma motion.

M. Chevrette: ... qu'il a remplacée, excusez. Est-ce que je pourrais finir?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: C'est une directive que j'ai demandée au président sur ma motion; ce n'est pas un amendement.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Non, ce n'est pas un amendement. A l'ordre! M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: On fera la joute un peu plus tard. C'est une proposition de remplacement sur laquelle le consentement a été refusé et il reviendrait, en retirant sa proposition de remplacement, à une proposition qu'il ne voulait plus débattre lui-même, par le fait qu'il voulait...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Est-ce que je pourrais terminer, M. le Président?

Le Président (M. Cardinal): Oui, j'aimerais beaucoup que vous puissiez continuer et terminer.

M. Chevrette: J'ai été très calme, je portais le nom de mon comté. Il revenait donc à une proposition que lui-même ne reconnaissait plus, dans son désir de vouloir apporter une proposition de remplacement, ce que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas fait. Il a apporté une motion qu'il a retirée mais pas en faveur d'une autre, parce qu'il n'y en avait pas d'autre. Donc, quant à être exact, soyons précis dans les faits qu'on apporte devant la commission pour vous permettre, durant votre moment de réflexion, de bien y réfléchir.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Joliette-Montcalm. M. le député de Mont-Royal, sur la même question.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais seulement rappeler au président, avant qu'il ne suspende les débats pour prendre sa décision, qu'en aucun temps, contrairement aux propos et à la déclaration du député de Saint-Jacques, le député de Mégantic-Compton n'a retiré sa motion. Il a demandé s'il pouvait en faire une autre. Par courtoisie, c'est vrai, par courtoisie, le député de Saint-Jacques lui a permis de lire sa deuxième motion. Puisque c'était par courtoisie, il n'y avait aucunement la décision ou le désir, de la part du député de Mégantic-Compton, de retirer sa première motion. C'était la question de savoir s'il aurait pu avoir le consentement de la commission pour débattre la motion, la nouvelle motion qu'il devait proposer.

Vous, par courtoisie, avez décidé de procéder d'une ou de deux façons. Premièrement, de demander le consentement ou bien d'entendre certaines représentations très limitées sur la recevabilité.

En aucun moment — et c'est important, parce que je crois qu'il y a des sujets assez importants en jeu — le député de Mégantic-Compton n'a retiré sa première motion. C'était une question de courtoisie, une question de directive. Cela a été réglé, cela a été décidé. Alors, juridiquement, légalement, sa première motion est maintenant devant nous et vous lui avez accordé le droit de procéder.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Verchères, sur une question de règlement.

M. Charbonneau: Très rapidement, en vertu de l'article 100, est-ce que je pourrais demander au député de Mégantic-Compton — cela vous permettrait peut-être de résoudre le problème — étant donné qu'il ne voulait justement pas faire de motion dilatoire et qu'il nous avait proposé une motion qui, à certains égards, pouvait paraître intéressante... On pourrait peut-être lui demander s'il serait prêt à retirer sa motion principale et présenter celle qui n'était pas acceptable tantôt et recevable à un autre moment donné.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: Sinon, on va mettre en doute la valeur et la prétention du fait que vous ne vouliez pas présenter de motions dilatoires.

M. Grenier: Question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Non, non, c'est assez. Je m'excuse. Je n'ai pas reconnu tantôt, je m'en excuse, le député de D'Arcy McGee. C'est la dernière intervention que j'entends. Ensuite, je le dis tout de suite, je suspendrai la séance pendant quatre minutes.

Le noeud de la question, le noeud du problème... Non, un, et ensuite, je suspends la séance. C'est justement de savoir si, à travers les décisions que j'ai rendues, le député de Mégantic-Compton n'a pas, dans le fond, remplacé une motion par une autre, laissant tomber la première. Je ne rends pas la décision justement et c'est pourquoi je veux suspendre la séance.

Je dis une seule intervention pour que nous ne nous rendions pas à 23 h sur une question de règlement.

M. le député de D'Arcy McGee, s'il vous plaît.

M. Goldbloom: M. le Président, je soumets respectueusement à votre considération ce qui suit: La motion du député de Mégantic-Compton était recevable, a été jugée recevable, a été reçue et a subi un certain débat.

Le député de Mégantic-Compton est arrivé ce soir avec une requête qu'il a adressée d'abord à la présidence et, suivant votre directive préliminaire, à l'ensemble des membres de cette commission, une requête de pouvoir substituer une motion différente.

A partir de ce moment-là, immédiatement, le député-ministre de Saint-Jacques a dit: Je ne donne pas mon consentement à cette procédure. Vous avez, par courtoisie, permis au député de Mégantic-Compton d'aller néanmoins plus loin afin de saisir les membres de la commission de la vraie nature de sa proposition.

Mais je soumets respectueusement, M. le Président, que nous nous trouvons en ce moment dans une situation où, à partir du moment où le député de Mégantic-Compton a formulé sa re- quête, la réaction des membres de la commission, notamment du côté ministériel, a été que toute cette procédure était entachée d'irrégularités et n'était pas recevable, n'était pas conforme à notre règlement.

Donc, M. le Président, il me semble que nous nous retrouvons dans le statu quo ante où le député de Mégantic-Compton avait le droit de parole sur la motion qu'il avait bel et bien présentée et qui était en discussion.

Le Président (M. Cardinal): Merci. M. le député de Vanier, si je vous accorde la parole cela ne serait pas... Je regrette. Il est 10 h 25, j'ai dit tantôt quatre minutes. Je regrette pour tous, je suspends la séance jusqu'à 10 h 30. Nous reprendrons les travaux de la commission à 10 h 30.

(Suspension de la séance à 22 h 25)

Reprise de la séance à 22 h 35

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et messieurs!

Je vois que beaucoup de livres de règlements sont sur cette table et j'indique que, quand la décision sera rendue, on ne pourra invoquer aucun règlement pour l'attaquer, qu'elle soit bonne ou mauvaise.

La commission, comme l'usage en est établi, a usé de beaucoup de politesse envers le député de Mégantic-Compton, ce qui nous a entraîné, dans ce dédale de procédure où l'on peut se demander si une motion prise en délibéré peut être retirée.

Cependant, j'admets que j'ai accepté qu'elle soit retirée, et ceci conformément à deux décisions rendues, depuis que cette commission siège, à savoir que le proposeur d'une motion en est maître et peut toujours la retirer sans le consentement ni de la commission, ni de la présidence.

J'ai suspendu les travaux, parce que, justement, je voulais prendre quelques minutes, après avoir entendu tous ceux qui se sont prononcés, tant sur la recevabilité de la motion retirée que sur l'opportunité de revenir à la motion principale du député de Mégantic-Compton.

La motion prise en délibéré étant retirée, il n'y a plus de délibéré. Nous revenons donc à la motion principale, et je donne la parole à M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je vous remercie, M. le Président. Evidemment, depuis le dépôt de ma motion, hier soir... Il est peut-être bon de la faire connaître aux gens qui étaient ici à cette table et aux autres qui se sont ajoutés: "Que cette motion invite l'Union des conseils de comtés du Québec à venir expliquer les..."

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Mégantic-Compton...

M. Grenier: Oui.

Le Président (M. Cardinal):... quand même, je veux être sage pour tout le monde, pour autant que je puisse l'être. Je vous ai mentionné tantôt que si nous revenions à votre première motion, il vous restait deux minutes.

M. Grenier: D'accord, merci. Je vous fais grâce de la lecture, c'est simplement pour vous dire qu'il y a eu changement d'attitude dans cette commission. C'est ce qui fait que l'Union Nationale n'a pas changé d'opinion, mais, étant donné que nous voyons aujourd'hui, avec un éclairage nouveau, que la commission tire à sa fin, nous avons voulu présenter tout à l'heure un amendement qui n'en était pas un et qui n'a pas été reçu. Je voudrais donc, M. le Président, en terminant l'étude de ma motion d'hier soir, vous proposer cet amendement qui se lira maintenant comme suit, sur ma motion...

Le Président (M. Cardinal): Attendez un peu, vous proposez un amendement à votre propre motion? Non, quand même, je peux aller loin, mais il y a des limites.

Une Voix: A moins qu'il n'y ait consentement unanime.

M. Charron: II n'y a pas consentement unanime.

M. Grenier: Je m'excuse, dans ce cas-là, il n'y en a pas.

Mme Lavoie-Roux:... on est d'accord.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, à l'ordre! Il y a eu une motion principale...

M. Grenier: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): II y a eu une motion qu'on a appelée ce soir, pour fins de procédure de remplacement, mais vous ne ferez pas un amendement à votre propre motion.

M. Grenier: D'accord. Je m'excuse, M. le Président. Je dois admettre que l'Union Nationale n'a peut-être pas dans sa députation son procédurier que nous regrettons beaucoup dans des moments comme ce soir, la batterie du Parti libéral est plus considérable, de même que celle du Parti québécois. Je voudrais que vous teniez compte de ces choses. Sur la motion principale que j'avais hier, alors qu'il ne me restait que deux minutes, je dois vous dire que je la retiens comme telle et je vous dis qu'elle a sa valeur. A partir de maintenant, je laisse la parole aux autres députés que vous voudrez bien entendre, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Je n'en doute pas. Merci, M. le député de Mégantic-Compton. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Pourrais-je vous demander, avant de commencer, combien de minutes il me reste? Vous l'avez indiqué...

Le Président (M. Cardinal): Je l'ai indiqué tantôt. Attendez un peu. Il faudrait que je retourne...

Mme Lavoie-Roux: II avait parlé cinq minutes.

Le Président (M. Cardinal): Oui, vous aviez parlé cinq minutes et il vous reste quinze minutes.

Motion d'amendement

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Ce n'est pas que je voudrais nécessairement prendre les quinze minutes, mais simplement pour me gouverner dans l'utilisation de mon droit de parole.

Je vous ai indiqué sur cette motion du député de Mégantic-Compton qu'à mon sens, il y a une importance assez particulière à entendre les représentants du monde rural, et notamment parce que nous disons toujours que le palier municipal de l'administration publique est celui qui est le plus près de la population. Si cela peut être vrai en principe, pour l'ensemble des municipalités, cette vérité est moins perceptible quand il s'agit d'une grande métropole. Quand il s'agit d'une petite municipalité rurale, et je vous rappelle qu'au Québec, il y a à peu près les trois quarts de nos municipalités qui ont moins de 1000 âmes de population... Nous avons donc des entités qui sont peut-être grandes en territoire, mais petites en ce qui concerne leur population. Quand les dirigeants municipaux, quand les élus du peuple quittent leur maison, ils sont nécessairement et immédiatement en contact avec cette population. Je suggère, en vertu d'une certaine expérience dans ce domaine, que dans une ville comme Montréal, dans une ville comme Québec — et ce n'est pas péjoratif, ce que je vais dire — les citoyens n'ont pas une tendance générale à s'en aller de chez eux vers l'hôtel de ville — se présenter à l'hôtel de ville, à demander des renseignements, à faire valoir leurs points de vue sur des mesures proposées par ces mêmes autorités municipales. Dans les municipalités rurales, il y a un contact qui est quotidien, il y a une coutume, une habitude généralisée d'aller voir les dirigeants municipaux pour discuter avec eux de questions qui préoccupent les administrés. S'il y a une question qui préoccupe tous les Québécois, et par la force des choses — ce n'était peut-être pas toujours le cas — mais par la force des choses, c'est devenu le cas, c'est bien la question linguistique.

Dans l'administration courante d'une entité municipale, les communications sont importantes pour la vie quotidienne des citoyens. Si ces citoyens ne peuvent recevoir leurs communications et leurs services dans une forme et donc dans une langue qui leur sont compréhensibles, il y a un affaiblissement, non seulement de la valeur de cette administration locale, mais du sens même de ce vieux principe que ce palier d'administration est le plus près du peuple.

Connaissant les municipalités rurales du Québec, M. le Président, je suis en mesure d'affirmer que, même si, individuellement, elles sont dirigées par des personnes qui connaissent leur population, qui connaissent leur administration et qui sont capables de bien s'exprimer sur les problèmes qui peuvent se présenter, il faut dire que, contrairement aux grandes villes, ces municipalités sont presque toutes dirigées par des personnes qui doivent gagner leur vie à faire autre chose. C'est pour cette raison que l'Union des conseils de comté a une telle importance dans l'économie de l'administration municipale. Ce n'est pas désobligeant à l'endroit de l'Union des municipalités du Québec de dire que ce dernier organisme n'a pas tout à fait la même importance par rapport à ses membres parce que les cités et villes sont généralement en mesure de s'exprimer convenablement et individuellement. Mais, les municipalités rurales, qui représentent une proportion importante de notre population, se fient énormément à leur conseil de comté et encore davantage à l'Union des conseils de comté pour exprimer leur point de vue.

J'ai participé activement à plusieurs congrès annuels de l'union et à un congrès spécial, assez mémorable, quelques jours après mon accession au titre et à la responsabilité de ministre des Affaires municipales. C'est ainsi que j'ai été en mesure, que je suis en mesure d'apprécier la valeur de cet organisme et son importance pour ses membres. Je suggère respectueusement, M. le Président, que le fait, pour cette commission parlementaire, de ne pas entendre l'Union des conseils de comté du Québec serait un geste désobligeant à l'endroit du milieu rural et de sa population, et justement pour les raisons que j'ai déjà invoquées. Parce que cette population, dans ses communications avec ses dirigeants, veut être en mesure de travailler, de transiger à son aise, ne veut pas être prise dans des tracasseries inutiles.

Il y a une réalité qu'il faut reconnaître et cette réalité a voulu, selon cette tendance bien humaine que nous avons peut-être en majorité, de graviter vers des semblables... C'est ainsi, notamment sur le plan linguistique, qu'il y a dans les grandes villes des quartiers à forte prépondérance de langue française, d'autres quartiers à forte prépondérance de langue anglaise et, dans le cas des municipalités rurales, il y a des municipalités entières qui, par cette force de gravité, sont devenues, à toutes fins pratiques, ou bien francophones ou bien anglophones. Et puisque nous avons devant l'Assemblée nationale, devant cette commission parlementaire, un projet de loi qui vise à renforcer, à protéger la langue française au Québec, nous devons, en toute justice, être vigilants à notre propre endroit, comme législateurs.

Nous devons nous assurer que, par l'adoption d'une loi qui vise un but que nous acceptons, je crois, à l'unanimité ou presque — je ne parle pas pour d'autres que les membres de la formation dont je fais partie — le principe fondamental, le but visé ne souffre plus de discussion; mais, par un projet de loi qui vise cet objectif accepté, nous ne devons pas brimer les droits de qui que ce soit, et je ne parle même pas de droits, je parle d'une réalité de vie quotidienne, nous ne devons pas compliquer inutilement la vie quotidienne de citoyens qui veulent transiger, normalement et facilement, avec leur administration municipale.

M. le Président, quelques collègues à cette table ont soulevé le fait que l'Union des conseils de comté du Québec n'a pas posé de geste pour demander d'être entendue. Je vous avoue que j'aurais pu — c'est une chose qui s'est déjà vue dans les annales politiques du Québec — prendre le téléphone, appeler le président de l'Union des conseils de comté du Québec, appeler plusieurs des préfets de comté et susciter une action, faire envoyer un télégramme à cette commission parlementaire — nous avons effectivement reçu des télégrammes de divers organismes — j'aurais pu susciter un tel geste. J'aurais pu faire demander par l'Union des conseils de comté une occasion exceptionnelle d'être entendue devant la commission parlementaire ou plus simplement l'acceptation de cette invitation proposée par la motion du député de Mégantic-Compton.

Je n'ai pas voulu agir de cette façon, même si je dois conserver dans mon for intérieur quelques soupçons quant à l'initiative prise par diverses personnes pour faire présenter des opinions devant cette commission parlementaire. Je pense que la motion présentée par le député de Mégantic-Compton suffit, devrait suffire pour convaincre les membres de cette commission parlementaire d'accepter d'entendre — et je suis convaincu de l'acceptation de l'Union des conseils de comté — cet organisme. Alors, M. le Président, mon temps de parole tire à sa fin. Je voudrais terminer en proposant un amendement qui aurait pour effet, très simplement, d'ajouter, à la fin de la motion du député de Mégantic-Compton, les mots suivants: le 19 juillet 1977. Merci, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de recevabilité, est-ce que vous allez poser des questions à cette commission?

M. Charron: M. le Président, il n'y a pas deux minutes de questions sur la recevabilité. Le député de D'Arcy McGee vient de nous farcir un dix minutes sur une motion qui devait nécessairement être recevable.

M. Goldbloom: Ce que le député de Saint-Jacques n'a jamais fait de sa vie.

M. Lalonde: Non, jamais.

M. Goldbloom: Jamais. La vierge offensée! Ah! J'ai mon voyage.

M. Lalonde: On va vous en donner.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs les députés!

M. Charron: Mais pas du tout. Les propos insignifiants du député de D'Arcy McGee, on peut en entendre encore, ce sont des droits propres à l'Opposition de les fournir.

