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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 28 février 1990 - Vol. 31 N° 13

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur les modifications à apporter à la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux


Journal des débats

 

(Neuf heures sept minutes)

Le Président (M. Bélanger): La commission des affaires sociales...

Une voix: De l'économie et du travail.

Le Président (M. Bélanger): De l'économie et du travail, excusez. Quatre ans de mauvaises habitudes. Excusez, ce sont les réminiscences du passé. Or, la commission de l'économie et du travail se réunit ce matin pour procéder à une consultation générale et à des auditions publiques sur les modifications à apporter à la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux.

Ce matin, nous recevrons la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation le dimanche et la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche.

On se rappelle que, ce matin, il y a une petite particularité dans notre horaire: nous devons suspendre nos travaux entre 10 h 30 et 11 h 30, tel qu'on l'avait précisé hier, ce qui explique pourquoi nous débutons à 9 heures plutôt qu'à 10 heures.

Messieurs, dames de la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation le dimanche, j'ai trois... Vous avez rétabli l'équilibre. J'ai juste des dames ici. Alors, Mme Nicole Laliberté, Mme Solange Guillot-Lemelin et Mme Josée Béliveau. De toute façon, vous vous présenterez et vous identifierez votre porte-parole. Par la suite, vous aurez 30 minutes pour procéder à la présentation de votre mémoire.

Or, je vous prierais donc de commencer, s'il vous plaît!

Mme Marois: M. le Président, si vous me permettez...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: On s'étonne toujours quand il n'y a que des femmes et on ne s'étonne jamais quand il n'y a que des hommes.

Le Président (M. Bélanger): Non

Mme Marois: Non, je le sais, vous avez dit que s'était rétabli l'équilibre, mais, dans les autres cas...

Le Président (M. Bélanger): Mon document ici ne tenait compte que des noms de femmes et je m'aperçois qu'il y a cinq personnes ce matin alors que j'en avais trois ici. C'était juste ça.

M. Tremblay (Outremont): II y en a qui semblent s'étonner, mais au moins on les écoute.

Des voix: Ha,ha, ha!

Mme Marois: Mais certainement. Moi, j'écoute toujours aussi, M. le ministre.

M. Jolivet: Sans arrière-pensée.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, écoutons nos invités, ce sera plus pertinent. Alors, je vous en prie.

Mme Laliberté (Nicole): Alors, je me présente. Je suis Nicole Laliberté, présidente de la Coalition pour l'équité et le libre accès, et je vais laisser les gens qui sont ici se présenter eux-mêmes.

Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation le dimanche

Mme Guillot-Lemelin (Solange): Bonjour, mesdames, messieurs. Mon nom est Solange Guillot-Lemelin. Je suis ex-présidente de l'Association des consommateurs du Québec. Il y en a qui doivent se souvenir de moi, qui m'ont déjà vue à d'autres commissions parlementaires sur le même sujet. Je suis toujours bénévole active au sein de l'Association des consommateurs du Québec.

M. Falardeau (Jean): Bonjour. Mon nom est Jean Falardeau. Je suis propriétaire d'un supermarché d'alimentation sous la bannière Provigo situé à Québec.

M. Racicot (Jean-Guy): Jean-Guy Racicot, propriétaire d'un magasin d'alimentation Métro, à Montréal.

Mme Béliveau (Josée): Bonjour. Josée Béliveau, vice-présidente executive de la Jeune Chambre de commerce de Montréal.

Le Président (M. Bélanger): Merci. Alors, votre porte-parole peut-il nous liver votre message? Madame.

Mme Laliberté: Nous remercions les membres de cette commission parlementaire de nous donner l'occasion de présenter notre position sur un sujet qui a déjà fait couler beaucoup d'encre, les heures d'affaires.

Nous tenons à remercier plus particulièrement le ministre de l'Industrie et du Commerce

d'avoir annoncé clairement hier matin, à l'ouverture des travaux de cette commission, que son gouvernement n'allait trancher le débat qu'après avoir entendu publiquement toutes les parties, car, que nous aurait servi d'avoir préparé notre présentation ce matin pendant plusieurs semaines si cette commission avait déjà fait son lit.

À ce sujet, nous sommes un peu déçus de l'attitude des représentants de l'Opposition à cette commission qui, d'entrée de jeu, hier matin, ont annoncé leur opposition dans ce dossier en précisant que les travaux de la commission et la présentation des 80 groupes ne la changeraient pas. Néanmoins, nous espérons que nos arguments sauront les convaincre que la qualité de vie si nettement défendue par eux passe aussi par le respect des groupes qui témoigneront ici pendant plus de trois semaines

M le Président, dans un contexte de démocratie, de libre entreprise et d'évolution d'une société moderne, la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation prend position en faveur de l'ouverture le dimanche et fonde son action sur les besoins des consommateurs et consommatrices, l'équité commerciale et la protection des travailleurs.

La Coalition, c'est l'Association des consommateurs du Québec, les Femmes regroupées pour l'accessibilité aux pouvoirs politique et économique, la Jeune Chambre de commerce de Montréal, avec l'appui de la Fédération des clubs de l'âge d'or de Québec qui compte plus de 37 000 membres, de la Fédération de l'âge d'or Concordia Montréal et de la Fédération de l'âge d'or du lac Saint-Louis, Montréal aussi De plus, la Coalition se fait le porte-parole de 54,7 % des consommateurs québécois qui se sont prononcés en faveur de l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche dans le cadre d'une étude scientifique du professeur Jacques Nantel, PhD, des HEC.

Dans le contexte de cette présentation, la Coalition met de l'avant un principe qui est reconnu par l'International Organization of Consumers Unions, IOCU, qui siège à l'ONU, le droit de choisir qui donne au consommateur l'accès à une variété de produits et de services à des prix compétitifs

Sous l'initiative de la Coalition, des lettres d'appui des groupes de consommateurs québécois représentant 49 comtés - qui sont tous ici - du Québec, cinq régions et des organismes membres de la Coalition, ont été signées et distribuées aux députés concernés afin de leur démontrer qu'il y avait un appui dans la population à notre position.

Si nous sommes ici aujourd'hui réunis, c'est parce que la loi 59 qui régit présentement les heures d'ouverture des commerces n'a jamais été fondamentalement modifiée depuis son entrée en application le 1er janvier 1990. Les ajustements qui ont été apportés au cours de toutes ces années font que cette loi est devenue un véri- table fouillis d'exemptions et de règlements plus ou moins observés qui ont contribué à créer une inéquité commerciale. D'ailleurs, le comité de députés dirigé par M. Maurice Richard et chargé de faire la lumière sur la situation en 1988 a reconnu que la loi est très difficile à appliquer de façon rigoureuse.

Dans ce secteur de l'alimentation, l'accord de toutes ces exemptions a créé, d'abord, une inéquité commerciale décriée par tous les intéressés, soit les marchands, les consommateurs et consommatrices et même les députés. Ces exemptions ont de plus entraîné l'apparition d'une structure parallèle qui, à son tour, est la cause d'une concurrence déloyale. Par exemple, pourquoi une fruiterie devant employer plus de trois personnes à la fois, à cause de la manutention des produits, ne peut elle ouvrir le dimanche, tandis quo, dans un marché public, il peut y avoir 20 travailleurs et on peut ouvrir le dimanche?

Parlons des zones touristiques, ces fameuses zones touristiques. Nous nous demandons sur quel principe le législateur s'est basé pour formuler cette loi. En voici les critères: service adéquat nécessaire à la clientèle, résolutions du conseil municipal, accord de la majorité des commerçants environnants et organismes représentatifs démontré par la municipalité relié à une période d'activité pour une période de temps déterminé. Où voit-on dans ces critères la mention des mots "touriste" ou "touristique"?

De plus, il y a certaines aberrations qu'on a relevées dans cette loi. Par exemple, Saint-Sauveur, qui est un centre de ski bien reconnu, qui est largement habité par des Montréalais qui y possèdent une résidence secondaire, est une zone touristique. Bromont, qui est un centre de ski, largement habité par des Montréalais qui y possèdent une résidence secondaire, ne peut être une zone touristique. Est-ce qu'à Saint-Sauveur et Bromont, la qualité des citoyens serait plus importante que celle des villes, puisque eux ont accès aux services le dimanche?

À l'aube de l'an 2000, nous voyons apparaître de nouvelles façons de magasiner à domicile La vente par catalogue. J'en ai ici trois nouveaux que je ne connaissais pas et que j'ai reçus, tous les trois, le même dimanche: Intimité Jour et Nuit, Sélect et l'autre s'appelle Collection Orford La vente par catalogue, donc, c'est déjà un phénomène qui se répand de plus en plus. La télévision, le système Alex et Vidéoway, ce ne sont là que quelques exemples très concrets de modes de magasinage qui ne sont réglementés en aucune façon par la Loi sur les heures d affaires et qui rejoignent les consommateurs et consommatrices dans leur foyer à toute heure de la journée, semaine et week-end,

II nous apparaît très étrange que ces phénomènes qui sont à nos portes n'aient pas été traités dans le document d'information du ministère. Pourtant, ces systèmes existent déjà.

Par exemple, on peut, aujourd'hui, acheter chez Pascal par catalogue sept jours sur sept et se faire livrer de la marchandise à domicile. De plus, des études américaines récentes estiment qu'en l'an 2000, 50 % des gens vont adopter ces nouveaux modes d'achat.

Tous reconnaîtront que se nourrir est un besoin réel et essentiel et c'est tellement important que nous avons décidé de le souligner, ici, dans le tableau. C'est un acte vital qu'il faut répéter tous les jours de sa vie. Pour ce faire, les Québécois et Québécoises doivent avoir accès aux commerces qui vendent des produits alimentaires frais, à bon prix et en grande variété tous les jours. Il s'agit d'un élément essentiel à la qualité de la vie.

Ce sont, contrairement à ce qu'on peut répandre, des contraintes de temps de plus en plus importantes qui incitent les consommateurs québécois à magasiner le dimanche afin d'étaler leurs achats sur deux jours plutôt qu'un seul. Présentement, ceux qui n'ont pas le temps de faire leur épicerie sont, en plus, pénalisés parce qu'ils doivent s'approvisionner chez le dépanneur où les prix sont au moins 13 % à 15 % plus cher qu'ailleurs.

Pour souligner la qualité de vie, permettez-moi de vous citer les témoignages de deux personnes entendues, hier, à l'émission Midi dix, de Radio-Canada. Il s'agit ici de Mme Ouellet, de Montréal: "Moi, j'ai vécu en Alberta pendant sept ans et à peu près les trois, quatre dernières années que j'y étais, ils ont ouvert les magasins. Tout était ouvert le dimanche et même les épiceries étaient ouvertes: le lundi soir jusqu'à 23 heures, toute la semaine jusqu'au vendredi soir. Le samedi, c'était ouvert de 8 heures jusqu'à 18 heures et le dimanche, c'était ouvert toute la journée. J'ai vécu, moi, une liberté d'achat incroyable. J'ai extrêmement souffert de revenir au Québec et d'avoir seulement le jeudi, le vendredi et le samedi, surtout qu'avec les emplois que j'ai, c'est souvent que je travaille de longues heures et que le samedi, parfois, j'ai à travailler pour rattraper le temps perdu. Alors, ça arrivait parfois que je ne pouvais pas aller faire l'épicerie, jamais. J'ai trouvé ça très pénible l'ajustement de revenir et d'avoir à subir les restrictions des heures. La grande chose que je trouvais intéressante, c'était d'avoir autant d'heures d'ouverture. C'est que je pouvais répartir mes loisirs en fonction de mes goûts à moi et non pas en fonction des heures d'ouverture. Je pouvais faire de la randonnée pédestre le samedi parce que je savais que, le dimanche, je pouvais aller faire mon épicerie, ou le lundi, dans la semaine ou quoi que ce soit. Je n'avais aucune restriction à ce niveau-là."

Et j'ajouterai aussi, l'autre témoignage de Mme Dumas, de Montréal. Elle dit: "Alors, moi, je suis pour l'ouverture des magasins et j'ai grande hâte que l'ouverture se fasse et je vais vous dire pourquoi. Parce qu'on travaille, on est obligés de faire toutes les courses à la vitesse, puis c'est le samedi. On est tout essoufflés, puis arrive le dimanche, là, c'est un gros vide. Alors, on pourrait répartir." Elle dit: "Le soir, moi, j'ai mon voyage, comme on dit, et aller faire mon épicerie, là ça ne va pas. Un autre point que j'apporte, c'est pour les personnes âgées aussi. Pour elles aussi, c'est très possible que ça fasse leur affaire. En plus de ça, ça donnerait du travail aux gens. On dit tout le temps que les gens n'ont pas de travail. Bien, ça pourrait répartir le travail. Moi, je trouve que ça, c'est une très bonne chose." Et voilà.

Au Québec, 13 % . de la population active travaille dans le secteur du commerce de détail, dont 2,6 % dans le secteur de l'alimentation. On estime que moins de 1 % de la population active serait appelée à travailler le dimanche si on ouvrait les marchés d'alimentation. À la lumière de ces chiffres, on peut donc affirmer que le gouvernement a fait et maintient une loi pour une minorité de travailleurs plutôt que pour la collectivité. Il faudrait donc que certains groupes cessent de nous dire que tout le monde serait appelé à travailler le dimanche. Nous avons ici la preuve qu'il s'agit de moins de 1 % de toute la population active du Québec.

Les travailleurs et travailleuses en alimentation, de plus, selon nos recherches, seront libres de travailler ou non le dimanche Ils auront le choix. Selon le document d'information du MICT, on estime qu'au moins de 45 % des travailleurs et travailleuses du secteur alimentaire font partie d'une association syndicale, dont deux travailleurs sur trois dans les supermarchés. Un grand nombre de conventions collectives ont en annexe des lettres d'entente qui prévoient que les parties s'engagent à rouvrir la convention - donc, les syndicats savaient que c'était une possibilité et que ça s'en venait - et sont prêtes à négocier selon les conditions de travail advenant l'ouverture le dimanche.

De plus, ce n'est pas vrai que les travail leurs auraient à travailler plus d'heures puisque les lois du travail au Québec régissent le nombre d'heures de travail et, en plus, les jours de congé. On nous dit que, de toute façon, les travailleurs ne seraient pas appelés à travailler tous les dimanches. En ouvrant les supermarchés le dimanche, par contre, on permettrait d'étaler sur une plus longue période l'achalandage au bénéfice tant des consommateurs que des travailleurs.

Le dernier sondage effectué en septembre 1989 par Jacques Nantel à la demande de la Coalition démontre qu'une majorité, soit 54,7 %, des Québécois se disent favorables à l'ouverture de leur principal marché d'alimentation le dimanche tandis que la portion des opposants passe à 34 %; elle était de 36 %. Le nombre de personnes pour, en 1988, qui ont répondu exactement à la même question, était de 43,9 % par rapport à 54,7 %. Lorsque la question de l'équité

est évoquée, 63,5 % des consommateurs trouvent la loi inéquitable, 25 % la trouvent équitable

Pour quelles raisons de plus en plus de gens sont-ils en faveur de l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche? Parce que les consommateurs vivent avec des contraintes de temps plus fortes qu'en 1970, au moment de l'entrée en application de la loi, parce que la cellule familiale traditionnelle a beaucoup changé depuis ce temps. Aujourd'hui, le modèle dominant est la famille à deux revenus. L'intégration de la majorité des femmes sur le marché du travail, l'augmentation du nombre des familles où les deux adultes travaillent et l'augmentation des familles monoparentales ont contribué à transformer considérablement la structure familiale au cours des dernières années et à diminuer les heures disponibles au magasinage. Les familles doivent quotidiennement composer avec des problèmes d'organisation de temps, notamment, en ce qui concerne des tâches répétitives comme l'approvisionnement hebdomadaire en alimentation.

L'accroissement du taux d'activité des femmes, qui atteint aujourd'hui 59 % avec 77 % des emplois occupés à temps plein, constitue une variable des plus significatives en faveur de l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche, d'autant plus que si la tendance actuelle se maintient, on prévoit que le taux d'activité des femmes au Canada pourrait être de 71,3 % en l'an 2000.

Le nombre de familles monoparentales a augmenté considérablement. En fait, il a plus que quadruplé entre 1961 et 1986 au Canada et représentait, en 1986, 12,7 % de la population

Pour le magasinage en général, il est toujours possible de reporter la plupart des achats à la semaine suivante, mais, lorsqu'il s'agit de dépenses inévitables comme l'alimentation, les perspectives sont moins évidentes, et la régularité de ces achats engendre des contraintes de temps toujours plus exigeantes. Pour un couple ou une personne seule qui travaille de 9 heures à 17 heures, il ne reste plus que les jeudi et vendredi soir et le samedi pour faire des achats. Le temps du magasinage doit alors être partagé avec celui d'autres activités qui ont souvent été, elles-mêmes, reportées à la fin de semaine par manque de temps.

Pour la Coalition, la prolongation des heures d'ouverture les lundi, mardi et mercredi soir ne réglerait en rien cette situation. Dans le peu d'heures que cela représente, une foule d'autres tâches familiales et professionnelles doivent être accomplies. Cette prolongation équivaudrait pour nous à ne reporter notre course que du jeudi au mercredi. À titre d'exemple, nous pouvons prendre la situation qui prévaut en Ontario. Malgré le fait que les commerces soient ouverts de 9 heures à 21 heures tous les jours de la semaine, les consommateurs ontariens et les consommatrices ontariennes sont insatisfaits et ils réclament l'ouverture le dimanche. On a vu apparaître, au cours des dernières années, de nouveaux types de commerces qui sont venus compenser les besoins en alimentation, le dimanche, des consommateurs québécois qui ne peuvent avoir accès à leur principal marché d'alimentation.

Cette structure de dépannage ne comble qu'une partie seulement des besoins des consommateurs et selon l'Office de la protection du consommateur et une étude des HEC, en plus, les gens sont pénalisés pour ne pas avoir de temps pour magasiner; ils paient toujours de 13 % à 15 % plus cher dans cette structure parallèle.

Les dépanneurs, de même que les marchés publics et les fruiteries répondent à des besoins bien particuliers des consommateurs mais, malheureusement, ils ne peuvent pas prendre la place d'un supermarché. La Coalition ne croit pas que les petites entreprises soient menacées par l'ouverture des supermarchés le dimanche parce que la vocation des dépanneurs se déconcentre de plus en plus du domaine de l'alimentation pour offrir des services connexes et spécialisés. Ces petites entreprises, de plus, à notre avis, possèdent beaucoup d'atouts qui attirent la clientèle: proximité du domicile, livraison, possibilité de s'adapter aux besoins de leur clientèle très rapidement, justement à cause de leur taille. De plus, toutes les statistiques indiquent que la structure parallèle est bien en santé puisque le dépanneur, dans un marché stagnant, et les petites épiceries ont gagné plus de 6 points de pourcentage depuis 1985 et les magasins spécialisés, eux, 2,3 % Nous avons pris cette information dans le document du MICT. De leur côté, les supermarchés du Québec, eux, ont perdu près de 10 points de pourcentage au cours des dernières années.

Un autre phénomène vient confirmer cette affirmation que les petites entreprises ne subiraient pas tant de dommage, c'est qu'à l'époque de l'entrée de la bière dans les épiceries, si vous vous souvenez, on avait prédit que parce qu'on vendrait de la bière dans les grandes corporations, il y aurait 2000 faillites de dépanneurs, ce qui ne s'est jamais produit. Ils ont continué même de progresser au cours des dernières années

Contrairement à ce que certains groupes prodament, l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche n'entraînerait pas de hausse de prix anormale ou exagérée parce que la concurrence est encore la meilleure garantie de meilleurs prix De plus, cela avantagerait le consommateur pour ce qui est de la variété des produits frais disponibles. Tel que mentionné dans le document d'information du MICT, les commerces supportent déjà les coûts fixes (bâtiment, chauffage, surveillance) même s'ils sont fermés le dimanche De plus, on nous dit que les pertes de denrées périssables engendrées dans la période de fermeture du vendredi au lundi est assez si-

gnificative. Donc, peut-être qu'on pourrait récupérer là aussi.

L'ouverture le dimanche entraînerait inévitablement un nouvel horaire d'approvisionnement. Cela ne pourrait être que bénéfique pour les consommateurs qui pourraient bénéficier de produits frais et en grande quantité tous les jours. Un fait est certain, les consommateurs, eux, se sont habitués à la structure parallèle. Il leur serait impensable que le gouvernement leur enlève leur acquis. Le gouvernement ne peut pas tout fermer car là, il soulèverait des protestations de la part des consommateurs et consommatrices qui ont déjà pris des habitudes du dimanche et le magasinage du dimanche étant en progression, je pense que ça passerait difficilement.

Tout ce que la Coalition souhaite, c'est que les Québécois puissent choisir le type de commerces qu'ils veulent fréquenter le dimanche. L'achalandage actuel le dimanche, au Québec, démontre bien le besoin d'une libération des heures d'ouverture des commerces en alimentation. Selon l'Association provinciale des fruiteries du Québec et dont les données sont fournies dans le document d'information du MICT, environ 80 000 clients visitent les fruiteries chaque dimanche. L'achalandage moyen par fruiterie serait de 800 clients le dimanche et de 3500 clients par semaine.

Pour ce qui est des marchés publics, leur association représentative estime l'achalandage à 100 000 clients par dimanche, ce qui donnerait une moyenne de 8000 clients par marché public. Si on combine ces chiffres, c'est plus de 180 000 clients, ménages québécois, qui fréquentent ces divers commerces en alimentation le dimanche. Il faut compter en plus les milliers de consommateurs qui fréquentent les marchés aux puces, les pharmacies, les dépanneurs, les pâtisseries, les clubs Price, les commerces situés dans les zones touristiques et autres commerces ouverts le dimanche. Et on a vu hier - ce fait est confirmé par M. Jacques Nantel - qu'on dépense 7 000 000 $ en produits alimentaires chaque dimanche pour un total de 320 000 000 $ et, là-dedans, nous n'avons pas non plus les chiffres des États frontaliers américains qui font également des bonnes affaires avec les Québécois le dimanche. Nous n'avons qu'à penser aux nombreux départs d'autobus de Montréal, chaque week-end, en direction de Plattsburg ou d'autres villes américaines.

La libération des heures d'ouverture le dimanche là où elle est en vigueur, ne semble pas perturber outre mesure la vie des clients. À preuve, voici les résultats d'un sondage effectué en Alberta et que le témoignage de Mme Ouellet tout à l'heure venait confirmer. Lorsqu'en 1984, il n'y avait que 42 % de la population en faveur de l'ouverture le dimanche, en 1989, 74 % des consommateurs sont en faveur de l'ouverture le dimanche, 69 % affirment que l'ouverture facilite le magasinage, 93 % affirment que cela ne les a pas empêchés daller à l'église et 91 % affirment que cela n'a pas modifié leur vie familiale.

La Coalition estime que la décision du gouvernement doit se baser sur des résultats d'études scientifiques plutôt que sur des analyses sommaires et des impressions. L'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche répond à un besoin réel d'un nombre de plus en plus élevé de familles et de personnes qui, du fait qu'elles sont actives sur le marché du travail, ont de moins en moins de temps pour magasiner. Elles doivent alors partager ce temps entre l'achat de divers produits et la participation à d'autres activités qui doivent se faire la fin de semaine. Même si plusieurs types d'achats peuvent être reportés, il n'en va pas de même pour l'approvisionnement hebdomadaire en alimentation. La Coalition estime que le gouvernement doit baser ses décisions sur des résultats d'enquêtes, plutôt que sur des analyses sommaires. Des changements majeurs ont eu lieu dans la société québécoise au cours des dernières années, il faut donc que la législation suive ce courant et s'ajuste aux besoins des consommateurs des années quatre-vingt-dix.

Le débat sur les heures d'affaires des commerces en alimentation, à notre avis, a trop duré. La Coalition demande au gouvernement de régler définitivement ce problème dès ce printemps. Le gouvernement n'a pas plusieurs solutions pour régler ce dossier. Régler l'inéquité commerciale en fermant tout le dimanche est une solution socialement et politiquement impensable, qui soulèverait un tollé de la part des consommateurs qui se sont habitués à la structure parallèle existante et qui n'ont pas d'autres choix, à cause de fortes contraintes de temps. Modifier le régime actuel d'exceptions ne simplifierait pas l'application de la loi et créerait, à notre avis, de nouvelles inéquités en plus d'entraîner des coûts juridiques et de contrôle très importants. (9 h 30)

Libéraliser l'ouverture dans le monde de l'alimentation serait, selon nous, la meilleure solution, car elle permettrait à chaque commerce de décider de ses heures d'ouverture selon le marché dans lequel il se trouverait. Un retour à la formule de trois personnes en tout temps, le dépannage, ne pourrait répondre aux besoins des consommateurs en termes de prix, de qualité des produits et de variété. De plus, seulement 35 % de la population trouve satisfaisante cette formule pour une commande principale. N'oublions pas que présentement beaucoup de dépanneurs emploient plus de trois employés. La Coalition est en désaccord total avec la proposition du MICT de transférer aux municipalités et aux MRC la décision ultime sur les heures d'ouverture des commerces. Une telle décision créerait une situation invivable, tant pour les consommateurs que pour les commerçants qui ne s'y

retrouveraient pas, d'une ville à l'autre.

Faut-il vous rappeler que le gouvernement, et plus particulièrement le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, se doit de favoriser la libre concurrence au bénéfice des consommateurs et laisser les lois du marché décider de l'ouverture des commerces? En conséquence, la Coalition demande au ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie d'agir dans les plus brefs délais, dans l'intérêt de tous, de donner la liberté d'ouvrir les commerces en alimentation le dimanche, et de laisser les règles du marché rétablir la situation.

Je terminerai en vous donnant les avantages d'une libéralisation: des produits plus frais, à meilleur prix, en plus grande quantité et variété, choix du moment du magasinage sans stress, meilleure gestion du temps, diminution de l'achalandage et meilleur service, création d'emplois pour les étudiants et les personnes voulant apporter un revenu d'appoint. Ça égale amélioration de la qualité de vie Je vous ferai remarquer que dans le document d'information, on parle de maintien de qualité de vie. Nous, nous préférons parler d'amélioration de qualité de vie. La libéralisation n'égale pas l'obligation pour le commerçant de commercer, pour le travailleur de travailler et pour le consommateur de magasiner. Voilà! C'est tout.

Le Président (M. Bélanger): Nous vous remercions, Madame. Avant de céder la parole à M. le ministre ou à Mme la députée de Taillon, il y a un petit point de procédure qu'on a oublié en débutant, ce matin. Si vous me permettez de faire machine arrière. C'est qu'il y avait un remplacement et j'ai oublié de l'annoncer II s'agit du député Benoît, de Orford qui est remplacé par le député Richard, de Nicolet-Yamaska. C'est ça? On ne fera pas de discussion sur la qualité, on va le prendre tel quel.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Peut être une petite annonce aussi, ce qui est très inhabituel, mais c'est la fête de Mme Lambert, ce matin. C'est incroyable qu'elle puisse vieillir. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha! Des voix: Qu'elle doive!

Le Président (M. Bélanger): Qu'elle doive, c'est encore pire. C'est inévitable. Bien. Alors, cela dit, nous revenons à la pertinence de notre sujet, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je vous remercie beaucoup, Mme Laliberté, pour votre présentation. J'aimerais profiter de ce que vous avez mentionné.. Vous nous faites la recommandation de ne pas donner suite à la proposition du ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de transférer aux municipalités la responsabilité J'aimerais y référer pour clarifier quelque chose parce qu'il y a beaucoup d'intervenants qui mentionnent ça. Le document de consultation qui a été remis à tous les intervenants mentionne comme hypothèse de travail, donc pas comme proposition, mais comme hypothèse de travail la possibilité de transférer au niveau local le pouvoir décisionnel de l'ouverture le dimanche dans le secteur de l'alimentation, au même titre qu'on mentionne la possibilité d'élargir les heures en semaine, la possibilité d'augmenter le nombre d'employés Alors, c'est une hypothèse de travail seulement. Je pense que c'est important de le répéter encore, ça n'a jamais été une proposition du ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

Mme Laliberté: ...oui, parce que, vraiment, elle ne me plaisait pas du tout.

M. Tremblay (Outremont): Ça, je l'ai bien compris.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Outremont): J'ai deux questions. La première, pour être bien certain qu'on clarifie votre position, en quoi l'ouverture le dimanche répond-elle aux besoins réels du consommateur et pourquoi, dans cette optique, ne pas simplement prolonger les heures en semaine, ce qui pourrait peut-être également répondre aux besoins réels des consommateurs?

Mme Laliberté: La prolongation en semaine, nous l'avions déjà étudiée lorsque j'étais à l'Association des consommateurs du Québec, en 1983 À ce moment-là, ça nous semblait une hypoythèse acceptable, mais si vous remarquez, on a toujours parlé de libéralisation. Bon. Mais on est rendus en 1990 et, en approfondissant nos études, on se rend compte que si on prolonge le mercredi soir, on va en venir à refaire ce fameux débat sur les heures d'ouverture dans très peu de temps parce que ce n'est réellement pas la solution. Ce n'est qu'une amélioration de la situation, mais pas la solution définitive De plus, les gens qui Le très peu d'heures que l'on a II y a d'autres raisons pratiques qui vont vous être apportées probablement par l'Association des consommateurs, cet après-midi, reliées au fait que le mercredi, ce n'est vraiment pas l'idéal. C'est encore du dépannage, quoi!

M. Tremblay (Outremont): Ma deuxième question... Je fais référence à votre mémoire, à la page 18, où on discute de l'effet sur les prix Vous mentionnez que "contrairement à ce que certains groupes proclament - et je vous cite - l'ouverture des marchés d'alimentation le

dimanche n'entraînerait aucune hausse de prix, mais au contraire, avantagerait le consommateur pour ce qui est du prix et de la variété des produits frais disponibles". Comment conciliez-vous cette affirmation-là avec la position de la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche? Et je cite également: "Le constat général prévoit un étalement de coûts plus qu'une augmentation des revenus" On fait référence à 85 % des 993 marchands qui ont collaboré à ces chiffres-là: "...croient que les revenus supplémentaires ne pourront justifier les coûts d'exploitation."

Mme Laliberté: Je pense que si on parle de l'alimentation, ce n'est pas vrai, parce qu'en alimentation, justement, il y a des coûts reliés à la fermeture du samedi soir jusqu'au lundi. Alors, déjà, là il y a une perte. En plus, pour les marchands - puis, là, on me corrigera ici; il y a des marchands avec moi - la possibilité d'étaler leurs achats sur une semaine plutôt que de les faire en un seul jour, ça représente aussi des économies. Il y aurait une répartition du temps de travail et non pas nécessairement beaucoup plus d'heures d'ouverture. Donc, là aussi...

En plus, pour nous, le point important, c'est que la concurrence, si tous les magasins sont ouverts, va être assez forte pour empêcher la tentation, surtout dans l'alimentation, pour empêcher les hausses de prix. Il y a déjà une très forte concurrence dans la... Et une autre chose que je pourrais souligner, c'est que, présentement, si on a des aubaines, c'est grâce aux supermarchés qui, eux, ont un volume d'achat très élevé et qui peuvent, finalement, nous refiler des aubaines. Si les supermarchés continuent à perdre des parts de marché, comme on nous le dit, les premiers qui vont être touchés, ce sont les travailleurs sûrement, mais aussi les consommateurs, parce que, s'il y a une diminution d'efficacité, je pense bien qu'on va payer en bout de ligne. Donc, pour nous, c'est important. Pour nous, cette concurrence-là, c'est notre meilleur garant de prix raisonnables

M. Tremblay (Outremont): Est-ce que je peux demander, soit à M. Falardeau ou à M. Racicot qui exploitent des commerces, donc, qui connaissent très bien l'aspect quantitatif... Est-ce que vous pourriez nous donner des arguments quantitatifs, nous démontrer la réponse, parce qu'on va devoir faire face...

M. Falardeau: Si vous voulez me permettre de répondre. Évidemment, pour reprendre la question que vous avez posée à Mme Laliberté, actuellement, compte tenu qu'on doit libérer ou, en fait, vider nos comptoirs le samedi soir, étant donné qu'on est fermés le dimanche, il y a une augmentation de coûts qui est justifiée, parce qu'on a des pertes de marchandise. Le fait que les commerces seraient ouverts le dimanche ne nous obligerait pas à vider nos comptoirs; donc, il y aurait probablement une diminution de nos pertes de produits périssables. Et, à ce niveau-là, il y aurait une économie de coûts.

Quand vous disiez tout à l'heure qu'il y aurait une augmentation au niveau des coûts par rapport aux revenus engendrés, j'imagine que les gens de la Coalition pour le non font référence à l'augmentation des salaires ou des taux de salaires qu'on devra dépasser, compte tenu que le dimanche est régi par une loi différente. Mais on sait que dans la majorité des conventions collectives, il y a des lettres d'entente stipulant que ça pourrait les réglementer. Et, nous, on serait même très ouverts à ce qu'il y ait une modification au niveau de la Loi sur les normes du travail qui fasse en sorte que les salariés ne seraient pas tenus ou \ obligés de travailler le dimanche, que ce serait par bénévolat. À ce niveau-là, on n'a aucune objection à ce type de modification dans la loi.

Au niveau de la quantité, c'est évident que les revenus ne seraient pas supérieurs de façon très substantielle, mais il y aurait une répartition au niveau des chiffres d'affaires que nous ferions, ce qui ferait en sorte que nous pourrions servir de façon plus efficace notre clientèle et nous aurions des périodes de pointe moins considérables que celles que nous avons actuellement, ce qui fait en sorte que les jeudi, vendredi et samedi représentent, pour nous, environ tout près de 75 % de notre chiffre d'affaires. Évidemment, c'est très difficile. Ça demande un surplus d'employés dans des périodes, dans des plages horaires très précises et c'est très difficile à gérer. Je pense que l'augmentation de coûts qu'on a présentement avec les pertes de produits périssables, le samedi soir, serait nettement justifiée par l'étalement des revenus que nous aurions le dimanche. Ça, j'en suis convaincu et M. Racicot pourrait vous confirmer mes dires.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: M. le ministre a terminé complètement? Est-ce que c'est ça?

Une voix: Pas nécessairement.

Mme Marois: Alors, il me semble qu'on s'était entendus, hier, sur les règles du jeu de ce matin. C'était une demi-heure à peu près, trente minutes.

Le Président (M. Bélanger): Trente minutes, oui.

Mme Marois: Trente minutes de notre côté. Alors, je vais leur laisser le temps qui leur est nécessaire.

Le Président (M. Bélanger): Non, mais je

pense qu'on peut...

Mme Marois: Sinon, s'ils ont terminé, je vais prendre le reste du temps. Ça ne m'ennuie pas, on peut aller jusqu'à 10 h 30.

Le Président (M. Bélanger): Non, je pense qu'il faut comprendre une chose: l'article 169 de notre règlement énonce dune façon très claire le partage du temps entre les députés de la majorité et ceux de l'Opposition, le temps que la commission consacre à chaque personne ou organisme, c'est-à-dire 30 minutes par parti. Or, sous réserve de l'alternance, chaque député peut parler aussi souvent qu'il le désire, sans excéder dix minutes consécutives et c'est même appelé sur une décision de M. Jean-Pierre Charbonneau que vous avez bien connu, qui était de votre parti, qui présidait la commission de l'économie et du travail en 1986, le 26 mars 1986.

Donc, si un parti, comme vous, décidiez au bout de cinq minutes que vous voulez revenir plus tard, tout simplement, on fera une forme d'alternance par bloc.

Mme Marois: M. le Président, je suis un petit peu déçue de votre attitude ce matin et je ne comprends pas...

Le Président (M. Bélanger): Vous n'avez pas à être déçue de l'attitude du président...

Mme Marois: ...ce qui se passe.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, madame. Vous n'avez pas à être déçue de l'attitude du président; il est là pour diriger et organiser les travaux. Il fait...

Mme Marois: II me semble que nous nous étions entendus, M. le Président, hier. Le ministre est devant moi. Est-ce que le ministre est d'accord avec le fait que nous nous étions entendus que vous preniez généralement le temps qui vous était alloué dans un premier temps et que, par la suite, notre formation politique prenait le sien? Alors, je ne comprends absolument pas cette attitude. On revient sur les engagements pris, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: M. le Président, si vous me le permettez. Vous savez que nous avons vécu ensemble et probablement ainsi qu'un certain nombre de membres de la commission parlementaire qui a étudié la réforme de l'aide sociale et qui a entendu, si ma mémoire est exacte, à peu près 120 mémoires... Nous avions, à ce moment-là, avec Mme la députée de Maisonneuve - et vous pouvez lui demander, je suis sûr qu'elle se le rappelle - fonctionné par alternance, faisant en sorte que la parole allait, pour commencer, au ministre, ensuite à la critique officielle et ensuite, par alternance, aux divers membres de la commission qui voulaient poser des questions à nos intervenants De mémoire, ça avait très bien fonctionné et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions plus... Je comprends que la députée de Taillon n'était pas là à ce moment-là, mais je ne comprends pas pourquoi ce qui était bon à la commission des affaires sociales ne serait pas bon à la commission de l'économie et du travail.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Si vous me le permettez, mon cher collègue, c'était peut-être bon et j'en conviens, sauf que le ministre, le président et moi avions convenu d'autre chose, hier, et je croyais que lorsque l'on donnait sa parole, ça avait une signification Je ne continuerai pas un débat de procédure parce que je crois que nous faisons perdre le temps aux invités qui sont devant nous, mais j'aimerais bien signifier aux membres de la commission que ce n'est pas moi qui ai engagé un débat de procédure. Au contraire, j'ai souhaité, dès hier, le régler de telle sorte que ce soit clair. Maintenant, si la parole donnée est remise en question, on va se le dire et on partira sur d'autres bases.

Le Président (M. Bélanger): Bon, il y a eu effectivement une forme d'entente, hier. Maintenant, je constate qu'après X minutes - je ne sais pas combien - le ministre a posé un certain nombre de questions, en fait une première série de questions et qu'il n'y a personne d'autre qui désire du côté ministériel prendre la parole pour le moment Or, sous réserve de revenir plus tard, je cède la parole à l'autre parti. Maintenant, si on veut reprendre la discussion sur notre façon de procéder, on pourra le faire tout à l'heure. Nous aurons une suspension des travaux d'une heure. Alors, on pourra profiter de ce moment-là pour (9 h 45)

M. Jolivet: . pour ajouter à ce que ma collègue dit...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: c'est simplement le "fair play" normal Je connais le ministre comme étant quelqu'un qui a dit quelque chose hier. Tout le monde s'était entendu. Alors, moi, je m'attendais que ce soit la même chose ce matin. Je ne vois pas pourquoi on ferait une procédure ce matin, une question de procédure. C'est quelque chose qui avait été entendu et même inscrit à notre procès-verbal.

M. Tremblay (Outremont): En tout cas. En

fait, je vais essayer de clarifier ma position. Ma compréhension de l'entente que nous avions hier, c'est que nous avions chacun 20 minutes et qu'on les respecterait. Je ne pense pas honnêtement de rappeler qu'on avait clairement défini qu'il n'y aurait pas d'alternance. Alors, ce qu'on a fait, on a pris chacun 20 minutes de notre côté. Et je m'aperçois que dans le meilleur intérêt de la dynamique qu'on doit créer, c'est plus normal qu'on alterne. Ça fait une meilleure dynamique et ça permet de revenir sur des éléments, d'avoir une meilleure discussion. Dans mon cas, j'aime mieux une procédure comme celle-là. Je vous dis, j'ai donné ma parole sur le temps et non pas sur la spécificité de l'alternance. Et je pense que dans le meilleur intérêt des débats, c'est mieux qu'on alterne et ça va permettre aux intervenants et à nous de poser, je pense, des questions beaucoup pertinentes qui vont aider au débat.

Mme Marois: Alors, je ne suis pas d'accord avec l'interprétation que vous donnez et je vais le dire, M. le Président, ici, devant les membres de cette commission. Je ne suis d'accord avec l'interprétation que le ministre fait de l'entente que nous avons eue hier, en plus du fait que sur la base de cette entente d'hier, toute la journée, nous avons fonctionné à 20 minutes d'un côté et 20 minutes de l'autre. Si vous me dites que vous avez changé d'avis, ça, c'est une autre chose et que vous retirez l'engagement pris hier, vous le retirez. Mais au moins, dites-le-moi clairement et après ça, on va discuter.

M. Jolivet: C'est ça qui est arrivé. En fait, M. le Président, c'est ce qui est arrivé hier.

Le Président (M. Bélanger): En tout cas. On a des invités et on a un horaire à respecter.

Mme Marois: Je vous l'ai fait remarquer.

Le Président (M. Bélanger): Alors, il y aura une intermission d'une heure tout à l'heure. On pourra s'asseoir ensemble et discuter de toutes ces choses-là, à ce moment-là. Maintenant, ce que je comprends bien, c'est qu'on désire mettre en pratique l'alternance, c'est bien ça? Alors, pour cette audition-ci, on va procéder avec l'alternance. On refera l'entente, si vous voulez, d'une façon plus formelle durant l'heure d'inter-mission que nous aurons tout à l'heure.

Mme Marois: Vous permettrez, M. le Président, que je mette en doute le fait qu'on procède à nouveau à une autre entente puisque celles que l'on prend ne sont pas tenues Alors, je vous remercie. Cela dit, par respect pour les invités qui sont devant nous, je vais procéder à un certain nombre de questions et ce n'est pas parce que je n'en ai pas, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Ah, ça, je ne suis pas inquiet.

Mme Marois: D'abord, avec tout le respect que je vous dois, Mme Laliberté, bonjour, bonjour, mesdames et messieurs. Je vous ferai remarquer... Je sais que vous avez mentionné dès le départ que vous étiez un petit peu déçus de l'attitude du parti de l'Opposition. Mais je vous ferai remarquer que si je suis élue comme députée à l'Assemblée nationale, c'est, entre autres, parce que j'ai une idée claire sur un certain nombre de sujets, pas sur tout mais sur un certain nombre de sujets. Quand je me fais élire, c'est aussi sur ces points de vue-là que je veux défendre et représenter. Et, comme vous, j'ai une idée claire du débat dans lequel nous nous engageons actuellement. J'ai beaucoup de respect pour votre point de vue. Votre point de vue pourra venir nuancer le mien, pourra venir l'aménager peut-être, je le respecte. Mais d'autre part, dans ce sens-là, je pense qu'on part sur le même pied à cet égard puisque si vous vous êtes fait un point de vue, je m'en suis fait un. Alors, je vous remercie.

Mme Laliberté: Je n'aurai pas à prendre une décision. Ce n'est pas moi qui vais décider de la libération des heures d'ouverture. Alors, je viens...

Mme Marois: Moi non plus, mais j'essaierai de l'influencer cependant.

Mme Laliberté: Je suis bien contente de voir que quand même vous acceptiez d'entendre nos revendications.

Mme Marois: Voyez-vous, Mme la présidente, vous comprendrez que ça fait quand même quatre ans qu'il se fait des consultations et il m'apparaissait qu'il y avait un éclairage déjà pas mal important qui avait été apporté sur la question. Si l'exercice que nous faisons à cet égard-là en apporte un de plus, d'accord. Bon

Cela dit, une question d'abord sur la représentativité et la représentation de vos membres. Quand vous dites l'Association des consommateurs du Québec, bon, je vois plus loin dans votre document une définition de qui vous êtes, etc., mais quel est votre membership? Comment s'établit votre membership? Est-ce qu'on paie pour être membre chez vous? Est-ce qu'on a une carte de membre?

Mme Laliberté: Bon, je peux vous dire que j'ai milité très longtemps à l'Association des consommateurs du Québec. J'ai quitté il y a quatre ans pour d'autres activités. L'Association des consommateurs du Québec a un fonctionnement, et je passerai la parole à Solange tout à l'heure, elle vous dira le reste. D'ailleurs, ces gens vont être entendus cet après-midi et vont

clarifier cette situation-là. Donc, on ne perdra pas trop de temps là-dessus. C'est une association qui est là depuis 40 ans, donc, reconnue, qui a participé à des dossiers aussi importants que les dossiers qui ont amené l'enquête de la CECO, par exemple.

Mme Marois: Oui, mais pour éviter justement que l'on élabore trop longuement, combien y a-t-il de membres à l'Association?

Mme Laliberté: L'Association des consommateurs du Québec a environ 5000 membres qui paient une cotisation.

Mme Marois: D'accord.

Mme Laliberté: Par contre, l'Association des consommateurs du Québec a des publications qui sont extrêmement populaires. Par exemple, la revue Jouets tire à 120 000 exemplaires et chaque revue, nos enquêtes nous le disent, est lue par au moins douze personnes.

Mme Marois: D'accord.

Mme Laliberté: Donc, elle a un centre d'information, par lequel elle répond aux consommateurs, et elle a une autre publication qui est très populaire aussi, qui est une publication sur les assurances.

Mme Marois: D'accord. Maintenant...

Mme Laliberté: Veux-tu ajouter quelque chose d'autre, Solange?

Mme Marois: C'est parce que je voulais savoir vraiment le mode de membership?

Mme Laliberté: Bien, c'est parce que cet après-midi, ils vont faire le point. Les gens sont ici pour ça.

Mme Marois: Bon, d'accord, et comme vous me l'avez mentionné, il ne s'agit pas de perdre trop de temps sur ça. Je suis membre de FRAPPE, remarquez qu'on ne m'a pas consultée sur cette question-là, alors peut-être qu'il y en a d'autres comme ça qui ne l'ont pas été non plus dans FRAPPE et qui ne partageraient pas ce point de vue-là. Il y a combien de membres, déjà, dans FRAPPE? Est-ce que vous le savez?

Mme Laliberté: Mme Dumas? D'abord, je dois excuser Mme Dumas, elle devait être ici ce matin, mais elle a été hospitalisée et n'a pu être présente.

Mme Marois: Ah bon

Mme Laliberté: Mme Dumas me dit que vous êtes environ, à FRAPPE, 800 à 900 membres, je crois.

Mme Marois: D'accord. Bon, la Jeune chambre - j'ai vu dans les mémoires - on parle de 200 propriétaires. Plus loin, vous mentionnez à la page 2, que de nombreux intervenants reliés au secteur de l'alimentation se sont d'ailleurs prononcés en faveur de l'ouverture des commerces en alimentation le dimanche Et vous incluez, entre autres, l'Ordre des pharmaciens du Québec. Oui, c'est à votre mémoire, à la page 2, mémoire de la Coalition pour l'équité, l'Ordre des pharmaciens du Québec. Or, j'ai compris, hier, lors de leur présentation..

Mme Laliberté: Ah, d'accord.

Mme Marois: qu'ils étaient d'accord avec l'ouverture de la pharmacie le dimanche, parce que c'était un produit essentiel, mais qu'ils n'avaient absolument pas l'intention de se mêler de l'autre débat, et que, même aux réponses aux questions - je ne voudrais pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit - ils semblaient plus ou moins favorables à l'ouverture. Mais je ne leur fais pas dire ça.

Mme Laliberté: Bon, d'accord.

Mme Marois: Comment se fait-il qu'ils se retrouvent là?

Mme Laliberté: Parce qu'on a mentionné des gens qui étaient en faveur d'une libéralisation ou d'une certaine ouverture le dimanche, et on a mentionné l'Ordre des pharmaciens, c'est peut-être pas la meilleure, mais en tout cas.

Mme Marois: D'accord, mais disons qu'on a étiré un petit peu la vérité, dans ce cas-là.

Mme Laliberté: Bien, je ne crois pas, parce qu'en fait, si on met ces gens là, c'est que, eux, ils sont ouverts le dimanche et ils n'ouvrent pas tous le dimanche.

Mme Marois: D'accord.

Mme Laliberté: Alors, pour nous, c'était un exemple d'une profession où on a la liberté d'ouvrir ou de ne pas ouvrir et qui ne semble pas créer de problème à l'intérieur.

Mme Marois: C'est parce qu'on a dit: Ils se sont d'ailleurs prononcés en faveur de l'ouverture Alors, j'imagine que...

Mme Laliberté: Bien, ils sont déjà ouverts, je crois que..

Mme Marois: c'est une modification qui pourrait être apportée. Qui finance la Coalition?

Mme Laliberté: La Coalition est financée par des marchands: Métro, Provigo et Steinberg.

Mme Marois: D'accord. Comment est...

Mme Laliberté: Bon, quand vous me demandez ça...

Mme Marois: Les marchands.

Mme Laliberté:... ça me fait toujours un peu peur, parce que la contribution de l'Association des consommateurs du Québec - et je pense que vous êtes au courant des subventions que reçoivent les associations de consommateurs - ne peut pas être la seule, mais quand même...

Mme Marois: Je comprends ça.

Mme Laliberté:... je peux dire qu'en temps, en personnel et en recherches, elles ont une grosse contribution, de même que FRAPPE, de même que la Jeune Chambre de commerce de Montréal, qui ont contribué beaucoup en temps. Elles ont mis à notre disposition leur personnel.

Mme Marois: Mais ce sont majoritairement les marchands qui...

Mme Laliberté: Mais pour ce qui est du financement, comme la Coalition contre, d'ailleurs.

Mme Marois: On posera la question à la Coalition contre qui pourra sans doute nous répondre.

Mme Laliberté: Je pense que tout le monde sait que des associations de consommateurs ne peuvent pas être seules dans un financement d'une telle envergure.

Mme Marois: Je vais vous poser une autre question. J'en ai beaucoup d'autres mais je reviendrai, comme on tranche notre temps en petites tranches de saucisse. Vous avez parlé de sept droits du consommateur, à la page 2, le droit de choisir, le droit d'être entendu... Quels sont les autres types de droits? Juste pour mon intérêt personnel.

Mme Guillot-Lemelin: Le droit de choisir, le droit d'être entendu, le droit à la sécurité, et des nouveaux droits qui sont aussi ajoutés par l'IOCU, dont Nicole a parlé tout à l'heure, le droit de recours, le droit à un environnement sain et le droit à l'éducation, également.

Mme Marois: D'accord. Ça va.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Richard: Je vois dans votre mémoire, mesdames et messieurs, que vous faites allusion uniquement au dossier de l'alimentaton.

Mme Laliberté: Oui.

M. Richard: En ce qui a trait au reste - parce qu'il ne faut pas oublier que c'est la Loi sur les heures d'affaires des commerces au détail au Québec - vous semblez du moins, puisque vous ne prenez pas position, dire que ça, ça devrait aussi être ouvert ou élargi le dimanche ou ça devrait rester avec des exemptions. C'est quoi votre position là-dessus?

Mme Laliberté: Bon, on a formé une coalition pour étudier la question de l'alimentation. Donc, on s'est penchés sur la question de l'alimentation dans le temps que l'on a eu pour faire les études, aller voir ce que ça voulait dire et aller voir la protection des travailleurs. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, on s'est basés sur trois choses: l'inéquité commerciale, la protection des travailleurs et les besoins réels des consommateurs. C'est que dans le domaine de l'alimentation, ça nous semble évident que ça ne peut pas durer. C'est là qu'est l'inéquité, c'est là qu'il y a des exceptions et si ces exceptions-là sont apparues, c'est parce qu'il y avait des besoins des consommateurs. Donc, c'est pourquoi on s'est penchés sur ce dossier-là parce que ça nous a semblé que c'était le plus gros problème dans le domaine du commerce de détail. C'est là que résidait le plus d'inéquités et pour les consommateurs et pour les marchands. C'est pourquoi nous avons fait nos études sur le domaine de l'alimentation.

M. Richard: Maintenant, Mme Laliberté, puisque, avec vous, vous avez des gens qui se sont impliqués directement chez Provigo et chez Métro...

Mme Laliberté: Et chez Steinberg. M. Richard:... et chez Steinberg.

Mme Laliberté: II n'est pas ici ce matin mais il...

M. Richard: Alors j'ajoute Steinberg parce que ça va dans le même sens. Vous, MM. Falardeau et Racicot, vous êtes de ceux... Je dis bien vous êtes de ceux, parce que ce n'est pas unanime chez Provigo, chez Métro et chez Steinberg l'élargissement des heures d'affaires dans le domaine de l'alimentation. Je sais que ce qu'on appelle le Métro corporatif ou le Provigo corporatif, eux demandent l'élargissement des heures d'affaires, sauf que chez le propriétaire de ces entreprises-là, ce n'est pas tout à fait la même chose sur le terrain. Dans mon propre comté, où il y a quand même plusieurs Provigo

et plusieurs Métro, on s'aperçoit que ce n'est pas tout à fait l'unanimité. Maintenant, dans votre esprit, libéraliser en alimentation, ça veut dire que tout ce qui se mange et qui se boit serait libéralisé.

Mme Laliberté: Tous les points de vente en alimentation.

M. Richard: Parfait. Maintenant, vous savez qu'il n'y a pas de cloisonnement au Québec au niveau des commerces. Qu'est-ce qui arriverait avec, par exemple, un élargissement des heures d'affaires - je fais l'hypothèse - dans le domaine alimentaire et qu'est-ce qui empêcherait, par exemple, un Métro, entre autres - ça pourrait être une autre firme - de vendre autre chose que de l'alimentation le dimanche puisqu'il n'y a pas de cloisonnement? Je veux dire, vous savez, il y a déjà des marchés d'alimentation...

Mme Laliberté: Oui.

M. Richard: ..qui ont la vente par catalogue, qui louent des aspirateurs, qui, bon... Dans le commerce de l'alimentation, ça commence à être élargi aussi, là. Qu'est-ce qui empêcherait ça si un jour on disait l'alimentation "at large" et qu'est-ce qui pourrait baliser ça?

Mme Laliberté: Je ne sais pas si M. Falar-deau veut répondre mais, en tout cas, il peut y avoir à l'intérieur du commerce en alimentation des consensus et des règles qui sont établis par les marchands. On s'entend sur des choses. Ça peut exister, ça peut... Par exemple, des marchands d'automobiles peuvent ouvrir, eux, le dimanche. S'ils se sont entendus pour ne pas ouvrir, ils n'ouvrent pas. Si on ouvre en alimentation, on s'entend sur ce qu'on vend en alimentation le dimanche. M. Falardeau, voulez-vous ajouter quelque chose? (10 heures)

M. Falardeau: Je pense que par la nature du commerce, ce à quoi vous faites allusion probablement c'est... Je regarde l'apparition des fameux clubs Price où vous pouvez vous procurer des frites congelées, des pneus d'hiver, un ensemble de stéréo.. On peut tout se procurer. C'est le magasin, le super "store" qu'on appelle, qui fait son apparition au Québec. Dans le type de supermarche qu'on a, qui est conventionnel, qui n'est pas du dépannage, qui n'est pas de la grande surface - je pense que M. Racicot le vit depuis plus longtemps que moi - c'est un type de commerce qui se spécialise dans la vente de denrées périssables principalement et de conserves. D'après les expériences qu'on a de vente de produits non alimentaires - quand je dis "non alimentaires", je ne parie pas d'une cuillère à soupe, mais de produits qui sont carrément autres que des denrées périssables - je ne pense pas qu'on aurait beaucoup de succès, considérant les types de commerce que nous avons

Si nous avions des surfaces de 75 000 pieds carrés, comme Club Price, là. nous pourrions vendre des réfrigérateurs, des laveuses, des sécheuses, mais ça prendrait des surfaces faramineuses pour ça.

M. Richard: Club Price vend de l'alimentation Si on libéralisait dans le domaine alimentaire, est ce que Club Price pourrait rester ouvert?

Mme Laliberté: Bien, si on libéralisait tous les points de vente en alimentation...

M. Richard: Vous avez exactement le sens de ma question Est-ce que...

Mme Laliberté: Oui

M. Richard: ...Club Price resterait ouvert parce qu'il vend de l'alimentation?

Une voix: Pourquoi pas?

Mme Laliberté: C'est de la concurrence.

M. Richard: Ah bon!

M. Falardeau: Actuellement, il ouvre sept jours par semaine..

M. Richard: Mais, par contre...

M. Falardeau: ...dans la région de Montréal.

M. Richard: en contrepartie, vous dites: On ne s'occupe pas du reste, on ne s'occupe que de l'alimentaire. Mais à l'instant où je vous pose la question: Est-ce que Club Price resterait ouvert. Alors là, ce n'est plus de l'alimentation, c'est, entre autres, de l'alimentation, mais c'est à peu près n'importe quoi, des Esquimaux en descendant.

M. Falardeau: Ça dépend aussi comment est-ce que vous le cataloguez. Parce que Club Price fonctionne, présentement, sept jours par semaine dans la région de Montréal et il vend autant des produits alimentaires que des produits non alimentaires. C'est un type de commerce qui a fait son apparition récemment. Comment le cataloguer? Il est très difficile, au même titre que la vente par catalogue. Éventuellement, il y aura peut être de la vente par catalogue des produits périssables seulement et non des produits durables.

M. Richard: Alors, vous comprenez la complexité de ce dossier-là En libéralisant dans le domaine alimentaire, on risque de libéraliser aussi dans l'ensemble des domaines. Qui vous empêcherait, vous, à l'intérieur de votre marché

Provigo, d'avoir une section de bijouterie?

Mme Laliberté: Bien, quand on parle de libre choix, on parle de libre choix. Dans le domaine du commerce, s'il existe un libre choix, il y aura un libre choix. Ce n'est pas une obligation, c'est un libre choix.

M. Richard: Ça veut dire, en fait, que vous avez de camouflé le fait qu'en disant "libéralisation en alimentation", ça veut dire libéralisation dans tous les domaines.

Mme Laliberté: On n'a camouflé absolument rien...

M. Richard: Non, non.

Mme Laliberté: ...je m'excuse On a pris un domaine qu'on a pensé... Vu que c'est toujours très compliqué, politiquement, d'agir sur une grande échelle, on a pris un domaine où on trouve qu'il faut agir, présentement, parce que c'est devenu intolérable pour tout le monde. Ça, au moins, on s'entend tous sur ça. Bon! On a besoin d'élargissement d'heures d'ouverture et on a besoin de rétablir une équité commerciale, surtout en alimentation. Alors, on s'est penchés sur l'alimentation parce que... Ce n'était pas pour cacher qu'on est pour ci ou pour ça, mais c'est parce que c'est là qu'est le problème, présentement. Comme je le disais tout à l'heure, ça semble toujours très très compliqué, en politique, d'agir tout de suite, de tout déréglementer. Il faut toujours procéder par étapes, semble-t-il. Donc, nous, on vous dit: Cette étape-là, c'est tout de suite; c'est celle-là qui fait le problème et c'est tout de suite.

Alors, si vous voulez tout libéraliser, alors là à vous... Mais, au moins ça, c'est quelque chose qui ne peut pas attendre.

M. Richard: Merci...

Le Président (M. Bélanger): Moi, comme député de Laval-des-Rapides, ça me suggère une réflexion. Quand j'écoute ça, j'ai l'impression qu'on va revenir à la formule des anciens magasins généraux...

Une voix: ...M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît. Je vous remercie.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Ça me fait penser aux anciens magasins généraux où on avait de tout: des pneus, des machines agricoles, des sacs de grain, du café, de la nourriture, n'importe quoi. Va-t-on revenir à ça? Je ne le sais pas. J'ai l'impression qu'on s'en va vers une sorte de commerce.

Mme Guillot-Lemelin: J'aimerais peut-être dire quelque chose là-dessus, M. le Président. Ça me surprendrait qu'on revienne 40 ans en arrière, ou encore plus, 100 ans en arrière, de la façon dont vous le décrivez puisque, évidemment, le marché a évolué et les systèmes de production ne sont plus les mêmes. Et on n'offre plus à l'intérieur d'un club Price ce qu'on offrait dans un marché du type dont vous parlez. Et, entre autres, si on pense au consommateur, il y a un principe bien connu auprès du consommateur qui dit que... Moi, je ne vous conseillerais pas - en tant que conseillère en consommation - d'aller vous acheter un appareil de système de son dans un endroit où il n'y a à peu près qu'un petit coin dans le magasin où on vend ce genre de produit-là puisque souvent le service après vente, la qualité du produit... puisque ce sont des gens qui ne connaissent pas le produit, ils risquent de ne pas vous offrir un bon service après vente. Mais ça serait la même chose. C'est un peu comme M. Richard disait. Est-ce qu'on fera des bijouteries à l'intérieur des marchés d'alimentation? Il ne faut quand même pas exagérer. Est-ce que les gens seront intéressés d'aller s'acheter des bijoux, je ne sais pas, moi, chez Provigo? Je serais très étonnée puisque le consommateur a quand même évolué depuis tout ce temps-là.

Le Président (M. Bélanger): Moi, je... Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors si je comprends bien...

Mme Laliberté: Oui, bien ça, c'est son choix.

Mme Marois: Excusez-moi. Mme Laliberté: C'est son choix.

Mme Marois: Mais je comprends bien, dans vos propos deux choses, d'une part, c'est une étape. Vous dites: À la limite, nous, ce qu'on voudrait c'est que...

