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(Neuf heures trentre-six minutes)
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît, messieurs dames! Je déclare la séance de la
commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle le
mandat de la commission qui est d'étudier la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour l'année 1992 et d'entendre à cette fin
les membres du conseil de direction d'Hydro-Québec, par ordre de
l'Assemblée du 10 mars 1992. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a
des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Fradet
(Vimont) remplace Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Caron
(Terrebonne) remplace M. Blais (Masson), M. Beaulne (Bertrand) remplace Mme
Dupuis (Verchères) et M. Baril (Arthabaska) remplace M. Léonard
(Labelle).
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, je vous fais part
de l'ordre du jour dont on a convenu et qui a été
déposé en Chambre. De 9 h 30 à 9 h 50 ce matin, il y a les
remarques d'ouverture de Mme la ministre; de 9 h 50 à 10 h 10, les
remarques d'ouverture de l'Opposition officielle; de 10 h 10 à 10 h 30,
les remarques d'ouverture d'Hydro-Québec. De 10 h 30 à 12 h 30,
les propositions tarifaires, et nous reprendrons de 16 h 30 jusqu'à 18 h
30 et, ce soir, de 20 heures à 23 heures.
Je veux souhaiter, au nom des membres de la commission, la bienvenue aux
gens d'Hydro-Québec et je donne la parole immédiatement à
Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources pour son intervention
d'ouverture.
Remarques d'ouverture Mme Lise Bacon
Mme Bacon: Je vous remercie, M. le Président. Il est vrai
que le sujet qui nous réunit aujourd'hui, et vous en conviendrez, je
pense, est de première importance. Faire l'étude de la
proposition tarifaire d'Hydro-Québec pour 1992 mènera à
une décision qui touche tous les Québécois.
L'électricité est un service essentiel dont personne ne peut se
passer, il ne faut pas l'oublier. On peut et on doit certes l'utiliser avec le
plus grand souci d'économie, mais elle fait partie de notre vie de tous
les jours à la maison comme au travail, quel que soit notre mode de vie
ou notre revenu. Et voilà pourquoi 11 m'importe que nous mettions au
premier rang de nos travaux, pendant deux jours, le souci de la protection du
consommateur. La décision du gouvernement, je peux vous l'assurer,
s'appuiera fortement sur ce critère. Nous verrons à prendre en
considération un niveau de tarification acceptable et raisonnable qui
garantisse la fiabilité et la qualité du service.
L'électricité est aussi un facteur déterminant dans
notre économie. Elle y joue un rôle moteur au Québec
grâce particulièrement à la ressource hydraulique sur
laquelle elle s'appuie. Elle nous a permis de développer une expertise
reconnue, de soutenir le développement des entreprises et la
création d'emplois dans différentes sphères
d'activité. Il nous appartient de maintenir ces acquis, de nous donner
les outils pour poursuivre notre développement. Cette
préoccupation est particulièrement importante dans la conjoncture
actuelle.
Hydro-Québec doit inscrire dans ses orientations et objectifs
cette volonté de contribuer au développement économique du
Québec. Le gouvernement devra en tenir compte dans le niveau de
tarification qu'il lui accordera. Cela veut dire tenter de concilier l'impact
des tarifs sur la santé financière et la productivité des
entreprises avec les besoins financiers d'Hydro-Québec pour assurer la
disponibilité de la ressource au rythme des développements.
La commission de l'économie et du travail donnera à
Hydro-Québec l'occasion de faire le point sur l'état de
réalisation de son plan de développement 1990-1992, de faire la
preuve aussi que les consommateurs d'électricité en ont pour leur
argent. Hydro-Québec se voit offrir également
l'opportunité d'expliquer sa proposition tarifaire pour 1992 et d'en
démontrer le bien-fondé.
Je veux ici rappeler brièvement à la commission le
contexte de nos travaux. Ils découlent de la consultation
générale tenue en mai 1990 sur «La situation et les
perspectives de l'énergie électrique au Québec» qui
nous a permis d'entendre une soixantaine de groupes et d'associations. En
décembre 1990, j'annonçais une nouvelle procédure de
préparation et d'examen du plan de développement
d'Hydro-Québec. Très largement ouvert à la consultation,
ce processus amènera à s'interroger sur les choix
stratégiques de long terme.
La société d'État a amorcé le processus de
préparation de son plan 1993-1995 qu'elle doit soumettre au gouvernement
à l'automne 1992. Et, par la suite, nous aurons l'occasion de consulter
la population dans le cadre d'une commission parlementaire élargie.
Cette procédure prévoyait également qu'au cours des
années suivant l'adoption du plan la commission se pencherait sur le
suivi du plan et la proposition tarifaire annuelle d'Hydro-Québec.
Les travaux que nous entreprenons aujour-
d'hui se limitent à cette étape et je convie mes
collègues à consacrer les quelques heures qui nous sont
allouées au suivi du plan 1990-1992 et à la proposition tarifaire
pour 1992. Pour satisfaire cette commission et faciliter nos travaux,
Hydro-Québec a déposé un rapport général de
suivi, lequel a fait un bilan de l'état d'avancement des
activités prévues et les met en relation avec les objectifs
visés.
En outre, considérant les engagements et les discussions de la
commission parlementaire de 1990, il m'est apparu utile de lui demander de
soumettre quatre rapports particuliers sur le projet d'efficacité
énergétique, la production privée
d'électricité, l'état de l'hydraulicité, le
défi performance. Ces documents constituent le matériel de base
sur lequel nous appuyer pour solliciter d'Hydro-Québec les explications
additionnelles requises.
Je tiens à vous féliciter pour la qualité de ce
matériel et vous en remercier même si, vous n'en serez pas
surpris, il m'inspire beaucoup de questions.
De la lecture du rapport général de suivi se
dégagent des résultats intéressants: amélioration
au chapitre de la qualité du service, en particulier de ta communication
et de la réponse téléphonique, des délais de
raccordement et des préavis d'interruption planifiée et de la
continuité du service. Il se dégage également des efforts
à consentir et des zones plus problématiques au sujet desquelles
je voudrais vous entendre. Le rapport fait état aussi
d'améliorations dans le recouvrement, et vous comprendrez qu'il ne sera
pas possible de passer sous silence l'entente entre Hydro-Québec et la
communauté mohawk d'Akwesasne au sujet de laquelle j'ai
déjà exprimé ma position.
Au chapitre de la demande, je constate un certain recul sans doute en
raison de la situation économique. Ce ralentissement réduit en
partie l'impact négatif de la faible hydraulicité qui a
continué de nous affecter en 1990 et en 1991. Je note également
le report de la mise en service de certains projets. Nous aurons l'occasion d'y
revenir au cours de nos travaux.
Le rapport fait état des efforts de la société en
matière d'environnement. Ma préoccupation en regard du
développement durable m'amènera à approfondir cette
question avec vous. C'est aussi dans le rapport général que l'on
retrouve un bilan de la gestion financière de l'entreprise. J'y
reviendrai plus loin en discutant de la proposition tarifaire et, pour
l'instant, je veux traiter des rapports particuliers.
L'efficacité énergétique doit demeurer une
préoccupqtion première pour notre société dans un
contexte de développement durable. Je suis donc particulièrement
intéressée à discuter avec les représentants
d'Hydro-Québec de leur projet d'efficacité
énergétique et j'espère que nos discussions feront
ressortir clairement la portée énergétique,
économique et sociale de ce projet et des activités qui le
sous-tendent.
En matière d'économie d'énergie, il importe que les
objectifs visés soient réalisables et réalistes. Un
objectif louable en soi mais hors d'atteinte pourrait entraîner, entre
l'offre et la demande, un déséquilibre qui mettrait en
péril la capacité d'Hydro-Québec de satisfaire
adéquatement la demande future d'électricité.
L'amélioration de notre efficacité
énergétique constitue une priorité. Elle doit cependant
s'appuyer sur des choix économiques et sociaux qui tiennent compte des
besoins des Québécois. La production privée
d'électricité mérite aussi qu'on s'y attarde. D'une part,
nous avons décidé, en 1990, de favoriser l'exploitation de petits
sites hydrauliques par des promoteurs privés. En décembre
dernier, dix sites ont été octroyés. Les promoteurs
poursuivent à ce jour leur démarche. Nous allons, d'ici la fin du
printemps, enclencher l'an 2 de ce programme par l'offre d'autres sites. La
collaboration d'Hydro-Québec est, à cet égard, importante
pour assurer le succès d'un tel programme. (9 h 45)
D'autre part, la cogénération, c'est-à-dire la
production combinée d'électricité et de vapeur à
partir d'une source d'énergie thermique, est aussi une
possibilité de production privée d'électricité. Le
succès de popularité des appels d'offres d'Hydro-Québec
indique clairement l'intérêt de cette forme d'énergie.
J'aimerais que l'entreprise nous présente son point de vue et ses
objectifs sur cette forme de production d'électricité.
Au cours des huit dernières années, le Québec a
connu des années de faible hydraulicité. Les déficits
répétés sur le plan des apports hydrauliques ont
obligé Hydro-Québec à adopter des stratégies
diverses pour reconstituer sa réserve énergétique à
un coût important. Encore cette année, l'entreprise prévoit
des moyens exceptionnels de 142 000 000 $, qu'elle répercute dans une
large partie sur les tarifs. Il semble justifié d'interroger
Hydro-Québec sur le caractère exceptionnel de ce
phénomène échelonné sur huit années. Faut-il
comprendre que l'augmentation de 2 %, attribuée à ce facteur
serait temporaire et donc récupérable si la situation se
corrigeait? Ce phénomène ne doit-H pas plutôt faire partie
de contingences de l'entreprise?
Le gouvernement prête une attention particulière à
la productivité d'Hydro-Québec, facteur qui se répercute
nécessairement sur les coûts, comme dans toute entreprise.
À la demande du gouvernement, Hydro-Québec a d'ailleurs
élaboré un plan quinquennal pour le contrôle des charges
d'exploitation: il s'agit du «Défi Performance»,
déposé en novembre 1990. Ce plan vise l'application d'une
approche qualité à tous les domaines de l'entreprise. Sa mise en
place s'est faite en 1991 et l'année qui vient devrait en être une
de consolidation.
Le rapport produit à ma demande devrait
permettre au gouvernement et à la population de juger des efforts
consentis par Hydro-Québec pour améliorer sa performance. Je peux
vous assurer de mon insistance auprès de la société
d'État pour que toutes les dispositions soient prises pour
réaliser ce plan. C'est donc avec grand intérêt que je vous
entendrai sur ce sujet.
Je reviens maintenant sur l'objet principal de la présente
commission: l'examen de la proposition tarifaire pour 1992. Vous conviendrez
que nous avons une tâche particulièrement ardue en raison des
augmentations proposées. Force nous est de constater qu'en dépit
de l'ampleur des hausses tarifaires consenties au cours des deux
dernières années la situation financière
d'Hydro-Québec ne s'est pas améliorée au rythme
prévu. Bien sûr, la situation économique du Québec,
les conditions de faible hydraulicité en sont pour une bonne part la
cause. Mais, comme toutes les entreprises québécoises,
Hydro-Québec doit faire face à ces circonstances en
considérant la capacité de payer de ses clients. En aucun cas, sa
situation de monopole ne doit lui faire oublier cette
réalité.
Dans ce contexte, il est pour le moins inquiétant de constater
que les charges d'exploitation ont crû à un rythme nettement
supérieur au taux d'inflation et que la société
prévoit qu'il en sera ainsi en 1992. Faut-il voir ici certaines
difficultés pour l'entreprise à contrôler
l'évolution de ses charges? Je ne peux évidemment pas passer sous
silence la part des frais de garantie dans la proposition tarifaire, 1,9 %. Le
gouvernement est ici directement visé puisqu'il a lui-même
imposé ces frais. J'aimerais, par ailleurs, rappeler que, dans un
contexte d'affaires, toute entreprise qui sollicite une garantie de prêt
d'une institution privée doit assumer des frais de garantie et le
prévoir dans ses charges. HydroQuébec n'a pas eu à
supporter de tels frais jusqu'à maintenant. Il m'apparaît
justifié ici de demander à Hydro-Québec pourquoi il ne lui
est pas possible d'assumer ces frais à même ses charges.
Je le précisais en introduction, j'ai deux grandes
préoccupations dans l'établissement de la tarification: d'abord,
la protection des consommateurs d'électricité et aussi la
situation financière d'Hydro-Québec. Protéger
l'intérêt des consommateurs, c'est s'assurer que les tarifs sont
établis de façon juste et équitable et qu'ils
reflètent les coûts de la fourniture d'électricité
aux diverses catégories d'abonnés. C'est aussi s'assurer que les
besoins en électricité actuels et futurs sont satisfaits de
manière efficace, au meilleur coût possible. Je m'attarderai sur
chacun de ces points au cours de nos échanges. Mais d'ores et
déjà je peux dire que je m'interroge sur la pertinence et
l'urgence de réduire l'inter-financement dans un contexte où la
hausse tarifaire moyenne proposée est au-dessus du taux d'inflation
prévu.
La situation financière d'Hydro-Québec est aussi, je le
répète, un facteur important à considérer lors de
l'établissement du niveau des prix de l'électricité. La
société d'État doit en effet disposer de moyens financiers
suffisants pour s'acquitter de ses responsabilités envers la
collectivité québécoise. Qu'il suffise ici de rappeler
qu'Hydro-Québec compte investir au-delà de 4 500 000 000 $ en
1992; cela représente environ 93 % des investissements
énergétiques québécois et environ la moitié
des investissements publics prévus en 1992.
En fait, si on laissait se dégrader indûment la situation
financière d'Hydro-Québec, cela pourrait mettre en cause sa
crédibilité sur les marchés financiers, sa capacité
de jouer son rôle moteur dans l'économie du Québec. Il est
donc important d'assurer à la société d'État un
niveau de bénéfices suffisant pour maintenir des ratios
financiers acceptables.
Ceci étant dit, je m'attends à ce que le maintien d'une
bonne situation financière passe d'abord et avant tout par un
contrôle rigoureux des charges et une amélioration de la
productivité de l'entreprise, et, à cet effet, malgré une
prévision par Hydro-Québec d'un taux d'inflation de 2,6 %, et en
dépit d'un effort de rationalisation de l'ordre de 100 000 000 $, il
semble que les charges d'exploitation augmenteront de plus de 7 % en 1992. Il y
a là matière à s'inquiéter. À cet
égard, je m'attends à ce que les dirigeants de la
société d'État me démontrent la
nécessité d'une telle croissance, surtout dans le contexte actuel
où des sacrifices sont exigés de tous pour traverser la situation
économique difficile.
En conclusion, M. le Président, l'ordre du jour de cette
commission devrait nous permettre de discuter à la fois du degré
de réalisation du plan de développement 1990-1992 et de la
proposition tarifaire qui nous a été soumise. Personnellement, je
souhaite que cette commission permette à Hydro-Québec de nous
éclairer - c'est le cas de le dire - sur l'évolution de ses
projets et de ses programmes et notamment de nous expliquer les écarts
qui existent entre la planification adoptée il y a deux ans et sa mise
en oeuvre. Pour ce qui est de la proposition tarifaire, j'insiste pour dire que
les augmentations de tarif m'apparaissent comme un ultime recours pour
conserver une saine situation financière d'Hydro-Québec. J'invite
donc les dirigeants de la société d'État à nous
démontrer qu'ils ont épuisé toutes les autres avenues de
solutions avant de nous faire leur demande tarifaire.
Le Président (M. Audet): Merci, Mme la ministre. Alors, je
vais maintenant reconnaître le critique de l'Opposition en matière
d'énergie, M. le député de Joliette. Vous avez 20
minutes.
M. Guy Chevrette M. Chevrette: M. le Président, quand j'ai
lu
la première phrase de la page 3 du discours de Mme la ministre:
«... nos travaux, pendant ces deux jours, le souci de la protection du
consommateur», j'ai été très, très ému
et je me suis dit: Où était-elle lorsque le ministre des Finances
a imposé, par la loi 162, 150 000 000 $ à Hydro-Québec
pour les frais de garantie? Je me suis demandé où elle
était lorsque son gouvernement, en septembre dernier, a augmenté
la taxe sur le capital de 8 % qui va rapporter au gouvernement 30 000 000 $ de
plus. Ce qui fait qu'on a 180 000 000 $ exclusivement d'exigences du
gouvernement sur 203 000 000 $ qu'exige Hydro-Québec en 1992, à
savoir 90 %. Un drôle de souci du consommateur!
M. le Président, Hydro-Québec demande une hausse de
tarif... J'aurais pu ajouter, je m'excuse: Comment peut-elle avoir signé
le mémoire des contrats secrets qui coûtent au-delà de 240
000 000 $, nous dit-on, contrats secrets qui occasionneront une perte
évaluée d'ici l'an 2000 à 2 000 000 000 $? Drôle de
souci du consommateur.
Aujourd'hui, M. le Président, Hydro-Québec demande une
hausse des tarifs de 5, 5 % alors qu'elle prévoit une inflation de 2, 6
%. Et, selon elle, on devrait se considérer chanceux puisque les
coûts de fourniture seraient en hausse de 6, 8 %. On doit se compter
doublement chanceux car on a appris tout dernièrement que les
visées sur les hausses de tarifs étaient au départ
beaucoup plus élevées. À un moment, on a travaillé
sur des hausses de 8, 8 %, de 7, 7 %. On a entendu parler d'une hausse de 6, 5
% et Hydro-Québec nous arrive avec une hausse de 5, 5 % alors qu'au
ministère on travaille sur des hausses aux environs de 3 %. Ça,
c'est sans doute suite au tollé engendré par la demande
d'Hydro-Québec.
Pour les années 1990-1991, les hausses consenties à
Hydro-Québec totalisent 15 % alors que l'inflation a été
de 10, 7 %. Avec la demande de 5, 5 % d'Hydro-Québec pour 1992, les
Québécois auront donc subi, de 1990 à 1992, une hausse de
21, 3 % alors que l'inflation n'aura progressé que de 13, 5 %. Ce qui se
traduirait, avec la TPS et l'effet de la taxe sur la taxe (TVQ), par une
augmentation réelle de 33 %, plus précisément 32, 9 % sur
la facture du consommateur moyen. Pourtant, les salaires n'ont pas
progressé de 33 % depuis 1989.
Au contraire, dans plusieurs secteurs d'activité, les
travailleurs et les travailleuses du Québec ont consenti d'importants
sacrifices salariaux au cours des dernières années. Certains ont
même accepté des baisses de salaire pour sauver leur entreprise.
Le gouvernement s'apprête même à revenir sur ses engagements
d'il y a à peine six mois à l'endroit de la fonction publique en
ramenant les augmentations de salaire de 3 % à 1 %. Gouverner, dit-on,
c'est prévoir. Imaginez, on a un gouvernement qui dirige les
destinées de l'État et qui n'est même pas capable de
prévoir six mois à l'avance.
La récession économique que nous connaissons crée
400 000 chômeurs et 620 000 assistés sociaux. Il est donc
évident que les mauvaises créances d'Hydro, qui se sont
élevées à 71 000 000 $ l'an dernier, vont augmenter ainsi
que le nombre de citoyens et de citoyennes en difficulté de paiement qui
seront menacés de coupures de courant. Les comptes en souffrance
s'élèvent déjà, en 1991, à plus de un
demi-milliard de dollars. Cela, aux dires mêmes du président de
l'Hydro. Dans un tel contexte, une augmentation moyenne de 5, 5 %, et
même de 3 %, de 2, 9 % ou de 2, 8 %, serait inadmissible, voire
même indécente. Surtout qu'elle est manifestement injustifiable
à la lecture même de la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour 1992.
Cette demande de hausse de tarifs est directement
téléguidée par le gouvernement qui est passé
maître dans la taxation déguisée. Par exemple, la taxe sur
le capital d'Hydro-Québec a été augmentée depuis le
1er septembre 1991 de 8 %, ce qui donne au gouvernement 30 000 000 $ de plus
qu'en 1992. De plus, la nouvelle taxe appelée «frais de garantie
de la dette», que le gouvernement a imposée à
Hydro-Québec par la loi 162 du ministre des Finances, et pour laquelle
on réclame 1, 9 % d'augmentation de tarifs, représente à
elle seule 35 % de la hausse tarifaire demandée. Manifestement, la
ministre de l'Énergie n'a pas su freiner l'appétit du ministre
des Finances qui réclame à ce chapitre 150 000 000 $ aux
consommateurs d'électricité. Pourtant, elle m'avait bien dit,
à l'Assemblée nationale en novembre 1991, que ça n'aurait
pas d'incidence sur les tarifs.
La proposition tarifaire représente pour Hydro-Québec des
revenus supplémentaires de 203 000 000 $ en 1992. Ces deux taxes,
c'est-à-dire l'augmentation de la taxe sur le capital et les frais de
garantie, mangent à elles seules 180 000 000 $. Je le disais dans le
préambule, mais je veux le répéter: N'est-ce pas la preuve
que le gouvernement est le seul responsable de l'augmentation demandée
puisqu'il siphonne 90 % des revenus supplémentaires découlant de
la hausse des tarifs demandée, soit 180 000 000 $ sur 203 000 000 $ des
revenus attendus?
D'autre part, les citoyens et les citoyennes du Québec paieront
au total, avec la TPS, 185 000 000 $ au gouvernement fédéral et,
encore plus, les 5, 5 % d'augmentation moyenne des tarifs représentent
10 100 000 $ donnés en cadeau additionnel à ce même
gouvernement. Ils paieront également 226 000 000 $ sur la taxe de vente
provinciale au gouvernement du Québec, ce qui représente en tout
411 000 000 $ de taxe.
En guise de conclusion sur la question, j'aimerais signaler, en me
basant sur le tableau 2. 1 de la proposition tarifaire, que les revenus
attendus en 1992 par l'augmentation des tarifs seront de 203 000 000 $. Cela
correspond rigoureusement à l'augmentation des taxes qu'Hydro
aura à payer en 1992. Regardez le tableau 2.1: 595 000 000 $
moins 300 000 000 $, cela donne exactement les revenus escomptés par
Hydro. Un drôle de hasard, je suppose!
Hydro-Québec, n'étant pas au bout de ses peines avec la
taxation, doit faire face à deux difficultés majeures qui sont
les contrats secrets et la faible hydraulicité. Au niveau des contrats
secrets, le manque à gagner est beaucoup plus important que
prévu. L'heure est définitivement venue, et elle a
déjà trop tardé d'ailleurs, de siffler la fin de la
récréation au chapitre de ce dossier si contesté. Il faut
crever l'abcès. HydroQuébec invoque régulièrement
son souci de transparence. Aujourd'hui, le temps est venu d'en faire la preuve.
Ceci est primordial pour l'ensemble de la population du Québec, y
compris les employés d'Hydro-Québec qui se demandent si la hausse
de tarif ne sert pas en partie à compenser les pertes engendrées
par ces contrats. (10 heures)
M. Drouin a précisément annoncé, en
conférence de presse, un manque à gagner de 240 000 000 $ en
1992, soit le double des prévisions du dernier plan de
développement. La situation est donc très inquiétante. Les
revenus attendus de ces contrats signés sont basés sur un prix de
l'aluminium et du magnésium qui est aujourd'hui fictif par rapport au
cours actuel des métaux. À cet égard, j'aimerais citer M.
David Morton, président du conseil et chef de la direction d'Alcan, qui,
dans son rapport annuel de 1991, mentionne: «Si l'année 1991 a
été éprouvante, 1992 le sera aussi car l'offre
excédentaire de l'aluminium dans le monde demeure un grave
problème.»
Je suis d'autant plus inquiet qu'Hydro-Québec prévoit pour
1993 un prix de l'aluminium de 0,77 $ U.S. la livre alors que je lisais, dans
le journal Les Affaires du 22 février 1992, une prévision
de 0,63 $ de la firme Scotia McLeod, ce qui est 20 % de moins que la
prévision d'Hydro-Québec. Dans le cas du magnésium, les
procureurs d'Hydro admettent eux-mêmes, dans leurs représentations
auprès du département du commerce américain dans le
dossier de Norsk Hydro, que jamais le tarif L ne sera atteint pour la
durée du contrat. Nous verrons, à cet égard, lors de la
période des questions, d'ailleurs, que nous avons été
carrément induits en erreur, pour ne pas dire trompés. C'est
à se demander si le gouvernement n'a pas forcé
Hydro-Québec à surévaluer le prix de l'aluminium et du
magnésium pour pouvoir présenter un bénéfice net de
700 000 000 $. Je sais, en effet, que les contrats sont basés sur les
prix respectifs de 0,77 $ U.S. et de 0,82 $ U.S. la livre, alors que le cours
des métaux est actuellement largement inférieur. Soyons clairs,
on se dirige vers un gouffre financier sur lequel on n'a pas de contrôle.
D'ailleurs, certains experts prévoient l'existence de pertes cumulatives
de l'ordre de 2 000 000 000 $ d'ici l'an 2000. Les activités et les
emplois que ces contrats ont créés justifient-ils le fardeau
qu'on fait payer à la population?
Les pertes d'Hydro-Québec sont donc aujourd'hui très
élevées. C'est ainsi qu'on perdra avec ABI: 85 000 000 $;
LAURALCO: 26 000 000 $; Reynolds: 62 000 000 $; QIT: 17 000 000 $; Alouette: 11
000 000 $. Non seulement c'est curieux, mais cela manque de transparence de
voir que ces pertes n'apparaissent nulle part dans la composition de la hausse
des tarifs demandée. Où figurent-elles? Ce n'est pas par des
tours de magie et des illusions qu'on cachera la vérité. Est-ce
qu'on n'en retrouverait pas, par hasard, une partie dans les coûts moyens
de fourniture d'électricité de toute la clientèle
où on essaie de les dissimuler? Est-ce que le glissement des ratios
financiers d'Hydro-Québec n'en absorberait pas une autre partie, surtout
lorsque l'on regarde le tableau 3.2 de votre proposition tarifaire, du
mémoire tarifaire, dis-je, qui indique un rendement sur l'avoir propre
de 7,2 % alors qu'on nous dit que la hausse proposée procure à
Hydro, si on tient compte des clients assujettis au règlement tarifaire
de 1992, un rendement de 11,3 %? Il y a sans doute là quelque chose.
Pour en finir avec les contrats secrets, est-ce qu'Hydro-Québec
nous dira franchement, aujourd'hui, si tous les contrats secrets contiennent la
clause de confidentialité, oui ou non? Une chance qu'Hydro-Québec
a pu bénéficier de la baisse des taux d'intérêt et
du taux de change pour compenser une partie de ses pertes, sinon c'est une
augmentation de tarifs de plus de 10 % que nous aurions à discuter
actuellement. Pourtant, dans les dernières années, lorsque les
taux d'intérêt étaient beaucoup plus élevés,
la société d'État se targuait d'avoir su profiter de la
conjoncture favorable sur les marchés financiers pour devancer son
programme d'emprunt. Ce préfinancement prévu dans son dernier
plan de développement représentait environ 2 500 000 000 $ en
1991. Compte tenu de la baisse des taux d'intérêt, combien ce
devancement a-t-il coûté aux consommateurs
québécois? 15 000 000 $, 17 000 000 $, 18 000 000 $, 20 000 000
$? Cette façon de gérer mérite un sérieux
questionnement.
Reste maintenant la question de la faible hydraulicité. Ceci
coûtera à Hydro-Québec 142 000 000 $ en 1992. Notons encore
ici que ces coûts ne se répercutent pas entièrement sur les
tarifs demandés puisqu'ils ne représentent que 2 % alors qu'ils
devraient correspondre à environ 3,8 %, si je me fie aux ratios de 50
000 000 $ à 1 % ou environ. La faible hydraulicité est un
phénomène connu depuis 1985, ce n'est pas d'aujourd'hui. Il est
incompréhensible et inacceptable que le gouvernement ait permis, par ces
contrats secrets, de puiser autant dans la réserve
énergétique au point d'être forcés, pour faire
face à ses obligations, d'en acheter sur d'autres marchés.
Pourquoi Hydro-Québec aurait-elle été obligée de
signer ces fameux nouveaux contrats secrets dans une telle situation? Serait-ce
pour réaliser le projet si cher à M. Bourassa?
Donc, sans les contrats secrets, HydroQuébec n'aurait pas besoin
de prendre de mesures exceptionnelles pour contrer la faible
hydrau-licité. Il va sans dire qu'on y perd de tous les
côtés. D'une part, les revenus sont insuffisants et, d'autre part,
Hydro doit acheter de l'électricité à fort prix ailleurs
pour répondre à ses obligations. Il faut le dire clairement, le
gouvernement a forcé Hydro-Québec à risquer gros et tout
le monde y perd. Pire encore, le gouvernement est entièrement au courant
de la situation et il impose à Hydro-Québec une autre contrainte
lourde de conséquences en fixant le niveau de son bénéfice
net. Ceci se traduit par une demande de hausse de tarifs injustifiable dans le
contexte économique actuel et par des coupures budgétaires
répétées qui empêchent Hydro-Québec
d'atteindre ses objectifs d'amélioration de la qualité et du
service à la clientèle québécoise.
Il va sans dire que la performance économique à
Hydro-Québec, à cause de l'ingérence du gouvernement,
constitue tout un défi; c'est même plus que le «Défi
Performance»! C'est curieux, le seul élément qui semble
être planifié avec un maximum d'exactitude à
Hydro-Québec, c'est son bénéfice net. Or, nous venons de
voir, dans les pays de l'Est, les résultats que donnent les
économies dont seuls les rendements sont planifiés. J'aimerais
souligner à cette commission que c'est ce que le gouvernement fait en
obligeant Hydro-Québec à atteindre un bénéfice net
préétabli afin de réduire son propre déficit.
Parlons maintenant des frais de garantie. Je voudrais sur ce point
apporter une précision importante. Lorsqu'en 1981 notre gouvernement a
modifié la Loi sur Hydro-Québec en introduisant un dividende
à déclarer à l'État, ceci correspondait à
une part de sa richesse qu'elle remettait à l'ensemble de la
société québécoise. Mais il y avait deux
conditions: que l'entreprise, d'abord, réalise des
bénéfices et qu'elle atteigne un taux de capitalisation de 25 %,
c'est-à-dire qu'il fallait qu'Hydro-Québec fasse des profits et
qu'elle maintienne les ratios financiers à un niveau qui lui permette de
continuer d'avoir une excellente cote de crédit. Le dividende
découlait donc de la performance financière réelle et
réalisée.
Or, les frais de garantie sur la dette sont une taxe perçue
à l'avance, indépendamment des résultats financiers. En
1992, 1993 et 1994, cette taxe rapportera au gouvernement 500 000 000 $ qui
sont obligatoirement à la charge des consommateurs. Et on s'affiche
comme défenseur des consommateurs! Cette taxe que le gouvernement impose
aux consommateurs et particulièrement aux citoyens ordinaires est
antisociale dans un contexte de récession et de pauvreté qui
s'ac- croît. Le gouvernement doit carrément la retirer et c'est
donc 1,9 % de tarif en moins.
On réclame 2 % de tarif au consommateur pour faire face au
problème de la faible hydrau-licité. Étant donné
qu'il s'agit d'un investissement pour économiser les réserves
d'eau, pourquoi, comme pour tout investissement, ne pas répartir ou ne
pas amortir ces coûts sur plusieurs années? N'y aurait-il pas
aussi d'autres moyens de ménager notre matière première?
À ce titre, j'aimerais féliciter les gens du
Saguenay-Lac-Saint-Jean pour l'initiative qu'ils ont prise en décembre
dernier avec l'opération «Clic! Le geste qui compte». Les
consommateurs étaient invités à participer à
l'expérience en baissant légèrement les thermostats et en
éteignant les lumières inutiles; ils ont pu constater à la
télévision qu'ensemble ils venaient de réduire leur
consommation de façon significative. Un tel scénario ne serait-il
pas plus apprécié par les consommateurs de l'ensemble du
Québec qu'une hausse de 2 %? Ce n'est qu'un exemple d'initiative qu'on
pourrait prendre en se fiant au bon sens des citoyens québécois
plutôt que de puiser continuellement dans leurs poches?
Les intentions d'Hydro-Québec dans son projet d'efficacité
énergétique sont bonnes; dire le contraire serait prêcher
contre la vertu. Mais la vertu peut s'offenser quand on réclame d'un
individu de dépenser pour l'achat d'accessoires comme les pommes de
douche et les fluorescents compacts pour réduire sa facture
d'électricité. Les citoyens et les citoyennes du
Saguenay-Lac-Saint-Jean viennent de faire la preuve que le simple bon sens peut
donner un rendement supérieur à tous les investissements qu'on
ferait payer aux consommateurs québécois si la demande tarifaire
d'Hydro-Québec était acceptée. Il est vrai que, lorsqu'on
est obnubilé par les bénéfices nets, on risque de manquer
d'imagination pour traiter les consommateurs avec un minimum
d'équité.
Quant au 1,6 % restant, il est évident qu'Hydro-Québec
pourrait l'absorber à même son bénéfice net; ceci ne
serait pas dramatique pour sa cote de crédit car, n'oublions pas qu'elle
est en avance sur son programme d'emprunt de 2 500 000 000 $; n'oublions pas
non plus qu'Hydro-Québec, comme le gouvernement, empruntera 25 % de
moins en 1992, compte tenu du report de certains grands projets de la
société d'Etat. Vous comprendrez donc pourquoi je
déclarais, lors de ma conférence de presse du 26 février
dernier, et je cite: «Quand allons-nous arrêter d'étouffer
les Québécoises et les Québécois à faibles
et moyens revenus? De telles hausses sont injustifiables dans le contexte de la
récession économique que nous subissons [...] et elle est
carrément téléguidée par le gouvernement
Bourassa.» Et j'ajouterai ce matin que nos petites et moyennes
entreprises ont tout autant le droit de respirer.
L'analyse des documents déposés par Hydro-
Québec montre à l'évidence que la
société d'État n'a pas besoin de hausse de tarifs en 1992.
Je souhaite que vous aurez tous remarqué que mes propos se sont
limités à la proposition tarifaire pour 1992. Je n'ai pas
abordé les aspects des pratiques de gestion des ressources humaines ni
certaines transactions commerciales faites récemment par
Hydro-Québec. Je n'ai pas parlé non plus de l'entente imminente
de Churchill Falls dans laquelle Hydro-Québec se lierait pour une
cinquantaine d'années avec Terre-Neuve. Sans doute que la période
de questions me permettra d'élaborer sur ces points.
Hydro-Québec fut la fierté des jeunes de mon âge en
1962. Dans le cadre du programme «Défi Performance», on
découvre qu'Hydro-Québec se donne un objectif en trois points
pour l'année 2000: Tout d'abord, elle doit être reconnue comme la
meilleure entreprise d'électricité au Canada. Je croyais que
depuis longtemps les Québécois pensaient que c'était
déjà la meilleure entreprise en Amérique du Nord. Elle
doit être reconnue comme une partenaire majeure dans le
développement durable du Québec. C'est la conviction, il me
semble, que la population partage depuis fort longtemps. Elle doit mettre en
valeur le savoir-faire de ses employés et les ressources
hydroélectriques. La mise en valeur de la ressource est acquise par tout
le monde avec plus d'un siècle d'hydroélectricité et les
employés démontrent eux-mêmes leur savoir-faire dans leur
quotidien. La première marque de reconnaissance de leur savoir-faire
serait d'ailleurs d'utiliser au maximum les compétences internes de
l'entreprise, et on pourra en parler au niveau de la période des
questions. La haute direction d'Hy-dro-Québec se donne donc des
objectifs qui sont quasiment atteints.
Il y a toutefois, depuis quelques années, des lacunes qui
empêchent la population québécoise de conserver sa
fierté envers Hydro-Québec. La haute direction en reconnaît
implicitement l'existence à travers son projet «Défi
Performance». Avec des décisions et une volonté très
claire, c'est avant l'an 2000 qu'elles doivent être corrigées.
Ceci peut se faire sans grands bouleversements, tout simplement en stimulant le
sentiment qu'a l'ensemble des employés d'Hydro-Québec
d'être au service de la population québécoise.
En terminant, j'aimerais vous entretenir de certaines des facettes qui
touchent les comptes en souffrance chez Hydro-Québec. Pour
l'année 1991 seulement, la société d'État a
dû renoncer à récupérer 56 000 000 $. De même,
le total des comptes en souffrance a atteint 556 000 000 $ en 1991. On n'a
jamais vu cela depuis 1988. Un autre aspect de cette même dynamique peut
être expliqué par les 21 722 interruptions de service pour
non-paiement, dont plus de 400 au mois de décembre, auxquelles
Hydro-Québec a dû recourir en 1991.
Ceci m'amène, en terminant, à aborder une facette plus
litigieuse des relations entre les consommateurs et la société
d'État. Ici, je fais évidemment allusion aux relations entre les
citoyens autochtones utilisateurs d'électricité et
Hydro-Québec. Lorsqu'on regarde l'évolution récente des
événements entre les deux groupes, un fait marquant saute aux
yeux de tout le monde. En effet, l'entente secrète conclue entre le
Conseil de bande d'Akwesasne et Hydro-Québec, le 28 octobre 1991, a
provoqué une vague de protestations généralisée et
a créé un gouffre d'incompréhension entre les autochtones
et des portions importantes de la population québécoise. Pour
moi, Hydro-Québec a cédé au chantage et a contribué
à accréditer la dangereuse prétention que cette
façon de faire peut rapporter des dividendes.
Sans entrer dans les détails concernant les tenants et
aboutissants de ce protocole d'entente, on peut d'ores et déjà
affirmer que les répercussions de cette situation se font toujours
sentir parmi la population en général. Une autre situation tout
aussi conflictuelle existe aussi entre Hydro-Québec et les citoyens de
Kahna-wake.
Si on regarde les aspects financiers de cette problématique, on
s'aperçoit que l'entente dont on vient de discuter aura
coûté à ce jour 700 000 $ et ce, exclusivement pour
répondre aux plaintes des citoyens qui se considèrent «bons
payeurs» de leur compte d'électricité, sans pour autant
n'avoir rien réglé jusqu'à maintenant. On constate aussi
qu'il reste encore un solde impayé d'environ 100 000 $ en date de
février 1992 pour ce qui est des résidents d'Akwesasne et des
montants a recevoir de l'ordre de 2 000 000 $ en date du 31 janvier par
Hydro-Québec de la part des habitants de Kahnawake.
Dans l'espoir d'en arriver à une solution équitable pour
toutes les parties, il pourrait être intéressant de tenter
d'établir un parallèle entre certains des éléments
de la situation en cause et celle existant dans des villes comme Joliette, Aima
et Sherbrooke. Ces trois villes étant responsables de la vente et de la
distribution de l'électricité sur leur territoire respectif, ne
serait-il pas pertinent, à ce moment-là, d'envisager de
répéter l'expérience des réseaux municipaux chez
certaines communautés autochtones? La mise en oeuvre éventuelle
de cette hypothèse aurait pour avantage d'apaiser les esprits, de
traiter les consommateurs sur le même pied et pourrait permettre
également aux autochtones d'acquérir une plus grande
responsabilité quant à l'administration de ce service essentiel.
Je vous remercie.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant M. Richard Drouin,
président du conseil et chef de fa direction d'Hydro-Québec. M.
Drouin, vous avez vingt minutes. (10 h 15)
M. Richard Drouin, président
d'Hydro-Québec
M. Drouin (Richard): M. le Président, Mme la ministre, M.
le leader parlementaire de l'Opposition, MM. et Mmes les députés,
HydroQuébec se présente aujourd'hui devant vous afin de
présenter un suivi de son plan de développement 1990-1992,
Horizon 1999, ainsi que sa proposition tarifaire.
Au cours de ma présentation, je ferai état du travail
accompli en matière d'amélioration du service à la
clientèle, de la qualité du produit et de la productivité.
J'aborderai également les révisions apportées au plan de
développement au chapitre de la demande d'électricité, de
l'efficacité énergétique et de la capacité de
production de l'entreprise. Enfin, je brosserai un tableau sommaire de nos
prévisions financières et des facteurs qui expliquent notre
proposition tarifaire.
Au printemps 1990, alors qu'Hydro-Québec présentait son
plan de développement, les membres de cette assemblée ont reconnu
que l'entreprise devait faire face à un effort de rattrapage en
matière de qualité du service. Le gouvernement du Québec a
souscrit aux objectifs précis que nous nous étions donnés
à l'égard de l'amélioration des services à la
clientèle. De nombreux programmes ont été mis en oeuvre
à cette fin et l'on peut aujourd'hui en mesurer les
résultats.
Pour améliorer l'accueil téléphonique, nous avons
prolongé les heures d'affaires, modernisé notre système
téléphonique sur l'île de Montréal et
embauché du personnel additionnel. Ces mesures ont permis de faire
passer le taux de réponse de 82 % en 1990 à 90 % en 1991. Pour ce
qui est des délais de raccordement, 77 % des demandes ont
été réalisées dans les délais prévus
au cours de 1991, soit une augmentation sensible par rapport aux 58 % de
l'année 1990. Au cours de la même période, le nombre de
clients ayant adhéré au mode de versements égaux a plus
que triplé, passant de 265 000 à 814 000. Au chapitre de la
relève des compteurs, le pourcentage des factures basées sur un
relevé réel a augmenté de 75 % à 88 % entre 1990 et
1991.
Notre clientèle a ressenti les effets bénéfiques de
cette amélioration. Selon nos sondages, le taux de satisfaction de la
population envers l'entreprise a augmenté de 62 % à 80 %.
Malgré les progrès accomplis, il est essentiel de poursuivre nos
efforts en vue de satisfaire pleinement les attentes de notre
clientèle.
Toutes les mesures que nous avons prises pour répondre aux
demandes de notre clientèle n'auraient aucun sens si l'alimentation en
électricité n'était pas fiable. Là aussi, les
résultats de nos efforts se font sentir. Le nombre moyen d'heures
d'interruption de service par client est passé de 15,4 en 1988 à
6,6 en 1991. Si on exclut les pannes générales et les
événements hors de contrôle de l'entreprise, les indices
sont de 9,6 heures en 1988 et de 5,3 en 1991. Les résultats sont
encourageants, mais il faut réaliser qu'il s'agit d'une moyenne qui est
encore trop élevée. Dans certaines localités, la
continuité du service est encore en deçà de cette moyenne.
Après s'être concentrée sur les corrections les plus
urgentes, Hydro-Québec doit poursuivre ses programmes afin d'atteindre
son objectif d'une moyenne de quatre heures d'interruption par client et par
année d'ici 1995.
Par son service à la clientèle et par la fiabilité
de son réseau, Hydro-Québec vise à devenir la meilleure
entreprise d'électricité au Canada. Cette vision d'entreprise
exigera non seulement de poursuivre les investissements prévus, mais
aussi de mobiliser tous nos employés.
Au terme de la commission parlementaire de 1990, la ministre de
l'Énergie et des Ressources demandait à Hydro-Québec
d'accroître sa productivité. Nous nous sommes engagés,
dès l'automne 1990, dans l'implantation d'une approche de gestion
intégrale de la qualité que nous appelons «Défi
Performance». Cette approche doit nous permettre d'assurer la plus grande
satisfaction possible de nos clients, au moindre coût. Elle
entraînera une optimisation graduelle de nos activités, tout en
offrant une qualité accrue.
En 1991, dans le cadre de ce projet, 69 équipes
d'amélioration ont été constituées et près
de 700 employés ont participé à des séances de
formation en gestion de la qualité. Il s'agissait d'une année de
mise en place des conditions nécessaires à l'émergence de
l'amélioration continue. Les véritables effets se feront sentir
davantage en 1992 et au cours des années suivantes.
Avec le «Défi Performance», Hydro-Québec a
entrepris de changer sa culture et son mode de gestion sur une période
de cinq ans. Rares sont les entreprises qui ont pu opérer un tel virage
en si peu de temps, mais notre clientèle l'exigeait depuis
longtemps.
Dans le plan de développement de 1990- 1992, nous avons
prévu différents moyens pour répondre à la
croissance de la demande d'électricité. Deux ans plus tard, il
est nécessaire de réviser certaines données afin de
maintenir l'équilibre entre l'offre et la demande pour la période
1992-2000. Je n'aborderai pas ici les choix énergétiques à
long ternie qui orienteront les activités d'Hydro-Québec
au-delà de l'an 2000, comme par exemple les objectifs d'exportation ou
de développement industriel. Ces sujets seront traités dans le
prochain plan de développement.
Les prévisions de la demande d'électricité pour les
années 1992 à 2000 ont diminué par rapport à celles
d'il y a deux ans. Cette baisse s'explique par une réduction des besoins
prioritaires du Québec et une diminution des exportations
d'électricité. Au Québec, la récession a
entraîné, à court terme, un recul de la consommation
d'électricité, principalement dans le secteur industriel.
Cependant, à long terme, l'augmentation de l'immigration et la hausse
plus importante que prévu du taux de natalité contribueront
à ramener la demande à un niveau comparable à celui du
plan de 1990-1992. Quant aux exportations, les nouvelles prévisions
tiennent compte du report d'un contrat de 1000 mégawatts avec la New
York Power Authority.
Afin de réduire la croissance de la demande
d'électricité, Hydro-Québec engageait, au printemps 1990,
une offensive dans le domaine de l'efficacité énergétique.
Un tel projet ne peut donner des résultats spectaculaires à
courte échéance. En fait, le succès doit passer par
l'acceptation collective d'une modification de nos habitudes de consommation.
Après une réévaluation des données disponibles,
nous prévoyons que les économies d'énergie seront moindres
que prévues durant la première moitié de la
décennie. Cependant, notre objectif à long terme a
été maintenu, à peu de choses près, au même
niveau.
Sans entrer dans les détails des six programmes commerciaux
lancés depuis 1990, j'aimerais, par exemple, souligner que plus de 2500
magasins se sont associés à Hydro-Québec pour la promotion
des produits économiseurs d'énergie. Dès la
première moitié de 1991, l'objectif de vente de 200 000 produits
était dépassé de* 31 %. Douze nouveaux programmes
viendront prochainement s'ajouter aux six qui sont déjà en
application. Cinq d'entre eux s'adresseront au marché
résidentiel, tandis que les sept autres auront pour cible les
marchés commercial et industriel.
Pour Hydro-Québec, l'atteinte des objectifs du projet
d'efficacité énergétique est une nécessité.
En effet, si l'on fait abstraction des centrales qui sont actuellement en
construction, les économies d'énergie représenteront
environ 40 % des moyens mis en oeuvre pour maintenir l'équilibre entre
l'offre et la demande d'ici 2001. Dans ce contexte, si le projet
d'efficacité énergétique ne devait se réaliser que
partiellement, l'entreprise ne disposerait que de très peu de solutions
de rechange.
Du côté de l'offre énergétique,
HydroQuébec entend poursuivre la construction des centrales La Grande 1,
Laforge 1 et Brisay, ainsi que la douzième ligne à 735 kilovolts.
Cependant, les retards dans les échéanciers de certains projets
limiteront la quantité d'énergie disponible. En effet, depuis le
dépôt du plan de 1990-1992, plusieurs projets ont vu leur mise en
service reportée. C'est le cas des centrales de Laforge 2 et d'Eastmain
1, ainsi que du complexe Grande-Baleine. Ces retards entraîneront par
ailleurs des pertes d'emploi qu'on estime à 4400 années-personnes
d'ici l'an 2000.
De façon globable, cette baisse importante du niveau prévu
de l'offre a été partiellement compensée par une
réduction de la demande. Pour combler le déficit résiduel,
Hydro-Québec envisage deux solutions: la mise en service, en 1998 et
1999, de centrales hydroélectriques de moyenne envergure d'une puissance
totale d'environ 200 mégawatts et l'augmentation de 390 à 750
mégawatts de l'objectif d'achat de production privée d'ici 1996.
En rapport avec cette solution, la puissance totale des projets de production
privée d'électricité retenus à ce jour pour fins de
négociation atteint environ 1400 mégawatts. L'analyse de ces
projets sera effectuée sur la base de leur efficacité
énergétique.
Voyons maintenant comment a évolué la situation
financière de l'entreprise. Le bénéfice net prévu
en 1992 accuse une baisse de près de 400 000 000 $ par rapport aux
prévisions du plan de 1990-1992. Cette situation s'explique par la
faible hydraulicité, l'augmentation des charges fiscales et une
croissance moins forte que prévue des ventes
d'électricité. En fait, les charges totales d'Hydro-Québec
augmenteront de 692 000 000 $ entre 1991 et 1992 soit une hausse de 12, 5 %. De
ces 692 000 000 $ d'augmentation, 203 000 000 $ sont attribuables à des
hausses de taxes et de frais de garantie, 173 000 000 $ sont liés aux
intérêts et pertes de change, 88 000 000 $ vont à
l'amortissement des immobilisations et 124 000 000 $ sont attribuables à
la faible hydraulicité. En effet, en 1991 les appports hydrauliques aux
réservoirs d'Hydro-Québec ont accusé un déficit de
26 000 000 000 de kilowattheures par rapport à la moyenne, ce qui
équivaut environ à 20 % de la consommation totale des clients
d'Hydro-Québec durant une année.
Une fois exclues ces charges sur lesquelles nous avons peu de
contrôle à court terme, il reste une augmentation de 100 000 000 $
dont 42 000 000 $ sont affectés au projet d'efficacité
énergétique. C'est donc dire que les charges d'exploitation
reliées aux activités de base de l'entreprise augmenteront de 58
000 000 $, soit une hausse de 3, 2 %. Cette augmentation englobe non seulement
l'inflation prévue, qui est de 2, 6 %, mais aussi la croissance des
activités courantes de l'entreprise. À ce chapitre, tous les
indicateurs d'activités de l'entreprise, que ce soit le nombre
d'abonnements, les actifs en exploitation ou la puissance installée,
connaîtront en 1992 des hausses qui varieront entre 2, 1 % et 6 %.
Si l'augmentation de nos charges d'exploitation a pu être
réduite à un tel niveau malgré la croissance de nos
activités, c'est d'abord grâce aux gains de productivité
que nous avons réalisés depuis deux ans. À titre
d'exemple, la productivité de nos monteurs en distribution s'est
améliorée de 14 %. On observe également dans le groupe des
métiers une diminution de 6, 5 % de jours d'absence pour maladie ou
accident hors travail. À cet égard, il importe de souligner que
l'entreprise a réalisé des progrès majeurs au chapitre des
relations de travail, ce qui a également contribué à
l'amélioration de la
productivité.
Au-delà de ces gains de productivité, Hydro-Québec
s'est imposé un effort de rationalisation important. Une compression des
dépenses de 107 000 000 $ par rapport aux prévisions du plan a
été effectuée dans les activités de base de
l'entreprise. Ces compressions budgétaires n'ont cependant pas
afffecté nos engagements en matière de qualité du service
et d'efficacité énergétique. (10 h 30)
Compte tenu des efforts que nous avons faits pour comprimer nos charges
d'exploitation et améliorer notre productivité, nous aurions
souhaité vous présenter une proposition de hausse tarifaire
beaucoup moindre. Malheureusement, les obligations auxquelles nous devrons
faire face nous en empêchent. S'il fallait refléter les
coûts de fournitures rattachés aux ventes assujetties au
règlement tarifaire, la hausse moyenne des tarifs aurait dû se
chiffrer à 6,8 % pour l'année 1992. Toutefois, en raison de la
conjoncture économique difficile, nous proposons une hausse moyenne de
5,5 %.
Nous sommes conscients du fait que cette proposition tarifaire comporte
certains risques financiers. En effet, il faut se rappeler que le plan de
développement prévoyait pour 1992 un rehaussement des
critères financiers d'HydroQuébec afin de lui permettre de faire
face à un important programme d'investissement de 15 000 000 000 $ au
cours des trois prochaines années. La hausse proposée
entraînera plutôt un abaissement de certains de ces critères
financiers. À notre avis, il serait imprudent de prendre des risques
additionnels, compte tenu également du bas niveau de nos
réservoirs et de la possibilité, toujours présente, d'une
autre année de faible hydraulicité.
Après avoir comprimé ses dépenses d'exploitation,
après avoir proposé une hausse tarifaire qui comporte certains
risques financiers, vous comprendrez qu'Hydro-Québec peut difficilement
faire plus. Si nous réduisons nos engagements dans les projets
d'efficacité énergétique, nous mettrons en péril
l'équilibre que nous devons maintenir entre l'offre et la demande. Nous
pénaliserons nos clients et nous irons à rencontre de nos
objectifs de développement durable. Si nous relâchons nos efforts
dans l'amélioration de la qualité du service et du produit, nous
ne pourrons respecter les attentes de nos clients ni les engagements que nous
avons pris face au gouvernement. Enfin, si nous ne réalisons pas un
bénéfice proportionnel à la valeur des actifs collectifs
dont nous avons la responsabilité et aux Investissements que nous devons
effectuer, nous risquons d'augmenter le coût de financement de nos
projets.
Il y a deux ans, le gouvernement acceptait les orientations
proposées par Hydro-Québec dans son plan de développement.
Ce plan prévoyait la mise en oeuvre d'un projet d'efficacité
énergéti- que, des investissements importants dans
l'amélioration du service à la clientèle et dans la
poursuite du développement hydroélectrique du Québec. La
population québécoise a déjà commencé
à profiter de ces programmes. En faisant le choix de la qualité
du service au moindre coût, nous avons décidé de
répondre aux attentes des consommateurs québécois. Notre
proposition tarifaire vise à maintenir cette orientation. Les
progrès accomplis ne doivent pas faire perdre de vue le chemin à
parcourir. Pouvons-nous priver nos clients des avantages découlant des
programmes d'amélioration de la qualité du service et du produit?
Pouvons-nous freiner nos efforts en matière d'efficacité
énergétique? Pouvons-nous réduire encore plus un
bénéfice qui nous paraît raisonnable pour
qu'Hydro-Québec puisse financer ses investissements au meilleur
coût?
Nous sommes sensibles au contexte économique difficile que le
Québec traverse. Cela dit, Hydro-Québec doit quand même
répondre à ses engagements et demeurer une entreprise rentable
pour contribuer à la richesse collective des
Québécois.
En terminant, je souhaite vivement que les échanges des
prochaines heures vous permettront de recueillir toutes les données
pertinentes pour évaluer nos propositions, nos objectifs et le travail
que nous accomplissons dans le but de les atteindre. Je vous remercie.
Le Président (M. Audet): Merci, M. Drouin. Nous allons
passer au deuxième point de notre ordre du jour. Pour ce qui est de la
proposition tarifaire, il y a 10 minutes d'accordées à
HydroQuébec. C'est M. Pierre Bolduc, je crois.
M. Drouin: Oui. D'abord, permettez-moi de présenter ceux
qui sont à la table.
Le Président (M. Audet): S'il vous plaît!
M. Drouin: Merci. M. John Hanna, à mon extrême
droite qui est le vice-président exécutif, finances et
administration; M. Pierre Bolduc, qui est le nouveau vice-président
exécutif, commercialisation et affaires internationales; M. Claude
Botvin, qui est président et chef de l'exploitation, et à ma
gauche, ici, M. André Detisle, qui est vice-président,
planification générale.
Tout au cours des questions ou des présentations, nous aurons
l'occasion de vous présenter d'autres personnes qui pourront
répondre à vos questions.