M. Goldbloom: Toujours des insultes! C'est le style du député de Saint-Jacques. Quel honneur pour l'Assemblée nationale! J'ai mon voyage.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs les députés!

M. Goldbloom: C'est dégoûtant!

M. Charron: Nous sommes disposés à les entendre.

M. Goldbloom: J'ai mon voyage!

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs les députés!

M. Charron: Les Québécois l'ont eu de vous bien avant que vous l'ayez de moi.

M. Lalonde: Ce ne sera pas long qu'ils vont l'avoir de vous aussi.

M. Charron: Allez-y.

Le Président (M. Dussault): Je demanderais, s'il vous plaît, votre collaboration. Il reste quelques minutes. Il me semble qu'il faudrait terminer cela dans le calme. Etant donné cette demande d'amendement, je vais suspendre les travaux de la commission pendant une minute avant de rendre une décision sur cet amendement.

(Suspension de la séance à 22 h 54)

Reprise de la séance à 22 h 55

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, madame et messieurs!

Je demanderais aux députés de reprendre leur place. M. le député de D'Arcy McGee soumettait un amendement à la proposition, à savoir ajouter à la fin de la motion les mots: "Le 19 juillet 1977" et je déclare que cet amendement est recevable.

M. Chevrette: Vingt minutes là-dessus, c'est brillant.

Le Président (M. Dussault): Cela veut donc dire maintenant que le débat doit se faire sur cet amendement.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. M. Chevrette: D'après le règlement...

M. Bertrand: M. le Président, une directive, s'il vous plaît.

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Est-ce que vous allez permettre que le débat se fasse uniquement sur une date? Allez-vous bien vérifier qu'il ne porte que là-dessus?

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Vanier, le débat ne se fera que sur l'amendement, à savoir la date du 19 juillet 1977.

M. Ciaccia: Est-ce que je peux commencer?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît. Si je suis bien informé, la parole était au député de Mont-Royal en lui rappelant que dans deux minutes, je devrai ajourner le débat sur la motion d'amendement.

M. Ciaccia: M. le Président, nous avons devant nous un amendement du député de D'Arcy McGee sur la motion principale du député de Mégantic-Compton demandant que l'Union des conseils de comté du Québec...

M. Laplante: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, un instant.

M. Laplante: Est-ce que vous pourriez nous lire l'amendement?

Le Président (M. Cardinal): Justement, j'étais pour intervenir... à l'ordre, s'il vous plaît. Il n'y a rien de dilatoire là-dedans, le règlement exige que toute motion soit remise par écrit au président. Je demande que la motion d'amendement me soit remise par écrit, s'il vous plaît. Un instant, s'il vous plaît.

J'ai toujours agi de la même façon, ce qui est parfaitement recevable.

Merci. L'amendement se lit comme suit: "En ajoutant à la motion principale, à la fin de la motion, les mots "le 19 juillet 1977".

Il vous reste trente secondes, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je vais commencer ce soir, je terminerai demain. Le 19 juillet, M. le Président, c'est un mardi.

Le Président (M. Cardinal): Sur ce, M. le député de Mont-Royal, permettez que j'ajourne les travaux à demain, dix heures.

Les travaux de cette commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 22 h 59)

ANNEXE 1 (1)

Mémoire

Présenté par l'Ordre des Ingénieurs du Québec

à

la commission parlementaire d'étude du projet de loi no 1

Charte de la langue française au Québec

Avant-propos

En mai dernier, l'Ordre des ingénieurs a fait un sondage d'opinion auprès de ses membres domiciliés au Québec dans le but de connaître leur réaction face au projet de loi no 1 sur la langue française et d'en faire part au gouvernement sous forme de mémoire.

Le sondage est basé sur un échantillon de 2,000 ingénieurs travaillant, à divers niveaux de responsabilités, dans les secteurs de l'industrie privée, de la fonction publique, de l'enseignement et du génie-conseil.

Le souci d'une méthodologie rigoureusement scientifique a présidé à la conception du questionnaire. La compilation des réponses a été confiée à la firme "Sondage d'opinion du Québec".

Comme en fait foi le taux de participation, 58% de réponses dans les six jours ouvrables suivant l'envoi, ce sondage exprime bien l'intérêt de nos membres pour cette importante question qu'est la langue française. D'ailleurs, ils ont clairement exprimé, à travers ce sondage, leur désir que l'Ordre se prononce publiquement.

Le présent mémoire est donc l'expression même d'un groupe de citoyens québécois et non celle de personnes prises individuellement. C'est en cela sans doute qu'il puise son originalité et qu'il mérite une attention particulière.

Mémoire

L'Ordre des ingénieurs, le 30 avril 1977, comptait 19,753 membres actifs, dont 18,184 domiciliés au Québec, soit 62% de francophones et 38% d'anglophones.

Nous avons recueilli l'opinion de 1,168 ingénieurs domiciliés au Québec: 56% francophones et 44% anglophones. Nous sommes convaincus que les résultats, dans les deux cas, sont fiables à cause d'abord de la méthode aléatoire de sélection et, ensuite, du taux élevé de réponses (58%), au moment de la rédaction de ce mémoire.

Pessimisme justifié

Notre sondage démontre que les ingénieurs ont une bonne connaissance du projet de loi no 1, que leurs inquiétudes sur le plan personnel sont relativement faibles, tandis qu'à leur avis les conséquences socio-économiques du projet, dans sa forme actuelle, pourraient être importantes surtout sur le plan d'une baisse du niveau de vie au Québec. Notons, au passage, que ce pessimisme est justifié par les conséquences et non les principes du projet de loi. En effet, 57% des ingénieurs francophones pensent que le projet de loi est "un pas en avant" pour le Québec, tandis que 39% de ce même groupe et 95% d'anglophones sont d'avis contraire.

D'autre part, les ingénieurs, tant francophones qu'anglophones, reconnaissent que le projet n'aura pas d'effets positifs, du moins à court terme, sur l'économie du Québec. A long terme, cependant, le groupe francophone est légèrement plus optimiste: 40% anticipent un effet positif d'une telle loi sur l'économie.

Conséquences du projet de loi no 1

Toutefois, une très forte proportion d'ingénieurs ressent des inquiétudes vis-à-vis des conséquences du projet de loi no 1: 71% des anglophones et 26% des francophones prévoient un exode important des firmes de génie du Québec; 54% des anglophones et 19% des francophones craignent un effet défavorable dans leur milieu de travail d'ici cinq ans et 49% d'anglophones quitteraient "probablement" ou "certainement" le Québec si une telle loi entrait en vigueur.

Par ailleurs, les deux groupes croient que les perspectives d'emplois pour les francophones vont s'améliorer si cette loi est adoptée.

Modalités d'application répressives

Malgré certaines réticences sur le plan des modalités, on sent chez les ingénieurs une très grande sympathie vis-à-vis des objectifs poursuivis par le projet de loi, à savoir un Québec plus intensément français. On se demande alors pourquoi le gouvernement, dans les détails, procède comme si la majorité des Québécois étaient contre les objectifs du projet de loi.

Par contre, presque tous les ingénieurs de l'échantillon reconnaissent que l'anglais est "utile" ou "nécessaire" dans leur formation et dans la pratique du génie. Actuellement, 81% des répondants prétendent avoir une connaissance de la seconde langue qui est "suffisante" ou "excellente".

On ressent toutefois une inquiétude de la part des deux groupes linguistiques quant à une trop grande bureaucratisation du système gouvernemental. Aussi posons-nous la question suivante à la Commission: Faut-il réellement s'aventurer à mettre sur pied une nouvelle et imposante bureaucratie, qui elle-même risquerait d'être incontrôlable? Et que dire du mandat extrêmement rigide qui lui donne le pouvoir d'accorder aux entreprises des permis d'opération, d'y procéder systématiquement à l'inspection et de s'assurer que partout au Québec le programme de francisation soit appliqué?

Le succès qu'ont connu le syndic et les enquêteurs de l'Ordre des ingénieurs à faire respecter les lois et les règlements régissant la pratique du génie au Québec, nous font préconiser une approche similaire dans le cas du projet de loi no 1.

Il eût sans doute été plus simple et, certainement, moins coûteux aux contribuables que la Loi no 1 proclame les droits linguistiques des Québécois et qu'il leur donne accès à un système de redressement équitable et rapide.

Nous espérons donc que d'une façon générale le projet sera amendé pour faire plus confiance aux citoyens et que les mesures qu'il propose cadreront davantage avec des droits déjà acquis au Québec.

Education

Même si les média d'information en ont fait grand état, le domaine de l'éducation n'est pas un des principaux sujets d'inquiétudes des ingénieurs vis-à-vis du projet de loi no 1. Le sondage indique, par contre, la très grande importance que les ingénieurs accordent à la connaissance de l'anglais dans leur formation et la pratique de leur profession. L'anglais, nul ne l'ignore aujourd'hui, est la langue des affaires à travers le monde. L'on sait que le gouvernement a l'intention de renforcer l'enseignement de cette langue dans les écoles publiques francophones. Il est impensable que dans le contexte international les ingénieurs québécois ne puissent pratiquer et rivaliser sur le plan technologique sans avoir une connaissance adéquate des deux langues.

Comité de francisation

Même si le sujet n'a pas été abordé par le questionnaire, l'idée de créer un comité de francisation dans l'entreprise, de caractère interdépartemental nous paraît excellente. Les communications à l'intérieur de l'entreprise n'en seront qu'améliorées et, par conséquent, elles pourraient stimuler la productivité au Québec. Vu la diversité des entreprises au Québec, il serait préférable que la composition de ce comité ne soit pas édictée, quitte à la soumettre à l'approbation de l'Office de la langue française, et que le comité ait une fonction de coordonnateur et de conseiller plutôt que celle que lui accorde le projet de loi. Il est donc essentiel que l'entreprise québécoise puisse demeurer compétitive et que sa francisation réponde à ce souci.

Les sièges sociaux

La quantité et la qualité d'emplois disponibles aux Québécois dépendent, dans une certaine mesure, de la présence et du développement des sièges sociaux tant à caractère national qu'international au Québec. Il y va donc de l'intérêt économique de la province de rendre alléchante l'invitation à ce type d'entreprise de s'installer au Québec, ce qui freinerait ou empêcherait carrément l'exode amorcé ou anticipé que nous indique le sondage. Le Québec pourrait être un important carrefour d'activités commerciales et industrielles bien plus important qu'il ne l'est actuellement, par sa situation géographique, la richesse de ses ressources naturelles, son originalité culturelle, son énorme potentiel économique.

Pour atteindre cet objectif, la future loi devrait faire preuve d'un peu plus d'originalité que son projet actuel. Il semble y avoir nombre de modalités contraignantes qui, en effet, n'ont rien à faire avec la francisation du Québec. On laisse aux chefs d'entreprises le soin de les souligner. Par contre, les législateurs pourraient eux-mêmes concevoir certaines mesures incitatives. De telles mesures, certains pays les appliquent d'ailleurs, surtout pour encourager l'implantation chez eux d'entreprises étrangères en mettant à leur disposition des zones franches. N'y aurait-il pas lieu, dans le cas du Québec, surtout dans des régions peu développées mais disposant de moyens de communication, d'instaurer des zones d'exception qui permettraient aux entreprises, dont le commerce est international, de s'y installer sans

être directement touchées par le programme de francisation ni avoir besoin du permis d'opération. Bref, ces entreprises ne devraient pas tomber sous le coup de la future loi sur la langue française.

Le rôle de l'OIQ

La moitié des répondants francophones (51%) et la majorité (96%) des anglophones ne sont pas d'accord que l'ordre communique exclusivement en français avec ses membres et le public.

Les trois quarts de l'échantillon estiment plutôt que "toute communication entre l'Ordre et ses membres peut être faite dans l'une ou l'autre des langues officielles du Canada".

Ainsi, le mandat de l'OIQ, tel que défini par ses membres, est clair: la majorité des membres appuierait la politique courante de l'Ordre, soit de "fournir aux membres anglophones, tous les documents officiels (79%), les textes de lois et règlements de l'Ordre (82%), dans une version anglaise".

La langue de communication des ordres professionnels

Nul doute que les ordres professionnels doivent assumer pleinement leurs responsabilités dans l'intégration de leurs membres à la réalité québécoise. Cette volonté, nos membres eux-mêmes nous l'ont indiquée. Et si l'article 27 n'exclut pas l'utilisation d'autres langues, en particulier l'anglais, nos commentaires s'arrêtent là.

Si, par contre, la volonté du gouvernement est que les ordres professionnels communiquent uniquement en français avec leurs membres ainsi qu'avec le public, cette mesure nous paraît aller à l'en- contre de l'intérêt des Québécois. Si l'administration publique elle-même trouve irréaliste de se plier à cette exigence, les ordres professionnels, dont une des principales responsabilités est de voir à ce que les lois et les règlements régissant la pratique soient compris et observés, pourraient fort bien l'imiter.

La langue de certains organismes parapublics

Le chapitre du projet de loi qui traite de la langue de certains organismes parapublics nous touche dans notre fonctionnement organique et technique et, plus particulièrement, dans notre rôle précis d'émission des permis de pratique.

Nous croyons que les conditions d'obtention de permis de pratique, autres que la langue, sont du ressort du Code des professions et de la Loi particulière de chaque ordre professionnel et ne devraient pas se trouver de quelque façon dans une autre loi. Nous référons ici aux mots "autorisés à exercer leur profession en vertu des lois d'une autre province ou d'un autre pays" dans le premier alinéa de l'article 32. Ces mots n'ajoutent rien de valable à l'article. Au contraire, à cause du grand nombre de pays sans loi autorisant l'exercice du génie ou autre profession, tout immigrant de ces pays ne pourrait obtenir un permis temporaire.

Par ailleurs, et tout en respectant la primauté de la langue française, le projet devrait tenir compte de la difficulté certaine d'apprendre la langue française, surtout pour les ingénieurs à cause de la nature de leur travail qui les oblige à une grande mobilité. Nous suggérons donc que la période minimale de validité soit de deux ans plutôt qu'un; à ce moment, on pourrait limiter la possibilité de renouvellement du permis à une seule fois au lieu de deux.

Le chapitre V du projet de loi ne couvre d'aucune façon l'exercice temporaire de professions par des personnes non domiciliées au Québec mais qui y viennent de temps à autre soit à titre d'experts, soit à titre de consultants dans le contexte d'un travail ou d'un projet bien spécifique, ou même qui ne viennent pas au Québec mais posent des actes professionnels nécessitant la sanction de l'Ordre professionnel.

Selon la Loi des ingénieurs, ne peuvent être admis à l'Ordre que les personnes domiciliées au Québec, ou encore, domiciliées dans une province contiguë mais travaillant continuellement au Québec. Lorsque des experts, spécialistes ou consultants domiciliés hors du Québec sont engagés pour des projets spécifiques situés au Québec, la Loi des ingénieurs nous autorise présentement à accorder une licence temporaire valide pour chaque projet spécifique, et ce, pour la durée du projet. Le Code des professions reconnaît ce besoin en autorisant l'émission d'"autorisations spéciales" valides pour trois mois, durée nettement insuffisante pour un projet d'ingénierie.

Si les articles 30 et 32 du projet de Loi entendent inclure tous les permis, licences et autorisations spéciales, nous sommes alors d'avis qu'il y a nécessité d'ajouter un article 32 a) qui pourrait se lire comme suit: "32 a) Sous réserve des conditions imposées dans leurs lois particulières, les ordres professionnels peuvent accorder des autorisations spéciales aux personnes possédant les qualifications professionnelles requises, mais qui ne sont pas domiciliées au Québec et n'y pratiquent pas leur profession de façon continue".

Il est certain que nous devrons toujours avoir recours occasionnellement à des ingénieurs de l'extérieur du Québec et qu'ils seront généralement anglophones. Chez les ingénieurs canadiens, il

existe des ententes qui permettent justement ces échanges entre provinces et qui ont été jusqu'ici favorables au Québec.

L'industrie du génie-conseil

Certains des articles du projet de loi apportent des restrictions sérieuses dans le fonctionnement de firmes qui oeuvrent principalement sur le marché international en ce qui concerne la langue des affaires et l'engagement de personnel compétent pour faire le travail en ce domaine.

La majorité des firmes de génie-conseil de grande à moyenne envergure vit surtout des contrats accordés par d'autres pays. Les choses étant ce qu'elles sont, ces contrats se déroulent majoritairement en anglais, qui est soit la langue du client, soit la langue des affaires. Il s'ensuit que, même si la langue de travail au sein Je la firme québécoise peut être le français, tous les documents techniques et toutes les négociations se font dans une autre langue. Il en va ainsi de certains secteurs de l'ingénierie où la langue internationale reconnue n'est pas le français.