Mme Laliberté: Comme je ne parle pas... Mme Marois: Non?

Mme Laliberté: ...au nom de la Coalition, on me pose la question...

Mme Marois: D'accord.

Mme Laliberté: ...on me dit. Est-ce que si on libéralisait tout... bien je veux dire, moi, je suis ici, je vous dis ce qu'on a fait, nous, en alimentation et je pense qu'on vous a fourni des études bien étoffées pour un problème précis.

Mme Marois: Merci. C'est parce que j'ai d'autres questions à vous poser. Ce que vous dites, madame, par contre, en répondant à la question du président de la commission et député, bien sûr, de Laval-des-Rapides, vous dites, inversement de ce qui a été dit tout à l'heure, que dans le fond, les clubs Price, ce serait préférable que la partie qui n'est pas alimentaire soit...

Mme Guillot-Lemelin: Non, ce n'est pas du tout ce que j'ai dit. Au contraire. C'est le contraire que j'ai dit.

Mme Marois: Non? Parce qu'on en vend des stéréos, là, on en vend des produits d'un autre...

Mme Guillot-Lemelin: C'est justement Si, par exemple, le consommateur se satisfait du stéréo qui est vendu chez Price parce que ça correspond au prix qu'il veut payer et qu'il se fout de la garantie et qu'il se fout du service après vente et qu'il ne s'interroge pas du tout sur ce qu'on va faire après, peut-être qu'il peut aller là mais, au contraire, en consommation, on recommande, pour ce genre de produit-là, d'aller dans les endroits spécialisés. Alors si le consommateur veut y aller, c'est à son choix mais c'est aussi à ses risques.

Mme Marois: Mais vous le lui déconseilleriez évidemment, comme agente de protection du consommateur.

Mme Guillot-Lemelin: D'aller acheter ça là? Mme Marois: Oui.

Mme Guillot-Lemelin: Bien, c'est selon ses besoins à lui, ça dépend.

Mme Marois: D'accord.

Mme Laliberté: Mais je voudrais juste ajouter un point. Quand on parle de ça, peut-être qu'on ne pose pas la bonne question. On pourrait peut-être se demander pourquoi...

Mme Marois: C'est M. Richard qui l'a posée.

Mme Guillot-Lemelin: il y a des commerces comme Club Price présentement. Ce serait peut-être... Moi, je vous retourne la question. Mais pourquoi y a-t-il des commerces comme Club Price, présentement? Avec toute la législation, les exceptions, les ci, les ça, pourquoi a-t-on des commerces comme Club Price?

Mme Marois: Parce que, sans doute, il y a un certain nombre de trous dans la loi et qu'ils sont exploités par...

Mme Laliberté: Bon, alors...

Mme Marois: ...un certain nombre de marchands qui ont l'agressivité pour le faire, j'imagine.

Mme Guillot-Lemelin: Nous avions un expert, hier, qui vous disait, M Sletmo... Je veux dire c'est bien difficile de revenir en arrière, de dire: Ce genre de commerce-là, on met la clé dans la porte parce que... je veux dire, dans un conlexte de libre échange et partout, on ne peut pas le faire. Pourquoi y a-t-il un club Price? Moi, je vous pose la question. Vous avez une loi et il y a un club Price pareil, et il y a une inéquité.

Mme Marois: Oui, parce qu'il y a des trous dans la loi et c'est, entre autres, pour ça qu'on se réunit, pour essayer de voir comment...

Mme Laliberté: Bon alors..

Mme Marois: ...soit les colmater ou les ouvrir plus béatement et qu'il n'y en ait plus, à la limite Vous évaluez que la solution d'ouverture pour les lundis, mardis et mercredis, soit jusqu'à 19 heures ou jusqu'à 21 heures, il y a différentes hypothèses, vous évaluez, vous, que ça ne répondrait pas aux besoins des personnes...

Mme Laliberté: Non.

Mme Marois: ...des consommateurs et des consommatrices.

Mme Laliberté: Pas de ceux qui ont besoin du service le dimanche, ça ne répond pas.

Mme Marois: Est-ce que vous avez des sondages sur ça, qui vous le prouvent? Comme vous utilisez d'autres sondages pour dire que les gens sont d'accord pour aller magasiner le dimanche...

Mme Laliberté: Oui. Justement, dans nos sondages, quand M. Nantel vous disait hier qu'on a évalué le comportement du consommateur, les gens vont.. Quand on leur pose la question, en général, à tout le monde: Est-ce que vous préférez l'ouverture le mercredi? Bien la, si on la pose à tout le monde, ceux qui n'ont pas de problème et ceux qui en ont, ont dit: Oui, le mercredi. Quand on la pose aux gens qui ont des problèmes, c'est le dimanche et ça, c'est à quelque chose comme 53 % des gens qui ont des contraintes de temps, c'est le dimanche qu'on préfère.

Mme Marois: D'accord, mais

Mme Laliberté: En plus, le mercredi soir où les magasins sont ouverts et les gens...

Mme Marois: Pardon?

Mme Laliberté: ...c'est seulement... Il y a des magasins présentement...

Mme Marois: Oui.

Mme Laliberté: Ceux qui peuvent ouvrir en dehors des heures des plages horaires le sont le mercredi soir, et la fréquentation est de 15 % par rapport au dimanche où c'est 30 %; c'est le double de personnes qui vont le dimanche. À un moment donné, on a fait l'étude, à l'Association, pour le mercredi soir et puis, comme tout évolue, on s'est rendu compte que ça ne répondait plus, en 1990, aux besoins des consommateurs. En fait, comme vous le dites dans le document...

Mme Marois: Mais vous ne les avez pas déposées, ces études-là. C'est parce que...

Mme Laliberté: Bien...

Mme Marois: Je vous le dis, là, vous allez me permettre d'intervenir un petit peu...

Mme Laliberté: Oui.

Mme Marois: ...pour qu'on clarifie les choses. D'accord? C'est parce que vous avancez des chiffres, vous avancez des données et moi, j'aime bien qu'on parte sur les mêmes bases et les bonnes bases. Alors, quand on me dit que 54,7 % des Québécois se disent favorables à l'ou-verturue de leur principal marché d'alimentation le dimanche, si on leur dit: Voulez-vous ouvrir le dimanche? et que les gens ont la possibilité de répondre oui ou non, ça peut arriver peut-être à des solutions comme celles-là. Mais si on pose la question: Qu'est ce que vous préféreriez entre le lundi, mardi, mercredi - mettons-les jusqu'à 19 heures, 21 heures, mettons les trois hypothèses - est-ce qu'on arrive à la même chose?

Ce que M. Nantel nous a dit hier, c'est qu'il y avait eu une légère préférence pour l'ensemble des consommateurs pour le début de semaine. Hein?

Mme Laliberté: Oui.

Mme Marois: II a dit: Pour ceux et celles - et c'est surtout celles - qui font le marché, il y a une légère préférence pour le dimanche. Et il a dit: Là, madame, c'est une bibite de chercheur - et je pense que je le cite au texte. Nous avons privilégié, compte tenu qu'il y avait à la marge une différence, cette hypothèse-là et nous l'avons creusée, et je respecte son point de vue, je le comprends. Mais ce que je vous dis, vous êtes des représentants de consommateurs et de consommatrices. Est-ce que vous n'auriez pas pu creuser aussi l'autre hypothèse ou ces deux hypothèses-là, pourquoi pas? Moi, je n'ai absolument rien contre, mais les creuser à fond, selon les mêmes techniques. Bon, ça, c'est pour une chose

Une autre chose. À la page 9 - c'est pour ça que je dis qu'il faut faire attention aux chiffres - de votre document, vous dites: 60 % voudraient utiliser leur... On va lire comme il faut la phrase, on dit: 27,8 % des consommateurs déclaraient faire régulièrement ou occasionnellement l'achat de produits alimentaires le dimanche. Parmi ceux-ci, 60 % voudraient utiliser leur supermarché le dimanche, dont la moitié pour y faire leur commande principale. Quand on lit ces chiffres-là, c'est époustouflant aussi. La conclusion qu'on a envie de tirer, c'est que la moitié voudrait faire leur commande principale le dimanche. Mais attention, c'est 60 % des 28 % qui le font et c'est 50 % de tout ce monde-là... Ça nous donne quoi, au bout de la ligne? Moi, je l'ai fait le calcul, ça nous donne, entre autres, 8,1 %. Quand vous dites que 28,7 % des consommateurs déclaraient faire régulièrement l'achat de produits alimentaires, c'est 8,1 % qui font leurs achats le dimanche. Ce n'est pas 50 %, ce n'est pas 30 %, de tous les consommateurs qui font leurs courses.

Puis, dans l'autre cas, on parle de Montréal, après ça, on applique cette même formule à Montréal. Là, on dit: 54 % de ces derniers feraient leur commande principale. Mais 54 %, quand on décortique les chiffres, ça donne 13,7 % des gens. Bon. Alors, je veux bien, mais je veux aussi qu'on fasse un petit peu attention. On va en prendre un autre - c'est dans votre mémoire, je ne l'invente pas, hein? - l'Alber-ta.

Une voix: Oui.

Mme Marois: Là, on nous dit que pour l'Alberta - et vous nous l'avez donné tout à l'heure en chiffres et c'était intéressant - ça n'avait pas modifié leur vie de famille, ça affirmait que l'ouverture le dimanche facilitait le magasinage, etc. Bon. En Alberta, effectivement, c'est libéralisé, sauf que, et ça, c'est dans le document du ministère, je ne me trompe pas, c'est à Calgary et à Edmonton que ça se passe et pas ailleurs, c'est libéralisé là. Alors, il faut faire attention. Il faut le dire. Il faut dire: Oui, en Alberta, une province qui a libéralisé, voici comment les gens sont contents, voici comment la moitié de la population que cela concerne a été consultée. Cette moitié nous a dit, à x %, qu'elle était contente. Il faut dire ça, sinon on fait dire n'importe quoi aux chiffres qui sont devant nous, hein?

Une voix: Bon, je pense...

Mme Marois: Là, je viens de vous citer trois exemples où moi, je soulève des questions.

Ça sème le doute dans ma tête. Et, peu importe, à cet égard-là, je suis persuadée que mes collègues - je vois des points d'interrogation chez les gens d'en face - je suis sûre que ça soulève aussi des questions dans leur tête.

Mme Laliberté: Bon Je pense qu'on vous a mis les vrais chiffres. C'est déjà... On ne les a pas truqués, ils sont là. Josée voudrait vous répondre là-dessus.

Mme Marois: Sauf qu'on ne les a pas mis complètement. Vous savez, en philosophie, on apprenait le mensonge blanc. Ha, ha, ha!

Mme Laliberté: Oui. Bien non. On vous a dit exactement ce que l'on a découvert et ce qu'on avait. On ne peut pas vous mettre ce qu'on n'a pas, alors on vous a mis ce qu'on avait, ce qu'on a découvert. Je pense qu'on a été assez francs pour vous citer les chiffres tels qu'ils étaient. On ne les a pas truqués et on ne les a pas...

Mme Marois: Je n'ai pas dit que vous les aviez truqués.

Mme Laliberté: Non plus. Ils sont tels qu'on les a découverts. Mais n'oubliez pas qu'on parie de tendance et que, dans la vraie vie, parce que vous nous dites que nous, on est en consommation, ça se vérifie par les 180 000 ménages qui magasinent le dimanche, de cette façon-là, et par les témoignages de gens, par l'achalandage. En tout cas, je ne sais pas si vous faites votre épicerie de temps en temps le dimanche, mais il y a du monde.

Mme Marois: Oui, je le fais, bien sûr, à l'occasion.

Mme Laliberté: Bon. Alors, Josée, sur la question des chiffres.

M. Jolivet: Chez le dépanneur.

Mme Marois: Chez le dépanneur. (10 h 15)

Mme Béliveau: Je ne répondrai peut être pas nécessairement aux questions des chiffres, mais peut-être à la question que vous avez posée à savoir pourquoi on a creusé le dimanche, pourquoi on n'a pas creusé les soirs de semaine. Le principe de base est l'inéquité commerciale, ça je pense qu'il faut le montrer, c'est l'inéquité commerciale qui est la base de tout. Ce qu'on demande, c'est un libre choix, on demande que les gens aient le choix, la liberté d'aller consommer, d'aller magasiner aux heures, aux moments où ils sont disponibles.

Notre principe de base, c'est qu'il y a des commerces présentement qui sont ouverts le dimanche. Il y en a qui sont dans la légalité, il y en a qui sont dans l'illégalité On peut contester aussi la légalité, les exceptions, mais c'est la réalité, il y a des commerces qui sont ouverts le dimanche et il y a un achalandage certain, on parle de 320 000 000 $ par année qui sont dépensés au Québec. On n'a pas de chiffres, malheureusement, pour ce qui est dépensé aux États-Unis, mais je pense qu'on n'a pas besoin de chiffres pour se dire qu'il y a un besoin là. L'été, combien de gens s'en vont à Plattsburgh, à Burlington, à Rouses Point? Il y a énormément de gens. Donc, ça, c'est la réalité d'aujourd'hui.

Ce que nous disons, s'il y a du monde qui magasine le dimanche, c'est qu'il y a un besoin chez les gens. C'est sûr que ça ne sera pas tout le monde qui va devoir aller magasiner le dimanche, ceux qui ne veulent pas y aller. C'est certain qu'il y a des gens qui sont contre parce qu'il y a des gens qui ne travaillent pas à temps plein, il y a des gens qui n'ont pas le même besoin que d'autres. Alors, c'est certain que ça ne sera pas tout le monde qui va aller magasiner le dimanche. Mais il y a un besoin chez les gens Ce que nous demandons, de base, c'est le dimanche. Si vous voulez ouvrir le lundi, mardi, mercredi soir, que vous voulez ouvrir la nuit, le samedi, faites le, libéralisez ça, mais ce que nous demandons, le minimum, la base de départ qu'on demande, c'est le dimanche. Si vous voulez libéraliser les autres types de commerce, si vous voulez ouvrir 24 heures par jour, que les gens se mobilisent et fassent ce qu'ils veulent, on est très, très ouverts à ça, mais ce qu'on demande, c'est un minimum et toute notre présentation est basée autour de ça. On veut le minimum, on veut le dimanche parce qu'il y a un besoin, il y a une réalité.

Les chiffres, tout le monde peut en parier, on peut les interpréter de différentes façons selon qu'on est d'un côté ou de l'autre. On les montre. Il y a 54, 7 %. Vous allez me dire: Bien, il y en a quelque 40 % de l'autre côté. C'est certain. Il y a 55 % des femmes qui travaillent à l'extérieur. Je suis sûre que ces 55 % sont d'accord avec l'ouverture le dimanche ou c'est...

Mme Marois: Mais si vous êtes certaine de ça, et c'est ça mon propos, comprenez-vous... Je vous comprends très bien que vous vouliez l'équité. J'ai bien entendu votre première phrase. Je suis à 100 % d'accord avec vous. Il y a actuellement inéquité. Ça a été mon propos hier matin. Il faut aller vers une équité qui va faire en sorte qu'un marchand ne va pas être traité différemment à côté de l'autre marchand. Ça n'a pas de bon sens.

Mme Béliveau: Une inéquité commerciale, et pour le consommateur ou si...

Mme Marois: Bon. Après ça, pour le consommateur, oui, je sais, vous l'avez abordé aussi. Mais ce que je vous dis, c'est que les éléments

que vous nous apportez en nous faisant des affirmations que je trouve grosses des fois, je les questionne Vous me dites La Coalition estime que lo gouvernement doit baser ses décisions sur les résultats d'études scientifiques plutôt que sur des analyses sommaires de syndicats et de groupes de consommateurs. Et moi, je vous dis. Pourquoi n'avez-vous pas fait l'autre analyse? Est-ce que la vôtre n'est pas aussi sommaire ou ne présente pas autant de limites?

Mme Béliveau: Bien, c'est certain qu'elle présente un côté...

Mme Marois: D'autre part, vous savez, quand vous me dites: II y a des gens qui fréquentent les centres commerciaux de Plattsburg, le dimanche, j'imagine qu'ils ne vont quand même pas faire leur commande principale à Plattsburg. S'ils y vont...

Mme Laliberté: Non. Ça, c'était dans un autre contexte.

Mme Marois: ...vous m'apprendriez des choses.

Mme Béliveau: Oui, mais on parle d'alimentation. Probablement que les gens, l'été, peut être vont faire leur épicerie, ou en tout cas une partie de leur épicerie...

Mme Marois: Mais on ne peut pas l'affirmer, ni vous ni moi.

Mme Béliveau: Non. Mme Marois: D'accord.

Mme Béliveau: Comme on parle de structure de dépannage, présentement, le dimanche, c'est peut-être du dépannage, sauf qu'il faut voir la réalité d'aujourd'hui. La réalité, elle est là. Je pense qu'on ne peut pas s'en sortir. On parle de qualité de vie, de projet de vie sociale. Il y a une réalité et elle est là. Ceux qui ne veulent pas s'en servir du dimanche, ils ne s'en serviront pas. Ils feront comme ils font aujourd'hui. C'est ce qu'on dit.

Mme Marois: Oui.

Mme Guillot-Lemelin: Je peux vous dire, Mme Marois, qu'à l'Association des consommateurs du Québec, lorsqu'on a interrogé les consommateurs, dans un dépistage qu'on appelle "maison", c'est-à-dire qu'on n'a pu le considérer comme scientifique selon les critères, sauf qu'en ce qui concerne le mercredi soir, on avait quand même un bon pourcentage - je donnerai le chiffre exact cet après-midi, d'après moi, c'est autour de 63 %, d'accord? Et on leur a posé la question, puisque de 1987 à aujourd'hui, il y a eu aussi des changements, l'année dernière, à peu près au même moment, en ce qui concerne les marchés d'alimentation Donc, ce que vous dites, on l'a fait Et pour le marché d'alimentation, pour le dimanche, c'était 52 %, où il y avait quand même une bonne proportion des consommateurs qui était favorable.

Donc, on sait que, peut-être d'une façon générale, c'est que les consommateurs...

Mme Marois: Est-ce que vous pouvez nous déposer ces données-là?

Mme Guillot-Lemelin: Certainement, cet après-midi.

Mme Marois: D'accord? Ce serait intéressant qu'on les ait à la commission.

Mme Guillot-Lemelin: D'accord. Étant donné qu'à ce moment-là, c'étaient des sondages maison, on s'est fait critiquer. On s'est fait dire: Bon, ça vaut ce que ça vaut. Effectivement, ce sont les gens dans nos régions qui téléphonent aux membres et qui posent la question. Et, évidemment, on a confiance en nos travailleurs. Mais, étant donné que certains s'interrogeaient sur les sondages maison, on s'est dit: On va s'organiser cette fois-là en étant membre d'une coalition, et on aura des sondages scientifiques. Alors, voilà la façon dont on a procédé.

Mme Marois: D'accord.

M. Falardeau: J'aimerais peut-être ajouter quelque chose. Au-delà de toutes les statistiques ou des recherches scientifiques qui peuvent être faites, regardons seulement la demande commerciale qui est faite actuellement. Pour avoir resté quelques années à l'île Bizard, Mme Marois, vous comprenez que je connais très bien le marché de l'ouest, et aller au marché de l'ouest le dimanche, comparativement...

Mme Marois: Remarquez que je n'y suis jamais allée au marché de l'ouest, mais je devrais peut-être.

M. Falardeau: Vous devriez peut-être, pour voir comment est-ce que la demande est là, le dimanche, principalement. Et je pense que ces commerces-là ont compris qu'il y avait un besoin le dimanche et non les lundi, mardi, mercredi soir. Le marché de l'ouest actuellement, c'est un des marchés publics qui fonctionne le mieux dans la province de Québec et c'est aberrant de voir les gens qui sont là, qui ne font peut-être pas leur commande principale, mais qui achètent tout près de 50 % de leur épicerie sous forme de viande, de fruits et légumes ou de produits d'épicerie. Je pense que ces commerces-là ont répondu effectivement à la demande. Ils n'ont pas attendu qu'il y ait des études statistiques

pour dire: Est-ce que les gens seraient prêts à y aller au début de la semaine plutôt que le samedi? Les gens y vont le dimanche principalement. Et au début de la semaine, à ma connaissance, c'est ouvert pour les agriculteurs qui sont à l'extérieur et non pour les commerces, à l'intérieur.

Mme Marois: À cela, j'aurais le goût de vous dire: Qu'est-ce qui vient avant, la poule ou l'oeuf? Tu es là, tu crées un achalandage, tu fais une publicité... Il y a ça aussi qui joue. Mais je conviens avec vous qu'il y a un certain nombre de marchés, le dimanche, de produits spécialisés - on en convient aussi - qui commandent un certain achalandage.

M. Falardeau: Si vous dites que les fruits et légumes, la viande sont des produits spécialisés, on n'est pas tout à fait d'accord. Les produits spécialisés, quant à moi. ce sont des produits qui ont un créneau très particulier comme - je ne le sais pas, moi - des produits naturels ou des trucs comme ça. Mais les deux kiosques de fruits et légumes qui sont là et les quatre boucheries qui sont là fonctionnent très bien. À ma connaissance, ce ne sont pas des produits spécialisés, dans mon livre à moi, en tout cas.

Mme Marois: Oui, d'accord. Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bélanger): Cinq...

Mme Marois: Sept minutes? Alors, je vais les garder...

Le Président (M. Bélanger): Cinq minutes, vingt.

Mme Marois: ...en vertu de la règle d'alternance.

Le Président (M. Bélanger): Oui, vous pourrez terminer. Alors, j'avais ici M. le député d'Acadie qui avait demandé la parole.

M. Bordeleau: Oui. Je veux juste avoir une information. On a reçu une pétition que vous aviez fait circuler. Tout à l'heure, vous y avez fait référence, je pense, en mentionnant qu'il y avait 49 comtés.

Une voix:...

M. Bordeleau: Bon. C'est bien ça, 49 comtés.

Mme Laliberté: Oui, c'est 49 comtés. La Coalition, ce n'est pas une coalition, c'est aussi des... Nous sommes allés voir ce que les consommateurs pensaient et...

M. Bordeleau: En fait, ma question, précisé- ment, c'est de savoir combien de personnes, dans ces 49 comtés, ont signé la pétition.

Mme Laliberté: Bon. Nous, on a procédé sous forme de mémoires. On a appelé ça des petits mémoires. Donc, on avait comme objectif de rencontrer des gens. On leur exposait nos raisons pour lesquelles on demandait la libéralisation le dimanche et on demandait que, dans les groupes, il y ait au moins 25 signatures par petit mémoire.

M. Bordeleau: Alors, c'est un peu au-dessus de 25 signatures par...

Mme Laliberté: II y en a plus, là II y en a ailleurs. Il y en a qui en ont plus, mais au moins 25 personnes.

M. Bordeleau: Alors, je reviens à ma question plus précise. Tout à l'heure, le député de Nicolet Yamaska mentionnait la complexité du problème. Je veux juste faire une relation entre votre présentation et une présentation d'hier. Vous arrivez un peu à des conclusions... À partir de la même position de libéralisation, vous arrivez, sur un point particulier, disons, à des positions divergentes. Je fais référence ici à votre mémoire, à la page 17, où vous mentionnez que "la Coalition ne croit pas que les petites entreprises soient menacées par l'ouverture des supermarchés le dimanche..." Hier, M. Sletmo, qui favorisait aussi la libéralisation des heures d'ouverture, lui, arrivait à une conclusion différente dans la mesure où on lui a demandé s'il y avait des désavantages à la formule de libéralisation, quels pouvaient être ces désavantages, parce qu'il n'y a pas une formule qui est parfaite

Mme Laliberté: Non.

M. Bordeleau: Et ce qu'il nous a mentionné, à ce moment-là, c'est qu'un des dangers ou un des risques, c'était la fermeture de petits commerces qui, dans son esprit à lui, de toute façon, à long terme, devaient fermer. Et vous, ici, vous nous dites qu'il n'y a pas de difficultés et que les petites entreprises ne seront pas menacées par l'ouverture des supermarchés.

Mme Laliberté: En fait, on se base vraiment sur notre expertise en consommation. C'est que, quand on va chez le dépanneur, on y va pour des raisons spécifiques. Quand on va au marché, on y va pour d'autres raisons. Donc, les mêmes raisons pour lesquelles on va aller chez le dépanneur sont toujours là. Et les dépanneurs, comme on l'a dit tout à l'heure, et ça, c'est une tendance, on le voit, ils délaissent, à part ceux qui se sont introduits dans l'alimentation à cause des heures d'ouverture et qui sont devenus des presque supermarchés, des grandes surfaces de

nourriture, les vrais dépanneurs délaissent l'alimentation de plus en plus; ils s'en vont vers la vidéo; ils vont offrir... Il y en a qui offrent du nettoyage. Il y en a qui offrent différents produits que ceux de l'alimentation. Donc, ils vont vraiment dans leur créneau de dépannage, qui est différent de l'alimentation.

Donc, on ira chez le dépanneur toujours pour les mêmes raisons. On vous soulignait l'exemple de la bière. Les dépanneurs disaient que la bière, c'était ce qui attirait les gens chez eux et que si on leur enlevait ça, ils étaient tous pour mourir. On avait dit, a ce moment-là - c'est l'Association des consommateurs qui défendait le dossier: Non, nous, dans la vraie vie, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Quand on va chez le dépanneur, c'est pour d'autres raisons que quand on va au supermarché, et les dépanneurs, ils sont utiles Ils sont là, il vont rester s'ils savent s'ajuster au nouveau marché, s'ils savent prévoir les besoins de leurs consommateurs. C'est ce qu'on dit aussi dans notre mémoire. Les dépanneurs peuvent s'ajuster très rapidement aux besoins de leurs consommateurs. S'ils s'aperçoivent, dans une certaine région, que les gens ont besoin d'un endroit pour aller chercher des vidéos, ou pour le nettoyage, ou des choses qu'on demande 24 heures par jour, bien, ils vont s'ajuster à leur clientèle. Donc, pour nous, c'est vraiment, par expérience en consommation, du comportement du consommateur qu'on dit: Ne vous en faites pas. Et je peux vous apporter la même chose... Les restaurateurs aussi avaient dit que si on permettait d'apporter du vin dans certains restaurants, ce serait la catastrophe. Et non, on leur a dit la même chose: Les consommateurs vont dans des restaurants où ils apportent leur vin, ils vont pour certaines raisons, dans ces restaurants-là et pour d'autres raisons dans un restaurant rapide. Donc, c'est la même chose pour les dépanneurs, les petites entreprises. Moi, en tout cas...

M. Bordeleau: Juste pour...

Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous me le permettez, un instant. Merci, Mme Laliber-té. Mme Guillot-Lemelin voulait aussi ajouter quelque chose.

Mme Guillot-Lemelin: C'est sûr que c'est dans le même sens que ce que Nicole vient d'annoncer, c'est que nous, en tant qu'association de consommateurs, évidemment, notre but, c'est de protéger le consommateur dans toute cette histoire-là et c'est de ne pas être pour les grands et contre les petits, c'est bien évident. Alors, si le dépanneur du coin - d'ailleurs, on ne serait pas ici aujourd'hui, autour de la table, pour en parler, le problème serait le même - n'innove pas, n'essaie pas d'aller chercher le consommateur pour que ce soit agréable de rentrer chez lui pour aller s'acheter des produits, bien, il va mourir peut-être un jour, c'est évident. Toute entreprise, aujourd'hui, qui ne satisfait pas le consommateur court à sa perte. Alors, donc, effectivement, il devra s'ajuster, quelles que soient les raisons qui vont amener des changements dans le commerce de détail. Évidemment, c'est une question de service à la clientèle. Ce n'est pas parce qu'il est petit qu'il peut se permettre de ne pas bien nous servir, comme le grand, évidemment. Alors, c'est sur ce principe-là qu'il n'y a aucune raison que le petit dépanneur disparaisse. S'il nous accueille, s'il a un service de courtoisie et qu'on se sent bien accueilli chez lui, c'est évident qu'on va continuer d'y aller.

Le Président (M. Bélanger): Alors, simplement un petit point. Vous aviez une question, M. le député de Laviolette? Oui? Alors, on va respecter l'alternance. C'est que j'allais faire une proposition. Comme dans la règle de l'alternance, normalement, on commence du côté ministériel avec la parole, que l'Opposition... Techniquement, c'est l'Opposition qui devrait finir. En simple fair-play, j'aurais aimé vous laisser quelques minutes...

Mme Marois: Nous allons les garder pour la fin, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): ...d'autant plus que M. le ministre est celui qui a le dernier, dernier droit de parole, je pense que ça, c'était compris. Alors, si vous acceptez cette règle-là, ce n'est pas une décision, c'est simplement une position de fair-play que je demanderais qu'on respecte.

M. Jolivet: On est habitué au fair-play.

Le Président (M. Bélanger): Oui! Alors, dans ce sens-là, est-ce que vous désirez toujours, M. le député de Laviolette... M. le député de Laviolette, vous désirez toujours avoir la parole maintenant?

M. Jolivet: Bien, je garde les cinq minutes.

Le Président (M. Bélanger): Excellent. Alors, je cède donc la parole à Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Merci, M. le Président. Moi, j'aimerais adresser ma question à M. Racicot qui, d'après moi, est propriétaire d'un marché d'alimentation, vous nous l'avez dit tout à l'heure. Est-ce que vous êtes en zone touristique ou en zone régulière, normale?

M. Racicot: J'ai les deux.

Mme Dionne: Vous avez les deux. Bon!

M. Racicot: Oui

Mme Dionne: Alors, comme ça... M. Racicot: J'avais les deux. Mme Dionne: Vous aviez les deux.

M. Racicot: J'étais à Saint-Sauveur avant; je ne suis plus à Saint-Sauveur, mais je suis à Montréal.

Mme Dionne: D'accord. Alors, parlons de la zone touristique, puisque c'est là où vous pouviez ouvrir le dimanche. Est-ce que vous aviez des difficultés à recruter du personnel, le dimanche? (10 h 30)

M. Racicot: Pas du tout. Notre personnel se recrute, en général, chez les étudiants, en fait, qui veulent travailler. On leur donne des heures... Ils veulent avoir des heures supplémentaires et ça leur fait plaisir de travailler Ce n'est pas un problème.

Mme Dionne: J'aimerais aussi vous entendre sur la qualité de vie autant des travailleurs - je pense que vous avez beaucoup d'expérience - que des propriétaires de magasins qui sont ouverts le dimanche. Parce qu'on a entendu, hier, des gens qui ont dit: Écoutez, ce n'est pas facile quand on est une famille, tout ça et qu'on doit ouvrir sept jours par semaine. La vie familiale, pour un propriétaire de marché d'alimentation, elle en prend pour son rhume. Est ce que vous pouvez nous parler de ça et aussi au niveau des travailleurs des marchés d'alimentation?

M. Racicot: Je pense que pour un propriétaire, que ça soit un supermarché ou un dépanneur, je ne pense pas que le bonhomme travaille sept jours par semaine comme propriétaire. On est en 1990 maintenant. En 1970, oui, le gars travaillait sept jours par semaine. Mais en 1990, je pense que la madame qui vit avec le gars veut avoir une journée à passer avec son mari et ils s'organisent avec des employés pour se faire remplacer. Je ne vois absolument pas d'inconvénient à ce que le patron... Il prend, de toute façon, une journée de congé dans la semaine, que ce soit un dépanneur ou un supermarché

Mme Dionne: Pour revenir aux travailleurs, quel est le pourcentage de temps - toujours d'après votre expérience - qu'on peut passer comme travailleur à temps plein et travailleur à temps partiel? Est-ce que vous aviez seulement des étudiants qui étaient à temps partiel ou vous aviez du personnel à temps plein qui travaillait...

M. Racicot: Je peux dire que ma proportion est d'à peu près 70 % de partiels contre 30 % de réguliers.

Mme Dionne: Contre 30 % de réguliers?

M. Racicot: Oui J'avais trois magasins. J'ai 300 employés, alors c'est.. Je marche sur le même principe. Mes caissières, mes "wrappers" ce sont tous des étudiants et étudiantes. Ils veulent travailler, c'est évident.

Mme Dionne: Daccord. Alors pour les étudiants, c'est sûr que c'était un salaire de fin de semaine, c'était sûrement bien apprécié. Si on regarde le temps plein, les 30 %, est-ce qu'au fil des années ces gens-là on eu des conditions différentes de travail? Comment se sentaient-ils de travailler le dimanche parce que ce n'est pas facile?

M. Racicot: Je pense que tout le monde a des conventions collectives. On leur donne cinq jours de travail. II n'est pas question de faire travailler un employé six jours ou sept jours, maintenant. Comme je l'ai dit. on est en 1990. II faut s'adapter en 1990 Moi, ça fait dix, quinze ans que mes employés travaillent cinq jours par semaine, 40 heures II n'est pas question de 50 heures par semaine. Ce n'est plus ça, maintenant. Il y a une alternative entre le samedi ou le dimanche. Le bonhomme, ça ne lui fait rien de travailler le dimanche. Il n'y a pas de problème là-dessus.

Mme Dionne: II n'y a pas de problème là dessus?

M. Racicot: Pas du tout.

Mme Dionne: Pas dans ce que vous avez vécu. Parce que je posais la question... On en parle beaucoup dans... Je pense que les gens qui sont justement contre l'ouverture le dimanche parlent de cette qualité de vie des travailleurs...

M. Racicot: Je pense qu'elle est faussée. Ce n'est pas vrai. Je ne pense pas. Maintenant, le personnel dans l'alimentation travaille entre 38 et 40 heures. Il n'y a pas de 45 heures.

Mme Dionne: Sur cinq jours?

M. Racicot: Sur cinq jours. Et il va y avoir une alternance. Qu'est-ce qu'on peut faire.. Ce que je faisais à Saint-Sauveur, on avait un employé, disons un boucher, si vous voulez. Le boucher pouvait travailler... J'ai quatre bouchers, disons. Bien, ils alternaient. Une journée par mois ils travaillaient le dimanche. Et ça faisait leur affaire. Chacun a un congé des fois dans la semaine, ça fait son affaire II est avec son épouse, il fait son magasinage. Parce qu'il ne peut pas faire son marché le dimanche, alors il est obligé de prendre une journée dans la semaine pour le faire. Je pense qu'il n'y a absolument pas de problème.

Mme Dionne: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M le député de Taschereau.

M. Leclerc: Merci, M. le Président Moi aussi, comme ma collègue, j'ai une question sur la qualité de vie. Parce que vous qui êtes pour et ceux qui sont contre et qu'on va entendre tout à l'heure, je pense que c'est un des points d'achoppement. Vous, vous prétendez que le fait d'être ouvert le dimanche ça va permettre aux gens, aux consommateurs d'avoir une meilleure qualité de vie et que ça ne touchera pas finalement la qualité de vie des travailleurs.

Ceux qui sont contre vont sans doute nous dire que le consommateur, ça n'augmentera pas sa qualité de vie parce qu'il a bien d'autres choses à faire le dimanche et que ça va, par contre, embêter un certain nombre de travailleurs. Je pense qu'il y a une différence fondamentale de perception entre tes deux groupes et, de toute façon, je poserai également la question aux gens qui sont contre tout à l'heure.

Moi, je veux savoir de M. Falardeau... Vous, je pense que vous avez un Métro dans la région de Québec?

M. Falardeau: Un Provigo.

M. Leclerc: Un Provigo dans la région de

Québec. Est-ce que vous avez ouvert... À un moment donné, il y a eu, il y a quelques mois, une campagne d'ouverture le dimanche, ce n'est pas un secret, c'était à pleines pages dans les journaux. Vous, est-ce que vous avez ouvert, à ce moment-là?

M. Falardeau: Si j'étais hors la loi? Oui, j'étais hors la loi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Leclerc: Vous n'avez pas eu trop de problèmes avec les amendes? Non?

M. Falardeau: Non, ce n'était pas si pire.

M. Leclerc: Donc, ça prouve qu'elles ne sont pas assez hautes. Cela dit, est-ce que vous pouvez nous dire, vous qui êtes passé, du jour au lendemain, d'un établissement qui était toujours fermé le dimanche à un établissement qui a ouvert un ou deux dimanches, je ne sais pas, comment les employés ont pris ça? Et comment les consommateurs... D'abord, est-ce qu'ils se sont déplacés pour aller dans votre supermarché? Ont-ils acheté une pinte de lait et une livre de beurre ou est-ce qu'ils ont fait leurs emplettes complètes? Est-ce que ce sont des personnes âgées qui, à la retraite, peuvent aller à peu près n'importe quand au supermarché, mais qui ont dit: Tiens, ça ferait peut-être quelque chose à faire dimanche, ou est-ce que ce sont des familles ou des chefs de famille monoparentale qui vous ont dit. Aïe! On est bien contents, ça m'arrange que ce soit ouvert. C'est ça que je voudrais savoir. Vous, comment avez-vous vécu ça, sur le terrain, en ouvrant, vous l'avez confessé, illégalement? Loin de là notre idée de cautionner ça, mais c'est fait aujourd'hui, on pourrait peut-être au moins tirer ce que vous avez remarqué et chez vos employés et chez les consommateurs.

M. Falardeau: Je pense qu'il y a deux volets: le premier, c'est la réaction qu'ont eue mes employés. Évidemment, quand je leur ai parlé de la possibilité d'ouvrir le commerce le dimanche, les gens étaient réfractaires à ça. Évidemment, les gens travaillent des plages de cinq jours sur une possibilité de six. Mais je pense que ce sont des réactions tout à fait humaines. On vous demanderait, messieurs, de siéger douze mois par année, je pense qu'à un moment donné, vous diriez: Bien là, on aurait besoin d'un petit "break", à un moment donné, pour faire d'autre chose. Mais les gens ne travailleront pas plus que cinq jours par semaine parce que la loi permettrait qu'on ouvre les commerces sept jours, c'est bien évident. Mais je peux vous dire que je n'ai pas eu de problème du tout à recruter de la main-d'oeuvre pour travailler le dimanche et le pourcentage d'employés à temps partiel qui travaillent dans un supermarché serait peut-être environ 70 % de la main-d'oeuvre, ce que M. Racicot confirmait tout à l'heure.

Ce dimanche-là, j'ai eu tout près de 80 % en main-d'oeuvre qui étaient des employés à temps partiel parce que, eux, vont à l'école. Les étudiants maintenant fréquentent les cégeps, universités et gardent des emplois à temps partiel pour payer les frais de scolarité qui vont augmenter et ils doivent trouver des salaires d'appoint, des revenus d'appoint. Alors, travailler le samedi et travailler le dimanche, pour eux, ce sont des revenus supplémentaires. Ce qu'on disait tout à l'heure, c'est pareil Ce sont les employés qui travaillent à temps plein, qui ont la charge dune famille, qui ont des responsabilités, peut-être que ça ne leur convient pas, mais, aujourd'hui, il y a de plus en plus de secteurs d'activité où les gens travaillent cinq jours, deux jours de congé, qui ne sont pas vraiment du lundi au vendredi, qui peuvent être le samedi et le dimanche et qui peuvent avoir des journées de congé, dans la semaine, consécutives, qui peuvent être le mardi et le mercredi. Si, jumelé à ça, on doit faire des modifications au niveau de la Loi sur les normes, on n'est pas contre non plus. Si les salariés réguliers, qui sont des soutiens de famille, qui ne veulent pas avoir leur horaire de famille dérangé à cause de ça, qui auraient deux jours de congé consécutifs dans la semaine, je

pense que ça réglerait beaucoup le problème Les gens seraient très heureux de ça. Il y a beaucoup de travail maintenant, professionnel ou non, qui se fait le samedi et le dimanche. Les gens ont congé dans la semaine. À ce niveau-là, je pense que la société a évolué énormément, l'apparition des femmes sur le marché du travail vient changer toutes les habitudes.

Au niveau des clients, je peux vous dire que les gens ont magasiné dans un climat très détendu, très différent et, en termes de... Évidemment que les gens savaient que j'étais ouvert le dimanche parce qu'on en avait fait écho un petit peu, c'était un chiffre d'affaires très intéressant, mais le climat dans lequel les gens ont magasiné était très détendu Les gens prenaient plus de temps pour faire leur épicerie et ils n'avaient pas de pression, ils n'avaient pas de contrainte de temps pour faire leur épicerie. Il y en a qui ont fait leur commande principale, mais je ne dirais pas que c'est représentatif parce que c'était une occasion, c'était un coup d'épée dans l'eau, ce n'était pas une habitude. Alors la majorité des gens sont venus chercher des choses d'appoint parce que soit qu'ils avaient oublié d'acheter ces trucs-là durant la semaine, soit qu'ils avaient de la visite à la maison. Ce sont les commentaires que les clients m'ont rapportés ou qu'il y avait certains produits qu'ils ne pouvaient pas se procurer dans un autre supermarché, qu'ils se sont procurés dans le mien parce que j'étais ouvert et que les autres étaient fermés. C'est évident Mais je pense que le tableau qui est ici répond très bien à la question au niveau des employés: la population active qui représente moins de 1 %.

Mme Laliberté: La population active du Québec, vous avez dans le commerce de détail, c'est 13 %; dans le commerce de l'alimentation, c'est 2,6 % et ce qui serait requis de travailleurs pour le dimanche, c'est moins de 1 %. C'est ça ici.

M. Falardeau: Là-dedans, on parle aussi des...

Mme Laliberté: Si on visualise ça, je pense que ce n'est pas une loi pour une minorité dont on a besoin, mais c'est une loi pour une majorité.

M. Falardeau: Et je pense que dans ce moins de 1 %, les employés à temps plein... temps partiel. Je pense que le travail effectué le dimanche va être beaucoup plus un travail effectué par des employés à temps partiel. On aura besoin d'employés à temps plein, c'est évident, qui demandent plus de responsabilité, mais je pense que, de façon majoritaire, ces employés.. Même, d'ailleurs, le samedi, dans la majorité de nos établissements, ce sont beaucoup plus des employés à temps partiel qui sont là parce que c'est plus facile de recruter une main-d'oeuvre, le samedi, qui est disponible, qui est accessible que dans la semaine.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon, il vous reste cinq minutes vingt.

M. Jolivet: Bien, je vais commencer par deux...

Le Président (M. Bélanger): Ah! M. Jolivet, député de Laviolette.

M. Jolivet: ...oui, par deux réflexions. D'abord, quand Mme Laliberté a parlé d'une personne de l'extérieur disant qu'elle a eu de la difficulté à s'adapter au Québec, je pourrais dire la même chose et vouloir l'utiliser à mes fins en disant qu'une personne qui a vécu à Toronto, qui est habituée de tourner à droite à la lumière rouge va avoir de la difficulté à s'habituer au Québec après deux ou trois contraventions. Tu sais, je veux dire que ça, pour moi, là, ça ne m'émeut pas du tout.

La deuxième, c'est quand on a fait des batailles sur la question des chemises puis du linge au Québec On a dit: II ne faudrait pas s'opposer à l'entrée de ce qui vient de Taiwan ou d'ailleurs parce que les consommateurs vont acheter à meilleur prix Je dois vous dire qu'aujourd'hui, à Grand-Mère, il n'y a plus de chemises qui se fait, il n'y a presque plus de textile qui se fait, puis tout ce qui vient de l'extérieur est plus cher et de moindre qualité. Ça fait que ça, là, quand on le regarde bien honnêtement, il faut se poser la question: Est-ce que ça n'aura pas des effets sur l'ensemble des prix à la consommation pour le consommateur lui-même?

Deux questions Dans un contexte de libéralisation, est-ce que vous seriez d'accord, à ce moment-là, pour dire que, pour éviter toute inéquité quelconque, qu'on fasse disparaître - ou même actuellement, ça dépend comment vous le voyez - toute vente par catalogue, que ça soit Sears, que ça soit Club Price, que ça sort Québec Loisirs? C'est quoi, votre position dans l'un ou dans l'autre? Est-ce que. pour vous, ça veut dire que ça, ça serait ouvert, puis ça serait des formules nouvelles au niveau de la vente par catalogue?

Et la deuxième question: À la page 20. vous dites que la Coalition a beaucoup d'admiration pour les travailleurs, etc., en disant qu'il faut voir ce qui se passe le samedi à 11 heures, la cohue, la bataille, en tout cas, pour avoir un panier. Et là, vous terminez en disant: En ouvrant les supermarchés le dimanche, on permettrait d'étaler sur une plus longue période la cohue Je ne crois pas comprendre que vous seriez d'accord pour qu'il y ait une cohue le dimanche, là?

Mme Laliberté: C'est une erreur.

M. Jolivet: D'accord, ce n'est pas grave.

Mme Laliberté: Je l'ai dit tout à l'heure, c'est l'achalandage.

M. Jolivet: Oui, mais c'est parce que...

Mme Laliberté: C'est une erreur de transcription.

M. Jolivet: Mais je veux aller là parce que moi, là... Je vous pose la question suivante: Quelqu'un qui veut avoir le marché le dimanche - puisque vous dites qu'il y a tellement de gens qui veulent magasiner le dimanche, là - est-ce qu'il n'y aurait pas, justement, le dimanche, de la part des entreprises, les gros supermarchés en particulier, la capacité de dire: On fait une vente, puis une telle vente que, là, on va en avoir encore davantage le dimanche? Est-ce que, dans le fond, l'ouverture le dimanche ne reporterait pas sur une autre journée ce qui se passe les autres journées et que l'étalage sur la semaine serait peut-être une meilleure façon que de le faire un dimanche? Parce que, il est évident que, si je veux avoir la part du marché, je vais faire de méchantes belles ventes cette journée-là, le dimanche, pour avoir du monde.

Mme Laliberté: En tant que consommateur, en tout cas, je n'aurais aucune objection aux ventes du dimanche si c'est à mon avantage. Ha, ha!

M. Jolivet: Mais ça n'enlèvera pas l'achalandage...

Mme Laliberté: Non.

M. Jolivet: ...ça n'enlèvera pas les batailles des gens...

Mme Laliberté: C'est parce que

M. Jolivet: ...qui vont aller acheter à 1,49 $ le mercredi, là, hein?

Mme Laliberté: Oui, bien, il y a plus d'heures le dimanche que le mercredi soir, vous avouerez.

M. Jolivet: Non, mais...

Mme Laliberté: Bon, en tout cas, c'est la meilleure...

M. Jolivet: D'accord, mais ce que je veux dire, c'est que vous reportez sur une autre journée, vous acceptez, dans le fond, qu'il y ait ce que vous appelez l'achalandage de la journée du samedi un dimanche.

Mme Laliberté: Bon. Vous avez posé deux questions et j'aimerais que vous les répétiez parce que, là, vous avez élaboré et je ne suis plus certaine de la question que vous voll!e2 poser.

M. Jolivet: La première, c'est la vente par catalogue.

Mme Laliberté: Bien non. Nous, ce qu'on demande, c'est de la concurrence: la meilleure garantie de prix pour les consommateurs, c'est la concurrence. Donc, on ne demande pas d'en enlever, on demande de libéraliser.

M. Jolivet: Comme consommateur...

Mme Laliberté: Même dans l'alimentation, quand on veut rétablir l'équité, on a deux formules: fermer ou ouvrir. Nous, on vous dit: Si vous fermez, non, on ne peut pas accepter que ça soit fermé parce que, là, il n'y aura pas assez de magasins pour servir les gens le dimanche, qui ont besoin du dimanche. Et puis, il y en a une cohue, le jeudi et le vendredi. Quand on parle... ce sont des choses vécues. Moi, je ne trouve pas que c'est une qualité de vie que d'arriver le jeudi soir au marché... Parce qu'il faut y aller le jeudi, parce que mon gérant m'a dit: Si vous voulez profiter des aubaines, bien, venez le jeudi. Hein? Bon! Alors, d'arriver le jeudi soir au marché, d'attendre pour avoir un panier pendant dix minutes, de finalement mettre la main sur un panier, de partir avec mon panier, de mettre quelque chose dedans, de me retourner de bord pour aller chercher du café et de m'apercevoir qu'on a vidé mon panier et qu'on est parti avec. Alors, je vous assure que, moi, je ne trouve pas que c'est bien pratique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Jolivet: Je change de supermarché.

Mme Laliberté: Bon! Puis, quand vous arrivez le samedi matin à 11 heures, à l'épicerie, c'est la même chose, je l'ai fait deux fois. La course au panier... Je ne trouve pas que c'est une qualité de vie. Je pense que si j'y allais le dimanche, je pourrais avoir plus d'heures, être moins stressée et je pourrais avoir accès aussi à des produits plus frais parce que, au lieu de défaire les étalages à 15 heures de l'après-midi, on les referait, les étalages à 15 heures de l'après-midi. Donc, pour moi, ce serait certainement meilleur en termes de qualité de vie, d'avoir des épiceries ouvertes le dimanche. Et je vous dis que...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Laliberté: ...le mercredi, moi, c'est une... Le mercredi, on peut dire... c'est comme

dans le document du MICT, c'est peut être un maintien, même pas un maintien, c'est une petite amélioration de la qualité de vie sur tout l'ensemble. Alors on ne parle pas de maintien mais d'amélioration de la qualité de vie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la députée de Taillon, il vous reste une minute.

Mme Marois: II ne me reste qu'un temps pour la conclusion. J'avais une question à poser; je vais la faire en remarque. Quand vous dites que 1 % des travailleurs et des travailleuses serait concerné, c'est environ 30 000 personnes. Je peux me tromper, mais c'est autour de 30 000 personnes, ce qui, évidemment, concerne la vie de peut-être 60 000 ou 70 000 personnes et peut-être davantage...

Mme Laliberté: En majorité des étudiants.

Mme Marois:... parce qu'il faut aussi imaginer que ça amène le fait que d'autres types de services ouvrent aussi pour accommoder les consommateurs et, à mon point de vue, c'est un pas dans la porte pour ouvrir - et c'était assez évident au début de vos interventions - vers le commerce de détail en général.

Il y a une affirmation que je ne peux pas suivre, quand vous dites: Permettre l'ouverture ne veut pas dire obligation d'ouverture. Mais, si je me tourne vers les gens d'affaires, ils savent très bien que, dans certains contextes, dire: Nous permettons mais nous n'obligeons pas, amène certains commerçants à être obligés d'ouvrir, sinon ils perdent leur part de marché, et l'alimentation est actuellement assez serrée. M. Nantel disait hier qu'on se battait pour 10 000 000 $, pour 15 000 000 $. pour 120 000 000 $... de chiffre d'affaires réparti sur l'ensemble du territoire.

Ce marché-là est tellement serré que je ne peux accepter votre affirmation que ça ne crée pas d'obligation; ça en crée une si on veut pouvoir rester dans le marché. Et vous savez très bien que sur certaines rues, dans certains coins, lorsqu'on va ouvrir un commerce, si les autres n'ouvrent pas, ce n'est pas intéressant de le faire. Donc, on va créer une pression pour que les autres commerces ouvrent, alors on recrée une autre forme d'inéquité que, pourtant, on veut actuellement combattre. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre, en conclusion.

M. Tremblay (Outremont): Ma conclusion, c'est de remercier Mme Laliberté et son équipe de l'excellente présentation qu'ils nous ont faite ce matin. Soyez assurés qu'on va prendre en considération votre argumentation dans la décision que nous aurons à prendre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail remercie la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation le dimanche, et elle suspend ses travaux une heure, c'est-à-dire jusqu'à 11 h 30.

Une voix: En tout cas, jusqu'à 11 h 30.

Le Président (M. Bélanger): À 11 h 30, on demanderait à tout le monde d'être présent, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 10 h 48)

(Reprise à 11 h 34)

Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux pour procéder à une consultation générale et à des auditions publiques sur les modifications à apporter à la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux. Nous recevons présentement la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche, Nous avons une heure trente pour discussions avec vous.

Pour vous expliquer un peu la procédure, d'abord, vous vous présentez, donnez vos noms. Chaque fois que vous aurez une intervention à faire durant la période de questions, s'il vous plaît, donnez votre nom avant. Ce n'est pas pour nous faire plaisir, à nous. C'est tout simplement aux fins do transcription au Journal des débats. Les petites madames qui font la transcription des débats, en bas, ont un plaisir fou quand on donne les noms, mais ont un travail épouvantable quand on ne les donne pas. Il faut les considérer. Elles travaillent dans l'ombre. Si vous pouviez vous présenter. Vous avez 30 minutes pour présenter votre mémoire et, ensuite, il y aura la période d'échanges avec les parlementaires. Alors, si vous voulez procéder, je vous en prie.

M. Tremblay (Marcel): D'accord. M. le Président, M. le ministre, Mme la députée, membres de la commission, mon nom est Marcel Tremblay C'est moi qui suis le porte-parole général au niveau de la Coalition; je suis vice-président au niveau de la FTQ; je suis président des TOAC, local 503

J'ai avec moi des gens qui regroupent à peu près tous les acteurs que l'on retrouve au niveau du commerce au détail. Il y a des gens qui sont

ici présents qui sont des gens du non alimentaire, des gens qui représentent les commerçants et des gens qui représentent les commerces. J'aimerais que chacun se présente lui-même.

M. Nantel (Yves): Mon nom est Yves Nantel. Je suis de la Fédération des associations coopératives d'économie familiale du Québec, de la Fédération des ACEF; je suis responsable do la commission pratique commerciale qui, elle, est responsable de ce dossier des heures d'ouverture

M. Gadbois (Michel): Je suis Michel Gadbois. Je suis le directeur de la Coalition.

M. Lord (Gérald): Gérald Lord, président du Regroupement des détaillants et vice-président de la Coalition, marchand IGA.

M. Vaillancourt (Paul): Paul Vaillancourt, président de la Corporation des marchands de meubles du Québec et responsable dans la Coalition au niveau du non alimentaire.

M. Tremblay (Marcel): Ça va au niveau de la présentation. Je pense qu'il y a un fait qu'il faut remarquer au niveau de cette Coalition. C'est quand même, je pense, un moment quand même assez historique ici, au Québec, de retrouver à une même table une espèce de solidarité entre travailleurs, propriétaires indépendants et grossistes, ainsi qu'une très grande majorité d'associations représentant les consommateurs. Ça, ce sont des gens qui, finalement, travaillent dans ce secteur comme tel au niveau pratique, qui sont là tous les jours, qui peuvent réellement vous donner le "feeling", ce qui se passe dans ce secteur, les besoins autant au niveau des consommateurs, des commerçants que des travailleurs et travailleuses que représente finalement ce secteur, de même que les gens qui ne sont pas syndiqués et qui sont également des commerçants et des gens qui ne font pas également partie de l'alimentation.

Ça, c'est un consensus qui existe finalement depuis 1988. D'ailleurs, déjà, au bureau du premier ministre, je pense qu'on avait présenté ce que cet organisme présentait comme position et les raisons de cette position et que la majorité de ces positions s'appuyaient sur les recommandations finalement du rapport Richard. Et lorsque, d'ailleurs, a eu lieu cette espèce de commission Richard, de commission pour aller chercher une espèce d'information dans le secteur, je pense que tout ce que la commission Richard avait soumis comme tel, a fait une espèce d'unification d'un groupement, qui regroupait l'ensemble, comme je le disais tout à l'heure, des acteurs, et qui faisait qu'on adoptait finalement presque unanimement le rapport Richard comme tel.

Également, au niveau de cette Coalition, on retrouve environ 1 500 000 personnes qui sont représentées par différentes personnes, ici dans cette salle, qui se sont d'ailleurs déplacées ce matin. Et tout ça pour vous dire que, finalement, la loi sur les heures d'ouverture, c'est quand même une loi très importante. Pour que des gens prennent la peine de se déplacer, de venir ici, ce matin, nombreux, qui représentent à peu près toutes ces associations et ces regroupements... C'est une loi, finalement, qui touche l'ensemble de la société et c'est réellement une loi de société.

On retrouve également dans ces organismes, des organismes quand même assez importants comme la FTQ, la CSN, la CEQ, la CSD. On retrouve l'UPA. On retrouve les AFEAS. On retrouve des associations telles que le Cercle des fermières, qui sont quand même des associations très représentatives, je pense, au niveau de la population comme telle.

C'est sûr que cette Coalition a basé finalement ses interventions sur deux prémisses qui sont les suivantes et que vous retrouverez, d'ailleurs, à la page 5 de notre mémoire. L'une de ces premières prémisses est la suivante: Une opposition ferme à toute libéralisation des heures d'affaires le dimanche, dans le secteur de l'alimentation, puisqu'elle aurait un effet d'entraînement sur d'autres secteurs du commerce des biens et services, de détail comme de gros. La deuxième: La défense de la qualité de vie que représente le dimanche comme journée commune de vie sociale contre son érosion par la libéralisation des commerces le dimanche.

Maintenant, j'aimerais passer la parole au représentant du non alimentaire, M. Vaillancourt.

M. Vaillancourt: Évidemment, notre position sur le non alimentaire, et ce qui nous fait craindre un peu, ce sont les effets de débordement. Les effets de débordement, quand on parle de l'alimentation, actuellement, dans laquelle il existe une certaine inéquité, à entendre parier plusieurs, pour nous autres, ces effets de débordement sont un point des plus importants parce que c'est ouvrir une porte à une libéralisation des heures des plus complètes dans l'avenir. On ne voudrait pas se ramasser dans deux ans, comme une personne l'a mentionné, ce matin, devant une autre commission parlementaire pour définir le reste du secteur du commerce de détail, au niveau des heures d'ouverture.

Mais il y a des exemples concrets auxquels il faut faire attention et qu'il faut mentionner. Je donne un exemple. En 1985, on a amendé une loi pour les marchés publics La définition des entreprises qui devaient oeuvrer dans les marchés publics a été établie dans cette loi et dans cet amendement Je ne sais pas si quelqu'un parmi vous a visité récemment des marchés publics, mais, moi, je me suis aperçu que, après quelques années... Évidemment, il y avait une mode de marchés publics et on en a créé peut-être un peu plus que la demande. Croyez-moi, dans les

marchés publics que vous allez visiter aujourd'hui, vous allez trouver des coiffeurs ou des salons de coiffure, des agences de voyage. Dans le dernier, j'ai même vu un vendeur d'automobiles ou location-achat d'automobiles. Alors, c'est devenu un royaume pour contourner la loi sur les heures d'ouverture dans les commerces de détail.

Qu'est-ce qu'on fait avec - je vous donne un autre exemple - les grands Miracle Mart qui ont, dans la majorité de leurs magasins, un secteur alimentaire? Comment va-ton faire pour essayer de ne contrôler que le secteur alimentaire et que les autres départements de vente ne se ramassent pas sur les tablettes de l'alimentaire? C'est un peu ça qu'on retrouve actuellement Nous, le non alimentaire, on se dit: II faut combien de temps encore pour qu'on retrouve.. Et d'ailleurs, ça existe déjà sur les tablettes des grands pharmaciens: des micro-ondes, des cafetières, des électroménagers. Alors, on se dit: L'effet de débordement, il est là. Le statut des entreprises, comme tel, ça n'a pas été tellement touché.

On vient de voir apparaître, et on en entend parler couramment, ce nouveau mode de club d'achat, Club Price ou autres, parce qu'aux États-Unis il en existe d'autres. Club Price en est un qui a touché ici, actuellement, le Québec, mais il y en a certainement d'autres qui pourront suivre dans l'avenir. Tout ça, évidemment, fonctionne avec le problème qu'on a de notre chef-d'oeuvre d'incohérence, comme le mentionnait M. le ministre, au début de cette commission, avec cette loi qu'on a ici, actuellement présente.

Il y a un phénomène qui est très important au Québec et qu'il ne faut pas oublier, qu'il ne faut pas négliger. Moi, je l'appelle un peu le patrimoine économique du Québec. Eh bien, 70 % des entreprises de commerce de détail sont des entreprises privées contre 30 % qui sont des chaînes nationales ou autres. En Ontario, vous allez trouver 55 % de ces entreprises-là qui sont des entreprises d'entrepreneurship privé. En Colombie-Britannique, et je vous donne les trois grands schelems qui contrôlent peut-être 75 % du commerce de détail de tout le Canada... 57 % en Colombie-Britannique. Qu'est-ce qui arrive dans cinq ans si on prend la formule de 70-30 et qu'elle est inversée? Le Québec deviendra une autre province comme l'Ontario, une province de succursales et beaucoup moins de sièges sociaux. Quand on dit que le Québec, par tête, per capita, actuellement, a le plus de sièges sociaux, c'est vrai. Mais n'oubliez pas que, là-dedans, il n'y a pas seulement les nationales, il n'y a pas seulement les grandes entreprises. Il faut aussi considérer qu'il y a des PME qui font partie de ça.

Alors, comment on protège ça? Évidemment, pourquoi on est rendu là, au Québec? Eh bien, ce n'est pas seulement le phénomène des minorités, mais c'est surtout l'entrepreneurship québécois qui a fait qu'il y a 25, 30 ans, on a commencé à se regrouper dans différents secteurs du commerce de détail, pas seulement l'alimentation, mais... L'alimentation a créé ce qu'on sait aujourd'hui, des Provigo, des Métro et des corporatifs Dans l'ameublement, vous le retrouvez; dans le secteur de la ferronnerie, vous le retrouvez; dans plusieurs autres secteurs de commerce de détail, vous le retrouvez Alors, cet effet de regroupement de même, sous des bannières unifiées, a fait que, cela a préservé nos entreprises québécoise du commerce de détail.

