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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 17 avril 1991 - Vol. 31 N° 70

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère du Travail


Journal des débats

 

(Seize heures trente-huit minutes)

Le Président (M. Bélanger): La commission de l'économie et du travail se réunit afin de procéder à l'étude des crédits budgétaires du ministère du Travail pour l'année financière 1991-1992. C'est un ordre de l'Assemblée nationale du 27 mars 1991. Donc, nous avons une durée de quatre heures, et il avait été convenu que nous faisions les quatre heures consécutives. Donc, on se rendrait jusqu'à 8 h 30 - ça veut dire 20 h 30, il faut toujours que je les calcule, que je rajoute 12 - il n'y a pas de remplacement possible, nous avons quorum. D'abord, je veux dire bonjour à M. le ministre et à son imposante équipe. Ça nous fait plaisir de vous rencontrer. Sans plus tarder, s'il y a des remarques préliminaires, M. le ministre, la parole est à vous.

Remarques préliminaires M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. D'abord, dans un premier temps, je profiterai de l'occasion pour vous présenter, j'espère bien, tous les gens qui ont été convoqués ici. Puis le but qu'il y ait bien des gens... J'ai entendu la remarque de mon collègue tantôt; il a utilisé le mot "aréopage", en disant: Ce n'est pas peu dire, tellement il y a des gens. Je veux simplement lui indiquer que je n'ai pas l'intention de changer, M. le Président, ma façon de travailler. On pourrait se faire des discours puis utiliser notre temps, 20 minutes, 20 minutes, mais j'aimerais mieux qu'on profite de l'occasion, du temps, des quatre heures qui nous sont consacrées pour qu'on puisse répondre à des questions puis à des échanges qui amélioreraient vraiment les choses qu'on a besoin de savoir ensemble. Dans ce sens-là, c'est pour ça que j'ai demandé à tous ces gens-là d'être ici.

Vous me permettrez d'abord de les identifier pour vous, les membres de la commission, puis mes collègues aussi en face. Donc, évidemment, le sous-ministre du Travail, M. Marius Dupuis et, à côté, M. Jean Des Trois Maisons, sous-ministre adjoint responsable des relations du travail; M. Robert Labbé, sous-ministre adjoint responsable de l'inspection; M. Jean Larivière, qui est au secrétariat chez nous; et M. Yves Germain, directeur des ressources financières et de la perception.

Au niveau de la Commission de la construction, M. Alcide Fournier, président-directeur général; vous avez M. André Ménard, directeur de la qualification; et M. Serge Major, directeur des finances chez nous aussi.

La Commission de la santé et de la sécurité du travail: M. Robert Diamant, président-directeur général; M. Pierre Shedleur, vice-président aux finances; Mme Lise Langlois, vice-présidente à la planification et à la programmation; Mme Lise Thibault, vice-présidente aux relations avec les bénéficiaires; Mme Linda Durand, vice-présidente aux services; M. Pierre Lafrance, secrétaire; Mme Diane Gaudet, directrice aux opérations pour le réseau; et M. Sylvain Gen-dreau, adjoint à la vice-présidente aux services.

Au Conseil des services essentiels: Mme Madeleine Lemieux, la présidente. Et à l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération: Mme Nicole Poupart-Gendreau, la présidente-directrice générale, qui est assise... Alors, ça fait le tour. Et comme je le disais, M. le Président, le but de ça, c'est...

Le Président (M. Bélanger): II y a un monsieur qui n'a pas été présenté, je pense.

M. Cherry: M. Labbé?

Le Président (M. Bélanger): M. Labbé, oui.

M. Cherry: Oui. Il a été présenté tantôt.

Le Président (M. Bélanger): Alors, c'est si... Non, parce que...

M. Cherry: Oui. Alors, simplement pour vous dire que ces gens-là sont ici pour qu'ils puissent compléter des informations, parfois d'ordre technique, pour aider à une meilleure compréhension de la situation des dossiers. C'est le but de ça. C'est ça qu'on a voulu faire.

Le Président (M. Bélanger): Excellent. Alors, bienvenue, mesdames et messieurs. On espère avoir beaucoup recours à vos lumières pour que vous ne vous soyez pas déplacés inutilement. Ça peut sembler fastidieux, ce genre d'exercice qu'on fait ici pour quelqu'un qui n'est pas dans le système, mais, croyez-moi, ça a une utilité très grande pour les parlementaires. Ça nous permet de comprendre, en tout cas, de petits méandres ou de petites frustrations qu'on a dans les bureaux de comtés avec certains dossiers. Alors, dans ce sens-là, on apprécie beaucoup votre présence. M. le député de Pointe-aux-Trembles, vous avez des petites remarques préliminaires, je présume?

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: Oui, M. le Président. Je veux d'abord saluer le ministre et sa suite nombreuse.

Les seules suites plus nombreuses sont celles d'Hydro-Québec, du Conseil du trésor et du ministère des Finances. Ça atteint des proportions où on se dit que M. Gérard 0. Lévesque va finir par louer le Forum pour rencontrer une commission parlementaire. Je souhaite la bienvenue à tous et chacun. Le député-ministre de Sainte-Anne entreprend pour la première fois l'étude des crédits alloués au ministère du Travail ainsi qu'aux organismes relevant de sa responsabilité. Cette courte expérience ne lui permettra sans doute pas de dresser le même bilan que l'Opposition officielle qui, pour la sixième fois, procède à l'étude des crédits du gouvernement du Parti libéral. Comme l'année dernière, je peux déjà, d'entrée de jeu, vous signaler que le constat auquel nous arrivons n'a rien de très réjouissant pour ce qui est du ministère du Travail. L'année 1990-1991, à bien des égards, fut une copie conforme de l'année 1989-1990 en matière de relations du travail et de santé et sécurité du travail: de la gérance à la petite semaine, du balayage sous le tapis ou encore du pelletage des problèmes rencontrés dans la cour des autres.

Le Président (M. Bélanger): Pas de méchancetés, là.

M. Bourdon: Mais, avant de pénétrer plus à fond dans ce bilan de l'année qui vient de se terminer, permettez-moi de souhaiter qu'on puisse, avec le ministre, trouver des solutions aux problèmes trouvés, et, si on les trouve, il pourra dire que c'est son prédécesseur qui n'était pas à la hauteur. Pour le nouveau ministre du Travail, l'exemple le plus éloquent de l'indécision dont il a hérité de la part de son gouvernement concerne le rapport sur la stabilisation des revenus et de l'emploi des travailleurs de l'industrie de la construction, mieux connu sous le nom du rapport Sexton-Picard. Rappelons au ministre la promesse non tenue de son gouvernement en ce qui a trait à la commission Sexton-Picard. Rappelons qu'en avril 1959... 1989...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Vous voyez comme le temps nous paraît long avec ce gouvernement-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Ça fait à peine deux ans; nous, ça nous a paru 22 ans.

Une voix: On a eu neuf ans et 17 jours avec vous autres.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: II y a ça. Il y a ça. Et comme j'aime à le citer souvent, comme dit Woody Allen dans un de ses films, l'éternité, c'est long, surtout vers la fin

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: En avril 1989, les organisations syndicales acceptaient de prolonger pour un an le décret régissant les conditions de travail dans ce secteur. Le gouvernement de l'époque était soucieux de prolonger le décret de la construction parce que les infirmières s'en venaient On sait que ce n'est toujours pas fini avec elles Et, visiblement, le gouvernement, qui a une longue expérience de ça, ne voulait pas affronter les infirmières et les gars de la construction en même temps.

En retour de ce prolongement, le ministre du Travail de l'époque mettait sur pied la commission d'enquête Sexton-Picard. Les recom mandations de la commission, selon la promesse du ministre de l'époque, devaient servir aux négociations de 1990. La suite n'a pas été à la hauteur des aspirations des travailleurs de la construction. Au mois de mai 1990, le rapport Sexton-Picard n'étant pas prêt, le gouvernement décide, sans en attendre les conclusions, d'imposer un nouveau décret de trois ans aux 110 000 travailleurs de la construction. Le rapport sera finalement déposé en 1990. Et depuis, rien. Le ministre étudie ledit rapport. J'ai entendu dire récemment qu'il le faisait également étudier au caucus de son parti, ce qui peut être un bon signe, parce que, parfois on voit que la sagesse est plus grande dans les groupes plus grands que dans les groupes plus restreints. Et il peut arriver qu'un caucus de 92 soit plus progressiste qu'un Conseil des ministres de 30. En tout cas, je n'irai pas jusqu'aux 300 membres du conseil général et aux 3000 membres du parti au pouvoir en congrès parce que, ta, il y a parfois des différences importantes entre les conclusions des congrès et ce que le concile de Trente, comme on l'appelle, décide. Pour les 110 000 travailleurs de la construction qui attendent depuis deux ans et qui avaient fondé des espoirs dans le rapport Sexton-Picard, la déception est vive comme en témoignent leurs nombreuses manifestations publiques depuis juillet dernier.

Un autre dossier qui est sous le tapis depuis 1987 concerne la fameuse Commission des relations du travail, et, à cet égard, M le Président, je voudrais dire au ministre que la Commission des relations du travail, c'est presque quelque chose qui va devenir un exemple mondial de ce qu'un Parlement ne doit pas faire. J'en parle à l'aise, mon vis-à-vis n'y est pour rien, sauf peut-être comme député à l'époque, mais il n'avait pas la responsabilité ministérielle précise qu'il a aujourd'hui. Et d'ailleurs, c'était avant l'élection qui l'a vu accéder au poste de député de Sainte-Anne.

On fonde une Commission des relations du travail par une loi. On discute la loi longtemps,

longtemps, longtemps, très longtemps, en attendant un consensus entre les parties. En relations du travail, on connaît l'idée. Quand on ne veut rien faire, on dit attendre un consensus entre les parties. Déjà, faire se rencontrer les parties, ce n'est pas simple; les amener à un consensus, c'est encore plus difficile. Mais, finalement, ça donne lieu à une loi qui a des avantages, des inconvénients et des mérites. Mais là, ça fait quatre ans. La loi n'est toujours pas en vigueur. On a eu mieux. Un peu après, le même ministre a formé un comité chargé d'étudier la loi qui avait été adoptée. Bon, c'a donné un comité de travail, le comité Blain - ceux qui connaissent ça le savent - qui a dépensé un peu des fonds publics - pas énormément, ce n'est pas ça qui est important - pour étudier ce qu'on ferait bien avec la loi que le Parlement avait adoptée. Après ça, on a eu le rapport Blain. On a dit: Écoutez, une minute, on va aller au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre pour voir les parties intéressées, pour savoir ce qu'elles pensent des recommandations du comité qui a étudié la loi qu'on n'a jamais mise en vigueur. Et la loi 30 qui créait la Commission des relations du travail est toujours dans les méandres du Conseil consultatif depuis l'époque.

Alors, je vais profiter des crédits pour demander au ministre s'il a eu des appels, des nouvelles de la loi 30, et pour savoir si l'effort considérable qui a été fait en commission parlementaire pour entendre les parties et adopter une loi, si on jouait au Parlement-école ou si on adoptait une loi susceptible d'être appliquée. Vous savez, tout un chacun, sur ma rue à Tétreaultville, pense que, quand on adopte une loi ici, c'est parce qu'on veut faire quelque chose. Mais dans le cas de la Commission des relations du travail, on a adopté une loi qui est devenue un mécanisme et un document de base pour consulter les parties. C'est un peu particulier. Et je pense qu'il faudrait savoir ce qui arrive à cet égard-là.

L'autre domaine qui nous concerne énormément, et je vais vous donner mon sommaire des questions que je vais aborder à la fin de mon exposé, c'est la CSST, on l'aura deviné. Après 11 ans d'existence dans cette forme-là, elle est devenue, selon le Protecteur du citoyen, Me Jacoby, un monstre bureaucratique, un Etat dans l'État qui a peut-être perdu le sens de sa mission première, soit l'aide aux travailleurs accidentés et la prévention en matière de santé et de sécurité du travail.

Je pense qu'à cet égard il ne serait pas utile d'accuser la direction de la CSST et puis les gestionnaires de cette Commission qui sont nombreux ici, de tous les maux de la terre. Il s'agit de voir une chose, c'est que la CSST coûte cher et que les justiciables se plaignent, ceux qui n'ont pas de possibilité d'avoir justice dans des délais raisonnables et selon des normes raisonnables; le Protecteur du citoyen consacre toujours à la CSST un rapport bien carabiné dans tous ses rapports annuels à l'Assemblée nationale. Alors, il faut se poser des questions sur les délais qui sont en cause, les façons dont on administre la Commission, la manière d'indemniser les victimes et l'efficacité finalement que ça dégage.

À cet égard, M. le ministre, je voudrais souligner que la performance de la CSST peut s'évaluer à partir d'un organisme comparable qui, à mon point de vue, est la Société de l'assurance automobile du Québec. Il y a quoi? 4 000 000 d'automobilistes au Québec; il y a plusieurs centaines de milliers d'employeurs. Or, avant la réforme de Mme Lise Payette en matière d'assurance automobile, il y avait là une situation invraisemblable, un fouillis dont les gens qui avaient des accidents souffraient. Qu'on se rappelle de la solution qui a été trouvée. On a laissé la ferraille à l'assurance privée, mais avec des règles plus strictes pour que l'évaluation se fasse mieux. Et vous vous rappelez à l'époque que les avocats, entre autres, nous prédisaient la fin du monde. Pour eux, la réforme de Mme Payette était l'équivalent d'une guerre nucléaire, parce qu'ils perdaient 45 000 000 $ d'honoraires. On est passés à travers. Le gouvernement actuel se réjouit, dans le fond, des succès de la Société de l'assurance automobile, parce que, quand il manque d'argent, il y a un petit 625 000 000 $ qu'on va chercher aux dépens des assurés. C'est des surplus, dans le fond, que la bonne administration de la Société de l'assurance automobile a produits. Or, je pense qu'on est en face de deux organismes publics qui se comparent bien. Il y a des accidents d'autos et il y a des accidents du travail. En matière d'assurance automobile - c'est le député qui parle - on n'est pas toujours content des décisions que rend la Société de l'assurance automobile, mais quand on va en appel de ces décisions, en dedans d'un an, on a une décision.

Alors, pour le justiciable, l'élément temps a une importance considérable. Or, je prétends que les médecins et les procureurs syndicaux et patronaux sont les principaux bénéficiaires de l'inefficacité actuelle de la CSST, que j'attribue à deux causes: la "maladministration" de la Commission, à certains égards; mais, à sa décharge, la loi est complexe, trop ramifiée et dès le début, dès le moment où il y a un accident, encombre la question. Je donne quelques exemples, M. le Président et M. le ministre. On prévoit dès le départ qu'entrent en scène trois médecins: le médecin de l'accidenté, le médecin de la CSST et un médecin privé retenu par l'employeur qui conteste l'accident ou la maladie professionnelle de l'employé. À partir de là, le système est fait pour les avocats et les médecins, mais pas pour les gens en appel d'une décision de la CSST.

Je pense qu'il faudra éventuellement que les législateurs regardent les mécanismes d'appel. Par

exemple, est-il utile et nécessaire qu'au bureau de révision paritaire - et ce n'est pas la faute du président de la CSST que je vois là - ça soit un conseil de trois? Est-il normal que, dans l'arbitrage médical, le président, parfois, et le médecin représentant l'employeur soient de la même clinique privée? Est-ce qu'il n'y a pas là un conflit d'intérêts? Est-il normal que, tant au bureau paritaire qu'à l'arbitrage médical, la CSST nomme le président ou la présidente qui va évaluer sa propre décision? Le Protecteur du citoyen le dit avec raison: Quand on va en appel d'un organisme, il ne faut pas trop que la personne de qui on appelle nomme le juge ou l'arbitre qui va décider de sa décision.

Alors, tout ça fait qu'il y a un engorgement qui est chronique dans les mécanismes d'appel de décisions de la CSST et, en plus, quand la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles finit par rendre une décision, s'il y a 104 cas semblables, on laisse les 104 cas traîner de trois à cinq ans.

L'autre élément que votre prédécesseur avait souligné. Il n'y a pas à la CSST de reconsidération administrative des décisions qui se prennent, de telle sorte que, même quand on fait erreur, on continue pendant trois, quatre ou cinq ans à s'acharner sur le justiciable à l'endroit duquel on a commis l'erreur. On le sait par nos bureaux de comté, quand il arrive des décisions de la CSST, ça ne se change pas autrement que par la mécanique compliquée où on a judiciarisé à l'excès, dès le départ, et médicalisé sous l'empire d'une judiciarisation. Je veux dire que l'accidenté du travail est pris en charge par trois médecins, deux avocats et un processus qui dure de trois à cinq ans. Puis après ça, à la CALP, ça se règle dans les corridors à la fin, comme ça se faisait dans l'assurance automobile dans l'ancien système. Une personne qui subissait un accident grave pouvait attendre la compensation jusqu'à 10 ans. Son avocat et l'avocat de la compagnie d'assurances étaient en contact, et on judiciari-satt, et on faisait des délais, sans compter que, dans le cas de l'assurance automobile, je viens de parler de conflit d'intérêts, à l'occasion, il y en avait. Il y avait des dîners d'avocats des deux parties qui s'échangeaient un nombre de dossiers suffisant pour pouvoir changer d'auto, acheter une nouvelle maison ou aller en vacances au détriment des gens qui avaient eu un accident d'auto. Or, l'Etat est intervenu dans le cas de l'assurance automobile. Les avocats n'étaient pas contents.

Ça va être la même chose quand on va réformer la CSST. Qu'est-ce que vous voulez? Je ne sais pas combien de médecins au Québec gagnent leur vie grassement sans jamais soigner un patient. M. le ministre, vous avez été syndicaliste vous-même, vous savez de quoi je parle, de ces médecins dont la fonction est de donner un avis d'expert sur. Est-ce que la personne a eu un accident ou non et est-ce qu'elle est vraiment malade? Il y a des cliniques spécialisées qui sont des entreprises de plus en plus considérables. Elles ne soignent jamais personne. Elles sont là pour donner une opinion sur la maladie d'une personne. Donc, il y a une bureaucratie patronale considérable qui s'est développée. Et, pendant ce temps-là, M. le Président et M. le ministre, la médecine du travail ne va pas loin et ne joue pas fort au Québec

L'autre facteur qui joue en termes de prévention - et là, je suis en train de faire le dossier à la décharge de la CSST - l'État ne veut pas payer pour l'inspection que fait la CSST. On a une situation tout à fait rocam-bolesque où la CSST est en train d'ester en justice contre le Conseil du trésor pour se faire payer ce qui est dû à la CSST. Je suis d'accord avec la position de la Commission. Les contributions des employeurs dans ce qui est une espèce d'assurance patronale contre les accidents, les cotisations sont payées par les employeurs parce qu'ils sont responsables de la santé et sécurité dans leur entreprise, leur bureau, leur établissement, mais ça n'est pas aux employeurs de payer l'inspection. Ça n'a aucun sens de le faire. Je pense à nos amis de la Commission de la construction du Québec qui vivent la même situation à l'égard de leurs exigences et de leurs activités en matière de formation professionnelle et d'apprentissage. Le gouvernement et le Conseil du trésor disent: Ils ont les contributions des employeurs et des employés, qu'ils payent donc pour ça. Mais les employeurs de la construction, les employés de la construction paient des impôts. Les employeurs qui contribuent à la CSST paient des impôts; ils paient des impôts sur le revenu des particuliers, mais ils paient aussi l'impôt sur les profits des entreprises Ils s'attendent à ce que l'État paie pour l'inspection que ça nécessite.

Le Président (M. Bélanger): Je vous inviterais à conclure, M. le député.

M. Bourdon: Alors, M. le Président, je vais conclure là-dessus. On a eu une année en matière de relations du travail, qui a succédé à une année difficile. Je pense à la loi matraque contre les syndiqués de l'Hydro, l'imposition des conditions de travail aux gars de la construction pour trois ans, la perte d'ancienneté des 150 000 syndiqués de la santé et des services sociaux; et là, ça se télescope, on est en train de les geler et ils sont toujours en perte d'ancienneté. Alors, il y a des jours assez difficiles, je pense, qui s'annoncent. J'espère qu'on pourra, avec le ministre du Travail, trouver des moyens et des solutions pour ce qui est de Sexton-Picard, pour ce qui est de la CSST, pour ce qui est d'un bon nombre de questions. Je ne demanderai pas au ministre de réformer la manière d'agir du Conseil du trésor; ça sera l'oeuvre d'un prochain gouvernement, je pense bien.

Je donne ma liste de sujets qu'on voudrait aborder. Donc, M. le Président: le rapport Sexton-Picard; le rapport du Protecteur du citoyen à l'endroit des accidentés du travail,; l'inspection à la CSST et son financement; le programme de stabilisation économique et sociale; la sécurité sur les chantiers de construction; les articles 204 à 215 qui étaient censés, comme la Commission des relations du travail, exister un jour, le programme de retrait préventif pour les femmes enceintes; le financement de la Commission de la construction du Québec à l'égard de ses mandats publics; le trafic des cartes de compétence, juste pour se rassurer, la Commission des relations du travail, juste pour savoir si elle existe encore; le travail chez les moins de 14 ans, parce que, dans mon comté, il y a un enfant de 14 ans qui est mort alors qu'il travaillait chez un dépanneur, et je pense que c'est une question grave; le travail au noir - je reviens donc à la construction, en passant par le vêtement et d'autres secteurs - le rôle de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération; et la question relative à certains documents que l'Opposition officielle avait demandés. Bref, on n'aura pas grand temps pour souper, M. le Président. (17 heures)

Le Président (M. Bélanger): Bon, alors, si je comprends bien, vous ne voulez rien perdre. On laisse le varia ouvert au cas où on aurait oublié quelque chose.

M. Bourdon: C'est cela.

Le Président (M. Bélanger): Bien.

M. Bourdon: À part ça, ça va.

M. Cherry: À part ça, c'est correct, Michel? Oui?

M. Bourdon: Puis, à part ça, je n'ai pas de question.

M. Cherry: O.K.

Le Président (M. Bélanger): On peut voir que tout va bien.

M. Cherry: Mais, vous permettez, M. le Président, je comprends mon collègue. Il a fait la lecture de sa liste d'épicerie rapidement. Comme le but de l'exercice, c'est qu'on y réponde et qu'on prenne le temps, j'aimerais ça s'il pouvait nous la répéter un peu plus lentement pour qu'on prenne des notes. Et après ça, si c'est son souhait, qu'on travaille ça dossier par dossier, de façon méthodique. S'il y en a qui doivent être regroupés, on les regroupera pour pouvoir les traiter comme une entité. Et quand on aura eu le temps de vider ce sujet-là, on pourra passer à un autre sujet. Alors, j'appré- cierais, Michel, si tu voulais la reprendre, là, la liste, plus lentement, pour que les gens de chez nous...

M. Bourdon: O.K.

M. Cherry: ...puissent en prendre note et se préparer en conséquence. Ça te va?

M. Bourdon: Ça va. Et à cet égard-là, j'ai oublié un point.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Je ne te la reposerai plus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: J'en avais avisé le ministre, hier. Vers la fin, je voudrais parler du cas de la Bibliothèque centrale de prêt de la Montérégie. C'est un lock-out, un conflit de travail assez douloureux qui est vécu sur la rive sud de Montréal.

M. le ministre, si le secrétaire voulait la photocopier, j'ai la table des matières. Il n'y a rien comme avoir un menu quand on s'assoit dans un restaurant.

Le Président (M. Bélanger): C'est vrai. Ha, ha, ha! Il faut quand même rester frugal.

M. Bourdon: Oui, oui, oui.

Le Président (M. Bélanger): La modération a toujours meilleur goût.

M. Bourdon: Oui.

Le Président (M. Bélanger): Alors, ceci étant dit, vous...

Discussion générale Rapport Sexton-Picard

M. Bourdon: Le premier sujet que je voudrais aborder, M. le ministre, dans le fond, en attendant qu'on fasse le travail, c'est le rapport Sexton-Picard. Et je ne vous ferai pas l'injure de vous le résumer. Dans le fond, ce qu'il nous tarde de savoir, M. le ministre, là, c'est... Ça fait deux ans que le rapport, c'est commandé; ce sont deux universitaires distingués qui l'ont fait avec beaucoup de rigueur, tout le monde en convient, un de l'Université Laval et l'autre de l'Université McGill. Les syndiqués et les syndicats réclament à cor et à cri l'application des recommandations du rapport Sexton-Picard qui ne traitait pas que d'un supplément d'assurance-chômage. Le ministre a rencontré les parties et il a même, je pense, fait rencontrer MM. Sexton et Picard par son caucus. Tout ça

regarde bien. En fait, notre question est simple, c'est: Quand est-ce qu'on l'applique?

M. Cherry: O.K. Dans un premier temps... Michel, si tu permets, dans la liste des choses, il me semble que j'ai entendu tantôt que tu as parié, par exemple, du travail au noir.

M. Bourdon: Oui.

M. Cherry: Mais, évidemment, le travail au noir, ça fait partie de...

M. Bourdon: C'est sûr.

M. Cherry: On va regrouper tout ça ensemble juste pour s'assurer... Bon.

M. Bourdon: Oui.

M. Cherry: O.K. Dans un premier temps, concernant Sexton-Picard, je pense que la deuxième journée de la reprise de la session, au mois de mars, là, à une question que tu me posais, il me semble que ce que j'ai déclaré, c'est que durant la présente session, qui est en cours, je déposerais au Conseil des ministres l'ensemble des réponses sur les 62 recommandations. Juste pour rappeler que, comme Sexton-Picard est un organisme qui découle d'une décision du Conseil des ministres, je dois retourner là pour m'assurer de la façon dont je suggère que l'exécution soit faite.

Mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, a raison de dire que ça implique beaucoup de consultation. Et ça continue. Évidemment, il connaît ça, là, la façon avec laquelle on fonctionne, par phases. Et plus on approche de la fin, plus, évidemment, les périodes sont difficiles. Je crois comprendre qu'une partie intéressée au rapport Sexton-Picard a également rencontré son caucus ou a l'intention de le faire. Donc, il semble que, de part et d'autre, on se familiarise mieux avec le processus.