Réputation internationale

Le Québec doit être fier à juste titre de la force et de la réputation de ses firmes de génie-conseil: dans ce domaine, le Québec possède la prépondérance en regard des autres provinces. Les firmes québécoises jouissent d'une réputation internationale, elles doivent s'alimenter à même les meilleurs talents, où qu'ils se trouvent, pour prospérer et continuer à fonctionner. La présence de ce secteur n'est pas négligeable au Québec, car les répercussions de ses activités sont nombreuses sur l'économie de toute la province. Avec ses 11,000 employés, dont plus de 3,000 ingénieurs, le secteur du génie-conseil apporte à l'économie $150 millions en salaires par année, achète au Québec pour $75 millions de fournitures et exporte pour $200 millions de produits du Québec; les effets secondaires et indirects des activités de ce secteur au Québec se comptabilisent mal, mais sont d'importance majeure.

Objet de promotion et de fierté

Si ces firmes de génie-conseil ne peuvent se procurer l'expertise nécessaire à leur fonctionnement et si elles ne peuvent continuer à concurrencer les firmes hors du Québec à cause de restrictions imposées par le projet de loi sur la langue, il est certain que le Québec en souffrira. Le client ne cherche pas les difficultés, il ira ailleurs; le spécialiste dont on a besoin pour obtenir tel contrat ne cherche pas non plus les difficultés et il ira aussi ailleurs puisque ses services sont en demande. Tout en respectant le principe de la primauté de la langue française, le Québec doit faire face aux réalités de son existence dans une mer d'anglophones et d'une économie liée inévitablement à des contingences où la langue ne tient pas la première place.

La Charte de la langue française ne doit pas être un épouvantail, mais bien un outil de promotion et de fierté pour tous les Québécois.

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Analyse des résultats du sondage

Composition de l'échantillon

L'Ordre, en date du 31 mars 1977, comptait 19 747 membres actifs répartis à travers le monde; de cette population mondiale, 59% sont francophones pour 41% d'anglophones. De ce nombre 18 184 ingénieurs sont domiciliés au Québec dont 62% sont francophones.

Nous avons fait parvenir un questionnaire aux 2000 membres sélectionnés aléatoirement pour l'échantillon de ce sondage. Au moment de rédiger ce rapport, nous avions reçu un total de 1168 réponses. Les résultats que nous vous présentons ici s'appuient donc sur la compilation de ces données.

Le tableau ci-dessous démontre la composition de l'échantillon par région, secteur de travail, et âge.

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Utilisation du français dans le milieu de travail

Pour 78% des francophones et 23% des anglophones, le français est la langue principale dans le milieu de travail des ingénieurs de l'échantillon; 84% des francophones et 20% des anglophones admettent parler français tout le temps ou la plupart du temps.

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Connaissance de la seconde langue

Selon les répondants francophones, 7% seulement ont une "faible" connaissance de la langue anglaise; parmi eux, 44% et 49% estiment leur connaissance "suffisante" et "excellente".

Chez les anglophones, par ailleurs, 33% avouent avoir une "faible" connaissance du français, 48% jugent leur connaissance "suffisante" et 18% "excellente".

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Utilité de l'anglais

Les ingénieurs de l'échantillon évaluent hautement la connaissance de l'anglais tant dans leur formation que dans la pratique même du génie. En effet, presque la totalité des répondants, soit 98%, reconnaît que l'anglais est "utile" et "nécessaire" dans la formation d'un ingénieur et la pratique du génie.

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Connaissance du projet de loi

Presque tous les membres de l'échantillon (97%), tant francophones qu'anglophones, connaissent le projet de loi no 1 dans ses grandes lignes. Par ailleurs, les résultats indiquent que 55% des anglophones et 37% des francophones ont lu intégralement le texte de ce projet de loi.

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Inquiétudes

Presque tous les anglophones et une forte proportion de francophones (80%) ressentent des Inquietudes vis-à-vis du projet de Loi sur la langue française et notamment quant aux conséquences possibles.

C'est principalement au chapitre de l'économie au Québec que les francophones (53%) et les anglophones (83%) craignent le plus.

En outre, 62% des anglophones et 29% des francophones sont inquiets des répercussions du projet de Loi sur l'unité canadienne.

Mentionnons également que "les droits de la minorité" inquiètent bon nombre d'anglophones (64%).

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Modalités d'application

La majorité des répondants principalement les anglophones (84%), par rapport à 39% des francophones, considère "répressives" les modalités d'application du projet de Loi. Par ailleurs, 43% des francophones et 47% d'anglophones jugent ces modalités "équitables".

En ce qui a trait au contrôle du gouvernement chargé de veiller à l'application de la Loi, 40% des francophones et 87% des anglophones trouvent ce système de contrôle "exagéré", alors que 48% des francophones considèrent qu'il est "nécessaire et adéquat".

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Effets sur l'économie

Près de la moitié des répondants pensent que, si ce projet de loi était voté tel quel, il aurait un effet négatif à court (47%) et à long terme (52%) sur l'économie du Québec, les anglophones étant à ce sujet beaucoup plus pessimistes que les francophones: 61% des anglophones contre 37% chez les francophones anticipent un effet négatif à court terme, alors que 82% contre 31% y voient un effet négatif à long terme. Par ailleurs, 40% des francophones estiment, qu'à long terme, une telle loi aurait un effet positif.

Les opinions sont partagées en ce qui a trait à l'éventuel exode des firmes d'ingénieurs du Québec: 71% des francophones ne croyant pas qu'il y aura un exode important si une telle loi entrait en vigueur, tandis que 73% des anglophones croient le contraire.

Cependant, près des trois quarts (73%) dont 93% des anglophones de l'échantillon admettent la possibilité qu'une telle loi puisse avoir des répercussions sur les perspectives d'emploi en génie.

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Conséquences personnelles

Si un tel projet de Loi entrait en vigueur, 54% des anglophones et 19% des francophones craignent que cela ne les affecte défavorablement dans leur travail d'ici les cinq prochaines années. La majorité des francophones, cependant, croit que cela pourrait avoir un effet favorable (28%) ou n'avoir aucun effet (50%), une comparaison avec 14% et 30% chez les anglophones.

De même, les répondants diffèrent d'opinion selon la langue sur la question de l'accessibilité d'un plus grand nombre de francophones aux postes supérieurs à la suite de la mise en vigueur de cette Loi: 63% des francophones pensent que ce sera le cas alors que 64% des anglophones sont d'un avis contraire.

Presque la moitié des répondants anglophones (46%) se sentent menacés par le projet de Loi. En plus, la moitié des répondants anglophones anticipent de "quitter probablement (40%) ou "certainement (9%)" le Québec" si une telle Loi entrait en vigueur.

Chez les francophones, comme on s'y attendait, 7% seulement se sentent menacés et prévoiraient quitter le Québec (6%) si le projet de Loi devenait Loi.

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Conséquences générales

Une très faible proportion d'anglophones (4%) estime que le projet de Loi no 1, dans sa forme actuelle, constitue un pas en avant pour le Québec, comparativement à 57% chez les francophones.

Quant aux conséquences probables du projet de Loi, les répondants envisagent plutôt des conséquences négatives telles "une baisse du niveau de vie au Québec", "une perte des libertés civiles" et "une plus grande bureaucratisation du système gouvernemental". Très peu de répondants, tant francophones qu'anglophones, croient à un Québec plus démocratique (9%) et à "une amélioration des communications entre les Québécois" (12%) comme conséquences d'un tel projet de Loi.

Les anglophones, pour leur part, craignent "une perte des libertés civiles" (80%) et "une baisse du niveau de vie au Québec" (79%).

De leur côté, les francophones croient que ce projet de Loi améliorerait "leurs perspectives d'emploi" (39%) tout en reconnaissant une éventuelle "baisse du niveau de vie au Québec (35%).

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Faisabilité d'un Québec français

La presque totalité des répondants (90%) admet que "tout ingénieur non-francophone qui travaille ou désire s'installer au Québec devrait acquérir une connaissance suffisante du français".

Par contre, quant au temps requis pour apprendre le français, les opinions sont partagées: 65% pensent que trois ans est un laps de temps suffisant: 34% croient qu'il faut plus de trois ans à un ingénieur qui travaille pour apprendre le français. Les résultats montrent, par ailleurs, que ce sont les anglophones (50%) qui estiment que trois ans est une période insuffisante pour l'apprentissage.

D'autre part, 74% des anglophones pensent que la firme pour laquelle ils travaillent ne pourrait fonctionner uniquement en français au Québec. Les francophones ne sont pas tout à fait de cet avis puisque 69% pensent qu'il est possible que leur firme opère uniquement en français au Québec.

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Rôle de l'OIQ

Le but de ce sondage étant de consulter les membres de l'OIQ afin de déterminer l'action que cet organisme devait entreprendre; les résultats nous donnent deux instructions claires: "l'Ordre devrait se prononcer publiquement sur le projet de Loi no 1 et présenter un mémoire au gouvernement".

La moitié des répondants francophones (51%) et la majorité (96%) des anglophones ne sont pas d'accord pour que "l'Ordre communique exclusivement en français avec ses membres et le public."

Les trois quarts de l'échantillon estiment plutôt que "toute communication entre l'Ordre et ses membres peut être faite dans l'une ou l'autre des langues officielles du Canada".

Ainsi, le mandat de l'OIQ, tel que défini par ses membres, est clair: la majorité des membres appuierait la politique de l'Ordre, soit de "fournir aux membres anglophones, tous les documents officiels (79%), les textes de lois et les règlements de l'Ordre (82%), dans une version anglaise."

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(ANNEXE A) L'Ordre des ingénieurs du Québec: Rôle et structures

L'Ordre des ingénieurs du Québec est le seul organisme qui représente tous les ingénieurs en tant que professionnels et aussi la seule autorité qui régit l'exercice de cette profession au Québec.

Historique

Fondé en 1920, sous l'appellation de la Corporation des ingénieurs professionnels du Québec, l'Ordre a comme raison principale la protection du public, c'est-à-dire qu'il veille à ce que seules des personnes qualifiées soient admises à la pratique du génie dans la province. Il s'emploie, en outre, à inculquer à ses membres le sentiment légitime d'appartenir à une véritable profession, à favoriser l'évolution de la profession en collaboration avec les facultés de génie, les sociétés savantes, les divers organismes ou groupements socio-économiques.

Législation

Tout comme les autres corporations professionnelles au Québec, l'OIQ est régi par le Code des professions, de même que par une loi qui lui est propre, la Loi des ingénieurs: ses membres sont soumis à un ensemble de règlements dont un Code de déontologie.

Administration

Le conseil d'administration de l'OIQ s'appelle le Bureau; il est composé de vingt-quatre administrateurs, dont quatre sont nommés par l'Office des professions afin d'v représenter le public; les vingt autres sont élus par les membres dans sept régions électorales. Un comité administratif formé de cinq administrateurs s'occupe des affaires courantes de l'Ordre.

Siège social

Le siège social de l'Ordre des ingénieurs du Québec est situé au 2075 University, bureau 1100, Montréal. Le secrétariat comptait, au début du mois d'avril 1977, 39 employés permanents, dont 19 occupent des postes de cadre. Le secrétariat est placé sous l'autorité du directeur général, et les services qui y sont groupés se divisent en cinq secteurs distincts: le Service d'admission et d'enregistrement, le Service des affaires juridiques, le Service des communications, les Services aux membres et le Service des affaires administratives.

Effectifs

L'OIQ regroupe actuellement quelque 20,000 membres. Les francophones (58.5%) y sont plus nombreux que les anglophones (41.5%). On évalue à près de 15% ceux qui pratiquent à titre d'ingénieurs-conseils, soit comme employeurs ou comme employés. La majorité des membres de l'OIQ sont à l'emploi d'entreprises privées, publiques ou parapubliques: 60% des membres oeuvrent dans l'industrie.

Conseil canadien des ingénieurs

L'OIQ compte parmi les onze associations constituantes du Conseil canadien des ingénieurs, les autres associations professionnelles regroupant les ingénieurs des autres provinces canadiennes et du Territoire du Yukon: le siège social du Conseil canadien se trouve à Ottawa.

Administration des procédures d'admission à l'exercice de la profession

La profession d'ingénieur, par ses associations professionnelles provinciales, a établi des procédures régissant l'admission des personnes qualifiées à l'exercice de la profession d'ingénieur.

Elle consacre un temps et des efforts considérables à l'évaluation aussi juste que possible des titres et qualités d'ingénieurs étrangers et à leur équivalence canadienne, et accepte un grand nombre de diplômés étrangers, comme satisfaisant aux exigences académiques d'admission à la profession. Au cours des dix dernières années, plus de 20% des nouveaux membres admis à l'Ordre chaque année étaient diplômés d'établissements étrangers.

L'OIQ a d'ailleurs fait connaître ses vues sur cet aspect particulier de l'admission d'un fort pourcentage d'étrangers à la pratique du génie au Québec, dans un mémoire soumis au Comité mixte spécial du parlement sur la politique de l'immigration, le 6 juin 1975.

L'OIQ, à l'instar des autres associations professionnelles provinciales, doit administrer les procédures d'admission des candidats à l'exercice de la profession et émettre les permis de pratique en conséquence.

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Rôle du syndic

Nous avons vu plus haut que la vocation première de l'OIQ est la protection du public. Mais pour que cela se fasse efficacement, il est de prime importance que la profession de l'ingénieur soit elle-même respectée par tous et partout. C'est ainsi que l'Office des professions du Québec créa la fonction du syndic. Le rôle du syndic, au sein de l'OIQ, est de maintenir la discipline professionnelle chez les membres de l'Ordre, en s'assurant que ceux-ci exercent la profession conformément aux lois et règlements qui la régissent ainsi qu'en logeant les plaintes requises devant le Comité de discipline.

Inspection professionnelle

Le Code des professions exige des ordres professionnels la mise sur pied d'un Comité d'inspection professionnelle, dont l'objet est la vérification constante de la compétence des membres et de la qualité des services rendus. Pour faire face à un public de plus en plus averti, les candidats à la pratique du génie, doivent, non seulement se qualifier à l'admission, mais par la suite maintenir leurs connaissances et leur compétence à un niveau suffisamment élevé; voilà l'objectif précis que le Comité d'inspection professionnelle de l'OIQ doit poursuivre.

La formation continue des professionnels

La législation professionnelle québécoise fait, de la formation continue, une obligation formelle pour les corporations professionnelles en raison de la responsabilité qu'elle leur confie de^vérifier la compétence de leurs membres par l'inspection professionnelle.

C'est pourquoi, l'Ordre des ingénieurs du Québec a mis sur pied un comité chargé d'étudier les composantes et les différentes étapes de la formation professionnelle de ses membres. Le Conité d'éducation permanente s'intéresse aux différentes modalités de mise en application de stages de perfectionnement professionnel et de recyclage et d'un programme de formation continue. Le sujet demeure une préoccupation constante des doyens de facultés de génie et des représentants de l'Ordre.

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ANNEXE 1 (2)

Considérations supplémentaires au mémoire

présenté par l'Ordre des ingénieurs du Québec

à la commission parlementaire d'étude du projet de loi no 1

Charte de la langue française au Québec 6 Juillet 1977

Ordre des ingénieurs du Québec

2075, rue University

Montreal

Introduction

Les résultats du sondage indiquent que la majorité des membres attendaient de l'Ordre qu'il se prononce publiquement sur le Projet de loi no 1 et qu'il présente un mémoire au gouvernement. Tel est le mandat que recevait l'Ordre des ingénieurs du Québec à travers un sondage qu'il effectuait auprès de 2000 de ses membres.

Dans l'ensemble, les ingénieurs favorables au Projet de loi no 1 sont convaincus que le gouvernement apportera des modifications à ce projet en fonction des commentaires qu'il aura reçus. Par contre, ceux qui s'y opposent ne croient pas que le gouvernement le modifiera.

 la lumière des opinions exprimées par nos membres lors de ce sondage, l'Ordre a jugé bon d'apporter quelques modifications aux articles qui le concernent directement dans son fonctionnement.

Article 4 "Les travailleurs ont le droit fondamental d'exercer leurs activités en français, quelles que soient la nature, la forme et la taille de l'entreprise."

Cet article est ambigu. Il proclame un droit fondamental et universel, quelle que soit la situation de l'entreprise. Mais ce droit est tempéré par d'autres articles, tels l'article 37 et l'article 113. L'Ordre des ingénieurs du Québec propose le libellé suivant: "Tout Québécois a le droit de travailler en français". La reconnaissance d'un droit fondamental n'a pas besoin d'être qualifiée ou précisée par un "quelles que soient...". Ainsi amendée, la loi proclame le droit et impose à la société la nécessité de s'assurer que tout Québécois qui veut l'exercer pourra le faire. Le libellé de l'amendement rend l'article similaire aux articles 2, 3, 5 et 6 qui traitent aussi de droits.

Article 10 "Une version anglaise des textes de loi est imprimée et publiée par les soins de l'Administration."

Nous suggérons le libellé suivant: "Une version anglaise des projets de loi, des textes de loi. des projets de règlements, des règlements afférents et des avis est imprimée et publiée par les soins de l'Administration".

(les révisions sont soulignées)

L'article devrait aussi porter sur les projets de loi et de règlement, sur les règlements et sur les avis officiels, en vertu du même principe que celui qui justifie une version anglaise pour tout texte de loi. Dans bien des cas, les règlements et projets (surtout lorsqu'ils sont de nature technique) sont aussi importants que la loi.