Alors, ça n'améliorera pas définitivement, une libéralisation ou une ouverture le dimanche, parce qu'on a une autre statistique qui dit aussi que, dans nos commerces de détail, 68 % de ces entreprises là sont des entreprises familiales de cinq employés et moins, de trois employés et moins, et, la grande majorité, de cinq employés et moins. Alors, comment une entreprise régionale ou locale dans une autre municipalité que les grands centres, soit Montréal et Québec, peut-elle venir à bout de compétitionner des chaînes qui pourraient s'installer régionalement, dans nos régions, et qui deviendraient des chaînes nationales, compétitionner avec ces gens-là sur des heures d'ouverture libéralisées? Il y a ce phénomène d'entrepreneurship québécois qui existe, qui a fait ses preuves. Il a fait ses preuves quand on regarde les autres provinces et il ne faut pas le négliger, il faut continuer à le protéger.

Évidemment, ce matin, on a entendu parler de liberté de choix. La liberté de choix, évidemment, quand on parle d'alimentation... Ce matin, on disait que ça pouvait ne représenter que 30 000 emplois, mais quand vous allez prendre tout l'ensemble du commerce de détail, on ne parie plus de 30 000 emplois, mais on parle de beaucoup d'emplois. Alors, la liberté de choix, sur le dos de qui veut-on la faire? Est-ce qu'on veut commencer à créer deux classes de citoyens, deux classes de travailleurs au Québec? C'est ça, le point qu'il faut se demander, c'est un choix de société Nos entreprises québécoises de détail sont compétitives, l'ont été, ont pris les moyens nécessaires de le demeurer au cours des derniers 25, 30 ans et je pense que c'est important, au Québec, qu'on protège ce système de commerce de détail qui existe. (11 h 45)

Dans l'effet du non alimentaire, il faut surtout ne pas oublier que dans la plupart des commerces de détail, ça prend du personnel qualifié, du personnel entraîné. Autrement dit, dans mon domaine ou dans le domaine de la construction, ce n'est pas un bonhomme au bout d'une caisse enregistreuse qui fout des aliments ou des boîtes dans un sac. Ça ne prend pas un entraînement et une compétence de travail énorme pour faire ça Par contre, ça couvre un dossier important au niveau de l'emploi à temps

partiel ou contractuel chez nos jeunes, chez nos étudiants. Je ne mets pas ça en doute. Mais quand vous allez tomber dans les autres lignes du commerce de détail, dans l'ameublement, ça prend des personnes qualifiées et entraînées. Moi aussi, je me promène un peu partout dans le monde et je peux vous dire qu'aux États-Unis, quand on me cite des exemples américains, de municipalités frontières ou autres, ou touristiques, c'est vrai... Mais c'est aussi vrai qu'il ne faut pas négliger que, quand on pénètre dans ces magasins-là, eh bien, on a le service qu'on doit s'attendre d'avoir, mais on n'a pas l'information, le service et la compétence qu'on devrait s'attendre de recevoir.

Alors, je me permets de terminer là-dessus et de transmettre la parole à mon collègue, immédiatement, sur l'alimentaire.

M. Lord: Gérald Lord, secteur alimentaire. Je peux vous dire qu'on prône, nous autres aussi, l'équité, mais l'équité par la fermeture le dimanche. Je pense que ça rejoint énormément de gens parce que... Pour ceux qui se souviennent, il y a deux ans, au Reine Elizabeth, il y a eu un colloque sur les heures d'affaires. J'étais panel-liste. Ma position est la même, c'est non au dimanche. D'ailleurs, la coalition de 1 500 000, qui a beaucoup de représentants dans la salle, a commencé à ce moment-là. M. Laberge était présent. Nous avons, aujourd'hui, M. Tremblay, vice-président de la FTQ. Donc, 1 500 000 gens de la province de Québec, ça doit vouloir dire quelque chose. Donc, c'est vraiment l'équité, mais par la fermeture, bien sûr, tout en laissant le dépannage le dimanche.

Brièvement, j'interviendrai sur trois aspects demandés par le gouvernement pour l'application de la loi. Et ça, vous l'avez à la page 13, au chapitre 2 du document de la Coalition. C'est la révision des exemptions, le transfert au niveau local du pouvoir décisionnel de l'ouverture le dimanche du secteur alimentation et les mécanismes et modalités d'application de la loi. En ce qui concerne les deux derniers aspects, vous les trouverez dans nos propositions, aux pages 11 et 12, et je pourrai les expliquer à la période de questions.

Pour ce qui est des exemptions, la Coalition appuie les recommandations du rapport Richard et, à la page 44 du même rapport du comité Richard... Et M. Richard, on vous salue. Dieu sait si vous avez fait un travail qui a duré environ neuf mois et vous étiez vraiment sur le terrain pour tout comprendre. Par contre, la Coalition tient à mettre en garde les membres de la commission face aux revendications de certains droits acquis que pourraient invoquer certains marchés publics, marchés aux puces et pharmacies en s'appuyant sur les décrets de janvier 1985 et février 1987. L'abrogation de ces décrets, telle que recommandée par le comité Richard, à la page 43 du rapport Richard, est, en plus, appuyée par le jugement tout récent, le 12 septembre 1989, durant la campagne électorale, dans la cause de la plantation de fruits Levy inc. qui déclare le règlement de février 1987 inopérant dans sa totalité. Et ça, la référence, vous l'avez dans le document d'information du gouvernement, aux pages 2 et 3.

Enfin, cette fameuse formule dont M. Vaillancourt parlait tantôt, les entrepôts-clubs, constitue un nouveau secteur de la distribution au détail qui n'est réglementé par aucune loi actuelle.

L'achalandage en dehors des heures d'ouverture normales démontre que, par le biais de cartes de membres, par une structure de prix à trois niveaux, ils font une concurrence directe aux commerçants conventionnels.

Donc, j'insiste que si la loi tient compte de ces éléments, ça rejoint exactement les trois critères du gouvernement: l'équité entre les commerçants, les besoins réels du consommateur le dimanche, la qualité de vie des Québécois. En parlant d'équité entre commerçants, je pense que je peux vous en parler, de père en fils on est épicier depuis au-delà d'une cinquantaine d'années et ça fait 30 ans, moi-même, que je suis à temps plein dans une épicerie. Le vrai problème, fondamentalement, à part les grandes corporations qui ont bien des raisons bien connues pour ouvrir sans limite, sept jours par semaine, 24 heures sur 24... Nous retrouvons un petit nombre de marchands qui les appuient, et cela, pour deux raisons différentes d'équité. Le premier, c'est un petit groupe qui pense qu'il va faire de grosses affaires le dimanche et probablement que ces gens-là se disent: On va devenir tellement gros que ça va être comme les corporations, on n'aura pas besoin de travailler le dimanche. L'autre groupe, ils sont plus nombreux, on les connaît, j'en ai vu ici ce matin. On parle ensemble, on est tous des confrères épiciers; on n'est pas des ennemis dans la vie, on est des amis, disons, au niveau de la business, mais en tant qu'épiciers québécois, on vit les mêmes choses. Ils se sont fait dire par les grandes corporations, comme je me suis fait dire, comme les gens de la Coalition avec moi se sont fait dire, en 1988, précisément au mois d'octobre: C'est tout décidé, messieurs, le gouvernement ne fait pas appliquer la loi. Regardez ça, ce que vous faites avec les injonctions: vous dépensez de l'argent, vous prenez des injonctions partout, ça n'aboutit pas, ça traîne sur les tablettes, il y a toutes sortes de choses qui se passent en cour, on manque de jeu, c'est effrayant. Vous voyez, ils ne veulent pas, ils sont convaincus que le gouvernement n'a pas les moyens ni la volonté politique d'avoir une loi qui respecte le dimanche. Cependant, mesdames et messieurs, depuis les travaux du comité Richard, son rapport nous a toujours convaincus que l'équité était possible dans la fermeture le dimanche. N'est-ce pas ce que tout le monde cherche, l'équité?

Je vous soumettrais très respectueusement la dernière phrase du mémoire du gouvernement, à la page 113, la toute dernière phrase qui se lit comme ceci: "Enfin, ne devons-nous pas convenir qu'il faille maintenir, dans notre société, le niveau de la qualité de vie associé à la journée du dimanche." Là-dessus, j'invite donc Yves Nantel, qui représente 40 associations de consommateurs du Québec, à vous parier de la qualité de vie. Merci.

M. Nantel: Alors, au point de départ, soyons clairs. Le libre choix des propriétaires de magasins à ouvrir ou à ne pas ouvrir, le libre choix des travailleurs de travailler ou de ne pas travailler, le libre choix des consommateurs d'aller acheter ou de ne pas acheter, ça demande énormément de nuances et c'est quelque chose en laquelle nous ne croyons pas, du moins de la façon dont ça a été affirmé jusqu'à aujourd'hui.

Quand on regarde la qualité de vie, il faut regarder les implications ou les perturbations qui vont se produire, d'une part, chez les travailleurs et, soit dit en passant, quand on parle des travailleurs du commerce, on devrait plutôt dire régulièrement les travailleuses du commerce parce qu'elles sont - on a une statistique au niveau syndical - 57 % des syndiqués au niveau du commerce de l'alimentation sont des femmes, alors la qualité de vie de ces femmes est aussi très importante. Alors obligés de travailler le dimanche, les travailleuses et travailleurs se voient définitivement privés de leur vie familiale, la fin de semaine. Le conjoint au travail ou la conjointe se retrouve à la maison avec les enfants le dimanche. Les sorties en famille, ça doit aller le lundi ou le mercredi soir ou le mercredi dans la journée parce que les congés sont le mercredi, excepté que le problème, c'est que les enfants sont à l'école et le conjoint ou la conjointe est au travail. Alors, beau congé!

Les sorties avec les amis, la randonnée à la plage, en ski, on repassera ou bien, change de job, c'est tout.

Si on demande aux gens: Est-ce que vous accepteriez de travailler le dimanche, même avec une surprime? Cette question-là a été posée justement en Alberta, où on a libéralisé l'ouverture des magasins le dimanche, et le résultat du sondage qui est rapporté dans la revue Protégez-vous de l'Office de la protection du consommateur est que seulement 2 % des répondants accepteraient de travailler le dimanche, même avec une surprime. Le travail le dimanche, c'est la dislocation de la vie familiale et de la vie sociale de ces personnes. Les répercussions vont se faire sentir sur l'éducation des enfants, sur les résultats scolaires, etc. Évidemment, ça va faire vivre les psychologues: les dépressions nerveuses, les difficultés d'apprentissage à l'école...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Nantel: Oui. Mais je pense que l'objectif n'est pas de faire vivre les psychologues, on ne se retrouvera pas avec une société très forte avec ça. Ces contraintes, bien que un peu moins présentes, vont se retrouver chez un grand nombre de propriétaires de magasin qui vont être obligés aussi de rester sur le plancher le dimanche pour travailler et voir à la gérance de leur magasin.

Si on revient aux travailleurs, si on regarde à l'intérieur même, pour voir non seulement la qualité de vie mais la qualité des conditions de travail de r:es travailleurs-là. Qu'est-ce qui arrive dans un même milieu de travail - concrètement, là, pas en l'air - quand le patron demande de travailler en fin de semaine et que lui ne veut pas travailler mais que son confrère, lui, est prêt à travailler et que s'installe une compétition? Le patron, lui, dit. Écoute, lui ne veut pas travailler, mais c'est un bon travailleur, je veux l'avoir. Les pressions qui sont faites et toute cette concurrence qui va s'installer à l'intérieur même du milieu de travail, c'est important à considérer.

À ce moment-là, l'insécurité va s'installer: Est-ce que je vais aller travailler? Je veux aller avec les enfants, je veux aller avec ma femme, ça va être des conditions de travail qui vont se détériorer et, en même temps, qu'on le veuille ou non, la pression des patrons pour avoir leur meilleur employé - parce que ce n'est pas avec les temps partiels qu'on va amener une qualité de services au consommateur - alors, avec quoi on se retrouve? Avec un travail qui est de moins en moins intéressant.

Qu'est ce que les travailleurs préfèrent au niveau des normes de travail? On retrouve une donnée intéressante dans le livre de Lise Poiriin-Simon au niveau du plein emploi au Québec où on demandait au travailleur qu'est-ce qui était le plus intéressant Dans 61,5 % des cas, les travailleurs ont répondu: Nous, dans notre travail, là, quant à l'éthique du travail, ce qu'on préfère, c'est d'avoir un travail intéressant. Seulement 3,1 % ont dit qu'ils préféraient avoir un salaire élevé Alors, la surprime pour travailler en fin de semaine, ce n'est pas ça qu'ils veulent. Alors, à ce moment-là, avec quoi on va se retrouver? C'est vraiment avec des conditions de travail qui vont se dégrader à l'intérieur. Et ça, ça va se traduire demain matin, c'est-à-dire le lendemain matin que la loi va être acceptée, ça ne sera pas à long terme, c'est à court terme. (12 heures)

Au niveau des conditions de la qualité de vie des consommateurs. Si les consommateurs substituent les activités que j'appelle d'épanouissement personnel ou de relations sociales par des activités de magasinage - et quand je parle des activités de relations sociales, j'entends autant les activités à l'intérieur de la famille, les visites dans la famille, les visites dans les

centres d'accueil, à des personnes qui sont dans les hôpitaux; j'entends les activités culturelles. On voit toute l'effervescence actuellement avec les expositions Cités-cinés, Insectarium, etc., mettons-en, les gens veulent une politique de loisir, de développement et d'activités culturelles - si les gens substituent les contacts avec la nature ou avec leurs enfants par des activités de magasinage, à ce moment-là, nous croyons qu'on diminue, qu'on atténue, que le tissu social au Québec va se dégrader et on va faire face à des problèmes sociaux qui vont aller en grandissant. C'est dans ce sens-là qu'on dit que la qualité de vie des consommateurs va aussi se dégrader; non seulement la qualité de vie des travailleurs, mais celle de l'ensemble des consommateurs que nous sommes tous ici d'ailleurs.

Je vais terminer en parlant très rapidement d'autres impacts et coûts sociaux que ça pourrait entraîner. On n'a pas fait d'étude exhaustive et ce serait intéressant d'avoir des études plus intéressantes, mais je veux parler, entre autres, de l'augmentation de l'achalandage dans les transports publics, donc de l'augmentation du service surtout dans les grandes villes, de l'augmentation de la surveillance policière, des pressions pour ouvrir les garderies le dimanche pour les travailleurs et les travailleuses, de l'encombrement des routes par les camions de transport pour faire leurs livraisons, et tout ça va se répercuter par des coûts sociaux que l'État aura à assumer. À ce jour, aucune étude d'impact sur la qualité de vie n'a été faite et, hélas! le document d'information du ministère ne nous informe pas du tout. Il est très peu bavard sur cette question-là; il ne fait que poser la question à la fin du document. Nous, nous essayons de pallier cette question-là.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure. Il vous reste deux minutes.

M. Tremblay (Marcel): D'ailleurs je vais conclure, M. le Président. Je pense que la Coalition a été créée pour faire une démonstration d'un ensemble d'acteurs qui oeuvrent dans le secteur sur lequel vous avez à vous pencher. À la page 11 de notre mémoire, je pense qu'on a résumé en six points ce que pourraient être une position et une loi qui permettraient une équité.

Pour terminer, M. le Président, j'aimerais quand même vous souligner qu'il y a deux ans, en Suisse, on a fait, dans le canton de Genève, une espèce de référendum sur l'extension des heures d'ouverture le dimanche et la population a préféré une qualité de vie et a rejeté à 83 % le fait d'extensionner les heures d'ouverture le dimanche. Également, l'an passé, en Allemagne fédérale, qui est quand même une Allemagne où les activités économiques sont aussi grandes sinon plus grandes qu'ici au Québec, on a également fait une espèce de sondage auprès de la population et la population a également rejeté toute possibilité d'extension des heures d'ouverture des commerces. Il ne faut pas oublier une chose, messieurs et mesdames, si on a pollué la planète à un point tel qu'aujourd'hui, on n'a pas les moyens de la dépolluer, il ne faudrait pas non plus polluer la société à un point tel qu'un jour on ne soit plus capable de la dépolluer. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, messieurs. Je vais avoir quelques questions. Celui qui se sentira le plus apte à répondre aux questions pourra le faire. Je voudrais vous dire, juste au départ, que lorsque vous vous référez au document du gouvernement, à la page 113, la conclusion, la conclusion parle des trois principes: de l'équité, des besoins réels et de la qualité de vie Alors, tout ce que je veux vous dire... c'est qu'il y a un point d'interrogation aussi. Le but, justement, de la commission, c'est ensemble, avec l'Opposition, essayer de voir qu'est-ce que ça veut dire pour tous et chacun. C'est justement dans cette optique qu'on est bien contents que vous soyez ici pour nous expliquer ce que c'est, pour vous, la qualité de vie.

Deuxièmement, vous avez mentionné que la loi est un chef-d'oeuvre... Vous me citez, c'est ça que vous faites, en disant que la loi est un chef-d'oeuvre d'incohérence. Alors, je suis bien content d'entendre ça parce que je pense que, là-dessus, on est d'accord.

Mme Marois: Vous êtes d'accord sur le reste aussi?

M. Tremblay (Outremont): Oui. Attendez. Attendez. Premièrement, je voulais dire que je n'ai pas de position pour le reste encore. Je l'ai assez dit de fois. Deuxièmement, je voulais, pour une fois, être gentil avec l'Opposition et ne pas lui dire que c'est elle qui avait créé cette loi. Alors.. On m'attaque, alors, je dois au moins faire ça.

Ce que j'ai dit, par contre, c'est qu'il faut avoir une loi qui va être applicable, qui va être gérable, qui va être viable. Je pense qu'on est d'accord avec ça II ne faudrait pas se ramasser, dans deux ans, avec la même situation. C'est ce que j'ai mentionné dans mes propos initiaux.

Dans cette optique, je pense qu'il faut avoir une vision globale. C'est le but du gouvernement d'avoir tenu ces consultations pour avoir cette vue globale. J'aimerais que vous preniez la loi. Vous avez une copie de la loi? On peut vous en donner une si vous ne l'avez pas, dans le document ici.

Si je fais abstraction des décrets, parce que je pense que, tout à l'heure, M. Lord a fait un point là-dessus, quelles exceptions vous abrogeriez dans cette loi? Vous savez qu'il y en a à

peu près 23.

M. Lord: M. le ministre, je peux me permettre de répondre. Gérald Lord. Dans nos recommandations, nous l'avons. Alors, s'il y en a parmi vous qui ont actuellement avec eux le comité Richard, à la page 44, la citation est telle quelle: Le rapport du comité Richard, du député, sur la Loi sur les heures d'affaires, septembre 1988, à la page 44. Mais vous l'avez aussi dans nos positions. Est-ce que vous voulez qu'on lise, M. le ministre?

M. Tremblay (Outremont): Non, non M. Lord: Ça va?

M. Tremblay (Outremont): Alors, je vais poser la question d'une façon différente: Qu'est-ce que vous faites avec les zones touristiques?

M. Lord: Les zones touristiques, M. le ministre, on dit qu'elles doivent être contrôlées. Je pense que tout le monde a vu ça, ce matin. Maintenant, si je peux vous conter une petite anecdote que vous connaissez bien dans la région, disons, de Sainte-Adèle, qui est devenue une zone touristique à l'année, juste par la demande actuellement du ministre. Ce qui est arrivé avec les zones touristiques, c'est-à-dire la demande du greffier de la ville au ministre et le ministre accorde... On va expliquer ça comme il faut.

Ce qui est arrivé là-dedans, c'est que les zones touristiques, lorsque ça a débuté, c'était pour une période bien fixe de six semaines d'été où les gens allaient à leur chalet d'été, que ce soit dans les Cantons de l'Est, dans les Laurentides ou dans la Gatineau. Ça a été aussi au niveau des périodes des fêtes. Ensuite, ça s'est propagé, disons, au niveau du commerce général, l'ouverture du 11 décembre jusqu'au 24, et vous savez que dans certaines autres régions, c'est encore plus loin à cause des zones frontalières.

Donc, ce qu'on dit, on n'est pas absolument contre les zones touristiques, mais il faut qu'elles soient contrôlées et que ce soit vraiment question de zone touristique à des moments opportuns. Moi, je peux vous dire, les marchands, c'est mon coin, je demeure à Saint-Jérôme, je connais tous les épiciers, même M. Racicot qui était ici ce matin. Les gens nous disent: M. Lord, dans les périodes, on est prêts à rendre service aux consommateurs, mais les "in-between", on ne peut pas fermer, l'autre est ouvert, ça a été demandé par la municipalité et ça a été accordé par le ministère. Qu'est-ce qu'on fait? On est obligés d'ouvrir.

Les gens me disent: Bien, écoutez, fais fermer les autres, pas de problème, je vais fermer.

M. Tremblay (Outremont): Alors, deux questions sur ça. Premièrement, qu'est-ce que c'est, pour vous, une zone touristique? Deuxièmement, quelles sont les dates ou les mois où on devrait permettre l'ouverture?

M. Vaillancourt: M. le ministre, si je pouvais me permettre une réponse à votre première question sur les zones touristiques. Évidemment, on n'est pas ici pour dire que la loi qui existe est ce qu'il y a de mieux. On est ici pour encore la discuter et essayer de trouver un encadrement de loi dans lequel on peut tout inclure. Mais, je voudrais juste rappeler ou vous retourner votre question dans l'autre sens. Qu'est ce qu'on fait avec les zones touristiques? Eh bien, surtout ne pas faire ce que les gouvernements ont fait avec les marchés publics, attendre que ça devienne tellement ouvert qu'on soit obligés de légiférer.

Alors, c'est un peu ce qui est arrivé avec les zones touristiques et je pense que mon collègue essayait d'expliquer tantôt: une zone touristique commençait sur un laps de temps dans un endroit désigné et ce laps de temps-là a été étalé plus qu'indéfiniment. Il y a ça aussi dans le cadre de la prochaine loi avec laquelle on sera d'accord qu'il y ait une structure.

M. Tremblay (Outremont): Ça je le comprends, M Vaillancourt. Le premier principe, c'est l'équité. On a une loi qui existe. Les zones touristiques, ça existe depuis assez longtemps. Et faisons abstraction des marchés publics ou des fruiteries à cause des remarques de M. Lord, tout à l'heure, concernant le décret. Juste à titre d'information, j'essaie de prendre un exemple, qui est dans votre environnement, qui est partout au Québec, il y en a des zones touristiques, et il y a des attentes qui ont été créées. Il y a des commerçants qui se sont établis, par exemple, à Sainte-Adèle, à Saint-Sauveur, à Bromont, à Magog, sur la base d'une loi qui permettait d'ouvrir des zones touristiques.

Alors là, si on veut être équitables, ce que j'essaie de voir, quelle serait votre position. C'est quoi, une zone touristique, d'après vous? Et c'est quoi, les dates où il faudrait permettre l'ouverture pour que vous soyez heureux?

M. Vaillancourt: M. le ministre, si je peux me permettre, s'il vous plait. Vous pariez de zone touristique. Il existe, ce problème de zone touristique, mais c'est un tout ça aussi. Ou vous n'avez pas une zone touristique actuellement ou, entre deux zones touristiques, on a créé un autre problème, ce sont des marchés aux puces qui deviennent des zones touristiques. Dans le même...

M. Tremblay (Outremont): Mais ne mélangeons pas. Je veux vous faire saisir la vision globale qu'on veut avoir. Je comprends que des intervenants viennent nous voir et nous disent:

Moi, c'est ça que je veux. Ça, je l'apprécie, je le comprends. Je pense que c'est correct. Mais il faut regarder la problématique globale C'est également ça que j'ai dit au niveau de mes remarques préliminaires En d'autres mots, tout le monde nous donne leurs problèmes. La zone touristique, vous ne nous demandez pas dans votre mémoire de l'abolir, la zone touristique. Au contraire, vous reconnaissez, indépendamment des dates, qu'il y a un certain besoin du consommateur - parce que je pense que vous représentez les consommateurs - pour une zone touristique.

Alors, là je vous demande: C'est quoi ça? C'est moi, c'est un pouvoir du ministre. Je devrais ouvrir de quand à quand, pour la zone touristique? Premièrement, est-ce que je dois l'abolir, d'après vous? Parce que c'est ça, l'équité, là. Pensez-y l'équité. On a des gens qui, depuis 1984, sur la base d'une zone touristique, que ce soit Sainte-Adèle, Saint-Sauveur, ont ouvert des commerces. Le commerce est là. Alors là, qu'est-ce que je fais?

M. Tremblay (Marcel): M. le ministre, je pense que vous n'avez pas à abolir les zones touristiques. Sauf les critères sur lesquels on doit se baser pour fixer des dates au niveau des zones touristiques, ce sont des critères qui, à un moment donné, sont très objectifs et qui existent d'une façon naturelle, finalement.

M. Tremblay (Outremont): Très bien

M. Tremblay (Marcel): Je vais donner l'exemple du lac Saint-Joseph. Prenons la période d'été où tout le monde reconnaît d'une façon naturelle, on voit les bassins de population augmenter, on voit d'une façon naturelle qu'il y a effectivement un besoin qui s'accroît à une période X dans le temps. Si je suis bien placé pour en parler, M. le ministre, c'est qu'on a des conventions collectives dans les magasins finalement qui existent dans des zones touristiques et, dans ces conventions collectives, il y a des périodes bien précises où les employeurs peuvent ouvrir le dimanche.

Je pense qu'on s'entend très bien. Moi, j'ai pour mon dire, M. le ministre, que si on est capable, en tant qu'entité syndicale, de définir une zone touristique et des dates, c'est que vous êtes capable, en tant que gouvernement avec l'aide du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, d'arriver à établir quelles sont les dates d'ouverture qui peuvent être permises au niveau touristique.

M. Tremblay (Outremont): Excellent! M. Nantel. Quelles sont ces dates?

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît, M. le ministre... Nos dix premières minutes étant écoulées, est-ce qu'on a consentement pour poursuivre quelques minutes?

Mme Marois: Non, M. le Président. (12 h 15)

Le Président (M. Bélanger): Alors, sans consentement. Donc, la parole...

Mme Marois: II n'y a pas le consentement...

Le Président (M. Bélanger): ...appartient à Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: ...parce que moi, je pense que c'est justement intéressant...

Une voix: II n'y a pas de problème. Il n'y a pas de problème.

Mme Marois: M. le Président, c'est justement...

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je voudrais...

Mme Marois: C'est...

Le Président (M. Bélanger): ...qu'on s'adresse à nos invités et qu'on ne discute pas entre nous là-dessus.

Mme Marois: Vous avez tout à fait raison.

Le Président (M. Bélanger): Alors, s'il vous plaît.

Mme Marois: Comme ce matin nous avons discuté une question quant au fait que l'on puisse interroger nos invités pendant une période relativement longue nous permettant de creuser à fond certaines questions, le ministre s'était entendu avec moi là-dessus hier et a changé d'idée ce matin. Je croyais que les travaux de la commission iraient mieux si on fonctionnait selon mon point de vue. Je respecte le sien. Il a fini ses dix minutes, c'est à mon tour.

Le Président (M. Bélanger): Alors, selon le règlement, c'est effectivement à votre tour, madame.

Mme Marois: Merci, M. le Président. C'est parce que je vis une autre expérience comme présidente de commission, depuis...

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie, on procède.

Mme Marois: ...un mois. Un peu comme je l'ai fait pour ceux qui vous ont précédés, j'ai questionné sur qui étaient membres, qui font partie de la Coalition. Je vois, à la page 9 de votre mémoire, la liste des membres de la Coalition. Est-ce que, dans le cas qui nous

préoccupe, ces personnes-là vous ont fait tenir soit des résolutions, des lettres ou si, dans tous les cas, vous avez une déclaration soit publique ou privée dans le sens où on vous a au moins envoyé une lettre ou un document disant: Nous appuyons la Coalition?

M. Gadbois: Si vous me permettez...

Mme Marois: Vous savez pourquoi? Parce que je pense que vous étiez là ce matin. On disait: Bon, bien, tel groupe a appuyé cette position-là. Et, pour avoir entendu ce groupe-là hier, ça ne semblait pas être le cas. Alors, je voudrais bien qu'on parte sur les mêmes bases de discussion.

M. Gadbois: Si vous me le permettez, en tant que directeur je dois faire la gérance de cette réalité-là.

Le Président (M. Bélanger): C'est M. Gadbois.

M. Gadbois: M. Gadbois, je m'excuse. Dans la plupart des cas, on a reçu des lettres d'appui très claires. On a eu des réunions avec les représentants - on les a envoyés ici - qui viennent à des réunions régulières de la Coalition, depuis un an et demi. Il y a même un fonds qui a été composé à partir de ces membres-là, pour pouvoir opérer. C'est très ouvert. En plus, je peux vous dire que, de façon très publique, on se promène avec cet encart-là depuis un bout de temps, qui se promène partout avec les noms des gens. S'ils n'étaient pas d'accord, vous le sauriez depuis longtemps. Alors, il y a une adhésion formelle et ces gens-là viennent à nos réunions régulièrement. Ce n'est pas juste depuis le printemps dernier que ça existe; ça fait un an et demi que ces gens-là sont là.

Mme Marois: D'accord. M. Nantel, je crois, de la Fédération des ACEF, a donné au début de la semaine une conférence de presse, appuyée en cela par un certain nombre de représentants et de représentantes des consommateurs. Ça regroupait combien de membres consommateurs ou consommatrices, ces personnes qui vous appuyaient dans votre démarche?

M. Nantel: Je pense que je ne pourrais pas répondre en termes de membres précis de chacune de ces associations-là, parce que ce sont des associations indépendantes et qu'on ne se parle pas nécessairement tout le temps, excepté que, ce que je peux dire, c'est qu'actuellement le mouvement de consommateurs au Québec est constitué, gosso modo, d'une cinquantaine d'associations de consommateurs. De ces 50 associations, il y en a 42 qui se sont prononcées. Et 40, en conférence de presse, lundi matin, se sont prononcées contre l'ouverture des magasins le dimanche, en favorisant le réaménagement le mercredi soir. Alors, je pense qu'on a une représentativité très, très large. Et toutes ces associations de consommateurs font du travail sur le terrain: cours sur le budget familial, rencontres d'information, consultations budgétaires, recueil de plaintes des consommateurs. Elles sont enracinées dans le milieu.

Mme Marois: D'accord. Est-ce que vous avez une idée de la taille moyenne des associations ou pas vraiment? C'est très disparate ou quoi?

M. Nantel: C'est-à-dire que, de ces associations de consommateurs, il y en a onze qui sont regroupées à l'intérieur de la Fédération des ACEF, il y en a neuf qui sont regroupées à l'intérieur de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec et les autres, ce sont des associations indépendantes de consommateurs partant de la Gaspésie, de Sept-îles. passant par le Lac-Saint-Jean, Thetford Mines, etc., à travers tout le Québec, en fait.

Mme Marois: D'accord. C'est parce que c'est important qu'on s'entende sur la représentativité - je me dis - pour partir sur des bases solides.

Maintenant, je vais prendre un autre thème qui est abordé par la Coalition pour et qui vous met en cause un peu, qui met en cause particulièrement le lobby, dit-on, syndical. Alors, je vais peut-être m'adresser davantage à M. Tremblay. Ce qu'on dit, c'est: II y a un lobby syndical qui irait à rencontre, finalement, de l'intérêt des travailleurs et des travailleuses parce qu'on serait contre l'emploi. Ce que l'on dit, ce que la Coalition dit, sans qu'il y ait une augmentation quand même très grande du nombre d'emplois - je ne veux pas leur prêter des propos qu'ils n'ont pas tenus, je veux être bien honnête avec eux - c'est: Bon, ça augmenterait quand même un peu l'emploi. À cet égard-là, est-ce que les représentants des travailleurs et des travailleuses ne vont pas à rencontre de leur intérêt collectif? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, M. Tremblay.

M. Tremblay (Marcel): Naturellement, je pourrais donner une réponse là-dessus. Je dirais qu'on va plutôt à rencontre de nos intérêts personnels parce que plus on a de membres, plus il entre d'argent, donc, je dirais qu'on va plutôt à l'encontre de nos intérêts personnels. Mais ce n'est pas le cas, non plus, je veux dire, au niveau des travailleurs et au niveau des emplois, c'est qu'on explique, depuis des années, que c'est tout simplement des transferts d'emplois. C'est une précarisation d'emplois qui va venir au monde et qui va faire en sorte que des emplois qui sont aujourd'hui sérieux, qui sont des emplois qu'on appelle réguliers dans le jargon, des temps

partiels dans l'autre, c'est que ça va tout simplement déplacer des emplois réguliers à des emplois à temps partiel qui vont devenir, finalement, des emplois qui vont être encore des emplois de plus en plus précaires et qui appauvrissent, finalement, le travailleur. Donc, par conséquent, je ne pense pas que ça va créer de l'emploi comme tel.

Mme Marois: D'accord.

M. Tremblay (Marcel): Je pense qu'il y a eu des études de faites et, d'ailleurs, cette semaine, je pense qu'il y a eu même des gens de l'université, des Hautes Études commerciales qui sont venus faire des exposés là-dessus et qui ont, eux autres mêmes, reconnu, à l'intérieur de l'étude qui avait été faite au point de vue économique, qu'effectivement, ça aurait comme conséquence une espèce de bassin d'emplois de plus en plus précaires.

Mme Marois: D'accord.

M. Tremblay (Marcel): Donc, c'est évident que les syndicats s'opposent à ça et les membres qu'on représente également.

Mme Marois: On dit: Oui, mais les gens auront la liberté, dans le fond, les travailleurs et les travailleuses. C'était la conclusion, un peu, de la Coalition, ce matin, en disant: Permettre l'ouverture, ce n'est pas l'obligation.

M. Tremblay (Marcel): Bon. Mme Marois: C'est différent de l'obligation. M. Tremblay (Marcel): Là-dessus, madame... Mme Marois: Oui

M. Tremblay (Marcel): je me permets de répondre et, d'ailleurs, vous pourrez faire même la vérification. C'est qu'actuellement - on va prendre le samedi, qui est une journée où les travailleurs à temps partiel, les travailleurs réguliers travaillent, qui est une sixième journée dans la semaine où les commerces sont ouverts - on est obligés de mettre à l'intérieur des conventions collectives qu'un employeur peut exiger de la part des salariés qu'ils soient présents au travail. Ça, ce sont des discussions, des négociations qu'on a avec l'ensemble des commerçants, leur permettre de pouvoir obliger les gens à rentrer le samedi parce que les gens ne veulent pas travailler le samedi. Imaginez-vous si, en plus de ça, on élargit les heures d'ouverture et on demande aux gens de rentrer le dimanche. On refuse de travailler le samedi et on nous dit que, par une espèce de libre choix, les salariés vont vouloir rentrer le dimanche. Jamais, madame, les salariés vont vouloir rentrer le dimanche.

Les études qui ont été faites en Alberta corroborent ce qu'on vous dit là. Les études qui ont été faites en Colombie Britannique et en Ontario corroborent exactement ce qu'on vous dit là. Les gens ne veulent pas travailler le dimanche. C'est sûr qu'on ne pourra pas, même à l'intérieur d'un cadre juridique, laisser un libre choix aux salariés, parce que, à un moment donné, il y a toujours une espèce de lien, quand même, de subordonné à "subordinateur". Le type qui est subordonné, à qui on demande: Voudrais-tu faire ça?, à partir du moment où il dit non, il va peut-être dire non une fois, deux fois, trois fois, mais, à un moment donné, l'employeur va le regarder de travers et là il va commencer à être gêné de dire non. Je veux dire, cette liberté-là, elle ne peut exister. Ça, on le vit dans 95 % de nos conventions collectives, qu'il y a toujours un texte qui dit que l'employeur peut forcer les salariés, par ordre inverse d'ancienneté, à rentrer le samedi.

Mme Marois: Oui, M. Nantel.

M. Nantel: Je pense qu'au niveau des consommateurs, c'est la même situation. Quand on considère ceux qui ont les capacités, l'argent pour faire la publicité, pour utiliser les techniques de marketing en conséquence pour attirer les consommateurs, soit dans les centres d'achat, soit dans les magasins d'alimentation, je pense que croire au libre choix des consommateurs, c'est croire qu'on vit dans une société des anges où tout le monde est égal, tout le monde va pouvoir faire ce qu'il veut. Ce n'est pas vrai. Quand les consommateurs qui n'ont pas beaucoup de pouvoir d'achat vont avoir une réduction de 30 % sur un article ou sur un vêtement, ils vont être attirés le dimanche, et c'est tout normal qu'ils aillent magasiner le dimanche, mais ça va se faire au détriment des activités sociales ou d'épanouissement personnel que j'ai mentionnées tantôt. Alors, ce libre choix ne peut pas s'exercer à moins que les associations de consommateurs n'aient les mêmes budgets ou des budgets semblables pour faire le même type de publicité, mais à l'inverse, pour dire aux consommateurs: Écoutez, vous pouvez faire un choix, mais faites un choix éclairé entre aller magasiner et visiter vos parents ou aller faire des randonnées dans la forêt avec les enfants, etc. Si on avait, nous, comme associations de consommateurs, les budgets pour ie faire, oui, on aurait un libre choix parce que, là, il y aurait une espèce d'égalité. Actuellement, il n'y a pas d'égalité. C'est le pouvoir de la publicité, du marketing qui va entraîner les gens dans les centres d'achat et qui va amener les gens, naturellement. Il ne faut pas les blâmer, absolument pas. Et, à ce moment-là, c'est la dégradation et l'appauvrissement du tissu social.

Mme Marois: Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): La parole appartient maintenant à la partie ministérielle. M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): On va avoir l'opportunité, cet après-midi, d'approfondir certains sujets. Je voudrais juste essayer de circonscrire le premier: l'équité. Admettons qu'on oublie les zones touristiques, mais ce que je retiens - je ne veux surtout pas vous prêter des paroles -c'est que vous êtes d'accord avec des zones touristiques pour autant qu'on définisse bien, dans un premier temps, ce qu'est une zone touristique et, dans un deuxième temps, qu'il y ait des planches clairement définies et qu'on essaie d'appliquer ça de façon uniforme.

M. Vaillancourt: M. le ministre, vos zones touristiques, évidemment, ça devient un peu difficile-Une voix:...

M. Tremblay (Outremont): Oui, je sais que c'est...

Le Président (M. Bélanger): Non, c'est pour les fins de la transcription.

M. Tremblay (Outremont): Essayez de répondre, M. Vaillancourt, à ma question, parce que je vais perdre tout mon temps. Le seul point que je veux essayer... J'essaie d'aller chercher de l'information et je ne veux pas...

M. Vaillancourt: J'en ai une réponse, si vous voulez l'entendre.

M. Tremblay (Outremont): Oui.

M. Vaillancourt: Évidemment, ça devient difficile de parler de zones touristiques dans un encadrement assez général parce qu'il y a l'attrait touristique d'une région qu'il faut prendre en considération et le rapport économique qu'il peut y avoir en considération avec l'attrait touristique. Autrement dit..

M. Tremblay (Outremont): Le Vieux-Québec, est-ce que c'est une zone touristique?

M. Vaillancourt: Oui. Je dirais que c'en est une.

M. Tremblay (Outremont): Très bien.

M. Vaillancourt: Maintenant, il ne faut pas, non plus, dans une zone touristique, ouvrir "at large", libéraliser dans tous les commerces.

M. Tremblay (Outremont): Mais c'est ça qui existe en ce moment.

M. Vaillancourt: II s'agit de les définir. C'est entendu que si vous allez, je ne sais pas, en haut de Mont-Laurier, à Ferme-Neuve, ce sont des secteurs de tourisme de pêche; c'est en fonction du loisir qui est exploité et c'est dans ce genre de commerce-là qu'il faudrait peut-être ... Alors, c'est pour ça qu'une loi-cadre devient difficile. C'est peut-être pour ça que nous, de la Coalition, on dit: Ça relève du ministre de prendre la décision comme telle. Elle peut être faite et bien appliquée en rapport avec la zone et l'attrait touristique.

M. Tremblay (Outremont): Vous êtes conscient qu'en fonction de mon premier principe qui est l'équité - je pense qu'on est tous d'accord avec ça, il faut avoir une loi équitable - si, depuis 1984, parce qu'il y a une exception dans la loi permettant à des commerces en général. Parce que c'est ça la zone touristique, ça permet à tout le monde d'ouvrir, à un certain nombre. Est-ce que c'est équitable d'aller dire à des commerçants qui ont ouvert des commerces depuis un certain nombre d'années, sept ans: Non, vous n'avez plus le droit; fermez maintenant? C'est ça la question. Est-ce que c'est ça l'équité? Je pense que ce n'est pas ça que vous me dites. Est ce que c'est ça que vous me dites? Je ne le sais pas. Je pose une question.

M. Tremblay (Marcel): Là-dessus, M. le ministre, je pense que ce ne serait pas, effectivement, l'équité

Une voix: Marcel Tremblay.

M. Tremblay (Marcel): Marcel Tremblay, pour les "records".

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Les pharmacies, maintenant. C'est le dernier point que je fais sur l'équité avant de céder la parole à mes collègues L'équité, les pharmacies. L'article 52 de la loi: Une pharmacie a le droit d'ouvrir le dimanche, vendre... Quelle est votre suggestion?

M. Lord: Veux-tu que je réponde à ça? M. Tremblay (Marcel): Ah oui, vas-y.

M. Lord: Gérald Lord. Vous l'avez à notre point 4: "Quant aux commerces qui, en plus de leurs marchandises habituelles, vendent des denrées alimentaires, soit les pharmacies, tabagies, stations-service et autres, ils ne pourront vendre ces denrées alimentaires en dehors des heures prescrites que dans la mesure où l'établissement entier se conforme à la règle de trois personnes ou moins en lout temps."

M. Tremblay (Outremont): Est ce que c'est équitable d'aller dire à des commerçants - parce qu'on parle juste d'équité, là - qui ont, de par la loi, non pas par un décret, depuis 1984, la permission d'ouvrir - on parle de gens qui ont investi de l'argent dans les commerces - :Fermez maintenant; il faut revenir sept ans en arrière? C'est ça la question que je vous pose. Toujours l'équité. (12 h 30)

M. Tremblay (Marcel): Marcel Tremblay. M. le ministre, je pense qu'effectivement, à ce moment-là, oui, l'équité est là. Il faut bien, à un moment donné, mettre les points tels qu'ils sont, les points sur les "i", comme on dit. Lorsque les pharmacies ont demandé à être considérées comme des exceptions, ce n'était pas dans le but de faire du commerce au détail, d'alimentation, de tondeuses. Maintenant, vous pouvez quasiment retrouver n'importe quoi dans certaines pharmacies. L'esprit de la loi, ce n'était pas ça. De les mettre dans les exceptions, M. le ministre, ce n'était pas ça du tout; la philosophie de la loi. C'était de dire: Les gens ont besoin de médicaments le dimanche; il peut y avoir certaines obligations; donc, les pharmacies devraient être dans un cadre d'exceptions. Et c'est dans ce cadre-là qu'à un moment donné, on a permis l'ouverture des pharmacies le dimanche. Ce n'est pas dans un cadre de commerçant général.

M. Tremblay (Outremont): Non. Une question d'information, il faut faire attention à ce que vous dites là. La loi permettait, en 1984, à un pharmacien d'être ouvert et de vendre également de l'alimentation alors qu'en tout temps, trois employés dans son commerce... La loi permettait ça. Le gouvernement, en 1984, a créé une exception, 5.2, pour dire: Non, trois employés, je l'abolis et je donne la permission à 219 pharmacies d'ouvrir, indépendamment du nombre d'employés. Alors moi, la question que je vous pose - on l'a dit là - la seule question que je vous pose, toujours pour l'équité et, encore là, c'est une question que je vous pose. Est-ce que c'est équitable d'aller dire à ces 219 commerçants-là et d'autres, parce que, vous savez, ce n'est pas équitable parce qu'il y en en d'autres qui ont ouvert par la suite: Maintenant, vous n'avez plus le droit parce qu'on retourne sept ans en arrière? En fonction de l'équité.

M. Tremblay (Marcel): Encore une fois, M. le ministre, je vous donne la même réponse, c'est qu'effectivement, c'est équitable. Mais je veux dire, il y a une philosophie pour laquelle on met des exceptions. Je vais vous donner un exemple, le principe des dépanneurs. On a mis ça à un moment donné au point de vue de la philosophie de dépanner le monde, de faire en sorte que les gens ne soient pas mal pris le dimanche. Mais, à un moment donné, quand on regarde l'évolution des choses, on brise, finalement, tous les principes de base pour lesquels on fait des exceptions. Les pharmacies, c'est sûr qu'elles n'ont pas été dire, lorsqu'elles ont demandé d'être mises dans des exceptions: Nous autres, on veut que vous mettiez des exceptions, que vous ne nous encadriez pas et on va vendre de l'alimentation. Peut-être que si les pharmacies...

M. Tremblay (Outremont): C'est ça qu'elles ont dit.

M. Tremblay (Marcel): Non, non, elles ont demandé...

M. Tremblay (Outremont): Non, non, c'est ce qu'elles ont dit en 1984. Elles ont dit: Trois employés et moins, on n'est pas capables de vivre avec ça; éliminer la contrainte des employés. En d'autres mots, ce que vous me dites... C'est parce que moi, ce n'est pas moi qui ai fait cet article, je suis obligé de vivre avec lui. Je le vois que ça cause des problèmes. La seule chose qui me surprend dans vos remarques, vous me demandez de retourner sept ans en arrière, d'aller voir des commerçants et leur dire: Fermez votre boutique. C'est ça que vous me demandez.

M. Gadbois: M. le ministre, si vous permettez...

M. Tremblay (Outremont): Ça, je ne sais pas si c'est équitable ou pas, je me pose la question.

M. Tremblay (Marcel): C'est-à-dire, je ne vous demande pas de fermer leur boutique, M. le ministre. Il faut bien s'entendre.

M. Gadbois: On leur dit de faire un choix. Ces groupes veulent être des pharmacies, qu'ils fonctionnent comme des pharmacies avec les privilèges des pharmacies. Ils veulent être des commerces alimentaires, qu'ils se comportent comme des commerces alimentaires avec la même situation. C'est ça qu'on dit. S'ils en ont profité pendant des années...

M. Tremblay (Outremont): Oui, mais ils sont venus; en 1984, il y a eu une commission parlementaire.

M. Gadbois: Oui.

M. Tremblay (Outremont): Ils ont fait leurs représentations et le ministre a dit: Vous avez raison, ouvrez, je vous donne la permission. Ce que vous venez me dire aujourd'hui, c'est qu'en 1984, quand le gouvernement du temps a mis en application cette loi-là, il ne l'a pas fait, il s'est trompé. C'est ça que vous me dites. Il s'est trompé? Parfait.

Une voix: Oui, absolument.

M. Tremblay (Outremont): Parfait, excellent.

M. Gadbois: Qu'est-ce que vous pensez des autres pharmacies, M. le ministre, celles qui n'ont pas eu cène permission-là?

M. Vaillancourt: M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): M. Vaillancourt

M. Vaillancourt: Si je peux me permettre. Paul Vaillancourt.

M. Tremblay (Outremont): Elles sont ouvertes en passant.

M. Vaillancourt: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Ça prouve que c'est inéquitable.

M. Vaillancourt: Certainement qu'il y a de l'équité dans ces lois-là actuellement. Il y a des problèmes. Ce n'est pas pour rien qu'on est autour de cette table-là. Je reviens à un exemple. Vous parlez de pharmacies; c'est exactement le même exemple que j'ai donné avec les marchés publics. La définition, en 1985, c'était de l'alimentation, et allez-y en 1989 et en 1990 là-dedans, faites l'inventaire de ce que vous aller trouver vous-même et vous m'en redonnerez des nouvelles. Je vais vous donner un autre exemple. Dans les pharmacies, quand vous parlez de 1984, il n'y avait pas de librairie, il n'y avait pas de département d'automobiles, il n'y avait pas de département de ferronnerie et il n'y avait pas de département d'accessoires électriques dans les pharmacies en 1984; allez-y aujourd'hui, il y en a. C'est ça le problème, le statut, la définition.

Un autre exemple que je vais vous donner, M. le ministre, parce que je l'ai vécu, si je peux me permettre.

Le Président (M. Bélanger): Oui, je vous en prie.

Des voix: Oui.

M. Vaillancourt: Un autre exemple que j'ai vécu moi-même dans ma propre entreprise. On a été les premiers à importer des meubles de patio en résine de synthèse et on a perdu ce marché-là aux "pisciniers". Pour quelle raison? Parce que les "pisciniers" pouvaient ouvrir sept jours par semaine, sept soirs par semaine. Il n'y a plus un marchand de meubles, ou à peu près plus, qui peut vendre de meubles de patio. C'est un marché qui est complètement déplacé. Alors, c'est ça, les problèmes de chef-d'oeuvre d'incohérence dont je partais tantôt. Je vous accorde que vous avez raison sur cette partie-là. Il y a certainement des décisions qu'il va falloir prendre dans cette nouvelle loi qu'on propose, tout le monde ensemble. Elle ne peut pas plaire à tout le monde; ça, c'est sûr qu'elle ne peut pas plaire à tout le monde. Puis H y en a qui vont avoir des grincements de dents, c'est vrai.

M. Tremblay (Outremont): Parfait. Puis je n'ai pas parlé des tables. Je savais que vous étiez un marchand de meubles mais sur ça aussi, je comprends que c'est une inéquité. La seule chose que je veux vous dire, c'est que c'est... Encore une fois je pose la question Vous, vous prônez l'équité. Est-ce que c'est...

Le Président (M. Bélanger): II reste une minute.

Mme Marois: Je vais vous laisser terminer.

Le Président (M. Bélanger): II vous reste une minute.

M. Tremblay (Outremont): Est-ce que c'est équitable d'avoir créé des attentes chez certains commerçants - je parle uniquement au niveau de l'alimentation, oubliez tout ce qu'on vend d'autre dans les pharmacies, là - et de dire à cos gens-là, après: Écoutez, on s'est trompés, vous avez investi des sous, maintenant, fermez boutique? On ne dit pas de fermer boutique, je suis d'accord avec vous, mais: Au lieu d'avoir loué 4000 pieds carrés, maintenant, retourne à 1500 pieds carrés. Je fais juste poser la question en fonction du principe, que vous évoquez, d'équité.

M. Vaillancourt: M. le ministre. Mon nom est Paul Vaillancourt. Je voudrais juste ajouter quelques mots là-dessus. Si on a besoin d'une loi, c'est parce qu'il y en a, de l'inéquité, et il faut que quelqu'un tranche les décisions quelque part. Si on regarde toutes les lois d'heures d'ouverture où ces lois-là existent, dans d'autres pays, dans d'autres provinces, il s'agit d'enchâsser dans la loi-cadre un certain minimum. Le reste, ça deviendra des exceptions. Alors, c'est ça qui est le cadre de la loi qu'il faut faire.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Si M. Lord veut ajouter des choses...

M. Lord: Ce que je voulais répondre à M. le ministre, c'est que les gens... Vous avez parlé du secteur alimentaire; je vais dire quoi à ces gens-là? Je peux vous dire que ces gens-là savaient très bien qu'ils contrevenaient à la loi, et c'est ça, l'inéquité dans les marchés d'alimen-

tation. C'est que c'est un marché qui a été déplacé là. C'est facile de faire de la business le dimanche: je serais le gars le plus heureux, le dimanche, à Saint-Jérôme, si Métro, Provigo, tout le monde était fermé et juste Gérald Lord ouvert; j'ouvrirais. C'est facile de faire de la business comme ça. Il ne faut pas oublier que ces gens-là le savaient et vous avez des preuves actuellement que, quand des injonctions sont prises, pour ne pas les nommer - vous le savez - ils sont fermés, ces magasins-là. Donc, ces gens-là le savaient et ils ont fait des profits sur le dos des commerçants qui observaient la loi.

Une voix: Et j'ajouterais, M. le ministre, si vous me le permettez...

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.

M. Tremblay (Outremont): Sur le temps de qui on est?

Mme Marois: Sur le vôtre. Ha, ha, ha! Le Président (M. Bélanger): Sur le vôtre. M. Tremblay (Outremont): Non, non.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la parole appartient à Mme la députée de Taillon.

M. Tremblay (Outremont): Parce que, M. Lord, j'avais...

Mme Marois: Ce n'est pas moi qui établis ces règles de dix minutes par ci, c'est vous. Alors, on joue avec cela.

Le Président (M. Bélanger): Non, non. S'il vous plaît, s'il vous plaît! On ne coupera pas les secondes en deux.

M. Tremblay (Outremont): Ce n'est pas vous, ce n'est certainement pas vous qui allez donner...

Le Président (M. Bélanger): Non, non.

M. Tremblay (Outremont): Ce n'est pas la députée de Taillon qui va donner la permission, sur mon temps, à ces gens-là de répondre. Il ne faut pas...

Le Président (M. Bélanger): Non, non.

Mme Marois: Alors, vous ne voulez pas qu'il réponde à vos questions?

M. Tremblay (Outremont): Non, non. Le problème soulevé, c'est un problème au niveau des tribunaux par M. Lord. J'ai volontairement fait abstraction... Je l'ai mentionné, j'ai dit: Je fais abstraction, je ne veux pas parler des décrets, parce que je suis conscient de ce problème-là.

Le Président (M. Bélanger): Bien.

M. Tremblay (Outremont): Alors, tu sais, il ne faut pas prendre du temps sur tout mon temps pour discuter de ça alors qu'on a eu l'opportunité d'en discuter pendant des heures.

Le Président (M. Bélanger): Bon, ceci étant dit, Mme la députée de Taillon, la parole vous appartient.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Bélanger): Sur votre temps.

Mme Marois: Mon intention n'est pas de vous priver de votre temps, M. le ministre, vous le savez très bien. Mais je voudrais revenir là-dessus: on est d'accord avec le ministre, là, qu'il y a eu du cafouillage, que dans la loi de 1984 il y a des améliorations à apporter, que les exemptions qui ont été permises - et j'aimais ça, vous entendre, parce que ça clarifiait des choses - l'ont été dans un contexte et, donnez un pouce, on prend un pied - on dirait maintenant: donnez un décimètre, on prend un mètre - alors, ce qui est arrivé, c'est qu'on s'est faufilé à travers un certain nombre de trous et on a amplifié ce phénomène d'inéquité. Alors, c'est vrai - et j'en conviens avec le ministre - que c'est compliqué. On se dit: Ces gens-là sont allés chercher une part de marché, ont foncé, il n'y a personne qui les a arrêtés, on n'a pas émis d'injonction, on n'a pas... Et aujourd'hui, on se sent un petit peu mal à l'aise avec ça. Mais, vous savez, n'importe quelle loi qu'on adopte, et je prends la Loi sur l'assurance automobile...

M. Tremblay (Outremont): J'ai une question.

Mme Marois: Je le prends sur mon temps, hein, par exemple, ha, ha, ha!

M. Tremblay (Outremont): Non, non, ce n'est pas, c'est une question de...

Le Président (M. Bélanger): Procédure? M. Tremblay (Outremont): Oui. Le Président (M. Bélanger): Oui?

M. Tremblay (Outremont): Je veux bien clarifier, parce que, ce que je dis, là, c'est que je ne fais pas allusion à des gens qui en ont profité. Je fais abstraction de tout ça.

Mme Marois: Non, non, j'ai compris ça, M le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Moi, je prends des gens qui, légalement.

Mme Marois: Oui.

M. Tremblay (Outremont): Je fais spécifiquement allusion à deux catégories, entre autres les pharmacies, où c'est dans la loi. Ce n'est pas quelque chose, là...

Mme Marois: Oui

M. Tremblay (Outremont): ...dont ils ont abusé. On leur a donné le droit...

Mme Marois: D accord.

M. Tremblay (Outremont): ...dans la loi de 1984, c'est ça, c'est parce...

Mme Marois: D'accord

M. Tremblay (Outremont): ...qu'il faut clarifier ça, ce sont ceux-là.

Mme Marois: Non, je suis d'accord avec vous, c'est important que sur les concepts, on soit clair. Je vais prendre un exemple justement qui va dans le sens de ce que vous soulevez. Un jour, on a adopté la loi sur l'assurance auto. À minuit, un soir, elle s'est appliquée. Mais, la veille, il y a des gens qui avaient subi un accident et qui étaient couverts par d'autres règles du jeu, qui, s'ils avaient eu cet accident le lendemain, auraient eu une meilleure compensation, un meilleur remplacement du revenu parce qu'on s'imagine que, si on fait une loi, c'est pour le mieux et non pour le pire. Donc, quelque part entre les deux réalités, les gens vont avoir été traités différemment, non pas parce qu'on voulait les traiter différemment, mais parce que, à un moment donné, si on prend une décision dans le temps, elle a des impacts sur les personnes que cela concerne. Et, dans ce sens-là, je comprends le dilemme dans lequel vous êtes, mais, que la décision aille dans un sens ou dans l'autre, elle rendra des personnes insatisfaites et elle créera sûrement, elle apportera des réactions qui vont dire: Bien non, on n'est pas heureux que vous preniez cette décision-là. Mais je comprends le problème devant lequel vous êtes et c'est à celui-là aussi que je veux pouvoir faire référence.

Je vais revenir maintenant sur d'autres éléments que vous avez abordés ou que l'autre coalition a abordés avant vous et qui sont plus de l'ordre du commerce et des questions plus techniques. C'est vous qui l'avez abordé cependant tout à l'heure. Vous avez parlé, je ne me souviens pas lequel d'entre vous, et vous avez dit: II y a une structure de prix à trois niveaux dans les clubs Price. Je veux juste comprendre ce qu'est cette structure. Là, c'est vraiment une question d'information purement et simplement. C'est vous, M Lord, qui l'avez abordée, oui?

M. Lord: Oui. Dans la structure de club Price, ce qui se produit, c'est que c'est un club d'achats avec une carte Maintenant, il y a des gens qui peuvent acheter sans carte, qui paient 5 % de plus que ce qui est marqué sur les tablettes et ça, aux heures d'ouverture des commerces. Il y a une autre structure qui est une carte dite "professionnelle". Ce sont des avocats, des notaires, des collets blancs, Bell Canada, des compagnies, des fonctionnaires. Ces gens-là reçoivent une carte et ils peuvent payer, disons, un coût inférieur de 5 % de la masse des gens, mais ils doivent magasiner aux heures d'affaires des commerces. Il y a une troisième carte qui se veut une carte d'affaires pour les commerçants: eux autres peuvent acheter en tout temps, du lundi au vendredi, tous les soirs, ainsi que le dimanche.

Mme Marois: D'accord. Au même prix, à ce moment-là, que les autres...

M. Lord: Oui, mais c'est parce qu'ils ont un privilège d'acheter en dehors des heures d'ouverture.

Mme Marois: D'accord. Je voulais juste bien comprendre, comme phénomène, ce qui se passait. On a affirmé à différentes reprises ici qu'il y avait vraiment un problème pour les gens dans les grandes surfaces lorsqu'ils fermaient le samedi soir et qu'ils devaient rouvrir le lundi. Il y avait deux ou trois problèmes que ça soulevait, la question de la fraîcheur des produits, on nous a dit ça ce matin; l'autre chose, c'est le fait qu'il y avait une manutention que ça exigeait - évidemment, on devait vider les comptoirs, les réinstaller pour le lundi matin - et que, donc, il y avait des coûts qui s'ajoutaient à ce moment-là. Ce qu'on semblait dire, c'est que le fait d'ouvrir le dimanche, malgré le fait qu'il semble que le marché soit quand même un peu saturé actuellement, ferait en sorte qu'on irait chercher suffisamment de revenus et qu'on n'aurait pas, en plus, ces coûts-là. La question de la fraîcheur et la question des coûts de manutention dû au fait que l'on ferme une journée pendant la semaine, dans les grandes surfaces, en tout cas, c'est le cas.

M. Lord: Gérald Lord, encore une fois. Étant épicier depuis 30 ans, je peux vous dire que tout ce qu'on sait actuellement, avec tous les gens qui sont ici, tout ce qu'on a examiné, c'est un déplacement des ventes. C'est ce qu'on préconise d'ailleurs. Maintenant, donc, il n'y a pas plus de ventes le dimanche. Vous avez,

madame, par exemple, 125 $ à dépenser. Vous n'en dépenserez pas 225 $ parce que vous êtes ouverts le dimanche. Cela dit, question de fraîcheur, très important pour moi parce que, ce que j'ai cru comprendre ce matin de la Coalition et la question que vous me posez, c'est que les gens achètent le dimanche des fruits qui ne sont pas frais parce qu'on nous dit qu'on va jeter des fruits dans l'alimentation, étant donné qu'on est fermés le dimanche. Ma première remarque, c'est qu'il faut être très conscients au niveau de la livraison des fruits au Québec, dans la province de Québec, que ça arrête le vendredi. Il n'y a pas de livraison de fruits le samedi et le dimanche. Il y a des grossistes...