Je suis content que Michel mentionne que le caucus, chez nous, a eu une rencontre avec MM. Sexton et Picard, une rencontre que les gens ont jugée trop courte, ou très importante. Ce n'est pas moi qui peux qualifier ça, mais de mes collègues députés disent qu'à leur connaissance, c'est probablement une des rencontres où l'assiduité de l'assistance a été très remarquée. Au-delà d'une quarantaine de mes collègues étaient présents, et ils ont même déploré que ça ait été trop court et que ça ne nous ait pas permis de faire vraiment le tour comme ils le souhaitaient pour présenter ça.

Donc, dans un court laps de temps, je veux juste assurer Michel que, tel que convenu et tel qu'engagé devant l'Assemblée nationale, je déposerai au Conseil des ministres durant la présente session - et ça veut dire très prochai- nement - un rapport qui traitera des 62 recommandations. Ça semblait important, et on me le rappelle chaque fois que je rencontre des groupes impliqués. On fait un parallèle avec un dossier qui est bien familier: lors de la commission Cliche, qui avait siégé en 1975, certains des sujets qui étaient traités, par exemple, traitaient du travail au noir. Ce n'est pas nouveau, ça n'a pas été inventé aujourd'hui, le travail au noir; ce n'est pas quelque chose de récent. Et, par exemple, tous les groupes de travailleurs que j'ai rencontrés, indépendamment de leur allégeance syndicale, disent. En 1975, ceux qui étaient là à l'époque pariaient du travail au noir comme d'un problème. 15 ans plus tard, ils disent que ce qui était un problème en 1975 est devenu un fléau en 1990, parce qu'ils disent: Les recommandations ou les choses qui étaient prévues, qui devaient être faites pour corriger, enrayer ou diminuer le travail au noir n'ont pas été faites. Alors, ils disent: Assurez-vous que l'ensemble des recommandations de Sexton-Picard vont s'appliquer. En d'autres mots, qu'il ne nous arrive pas, disent-ils, la même chose qui est arrivée à l'époque: Sur une série de recommandations qui constituaient l'ensemble du rapport de la commission Cliche, quelques-unes seulement ont été appliquées, et les autres ont été oubliées. Alors, ils ont l'intention, cette fois-ci, et c'est l'engagement que j'ai pris envers eux, de traiter ça comme un tout.

Et c'est une des conclusions - et ma mémoire est bonne - à la page 200, le deuxième paragraphe dit que, pour que ça ait des chances de fonctionner - on sait bien que ça ne corrigera pas tout - il faut que ce soit traité comme un tout, cette affaire-là. Le travail au noir, comment on en est arrivé là? Quelles sont les conséquences aujourd'hui pour les travailleurs de la construction, pour les vrais entrepreneurs de la construction? Eux aussi ont des choses à dire là-dedans. Mais, en premier lieu, si vous me permettez, selon ma préoccupation, c'est le client, celui qui reçoit le produit du secteur de la construction, à cause de la façon dont ça fonctionne. Je me permets une référence ou un exemple: le jeune couple dont les deux travaillent et qui tente de se porter acquéreur d'une première maison. Bien souvent, pour être capable de rencontrer les engagements financiers, là, premièrement, au départ, ça présuppose, presque dans tous les cas, que les deux travaillent. Il faut que tu places les enfants en garderie, et enfin, on sait comment ça marche dans le quotidien pour s'assurer que tu vas être capable. Et quand tu prends livraison de ta première propriété, ta neuve, il ne se passe pas des fois bien du temps avant que tu aies des réclamations à faire ou des choses à faire corriger. Ce que les gens découvrent très souvent, en dépit de programmes d'assurances... Je ne conteste pas que ça ait pu être un pas dans la bonne direction, mais de là à ce que ça assure vraiment la

protection du consommateur, du citoyen, de celui qui achète sa maison... Le problème, c'est que la sous-traftance est très souvent un mode de fonctionnement là-dedans, et quand on parle de sous-traitance, on sait comment ça marche. C'est souvent de la sous-sous-sous-traitance, avec le résultat que, quand celui qui s'est porté acquéreur de la propriété a des réclamations à faire, trouver la vraie personne responsable ou le vrai entrepreneur responsable pour être capable de lui donner justification, ça n'arrive pas ou ça arrive difficilement ou dépendamment.

Donc, je veux me préoccuper de ça, et c'est un de mes filons premiers, pour protéger les consommateurs, bien sûr, et pour protéger les vrais travailleurs de la construction, ceux qui ont fait de ça leur profession, leur façon de gagner leur vie, pas ceux qui entrent et qui sortent. Parce qu'on sait qu'il y a, dans ce domaine-là, un mouvement annuel qui est loin de rendre justice à ceux qui veulent faire de ça une vraie... Le nombre d'entrepreneurs qui apparaissent et qui disparaissent presque avec la saison au cours de laquelle ils ont décidé d'être entrepreneurs, si ma mémoire est bonne - et je pourrais être corrigé là-dessus - il me semble qu'on me dit qu'il y a à peu près 4000 entrepreneurs de la construction qui apparaissent et qui disparaissent, bon an, mal an. Alors, il est évident qu'il y a là un malaise. Il y en a qui essaient, mais qui ne réussissent pas. Donc, il faut savoir pourquoi ils ont de la difficulté à résister et, quand ils le deviennent, est-ce qu'ils sont équipés pour le faire? Est-ce que la protection du consommateur, celui à qui ils vont rendre service, est bien faite? Alors, ça, c'est dans un premier temps.

Donc, les vrais entrepreneurs de la construction ont de la difficulté parce que le système actuel permet une compétition qui leur semble injuste. Souvent, j'ai rencontré des entrepreneurs qui m'ont dit: M. le ministre, je ne comprends pas. Sur certains travaux, j'ai soumissionné - leur jargon - à mon "cost", à mon coût, simplement pour garder mon monde. J'ai une bonne équipe, je suis capable de fonctionner. On est 15, 20, 25 soumissionnaires. Ceux qui obtiennent le contrat par voie de soumission, comment ont-ils pu faire pour l'obtenir à ce prix-là? Ça n'a pas de bon sens. Mais quand ils suivent - et il y en a certains qui le font par la suite - comment ça se déroule, ils réalisent: Qui est-ce qui a fait les travaux? Et il "l'a-tu" sous-contracté à un autre qui, lui, l'a donné à son beau-frère qui était son ancien "partner"? Avec le résultat que celui qui reçoit ces travaux-là - souvent, les travaux sont faits les fins de semaine où la surveillance n'est pas toujours facile; vous savez, les tireurs de joints, les peintres, enfin, on connaît tout ça, ces métiers-là - avec le résultat que le citoyen et le travailleur ont besoin d'être protégés, mais l'entrepreneur aussi, celui qui a décidé d'en être un vrai et qui veut appliquer et qui veut faire de ça son revenu et protéger le revenu de ses salariés selon les vraies règles du jeu. Donc, le travail au noir est une préoccupation extrêmement importante, sans compter - et c'est un argument que font valoir très souvent les travailleurs de la construction - les pertes de revenus qui sont occasionnées à ça par tous les niveaux de gouvernement.

Un des sujets préférés de mon collègue de Pointe-aux-Trembles: les vraies heures enregistrées à la Commission de la construction, les vraies heures enregistrées à la Commission des accidents du travail. Tout ça, c'est important aussi. Ça fait partie de tout ça. On me raconte des incidents où quelqu'un pouvait travailler sur le chantier depuis un certain temps, et quand il lui arrive un accident ou qu'arrive l'inspecteur: Ah bien! vous arrivez juste à temps, il vient de commencer ce matin. C'est devenu presque le mode de fonctionnement dans certaines régions ou dans certains types de travaux. Donc, il est important qu'on s'attaque à ça, avec l'objectif de l'éliminer complètement, mais je pense faire de vrais vrais efforts. Et dans ce sens-là, je vous assure qu'on y travaille de façon méthodique.

Je tiens à faire valoir aussi que, dans le cas de Sexton-Picard... On dit que ça prend du temps. Je suis responsable de ce ministère-là depuis cinq mois et quand je fais référence à la commission Cliche, il s'est passé à peu près 15 ans entre les deux. Alors, je pense que je ne voudrais pas que du travail qui est sous ma responsabilité maintenant puisse y être associé en disant qu'il n'y a eu que quelques recommandations qui ont été appliquées. Donc, je veux prendre le temps qu'il faut, mais dans des délais vraiment de méthode de fonctionnement. (17 h 15)

Une des préoccupations principales des travailleurs de la construction aussi, et ça fait l'objet de chapitres importants dans le rapport Sexton-Picard, c'est la formation, le recyclage et le réentraînement de la main-d'oeuvre. J'avais l'honneur, hier, avec de mes collègues, d'annoncer des écoles de construction qui vont s'occuper également, en partie, de recyclage. Mais, pour bien situer la dimension de ce problème-là, les travailleurs de la construction, ceux qui sont là-dedans depuis plusieurs années, ceux que vous avez connus et que j'ai connus aussi, disent souvent: II y a des écoles qui facilitent l'accessibilité à l'industrie de la construction pour un jeune qui veut y adhérer. Mais le problème, c'est que si ça fait six, sept, huit ou neuf ans que je suis dans cette industrie-là, l'évolution de mon métier, les matériaux avec lesquels je travaillais à l'époque ne sont plus les mêmes aujourd'hui. Les méthodes de production, les équipements nécessaires ne sont plus les mêmes. Très souvent, il n'a pas eu de formation depuis ce temps-là. Il a appris sur le tas au fur et à mesure, dans certains cas. Donc, entre ce qu'il a pu apprendre à l'école pour lui permettre d'accéder - s'il est

passé par là - contrairement à l'évolution de son métier, il me semble que ça, là, ils se plaignent amèrement de ça.

Les entrepreneurs aussi se plaignent de ça. Quand des gens viennent travailler pour eux, Hs n'ont pas la formation nécessaire; et quand on sait qu'à cause de la période cyclique, à cause de la température, le climat dans ce coin-ci du globe a comme résultat que le travail dans l'industrie de la construction, pour un très grand nombre d'entre eux, est saisonnier. Alors, ils disent: Quand je suis prêt à démarrer mes travaux, je les pars avec les gens que j'ai. Le temps qu'ils deviennent plus productifs et aient appris les roulements du métier, bien souvent, on est déjà rendus à la saison où il faut commencer à penser à fermer le chantier.

Donc, il va être important - ça, c'est une des pistes à laquelle on consacre énormément d'énergie et d'attention - de nous assurer qu'on va pouvoir profiter des périodes creuses pour que ces périodes-là soient maximisées, que leur utilisation soit faite pour mieux préparer les vrais travailleurs de la construction et, dans certains cas, les vrais entrepreneurs de la construction aussi pour que, la saison suivante, le printemps prochain, les gens soient mieux préparés. Alors, dans ce sens-là, j'ai touché au travail au noir; je touche à la formation de la main-d'oeuvre, je pourrais toucher à l'ensemble des recommandations. C'est pour vous dire qu'on ne prend pas du temps pour tuer du temps, mais qu'on prend du temps pour bien se préparer et pour bien répondre.

Pour faire un sommaire de tout ça, dans les meilleurs délais, dans les semaines qui viennent, j'ai l'intention de répondre, tel que prévu, à l'ensemble du rapport Sexton-Picard. Ça vous va?

Une voix: Oui.

M. Bourdon: M. le Président...

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, il y a des règles de 10 minutes, de 15 minutes. Là, je ne les applique plus. On marche et on finit à 20 h 30 avec l'adoption de tous les programmes. Ça va?

Une voix: C'est cela.

Le Président (M. Bélanger): O.K.

M. Bourdon: ...je voudrais d'abord dire au ministre que je trouve son analyse des problèmes de la construction correcte; je vais lui faire une confidence, elle ne restera pas entre nous. J'ai été...

Le Président (M. Bélanger): On va aller en arrière; je peux suspendre cinq minutes.

M. Bourdon: Non, non.

M. Cherry: J'admire ta discrétion.

M. Bourdon: J'ai été président de la CSN-Construction...

Le Président (M. Bélanger): On peut suspendre cinq minutes.

M. Bourdon: ...sept ans et j'ai quitté en 1979 pour m'essayer à une convention de mon parti politique, convention où j'ai embrassé l'asphalte, comme on dit. À partir de là, à la Confédération des syndicats nationaux, j'ai été au secteur des communications, donc peu en contact, à part la participation aux instances du mouvement, avec la construction. Et, étrange ment, depuis que je suis député, comme j'ai le dossier du travail, je me suis retrempé dans les dossiers de la construction.

Je vais vous dire ce qui me trappe, c'est qu'il n'y a rien qui a changé; même les chiffres sont restés les mêmes. Bien, de 1979 à 1991, ça fait 12 ans et, entre-temps, il y a eu un gouvernement du Parti québécois et un gouvernement libéral, donc, ce n'est pas une question partisane, il n'y a rien qui a changé et, si on ne fait pas ce qu'il faut, le rapport Sexton-Picard va rejoindre le rapport Cliche sur les tablettes, parce que la construction est quasiment un domaine de l'anthropologie pour les universitaires, où on peut admirer le libéralisme économique dans toute sa splendeur, avec un encadrement légal, quand même, un encadrement législatif et des règles, mais deux économies. La construction, c'est l'ancienne Europe de l'Est, d'une certaine manière, dans le sens qu'il y avait un système officiel et il y avait un système officieux. Il y avait l'économie officielle et il y avait l'économie officieuse. Le travail au noir dans la construction, ça ressemble au travail au noir qu'il y avait en Pologne, en Hongrie et qu'il y a encore en Union soviétique.

Dans ce sens-là, il y a une réflexion à faire. Je vous donne des exemples. Quand j'étais président de la CSN-Construction, je disais: Ça l'air gros; le salaire horaire est à peu près de 20 $ l'heure. Mais en moyenne, on fait 1000 heures, donc, ça fait 20 000 $, et c'est insuffisant. Mais je vous le dis, là, en 1975, 1976, 1977 et 1978, c'était 1000 heures. Maintenant, c'est 1000 heures, et c'est toujours 1000 heures. Le ministre a omis de mentionner ce qu'il va faire, et je vais lui demander tout à l'heure de répondre. Il ne faut pas oublier que Sexton-Picard, à l'origine, c'était pour avoir un supplément à l'assurance-chômage dans la construction. Je sais les difficultés nombreuses que ça comporte parce que c'est une industrie qui est cyclique, qui est saisonnière, qui est instable et où il y a des mesures qui n'ont pas été prises depuis nombre d'années.

Dans ce sens-là, s'ils mettent un programme de supplément à l'assurance-chômage, ça corn-

porte des difficultés importantes. Je donne deux exemples que le ministre va sûrement reconnaître tout de suite. Quand on parle de débardeurs du port, de la mi-décembre à la mi-février, il y a moins de bateaux dans le fleuve, ça se contrôle assez bien et ça se quantifie bien. Quand on parle des Travailleurs unis de l'automobile à Boisbriand, il y a de la différence entre l'assu-rance-chômage et 90 %. Un changement de modèle de GM, ça se planifie assez bien, et d'ailleurs, en passant, l'économie de Boisbriand s'effondrerait actuellement s'il n'y avait pas le supplément à l'assurance-chômage.

Dans la construction, c'est une autre paire de manches. J'ai rencontré récemment les entrepreneurs en construction, et le ministre avait raison de le dire: Le 23 avril, l'AEQ rencontre mon caucus et le 30 avril, la CSN-Construction, le Conseil des métiers et peut-être la FTQ vont nous rencontrer à leur tour. Parce que, des deux bords de la Chambre, si on peut le mettre de même, on voudrait essayer de faire quelque chose qui règle quelques problèmes dans la construction. Moi, je pense que Sexton-Picard le soulignait aussi, les 1000 heures par année, ce n'est pas qu'il manque d'heures à effectuer, c'est que c'est mal réparti. Et l'AEQ est de plus en plus consciente que, dans les 10 dernières années, il y a à peu près 70 % des travailleurs de la construction qui sont partis. Ça doit être parce qu'ils ne gagnaient pas assez bien leur vie. Et, pour les 1000 heures, M. le ministre, avant qu'on me le dise, je sais que dans les métiers mécaniques, il y a des gens qui travaillent 11 mois par année et puis c'est une moyenne de 1000 heures. Mais si la moyenne montait à 1400 ou 1500 heures... Je vois le sous-ministre à votre gauche, et je l'ai entendu le dire il y a 15 ans, et je le disais. On le sait. 1500 heures à 20 $ de l'heure, ça fait 30 000 $, plus l'assurance-chômage, plus la partie du travail au noir qui est faite par les vrais gars de la construction, ça, ça suffit pour faire un revenu plus que suffisant.

Alors, ça, je pense qu'il faut le regarder, mais il ne faudrait pas que le gouvernement se mette de côté parce qu'il est client pour près du tiers de tous les travaux de construction au Québec. Parmi les ordres de solution qu'on envisage, il y a l'étalement des travaux. Et le changement technologique le permet. Les bri-queteurs aiment quasiment mieux travailler l'hiver que l'été parce que l'hiver, avec ce qui recouvre maintenant l'immeuble où ils posent la brique, ils sont chauffés; des fois, c'est mieux d'être chauffé à 70° Farenheit, à 20° Celsius à peu près, que d'être à 30° Celsius en plein été.

Et l'État ne planifie pas ses travaux pour plusieurs raisons. Une des raisons, c'est que le Conseil du trésor est lent et capricieux à rendre des décisions. Bon. Ça, on le sait, là. N'importe quel député va vous le dire et n'importe quel gestionnaire de la CSST va vous le dire. Quand quelque chose entre dans le Conseil du trésor, ça entre bien, mais ça ne sort pas vite de là. L'autre aspect, c'est que, quand il s'agit de travaux routiers et de grands travaux, il y a des "games" politiques qui se jouent. On est entre députés, on peut bien se le dire. Et à cet égard là, le député d'Anjou, quand on a voté à la vapeur la loi pour qu'il y ait huit kilomètres de la route 30 qui se fassent pour empêcher que les gens de Châteauguay passent chez nos frères amérindiens, René Serge Larouche, le député d'Anjou, citait un extrait du rapport Durham qui était éloquent, qui disait à peu près textuellement: Les habitants du Bas-Canada ont un goût immodéré pour les travaux publics, qu'il s'agisse de routes ou de ponts. Et pour les députés, ça revêt une grande importance pour être élu et réélu. Alors, à cet égard-là, la planification des travaux... Ce que j'entends par là, c'est que l'État à lui seul pourrait assurer l'étalement des travaux dans la construction en faisant en sorte qu'à part les routes où je connais les inconvénients que ça cause l'hiver, on pourrait faire en sorte d'étaler les travaux, ce qui pourrait permettre aux gars de la construction d'approcher 1400 ou 1500 heures.

Le ministre a parlé de formation professionnelle, le retard commence à être criant. On a déjà eu à peu près la meilleure main-d'oeuvre de la construction de l'Amérique du Nord et, en passant, la mobilité de main-d'oeuvre vers les autres provinces, et les États américains est de moins en moins grande. Je ne chanterai plus à mes amis des unions internationales l'affaire de Beau Dommage: "Ça ne vaut pas la peine de laisser ceux qu'on aime pour aller faire tourner des ballons sur son nez." Mais toujours est-il qu'il y a moins de mobilité et on commence à être en danger si on ne forme pas mieux la main-d'oeuvre. Mais pour la former, il faut la retenir.

Si elle s'en va, là... N'importe quel employeur va vous dire: On ne met pas de l'argent sur quelqu'un qui est un "fly-by-night"; ça rentre, ça sort, et... À cet égard-là, j'ai été étonné de constater que les employeurs n'ont même plus de vraie réticence à accorder à leurs employés l'ancienneté, à certaines conditions, une forme d'ancienneté qui pourrait s'appliquer à la construction. Parce que, ancienneté veut dire rétention de la main-d'oeuvre. Il faudra mettre en cause aussi la préférence régionale d'emploi. J'en parle à l'aise; je viens de l'organisation qui l'a imposée pour protéger ses membres et protéger les employeurs avec qui elle faisait affaires.

Mais l'économie s'est mondialisée et l'économie québécoise s'est interrégionalisée, de telle sorte qu'un gros entrepreneur de Chicoutimi, maintenant, ça fait des travaux à Rivière-du-Loup et à Québec. Et l'empêcher artificiellement d'amener sa main-d'oeuvre avec lui, il y aurait des choses à réfléchir à cet égard-là.

Et, de but en blanc, en terminant, je pose

la question au ministre. Comme ce ne serait pas simple d'appliquer tout de suite, rapidement et de but en blanc un système de supplément à l'assurance-chômage, est-ce qu'il serait prêt à envisager - parce qu'il envisage déjà, si je regarde tous ceux qui l'entourent il y a une imagination débordante de ce bord-là - d'avoir un programme intensif, réel, de formation professionnelle, d'adaptation de la main-d'oeuvre et de recyclage pour favoriser la polyvalence? Mon étonnement... Quand je dis qu'il n'y a rien qui a changé, les acteurs, je pense, ont changé. Les gens savent ce que c'est la polyvalence parce que, si tu poses de l'asphalte l'été et que tu enlèves de la neige l'hiver, tu as un peu plus de sécurité d'emploi que si tu as juste une carte. Et ça, à cet égard-là, il y a une évolution sensible. Est-ce que, M. le ministre, vous seriez prêt à envisager d'instaurer un programme de supplément à l'assurance-chômage pour ceux qui suivent des cours, pour ceux qui se recyclent? Autrement dit, je vous dis tout de suite l'avantage que ça comporterait. D'abord, ça lancerait un programme, et comme les partenaires avec le gouvernement se seraient, par hypothèse, entendus sur un nombre de personnes à former et à recycler...

On s'entend bien. Il y a de l'apprentissage et il faut former. Mais il faut aussi recycler le travailleur qui en a besoin et qui pourrait acquérir plus qu'une carte s'il en a juste une, et pour favoriser la polyvalence. Et, à cet égard-là, est-ce que le ministre "discarte" du revers de la main ou s'il trouve qu'il y aurait de l'allure à dire qu'un programme de supplément à l'assurance-chômage pourrait s'adresser aux travailleurs en formation par recyclage?

Parce que, je dis tout de suite, en termes de contrôle, l'avantage que ça comporte. Si on ouvre, je ne sais pas, moi, 10 000, 11 000, 12 000 places pour des cours - j'exagère, là, avec la bureaucratie qu'il y a quand on fait de l'enseignement de n'importe quelle sorte au Québec, ce ne serait pas aussi simple - et que ceux qui les suivent ont un supplément à l'assurance-chômage, on contrôle la dépense, on dit: On en admet tant et ceux qui suivent... Et en passant, on pourrait demander que, comme en Ontario, le fédéral contribue. Ce n'est pas parce qu'on est francophones, pour le temps qu'il nous reste à rester dedans, ils pourraient payer en partie pour...

M. Cherry: . notre tour d'être francophones... (17 h 30)

M. Bourdon: Oui. Ils pourraient payer en partie pour ça. Alors, je pense que c'est une autre chose. Est-ce que le ministre a fait un peu de réflexion, aussi - je déborde un peu de Sexton-Picard - sur le problème de l'apprentissage, qui est grave aussi. Parce que, comme l'apprentissage dans la construction comporte un pourcentage croissant du salaire normal, mais qu'il n'y a pas de formation professionnelle en route, il y a deux phénomènes Premièrement, l'employeur dit: Je veux bien passer jusqu'à 80 % du salaire, mais il faudrait que le rende ment de l'employé s'améliore; et pour ça, il faudrait qu'il suive des cours. Et puis, ce n'est pas à l'employeur de lui donner des cours. Ça, je suis assez d'accord avec les patrons à cet égard Mais pour ça, donc, il faut entrer la dimension formation professionnelle. Parce que l'idée du pourcentage, c'est de dire que le pourcentage est croissant parce que l'habileté et la compétence sont croissantes, donc il y a une certaine justice à payer mieux. Et puis, en plus, dans la construction, quand on peut payer moins cher, on paie moins cher.

Alors, je m'excuse, M. le Président, j'ai peut-être été un peu long, mais moi, il me semble que sur l'étalement des travaux par le gouvernement, j'aimerais ça avoir un engagement du ministre quand il sera capable de le prendre Par ailleurs, le supplément à l'assurance-chômage pour ceux qui suivent des cours, si on veut vraiment faire quelque chose dans la formation professionnelle, je pense que ça compterait. Puis, en tout cas, je vais commencer avec ces deux-là, puis après ça, je reviendrais, si le ministre me le permet, sur le travail au noir qui est comme un cas en soi.

M. Cherry: O.K. Évidemment, là, comme je me dois, je l'ai dit tantôt, de présenter l'ensemble de mes réponses aux 62 recommandations au Conseil des ministres, c'est bien certain que, là, si tu sors la 39 ou la 19 ou la 22, et puis je veux dire quoi... Donc, O.K.

Mais, ceci étant dit, permets-moi, Michel, de dire que - et ça, là, il n'y a aucun doute dans notre esprit, je pense que ça va s'annoncer comme ça - la formation de la main-d'oeuvre, le recyclage, le réentraînement, c'est une priorité. C'est une priorité pour les travailleurs comme pour les entrepreneurs. Ils sont rendus au stade critique.

Et un exemple que je n'ai pas abordé, mais qui se rattache directement à ça, et que tu aurais pu également faire, c'est que 85 % des entrepreneurs dans l'industrie de la construction ont cinq travailleurs et moins. Donc, on ne peut pas s'attendre à ce qu'un entrepreneur qui a cinq travailleurs et moins, et puis il y en a 85 %...

M. Bourdon: ...paie leur formation...

M. Cherry: ...dépense de l'argent pour faire la formation de sa main-d'oeuvre. Il n'est même pas certain combien de temps il va l'avoir, puis s'il va la garder l'année prochaine et l'année d'après. Donc, à l'intérieur de ça, il est bien évident, Michel, qu'on se dirige vers quelque chose qui va prendre soin de ça.

Il y a également aussi, parmi l'ensemble des

métiers là, on aurait pu en faire la liste, mais on va dire qu'il y en a tout près de 30, si on veut. J'ai découvert, avec mes rencontres - on va prendre les gens de la CCQ, entre autres - qu'il y a certains corps de métier où n'a jamais existé de type de formation. Tu apprends ça sur le tas, au fur et à mesure que tu fais la job.