Le Président (M. Audet): Merci beaucoup. Proposition
tarifaire
M. Drouin: Pour la présentation sur la proposition
tarifaire, M. le Président, nous allons d'abord entendre M. Bolduc pour
cinq minutes et M. Hanna pour un autre cinq minutes.
Le Président (M. Audet): M. Hanna. M. Drouin: C'est
ça.
Le Président (M. Audet): Alors allez-y, M. Bolduc, on vous
écoute.
M. Bolduc (Pierre): Merci. M. le Président,
Hydro-Québec propose une augmentation moyenne des tarifs de 5,5 % pour
l'année 1992, malgré une croissance de ses coûts unitaires
de fournitures de 6,8 %. Rappelons que la hausse de 5,5 % comprend une
première tranche de 3,9 % pour couvrir des coûts qui
échappent au contrôle d'Hydro-Québec, soit les mesures pour
contrer la faible hydraulicité et les frais de garantie de la dette,
ainsi qu'une deuxième tranche de 1,6 % pour couvrir une partie seulement
des charges régulières de l'entreprise qui, elles, augmentent
à 2,9 %. Ces charges régulières incluent les programmes
d'efficacité énergétique et la qualité du
service.
Dans la présente conjoncture économique,
Hydro-Québec est très préoccupée de l'impact des
hausses de tarif sur sa clientèle. C'est pourquoi elle limite sa hausse
de tarif à 5,5 %, en acceptant que certains critères financiers
soient temporairement en dessous des niveaux normalement visés. Elle
propose également aux clients qui veulent en accepter le défi des
moyens concrets de limiter et même d'annuler l'effet de cette hausse sur
les factures en participant aux divers programmes d'économie
d'énergie, déjà lancés et à venir, et en
profitant de conseils spécialisés à cet effet.
La proposition tarifaire 1992 comporte aussi une hausse
différenciée selon les catégories tarifaires. Le secteur
résidentiel n'assure pas toute la rentabilité souhaitée et
Hydro-Québec poursuit, depuis plusieurs années, l'objectif
à long terme de réduire graduellement la situation
d'interfinancement qui existe entre les catégories tarifaires. Lorsqu'on
compare la contribution relative aux bénéfices des principales
catégories tarifaires, on constate que, sur la base de l'année
1991, les clients résidentiels, qui représentent un volume de
vente de 42 %, contribuent pour seulement 17 % aux bénéfices,
tandis qu'à l'inverse les clients de la petite et moyenne entreprise,
qui représentent 29 % des ventes, contribuent à 69 % des
bénéfices.
Compte tenu, toutefois, du contexte actuel, Hydro-Québec ne
propose qu'une légère différenciation visant tout au plus
à ne pas accentuer le déséquilibre entre les
catégories tarifaires. Les hausses proposées par catégorie
s'établissent comme suit: tarif domestique, 5,9 %; tarif petite et
moyenne puissance, 5,1 % et tarif grande puissance, 5,5 %. La révision
tarifaire prévoit une hausse moyenne de 5,9 % pour les clients
domestiques réguliers, mais la structure actuelle à prix
croissant pour l'énergie confère un caractère saisonnier
au tarif D, ce qui veut dire que l'augmentation de la dernière tranche
sera plus importante, à 6,4 %, pour mieux refléter les
coûts de fournitures et favoriser les bons choix
énergétiques. Les clients seront donc affectés
différemment selon leur type de consommation.
Ces hausses peuvent être compensées par des mesures
d'économie d'énergie. Dans certains cas, il suffit de modifier
des comportements. Lorsqu'il s'agit d'appareils et d'accessoires performants,
les programmes d'Hydro-Québec permettent déjà des rabais
dans plusieurs cas. On trouvera, aux tableaux qui ont été
distribués, quelques combinaisons possibles pour compenser la croissance
de la facture; des dizaines d'autres sont possibles.
Malgré cette augmentation de tarifs, l'électricité
continue de bénéficier d'une position concurrentielle favorable
par rapport aux autres formes d'énergie dans le secteur
résidentiel. De plus, Hydro-Québec offre aux consommateurs
québécois des tarifs parmi les plus avantageux à
l'échelle canadienne et nord-américaine. A titre d'exemple, la
facture d'un client résidentiel à Toronto est de 41 % plus
élevée qu'à Montréal. La proposition tarifaire pour
1992 comporte également une réforme des tarifs d'usage
général. Hydro-Québec a entrepris, en 1990, un effort de
rationalisation du tarif grande puissance qui se terminera en 1992. Cette
révision s'est imposée pour assurer un meilleur reflet des
coûts de fournitures, simplifier la structure tarifaire et faciliter
l'introduction d'une éventuelle tarification différenciée
dans le temps.
Un aménagement du tarif moyenne puissance est également
proposé pour 1992. De plus, certaines autres modalités tarifaires
sont révisées, tels les tarifs d'éclairage public et les
tarifs biénergie. L'ensemble de ces modifications des tarifs est
proposée pour une mise en vigueur le 1er mai 1992.
M. Hanna (John): M. le Président, sur le plan financier,
Hydro-Québec, comme vous le savez, est une entreprise qui
génère un volume de ventes annuel de plus de 6 000 000 000 $ et
qui a dépensé, en 1991, presque 4 000 000 000 $ au Québec.
C'est également une entreprise en expansion, comme en témoigne la
reprise importante du programme d'investissements des dernières
années.
Tel que montré dans le diagramme, les investissements ont en
effet presque doublé depuis 1989. Une telle expansion exige le maintien
d'un accès continu et assuré aux marchés des capitaux.
Rappelons que l'entreprise détient une dette de plus de 30 000 000 000
$. Compte tenu de son programme d'investissements et de la
nécessité de refinancer la dette existante venue à
échéance, Hydro-Québec doit réaliser des emprunts
annuels variant entre 3 000 000 000 $ et 5 000 000 000 $.
Hydro-Québec a réussi, au cours des années,
à gagner la confiance des milieux financiers
internationaux. Ceci lui a permis notamment de réaliser une
première, en 1991, soit l'émission, dans une dizaine de pays
simultanément, de deux séries d'obligations en dollars canadiens
totalisant 2 200 000 000 $. Ces émissions dites mondiales ont
été réalisées à un coût très
intéressant dans un contexte où le marché domestique, dans
les mois précédents, n'était pas particulièrement
favorable à une émission strictement réservée au
marché canadien.
Cette confiance des marchés financiers internationaux provient de
la volonté de l'entreprise de maintenir une rentabilité
suffisante pour respecter deux conditions fondamentales. Premièrement,
il faut assurer le service de la dette, c'est-à-dire ne pas avoir
à emprunter pour payer les intérêts. Deuxièmement,
il faut contrôler le niveau d'endettement en finançant avec nos
fonds propres au moins 30 % de nos investissements. De plus, pour respecter ces
deux conditions malgré les risques économiques et hydrauliques,
l'entreprise doit se doter d'une certaine marge de manoeuvre. Cette marge
serait obtenue en visant un rendement sur l'avoir propre comparable au
coût moyen de la dette.
Les profits requis pour atteindre les objectifs financiers sont
proportionnels à la taille de l'entreprise. Ainsi, par exemple, avec des
investissements courants et à venir de plus de 4 000 000 000 $ par an,
le maintien d'un autofinancement de 30 % exigera un bénéfice net
annuel de l'ordre de 1 000 000 000 $. Déjà, en 1990, l'entreprise
avait connu une mauvaise année, alors que le bénéfice net
chutait à 400 000 000 $ en raison principalement des dépenses
associées à la faible hydraulicité. Compte tenu de la
forte croissance de son programme d'investissements, Hydro-Québec s'est
engagée à rejoindre, en 1992, la plupart de ses ratios financiers
minimums. Ainsi, dans son plan de développement, elle visait pour 1992
un bénéfice net de 1 100 000 000 $ et la hausse tarifaire
projetée se situait à 6 %.
Depuis la publication de ce plan, plusieurs facteurs sont venus affecter
les résultats recherchés. Certains ont été
favorables. Ainsi, l'entreprise a bénéficié d'une baisse
des taux d'intérêt et de l'inflation sur ses charges. Par contre,
ces effets positifs ont été largement effacés par des
chocs négatifs principalement associés à la baisse de la
demande, à l'imposition par le gouvernement des frais de garantie sur la
dette et aux charges exceptionnelles requises pour compenser la faible
hydraulicité. Au net, il s'agit donc d'un choc négattf de 486 000
000 $ par rapport aux résultats visés dans le plan.
Dans de telles conditions, il apparaît impossible d'atteindre en
1992 les critères financiers minimums normalement visés.
HydroQuébec se voit en fait contrainte de laisser l'ensemble de ses
ratios financiers se détériorer par rapport à la
performance de l'an dernier, alors même que son programme
d'investissements continue à croître et que la cote de
crédit de la province fait l'objet d'une grande attention. L'entreprise
ne peut toutefois se permettre de laisser son taux d'autofinancement, un indice
fondamental de liquidité pour les milieux financiers, chuter en dessous
du niveau de 1991. Ce niveau de 27,5 % était déjà
lui-même en dessous du minimum recherché de 30 %. Ainsi, compte
tenu du niveau de ses investissements prévus pour 1992 et des risques
associés à la situation économique et à
l'hydraulicité, l'entreprise ne peut viser un bénéfice net
inférieur à 700 000 000 $. (10 h 45)
Par ailleurs, afin de maintenir le bénéfice net au niveau
visé de 700 000 000 $ et d'éviter à la clientèle
une trop forte hausse de tarifs, l'entreprise a appliqué des
compressions de 107 000 000 $ sur ses charges d'exploitation. Ces compressions
ont permis d'absorber une partie des chocs financiers négatifs survenus
et de dégager une marge suffisante pour alléger de 6 % à
5,5 % la hausse de tarif envisagée dans le plan. Hydro-Québec a
fait sa part dans un contexte difficile à la fois en sacrifiant
temporairement ses critères financiers dans les limites du possible et
en comprimant de façon importante les charges sur lesquelles elle peut
intervenir à court terme, sans toutefois remettre en cause ses
engagements en matière d'amélioration de la qualité de
service. Merci.
Le Président (M. Audet): Merci, monsieur. Alors, en vertu
de l'entente, 30 minutes de questions. Nous allons procéder à la
période de questions: 30 minutes de questions pour la formation
ministérielle et 30 minutes pour l'Opposition et nous reviendrons avec
25 minutes pour la formation ministérielle et 25 minutes pour
l'Opposition. Enfin, on ajustera selon le déroulement des travaux.
M. Chevrette: II me semble que c'est à midi et demi qu'on
lunche.
Le Président (M. Audet): C'est ça. Alors, puisqu'on
termine à midi et demi, il nous reste une heure et trois quarts. Si vous
voulez débuter.
Mme Bacon: M. le Président, vous me permettrez, avant de
commencer la période des questions, de relever certaines affirmations
qui ont été faites par le député de Joliette et
leader de l'Opposition quand il s'informait où j'étais dans
différentes circonstances. Je pense que c'est justement une
réaction de l'Opposition, quand elle était aussi au pouvoir, de
laisser toute augmentation se répercuter aux consommateurs sans souci de
les protéger contre toute hausse. L'Opposition a retourné aux
consommateurs des hausses atteignant 17,5 % en 1982. Le député de
Joliette semble l'oublier. Où était le député
de
Joliette, M. le Président? Je pense que là-dessus je n'ai
pas de leçon à recevoir du député de Joliette.
C'est justement l'objet de cette présente commission - j'aimerais bien
qu'il m'écoute aussi, M. le Président - d'étudier dans un
esprit constructs - je pense que le député de Joliette peut
revenir à un esprit constructs - la demande d'Hydro-Québec.
À en croire certaines déclarations à
l'emporte-pièce de ce matin, c'est comme s'il avait conclu à
l'avance, avant même d'entendre les échanges qu'on aura pendant
deux jours. Je pense qu'on ne peut pas arriver à une conclusion avant
d'avoir échangé. C'est le but de cette commission parlementaire.
Avec tout le respect que je dois au député de Joliette, je pense
qu'il a autant de respect que moi des institutions parlementaires pour pouvoir
profiter pleinement de ces deux journées.
Évidemment, à l'époque du gouvernement qui nous a
précédés, on accordait même plus que ce
qu'Hydro-Québec demandait, M. le Président. En 1981,
Hydro-Québec demandait 11 %, on lui a accordé, 11,6 %. Jamais,
depuis que nous sommes au gouvernement, nous n'avons donné plus à
Hydro-Québec qu'elle n'en a demandé.
M. le Président, on peut regarder aussi... C'est parce que le
député de Joliette se conduit un peu comme s'il n'avait jamais
été au pouvoir. Il faut peut-être le ramener un peu dans ce
qu'ils ont déjà fait et on doit rendre compte des gestes qu'on a
posés quand on est au pouvoir. L'ancien gouvernement avait imposé
aussi une taxe sur le capital - le député de Joliette semble
oublier ça - en 1981 pour l'ensemble des entreprises. Seulement à
Hydro-Québec, on avait demandé à ce moment-là 123
000 000 $ qui étaient 0,5 de 1 %. Au premier septembre 1991, notre
gouvernement n'avait demandé que 0,1 de 1 % à
Hydro-Québec. Alors, il faut quand même comparer les choses qui
sont comparables. En septembre 1988, le député de Joliette
mentionnait tantôt les contrats qui ont été conclus, en
disant qu'au moment où il y avait une rareté
d'hydrau-licité il y avait un surplus de 67 térawattheures en
1988. Je pense qu'à ce moment-là, malgré
l'hydraulicrté que nous avions, ce n'est donc pas vrai de dire que nous
avons conclu des contrats en période totale de faible
hydraulicité. Il y avait 67 térawattheures de surplus.
Treize ententes en vigueur ont injecté, et ça, le
député de Joliette semble l'oublier, 4 600 000 000 $ dans
l'économie du Québec et je ne pense pas que les gens de
Sept-îles, les gens de Baie-Comeau, les gens de la Côte-Nord qui
auront 6400 emplois permanents, qui ont eu 40 600 années-personnes
d'emplois durant la construction aimeraient voir le député de
Joliette oublier ces faits-là. Alors, je pense qu'il faut aussi regarder
l'écart de la hausse annuelle moyenne de 1977 à 1985 et je ne
sache pas que ce soit un gouvernement libéral qui ait été
au pouvoir à l'époque. La moyenne des tarifs
d'électricité était de 10,5 %, l'IPC canadien était
à 8,4 %, donc un écart de 2,1 %. Nous sommes là depuis
1985-1986. Depuis 1986-1991, il y a une hausse moyenne annuelle de 5,4 % avec
un IPC de 4,7 %, donc 0,7 % d'écart, comparé à 2,1 %. Il
faudrait peut-être que le député de Joliette regarde aussi
ces chiffres-là.
On a parlé de hausse de 32,9 % de 1990 à 1992. Il y a une
responsabilité du Québec et il y a une responsabilité du
gouvernement fédéral. J'espère que le député
de Joliette ne mêle pas les deux! En 1990, c'était 7,5 %, 1991, 7
%. On nous en demande 5,5 % en 1992. Avec une baisse de la TVQ de moins 1 %,
ça fait 20,1 % dans mes chiffres à moi. Il y a une
responsabilité fédérale de TPS de 7 % et non une
responsabilité provinciale.
M. le Président, les augmentations de tarifs doivent demeurer
l'ultime recours pour maintenir la situation financière
d'Hydro-Québec. Par conséquent, la société
d'État doit démontrer qu'elle a épuisé toutes les
autres avenues de solutions avant de faire ses demandes tarifaires. Nous devons
être conscients qu'une bonne situation financière sera
nécessaire à Hydro-Québec pour aller emprunter aux
meilleures conditions plus de 11 000 000 000 $ sur les marchés
financiers au cours des trois prochaines années.
Je suis aussi consciente que la conjoncture actuelle, notamment la
récession économique, la faible hydraulicité,
l'introduction des frais de garantie sur la dette présentent un ensemble
de facteurs plutôt défavorables. Toutefois, il faut prendre
conscience que la population, les commerces et l'industrie
québécoise subissent les mêmes contrecoups de la
récession et qu'ils doivent aussi se serrer ia ceinture en cette
période difficile et, par conséquent, je m'attends à ce
qu'Hydro-Québec fasse aussi preuve de ce que j'appellerais des
sacrifices budgétaires tangibles en 1992 et contribue à
alléger le fardeau des consommateurs plutôt qu'à
l'aggraver.
Période de questions Charges
d'exploitation
À cet égard, Hydro-Québec nous dit qu'elle ne
contrôle directement que 30 % de ses charges totales, soit
essentiellement ses charges d'exploitation. Je vous réfère aux
pages 115 et 127. Ces dernières ont fait l'objet d'un effort de
rationalisation de 106 000 000 $, comme vous l'avez mentionné
tantôt, et tel qu'indiqué au tableau qui figure à votre
page 127 du rapport général de suivi.
On constate aussi dans ce tableau que l'évolution à la
baisse du taux d'inflation permet de dégager 27 000 000 $, soit
l'équivalent de 1,3 % des charges. Or, cette réduction correspond
seulement à la moitié de la baisse d'inflation qui était
de 5,2 % dans le plan et qui est maintenant à 2,6 %.
A priori, il semble que les charges d'exploitation ne s'ajustent pas
à l'inflation. Est-ce que vous pourriez nous indiquer, ce matin, quel
facteur explique cette résistance à la baisse des charges
d'exploitation face à une réduction sensible de l'inflation?
M. Drouin: Juste un premier énoncé et je
céderai la parole à notre vice-président Finances et
Administration. Je veux juste mettre dans le contexte que l'augmentation de nos
charges d'exploitation se traduit aussi par une augmentation sensible des
activités de l'entreprise et qu'au cours de la prochaine année
nous vendrons 6 % de plus de kilowattheures que l'année
précédente. Nous aurons 2 % de plus d'abonnement. Enfin, nous
avons fait une liste des différentes activités additionnelles
auxquelles l'entreprise a eu à faire face durant l'année 1991.
Dans tout l'exercice - et je pense qu'on voudra vous référer
à un tableau qui est dans la dernière page de la
présentation de M. Hanna ce matin, un tableau qui comporte ce qu'on
appelle une tarte de distribution des charges. L'on voit que cette distribution
des charges ou l'augmentation pour 1992, la croissance pour 1991-1992 sur
l'ensemble des 692 000 000 $ d'augmentation, il y a, bien sûr, les
intérêts et pertes de change, il y a la partie taxes ou frais de
garantie, la partie amortissement des immobilisations. Enfin, vous les avez
toutes subdivisées et celle qui ressort c'est les charges de base de 58
000 000 $. Je pense que, là-dessus, on peut vous donner des explications
plus précises. M. Boivin va vous...
M. Boivin (Claude): M. le Président, Mme la ministre a
raison de dire qu'à prime abord nos charges d'exploitation semblent
augmenter plus rapidement que l'inflation. Maintenant, en terme absolu c'est
vrai, mais en terme relatif ce n'est pas exact. Quand on parle des frais
d'exploitation de l'entreprise, il faut tenir compte, comme le disait le
président du conseil, de l'évolution ou de l'augmentation des
activités de base de l'entreprise. Malgré la récession,
Hydro-Québec est, en 1992, une entreprise en croissance, une entreprise
qui va avoir une augmentation du volume de ses ventes de l'ordre de 6 % en
1992, comparativement aux ventes totales réalisées en 1991.
Alors, pour voir vraiment l'effet de l'inflation par rapport à
l'augmentation du volume d'affaires, donc du volume d'activités, je vais
vous référer au tableau de la page 127, qui donne la croissance
1991-1992 des charges d'exploitation en coût unitaire. Il s'agit
effectivement de la page 127 du suivi du plan de développement.
On a mentionné déjà, dans la présentation du
président du conseil, qu'en 1992 il y a des imprévus, des
aléas dans nos opérations, des choses qui n'étaient pas
prévues dans le plan de développement 1990-1991 et, notamment, la
faible hydraulicité et le fonctionnement de la centrale de Tracy, je
devrais dire qui amène le fonctionnement de la centrale de Tracy, pour
des charges de l'ordre de 38 000 000 $. Il y a également une
augmentation, en 1992, supérieure à celle que nous avions
prévue, une augmentation d'activités dans le secteur de
l'efficacité énergétique. Alors, si on regarde le tableau
de la page 127, on se rend compte, en fait, qu'en 1992 nous allons avoir des
charges d'exploitation totales de 2 008 000 000 $, comparées à
des charges de 1 870 000 000 $ en 1991. En termes réels, il s'agit
effectivement d'une augmentation de 7,4 %, qui est, je crois, le chiffre auquel
référait Mme la ministre, versus une prévision d'inflation
de l'ordre de 2,6 %.
Nous ramenons maintenant ces données en coût unitaire,
parce que ce qui compte vraiment, c'est ce qu'on vend. Chez General Motors,
lorsque, par exemple, ils établissent le coût de production d'une
automobile, ils ne l'établissent pas à partir de n'importe quoi,
mais ils disent: Une automobile me coûte tant de milliers de dollars
à produire et je la vends tant de milliers de dollars. Finalement, c'est
le coût unitaire qui témoigne du volume ou du rythme
d'activité de l'entreprise qu'on doit prendre. Alors, vous remarquerez,
effectivement, qu'entre 1991 et 1992 les charges d'exploitation,
reflétées dans le coût unitaire du kilowattheure, passent
de 0,0137 $ à 0,0138 $ en 1992, soit une augmentation de 1,2 %, ce qui
est effectivement inférieur au taux d'inflation prévu de 2,6
%.
Maintenant, si, en plus, on tenait compte de l'élément
exceptionnel de la faible hydraulicité qui nous amène à
faire fonctionner la centrale de Tracy. Il est peut-être important de
mentionner dès maintenant que les charges dues à la faible
hydraulicité sont de 142 000 000 $. Maintenant, de ces 142 000 000 $, il
y en a 38 000 000 $ qui servent à fournir ou à acheter ie
combustible pour la centrale de Tracy et donc qui sont imputés
directement aux charges d'exploitation. La balance, 104 000 000 $, qui vont
à l'achat d'énergie additionnelle des réseaux voisins,
n'est pas imputée aux charges d'exploitation mais à la rubrique:
autres charges, qui comprend les achats d'énergie d'Hydro-Québec,
notamment de Churchill Falls, des autoproducteurs ainsi que les 104 000 000 $
que nous devrons acheter des réseaux voisins pour pallier à la
faible hydraulicité.
Donc, sans la faible hydraulicité, l'évolution des charges
d'exploitation au kilowattheure, il y aurait effectivement une réduction
de 0,7 %, moins de 1 %, mais quand même une réduction en termes
réels. Maintenant, si j'excluais les dépenses additionnelles que
nous devons faire, compte tenu des programmes de promotion de
l'efficacité énergétique, à ce moment-là,
nos charges d'exploitation en coût unitaire présentent une
réduction réelle de 2,7 %. Alors, je pense que ça explique
le fait qu'à Hydro-Québec nous
disons que, pour ce qui est des charges d'exploitation qui sont des
charges que nous contrôlons à court terme, nous avons fait un
effort très important de rationalisation puisque, en regard d'un taux
d'inflation anticipé de 2,6 %, nous avons, en termes réels, une
réduction de 2,7 %, une diminution de nos coûts unitaires de 2,7
%, ce qui fait au-delà de 5 % effectivement de réduction, si vous
voulez, en termes réels. (11 heures)
Mme Bacon: En regard du plan de développement, les ventes
totales d'Hydro-Québec, en 1992, s'inscrivent en baisse de 6,9
térawattheures ou près de 5 % C'est une réduction
qui est quand même substantielle de la demande
d'électricité et ce n'est pas sans se répercuter sur les
charges à l'entreprise, particulièrement les charges
d'exploitation.
Est-ce que vous pourriez expliciter dans quelle mesure l'effort de
rationalisation que vous présentez, à la page 126 du même
document que vous venez de citer, ne découle pas simplement de la
réduction importante de la demande prévue au plan de
développement? Est-ce qu'il y a d'autres efforts qui ont
été faits?
M. Boivin: M. le Président, Mme la ministre a raison de
nous souligner que les ventes réalisées ou prévues
maintenant pour 1992, par rapport aux prévisions que nous avions
établies dans le plan 1990, sont inférieures. Donc, il y a un
effet de la récession, il y a une réduction de l'activité
économique au Québec qui fait que nous allons vendre, en 1992,
moins de kilowattheures que nous avions anticipé lors de la
préparation du plan.
Maintenant, à Hydro-Québec, nous sommes une entreprise de
service public qui exploite des centrales, un réseau de transport, un
réseau de distribution et des services à la clientèle. La
baisse du niveau d'activités ou du niveau de ventes ne peut se
répercuter directement dans une baisse des coûts d'exploitation
pour une raison bien simple: lorsqu'une industrie - parce que je ferais ici le
parallèle ou la comparaison avec une industrie manufacturière -
manufacturière rencontre une baisse de la demande pour son produit, la
première étape, normalement, pour cette industrie, c'est
d'augmenter un peu ou légèrement ses inventaires et, lorsque les
inventaires auront atteint un niveau maximal, à ce moment-là, on
va tout simplement, pendant une période d'une semaine, deux semaines ou
trois semaines, fermer une usine, épuiser les inventaires et,
après ça, reprendre la production.
À Hydro-Québec, nous ne pouvons pas fermer nos usines
pendant une semaine, deux semaines ou trois semaines durant l'année.
Vous savez que nous devons être en production 7 jours par semaine, 365
jours par année, 8760 heures par année et, effectivement, les
périodes de faible demande sur le réseau sont les périodes
que nous utilisons pour faire l'exploitation ou l'entretien, devrais-je dire,
de notre réseau, donc particulièrement dans la période
d'avril à novembre. Et même s'il y a eu une réduction des
ventes en kilowattheure, ça ne se produit pas, la réduction des
ventes, par rapport à la prévision à un endroit
donné. On n'a pas fermé une ville au Québec; on n'a pas
abandonné notre réseau dans un endroit. Alors, nous avons besoin
quand même de continuer l'exploitation complète de nos
installations.
De plus, j'aimerais faire remarquer également que, dans la
période 1990-1994, nous sommes en plus dans une période de
rattrapage, et on en a fait état ici abondamment lors de la
présentation du plan 1990. Nous sommes dans une période où
nous avons mis en place des programmes d'amélioration de fa
qualité du service tant de nos réseaux de distribution que de nos
réseaux de production et de transport et nous sommes dans une
période où nous devons effectuer du rattrapage, donc un niveau
d'activité d'entretien sur notre réseau qui est supérieur
à la moyenne normale. Donc, même s'il y a eu réduction de
nos ventes en kilowattheure, ça ne s'est pas traduit directement par une
réduction de notre main-d'oeuvre, etc.
Mme Bacon: Est-ce qu'il serait utopique de croire qu'en 1992, et
peut-être au cours des deux prochaines années, Hydro-Québec
pourrait maintenir la croissance des charges d'exploitation au rythme de
l'inflation qui est prévu, qui est de 3,1 %, je pense?
M. Boivin: Ce n'est pas nécessairement utopique, mais
ça nécessiterait effectivement des gains de productivité
très importants. Parce que, encore là, je le
répète, en 1992, 1993 et 1994, nous avons des prévisions
d'augmentation de nos ventes et, pour rencontrer les prévisions
d'augmentation de ces ventes, nous avons présentement un programme
très important d'investissement, notamment avec la phase II du complexe
La Grande à la Baie James et, d'ici 1994, nous allons ajouter
au-delà de 3500 mégawatts de puissance additionnels sur notre
réseau. En 1992, nous allons terminer la mise en service de la centrale
de LG 2A; en 1993, nous allons effectuer la mise en service de la centrale
Brisay et, en 1994-1995, nous allons mettre en service les centrales de Laforge
1 et de LG 1. Nous allons également, dans cette
période-là, mettre en service une douzième ligne de
transport, à 735 kV qui vient de la Baie James, pour être capables
de transiter cette énergie.
Il s'agit donc effectivement d'un rythme de croissance simplement de nos
installations de production transport de l'ordre de 3,5 % par année.
Vous comprendrez avec moi que, lorsque nous mettons en service une nouvelle
centrale pour satisfaire la demande, ça ne fonctionne pas seul. Il faut,
au moins 18 mois avant la mise en service, commencer à recruter et
à former le
personnel. Donc, il va y avoir, dans les années qui viennent, une
augmentation du volume d'activités et du nombre d'installations dont
Hydro-Québec est propriétaire et qu'elle doit maintenir. Donc,
pour maintenir - et je reviens à votre question, Mme la ministre - ou
contenir le rythme de croissance des charges d'exploitation au rythme de
croissance de l'inflation, il faudrait effectivement que nous réalisions
des gains de productivité qui seraient au moins égaux sinon
supérieurs au taux de croissance du volume d'affaires de l'entreprise.
Je ne vous dis pas que c'est impossible. Ça fait partie effectivement
des réflexions que nous avons actuellement dans l'entreprise. Mais c'est
une tâche énorme.
Mme Bacon: Pour les trois prochaines années, disons 1992,
1993 et 1994, la croissance qui est de 6,2 %, qui va correspondre au double du
taux d'Inflation qui est prévu, comme je le disais tantôt, de 3,1
%... Est-ce qu'il y a des possibilités que vous nous rassuriez ce matin,
que la croissance des charges d'exploitation est sous contrôle? Est-ce
que vous pouvez nous exposer les principales normes, les principales directives
budgétaires qui sont en vigueur à Hydro-Québec? Et je vais
aller dans le détail: les indemnités pour repas,
hébergement, frais de déplacement, allocations pour
dépenses personnelles... On entend ça partout à travers le
Québec. Les gens s'inquiètent à savoir si on serre
suffisamment les dépenses qui sont faites, autant dans ces
détails, comme on entend ailleurs si les gens ont fait des efforts
considérables pour réduire les frais d'exploitation. Est-ce que,
ce matin, vous pouvez nous assurer que la croissance est sous contrôle
pour les années qui viennent?
M. Drouin: Je pense que je peux vous dire qu'on a pris des
mesures tout à fait spéciales cette année. Je pense qu'en
termes de notre évaluation budgétaire, lorsqu'on a
procédé à la préparation de nos budgets pour
l'année 1992, nous avons fait des ponctions importantes dans des sujets
comme, par exemple, le temps supplémentaire, une réduction de 16
000 000 $, la réduction du personnel temporaire, 16 000 000 $, la
réduction des services achetés, 12 000 000 $, des dépenses
de personnel, 12 000 000 $, services professionnels, 17 000 000 $, gel du
comblement des postes de cadres et spécialistes, autres
activités. Et je peux vous dire que la consigne à
l'intérieur de l'entreprise, depuis l'adoption de notre budget au niveau
de l'exploitation pour 1992, est justement de restreindre, et nous l'avons fait
par des chiffres, de restreindre les dépenses auxquelles vous faites
allusion. Et nous nous y sommes adonnés spécifiquement.
Mme Bacon: L'effectif temporaire d'Hydro-Québec augmente
beaucoup plus vite que prévu. Les nouveaux programmes
d'Hydro-Québec, comme ceux reliés, par exemple, à
l'efficacité énergétique, contribuent probablement
à la hausse des effectifs qui est toutefois beaucoup plus forte que
celle anticipée. Comment la direction d'Hydro-Québec peut-elle
justifier un accroissement annuel moyen de 5 % de ses effectifs totaux dans les
contextes économiques actuels? Je vous réfère à la
page 103 de votre document.
M. Drouin: Oui. Je vais demander à M. Jean-Marie Gonthier,
qui est vice-président exécutif Qualité et Ressources
humaines, de vous donner la réponse à cette question.
M. Gonthier (Jean-Marie): M. le Président, quand on
regarde l'évolution des effectifs à Hydro-Québec, H faut
la regarder sur une période de 10 ans. Je m'explique. Quand on regarde
les deux périodes 1982 à 1987 et 1987 à 1992, on
réalise, effectivement, que de 1982 à 1987 l'ensemble de
l'effectif à Hydro-Québec a diminué d'environ 7 %. On se
souvient qu'à cette période-là il y avait une
volonté de ne pas laisser se détériorer la situation
financière de l'entreprise. Par contre, comme le disait M. BoMn,
tantôt, depuis 1988, il y a des programmes de rattrapage qui font en
sorte que l'effectif total d'Hydro-Québec a crû, dans cette
période-là, à peu près de 26 % et, plus
spécifiquement, au niveau des temporaires, pour tenir compte de l'effet
des programmes spéciaux, soit PAM, PAQS, etc., tous les programmes.
Au niveau des chantiers et décrets, comme on le disait
tantôt, il y a une augmentation au niveau de la construction, donc les
temporaires-construction ont augmenté en 1990, 1991 et 1992. On doit
ajouter aussi qu'il y a une partie des augmentations qui est due à des
ententes passées au niveau de nos relations de travail avec nos
syndicats, qui font en sorte qu'actuellement on est dans une période
aussi de récupération dans des droits de gestion qui vont
permettre de diminuer l'effet sur l'utilisation des temporaires. Et ça
compte pour une partie importante de l'augmentation entre 1987 et 1992.
M. Drouin: Je pense que ce qu'il importe de vous informer ici, M.
le Président, c'est qu'au cours de l'année 1992 fa masse
salariale d'Hydro-Québec n'augmentera pas. Notre objectif - ça
répond peut-être à une de vos questions antérieures
- pour l'année 1993-1994, est également d'examiner de très
près l'augmentation ou la non-augmentation de notre masse salariale.
Évidemment, on peut jouer avec les temporaires, les permanents, les
différents postes, le temps supplémentaire, etc., mais ce qui est
important, pour l'information de cette commission, c'est de vous informer que
nous ne prévoyons aucune augmentation de la masse pour l'année
1992.
Mme Bacon: M. le Président, les charges salariales
représentent plus du cinquième des
charges totales de l'entreprise, d'Hydro-Québec. La comparaison
avec le marché, qui est présentée à la page 109 du
rapport général, montre une avance de la
rémunération des employés d'Hydro-Québec. Dans un
contexte où un nouveau contrat social s'établit entre le patron
et les syndicats, est-ce que la société d'Etat envisage de
demander à ses salariés de participer à l'effort
exigé de ses autres partenaires, je dirais les abonnés?
M. Drouin: Je pense qu'il n'y a rien de nouveau dans un tel
exercice, M. le Président, dans le sens où, depuis 1982,
où l'avance salariale des employés d'Hydro-Québec
était de l'ordre de 21 % par rapport à son marché de
comparaison, cette avance salariale a été réduite de
moitié. L'avance salariale, aujourd'hui, en 1991, en moyenne, est de
l'ordre de 10 %. Comme vous le savez, je ne sais pas si c'est le temps d'entrer
dans ce sujet-là parce qu'on est sur la proposition tarifaire, mais il y
a eu quelques négociations en 1990 et en 1991, ça a
débouché sur un gel salarial et une convention collective de
signée jusqu'à la fin de 1993. Le gouvernement envisage,
actuellement, certaines mesures. C'est clair que les employés
d'Hydro-Québec ou les cadres ou les spécialistes s'inscrivent
normalement dans ce type de mesures. Mais ce qu'il est important de mentionner,
c'est que, sans faire des chocs de coupures de salaires et d'avantages sociaux,
nous avons réussi quand même, au cours des 10 dernières
années, à récupérer 10 %, c'est-à-dire
à réduire de 10 % l'avance salariale, donc la réduire de
moitié. (11 h 15)
Mme Bacon: Je vous réfère au tableau qui est
présenté à la page 109 de votre document de suivi. Est-ce
que vous pouvez nous indiquer, d'abord, quelles sont les composantes du
marché témoin qui est utilisé dans cette comparaison? Et,
étant donné peut-être la similitude entre plusieurs corps
d'emploi, les ingénieurs, professionnels, techniciens, bureau et
ouvriers, un exercice de comparaison qui se baserait uniquement avec la
fonction publique québécoise, est-ce que ça creuserait
davantage cet écart?
M. Drouin: Oui. La réponse c'est oui parce que le
marché de comparaison d'Hydro-Québec a toujours été
un marché de comparaison d'entreprises similaires au Québec ou au
Canada. Ce n'est pas le même marché de comparaison des
employés des secteurs publics et parapublics. Nous l'avons dit et nous
l'avons invoqué également au cours des négociations, ce
marché de comparaison est un marché comparable à des
entreprises similaires à travers le Québec et le Canada. Donc,
vous avez raison de dire que l'avance de rémunération globale du
marché de comparaison ou des employés d'Hydro-Québec est
plus élevée que les 10 % qui sont mentionnés
là.
Le Président (M. Audet): Merci. L'enveloppe de temps
étant terminée, je dois reconnaître maintenant M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Étant
donné que Mme la ministre a commencé par quelques remarques, je
ferai de même. Je vous dirai, sans vous surprendre, que depuis 16 ans
dans ce Parlement, quand on se permet de faire des comparaisons des hausses des
tarifs d'Hydro, il faut regarder la hausse des taxes globales que l'on met aux
consommateurs, aux concitoyens. C'est sans prédécent ce qu'on a
vu au cours des deux dernières années. Quand on double les taxes
scolaires, qu'on s'apprête à taxer sur le plan municipal de
façon désordonnée, qu'on défonce les frais de
scolarité, qu'on augmente les plaques d'immatriculation, qu'on augmente
les permis de conduire - et je pourrais vous en énumérer d'autres
- pour une facture de 3 400 000 000 $, c'est très différent parce
qu'en 1981 ou en 1982, aux références que l'on fait,
c'était l'hydroélectricité mais avec des clauses bien
précises qu'Hydro faisait de l'argent pour payer des dividendes et non
pas imposer par loi des taxes obligatoires.
Ça m'amène donc à ma première question sur
la proposition tarifaire. À la page... C'est non paginé, mais
dans le sommaire vous parlez des effets sur les revenus, à la
dernière page du sommaire. Vous dites que, pour la période du 1er
mai 1992 au 30 avril 1993, ça sera 339 000 000 $ dont 203 000 000 $ pour
la période du 1er mai 1992 au 1er décembre 1992. Donc,
Hydro-Québec, si je comprends bien, aura 203 000 000 $ à verser
au gouvernement pour la période de mai 1992 à décembre
1993. Je m'en vais maintenant au tableau 2.1, à la page 7 de votre
proposition tarifaire: Charges d'exploitation, autres charges, amortissement,
taxes. Vous avez, en 1991, payé 392 000 000 $ de taxes aux
différents paliers de gouvernement et vous aurez à en assumer 595
000 000 $ en 1992. Si je fais la soustraction de 595 000 000 $ moins 392 000
000 $, j'arrive exactement au coût de 203 000 000 $ que vous allez
chercher du 1er mai au 31 avril... Au mois de décembre, excusez-moi,
parce que les 150 000 000 $ doivent rentrer avant décembre, j'ai bien
compris ça. C'est une autre partie à compter de décembre
en plus.
Donc, est-ce que je dois conclure, s'il n'y avait pas de surcharge de
taxes, s'il n'y avait pas d'autres taxes, qu'Hydro-Québec aurait pu ne
rien aller chercher pour la période de mai à décembre 1992
puisque c'est exactement la même somme. Je ne sais pas qui peut me
répondre?
M. Drouin: (I y a une bonne coïncidence dans ce que vous
venez de dire.
M. Chevrette: Un heureux hasard, hein?
M. Drouin: Vous pouvez appeler ça «un heureux
hasard», mais il ne faut pas oublier que,
dans l'augmentation de tarifs, ce n'est pas l'ensemble de l'augmentation
des taxes que nous imputons aux ventes assujetties aux tarifs. Par
conséquent, ce n'est pas juste de dire qu'un ajout de 203 000 000 $ de
taxes passerait directement dans les tarifs parce qu'on parle des coûts
de fourniture aux clients qui sont assujettis aux tarifs. Mais il y a des
clients qui ne sont pas assujettis aux tarifs et pour lesquels on impute des
charges comme celle de l'hydraulicité ou celle de l'augmentation des
taxes.
M. Chevrette: Pour une partie.
M. Drouin: Pour une partie. Quand je vous dis «une
partie», si on veut être un peu plus précis, il y a
peut-être 20 % qui vont aux ventes non assujetties et 80 % qui vont aux
ventes assujetties.
M. Chevrette: On va régler ça tout de suite. Allez
à la page 14 de votre proposition tarifaire. Je sais très bien
que les assujettis paient une part des pertes des contrats secrets.
M. Drouin: Ce n'est pas exact.
M. Chevrette: Vous dites à la page 14, M. Drouin:
«En effet, la hausse proposée pour les ventes assujetties en 1992
procure, pour cette partie des ventes d'Hydro-Québec, un rendement sur
l'avoir propre d'environ 11,3 %> Allez voir dans votre tableau 3.2:
Rendement sur l'avoir propre qui, lui, n'est pas pour les assujettis, qui est
pour l'ensemble: et les assujettis et les contrats secrets et l'exportation.
Vous arrivez à 7,2 %. Donc, en l'occurrence, les assujettis en absorbent
un joyeux paquet si votre taux de rendement sur l'avoir propre se trouve
abaissé à 7,2 %.
M. Drouin: Je pense que ça tend à démontrer
justement que, si nous voulions faire assumer aux assujettis l'ensemble des
charges additionnelles dont on fait mention, nous nous rapprocherions beaucoup
plus de 7,2 % que du 11,2 % que vous mentionnez pour les assujettis. C'est
justement parce que les assujettis n'assument pas une partie des charges qui
sont, par exemple, allouées aux exportations, qui sont allouées
aux industries fortes consommatrices que le 11,2 % qu'on réalise ou
qu'on veut réaliser dans les ventes assujetties se transforme en 7,2 %
sur l'ensemble du rendement de l'entreprise.
M. Chevrette: O.K. Je vais vous reposer la question d'une
façon différente. Étant donné que les contrats
secrets sont dans les autres parties, étant donné que
l'exportation est dans l'autre partie, êtes-vous en train de m'expliquer
que c'est dissimulé à travers la comptabilité de l'Hydro
puisqu'on ne retrouve pas, à l'intérieur de l'Hydro, qui assume
ces coûts? Vous dites que ce ne sont justement pas les assujettis, c'est
votre réponse. Si ce n'est pas les assujettis, qui les assume puisqu'on
est en perte sur les contrats secrets, à votre dire même, de 240
000 000 $? Il doit y avoir quelqu'un qui va absorber la facture?
M. Drouin: C'est l'actionnaire, M. le Président, qui
assume parce que ça, ça veut dire que ce sont des profits en
moins.
M. Chevrette: Les actionnaires je pensais que c'étaient
tous les Québécois, moi, juste pour le...
M. Drouin: Non, non, mais c'est ça que je veux dire. Les
profits de l'entreprise sont beaucoup moindres. Si je peux faire une image ou
un exemple, c'est comme si nous opérions deux entreprises, une comme
Bell Canada, par exemple, qui est régie par la Régie, etc., et
qui établit des tarifs pour le téléphone, et BCE qui a de
la diversification dans d'autres domaines.
M. Chevrette: Mais, M. Drouin, juste pour comprendre. Si je ne
paie pas comme assujetti, je paie comme actionnaire. C'est ça que je
dois comprendre de vos propos? Ce n'est pas le même gorlot, le même
individu?
M. Drouin: Ce n'est pas que vous allez payer comme actionnaire,
c'est que vous allez être en moins gagnant comme actionnaire. Au lieu de
faire 1 000 000 000 $ de profits on va faire 700 000 000 $ de profits. Mais on
ne fait pas assumer les coûts de fourniture de
l'électricité, la production, le transport à travers le
Québec, la distribution dans les rues, par d'autres que les ventes
assujetties pour la partie qui leur revient. De sorte que, à titre
d'exemple, une partie des taxes ou une partie des frais de garantie, nous
n'imputons pas le plein montant aux ventes assujetties. L'autre partie, les 20
% qui ne sont pas des ventes assujetties, c'est dans les profits
d'Hydro-Québec ou le moins gagnant profit d'Hydro-Québec qu'on
retrouve ces sommes.
M. Chevrette: Je le sais mais c'est une explication
théorique que vous donnez, M.
Drouin. Hydro-Québec, c'est l'ensemble des
Québécois.
M. Drouin: Tout à fait!
M. Chevrette: Que l'on ne fasse pas payer par l'ensemble des
consommateurs d'hydroélectricité mais plutôt par l'ensemble
des contribuables parce que, si le gouvernement n'a pas de dividendes et si le
gouvernement cherche des revenus, c'est quand même le payeur de taxes
québécois. On peut jouer sur les mots pendant
une demi-heure tous les deux, mais, fondamentalement, le partage entre
ceux qui consomment l'électricité et ceux qui payent des
impôts, de toute façon, ce sont des Québécois qui y
perdent au change.
M. Drouin: Mais, pour admettre ça, il faut admettre que la
partie non-assujettie serait toujours perdante, ce qui n'est pas le cas, parce
qu'on a les exportations qui sont dans cette partie-là, qui est une
partie plus lucrative, évidemment, à ce moment-ci, que les
contrats à partage de risques, mais l'idée, c'est que dans la
partie qui est non assujettie, on est capable, et on devrait pouvoir faire,
là aussi, des profits additionnels. Donc, ce n'est pas ces deux secteurs
séparés. Mais ce qui est important pour le bénéfice
de cette commission, c'est que nous n'imputions pas au consommateur qui est
assujetti par le tarif des charges pour lesquelles il ne serait pas
responsable. Quant au reste, exportations, ventes, des contrats à
partage de risques, là, il s'agit de voir quelle est la
rentabilité de ces projets-là, mais non pas sur une année,
parce que contrats à partage de risques et de bénéfices
impliquent en soi que, dans d'autres années, on va faire des profits par
rapport à des années où on en fait moins, et en plus de
ça, évidemment, on doit ajouter les exportations qui, elles, sont
normalement des contrats qui sont rémunérateurs.
M. Chevrette: Les contrats secrets, on en parlera tantôt.
D'ailleurs, vous les avez déjà vantés abondamment dans les
journaux. On va pouvoir vous questionner spécifiquement
là-dessus. Je voudrais que vous me décortiquiez le 1, 9 % que
vous demandiez pour les frais de garantie. Normalement, vous auriez dû
demander 3 %, si on se fie au ratio 50 000 000 $ à 1 % de tarif. Vous en
demandez 1, 9%. Où est-ce que se situe l'autre 1, 1%? À qui le
chargez-vous?
M. Drouin: Bien, on l'impute dans un manque à gagner,
purement et simplement.
M. Chevrette: Vous l'imputez dans un manque à gagner?
M. Drouin: Exact. On l'absorbe à même nos ratios
financiers et à même notre profit.
M. Chevrette: Bon. Donc, encore là, on voit bien que vous
ne demandez pas 3 %, comme vous devriez le faire pour maintenir exactement la
courbe normale de progression que vous aviez antérieurement.
M. Drouin: Non. Si on demandait 3 %, M. le Président,
ça équivaudrait à demander ou à faire payer par le
consommateur assujetti au tarif une partie des charges qui doit être
assumée par d'autres types de consommation, telles les exportations et
les contrats à partage de risques. Alors...
M. Chevrette: Bon. Les contrats à partage de risques sont
aussi dans ça, dans le 1, 1 %.
M. Drouin: Exact. M. Chevrette: Exact. M. Drouin:
Exact.
M. Chevrette: Et quand ils n'ont pas tant de la livre, c'est nous
autres qui payons, les assujettis ou les contribuables
québécois.
M. Drouin: Ce n'est pas ça que j'ai dit du tout. Ce n'est
pas ça que j'ai dit du tout. Je vous...
M. Chevrette: Non, mais ce n'est pas les anges - ce n'est pas le
sexe des anges, ça - qui payent.
M. Drouin: Non, mais supposons que le 1, 1 %, on n'avait pas
à le payer, et qu'on prenait juste le 1, 9 %, tout ce que ça
ferait, ça donnerait plus de profits dans l'entreprise, point final.
Ça ne viendrait pas soulager la partie de ceux qui sont assujettis au
tarif.
M. Chevrette: Comme dans la faible hydrau-licité, vous
n'allez pas chercher tout ce qui correspond à l'application du ratio 50
000 000 $. C'est le même principe pour la faible
hydrauli-cité.
M. Drouin: C'est le même principe, exactement.
Contrats à risques partagés
M. Chevrette: O. K. M. Drouin, quand on a commencé
à discuter des contrats à partage de risques, est-ce
qu'Hydro-Québec avait produit des avis au gouvernement?
M. Drouin: Produit des avis au gouvernement?
M. Chevrette:... sur le danger, par exemple, à cause de ce
qui restait comme marge, comme surplus. Madame parlait de x
térawattheures, tantôt, quand elle allait signer ses contrats. La
faible hydraulicité était connue en 1985, 1986, 1987?
M. Drouin: Non. Mais il y a eu des...
M. Chevrette: Vous nous dites, dans vos livres, que c'est connu
depuis sept ans, là, ça doit être connu... (11 h 30)
M. Drouin: Non, non, mais ce que je veux dire par là,
c'est qu'il y avait des surplus jusqu'en 1988. Il y a eu des années de
faible hydraulicité, mais il y avait des surplus, quand même,
énergétiques.
M. Chevrette: Bon. Il y avait des surplus
énergétiques. Est-ce que vous avez produit des avis au
gouvernement sur le fait que tout manger le surplus risquait de vous placer en
état de vulnérabilité et dans l'obligation d'acheter sur
d'autres marchés?
M. Drouin: Moi, je vais demander à M. Boivin de vous
répondre, il était...
M. Boivin: M. le Président, c'est une excellente question
de la part du député de Joliette, mais il faut comprendre
comment, à Hydro-Québec, on fait la planification des besoins et,
après ça, la planification des équipements pour
répondre aux besoins. Vous avez raison de dire qu'en 1987 nous
étions en faible hydrauticité. Ce n'est pas exact, par contre, de
dire que nous connaissions la faible hydraulicité, pas plus
qu'aujourd'hui je puis vous dire quelle va être l'hydraulicité de
1992 ou de 1993. D'ailleurs, s'il y a quelqu'un...
M. Chevrette: Mais vous observiez une tendance à la baisse
depuis 1985, M. Boivin.
M. Boivin: S'il y a quelqu'un... M. Chevrette: Bien,
voyons!
M. Boivfn: ...dans cette salle qui pouvait me prédire
quelle sera l'hydraulicité des prochaines années, ce serait
extraordinaire. Alors, on ne peut pas prédire l'avenir, donc on planifie
sur une hydraulicité moyenne. En 1987, effectivement, nous avons eu une
faible hydraulicité, mais notre planification était basée
sur des années futures à hydraulicité moyenne. Ce que
l'implantation des industries énergivores a fait au Québec, c'est
que ça nous a amenés à devancer des installations futures
parce que ça amenait une augmentation, un taux de croissance de la
demande supérieur à ce que nous aurions eu ou ce que nous aurions
anticipé si nous n'avions pas eu ces implantations.
Maintenant, vous vous rappellerez qu'au début de la
décennie, avec la récession de 1981, nous prévoyions,
effectivement, que pour satisfaire exclusivement les besoins du Québec,
avec des taux de croissance qu'on avait anticipés très bas
à ce moment-là, la mise en service de la prochaine installation
prévue à ce moment-là dans le plan de développement
de 1982-1983, c'était LG 1 en 1999. Il y a eu, par contre, des
implantations d'industries énergivores. La croissance a
été beaucoup plus forte qu'anticipée en 1982,
particulièrement pour les années 1984 à 1989, ce qui a
fait que nous avons devancé les mises en service de la phase II du
complexe La Grande à 1993, à 1995. Maintenant, encore
aujourd'hui, nous planifions sur une hydraulicité moyenne.
M. Chevrette: Oui, mais, M. Boivin, je voudrais vous
arrêter parce que ce n'est pas l'objet de ma question. J'ai eu ces
explications que vous êtes en train de donner, à plusieurs
reprises, d'Hydro et de toutes les sources. Donc, ma question, je vais la
reprendre. Vous planifiez en fonction d'une hydraulicité moyenne, je
suis conscient de ça, je sais ça. On sait que, depuis 1985, et
c'est dans vos propres documents, on remarque une faible hydraulicité
qui s'est maintenue d'ailleurs jusqu'en 1991. On espère d'ailleurs que
la courbe va s'inverser parce que la moyenne va sûrement baisser. La
question était très précise.
Quand vous avez été appelés à signer des
contrats secrets - moi, je les appelle «secrets» parce qu'on ne les
a pas - vous vous êtes basés sur ce que vous aviez en main et vous
avez signé 13 contrats secrets, si bien que vous avez été
obligés d'en arrêter trois autres qui en voulaient, une signature.
Là, vous avez dit: Ça n'a plus de bon sens, là; on va
être encore pire. Je veux savoir si, dans votre planification, vous avez
produit des avis au gouvernement pour dire que c'est dangereux de manger toute
la marge, sinon on peut se retrouver à être obligé
d'acheter d'une façon démesurée sur les marchés
étrangers, à des prix absolument supérieurs à ceux
qu'on a consentis, même supérieurs au tarif L dont on va se parier
tantôt. Est-ce que vous avez produit des avis, à
Hydro-Québec, sur les dangers de manger toute la réserve ou
presque? Ma question est très précise.
Une voix: Non.
M. Drouin: À ma connaissance, M. le Président, nous
n'avons pas produit d'avis au gouvernement dont fait mention M. Chevrette.
M. Chevrette: M. Drouin, en vertu des règles de l'art de
l'administration, vous devez planifier sur 20 ans. Vous avez des planifications
sur 20 ans, vous autres, à Hydro? D'ailleurs, ce serait
intéressant que vous nous les fassiez connaître, au lieu de nous
faire connaître une planification de deux ou trois ans et qu'on se casse
la tête pour savoir où vous allez. Ce serait
intéressant...
M. Drouin: Quand on produit notre plan de développement,
on produit une planification avec une vision de 15 ans.
M. Chevrette: 15 ans.
M. Drouin: On l'a fait en 1990. On est en
consultation actuellement pour présenter un plan qui va
être produit en novembre de cette année et qui va prévoir
encore un plan de 15 ans sur la consommation.
M. Chevrette: Est-ce qu'il vous serait possible de rendre
publiques ces études de planification de 15 ans pour que ça nous
serve, pour comprendre un peu?
M. Drouin: Écoutez, c'est tout à fait disponible.
Nous avons déposé auprès des 101 groupes qui sont en
consultation actuellement des documents sur quatre sujets très
importants pour nous et importants également pour ces groupes-là.
Nous n'avons aucune objection. Un des dossiers sur lesquels nous sommes en
consultation, il y a, évidemment, les exportations, il y a
l'efficacité énergétique, il y a la production de
l'électricité et les contrats à partage de risques ou,
enfin, les contrats, les industries à forte consommation. Tous ces
documents-là sont tout à fait disponibles pour...
M. Chevrette: Merci. Vous me dites donc, à ma
première question, que vous n'avez pas produit d'avis au
gouvernement...
M. Drouin: Là, je vous dis, à ma connaissance et
depuis mai 1988 que nous dirigeons Hydro-Québec, que nous n'avons pas
produit d'avis dans ce sens-là.