Mme Marois: Vous me dites qu'il n'y a pas de grossistes qui livrent le samedi et le dimanche.

M. Lord: Exact. Ces gens ont deux jours en ligne. Les conventions peuvent vous le dire, ils sont là. (12 h 45)

Mme Marois: Ces syndiqués, quoi! Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lord: Ce qui se produit, c'est que les dernières livraisons de fruits se font le vendredi, comme je le disais tantôt. Par contre, le samedi matin, certains grossistes, pour dépanner, ouvrent jusqu'à midi et on peut aller chercher des fruits avec des camions. Mais ce n'est pas tout le monde qui est équipé pour aller chercher des fruits. Donc, il faut comprendre aussi que, peut-être qu'on ne l'a pas mentionné, mais a l'Université Laval il y a un département qui s'occupe de la conservation des fruits pour donner une meilleure qualité aux Québécois. Donc, on travaille actuellement au niveau universitaire dans des serres. M. Forget, qui est un agriculteur, qui était à la commission Richard, connaît ça très bien. Il en a parlé quand même. C'est une réalité pour essayer de donner une meilleure qualité. Par contre, il faut comprendre aussi que les fraises, par exemple... On est chanceux dans un pays comme le nôtre, avec la neige actuellement et tout ça, on a des fraises à l'année.

Mme Marois: Oui.

M. Lord: Je ne suis pas encore assez vieux pour savoir qu'il y avait juste des oranges à Noël dans les bas, mais il y en a peut-être qui ont vu ça dans l'histoire. Je peux vous dire que, des fraises à l'année, il ne faut pas penser que ça a été cueilli hier matin. C'est venu par camion. Ça vient de la Floride, de la Californie. C'est aussi loin que d'aller à Paris, aller en Californie, hein?

Mme Marois: Oui.

M. Lord: Ça vient par camion. Donc, la fraîcheur, j'ai beaucoup de difficulté à comprendre ça. En fait, ce qu'ils disaient ce matin, la fraîcheur... N'oubliez pas, quand Mme la consommatrice achète son fruit ou son légume et qu'elle s'en va chez elle...

Mme Marois: Ou M. le consommateur, évidemment.

M. Lord: Ou M. le consommateur, excusez. Vraiment... C'est parce que je tombe dans un élément de fruits, j'aime ça à mort et c'est beau, les fruits. Ce que je veux vous dire, c'est qu'elle ne prend pas ça et s'en va chez elle et mange ça tout de suite... ni lui. Ça va au frigidaire, ça a une longueur de vie. Là, ils nous ont dit ce matin: On va les jeter dimanche. Est-ce que ça veut dire qu'on vend de la "scrap" aux clients et que, le lundi, la femme va les jeter parce qu'ils ne seront plus bons? Ça, c'est ma question.

Quant à vider les comptoirs, chère madame, M. Pagé n'est pas ici, mais Dieu sait que pour protéger nos consommateurs, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a des inspecteurs partout. Les bibites dont on parlait ce matin, il en a, lui aussi, des bibites qu'il cherche. Je peux vous dire que... La "sanitation" va se faire quand, si on est ouverts sept jours? Il faut les vider, ces fameux comptoirs de viande. Il y a du sang qui coule. Dans les légumes, il y a toutes sortes de petites patentes. Je vous fais grâce de tout le processus, mais je vous dis qu'il y a de l'ouvrage à faire là-dedans. Il faut que la "sanitation" se fasse quelque part. Sept jours par semaine, il n'y aura plus d'hygiène. M. Pagé va avoir de l'ouvrage, vous allez avoir d'autres chats à fouetter. On sera peut-être en commission parlementaire sur la qualité.

Mme Marois: Je veux bien comprendre. À ce moment-là, est-ce que la majorité des fruiteries ont des camions qui leur permettent de s'approvisionner ou c'est inégal? Peut-être que vous ne pouvez pas me répondre ou peut-être que je ne pose pas la question à la bonne personne, mais je la pose.

M. Lord: Gérald Lord. Non, mais je ne suis pas expert. Cependant, parmi ceux que je connais, étant dans le domaine depuis 30 ans, ce n'est pas tout le monde qui a un camion de fruits et légumes. Je peux vous dire ça.

Mme Marois: D'accord.

M. Lord: Mais, il y en a qui vont en chercher des fruits. N'oubliez pas une chose, c'est que ce sont les mêmes fruits qui s'en vont dans les magasins d'alimentation. Pour le besoin de la cause, aux Halles d'Anjou, on est actuelle-

ment dans une petite injonction. On a fait une étude de marché. On a des photographies de camions qui vont livrer aux Halles d'Anjou, qui sont des boutiques spécialisées, et qui vont livrer au Steinberg qui est à côté, parce que Steinberg est avec nous autres dans cette injonction-là aussi, et même Provigo, je peux vous le dire, et les marchands Métro. C'est le même camion. On nous a dit que c'était spécialisé, mais ce sont les mêmes fournisseurs. Ce n'est pas compliqué ça. Les fraises qui viennent de la Californie, le gars ne se parque pas aux coins des rues et ne vend pas ça comme un "peddler". Ça s'en va chez des grossistes. Ça peut être Botner, ça peut être IGA, ça peut être Provigo, ça peut être Métro. Mais ces grossistes-là en fruits, c'est eux autres qui vendent aux fruiteries. Les gars ne vont pas chercher ça aux États-Unis.

Le Président (M. Bélanger): Alors, en vertu de l'alternance, M. le député de Saint-Maurice.

M. Lemire: Ce matin, M. le Président, Mme la députée de Taillon a demandé à fa Coalition pour, quelle était sa source de financement? Je remarque qu'elle ne vous a pas posé cotte question-là. Moi, ce que j'aimerais savoir, c'est quelle est votre source de financement?

M. Gadbois: Michel Gadbois. Je m'excuse, mais je l'ai déjà dit tout à l'heure. Vous n'étiez peut-être pas là.

M. Lemire: Voulez-vous le répéter pour le bénéfice de la commission.

M. Gadbois: On a le membership.

M. Lemire: Je remarque qu'elle ne vous a pas posé la question. Ça me donne l'impression qu'elle vous supporte dans votre demande.

Le Président (M. Bélanger): Vous avez posé la question, on pourrait écouter la réponse.

M. Gadbois: Je ne sais pas si elle nous supporte ou pas. La question était d'expliquer notre membership. Je vais profiter pour dire, non seulement que notre membership est évident, mais que je peux même vous expliquer notre structure financière. Dans cette structure, ce qu'on a fait, c'est qu'on a des réunions. Il ne faut pas penser que la Coalition, vous la voyez pour la première fois aujourd'hui. Ça fait un an et demi qu'on existe. Pour exister, on en a fait des activités. Quand on faisait des réunions, il fallait payer les salles, il fallait envoyer de la correspondance, etc. On a formé un fonds commun. On a demandé aux gens de participer. On a fait une espèce de prorata. On s'est fait un fonds. En ce moment, on fonctionne avec ce fonds-là payé par les membres de la Coalition. Il y en a qui ont moins d'argent à mettre, parce qu'ils représentent des groupes qui n'ont pas de fonds; d'autres en ont plus On a fait une structure et c'est avec ça qu'on fonctionne.

M. Lemire: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Taschereau

M. Leclerc: Merci, M. le Président. Je dois vous dire au départ que j'ai trouvé votre entretien très intéressant et, un peu comme mon collègue et patron, que mon idée n'est pas faite non plus. Je peux vous dire que c'est le genre de mémoire et d'exposé qui nous aide à se faire une idée. D'abord, je voudrais demander à M. Lord... parce qu'on a vu tout à l'heure, dans la Coalition pour, des marchands qui sont venus nous dire qu'ils étaient pour et vous M. Lord, et sans doute un bon nombre d'autres marchands, vous êtes dans la Coalition contre.

Est-ce que vous avez, soit le pourcentage, soit le chiffre exact de membres Métro, Provigo, IGA pour et contre et, comme il y a eu beaucoup de chiffres qui ont été lancés au cours des derniers mois, de la dernière année, le chiffre le plus récent possible des appuis de part et d'autre?

M. Gadbois: Juste une seconde. Avant que M. Lord réponde, juste un point là-dessus. Chaque groupe qui est ici va revenir parler de son secteur particulier, entre autres, les marchands d'alimentation. On n'a rien à cacher On va vous le sortir tout de suite Mais ce que je veux dire, c'est que, quand on entre dans les détails, en tant que tel, de qui...

M. Leclerc: Je vous dis en pourcentage, en gros, je ne vous demande pas ça au marchand près. C'est seulement pour avoir une idée.

M. Gadbois: On va vous le dire. On a...

M. Lord: Disons que, dans le mémoire - nous, on passe le 6 mars, je pense, mercredi - du Regroupement des détaillants contre l'ouverture le dimanche, travailleurs et travailleuses, vous avez, à l'annexe 2, exactement la position des marchands, par bannière.

Une voix: Donne-leur donc.

M. Lord: Sur un total de 4747 marchands contactés, il y en a 4490 qui ont dit non au dimanche, ce qui représente 94, 59 % et il y en a 221, et ça de toutes les bannières - vous les avez détaillées - qui ont dit oui, ce qui représente 4, 66 % des marchands qui veulent ouvrir le dimanche. On le sait, qu'il y en a un petit groupe, je vous l'ai dit tantôt.

M. Leclerc: Non Bien Ça répond à ma

question. Ça me donne une idée des proportions. Même s'il y a toujours une marge d'erreur là-dedans, ça donne une bonne idée des proportions.

Une dernière question sur la qualité de la vie. C'est une question que j'ai posée tout à l'heure à la Coalition pour. Je lui avais dit, d'ailleurs, que je vous poserais la même. Mais, compte tenu du fait que vous en avez tellement parlé dans votre exposé, et très éloquemment d'ailleurs, je voudrais vous demander si vous ne croyez pas que le concept de qualité de vie, ce n'est pas quelque chose d'un peu relatif. Et je m'explique. Moi, personnellement, je ne magasine pas le dimanche. Je ne fréquente pas les halles, etc. Sauf qu'il y a deux semaines, je suis allé pour voir, justement, pour mieux me renseigner pour cette commission parlementaire. J'ai eu de la misère à me trouver un stationnement, je dois le dire, tellement il y avait du monde. J'ai rencontré là beaucoup de gens de mon comté. Et, bien que ce ne soit pas, pour moi, une valeur de qualité de vie de magasiner le dimanche, je dois le confesser - remarquez que je n'ai pas une grosse famille - ça peut évoluer...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Leclerc: Non pas la famille, mais le concept.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Leclerc: La famille aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): Les deux, les deux.

M. Leclerc: Non, je ne crois pas. Est-ce qu'on peut accepter, surtout nous, comme politiciens, mais aussi la population en général, que le concept de qualité de vie soit quelque chose de relatif, que, pour vous, la qualité de vie, ce soit d'aller à l'insectarium, d'aller voir des musées, des expositions culturelles, mais que, pour un certain nombre des gens qu'on représente, la qualité de vie, c'est d'aller faire son épicerie le dimanche? Ça devient, en quelque sorte, une sortie sociale. Moi, j'ai vu là des gens de mon comté qui prenaient un petit café, qui rencontraient des connaissances, qui faisaient leurs commissions. Je vous le dis, là, ce n'est pas l'idée que j'ai de la qualité de vie, mais est-ce que ce n'est pas très relatif, la qualité de vie? J'ai toujours eu peur, moi, de la fameuse attitude qu'on peut avoir comme législateur, de dire: On veut votre bien et on va l'avoir, en ce sens que ce qui n'est pas la qualité de vie pour un individu, l'est peut-être pour un autre. C'est ça. Je sais que vous avez fait un très bel énoncé sur la qualité de vie et je voudrais, dans la perspective que ça puisse être relatif, que vous nous donniez votre opinion.

M. Nantel: Je vais vous donner mon opinion, mais je vais anticiper sur ce qu'on va donner comme exposé, cet après-midi, dans le mémoire de la Fédération des ACEF, parce que tout est relié et on est membres de la Coalition. Mon nom, c'est Yves Nantel.

Il y a un professeur de marketing qui s'appelle John Petrof, à l'Université Laval, qui a développé cette question ainsi que le concept du centre commercial comme étant l'aspect du loisir, comme étant amalgamé au loisir. Effectivement, il y a des gens qui y vont pour se divertir ou pour faire une sortie parce qu'ils veulent faire quelque chose le dimanche. Excepté que d'interpréter le fait que les gens vont au marché public ou dans un marché aux puces - c'est encore plus caractéristique - pour magasiner, je pense que c'est mal interpréter cette sortie que les gens font. Les gens, ce qu'ils veulent, à mon avis - et c'est corroboré par l'ensemble des sorties quand ils vont à l'insectarium, à un spectacle de l'Orchestre symphonique de Montréal - ce sont des activités de loisir, des activités culturelles, des activités où ils vont pouvoir s'épanouir, où ils vont pouvoir faire des choses. Mais ce qui est premier, ce n'est pas l'activité de magasinage. Actuellement, ce qu'on tente de faire, c'est d'amalgamer ces deux concepts-là. John Petrof a dit dans le journal Les Affaires ou le journal Finance, parce qu'il s'adressait aux marchands d'alimentation: N'oubliez pas qu'il y a des études aux États-Unis qui disent que quand les gens vont magasiner le dimanche, ils y vont dans un climat de détente, etc., comme loisir et, dans 60 % des cas, ils succombent et ils achètent.

Je pense que l'objectif, c'est d'amener les gens à acheter les produits, mais, en réalité, ce à quoi les gens aspirent, c'est à une politique du socioculturel. On a des preuves que les gens, c'est ce qu'ils veulent, quand ils s'en vont au marché aux puces particulièrement et dans les marchés publics. Quand on nous dit que les gens vont prendre un petit café, en famille, au marché public, ce à quoi les gens aspirent, ce n'est pas à magasiner. On va vous le prouver encore plus, cet après-midi, avec d'autres données statistiques.

M. Leclerc: C'est ça, on va devoir continuer cet après-midi parce qu'on me dit qu'il n'y a plus de temps.

Le Président (M. Bélanger): Alors, le temps du parti ministériel était écoulé, la parole appartient à Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Il y a eu beaucoup de débats, de discussions autour de la question de l'applicabilité d'une loi dont on resserrerait les critères. Comment fait-on pour contrôler ça, trois employés en tout temps? Est-

ce que les gens ne vont pas facilement encore passer à côté? Le ministre s'inquiète du fait qu'il y a déjà des entreprises existantes et là, si on adopte une loi qui vient resserrer un peu, là encore, les critères et que ça amène ces entreprises à devoir fermer des parties de magasins, on voit ça comme un drame et quasi comme une impossibilité. C'est un peu ce qu'on nous dit. Et je vais aller plus loin dans ça. I! y a des commerçants qui sont venus, entre autres, ce matin, hier après-midi et il y en a d'autres qui vont venir et j'ai le sentiment qu'ils sont tellement... Ils ne voudraient pas eux autres non plus être d'accord avec l'ouverture du dimanche, mais ils le sont parce qu'ils se disent: Le gouvernement n'ira pas jusque-là parce que ça a l'air trop compliqué à appliquer. Donc, même si on ne veut pas, on va se mettre plutôt de l'autre bord, comme ça, au moins, on va être traité équitable-ment. Si jamais ça ouvre, ça va être pour nous autres aussi.

Je ne sais pas si vous suivez un peu mon raisonnement. J'avoue que c'est un petit peu compliqué, mais il reste que c'est ce sentiment-là que j'ai quand j'écoute les personnes témoigner devant moi. Et ils se basent sur un fait: Est-ce qu'une loi comme celle-là va être applicable? Cette règle de trois employés, cette règle qui fait des exceptions, est-ce qu'on n'essaiera pas de passer à côté encore une fois et qu'on ne se retrouvera pas dans la situation que l'on connaît maintenant dans cinq ans ou dans dix ans? J'aimerais que vous m'en parliez un peu.

M. Lord: Je peux vous en parler très rapidement. Gérald Lord, encore une fois. Je pensais même que M. Richard s'en venait prendre ma place pour l'expliquer. Il l'a très bien expliqué dans son énoncé au rapport Richard. Il a très bien compris.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lord: II n'y avait aucun problème M. Leclerc, M. Richard, c'est un AXEP chez Provigo.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lord: Même si on n'est pas Métro, on connaît notre monde.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: On finit toujours nos commissions, de ce temps-ci, avec un peu d'humour et ça aide. Oui, continuez.

M. Lord: Non, mais vous êtes sûr, M. Richard, que vous ne voulez pas prendre ma place, parce que...

Mme Marois: J'aimerais bien vous entendre, moi. Ha, ha, ha!

M. Lord: Non, c'est que...

Mme Marois: M. Richard aussi, d'ailleurs

M. Lord: Mais, il n'y a aucun problème. La règle de trois employés.. Je suis déjà passé et j'étais assis où vous étiez, vous, madame, à la commission Richard, vous souvenez-vous? On était juste en face. À côté de lui, il y avait un dénommé Plante, je pense qu'il travaille encore au ministère, pour M. Tremblay. Lui, il m'a dit qu'il n'y avait pas de problème avec la règle de trois. Le problème qu'il y avait dans le temps - M. Tremblay, vous n'étiez pas là - c'est que c'était déposé sur les tablettes. Mais ça se règle très facilement. La loi avec des dents, "hi, mosus" ça fait mal. C'est drôle, sur l'autoroute, quand tu roules puis que tu as un "ticket", je te dis que tu modères après, c'est la même affaire ça. Mettez une loi avec des dents! Ce matin, j'ai entendu une petite remarque, if y a quelqu'un, un député, qui a posé une question à M. Farladeau, je pense que c'était vous, monsieur...

Mme Marois: Leclerc.

M. Lord: ...vous avez parlé du dimanche, M. Leclerc. Vous avez dit: "Les amendes, puis?" Ah, il a dit: "ce n'est pas si pire". Je comprends. Comprenez-vous? L'affaire est toute là. Lui, il nous l'a dit, mettez-y des dents. Je vais vous dire une affaire, un gars qui va payer 10 000 $, 15 000 $, je ne sais pas là, les chiffres sont là, "ayoye". Il ne recommencera pas puis les autres vont dire: "ayoye", je suis mieux de ne pas prendre de chance". C'est clair pour moi. Je ne sais pas si ça l'est pour vous.

Mme Marois: Oui, M. Tremblay.

M. Tremblay (Marcel): J'aimerais ajouter un peu quelques mots là-dessus. Vous savez, qu'on prenne toutes les lois qui existent présentement et vous aurez toujours des gens pour tenter de les contourner Ça. c'est n'importe quoi. Par exemple, si on regarde le Code criminel, prenez les lois, par exemple, qui régissent tout l'ensemble de ce qu'on appelle les voleurs. Moi, H me semble que les voleurs, ça date depuis Ali Baba, ça date depuis des siècles...

Mme Marois: Et les 40 voleurs, justement.

M. Tremblay (Marcel): il y a toujours eu des voleurs et il y a toujours eu des gens qui ont tenté de frauder, de contourner les lois qui existent. Est-ce que, parce que, à un moment donné, on arrive à la conclusion que tout le monde, finalement, qu'un ensemble de gens finit par les contourner, on va dire: On va abolir toutes lus formes de loi Cost quasiment ça qu'on ressent. Hier, par exemple, quand on

parlait de libéralisation totale de tout, on a dit: Finalement, de toute façon, on ne sera jamais capables de faire respecter. Que fait-on? On se dit: Bon, au nom de la liberté, on crée un système anarchique. Comme cela, on est certains que tout le monde va faire ce qu'il veut, quand il veut, qu'il n'y aura pas de loi, qu'on n'aura pas besoin de les poigner, ça fait que, ainsi, les gens n'auront pas besoin de contourner les lois. Je pense, moi, que les lois, il faut que ça existe, il faut que ça ait des dents. C'est évident que même si ça a des dents et qu'il existe des lois, il y aura toujours des gens pour tenter de les contourner. Mais c'est avec la célérité et la sévérité avec lesquelles on va les appliquer qui va faire qu'elles vont être respectées.

Mme Marois: D'accord. Une autre question. Ça a été soulevé déjà à quelques reprises, il y a des gens qui font des recherches dans les universités, un professeur, entre autres, hier nous en a parlé. Ce sont les fameux achats à domicile. Ce matin encore aussi, la Coalition en pariait en disant: Bon, il y a des catalogues. La présidente de la Coalition est arrivée avec quelques-uns. Elle dit: Bon, bien, voilà. Ça, ça existe. Est-ce que, à votre point de vue... Évidemment, ce n'est pas l'alimentaire. En tout cas, je n'en ai pas encore vu beaucoup dans l'alimentaire. C'est dans le congelé déjà. Peut-être, oui, M. Vaillancourt pourrait répondre à cette question-là. Est-ce que, pour vous, c'est une concurrence déloyale? Est-ce que, pour vous, c'est aussi un secteur pour lequel il faudrait pouvoir intervenir ou ça vous apparaît d'un ordre un peu différent?

M. Vaillancourt: Écoutez, il y a une évolution qui se fait au niveau du commerce de détail et, en ce sens là, on a vu, il y a 20 ans passés, que toutes les grandes chaînes de magasin avaient leur catalogue. Le catalogue ne devenait plus rentable, c'est-à-dire que l'administration du département de commandes du catalogue devenait tellement coûteuse qu'il n'y avait plus aucune rentabilité de ce côté-là. Les achats faits à la télévision, il n'y a rien de nouveau là-dedans. Ne pensez pas que ça arrive ici à Montréal et que ça n'existe pas ailleurs. Ça existe aux États-Unis depuis de nombreuses années et les clubs d'achat américains télévisés ne sont pas encore, malgré la masse de population et de consommateurs qui existe dans certains États où ça se pratique, ce qu'il y a de plus rentables. Évidemment, on implante actuellement des systèmes de service via la télévision, la câblodistribution additionnelle, mais les preuves sont loin d'être faites de ce côté-là. Ce n'est pas ça qui nous inquiète. On n'est pas rendus là, d'après moi, au niveau de l'évolution des tendances de consommation.

Mme Marois: Ce qui vous inquiète.

M. Vaillancourt: Ce qui nous inquiète, évidemment... Moi, pour ma part, les tendances de consommation, les gouvernements en sont responsables pour une grande partie, et je pourrais peut-être citer une couple d'exemples. On a des services d'assurance-maladie ou des services d'assurance sociale dont la facture ne fait que s'élever d'année en année et dont les gouvernements qui administrent, au fil de ces années-là, sont pris avec des factures additionnelles énormes et des budgets à boucler. C'est bien beau faire des déficits mais, dans l'entreprise privée, on ne peut pas se permettre ça. Alors, quand je dis que les gouvernements sont responsables des tendances, jusqu'à un certain point, oui. Il s'agit de trouver la qualité de vie qu'on peut se payer avec les moyens qu'on a. Il faudra faire attention à ça, à l'avenir. Il y a des coûts additionnels qui se rapportent à des ouvertures additionnelles dans le commerce de détail. Je me rappelle les premières fois que je suis passé devant... mes premières commissions parlementaires, au temps du ministre Biron, je pense, la loi 57 ou 58 du temps...

Mme Marois: La loi 59 de M. Biron, oui.

M. Jolivet: La loi 59.

M. Vaillancourt: la loi 59, on avait évalué le coût horaire à peu près à 900 000 $ l'heure. Quatre ans après, on était rendus à 1 500 000 $. Si on le regarde en 1990, je pense que c'est en 1984 ou 1985...

Mme Marois: C'est en 1984.

M. Vaillancourt: SI on regarde en 1990, on dépasse certainement les 2 000 000 $ l'heure de plus pour ouvrir les entreprises en heures additionnelles. Alors ne pensez pas que, quelque entreprise que ce soit, que ce soit un club Price, que ce soit un Steinberg, que ce soit un Provigo, que ce soit un commerce de meubles ou autre, ces coûts-là ne sont pas répartis aux consommateurs. Ils le sont, définitivement.

Mme Marois: D'accord, merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous voulez remercier notre groupe.

Mme Marois: Oui, certainement. Je vous remercie de la présentation que vous nous avez faite et de l'échange très enrichissant que nous avons eu. Je pense que je n'ai pas à vous rappeler la position que nous avons prise. Elle rejoint en cela la vôtre, et j'espère... Je participe cependant, avec beaucoup de plaisir, à la commission, en ce sens que je pense que des points de vue différents viennent éclairer, viennent peut-être nuancer, etc. Je reste avec l'espoir, et j'imagine qu'on le partage ensemble,

que la décision qui sera prise ira dans le sens de ce que vous défendez, qui est la qualité de la vie. Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Lors de mon exposé, j'avais mentionné que le but était de ne pas revenir, d'ici deux ans, donc dans cette optique-là, les principes, une loi applicable gérable et viable. Et j'ai surtout dit qu'il faudrait profiter de cette consultation publique pour une réflexion globale du dossier, qui aille au-delà de l'intérêt personnel et immédiat de chacun. Je sais qu'on va passer encore l'après-midi avec des organismes que vous représentez. J'ai parlé d'équité, alors je fais abstraction de la qualité de vie, parce que je pense que vous êtes très clair là-dessus; besoins réels, on va en discuter avec M. Nantel, entre autres, cet après-midi Mais je veux juste conclure, moi, sur la question d'équité pour que vous puissiez penser à ça et peut-être me revenir par le biais d'autres représentants. Un droit statutaire, par exemple, la Loi de l'impôt, ce que ça dit, c'est que vous avez le droit de faire tout ce qui n'est pas défendu. Une loi, quand on fait une loi et qu'on dit à quelqu'un: Tu as le droit de faire ça, je parle de l'équité, là, est-ce qu'on peut rétroactivement, c'est une question que je pose, parce que je pense que c'est fondamental, est-ce qu'on peut, rétroactivement, dire à quelqu'un qui, de bonne foi, a fait dos choses: Je regrette, on n'aurait pas dû faire ça? Et je pense que ça vous tracasse aussi. La preuve, c'est que dans les exceptions que vous enlevez, vous ne parlez pas, vous dites les zones touristiques, oui, il faut mieux les baliser, et là-dessus on va sûrement travailler là-dessus. Deuxièmement, la question des pharmacies qui avaient un droit. Alors moi, je vous laisse là-dessus, sur la question de l'équité, parce que je pense que c'est important, c'est fondamental pour tout le monde, c'est fondamental pour le Québec et c'est fondamental surtout pour un gouvernement. Il faut être équitable. Alors essayez de m'aider, cet après-midi, comment on peut faire ça. Alors, MM. Tremblay, Lord, Nantel, Gadbois, et Vaillancourt, je vous remercie beaucoup. Je pense que ça a été une bonne discussion j'espère qu'on va pouvoir la poursuivre au courant de la journée. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission remercie la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche et suspend ses travaux jusqu'à 14 h 30.

(Suspension de la séance à 13 h 9)

(Reprise à 14 h 36)

Le Président (M. Bélanger): Je demanderais à chacun de reprendre sa place afin que la commission de l'économie et du travail puisse se réunir pour procéder à des consultations générales et à des auditions publiques sur les modifications à apporter à la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux.

Cet après-midi, dans un premier temps, nous recevons l'Association des consommateurs du Québec qui sera représentée par Mme Paule Gilbert, Mme Solange Guillot-Lemelin à qui, j'en profite, au nom de la commission, je veux souhaiter bon anniversaire. Je l'ai appris. On a créé le précédent ce matin. Alors, on va continuer. Et M Marcel Pedneault, directeur de la recherche. Tout le monde a 20 ans aujourd'hui. C'est merveilleux.

Mme Marois: On a l'âge de son coeur, M. le Président

Le Président (M. Bélanger): Ça, c'est vrai. Alors il y en a qui sont encore plus jeune que ça Ha, ha, ha! Je vais vous expliquer un peu notre procédure, je pense que vous êtes familière Quand vous avez à prendre la parole, surtout au moment des échanges, bien vouloir vous nommer, pas pour notre plaisir à nous, c'est pour les "transcripts" qui travaillent dans une autre pièce dans l'édifice; ne reconnaissant pas les voix, ça leur crée un travail épouvantable. Il faut le faire au moins pour elles. Pour eux ou elles, je ne sais pas qui sont les "transcripts".

Une voix: C'est pas mal des "elles".

Le Président (M. Bélanger): On me dit que c'est pas mal des "elles", mais ça ne fait rien, il y a peut-être un des "eux" là-dedans. Alors donc, si vous voulez procéder à la présentation de votre mémoire, ça nous fait plaisir.

Association des consommateurs du Québec

Mme Guillot-Lemelin: M le Président, M. le ministre. Comme premier point, si vous me permettez, j'aimerais un peu revenir sur les questions qu'on nous a posées ce matin pour faire une précision en termes de présentation d'organisation qu'on représente. Alors, l'Association des consommateurs du Québec est une association provinciale qui existe au Québec, qui existe depuis 40 ans Donc, ça nous remet en mémoire l'existence un peu du mouvement des consommateurs au Québec; donc, un mouvement qui est certainement utile, puisque nous sommes encore là depuis 40 ans, et un mouvement qui est aussi très durable.

Nous sommes une organisation qui a travaillé durant toutes ces années sur plusieurs dossiers de consommation qui évidemment, aujourd'hui, profitent aux consommateurs. Entre autres, pensons à toutes les actions sur la protection de l'environnement où l'ACQ est

intervenue avant même les groupes environ-nementalistes en ce qui concerne l'environnement, question de pesticides, aérosols, les revendications qu'on avait dans les années 1972 qui sont aujourd'hui tout à fait actuelles, et, aussi, entre autres, j'aime revenir sur celui de la publicité destinée aux enfants, puisque c'est une loi que nous avons au Québec et qu'à ma connaissance, elle n'existe nulle part ailleurs dans le monde. Donc, C'est vraiment une particularité qu'on doit être fiers d'avoir. Il y a aussi le dossier d'assurances dont on entend parler depuis quelques années, un dossier important à l'association et, évidemment aussi, le dossier sur les heures d'affaires qu'on a suivi depuis le début des années quatre-vingt.

Je répète qu'en termes de membres pour ceux qui voudraient... On a 5000 membres ici au Québec. Et nous sommes une organisation - j'aimerais aussi faire cette précision - qui a une base et qui consulte aussi les consommateurs de manière générale, contrairement à d'autres organisations qui ont un procédé très différent d'agir que nous respectons, qui eux, se regroupent et prennent position sur différents sujets.

Évidemment, à l'intérieur du mouvement des consommateurs comme à l'intérieur de tout mouvement social, il y a des divergences de points de vue. Nous considérons... Je me souviens déjà avoir entendu d'autres ex présidents de l'Association des consommateurs dire en commission parlementaire l'importance qu'il y a à avoir une concurrence d'idée à travers même le mouvement des consommateurs. C'est important la concurrence d'idées, et on n'a pas à le démontrer. On n'a seulement qu'à regarder dans les pays où ça n'existe pas comme dans les pays de l'Est, l'Europe de l'Est, où, actuellement, c'est ce qu'on revendique.

Alors, ma présentation sera la suivante. Évidemment, je vais tenir compte des trois principales questions qui ont été développées depuis le début: les besoins réels des consommateurs, la qualité de vie et aussi des informations en ce qui concerne les travailleurs.

Mais tout d'abord, il est important de comprendre que l'Association de consommateurs du Québec a pris position en faveur de l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche. Alors, les marchés d'alimentation, évidemment, c'est tout ce qui concerne le secteur alimentaire, et l'Association des consommateurs du Québec ne s'est pas prononcée en faveur de l'ensemble des établissements commerciaux. C'est tellement important, le fait qu'on soit d'accord avec une ouverture face aux marchés d'alimentation évidemment. Et d'autres, c'est par rapport à l'ensemble des établissements commerciaux. Il y a toute une confusion en ce qui concerne la qualité de vie, en ce qui concerne les travailleurs et les consommateurs. C'est une précision importante à faire.

Alors, le point de vue des consommateurs.

J'étais heureuse de constater ce matin, lorsque j'étais présente avec la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation le dimanche, de voir que c'était vraiment le point de vue des consommateurs qui était relevé. Évidemment, nous avons des marchands avec nous, puisqu'ils partagent la même position, mais c'est important de voir que c'est vraiment, à l'intérieur d'une coalition, le point de vue du consommateur qui est aussi très très important. Alors, on parle beaucoup d'organisation contemporaine de la vie familiale. Bon, les femmes au travail à 59 %, l'augmentation des revenus, l'augmentation de l'éducation, le changement dans les habitudes alimentaires. Ce sont des choses très importantes pour le consommateur. Donc, des modifications dans les habitudes d'achat, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire qu'actuellement les consommateurs ont de nouveaux besoins, de nouvelles formes de vouloir acheter, et c'est normal, puisque, quand on parle de besoins du consommateur - c'est ce dont on va parler durant toute notre présentation - on ne peut pas parler de besoins du consommateur comme quelque chose de statique. Il y a 40 ans, si on avait pris position, on n'aurait probablement pas pris la même qu'aujourd'hui, et c'est normal qu'on évolue et qu'on amène des positions différentes, rendus dans les années quatre-vingt-dix. Je pense que penser aux besoins du consommateur durant les années quatre-vingt-dix comme on y pensait durant les années soixante, ça démontrerait un retard marqué de la part d'une organisation de consommateurs.

Ces nouveaux besoins viennent évidemment des nouveaux modes de vie dans notre société, dont on ne peut pas faire abstraction, c'est évident. Entre autres, pensons aux familles monoparentales, 12 % au Canada, et aux 34 % au Québec de familles à une seule personne par ménage. Inutile de préciser que cette nouvelle famille qui n'est plus la famille traditionnelle d'avant, on doit en tenir compte. On ne peut pas dire: Bien coudon, ils sont là, mais ils vont s'organiser avec leurs choses. Les familles monoparentales ont des besoins bien particuliers, et il faut s'en occuper. Donc, il y a nécessité d'offrir à ces gens des services adaptés à leurs besoins. Si on veut leur offrir des services adaptés à leurs besoins, il faut inévitablement faire des changements et leur offrir de nouvelles possibilités.

Un point important aussi pour le consommateur, lorsqu'on parle de comportements de consommateurs, de comportements d'achat. Le comportement des consommateurs dans les années quatre-vingt-dix n'est plus homogène. C'est mentionné dans le document présenté par le ministère de l'Industrie et du Commerce. Donc, ça ne forme plus un bloc de personnes avec les mêmes comportements, un ensemble de segments aux attentes différentes. Mais ça veut dire que les gens, aujourd'hui, en tant que consommateurs,

ne se suivent plus comme des moutons, et heureusement d'ailleurs Ce qui devrait être sous-entendu et important dans le dossier qu'on traite aujourd'hui, c'est la solidarité des consommateurs dans ce dossier-là. Je ne sais pas si vous le savez comme moi, mais la solidarité des consommateurs au Québec, ce n'est pas quelque chose de très très fort. On n'a qu'à penser au nombre de personnes qui se plaignent; il y a seulement 4 % des gens qui se plaignent Lorsqu'en tant que consommateur, on ne se plaint pas, c'est qu'on laisse les commerçants profiter d'une situation. Alors, si on ne se plaint pas, c'est qu'ensemble, on n'est pas solidaires. Être solidaire dans le dossier des heures d'affaires, ça veut dire quoi? Ça veut dire comprendre que, si, moi, je n'ai pas besoin d'aller au magasin d'alimentation faire ma commande principale, par exemple, le dimanche quelque part, les 12 % des familles monoparentales et les 34 % des familles seules en ont besoin. Alors est-ce que je vais fermer les yeux? Est-ce qu'une association de consommateurs doit refouler les besoins des consommateurs, ou les regarder et être main dans la main avec eux et aller de l'avant? (14 h 45)

L'autre point de vue aussi qui est très important, évidemment, en tant que consommateurs, c'est les prix. Je pense qu'on l'a assez bien démontré ce matin avec la coalition, mais permettez-moi de reprendre certains points. Entre autres, les prix actuellement dans le marché chez les dépanneurs, c'est clair que ça coûte plus cher que dans un supermarché. On dit autour de 10 % ou 15 %. Entendons-nous à 13 %. Donc, c'est évident que les gens qui ont besoin de faire leur marché d'alimentation le dimanche, devront aller quelque part. Actuellement, il y a des marchés publics, il y a des halles et il y a des dépanneurs. Eh bien, ceux qui en ont besoin apprécieraient énormément aller dans des supermarchés. Alors, pourquoi laisser un petit secteur à part du marché d'alimentation et ne pas leur offrir la possibilité daller dans des endroits où ils risquent fort bien d'avoir un service, d'avoir une variété de produits et, entre autres, des prix intéressants? Comment une association de consommateurs ne peut-elle pas comprendre qu'actuellement, ça coûte plus cher? Alors, pourquoi dire que si on amène des modifications à la loi sur les heures d'affaires, ça va nous coûter plus cher? Regardons les faits. C'est actuellement que ça nous coûte plus cher II me semble que tout le monde est capable de comprendre ça.

Entre deux endroits, j'ai entendu des consommateurs, parce qu'on les a consultés à différentes reprises, j'ai entendu des commentaires du genre: C'est sûr qu'actuellement je vais chez Consommât, mais si Cooprix était ouvert, c'est sûr que j'irais là, ça coûte moins cher et c'est moins loin. Regardons-le du point de vue du consommateur. Nous sommes heureux, en tant qu'association de consommateurs, de constater qu'au moins quelque part, il y a une association de consommateurs qui parle au nom des consommateurs Évidemment, à la fin de la présentation, on va mentionner le point de vue des travailleurs, parce qu'on est assez intelligents pour se rendre compte qu'on est aussi des travailleurs, mais une association de consommateurs doit d'abord défendre les intérêts des consommateurs.

Donc, on a l'appui de la population. On dit que 54 % des gens sont en faveur. Je ne parlerai pas beaucoup de pourcentages. Je sais que pour beaucoup de gens, ça les énerve, les chiffres, les sondages, etc. Je les comprends, moi aussi. Mais, quand même, le chiffre, cet appui qu'on a de la population, je ne comprends pas que certaines personnes ne le voient pas. Ce ne sont pas des extra-terrestres, ces gens-là qui ont besoin daller dans les supermarchés, ce sont des consommateurs.

Et des données.. Évidemment, l'achalandage Oublions-les, les sondages, mais regardons l'achalandage Les gens y vont Alors, ils y vont pourquoi? Parce que ce sont des gros méchants, parce qu'ils ont de nouveaux besoins? Bien, voyons donc1 Ils y vont parce qu'ils sont dans une situation où ils doivent y aller. Donc, l'achalandage, pour nous, est un principe sur lequel on se base pour déterminer... Vous dites: Pourquoi les consommateurs en ont-ils besoin? Bien, on n'a qu'à regarder l'actualité. Ils s'y rendent, dans les supermarchés S'ils s'y rendent, ce n'est certainement pas parce qu'ils ont inventé quelque part, dans leur esprit, des besoins. Selon le Conseil économique du Canada, 44 % des familles se retrouvent dans une situation où il est difficile de faire ses emplettes en dehors des heures habituelles de travail. Bon. Une donnée aussi importante pour montrer, encore une fois, le pourquoi... Nous, on propose une ouverture dans ce secteur là du commerce de détail.

Évidemment, lorsque l'Association des consommateurs du Québec avait posé des questions à ses membres en ce qui concerne l'ensemble des établissements commerciaux, on n'avait pas eu un gros appui des consommateurs, parce que, évidemment, aujourd'hui, je pense qu'au Québec, de penser à l'ensemble des établissements commerciaux ne correspond pas à la réalité québécoise. Et si ça correspond à la réalité québécoise dans 25 ans, on le regardera, parce que, même dans 25 ans, on ne se dira pas: On a réglé ça en commission parlementaire, il y a 25 ans, et on n'en parle plus. Parce que les besoins des consommateurs, c'est quelque chose dont on parle toujours et qui change.

Donc, on s'est dit: En tant qu'association, on veut faire un changement à l'intérieur de la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux Alors, si on veut enlever les exceptions, ça n'a pas de bon sens. Le secteur, un des plus importants où il ne faudrait pas

enlever les exceptions, c'est bien l'alimentation. Les vêtements, à moins d'une urgence, je ne sais pas moi, d'un bal extraordinaire qui nous arrive et qu'il faille avoir un vêtement spécial pour s'y rendre, on va aller se l'acheter, mais c'est très spécial. Le vêtement, les meubles aussi. Donc, l'alimentation est un secteur où on n'a pas à se poser la question si on a besoin ou non. Il faut avoir de bons aliments et tout le temps.

Donc aussi, le dépannage. Le dépannage dans les années quatre-vingt-dix, pour le consommateur, évidemment, ce n'est pas le dépannage des années soixante. Essayons d'imaginer un portrait type du consommateur qui entre dans un dépanneur, qui s'achète un paquet de Player's, de la gomme à mâcher, un peu de chocolat, ça pouvait bien dépanner des gens. Mais, aujourd'hui, ce n'est plus ça. Aujourd'hui, on est plus exigeant. On est beaucoup plus soucieux de la qualité. Et que le dimanche on veuille se procurer un très bon pain, il n'y a pas de scrupule à y avoir pour le consommateur. C'est normal, dans les années où on en est rendus. Cette ouverture que l'on suggère tient compte, d'après nous, d'une réalité.

Alors, comment une association de consommateurs peut s'opposer à offrir aux consommateurs toutes les possibilités pour mieux s'alimenter, en tenant compte des besoins, évidemment. Donc, offrir aux consommateurs, c'est le prix, le service, le choix, la variété, la qualité, des produits frais. M. le ministre, on peut vous dire qu'on n'est pas contre les dépanneurs, mais c'est quand même des choses dont on se rend compte. Pourquoi, dans la période, à l'automne, où les pommes sont en grande quantité ici, au Québec, à quelques pas de l'île d'Orléans, ne peut-on pas trouver des pommes fraîches dans certains dépanneurs9 La fraîcheur, c'est important parce qu'on dit que, maintenant, le consommateur, 50 % des produits qu'il achète, ce sont des produits frais. Donc, il faut qu'il se les procure quelque part, ces produits-là

Donc, l'autre point de vue, la qualité de vie, un point que l'on discute évidemment en rapport avec ce dossier-là, et c'est important d'en parler, sauf qu'il ne faudrait pas non plus déplacer le débat. Je ne veux pas diminuer du tout toutes les questions qui ont rapport avec la qualité de vie, mais c'est une commission parlementaire sur les heures d'affaires et non pas une commission parlementaire sur la qualité de vie. Ce que je veux dire par là, c'est que, tout d'abord, la qualité de vie, ce n'est pas quelque chose qui se mesure le dimanche après-midi, entre midi et 17 heures. La qualité de vie, c'est tous les jours de la semaine et c'est tout le temps. Alors, pourquoi, tout d'un coup, on se met à penser, parce qu'on offrirait des produits d'alimentation pour le consommateur, chose tout à fait normale, que tous les renversements de société... Parce que c'est incroyable tout ce qu'on entend par rapport à la qualité de vie. Je pense qu'on est en train d'un peu "paranoïer" par rapport à ça, par rapport à la réalité. Donc, c'est important de parler de qualité de vie et d'en parler tout le temps pour le consommateur, et pas seulement le dimanche après-midi.

Ce que je veux dire par là, c'est que les familles monoparentales, entre autres, dont les services doivent être adaptés, ont besoin qu'on s'occupe d'elles, évidemment, parce qu'elles aussi ont une qualité de vie et doivent avoir la possibilité d'aller dans les supermarchés à des moments différents d'autres genres de familles. Donc, la qualité de vie passe aussi par le droit du travail. Le travail à temps partiel, entre autres, peut aider bien des consommateurs, les travailleurs, puisqu'il vaut mieux travailler à temps partiel que pas du tout, quand même, dans une société. Donc, la qualité de vie est en relation avec le droit au travail.

M. le ministre, là-dessus, j'aimerais faire une précision. Je pense que c'est quand même terrifiant d'entendre certains exploiter l'émotivité du consommateur par rapport à la qualité de vie. Vraiment, on exploite l'émotivité du consommateur de la même manière que l'entreprise. Et on a toujours critiqué qu'elle le fasse pour provoquer l'achat. C'est-à-dire que, par émotivi-té, on est en train de parler des personnes malades, on est en train de parler des personnes âgées qui ne seront plus visitées le dimanche. Vraiment, on prend les gens pour qui? Est-ce que le fait d'aller s'acheter un bon brocoli, un pain frais, etc., le dimanche après-midi, va nous rendre complètement stupide? Les droits aux personnes âgées, l'amour qu'on doit avoir pour les personnes âgées, on le comprend très bien, à l'Association des consommateurs du Québec. Et qu'on ne vienne pas nous dire des choses aussi horrifiantes.

En parlant des personnes âgées, dans la région de Trois-Rivières, entre autres, on a fait un très bon travail auprès des personnes âgées, en termes de condition de vie dans les centres d'accueil, en passant. Donc, il ne faut pas refouler les besoins des consommateurs et, au contraire, il faut les écouter.

Donc, élargir les services aux consommateurs n'égale pas du tout une absence de qualité de vie, c'est tout à fait le contraire, on leur permet un meilleur service.

Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous me permettez, madame, je vous inviterais à conclure, il vous reste...

Mme Guillot-Lemelin: D'accord. Alors, pour les travailleurs, je vais conclure rapidement puisque notre position est facile à synthétiser, on l'a dit: C'est le droit au travailleur de refuser et d'exiger de l'employeur qu'il ne demande aucun motif. S'il y a une loi, parce que je pense que lorsque la loi existe... C'est sûr que s'il y a une loi qui existe et qu'on laisse les

employeurs faire sans les contrôler, s'ils n'ont pas le droit d'exiger des employés de travailler, bien, il y a en quelque part qu'il faut le contrôler.

Alors, en conclusion, le temps me presse, me bouscule un peu, mais je pense qu'on a l'appui de la population, 54 % des gens. Il fallait quand même qu'il y ait une association de consommateurs qui ait le courage et le cran de proposer un changement face à toute la problématique qu'on vit avec les heures d'affaires.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, madame. M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, Mme Guillot-Lemelin. 5000 membres, pouvez-vous nous ventiler ou nous donner... Donnez-moi un exemple de ces membres-là Vous dites que vous avez 5000 membres. Je vais vous dire pourquoi je vous pose la question. Par exemple, les ACEF qui vont venir tout à l'heure vont nous dire qu'elles sont très représentatives. On va avoir également, tout à l'heure, la Fédération nationale des associations de consommateurs du Canada qui représente 5000 membres individuels et près de 120 000 membres corporatifs. Après vous, l'Association des consommateurs du Canada qui va venir, elle compte 18 000 membres.

Alors, qui représentez-vous au juste. Est-ce significatif, 5000 membres, par opposition à tous les autres? Quand on regarde la coalition contre, elle va nous donner tous les syndicats et elle va nous dire que ça représente 300 000, 400 000 membres, 500 000. Si on additionne tout ça à la fin, on est rendu à 10 000 000 au Québec. Mais indépendamment de ça, j'essaie de voir. Ma première question. Dites-moi qui vous représentez?

Mme Guillot-Lemelin: D'accord. Donc, évidemment, il y a des membres individuels, des individus; il y a des familles. Il y a également des membres corporatifs, entre autres l'Association des conseillers en consommation du Québec, des personnes âgées, des garderies; il y a une coopérative d'habitation. Donc, ce sont des membres corporatifs, des membres individuels et des membres familiaux.

J'aimerais dire, M. le ministre, que, moi, j'étais ici dans la salle ce matin lorsque la Fédération des associations coopératives d'économie familiales, M. Nantel, à qui vous avez posé la question, ne vous a pas parlé de chiffres. Alors, effectivement, comme vous le dites, on peut en imaginer et en ajouter. On n'a pas de chiffres et on en a très rarement.

Donc, ce sont ces membres-là qu'on représente et, comme on l'a aussi dit ce matin, n'oublions pas toutes nos publications. Parce que les publications sont un outil super important pour rejoindre des consommateurs et pour pouvoir exprimer nos points de vue. Et toutes les personnes qui ne sont pas membres et qui nous appellent dans nos régions, qui nous appellent tous les jours... Il y a une quantité phénoménale de consommateurs qui nous consultent, auprès de qui nous faisons de l'information. On n'a pas de chiffres, c'est l'ensemble de la population, puisqu'ils nous appellent continuellement.

M. Tremblay (Outremont): Est-ce que vos 5000 membres, ce sont 5000 oui?

Mme Guillot-Lemelin: Par rapport au marché de l'alimentation, d'accord?

M. Tremblay (Outremont): Oui.

Mme Guillot-Lemelin: On a fait une nouvelle consultation, que je précise encore "maison", comme je vous le disais ce matin, et, étant donné qu'on était pris, parce qu'on savait que la loi devait changer et qu'on avait peur d'éliminer l'exemption, entre autres, du secteur Je l'alimentation, un secteur tellement important pour le consommateur, on sest dit: On va reconsulter nos membres et on va leur demander, exclusivement pour le marché de l'alimentation, s'ils seraient d'accord pour ouvrir le dimanche. Et, à cette question-là, 52 % ont dit oui. Parce que, effectivement, même à l'intérieur de nos membres, il y en a qui n'ont pas ce besoin.

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Excellent Le point que j'essaie de faire, c'est de dire que, même dans votre association, la majorité est pour et c'est possible que dans les autres associations - je vais le savoir tout à l'heure - qui représentent 300 000 à 400 000 membres, ça peut être majoritairement oui, mais il pourrait peut-être y en avoir, disons sur 600 000, 290 contre et...

Mme Guillot-Lemelin: Exactement. M. Tremblay (Outremont): Bon, parfait.

Mme Guillot-Lemelin: Excusez-moi, mais surtout de savoir si on leur a posé la question...

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Excellent Je connais bien la représentativité.

Deuxièmement, on a parlé de besoins réels et de qualité de vie. Si je me fie à ce que vous me dites - et je vais poser la question aux autres cet après-midi - vous me dites: Besoins réels, services adaptés aux besoins. Et vous avez donné l'exemple des familles monoparentales. Après ça, vous nous avez dit: Les prix. C'est plus cher ailleurs. Et, troisièmement, vous avez parlé de l'achalandage. Vous avez dit: II y a de l'achalandage, donc il y a un besoin. Si on faisait abstraction de la qualité de vie et qu'on s'attaquait uniquement à la question des besoins réels - si je me fie à ce que vous me dites - le

consommateur devrait toujours dire oui à l'ouverture des commerces, à la libéralisation totale de tous les commerces.

Mme Guillot-Lemelin: Non, pas dans ce sens-là, puisque, actuellement nous ne croyons pas que ce soit autant un besoin, comme je l'ai mentionné dans ma présentation, de s'acheter des vêtements. Actuellement, je le précise, parce que peut-être plus tard ça changera Pour les consommateurs, ce n'est pas vraiment un besoin selon la réalité d'aujourd'hui. Mais, en ce qui a trait à l'alimentation, c'est sûrement un besoin, puisque les gens se présentent dans les endroits où c'est ouvert.

M. Tremblay (Outremont): Oui. C'est parce que j'allais un peu plus loin et je... On a parlé beaucoup des Club Price ce matin...

Mme Guillot-Lemelin: Oui.

M. Tremblay (Outremont): et je suis certain qu'il ne se vend pas juste de l'alimentation chez Club Price, donc... Et on a parlé des zones touristiques... (15 heures)

Mme Guillot-Lemelin: J'ai pensé à ça. M. le ministre, si vous me permettez, parce que je trouvais quand même la question de M. Richard pertinente, parce que, effectivement, vous aurez à gérer une loi et il y a les commerçants et des gens qui peuvent se faufiler. C'est la règle. On s'en rend compte aujourd'hui. Mais la question des Club Price, d'abord, c'est sûr que ça répond sûrement à un besoin parce que, dans la région de Montréal, c'est fréquenté. Mais pour éliminer le problème, parce que, nous, on s'attarde à l'alimentation et qu'on veut éliminer l'ensemble des commerces, bien il faudra, pour ceux qui veulent ouvrir le dimanche et vendre de l'alimentation, avoir un pourcentage assez élevé de leur volume, par exemple, qui pourrait être, je ne sais pas; un chiffre entre 70 % et. 80 % d'alimentation, au minimum, parce que, sinon, ça pourrait être une concurrence déloyale.

M. Tremblay (Outremont): Si on limite les besoins réels à l'alimentation...

Une voix: Oui.

M. Tremblay (Outremont): ..on dit, au niveau des services pour la clientèle, on parle de l'achalandage et le prix, normalement, le consommateur, pour l'alimentation, devrait dire selon des besoins réels en fonction des caractéristiques: ouverture le dimanche pour l'alimentation.

Une voix: Oui.

M. Tremblay (Outremont): Bon. Là, on entre la variable qualité de vie. Est-ce que je com- prends bien que vous dites que ça ne devrait peut-être pas faire partie du débat?

Mme Guillot-Lemelin: Non, je dis que ça fait partie du débat, mais qu'il ne faut pas charrier avec ça. C'est ça que je veux dire. Quand on dit que, par exemple, on ne s'occupera plus de nos personnes âgées, de nos personnes malades, qu'on ne visitera plus nos amis et qu'on ne fera plus faire nos devoirs à nos enfants, il ne faut pas nous prendre pour des imbéciles. Entre autres, sur les devoirs pour enfants, entre parenthèses, le dimanche, ils sont en congé, ils n'ont pas ces problèmes-là. J'entendais M. Nantel proposer ça ce matin. Pourtant, eux, ils favorisent l'ouverture le mercredi soir. S'il y a un moment où on a besoin de faire nos devoirs, c'est bien les jours de semaine. Enfin, c'est un détail.

C'est ça. Actuellement, la situation fait que les consommateurs ne changeraient... Ce ne serait pas un bouleversement de société, ce n'est pas la révolution, le fait qu'en tant que consommateurs, on puisse s'acheter des aliments le dimanche, où on veut.

M. Pedneault (Marcel): J'ajouterais peut-être qu'il y a une confusion dans toute la discussion aussi lorsqu'on parle de qualité de vie. C'est à la fois. Quelquefois, on mélange tous les secteurs: alimentation et tout, on mélange la qualité de vie des travailleurs et la qualité de vie en général de la société. Il y a toujours trois niveaux de discours dans les mémoires. En tout cas, tout ce que j'ai vu jusqu'à maintenant, c'est confondu, ce qui fait qu'il faut... Nous avons regardé ça aussi la qualité de vie des travailleurs. Même si les supermarchés ouvraient le dimanche, s'il y a un milieu où ils sont bien protégés et où ils ont de bonnes conventions collectives dans le milieu de l'alimentation, c'est bien là qu'ils ont la meilleure protection. Donc, on ne voit pas où est le problème là. La qualité de vie de la société en général, c'est là qu'on a charrié beaucoup au niveau des valeurs traditionnelles, de la famille et tout ça. On se rend compte statistiquement aujourd'hui que la famille n'est plus comme elle était jadis, donc il faut s'adapter à de nouveaux besoins, de nouvelles habitudes de vie également.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vais reprendre ce que vous venez de dire, M. Pedneault. Vous dites être à l'écoute des besoins des consommateurs et des consommatrices. Et vous dites: Leurs besoins, c'est que les heures d'ouverture soient plus importantes en matière d'alimentation. Ne mêlons pas les choux et les carottes, votre point de vue, c'est l'alimentation, et j'ai bien compris que le commerce de détail

dans d'autres types de produits, ça ne souffre pas les mêmes exigences. On s'entend bien?

Une voix: Exactement.

Mme Marois: Mais, M. Pedneault, vous me dites: On est à l'écoute de nos consommateurs et de nos consommatrices, et voilà ce qu'on vous recommande. Nous, en même temps, on a les travailleuses et travailleurs de l'alimentation...

M. Pedneault: Oui.

Mme Marois:... qui, eux, nous disent: On croit que ce n'est pas pertinent de faire en sorte que l'on libéralise davantage les heures d'ouverture parce que ça va nous amener à vivre des horaires brisés, ça va nous amener à modifier les conditions de vie générales et, nous, on vous dit qu'on n'est pas d'accord avec cette perspective-là. Alors, il faut aussi être à l'écoute, comprenez-vous? Vous comprenez un peu le parallèle que je fais...

M. Pedneault: Oui.

Mme Marois:... il faut aussi être à l'écoute des besoins exprimés par ces personnes-là.

M. Pedneault: O. K.

Mme Marois: Et, évidemment, la responsabilité d'un législateur, c'est d'essayer de trouver l'équilibre entre l'ensemble des besoins collectifs des uns et des autres, et de trancher et de faire des choix à cet égard- là. Peut-être M. Pedneault, et, après ça, vous vouliez répondre, madame?

M. Pedneault: L'argumentation est aussi construite autour de deux choses. Le document du MICT souligne que le milieu le mieux protégé dans les conventions collectives, c'est le milieu des supermarchés, justement, où il y a le plus haut taux de syndicalisation et où les conditions de travail sont le plus réglementées. Donc, on se dit: II y a une protection à ce niveau-là. Puis, comme Mme Guillot-Lemelin le soulignait aussi, il peut même y avoir création d'emplois. Les gens, apparemment, selon les conventions collectives, ont droit de refus s'ils ne veulent pas travailler le dimanche. Bon, il va y avoir embauche ou déplacement du temps partiel qu'il y a présentement dans les supermarchés.

Il y avait ce point-là. L'autre, je l'ai oublié.

Mme Marois: L'autre, c'était plus une question de commentaire de ma part dans le sens où il y a un équilibre.

M. Pedneault: Oui c'est ça.

Mme Marois: Et moi, je vous dis, il y a aussi ce message-là qui nous est envoyé parce que. malgré leur niveau de protection...

M. Pedneault: Oui.

Mme Marois: En plus, ce matin, si je pense à la TUAC, il reste que ce sont les gens qui sont probablement les mieux protégés dans le sens où ils ont des conventions collectives, ils ont des conditions de travail à tout le moins négociées. Ils ne sont peut-être pas toujours contents parfaitement à 100 %, mais au moins ils négocient. Bon.

M. Pedneault: Oui.

Mme Marois: Mais si même eux nous disent... Comprenez-vous?

M. Pedneault: Mon autre point vient de revenir. C'est justement le pourcentage de gens qui sont touchés par cet aspect-là. Même le MICT le souligne, ça va autour de 1 %, ce qui fait que nous, on représente l'ensemble, entre guillemets, même si on a 5000 membres. Je veux dire que, dans tous les dossiers, on ne consulte pas nécessairement toujours tous nos membres et toute la population toutes les fois, parce qu'on a une expertise aussi dans le domaine de la consommation, ce qui fait qu'on représente globalement aussi.

Mme Marois: Oui, madame, vous vouliez ajouter quelque chose.

Mme Guillot-Lemelin: J'aimerais ajouter ce point-là parce que ce matin, moi aussi, j'ai entendu les travailleurs de la TUAC, les représentants dire: Bien, écoutez, on le demande à nos travailleurs et ils refusent de travailler le dimanche. Évidemment, ceux qui ont déjà un horaire bien établi du lundi au vendredi, je pense que, spontanément, c'est normal que certains réagissent de ne pas vouloir travailler la fin de semaine avec la tradition qu'on a dans notre société; c'est évident. Mais est-ce qu'ils l'ont demandé à des gens qui sont sur le chômage? Il y en a 10 %, Mme Marois, qui sont sur le chômage actuellement au Québec. Quand on parle de politique pour améliorer ça, nous, on en suggère une. Puis, merde, on se fait dire: Ça. n'a pas de bon sens, puis arrêtez. C'est comme si on sortait des nues. Ça n'a pas d'allure. Qu'on en prenne quelque part, qu'on aille les chercher quelque part. Nous, en tant qu'association, on est honnête - je n'ai pas eu le temps beaucoup, dans ma présentation, de parler des travailleurs - on est honnête quand on dit qu'on a quand même une préoccupation et qu'ils doivent, premièrement, avoir le droit de refuser de travailler le dimanche et que, deuxièmement, leur employeur ne doit pas exiger de motifs. Mais aussi, si

jamais avec toute notre bonne volonté, à travers même les gens qui sont sur le chômage, à travers les femmes qui veulent retourner sur le marché du travail, à travers les étudiants, il n'y avait pas assez de gens pour combler le besoin que, nous, on demande actuellement, bien, on dira: Bien coudon, on a fait notre effort pour répondre vraiment, en tant que représentants des consommateurs. Mais je suis convaincue qu'il y a suffisamment de travailleurs aujourd'hui qui voudraient l'avoir.