L'opinion générale des membres de l'Ordre soutient cette modification suggérée (Questions 18 f) et 18 g).

Article 27 "Les ordres professionnels doivent communiquer en français avec leurs membres ainsi qu'avec le public."

Nous ne suggérons aucune modification car le libellé n'exclut pas la possibilité de communiquer également en anglais. Les résultats de l'enquête (Questions 18 d) et 18 e), indiquent que les membres de l'Ordre sont d'accord pour qu'une version anglaise accompagne la version française.

Article 32 "Les ordres professionnels peuvent délivrer des permis temporaires valables pour une période d'au plus un an aux personnes autorisées à exercer leur profession en vertu des lois d'une autre province ou d'un autre pays et qui ne remplissent pas les conditions de l'article 30 quant à la connaissance de la langue officielle.

Ces permis ne sont renouvelables que deux fois, et sous réserve que l'intérêt public le justifie.

Pour chaque renouvellement, les intéressés doivent se présenter à des examens tenus conformément aux règlements du gouvernement."

Le chapitre du Projet de loi qui traite de la langue de certains organismes parapublics nous touche dans notre fonctionnement organique et technique et, plus particulièrement, dans notre rôle précis d'émission des permis de pratique.

Nous croyons que les conditions d'obtention d'un permis de pratique autres que la langue, sont du ressort du Code des professions et de la loi particulière de chaque ordre professionnel et ne devraient pas se trouver de quelque façon dans une autre loi. Nous référons ici aux mots "autorisés à exercer leur profession en vertu des lois d'une autre province ou d'un autre pays" dans le premier alinéa de l'article 32. Ces mots n'ajoutent rien de valable à l'article. Au contraire, à cause du grand nombre de pays sans loi autorisant l'exercice du génie ou autre profession, tout immigrant de ces pays ne pourrait obtenir un permis temporaire.

Par ailleurs, et tout en respectant la primauté de la langue française, le projet devrait tenir compte de la difficulté certaine d'apprendre la langue française, surtout pour les ingénieurs, à cause de la nature de leur travail qui les oblige à une grande mobilité. Nous suggérons donc que la période minimale de validité soit de deux ans plutôt qu'un; à ce moment, on pourrait limiter la possibilité de renouvellement du permis à une seule fois au lieu de deux.

Le chapitre V du Projet de loi no 1 ne couvre d'aucune façon l'exercice temporaire de professions par des personnes non domiciliées au Québec mais qui y viennent de temps à autre soit à titre d'experts, soit à titre de consultants dans le contexte d'un travail ou d'un projet bien spécifique, ou même qui ne viennent pas au Québec mais posent des actes professionnels nécessitant la sanction de l'Ordre professionnel.

Selon la Loi des ingénieurs, ne peuvent être admis à l'Ordre que les personnes domiciliées au Québec, ou encore, domiciliées dans une province contiguë mais travaillant continuellement au Québec. Lorsque des experts, spécialistes ou consultants domiciliés hors du Québec sont engagés pour des projets spécifiques situés au Québec, la Loi des ingénieurs nous autorise présentement à accorder une licence temporaire valide pour chaque projet spécifique, et ce, pour la durée du projet. Le Code des professions reconnaît ce besoin en autorisant l'émission d'"autorisations spéciales" valides pour trois mois, durée nettement insuffisante pour un projet d'ingénierie.

Si les articles 30 et 32 du projet de loi entendent inclure tous les permis, licences et autorisations spéciales, nous sommes alors d'avis qu'il y a nécessité d'ajouter un article 32 a) qui pourrait se lire comme suit: "32 a) Sous réserve des conditions imposées dans leurs lois particulières, les ordres professionnels peuvent accorder des autorisations spéciales aux personnes possédant les qualifications professionnelles requises, mais qui ne sont pas domiciliées au Québec et n'y pratiquent pas leur profession de façon continue."

Il est certain que nous devrons toujours avoir recours occasionnellement à des ingénieurs de l'extérieur du Québec et qu'ils seront généralement anglophones. Chez les ingénieurs canadiens, il existe des ententes qui permettent justement ces échanges entre provinces et qui ont été jusqu'ici favorables au Québec.

Plusieurs questions du sondage ont une incidence sur l'article 32. Ainsi, 52% des ingénieurs anglophones sont d'avis que trois ans ne constituent pas une période suffisamment longue pour apprendre le français (Question 18 b) (22% des ingénieurs francophones sont du même avis). Par ailleurs, 95% des ingénieurs francophones et 86% des ingénieurs anglophones croient que tout ingénieur non-francophone qui travaille ou désire s'installer au Québec devrait acquérir une connaissance suffisante du français (Question 18 a). De plus, 12% des ingénieurs anglophones ont indiqué spontanément qu'une des conséquences probables du Projet de loi no 1, s'il était adopté tel quel, serait la difficulté de recruter des ingénieurs qualifiés de l'extérieur du Québec (Question 7 a).

Article 36 "II est interdit à tout employeur de congédier ou rétrograder un salarié pour la seule raison qu'il ne parle que le français ou qu'il ne connaît pas suffisamment une langue donnée, autre que le français.

Toute contravention au présent article, en plus de constituer une infraction à la présente loi, autorise le salarié à faire valoir ses droits auprès d'un commissaire-enquêteur nommé en vertu du Code du travail, au même titre que s'il s'agissait d'un congédiement pour activités syndicales; les articles 14 à 19 du Code du travail s'appliquent alors, mutatis mutandis."

Cet article pourrait créer de sérieux problèmes aux bureaux d'ingénieurs. Prenons le cas de deux ingénieurs francophones dont l'un est unilingue et l'autre, bilingue. Le premier a plus d'ancienneté. Ils travaillent tous deux à un projet de l'Etat. Le projet terminé, le seul projet où ils peuvent être affectés est un projet pour un client américain. La connaissance de l'anglais est nécessaire pour travailler à ce projet. Selon l'article 36, il semblerait difficile de congédier l'ingénieur unilingue et de garder l'ingénieur bilingue. Nous craignons aussi que cet article puisse être utilisé comme moyen de pression par certaines personnes amenées à être congédiées lors de la terminaison du contrat.

Notons à cet égard que 63% des ingénieurs francophones sont d'avis que la connaissance de l'anglais est nécessaire dans la pratique du génie.

Article 37 "II est interdit a tout employeur d'exiger pour l'accès à un emploi ou à un poste la connaissance d'une langue autre que le français, à moins que l'accomplissement de la tâche ne nécessite la connaissance de cette autre langue, conformément aux règlements adoptés à cet effet par l'Office de la langue française.

Il incombe à l'employeur de prouver que la connaissance de l'autre langue est nécessaire." Il faudrait rappeler au législateur que pour la très grande majorité des postes réservés aux ingénieurs, l'habileté de lire l'anglais est essentielle. Pour un nombre élevé de postes, comprendre l'anglais et le parler peut aussi s'avérer nécessaire. Compte tenu de l'étendue de ces exigences, il est important de connaître la réglementation de l'Office.

Nous avons des réserves sur la valeur de cet article. Si on ne peut mieux justifier son utilité, on devrait l'abolir.

Les réponses données à la question 14 du sondage, notamment par les ingénieurs francophones, soulèvent de nombreuses interrogations quant à la pertinence de l'article 37. De plus, notons que 30% des ingénieurs francophones et 76% des ingénieurs anglophones ne croient pas que leur firme pourrait fonctionner uniquement en français au Québec (Question 10). L'article 37 pourrait donc poser des problèmes importants pour les entreprises employant des ingénieurs.

Articles 52 et 58

Afin de faciliter la mobilité du personnel dans les entreprises ou établissements dont le rayonnement administratif dépasse les frontières du Québec, nous proposons les modifications suivantes aux articles 52 et 58:

Article 52 "Par dérogation à l'article 51, peuvent recevoir l'enseignement en anglais, à la demande de leur père et de leur mère: a)les enfants dont le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs au Canada, l'enseignement primaire en anglais; b)les enfants qui, à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, sont domiciliés au Québec, et i. qui reçoivent déjà, au Québec, l'enseignement en anglais à l'école maternelle, primaire ou secondaire, le même droit s'étendant à leurs frères et soeurs cadets; ii. dont le père ou la mère est, à ladite date, domicilié(e) au Québec et a reçu, hors du Québec, l'enseignement primaire en anglais.

Lorsqu'un enfant est à la charge d'un seul de ses parents, la demande prévue au présent article doit être faite par ce dernier.

(les révisions sont soulignées) Article 58 "Le présent chapitre ne s'applique pas aux personnes qui, aux conditions fixées par règlement afférant à cette loi. sont de passage au Québec ou v séiournent pour une durée de deux ans. Cette exemption est renouvelable une seule fois."

(les révisions sont soulignées)

L'enquête ne portait pas spécifiquement sur les questions soulevées par les articles relatifs à la langue d'enseignement. Cependant on doit noter que les articles 52 et 58 ont une incidence sur la facilité qu'auront les entreprises à recruter au Québec des ingénieurs provenant de l'extérieur. De nombreux organismes ont fait état de ce problème, en particulier les directeurs des centres de recherche industrielle à Montréal.

Articles 67 à 74

La constitution de l'Office.

A cause des pouvoirs discrétionnaires qui lui sont confiés, il y aurait tout avantage à faire de l'Office un organisme de concertation, en lui ajoutant un conseil d'administration formé principalement de personnes non employées de l'Etat. Le président et les deux vice-présidents pourraient être fonctionnaires de l'Etat, comme à l'actuelle Régie.

Les membres de l'Ordre, dans une proportion de 61%, sont d'avis que les mécanismes institutionnels prévus sont trop lourds (Question 16). De plus, les ingénieurs ont indiqué, dans une proportion de 38%, que les modalités d'application les inquiétaient (Question 17).

A noter également que 36% des ingénieurs ont indiqué qu'une des conséquences probables du Projet de loi no 1 sera une plus grande bureaucratisation du système gouvernemental.

Article 86 "Sur publication de la liste visée à l'article 85 dans la Gazette Officielle du Québec, l'emploi des expressions et termes y figurant devient obligatoire dans les textes et documents émanant de l'administration, dans les contrats auxquels elle est partie ainsi que dans les ouvrages d'enseignement, de formation ou de recherche publiés en français au Québec et approuvés par le ministre de l'Education."

Les pouvoirs confiés à l'Office par cet article sont trop vastes. Un manuel scolaire ne pourrait être approuvé par le ministre de l'Education s'il ne contient pas "la" bonne terminologie. En dernière analyse, c'est l'usage qui justifie l'acceptation d'un mot. Les ingénieurs sont parmi les principaux usagers de "nouvelle" terminologie et de terminologie technique. A cet égard, il faudrait prévoir des mécanismes plus souples.

Articles 106 et 119

La loi 1 oblige toutes les entreprises de plus de 50 employés à avoir un programme de francisation. A rencontre de la loi 22 qui était compensatoire, la loi 1 est d'application universelle (comme le sont la majorité des lois et les articles 106 et 119), et confère à l'Office un pouvoir de sanction, ce qui le rend à la fois juge et partie. Nous croyons qu'on devrait avoir le moyen de recourir au pouvoir judiciaire dans les cas d'infractions présumées: ceci devrait être le mécanisme retenu par la loi no 1.

Les réponses données à la question 3 sont, en ce sens, pertinentes: la majorité des membres de l'Ordre (57%) trouvent que les modalités d'application sont "répressives".

Articles 115 et 116

Tout programme de francisation doit refléter un engagement de l'entreprise: c'est donc la direction de l'entreprise qui doit en être responsable.

Le rôle qu'accorde le Projet de loi no 1 au Comité de francisation peut créer des problèmes. Nous croyons donc que ce comité devrait avoir un rôle uniquement consultatif.

Article 119

Bien que le texte de cet article n'exclut pas la possibilité d'appel des décisions de l'Office, si ce droit existe, il nous semble préférable que les modalités soient précisées et fassent partie de l'article 119.

ANNEXE 1 (3)

Evaluation méthodologique

et

Analyse des résultats

du sondage

mené par

L'Ordre des Ingénieurs du Québec auprès de ses membres

au sujet du Projet de Loi no 1

La Charte de la langue française au Québec

- Juillet 1977 - Introduction

Le présent rapport se divise en deux sections. La première section porte sur l'évaluation méthodologique de l'enquête menée par l'Ordre des Ingénieurs du Québec auprès de ses membres au sujet du projet de loi no 1. La deuxième section présente quelques résultats obtenus lors de cette enquête.

SECOR INC. ne fut impliqué dans la confection du questionnaire, la sélection de l'échantillon et dans la conduite de l'enquête. Nos services ont été retenus suite à la réunion du Conseil d'administration de l'Ordre du 20 juin 1977. Lors de cette réunion il fut décidé de nous confier les questionnaires complétés et de nous charger du mandat de faire l'évaluation méthodologique de l'enquête et une nouvelle analyse des résultats qui refléterait mieux la composition linguistique de l'Ordre.

On retrouvera en annexe les versions française et anglaise du questionnaire.

Evaluation méthodologique

des résultats du sondage effectué par

l'Ordre des Ingénieurs du Québec

au sujet du Projet de Loi no 1 La Charte de la langue française Introduction

Deux concepts fondamentaux sous-tendent l'évaluation méthodologique des résultats d'un sondage: la fiabilité et la validité des résultats. Différents types d'erreur peuvent vicier ces deux caractéristiques d'un sondage. Nous évaluerons la fiabilité et la validité des résultats du sondage de l'O.I.Q. en analysant les différents types d'erreur susceptibles de ce produire dans un sondage de ce genre.

Les erreurs peuvent être associées aux points suivants: 1. Définition de la population 2. Le cadre échantillonnai 3. Le mode d'échantillonnage 4. L'erreur échantillonnai 5. L'erreur de non-réponse 6. L'erreur de codification 7. Les biais provenant de la formulation et de la séquence des questions 8. Erreurs provenant de la traduction du questionnaire

Nous analyserons successivement chacune de ces sources possibles d'erreur.

Référer à la version PDF page CLF-1580

1 - La population

La population dont a été tiré l'échantillon est l'ensemble des membres actifs de l'Ordre des Ingénieurs du Québec domiciliés au Québec, selon l'adresse inscrite du lieu de résidence au fichier de l'Ordre. En date du 31 mars 1977, l'Ordre comptait 19,747 membres actifs, dont 18,184 étaient domiciliés au Québec.

On retrouve deux catégories de membres actifs: les membres juniors et les membres. Les membres juniors sont des membres qui ont complété leur scolarité de génie mais qui n'ont pas encore terminé leur stage pratique de deux ans nécessaire à l'obtention du certificat d'ingénieur.

L'enquête fut menée auprès des membres actifs domiciliés au Québec en date du 31 mars 1977. Cette population correspond à ce qu'il est convenu d'appeler couramment les ingénieurs au Québec.

2- Le cadre échantillonnai

La population décrite ci-dessus fut à la base de l'échantillon. Aucun nom ne fut exclu pour des raisons telles adresses inconnues, adresses étrangères, etc. De même seulement sept des 2000 questionnaires expédiés ne purent être livrés à leur destinataire. Les membres juniors furent traités de la même façon que les membres réguliers.

3- Le mode d'échantillonnage

Un échantillon de 2000 noms fut tiré selon une procédure aléatoire simple, chaque membre dans la population effective ayant une probabilité égale d'être choisi dans l'échantillon. Le choix des sujets fut effectué à l'aide d'une liste de nombres aléatoires générés par ordinateur. Un questionnaire fut expédié par courrier entre le 13 et le 26 mai 1977.

4- L'erreur échantillonnale

L'erreur échantillonnale provient des variations probables mais d'ampleur contrôlable qui résultent du fait qu'un échantillon et non l'ensemble de la population fut étudié. Les résultats basés sur les réponses d'un sous-ensemble de la population peuvent donc être différents de ceux obtenus si la population entière participait à l'enquête. L'erreur possible variera, selon le niveau de confiance recherché, le nombre de sujets répondant à la question (n), le nombre de sujets dans la population (N), et la variance des réponses dans la population. La formule suivante donne l'écart ou l'intervalle autour d'un pourcentage obtenu dans un échantillon où se situeraient les résultats d'enquêtes similaires auprès de la même population dans 19 cas sur 20 (niveau de confiance de 95%).

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5 - L'erreur de non-réponse

Un taux de réponse de 100% est rarement atteint dans une enquête. Il y a donc une possibilité additionnelle d'erreur si les sujets qui ne répondent pas à l'enquête ont des opinions dont la distribution est différente de celle des opinions des sujets qui participent à l'enquête.

Pour déceler le biais de non-réponse, il est d'usage de faire un second envoi aux personnes qui n'ont pas répondu au premier ou de faire des entrevues téléphoniques avec un sous-échantillon de ces personnes. La comparaison des résultats obtenus de ce sous-échantillon avec ceuxobtenus à la suite du premier envoi permet de cerner les biais possibles de non-réponse. Les contraintes de temps n'ont pas permis à l'O.I.Q. de faire deux envois. Le taux de réponse dans l'ensemble (67%) est cependant élevé et se compare favorablement aux taux obtenus lors de sondages par entrevues personnelles. Par contre, le taux de réponse diffère entre francophones et anglophones. Bien qu'ils ne représentent que 37.3% des membres de l'Ordre domiciliés au Québec et 37.6% des sujets dans l'échantillon, les anglophones représentent 42% des répondants. Cette situation doit être corrigée par une pondération appropriée des résultats bruts de sorte que les conclusions tirées de l'ensemble de l'échantillon ne soient pas spoliées par ce phénomène."