M. Chevrette: Est-ce que le gouvernement, lui, vous a
demandé des avis avant de signer les 13 contrats?
M. Drouin: Écoutez, c'est clair qu'il y a des
études qui se font conjointement, en relation avec le ministère
des Finances et c'est tout à fait normal parce que le gouvernement doit
adopter des décrets. Donc, c'est normal qu'ils viennent vérifier
et qu'ils vérifient les chiffres et les études économiques
sur lesquelles nous basons ces contrats-là.
M. Chevrette: Au moment où vous vantiez ces contrats
secrets, aviez-vous anticipé, M. Drouin, des pertes de l'ordre de celles
que vous connaissez présentement? C'est marqué: Drouin vante ses
contrats secrets. Je ne l'ai pas inventé, là. Je voudrais savoir
si Drouin, donc, M. Drouin, qui est ici ce matin - le journaliste n'est pas
poli envers vous, là - assis devant moi peut nous dire comment il se
fait que vous n'avez pas anticipé ces pertes ou pourquoi avez-vous
laissé manger toute la réserve pour se ramasser dans une telle
situation. Est-ce qu'Hydro-Québec n'a pas les moyens, avec toutes les
ressources qu'elle a, pour ne pas se retrouver dans des culs-de-sac comme celui
où on se retrouve avec la faible hydraulicité en grande partie
due à des contrats secrets?
M. Drouin: Écoutez, on a un document ici. Nous pourrions
le déposer et ça vous permettrait de voir les études, les
analyses et les prévisions qu'on a faites relativement aux
possibilités de pertes et de gains. Comme il s'agit de contrats à
partage de risques et de bénéfices, bien sûr qu'on peut
s'attendre à ce que, dans une période donnée, il y ait
certaines pertes et, dans d'autres années, il y ait des gains. Je vais
demander à M. Boivin de vous faire cheminer dans ces quelques
informations là pour vous montrer que c'est tout à fait
prévisible, le genre de situation qui se passe actuellement.
M. Chevrette: C'était prévisible et vous les avez
laissés signer pareil?
M. Drouin: Non, mais c'est parce qu'on le regarde sur une
période de plusieurs années, M. le Président. On ne le
regarde pas uniquement en fonction d'une seule année. Il faut voir, sur
une période de 10 ans et de 20 ans, quelle est la rentabilité de
ces contrats-là.
M. Chevrette: Pas de problèmes. Je vous ai
laissé...
M. Boivin: M. le Président...
Le Président (M. Audet): M. Boivin.
M. Boivin: ...dans les contrats à partage de risques,
notamment les contrats des alumineries, effectivement, comme ce sont des
contrats où le prix est variable, adapté ou indexé
à l'évolution du prix du produit de l'usine, nous avons fait,
avant de signer ces contrats-là, un certain nombre de scénarios
et d'hypothèses. D'abord, il faut mentionner que ces contrats-là
sont construits de façon telle que les revenus sont inférieurs au
début du contrat et vont en augmentant à mesure que le temps
passe dans le contrat.
Deuxièmement, il est évident que nous avons fait des
hypothèses de différents scénarios d'évolution des
prix de l'aluminium et, effectivement, cette année, en 1992, nous sommes
dans un creux historique du prix de l'aluminium. Pour votre information, notre
cadre financier 1992 a été construit sur l'hypothèse que
le prix de l'aluminium serait en moyenne à 0,62 $ la livre en dollars
1992 pour l'année. À titre de comparaison, si on faisait la
moyenne historique des prix de l'aluminium des 15 dernières
années ramenés en dollars constants de 1992, on se rend compte
qu'en moyenne le prix de l'aluminium, au cours des derniers 15 ans, a
été à 0,95 $. À 0,62 $ la livre, il s'agit,
effectivement, d'un creux historique et, malgré ce creux historique,
nous sommes à l'intérieur de la fourchette des risques que nous
avions évalués. Nous sommes dans le bas du risque que nous avons
évalué.
M. Chevrette: M. BoMn, n'avez-vous pas évalué
à partir de 0,77 $ US l'aluminium, 0,82 $ le magnésium, alors que
des rapports de firmes d'experts nous disent que ce n'est pas du tout le cas
présentement? C'est 0,58 $ et 0,63 $ et c'est beaucoup moins aussi pour
le magnésium. Est-ce que ce n'est pas là aussi une erreur
fondamentale d'Hydro ou bien une surévaluation d'Hydro pour en arriver
à garder son avoir ou son bénéfice net? C'est quoi?
M. Bol vin: M. le Président, je ne sais pas d'où
vient votre 0,77 $. Moi, je vous dis que pour l'année 1992, pour les
équilibres financiers, parce que nous devons faire des prévisions
de revenus, nous avons estimé que le prix de l'aluminium en 1992 serait
de 0,62 $ la livre. On a passé ça dans la machine, et nous avons
calculé à partir des données du contrat quels seront les
revenus que nous pouvons anticiper en 1992 et c'est ce qui est dans nos
prévisions de revenus. Alors, je ne sais pas d'où vient votre
0,77 $. Ce que je peux vous dire c'est qu'effectivement...
M. Chevrette: Non, mais les revenus d'Hydro. Excusez, je...
M. Boivin: ...et là quand on parle de sous ou d'argent il
faut toujours qualifier en dollars de quelle année; j'avoue que votre
0,77 $ je ne sais pas d'où il vient - lorsque nous avions signé
nos contrats, à ce moment-là, en dollars 1988, si ma
mémoire est bonne, nous avions estimé qu'il fallait que le prix
de l'aluminium se maintienne à 0,71 $ en moyenne. Maintenant, je peux
vous dire que les investisseurs dans le domaine de l'aluminium à ce
moment-là avaient des prévisions, eux, de l'ordre de 0,80 $
à 0,81 $, en moyenne, à long terme.
Maintenant, moi, j'ai toujours dit et je maintiens que vous ne pouvez
pas juger de la valeur de ces contrats-là sur une base ponctuelle. Ce
sont des contrats, en fait, qui ont été établis, comme je
l'ai dit, sur un horizon de 25 ans, qui ont été volontairement
déséquilibrés dans le sens que les revenus
anticipés sont plus faibles au début qu'à la fin du
contrat. Ils vont en croissant, et ils sont construits comme ça. Donc,
comment peut-on juger de la valeur d'un contrat qui va durer 25 ans dans un
horizon d'un an ou deux, alors qu'on est présentement dans un creux
historique du prix de l'aluminium? Vous savez comme moi que ce creux historique
a été causé principalement par un changement structurel
dans le marché de l'aluminium avec la venue sur le marché mondial
de l'aluminium produit en Union soviétique... en Russie, je devrais dire
maintenant.
M. Chevrette: À combien de sous la livre devra être
l'aluminium et le magnésium pour qu'Hydro-Québec commence
à connaître des bénéfices, M. Boivin?
M. Boivin: Je vous réfère au document qui vient de
vous être passé, à la page C-8.
M. Chevrette: Je l'ai, ça.
M. Boivin: On vous donne dans ce document, M. le
député de Joliette, une fourchette de prix. Vous voyez que si...
Ça, c'est toujours en dollars de...
Une voix: De 1988.
M. Chevrette: Étant donné qu'il me reste une
minute, je vais vous poser ma question sur deux volets parce que, si vous allez
répondre, je ne pourrai pas la poser.
M. Boivin: Vous avez la réponse à toute votre
question là.
M. Chevrette: Pardon?
M. Boivin: Vous avez la réponse à toute votre
question là.
M. Chevrette: Oui, mais je vais vous dire... À combien de
sous la livre... Je vais vous poser une question additionnelle. Quel est le
chiffre inscrit dans les contrats que vous avez signés pour que les
compagnies commencent à payer?
M. Boivin: Je ne comprends pas votre question, M. le
député.
M. Chevrette: En d'autres mots, vous avez signé des
contrats à partage de risques. À quel tarif que les compagnies
commencent à verser, que ça commence à être rentable
pour le gouvernement, au lieu que ce soient les consommateurs assujettis et
puis les contribuables québécois qui absorbent le risque?
À quel moment? Quelle est la formule contractuelle des contrats? Par la
même occasion, les contrats ont-ils tous la clause de
confidentialité, oui ou non? J'aimerais bien avoir la réponse -
et je répète la question: Ont-ils tous la clause de
confidentialité, oui ou non?
M. Boivin: II y a plusieurs questions, là.
M. Chevrette: Oui. Bien c'est parce qu'il me restait une
minute.
M. Boivin: À ma connaissance, à votre
dernière question, oui. Je vous avoue que je n'ai pas regardé
dernièrement les 13 contrats, mais je crois qu'ils comportent tous la
clause de confidentialité.
M. Chevrette: Vous affirmez ça.
M. Boivin: Je vous dis que je crois. Je ne
les ai pas vérifiés. Il faudrait que je les relise
aujourd'hui, mais je le crois.
M. Chevrette: Pourriez-vous le vérifier d'ici la fin de la
commission, s'il vous plaît?
M. Boivin: On est capable de vous donner une réponse
à ce sujet-là avant la fin de la commission, certainement.
M. Chevrette: Bien. (11 h 45)
M. Boivin: Votre premier volet de la question - à quel
moment on commence à ne pas perdre de l'argent? - c'est relatif encore
là, la réponse à cette question-là, parce que ce
que nous avons mis a risque dans les contrats à partage de risques,
c'est la marge bénéficiaire d'Hydro-Québec. Et,
effectivement, lorsque nous parlons de nos coûts de fourniture à
HydroQuébec, nous incluons dans nos coûts de fourniture un taux de
rendement qui, lors de la dernière commission parlementaire,
était de 13 % prévus sur l'avoir propre et qui a
été ramené au cours de l'année qui vient de
s'écouler à 12,25 % compte tenu de la baisse des taux
d'intérêt et de la baisse du taux d'inflation prévue pour
le reste de la décennie.
Alors, effectivement, nous prévoyons un taux de rendement de
12,25 % sur l'avoir propre et c'est cette partie-là que nous avons mise
à risque sur les contrats à partage de risques. Ça ne veut
pas dire que nous perdons de l'argent, mais nous ne faisons pas de profit
présentement avec les contrats à partage de risques alors que,
comme l'a expliqué M. Drouin tantôt, sur les ventes assujetties au
règlement tarifaire, nous avons une marge bénéficiaire de
11,3 % anticipée en 1992 à partir ou selon l'hypothèse de
la hausse de tarif que nous avons demandée en 1992.
Le Président (M. Audet): Merci, M. Boivin. Je reconnais
maintenant la formation ministérielle. Mme la ministre.
Remboursement de la dette
Mme Bacon: Quelques questions, M. le Président, et je
passerai la parole à mes collègues ensuite. Dans les prochaines
années, Hydro-Québec devra emprunter des sommes suffisamment
importantes et, dans le public, certains appréhendent cette
situation-là et se questionnent sur le fardeau éventuel de la
dette ou de la capacité de rembourser de votre entreprise. Est-ce que
vous pourriez expliquer quelle sera la situation financière
d'Hydro-Québec dans 10 ans, par exemple, avec sa dette, ses frais
d'intérêt et de quelle façon cela va se comparer avec les
états financiers actuels?
M. Boivin: Vous avez demandé dans 10 ans, madame?
Mme Bacon: D'ici 10 ans, oui. Disons, une question de long terme,
là.
M. Hanna: Ce qui est prévu dans le plan initial de 1990
à 1999, le plan de développement en cours, les emprunts bruts
sont de l'ordre de 40 780 000 000 $ et les besoins nets sont de l'ordre de 29
859 000 000 $. Maintenant, les emprunts sont toujours en vertu du programme
d'investissement prévu dans le plan de développement de 1990
à 1999. Les emprunts sont toujours calculés en fonction que les
ratios et les critères minimaux sont respectés
c'est-à-dire une couverture de taux d'intérêt d'au-dessus
de 1,0 % et, aussi, naturellement, que le taux de financement soit au moins de
l'ordre de 30 %.
Mme Bacon: Est-ce que vous comparez ça favorablement avec
la situation des états financiers actuels, ce qui sera dans 10 ans?
M. Hanna: C'est surtout juste de dire que, naturellement...
Mme Bacon: Oui.
M. Hanna: ...on sacrifie, pour 1992. Les critères
financiers sont inférieurs aux objectifs visés. Je pense que la
considération de la conjoncture économique fait en sorte que, de
laisser détériorer pour un an, ça semble être
plausible, mais que la santé financière, les critères
minimaux soient rétablis dans les délais les plus brefs.
Mme Bacon: O.K. Dans le cadre financier soumis par votre
entreprise au tableau 13 du rapport général, à la page
170, on remarque que les charges en intérêts et en perte de change
vont accaparer au-delà de 41 % des charges totales qui sont
prévues sur la période de 1992-1994. Pour l'année 1992
seulement, ces dépenses doivent s'élever à 2 500 000 000 $
et, a priori, ces chiffres nous apparaissent assez inquiétants. Est-ce
que vous pouvez démontrer qu'Hydro-Québec a la capacité de
défrayer les charges financières d'une telle ampleur?
M. Hanna: Comme vous pouvez le voir, en effet, les charges de 2
500 000 000 $ représentent pas loin de 36 % de toutes les charges
d'entreprises et le critère pour...
Mme Bacon: O.K.
M. Hanna: ...s'assurer que les intérêts sont
remboursés aux investisseurs, c'est le taux de couverture
d'intérêt. C'est-à-dire que le taux de couverture, qu'il
soit au-delà de 1,0 %, ça veut dire, en effet, que le flux
monétaire est plus élevé pour rembourser les
intérêts et non
emprunter pour payer les intérêts. C'est donc ce
critère de base qui assure toujours... Vous pouvez juger pour 1991,
d'ailleurs le taux de couverture est à 1,10 %, ce qui est relativement
bien pour l'année 1991. Comparez ça en 1992, il se
détériore mais d'une façon temporaire, et on pense qu'en
1993 il devrait être rétabli.
Le Président (M. Audet): Merci. Je reconnais maintenant M.
le député de Saint-Maurice.
Rationalisation et économies
M. Lemire: Merci beaucoup, M. le Président. MM. les
présidents, moi je voudrais en tant que député d'un
comté retourner sur le terrain et vous rappeler un peu ce qui se dit
dans nos bureaux de comté. Peut-être que mon collègue d'en
face trouve ça drôle, mais il en a sûrement des appels, lui
aussi, le député de Joliette. Je pense que là ce n'est pas
le temps de parler des prouesses de nos gouvernements, ou des années
qu'eux ont fait des contrats, ou nous on a fait des contrats. Moi, en tant que
député j'ai confiance en l'avenir. Je suis persuadé qu'on
investit dans de très bons projets.
Mais ce que les citoyens se posent comme question chez nous, surtout
quand on voit - et j'ai envie de vous le dire - des personnes qui perdent leur
emploi dans les papetières - usine Consol Belgo - des gens de 15 ou 20
ans de séniorité, des petites familles de deux enfants qui ne
sont plus capables de faire leur paiement sur leur maison... Ces gens-là
nous appellent et ils nous disent: Écoutez, c'est une bien mauvaise
situation pour augmenter l'électricité, les tarifs. Moi, les gens
me disent, ceux qui perdent leur emploi... Écoutez, ils constatent que
sur le terrain on voit... Depuis quelque temps, les gens d'Hydro-Québec,
vous avez passé le message, parce qu'on ne voit plus de camionneurs
aller prendre le déjeuner à neuf heures et on ne voit plus
certaines choses qui se passaient avant.
Comme député, j'ai de la difficulté à
accepter ça parce que pour moi, Hydro-Québec, c'est quelque chose
d'important au Québec. Ce que les gens se posent comme question, c'est:
Est-ce que la productivité a augmenté? Souvent, il y avait de vos
employés qui ne travaillaient pas la moitié de leur... Ils
travaillaient à peine quatre heures par jour. C'est les gens qui
constatent ça qui viennent nous dire ça. Vous avez aussi les gens
qui disent: Bien moi, j'ai perdu mon emploi. Le gars d'Hydro-Québec,
lui, il est certain de ne pas le perdre son emploi.
Vous l'avez dit tantôt. Vous n'avez pas de rationalisation en vue.
Vous avez seulement dit qu'en 1992 vous n'avez pas de nouveaux emplois à
Hydro-Québec. C'est vrai qu'on a besoin d'Hydro-Québec pour
relancer notre économie.
C'est vrai que, si l'on n'avait pas Hydro-Québec
présentement, les 4000 emplois qu'il y a dans les travaux du Nord...
Ça serait très grave au Québec. Mais, moi, où je
veux en venir, MM. les présidents, c'est que quand on voit la
rationalisation qui se fait au point de vue mondial dans toutes les
entreprises, dans toutes les multinationales, vous dites que vous allez
appliquer la qualité totale pour augmenter la productivité de vos
employés. Moi, j'aimerais savoir, au nom de mes citoyens, quelles sortes
d'efforts que vous allez faire. Je me demande si vous ne devriez pas
accélérer vos efforts pour en arriver au moins à ne pas
augmenter l'électricité plus que le coût de la vie. C'est
ma question, M. le Président.
M. Drouin: M. le Président, bien sûr qu'on tend
à démontrer qu'on n'aurait pas à augmenter
l'électricité plus que le coût de la vie si nous n'avions
pas deux éléments qui viennent ajouter à nos charges d'une
façon importante. Lorsqu'on dit que sur 5,5 % d'augmentation il y a 1,6
% qui est dû à l'augmentation de nos charges, celles que vous
évoquez justement, c'est-à-dire nos employés qui
travaillent sur le champ... Il y a 1,6 % qui est affecté aux
augmentations tarifaires quant à nos charges de base.
Vous savez, sur le plan de la productivité - je l'ai
évoqué dans le message que j'ai livré au début de
cette commission - il y a des constatations précises d'augmentation de
productivité. Vous en avez évoqué une, c'est celle du
temps à pied d'oeuvre de nos employés, de nos monteurs. Moi, je
vous ai dit que c'était une amélioration de 14 %. Il n'y a pas
juste un message dans ça, il y a réellement une volonté de
l'entreprise de se prendre en main sur le plan de la productivité. Par
conséquent, quand je vous ai dit qu'il n'y aurait pas d'augmentation de
la masse salariale, c'est parce qu'il va y avoir une diminution du temps
supplémentaire, que ça va se faire plus à temps simple,
etc.
Ce qu'il faut éviter dans une entreprise comme ça - et
c'est ce que nous avons tenté de faire - premièrement, c'est de
ne pas retourner... Je regrette de faire allusion à ce que vous avez
mentionné. Vous avez mentionné les papetières. Moi, je
vais vous dire une chose, Hydro-Québec n'a pas l'intention de laisser
aller son réseau et de laisser aller les 40 000 000 000 $ d'actifs qu'il
y a sur le territoire du Québec. Comme on l'a évoqué
tantôt, c'est clair que lorsqu'il y a une diminution des ventes - 400 000
000 $ de moins de revenus que ce que nous avions prévu lorsque nous
avons fait le plan de 1990 - nous pourrions évoquer que nous pourrions
fermer une centrale, mais ça ne se ferme pas une centrale à
Hydro-Québec, comme l'a mentionné M. Botvin tantôt. Donc,
il faut maintenir nos charges d'exploitation et non pas seulement les maintenir
pour les maintenir, mais pour terminer l'engagement qu'on a pris à
l'égard de la population du
Québec.
Rappelez-vous la dernière commission parlementaire où,
autour de cette table, on s'est tous fait le reproche qu'Hydro-Québec ne
livrait pas un produit de qualité. Bien, c'est changé depuis ce
temps-là, mais on n'a pas l'intention de retourner dans une situation
qui a déjà été vécue, où il y a eu
une ponction majeure dans les emplois et dans les cadres et qui ont
amené une détérioration du réseau, au point tel que
nous avons eu un nombre d'heures d'interruption record. Nous sommes descendus,
en popularité auprès de nos clients, à 49 % de
degré de satisfaction de notre clientèle. Aujourd'hui, nous
sommes à 80 %. À notre avis, ce n'est pas le temps de dire: On
coupe pour couper. Je vous dis que nous avons fait un effort énorme au
point que nous voulons ne faire absorber, dans nos charges d'exploitation, que
1,6 % de l'augmentation de ces charges-là, alors que l'indice des prix
à la consommation est de 2,6.
Nous avons tout un dossier sur la productivité. Je ne veux pas
rentrer dans le dossier «Défi Performance», parce que nous
sommes dans la partie «tarif». On pourra en parler peut-être
demain matin. Il y a peut-être une période de prévue pour
ça. Nos objectifs relativement à la qualité et la gestion
de la qualité totale à l'intérieur de l'entreprise sont
précis. On a un échéancier. Il n'est pas question pour
nous d'essayer de bouleverser les choses et de montrer des affaires
artificielles. La gestion de la qualité totale, ça ne peut se
faire que dans un mode où ça se gère dans la ligne
hiérarchique et dans laquelle nous allons pouvoir donner une formation
accrue à nos employés et à nos cadres, de façon
à gérer différemment qu'auparavant et à changer la
culture de l'entreprise. C'est ça que nous faisons actuellement.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Taschereau.
M. Lecierc: Merci, M. le Président. M. Drouin... L'an
dernier, le gouvernement du Québec s'est entendu avec ses travailleurs
syndiqués sur un gel des salaires pour le premier semestre de
l'année. Il y a même eu une loi à l'Assemblée
nationale pour ceux qui n'étaient pas couverts par l'application des
conventions collectives, ce qui fait qu'à peu près tous ceux qui
sont ici devant vous, fonctionnaires, députés, personnel de
l'Assemblée... Tout le monde est sous le coup d'un gel de salaire pour
six mois. Évidemment, ça comprenait la fonction publique,
parapublique, péripublique. Moi, je voudrais savoir de quelle
façon cet état qui fait qu'un grand nombre de travailleurs du
secteur public, au Québec, sont sous une période de gel
s'applique à Hydro-Québec. Comment ça va s'appliquer
à Hydro-Québec?
On sait très bien qu'il y avait, lors de cette entente-là,
des conventions collectives en cours à Hydro-Québec et le
gouvernement du Québec a toujours été d'accord à
l'effet qu'il fallait attendre la fin des conventions pour appliquer ce
gel-là. Moi, je voudrais donc savoir de quelle façon vous avez
procédé ou vous allez procéder par catégorie
d'emploi: hauts dirigeants, cadres, professionnels, syndiqués,
employés de bureau.
M. Drouin: M. le Président, premièrement, une
remarque générale: Oui, le gel s'est appliqué à
Hydro-Québec. Je vais vous dire qu'il s'est appliqué dans des
conditions qui ont amené, à mon avis, l'harmonisation de nos
relations de travail à Hydro-Québec. Vous vous souviendrez, pour
être de l'Assemblée nationale, d'avoir passé une loi en mai
1990, pour décréter une convention collective et arrêter
les moyens de pression, etc., en mai 1990. Cette loi de mai 1990
établissait des salaires non gelés jusqu'à décembre
1992, donc, avec des augmentations telles que prévues, etc., dans le
cadre d'une convention collective normale.
(12 heures)
En 1991, lorsque le gouvernement a indiqué son intention à
l'égard des employés du secteur public et parapublic, nous avons
pu nous asseoir avec nos syndicats - la plupart d'entre eux, surtout ceux qui
sont affiliés au SCFP et qui comportent 95 % de notre personnel
syndiqué - pour négocier réellement une nouvelle
convention collective pour remplacer la loi qui avait été
adoptée en mai 1990, ce qui a permis à l'Assemblée
nationale de rescinder, en septembre dernier, la loi qui s'appliquait aux
employés d'Hydro-Québec. Cette convention collective que nous
avons signée avec nos employés comportait exactement les
mêmes règles de gel qui s'appliquaient aux employés du
secteur public. Nous avons également appliqué à nos cadres
les mêmes règles qui se sont appliquées aux cadres du
secteur public et parapublic. En plus de ça, nous avons, bien sûr,
signé, comme je vous l'ai dit, une convention collective, mais non pas
jusqu'en décembre 1992, mais plutôt jusqu'en décembre 1993,
laissant la période de l'année 1993 ouverte à la
négociation, mais ayant comme paramètres ce qui se passe dans le
secteur public et parapublic.
Le Président (M. Audet): O.K. Donc, dans les faits, les
employés d'Hydro-Québec, qu'ils soient syndiqués ou non,
de janvier à juin cette année, sont gelés comme le reste
des travailleurs du secteur public.
M. Drouin: La réponse à votre question, M. le
Président, c'est oui.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Vimont.
M. Fradet: Merci, M. le Président. J'aurais, moi aussi,
quelques questions à vous poser. Mais, avant, j'aimerais peut-être
juste faire un petit commentaire. J'écoutais attentivement, tout
à l'heure, le discours du leader de l'Opposition, critique en
matière d'énergie, et je me rends compte qu'il y a comme, en tout
cas, à mon avis, deux discours que tient l'Opposition, le Parti
québécois: le discours du Parti québécois lorsqu'il
était au gouvernement et le discours du Parti québécois
lorsqu'il est dans l'Opposition. Il parlait des taxes, des augmentations. Moi,
j'ai fait un petit calcul vite fait, tout à l'heure, pour l'augmentation
des tarifs domestiques. De 1975 à 1982, II y a une moyenne
d'augmentation de 12, 5 %. De 1985 à 1991, il y a une moyenne
d'augmentation du tarif domestique de 5, 1 %. Alors, je pense qu'il faudrait
aussi se rappeler ce qu'on a fait dans le passé lorsqu'on était
au gouvernement.
J'entendais le député parler des taxes et des taxes. De
1976 à 1985, le déficit, la dette est passée de
5000000000$ à 27 000000000$ dont 12 000 000 000 $ sur des
dépenses d'épicerie. Ça, ça veut dire qu'on allait
s'acheter un paquet de cigarettes et qu'on le finançait. C'est ça
que ça veut dire. Ça, ça a sacrifié, à mon
avis, ma génération et peut-être même les
générations futures. Alors, quand on parle de gestion, bien, il
faudrait peut-être regarder ce qu'on a fait dans le passé.
M. le Président, il y a eu - et vous êtes au courant, je
pense qu'on s'est rencontrés - le rapport Poulin sur les dépenses
ou les restrictions. Il y a un comité de députés du caucus
du Parti libéral qui s'est penché là-dessus. On a
comparé, M. le Président, différentes compagnies
d'utilités et on a même, dans nos recommandations, parlé du
nombre de vice-présidents qu'on retrouve à Hydro-Québec.
Au gouvernement du Québec, on a un budget de 35 000 000 000 $, à
peu près, 30 ministres. Hydro-Québec, un budget de 6 000 000 000
$, 45 vice-présidents. J'ai une liste ici d'autres compagnies
d'utilités, peut-être même Hydro Ontario: 26 821
employés, 20 hauts dirigeants, vice-présidents.
Hydro-Québec, 20 000 employés permanents, 45 hauts
dirigeants.
Là, j'ai une liste... En Floride, Colombie-Britannique... J'en ai
plusieurs, ici - je ne vous les nommerai pas toutes, là - avec des
ratios vice-président par employés allant jusqu'à 327
employés par vice-président. Je trouve ça énorme.
En tout cas, moi, ce que j'entends dans mon comté, depuis que vous avez
fait la proposition d'augmentation des tarifs... Je ne vous dirai pas tout ce
qui se passe, mais il y a beaucoup, beaucoup de questions que les citoyens se
posent et je pense que, même si vous avez fait beaucoup d'efforts en ce
sens-là, il va falloir, peut-être, que vous révisiez
encore, je ne sais pas, dans le domaine de l'opération...
Mon collègue, le député de Taschereau, et
même la vice-première ministre en parlaient tout à l'heure,
bon, de ce qui se fait dans les conventions collectives. Êtes-vous au
courant combien de paires de bottes, vous, qu'un employé peut avoir par
année gratuites, payées, même quand elles ne sont pas
usées? Non, mais quand on regarde des petits détails, tu sais...
Je pourrais vous en amener, des paires de bottes qui ne sont même pas
encore usées, des gens qui travaillent à Hydro-Québec qui
ont eu une paire de bottes à leur bureau parce que c'est dans les
conventions collectives.
Lorsqu'on compare, aussi, les négociations, présentement,
avec le secteur public, au gouvernement, le gel des salaires, ça m'a
fait plaisir d'entendre que vous avez gelé vos travailleurs aussi. Vous
parliez du gel de la masse salariale, bien, il y aurait peut-être, dans
les négociations... En tout cas, regardez, là, je ne sais pas,
moi, les manteaux, les choses que vous distribuez. Je sais qu'il y a des
équipements qui sont nécessaires pour les travailleurs qui
travaillent sur les lignes à haute tension, mais vous pourriez
peut-être vérifier les travailleurs d'Hydro-Québec qui sont
sur le chantier, à Montréal, qui sont inspecteurs ou surveillants
de chantier et qui ont des équipements gratuits, payés
automatiquement à chaque x mois, je ne sais pas.
Alors, moi, avant d'augmenter à 5, 9 % la contribution du citoyen
à Hydro-Québec, j'aimerais ça qu'on s'assoie ensemble et
qu'on révise. J'ai peut-être imagé un petit peu la
position, mais ce sont des questions qui se posent vraiment parmi les
citoyens.
M. Drouin: Premièrement, je dois vous dire que
l'équipement que portent nos travailleurs et travailleuses est de
l'équipement que nous devons payer, effectivement, parce que la loi
l'exige qu'on doit payer ces équipements-là. Que certains ne les
usent pas au même rythme que d'autres...
M. Fradet: Je ne parle pas de l'équipement, mais
peut-être du remplacement, M. le Président.
M. Drouin:... on en est bien conscient. Je dois vous dire
cependant qu'on est bien conscient qu'il y a beaucoup de choses à faire
sur le plan des dépenses et loin de nous de dire qu'on ne doit pas
regarder à un moment donné ce type de détails. Mais pour
le moment, il y a des choses plus importantes auxquelles nous devons nous
attarder et vous pouvez être sûr qu'avec l'implantation du
«Défi Performance» ce n'est pas en un an qu'on va
régler ça mais en quelques années.
Pour revenir à votre point principal relativement aux
vice-présidents, tout se rapporte, vous savez, à un taux
d'encadrement dans l'entreprise. Que vous parliez de hauts dirigeants...
Ça me surprend un peu que vous ne parliez que des ministres quand vous
parlez du gouvernement, parce qu'il y a tout de même 273 sous-ministres
et sous-ministres adjoints dans le
gouvernement...
M. Fradet: J'imagine que vous avez des adjoints aux
vice-présidents aussi.
M. Drouin: ...pour 54 000 employés. Nous avions - parce
que nous n'avons plus - comme vous l'avez si bien noté, 43
vice-présidents pour 22 000 employés. Bien, écoutez, je
veux dire quand je fais juste ce parallèle-là... Je sais qu'il
est faux, mais je vous le dis quand même parce que c'est quand vous
parlez de ce type de...
M. Chevrette: ...ne paie pas les souliers.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Fradet: Les habits, peut-être.
M. Drouin: En termes de taux d'encadrement, notre taux
d'encadrement à Hydro-Québec est de 1 cadre pour 10,45
employés. Celui du gouvernement, je vous le souligne, est à 10.
Celui de Gaz Métropolitain est entre 8 et 10. Celui de Bell Canada est
de 6 à 9. Nous, il est à 10,45. La Banque nationale, si on
regarde uniquement la question des opérations, on va trouver que le taux
d'encadrement est de 1 pour 4. Alors, je veux juste vous dire que 50
entreprises sur le plan mondial, de grandes entreprises, ont un taux
d'encadrement de 8, c'est-à-dire 1 cadre pour 8.
Pour revenir à ce qui a pu faire une nouvelle relativement au
nombre de vice-présidents à Hydro-Québec par rapport
à d'autres entreprises, je dois vous dire que, effectivement, on a
à regarder tout l'ensemble de la structure de l'entreprise et on l'a
regardé. Effectivement, durant l'année 1991, il y a trois
vice-présidents exécutifs qui ont quitté, qui ont pris
leur retraite. Nous avons, à cette occasion-là, revu une partie
de la structure et, dans les six unités administratives, on a
réduit à trois unités administratives et diminué de
six vice-présidents, juste à la fin, par l'attrition, bien
sûr.
Je vous le dis, nous ne croyons pas aux grands chocs. Nous croyons
à examiner les choses au fur et à mesure qu'elles se
présentent et dans les meilleures conditions possible. Si bien
qu'aujourd'hui nous avons 37 vice-présidents et non 43, parce que dans
la révision de la structure nous avons cru bon, justement, de
réduire le nombre, non pas à cause des vice-présidents,
mais à cause de l'imputabilité qu'on veut donner à nos
gestionnaires. Parce qu'on veut rapprocher les têtes dirigeantes de
l'entreprise de la base, il est normal qu'on essaie tranquillement
d'éliminer des niveaux d'intervention et des niveaux
hiérarchiques qui vont permettre de rapprocher davantage la base de la
direction de l'entreprise.
Tout ça pour vous dire qu'on considère qu'on se compare
très bien à un très grand nombre d'entreprises au niveau
du taux d'encadrement dans l'entreprise. Si on va plus loin dans un ensemble
mondial, on va constater qu'en termes de têtes dirigeante il y a des
comparabi-lités. La Banque de Montréal a 85
vice-présidents pour 32 000 employés. La Banque nationale en a 72
pour 12 600 employés. Donc, il ne faut pas s'attarder au titre que porte
une personne. Nous avons nommé - et ça a fait la nouvelle - un
vice-président en Europe, M. Jacques Finet, qui nous représente
à Bruxelles. C'est clair que, lorsqu'il n'y a qu'une seule personne dans
un bureau en Europe à Bruxelles, on peut se demander si c'est utile de
l'appeler un vice-président. Mais, lorsqu'il s'appelle
vice-président aux Affaires européennes et qu'il a à
traiter avec les parlementaires européens et avec tous les politiciens
du côté de l'Europe ou la bureaucratie européenne, ses
portes d'entrée sont plus faciles en ayant le titre de
vice-président.
Le Président (M. Audet): D'accord, merci. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: On va lâcher les bottes, puis on va passer
à... Je voudrais vous féliciter pour la plaidoirie que vous
faites, parce que le gouvernement devrait regarder même les ratios dans
ses propres institutions paragouvernemen-tales. C'est que, dans certains
hôpitaux du Québec, tu as un ratio de un pour huit. Tu as un pour
six dans la même boîte. C'est juste s'ils n'ont pas quatre
pièces pour s'en occuper, de sorte que c'est, effectivement... Je trouve
que la comparaison ne tient pas. Il faut commencer à regarder un petit
peu ce qui se fait.
Frais de garantie et taxe sur le capital
Je voudrais parler à M. Bolduc s'il est ici, parce que,
tantôt, M. Bolduc a dit que, sur l'augmentation demandée de 5,5 %,
il y en avait 3,9 % qui y échappaient. Si j'ai bien compris, il y a donc
1,6 % seulement pour lesquels HydroQuébec est responsable et, si c'est
1,6 %, c'est un point en bas de l'inflation envisagée. Si, demain matin,
le ministre des Finances retirait les 3 % de frais de garantie et si vous
acceptiez d'amortir sur cinq ans les coûts de la faible
hydraulicité, quelle serait la proposition ou la demande tarifaire que
vous auriez faite?
M. Drouin: Est-ce que vous nous donnez une semaine?
M. Chevrette: Non, mais je suppose que...
M. Drouin: Non, mais, regardez, juste avant la question à
M. Bolduc, il y a deux questions très importantes. Je veux dire, la
question de l'hydraulicité et de l'amortissement de
l'hydrauli-cité, c'est réellement un dossier sur lequel on s'est
déjà penché et ça, on peut vous...
M. Chevrette: Oui, mais c'est parce que je sais la
réponse. Vous allez me dire que ce sont des formules comptables. Mais,
moi, je vais vous répondre d'autre chose.
M. Drouin: Non, ce n'est pas du tout ça. Justement, on
voulait vous dire qu'on ne voulait pas se rabattre sur les formules comptables
et vous dire que, si, par exemple, on avait appliqué entre 1989 et 1990
les régies que vous suggérez en termes d'amortissement, on aurait
une augmentation de tarifs plus élevée aujourd'hui à cause
de l'amortissement ou de l'étalement des coûts de
l'hydraulicité de 1989-1990. On en aurait des effets aujourd'hui.
M. Chevrette: M. Drouin, vous faites payer immédiatement
et entièrement des coûts d'une conjoncture et ça, à
ce que je sache, je ne connais pas une société d'État ni
aucun organisme, quand ils taxent, qui vont baisser s'il se met à
mouiller, s'il se met à pleuvoir à tour de bras, puis que les
bassins se remplissent. Je n'ai pas l'impression que vous allez baisser vos
tarifs pour autant. Vous allez arriver avec au moins l'inflation et vous aurez
à perpétuité chargé tout le coût dans un seul
moment à des individus.
M. Drouin: Non. En tout cas, ce n'est pas exact. On va vous
donner...
M. Chevrette: Bien, ce n'est pas exact... Je m'excuse. Avez-vous
déjà vu baisser les tarifs d'Hydro, vous?
M. Drouin: Non, mais c'est parce que, regardez... Écoutez,
la conclusion que vous tirez... Vous pouvez tirer cette conclusion-là,
mais n'oubliez pas qu'on ne comptabilise pas l'eau dans nos réservoirs.
Les entreprises qui fonctionnent au pétrole comptabilisent le
pétrole au moment où ils s'en servent. Avant ça, c'est un
inventaire. Mais on ne comptabilise pas l'eau dans les réservoirs. Ce
que vous proposez, c'est de comptabiliser une partie de l'eau dans le
réservoir, alors que le reste n'est pas comptabilisé. On va vous
donner un exemple de ce...
M. Bolvin: M. le Président, c'est une solution qui est
envisageable, ce qui est mis sur la table. Maintenant, il faut être bien
conscient de l'Impact possible que ça peut avoir. Moi, je suis
obligé de vous dire en tant que gestionnaire supérieur
d'Hydro-Québec, qu'actuellement il s'agirait d'un risque que je ne peux
recommander que l'entreprise assume.
À titre d'exemple, si on avait pris cette technique-là en
1989... Vous vous souviendrez qu'en 1989 on a eu des dépenses
exceptionnelles de 217 000 000 $ à cause de la faible
hydrauli-ctté. En 1990, on en a eu de 341 000 000 $ et, là, en
1992, on va en avoir de 142 000 000 $. Si, effectivement, en 1989, on avait
dit: On va amortir ça sur cinq ans - dans le fond, on va pelleter de la
neige en avant - et qu'en 1990 on avait dit la même chose et qu'on ferait
la même chose aujourd'hui en 1992, en 1992, les charges qu'on devrait
absorber serait de 174 000 000 $ et on devrait les absorber pour les cinq
prochaines années. Je ne vous dis pas que ce n'est pas possible, mais on
absorberait, cette année, plus que les 142 000 000 $ qu'on doit absorber
pour la faible hydraulicité si on avait eu cette technique-là.
Maintenant, je vais ajouter à ceci et je vais vous
référer, dans le suivi du plan de développement, à
la dernière page, sur l'impact financier de divers scénarios de
faible hydraulicité. (12 h 15)
M. Chevrette: Quelle page?
M. Drouin: La dernière.
M. Boivin: C'est à la page 173. Vous allez remarquer,
effectivement, dans ce tableau 16 de la page 173, il y a un scénario
d'hydraulicité faible et un scénario d'hydraulicité forte.
Dans le scénario d'hydraulicité faible... Notre planification,
actuellement, est faite sur l'hypothèse qu'en 1992, 1993 et 1994 nous
allons avoir une hydraulicité moyenne. Si l'hydraulicité devait
être faible, effectivement, en 1992, ça veut dire que ce n'est pas
142 000 000 $ qu'il faudra dépenser mais 239 000 000 $. Nous
prévoyons arrêter les moyens exceptionnels à la fin de
l'été lorsque nous aurons une bonne idée de
l'évolution de l'hydraulicité. En 1993, il faudra absorber 543
000 000 $ et, en 1994, 584 000 000 $. Moi, je vous dis qu'il s'agit, à
ce moment-là, d'un risque qu'on ne peut pas étaler ou reporter,
compte tenu des sommes potentiellement en jeu dans les années qui
viennent.
M. Chevrette: Mais, M. Boivin...
M. Boivin: Je ne peux pas vous recommander... Je ne pourrais pas
en tant que gestionnaire supérieur d'Hydro-Québec...
M. Chevrette: Non.
M. Boivin: ...recommander aujourd'hui que nous amortissions les
coûts de la faible hydraulicité sur cinq ans. Ce que je crois - et
nous l'avions indiqué dans le plan de développement 1990-1992 -
être la solution éventuelle à ce problème-là,
qui va certainement se reproduire dans l'avenir, remarquez, c'est la
création d'un fonds de stabilisation, mais vous comprendrez avec moi
qu'on ne peut pas faire ça dans une période où on est en
faible hydraulicité prolongée.
M. Chevrette: Mais vous amortissez sur 50 ans, je crois, la
durée, la longévité d'un barrage. Dans les faits, certains
barrages peuvent aller
jusqu'à 75 ou 80 ans. Puis quand vous arrivez pour faire votre
comptabilité annuelle, pour que ça balance, vous décidez,
par exemple, qu'un ordinateur, ça se déprécie en 6 ans.
Vous avez tous les moyens. De toute façon, même si je vous posais
quelque question que ce soit, je sais que vous allez la justifier.
Ce que je vous explique, dans un contexte où le monde est
étouffé par les taxes - le monde est étouffé par
les taxes - ne pensez-vous pas qu'avec 429 000 000 $ de revenu additionnel, que
vous avez de toute façon - c'est vos chiffres, 429 000 000 $ de revenu
additionnel... Est-ce qu'Hydro-Québec est en péril? Elle a
même devancé, et vous êtes tout fier d'annoncer que vous
avez devancé votre programme d'emprunt. M. Drouin le dit à la
page 134. Je le vois le torse bombé pour annoncer qu'il est heureux de
l'avoir devancé même si les intérêts baissent
actuellement à un rythme encore plus grand qu'au moment où il a
emprunté. Il est tout fier de dire ça. Je voudrais savoir, moi,
ce qui vous empêche, dans une conjoncture où le monde est
étouffé... si c'est faisable de planifier sur un certain nombre
d'années, de l'amortir, comme vous amortissez autre chose plus
rapidement quand ça fait votre affaire, puis moins rapidement quand
ça ne fait pas votre affaire.
M. Drouin: M. le Président, il faudrait être
masochiste, vous savez, pour penser qu'on veut une augmentation tarifaire juste
pour le plaisir d'en avoir une. Vous avez évoqué vous-même
des processus dont vous avez eu vent à HydroQuébec sur
l'évolution de notre réflexion sur la demande tarifaire. Ce qui
est important... On vient de vous dire qu'en tant que gestionnaire on ne peut
pas vous recommander ça. C'est faisable, ça. On ne se rabattra
même pas sur les procédures comptables pour vous dire: Les
comptables n'accepteront jamais ça. Ils vont mettre une note dans les
états financiers.
Oublions cette partie-là. Ce qui est important pour les
Québécois, c'est de ne pas se ramasser comme ils se ramassent en
Ontario aujourd'hui. Vous savez, pelleter par en avant puis dire: On peut
reporter ces frais-là. C'est une conjoncture économique
difficile. On va reporter ça, puis on va le ramasser l'an prochain, etc.
L'hydraulicité, on ne peut pas jouer avec ça parce qu'il n'y a
personne ici et ailleurs qui est capable d'en prévoir l'issue durant
l'année ou l'année suivante. On vous fait un simple exercice pour
vous montrer que, si votre proposition avait été mise en place en
1989 et en 1990 au moment où on a eu une hydraulicité encore
faible, nous aurions des charges additionnelles dans les états
financiers ou dans nos budgets actuels au-delà des 142 000 000 $ et, par
conséquent, une charge additionnelle pour le consommateur.
C'est donc dans ce sens-là, dans notre choix, je vous le dis...
C'est un choix qu'on a fait de ne pas évoquer cette
possibilité-là et d'évoquer, cependant, et on le fait
depuis au-delà de deux ou trois ans, la possibilité d'avoir un
fond de stabilisation pour que, au moment où on sera en forte
hydraulicité, l'on puisse réserver une certaine partie des
revenus pour, justement, faire face au choc d'hydraulicité faible. Et
ça, c'est une proposition qui nous semble intéressante.
M. Chevrette: Bon. J'essaie de vous suivre. Vous justifiez bien
chaque point. Mais ce que je veux vous expliquer, M. Drouin, M. le
président, excusez, quand vous justifiez votre hausse de tarif pour
expliquer la faible hydraulicité... Tantôt vous répondiez
à une de mes questions que vous n'avez donné aucun avis au
gouvernement en ce qui regarde le fait que les contrats secrets grugent la
réserve et qu'on soit placé en position d'être
obligé d'acheter à fort prix sur les marchés
étrangers. Vous les avez justifiés vous-même,
ceux-là aussi, les contrats secrets. Donc, vous justifiez les contrats
secrets. S'ils n'avaient pas été signés au complet, il y
aurait une réserve beaucoup plus forte, donc un achat beaucoup moins
grand sur les marchés étrangers. Ça, c'est
Hydro-Québec qui nous le dit. Vous justifiez le tarif de 2 %
après l'avoir laissé passer sans avis. Du moins, ce sont vos
propres propos.
Moi, je voudrais demander à M. Bolduc, qui nous a dit qu'il y a
3,9 % qui échappe complètement à Hydro-Québec...
C'est la première fois, d'ailleurs, que je vois Hydro-Québec,
soit dit en passant - là-dessus vous méritez peut-être des
félicitations... C'est la première fois que vous dites que
ça ne dépend pas de vous autres s'il y a une certaine somme
complète d'augmentation. Et je suis d'accord avec vous autres. Vous avez
vu mes propos d'ouverture. Il y a 3,9 %... Si Mme la ministre décidait,
demain matin, de demander à M. Levesque, ministre des Finances,
d'enlever le 1,9 % sur les frais de garantie pour fa présente
année, et si elle retirait également son augmentation de la taxe
sur le capital, est-ce qu'Hydro-Québec accepterait de faire l'effort
pour en arriver à un gel des tarifs en 1992?
M. Boivin: M. le Président, pour geler les tarifs en 1992,
après l'effort de rationalisation que nous avons fait et qui est
très important... Nous avons indiqué, par exemple, que...
M. Chevrette: 100 000 000 $
M. Boivin: ...par rapport aux demandes budgétaires
originales qui nous avait été formulées par les
régions, nous avons fait des réductions de 138 000 000 $. Et par
rapport à ce que nous avions prévu dans le plan de
développement 1990 pour l'année 1992, effectivement, il s'agit
d'une rationalisation ou d'une diminution de 54 000 000 $. Je vous ai
mentionné tantôt que
nous faisons ça dans une période également
où nous sommes en rattrapage au niveau de la remise en ordre de nos
installations.
M. Chevrette: M. Boivin.
M. Boivin: Je ne vous dis pas que ce n'est pas possible de
ralentir l'entretien sur nos installations. C'est tellement possible qu'on a
tenté cette expérience-là dans les années 1985
à 1987 avec les résultats qu'on connaît.
M. Chevrette: M. Borvin.
M. Boivfn: Avec les programmes...
M. Chevrette: Arrêtez-vous 30 secondes.
M. Boivin: Laissez-moi terminer. Avec les programmes...
M. Chevrette: Voulez-vous répondre à mes questions?
Vous prenez sept, huit minutes pour m'expliquer ce que je ne vous demande pas.
Je vous demande s) Gérard D. Levesque, ministre des Finances, retirait
les frais de garantie... Ça ne peut pas être bien plus clair.
C'est 150 000 000 $ que vous auriez de moins à payer. Et si Mme la
ministre convainquait également, par une simple déclaration
ministérielle, d'enlever l'augmentation sur la taxe sur le capital qui
rapporte 30 000 000 $, ce qui fait 180 000 000 $ sur 203 000 000 $ de vos
besoins réels pour 1992, du moins pour ce que vous nous déclarez,
seriez-vous prêt à franchir le pas d'éliminer les 23 000
000 $ et en arriver avec un gel pour 1992? C'est ça que je vous
demande.
M. Boivin: Effectivement, ce que vous nous demandez, il nous
faudrait faire une autre coupure de 100 000 000 $ et moi, je vous dis que
ça ne peut pas être fait sans toucher, de façon très
importante, les programmes d'entretien et d'exploitation du réseau. Et
moi, je vous dis que ma recommandation, ce n'est certainement pas de faire
ça.
M. Chevrette: Vous prévoyez des revenus exclusivement de
23 000 000 $ pour HydroQuébec en 1992 parce que vous dites: Mes tarifs
vont chercher 203 000 000 $ et le gouvernement va en chercher 180 000 000 $. Ce
n'est pas une coupure de 100 000 000 $, c'est une coupure de 23 000 000 $ que
je vous demande pour 1992. C'est sur la période budgétaire du
gouvernement que vous visez 339 000 000 $. C'est vous autres mêmes, dans
vos chiffres, dans votre proposition tarifaire, qui dites que la nouvelle base
de tarifs que vous demandez va rapporter à Hydro-Québec 203 000
000 $. Ce sont vos chiffres. Si, sur les 203 000 000 $... Vous nous dites que
c'est seulement des taxes. Moi, j'en trouve au moins deux: C'est 30 000 000 $
sur la taxe sur le capital, et 150 000 000 $ sur les frais de garantie.
Ça fait 180 000 000 $. Il vous resterait 23 000 000 $ à
couper?
Le Président (M. Audet): Alors, M. Bolduc.
M. Bolduc: Je pense qu'il y a une question de revenir au principe
du calcul des coûts de fourniture d'électricité qui servent
à calculer la hausse de tarifs qui est requise. Les taxes additionnelles
représentent 1,9 % de la hausse de tarifs de 5,5 % qui, elle, au total,
va rapporter 203 000 000 $. Alors, je pense que vous comprenez comme moi qu'il
faut prendre une partie des 203 000 000 $, qui représentent le prorata
de 1,6 % sur 5,5 %, qui serait l'effet d'un abandon de ces taxes par le
gouvernement. Ça n'affecterait le calcul des coûts de fournitures
qu'au prorata de 1,9 % sur 5,5 % et non pas sur le total. La coïncidence
qui était citée tout à l'heure entre les deux chiffres de
203 000 000 $... Dans le premier cas, 203 000 000 $, d'abord, c'est ce que va
rapporter la hausse de tarifs à HydroQuébec sur une
période d'un an, de mai 1992 à mai 1993. Ce n'est pas la partie
qui s'applique à l'année 1992.
M. Chevrette: C'est 339 000 000 $, vos chiffres. Là, je
m'excuse, vous allez nous clarifier cela, parce que dans votre proposition
tarifaire vous escomptez 339 000 000 $. Je m'excuse.
M. Bolduc: Sur un an de temps, monsieur.
M. Chevrette: Correct?
M. Drouin: Sur une base annuelle.
M. Chevrette: Bon, sur une base annuelle.
Mais pour la période couvrant votre année
financière, à vous autres, c'est 203 000 000 $, je m'excuse.
M. Bolduc: Oui, c'est exact.
M. Chevrette: Bon. 203 000 000 $. Vous allez m'expliquer ceci.
Est-il exact que vous allez devoir payer, d'ici décembre 1992, la somme
de 150 000 000 $ au gouvernement pour les frais garantis? Est-ce qu'on se
comprend?
M. Drouin: Oui, c'est exact.
M. Chevrette: C'est exact. Est-H exact que vous allez devoir
payer 30 000 000 $ sur l'augmentation de la taxe de capital? Est-ce exact?
M. Drouin: Oui.
M. Chevrette: Bon. Au 31 décembre 1992,
Hydro-Québec n'aura touché, en vertu de ces tarifs, que 203 000
000 $, oui ou non?
M. Bolduc: Oui, c'est exact.
M. Chevrette: Donc, le manque à gagner au 31
décembre 1992... Je ne suis pas un expert, et je n'ai pas la batterie
que vous avez derrière vous, mais la différence de manque
à gagner entre le 180 000 000 $ et le 203 000 000 $, moi, je calcule que
c'est 23 000 000 $. Je vous demande si, pour la partie 1992, il ne vous reste
qu'un effort à faire de 23 000 000 $, oui ou non?
M. Bolduc: Non, parce que... M. Chevrette: Ah! C'est
non.
M. Bolduc: ...les 203 000 000 $ qui représenteraient la
somme de la taxe sur le capital... Les 183 000 000 $ dont vous parlez qui
seraient la taxe sur le capital plus les taxes...
M. Chevrette: II se répète en 1993?
M. Bolduc: ...sont répartis entre deux secteurs de
l'entreprise, ce qu'on a expliqués tout à l'heure. Il y a la
partie qui est assujettie au règlement tarifaire, et la partie qui est
appliquée aux autres activités non assujetties de l'entreprise.
La part totale des 180 000 000 $ qui est chargée à
Hydro-Québec, qui, elle, est déjà calculée dans la
hausse de tarifs, représente le 1,9 % de ces 203 000 000 $ que nous
allons chercher. C'est-à-dire que, comme nous n'avons pas affecté
ceux qui sont assujettis à la hausse de tarifs par la totalité
des charges financières nouvelles mais seulement par la part qui leur
est assujettie, la disparition de ces charges-là ne pourrait pas
être créditée complètement à des revenus des
clients assujettis au règlement tarifaire, puisqu'on ne l'avait pas
débitée là de toute façon au départ. C'est
pour ça que le calcul ne peut pas se faire de façon aussi simple
que ça. C'est pour ça qu'il faudrait qu'on recalcule l'effet de
tout changement de la taxation sur nos coûts de fournitures, et, comme
disait M. Drouin, donnez-nous quelques jours ou une semaine. C'est un calcul
relativement compliqué à faire.
M. Chevrette: Mais si le ministre des Finances enlevait ses frais
de garantie complètement, pour son année budgétaire, il se
rendait à décembre 1993... Le gouvernement joue de mai à
avril, ça, je le comprends. Mais s'il l'enlevait pour la durée,
la présente augmentation tarifaire, en fonction de ses années
budgétaires, est-ce que vos calculs ne seraient pas plus clairs,
à ce moment-là? Vous enlèveriez la partie des 150 000 000
$ qui est touchée pour 1992 seulement, parce que M. Gérard D.
Levesque a dit que c'est en 1992. Mais, vous autres, vous devez calculer aussi
que, l'année prochaine, ce sera 163 000 000 $ et, quatre mois sur 163
000 000 $ ou trois mois, ce sera 41 000 000 $. Donc, dans les faits, les frais
de garantie pour le consommateur québécois, c'est 191 000 000 $
et non pas 150 000 000 $, soit dit en passant, en plus pour la partie
budgétaire de l'État.
M. Drouin: Non, ce qu'on essaie d'expliquer, c'est que, n'ayant
pas chargé le plein montant des taxes aux ventes assujetties, on ne peut
pas leur créditer le plein montant des taxes. Je vous ai dit qu'on
chargeait à peu près dans la proportion de 80 % des taxes. Donc,
un crédit des taxes aurait deux effets. Il y aurait un effet de venir
baisser d'une certaine partie l'augmentation des ventes assujetties et il y
aurait un effet sur les profits de l'entreprise. Autrement dit, si les 20 %
équivalent à 35 000 000 $, au lieu d'un profit anticipé de
700 000 000 $, on aurait un profit de 735 000 000 $. Comprenez bien qu'on n'a
pas chargé les taxes au complet au consommateur.