Je ne sais pas si vous me permettez, Mme Marois, de vous poser cette question-là. Je ne sais pas si vous en avez rencontré, des gens qui travaillent la fin de semaine et qui sont heureux, qui ont des valeurs familiales, qui aiment leurs enfants. Il y en a de ces gens-là Et, selon le cycle familial, certaines personnes, à un moment donné, dans un bout de leur vie, vont même être heureuses de pouvoir travailler parce que ça va leur permettre d'améliorer leur qualité de vie dont on parle, M. le ministre. Pourquoi cela va-t-il améliorer leur qualité de vie? Parce que le petit revenu qu'ils vont aller se chercher la fin de semaine, ça va leur permettre de s'acheter, je ne sais pas, moi, une maison avec un bout de terrain, pour que leurs enfants jouent plutôt que d'être dans un troisième étage avec un balcon qui risque de manquer de tomber et qu'on ne les laisse même pas aller seuls dehors, parce qu'on a peur qu'ils se fassent frapper. C'est ça, la qualité de vie. Il y a des gens quelque part qui sont intéressés selon une période x de leur vie à travailler. Il va toujours y en avoir parce qu'il va toujours y avoir des gens, j'espère, qui vont avoir des enfants. Donc, ce n'est pas vrai que les gens qui travaillent le dimanche, ce sont tous des gens qui sont en train... Prenons l'exemple des travailleurs de nuit. Pour certains, ça les étonne. Il y a certains travailleurs qui aiment travailler la nuit et qui sont très heureux parce qu'ils ont une vie qui les comble.

Mme Marois: Vous me posez la question. Je vais y répondre.

Mme Guillot-Lemelin: D'accord.

Mme Marois: Je viens d'une famille dont le père était mécanicien et travaillait la nuit. Il travaillait un mois de nuit, un mois de jour. Il travaillait sur les quarts de travail. Il n'aimait pas beaucoup ça. Il n'avait pas le choix. Il le faisait. Il n'aimait pas beaucoup ça. J'ai un frère qui travaille dans les services d'urgence sociale, il travaille la nuit. II ne le fait pas par choix, c'est parce qu'il n'a pas d'autres emplois qui s'offrent dans ce secteur-là. Vous me posez la question, j'y réponds.

Mme Guillot-Lemelin: D'accord.

Mme Marois: Et depuis, je vais vous dire, parce que j'ai beaucoup cheminé. J'ai rencontré votre association, vous le savez, M. Pedneault entre autres, je l'ai rencontré et j'ai eu moi-même pendant un bon moment vraiment le même point de vue que vous. Je me suis dit: Pourquoi ça ne serait pas ouvert le dimanche? Ça m'emmerde, moi, quand j'arrive le samedi soir, à 17 heures, et que je n'ai pas eu le temps d'aller m'acheter telle ou telle chose. Si je pouvais, demain matin, décider que je vais acheter ma grosse commande, j'aimerais mieux ça. Bien sûr. C'est vrai que j'aimerais mieux ça, mais j'ai regardé effectivement les personnes qui travaillent. Et là, c'est un autre point de vue, j'en conviens, mais je les ai regardées et j'ai posé la question, et je la pose depuis que je me suis engagée dans cette réflexion-là. Est-ce que, pour vous, c'est un choix? Ce n'est jamais un choix, sauf quelques exceptions. Enlevons le mot "jamais". Ce n'est presque jamais un choix.

Mme Guillot-Lemelin: De travailler le dimanche?

Mme Marois: De travailler le dimanche. Les gens souhaiteraient.. Comme on sait que, naturellement et normalement, à cause de notre structure économique et de son mode organisa-tionnel, la majorité des gens travaillent plutôt du lundi au vendredi... Il y en a un certain nombre d'autres, à cause de la restauration, des industries manufacturières - je sais tout ça - d'un certain nombre de services qui doivent être ouverts, les hôpitaux, la fin de semaine, mais il faut voir. Regardez la bataille qu'ont menée les infirmiers et les infirmières du Québec sur le fait qu'on ait des primes, qu'on soit moins nombreux à travailler, etc.

La majorité des gens disent: Pourquoi on ne se donnerait pas... Cela va m'amener, et vous voyez où je m'en vais aussi, vers cette espèce de vision un peu de qualité de vie où on essaie de se retrouver, à un moment dans le temps, le plus nombreux possible à ne pas avoir à être au travail. Par obligation, il y en aura toujours dans notre société: les urgences de santé, les urgences sociales, les services de dépannage, les services de pharmacie, les services essentiels, bien sûr. Mais n'est-il pas imaginable que l'on puisse combler les besoins d'un certain nombre d'autres personnes que vous représentez? Je comprends ces besoins-là, je les ai aussi. S'il y en a une qui est prise aussi avec des horaires épouvantables, et je suis sûre que, de l'autre côté, c'est la même chose. Mais est-ce qu'on ne peut pas établir un consensus et se dire que, quelque part, on va ralentir le plus possible les activités de production, les activités de commerce et qu'il y ait une journée - et, en plus, on a une tradition à cause de notre histoire judéochrétienne, mais oublions ça - où on a pu tout arrêter dans le temps. Est-ce qu'on ne peut pas arriver à ça? Et quand vous me dites: II y a des besoins de

consommateurs et de consommatrices, 34 % des familles ont un membre, une personne... C'est vous qui l'avez dit, je ne me trompe pas là?

Mme Guillot-Lemelin: Non, non.

Mme Marois: Je l'utilise bien votre chiffre. Mais une personne, elle ne doit pas travailler lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi et samedi.

Mme Guillot-Lemelin: Non, mais, justement, les gens de ces familles-là peuvent travailler le dimanche sans que ça amène tous les problèmes sociaux que les autres amènent.

Mme Marois: Oui, mais prenons-le sous l'autre angle, dans le sens où ces personnes-là... C'est parce que vous vous en servez comme argument dans l'autre sens. Ces personnes-là ont quand même... Si elle est seule, cette personne-là, elle a un peu de temps, j'imagine, à se trouver quelque part pour aller s'acheter ses biens de consommation et même ses biens en matière d'alimentation. Si, en plus, que ce soit pour les chefs de famille monoparentales ou pour des familles où les deux parents travaillent, on allonge les plages du lundi, du mardi et du mercredi, qu'on me dise que le monde n'y va pas même si c'est ouvert maintenant, bien sûr, parce qu'ils savent qu'ils vont se débrouiller autrement le dimanche. Mais si on sait que le dimanche, ça va être plus compliqué, on va s'organiser pour aller s'approvisionner autrement. D'accord? Donc, dans ce sens-là... Je ne veux pas qu'on charrie non plus. Je vous comprends d'être un peu heurtés par, des fois, des propos sur la qualité de la vie, où on met...

Mme Guillot-Lemelin: On charrie, c'est ça

Mme Marois: ...là-dedans à peu près n'importe quoi. Mais il reste - et là, c'est ça mon point principal - qu'il me semble qu'il se dégage chez un grand nombre de personnes. Les personnes âgées, entre autres, disent. Si on pouvait se retrouver un jour un moment où il y a un peu moins d'activités de production et de commerce, de telle sorte qu'on puisse être plus nombreux à pouvoir se rencontrer, faire des loisirs, etc., et ce, sans charrier et sans y mettre trop d'émotivité...

Mme Guillot-Lemelin: D'accord.

Mme Marois: ...est-ce qu'on ne réussirait pas par d'autres moyens à donner accès aux consommateurs et aux consommatrices à d'autres heures pour qu'on puissent répondre à leurs besoins qui sont réels, j'en conviens avec vous?

Mme Guillot-Lemelin: C'est sûr que, quand on étudie un dossier de consommation, on regarde les désavantages et les avantages, un peu comme tous les dossiers que vous étudiez en politique. Mais on s'est dit qu'étant donné qu'on sait qu'il y en a qui ont des besoins, on le voit par l'achalandage, et qu'il faudrait les combler quelque part, en tant que consommateur - les consommateurs qui ne veulent pas y aller, c'est évident qu'ils ne seront pas forcés d'y aller - il n'est pas désavantagé. On a parlé des prix, etc. C'est clair. (15 h 15)

Donc, la personne qui veut y aller, elle, les personnes surtout, la forte proportion de personnes qui veulent s'y rendre, comment on peut diminuer les désavantages. Évidemment, on traite des travailleurs à ce niveau-là, on ne traite plus des autres consommateurs. Les autres consommateurs feront ce qu'ils voudront le dimanche après-midi. Il y en a qui n'iront jamais, mais aussi, n'oublions pas que parmi ceux qui s'opposent actuellement, si on fait un changement à la loi, ils seront probablement les premiers à y aller parce que le service n'est pas offert actuellement Alors, ils ne peuvent pas y aller dans le supermarché, il n'est pas ouvert.

Souvent, les gens qui s'opposent, c'est par souci des travailleurs. C'est normal parce qu'ils ne veulent pas remettre le problème sur le dos des travailleurs. Mais il y a les travailleurs qui sont disponibles actuellement et qui le veulent, je le répète, les étudiants, les femmes qui veulent retourner sur le marché du travail. Pour certains, ça peut sembler un travail pas si intéressant que ça, caissière dans un marché d'alimentation, mais je peux vous assurer que pour bien des gens, bien des femmes, bien des hommes - c'est sûr que pour la majorité, ce sont des femmes - c'est une réinsertion dans la vie en société. Travailler, vous savez comme moi que c'est important Donc, ces personnes. Il y a quelque part des gens, d'après nous, qui seraient capables de combler le moins 1 % qu'on vous a montré sur tableau ce matin sans toucher à ceux qui sont déjà sur le marché du travail.

Là, évidemment, il y a toutes les interrogations en disant. Là, vous allez faire cette ouverture aujourd'hui, et demain, ça va en être une autre, ça va en être une autre. Là, je m'excuse, mais l'alimentation est un secteur particulier. Il faut le regarder comme un secteur particulier.

Pensons aux institutions financières. Vous, comme moi, vous êtes sûrement contents de pouvoir éviter de vous présenter à tout prix un vendredi après-midi parce que vous n'avez pas eu le temps et de dire: Ce n'est pas grave, je vais aller au guichet automatique. Les institutions financières ont pensé à ce système. Ils l'ont fait pour qui? Ils l'ont fait pour nous, consommateurs, et on s'en sert. C'est ce dont on parte, de nouveaux services. C'est ça que ça veut dire dans les faits.

Donc, le reste du commerce au détail, je ne pense pas que... Il y a le téléachat qui est une

forme aussi où il n'y a pas tant de travailleurs qui sont impliqués; la commande que vous faites sur écran, il y a un travailleur qui va la prendre le lundi matin, il n'a pas besoin d'être là. Donc, je pense que le reste du commerce au détail, il ne faut pas trop supposer que ça va venir si vite. Ce n'est pas si évident que ça Évidemment, si ça a à venir dans 20 ans, il faudra s'ajuster.

Donc, je ne voudrais pas qu'on dise: Bien là, vous ouvrez l'alimentation, vous allez tout ouvrir. Il est possible qu'on fasse des exceptions et qu'on le fasse pour l'alimentation. D'après moi, je pense, Mme Marois, qu'il y a suffisamment de travailleurs, à moins que je ne me trompe, que je sois carrément en dehors de la carte, mais je pense qu'il y en a qui seraient d'accord pour le faire. Et si, à la rigueur, on se rend compte qu'il n'y aura pas de travailleurs, on ne pourra pas l'appliquer.

Mme Marois: Je reviendrai sur ça. Mon temps est écoulé.

Le Président (M. Bélanger): Je cède la parole au député de Nicoiet-Yamaska.

M. Richard: En quoi votre position est-elle différente d'il y a un an et demi environ, lorsque votre organisme s'était positionné en fonction des heures d'affaires? Quelle est la différence aujourd'hui? Est-ce que le dossier, selon vous, a évolué? Est-ce que c'est suite à un sondage? J'aurai une question sur votre sondage auprès de vos membres par la suite.

Mme Guillot-Lemelin: D'accord La situation a évolué certainement. Comme je l'ai dit tout à l'heure. Peut-être que je n'ai pas été assez claire. C'est que nous, la position de ceux qui sont les opposants qui disent qu'ils sont favorables au mercredi soir... D'ailleurs, ça a toujours été une spécificité à l'Association des consommateurs du Québec, le fait qu'elle ait toujours été à l'avant-garde. Elle a toujours pris des positions avant-gardistes, l'Association des consommateurs, pas avant-gardiste 150 000 pieds en avant du consommateur, au moins avant pour être capable de proposer des choses. Ce n'est pas mieux d'être trop en avant, ce n'est pas mieux d'être trop en arrière non plus. Donc, on a toujours été assez à l'avant-garde pour être préventifs et amener de nouvelles solutions.

Donc la position du mercredi soir, ça fait presque dix ans que nous l'avons comprise. Évidemment, étant donné que, depuis qu'on se rencontre en commission parlementaire où je vous ai vu, M. Richard, il y a presque deux ans, bien, étant donné que les choses n'ont pas changé, c'est évident que la situation change, que l'actualité change.

En tant qu'association, on a réfléchi. Et on s'est dit: S'ils sont en train de vouloir nous enlever des exceptions - et je le répète, l'ali- mentation, on ne peut pas s'imaginer d'empêcher les gens d'aller s'acheter des aliments le dimanche - si on réduit ça à du petit dépannage, comme certains disent, ça n'a pas de sens. On ne peut pas reculer et enlever un service à la clientèle aussi important pour le consommateur.

On a donc eu peur de retirer ces exceptions. Donc, on s'est dit: On va faire un compromis. On a eu une ouverture, c'est le cas de le dire, dans tout le dossier des heures d'affaires. L'AC a pensé: Bien, peut-être que le secteur de l'alimentation pourrait être une exception. Alors, c'est ça qui fait la différence entre lorsqu'on s'est rencontrés la dernière fois. On ose aller de l'avant par rapport à toucher le dimanche, c'est le cas de le dire, mais pour l'alimentation.

M. Richard: Maintenant, au niveau de votre sondage, si vous me permettez, M. le Président, vous avez mentionné que vous aviez environ 40 % des gens que vous avez sondés qui ont de la difficulté à faire leurs achats dans l'enveloppe que nous connaissons actuellement qui est une enveloppe de 62 heures.

Lors de votre sondage, votre sondage était-il en fonction de dire que vous préfériez des aménagements sur semaine ou un ajout additionnel d'heures le dimanche, ou si vous avez seulement questionné dans le sens: Est-ce que vous seriez en faveur d'un élargissement des heures d'affaires le dimanche? Je le répète: Est-ce que vous avez posé aussi la question pour des heures en ajout sur semaine, en alternative? Ou si les gens disaient: Nous, on veut les deux; on veut un ajout sur semaine et le dimanche en plus, ou si c'était tel quel sur semaine, avec l'ajout du dimanche?

Mme Guillot-Lemelin: La référence que vous faites, je pense, c'est au sondage que l'Association avait faite vers 1987, qu'on avait présenté à la dernière commission. Je ne sais pas si c'est de celui-là dont vous parlez là. Oui, on avait posé des questions, soit un prolongement en heures de semaine, par rapport au dimanche, mais, étant donné que ça concernait l'ensemble des commerces, on ne peut pas se baser sur les mêmes choses parce qu'aujourd'hui, on parle de l'alimentation.

M. Richard: Je m'excuse, non, c'était en référence à vous-même tout à l'heure. Vous avez dit que 43 % ou 44 %, de mémoire, des gens ont de la difficulté à faire leurs achats.

Mme Guillot-Lemelin: Ce n'est pas l'Association des consommateurs du Québec, c'est le Conseil économique du Canada. C'est une donnée.

M. Richard: Mais vous, vous n'avez pas fait cette vérification auprès de vos membres cette fois-ci?

Mme Guillot-Lemelin: Cette fois-ci. Récemment là?

M. Richard: Oui, oui.

Mme Guillot-Lemelin: II y a un an, on l'a fait pour l'alimentation exclusivement, quand j'ai parié de 52 %.

M. Richard: Ah bon! merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: D'abord, je voudrais reprendre une affirmation que vous avez faite qui, à mon sens, est très juste. Vous dites: La clientèle, le consommateur n'est plus homogène comme il l'a déjà été. Ça, je pense que vous touchez là quelque chose de fondamental, qui fait que des changements se sont opérés au cours des années chez le consommateur. Alors, un petit peu comme la question que je posais avant le dîner à des gens de la coalition contre, est-ce que la qualité de la vie, ce n'est pas quelque chose d'un petit peu relatif? Oui, justement parce que nous ne sommes plus une société homogène. Elle est constituée d'individus de plus en plus différents, de structures familiales très différentes. C'est ce qui fait que, de toute façon, toutes les études de marketing font en sorte que les entreprises offrent des produits dans des niches toujours plus spécialisées aux consommateurs, toujours des produits de plus en plus pointus pour aller chercher justement tel ou tel type de consommateurs.

Cela dit, je crois que vous avez raison de dire que le consommateur n'est plus homogène du tout. Ma question est sur la qualité de vie. Je ne vous cacherai pas que je trouve que les commentaires que nous avons sur la qualité de vie sont vraiment à l'opposé, que l'on entende des gens qui sont pour ou des gens qui sont contre. Avec une réalité X, pour vous, ça améliore la qualité de la vie, ça la rend meilleure et, pour les opposants, ça rempire de façon épouvantable la qualité de la vie. En tout cas, je pense qu'un jour ça va prendre Salomon pour trancher là-dedans, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Leclerc: Non, mais tout ça pour vous dire que vous dites que le fait d'ouvrir le dimanche, ça va augmenter la qualité de vie des consommateurs, alors que, ce matin, les gens nous disaient: Non, au contraire, ils vont avoir moins de temps pour la culture, pour ceci, pour cela. Les gens, ce matin, nous disaient que, d'ouvrir le dimanche, ça va gâter la qualité de vie des travailleurs et vous, vous dites: Non, bien au contraire, il y a même des chômeurs qui vont pouvoir améliorer leur qualité de vie parce qu'ils vont avoir un revenu supplémentaire.

Cela dit, on a vraiment une grande plage entre les opinions pour un fait bien précis, qui est, par exemple, dans le cas qui nous occupe, le fait que des gens vont avoir à travailler le dimanche. Ma question est justement là-dessus. Vous dites: Des gens vont avoir à travailler le dimanche. C'est mieux de travailler à temps partiel que de ne pas travailler du tout. Tout le monde est d'accord avec ça. Monsieur a dit: On s'adresse à une classe de travailleurs relativement bien protégés, compte tenu qu'il y a un certain nombre d'entreprises syndiquées là-dedans.

Cependant, je suis moins d'accord, et c'est là-dessus que porte directement ma question, sur le fait que ça va créer de nouveaux emplois. Connaissant un petit peu le domaine, mais pas autant que mon collègue de Nicolet, on sait que ces entreprises-là fonctionnent par pourcentage de main-d'oeuvre par département. Moi, je soupçonne que, si, dans un département de fruits et légumes, parce qu'on est ouvert le dimanche, le pourcentage de main-d'oeuvre augmente, il y a quelqu'un qui va écoper le lundi ou le mardi. Alors, je suis loin d'être convaincu qu'on va avoir une augmentation du nombre d'emplois.

Également, si, dans un district donné, dans une ville donnée, un supermarché va chercher une partie des affaires d'un dépanneur, on risque bien plus d'avoir un transfert de types d'emploi. Ce n'est pas nécessairement le même employé qui va passer du dépanneur au supermarché, mais il y a des emplois qui seront peut-être perdus dans un dépanneur et qui seront créés dans un supermarché. Donc, lorsque vous me dites que c'est mieux de travailler à temps partiel que de ne pas travailler, j'en conviens, mais ça, ça sous-tend que l'on tienne pour acquis qu'il y aura une augmentation du nombre d'emplois total dans l'alimentation, et, moi, je n'en suis pas convaincu Peut-être que oui, mais je vous demanderais d'essayer d'étayer le fait que vous pensez, vous, que ça va créer de nouveaux emplois.

Mme Guillot-Lemelin: Je n'ai pas vraiment insisté, en termes de création de nouveaux emplois. Ce que j'essayais de présenter, et peut-être que je l'ai mal fait, c'est qu'il y a sûrement quelque part des travailleurs qui sont prêts à travailler dans les marchés d'alimentation le dimanche après-midi. Si ce n'est pas de nouveaux emplois de créés, si on dit qu'il y a environ 70 % des emplois dans les supermarchés, qui sont à temps partiel, les gens qui sont à temps partiel vont peut-être aimer avoir quelques heures de plus, justement pour avoir une semaine un peu plus longue d'heures de travail. Peut-être que ce sera ces gens-là qu'on ira chercher. La personne qui travaille le jeudi soir et le vendredi soir sera peut-être intéressée à avoir quelques heures de plus qui s'ajoutent à son horaire. Aussi, pour

revenir à tout ce que vous disiez au début de votre présentation, il y a une perception très différente de la part des opposants et de la part des pour, c'est évident. Mais je pense que c'est aussi basé sur la compréhension du consommateur dans les années quatre-vingt-dix. C'est important de comprendre le consommateur tel qu'il est, de ne pas l'imaginer, et, nous, en tant qu'association de consommateurs, de ne pas lui dicter des façons d'agir. On n'est pas là pour dicter aux gens comment agir. On est là pour les conseiller. Et ce sont les gens qui décident de leurs habitudes d'achat. C'est un peu comme dans la langue, c'est l'usage qui détermine une langue. Donc, en consommation, ce sont les habitudes des gens qui déterminent ce dont ils ont besoin ou non.

Pour revenir à votre question, en termes de création d'emplois, je pense qu'à travers les travailleurs à temps partiel... Moi, j'insiste tellement. Il y a une commission parlementaire en même temps que nous, aujourd'hui, sur les frais de scolarité. J'enseigne à l'université et, en consultant les étudiants, je me disais: Laissez-moi vous dire qu'il y en a qui songent sérieusement, ceux qui n'ont pas d'emploi, à s'en trouver et ça va presser. Il me semble qu'il y en a des gens pour ça.

Le Président (M. Bélanger): M. Pedneault.

M. Pedneault: Oui. J'ajouterais aussi, au début de votre présentation, qu'on ne dit pas, pour contrebalancer: Ça va être extraordinaire, l'ouverture des commerces d'alimentation le dimanche. Ça va améliorer extraordinairement la qualité de vie. Par contre, le scénario pessimiste ou apocalyptique même... Ce qui est étonnant, c'est de voir qu'on donne tant d'importance à quelque chose qui est, en tout cas, relativement... Si l'ouverture des commerces en alimentation le dimanche a cet impact-là sur la société québécoise...

M. Leclerc: Je suis un petit peu d'accord avec vous. Vous avez fait mention...

M. Pedneault: C'est ça, il y a une démesure.

M. Leclerc: ...des visites des parents âgés, c'est un petit peu tiré par les cheveux.

M. Pedneault: On ne dit pas que la qualité va être extraordinaire pour 100 ans à venir, mais ça va au moins aider un peu pour les... Entre autres, je suis monoparental, et la difficulté que j'ai à agencer mon horaire, ma gestion du temps, par rapport à tout ça, je le vis, moi, concrètement. J'ajouterais... Je ne sais pas si je peux faire ça, ajouter des choses pour Mme Marois.

M. Leclerc: Enfin, c'est sur notre temps, mais...

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, on va...

M. Leclerc: À moins que vous m'attendiez, tout à l'heure.

Le Président (M. Bélanger): ...s'en tenir aux questions. Alors, M. le député de Drummond.

M. Saint-Roch: Merci, M. le Président. Dans le mémoire, vous élaborez sur la qualité des produits, prétendant qu'on aura une meilleure rotation des produits périssables et, conséquem-ment, une fraîcheur accrue, un choix varié et abondant de produits, un meilleur étalement des aubaines. Ce matin, on a eu des gens qui étaient contre l'ouverture des commerces d'alimentation le dimanche venir nous dire: Attention, messieurs et mesdames de la commission parlementaire, vous savez, il y a de la réglementation, il y a une loi qui régit toutes les matières périssables. Au niveau de la salubrité et de l'hygiène, nous sommes obligés, au moins une fois la semaine, soit le samedi soir à ce moment-ci, de vider nos comptoirs, ce qui nous permet d'avoir un bon nettoyage, que ce soit des fruits, des légumes ou de la boucherie. Dans l'éventualité d'une ouverture de sept jours, il y aurait donc peut-être un danger potentiel au niveau de la salubrité, de l'hygiène et de la santé publique. J'aimerais entendre vos commentaires sur une position de cette nature-là.

Mme Guillot-Lemelin: Là-dessus, monsieur, je pense que ce n'est pas une gestion hors pair d'être capable de savoir quand il faut nettoyer les comptoirs. Je pense que c'est clair. Supposons que les marchés sont ouverts sept jours, en tout cas, une partie... Aussi, le dimanche, ne l'oublions pas, c'est de midi à 17 heures. Donc, il y a le dimanche matin auquel on ne touche pas, je le précise. Moi, j'ai été membre, l'année dernière, par rapport aux Annuelles de l'alimentation. J'ai visité des supermarchés, j'ai visité des petites et moyennes surfaces et il y a des gens, dans l'alimentation, qui ont vraiment le souci que ce soit très très très propre, d'autres qui l'ont moins. Je pense que ce n'est pas ça qui va régler le problème de la salubrité dans les comptoirs. La salubrité dans les comptoirs, ça prend une détermination, une vérification importante du commerçant, et le faire continuellement pour que ce soit propre. Alors, c'est évident et même je ne pense pas qu'il y ait aucun problème à nettoyer ça d'une façon régulière, de passer un chiffon quand c'est sale.

M. Pedneault: Je répondrais: Si ça se fait dans les dépanneurs, sept jours sur sept, je ne vois pas pourquoi un supermarché n'arriverait pas à faire ça, logiquement. (15 h 30)

M. Saint-Roch: Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie. Mme la députée de Taillon, il vous reste cinq minutes.

Mme Marois: M. le Président, je ne reprendrai pas la question du député de Taschereau, mais, effectivement, j'ai un petit peu les mêmes interrogations qu'il a soulevées sur la création d'emplois, parce que les 10 %... Vous m'avez dit, là, je ne l'ai pas inventé, je pense que, madame, vous avez dit: Écoutez, vous ne pouvez pas, vous, Mme Marois, avec le taux de chômage que l'on a, si on crée de l'emploi. Or, il apparaît évident dans tout ce que l'on a vu comme documents, tant par le ministère que par d'autres intervenants qui sont venus devant nous, qu'il y a une certaine forme de saturation actuellement et qu'on s'échange les parts de marché.-..Donc, il va y avoir des transferts. Même les gens de la coalition pour, ce matin, dont les détaillants nous ont dit: II y a une cohue - c'est même dans la coalition - certains soirs; en étalant le dimanche, on va étaler aussi la cohue. Enlevons le mot "cohue". Il y a beaucoup de monde, on va l'étaler...

M. Jolivet: L'achalandage.

Mme Marois: l'achalandage. On disait même: On est obligés d'investir beaucoup de personnel les jeudis, vendredis et samedis; ça nous cause des heures de pointe compliquées; donc, on va l'étaler, ce qui veut dire que ce sont des travailleurs qui vont se déplacer, peut-être pas eux spécifiquement, peut-être pas celui qui travaille le vendredi soir, mais on s'entend, d'accord? Donc, je trouve qu'il faut être un petit peu prudent aussi là-dessus, sur l'effet quant à l'emploi.

Deux éléments. Vous suggérez de midi à 17 heures, autour de 17 heures. Il y a une autre hypothèse qui est envisagée, qui donne exactement le même nombre d'heures. Il y a une hypothèse qui dit: Ouvrons la plage un peu plus longuement le lundi d'une heure, le mardi d'une heure et le mercredi de trois heures. Il y a une des hypothèses qui était celle-là. Quand on regarde, c'est le même nombre d'heures. Alors, dans ce sens-là, ça permet à des gens d'avoir plus de temps à des personnes qui n'en ont pas. Et je vais revenir sur cet aspect sur lequel on revient tout le temps, parce que si on pense qu'on charrie dans un sens, on charrie aussi dans l'autre sens parfois. Quand on me dit: Les chefs de familles monoparentales ont un problème de gestion du temps, j'en conviens et j'en suis. Mais moi, je pense que, souvent, le problème des chefs de familles monoparentales, c'est d'avoir l'accès à d'autres types de ressources, que ce soit de la garde ou de l'aide financière, dans certains cas, il y a aussi le temps, mais il y a souvent, d'abord, cette première question. Donc, je dis qu'il faut faire attention un petit peu.

Donc, cinq heures pour cinq heures, ça allonge, en tout cas, le temps disponible pour les consommateurs et les consommatrices.

Dernier élément. Après ça, je vous laisserai tout le temps pour donner la réplique, pour me donner les informations que vous vouliez me donner. C'est M. Pedneault qui a dit: Mais qu'est-ce que c'est que cette espèce de débat qui fait qu'on a l'impression de revirer le monde à l'envers quand on parle de la question des heures d'ouverture? Je pense qu'il y en a un débat de société dans ça, où on a l'impression que nous échappe un concept qui avait fait, jusqu'à un certain point, l'unanimité entre nous, à savoir qu'il y avait, dans la semaine, un moment où - je ne me répéterai pas, là - on réduisait un peu les activités. Et c'est ça, dans le fond, qui soulève tant d'émotivité, à mon point de vue. C'est toute cette réalité-là qu'on a l'impression qui nous échappe, qui s'en va, que l'on perd. On a l'impression de perdre quelque chose, et c'est pour ça que ça soulève tant d'émotivité. Si ce n'était qu'une question de dire: Trois heures de plus, trois heures de moins, je tasse un peu de temps-là. Je pense que c'est beaucoup plus profond que ce que l'on pense. Et c'est le résultat justement de cette profondeur comme problème, comme réalité, auquel on s'attaque qui fait que ça soulève autant d'interventions et d'émotivité.

M. Pedneault: Je suis content que vous reveniez sur ce troisième point-là, c'est là-dessus que je voulais revenir. Je pourrais pousser à l'absurde un peu votre raisonnement, votre argumentation. Il y a tout le secteur du travail où les gens sont obligés de travailler, les hôpitaux que vous avez mentionnés tout à l'heure. Il y a plein d'autres secteurs d'activité où les gens choisissent de travailler également. Je me dis, pour être cohérent aussi, il faudrait dire que les librairies qui sont ouvertes, les cinémas, les théâtres, les activités de loisirs, les dépanneurs, tout ce qui est imaginable et que tout le monde connaît, pour être cohérent, pour se donner comme société une journée par semaine, pourquoi ne pas fermer tout ça, pour conserver une société harmonieuse et tout ça? Ce que je ne comprends pas dans le raisonnement, c'est comment ce secteur d'activité là va venir bouleverser, alors que toutes ces autres activités-là qui sont importantes aussi, les restaurants et tout ça, ça en fait du monde qui travaille là-dedans...

Mme Marois: Est-ce que vous me permettez de dire que j'ai justement abordé ça dans mon intervention de départ en disant que, peut-être que l'une des hypothèses - et là, ne me faites pas dire ce que je ne dirai pas - serait d'envisager... Dans les secteurs manufacturiers où ce n'est pas tout à fait nécessaire et tout à fait utile, peut-être qu'on devrait envisager de

réduire encore un peu le nombre de secteurs où on a à travailler le dimanche? C'est une des questions que j'ai soulevées. D'accord? Pour être cohérente aussi.

M. Pedneault: Oui. Non, non. C'est que je pourrais pousser à l'absurde aussi toute cette question-là.

Mme Marois: Oui, je comprends bien.

M. Pedneault: L'autre, le temps disponible sur la semaine... Je vais plus parler de mon expérience personnelle de gestion de temps. Quand je finis de travailler au bureau à 17 heures - et j'essaie d'avoir des horaires aussi et mon emploi me le permet - il faut que j'aille chercher mon gars à l'école, à la halte-garderie, le temps de le prendre, je le ramène, on est rendu à 18 heures, le souper n'est pas fait, les devoirs ne sont pas faits. Que ça soit le lundi soir ou... Le seul soir que j'ai de libre où on peut relaxer un peu, c'est le vendredi soir. On court moins. Mais les autres soirs de la semaine, que vous m'ouvriez l'épicerie le lundi soir ou le mercredi soir, je n'ai pas plus de temps de disponible là-dessus parce que j'ai à "rusher" avec lui. Je ne veux pas le traîner à l'épicerie, courir - j'ai couru toute la journée - à l'épicerie et faire ça. Mme Guillot-Lemelin avait souligné ça. C'est sept jours sur sept, la qualité de vie. Ce n'est pas juste une journée par semaine. C'est essayer de voir, se donner des conditions sept jours sur sept et penser en fonction de ça. Et moi, en tout cas...

Le Président (M. Bélanger): Merci M. Pedneault: O.K.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la députée de Taillon, si vous voulez remercier notre groupe, nous en sommes rendus aux conclusions.

Mme Marois: Je vous remercie de votre contribution à nos travaux, de votre éclairage et de l'honnêteté de nos échanges. Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Juste une remarque qui a été faite. Ça peut devenir émotif parce que les gens peuvent avoir l'impression de perdre quelque chose si jamais il y avait ouverture le dimanche. Alors, je ne fais que poser la question. Combien émotif est-ce que ça va devenir pour ceux et celles qui vont perdre quelque chose si on doit faire marche arrière?

J'ai mentionné au début, hier, lorsqu'on a commencé, que ça serait très difficile. J'ai dit qu'on s'apercevrait que c'est très difficile de cerner avec exactitude les notions de besoins réels et de qualité de vie. J'ai mentionné que ce qui va apparaître comme une condition sine qua non de qualité de vie pour certains, ça représente au contraire une diminution de la qualité de vie pour d'autres. Alors, j'ai ajouté qu'une des tâches de cette commission, c'est justement d'essayer de réconcilier cette dualité. Alors, dans ce sens-là, Mme Guillot-Lemelin, Mme Gilbert et M. Pedneault, je vous remercie beaucoup de l'information que vous nous avez donnée et nous allons la prendre en considération dans la solution finale. Merci.

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail remercie l'Association des consommateurs du Québec de sa participation à nos travaux et des éclairages qu'ils nous ont apportés et invite à se présenter à la table des témoins, la Fédération des associations coopératives d'économie familiale, c'est-à-dire les ACEF.

La commission de l'économie et du travail reprend ses travaux pour entendre la Fédération des associations coopératives d'économie familiale. M. Nantel, que nous avons d'ailleurs vu plus tôt ce matin, vous pouvez nous présenter les gens qui vous accompagnent. Vous aurez 20 minutes pour nous faire part de votre mémoire et, ensuite, il y aura période de questions de chaque côté. On vous demanderait, pour le bénéfice de ceux et celles qui ont à transcrire nos débats, de bien vouloir vous nommer avant de parler.

Fédération des associations coopératives d'économie familiale

M. Nantel: Merci. Yves Nantel. M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. de la commission parlementaire, je vous remercie de nous donner l'opportunité de venir donner notre opinion sur ce débat qui a lieu actuellement.

Je vais tout de suite vous présenter les deux personnes qui vont contribuer à vous donner notre opinion. J'ai, à ma droite, Mme Carole Gadoua; à ma gauche, Mme Lise Goulet, qui sont toutes deux membres de la Commission de pratiques commerciales de la Fédération des ACEF.

Premièrement, juste une petite mise au point: On va avoir besoin pour travailler de deux documents, le mémoire évidemment, mais aussi deux documents que j'ai déposés seulement hier au Secrétariat des commissions, qui est un nouveau graphique; il y en a un à la fin du mémoire, mais il y a un nouveau graphique qui complète le graphique que nous avons dans notre mémoire, et le document qui s'appelle "Commentaires sur le sondage de la Coalition pour l'équité et le libre accès aux marchés d'alimentation" qui est présenté par M. Jean-Paul Voyer, professeur titulaire au département de mesures et évaluation de l'Université Laval.

Le Président (M. Leclerc): Bien. M. le secrétaire nous dit qu'il va devoir vérifier pour voir si on a bel et bien eu ça. Si on l'a eu, il n'y a pas de problème pour que ça puisse être distribué aux membres de la commission.

M. Nantel: Ça a été déposé hier après-midi, dans le courant de l'après-midi.

Le Président (M. Leclerc): Ça va?

Le Secrétaire: Oui, oui, ça va. On va le distribuer aux membres.

M. Nantel: Et ça revient vers la fin, de toute façon, de notre exposé...

Le Président (M. Leclerc): Si je comprends bien, vous apprécieriez que ce soit distribué aux membres de la commission.

M. Nantel: S'il vous plaît, parce qu'on aura à suivre, du moins sur le graphique quand... C'est assez important.

Le Président (M. Leclerc): On procède. Ça va. Vous pouvez y aller.

M. Nantel: Je vais tout de suite amener la question qui va venir parce qu'elle vient à tous les groupes: C'est quoi, la représentativité de notre groupe? Alors, on a deux façons d'acquérir un "membership". La première façon, c'est un "membership" individuel et la deuxième façon, c'est un "membership" corporatif; traditionnellement dans les ACEF, ça s'est toujours fait comme ça. On a quelque 3000 membres individuels et quelque 175 organismes corporatifs, dont une dizaine de caisses populaires, une centaine de groupes communautaires, des CLSC, des syndicats locaux et régionaux, des coopératives d'habitation, etc. Je pense qu'il ne serait pas opportun de faire le décompte des membres des caisses populaires parce que, évidemment, les membres corporatifs n'adhèrent pas nécessairement sur la base d'un dossier, ils adhèrent sur la base de l'ensemble de notre travail qu'on fait. Et on ne peut pas dire que les membres de ces caisses populaires ont été consultés; ce ne serait pas correct de dire ça.

Par contre, la structure de la Fédération des ACEF comprend quand même onze associations régionales comprenant chacune son propre conseil d'administration, son propre comité de travail et ses propres dossiers d'intervention parce que la Fédération n'est qu'une fédération d'associations et ces onze associations sont présentes sur une bonne partie du territoire du Québec. Je ne veux pas embarquer nécessairement là-dedans.

Comme introduction, je vous ferai remarquer qu'évidemment notre position se démarque assez largement de certaines autres associations de consommateurs en ce sens que nous avons privilégié une approche globale de la situation et nous avons utilisé une grille d'analyse qui est la grille écologique en écologie humaine et sociale qui nous obligeait à considérer l'ensemble des facettes du problème, non seulement la facette économique comme consommateurs, mais aussi la facette sociale, autant sur les perturbations à court terme pour les consommateurs que sur les perturbations à long terme sur l'ensemble de la vie en société. Alors, nous allons vous présenter notre analyse et elle va être divisée en cinq points. (15 h 45)

Le premier point: Comment voyons-nous les besoins des consommateurs en matière d'accès aux biens de consommation? Deuxièmement, comment voyons-nous aussi le consommateur comme étant une personne vivant en société avec d'autres besoins que des besoins de consommer ou de s'approvisionner en consommation? Troisièmement, les conséquences à court, moyen et long termes sur les consommateurs et la vie en société. Quatrièmement, nous aborderons l'analyse des sondages qui sont faits depuis 1987, parce qu'on en a fait état énormément et abondamment de ces sondages. Et, cinquièmement, les recommandations de la Fédération des ACEF pour, croyons-nous, solutionner le mieux possible, parce qu'on ne croit pas qu'il y ait de solutions miracles, le problème des heures d'ouverture actuellement au Québec. Alors, je passe la parole à Mme Goulet qui va vous introduire les deux premiers points.

Le Président (M. Leclerc): Mme Goulet.

Mme Goulet (Lise): Bonjour, monsieur, mesdames. Je commencerai la présentation de notre mémoire en tentant de cerner le besoin d'accès aux biens de consommation de la part des consommateurs. D'après notre expertise en tant qu'association de consommateurs et d'après notre analyse de la conjoncture actuelle, il est évident qu'il existe un certain problème d'accès aux biens de consommation pour les consommateurs étant donné la nouvelle réalité socio-démographique Par exemple, la progression de l'entrée des femmes sur le marché du travail est l'un des principaux facteurs expliquant la diminution du temps disponible pour le magasinage. Par contre, il serait bon de pondérer ce besoin d'accès en sachant qu'en 1987, 23 % de l'ensemble de la main-d'oeuvre féminine travaillait à temps partiel et qu'en général le taux de chômage féminin est supérieur au taux de chômage masculin.

De plus, il est abusif d'invoquer aussi souvent le phénomène de l'augmentation de la monoparental ité pour justifier les besoins d'accès justement aux biens de consommation, puisque 62,4 % des chefs de famille monoparentale sont inactifs, c'est à-dire sans emploi, et 33,4 % des chefs de famille monoparentale vivent de l'aide

sociale. Donc, dans leur cas, ce n'est pas le temps pour magasiner qui leur manque mais plutôt le pouvoir d'achat, dans la plupart des cas. Donc, on tenait à pondérer ce phénomène.

Enfin, la tendance vers une diminution des heures hebdomadaires de travail et la récente introduction du magasinage électronique, quoiqu'on n'ait pas d'étude qui démontre, qui nous amène des chiffres à ce sujet, sont d'autres facteurs nous amenant à relativiser le problème d'accès pour les consommateurs. Ce sont des tendances qu'on devra observer dans l'avenir.

Donc, effectivement, nous reconnaissons qu'il existe un besoin réel de réaménager les heures d'ouverture et ce, afin de répondre aux problèmes d'accès aux biens de consommation. Par contre, l'utilisation quelque peu démagogique de certains phénomènes nous oblige à pondérer ce problème d'accès. Donc, il y en a un, mais il ne faut quand même pas - c'est ça - prendre pour acquis tous ces arguments-là de la façon que ça a été présenté jusqu'à maintenant.

Maintenant, la deuxième partie. Je vais vous parler du consommateur en tant qu'être global parce que, comme le mentionnait M. Nantel, notre réflexion sur la problématique ne s'est pas limitée à une simple approche, un consumérisme étroit, c'est-à-dire que nous avons analysé les besoins du consommateur en tant qu'être global plutôt que simple être de magasinage.

Ce que ça signifie, selon nous, c'est qu'au fond le consommateur, en dehors de son travail, en dehors de son sommeil, tout ça, il a besoin d'occasions, premièrement, pour entretenir des relations avec les autres individus: que ce soit sa famille, que ce soient ses amis, etc. En tout cas, même si certains pensent. C'est un exemple. Que ce soit pour visiter des personnes dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, que ce soit pour pique-niquer, pour faire des randonnées, on a besoin de temps commun pour justement profiter de ces occasions-là On a besoin d'occasions aussi pour décompresser psychologiquement, soit en assistant à des activités de plein air, à des spectacles, à des expositions, à des activités culturelles, de loisir, ou tout simplement en allant dans la nature.

Et, à ce sujet-là, justement, on a juste à regarder l'augmentation de la participation aux différentes activités telles: Cités cinés, Imax, les expositions en plein air de l'OMS. Depuis quelques années, il y a vraiment une augmentation de la participation à ces activités-là. Donc, il y a toute une infrastructure culturelle et de loisir qui s'installe au Québec et, d'après nous, ça démontre un autre besoin du consommateur. Donc, ce n'est pas seulement le fait de magasiner mais il y a un besoin aussi de décompresser psychologiquement. Et, au Québec, ces occasions privilégiées justement d'entretenir des liens, de décompresser etc., c'est principalement le samedi soir et le dimanche qu'elles sont exercées.

À cet effet, on a lu un sondage de Léger-Léger de novembre 1988 concernant la vie montréalaise - on n'a pas les données pour Québec, c'est vraiment un sondage qui a été fait pour Montréal - qui dit qu'il y a seulement 15 % des Montréalais qui ne se retrouvent pas avec les membres de leur famille immédiate durant la fin de semaine. Au fond, il y a 45,8 % des Montréalais qui profitent du dimanche pour visiter leurs parents, leur famille immédiate et il y en a 20,7 % qui profitent de toute la fin de semaine pour la visiter. Donc, il y a seulement 15 % des Montréalais qui n'utilisent pas ce temps-là pour visiter la famille.

Une autre donnée de ce sondage qu'on trouvait fort importante, c'est lorsqu'ils ont demandé aux Montréalais de manifester leur préférence pour certaines journées, pour certaines activités; le magasinage le dimanche n'a obtenu que 2 % d'adhérents. Il y a seulement 2 % des personnes qui préféreraient magasiner le dimanche. Donc, selon nous, c'est très très révélateur, c'a été fait en novembre 1988 et ça parle beaucoup. On pourra dire: Oui, mais c'est Montréal. En région, souvent, la structure familiale est beaucoup plus développée, donc, selon nous, on pourrait s'attendre à des pourcentages encore plus élevés en région - je parle du niveau familial.

Ces moments communs dont la plupart des gens profitent pour nouer les liens, pour partager, pour échanger ou pour s'adonner aux diverses activités culturelles et sociales, c'est ce qu'on appelle, nous, le minimum de conformité sociale. Selon nous, il est essentiel de préserver ce minimum de conformité sociale pour qu'une vie sociale équilibrée soit maintenue au Québec. Donc, il est important qu'une journée par semaine soit exempte d'activités de travail et de commerce pour le plus grand nombre possible de Québécois et ce, afin de préserver ces occasions privilégiées. C'est le dimanche que notre culture et notre tradition ont choisi pour exercer ces activités. C'est terminé pour moi.

Le Président (M. Leclerc): Bien. M. Nantel, je voudrais vous confirmer qu'on est à distribuer les deux documents dont vous nous avez parlé.

M. Nantel: Parfait

Le Président (M. Leclerc): Bien. Vous pouvez continuer.

M. Nantel: Le troisième point de notre exposé concerne les conséquences à court, à moyen et à long terme pour les consommateurs et la vie en société. Une première conséquence, pour nous, de l'ouverture des magasins le dimanche... Parce qu'il faut faire une mise au point aussi au départ. Pour nous, l'ouverture des magasins d'alimentation le dimanche n'est qu'une étape à très très court terme vers l'ouverture

généralisée de l'ensemble des commerces le dimanche, et je pense que plusieurs personnes avant nous l'ont spécifié. On ne croit pas à une loi qui ne réglementerait que les marchés d'alimentation le dimanche. Donc, dans cette perspective, on ne peut pas analyser les conséquences uniquement à partir de l'ouverture des marchés d'alimentation le dimanche.

Premièrement, on pense que, de façon générale, on en arriverait à une augmentation des prix des produits qui est due, je pense qu'on l'a mentionné déjà depuis le début de la commission parlementaire, au fait qu'il n'est pas possible ou très difficile d'élargir l'ensemble du chiffre d'affaires, et nous avons quelques chiffres à ce niveau-là. Le pouvoir d'achat des consommateurs a diminué, depuis dix ans, de 6 %. Le pouvoir d'achat familial - on pourrait dire que, lorsque les deux conjoints travaillent, le pouvoir d'achat augmente - c'est la même chose; le pouvoir d'achat familial a stagné depuis ces dernières années. Le pouvoir d'emprunt des consommateurs est rendu à un taux de 28 % du revenu personnel pour rembourser leurs dettes, la cote d'alerte dans les banques et les caisses étant autour de 30 %, et, si on pense que les consommateurs iraient chercher de l'argent en banque pour consommer davantage, de 1982 à 1988, on est passé à un taux d'épargne de 18 % à 6 % au Québec. On est sur le bord de la récession et c'est grave. Les consommateurs ne sortiront pas plus d'argent pour aller magasiner le dimanche. À ce moment-la, où prendrons-nous l'argent pour augmenter le chiffre d'affaires, pour augmenter les profits on l'argent pour payer les frais supplémentaires occasionnés par l'engagement de travailleurs supplémentaires, par les assurances supplémentaires, par les frais de publicité, etc.? C'est évident que cette logique-là ne s'applique pas de façon linéaire. Il y a tout le jeu de la concurrence qu'on peut faire jouer là-dedans, mais au moment où ça ne s'applique pas, ce qui est clair, c'est qu'on assiste a une concurrence acharnée entre les différents commerçants pour s'approprier des parts du marché et on n'est pas tellement plus avancé. De toute façon, il y a un risque très grave d'augmentation des prix des produits qui seront soumis à l'ouverture des magasins le dimanche.

Une deuxième perturbation à court terme - j'en ai parlé ce matin dans l'exposé de la Coalition contre l'ouverture des commerces le dimanche, et je ne veux pas m'étendre longtemps - concerne les conditions de vie et de travail des travailleurs et travailleuses du commerce et des propriétaires de magasins aussi.

L'autre élément aussi, c'est l'entraînement probable de coûts sociaux: force constabulaire, transport en commun, garderie, transport routier, etc. C'est à très court terme

Par contre, un autre point important - encore ce matin, j'ai été obligé d'utiliser les arguments qu'on doit présenter aujourd'hui, cet après-midi - c'est tout le phénomène qu'on appelle d'une plus grande commercialisation de la vie. Une plus grande commercialisation de la vie, on la définit comme étant le phénomène par lequel la vie se calque de plus en plus sur les activités commerciales. À notre point de vue, le fait d'aller magasiner le dimanche et de l'associer à des activités de loisir, à des activités de culture ou à des activités de détente, et que l'objectif premier, ce soit de faire acheter des produits en utilisant toutes les techniques de marketing et de publicité conséquentes, qui sont normales dans notre société actuelle pour faire vendre des produits, à cause de la concurrence entre les différents commerçants, il ne faut pas nier que les gens vont ainsi se reconnaître dans les activités commerciales, donc de magasinage, au détriment des activités d'épanouissement personnel ou de relations entre les individus.

Cela ne sera pas l'apocalypse, comme certains tentent de nous le faire dire, mais ça va constituer un appauvrissement du tissu social. Appauvrir, ça se fait graduellement, à moyen terme, à long terme. Ça ne se fait pas tout d'un coup et on ne s'apercevra pas du résultat le lendemain matin que la loi va être passée. Ce sont des conséquences à long terme qu'on anticipe et qu'on croit qui vont arriver chaque fois que les consommateurs vont préférer, comme je le disais ce matin, une aubaine de 30 % sur un objet ou sur un produit ou amener les enfants dans un centre commercial qui a organisé un spectacle pour les enfants ou un chanteur populaire, etc. Les publicitaires en ont, des idées, et les responsables en marketing en ont plein d'idées. Ils paient des spécialistes pour en trouver. Ils vont les attirer, les gens, dans les centres commerciaux. Et c'est normal que les gens aillent dans les centres commerciaux. Mais ce qu'il faut prévoir, ce sont, effectivement, les conséquences, à ce moment là, qui vont en résulter.

Il nous reste trois minutes seulement?

Le Président (M. Leclerc): Exactement.

M. Nantel: Bon. Alors, il y a la question des sondages qu'on a analysée Je vous demanderais de prendre le graphique qu'on vous a distribué. Je vais vous le présenter rapidement en espérant avoir une question là-dessus tout à l'heure.

Le graphique représente, selon les différents sondages qui ont été produits entre 1987 et 1989, la tendance des consommateurs qui ont été sondés et qui se manifestent, pour ceux qui ont un petit losange vide, blanc, contre l'ouverture des magasins le dimanche, ceux qui ont le petit losange noir sont pour et ceux qui ont un point noir optent de préférence, soit pour le lundi, le mardi, le mercredi, soit pour le mercredi soir seulement Ce sont les deux alternatives qui ont été données, selon le sondage. Il faut dire que

ces sondages ont été faits uniquement au niveau des marchés d'alimentation, c'est-à-dire que les questions qu'on a utilisées, c'est uniquement sur l'ouverture des marchés d'alimentation.

On voit très bien que la courbe de la préférence des consommateurs se manifeste au-dessus de toutes les opinions de ceux qui sont pour l'ouverture des magasins le dimanche, au-dessus complètement de toutes les opinions de ceux qui étaient pour l'ouverture le dimanche, tandis que ceux qui étaient contre, on voit qu'il y a quand même deux sondages, SEGMA Lavalin et Léger & Léger - Journal de Montréal, qui démontrent qu'il y a même une majorité de consommateurs qui sont contre l'ouverture le dimanche et encore plus défavorables à l'ouverture, selon Léger & Léger, les lundi, mardi et mercredi soir. (16 heures)

Quant au dernier sondage, celui de la Coalition pour l'équité, fait par M. Nantel, mon homonyme, qui est venu vous présenter ça hier, nous contestons le fond même de ce sondage à partir de deux considérations importantes Une première, c'est qu'on a tiré des conclusions qui, à notre avis, étaient fallacieuses, qui amenaient à tromper, que ce soit intentionnellement ou non, quand on a comparé le sondage d'avril 1988, pour dire qu'on passait de 44 % de consommateurs qui étaient pour l'ouverture et qu'aujourd'hui on passait a 54 %. On ne peut pas comparer un sondage qui offre le choix de trois options à un sondage qui offre le choix de seulement deux options.

En plus de ça, on a demandé l'avis d'un expert, M. Jean-Paul Voyer, de l'Université Laval, qui est professeur titulaire au département de mesures et évaluation de l'Université Laval, qui nous confirme nos appréhensions à l'analyse des sondages au sujet de la technique qui a été utilisée; nous, on l'appelle la technique de l'entonnoir qui amène les gens à répondre ce qu'on veut bien répondre; lui l'appelle la technique du conditionnement des options, et on a cet avis dont on pourra vous parler plus longtemps par après.

Le Président (M. Leclerc): Bien. Alors, c'est ça. Vous pourrez continuer à étayer votre position à la suite des questions.

M. Nantel: II y avait nos recommandations qu'on voulait vous lire, mais vous les avez. C'est ça?

Le Président (M. Leclerc): Oui, on les a déjà.

M. Nantel: O.K.

Le Président (M. Leclerc): Juste avant de laisser la parole à M. le ministre, la commission me permettra sans doute de faire une mise au point. C'est au sujet de la transmission de documents aux membres de la commission. M. le secrétaire a été consulté par des gens qui, ce matin, avaient peut-être des documents à faire distribuer et qui ne l'ont pas fait. La politique est très simple. Le Secrétariat des commissions retransmet, dans les meilleurs délais, à tous les membres de la commission les documents qui lui sont expédiés en rapport avec la commission parlementaire et en rapport avec les mémoires. Si les documents dont vous nous avez fait mention n'étaient pas déjà distribués, c'est qu'il y a eu une petite erreur dans le nom. Il y a deux M. Nantel qu'on a reçus en deux jours, et il y avait confusion. C'est pourquoi on ne les avait pas déjà et vous avez vu que nous les avons fait distribuer. Si d'autres personnes, qui sont déjà passées, avaient des documents pour le meilleur intérêt des membres de la commission, puisqu'on est ici pour vous entendre, pour vous écouter et même pour vous lire, il ne faut pas vous gêner. Vous transmettez ça au Secrétariat des commissions et, dans les meilleurs délais, ça nous est distribué. Cette mise au point étant faite, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Merci, M. Nantel, Mme Goulet et Mme Gadoua. Vous allez peut-être avoir la chance de nous les faire, mais on les a lues, les recommandations. Une question avant d'aborder deux sujets que j'aimerais discuter avec vous. Quand vous dites que vous représentez 3000 individus, 175 organismes, ce n'est pas unanime... Est-ce que c'est unanime pour la fermeture le dimanche? Je comprends que c'est majoritaire parce que vous venez les représenter, mais est-ce que c'est unanime?

M. Nantel: II faut dire que ce débat-là, c'est la même chose qui s'est passée qui, à notre avis, se passe dans la société en général quand on en discute. Quand on commence à en discuter et qu'on fait valoir les arguments, les gens adhèrent habituellement à notre position. Cela a été la même chose dans le mouvement des ACEF, parce que les membres ce ne sont pas tous ce qu'on appelle des militants, des gens qui sont assez proches dans les comités de travail de chacune des ACEF en région. C'est évident que ç... n'a pas été unanime, mais dans les ACEF régionales, ça a passé en assemblée générale, ça a passé en conseil d'administration et des votes se sont pris majoritairement pour l'ouverture des magasins le dimanche.

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Je comprends que c'est majoritaire. Je veux juste dire qu'au même titre que d'autres groupes qui sont pour, évidemment, ce n'est pas l'unanimité. Le seul point que je veux faire, c'est que dans votre groupe, ça ne doit sûrement pas être l'unanimité, mais c'est majoritaire.

M. Nantel: Effectivement. Effectivement.

M. Tremblay (Outremont): Parlait Les deux points que je veux discuter avec vous sont les prix et le dépannage. Un des arguments qu'on entend beaucoup, on parle du pouvoir d'achat, vous en avez parlé et vous prônez, par exemple, le dépannage le dimanche où on dit que c'est plus cher. Comment faites-vous pour concilier le fait - vous êtes une association qui représente des consommateurs - qu'on pénalise d'une certaine façon le consommateur en ne libéralisant pas les commerces le dimanche parce qu'ils paient plus cher? Je pense que, même au niveau de l'Opposition, le député d'Ungava l'a dit encore hier, l'expérience démontre que, dans les dépanneurs, c'est plus cher.

M. Nantel: Je pense que c'est évident. Les mêmes coups de sonde qu'on peut porter nous-mêmes, c'est évident que dans les dépanneurs, l'approvisionnement est plus cher. Mais, est-ce qu'il y a beaucoup de personnes qui vont faire leur commande d'épicerie dans les dépanneurs? D'après ce qu'on voit, nous, comme réalité, il n'y a pas beaucoup de personnes qui vont faire leur commande d'épicerie dans les dépanneurs. Ça, c'est une première réalité.

Une deuxième réalité, c'est qu'on offre une alternative, en termes de solution C'est vraiment de faire en sorte que le dépannage demeure le dépannage primaire le dimanche et qu'on concentre le mercredi soir, jusqu'à 21 heures, l'ouverture de tous les magasins, pas uniquement les magasins d'alimentation. Donc, on offre une alternative.

Une deuxième considération à ce niveau-là, c'est que c'est évident, si on regardait uniquement les besoins des consommateurs à court terme, de façon assez étroite, qu'on se dirait: Bien, il y a une contradiction. Mais si on regarde le bien-être de l'ensemble de la société et les conséquences à moyen et à long terme, on se dit: Là, il faut avoir un compromis. Il n'y aura pas de solution idéale et notre compromis, comme je vous le dis, c'est le mercredi soir.

M. Tremblay (Outremont): Étant donné que c'est plus cher et qu'il y aurait la possibilité d'élargir les heures en semaine, est-ce que vous seriez prêt à accepter qu'on ferme les dépanneurs le dimanche et qu'on élargisse les heures en semaine, ce qui améliorerait, selon vos commentaires, la qualité de vie?

M. Nantel: Absolument pas. Je pense qu'actuellement il y a nécessité, pour l'ensemble de la population, c'est un besoin, qu'il y ait le dépannage alimentaire le dimanche, qu'il y ait la possibilité d'aller s'approvisionner en médicaments, en essence, en huile à chauffage et quelques autres exceptions qu'on a mentionnées dans...

M. Tremblay (Outremont): Je veux juste clarifier pour être certain. Oublions tous ceux-là; ça, ça va. Mais moi, je parle uniquement du dépannage au niveau de l'alimentation. On fermerait les vrais dépanneurs d'alimentation parce qu'on doit garder une journée de qualité de vie le dimanche et, en élargissant en semaine, le consommateur pourrait être bien servi la semaine sans être obligé de payer plus cher pour se dépanner, de 15 %; il devrait prévenir la semaine.

M. Nantel: Non, on ne serait pas d'accord avec ce type de solution-là.

Mme Goulet: Moi, j'aimerais ajouter quelque chose.

Une voix:...

Mme Goulet: Oui, Lise Goulet, c'est ça. Au fond, présentement, c'est vrai que les gens paient peut-être jusqu'à 15 % plus cher dans les dépanneurs, justement, dans des cas où ils ont besoin de biens qu'ils n'auraient pu prévoir à l'avance. Mais il faut voir que, si on ouvre le dimanche, l'augmentation des prix, ça va être sur la semaine, à longueur de semaine. Donc, pour l'instant, les gens qui utilisent les dépanneurs, ça va être minoritaire. Tandis que si on ouvre le dimanche, l'augmentation des prix, ça va être pour toute la semaine. Donc, ce ne sera plus seulement pour les gens qui utilisent les services de dépannage; ça va être pour l'ensemble des gens, la hausse des prix.

M. Tremblay (Outremont): C'est parce qu'il y a d'autres intervenants qui nous disent - je voudrais passer au deuxième point - que, si on ouvrait le dimanche, au contraire, il n'y aurait sûrement pas une augmentation des prix et, possiblement, une amélioration.

Mais le deuxième point, pour rester sur le dépannage.. Je vous cite. En fait, j'espère qu'on vous a bien cités dans les médias. Vous avez dit que le regroupement permettrait l'ouverture des commerces de moins de trois employés pour assurer un vrai dépannage. Qu'est-ce que c'est, pour vous, un vrai dépannage? Vous avez dit: Des petites pharmacies, des petites boulangeries, des petites pâtisseries.