Alors, il me semble que, tu sais, il y a des choses, là... Et c'est pour ça que c'est un problème avec une dimension très large, et j'ai l'intention d'y répondre dans ce sens-là en disant, d'abord, ça fait partie... Et la formation est une priorité dans ce sens-là: recyclage, réentraînement, formation.

Quant aux jeunes travailleurs, ceux qui veulent y adhérer, on a annoncé des programmes des écoles hier. En d'autres mots, ce qui existait avant, les fameuses écoles des métiers de la construction qui ont existé, tu as raison, les travailleurs s'en rappellent. Ils disent que c'était la fierté à l'époque. Quand tu parlais de quelqu'un qui était issu du milieu de la construction de la province de Québec, ses services étaient recherchés non seulement au Canada, mais souvent dans des États américains. Et puis, on sait combien de Québécois ont fait leur réputation, pour leur qualité de travail dans l'État de la Floride, par exemple, ou ailleurs, puis ils ont même été recherchés à l'étranger.

Donc, dans ce sens-là, c'est important qu'on le fasse et on va s'y adresser de façon, je pense, très très méthodique. Ça, là-dessus, on se rejoint de façon très précise.

Tu voulais parler de quelque chose, du travail au noir, toi?

M. Bourdon: Du supplément à l'assurance-chômage, est-ce que vous envisageriez de le donner à ceux qui suivraient des cours, si vous ne le donnez pas à l'ensemble? Moi, je pense que votre promesse, c'était de le donner à l'ensemble, mais mettons que vous songeriez à modifier votre promesse rétroactivement, ça s'est vu en politique...

M. Cherry: Ah oui! Comme quoi par exemple?

M. Bourdon: Bien, par exemple, des travailleurs qui se recyclent...

M. Cherry: Un budget avant un référendum, et puis un autre après, non? Pas quelque chose dans ce genre-là, non? Vu qu'on...

M. Bourdon: Non, non, non. Mais écoutez, j'avance librement cette idée, puis je ne m'attends pas à ce que le ministre s'engage ce soir. Je dis que le supplément à l'assurance-chômage, s'il ne s'applique pas à l'ensemble, pourrait-on envisager qu'il s'applique aux travailleurs qui se recycleraient, qui suivraient des cours de formation professionnelle? Je veux laisser au ministre le temps d'y penser, je ne m'attends pas à ce qu'il dise oui comme ça, de but en blanc. J'ajoute une chose, en formation professionnelle, méfiez-vous du ministère de l'Éducation; c'est une bureaucratie redoutable. C'est pire que le Conseil du trésor. Tu entres un doigt là-dedans et tu te fais passer toute la main, tout le bras.

Parce que je commence à connaître ça, la formation professionnelle. Un gars de Vickers qui veut sa carte de soudeur et que le ministère de l'Éducation veut empêcher de suivre le cours pour la seule raison qu'il a passé l'examen d'équivalence en mathématiques, qu'il a passé l'examen d'équivalence en français, mais qu'en anglais, il a l'équivalent du secondaire III et leur norme est le secondaire IV. Bien, jusqu'à temps que tu trouves quelqu'un à la commission scolaire qui dit: Bien, bâtard! on va mettre secondaire IV en anglais sur sa feuille et on va lui faire suivre le cours.

Mais le travailleur en question qui avait subi la fermeture de Vickers, M. le ministre, il voulait souder. Pour être honnête, je préfère un soudeur avec qui ma galerie va rester là, mais qui n'est pas parfait en anglais, qu'un parfait bilingue et avec qui la galerie s'écroulerait. Mais essayer d'expliquer ça au ministère de l'Éducation, c'est infernal parce que la norme existe par et pour elle-même. C'est une norme. Et c'est la même logique que le Conseil du trésor quand il parle de rémunération des employés, c'est une logique bureaucratique classique. C'est qu'il y a une boîte, et si un pied dépasse de la boîte, on coupe le pied et on dit: À la longue, le propriétaire du pied va s'habituer à l'absence de son pied.

En termes de formation professionnelle, vos écoles, je trouve ça prometteur. Rapprochez-vous des parties pour que ça se fasse, et pas sur le tas, l'idée n'est pas là. Il faut que ça se fasse avec une formation théorique, une formation théorique et pratique, avec toutes les ressources de la technologie moderne. Je ne veux pas dire de faire ça à la mitaine, M. le ministre, mais méfiez-vous du ministère de l'Éducation. Pas parce qu'ils sont méchants, parce qu'ils sont 5000 à administrer, eux autres. N'oubliez pas qu'en formation professionnelle au Québec, actuellement, d'après M. Claude Béland au Forum pour l'emploi, il y a 12 000 fonctionnaires d'impliqués. 12 000 fonctionnaire d'impliqués à un titre ou à un autre dans la formation professionnelle, c'est un nombre de fonctionnaires bien trop élevé pour la santé du secteur en question. Parce que ce n'est pas de la...

Ce que je veux dire, c'est qu'il ne s'agit pas d'administrer la formation professionnelle, il faudrait qu'il y en ait. À cet égard, je pose la question: Est-ce que vous avez sondé les employeurs pour savoir s'ils seraient prêts à contribuer, parce que, pour revenir à votre exemple de l'entreprise qui a cinq employés, c'est une évidence que ce n'est pas une taille d'entre-

prise où Hs peuvent payer la formation en emploi ou la formation professionnelle à leurs salariés, sauf que je donne un chiffre juste aux fins d'illustrer mon propos: S'ils devaient payer 0,20 $ de l'heure pour la formation professionnelle en général et que ça représentait 2000 $ par année pour un petit entrepreneur de cinq salariés, il est certainement capable d'y faire face. Ce que je veux dire par la, c'est que, s'il faut financer la formation professionnelle, envisagez-vous de la faire financer en partie par l'ensemble des entrepreneurs de la construction? Parce que l'État devrait mettre de l'argent aussi et les salariés ne veulent pas en mettre. Je les comprends. Et les employeurs aussi ont la même réticence. C'est que tout ce monde-là paie des impôts. Mais si jamais ça accrochait au Conseil du trésor, est-ce qu'il y a des possibilités à cet égard-là?

M. Cherry: Encore un fois, l'habileté proverbiale de mon collègue pour tenter de me faire sortir à la pièce un des items...

Permettez, M. le Président, un parallèle concernant la formation de la main-d'oeuvre, sur une expérience que j'ai bien vécue avant de me joindre aux responsabilités que j'ai à l'heure actuelle. Au mois de janvier dernier, le ministre de l'Éducation est allé annoncer dans l'est de Montréal la première école pour les métiers de l'aérospatiale au Québec. Évidemment, c'est un secteur dans lequel j'ai oeuvré toute ma vie. On cite ça comme modèle; on dit que c'est le CAMAQ, le Centre d'adaptation de la main-d'oeuvre aérospatiale du Québec qui a été le propagandiste de la nécessité de cette école-là. Le CAMAQ est un organisme qui regroupe tous les syndicats, tous les patrons, et qui s'allie à des gens sur des dossiers bien particuliers, mais qui garde constamment la maîtrise de son affaire.

J'ai eu l'honneur et le privilège d'être le premier vice-président fondateur de CAMAQ de 1978 jusqu'en 1989. Je l'ai quitté pour accepter les responsabilités qui sont les miennes maintenant. C'est un succès, et le modèle de l'aérospatiale qui a été annoncé en janvier a maintenant été suivi. On est allés à l'école Pierre-Dupuy en mars pour annoncer certains métiers de la métallurgie, et tout ça, et hier, on annonçait les trois écoles du secteur de la construction. Chaque fois, ça se fait en très très très étroite collaboration avec ceux qui sont impliqués dans l'industrie.

Ça va même, dans le cas de l'industrie aérospatiale, jusqu'à être géré par les entreprises et les syndicats. La Commission des écoles catholiques de Montréal a fourni les locaux, il y avait une école qui était sous-utilisée ou presque fermée et il y avait même... Je veux dire que, pour le contenu des cours, les professeurs, ce sont les même entreprises qui doivent libérer des gens compétents dans certains domaines pour assurer qu'on va pouvoir donner du contenu qui va coller à la réalité. En d'autres mots, quand le travailleur va être passé là, il va pouvoir vraiment saisir l'aspect pratique de ça.

M. Bourdon: Même chose pour la pétrochimie dans l'est, le cégep Maisonneuve en fait.

M. Cherry: Oui, oui, Michel; ça va même plus loin que ça. Je vais prendre un secteur que je connais bien, mais qui, je pense, va illustrer jusqu'où on peut, quand on travaille ensemble, accomplir des choses vraiment importantes. On se plaignait du taux de chômage; on se souvient de la période 1977-1978 et du haut taux de chômage au Québec. Et pendant ce temps-là, le secteur de l'aéronautique devait aller recruter des compétences a l'étranger. Et on avait des ingénieurs ici, au Québec, qui se plaignaient de manquer de travail.

Ce qu'on a identifié, M. le Président, à l'époque - et je le dis pour mon collègue aussi - c'est qu'au Québec, quand on se plaignait dans l'industrie aéronautique qu'on n'avait pas d'ingénieurs québécois dans ce secteur-là et qu'on allait recruter à l'étranger, on s'est aperçu qu'il n'y avait au Québec aucune université qui donnait la formation nécessaire pour accéder à ça. Donc, c'était bien clair que chaque fois que l'industrie de ce secteur-là en avait besoin, il fallait qu'ils aillent recruter, ils allaient en France, ils allaient en Angleterre, ils allaient ailleurs et ils recrutaient.

Et s'ils passaient après Boeing qui avait passé l'année d'avant, ils ramassaient ceux qui restaient et ils le faisaient comment? Bien souvent, les gens de ces pays-là avaient l'obsession de l'Amérique du Nord. Ils prenaient une job au Québec, au Canada, mais il ne se passait pas bien bien de Noëls sans qu'ils aillent passer leurs vacances à Seattle et se "pogner" une job dans ce bout-là. On a modifié, aujourd'hui. Il y a cinq institutions de haut savoir au Québec qui donnent de la formation. On va même dans certaines spécialités où on a donné des bourses d'études à des gens d'ici qui sont allés se parfaire en Europe, par exemple pour les matériaux composés. O.K.? Parce que c'est très important, pour revenir ici et l'enseigner.

Mais des gens du milieu, Michel, de l'en seignement, des gens du milieu de l'entreprise privée, des ingénieurs dans cette spécialisation-là sont allés là-bas parfaire leur formation et sont revenus ici avec l'engagement de communiquer leurs connaissances. Et c'est quoi, le résultat, aujourd'hui? À peine 3 % des ingénieurs dont on a besoin dans le secteur de l'aéronautique doivent être recrutés à l'étranger. Donc, il y a eu des moyens et c'est ce qui fait que l'école d'aérospatiale a été suivie par celle de chez Pierre Dupuy dans les métiers de soudure; et hier, on a enchaîné avec les trois écoles de la construction. Tout ça exige une implication des gens du milieu.

Ce n'est pas sous l'égide du ministère de l'Éducation et des commissions scolaires. En d'autres mots, permettez-moi, ce n'est pas un professeur de catéchèse qui va se ramasser professeur, ce n'est pas ça "pantoute". On va avoir des gens qui ont une connaissance et une compétence et qui vont la partager. C'est dans ce sens-là qu'hier, on a annoncé les trois écoles. Et, seulement ce qu'on a annoncé hier, les trois écoles, ça crée 1700 nouvelles places-années, sans compter le recyclage et le réentraînement dans le réseau du Québec. Et ça s'est fait en étroite collaboration avec les entreprises et les organismes syndicaux.

M. Bourdon: Ce que je voudrais demander au ministre à cet égard, M. le Président, les écoles dont il parle, ce sont des pas dans la bonne direction, mais si on définit que, par hypothèse, il y aurait 60 000 travailleurs de la construction qui devraient élargir leur champ de connaissances, acquérir plus qu'un certificat, qu'une carte de compétence comme on dit encore, ça représenterait 10 000 ou 12 000 personnes par année à passer par des écoles ou en recyclage. Est-ce qu'il y a la capacité physique et financière de la part du gouvernement de faire un effort de cet ampleur-là? On parle des pays en avance sur nous-autres, et, au Québec et au Canada, en matière de recherche et de développement, on est en-dessous des États-Unis, de l'Europe de l'Ouest et du Japon, mais en matière de formation professionnelle, on a un retard très considérable. (17 h 45)

Vous me parlez, M. le ministre, de 1700 places; c'est intéressant, mais c'est une goutte d'eau dans la mer. Dans le fond, ce que je voudrais aussi savoir du ministre, c'est si on va avoir avant la fête nationale - et donc, bien avant le référendum sur la souveraineté qui a l'air de vouloir être retardé d'au moins un an - un échéancier pour un programme complet de formation professionnelle, de recyclage dans la construction pour faire en sorte qu'on se requalifie à ce égard-là? Et le ministre n'a pas répondu - il a dû l'oublier - est-ce que le gouvernement va faire quelque chose pour ce qui est de l'étalement des travaux de construction? Est-ce qu'il a des choses pratiques qui s'en viennent à cet égard-là?

M. Cherry: Moi, j'ai la conviction, Michel, que de la façon dont on va répondre à l'ensemble des recommandations de Sexton-Picard, on devrait trouver là des réponses dans le sens qu'on le souhaite.

Travail au noir

M. Bourdon: Et je voudrais, M. le Président, vous parler du travail au noir. D'après une étude réalisée par le Conseil du patronat, 31, 5 % des activités du secteur de la construction, 17, 6 % des services de garde d'enfants et 10, 8 % des services d'entretien domestique sont effectués de façon illicite. On dit qu'au Québec, le travail au noir représente au moins 1, 4 % du produit intérieur brut au Québec.

Alors, pour la construction, 30 % est un chiffre qui est dur à valider d'une certaine manière, parce qu'on évalue la clandestinité. C'est toujours dur de quantifier la clandestinité, sauf qu'on sait qu'il y a une énorme propension au Québec à déplacer la construction d'habitations neuves vers la rénovation, et la rénovation, c'est le domaine par excellence du travail au noir. Ça, c'est connu. Et à cet égard, j'ai une couple de questions à poser au ministre. Est-ce qu'il y a des mesures concrètes pour combattre le travail au noir? Ça, c'est une première question. Est-ce que ces mesures-là prévoient d'utiliser à la fois la carotte et le bâton? Parce que vous savez qu'il y a des pays où il y a eu des maquis et, quand on veut en finir avec la guerre civile et le maquis, on intègre les maquisards dans l'armée régulière. C'est une façon de passer ça. On ne peut pas penser que la répression à elle seule va réussir à régler le problème parce que le contrôle n'est pas facile.

Et, autre aspect qui intéresse beaucoup les syndicats de la construction: Est-ce que le ministre va revoir la loi où les syndicats ont fait une concession il y a quelques années? On a dit: O. K., quand une personne seule travaille dans une maison qui n'est pas neuve, c'est exclu du champ d'application de la construction. C'est rendu que les personnes seules sont associées à 30 sur un édifice à bureau, mettons. 30 personnes seules! On a beau dire que c'est tout seul qu'on est le plus nombreux, il y a là comme un problème. Est-ce que le ministre entend donner un peu de dents à sa loi? On a ouvert une porte et la porte s'est ouverte comme plus grande. J'ai lu des communications d'associations patronales régionales qui disaient: Appelle à tel numéro et on va l'expliquer comment cette loi-là peut être interprétée pour faire entrer un paquet de monde dans la construction. Écoutez, soyons clairs, à l'égard du travail au noir, la portée intentionnelle de la loi était: Si le député de Sainte-Anne fait peinturer le sous-sol de sa maison, il a le droit d'engager une personne à des conditions mutuellement convenues. Mais là, c'est parce qu'à coup d'une personne, on introduit ça sur les grands chantiers. Dans ce sens-là, c'est une partie du travail au noir qui est dans un no man's land légal, et on sait comment la Commission de la construction a du plaisir quand elle doit naviguer dans des no man's land; ce n'est pas simple. Est-ce que le ministre a l'intention de nous arriver avec des amendements à la loi à cet égard-là?

M. Cherry: La façon dont on entend y

répondre... Encore une fois, je reconnais son amabilité et son habileté, mais je vais résister à la tentation d'y succomber. Je n'ai pas l'intention de... Mais il a raison, c'est une préoccupation. Le travail au noir pour la rénovation, c'est vrai que ça fait partie de ça. Si ma mémoire est fidèle - elle pourrait être corrigée - on me disait que dans certains cas, par exemple, était reconnu comme de la rénovation... Il me semble que les gens se réfèrent à ça. Ils disent: Bien, quand tu finis ton sous-sol de bungalow... Bien ça, c'est quand toi, tu fais des travaux pour toi. O.K.? Mais quand il est question de... Même si t'es propriétaire. Si t'es propriétaire d'une maison à huit logements, c'est juste quoi? Là, je pense que c'est tout ça, Michel, qu'il faut regarder, c'est toute cette approche-là, pour définir les règles du jeu, pour définir la qualification des entrepreneurs, et ceux de la construction aussi. Je pense que ça fait référence un peu à ce que tu expliquais tantôt, là. On veut s'y adresser de la façon la plus globale possible, des deux côtés de la médaille, pour donner une chance aux vrais travailleurs et aux vrais entrepreneurs.

M. Bourdon: Maintenant, M. le Président, je voudrais ajouter deux questions, dans le fond. Est-ce qu'on a étudié, au ministère du Travail, récemment, le phénomène du travail au noir? Je pense à la construction, mais on peut penser à l'Industrie du taxi où il y en a un certain nombre. Puis, je vois dans les crédits que vous avez du monde qui voyage en taxi, là, et tant mieux pour les chauffeurs de taxi. Ce n'est pas ça, l'idée, mais est-ce...

M. Cherry: T'es pas contre ça? M. Bourdon: Pas du tout M. Cherry: Pas du tout.

M. Bourdon: Pas le moins du monde et...

M. Cherry: Ah! Je savais qu'on finirait par être d'accord sur quelque chose.

M. Bourdon: Je suis partisan de la syn-dicalisation des chauffeurs de taxi, puis j'ai espérance qu'un jour, vous convainquiez votre collègue de la Santé et des Services sociaux de la pertinence de permettre la syndicalisation des chauffeurs de taxi.

M. Cherry: Est-ce qu'il prend des taxis pour les hôpitaux?

M. Bourdon: Non. C'est que je pense qu'il a des amis dans le taxi, puis c'est un homme qui est fidèle en amitié. Mais sur le travail au noir, est-ce que le ministère a fait ou entend faire des études un peu plus pointues que ce qu'on a? Parce que je soulignerai au ministre qu'il n'y a pas que la construction. Dans le vêtement, du travail à domicile, il y en a en masse. Et je vais vous dire, il y a comme une résistance des organismes officiels à intégrer. Moi, j'ai eu une entrepreneure qui est venue me voir, dans mon comté, et elle voulait cesser de faire faire du travail au noir dans le vêtement. Son domaine, c'est le vêtement. Bien, quand elle a traité avec la CSST, je m'excuse, ça n'est pas parce que... Le ciel lui est tombé sur la tête dans le sens qu'elle prétendait qu'on devrait trouver quelque chose, parce que ça n'avait pas de bon sens d'assujettir à la CSST des gens qui travaillent chez eux et qu'en cas d'accident, ça créerait des problèmes insolubles. Quand les gens travaillent chez eux, me disait-elle, ça peut être la femme qui, officiellement, est à l'emploi, mais ça peut être le mari qui fait l'ouvrage pendant qu'elle est partie ailleurs, et autre chose. Puis est-ce qu'on peut avoir beaucoup d'accidents chez soi? Bon. Elle posait le problème.

Mais, ce que je veux dire, et je n'adresse pas de reproche spécifique à la CSST: Est-ce qu'il y a quelque chose, éventuellement, qui va être étudié pour permettre aux gens qui travaillent en dehors de l'économie officielle de réintégrer l'économie officielle? Et puis ça, ce n'est pas simple. L'Australie a fait une expérience probante. Ils ont annoncé que, pendant un an, ils donneraient l'amnistie à ceux qui fraudaient le fisc, entreprises et individus, et qu'après un an, ça revolerait. Ils ont ramassé des milliards, et ils les ont mis en règle. Mais ils ont commencé par amnistier, parce que l'amnistie, c'était la carotte, ce n'était pas le bâton. Une entreprise où le comptable dit: Un jour, vous allez vous faire "pogner" pour 500 000 $. Et on dit L'amnistie, et tu ne le fais plus jamais Et, en se faisant amnistier, ils s'Inscrivent pour être surveillés pour ne plus le faire. Est-ce qu'on envisage des mesures? Puis qu'est-ce que le ministre pense des recommandations de Sexton-Picard qui traitent spécifiquement du travail au noir?

M. Cherry: Parmi les pistes de solutions que je peux déceler dans ce que tu soulèves, c'est que ça ne se limite pas exclusivement, je pense bien, si je t'ai bien compris... Le travail au noir, c'est important dans Sexton-Picard. C'est une partie importante. Je pense bien qu'on l'a commenté, là, et on peut commenter davantage. Ce que tu m'indiques, Michel, c'est que ça ne se limite pas uniquement à l'industrie de la construction, mais que ça va dans d'autres domaines. Et parmi les solutions qui sont envisagées, je suis bien convaincu que, pas seulement la CSST, mais le ministère du Revenu aussi pourrait être une façon d'identifier, de régulariser, tu sais? Je pense que c'est l'ensemble de tout ça qu'il nous faut regarder.

Commission de la construction

M. Bourdon: Maintenant, pour rester dans la construction, M. le Président, j'adresserais une question au président de la Commission de la construction du Québec, qui est une question directe, là, parce que je ne veux pas convaincre le ministre de l'existence du problème, je sais qu'il s'en occupe, mais des fois, ce n'est pas simple. Alors, je demanderais à M. Fournier, avec la permission du ministre...

M. Cherry: Tu me la donnes, si je commence, je commence... O.K.?

Financement

M. Bourdon: O.K. Alors je voudrais savoir, en matière d'apprentissage, de formation professionnelle, en vote d'allégeance syndicale, à combien, à la Commission, ils estiment que le gouvernement devrait verser à la Commission de la construction du Québec pour que les employeurs et les employés de la construction ne paient pas des impôts pour faire faire des choses, et des contributions à la CCQ pour les faire faire une deuxième fois? Alors, c'est la question que je vous avais...

M. Cherry: Oui. C'est un secret qui, à mon avis, est au mérite des gens de l'industrie de la construction, des entrepreneurs et des travailleurs. Ils sont prêts a prendre en mains de bonnes responsabilités dans ce sens-là, et je pense qu'il ont besoin d'être aidés, là, tu sais, encadrés, quoi.

M. Bourdon: Mais M. le ministre, ce sur quoi j'insiste, c'est que je vois M. Des Trois-Maisons qui vous accompagne, il a déjà vu ou supervisé ou entendu parler de vote d'allégeance syndicale. Ça existe, ça, au Québec, et c'est payé à même nos impôts. Pourquoi pas dans la construction? Ils paient des impôts eux autres, les employeurs et les travailleurs. Le vote d'allégeance qui représente une couple de 100 000 $, me dit-on, si ce n'est pas plus, ils se le paient à même des contributions qu'employeurs et employés mettent pour appliquer le décret qu'ils ont négocié - ou qui leur a été imposé, là, c'est la mode - n'empêche, pour appliquer leur conditions de travail. Et les carnets d'apprentis, si je ne me trompe pas, c'est la Commission de la construction. À combien - et si je peux passer à travers le ministre pour m'adresser à la Commission de la construction du Québec - je voudrais savoir, elle est de combien, la réclamation? Ils ne sont pas rendus en cour comme la CSST, eux autres, mais combien demandent-ils pour les mandats publics dont ils s'acquittent?

M. Cherry: Mais je pense, Michel, qu'il ne faudrait pas non plus sous-estimer l'étroite collaboration qui existe entre le ministère du Travail et l'organisme et tout le secteur de la construction. Moi, je peux dire qu'on fait beaucoup beaucoup... En tout cas, moi, ça fait un peu plus que cinq mois que je suis au ministère du Travail et je t'avoue... Tu pourras me dire que c'est à cause de Sexton-Picard et d'autres - et d'ailleurs, je le dis aux travailleurs et je ne le leur reproche pas; c'est un constat que je fais - je dirais qu'au moins-Même si c'est important, là, les travailleurs de la construction représentent 5 % de la force globale de l'ensemble des travailleurs du Québec. Mais moi, chez nous, depuis que je suis là, j'y consacre au moins 50 % de mon temps. Tu sais, mon monde travaille, et ça, ça fait partie d'une série de services qu'on leur rend. Il y a des particularités qui leur sont propres, même dans le Code du travail. Tu parles du Code du travail, et après ça, tu parles du secteur de la construction. Je voudrais dire aussi que, dans le cas de ce qui s'appelle le décret de la construction, tu sais, une grande partie des choses sur lesquelles les parties entre elles se sont entendues font partie, là... Le gouvernement publie et ça devient le décret. Depuis que je suis là, j'ai eu à quatre ou cinq reprises à modifier le décret à la suite des ententes convenues entre les parties. Vous allez me dire: Tu sais, on travaille en étroite collaboration...

M. Bourdon: M. le Président, tout ça est parfait, mais ma question, c'est: Combien? Combien la Commission de la construction réclame-t-elle du gouvernement pour les mandats publics dont elle s'acquitte?

M. Cherry: Tu t'occupes de ça, Alcide, cet aspect-là?

Le Président (M. Bélanger): Alors, si vous voulez vous identifer, s'il vous plaît, pour les fins de transcription au Journal des débats.

M. Fournier (Alcide): Alcide Fournier, président-directeur général de la Commission de la construction du Québec. La demande qu'on avait adressée au gouvernement était à partir du budget de 1989. On avait prévu dépenser pour les différents mandats d'ordre public, ce qui va au delà de la formation et de la qualification de la main-d'oeuvre... On avait demandé une somme de... (18 heures)

M. Bourdon: Avez-vous la liste des mandats publics, de mémoire?

M. Fournier: C'est-à-dire que je peux vous donner la liste des choses qu'on avait demandées.

M. Bourdon: O.K.

M. Fournier: Alors, il y avait les frais du

comité de formation professionnelle de l'industrie de la construction, la mise à jour des devis de formation pour chacun des métiers, la mise à jour ou la fabrication - dans les deux cas - des devis d'apprentissage pour chacun des métiers, l'opération d'estimation des besoins en main-d'oeuvre et de la main-d'oeuvre - c'est-à-dire l'opération quantitative et qualitative - l'organisation des cours et le suivi de l'apprentissage.