M. Chevrette: On pourra continuer après-midi, mais sur la
partie de contrat à partage de risques, vous aurez compris que c'est les
contribuables, les actionnaires qui paient.
M. Drouin: Mais je vous l'ai bien expliqué. C'est en moins
gagnant sur les profits. Les tarifs ne sont pas du tout affectés par les
contrats à partage de risques. Ça, c'est important.
Le Président (M. Audet): Alors, compte tenu de l'heure et
de notre ordre du jour, nous devons suspendre nos travaux pour reprendre
à 16 h 30.
(Suspension de la séance à 12 h 32)
(Reprise à 16 h 40)
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît. Alors, je déclare la séance de la commission de
l'économie et du travail ouverte. Je vous rappelle le mandat de la
commission, qui est d'étudier la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour l'année 1992, et entendre à cette fin
les membres du conseil de direction d'Hydro-Québec, selon un ordre de
l'Assemblée du 10 mars 1992. Alors, en vertu de l'entente pour le temps
de parole qui a été établie, je vais maintenant
reconnaître la formation ministérielle pour une période de
30 minutes. Mme la ministre.
Mme Bacon: Alors, j'aurai quelques questions, peut-être, en
commentaire, au départ, M. le Président, et je laisserai la
parole à mes collègues par la suite. J'aurais peut-être un
commentaire sur la taxe sur le capital. Quand on regarde, sur 30 000 000 $
d'augmentation du montant de la taxe sur le capital qui est payée par
Hydro-Québec, il y a près de la moitié qui s'explique par
la croissance du capital ou des
actifs. Si on gelait le taux de la taxe sur le capital, tel que
proposé par le député de Joliette, il faudrait le faire
pour l'ensemble des entreprises québécoises. Alors, ça,
ça entraînerait un manque à gagner d'environ 85 000 000 $
au niveau des revenus publics, et ce montant devrait être
récupéré, évidemment, dans les poches de M. et de
Mme Tout-le-Monde. En 1980, il y a eu l'introduction d'une taxe de 3% sur le
revenu brut, qui a causé une charge additionnelle de 51 000 000 $
à Hydro-Québec. En mai 1981, l'extension de la taxe sur le
capital à HydroQuébec, soit une autre charge annuelle de l'ordre
de 100 000 000 $. Total de ces nouvelles taxes. 151 000 000 $. En 1982, en
pleine récession, ces charges ont été englouties dans une
hausse tarifaire de 16,3%, dont 17,5% pour les abonnés domestiques, soit
des hausses qui sont nettement plus élevées que l'inflation qui
était à l'époque de 11,4%.
Si on revient aux frais de garantie, HydroQuébec assimile les
frais de garantie à une taxe. En réalité, les frais de
garantie constituent le prix à payer pour un service qui est rendu par
le gouvernement du Québec à Hydro-Québec. D'ailleurs, que
ce soit la SDI ou d'autres institutions financières, ces organismes
perçoivent des honoraires lorsqu'ils garantissent des prêts. En
outre, Ontario Hydro, B.C. Hydro, Manitoba Hydro, Newfoundland and Labrador
Hydro, la Commission d'énergie électrique du Nouveau-Brunswick
doivent aussi payer des frais de garantie sur leurs dettes; donc, les frais de
garantie ne constituent pas une taxe mais plutôt le prix d'un service.
Dans ce contexte, est-ce qu'Hydro-Québec pourrait nous indiquer quelles
seraient les conséquences, pour la société d'État,
si elle réalisait son programme d'emprunts sans la garantie du
gouvernement?
M. Drouin: Ce serait désastreux. Mme Bacon: Mais
où est la...
M. Drouin: Non, mais écoutez, c'est clair que nous avons
eu, à date, la garantie financière du gouvernement, et ça,
je pense, de temps immémoriaux, ou, enfin, depuis l'existence
d'Hydro-Québec. C'est clair qu'Hydro-Québec ayant un seul
actionnaire qui s'appelle le gouvernement du Québec, si nous devions
aller sur les marchés financiers pour emprunter sans la garantie du
gouvernement alors que nous l'avons eue depuis tout le temps, ça
changerait définitivement le contexte dans lequel nous pourrions
emprunter. M. Hanna, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose
là-dessus?
M. Hanna: Présentement, les critères financiers
sont insuffisants pour appuyer une dette sans la garantie, c'est-à-dire
que notre taux de capitalisation est de l'ordre de 24%, ou 23,5%, ce qui est
inférieur à la normale qui se situe aux environs de 50%. Aussi,
les taux de couverture des taux d'intérêt sont en ce moment de
1,6% pour l'année 1992 et, normalement, dans le secteur privé
où ce sont des emprunts sans garantie, ils sont de l'ordre de 3 fois
3,0%. Donc, les critères financiers sont insuffisants sans l'appui du
gouvernement du Québec.
Mme Bacon: Tel qu'indiqué dans la proposition tarifaire -
je vous réfère à la page 14 - la hausse moyenne devrait
générer un rendement sur l'avoir propre de 11,3% sur les ventes
assujetties au règlement tarifaire. Pour nous permettre
d'apprécier ce rendement, est-ce que vous pourriez le situer
relativement au rendement consenti par des organismes de réglementation
à d'autres entreprises de services publics? On pourrait mentionner Bell
Canada, Gaz Métropolitain, et autres.
M. Drouin: Je peux vous en donner, M. le Président. En
1991, par exemple, Gaz Métropolitain, c'était de l'ordre de
14,25%; TransAlta Utilities, qui est une compagnie semblable à nous,
c'est 13,5%, TransCanada PipeLines, 13,25%, Bell Canada, 13,20 % et puis B.C.
Gas, 13,4 %. Alors, c'est quelque chose qui a toujours été entre
12,5 % et 14,5 %.
Mme Bacon: Contrairement à ce qui...
M. Drouin: Excusez-moi, madame. M. le Président, juste
pour compléter, c'est que nous avions, dans le plan
précédent, un objectif de 13,5 %, mais compte tenu...
Une voix: 13 %.
M. Drouin: De 13 %, et compte tenu de tous les
éléments, baisse des taux d'intérêt, etc., nous
avons révisé ça à la baisse.
Mme Bacon: Contrairement à... M. Drouin: A 12,25
%.
Mme Bacon: À 12,25 %. Contrairement à ce qui avait
été prévu au plan 1990-1992, à savoir une hausse
tarifaire de 6 % qui était dans votre plan, en relation avec un taux
d'inflation de 5,2 %, Hydro-Québec sollicite une hausse moyenne qui est
nettement supérieure à l'inflation en 1992. Le document
«Proposition tarifaire pour 1992» laisse aussi présager la
nécessité de hausses tarifaires qui seront supérieures
à l'inflation en 1993, en 1994. On retrouve ça à la page
15.
Comment pouvez-vous expliquer cette coupure dans la relation qui
semblait exister historiquement entre les hausses tarifaires et
l'inflation?
M. Boivin: Effectivement, dans le plan 1990,
nous prévoyions pour l'année 1992 une hausse de tarif de 6
% sur une hypothèse d'inflation de 5,2 %. Les nouvelles
hypothèses d'inflation pour 1990 sont à 2,6 % et nous demandons
5,5 %. Donc, c'est un écart important.
Maintenant, selon les hypothèses du plan de développement
1982-1990, il y a deux éléments majeurs qui ont changé: le
premier, c'est l'affaire de l'hydraulicfté. Les 142 000 000 $ de
dépenses additionnelles en 1992, que nous n'avions pas anticipées
lors de la préparation du plan 1990; et le deuxième, ne
l'appelons pas la taxe mais les frais de garantie que nous devons payer
à compter de 1992 à l'actionnaire, ce qui, dans la hausse de
tarif de 5,5 %, compte pour 3,9 %. Alors, comme on l'a expliqué ce
matin, selon les hypothèses du plan de développement 1990, toutes
choses étant égales, ce que nous demandons effectivement, ce
serait 1,6 % par rapport à une inflation de 2,6 %. Donc, nos
espérances de tarification, selon les mêmes hypothèses que
le plan 1990, sont beaucoup plus faibles par rapport à l'inflation
anticipée.
Interfinancement des catégories
tarifaires
Mme Bacon: Dans la proposition tarifaire, et là je vous
réfère à la page 17, la hausse qui est demandée
pour le secteur domestique est supérieure à la hausse moyenne
globale, de façon à redresser progressivement la situation
d'inter-financement entre les catégories tarifaires. Je m'interroge
toutefois sur l'urgence d'une telle mesure lorsque la hausse moyenne est plus
du double du taux d'inflation qui est prévu. À cet
effet-là, est-ce qu'on doit considérer que la mesure
proposée par Hydro-Québec est nécessaire dans le contexte
économique actuel et pourquoi?
M. Drouin: Je pense que je vais céder la parole à
M. Bolduc mais, juste comme préliminaire, il faut dire qu'il y a un
signal de prix à passer en fonction des véritables coûts
envers chacune des classes de clientèle. Et, si vous prenez le tableau
à la page 17 du mémoire tarifaire, vous constaterez, au tableau
3.3, que le tarif domestique y est pour 41 % des coûts de fourniture.
C'est dans le mémoire tarifaire.
Mme Bacon: Je l'ai là, ça va.
M. Drouin: II y est pour 41 %, alors que la contribution relative
aux bénéfices est de 17 %. Par ailleurs, si vous allez dans le
tarif G et le tarif M, c'est-à-dire petite puissance et moyenne
puissance, qui est une autre catégorie de clients dans laquelle il y a
effectivement des organisations qui peuvent souffrir énormément
d'une augmentation tarifaire, vous verrez que ces deux catégories
contribuent pour à peu près 28 % ensemble, mais paient à
peu près 70 % de la facture; alors que, sur le plan du tarif L, il y a
une contribution, mais il y a une stabilisation tarifaire, donc ça
crée une situation différente.
Mais ce qui est important à remarquer, c'est qu'il y a une
correction à faire au moins pour maintenir, pour ne pas aggraver une
situation où une catégorie de clients paie davantage par rapport
à une autre catégorie. Et la marge bénéficiaire,
dans ce même tableau, démontre que, alors que nous visons - au bas
du tableau - un rendement ou une marge bénéficiaire de 12,1 %, on
constate que le domestique ne contribue à la marge
bénéficiaire que pour 6,6 %, alors que le tarif G et le tarif M,
respectivement, contribuent pour 32 %. Ça veut dire que notre marge
bénéficiaire, sur ces deux catégories de clients, est de
32 % alors que le domestique est de 6 %. Et l'objectif, comme on l'a
mentionné tantôt, est de 12 %.
Alors, notre objectif relativement à la correction de
l'interfinancement, c'est-à-dire, pas la correction, mais au moins le
maintien d'un statu quo, est de suggérer qu'au domestique l'augmentation
soit de 5,9 % et qu'aux deux catégories G et M ça soit 5,1 %.
Mme Bacon: Depuis 1989, de quelle façon a
évolué la situation de l'interfinancement? Est-ce que c'est
favorable? Défavorable?
M. Drouin: Elle s'est corrigée un peu, mais par les forces
du marché, en ce sens que les ventes ont diminué durant cette
période-là et, de ce fait, comme il y a moins de consommation au
niveau domestique, la contribution s'est corrigée
légèrement. Et peut-être que M. Bolduc ou M. Roy peut
donner la donnée là-dessus.
Le Président (M. Audet): Si vous voulez vous identifier,
s'il vous plaît.
M. Roy (Gilles): Mon nom est Gilles Roy. En fait, la situation de
l'interfinancement, c'est une vieille histoire; Hydro-Québec est
demandeuse pour redresser cette situation-là depuis le milieu des
années 1980, avec pas beaucoup de succès, remarquez, en passant.
Quand on n'intervient pas, effectivement, la situation a tendance soit à
stagner, soit à se détériorer doucement. La question de
Mme la ministre était, tantôt: Qu'est-ce qui arrive à ce
moment-ci si on ne fait rien? En fait, il semble que ce n'est jamais le bon
temps pour commencer. Ça fait un bon moment qu'on veut redresser cette
chose-là. On veut la redresser graduellement. Le redressement qu'on
propose cette année représente environ 6 000 000 $. C'est un
petit montant en termes de transferts. L'objectif d'Hydro-Québec est, on
l'a dit, de redresser ça très graduellement sur une
période d'une dizaine d'années. Il y a, derrière les
chiffres, les distorsions que M. Drouin vous a mentionnées tantôt,
un risque financier important qu'on pense qu'il faut redresser à terme.
Mais, on le répète, si la question est: C'est quoi la
conséquence de ne pas le faire cette année?
c'est environ 6 000 000 $ qu'on demande de redresser en faveur des
petites et moyennes entreprises, au détriment du secteur domestique.
Mme Bacon: II est souvent mentionné que le chauffage
électrique ne fait pas ses frais et que, par conséquent,
Hydro-Québec perdrait de l'argent en produisant de
l'électricité pour l'usage du chauffage électrique. Est-ce
que vous pouvez nous indiquer la rentabilité, ou peut-être les
pertes qui sont associées à cet usage-là, lorsqu'on
considère le coût moyen de fourniture
d'électricité?
M. Roy: Je crois que les chiffres indiqués au tableau 3.3
du mémoire tarifaire traduisent bien la situation du secteur domestique.
On sait que cette situation-là est conditionnée en très
large partie par le chauffage électrique. Je pense que ce
qu'Hydro-Québec a toujours dit, c'est que le secteur domestique, dans sa
totalité, n'assure pas le rendement souhaité. Je pense que c'est
un abus de langage de dire qu'il ne fait pas ses frais. On voit qu'il
génère une marge bénéficiaire d'environ 6 %. Ce
n'est pas suffisant par rapport à l'ensemble de nos marchés. Une
situation d'équilibre idéale serait aux alentours de 15 % pour
chacun des marchés.
Donc, le chauffage électrique n'assure pas, évidemment,
toute la rentabilité souhaitée, mais il ne faut pas en conclure
que c'est un marché qui n'est pas rentable et ne génère
pas une marge bénéficiaire qu'on trouve acceptable.
M. Boivin: J'aimerais peut-être ajouter, là, pour
bien se comprendre... D'ailleurs, si vous regardez la proposition tarifaire,
effectivement, nous proposons deux choses dans le secteur domestique. Nous
proposons une hausse moyenne qui est 0,05 % plus haute que la hausse moyenne
demandée, mais, si vous regardez la structure même du tarif
proposé, vous allez remarquer que la dernière tranche du tarif
domestique est un tarif progressif, c'est-à-dire que la dernière
tranche, qui affecte surtout le chauffage, est plus élevée parce
qu'on le vend plus cher. Et on propose, effectivement, une hausse de 6,4 % sur
la dernière tranche, justement pour tenir compte, en fait, qu'en hiver
le tarif domestique est encore moins rentable que dans la partie
été. Donc, c'est pour corriger, à travers même la
structure du tarif, graduellement.
Et j'aimerais ajouter ce qu'on vise au niveau de la correction de
l'interfinancement: on s'était donné comme objectif, au cours de
la décennie quatre-vingt-dix, de récupérer à peu
près la moitié de l'interfinancement. Maintenant, à date,
on n'a pas récupéré tellement. La situation, je dirais, au
moment où on se parle, est à peu près la même
qu'elle était en 1985-1986. Elle ne s'est pas
détériorée, elle ne s'est pas améliorée. Il
est évident que personne ne pourrait dire que retarder d'un an,
ça va conduire à un désastre monumental immédiat
parce que les signaux de prix qui sont importants sont importants à long
terme et n'ont pas un impact immédiat à court terme, comme on
l'avait d'ailleurs expliqué assez longuement à la commission
parlementaire de 1990.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, je vais
reconnaître maintenant M. le député de Drummond.
Effets d'une augmentation des tarifs égale
à l'inflation
M. St-Roch: Merci, M. le Président. Peut-être pour
ramener ça dans un langage que nous, les parlementaires, on serait
peut-être mieux en mesure de saisir, laissez-moi vous proposer le
scénario suivant, et j'aimerais connaître vos réactions.
Si, suite aux travaux de la commission, on disait à Hydro-Québec:
Le maximum va avec le taux d'inflation, qui serait de 2,6 %, avec obligation de
maintenir les efforts que vous faites au niveau de la fiabilité du
réseau et l'implication, aussi, de votre performance de qualité
globale, quels seraient les effets sur les décisions que vous avez
à prendre et quelles seraient-elles? Et quels seraient les effets sur
les performances et les résultats financiers d'Hydro-Québec?
M. Boivin: Effectivement, si la hausse de tarif était
à 2,6 %, tel que vous le proposez, par rapport au 5,5 % que nous
demandons, ça voudrait dire qu'il y aurait, en fait, une diminution des
revenus équivalente à 2,4 %, sort, pour l'année 1990,
environ 80 000 000 $ de moins. Ça veut dire qu'il faudrait effectivement
effectuer une réduction de nos dépenses d'exploitation d'environ
80 000 000 $... Je m'excuse, c'est 2,9 %, alors ce serait 100 000 000 $,
à toutes fins pratiques, en chiffres ronds. Réduire nos frais
d'exploitation de 100 000 000 $, je vais être le dernier à vous
dire que ce n'est pas possible. Tout est possible dans la vie. On peut faire
500 mises à pied, on peut fermer des centrales, il n'y a rien
d'impossible.
Maintenant, réduire de 100 000 000 $ les dépenses
d'exploitation... Il y a une chose qui ne serait pas possible, c'est que, quand
même que vous mettriez l'obligation de maintenir le degré
d'entretien de nos installations et le degré de qualité, bien,
moi, je vous dis: Ce n'est pas possible dans le contexte actuel. Il ne faut pas
oublier qu'on est en rattrapage. On est en rattrapage, et réduire la
fréquence et le taux d'entretien de nos installations dans une
période très difficile... Au début des années
quatre-vingt et au milieu des années quatre-vingt, on l'a fart, avec les
résultats sur la qualité du service qu'on a connus en 1988 et
1989. On a seulement à se souvenir des discussions que nous avons eues
ici, en commission parlementaire en 1988-
1989, pour se rappeler que la population du Québec nous avait
fait savoir de façon très claire qu'un service avec beaucoup
d'interruptions et beaucoup de pannes, ce n'est pas acceptable. Alors, moi, je
vous dis: Ce n'est pas possible.
Le problème d'une entreprise comme HydroQuébec, il est
différent, aussi, du problème que vous allez retrouver dans
certains autres secteurs. On peut citer, par exemple, le domaine de la voirie.
Il est possible de laisser, pendant deux, trois ou quatre ans, se
détériorer l'état des routes. On peut faire ça. Les
gens vont peut-être se plaindre un peu, on va abîmer les
automobiles, il va y avoir un accident de temps en temps, mais l'autoroute va
demeurer ouverte, même s'il y a des trous dans l'autoroute. Nous, nos
autoroutes, ce sont des lignes de transport. Quand on arrête de faire de
l'entretien dessus, on commence à avoir des bris. Quand il y a un bris
sur une ligne de transport - et ça ne prend pas toujours des grosses
choses; on se rappellera qu'on avait eu, à un moment donné,
simplement des vis dans des relais qui étaient mal ajustées -
à ce moment-là, notre autoroute, nous autres, est fermée.
La ligne tombe. Et qu'est-ce qui en résulte? En fait, c'est une panne
majeure pour une grosse partie de la population.
Alors, moi, je vous dis: On a 40 000 000 000 $ d'actif actuellement en
service, et il est extrêmement important, à mon point de vue, pour
la population même du Québec, qu'on fasse de façon
convenable l'entretien de ces installations-là si on ne veut pas, dans
cinq ans ou dans dix ans, se retrouver avec des dépenses qui vont
être de beaucoup supérieures à celles des frais d'entretien
normaux. (17 heures)
M. St-Roch: M. le Président, il n'y aurait pas une autre
alternative? Si vous maintenez votre niveau de maintenance pour garder la
fiabilité et la qualité du réseau, un des moyens, avec les
100 000 000 $ de manque à gagner, serait, à ce moment-là,
de laisser baisser les profits à 600 000 000 $ au lieu de 700 000 000 $,
tel que prévu. Alors, si c'était le scénario, en laissant
baisser les profits à 600 000 000 $, quels seraient les impacts sur la
société dans son ensemble? J'imagine, dans les cartes de
crédit, etc..
M. Drouin: Je pense que, là-dessus, c'est clair que les
critères financiers qu'on veut normalement maintenir: taux de
capitalisation, 25 %, taux d'intérêt au-dessus d'un taux
d'autofinancement à 30 %, rendement sur l'avoir propre, au moins le
coût de la dette, à près de 11 %... Si nous devions laisser
les profits chuter de 100 000 000 $, c'est clair que ces
critères-là et ces ratios-là se
détérioreraient. Et, dans ce sens-là, on peut vous donner
un peu la conséquence de laisser tomber les profits de 100 000 000
$.
M. Roy: Naturellement, les conséquences directes seront en
effet que ça augmenterait le programme d'emprunt par le montant du
manque à gagner sur le bénéfice net. Et ça, c'est
une conséquence immédiate. Et, de plus, vous appréciez
qu'on est une entreprise en croissance en termes de ses investissements. Donc,
il y aurait une préoccupation des agences de crédit qui
évaluent la santé de l'entreprise. Et vous savez bien que le
bénéfice net de l'entreprise, lui aussi, est consolidé
dans les résultats du gouvernement du Québec. Donc, certainement,
les agences de crédit vont porter une attention particulière et
ça peut amener une réévaluation de la cote.
De plus, baisser le bénéfice net en 1992, ça aurait
pour effet de reporter le problème aux années futures et, donc,
ça va exiger un rendement plus élevé et des hausses
tarifaires plus élevées pour répondre à notre
manque à gagner. Et, naturellement, on regarde un peu aussi le fait de
laisser passer les critères qui sont déjà au minimum,
même inférieurs au minimum exigé pour une entreprise de
notre grosseur. Si vous vous souvenez, le taux d'autofinancement est
inférieur à 30 %, à ce qui est visé; en ce moment,
on vise, pour l'an prochain, 27,5 %. Donc, ça, c'est une
inquiétude qui sera exprimée dans les marchés, à
savoir qu'on n'est pas capable de faire face à des ratios importants
pour combler les programmes d'investissements majeurs prévus pour les
années futures, autant pour cette année que pour les
années futures.
M. St-Roch: Vous ne croyez pas que le tout pourrait être
contrebalancé lorsque vous soumettez un plan d'action? Parce que, un peu
plus loin dans la documentation, avec l'introduction de tout le plan de
qualité globale, vous prévoyez, à moyen terme - et ce
n'est pas défini dans ce que j'ai pu lire - à peu près la
récupération de 1 000 000 000 $ là. Est-ce qu'il n'est pas
possible, dans le cas d'une récession, pour aider à donner un peu
ce vent d'optimisme, de présenter un plan d'action et de dire: On
maintient l'inflation et on prend un plan d'action en rapprochant cette
qualité de performance avec ce 1 000 000 000 $ pour
rééquilibrer le manque à gagner de 100 000 000 $ en
1992?
M. Roy: Vous avez raison de dire ça mais, par ailleurs,
les gains de productivité ou la rationalisation qui va être faite
par l'entreprise sont déjà intégrés dans le cadre
financier. C'est déjà comptabilisé dans le futur.
M. Drouin: Et quand on regarde 1992, la couverture
d'intérêt à 1,06 %, on est très près du 1 %
ou en bas du 1 %. En bas du 1 %, ça veut dire qu'on se sert de l'argent
des emprunts pour payer nos intérêts ou nos dépenses
courantes. Donc, on va emprunter pour payer notre coût de la dette. Donc,
ce 1,06 % là est très
près de la zone dangereuse. En plus de ça, si on avait
été dans une année où, effectivement, sur le plan
économique, on pouvait se permettre toute une série, je dirais,
de sauvegardes, on aurait pu comptabiliser davantage sur
l'hydrauli-cité. On n'en a mis que 142 000 000 $ et on vous a
mentionné ce matin que c'est pour prévoir jusqu'au mois de
septembre, et à hydrau-licité moyenne. Mais si, effectivement,
ça > s'avère encore une année difficile, on a
l'hypothèse que, au mois de septembre, on doive continuer et investir 80
000 000 $ additionnels. 80 000 000 $ additionnels viennent certainement, au
niveau de ces ratios-là, les affecter d'une façon importante et
nous mettent dans une situation très difficile.
J'ajouterai, juste en dernier lieu, si vous me le permettez,
qu'Hydro-Québec, au niveau des investissements, et par conséquent
des emprunts qui en découlent, pour l'année 1992-1993,
prévoit des investissements de l'ordre de 4 000 000 000 $; en 1993, 4
700 000 000 $ et, en 1994, 4 500 000 000 $. C'est des investissements
importants, qui sont, bien sûr, un apport très positif sur le plan
économique au Québec, mais pour lesquels il faut être
sûr que nous ne payerons pas un coût de la dette beaucoup plus
élevé, compte tenu que nous ne rencontrerions pas nos
critères financiers et que nos prêteurs nous mettraient une
surprime à cause de notre condition financière. Ça
m'apparaît très marginal comme situation, et il est difficile
d'envisager un profit inférieur aux 700 000 000 $ que nous projetons.
Rappelons-nous que nous avions projeté, pour l'année 1992, des
profits de l'ordre de 1 100 000 000 $.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de l'Acadie.
Rémunération des employés
d'Hydro-Québec
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
sur un point particulier. On a parlé ce matin du tableau qui est
à la page 109 du rapport général concernant l'état
de la rémunération globale du personnel d'Hydro-Québec par
rapport au marché de comparaison. On voit dans le tableau que, depuis 10
ans, c'est-à-dire depuis 1982, l'écart, au fond, a diminué
de moitié. Mais je vous avoue que je suis encore assez inconfortable
avec les données qui sont dans ce tableau-là. C'est-à-dire
qu'on est dans un contexte économique extrêmement difficile. On
voit chaque jour des entreprises qui ferment, des gens qui se retrouvent au
chômage. On a demandé aux contribuables de donner le maximum. Il y
a eu des taxes. Il y a des gens qui n'ont pas d'emploi. Et on arrive avec une
demande de hausse tarifaire de 5,9 %.
Quand on regarde tout ce contexte-là, on est encore dans une
situation, actuellement - je suis bien conscient du passé - mais
actuellement, au moment où on est dans un contexte aussi difficile, on
est encore au niveau d'une compagnie qui donne, par rapport à son
marché de comparaison, 10 % de plus que toutes les compagnies. Et vous
avez dit ce matin que, si on comparait avec la fonction publique,
l'écart serait encore plus grand. Alors, je vous avoue que c'est... Et
quand on pense à la masse salariale d'Hydro-Québec -
j'évalue que c'est à peu près 1 300 000 000 $ ou 1 400 000
000 $, la masse salariale - ça veut dire qu'à chaque année
Hydro-Québec donne à ses employés 130 000 000 $ de plus
que ce qui existe dans le marché de comparaison.
Et, au moment où ça, ça existe, on demande aux
contribuables de se forcer. On a des gens qui perdent leur emploi. Comment vous
pensez que la population peut accepter facilement cet état de choses?
J'aimerais savoir quelles sont vos prévisions par rapport à
ça. Je ne vois pas, a priori, de justification pour expliquer aux
concitoyens que c'est normal qu'on donne 10 % de plus, 130 000 000 $ par
année, alors qu'on parle de 200 000 000 $; c'est quand même un
montant important, comme ça. Comparativement à toutes les autres
entreprises, on a les moyens de donner 130 000 000 $ de plus. Alors, j'aimerais
avoir votre réaction là-dessus, et je reviendrai peut-être
avec une question, si le temps le permet.
M. Drouin: Écoutez, vous dire qu'on se sent à
l'aise avec ça, ça serait faux. C'est bien évident qu'il y
a une valeur et il y a un élément d'histoire et d'historique dans
tout ce dossier-là. Nous, nous essayons de corriger
régulièrement la situation. La preuve, on la démontre dans
notre rapport: on l'a corrigée au moins à raison de 50 % sur
cette période-là. Nous continuons à le faire. Nous avons
l'intention de le faire, mais on ne peut pas refaire l'histoire d'un coup sec.
Et nous avons eu une négociation, la dernière fois,
serrée. Je pense que les membres de l'Assemblée nationale sont
bien conscients de cette négociation que nous avons eue la
dernière fois, et qui comportait, entre autres, des
éléments de récupération, non seulement sur les
salaires ou sur les avantages sociaux, mais également sur des contenus
de conventions collectives.
Il nous apparaît important, peut-être de corriger sur le
plan salarial, mais aussi d'améliorer la situation sur le plan de la
productivité. Et les batailles que nous avons faites lors de la
dernière négociation de la convention collective ont
été sur la rémunération, mais aussi sur des
éléments importants en termes de contenu de ia convention
collective, parce que ce n'était pas juste une question d'argent,
c'était aussi une question de permettre à la gestion ou à
la gérance de pouvoir gérer convenablement et dans des
circonstances que l'on peut revoir dans d'autres secteurs de l'industrie ou du
monde des relations patronales-ouvrières au Québec.
Vous dire qu'on est à l'aise, c'est non. Mais
vous dire qu'on veut corriger la situation, c'est oui. Et on a, au cours
des années, depuis 1982, pris des mesures - toujours, bien sûr,
avec le Conseil du trésor de qui nous devons obtenir nos mandats - pour
tenter de diminuer cet écart-là. Et nous y parviendrons à
un moment donné.
M. Bordeleau: Est-ce que vous croyez que...
Le Président (M. Audet): Là, vous devez conclure.
L'enveloppe de temps réservé à la formation
ministérielle est écoulée. Alors, je vais maintenant
reconnaître un député de l'Opposition. M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, dans un
premier temps, faire un commentaire en ce qui regarde les salariés. On
semble depuis le matin - plusieurs ministériels - s'acharner sur la
facture émanant des conventions collectives. Je vous ferai remarquer
qu'en pleine nuit la ministre actuelle et moi-même avons voté sur
une loi spéciale, et la loi était punitive, à
l'époque. Rappelez-vous qu'Hydro-Québec était prête
à offrir plus. Il faut appeler les choses par leur nom, là.
Hydro-Québec était prête à offrir plus que ce que le
gouvernement a réglé dans la loi spéciale. Et ça,
il faut se le rappeler, là.
La deuxième chose, le président du conseil
d'Hydro-Québec nous dit depuis le matin qu'il a arrimé exactement
à la fonction publique, ou à la progression de la fonction
publique. À moins que vous ne vouliez nous annoncer que vous voulez
couper encore dans l'arrimage qu'il a fait là, je pense que ça
serait un petit peu indécent, et je pense qu'il va falloir arrêter
ça, les folies, là.
Contrats à risques partagés
(suite)
Deuxième chose, moi, M. le Président, je voudrais revenir
sur les contrats secrets. Vous nous avez répété, pour nous
les vendre, à plusieurs reprises que, lorsque les compagnies
atteindraient le tarif L, ça serait extraordinaire les rentrées
qui arriveraient dans nos coffres. Mais vos représentants devant la
commission américaine, les représentants des groupes qui se
défendent devant la commission américaine et même l'avocat
représentant Reynolds - M. Johnston, je pense, ou Johnson - tout le
monde s'entend allègrement pour dire qu'on ne les atteindra probablement
jamais. Et, si jamais on les atteint, ça va être en 2013, et puis
2013, c'est à peu près la fin du contrat. Qu'est-ce qui vous a,
pas permis parce que vous aviez le droit de tout faire, probablement, mais
qu'est-ce qui vous a incité à vendre ça aux
Québécois comme étant des contrats qui rapporteraient
à merveille? Tous ces groupes-là, y compris vos
représentants, plaident devant la commission américaine à
l'effet qu'ils ne l'atteindront à peu près jamais, et qu'il n'y a
pas de problème là.
Pourriez-vous m'expliquer ça? Parce que, pour nous autres,
là, c'est comme si vous nous aviez endormis en disant: Ne vous faites
pas de bile, on signe les contrats, on en assumera les coûts. On va faire
accroire que le tarif L va être atteint très bientôt, et
puis qu'il n'y a pas de problème. Puis, du même souffle, vous
allez soutenir devant la commission américaine qu'on ne les atteindra
jamais, donc, que nous autres, les actionnaires d'Hydro-Québec, on
paiera toujours. Pourriez-vous m'expliquer ce problème-là.
M. Orouin: Bon, alors, premièrement...
Le Président (M. Audet): Juste avant, M. Drouin, juste
avant de poursuivre. Si vous voulez, j'aimerais apporter une précision
là-dessus. Etant donné qu'il y a déjà un dossier...
vous en avez parlé, M. le député de Joliette...
M. Chevrette: Je suis très au courant, soyez sans
crainte.
Le Président (M. Audet): Juste pour inviter les gens
à la prudence dans ce dossier-là, parce que c'est au tribunal
d'arbitrage.
M. Chevrette: Je sais tout ça.
Le Président (M. Audet): Bon, il y a certains dangers
là.
M. Chevrette: Oui, mais ce n'est pas au tribunal criminel, et
puis je suis conscient des responsabilités que j'ai, M. le
Président.
Le Président (M. Audet): Simplement pour vous
rappeler...
M. Chevrette: Et puis je pense que vous n'avez pas à me
mettre en garde là-dessus.
Le Président (M. Audet): ...et aux membres de la
commission aussi. Merci.
M. Chevrette: Je ne m'appelle pas, moi, le président de
Equality. Correct!
Le Président (M. Audet): Merci, M. le député
de Joliette. Alors, M. Drouin, si vous voulez poursuivre. (17 h 15)
M. Drouin: La mise en garde s'adresse à moi
également.
M. Chevrette: Non, non, c'est ça, mais je ne veux pas me
faire charrier.
Le Président (M. Audet): Elle s'adresse à tout le
monde de la commission, M. Drouin.
M. Chevrette: Non, c'est parce que je ne veux pas me faire
charrier.
Le Président (M. Audet): Non, pas simplement à M.
le député de Joliette. Alors, si vous voulez poursuivre.
M. Drouin: D'abord, il faut bien comprendre que ce qui est devant
la commission américaine, c'est le dossier de Norsk Hydro. Il faut faire
une différence entre le dossier de Norsk Hydro et celui des alumineries.
Alors, quand vous parliez des 13 contrats que, moi, j'appelle à partage
de risques et de bénéfices, c'est des contrats qui comportent
effectivement des risques mais, au bout de la ligne, des
bénéfices.
Nous, ce qu'on vous dit - et là - je laisse de côté
le dossier de Norsk sur lequel je veux revenir parce que je veux être
bien sûr que vous compreniez qu'on n'a jamais dit, nulle part, que les
contrats qui s'appliquaient aux alumineries étaient des contrats qui
étaient perdants. On n'a jamais dit ça. Ce qu'on dit, c'est que,
sur une période de 20 ou 25 ans, nos études économiques
font en sorte que les tarifs qu'on a négociés avec les
alumineries rapporteront l'équivalent du tarif L, ou à peu
près.
Maintenant, il m'apparaît important d'expliquer à cette
commission que, lorsque nous parions d'un tarif comme le tarif L ou le tarif D,
domestique, et qu'on parie des coûts de fournitures dans ces
tarifs-là, ça Inclut notre marge de profit. Donc, si nous avons
un tarif L qui donne un rendement - et je vous réfère toujours
à notre tableau, à la page 17 du mémoire tarifaire, pour
vous montrer ce que je veux expliquer - vous constaterez que le tarif L a un
rendement de 12,4 %. Quand je dis un rendement de 12,4 %, c'est des profits,
ça, de 12 %. Bon! Alors, si par exemple - et là j'arrive à
celui de Norsk Hydro - si, par hasard, on disait qu'un contrat ne rapportera
pas, dans sa durée, l'équivalent du tarif L, ça ne veut
pas dire qu'on perd de l'argent. Ça peut vouloir dire qu'on fait moins
de profits. Et l'exemple que vous avez, c'est celui du tarif domestique
où, effectivement, on ne réalise pas - dans la même page -
une marge de 12 % comme nous vous souhaiterions au tarif L. Au tarif
domestique, nous réalisons 6,6 %.
Supposons - et je fais une supposition pour répondre à la
mise en garde du président - qu'au moment de l'adoption de notre contrat
avec Norsk Hydro nous aurions constaté que le rendement de ce
contrat-là était de 6 % - ce n'est pas le tarif L, c'est en bas
du tarif L - nous aurions une marge bénéficiaire
équivalente à celle du tarif domestique qui est de 6 %, parce que
les coûts de fournitures sont en bas de ça.
Alors, c'est faux de dire que, quand on a un contrat qui est en bas du
tarif L, on fait payer tout le monde. C'est tout à fait faux parce que,
pour qu'on fasse payer le contribuable... Et là on pourra en discuter
parce que je vous ai dit que ces contrats-là ne sont pas dans le
mémoire tarifaire comme étant des ventes assujetties. Mais notre
objectif dans les contrats d'alumine-rie, c'est le tarif L à long terme.
Dans le contrat de Norsk Hydro, supposons que je vous dis que la marge
bénéficiaire aurait été de 6 %, c'est vrai que nous
n'aurions pas fait le tarif L mais, à tout le moins, nous aurions fait
une marge bénéficiaire. Et, dans ce sens-là, l'entreprise
ne perdrait pas d'argent. Ça, ça m'apparaît important de
bien clarifier la situation parce que, ne pas faire le tarif L, ça ne
veut pas dire que nous ne faisons pas au moins un profit sur un contrat
donné.
M. Chevrette: O.K. Je reviens sur la question. Même un de
vos avocats, M. Feldman, a écrit au secrétariat; lui-même
dit que ça ne s'applique pas, le tarif L C'est impossible qu'on atteigne
le tarif L C'est vos propres avocats qui soulignent le fait. Donc, est-ce qu'on
a signé des contrats en sachant, ou à peu près, qu'on ne
l'atteindrait jamais avant 2013? Mais on a fait miroiter des profits et,
entretemps, s'Hs se rendent jamais au tarif L, vous ne ferez pas grand
argent.
M. Drouin: Non...
M. Chevrette: Vous allez faire une marge de profit, au lieu de 13
%, de 6 %, de 5 %...
M. Drouin: Exact.
M. Chevrette: ...si je suivais votre raisonnement.
M. Drouin: Exact. C'est ça, mon raisonnement.
M. Chevrette: Ça semble être votre raisonnement.
M. Drouin: Oui, et c'est comme je fais avec le tarif domestique
actuellement; c'est 6,6 % que je fais actuellement avec le tarif
domestique.
M. Chevrette: Bon! Mais vous dites que ça n'influence pas
du tout. On fait quand même un peu d'argent.
M. Drouin: Non, ce que je veux vous dire, M. le Président,
c'est qu'il faut regarder ça comme si ce livre-là s'appliquait
à une entreprise qui fournit de l'électricité à
tous les consommateurs du Québec. Les alumineries, les exportations sont
en dehors de ce livre-là. Cependant, tout ce que je dis, c'est que ce
livre-là n'influence pas, et l'autre n'influence pas les coûts
ici.
M. Chevrette: Mais, M. Drouin... M. Drouin: Oui?
M. Chevrette:... si vous avez des pertes de 142 000 000 $, ou de
240 000 000 $, ou de 132 000 000 $, pour l'équilibre
d'Hydro-Québec, pour conserver ses ratios financiers et tout, vous devez
taxer en conséquence. Vous venez de me dire que ça n'influence
jamais la tarification des...
M. Drouin: Mais ça... Non, non...
M. Chevrette:... assujettis, le temps que vous perdez.
M. Drouin: Ça n'affecte pas les tarifs assujettis parce
qu'on fait la démonstration ici que ce qu'on réclame à
ceux qui sont assujettis, c'est 12, 1 % de rendement, alors que des
entreprises, dans d'autres domaines, comme TransAlta Utilities, vont chercher
13, 25 % et 14 %. Donc, vous avez la preuve ici qu'on ne réclame rien
d'autre que les coûts de fourniture réels à la
clientèle, plus... Bien, coût de fourniture, chez nous, ça
inclut la marge bénéficiaire. Donc, incluant la marge
bénéficiaire, dans le cas du domestique, de 6, 6 %. Donc, on ne
demande absolument rien de plus à la clientèle.
M. Chevrette: M. Drouin, si vous n'aviez pas
procédé à la signature des 13 contrats, est-ce que vous
seriez dans l'état de faible hydrauli-crté?
M. Drouin: Ah, mon Dieu! Là, vous entrez dans un
débat qui peut durer pas mal longtemps.
M. Chevrette: Non, mais par rapport... Je n'ai pas l'intention de
passer trois heures là-dessus.
M. Drouin: Non, non, mais c'est parce que, écoutez, toute
notre planification aurait été différente. Si on n'avait
pas eu de contrats d'exportation, si on n'avait pas eu d'alumineries, on
n'aurait pas construit des centrales. Donc, toutes choses étant
égales, je vous dis qu'on aurait été dans le même
état d'hydraulicité faible. Toutes choses étant
égales...
M. Chevrette: Avec 2700 mégawatts, comme vous le dites,
qui ont été consacrés aux alumine-ries, vous seriez quand
même dans un état de faible hydraulicité et les assujettis
auraient à payer...
M. Drouin: Écoutez là. Je...
M. Chevrette: C'est ça que vous dites?
M. Drouin: Oui. La réponse, c'est ça, mais je vais
vous expliquer pourquoi. Quand on a des contrats d'alumineries... Non, mais
écoutez, écoutez moi. Quand on a des contrats...
M. Chevrette: J'écoute.
M. Drouin:... d'alumineries ou des contrats d'exportation qu'on
prévoit, prenons par exemple... Assumez que le contrat d'exportation de
New York pour 1995-1996, qui va venir peut-être en 1998-2000, ne se
réalise pas, bien, on l'a dit carrément qu'on va retarder la
construction de centrales ou de réservoirs. Donc, ça ne vient pas
du fait qu'on prenne des alumineries ou qu'on prenne une nouvelle charge ou des
exportations. Et qu'on construise, qu'on devance des constructions pour les
fins de fournir ces clients-là, ça n'implique pas qu'on ajoute
aux problèmes de l'hydraulicité parce que, si nous n'avions pas
eu ces contrats-là, nous aurions construit moins, mais nous aurions eu
quand même moins d'eau dans des réservoirs plus petits.
M. Chevrette: Mais, quand vous construisez des barrages, vous
essayez de garder une réserve normale. Hydro-Québec doit
planifier en fonction de se garder une réserve, M. Drouin, jamais je ne
croirai.
M. Drouin: Tout à fait, tout à fait. Et c'est ce
qu'on fait.
M. Chevrette: Quand vous avez octroyé ces contrats secrets
que vous appelez «à partage de risques», est-ce que vous
étiez conscients qu'il y avait une conjoncture de faible
hydraulicité? C'était en 1988, et la faible hydraulicité
commençait à se manifester en 1985. C'est vous autres mêmes
qui le dites. Vous n'avez pas pensé que vous seriez obligés, par
le fait que vous octroyez ces contrats, d'acheter plus
d'électricité à court terme pour répondre à
vos obligations? Il me semble que c'est logique. Si vous aviez une
réserve de 2700 mégawatts au lieu d'aucune réserve, comme
c'est le cas - vous êtes obligés de partir Tracy, vous êtes
obligés d'en acheter ailleurs...
M. Drouin: Monsieur...
M. Chevrette:... est-ce que vous auriez à taxer les
contribuables pour la faible hydraulicité, présentement?
M. Drouin: La réponse à la question, c'est non, M.
le Président, parce que, quand on planifie des ouvrages en fonction de
clientèles, de prévisions de clientèles et de la demande
qui est prévue pour des années à venir, on planifie
toujours en fonction d'une hydraulicité moyenne. On est parti de la
situation au moment où ça existait, en 1989; on a regardé
la situation énergétique, le bilan énergétique; et
là on a examiné tout ce qui pouvait se passer dans l'entreprise
avec une hydraulicité moyenne. Et c'est en fonction de ça,
sachant quelle est la demande, sachant ce qu'on peut offrir, qu'on
planifie la construction des ouvrages. Donc, on se garde toujours une
réserve énergétique; peu importe qu'il y ait des
alumineries qui viennent dans quatre ou cinq ans, ou dans trois ans, ou des
contrats d'exportation, on se garde toujours une réserve
énergétique.
M. Chevrette: Et votre refus d'octroyer des contrats secrets
à trois autres, ou des avantages à trois autres compagnies qui en
faisaient la demande, vous savez qu'il y a un moratoire là-dessus?
M. Drouin: Là, je ne sais pas quelle allusion vous
faites.
M. Chevrette: C'est dû à quoi? Vous savez qu'il y a
des compagnies qui demandent à s'installer.
M. Drouin: Moi, je peux vous dire que...
M. Chevrette: Je vais essayer de vous donner les noms d'ici 18
heures, pour préciser. J'ai ça dans mes paperasses.
M. Drouin: Non, non, mais écoutez. Moi, je vous dis qu'on
a signé les contrats; vous les connaissez, ils sont signés. Au
moment où on se parle, il n'y a absolument rien qui nous démontre
qu'on va signer d'autres contrats d'ici quelques mois ou quelques années
dans ces dossiers-là. Il n'y a rien qui donne ça. SI vous dites
que vous avez des alumineries à nous introduire, on est prêts
à les regarder, mais c'est vrai qu'il y a un moratoire pour le moment et
qu'on a une part importante de notre consommation qui est dédiée
à des usines, à des entreprises fortes consommatrices
d'énergie. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il faut regarder tout
le «mix» énergétique du Québec pour savoir si
on en prend d'autres ou si on n'en prend pas d'autres; et c'est ce qu'on fait
actuellement.
M. Chevrette: M. Drouin, si je vous disais que, par exemple, les
dossiers actuellement en suspens sont les dossiers de SKW Canada, les
Industries Cafco, MSEi Groupe et Etchevaria. Ça ne vous dit rien, vous,
à Hydro-Québec?
M. Drouin: Monsieur, ça me dit... Une voix: SKW,
c'est un client existant. M. Drouin: Mais oui, SKW, vas-y.
M. Boivin: SKW, c'est un client existant à
Bécancour, qui a un contrat à partage de risques.
M. Chevrette: Et qui vous demande de rouvrir pour aller,
justement, sur des contrats à partage de risques.
M. Boivin: II y a un contrat à partage de risques, il est
dans la...
M. Chevrette: Je m'excuse...
M. Boivin: II est dans la série des contrats, d'ailleurs,
à partage de risques, un des 13 contrats.
M. Chevrette: C'était réglé au niveau
d'Hydro-Québec, mais avant le moratoire, là, ces dossiers...
M. Boivin: Etchevaria, c'est un projet...
M. Chevrette: L'information qu'on a du ministère de
l'Énergie...
M. Boivin: ...c'est un petit projet d'implantation industrielle
avec lequel on a eu des négociations, mais qui ne s'est pas
matérialisé. C'était une charge de l'ordre, si ma
mémoire est bonne, de 25 mégawatts. Ça ne s'est pas
matérialisé, pas à cause de la disponibilité
d'électricité, mais parce que les clients - ce sont des
Espagnols; je les ai rencontrés moi-même - ont
décidé d'abandonner le projet.
M. Chevrette: M. Boivin - je vais y aller plus
précisément, d'abord - est-ce que le 10 décembre 1990 le
Conseil des ministres ne vous a pas demandé de revoir votre programme
dans le sens des contrats à partage de risques et de surseoir à
la conclusion de nouveaux contrats de ce type?
M. Boivin: C'est exact. Selon une recommandation
d'Hydro-Québec, d'ailleurs. Nous avions recommandé de surseoir,
le temps de refaire les analyses économiques et les analyses de risques,
parce que nous avons toujours maintenu - et on l'a maintenu ici à de
nombreuses reprises depuis 1982, au moment où nous avons commencé
à faire des contrats à partage de risques - nous avons
expliqué ici en commission parlementaire, à de nombreuses
reprises, que l'entreprise pouvait mettre à risque, pour fins de
développement industriel, une certaine partie de son énergie. Et
effectivement, lorsqu'on a signé le dernier contrat d'une aluminerie, on
a décidé à ce moment-là qu'il était temps de
refaire une évaluation. On a pensé, en fait, que
particulièrement dans le secteur des alumineries, au moment où,
avec ce qui est présentement en construction, on va produire au
Québec, en incluant les installations d'Alcan, près de 15 % de la
production mondiale d'aluminium, on a pensé, pour utiliser une
expression populaire, qu'on ne voulait pas mettre tous nos oeufs dans le
même panier et qu'on en avait probablement assez pour le moment.
M. Chevrette: Le comité conjoint - Hydro-
Québec, le ministère de l'Énergie et des Ressources
et le ministère des Finances - avait analysé votre programme et
recommandait certains critères. Est-ce que, à toutes fins
pratiques, vous n'avez pas décidé que vous ne concluriez pas de
nouvelles ententes avant une dizaine d'années?
M. Boivin: On n'a pas fixé d'horizon, mais on a dit que,
tant que la marge de manoeuvre de l'entreprise ne se rétablirait pas, on
ne voulait pas signer de nouveaux contrats à partage de risques. On n'a
pas dit qu'on ne voulait pas fournir de l'énergie et assumer le risque
au tarif normalisé pour les entreprises.
M. Chevrette: Non, mais je parle de contrats du même
type.
M. Boivin: Mais on a dit que dans le secteur des contrats
à partage de risques, pour le moment - il n'y a pas eu, à ma
connaissance, d'horizon de fixé - la marge de manoeuvre que nous avions
de disponible avait été utilisée. (17 h 30)
M. Chevrette: O.K. Je reviendrai tantôt. Je vais laisser
mon collègue...
Le Président (M. Audet): M. le député de
Bertrand.
Emprunts sur les marchés financiers
extérieurs
M. Beaulne: M. le Président, un des problèmes
auxquels font face les compagnies d'utilité publique, c'est le fait
qu'elles sont tentées d'emprunter de plus en plus sur les marchés
de capitaux étrangers, en devises étrangères, alors que la
grande partie de leurs revenus sont en devises locales. Quand je regarde les
tableaux que vous nous avez présentés, vous dites que dans la
part relative des composantes des coûts, pour 1991 - c'est le graphique
2.1; c'est la page 6 - les intérêts et les pertes de change
représentent 36,9 % de cette part des composantes des coûts de
1991. À la page suivante on remarque que, sous cette rubrique-là,
on prévoit une augmentation de 12,8 % entre 1991 et 1994.
Malheureusement, en comparant les différents tableaux, je vois
difficilement comment on peut décortiquer la part de ces 36,9 % qui est
attribuable aux intérêts par rapport à ce qui est
attribuable strictement aux opérations de change. Et vous dites
également, à la page 133 de votre rapport général,
qu'en 1991 65,6 % du financement de la dette est en dollars canadiens, et ceci,
vous dites, résulte des crédits croisés,
c'est-à-dire des opérations de «swaps».
J'ai trois questions. Je vais vous les donner tout de suite toutes les
trois, et puis vous pourrez répondre. D'abord, j'aimerais savoir si vous
seriez prêt à déposer à la commission
l'évolution de la structure de l'endettement extérieur
d'Hydro-Québec, avec une ventilation par devise, par maturité des
prêts, par coût des contrats de change ou ce que vous appelez les
«swaps».
Deuxièmement, vous dites qu'une des stratégies que vous
avancez au niveau de vos activités de financement, ça consiste
à maximiser la part du financement en dollars canadiens. Vous le savez
sans doute, les marchés des eurodollars en dollars canadiens, même
s'ils sont d'une ampleur assez considérable, sont loin de pouvoir
absorber, à moyen et à long terme, les nécessités
d'emprunt d'Hydro-Québec, surtout si on songe à des emprunts pour
financer les projets Grande-Baleine.
L'autre question que j'aurais à vous poser à ce
niveau-là, c'est: Quel est le maximum que vous jugez adéquat
puisque vous dites que vous allez maximiser? On est, en 1991, à 65,6 %.
On était, en 1989, à 68,5 %. Quel est le maximum que vous jugez
acceptable, ou que vous vous êtes fixé comme objectif, d'une part?
D'autre part, pour établir vos projections entre 1991 et 1994, pour dire
que les charges d'intérêts et pertes de change vont augmenter de
18,8 %, sur quel niveau ou quel taux de change du dollar canadien, par rapport
au dollar américain, vous êtes-vous basé pour
établir ces prévisions-là?
Et, finalement, une dernière question d'ordre un peu plus
général sur cette question de la structure de l'endettement
extérieur: Jusqu'à quel point n'êtes-vous pas en train de
faire porter par le consommateur québécois les fluctuations de
taux de change ou les couvertures de taux de change que vous devez prendre sur
la portion de plus en plus grande de votre endettement extérieur par
rapport à vos revenus en dollars canadiens?
M. Orouin: Michel Labonté, vice-président,
finances.
M. Labonté (Michel): À votre première
question concernant l'endettement, la liste des emprunts de l'entreprise, ce
sont des documents déjà publics qui font partie des prospectus
qu'on est obligé de soumettre à la Commission des valeurs
mobilières aux États-Unis, à Washington. Donc, ce sont des
documents qui sont déjà publics. La liste de nos emprunts, les
maturités, l'échéance, devrai-je dire, de même que
la devise de l'emprunt, pour la totalité des emprunts de l'entreprise,
ça fait partie du domaine public. Il suffit de vous donner le dernier
prospectus que nous avons émis dans le marché américain,
et cette information-là, elle est disponible.
M. Beaulne: De quand date le dernier prospectus?
M. Gonthier: Janvier. Nous avons fait un emprunt de 1 000 000 000
$. On a fait une mise à jour de ce prospectus-là. Donc, il est
à jour.
M. Beaulne: Janvier 1992?
M. Gonthier: Janvier 1992. C'est mis à jour de
façon régulière, de toute façon, et c'est
constamment disponible. On peut vous le donner avec empressement, si vous
voulez; il n'y a pas de problème. Dans les états financiers,
c'est regroupé par périodes de temps et, par monnaies; je pense
qu'on peut l'avoir également, mais c'est un regroupement. La liste
détaillée est disponible dans le prospectus comme tel.
Pour répondre à votre deuxième question sur
l'apport du financement en dollars canadiens, on sait que, traditionnellement,
Hydro-Québec, quand on regarde au minimum les 20 dernières
années et en tenant compte du programme d'investissement que
l'entreprise a eu, qui est cyclique dans le temps - on a investi un peu moins
dans la période 1983 à 1989 - l'entreprise, quand on regarde
historiquement, n'a jamais été capable de réaliser en
dollars canadiens, en moyenne, plus de 50 %. On pense que c'est le maximum
qu'on peut faire en dollars canadiens, originellement empruntés, et on
pense que la réalité est plus près de 40 % dans les
périodes où on investit massivement, comme à l'heure
actuelle.
Depuis 1983, il existe un marché de «swaps» qui nous
a permis, justement, de ramener des emprunts en devises
étrangères en dollars canadiens de manière à
augmenter le contenu, je dirais, synthétique total canadien de notre
dette. On est fiers d'être rendus autour de 65 % aujourd'hui. Avec le
programme d'investissement que nous avons dans les prochaines années, si
on est capables de maintenir un minimum de 60 %, ça va être beau.