M. Nantel: C'est-à-dire que...

M. Tremblay (Outremont): C'est quoi un vrai dépannage, pour vous?

M. Nantel: Yves Nantel. C'est sûr qu'on n'a pas analysé des mesures très très très strictes. On n'a pas circonscrit exactement ce que c'est. Mais le vrai dépannage alimentaire, c'est le dépanneur du coin qui peut dépanner les personnes qui ont besoin de certaines denrées aiimen-

taires de base, qui ont oublié du lait, du pain, certaines conserves. En fait, j'ai l'image du dépanneur du coin, chez nous, qui peut opérer à peu près avec trois personnes et, quand j'ai besoin, je peux y aller le dimanche.

M. Tremblay (Outremont): Prenons juste l'exemple de la boulangerie. Une boulangerie, où il y a trois employés le dimanche, va vendre un meilleur pain qu'une boulangerie où il y a huit employés le dimanche, si on vendait juste du pain. Il y a des boulangeries qui sont ouvertes. Parce que vous dites, vous: Une petite boulangerie, trois employés et moins. La boulangerie qui est un peu plus grosse, qui a huit employés et qui vend du pain, comment conciliez-vous ça? Ce n'est pas un vrai dépannage, ça?

M. Nantel: C'est-à-dire que le pain ne sera pas meilleur chez celle qui a trois employés ou huit employés, c'est bien clair. Excepté que ça fait une démarcation pour favoriser l'équité entre les différents commerçants.

M. Tremblay (Outremont): Ils vendent tous les deux du pain. Poussons l'exemple à l'extrême. Ils vendent tous les deux du pain. Vous dites. Un vrai dépannage, c'est trois employés et moins, des petites boulangeries. La boulangerie qui aurait trois employés et l'autre qui en aurait huit, le vrai dépannage, ce n'est pas celle qui en a huit, qui vend le même pain de la même qualité que celle qui en a trois et qui en vend.

M. Nantel: Écoutez, c'est pour essayer de circonscrire un certain nombre de petits marchés, comme la charcuterie; habituellement, la boulangerie ne vend pas uniquement du pain, il y a toutes les pâtisseries, les charcuteries, des fromages, une petite boutique qui permet de vendre ces différents produits-là le dimanche. Alors ça, on accepterait...

M. Tremblay (Outremont): Ma dernière question, sur le même point. Je ne veux pas vous couper la parole, parce que je pense que c'est intéressant; ça démontre les problèmes qu'on a dans la loi quand on veut l'appliquer et on veut bien... Est-ce que vous seriez prêts à accepter d'augmenter le nombre d'employés minimum, tout en restant petits? Au lieu d'avoir trois employés, est-ce qu'on pourrait dire cinq employés? J'aimerais vous entendre sur ce dernier point.

M. Nantel: Je pense que le problème - ce serait votre problème après - c'est que plus on augmente le nombre d'employés, plus ça devient inéquitable, à notre avis, pour les autres commerçants. Plus on va conserver ça au niveau du dépannage alimentaire, du dépannage primaire et des besoins essentiels des gens, plus on va garder ça petit, plus l'équité va être grande avec les commerçants, bien qu'elle ne soit jamais complète. Évidemment, il y en a qui vont être déçus dans l'application d'une loi qui serait à partir de notre point de vue. Mais plus on va permettre un plus grand nombre d'employés, plus l'inéquité va être grande et plus ça va être difficile, parce que le chiffre d'affaires de ces entreprises-là va beaucoup plus concurrencer des commerces moyens et plus gros que les petits dépanneurs qui vont concurrencer beaucoup moins les entreprises qui sont moyennes et plus grosses.

M. Tremblay (Outremont): Je vous posais la question parce qu'un des arguments qu'on entend souvent, et je pense que c'est important, c'est que les gens, pour se dépanner - là, on rentre directement dans la qualité de vie - si c'est pour acheter, par exemple, de la gomme, des cigarettes, du chocolat et certains fruits, ils peuvent aller chez le dépanneur, mais les fruits seront sûrement moins frais, je pense, que si on allait dans une fruiterie. Par contre, dans une fruiterie, ce qu'on nous dit, c'est: Trois employés, ce n'est pas assez, il faudrait qu'il y ait un peu plus d'employés à cause de la fraîcheur, à cause de la qualité, à cause des besoins requis. C'est pour ça que je vous pose la question, pour le savoir, dans le meilleur intérêt du consommateur, tout en protégeant la qualité de vie. Est-ce que vous pourriez avoir une ouverture d'esprit et dire: Peut-être que trois, ça répondait aux besoins réels il y a dix ans et peut-être qu'aujourd'hui, sans sauter à un autre extrême et dire que c'est huit, dix, quinze employés, pour parler du supermarché, ça pourrait peut-être être quatre ou cinq? C'est ça, la question.

M. Nantel: Je pense qu'on maintient notre position à l'effet que le dépannage primaire peut être assuré avec un maximum de trois personnes à l'intérieur du commerce, mais l'alternative, c'est vraiment le mercredi soir où on ouvre les magasins, tous les magasins.

Le Président (M. Leclerc): Bien. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Vous nous avez lancé un petit appel au secours, tout à l'heure, en nous disant: Je n'ai pas beaucoup de temps, j'ai une analyse des sondages qui a été faite par un professeur de l'Université Laval, M. Voyer, document que vous nous avez remis. Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu, de l'analyse qu'il fait des techniques de sondage qui ont été utilisées pour arriver au résultat que l'on connaît, quant à la priorisation du choix des consommateurs et des consommatrices?

M. Nantel: Oui, effectivement, parce que, actuellement, partout dans les médias on utilise et on a utilisé très fortement le chiffre de

54, 7 % de consommateurs qui appuient la Coalition pour l'équité et les autres qui sont pour l'ouverture des magasins le dimanche, tandis que, quand on analyse très bien ce sondage, on s'aperçoit, en définitive, que la façon dont les questions ont été posées.. Je le redis, ça peut être tout simplement de façon fortuite que ç'a été fait par M. Nantel, dont j'ai entendu l'exposé hier, mais il n'en reste pas moins que l'avis de M. Voyer, à qui nous avons demandé l'expertise... Je vais vous lire quelques phrases de son avis qui sont assez révélatrices de la façon dont il traite ce sondage.

Le premier paragraphe mentionne qu'une analyse rapide de la structure du questionnaire et de la formulation des questions nous informe assez directement de la position exacte du ou des concepteurs du questionnaire face au problème étudié. Un tel constat est pour le moins troublant, en ce sens qu'il soulève des doutes quant à la possibilité réelle qu'avait le répondant d'y répondre librement.

À la fin de cette page-là, il parle de règles élémentaires à utiliser et une des règles, c'est de s'assurer - à la troisième ligne du bas - au départ que le sujet est en mesure de répondre aux questions qu'on lui pose. (16 h 15)

Et, un peu plus loin, dans la deuxième page, deuxième paragraphe, il mentionne: "Un autre des rares principes de base à respecter lorsqu'on élabore un questionnaire est d'éviter de suggérer une réponse. À cet égard, on peut affirmer sans peine que la séquence des questions 7 à 11 a pour effet évident de conditionner les réponses à la question 12. Il y a là un vice de forme mais surtout une récupération évidente de fond. "

Plus bas, dernier paragraphe "En dépit de tout ce qui précède - et la canalisation des réponses n'est pas mince - ce qu'il y a de plus regrettable dans cet instrument de mesure, c'est l'absence totale de toute référence socio-économique dans cette analyse d'impact, d'une mesure comme celle d'ouvrir les magasins le dimanche. On n'offre jamais le choix au répondant de solutionner autrement son problème que le dimanche, pas plus que l'on ne se préoccupe de savoir si les gens sont prêts à assumer le coût de cette plus grande disponibilité. "

Alors, je pense que c'est assez éloquent pour dire que ce sondage-là, quand on l'utilise, qu'on dit que les consommateurs sont favorables à 54, 7 %, je pense qu'il est préférable de retourner aux graphiques et de voir les sondages impartiaux. Parce que, dans ces sondages-là, il y a trois sondages qui n'ont pas été financés par des groupes qui avaient déjà pris position. Le sondage de SEGMA-Lavalin donne 46 % de consommateurs qui sont contre et 40 % qui sont pour. Le sondage CROP La Presse de novembre 1988 donne 45 % de consommateurs qui sont pour et 49 % qui sont contre et le sondage Léger & Léger - Journal de Montréal donne 37 % de con- sommateurs qui sont pour et 59 % de consommateurs qui sont contre. Alors, ce sont les sondages qu'on peut considérer comme impartiaux D'ailleurs, les seuls sondages... Ça, ce sont les sondages qui ont posé la question de la préférence pour le dimanche, contre le dimanche ou la préférence en début de semaine. Le sondage IQOP-La Presse n'a pas donné ce choix de préférence et le sondage de la Coalition pour l'équité, le dernier, celui de septembre 1989, n'a pas non plus donné cette option-là. D'ailleurs, M. Nantel a eu à s'expliquer sur cette éventualité-là.

À notre avis, il y a deux vices. À ce moment là, on ne peut pas comparer deux sondages et dire que, pendant un an, il y a eu une évolution et que les consommateurs sont passés de 44 % à 54 %. C'est complètement tromper l'opinion publique que de dire ça. On compare des choses qui ne sont pas comparables. Et, plus que ça, le sondage utilisait ce que, nous, on appelle la technique de l'entonnoir pour amener le répondant à donner une réponse plus particulière.

Mme Marois: D'accord. Dans votre document... On va parler d'un autre sondage auquel vous faites référence et j'aimerais que vous m'en parliez un peu plus. À la page 2 de votre résumé, vous dites: "Les liens familiaux, pris dans un sens large, se nouent en fin de semaine (85 % pour les Montréalais). " J'en ai manqué un moment quand vous avez présenté, parce que je me préoccupais d'aller fouiller dans un certain nombre d'autres éléments. J'aimerais ça que vous reveniez un petit peu... Comment s'est-il fait, ce sondage? Où s'est-il fait? Chez qui?

Mme Goulet: C'est moi qui vais répondre. Mme Marois: D'accord.

Mme Goulet: Lise Goulet. Ce sont des résultats qui ont été puisés à même l'étude de Léger & Léger, qui s'intitulait "La vie montréalaise", qui a été produit, c'est-à-dire déposé, le 2 novembre 1988, et le sondage a été fait auprès... Je vais vous donner le nombre exact de personnes qui ont été rejointes: 1016 Montréalais ont été interrogés lors de cette étude-là. Et, justement, il y a une partie du sondage qui posait la question - j'essaie de trouver le document - qui demandait justement aux gens de manifester leur préférence quant à la journée où ils souhaitaient justement vivre certaines activités. Et quand on leur demandait, pour ce qui est de magasiner le dimanche, dans quelle proportion ils préféraient faire cette activité-là, les réponses 6ont seulement de 2 %. Il y a seulement 2 % des Montréalais qui ont répondu...

Mme Marois: Le fait est, autrement dit - je veux bien comprendre parce que ça chuchote -

quand on mettait des alternatives devant les gens...

Mme Goulet: Hum, hum.

Mme Marois: Est-ce que c'est bien ça? On se comprend. À savoir qu'on peut, je ne sais pas, aller au cinéma, faire une promenade, imaginons n'importe quoi...

Mme Goulet: Hum, hum. Mme Marois: C'est bien ça? Et là... Mme Goulet: Oui, c'est ça. Mme Marois:... ça se répartissait...

Mme Goulet: J'essaie de vous trouver d'autres pourcentages d'autres activités qui étaient avancés justement par ces gens-là. C'est juste que je veux donner les chiffres exacts. Attendez un petit peu.

Mme Marois: Peut-être que vous pouvez fouiller et j'ai d'autres questions de toute façon. Ça va? Ah! vous les avez!

Mme Goulet: C'est ça. Par exemple, le dimanche, ils préfèrent aller au cinéma dans 5, 9 % des cas; ils préfèrent prendre un bon repas au restaurant dans 11. 7 % des cas et ils préfèrent rencontrer la famille dans 47, 3 % des cas, le dimanche. Pour ce qui est de magasiner le dimanche, seulement 2 % des gens préféreraient magasiner le dimanche, surtout dans une ville comme Montréal. Et il y a d'autres données concernant la famille, évidemment On trouvait que si on allait chercher les mêmes chiffres - évidemment, c'est de l'extrapolation - quant à nous, ces pourcentages-là augmenteraient en région, pas pour le magasinage, mais pour ce qui est des activités familiales. O. K?

Mme Marois: Ah oui! D'accord. Je vous remercie. Je reviendrai. Il me reste juste une minute et je vous reviendrai plus tard. Le Président (M. Bélanger): Bien. M. le ministre. Excusez, j'avais M. le député l'Acadie.

M. Bordeleau: J'aimerais peut-être... Ça fait deux journées qu'on a commencé les auditions et on est revenus souvent, comme on l'a déjà mentionné, sur la question de la qualité de vie. -¦ J'ai l'impression qu'on se trouve un peu face à deux positions par rapport à la qualité de vie, c'est-à-dire un groupe qui détermine peut-être d'avance ce que doit être la qualité de vie et l'autre groupe qui dit que la qualité de vie doit être définie par les personnes qui sont impliquées, les consommateurs. La première remarque, disons, c'est que dans le commerce, en général, l'objectif premier, c'est de satisfaire une clientèle - de tout commerce, y compris les commerces d'alimentation. S'il n'y avait pas de clients, il n'y aurait pas de commerces. Donc, l'objectif premier d'un commerce, c'est de satisfaire une clientèle.

Quand on est dans une population assez hétérogène, on l'a déjà mentionné également, au Québec, hétérogène au plan culturel, au plan religieux, à un moment donné, les valeurs comme telles, fondamentales, sont aussi hétérogènes. On n'est plus dans une population comme il en existait peut-être il y a 30 ou 40 ans, où les valeurs de la population québécoise, canadienne-française étaient peut-être plus homogènes. Dans ce contexte-là, ce que je trouve un peu difficile, et je me réfère à ce moment-là aux deux positions que j'ai décrites tout à l'heure, c'est qu'on soit capable, comme gouvernement, et aussi je pense avec la responsabilité que vous avez au niveau des consommateurs, qu'on soit capable, de part et d'autre, de définir ce qu'est la qualité de vie pour les gens.

Vous disiez tout à l'heure, Mme Goulet, que vous aviez abordé toute la problématique à partir d'une conception du consommateur en tant qu'être global. Il me semble qu'un être global, sa première caractéristique, c'est d'avoir le libre arbitre et le libre choix de déterminer ce que lui valorise. Il y en a pour qui ça va être la famille et d'autres, ça va être la religion et d'autres, ça va être tel type de loisir; d'autres, ça va être les restaurants et ça peut même aller, comme loisir, disons dans les centres commerciaux, à la limite.

Alors, les doux positions qu'on a eues au niveau dos consommateurs - et je trouve ça intéressant de le signaler c'est que dans un cas, on nous dit: On représente des consommateurs et les gens détermineront ce qui a de la valeur pour eux et ils feront des choix en conséquence. On a une autre attitude qui est de déterminer d'avance que les commerces ne devraient pas être ouverts le dimanche à cause de la qualité de vie. Et la qualité de vie, c'est fondamentalement une question de valeurs. Je ne sais pas... J'aimerais avoir votre réaction là-dessus parce que ça me semble être difficile dans le contexte actuel et dans le contexte prévisible d'être capable de déterminer d'une façon très précise quelles sont les valeurs qui caractérisent notre société et qui font en sorte qu'on est capable de poser des gardes au fond, ou de mettre des limites sur la question des heures d'ouverture en fonction de ce critère-là, de la qualité de vie.

Mme Goulet: J'aimerais répondre. C'est ça. Évidemment, si on s'en tenait aux consommateurs, juste en termes de biens de consommation, de services de consommation, c'est certain, quant à nous, que ça serait de privilégier la plus grande accessibilité possible, si on ne s'en tenait

qu'à ça. Mais nous avons préféré justement aborder une approche globale dans le sens de dire: Le travailleur, c'est un consommateur, le propriétaire de magasin, c'est un consommateur. En fin de compte, c'est ça, de façon globale, on a pris la personne dans toutes ses dimensions; c'est un être d'amitié, un être familial, tout ça.

Évidemment, on n'est pas partis de rien. Nous faisons beaucoup de rencontres d'information dans nos groupes. On a beaucoup de cours sur le budget, on a beaucoup de services sur le terrain et on a l'occasion d'en discuter avec les gens. En moyenne, je rejoins à peu près 3000 personnes par année, par différentes activités et nos activités, ce n'est pas seulement de donner de l'information, il y a un échange qui se fait et on s'est rendu compte que, souvent, quand on abordait des groupes, c'est que, bon, il y avait des positions partagées, il y en avait qui ne savaient pas trop quoi en penser. Mais quand on abordait une analyse critique, un peu avec des conséquences à long terme, en fin de compte en leur donnant des outils pour effectuer un choix éclairé, ce n'était pas rare qu'ils en venaient à appuyer notre position.

Évidemment, on n'a pas fait d'enquête. On est partis de ça, de notre expérience sur le terrain et on se rend compte que ce n'est pas seulement dans nos activités de travail. Moi, j'en parle dans ma famille, j'en parle un peu partout. Et quand on leur fait entrevoir un petit peu ce qui s'en vient avec tout ça... Comme on le disait, ce n'est pas quand la loi va être adoptée, demain matin, que tout va être chambardé. Mais c'est comme si on dit oui, par exemple, à l'ouverture des commerces d'alimentation le dimanche, moi, à ce moment-là - j'extrapole encore - quant à moi, c'est aussi nécessaire, les services gouvernementaux. Ça ne me tente pas de manquer une demi-journée de travail pour aller, soit pour mes immatriculations... Ça me tanne de manquer du travail pour aller chez le dentiste. C'est tout ce processus qui risque d'être enclenché. Quant à nous, c'est ouvrir une porte à d'autres valeurs, à une autre façon de fonctionner au Québec à long terme. C'est un choix. Si des consommateurs décident que c'est ça et que ça, ça fait leur affaire, bien nous, on ne pourra pas s'imposer contre le mouvement des consommateurs. Mais on se rend compte que, quand on leur fait penser à toutes ces conséquences, c'est comme: Oups, c'est moins évident pour eux, l'ouverture des magasins le dimanche.

M. Bordeleau: Par exemple, le fait d'avoir l'ouverture des commerces le dimanche, ça n'oblige pas les gens à y aller. Si, moi, je préfère avoir une activité familiale le dimanche, ou si un individu préfère avoir une activité familiale le dimanche, il peut l'avoir. Actuellement, on a la possibilité... Les commerçants, par exemple, dans le domaine de l'automobile, ont la possibilité d'ouvrir le dimanche. Dans les régions en général, ils n'ouvrent pas.

M. Nantel: Parce qu'ils ont pris une entente entre eux de ne pas ouvrir et s'il y en avait un qui ouvrait, tout le monde ouvrirait.

M. Bordeleau: C'est ça. C'est un choix.

M. Nantel: C'est ça le problème. Je pense que ce qu'il faut comprendre c'est qu'en théorie, ce que vous dites est vrai, mais en pratique, ça ne se passe pas de même. En pratique, l'égalité n'est pas là. Le libre choix n'est pas là parce que - j'essayais de l'expliquer ce matin - ceux qui veulent entraîner les consommateurs dans les magasins, ils vont réussir à le faire avec toutes les techniques de publicité et de marketing et les consommateurs vont y aller. Et c'est juste. Les consommateurs, c'est normal, ils vont y aller.

M. Bordeleau: Je trouve ça embêtant un peu.

M. Nantel: À ce moment-là, ceux qui font cette publicité-là pour les entraîner, eux, la qualité de vie au Québec, à cause des intérêts qu'ils ont encore de concurrencer, de faire des profits, à cause des intérêts qu'ils ont, ils vont aller les chercher, les consommateurs, et ils vont les amener dans les commerces. Et là, ce qui va en souffrir, c'est ce qu'on disait tantôt, on l'a expliqué, toutes les activités d'épanouissement personnel et de relations sociales vont en souffrir à long terme et on va se retrouver dans une société que vous aurez à gérer comme élus du peuple à moyen terme et à long terme.

M. Bordeleau: Mais ça me semble être, peut-être discutable à tout le moins qu'on protège... Vous dites que le libre choix n'existera pas. Par exemple, si...

M. Nantel: Ce n'est pas 100 %.

M. Bordeleau: C'est ça que je trouve discutable, c'est-à-dire qu'on ne protégerait pas le libre choix parce qu'on laisserait la liberté aux gens de choisir. C'est de faire une espèce de postulat au départ que les gens ne seront pas capables de choisir. Si on leur met l'alternative devant eux, ils ne seront plus capables d'exercer leur libre choix. Donc, pour qu'ils soient réellement libres, il faut les empêcher de choisir!

Mme Gadoua (Carole): Je pense que ce sont les moyens de pression utilisés qui... Ce n'est pas qu'ils ne sont pas capables de choisir, mais que les moyens de pression utilisés, on n'a pas de rapport de forces avec ça.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Le temps de parole de la formation ministérielle étant écoulé, je cède la parole à Mme la députée de

Taillon.

Mme Marois: C'est ma collègue qui va poser des questions et en même temps s'inscrire comme remplaçante.

Le Président (M. Bélanger): II est trop tard. Il faut le faire au début des travaux. Maintenant, si on a le consentement... Il y a consentement? Consentement. Bien. Alors, madame.

Mme Marois: Avant, peut-être que ma collègue ne pose une question, on aimerait ça vous entendre.

Une voix: Voulez-vous compléter?

Mme Goulet: C'était juste concernant justement la réflexion qu'on amène les gens à réfléchir plus profondément. C'est certain que, quant à nous, ouvrir les commerces le dimanche, c'est faire pression indirectement sur plein d'autres choses. S'il y a plus de gens qui travaillent le dimanche, ça va être justifié de demander plus de frais de services de garderie, ça va être comme nécessaire d'avoir plus de transports en commun. On va vouloir se rendre à ces points d'achat. Ça va peut-être nécessiter plus de gens sur la route pour la sécurité, les pompiers. Ces études n'ont pas été faites mais, indirectement, si tous ces services-là augmentent, je ne sais pas qui va assumer ça. Peut-être que ce sera en taxes, peut-être que ce sera... Et ça amène d'autres gens à travailler le dimanche Ce ne sont pas juste les travailleurs du commerce de l'alimentation, ça implique plein de monde, peut-être même nous les premiers, en disant: Oui, au premier coup d'oeil, moi, ça fait mon affaire d'aller le dimanche faire ma commande. Mais si je travaillais dans une garderie et que je me mettais à réfléchir et je disais: Oups, s'il y a plus de travailleurs, ils ont besoin de plus de services de garderie... Donc, là, je suis rejointe. Et l'autre à côté, bon, lui, je ne sais pas, son frère conduit des autobus; il va dire. Bien, mon Dieu, il risque de travailler le dimanche. (16 h 30)

C'est tout cet enchaînement-là qui va briser les relations sociales. C'est à long terme. Tu as beau impliquer 20 % de la population à long terme dans ça, c'est tout ce démantibulement des relations que nous craignons. En soi, à court terme, on ne se sent pas concerné, mais jusqu'où est-ce que ça va aller? C'est comme ouvrir la porte à plein de choses et on ne veut pas ouvrir cette porte-là. C'est tout, merci.

Mme Caron: Dans un premier temps, je voudrais vous remercier pour le dépôt de l'analyse des sondages d'opinion. Effectivement, avec la quantité de sondages que nous avons eus sous les yeux et les chiffres qui sont quelque peu variables, je pense que c'était important d'ap- porter certaines précisions. À la suite de l'intervenant précédent, j'aimerais que vous me précisiez l'année de l'étude qui confirme que 85 % des Montréalais préfèrent des activités de type familial.

Mme Goulet: J'ai mentionné tout à l'heure la date exacte du dépôt de l'étude. C'était le 2 novembre 1988.

Mme Caron: Donc, le 2 novembre 1988. Ce n'est pas une étude qui nous démontre les besoins de 1940 ou de 1950.

Mme Goulet: Non, c'est ça. C'est quand même très récent.

Mme Caron: Parfait. Merci. «J'aimerais que vous élaboriez davantage sur les conséquences à moyen et à long terme sur les individus. Là, j'entends surtout sur une plus grande commercialisation de la vie. Ce que j'en ai compris, c'est que le regroupement des ACEF considère qu'en plus d'un rôle de consommateur il a également un rôle de protection de la qualité de cette consommation-là.

M. Nantel: Oui, effectivement, je pense qu'on traite de cette question dans notre mémoire. Nous, on considère qu'on est obligés de faire face à une recrudescence de publicité pour entraîner les gens à magasiner le dimanche, une journée exempte de travail et de commerce habituellement et, à ce moment-là, on vient saper toute une partie du travail d'éducation qu'on tente de faire en vue d'une consommation rationnelle.

Là, vous l'avez dans notre mémoire, on fait référence aux techniques de marketing que le professeur Petrof de l'Université Laval indique aux gens d'affaires et aux propriétaires en disant: Ouvrez vos commerces le dimanche parce que vous utilisez, à ce moment-là, des aspirations légitimes des gens de se recréer, d'aller dans des activités culturelles, etc. Vous utilisez ces aspirations-là qui sont naturelles et normales en vue de les entraîner dans vos commerces et de les faire succomber à acheter. Évidemment, sa conclusion est que les ventes augmenteraient et, les ventes augmentant, le prix des produits n'augmenterait pas, ce qui n'est pas le cas; je pense qu'on l'a démontré de façon suffisante.

Quand on demande aux gens de développer et qu'on tente par les cours sur le budget familial, par nos rencontres d'information, nos conférences et tout ce qu'on fait... Dieu sait comme on en fait à travers le mouvement des ACEF, de ce travail d'éducation, on essaie de développer une consommation rationnelle. Quand on regarde de l'autre côté les techniques qui amèneraient les gens, parce qu'on magasine dans un climat de détente le dimanche, à succomber sans faire cette opération de rationalisation des

achats ou des choix de consommation, pour nous, ça vient saper le travail d'éducation qu'on fait comme association de consommateurs. Vous savez qu'on n'a pas les moyens ni les ressources pour faire le travail d'éducation qu'on fait. On le fait habituellement à bout de bras et on n'a pas besoin d'avoir d'autres formes qui vont venir rendre encore plus difficile notre travail d'éducation des consommateurs. C'est une des conséquences aussi sur le:» associations de consommateurs et sur le travail qu'on fait.

Mme Caron: Je vous remercie. C'est un rôle important de vos associations. Mme Gadoua, peut-être, parce que vous n'avez pas eu la chance beaucoup de vous exprimer, pourriez-vous nous résumer les principales recommandations?

Mme Gadoua: Oui, bien sûr. En fait, toutes les recommandations qui ont été élaborées par la Fédération des ACEF ont tenu compte, bien sûr, de l'agrandissement de l'accès aux biens de consommation, mais ont voulu aussi tenir compte, d'une part, de la nécessité de conformité sociale dont on vient de parler, d'autre part, de la nécessité de considérer les conséquences d'une plus grande commercialisation de la vie et, enfin, de la nécessité de tenir compte des conséquences à moyen et à long terme sur le tissu social au Québec.

La première recommandation que l'on fait, c'est de maintenir le principe de la fermeture la plus étanche possible des magasins le dimanche tout en reconnaissant la nécessité de certaines Kxcoptions. La deuxiftmo recommandation, cost l'accoptation des exceptions, tel que déj.1 mentionné dans le rapport Richard. La troisième recommandation, c'est l'ouverture des magasins le mercredi soir jusqu'à 21 heures, sans pour autant augmenter le nombre total d'heures de magasinage. La quatrième recommandation, c'est que le dépannage alimentaire soit assuré par les commerces opérant, comme on l'a dit tantôt, avec trois personnes et moins en tout temps. Enfin, la cinquième recommandation est que la juridiction de la loi demeure du ressort de la province et ne soit pas remise aux municipalités. La sixième recommandation est le maintien du concept des zones touristiques à condition de bien les circonscrire et, enfin, que la loi soit appliquée par des amendes majorées, tel que proposé aussi par le comité Richard.

Mme Marois: Un des problèmes qui est soulevé par les intervenants qui sont venus à différents moments, sur le fait que l'on accepte l'ouverture de dépanneurs où il n'y aurait que trois employés et pas plus c'est le contrôle d'une telle réglementation. J'ai posé déjà à d'autres avant vous cette question, mais j'aimerais aussi que vous m'apportiez votre point de vue. Est-ce que ça vous apparaît si compliqué ou si complexe à assurer pour que l'équité soit maintenue, sachant que l'équité parfaite n'existe pas? J'aimerais vous entrendre un peu sur ça.

M. Nantel: Ça ne nous semble pas tellement sorcier d'appliquer cette politique. Je pense qu'au point de départ - je ne suis pas un inspecteur du gouvernement - il me semble que du seul fait de voir un commerce avec sa surface, H y a déjà un premier indice. Une grande surface et une petite surface, il y a déjà un premier indice qu'on peut voir de prime abord, de la part des enquêteurs du gouvernement; ensuite, c'est de vérifier s'il fonctionne avec trois employés et moins. J'imagine que c'est tout simplement d'aller vérifier, d'entrer dans le commerce de façon inopportune, d'aller vérifier combien il y a d'employés, de faire des vérifications ou de se fier aux plaintes des autres commerçants qui se croient lésés parce qu'ils voient que leur concurrent ouvre avec plus d'employés.

Il me semblé, et je reprendrai la même argumentation que ce matin, qu'au moment où il y en aura quelques-uns qui se seront fait taper sur les doigts et qu'on aura appliqué de façon stricte une loi qui va enlever les profits réalisés pendant les heures ouvertes illégalement, plus une amende importante, à ce moment, je pense qu'on devrait se retrouver avec une applicabilité de la loi sur cet aspect qui est tout à fait plausible et possible.

Mme Marois: D'accord II me reste un peu de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bélanger): Deux minutes.

Mme Marois: Deux minutes. Je reviens aux pages 22 et 23 de votre mémoire qui, soit dit en passant, est tout à fait exceptionnel quand on le creuse dans chacun de ses éléments.

Aux pages 22 et 23, vous faites référence au problème de l'échappatoire devant certains problèmes de société: la solitude et l'isolement. À la page 23, vous faites référence à l'expérience de l'Alberta. Cette expérience, on en a parlé depuis quelques jours aussi, depuis deux jours qu'on siège, et ce matin, entre autres, la Coalition pour l'ouverture le dimanche la citait comme une expérience qui n'empêchait pas tes gens d'avoir des activités familiales, etc. Or, vous semblez un peu plus critiques quant à l'expérience de l'Alberta et vous nous apportez des commentaires un peu différents. J'aimerais que vous m'en parliez un peu.

M. Nantel: Oui, effectivement, on n'a pas eu le temps de parler de tout le mémoire, toute cette question des personnes qui sont en mal de solitude et qui iraient, évidemment, flâner dans les centres commerciaux ou dans les magasins pour sortir de leur problème de solitude. Nous disons: Si c'est la solution à la solitude et à l'isolement, on a de bien tristes solutions dans

notre société et il faut faire attention à cet aspect, d'autant plus qu'en Alberta, et c'est la vice-présidente de l'ACC, section Alberta...

Mme Marois: L'Association des consommateurs canadiens, section Alberta.

M. Nantel: ...qui est venue témoigner au colloque de l'ADA, l'Association de la distribution alimentaire, je pense, que ça s'appelait à ce moment, ça a changé de nom depuis...

Des voix: Des détaillants. Mme Marois: En alimentation.

M. Nantel: ...détaillants en alimentation, au colloque, qui est venue témoigner pour dire des témoignages recueillis en Alberta de gens qui travaillaient dans les foyers de personnes âgées, qui disaient qu'ils ont remarqué, à la suite de la libéralisation des heures d'ouverture, qu'il y avait une diminution de la visite de ces personnages. Ce n'est pas une enquête, mais ce sont des témoignages recueillis. Elle est venue témoigner, de l'Alberta, ici au Québec, pour nous dire: Attention! moi, je travaille pour une association de consommateurs et je viens vous dire... Cette même association de consommateurs, section Québec, va venir vous dire, après nous, qu'il faut libéraliser le dimanche.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Le temps étant écoulé, si vous voulez remercier nos invités.

Mme Marois: Je vous remercie de votre contribution à nos travaux sous un angle qui n'avait pas été abordé jusqu'ici et avec le contenu que vous nous avez apporté. Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, M. Nantel, j'aimerais vous laisser et votre groupe sur la réflexion suivante. Au début de la commission, j'ai mentionné que c'est un forum privilégié pour faire une réflexion globale et, dans ce sens, je pense que je suis d'accord avec la députée de Taillon que votre mémoire, c'est un très bon mémoire. Il y a une approche globale. Mais j'ai ajouté: II va falloir que les intervenants aillent au-delà de l'intérêt personnel et immédiat de chacun dans le meilleur intérêt de l'équité de la loi. Alors, dans ce sens-là, vous le dites également: II va falloir faire respecter la loi. Ça, vous le dites. La loi, c'est pour les trois, juste le vrai dépannage. Je veux vous dire, pour votre réflexion, que je serais même prêt à recevoir, si vous voulez nous donner, par exemple, à la suite d'une ouverture d'esprit, une recommandation différente sur le nombre d'employés; je pense que ça pourrait nous aider dans notre réflexion.

La loi dit: La pâtisserie, pas plus de trois employés en même temps pour assurer le fonctionnement. Vous savez très bien qu'aujourd'hui beaucoup de ces pâtisseries-là vont ouvrir le dimanche, disons, de 11 heures, avant la messe, jusqu'à 2 heures. Ça veut dire qu'ils préparent leur pain pour qu'il soit frais, tout ça pour la qualité de vie; les pâtisseries, il faut toujours que ce soit frais. Trois personnes, ça peut causer un problème parce que ça veut dire que les personnes qui sont en arrière n'ont pas le droit de traverser dans le magasin parce que ça va faire plus de trois personnes, et vous me dites: II faut que je fasse respecter la loi.

Alors, je vous dis que peut-être qu'une des solutions qu'il faudrait envisager, c'est de dire que trois personnes, dans un contexte où on parle de qualité de vie, où les gens veulent avoir des fruits frais, veulent avoir des pâtisseries et des pains frais, sans sauter à l'extrême et dire, gros et petit, peut-être que cinq c'est encore petit par opposition à huit, dix, qui est plus gros. Alors, j'aimerais que vous y pensiez.

Je veux vous remercier. Je pense qu'on a eu une discussion franche, une discussion honnête. Votre point de vue est très clair et ça va sûrement nous aider dans notre réflexion. Encore une fois, je vous réitère, si jamais vous voulez nous faire des suggestions sur le nombre d'employés, qu'on serait peut-être prêt à recevoir ces arguments-là. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de l'économie et du travail remercie le groupe, la Fédération des associations coopératives d'économie familiale, et invite à la table des témoins l'Association des consommateurs du Canada, section Québec. Alors, on suspend les travaux pour une minute pour faire la transition.

(Suspension de la séance à 16 h 44) (Reprise à 16 h 50)

Le Président (M. Bélanger): Je vous invite à bien vouloir reprendre place pour que nous procédions à l'audition du mémoire de l'Association des consommateurs du Canada. Alors, vous voulez bien vous présenter, vous identifier et passer à la présentation de votre mémoire. Vous connaissez un peu notre façon de procéder. Je vous demanderais, chaque fois que vous devez prendre la parole, de bien vouloir vous identifier, ceci pour les fins de transcription au Journal des débats. Alors, si vous voulez bien commencer, s'il vous plaît... Je vous remercie.

Association des consommateurs du Canada, section Québec

M. Carouzet (Jean): M. le Président, Mmes

et MM. les députés, je me présente, Jean Carou-zet, président de l'Association des consommateurs du Canada (Québec). Je vous présente également Mme Lucile Brisebois qui est secrétaire-trésorière de l'ACCQ.

Tout d'abord, question de représentation, l'Association des consommateurs du Canada (Québec) est un groupe indépendant, bénévole, qui représente les consommateurs du Québec et a pour. objet d'améliorer la qualité de vie des Québécois. Nous avons 18 000 membres au Québec. À ce sujet, je voudrais vous expliquer de quelle manière nous calculons ce nombre. Nous incluons parmi nos membres tous les Québécois qui souscrivent, qui ont une carte de membre de l'Association des consommateurs du Canada en bonne et due forme, à qui nous avons soumis nos brochures, nous avons soumis notre programme et qui ont jugé donc que ça valait la peine d'adhérer a notre association. Je voudrais aussi, entre parenthèses, souligner que les membres que nous représentons sont uniquement des membres individuels, à la différence d'autres associations qui représentent des corporations. Quand nous parions de 18 000 membres, ce sont uniquement des individus qui se recrutent dans toutes les catégories de la population. Ça peut être des retraités, ça peut être des étudiants, ça peut être des jeunes couples, enfin, toutes les classes de la société.

Alors, l'ACCQ s'occupe activement de promouvoir notre droit d'être entendus, notre droit à la sécurité, notre droit d'être informés. La toi modifiant les heures d'ouverture des établissements commerciaux votée en 1984 est encore une fois sujet de débat. En 1984, les grandes chaînes en alimentation combattaient les marchés publics. Aujourd'hui, ces mêmes grandes chaînes veulent ouvrir les magasins le dimanche, de 10 heures à 17 heures.

MM. les députés, lors de la présentation du projet de la refonte de cette loi, en 1988, l'ACCQ s'était prononcée pour la libéralisation des heures d'ouverture des magasins. Nous avions déclaré au sous-ministre du ministère de l'Industrie et du Commerce notre indignation face aux amendes prévues dans la loi, les contrevenants de la loi qui sont des marchands disposés à donner des services à la population, services dont elle a besoin dans notre société qui a forcément évolué dans les dernières années.

Alors, en fait, ce que nous recherchons, ce que nous soutenons ici, d'abord, ce que soutient notre association, c'est qu'il y a un grand principe qui s'applique dans notre société, c'est une société démocratique. Je soumets qu'un des grands principes qui sous-tendent notre société, c'est le principe de la liberté, que chacun est capable, est libre de faire tout ce qu'il veut ou tout ce qu'il désire pourvu, évidemment, que ça ne vienne pas en contradiction avec certains impératifs de droit public ou d'ordre public.

Je soumets donc que soutenir le contraire, c'est évidemment aller contre ce grand principe, surtout dans la matière qui nous occupe, parce qu'au nom du principe sacro-saint du congé dominical, on voudrait soutenir qu'il faut laisser ce principe de côté et il faudrait donc interdire à certaines personnes ou à certaines corporations de faire le commerce le dimanche. Alors, je soumets que ça, c'est absolument contraire à notre principe démocratique et que, si on suit l'évolution de notre droit en la matière, on voit qu'il y a une évolution qui se fait toujours dans le sens d'une plus grande liberté. Il suffit de se rappeler qu'il n'y a pas tellement de temps, si vous vouliez boire une bière le dimanche dans un débit de boisson, c'était absolument impossible et ça, il n'y a pas tellement longtemps. Un peu plus tard, il s'est agi de la vente des boissons alcooliques dans les supermarchés, alors que les dépanneurs avaient seuls le droit de la vendre. On a soulevé un tollé de protestations parce qu'il fallait empêcher les supermarchés de vendre de la bière. Et, finalement, il est arrivé qu'on leur a permis de vendre de la bière, il n'est pas arrivé de catastrophe. Il n'y a pas eu... Les faillites qu'on craignait ne se sont pas produites. Je soumets que dans le présent cas, ça va être la même chose. Si on permet aux gens de vendre de l'alimentation, je veux dire à tous les gens, à tous les individus, à toutes les corporations de vente d'alimentation le dimanche, bien, il n'arrivera rien, ça va être simplement que les gens vont avoir de plus grands services et pourront se ravitailler plus facilement.

En fait, devant la situation présente, l'État a le choix entre un retour au respect strict de la loi ou la déréglementation. Tout le monde serait sur le même pied. Telle qu'elle est, cette loi est discriminatoire, injuste pour le consommateur, injuste pour les marchands forcés de fermer leur établissement.

Alors, surtout pour les établissements, je soumets que ces gens-là paient des taxes qui sont très élevées. Tout le monde sait aussi que les magasins d'alimentation ont une marge bénéficiaire qui est extrêmement réduite. Alors, je pense que c'est un domaine où on doit plus spécialement respecter la liberté des gens.

Protectionnisme. Il faut abandonner le protectionnisme qui a primé lors de fa refonte de la loi. Les commerces s'adaptent bien au changement. Prenons pour exemple la bière demandée par Steinberg à un moment donné. Ça, c'est l'exemple que j'ai cité tout à l'heure, l'exemple de la bière On avait interdit à Steinberg et à d'autres de vendre de la bière et, finalement, on leur a permis de le faire. Et tout ce qui est arrivé, c'est que maintenant les gens peuvent se procurer de la bière plus facilement. Donc, ils ont eu plus de services et, finalement, les inconvénients qu'on craignait ne se sont pas produits.

Il y a un fait, il y a une évolution qui se fait et cette évolution, je soumets qu'elle est

démontrée par les sondages, les diverses enquêtes qui ont été faites pour déterminer de quelle manière les consommateurs ont évolué et quels étaient leurs besoins actuels et les désirs qu'ils désiraient voir satisfaire. Ces sondages ont révélé, sans l'ombre d'un doute, que les consommateurs ont de plus en plus le goût de faire ce qui leur plaît et, notamment, de magasiner le dimanche. Ils ne comprennent absolument pas pourquoi le dimanche on les empêche de faire telle ou telle chose. On comprend mal la position des ACEF et puis d'autres groupes qui sont venus et qui ont dit qu'ils étaient contre la liberté pour les commerces d'alimentation de vendre leurs produits le dimanche, étant donné que, finalement, les gens qui veulent aller le dimanche visiter leurs proches dans les hôpitaux ou bien se livrer à d'autres activités, rencontrer des amis... Je ne vois absolument pas, si les commerces sont ouverts le dimanche, que ça peut les empêcher de faire ce qu'ils ont envie de faire. Je ne vois pas la contradiction entre les deux. Si les gens ont envie d'aller voir leurs proches qui sont dans les hôpitaux, je ne vois pas du tout en quoi le fait que les commerces d'alimentation soient ouverts le dimanche, ça peut les empêcher de le faire. Et même, ça peut leur faciliter la tâche; admettons qu'ils veuillent acheter des fleurs, bien, ça va être pratique pour eux d'aller dans un magasin quelconque et d'acheter des fleurs.

Je trouve que ce sont des services qu'on met à la disposition des gens. Qu'ils s'en servent ou qu'ils ne s'en servent pas, ça, c'est leur affaire. Mais je soumets que c'est absolument incompréhensible qu'on interdise à des commerces de vendre leurs produits le dimanche, surtout des produits d'alimentation qui sont absolument indispensables et essentiels à la population, sous prétexte que les gens peuvent faire autre chose et que, si on ouvrait le commerce, ça leur donnerait le goût de faire autre chose.

En plus de ça, ça a quelque chose d'un peu insultant d'aller dire à des gens. Écoutez, si on met des services à votre disposition, si on ouvre le supermarché de votre quartier le dimanche, bien, peut-être que vous n'irez pas voir les gens qui sont à l'hôpital et qui attendent votre visite. Je trouve que c'est un peu aller loin. Je trouve que c'est un raisonnement qui est vraiment déficient et même insultant à l'égard du commun des citoyens. Il me semble que ce n'est certainement pas ça qui va les empêcher d'aller voir leurs proches dans un hôpital s'ils sentent qu'ils ont le devoir de le faire.

La libéralisation des heures d'ouverture des magasins ne veut pas dire qu'on doive obliger tous les commerçants à ouvrir leur magasin. Ça, c'est une autre chose. On dit: Permettre aux magasins d'alimentation d'ouvrir, ça va obliger des gens à travailler le dimanche, etc. Alors, ici encore, je ne suis absolument pas d'accord avec cette position parce que les gens qui vont travailler le dimanche ne sont pas forcément et ne seront sûrement pas les mêmes que ceux qui travaillent d'une manière régulière dans lés magasins.

Il faut remarquer - et il y a une statistique qui est assez importante, à mon sens - que dans les supermarchés d'alimentation surtout, ceux qui ouvriraient réellement si on leur donnait la permission, il y a 58 % de la main-d'oeuvre qui est une main-d'oeuvre à temps partiel. Alors, ça veut dire que c'est déjà une main-d'oeuvre, en somme, qui ne travaille pas d'une manière régulière. On peut penser que si on ouvrait les magasins le dimanche, les supermarchés le dimanche, ce pourcentage pourrait encore augmenter et ça pourrait inclure... C'est ça qui est intéressant. On se plaint et on dit: Oui, mais les gens seront obligés de travailler le dimanche, ça va les empêcher de.. Surtout question de main-d'oeuvre. Mais je soumets que là, si on commence à s'occuper de main-d'oeuvre, à ce moment-là, on ne s'occupe plus des consommateurs. Ce n'est déjà plus la même chose, si on s'occupe de la main-d'oeuvre. Mais si on regarde le problème de la main-d'oeuvre, je soumets qu'à ce moment-là il va y avoir toute une catégorie de gens qui cherchent des revenus comme des étudiants. Ça peut être des étudiants ou des familles monoparentales ou des gens comme ça qui cherchent à avoir des petits revenus et qui, à ce moment-là, étant donné l'offre d'emploi que ça va faire, vont pouvoir justement commencer à travailler et avoir des petits revenus. Ça, je trouve que c'est extrêmement intéressant. Ce sont des gens qui peut-être n'ont pas la possibilité justement d'avoir un emploi et qui, à ce moment-là, vont pouvoir se procurer de petits revenus. Je pense notamment aux étudiants qui sont aux études, qui ont un urgent besoin d'un peu d'argent et qui, à ce moment-là, vont pouvoir se le procurer. Alors, ce sont des retombées auxquelles on ne pense pas toujours mais je soumets que c'est très intéressant, ça peut ouvrir beaucoup de débouchés et de retombées qu'on ne prévoit pas ou que les gens qui sont contre l'ouverture des supermarchés le dimanche ne prévoient pas et n'ont peut-être pas considérés. Le problème est assez complexe. Et quand on considère les conséquences de ça, il faut voir toutes les facettes du problème et c'est ce que ne font pas les gens qui sont contre le projet.

Alors, on a parlé aussi de qualité de la vie. Là, évidemment, la qualité de la vie, comme j'ai déjà un peu abordé le problème, la question de la qualité de la vie, on sous-entend et on fait allusion à la notion du congé dominical. Évidemment, c'est le dimanche et ça, on remonte . à toute une tradition. Le dimanche, c'était le jour saint, le jour... D'abord, c'était le jour où on allait à la messe, c'était la chose principale et puis, c'était le jour qui était consacré au repos, on ne devait pas travailler...

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure. Il reste deux minutes, rapidement.

M. Carouzet: C'est vrai, le temps passe Alors, c'est ça. Actuellement, la qualité de la vie, ça a changé beaucoup et je soumets que la qualité de la vie, ce n'est plus la même notion que celle quo nous avions l'habitude de considérer. La question de visites de gens dans les hôpitaux, de rencontres chez les amis, etc, tout ça a changé.

Maintenant, pour ce qui est des loisirs, ça c'est une autre chose. Mais je veux dire: Est-ce que c'est vraiment nécessaire que tous les gens prennent leurs loisirs en même temps le dimanche, par exemple? Je pose la question. S'il y a des gens qui sont obligés de travailler le dimanche, évidemment, ils vont prendre leurs loisirs un autre jour de la semaine. Je pose la question, c'est une autre retombée ça: Est-ce que, s'il y a un étalement des loisirs sur plusieurs jours de la semaine, sur un autre jour, est-ce que c'est une mauvaise chose? Est-ce que c'est nécessaire, par exemple, que tous les skieurs se retrouvent le même jour, le dimanche, sur la même montagne, en même temps ou bien si ce n'est pas préférable qu'il y ait des gens qui travaillent le dimanche et qui prennent leur jour de congé un autre jour de semaine et qu'ils fassent du ski un autre jour de la semaine où il y a moins de monde sur la montagne?

Ils vont bénéficier de prix réduits. C'est encore une autre chose. Il y a beaucoup de choses à considérer. Alors, la neige ne tombe pas non plus nécessairement le vendredi après midi. Elle peut tomber le lundi ou le mardi. Je dis: Ce sont toutes des choses qu'on peut considérer La question de la qualité de vie, n'est-ce pas, on est sur la qualité de la vie. Alors, ce sont des questions que je pose. Je ne veux pas raisonner.

Le Président (M. Bélanger): Brièvement pour qu'on puisse...

M. Carouzet: Donc, je vais terminer ici pour conclure que nous sommes foncièrement et entièrement... Je vais passer la parole à Mme Lucile Brisebois. D'ailleurs, elle va vous communiquer un sondage sur le sujet.

Le Président (M. Bélanger): Très brièvement puisque...

M. Carouzet:... un sondage qu'on a.

Mme Brisebois (Lucile): Ce que j'aimerais juste en conclusion... Vous avez le mémoire devant vous là. Mais on croit que le gouvernement provincial surtout doit prendre position. Si on laisse aux municipalités de légiférer, il y aura un chaos comme ça se produit en Ontario présentement. Montréal est contre l'ouverture - ils se sont prononcés contre - et la ville de Laval s'est prononcée pour. Vous voyez le chaos qu'on aurait où, nous autres, à Montréal, on ne pourrait pas aller - c'est vrai - magasiner, il faudrait aller à Laval. Bon. Oui, oui, c'est vrai, je suis bien certaine.

Surtout, on veut que tous les marchands soient sur un pied d'égalité. Que les travailleurs et travailleuses a plein temps ne soient pas forcés de travailler le dimanche, c'est très important pour nous autres parce qu'on ne veut pas ajouter à leurs heures, on veut leur laisser le temps qu'ils veulent, qu'ils soient libres de le faire ou non parce que nous autres, on a toujours été pour la promotion de la libre entreprise, de la saine concurrence. Et ce serait très important, comme je vous le disais, que vous preniez position et que vous ne laissiez pas ça aux villes. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Je cède la parole à M. le ministre. Durant la période de questions vous pourrez répondre. M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Prendre position. Mme Brisebois, je pense que ça je l'ai répété assez de fois, on va déposer un projet de loi. Je pense qu'au niveau des villes, c'est une hypothèse de travail. Alors, on verra. Moi, je veux vous remercier beaucoup pour la présentation J'ai posé beaucoup de questions. Je préfère laisser à mes collègues la possibilité de vous poser des questions.

Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le député d'Acadie et M. le député de Drummond par la suite.

M. Bordeleau: En fait, c'est un point sur lequel je voudrais revenir. Vous avez parlé de la question de la croissance possible des emplois. Vous faisiez référence, disons, à des emplois qui seraient plutôt de type temps partiel pour des étudiants, etc. Il y a une autre dimension que j'aimerais peut-être vous suggérer et avoir votre réaction là-dessus. On parle d'un marché qui est assez stable, le marché de l'alimentation, qu'il y aurait probablement un étalement des achats durant la semaine dans l'éventualité où il y aurait une ouverture le dimanche. Maintenant, est-ce qu'on est certain que ça amènerait une création d'emplois et est-ce qu'il n'y aurait pas aussi une autre... Parce que combler les besoins en personnel le dimanche, il y a une autre façon de le concevoir. C'est que, s'il y a un étalement, probablement qu'il y aura peut-être des journées qui seront moins occupées; je pense, par exemple, au lundi ou à des journées comme ça qui seront moins occupées et il pourrait y avoir tout simplement des déplacements du personnel régulier, régulier temps plein et temps partiel,

vers le dimanche et que le lundi ou le mardi il y ait moins de personnel requis et que ça se stabilise comme ça et que ça ne crée pas nécessairement de l'emploi.

M. Carouzet: C'est possible. C'est difficile, à ce stade-ci, de voir quelles seraient les retombées, comme j'ai dit. Tout le monde fait des hypothèses, tire des... C'est difficile. Même là, il y aurait certainement un étalement. Il se produirait certainement un étalement, c'est à peu près sûr, c'est obligatoire qu'il y a des gens qui vont travailler le dimanche, donc, ces gens-là ne pourront pas travailler toute la semaine. Peut-être que ça va être pris sur un autre jour où ça sera plus calme. C'est possible. Mais, étant donné que le volume des ventes va probablement augmenter - et il y a des projections quand même à cet effet-là - il devrait y avoir une augmentation du personnel. C'est presque nécessaire, je veux dire.

M. Bordeleau: On a eu aussi d'autres données qui nous laissent croire qu'il n'y aurait pas une augmentation du volume des ventes, mais qu'il y aurait un déplacement du volume des ventes en partie vers le dimanche. Dans ce contexte-là, à partir de la question que je vous posais tout à l'heure et à laquelle vous avez répondu, il n'y aurait pas nécessairement une création d'emplois. Vous avez fait allusion à ça comme étant quelque chose de certain et ça me semble une hypothèse, mais ce n'est pas nécessairement une hypothèse plus certaine que la possibilité d'un réaménagement des ressources actuelles.

Mme Brisebois: Si vous faites comme on pense, comme on espère que vous ferez, et que vous n'obligez justement pas à travailler les travailleurs qui sont réguliers, ça veut dire qu'obligatoirement il va falloir que ce soient d'autres personnes et, à ce moment-là, c'est là que ça va créer des emplois.

À part ça, on a un débat là-dessus et, en vérité, les magasins sont ouverts le dimanche. Il ne faut pas se leurrer, surtout si vous allez autour de. Montréal et sur la rive sud, vous avez des marchés où, le dimanche, vous ne pouvez pas trouver une place pour stationner. La ville de Montréal se prononce contre l'ouverture, ce qui nous a beaucoup étonnés. Pourquoi? Parce que le marché Atwater est ouvert le dimanche. Tout ce qu'il fait, c'est protéger son propre marché pour être sûr que les gens qui louent chez lui n'auront pas la compétition plus grande d'autres magasins. C'est assez étrange. J'y suis allée dimanche, j'aurais pu acheter ce que je voulais: de la viande, des produits d'épicerie, le vrac, la boulangerie etc. Il y avait des kiosques fermés, alors personne n'est obligé d'ouvrir.

Nous, on dit qu'on devrait laisser le libre choix. Pour ça, j'ai attendu. On avait envoyé au ministre, en 1988, des lettres. La façon dont on rejoint les gens beaucoup, c'est quand on va à une station de radio. Par exemple, on a été invités par un animateur quelconque et on â dit aux gens: Écoutez, si vous êtes d'accord avec notre position, écrivez-nous. Là, on a reçu des lettres de partout au Québec, pas seulement de Montréal, mais d'Arthabaska, de partout. "Libération absolue des heures d'ouverture car il est temps que les consommateurs, aussi bien que les commerçants, aient justice." C'est comme ça que les Québécois voient ça, ou: "Je suis pour l'ouverture des commerces le dimanche, soit la libre entreprise. Le gouvernement sauverait beaucoup d'argent en inspecteurs et en procès." Vraiment, on trouve qu'avec la loi du marché, ça devrait se placer. Quant à nous, il n'y aurait pas de loi du tout et je pense que ça ferait l'affaire de tout le monde et pas seulement...

M. Carouzet: On a reçu 136 lettres à cette demande qu'on avait faite à CKAC. Sur les 136 lettres, 134 lettres étaient pour l'ouverture et seulement 2 étaient contre. C'est assez écrasant comme résultat.

Mme Brisebois: Et une lettre qu'on reçoit d'un consommateur, ça représente 200 autres au moins qui n'ont pas été capables de nous écrire. Alors, on compte que c'était au moins 26 000 personnes, juste pour un appel, à peu près cinq minutes sur le programme de M. Pascau.

M. Bordeleau: Juste une dernière question de clarification très courte. Votre position, c'est pour le commerce en général et non seulement pour le commerce dans le domaine de l'alimentation.

M. Carouzet: Non, non, pour l'alimentation. M. Bordeleau: Pour l'alimentation seulement.

M. Carouzet: Oui. Il y a une chose pour l'alimentation, il y a un autre motif qui a déjà été invoqué, c'est le fait que, pour l'alimentation, cette coupure d'un jour, le dimanche, c'est très mauvais parce que, s'il y a des denrées périssables, ça fait un jour mort, un jour pour lequel... Si ces marchandises viennent d'être livrées le samedi, elles vont rester le dimanche dans les entrepôts et les gens vont en être privés. Pour acheter des fruits frais ou des denrées fraîches, ça fait un jour de perdu. Pour l'alimentation, c'est très mauvais; c'est plus mauvais que pour les autres commerces.

Mme Brisebois: À part ça, vous avez aussi le fait qu'on peut aller aux États-Unis. Il y a beaucoup de nos beaux dollars qui s'en vont de ce côté-là. Ils sont très prospères à Plattsburg. Si vous y êtes allés dernièrement, le centre commercial qu'il y a là, à la sortie 37, aujour-

d'hui, est quatre fois plus gros parce qu'ils l'ont construit de l'autre côté de la rue. Là, ici, il y a un projet d'une compagnie québécoise qui s'en va investir avec une autre compagnie pour rénover le centre-ville de Plattsburg parce que c'est là que les Québécois vont. Ils les ont, ils comptent sur la clientèle des Québécois. Je ne sais pas trop comment ils peuvent s'arranger. L'alimentation, ça passe tout seul là-bas. Vous n'avez pas de problème, vous pouvez même acheter, maintenant, sans payer de douane, des équipements électroniques. C'est un endroit où il y a l'écoulement de nos dollars. (17 h 15)

M. Tremblay (Outremont): Juste une question d'information. Juste pour clarifier ce que vous avez dit concernant vos 134 lettres sur 136, pour être bien certain que j'ai compris.

M. Carouzet: Je peux vous lire ou vous pouvez lire...

M. Tremblay (Outremont): Non, non. Mais...

Mme Brisebois: Nous en avons une copie dans notre mémoire.

M. Tremblay (Outremont): Oui, oui. C'est justement ça. C'est justement pour ça. C'est là qu'est ma question. Si vous le demandez sur les ondes de CKAC: Si vous tenez à avoir la possibilité de faire votre marché le dimanche, il faut absolument que vous, du public, vous vous manifestiez; écrivez-nous, faites-nous parvenir une carte postale; il faut que les consommateurs fassent valoir notre position au gouvernement... En d'autres mots, ce n'est pas un sondage. Les personnes qui vous ont écrit, c'est évident qu'elles vous ont écrit parce qu'elles étaient favorables. Si vous aviez dit...

Mme Brisebois: II y en avait deux qui étaient contre.

M. Tremblay (Outremont): Pardon?

Mme Brisebois: II y en avait deux qui étaient contre.

M. Tremblay (Outremont): Oui, oui C'est ça. Mais je veux juste au moins clarifier votre remarque pour dire que...

Mme Brisebois: Multipliez-les par 200. Ça prouve que les gens sont... Puis les lettres sont...

M. Tremblay (Outremont): On est d'accord, madame. Il y en a qui sont pour l'ouverture, c'est certain. Dans ce cas-là, il y en avait 134. Mais si vous aviez fait un vrai sondage, c'aurait pu être différent.

Mme Brisebois: Bien, des vrais sondages, nous n'avons pas les moyens de les faire parce qu'on n'a pas d'argent. Nous ne recevons rien, nous, de l'Office de la protection du consommateur du Québec.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie.

Mme Brisebois: C'est de cette façon qu'on vient à bout de demander aux gens ce qu'ils veulent, leur opinion.

À part ça, comme association, on est toujours en contact avec le public. Quand vous êtes dans une association de consommateurs, on ne pense qu'à ça, nos projets. Quand tu as quelque chose, tu questionnes tout le monde autour et tu sais l'opinion du public. Les gens ne peuvent pas comprendre que, par exemple, je vous ai donné une idée, dans un article ici: La situation aberrante qu'on a quand on est un consommateur et que, par exemple, on a le droit de La loi des exceptions, cette histoire-là, pour tellement de commerces différents, c'est à n'y rien comprendre pour le consommateur, excepté qu'on lui refuse le privilège d'acheter ce qu'il veut à son marché local le dimanche et qu'il peut magasiner dans un marché public à des milles de chez lui. Tu es obligé de sortir. Tu peux visiter un vendeur de piscines, tu peux acheter un monument funéraire, tu peux aller à la librairie, une galerie d'art, une pâtisserie, un antiquaire, mais tu ne peux pas te procurer de fruits près de chez vous.

Pensez aux marchés aux puces qui attirent des foules considérables. Les gens, c'est un plaisir...

Le Président (M. Bélanger): Vous permettez, madame. Comme on est minutés, le temps du parti au pouvoir est fini.

Mme Brisebois: On aime ça, aller magasiner. Ce n'est pas nécessairement une corvée

Le Président (M. Bélanger): Je dois donc vous interrompre. Vous m'excusez. Je dois vous interrompre et céder la parole à la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président. En fait, je vais faire seulement une remarque. C'est mon collègue qui va poser une question. Vous parliez du libre choix et de la liberté, mais il faut faire attention aussi, parce que la liberté absolue, c'est aussi la loi de la jungle et puis, bon...

Mme Brisebois: On obéit aux lois.