Alors ça, c'était la partie formation, qui faisait un montant de 5 500 000 $. Dans la deuxième partie, identification des salariés, la reconnaissance des formations - c'est-à-dire mettre sur pied l'opération des acquis "expérien-tiels" - l'émission des certificats de compétence, les carnets d'apprentissage, la gestion du carnet d'apprentissage, la mise à jour des fichiers du MMSR, la diffusion d'information, les salariés occasionnels, la mise à jour des bassins de main-d'oeuvre, la référence de main-d'oeuvre - ces deux items-là concernent l'application du règlement de placement - et le vote d'allégeance syndicale.

Alors, pour les dépenses réelles, la demande était de 12 000 000 $. La dépense réelle en 1989 a été de 9 199 000 $.

M. Bourdon: Vous dites en 1989, 9 000 000 $, près de 10 000 000 $, c'est ça? Est-ce qu'on pourrait avoir le dépôt de ces documents-là? Je ne sais pas si...

Le Président (M. Bélanger): Juste pour des questions pratiques, on va avoir les galées. Comme il y a quatre commissions qui siègent et qu'on est la plus lointaine, ça peut prendre quelques jours de délai, au maximum une semaine, vous allez tout avoir dans les galées.

M. Bourdon: O. K., ça va. Donc, c'est une facture de 17 500 000 $. Je voudrais savoir du ministre: Où en sont les démarches avec le Conseil du trésor pour rembourser ça?

M. Cherry: C'est en gestation.

M. Bourdon: O. K. Alors, je souhaite bonne chance à la Commission de la construction. Mais M. le ministre, puisqu'on parle de ça, pour rester sur le même sujet, avant de passer à l'aspect spécifique de l'ensemble des mandats de la CSST, j'aimerais vous poser une question similaire pour ce qui est de la CSST. Pour l'inspection, est-ce qu'il va y avoir une entente à l'amiable entre le gouvernement et l'organisme qui dépend de lui pour les sommes assez appréciables qui sont réclamées par la CSST?

M. Cherry: On a eu un exercice, cet après-midi, en Chambre, à cet effet-là. Vous comprendrez qu'à partir du moment où une chose comme celle-là est devant les tribunaux, je fais confiance au système judiciaire.

M. Bourdon: Mais, M. le Président, on ne répétera pas la cachette de Norsk Hydro pour ce qui est de la CSST dans l'étude des crédits Comme disait ma vieille grand mère: Wo! les moteurs! La question est la suivante: Les établissements industriels et commerciaux au Québec sont visités par des inspecteurs pour s'assurer qu'il n'y a pas de gens qui se tuent. La CSST a ce mandat public et ce n'est pas aux employeurs à payer pour ça, c'est normalement payé à même le fonds consolidé de la province. Moi, la question que je pose, c'est... Je ne suis pas sûr, qu'à l'origine, c'était le meilleur endroit où envoyer l'inspection, à la CSST, simplement sous l'angle que, déjà, la compensation des accidents est quelque chose de très considérable. Je soupçonne que les gouvernements - j'inclus ceux du Parti québécois - avaient l'arrière-pensée de confier l'inspection là, parce qu'il y a de gros budgets et qu'on peut toujours se décharger de ses responsabilités.

Au niveau de la philosophie que ça comporte, M. le Président... Ça comporte des problèmes de demander à un organisme entièrement financé par les employeurs - dans le cas de la CCQ, c'est moitié par les employeurs, moitié par les salariés, mais c'est de même nature - d'assumer des fonctions qui sont des fonctions d'ordre public, des mandats publics, puis qui devraient être payées. En plus, il y a un problème, je pense, de conflit d'intérêts possible parce que les employeurs qui financent la CSST se trouvent à financer leur propre inspection. Ce n'est pas leur faire injure que dire que, dans un quartier délabré de Montréal, on ne cotise pas les "pushers" pour que la police vienne les arrêter, au besoin. Alors, c'est là-dessus, M. le ministre, que je voudrais savoir si l'inspection qui, quant à moi, pourrait se faire au ministère du Travail... Le ministère du Travail, M. le ministre, regardons ça, il a perdu des plumes depuis 10 ans, il a perdu énormément d'effectifs et de moyens. Il a perdu la main-d'?uvre puis il a perdu plus ou moins... C'est arrivé sous le Parti québécois... Ça, c'est sûr...

M. Cherry: Ah bon! On constate ça comme une perte, quoi?

M. Bourdon: Non, non, mais je n'étais pas là. Moi, je pense que ça a été une perte, effectivement. Puis je ne sais pas, dans mon parti, la décision qui se prendrait à cet effet-là. Mais, je reviens au ministre avec une question pointue: Quand le gouvernement va-t-il payer à la CSST l'inspection que la CSST fait? Si on assimile l'inspection à de la police, au sens correct du terme, pourquoi les employeurs paieraient-ils la police de leurs propres activités? Ce n'est pas de même nulle part dans aucun autre secteur. Puis à travers le ministre, c'est le Conseil du trésor que

je voudrais convaincre, mais il est sûr que ça pose des problèmes. Une autre question au cas où celle-là serait très brève à répondre: Qu'ar-rive-t-il de l'entente entre la CSST, les départements de santé communautaire et les CLSC en matière de prévention, qui est échue, je pense, depuis deux ans? Est-ce vrai qu'au lieu de s'intéresser aux conditions de travail dangereuses qui occasionnent des lésions ou des maladies professionnelles, on envisage un vaste programme de sensibilisation sur les maladies cardio-vas-culaires? Mes questions sont posées, M. le Président.

M. Cherry: II me semblait qu'on avait convenu qu'on finissait la construction, puis après ça qu'on passait à autre chose...

M. Bourdon: Non, mais M. le Président, j'ai terminé la construction par son financement...

M. Cherry: O K. J'aimerais le savoir, O.K.

M. Bourdon: Là, pour ce qui est de la CSST, écoutez, je ne me contenterai pas d'une réponse qui dit que c'est sub judice, parce que l'organisme poursuit le gouvernement qui dépend de lui. Une minute, là... L'organisme poursuit - je veux bien - parce que la loi obligeait le gouvernement à financer l'inspection, mais ça "va-tu" se régler bien vite?

M. Cherry: J'ai confiance, je sais que les pourparlers sont en cours. Même s'il y a eu des choses de faites, j'ai confiance que ça va cheminer dans le sens qui devrait être acceptable pour tout le monde, dans ce sens-là. Si tu as fini là-dessus... Tantôt, tu avais dit que tu souhaitais - pendant qu'Alcide est ici - tu souhaitais aussi parler, tu as dit, je ne sais pas comment tu as phrasé ça, les fausses cartes...

Trafic des cartes de compétence

M. Bourdon: Ah! Le trafic des cartes de compétence.

M. Cherry: Oui, bien...

M. Bourdon: J'ai ça quelque part.

Le Président (M. Bélanger): Si vous êtes d'accord, on pourrait faire une section complète pour libérer les gens qui sont concernés, en garder le moins possible, pas parce qu'on ne vous aime pas...

M. Cherry: ...quand tu as donné la liste...

M. Bourdon: On pourrait faire le trafic des cartes, puis libérer la CCQ pour aller souper, puis on se garde la CSST.

M. Cherry: Juste, Michel, puis Alcide complétera là-dessus. Je me souviens que, récemment, on a eu des déclarations à cet effet-là, mais les vérifications immédiates des faits ont prouvé exactement le contraire. On ne peut pas parler de trafic ni d'existence de ci, de ça. Il y a quelques cas bien bien isolés, on parle de un ou deux ici et là. La déclaration a été faite à Sept-îles. Peut-être Alcide, parce que tu as réagi immédiatement, on a envoyé des inspecteurs sur les lieux, veux-tu compléter dans ce sens-là?

M. Fournier: On a vérifié. D'abord, je pense que je peux vous rassurer, il n'y a pas eu de trafic de cartes de la CCQ. Je pense que pour bien comprendre, il faut voir comment se fait rémission d'une carte, en particulier pour les compagnons, parce qu'il s'agissait de compagnons. Actuellement, la certification d'un compagnon ou la qualification est donnée à un compagnon par le ministère de la Main-d'oeuvre. Lorsque le ministère de la Main-d'oeuvre émet la carte de compagnon, nous, à la CCQ, on émet une carte compagnon, une carte de compétence. C'est la partie de la loi 119 qui n'est pas encore transférée à la CCQ. Alors, dans le cas qui nous préoccupe, des gens, une personne en particulier, ont utilisé le fait que les monteurs-vitriers du verre plat - suite à une décision d'un tribunal - étaient devenus assujettis au décret de la construction. On avait convenu de reconnaître des cartes de compétence - soit charpentier-menuisier, soit ferblantier. Ils ont profité de la circonstance pour produire au ministère de la Main-d'oeuvre des documents qui ne reflétaient pas la réalité. C'est de cette façon que certaines personnes ont obtenu des cartes légales - si je peux dire - du ministère de la Main-d'oeuvre et que, par la suite, on a émis une carte de compétence légale de la Commission de la construction.

Ces faits ont été connus, je pense, l'an dernier. Celui qui avait trouvé le truc a été poursuivi et même condamné. Les autres personnes impliquées sont actuellement sous enquête de la Sûreté du Québec.

M. Bourdon: Dans cette question-là, il y avait quelqu'un du Conseil provincial des métiers de la construction qui avait dit qu'il y avait un trafic de fausses cartes depuis un moment et qu'il avait fait de grosses pressions auprès de la Commission pour que ça arrête. Est-ce que vous pourriez nous expliquer cette déclaration?

M. Fournier: Dans l'industrie de la construction, j'ai constaté qu'à peu près tous les trois ans, il y a des déclarations de gens qui peuvent acheter des cartes. On a autant comme autant tenté de vérifier toutes ces déclarations sans jamais pouvoir parler à une seule personne qui était vraiment au courant. Les seules personnes qu'on a pu rencontrer avaient entendu dire

que... Donc, dans aucun cas, du moins depuis les huit ans que je suis à la Commission, on a pu constater un seul de ces cas-là. L'émission des cartes de compétence à la Commission est centralisée. Elles sont modifiées chaque année. Alors, c'est très difficile pour une personne... Même si elle réussissait une année à utiliser une fausse carte, l'année suivante elle serait périmée. Donc, les risques sont minimes à ce niveau-là.

M. Bourdon: Alors, M. le Président, j'en ai fini avec la Commission de la construction. Je souhaite à la Commission bon courage dans le travail qu'elle effectue pour que les mandats publics lui soient remboursés mais...

M. Cherry: Elle en a un bon courage.

M. Bourdon: C'est ça.

M. Cherry: Elle a de l'espoir et du courage.

Le Président (M. Bélanger): M Alcide Fournier, on vous remercie beaucoup de votre présence ainsi que les gens de votre équipe qui vous accompagnaient. Si M. le ministre veut vous libérer, c'est son privilège maintenant. On vous remercie beaucoup. Bonjour.

Alors, on passe au dossier suivant?

Commission de la santé et de la sécurité du travail

Rapport du Protecteur du citoyen

M. Bourdon: Oui, la CSST. Je voudrais faire quelques remarques, des remarques que m'a inspirées la lecture du rapport du Protecteur du citoyen.

Dans son dernier rapport annuel, le Protecteur du citoyen émet une série de commentaires quant aux lacunes de la CSST. Il note tout d'abord qu'en première instance, beaucoup trop de dossiers sont réacheminés vers un deuxième palier. À cet égard, il suggère à la Commission de mettre l'accent sur la qualité du traitement des dossiers de première instance. Ce faisant, il pourrait, selon lui, y avoir une décongestion des paliers dits de révision.

Le Protecteur du citoyen croit également que, dans les 14 premiers jours après l'accident, la CSST pourrait déjà simplifier le processus. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que le Protecteur du citoyen soulève cette question.

En ce qui a trait à la preuve médicale, Me Jacoby croit qu'elle est souvent trop coûteuse pour le travailleur. À cet égard, je voudrais souligner que le syndicat des Métallurgistes unis d'Amérique, à la compagnie Noranda, dans mon comté de Pointe-aux-Trembles, vient de voter une cotisation spéciale pour payer les expertises médicales dont les travailleurs ont besoin quand ils ont affaire à la CSST parce que ça coûte, me dit-on, de 1500 $ à 2500 $, cette expertise médicale-là. Même si le travailleur a gain de cause, ça ne lui est pas remboursé. Il y a disproportion de moyens entre le groupe Noranda, propriétaire de l'usine qui embauche un spécialiste pour contester l'accident de travail ou la maladie professionnelle, et les moyens du travailleur individuel. Donc, ce syndicat-là que je connais, qui a 1100 membres, a été obligé de voter une cotisation spéciale pour payer ces expertises médicales. (18 h 15)

Les coûts peuvent atteindre plusieurs milliers de dollars et le Protecteur du citoyen s'interroge sur la capacité d'un travailleur disposant d'un revenu réduit de s'offrir une telle expertise. À cet égard-là, il faut rappeler qu'au Québec, à peine 40 % des travailleuses et travailleurs sont syndiqués et que, quand on tombe dans le secteur manufacturier à hauts risques, le pourcentage de syndicalisation est de 20 %. A cet égard-là, donc, il y a un problème. Me Jacoby, le Protecteur du citoyen, déplore aussi que la reconsidération administrative d'une décision soit difficile d'accès. Ça, c'est un euphémisme. On parle avec les députés de tous les partis. La CSST doit être infaillible parce qu'elle ne change jamais ses décisions.

Dans le cas des programmes de stabilitation économique et sociale - c'est un autre sujet - le Protecteur du citoyen croit qu'ils sont devenus trop complexes, trop judiciarisés et que cela rend la situation actuelle périlleuse pour la stabilité financière de certains bénéficiaires. Autres sujets traités par le Protecteur du citoyen, les cas de rechute où les délais d'attente sont beaucoup trop longs, la réadaptation sociale et professionnelle qui est parfois difficile à exercer et, enfin, la difficile cohabitation des régimes d'assurance automobile et de santé et de sécurité du travail Alors, une question d'ordre général: Qu'est-ce que la CSST a fait suite aux critiques formulées par le Protecteur du citoyen dans son dernier rapport?

M. Cherry: Dans un premier temps, M. le Président, comme mon collègue vient de le faire, d'entrée en matière, je vais faire des remarques d'ordre général et, après ça, je vais lister la chose plus spécifique.

Dans un premier temps, M le Président, je pense qu'on sera tous unanimes, indépendamment de la formation politique dans laquelle on est Quand entre dans nos bureaux de comté un cas de CSST, sur le plan humain, sur le plan personnel, c'est quelque chose de difficile Bien sûr, on n'est pas à l'aise avec ça On se sent parfois... On voudrait aider et bon... Je l'ai dit et je le répète, un accidenté du travail au Québec, ce serait un de trop. Donc, quand bien même on en voit souvent ou pas souvent dans nos bureaux de comté, on a toujours humainement la même réaction.

Je pense qu'en toute honnêteté pour l'organisme qu'est la CSST, il faut dire que 97 % de toutes les décisions administratives qu'elle prend ne font l'objet d'aucune contestation. Vous savez, je pense, là, qu'on pourra... C'est ça notre objectif, c'est de travailler à améliorer les 3 % qui font l'objet de nos préoccupations. Mais je veux dire que - si je me trompe, on pourra me corriger - de ces décisions administratives, le taux d'acceptation se situe autour de 97 %.

M. Bourdon: M. le Président, le ministre me permettra. C'est comme quand on dit qu'il y a 15 % de chômeurs à Montréal. Avant que le congrès libéral dise que c'est grave, le président du Conseil du trésor disait, en pratique: Pensez donc aux 85 % qui travaillent. Tous ceux qui sont indemnisés correctement, ils ne viennent pas nous voir. Tant mieux.

M. Cherry: Mais ce que j'ai voulu dire d'ordre général, c'est que je pense qu'il faut rendre à chacun... Le but de l'exercice, c'est qu'on puisse identifier des choses et les correctifs qu'on peut apporter. Mais si on ne parle que de ça et ne pas dire... Ça pourrait créer la perception que les gens qui sont ici et dont leur association professionnelle quotidienne est celle de bien faire marcher ça, ont l'impression qu'on ne parle que de choses qui ne vont pas bien et qu'on ne le reconnaît jamais. Bon! Peut-être que c'est une déformation ou une formation de celui qui vous parle, mais j'ai passé ma vie à défendre des gens que je croyais injustement attaqués. Alors, avant que je m'attaque à vouloir améliorer ce qui doit être amélioré, j'ai un réflexe instinctif qui me dit: Avant qu'on s'engage là-dedans, je veux, dans un premier temps, établir les balises et dire que près de 97 % de toutes les décisions qui sont prises par la CSST ne font pas l'objet de contestation. Ça me semblait élémentaire de dire ça.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, si vous permettez que je vous interrompe une seconde. Je suis content que vous me donniez ce chiffre-là parce que ceux qui viennent chez nous, c'est sûr que ça a échoué dans le système chez vous, moi, je vois 100 % de gens qui ont des troubles avec la CSST. Alors, la perception qu'on a est toujours négative, c'est évident. Qu'est-ce que tu veux? Des fois, c'est compliqué en maudit. Quand ils me disent: C'est une entorse lombaire ou cervicale, je dis: Mon oeil! il n'y a pas gros de zèle dans ces dossiers-là parce que je suis porté à croire qu'il y a bien des gens qui exploitent le système là-dessus. Mais il y a des cas qui me semblent assez évidents. Le type est en recours, puis on se fait dire: Là ça va passer en recours. Ça passe dans trois ans. Tu dis à ton gars: Bon, bien, tu vas passer dans trois ans. Là, tu te sens un peu plus mal. C'est peut-être plus là que... Qu'il y ait 90 % des cas de réglés, je trouve ça fantastique, mais, comme je vous le dis, ma perception, moi, ce n'est pas ça que je vis, et je pense que mes collègues vont vous dire la même chose.

Une voix: Exact.

Délais d'appel

M. Bourdon: Ce que j'ajouterais à cet égard-là, c'est que l'assurance automobile aussi c'est 3 %. L'ensemble de la mécanique de révision prend un an. Alors, on écrit à la Société de l'assurance automobile et on obtient ce qu'on n'obtient pas de la CSST, c'est-à-dire qu'on obtient une vraie réponse. À la CSST, je pense que c'est un ordinateur qui nous répond. Ça dit: Mme Unetelle va passer au bureau de révision paritaire en juillet 1992. Bravo! Mme Unetelle fait peut-être partie juste du 3 %, mais, pour elle, c'est le drame de sa vie.

M. Cherry: Je pense, Michel, que tu avais aussi parlé dans un deuxième temps des BRP. C'est ça, hein? O. K. Ton commentaire c'est que c'est long, que ça prend bien du temps là-dedans et encore une fois pour celui qui souffre, qui attend une réponse, c'est toujours long. O. K. ? Alors, il y a eu la mise en place d'un plan de redressement. En 1989, M. le Président, juste pour se donner une date de référence, le délai moyen était de 15 mois. Ça, c'est en 1989. Au mois de novembre 1990, ce délai-là était réduit - temps toujours trop long - à neuf mois. Donc, de 15, on est passé à 9 mois. En avril de cette année, au moment où on se parle, le délai moyen de convocation est de sept mois. Donc, de 15 en 1989, on est rendu à 7 à 8 mois à peu près, ça joue dans les fractions. L'objectif que s'est donné l'organisme, c'est que ce soit 3 mois d'attente dans toutes les régions du Québec. Cet objectif-là est fixé pour décembre de cette année. Comme vous voyez là, on y va, et je dois vous dire que dans certaines régions du Québec... Évidemment, à cause de l'achalandage qui peut être moindre dans certains cas, on est déjà rendu à trois mois. Donc, ce qui était une moyenne de 15 mois est maintenant rendu à 7 et une fraction, et l'objectif pour la fin de cette année est de 3. Ça me semble quand même une indication de données que, dans le plan qui avait été déposé, les efforts que les gens de la CSST font commencent à porter fruit. Mais, encore une fois, je le dis toujours pour reconnaître les efforts des gens qui ont fait ça.

La réduction des délais entre l'audition et la décision. Avant, en moyenne, ça prenait 53 jours. Au moment où on se parle, c'est devenu 35 jours. Il faut le dire, il y a une amélioration. C'est pour ça que les gens sont confiants que, dans cette foulée, dans la poursuite de ça, on va continuer à s'améliorer. Pourquoi peut-on y arriver? Évidemment, il y a eu toutes sortes de

mesures administratives. Entre autres, pour faciliter le mode de fonctionnement, il y a eu un manuel d'opération qui a été confectionné et qui est distribué dans l'appareil au fur et à mesure que se prennent des décisions. En d'autres mots, tout le monde travaille de plus en plus de façon méthodique et coordonnée. Évidemment, il faut mettre ça sur pied, ça prend du temps. Après avoir pondu ce manuel-là et qu'il est approuve, il faut que tu formes les gens, les utilisateurs de ce manuel-là, puis tu le raffines, tu le rajustes, mais c'est ce qui donne la sorte de résultats que j'annonce aujourd'hui. Dans ce sens-là, on y va.

Le Président (M. Bélanger): Je trouve les résultats très intéressants parce que je dois vous avouer que ma perception, ce n'était pas ça pantoute. C'était le fouillis et le bordel. Qu'est-ce que vous voulez? Je vois juste ceux pour qui ça ne marche pas. Ceux pour qui ça va bien, ils ne viennent pas me voir et je n'en entends pas parler. Je ne sais même pas qu'ils sont allés chez vous. Comment ça se fait que cette perception-là persiste? Je suis convaincu que, si vous faites le tour des bureaux, ils vont tous avoir la même perception, autant d'un bord que de l'autre.

M. Bourdon: M. le Président, on écoute les chiffres, c'est à peu près comme une expression que M. Parizeau aime utiliser de temps en temps. Il dit: Je ne connais pas la température moyenne d'un corps dont la tête est dans un frigidaire puis les pieds dans un fourneau. Ce que je veux dire, c'est que les chiffres, ça a une importance toute relative. Je vais prendre juste un cas, juste pour montrer au ministre ce qui se passe à la CSST. Un policier à la retraite - ce n'est pas un pauvre, il n'est pas mal pris, il a une pension de 32 000 $ indexée - lui, les deux années précédant sa retraite, il était agent de liaison à la cour. Un matin, il est sorti de l'ascenseur - il y avait eu une fuite d'eau dans le toit - il est tombé puis il s'est fait mal au genou. Il n'a jamais perdu un seul jour de travail, mais il a vécu des péripéties nombreuses. Ça lui a pris deux ans pour se faire soigner le genou. Ça, ça ne regarde pas la CSST. À un moment donné, il y a quelqu'un qui lui a dit: Tu devrais réclamer ce que ça t'a coûté pour finir par te faire opérer le genou puis avoir une physiothérapie. Il a adressé à la CSST une réclamation de 1238 $, il y a deux ans. Ce n'est pas réglé encore. La CSST a commencé par dire: Tu es hors délai. C'est de même qu'elle traite le monde: Tu es hors délai. S'il manque un papier, on ne le dit pas à la personne, puis, trois ans après, elle apprend qu'elle avait oublié de fournir un papier ou que le certificat du médecin n'était pas signé. Ça, M. le ministre, les statistiques ne montrent pas ça, mais le monde vit ça. 1238 $. La Fraternité des policiers - parce qu'il était rendu retraité - lui a fourni un avocat. L'agent de réclamation de la CSST lui a dit: Si tu te penses fin parce que tu as un avocat, on va te planter au bureau de révision paritaire. Il a gagné au bureau de révision paritaire. Ça n'est qu'une étape quand tu gagnes quelque chose contre la CSST, parce que, après, on a dit que, son genou, ça venait de sa condition personnelle. Là, lui, il a l'intention de dépenser 12 000 $ s'il le faut pour avoir son 1238 $. Il a payé des impôts pendant 30 ans, le Service de police de la CUM a payé la CSST pour lui pendant 30 ans et il fait une réclamation. Sa façon à lui de prendre l'attitude de la CSST, M. le ministre, c'est de trouver qu'on l'accuse d'être malhonnête. Il est policier, puis il est honnête. Alors, on "va-tu" dépenser 123 000 $ pour ne pas lui donner ses 1238 $? "C'est-u" un fraudeur, lui? Il n'a même pas perdu une journée d'ouvrage. Je le prends parmi d'autres, pas pour que la CSST me le règle, c'est de même que le système marche.

Autre point qui nous est rapporté par les centrales syndicales, M. le ministre. Quand un cas se règle à la CALP puis qu'il y en a 104 semblables, on ne veut pas régler les 104 autres. J'aimerais ça un jour qu'on me réponde là-dessus autrement que pour me dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, comme dans Le Château de Kafka. Ce n'est pas vrai que ça va mieux. Ce n'est pas vrai que ça s'améliore. C'est puant comme système, puis le monde n'est pas traité avec justice. M. le ministre, moi, je vous pose des questions précises. C'est bien beau le délai pour aller au bureau de révision paritaire. Pourquoi ils sont trois aux bureaux de révision paritaire? Ça ne serait pas mieux de payer l'expertise médicale puis la défense des gens qui s'en vont au lieu d'en avoir trois? Pourquoi il y en a trois à la révision médicale? Ça ne serait pas mieux d'en avoir juste un, puis l'argent épargné, de le donner à ceux qui se défendent puis qui font valoir qu'ils ne sont pas d'accord avec la décision de la CSST? Pourquoi est-ce que l'employeur, automatiquement, peut envoyer le salarié qui a un accident chez son médecin? Si je vous frappe, M. le ministre, en automobile, je vous "envoie-tu" chez mon médecin, en plus, vérifier si c'est vrai? C'est la Société de l'assurance automobile qui décide ça toute seule. Alors, ce que je veux dire, c'est que c'est de la "bullshit" - pardonnez-moi l'expression - de nous dire: C'est rien que 3 %, que le diable les emporte. La Société de l'assurance automobile fait bien mieux que la CSST, elle règle les cas plus vite. Il y encore des litiges, mais ça se règle. (18 h 30)

L'autre problème qui est posé depuis 1931, ce n'est pas d'hier: Comment se fait-il que la CSST se comporte comme une compagnie, une mutuelle d'assurances patronale, hostile aux travailleurs? C'est ça, qu'elle est. C'est ça, qu'elle manifeste. Quand elle peut trouver un moyen de ne pas payer puis d'embêter, elle le fait. Ça, M. le ministre, je regrette, là... En plus,

y aurait-il moyen qu'on obtienne ceci de la CSST: considérer que le Parlement a le droit de poser des questions sur ses activités? Ce n'est pas vrai que c'est privé, ce n'est pas vrai qu'elle administre toute seule. Moi, les gens du milieu syndical et pas les moindres - je vous les nommerai en privé - me disent que les avocats et les médecins de la CSST sont tellement hostiles aux requérants qu'il n'y a pas moyen de réformer ça. Il faudrait qu'ils partent. "C'est-u" clair ça? C'est ça qu'on a dans nos bureaux de comté, des gens... 3 % de 200 000 cas par année, ça fait juste 6000 personnes qui n'obtiennent pas justice. Là, le président de la CSST va nous dire: Le délai moyen, le délai moyen. C'est quoi la température moyenne d'un corps dont la tête est dans le frigidaire et les deux pieds dans un four? J'aimerais ça... Un exemple, je vais poser une question au président de la CSST.