Il nous est assez difficile d'emprunter en dollars canadiens,
traditionnellement, et on pense que 60 % minimum... Je ne fixe pas de maximum
parce qu'il m'est très difficile de l'évaluer, mais, quand on
regarde historiquement le contenu synthétique, on pense
qu'idéalement on se fixe un minimum.
Je voudrais enchérir sur le point suivant: les
«swaps» que nous faisons pour ramener en dollars canadiens et,
donc, éliminer le risque de change, nous le faisons avec les devises
européennes et japonaises, des devises autres que le dollar US. Nous
pouvons, comme entreprise, maintenir un certain niveau de dette en dollars US
parce que nous avons des revenus en dollars US provenant de deux sources, en
vertu de contrats à long terme - les contrats aux exportations et les
contrats au secteur de l'aluminium au Québec - ce qui nous permet de
couvrir plus avantageusement le risque de change par des rentrées de
revenus dans l'entreprise. Donc, on évite de faire des
«swaps» pour ramener ces emprunts-là de dollar US à
dollar canadien.
M. Beaulne: Mais à ce niveau-là, justement, sur
cette dernière question, sur ce dernier point, est-ce que... Je suis
sûr que ça ne s'équivaut pas à 100 %. Alors, en
termes de trésorerie, quels sont vos revenus en dollars
américains par rapport à vos engagements en dollars
américains, comme vous avez dit, puisque vous dites que vous n'assurez
pas une couverture de change par rapport aux opérations strictement en
dollars américains?
M. Gonthier: Si on ne tient pas compte des emprunts futurs de
l'entreprise, sur le plan comptable, on est, à toutes fins pratiques, au
point neutre au cours des prochains cinq à huit ou dix ans. Si on ne
tient pas compte des emprunts futurs.
M. Beaulne: Donc, si je vous comprends bien, les coûts de
couverture de change s'appliquent au yen, au deutsche mark et aux devises
autres que le dollar américain.
M. Gonthier: Bien, c'est-à-dire qu'on a comme
stratégie d'entreprise, depuis que le marché des
«swaps» existe... La volatilité du dollar canadien est plus
grande, donc, le risque est plus grand avec les autres devises qu'avec le
dollar US; c'est clair, on a beaucoup d'échanges avec les
Américains. La volatilité du dollar canadien par rapport au
dollar américain est beaucoup plus petite que par rapport au yen
japonais ou au deutsche mark, par exemple. Donc, nous avons
décidé, stratégiquement, de ramener en dollars canadiens
les devises autres que le dollar US de façon systématique, depuis
un bon nombre d'années, et même de convertir en dollars canadiens,
par des «swaps», l'ancienne dette contractée dans les
années, disons, soixante-dix et le début des années
quatre-vingt, en deutsche marks ou en livres sterling, de manière
à réduire au minimum le risque de change. Donc, il est vrai que
nous réservons, pour l'instant... On a fait quelques «swaps»
du dollar US au dollar canadien au milieu des années 1980, alors que
nous n'avions pas assez de revenus en dollars US pour faire face, disons, au
volume de dettes en dollars US que l'entreprise avait à ce
moment-là.
M. Beaulne: Et à quel niveau de taux de change avez-vous
fait vos projections?
Une voix: Tu les as ici.
M. Gonthier: Bon! Je pense qu'on les a à une place,
là. Les taux de change, je ne sais pas quelle page. As-tu la page?
Qu'est-ce que ça donne? Pour 1992...
Une voix: Page 169.
M. Gonthier: Pardon? Page 169, nous avons les projections que
nous avons utilisées pour le dollar US et les principales devises: le
deutsche mark, le franc suisse et le yen. Donc, vous avez,
en 1992, 0,84 $, en 1993, 0,826 $ pour le dollar US-Canada, en 1994,
0,813 $, et ainsi de suite, si vous voulez.
M. Beaulne: En d'autres mots, et je termine là-dessus, M.
le...
Le Président (M. Audet): C'est terminé,
l'enveloppe. Vous avez déjà passé le temps d'à peu
près une minute. Alors, vous pourrez revenir un peu plus tard, M. le
député de Bertrand. Je vais reconnaître la formation
ministérielle pour une période de 25 minutes, et nous terminerons
avec une autre période de 25 minutes avec la formation de l'Opposition
officielle. Mme la ministre.
Révision de la structure tarifaire
Mme Bacon: Alors, on va se rappeler, M. le Président, que
lors de l'approbation du plan de développement 1990-1992 le gouvernement
avait demandé à Hydro-Québec de procéder à
une révision en profondeur de la tarification de
l'électricité sur les marchés québécois, en
examinant notamment l'opportunité d'offrir des options tarifaires aux
abonnés domestiques. L'exercice de révision devrait se terminer,
si ma mémoire est fidèle, cet été. Est-ce que vous
pourriez nous donner un aperçu des travaux qui sont en cours à ce
sujet-là?
M. Boivin: M. Roy, qui est directeur de la tarification, va venir
donner des explications plus techniques mais, effectivement, tel que vous le
mentionnez, nous avons entrepris en juillet 1990 une étude assez
exhaustive de toute notre structure tarifaire. Nous sommes d'ailleurs à
réviser. Avec la proposition tarifaire, cette année, on termine
la révision de la structure du tarif grande puissance, et nous serons en
position, en juillet prochain, de donner des orientations définitives
quant aux différentes modalités de tarification
différenciée dans le temps pour différents types de
clients. Mais on peut d'ores et déjà dire que nos études
sont très avancées. Nous allons effectuer au cours du printemps
une consultation auprès de nos clients grande puissance en vue
d'introduire, dans les mois qui suivront, une tarification
différenciée dans le temps, non pas sur une base horaire ou
quotidienne, mais plus sur une base saisonnière.
Maintenant, je pourrais demander à M. Roy de donner de
façon peut-être un peu plus détaillée, pour les
différentes catégories de clientèles, les résultats
à date et l'état de nos réflexions quant à la
structure tarifaire, notamment des modalités de
différenciation.
Le Président (M. Audet): M. Roy.
M. Roy: Oui. Comme dit M. Boivin, du côté de la
grande entreprise, suite à la réforme du tarif L - qu'on vous
demande d'ailleurs de compléter dans la proposition tarifaire actuelle -
la porte nous est maintenant ouverte pour introduire les formules de
tarification différenciée. On est en train d'en explorer
plusieurs. Celle qui semble retenir le plus notre intérêt est
celle qui assurerait une différenciation selon les saisons.
Du côté du secteur domestique, c'est l'autre endroit
où on a des études en marche. On pense, à ce
moment-là, à des tarifications différenciées de
façon un peu plus modulée - par exemple en fonction de la
température - quelque chose qui pourrait ressembler à notre
tarification biénergie. On a, avec notre parc biénergie
résidentiel, une bonne expérience de quelques années avec
de la tarification différenciée dans le temps. On explore la
possibilité d'élargir cette possibilité-là à
des clientèles plus nombreuses dans le secteur domestique dans les
années qui s'en viennent. (17 h 45)
Comme vous le savez bien, on est dus pour vous produire, en juillet qui
vient, un rapport beaucoup plus complet. Une fois cette opération-ci
terminée, on va pouvoir s'y consacrer de façon plus profonde.
Mme Bacon: Dans le document des propositions tarifaires pour
1992, il y a un exemple où l'impact des mesures d'économie
d'énergie sur une facture de tarif D est montré. On parie du
tableau 4.3 à la page 21. C'est un exemple qui est intéressant
parce que ça montre la capacité de l'abonné d'influencer
sa consommation et sa facture d'électricité. Selon l'état
de vos connaissances du marché résidentiel, est-ce que les
mesures d'efficacité énergétique que vous proposez pour
réduire la facture d'électricité sont déjà
appliquées par les abonnés? Et, si oui, dans quelles proportions?
Et est-ce qu'il existe d'autres mesures?
M. Roy: En fait, comme M. Bolduc vous le disait ce matin,
l'éventail des mesures possibles est assez large. Dans le cadre de nos
travaux en matière d'efficacité énergétique,
actuellement, nous avons identifié entre 400 et 500 mesures possibles.
Ça dépasse la clientèle domestique; c'est pour l'ensemble
de notre clientèle. Donc, l'éventail est extrêmement large
et les combinaisons qu'on peut faire de ces mesures, de ces
possibilités-là sont multiples aussi. Ce qu'on a essayé de
faire ici à titre d'indication - et on l'a bien présenté
comme ça - c'était de vous montrer qu'il est possible, en
adoptant des mesures d'économie d'énergie, de contrer dans une
large mesure l'augmentation tarifaire.
Votre question pose aussi un autre élément, à
savoir ce qui est déjà adopté par la clientèle. Nos
études de marché actuellement ont tendance à
démontrer que notre clientèle résidentielle,
particulièrement, est plus avancée qu'on ne le croyait en
matière d'efficacité énergétique. On a
plusieurs études de marché qui nous démontrent, on
pense, de façon assez évidente, que les Québécois
ne sont pas les vilains gaspilleurs d'énergie qu'on a tendance à
les appeler. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne reste pas des potentiels, bien
sûr. Et il reste des mesures à appliquer. On essaye, dans nos
études, de les identifier et de les mettre en marché, et c'est ce
qui constitue fondamentalement notre projet d'efficacité
énergétique actuel.
Mme Bacon: Dans la proposition tarifaire Hydro-Québec
entreprend une correction de sa grille tarifaire pour le service complet
d'éclairage public. Et là je vous réfère à
la page 27. J'aimerais savoir quels sont les objectifs de cette réforme
et pourquoi elle doit être étalée sur quatre ans.
M. Roy: En fait, ce qu'on veut faire avec un redressement de
notre structure tarifaire au niveau de l'éclairage public, c'est
traduire de façon plus fidèle l'évolution de nos
coûts en fonction de l'évolution des technologies aussi. Là
on parle de ce qu'on appelle, sans vouloir être trop technique, le
service complet d'éclairage. Dans le fond, avec le service complet
d'éclairage, ce qu'Hydro-Québec vend, c'est qu'elle assume
l'entretien, assume les appareils et vend des pieds-bougies, elle vend des
lumens - sans vouloir être trop technique. Avec les développements
technologiques des dernières années, avec l'arrivée de
l'éclairage au sodium à haute pression, on est capable de
produire, donc, des pieds-bougies de façon plus économique. Et le
redressement de la tarification de l'éclairage public veut prendre
ça en compte, veut traduire ces gains d'efficacité par un
ajustement.
Pourquoi on le fait sur une période de quatre ans? C'est pour ne
pas créer trop de... Les conséquences de ça, si on le
faisait rapidement, c'est qu'il y a beaucoup de municipalités qui
viendraient à notre porte pour demander des conversions, par exemple,
d'éclairage public. C'est pour étirer sur un certain nombre
d'années notre capacité de répondre à la demande en
termes de conversion de réseaux.
Mme Bacon: On sait qu'il y a un groupe de travail qui a
été formé, notamment avec les représentants de
l'industrie forestière, pour développer des avenues de solutions
sur le plan de la tarification de l'électricité. Ça
pourrait être profitable tant à l'industrie qu'à
HydroQuébec. Est-ce que vous pouvez nous dire aujourd'hui quelle est la
nature et l'état d'avancement des travaux? Est-ce qu'Hydro-Québec
considère comme réaliste le développement de mesures
tarifaires applicables dès 1992, comme ça nous avait
été demandé par l'Industrie forestière?
M. BoWuc: Nous avons commencé à travail- ler
conjointement avec les représentants de l'industrie des pâtes et
papiers pour identifier et essayer de trouver des modalités
d'application, à très court terme, de mesures qui permettraient
d'atténuer dans ce secteur-là l'effet de la hausse de tarif. Il y
a un certain nombre de mesures qui, du moins théoriquement, pourraient
être des mesures qui n'impliquent pas des déboursés
financiers additionnels pour Hydro-Québec et dont
bénéficient ces industries.
La première catégorie de ces mesures est un peu la
même que nous essayons d'appliquer partout, c'est une application
accélérée de programmes d'économie d'énergie
et d'efficacité énergétique dans ces entreprises. Il y a
eu un certain scepticisme au départ du côté des
entreprises, mais je crois qu'avec des exemples et des cas précis que
nous avons pu amener il se dessine actuellement un début de consensus
qu'une intégration très, très rapide de l'action des
papetières et d'Hydro-Québec pourrait, dès 1992, avoir des
effets relativement valables dans ce secteur-là; et nous continuons
à travailler avec les papetières dans ce sens.
Les travaux conjoints aussi... Identifier les possibilités
d'ajustement de la formule tarifaire en général, ce n'est pas
encore concluant en termes de possibilités d'application dès
1992, mais ça va dans le sens de certaines tendances que nous
étudions à plus long terme comme, par exemple, une tarification
un peu plus saisonnière, différenciée dans le temps, et
certaines autres modalités touchant la prime de puissance versus un prix
variable pour l'énergie. Nous travaillons très activement avec
les entreprises pour en arriver à identifier des possibilités
dans ce sens-là.
Et un troisième volet qui est également exploré,
c'est de travailler de façon beaucoup plus quotidienne ou hebdomadaire
à identifier des occasions qui permettent aux deux de
bénéficier de la situation énergétique. Par
exemple, si une papetière devait fermer pour une ou deux semaines et
qu'on trouvait un marché à l'extérieur du Québec,
un réseau voisin pour lui vendre l'énergie, on pourrait trouver
des situations qui sont des situations gagnant-gagnant qui permettent de
dégager une marge de manoeuvre financière additionnelle. Alors,
jusqu'ici, ces travaux semblent progresser de façon intéressante.
Il va rester à voir si des bénéfices valables vont pouvoir
en sortir, mais les pistes semblent prometteuses.
Mme Bacon: Les papetières nous disaient qu'elles avaient
perdu leur avantage concurrentiel en termes de prix
d'électricité, et il me semble que cette comparaison a
été établie avec leurs concurrents qui sont situés
dans le sud-est des États-Unis. Est-ce que vous pensez que c'est un cas
particulier ou, de façon générale, est-ce que l'avantage
concurrentiel du Québec se détériore en Amérique du
Nord, par exemple?
M. Boivin: Je pourrais répondre partiellement à la
question et je demanderai peut-être à M. Bolduc d'intervenir dans
un deuxième temps. Effectivement, la position concurrentielle de
l'énergie électrique, les tarifs normalisés
d'Hy-dro-Québec par rapport aux États américains, qu'ils
soient limitrophes ou que ce soit les États du sud des
États-Unis, cette position concurrentielle ne s'est pas
détériorée et il y a toujours, entre les tarifs grande
puissance d'Hydro-Québec et les tarifs équivalents, que ce soit
dans le nord-est des États-Unis ou dans le sud-est des
États-Unis, il y a toujours une marge très importante.
Maintenant, ce qui est arrivé dans le cas des pâtes et
papiers du côté américain, c'est que la très grande
majorité des installations de pâtes et papiers américaines
se sont dotées, au cours de la dernière décennie,
d'installations de cogénération. Vous connaissez sans doute la
législation Purpa américaine qui oblige les compagnies
d'électricité à acheter, au coût évité
- au coût marginal, je devrais dire -l'énergie produite par les
cogénérateurs lorsqu'il y a des besoins de vapeur à
rencontrer. À ce moment-là, ça veut dire, à titre
d'exemple, qu'une compagnie américaine dans le sud-est des
États-Unis - où le coût marginal évité serait
de l'ordre de 0,08 $ le kilowattheure - qui a une installation de
cogénération de 100 mégawatts, si c'est la capacité
requise par l'usine de pâtes et papiers, fa compagnie de papier peut
installer 100 mégawatts de cogénération, vendre ces 100
mégawatts-là à 0,08 $ et racheter 80 ou 100
mégawatts pour sa propre consommation, au tarif moyen en vigueur, qui
peut être de l'ordre de 0,05 $ ou 0,055 $. Donc, un profit très
important. La très grande majorité, effectivement, des
installations de cogénération américaines ont pris
naissance autour des usines de pâtes et papiers. On sait effectivement
qu'ici nous commençons - en fait, plus tard que les Américains -
du côté de la cogénération et nous avons un objectif
de 750 mégawatts.
Maintenant, il faut être bien conscients que, même ici, la
cogénération n'amènera pas, au niveau des usines de
pâtes et papiers ou d'autres types d'usines qui ont des besoins de
vapeur, le même bénéfice qu'elle peut amener à une
compagnie américaine, pour une raison - et c'est un petit peu ironique
de dire ça - c'est le résultat de l'avantage très grand de
l'hydroélectricité. À titre d'exemple,
présentement, si on prend le cas du complexe Grande-Baleine, nos
coûts marginaux en dollars 1992 sont à 0,046 $ du kilowattheure,
alors que, pour la plupart des entreprises américaines, les coûts
marginaux sont de l'ordre de 0,07 $ ou 0,08 $ du kilowattheure. Donc, nous,
nous allons acheter de l'énergie produite par les
cogénérateurs à 0,046 $ ou 0,045 $, alors que les
cogénérateurs du côté américain vont vendre
à la compagnie d'électricité à 0,07 $ ou à
0,08 $. Donc, il n'y a pas la même marge de profit, et ça
n'amènera pas autant de réduction des coûts
d'énergie globaux d'une usine qui a des besoins de vapeur de faire une
installation de cogénération au Québec que ça en
amène de faire une installation de cogénération du
côté américain.
Mme Bacon: Ça va.
Le Président (M. Audet): D'accord. M. le
député de Taschereau.
Rationalisation et économies (suite)
M. Leclerc: Merci, M. le Président. Je ne sais pas ce qui
fait rire le député de Joliette, mais enfin... Mon
collègue de Vimont, tout à l'heure, nous a parlé des
bottines; ça vous a fait dire que c'était un détail et
ça a fait sourire le député de Joliette. Sauf que, pendant
que nous autres, ici, sur la colline parlementaire, on parle de millions et de
milliards, il y a des gens de l'autre bord de la rue, dans mon comté,
qui coupent dans l'alimentation pour payer leur compte d'Hydro-Québec.
Et je pense qu'on leur doit de s'occuper de ces petits
détails-là, si c'est des détails, comme vous le dites.
Je pense qu'une entreprise comme la vôtre, qui a 20 000
employés, plus de 3 000 000 de clients, ça fait en sorte qu'un
détail coûte vite plusieurs millions. Et comme consommateur - pas
comme parlementaire mais comme consommateur - je suis à même de
remarquer quantité d'économies qu'Hydro-Québec pourrait
faire. Exemple, vous vous rappelez, M. Drouin, je vous ai écrit au cours
de l'année pour vous dire que je ne comprenais pas pourquoi
Hydro-Québec m'avait écrit personnellement pour m'offrir le
système de paiement nivelé, alors qu'Hydro-Québec
m'écrit toujours, six fois par année, pour m'envoyer mes comptes.
Je ne comprenais pas pourquoi Hydro-Québec devait m'écrire une
fois supplémentaire, en dehors de l'envoi régulier du compte que
je reçois chaque deux mois, pour m'offrir ça. Parce que je suis
persuadé que cet envoi-là a coûté à
Hydro-Québec, au minimum, 1 $: le timbre, l'enveloppe, la lettre, le
traitement. Je suis sûr qu'Hydro-Québec n'a pas envoyé
ça seulement à Jean Leclerc. On doit être quelques
centaines de milliers, pour ne pas dire peut-être 1 000 000, au
Québec, qui avons reçu cette lettre-là
d'Hydro-Québec. Si ça coûte 1 $ par enveloppe, ça
vient de coûter 1 000 000 $. Et je ne comprends pas pourquoi
Hydro-Québec a dépensé 1 000 000 $.
Même chose quand on reçoit son compte: on reçoit
toujours une enveloppe pour payer HydroQuébec. À l'oeil, 20 000
000 d'enveloppes par année. Je suis persuadé que la moitié
de ces enveloppes-là, toute recyclées qu'elles sont, se
retrouvent dans les poubelles, parce que de plus en plus de
Québécois paient dans les guichets automatiques, paient dans les
banques. Ils n'ont
pas besoin d'enveloppes. Alors, pourquoi des enveloppes recyclées
alors que la moitié se retrouve, de toute façon, dans les
vidanges? La vraie protection de l'environnement, c'est de ne pas en
dépenser inutilement. Ce n'est pas d'envoyer des enveloppes qui sont
recyclées.
Comme consommateur, je trouve qu'Hydro-Québec devrait resserrer
sur ces pratiques-là. Encore hier, le reportage de M. Morin faisait
état de la publicité d'Hydro-Québec sur les fameuses
petites ampoules fluorescentes. Écoutez bien, je ne suis pas
ingénieur, mais, si c'est vrai que ça ne donne pas grand-chose
d'acheter ces ampoules-là, il ne faudrait peut-être pas
dépenser dans les journaux - parce que la campagne doit coûter des
dizaines et peut-être une centaine de milliers de dollars - pour les
annoncer. Si on l'annonce, l'ampoule, on pourrait essayer de le faire par la
voie de la publicité coopérative. On fait de l'annonce pour ces
ampoules-là, il faudrait peut-être faire participer ceux qui en
fabriquent. Alors là je me retrouve avec un cas où c'est
Hydro-Québec qui dépense 100 % de la publicité pour ces
ampoules-là et je ne suis même pas sûr que c'est rentable
pour le consommateur. Je ne suis même pas certain que c'est rentable pour
Hydro-Québec. Mais ça risque d'être rentable pour ceux qui
les fabriquent. Et ce sont les seuls qui ne participent pas. (18 heures)
Donc, ce que je trouve, comme consommateur, c'est qu'Hydro-Québec
n'a pas épuisé tous les moyens à sa disposition pour
économiser. Et je me vois, moi, pour une semaine, directeur de votre
département de courrier - c'est peut-être ma formation dans une
PME, mais je suis habitué de compter des piastres et juste dans
votre département de courrier, là, il y a des centaines de
milliers de dollars à sauver dans un an. Et, moi, je vous demande au nom
des gens de mon comté, qui sont des gens pas trop fortunés, de
travailler là-dessus. Si on peut sauver 0,01 % de l'augmentation
grâce à ces détails-là, qu'on le leur fasse
sauver.
M. Boivin: M. le Président, M. le député de
Taschereau a parfaitement raison de s'inquiéter, en fait, de certaines
dépenses comme, d'ailleurs, à Hydro-Québec nous nous en
préoccupons énormément. Je vais être le dernier
à vous dire que... Dans une boîte de la grosseur
d'Hydro-Québec, je ne peux certainement vous donner aucune garantie que
nulle part, dans l'entreprise, il n'y a pas de gaspillage. Je pense que
personne dans une boîte de la grosseur de la nôtre ne pourrait
donner cette garantie-là. Je peux, par contre, vous garantir que, depuis
trois ans, il y a des efforts très importants qui ont été
faits et qui continuent de se faire pour rationaliser et surveiller nos
dépenses.
Maintenant, il faut faire attention, lorsqu'on porte ou pose un geste,
d'être certain que ce geste-là va effectivement nous apporter de
façon réelle une économie et non pas en fait un geste qui
pourra tout à l'heure se transformer en des coûts additionnels.
Vous avez mentionné avec raison, je crois, parce que la question a
déjà été soulevée par certains de nos
clients, la correspondance ou les offres que nous avons faites en dehors de
l'émission de la facture pour inciter notre clientèle à se
joindre au mode de versements égaux. En 1989 ou en 1990, nous avions 5 %
de notre clientèle qui était sur le mode de versements
égaux. À plusieurs reprises, nous avons utilisé des
insertions dans les factures ou encore des messages imprimés ou
dactylographiés sur la facture pour inciter notre clientèle
à se joindre ou à souscrire au mode de versements égaux.
Ça n'a pas donné de résultats très importants.
Des sondages nous ont indiqué que, si nous voulions rejoindre
vraiment la clientèle pour une opération de ce genre-là,
il fallait envoyer des lettres personnalisées, ce que nous avons fait.
Ce n'est pas le seul outil que nous avons utilisé, mais effectivement,
si vous regardez à la fin de 1991, nous avons atteint un taux de 27 % de
notre clientèle qui utilise le mode de versements égaux.
Maintenant, vous me direz: Pourquoi vouloir que la clientèle
utilise le mode de versements égaux?
Une voix: C'est ça, la question.
M. Boivin: II y a des avantages très importants au niveau
des économies pour l'entreprise. Vous me direz: Vous êtes
obligés d'émettre 12 factures par année plutôt que
6. C'est exact. Par contre, les encaissements se font plus rapidement et se
font de façon tout à fait systématique, et les
économies sont de beaucoup supérieures aux coûts qui sont
impliqués. Deuxièmement, le mode de versements égaux
s'avère, particulièrement dans les périodes
économiques difficiles et pour les familles à plus faibles
revenus, un moyen très pratique d'avoir un budget uniforme et de
rencontrer les paiements. Donc, ça enlève une pression ou des
problèmes de recouvrement à l'entreprise, si vous voulez.
Ça limite les problèmes de recouvrement. Et, là encore, il
y a des économies très importantes.
Donc, le 1 000 000 $ ou le 1 500 000 $... Vous remarquez que je vous
cite le chiffre. Ce n'est peut-être pas le bon chiffre parce que je ne
l'ai pas avec moi, mais l'argent que nous avons dépensé pour
faire la promotion du mode de versements égaux, nous croyons, est de
l'argent qui a été dépensé de façon
très rentable parce que les bénéfices sont de beaucoup
supérieurs à l'argent que nous avons mis.
Du côté des enveloppes, nous sommes à regarder
effectivement d'envoyer des enveloppes pour être capable d'envoyer des
enveloppes seulement à nos clients qui en requièrent parce
qu'effectivement il y a à peu près 50 % de notre
clientèle qui nous paient par la poste et 50 % paient du
côté des banques. Donc, ceux qui paient aux banques ou aux caisses
populaires n'utilisent pas l'enveloppe-retour. Mais, présentement, notre
système de facturation ne nous permettrait pas de faire cette
segmentation-là et de modifier le système de facturation à
HydroQuébec. C'est quand même une opération très
majeure et nous sommes en train de regarder... Je vous dirais qu'il n'y aura
probablement pas de développement pratico-pratique d'implantation dans
ce domaine-là avant à peu près deux ans. Enlever les
enveloppes complètement dans des périodes où nous avons
autant de problèmes de recouvrement que nous en avons
présentement, moi, je vous prédis - et, d'ailleurs, nos sondages
nous l'indiquent de façon très claire - qu'à ce
moment-là l'économie va être largement compensée par
des pertes additionnelles qui sont de beaucoup supérieures au coût
des enveloppes.
M. Leclerc: Ça, ça veut dire que pour deux ans, je
comprends que 50 % peut-être des 20 000 000 d'enveloppes qui sont
envoyées vont rester dans les vidanges. C'est ça que je
comprends?
M. Boivin: C'est exact. Mais si vous regardez... Je dois vous
dire, par contre, à notre décharge, là, que je ne connais
pas présentement de compagnie, que ce soit vos cartes de crédit,
que ce soit Bell Canada ou que ce soit les compagnies de pétrole pour
votre carte de crédit pour l'essence, toutes les compagnies mettent une
enveloppe-réponse parce qu'on sait que sans enveloppe-réponse il
y a une partie de notre clientèle qui ne nous paiera pas. Là, vos
frais de collection sont énormes comparés au coût d'une
enveloppe qui est d'un cent ou une fraction de cent. Je n'en connais pas le
coût exact.
Le Président (M. Audet): Merci. Je vais maintenant
reconnaître l'Opposition. M. le député de Bertrand.
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Simplement pour
conclure sur la discussion que j'avais avec votre vice-président des
finances tout à l'heure. Si je regarde les prévisions du taux de
change du dollar canadien, je vois que vous êtes plutôt des
partisants de M. Crow. Si je regarde le taux de 0,84 $ pour 1992 et 0,82 $ pour
1993, vous êtes sans doute conscient que les associations des
manufacturiers, les associations d'exportateurs de toute sorte au Canada et au
Québec de même que tous les premiers ministres des provinces
incitent le gouvernement fédéral, la Banque du Canada à
faire baisser le taux de change canadien pour relancer l'économie
canadienne.
D'autre part, toute baisse importante du taux d'intérêt au
Canada - et cette baisse est nécessaire pour la relance de
l'économie - va se traduire inévitablement par un déclin
plus substantiel du dollar canadien que ce que vous avez projeté ici, du
moins pour 1992 et 1993. Ce qui veut dire que ça risque de se traduire
par un manque à gagner au niveau de vos revenus et de vos
prévisions. Comment entendez-vous combler ce manque à gagner?
Allez-vous refiler la différence aux consommateurs?
M. Labonté: Si je peux me permettre-Michel Labonté.
Comme j'essayais d'expliquer tantôt, par rapport au dollar
américain qui est le gros de notre exposition aux risques de change,
nous sommes à peu près en équilibre ou à peu de
choses près par le biais de la couverture par les revenus. Ce qui veut
dire que quand la perte de change augmente, si le dollar canadien se
révèle être plus faible, ça va être largement
compensé par une hausse de nos revenus qui, eux, sont libellés en
dollars américains. C'est-à-dire que les ventes aux exportations
que nous faisons, qui sont libellées en dollars américains, que
nous avons dans nos revenus, sont au taux que vous voyez là. La
même chose pour les ventes aux alumineries; elles sont au taux que vous
voyez là. De sorte que si les flux de dépenses et les flux de
revenus sont équilibrés ou à peu près
équilibrés, ce qu'on perd d'un côté,
c'est-à-dire que, si la perte de change augmente, vous allez avoir une
augmentation des revenus qui vient contrebalancer. C'est le principe de la
couverture par les revenus.
Donc, avant les nouveaux emprunts en dollars américains, nous
sommes relativement neutres au cours des prochaines années. Mais
ça se voit à deux postes. Vous ne le verrez pas au poste des
revenus. Vous verrez des revenus peut-être plus élevés. On
ne vous dira pas que c'est l'effet du taux de change parce que, sur le plan
comptable, ils prennent le taux au moment où ces deniers sont
encaissés; si le revenu rentre le 15 du mois, ils vont le prendre le 15
du mois. Donc, ça se manifeste des deux côtés: des
dépenses peut-être plus grandes, mais des revenus également
plus élevés pour les revenus qui sont libellés en dollars
américains. C'est le principe de la couverture par les revenus.
M. Beaulne: Donc, pour terminer, ce que vous dites, c'est que les
consommateurs ne doivent pas se préoccuper des fluctuations du taux de
change à la hausse ou à la baisse, surtout à la baisse
dans ce cas-ci.
M. Labonté: C'est exact.
Le Président (M. Audet): Merci. Alors, M. le
député de Joliette.
M. Chevrette: Moi, M. le Président, dans un premier temps,
je voudrais faire un commentaire. Après ça, je demanderais des
dépôts de documents à Hydro-Québec.
Le commentaire est le suivant: Je constate que le gouvernement attache
beaucoup d'importance pour essayer de sauver sur le nombre de paires de bottes,
sauver sur le dos des employés, sauver sur les enveloppes. Un
dixième de 1 % ici et là. Toutes leurs questions roulent autour
de ça depuis ce matin. Je comprends que c'est important et je pense
qu'Hydro devrait faire un effort effectivement pour le faire. Moi, ce que
crains, c'est que, si vous le faites, on va venir le manger par une taxe. Parce
que le 1,9 % des services de dette sur les frais de garantie, ça, c'est
direct, c'est perpétuel. Mme la ministre disait: Si on ne vous donnait
pas la garantie? On l'a toujours donnée la garantie, mais on la donnait
gratuitement.
Il faudrait peut-être faire attention quand on se compare à
l'Ontario. L'Ontario a les frais de garantie, mais elle n'a pas de dividendes
quand elle fait de l'argent. Ici, c'est un choix qui avait été
fait antérieurement; supplément des dividendes au lieu d'imposer
des frais. Là, si j'ai bien compris, il y aura les frais et les
dividendes. Quand on se compare, il faut regarder tout le portrait et non pas
en regarder seulement une partie.
Évolution des prix du magnésium et de
l'aluminium
Est-ce que vous pourriez vous engager, M. le président, à
déposer ici aux membres de cette commission l'étude de
faisabilité, si vous me permettez l'expression, qui a été
faite avant la signature des contrats secrets, autant pour le magnésium
que pour l'aluminium, en ce qui regarde la tarification escomptée ou les
projections escomptées jusqu'en 2013? Vous avez fait ça à
Hydro-Québec?
M. Drouin: L'étude de faisabilité...
M. Chevrette: Bien, je dis faisabilité. Vous avez fait des
calculs, vous avez une étude avant de recommander... Moi, j'appelle
ça faisabilité parce que l'expression que vos avocats utilisent,
en anglais, ça se traduit à peu près par étude de
faisabilité, mais je suppose que c'est étude de projection de
tarifs jusqu'en 2013, autant pour le magnésium que pour l'aluminium.
M. Drouin: Globalement?
M. Chevrette: Global, oui. Année par année, avec
les courbes.
M. Drouin: Est-ce que ce n'est pas ça qu'on a
déposé ce matin? Vous savez, on vous a déposé, ce
matin, la formule de partage de risques et le suivi des résultats et
explications. Est-ce que vous...
M. Chevrette: Je n'ai pas ça, moi. C'est que ceux qui ont
accès à vos documents, qui en ont eu, disent que, même dans
vos projections, vous ne prévoyez pas, vous n'anticipez pas, au niveau
du magnésium, par exemple, une rentabilité avant 2013. Je ne vois
pas ça dans vos documents de ce matin.
M. Boivin: M. le Président, pour répondre à
la question du député de Joliette, je pense que nous ne pouvons
nous engager à déposer les études de rentabilité
des contrats à partage de risques parce que ces études de
rentabilité sont automatiquement attachées aux contrats et vous
avez fait remarquer avec raison que ces contrats-là sont secrets, pour
le moment du moins. À ce moment-là, nous ne pouvons nous engager
à déposer les études de rentabilité puisque,
automatiquement et en même temps, nous révélerions le
contenu du contrat. Dans le cas du contrat de Norsk Hydro, les études
ont été déposées effectivement parce que le contrat
a été rendu public.
M. Chevrette: C'est parce que, dans l'étude de Norsk
Hydro, l'analyse qui est faite, c'est marqué: Dans le scénario
optimiste, oui, comme dans le scénario pessimiste, il n'y aura jamais de
problème, vous n'atteindrez jamais le tarif L C'est pour ça que
je pensais que vous aviez fait des évaluations pour contredire cette
argumentation qui est faite devant la commission américaine.
M. Drouin: C'est parce que les études qui ont
été déposées devant la commission américaine
ne sont pas les études qui ont été faites au moment de la
signature du contrat. C'est une évaluation qui a été faite
dans le temps en tenant compte de la conjoncture économique au moment
où l'étude a été faite. Alors, c'est vrai que cette
étude-là ne donne pas de rentabilité pour le contrat tel
que vous le mentionnez ou équivalant au tarif L, mais ce n'est pas
l'étude qui a été déposée au moment de
l'adoption de la résolution du conseil d'administration qui adoptait le
contrat de Norsk Hydro.
M. Chevrette: C'est bien écrit: «The faisability
study was collected as HQ, HydroQuébec, exhibit no 11». Tout ce
qui manque, c'est des chiffres calculés entre tant pour cent et tant
pour cent. Ils ne l'écrivent naturellement pas, probablement pour ne pas
divulguer les coûts. Mais si Hydro-Québec pouvait déposer
également ces études de faisabilité en disant... Moi, je
dis «faisabilité» parce que j'ai traduit de l'anglais au
français. Il y a sûrement du monde qui l'a vue pour qu'on puisse
nous dire que, dans un cas comme dans l'autre, aucun des deux scénarios,
«the pessimistic forecast», vous n'y arriverez jamais, ni par
l'optimisme, ni par le pessimisme. Qu'est-ce qui arrive? (18 h 15)
M. Boivin: Comme vous l'a expliqué M. Drouin tantôt,
le contrat de Norsk Hydro, d'abord, ce n'est pas le contrat qui est
nécessairement le plus rentable pour Hydro-Québec, mais ce n'est
pas un contrat, en fait, où on va, en moyenne, sur la durée du
contrat, en bas de la marge bénéficiaire. Alors, tant que, dans
un contrat, on a une marge bénéficiaire positive, il reste qu'on
ne perd pas d'argent, mais on peut vendre en bas du tarif normalisé
grande puissance. C'est ce qui est indiqué. Maintenant, les
études, si ma mémoire est bonne, qui ont été
déposées devant la Commission du commerce international
américaine tiennent compte de la première période du
contrat effectivement de Norsk Hydro. Vous connaissez le contrat - d'ailleurs,
il a été rendu public - qui prévoyait, pendant les
premières années, des rabais tarifaires de l'ordre de 60 %.
Alors, lorsqu'on tient compte effectivement de ces rabais tarifaires de 60 %
pendant la première période du contrat et qu'on projette les
revenus du contrat sur la durée du contrat, il est évident, en
fait, qu'à ce moment-là on va être en moyenne, en tenant
compte de ces premières années, en bas du tarif normalisé
grande puissance. Mais je serais le dernier à vous dire que ce n'est pas
possible que sur la durée du contrat, dépendant de
révolution des prix du magnésium, il n'y ait pas des
années et même plusieurs années où, effectivement,
nous allons vendre au-delà du tarif L
M. Chevrette: Mais même dans les prévisions de
1988... parce que vous avez quatre étapes dans le contrat de Norsk
Hydro.
M. Boivin: Exact.
M. Chevrette: Vous avez parlé de la première, qui
est de janvier 1988 à mars 1994. Impossible d'atteindre les
prévisions du tarif L.
M. Boivin: À cause des rabais tarifaires.
M. Chevrette: De 1994 à 2005, c'est assez long ça,
impossible, d'avril 1994 à décembre 2005. Après ça,
vous avez de janvier 2006 à décembre 2009, encore en bas du tarif
L. De janvier 2010 jusqu'à décembre 2013, c'est possible, il n'y
a rien de sûr, puis la différence va être assez faible que
ce n'est pas sûr que ça atteigne L. Est-ce que c'est bien
ça la situation des quatre étapes?
M. Boivin: Oui, grosso modo, de mémoire, là, c'est
la structure du contrat.
M. Chevrette: Ce n'est pas un contrat trop, trop payant,
ça!
M. Boivin: Mais il n'est pas nécessairement, comme on a
dit là... c'est parce que dans le tarif L ce n'est pas le contrat le
plus payant, mais dans le tarif L nous comptons une marge
bénéficiaire de l'ordre de 13 % et c'est cette marge-là
que nous mettons à risque dans ce contrat-là.
M. Chevrette: Dans le cas de i'aluminerie, des alumineries,
étant donné qu'ils ont été signés avant la
chute de l'empire URSS et qu'il y a eu un dumping de 1 000 000 de tonnes
d'aluminium sur le marché, quelque chose comme, ça
représente, si ma mémoire est fidèle, 32 % ou quelque
chose du genre, là. Est-ce que ce dumping-là vient changer les
visées d'Hydro-Québec et du gouvernement, maintenant que
ça s'est produit par rapport au moment où vous l'avez
signé?
M. Boivin: À court terme, il est évident, en fait,
qu'au moment où on se parle, la fin de l'année 1991 et le
début de l'année 1992, les prix internationaux de l'aluminium
sont dans un creux historique. Ça n'avait pas été
prévu, mais je vous ai dit ce matin que nous sommes quand même
à peu près au plancher des pires années que nous avions
prévues. Bon. Alors, nous sommes à l'intérieur de la
fourchette de prévisions que nous avions faites. Maintenant, il est
évident que si l'on considère l'historique de l'évolution
des prix de l'aluminium, habituellement, les creux sont de courte durée.
Le creux actuel, qui est provoqué par deux phénomènes,
d'une part, la récession à l'échelle mondiale qui a
ralenti la demande pour l'aluminium et, d'autre part, la mise sur le
marché occidental, l'arrivée sur le marché occidental,
dis-je, de 1 000 000 de tonnes de la part de la Russie, bien, ces deux facteurs
jumelés font qu'effectivement le prix de l'aluminium est tombé
à son plus bas niveau historique et que ce creux-là va
probablement durer plus longtemps que dans le passé, les creux
historiques que nous avons connus dans le passé.
Maintenant, comme dans tous les marchés des "commodities",
effectivement, la situation au fur et à mesure que le marché va
être en expansion et va absorber cette production additionnelle mise sur
le marché par les Russes, graduellement, le prix de l'aluminium devrait
se rétablir.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez fait des projections à
partir du fait qu'il arrive un tonnage aussi important dans le décor qui
était inattendu? Est-ce qu'au niveau d'Hydro-Québec on a
recommencé à faire des prévisions parce que les pertes
peuvent être beaucoup plus lourdes que celles anticipées au moment
où vous les avez faites? On a envahi le marché d'une façon
imprévisible: 1 000 000 de tonnes, c'est quelque chose. Est-ce que vous
avez fait des projections, par exemple, sur les quatre, cinq prochaines
années par rapport à celles que vous aviez faites au moment
où vous avez signé des contrats?
M. Boivin: D'abord, je devrais vous dire qu'à
l'Hydro-Québec on ne se prétend pas les
experts dans l'évolution du marché de l'aluminium. Les
projections que nous utilisons sont les projections effectuées par les
grandes maisons à l'échelle mondiale, Chase Econometrics, etc.
Nous faisons une moyenne, en fait, à partir des différents
scénarios. Ce que je peux vous dire, c'est qu'à long terme les
prévisions des principales maisons qui se préoccupent de
l'évolution des prix de l'aluminium n'ont pas varié sensiblement.
À toutes fins pratiques, elles sont les mêmes qu'elles
étaient avant l'arrivée sur le marché de l'aluminium en
provenance de la Russie. Sauf que pour la période de deux ou trois ans,
comme je vous le dis, le creux est prévu demeurer plus longtemps. Mais
la situation devrait se rétablir parce que tout ce que ça va
faire, effectivement, c'est que les compagnies qui prévoyaient des
nouvelles installations, soit pour remplacer des installations
désuètes ou pour faire face à de la demande additionnelle,
vont reporter à deux, trois, quatre ou cinq ans, en fait, les mises en
service de ces nouvelles installations.
Si vous regardez à travers le monde présentement, si mon
information est bonne, il n'y a pas de nouvelles installations d'aluminerie qui
sont au stade de la planification. On est en train de compléter un
certain nombre de constructions de lignes d'aluminium, de lignes de cuve,
particulièrement ici au Québec, mais il n'y a pas de nouvelles
installations qui sont planifiées pour être mises en construction
dans les 15 ou 18 mois qui viennent. Donc, les producteurs d'aluminium
retardent leurs prévisions d'investissement jusqu'à ce que le
marché puisse absorber la production additionnelle qui est venue de la
part de la Russie.
M. Chevrette: Dans votre exposé de ce matin, M. Drouin,
vous disiez, à la page 13: «Nous sommes conscients du fait que
cette proposition tarifaire - c'est-à-dire 5,5 %, je suppose - comporte
certains risques financiers. En effet, il faut se rappeler que le plan de
développement», etc., etc. Vous dites que cela représente
des risques financiers. À une réponse donnée par M. Boivin
un peu plus tard dans la journée, au moment ou Mme la ministre lui
demandait: Est-ce possible de penser à couper, par exemple, X % ou
améliorer telle situation? M. Boivin, qui est président d'Hydro,
l'autre, qui est président du conseil d'administration, président
exécutif... Est-ce qu'il n'y a pas une contradiction entre vous deux en
disant que, pour vous, c'est possible de le faire, et l'autre dit: Même
une tarification de même comporte des risques. Donc, selon la
réponse que vous avez donnée, êtes-vous prêt à
assumer le risque ou si vous allez être plus risqué que ce que le
grand président dit? Je ne sais pas, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Le grand et le petit. Pour- riez-vous
démêler le semblant de contradiction? Parce que vous le dites
vous-même à la page 13 - ce n'est pas moi qui l'invente - vous
dites qu'il y a des risques financiers.
M. Drouin: Oui. C'est parce que - et je l'ai
répété cet après-midi et je ne pense pas du tout
que ça soit en contradiction avec ce que M. Boivin a dit - c'est que, en
fait, on aurait pu prendre des marges de manoeuvre à certains endroits
et on aurait peut-être dû, en bons gestionnaires, prendre des
marges de manoeuvre qui auraient effectivement contribué à
demander une hausse tarifaire plus élevée. J'ai cité,
à titre d'exemple, le fait que nos dépenses pour la faible
hydraulicité sont prévues se terminer en septembre et que, s'il
s'avérait que ça ne donne pas les résultats qu'on avait
prévus, on serait obligés de continuer ces
dépenses-là et peut-être d'ajouter 80 000 000 $
additionnels de dépenses pour l'année courante. En faisant cet
état-là, j'ai mentionné que notre taux de couverture
d'intérêt pour 1992, dans les conditions de la demande tarifaire
que l'on vous fait est à 1,06 %, ce qui est très proche de 1
%.
Par ailleurs, notre taux d'autofinancement est à 27 % alors qu'on
devrait être à 30 %. Vous l'avez mentionné vous-même,
au niveau de notre taux de capitalisation qui, normalement, est le
déclencheur pour le paiement des dividendes, il devrait être de 25
% au moins. Il est à 23,5 %. Alors, tout ce que j'ai dit dans mon
exposé de ce matin était de dire: L'entreprise a fait un effort
pour se mettre réellement un peu à la marge par rapport à
notre situation financière de façon à amener une
augmentation de tarifs qui soit la moins grande possible. Dans ce
sens-là, je ne pense pas que j'aie contredit en rien l'exposé de
M. Boivin sur le même sujet. Alors, je demanderais à M. Boivin
s'il est d'accord. Ha, ha, ha!
M. Boivin: Je suis parfaitement d'accord parce qu'effectivement
M. Drouin parle du risque global. Moi, ce dont j'ai parlé, en fait,
c'est des compressions additionnelles du côté des dépenses
d'exploitation, et je vous ai fait état des impacts possibles de
compressions additionnelles. Je vous ai indiqué qu'en tant que
responsable de l'exploitation je ne pensais pas que c'était une avenue
qui était satisfaisante.
Maintenant, il faut se rappeler que, dans les dépenses totales
d'Hydro-Québec, les dépenses d'exploitation représentent
effectivement à peu près 30%. L'autre 70%, il n'est pas sous
notre contrôle à court terme. Je veux dire, on a un certain
contrôle à moyen terme, mais il n'est pas sous notre
contrôle à court terme, et les risques globaux de l'entreprise
touchent non pas seulement les dépenses d'exploitation, mais touchent
tous les autres secteurs de dépenses de l'entreprise. Et il y a la
faible hydraulicité, il y a l'évolution du volume de ventes,
également. Nous
avons une prévision de ventes qui, nous le croyons, est
réaliste. Je vais simplement vous donner une indication: par exemple, le
facteur température. Une légère variation par rapport
à la température moyenne dans une année donnée peut
facilement faire varier nos ventes de 70 000 000 $à80 000 000 $.
Alors, ce sont des risques que nous devons être capables de
couvrir. Comme l'a dit M. Drouin, pour couvrir tous ces risques-là, en
période normale, nous aurions dû demander, effectivement, 6,8 %
d'augmentation et nous avons demandé 5,5 % parce qu'on dit: Dans une
période difficile, on va absorber une partie de ce risque-là.
Donc, il n'y a pas, à mon point de vue, de contradiction.
M. Chevrette: Ce matin, Mme la ministre faisait
référence, dans son discours, à la page 13, à la
production privée d'électricité. En décembre
dernier, dix sites ont été octroyés, dit-elle, etc. Vous
vous engagez à racheter l'électricité? À quel
prix?
M. Drouin: Au taux marginal de notre projet le plus près,
qui est normalement celui de Grande-Baleine. M. Bolduc.
M. Bolduc: 0,04 $ en dollars de 1991 indexé au taux
d'inflation au Québec, ce qui correspond à notre prévision
du coût de notre propre construction. Donc, ces projets-là sont
traités de façon égale. Dès qu'ils peuvent entrer
en concurrence avec nos propres projets au même prix, nous acceptons,
nous négocions des contrats pour la fourniture
d'électricité avec ces promoteurs.
M. Chevrette: Ça représente combien de potentiel
d'achat, la somme globale que ça représente pour
Hydro-Québec?
M. Bolduc: Le besoin total qu'Hydro-Québec a actuellement
inscrit dans ses projets de développement, c'est 750 MW de production
privée pour rencontrer l'accroissement de la demande, une fois
terminée la phase 2 du complexe La Grande, vers 1995, jusqu'à
l'arrivée du projet Grande-Baleine ou des projets suivants de
développement. Il y a un besoin de 750 MW qui sera comblé par la
production privée; à l'intérieur de ces 750 MW-là,
nous donnons priorité absolue aux petits projets
hydroélectriques, tous ceux qui sont octroyés par le
ministère en termes du programme fait par le ministère ou ceux
qui nous sont proposés par d'autres promoteurs sur des rivières
du domaine privé qui sont retenus. Il semble actuellement qu'un
potentiel pouvant atteindre, je dirais, jusqu'à 200 MW de petites
centrales hydrauliques pourrait venir combler une partie des 750 MW totaux qui
représentent notre objectif de production privée.
Au-delà de ces 200 MW de petites centrales hydrauliques, la
production privée prend la forme de projets de biomasse,
d'incinérateurs et, éventuellement, des projets de
cogénération qui sont associés à des entreprises
industrielles qui utilisent la vapeur. Nous avons fait des appels de
propositions pour combler ces besoins-là. Nous avons reçu des
propositions qui dépassent largement notre objectif, actuellement, et
nous avons établi des critères de sélection qui sont
basés sur l'efficacité énergétique dans le but
d'obtenir le maximum de rendement en termes de l'énergie utilisée
et, par conséquence, en termes d'impact minimum sur l'environnement.
Donc, pour l'instant, nous sommes dans la phase de négociation avec un
groupe de projets qui ont été sélectionnés, et ces
négociations-là devraient arriver à échéance
dans les mois qui viennent.
M. Chevrette: Vous avez eu pour 8000 MW, je pense, de
propositions. Ça, on sait ça. On connaît également
la liste parce qu'Hydro-Québec, par l'entremise de la ministre, nous a
fait parvenir l'ensemble des projets. Vous nous avez aussi fait parvenir
dernièrement, parce qu'on vous l'a demandé, les critères
de sélection, comme vous venez de parler. Mais les critères de
sélection, tels que décrits sur papier, je vous dis que ça
ne donne pas grand-chose pour un profane qui n'a pas de spécialistes
comme vous autres pour justifier tout comme vous le faites sur tous les sujets
qu'on vous demande.
Je voudrais savoir, moi, dans l'octroi de la cogénération
en particulier, si vous allez favoriser tous les projets
hydroélectriques au préalable, c'est-à-dire énergie
qui est à partir de l'eau, avant de penser à octroyer des
mégawatts à partir de produits polluants. Est-ce que c'est une
directive claire, formelle, arrêtée à
HydroQuébec?
M. Drouin: Ça, c'est clair.
M. Chevrette: Est-ce que vous avez le droit de refuser,
même si vous aviez de la pression par exemple du ministère, pour
octroyer un contrat à quelqu'un qui serait bien vu du
ministère?
Des voix:...
M. Chevrette: Kruger, par exemple.
Le Président (M. Audet): Alors, nous avons
dépassé l'enveloppe de temps...
M. Chevrette: C'est peut-être mieux! Des voix: Ha,
ha, ha!
Le Président (M. Audet): La commission suspendre ses
travaux pour reprendre à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 32)
(Reprise à 20 h 5)
Le Président (M. Bordeleau): Alors, si vous voulez prendre
place, on va commencer la séance. Je désire déclarer la
séance de la commission de l'économie et du travail ouverte.
Comme ça a été convenu ce soir, nous allons traiter de
l'offre et de la demande. Alors, il y aura 10 minutes de présentation de
la part des représentants d'Hydro-Québec et, ensuite, on
procédera par alternance, c'est-à-dire qu'on aura 2
périodes de... L'Opposition et le gouvernement auront chacun 2
périodes de 30 minutes, et la dernière de 25 minutes pour se
terminer à 23 heures.
Alors, je laisse maintenant la parole aux représentants
d'Hydro-Québec pour faire une présentation sur l'offre et la
demande.
M. Orouin: Alors, c'est M. André Delisle, qui est
vice-président à la planification générale.
L'offre et la demande
M. Delisle (André): Merci. On vous a passé copie du
texte que je vais lire. Le but de cette présentation est de faire le
point sur les changements ayant eu un effet significatif sur l'équilibre
offre-demande depuis le plan de développement 1990-1992, Horizon 1999.
En plus de présenter les faits saillants qui ont marqué la
période 1990-1992, nous aborderons les principaux changements
prévus à l'offre et à la demande pour la période
1992-2000. Les changements à long terme, c'est-à-dire
au-delà de l'an 2000, seront abordés dans le prochain plan de
développement qui paraîtra en novembre 1992.
En ce qui concerne la demande d'électricité pour la
période 1992-2000, les écarts énergétiques entre la
planification actuelle et celle du dernier plan sont de l'ordre de 37 000 000
000 de kWh. La baisse des besoins prioritaires au Québec, pour 23 500
000 000 de kWh, et des ventes à l'exportation moins importantes que
prévues, pour 27 700 000 000 de kWh, est en partie compensée par
des économies d'énergie moins grandes qu'anticipées,
c'est-à-dire 14 600 000 000 de kWh de moins.
À court terme, la récession a provoqué un certain
recul de la demande au Québec, creusant ainsi un écart par
rapport à ce qui était prévu dans le dernier plan. Cette
baisse s'est d'abord manifestée en 1991, les ventes
d'électricité régulières au Québec ayant
été de 127 300 000 000 de kWh au lieu de 134 200 000 000 de kWh.
Cela s'explique par l'ampleur de la récession qui touche surtout le
secteur manufacturier et, en particulier, l'industrie des pâtes et
papiers. Même si les ventes sont inférieures aux
prévisions, elles ont enregistré une légère
croissance de 1 300 000 000 de kWh entre 1990 et 1991.
Pour les mêmes raisons qu'en 1991, les ventes
d'électricité régulières au Québec en 1992
seront aussi plus faibles que prévues, 134 300 000 000 de kWh
plutôt que 139 400 000 000 de kWh. Notons que les ventes
d'électricité devraient augmenter de 7 000 000 000 de kWh en 1992
par rapport à celles de 1991, augmentation principalement reliée
à de nouveaux établissements dans le secteur de la fonte et de
l'affinage.
À plus long terme, les fermetures d'usines et
l'accélération des projets de recyclage dans l'Industrie des
pâtes et papiers provoqueront un fléchissement de la demande
prévue dans le dernier plan, d'ici la fin du siècle. Par contre,
l'augmentation de l'immigration et la hausse plus importante que prévu
du taux de natalité contribueront à ramener la demande, à
l'horizon 2000, à un niveau comparable à celui du plan 1990-1992.
Sur l'ensemble de la période 1992- 2000, la demande au Québec
aura été inférieure de près de 24 000 000 000 de
kWh par rapport au dernier plan.