Mme Marois: Oui, je sais, mais la liberté des uns s'arrête là où commence la liberté des autres.

Mme Brisebois: II y en a beaucoup de lois.

Mme Marois: Et la liberté absolue, C'a donné aussi le capitalisme sauvage auquel nous n'assistons plus maintenant, je le souhaite et je l'espère.

Il faut faire attention aussi quand on aborde des concepts comme ceux-là parce qu'ils ont des conséquences. Ils ont des conséquences quant à nos lois, quant à nos attitudes, quant à nos comportements, quant à nos modes de vie.

C'était un commentaire. Je vais laisser mon collègue vous poser une question J'imagine que, dans la réponse à la question de mon collègue, vous pourrez commenter mon commentaire.

M. Jolivet: En fait, d'abord, moi aussi, j'ai un commentaire de départ parce qu'à la question qui a été posée par le député d'Acadie vous avez dit: Nous voulons simplement l'ouverture des services d'alimentation. Mais, quand on prend votre principe de démocratie d'acheter où je le veux, quand je le veux, bien là, il faudrait que je l'ouvre ailleurs qu'à l'alimentation. Je pourrais être aussi non démocrate si je fermais les magasins de meubles, si je fermais les magasins de fourrures, si je fermais les magasins de ci et les magasins de ça. Je pense que, portée à l'extrême, votre démocratie impliquerait qu'on devrait tout ouvrir, à mon avis, et non pas juste le secteur de l'alimentation, parce que, dans le fond, ça servirait à quoi de parler de démocratie simplement pour un secteur, qui est l'alimentation. Ça, c'est la première chose.

La deuxième chose, c'est la question de la ville de Montréal. J'essaie de m'imaginer la ville de Montréal et je suis incapable de m'imaginer, à moins qu'on ne défasse des quartiers entiers, qu'on ne reconstruise un grand centre commercial dans la ville de Montréal.. Donc, ça va être à l'extérieur de la ville de Montréal. Si vous me dites que Montréal est contre l'ouverture des magasins le dimanche et que Laval est pour, je pourrais le comprendre en disant que ce qui va arriver, c'est que si l'un est pour, il profite du fait que l'autre est contre pour ouvrir ses magasins et forcer la note. Je pense que là, ce n'est pas charrier que de dire ça. C'est de simplement en arriver, finalement, a s'apercevoir que Montréal, sa structure commerciale est basée sur de petits commerces. Montréal, quand je regarde à l'extérieur de Montréal, c'est plutôt à côté, à Mont-Royal, c'est en haut dans le nord, Saint-Laurent. En fait, c'est Anjou et tout ça. C'est à l'extérieur du commerce de Montréal. La ville de Montréal étant basée sur des petits commerçants, elle dit: Moi, je ne peux pas me permettre, comme responsabilité municipale, d'être pour l'ouverture parce que la crainte que j'ai, c'est que ce qui va arriver, c'est que ça va aller à l'extérieur de la ville de Montréal et, là, on va tuer le commerce de la ville de Montréal. Il faut le comprendre comme tel.

Qui va être perdant au bout de la course? C'est le consommateur qui se trouve dans le centre-ville de Montréal, la personne âgée, la personne qui a moins de capacité de voyager, qui ne pourra pas prendre le métro avec ses sacs d'IGA, ses sacs de Métro ou ses sacs de Provigo et partir d'Anjou pour descendre dans le centre de Montréal avec ça. Donc, elle va devoir payer davantage pour des petits commerces qui vont peut-être faire faillite en cours de route.

Je reviens à la dernière question, c'est celle de l'équité. Dans ce contexte-là, le ministre nous dit: Est-ce que ça serait équitable - il l'a posée à des gens cet après-midi - de revenir en arrière pour des pharmacies qui ont été acceptées en vertu de la loi votée en 1984?

Moi, je poserais la question inverse. Dans un contexte d'ouverture comme celui-là, est-ce que ce serait équitable, pour les petits commerces de la ville de Montréal - et il y en a d'autres ailleurs aussi comme ça - de se voir, par une loi qui ouvrirait le commerce, mourir par le fait même, perdre les investissements qu'ils ont faits, faire faillite?

Est-ce que ça serait équitable? Moi, je pense que non. Dans ce sens-là, il me semble que notre position se tient quand on dit qu'il faut avoir au moins une journée où il ne faut pas ouvrir "at large", ni pour l'alimentation ni pour les autres, les commerces le dimanche.

Ce sont mes opinions que je voulais bien vous donner parce que la démocratie ne s'applique pas juste...

Mme Brisebois: Est-ce que je comprends que vous voulez favoriser les dépanneurs? Les dépanneurs, ce n'est pas le consommateur qu'il aide. Les dépanneurs, c'est cher. Toujours leurs produits sont chers. Ils vous vendent des petits contenants. Tu ne peux pas faire un marché qui a de l'allure. C'est juste bon pour être un dépanneur. Ils vendent le vin...

M. Jolivet: Madame, quand je vais chez le dépanneur, parce que ça arrive aussi avec six enfants à la maison, avec mon épouse, de temps en temps - elle travaille comme je travaille à l'extérieur - quand on se permet d'aller faire le magasinage, c'est parce qu'on n'a pas été capables, d'une certaine façon peut-être, d'aller faire le magasinage durant la semaine, mais c'est aussi parce que durant la fin de semaine, compte tenu de la famille que j'ai, ça peut arriver qu'il y ait du monde qui vienne à la maison le dimanche et que je n'aie pas tout ce qu'il faut et, en conséquence, je vais aller le chercher.

J'ai à le payer. C'est un coût que je me permets de penser que je dois payer. Mais, d'une façon ou d'une autre, je dois m'organiser durant la semaine et le temps, en ouvrant la plage horaire durant la semaine, me permettrait peut-être de régler le petit problème que j'ai d'aller chez le dépanneur.

Mme Brisebois: Vous êtes différent de bien d'autres consommateurs parce qu'à Anjou, sur la rive sud, à Dollard-des-Ormeaux, sur la 440, c'est plein le dimanche. Les stationnements sont pleins. Les gens vont même acheter leur boisson parce que la Société des alcools est ouverte partout. Le faubourg de Montréal, la même chose.

M. Carouzet: Je vais répondre à Mme Marois. Ce qui arrive, c'est qu'au nom du principe de la liberté je trouve que les consommateurs recherchent de plus en plus... C'est une évolution vers la recherche de la liberté de plus en plus complète, un goût de pouvoir acheter quand ça vous plaît. Et si on regarde même l'opinion des ACEF, vous avez eu les ACEF qui sont venues et qui vous ont expliqué qu'elles sont contre l'ouverture, et elles-mêmes reconnaissent que les gens ont le goût d'aller acheter le dimanche. Je vais vous lire un passage de M. Nantel. Il dit: "Bien sûr, les gens ne seraient pas obligés de magasiner le dimanche, mais il faut bien être naïf pour croire qu'ils s'en abstiendront longtemps s'ils en ont la possibilité." Donc, il reconnaît que, finalement, les gens vont se laisser tenter et vont aimer ça, aller magasiner le dimanche. Lui-même reconnaît ça.

M. Jolivet: Moi, je vais à l'absurde de votre raisonnement aussi en disant que la démocratie implique l'ouverture; si ça implique, l'ouverture, de pouvoir magasiner où je veux, quand je veux, 24 heures par jour, 7 jours par semaine, 365 jours par année, dans tous les commerces, ce serait la logique, là.

Mme Brisebois: N'exagérez pas. C'est comme ça en Floride, c'est comme ça au Nouveau-Brunswick, c'est comme ça en Ontario. Je veux dire: Pourquoi est-ce que nous autres, on est différents à ce point-là?

M. Carouzet: Vous avez les dépanneurs, ils sont ouverts 24 heures par jour. Ça, c'est la première chose. Il me semble qu'il y a un goût du public de pouvoir magasiner le dimanche. Il y a quelque chose, un désir de plus en plus fort de pouvoir faire ce qui vous plaît et de magasiner le dimanche. Une deuxième chose là; vous avez dit: Oui, en ce qui concerne la ville de Montréal, on a dit: Bon, bien, la ville de Montréal, c'est parce qu'il y a des petits commerces et ça pourrait encourager les supermarchés, etc. Justement, si, dans la ville de Montréal, il y a surtout des petits commerces, on peut penser que Ça ne va pas changer grand-chose, finalement. Si des gens sont obligés d'aller en dehors de la ville pour aller s'approvisionner, est-ce qu'ils ne vont pas plutôt aller chercher ce dont ils ont besoin sur place et aller dans les petits commerces? Alors, qu'est-ce que ça va changer, à ce moment-là? Là-dessus, je ne trouve pas qu'il y aurait un gros changement. Finalement, il me semble que les arguments contre ne sont pas absolument convaincants.

Mme Marois: En fait, ce qu'ils disent, pour ne pas qu'il y ait "malinterprétation", ce que la ville dit à ce moment-là, c'est: Les gens risqueraient d'aller faire leurs courses et leurs emplettes ailleurs et de tuer nos petits commerçants, parce que eux ne seront pas capables d'assumer l'ouverture le dimanche compte tenu du fait que ce sont des indépendants et que, souvent, le propriétaire est un propriétaire unique avec à peine quelques employés. C'est l'essentiel de leur raisonnement, si je ne me trompe pas. Ils vont venir, de toute façon, nous le présenter.

Mme Brisebois: La situation est la même dans le moment, il y en a des magasins ouverts. Tous les magasins sont ouverts, vous pouvez acheter ce que vous voulez dans Montréal, à peu près Je connais des magasins que je peux vous nommer; c'est ouvert le dimanche. Alors, tout le Vieux-Montréal, par exemple, c'est ouvert le dimanche, les gens vont magasiner.

M. Carouzet: Oui, et il suffit de

M. Jolivet: Oui, mais ce n'est pas pareil, le Vieux-Montréal.

Mme Brisebois: Les villages aussi. Vous savez que ça a toujours été ouvert dans tous les villages. Pourquoi? Parce que les fermiers, eux autres, c'est le dimanche qu'ils vont au village pour s'approvisionner. Si vous avez Loto-Québec aujourd'hui, de toute façon, vous êtes obligés d'ouvrir. Vous avez la possibilité... Moi, je n'ai pas de problème avec ça parce que je peux magasiner où je veux, le dimanche, à mon magasin au village, l'été, quand je vais à la campagne, et en ville. Alors, on en a besoin.

Le Président (M. Bélanger): Alors, les dix minutes sont terminées. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mme Brisebois: II y a un besoin impossible à réprimer.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Drummond.

M. Saint-Roch: Oui, j'aurais une question. Dans votre mémoire, vous mentionnez: "Nous croyons que le gouvernement provincial doit prendre position", parce que vous craignez que, si ce sont les villes ou les MRC qui légifèrent, on ait toutes sortes de législations et de réglementations.

Mme Brisebois: Bien, surtout...

M. Saint-Roch: Je pars du principe que c'est le gouvernement qui va légiférer, qui va réglementer. Ma question est celle-ci: Quelle serait votre position, dans l'application de la loi - parce qu'il y a toujours aussi l'application et le contrôle de cette loi-là - au niveau du contrôle de la loi? Est-ce que vous manifesteriez une ouverture d'esprit d'aller vers les municipalités, à ce moment-là...

Mme Brisebois: Non

M. Saint-Roch:... pour faire appliquer la loi?

Mme Brisebois: Pas du tout. On serait complètement contre. Notre conseil d'administration s'est prononcé contre ça parce qu'il va y avoir des endroits où... Seulement le problème qu'on aurait avec Montréal qui est contre et Laval qui est pour, qu'est-ce que vous pensez qui va arriver? Les gens vont aller à Laval et les petits commerçants vont mourir pareil à Montréal.

M. Saint-Roch: Non, ce n'est pas ma question. Si la loi dit, c'est un exemple. Tous les commerces ou une partie des commerces sont fermés...

Mme Brisebois: Ce qu'on a trouvé...

M. Saint-Roch:... ou sont ouverts..

Mme Brisebois:... nous autres, en tout cas...

M. Saint-Roch:... pour faire observer cette loi-là...

Mme Brisebois:... c'est assez indignant de penser...

Le Président (M. Bélanger): Laissez M. le député...

Mme Brisebois:... qu'il y a des lois...

Le Président (M. Bélanger):... poser sa question...

Mme Brisebois:... il y a des amendes jusqu'à...

Le Président (M. Bélanger): Madame... Mme Brisebois: Pardon, monsieur.

Le Président (M. Bélanger): on va laisser M. le député poser...

M. Saint-Roch: Ma question...

Le Président (M. Bélanger):... sa question et...

M. Saint-Roch:... est celle-ci.

Le Président (M. Bélanger):... vous répondrez après.

M. Saint-Roch: II y a une loi... Mme Brisebois: II semble la poser... M. Saint-Roch:... qui existe. Mme Brisebois:... à moi, if me regarde.

M. Saint-Roch: Bon. Quelle que soit la loi, la loi existe.

Une voix: Oui.

M. Saint-Roch: On pourrait décider que ça va être des inspecteurs à partir du ministère de l'Industrie et du Commerce qui feraient observer la loi, qui donneraient les contraventions ou on pourrait dire, à ce moment-là: On va déléguer aux municipalités ce rôle de surveiller l'application de la loi. C'est là qu'est ma question: Est-ce que vous seriez, à ce moment-là, pour que ce soient les municipalités qui aient ce rôle de faire appliquer la loi et de donner les amendes s'il y a des infractions?

Mme Brisebois: Je vais laisser notre avocat vous dire ce qu'il pense.

M. Carouzet: Nous, on serait plutôt contre les amendes, puisqu'on est pour la liberté. Ha, ha, ha!

M. Saint-Roch: Non, mais il va y avoir quand même des commerces, quelque part, qui seront fermés.

M. Carouzet: Qui seront fermés...

Mme Brisebois: Surtout, ne nous enlevez pas les marchés publics parce qu'on aime ça, nous autres, les marchés publics, c'est très important. Si vous êtes pour garder le statu quo, vous allez être encore pris avec des amendes.

M. Carouzet: C'est ça

Mme Brisebois: Et des amendes de 10 000 $ pour un commerçant qui veut ouvrir un magasin, on trouvait ça assez difficile, on vous l'a mentionné dans...

M. Saint-Roch: Non, mais ma question est celle-ci. Vous avez dit tout à l'heure.:.

Mme Brisebois: Laisser aux municipalités...

M. Saint-Roch: Je m'excuse, madame.

Mme Brisebois: ...je n'aimerais pas. On n'aimerait pas ça.

M. Saint-Roch: Vous avez dit tout à l'heure, en réponse à une question de M le député d'Acadie et de M. le député de Joliette, que vous êtes concernés par les commerces d'alimentation seulement.

M. Carouzet: Oui, pour l'instant, c'est le débat...

Mme Brisebois: C'était général. M. Carouzet: ...qui est devant nous.

Mme Brisebois: Notre mémoire était général.

M. Jolivet: Laviolette.

M. Saint-Roch: Laviolette

Une voix: M. Jolivet, de Laviolette.

Une voix: Le comté de M. Jolivet, c'est Laviolette.

M. Saint-Roch: Le secteur qui serait légiféré, à ce moment-là, et réglementé, au niveau de l'application, est-ce que vous auriez une objection a ce que ce soit la municipalité...

Mme Brisebois: Non, non.

M. Saint-Roch: ...à ce moment-là, qui donne les contraventions?

Mme Brisebois: Je n'aimerais pas.

M. Carouzet: Que ce soit le commerce des meubles, par exemple, auquel on ne permettrait pas d'opérer le dimanche, quelque chose comme ça.

M. Saint-Roch: Oui.

Mme Brisebois: Si vous faites des exceptions, il faudrait que vous ayez une police, mais...

M. Carouzet: C'est ça, il faudrait avoir...

Mme Brisebois: nous autres, on ne voit pas pourquoi il y a des exceptions, alors c'est difficile... Et si vous voulez une opinion sincère, parce que vous nous posez cette question-là, moi, personnellement, parce qu'on n'a pas consulté nos membres là-dessus, je pense que ça devrait rester au gouvernement, que ce ne soit pas aux municipalités, de grâce, parce que les municipalités sont trop près aujourd'hui. Je veux dire, c'est la police ici et la police là. Tu es rendu en ville et tu ne peux même pas traverser une rue sur la lumière rouge parce que tu te fais arrêter par la police. Des polices, on en a plein..

Le Président (M. Bélanger): J'espère! Parce que vous êtes en contravention.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Brisebois: Moi, ça m'est arrivé. J'ai eu une contravention parce que j'ai traversé sur la lumière rouge en ville. Alors, écoutez!

M. Saint-Roch: J'aimerais vous rappeler, à ce moment-là, que le corps policier fait appliquer le Code de la sécurité routière, qui est provincial.

Mme Brisebois: Je ne le sais pas, mais ne nous apportez pas une autre police dans cette histoire là

Le Président (M. Bélanger): Bon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Bien. Alors, si Mme la députée de Taillon veut remercier le groupe.

Mme Marois: Merci de votre contribution à nos travaux et de cet échange que l'on a eu.

Mme Brisebois: On vous remercie de nous avoir consultés.

Le Président (M. Bélanger): M le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, merci beaucoup. Je pense que ça a été très intéressant. Alors, on va prendre en considération vos remarques.

Mme Brisebois: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de l'économie et du travail remercie l'Association des consommateurs du Canada et invite, à la table des témoins, la Fédération nationale des associations de consommateurs. Alors, on suspend une minute pour faire la transition, s'il vous plaît!

(Suspension de la séance à 17 h 32)

(Reprise à 17 h 33)

Le Président (M. Bélanger): Je vais vous expliquer rapidement nos règles de fonctionnement. D'abord, si vous voulez bien vous présenter en débutant tout à l'heure. Et lorsque vous aurez à prendre la parole, au moment des échanges avec les députés, H serait important

que vous donniez votre nom chaque fois, cela pour la transcription du Journal des débats, parce qu'ils ne reconnaissent pas les voix. Ils sont moins familiers avec vous qu'avec nous. Si possible, on va essayer de ne pas l'oublier. Vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire, et il y aura une période d'échanges avec les parlementaires par la suite. Si vous voulez bien procéder. Merci.

Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec

Mme Beaulieu (Ghislaine): Je suis vice-présidente de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec, la FNACQ. Je vous présente aussi Mme Josée Bédard qui est à l'ACEF de Québec, Mme Lise Pilon qui est présidente de la FNACQ et M. Richard Dagenais qui est aussi de l'ACEF de Québec.

Nous vous remercions beaucoup de nous permettre de nous faire entendre à la commission parlementaire. Nous vous présentons notre mémoire. Nous commençons par Mme Pilon.

Mme Pilon (Lise): La FNACQ tire sa raison d'être des différents groupes de consommateurs qui sont membres de la Fédération et qui se sont donné pour objectif de construire ensemble une force de représentation pour la promotion et la défense des intérêts des consommateurs. La FNACQ défend une approche globale de l'intérêt des consommateurs. Elle tient à ce que la notion de bien-être soit au coeur de la définition de l'intérêt des consommateurs. Et vous avez, à la page 1 de notre mémoire, justement, une longue définition de ce que nous entendons par "bien-être". Alors, cette définition-là évite de restreindre le consommateur à un simple acheteur. L'achat est loin d'y être défini comme un besoin, mais plutôt comme l'un des moyens à évaluer pour répondre à un besoin.

La représentativité des consommateurs québécois au sein de la FNACQ tu fait aucun doute. À l'assemblée générale de novembre 1989, nous recensions neuf organismes membres, dont vous avez la liste à l'annexe 1, environ 5000 membres individuels et près de 120 000 membres corporatifs. Les délégués ayant droit de vote à cette assemblée ont réaffirmé leur position sur les heures d'affaires des établissements commerciaux. La consultation et le vote nous amènent à conclure à un constat d'unanimité contre l'ouverture des commerces le dimanche et pour un réaménagement des heures actuelles d'ouverture.

Il s'est dit beaucoup de choses contre l'ouverture des commerces le dimanche. Nous considérons que cette question est une décision politique qui s'intègre dans un choix de société. C'est une décision qui ne peut s'effectuer simplement sur la question de la commodité à donner aux consommateurs. Il nous semble beaucoup trop simpliste de croire que cette seule variable puisse avoir de l'importance aux yeux des consommateurs.

Le débat actuel nous amène à une question fondamentale. Est-ce qu'on veut instituer une course à la consommation continue dans le temps ou l'interrompre une journée par semaine pour accorder aux consommateurs et aux consommatrices un moment commun de loisirs, d'activités culturelles, sportives et familiales ou de rencontres familiales ou amicales? On pourrait poser la question: Est-ce qu'on vit pour consommer ou est-ce qu'on consomme pour vivre?

Cela nous amène à la question de la nécessité de maintenir une certaine qualité de vie. On a beaucoup parlé de qualité de vie. Pour nous, ce n'est pas un concept vide, mais c'est un élément essentiel de la santé mentale et psychologique des individus et des familles. À ce titre-là, la FNAQ tient à ce que la qualité de vie des consommateurs soit protégée. Parce que le dimanche, c'est une journée associée aux loisirs et à la détente, et parce qu'on consacre de plus en plus de temps, justement, à ces activités, on considère que le prolongement des heures d'affaires le dimanche risque de faire perdre aux consommateurs le sens de la détente. Et cela, en fait, ça pourrait se manifester par le fait qu'il faut absolument se donner des moments libérateurs, et l'ouverture des magasins le dimanche permettrait d'étaler son stress sur sept jours au lieu de six, de sorte qu'on considère qu'il faut accorder la priorité aux valeurs sociales plutôt qu'aux valeurs économiques. Et on considère aussi qu'il est dangereux de prolonger les heures d'affaires le dimanche parce que ça aurait justement un effet d'entraînement sur les autres commerces et que cet effet d'entraînement ferait que par le jeu de la concurrence et par le jeu, si vous voulez... On aurait le fait que non seulement les magasins d'alimentation ouvriraient le dimanche, mais aussi d'autres types de magasins. Je vais maintenant passer la parole à M. Richard Dagenais.

M. Dagenais (Richard): Contre la hausse des prix à la consommation. On s'entend pour dire que la demande alimentaire est une demande qui est inélastique, qui est à peu près stabilisée au Québec, de sorte que l'augmentation des heures d'ouverture va créer nécessairement un accroissement des coûts et donc une augmentation des prix de l'alimentation. Finalement ici, notre principe, c'est de dire qu'il faut garder la possibilité pour les consommateurs de s'approvisionner pour un bien, mais aussi en considérant les aspects prix et capacité de payer des consommateurs. Pour nous, entre autres, un élément important, c'est les consommateurs de bas et moyen revenu qui ont une capacité limitée finalement de payer pour leur alimentation. Il faut s'attendre effectivement, s'il y a des coûts supplémentaires, que ce soit refilé aux consommateurs. On ne s'attend pas à ce qu'il y ait de

cadeau de la part des chaînes alimentaires là-dessus.

On s'oppose finalement à des alternatives qui vont faire croître les coûts et les prix pour les consommateurs parce que l'un des chevaux de bataille, finalement, c'est d'assurer l'accessibilité pour tous les êtres humains à une alimentation saine, en quantité suffisante et en qualité constante. On revendique l'accessibilité à des produits de qualité, à un juste prix pour les ménages à faibles revenus.

Il faut considérer aussi l'aspect de l'endettement des ménages. On dit, entre autres, ici, que près de 40 % des consommateurs et des consommatrices qui visitent des centres commerciaux le dimanche y effectuent des achats spontanés, c'est-à-dire que c'est une incitation de plus, finalement, à ia consommation spontanée pour le consommateur; ça devient un loisir que de consommer et de dépenser pour l'achat de nourriture

L'autre aspect qui pour nous est important, c'est un voeu finalement des grandes entreprises que de pouvoir ouvrir le dimanche pour pouvoir regagner une partie du marché qui leur a échappée au bénéfice des indépendants et puis aussi des spécialistes: boucheries, fruiteries, etc.

Alors, à moyen terme, ce qu'on peut anticiper finalement, c'est que les chaînes alimentaires gagneront une part du marché aux dépens des indépendants et des spécialistes Et, à ce moment-là, ça amènera une concentration accrue dans la distribution alimentaire au Québec. Les chaînes alimentaires contrôlent environ 98 % de l'approvisionnement en gros au Québec et environ 82 % de l'approvisionnement au détail. Et, pour nous, on doit maintenir un secteir indépendant qui est le gage, quant à nous, d'une concurrence qui va maintenir des prix abordables pour la distribution alimentaire.

L'ouverture des commerces le dimanche peut nous apparaître finalement aussi une illusion parce que les gens sont attirés par l'aspect marketing, par l'aspect publicité. Finalement, ce qu'on veut nous vendre, c'est une journée de plus. Donc, c'est une journée de plus pour satisfaire les besoins des entreprises aussi.

Il y a des sondages qui semblent dire que l'opinion publique évolue finalement vers une plus grande libéralisation en ce sens. Pour nous, ce qu'on pense aussi, c'est qu'il y a quand même des biais à ces sondages-là C'est présenté comme si c'était un bien public, les heures d'ouverture, c'est-à-dire: On peut ouvrir "at large" et il n'y aurait pas de coûts pour les consommateurs. Mais on pense que poser la question: Êtes-vous favorables à l'accroissement des heures d'ouverture, c'est un peu comme dire êtes-vous favorables à ce que le gouvernement double le budget dans les hôpitaux, si on ne pose pas la question oui, mais qui va payer? Alors, pour nous, c'est finalement de ne pas juste faire miroiter les avantages, niais aussi de montrer les conséquences et de faire peser par les gens les conséquences de ces décisions-là.

Mme Bédard (Josée): Je vais continuer. Pour reprendre notre point 2 3, Contre une orchestration des grandes entreprises, j'aimerais revenir sur le fait qu'on a dit aujourd'hui que les consommateurs devraient se laisser tenter, que c'était une atteinte à la liberté de choix que de ne pas ouvrir les commerces le dimanche. Moi, vous savez, cette affirmation me fait penser au chien de Pavlov. C'est très facile pour les grandes entreprises de faire saliver le consommateur devant des spéciaux adaptés au dimanche et de les amener à consommer le dimanche. De cette façon là, l'entreprise peut conditionner le consommateur à consommer, et ça nous amène, encore une fois, à la question fondamentale. Vit-on pour consommer ou consomme-t-on pour vivre7

L'illusion du gain de temps maintenant Le temps, vous le savez tous, c'est une ressource limitée, non accumulable, non arrêtable, irrécupérable et très mal exploitée. Tout le monde dispose de la même quantité de temps - c'est à peu près la seule justice qu'on a sur terre -dans une semaine, dans une journée, dans une année. La façon dont on s'en sert cependant affecte notre qualité de vie à des degrés différents C'est vrai que les consommateurs ne forment pas un bloc monolithique. On l'a répété aujourd'hui Leurs valeurs et leurs priorités sont diversifiées Et les variables qui semblent influencer la position des consommateurs et des consommatrices dans le débat des heures d'ouverture sont principalement, et je ne les cite pas par ordre d'importance, l'âge, la région de résidence, l'occupation, la structure familiale, le revenu et le niveau de scolarité. Rappelez-vous que les gens les plus jeunes, les mieux scolarisés et les plus favorisés socio-économiquement sont généralement ceux qui demandent l'ouverture le dimanche. Ces variables ont été mesurées dans une approche cependant limitée, celle de l'ouverture le dimanche. Mais si on avait pris une approche globale - par approche globale, j'entends la gestion des ressources personnelles en général - on aurait peut-être eu des résultats •complètement différents. (17 h 45)

On ne peut affirmer que l'ouverture des commerces le dimanche soit la solution à la gestion du temps des consommateurs québécois. Pour affirmer une telle chose, il aurait fallu évaluer d'autres facteurs. Vous avez actuellement une commission parlementaire sur le travail, mais pourquoi ces gens-là ne se posent-ils pas la question sur la disponibilité du temps de travail ou, si vous préférez, la mesure de jeu dans notre temps de travail9 Parce que, finalement, c'est peut-être ça la solution à la gestion du temps davantage que d'ouvrir les magasins le dimanche C'est pout ôtro aussi l'accès à des ressources

familiales qui pourraient faire notre marché à notre place quand on en a les moyens, bien entendu. L'accès à des ressources économiques aussi. Et ça pourrait être, bien entendu, le partage des tâches ménagères à l'intérieur des ménages. On me faisait rire hier; on me disait que les gagnantes du dimanche, ce seraient les femmes. Ce ne sont pas les femmes, ce sont les hommes. Ce sont les hommes. C'est très méprisant pour les femmes de penser une telle chose, parce que ça voudrait dire que les femmes sont responsables de faire le marché dans leur foyer. Et, moi, en tant que femme, je trouve ça insultant pour les femmes.

Le Conseil économique du Canada nous dit que 44 % des familles éprouvent des contraintes de temps telles qu'il leur est difficile d'assumer leurs tâches ménagères dont justement l'approvisionnement alimentaire. Selon SORECOM, les moments que les gens privilégient pour faire leur épicerie sont presque à égalité l'après-midi et le soir. Si on prend le sondage des HEC, 14,9 % des consommateurs qui fréquentent les supermarchés préféreraient magasiner les lundis, mardis et mercredis soirs. Ça vous semble peut-être peu élevé, 14,9 %, mais, dans le même sondage, on dit que 8,7 % des consommateurs préféreraient magasiner le dimanche.

Je ne veux pas faire, cet après-midi, la guerre des sondages. Je trouve que la Fédération des ACEF nous a livré une très bonne information sur les sondages, et, nous, on n'est pas là pour refaire cette bataille-là, on est là pour discuter des valeurs et des principes qui sous-tendent ça et qui nous amènent à déterminer les moyens, et non pas l'inverse.

On veut aussi un réaménagement des heures d'ouverture. Malgré notre opposition ferme à la fermeture des magasins le dimanche - et tout à l'heure, Ghislaine va vous expliquer quelle est exactement notre politique - on considère important de tenir compte des besoins de commodités exprimés par les consommateurs. On propose, nous, un réaménagement des heures d'ouverture des commerces. À notre avis, les établissements commerciaux pourraient ouvrir leurs portes une soirée supplémentaire, par exemple le mercredi soir, et réaménager les heures d'ouverture de façon à ce que la totalité des heures reste la même. Ainsi la qualité de vie des consommateurs, qu'ils soient simplement consommateurs ou encore consommateurs travailleurs dans le domaine de l'alimentation, serait préservée et on n'aurait pas de hausses de prix prévisibles.

On revendique aussi une consultation démocratique des associations de consommateurs. La FNACQ a voulu dépasser le cadre de sa propre fédération pour consulter dans ce débat-là. Lorsqu'on a rédigé notre mémoire, 36 associations de consommateurs au Québec étaient contre l'ouverture des commerces le dimanche - vous avez cette liste-là à l'annexe 3 - et sept as- sociations étaient pour. Si vous avez lu les journaux de mardi matin ou si vous avez suivi la presse de lundi, vous avez pu voir que 40 associations de consommateurs se prononcent maintenant contre l'ouverture le dimanche. Toutes ces démarches ne font que renforcer la position de la FNACQ.

Mme Beaulieu: Position de la FNACQ. Fermeture le dimanche des commerces vendant des denrées alimentaires, sauf ceux opérant avec trois personnes ou moins en tout temps, excluant la possibilité pour les commerces à grande superficie de défier la loi par l'installation de cloisons transparentes ou non, afin de constituer plusieurs surfaces avec personnel limité. Fermeture également le dimanche des établissements commerciaux des autres secteurs qui ne sont pas spécifiquement exemptés par la loi.

Réaménagement des heures d'ouverture en début de semaine plutôt que le dimanche. On a parlé pour ça du mercredi soir.

Abolition des exemptions, sauf celles qui avaient été prévues dans le rapport du comité du député Richard en 1988. On ne nommera pas ici toutes les exemptions qui avaient été prévues à ce moment-là. Vous les avez dans la liste dans le mémoire.

Quant aux commerces qui, en plus de leurs marchandises habituelles, vendent des denrées alimentaires, soit les pharmacies, les tabagies ou d'autres, ce qu'on préconise, c'est qu'ils se conforment à la règle de trois employés ou moins en tout temps. Ça veut dire que si une pharmacie, par exemple, veut aussi vendre de l'alimentation, à ce moment-là, ce n'est plus une pharmacie. Ça devient presque un supermarché. À ce moment-là, elle devrait se conformer à une règle de trois employés ou moins.

Nous pensons que, présentement, au niveau de la loi actuelle, il y a eu des débordements de part et d'autre, ce qui fait que, maintenant, c'est une loi qui est très difficile à gérer. Nous pensons qu'il faut une loi qui se gère et, je pense, qui soit très stricte face à ça.

Application vigoureuse aussi de la loi selon les recommandations du rapport Richard de 1988, également: que les amendes reliées à la loi soient augmentées de 3000 $ à 15 000 $ pour une première infraction, de 10 000 $ à 50 000 $ et que s'additionnent aussi les bénéfices des ventes que ces marchands ont faites en contrevenant à la loi.

Que la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux reste de juridiction provinciale et qu'aucun pouvoir ne soit conféré aux municipalités. Cette position a été unanimement adoptée par notre assemblée générale du mois de novembre 1989.

Voilà, c'était la fin de notre mémoire. Si vous avez des questions...

Le Président (M. Bélanger): Bien. Je vous

remercie. Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Oionne: Merci, M le Président. Tout d'abord, j'aimerais vous remercier pour la préparation de votre mémoire. J'étais en train de lire la conclusion en même temps que vous la lisiez. Vous parliez de qualité de vie associée à la journée du dimanche autant que de l'accessibilité des services. Vous parlez d'un certain équilibre. J'aimerais tout d'abord peut-être faire un petit commentaire sur la qualité de vie parce que, toute la journée on a entendu des gens qui étaient pour, qui étaient contre l'ouverture des commerces le dimanche en alimentation ou de façon plus large. Il reste aussi une chose, c'est qu'on parle de services à la population, d'alimentation ou autrement. Ma perception, c'est que, quand on travaille dans le domaine des services, par exemple, notre qualité de vie est aussi la qualité au travail autant que dans notre vie personnelle ou notre vie familiale. Les gens qui travaillent, par exemple, dans la restauration, c'est un service du dimanche comme de la semaine. C'est peut-être plus intéressant, par exemple, pour quelqu'un qui travaille dans un restaurant d'avoir le restaurant plein de monde, où il y a vraiment de la clientèle, où ça bouge que le lundi où il y a moins de clientèle parce que c'est valorisant, dans le domaine des services, d'avoir des gens autour de soi. C'est pour ça qu'on a choisi de travailler dans le domaine des services. Par exemple, je pourrais dire comme députée: C'est aussi intéressant de travailler les fins de semaine, parce qu'on le fait, et aussi bien le dimanche, et des fois peut-être parce qu'on rencontre des gens de l'âge d'or. On rencontre un tas de gens le dimanche, ça fait partie, entre guillemets, de notre travail et c'est aussi valorisant Ça fait partie de la qualité de vie pour un député autant le dimanche que la semaine. C'est un petit commentaire que je voulais faire avant d'aborder les différentes questions que je veux vous poser

Vous dites qu'on pourrait réaménager les heures sur semaine d'ailleurs pour améliorer l'accessibilité, mais sur semaine. Vous parlez du mercredi. Est-ce qu'on ne pourrait pas dire, à un moment donné: Au lieu que les magasins soient ouverts l'avant-midi et l'après-midi, pourquoi ne pourraient-ils pas être ouverts l'après-midi et le soir du lundi au samedi soir? Prenons, par exemple, de midi à neuf heures, du lundi au samedi soir inclusivement. Est-ce que ça ne serait pas une possibilité aussi qui pourrait être intéressante pour les consommateurs?

Mme Bédard: La possibilité pourrait être intéressante mais, nous, on vous livre aujourd'hui les recommandations de notre assemblée générale qui s'est tenue en novembre dernier et, avant d'aborder une question comme ça, il faudrait revenir démocratiquement en assemblée générale.

Mais je vous avoue que les associations de consommateurs présentes - j'étais secrétaire à la dernière assemblée générale - étaient unanimement pour l'ouverture le mercredi soir et nous disaient, à ma grande surprise, que, de plus en plus, les adhérents à leur association de consommateurs étaient contre l'ouverture le dimanche et même parlaient de non-besoin de rouvrir la question J'en étais surprise.

Mais vous avez aussi le SAC de Shawinigan qui a fait un sondage maison auprès de tous ses membres qui nous dit la même chose.

Mme Dionne: O.K. Comme ça, la question n'a pas été posée pour un changement global?

Mme Bédard: Oui, la question a été posée sur le changement global Les gens se sont entendus pour dire oui au mercredi soir, unanimement, après débat.

Mme Dionne: Au lieu du dimanche.

Mme Bédard: Au lieu du dimanche et au lieu de la prolongation de tous les soirs

Mme Dionne: O.K. En tant que tel, si justement les besoins des consommateurs changent ou les consommateurs changent leurs habitudes, de pouvoir changer comme ça de midi à 21 heures, par exemple, du lundi au samedi soir et de tout fermer le dimanche, par exemple, est-ce que ça ne serait pas, d'après vous - je vous pose la question, sans nécessairement que vous retourniez à votre assemblée générale - peut-être un choix qui serait à penser parce que...

Mme Bédard: Tout ce que je pourrais vous donner, madame, c'est mon opinion personnelle.

Mme Dionne: Oui, oui

Mme Beaulieu: On peut aussi se demander si quand on parle des besoins des consommateurs, on parle, en tout cas, dans notre document, d'orchestration des grandes chaînes d'alimentation Présentement, ce qu'on voit, et on l'a vu même dans le journal Les Affaires de la fin de semaine, les grandes chaînes d'alimentation, les quatre grands secteurs d'alimentation au Québec disent qu'ils ont perdu 1 000 000 000 $ depuis 1980, et ce, à cause des heures d'ouverture actuelles. On le voyait aussi dans le document du ministère, où on nous disait que les supermarchés et les grandes chaînes avaient perdu 7,5 % du marché. Alors, c'est à se demander. On parle beaucoup au niveau du débat actuel. On trouve curieux nous aussi qu'il y ait tant de... Bon, ça se promène beaucoup. On pensait qu'il pourrait y avoir plus consensus que ça. Mais est-ce qu'à un moment donné il n'y a pas de gros pouvoirs d'achat, de pouvoirs qui veulent protéger... Je

pense que quand on parle de commerce, on pense qu'il y a des commerces, en tout cas, qui veulent protéger leur part du marché et que le débat se fait beaucoup autour de ça.

Mme Dionne: Je serais peut-être du même avis que vous en disant: O.K., s'il y a des grands marchés qui veulent protéger leur chiffre d'affaires, il y a aussi les dépanneurs. Par exemple, dans mon comté, on dit: On est contre l'ouverture des commerces le dimanche. Ils veulent également protéger leur chiffre d'affaires du dimanche. C'est peut-être un commerce familial de moins de trois employés. Alors, on essaie de se protéger. Je pense que c'est de bonne guerre de commencer par vouloir le faire.

Mme Beaulieu: . Pour les commerçants, je pense que ça existe déjà. Dans ce cas-là, les dépanneurs, je pense que c'est justifié pour eux aussi de vouloir protéger leur marché.

Mme Dionne: Oui, c'est ça, des deux côtés. Mon autre question, ce serait au niveau des zones touristiques. Vous n'en avez pas parlé beaucoup, mais, tout à l'heure, on a entendu d'autres groupes qui disaient que les zones touristiques, ça devait être contrôle de façon bien précise. Alors, on peut dire maintenant qu'il y en a de bien définies, mais si on prend, par exemple, la région de Charlevoix qui est une région fortement touristique, une municipalité de Charlevoix comme Baie-Saint-Paul pourrait demander que les commerces soient ouverts le dimanche. Mais, à un moment donné, on pourrait retrouver toutes les municipalités de Charlevoix qui pourraient demander la même exemption parce qu'il y a du tourisme autant l'été que l'automne et l'hiver, il y a des centres de ski autant que de bonnes auberges d'été. Comment, d'après vous, pourrait-on définir des zones touristiques, bien les définir? Parce que le Québec s'en vient une grande zone touristique, peut-être pour les dix prochaines années. Est-ce que vous avez une opinion à ce sujet-là?

M. Dagenais: Peut-être rapidement. Je pense que, d'une part, dans une zone touristique, il y a le facteur restauration qui est important où les gens vont s'alimenter. Si les gens restent un certain temps, je pense qu'ils ont la possibilité de planifier leur temps d'achat pour s'approvisionner, pour stocker.

L'autre aspect, c'est de voir, si les gens vont consommer, quel impact ça va avoir sur l'industrie culturelle? Les gens ont quand même une limite de temps. Alors, si on leur donne la possibilité d'aller faire de la consommation de loisirs, qu'est-ce qu'il va y avoir au niveau de l'industrie touristique et des cultures?

Mme Dionne: Mais, déjà, on a des zones touristiques. Prenons dans les Laurentides, il y a certaines villes qui sont désignées, qui ont demandé au ministre une exemption pour devenir zone touristique et pour que les commerces puissent être ouverts le dimanche. Alors, on a déjà certaines villes qui ont cette possibilité-là.

Mais là, dans l'avenir, est-ce qu'on devrait circonscrire ça de façon bien précise? Parce que des zones touristiques, je pense, que de plus en plus, dans l'avenir, on en aura.

M. Dagenais: Je pense qu'à ce moment là, il faudra considérer Québec, zone touristique, Montréal, zone touristique, et là, je pense que ça va... Il n'y aura plus de limite, à prime abord.

Mme Beaulieu: Je pense qu'il faudrait que ce soit vraiment circonscrit. Moi, je suis de la région de l'Estrie...

Mme Dionne: Oui.

Mme Beaulieu: ...et Magog avait demandé une exemption, l'année dernière, pour six mois d'ouverture l'été. Les marchands sont revenus, la Chambre de commerce, entre autres, est revenue demander l'ouverture à l'année. Je pense que c'est la même chose qui se passe au niveau des zones touristiques que ce qui se passe présentement au niveau d'ouverture des commerces le dimanche. Je pense qu'on avait ouvert la porte à certaines exemptions. Il y a des commerçants, je pense, qui en ont profité. Les pharmacies qui devaient vendre des produits pharmaceutiques deviennent, maintenant, presque des supermarchés. La même chose au niveau des fruiteries. Si elles étaient, les fruiteries, vraiment considérées comme petits commerces, je pense que nous, on serait vraiment d'accord pour qu'elles soient ouvertes le dimanche, mais quand ça ressemble à un supermarché, ce n'est plus une fruiterie. La même chose au niveau des zones touristiques, il faudrait, je pense, une responsabilité du gouvernement pour que ce soit vraiment circonscrit. Si c'est six mois par année, ça pourrait être six mois par année, et qu'on ne revienne pas, au bout de six mois ensuite, demander l'ouverture à l'année. Nous, on s'était dit, au niveau de Magog: Est-ce que c'était vraiment nécessaire d'ouvrir toute la ville, le centre d'achats compris? Est-ce que ce n'était pas seulement peut-être le centre-ville, ce qui était vraiment petit commerce avec côté plus artisanat? Parce que c'est pour ça qu'on dit qu'on veut ouvrir les zones touristiques, c'est l'aspect artisanat ou, on peut dire, ce qui est intéressant pour ce lieu-là qu'on ne trouve pas ailleurs. Si je vais magasiner au centre d'achats et que je trouve un Zellers, un Eaton ou un Sears, comme j'ai chez mot, à Sherbrooke ou à Montréal, pourquoi ouvrir, à ce moment, le centre d'achats? (18 heures)

Alors, je pense que ça devrait être cir-

conscrit dans l'année et aussi circonscrit en termes d'espace. On ne peut pas dire que c'est une position de la FNACQ, mais c'est une position qui a été discutée plusieurs fois, je pense, au niveau des organismes qui sont contre l'ouverture des commerces le dimanche.

Mme Dionne: Mais est-ce qu'on ne pourrait pas faire...

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée, le temps est écoulé. Je cède la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Voulez-vous finir votre question? Ça prendra peut-être une ou deux minutes, puis ce sera...

Mme Dionne: C'est juste pour compléter.

Le Président (M. Bélanger): Pas de problème, s'il y a consentement.

Mme Dionne: Ma dernière question, c'est de dire: Vous avez une position bien claire, mais est-ce qu'on ne pourrait pas faire, par une zone touristique, ce qu'on ne peut pas faire directement? Comprenez-vous? C'était là où je voulais en venir: faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement, par une zone touristique.

Mme Beaulieu: C'est un peu le danger, je pense. En tout cas, présentement, à Magog...

Mme Dionne: Parce que le Québec...

Mme Beaulieu: Cette région-là, si on se rend compte... Puis là, peut-être que les gens, les commerçants vont être un peu pris par surprise, parce qu'ils se rendent compte que c'est seulement l'été qu'on leur a donné comme ouverture. Mais il y a déjà des commerçants qui se sont déplacés d'une région, de villes voisines, par exemple Rock Forest, et qui sont allés ouvrir leur commerce à Magog, parce que c'est permis d'ouvrir le dimanche.

Mme Dionne: O.K.

Mme Beaulieu: C'est pour ça qu'on se dit. Il faudrait que ce soit circonscrit dans le temps et que ça ne soit pas non plus six mois après qu'on ouvre encore plus large. Voyez-vous, ça devient, là, l'ouverture généralisée.

M. Dagenais: Peut-être pour compléter, il faudrait se poser la question: Est-ce que le réseau de dépannage est insuffisant dans ces zones-là pour expliquer une permission spéciale d'ouvrir des supermarchés? D'autre part, est-ce que ça va servir uniquement aux touristes ou si ça va servir à la population entière et qu'à un moment donné, c'est les trois quarts des gens qui vont y aller et un quart de touriste? Alors, l'aspect touriste, à ce moment-là, est à remettre en question, quant à moi. Pour moi, c'est une porte ouverte, finalement, à des permissions spéciales.

Mme Dionne: O.K. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vous remercie de votre présentation. J'aimerais faire quelques commentaires sur ce qu'a apporté la députée de Kamouraska-Témiscouata. D'une part, si on peut se permettre, nous comme députés, d'aller voir des personnes, des clubs d'âge d'or et d'autres groupes - je pense à toutes les nombreuses interventions que l'on fait pendant les fins de semaine, le dimanche particulièrement - c'est parce que, justement, ces personnes-là peuvent se rencontrer, compte tenu qu'il n'y a pas d'autres activités de type commercial et industriel qui se passent, entre autres.

Le Président (M. Bélanger): Ah bien là! je suis pour l'ouverture le dimanche. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: On se l'est posée la question. Remarquez qu'on se la pose, nous, la question, effectivement, comme députés à l'occasion. Et moi, je peux vous dire que c'est vrai que c'est une forme de travail pour nous, même si on y trouve... Oui, c'est agréable, mais c'est une forme de travail.

Une voix: C'est plus agréable que magasiner

Mme Marois: Plus agréable que magasiner? Ah oui, sûrement. Mais, cela étant dit, ça a le même impact sur nous que ça a sur plein d'autres de nos concitoyens, à savoir que ce temps-là, les heures que l'on consacre à nos concitoyens et concitoyennes dans des activités comme celles-là, on ne les consacre pas à nos familles, à nos besoins à nous de réflexion, de repos, et tout le reste. Je pense que c'est quand même... On se la fait aussi la réflexion. Je suis persuadée que plusieurs d'entre nous la font à travers tout le débat que l'on a.

D'autre part, sur les zones touristiques, j'ai un petit peu de difficulté à comprendre que, parce qu'on désigne une zone touristique, à partir du moment où on permet certaines exemptions, exceptions, par exemple sur l'artisanat, qu'il y ait le dépannage, avec trois personnes et moins, on ne réussisse pas, à travers un réseau comme celui-là, à répondre aux besoins des personnes qui viennent nous visiter, qu'elles soient de l'intérieur du Québec ou de l'extérieur

du Québec. Parce que j'imagine que si elles viennent, elles viennent aussi pour voir les attraits que l'on a sur le plan de nos paysages, de la rencontre aussi des gens qui vivent chez nous, et sur le plan culturel. Qu'on aille vers des activités d'accès à des produits de consommation une journée de plus, j'ai un petit peu de difficulté à accepter cette approche là, en me disant: C'est bien important qu'il y ait une zone touristique. Mon point de vue, c'est qu'on pourrait fort bien appliquer les mêmes règles qui s'appliqueraient sur l'ensemble du territoire québécois sans pour autant brimer les besoins des touristes qui viennent nous visiter ou qui restent dans certaines de nos villes ou de nos villages pendant quelque temps. J'imagine qu'on a autre chose que des produits de commerce à leur présenter, sûrement.

Cela étant dit, il y a des choses intéressantes que vous nous avez dites. Vous dites que - et ce n'est pas dans votre mémoire, j'ai essayé de le relire encore, à moins que ça m'ait échappé - quand on consulte aussi et qu'on regarde un petit peu plus en profondeur qui est davantage d'accord pour ouvrir soit les magasins d'alimentation ou d'autres types de commerce de détail le dimanche, on se rend compte qu'il se dégage un profil. J'aimerais ça que vous reveniez sur ce profil-là. J'ai pris en note: jeunes, fortunés.

Mme Bédard: Je n'aurais pas la référence comme telle, mais c'était les gens les plus jeunes, les plus scolarisés et qui sont les mieux nantis en termes socio-économiques.

Mme Marois: D'accord. Et quelle conclusion vous tirez de cela?

Mme Bédard: On peut en tirer plusieurs. Disons que les jeunes ont probablement l'illusion du travail parce que, quand on aborde la question du travail dans les supermarchés, on se rend compte que la marge de jeu des grandes entreprises leur permettrait probablement de réaffecter les heures de travail et de les étendre sur sept jours plutôt que six jours. Et ça demeurerait quand même des emplois très précaires, s'il y avait création d'emplois. Parce qu'on sait que les entreprises, dans le domaine de l'alimentation, ont une marge de jeu très très mince, et, comme le disait M. Leclerc ce matin, généralement ces entreprises-là travaillent sur les normes de rendement homme-heure. Donc, un département, si ses ventes n'augmentent pas, doit offrir un même rendement. Donc, l'illusion d'avoir des emplois pour les jeunes, il faudrait vérifier si c'est réel ou pas. Nous, on pense que ça ne l'est pas.

Scolarisés, je ne voudrais pas être méchante, mais ce n'est sûrement pas les gens très scolarisés qui vont avoir à travailler dans ce genre de commerce-là le dimanche. Donc, c'est une attitude très individualiste qui fait référence à une valeur qu'on voit beaucoup actuellement.

Et bien nantis en termes socio-économiques, je ne pense pas qu'on puisse généraliser, mais est-ce qu'on peut penser que ces gens-là ont la prétention de croire que les autres doivent être à leur service parce qu'ils appartiennent à une catégorie, entre guillemets, supérieure? C'est à voir. J'assistais la semaine dernière à un colloque sur l'environnement où on parlait beaucoup des valeurs des gens. On parle beaucoup de notre individualisme et on dit beaucoup aussi qu'on est très attaché aux valeurs monétaires, qu'on est très mercantilistes.

Mme Marois: Plus à l'avoir qu'à l'être.

Mme Bédard: Oui, plus à l'avoir qu'à l'être, plus au contenu qu'au contenant comme tel.

Mme Marois: Plus au contenant qu'au contenu.

Mme Bédard: On nous disait que si les gens s'étaient battus il y a quelques années pour atteindre un niveau de vie, ils allaient se battre dans l'avenir pour la qualité de vie. Et là, on faisait référence à tout le débat sur l'environnement. Donc, je déborde, mais j'espère que j'ai répondu à votre question.

Mme Marois: Non, très très bien. Parce que l'impression aussi que j'ai, c'est que, souvent, la demande de vouloir consommer le dimanche nous vient de gens qui risquent de se trouver rarement dans la situation à avoir à les offrir ces services-là, eux mêmes, le dimanche. Il y a une partie d'individualisme, j'en suis persuadée, et il y a une partie d'inconscience aussi, je pense, dans cette attitude-là. D'inconscience, dans le sens où on ne l'a pas faite, cette équation-là, on n'est pas allé au bout de la réflexion. On dit: Moi, j'ai le besoin, je l'exprime, j'aimerais bien que quelqu'un y réponde, en conséquence, je suis prête à débourser ce qu'il faut pour qu'on y réponde. Mais quand on pose la question et qu'on met la personne en situation: Vous, le feriez-vous? Lui dire: Vous allez travailler le samedi, vous allez travailler le dimanche, vous allez travailler des heures brisées? Comme ça ne s'est jamais posé, ils n'y ont pas pensé, mais quand on la pose, ils ont un peu plus de réticence. Vous vouliez ajouter quelque chose?

Mme Bédard: Oui, je voulais ajouter quelque chose. J'ai eu un conjoint qui travaillait dans le milieu hospitalier et qui travaillait une fin de semaine sur deux. Et je vous avoue que j'ai subi les affres de la fin de semaine sur deux; c'était vraiment l'enfer. Mais si j'amène ça comme point d'information, c'est que... On disait ce matin que 1 % seulement des travailleurs seraient affectés au dimanche. Moi, je ne suis pas du tout d'ac-

cord. Je donnais le cours "budget alimentaire" à l'Université Laval et je voyais avec les étudiants tous les intervenants de la chaîne agroalimentaire, du producteur au consommateur. Si on veut changer les choses, on sait que les consommateurs ont de la difficulté à obtenir du pain et des produits laitiers frais à partir du mardi matin dans les épiceries - ça veut dire que tout le circuit de distribution et de production va se trouver perturbé. Et là, je vous avoue - deman dez à M. Pagé les chiffres exacts - que ça va toucher énormément de monde au Québec C'est vrai que les biscuits, M. Leclerc, c'est un élément qui a une durée de vie de tablette beaucoup plus longue, mais tous les aliments périssables...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bédard: ...ça va vraiment les toucher.

Le Président (M. Bélanger): T'as été reconnu.

M. Leclerc: ...qu'ils soient mangés avant de ne plus être bons. C'est bien ça

Mme Marois: Je suis très contente que vous apportiez cet exemple-là et...

Mme Bédard: C'est un élément à calculer. Je ne pense pas à moi. Je pense à tout le monde qui va avoir quelqu'un qui va disparaître en termes de disponibilité pour la vie sociale.

Mme Marois: C'était l'objet de mon propos, ce matin, quand je disais: 1 % des travailleurs et travailleuses concernés... C'est qu'on prend les travailleurs et les travailleuses directement concernés qui vont aller travailler soit chez Steinberg, Provigo ou Métro, peu importe, mais on oublie tout l'effet d'entraînement et.. On aborde souvent la question de la garderie, du policier, de la personne qui va conduire l'autobus. Mais derrière ces travailleurs et ces travailleuses en alimentation, il y a les fournisseurs, les gens qui sont, comme vous dites, dans toute la chaîne alimentaire. Et je pense que cela amène un éclairage qui n'avait pas été encore apporté. J'ai terminé, j'imagine pour l'instant? Il me reste une minute?

Le Président (M. Bélanger): II vous reste une minute.

Mme Marois: Je la reprendrai tantôt.

Le Président (M. Bélanger): Bien Alors, M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: Oui, merci, M. le Président. Quant à ce dont vous faites mention sur la pression qui sera exercée sur toute la chaîne alimentaire, y compris les fournisseurs, moi, je vous dirai, pour avoir vécu ça quand même pendant neuf ans avant d'être député, que je ne suis pas convaincu que, parce qu'on ouvrirait, par exemple, le dimanche, les fournisseurs devraient nécessairement livrer le dimanche. La preuve, c'est qu'actuellement, c'est ouvert le samedi et que les fournisseurs ne livrent pas. La preuve, c'est qu'il y a un bon nombre de services dans notre société, des restaurants et tout ça, qui sont ouverts le dimanche, et il n'y a pas de service de livraison pour les restaurants le dimanche, que je sache. Je concède cependant qu'à la limite il y aurait une pression, éventuellement, avec le temps, où un certain nombre de fournisseurs devraient peut-être, au lieu de livrer seulement cinq jours par semaine, monter à six. Je suis d'accord avec vous. Mais ça ne serait sûrement pas un effet direct et immédiat, bien loin de là.

Vous vous doutez sans doute que je vais vous poser une question suite à votre affirmation selon laquelle vous avez trouvé un petit peu insultant le fait que je fasse, par une de mes questions et que le professeur suivant l'ait textuellement mis dans son texte, enfin, que, nous deux, on ait fait un rapprochement entre le fait que, s'il n'y a pas ouverture le dimanche - ça ne veut pas dire que je suis pour l'ouverture le dimanche, je l'ai dit tout à l'heure que mon idée n'est pas faite comme, je l'imagine, l'idée de la plupart de mes collègues - que ce serait les femmes qui seraient les grandes perdantes. J'ai compris que vous avez trouvé quelque chose d'insultant là-dedans. Est-ce que c'est le fait que, dans 75 % des cas, ce sont les femmes qui prennent les décisions d'achat en alimentation ou est-ce que c'est le fait qu'on veuille étudier ce chiffre-là, en tenir compte, à tout le moins? Et c'est ce pourquoi j'avais posé la question au professeur en question. Qu'est-ce que vous trouvez d'insultant à ce point là-dedans? Je suis un peu surpris que vous trouviez ça insultant.

Mme Bédard: Je ne savais pas que c'était vous, M. Leclerc. Ha, ha, ha!

M. Leclerc: Ah, bon!

Mme Bédard: Je ne savais pas exactement qui avait posé la question. Ce que je trouve insultant, c'est que c'est vrai qu'encore aujourd'hui, ce sont des femmes qui font le marché. C'est vrai, ça. Mais si on dit que les femmes sont les gagnantes, ça veut dire que la tâche leur est comme automatiquement vouée. Ce n'est peut-être pas le fond de votre pensée, mais on le prend pour acquis et on prend pour acquis que ça ne peut pas changer. Moi, je vous avoue que j'ai travaillé pour les Cooprix, la Fédération des magasins Coop, et on voit de plus en plus des hommes faire le marché, on voit de plus en plus

de gens se partager les tâches ménagères. Et je ne voulais pas qu'on tombe dans le stéréotype et daris l'affectation unique de tâches. Si vous voulez croire en cette affirmation, dites que les conjoints, la famille, le ménage, seront gagnants mais n'affectez pas ça, s'il vous plaît, uniquement à la femme.

M. Leclerc: Oui. Cependant, si vous le permettez, comment vous dirais-je ça? L'égalité entre conjoints ne sera jamais une égalité mathématique. Et, selon moi, ce n'est pas parce qu'on dit que, dans 75 % des cas, ce sont les femmes qui prennent des décisions d'achat... Quant à moi ça ne remet pas l'égalité entre conjoints en question. Moi, mon adjointe ici, ça fait cinq ans que la connais. Je connais son mari. Ça fait cinq ans que c'est son mari qui fait le marché. Ça ne fait pas un couple nécessairement plus évolué ou moins évolué qu'un autre. Un jour, ils ont pris ensemble une décision et ils ont décidé que c'était le mari qui le faisait. Elle fait sans doute d'autres choses. Donc, moi, personnellement, ce que je vois dans mon comté, lorsque je fais mon marché, c'est moins de 75 %. D'après moi, les femmes sont encore majoritaires, mais en tout cas, dans mon comté où je fais mon marché, c'est moins que cela. (18 h 15)

Mais, quoi qu'il en soit, les professeurs qu'on a interrogés à ce sujet-là nous ont dit: Dans 75 % des cas, ce sont les femmes qui prennent les décisions. Il y avait aussi le facteur famille monoparentale où on sait que ce sont des femmes, plus souvent qu'autrement, qui sont des chefs de famille. Tout ça mis ensemble faisait en sorte que ces professeurs-là en sont venus à la conclusion que ce seraient les femmes qui, éventuellement, si le gouvernement le décidait, seraient les grandes gagnantes. Et, de la même façon, si le gouvernement décidait seulement de prolonger, de prendre la formule de l'Opposition, par exemple - pourquoi ne pas en parler - ce seraient aussi les femmes qui seraient les grandes gagnantes.

Moi, personnellement, je ne vois rien d'insultant là-dedans. De toute façon, on parle bien de prendre la décision d'achat. Si c'était le contraire, vous me diriez peut-être: Ça n'a pas de bons sens. Seulement dans 25 % des cas, ce sont les femmes qui prennent les décisions d'achat et on ne peut pas s'insulter du contraire parce que là, c'est 75 % des femmes. Bien que je croie que ce soit un peu moins que ça, selon ce que moi, je vois.

Mme Bédard: Je ne veux pas vous obstiner sur les chiffres, M. Leclerc, c'est sur l'affirmation. Je vais laisser Lise, ma compagne, continuer là-dessus.

M. Dagenais: Peut-être juste une demande de précision. Quand on dit que 75 % des femmes prennent des décisions, est ce que ça veut dire qu'elles font les achats elles-mêmes et seules? Est-ce que ça veut dire ça?