Arbitrage médical

Est-ce que c'est normal qu'en révision, qu'en arbitrage médical, le président et le médecin représentant l'employeur soient de la même clinique médicale privée? J'aimerais ça, juste voir quelle sorte de réponse on pourrait avoir.

M. Cherry: Avant qu'il enchaîne là-dessus... Ça fait déjà un bout de temps qu'on fait des commentaires. Ça fait déjà deux heures, et on a réussi jusqu'à maintenant à avoir un bon ton.

M. Bourdon: Ah oui! ça va bien.

M. Cherry: Mais je réalise que quand on parle de la CSST, on devient rapidement émotif. C'est normal parce que ça nous touche de près. C'est des gens accidentes, des gens qui souffrent, et, bon, c'est toujours trop long pour ça. J'ai pensé qu'en introduction, ça valait la peine qu'on établisse des choses qui, à mon avis, rendent justice à l'organisme mais qui ne font en aucune façon diminuer l'amélioration qui doit être apportée et dont on aura l'occasion de parler. Je veux juste rappeler à mon collègue, je sais qu'il le sait, mais il me semble que c'est important qu'on dise ça. Quand il dit: Comment ça se fait que dans tel type de bureau de structure, ils sont trois? Il ne pourrait pas être rien qu'un à la place? Je pense que vous me l'avez dit à l'interpellation ou à un débat de fin de séance, si je me souviens bien. Je veux juste rappeler que la loi, toute l'orientation de la loi concernant la CSST, tu sais, c'est le paritarisme tout le long. La loi a été faite comme ça.

M. Bourdon: Oui, oui.

M. Cherry: Écoute, à l'époque, maudit, j'étais dans le milieu syndical. Je me souviens, c'était Pierre Marois qui a été ministre qui a rentré cette loi-là et partout partout, on insistait pour impliquer, responsabiliser les partis, les impliquer partout. Là, aujourd'hui, on me dit que c'est parce que, justement, tous les partis sont représentés que ça prend plus de temps. Il me semble qu'on remet en cause le fondement même de tout le concept. Si c'est ça, j'ai besoin de l'entendre de ta part. Là, on est en train de dire qu'il y a des places où - parce que tout le monde est représenté - ça prend plus de temps. Tu suggères quoi, en réplique à ça, Michel?

M. Bourdon: M. le Président, c'est une question...

M. Cherry: C'est ça que je veux savoir.

M. Bourdon: ...double que je pose. Est-ce qu'il y aurait moyen d'assumer l'expertise médicale qu'une personne mécontente d'une décision de la CSST utilise? Est-ce qu'il y aurait moyen d'envisager ça et de l'aider à assumer sa défense? Le principe est assez simple. Si l'employeur est une multinationale au chiffre d'affaires de 9 000 000 000 $, l'employeur a plus les moyens d'embaucher un témoin expert, un médecin et un avocat que la personne qui requiert contre la CSST. Bon, c'est ça. C'est la première chose.

M. Cherry: Je ne sais pas, Michel. Le paritarisme, remets-tu ça en cause comme structure, comme fondement...

M. Bourdon: Écoutez bien, M. le Président... M. Cherry: ...comme fonctionnement? M. Bourdon: ...je reviens... M. Cherry: Je veux juste savoir.

M. Bourdon: ...à mon exemple de l'assurance automobile. Si je frappe un piéton, pourquoi on entrerait dans une relation de paritarisme lui et moi? Pourquoi je pourrais le traîner devant mon médecin? C'est sûr que c'est au législateur de décider si la loi est correcte. Mais je résumais ma question à quelque chose de ciblé moins large parce que j'espère que la commission aura l'occasion de revenir sur la façon dont la loi ordonne les choses. Je pense que le paritarisme a été un échec parce que le patron ne veut pas toujours payer. Il n'est pas intéressé, et la CSST prend systématiquement le parti du patron. Il y a même un temps, vous le savez, M. le ministre, où la CSST contestait parfois à la place du patron même quand il était d'accord qu'il y avait eu tel accident et que ça avait telle conséquence. Or, ma question est claire, nette, simple et précise. Est-ce que la CSST envisage de trower un moyen de payer les expertises médicales dont le salarié, de son côté, a besoin pour avoir une

défense pleine et entière, et de payer aussi son procureur? Pourquoi est-ce qu'on obtiendrait justice ou pas selon qu'on a les moyens de donner 2 500 $ pour un témoin expert ou pas?

M. Cherry: Oui, je pense Michel qu'on va convenir que, quand on parle des gens équipés pour se faire représenter devant les instances... Tu te référais tantôt aux Métallos de Noranda, dans ton coin, bon. T'as raison quand tu dis que, quand tu fais partie d'un gros syndicat ou si t'es un employeur important ou bien structuré, t'as raison, il y a plus de facilité, je pense que c'est ça que tu disais. Mais je pense que, quand on regarde la composition des petits patrons aussi, tu sais, H y en a bien qui n'ont pas grand monde qui travaillent pour eux là. Je ne suis pas certain Michel que si on ne fait pas cette distinction-là de dire... On a l'air à dire que aussitôt que tu es un boss, même si t'as deux gars qui travaillent pour toi là, tu deviens une espèce de méchant qui ne veut pas payer personne, qui ne veut pas prendre ses responsabilités.

M. Bourdon: Tous les employeurs sont bons, M. le ministre. Je veux savoir: La CSST qui a un budget de 1 500 000 000 $, envisage-t-elle qu'un citoyen ordinaire qui conteste sa décision, se fasse rembourser par la CSST au moins les frais de son expertise médicale? Je pose une question claire, nette et précise... Pas son employeur qui pale. La CSST, à même le 1 500 000 000 $ qu'elle reçoit chaque année pour ça, est-ce qu'elle pourrait faire ça? À titre de suggestion, est-ce qu'elle accepterait l'idée que s'il y avait moins de médecins à l'arbitrage médical, ça ne dérangerait que les cabinets privés de médecins qui font de l'argent avec ça, puis ça coûterait moins cher et à la CSST et aux employeurs? Un jour, je vais démontrer que les employeurs paient très cher, eux aussi, pour refuser d'indemniser les gens correctement, à l'occasion.

M. Diamant (Robert): Robert Diamant, président de la CSST. Je ne sais pas si je peux ajouter... Je comprends très bien les propos de M. Bourdon. Ceci dit, l'arbitrage médical est un mécanisme de révision des décisions rendues par le médecin traitant. À l'origine, le médecin traitant émet une opinion, diagnostique une maladie ou une lésion, et ce diagnostic-là lie la Commission. Dans la mesure où des doutes sont perceptibles quant à la décision ou au diagnostic du médecin, à ce moment-là, il est possible de contester. Puis, il y a trois parties qui peuvent contester: l'employé lui-même, lorsque ça ne le satisfait pas, l'employeur et la CSST.

Il faut savoir qu'au fil des ans, la CSST a joué un rôle de contestation assez important en se substituant parfois à des employés, parfois à des travailleurs, parfois à des employeurs. Depuis quelques années, non, depuis peut-être un an ou deux, la CSST ne conteste à peu près pas les décisions.

Ce qui est évoqué par le député, c'est la possibilité que les petits employeurs ou les travailleurs moins bien nantis, non représentés par leurs instances syndicales, puissent obtenir une subvention. Quant à nous, à la CSST, dans la mesure où il s'agirait d'une volonté des parties, je vous dis que comme organisme nous nous plierions à ça. Par ailleurs, je ne vois pas comment une chose comme celle-là pourrait se gérer techniquement, sans créer d'une façon ou d'une autre une certaine distorsion.

C'est sûr et certain que les grandes entreprises vont toujours conserver une capacité de se faire représenter, un moyen de se faire représenter qui est plus grand. Bien sûr, il y aurait probablement moyen de trouver des critères pour permettre l'assistance. Mais la CSST, comme organisme... Je vous rappelle que l'arbitrage médical, c'est un mécanisme qui est prévu par la loi, que les modalités de fonctionnement du mécanisme n'appartiennent pas, le contrôle de ça n'appartient pas à la CSST, ce mécanisme-là étant la révision de décisions prises ailleurs qu'à la CSST.

M. Bourdon: Une question au président de la CSST. Estime-t-il qu'il y a conflit d'intérêts quand le président d'un conseil d'arbitrage médical et le médecin de l'employeur appartiennent à la même clinique privée?

M. Diamant: Le médecin de l'employeur et l'arbitre médical?

M. Bourdon: Et l'arbitre médical.

M. Diamant: Oui, je pense que ça mériterait d'être regardé. J'ai l'impression que oui, mais je n'ai pas l'impression que c'est une chose qui arrive très souvent.

M. Bourdon: Comme ça arrive par-fols - d'après ce que vous dites - en feriez-vous un mémo interne pour dire qu'il y a situation anormale quand deux des trois membres viennent de la même organisation?

M. Diamant: Je pense que les personnes qui sont là sont en mesure de poser de telles... Il faut savoir aussi que le système d'arbitrage médical n'est pas administré par la CSST. Je pense qu'il est bon de savoir ça. Quand on parle des mécanismes de révision et d'appel, le seul mécanisme qui est administré par la CSST, ce sont les bureaux de révision paritaires qui conservent, en raison même de leur statut, une indépendance par rapport à l'administration de la CSST. Mais la gestion générale relève du président de la CSST, dans une structure qui lui conserve son indépendance. Mais les autres mécanismes ne sont pas administrés par la CSST.

L'arbitrage médical est un mécanisme prévu par la loi et le service d'arbitrage médical relève du ministre du Travail, directement de son ministère. Les BRP sont encadrés par une législation, une réglementation, et relèvent administrative-ment du président de la CSST.

M. Bourdon: Oui.

M. Diamant: La Commission d'appel en matière de lésions professionnelles relève du ministère de la Justice...

M. Bourdon: Oui.

M. Diamant: ...et elle est financée par la CSST. Il faut savoir que la CSST n'a aucune autorité sur ce mécanisme-là. Elle ne fait que payer la facture dont elle apprend l'existence et le montant quand elle lui est envoyée. Je pense que c'est important de placer ces choses-là. Dans la foulée des mécanismes de révision, le premier mécanisme de révision, c'est celui de la reconsidération administrative. La loi, l'article 369, décrit formellement le mécanisme de révision administrative, de reconsidération administrative, et décrit dans quelles conditions ce mécanisme-là, la révision, la reconsidération, peut se faire. Il faut savoir que les fonctionnaires de la CSST n'ont aucune possibilité de reconsidérer leur décision à moins qu'il n'y ait un fait nouveau qui soit porté à leur attention.

M. Bourdon: Oui.

M. Diamant: Dans ce contexte-là, il est vrai qu'à certaines occasions, en révision de dossier, une fois que la décision est rendue, nous pourrions modifier notre décision. Mais nous en sommes empêchés par la disposition qui est là. Ceci pour, je pense, à la demande des parties...

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, il y avait le député de Beauce-Nord qui avait une question.

M. Audet: Non, je dois quitter. En tout cas, on aura l'occasion de...

Le Président (M. Bélanger): Bon, on s'excuse. Je m'excuse, M. le président.

M. Diamant: Je pense que c'est important de revoir les mécanismes de révision et d'appel des décisions de la Commission dans leur juste perspective.

M. Bourdon: Mais, M. le Président, une question que je poserais au président de la CSST. Je savais déjà que le bureau de révision paritaire dépend de la CSST et fait partie...

M. Diamant: Oui, du président de la CSST.

M. Bourdon: C'est ça. Le président fait partie de la CSST, la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles dépend du ministère de la Justice et l'arbitrage médical dépend du ministre du Travail. Alors, je vais demander au ministre du Travail s'il ne pourrait pas émettre une directive précise à l'égard des conflits d'intérêts quand deux des trois médecins proviennent de la même clinique. Mais à cet égard-là, sur le mérite, je connais les contraintes, est-ce que le président de la CSST ne pense pas qu'on pourrait trouver des mécanismes de révision et d'appel plus rapides et plus efficaces que ceux qu'on a actuellement? Le justiciable, ce dont il a à se plaindre, ça peut être de la décision, mais une décision après un an, c'est moins enrageant qu'une décision défavorable après cinq ans, pour prendre juste cet exemple-là. (18 h 45)

M. Diamant: Moi je pense, au surplus, que la meilleure décision... Quand les décisions sont bonnes au départ, il y a moins de contestation possible. Un des objectifs de la CSST, c'est de faire en sorte que les décisions originales soient les meilleures possibles. M. le ministre parlait tantôt du nombre de décisions non contestées. Je pense que c'est important de revenir là-dessus, même si vous avez donné l'exemple de la tête au frigo... Il me semble que quand on considère qu'il y a, bon an, mal an, entre 240 000 et 250 000 réclamations par année et que, pour chaque réclamation, il y a en moyenne quatre décisions qui se prennent, ça fait autour de 1 000 000 de décisions. Qu'il y en ait 15 000 ou 16 000 qui sont contestées, je pense qu'à ce moment-là, on peut parler d'une bonne performance générale de l'organisation. Ceci dit, on n'empêchera jamais - c'est pour ça qu'il y a des mécanismes de révision et d'appel - les contestations. Pour les contestations, quand on regarde chacun des mécanismes, au niveau de l'arbitrage médical, il me semble qu'on peut constater des problèmes dans la mesure où 50 % des décisions prises par les arbitres médicaux sont portées en appel à la CALP et que 60 % et même plus, je crois, que ces décisions sont renversées, je pense qu'il y a un problème. Il y a un problème de qualité de fonctionnement du mécanisme, et là-dessus, le ministre du Travail s'est intéressé à cette question-là. Disons, qu'il est à la recherche de moyens pour bonifier le mécanisme dans la mesure où il est possible, comme vous me le dites, d'assurer un meilleur traitement des dossiers d'arbitrage médical. Je pense qu'on éviterait d'engorger par la suite les structures de révision du mécanisme d'appel.

M. Bourdon: Maintenant, une autre question qui me vient à l'esprit. Pourquoi faut-il que le travailleur soit astreint à l'expertise du médecin de l'employeur alors qu'en matière d'assurance automobile, la seule expertise médicale qui est

requise par la loi à la Société de l'assurance automobile, c'est la propre expertise de la Société. Ce que je veux dire, là, ce n'est pas simpliste de le dire de même. Si je frappe un piéton, je n'aurai pas mon mot à dire dans son indemnisation. Pourtant, je paie autant que les employeurs paient pour faire vivre la CSST. C'est mon certificat d'immatriculation qui fait vivre la Société de l'assurance automobile. Je dis ça parce que... Est-ce que M. Diamant conviendrait que la manière dont les appels sont prévus fait que le processus est comme judiciarisé dès le départ? Les parties prennent des positions, et il y a des avocats et des médecins qui embarquent dans le processus pour aboutir à une révision. Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est judiciarisé à l'excès?

M. Diamant: La loi est ainsi faite. La loi reconnaît à l'employeur, comme à l'employé, le droit de contester la décision du médecin traitant. De ce point de vue-là, bien, à l'origine, le régime lui-même reconnaît le choix du médecin, on le dit, c'est le seul... Tous les régimes, je pense, reconnaissent le choix du médecin. Le seul régime qui, au Canada, reconnaît que le diagnostic médical lie l'organisme, c'est le régime québécois. Il y a des raisons, j'imagine, je n'étais pas là quand la discussion s'est faite pour faire ce choix-là. J'imagine que c'était important de permettre cette chose-là dans la législation, dans la mesure où, au Québec, l'accessibilité aux services ou au choix du médecin est importante. Aussi, le rôle reconnu à la profession médicale dans ce type de régime-là est particulier.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. À l'écoute de mon collègue de Pointe-aux-Trembles, il a mentionné une figure qui était peut-être un réflexe du passé qui allume une lumière. Il a mentionné, M. le ministre, que le budget qu'avait administré la CSST était de 1 500 000 000 $. Ça m'a allumé une lumière en me disant: Bon, l'année financière est probablement terminée à la CSST, est-ce qu'on pourrait avoir une idée de l'évaluation des performances de la CSST versus les revenus et dépenses?

M. Cherry: Je ne veux pas oublier ta question, Jean-Guy, je vais y arriver tout de suite. Juste pour permettre d'enchaîner sur un aspect que notre collègue de Pointe-aux-Trembles a soulevé concernant les règles d'éthique par rapport aux professionnels. Je pense que si j'ai bien saisi, c'est dans ce sens-là. Pendant qu'on en parlait, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre a émis un document à l'intention des professionnels de la santé. "Les professionnels de la santé qui sont intéressés à agir comme arbitres en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles..." Je m'en vais tout de suite à l'aspect qui nous préoccupe. Il y a des règles d'éthique applicables aux professionnels de la santé qui acceptent d'agir de la façon dont tu le dis. Dans le préambule, c'est bien clair, on dit que le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre détermine certaines règles d'éthique applicables aux professionnels de la santé qui acceptent d'agir comme arbitres pour les fins de l'article 216 de la loi sur les maladies professionnelles. Toute personne dont le nom apparaît sur la liste"... Il faut savoir que la liste des médecins est confectionnée, en totalité, à partir de noms qui nous sont fournis par les corporations intéressées. C'est comme ça que ça vient, c'est comme ça que la liste est bâtie, ce n'est pas nous qui choisissons les intervenants, donc c'est bien à partir de cette liste-là. Dans la description de l'impartialité, Michel, ça dit: "L'arbitre doit être libre de toute attache permanente ou contractuelle avec un employeur ou une association d'employeurs, avec un syndicat ou une association de travailleurs, et refuser de faire des évaluations médicales à la demande de la Commission. L'arbitre doit agir, se comporter dans l'exercice de ses fonctions de façon impartiale et objective. L'arbitre doit... " Mais l'aspect que tu viens de soulever, ou vous deux ensemble, en tout cas, à la première lecture, je ne le retrouve pas là-dedans. Je vais me permettre de demander un avis, d'attirer l'attention du Conseil consultatif, Michel, pour leur demander un avis là-dessus.

M. Bourdon: C'est ça. Mais, M. le ministre, je pense aussi que même indépendemment du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, le ministre devrait, par écrit, définir que deux personnes sur trois dans un conseil d'arbitrage médical, qui oeuvrent ensemble dans la même clinique, c'est un conflit d'intérêts. Ce que je veux dire, c'est que c'est une disposition d'ordre public.

Un des problèmes qu'on rencontre s'agissant de la CSST, c'est dans le fond la prétention non écrite que ça ne regarde que les membres du conseil d'administration de la CSST. Ce que je veux dire, c'est que j'y crois beaucoup à la concertation patronale-syndicale au sein de la CSST mais ça regarde les députés aussi. C'est d'ordre public, ne serait-ce que parce que les centrales ne représentent pas 60 % des victimes d'accident, qui ne sont pas syndiquées. Je ne fais pas reproche aux centrales, c'est un état de fait Alors, il faut que les parlementaires s'interrogent sur comment ça devrait marcher. Moi, je vais vous dire ce qui m'apparaît incroyable. Y a-t-il une mesure de justice si on établit que, dans tel cas, telle personne a perdu en révision paritaire ou en arbitrage médical - plus souvent en arbitrage médical - pour la seule raison qu'elle n'avait pas 1500 $, 2000 $ ou 2500 $ pour se

payer une expertise médicale. Peut-on dire qu'il y a une mesure de justice là-dedans? Mes collègues libéraux ont introduit, quand ils étaient au pouvoir, la Cour des petites créances pour éviter que tu te fasses laver, parce que tu n'as pas les moyens de te payer un avocat. Or, si on n'y prend garde, quelqu'un qui n'est pas syndiqué doit se trouver un procureur, que ce soit un avocat ou pas, un procureur. Il y a la FATA puis d'autres organisations qui le font contre rétribution maintenant, parce que ça coûte assez cher. Il y a la question de l'expertise médicale. Autrement dit, est-ce qu'on peut dire dans ce cas-là que la personne a le droit - pour prendre un principe de droit - à une défense pleine et entière? C'est sûr qu'au niveau des procureurs, ceux qui sont admissibles à l'aide juridique peuvent par ce biais-là se faire aider. Dans la plupart des cas de comté que j'ai à cet égard-là, il y a un travail qui est fait par l'aide juridique. Il me semble, M. le ministre - c'est une suggestion que je vous fais - que sur la question de conflit d'intérêts, la prise de position devrait venir de vous, être communiquée, puis que ça règle le cas. Je n'ai pas besoin des délibérations du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre là-dessus. Il s'agit d'un conflit d'intérêts, puis c'est d'ordre public. Les autres questions que je voudrais poser au président de la CSST et au ministre, c'est: En termes d'inspection, est-ce qu'on estime qu'il y en a assez? La façon la plus simple de ne pas avoir tous les problèmes qu'on mentionne, c'est encore qu'il n'y ait pas d'accident. C'est sur le sens commun, ça, que la question se pose. À cet égard-là, est-ce que la Commission estime qu'elle a les effectifs nécessaires, qu'elle a les ententes nécessaires avec les DSC et les CLSC pour aider les employeurs aussi à éliminer les dangers à la source? Est-ce que l'inspection est satisfaisante?

Je vais vous dire, moi, si ça coûtait 300 000 000 $ au lieu de 1 500 000 000 $, il y a bien des employeurs qui seraient contents et, comme législateurs, on serait bien contents. En fait, si ça coûte bien cher, c'est parce qu'il y a bien des accidents, et l'accident le moins coûteux, c'est... Excusez-moi, M. le ministre, mais l'accident qui n'a pas lieu, il coûte zéro à personne. Alors, là-dessus, j'aimerais ça, si vous le permettez, entendre la Commission. Est-ce qu'elle estime que l'inspection... J'oublie le contentieux financier avec le gouvernement, les tribunaux décideront. Mais est-ce que la Commission estime qu'elle a les effectifs nécessaires pour faire l'inspection qui est requise?

M. Cherry: Juste parce qu'on avait convenu qu'on procéderait par ordre et tout ça... Dans un premier temps, il y a aussi, Michel, là-dedans un code d'éthique qui dit que, quand il y a des plaintes sur le comportement, il y a une façon de procéder. Mais je prends note de ça et je vais regarder.

M. Bourdon: En passant, l'en ai fait à l'Ordre des médecins, par exemple, au sujet d'un psychiatre qui était là comme expert, qui faisait du harcèlement à l'égard de la personne en voulant connaître tous les détails de sa vie sexuelle, ce qui n'avait pas un rapport évident avec l'accident que la personne avait subi. M. le Président, vous savez comment fonctionne l'Ordre des médecins, ça se passe à huis clos, et ils ne sont jamais coupables. Ça aussi, un jour, II va falloir s'interroger ià-dessus. Le cas que je vous mentionne, c'est un psychiatre qui faisait des affaires invraisemblables.

M. Cherry: Quand tu as mentionné, tantôt, et je pense que tu viens de le dire, quand tu parles de sommes d'argent allouées, si on faisait ci, ça coûterait moins cher, et tout ça, tu as dit: Un budget, je pense, de 1 500 000 000 $, tu as parlé de quelque chose comme ça... C'est ce qui a fait l'intervention d'un autre membre de la commission, le député de Drummond, mon collègue Jean-Guy, qui dit: Bon bien, c'est quoi? Rephrase-moi ta question. Tu dis: C'est quoi le...

Performance, revenus et dépenses

M. St-Roch: Bien, M. le ministre, en d'autres mots, j'imagine que la CSST a son budget. Alors on prévoyait un budget alentour de 1 500 000 000 $ pour l'année qui vient de se terminer à la fin de mars, alors j'aimerais savoir de vous quelle est la performance financière versus les prévisions budgétaires?

M. Cherry: Les états financiers de la CSST viennent d'être adoptés le 25 mars dernier. Donc, on est dedans. C'est ça? C'est l'année civile, c'est comme ça que ça marche? L'année 1990. Alors, le conseil d'administration de la CSST a présenté, pour cette année-là, des revenus, Jean-Guy, de 1 848 400 000 $. Donc c'est beaucoup d'argent et quand mon collègue, tantôt, disait: La CSST fait tout pour ne pas payer... En tout cas, ils en collectent un paquet.

Les dépenses pour la même période, M. le Président, pour le même exercice, c'est 2 110 700 000 $, ce qui a comme résultat, Jean-Guy, un déficit d'opération pour cette année-là de 262 300 000 $. Ça, c'est le déficit de l'année passée, un peu plus de 250 000 000 $. Ça, c'est pour l'année passée. Par rapport à 1989, si on fait un peu de comparaisons, en 1989, l'organisme avait eu un surplus de 213 000 000 $ et si je peux présumer des questions qui vont suivre là-dessus...