L'objectif d'économie d'énergie à long terme a
été révisé à 9 300 000 000 de kWh par an
à l'horizon 2000, alors qu'il était de 9 000 000 000 par an
à l'horizon 1999, dans le plan 1990-1992. Rappelons que, dans le plan
1990-1992, l'objectif annoncé était de 12 900 000 000 de kWh en
1999. De ce total, 9 000 000 000 étaient directement liés
à nos programmes commerciaux et 3 900 000 000 de kWh correspondaient
à des économies dites tendancielles. Quoique l'objectif à
long terme ait été confirmé, on s'attend à ce qu'il
soit atteint un peu plus lentement qu'anticipé. Ainsi, les
économies d'énergie seront moindres que prévu durant la
première moitié de la décennie, atténuant donc la
baisse de la demande escomptée durant cette période.
Au cours des deux dernières années, nous avons
concentré nos efforts sur la sensibilisation du public et sur
l'établissement de relations étroites avec nos partenaires,
c'est-à-dire les manufacturiers, les distributeurs et les
détaillants de produits économiseurs. Le développement des
programmes commerciaux nous a aussi largement occupés. Depuis 1990, nous
avons lancé en tout six nouveaux programmes appuyés par trois
campagnes d'information et de sensibilisation. Le tableau qui suit
présente l'ensemble des programmes commerciaux déjà
lancés ainsi que ceux prévus dans un proche avenir.
Le projet d'efficacité énergétique aura un
rôle prépondérant dans le maintien de l'équilibre
entre l'offre et la demande au cours de la présente décennie. En
effet, en faisant abstraction des projets de La Grande, phase II,
c'est-à-dire Brisay, LA 1 et LG 1, déjà en cours de
réalisation, les économies représenteront environ 40 % des
moyens mis en oeuvre pour maintenir l'équilibre entre l'offre et la
demande d'ici l'an 2001. Dans ce contexte, si le projet d'efficacité
énergétique ne devait se réaliser que partiellement,
l'entreprise ne disposerait que de très peu
de solutions de rechange pour répondre aux besoins
énergétiques de ses clients.
Certaines modifications ont également été
apportées à l'objectif des ventes d'électricité
à l'exportation, entraînant une réduction des ventes
prévues de l'ordre de 28 000 000 000 de kWh pour la période
1992-2000. La puissance initialement prévue au contrat avec les Vermont
Joint Owners, de 450 MW, a été réduite à 374 MW.
Par ailleurs, les surplus d'énergie qu'anticipent les États du
nord-est des États-Unis ont amené Hydro-Québec et la New
York Power Authority à reporter au 30 novembre 1992 la date ultime
à laquelle l'une ou l'autre des parties pourra annuler le contrat de
1000 MW. Toutefois, les discussions se poursuivent toujours de façon
à préciser les dates probables du début des livraisons.
Notons que pour l'exercice de planification 1992, le début des
livraisons a été fixé comme hypothèse en 1998.
Par ailleurs, mentionnons que, dans le présent cycle de
planification, nous n'avons retenu que les engagements contractuels à
l'exportation déjà signés, alors que le plan 1990-1992
présentait un objectif de 3500 MW à long terme. Cette
modification entraîne le report des mises en service des nouvelles
centrales prévues au-delà de l'an 2000. Le prochain plan
réexaminera l'objectif de ventes à l'exportation à long
terme.
Hydro-Québec connaît depuis 1985 le plus long cycle de
faible hydraulicité de son histoire. Sur la base de son parc actuel, le
déficit énergétique cumulatif sur cette période par
rapport à l'hydraulicité moyenne correspond à environ 120
000 000 000 de kWh, soit un peu moins que la consommation
québécoise d'une année. À elle seule,
l'année 1991, marquée par une très faible
hydraulicité, représente un déficit de 26 000 000 000 de
kWh.
Pour pallier à cette très faible hydraulicité, les
achats auprès des réseaux voisins ont débuté
dès l'automne. Ces achats totalisent environ 18 000 000 $ pour
l'année 1991. Les moyens exceptionnels seront intensifiés au
cours de l'année 1992 et devraient atteindre environ 5 000 000 000 de
kWh, pour un total de 142 000 000 $. Ces moyens exceptionnels sont rendus
nécessaires pour maintenir le niveau des réservoirs à un
niveau minimum, advenant le cas où la faible hydraulicité devait
se poursuivre au cours des prochaines années. N'eût
été de la baisse importante de la demande
québécoise prévue pour les années 1991-1992, nous
aurions dû enclencher des moyens exceptionnels pour près de 12 000
000 000 de kWh.
Si l'année 1992 s'avérait une année de faible
hydraulicité comme celle connue au cours de 1991, l'entreprise se
verrait alors dans l'obligation d'augmenter les moyens exceptionnels
prévus pour 1992, c'est-à-dire 3 000 000 000 de kWh de moyens
exceptionnels pour 80 000 000 $ et de les utiliser massivement pour 1993.
Ces moyens pourraient atteindre près de 12 000 000 000 de kWh au
cours de l'année 1993 également.
Dans le plan de développement 1990-1992, plusieurs projets de
centrales hydrauliques prévus d'ici l'an 2000 ont vu leur mise en
service reportée. C'est le cas des centrales Laforge 2, prévue
pour 1995, et Eastmain 1, prévue pour 1996, dont les mises en service
ont été reportées d'un an. J'aurais dû dire
«depuis» le plan de développement et non pas
«dans» le plan de développement.
Ces reports sont rendus nécessaires, le processus d'obtention des
autorisations n'étant pas complété. De même, le
report de 1998 à 1999 de la mise en service de Grande-Baleine a
été annoncé au cours de 1991. Depuis ce temps, une
harmonisation des différents processus d'évaluation
environnementale concernant ce projet a été convenue. À
cet effet, l'ensemble des comités d'évaluation environnementale
du projet Grande-Baleine a entamé une consultation publique pour
établir les directives encadrant l'étude d'impact
qu'Hydro-Québec devra réaliser. (20 h 15)
L'ensemble de ces reports entraîne une baisse de l'offre de
l'ordre de 31 000 000 000 de kWh pour la période 1992-2000. L'objectif
d'achat auprès des producteurs privés a été
porté de 390 MW à 750 MW à l'horizon de 1996. La
contribution de la production privée à cet horizon sera de
l'ordre de 5 100 000 000 de kWh. L'ensemble des installations
déjà en service et des contrats signés avec d'autres
producteurs privés totalisent actuellement 162 MW, pour un
équivalent énergétique d'environ 1 100 000 000 de kWh.
En 1991, Hydro-Québec lançait l'appel de propositions
restreint APR-91. Les propositions reçues dans le cadre de cet appel de
propositions totalisaient plus de 8000 MW. Afin d'atteindre son objectif de 750
MW et en tenant compte du taux de réussite de projets semblables en
Amérique du Nord, Hydro-Québec prévoit retenir des projets
totalisant environ 1600 MW à des fins de négociation.
Depuis le plan 1990-1992, certains ajustements ont également
été apportés aux paramètres servant à
évaluer l'offre énergétique des équipements de
production. Parmi les plus importants, mentionnons une révision de la
productivité du parc existant en intégrant les statistiques
d'hydraulicité des années 1989 et 1990. D'ici l'an 2000,
Hydro-Québec devra composer avec une baisse importante de l'offre
énergétique: 50 000 000 000 de kWh, principalement due au retard
de projets de centrales hydrauliques.
Compte tenu de la baisse importante de la demande tant au Québec
qu'à l'exportation, l'augmentation des objectifs concernant la
production privée, le recours à des centrales de moindre
envergure et diverses autres mesures permettent de rétablir
l'équilibre entre l'offre et la demande. D'ici la fin de la
décennie, en
faisant abstraction des projets de La Grande, phase II,
déjà en cours de réalisation, les économies
d'énergie et les achats de production privée
représenteront près de 65 % des moyens mis en oeuvre pour
maintenir l'équilibre entre l'offre et la demande.
Dans ce contexte, il deviendra important de minimiser les risques de
non-réalisation des programmes d'économie d'énergie et des
achats de production privée. Il convient de souligner que les solutions
de rechange sont fort limitées, que ce soit pour répondre
à une demande plus forte que prévue au cours de la prochaine
décennie ou pour pallier au déficit que pourraient
entraîner d'autres retards dans la mise en service des équipements
de production. Certaines de ces solutions de rechange s'avèrent plus
coûteuses pour nos clients et moins intéressantes d'un point de
vue environnemental.
Ce court bilan nous permet de réaliser l'ampleur des incertitudes
entourant la planification de l'équilibre offre-demande
d'Hydro-Québec. Merci.
Le Président (M.
Bordeleau): Alors, merci,
M. Delisle. Nous allons procéder à la première
période de questions de 30 minutes pour le parti gouvernemental.
Période de questions
Mme Bacon: Alors, M. le Président, un bref survol de
l'équation offre-demande nous permet de situer les enjeux, les facteurs
de changement et aussi d'illustrer les choix énergétiques
possibles. Du côté de la demande, il s'avère primordial de
s'assurer que les besoins des Québécois en
électricité soient satisfaits efficacement malgré les
aléas de la demande; il faut également tenir compte des
économies d'énergie envisagées et aussi des
résultats attendus de la gestion de la consommation. Un rapport
particulier sur le projet d'efficacité énergétique
d'Hydro-Québec a été déposé par
Hydro-Québec et on ajoute aussi les exportations
d'électricité.
Du côté de l'offre, le devancement ou le report de certains
projets, la mise en service de nouvelles centrales, la productivité du
plan d'équipement, l'hydraulicité, l'achat
d'électricité auprès de producteurs privés et des
réseaux voisins sont autant d'éléments
qu'Hydro-Québec doit prendre en considération pour satisfaire la
demande.
Il est presque inutile de rappeler que plusieurs de ces
éléments, tant du côté de la demande que de l'offre,
présentent un caractère aléatoire. Le maintien d'un
équilibre nécessite bien souvent une gymnastique complexe et
évolutive et, à cet égard, le rapport sur le suivi du plan
illustre bien les changements appropriés au cours d'une brève
période tout comme les rapports particuliers sur l'hydraulicité,
la production privée d'électricité. Il faut donc garder
à l'esprit qu'il s'agit d'un processus évolutif et le programme
d'équipement qui est présenté par Hydro-Québec va
être examiné dans cette perspective. Les échanges, je
pense, devraient nous permettre de jeter peut-être davantage, c'est le
cas de le dire, un éclairage sur cette délicate
équation.
Prévisions de croissance des ventes
d'électricité
En regard des ventes d'électricité au Québec,
j'observe, en page 50 du suivi, qu'Hydro-Québec compte vendre en 1992,
après révision, quelque 134,3 tWh par rapport aux 127,3 tWh
vendus en 1991. Je m'interroge sur vos prévisions compte tenu, d'une
part, que, présentement, la croissance des économies des pays
industrialisés dépend en majeure partie de la capacité des
consommateurs a générer une activité économique
soutenue et, d'autre part, que l'inquiétude qui est manifestée
à l'égard des conditions de l'emploi dans certains secteurs
économiques retarde la reprise. Dans un tel contexte, sur quel
critère appuyez-vous les prévisions de croissance des ventes
d'électricité québécoise d'Hydro-Québec pour
1992, l'année en cours?
Le Président (M. Bordeleau): M. Delisle.
M. Delisle: Regardez... D'accord. Pour vraiment bien comprendre
notre prévision de la demande en 1992, je pense qu'il faut d'abord
partir du point de départ qui est ia fin de 1991. En 1991, on vous a
indiqué tout à l'heure que la croissance de la demande a
été de 6,9 tWh moins élevée qu'on avait
prévu. Pour expliquer ces 6,9 tWh de croissance de la demande moins
élevée, d'abord, il faut se référer au secteur
domestique où la demande a été de 0,7 tWh moins
élevée que prévu et, dans ce cas-là, ça
s'explique principalement par un effet de température dans le sens qu'en
1991 la température a été moins élevée.
Donc, ça, ce n'est pas un problème pour le futur. C'est
simplement un problème passager et ça n'affecte pas tellement les
considérations qu'on doit avoir sur le point de départ.
Dans le domaine général et institutionnel, c'est un peu la
même chose dans le sens que la demande, dans le secteur
général et institutionnel, a été de 0,7 tWh moins
élevée que prévu. Par contre, le facteur qui explique
cette réduction de la demande est le fait qu'on a racheté la
biénergie en 1990 et on a connu, suite à ça, un
effritement de ce marché-là si bien que, dans ce cas-là,
on peut parler d'un facteur structurel qui va se perpétuer par la suite,
et il faut en tenir compte dans le cadre de nos prévisions
ultérieures.
Par contre, dans le secteur industriel, et c'est là, en fait...
ça concerne surtout ce secteur-là, votre question. C'est qu'on a
connu 5,3 tWh de moins qu'on avait prévu. Qu'est-ce qui
explique, en fait, cette réduction de la demande à ce
chapitre-là? C'est d'abord un problème avec l'industrie des
pâtes et papiers, qui va s'avérer par la suite, dans notre
prévision - vous l'avez vu dans le rapport de suivi - un problème
structurel dans le sens qu'il y a eu un certain nombre de fermetures. Il y a eu
aussi... au niveau des procédés de fabrication, etc. Alors, on
utilise plus le recyclage et, donc, on a un problème structurel dans le
domaine des pâtes et papier au secteur industriel.
Par contre, il y a eu toute une partie de la réduction de la
demande, qui est pour nous un facteur conjoncturel dans le sens que les
capacités d'utilisation des entreprises ont été moins
suscitées, compte tenu du fait que l'économie a été
en récession. Donc, au point de départ, qu'est-ce qu'on peut
dire? C'est qu'on a été affectés par un problème
conjoncturel puis aussi, au point de vue structurel, il y a trois dimensions.
Il y a la biénergie qui s'est effritée et dont l'effritement va
se maintenir dans la prévision. Il y a l'industrie des pâtes et
papiers qui a connu des problèmes structurels, et ça va se
maintenir par la suite. Il y a un autre facteur, par contre, que je dois
mentionner, c'est qu'à la fin de 1991 on trouve 70 000 personnes de plus
au Québec qu'on en avait prévu. Donc, au point de vue
démographique, le Québec semble se développer de
façon plus rapide que prévu.
Partant de ce point-là, on fait notre prévision pour le
futur. Vous nous demandez quels sont les critères qu'on utilise pour
faire notre prévision. Fondamentalement, on essaie de connaître,
en fait, quel est le rythme de croissance de l'économie et, à
partir de ça, on tente de prévoir notre demande. Une des choses
qu'il est très important de saisir dans la prévision de la
demande pour les années 1992-1993, c'est que la demande... les ventes
régulières sont prévues de croître de 7,5 tWh en
1992 et de 10,3 tWh en 1993. C'est une croissance de la demande, donc, au
total, de 17,8 tWh. Essentiellement, qu'est-ce qui explique cette
croissance-là? Je pourrais vous en parler longtemps, mais je vais
plutôt aller à un ou deux facteurs.
D'abord, dans ces deux années-là, il y a pour 8,5 tWh de
mises en service, de nouvelles charges, principalement dans le domaine de
l'aluminium au Québec. Donc, c'est ça qui explique la croissance
de 11 tWh qu'on a dans le secteur industriel. C'est relié à des
usines de classe mondiale qui viennent s'établir au Québec, qui
sont les plus efficaces qu'on peut connaître et qui, donc, en fait, vont
être fort probablement utilisées à très près
de leur pleine capacité, puis dont la consommation
d'électricité ne sera pas affectée par la morosité
économique au Québec ou par le fait qu'on est encore un petit peu
en récession en Amérique du Nord, parce que de telles usines
viennent prendre la place des usines plus vieillottes sur le marché
mondial de l'aluminium.
L'autre facteur, bien entendu, c'est que notre croissance de la demande
dans le secteur domestique et dans le secteur commercial repose sur une reprise
économique. En fait, on présume que la croissance
économique en 1992 va être de 2,3 % et de 3,5 % en 1993. Donc, un
peu à l'instar de l'ensemble des prévisions... on prévoit
une reprise de l'économie qui va se manifester graduellement cette
année et plus fortement l'année prochaine. Donc,
fondamentalement, notre prévision de la demande repose sur une...
À court terme, en fait, c'est une reprise de l'économie
couplée à des nouvelles charges dans le secteur industriel
reliées principalement à l'industrie de la fonte et de
l'affinage.
Contrat avec la New York Power Authority
Mme Bacon: Hydro-Québec et la New York Power Authority ont
entamé des discussions pour reporter peut-être de quelques
années le début des livraisons qui étaient initialement
prévues pour 1995, et le rapport général, en page 54, nous
mentionne que l'État de New York est en surplus
d'électricité à cause d'une demande plus faible, de
programmes de conservation d'énergie et aussi la présence de
producteurs privés. Est-ce qu'Hydro-Québec peut nous donner des
explications peut-être plus détaillées sur le contexte
énergétique qui prévaudra dans l'État de New York
au cours des prochaines années?
M. Drouin: Je vais d'abord faire quelques énoncés
généraux et peut-être que Pierre Bolduc, qui est notre
vice-président en commercialisation, pourra compléter. Il s'est
avéré que l'État de New York n'a pas la même
situation économique qu'elle avait au moment où elle a
signé un contrat d'importation d'énergie venant
d'Hydro-Québec en 1989. Ce contrat prévoyait que les livraisons
commencent pour 500 MW en 1995 et un autre 500 MW pour l'année 1996.
Suite à des discussions qui ont eu lieu au cours de l'année 1991,
compte tenu d'un changement assez important dans les prévisions de la
demande de l'État de New York faisant passer leurs prévisions de
la demande de l'ordre de 1,6 % à 0,6 % ou 0,5 %, il s'est
avéré que l'État de New York n'avait pas besoin, à
partir de 1995, ou semble ne pas avoir besoin, à partir de 1995, du
contrat qu'il avait signé avec nous. Au lieu de renégocier
à ce moment-là, il nous a demandé de reporter la date
finale de décision sur le contrat comme tel à la fin de novembre
1992. (20 h 30)
Le portrait de la demande de l'État de New York est le suivant:
Le sud de l'État de New York est dans une situation très
difficile parce que la situation économique les a frappés
davantage. On nous dit que le taux de vacance dans les édifices
commerciaux dans la ville de New York est de l'ordre de 25 %, qu'il y a une
fuite d'emplois vers des États voisins de l'ordre de
100 000 emplois par année qui quittent la ville de New York et
ça, pour des raisons bien autres que juste la récession
économique. C'est la situation de la ville de New York qui est rendue
très difficile. Long Island, c'est la même chose. Donc, deux
grosses compagnies qui font affaire dans le sud de l'État de New York,
Con Edison à New York même et Long Island Utilities à Long
Island, ont des prévisions de demande bien inférieures à
ce qu'elles avaient anticipé au départ ou, enfin, au moment de la
signature. Le nord de l'État de New York est assez différent.
D'ailleurs, on constate que les prévisions de la demande d'autres
parties de l'État de New York, celles qui sont plus près de nos
territoires et de ceux de l'Ontario, ont des prévisions de demande qui
coïncident assez bien avec les nôtres.
Tout ça pour dire que les besoins de l'État de New York ne
s'avèrent pas imminents d'ici l'an 2000. On pense que ça pourrait
être entre 1998 et 2002, par exemple, que pourraient commencer les
livraisons que nous avions prévues pour un tel contrat. Par
conséquent, c'est strictement, à notre avis, dû à la
pression économique, qui ne s'est pas avérée ce qu'elle
devait être, que ces contrats-là ont été
reportés. Je ne sais pas si ça complète ça?
Scénarios de rechange en cas de report de la
construction de certaines centrales
Mme Bacon: Les futures installations d'Hydro-Québec font
l'objet de contestations, c'est le moins qu'on puisse dire, de la part des
autochtones, de certains groupes d'intérêt. On sait que des
arguments qui sont liés à l'environnement, au bilan
énergétique, sont à la base des oppositions au projet
d'Hydro-Québec. Ces oppositions risquent de mener à des retards
dans la réalisation des projets et, peut-être, aussi, remettent en
question le programme d'équipements, tel que présenté dans
le rapport.
Je pense qu'on peut dire que vous n'êtes pas toujours en plein
contrôle de toutes vos échéances. Est-ce que des plans de
contingence sont élaborés? Quels sont les scénarios de
rechange qui sont imaginés ou développés par
Hydro-Québec pour satisfaire la demande en cas de report, disons, du
grand complexe Grande-Baleine ou d'autres grands projets?
M. Drouin: Comme entrée en matière, je me devrai de
dire, tout d'abord, qu'Hydro-Québec est toujours en réflexion sur
ces dossiers de l'offre et de la demande. Je voudrais, à ce titre, vous
dire, par exemple, que nous croyons, malgré que nous ayons, dans le
rapport de suivi, indiqué que nous prévoyons un report d'un an
pour les travaux de trois ouvrages, à savoir Eastmain 1, Laforge 2 et
Grande-Baleine... On a vu que, tout récemment il a été
annoncé un certain délai additionnel pour les revues
environnementales ou les directives environnementales à être
émises.
Ce délai-là nous amène au mois de juillet pour
rémission des directives, juillet 1992.
Il était bien dans notre intention, comme nous l'avions
indiqué, de débuter les travaux en 1992 pour Grande-Baleine, mais
force nous est de constater que ce sera extrêmement difficile de pouvoir
commencer les travaux cette année. Par conséquent, dans notre
meilleure évaluation, on est obligé de dire que Grande-Baleine,
quant à nous, ne pourra pas être en service avant l'an 2000.
Quant à votre question, à savoir, si, effectivement, on a
des plans de contingence ou d'autres moyens de subvenir, je céderai la
parole à M. Benoît Michel, qui est vice-président
exécutif du groupe équipement à Hydro-Québec.
Le Président (M. Bordeleau): M. Michel.
M. Michel (Benoît): Quant aux plans de contingence, les
variables que nous considérons présentement sont les
répercussions du jugement de la Cour suprême - fin janvier,
début février - sur le projet de Old Man River en Alberta. Ce
projet-là avait fait l'objet d'une contestation qui demandait qu'on
applique au projet le processus fédéral d'évaluation
d'examen environnemental. Finalement, la Cour suprême a statué que
la directive qui a donné naissance au PFEEE - processus
fédéral d'évaluation - était valable et que le
projet devait être soumis à ce processus d'évaluation.
Par ailleurs, ce qui est ressorti du jugement de la Cour suprême -
auparavant, l'organisme fédéral qui chapeautait l'application
possible du PFEEE était Pêches et Océans Canada - de
façon très claire, c'est que le ministère
fédéral qui avait autorité pour enclencher le processus du
PFEEE était le ministère des Transports du Canada. Nous sommes
présentement à regarder l'implication de ce jugement sur chacun
de nos projets parce que le critère d'application, au nom du PFEEE,
c'est le critère des eaux navigables pour fins commerciales. Il existe
une jurisprudence très volumineuse sur les eaux navigables de
façon commerciale, et nous sommes présentement à
évaluer l'implication de ce jugement sur chacun de nos projets.
En ce qui concerne les plans de contingence, maintenant, vous vous
souviendrez que, depuis plusieurs années, nous avons dit, nous avons
même écrit dans les plans de développement,
qu'Hydro-Québec prévoyait la construction de ces projets pour un
scénario cible, et enclenchait le processus d'autorisation pour un
scénario fort. Donc, en principe, nous devrions obtenir nos permis, nos
autorisations gouvernementales pour des projets avec scénario fort.
C'est le cas présentement dans le projet de Sainte-Marguerite, de
l'Ashuapmushuan et du Haut-Saint-Maurice. Comme vous le savez, nos demandes
d'autorisation... nous attendons un avis de recevabilité du
ministère de l'Environnement pour
le projet de Sainte-Marguerite, et ce projet-là, au moment
où on se parle, si on pouvait avoir une autorisation au cours de
l'année, pourrait se faire pour 2001. De la même façon,
nous continuons nos avant-projets sur le Haut-Saint-Maurice et sur le projet
Ashuapmushuan de façon à avoir des solutions de rechange, dans
l'éventualité où nos problèmes se complexifieraient
davantage.
Mme Bacon: Je suis un petit peu surprise, M. Michel, que vous me
parliez de la Sainte-Marguerite en 2001; remarquez, agréablement
surprise. Ce qui m'inquiétait, c'est qu'il n'y avait pas beaucoup de
grands projets qui partaient avant 1993. Je remarquais, dans votre dossier,
qu'on reporte de six ans la mise en service de la centrale Sainte-Marguerite.
On devance le complexe de l'Ashuapmushuan. On sait que les gens sont beaucoup
plus d'accord avec le projet de la centrale de Sainte-Marguerite et beaucoup
moins d'accord avec le projet du complexe de l'Ashuapmushuan. C'est un peu des
projets qui sont du même ordre de grandeur. Qu'est-ce qui vous
amène à faire de telles modifications? Là, vous me dites
que Sainte-Marguerite pourrait être devancée. Ça change,
vos dates, comme ça, d'une journée à l'autre?
M. Michel: Non, pas du tout. Ici, le rapport qui vous est
présenté, c'est un rapport de suivi du plan. Vous vous
souviendrez que l'entreprise est présentement en consultation publique
pour le plan qui va être présenté pour cet automne, le plan
qui va être préparé pour cet automne, pour discussion. La
consultation publique couvre l'ensemble des volets qui sont susceptibles
d'affecter l'offre et la demande. Nous nous sommes entendus avec les publics en
ce qui concerne l'exportation, depuis la période où on
débutait les consultations jusqu'à la présentation de
notre plan à l'automne, c'est-à-dire jusqu'au moment où
l'entreprise aura précisé sa pensée en matière
d'exportation. Nous nous sommes entendus, nous avons pris l'engagement envers
les publics de ne pas parler de projets d'exportation autres que ceux qui sont
déjà signés, à savoir NYPA, 1000 MW, NYPA Diversity
et Vermont Joint Owners, qui est à 374 MW présentement. C'est une
entente qu'on a prise d'ici la présentation de notre futur plan parce
qu'on discute présentement d'un plan de suivi.
Avec ces hypothèses, de ne pas avoir de contrats d'exportation
additionnels à ceux que je vous ai mentionnés, Sainte-Marguerite,
comme vous l'avez dit, tombe en l'an 2006. Mais, dans l'hypothèse
où la croissance de la demande serait plus forte ou que d'autres
scénarios de développement de marché se
développeraient, à ce moment-là, Sainte-Marguerite peut
être devancée. C'est la marge de manoeuvre que nous maintenons
toujours possible pour avoir cette flexibilité qui nous permet de faire
face à des aléas.
Centrales privées de moins de 25 MW
Mme Bacon: Je vais retourner aux petites centrales, M. le
Président. En lisant votre document, on peut se demander si
Hydro-Québec sait qu'il y a un programme gouvernemental qui vise
à permettre aux promoteurs privés d'exploiter les petites
centrales du domaine public. Est-ce que le peu d'importance que vous accordez
au programme gouvernemental, et vous le qualifiez même, dans votre
rapport particulier, de processus, est-ce que ça reflète bien
votre position? Est-ce que, pour vous, c'est important ou pas?
M. Drouin: Je pense que, pour HydroQuébec, c'est
important. Je pense que M. Michel pourrait vous donner quelques explications
sur l'importance qu'on lui accorde, sur ce qu'on a fait cette année et
ce qu'on entend faire l'an prochain. M. Masson va vous donner une
réponse.
M. Masson (Louis): Mme la ministre, comme vous savez, la
problématique des petites centrales est gérée par une
entente administrative entre Hydro-Québec et le gouvernement dans une
entente qui a été faite en octobre 1990, qui définit un
protocole par lequel Hydro-Québec céderait ses droits sur
certains sites hydrauliques de puissance possible de moins de 25 MW. Donc, nous
fonctionnons dans le cadre de cette entente-là. Il y a
déjà eu la liste des projets 1991 qui a été
réalisée. Il y en a une deuxième qui est en discussion
dans le moment, et il reste un certain nombre de projets possibles qui n'ont
pas encore été identifiés par des promoteurs, ou sur
lesquels nous n'avons pas encore donné d'avis ou nos intentions parce
que des études se poursuivent.
Les critères qui font que nous pouvons retenir ou pas un site
sont, évidemment, les prix de revient de l'énergie. Le
critère est que le coût de l'énergie doit être
inférieur à notre coût marginal qui, dans le moment, est le
coût de Grande-Baleine. Donc, si nous estimons que le prix de revient du
kWh est plus élevé que celui de Grande-Baleine, nous laissons le
site, nous libérons le site si vous voulez, et le promoteur peut le
développer.
Les raisons pour lesquelles le promoteur pourrait le développer
à un coût moindre que nous sont diverses. On peut prendre, par
exemple, les coûts d'exploitation. Pour toutes sortes de raisons, un
promoteur peut, localement, avec des moyens différents des nôtres,
baisser ses coûts d'exploitation, ou d'entretien, ou quoique ce soit.
En ce qui concerne le potentiel que nous estimons, bien, comme je l'ai
mentionné, il en reste encore un certain montant. En plus, il y a des
sites qui sont de plus grande envergure, qui pourraient s'avérer non
intéressants pour nous dans leur plein potentiel, mais, si un promoteur
proposait un aménagement qui, je dirais, utilise-
rait seulement une partie du potentiel, ça s'ajouterait à
la liste. Alors, pour prendre un exemple concret, ça serait le cas de
Spicer, à Drummondville, qui a un potentiel théorique de 70 MW,
75 MW, mais dont le prix de revient est nettement au-dessus de notre coût
marginal. Donc, nous avons avisé le ministère que nous
libérons ce site-là, qu'il y a effectivement un promoteur qui
propose un projet de l'ordre de 25 MW, je crois.
Mme Bacon: M. Masson, vous dites dans le rapport particulier, et
là je vous cite, toujours à la page 9: «Lorsque le
réaménagement, l'exploitation de ces sites ne s'avère pas
économique, Hydro-Québec les cède au gouvernement du
Québec, ce qui laisse la possibilité à des tiers, à
l'intérieur d'un processus bien défini, de procéder
à leur aménagement.» Je vais vous donner une série
de questions parce qu'il me reste peu de temps, et je vous demanderais
peut-être d'essayer d'y répondre. Pensez-vous que ce n'est pas
rentable pour Hydro-Québec et que ça peut peut-être
l'être pour l'entreprise privée? J'aimerais ça que vous
m'expliquiez ça. Sinon, Hydro-Québec est-elle prête
à soutenir la réalisation de ces projets-là par
l'entreprise privée en assumant, par exemple, une partie de leurs
coûts? Leurs coûts de raccordement de réseau, par exemple.
Quels sont les sites que la société d'État
considère comme économiquement rentables et qu'elle compte
réaménager elle-même? Quel est l'échéancier
de réalisation de ces projets?
M. Masson: Pour ce qui est de la question de rentabilité
et des conditions, c'est vraiment le résultat de l'étude que nous
faisons. Si le résultat démontre que le prix de revient du kW est
supérieur à notre coût marginal, donc le coût du kWh
produit à Grande-Baleine, c'est un site qui ne nous intéresse
pas, que nous avons convenu de remettre entre les mains de promoteurs.
Mme Bacon: Vous pensez que ça peut être rentable
pour l'entreprise privée si ça ne l'est pas pour
Hydro-Québec?
M. Masson: Ça peut effectivement... Le mot
«rentabilité», ici, aurait peut-être dû
être précisé pour signifier exactement notre pensée.
Le promoteur particulier peut avoir des façons différentes
d'opérer ou même de construire, pour des questions locales. On
sait que ces sites-là, évidemment, sont répartis sur le
territoire, et ils sont peut-être à proximité de certaines
municipalités ou de communautés. Il peut y avoir localement des
moyens de développer ou d'exploiter...
Mme Bacon: C'est très culturel.
M. Masson: ...ces sites-là, à des prix de revient
inférieurs aux nôtres, pour toutes sortes de raisons.
M. Boivin: M. le Président, j'aimerais ajouter à ce
sujet-là.
Le Président (M. Bordeleau): M. Boivin. (20 h 45)
M. Boivin: Je pense que c'est important d'expliquer. À
Hydro-Québec, nous avons des centrales réparties un peu partout
à travers la province. Nous avons des mécanismes et nous avons,
par exemple, nos opérateurs mobiles qui doivent être
habilités à travailler dans toutes nos installations. Alors, il y
a une normalisation qui se fait dans le type d'installation ainsi que dans les
mécanismes de protection, etc. Il y a une normalisation qui se fait de
manière que nos employés puissent travailler sans risque dans les
diverses installations. Notre normalisation, nécessairement, n'est pas
basée, règle générale, sur des centrales de 10 ou
de 15 MW, mais est plutôt basée sur des très grosses
centrales parce que la majorité de nos centrales sont des grosses
installations.
Alors, il est évident qu'à cause de cette normalisation
nos critères de conception, pour avoir des installations
normalisées, amènent des coûts de construction
supérieurs à ce qui pourrait être fait par un entrepreneur
privé qui, lui, aurait une centrale de 12 MW, de 18 MW ou de 20 MW et
pourrait se donner des critères parce que ça va être la
seule centrale qu'il va devoir exploiter. Donc, il peut se donner des
critères différents des nôtres. Alors, c'est possible.
Je tiens à mentionner que la façon dont c'est écrit
dans notre rapport, je pense que c'est tendancieux. Ça n'aurait pas
dû être écrit comme ça, ça a glissé
dans la rédaction. Effectivement, ça ne veut pas dire qu'une
centrale est non rentable. C'est-à-dire que, ce qu'on vise, ce sont les
installations que nous pouvons construire et exploiter à moins cher que
notre coût marginal. Sur une base d'équité pour notre
clientèle, ces centrales, nous pensons que nous devons les garder
à Hydro-Québec. Si nous les donnons au secteur privé, et
qu'on peut les réaliser et les exploiter meilleur marché,
l'écart entre le prix qu'on va payer, qui est le coût marginal, et
le prix où on pourrait le faire, on va le charger à notre
clientèle, il va être dans nos tarifs.
Mais if y a d'autres cas où, à cause de nos normes, le
site est marginal. À ce moment-là, on dit qu'un promoteur
privé qui a des normes différentes, des méthodes
d'exploitation différentes pourrait rentabiliser ce site-là.
Ceux-là, on les donne au secteur privé et on est prêt
à racheter cette énergie-là au prix marginal parce que
ça devient neutre pour notre clientèle. Donc, il n'y a pas de
subvention offerte aux promoteurs prives. S'il y avait subvention, il faut
comprendre qu'il faudrait la faire payer par notre clientèle. Donc, les
subventions qu'on donnerait entreraient dans la base de nos tarifs.
On n'a pas cette mission-là, du moins, pas présentement,
à Hydro-Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Boivin. Nous allons
maintenant procéder à une période de questions de 30
minutes de la part de l'Opposition. Je laisse la parole au député
de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, la ministre a
commencé une série de questions, je voudrais un petit peu
continuer. À la lecture de votre rapport, ça a l'air de vouloir
dire: Ce qui est gros puis qui est bon, on le garde; ce qui est petit et qui ne
rapporte pas, on le donne. C'est un peu ça, la lecture qu'on fait quand
on est profane. Je vous avoue que c'est toute une mission pour une
société d'État, que je comprends mal, moi,
personnellement. Hydro-Québec, qui est propriétaire, à
toutes fins pratiques, de plusieurs petits points de service à travers
le Québec, peut très bien... Je peux très bien envisager
qu'avant de rêver à des mégaprojets elle puisse
créer, à la grandeur des régions du Québec, une
activité économique. D'abord, à partir de la
réfection de certains de ses barrages, à partir de l'augmentation
de la capacité de certains de ses petits barrages. Moi aussi,
j'interprétais que vous n'étiez pas intéressés
à ce qui pourrait être peu rentable, et que vous visiez
plutôt... l'idée de grandeur. Peut-être que, quand on
grossit, on devient obnubilé par l'idée de grandeur.
C'est exactement la lecture que j'en faisais. Je vous avoue que, comme
culture québécoise, je trouvais ça accrochant. Vous avez
affirmé vous-même que c'était tendancieux, je suis heureux
de vous l'entendre dire. J'ose espérer, en tout cas, que ce n'est pas la
lecture qu'on en fait qui est la philosophie d'Hydro-Québec parce que,
moi, je m'objecterais. J'appuierais même le gouvernement sur ce point -
je n'ai pas tendance à le faire très régulièrement
- et je le ferais, sur ce point, avec beaucoup de facilité. Je pense
que, comme société d'État, on doit être en droit de
s'attendre qu'elle joue un rôle un peu dans toutes les régions du
Québec.
Je ne sais pas si vous avez une réaction à cela, mais la
lecture qu'on fait présentement, c'est un peu ça. Un promoteur
privé dépense, investit, risque, mais, nous autres, on t'assure
notre prix moyen.
M. Boivin: Pas le prix moyen. M. Chevrette: Notre prix
marginal. M. Boivin: Non, d'abord, j'aimerais...
M. Chevrette: Le prix de Grande-Baleine, c'est ça? J'ai
bien compris.
M. Boivin: M. le Président, j'aimerais tout d'abord dire
qu'on n'a certainement pas, du côté d'Hydro-Québec,
l'unique objectif de s'occuper des grosses affaires et de ne pas s'occuper de
ce qui est plus petit. Effectivement, du côté de la
clientèle, pour nous, je pense que tous nos clients sont importants, et
je tiens à le mentionner. Du côté des installations, ce que
nous avons, c'est une politique du moindre coût, politique qui favorise
donc le maintien du tarif le plus bas possible. Il ne faut pas s'imaginer...
rien ne se perd, rien ne se crée. Si nous construisons des installations
plus chères, lorsque ces installations vont entrer en service,
nécessairement, ça va augmenter le coût moyen ou nos
coûts de fourniture moyens et les tarifs vont suivre. Alors, nous avons
une politique du moindre coût.
D'ailleurs, cette politique-là a été suivie de tout
temps. Les sites hydrauliques les meilleurs marchés ont
été hanarches au début du siècle. Je pense à
la Saint-Maurice, la Gatineau, après on est venu avec Beauharnois.
C'étaient des sites qui étaient près des centres de
consommation, qui ne nécessitaient pas de gros investissements en
transport, et qui étaient relativement pas chers à construire. Il
est évident que plus on s'éloigne, plus les coûts, en fait,
augmentent. Donc, les meilleurs sites ont été exploités au
Québec. Dans les petites centrales, c'est la même chose. Les
petites centrales qui sont meilleur marché à construire ou dont
c'est meilleur marché de faire la réfection que de construire
Grande-Baleine, Ashuapmushuan ou Sainte-Marguerite, c'est évident que
ces petites centrales, on va en faire la réfection en premier.
Il ne faut pas oublier qu'en 1981-1982, au moment de la mise en service
du complexe La Grande, on s'est retrouvé à mettre en service 10
000 MW au moment où on a traversé une récession
très profonde. On a même eu, en fait, une baisse de la
consommation. On s'est retrouvé, à un moment donné, avec
5000 MW de surplus et des difficultés financières importantes.
Qu'est-ce qu'on a fait? On a regardé nos installations et on a - si je
peux utiliser l'expression - mis dans les boules à mites un certain
nombre de petites centrales qui, à ce moment-là,
s'avéraient plus chères à exploiter ou, encore, qui
avaient besoin de travaux majeurs de réfection. On ne fait pas des
réfections à des centrales au moment où on a 5000 MW de
surplus. Maintenant, aujourd'hui qu'on revient à l'équilibre
offre-demande ou très près de l'équilibre offre-demande,
on a recommencé à regarder toutes les petites centrales ou les
petits sites où on avait des infrastructures. On est en train, en fait,
de faire les études requises pour prendre une décision. Comme je
l'expliquais tantôt, ceux qui s'avèrent - dans le contexte
d'Hydro-Québec et selon les normes d'Hydro-Québec -
économiquement réalisables, on va les réaliser. À
cause de nos normes, à cause de nos façons de faire - je pense
que ces façons de faire sont
justifiables - ceux qui s'avèrent plus chers, à ce
moment-là, on va les remettre à l'entreprise privée parce
que c'est possible que l'entreprise privée, avec des normes
différentes, compte tenu qu'une petite compagnie peut avoir une seule
centrale, puisse harnacher à un meilleur coût que nous autres.
Ça, c'est la politique du moindre coût.
M. Chevrette: Puis, vous vous engagez à lui payer, au
départ, le prix marginal pour vos besoins, s'il y a surplus dans leur
cas.
M. Boivin: Ce qui est tout à fait équitable, comme
on fait pour la cogénération. En fait, on paie le prix qu'on
devrait payer nous-mêmes pour construire une autre centrale. Donc, c'est
la politique de neutralité dans nos tarifs. Ça n'a pas d'impact
et il n'y a pas de subvention, ni d'un côté ou de l'autre,
à ce moment-là, qui est requise dans notre tarification.
M. Chevrette: S'il n'y a pas preneur, M. Boivin...
M. Boivin: Ou site? M. Chevrette: Du site.
M. Boivin: À ce moment-là, pour le moment, il va
dormir jusqu'à ce qu'on soit rendu, probablement...
M. Chevrette: Qu'il tombe en décrépitude, puis
qu'on ne s'en occupe pas. Est-ce que c'est ça?
M. Masson: C'est-à-dire que, si HydroQuébec a
déjà un ouvrage en exploitation, on va s'en occuper et on va
aller jusqu'à la remise en état du site. Si, nous, on l'abandonne
parce qu'il devient non économique ou qu'il nécessite trop de
travaux de réfection... Maintenant, si le site naturel n'est pas
aménagé, en tout cas, n'a pas d'aménagement qui
présente un risque, il va rester là jusqu'à temps qu'un
promoteur se pointe. Donc, il n'y a pas de condition où un site serait
abandonné à lui-même, à tout jamais.
Négociations avec Terre-Neuve sur le
Bas-Churchill
M. Chevrette: O. K. Churchill Falls, comment ça se situe
ça? Je ne sais pas lequel va répondre, celui qui voudra. Comment
ça se situe dans votre planification, dans votre programmation, pour les
années, par exemple, 2001 à 2041? Est-ce qu'on pourrait savoir
tout d'abord où en est rendue l'entente, dans un premier temps?
Une voix: Est-ce que vous...
Mme Bacon: Écoutez, ce n'est pas ce que vous avez dit aux
journalistes aujourd'hui.
M. Chevrette: Laissez-moi venir! Je peux vous en donner des
informations, si vous n'en avez pas!
M. Drouin: Est-ce que vous parlez de Upper... Est-ce que vous
parlez de Churchill Falls, le contrat actuel, ou si vous parlez de...
M. Chevrette: Non. L'entente entre Terre-Neuve, le
fédéral et Hydro-Québec qui est sur le point d'être
signée, qui va bon train. Je parte à la fois de CFLCo, de Lower
Churchill Development, de Newfoundland and Labrador Hydro. Je peux vous parler
également de la centrale Churchill Falls elle-même, de Twin Falls,
de Lobstick, de Muskrat Falls, de Gull Island.
M. Drouin: Alors, il y a des négociations. D'abord,
premièrement, dans le plan d'équipement d'Hydro-Québec, si
j'ai compris votre première question, où est-ce qu'il se situe
dans le plan d'Hydro-Québec?
M. Chevrette: Bien, je suis obligé de rattacher ça
au plan. On parle du plan, là.
M. Drouin: Oui. Premièrement. Évidemment, ce qui
est construit est déjà en service et, par conséquent, fait
partie de l'offre d'Hydro-Québec vis-à-vis de sa
clientèle. Il y a des négociations depuis novembre 1989 qui ont
cours avec Terre-Neuve sur le développement possible des Basses
Churchill. Ces négociations-là ont eu cours pendant trois ans ou
près de deux ans et demi. Au moment où on se parle, il n'y a pas
imminence, d'aucune façon, de signature d'une convention ou de quoi que
ce soit avec Terre-Neuve. Il y a eu des échanges techniques et beaucoup
d'échanges sur des possibilités d'entente, mais je peux vous dire
qu'au moment où on se parle il n'y a aucune imminence d'entente à
être signée avec Terre-Neuve sur le Lower Churchill.
M. Chevrette: Est-ce que ça figure dans un plan
d'alternatives, par exemple, avec le projet Grande-Baleine?
M. Drouin: Tout est possible en termes de... On a parlé,
tantôt, de mesures de contingence ou quoi que ce soit. Nous, on vous dit
que, dans le cadre de notre planification actuelle, nous ne tenons pas compte
de la négociation de Lower Churchill. Nous n'en tenons pas compte. Si on
devait en tenir compte, ce serait peut-être en contrepartie avec un
contrat d'exportation ou des choses semblables, mais, pour le moment, elle
n'est pas envisagée dans le plan des équipements qui feraient
face à la demande pour les années 2000.
M. Chevrette: Est-ce qu'il n'y a pas déjà des
lettres d'entente de signées...
M. Drouin: Non.
M. Chevrette: ...à l'effet, par exemple, du respect des
contrats à terminer, des études préliminaires à
faire, des autorisations à obtenir, le financement?
M. Drouin: Non.
M. Chevrette: Rien de ça?
M. Drouin: Non.
M. Chevrette: Vous nous jurez ça?
M. Drouin: Bien, jurer ça...
M. Chevrette: Parfait. Non non, mais c'est important que vous le
disiez.
M. Drouin: Bien, voyons! Je ne suis pas ici pour jurer de quelque
chose comme ça.
M. Chevrette: Je m'excuse, madame, si je suis mal informé
des documents d'Hydro. Est-ce correct? Si je suis mal informé... il y a
quelqu'un qui produit chez eux.
M. Drouin: Non non, mais, écoutez! J'ai dit qu'il y avait
des négociations. Comprenez-moi bien. Vous m'avez demandé s'il y
avait des signatures de lettres d'entente. Moi, je vous dis qu'il n'y a aucune
signature de lettres d'entente.
M. Boivin: La seule entente qui a été conclue avec
Terre-Neuve, enfin, depuis le contrat original, ça a été
une entente d'exploitation qui a été modifiée - je ne peux
pas vous donner la date exacte, mais c'est assez récent, il y a 18 mois
à peu près - sur la centrale de Churchill Falls actuelle, au
niveau de l'exploitation. Effectivement, nous avons signé une entente
sur le plan de l'exploitation de cette centrale-là, à cause de la
faible hydraulicité, pour qu'on puisse gérer nous-mêmes le
réservoir de Churchill dans notre grand parc de réservoirs. Il y
avait des avantages très importants pour Hydro-Québec. Il y avait
également, dans cette entente-là, si ma mémoire est bonne,
des éléments concernant le matériel stratégique de
relève dans l'installation de Churchill Falls, notamment au niveau des
transfos, pour assurer la fiabilité de notre réseau, mais il n'y
a eu aucune entente ou lettre d'entente de signée concernant Lower
Churchill, etc.
M. Chevrette: Est-ce que ces ententes-là sont publiques ou
secrètes, M. Boivin?
M. Boivin: En fait, ce sont des contrats d'achat avec
Terre-Neuve.
M. Chevrette: Est-ce que c'est public ou si ça ne l'est
pas?
M. Boivin: À ma connaissance, on ne s'est jamais
posé la question.
M. Drouin: L'entente de Churchill? J'imagine que c'est public,
ça s'est rendu jusqu'en Cour suprême. Il y a eu tout un
débat, depuis une quinzaine ou une dizaines d'années, qui s'est
terminé par un jugement favorable à HydroQuébec et au
gouvernement.
M. Chevrette: Ça, c'est l'ancien contrat. M. Drouin:
Oui oui.
M. Chevrette: C'est l'offre du 1 000 000 000 $ qui a
déjà été faite pour régler le contentieux,
etc. C'est de ça que vous parlez.
M. Drouin: Oui, et qui s'est résolu en Cour suprême
sans qu'on n'ait à verser le milliard.
M. Chevrette: C'est ça. À toutes fins pratiques, on
a gagné.
M. Drouin: On a gagné.
M. Chevrette: Exact. On était très heureux.
M. Drouin: Quant à Lower Churchill, je peux affirmer, M.
le Président, qu'on n'a signé aucune lettre d'entente
relativement au développement, aux études ou quoi que ce soit. Il
y a eu des études conjointes de faites entre les parties, ça,
ça dure depuis plusieurs années. Il y a eu des études. M.
Bolduc, vous pouvez donner peut-être, là-dessus... Y a-t-il eu des
ententes sur des études d'ingénierie qui datent de plusieurs,
plusieurs années sur Lower Churchill?
M. Bolduc: À ma connaissance, il n'y a eu aucune entente
contractuelle ou lettre d'intention de signée à cet effet.
M. Drouin: Exact.
M. Chevrette: Est-ce qu'on négocie, au moment où on
se parle?
M. Drouin: Oui.
M. Chevrette: Comme ça, Clyde Wells, qui déclarait,
tout dernièrement, qu'il était sur le point d'une entente, il est
dans les carottes?
M. Drouin: Oui.
Une voix:...
(21 heures)
M. Chevrette: Ce n'est pas la dernière. Je ne vous ai pas
dérangé quand vous avez parié de vos bottes, tantôt.
Excusez, c'est les enveloppes, excuses. Est-ce que les négociations, les
échanges ou les conversations... En tout cas, appelez ça comme
vous voulez parce que je sais que, pour un ancien négociateur, les mots
ont beaucoup de sens. Ça vise combien de mégawatts,
potentiellement?
M. Drouin: Comme c'est une question qui vient d'un
négociateur également, je vais...
M. Chevrette: Vous allez demander à l'autre de le
dire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Drouin: C'est 2700 MW qui sont prévus pour cette
possibilité de développement, deux centrales.
M. Chevrette: C'est encore un hasard si ça
représente à peu près 2779 mégawatts, les contrats
secrets.
M. Drouin: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: II y a des hasards, dans votre affaire, c'est
effrayant. Est-ce que vous avez bel et bien discuté de dates qui
pouvaient lier, éventuellement, s'il y avait une entente finale?
M. Drouin: Ah, il n'y a pas de doute qu'on a discuté de...
Vous avez assez d'expérience. M. le Président, le
député de Joliette a assez d'expérience avec les
négociations pour savoir qu'en négociation on discute de tout,
mais qu'il n'y a jamais rien de réglé tant que tout n'est pas
réglé.
M. Chevrette: Non. Des fois, on fait appel au gouvernement pour
régler ses problèmes, vous avez raison. Mais, là, je vous
parie véritablement de dates. C'est 2041 que vous avez discuté
comme date?
M. Drouin: Non non, mais 2041, c'est la date où se termine
le contrat...
M. Chevrette: ...le contrat... M. Drouin: ...le contrat
actuel. M. Chevrette: Oui.
M. Drouin: Quant au contrat de développement...
M. Chevrette: C'est un ajout.
M. Drouin: ...de Lower Churchill, on ne parle que de 20 ou 25
ans. Vous avez dit, dans votre discours, 40 ans ou 50 ans...
M. Chevrette: Mais c'est parce que je me basais sur 1991 à
2041...
M. Drouin: Mais 20...
M. Chevrette: Je me disais: Si on signe aujourd'hui... Je
comprends que ce n'est pas toujours en application...
M. Drouin: Mais, ce n'est pas ça, les discussions...
M. Chevrette: ...parce que l'application doit être
graduelle comme dans tous les contrats.
M. Drouin: Mais ce n'est pas de ça qu'on a discuté,
de toute façon, je vous le dis. Il n'a pas été question,
en aucune façon, pour le développement de Lower Churchill,
d'avoir un contrat qui se termine en 2041. La seule référence
à 2041, c'est une référence au contrat actuel en vigueur,
signé depuis 1966, et qui va fournir de l'énergie et de
l'électricité pour le Québec jusqu'en 2041.
M. Chevrette: Ouais. Est-ce que vous avez discuté de
tarifs?
M. Drouin: Je vous ai dit, M. le Président, que nous
avions discuté de tous les sujets possibles de discussion dans une
négociation de cette nature-là. Mais ce que je
répète, il n'y a aucune entente, il n'y a aucune imminence d'une
entente, au moment où on se parle.
M. Chevrette: Mais M. Drouin, à toutes fins pratiques,
qu'est-ce qui se passe, dans les discussions avec Terre-Neuve? Le
fédéral est impliqué, vous le savez. Le
fédéral va subventionner Terre-Neuve, contrairement à ce
qu'il fait au Québec, ça, on est au courant de cette
partie-là.
M. Drouin: Mais, là, vous venez d'affirmer une chose avec
laquelle, pour nous, nous ne sommes pas du tout...
M. Chevrette: O.K.
M. Drouin: ...en relation. La partie avec qui nous
négocions, dans le dossier de Terre-Neuve...
M. Chevrette: ...c'est Terre-Neuve... M. Drouin: ...c'est
Terre-Neuve.
M. Chevrette: Ça, je le sais, c'est écrit sur mon
papier.
M. Drouin: Nous savons très bien que Lower Churchill
Development Corporation est la pro-
priété, pour 51 %, de Terre-Neuve et, 49 %, du
fédéral.
M. Chevrette: Mais, M. Drouin, si je comprends bien ce qui se
passe, vous avez un contrat existant. Vous pourriez ajouter de la puissance
à aller chercher. Il y a possibilité de harnachement de
rivières sur le territoire de Terre-Neuve et vous discutez si,
potentiellement, vous ne pouvez pas ajouter au nombre de mégawatts
à aller chercher en vous associant à Labrador-Terre-Neuve, le
territoire de Labrador-Terre-Neuve, à Terre-Neuve lui-même,
potentiellement... En tout cas, moi, je sais que le fédéral
subventionnera le projet. Est-ce qu'il n'a pas été discuté
également, M. Drouin, au cours de ces négociations-là...
Il faudrait que tu essaies de comprendre ce qu'on dit seulement. C'est assez
pour toé!
M. le Président, je voudrais avoir la paix, s'il vous
plaît!
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: II a une question à poser sur la
rivière Saint-Maurice, puis il va l'oublier.
Le Président (M. Audet): Messieurs dames, à
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Est-ce qu'Hydro-Québec a
négocié la possibilité d'acheter des actions dans ce
nouveau barrage?
M. Drouin: Non.
M. Chevrette: Du tout?
M. Drouin: Non.
M. Chevrette: Merci. C'est bon à savoir. Est-ce que vous
avez discuté, par exemple, du moment où ça pourrait entrer
en service, les ouvrages qui se feraient?
M. Drouin: Certainement.
M. Chevrette: 2001 à 2005, ça correspond à
peu près à ça.
M. Drouin: Je vous dis qu'on a eu des discussions de toutes
natures et de toutes sortes sur la mise en service, sur le type de contrat, sur
le montant d'énergie, le nombre de mégawatts. Je vous dis qu'on a
discuté de toutes les choses dont il faut normalement discuter à
l'occasion d'une négociation pour un contrat de cette nature.
M. Chevrette: Est-ce que vous n'avez pas discuté des prix
qui pourraient ressembler à NBR, par exemple? Des prix du coût de
NBR?
M. Drouin: Je vous dis qu'on a discuté des prix et que
ça a été bien sûr l'objet de la discussion. Vous
savez, on a suffisamment d'expérience dans ce domaine pour savoir que ce
n'est pas sur la place publique qu'on va révéler nos
stratégies de négociation, l'objet de nos négociations,
nos marges de manoeuvre, le contenu, etc., et nos intentions.