L'erreur maximale (mais peu plausible) associée au biais de non-réponse dans le cas du questionnaire de l'Ordre, serait de 17%. Considérons le cas suivant, qui porte sur l'erreur maximale, pour une réponse dichotomique.

Dans cet exemple, nous avons fait l'hypothèse que tous les non-répondants auraient répondu "oui". Ceci fait passer la réponse "oui" de 50% à 67%. Cette hypothèse est peu plausible. Si les non-répondants avaient divisé leurs réponses dans une proportion de 60%—40%, au lieu de 50%—50% comme les répondants (et de 100%— 0% dans l'exemple), l'erreur aurait été de 3.5%. Selon les hypothèses les plus probables, l'erreur associée à la non-réponse sera inférieure dans tous les cas à 5%. Dans les cas de réponses se situant aux extrémités (80% ou plus), le taux d'erreur pourrait être légèrement plus élevé. Par contre, la probabilité que les non-répondants soient très différents des répondants sur ces questions où un large consensus se dégage chez les répondants est faible. C'est pourquoi nous ne croyons pas que le biais de non-réponse pour ce type de question puisse entraîner une erreur supérieure à 5%.

6— Erreur de codification

Le questionnaire comprenait 52 questions. Une seule était ouverte. La codification de cette question fut faite sur une grille établie à partir d'un échantillon de 20 questionnaires complétés en français et de 20 questionnaires complétés en anglais. Certaines questions donnaient lieu à des réponses multiples. Dans ce cas, deux ou trois réponses furent codées. La présentation du questionnaire était claire et il n'y a pas lieu de croire que des erreurs significatives puissent être associées à la codification ou au rapport des réponses.

7— Les biais provenant de la formulation et de la séquence des questions

La formulation des questions et l'ordre de présentation des questions sont généralement les principales sources d'erreur d'un questionnaire, quoiqu'on n'en fasse pas souvent état. *On peut fabriquer des exemples où le taux d'erreur est plus élevé si l'on suppose que les non-répondants auraient répondu (et auraient pu répondre) de façon parfaitement contraire aux répondants. Ce sont là cependant des situations sans intérêt méthodologique.

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Dans l'ensemble, le questionnaire de l'O.I.Q. est bon. La majorité des questions sont claires et sans équivoque. Nous soulignerons ici certaines faiblesses. La question 24 portant sur la lecture du texte du projet de loi no 1 aurait dû être au début. Une telle question située au début aurait augmenté le taux de non-réponse sur certaines questions, mais elle aurait contribué à diminuer les réponses au hasard. Il est fort probable qu'un nombre important de répondants connaissaient peu le projet de loi. A cet égard, les réponses à certaines questions (notamment les questions 3, 16 et 17) doivent être traitées avec prudence. De plus les réponses à la question 24 peuvent être biaisées par les réponses antérieures.

Le questionnaire n'offrait pas le choix de répondre "Ne sais pas". Ceci contribue à forcer les "hésitants" et les "ignorants" à donner une réponse et tend à fausser les résultats. Cet effet est moins marqué pour les questions les plus claires et généralement les plus controversées.

Certaines questions invitaient des réponses multiples alors que le questionnaire demandait une seule réponse. C'est le cas des questions 3, 5, 17, 20 et 21. Les réponses à ces questions devront être traitées avec prudence.

La question 26 sur le lieu de domicile peut être ambiguë pour certains répondants qui demeurent à la périphérie de Montréal (Valleyfield, Mirabel, Ste-Thérèse, Sorel, Verchères, etc.)

Certaines échelles auraient pu être utilisées aux questions 12, 13, 14, 15 et 16. La formulation des questions ne semble pas introduire des biais de désirabilité sociale ou d'acquiescement. Le fait que les répondants soient hautement scolarisés diminue aussi la probabilité de ces biais.

Certaines des réponses possibles à la question 20 sont ambiguës et leur interprétation peut varier selon les opinions des répondants.

Finalement, on notera que les réponses possibles aux questions 20 et 21 ne constituent pas une liste exhaustive. La catégorie "autre" ne peut corriger le biais entraîné par la suggestion des autres réponses. Nous croyons qu'il vaut mieux interpréter ces deux questions comme deux séries de questions dichotomiques exprimant un accord ou un désaccord avec des énoncés.

Par ailleurs, nous sommes d'avis que les questions 1, 2, 4, 6, 7, 9, 11, 19, 22, 25, 27 et 28 ne font pas problème et sont formulées correctement.

8 — Erreurs provenant de la traduction du questionnaire

II est très difficile d'obtenir une équivalence parfaite entre deux versions d'un même questionnaire. La traduction d'un instrument exige donc un soin particulier afin de bien saisir toutes les nuances et subtilités des erreurs possibles dans le passage d'une langue à l'autre. Le libellé en général simple et concret des questions dans le présent sondage facilite grandement la tâche. Cependant, quelques questions nous semblent souffrir d'imperfection à ce niveau.

Q. 8 Si une telle Loi entrait en vigueur ... if such a law were enforced Q.10 ...votre firme pourrait fonctionner ...could conduct its affairs

Q.18 (d) (f) (g) Le sens de la version anglaise est fort différent de la version française. Q.21 une amélioration des communications entre les Québécois improved communications amongst citizens in Quebec. Q.23 actuellement dans votre travail would you say that in terms of work

Conclusions

Dans l'ensemble, l'enquête rencontre les critères usuels de qualité pour des sondages.

Le taux de réponse (65%) est très élevé. Ceci diminue non seulement l'erreur échantillonnale qui est de moins de 2.6%, mais aussi l'incidence de l'erreur de non-réponse, que nous situons à moins de 5%. Ceci donne donc une marge d'erreur maximale de l'ordre de 7.50%.

Les données brutes furent pondérées pour assurer une représentation proportionnelle aux anglophones et francophones. Le fait que les résultats soient pondérés ou non en fonction de la langue ne change pas cette marge d'erreur.

Les réponses à certaines questions doivent être traitées avec prudence. Ceci ne veut pas dire qu'elles n'ont pas de valeur. Toutefois, la formulation ambiguë de ces questions a pu être interprétée de façon différente par certains répondants et en conséquence, la marge d'erreur associée à ces questions serait plus grande. Cependant, pour les questions cruciales la formulation nous semble adéquate.

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Analyse des résultats du sondage effectué par

L'Ordre des Ingénieurs du Québec

au sujet du Projet de loi no 1 La charte de la langue française I — Composition de l'échantillon

En date du 31 mars 1977, l'Ordre comptait 19,747 membres actifs répartis à travers le monde dont 18,184 domiciliés au Québec. L'enquête fut menée auprès de membres actifs domiciliés au Québec. Pour ce faire, un échantillon de 2,000 membres fut constitué selon une procédure aléatoire et un questionnaire fut envoyé à ceux qui avaient été sélectionnés. Un total de 1,307 questionnaires dûment complétés furent retournés à l'Ordre.

Parmi les 18,184 membres actifs domiciliés au Québec, 62.7% sont francophones et 37.3% sont anglophones. L'échantillon reflétait adéquatement ces mêmes proportions. Cependant, étant donné que le taux de réponse varie selon le groupe linguistique, il fut nécessaire de pondérer les résultats obtenus de façon à ne pas sous-représenter (sur-représenter) l'opinion des francophones (anglophones). Pour ce faire nous avons assigné un poids de 1.0769 à chaque réponse d'un ingénieur francophone et un poids de 0.8955 à chaque réponse d'un ingénieur anglophone. Suite à cette pondération, les pourcentages dans les tableaux qui suivent reflètent bien la composition par groupe linguistique des membres actifs domiciliés au Québec.

Afin de bien cerner le point de vue des ingénieurs, nous avons retenu comme variable d'analyse le groupe linguistique, la région de résidence, l'âge, le regroupement des ingénieurs selon qu'ils ont répondu oui ou non à la question 2 (Dans sa forme actuelle, pensez-vous que le projet constitue un pas en avant pour le Québec?), le regroupement des ingénieurs selon qu'ils prévoient rester ou quitter le Québec (Q.22) et le regroupement des ingénieurs selon leur réponse à la question 24 (Avez-vous déjà lu, intégralement, le texte du Projet de loi no 1?) Pour chacune des variables d'analyse retenues les réponses ont été pondérées afin de bien représenter la juste proportion d'anglophones et de francophones. La représentativité de l'échantillon, la marge d'erreur et l'impact de ces procédures de pondération sont discutés dans le rapport portant sur l'évaluation méthodologique des résultats du sondage.

Le tableau I montre la composition de l'échantillon par région, par secteur de travail et par âge.

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On doit noter que 86.4% des ingénieurs oeuvrant dans la fonction publique sont francophones de même que 69% des ingénieurs oeuvrant dans le secteur "enseignement ou autre". De plus, l'importance de chaque groupe linguistique selon l'âge présente un certain intérêt.

Il - Utilisation du français dans le milieu du travail

Pour 57% des membres de l'Ordre, le français est la principale langue utilisée dans le milieu de travail alors que 62% des membres de l'Ordre parlent en français la majorité de leur temps au travail. Cependant, tel qu'illustré au tableau III, l'utilisation du français au travail varie selon que le membre de l'Ordre est du groupe francophone ou anglophone.

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V - Opinion générale quant à l'impact du projet de loi no 1

Dans l'ensemble de l'échantillon (ainsi pondéré), 61.4% des répondants ne considèrent pas que le projet de loi no 1 constitue un pas en avant. Cependant, l'écart d'opinion à ce sujet entre francophones et anglophones est considérable. Alors que 60% des francophones considèrent le projet de loi comme un pas en avant, seulement 4% des anglophones abondent dans le même sens. Cette constatation vaut pour la plupart des résultats obtenus avec ce sondage. Les francophones diffèrent profondément d'avis avec les anglophones de sorte que les résultats pour l'ensemble de l'échantillon doivent être utilisés avec réserve. De même, parce que les anglophones se retrouvent surtout à Montréal, parmi les ingénieurs plus âgés et parmi ceux oeuvrant dans l'industrie, toutes les ventilations sur cette base donnent des résultats qui reflètent la concentration des anglophones dans certaines catégories particulières.

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VI — Les modalités d'application

Les réponses à certaines questions portant sur les modalités d'application de la loi reflètent beaucoup plus des attitudes générales vis-à-vis de la loi qu'une opinion précise sur des modalités particulières. C'est le cas des réponses aux questions 3 et 16.

Ainsi, 53% des ingénieurs francophones considèrent les modalités d'application "équitables" ou "généreuses" alors que ce n'est le cas que pour 5% des ingénieurs anglophones. De même en ce qui a trait aux mécanismes institutionnels prévus aux fins de l'application de la loi, 51% des ingénieurs francophones et 7% des ingénieurs anglophones considèrent ces mécanismes "nécessaires et adéquats" alors que 43% des ingénieurs francophones et 90% des ingénieurs anglophones les trouvent "exagérés".

L'évaluation des modalités d'application du projet de loi no 1 par ceux qui considèrent cette législation comme un pas en avant et ceux qui sont d'avis contraire ne fait surgir aucune surprise, sauf peut-être, que 11% de ceux qui considèrent le projet de loi no 1 comme un pas en avant trouvent les modalités d'application "répressives" et 18% d'entre eux, que les mécanismes institutionnels prévus sont "exagérés". Par ailleurs, ceux qui croient que le projet de loi no 1 ne constitue pas un pas en avant jugent les modalités d'application et les mécanismes institutionnels de la même façon que les anglophones (86% modalités d'application "répressives" et 88% mécanismes institutionnels "exagérés").

Les résultats détaillés apparaissent au tableau XVI.

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Le tableau XXII fait ressortir les résultats suivants: a) les ingénieurs anglophones pris comme groupe sont ceux qui expriment le plus d'inquiétudes face au Projet de loi no 1, b) comme groupe, ceux qui sont d'avis que le Projet de loi no 1 constitue un pas en avant sont les moins inquiets, c) comme groupe, les ingénieurs de la région de Montréal sont plus inquiets que leurs confrères des autres régions du Québec, d) le niveau d'inquiétude croît avec l'âge et e) comme groupe, ceux qui ont lu intégralement le Projet de loi no 1 sont plus inquiets que ceux qui ne l'ont pas lu intégralement.

VIII - Les conséquences probables du projet de loi no 1 a) Les conséquences générales

II ressort assez clairement du tableau XXIII que les ingénieurs francophones voient différemment de leurs confrères anglophones les conséquences probables du projet de loi no 1. Par exemple, chez les ingénieurs francophones, 42% croient que le projet de loi no 1 entraînera une amélioration des perspectives d'emploi pour les francophones alors que seulement 22% des ingénieurs anglophones sont du même avis. De même 35% des ingénieurs francophones et 80% des ingénieurs anglophones sont d'avis que le projet de loi no 1 entraînera une baisse du niveau de vie au Québec.

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Afin de faciliter les comparaisons entre groupes d'ingénieurs, nous avons construit le tableau XXIV où les pourcentages indiquent la proportion des ingénieurs du groupe qui ont mentionné la conséquence probable. Ici encore, à cause de la faiblesse méthodologique de cette partie de l'enquête, on doit utiliser les résultats avec prudence. Cependant, comme critère de comparaison entre groupes, la méthode est valable.

TABLEAU XXIV

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b) Conséquences sur l'économie

A cause de certaines faiblesses méthodologiques, les réponses à la question 5 doivent être reçues avec prudence. Néanmoins, à court terme, il se dégage un consensus à l'effet que l'impact sera négatif. A long terme, deux francophones sur cinq croient que l'impact sera positif alors qu'un sur trois croit qu'il sera négatif. Chez les anglophones, la très grande majorité est d'avis que l'impact sera négatif.

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La différence d'attitude entre anglophones et francophones ne peut être plus marquée que dans les réponses à la question 8. (Tableau XXVI) Trois ingénieurs francophones sur quatre croient qu'il n'y aura pas d'exode important de firmes d'ingénieurs du Québec. La proportion est l'inverse chez les anglophones. Les différences d'attitudes selon le lieu de résidence ou l'âge des ingénieurs présentent également un certain intérêt.

La loi aura, selon les répondants, des répercussions sur leurs perspectives d'emploi. Ce sentiment est plus marqué chez les anglophones (93%) que chez les francophones (61%), chez ceux de la région de Montréal (77%) que des autres régions du Québec et chez les ingénieurs plus âgés (72% et 83%) que chez ceux âgés de moins de 30 ans (65%). (Tableau XXVII) Dans l'ensemble, selon les ingénieurs qui ont répondu à cette question, l'impact sera négatif bien qu'un nombre élevé de francophones croient que l'application de la loi favorisera l'accès d'ingénieurs francophones à des postes supérieurs. De plus, notons que ceux qui avaient répondu "non" à la question 7 n'ont pas répondu à la question 7a. Rappelons ici que la question 7a était une question ouverte et que les ingénieurs étaient libres d'indiquer les répercussions qu'ils prévoyaient sur les perspectives d'emploi en génie suite à l'adoption de la loi 1.

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La majorité des membres de l'Ordre domiciliés au Québec (53%) croient que si le projet de loi no 1 est adopté, plus de francophones auront accès à des postes supérieurs. Cela demeure vrai quelle que soit la région des ingénieurs. Par contre, les opinions à cet égard sont différentes selon le groupe linguistique ou le groupe d'âge auquel appartient l'ingénieur: 65% des ingénieurs francophones croient que plus de francophones auront accès à des postes supérieurs alors que 65% des ingénieurs anglophones croient le contraire et 64% des ingénieurs de moins de 30 ans croient que plus de francophones auront accès à des postes supérieurs alors que 59% de ceux âgés de 46 ans et plus croient le contraire.

Par ailleurs, tel que l'indiquent les réponses à la question 23 (tableau XXVIII) 78% des membres ne se sentent pas personnellement menacés par le projet de loi no 1. (45% des ingénieurs anglophones se sentent personnellement menacés). Il convient de noter cependant, que les ingénieurs de la région de Montréal et ceux âgés de plus de 45 ans se sentent plus menacés personnellement que ceux des autres régions du Québec ou des groupes moins âgés.

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II ressort de notre analyse que ceux qui prévolent quitter le Québec sont en général des anglophones très opposés à cette législation et sont convaincus que les conséquences seront négatives tant pour la pratique du génie que pour l'économie du Québec. Par exemple, aucun de ceux qui prévoient quitter le Québec croit que le Projet de loi no 1 constitue un pas en avant pour le Québec et 90% de ceux qui prévoient quitter le Québec trouvent les modalités d'application "répressives" (46% de ceux qui prévoient rester sont du même avis) et 93% sont d'avis que les mécanismes institutionnels prévus sont "exagérés"). Il convient également de noter que ceux qui prévoient demeurer au Québec ont indiqué deux sujets d'inquiétude en moyenne à la question 20 alors que ceux qui prévoient quitter le Québec en ont indiqué 3.7.