M. Leclerc: Pas nécessairement. M. Dagenais: Je pense.

M. Leclerc: Pas nécessairement. Elle peut faire la liste d'épicerie, comme le dit mon collègue, elle peut...

Une voix: Le partage des tâches...

M. Leclerc: Elle peut la faire avec son conjoint et, à ce moment-là, être plus importante dans la décision. Ce que je veux vous dire, c'est que, quant à moi, il n'y a rien d'insultant à ce qu'on ait ces chiffres-là devant nous, d'une part et, d'autre part, je veux comme politicien prendre la décision la plus éclairée possible lorsqu'on aura, comme gouvernement, à prendre une décision. C'est un élément parmi d'autres. Ce n'est pas à cause de ça que je vais être pour ou contre l'ouverture le dimanche. C'est un élément parmi d'autres. Mais dans une société où on se dit évolués et conscients de la place de la femme dans la société, on ne peut pas regarder ces chiffres-là seulement lorsqu'ils supportent la thèse qu'on a et se dire insultés ou pas trop contents qu'on se serve de ces chiffres-la quand, pour toutes sortes de raisons, ça ne supporte pas notre thèse. C'est rien que ça que je veux vous dire.

Mme Pilon: Je voudrais peut-être compléter en disant que, jusqu'à...

Le Président (M. Bélanger): Mme Pilon?

Mme Pilon: Oui, je voudrais compléter en disant que, jusqu'à présent, on semble justement... Et le danger que, nous, on voit, c'est qu'on mélange consommation et loisirs. Et faire le marché, pour ceux qui le font, homme ou femme, c'est quand même une corvée qui représente à peu près deux ou trois heures de travail, et les gens ne seraient pas prêts à sacrifier leur dimanche, disons, pour faire cette corvée-là. Je pense que, ça aussi, c'est quelque chose à considérer qui n'est pas du tout en faveur de l'ouverture le dimanche. Disons, aller faire le marché, ce n'est pas nécessairement un plaisir, ça peut être... Surtout si ça revient 52 fois dans une année, toutes les semaines, c'est loin d'être un plaisir; ça devient à ce moment-là une corvée que la personne doit effectuer, quel que soit le sexe de la personne. C'est sûr que, culturellement et traditionnellement, ça a été les femmes qui, dans notre société, ont assumé cette tâche-là. Espérons que, dans l'avenir, ça va être 50-50 ou que ça va être un partage un peu plus égalitaire. Mais il semblerait que l'on doive

considérer que, quel que soit le sexe de la personne qui fait ça, c'est une corvée qu'elle doit répéter 52 fois par année. À ce moment-là, cette corvée-là, elle n'a pas intérêt à la faire le dimanche parce que ça lui coupe du temps de loisirs, ça lui coupe du temps de repos et de récupération. Elle a intérêt à la faire les jours de semaine.

Le Président (M. Bélanger): Le temps de la formation ministérielle étant écoulé, je cède la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci. Je pense que ma collègue a une question ou un commentaire.

Le Président (M. Bélanger): C'est Mme la députée de Terrebonne. Je vous avais changée de comté tout à l'heure, je m'en excuse.

Mme Caron: Je suis vraiment heureuse que vous ayez apporté cette précision-là parce que mon commentaire est dans le sens de votre ligne de pensée: Si 75 % des femmes sont encore responsables de la commande, à mon avis, elles sont loin d'être gagnantes si on leur permet de la faire le dimanche. Au contraire, elles s'ajoutent une journée de tâches de plus, alors qu'elles en ont déjà plusieurs, surtout qu'on a relevé beaucoup de chiffres du côté des chefs de familles monoparentales. Alors, je suis très heureuse que vous ayez amené ces précisions.

Mme Marois: D'ailleurs, je vais reprendre ce que disait ma collègue justement sur les chefs de familles monoparentales. Je ne sais pas si le député de Taschereau était là cet après-midi, quand la Fédération des ACEF... Non, je le sais, c'est pour ça que je vous le dis, parce que vous avez presque toujours été là. Mais ils mentionnaient, c'étaient les premiers qui le faisaient d'une façon systématique, parce que ça revient sans arrêt dans les mémoires... On va améliorer la situation d'un certain nombre de personnes dont, entre autres, les couples avec deux revenus, qui sont pris avec moins de temps; les chefs de familles monoparentales - on sait que ce sont très largement des femmes, en fait, 85 %, les proportions ne changent pas depuis 20 ans, malheureusement. Sauf ce qu'ils nous ont apporté, cet après-midi, c'est que 62,4 % des chefs de ces familles sont inactives, bien sûr au sens statistique du terme. Donc, elles ont au contraire beaucoup de temps pour avoir accès à des services d'alimentation pour aller s'acheter des produits nécessaires pour leurs besoins. Ce qui nous ramène à une proportion de 38 % à peu près de chefs de familles monoparentales qui ont un emploi, soit à temps partiel ou à temps plein. Alors, il faut toujours faire attention justement quand on amplifie des phénomènes ou quand on les regarde sous un angle statistique en affirmant un certain nombre de choses, et ça permet, je pense, le débat qu'on a actuellement, de replacer ces éléments-là.

Une chose que je trouve intéressante dans votre proposition, vous allez jusqu'au bout, je dirais, de cette notion: Qualité de vie, moins de temps pour l'activité commerciale, plus à l'activité, soit de loisirs, de culture, d'échanges ou de repos parce que vous, vous dites bien: On devrait même réduire du temps, donnons un exemple, le lundi matin, le mardi matin, pour s'en redonner, si on veut s'en redonner, le lundi soir, le mardi soir et le mercredi soir. J'ai bien compris votre position?

Mme Beaulieu: On parie de réaménagement surtout en se disant... Par exemple, au niveau des marchés ou des commerçants présentement, je pense que c'est à 8 h 30 que c'est permis d'ouvrir le matin. Alors, on se disait: Souvent des commerces ouvrent à 9 h 30 de toute façon. Alors, pourquoi pas? Au niveau de la loi, on récupère déjà une heure par jour si on met l'ouverture des commerces à 9 h 30 et on peut ouvrir, à ce moment-là, le mercredi soir. Nous, au niveau de notre organisme, le mercredi soir, c'était une proposition. Les autres soirs de semaine, c'est certain que si on ouvre tous les soirs de la semaine, ça veut dire que, pour les personnes qui auront à travailler, ça coupe aussi... Par exemple, si on parie de cours, si des personnes veulent aller suivre des cours pour se perfectionner, pour, à un moment donné, obtenir un meilleur emploi etc., alors, si on ouvre le lundi, le mardi, le mercredi soir en plus du jeudi et du vendredi, est-ce qu'ils auront du temps à ce moment-là pour suivre des cours? Alors, quand on parlait tantôt de fermer le lundi matin et de fermer le mardi matin pour ouvrir le lundi soir, le mardi soir, nous, en tout cas, on n'en était pas rendus là du tout. C'est plus le mercredi soir, mais comme concession, si on peut dire.

Mme Marois: D'accord. Est-ce que le fait que des associations de consommateurs comme celles que l'on a entendues aujourd'hui et qui sont membres d'une coalition pour l'ouverture des commerces d'alimentation - il y a même un groupe qui est passé avant vous pour défendre ce point de vue-là - ne vous met pas un petit peu en porte-à-faux ou un petit peu en situation de confrontation? Qui sont les vrais ou les pas vrais représentants des consommateurs et des consommatrices? Je ne veux pas vous mettre dans une mauvaise situation, mais je voudrais comprendre la différence de philosophie qui vous anime puisqu'il y en a sûrement une. compte tenu que, dans un cas, on prône l'ouverture et que, dans l'autre cas, on prône autre chose et qu'on est tous les deux à la défense des besoins des réalités des consommateurs et des consommatrices.

Mme Bédard: Je pense que c'est une ques-

tion de valeurs. On a dit que la société n'est pas homogène, qu'elle était hétérogène. Je pense que c'est la même chose du côté des associations de consommateurs. L'Association des consommateurs du Québec, je ne suis pas là pour expliquer quelles sont leurs valeurs, mais si vous vous référez aux autres mémoires présentés généralement, c'est une association qui défend le libéralisme économique. Nous, on défend vraiment - Lise l'a bien expliqué au début du mémoire -la notion de bien-être, elle est vraiment au centre de notre inteprétation. J'aimerais ça ouvrir une parenthèse parce que j'ai eu la chance de discuter avec M. Daneau, professeur d'économique à l'Université Laval et il me disait... Et ça, ne me demandez pas de statistiques, il me disait ça à brûle-pourpoint...

Mme Marois: II est professeur de statistiques d'ailleurs, M. Daneau.

Mme Bédard: II est professeur d'économique, oui.

Mme Marois: D'économique

Mme Bédard: Et M. Oaneau me disait: C'est drôle quand on regarde le spectre concurrentiel des entreprises Généralement, les gouvernements souhaitent amener le spectre concurrentiel dans un cadre de concurrence parfaite, et le libéralisme aurait dû amener le marché dans ce cadre-là. Et il dit: Cependant, ce qu'on regarde maintenant, c'est que ça nous amène vers la partie du spectre qui est la partie monopolistique ou encore même du monopole. Lui disait: C'est drôle, le libéralisme ne permet pas nécessairement d'atteindre la fin. Si vous voulez plus de références, vous consulterez vous-même M. Daneau. Il est toujours à l'Université Laval; il est là depuis vingt et quelques années. Mais je trouvais ça intéressant parce que, justement, on parle de concurrence. Et c'est vrai que la concurrence a une influence sur les prix et les services, mais il faudrait voir si justement le moyen qu'on prend nous permet d'atteindre la fin.

Mme Beaulieu: Peut-être...

Le Président (M. Bélanger): Oui, madame.

Mme Marois: Oui, vous vouliez ajouter?

Le Président (M. Bélanger): C'est Mme Beaulieu.

Mme Beaulieu: Au niveau de la FNACQ, notre fédération, nous sommes neuf organismes membres. La plupart sont des organismes des ACEF comme la Fédération des ACEF aussi. Nous travaillons, au niveau des consommateurs, plus au niveau information, éducation, consultation bud- gétaire. On reçoit à nos bureaux les gens régulièrement, on peut dire au jour le jour. On donne de l'information aussi. On fait surtout de l'éducation. On fait surtout du travail terrain avec les gens. C'est un peu ce qui fait peut-être aussi la différence de philosophie dont on a parlé tantôt.

Mme Marois: D'accord. Il y a un monsieur qui voulait ajouter quelque chose.

M. Dagenais: Peut-être pour compléter aussi. Je pense qu'on oppose le choix individuel, fa liberté individuelle, au choix collectif aussi. Pour moi, la question des heures d'ouverture, c'est aussi un choix collectif. Je pense que, dans notre société, on donne beaucoup trop d'importance aux valeurs économiques. Je suis moi-même économiste et je pense qu'on charrie une foule d'informations économiques, comme si les valeurs sociales, les valeurs personnelles et les valeurs fondamentales, quant à moi, dans la société, doivent être sous-jacentes aux valeurs économiques. Je pense qu'il faut, pour un gouvernement qui se tient debout, maintenir un certain équilibre au niveau des valeurs et rétablir le vrai choix de valeurs dans une société.

Le Président (M. Bélanger): C'était M. Dagenais, c'est bien ça?

M. Dagenais: C'est bien ça.

Mme Marois: Merci. J'aime bien vous entendre, évidemment. On cherche toujours des points de vue qui ressemblent aux nôtres, mais ça fait partie aussi des règles du jeu. Ça faisait partie de mon intervention de départ à cette commission, à savoir que si c'était une responsabilité d'un gouvernement de maintenir l'équilibre, justement, et de s'assurer que les intérêts collectifs étaient aussi bien préservés.

Une dernière question. À la page 4 de votre mémoire, vous dites, et c'est mis entre guillemets, "que près de 40 % des consommateurs et consommatrices qui visitent des centres commerciaux le dimanche y effectuent des achats spontanés". J'aimerais que vous me commentiez un tant soit peu cet élément-là, s'il vous plaît.

Mme Beaulieu: C'était dans le document du ministère. Je pense qu'on doit citer aussi la page en annexe, la bibliographie. Je pense qu'au niveau de la FNACQ, on en a parlé tantôt, on ne parle pas seulement de commerces d'alimentation le dimanche. Quand on parle d'ouverture, nous, notre position, c'est de dire que, si les commerces d'alimentation ouvrent le dimanche, avec les pressions qui existent présentement, probablement qu'il y aura élargissement à d'autres commerces parce que, quand on regarde ce qui se passe maintenant dans les pharmacies qui ne vendent pas seulement des produits pharmaceutiques, mais

qui vendent plein d'autres produits, la même chose si les commerces d'alimentation ont le pouvoir d'ouvrir le dimanche, qu'est-ce qui les empêchera, par exemple, de vendre de la quincaillerie et, à un moment donné, ce seront les marchands de quincaillerie qui voudront aussi ouvrir le dimanche? Ça peut, à ce moment-là, amener tout un élargissement au niveau du secteur commercial.

Dans le document du ministère, il était question que, souvent, le dimanche, c'étaient plutôt des achats spontanés qui se faisaient - c'est une étude qui avait été faite aux États-Unis - et les achats spontanés, c'était surtout, par exemple, des vêtements, des cadeaux, mais ce n'étaient pas nécessairement des besoins pour les gens. Ce qu'on peut dire, c'est que nous, qui sommes des organismes de protection du consommateur, qui travaillons beaucoup au niveau de l'endettement, du crédit, on pense qu'il va y avoir encore une pression de plus sur le consommateur et aussi, avec la publicité et le marketing, on peut dire, qui entrent en jeu et qui vont amener une pression sur le consommateur, on aura encore un problème de crédit et d'endettement plus élevé.

Le Président (M. Bélanger): Si vous voulez remercier nos invités, madame.

Mme Marois: Certainement. Je vous remercie de cette précision qui nous est apportée. D'ailleurs, j'ai trouvé effectivement la référence dans le document. Je me souviens maintenant l'avoir lue. Je vous remercie de votre présentation et je veux vous dire que j'ai déjà fait de la consultation budgétaire dans les ACEF et qu'effectivement, on y voyait parfois des situations assez difficiles. Donc, je connais un peu le type de travail que vous pouvez accomplir et j'en connais aussi l'importance dans une perspective d'éducation populaire au sens très généreux de ce terme.

Alors, merci de votre contribution à nos travaux. (18 h 30)

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je ne sais pas si l'Opposition va me permettre... Je pourrais leur dire merci, mais j'ai un éclaircissement. C'est un éclaircissement. Je pense que c'est important.

Mme Marois: Certainement.

M. Tremblay (Outremont): Le réaménagement des heures d'ouverture, vous dites, de façon à ce que la totalité des heures reste la même. Une des hypothèses, vous l'avez soulevée, c'est, par exemple, d'ouvrir à 8 h 30 au lieu d'ouvrir à 9 h 30; on récupère une heure. On le fait le vendredi soir de 18 heures à 21 heures.

Est-ce que l'autre possibilité, et j'aimerais ça vous entendre là-dessus, c'est de dire: Oui, on ouvre à 9 h 30, mais, au lieu de fermer à 18 heures, on ferme à 19 heures, les lundis, mardis et mercredis? Pourquoi? Ça pourrait permettre à de nombreux couples qui travaillent, par exemple, jusqu'à 17 heures, 17 h 30, qui ont des problèmes de transport, des problèmes de métro, de retourner dans leur environnement et d'avoir accès, sans être trop stressés - la qualité de vie, on en parle - à un supermarché qui serait ouvert jusqu'à 19 heures.

J'aimerais juste vous entendre dire comment ça pourrait perturber la famille, oui ou non, ou est-ce que ce serait une autre avenue qui pourrait être réaliste?

Mme Beaulieu: Je pense que, si on prend le point de vue du consommateur, ça pourrait peut-être être intéressant. Nous, à la FNACQ, parce qu'on prend le consommateur aussi dans sa globalité, on a dit, à un moment donné: C'est un travailleur. Je regarde aussi du côté des femmes, parce qu'on voit qu'il y a beaucoup de femmes au niveau des commerces, qui devront finir de travailler à 19 heures. À ce moment-là, entre 17 heures et 19 heures, c'est souvent l'heure des repas, c'est souvent le temps où la personne a besoin d'être avec sa famille. Aussi, pour ce qui est de couper, par exemple, comme on parlait tantôt, dans les cours ou le perfectionnement ou même le travail bénévole, le comité de bénévoles, les réunions commencent à 19 heures. À ce moment-là, ces personnes, quand elles arriveront de travailler à 19 heures, ce n'est pas certain qu'elles vont pouvoir se rendre disponibles pour participer à d'autres activités. C'est pourquoi nous avions privilégié le mercredi soir en se disant qu'on pensait que le consommateur pouvait, à travers la grille actuelle, en mettant le mercredi soir en plus, trouver le moyen d'aller magasiner.

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Alors, la commission de l'économie et du travail remercie la Fédération nationale des associations de consommateurs et invite à la table des témoins le Regroupement des coopératives de consommateurs de la province de Québec.

(Suspension de ta séance à 18 h 34) (Reprise à 18 h 35)

Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous plaît! J'aimerais, dans un premier temps, souhaiter la bienvenue au Regroupement des coopératives de consommateurs de la province de Québec. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier ainsi que les membres qui l'accompagnent, pour le bénéfice du Journal des débats.

Regroupement des coopératives de consommateurs de la province de Québec

M. Noël (Fernando): Merci, M. le Président. J'ai reçu le mandat du Regroupement des coopératives de consommateurs de la province de Québec de présenter le mémoire. Je suis accompagné, à la table, ici, en débutant à l'extrême gauche, par M. Camille Gagné qui, entre autres titres, est directeur général de la Coopérative des consommateurs de Charlesbourg; à ma gauche immédiate, M. Gabriel Bouchard, jusqu'à récemment président et toujours administrateur de la Coopérative des consommateurs de Lorette, qui a trois magasins dans la région de Loretteville; à ma droite immédiate, mon collègue Me Jean-Claude Simard, avocat, président de la Coopérative des consommateurs de Tilly et qui exploite deux supermarchés, l'un à Sainte-Foy, l'autre à Saint-Nicolas, et, à mon extrême droite, M. Marcel Gendreau, président de la Coopérative des consommateurs de Saint-Joseph-de-Beauce. J'aimerais également signaler la présence en arrière de nous de Mme Juliette Bonneville, directrice générale du Conseil de la coopération du Québec, organisme qui regroupe les coopératives de la province de Québec, incluant les caisses populaires, de M. Paul Picard, président de la Coopérative des consommateurs de Charlesbourg et de M. Gérard Perron, directeur général de la Coopérative de développement régional de la région de Québec.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Noël. Je vais maintenant reconnaître M. Simard. Est-ce que c'est M. Simard qui est le porte-parole.

Des voix: Non, ça va être...

Le Président (M. Saint-Roch): Ça va être M. Noël. Alors, M. Noël, je vous cède la parole.

M. Noël: Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, l'honorable Gérald Tremblay, Mmes, Mlles, MM. les députés, nous avons préparé le mémoire que vous avez déjà en main. Dans un premier temps, je vous proposerais d'en faire une lecture commentée, avant de procéder aux différentes périodes de discussions et d'échanges. En vous référant à la page 1 où le titre est "Résumé", avec votre permission, nous passerions, en premier lieu, au chapitre III qui est intitulé "Qui nous sommes". Vous avez cette section-là à la page 7 du mémoire.

Nous sommes, en premier lieu, des coopératives. Je cite ici Georges Laserre, dans son ouvrage La Coopération: "Une coopérative de consommation est une association de consommateurs qui, pensant qu'on n'est jamais si bien servi que par soi-même, ont créé une entreprise chargée de leur procurer les produits dont ils ont besoin."

Notre regroupement compte 143 coopératives membres. Ce sont des entreprises de service dont la propriété, la gestion et le contrôle, ainsi que la répartition des surplus, appartiennent à ces 110 000 membres usagers. L'objectif de nos organisations n'est pas le plus grand profit capitaliste possible, mais bien le service à ses membres.

En conformité avec la Loi sur les coopératives et les principes coopératifs internationalement reconnus, les organisations membres de notre groupement appliquent en leur sein les principes suivants, qui sont les six principes coopératifs tel que stipulés par l'Alliance coopérative internationale:

La porte ouverte, qui signifie que peuvent devenir membres sociétaires toutes les personnes pouvant utiliser les services de la coopérative.

L'autorité démocratique. Chaque membre a droit à un seul vote, quel que soit le montant de capital qu'il détient dans la coopérative.

L'intérêt limité sur le capital social. Par application de la loi, aucun intérêt n'est payable sur nos parts sociales et l'intérêt sur les parts privilégiées est limité par règlement.

La ristourne. Les surplus d'opération de fin d'année sont soit virés à une réserve générale impartageable entre les membres, soit, comme chacun sait, répartis entre les membres au prorata de leur transaction avec la coopérative; et même, en cas de liquidation ou de fin d'existence de la coopérative, le solde de cette réserve générale est remis à une oeuvre sociale désignée par le ministre.

Le principe de l'éducation. Nous enseignons les principes et les méthodes de la coopération à nos dirigeants, employés, membres et au public en général.

L'intercoopération. Nous collaborons activement avec les autres coopératives, de façon à développer le coopératisme.

Des entreprises de distribution alimentaire. Nos coopératives membres ont réalisé, en 1988, un chiffre d'affaires de 365 000 000 $ et possèdent un avoir collectif sous forme de capital social et réserve générale dépassant les 39 000 000 $. Aux fins de leur approvisionnement et de la mise en marché de leurs produits, nos coopératives membres ont signé des ententes commerciales avec les quatre grandes chaînes d'alimentation au Québec. Et ces quatre grandes chaînes sont. Provigo, Métro-Richelieu, Steinberg et IGA; IGA, en fait, est l'abréviation de Independent Grocer Alliance ou, en français, l'association internationale des épiciers, qui nous vient des États-Unis et qui est représentée, plus particulièrement dans la région, par sa filiale de Hudon et Daudelin.

Nos coopératives sont présentes dans toutes les régions du Québec et constituent une présence importante dans plusieurs dizaines de communautés à l'extérieur des grands centres

urbains. Nous avons des membres aux Îles-de-la-Madeleine, par exemple, et dans la ville de Fermont, dans toutes les régions du Québec. Sur l'île de Montréal, actuellement, nous n'avons pas de membre, le membre le plus proche que nous ayons de la métropole est dans la région de Joliette où nous avons des membres. Plus de 1300 personnes, élues par des assemblées démocratiques, agissent bénévolement comme administrateurs de nos coopératives.

Nous sommes également des employeurs. En 1988, nos coopératives membres ont payé une masse salariale de 36 200 000 $ à leurs employés, lesquels sont majoritairement des employés syndiqués. Nos employés et leurs familles sont opposés à l'ouverture des commerces le dimanche et ils ont fait valoir leur opposition par le canal de leurs centrales syndicales. (18 h 45)

À l'intérieur de nos 143 membres, les employés sont représentés par les quatre grandes centrales syndicales, c'est-à-dire qu'une bonne part sont représentés par l'Union des employés de commerce qui, elle, est rattachée à la FTQ. Une certaine part est représentée soit par la CSN, la Confédération des syndicats nationaux, soit par la CSD et quelques syndicats indépendants également.

Nous sommes enfin des familles de consommateurs. Nos 110 000 membres sont des familles qui s'approvisionnent en produits alimentaires auprès de leurs coopératives. Alors, si on multiplie par un multiplicateur de 2,4 ou 2,3 pour avoir le nombre de personnes dans une famille au Québec, nos membres représentent, de ce fait, plus de 250 000 consommateurs.

Propriétaires usagers de leurs coopératives, nos membres s'opposent à l'ouverture le dimanche à la fois de leurs coopératives et de leurs concurrents. Ils tiennent au respect du jour de congé uniforme, tant dans leur propre intérêt que dans celui de leurs employés.

La consultation, si vous me permettez un aparté, M. le Président, s'est faite, dune part, par la tenue d'un colloque provincial auquel ont été invités tous nos membres, colloque qui s'est tenu à l'Université Laval, il y a de ça environ une année. Et, à cette occasion-là, après avoir débroussaillé le terrain, chacun est reparti dans sa région rencontrer son conseil d'administration où, là, on a adopté la résolution qui vous sera présentée tout à l'heure et qui indique que les coops sont contre l'ouverture des commerces le dimanche.

Vous pensez bien qu'en tant qu'organisme démocratique qui doit absolument tenir une assemblée générale annuelle, nos membres, à cette occasion, étant donné l'importance du débat au niveau des citoyens, nous ont apostrophés, nous ont questionnés sur ce point-là, insistant dans beaucoup de cas pour que nous adoptions une position claire, nette et précise. Alors, nos conseils, suite à ça, ont décidé d'entreprendre la démarche, justement, de produire un mémoire devant la présente commission.

Si vous voulez, M. le Président, et mesdames les membres du comité, nous allons maintenant nous reporter au point I de notre mémoire qui s'intitule "Le débat sur les heures d'ouverture, de l'iniquité à l'absurdité".

Dans un premier temps, il nous est apparu de la première importance d'essayer de déterminer quel était l'objet de la loi et de voir un petit peu comment elle était appliquée. La Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux, Lois refondues du Québec, chap. H-2, a fait l'objet d'une abondante jurisprudence et les tribunaux se sont attachés, dans certains cas, à déterminer quel était l'objectif de la loi. J'ai trouvé un jugement de la Cour supérieure qui, justement, dans les propos du juge Yves May-rand, nous informe quel est d'après lui l'objet de cette loi-là.

L'objectif de la loi, dit-il, était d'assurer un jour de repos aux employés. Mais il fallait tenir compte de la situation réelle et du maintien d'un service approprié aux consommateurs, d'où la vente de certains produits et l'ouverture des pharmacies et autres commerces dont l'activité est jugée nécessaire. Le maintien d'un service minimum aux consommateurs le dimanche est un objectif raisonnable, reconnu dans les sociétés démocratiques comme est reconnu le droit à un jour de congé uniforme pour l'ensemble des travailleurs.

Le législateur a voulu assurer la rentabilité des petits commerces d'où la règle de trois et leur protection contre les grandes chaînes d'alimentation qui ont plusieurs employés pour opérer.

L'objectif premier de la loi est donc le jour de repos uniforme pour tous les employés du commerce de détail. De façon accessoire, on assurera au consommateur un service minimum le dimanche pour l'approvisionnement en biens de première nécessité comme les médicaments.

Si, dans un premier temps, les députés ont adopté une loi juste et équitable, la situation évolua dans une direction différente par suite d'un recours abusif à la législation par délégation. Ladite délégation s'exerce par la mise en vigueur de règlements d'application décrétés par le Conseil des ministres sans consultation de l'Assemblée nationale.

M. le ministre, je veux tout de suite vous dire que c'est bien clair que le Conseil des ministres qui se réunit une fois par semaine et qui doit régler l'ensemble des problèmes qui confrontent l'Etat du Québec ou le gouvernement de la province ne peut pas apporter tout le temps qu'il voudrait, souvent, pour penser aux législations et aux règlements qui s'appliquent Je comprends que ça se passe vite. Mais je pense aussi que c'est une bonne chose que le môme gouvernement ait décidé de faire une commission parlementaire pour que, là, on prenne le temps

vraiment d'envisager des choses de façon un peu plus longue.

C'est ainsi, donc, par cette délégation qui se fait par règlement, qu'on a obtenu ce qu'on a aujourd'hui, le règlement sur des exemptions d'application de la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux. C'est le décret du 4 décembre 1987. Ce décret-là en vint à reconnaître pas moins de 19 exceptions à la règle générale, et la porte est grande ouverte pour en admettre d'autres puisque le règlement dit que sera exempté tout autre produit déterminé par règlement du gouvernement.

La situation évolua de l'exception commandée par un service minimum en approvisionnement en biens de première nécessité à la couverture légale de certains privilèges particuliers, de sorte que, pour le justiciable, l'exception est devenue la règle. Son représentant démocratiquement élu, le député, a perdu le contrôle sur l'évolution de la législation, et il s'ensuit, bien sûr, une perte de crédibilité importante à l'endroit de la loi elle-même et des officiers chargés d'en assurer l'application.

Point B, la proposition de changement. Dans ce débat complexe intervient alors la proposition dont l'origine d'ailleurs la rapproche des intérêts des actuels détenteurs de privilèges particuliers, proposition, dis-je, à l'effet de revenir à une situation équitable en disant: On va permettre à tout le monde d'ouvrir le dimanche. Cette belle équité nous fait sourire, même si je ne souris pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Noël: Bien sûr, une telle proposition contredit de front le fondement principal, l'objectif numéro un de la loi qui est le jour de repos uniforme pour les employés du commerce de détail. 11 faut se rappeler que c'est l'objectif premier de la loi.

Le service minimum en approvisionnement en biens de première nécessité n'est absolument pas en cause. Il suffit de voir au journal télévisé les longues lignées de consommateurs soviétiques ou africains pour constater qu'au Québec, ici, on a tout ce qu'on veut, tout ce qu'on peut désirer avoir; on peut se le procurer assez facilement.

Par suite de la stabilité démographique, le panier de consommation québécois est saturé et tout changement dans les règles du jeu des heures d'ouverture ne peut être motivé que par une stratégie commercialiste de concentration de la part de gros intérêts capitalistes particuliers.

La situation actuelle. M. le Président, est-ce qu'on me signale que le temps...

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous demanderais, malheureusement, M. Noël, de conclure brièvement, s'il vous plaît.

M. Noël: Notre position telle que nous l'ont fait savoir nos membres par une résolution claire, nette et précise est: Nous sommes contre l'ouverture des établissements commerciaux le dimanche. Les principaux motifs sont ceux de stabilité économique, d'équité, de concurrence loyale entre commerçants. Alors, au cours des discussions qui vont suivre, M. le Président, je ne doute pas que nous aurons la chance d'entendre en particulier M. Gagné, qui, du haut de son expérience de 30 ans dans le commerce de détail d'épicerie, va être en mesure de nous mettre de la chair autour des notions un petit peu théoriques qui sont là.

Le principal de ça, c'est que nous, on est des supermarchés et qu'on dit: Bien, c'est vrai que depuis dix ans on a perdu 10 % du marché. On le sait pourquoi. C'est parce que, le dimanche, on n'a pas le droit d'ouvrir et, de plus en plus, quelque chose comme 28 % ou 29 % des gens achètent de l'alimentation le dimanche. C'est pour ça que nos ventes baissent. On calcule qu'il y a trop d'exceptions, trop d'exceptions folkloriques et trop de manque de respect de la loi actuellement. Il faut absolument que l'Assemblée nationale se remette à la tâche pour reprendre la loi à son début et en faire une nouvelle qui enlève les privilèges de monopole ratifiés par décrets gouvernementaux, qu'ils arrêtent de dire que ce sont les employés, à la caisse, qui vont appliquer la loi et dire aux clients: Après cette heure-là, tu n'as pas le droit d'acheter ça, ou des choses du genre, pour que des inspecteurs du gouvernement puissent facilement appliquer la loi et traduire devant les tribunaux les gens qui enfreignent les lois.

En ce qui concerne l'option d'ouvrir le dimanche, encore là, M. Gagné va vous donner des exemples, mais on est, nous autres, d'opinion assez sérieuse tout de même que ça va être la fin d'un très grand nombre de petits commerces, dépanneurs, petites épiceries spécialisées, etc. Alors, vous pouvez tout de suite penser à une augmentation de votre budget de bien-être social de la province de Québec. Il va augmenter très rapidement. La marge bénéficiaire des supermarchés va diminuer parce que nos employés sont syndiqués. Et ce qui va arriver probablement, c'est que les très grandes surfaces de type Carnaval ou Club Prix ou Club Price vont en profiter pour augmenter ventes et profits. On calcule qu'au niveau de la main-d'oeuvre également, en ouvrant le dimanche, vous allez simplement faire un transfert de la main-d'oeuvre en moins, c'est-à-dire que ce qu'il va y avoir, ce sont des pertes de postes d'employés salariés réguliers qui bénéficient des avantages sociaux et qui sont soutiens de famille pour créer des postes qui ne bénéficient pas de ces avantages sociaux. Et, finalement, une réaction sur l'ensemble du commerce de détail dans le sens où on va ouvrir la porte à une généralisation de l'ouverture des commerces le dimanche.

C'était l'essentiel de notre mémoire, M. le

Président, qui a été soumis. Nous sommes prêts autour de la table, chacun peut-être dans notre domaine, à donner des exemples ou à renforcer les opinions déjà contre.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Noël. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, sur une note d'encouragement, Me Noël, j'aimerais vous dire que j'attache beaucoup d'importance à cette consultation dans le sens qu'au début de la commission j'ai mentionné qu'il est essentiel de garder une ouverture d'esprit constante dans la recherche d'une solution. Je voudrais également vous remercier de reconnaître la pertinence de cette commission pour autant, évidemment, qu'on tranche le débat une fois pour toutes. (19 heures)

On veut consulter sur six points. J'aimerais en discuter deux, mais deux surtout avec MM. Gagné et Bouchard parce que ce sont plus des gens qui sont pris dans le quotidien comme directeurs. Le premier, c'est l'aménagement des heures sur semaine. Tenons pour acquis que votre position est claire sur le dimanche. Une des hypothèses, c'est de dire: Au lieu d'ouvrir à 8 h 30 - vous opérez des commerces, les deux directeurs généraux - on ouvrirait à 9 h 30 Donc, on sauverait une heure, lundi, mardi et mercredi; il y a deux hypothèses d'offertes avec ces trois heures-là. C'est de dire qu'on les applique le mercredi de 18 heures à 21 heures ou on les applique les lundis, mardis et mercredis, une heure de plus, donc au lieu de fermer à 18 heures, on fermerait à 19 heures. Vous représentez 110 000 membres. Comment percevez-vous ça? Quelle est votre réaction à ça?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Gagné.

M. Gagné (Camille): Notre réaction par rapport à ça est la suivante. Nous, par rapport aux heures d'ouverture, nous serions favorables à un ajout, c'est-à-dire, par exemple, le mercredi soir d'ouvrir jusqu'à 21 heures pour ajouter un soir additionnel pour pouvoir donner le service. Il ne faut pas oublier qu'on fait juste un déplacement d'heures, un déplacement de volume. On n'augmente pas le volume.

M. Tremblay (Outremont): Oui, ça, c'est clair. Mais si...

M. Gagné: O.K.

M. Tremblay (Outremont): C'est clair, mais si, pour permettre à des couples dont les deux personnes travaillent, d'avoir accès, par exemple, à un service - ils travaillent jusqu'à 17 heures, . le temps de se rendre - jusqu'à 19 heures, au lieu de dire que le mercredi, ce serait lundi, mardi, mercredi jusqu'à 19 heures, est-ce que vous le vivez? Vous avez 110 000 membres. Est-ce que ça cause réellement un problème?

M. Gagné: Écoutez, si vous me demandez de commencer à 9 h 30 plutôt que... Mais on commence à 9 heures; ça voudrait dire qu'il faudrait commencer à 10 heures. Ça apporterait définitivement des problèmes.

M. Tremblay (Outremont): Comment? Pourquoi?

M. Gagné: Parce que, d'abord, il y a la question de la réception de la marchandise, aussi. Les fournisseurs, vous avez le grossiste, par exemple, où on reçoit la "van" le matin assez de bonne heure. Vous avez les boulangeries qui passent assez de bonne heure le matin. Déjà là, on doit faire face à ça, au départ. Si vous mettez les heures encore plus haut, à ce moment-là, ça va faire un déplacement - comment est-ce que je dirais bien ça? - il y en a qui vont être desservis plus tard par les fournisseurs, et ça va créer des problèmes.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Bouchard, comme complément de réponse.

M. Bouchard (Gabriel): J'aimerais, M. le ministre, vous apporter la dimension suivante, une mention en tant que père de famille et aussi grand-père. Quand on rallonge les heures le soir, si je regarde ma fille qui sort de travailler à 17 h 30, 18 heures et qui se dépêche de faire faire les devoirs à mes petits-fils, ce n'est pas tellement approprié. J'apprécierais, si on n'a pas le choix, que ce soit définitivement le mercredi soir similaire au jeudi ou au vendredi. Ça, c'a plus de bon sens et c'est plus acceptable pour une meilleure qualité de vie. Un peu comme il a été mentionné dans le rapport du comité précédent, on est beaucoup de bénévoles au Québec et, si on ampute une heure déjà pour des ouvertures de marchés, ça nous empêche de siéger sur d'autres comités en lesquels on croit réellement.

M. Tremblay (Outremont): Très bien. Donc, c'est clair.

Le deuxième point. Vous faites allusion, dans le mémoire, à l'effet de dire qu'il y a des exceptions et que ça crée des iniquités et vous mentionnez même le mot "absurdité". Je voudrais juste avoir votre point de vue Je la pose parce que vous êtes des coopératives; ce n'est pas un piège du tout. La commission Richard suggérait d'abolir l'exception, la vente de fournitures scolaires par des coopératives en milieu scolaire. On en a discuté un peu avec d'autres intervenants, et ce dont on s'aperçoit, à cause de l'éducation des adultes, à cause des cours du soir de plus en plus, à cause de l'importance de la

formation professionnelle que le gouvernement attend et également des centres spécialisés, c'est que ces coopératives sont ouvertes, de par la loi, le soir et qu'elles sont également ouvertes le dimanche. Il faut dire que ç'a été fait en 1970. À ce moment-là, elles vendaient des fournitures scolaires. Aujourd'hui elles vendent, par exemple, des ordinateurs, des calculatrices et également d'autres fournitures moins reliées, par exemple, à l'éducation immédiate. Donc, elles se trouvent à concurrencer d'autres commerces qui ne peuvent ouvrir le dimanche ou le soir. Dans cette optique, pour avoir une loi équitable, est-ce que vous seriez d'accord avec le rapport Richard d'annuler cette exception-là pour les coopératives en milieu scolaire?

M. Gagné: Radicalement, M. le ministre. Moi, je suis en coopérative d'alimentation. D'accord? Puis, en début de juin 1989, j'ai fait une demande au gouvernement pour faire respecter la loi en ce qui concerne une pharmacie bien connue, pour ne pas la nommer, Jean Coutu. Il faut vous dire, M. le ministre, que la coopérative de Charlesbourg est en vie depuis 52 ans. Depuis 52 ans, on est à Charlesbourg.

Jean Coutu est arrivé, ça fait environ six ans, lui, avec tous les droits et la bénédiction pour ouvrir le dimanche, pour ouvrir le soir. Il peut vendre de l'alimentation tant qu'il veut, comme il veut, sans aucun respect pour l'entourage. Ça n'a pas d'importance. Alors, quand vous me demandez si on devrait couper la coopérative que vous mentionniez tantôt, je vous dis oui, puis je vous dis: Les 216 autres aussi.

M. Tremblay (Outremont): Mais vous êtes conscient - je vais juste vous donner un peu plus d'information - qu'on parle de 380 000 membres aujourd'hui, sans compter l'évolution, parce que, si on va à l'éducation aux adultes et aux centres de formation professionnelle, les centres spécialisés, ça s'en va en grossissant. Donc, vous, vous dites: On doit pousser l'équité au point de dire à ces coopératives qui avaient une exception: Non, vous n'avez plus le droit de vendre le dimanche autre chose que... Bien, là, c'est tout.

M. Gagné: Vous avez bien raison.

M. Tremblay (Outremont): Oui? Bien, moi, je n'ai pas raison, je n'ai rien décidé.

M. Gagné: Sur ce que vous dites.

M. Tremblay (Outremont): Je pose juste une question. C'est juste une question. Je pose une question.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: On y arrivera peut-être.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le ministre. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

M. Noël: M. le Président, pour compléter peut-être. Peut-être que M. le ministre voulait vérifier...

Le Président (M. Saint-Roch): M. Noël.

M. Noël: Peut-être que M. le ministre voulait vérifier si on pratiquait l'intercoopération en nous parlant des coops scolaires.

M. Tremblay (Outremont): Non, mais c'est parce que, si jamais on en arrivait à cette conclusion, si on avait des coopératives qui nous disaient qu'il n'y a pas de solidarité entre les coopératives, vous pourriez leur parler.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Noël.

M. Noël: M. le Président, pour compléter ce qu'a dit mon confrère, je conçois qu'on puisse trouver des exceptions. il y en a 19 présentement. Il y en a qui n'ont pas d'affaire à être là, mais il y en a qui ont raison d'être là. Est-ce que ça sera au législateur d'en décider? Je pense que, quand on parle des coops scolaires qui sont ouvertes le dimanche...

M. Tremblay (Outremont): Est-ce que je peux... Je vais vous demander votre opinion parce que vous dites "iniquité" et "absurdité". D'ailleurs, vous avez bien imagé dans le mémoire... Lesquelles?

M. Noël: Vous avez des exemples patents, et ce n'est pas moi qui le dis, ce sont des juges de la Cour supérieure.

M. Tremblay (Outremont): Mais, très rapidement, je ne veux pas prendre... Mais, dites-moi, aidez-nous, lesquels vous enlèveriez, juste pour l'information.

Mme Marois: Ah! Les exceptions. On parle d'autre chose.

M. Noël: Dans les exceptions. Nous soulignons dans notre mémoire plus particulièrement, aux pages 3 et suivantes, le cas du Club Prix ou du Club Price.

M. Tremblay (Outremont): Mais ce n'est pas une exception. Il n'est pas là. Prenez...

M. Noël: Ça, c'est assez clair.

M. Tremblay (Outremont): Ah oui! Ça, ce

sont les pharmacies.

Mme Marois: Les pharmacies à grande surface.

M. Tremblay (Outremont): Vous, vous aboliriez l'article 5.2.

M. Gagné: La règle de trois. On vivait bien comme ça.

M. Tremblay (Outremont): Oui, oui Je comprends. Vous abolissez l'article 5.2. O.K.

M. Gagné: C'est ça.

M. Tremblay (Outremont): Bien, l'article 5. À moins que vous ne l'ayez pas Je ne veux pas vous forcer à un exercice Je pensais que... C'est parce que, quand on dit que la loi est absurde et quand on dit que la loi est inéquitable, il me semble qu'on a peut-être passé à travers les exceptions. Mais, si vous ne lavez pas fait, ce n'est pas grave. Je voulais profiter de votre expertise pour me faire dire lesquelles vous étiez pour éliminer dans les 19.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le ministre.

M. Noël: M. le Président.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Noël, je m'excuse, mais je pense qu'on pourra peut-être... Oui?

Mme Marois: Non. Je suis prête à l'entendre. C'est intéressant.

Le Président (M. Saint-Roch): Très bien, Mme la députée de Taillon.

M. Noël: J'aimerais échanger avec le ministre.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Noël.

M. Noël: Quand on dit "de l'iniquité à l'absurdité", on parle du débat, M. le Président. Ce que nous trouvons absurde aujourd'hui, c'est l'état dans lequel on en est, c'est-à-dire qu'il faut, par injonction, à grands frais, fermer des concurrents. Nous, c'est la situation actuelle qui fait qu'on trouve ça absurde. On a expliqué pour quelles raisons c'est comme ça.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Noël. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Il y a de vos collègues, dans des chaînes privées, qui sont venus ce matin, qui nous ont dit que, pour eux, ça ne posait pas de problème, la question des travailleurs et des travailleuses, qu'ils avaient facilement accès à un bassin de personnes pour travailler le dimanche et que ça ne leur apparaissait pas poser des contraintes particulières, parce que leurs gens avaient l'air d'être d'accord pour travailler le dimanche. J'aimerais ça entendre votre point de vue, parce qu'il semble être très différent.

Le Président (M. Saint-Roch): M Bouchard.

M. Bouchard: J'aurais envie d'être mordant et de dire: Ça, c'est un commentaire de patron. Parce que, le travailleur comme tel, si je regarde à l'intérieur de nos conventions collectives, c'est une bataille même pour le faire travailler le samedi. Le samedi, la clientèle se plaint de la qualité du service parce qu'il y a des contraintes de convention qui nous forcent à le faire travailler sur semaine pour être libre le samedi et enfin le dimanche. Imaginez-vous donc qu'ils ne sont pas heureux. Ce sont de jeunes étudiants sans expérience. Et, je vous le dis, on doit, des fois, faire du tordage de bras pour avoir des gens d'expérience pour travailler en fin de semaine Alors, ceux qui affirment le contraire, c'est parce qu'ils sont très très en haut, dans les étages et qu'ils ne sont pas en bas.

Une voix: Ça fait longtemps qu'ils ne sont pas descendus.

M. Bouchard: Oui.

Mme Marois: Et ça, c'est vraiment l'expérience que vous vivez d'une façon...

M. Bouchard: Oui, continuellement. Mme Marois: ...systématique dans vos...

M. Bouchard: On vient de renouveler la convention, et ça a été beaucoup de tordage de bras de notre part pour tenter de leur faire comprendre qu'il faut qu'il y ait de la qualité de service en fin de semaine, c'est indispensable.

Mme Marois: Si le ministre et son gouvernement prenaient la décision d'ouvrir le dimanche, c'est une des hypothèses qui sont envisagées, de 10 heures à 15 heures ou 16 heures, vous sentiriez-vous obligé d'ouvrir ou pensez-vous que vous auriez le choix de rester fermé le dimanche?

M. Noël: Je laisserai répondre M. Gagné. Le Président (M. Saint-Roch): M. Gagné.

M. Gagné: On n'aurait pas d'autre alternative que d'être obligés d'ouvrir...

Une voix: C'est officiel.

M Gagné: ...parce que c'est jouer le jeu des grossistes et non des détaillants, et c'est ce que les grossistes recherchent, ouvrir.

Mme Marois: Parlez-m'en un peu. Parce que, justement, il y a des chaînes qui sont contrôlées par des grossistes qui vont venir et qui nous disent qu'ils veulent ouvrir, eux.

M. Gagné: O.K. Vous allez prendre, par exemple, des magasins comme Maxi, Super Carnaval, Club Price, ils rayonnent sur une plus grande surface que la coopérative de Charlesbourg, par exemple, avec ses 17 000 pieds de plancher. Or, nous, on a un bassin primaire, sur un mille, secondaire et tertiaire, sur deux milles et trois milles, mais eux, ils rayonnent sur 30 milles, 50 milles, 60 milles à la ronde. Quand vous allez ouvrir les magasins le dimanche, ces supersurfaces-là deviendront des entonnoirs qui vont vider même les campagnes, les villages. Ça va tout se drainer dans ça. Prenez des Super Carnaval, prenez des Club Price, vous ne pouvez en mettre plus de 25 dans la province de Québec et vous réglez le problème de l'alimentation. Tout le reste, 10 000 pieds de plancher en descendant, c'est terminé; 10 000 pieds en montant, ça commence à être des dépanneurs de quartier. Après ça, vous allez arriver aux supersurfaces. Pourquoi? Parce que le grossiste a atteint une saturation actuellement et qu'il cherche de l'argent. Et pour faire de l'argent, il faut qu'il en rentre dans ses entonnoirs. Alors, quand on regarde Provigo qui a acheté le Marché du jour, il n'a pas fait ça pour le plaisir de le faire. Il l'a acheté en pensant que ça va drainer, que c'est une supersurface à l'attaque de Super Carnaval qui est à l'attaque de Club Price. Steinberg, quand il a parti Club Price - les anciens - il ne faut pas oublier que, dans un magasin, il vit et il récupère à peu près ce que 12, 15 magasins récupéraient avant, avec un compte de téléphone, un compte d'électricité, un compte de chauffage, un compte d'assurances, une bâtisse, pas 15 bâtisses. Alors, nous, c'est chaque bâtisse, c'est chaque compte de taxes, etc. Si on laisse aller ces grossistes-là de cette façon-là.. D'ailleurs, c'est même au détriment de leurs propres membres, et ils s'en foutent éperdument parce que la majorité de leurs membres sont tenus par la cravate. Regardez les chaînes d'alimentation, vous allez retrouver à peu près, six, sept gros propriétaires. Après ça, c'est quoi? Ce n'est plus rien. Alors, il s'agit de bien dorloter les bons, et le reste, ça suit.

Mme Marois: C'est intéressant d'ailleurs de rappeler justement le lien - on le sait et à un moment donné on l'oublie - entre Steinberg et Club Price.

M. Gagné: Le gros au détriment du petit. Et vous allez trouver quoi dans ça? Vous allez ramasser des salaires d'étudiants comparativement à des salaires de pères de famille, de mères de famille qui paient des impôts. Les étudiants paient beaucoup moins d'impôt, je pense. (19 h 15)

Mme Marois: En fait, c'est un des arguments, d'ailleurs, que l'on soulève, la "précarisa-tion" de l'emploi, avec lequel...

M. Gagné: C'est ça.

Mme Marois: ...aussi on a un certain nombre de problèmes. Je pense que vous vouliez ajouter quelque chose, oui?

M. Gendreau (Marcel): Oui. Je voulais souligner, M. le Président, que je suis dans un milieu semi-rural, dans la Beauce. Je vous assure que si le gouvernement libéralisait les heures d'ouverture le dimanche, les commerces se videraient au profit de la ville. Ça, c'est évident. Et puis ça, ça ferait d'autres chômeurs et toute la chaîne qui s'ensuit.

Je ne pense pas qu'on puisse parler d'accès, à ce moment-là, de laisser les gens libres. Libres de quoi? Est-ce que les gens deviennent plus libres, à ce moment-là, en consommant de n'importe quelle façon, à temps et à contretemps? Les magasins seraient ouverts huit jours par semaine qu'il n'y en aurait pas assez. Il y en a qui ont des habitudes comme ça. Il faut le respecter, je suis prêt à l'accepter, mais de là à imposer à l'ensemble de la population des habitudes comme celle-là, est-ce que c'est ça? C'est quoi, un Québécois? Qu'est-ce qui nous distingue des Américains? Chez nos voisins du Sud, pas le vrai Sud, le beau soleil, mais, disons, dans l'État du Maine, on ne voit pas de magasins d'alimentation ouverts le dimanche. Il y a seulement les dépanneurs. Il n'y a aucune chaîne d'alimentation dans l'État du Maine, qui, pourtant, est un État où on peut dire qu'il y a beaucoup de vacanciers, beaucoup plus qu'au Québec, en tout cas. Pourtant, ces gens-là ont décidé que les magasins resteraient fermés le dimanche. C'est sûr que si on va dans le Sud, là, c'est évident; il y a même des policiers à la porte du magasin. On n'en est pas rendus là. J'espère que les Québécois, en tout cas, vont devenir capables de se définir: C'est quoi qui nous distingue d'un Américain? Est-ce qu'on est simplement des commerçants?

Nous autres, nous sommes des membres de conseils d'administration, qui gérons des coopératives. Nous essayons, tous ensemble, de nous donner des services dans nos différents milieux. C'est évident qu'on n'a pas les moyens d'ouvrir nos magasins le dimanche et de concurrencer les grandes chaînes qui, pour arriver, ont peut-être besoin d'ouvrir sept jours par semaine. Ça, c'est peut-être un autre problème. Est-ce que c'est le problème du Québécois, du Québécois moyen?

Moi, en tout cas. je me permets d'en douter.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci. Madame.

Mme Marois: II me reste deux minutes, je reviendrai pour les utiliser à la fin de mon intervention. J'aurai encore quelques... Si j'ai deux minutes, je vais faire un commentaire.

Le Président (M. Saint-Roch): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: C'est parce que, depuis ce matin, une des thèses défendues par les gens qui recommandent, proposent et demandent l'ouverture des commerces le dimanche, c'est la suivante. Proposer et demander l'ouverture et la permettre, cela ne voudra pas dire l'obligation. Ça, c'est une des thèses qui nous a été présentée toute la journée. Ça m'inquiète parce que ça intoxique, ça. On dit: Bien oui, ça a du bon sens, on n'est pas obligés. Alors, c'est pour ça que je voulais vous entendre sur cette question-là, parce que, à mon point de vue, si on permet d'ouvrir et qu'un certain nombre de chaînes décident d'ouvrir, ça va amener automatiquement l'obligation pour les autres d'ouvrir, sinon c'est fini de leur part du marché. C'est déjà le problème que vous causent les pharmacies à grande surface qui vendent de l'alimentaire.

M. Noël: Exactement.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Noël.

M. Noël: Oui, M. le Président. On a répondu à votre question au point de vue de la nécessité économique, de façon unanime, c'est sûr comme du béton, ça. Mais on peut y répondre au point de vue de la philosophie sociale aussi quand quelqu'un nous dit Je veux ouvrir le dimanche, parce que je veux augmenter ma liberté individuelle de citoyen, alors, dans un premier temps, on peut penser qu'en ouvrant le dimanche, on augmente la liberté individuelle d'un citoyen. Mais si, collectivement, comme État, on fait des lois qui permettent que des magasins soient ouverts le dimanche et qu'en fait ils sont ouverts et que tout le monde est ouvert, ça fait en sorte que, collectivement, les gens travaillent le dimanche. Là, si on revient à notre M. Jos. Bleau dont on a augmenté la liberté individuelle, lui, il se rend compte que, le dimanche, il ne peut plus tenir de réunion de famille, il ne peut plus voir sa femme, il ne peut plus voir sa petite fille parce qu'elle garde chez la madame qui travaille à l'épicerie, etc. Ce qui veut dire que, voulant augmenter un petit peu la liberté individuelle de Jos. Bleau, finalement, par le processus du levier de la collectivité, on se retrouve à diminuer la liberté de M. Jos. Bleau. !

Mme Marois: C'est ça.

M. Noël: Ça nous apparaît très clair.

Le Président (M. Saint-Roch): M. Bouchard.

M. Bouchard: Alors, peut-être pour M. le ministre, dans le cadre de la consultation, justement, sur les heures d'ouverture et de fermeture le dimanche et dans le cadre de notre assemblée générale annuelle qui regroupe normalement 400, 500 et 600 membres - c'est gros pour une coopérative, parce que. normalement, c'est 50, 60 membres - cette année, c'est-à-dire au mois de novembre, le troisième dimanche de novembre, c'est une tradition, dans la troisième semaine, nous faisons notre assemblée générale, on a dit: Tiens, on va faire ça le dimanche. C'est tellement d'actualité. On n'a même pas eu 200 personnes qui y ont assisté, le dimanche. Alors, je suis allé voir ce que j'appelle le comité des anciennes jeunes filles - j'appelle ainsi les dames des résidences pour personnes âgées, avec qui j'ai de très bonnes relations, pas nécessairement par rapport à mon âge, mais à cause de certaines affinités...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard:... même si je suis grand-père, remarquez bien - et on m'a dit: M. Bouchard, à quoi avez-vous pensé de faire ça le dimanche? C'est la seule journée de la semaine où on peut voir nos enfants et nos petits-enfants. Ça, ça vaut un paquet de sondages. Je pense qui faut en tenir compte.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Bouchard. M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: Je suis bien content que vous soyez venus parce que vous êtes, pour la plupart, de la région de Québec. Vous êtes installés dans la région depuis très longtemps, 52 ans à Charlesbourg. Je ne me doutais pas que c'était si ancien que ça. Il y a une particularité dans votre affaire, c'est que vous venez ici en nous donnant l'opinion de vos membres qui sont à la fois vos clients et vos patrons. Je ne me trompe pas trop en disant ça?

M. Bouchard: C'est absolument ça.

M. Leclerc: Vous n'êtes pas d'accord, vous?

M. Bouchard: C'est absolument ça.

M. Leclerc: Bien, votre collègue n'est pas d'accord.

M. Gagné: Non, étant membre du conseil d'administration, lui pourrait être employé, c'est

différent. Si je veux faire une petite distinction.

M. Leclerc: O.K. Au sens large du terme. Disons que je m'adresse à M. Gagné.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Leclerc: Je trouve ça particulièrement intéressant parce que, finalement, vous avez deux sortes de clients. Vous avez un client sociétaire et vous avez M. ou Mme Tout-le-Monde qui peut passer chez vous et acheter. Ça ne prend pas nécessairement une carte, etc. Des fois, par exemple, des clients qui ne sont pas sociétaires peuvent être plus fidèles que des membres sociétaires. Bref, il y a une dynamique qui se crée, et chacun est libre d'être sociétaire ou pas, libre d'y aller ou de ne pas y aller.

Est-ce que, dans vos consultations, vous avez remarqué une différence significative entre l'opinion des membres clients et l'opinion des clients tout court? Je vais vous dire pourquoi je vous pose cette question-là. Si vos membres sont contre - et ça, je n'ai pas de mal à le croire - est-ce qu'une des raisons, c'est qu'ils ont effectivement deux chapeaux et qu'ils se disent que ça va donner des frais supplémentaires à notre coop? On est au courant des états financiers chaque année, etc. Donc, est-ce que ces gens-là, étant plus sensibilisés aux problèmes, par exemple avec les employés, que ça peut causer le dimanche... Parce que je suis un de ceux qui pensent qu'il n'y a pas grand monde qui aime ça travailler le dimanche. Est-ce que ces gens-là, étant plus sensibles à un certain nombre de facteurs, du fait qu'ils sont sociétaires, du fait que même un certain nombre sont sur le conseil d'administration, etc., est-ce que ces gens-là mieux renseignés ne sont pas davantage contre? Je ne veux pas vous mettro la réponse dans la bouche, mais j'aimerais ça savoir s'il y a une différence et, si oui, quelle est-elle?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Bouchard.

M. Bouchard: Le sondage qui se fait n'est pas un sondage d'ordre économique On ne dit pas à nos membres: Ça va coûter plus cher. On dit: Que pensez-vous de l'ouverture le dimanche? Et je vous le dis, de façon presque unanime, du moins une très très forte proportion dit: Non, on n'est pas intéressés, pour une des raisons que j'ai mentionnées tout a l'heure. C'est une qualité de vie. On n'en a pas besoin. Il n'y a même pas de qualité ou de fraîcheur de nourriture qui est mentionnée là-dedans parce que c'est un euphémisme, ce n'est pas vrai, ça. Alors, on vous dit: Non, dans notre questionnaire, ce n'est pas ça. On jase surtout de qualité de vie. Parce que le simple membre que vous mentionnez, le budget ou le bilan financier, il ne le consulte pas ou pas beaucoup. Il vient à l'assemblée générale et il prend le rapport annuel. Il s'en va avec ça et il est tout content s'il a une ristourne. Après ça, je veux dire, c'est du côté humain seulement qu'il est touché.

M. Leclerc: Mais là, y a-t-il une différence entre l'opinion, selon vous, du client membre et du client tout court?

Le Président (M. Saint-Roch): M. Simard.

M. Simard (Jean-Claude): Effectivement, on n'a pas eu le moyen de faire une étude statistique ou exhaustive pour répondre à une question qui est de ce niveau-là, mais on a fait quelques tentatives chez nous, à la Coopérative des consommateurs de Tilly-Sainte-Foy, et je dois vous dire que pour le client et pour le membre, en tout cas, il m'est apparu dans le sondage, je dirais, maison que la nuance pour eux autres, pour le dimanche, était une valeur et qu'ils souhaitaient la fermeture, dans ce secteur-là en tout cas. Mais je ne suis pas capable de vous le dire scientifiquement malheureusement, on ne l'a pas fait. Mais cette nuance-là, les membres du conseil avaient demandé de la faire. On a fait quelques études le samedi. Cette distinction-là qu'on aurait pu déceler, en tout cas chez nous, ne s'est pas décelée. Les deux souhaitaient, au nom de la valeur, que ça reste fermé.

M. Leclerc: S'il y en a une, elle est tellement petite que ça ne vaut pas la peine d'en parler.

M. Simard: C'est ça. M. Leclerc: Ça va.

Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le député de Taschereau. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Moi, j'ai pas mal passé à travers les questions que je voulais soulever. Comme sans doute vous le savez, on a fait valoir notre point de vue dès le départ de la commission en disant: On ne va pas créer de fausses attentes ou leurrer les personnes; voilà notre point de vue, essayez de nous convaincre du contraire si vous ne partagez pas ce point de vue là. Et comme je partage plutôt celui que vous défendez, ça m'a permis de vérifier un certain nombre d'éléments qu'affirment d'autres groupes qui, eux, pensent autrement. Alors, je vous remercie de la contribution et de l'éclairage que vous nous avez apportés. Et je suis persuadée qu'à cet égard-là, ça a sûrement aidé beaucoup d'autres membres de la commission aussi, particulièrement sur la question des travailleurs et des travailleuses. Merci.

Le Président (M. Saint-Roch): Merci, Mme la députée de Taillon. M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Me Noël, MM. Gagné, Bouchard, Picard et Simard, je vous remercie beaucoup pour la discussion franche que nous avons eue. On va prendre en considération vos représentations dans la décision qu'on sera appelés à prendre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Saint-Roch): Messieurs les porte-parole du Regroupement des coopératives de consommateurs de la province de Québec, je tiens à étendre nos remerciements au nom de tous les parlementaires, pour les apports aux travaux de cette commission. Sur ceci, la commission de l'économie et du travail ajourne ses travaux à dix heures demain matin.

(Fin de la séance à 19 h 27)

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