M. St-Roch: Oui, ce que je pourrais vous poser, M. le ministre, c'est comment peut-on expliquer...

M. Cherry: Là, je te vois venir.

M. St-Roch:... un changement de 475 000 000 $?

M. Cherry: D'abord, les revenus ont subi une baisse réelle. L'argent de moins qui est rentré, c'est presque 118 000 000 $, 117 900 000 $. Évidemment, ça, ça résulte principalement de la diminution, de la réduction du taux moyen des cotisations, et il y a une diminution - on peut l'ajouter parce que ça fait partie de la justesse des propos, mais pas dans un ordre bien important - des revenus sur les placements. (19 heures)

Selon les informations que m'a transmises la CSST, on observe au chapitre des dépenses - mon collègue disait tantôt qu'ils font tout pour ne jamais payer - une augmentation substantielle des coûts de l'assitance médicale. Peut-être que le président pourra compléter tantôt et y aller dans les chiffres. Les prestations versées pour le remplacement du revenu aussi, vous savez, le programme de retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite. Les dépenses sont moins élevées au chapitre de l'administration et des programmes de prévention.

Durant l'année 1990, Jean-Guy, le nombre d'accidents a diminué. Les chiffres, ils vont te les donner, c'est une diminution. Mais, tu dis: Comment ça se fait que les accidents diminuent, qu'on a moins d'accidents qu'avant, et que ça coûte plus cher qu'avant? Comment ça se fait qu'on arrive avec un déficit? Ça semble un peu invraisemblable, mais on dit que, par ailleurs, c'est la gravité des accidents qui change. Tu dis: II y a moins d'accidents, mais ceux qui arrivent sont plus graves.

Le Président (M. Bélanger):... il tombe du cinquième.

M. Cherry: Pardon? Au lieu de tomber du deuxième...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry:... il tombe du cinquième. Bon, là, on peut se dire: Comment ça se fait qu'ils sont plus graves? La façon de mesurer ça...

M. Bourdon: II faut quand même qu'il regarde, M. le ministre, que la prévention et l'inspection diminuent. Ça se peut que, quand il y a moins d'inspection et moins de prévention, il y ait plus d'accidents.

M. Cherry: La façon dont on mesure la gravité, parce que c'était la question que j'ai posée, j'ai dit: Comment vous arrivez à ça? "C'est-u" parce qu'avant, il avait une fracture simple et que, là, il en a une double ou une triple? Qu'est-ce qui fait que ça arrive comme ça? On me dit: Ça se mesure par le nombre de jours que l'accidenté est à l'extérieur de son emploi. Donc, on se dit: C'est comme ça que la CSST arrive à la conclusion que c'est plus grave parce que ça prend plus de temps avant qu'il revienne travailler. Quand on parle aux travailleurs, eux autres... Je vous donne un exemple Supposons que tu as besoin de subir une opération et que tu attends six mois ta place à l'hôpital, bien. en attendant, tu reçois des prestations hebdomadaires quand même Ça ne veut pas dire que ton accident est plus grave. Ça veut dire que ç'a pris plus de temps a obtenir des soins. On parlait tantôt des médecins - je suis certain qu'on va y revenir - Jean-Guy, je pense qu'il faut répondre à ça, aussi. Le médecin, il sait que le patient qu'il a devant lui même si c'est lui le médecin traitant, si jamais son patient n'est pas satisfait de son diagnostic il peut contester ça. L'employeur peut contester le travailleur peut contester et même, à l'occasion, comme disait Michel, la CSST peut con tester. Donc, si tout le monde se "brace" pour être certain de ne pas se faire contester et jouer plus "safe", est-ce que ça se peut, et là, je me pose la question devant ça, que ça ait comme résultat - parce que normalement, si c'était un autre cas, il serait traité en dedans de x temps - toujours pour se prémunir contre ça, le monde est absent plus longtemps de leur travail, de là, comme quand on lit les statistiques, on assume que c'est plus grave? Ce n'est peut-être pas plus grave. C'est peut-être la façon dont on répond à leurs besoins et dont on les traite qui fait que c'est ça comme résultat.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, ce n'est pas pour vous mettre en boîte, mais il y a une image qui me vient dans la tête et ça me fatigue. Moi, je viens du réseau de la santé. J'ai été administrateur là-dedans pendant des années..

M. Cherry: Oui

Le Président (M. Bélanger): et j'ai vu une chose. Même si la clientèle baissait, jamais les coûts d'opération ne baissaient. Ça, c'est une constante. D'ailleurs, la population du Québec augmente à peu près de 1 % par année et les dépenses de santé augmentent de 7 % à 10 %. On est parti avec une machine qu'on ne contrôle plus. On essaie par tous les moyens, mais. Alors, y a-t-il du danger qu'on soit pris avec une bebite comme ça avec la CSST? Ça va toujours augmenter et ça va toujours grossir? Il va arriver quoi? Il va falloir arrêter quelque part, à un moment donné.

M. Cherry: J'attire ton attention sur le chapitre que ç'a coûté moins cher que ce qui avait été prévu en frais d'administration. Donc, on ne peut pas, pour cet organisme-là, dire que ça coûte plus cher parce que les frais d'administration ont coûté plus cher que prévu. Ce

n'est pas là que sont arrivées les affaires.

M. Bourdon: M. le Président, là-dessus, moi, je voudrais dire que l'Opposition officielle s'était opposée, à l'Assemblée nationale, à la baisse des cotisations des employeurs. On croyait et on croit encore qu'une ristourne aurait été préférable parce qu'on sait qu'il y a des cycles dans l'économie et que bonne année, mauvaise année, année de vaches grasses, année de vaches maigres, c'était très imprudent de baisser la cotisation des employeurs. D'ailleurs, les votes ont été serrés au conseil d'administration sur cette question-là. Ce que j'entends par là, c'est que si on avait dit: On a un surplus de 213 000 000 $ - et la loi le permet, à ce qu'on me dit - et on donne une ristourne aux employeurs, bien, ils l'ont une fois là. L'année d'après, on n'est pas obligé de réaugmenter la cotisation, parce que ça, c'est un sujet qui est "touchy".

Dans mon comté, j'ai commencé à recevoir des lettres d'employeurs qui ont entendu dire qu'il y a un déficit à la CSST, donc que les contributions vont augmenter. Moi, M. le ministre, je vais être clair là-dessus. Le coût pour les employeurs est aberrant. Maintenant, il y a une partie qui est de leur faute et il y a une partie qui n'est pas de leur faute. La partie de leur faute, c'est les mesures de prévention. S'il n'y a pas d'accident, ça coûte moins cher. La tarification qui a été faite, est-ce qu'elle a été un facteur qui a contribué à diminuer le nombre d'accidents? On nous dit qu'il y a peut-être une diminution relative, mais que les accidents sont plus graves. Est-ce que le nombre d'accidents a diminué ou le nombre de rapports entrés a diminué? La tarification, ça comporte un inconvénient: l'employeur peut avoir intérêt à tricher et, sur le lot - 1 %, 2 % ou 3 %, pas plus - il y en a qui peuvent, à un moment donné... Il y a un triptyque qui ne revient pas, il me semble, dans le bilan qu'on fait, M. le ministre, c'est: prévention, inspection et réparation.

La réparation est partie à monter. À cause d'un fléchissement de l'activité économique, il n'y a pas un accident de plus et la récession fait que les revenus de la CSST diminuent. L'inspection: on est à zéro pour l'inspection cette année, c'est encore en discussion avec le Conseil du trésor. Il y a deux ans, c'était 23 000 000 $; l'an passé, on a baissé à 13 000 000 $ et là, on est à zéro. Si je comprends bien, c'est ce que le gouvernement donne pour l'inspection. M. Diamant me corrigera sur l'inspection qui se fait quand même. Quant à la prévention, bien, l'entente-cadre avec les CLSC et les DSC - j'aimerais ça avoir des réponses là-dessus parce qu'on met des fonds aussi là-dedans - est échue depuis deux ans. Il y a des équipes à pied d'oeuvre dans tout le secteur de la santé à cet égard. Est-ce vrai qu'on parle d'un grand programme de sensibilisation aux maladies cardio-vaculaires?

M. Cherry: Michel, pour être bien certain qu'on ne perdra pas le fil conducteur des choses qu'on a a traiter... On s'est déjà entendus tous les deux là-dessus, même si on est de formation politique différente, on a bien d'autres affaires dont on peut diverger d'opinion. Entre nous autres, on n'essaiera pas de faire de la politique sur le dos du monde qui est accidenté; on va essayer de les aider du mieux qu'on peut à l'intérieur de nos cadres respectifs.

Mais il y a eu des années où le déficit de la CSST était à ce point grave que ça mettait même en danger la sécurité du revenu et les prestations du monde qui était là. Tu sais, il y a des espèces de normes actuarielles qui font qu'à un moment donné, quand tu dépasses de plus que tant, que tu n'y fais pas attention et que tu accumules ça trop longtemps, tu vas te ramasser avec comme résultat que ça va devenir prohibitif, ce ne sera pas viable, actuariellement parlant. Donc, quand on a modifié l'aspect de la tarification au niveau de la CSST - on pourra compléter ou corriger ce que je vais dire là - les travailleurs ont identifié quelque chose de rassurant pour eux autres, soit de savoir que, quand il y aura des surplus, ils appartiendront aux employeurs et, quand il y aura des déficits, l'étalement ne pourra pas se faire sur plus de cinq ans pour éviter une situation comme celle qui a été l'héritage vers le milieu des années quatre-vingt où - il me semble, si ma mémoire est bonne - on parlait de 500 000 000 $ de déficit et on s'en allait gaiement. Si on n'avait pas fait attention, on allait plus loin que ça.

Alors, les travailleurs ont dit: Quand il y aura un surplus, ça appartiendra au boss. On pourra discuter si ça devrait être une ristourne ou si ça devrait être une diminution. La loi ne le permet pas, à ce qu'on m'indique. Donc, il fallait leur donner. Évidemment, ils voient bien ce qui va leur arriver aussi dans ça. Il y a des correctifs à apporter de différentes façons. Il y a des correctifs de mesures administratives qui font partie de ce que j'ai décrit tantôt, qui vont en s'accélérant, en s'améliorant dans ce sens-là, qui vont avoir comme résultat, par exemple, qu'on va améliorer la prestation des services médicaux et qu'on va réduire les délais de transmission des informations. Quand je parlais, tantôt, de la gravité des accidents, ce n'est pas nécessairement parce que ça prend plus de temps que c'est plus grave. Mais si ça prend plus de temps pour que les informations soient communiquées à tous les niveaux responsables, bien, ça a comme résultat bien direct que, tant que la paperasse n'est pas toute communiquée - permettez-moi l'expression - que tous les fils ne sont pas attachés, le résultat bien direct, c'est que le patient, le client est chez lui, il attend, puis il reçoit ses prestations toutes les semaines.

Évidemment, en ce qui concerne la cotisation, et je vais terminer avec ça, Michel... Pardon?

M. Bourdon: Ça ne sera pas populaire de l'augmenter.

M. Cherry: S'il fallait gouverner seulement en fonction des gestes de popularité...

M. Bourdon: Si c'était en fonction de la popularité, vous ne seriez plus là.

M. Cherry: Non, mais il y a eu des expériences qui ont été vécues et je le disais tantôt: budget avant référendum et budget après. Tout le monde se souvient des expériences qu'on ne veut pas revivre. On est mieux de prendre des décisions courageuses au fur et à mesure qu'elles sont nécessaires, puis on fait confiance à l'ensemble de la population pour le jugement qu'elle aura à porter.

Parmi les choses, il va y avoir des mesures d'ordre administratif. J'en ai décrites, je viens d'en nommer d'autres, puis il va y en avoir également... Que veux-tu? C'est prévu pour le mois de juin, je pense. Il va falloir qu'ils regardent la tarification. Populaire ou pas populaire...

M. Bourdon: C'est ça.

M. Cherry:... il faut faire face à tes responsabilités, puis garantir les choses que tu as prévues.

Prévention, inspection et réparation

M. Bourdon: Oui, mais ce que j'aimerais savoir, entre autres, c'est qu'on ne sort pas du triptyque: prévention, inspection, réparation. Sur l'inspection, je vais essayer de citer une autorité plus probante que la mienne. La vice-présidente aux opérations de la CSST, le 31 août 1989, disait au deuxième paragraphe d'un rapport intitulé "Besoins d'inspecteurs en santé et en sécurité du travail à la Commission de la santé et de la sécurité du travail". Elle disait: "Or, depuis 1981, malgré un accroissement du nombre d'employeurs et du nombre de travailleurs, donc de la clientèle à desservir par les services d'inspection, on assiste à une diminution des ressources affectées à ces tâches. Nous croyons essentiel, si l'on veut atteindre des résultats probants de diminution permanente des lésions professionnelles, d'augmenter sensiblement la présence des inspecteurs dans les établissements et les chantiers au Québec. " Alors, ça date du 31 août 1989. Puis-je savoir du ministre combien d'inspecteurs ont été ajoutés depuis ce temps-là?

M. Cherry: Veux-tu, Michel, on va parler de tout l'aspect de l'inspection?

M. Bourdon: Non. Moi, c'est plus pointu que ça, M. le ministre.

M. Cherry: Pas juste par le nombre. Tu prendras les points qui font ton affaire.

M. Bourdon: Je prends un rapport de la CSST de 1989 et je dis que le verdict que la CSST pose elle-même, par sa vice-présidente aux opérations, c'est qu'il n'y a pas assez d'inspecteurs. Je ne connais pas du tout la réponse mais je pose la question. Depuis le 31 août 1989 combien y a-t-il d'inspecteurs de plus ou de moins à la CSST''

M. Diamant: Depuis le 31 août 1989, on a essentiellement le même nombre d'inspecteurs Ceci étant dit, je pense qu'il faut considérer les choses dans leur ensemble: le lien entre la prévention, l'inspection, la réparation. La CSST, depuis quelques années et de façon très intense - je peux le dire depuis un an parce que je ne peux pas parler beaucoup de ce qui s'est passé avant - met une emphase énorme là-dessus Ce qui nous a amenés à faire justement de ia prévention et de l'inspection, une des dimensions majeures de nos objectifs prioritaires. En ce qui concerne l'utilisation des inspecteurs, effectivement, on pourrait dire - il y a plus ou moins 300 inspecteurs qui oeuvrent à l'intérieur de la CSST - et démontrer, compte tenu du nombre d'établissements à visiter, du nombre d'activités problématiques observées, qu'il faudrait le double, le triple ou le quadruple des inspecteurs dans la mesure où on pousse à la limite l'opportunité d'utiliser ce type d'intervention - qui est l'intervention du bâton - pour s'assurer qu'il y a une réduction du nombre d'accidents.

Le dosage actuel peut être revu, mais, me semble-t-il, a priori, il faut que les ressources actuelles soient de mieux en mieux utilisées Et c'est ce à quoi on s'est adonné la dernière année. Avec le même nombre d'inspecteurs, on a augmenté de façon considérable le nombre d'interventions dans les établissements et dans les chantiers. On les a sortis des bureaux, on les a arrêtés de faire des rapports, puis on les a envoyés sur les chantiers. On les a arrêtés de pitonner sur des...

M. Bourdon: Juste pour me donner une idée il y en a combien sur les chantiers de construction?

M. Diamant: Juste pour une idée générale, entre 1989 et 1990, on est passés de 43 900 interventions à 47 100 interventions avec le même nombre d'inspecteurs. On a choisi de faire intervenir les inspecteurs dans les entreprises ou les risques étaient les plus grands, c'est-à-dire les entreprises où il y avait une moins bonne performance. On a ciblé ces entreprises-là, et on a fait une opération pour s'assurer que les

interventions ou les mesures prises vis-à-vis de ces établissements et de ces chantiers soient plus nombreuses. Les résultats sont importants parce que, au chapitre des dérogations, par exemple, on est passés en dérogations constatées entre 1989 et 1990 de 44 500 à 51 500. C'est quand même important, c'est quand même majeur, nous semble-t-il. On a fermé des lieux où il y avait des risques, qui présentaient des risques, selon nos inspecteurs; on est passés de 790 à 1022 fermetures. On a augmenté le nombre d'avis d'infraction et on a augmenté le nombre de poursuites engagées. Avec les ressources qu'on a, je dis que ce n'est pas fini. On essaie d'aller à la limite de la productivité et de l'efficience de nos ressources. Idéalement, M. Bourdon, si on pouvait avoir 200, 300 inspecteurs de plus, on serait contents.

Le Président (M. Bélanger): Si vous permettez, il y aurait une demande pour une pause sanitaire de cinq minutes...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bélanger): ...la nature étant ce qu'elle est.

(Suspension de la séance à 19 h 17)

(Reprisée 19 h 30)

Le Président (M. Bélanger): S'il vous plaît! Je demanderais à chacun de prendre sa place pour que la commission puisse poursuivre ses travaux. Nous entendons présentement le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, je voudrais parler de deux sujets, assez rapidement, pour savoir les intentions du ministre. D'abord, le programme de stabilisation économique et sociale et la question du retrait préventif des femmes enceintes.

Pour ce qui est du programme de stabilisation économique et sociale, depuis que je suis député que je l'attends puis qu'il nous est promis, c'est-à-dire la revalorisation des rentes qui sont versées à des travailleurs généralement âgés. On a dit qu'il y en avait près de 7000. La dernière décision dont on m'a fait état remontait à 1985 ou 1986, mais excluait de facto ceux qui ont été exclus du programme, parce qu'il a été gelé depuis 1982, si je ne me trompe pas.

Alors, j'aimerais savoir, M. le ministre, où on en est quant au programme de stabilisation économique et sociale? Est-ce que ça prend une législation pour corriger la situation? Est-ce que la législation va être déposée avant la fête nationale?

M. Cherry. J'ai signé, si ma mémoire est bonne, Michel, au mois de janvier, tout ce qu'il fallait. On appelle ça, pour nous autres: J'ai mis ça dans la machine. C'est parti. C'est "slotté" sur un mémoire que j'ai signé pour le Conseil des ministres, qui suit le cheminement normal qu'on connaît tous et qui devrait connaître un aboutissement. Comme tu le dis, ça fait longtemps que tu attends, mais ça devrait aboutir prochainement, Michel.

Le Président (M. Bélanger): J'appelle, sur le même sujet, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Ce n'est pas sur le même sujet, mais sur le sujet dont il était question avant. On a parlé tout à l'heure de la question des inspections. Je voyais qu'en 1989, il y avait eu 251 000 dossiers ouverts. En 1990, il y a eu une diminution, selon ce qu'on disait tout à l'heure aussi.

M. Diamant: Quelque 240 000. M. Bordeleau: 240...?

M. Diamant: On parle de 241 000 en 1990. 10 000 réclamations ou ouvertures de dossier de moins.

M. Bordeleau: Malgré ce qu'on a mentionné tout à l'heure sur toute la question des inspecteurs et l'utilisation que vous avez faite des inspecteurs, on voit quand même, depuis 1988, une baisse, annuelle de 10 000 cas.

M. Diamant: C'est un ensemble d'activités en matière de prévention; ce n'est pas juste de l'inspection. Quand on parle de prévention, on parle aussi des activités qui sont conduites avec les départements de santé communautaire. On parle aussi des activités qui sont conduites par les associations sectorielles paritaires. Pour l'ensemble des activités en prévention, il faut aussi parler de la recherche et de la programmation à l'IRSST. Il y a 84 000 000 $ là-dedans, plus les 24 000 000 $ de l'inspection. Tantôt, je pense - ça me donne l'occasion de rétablir - M. Bourdon nous disait ou nous laissait sous l'impression que, parce que les subventions gouvernementales avaient été réduites ou coupées, il n'y avait plus d'inspection. Je pense qu'il ne faut pas voir ça comme ça. C'est une baisse heureuse. C'est un manque à gagner dans les revenus, mais le budget, les dépenses ont été effectuées entièrement comme prévu. Le budget a été maintenu pour l'inspection, strictement pour l'activité des inspecteurs, dans l'ordre de 24 000 000 $, et c'est maintenu pour l'année en cours, même s'il y a eu...

Une voix: C'est dans le budget.

M. Diamant: Oui. C'est ça. C'est dans le

budget de dépenses

M. Bourdon: M. le Président...

M. Bordeleau: Pardon. J'aurais une autre question. En fait, je voulais revenir sur la question des délais dont on a parlé tout à l'heure. Disons que j'apprécie, comme député, les chiffres que vous nous avez donnés où il y a une diminution des délais au bureau de révision et aussi pour les arbitrages. Je pense effectivement qu'il faut rendre justice à l'organisme, qu'il faut être capable de voir l'ensemble de tout ce qui se fait. Tout à l'heure, on utilisait des qualificatifs avec lesquels je ne suis pas nécessairement d'accord parce que, au fond, quand un système s'améliore et qu'il y a des objectifs, prévus... On pourra évaluer, à ce moment-là, en décembre, la performance pour voir si, de fait, les délais prévus sont réalisés. Je pense qu'il faut apprécier le travail qui est fait de ce côté-là. C'est évident qu'on est plus sensible aux 3 % qui viennent dans nos bureaux se plaindre, mais pour être équitable, il faut aussi voir ce qui est fait et non pas seulement les 3 % qui se présentent.

Dans cet ordre-là, je voulais juste savoir... Vous donniez tout à l'heure des chiffres moyens de temps pour qu'une révision soit faite ou qu'un arbitrage soit fait, est-ce que vous avez la moyenne ou des indices sur la moyenne de la région de Montréal par rapport à l'ensemble? Est ce qu'il y a une différence? Là, on a donné un taux moyen sur l'ensemble des dossiers. Comme on est de la région de Montréal, et qu'à Montréal, il y a évidemment plus de cas que dans les autres régions de la province, est-ce que ces délais-là moyens sont plus longs à Montréal qu'ailleurs en province? Est-ce qu'ils sont supérieurs à la moyenne provinciale que vous avez donnée tout à l'heure.

M. Cherry: Là, on entre dans la mécanique, dans le technique, je vais demander au président de la CSST, M. Diamant, de répondre à ces aspects-là, de besoins, de délais, d'inspection, puis tout ça, vas-y donc

M. Diamant: Effectivement, on a pu observer qu'il y a des différences dans la longueur des délais d'une région à l'autre. Je n'ai pas ici la liste, mais pour s'assurer qu'on arrive à une réduction des délais qui sort la même - notre objectif est de trois mois, décembre 1991 - on a mis sur pied des équipes qui vont en "backup", qui vont en relève, qui vont assister les équipes permanentes dans chacune des régions. Alors, s'il y a une région où il y a effectivement des délais plus longs, que la moyenne est plus longue, on a des équipes volantes qui vont dans ces régions-là. De mémoire, une région comme Hull par exemple ou Rimouski, ils sont presque à zéro de délai. Donc, ces gens-là vont aider la région de Montréal par exemple où... Je suis pas mal sûr que dans la région de Montréal - je ne les ai pas, les chiffres - pour compenser, on a aussi plus de BRP actifs en moyenne qu'on en a dans les régions.

M. Bordeleau: Excusez. BRP, c'est quoi ça?

M. Diamant: Bureau de révision paritaire.

M. Bordeleau: O.K. À Montréal, les délais seraient probablement plus longs que..

M. Diamant: Au début là, quand on a mis le plan de redressement en marche, ils étaient plus longs à Montréal que dans le reste de la province parce qu'il y avait un volume plus grand. Disons qu'on a pris un certain nombre de mesures. entre autres, plus de bureaux de révision, on en a ajouté. On a des équipes qui viennent supporter ceux qui sont en place.

M. Bordeleau: Ce sont les mêmes objectifs que vous avez pour Montréal?

M. Diamant: On va arriver exactement en même temps aux mêmes objectifs.

M. Bordeleau: Parfait, merci.

Le Président (M. Bélanger): M le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Cherry: O.K.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre, d'abord.

Création d'un bureau des plaintes

M. Cherry: Oui, oui. Je veux juste enchaîner sur quelque chose concernant le service à rendre à la clientèle, les 3 %. puis ce dont on parlait tantôt. Michel a aussi cité à quelques reprises le Protecteur du citoyen puis la façon dont il décrit les plaintes. T'as raison, on en entend parler tout le temps. Moi. il ne se passe pas une journée sans qu'un collègue de l'Assemblée nationale... Des lettres, j'en signe, des cas... J'ai du personnel de cabinet chez nous qui de façon constante voit à faire ça.

Dans cette optique-là, j'ai demandé à la CSST qu'on mette sur pied pour l'automne, l'automne qui vient là, un bureau des plaintes à la CSST comme ça se fait ailleurs. Puis je veux que ça réponde efficacement aux plaintes formulées tant par les travailleurs accidentés que par les employeurs. S'il y a quelque chose qu'on doit constater là-dedans c'est que, les travailleurs si on en entendait parler et si on décide de généraliser à partir des 3 %, il semble que personne qui travaille n'est satisfait des services de la CSST. Si on se fie à certaines déclarations

des employeurs - on dit toujours bonnes nouvelles pas de nouvelles, ce qui fait la nouvelle ce sont les choses négatives - t'aurais l'impression que tous les travailleurs sont mécontents de la CSST et que tous les employeurs sont mécontents de la CSST. Donc, j'ai décidé de demander à la CSST, que, pour l'automne, il y ait un bureau des plaintes où les deux parties pourraient faire part de leurs doléances et travailler avec eux autres. Tu sais, chacun son dossier, comment ça chemine, pourquoi il est là, quelqu'un qui va s'occuper de lui en particulier, de son cas. Puis la responsabilité, c'est d'effectuer un nouvel examen des dossiers et puis des recherches de solutions.

Je souhaiterais, et puis je pense bien que là-dessus... Tu sais ce n'est pas fait pour remplacer les recours à l'heure actuelle, mais je veux que le bureau des plaintes agisse en collaboration avec le Protecteur du citoyen. Je veux que, finalement, on fasse travailler ce monde-là ensemble, qu'on identifie des problèmes, qu'il y ait des suggestions de part et d'autre et qu'on établisse un lien. Il me semble qu'au niveau de la CSST, avec un bureau des plaintes, qui, lui, aurait la responsabilité de travailler avec le Protecteur du citoyen, on peut faire marcher tout ce monde-là ensemble. J'ai demandé qu'ils fassent ça pour l'automne, même si on me dit que c'est déjà fait dans certaines régions. On parlait des régions tantôt, avant il y en avait 14 et on est passé à 21, je pense qu'il faut le dire aussi. Pour aller porter le service plus près du citoyen qui en a besoin. Ça s'est fait dans certaines régions, mais là je veux que ça se fasse au niveau de l'ensemble des régions. Même si on me dit que ça s'est déjà fait, je veux que ça se refasse dans ces coins-là, qu'il y ait des réunions entre les services de la CSST, les députés et le personnel politique des députés. En d'autres mots, ceux qui les reçoivent les 3 % dans leurs bureaux, je veux qu'ils aient une familiarisation, une sensibilisation, une façon de mieux établir des liens et des contacts. Savoir comment ça marche? Que des questions puissent être posées autrement que par des lettres et ces affaires-là, qu'on puisse se parler et établir des liens. C'est débuté, mais, à mon avis, c'est important que ce soit publicisé. Je profite de l'occasion pour le dire, je veux que ce soit fait à la grandeur du territoire du Québec et que les députés, comme les attachés politiques, soient accessibles. C'est fait pour eux parce qu'ils sont un rouage important qui identifie des problèmes et des pistes de solution en même temps. Donc, je profite de l'occasion pour vous dire ça, et ça, ça me vient de tous vous autres qui m'envoyez périodiquement des lettres, ça germait. Donc, je profite de ton ouverture, Yvan, pour répondre à ça.