M. Chevrette: Vous comprendrez que, pour un élu du
Québec, il a le droit de s'interroger, à savoir si la
priorité d'Hydro est d'aller procurer de l'emploi à Terre-Neuve
ou à Québec.
M. Drouin: Tout à fart.
M. Chevrette: Ça, je pense que vous comprenez l'objet de
mes questions.
M. Drouin: Je peux vous dire une chose, c'est que la
dernière fois que le Québec a négocié avec
Terre-Neuve pour avoir de l'électricité, ça a assez bien
marché, vous devez le savoir.
M. Chevrette: Si je pose les questions, M. Drouin, c'est que vous
savez pertinemment qu'il se fait des déclarations en dehors du
Québec aussi, puis ce ne sont pas des déclarations d'un
employé d'Hydro Terre-Neuve-Labrador là, c'est des
déclarations d'un chef d'État de cette province. Quand il affirme
être sur le point de conclure une entente, qu'il a le soutien du
fédéral et qu'Hydro-Québec s'associera, non pas par
contrat, mais même par action pour éviter la faillite
éventuelle de Newfoundland and Labrador... je ne me souviens jamais de
l'autre lettre: Power Authority, je suppose. Si ça vient d'ailleurs,
s'ils se permettent d'en parler ailleurs, on dort être capable, en toute
liberté, de poser les questions ici sans se faire prêter
d'intention de quelque nature que ce soit. Est-ce que c'est clair?
M. Drouin: Absolument.
M. Chevrette: Puis je vais continuer dans ce sens-là, que
ça fasse gigoter la ministre et ses collègues.
Des voix:...
M. Chevrette: Vous n'arrêtez pas de placo-ter depuis
tantôt. Laissez-moi tranquille. Quand vous posez vos questions, je vous
laisse tranquille. Laissez-moi tranquille. C'est clair?
Le Président (M. Audet): À l'ordre! Messieurs,
mesdames de la commission, je vous demanderais de respecter le temps de parole
de chacun des parlementaires qui ont un droit de parole. Je sais qu'il est
peut-être un peu plus tard, mais afin d'assurer le bon déroulement
de
nos travaux, je vous demande de respecter le temps de parole de vos
collègues. M. le député de Joliette, vous avez la parole
jusqu'à 21 h 15.
M. Chevrette: Merci. Bien, voyons! Est-ce qu'elle va
arrêter, elle? Laissez-moi finir. Non, mais arrêtez. Vous
êtes où vous là? Laissez-moi parler, je vous ai
laissée parler.
Le Président (M. Audet): Messieurs dames, s'il vous
plaît! M. le député de Joliette, la parole est à
vous. M. le député de Saint-Maurice, s'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. le député de Joliette, vous avez la parole. Je vous
demande de poursuivre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: M. le Président, je vous dis personnellement
que, si Hydro-Québec négocie, c'est parce qu'elle sera
autorisée, elle devra avoir une autorisation du gouvernement pour
conclure une entente avec une corporation à l'extérieur du
Québec.
M. Drouin: Sûrement.
M. Chevrette: Imaginez-vous bien que j'ai le droit - je vais le
répéter au cas où vous l'oublieriez ou que d'autres
l'oublieraient - qu'on a le droit, comme élus du Québec, de
s'interroger sur les tractations qui se font. On sera placés
probablement devant une éventualité, puis on n'aura même
pas pu discuter, à savoir s'il n'y aurait pas eu des alternatives en sol
québécois. C'est ça que je veux questionner, et j'ai le
droit strict de le faire. Vous me dites qu'il y a des négociations sur
tous les points. Tantôt, il n'y avait rien. Ce que j'entendais dans les
murmures: II n'y a rien là, il n'y a rien là. Il y a de quoi
là et, si vous avez discuté sur tous les points, vous
évoluez dans le dossier.
Vous n'avez pas signé, mais vous évoluez dans le dossier.
Puisque vous en êtes rendus à discuter du taux du kilowattheure,
vous en êtes rendus à discuter de la longueur du contrat. Vous en
êtes rendus à discuter du nombre de kilowatts que vous ajoutez.
Qu'est-ce qui reste à conclure?
M. Drouin: II reste des affaires fondamentales.
M. Chevrette: Dites-le donc, s'il vous plaît.
M. Drouin: Je vous avoue que rendre publiques nos discussions
dans ce dossier-là, et ce n'est pas dans le but de cacher quoi que ce
soit... Je vous dis qu'il reste des choses fondamentales parce que ce que nous
recherchons dans un contrat de cette nature, c'est définitivement un
avantage sérieux pour le Québec. C'est clair que nous n'irions
pas signer un contrat d'achat d'énergie dans une province voisine s'il
n'y avait pas une contrepartie très importante pour le
Québec.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il n'est pas clair dans l'esprit des
juristes et des experts que le contrat actuellement en cours peut vivre
jusqu'à 2041. Dans ce sens-là, c'est clair que, lorsque nous
négocions avec Terre-Neuve, c'est pour de l'achat d'énergie
additionnelle, mais c'est aussi pour consacrer d'une façon
définitive la viabilité financière de ce qu'on appelle,
nous, Upper Churchill, c'est-à-dire de ce qui existe.
Quand je dis qu'il reste des questions fondamentales, c'est que si on se
reporte à des discussions qui ont eu lieu en 1984-1985. avant qu'un
jugement ne soit rendu par la Cour suprême, et avant même que
l'audition n'ait lieu en Cour suprême, c'est clair qu'il y avait eu des
négociations qui pouvaient amener des solutions à ce que je vous
ai mentionné. Mais, finalement, le jugement comme tel a consacré
un contrat, mais n'a pas amené toutes les solutions pour assurer la
viabilité du contrat actuel.
Les négociations que nous avons sont dans un double esprit. Elles
sont dans l'esprit, premièrement, peut-être à l'avantage du
Québec, d'acheter de l'énergie qui pourrait être
utilisée pour des fins d'exportation ou pour d'autres fins, mais qui
pourrait être utilisée avec des retombées
économiques importantes pour le Québec, même s'il s'agit
d'une construction dans un territoire voisin, mais elles se font aussi pour que
l'on puisse régler certaines choses relativement au dossier de ce que
j'appelle le dossier Upper Churchill.
La raison pour laquelle je vous dis qu'on a discuté de tout,
c'est parce que c'est vrai qu'on a des paramètres intéressants
sur le développement de Lower Churchill. Mais, il y a des affaires
fondamentales qui ne sont pas réglées et, à mon avis, qui
ne sont pas près d'être réglées dans un délai
court. Peut-être qu'il y aura un cheminement, mais, en des mots un peu
plus clairs, il n'est pas question pour le Québec, ni pour
Hydro-Québec, d'abandonner ce qu'on a d'acquis avec le jugement de la
Cour suprême. Je pense que c'est clair dans notre esprit que jamais on ne
signera une entente ou une convention qui va consister à concéder
des choses qu'on a déjà acquises avec le jugement de la Cour
suprême.
M. Chevrette: Mais si je comprends bien, la négociation
visait à régler les parties non réglées par la Cour
suprême.
M. Drouin: La viabilité financière de la compagnie
Churchill Falls and Labrador Corporation.
M. Chevrette: Et à se prémunir aussi contre
certains gestes que pouvait poser Terre-Neuve, que vous ne retrouvez pas
dans... (21 h 15)
M. Drouin: Tout à fait.
M. Chevrette:... le jugement. Ça je le comprends
aussi.
M. Drouin: Tout à fait.
M. Chevrette: Par la même occasion, de négocier 2700
MW, avez-vous dit, en fonction d'alternatives ou en fonction d'un ajout,
purement, de puissance, au Québec.
M. Drouin: Je vous le donne à titre d'exemple. Ça
pourrait peut-être être l'utilisation de 1000 MW au Québec
et de 1500 MW en exportation. Maintenant, il y a toujours, aussi, pour
Terre-Neuve, sa volonté de se rendre sur l'île de Terre-Neuve avec
une ligne de transport qui coûterait énormément cher, et
qui rend le projet difficilement rentable s'il n'y a pas un financement
extraordinaire qui vient d'une source que vous avez mentionnée et qui
n'est définitivement pas du Québec.
M. Chevrette: Oh! c'est beau, ça. Une voix:...
M. Chevrette: Ne me dites pas! On va se reprendre, on n'est pas
pressé. O. K. Quelle est la puissance globale de ce barrage...
M. Drouin: Pardon?
M. Chevrette:... du barrage qu'on voulait faire?
M. Drouin: Actuel?
M. Chevrette: Non non, qu'on projette.
M. Drouin: 2700.
M. Chevrette: Mais...
M. Drouin: Excusez!
M. Chevrette:... ce n'est pas la partie, plutôt, de
puissance achetée par Québec qui est 2700?
M. Drouin: Non, c'est la totalité. M. Chevrette: La
totalité.
M. Drouin: Oui. Ces deux centrales s'appellent Gull Island et
Muskrat Falls.
M. Chevrette: À ce moment-là, dois-je dire que
Terre-Neuve aurait dû se garder quelques mégawatts, dans cette
entente?
M. Drouin: En fait, c'est ça. Le détail de ce
que... C'est 800 MW que Terre-Neuve aurait aimé rapatrier sur
l'île... Mais la faisabilité économique d'un tel projet, au
moment où le prix du pétrole est à un niveau tel qu'il est
aujourd'hui, ce n'est pas rentable.
M. Chevrette: Au retour, on parlera de l'Ashuapmushuan - parce
que j'ai fini mon temps - et on va parler de la ligne sous-fluviale.
Le Président (M. Audet): Merci, M. le
député. Je vais maintenant reconnaître la formation
ministérielle. Mme la ministre.
Mme Bacon: Je vais passer mon tour pour le moment et je
reprendrai, M. le Président.
Le Président (M. Audet): M. le député de
Saint-Maurice.
Aménagement de la rivière
Saint-Maurice
M. Lemire: Merci beaucoup, M. le Président. On va revenir
en région, si vous voulez, où il y a des populations. J'aimerais
ça parier... Comme vous le savez, je pense que M. le
député de Joliette l'a mentionne, c'est certain que, ce qui
m'intéresse, moi, c'est la Saint-Maurice. C'est de valeur, mais il y a
du monde. Il y a 70 000 de population dans une MRC, en plein centre, à
Shawinigan. Vous retrouvez sur cette rivière-là, M. le
Président, de la réfection, les plus vieilles centrales au
Québec. Vous retrouvez aussi des discussions dans le sens où il y
a une concertation qui est en train de se faire. Vous avez aussi des nouvelles
centrales installées sur la rivière.
Moi, ce que je sais d'Hydro-Québec, c'est que vous avez fait un
genre de consultation qui, d'après moi, est une nouvelle vague de
consultation, un nouveau genre de consultation. Vous avez rencontré
différents intervenants régionaux. Vous avez rencontré les
maires, les MRC, les groupes sociaux. Vous avez fait part des différents
projets. Vous avez même, on a vu ça dans les
échéanciers, des projets de réfection qui sont
bientôt...
Ce que j'aimerais savoir, après toutes les consultations que vous
avez faites et toutes les discussions... Je ne voudrais pas que vous me fassiez
le détail de toutes les consultations qu'on a connues depuis
bientôt deux ans. J'aimerais savoir comment vous comptez concilier tous
les besoins et les exigences du milieu, après toutes les discussions que
vous avez faites.
M. Drouin: M. Benoît Michel.
M. Michel: Vous avez raison, il y a beaucoup de projets qui
touchent la Saint-Maurice. S'agit-il de nommer le projet de réfection de
La Gabelle, de Shawinigan et de La Tuque où on a des
déboursés de l'ordre de plus de 800 000 000 $ envisagés,
à moyen terme. Ceci va
au-delà des centrales du Haut-Saint-Maurice que nous
étudions aussi présentement. Je crois que vous faites
référence à la Corporation de gestion du
développement du bassin de la rivière Saint-Maurice. Nous avons
rencontré à quelques reprises les gens de la Corporation et les
attentes du milieu se précisent. Les attentes du milieu, ce que j'en
constate, concernent la navigabilité de la rivière de même
que le développement récréotouristique qui vous
apparaît comme une priorité. Nous sommes à regarder
l'acceptabilité des demandes qui nous sont faites parce que certaines de
ces demandes sont très grandes de la part d'Hydro-Québec. Hydro
est sûrement disponible et ouverte à discuter avec la Corporation
en autant que la Corporation sera un représentant de l'ensemble des
municipalités et des MRC concernées, ce qui, je crois comprendre,
n'est pas le cas présentement. Nous sommes sûrement prêts.
D'ailleurs, je crois avoir une rencontre la semaine prochaine avec les gens de
la Corporation de gestion du Bas-Saint-Maurice pour discuter plus à fond
de comment est-ce qu'on pourrait concerter nos efforts pour que ça
profite à tout le monde.
M. Lemire: Disons que je suis persuadé que mon
collègue de Laviolette est d'accord avec moi. Il écoute
présentement parce qu'il fait partie... C'est peut-être une des
seules choses avec laquelle il va être d'accord, mais, en tout cas. Il
fait partie de la table de concertation comme représentant,
député de la circonscription de Laviolette, et moi de même.
Il y a 22 personnes à cette table. Nous avons le président des
nations attikameks, nous avons les maires. Il y a déjà six, sept
maires qui sont à la table présentement. C'est sûr que
c'est peut-être une des premières consultations régionales
qui nous permettent, peut-être, de réaliser une certaine
planification. Ce qu'on demande, ce que les gens demandent, comme vous le
savez, c'est la navigabilité, l'accès des deux rives. C'est ce
qui n'a pas été fait dans le passé. À chaque fois
que vous allez... Vous regardez, par exemple, la difficulté d'aller
d'une rive à l'autre, et l'accès à la rivière pour
les citoyens.
Je ne voudrais pas qu'on discute des négociations ici, ce soir,
mais ce qui m'intéresse, MM. les présidents et M. Michel, M. le
vice-président, c'est de savoir, quand Hydro-Québec fait ses
horaires, ses échéanciers, donne ses échéanciers et
ses tableaux, est-ce que vous tenez compte des problèmes qu'on vit en
région? Par exemple, quand on voit une situation difficile comme celle
qu'on vit dans la région de la Mauricie, la fermeture des
papetières, PFCP, vous avez des difficultés, des rationalisations
qui se font depuis trois ans dans les usines de Stone Consol. Il y a des pertes
d'emploi considérables. Est-ce que vous tenez compte de ces
régions-là? Est-ce qu'il y a une possibilité de faire
accélérer certains scénarios, comme le
Haut-Saint-Maurice?
Il ne faut pas oublier que c'est en région. Les travailleurs sont
près. Vous n'avez pas besoin de les faire voyager. Les gens attendent
pour travailler. Est-ce qu'Hydro-Québec tient compte de ces
situations-là?
M. Michel: Non seulement nous en tenons compte, nous avons, je
crois, été proactifs dans ce dossier-là pour rencontrer
tous les intervenants du milieu. La Corporation de gestion du
développement du bassin de la rivière Saint-Maurice est
probablement le résultat de cette consultation-là. C'est
sûr que, dans le contexte actuel, si on se sent un peu
désiré dans une région donnée, ça peut
biaiser un peu notre... pas notre jugement, mais ça peut nous inciter
à être plus proactifs encore. Hydro-Québec, par ailleurs,
ne peut, dans une région donnée, être le seul intervenant
pour pallier à des difficultés d'ordre économique. Nous
sommes très ouverts à discuter avec les intervenants du milieu,
mais Hydro-Québec ne pourra être seule, à titre d'exemple,
pour régler la question du flottage du bois, pour régler la
question de la navigabilité. Hydro ne peut être seule pour aller
de l'avant et tout financer ces projets-là. Quant à
l'accès aux rives, ça peut être problématique, dans
certains cas. L'accès aux rives par le passage d'un véhicule,
comme sur la centrale La Gabelle, peut être un danger public dans le
fond. Une centrale hydroélectrique n'est pas un chemin public. Tout
ça est à regarder avec une ouverture d'esprit.
M. Lemire: J'ai une petite dernière question, MM. les
présidents, M. le vice-président. Est-ce que, dans le cas de La
Gabelle, c'est coulé dans le ciment? On ne peut plus... Je regardais
tantôt. Vous avez dit que vous étiez très flexibles dans
certaines de...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lemire: Est-ce qu'on peut dire que les négociations
sont terminées, que vous allez de l'avant et qu'il n'y a plus aucune
discussion là-dessus?
M. Michel: La décision d'effectuer une réfection
pour La Gabelle a été prise au conseil d'administration
d'Hydro-Québec, au mois d'août dernier, je crois, et ce
n'était pas pour des motifs légers. On voyait des
problèmes sérieux, d'environnement et sur les populations,
à partir du projet Les Forges. Il y avait un ennoiement de superficies
et le déménagement d'une cinquantaine de familles, je crois, de
maisons. Le chiffre, je vous le donne sous toutes réserves. Il y avait
le déménagement de plusieurs maisons, il y avait l'excavation de
la rivière Saint-Maurice pour faire disparaître la rivière
Les Forges. Il y avait aussi un impact sur le parc fédéral des
Vieilles-Forges. Donc, ça n'a pas été une décision
qui a été prise facilement. Mais, ce que je
comprends, c'est que, d'après les consultations qu'on a
effectuées auprès des gens du milieu, c'est que notre rationnel
semble être compris maintenant par les gens du milieu, selon la lecture
que, moi, j'ai de la situation.
Le Président (M. Audet): D'accord, je reconnais maintenant
M. le député de Drummond.
M. St-Roch: Merci, M. le Président. MM. les
présidents, devant l'accroissement tout récent de l'exploration
gazéifière au Québec, principalement au coeur du
Québec, lorsque vous avez déterminé vos grands
équilibres de l'offre et de la demande, est-ce que vous avez tenu compte
du potentiel d'une découverte majeure de gaz au centre du Québec?
Si oui, comment est-ce que ça pourrait affecter vos grands
équilibres d'offre et de demande?
M. Michel: À ma connaissance, non. Par contre, je dois
vous dire que, parmi les scénarios de contingence dont on parlait plus
tôt, on a un avant-projet qu'on met de l'avant pour une centrale de
turbines à gaz à cycles combinés, c'est-à-dire une
centrale alimentée par le gaz; une centrale de turbines à gaz
à cycles combinés, c'est-à-dire à haut degré
d'efficacité au point de vue énergétique. Ça serait
un des moyens de contingence qui pourraient être mis de l'avant pour le
début du siècle ou la fin des années quatre-vingt-dix.
Advenait-il la possibilité d'une disponibilité locale de gaz
à prix compétitif et avec des garanties d'approvisionnement
à moyen ou long terme, c'est sûr que ça pourrait rendre le
projet encore plus intéressant parce que, présentement, comme
vous le savez, ces projets-là, de même que le projet de conversion
de la centrale Tracy, sont alimentés par gaz naturel, seront
alimentés par gaz naturel à partir de pipelines de l'Ouest
canadien. Ça pourrait être un incitatif économique,
dépendamment des coûts.
M. St-Roch: Mais ça pourrait l'être davantage parce
que, à l'heure actuelle, les estimés de prospection qui se font
présentement, dont on devrait avoir les résultats
préliminaires bientôt, les estimés sont de l'ordre de 345
000 000 000 de mètres cubes estimés. On sait qu'il y a un
programme qui va s'échelonner à partir de la région de
Drummondville jusqu'ici, la région de Sainte-Croix. Alors, les
quantités de gaz en question, si elles sont prouvées comme
étant véridiques, à partir des hypothèses qui
avaient été émises, c'est plusieurs centaines de milliards
de mètres cubes. Alors, c'est plus, je pense, à ce moment-ci, que
d'alimenter la centrale de Tracy ou celle prévue comme relève,
Gentilly. Ça pourrait amener une toute autre problématique pour
l'approvisionnement de gaz qui pourrait servir à la biénergie ou
au transfert de toute la demande énergétique de chauffage versus
le gaz, à ce moment-là. Une des problématiques à
envisager serait une réduction substantielle, strictement au niveau du
transport du gaz. En étant au coeur du Québec, on a la chance
d'avoir ces mètres cubes. C'est pour ça que je me demandais si
vous suiviez cette évolution-là. J'ai l'impression que ça
pourrait avoir un impact significatif dans tous ces grands équilibres
d'offre et de demande.
M. Michel: Ça pourrait effectivement être d'un
intérêt, si ça s'avérait prouvé, à
court terme. Évidemment, si ce sont des programmes d'exploration
à très long terme... Mais si ça s'avérait
prouvé comme réserve à court terme, ça pourrait
sûrement être un facteur intéressant à
considérer dans la génération à partir de centrales
à cycles combinés.
Le Président (M. Audet): Ça va? M. le
député de Taschereau?
M. Leclerc: Oui, M. le Président... Pardon? Non, allez-y,
je vais finir. Allez-y.
Le Président (M. Audet): Alors, Mme la ministre. (21 h
30)
Économies d'énergie
Mme Bacon: Je voudrais revenir, si vous le voulez bien, sur le
projet d'efficacité énergétique, en disant à mon
collègue de Taschereau qu'on va lui donner suffisamment de temps pour
qu'il puisse continuer. Les résultats des programmes d'économie
d'énergie pour les années 1990-1991 sont relativement faibles et,
quand on regarde à la page 16 de votre document, on voit qu'en
proportion des objectifs fixés au sein du dernier plan de
développement il y a une certaine faiblesse. Et vous expliquez ces
écarts-là par la stratégie de démarrage que vous
avez adoptée dans le projet d'efficacité
énergétique. Vous avez aussi sensiblement révisé
à la baisse l'objectif pour 1992; il est aujourd'hui fixé
à 673 gWh, qu'on retrouve en page 13, alors qu'il était de
près de 2,7 tWh dans le dernier plan. Compte tenu du retard qui est pris
au chapitre des économies d'énergie, de même que la
révision à la baisse de l'objectif pour 1992, est-ce que vous
êtes aujourd'hui en mesure de nous assurer que vous allez rencontrer vos
objectifs pour 1992 et que vous ne ferez pas face, à ce
moment-là, à des retards importants?
Une voix: M. Roy.
M. Roy: Je pense que vous mentionnez avec beaucoup
d'à-propos le fait qu'on est légèrement en retard sur les
résultats qu'on affiche en matière de nos programmes
d'efficacité énergétique pour l'année 1990-1991. Il
y a un certain nombre de raisons qui peuvent être évoquées,
à
ce retard-là. Une première, évidemment, est celle
de la mise en place de l'organisation, le recrutement des ressources, la
formation de ces ressources-là. C'est un dossier nouveau pour nous et
puis il ne faut pas négliger cette chose-là. Les
compétences sur le marché pour développer ces
choses-là ne sont pas facilement disponibles. Il faut prendre le temps
de les former. Il y a la conjoncture économique aussi qui n'a pas
été favorable. On sait que l'efficacité
énergétique veut dire, pour les clients, des investissements. Et
puis on a les programmes, par exemple, du côté du secteur
industriel. Je vais vous donner un exemple avec les programmes favorisant
l'implantation, les moteurs à haute efficacité, à haut
rendement qui ont des taux de réponse beaucoup moins intéressants
que l'on ne l'aurait cru à cause, fondamentalement, de la
récession économique actuellement qui fait que les gens
investissent moins, donc, n'ont pas l'opportunité de faire ces
choix-là. Dans les faits, les budgets qu'on prévoyait pour 1991
ont été dépensés à la moitié. Donc,
il faut dire aussi qu'on livre à peu près pour l'argent qu'on
met.
Un autre élément qu'on doit quand même ajouter
à ce moment-ci par rapport à ces résultats-là,
c'est qu'on est encore bien jeunes dans le développement de ce
projet-là. Les chiffres qu'on avance actuellement sont des chiffres de
résultats, je dirais, directs de nos interventions. Ce qu'on peut
mesurer, pour sûr, le nombre d'appareils qu'on a subventionnés, le
nombre d'installations qui ont été faites. On sait qu'il y a
beaucoup d'entraînement indirect aussi. On a certains points de mesure
pour le faire. On sait que les clients, par exemple, qui lisent Hydro 91
nous disent - 830 000 - qu'ils ont fait certains gestes suite à la
lecture des conseils qu'on leur a donnés. Tout ceci pour vous dire qu'il
y a aussi un paquet de résultats indirects qu'on n'est pas capable de
capturer encore, ça va prendre un certain moment de recul. Ce avec quoi
on joue, avec les projets d'efficacité énergétique, c'est
avec les changements d'habitudes, avec les changements de comportements de nos
clients. Les outils pour mesurer ça sont des outils de nature
commerciale et les outils d'analyse de marché, de recherche commerciale
et ça prend un certain recul avant d'être capable de lire des
choses, des résultats significatifs, statistiquement. Tout ceci pour
dire que les résultats qu'on affiche demeurent sûrement encore
partiels par rapport aux objectifs qu'on poursuivait, qu'à mesure qu'on
va implanter nos outils de mesure on va, je pense, découvrir des
résultats additionnels.
M. Drouin: Si vous me permettez, M. le Président, ce qui
m'apparaît important relativement à la question de la ministre de
l'Énergie, c'est de constater qu'au moment où on se parie les
programmes sont en place et il y a des programmes à venir qui sont
déjà très bien définis. Si je peux prendre un de
ces programmes-là, à titre d'exemple, qui s'appelle ECOKILO qui
consiste à faire l'évaluation dans les résidences de la
consommation de l'énergie, à détailler et promouvoir, par
des conseils, des économies d'énergie à la suite d'une
analyse que j'appellerais un bilan énergétique de la maison,
l'expérience de ce programme-là qui a été lance
dans la région de Québec est qui est maintenant dans la
région de Montréal, c'est que la réponse de la
clientèle est bien au-delà de ce qu'on avait prévu, en
termes de taux de réponse. Et ça, c'est indicateur.
L'autre aspect qui m'apparaît intéressant et que j'ai
mentionné dans mon discours, c'est l'adhésion des quelque 52
différentes chaînes ou, enfin, bannières qui comportent
à peu près 2500 points de vente, qui distribuent et vendent des
produits économiseurs d'énergie. Les objectifs sont largement
dépassés depuis. J'ai eu l'occasion, la semaine dernière,
de rencontrer un groupe de ces présidents de maisons, Brico, Canadian
Tire, enfin, toutes ces maisons-là qui sont à même de nous
dire combien il y a une réponse de la part de la clientèle, que
les ventes sont beaucoup plus élevées que ce qu'on avait
prévu. Alors, ce qu'il est important de constater, en répondant
à votre question, c'est que là on a passé aux actes et,
finalement, ça devrait, au cours des prochaines années, donner
des résultats très concrets et mesurables.
Mme Bacon: On sait, M. le Président, que la promotion des
produits économiseurs ou les analyses énergétiques
résidentielles relèvent beaucoup plus de la sensibilisation ou de
l'information que de l'intervention directe. Étant donné
l'attitude des clients résidentiels face aux économies
d'énergie, est-ce qu'il est indiqué que vous adoptiez des mesures
plus interventionnistes que celles que vous avez retenues pour atteindre les
objectifs que vous vous êtes fixés dans ce secteur-là?
M. Roy: Définitivement. En fait, la stratégie qu'on
applique dans notre projet d'efficacité énergétique, je la
résumerai. On a cinq grands outils avec lesquels on va travailler. Le
premier et celui que vous avez bien mentionné est toute la
sensibilisation, l'information à nos clients. C'est un outil, dans les
premiers pas de notre projet, avec lequel on a beaucoup travaillé parce
qu'on savait qu'on avait à faire du rattrapage à ce
niveau-là. Le deuxième outil dans lequel, je pense, les
Éconos se situent, c'est ce qu'on appelle le soutien commercial et
technologique, donc, un outil qui consiste à rendre disponibles des
technologies, à aider les distributeurs à les rendre disponibles,
etc. Le troisième, dans lequel vous allez pouvoir nous être utile,
d'ailleurs, à travers les années, c'est la réglementation
qui va entériner des comportements, qui va les susciter aussi. Le
quatrième, c'est la tarification, bien
sûr, un autre outil avec lequel vous allez devoir être en
accord avec nous. Et le dernier, celui que vous mentionniez avec beaucoup de
raisons, c'est les interventions monétaires directes.
Il y a de la place pour ces cinq éléments-là, ce
qu'on appelle, en bon français, le mixte marketing. Constamment, ces
éléments-là vont avoir une contribution différente.
Bien sûr, il va y avoir de la place et, je pense, de la place accrue,
à travers les années, pour les interventions directes pour les
programmes. On en a déjà certains. Dans le secteur
résidentiel, on a joué plus avec l'information. Vous avez bien
mentionné les programmes comme ÉCOKILO, commes les Éconos.
Ils sont à caractère de sensibilisation. Dans le secteur
industriel, avec les moteurs à haut rendement, dans le secteur
commercial avec les produits d'éclairage, on est déjà dans
la partie d'être très interventionniste. On travaille des choses
au niveau du secteur résidentiel sur l'enveloppe thermique des
bâtiments, des résidences, ce qui va sûrement nous amener
à être très interventionnistes, mais sans cesse, à
travers les années, on va faire jouer chacun de nos cinq
éléments â leur valeur, dans notre meilleur jugement et
compte tenu aussi des résultats qu'on va atteindre.
Le Président (M. Audet): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le député de Taschereau.
M. Leclerc: M. le Président, je m'excuse auprès de
nos invités. Je n'étais pas en train de lire mon journal, mais je
cherchais un article de ce matin quant au projet du lac Robertson. On fait
état, et je pense que c'est significatif d'en parier, que des gens de la
Basse-Côte-Nord, selon le principe que tous les clients, au
Québec, peu importe leur région, paient le même prix,
paient leur électricité 0,045 $ du kilowattheure alors qu'il en
coûte 0,59 $ pour produire ce même kilowattheure. Je ne veux pas
remettre en question ce principe, loin de là. Cependant, est-ce qu'on ne
pourrait pas faire le raisonnement suivant, qu'en subventionnant à 92 %
l'électricité dans cette région-là - mais on
pourrait parler d'autres régions - on n'incite pas nécessairement
les populations locales - on parle des Attika-meks-Montagnais - à
collaborer avec HydroQuébec pour trouver des solutions moins
dispendieuses? En ce sens, est-ce qu'on ne donne pas l'occasion à ces
gens-là d'avoir le meilleur de deux mondes, d'avoir de
l'électricité faite à partir du diesel subventionné
à 92 % ou, ensuite, négocier le plus durement possible avec
HydroQuébec pour aller chercher le plus possible d'argent dans le cas
d'une éventuelle centrale hydroélectrique? Parce que c'est
ça dont il est question.
Et je me dis, et je vais pousser mon raisonnement: Si les
Attikameks-Montagnais payaient le coût réel du kWh sur leurs
réserves, ils seraient peut-être un peu plus parlables. Et je ne
remets pas en cause le principe de la tarification égale au
Québec. Mais ce que je me dis, c'est que finalement, ce sont les
Québécois de tout le Québec qui subventionnent à 92
% l'électricité sur la Basse-Côte-Nord. On serait en droit,
minimalement, d'attendre de la population locale, et notamment des Attikameks
qui se disent contre le projet, un minimum de collaboration pour faire en sorte
que la subvention qu'on leur verse chaque année, indirectement, à
même ce qu'on paie ici, à Québec, dans mon comté,
pour notre électricité, baisse un peu.
Et, si je le comprends, la centrale que vous construiriez
ramènerait les coûts à 0,17 $, donc, ferait sensiblement
baisser la subvention. Alors, je ne sais pas s'il y a déjà des
gens, chez Hydro-Québec, qui se sont penchés sur cette
question-là. Et est-ce que le principe de tarification égale pour
tout le monde, qui est aussi vieux qu'Hydro-Québec, est immuable?
M. Drouin: En tout cas, moi, je pense que c'est difficile de dire
à quelque population que ce soit qui est affectée par un projet
que ce projet-là ou, enfin, l'électricité pourrait lui
coûter plus cher parce qu'ils seraient contre le projet. Que ce soit une
communauté blanche ou une communauté amérindienne, c'est
un droit qui est inhérent à tous les Québécois de
se prononcer pour ou contre un projet. Et, quant à nous, c'est bien
clair que nous essayons de nous entendre avec toutes les populations de la
Basse-Côte-Nord pour faire ce projet. On a un permis, la construction est
commencée, à toutes fins pratiques. Je pense que ça va
fonctionner et ça va se construire. Bien sûr que les Attikameks se
sont prononcés contre, mais je pense qu'il y aura moyen de s'entendre
avec eux autres pour qu'on puisse continuer la construction comme on l'avait
prévu. Mais je ne pense pas qu'il soit question, en aucune façon,
pour nous, de menacer qui que ce soit, Blancs, Amérindiens ou autres,
que les coûts d'électricité pourraient leur être
imputés à part entière, compte tenu de leur opposition
à un projet.
M. Leclerc: II n'était pas question de menaces.
M. Drouin: Non, mais c'est parce que, vous savez, ou bien on leur
dit: Vous allez payer plus cher, et là, à ce moment-là,
ils vont dire: Ça n'a pas de maudit bon sens... On ne peut pas les
menacer de quelque chose qu'on ne peut pas exécuter et on n'a pas
l'intention de les menacer de ça, non plus.
M. Leclerc: Donc, vous pensez qu'à moyen et à long
terme on ne fera jamais de rapprochement régional entre les coûts
de la production et de la distribution.
M. Drouin: Bien, écoutez, c'est la différenciation
tarifaire. Vous savez, on a eu le même problème aux
Îles-de-la-Madeleine - si M. Farrah, le député des
îles, était ici ce matin, il aurait corroboré ce que je dis
- lorsqu'il s'est agi de construire une nouvelle centrale ou de passer des
câbles sous-marins. Mais passer des câbles sous-marins aurait
imposé que nous ayons une restriction sur la consommation
d'électricité et, par conséquent, ce qu'on appelle un
tarif ballon pour la surconsommation. En vertu du principe que tous les
Québécois et les Québécoises ont accès
à un tarif d'électricité uniforme, peu importe où
ils sont, je pense que ça va continuer comme ça. C'est tout
l'objet de la présence d'Hydro-Québec sur le territoire du
Québec.
Le Président (M. Audet): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions de ce côté-ci? Alors, afin de permettre aux membres
de la commission et aux gens d'Hydro-Québec de se délier les
jambes et faire ce qu'il faut, on va suspendre les travaux de la commission
pour reprendre dans trois ou quatre minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 45)
(Reprise à 21 h 51)
Le Président (M. Audet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Si vous voulez prendre place, messieurs, mesdames, la commission va
reprendre ses travaux. Alors, il nous reste 70 minutes de travaux
parlementaires pour ce soir. Il y a 35 minutes pour le parti de l'Opposition
officielle et 35 minutes pour le groupe ministériel. Demain matin...
M. Chevrette: Je m'excuse, mais ça ne marche pas de
même parce que vous avez commencé une demi-heure par Mme la
ministre, ce qui était entendu et une demi-heure pour l'Opposition, ce
qui était entendu. Elle vient de prendre une demi-heure. Donc, on va
prendre une demi-heure, et on se sépare le temps qui reste en deux.
Le Président (M. Audet): Oui, O.K. C'est une solution ou,
ce qu'on aurait pu faire...
M. Chevrette: Ce n'est pas une solution, c'est l'entente qu'on a
conclue.
Mme Bacon: Quand on s'entendait. Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Audet): O.K., je ne le savais pas.
Excusez-moi.
M. Chevrette: Au moment où on s'entendait, c'était
ça.
Le Président (M. Audet): Lorsque les travaux ont
commencé, M. le député de Joliette, j'étais absent.
Alors, à ce moment-là ce qu'on va faire, c'est qu'il y aura... Il
reste 70 minutes.
M. Chevrette: Non, on a le droit à une demi-heure.
Le Président (M. Audet): Oui, vous avez droit à une
demi-heure.
M. Chevrette: II restera 30 ou 40 minutes, 20-20.
Le Président (M. Audet): 20-20, O.K. Ça me va. Pas
de problème. Non, c'est parce que j'étais absent lorsque les
travaux ont débuté. Alors...
Mme Bacon: On s'entendait dans ce temps-là.
M. Chevrette: Oui, oui. On ne s'entend plus là. C'est
ça. On a compris ça.
Le Président (M. Audet): Alors vous avez la parole, M. le
député de Joliette, pour une période de 30 minutes.
M. Chevrette: Oui, merci. Je voudrais revenir sur le programme
d'efficacité énergétique. Il y a eu un reportage
télévisé hier. Il y a quelqu'un qui y a fait allusion cet
après-midi. Effectivement, dans les deux ou trois questions
posées, il n'y a pas eu de réponse de donnée. Donc, je
voudrais donner l'occasion de fournir une réponse parce que le reportage
concluait qu'il en coûtait plus aux consommateurs, en main-d'oeuvre et en
équipement, que la diminution même d'énergie, que le
coût de la diminution d'énergie.
Donc, j'aimerais que vous le glissiez dans une réponse parce que
c'est important qu'on sache. On me dit, par exemple, que dans la pomme de
douche - je vous donne un exemple - l'achat de la pomme de douche, pour les
personnes âgées, elles sont obligées d'engager de la
main-d'oeuvre pour la faire poser. Bien souvent, il y a des ajustements. Alors
ils font venir de la main-d'oeuvre et ça coûte plus cher en fin de
compte pour eux, consommateurs. Je ne parle pas de l'économie
d'énergie mais, pour le consommateur, ça se solde par des
coûts plus forts que dans les farts. Et ça, c'est dit non
seulement par des personnes qui l'utilisent, c'est aussi dit par des gens qui
ont à l'analyser et qui ont reçu des plaintes à plusieurs
paliers, y compris à Hydro-Québec, à ce
niveau-là.
Et la deuxième question. J'aimerais que vous en profitiez pour
nous dire, pour une grande efficacité, combien vous devriez investir
dans les prochains mois ou dans la prochaine année, dans
les prochains deux ou trois ans, et combien il en coûtera aux
consommateurs pour vous suivre. Par exemple, si vous investissez 2 000 000 000
$, quelle est la part du consommateur qui devrait être versée par
lui-même?
M. Drouin: Très bien. M. Boiduc va vous
répondre.
M. Boiduc: Je voudrais commencer par faire allusion au cas des
fluorescents compacts qui ont fait l'objet de chiffres publiés hier soir
et de certains commentaires. Je pense que c'est un cas idéal pour
illustrer la philosophie et l'approche que nous prenons à
l'efficacité énergétique, en commençant par des
études technico-économiques, mais en passant ensuite à
l'aspect marketing, commercialisation et changement de comportement des
consommateurs. Le projet d'efficacité énergétique, ce
n'est pas un projet strictement d'ingénierie ou d'économiste,
c'est un projet de changement de société. C'est d'amener les
gens, de façon générale, à avoir un comportement
qui maximise l'efficacité énergétique. Et le fluorescent
compact est un très bel exemple d'une façon dont une approche
marketing peut à la fois réduire les coûts pour tout le
monde et produire des économies intéressantes. L'étude qui
avait été faite au départ, sur le plan strictement
économique, en prenant les coûts d'un fluorescent compact
typique... Peut-être pour situer tout le monde, on parie d'un appareil
qui remplace une ampoule ordinaire 60 watts sur n'importe quelle lampe et qui
utilise seulement 15 watts pour donner le même effet d'éclairage.
Donc, on coupe en quatre l'utlilisation de l'électricité pour
obtenir à peu près exactement le même service. Ces
ampoules-là sont devenues, partout dans le monde, en Amérique du
Nord surtout, presque le symbole de ce qu'est l'efficacité
énergétique. C'est bien au-delà de l'appareil
lui-même. C'est un peu ce que le Bonhomme Carnaval est au Carnaval de
Québec, si je peux dire. C'est un objet de ralliement qui symbolise
l'efficacité énergétique. Dans les calculs initiaux que
nous avons farts, le prix de cette ampoule-là se situait autour de 30
$.
M. Chevrette: Prenons ce point précis. M. Boiduc:
Oui, j'y arrive.
M. Chevrette: On me dit que, dans un contexte où on vit
dans un pays froid, celui qui se chauffe à l'électricité,
qui réduit la chaleur par ses ampoules, son grillage, sa plinthe
électrique va marcher d'autant plus et il n'y a aucune économie,
c'est même plus cher pour le gars. Qu'est-ce que vous répondez
à ça?
M. Boiduc: C'est ce qu'on appelle les effets croisés,
justement, qui font partie des études que nous avons faites. M. Roy,
tout à l'heure, pourra vous parier techniquement, un peu, davantage
comment les effets croisés interviennent. Vous allez voir que c'est loin
d'être simple. Évidemment, le cas extrême, c'est si vous
mettez un fluorescent compact dans un garage non chauffé; il n'y a aucun
effet croisé, il y a la pleine économie. Si vous le mettez pour
éclairage extérieur, c'est la même chose. Si vous le placez
dans une maison, l'effet compensatoire, si vous voulez, sur le chauffage varie
beaucoup selon où il est placé. S'il est placé au plafond,
il a un effet assez faible parce que la chaleur monte et ça n'affecte
pas autant la température de la pièce. S'il est placé dans
une lampe qui est beaucoup plus basse, plus bas que le thermostat, ça va
avoir un effet. Alors, les cas varient de façon extrême, selon les
utilisations.
Dans les exemples que nous avons donnés ce matin avec la
présentation de la justification de hausses de tarifs, de façons
d'économiser, nous avons donné comme crédit à peu
près une économie de 3 $ par année par ampoule qui est
installée par un client comme ça. Si on avait donné la
pleine valeur sans tenir compte d'effets croisés, on aurait dit: 4 $. Il
est certain que pour certaines installations ça va peut-être
être encore moins fort comme économie, mais pour d'autres
ça va peut-être être 4 $. On a mis 3 $ comme un cas typique
moyen. Mais ce qui est important, et je vais revenir au point de tout à
l'heure, c'est que les études initiales qui ont démontré
que l'économie était faible ou même négative, dont
celle qui a été citée à la télévision
hier, supposaient un coût d'achat de 30 $ pour ces ampoules. Or, avec le
programme Les Éconos que nous avons déclenché au
Québec, les ventes de ces ampoules se sont multipliées de
façon phénoménale depuis que nous avons commencé
à en faire la promotion avec les distributeurs. Et, comme partout
ailleurs en Amérique du Nord, quand il y a un volume qui
s'accroît, le prix baisse. Aujourd'hui, on peut acheter ces ampoules pour
la moitié du prix qui a été cité dans
l'étude d'hier et si la tendance continue, dans un an ou deux, elles
vont coûter en bas de 10 $, ces ampoules-là. En bas de 10 $, le
client qui en achète a une économie tout de suite en partant
simplement en éliminant le remplacement d'ampoules ordinaires qui ont
une vie beaucoup plus courte. C'est-à-dire que, finalement, ça ne
va rien coûter au consommateur. Il va déjà
économiser simplement sur son coût d'achat en ayant des
fluorescents compacts qui durent sept à huit ans en moyenne - ils ont
une vie très longue - et en évitant d'avoir à acheter,
dans cette période-là, plusieurs ampoules ordinaires dont le
coût accumulé serait aussi élevé que son
ampoule.
Donc, notre action auprès des promoteurs, au lieu de coûter
de l'argent à Hydro-Québec qui aurait pu dire: On va payer la
moitié ou on va donner gratuitement ces ampoules, ce qui aurait
créé des coûts très élevés pour
Hydro-Québec et
se refléter encore une fois dans les hausses de tarifs, par une
approche de marketing où on développe avec les distributeurs un
volume, on fait baisser le prix et on en arrive à une situation
où ça va être rentable en partant. Avant même de
parier d'économie d'énergie, ça va être rentable
pour le consommateur de changer d'une ampoule de 60 watts ordinaire à un
fluorescent compact et, évidemment, à partir de là,
l'économie d'énergie qui s'ajoute est gratuite et fait le
bénéfice et du consommateur et, évidemment,
d'Hydro-Québec puisqu'à un coût très bas on obtient
des économies d'énergie qui nous permettent d'atteindre les
objectifs visés. Peut-être que M. Roy peut ajouter des
éléments techniques.
M. Roy: En fait, le cas du fluo compact est un cas
extrêmement intéressant parce qu'il pourra traduire un peu tout
l'esprit, toute la difficulté qu'il y a à faire de
l'efficacité...
M. Chevrette: Parlez plus fort.
M. Roy: II traduit toute la difficulté, toute la
particularité du projet d'efficacité énergétique au
Québec. Cette problématique d'effets croisés,
évidemment, se limite aux pays nordiques et elle est encore plus
particulière chez nous, dû au fait que nos gens se chauffent
à 70 % à l'électricité. Donc, c'est un fait, quand
on fait des... Ça s'applique aux ampoules, ça s'applique aux
frigos, ça s'applique aux chauffe-eau non performants. Tous ces
appareils-là ont des pertes thermiques qui contribuent, dans une
certaine mesure, à chauffer les espaces. On est bien conscient de cette
chose-là, c'est de la thermodynamique assez primaire. Comme on le
disait, par contre, c'est des phénomènes qui sont difficiles
à quantifier. (22 heures)
On est en train d'intégrer ça dans nos modèles de
potentiel et d'objectifs d'efficacité énergétique. C'est
d'ailleurs un des paramètres importants qui est derrière le fait
que, dans le prochain pian de développement, ce qui est en consultation
actuellement, c'est un des éléments qu'on a pris en compte dans
la révision de nos objectifs et dans la révision de nos budgets.
C'est la prise en compte de ces genres de choses là.
Ce sur quoi ça déborde aussi, cette chose-là -
parce que la nouvelle d'hier avait l'air à dire: Vous êtes
tendancieux, vous faites des mensonges aux clients. On s'en défend bien,
bien sûr. Mais ça remet en cause c'est quoi qu'on doit donner
comme conseils aux clients. Cet après-midi, on a mentionné qu'on
a identifié 400 à 500 mesures d'économie d'énergie
à date. Il est bien évident que chaque client n'est pas
intéressé par chacune des 400. Je vais vous donner des exemples
assez triviaux. On dit à des clients: Baissez vos thermostats la nuit.
Ceux qui l'ont déjà fait, c'est une mesure qui n'est pas
applicable. On dit à d'autres clients: Faites vos lavages à l'eau
froide. Ceux qui le font déjà, ce sont des mesures qui ne sont
pas applicables. On dit à des gens: Installez des fluorescents compacts.
Il y a un certain nombre de gens pour lesquels ce n'est pas applicable non
plus. Si vous installez un fluorescent compact, si vous faites de la
climatisation, non seulement il n'y a pas d'effets croisés
négatifs, mais il y a des effets croisés positifs parce que,
l'été, vous devez climatiser la chaleur...
Tout ceci pour dire que les produits écono-miseurs
d'énergie, c'est des produits de consommation comme n'importe quel autre
produit. Les clients doivent avoir, vis-à-vis ces produits, le
même discernement qu'ils ont vis-à-vis de n'importe quoi qu'ils
achètent et ils doivent essayer d'adapter ces choses-là à
leur situation propre. On a d'ailleurs des programmes pour les aider à
faire ça. On parlait tantôt du programme ÉCOKILO. C'est un
programme personnalisé qui vise à dire: M. ou Mme client, dans
votre situation particulière à vous, vous devriez utiliser
plutôt telle mesure. Mais il est évident que, dans les 400
à 500 mesures, les clients vont devoir faire leur choix, vont devoir
adapter ça à leur situation propre, comme ils le font pour
n'importe quel produit de consommation.
M. Chevrette: La deuxième réponse,
brièvement, s'il vous plaît.
M. Drouin: La deuxième réponse, c'est que si on
regarde d'ici l'an 2000, 1991 à 2000, on parle d'un investissement de la
part d'Hydro-Québec de 2 000 000 000 $. Le client ou les clients
auraient à investir, pour leur part, 1 000 000 000 $, ce qui fait un
coût total pour un programme comme ça de l'ordre de 3 000 000 000
$. L'objectif, parce qu'on vous a dit qu'en termes d'économie
d'énergie ça veut dire qu'on ne construit pas pour la
différence, c'est presque... On parle de 9,3 tWh sur une période
de 10 ans. Je veux juste faire une comparaison avec Grande-Baleine, disons,
c'est 16 tWh. Donc, l'objectif, c'est d'éviter la construction d'une
centrale qui aurait l'équivalent de deux tiers ou trois
cinquièmes de Grande-Baleine. C'est un projet ambitieux, mais comme on
vous l'a mentionné, avec tout ce qui est en place, on pense qu'on peut
le réussir.
M. Chevrette: Mais, M. Drouin, pour aller dans le sens du
député de Taschereau, je pense, cet après-midi, vous
faites des programmes de sensibilisation. C'est payé à même
les cotisations que vous retirez, bien sûr, des actionnaires
d'Hydro-Québec, que sont les consommateurs d'électricité
et vous en faites profiter largement l'entreprise. Comment se fait-il que, dans
ces programmes de sensibilisation... Je veux reposer la question parce que je
n'ai pas senti qu'il y avait eu une réponse claire cet
après-midi
Comment se fait-il, par exemple, qu'une compagnie qui vend des ampoules,
dont vous faites la promotion, comment se fait-il qu'elle ne participe pas
à des campagnes de sensibilisation? Les pommes de douche, ils en ont
vendu, grâce à vous autres, je ne sais pour combien de centaines
de milliers. Comment se fait-il qu'ils ne participeraient pas à une
campagne de sensibilisation avec vous autres? Est-ce que c'est parce que vous
ne le demandez pas ou si c'est parce que c'est votre philosophie?
M. Roy: Mais le sens même d'un programme comme les produits
économiseurs d'énergie, qu'on appelle les Éconos, dans
notre langage, est de faire participer effectivement les distributeurs, les
fabricants, etc. Dans notre programme les Éconos, je ne sais pas si vous
avez remarqué, Hydro-Québec n'a jamais subventionné... M.
Bolduc disait que le coût des fluorescents compacts était
baissé de 50 % depuis le début de ça...
M. Chevrette: Ce n'est pas ça que je vous ai
demandé.
M. Roy: Non, mais Hydro-Québec s'associe avec des
distributeurs, avec des fabricants qui, eux... On fait des promotions
conjointes.
M. Drouin: Ils paient leur part.
M. Roy: C'est ça l'essence même de notre projet les
Éconos.
M. Drouin: Ils paient une part dans les promotions.
Une voix: Ils paient une part extrêmement importante.
Une voix: C'est ça.
M. Chevrette: Donnez-moi donc un exemple. Parce que je n'ai
jamais vu la compagnie «pommes de douche X», conjointement avec
HydroQuébec, proposer, dans une annonce publicitaire... Je n'ai jamais
vu ça, moi. Je ne sais pas si je suis tout seul, ici.
M. Roy: Si vous êtes entré dans quelques Canadian
Tire, pour nommer ceux-là, ou dans quelques Brico au cours de
Tannée 1991, on a eu deux promotions. Vous avez sûrement vu nos
annonces, qui sont des collaborations conjointes. Si vous lisez la circulaire
de Ro-Na, vous allez voir qu'il y a des publicités associatives avec
Hydro-Québec-Ro-Na pour faire la promotion de produits
économiseurs d'énergie. C'est dans le sens même, je crois,
de la philosophie que vous énoncez, de s'associer avec les forces du
milieu pour faire connaître les produits économiseurs
d'énergie et pour partager les publicités conjointes.
M. Drouin: Ce que j'aurais aimé vous montrer et que je
n'ai pas réussi...
M. Chevrette: Non?
M. Drouin: ...c'est la série d'annonces et de pamphlets
que les 52 bannières auxquelles je faisais allusion tantôt, qu'on
a associées à travers le Québec, défraient, en
termes de publicité. Je suis convaincu que si vous lisez le moindrement
les feuillets qu'on reçoit à la maison, parfois indûment,
le dimanche, etc., on a des pages d'annonces et vous voyez que cette
bannière, qui peut être Brico, par exemple, va annoncer les
produits économiseurs d'énergie avec un signe
d'Hydro-Québec, etc.
M. Chevrette: Vous êtes assez difficile à suivre,
imaginez-vous, juste dans vos dossiers, qu'on n'a pas le temps de lire votre
publicité! Surtout le dimanche matin! Je vais laisser la parole à
ma collègue et je reviendrai.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Drouin: Vous recevez tellement de documents, il me semble, que
vous devriez au moins recevoir ceux-là!
M. Chevrette: Ce n'est pas ceux-là qu'on m'envoie.
Dites-moi pas que vous êtes jaloux, vous aussi?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Audet): O.K. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions de ce côté-ci? Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Si vous permettez,
M. le Président, je voudrais revenir un peu au suivi du plan de
développement 1990-1992, les équipements de production. À
la page 12 du document présenté tout à l'heure par M.
Delisle, vous rappelez qu'il y a eu un retard dans les
échéanciers prévus pour Grande-Baleine. Vous dites:
«Depuis ce temps, une harmonisation des différents processus
d'évaluation environnementale concernant ce projet a été
convenue.» Juste une brève question et je voudrais une
brève réponse, parce que je voulais aller sur un autre dossier:
Combien Hydro-Québec a-t-elle consenti aux Cris pour faire leur
évaluation environnementale? Je pense qu'il y a eu une entente qui est
intervenue, et les Cris vont faire leur propre évaluation
environnementale.
M. Drouin: Pour les Cris et les Inuit, il y a eu une entente pour
3 000 000 $.
Mme Blackburn: 3 000 000 $?
M. Drouin: Oui.
Mme Blackburn: Alors, les chiffres qui circulaient à
l'effet que ça pouvait aller jusqu'à 8 000 000 $...
M. Drouin: Ah! Non, non. Mme Blackburn: 3 000 000 $.
M. Drouin: Là, je vous donne la contribution d'Hydro.
Mme Blackburn: Ah oui!
M. Drouin: C'est ce que vous m'avez demandé.
Mme Blackburn: Mais, au total, je pense qu'ils ont une
contribution... C'est ça. Il y a
Hydro-Québec, le gouvernement du Québec et le gouvernement
canadien.
M. Drouin: C'est ça.
Mme Blackburn: C'est ça, le total, c'est de 8 000 000 $
à 9 000 000 $.
M. Drouin: Je pense que c'est 5 000 000 $, si je ne me trompe
pas.
M. Michel: 2 000 000 $...
M. Drouin: 2 000 000 $ de la part des gouvernements.
M. Michel: ...plus 3 000 000 $,5 000 000 $. M. Drouin: 5
000 000 $.
Mme Blackburn: Bien. Je pense que c'est M. Michel, tout à
l'heure, qui, en réponse à une question de la ministre, disait:
Si les problèmes se complexifient davantage - et j'ai mis entre
parenthèses «avec les Cris» - on va se tourner vers des
projets intermédiaires. Alors, j'ai compris par «projets
intermédiaires», Ashuap-mushuan, les rivières que vous
projetez harnacher, le Haut-Saint-Maurice, parce que ou les Blancs sont plus
tolérants ou plus dociles ou habitués à laisser inonder
leur territoire sans trop disputer... Je sais que, chez nous, au sujet de
l'Ashuapmushuan, ça conteste beaucoup, comme le rappelait d'ailleurs la
ministre, tout à l'heure. Pourriez-vous faire un peu l'état de la
situation, en nous rappelant, parce qu'on parle de la mise en route de la phase
II... Comme je pense que c'est quelque 30 000 000 $, la phase II, donc cette
phase-là étant enclenchée, le projet serait pour ainsi
dire irréversible, c'est-à-dire qu'en dépit des
contestations on procéderait. Est-ce que vous pourriez faire le point
là-dessus?