Ceux qui prévoient quitter sont plus sceptiques vis-à-vis de la possibilité que le gouvernement modifie son Projet de loi en fonction des commentaires reçus. En effet, 71% de ceux qui prévoient quitter ne croient pas que le gouvernement modifiera son Projet alors que 58% de ceux qui prévoient rester sont d'avis contraire.

La différence d'attitude qui prévaut entre ceux qui prévoient rester et ceux qui prévoient quitter le Québec ne pourrait être exprimée plus clairement que par les réponses aux questions 5 et 21.

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ANNEXE 2

Mémoire soumis par

Le Congrès Juif Canadien Région du Québec

A

La Commission de l'Education

des Affaires culturelles et des

Communications

sur

Le Projet de loi no 1 Charte de la langue française au Québec

2 juin 1977

Préface

Le Congrès Juif Canadien, Région du Québec, est le porte-parole reconnu de la communauté juive de la Province du Québec, laquelle comprend quelque 115 000 âmes. Le Congrès Juif Canadien est un corps élu démocratiquement qui représente virtuellement tous les courants d'idées au sein du Judaïsme au Québec. La B'nai B'rith est la plus importante des organisations de services Juifs. Ces deux organismes vous soumettent conjointement et respectueusement ce qui suit:

La communauté juive, bien qu'unie, n'est pas monolithique. En raison de l'importance du Projet de loi No 1, nous avons sollicité par le biais d'une série de réunions publiques ouvertes à tous les membres de la communauté juive, la plus grande expression possible de points de vue à l'égard dudit Projet. Un comité spécial a été établi par le Comité Conjoint des Relations Communautaires du Congrès Juif Canadien et de B'nai B'rith afin d'étudier le Projet de loi. Ce comité commença à se réunir alors que le Livre Blanc fut publié, et étudia sérieusement les répercussions du Projet de loi, eu égard à son impact sur la vie au Québec et à ses conséquences pour la communauté juive et toutes les minorités au sein de la Province.

La poussée du Projet de loi No 1 est d'une importante cruciale à l'endroit des citoyens du Québec. La communauté juive croit que toute forme d'encouragement doit être donnée à l'épanouissement de la culture et de la langue française, car cela reflète les aspirations légitimes de la majorité de nos concitoyens dans la Province. Dans notre présentation à la Commission de l'Education, des Affaires Culturelles et des Communications de l'Assemblée Nationale sur la loi de la langue officielle (Loi 22), nous avons déclaré que: "La communauté juive est unanime dans sa conviction que le langage prééminent du travail et des communications en cette Province, doit être le français. Nous sommes toujours attentifs et éprouvons une profonde sympathie envers les aspirations linguistiques et culturelles des Québécois de langue française.

La communauté juive du Québec a, durant les dernières années, en commun avec d'autres communautés dont la langue de base est l'anglais, vécu une transformation considérable dans l'usage et la priorité de l'anglais et du français, grâce à l'adoption plus large du français en tant que langue d'expression et de travail.

Il est à relever que les toutes dernières statistiques publiées indiquent que le groupe le plus bilingue non-francophone dans la Province du Québec, est la communauté juive."

Conformément à cette politique, dans notre présentation à la Commission Gendron faite à une date antérieure, la politique substantielle de la communauté juive entre autres: "a) Exprima sa compréhension des aspirations du peuple francophone de la Province du Québec tendant à maintenir son intégrité linguistique et culturelle, et en conséquence suggéra que les mesures en vue d'aboutir à cet objectif, soient fondées sur des motifs constructifs, et l'auto-motivation dirigée. b)Proposa que rien ne devrait déroger ou diminuer en aucune manière aucun droit ou privilège acquis ou exercé en ce qui concerne la langue — et en particulier le français et l'anglais — par n'importe quel habitant de la Province du Québec. c) Insista sur le fait que toute division des résidents du Québec entre groupes "majoritaire" et "minoritaire" soit éliminée et que tous les Québécois soient considérés comme possédant un statut égalitaire.

d) Proposa qu'il n'y ait point de distinction entre des résidents nés au Québec, ceux qui s'y sont établis ou y vinrent avant ou après une certaine date. e) Recommanda que toutes les écoles établissent un système éducatif qui fournisse à leurs étudiants une connaissance de travail des langues française et anglaise en tant que moyens de communication. f) Insista en vue de l'adoption d'un Code des Droits de l'Homme incorporé dans la Constitution, qui inclurait des garanties pour la liberté de choix des langues française et anglaise en faveur de tous les Québécois."

Ainsi, la communauté juive reconnaît que l'avancement pour la langue et la culture françaises est un développement positif dans cette Province.

Ainsi qu'on pourra le remarquer dans le mémoire qui suit, notre souci majeur réside dans le fait qu'il ne devrait pas y avoir de violation des droits de l'homme pour n'importe quelle personne, et que l'équité, en termes de loi, habitude et usage, soit maintenue pour tous les individus, sans distinction. Nous partageons un souci profond avec de nombreux segments de l'opinion publique dans la Province à l'effet que la Charte des droits et libertés de la personne ne devrait pas être supplantée de quelque façon que ce soit par le Projet de loi No 1, et que l'attitude adoptée par le Parti Québécois pendant qu'il était dans l'Opposition, à savoir que toute nouvelle législation ne l'emportera pas sur la Charte des droits et libertés de la personne, soit honorée. Nous croyons que l'épanouissement du français, comme dans l'étude établie dans le Livre Blanc et dans la législation proposée, ne doit pas diminuer les droits et libertés fondamentaux de l'homme de tous les citoyens du Québec.

Quelqu'aient été les injustices du passé dont la communauté juive fut aussi la victime, comme cela est arrivé si souvent dans notre histoire, celles-ci ne peuvent être corrigées par des mesures discriminatoires ou coercitives. Les problèmes culturels et linguistiques du Québec doivent plutôt être résolus par la coopération et la compréhension la plus étroite de la part de tous les citoyens, sans distinction d'origine. Introduction

La communauté juive appuie une politique linguistique qui rend le français langue primordiale et langue d'usage au Québec. Notre communauté a commencé à prendre les mesures nécessaires il y a de cela un certain nombre d'années pour permettre aux institutions communautaires dont la langue d'expression était presqu'exclusivement l'anglais, de s'exprimer aussi efficacement en langue française.

La communauté juive au Québec est composée de personnes parlant français, anglais et bilingues. Toutefois, les deux derniers groupes constituent la majeure partie de la communauté. Il est à noter que bien des personnes bilingues trouveraient difficile, si non impossible, de communiquer en langue française avec les institutions communautaires ou gouvernementales sur des problèmes compliqués. Il existe des degrés de bilinguisme, de telle sorte que bien des personnes bilingues, peuvent facilement s'exprimer jusqu'à un certain point dans leur langue seconde. Quoiqu'il en soit, la majorité des personnes dans notre communauté ont toujours bénéficié et s'attendent à recevoir des services communautaires offerts en langue anglaise. Telle est la réalité linguistique de notre communauté.

Nous appuyons le Projet de loi No 1, en autant qu'il a pour objet de faire du français la langue principale, primordiale et d'usage au Québec. Nos objections vis-à-vis du Projet de loi No 1 sont fondées sur ce qui nous semble être un traitement injuste des minorités ou des individus ou une violation de leurs droits et de leurs libertés. Nous sommes d'accord avec la déclaration faite par l'actuel Vice Premier Ministre et Ministre de l'Education à l'Assemblée Nationale le 21 juin 1976, lorsqu'il dit: "On juge une démocratie par le traitement qu'elle offre à ses minorités". Ceci devrait s'avérer vrai également en ce qui concerne le traitement des individus.

Nous comptons que l'Assemblée Nationale et le Gouvernement continueront d'appuyer les principes et dispositions de la législation en vigueur applicable au Québec, offrant la protection des droits et libertés pour les minorités et les individus. Il est donc impératif que l'article 172 du Projet de loi No 1 soit supprimé de façon à ce que, dans les termes de l'article 52 de la Charte des droits et libertés de la personne, "Les articles 9 à 38 (de cette Charte) prévalent sur toute disposition" de la Charte sur la langue française au Québec.

En premier lieu, nous traiterons des droits fondamentaux, tant des individus que des minorités, et deuxièmement de la substance et de l'administration du Projet de loi No 1.

1. Droits fondamentaux

A. Les droits et libertés de la minorité de langue anglaise.

L'Acte Britannique de l'Amérique du Nord protège certains droits collectifs de la minorité. Par exemple, l'article 93 garantit certains droits à l'enseignement à la fois des Protestants et des Catholiques Romains tant en Ontario qu'au Québec, et l'article 133 garantit certains droits linguistiques au niveau fédéral et au Québec.

L'article 43 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec stipule que: "Les personnes appartenant à des minorités ethniques ont le droit de maintenir et de faire progresser leur

propre vie culturelle avec les autres membres de leur groupe." Le troisième paragraphe du préambule du Projet de loi No 1 mentionne que l'Assemblée Nationale entend "poursuivre cet objectif dans un climat de justice et d'ouverture à l'égard des minorités qui participent au développement du Québec". A notre point de vue, cette intention n'est pas appliquée de façon logique dans le Projet de loi No 1 ainsi que l'indiquent les exemples suivants:

Premièrement, il semblerait que le mot "Québécois" figurant dans le préambule aussi bien que dans les articles 2, 6 et 112(b) du Projet de loi No 1, se prête à des interprétations diverses. Il peut signifier: chaque Québécois, quelle que soit son ethnicité ou sa langue; Québécois de langue française; ou seulement Canadiens Français. L'emploi de ce terme tendrait à créer différentes classes de Québécois. Contrairement à ce que certains auteurs du Projet de loi No 1 ont déclaré, y compris le Premier Ministre et le Ministre d'Etat au Développement Culturel, le premier paragraphe du préambule exclut les personnes ne parlant pas français au sein du Québec de la définition "Québécois". Aussi, un touriste Belge ou un Ontarien de langue française aurait le droit de demander à ce que certaines personnes communiquent avec lui en français aux termes de l'article 2 du Projet de loi No 1 où il est stipulé que: "Tout Québécois" jouit d'un tel droit? Assurément, un tel touriste n'est pas inclus dans la définition du terme "Québécois". Nous croyons que toutes les personnes devraient avoir des droits linguistiques égaux au Québec. Nous prions donc le Gouvernement de remplacer le terme "Québécois" par les mots: "Toute personne".

Un second exemple de violation des droits de la minorité figure au chapitre 3 du Projet de loi No 1 qui traite de la langue et de la législature et les tribunaux. L'article 133 de l'Acte Britannique de l'Amérique du Nord stipule, tel qu'indiqué ci-dessus, une certaine protection de la langue pour la minorité parlant anglais au Québec. La question n'est pas de savoir ici si l'Assemblée Nationale peut éliminer ou diminuer bien des droits des minorités par exemple, ceux figurant à l'article 43 de la Charte des droits et libertés de la personne. L'élimination des droits linguistiques de la minorité, proposée au chapitre 3 du Projet de loi No 1, est inéquitable et injuste. Il faut garder présent à l'esprit le fait que ces droits linguistiques ont été le privilège de la communauté de langue anglaise du Québec depuis bien avant la Confédération. Enfin, nous ne pouvons accepter le fait que l'élimination de certains droits de la minorité de la langue anglaise dans les tribunaux et la législation, tendra à préserver ou à contribuer au développement de la langue et de la culture françaises.

Troisièmement, certaines collectivités locales de langue anglaise se sont exprimées dans cette langue au Québec depuis le 18ème siècle. Le but du chapitre 4 du Projet de loi No 1 vise à forcer ces collectivités locales — par exemple des commissions scolaires et des municipalités — à travailler dans la langue française. Ceci est inéquitable et injuste. Le fait de changer la langue de travail des institutions parlant essentiellement anglais ne contribuera sûrement pas à l'épanouissement de la langue française au Québec. En dernier lieu, il est à noter que des institutions similaires d'expression française se trouvant dans la province voisine du Nouveau Brunswick seront capables de s'administrer exclusivement en langue française.

Le traitement d'une minorité par une législature se rapporte évidemment à un traitement législatif. A notre point de vue, le traitement législatif proposé dans le Projet de loi No 1 en regard de la minorité de langue anglaise au Québec, affectera de façon défavorable les valeurs et les croyances démocratiques de notre société.

B. Droits et libertés de la personne

Les droits de l'homme ont été transgressés dans un certain nombre d'articles du Projet de loi No 1. Afin d'illustrer ces transgressions, nous donnons les exemples suivants:

L'article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne prévoit la protection d'un nombre de libertés fondamentales y compris la liberté de parole. L'article 10 en outre prévoit que: "Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la... langue". Il semblerait que l'article 46 du Projet de loi No 1 qui interdit l'emploi d'une langue autre que le français dans l'affichage, entre clairement en contradiction avec les droits et libertés ci-dessus. Nous croyons que protéger la liberté de parole revient également à protéger le libre cours de l'information commerciale. Une telle liberté d'expression est et devrait rester partie intégrante de la loi du Québec.

Une autre violation des droits et libertés de la personne figure au chapitre 8 qui traite de la langue d'enseignement. L'élimination des enfants parlant anglais, venant d'écoles anglaises de l'extérieur du Québec, n'est pas une classification rationnelle. Pourquoi classer différemment des enfants? Supposons par exemple que deux familles parlant anglais viennent d'Ontario au Québec, et que l'un des pères ait reçu un enseignement élémentaire au Québec. Pourquoi les enfants de ce dernier devraient être classés comme étant éligibles pour l'admission aux écoles anglaises alors que les enfants des autres parents ne seraient pas éligibles? La Charte des droits et libertés de la personne déclare dans le préambule que tous les êtres humains "ont droit à une égale protection de la loi". Selon nous, la classification législative au chapitre 8 du Projet de loi No 1 fournit une protection inégale, et, est injuste, inéquitable et arbitraire. Ce type de classification discriminatoire n'existe pas pour ce qui est de l'admission des enfants aux écoles existantes anglaise et française ailleurs au Canada.

Des violations possibles des droits de l'homme figurent également dans les articles du Projet de loi No 1 qui traitent de l'application de la loi. Deux bureaucraties puissantes sont établies — L'Office de la langue française et la Commission de surveillance et les enquêtes. Ces organismes, gérés tel que stipulé par une personne, et dotés de pouvoirs énormes, devraient être sujets à des contrôles spécifiques et efficaces incluant clairement des droits d'appel interjetés à propos de décisions administratives.

Enfin, la protection de la langue et de la culture française n'est point hostile aux droits et libertés de groupe, de minorité ou d'individu. Il est important cependant que le Projet de loi No 1 soit dans tous ses aspects, logique avec de tels droits et de telles libertés. Il est bon de rappeler que les paragraphes 2 et 3 du préambule de la Charte des droits et libertés de la personne déclarent que: "le respect de la dignité de l'être humain et la reconnaissance des droits et libertés dont il est titulaire constituent le fondement de la justice et de la paix; (et que) "les droits et libertés de la personne humaine sont inséparables des droits et libertés d'autrui et du bien-être général".

Dispositions spécifiques du Projet de loi no 1

A. Substance du Projet de loi no 1

PREAMBULE Changements suggérés

II est suggéré que le préambule en vigueur soit remplacé et se lise comme suit: "L'Assemblée Nationale constate que la langue française est, depuis toujours, la langue de la majorité du peuple résidant au Québec, et que c'est elle qui permet à la majorité des résidents du Québec d'exprimer leur identité;

Et l'Assemblée Nationale reconnaît la volonté de tous les résidents du Québec d'assurer la qualité et le rayonnement de la langue française; elle est donc résolue à faire du français la langue du Gouvernement et de la Loi aussi bien que la langue normale et habituelle du travail, de l'enseignement et des communications;

L'Assemblée Nationale entend poursuivre cet objectif afin de respecter les minorités comprenant la population du Québec, et de respecter particulièrement leur langue et leurs cultures respectives;

Et ces principes s'inscrivent dans le mouvement universel de revalorisation des cultures nationales qui confèrent à chaque peuple l'obligation normale d'apporter une contribution à la communauté internationale;..."

Raisonnement

Le préambule existant laissant supposer comme il le fait que la langue française a été la langue du "peuple québécois", suggère deux faits de base qui sont historiquement inexacts. Le premier fait erroné veut qu'aucune autre langue n'ait fait partie de la culture du Québec. Il n'est pas dans l'intention de la communauté juive d'entrer dans un débat en rapport avec ce que fut la contribution de Québécois parlant anglais dans un contexte historique et social, tout comme ce n'est pas l'intention de la communauté de débattre la forme des présomptions de base qui ont été présentées dans la première partie de cette soumission. Néanmoins, il est clair que l'anglais a été la langue d'un pourcentage substantiel de la population du Québec et plus encore, elle continue de représenter une langue parlée par un segment substantiel de la population dans des régions spécifiques notamment la zone de Montréal. Le préambule tel que rédigé, ne reconnaît pas ces faits, et dans le but d'atténuer les craintes et appréhensions de ces personnes dont la langue maternelle est l'anglais, le changement suggéré est soumis sans avoir à affecter clairement le français, restant la langue primordiale de la Province.