Le Président (M. Bélanger): C'est sur le modèle de celui qui avait été fait à Hydro-

Québec. Est-ce que c'est une mauvaise image que je donne là?

M. Diamant: Disons que ce n'est pas tout à fait ça, mais c'est plus du genre du ministère du Revenu.

M. Bourdon: Est-ce qu'il n'y a pas déjà une vice-présidente aux bénéficiaires?

M. Diamant: Aux relations avec les bénéficiaires...

M. Cherry: Oui.

M. Diamant:... sauf que le mandat de la vice-présidente aux relations avec les bénéficiaires s'adresse davantage à bonifier les relations avec les bénéficiaires déjà dans l'organisation, ceux qui sont admis et qui vivent des difficultés.

M. Bourdon: Oui.

M. Diamant: Pour ça, la vice-présidence tient des réunions régulières dans toutes les régions, tous les mois, avec tous les bénéficiaires qui sont dans nos programmes tandis que le bureau des plaintes, ça va être une organisation qui va strictement traiter les plaintes acheminées.

Le Président (M. Bélanger): Dans votre organigramme, il va être rattaché à qui?

M. Diamant: Au président.

Le Président (M. Bélanger): Directement?

M. Diamant: Directement.

Le Président (M. Bélanger): Excellent.

M. Diamant: C'est une recommandation qui nous a été faite par tous les organismes qui en opèrent.

Le Président (M. Bélanger): Excellent. M. Diamant: Pour compléter...

Le Président (M. Bélanger): Je vous ai interrompu... Il y avait Mme la députée de

Kamouraska-Témiscouata, auparavant. Je vous reviens. Madame.

Réadaptation et réinsertion au travail

Mme Dionne: Oui, M. le Président, j'avais une question sur la réinsertion au travail. Tout d'abord, en vous écoutant parler, ça m'a fait penser que j'ai déjà travaillé à la Commission des accidents du travail. Oui, il y a quelques

années, c'était en 1972, c'était mon premier travail, trois mois, au bureau du pourvoyeur. Alors, ça fait longtemps, je sais que les méthodes ont bien changé depuis le temps. D'ailleurs, à ce moment-là, c'était déjà une grosse équipe qui travaillait à la CSST. Mais pour parler de réinsertion de façon particulière, chez nous, quand je vois des gens de mon comté qui viennent me voir, plusieurs ont des problèmes parce qu'au moment où il y a un programme de réinsertion, où on aide les gens, on leur dit. Prenons un exemple, un bûcheron ne peut plus aller en forêt, on lui dit: Cherchez-vous donc un travail léger. Pendant cette période-là, en même temps qu'on leur dit ça, je pense qu'il sont dans un programme qui leur permet d'avoir des indemnités. Sauf que les pauvres bonhommes, c'est très difficile dans la région de se trouver un travail léger quand tu as été bûcheron et que tu a des fois une sixième ou une septième année. Ils sont vraiment frustrés de ça, parce qu'ils se disent: Écoutez, on ne semble pas avoir certains avantages que la Société de l'assurance automobile donne, des fois, un incitatif à une formation additionnelle ou quelque chose comme ça. En tout cas, c'est ce qu'on me dit. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus au niveau de la réinsertion, parce que bien des accidentés, qui après leur accident ont de la difficulté, se retrouvent sur le bien-être social. Certaines fois, ils ont des indemnités pendant un temps, d'autres fois, ils peuvent avoir un montant forfaitaire, je pense, et tout ça. Alors, j'aimerais vous entendre un peu là-dessus, parce que ça n'est pas clair et c'est difficile.

M. Cherry: Oui, allez-y donc M. Diamant.

M. Diamant: En ce qui concerne... C'est parce que quand je pense à Mme Dionne, je pense à mon lieu d'origine et au fait que sa... (19 h 45)

Mme Dionne: À Saint-Pascal...

M. Diamant: ...mère était mon institutrice quand j'allais à l'école. Je ne peux pas faire autrement que de penser à ça.

Mme Dionne: Ha, ha, ha!

M. Diamant: La loi présente, la loi de 1985, prévoit que, quand une personne ne peut pas, pour des raisons, soit de sa lésion, soit des conséquences de sa lésion, reprendre son travail, on y retourner, à ce moment-là, il y aura, bien sûr, la reconnaissance d'un déficit personnel et il y aura une compensation pour ça. Mais ça, c'est un problème à part. Il peut être admis par la suite, ce qu'on appelle, à la réadaptation. C'est un des droits consentis par la loi de 1985, qui est le droit à la réadaptation, ce qui est nouveau par rapport à ce qui existait antérieurement. Quand on parle de réadaptation, on parle, bien sûr, de réadaptation professionnelle, on parte de réadaptation sociale, et on parie de réadaptation physique. Donc, ce sont trois aspects qui. généralement, sont couverts par les programmes de réadaptation. Alors, un individu qui est dans cette situation-là se verra proposer une façon de se réinsérer au marché du travail en suivant un programme de formation. Il faut comprendre que, dans beaucoup de cas, c'est difficile, c'est pénible. Quand les gens ont peu de scolarité, que les emplois sont rares dans la région, à ce moment-là, il faut véritablement faire des tours de force pour pouvoir trouver des programmes de formation qui leur conviennent. Par ailleurs, on détermine à ce moment-là avec lui, quel serait le genre d'emploi qui lui conviendrait, ce qu'on appelle l'emploi convenable. La loi ne fait pas obligation, bien sûr, à la Commission, de fournir du travail à la personne. Mais à partir du moment où la personne est devenue ou est rendue apte à exercer un emploi détermine, à ce moment-là, le programme prévoit que nous allons verser - si l'emploi en question est disponible, s'il rapporte moins d'argent - la différence entre le salaire qu'il gagnait précédemment et le salaire de son nouvel emploi. Si, au bout d'un certain temps, il n'y a pas d'emploi disponible, à ce moment-là, les prestations seront terminées. Il y aura strictement une indemnité minimale qui sera versée à la personne. C'est comme ça que les programmes sont faits, c'est ce que la loi prévoit. Mais je suis très conscient avec vous de la difficulté de certains cas. En général, on fait beaucoup de progrès avec nos activités dans le domaine de la réadaptation. Les travailleurs qui sont admis en réadaptation - on ne réussit pas tout le temps - mais quand ils s impliquent beaucoup dans l'affaire, je pense que ça permet de les faire avancer. Actuellement, on a develop pé des outils que l'on appelle les tableaux de connexités d'emplois, ce qui permet à ce moment-là, de trouver assez rapidement quelque chose qui est proche de ce que la personne faisait avant et d'avoir un minimum d'efforts pour le rendre apte à faire son nouvel emploi. On est en train de développer des programmes de support à la recherche d'emplois. Il est bien entendu que ce n'est pas notre rôle de nous substituer aux organismes existants qui, eux, ont comme mandat d'assister les personnes à se trouver des emplois, ce sont des organismes bien connus.

Mme Dionne: Est-ce que ça veut dire, M. Diamant, que vous avez quand même des ententes avec les centres Travail-Québec, les centres d'emploi...

M. Diamant: Oui...

Mme Dionne: Est-ce qu'il y a des ententes signées pour dire qu'il y a un travail commun fait pour la réinsertion des accidentés sur le marché du travail?

M. Diamant: II n'y a pas nécessairement d'entente, mais il y des activités conjointes qu'on réalise avec eux. Par exemple, ce que je viens de vous citer comme outils qu'on a déjà. On l'a développé en collaboration avec ces organismes-là.

Mme Dionne: D'accord.

M. Diamant: Bien sûr, nous-autres, on pousse pour nos clientèles.

Mme Dionne: D'accord.

M. Diamant: Mais on sait qu'on n'est pas les seuls qui frappent à la porte.

Mme Dionne: En fin de compte, c'est vraiment difficile. Quand un bûcheron se retrouve à se faire offrir, à se faire dire: Bien, allez donc vers un travail léger, à cause de sa condition physique, et que, dans la région, vous savez des gardiens d'hôpitaux, là, du travail léger, on n'en a pas à tous les coins de rue, c'est très difficile.

M. Diamant: Mais...

Mme Dionne: Mais je suis contente de vous entendre là-dessus, ça veut dire qu'il y a un travail d'équipe qui se fait dans chacune des régions.

M. Diamant: Définivement. Je dois dire que pour la réadaptation, comme c'est quelque chose quand même de complexe à développer, ce sont des services nouveaux. On est porté à penser aussi que le régime de santé et de sécurité au travail au Québec c'est une vieille histoire. Mais je peux vous dire que l'application de la nouvelle loi, en 1986, ça ne fait pas longtemps. Les institutions qui ont cinq ans d'existence et qui sont arrivées au maximum de leur développement, c'est assez rare. Je pense qu'on est porté à oublier ça. C'est un droit nouveau, la réadaptation, dans cette loi-là. Avant qu'on ait réussi à mettre en place toutes les infrastructures, tous les programmes, toutes les procédures, je pense qu'il faut donner la chance au régime. J'aurais envie de dire autre chose. Je le dirai à la fin, M. le ministre, si vous me le permettez.

Des voix: Ha, ha, ha! Mme Dionne: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le député, vous m'aviez parlé de deux programmes que vous vouliez regarder encore, les retraits préventifs et le travail des mineurs.

M. Bourdon: Le travail chez les moins de 14 ans.

Le Président (M. Bélanger): Chez les moins de 14 ans. Alors, est-ce qu'on pourrait régler le retrait préventif...

M. Bourdon: Oui, j'ai la Bibliothèque centrale...

Le Président (M. Bélanger):... pour permettre aux gens de se retirer.

M. Bourdon:... de prêt de la Montérégie aussi et des questions sur les documents fournis.

M. Cherry: Dans...

Le Président (M. Bélanger): Alors, on y va.

M. Cherry:... le cas des mineurs...

Le Président (M. Bélanger): Est-ce qu'on pourrait régler tout ce qui touche la CSST pour permettre aux gens de se retirer?

M. Bourdon: C'est pour ça que je voulais prendre d'abord...

Le Président (M. Bélanger): Ils ne sont pas obligés de partager nos horaires de fous.

M. Bourdon:... le projet de...

M. Cherry: Les mineurs, ça touche eux autres aussi.

Le Président (M. Bélanger): Oui, bon. M. Bourdon: Oui, oui, oui. M. Cherry: Les jeunes, je veux dire... M. Bourdon: C'est vrai. Alors...

M. Cherry: C'est pour ça que ça enchaîne mes...

M. Bourdon:... prenons...

Le Président (M. Bélanger): Vous allez veiller avec nous autres. J'ai une bonne nouvelle à vous annoncer.

Retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite

M. Bourdon:... le programme de retrait préventif, M. le Président, M. le ministre. En 1989, la CSST a consacré 54 000 000 $ au programme de retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite; 18 043 travailleuses ont bénéficié du programme comparativement à

16 111 pour 1989. Selon une étude récente, la CSST prévoyait qu'elle aurait à débourser 83 000 000 $ cette année, soit une augmentation de 34 % par rapport à 1989. Cette forte augmentation serait due au fait que la réaffectation est peu souvent retenue comme solution aux dangers que la mère ou l'enfant à naître peuvent courir et que l'on recourt plus souvent qu'autrement au retrait pur et simple. Alors, mes questions sont les suivantes: D'abord, est-ce que la prévision de 83 000 000 $ pour cette année était exacte? Est-ce qu'elle va se réaliser? D'autre part, qu'est-ce que la CSST entend faire à l'égard des réaffectations? Est-ce qu'on va continuer à avoir tendance... Ce que me disent les femmes qui vivent le problème, c'est que, bien que la loi soit formelle que c'est sur avis du médecin traitant et qu'on doit présumer que le médecin traitant a posé le bon diagnostic et a prescrit un retrait préventif ou une réaffectation, selon le cas, dans un premier temps, on a insisté pour que des médecins des départements de santé communautaire soient associes à la décision et que, de plus en plus, ce seraient des médecins de la CSST qui prendraient la décision. On m'a décrit ça comme une tendance. Maintenant, |e ne demande qu'à...

M. Diamant: Je vais peut-être reprendre vos questions l'une après l'autre.

M. Bourdon: Oui.

M. Diamant: Concernant le nombre de retraits préventifs, le nombre de retraits préventifs acceptés, effectivement, au cours de l'année 1990, on l'estime - parce que je n'ai pas les derniers chiffres - à 18 300, ce qui est 24 % de plus qu'en 1989. On a aussi des dépenses estimées de l'ordre de 77 600 000 $. C'est un peu moins que ce qui avait été annoncé comme possibilité au mois de novembre, je crois. Votre chiffre se réfère au mois de novembre, j'ai l'impression.

M. Bourdon: Mais le chiffre que j'avais, M. le Président, pour 1989, c'était 18 043...

M. Diamant: Oui, mais ça, c'est...

M. Bourdon: ...bénéficiaires du programme.

M. Diamant: 18 043, ça comprend des retraits préventifs acceptés et celles qui avaient été acceptées l'année d'avant.

M. Bourdon: O.K.

M. Diamant: Comprenez-vous? Il faut additionner les deux chiffres Donc, on parle effectivement d'une augmentation budgétaire, c'est-à-dire de dépenses de l'ordre de 40 % pour l'année 1990 par rapport à l'année 1989. D'ailleurs - on l'a indiqué tantôt lorsqu'on a parlé du déficit - c'est un des postes ou la prévision a été beaucoup en deçà des dépenses réelles. Vous avez parlé de la nécessité ou du problème de l'affectation. Il faut toujours rappeler, je pense, les objectifs prévus à la loi. Ce sont des objec tifs très précis qui devraient normalement reconnaître le droit à la travailleuse d'être immédiatement affectée à d'autres tâches qui ne comportent pas de danger pour elle et quelle serait raisonnablement en mesure d accomplir. C'est là qu'on parie d'affectation. Mais, avant de parler d'affectation, le programme prévoit un certain nombre de moyens que l'employeur peut utiliser. Il doit les utiliser préférablement avant de faire l'affection et avant de faire le retrait préventif. Le premier moyen, c'est de travailler ou d'intervenir pour éliminer le danger à sa source. S'il le fait, à ce moment-là, bien sûr, il y a des chances que le risque disparaisse ou diminue. Le deuxième moyen, c'est qu il doit travailler à la modification de la tâche de la travailleuse Le troisième moyen qui lui est fourni, c'est d'adapter le poste de travail. Le quatrième moyen, c'est à ce moment-la qu'on parle d'affectation à d'autres tâches. À la fin. lorsque tout ça n'est pas possible, c'est là qu'on intervient avec le retrait préventif. Mais on constate que, même si c'est le cinquième moyen, le plus bas dans la liste, c'est, de tous les moyens, celui qui est presque automatiquement utilisé par les employeurs. On a examiné cette problématique-là et on a proposé au conseil d'administration du mois de juin 1990 une approche pour essayer de ramener le programme à ses objectifs et de permettre justement que les employeurs et les travailleurs se concertent pour appliquer successivement les moyens déjà prévus. Pour ça, ce qu'on a convenu de faire, c'est de travailler d'abord sur... Vous avez évoqué tantôt l'histoire du médecin traitant, du médecin du département de santé communautaire. Actuellement, la pratique est claire: lorsqu'il y a entente entre le médecin traitant et le médecin du département de santé communautaire, la Commission accepte le retrait préventif...

M. Bourdon: Mais est-ce que...

M. Diamant: ...ça, c'est la politique. Sauf.

M. Bourdon: Est-ce que M. Diamant pourrait me lire l'article de la loi qui traite du diagnostic du médecin traitant parce que, moi, ce qu'on me dit, c'est que...

M. Diamant: Dans le cas du retrait préventif, bien sûr, le diagnostic qui se pose, ce n'est pas un diagnostic, à savoir- Est-elle enceinte. elle n'est pas enceinte? Dans le fond, le médecin traitant dit: Est-ce que, d'après moi, sa condition particulière, qu'elle me décrit, présente un danger pour elle ou pour le bébé? Le programme prévoit que le département de santé communau

taire est censé faire un rapport ou une évaluation des risques potentiels. Quand les deux le confirment, nous, à la Commission, on accepte à moins qu'on considère - ce n'est pas arrivé souvent dans la dernière année - que les deux médecins sont complètement dans les pommes. Mais, à mon sens, c'est excessivement rare...

M. Bourdon: Est-ce que vous pourriez m'expliquer ce que vient faire la notion de grossesse normale? Ce qu'on me dit, c'est qu'on introduit graduellement l'élément qu'une grossesse normale permettrait de faire telle ou telle chose et qu'on ne tiendrait pas compte...

M. Diamant: De la condition personnelle. M. Bourdon:... de la condition personnelle.

M. Cherry: Michel, j'ai un chiffre qui est peut-être intéressant et qui peut peut-être aider à éclairer tout le monde. Au départ, l'orientation - ce qu'on me dit - concernant le retrait préventif, c'était suite à la possibilité de danger des produits chimiques. Pourtant, aujourd'hui, pour montrer comment ça a évolué, aujourd'hui, 64 % des dangers appréhendés ne sont pas de nature chimique mais de nature ergonomique. Alors, on voit là qu'on a dépassé l'orientation originale d'être exposé à des matières chimiques qui peuvent mettre en danger ou la mère ou l'enfant, parce que, aujourd'hui, 64 % - deux sur trois - de tous les retraits préventifs sont de nature ergonomique. Donc, de ce côté-là, il y a du cheminement à faire. Je reviens à ce que M. Diamant disait tantôt. Même s'il y a cinq conditions dans le cas des travailleuses enceintes, ils se réfèrent toujours à la dernière. Clac! pas d'affaire là. Ils ne l'assignent pas à d'autres tâches ailleurs. Pourtant, ils pourraient. Ce n'est pas une maladie d'être enceinte, hein?

M. Diamant: Pour faire référence justement à l'intervention du médecin du département de santé communautaire, je n'ai pas l'article exact de la loi, mais la loi fait obligation de consulter.

M. Bourdon: Mais M. le Président, je suis frappé. La loi fait obligation de consulter mais ce que le président de la CSST disait, c'est qu'il fallait qu'ils se mettent d'accord pour que la CSST accepte. (20 heures)

M. Diamant: Mais nous autres, dans la mesure où les deux sont d'accord, on ne refuse jamais.

M. Bourdon: Mais est-ce que ça veut dire, dans les faits...

M. Diamant: Mais le diagnostic qui est posé, c'est le diagnostic du danger pour la maternité.

M. Bourdon: Mais est-ce que le médecin du DSC a un droit de veto ou si c'est le médecin traitant qui rend la décision?

M. Diamant: C'est le médecin traitant, c'est toujours le médecin traitant, parce que c'est un avis qu'il demande au département de santé communautaire.

Travail chez les moins de 14 ans

M. Bourdon: Je voudrais passer, M. le Président, au travail chez les moins de 14 ans. En fait, il y a le magazine L'Actualité qui a révélé l'état de la question. Le magazine a eu une réponse assez laconique au ministère du Travail, je ne sais pas par qui, selon laquelle il n'y aurait pas eu de plainte. Moi, si ça prend une plainte, j'en fais une, parce qu'il y a un jeune d'une douzaine d'années qui s'est tué dans mon comté. Il travaillait chez un dépanneur, dans le sous-sol, avec un convoyeur à moteur. Il est monté avec et il s'est tué.

Moi je pense, d'après ce que je peux vérifier de mes collègues, en 1979, quand l'âge minimum légal pour travailler a été biffé de la loi, il n'y a pas eu de débat, il n'y a personne qui s'en est comme rendu compte. Dans le fond, je voudrais avoir deux éclairages, celui du président de la CSST dans le cas du jeune qui s'est tué dans mon comté - il travaillait pour un dépanneur sur la rue Notre-Dame... M. le Président, je pense que ce qu'il faut dire, c'est qu'on s'attend à ce que des jeunes soient affectés à de menues tâches qu'on appelle, du genre... Bon, pour les camelots, il n'y a jamais personne qui a trouvé matière à scandale, mais comme on vit une récession économique assez sévère, il y a de plus en plus de jeunes qui font des emplois industriels et dans des conditions parfois assez inacceptables.

Alors, je voudrais savoir, dans le cas de mon comté, les gens se posent encore des questions, et j'imagine que la CSST a fait enquête sur les circonstances de l'accident. Du ministre, je voudrais savoir s'il est prêt à s'engager à introduire un amendement à la loi pour mettre un âge minimum pour travailler, comme ça a déjà existé.

M. Cherry: Pour ce qui concerne la partie, Michel, que tu diriges à moi, d'abord, je tiens à dire que, quand Michel Arseneault, qui est journaliste, a appelé chez nous, c'était la première fois que c'était porté à mon attention. Tu te dis: Bien, c'est la première fois que quelqu'un l'apporte à part ça. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de problème, là, ça veut dire que c'est la première fois que quelqu'un porte ça à ton attention.

Donc, j'ai demandé de vérifier, pour dire: Tu sais, c'est quoi, il me semble... Je me souviens, moi, quand je suis entré sur le marché du

travail, je n'avais pas 16 ans, j'avais 15 ans. Ça m'avait pris un permis pour dire que je continuais mes études le soir. Donc, je savais, par expérience personnelle, qu'il y avait quelque chose là-dedans, mais je me demandais comment ça se faisait que c'était disparu. D'ailleurs, je demanderais au président... Il y a une série de listes d'emplois pour lesquels, la CSST, il faut qu'elle intervienne là-dessus. Ce n'est pas complètement le néant.

Pourquoi c'est comme ça? En 1980, c'est le gouvernement de l'époque qui a décidé de transférer à la CSST la responsabilité qui, avant 1980, appartenait au ministère du Travail. Ça a eu comme résultat que ça a créé un peu ce que tu décris, une espèce de vide juridique. Tu sais, ça n'appartient pas à nulle part et on... Si ma mémoire est bonne, on me dit qu'à quelques reprises, durant la même période et dans les années qui ont suivi, il y aurait eu des tentatives de vouloir... En 1981, la CSST a proposé un projet de règlement visant à déterminer l'âge minimum pour le travail à 16 ans, avec la possibilité d'obtenir un permis pour 15 ans. Le gouvernement de l'époque n'a pas adopté ce projet, préférant aborder la question par le biais d'une autre loi.

Il y a eu quelque chose de tenté à l'époque, et il y a eu des raisons. On me dit que c'était Mme Payette qui à l'époque, avait un type d'objection. Je ne pourrais pas t'indiquer quoi, mais on me dit que c'est elle qui avait fait que ça n'avait pas pu être inclus. Alors moi, une fois que ça a été porté à mon attention, que j'ai suivi le dossier, j'ai demandé chez nous, dans un premier temps: Je veux voir c'est quoi le problème, s'il y en a un, c'est quoi sa véritable dimension? J'ai demandé au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre... Quand les Affaires sociales, la Famille, les Normes du travail m'auront dit, eux autres, ce qu'ils ont constaté là-dessus, puis la CSST. S'il y en a un, c'est quoi sa dimension réelle, est-ce que ça nécessite de la législation, si oui, dans quel type, ils me donneront un avis, et je procéderai dans ce sens-là. C'est ça que je fais dans le moment.

M. Bourdon: Est-ce qu'on peut s'attendre à des études qui concluraient assez vite? Je vais dire franchement au ministre: Quand j'ai appris la tragédie dans mon comté, je suis resté renversé, peu importe à cause de quel gouvernement la disposition est tombée. C'est qu'au début du siècle, un des signes de civilisation qu'on a vécu, c'a été d'interdire le travail des enfants. On se rappelle l'époque où il y avait des enfants de 10, 12 ans, qui travaillaient dans les mines. Là, on vit une récession qui est relativement grave, et même sans récession, le principe est le suivant: qu'on mette l'âge minimal à 16 ans avec une possibilité d'exemption à 15 ans. Moi, j'ai des souvenirs d'adolescent. Je voulais travailler l'été et j'avais 15 ans. J'étais allé au ministère du Travail. J'avais expliqué l'emploi que j'avais obtenu dans une banque et on m'avait donné l'exemption, mais on m'avait posé des questions sur ce que je ferais. Mais sur une chaîne de montage, des enfants de 10 ans, 12 ans, 13 ans, 14 ans... La récession fait qu'il y a des gens mal pris et qu'il y a des familles qui recourent à ça. Je ne sais pas l'âge exact qu'avait l'enfant qui est mort dans mon comté, happé par un convoyeur, mais c'est évident qu'à 13 ou 14 ans, en matière de sécurité, on comporte un plus grand risque, j'ai l'impression.

M. Cherry: li en existe, Michel, de la réglementation là-dessus parce que... Par rapport à 1980, quand on a passé cette responsabilité-là du ministère du Travail à la CSST, il en existe. Ça vaudrait la peine qu'on regarde, évidemment, basé sur l'aspect sécurité-santé. On a dit: C'est ça, par rapport au travail. C'est porté à ton attention.

M. Bourdon: Je prends l'exemple de..

M. Cherry: Je prends l'article, par exemple, du jeune chez vous. Ça, là, on pourrait regarder ça. Mais si tu prends, par exemple - l'article le reproduisait bien - le père de famille qui opère un dépanneur et pour qui les enfants travaillent, je ne suis pas certain qu'il va aller demander un permis pour ça, mais, dans le fond, ce que tu me dis, c'est: Est-ce qu'on pourrait avoir une espèce de loi minimum ou quelque chose, quand quelqu'un serait pris en...