M. Drouin: Certainement. M. Michel.
M. Michel: Depuis 1988, Hydro-Québec a
décidé de scinder ses avant-projets en deux phases: la phase I et
la phase II. Ce qui se produisait, antérieurement à ces
dates-là, c'est qu'on faisait un avant-projet au complet et on avait les
montants substantiels. À titre d'exemple, dans Sainte-Marguerite, il y a
environ 60 000 000 $ de dépensés. Au bout de deux, trois ou
quatre ans, Hydro était devant un état de fait. Elle avait
investi une grande quantité d'argent dans un avant-projet, elle avait
dépensé du temps et elle n'avait pas de scénario de
rechange. Dans un esprit d'ouverture, ce qu'on a décidé de faire
depuis 1988, c'est de scinder les avant-projets en un avant-projet phase I et
un avant-projet phase II. Dans le cas d'Ashuap-mushuan, on a terminé
l'avant-projet phase I l'été dernier et on est allé en
consultation du public parce que, dans Ashuapmushuan, on se trouve dans une
situation un peu analogue où on se trouvait dans Sainte-Marguerite
après la phase
I, c'est-à-dire qu'après un avant-projet phase I, on a
identifié des problèmes potentiels mais on n'a pas de solutions
réelles, tangibles parce que ces solutions-là, on les
développe durant la phase
II. Donc, on se ramasse avec une situation souvent où le public
est un peu inquiet étant donné qu'on a une vision plutôt
négative du projet, c'est-à-dire une connaissance des
problèmes et une connaissance beaucoup moins grande des solutions
possibles. Mais, dans le cas d'Ashuapmushuan, on est en avant-projet phase I.
On est retourné en consultation publique, on a identifié des
zones problématiques au niveau de la ouananiche, entre autres. Il y a
peut-être des palliatifs possibles et il y a peut-être de
l'ensemencement possible dans d'autres rivières mais ça, c'est en
phase II qu'on fera ça. Mais la décision d'aller en phase II, au
moment où je vous parle, n'est pas prise, on va la prendre au cours de
l'été.
Mme Blackburn: Bien. Est-ce que les études
environnementales pour Ashuapmushuan, il y a seulement celles d'Hydro ou s'il y
en a d'autres qui seront réalisées? Le BAPE n'est pas venu, il
n'y a pas eu d'études environnementales autres que celle d'Hydro.
M. Michel: On a travaillé de concert avec le MLCP dans
certaines études et on a même, depuis l'été dernier,
fait des études complémentaires avec le MLCP sur la ouananiche.
Le MLCP a un objectif de prises dans le lac Saint-Jean de 20 000 ouananiches
par année et le projet Ashuapmushuan pourrait interférer avec
ça quelque peu et on étudie, de concert avec eux, des programmes
d'étude de solution pour ça.
M. Drouin: Quant au BAPE, M. le Président, ça
viendrait définitivement dans le processus final d'évaluation
environnementale, une fois qu'on a aurait terminé la phase II de
l'avant-
projet et que nous serions - parce que c'était ça le but
de votre question tantôt... Je ne pense pas qu'on puisse dire, une fois
qu'on a complété une phase d'avant-projet, que le projet est
irréversible. Il n'est jamais irréversible. Le BAPE se prononce
là-dessus par la suite et fait des recommandations que le promoteur ou
que le ministre de l'Environnement décide d'appliquer ou pas.
Mme Blackburn: À une question du député de
Saint-Maurice tout à l'heure, M. Michel répondait: Si la
région est plus acceuillante, Hydro-Québec pourrait être
plus proactive. Comment doit-on recevoir ça dans une région comme
la mienne?
M. Michel: Une région comme... Pardon?
Mme Blackburn: La nôtre. Finalement, on conteste le
projet.
M. Michel: Je pense que la seule façon de travailler
où que ce soit, c'est avec transparence et c'est ce qu'on essaie de
faire, tant dans Ashuapmushuan que dans le Haut-Saint-Maurice qu'à
Sainte-Marguerite. Dans le cas de Sainte-Marguerite - c'est un exemple, je
pense, qui est digne de mention - après la phase I, les gens
étaient inquiets à propos du saumon de la rivière Moisie.
On a formé des comités scientifiques, on a formé des
comités sur la génétique du saumon et on a
étudié la question avec les intervenants du milieu, des gens
d'une grande compétence dans le domaine du saumon. Je pense que c'est la
seule façon de travailler, que ça soit en Mauricie ou au
Lac-Saint-Jean.
Mme Blackburn: Dans la région, on invoque souvent, en
faisant état des dommages causés à l'environnement et
parce que c'est la seule grande rivière qui n'ait pas été
harnachée dans la région, on parle même d'une
rivière patrimoniale... En dépit de toutes les
précautions, de la possibilité d'organiser des frayères
dans la rivière Mistassini pour compenser les pertes dans
l'Ashuapmushuan, il y aura quand même des dommages à
l'environnement. Il y a évidemment tous les dangers d'inondation. Les
organismes parlent beaucoup de compensations, l'équivalent de ce qu'on a
reconnu, par exemple, aux Cris, aux Inuit, aux moment où on a
inondé leur territoire. Est-ce qu'il y aurait, dans ce cas-là
aussi, de la part d'Hydro-Québec peut-être un peu plus
d'équité que dans d'autres dossiers et où on traitera les
Blancs de la même manière qu'on a traité les autochtones?
(22 h 15)
M. Drouin: Vous savez que nous avons déjà, M. le
Président, un programme de mise en valeur environnementale à
Hydro-Québec et ceux ou celles chez qui nous avons construit des
ouvrages, au cours des dernières années, ont su en
bénéficier. Je prends pour exemple la région des
Îles-de-la-Madeleine où nous avons construit une centrale de
quelque 200 000 000 $ et où il y a eu des retombées
environnementales importantes. Quand je dis «des retombées
environnementales», ce sont des retombées économiques mais
qui s'adressent à la valeur et à la valorisation
environnementale. Ça, ça existe à Hydro-Québec.
C'est évident que ça s'applique dans un projet comme celui de
l'Ashuapmushuan. Je sais que les gens du milieu, dans le Lac-Saint-Jean, ont
évoqué la possibilité d'une mise en valeur
économique d'un projet, en même temps qu'une mise en valeur
environnementale. Je pense qu'il ne faut pas exclure ces hypothèses et,
s'il y a lieu de les examiner plus à fond en temps opportun, je suis
sûr qu'on pourrait trouver des terrains d'entente.
Mme Blackburn: J'aurais d'autres questions mais je sais que mes
collègues veulent intervenir aussi. Alors, j'aurai peut-être
l'occasion d'intervenir d'ici la fin des...
Le Président (M. Audet): Madame la députée
de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais
revenir sur le programme dont vous parliez tantôt dans les programmes
d'efficacité énergétique, celui d'ÉCOKILO.
J'aimerais connaître le coût de ce programme qui a
été effectué dans la région de Québec et qui
est maintenant dans Montréal.
M. Drouin: Et qui le sera à la grandeur de la province.
C'est de l'ordre de 30 000 000 $. On peut vous le trouver
précisément.
Mme Caron: 30 000 000 $?
Une voix: C'est de l'ordre de 30 000 000 $.
Mme Caron: II y a combien de réponses types qui sont
préparées pour envoyer au consommateur, suite à la
réponse du questionnaire?
M. Roy: Excusez-moi?
Mme Caron: Lorsque le consommateur répond au questionnaire
d'ÉCOKILO, vous avez combien de réponses types que vous retournez
au consommateur?
M. Drouin: C'est une analyse qui est faite par ordinateur.
Mme Caron: Oui. Il y a combien de réponses types, à
peu près?
M. Roy: Je vais essayer de répondre le mieux possible.
Dans la région de Québec où on a fait ÉCOKILO, on a
eu un taux de réponses
des clients... On envoie un questionnaire, les clients nous retournent
le questionnaire... Parce que le taux de réponses, c'est de la part du
client. Nous on envoie notre questionnaire...
Mme Caron: Oui, oui, et vous répondez après.
M. Roy: Et ils nous répondent environ à 50 %.
Ça a été le pourcentage dans la région de
Québec. Ce qui était très surprenant parce qu'on avait
travaillé plutôt avec 25 % à 30 % qui étaient les
résultats obtenus un peu ailleurs, en Ontario, par exemple, parce que
ces types de programmes là ont été pratiqués dans
certains États américains.
Mme Caron: Ce n'est pas ça ma question. Le consommateur
vous répond.
M. Roy: Oui.
Mme Caron: Retourne son questionnaire.
M. Roy: Oui.
Mme Caron: À 50 %. Vous répondez au consommateur,
hein, vous faites l'analyse?
M. Roy: On va traiter...
Mme Caron: Vous lui donnez des conseils. Votre série de
conseils... Vous avez combien de séries de conseils différentes
pour répondre au questionnaire que le consommateur vous a
retourné?
M. Roy: Bon, il peut en avoir plusieurs. En fait, le
questionnaire s'intéresse à l'ensemble de la consommation du
client. Dépendant de sa situation particulière, on va lui donner
des conseils sur son eau chaude, on va lui donner des conseils sur son
isolation, sur les infiltrations.
Mme Caron: Plus clairement, j'ai répondu au questionnaire
ÉCOKILO.
M. Roy:...
Mme Caron: Dans la région de Québec. J'ai
effectivement reçu une réponse que j'ai comparée à
celle de mes voisins. En fait, c'était une lettre type qu'on nous
envoyait et on nous donnait à peu près à tout le monde les
mêmes conseils, peu importe ce qu'on avait répondu dans le
questionnaire.
M. Drouin: Vous restez dans un bloc d'appartements?
Mme Caron: Non, ce n'est pas un bloc d'appartements.
M. Drouin: Non, non, je pose la question.
Mme Caron: Puis on n'a pas la même consommation vu que je
suis à Québec seulement trois jours sur cinq sur semaine. Donc,
on n'avait pas tout à fait les mêmes réponses,
sûrement. C'est pour ça que je vous demande. Vous avez combien de
réponses types finalement pour ce programme-là? Et on nous
envoyait, bien sûr, en récompense probablement en réponse
à nos questionnaires, un petit thermomètre pour le
réfrigérateur et un petit «gadget» pour le robinet.
Personnellement, je considère que 30 000 000 $ pour un programme comme
celui-là... Moi, ce que j'ai eu comme impression, c'est
qu'Hydro-Québec se donnait bonne conscience, voulait donner l'impression
qu'elle faisait une véritable analyse de nos besoins d'énergie
alors que, finalement, la réponse type qu'on avait ne nous
avançait strictement pas, surtout qu'en fait la vraie réponse
pour régler le problème d'énergie chez nous,
c'était de l'isolation et on ne m'en a pas parlé du tout dans ma
réponse type. Pour 30 000 000 $ - c'est pour ça, je ne savais pas
le coût du programme - je vous avoue que je trouve ça vraiment
extrêmement dispendieux. Et ça ne répond pas aux vrais
problèmes parce que les vrais problèmes, la plupart du temps, ont
justement trait à l'isolation des maisons puis, quand on regarde les
personnes dont la facture d'électricité est la plus
élevée, c'est souvent les familles à plus faible revenu
parce qu'elles sont dans des logements qui sont mal isolés et ça,
il n'y a pas de réponse à ça dans vos programmes
d'efficacité énergétique. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu
d'avoir un programme qui répondrait aux vrais problèmes?
M. Roy: ÉCOKILO, comme on l'appelle, dans notre langage,
un programme locomotive dont le but est d'identifier auprès des
clients... Je continue à dire qu'il n'y a pas de réponse type
à ÉCOKILO; il y a des réponses qui sont
personnalisées à chacun des clients, dépendant des
réponses qu'ils ont données, puis il n'y a rien de type
là-dedans. Vous me dites... Pour finir là-dessus, le but qu'on
poursuit avec ÉCOKILO, c'est de sensibiliser notre clientèle
à entreprendre des mesures d'efficacité
énergétique. Bien sûr, c'est un programme d'information
avant tout, auquel on va greffer à notre locomotive un paquet de wagons
qui vont être des programmes d'isolation thermique et d'autres types de
programmes.
Pour en venir au programme d'isolation thermique, on y travaille
très fort actuellement, mais il ne faut pas oublier qu'au Québec
on est après Énergain, on est après les maisons Novelec,
on est après les maisons Médaillon; on a déjà un
parc d'habitation au Québec qui est, selon toute l'information qu'on a,
relativement performant.
Il est très facile de lancer de l'argent en isolation thermique.
On est en train de faire des
études pour identifier clairement à quel endroit sont les
potentiels. Puis, de ces études, on a, dans notre planification vers la
fin de l'année 1992, des projets de lancer des programmes sur
l'isolation thermique. On est bien conscient, comme vous le dites bien, qu'au
Québec, dans un pays où il fait froid, où on se chauffe,
une partie importante du potentiel d'efficacité
énergétique se situe dans l'isolation, mais on sait aussi que la
rentabilité de ça n'est pas évidente. Une des raisons pour
lesquelles ECOKILO ne vous a pas donné de conseil dans votre cas
personnel au niveau de l'isolation, c'est probablement que les retours sur
l'investissement que vous auriez pu faire là-dessus ne sont pas
raisonnables. On ne peut pas ouvrir les murs, mais, bien sûr, on peut
changer les fenêtres, ce qui coûte très cher; on profite de
l'occasion où le client a besoin de les changer pour lui donner des
conseils et lui dire; Écoutez...
Mme Caron: Du Zip, ça coûte moins cher.
Le Président (M. Audet): Votre enveloppe de temps est
terminée.
M. Jolivet: Ah! C'est de valeur.
Le Président (M. Audet): Je vais maintenant passer
à la formation ministérielle. Mme la ministre, vous avez 20
minutes.
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Au niveau de
l'environnement, dans le domaine de la santé et des champs
électromagnétiques, une étude
épidémiologique importante est en cours qui met à
contribution trois compagnies d'électricité: Hydro-Québec,
Hydro Ontario et EDF, et des résultats étaient attendus pour
1992. Dans le suivi, on ne voit rien de mentionné à ce
propos-là. À quelle étape l'étude est-elle rendue
et quand prévoyez-vous rendre publics les résultats de cette
étude?
M. Drouin: M. Daniel Dubeau, vice-président,
environnement.
M. Dubeau (Daniel): M. le Président, effectivement,
l'étude...
Le Président (M. Audet): Voulez-vous vous identifier, s'il
vous plaît?
Mme Bacon: II vient de l'identifier. M. Dubeau.
Le Président (M. Audet): M. Dubeau. D'accord. Merci.
M. Dubeau: Donc, M. le Président, effectivement,
l'étude épidémiologique que nous avons entreprise avec
Électricité de France, Hydro Ontario et Hydro-Québec
représente l'analyse de 150 000 dossiers médicaux de l'ensemble
des trois entreprises d'électricité. Il s'est posé des
problèmes au niveau de l'application du protocole de recherche
épidémiologique au sein des trois entreprises,
particulièrement du côté d'Ontario Hydro; des correctifs
ont été apportés, mais ça amène un retard
effectivement dans les conclusions de l'étude. Maintenant, nous
prévoyons avoir un rapport en 1993.
Mme Bacon: Alors, c'est reporté d'une année?
M. Dubeau: Oui.
Mme Bacon: D'accord. Vous avez effectué aussi, au cours
des années quatre-vingt, une recherche sur l'évolution des
teneurs en mercure des poissons du complexe La Grande. Le suivi ne mentionne
pas cette étude directement, mais pouvez-vous nous faire part des
principales conclusions de cette étude et des perspectives dans le
domaine ou dans d'autres projets?
M. Dubeau: Effectivement, M. le Président, depuis 1986,
Hydro-Québec a entrepris, de concert avec le gouvernement du
Québec représenté par le CRSSS de Chisasibi et le Grand
Conseil des Cris, une étude importante sur le dossier du mercure
à la Baie James, particulièrement avec le suivi du complexe La
Grande. Jusqu'à maintenant, il n'y a pas de solutions techniques qui ont
été identifiées pour solutionner le problème du
mercure qui se retrouve à l'état naturel suite à
l'ennoiement de territoires. Cependant, ce qui a été
défini, ce sont des mesures qui ont permis, entre autres, d'indiquer aux
autochtones comment consommer le poisson, quelle quantité et dans quels
espaces, si vous voulez, du complexe La Grande. Donc, de façon pratique,
aucune des communautés autochtones concernées par le complexe La
Grande ne subit de préjudice grâce à la mise sur pied du
programme de recherche sur le mercure à la Baie James.
Par ailleurs, les études que nous menons actuellement sont
beaucoup plus pour connaître véritablement les composantes du
phénomène comme telles. Comment se fait-il qu'on retrouve autant
de mercure à l'état naturel dans ce territoire et, d'ailleurs,
dans l'ensemble du bouclier canadien. Donc, on veut mieux comprendre les
raisons pour lesquelles, au fil des siècles, la présence du
mercure a augmenté de façon naturelle dans l'environnement.
Par ailleurs, en ce qui a trait au mode d'alimentation des populations,
nous regardons également l'effet comme tel du mercure sur d'autres
sources alimentaires pour prévoir pour les autochtones un mode
d'alimentation approprié pour éviter la contamination au mercure.
Par contre, ce qui est intéressant aussi dans notre programme de suivi,
nous avons remarqué que
certaines espèces de poisson dans le complexe La Grande,
particulièrement les anadromes, ont actuellement une baisse très
significative du mercure depuis - on regarde ça - 1978 et ils sont
redevenus comestibles non seulement pour les autochtones, mais également
les pêcheurs et les travailleurs qui veulent s'approvisionner à
même nos réservoirs.
Mme Bacon: Vous avez aussi annoncé, en 1990,
qu'Hydro-Québec se doterait de moyens pour évaluer sa performance
environnementale et vous prévoyez, en 1992, à nouveau, de vous
doter de moyens pour évaluer votre performance environnementale. Et, par
ailleurs, certaines actions dans votre plan 1992, en page 90, ont
été posées et, entre autres, la vérification
d'indicateurs. J'aimerais que vous fassiez le point à ce sujet et que
peut-être vous mettiez en évidence les gains environnementaux qui
découlent des gestes que vous avez posés s'il y a des gains.
M. Dubeau: Oui. Prenons, par exemple, la gestion de nos sites
où nous entreposons des BPC. Il existe mainenant à
l'intérieur de l'entreprise plusieurs encadrements sur la gestion des
BPC sur des sites d'entreposage temporaires. Et, effectivement, à partir
de notre réglementation interne qui découle de la
réglementation gouvernementale, nous vérifions dans quelle mesure
il y a performance, au niveau de nos unités administratives en
région, en fonction des critères qui sont établies dans la
réglementation interne.
Donc, ce qui est intéressant par ce genre d'exercice, c'est de
vérifier si effectivement, concrètement, nos encadrements sont
appliqués et sont respectueux des lois et règlements en vigueur.
Dans ce sens-là, on mesure la performance de l'entreprise, parce qu'il y
a des engagements qui ont été pris par Hydro-Québec pour
gérer correctement les sites d'entreposage temporaires de BPC et c'est
donc, entre autres, ce qu'on est en mesure de vérifier avec ce type de
mesure.
Mme Bacon: Au sujet de l'offre par rapport à la production
privée d'électricité, quand on pense à la
cogénération de la biomasse forestière, quel bilan
Hydro-Québec peut-elle faire à ce moment-ci des perspectives de
la cogénération au moyen de la biomasse forestière comme
fournisseur d'énergie et de puissance pour son réseau
électrique?
M. Bolduc: Comme nous l'avons précisé dans le
rapport particulier et plus tôt aujourd'hui, notre objectif actuel, c'est
d'obtenir 750 MG au total de production privée. Nous avons fait
plusieurs appels de propositions et étudié ces appels en deux
étapes. Nous avons également intégré les petites
centrales hydrauliques qui ont fait l'objet de procédures avec le
ministère, et d'autres centrales hydrauliques. Actuellement, nous avons
765 MG de propositions qui ont été dans une première phase
retenues pour négociations avancées, c'est-à-dire pour
entente finale sur les modalités contractuelles, pour
détermination des modalités et des coûts de raccordement
avec le réseau d'Hydro-Québec. De ces 765 MG, il y a 96 MG de
projets hydroélectriques, 139 MG de biomasse forestière, 94 MG de
projets d'incinération de déchets municipaux, 16 MG de projets
d'incinération de produits industriels ei nous avions aussi, avant
l'appel de propositions, entamé des négociations sur trois
projets, pour un total de 307 MG de cogénération. À
ça, se sont ajoutés, à la fin de décembre 1991, de
nouveaux projets électriques pour 85 MG provenant de sites privés
et 28 MG provenant de l'exercice du ministère qui consiste en 10 projets
différents. (22 h 30)
Donc, ceci forme un premier bloc de 765 MG et, de ces 765, depuis la fin
de l'exercice, nous avons effectivement signé des contrats pour 141 MG
qui sont maintenant à l'étape où les promoteurs finalisent
le financement et déclenchent les démarches d'approbation
environnementale.
Dans une deuxième phase de propositions où nous avions
demandé à ceux qui nous proposaient des projets de
cogénération de réviser leurs projets pour en faire des
projets qui maximisent l'efficacité énergétique et
où nous avions proposé un critère que nous appelons
«indice de performance globale», IPG, qui est une formule technique
un peu complexe mais, de façon toute simple, qui vise simplement
à choisir les projets dans l'ordre où ils vont produire le plus
d'énergie avec le minimum de combustible non renouvelable. Donc, plus le
procédé technique est efficace, plus cet indice est
élevé; plus il combine dans le combustible lui-même de la
biomasse ou d'autres éléments qu'on assimile à de
l'énergie renouvelable, plus cet indice est élevé. Alors,
cette méthode nous a permis de sélectionner tout récemment
sept projets de cogénération, pour un total de 600 MG, qui sont
maintenant entrés eux aussi dans la phase de négociation
avancée. Nous avons identifié un deuxième bloc de cinq
autres projets pour lesquels les analyses techniques doivent être
raffinées, parce que nous voulons choisir à peu près 200
MG additionnels. Comme ces projets-là étaient tous très
près les uns des autres et qu'il est très difficile d'appliquer
la formule de façon équitable sans approfondir davantage les
calculs et les informations techniques, nous les avons placés dans une
phase de deuxième analyse, pour en arriver au choix final.
Ça veut dire que nous avons ou que nous aurons en
négociation pratiquement 1500 MG potentiellement de projets de
productions privées, en incluant les petits projets
hydroélectriques et la cogénération. Ça peut
paraître paradoxal face
à un objectif de 750, mais nous avons étudié
très attentivement le profil de négociation, l'historique de la
plupart des entreprises d'électricité qui négocient des
projets de ce genre et il y a un chiffre qui est presque magique, c'est qu'il y
a à peu près 50 % de ces projets-là qui aboutissent
effectivement à de la production d'électricité, parce
qu'il y a des étapes où plusieurs de ces projets
s'éliminent. Ça peut être les étapes de la
négociation elle-même; ça peut être les approbations
environnementales; ça peut être le financement par des banques ou
des institutions financières. Dans l'amorce des négociations, on
a fait, ces derniers jours, une analyse projectionnelle de la tendance des
négociations et on voit déjà qu'on va converger vers un
taux de succès d'environ 50 %. Donc, les 1500 MG devraient, selon toutes
ces statistiques comparatives et les tendances ailleurs, nous amener à
peu près 750 MG, qui est l'objectif.
Le Président (M. Audet): Merci. M. le député
de Taschereau.
M. Leclerc: M. le Président, je voulais revenir quelques
instants sur la question de la députée de Verchères. Je
dois dire...
Une voix: Terrebonne.
M. Leclerc: Terrebonne. Pardon, Mme la députée.
Également, je suis resté un peu sur mon appétit lorsque
j'ai reçu mon petit rapport Écono, non pas que j'aie
été surpris, parce que, lorsque j'ai rempli votre fameux
questionnaire, je me doutais bien que le résultat ne pourrait pas
être précis et ne pourrait pas satisfaire complètement
toutes les questions que je pourrais avoir sur l'efficacité
énergétique de ma résidence. Moi, je considère que
compte tenu du nombre de variables - tous ceux ici qui ont rempli le petit
questionnaire savent qu'il y a un nombre de variables assez considérable
- compte tenu de la marge d'erreurs... Quand on demande au consommateur combien
de fois vous avez fait fonctionner votre lave-vaisselle, comment le faites-vous
fonctionner de fois en moyenne par semaine, à la rigueur il faudrait
quasiment lui demander combien de fois il ouvre la porte. Bref, je pense que,
compte tenu de la marge d'erreurs et du nombre de variables, vous ne pouvez pas
faire mieux que vous faites là.
Je pense que ce qu'on est en droit d'exiger de notre
société d'État, c'est de s'assurer que l'argent qu'on
investit là-dedans vaut vraiment quelque chose. Je pense que vous avez
une analyse à faire de ce que ça coûte versus ce que
ça rapporte aux consommateurs, ce que ça vous rapporte pour
savoir si vous devez continuer sur cette lancée-là. Mais je ne
pense pas, même avec toute la meilleure volonté du monde, que vous
puissiez faire mieux que vous faites là. Je pense que c'est un bon
rapport que l'on reçoit, bien que l'on reste un petit peu sur notre
appétit.
Ceci dit, vous avez mentionné tout à l'heure 3 000 000 000
$ de dépenses en économie d'énergie sur 10 ans ou jusqu'en
l'an 2000. Bon. Il s'agit donc là de beaucoup beaucoup d'argent, en
espérant que la publicité en englobera le moins possible et que
les choses concrètes en engloberont le plus possible. Il s'agit
également d'un gros marché pour d'éventuels fabricants
québécois ou d'actuels fabricants québécois. Et
moi, je vous avoue que, lorsque j'ai reçu, comme la
députée de Terrebonne, ma petite caisse de carton avec les petits
cadeaux que vous m'avez envoyés, tout ce qui était de
québécois c'était à peu près la boîte
de carton. Ce n'est pas une critique, parce que je pense que vous avez voulu
faire vite et que vous avez voulu mettre en place votre programme et vous
n'avez probablement pas trouvé de petit interrupteur intermittent
fabriqué au Québec. Ce n'est pas une critique.
Sauf que ce que je me dis, c'est que si on est pour dépenser
collectivement 3 000 000 000 $, d'ici l'an 2000, dans des instruments comme
ceux-là, comme des housses de réservoirs à eau chaude,
comme des pommes de douche, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'avoir une
concertation entre Hydro-Québec et l'industrie pour faire en sorte que
le maximum des produits que vous allez conseiller à votre
clientèle puissent être fabriqués au Québec? Je
comprends que ce n'est pas le genre de projet qui peut se démarrer en
deux mois. Je comprends que des entreprises du Québec ne peuvent pas se
mettre à faire des interrupteurs, comme ceux que vous avez
donnés, en l'espace de deux mois. Mais si on est pour dépenser
collectivement 3 000 000 000 $, comme vous le dites, est-ce qu'il y a, chez
Hydro-Québec, des choses de faites pour s'assurer que la plus grande
partie de ces instruments d'économie d'énergie vont être
fabriqués au Québec?
M. Boivin: M. le Président, j'aimerais, en réponse
à ces questions, revenir au premier énoncé, soit le
programme ÉCOKILO parce que je réalise qu'entre autres la
députée de Terrebonne ne semble pas être satisfaite des
réponses qu'on a données. Je pense que c'est important pour le
bénéfice de la commission, compte tenu des sommes très
importantes qui sont en jeu - on a mentionné en fait que c'est un
programme qui coûte à peu près 30 000 000 $ - que nous
revenions pour expliquer un peu la stratégie.
Tout d'abord, je pense que, quand on cite un chiffre de 30 000 000 $,
c'est un gros montant, mais il faut comprendre que, dans une entreprise comme
Hydro-Québec qui a 3 000 000 de clients, 30 000 000 $ c'est 10 $ par
client. Alors, à 10 $ par client, il est évident, en fait, qu'on
ne fera pas des miracles. Maintenant, la stratégie de marketing pour
lancer les programmes d'économie d'énergie, c'est que, je pense,
on
est allé voir - on n'a pas été les premiers ou les
pionniers dans le domaine des économies d'énergie - à
travers l'Amérique du Nord quels étaient les programmes qui
avaient fonctionné et quelles étaient les raisons pour lesquelles
certains programmes fonctionnent, et tâcher de déterminer aussi
les raisons pour lesquelles certains programmes à certains endroits ont
été des échecs, afin de mettre toutes les chances de notre
côté.
Effectivement, et je voudrais revenir à ce que Gilles Roy a dit,
le programme ÉCOKILO ça s'est voulu un programme locomotive. Pour
à peu près 10 $ par client, soit à peu près 30 000
000 $ pour 3 000 000 de clients, ça nous permet d'entrer dans chaque
résidence et d'envoyer un questionnaire. C'est beaucoup plus puissant
que simplement de la publicité parce que ça prend beaucoup de
temps et l'objectif du programme ÉCOKILO, ce n'est certainement pas un
programme qui, selon nous, va régler la problématique des
économies d'énergie, au contraire. Mais c'est la locomotive
à laquelle va s'accrocher toute une série de programmes qu'on est
en train de développer - certains sont déjà lancés
- et qui va être la clé de la sensibilisation des clients. Les
clients qui ont pris 20 minutes ou une demi-heure pour remplir le
questionnaire... Et il est évident, on ne se leurre pas, qu'on ne peut
pas, à partir d'un questionnaire de ce genre-là, faire ce qu'on
appelle communément un audit énergétique, comme on en a
fait dans le cas du programme Énergain, lorsque vous envoyez un
technicien visiter une résidence, faire l'inventaire de fond en comble.
Dans un cas, ça coûte 10 $, dans l'autre cas, ça
coûte 300 $ pour faire des recommandations.
L'expérience des grandes compagnies qui ont fait du marketing
dans ce domaine-là nous indique que la sensibilisation chez les clients
qui ont pris la peine de remplir un questionnaire, pour le prix qu'il
coûte, après ça, il y a tout une série de mesures
dans la stratégie de marketing qui va venir se greffer, mais la
sensibilisation de base est faite, et pour un coût, par client, qui est
relativement minime. Et c'est ça qui est la stratégie de base, en
fait. On peut être en accord ou en désaccord avec nous. Moi, je
n'ai certainement pas la prétention d'être le meilleur expert en
marketing en Amérique du Nord, mais il reste qu'on est allé
chercher ce qu'on croit être la meilleure expérience dans ceux qui
nous ont précédés dans le domaine de l'efficacité
énergétique. Et, à date, ce que je peux vous dire, c'est
que ça semble donner des résultats qui sont très bons,
parce que la sensibilisation est en train de se faire. Et c'est ça
l'objectif du programme ÉCOKILO. Je voudrais aussi ajouter que, quand on
envoie, comme vous dites, les petits cadeaux, les petits cadeaux ont
été choisis de façon telle que, quand on considère
l'argent qu'on met là-dedans, pourvu que les clients les installent -
évidemment, s'ils sont jetés à la poubelle quand ils
arrivent.. Nos sondages nous indiquent que. dans 92 % ou 93 % des cas, les
clients les ont installés. En fait, dans un an, ils se paient
d'eux-mêmes, pour nous autres, au niveau des économies. C'est
ça la stratégie autour du programme ÉCOKILO. Le taux de
satisfaction dans la région de Québec, dans un sondage qu'on a
fait, est très élevé. Il est de l'ordre d'à peu
près 90 %.
Alors, ça aussi, ce sont des indications qui nous disent, je
pense, qu'on est sur la bonne voie. Maintenant, on n'a pas encore balayé
la province. On commence maintenant à Montréal et c'est sûr
qu'on va faire des sondages et qu'on va revenir en temps et lieu. Parce que si,
effectivement, les sondages nous indiquent quon se trompe, on va
arrêter.
Deuxièmement, j'aimerais parler des retombées
économiques, comme vous avez dit. Il serait intéressant, compte
tenu des montants d'argent qui vont être dépensés au
Québec dans ce secteur-là, que nous tentions d'amener la
fabrication au Québec. Effectivement, c'est une préoccupation que
nous avons. Je dirais, par contre, qu'il faut amener au Québec des
fabricants qui vont fabriquer pour un marché au moins canadien et
idéalement un marché nord-américain. Prenons l'exemple des
pommes de douche, etc., ce sont des petits appareils et il faut qu'ils soient
fabriqués en très grand volume pour qu'on soit capable de
concurrencer ce qui est déjà sur le marché, actuellement.
L'approche d'Hydro-Québec dans ce domaine-là est une
approche...
Le Président (M. Audet): M. Boivin, je dois vous
arrêter, en vertu des enveloppes de temps Si vous voulez conclure, si
possible.
M. Boivin: On continuera après.
Le Président (M. Audet): C'est ça. Alors, je vais
maintenant reconnaître la formation de l'Opposition, M. le
député de Laviolette.
Aménagement de la rivière Saint-Maurice
(suite)
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Mes questions vont
s'adresser à M. Michel, sur la rivière Saint-Maurice, bien
entendu. Vous avez dit, dans votre intervention, qu'il n'y avait pas, dans
l'ensemble du bassin de la rivière Saint-Maurice, unanimité
auprès des MRC. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous entendez par
ça.
M. Michel: Je m'excuse, j'ai mal saisi votre question.
M. Jolivet: Vous avez dit, dans votre réponse au
député de Saint-Maurice, qu'il n'y avait pas unanimité au
niveau de la table de concertation dans la Mauricie. Alors je veux
savoir qu'est-ce que vous entendez par ça.
M. Michel: J'ai dit que je croyais comprendre qu'il n'y avait pas
unanimité et, avec l'information que j'ai, que certains préfets
des MRC n'ont pas joint le comité de gestion de développement
de...
M. Jolivet: O.K. Je vais vous répondre. Ça ne sert
à rien d'aller plus loin. C'est la Haute-Mauricie. Je vous dirai que
c'est la seule lettre que vous avez reçue. Les raisons pour lesquelles
ils vous ont envoyé ça, c'est qu'il y avait une crainte qui
existait à l'effet que, dans le pourcentage prévu pour
l'environnement, ils n'aient pas le plein montant d'argent. Et je l'ai dit
à du monde: Cette lettre-là, il faut la laisser de
côté dans le contexte de ce qui s'est passé après.
Les objectifs sur lesquels se sont entendus hier les élus du bassin de
la rivière Saint-Maurice, Trois-Rivières, Cap-de-la-Madeleine,
Shawinigan, Grand-Mère, Shawinigan-Sud, La Tuque, MRC Mékinac et
MRC Haute-Mauricie - ils sont au nombre de cinq... Ils sont supposés
vous avoir demandé une rencontre, d'ailleurs, pour discuter de ces cinq
points-là. (22 h 45)
II y a unanimité - le député de Saint-Maurice va
dire la même chose que moi - il y a des demandes qui sont faites et, si
ces demandes-là ne sont pas réalisées, la bonne entente
avec les gens de la Mauricie risque d'en prendre un coup. Vous avez un groupe
de gens qui veulent travailler en disant que l'ensemble du bassin de la
rivière Saint-Maurice, nous ne sommes pas contre qu'il y ait des
barrages, il y en a. Deuxièmement, nous ne sommes pas contre qu'il y ait
des réalisations nouvelles, on le sait. Sauf qu'on ne voudrait pas que
ça se fasse en dehors des besoins de notre région. Je ne vous
énumérerai pas les cinq demandes, vous êtes supposés
les avoir reçues.
La deuxième, j'aimerais savoir si vous considérez la
rivière Saint-Maurice dans son entier, du barrage Gouin... à la
rivière Saint-Maurice, comme étant navigable.
M. Michel: Présentement elle ne l'est pas parce qu'il n'y
a pas de passe à bateau à chacune des centrales.
M. Jolivet: Bon, bien je vais vous dire, si j'applique le
document «Le traité du domaine», qui date de longtemps, et
qui a fait jurisprudence, si nous allons appliquer le système de Daviel
et du plus grand nombre des auteurs français qui veut qu'on ne
considère comme navigables - puis regardez bien ce que je vous dis
là - que les parties de la rivière qui le sont en fait, et comme
non navigables celles où la navigation est réellement impossible
à cause des chutes et des rapides qui s'y rencontrent, il faudrait
conclure que les propriétaires riverains de ces parties non navigables
sont devenus propriétaires des pouvoirs hydroélectriques
formés par ces chutes et rapides. Ainsi considérées, les
grandes chutes ou forces hydrauliques de Shawinigan, de Grand-Mère et
autres semblables auraient appartenu aux propriétaires riverains. C'est
une conséquence légale inévitable, car, d'après une
jurisprudence uniforme et bien établie, les droits des
propriétaires riverains des rivières non navigables
s'étendent jusqu'au milieu de la rivière, usque ad medium filium
aqua - en latin - s'ils ne sont propriétaires que d'un
côté, et à toute la rivière, s'ils sont
propriétaires des deux côtés.
Prenons en troisième lieu, dans les exemples qu'on donne, la
rivière Saint-Maurice. C'est encore une grande rivière dont la
navigation est interceptée par les chutes de Grès, de Shawinigan,
de Grand-Mère, de Grandes et Petites-Piles, de La Tuque, ça,
c'est dans l'ancien temps là, elles ont été
harnachées depuis ce temps-là, mais qui est navigable entre les
Piles et La Tuque sur un parcours de 80 milles. Cette rivière, dans son
ensemble, est navigable et flottable en train et radeau et le fait que s'y
rencontrent des chutes et des rapides à certains endroits ne lui
enlève pas son caractère de navigabilité.
Donc, en vertu de lois qui nous confrontent là, elle est
navigable. Sinon vous auriez des problèmes avec vos barrages. Dans ce
contexte-là, si elle est navigable, ce que les gens demandent... Ils
savent bien qu'il y avait à Saint-Étienne-des-Grès ou
à La Gabelle dans le temps, ou ailleurs, ou à Shawinigan, des
contoumements qu'on faisait. Dans le temps on faisait ça avec des
bateaux à vapeur, on mettait deux rails et puis on transportait le
bateau d'en bas du rapide des Hêtres et puis on le remontait l'autre
bord. À Grand-Mère on faisait la même chose au barrage de
l'époque, puis on montait ça jusqu'aux Grandes-Piles en montant,
puis on avait des chevaux pour faire ça. Vous ne me ferez pas accroire
qu'aujourd'hui on n'est pas capable de penser à ça.
Alors, dans ce contexte-là, elle est navigable. Ce que les gens
veulent, c'est qu'Hydro-Québec soit un partenaire, non pas un
empêcheur de permettre la navigabilité par des moyens nouveaux,
modernes. C'est ce que les gens vous demandent et vous disent. Et ça, il
y a unanimité. J'ai assisté à Grand-Mère - ceux qui
vous représentent le savent très bien, tout le monde le dit, le
maire Marchand en montant, incluant tous les gens du Regroupement des usagers
de la rivière Saint-Maurice. Ce que l'on vous dit, c'est qu'entre
Trois-Rivières et barrage Gouin, avec des aménagements... Et on
ne demande pas à Hydro-Québec de tout faire. On dit à
HydroQuébec: Dans ce contexte-là, n'empêchez pas des gens
de pouvoir le faire un jour s'ils veulent le faire.
Là où il y a eu mésentente avec la MRC du
Haut-Saint-Maurice, pour la lettre que vous avez reçue, c'est parce que
le maire de La Tuque qui
était là à l'époque, qui était
à la fois préfet, n'a pas fait son devoir. Tout le monde le dit,
le nouveau maire maintenant qui est là a compris ce message, et on
travaille ensemble. Il est vice-président de la corporation. Donc, dans
ce contexte-là, il y a unanimité.
La deuxième chose que je veux vous dire maintenant c'est La
Gabelle. Vous dites que ça va ennoyer, le barrage nouveau à La
Gabelle, ce qu'on appelle aussi le barrage des Vieilles-Forges, un ou l'autre
comme possibilité, ça ennoieratt le parc national
fédéral.
M. Michel: J'ai parlé de 50 résidences.
M. Jolivet: Non, non, non. Vous avez parlé qu'il y aurait
des impacts sur le parc national qui est le parc des Vieilles-Forges. On sait
qu'avec les moyens techniques, avec ce qui est possible, il y aurait à
ce moment-là sur ce site-là une possibilité de ne pas
ennoyer, en aucune façon, le parc fédéral qui s'y trouve.
Et nous on vous dit: Que ce soit La Gabelle ou que ce soit le site des
Vieilles-Forges à refaire comme nouvelle bâtisse, comme nouveau
barrage, ce que vous avez craint de faire comme Hydro-Québec... Je pense
que c'est bien important de le dire ici, c'est ce que les gens veulent qu'on
vous dise. Ce que vous craignez, c'est l'impact que ça aurait sur des
études d'impact amenant des audiences publiques. En faisant la
réfection de La Gabelle, vous faites des études d'impact, mais
vous n'êtes pas obligés à des audiences publiques. Tandis
que, dans l'autre cas, oui. Laissez donc la population décider si elle
veut avoir l'un ou l'autre, mais donnez-lui le choix.
Vous nous dites: La décision est prise, après avoir
consulté du monde. Si vous me dites que vous avez consulté le
gars de l'Université du Québec à Trois-Rivières,
vous n'avez pas consulté tout le monde. Et on sait que tout le monde n'a
pas été consulté. Dans ce contexte-là, tout le
monde vous dit: Donnez-nous la chance de vous aider dans le dossier mais ne
nuisez pas. Et ce que je voulais vous dire, avec mon collègue qui est
sur le même comité que moi, c'est qu'on peut faire
l'unanimité sur une chose: le bassin de la rivière Saint-Maurice,
on est éc?urés - excusez l'expression - de voir passer de la
pitoune et de voir l'hydroélectricité sans pouvoir en profiter,
comme société. Et on pense que dans le contexte des
difficultés des usines de pâtes et papiers actuelles, il serait
temps qu'Hydro-Québec comprenne son rôle, parce que, si demain
matin il n'y a plus de pitoune sur la rivière Saint-Maurice, vous allez
gagner de l'argent, plus besoin de nettoyer vos barrages, plus besoin de perdre
de l'eau qui s'écoule pour faire descendre les billes et, à ce
moment-là, cet argent-là pourrait peut-être être, sur
un laps de temps à définir, investi sur le transfert des bateaux
de l'autre bord du barrage. Et dans ce contexte-là, je vous le dis, vous
allez avoir notre appui, mais si vous vous entêtez à dire: Le
barrage à Trois-Rivières, qui est celui de La Gabelle, va
être en réfection et il n'y aura pas d'autre chose que ça,
vous venez de fermer la rivière pour les 50, 60, 100 ans à venir,
et ça, les gens ne l'accepteront pas. Alors, je vous pose la question
maintenant devant tout ça: Est-ce que vous avez décidé que
votre décision de La Gabelle était irrévocable9
C'est la question de mon collègue et je vous pose la même.
Si vous me dites ça, là, vous allez avoir des
problèmes.
M. Michel: Écoutez, moi je suis heureux de voir que vous
me dites qu'il y a unanimité. Vous nous demandez de vous rencontrer.
J'ai déjà accepté une rencontre, je pense que ce sera la
semaine prochaine, j'oublie la date. Donc, on pourra, à ce
moment-là, se parler de navigabilité et on pourra se parler de
droits riverains et de droits sur les barrages, ou autre chose, là.
J'accepte de vous rencontrer, ça c'est déjà acquis. Quant
au choix de La Gabelle versus les Forges, on ne peut pas à tout prix
décider de l'un par rapport à l'autre. Et je voudrais corriger
une chose, quand j'ai parlé d'impact sur le parc national des
Vieilles-Forges, je parlais de la disparition des rapides, parce que
l'aménagement de la centrale des Forges à l'endroit où
vous parlez demanderait, je pense, l'équivalent de 300 mètres
d'excavation pour le canal de fuite et, donc, la disparition complète
des rapides.
M. Jolivet: Non.
M. Michel: Nous, on est prêts à discuter, mais on
n'est pas prêts à faire des choses inacceptables non plus au
niveau environnemental. Mais, ceci étant dit, je suis prêt
à vous rencontrer, je vous le répète. Et l'ouverture dont
on a fait part jusqu'à présent... On vous a rencontrés,
les équipes de projets ont rencontré le conseil de
développement à plusieurs reprises, on est prêts à
continuer à discuter avec vous, dans un climat serein, cependant.
M. Jolivet: M. Michel, je peux vous dire que, partout où
on a été, ça a toujours été serein, mon
collègue peut le dire, et je pense que les gens sont sereins. La seule
chose, c'est qu'ils vous disent, et ils m'ont demandé de le dire et ils
ont demandé au député de Saint-Maurice de vous le dire, de
profiter de l'occasion, devant tout le monde, pour vous dire que nous croyons
que la rivière Saint-Maurice est apte à faire autre chose que de
voir couler des billes et, deuxièmement, de voir de
l'hydroélectricité s'y faire. Une fois qu'on a dit ça, on
dit: Si vous nous arrivez en nous disant. Demain matin on fait le barrage en
réfection de La Gabelle et on oublie les Vieilles-Forges, vous venez de
fermer la rivière. Le problème de Grand-Mère c'est cela.
L'eau, à Grand-Mère, fait un goulot d'étranglement qui ne
permet pas de
faire les puissances voulues pour Shawinigan et Trois-Rivières,
La Gabelle, et, dans ce contexte-là, il faut faire la réfection
de Grand-Mère. Les gens ne sont pas contre, mais ils vous disent que, si
vous nous barrez l'entrée de la rivière à
Trois-Rivières, il va y avoir des problèmes. On vous dit, nous:
Laissez, en mettant devant tout le monde, pas devant les individus que vous
rencontrez en catimini ou ici et là... Parce que, là, on n'a
jamais eu les raisons réelles des coûts au niveau de La Gabelle
versus les Vieilles-Forges. Et si vous avez peur d'aller en audiences
publiques... C'est ça qu'on pense, que vous avez peur, est-ce qu'on a
raison ou pas? Vous allez sur la question de La Gabelle directement sans aucun
changement, c'est que vous venez de dire: Vieilles-Forges c'est fini, n'y
pensons plus. Et, si c'est ça, ça veut dire que la rivière
Saint-Maurice, elle est barrée, en termes de navigabilité. Ce
n'est pas entre Shawinigan et La Tuque qu'on veut, nous autres, c'est de se
rendre au fleuve.
M. Michel: En tout cas, je répète, je vous
réitère ma grande disponibilité pour vous rencontrer.
M. Chevrette: Moi, M. le Président...
Le Président (M. Audet): Oui, M. le député
de Joliette.
M. Chevrette: ...j'aurais deux ou trois petites questions pour
finir ce soir. Il reste à peine sept minutes de temps. Je voudrais
savoir où vous en êtes rendus dans les coûts avec votre
expérience de ligne sous-fluviale.
Le Président (M. Audet): M. Michel. M. Michel:
Oui.
M. Chevrette: J'ai bien dit: Les coûts. Vous parlerez
d'expérience après.
M. Michel: Si vous me donnez 35 secondes afin que je puisse vous
donner les bons coûts, dans un souci de...
M. Chevrette: Avez-vous trouvé les bons câbles
aussi?
M. Michel: Les bons quoi? Une voix: Les bons
câbles.
M. Michel: Oui. On a trouvé les bons câbles.
M. Chevrette: Oui?
M. Michel: Oui. Les câbles, là, ça va bien.
On a peut-être certains petits problèmes qui subsistent avec les
jonctions des câbles. Nous tentons de régler ça à
l'IREQ. C'est quel numéro?
Une voix: C-11.
M. Michel: Sur la traversée sous-fluviale, on a trois
câbles d'installés sur six. Les trois autres sont en route du
Japon présentement. Les coûts sont respectés. C'est de
l'ordre de 120 000 000 $, si je me retrouve dans mes papiers, et on est
à l'intérieur des coûts. On a eu, cependant, comme vous le
savez, certains retards pour la mise en service de cet
équipement-là. Le démantèlement des lignes
aériennes va aussi être retardé...
M. Chevrette: Ça va coûter combien, le
démantèlement de la ligne aérienne?
M. Michel: C'est de l'ordre de 16 000 000 $. Une voix:
Ça fait des bottines, ça. M. Jolivet: Puis des
enveloppes.
M. Michel: C'est 16 000 000 $ pour le
démantèlement.
M. Chevrette: Et puis vous avez dit: 120 000 000 $?
M. Michel: 120 000 000 $ ou 122 000 000 $, là, je suis
mêlé dans mes papiers. Si vous me donnez 30 secondes de
plus...
M. Chevrette: Pendant que vous le trouvez, je vais vous en poser
une autre.
M. Michel: Allez-donc!
M. Chevrette: Je vais en demander une à M. Drouin.
À la page 134 du suivi du plan, vous dites que l'entreprise a donc
profité de la conjoncture favorable sur les marchés financiers
pour devancer son programme d'emprunt de 2 500 000 000 $ en 1991. Ces fonds
seront utilisés en 1992 et 1993 et permettront de maintenir le programme
d'emprunt. Comme les taux d'intérêt sont pas mal moins chers
qu'ils étaient, puis qu'ils ont baissé, comment ça
coûte à Hydro-Québec, le devancement de cet
emprunt-là? Je vous l'avais demandé ce matin mais je n'avais pas
eu de réponse.
M. Drouin: Oui...
M. Chevrette: J'avais dit 15 000 000 $, 16 000 000 $, 17 000 000
$ OU 20 000 000 $.
M. Drouin: C'est proche de 18 000 000 $.
M. Gonthier: Pour l'année 1991, 17 000 000 $. Ce qu'on
doit dire, cependant.
c'est que l'approche qui a été prise devant la question du
préfinancement en a été une, je pense, de gestion prudente
de la part de l'entreprise - c'est un peu une police d'assurance que nous avons
prise - de manière à faire face, disons, aux incertitudes qui
vont entourer le débat constitutionnel au Canada, dans les mois qui
viennent, puis qui vont frapper particulièrement l'année 1992.
Nous avons donc profité d'une conjoncture favorable sur les
marchés, comme d'autres emprunteurs importants au Canada, comme la
province d'Ontario et Ontario Hydro, pour faire du préfinancement, ce
qui nous a permis d'aller chercher un niveau de dollar canadien que nous
anticipions avoir des problèmes à avoir en 1992 et, à
date, on ne s'est pas trop trompé. Et le coût de cette
police-là pourrait être même un coût positif pour
l'entreprise parce que, dans une période d'incertitude, nous calculons
que 10 points de base de plus sur un emprunt, en moyenne de 15 à 20 ans,
nous coûtent 17 000 000 $ en valeur présente. Et, dans les
périodes d'incertitude, nous avons vu les écarts sur nos emprunts
varier facilement de 40 à 50 points de base à la hausse. De sorte
que, si vous avez fait un préfinancement dans une année
donnée et que, lorsqu'il y a une tourmente et que vos écarts
s'agrandissent sur les marchés, vous pensez d'aller emprunter dans ces
moments-là... on pourrait sauver facilement 30 000 000 $ à 40 000
000 $ sur ces 2 000 000 000 $ empruntés à l'avance. Donc,
ça a été fait dans l'optique d'une gestion prudente, c'est
le coût d'une police d'assurance.
Le coût réel pourrait être un coût positif pour
l'entreprise et, à date, notre stratégie a été
bonne. Ça nous a permis, en 1991, à une période où
le dollar canadien était très fort sur les marchés
internationaux, de réaliser deux emprunts de type mondial. Ça
nous a permis de lever 2 200 000 000 $ de dollars canadiens, chose que nous
aurions été incapables de faire sur les marchés canadiens
seulement, en 1991. En 1992, on le voit très bien, un emprunt de type
mondial, dans le contexte actuel du dollar canadien qui continue de se
déprécier, ne nous apparaît pas possible dans un
environnement court. Nous avions, en 1991, en début d'année, un
problème de l'après lac Meech où, sur le marché
canadien, notre capacité d'émettre et de faire absorber nos
titres par le marché canadien était limitée.
M. Chevrette: À quelle date avez-vous emprunté 2
000 000 000 $?
M. Gonthier: Toute l'année. Ah! l'année? En juin,
le «closing» a eu lieu en juillet.
M. Chevrette: Oui, mais à quel moment avez-vous...
M. Gonthier: Surtout vers la fin de la période de la
baisse des taux. En juin et juillet, dans un cas, et l'autre, en septembre. Le
30 ans, ça s'est fait en septembre et nous avons frappé... De
toute façon, il faut le voir de façon dynamique. On a une grande
partie de ces emprunts-là à taux fixe, il faut le dire. Notre
stratégie de gestion de la dette vise à augmenter la portion
flottante de notre dette et une grande partie de ces emprunts-là ont
été convertis par «swap» à taux flottant, de
sorte que le coût devient très minime lorsqu'ils sont à
taux flottant, parce que l'écart entre les deux... Si vous empruntez
à taux fixe, vous prêtez à court terme, c'est
l'équivalent d'un taux flottant, quand la courbe est positive, ça
peut vous coûter beaucoup...
M. Chevrette: Mais, à taux flottant, vous
bénéficieriez, à ce moment-ci, s'il y avait d'autres
baisses d'intérêt...
M. Gonthier: De la baisse des taux. Nous profitons pleinement de
la baisse des taux, effectivement, parce que, par «swap», on a
converti un emprunt à taux fixe, comme on le fait la plupart du temps,
à taux variable. Donc, là, on paie le taux, disons, des
acceptations bancaires à trois mois. Donc, on bénéficie de
la baisse des taux, mais ça faisait partie d'une stratégie
générale. Le prix du financement est rentré dans cette
stratégie générale d'augmentation de la portion de notre
dette à taux flottant.
Le Président (M. Audet): Merci. On va terminer, je crois,
avec la réponse de M. Michel.
M. Michel: Le coût de la traversée sous-fluviale,
tunnel, câbles, installation, mise en service, 105 400 000 $; le
coût de la traversée aérienne, 32 000 000 $; le coût
de démantèlement, 16 000 000 $; mise en service des câbles
au mois d'octobre, cette année, un an d'essai, un an de fonctionnement
pour prouver leur bon fonctionnement, démantèlement de la ligne
aérienne en 1994...
Le Président (M. Audet): D'accord. Merci. Avant d'ajourner
nos travaux, puisqu'on a parlé beaucoup d'hydraulicité, ce matin,
et puisque la nuit porte conseil, je voudrais inviter les gens
d'Hydro-Québec à réfléchir sur la rivière
Chaudière. On n'a pas de problème d'hydraulicité à
ce temps-ci de l'année. Ça pourrait peut-être régler
un de vos problèmes.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Audet): Alors, je termine
là-dessus. Je vous rappelle qu'on reprend nos travaux demain matin,
à 9 h 30. J'ajourne les travaux de la commission jusqu'à demain
matin.
(Fin de la séance à 23 h 3)