Le second fait susceptible de causer des conflits, laisse supposer que "Québécois" ne sont seulement que des personnes dont la langue maternelle est le français. Comme nous l'avons déclaré précédemment, l'emploi du terme Québécois est à la fois confus et déroutant. Le 13 mai 1977, le Premier Ministre René Lévesque fit la déclaration suivante au Congrès Juif Canadien: "Un Québécois est quelqu'un qui vit, travaille et paye ses taxes... au Québec". Nous croyons que le dessein du préambule, lequel est appuyé par la majorité de la communauté juive, répond mieux en remplaçant le terme "Québécois" par "toute personne".

En poursuivant, le libellé suggéré dans le second et troisième paragraphes du préambule, ne nuit pas à la politique fondamentale du gouvernement, et en outre reflète les idées et principes du Livre Blanc, sur le rôle à assumer des minorités au Québec.

ARTICLE 2 Changements suggérés "Toute personne a le droit d'exiger que communiquent en français ou en anglais avec elle l'Administration, les services de santé et les services sociaux, les entreprises d'utilité publique et les ordres professionnels. En outre, toute personne a le droit d'exiger des associations de salariés et des diverses entreprises exerçant au Québec, de communiquer avec elle en français."

Raisonnement

II appert que l'article tel qu'il existe n'empêcherait aucune des entités inscrites de communiquer avec un résident du Québec en anglais. Toutefois, il y a eu un certain degré d'appréhension dans les esprits des personnes parlant anglais à l'effet qu'elles ne seront pas capables de bénéficier de tous les différents services qui leur avaient été offerts jusqu'ici en anglais. En autant que nous croyons qu'il est du dessein du Gouvernement qu'une telle pratique du passé se perpétue, il ne semble pas déraisonnable de suggérer qu'une expression soit donnée à cela d'une façon législative concrète.

ARTICLE 3 Changements suggérés

Nous voudrions ajouter à cette phrase les mots: "et en anglais".

Raisonnement

A nouveau, alors que la conclusion est que l'emploi de l'anglais n'est pas interdit, il appert qu'il y a une implication voulant que ceux qui parlent l'anglais dans une assemblée délibérante ne puissent pas avoir le droit d'agir ainsi. Nous ne croyons pas que c'est là le véritable dessein du gouvernement et suggérons qu'une protection soit accordée aux Québécois de langue anglaise qui ont sans aucun doute à indiquer leur point de vue à cet égard.

ARTICLE 5 Commentaire

II n'est pas réaliste et il peut être dur et injuste de requérir d'une petite entreprise employant 5 personnes ou moins, de communiquer avec un client en français. A titre d'exemple, une petite entreprise familiale qui n'est pas d'expression française, requérerait un démembrement immédiat d'un employé de la famille pour se conformer à cette disposition. Une telle conformité forcée n'avancerait en aucun cas la tentative ou le dessein du Projet de loi no 1, d'une part, et ne permettrait pas d'autre part à la langue française de s'épanouir, mais cette situation pourrait avoir des effets désastreux essentiellement au niveau de l'entreprise familiale.

ARTICLE 6 Changement suggéré "Toute personne a droit à l'enseignement en français".

ARTICLES 7 à 13 INCLUS Changements suggérés

Sans se commettre, notre communauté dans la controverse apparente qui a été développée à savoir si oui ou non ce chapitre particulier est ou n'est pas constitutionnel, nous croyons qu'une consultation devrait être faite par le Gouvernement du Québec à la Cour d'Appel dans un effort afin de déterminer si oui ou non ces articles sont intra vires. Si le Gouvernement ne croit pas bon d'en référer de la question pour l'opinion juridique, alors nous suggérons que la loi actuelle soit maintenue.

Raisonnement

Le concept selon lequel des personnes morales doivent plaider devant les Tribunaux en français, semble être non seulement injuste et dur, mais également un déni du droit fondamental de toute personne devant les Tribunaux à pouvoir comprendre les procédures dans lesquelles elle est impliquée. Une personne morale ne peut agir seulement que par le biais d'une personne physique. De nombreuses procédures requièrent qu'elles soient appuyées par des dispositions sous serment, et cette loi proposée exigerait de la part des personnes de jurer sur des dépositions sous serment dans une langue qu'elles ne comprennent pas.

En outre, la grande majorité des sociétés sont en réalité des personnes réelles qui ne sont pas différentes des personnes physiques. Ces personnes se verraient interdire les mêmes droits devant les Tribunaux. Par exemple, une personne morale (dont le seul propriétaire est une personne unilingue parlant anglais) est poursuivie devant le Tribunal des petites créances, cette personne de langue anglaise devra plaider sa défense en français.

En conclusion, en raison du fait que de nombreuses procédures peuvent être suffisamment complexes et qui demanderaient l'avis de professionnels additionnels, tels que des comptables et des ingénieurs, ces dispositions du Projet de loi No 1 affectent ainsi de façon adverse les droits de bien des professionnels de langue anglaise.

ARTICLE 15 Changement suggéré "Les textes et documents de l'Administration doivent être rédigés dans la langue officielle et seront disponibles en anglais à ceux qui font une demande d'une version anglaise".

Raisonnement

Près d'un million de résidents du Québec ne doivent pas se trouver dans la position où ils pourraient soit mal interpréter la loi, soit n'être pas capables de bénéficier des politiques économique et sociale mises de l'avant par le Gouvernement actuel.

ARTICLE 16 Changements suggérés

II est suggéré que le mot "peuvent" mentionné en 1ère ligne, soit remplacé par le mot "seront" et que le mot "anglais" soit inséré après le mot "traduction" se trouvant à la 2ème ligne.

ARTICLE 17 Changements suggérés

Nous remplacerions la seconde phrase par la suivante: "Si la personne morale avec laquelle il correspond s'est adressée à lui en anglais, alors une traduction anglaise devra accompagner la réponse".

ARTICLE 18 Changements suggérés

Nous voudrions suggérer que la référence à "une autre langue" figurant à la 4ème ligne, soit supprimée et remplacée par le mot "anglais" lorsqu'il y a communication avec une partie canadienne à l'extérieur du Québec.

ARTICLES 21 A 24 INCLUS Changements suggérés

Nous voudrions suggérer que ces articles soient remplacés et que la loi en vigueur qui relève de ces domaines, continue d'avoir cours.

Raisonnement

Tenter de légiférer l'emploi du français dans les domaines considérés par ces articles, semble être une intrusion inutile dans la gestion des collectivités locales d'expression anglaise. Il est infaisable et injuste d'exiger que les conseils municipaux de langue anglaise soient forcés de délibérer et d'employer une langue autre que celle dans laquelle ils ont mené leurs délibérations depuis le 18ème siècle. De la même manière, il est exorbitant à l'endroit des droits de la minorité de légiférer à l'effet que des Commissions scolaires protestantes de langue anglaise devront utiliser seulement la langue française lorsqu'elles auront à faire circuler un quelconque message d'importance ou afficher des avis. En conclusion, les dispositions de l'article 23 mettront en danger l'emploi de plusieurs personnes de langue anglaise dans les collectivités locales d'expression anglaise.

ARTICLE 25 Changements suggérés "Les services de santé et les services sociaux doivent offrir leurs services au public dans la langue officielle aussi bien qu'en anglais, et peuvent offrir de tels services dans d'autres langues là où ils sont requis. Ils doivent utiliser la langue officielle pour s'adresser à l'administration;

Les entreprises d'utilité publique et les ordres professionnels doivent offrir leurs services au public dans la langue officielle ou bien lorsque requis, en anglais. Ils doivent également utiliser la langue officielle pour s'adresser à l'administration".

Raisonnement

Nous suggérons que les services de santé et les services sociaux devraient être traités séparément dans cet article. Etant donné que le fait de recevoir des services sociaux et des services de santé constitue un droit figurant au chapitre 48, une Loi respectant les services de santé et les services sociaux (articles 4 et 5), la pratique courante doit permettre de continuer ainsi là où des clients sont desservis dans leur propre langue. Notre réseau d'établissement de services sociaux et de services de santé connait une longue histoire de services donnés dans les langues des patients et des clients. Ceci est particulièrment important dans le cas de personnes âgées ou de personnes ayant des incapacités majeures, qui ne peuvent vraisemblablement pas apprendre d'autres langues. Nous croyons que le Gouvernement comprend bien ce phénomène et continuera de respecter la différence linguistique en autant qu'elle affecte les services de santé et les services sociaux.

ARTICLE 26 Changements suggérés

Nous suggérons que les ordres professionnels soient inclus dans la liste stipulée.

ARTICLE 27 Changements suggérés "Les ordres professionnels doivent communiquer en français avec leurs membres, mais ces communications peuvent être accompagnées d'une version anglaise.

ARTICLE 30 Changements suggérés

Nous suggérons qu'un paragraphe supplémentaire soit ajouté à l'article 30 se lisant comme suit: "L'article 30 ne s'applique pas à toute personne membre d'un ordre professionnel à la date où cette loi entrera en vigueur".

Raisonnement

Nous souhaitons rappeler au Gouvernement les déclarations faites par le Ministre d'Etat au Développement Culturel à l'effet que nulle personne ne perdrait son emploi comme conséquence du Projet de loi No 1. En outre, le Gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter une application discriminatoire et arbitraire de cette disposition.

ARTICLE 32 Changements suggérés

A cet article, nous voudrions ajouter ce qui suit, qui d'ailleurs est mentionné dans la Loi 22: "Un ordre professionnel peut émettre à un citoyen canadien, membre d'un ordre similaire d'une autre Province et qui ne possède pas la connaissance de la langue française du travail exigée en accord avec l'article 30 (Projet de loi No 1) un permis restrictif qui autorise son titulaire à pratiquer sa profession pour le compte exclusif d'un employeur dans une fonction qui ne l'amène pas a traiter directement avec le public."

ARTICLE 36 Changement suggéré

Nous suggérons que l'article 36 soit supprimé.

Raisonnement

Nous pensons que la Charte des droits et libertés de la personne interdit déjà le congédiement d'un employé en se basant sur le critère seul de la langue, étant entendu que les capacités linguistiques ne seront pas nécessaires pour accomplir les tâches requises pour un tel emploi. Nous devons également faire objection à la différenciation entre deux classes de citoyens, ceux qui parlent français et ceux qui parlent anglais. Allons-nous prétendre que l'article 36 permet aux personnes de langue anglaise d'être congédiées ou rétrogradées simplement parce qu'elles ne peuvent pas parler français, lorsqu'on sait que la connaissance du français n'est pas requise pour l'accomplissement de leurs fonctions? Cela est absolument inacceptable de la part de la communauté juive et constitue une violation absolue des dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne.

ARTICLE 37 Changements suggérés

II est difficile d'émettre une quelconque opinion en regard de cet article avant que les règlements ne soient émis. Toutefois, la communauté juive a constaté avec effroi les déclarations récentes de la politique du Gouvernement, lesquelles apparemment indiquaient que certaines personnes de langue anglaise, qui n'avaient pas une prétendue compétence en français, ne seraient pas capables de servir dans certains travaux de construction routière. Nous réitérons notre croyance dans le fait que nulle personne ne devrait perdre son emploi comme conséquence de l'adoption du Projet de loi No 1.

ARTICLE 41 Changement suggéré

Nous recommandons que le paragraphe 3 soit remplacé par: "D'autres langues peuvent être employées à la condition que le français soit diffusé de façon plus importante ou à tout le moins, d'une façon aussi importante que toute autre langue."

ARTICLE 42 Changement suggéré

Nous recommandons d'insérer la phrase suivante après les mots: "du plus large public": "des produits alimentaires importés employés aux fins de l'observance des pratiques religieuses. L'observance des lois du Kashruth est une nécessité constante pour les membres de la communauté juive. Nous avons déjà soumis un mémorandum détaillé au Ministre d'Etat au Développement Culturel à ce sujet. Nous souhaitons réitérer le fait qu'une tribulation illégitime retomberait sur des Juifs pieux par le simple fait d'entraver la vente de ces produits.

ARTICLE 46 Changements suggérés

Nous voudrions suggérer qu'une exception soit faite dans cette disposition de façon à permettre aux catalogues et à tout matériel similaire de publicité d'être adressés à un individu en anglais ou en tout autre langue et ceci peut être adéquat au type de catalogue ou de matériel de publicité à expédier.

Nous voudrions encore suggérer la phrase suivante: "(d) Des messages commerciaux placés à l'intérieur de n'importe quel commerce de détail ou à l'extérieur dans l'entourage immédiat d'un tel commerce, doivent être rédigés en français, ou en français et dans une autre langue, en autant que le français domine ou à tout le moins figure d'une façon aussi évidente qu'en tout autre langue."

Raisonnement

II semble que ce soit une méthode peu appropriée que celle de pénaliser le petit commerçant qui a récemment fait une dépense assez importante pour avoir de nouvelles affiches publicitaires placées sur ses lieux, à cause de la Loi 22, pour demander à l'heure actuelle qu'il obtienne une publicité additionnelle, en dépit des dispositions du Projet de loi No 1 qui semblent accorder un délai de quatre ans. En outre, il semblerait exagéré de requérir que la publicité conçue tout en français, soit faite afin de s'appliquer à ces régions où d'autres langues quotidiennes sont utilisées. Afin de conserver "le fait français" ou en fait une apparence française oonvenable, nous soumettons qu'il est suffisant de requérir l'emploi du français plus celui de n'importe quelle autre langue applicable. Tel est le cas par exemple en France de la Loi No 75-1349 du 31 décembre 1975, relative à l'emploi de la langue française.

ARTICLES 48 & 49 Changements suggérés

Les dispositions existantes de la loi en rapport avec les raisons sociales des compagnies semblent suffisantes et convenablement appropriées à l'heure actuelle dans le développement social et économique du Québec et les dispositions contenues dans le Projet de loi No 1 semblent excessives. Par conséquent, nous soumettons le fait que les articles 48 et 49 soient supprimés et que la loi actuelle s'appliquant aux raisons sociales des compagnies, continue d'être en cours pour les quatre prochaines années.

Dans l'alternative, nous ferions la suggestion suivante: Le changement coercitif de raison sociale ne prend pas en considération la perte substantielle de clientèle que de nombreuses compagnies pourront encourir. Ce qui à l'heure actuelle est présenté dans le Projet de loi No 1 équivaut à une expropriation sans compensation. Tout comme il est évident, une compagnie qui a utilisé sa raison sociale en association et en rapport avec une certaine entreprise, a habituellement au cours des années, développé sa clientèle en conjonction avec les services et/ou des marchandises qu'elle offre au public. D'imposer soudainement un impératif qui peut, dans certains cas, littéralement détruire le travail sans prix de nombreuses années, ne semble pas être une façon appropriée de remédier à la question. Le Gouvernement devrait aussi considérer le statut des entreprises canadiennes et étrangères qui ont des raisons sociales anglaises ou dans une autre langue.

ARTICLE 52 Changement suggéré "Les enfants suivants, à la demande de leur père ou de leur mère, peuvent recevoir l'enseignement en anglais: a) Un enfant dont le père ou la mère a reçu son enseignement primaire en anglais; b) Un enfant dont le père ou la mère est résident au Québec à la date de la mise en vigueur de cette Loi.

Lorsqu'un enfant est confié à la garde de l'un de ses parents, la demande prévue dans cet article doit être faite par ce parent.

Nonobstant ce qui précède, rien dans cet article n'affectera les droits des descendants de toutes personnes qui choisissent d'aller à l'école de langue française même si elles avaient l'autorisation d'aller à l'école de langue anglaise selon les dispositions précédentes".

ARTICLE 54 Changement suggéré

Une disposition devrait être faite dans cet article à l'effet que, un parent doit en tout temps être présent si l'éligibilité d'un enfant pour son enseignement en anglais est à définir et si l'enfant est présent lors d'une telle décision. En outre, nous voudrions suggérer que la date du 31 décembre 1977, soit changée par celle du 1er septembre 1978.

ARTICLE 55 Changement suggéré "Le gouvernement doit par règlement: (a) prescrire la procédure à suivre lorsque des parents invoquent l'article 52 et les éléments de preuve qu'ils doivent produire à l'appui de leur demande, étant entendu qu'en tout temps une preuve secondaire sera acceptable; (b) prescrire un appel des décisions des organismes scolaires et des personnes désignées par le Ministre, traitant de l'application des articles 52 et 54. La décision du comité d'appel pourra interjeter appel auprès d'un tribunal composé de trois juges de la Cour Provinciale du district dans lequel l'organisme scolaire est situé".