M. Bourdon: Admettez, M. le Président, qu'il...

M. Cherry: J'aimerais ça que le président donne la liste des...

M. Bourdon: ..y a un paradoxe. Il y a un âge minimum pour consommer de l'alcool dans un bar et...

M. Cherry: Mais celui qui passe les journaux, Michel?

M. Bourdon: Je le sais, mais avant, quand la loi existait à 16 ans, il y avait des camelots, et ça devait être par tolérance ou par amendement au règlement que c'était admis. Je ne dis pas qu'il y a moyen de tout, mais qu'il y ait un âge minimal pour consommer de l'alcool dans un bar et pas d'âge minimal pour travailler, il me semble qu'il y a quelque chose qui ne va pas là.

Le Président (M. Bélanger): Sous toute réserve, M. le ministre...

M. Cherry: M. le Président, quand ils ont enlevé ça, quand c'a été enlevé en 1980, c'était en connaissance de cause. Ils savaient qu'en

faisant ça, c'avait ça comme résultat, mais ils ont préféré ne pas le faire pour des raisons de respect de je ne sais pas trop quoi. On pourrait fouiller les débats de l'époque. Mais ce n'est pas quelque chose qui a été oublié dans la nuit des temps comme si personne n'en avait eu connaissance. Il y a eu un pourquoi à ça.

M. Bourdon: M. le Président, ils ont peut-être mal fait. C'est peut-être pour ça qu'on a perdu le pouvoir en 1985. Ça fait six ans que vous êtes là. Quand allez-vous réparer la gaffe, si c'était une gaffe?

Le Président (M. Bélanger): C'est qu'il y a des prescriptions dans la Loi sur la protection de la jeunesse...

M. Cherry: On a une liste longue de même de gaffes à réparer.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Si vous saviez comment la liste qu'on fait, nous, commence à être longue. Les municipalités, il y a quelqu'un qui va devoir reprendre ça, à un moment donné.

M. Cherry: On a au moins 5 à 10 ans à continuer à réparer vos gaffes.

Une voix: On va vous laisser ça en bon ordre.

Le Président (M. Bélanger): Simplement pour revenir sur le sujet des jeunes au travail, il y a des prescriptions qui existent dans la Loi sur la protection de la jeunesse qui empêchent les jeunes de travailler avant 16 ans, qui les obligent à fréquenter l'école, mais qui permettent des travaux mineurs, style camelot, livrer des journaux, travailler dans les dépanneurs, quelques heures par semaine, etc., mais ça existe dans la Loi sur la protection de la jeunesse. Ça, je suis sûr de ça.

M. Diamant: Je pense qu'on pourrait, comme dit M. Cherry, débattre longuement la question parce qu'il y a toutes sortes de tendances qui s'expriment quand on discute de ça, entre autres, quand on se réfère aux responsabilités des parents, aux Chartes des droits, des histoires de même. Finalement, il y a toutes sortes de tendances qui s'expriment. Il existe, effectivement, des dispositions dans la Loi sur la protection de la jeunesse, mais les gens nous disent que ces dispositions-là sont à revoir parce qu'elles ne sont pas étanches parfaitement. Il existe aussi certains secteurs prohibés où travaillent des jeunes actuellement. Dans le domaine de l'agriculture, il y a des choses, il y a des prescriptions. Je sais qu'il y a des dispositions dans les codes de sécurité ou les codes de construction pour différents travaux très précis, mais, encore là, une fois qu'on a fait le tour de ça, on n'épuise pas la question. C'est pour ça que le débat est sur la table. Je veux quand même préciser qu'en ce qui concerne la CSST, malgré tout ça, même s'il n'y a pas de règlement concernant l'âge minimum de travail, tous les règlements qui concernent les conditions sécuritaires du travail s'appliquent pour tous les travailleurs, y inclus les jeunes. Les jeunes sont couverts par la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Le cas que vous avez cité fait l'objet d'une enquête. Je n'ai pas les conclusions de l'enquête, mais il ne faut pas oublier qu'il y a des obligations qui sont faites aux employeurs dans nos lois. Je ne sais pas ce que ça va donner au bout, mais dans la mesure, par exemple, où nos lois font obligation à l'employeur de donner l'information lorsqu'il y a un danger, si ce n'est pas fait, qu'il s'agisse d'un jeune ou qu'il s'agisse d'un vieux, il y a un problème, là. Effectivement, je crois avec vous que cette question-là - et M. Cherry l'a mentionné - mérite d'être...

M. Cherry: Oui, on le regarde. C'est quelque chose qui est porté à notre attention et qu'il faut corriger.

M. Bourdon: Pour ce qui est du cas qui est dans mon comté, quand il y aura des conclusions à l'enquête, est-ce qu'on pourra avoir copie du rapport?

M. Cherry: Oui, Michel.

Institut de recherche et d'information sur la rémunération

M. Bourdon: M. le Président, j'ai' un autre sujet dans les renseignements demandés par l'Opposition officielle pour l'étude des crédits. C'est à la page 12 du document, où l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération répondait aux renseignements demandés par l'Opposition officielle. On a demandé des renseignements, et, en page 12, ça s'intitule: Contrats de moins de 25 000 $ octroyés pour des services professionnels. Il y en a un dont l'objet est la conception et la réalisation d'un logo pour l'IRIR avec toutes ses applications, 11 349,13 $.

Le Président (M. Bélanger): On parle de la page 12. J'ai un document, mais je n'ai pas la page 12.

M. Cherry: Michel, pour la CSST, peut-on libérer les gens?

M. Bourdon: Oui, oui.

Une voix: Est-ce que vous nous souhaitez bonne chance aussi?

M. Cherry: Bien sûr.

M. Bourdon: On vous souhaite bonne chance nous autres aussi.

Le Président (M. Bélanger): On voudrait vous remercier de votre participation efficace à nos travaux et aussi de votre patience. L'étude des crédits, c'est l'occasion de toutes les questions et de toutes les choses. Ce n'est pas juste une question de piastres, c'est les autres préoccupations qui y passent. Alors, on vous remercie de votre patience et de la pertinence de vos réponses.

M. Cherry: Une autre question, Michel?

M. Bourdon: Non, ça va. On vous remercie beaucoup.

M. Cherry: Le fait qu'il les libère, c'est sa façon de leur dire merci.

M. Bourdon: Alors, j'avais une question à la page 12 du document que l'Institut nous a remis. La conception et la réalisation d'un logo a coûté 11 349 $. Alors, ma question est la suivante. N'est-ce pas un peu cher pour un logo? Est-ce qu'il était beau au point qu'il justifiait largement le prix?

M. Cherry: Si on me le permet, je vais demander à la présidente, madame, de répondre à ça

Mme Poupart-Gendreau (Nicole): Je peux vous dire, effectivement, qu'il est très beau, pour commencer.

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse. Pouvez-vous vous identifier pour les fins du Journal des débats?

Mme Poupart-Gendreau: Oui, Nicole Poupart-Gendreau, présidente-directrice générale de l'IRIR. Le prix de 11 000 $, effectivement, si ça comprenait exactement la conception, je serais d'accord avec vous que ce serait un peu cher. Ce que ça comprend, c'est non seulement la conception du logo comme tel, mais toutes les implications au niveau des rapports de l'Institut, la papeterie, les cartes, les cartes de visite, etc. Alors, c'est pour ça que c'est 11 000 $. C'est beaucoup plus que la conception du logo

M. Bourdon: Écoutez, ma surprise, M. le Président, c'est qu'immédiatement après, on voit un bureau d'avocats connu - contestation de taxes municipales - et c'est la moitié moins cher. Je pense que c'est la première fois que je vois des avocats coûter moins cher que quoi que ce soit.

Le Président (M. Bélanger): On va les citer en exemple.

M. Cherry: Dis-le pas

M. Bourdon: Vous savez I histoire du député de Labelle, l'hiver passé, qui nous racontait qu'un citoyen âgé de son comté - c'est Jacques Léonard, le député de Labelle - lui a dit Jacques, il fait tellement froid ce matin que j'ai vu un avocat qui avait les mains dans ses propres poches

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Finalement, M. le Président, je voudrais remercier la présidente de l'Iinstitut Ça nous avait frappés. On a un souci d'économie On se dit que si on économise assez, ça va peut-être donner au président du Conseil du trésor ce qu'il faut pour ne pas geler les salaires de vos employés. Je vous remercie de vos explications. Et je voudrais, en terminant, M. le ministre, vous soulever le cas de la Bibliothèque centrale de prêt de la Montérégie. (20 h 15)

Bibliothèque centrale de prêt de la Montérégie

Le 28 novembre 1990, la direction de la Bibliothèque centrale de prêt de la Montérégie décrétait un lock-out contre ses 11 employés, après six séances de négociations, dont trois en conciliation. Alors qu'aucun moyen de pression n'avait été engagé, l'employeur a décidé d'un lock-out mettant ainsi en péril un service important pour 174 000 citoyennes et citoyens de la Montérégie. La Bibliothèque centrale de prêt, c'est une organisation financée par les municipalités, mais surtout par le ministère des Affaires culturelles, pour envoyer des livres sur demande à des personnes bénévoles dans les municipalités qui administrent de petites bibliothèques. Il y a 11 bibliothèques centrales de prêt au Québec.

L'attitude pour le moins étrange du directeur général, M. Richard Borvin, est vivement dénoncée par les employés en cause. Ce dernier exigerait d'ailleurs le congédiement du commis de la Bibliothèque centrale pour des motifs assez nébuleux, ce à quoi se refuse le syndicat qui est en cause. Entre autres choses, il semble que les problèmes de santé de l'employé en question qui l'ont forcé à s'absenter du travail soient pour quelque chose dans l'attitude de l'employeur. M André Richard, le commis en question, a d'ailleurs porté plainte auprès de la CSST pour ce qui est de ses problèmes physiques. Par ailleurs, le ministère du Travail, par un commissaire enquêteur, toujours dans le même dossier, celui de Mme Louise Daigneault, a rendu un jugement à rencontre de la Bibliothèque centrale de prêt. Il s'agit d'une syndiquée qui est allée déposer le

premier grief depuis deux ans au directeur de la Bibliothèque centrale et, en représailles, il a fait enlever la porte de son bureau pour qu'elle ne puisse plus travailler tranquillement, ce qui est un comportement un peu spécial.

Je voudrais aussi vous dire, M. le ministre, que si vous parlez à votre collègue des Affaires culturelles, vous devriez peut-être l'informer que les gens trouvent un peu spécial que M. Boivin fasse la promotion d'un logiciel pour toutes les bibliothèques des 70 municipalités abonnées, qui est produit par la firme où travaille sa femme. Ce n'est pas parce qu'on est des Canadiens français jaloux que d'autres Canadiens français réussissent, mais disons que ça, c'est un petit peu fort. Alors, je voudrais savoir si le ministre a été saisi de ce conflit de travail, s'il y a une démarche possible pour essayer de mettre fin au lock-out, et, à cet égard, je voudrais - parce que je l'ai reçu du syndicat - déposer un ensemble de pièces qui résument le conflit et qui donnent les dates.

Le Président (M. Bélanger): Documents déposés.

M. Cherry. M. le Président, hier mon collègue m'a informé qu'on aurait à traiter de ça aujourd'hui. Effectivement, il y a eu séance de conciliation. On me dit qu'il y avait même eu à un moment donné un accord de principe qui était presque intervenu. Il y aurait eu changement de personnel. Alors, j'ai demandé à des gens qui sont familiers avec le dossier - les responsables du service de la conciliation - d'être présents. Qui veut répondre à ça? Jean Des Trois Maisons.

M. Des Trois Maisons (Jean): Jean Des Trois Maisons, sous-ministre adjoint aux relations du travail. Juste pour donner un éclairage un peu plus grand sur le dossier. Toutefois, je dois souligner que c'est en conciliation. Donc, je pense que le député de Pointe-aux-Trembles qui connaît aussi bien que moi les relations du travail va comprendre qu'on ne peut pas aller tellement dans le détail de l'intervention, puisque ça pourrait, comme conclusion, peut-être nuire au règlement du dossier si on a une possibilité de le régler à court terme. Mais tout ce que je peux dire dans les grandes lignes, c'est qu'au mois de mars, le service de conciliation a relancé le dossier - ça fait déjà un petit bout de temps que ce dossier-là... Oui, j'ai ici ia date, le 28 novembre 1990. On a fait une relance, et le directeur de la conciliation a rencontré les porte-parole des parties avec la conciliatrice au dossier, puis il s'est dessiné, dans le cadre de ces discussions-là, une voie de règlement. Je ne pourrais pas élaborer sur le contenu comme tel, mais le processus était enclenché pour arriver à un règlement. Malheureusement, il y a eu des événements qu'on ne contrôle pas puis qu'on n'a pas à juger, il y a eu un changement de per- manent, c'est-à-dire le représentant des travailleurs, puis je ne porte pas un jugement négatif envers lui, loin de là. Effectivement, il y a eu un changement. Alors, quelqu'un d'autre est arrivé au dossier pour représenter les travailleurs. À ce moment-là, il y a eu une nouvelle analyse de la situation. Il aurait fallu un peu reprendre la démarche d'évaluation du dossier, compte tenu de son contenu. Ce qui est arrivé, c'est que ça a remis un peu le cadre de la démarche du règlement en cause. Donc, après cette démarche-là, on est resté en contact avec les parties. M. Normand Gauthier, qui est directeur du service de conciliation, est resté en contact avec les porte-parole. On a eu une dernière démarche téléphonique, hier, le 16 avril. Il y a une discussion avec les porte-parole pour tenter de relancer l'affaire et voir à organiser peut-être une nouvelle rencontre avec les porte-parole. Il y a un certain nombre de points - je n'entrerai pas dans le détail des points en litige - vous avez déjà énoncé des choses, entre autres devant le commissaire. Je ne suis personnellement pas informé de ce détail-là, mais vous avez fait le dépôt de l'ensemble des documents. Je suis bien convaincu que M. le ministre va me charger de regarder ça tout particulièrement.

Alors, c'est un peu ça. C'est un syndicat qui est affilié à la CEQ. Il y a 11 salariés dans le dossier. Comme je vous le dis, hier M. Gauthier a parlé avec (es porte-parole, puis on va mettre tous les efforts, c'est bien sûr, pour tenter de relancer la négociation.

M. Bourdon: M. le Président, je voudrais remercier le sous-ministre adjoint aux relations du travail de ses explications. Je ne discuterai pas longtemps avec lui comment se fait la conciliation parce qu'il m'a déjà concilié dans des dossiers, à l'époque. Je ne veux pas, en aucune manière, entrer dans le détail du dossier, mais qu'il suffise de dire qu'il s'agit d'une petite boîte; il y a 11 syndiqués en cause. La boite fonctionne pareil parce qu'il y a quatre cadres pour 11 syndiqués, ce qui est beaucoup de chefs par rapport au nombre d'Indiens victimes d'un lock-out. La boîte marche tant bien que mal quand même, et je soulève le problème parce que c'est l'application d'une des tâches essentielles du ministère qui est la conciliation, la médiation, qui n'est pas toujours spectaculaire, mais qui est très essentielle parce que c'est les relations entre les parties, et je pense que le ministère fait une tâche assez imposante à cet égard-là. C'est un petit syndicat et ça étonne un peu, dans le péripublic, d'assister à un lock-out comme ça qui n'avait pas été précédé de moyens de pression, ni de déclenchement de grève, ni même d'un vote de grève des syndiqués en cause. Maintenant, chacun sait qu'une des caractéristiques des petites boîtes, c'est que, des fois, c'est un peu comme une famille, puis on sait comment c'est quand les relations se détériorent dans une

famiHe. C'est André Gide, je pense, qui disait: "Familles, je vous hais!" Disons qu'il y a des problèmes dans cette boîte-là, et je suis heureux de voir que le ministère a l'intention de prendre les moyens pour essayer de tenter de rapprocher les parties.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Drummond.

Relations du travail

M. St-Roch: Merci, M. le Président. D'une façon un peu plus générale, M. le ministre, est-ce que vous êtes capable de nous dresser un tableau des relations du travail au Québec les deux dernières années? Est-ce qu'on s'améliore?

M. Cherry: Je pense qu'une façon qui a, à mon avis, toujours été utilisée, c'est le nombre de personnes qui sont en situation de conflit ou de lock-out. Dans le moment, évidemment, c'est la situation, si on peut dire, la meilleure, la plus basse, qu'on me dit. Les derniers chiffres, il me semble que c'est 1100 personnes. Évidemment, le contexte économique aussi contribue pour beaucoup. Quand on est dans une situation économique telle qu'on la vit présentement, inutile de dire qu'on observe des comportements qui n'étaient jamais pensés avant. Je pense à un sujet qui est bien d'actualité. Qui aurait pu penser au Québec il y a à peine quelques années ou quelques mois, si on veut, que des centrales syndicales représentant 400 000 travailleurs et travailleuses du secteur public et parapublic auraient, dans une démarche avec le Conseil du trésor, proposé l'acceptation d'un gel des salaires pour une période de trois mois. Je pense que c'est un signe des temps, un sentiment de reconnaissance du degré de la situation, et on me dit qu'une prochaine rencontre est prévue pour vendredi de cette semaine, après-demain, sur les mêmes sujets pour continuer entre les parties. Donc, pour répondre à votre question, le baromètre qui est, règle générale, utilisé, c'est celui du nombre de jours perdus à cause de grève ou de lock-out. Il est à son plus bas niveau là, depuis fort longtemps, c'est 1100 personnes au moment où on se parle.

Le Président (M. Bélanger): M le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, juste ajouter que, dans le cas du secteur public, c'est heureux qu'il y ait une tentative de négociation qui se soit faite. Mon parti a appris que, dans cette matière-là, la négociation est plus rentable politiquement que l'imposition des conditions de travail. Disons qu'on a payé assez chèrement.

Je voudrais cependant ajouter à ce que dit le ministre que. dans le monde industriel, une des choses qui est survenue il y a un certain nombre de mois, qui risque d'avoir des conséquences à long terme, c'est la loi spéciale visant les syndiqués d'Hydro-Québec affiliés à la FTQ Dans le sens qu'on a eu là un exemple manifeste d'utilisation par le ConseH du trésor de moyens vraiment très très agressifs à l'endroit de syndicats qui, à mon point de vue, ne le méri talent pas. Ce que je veux dire, c'est que vraiment on a vécu ça comme parlementaires, on sentait que, du côté du Conseil du trésor, la plus grande crainte, c'était que la paix éclate À cet égard-là, ils ont réussi..

M. Cherry: Ha, ha, ha! T'as une façon de décrire...

M. Bourdon: ...et on a imposé aux syndiqués des conditions de travail inférieures à la dernière offre de l'employeur. Je pense que c'est préoc cupant, M. le ministre, parce que Hydro-Québec vit de nombreux problèmes, dont un problème de productivité. Il faudrait que le gouvernement sache prendre un peu sa distance vis-à-vis des purs et durs du Conseil du trésor qui sont comme... Ils sont au gouvernement ce qu'un service du personnel est à une entreprise. Des fois, il y en a qu'on transfère ailleurs, qu'on invite à un départ, qu'on... Des fois, on trouve qu'un service de cette nature-là devient un petit peu comme un boxeur qui a trop boxé à un moment donné. À cet égard-là - je le dis en toute amitié au ministre, c'est un conseil politique que je donne - la manière forte avec les syndiqués de Hydro-Québec, entre autres, ils en parient encore partout, ils sont une quinzaine de mille et puis ils sont mécontents.

Cela dit, M. le Président, je pense que le ministère fait tous ces efforts pour réparer les pots cassés par d'autres et puis essayer de faire qu'il y ait un bon climat dans les relations du travail.

Le Président (M. Bélanger): Le problème au Conseil du trésor, c'est qu'ils sont tous syndiqués.

M. Bourdon: Pas tous, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): On ne peut pas les inviter.

M. Cherry: Non, je ne pense pas, non. En terminant, M. le Président, juste pour renchérir sur mon collègue. Hier, comme vous tous, on a pu prendre connaissance du budget dune province canadienne, la cinquième consécutive. On a vu qu'encore une fois, non seulement ils parlent de gel des salaires pour une période aussi longue, et même plus longue qu'il n'est question ici, c'est la cinquième province consécutive, si les informations que j'ai lues ce matin... Puis, si ma mémoire est exacte avec des coupures, des diminutions de postes, ce qui chez nous n'a pas été l'ap-

proche retenue. Ça, là, je pense qu'on doit le dire même si parler de situation de gel n'est jamais agréable. Je suis convaincu que la diminution envisagée au niveau du fédéral et au niveau de chacune des provinces qui l'a fait à date, et le nombre de diminutions ne fait pas l'objet ici, aucunement. Il n'est pas question de ça. Ça n'a pas été présenté. Je pense que ça démontre le souci du gouvernement du Québec, à l'intérieur de la situation bien difficile, de ne pas prendre ce genre de travers là.

Remarques finales

Comme c'est peut-être ma dernière intervention....

Le Président (M. Bélanger): Effectivement.

M. Cherry:... parce que je pense qu'on a atteint le but, vous permettrez, M. le Président, dans un premier temps, de remercier non seulement tous les gens qui sont venus nous assister, qui ont participé ne serait-ce que de façon bien patiente, puis qui nous ont aidés dans les informations, mais également l'ensemble de mes collègues autour de la table qui - on avait d'autres activités tout le monde, puis on va faire suite à ça - ont rempli le devoir pour lequel les électeurs les ont choisis. Puis dans ce sens-là, je tiens à les remercier aussi.

C'est ma première activité comme telle. J'ai trouvé l'expérience intéressante et enrichissante. Elle nous permet de prendre note, de donner le suivi de certains dossiers. Puis, encore une fois, je me plais à le répéter chaque fois que j'en ai l'occasion, il y a trop de gens qui pensent que, parce que des fois on origine du milieu syndical, on n'a pas nécessairement nos places dans des décisions. Mon confrère et moi, on vient du même secteur d'activité économique, et je pense qu'on est capables de faire la démonstration qu'on peut aider à contribuer au mieux-être de l'ensemble de la collectivité québécoise.

Le Président (M. Bélanger): Vous pourriez avoir été patron, ça ne mène nulle part, regardez.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Alors, M. le Président, juste dire au ministre, parce qu'il a mentionné l'importante négociation entre les 400 000 employés du gouvernement et le Conseil du trésor, juste deux idées que je lui laisse pour en faire l'usage qu'il voudra dans le fond. Avant la récession actuelle, on a connu cinq années de forte croissance économique. De 1985 à 1990, l'économie québécoise a grossi de 12 % après avoir soustrait l'inflation. Les employés de l'État n'ont eu que l'inflation et n'ont pas obtenu d'amélioration de leur pouvoir d'achat. Je veux juste donner au ministre trois chiffres pour réflexion et pour comprendre pourquoi l'élection de 1986 a été si défavorable au gouvernement qui avait coupé les employés de l'État. Selon les derniers chiffres disponibles de 1981 à 1991, les bas salariés de la fonction publique ont perdu 6 % de pouvoir d'achat, les salariés moyens ont perdu 29 % de pouvoir d'achat, et les hauts salariés - enseignants, conciliateurs, professionnels du gouvernement - ont perdu 48 % de pouvoir d'achat. Ce que je veux dire, c'est qu'il faut comprendre que ces gens-là disent: Ne nous faites plus mettre d'argent dans le coffre parce qu'on a déjà fourni au bureau pour la peine. Cela dit, je remercie le ministre de sa coopération habituelle, mes collègues ministériels aussi. Je pense que ça a été un exercice important. Les gens nous élisent, entre autres, pour savoir où va l'argent, pas juste en dollars et cents, mais quelles sortes de programmes et ce qu'il y a derrière. Je remercie le ministre et le président de la commission.

Le Président (M. Bélanger): Pour conclure brièvement par une anecdote, morale: Ne travaillons pas dans le parapublic, c'est trop dangereux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Je me permets, M. le Président, en terminant... Dans les remarques, les suggestions que m'a faites mon collègue concernant les gens du secteur public et parapublic, on me permettra de dire qu'à date - je suis convaincu que ça va continuer comme ça - personnellement, je n'ai jamais eu la prétention que des gens étaient trop payés en aucune façon. Quand l'État a eu les moyens de les rémunérer, il l'a fait, et là, il s'agit simplement de les convaincre de partager cette période difficile mais temporaire. Je suis convaincu que même s'ils sont présentement à la recherche de solutions, ils apprécient grandement, à mon avis, le fait qu'en aucune façon, par aucun commentaire, ni directement ni indirectement, on a mis en doute leur prestation de travail, leurs qualités et leur compétence professionnelle.

M. Bourdon: Encore une attaque contre Yves Bérubé.

Une voix: II faut adopter les programmes.

Adoption des crédits

Le Président (M. Bélanger): Un instant. Est-ce que le programme 1, Relations du travail, est adopté?

M. Cherry: Adopté.

Une voix: Adopté.

M. Bourdon: Sur division.

Le Président (M. Bélanger): Sur division? M. Bourdon: Oui.

Le Président (M. Bélanger): Ça allait si bien, vous voyez? Est-ce que le programme 2 est adopté?

M. Cherry: Adopté.

M. Bourdon: Sur division.

Le Président (M. Bélanger): Le programme 3 est-il adopté?

M. Cherry: Adopté.

M. Bourdon: Surdivision.

Le Président (M. Bélanger): Le programme 4?

M. Cherry: Adopté.

M. Bourdon: Sur division.

Le Président (M. Bélanger): Le programme 5?

M. Cherry: Adopté.

M. Bourdon: Sur division.

Le Président (M. Bélanger): Le programme 6?

M. Cherry: Adopté.

M. Bourdon: Sur division.

Le Président (M. Bélanger): Dans le programme 7 il n'y a pas de crédits, alors on n'a pas besoin de l'adopter.

M. Bourdon: S'il n'y a rien, on n'en fera rien.

Le Président (M. Bélanger): Donc, est-ce que l'ensemble des crédits du ministère du Travail sont adoptés?

M. Cherry. Adoptés.

Le Président (M. Bélanger): Adoptés. Alors, ça termine donc pour les procédures. Je vous remercie tout le monde. Bonsoir.

(Fin de la séance à 20 h 34)

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