ARTICLE 57 Commentaire

Nous recommandons fermement que le programme du Ministère de l'Education en rapport avec les écoles de langue anglaise, soit accru immédiatement de telle manière que tout enfant qui se voit décerné et reçoit un certificat de fin d'études secondaires soit capable de fréquenter avec autant de facilité, soit un CEGEP ou une université de langue anglaise, ou bien un CEGEP ou une université de langue française. Il est clair qu'afin d'atteindre son but, les normes de l'enseignement de la langue française devront être graduellement développées. Le programme idéal devrait être tel, qu'il devrait permettre à un étudiant recevant un certificat de fin d'études secondaires d'être assez versé en langue française afin de pouvoir être qualifié pour n'importe quelle profession qu'il désire entreprendre et poursuivre au Québec.

ARTICLE 58 Changements suggérés

Nous recommandons d'ajouter ce qui suit à l'article 58: "... pour un temps limité et cela ne s'appliquera pas aux personnes qui requièrent une éducation religieuse pour leurs enfants dans une école religieuse régie par la Loi sur l'Enseignement Privé."

ARTICLE 61 Changements suggérés

Nous suggérons que cet article soit supprimé et que la loi en vigueur soit maintenue. Rien d'utile ne pourrait être desservi en permettant la publication de n'importe quel avis requis qui puisse affecter les droits d'individus de langue anglaise, en le publiant exclusivement en langue française. Ce droit a été accordé aux deux groupes de langue majeure pendant des décennies, et d'y déroger en ce moment, on ajoute inutilement aux anxiétés et aux appréhensions de la minorité de langue anglaise.

B. Application de la Loi

ARTICLES 67 à 74 inclus

II nous semblerait que l'Office de la langue française serait mieux desservi si le Président était assisté par au moins deux autres personnes nommées par le Gouvernement. Les nominations additionnelles seraient représentatives des groupes minoritaires, la position du Gouvernement en regard des minorités serait alors satisfaite. A différents moments depuis l'élection du Gouvernement, bien des choses ont été dites à propos des droits des minorités qui seraient entendues sur les questions qui peuvent vraisemblablement affecter leur position particulière au sein du Québec. Par conséquent, il semblerait que ceci serait une occasion logique pour le Gouvernement de démontrer sa bonne foi en prévoyant une représentation minoritaire au sein de l'Office de la langue française.

ARTICLE 95 Commentaire

L'insertion de cet article entre en conflit avec certains articles précédents où la signification a été que l'anglais peut être encore employé dans certains domaines de l'administration. En outre, cet article n'anticipe pas une situation dans laquelle se trouvent de nombreuses compagnies. Nous nous en rapportons de façon spécifique aux compagnies de moins de 50 employés qui sont à prédominance ou totalement de langue anglaise à l'heure actuelle et qui dans le contexte des conditions économiques et à cause des marchés que ces compagnies desservent, sont vraisemblement appelées à demeurer dans un avenir prévisible. En outre, il est à prévoir que n'importe laquelle de deux personnes s'exprimant en langue anglaise, peut communiquer avec l'autre en anglais. A moins que certains de ces droits ne soient clairement énoncés, il y aurait lieu à une date ultérieure pour une interprétation judiciaire contraire des droits des personnes parlant anglais même entre elles, et par conséquent nous soumettons le point voulant que cet article devrait être substantiellement amendé, si non supprimé.

ARTICLES 99, 103 & 105 Commentaire

Ces articles sont en outre des exemples où la décision d'un fonctionnaire peut causer des dommages substantiels à une personne. Ainsi qu'on le verra dans la discussion d'articles subséquents, il doit y avoir une disposition en appel qui permettrait à une personne contre qui une sanction est prise, d'être à même d'en appeler à une plus haute autorité selon les règles et coutumes de la justice habituelle.

ARTICLE 106 Changements suggérés

II est suggéré qu'il soit permis à la législation en vigueur (Loi 22) se rapportant aux certificats de francisation, de demeurer en cours.

Le paragraphe A de l'article 106 est répugnant et coercltif. Dans une société libre et ouverte, des personnes et des entreprises doivent avoir le droit individuel d'entrer en affaires avec qui elles veulent de la façon dont elles veulent. Toute intrusion par l'Etat constitue une dérogation majeure aux pratiques qui ont été adoptées au Québec pendant des générations.

La législation en vigueur (Loi 22) apparaît en autant qu'elle permet à un individu le choix de négocier ou non avec le Gouvernement. Il y a un nombre incalculable d'entreprises qui n'ont jamais négocié avec le Gouvernement ou ses agences et au sujet desquelles il est peu vraisemblable qu'elles aient besoin de négocier dans un avenir prochain.

En outre, le fait d'exposer n'importe quelle compagnie aux caprices éventuels d'un fonctionnaire à un moment donné, dans la mise en application des articles 106 et 119, semble indûment dur et en fait répressif.

ARTICLE 111 Changement suggéré

II est suggéré que cet article soit supprimé.

ARTICLE 112 (B) Changement suggéré

L'article 112 (B) devrait être supprimé et remplacé par ce qui suit: "de manière à assurer l'utilisation du français à tous les niveaux de l'entreprise, y compris au sein du conseil d'administration et au niveau des cadres."

Raisonnement

La référence à "Québécois" dans cet article rappelle la discussion exposée sous le titre "Préambule". Le mot "Québécois" devrait être supprimé pour les raisons indiquées précédemment.

ARTICLE 119 Changements suggérés

Les changements suggérés en rapport avec l'article 119 ont été discutés en partie dans l'article 106. Une disposition d'appel est nécessaire avant que n'importe quelle détermination qui pourrait avoir de sérieuses ramifications soit prévue. Par conséquent, nous suggérons d'ajouter à l'article 119 ce qui suit: a) Que la suspension ou l'annulation du certificat de n'importe quelle entreprise ne soit pas prononcée avant que l'audition à laquelle l'entreprise en question doit être invitée, n'ait été tenue. b)Que l'exécution d'une telle décision soit suspendue, en attendant que le droit de l'entreprise pénalisée puisse en appeler à un banc de trois juges de la Cour Provinciale de la juridiction dans laquelle cette entreprise fait affaires. c)Que la décision prise par le banc composé des dits juges soit à même d'être interjetée auprès de la Cour d'Appel.

ARTICLE 120 Changements suggérés

Suite à notre suggestion d'ajouter une représentation minoritaire à l'Office, nous suggérons également d'augmenter le comité pour épauler et assister le Président dans l'accomplissement de ses fonctions.

ARTICLE 133 Changement suggéré "Toute personne ou groupe de personnes peut adresser une requête pour une enquête, et une copie d'une telle requête doit être signifiée à la compagnie ou aux personnes contre qui une telle pétition a été rédigée".

Raisonnement

Nous croyons que si n'importe quelle réclamation est faite contre un autre citoyen, ledit citoyen affecté doit avoir le droit d'être capable d'identifier et de comprendre la réclamation de ses accusateurs.

ARTICLE 142 Changements suggérés

Cet article doit être amendé de façon à permettre à la personne contre laquelle l'enquête est dirigée, d'y être présente. En outre, une disposition doit être rédigée à l'effet que, avant que toute procédure soit intentée contre cette personne, le droit d'appel envisagé et établi sous l'article 119, devrait s'appliquer.

ARTICLE 163 Commentaire

Nous nous objectons en principe, à la nécessité d'avoir des sanctions pénales eu égard à la législation linguistique. La multiplicité de telles sanctions rend confuse et affaiblit l'application de la loi criminelle en général.

ARTICLE 172 Commentaire

La communauté juive se sent spécialement concernée à propos de l'insertion de cet article. Il est le catalyseur majeur qui a suscité l'anxiété et l'appréhension de tous les segments de la société du Québec. Permettre à un article de cette nature de demeurer, dément non seulement la tentative de législation des droits de l'homme qui fut reçue avec tant d'empressement par notre communauté et en fait par tous les citoyens du Québec, mais tente à promouvoir un degré d'intolérance et ne tient aucun compte des droits et libertés de la personne.

Conclusion

La communauté juive du Québec appuie la tentative d'essai du Gouvernement de promouvoir et de préserver la langue française. Toutefois, nous croyons que les modifications que nous avons proposées n'amoindrissent nullement un quelconque des objectifs formulés par le Gouvernement eu égard au Projet de loi No 1; à notre avis, en adoptant ces changements d'acceptation plus importants, les principes généraux de la législation seraient à venir, émanant du grand public. Nous maintenons l'idée que les buts du Projet de loi No 1 doivent être consistants avec la protection des droits de l'homme et la dignité de tous les citoyens; nous croyons que la langue française peut s'épanouir sans coercition et pénalité. Et finalement, nous attendons que ce Gouvernement qui a si bien énoncé par le passé l'importance des libertés individuelles, fera les changements nécessaires afin d'assurer que le Projet de loi No 1 deviendra la Charte de la langue française pour toutes les personnes au Québec.

RESPECTUEUSEMENT SOUMIS

Harvey Crestohl, C.R.

Président

District 22, B'nai B'rith

Dr. Melvyn Schwartzben

Président

Congrès Juif Canadien

Région du Québec

Joel Pinsky

Président

Comité Conjoint des Relations Communautaires

Congrès Juif Canadien et

B'nai B'rith

ANNEXE 3 Mémoire du grand conseil des Cris du Québec

Le Grand Council of the Crees (of Québec) représente les Cris de la Baie James et du Nord québécois.

Les Cris sont les descendants directs d'une des grandes nations indiennes d'Amérique et constituent un des peuples fondateurs du Québec.

Ils possèdent une culture reliée intimement aux activités traditionnelles de la chasse, la pêche et le trappage. Néanmoins, à travers les siècles, ils ont pu s'accommoder des changements qu'ont apportés les autres civilisations tout en gardant leurs valeurs fondamentales.

Les Cris comptent environ six mille cinq cents (6,500) personnes regroupées en huit (8) bandes situées le long de la côte est de la Baie James et à l'intérieur des terres dans la région d'Abitibi.

La partie du Québec habitée par les Cris n'est devenue partie intégrante du Québec qu'en 1898 et 1912.

Une grande partie de la population crie est jeune et il est à noter que la plupart des Cris qui ont reçu une certaine éducation l'ont reçue dans les écoles fédérales en anglais.

Convention de la Baie James et du Nord québécois

Une entente connue sous le nom de la Convention de la Baie James et du Nord québécois a été conclue le 11 novembre 1975 entre les Cris du Québec et le gouvernement du Québec. Cette entente a été le fruit d'un long processus de procédures judiciaires et de négociations pour reconnaître certains droits aux autochtones et régler certains conflits entre les parties. Elle précise et garantit certains droits et obligations des parties l'une à l'égard de l'autre. Elle touche un grand nombre de secteurs d'activités de la vie, dont, à titre d'exemples, l'octroi des terres, la chasse, la pêche et le trappage, l'éducation, les services sociaux et de santé, le gouvernement local et l'administration régionale et autres.

Les Cris considèrent que la Convention constitue leur charte. Elle leur fournit les moyens par diverses structures et corporations de contrôler leur avenir et de gérer leurs affaires.

Projet de loi no 1

C'est à la lumière de la Convention que les Cris désirent faire connaître à la Commission leur position actuelle sur le projet de loi no 1.

Le projet de loi no 1 tel que présenté en première lecture, entre en conflit directement et indirectement avec plusieurs dispositions de la Convention. Il contredit l'esprit de certains articles de la Convention qui sont fondamentaux et qui ont fait l'objet de longues discussions avant la signature de la Convention.

Enfin, l'application intégrale du projet de loi no 1 aux Cris constituera une entrave sérieuse à la mise en application de la Convention.

Le ministre d'Etat au développement culturel a reconnu les problèmes sérieux inhérents à l'application du projet de loi no 1 face aux garanties prévues par la Convention en faveur des Cris.

Le 30 mai 1977, il s'est engagé envers les Cris à respecter intégralement la Convention et à apporter les amentements nécessaires au projet de loi no 1 pour qu'il se conforme à l'esprit et à la lettre de la Convention.

Considérant l'engagement du ministre et espérant que la Commission sera saisie des amendements nécessaires au projet de loi no 1, nous limitons notre présentation à certains points essentiels.

Usage de la langue française

Déjà en majorité bilingues (cri et anglais), les Cris ont accepté de poursuivre l'objectif d'acquérir une connaissance usuelle du français.

Cet objectif appert clairement, entre autres, d'une des dispositions du chapitre de la Convention concernant l'éducation citée ci-dessous.

Devant la Commission parlementaire étudiant le projet de loi fédérale pour approuver la Convention, le Grand Chef Billy Diamond a confirmé l'intention des Cris en ce sens.

Effets particuliers sur la Convention

II importe d'esquisser certaines incompatibilités entre le projet de loi no 1 et la Convention. Ceci est présenté uniquement à titre d'information et d'illustration, et en prenant pour acquis que les amendements attendus apporteront les corrections nécessaires.

Education

Le chapitre 16 de la Convention prévoit un programme général d'éducation pour les Cris de la Baie James. Ce chapitre stipule, entre autres, que: "Les langues d'enseignement sont le cri et, quant aux autres langues, selon la pratique actuelle dans les communautés cries du Territoire. La Commission scolaire crie se fixe comme objectif l'usage du français comme langue d'enseignement pour permettre aux diplômés de ses écoles de poursuivre leurs études en français, s'ils le désirent, dans une école, un collège ou une université ailleurs au Québec. Les commissaires fixent le rythme d'introduction du français et de l'anglais comme langues d'enseignement après avoir consulté le comité des parents, compte tenu des exigences de l'enseignement ultérieur."

Pour des raisons historiques, la pratique actuelle dans les communautés cries est à l'effet que les langues d'enseignement sont le cri et l'anglais. Cette situation est en train d'évoluer dans le sens de l'apprentissage d'une troisième langue: le français. Deux des établissements sont déjà pourvus d'écoles françaises, et les jeunes autochtones qui fréquentent ces écoles sont en voie de devenir trilingues. Toutefois, il faut noter qu'une accélération démesurée risque d'entraîner des effets négatifs. Il serait vain de vouloir brusquer ce processus.

L'article 59 du projet de loi reconnaît le droit aux Cris à l'instruction dans leur langue maternelle. En faisant abstraction de l'enseignement dans toute autre langue, notamment l'anglais, cet article entre en conflit avec la disposition de la Convention reproduite ci-haut. Cette dernière disposition garantit aux Cris le droit à l'enseignement en anglais et en cri. Cette clause prévoit également que les Cris s'engagent à introduire l'usage du français dans leurs écoles. Toutefois, elle leur reconnaît la discrétion d'agir en ce sens à leur propre rythme et en impliquant les parents. Ce pouvoir de déterminer eux-mêmes le rythme du processus de francisation est une pierre d'achoppement du chapitre 16 de la Convention. C'est sur la base de cette reconnaissance que les Cris ont donné leur accord à la Convention elle-même.

Par conséquent, l'article 59 du projet de loi, même s'il reconnaît le droit à l'enseignement en cri, est insuffisant pour donner effet au chapitre 16 et, de plus, entre directement en conflit avec celui-ci.

Organismes administratifs

La Convention crée plusieurs organismes administratifs ayant des responsabilités très étendues dans les secteurs d'activités les plus divers. Parmi ceux-ci on peut énumérer, à titre d'exemples, l'Administration régionale crie (chapitre 11 A), le Conseil régional cri pour les services de santé et les services sociaux (chapitre 14), le Comité conjoint — chasse, pêche et trappage (chapitre 24) et la Commission scolaire crie (chapitre 16). Ces organismes se classent dans deux catégories: la première est administrée en exclusivité par des autochtones, la seconde conjointement par des autochtones et des non-autochtones.

Le bon fonctionnement de tous ces organismes requiert une grande facilité de communication entre toutes les parties intéressées. La langue seconde de la presque totalité des Cris, et, par conséquent, de toutes les personnes susceptibles à court ou à moyen terme de siéger sur les conseils d'administration desdits organismes, ou d'y travailler, est l'anglais. Pour cette raison, jusqu'à ce que le processus de francisation mentionné plus haut soit suffisamment engagé, il sera nécessaire que la langue de communication et de travail de ces institutions soit le cri et l'anglais.

Au niveau de l'administration locale, la Convention consacre le statut du cri comme langue de communication, reconnaissant ainsi son importance pour le peuple cri et sur le plan culturel et sur le plan pratique.

Le projet de loi vise une francisation immédiate ou accélérée de toute l'administration publique, y compris les organismes ci-haut mentionnés. De plus, il accorde le droit à tout individu d'exiger que ces corps, dans toutes leurs sphères d'activités, que ce soit les relations de travail, l'embauche, les communications internes et externes, et autres, fassent affaires avec lui en français. Il apparaît évident que l'application intégrale du projet de loi aurait pour résultat concret de causer tant de problèmes, d'ennuis et d'inconvénients, à tous les niveaux, que l'auto-détermination des Cris, un des fondements de la Convention, se trouverait sérieusement compromise. La réalisation même de la Convention en dépend.

Conclusion

II faut souligner aux membres de la Commission que les Cris ne réclament du gouvernement du Québec à titre de représentant du peuple du Québec, que le respect de son propre engagement à titre de signataire de la Convention. Ils ne demandent rien d'autre que ce qui leur est dû.

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